Hotel AA DA Er à PURE LR LUN HISTOIRE NATURELLE Lee OISEAUX TOME QUATRIÉÈME. "HISTOIRE * Par BUFFON, DÉDIÉE AU CITOYEN LACEPEDE, MEMBRE DE L'INSTITUT NATIONAL. 29. 3 \ OISE A U X. TOME QUATRIEME. Ansontan Instituyg, RICHMOND COL LECTION: ation Museu À PARIS, À LA LIBRAIRIE HÉrnso te PE … pe P. DIDOT "AÎNÉ, GALERIES DU LOUVRE ,; N° 5. ET Fremin DIDOT, RUE DE THIONVILLE . ,N° {r6 AN VII. — :1790.: Er. NTI : dre be na ét (EE AUX ya PTz. Lag1 2 Tom 4. LE PAON. À Sougue.L PS ET OPLRE NU Pda LE. LE PAON* Voyez la planche 1 dé ce volume. S 1 l'empire appartenoit à la beauté et non à la force, le paon seroit, sans contredit, le roi des oiseaux; il n’en est point sur qui la nature ait versé ses trésors avec plus de pro- fusion : la taille grande, le port imposant, la démarche Rére: la figure noble, les pro 1 Voyezlesplanches enluminées ; n° 433, lémôâle : et n° 434, la femelle, 2 En latin, pavo; en espagnol, paron ; enitalien, | pavone ; en allemand, pfaw ; en anglois, peacock. Oiseauxs LV. 1 2 HISTOIRE NATURELLE ! portions du corps élésantes et sveltes , tout ce qui annonce un-être de distinction lui a été donné. Une aïigrette mobile et légère, peinte des plus riches couleurs, orne sa tête et l'élève sans la charger : son incomparable plumage semble réunir tout ce qui flätte nos yeux dans le coloris tendre et frais des plus belles fleurs , tout ce qui les éblouit dans les reflets pétillans des pierreries, tout ce qui les étonne dans l'éclat majestueux de l’arc- en-ciel ; non seulement la nature a réuni sur le plumage du paon toutes les couleurs du ciel et de la terre pour en faire le chef- d'œuvre de sa magnificence , elle les a encore mélées, assorties, nuancées, fondues de son inimitable pinceau, et en a fait un tableau unique , où elles tirent de leur mélange avec des nuances plus sombres, et de leurs oppositions entre elles, un nouveau lustre et des effets de lumière si sublimes , que notre art ne peut ni les imiter ni les dé- crire. Tel paroît à nos yeux le plumage du paon ; lorsqu’il se promène paisible et seul dans un beau jour du printemps : mais si sa femelle vient tout-à climat n'influe pas moins sur le plu= mage des oiseaux que sur le pelage des qua- drupèdes : nous avons vu dans les volumes précédens que le lièvre, l’hermine et la plu- part des autres animaux , étoient sujets à devenir blancs dans les pays froids, sur-tout pendant l'hiver ; et voici une espèce de paous, ou, si l’on veut, une variété, qui paroit avoir éprouvé les mêmes effets par la même cause, et plus grands encore, puisqu'elle a produit une race constante dans cette espèce, et qu'elle semble avoir agi plus fortement sur les plumes de cet oiseau : car la blancheur des lièvres et des hermines n’est que passa- gère et n’a lieu que pendant l'hiver, ainsi que celle de la gélinotte blanche ou du la- gopède, au lieu que le paon blanc est tou- jours blanc, et dans tous les pays, l'été comme l'hiver, à Rome comme à Tornéo: et cette couleur nouvelle est même si fixe, que des œufs de cet oiseau pondus et éclos HISTOIRE NATURELLE. 4x en ltalie donnent encore des paons blancs, Celui qu'Aldrovande a fait dessiner étoit né à Bologne, d’où il avoit pris occasion de douter que cette variété füt propre aux pays froids : cependant la plupart des naturalistes s'accordent à regarder la Norvége et les autres contrées du Nord comme son pays natal ; et il paroît qu’il y vit dans l’état de sauvage, car il se répand pendant l'hiver dans l'Allemagne, où on en prend assez com- _munément dans cette saison; on en trouve même dans des contrées beaucoup plus mé- ridionales, telles que la France et l'Italie, _ mais dans l’état de domesticité seulement. M. Linnæus assure en général, comme je J'ai dit plus haut, que les paons ne restent pas même en Suède de leur plein gré, et il n’en excepte point les paons blancs. _ Ce n’est pas sans un laps de temps consi- dérable et sans des circonstances singulières, qu'un oiseau né dans les climats si doux de l'Inde et de l'Asie a pu s’accoutumer à l'âpreté des pays septentrionaux : s’il n’y a pas été transporté par les hommes, il a pu y passer soit par le nord de l’Asie, soit par le nord de l'Europe. Quoiqu’on ne sache pas | k 42 HISTOIRE NATURELLE précisément l’époque de cette migration, je. soupçonne qu’elle n’est pas fort ancienne; Car je vois d’un côté dans Aldrovande, Lon- golius, Scaliger et Schwenckfeld, que les paons blancs n’ont cessé d’être rares que de- puis fort peu de temps; et, d’un autre côté, je suis fondé à croire que les Grecs ne les ont point connus, puisqu'Aristote ayant parlé, dans son Traité de la génération des ani- maux, des couleurs variées du paon, et en- suite des perdrix blanches , des corbeaux blancs, des moineaux blancs, ne dit pas un mot des paons blancs. Les modernes ne disent rien non plus de l’histoire de ces oiseaux, si ce n’est que leurs petits sont fort délicats à élever : cependant il est vraisemblable que l'influence du chi- mat ne s’est point bornée à leur plumage, et qu’elle se sera étendue plus ou moins jusque sur leur tempérament, leurs habitudes, leurs mœurs; et je m'étonne qu'aucun naturaliste ne se soit encore avisé d'observer les progrès ou du moins le résultat de ces observations plus intérieures et plus profondes : il me semble qu'une seule observation de ce genre seroit plus intéressante, feroit plus pour 1 LA N KW | LI DU PAON BLANC. 45 J'histoire naturelle, que d'aller compter scru- puleusement toutes les plumes des oiseaux, et décrire laborieusement toutes les teintes et demi-teintes de chacune de leurs barbes dans les quatre parties du monde. Au reste, quoique leur plumage soit en- tièrement blanc, et particulièrement les longues plumes de leur queue, cependant on y distingue encore à l'extrémité des vestiges marqués ;de ces miroirs qui en faisoient le plus bel ornement , tant l'empreinte des couleurs primitives étoit profonde. IL seroit curieux de chercher à ressusciter ces cou- leurs, et de déterminer par l'expérience com- bien de temps et quel nombre de générations il faudroit dans un climat convenable, tel _ que les Indes, pour leur rendre leur premier éclat. LE PAON PANACHÉ. Farscn croit que le paon panaché n'est autre chose que le produit du mélange des deux précédens , je veux dire, du paon ordi- naire et du paon blanc : et il porte en effet ‘sur son plumage l'empreinte de cette double origine, car il a du blanc sur le ventre, sur les ailes et sur les joues; et dans tout le reste, il est comme le paon ordinaire, si ce n'est que les miroirs de la queue ne sont ni si larges, ni si ronds, ni si bien terminés. Tout ce que je trouve dans les auteurs sur l'histoire particulière de cet oiseau, se ré= duit à ceci, que leurs petits ne sont pas aussi délicats à élever que ceux du paon blanc. 2 n 2 = = = PLIRUR AIS AN Fr suffit de nommer cet oiseau pour se rap- peler Le lieu de son origine : le faisan, c’est- à-dire , l'oiseau du Phase, étoit, dit-on, con- finé dans la Colchide avant l'expédition des ÂArgonautes; ce sont ces Grecs qui, en re- _montant:le Phase pour arriver à Colchos, virent ces beaux oiseaux répandus sur les bords du fleuve, et qui, en les rapportant . dans leur patrie, lui firent un présent plus riche que celui de la toison d’or. Encore aujourd’hui les faisans de la Col- chide ou Mingrélie, et de quelques autres contrées voisines, sont les plus beaux et les plus gros que l’on connoisse 5 : c’est de là , 1 Voyez les planches enluminées; n° r2r, le mâle; et n° 122, la femelle. ? En latin, phasianus ; en italien, fasano ; en allemand, fasan ; en anglois, pheasant. 5 Marco Paolo assure que c’est dans les pays soumis aux Tartares qu’on trouve les plus gros fai- sans, et ceux qui ont la plus longue queue. LA 4 46 HISTOIRE NATURELLE qu’ils se sont répandus d’un côté par la Grèce | à l'Occident, depuis la mer Baltique jusqu’au cap de Bonne- Espérance et à Madagascar; | et de l’autre par la Médie dans l'Orient jus- qu’à l'extrémité de la Chine et au Japon, et même dans la Tartarie. Je dis par la Médie; car il paroïit que cette contrée, si favorable aux oiseaux, et où l’on trouve les plus beaux paons, les plus belles poules , etc. a été aussi une nouvelle patrie pour les faisans, qui s’y sont multipliés au point que ce pays seul en a fourni à beaucoup d’autres pays. Ils sont en fort grande abondance en Afrique, sur- tout sur la côte des Esclaves, la côte d'Or, la côte d'Ivoire, au pays d’Issini, et dans les royaumes de Congo et d’Angola, où les Nègres les appellent ga/ignoles. On en trouve assez communément dans les différentes par= ties de l'Europe, en Espagne, en Italie, sur- tout dans la Campagne de Rome, le Milanès et quelques îles du golfe de Naples; en Alle- magne, en France, en Angleterre : dans ces dernières contrées ils ne sont pas générale- ment répandus. Les auteurs de la Zoologie britannique assurent positivement que dans toute la Grande-Bretagne on ne trouve aucun … a Ro : faisan dans l’état de sauvage. Sibbald s’ac- ‘corde avec les zoologistes, en disant qu’en Écosse quelques gentilshommes élèvent de ces oiseaux dans leurs maisons. Boter dit encore plus formellement que l'Irlande n’a point de faisans. M. Linnæus n’en fait au- cune mention dans le dénombrement des oiseaux de Suède., Ils étoient encore très- rares en Silésie du temps de Schwenckfeld : on ne faisoit que commencer à en avoir en Prusse il y a vingt ans , quoique la Bohème en ait uue très-grande quantité; et s'ils se sont multipliés en Saxe, ce n’a été que par les soins du duc Frédéric, qui en lächa deux cents dans le pays, avec défense de les prendre ou de les tuer. Gesner, qui avoit parcouru les montagnes de Suisse, assure n’y en avoir jamais vu. Il est vrai que Stumpsius assure au contraire qu’on en trouve dans ces mêmes montagnes : mais cela peut se concilier ; car il est fort possible qu’il s’en trouve en effet dans un certain canton que Gesner n’auroit point parcouru, tel, par exemple, que la partie qui confine au Milanès, où Olina dit qu'ils sont fort communs. Il s’en faut bien qu’ils soient généralement répandus en pp * fn, NP « 4 48 HISTOIRE NATURELLE NX L France ; on n’en voit que très-rarement dans nos PPT septentrionales, et able ment on n'y en verroit point du tout, s un oiseau de cette distinction ne devoit se le principal ornement des plaisirs de nos rois : mais ce n'est que par des soins con-— tinuels, dirigés avec la plus grande intelli- gence, qu’on peut Les y fixer, en leur faisant, pour ainsi dire, un climat artificiel conve- nable à leur nature ; et cela est si vrai, qu'on ne voit pas qu'ils se soient multipliés dans la Brie, où il s’en échappe toujours quelques uns des capitaineries voisines , et où mème ils s’apparient quelquefois, pârce qu'il est arrivé à M. Leroy, lieutenant des chasses de Versailles *, d’en trouver le nid et les œufs dans les grands bois de cette pro- vince : cependant ils y vivent dans l’état de liberté, état si favorable à la multiplication des animaux , et néanmoins insuflisant pour ceux même qui, comme les faisans, pa- roissent en mieux sentir le prix lorsque le * C’est à lui que je dois la plupart de ces faits: il est peu d’ hommes qui ait s1 bien observé les ani- maux qui sont à sa disposition, et qui ait commu uiqué ses observations avec plus de zèle. DU FAISAN. s0 climat est contraire: nous avons vu en Bour- gogne un homme riche faire tous ses efforts et ne rien épargner pour en peupler sa terre, située dans l'Auxois, sans en pouvoir venir à bout. Tout cela me donne des doutes sur les deux faisans que Regnard prétend avoir tués en Bothnie , ainsi que sur ceux qu'Olaüs Magnus dit se trouver dans la Scandinavie, et y passer l'hiver sous la neige sans prendre de nourriture : cette façon de passer l'hiver sous la neige a plus de rapport avec les ha- bitudes des coqs de bruyère et des gélinottes qu'avec celles des faisans, de mème que le nom de ga/læ silvestres qu'Olaüs donne à ces prétendus faisans , convient beaucoup mieux aux tetras ou coqs de bruyère; et ma con- jecture a d'autant plus de force, que ni M. Linnæus, ni aucun bon observateur, n’a dit avoir vu de véritables faisans dans les pays septentrionaux , en sorte qu’on peut croire que ce nom de /uisan aura été d’abord appliqué par les habitans de ces pays à des tetras ou des gélinottes , qui sont en effet très-répandus dans 1 id, et qu'ensuite ce nom aura été adopt s beaucoup d’exa- men, par les voyageurs, et même par'les b 5o HISTOIRE NATURELLE ‘T4 compilateurs, tous gens peu attentifs à à dis: tinguer les espèces. Cela supposé, il suffit de remarquer que le faisan a l'aile courte, et conséquemment le vol pesant et peu élevé, pour conclure: qu'il n’aura pu franchir de lui-même les mers interposées entre les pays chauds ou. même tempérés de l’ancien continent, et YAmérique : et cette conclusion est confir- mée par l’expérience; car dans tout le nou-. veau monde il ne s’est point trouvé de vrais faisans , mais seulement des oiseaux qui peu- . vent, à toute force, être regardés comme leurs représentans : car je ne parle point de ces faisans véritables qui abondent aujour- d’hui dansles habitations de Saint-Domingue, et qui y ont été transportés par les Euro- péens , ainsi que les paons et les peintades. Le faisan est de la grosseur du coq ordi- naire *, et peut en quelque sorte le disputer * Aldrovande, qui a observé et décrit cet oïseau avec soin, dit qu'il en a examiné un qui pesoit trois livres de douze onces (/:bras tres duodecim uncia- rum); ce que quel ins ont rendu par: frois livres douze onces ‘une différence de viugt- quatre puces sur trente-six ha DU FAISAN. 5r au paon pour la-beauté; il a le port aussi noble, la démarche aussi fière, et le plumage presque aussi distingué : celui de la Chine a méme les couleurs plus éclatantes; mais il n'a pas, comme le paon, la faculté d’étaler son beau plumage, ni de relever les longues plumes de sa queue ; faculté qui suppose un. appareil particulier de muscles moteurs dont le paon est pourvu, qui manquent au fai- san, et qui établissent une différence assez considérable entre les deux espèces : d’ail- leurs ce dernier n’a ni l’aigrette du paon, n1 sa double queue, dont l’une, plus courte, est composée des véritables pennes direc- trices , et l’autre, plus longue, n’est for- mée que des couvertures de celles-là : en général , le faisan paroît modelé sur des pro- portions moins légères et moins élégantes, ayant le corps plus ramassé, le cou plus rac- courci, la tête plus grosse, etc. Ce qu'il y a de plus remarquable dans sa physionomie, ce sont deux pièces de couleur écarlate, au milieu desquelles sont placés les yeux, et deux bouquets de plumes d’un verd doré, qui, dans Te temps des amours, s’élèvent de chaque côté au-dessus des oreilles; A 52 HISTOIRE NATURELLE car dans les animaux il y a presque tou- jours, ainsi que je l'ai remarqué, une pro- duction nouvelle, plus ou moins sensible, qui est comme le signal d’une nouvelle gé- nération : ces bouquets de plumes sont àp-= paremment ce que Pline appeloit , tantôt des oreilles, tantôt de petites cornes ; on sent à leur base une élévation formée par leur muscle releveur. Le faisan a outre cela à chaque oreille des plumes dont il se sert pour en fermer à son gré l'ouverture, qui est fort grande. Les plumes du cou et du croupion ont le bout échancré en cœur, comme certaines plumes de la queue du paon. Je n’entrerai pas ici daus le detail des cou- leurs du plumage * : je dirai seulement qu’elles ont beaucoup moins d'éclat dans la femelle que dans le mâle, et que dans celui- . ci même les reflets en sont encore plus fu- gitifs que dans le paon, et qu’ils dépendent non seulement de l'incidence de la lumière, mais encore de la réunion et de la position respective de ces plumes ; car si on en prend * Voyez les planches enluminées , n° r2r. DU FAISAN. 53 une seule à part, les reflets verds s’éva- nouissent, et l’on ne voit à leur place que du brun ou du noir. Les tiges des plumes du cou et du dos sont d’un beau jaune doré, et font l'effet d'autant de lames d’or. Les couvertures du dessus de la queue vont en diminuant, et finissent en espèces de filets : la queue est composée de dix-huit pennes, quoique Schwenckfeld n’en compte que seize ; les deux du milieu sont les plus longues de toutes, et ensuite les plus voisines de celles- là. Chaque pied est muni d’un éperon court et pointu, qui a échappé à quelques descrip- teurs, et mème au dessinateur de nos plan- ches enluminées, n° 1921 : les doigts sont joints par une membrane plus large qu’elle n’est ordinairement dans les oiseaux pulvé- rateurs; cette membrane interdigitale, plus grande ;/ semble être une première nuance par laquelle les oiseaux de ce genre se rap- prochent des oiseaux de rivière : et en effet, Aldrovande remarque que le faisan se plait dans les lieux marécageux; et il ajoute qu'on en prend quelquefois dans les marais qui sont aux environs de Bologne. Olina, autre lialien, et M. Leroy, lieutenant des chasses 2 ! 54 HISTOIRE NATURELLE de Versailles, ont fait la même observation: ce dernier assure que c’est toujours dans les lieux les plus humides et le long des mares qui se trouvent dans les grands bois de la Brie, que se tiennent les faisans échappés des capitaineries voisines; quoiqu'accoutu— més à la société de l’homme, quoique com- blés de ses bienfaits, ces faisans s’éloignent le plus qu'il est possible de toute habitation humaine; car ce sont des oiseaux três-sau- vages ,et qu’il est extrêmement difficile d’ap- privoiser. On prétend néanmoins qu'on les à! accoutume à revenir au coup de sifflet *, c’est-à-dire, qu'ils s’accoutument à venir prendre la nourriture que ce coup de sifflet leur annonce toujours : mais dès que leur besoin est satisfait, ils reviennent à leur na- turel, et ne connoissent plus la main qui les a nourris; ce sont des esclaves indom- tables qui ne peuvent se plier à la servitude, qui ne connoissent aucun bien qui puisse entrer en comparaison avec la liberté, qui T'il ÿ a grande apparence que c’étoit Jà tout le savoir faire de ces faisans APPTIVOISÉS que on nour- rissoit, selon Élien, dans la méragerie du roi des Indes. DU FAISAN, 55 “eherchent continuellement à la recouvrer, et qui n’en manquent jamais l’occasion : les sauvages qui viennent de la perdre sont fu- rieux; ils fondent à grands coups de bec sur les compagnons de leur captivité, et n’épar- gnent pas même le paon. Ces oiseaux: se plaisent dans les bois en plaine, différant en cela des tetras ou coqs de bruyère, qui se plaisent dans les bois en montagne; pendant la nuit, 1ls se perchent au haut des arbres, ils y dorment la tête sous l’aile : leur cri, c’est-à-dire, le cri du mâle, car la femelle n’en a presque point, est eutre celui du paon et celui de la pein- tade, mais plus près de celui-ci, et par con- séquent très-peu agréable. Leur naturel est si farouche, que non seu- lement ils évitent l’homme, mais qu’ils s’évitent les uns les autres, si ce n’est au mois de mars ou d'avril, qui est le temps où le mâle recherche sa femelle ; et il est facile alors de les trouver dansles bois, parce qu'ils se trahissent eux-mêmes par un batte- ment d'ailes qui se fait entendre de fort loin. Les coqs-faisans sont moins ardens que les coqs ordinaires : Frisch prétend que dans 566 HISTOIRE NATURELLE l'état de sauvages ils n’ont chacun qu’une seule femelle; mais l’homme, qui fait gloire de soumettre l'ordre de la nature à son in térêt ou à ses fantaisies, a changé, pour ainsi dire, le naturel de cet oiseau, en accontu- mant chaque coq à avoir jusqu’à sept poules, et ces sept poules à se contenter d’un seul ._ mâle pour elles toutes ; car on a eu la pa- tience de faire toutes les observations néces- saires pour déterminer cette combinaison , comme la plus avantageuse pour tirer parti de la fécondité de cet oiseau : cependant quelques économistes ne donnent que deux femelles à chaque mâle, et j'avoue que c’est la méthode qui a le mieux réussi dans la conduite d’une petite faisanderie que j'ai eue quelque temps sous les yeux. Mais ces dif- férentes combinaisons peuvent être toutes: bonnes selon les circonstances , la tempéra- ture du climat, la nature du sol, la qualité et la quantité de la nourriture, l'étendue et l’exposition de la faisanderie, les soins du faisandier, comme seroit celui de retirer chaque poule aussitôt après qu’elle est fé- condée par le coq; de ne les lui présenter qu'une à une, en observant les intervalles DU FAISAN. 5 convenables ; de lui donner pendant ce temps du blé sarrasin et autres nourritures échauffantes, comme on luien donne sur la fin de l'hiver, lorsqu'on veut avancer la saison de l’amour. La faisane fait son nid à ds seule ; elle choisit pour cela le recoin le plus obscur de son habitation; elle y emploie la paille, les feuilles et autres choses semblables ; et quoi- qu'elle le fasse fort grossièrement en appa- rence, elle le préfère , ainsi fait, à tout autre mieux construit, mais qui ne le seroit point par elle-même : cela est au point que si on lui en prépare un tout fait et bien fait, elle commence par le détruire et en éparpiller _ tous les matériaux, qu’elle arrange ensuite à sa manière. Elle ne fait qu'une ponte chaque année, du moins dans nos climats: cette ponte est de vingt œufs selon les uns, et de quarante à cinquante selon les autres, sur-tout quand on exempte la faisane du soin de couver; mais celles que j’ai eu occa- sion de voir n’ont jamais pondu plus de douze œufs, et quelquefois moins, quoiqu’on eût l'attention de faire couver leurs œufs par des poules communes. Elle pond ordi- IR 58 HISTOIRE NATURELLE rairement de deux ou trois jours l’un; ses œufs sont beaucoup moins gros que ceux de poule, et la coquille en est plus mince que ceux même des pigeous; leur couleur est un gris verdâtre, marqueté de petites taches brunes, comme le dit très-bien Aristote * arrangées en Zones circulaires autour de l'œuf; chaque faisane en peut couver jusqu'à dix-huit. î ( - Si l’on veut entreprend en grand une, éducation de faisans , 1l faut y destiner un parc d'une étendue proportionnée, qui soit en partie gazonné et en partie semé de buis- sons, où ces oiseaux puissent trouver un abri contre la pluie et la trop grande cha- leur, et même contre l’oiseau de proie : une parte de ce parc sera divisée en plusieurs pe- tits parquets de cinq ou six toises en quarreé, - faits pour recevoir chacun un cog avec ses femelles; on les retient dans ces parquets, soit en les éjointant, c’est-à-dire, en leur * Punctis distincta sunt ova meleagridum et phasianarum. Rubrum tinnunculi est modo minir. Pline, altérant apparemment ce passage, a dit: (| Ælia punctis distincta ut meleagridi; alia rubrs soloris ut phasianis , cenchridi. DU FAISAN. 5j coupant le fouet de l'aile à l’endroit de la jointure, ou bien en couvrant les parquets avec un filet. On se gardera bien de renfer- mer plusieurs mâles dans la même enceinte; car ils se battroient certainement, et fini- . roient peut-être par se tuer : il faut même faire en sorte qu’ils ne puissent ni se voir mi s'entendre ; autrement les mouvemens d'inquiétude ou de jalousie que s’inspire- roient les uns aux autres ces mâles si peu ardens pour leurs femelles et cependant si ombrageux pour leurs rivaux, ne manque- roient pas d’étouffer ou d’affoiblir des mou- vemens plus doux, et sans lesquels il n’est point de génération. Ainsi, dans quelques animaux, comme dans l’homme, le degré de la jalousie n’est pas toujours proportionne au besoin de jouir. Palladius veut que les coqs soient de l’an- née précédente ; et tous les naturalistes s’ac- cordent à dire qu’il ne faut pas que les poules aiemt plus de trois ans. Quelquefois, dans les endroits qui sont bien peuplés de faisans, on ne met que des femelles dans chaque par- quet, et on laisse aux coqs sauvages le soin de les féconder. 6 HISTOIRE NATURELLE L Ces oiseaux vivent de toutes sortes de grains et d’herbages, et l’on conseille mème de mettre une partie du parc en jardin po- tager , et de cultiver dans ce jardin des féves; des carottes, des pommes de terre, des oi- gnons, des laitues et des panais, sur-tout des deux dernières, dont ils sont très-friands; on dit qu’ils aiment aussi beaucoup le gland, les baies d’aubépine et la graine d’absinthe: mais le froment est la meilleure nourriture . qu’on puisse leur donner, en y joignant les œufs de fourmis. Quelques uns recomman: dent de bien prendre garde qu'il n’y ait des fourmis mélées, de peur que les faisans ne se désoûtent des œufs; mais Edmond King veut qu’on leur donne des fourmis même, et prétend que c’est pour eux une nourriture très-salutaire , et seule capable de lés réta- blir lorsqu’ils sont foibles et abattus : dans la disette, on y substitue avec succès des sauterelles , des perce-oreilles, des miile- pieds. L'auteur anglois que je viens de citer assure qu'il avoit perdu beaucoup de faisans avant qu'il connût la propriété de ces in- sectes, et que depuis qu’il avoit appris à en faire usage, 1 ne lui en étoit pas mort uw DU FAISAN. 6: seul de ceux qu’il avoit élevés. Mais quel- que nourriture qu’on leur donne, il faut la leur mesurer avec prudence, et ne point trop les engraisser; car les coqs trop gras sont moins chauds, et les poules trop grasses sont moins fécondes, et pondent des œufs à coquille molle et faciles à écraser. La durée de l’incubation est de vingt à vingt-cinq jours, suivant la plupart des au- teurs et ma propre observation. Palladius la fixe à trente : mais c’est une erreur qui n’auroit pas dû reparoître dans la Maison rustique; car le pays où Palladius écrivoit étoit plus chaud que le nôtre; les œufs de faisans u’y devoient pas être plus de temps à éclore que dans le nôtre, où ils éclosent au bout d'environ trois semaines ; d’où il suit que le mot frigesimus a été substitué par les copistes au mot sigesimnus. IL faut tenir la couveuse dans un endroit éloigné du bruit et un peu enterré, afin qu’elle y soit plus à l'abri des inégalités de la température et des impressions du ton- nerre. | ‘ AN Dès que les petits faisans sont éclos, ils commencent à courir comme font tous les (* 6: HISTOIRE NATURELLE gallinacés : on les laisse ordinairement vingt: quatre heures sans leur rien donner ; au bout de ce temps, on met la mère et les petits dans une boîte que l’on porte tous les jours aux champs, dans un lieu semé de blé, d'orge, de gazon, et sur-tout abondant en œufs de fourmis : cette boîte doit avoir pour couvercle une espèce de petit toit fermé de planches légères, qu’on puisse ôter et re- mettre à volonte, selon les circonstances ; elle doit aussi avoir à l’une de ses extré- mités un retranchement où l’on tient la mére renfermée par des cloisons à claire- voie, qui donnent passage aux faisandeaux : du reste, on leur laisse toute la liberté de sortir de la boîte et d'y rentrer à leur gré; les gloussemens de la mère prisonnière et le besoin de se réchauffer de temps en temps sous ses ailes les rappelleront sans cesse, et les empêcheront de s’écarter beaucoup : on a coutume de reunir trois ou quatre cou- vées à peu près de même âge, pour n’en former qu’une seule bande capable d’oc- cuper la mère, et à laquelle elle puisse suflire. PDT EU On les nourrit d’abord comme on nourrit | DU FAISAN. 63 tous les jeunes poussins, avec un mélange d'œufs durs, de mie de pain et de feuilles de laitue, hachés ensemble, et avec des œufs de fourmis de prés. Mais il y a deux atten- tions essentielles dans ces premiers temps: la première est de ne point les laisser boire du tout , et de ne les lâcher chaque jour que lorsque la rosée est évaporée, vu qu'à cet âge toute humidité leur est contraire; et c’est, pour le dire en passant, une des raisons pourquoi les couvées de faisans sau- vages ne réussissent guère dans notre pays; car ces faisans, comme je l’ai remarqué plus haut, se tenant par préférence dans les lieux les plus frais et les plus humides, il est dif- ficile que les jeunes faisandeaux n’y péris- sent : la seconde attention qu’il faut avoir, c'est de leur donner peu et souvent, et dès le matin, en entremélant toujours les œufs de fourmis avec les autres alimens. Le second mois on peut déja leur donner une nourriture plus substantielle; des œufs de fourmis de bois, du turquis, du blé, de l'orge, du millet, des féves moulnes, en augmentant insensiblement la distance des repas, 64 HISTOIRE NATURELLE t, Ce temps est celui où ils commencent à ètre sujets à la vermine : la plupart des mo- dernes recommandent, pour les en délivrer, de nettoyer la boîte, et même de la suppri- mer entièrement, à l’exception de son petit toit, que l’on conserve pour leur servir d’abri; mais Olina donne un conseil qui avoit été . indiqué par Aristote, et qui me paroît mieux réfléchi et plus conforme à la nature de ces oiseaux. Îls sont du nombre des pulvéra- teurs, et ils périssent lorsqu'ils ne se pou- drent point : Olina veut donc qu’on mette à leur portée de petits tas de terre sèche ou de sablon très-fin, dans lesquels ils puissent se vautrer, et se délivrer ainsi des piquures incommodes des insectes. | Il faut être aussi très-exact à leur donner de l’eau nette et à la leur renouveler souvent; autrement ils courroient risque de la pépie, à laquelle il y auroit peu de remèdes, suivant les modernes , quoique Palladius ordonne tout uniment de la leur ôter comme on l’ôte aux poulets, et de leur frotter le bec avec de l'ail broyé dans de la poix liquide. Le troisième mois amène de nouveaux dangers : les plumes de leur queue tombent DU FAISAN. 65 alors , et il leur en pousse de nouvelles ; c’est une espèce de crise pour eux comme pour lesxpaons : mais les œufs de fourmis sont encore ici une ressource; car ils hâtent le moment critique et en diminuent le dan- ger, pourvu qu'on ne leur en donne pas trop, car l'excès en seroit pernicieux. À mesure que les jeunes faisandeaux de- viennent grands, leur régime approche da- vantage de celui des vieux, et dès la fin du troisième mois on peut les lâcher dans l’en- droit qu'on veut peupler : mais tel est l'effet de la domesticité sur les animaux qui y ont vécu quelque temps, que ‘ceux même qui, comme les faisans, ont le penchant le plus invincible pour la liberté, ne peuvent y être rendus tout d'un coup et sans observer des gradations ; de même qu'un bon estomac af- foibli par des alimens trop légers, ne peut _s’accoutumer que peu à peu à une nourri- ture plus forte. IL faut d’abord transporter la boite qui contient la couveée dans l’en- » droit où l’on veut les lâcher; on aura soin de leur donner la nourriture qu'ils aiment le mieux , mais jamais dans le même en- droit, et en diminuant la quantité chaque 6 66 HISTOIRE NATURELLE jour, afin de les obliger à chercher eux- mêmes ce qui leur convient, et à faire con- noissance avec la campagne : lorsqu'ils se- ront en état de trouver leur subsistance, ce sera le moment de leur donner la liberté et de les rendre à la nature ; ils deviendront bientôt aussi sauvages que ceux qui sont nes dans les bois, à cela près qu'ils conserveront une sorte d'affection pour les lieux où ils auront été bien traités dans leur premier âge. Hi | L'homme ayant réussi à forcer le naturel du faisan en l’accoutumant à se joindre à plusieurs femelles, a tenté de lui faire en- core une nouvelle violence en l’obligeant de se mêler avec une espèce étrangère, et ses tentatives ont eu quelque succès ; mais ce n’a pas été sans beaucoup de soins et de précautions * : on a pris un jeune coq-faisan qui ne s’étoit encore accouplé avec aucune PA . * Jamais les faisans libres ne cochent les poules qu'ils rencontrent : ce n’est pas que le coq ne fasse quelquefois des avances, mais la poule ne les souffre point. R° C’est à M. Leroy, lieutenant des chasses de Ver- sailles, que Je dois cette observation, et beaucoup DU FAISAN. 67 faisane, on l’a renfermé dans un lieu étroit et foiblement éclairé par en haut; on lui a choisi de jeunes poules dont le plumage ap- prochoit de celui de la faisane; on a mis ces jeunes poules dans une case attenant à celle du cogq-faisan , et qui n’en étoit séparée que par une espèce de grille, dont les mailles étoient assez grandes pour laisser passer la tète et le cou, mais non le corps de ces o1- seaux; on à ainsi accoutuimé le coq-faisan à voir ces poules, et même à vivre avec elles, parce qu'on ne lui a donné de nourriture que dans leur case, joignant la grille de se- paration ; lorsque la connoissance a été faite, et qu'on a vu la saison de l’amour appro- cher, on a nourri ce jeune coq et ses poules de la manière la plus propre à les échauffer et à leur faire éprouver le besoin de se joindre; et quand ce besoin a été bien mar- que, on a ouvert la communication : il est arrivé quelquefois que le faisan, fidèle à la d’autres que J'ai insérées dans cet article. TI] seroit à souhaiter que sur l’histoire de chaque oïseau on eût à consulter quelqu'un qui eût autant de con- noissances, de lumières ; et d'empressement à les communiquer. ( ‘ 68 HISTOIRE NATURELLE nature , comme indigné de la mésalliance à laquelle on vouloit le contraindre, a mal- traité et même mis à mort les premières poules qu’on lui avoit données; s’il ne s’a- doucissoit point, on le domtoit en lui tou- chant le bec avec un fer rouge d’une part, et de l’autre en excitant son tempérament par des fomentations appropriées : enfin le. besoin de s’unir augmentant tous les jours, et la nature travaillant sans cesse contre elle- même, le faisan s’est accouplé avec les poules ordinaires, et il en a résulté des œufs poin- tillés de noir comme ceux de la faisane , mais beaucoup plus gros, lesquels ont pro- duit des bâtards qui participoient des deux espèces, et qui étoient même, selon quel- ques uns, plus délicats et meilleurs au goût que les légitimes , mais incapables, à ce qu’on dit, de perpétuer leur race, quoique, selon Longolius, les femelles de ces mulets, jointes avec leur père, donnent de véritables faisans. On a encore observé de ne donner au coq-faisan que des poules qui n’avoient jamais été cochées , et même de les renouve- ler à chaque couvée, soit pour exciter davan- tage le faisan (car l’homme juge toujours ( 4 DU FAISAN. 69 des autres êtres par lui-même), soit parce qu'on a prétendu remarquer que lorsque les mêmes poules étoient fécondées une seconde fois par le même faisan, il en résultoit une race dégénérée. On dit que le faisan est un oiseau stupide, qui se croit bien en sûreté lorsque sa tête est cachée, comme on l’a dit de tant d’autres, et qui se laisse prendre à tous les piéges. Lorsqu'on le chasse au chien courant, et qu'il a été rencontré, il regarde fixement le chien tant qu'il est en arrêt, et donne tout le temps au chasseur de le tirer à son aise. Il suffit de lui présenter sa propre image, ou seulement un morceau d’étofle rouge sur une toile blanche, pour l’attirer dans le piége ; on le prend encore en tendant des lacets on des filets sur les chemins où il passe le soir et le matin pour aller boire; enfin on le chasse à l’oiseau de proie, et l’on prétend que ceux qui sont pris de cette ma- nière sont plus tendres et de meilleur goût. L'automne est le temps de l’année où ils sont le plus gras : on peut engraisser les jeunes dans l’épinette ou avec la pompe, comme toute autre volaille; mais il faut bien + # HISTOIRE NATURELLE. prendre garde, en leur introduisant la petite boulette dans'le gosier, de ne leur pas ren- verser la Jangue, car 1ls mourroient sur-le- champ. | | | Un faisandeau bien gras est un morceau exquis, et en même temps une nourriture très-saine : aussi ce mets a-t-il été de tout temps réservé pour la table des riches; et l’on a regardé comme une prodigalité in- sensée la fantaisie qu’eut Héliogabale d’en _ mourrir les lions de sa ménagerie. = Suivant Olina et M. Leroy, cet oiseau vit comme les poules communes, environ six à sept ans, et c’est sans aucun fondement qu'on a prétendu connoître son âge par le nombre des bandes transversales de sa queue. LE FAISAN BLANC. O» ne connoît point assez l’histoire de cette variété du l’espèce de faisan, pour sa- voir à quelle cause on doit rapporter la blan- cheur de son plumage ; l’analogie nous con- duiroit à croire qu’elle est un effet du froid, comme dans le paon blanc. IL est vrai que le faisan ne s’est point enfoncé dans les pays septentrionaux autant que le paon; mais aussi sa blancheur n’est point parfaite, puis- qu'il a, selon M. Brisson, des taches d’un _ violet foncé sur le cou, et d’autres taches roussätres sur le dos, et que, selon Olina, les mâles montrent quelquefois Les couleurs franches des faisans ordinaires sur la tète et sur le cou. Ce dernier auteur dit que les faisans blancs viennent de Flandre ; mais sans doute qu'en Flandre on dit qu’ils vien- nent encore de plus loin du côté du Nord : il ajoute que les femelles sont d’une blan- cheur plus parfaite que les mâles; et je re- marque que la femelle du faisan ordinaire a aussi plus de blanc dans sou plumage que - _ n'en a Le mâle. | À : LE FAISAN VARIÉ. \ J C OMME le paon blanc, mêlé avec Le paon ordinaire, a produit le paon varié ou pa- naché, ainsi l'on peut croire que le faisan blanc, se mélant aÿec le faisan ordinaire, a produit le faisan varié dont il s’agit ici, d’autant plus que ce dernier à exactement la même forme et la même grosseur que l'espèce ordinaire, et que son plumage, dont le fond est blanc, se trouve semé de taches qui réunissent toutes les couleurs de notre faisan. | Frisch remarque que le faisan varié n’est point bon pour la propagation: : , 4: 78 £ FPE PL SI : Leg 62. “ ” L'É1C 0 Q Ù A'R D, O U LE FAISAN BATARD. Voyez la planche 2 de ce volume. : L> nom de faisan-huneru, que Frisch donne à cette variété du faisan, indique qu'il le regarde comme le produit du mélange du faisan avec la poule ordinaire : et en effet, le faisan bâtard représente l'espèce du faisan par son cercle rouge autour des yeux et par sa longue queue; et il se rapproche du coq ordinaire par les couleurs communes et obs- cures de son plumage, qui a beaucoup de gris plus ou moins foncé. Le faisan bâtard est aussi plus petit que le faisan ordinaire, et il ne vaut rien pour perpétuer l’espèce; ce qui convient assez à un métis, ou, si l’on veut, à un mulet. Frisch nous apprend qu’on en élève beau- Oiseaux. LV: 7 74 HISTOIRE NATURELLE. coup en Allemagne, à cause du profit qu'on | en retire, et c’ést en effet un très-bon man- ger *. # * Ce seroit ici le ie de parler du faisan- dindon qui à été vu en Angleterre, et dont M. Edwards a donné la description et la figure, pl. CCCXXX VII; mais j'en ai dit mon avis ci dessus à l’article du Dindon. D OISEAUX ÉTRANGERS QUI ONT RAPPORT AU FAISAN. JE ne placerai point sous ce titre plusieurs oiseaux auxquels la plupart des voyageurs et des naturalistes ont donné le nom de /üi- sans, et qui se trouvent même sous ce nom dans nos planches enluminées, mais que nous avons reconnus, après un plus mûr examen, pour des oiseaux d'espèces fort dif- _ férentes. | De ce nombre sont, 1°. le faisan des An- tilles de M. Brisson, qui est le faisan de l'ile Kayriouacou du P. du Tertre, lequel a les jambes plus longues et la queue plus courte que le faisan ; 2°. Le faisan couronné des Indes de M. Bris- son, qui est représenté sous le mème nom *, et qui diffère du faisan par sa conformation totale, par la forme particulière du bec, par * Voyez les planches enluminées, n° 118. 76 HISTOIRE NATURELLE ses mœurs, par ses habitudes, par ses ailes qui sont plus longues, par sa queue plus courte, et qui, à sa grosseur près, paroît avoir beaucoup plus de rapport avecde genre du pigeon; | 3°. L'oiseau d'Amérique !, que nous avons fait représenter sous le nom de /aisan huppé de Cayenne, parce qu'il nous avoit été en- voyé sous ce nom, Mais qui nous paroît dif- férer du faisan par sa grosseur, parle port de son corps, par son cou long et menu, sa tête petite, ses longues ailes, etc. ; 4°, Le hocco-faisan de la Guiane?, qui n’est rien moins qu’un faisan ,; comme il est aisé de s’en convaincre par la comparaison ” EE | . Tous les autres Le d'Amérique que us Brisson et Barrère, et plusieurs auûtres, entraînés par leur méthode, ont rapportés au genre du faisan, quoiqu'ils en diffèrent par un grand nombre d’attributs, et par quelques uns mème de ceux qui avoient éte choisis pour en faire les caractères de, ce genre. . 1 Voyez les planches eniluminées, n° 337, ÿ P , & Jhud, n° 66. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 7 15 LE FAISAN DORÉ ,; où LE TRICOLOR HUPPÉ DE LA CHINE. QUELQUES auteurs ont donné à cet oi- seau le nom de faisan rouge; on eût été presque aussi bien fondé à lui donner celui de faisan bleu, et ces deux dénominations auroient été aussi imparfaités que celle de faisan doré, puisque toutes les trois n’in- diquant que l’une des trois couleurs écla- tantes qui brillent surson plumage, semblent exclure les deux autres : c'est ce qui m'a donné l’idée de lui imposer un nouveau nom , et j'ai cru que celui de /7icolor huppé de la Chine le caractériseroit mieux, puis- qu’il présente à l’esprit ses attributs les plus apparens. 3 On peut regarder ce faisan comme une variété du faisan ordinaire, qui s’est em belli sous un ciel plus beau; ce sont deux branches d’une même famille qui se sont séparées depuis long-temps, qui même ont forme deux races distinctes, et qui cependant 78 HISTOIRE NATURELLE : se reconnoissent encore, car elles s’allient, se mêlent et produisent ensemble : mais il faut avouer que leur produit tient un peu de la stérilité des mulets, comme mous le verrons plus bas ; ce qui prouve de plus en plus l’ancienneté de la séparation des deux races. | () Le tricolor huppé de la Chine est plus petit que notre faisan; et je dois avertir à cette occasion que dans notre planche en- luminée, n° 217, on a omis le module, qui doit être de deux pouces neuf lignes. La beauté frappante de cet oiseau lui a valu d’être cultivé.et multiplié dans nos fai- sanderies, où il est assez commun aujour-— d’hui. Son nom de fricolor huppé indique le rouge, le jaune doré et le bleu qui do- minent dans son plumage, et les longues et belles plumes qu'il a sur la tête, et qu’il relève quand il veut en manière de huppe: il a l'iris, le bec, les pieds et les ongles jaunes; la queue plus longue à proportion que notre faisan, plus émaillée, et en géné- ral le plumage plus brillant : au-dessus des plumes de la queue sortent d’autres plumes longues et étroites, de couleur/ écarlate , DES OISEAUX ÉTRANGERS. y dont la tige est jaune ; il n’a point les yeux entourés d’une peau rouge, comme le faisan d'Europe; en un mot, il paroît avoir subi fortement l'influence du climat. La femelle du faisan doré: est un peu plus petite que le mâle; elle a la queue moins longue : les couleurs de son plumage sont fort ordinaires , et encore moins agréables que celles de notre faisaue; mais quelque- ” fois elle devient avec le temps aussi belle que Je mâle : on en a vu une en Angleterre, chez mylady Essex, qui, dans l’espace de six ans, avoit graduellement changé sa couleur igno- ble de bécasse en la belle couleur du mâle, duquel elle ne se distinguoit plus que par les yeux et par la longueur de la queue. Des personnes intelligentes, qui ont été à portée d'observer ces oiseaux, m'ont aussi assuré que ce changement de couleur avoit lieu dans la plupart des femelles ; qu’il com- mençoit lorsqu'elles avoient quatre ans, temps où le mâle commençoit aussi à prendre du dégoût pour elles et à les maltraiter; qu’il leur venoit alors de ces plumes longues et étroites qui dans le mâle accompagnent les plumes de la queuc; en un mot, que plus £o HISTOIRE NATURELLE elles avançoient en âge, plus elles devenoient semblables aux mâles , comme cela a lieu plus ou moins dans presque tous les animaux. M. Edwards assure qu’on a vu pareille- ment chez le duc de Leeds une faisane com- mune dont le plumage étoit devenu sem— blable à celui du faisan mâle; et il ajouté ct de. tels changemens de couleurs n’ont guêre lieu que parmi les oiseaux qui vivent dans la domesticité. Les œufs de la faisane dorée ressemblent beaucoup à ceux de la peintade, et sont-plus petits à proportion que ceux de la poule do- mestique , et ip rougeâtres que ceux de nos faisans. Le docteur Hans Sloane a conservé un _ mâle environ quinze ans : il paroît que c'est un oiseau robuste, puisqu'il vit si long-temps hors de son pays; il s’accoutume fort bien au nôtre, et y multiplie assez facilement ; il multiplie même avec notre faisane d'Eu- rope. M. Leroy, lieutenant des chasses de Versailles, ayant mis une de ces faisanes de la Chine avec un coq-faisan de ce pays- ci, il en a resulté deux faisans mâles fort ressemblans aux nôtres, cependant avec le 4 2 Loose RSR DES OISEAUX ÉTRANGERS. &r plumage mal teint, et n'ayant que quelques plumes jaunes sur la tête, comme le faisan de la Chine. Ces deux jeunes mâles métis ayant été mis avec des faisanes d'Europe, l’un d'eux féconda la sienne la seconde an- née, et il en a résulté une poule faisane qui n’a jamais pu devenir féconde ; et les deux coqs métis n’ont rien produit de plus jusqu’à la quatrième année, temps où ils trouvèrent le moyen de s DER a DE à travers leurs filets. Il y a grande apparence que le tricolor huppé dont il s’agit dans cet article, est ce beau faisan dont on dit que les plumes se vendent à la Chine plus cher que l'oiseau même, et que c’est aussi celui que Marco- Paolo admira dans un de ses voyages de la Chine, et dont la queue avoit deux à trois pieds de long. L 4 82 HISTOIRE NATURELLE IL LE FAISAN NOIR ET BLANC DE LA CHINE*. LA figure de nos planches enluminées n’a été dessinée que d’après l’oiseau empaillé, et je ne doute pas que celle de M. Edwards, qui a été faite et retouchée à loisir d’après le vivant, et qui a été recherchée pour les plus petits détails d’après l'oiseau mort, ne re- présente plus exactement ce faisan , et me donne une idée plus juste de son port, de son air, etc. Il est aisé de juger , par la seule inspection de la figure, que c’est une variété du faisan, modelée, pour la forme totale, sur les pro- portions du tricolor huppé de la Chine, mais beaucoup plus gros, puisqu'il surpasse même le faisan d'Europe : il a avec ce dernier un trait de ressemblance bien remarquable, c’est la bordure rouge des yeux, qu’il a même plus large et plus étendue; car elle lui tombe _* Voyez les planches enluminées ; n° 123, le mâle; et n° 124, la femelle, à éd. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 83 de chaque côté au-dessous du bec inférieur, en forme de barbillons, et d'autre part elle s’élève comme une double crête au-dessus du bec supérieur. La femelle est un peu plus petite que le mâle, dont elle diffère beaucoup par la cou- leur; elle n’a ni le dessus du corps blanc comme lui, ni le dessous d’un beau noir, avec des reflets de pourpre : on n’apperçoit dans tout son plumage qu’une échappée de blanc au-dessous des yeux; le reste est d’un rouge brun plus ou moins foncé, excepté sous le ventre et dans les plumes latérales de la queue, où l’on voit des bandes noires transversales sur un fond gris. À tous autres égards , la femelle diffère moins du mäle dans cette race que dans toutes les autres races de faisan ; elle a comme lui une huppe sur la tête, les yeux entourés d’une bordure rouge, et les pieds de même couleur. Comme aucun naturaliste, ni même au- cun voyageur , ne nous a donné le plus léger indice sur l’origine du faisan noir et blanc, nous sommes réduits sur cela aux seules conjectures : la mienne seroit que de même que le faisan de Géorgie s'étant avancé vers 1 8 HISTOIRE NATURELLE l'Orient , et ayant fixé son séjour dans les : provinces méridionales où tempérées,de la Chine, est devenu le tricolor huppé, ainsi le faisan blanc de nos pays froids ou de la Tartarie, ayant passé dans les provinces sep- tentrionales de la Chine, est devenu le faisan noir et blanc de cet article, lequel aura pris plus de grosseur que le faisan primitif ou de Géorgie, parce qu’il aura trouvé dans ces provinces une nourriture plus abondante ou plus analogue à son tempérament , mais qui porte l'empreinte du nouveau climat dans son port, son air , sa forme extérieure; sem- blable au port, à l’air, à la forme extérieure du tricolor huppé de la Chine, et qui a con- servé du faisan primitif la bordure, rouge. des yeux, laquelle même a pris en lui plus d’étendue et de volume, sans doute par les mêmes causes qui l'ont rendu lui-même: plus gros et plus grand que le faisan ordi. naire. | 4 Là La DES OISEAUX ÉTRANGERS. 85 b < III. L’'ARGUS, ou LE LUEN. Ox trouve au nord de la Chine une espèce de faisan dont les ailes et la queue sont semées d’un très-grand nombre de taches rondes, semblables à des yeux, d’où on lui a donné le nom d’argus : les deux plumes du milieu de la queue sont très-longues, et _excèdent de beaucoup toutes les autres. Cet oiseau est de la grosseur du dindon ; il a sur la tête une double huppe qui se couche en arrière. IV: Li LE NAPAUL, ou FAISAN CORNU. M. EpwaRrps, à qui nous devons la con- noissance de cet oiseau rare, le range parmi les dindons, comme ayant autour de la tête des excroissances charnues, et cependant il lui donne le nom de jfaisan cornu. Je crois en effet qu'il approche glus du faisan que du dindon; car les exèroissances charnues 8 x7” 8 HISTOIRE NATURELLE ne sont rien moins que propres à ce dernier: le coq, la peintade, l’oiseau royal, le casoar, - . Ê . 1 et bien d’autres oiseaux des deux continens, en ont aussi; elles ne sont pas même étran- gères au faisan, puisqu'on peut regarder ce large cercle de peau rouge dont ses yeux sont entourés, comme étant à peu près de mème nature, et que dans le faisan noir et blanc de la Chine cette peau forme réelle- ment une double crête sur le bec et des bar- billons au-dessous. Ajoutez à cela que le napaul est du climat des faisans, puisqu'il a été envoyé de Bengale à M. Mead; qu'il a le bec, les pieds, les éperons, les ailes et la forme totale du faisan; et l’on conviendra qu’il est plus naturel de le rapporter au faisan qu’à un oiseau d'Amérique, tel que le dindon. Le napaul ou faisan cornu est ainsi ap- pelé, parce qu’il a ent effet deux cornes sur la tête; ces cornes sont de couleur bleue, de forme cylindrique, obtuses à leur extré- mité, couchéés en arrière , et d’une subs- tance analogue à de la chair calleuse. Il n’a point autour des yeux ce cercle de peau rouge, quelquefois pointillée de noir, qu'ont ra ic ie \# DES OISEAUX ÉTRANGERS. 87 les faisans ; mais il a tout cet espace garni de poils noirs en guise de plumes. Au-dessous de cet espace et de la base du bec inférieur, prend naissance une sorte de gorgerette formée d'une peau lâche, laquelle tombe et flotte librement sur la gorge et la partie supérieure du cou; cette porgerette est noire dans son milieu , semée de quelques poils de mème couleur, et sillonnée par des rides plus ou moins profondes , en sorte qu’elle paroît ca- pable d'extension ‘dans l'oiseau vivant, et l’on peut croire qu’il sait la gonfler ou la resserrer à sa-volonté : les parties latérales en sont bleues, avec quelques taches oran- gées ,. et sans'aucun poil en dehors; mais la face intérieure qui s'applique sur le cou est garnie de petites plumes noires, ainsi que Ja partie du cou qu’elle recouvre. Le som- met de la tête est rouge, la partie antérieure du corps rougeâtre , la partie postérieure plus rembrumie; sur le tout, y compris la queue : et. les ailes, on voit des taches blanches en— tourées de noir , semées près à près assez régulièrement : ces taches sont rondes sur l'avant, oblongues ou en forme de larmes sux l'arrière, et celles-ci tournées de manièra LA 88 HISTOIRE NATURELLE que la pointe regarde la tête. Les aïles ne passent guère l’origine de la queue, d’où l’on peut conclure que c’est un oiseau pe- sant. La longueur de la queue n’a pu être déterminée par M. Edwards, vu qu’elle y est représentée dans le dessin original, comme wo été usée par quelque frottement. V. LE KATRACA. Quorqu’aA vrai dire il ne se soit point trouvé de véritables faisans dans l'Amérique, comme nous l’avons'etablr ci-dessus , néan- moins, parmi la multitude d’oiseaux diffé- rens qui peuplent ces vastes contrées , on en voit qui ont plus ou-moins de rapports avec le faisan; et celui dont il s’agit dans cet article en approche plus qu'aucun autre, et doit être regardé comme son représentant dans le nouveau monde. Il le représente en effet par sa forme totale, par son bec un peu crochu, par ses yeux bordés de rouge et par sa longue queue; néanmoins, comme il ap- partient à un climat et même à un monde " DES OISEAUX ÉTRANGERS: #9 différent, et qu’il est incertain s’il se méle avéc nos faisans d'Europe, je Le place ici après ceux de la Chine, qui s’accouplent cer- tainement et produisent avec les nôtres. L'histoire du katraca nous est totalement inconnue; tout ce que je puis dire d'aprés l'inspection de sa forme extérieure, c’est que le sujet représenté* nous paroit être le mâle, à cause de sa longue queue, et de la forme de son corps moins arrondie qu’alongée. Nous lui conserverons le nom de #a- traca qu'il porte au Mexique, suivant le P. Feuillée. * Voyez les planches enluminées, n°, r46. L :M GA { OISEAUX ÉTRANGERS! QUI PAROISSENT AVOIR RAPPORE AVEC LE PAON ET AVEC LEFAISAN. LA EL J E range sous.ce titre indécis quelques oi- seaux étrangers, trop peu connus pour qu'on puisse leur assigner une place plus fixe. k LE CHINQU'S. Da xs l'incertitude où je suis si cet oiseau est un véritable paon ou non, je lui done ou plutôt je lui conserve le nom de cAir- quis , formé de son nom chinois c£in-tchien- Æhi : c’est la dixième espèce du genre des faisans de M. Brisson ; il se trouve au Tibet, d’où cet auteur a pris occasion de le nommer paon du Tibet. Sa grosseur est celle de la peintade ; il a l'iris des yeux jaune, le bec cendré, les pieds gris, le fond du plumage LL HISTOIRE NATURELLE. on cendré, varié de lignes noires et de points blancs; mais ce qui en fait l’ornement prin- cipal et distinctif, ce sont de belles et grandes taches rondes d’un bléu éclatant, changeant en violet et en or, répandues une à une sur les plumes du dos et les couvertures des ailes:, deux à deux sur les pennes des ailes, et quatre à quatre sur les longues couver- tures de la queue, dont les deux du miliew sont les plus longues de toutes, les latérales allant toujours en se raccourcissant de cha- que côté. | On ne sait ou plutôt on ne dit rien de son histoire, pas même s’il fait la roue en relevant en éventail: ses belles plumes char- gées de miroirs. Il ne faut pas confondre le chinquis avec le kinki, ou poule dorée de la Chine, dont il est parlé dans les relations de Navarette , Trigault, du Halde, et qui, autant qu'on peut en juger par des descriptions impar- faites, n'est autre chose que notre tricolor huppé. 52 HISTOIRE NATURELLE IL l . LE SPICIFÈRE.. J’ArTPELLE ainsi le huitième faisan de M. Brisson, qu'Aldrovande a nommé paon du Japon, tout en avouant qu'il ne: res- sembloit à notre paon que par les pieds et la queue. Je lui ai donné le nom de spicifère:, à cause de l’aigrette en forme d’épi qui s’élève sur sa tête : cette aigrette est haute de quatre pouces, et paroit émaillée de verd et de bleu ; le bec est de couleur-cendrée, plus long et plus menu que celui du paon; l'iris est jaune et le tour des yeux rouge, comme _ dans le faisan ; les plumes de la queue sont en plus petit nombre, le fond en est plus rembruni et les miroirs plus grands, mais brillant des mêmes couleurs que dans notre " cs 1 1 paon d'Europe : la distribution des couleurs forme, sur la poitrine, le dos et la partie des ailes la plus proche du dos, des espèces d’écailles qui ont différens reflets en diflé- rens endroits, bleus sur la partie des ailes la (DES OISEAUX ÉTRANGERS. 3 plus proche du dos, bleus et verds sur le dos, bleus, verds et dorés sur la poitrine; les autres pennes de l’aile sont vertes dans le milieu de leur longueur, ensuite jaunâtres , et finissent par être noires à leur éxtrémite : le sommet de la tête et le haut du cou ont des taches bleues mélées de blanc sur un fond verdâtre. Telle est à peu près la description qu’Al- drovände a faite du mâle, d’après une figure peinte que l’empereur du Japon avoit en- voyée au pape : il ne dit point s’il étale sa queue comme notre paon; ce qu’il y a de certain, c'est qu’il ne l’étale point dans la figure d’Aldrovande, et qu’il y est même représenté sans éperons aux pieds, quoi- qu'Aldrovande n'ait pas oublié d’en faire paroître dans la figure du paon ordinaire qu’il a placée vis-à-vis pour servir d'objet de comparaison. +! Selon: cet auteur, la femelle est plus petite que le mäle : elle a les mêmes couleurs que lui sur la tête, le cou, la poitrine, le dos et les ailes ; mais elle en diffère en ce qu’elle a le dessous du corps noir, et en ce que les couvertures du croupion, qui sont beaucoup plus courtes que les pennes de la queue, sont 4 . HISTOIRE NATURELLE ornées de quatre ou cinq miroirs assez larges, relativement à la grandeur des plumes: le verd est la couleur dominante de la queue, les pennes en sont bordées de bleu.,.et les tiges de ces pennes sont blanches. Cet oiseau paroit avoir beaucoup de rap port avec celui dont parle Kæmpfer dans son Æistoire du Japon, sous le nom de fai- san; ce que j'en ai dit sufñt pour faire voir qu'il a plusieurs traits de conformité et plu- sieurs traits de dissemblance , soit avec: le paon, soit avec le faisan; et que par consé quent il ne devoit point avoir d'autre place que celle que je Ini donne ici. + BE UP L'ÉPERONNIER#. CET oiseau n'est guère connu que par la üigure et la description que M. Edwards a publiées du mäle et de la femelle, et a al avoit faites sur le vivant. Au premier md d œil le mâle paroitia avoir y 5% * Voy. les A6 nos 492 et 498. 623 Let à ES DES OISEAUX ÉTRANGERS. 5 quelque rapport avec le faisan et le paon ; comme eux il a la queue longue, il l’a semée de miroirs comme le paon; et quelques na- turalistes, s’en tenant à ce premier coup d'œil, l’ont admis dans le genre du faisan : mais quoique, d'après ces rapports superfi- ciels, M. Edwards ait cru pouvoir lui don- ner ou lui conserver le nom de faisan-paon, néanmoins, en y regardant de plus près, il a bien jugé qu’il ne pouvoit appartenir au genre du faisan, 1°. parce que les longues plumes de sa queue sont arrondies et non pointues par le bout; 2°. parce qu’elles sont droites dans toute leur longueur, et non recourbées en en bas; 3°. parce qu’elles ne font pas la gouttière renversée par le ren- versement de leurs barbes, comme dans le faisan ; 4°. enfin, parce qu’en marchant il ne recourbe point sa queue en en haut. Mais il appartient encore bien moins à l'espèce du paon, dont il diffère non seule- ment par le port de la queue, par la con- Hguration et le nombre des pennes dont elle est composée, mais encore par les pro- portions de sa forme extérieure, par la gros- seur de la tête et du cou, et en ce qu’il ne 6 HISTOIRE NATURELLE . | redresse et n’épanouit point sa queue conime le paon*, qu’il n’a au lieu d’aigrette qu'une espèce de huppe plate, formée par les plumes du sommet de la tête qui se re- lèvent , et dont la pointe revient un ‘peu en avant : enfin le mâle diffère du coq-paon et du cog-faisan par un double éperon qu'il a à chaque pied; caractère presque unique, d'après lequel je lui ai donné le nom d'épe- ronnier. | | Ces différences extérieures, qui certaine- ment en supposent beaucoup d’autres plus cachées, paroîtront assez considérables à tout homme de sens et qui ne sera préoc- cupé d'aucune méthode, pour exclure l’épe- ‘ronnier du nombre des paons et des faisans, encore qu'il ait comme eux les doigts sé | pares, les pieds nuds, Jes, jambes revêtues de plumes jusqu’au talon , le bec en cône courbé, la queue longue , et la tête sans crête ni membrane. À la vérité, je sais tel mé- * M. Edwards ne dit point que cet oiseau fasse la roue ; et de cela seul je me crois en droit de conclure qu'il ne la fait point : un fait aussi consi= dérable n’auroit pu échapper à M. Edwards; ets A Peût observé , il ne l’auroit point omis. | DES.OISEAUX ÉTRANGERS. . 97 thodiste qui ne pourroit sans inconséquence ne pas le reconunoître pour un paon ou pour un faisan, puisqu'il a tous les attributs par lesquels ce genre est caractérisé dans sa mé- thode; mais aussi un naturaliste sans mé- thode et sans préjugé ne pourra le recon- noître pour le paon de la nature : et que s'ensuivra-t-il de là, sinon que l’ordre de la nature est bien loin de la méthode du na- turaliste ? En vain me dira-t-on que puisque l’oiseau dont il s’agit ici a les principaux caractères du genre du faisan, les petites variétés par lesquelles il en diffère ne doivent point em- pêcher qu'on ne le rapporte à ce genre; car je demanderai toujours : Qui donc ose se croire en droit de déterminer ces caractères principaux; de décider, par exemple, que l’attribut négatif de n'avoir ni crête ni mem- brane soit plus essentiel que celui d’avoir la tête de telle ou telle forme, de telle ou | telle grosseur, et de prononcer que tous les oiseaux qui se ressemblent par des carac- tères choisis arbitrairement, doivent aussi se ressembler dans leurs véritables pro- priétes ? | 9 sy g HISTOIRE NATURELLE Au reste, en refusant à l’éperonnier le nom de paon de la Chine, je ne fais que. me conformer aux témoignages des voya- geurs, qui assurent que dans ce vaste pays on ne voit de paons que ceux vi ù due 7 porte des autres contrées. j L’éperonnier a l'iris des yeux jaune, ainsi que l’espace entre la base du bec, l'œil et le bec supérieur rouge, l’inferieur brun foncé et les pieds d’un brun sale : son plumage est d’une beauté admirable. La queue est, comme je l'ai dit, semiée de miroirs ou de taches brillantes, de forme ovale, et d’une belle couleur de pourpre avec des reflets bleus, verds et or: ces miroirs font d'autant plus d'effet qu'ils sont terminés et détachés du fond par un double cercle, l’un noir et l’autre orangé obscur : chaque penne de la queue a deux de ces miroirs accolés l’un à l'autre, la tige entre deux; et malgré cela, comme cette queue a infiniment moins de plumes que celle du paon, elle est beaucoup moins chargée de miroirs; mais en recom- . pense l’éperonnier en a une très-grande quantité sur le dos et sur les ailes, où le paon n’en a point du tout : ces miroirs des $ "a | f DES OISEAUX ÉTRANGERS. 9 ailes sont ronds; et comme le fond du plu- mage est brun, on croiroit voir une belle peau de martre zibeline eurichie de saphirs, d’opales, d’'émeraudes et de topazes. Les plus grandes pennes de l'aile n’ont point de miroirs, toutes les autres en ont chacune un ; et quel qu’en soit l'éclat, leurs couleurs, soit dans les ailes, soit dans la queue , ne pénètrent point jusqu'à l’autre surface de la penne, dont le dessous est d’un sombre uniforme. ' Le mâle surpasse en grosseur le faisan or- dinaire : la femelle est d’un tiers plus petite que Île mâle, et paroïit plus leste et plus _ éveillée; elle a comme lui l'iris jaune, mais point de rouge dans le bec, et la queue beau- coup plus petite. Quoique ses couleurs ap- prochent plus de celles du mâle que dans l'espèce des paons et des faisaus, cependant elles sont plus mattes, plus éteintes, et n'ont point ce lustre, ce jeu, ces ondulations de lumière, qui font un si bel effet dans les miroirs du mâle. | Cet oiseau étoit vivant à Londres l’année dernière , d'où M. le chevalier Codrington en a envoyé des dessins coloriés à M. Dan- _r00o HISTOIRE NATURELLE. | benton le jeune, d’après lesquels nous avons ‘ fait graver et enlumiuer les planches n°$ 492 et 493 , dont la première représente le mâle, et la seconde la femelle de cet oiseau. LES H0.C C OS. Tous les oiseaux que l’on désigne ordi- nairement sous cette dénomination prise dans cette acception générique, sont étran- gers à l'Europe, et appartiennent aux pays chauds de l'Amérique : les divers noms que les différentes tribus de sauvages leur ont donnés, chacune en son jargon, n’ont pas moins contribué à en enfler la liste que les phrases multipliées de nos nomencla- teurs ; etje vais tâcher, autant que la disette d'observations me le permettra, de réduire ces espèces nominales aux espèces réelles. ] / rez HISTOIRE NATURELLE LE HOCCO PROPREMENT DIT * Voyez les planches 4 et 5 de ce volume. JE comprends sous cette espèce non seu- lement le mitou et le mitou-poranga de Marcgrave, que cet auteur regardeten effet comme étant de la même espèce; le :coq- indien de MM. de l’académie et de plusieurs autres, le mutou ou moytou de Laëet et de Lery, le temocholli des Mexicains, et leur tepetototl ou oiséau de montagne, le qui- rizao ou curasso de la Jamaïque, de pocs de Frisch, le hocco de. Cayenne de M. Barrère, le hocco de la Guiane ou douzième faisan de M. Brisson : mais j'y rapporte encore. comme variétés le hocco du Bresil, ou dou- zième faisan de M. Brisson; son hocco de Curassou , qui est son treizième faisan; le hocco du Pérou ?, et même la poule rouge du Pérou d’Albin; le coxolisli de Fernan- ; Voyez les planches enluminées, n° 86 et 125. ? Thid. n° 125. N DES HOCCOS. 109 dès, et Le seiziéme faisan de M. Brisson. Je me fonde sur ce que cette multitude de noms désigne des oiseaux qui ont beaucoup de qualités communes, et qui ne diérent entre eux que par la distribution des couleurs, par quelque diversité dans la forme et les accessoires du bec, et par d’autres accidens qui peuvent varier dans la même espèce à raison de l’âge, du sexe, du climat, et sur- tout daus une espèce aussi facile à appri- voiser que celle-ci, qui même l’a été en plu- sieurs cantons, et qui par conséquent doit participer aux variétés auxquelles les oi- seaux domestiques sont si sujets. MM. de l'académie avoient ouï dire que leur coq indien avoit été apporté d'Afrique, où il s’appeloit azo : mais comme Marc- grave et plusieurs autres observateurs nous apprennent que c’est un oiseau du Bresil, et que d’ailleurs on voit clairement, en com- parant les descriptions et les figures les plus exactes , qu'il a les ailes courtes et le vol pesant, il est difficile de se persuader qu’il ait pu traverser d’un seul vol la vaste éten- due des mers qui séparent les côtes d'Afrique de celles du Bresil , et il paroît beaucoup 1 104 HISTOIRE NATURELLE plus naturel de supposer que les sujets ob servés par MM. de l’académie, s'ils étoient réellement venus d'Afrique, y avoient été portés précédemment du Bresil ou de quelque autre contrée du nouveau monde. On peut juger, d’après les mêmes raisons, si la dé- nomination de coq de Perse, employée par Jonston, est applicable à l'oiseau dont 1l s'agit. Le hocco approche: de la grosseur du din-. don. L'un de ses plus remarquables attributs, c'est une huppe noire, et quelquefois noire et blanche, haute de deux à trois pouces, qui s’étend depuis l'origine du bec jusque derrière la tête, et que l’oiséau peut coucher en arrière et relever à son gré, selon qu'il est affecté différemment : cette huppe est composée de plumes étroites et comme éta- gées , un peu inclinées en arrière, mais dont la pointe revient et se courbe en avant. Parmi ces plumes, MM. de l’académie en ont re- marqué plusieurs dont les barbes étoient renférmées, jusqu’à la moitié de la longueur de: la côte, dans une espèce d'étui mem- braneux. : La couleur ee du plumage est le DES HOCCOS. 10b noir, qui le plus souvent est pur et comme velouté sur la tête et sur le cou, et quelque- . fois semé de mouchetures blanches ; sur le reste du corps il a des reflets verdätres, et dans quelques sujets 1l se change en marron foncé, comme celui de la planche enlumi- née n° 125. L'oiseau représenté dans cette planche n’a point du tout de blanc sous le ventre ni dans la queue, au lieu que celui de la planche n° 86 en a sous le ventre et au bout de la queue; enfin d’autres en ont sous le ventre et point à la queue, et d’autres en ont à la queue et point-sous le ventre; et il faut se souvenir que ces couleurs sont sujettes à varier, soit dans leurs teintes, soit dans leur distribution, selon la diffé- rence du sexe. Le bec a la forme de celui des gallinacés, _ mais ilest un peu plus fort : dans les uns, -1l est couleur de chair et blanchâtre vers la pointe, comme dans le hocco du Bresil de ® M. Brisson : dans les autres, le bout du bec supérieur est échancré des deux côtés; ce qui le fait paraître comme armé de trois pointes, Ja principale au milieu, et les deux latérales formées par les deux échancrures un peu 106 HISTOIRE NATURELLE reculées en arrière, comme dans l’un des coqs indiens de MM. de l’académie : dans d’autres , il est recouvert à sa base d’une peau jaune, où sont placées les ouvertures des : narines, comme dans le hocco de la Guiane de M. Brisson ; dans d’autres, cette peau jaune se prolongeant des deux côtés de la fi tète, va former autour des yeux un cercle ‘de mème couleur, comme dans le mitou- poranga de Marcgrave; dans d’autres, cette peau se renfle, sur la base du bec supérieur, en une espèce de tubercule ou de bouton arrondi assez dur, et gros comme une petite noix. On croit communément que les fe- melles n’ont point ce bouton, et M. Edwards ajoute qu'il ne vient au mâle qu'après la première année; ce qui me paroît d'autant plus vraisemblable, que Fernandès a observé dans son tepetototl une espèce de tumeur sur le bec, laquelle n’étoit sans doute autre chose que ce même tubercule qui commençoit à se former. Quelques individus, comme le mitou de Marcgrave, ont une peau blanche derrière l'oreille comme les poules com- munes ; les pieds ressembleroient, pour la forme, à ceux des gallinacés, s'ils avoient DES "WHO. CC OS: 104 l'éperon , et s'ils n’étoient pas un peu plus gros à proportion; du reste, ils varient pour la couleur depuis le brun noirâtre jusqu’au couleur de chair. Quelques naturalistes ont voulu rapporter le hocco au genre du dindon; mais il est facile , d’après la description ci-dessus et d’après nos planches enluminées, de recueil- lir les différences nombreuses et tranchées qui séparent ces deux espèces * : le dindon a la tête, petite et sans plumes, ainsi que le haut du cou, le bec surmonté d’une ca- roncule conique et musculeuse, capable d’ex- tension et de contraction , les pieds armés d’éperons , et 1l relève les plumes de sa queue en faisant la roue, etc. au lieu que le hocco a la tête grosse, le cou renfoncé, l’un et l'autre garnis de plumes, sur le bec un tu- bercule rond, dur et presqüe osseux, et sur le sommet de la tête une huppe mobile, qui paroît propre à cet oiseau, qu'il baisse et redresse à son gré; mais personne n’a jamais dit qu’il relevât les pennes de la queue en faisant la roue. * Voyez les planches enluminées ; nos 86 et 122. 108 HISTOIRE NATURELLE Ajoutez à ces différences, qui sonttoutes extérieures , les différences plus profondes et toutes aussi nombreuses que nous découvre la dissection. Le canal intestinal du hocco est beaucoup plus long, et les deux cœcurn beaucoup plus courts que dans le dindon: son jabot est aussi beaucoup moins ample, n’ayant que quatre pouces de tour; au lieu que j'ai vu tirer du jabot d’un dindon, qui ne paroissoit avoir rien de singulier dans sa-conformation, ce qu'il falloit d'avoine pour remplir une demi- pinte de Paris. Outre cela, daus le hocco la substance charnue du gésier est le plus sou- vent fort mince, et sa membrane interne au contraire fort épaisse, et dure au point d’être cassante ; enfin la trachée artère se _dilate et se replie sur elle-même, plus ou moins vers le milieu dela fourchette, comme dans quelques oiseaux aquatiques , toutes choses fort différentes de ce qui se voit dans le dindon, | Mais si le hocco n’est point un dindon, les nomenclateurs modernes étoient encore moins fondés à en faire un faisan ; car, outre les différences qu'il est facile de remar-, DES HOCCOS. 10y quer, tant au dehors qu’au dedans, d’après te que je viens de dire, j'en vois une déci- sive dans le naturel de ces animaux : Le fai- san est toujours sauvage, et, quoiqu'élevé de jeunesse, quoique. toujours bien traité, bien nourri, il ne peut jamais se faire à la domesticité; ce n’est point un domestique, c'est un prisonnier toujours inquiet, tou— jours cherchant les moyens d'échapper, et qui maltraite même ses compagnons d’es- clavage , sans jamais faire aucune sociéte avec eux. Que s'il recouvre sa liberté, et qu'il soit rendu à l’état de sauvage, pour lequel il semble être fait, rien n’est encore plus défiant et plus ombrageux; tout objet nouveau lui est suspect : le moindre bruit l'effraie; le moindre mouvement l’inquiète ; l’ombre d’une branche agitée sufhit pour lui faire prendre sa volée, tant il est attentif à sa conservation. Au contraire, le hocco est un oiseau paisible, sans défiance, et même stupide , qui ne voit point le danger, ou du moins qui ne fait rien pour l’éviter; il semble s’oublier lui-même, et s'intéresser à peine à sa propre existence. M. Aublet en a tué jusqu'à neuf de la même bande avec Oiseaux. IV, 190 119 HISTOIRE NATURELLE le même fusil, qu’il rechargea autant de fois qu'il fut nécessaire ; ils eurent cette pa- tience. On conçoit bien qu'un pareil oiseau est sociable, qu’il s’accommode sans peine. : avec les autres oiseaux domestiques, et qu’il s'apprivoise aisément. Quoiqu'apprivoisé , il s'écarte pendant le jour, et va même fort loin : mais il revient toujours pour coucher, à ce que m'assure le même M. Aublet; il devient mème familier au point de heurter à la porte avec son bec pour se faire ouvrir, de tirer les domestiques par l’habit lorsqu'ils J’oublient, de suivre son maître par-tout , et, s’il en est empêché, de l’attendre avec inquiétude, et de lui donner à son retour des marques de la joie la plus vive. IL est difficile d'imaginer des mœurs plus opposées; et je doute qu'aucun naturaliste, et mème qu'aucun nomenclateur, s'il les eût connus, eüt entrepris de ranger ces deux oiseaux sous un même genre. Le hocco se tient volontiers sur les mon- tagnes, si l’on s’en rapporte à la significa= tion de son nom. mexicain ‘eperototl , qui veut dire oiseau de montagne. On le nourrit, dans la volière, de pain, de pâtée et autres. DES HOCCOS. rtt choses semblables; dans l’état de sauvage, les fruits sont le fond de sa subsistance. IL aime à se percher sur les arbres, sur-tout pour y passer la nuit. Il vole pesamment, comme je l'ai remarqué plus haut; mais 1l a la démarche fière. Sa chair est blanche, un peu sèche; cependant lorsqu'elle est par— dée suffisamment, c’est un fort bon manger. Le chevalier Hans Sloane dit, en parlant de cet oiseau, que sa queue n’a que deux pouces de long; sur quoi M. Edwards le re- lève, et prétend qu’en disant dix pouces au lieu de deux, M. Hans Sloane auroit plus approché du vrai. Mais je crois cette cen- sure trop générale et trop absolue; car je vois Aldrovande qui, d’après Le portrait d’un oiseau de cette espèce, assure qu’il n’a point de queue; et de l’autre, M. Barrère qui rap- porte, d’après ses propres observations faites sur les lieux, que la femelle de son hocco des Amazones, qui est le hocco de Curassou de M. Brisson, a la queue très-peu longue: d’où il s’eusuivroit que ce que le chevalier Hans Sloane dit trop généralement du hocco, doit être restreint à la seule femelle, du moins dans certaines races. + | { “10 Wa \ Br H 12 HISTOIRE NATURELLE KE \ LE PAUXI, ov LE PIERRE *. Nous avons fait représenter cet oiseau sous le nom de pierre de Cayenne; et c'est en effet le nom qu'il portoit à la ménagerie du roi, où nous l'avons fait dessiner d’après le vivant : mais comme il porte dans son pays, qui est le Mexique, le nom de pauxi, selon Fernandès, nous avons cru devoir l’in- diquer sous ces deux noms. C’est le quator— zième faisan de M. Brisson, qu'il appelle hocco du Mexique. | Cet oiseau ressemble, à plusieurs égards, au hocco précédent; mais il en diffère aussi en plusieurs points : il n’a point, comme lui, la tête surmontée d’une huppe; le tubercule qu'il a sur le bec est plus gros, fait en forme de poire, et de couleur bleue. Fernandès dit que ce tubercule a la dureté de la pierre, et je soupçonne que c'est de là qu'est venu au pauxi le nom d'oiseau à pierre, ensuite celui * Voyez les planches enluminées, n° 784 < Mar IDESNHOCANSELU 3 _ de pierre; comme il a pris le nom de cwsco -ou de cushew bird, et celui de poule numi- dique, de ce même tubercule à qui les uns ont trouvé de la ressemblance avec la noix d'Amérique. appelée cusco ou cushew , et d'autres avec Le casque de la peintade. Quoi qu’il en soit, ce ne sont pas là Les seules différences qui distinguent le pauxi des hoccos précédens : il est plus petit de taille ; son bec est plus fort, plus. courbe et presque autant que celui d'un perroquet ; d’ailleurs il nous est beaucoup plus rarement apporté que le hocco. M. Edwards, qui a vu ce dernier dans presque toutes les ménage- _ries, n'a jamais rencontré qu’un seul cusco u pauxi dans le cours de ses recherches. Le beau noir de son plumage a des reflets bleus et couleur ,de pourpre, qui ne pa- roissent ni ne pourroient guère paroitre dans la figure. ai Cet oiseau se perche sur les arbres; mais il pond à:terre comme les faisans, mène ses petits et les rappelle de même : les petits vivent d'abord d’insectes , et ensuite, quand ils sont grands, de fruits, de grains et de tout ce qui convient à La volaille. 10 tr4 HISTOIRE NATURELLE Le pauxt est aussi doux et, si l’on veut, aussi stupide que les autres hoccos; car il se laissera tirer jusqu’à six coups de fusil sas se sauver : avec cela il ne se laissé ni prendre ni toucher, selon Fernandès: et M. Aublet m'assure ci ‘il ne se trouve que dans les lieux inhabités: c’est probablement l’une des causes de sa rareté en Europe. M. Brisson dit que la femelle ne diffère du mâle que par les couleurs , ayant du brun pär-tout où celui-ci a du noir, et qu’elle lui est semblable dans tout le reste : mais Al- droyande, en reconnoissant que le fond de : son plumage est brun, remarque qu’elle a du cendré aux ailes et au cou, le bec moins crochu et point de queue; ce qui seroït un trait de conformité avec le hocco des Ama- zones de Barrère, dont la femelle, comme nous l'avons vu, a la queue beaucoup moins longue que le mâle : et ce ne sont pas les seuls oiseaux d'Amérique qui n'aient point de queue ; il y a même tel canton de ce con- tinent où les poules transportées d'Europe ne peuvent vivre long-temps sans perdre leur queue et même leur croupion, comme nous l’ayons vu dans l’histoire du coq. DES HOC COS. 115 L'TL L'HOAZIN* C£r oiseau est représenté, dans nos plan- ches enluminées , sous le nom de /aësan huppé de Cayenne; du moins il n’en diffère que trés-peu, comme on peut en juger en comparant notre planche 337 à la RARE de Hernandès. Selon cet auteur, l'hoazin n’est pas tout-à- fait aussi gros qu’une poule d'Inde : il a le bec courbé,-la poitrine d’un blanc jaunûtre, les ailes et la queue marquées de taches où raies blanches à un pouce de distance les unes des autres; le dos, le dessus du cou, les côtés de la tête, d’un fauve brun; les pieds de couleur obscure. Il porte une huppe composée de plumes blanchâtres d’un côté et noires de l’autre; cette huppe est plus haute et d’une autre forme que celle des hoccos, et il ne paroît pas qu'il puisse la baisser et la relever à son gré : il a aussi la tête plus petite et le cou plus grêle. .. * Voyez les planches enluminées, n° 337 171.1 INC PPIMPMENNNESS 116 HISTOIRE NATURELLE Sa voix est très-forte, et c’est moins un cri qu’un hurlement. On dit qu’il prononce : son nom, apparemment d’un ton lugubreet effrayant : il n’en falloit pas davantage pour | le faire passer, chez des peuples grossiers, pour un oiseau de mauvyaisaugure; et comme par-tout on suppose beaucoup de puissance à ce que l’on craint, ces mêmés peuples ont cru trouver en lui des remèdes aux maladies les plus graves : mais on ne dit pas qu'ils s’en nourrissent ; ils s’en abstiennent en effet, peut-être par une suite de cette même crainte, ou par.répugnance fondée sur ce qu’il fait sa pâture ordinaire de serpens : il se tient communément dans les grandes forêts, per- ché sur des arbres le long des eaux, pour guetter et surprendre ces reptiles. Il se trouve dans les contrées les plus chaudes du Mexi- que : Hernandès ajoute qu’il paroît en au- iomne; ce qui feroit soupçonner que c’est un oiseau de passage *. * Fernandès parle d’un autre oïseau auquel il donne le nom d’hoazin , quoique, par son récit même, 1l soit très-différent de celui dont nous ve- uons de parler : car, outre qu'il est plus peut, sou chant est fort agréable, et ressemble quelquefois à — ‘DES 'HOCCOS. 117 . M. Aublet m’assure que cet oiseau, qu'il a reconnu facilement sur notre planche en- luminée , n° 337, s’apprivoise; qu'on en voit par fois de domestiques chez les Indiens, et que les François les appellent des paons. Ils nourrissent leurs petits de fourmis, de vers et d’autres insectes. ENV: ” | Li YA GC Ou CET oiseau s’est nommé lui-même; car son cri, selon Marcgrave , est yacou , d'où l'éclat de rire d’un homme, et même à un rire moqueur ; et l’on mange sa chair, quoiqu’elle ne soit ni tendre ni de bon goût. Au reste, C’est un oiseau qui ne s'apprivoise point. Je retrouverois bien plutôt l'hoazin dans un autre oiseau dont parle le même auteur , au chapitre CCXXIIT, page 57, à la suite du pauxi. Voici ses termes : {ia avis pauxt annectenda... .... ciconiæ magnitudine , colore cinereo ; crislä octo uncias longä et multis aggeratà plumis..... in amplitudinem orbiculorum præcipuë circa sum mum dilatatis, Noïlà bien la huppe de Phoazin et sa taille. L 18 HISTOIRE NATURELLE lui est venu le nom d’iacupema : ‘pour moi L j'ai préféré celui d’yacou ,; comme plus : propre à le faire reconnoître toutes les fois qu’on pourra le voir et l'entendre. | Marcgrave est le premier qui ait parlé de cet oiseau. Quelques naturalistes , d’après lui , l’ont mis au nombre des faisans ; et d’autres , tels que MM. Brisson et Edwards, l’ont rangé parmi les dindons : mais il n’est ni l’un ni l’autre. Il @’est point un dindon, quoiqu'il ait une peau rouge sous le cou; car il en diffère à beaucoup d’autres égards, et par sa taille, qui est à peine égale à celle d'une poule ordinaire, et par sa tête, qui est en partie revètue de plumes, et par sa huppe, qui approche beaucoup plus de celle _ des hôccos que de celle du dindon huppé, et par ses pieds, qui n’ont point d’éperons : d’ailleurs on ne lui voit pas au bas du cou _ce bouquet de crins durs, ni sur le bec cette caroncule musculeuse qu'a le coq-d Inde , et il ne fait point la roue en relevant les plumes de sa queue. D’autre part, il n’est point un faisan; car il a le bec grêle et alongé, la huppe des hoccos, le cou menu, une rem brane charnue sous la gorge, les pennes de | w DES HOCCOS. 119 la queue toutes égales, et le naturel doux et tranquille, tous attributs par lesquels il diffère des faisans; et il diffère par son cri du faisan et du dindon. Mais que sera-t-il donc? il sera un yacou, qui aura quelques rapports avec le dindon (la membrane char- nue sous la gorge, et la queue composée de pennes toutes égales), avec les faisans (l'œil entouré d’une peau noire, les ailes courtes et la queue longue), avec les hoccos (cette longue queue, la huppe et Le naturel doux); mais qui s’éloignera de tous par des diffé- rences assez caractérisées et en assez grand nombre pour constituer une espèce à part, et empècher qu'on ne puisse le confondre avec aucun autre oiseau. On ne peut douter que le s4an ou le quan de M. Edwards (planche XIII), ainsi appelé, selon lui, dans les Indes occidentales, appa- remment par quelque autre tribu desauvages, ne soit au moins une variété dans l'espèce de notre yacou, dont il ne diffère que parce qu’il est moins haut monté * et que ses yeux sont d’une autre couleur; mais on sait que ces petites différences peuvent avoir lieu dans te Marcgraye dit positivement erwra longa. ' 120 HISTOIRE NATURELLE la même espèce, ét sur-tout parmi les races diverses d’une espèce apprivoisée. | Le noir mêlé de brun est la couleur prin- _cipale du plumage, avec différens reflets et quelques mouchetures blanches sur le cou, la poitrine, le ventre, etc.; les pieds sn d’un rouge assez vif. La chair de l’yacou est bonne à manger; tout ce que l’on sait de ses autres propriétés se trouve indiqué dans l'exposé que j'ai fait au commencement de cet article, des diffé- rences qui le distinguent des oiseaux aux- quels on a voulu le comparer. À: M. Ray le regarde comme étant delamême espèce que le coxolitli de Fernandèés ; cepen- dant celui-ci est beaucoup plus gros, et n’a point sous la gorge cette membrane charnue qui caractérise l’yacou : c’est pourquoi je l'ai laissé avec les hoccos proprement dits. LE MARAIL. LES auteurs ne nous disent rien de la femelle de l’yacou, excepté M. Edwards, qui DES HOCCOS. 12€ conjecture qu’elle n’a point de huppe. D’a- près cette indication unique, et d’après la comparaison des figures les plus exactes, et des oiseaux eux-mêmes conservés, je soup— çonne que celui que nous avons fait repré senter ! sous le nom de jaisan verdätre de Cayenne, .et qu'on appelle communément marail dans cette île, pourroit être la fe- melle, ou du moins une variété de l'espèce de l’yacou : car j'y trouve plusieurs rap- ports marqués avec le guan de M. Edwards (planche XIIT), dans la grosseur , la couleur du plumage, la forme totale, à la huppe près, que la femelle ne doit point avoir; dans le port du corps, la longueur de la queue, le cercle de peau rousse autour des yeux ?, l’espace rouge et nud sous la gorge, la conformation des pieds et du bec, etc. J'avoue que j'y ai aussi apperçu quelques différences; les pennes de la queue sont en tuyaux d'orgue, comme dans le faisan, et 1 Voyez les planches enluminées , n° 338. 2 Cette peau nue est bleue dans l’yacou et rouge dans le marail; mais nous avons déja observé la même variation de couleur d’un sexe à l’autre dans les membranes charnues de la peintade. IL 12 HISTOIRE NATURELLE nou point toutes égales, comme dans le güan d'Edwards, et les ouvertures des narines ne sont pas si près de l’origine du bec. Mais on ne seroit pas embarrassé de citer nombre d'espèces où la femelle diffère encore plus du mâle, et où il y a des variétés encore plus éloignées les unes des autres. M. Aublet, qui a vu cet oiseau dans son pays natal, nassure qu’il s’apprivoise très- aisément , et que sa chair est délicate et meilleure que celle du faisan, en ce qu’elle est plus succulente. Il ajoute que c’est un véritable dindon, mais seulement plus petit que celui qui s’est naturalisé en Europe; et c'est un trait dé conformité de plus qu’il a avec l’yacou d’avoir été pris pour un dindon. Cet oiseau se trouve non seulement à Cayenne, mais encore dans les pays qu’ar- rose la rivière des Amazones, du moins à en juger par l'identité du nom; car M. Barrère parle d'un marail des Amazones comme d’un oiseau dont le plumage est noir, le. bec verd, et qui n’a point de queue *. Nous * Phasianus nivger, aburus- viridi rostro. Je pa 2. 79 crois que cét auteur à entendu par le mot latin bar- bare ABURUS, sans queue; où qu'il aura écrit DES HOCCOS. 123 avous déja vu dans l’histoire du hocco pro- prement dit, et du pierre de Cayenne, qu'il y avoit dans ces espèces des individus sans queue, qu'on avoit pris pour des femelles : cela seroit-il vrai aussi des marails? Sur la plupart de ces oiseaux étrangers et si peu coûnus, onne peut, si l’on est de bonne foi, parler qu’en hésitant et par conjecture. V I LE CARACAR A. JAPPELLE ainsi, d'après son propre cri, ce bel oiseau des Antilles, dont le P. du Tertre a donné la description. Si tous les oiseaux d'Amérique qui ont été pris pour des faisans doivent se rapporter aux hoccos, le caracara doit avoir place parmi ces der- niers ; car les François des Antilles, et d'après eux le P. du Tertre, lui ont donné le nom de faisan. « Ce faisan, dit:l, est un « fort bel oiseau , gros comme un chapou, «plus hautymonté, sur des pieds de té | aburus au lieu de abrutus , qui, comme er HÉtIS pourroit signifier arraché , tronqué, »* | DORE EUR. Le ae 24 HISTOIRE NATURELLE ‘ «il a le cou beaucoup plus long que celui «d'un coq, et le bec et la tête approchant « de ceux du corbeau; il a toutes les plumes « du cou et du poitrail d’un beau bleu lui- «sant, et aussi agréable que les plumes des «paons; tout le dos est d’un gris brun; et « Les ailes et la queue, qu’il a assez courtes, «sont noires. | ; « Quand cet oiseau est apprivoisé, il fait «le maître dans la maison, et en chasse à « coups de bec les poules-d’Inde et les poules « communes, et les tue quelquefois; il en « veut même aux chiens, qu’il becque en « traître...:. J'en ai vu un..... qui:étoit «ennemi mortel des Nègres, et n’en pou- « voit souffrir un seul dans la case qu'il me « becquät par les jambes ou par les pieds. _ «jusqu'à en faire sortir le sang ». Ceux qui À en ont mangé m'ont assuré que sa chair est aussi bonne que celle des faisans de France. Comment M. Ray a-t-il pu soupconner qu'un tel oiseau fût l'oiseau de proie dont parle Marcgrave sous Le: mème nom de ca— racara ? Il est vrai qu'il fait la guerre aux poules, mais c’est seulement lorsqu'il est apprivoisé, et pour les chasser, en un mot, \ a | D: ES HOCC 0 Ge 125 comme il fait aux chiens et aux Nègres : on reconnoit plutôt à cela le naturel jaloux d’un animal domestique qui ne souffre point ceux qui peuvent partager avec lui la fa- veur du maître, que les mœurs féroces d’un oiseau de proie qui se jette sur les autres oiseaux pour les déchirer et s’en nourrir : d’ailleurs il n’est point ordinaire que la chair d'un oiseau de proie soit bonne à manger, ; comme l’est celle de notre caracara. Enfin ‘il paroît que le caracara de Marcgrave a la queue et les ailes beaueonp plus longues à proportion que celui du P. du Tertre. VIT LE CHACAMEL. FERNANDES parle d’un oiseau qui est du même pays, et à peu près de la même grosseur que les précédens, et qui se nomme en langue mexicaine, chachalacamelt, d'où j'ai formé le nom de cacamel, afin que du moins on puisse le prononcer. Sa principale propriété est d’avoir le cri comme la poule - ordinaire, ou plutôt comme plusieurs poules: 1] 126 HISTOIRE NATURELLE car il est, dit-on, si fort et si continuel qu’un seul de ces oiseaux fait autant de bruit qu’une basse-cour entière; et c’est de là que lui vient son nom mexicain, qui signifie oëseau criard. Il est brun sur le dos, blanc tirant au brun sous le naiss et le bec et les pieds sont bleuâtres. Le chacamel se tient ordinairement sur les . montagnes, comme Ja plupart des hoccos, et y élève ses petits. à: VIII LE PARRAKA gr L'HOITLALLOTL. - AUTANT qu’on peut en juger par les in- dications incomplètes de Fernandès et de Barrère, on peut, ce me semble, rapporter _ ici, 1°. le parraka du dernier, qu’il appelle faisan, et dont 1l dit que les plumes de la tête sont de couleur fauve , et lui forment une espèce de huppe; 2°. l’hoitlallotl ou oi- seau long du premier, lequel habite les plus chaudes contrées du Mexique. Cet oiseau a la queue longue, les ailes courtes et le vol pesant, comme la plupart des précédens ; DES HOCCOS. 127 mais il devance à la course les chevaux les plus viles, IL est moins grand que les hoccos, n'ayant que dix-huit pouces de longueur, du bout du hec au bout de la queue : sa couleur générale est le blanc tirant au fauve; les environs de la queue ont du noir mêlé de quelques taches ‘blanches ; indis Ja queue elle-mème est d'un verd UhEen it: et qui à des reflets à peu pres comme les plumes du paon. Au fond , cés oiseaux sont trop peu connus pour qu'on puisse les rapporter sûrement à leur veritable espèce : je ne les place ici que parce que le peu que l’on saït de leurs qua- lités les rapproche plus des oiseaux dont mous venons de parler que de tous autres; c'est à l’observation à fixer leur véritable place : en attendänt , je croirai avoir assez fait, si ce que j'en dis ici peut inspirer aux ‘personnes qui se trouveront à portée, l'envie de les connoiître mieux, et d'en donner une histoire plus M ue LES PP'E OI ss espèces Les plus généralement.connues _sont souvent celles dont l’histoire est le plus difficile à débrouiller, parce que ce sont celles auxquelles chacun rapporte naturellement les éspèces inconnues qui se présentent la première fois, pour peu.qu'on y apperçoive quelques traits de conformité, et,sans faire beaucoup d’atiention aux traits de dissem blance souvent plus nombreux; en sorte que de ce bizarre assemblage d’êtres qui se rap- prochent par quelques rapports superficiels, mais qui se repoussent par des différences plus considérables , il ne peut résulter qu’un chaos de contradictions d'autant plus révol- tantes, que l’on citera plus de:faits particu- liers de l’histoire de chacun; la plupart de ces faits étant contraires entre eux, et d'une absurde compatibilité lorsqu'on veut les ap- pliquer à une seule espèce, ou même à un seul genre. Nous avons vu plus d’un exemple de cet inconvénient dans les articles que + /, / V7 _ /} J 1 / 0 W » « . A PZ 1 / À a , = // L D 4 / DA ” 0 L HISTOIRE NATURELLE. 129 nous avons traités ci-dessus, et il y a grande apparence que celui que va nous fournir l’article de la perdrix ne sera pas le dernier. Je prends pour base de ce que j'ai à dire des perdrix , et pour première espèce de ce genre, celle de notre perdrix grise, comme étant la plus connue, et par conséquent la plus Propre à servir d'objet de comparaison pour bien juger de tous les autres oiseaux dont on a voulu faire des perdrix; jy recon- mois une variété et trois races constantes. Je regarde comme races constantes, 1°. la perdrix grise ordinaire !, et comme variété de cette race celle que M. Brisson appelle perdrix grise-blanche ::2°. la perdrix de Damas; non celle de Belon, qui est une géli- notte , mais celle d'Aldroyande, qui est plus petite que notre perdrix grise, et qui me pa- roît être la même que la petite perdrix de passage, qui est bien connue de nos chas- seurs : 3°. la perdrix de montagne, que nous avons fait représenter?, et qui semble faire la nuance entre les perdrix grises et les rouges. 1 Voyez les planches enluminées, n° 27. . % Thai. n° 136. ‘x3o HISTOIRE NATURELLE J'admets pour seconde espèce celle de la perdrix rouge, dans laquelle je reconnois deux races Constantes répandues en France, une variété et deux races étrangères. Les deux races constantes de perdrix rouges : du pays sont, 1°. celle de la plancheenlu— minée, n° 150; | | 2°. La bartavelle de la planche enluminée, n°23 1. | | Et les deux races ou espèces étrangères sont, 1°. la perdrix rouge de Barbarie Lou wrards, lames LXX ; . La perdrix de roche; qu’on trouve sur - si a de la Gambra. Et comme le plumage de la perdrix rouge est sujet à prendre du blanc, de même que celui de la perdrix grise, il en résulte dans cette espèce une variété parfaitement ana- logue à celle que j'ai reconnue dans l'espèce grise ordinaire. J'exclus de ce genre plusieurs espèces qui M à sr été rapportées mal- a+ prapos : | °. Le francolin, que nous avons fait re— as et que nous avons cru. devoir #, * Vo, les planches enluminées, n95 r47 et r48. k, * , ÿ PSY SOUPER D'R TX. ir séparer de la perdrix , parce qu’il en diffère non seulement par la forme totale, mais en- core par quelques caractères particuliers , tels que les éperons, etc. 2°. L'oiseau appelé par M. Brisson perdrix du Sénégal, et dont il a fait sa huitième perdrix. Cet oiseau, qui est représenté sous le même nom de perdrix du Sénégal, nous paroît avoir plus de rapport avec les fran- colins qu'avec les perdrix ; et comme c’est une espèce particulière qui a deux ergots à chaque jambe, nous lui donnerons le nom de Per °. La perdrix rouge d'Afrique !. & La troisième espèce étrangère donnée par M. Brisson sous le nom de grosse per- drix du Bresil, qu'il croit être le wacucagua de Marcsrave, puisqu'il en copie la descrip- tion, et qu'il confond mal-à-propos avec l’'agami de Cayenne *, lequel est un oiseau tout différent et du macucagua et de la perdrix. 5°. L’yambou de Marcerave, qui est la per- drix du Bresil de M. Brisson, et qui n’a ni la * Voyez les planches enlumintes, n° 180. # Jbid. n° 16% 132 HISTOIRE NATURELLE forme , ni les habitudes , ni les propriétés des perdrix, puisque, selon M. Brisson lui- _ même, il a le bec alongé, qu’il se perche sur les arbres, et que ses œufs sont bleus. 6°. La perdrix d'Amérique de Catesby et de M. Brisson , laquelle se perche aussi et fréquente les bois plus que les pays décou- verts, Ce qui ne convient guère aux perdrix. . que nous connoissons. 7°. Une multitude d'oiseaux d'Amérique que le peuple ou les voyageurs ont ‘jugé à propos d'appeler perdrix , d’après des res- semblances très-lésères, et encore plus légè- rement observées : tels sont les oiseaux qu'on appelle à la Guadeloupe perdrix rousses , perdrix noires et perdrix grises, quoique ,: selon le témoignage des personnes plus ins- truites, ce soient des pigeons ou des tourte- relles, puisqu'ils n ’ont ni le bec ni la chair des perdrix, qu'ils se perchent sur les arbres, qu’ils y font leur nid, qu’ils ne pondent que deux œufs, que leurs petits ne courent point dès qu’il sont éclos, mais que les père et mère les nourrissent dans le nid, comme font les tourrerelles ; telles sont encore, selon toute apparence, ces DRASS à tête bleue que DES PERDRIX. 133 Carreri a vues dans les montagnes de la Ha- vane; tels sont les z2ambouris, les pégas- sous , les pégacans de Léry , et peut-être quelques unes des perdrix d'Amérique que j'ai rapportées au genre des perdrix sur la foi des auteurs , lorsque leur témoignage n’étoit point contredit par les faits, quoiqu'il le soit, à mon avis, par la loi du climat, à _ laquelle un oiseau aussi pesant que la per- drix ne peut guère manquer d'être assujetti. 15 A LA PERDRIX GRISE*. | 1 OQvorov’Azprovanne ;, jugeant des autres pays par celui qu'il habitoit, dise que les perdrix grises sont communes par-tout, il est certain néanmoins qu'il n’y en a point dans l’île de Crète; et il est probable qu'il n’y en à jamais eu dans la Grèce, puisqu’Athé- née marque de la surprise de ce’ que toutes - les perdrix d'Italie n’avoient pas le bec rouge, comme elles l’avoient en Grèce : elles ne sont pas méme également communes dans toutes les parties de l’Europe; et il paroïît en géné- ral qu’elles fuient la grande chaleur comme le grand froid, car on n’en voit point en ? Voyez les planches enluminées, n° 27. Comme le mâle et la femelle se ressemblent pres- que en tout, nous ne donnons que l’un des deux, afin de ne pas trop multiplier les planches enlu- minées. 2 En latin, perdix ; en espagnol, perdiz ; en italien , perdice ; en allemand, w1/4-hun ou feld- Jun ; en anglois , partridge. : \ HISTOIRE NATURELLE. 1:35 Afrique ni en Lapponie*; et les provinces les plus tempérées de la France et de J’Alle- magne sont celles où elles abondent le plus. Il est vrai que Boterius a dit qu’il n’y avoit point de perdrix en Irlande; mais cela doit s'entendre des perdrix rouges, qui ne se trouvent pas même en Angleterre (selon les meilleurs auteurs de cette nation), et qui ne se sont pas encore avancées de ce côté-là au- delà des îles de Jersey et de Guernesey. La perdrix grise est assez répandue en Suède , où M. Linnæus dit qu’elle passe l'hiver sous la neige dans des espèces de clapiers qui ont deux ouvertures. Cette manière d’hiverner sous la neige ressemble fort à la perdrix blanche dont nous avons donné l’histoire sous le nom de /agopède ; et si ce fait n’étoit point attesté par un homme de la réputation de M. Linnæus , j'y soupçonnerois quelque méprise, d'autant plus qu’en France les longs hivers, et sur-tonut ceux où il tombe beau— coup de neige, détruisent une grande quan- tité de perdrix. Enfin, comme c'est un oiseau * La Barbinais le Genul nous apprend qu'on a tenté inutilement de peupler Pile de Bourhon de perdrix. KES Ÿ | % Ge x36 HISTOIRE NATURELLE fort pesant, je doute qu’il ait passé en Amé- rique; et je soupçonne que les oiseaux du nouveau monde qu’on a voulu rapporter au genre des perdrix, en seront séparés dès qu’ils seront mieux connus. {31 La perdrix grise diffère à bien des égards de la rouge; mais ce qui m’autorise principa- lement à en faire deux espèces distinctes , c’est que, selon la remarque du petit nombre des chasseurs qui savent observer, quoi- ga elles se tiennent quelquefois dans les mêmes endroits, elles ne se mélent point | l’une avec l’autre, et que si l’on a vu quel- quefois un mâle vacant de l’une des deux . espèces s'attacher à une paire de l’autre es- pêce, la suivre et donner des marques d’em- pressement et même de jalousie, jamais on ne la vu s’accoupler avec la femelle, quoi- qu’il éprouvât tout ce qu'une privation for- cée et le spectacle perpétuel d'un couple heureux pouvoient ajouter au penchant de la nature et aux influences du printemps. La perdrix grise est aussi, d'un naturel plus doux que la rouge *, et n’est point difh- * M. Ray dit le contraire, page 57 de sa Synop- | sis ; mais comme il avoue qu'il ny à point dé DE LA PERDRIX GRISE. 13 cile à apprivoiser ; lorsqu'elle n’est point tourmentée, elle se familiarise aisément avec l’homme : cependant on n’en a jamais formé de troupeaux qui sussent se laisser conduire comme font les perdrix rouges; car Olina nous avertit que c’est de cette derniére es- pèce qu’on doit entendre ce que les voya- geurs nous disent en général de ces nom- breux troupeaux de perdrix qu’on élève dans quelques îles de la Méditerranée. Les perdrix grises ont aussi l'instinct plus social entre elles ; car chaque famille vit toujours réunie en une seule bande, qu'on appelle volée ou “compagnie, jusqu’au temps où l’amour qui Vavoit formée la divise pour en unir les membres plus étroitement deux à deux; celles même dont, par quelque accident, les pontes n’ont point réussi, se rejoignant ensemble et aux débris des compagnies qui ont le plus .souffert, forment sur la fin de l’été de nou- velles compagnies souvent plus nombreuses que les premières, et qui subsistent jusqu’à la pariade de l’année suivante. perdrix rouges en Angleterre y il na pas été à portée de faire la comparaison par lui-même, comme l'ont fait les observateurs d’après qui je parle. 12 : 194 HISTOIRE NATURELLE Ces oiseaux se plaisent dans les déve: à Me: et sur-tout dans ceux où les terres sont bien cultivées et marnées, sans doute parce qu'ils y trouvent une nourriture plus abon- dante, soit en grains, soit en insectes, ou peut-être aussi parce’que les sels de la Marne, | qui contribuent si fort à la fécondité du sol, -sont analogues à leur tempérament ou à leur goût. Les perdrix grises aiment la pleine campagne, et ne se réfugient dans les taillis et les vignes que lorsqu'elles sont poursuivies par le chasseur ou par l'oiseau de proie;, mais jamais elles ne s’enfoncent dans les fo- rêts, et l’on dit même assez communement qu’elles ne passent jamais Ia nuit dans les buissons ni dans les vignes : cependant on a trouvé un nid de perdrix dans un buisson au pied d’une vigne. Elles commencent à s’apparier dès la fin de l’hiver aprèsles grandes gelées, c'est-à-dire que chaque mâle cherche alors à s’assortir avec une femelle : mais ce nouvel arrangement ne se fait pas sans qu'il y_ait entre les mâles, et quelquefois entre les femelles, des combats fort vifs. Faire la guerre et l'amour ne sont presque qu'une même chose pour la plupart des anÿnaux, 4e | DE LA PERDRIX GRISE. :3g et sur-tout pour ceux en qui l'amour est un besoin aussi pressant qu'il l’est pour la per- drix : aussi les femelles de cette espèce pon- dent-elles sans avoir eu de commerce avec le mâle, comme les poules ordinaires. Lorsque les perdrix sont une fois appariées, elles ne se quittent plus, et vivent dans une union et une fidélité à toute épreuve. Quelquefois, lorsqu’après la: pariade il survient des froids “un peu vifs, toutes ces paires se réunissent et se reforment en compagnie: : : Les perdrix grises ne s’accouplent guère, du moins en France, que sur la fin de mars, plus d’un mois après qu’elles ont commencé _ de s’apparier, et elles ne se mettent à pondre que dans les mois de mai et même de juin, lorsque l'hiver a été long. En général, elles font leurs nids sans beaucoup de soins et d'apprêts; un peu d’herbe et de paille gros- sièrement arrangées dans le pas d’un bœuf ou d’un cheval, quelquefois même celle qui s’y trouve naturellement, il ne leur en faut pas davantage : cependant on a remarqué que les femelles un peu âgées et déja ins- truites par l'expérience des pontes précé- dentes apportoient plus de précaution que \ , # 40 HISTOIRE NATURELLE les toutes jeunes, soit pour garantir le nid des eaux qui pourroient le submerger, soit pour le mettre en sûreté contre leurs enne- mis, en choisissant un endroit un peu élevé et défendu naturellement par des broussailles. Elles poudent ordinairement de quinze à vingt œufs, et quelquefois jusqu'à vingt- cinq; imais les couvées des toutes jeunes et celles des vieilles sont beaucoup moins nom- breuses, ainsi que les secondes couvées que des perdrix de bon âge recommencent lorsque la première n’a pas réussi, et qu’on appelle en certains pays des recoquées. Ces œufs sont à peu près de la couleur de ceux de pigeon : Pline dit qu’ils sont blancs. La durée de l’in- cubation est d'environ trois semaines , un peu plus, un peu moins, suivant les degrés de chaleur. | La femelle se charge seule de couver, et pendant ce temps elle éprouve une mue con- sidérable, car presque toutes les plumes du ventre lui tombent : elle couve avec beau- coup d’assiduité, et on prétend qu'elle ne quitte jamais ses œufs sans les couvrir de feuilles. Le mâle se tient ordinairement à portée du nid, attentif à sa femelle, et tou- \ DE LA PERDRIX GRISE. r4r jours prêt à l'accompagner lorsqu'elle se lève pour aller chercher la nourriture ; et son atta- chement est si fidèle et si pur, qu’il préfère ces devoirs péniblés à des plaisirs faciles que lui annoncent les cris répétés des autres per- drix, auxquels il répond quelquefois, mais qui ne lui font jamais abandonner sa femelle pour suivre l’étrangère. Au bout du temps marqué , lorsque la saison est favorable et que la couvée va bien, les petits percent léur coque assez facilement, courent au moment même qu’ils éclosent, et souvent emportent avec eux une partie de leur coquille; maisil arrive aussi quelquefois qu'ils ne peuvent forcer leur prison, et qu'ils meurent à la peine : daus ce cas, on trouve les plumes du jeune oiseau collées contre les parois inté- rieures de l’œuf; et cela doit arriver nécessai- rement toutes les fois que l’œuf a éprouvé une chaleur trop forte. Pour remédier à cet inconvénient, on met les œufs dans l’eau pendant cinq ou six minutes; l’œuf pompe à travers sa coquille les parties les plus ténues de l’eau ; et l'effet de cette humidité est de disposer les plumes qui sont collées à la co= quille à s’en détacher plus facilement : peut- 142 HISTOIRE NATURELLE être aussi que cette espèce de bain rafraîchit le jeune oiseau, et lui donne assez de force pour briser sa coquille avec le bec. Il en est de mème des pigeons, et probablement de plusieurs oiseaux utiles dont on pourra sau- ! ver un grand nombre par le procédé que je viens d'indiquer, ou par quelque autre pro- . cédé analogue. | | \ "4 Le mâle qui n’a point pris de part au soin de couver les œufs, partage avec la mère celui d'élever les petits; ils les mènent en commun, les appellent sans cesse, leur mon- irent la nourriture qui leur convient, et leur apprennent à se la PRE en grattant la terre avec leurs ongles. Il n’est pas rare de les trouver accroupis l’un auprès de l’autre, et couvrant de leurs ailes leurs poussins, dont les têtes sortent de tous côtés avec des yeux fort vifs; dans ce cas, le père et la mère se déterminent difficilement à partir, et un chasseur qui aime la conservation du gibier se détermine encore plus difhcilement à les troubler dans une fonction si intéres-. sante : mais enfin si un chien s'emporte, et qu'il les approche de trop près, c'est toujours le mâle qui part le premier, en poussant { DE LA PERDRIX GRISE. r43 des cris particuliers , réservés pour cette seule circonstance; il ne manque guère de se po- ser à trente ou quarante pas; et on en a vu plusieurs fois revenir sur Le chien en bat- tant des ailes: tant l'amour paternel inspire de courage aux animaux les plus timides! Mais quelquefois il inspire encore à ceux-ci une sorte de prudence et des moyens com- binés pour sauver leur couvée : on a vu le mâle , après s’être présenté, prendre la fuite, mais fuir pesamment et en traînant l'aile, comme pour attirer l’ennemi par l'espérance d’une proie facile, et fuyant toujours assez pour n'être point pris, mais pas assez pour décourager le chasseur; il l’écarte de plus en plus de la couvée : d'autre côté, la fe- melle, qui part un instant après le mâle, s'éloigne beaucoup plus et toujours dans une autre direction ; à peineis'est-elle abattue, qu'elle revient sur-le-champ en courant le long des sillons , et s'approche de ses petits, qui $e sont blottis, chacun de son côté, dans ‘ les herbes et dans les feuilles; elle les ras- semble promptement ; et ayant que le chien qui s’est emporté après le mâle ait eu le temps de revenir, elle les a déja emmenés r44 HISTOIRE NATURELLE fort loin, sans que le chasseur ait entendu. le moindre bruit. C’est une remarque assez généralement vraie parmi les animaux, que l’ardeur qu’ils éprouvent pour l'acte de la génération est la mesure des soins qu'ils prennent pour le produit de cet acte : tout est conséquent dans la nature, et la perdrix en est un exemple; car il y a peu d'oiseaux aussi lascifs, comme il en est peu qui soi= gnent leurs petits avec une vigilance plus assidue et plus courageuse. Cet amour de la: couvée dégénère quelquefois en fureur contre ri L \ . 1 les couvées étrangères, que la mère pour- suit souvent et maltraite à à grands coups de bec. Les perdreaux ont les pieds jaunes en naissant; cette couleur s’éclaircit ensuite et devient blanchâtre, puis elle brunit, et enfin devient tout-à-fait noire dans les perdrix de trois ou quatre ans. C’est un moyen de con- noître toujours leur âge; onle connoît en- core à la forme de la dernière plume de Yaile, laquelle est pointue après la première mue, et qui, l’année suivante, est entière ment arrondie. | Li première nourriture des pérdreaux ce f DE LA PERDRIX GRISE. 145 sont les œufs de fourmis, les petits insectes qu ils trouvent sur la terre et les herbes ; ceux qu'on nourrit dans les maisons refusent la graine assez long-temps, et il y a appa- rence que c’est leur dernière nourriture : à tout àge ils préfèrent la laitue, la chicorée, le mouron, le laiteron, le seneçon, et même la pointe des blés verds; dès le mois de no- vembre on leur en trouve le'jabot rempli, et pendant l’hiver ils savent bien l'aller cher- cher sous la neige; lorsqu'elle est endurcie par la gelée, ils sont réduits à aller auprès des fontaines chaudes qui ne sont point gla- cées, et à vivre des herbes qui croissent sur leurs bords, et qui leur sont très-contraires : en été, on ne les voit pas boire. Ce n’est qu'après trois mois passés que les jeunes perdreaux poussent le rouge; car les perdrix grises ont aussi du rouge à côlé des tempes entre l'œil et l'oreille, et le mo- ment où ce rouge commence à paroitre est un temps de crise pour ces oiseaux, comme pour tous les autres qui sont dans le cas ; cette crise annonce l’âge adulte. Avant ce temps, ils sont delicats, ont peu d’aile et craignent beaucoup l'humidité : mais après Oiseaux. IV. 19 146 HISTOIRE NATURELLE qu'il est passé, ils deviennent robustes, commencent à avoir de l’aile, à partir tous. ensemble, à ne se plus quitter; et si on est parvenu à disperser la compagnie, ils savent se reunir imalgre toutes les précautions du chasseur. C'est en se rappelant qu'ils se réunissent. Tout le monde connoit le chant des perdrix, qui est fort peu agréable : c’est moins un chant ou un ramage qu'un cri aigre imi- tant assez bien le bruit d’une scie: et ce n’est pas sans intention que les mytholo- gistes ont métamorphose en perdrix l'inven- teur de cét instrument. Le chant du mâle ne diffère de celui de la femelle qu’en ce qu'il est plus fort et plus traïnant; le mäle se distingue encore de la femelle par un éperon obtus qu'il a à chaque pied, et par une marque noire, en forme de fer à cheval, qu’il a sous le ventre, et que la femelle n’a pas. à | Dans cette espèce comme dans beaucoup d’autres, il nait plus de mâles que de fe- melles *, et 1l importe pour la réussite des * Cela va à environ un tiers de: plus, sélon M. Leroy. Re". \ / DE LA PERDRIX GRISE. 14» couvées de détruire les mâles surnuméraires, qui ne font que troubler les paires assorties et nuire à la propagation. La munière la plus usitée de les prendre, c’est de les faire rappeler au temps de la pariade par une femelle à qui, dans cette circonstance, om donne le nom de ckanterelle : la meilleure pour cet usage est celle qui a été prise vieille; les mâles accourent à sa voix et se livrent aux chasseurs, ou donnent dans les piéges qu'on leur a tendus; cet appeau na turel les attire si puissamment, qu’on en a vu venir sur le toit des maisons, et jusque sur l'épaule de l’oiseleur. Parmi les piéges | qu'on peut leur tendre pour sen rendre maître, le plus sûr et le moins sujet à incon- _véniens, c’est la tonnelle, espèce de grande nasse où sont poussées les perdrix par un homme déguisé à peu près en vache, et, pour que l'illusion soit plus complète, tenant em sa main une de ces petites clochettes qu’on met au cou du bétail; lorsqu'elles sont en-< gagées dans les filets, on choisit à la main les mâles superflus, quelquefois même tous les mâles , et on donne la liberté aux fe- imelles. 48 HISTOIRE NATURELLE | Les perdrix grises sont oiseaux sédentaires, | qui non seulement restent dans le même pays, mais qui s’écartent le moins qu’ils peuvent du canton où ils ont passe leur jeu- nesse, et qui y reviennent toujours. Elles craignent beaucoup loiseau de proie; lors- qu'elles l’ont appercçu , elles se mettent en tas les unes contre les autres et tiennent ferme, quoique l'oiseau, qui les voit aussi fort bien, les approche de trés-près en rasant la terre, pour tàcher d'en faire partir quelqu’une et de la prendre au vol. Au milieu de tant d'ennemis et de dangers, on sent bien qu’il en est peu qui vivent age de perdrix. Quel- ques uns fixent la durée de leur vie à a Le années , et prétendent que la force de ’àge et le temps de la pleine ponte est de deux à trois ans, et qu’à six elles ne pondent plus. Olina dit qu'elles vivent douze ou quinze ans. | _ On a tenté avec succès de les multiplier dans les parcs, pour en peupler ensuite les terres qui en étoient dénuées, et l’on a re- “connu qu’on pouvoit les élever, à très-peu près, comme nous avons dit qu’on élevoit les faisans ; seulement il ne faut pas compter DE LA PERDRIX GRISE. r49 sur les œufs des perdrix domestiques. Il est rare qu'elles pondent dans cet état, encore plus rare qu’elles s’apparientet s’accouplent; mais on ne les a jamais vues couver en pri- son , je veux dire renfermées dans ces par- quels où Les faisans multiplient si aisément. On est donc réduit à faire chercher par la campagne des œufs de perdrix sauvages, et à les faire couver par des poules ordinaires. Chaque poule peut en faire éclore environ deux douzaines, et mener pareil nombre de petits après qu'ils sont éclos : ils suivront _ cette étrangère comme ils auroient suivi leur propre mère, mais ils ne reconnoissent pas si bieu sa voix; ils la reconnoissent cepen- dant jusqu’à un certain point, et une per- drix ainsi élevée en conserve toute sa vie l'habitude de chanter aussitôt qu’elle entend des poules. Les perdreaux gris sont beaucoup moins délicats à élever que les rouges, et moins sujets aux maladies, au moins dans notre pays; ce qui feroit croire que c'est leur cli- mat naturel. [Il n’est pas même nécessaire de leur donner des œufs de fourmis, et l’on peut les nourrir, comme les poulets ordi- 15 150, HISTOIRE NATURELLE naires , avec la mie de pain , les œufs durs, etc. Lorsqu'ils sont assez forts, et qu’ils commencent à trouver par eux-mêmes leur subsistance, on les lâche dans l’en- droit même où on les a élevés, et dont, comme je l’ai dit, ils ne s’éloignent jamais beaucoup. La chair de la perdrix grise est connue depuis très-long-temps pour être une nour— riture exquise et salutaire; elle a deux bonnes qualités qui sont rarement réunies, c’est 7 d'être succulente sans être grasse. Ces oi- seaux ont vingt-deux pennes à chaque aile, et dix-huit à la queue, dont les quatre du milieu sont de la couleur du dos. Les ouvertures des narines, qui se trou- vent à la base du bec, sont plus qu'à demi recouvertes par un opercule de même cou- leur que le bec, mais d’une substance plus molle, comme dans les poules. L'espace sans plumes qui est entre l’œil et l'oreille, est d’un rouge plus vif dans le mâle que dans la femelle. Le tube intestinal a environ deux pieds et demi de long , les deux cœcum, cinq à six pouces chacun. Le jabot est fort , | DE LA PERDRIX GRISE. :15r petit*, et le gésier se trouve plein de graviers méêlés avec la nourriture, comme c’est l’or- dinaire dans les granivores. * Tngluvies ampla , dit Willughby; mais les perdrix que J'ai fait ouvrir l’avoient fort petit. LA PERDRIX GRISE- BLANCHE. Czrre perdrix a été connue d’Aristote, et observée par Scaliger, puisque tous deux parlent de perdrix blanche, et on ne peut point soupçonner que ni l’un ni l’autre ait voulu parler du lasopède, appelé mal-à-pro- pos perdrix blanche par quelques uns : car pour ce qui regarde Aristote, il ne pouvoit avoir en vue le lagopède, qui est étranger à la Grèce, à l'Asie, et à tous les pays où il avoit des correspondances ; et ce qui le prouve, c’est qu'il n’a jamais parlé de la propriété caracteristique de cet oiseau, qui est d’avoir les pieds velus jusque sous les doigts : et à l’égard de Scaliger, il n’a pu confondre ces deux espèces, puisque dans le même chapitre où il parle de la perdrix blanche qu’il a mangée, 1l parle un peu plus bas et fort au lone du /agopus de Pline, qui a les pieds couverts de piuEaes à , et qui est notre vrai lagopède. » HISTOIRE NATURELLE. 1:43 Au reste, il s’en faut bien que la perdrix grise-blanche soit aussi blanche que le la- gopède; il n’y a que le fond de son plumage qui soit de cette couleur; et l’on voit sur ce foud blanc les mêmes mouchétures que dans la perdrix grise, et distribuées dans le même ordre: mais ce qui achève de demontrer que cette difference dans la couleur du plumage n’est qu'une altération accidentelle, un effet particulier, en un mot une variété propre- ment dite, et qui n’empèche point qu’on ne doive regarder la perdrix blanche comme ap- partenant à l'espèce de la perdrix grise, c'est que, selon les naturalistes, et même selon les chasseurs , elle se mêle et va de compagnie avec elle. Un de mes amis * en a vu une compaonie de dix ou douze qui étoient toutes blanches , et les a aussi vues se mêler avec les grises au temps de la pariade. Ces perdrix blanches avoient les yeux ou plu- tôt les prunelles rouges, comme les ont les lapins blancs, les souris blanches, etc.; son bec et ses pieds étoient de couleur de plomb. * M. Leroy, lieutenant des chasses de Versailles. LA PETITE PERDRIX GRISE. J'ipprzrr ainsi la perdrix de Damas d'Aldrovande, qui est probablement la même, que la petite perdrix de passage qui se montre de temps en temps en différentes provinces de France. Elle ne diffère pas seulement de la per- drix grise par sa taille, qui est constamment plus petite, mais encore par son bec, qui est plus alongé, par la couleur jaune de ses pieds, et sur-tout par l’habitude qu'elle a de changer de lieu et de voyager. On en voit quelquefois dans la Brie et ailleurs passer par bandes très-nombreuses , et poursuivre leur chemin sans s'arrêter. Un chasseur des environs de Montbard, qui chassoit à la chanterelle au mois de mars dernier (1770), en vit une volée de cent cinquante ou deux ceuts, qui parut se détourner, attirée par le cri de la chanterelle, mais qui, dès le len- demain, avoit entièrement disparu. Ce seul fait, qui est très-certain, annonce et les HISTOIRE NATURELLE. :55 rapports et les différences qu’il y a entre ces deux perdrix : Les rapports, puisque ces per- drix étrangères furent attirées par le chant d’une perdrix grise ; les différences, puisque ces étrangères traversèrent si rapidement un pays qui convient aux perdrix grises et même aux rouges, les unes et les autres y demeurant toute l’année; et ces différences supposent un autre instinct, et par consé- quent une autre organisation, et au moins une autre race. Il ne faut pas confondre cette perdrix de Damas ou de Syrie avec la syroperdix d'É- lien, que l’on trouvoit aux environs d’An- tioche, qui avoit le plumagé noir, le bec de couleur fauve, la chäir plus compacte et de meilleur goût, et Le naturel plus sauvage que les autres perdrix : car les couleurs, comme l’on voit, ne se rapportent point; et Élien ne dit pas que sa syroperdix soit un oiseau de passage : il ajoute, comme une singularité, qu'elle mangeoit des pierres; ce qui cependant est assez ordinaire dans les granivores. Scaliger rapporte, comme té-— moin oculaire, un fait beaucoup plus sin- gulier , qui a rapport à celui-ci ; c'est que J' L 4 à b 186 HISTOIRE NATURELLE dans un canton de la Gascogne où le terrain est fort sablonneux , la chair des perdrix étoit remplie d’une quantité de petits grains ! de sable fort incommodes. | _— F L' st Pr qu'il a de prêter à tous les autres êtres sa nature propre et sa manière de voir et de sentir. G Comme les bartavelles ont beaucoup de choses communes avec les perdrix grises, il suffira , pour achever leur histoire, d'ajouter ici les principales differences par lesquelles elles se distinguent des dernières. Belon, qui avoit voyagé dans leur pays natal, nous apprend qu’elles ont le double de grosseur de nos perdrix ; qu’elles sont fort communes, et plus communes qu'aucun autre oiseau, dans la Grèce, les iles Cyclades, et princi- palement sur les côtes de l’ile de Crete (au- jourd’hui Candie); qu’elles chantent au temps de l'amour; qu’elles prononcent à peu prés le mot cacabis, d’où les Latins ont fait sans doute le mot cacabare pour expri- mer ce cri, et qui peut-être a eu quelque 1n- fluence sur la formation des noms cxbetx, cubata, cubejt, etc. par lesquels on a designé la perdrix rouge dans les langues orientales. Belon nous apprend encore que les barta- velles se tiennent ordinairement parmi les rochers ; mais qu’elles ont l'instinct de des- cendre dans la plaine pour y faire leur nid, 168 HISTOIRE NATURELLE afin que leurs petils troux put: en naissant une subsistance facile; qu’elles pondent de huit jusqu’à seize œufs, de la grosseur d’un petit œuf de poule, blancs, marqués de petits points rougedtres , et dont le jaune, qu’il appelle moyeu, ne se peut durcir. Enfin, ce qui persuade à un observateur que la per- drix de Grèce est d'autre espèce que notre perdrix rouge, c’est qu’il y a en Italie des: lieux où elles sont connues l’une et l’autre, et ont chacune un noi différent ; la perdrix de Grèce celui de cofhurno, et l’autre celui de pernice : comme si le peuple, qui impose les noms, n’avoit pu se méprendre, ou même distinguer par deux dénominations diffe- rentes deux races distinctes, appartenant à une seule et mème espèce! Enfin il conjec- ture, et non sans fondement, que c’est cette grosse perdrix qui, suivant Âristote, s’est mêlée avec la poule ordinaire, et a produit avec elle des individus féconds; ce qui n’ar- _ rive que rarement, selon le philosophe grec, et n’a lieu que dans les espèces les plus las- cives, telles que celles du coq et de la per- drix*, ou de la bartavelle, qui est la perdrix * Je rapporte en entier le passage d’Aristote, DÉS PERDRIX ROUGES. 169 d’Aristote : cellé-ci a encore une nouvelle analogie avec la poule ordinaire, c’est de couver des œufs étrangers à défaut des siens. Il y a long-temps que cette remarque a été faite, puisqu'il en est question dans les livres sacrés. Aristote a remarqué que les perdrix mâles chantoient ou crioient principalement dans la saison de l’amour , lorsqu'ils se battent entre eux. et même avant de se battre : l’ar- deur qu'ils ont pour leur femelle se tourne alors en rage contre leurs rivaux; et de là tous ces cris, ces combats, cette espèce d'ivresse, cet oubli d'eux-mêmes, cet aban- don de leur propre conservation qui les a parce qu’il présente des vues très-saines et très-phi- Zlosophiques. Ær 1deo quæ non unigena coeunt AAUNET., A (quod ea Jfactunt > quorum tlempus par, ei uiert gestatio proxima, et corporis magnitudo non mulio discrepans), hæc primos partus similes sib1 edunt, communi generis utriusque specie, quales...... (ex perdice et gallinaceo); sed tempore procedente divisi ex diversis provenientes , demum formä _ feminæ instituti evadunt ; quomodo semina pere- grina ad postremum pro terræ natura redduntur: hæc enim materiamcorpusque seminibus præstat. 19 4 ss 170 HISTOIRE NATURELLE - précipités plus d’une fois, je ne dis pas dans les pieges, mais jusque dans les mains de l’oiseleur. | | On a prolité de la connoissance de leur naturel pour les attirer dans le piege, soit en leur présentant une femelle vers laquelle ils accourent pour en jouir, soit en leur pre- sentant un mâle sur lequel ils fondent pour le combattre; et l’on a encore tire partie de cette haine violente des males contre les males pour en faire une sorte de spectacle, où ces animaux , ordinairement si timides et si pacifiques, se battent entre eux avec achar- nement; et on n’a pas manqué de les exci- ter, comme je l’ai dit, par la presence de leurs femelles, Cet usage est encore très- commun aujoufd'hui dans l’ile de Chypre; et nous voyons dans Lampridius, que l’em- pereur Alexandre Sévère s’amusoit beaucoup de ce genre de combat. > LA PERDRIX ROUGE D'EUROPE r / Voyez la planche 6 de ce volume. Cvrre perdrix tient le milieu pour la grosseur entre la bartavelle et la perdrix grise : elle n’est pas aussi répandue que cette dernière, et tout climat ne lui est pas bon. On la trouve daus la plupart des pays mon- tagueux et lempéres de l'Europe, de l'Asie et de l’Afrique; mais elle est rare dans les Pays-Bas, daus plusieurs parties de l'Alle- magne et de la Bohème, où l’on a tenté inu- tilement de la multiplier , quoique les fai- sans y eussent bien réussi. On n’en voit point du tout en Aneleterre ni dans certaines îles des environs de Lemnos; tandis qu’une seule paire portée dans la petite île d’Æ{zaphe (au- jourd'hui Nanfo) y pullula tellement, que * Voyez les planches enluminées, n° 15e. 57 HISTOIRE NATURELLE les habitans furent sur le point de leur céder la place. Ce séjour leur est si favorable , qu’encore aujourd'hui l’on est obligé d'y dé- truire leurs œufs par milliers vers les fêtes de Paque, de peur que les perdrix qui en viendroient ne détruisissent entièrement les mioissons ; et ces œufs, accommodes à toutes sauces , nourrissent les insulaires pendant plusieurs jours. Les perdrix rouges se tiennent sur les mon- tagnes qui produisent beaucoup de bruyères et de broussailles, et quelquefois sur les mêmes montagnes où se trouvent certaines gelinottes, mal-à-propos appelées perdrix blanches, mais dans des parties moins éle- vées, et par conséquent moins froides et moins sauvages. Pendant l'hiver , elles se recèlent sous des abris /de rochers bien ex- posés , et se répandent peu : le reste de l’an- née, elles se tiennent dans les broussailles, s’y font chercher long-temps par les chas- seurs, et partent difficilement. On m'assure qu’elles résistentsouvent mieux que les grises aux rigueurs de l'hiver, et que bien qu’elles soient plus aisées à prendre dans les différens piéges que les grises, 1l s’en trouve toujours Ne ES à DES PERDRIX ROUGES. 173 à peu près le même nombre au printemps dans les endroits qui leur conviennent. Elles vivent de grains, d'herbes, de limaces, de chenilles, d'œufs de fourmis et d’autres in- sectes; mais leur chair se sent quelquefois des alimens dout elles vivent. Élien rapporte que les perdrix de Cyrrha, ville maritime de la Phocide, sur le golfe de Corinthe, sont de mauvais goût, parce qu’elles se nourrissent d'ail. Elles volent pesamment et avec effort, comme font les grises; et on peut les recon- noître de mème sans les voir, au seul bruit qu’elles font avec leurs ailes en prenant leur volée. Leur instinct est de plonger dans les précipices lorsqu'on les surprend sur les montagnes, et de regagner le sommet lors- qu’on va à la remise. Dans les plaines, elles filent droit et avec roideur : lorsqu'elles sont suivies de près et poussées vivement, elles se refugient dans les bois, se perchent mème sur Les arbres, et se terrent quelquefois; ce que ne font poiut les perdrix grises. Les perdrix rouges diffèrent encore des . grises par le naturel et les mœurs; elles sont moins sociables ; à la vérité, elles vont par 15 ne. 174 HISTOIRE NATURELLE compagnies; mais il ne règne pas dans ces compagnies une union aussi parfaite. Quoi- que nées, quoiqu'elevées ensemble, les per- drix rouges se tieunent plus éloignées les unes des autres ; elles ne partent point en-— semble, ne vont pas toutes du même côté, et ne se rappellent pas ensuite avec le même empressement, si ce n’est au temps de l’a- mour ; et alors même chaque paire se réunit : séparément. Enfin, lorsque cette saison est passée et que la femelle est occupée à couver, le mâle la quitte, et la laisse seule chargée du soin de la famille; en quoi nos perdrix rouges paroissent aussi différer des perdrix rouges de l'Égypte , puisque les prêtres égyp- tiens avoient choisi pour l’emblème d’un bon ménage deux perdrix , l'une mäle et l’autre femelle , couvant chacune de son côté. Par une suite de leur naturel sauvage, les perdrix rouges que l’on tâche de multiplier dans les parcs, et que l’on elève à peu près comme les faisans, sont encore plus difficiles à élever, exigent plus de soins et de précau- tions pour les accoutumer à la captivité, ou, pour mieux dire , elles ne s’y accou- tument jamais, puisque les petits perdreaux \ _ DES PERDRIX ROUGES. 15 rouges qui sont éclos dans la faisanderie, et qui n'ont jamais connu la liberte, lan- guissent dans cette prison, qu'on cherche à leur rendre agreable de toutes manières, et meurent bientôt d’ennui ou d’une maladie qui en est la suite, si on ne les läche dans le temps où ils commencent à avoir la tête garnie de plumes, Ces faits, qui m'ont été fournis par M. Le- roy, paroissent contredire ce qu’on rapporte des perdrix d'A ie et de quelques îles de l'Ar- chipel, et même de Provence, où on en a vu des troupes nombreuses qui obéissoient à la voix de leur conducteur avec une docilité singulière. Porphyre parle d’une perdrix pri- vée venant de Carthage, qui accouroit à la voix de son maitre, le caressoit, et expri- moit son attachement par des inflexions de voix que le sentiment sembloit produire, et qui etoient toutes differentes de son cri or- dinaire. Mundella et Gesner en ont elevé eux-mêmes qui étoient devenues très-fami- lières : 1l paroît même, par plusieurs pas- sages des anciens, qu'on en étoit venu jus- qu'à leur apprendre à chanter ou à perfec- üonner leur chant naturel, qui, du moins \ 4 y : LACET n à El 176 HISTOIRE NATURELLE dans certaines races, passoit pour un ramage agréable. Mais tout cela peut se concilier en disant que cet oiseau est moins ennemi de l’homme que de l'esclavage ; qu’il est des moyens -d'apprivoiser et de subjuguer l'animal le plus sauvage, c’est-à-dire, le plus amoureux de sa liberté, et que ce moyen est de Le traiter selon sa nature, en lui laissant au- tant de liberté qu’il est possible. Sous ce point de vue, la societé de la perdrix appri- voisée avec l’homme qui sait s’en faire obéir, est du genre le plus intéressant et le plus noble : elle n’est fondée ni sur le besoin, ni sur l'intérêt, ni sur une douceur stupide, mais sur la sympathie, le goût réciproque , . le choix volontaire; il faut mème, pour bien réussir , qu’elle soit absolument volontaire et libre. La perdrix ne s'attache à l’homme, ne se soumet à ses volontés, qu'autant que l’homme lui laisse perpetuellement le pou- “voir de le quitter; et lorsqu'on veut Lui im— poser une loi trop dure, une contrainte au— delà de ce qu’exige toute sociète, en un mot lorsqu'on veut la réduire à l’esclavage do- mestique, sou naturel si doux se revoite, et A - : | * DES PERDRIX ROUGES. 197 le reoret profond de sa liberté perdue étouffe en elle les plus forts penchans de la nature ; celui de se conserver, on l’a vue souvent se tourmenter dans sa prison jusqu’à se casser la tête et mourir; celui de se reproduire, elle y montre une répugnance invincible ; et si quelquefois on la vit, cédant à l’ardeur du tempérament et à l'influence de la saison, s’accoupler et pondre en cage, jamais on ne l’a vue s'occuper efficacement, dans la vo- lière la plus commode et la plus spacieuse, à perpétuer une race esclave. LA PERDRIX ROUGE-BLANCHE. | \ Dixs la race de la perdrix rouge, la blan- cheur du plumage est, comme dans la race de la perdrix grise, un effet accidentel de quelque cause particulière, et qui prouve: V'analogie des deux races. Cette blancheur n'est cependant point universelle, car la tête conserve ordinairement sa couleur, le bec et les pieds restent rouges; et comme d’ailleurs on la trouve ordinaireinent avec les perdrix rouges, on est fondé à la regarder comme une variété individuelle de cette race de perdrix. LL LE FRANCOLIN *# C E nom de /rancolin est encore un de ceux qui ont été appliqués à des oiseaux fort diffe- rens : nous avons déja vu ci-dessus qu’il avoit été donne à l’attagas; et il paroïit, par un passage de Gesuer , que l'oiseau connu à Venise sous le noin de francolin, est une es- pêce de gelinotte (4azel-huhn ). Le francoliu de Naples est plus gros qu’une poule ordinaire; et, à vrai dire, la longueur de ses pieds, de son bec et de son cou, ne permettent point d'en faire ni une gélinotte ni un francolin. Tout ce qu’on dit du francolin de Ferrare, c’est qu'il a les pieds rouges et vit de poissons. L'oiseau du Spitzherg, auquel on a donne le nom de /rancolin, s'appelle aussi coureur de rivage, parce qu'il ne s’eloigne jamais beau- coup de la côte, où il trouve la nourriture qui lui convient; savoir, des vers gris et des chevrettes : mais il n’est pas plus gros qu’une x Voyez les planches enluminées, nos 147 et 148. » 180 HISTOIRE NATURELLE alouette. Le francolin dont Olina donne la description et la figure, est celui dont il s'agit ici : celui de M. Edwards en diffère en quelques points, et paroil être exactement le même oiseau que le francolin de M. de Tour- nefort, qui se rapproche aussi de celui de Ferrare, en ce qu’il se plaît sur les côtes de la mer et dans les lieux marecageux. Enfin le nôtre paroit différer de ces trois derniers, et même de celui de M. Brisson, soit par la couleur du plumage et même du bec, soit par les dimensions et le port de la queue , qui est plus longue dans la figure de M. Brisson, plus épanouie dans la nôtre, et tombante dans celle de M. Edwards et d'Olina; mais, malgre cela, je crois que le francolin d'Olina , celui de M. de Tournefort, celui d'Edwards, celui de M. Brisson et le inien sont tous de la même espèce, attendu qu’ils ont beaucoup de choses communes, et que les petites différences qu’on a cbservées entre eux ne sont pas assez caracterisées pour cons- tituer des espèces diverses, et peuvent d’ail- leurs être relatives à l’âge, au sexe, au cli- mat, ou à d’autres causes particulières. Il est certain que Le francojin a beaucoup DU FRANCOLIN. 18 de rapports avec la perdrix; et c’est ce qui a porté Olina, Linnæus et Brisson, à le ran- ger parmi les perdrix. Pour moi, après avoir examiné de près et comparé ces deux sortes d'oiseaux, j'ai cru avoir observé entre eux assez de différences pour les séparer. En effet, le francolin diffère des perdrix non seule- ment par les couleurs du plumage, par la forme totale, par le port de la queue et par son cri, mais encore parce qu'il a un éperon à chaque jambe *, tandis que la perdrix mâle a qu'un tubercule calleux au lieu d’éperon. Le francolin est aussi beaucoup moins ré- pandu que la perdrix. Il paroit qw’il ne peut guère subsister que dans les pays chauds : l'Espagne, l'Italie et la Sicile, sont presque les seuls pays de l'Europe où il se trouve ; on en voit aussi à Rhodes, dans l’ile de Chypre, à Samos, dans la Barbarie, et sur- tout aux environs de Tunis, en Égypte, sur les côtes d'Asie et à Bengale. Dans tous ces pays, on trouve des francolins et des perdrix qui ont chacun leurs noms distincts et leur espèce séparée. _* Celui d'Olina n’en a pomt; mais il y a appa- rence quil a fait dessiner la femelle. Oiseaux, TV. 16 182 HISTOIRE NATURELLE La rareté de ces oiseaux en Europe, jointe au bo goût de leur chair, ont donné lieu aux défenses rigoureuses qui ont été faites en plusieurs pays de les'tuer; et de là on pré- tend qu'ils ont eu le nom de francolin . « Ly + comme jouissant d’une sorte de franchise sous la sauve-sarde de ces défenses. On sait peu de chose de cet oiseau au-delà de cé que montre la figure. Son plumage est fort beau; il a un collier trés- remarquable de couleur orañgée : sa grosseur sUrpasse un peu celle de la perdrix grise. La femelle est “un peu plus petite que le mäle, et les cou- leurs de son ‘plumage sont plus foibles ét moins variées. | Ces oiseaux vivent de grains : on peut les élever dans des volières; mais il faut avoir l'attention de leur donner à chacun une pe- tite loge où ils puissent se tapir et se cacher, et de répandre dans la volière du sable et queiques pierres de tuf. Leur cri est moins un chant qu’un siffle ment très-fort, qui se fait entendre de FOR loin. Les: francolins vivent à peu prés autant que les perdrix : leur chair est exquise; elle \ DU FRANCOLIN. 185 est quelquefois préférée à celle des perdrix et des faisans. : M. Linneus prend la perdrix de Damas de Willughby pour Le francolin: sur quoi il y a deux remarques à faire ; la première, que cette perdrix de Damas est plutôt celle de Belon, qui en à parlé le premier, que celle de Willughby , qui n’en a parlé que d’après Belon ; la seconde, que cette perdrix de Da- mas diffère du francolin et par sa petitesse, puisqu'elle est moins grosse que la perdrix grise , selon Belon , et par son plumage, comme on peut le voir en comparant les figures de nos planches enluminées, et par ses pieds velus, qui ont empêché Belon de la ranger parmi les râles de genêt ou les pluviers. M. Linnæus auroit dû reconnoître le fran- colin de Tournefort dans celui d’'Olina, dont Wüllughby fait mention ; enfin le naturaliste suédois se trompe encore en fixant exclusive- ment l'Orient pour le climat du francolin, puisque cet oiseau se trouve, comme je l'ai déja remarqué, en Sicile, en Italie, en Espagne , en Barbarie, et dans quelques autres contrées qui n’appartienuent point à l'Orient. 184 HISTOIRE NATURELLE. Aristote met l’attagen, que Belon regarde comme le francolin , au rang des oiseaux pulvérateurs et frugivores : Belon lui fait dire de plus que cet oiseau pond un grand | nombre d'œufs , quoique cela ne se. trouve point à l’endroit cité; mais c’est une consé- quence que l’on peut tirer, dans les principes d'Aristote, de ce que cet oiseau est frupivore et pulvérateur. Belon dit encore, d’après les anciens, que le francolin est fréquent dans la campagne de Marathon, parce qu’il se plaît dans les lieux marécageux ; et cela s'accorde très-bien avec ce que M. de Tour- nefort rapporte des francolins de Samos. o £ — MLE BISÆRGOT. L, première espèce qui nous paroît voi- sine du francolin , c’est l'oiseau qui nous a été donné sous le nom de perdrix du Séné- gal*. Cet oiseau a à chaque pied deux ergots, ou plutôt deux tubercules de chair dure et calleuse ; et comme c’est une espèce ou race particulière, nous lui avons donné le nom de bis-ersof, à cause de ce caractère de deux ergots qu'il a à chaque pied. Je le place à la suite des francolins, parce qu'il me paroît avoir plus de rapports avec eux qu'avec les perdrix , soit par sa grosseur , soit par la longueur du bec et des ailes, soit par ses éperons. * Voyez les planches enluminées, n° 137. Y6 LE GORGE- NUE, ET Î 1" LA PERDRIX ROUGE D'AFRIQUE. Cer oiseau, que nous avons vu vivant à Paris chez feu M. le marquis de Montmirail, a le dessous du cou et de la gorge dénué de plumes, et simplement couvert d’une peau rouge : le reste du plumage est beaucoup moins varié et moins agréable que celui du francolin. Le gorge-nue se rapproche de cette espèce par ses pieds rouges et sa queue épa-— nouie , et de l’espèce précédente, qui est celle du bis-ergot, par le double éperon bus al à pareillement à chaque pied. | Le défaut d'observations nous met-hors _ d'état de juger à laquelle de ces deux espèces elle’ ressemble le plus par ses mœurs ou par ses habitudes. M. Aublet m'assure que c’est un oiseau qui se perche. CT | = La perdrix rouge d’Afrique* est plus rouge * Voyez les planches enluminées, n° 180. } HISTOIRE NATURELLE. 1:18; que nos perdrix rouges , à cause d’une large tache de cette couleur qu’elle a sous la gorge; mais le reste de son plumage est beaucoup moins agréable. Elle diffère des trois espèces précédentes par deux caractères fort appa-— rens : ses éperons plus longs et plus pointus, et sa queue plus épanouie que ne l'ont or- dinairemeut les perdrix. Le défaut d’obser- vations nous met hors d'état de juger si elle eu diffère aussi par ses mœurs ou par ses ha bitudes. | (OISEAUX ÉTRANGERS QUI ONT RAPPORT AUX PERDRIX. L LA PERDRIX ROUGE DE BARBARIE. L: perdrix rouge de Barbarie, donnée par M. Edwards, planche LXX, nous paroît être une espèce différente de notre perdrix rouge d'Europe ; elle est plus petite que notre per- drix grise. Elle a le bec, le tour des yeux et les pieds rouges, comme la bartavelle: ‘mais elle a sur le haut des ailes des plumes d’un beau bleu bordé de rouge brun, et autour du cou une espèce de collier formé par des taches blanches, répandues sur un fond brun; ce qui, joint à sa petitesse, distingue cette es— pèce des deux races de perdrix rouges qui sont connues en Europe. HISTOIRE NATURELLE. 189 LE LA PERDRIX"DE ROCHE, ou DE LA GAMBR A. CETTE perdrix prend son nom des lieux où glle a coutume de se tenir par préfe- rence ; elle se plaît, comme les perdrix- rouges, parmi les rochers et les précipices: sa couleur générale est un brun obscur, et elle a sur la poitrine une tache couleur de tabac d'Espagne. Au reste, ces perdrix se rapprochent encore de la perdrix rouge par la couleur des pieds, du bec, et du tour des yeux. Elles sont moins grosses que les nôtres, et retroussent la queue en courant ; mais , comme elles, elles courent très-vite, et ont en gros la même forme. Leur chair est ex- cellente. | IIL. LA PERDRIX PERLÉE DE LA CHINE. CETTE perdrix, qui n’est connue que par la description de M. Brisson, paroit propre r99 HISTOIRE NATURELLE | à l’extrémité orientale de l’ancien conti. : nent. Elle est un peu plus grosse que notre perdrix rouge; elle a sa forme, le port de la # queue, la briéveté des ailes et toute la tour- nure de la perdrix : elle a de notre rouge ordinaire (n° 150) la gorge blanche; et de celle d'Afrique (n° 180) les éperous plus longs et plus pointus, mais elle n’a pas, comme elle, le bec et les pieds rouges ; ceux- ci sont roux, et le bec est noirâtre, ainsi que les ongles : le fond de son plumage est de couleur obscure, égayée sur la poitrine’et les côtes par une quantité de petites taches rondes de couleur plus claire; d’où j’ai pris occasion de la nommer perdrix perlee. Elle a outre cela quatre bandes remarquables, qui partent de la base du bec et se prolongent sur les côtés de la tête : ces bandes sont alternativement de couleur claire et rem- brunie. | I V. LA PERDRIX DE LA NOUVELLE ANGLETERRE. k JE mets cet oiseau d'Amérique et les sni- vans à Ja suite des perdrix, non que je les DES OISEAUX ÉTRANGERS. 19% regarde comme de véritables perdrix, mais tout au plus comme leurs représentans , parce que ce sont ceux des oiseaux du nou- veau monde qui ont le plus de rapport avec les perdrix , lesquelles certainement n’ont pas l'aile assez forte ni le vol assez élevé pour avoir pu traverser les mers qui séparent le vieux continent du nouveau. L'oiseau dont il s’agit ici est plus petit que la perdrix grise ; il a l'iris jaune, le bec noir, la gorge blanche, et deux bandes de la même couleur qui vont de la base du bec jusque derrière la tête eu passant sur les yeux : il a aussi quelques taches blanches au haut du cou. Le dessous du corps est jau- nâtre rayé de noir, et le dessus d’un brun tirant au roux , à peu près comme dans la perdrix rouge, mais bigarré de noir. Cet oiseau a la queue courte comme toutes les perdrix. Il se trouve non seulement dans la nouvelle Angleterre, mais encore à la: Ja maïque , quoique ces deux AA soient différens. M. Albin en a nourri assez long-temps avec du blé et du chenevis. { LÀ" CASE CR Voyez la planche 7 de ce volume. Tusornrasre trouvoit une si grandé ressemblance entre les perdrix et les cailles, qu'il donnoit à ces dernières le nom de per- drix naines; et c’est sans doute par une suite de cette méprise, ou par une érreur semblable, que les Portugais ont appelé la perdrix codornix, et que les Italiens ont ap- pliqué le nom de coturnice à la bartavelle ou perdrix grecque. IL est vrai que les per- . * Voyez les planches enluminées, n° r76. Frisch prétend, planche CXVIT, que du temps . de Charlemagne on lui donnoit le nom de guacara : quelques-uns lui ont aussi donné celui de currelius, et jen dirai plus bas la raison: quoi qu’il.en soit, ces deux noms ont été omis par M. Brisson. 2 En latin, coturnir ; en espagnol, cuadervi; en italien, quaglia ; en ste wachiel ; en an- glois ; guail. Pl'7 lag1g3. Tom 4 . hp ——— _ = LA CAILLE. Î Pouqua P. | # me, "HISTOIRE NATURELLE. 193 drix et les cailles ont beaucoup de rap- ports entre elles : Les unes et les autres sont des oiseaux pulvérateurs, à ailes et queue courtes, et courant fort vite, à bec de gal- linacés, à plumage gris mouchete de brun et quelquefois tout blanc ; du reste, se nour- rissant, s'accouplant, construisant leur nid, couvant leurs œufs, menant leurs petits, à peu près de la même manière , et toutes deux ayant le tempérament fort lascif, et les mâles une grande disposition à se battre : mais quelque nombreux que soient ces rapports , ils se trouvent balancés par un nombre presque égal de dissemblances, qui font de l'espèce des cailles une espèce tout-à-fait séparée de celle des perdrix. En effet, 1°. les cailles sont constamment plus petites que les perdrix, en comparant les plus grandes races des unes aux plus grandes races des autres, et les plus petites aux plus petites. 2°. Elles n'ont point derrière les yeux cet espace nud et sans plumes qu'ont les perdrix , ni ce fer à cheval que les mâles de celles-ci ont sur la poitrine, ef jamais on n'a vu de véritables cailles à bec et pieds rouges. 3°. Leurs œufs sontplus petits etd’une: 17 .* Ve F w; | Didi 194 HISTOIRE NATURELLE tout autre couleur. 4°. Leur voix est aussi différente; et quoique les unes et les autres fassent entendre leur cri d'amour à peu près dans le même temps, il n’en est pas de même du cri de colère, car la perdrix le fait entendre avant dè se battre, et la caille en se battant. 5°. La chair de celle-ci est d’une saveur et d’une texture toute diffe- rente, et elle est beaucoup plus chargée de graisse. 6°. Sa vie est plus courte. 7°. Elle est moins rusée que la perdrix , et plus fa- cile à attirer dans le piège, sur-tout lors- qu'elle est encore jeune et sans expérience. Elle a les mœurs moins douces et le naturel plus rétif; car il est extrèmement rare d'en voir de privées : à peine peut-on les accou- tumer à venir à la voix étant renfermées de jeunesse dans une cage. Elle a les incli- nations moins sociales ; car elle ne se réunit guère par compagnies, si ce n’est lorsque la couvée, encore jeune, demeure attachée à la mère, dont les secours lui sont néces- saires , eh lorsqu'une même cause agissant sur toute l'espèce à la fois et dans le même temps, on en voit des troupes nombreuses traverser les mers et aborder dans le même DE LA CAILLE. 105 pays : mais celle association forcée ne dure qu'autant que la cause qui l’a produite; car dès que les cailles sont arrivées dans le pays qui leur convient, et qu'elles peuvent vivre à leur gré, elles vivent solitairement. Le besoin de l'amour est le seul lien qui les réunit : encore ces sortes d’unions sont-elles sans consistance pendant leur courte durée; car les mâles, qui recherchent les femelles avec tant d’ardeur, n’ont d’attachement de préférence pour aucune en particulier. Dans cette espèce, Les accouplemens sont fréquens, mais l’on ne voit pas un seul couple : lors- que le desir de jouir a cessé, toute société est rompue entre les deux sexes ; le mâle alors non seulement quitte et semble fuir ses femelles, mais il les repousse à coups de bec, et ne s'occupe en aucune façon du soin de la famille. De leur côté, les petits sont à peine adultes qu’ils se séparent ; et si on les réunit par force dans un lieu fermé, ils se battent à outrance les uns contre les autres, sans distinction de sexe, et ils finissent par se détruire *. * Les anciens savoient bien cela, puisqu'ils di= soient des enfans querelleurs etmatins, qu'ils étotent 196: HISTOIRE NATURELLE L’inclination de voyager et de changer de climat dans certaines saisons de l’année;'est, comme je l'ai dit ailleurs *, l’une des affec- tions les plus fortes de l’ LR des cailles. La cause de ce desir ne peut être qu’une cause très-générale, puisqu'elle agit non seu- lement sur toute l'espèce, mais sur les in- dividus même séparés, pour ainsi dire, de leur espèce, et à qui une étroite captivité ne laisse aucune communication avec leurs semblables, Ou a vu de jeunes cailles élevées dans des cages presque depuis leur nais- sance, et qui ne pouvoient ni connoitre ni regretter la liberté, éprouver régulièrement deux fois par an, pendant quatre années, une inquiétude et des agitations singulières dans les temps ordinaires de la passe; savoir, au mois d'avril et au mois de septembre: cette inquiétude duroit environ trente jours à chaque fois, et recommençoit tous les jours une heure avant le coucher du soleil; on voyoit alors ces caillés prisonnières aller et querelleurs comme des cailles tenues en cage. (Aristophane.) * Tome premier de cette Histoire nanirelle des piseaur , page bo. DE LA CAILLE. 197 venir d’un bout de la cage à l’autre, puis s’élancer contre le filet qui lui servoit de couvercle, et souventavec une telle violence, qu’elles retomboient tout étourdies ; la nuit se passoit presque eutièrement dans ces agi- tations, et le jour suivant elles paroissoient tristes, abattues, fatiguées et endormies. On a remarqué que les cailles qui vivent dans l’état de liberté, dorment aussi une grande partie de la journée ; et si l’on ajoute à tous ces faits, qu'il est très-rare de les voir arriver de jour, on sera, ce me semble , fondé à con- clure que c'est pendant la nuit qu'elles voya- gent, et que ce desir de voyager est inné chez elles , soit qu'elles craignent les températures excessives, puisqu'elles se rapprochent cons- tamment des contrées septentrionales pen- dant l'été, et des méridionales pendant l’hi- ver; ou, ce qui semble plus vraisemblable, qu’elles n’abandonnent successivement les différens pays que pour passer de ceux où les récoltes sont déja faites, dans ceux où elles sont encore à faire, et qu’elles ne changent _ ainsi de demeure que pour trouver toujours une uourriture convenable pour elles et pour leur couveée. 17 | 18 HISTOIRE NATURELLE (NE Je dis que cette dernière cause est la plus vraisemblable; car, d’un côté, il'est acquis par l'observation que les cailles peurs très- bien résister au froid, puisqu il s’en trouve en Islande, selon M. Horrebow, et qu'on en a conservé plusieurs années de suite dans. une chambre sans feu, et qui même étoit tournée au nord, sans que les hivers les plus rigoureux aient paru les incommoder, ni même apporter le moindre changement à leur manière de vivre. D’un autre côté, il semble qu’une des choses qui les fixent dans it FAT PATIENS 11 Ni un pays, c’est l'abondance de l'herbe, puis— que, selon la remarque des chasseurs, lors- que le printemps est sec, et que par consé- quent l’herbe est moins abondante, il y a aussi beaucoup moins de cailles le reste de l’année : d’ailleurs le besoin actuel de nour- riture est une cause plus déterminante, plus analogue à l’instinct borné de ces petits ani- maux, et suppose en eux moins de cette pré- voyance que les philosophes accordent trop. libéralement aux bêtes. Lorsqu'ils ne trou- vent point de nourriture dans un pays, il est tout simple qu’ils en ailleut chercher dans un autre : ce besoin essentiel les avertit, DE LA CAILLE. 199 les presse, met en action toutes leurs fa- cultes; ils quittent une terre qui ne produit plus rien pour eux; ils s'élèvent en l'air, vont à la découverte d’une contrée moins dénuée, s’arrètent où ils trouvent à vivre; et l'habitude se joignant à l'instinct qu'ont tous les animaux, et sur-tout les animaux ailés, d’éventer de loin leur nourriture, il n'est pas surprenant qu’il en résulte une affection, pour ainsi dire, innée, et que les mêmes cailles reviennent tous les ans dans les mêmes endroits; au lieu qu'il seroit dur de supposer, avec Aristote, que c’est d’après une connoissance réfléchie des saisons qu’elles changent deux fois par an de climat, pour irouver toujours la température qui leur convient, comme faisoient autrefois les rois . de Perse; encore plus dur de supposer, avec Catesby , Belon et quelques autres, que lors- qu'elles changent de climat, elles passent sans s’arrèter dans les lieux qui pour roient leur convenir en-deçà de la ligne, pour aller chercher aux antipodes précisément le même degré de latitude auquel elles étoient accoutumées de l’autre côté de l'équateur; æe qui supposeroit des connoissances , Ou 200 HISTOIRE NATURELLE plutôt des erreurs scientifiques auxquelles l'instinct brut est beaucoup Moins sujet que la raison cultivée. | | Quoi qu’il en soit, lorsque les cailles sont libres, elles ont un temps pour arriver et un temps pour repartir : elles quittoient la Grèce, suivant Âristote, au mois boedro- mion, lequel comprenoit la fin d’août et le commencement de septémbre ; en Silésie, elles arrivent au mois de mai, et s’en vont sur la fin d'août; nos chasseurs disent qu’elles arrivent dans notre pays vers le 10 ou le 12 de mai; Aloysius Mundella dit qu'on les voit paroître dans les environs de Venise vers le milieu d'avril; Olina fixe leur arri- vée dans la Campagne de Rome aux pre- miers jours d'avril: mais presque tous con- viennent qu’elles s’en vont à la première gelée d'automne, dont l’effet est d’altérer la qualité des herbes et de faire disparoître les insectes; et si les gelées du mois de mai ne les déterminent point à retourner vers le sud, c’est une nouvelle preuve que ce n'est point le froid qu’elles évitent, mais qu’elles cherchent de la nourriture dont elles ne sont point privées par les gelées du. DIE LPC AN LL) so mois de mai. Au reste, il ne faut pas re- garder ces temps marqués par les observa- teurs comme des époques fixes auxquelles la nature daigne s’assujettir; ce sont, au con- traire , des termes mobiles qui varient entre certaines limites d’un pays à l’autre, ‘sui- vant la température du climat, et même d’une année à l’autre, dans le même pays, suivant que le chaud et le froid commencent plus tôt ou plus tard, et que par conséquent la maturité des récoltes et la génération des insectes qui servent denourritureaux cailles, est plus ou moins avancée. _ Les anciens et les modernes se sont beau "coup occupés de ce passage des cailles et des autres oiseaux voyageurs : les uns l’ont chargé de circonstances plus ou moins merveilleuses; les autres, considérant combien ce petit oi- seau vole difficilement et pesamment, l’ont révoqué en doute, et ont eu recours, pour expliquer la disparition régulière des cailles en certaines saisons de l’année, à des suppo- sitions beaucoup plus revoltantes. Mais il fautavouer qu'aucun des anciens n’avoit élevé ce doute : cependant ils savoient bien que les cailles sont des oiseaux lourds, qui volent LA LAPS TCTEPAR © TU L r { WA > x Li À 4 : | it | “ 4 : 202 HISTOIRE NATURELLE très-peu et presque malgré eux; que, quoique | _très-ardens pour leurs femelles, les mâles ne se servent pas toujours de leurs ailes pour accourir à leur voix, mais qu’ils font souvent plus d’un quart de lieue à travers l’herbe la plus serrée pour les venir trouver; enfin qu'ils ne prennent l'essor que lorsqu'ils sont tout- à-fait pressés par les chiens ou par les chas- seurs. Les anciens savoient tout cela, et néan- _ moins il ne leur est pas venu dans l'esprit que les cailles se retirassent aux approches des froids dans des trous pour y passer l’hi- _ver, dans un état de torpeur et d’engourdis- sement, comme font les loirs , les hérissons, les marmottes, les chauve-souris, etc. C’etoit une absurdité réservee à quelques modernes, qui ignoroient sans doute que la, chaleur in térieure des animaux sujets à l’engourdisse- ment étant beaucoup moindre qu’elle ne l’est communément dans les autres quadru- pêdes, et à plus forte raison dans les oiseaux, elle avoit besoin d’être aidée par la chaleur extérieure de l’air, comme je l’ai dit ailleurs; et que lorsque ce secours vient à leur man- quer, ils tombent dans l'engourdissement et meurent même bientôt, s'ils sont exposés à. DEYL A'CAILELE. 203: un froid trop rigoureux. Or certainement cela n’est point applicable aux cailles, en qui l’on a même reconnu généralement plus de chaleur que dans les autres oiseaux, au point qu’en France elle a passé en proverbe*, et qu’à la Chine on se sert de ces oiseaux pour se tenir chaud en les portant tout vivans dans les mains. D'ailleurs on s’est assuré par observation continuée pendant plusieurs an- nées,qu'elles ne s’engourdissent point, quoi- que tenues pendant tout l'hiver dans une chambre exposée au nord et sans feu , ainsi que je l'ai dit ci-dessus, d’après plusieurs témoins oculaires et très-dignes de foi qui me l'ont assuré. Or, si les cailles ne se ca- chent ni ne s’engourdissent pendant l'hiver, comme il est sûr qu’elles disparoissent dans cette saison, on ne peut douter qu'elles ne passent d’un pays dans un autre; et c’est ce qui est prouvé par un grand nombre d’autres observations. Belon , se trouvant en automne sur un na- vire qui passoit de Rhodes à Alexandrie, vit des cailles qui alloient du septentrion au midi; et plusieurs de ces cailles ayant été À Où dit vulgairement, chaud comme une caille: dou (l " L' Ce s CARRE LU] | EP LU \ > PL 2 ) LUE 204 HISTOIRE NATURELLE prises par les gens de l'équipage, on trouva dans leur jabot des grains de froment bien entiers. Le printemps précédent, le même observateur, passant de l’ile de Zante dans: la Morée, en avoit vu un grandmombre qui alloient du midi au septentrion ; et il dit qu’en Europe, comme en Asie, les cailles sont généralement oiseaux de passage. M. le commandeur Godeheu les avvues: constamment passer à Malte au mois demai,: paï certains vents, et repasser au mois de sep tembre. Plusieurs chasseurs m'ont assuréque, pendant les belles nuits du printemps, on les entend arriver, et que l’on distingue! très- bien leur cri, quoiqu’elles soient à une très—. grande hauteur : ajoutez à cela, qu’onine fait nulle part une chasse aussi abondante de ce gibier que sur celles de nos côtes qui sont opposées à celles d'Afrique ou d'Asie, et dans les îles qui se trouvent entre deux, puisque toutes celles de l’Archipel, et jus- qu'aux écueils, en sont couverts, selon M. de Tournefort, dans certaines saisons de l’an- née; et plus d’une de tes îles en a pris le nom d’Ortygia*. Dès le siècle de Varron, * Ce nom d'Ortygia , formé du mot grec oué, 'DIÈ LA /CAILLE. 205 Jon avoit remarqué qu’au temps de l’arri- vée et du départ des cailles, on en voyoit uue multitude prodigieuse dans les îles de Pontia, Pandataria et'autres qui avoisinent la partie méridionale de l'Italie, et où elles faisoient apparemment uné station pour se reposer. Vers le commencement de l’au- tomne, on en prend une si grande quantité dans l’île de Caprée , à l’entrée du golfe de Naples, que le produit de cette chasse fait le principal revenu de l’évêque de l'ile, appelé par cette raison l’évéque des cailles; on en prend aussi beaucoup dans les environs de Pesaro, sur le golfe Adriatique, vers la fin du printemps, qui est la saison de leur arri- _vée; enfin il en tombe une quantité si pro- digieuse sur les côtes occidentales du royaume de Naples , aux environs de Nettuno, que sur une étendue de côte de quatre ou cinq milles, on en prend quelquefois jusqu’à cent milliers dans un jour, et qu'on les donne pour quinze qui signifie caille, a été donné aux deux Délos, selon Phanodémus dans Athénée : on l’a encore apphqué à ure autre petite île vis-à-vis Syracuse, et même à la ville d'Éphèse, selon Étienne de Bysance et Eustathe, - | 13 206 HISTOIRE NATURELLE jules le cent (un peu moins de huit livres de notre monuoie) à des espèces de courtiers qui les font passer à Rome, où elles sont beaucoup moins communes *. Il en arrive aussi des nuées au printemps sur l'es côtes de Provence, particulièrement dans les terres de M. l’évêque de Fréjus, qui avoisinent la mer ; elles sont si fatiguées, dit-on , de la traversée, que les premiers TPE on les prend à la main. Mais, dira-t-on toujours, comment un oiseau si petit, si foible, qui a le vol si pe- sant et si bas, peut-il, quoique pressé par la faim, traverser de grandes étendues de mer? J'avoue que quoique ces grandes étendues de mer soient interrompues de distance en dis< tance par plusieurs îles où les cailles peuvent se reposer , telles que Minorque, la Corse, la Sardaigne, la Sicile, les iles de Malte, de Rhodes, toutes les iles de l'Archipel; j’a- voue, dis-je , que, malgre cela , il leur faut encore du secours ; et Aristote l’avoit fort ‘bien senti; il savoit même quel etoit celui * Cette chasse est «1 lucrative, que le terrain où elle se fait par les habitans de Ncttuno est d’une cherté exorbitante. cal DE LA CAILLE. 207 dont elles usoient le plus communément ; mais il s’étoit trompé, ce me semble, sur la manière dont elles s’en aidoient : «Lorsque «le vent du nord souffle, dit-il, les cailles « voyagent heureusement; mais si c’est le « vent du midi, comme son effet est d'appes «santir et d’humecter, elles voleut alors « plus difficilement , et elles expriment là “« peine et l'effort par les cris qu’elles font «entendre en volant». Je crois, en eflet , que c’est le vent qui aide les cailles à faire leur voyage, non pas le vent du nord, mais le vent favorable ; de même que ce n’est point le vent du sud qui retarde leur course, mais le vent contraire ; et cela est vrai dans tous les pays où ces oiseaux ont un trajet considérable à faire par-dessus les mers. M. le commandeur Godeheu a très-bien remarqué qu’au printemps les cailles n’a- bordent à Malte qu'avec le nord-ouest, qui leur est contraire pour gagner la Provence, et qu’à leur retour c’est le sud-est qui les amène dans cette île, parce qu'avec ce’vent elles ne peuvent aborder en Barbarie. Nous voyons mème que l’auteur de la nature s’est . servi de ce moyen, comme le plus conforme { 208 HISTOIRE NATURELLE envoyer de nombreuses volées de cailles aux M? L. aux lois générales qu’il avoit établies, pour ni C4 P. ( Israélites dans le désert ; et ce vent, qui étoit le sud-ouest, passoit en effet en Égypte, en Éthiopie, sur les côtes de la mer Rouge , et, en un mot, dans les pays où les cailles sont en abondance. Des marins que j'ai eu occasion de con- sulter, m'ont assuré que quand les cailles étoient surprises dans leur passage par le vent contraire, elles s’abattoient sur les vais- seaux qui se trouvoient à leur portée, comme Pline l’a remarqué, et tomboient souvent. dans la mer, et qu’alors on les voyoit fiotter et se débattre sur les vagues, une aile en l’air, comme pour prendre le vent; d’où quelques naturalistes ont pris occasion de dire qu’en _ partant elles se munissoient d’un petit mor- ceau de bois qui püût leur servir d’une es- pèce de point d'appui ou de radeau, sur lequel elles se délassoient de temps en temps, ‘en voguant sur les flots, de la fatigue de vo- guer dans l'air : on leur a fait aussi porter à chacune trois petites pierres dans le bec, selon Pline , pour se soutenir contre le vent, et, selon Oppien, pour reconnoitre, en Les DE LA CAILLE. 209 laissant tomber) une à une, si elles avoient dépassé la mer; et tout cela se réduit à quel- ques petites pierres que les cailles avalent avec leur nourriture, comme tous les grani- vores. En général, on leur a prêté des vues, une sagacité, un discernement, qui feroient presque douter que ceux qui leur ont fait honneur de ces qualités en aient fait beau— coup d'usage eux-mêmes. On a observé que d'autres oiseaux voyageurs, tels que le râle terrestre, accompagnoient les cailles , et que l’oiseau de proie ne manquoit pas d'en at- traper quelqu’une à leur arrivée : de là om _a prétendu qu’elles avoient de bonnes raison$ pour se choisir un guide ou chef d’une autre espèce, que l’on à appelé oi des cailles (ortygometra ); et cela, parce que la première arrivante devant être la proie de l’oiseau car- nassier, elles tächoient de détourner ce mal- heur sur une tête étrangère. Au reste, quoiqu'il soit vrai en général que les cailles changent de climat, ik en reste toujours quelques unes qui n’ont pas la force de suivre les autres, soit qu'elles aient été blessées à l'aile, soit qu’elles soient surchar= gées de graisse, soit que, provenant d'une | 18 10 HISTOIRE NATURELLE seconde ponte, elles soient trop jeunes ef trop foibles au temps du départ ; et ces cailles traîineuses tâchent de s'établir dans les meil- leures expositions du pays où elles sont con- traintes de rester. Le nombre en est fort petit dans nos provinces ; mais les auteurs de la Zoologie britannique assurent qu’une partie seulement de celles qu’on voit en Angleterre , quitte entièrement l’île, et que l’autre partie se contente de changer de quar- tier, passant vers le mois d'octobre de l’inte- rieur des terres dans les provinces maritimes, et principalement dans celle d’Essex , où elles restent tout l'hiver : lorsque la gelée ou la neige les obligent de quitter les jachères et les terres cultivees, elles gagnent les côtes de la mer, où elles se tiennent parmi les plantes maritimes, cherchant les meilleurs abris, et vivant de ce qu'elles peuvent attra- per sur les algues, entre les limites de la haute et basse mer. Ces mêmes auteurs ajou- tent que leur première apparition dans le comté d’'Essex se rencontre exactement cha que année avec leur disparition du milieu des terres. On dit aussi qu’il en reste un assez bon nombre en Espagne et dans le sud de 4 [l J "7 1 DE LA CAILLE. 21E JItalie, où l'hiver n’est presque jamais assez rude pour faire peérir ou disparoitre entière- ment les insectes ou les graines qui leur servent de nourriture. | A l'égard de celles qui passent les mers, il n’y a que celles qui sont secondées par un vent favorable qui arrivent heureusement ; et si ce vent favorable souffle rarement au ‘temps de la passe, il en arrive beaucoup moins dans les contrées où elles vont passer l'eté : dans tous les cas, on peut juger assez sûrement du lieu d’où elles viennent par la direction du vent qui les apporte. Aussitôt que les cailles sont arrivées dans nos contrées , elles se mettent à pondre : elles ne s’apparient point, comme je l’ai déja re- marqué; et cela seroit difficile, si le nombre des males est, comme on l’assure, beaucoup plus grand que celui des femelles : la fidé- lité, la confiance, l'attachement personnel, qui seroient des qualités estimables dans les individus, seroient nuisibles à l'espèce; la foule des males célibataires troubleroit tous les mariages, et finiroit par les rendre sté- riles ; au lieu que n’y ayant point de mariage, ou plutôt n'y en ayant qu'un seul de tous Les 212 HISTOIRE NATURELLE mâles avec toutes les femelles, il y a moins de jalousie, moins de rivalité, et, si l'on veut, moins de moral dans leurs amours : mais aussi 1l y a beaucoup de physique; on a vu un mâle réitérer dans un jour jusqu’à douze fois ses approches avec plusieurs fe- melles indistinctement. Ce n’est que dans ce sens qu'on a pu dire que chaque mâle sufhi- soit à plusieurs femelles; et la nature, qui leur inspire cette espèce de libertinage, em tire parti pour la multiplication de l'espèce : chaque femelle dépose de quinze à vingt œufs dans un nid qu’elle sait creuser dans la terre avec ses ongles, qu’elle garnit d'herbes et de feuilles, et qu’elle dérobe autant qu’elle peut à l'œil perçant de l'oiseau de proie ; ces œufs sont mouchetés de brun sur un fond grisätre: elle les couve pendant environ trois semaines; Tardeur des mâles est un bon garant qu'ils sont tous fécondés, et il est rare qu'il s'en _ trouve de stériles. Les auteurs de la Zoologie britannique disent que les cailles en Angleterre pondent rarement plus de six ou sept œufs. Si ce fait est général et constant, il faut en conclure qu’elles y sont moins fécondes qu’en France, ÿ # / DEL AC ATLLE. 213 en Jtalie, etc.; reste à observer si cette moindre fécondité tient à la température plus froide, ou à quelque autre qualité du climat, Les cailleteaux sont en état de courir pres- que en sortant de la coque, ainsi que les per- dreaux ; mais ils sont plus robustes à quel- ques égards, puisque, dans l’état de liberté, ils quittent la mère beaucoup plus tôt, et . que même dès le huitième jour on peut en- treprendre de les élever sans son secours. Cela a donné lieu à quelques personnes de croire que les cailles faisoient deux couvées par été : mais j'en doute fort, si ce n’est peut-être celles qui ont été troublées et dé- rangées dans leur première ponte; il n’est pas même avéré qu'elles en recommencent une autre lorsqu'elles sont arrivées en Afri- que au mois de septembre, quoique cela soit beaucoup plus vraisemblable, puisqu’au moyen de leurs migrations répulières elles ignorent l’automne et l'hiver, et que l’âännée n’est composée pour elles que de deux prin- temps et de deux étés, comme si elles ne changeoient de climat que pour se trouver perpétuellement dans la saison de l'amour et de la fécondité. € / 214 HISTOIRE NATURELLE Ce qu'il y a de sûr, c’est qu'elles quittent leurs plumes deux fois par an,;-à la fin de l'hiver et à la fin de l’eté : chaque mue dure un mois; et lorsque leurs plumés sont reve- nues, elles s’en servent aussitôt pour chan- ser de climat si elles sont libres; et si ‘elles sont en cage, c’est le temps où se marquent ces inquiétudes périodiques qui dE mes au temps du passage, IL ne faut aux cailleteaux que quatre 1 mois pour prendre leur accroissement et se trou- ver en état de suivre leurs pères et mères dans leurs voyages. fr V La femelle diffère du mâle en ce qu'elle est un peu plus grosse, selon Aldrovande (d’autres la font égale, et d’autres plus pe- tite); qu’elle a la poitrine blanchätre, par- semée de taches noires et presque rondes, tandis que le mâle l’a roussâtre, sans mé- lange d'autres couleurs. [Il à aussi le bec noir, ainsi que la gorge et quelques poils autour de la base du bec superieur *. Enfin * Quelques naturalistes ont pris le mâle pour Ja femelle. J'ai suivi dans cette occasion l’avis des Chasseurs, et sur-tout de ceux qui en chassant sa vent observer. N'y ) { DE LA CAILLE. 215 on.a remarqué qu’il avoit Les testicules très- gros, relativement au volume de son corps: mais cette observation a sans doute été faite dans la saison de l'amour, temps où en gé- néral les testicules des oiseaux grossissent considérablement. Le mâle et la femelle ont chaëiih deux cris, l’un plus éclatant et plus fort, l’autre plus foible. Le mâle fait ovan, ouan, ouan, ouan; il ne donne sa voix sonore que lors- qu'il est éloigné des femelles, et il ne 14 fait jamais entendre en cage pour peu qu’il ait une.compagne avec lui. La femelle a un cri que tout le moude connoit, qui ne lui sert que pour rappeler son mâle; et quoique ce cri soit foible,. et que nous ne puissions l'entendre qu’à une petite distance , les males y accourent de près d'une demi-lieue: elle a aussi un petit son tremblotant, cri, cri. Le mâle est plus ardent qué la femelle ; car celle-ci ne court point à la voix du mâle, comme le mäle accourt à la voix de la fe- melle dans le temps de l’amour, et souvent avec une telle precipitation , un tel abandon de lui-même, qu’il vient la chercher ; jusque dans la main de l'oiseleur. 516 HISTOIRE NATURELLE La caille , ainsi que la perdrix et beau- PRINT à coup d’autres animaux, ne produit que lors- qu’elle est en liberté : on a beau fournir à celles qui sont prisonnières dans des cages, tous les matériaux qu’elles emploient ordi- nairement dans la construction de leurs _ nids; elles nenichent jamais, etne prennent aucun soin des œufs qui leur échappent et qu’elles semblent pondre malgré elles. On a débité plusieurs absurdités sur’ la _ génération des cailles. On a dit d’ellescomme des perdrix, qu’elles étoient fécondées par le vent : cela veut dire qu’elles pondene quelquefois sans le secours du mâle, On a dit qu'elles s’engendroient des thons que la mer agitée rejette quelquefois sur les côtes de Libye; qu’elles paroissoient d’abord sous la forme de vers, ensuite sous celle de mou- ches , et que, grossissant par degres , elles devenoient bientôt des sauterelles et enfin: des caïlles, c’est-à-dire que des gens gros- siers ont vu des couvées de cailles chercher dans les cadavres de ces thons laissés par la mer, quelques insectes qui y étoient éclos, et qu'ayant quelques notions vagues des \ ’ métamorphoses des insectes, 1ls ont cru SET À : À D'EL'ACC AILLE: àr7 qü'uné sauterelle pouvoitse changer en caille, comime un yer se changé en un insecte ailé, Enfin on a dit que le màle s'accouploit avec le crapaud femelle; ce qui n’a pas même d'apparence de fondement. Les cailles se nourrissent de blé, de rhillet, de chenevis, d'herbe verte, d'insectes, de toutes sortes de graines, même de celle d’el- _Iébore; ce qui avoit donné aux anciens de la répugnance pour leur chair, joint à ce. qu’ils croyoient que c'étoit le seul animal avec l’homme qui fût sujet au mal caduc : mais l'expérience a detruit ces préjugés. En Hollande, où il y a beaucoup de ces oiseaux, principalement sur les côtes, on appelle les baies de bryone ou couleuvrée ; D baies aux cailles ; ce qui suppose en elles un appétit de preference pour cette nourriture. ” Il semble que le boire ne leur soit pas ab- solument nécessaire : car des chasseurs m'ont assuré qu'on ne les voyoit jamais aller à l’eau; et d'autres, qu'ils en avoient nourri pendant une année entière avec des graines sèches et sans aucune sorte de boisson, quoiqu’elles boivent assez frequemment lorsqu'elles en ont la commodité: ce retranchement de toute Oiseaux, IVe 19 218 HISTOIRE NATURELLE boisson est même le seul moyen de les guérir. lorsqu’ elles rendent leur eau, c’est-à-dire, lorsqu'elles sont attaquées d’une espèce de maladie dans laquelle elles ont presque tou- jours une goutte d’eau au bout du bec. Quelques uns ont cru remarquer qu elles troubloient l’eau avant que de boire, ét l’on n’a pas manqué de dire que c’éloit par un motif d'envie; car on ne finit pas sur les motifs des bêtes. Elles se tiennent dans les champs, les pres, les vignes, mais très-rare- ment dans les bois, et elles ne se perchent jamais sur les arbres. Quoi qu’il.eu soit, elles prennent beaucoup plus de graisse que les perdrix : on croit que ce qui y contribue, c'est l'habitude où elles sont de passer la plus grande partie de la chaleur du jour sans mou: vement; elles se cachent alors dans l'herbe la pius serree, et on les voit quelquefois de- meurer quatre heures de suite dans la mème place, coucheées sur le côte et les jambes eten- dues : il faut que le chien tombe absolument dessus pour les faire partir. On dit qu’elles ne vivent guère au- del de quatre ou cinq ans; et Oliua regarde la brié- vete de leur vie comme une suite de leur dis- DE LA CAILLE. 219 position à s’engraisser : Artémidore l’attri- bue à leur caractère triste et querelleur : et tel est en effet leur caractère; aussi n’a-t-on pas manqué de les faire battre en public pour amuser la multitude. Solon vouloit même que les enfans et les jeunes gens vissent ces sortes de combats , pour y prendre des leçons de courage; et il falloit bien que cette sorte de gymnastique, qui nous semble pué-— rile, fût en honneur parmi les Romains, et qu'elle tint à leur politique, puisque nous voyons qu'Auguste punit de mort un préfet d'Égypte pour avoir acheté et fait servir sur sa table un de ces oiseaux qui avoit acquis de la célébrité par ses victoires. Encore au— jourd’hui on voit de ces espèces de tournois dans quelques villes d'Italie : on prend deux cailles à qui on donne à manger larsement ; on les met ensuite vis-à-vis l’une de l’autre, chacune au bout opposé d’une longue table, et l’on jette entre deux quelques grains de’ millet (car parmi les animaux il faut un sujet réel pour se battre); d’abord elles se lancent des regards menaçans; puis, partant comme un éclair, elles se joignent, s’attaquent à coups de bec, et ne cessent de se battre, en CC TRERNE PERS 220 HISTOIRE NATURELLE dressant la tête et s’élevant sur leurs «ergots , jusqu’à ce que l’une cède à l’autre le champ de bataille. Autrefois on a vu ces espèces de | duels se passer entre une caille et un homme. La caille etant mise dans une grande caisse, au milieu d'un cercle qui étoit trace sur le fond , l’homme lui frappoit la tête ou le bec avec un seul doigt, ou bien lui arrachoit quelques plumes : si la caille en se defendant ne sortoit point du cercle tracé, c’étoit son maître qui gagnoit la gageure; mais si elle mettoit un pied hors de la circonference , c'étoit son digne adversaire antagoniste qui étoit déclaré vainqueur , et les cailles qui avoientété souvent victorieuses, se vendoient fort cher. Il est à remarquer que ces oiseaux, de même que les perdrix et plusieurs autres, ne se battent ainsi que contre ceux de leur espèce; ce qui suppose en eux plus de jalou-— sie que de courage ou même de colère. On juge bien qu'avec l'habitude de chan- ger de climat, et de s’aider du vent pour faire ses grandes traversées, la caille doit être un oiseau fort répandu : et en effet, on la trouve au cap de Bonne-Espérance et dans toute l'Afrique habitable, en Espagne, en Italie, DL A LCA TE DE 221 en France, en Suisse, dans les Pays-Bas et en Allemagne, en Angleterre, en Ecosse, en Suêde , et jusqu’en Islande; et du côté de l'Est, en Pologne , en Russie, en Tartarie, et jusqu’à la Chine. Il est même très-probable qu’elle a pu passer en Amérique, puisqu'elle se répand chaque année assez près des cercles polaires, qui sont les points où les deux con- tinens se rapprochent le plus; et en effet, on en trouve dans les îles Malouines, comme nous le dirons plus bas. En général, on en voit toujours plus sur les côtes de la mer et aux environs que dans l’intérieur des terres. La caille se trouve donc par-tout, et par- tout on la regarde comme un fort bon gibier, dont la chair est de bon goût et aussi saine que peut l’être une chairaussi grasse : Aldro- vande nous apprend même qu’on en fait fondre la graisse à part, et qu’on la garde pour servir d'assaisonnement; et nous avons vu plus haut que les Chinois se servoient de l'oiseau vivant pour s’échauffer les mains. On se sert aussi de la femelle, ou d’un ap- peau qui imite son cri, pour attirer les mâles dans le piége; on dit même qu’il ne faut que leur présenter un miroir avec un filet au 19 FU REA 222 HISTOIRE NATURELLE. devant, où ils se prennent en accourant à leur | image, qu’ils prennent pour un autre oiseau de leur espèce ; à la Chine, on les prend au vol avec des troubles légères que les Chinois manient fort adroitement ; et, en géneral, tous les piéges qui réussissent pour les autres oiseaux, sont bons pour les cailles, sur-tout pour les mäles, qui sont moins défians et plus ardens que leurs femelles , et. que l’on mêne par-tout où l’on veut en imitant la voix de celles-ci. Cette ardeur des cailles a donné lieu d'at- tribuer à leurs œufs, à leur graisse, etc. la propriété de relever les forces abattues et d’exciter les tempéramens fatigués ; on a _ même été jusqu’à dire que la seule présence d'un de ces oiseaux dans une chambre pro- curoit aux personnes qui y couchoient des songes vénériens. IL faut citer les erreurs, afin qu’elles se détruisent elles-mêmes. BECHRORKIEL, OU GRANDE CAILLE DE POLOGNE. Nous ne connoissons cette caille que par le Jésuite Rzaczynski, auteur polonois, et qui mérite d'autant plus de confiance sur cet article, qu'il parle d’un oiseau de son pays. Elle paroît avoir la même forme, le même instinct, que la caille ordinaire, dont elle ne diffère que par sa grandeur : c’est pourquoi je la considère simplement comme une variété de cette espèce. Jobson dit que les cailles de la Gambra sont aussi grosses que nos bécasses. Si le cli- mat n'étoit pas aussi différent, je croirois que ce seroit le même oiseau que celui de cet article. ’ LA CAILLE BLANCHE. À nisrorr est le seul qui ait-parle de; cette caille, qui doit faire variété dans l’es- pèce des cailles, comme. la perdrix grise- blanche et la perdrix rouge-blanche font _ variétés dans ces deux espèces de perdrix; l’alouette blanche dans celle des alouettes, etc. . Martin Cramer parle des cailles aux pieds verdâtres (virentibus pedibus). Est-ce une variété de l’espèce, ou simplement un acci- dent individuel ? k TMC ACL L E DES ILES MALOUINES *. Ox pourroit encore regarder cette espèce comme une variéte de l'espèce commune qui est repandue en Afrique et en Europe, ou du moins comme uue espêce très-voisine ; car elle n’en paroît différer que par la cou- leur plus brune de sou plumage, et par son bec qui est un peu plus fort. Mais ce qui s'oppose à cette idée, c’est le grand intervalle de mer qui separe les con- tinens vers le Midi; et il faudroit que nos cailles eussent fait un très-srand voyage, si l’on supposoit qu'ayant passe par le nord de l’Europe en Amérique, elles se retrou- vent jusqu’au détroit de Magellan : je ne dé- cide donc pas si cette caille des îles Ma- louines est de la même espèce que notre caille, ni si elle en provient orisinairement, ou si ce n'est pas plutôt une espèce propre et particulière au climat des îles Malouines * Voyez les planches enluminées, n° 222, L'AUF RASE O U CAILLE DE LA CHINE *. C ET oiseau est représenté dans nos planches sous le nom de caille des Philippines, parce qu’elle a été envoyée de ces îles au Cabinet ; mais elle se trouve aussi à la Chine, et je l'ai appelée /a fraise à cause de l’espèce de fraise blanche qu'elle a sous la gorge, et qui tran- che d'autant plus que son plumage est d'un brun noirätre. Elle est une fois plus petite que la nôtre. M. Edwards a donné la figure du mâle, planche CCXLVII : il diffère de la femelle représentée dans nos planches enlu- minées, en ce qu’il est un peu plus gros, quoiqu'il ne le soit pas plus qu'une alouette; en ce qu’il a plus de caractère dans la phy- sionomie , les couleurs du plumage plus vives et plus variées, et les pieds plus forts. * Voyez les planches enluminées , n° 126. HISTOIRE NATURELLE. 22:97 Le sujet dessiné et décrit par M. Edwards avoit été apporté vivant de Nanquin en Au- gleterre. Ces petites cailles ont cela de commun avec celles de nos climats, qu’elles se battent à outrance les unes contre les autres, sur- tout les mâles; et que les Chinois font à cette occasion des gageures considérables , chacun pariant pour son oiseau, comme on fait en Angleterre pour les coqs : on ne peut donc guère douter! qu'elles ne soient du même genre de nos cailles, mais c’est pro- bablement une espèce différente de l’espèce commune; et c'est par cette raison que j'ai cru devoir lui donner un nom os et particulier. \ LE TURN | où | CAILLE DE MADAGASCAR *. Novs avons donné à cette caille ie nom * de turnix, par contraction de celui de co- turnix, pour la distinguer de la caille ordi- nairé, dont elle diffère à bien des égards : car, premièrement , elle est plus petite; en second lieu , elle à le plumage different, tant pour le fond des couleurs que pour l’ordre de leur distribution ; enfin elle n’a que trois doigts antérieurs à chaque pied, comme les outardes, et n’en a point de postérieur. * Voyez les planches enluminées, n° 191, PE ROVÉIL MATIN, O U LA CAILLE DE JAVA. Car oiseau, qui n’est pas beaucoup plus gros que notre caille, lui ressemble parfai-, tement par les couleurs du plumage, et chante aussi par intervalles : mais il s’en distingue par des différences nombreuses et considérables ; 1°. par le son de sa voix, qui est très-srave, très-fort, et assez semblable à cette espèce de mugissement que poussent les butors en enfonçant leur bec dans la vase des marais *. | 2°. Par la douceur de son naturel, qui la rend susceptible d’être apprivoisée au même degré que nos poules domestiques. 3°. Par les impressions singulières que le froid fait sur son tempérament : elle ne * Les Hollandoïs appellent ce mugissement pis tvor, selon Bontus. 20 * fai 239 HISTOIRE NATURELLE chante , elle ne vit, que lorsqu'elle voit le soleil ; dès qu’il est couché, elle se retire à l’écart dans quelque trou, où elle s’enye- loppe, pour ainsi dire, de ses ailes pour 2 passer la nuit; et dès qu’il se lève, elle sort de sa léthargie pour célébrer son-retour par des cris d’alégresse qui réveillent toute la maison *. Énûn, lorsqu'on la tient en cage, si elle n’a pas continuellement le soleil, et qu’on n’ait pas l'attention de couvrir sa cage avec une couche de sable sur du linge, pour conserver la chaleur, elle languit, dépérit et meurt bientôt. 4°, Par son instinct; car il paroît par la relation de Bontius qu’elle l’a fort social, et qu’elle va par compagnie. Bontius ajoute qu'elle se trouve dans les forêts de l'ile de Java : or nos cailles vivent isolées, et ne se trouvent jamais dans les bois. . Enfin, par la forme de son bec, qui est un peu plus alougé. Au reste, cetle espèce a néanmoins un trait de conformité avec notre caille et avec * Bontius dit qu’il tenoit de ces oiseaux en cage exprès pour servir de réveil-matin; et en effet leurs pretuiers cris annoncent toujours le lever du soleil. DES CATLILES, 23r beaucoup d’autres espèces; c'est que les mâles _se battent entre eux avec acharnement, et jusqu'à ce que mort s’ensuive : mais on ne peut pas douter qu'elle ne soit trés-différente de l'espèce commune, et c'est par cette rai- son que je lui ai donné un nom particulier. OISEAUX ÉTRANGERS QUI PAROISSENT AVOIR DU RAPPORT AVEC LES PERDRIX ET AVEC LES CAILLES. I. LES COLUMN Lzs colins sont des oiseaux du Mexique, qui ont été indiqués plutôt que décrits par Fernandès, et au sujet desquels il a échappe à ceux qui ont copié cet écrivain plus d’une méprise qu’il est à propos de rectifier avant tout. Premièrement, Nieremberg, qui fait pro- fession de ne parler que d’après les autres, et qui ne parle ici des colins que d’après Fernandès, ne fait aucune mention du ca- cacolin du chapitre CXXXIV, quoique ce, soit un oiseau de méme espèce que les colins. En second lieu, Fernandés parle de deux HISTOIRE NATURELLF,. 233 acolins ou cailles d’eau, aux chapitres X et CXXXI. Nieremberg fait mention du pre- mier, et fort mal-à-propos, à la suite des colins, puisque c’est un oisean aquatique, ainsi que celui du chapitre CXXXI, dont il ne dit rien. é Troisièmement, il ne parle point de l’oco- colin du chapitre LXXXV de Fernandès, lequel est une perdrix du Mexique, et par conséquent fort approchant des colins, qui sont aussi des perdrix, suivant ane vi, comme nous l’allons voir. En quatrième lieu, M. Ray copiant Nie- remberg, copiste de Fernandés, au sujet du coyolcozque, change son expression; et al- tère, à mon avis, le sens de la phrase : car Nieremberg dit que ce coyolcozque est sem- blable aux cailles ainsi appelées par nos Espagnols (lesquelles sont certainement les colins), et finit par dire qu'il est une es- pèce de perdrix d’Espagne ; et M. Ray lui fait dire qu’il est semblable aux cailles d'Eu- rope, et supprime ces mots, esf ein spe- _cies perdicis Hispanicæ : cependant ces der- niers mots sont essentiels, et renferment la véritable opinion de Fernandès sur l'espèce 29 234 HISTOIRE NATURELLE à is ces oiseaux doivent se raphorter ; puisqu’au chapitre XXXIX, qui roule tout entier sur les colins, il dit que les Espagnols les appellent des caïlles, parce qu’ils ont de la ressemblance avec les cailles d'Europe, quoique cependant ils appartiennent très- certainement au genre des perdrix. Il est vrai qu'il répète encore dans ce même cha- pitre que tous les colins sont rapportés aux cailles; mais il est aisé de voir, au milien de toutes ces incertitudes, que lorsque cet auteur donne aux colins le nom de cazilles, c'est d’après le vulgaire *, qui, dans l’im- position des noms, se détermine souvent par des rapports superficiels, et que son opinion réfléchie est que ce sont des espèces de perdrix. J'aurois donc pu, m'en rappor- * Il dit toujours, en parlant de cetie espece, coturnicis ÎMexicanæ (cap. XX1V), coturnicis »o- catæ (cap. XXXIV), 7Hamt vocant colurnicem (cap. XXXIX) ; et quand il dit coturnicis nostreæ (cap. XXV), il est évident qu’il veut parler de ce même oiseau appelé caille au Mexique , puis- qu'ayant parlé dans le chapitre précédent de cette . caille mexicaine , 11 dit 1r1 (cap. XXV), cofurnieis nOSiTæ quoque est spectres. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 235 tant à Fernandeés, le seul observateur qui ait vu ces oiseaux, placer les colins à Ja suite des perdrix ; mais j'ai miéux aimé me préter, autant qu’il étoit possible, à l'opinion vul- gaire, qui n'est pas dénuée de tout fonde-— ment, et mettre ces oiseaux à la suite des catlles, comme ayant rapport aux cailles et aux perdrix. | Suivant Fernandes, les colins sont fort communs dans la nouvelle Espagne ; leur chant, plus ou moins agréable , approche beaucoup de celui de nos cailles; leur chair est un manger très-bon et très-sain , même pour les malades, lorsqu'elle est gardée quelques jours : ils se nourrissent de grains, et on les tient communément en cage; ce qui me feroit croire qu'ils sont d’un naturel différent de nos cailles et même de nos per- drix. Nous allons donner ies indications par- ticulières de ces oiseaux dans les articles suivans. ETS gi VEUT AL ul 236 HISTOIRE NATURELLE I I. "HU LE ZONÉCOLIN. CE nom , abrégé du nom mexicain g7an/hc- sonecolin , désigne un oiseau de grandeur médiocre, et dont le plumage est de couleur obscure; mais ce qui le distingue , c’est son cri, qui est assez flatteur, quoiqu’ur peu plaintif, et la huppe dont sa tête est ornée. . Fernandès reconnoît dans le même cha- pitre un autre colin de même plumage, mais moins gros et sans huppe. Ce pourroit bien être la femelle du précédent, dont il ne se distingue que par des caractères accidentels, qui sont sujets à varier d'un sexe à l’autre, 1-10 LE GRAND COLIN. C'EST ici la plus grande espèce de tous ces colins. Fernandès ne nous apprend point son nom : il dit seulement que le fauve est. sa couleur dominante, que la tête est variée. ‘ DES OISEAUX ÉTRANGERS. 237 de blanc et de noir, et qu'il y a aussi du blanc sur le dos et au bout des ailes; ce qui doit contraster agréablement avec la couleur noire des pieds et du bec. LV: LE CACOLIN. CET oiseau, appelé cacacolin par Fer- nandès, est, selon lui, une espèce de caille, c’est-à-dire, de colin, de même grandeur, de même forme, ayant le même chant, se nour- rissant de même, et ayant le plumage peint presque des mêmes couleurs que ces cailles _mexicaines. Nierembersg, Ray, niM.Brisson, n’en parlent point. Vi LE COYOLCOS. C'EST ainsi que j'adoucis le nom mexicain coyolcozque. Cet oiseau ressemble, par son chant, sa grosseur, ses mœurs, sa mauière de vivre et de voler, aux autres colins; mais 238 HISTOIRE NATURELLE il en diffère par son plumage : le fauve mêlé de blanc est la couleur dominante du dessus du corps, et le fauve seul celle du dessous et des pieds; le sommet de la tête est noir et blanc , et deux bandes de la même couleur ‘descendent des yeux sur le cou : il se tiént dans les terres cultivées. Voilà ce que dit Fernandés : et c’est faute de l’avoir lu avec assez d'attention, ou plutôt c’est pour avoir suivi M. Ray, que M. Brisson dit que le coyolcos ressemble à notre caille par son chant, son vol, etc.; tandis que Fernandès assure positivement qu'il ressemble aux cailles ainsi appelées par le vulgaire, c'est- à-dire, aux colins, et que c’est en effet une espèce de perdrix. NA LE COLENICUX _. Friscx donne (planche CXIIT) la figure d’un oiseau qu'il appelie perite poule de bois d'Amérique, et qut ressemble , selon lui, aux gélinottes par le bec et les pieds, et par sa forme totale, quoique cependant elle n'ait DES OISEAUX ÉTRANGERS. 239 ni les pieds garnis de plumes , ni les doigts bordes de dentelures, ni les yeux ornés de sourcils rouges, ainsi qu’il paroit par sa figure. M. Brisson, qui regarde cet oiseau comme le même que le colenicuiltic de Fer- nandès, l'a range parmi les cailles, sous le mom de caille de la Louisiane, et en a donné la figure : imais, en comparant les figures ou les descriptions de M. Brisson, de Frisch et de Fernandès, j'y trouve de trop grandes différences pour convenir qu'elles puissent se rapporter toutes au même oi- seau ; Car, sans m arrêter aux couleurs du plumage, si difficiles à bien peindre dans une description, et encore moins à l’atti- tude , qui n’est que trop arbitraire, je re- marque que le bec st les pieds sont gros et jaunätres selon M. Frisch , rouges et de me- diocre grosseur selon M: Brisson, et que les pieds sont bleus selon Fernandès. Que si je m'’arrête à l’idée que l’aspect de cet oiseau a fait naître chez ces trois natura-— listes, l'embarras ne fait qu'augmenter; car M. Frisch n’y a vu qu'une seule poule de bois, M. Brisson qu'une caille, et Fernandès qu'une perdrix : car quoique celui-ci dise au ' NAT ETS 24 HISTOIRE NATURELLE commencement du chapitre XXV , que c’est une espèce de caille , il est visible qu'il se conforme en cet endroit au langage vulgaire; car il finit ce même chapitre en assurant que le colenicuiltic ressemble , par sa grosseur, son chant, ses mœurs, et par tout le reste (ceteris cunctis), à l'oiseau du chapitre X XIV : or cet oiseau du chapitre XXIV est le coyol- cozque, espèce de colin ;et Fernandès , comme nous l'avons vu, met les colins au nombre des perdrix. | | Je n’insiste sur tout ceci que pour faire sentir et éviter, s’il est possible, un grand inconvénient de nomenclature, Un métho- diste ne veut pas qu’une seule espèce, quel- qu'anomale qu’elle soit, échappe à sa imé- thode ; il lui assigne donc parmi ses classes et ses genres Ja place qu’il croit lui convenir le mieux : un autre qui à imagine un autre système, en fait autant avec le même droit; et pour peu que l’on connoisse le procédé des methodes et la marche de la nature, on com= prendra facilement qu’un mème oiseau pourra très-bien être placé par trois méthodistes dans irois classes différentes, et n'être nulle part à sa place. | DES OISEAUX ÉTRANGERS. 24r Lorsque nous aurons vu l'oiseau ou les oi- seaux dont il s’agit ici, et sur-tout lorsque nous aurons l’occasion de les voir vivaus, nous les rapprocherons des espèces avec les- quelles ils nous paroitront avoir le plus de rapport, soit par la forme extérieure , soit par les mœurs et les habitudes naturelles. Au reste, le colenicui est de la grosseur de notre caille, selon M. Brisson ; mais il paroît avoir les ailes un peu plus longues. Il est brun sur le corps, gris-sale et noir par- dessous ; 1l a la gorge blanche et des espèces de sourcils blancs. VAT L'OCOCOLIN, ou PERDRIX DE MON- TAGNE pe MEXIQUE. CeTre espèce, que M. Seba a pris pour le rollier huppe du Mexique*, s éloigne en- core plus de la caille, et même de la perdrix, que le précedent : elle est beaucoup plus grosse , et sa chair n’est pas moins bonne. * En général, les rolliers ont le bec plus droit et la queue plus longue que les perdrix. el 242 HISTOIRE NATURELLE. que celle de la caille, quoique fort au-dessous de celle de la perdrix. L’ococolin se rapproche un peu de la perdrix rouge par la couleur de son plumage, de son bec et de ses pieds: celle du corps est un melange de brun, de gris-clair et de fauve; celle de la partie infé- xieure des ailes est cendrée; leur partie su— périeure est semee de taches obscures, blan- ches et fauves, de même que la tête et le cou. T1 se plait dans les climats tempérés et même un peu froids, et ne sauroit vivre ni se per- pétuer dans les climats brülans. Fernandès parle encore d’un autre ococolin, mais qui est un oiseau tout différent. ! Tom g, Deer Pl 14 Lag2g2. : LE PIGÉON-CRAVATE. TT pa 1 AM 1e aa [UT pé vi LUN 4 IL Rs! 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LL étoit aisé de rendre domestiques des oi- seaux pesans , tels que les cogs, les dindons et les paons ; mais ceux qui sont légers et dont le vol est rapide, demandoient plus d'art pour être subjugués. Une chaumière basse dans un terrain clos suffit pour conte- mir , élever et faire multiplier nos volailles : il. faut des tours, des bâtimens élevés, faits exprès, bien enduits en dehors, et garuis en dedans de nombreuses cellules, pour attirer, retenir et loger les pigeons. Ils ne sont reel- lement ni domestiques comme les chiens et ! les chevaux, ni prisonniers comme les poules; ce sont plutôt des captifs volontaires , des hôtes fugitils, qui ne se tiennent dans le lo- gement qu'on leur offre qu'autant qu’ils s’y - plaisent, autant qu’ils ÿ irouvent la nourri- ture abondante, le gîte agréable, et toutes les commodités, toutes les aisances nécessaires à FENEN «F3 PEN ‘a 4 x 244 HISTOIRE NATURELLE à la vie. Pour peu que quelque chose leur . manque ou leur déplaise, ils quittent et se dispersent pour aller ailleurs : il y en a mème qui préfèrent constamment les trous pou- dreux des vieilles murailles aux boulins les plus propres de nos colombiers ; d'autres qui se sitent dans des fentes et des creux d'arbre; d’autres qui semblent fuir nos habitations, et. que rien ne peut y attirer, tandis qu’on en voit au contraire qui n'osent les quitter, et qu'il faut nourrir autour de leur volière, qu'ils n abandonnent jamais. Ces habitudes opposées, ces différences de mœurs, semble- roient indiquer qu'on comprend sous le nom de pigeons un grand nombre d'espèces di- verses, dont chacune auroit son naturel pro- pre et différent de celui des autres; et ce qui sembleroit confirmer cette idée, c’est l’opi- nion de nos nomenclateurs modernes qui comptent , indépendamment d’un grand nombre de variétés, cinq espèces de pigeons, sans y comprendre n1 les ramiers n1 les tour- terelles. Nous séparerons d’abord ces deux dernières espèces de celle des pigeons ; et comme ce sont en effet des oiseaux qui dif-" fèrent spécifiquement les uns des autres, DU PIGEO N. 245 nous traiterons de chacun dans un article séparé. Les cinq espèces de pigeons indiquées par nos nomenclateurs, sont, 1°. le pigeon do- mestique; 2°. Le pigeon romain , sous l'espèce duquel ils comprenuent seize variétés; 3°. le pigeon biset: 4°. le pigeon de roche avec une variété; 5°. le pigeon sauvage. Or ces cinq espèces, à mon avis, n’en font qu'une, et voici la preuve : Le pigeon domestique et Le pigeon romain avec toutes ses variélés, quoi- que différens par la grandeur et par les cou- leurs, sont certainement de la même espèce, puisqu'ils produisent ensemble des individus féconds et qui se reproduisent. On ne doit donc pas regarder les pigeons de volière et les pigeons de colombier , c'est-à-dire , les grands et les petits pigeons .domestiques à comme deux espèces différentes; et il faut se borner à dire que ce sont deux races dans une seule espèce, dont l’une est plus domes- tique et plus perfectionnée que l’autre : de même, le pigeon ‘biset, le pigeon de roche et le pigeon sauvage, sont trois espèces nomi- nales qu'on doit réduire à une seule, qui est selle du biset, dans laquelle le pigeon de 21 Ÿ / à FA 246 HISTOIRE NATURELLE roche et le pigeon sauvage, ne font que des variétés très-lésères, puisque, de l’aveu même de nos nomenclateurs, ces trois oiseaux sont à peu près de la même grandeur, que tous _trois sont de passage , se perchent , ont en tout les mêmes habitudes naturelles, et ne différent entre eux que par quelques teintes de couleurs. . Voila donc nos cinq espèces nominales déja réduites à deux, savoir ,:le: biset et le pigeon, entre lesquelles deux il n’y a de dif- férence réelle, sinon que le premier est sau- vage et. le second est domestique. Je regarde le biset comme la souche première de laquelle tous les autres pigeons tirent leur origine, et duquel ils diffèrent plus ou moins, selon qu'ils ont été plus ou moins maniés par les hommes : quoique je n’aie pas été à portée d’en faire l'épreuve, je suis persuadé que le biset et le pigeon de nos colombiers produis roient ensemble s'ils étoient unis; car 1l ÿ a moins Join de notre petit pigeon domestique au biset qu'aux gros pigeons pattus ou ro- mains, avec lesqueis néanmoins il s'unit et produit. D'ailleurs nous voyons dans celte espèce toutes les nuances du sauvage au nc ne > à — I CPE Tr 41 DU PIGEON. 247 domestique se présenter successivement et comme par ordre de généalogie, ou plutôt de dégenération. Le biset nous est représenté, d’une manière à ne pouvoir s y méprendre, par ceux de nos pigeons fuyards qui désertent nos colombiers et prennent l'habitude de se percher sur les arbres: c’est la première et la plus forte nuance de leur retour à l’état de nature. Ces pigeons, quoiqu'élevés dans l'etat de domesticité, quoiqu’en apparence accoutumes comme les autres a un domicile fixe, à des habitudes com munes, quittent ce domicile , rompent toute sociéte , et vont s'établir dans les bois ; 1is retournent donc à leur etat de nature poussés par leur seul ins- tinct. D'autres, apparemment moins cou- rageux , moins hardis, quoiqu'également amoureux de leur liberte, fuient de nos co- lombiers pour aller habiter solitairement quelques trous de muraiile, ou bien en petit nombre se refugient dans une tour peu fré- quentee ; et malgré les dangers, la disette et la solitude de ces lieux, où ils manquent de tout , où ils sont exposés à la belette, aux rats, à la fouine, à Ja chouette, et où ils sont forcés de subvenir en tout temps à leurs 248 HISTOIRE NATURELLE besoins par leur seule industrie, ils restent néanmoins constamment dans ces habitations incommodes, et les préfèrent pour toujours à leur premier domicile, où cependant ils sont nés, où ils ont ète élevés, où tous les exemples de la sociétéauroient dû les retenir: voilà la seconde nuance. Ces pigeons de mu- raille ne retournent pas en entier à l’état de nature; ils ne se perchent pas comme les premiers, et sont néanmoins beaucoup plus près de l’état libre que de la condition domes- tique. La troisième nuance est celle de nos pigeons de colombier , dont tout le monde connoit les mœurs, et qui, lorsque leur de- meure convient, ne l’abandonnent pas, ou ne la quittent que pour en prendre une qui convient encore mieux, et ils n’en sortent que pour aller s’égayer ou sepourvoir dans les champs voisins. Or, comme c’est parmi ces pigeons mêmes que se trouvent les fuyards et les déserteurs dont nous venons de parler, cela prouve que tous n’ont pas encore perdu leur instinct d'origine, et que l'habitude de la libre domesticité dans laquelle ils vivent, n’a pas entièrement effacé Les traits de leur première nature, à laquelle ils pourroient NU pe D'U'PTIGEO'N. 249 encore remonter. Mais il n’en est pas de même de la quatrième et dernière nuance dans l’ordre de dégénération : ce sont les gros et petits pigeons de volière, dont les races, les variétés, les mélanges, sont presque innumé- rables, parce que, depuis un temps immémo- rial , ils sont absolument domestiques ; et l’homme , en perfectionnant les formes exté- rieures, a en même temps altére leurs qua- lités intérieures, et détruit jusqu'au germe du sentiment de la liberté. Ces oiseaux, la plupart plus grands, plus beaux que les pi- geons communs, ont encore l'avantage pour nous d’être plus féconds, plus gras, de imeïl- leur goût; et c'est par toutes ces raisons qu’on les a soignés de plus près, et qu'on a cher- ché à les multiplier, malgré toutes les peines qu'il faut se donner pour leur éducation et pour le succès de leur nombreux produit et de leur pleine fécondité : dans ceux-ci aucun ne remonte à l’état de nature, aucun même ne s'élève à celui de liberté; ils ne quittent jamais les alentours de leur volière, il faut les y nourrir en tout temps : la faim la plus pres- sante ne les détermine pas à aller chercher ailleurs ; 1ls se laissent mourir d'inanition 250 HISTOIRE NATURELLE plutôt que de quêter leur subsistance; accou- Le tumeés à la recevoir de la main de l'homme ou à la trouver toute préparée, toujours dans le même lieu, ils ne savent vivre que pour manger , et n’ont aucune des ressources, au- cun des petits talens que le besoin inspire à tous les auimaux. On peut donc regarder cette dernière classe, dans.l’ordre des pigeons, comme absolument domestique, captive sans retour, entièrement dépendante de l’homme ; et comme il a créé tout ce qui dépend de lui, on ne peut douter qu’il ne soit l'auteur de toutes ces races esclaves, d'autant plus per- fectionnées pour nous, qu'elles sont plus de- générées, plus viciées pour la nature. Supposant une fois nos colombiers établis et peuplés, ce qui étoit le premier point et le plus difficile à remplir pour obtenir quelque empire sur une espèce aussi fugitive, aussi volage, on se sera bientôt apperçu que dans le grand nombre de jeunes pigeons que ces établissemens nous produisent à chaque sai- son , il s’en trouve quelques uns qui varient pour la grandeur, la forme et les couleurs. On aura donc choisi les plus gros, les plus singuliers, les plus beaux; on les aura sépa- fé D'U,P16GE ON. 25t rés de la troupe commune pour les élever à _ part avec des soins plus assidus et dans une captivité plus étroite : les descendans de ces esclaves choisis auront encore présenté de nouvelles variétés, qu’on aura distinguées, séparées des autres, unissant constamment et mettant ensemble ceux qui ont paru les plus beaux ou les plus utiles. Le produit en grand nombre est la première source des va- riétés dans Les espèces : mais le maintien de ces variétés, et même leur muitiplication, dépend de la main de l’homme; il faut re- cueillir de celle de la nature les individus qui _se ressemblent le plus, les séparer des autres, les uuir ensemble, prendre les mêmes soins pour les variétés qui se trouvent dans les . nombreux produits de leurs descendans; et, par ces attentions suivies, on peut, avec le temps, creer à nos yeux, c’est-à-dire, ame- ner à la lumière une infinité d'êtres nou- veaux, que la nature seule n’auroit jamais produits. Les semences de toute matière vi- vaute lui appartiennent ; elle en compose tous les germes des êtres organisés : mais la combinaison, fa succession, l’assortiment, Ja réunion ou la séparation de chacun de ces Lux sf. HISTOIRE NATURELLE êtres , dépendent souvent de la volonté de l’homme : dès lors il est le maître de forcer la nature/par ses combinaisons, et de la fixer par son industrie; de deux individus singu- liers qu’elle aura produits comme par hasard, il en fera une race constante et perpétuelle, et de laquelle il tirera plusieurs autres races qui, sans ses soins, n'auroient jamais vu le jour. Si quelqu'un vouloit donc faire l’histoire complète et la description détaillée des pi- geons de volière, ce seroit moius l’histoire de la nature que celle de l’art de l'homme ; et c’est par cette raison que nous croyons devoir nous borner ici à une simple énumeration, qui contiendra l'exposition des principales variétés de cette espèce, dont le type est moins fixe et la forme plus variable que dans aucun autre animal. = Le biset! ou pigeon sauvage est la tige pri- mitive de tous les autres pigeons ? : commu- nément il est de la même grandeur et de la 1 Biset, croiseau. Le nom croiseau vient peut- être de croisé , les ailes et la queue du biset étant “croisées de bandes noires ou brunes. : 2 Voyez les planches enluminées, n° 5re. D: UV": PI, G E ON.’ 253. mème forme, mais d’une couleur plus bise que le pigeon domestique ; et c’est de cette. couleur que lui vient son nom : cependant il varie quelquefois pour les couleurs et la gros- seur; car le pigeon dont Frisch a donné la figure sous le nom de co/umba agrestis, n’est qu'un biset blanc à tête et queue rousses ; et celui que le même auteur a donné sous. la dénomination de virago, sive columba montana , n’est encore qu'un biset noir-bleu : c’est ie même. qu'Albin a décrit sous le nom de pigeon ramier, qui ne lui convient pas; et le même encore dont Belon parle sous. le nom de pigeon fuyard, qui lui convient mieux; car on peut présumer que l’origine de cette variété dans les bisets vient de ces. pigeons dont. j'ai parlé, qui fuient et dé. sertent nos colombiers pour se rendre sau-. vages ; d'autant que ces bisets noirs-bleus. nichent non seulement dans les arbres creux, mais aussi dans les trous des bâtimens rui-. nes et Les rochers qui sont dans les forêts, ce qui leur a fait donner par quelques na- turalistes le nom de pigeons de roche ou rocheraies ; et comme ils aiment aussi les terres élevées et Les montagnes, d’autres les Oiseaux, IVe os | 22 :54 HISTOIRE NATURELLE ont appelés pigeons de montagne. Nous ré- marquerons même que les anciensine con= noissoient que cette espèce de pigeon sau- vase, qu’ils appeloient owas ou vinago et qu'ils ne font nulle mention de notre biset, qui néanmoins est le seul pigeon vraiment sauvage, et qui n’a pas passé par l’état de domesticité. Un fait qui vient à l’appui de mon opinion sur ce point, c'est que dans tous les pays où il y a des pigeons domes+ tiques, on trouve aussi des æzas, depuis la _ Suède jusque: dans les climats chauds ;: au lieu que les bisets ne se trouvent pas dans les pays froids, et ne restent que pendant l'été dans nos pays tempérés : ils arrivent par troupes en Bourgogne, en Champagne; et dans les autres provinces septentrionales de la France, vers la fin de février et: au commencement de mars; ils s'établissent dans les bois, y michent dans des creux d'arbre , pondent deux ou trois œufs au printemps, et vraisemblablement font une seconde ponte en été; à chaque ponte ils n’elèvent que deux petits, et s'en retournent dans le.moïs de novembre; ils prénnent leur route du côté du midi, et se rendent probas DU PIGEON. 255 blement en Afrique par l'Espagne pour y passer l'hiver. Le biset ou pigeon sauvage, et l’œænas ou le pigeon déserteur, qui retourne à l'état de sauvage; se perchent, et par cette habi< tude se distinguent du pigeon de muraille, qui déserte aussi nos colombiers, mais qui semble craindre de retourner dans les bois, et ne se perche jamais sur les arbres. Après ces trois pigeons, dont les deux derniers sont plus ou moins près de l’état de nature, vient le pigeon ! de nos colombiers?, qui, comme nous l'avons dit, n’est qu'à demi domestique, et retient encore de son pre- ‘mier instinct l'habitude de voler en troupe : s'il a perdu le courage intérieur d’où dé- pend le sentiment de l'indépendance, il a acquis d’autres qualités qui, quoique moins nobles, paroissent plus agréables par leurs effets. Ils produisent souvent trois fois l'an- née, et les pigeons de volière produisent * En latin, co/umba ; en espagnol, paloma ; en italien, colombo , colomba ; en allemand, 1aube ou fauben; en anglois, dove, common dore, house-piseon. 2 Voyez les planches enluminées, n° 466. #56 HISTOIRE NATURELLE jusqu’à dix et douze fois, au lieu qué le | { biset ne produit qu’une ou deux fois tout . au plus : combien de plaisirs de plus sup- | pose cette différence, sur-tout dans unetes- “pêce qui semble les goûter dans toutes leurs _ nuances, et en jouir plus pleinement qu’au- cune autre! Ils pondent, à deux jours de distance, presque toujours deux œufs, ra- xement trois , ‘et n'élèvent presque jamais que deux petits, dont ordinairement l’un se trouve mâle et l’autre femelle : il y en a même plusieurs, et ce sont les plus jeunes, qui ne pondent qu’une fois; car le produit du printemps est toujours plus nombreux, c'est-à-dire, la quantité de pigeonneaux dans le même colombier plus abondante qu’en automne, du moins dans ces climats. Les meilleurs colombiers où les pigeons se plai- sent et multiplient le plus, ne sont pas ceux qui. sont trop voisins de nos habitations : placez-les à quatre ou cinq cents pas de dis- tance de la ferme, sur la partie la plus éle- vée de votre terrain, et ne craignez pas que cet éloignement nuise à leur multiphcatron; . ils aiment les lieux paisibles, la belle vue, l'exposition au levant, la situation élevée où | | DU PIGEON. 257 _ils puissent jouir des premiers rayons du, soleil. J'ai souvent vu les pigeons de plu- sieurs colombiers situés dans le bas d’un vallon, en sortir avant le lever du soleil pour gagner un colombier situé au-dessus de la colline, et s’y rendre en si grand nombre, que le toit étoit entièrement cou-— vert de ces pigeons étrangers, auxquels les domiciliés étoient obliges de faire place, et quelquefois mème forcés de la céder. C’est sur-tout au printemps et en automne qu’ils semblent rechercher les premières influences —du soleil, la pureté de l'air et les lieux élevés. Je puis ajouter à cette remarque une autre observation, c’est que le peuplement de ces colombiers isolés , élevés et situées haut, est plus facile, et le produit bien plus nombreux que dans les autres colombiers. J'ai vu tirer quatre cents paires de pigeon- neaux d’un de mes colombiers qui , par sa situation et la hauteur de sa bâtisse, etoit élevé d'environ deux cents pieds au-dessus des autres colombiers, tandis que ceux-ci ne produisent que le quart ou le tiers tout au plus, c’est-à-dire, cent ou cent trente paires : il faut seulement avoir soin de 22 À 258 HISTOIRE NATURELLE veiller à l'oiseau de proie , qui fréquente de préférence ces coloimbiers élevés et isoles, et qui ne laisse pas d’inquiéter les pigeons, sans néanmoins eu détruire beaucoup, car il ne peut saisir que ceux qui se séparent de la troupe. éL AS … Après le pigeon de nos colombiers. qui n'est qu'à demi domestique, se présentent les pigeons de volière, qui le sont entière- ment, et dont nous avons si fort favorisé la propagation des variétés, les mélanges et la multiplication des races, qu’elles deman- deroient un volume d'écriture et un autre de planches, si nous voulions les décrire eë les représenter toutes; mais, comme je l'ai déja fait sentir, ceci est plutôt un objet de curiosité et d'art qu’un sujet d'histoire na- turelle , et nous nous bornerons à indiquer les principales branches de cette famille im- meunse, auxquelles on pourra rapporter les rameaux et les rejetons des variétés secon< daires. Les curieux en ce genre donnent le nom de bisets à tous les pigeons qui vont prendre leur vie à la campagne, et qu'on met dans de grands colombiers : ceux qu'ils appellent { DU PIGEON. 25ÿ pigeons domestiques ne se tiennent que dans de petits colombiers ou volières, et ne se répandent pas à la campagne. Il y en a dé plus grands et de plus petits : par exemple, les pigeons culbutans et Les pigeons tournans, qui sout les plus petits de tous les pigeons de volière, le sont plus que le pigeon de colombier ; ils sont aussi plus légers de vol et plus dégagés de corps; et quand ils se mêlent avec les pigeons de colombier , ils perdent l'habitude de tourner et de culbu- tér. IL semble que ce soit l'etat de captivité _ forcée qui leur fait tourner la tête, et qu’elle reprend son assiette dès qu’ils recouvrent leur liberté. Les races pures, c’est-ädire, les variétés principales de pigeons domestiques , avec lesquelles on peut faire toutes les variétés secondaires de‘chacune de ces races, sont, 1°, les pigeons appelés grosses-gorges *, parce qu'ils ont la faculté d’enfler prodigieuse- ment leur jabot en aspirant et retenant l’air; 2°. les pigeons mondains, qui sont:les plus recommandables par leur fécondité, ainsi xY oyez les planches VIII et IX de ce volume. 260 HISTOIRE NATURELLE que les pigeons romains, les pigeons pattus et les nonnains !; 3°. les pigeons-paons?, qui élèvent et étalent leur large queue comme le dindon ou le paon; 4°. le pigeon-cravate ou à gorge frisée *; 5°. le pigeon-coquille hollandois;-6°. le Dee -hirondelle; 7°. le pigeon-carme ; 8°. le pigeon heurté; 9°. les AE suisses ; 10°. le pigeon culbutant ; . le pigeon tournant. | | un race du pigeon grosse-sorge est one sée fes variétés suivantes : . Le pigeon grosse-gorge soupe-en-vin , ts les mâles sont très-beaux, parce qu’ils sont panachés, et dont les femelles ne pa- nachent point. | 2°. Le pigeon gfosse-gorge chamois pana- ché : la femelle ne panache point. C’est à cette variéte qu'on doit rapporter le pigeon de la planche CXLVI de Frisch, que les Allemands appellent #ropf-taube ou kroëüper, et que cet auteur a indiqué sous la dénomi- nation de columba strumosa, seu columb@ æsophago inflato. 1 Voyez la planche X de ce volume, ? Ibid. planche XIII. 3 Jbid. planche XIV. I \ DU PIGEON. 261 3°. Le pigeon grosse-gorge, blanc comme un cygne. - 4°, Le pigeon grosse-gorge blanc, pattu, et à RER ailes qui se croisent sur la queue, dans lequel la boule de la gorge paroît fort détachée. | 5°. Le pigeon grosse-gorge gris panaché, et le gris doux, dont la couleur est douce et uniforme par tout le corps. 6°. Le pigeon grosse-corge gris de‘fer, ra Li pi et à rubans. . Le pigeon grosse-gorge gris piqué, comme argenté. 8°. Le pigeon grosse-gorge jacinthe, d’une couleur bleue ouvragée en blanc. 9°. Le pigeon grosse-sorge couleur de feu : il y a sur toutes ses plumes une barre bleue et une barre rouge, et la plume est termi- née par une barre noire. 10°. Le pigeon grosse-sorge couleur de bois de tri | . Le pigeon grosse-corge couleur de marron, avec es pennes de l'aile toutes blanches, | 12°. Le pigeon grosse-sgorge maurin, d’un beau noir yelouté, avec les dix plumes de » | 262. HISTOIRE NATÜRELLE l'aile blanches comme dans la grossegorge marron : ils 6nt tous deux la bavette ou le mouchoir blanc sous le cou; et daus 0 der- nières races à vol blanc et à grosse gorge, la femelle est semblable au mäle. Au reste, dans toutes les races de grosseaggorges d'ori- gine pure, c’est-à-dire, de couleur uniforme, les dix pennes sont toutes blanches jusqu'à la moitié de l'aile, et on peut regarder ce caractèré comme général. hi 13°. Le pigeon grosse-corge ardoisé, avec le vol blanc et la cravate blanche : la fe- melle est semblable au mâle. Voilà les races principales des pigeons à grosse gorge; mais il y en a encore plusieurs autres moins belles, comme les rouges, les olive, les couleur de nuit, etc. | Tous les pigeons en général ont plus ow moins la faculté d’enfler leur jabot en ins- pirant l’air; on peut de même le faire enfler en soufflant de l'air dans leur gosier : mais cette race de pigeons grosse-scorge ont cette même faculté d’enfler leur jabot si supérieu= _rement, qu’elle doit dépendre d’une confor- mation particulière dans les organes ; ce. jabot, presque aussi gros que tout le reste ) DU PIGEO N. 263 de leur corps, et qu’ils tiennent continuel- lement enflé, les oblige à retirer leur tête, et les empêche de voir devant eux : aussi, pendant qu'ils se rengorgent, l’oiseau de proie les saisit sans qu’ils l’apperçoivent. On les élève donc plutôt par curiosité que pour l'utilité. Une autre race est celle des pigeons mon- dains ; c’est la plus commune, et en même temps la plus estimée, à cause de sa grande fécondité. Le moudain est à peu près d’une moitié plus fort que le biset; la femelle ressemble assez au mâle : ils produisent presque tous les mois de l’année, pourvu qu’ils soient en petit nombre dans la même volière; et il leur faut au moins à chacun trois ou quatre pa- ‘hiers, ou plutôt des trous un peu profonds, formes comme des cases , avec des planches, afin qu’ils ne se voient paslorsqu’ils couvent; car chacun de ces pigeons défend non seule- ment son panier, et se bat contre les autres qui veulent en approcher, mais même il se bat aussi pour tous les paniers qui sont de son Côté. Par exemple, il ne faut que huit paires de = 264 HISTOIRE NATURELLE U ces pigeons mondains dans un espace quarré de huit pieds de côté; etiles personnes qui en ont éleyé, assurent qu'avec six paires on pourroit avoir tout autant de-produit : plus on augmente leur nombre dans un espace donné, plus il y a de Combat, de tapage et d'œufs cassés. Il y a dans cette race assez sou— vent des mâles stériles, et aussi des femelles infécondes et qui ne pondent pas. - Ils sont en état de produire à huit cu neuf mois d’äge; mais ils ne sont en pleine ponte qu’à la troisième année : cette pleine ponte dure jusqu’à six ou sept ans } après quoi le nombre des pontes diminue; quoiqu'il y en ait qui pondent encore à l’âge de douze ans. La ponte des deux œufs se fait quelquefois en vingt-quatre heures, et dans l'hiver en deux jours ; en sorte qu’il y,a un intervalle de” temps différent, suivant la saison, entre la: ponte de chaque œuf. La femelle tient chaud: son premier œuf, sans néanmoins le couver assidument ; elle ne commence à. couver. constamment qu'après la ponte du second: œuf : l’incubation dure ordinairement dix- huit jours, quelquefois dix-sept, sur-tout em eié, et jusqu'à dix-neuf ou vingt jours en \ Qx : DU PIGEON. 46 hiver. L'attachement de la femelle à ses œufs est si grand, si constant, qu'on en a vu souf- frir les incommodités les plus grandes et les douleurs les plus cruelles , plutôt que de les quitter : une femelle entre autres, dont les pattes gelèrent et tombérent, et qui, mal- gré cette souffrance et cette perte de membres; continua sa couvée jusqu'à ce que ses petits fussent éclos ; ses pattes avoient gelé, parce que son panier étoit tout près de la fenêtre. de sa volière. Le mâle, pendant que sa femelle couve, se tient sur le panier le plus voisin; et au mo- ment que, pressée par le besoin de manger, lle quitte ses œufs pour aller à la trémie, le mâle, qu’elle a appelé auparavant par un _petit roucoulement, prend sa place, couve ses œufs ; et cette incubation du mâle dure deux ou trois heures chaque fois, et se renouvelle ordinairement deux fois .en vingt-quatre heures. L On peut réduire jet variétés de la race des. pigeons mondains à trois pour, la grandeur, qui toutes ont pour caractère commun un filet rouge autour des yeux. 1°. Les premiers mondains sont des oiseaux 25 1 266 HISTOIRE NATURELLE lourds, et à peu près gros comme de petites poules : on ne Les recherche qu’à cause de leur grandeur, car ils ne sont pas bons PS Ja A Can | “4 2°. Les bagadaïs sont de gros mondains avec un tubercule au-dessus du bec en forme d'uné petite morille, et un ruban rouge beaucoup plus large autour des yeux, c’est-à-dire, une seconde paupière charnue rougeûtre, qui. leur tombe même sur les yeux lorsqu'ils sont vieux, et les empèche alors de voir. Ces pis geous ne produisent que diflicilement et en petit nombre. Les bagadais ont le bec courbé et crochu, et ils présentent plusieurs variétés; il y en a de blancs, de noirs, de FOEESS de mi- nimes, etc. à ‘ : 3°. Le pigeon espagnol, qui est éncore un. pigeon mondain, aussi gros qu’une poule, et qui est très-beau ; il diffère du bagadais en ce qu'il n’a point de morille au-dessus du bec, que la seconde paupière chärnue est moins saillante, et quelé bec est droit au lieu d'être courbé : on le méle avec le'baga— dais, et le produit ést un très-sros et très grand pigeon. DU PIGEO NN: 267 4*, Le pigeon turc, qui a, comme le baga- dais, une grosse excroissance au-dessus du bec, avec un ruban rouge qui s'étend depuis le bec autour des yeux. Ce pigeon turc est très-gros, huppé, bas de cuisses, large de corps et de vol : il y en a de minimes ow bruns presque noirs, tels que celui qui est représenté dans la planche CXLIX de Frisch; d’autres dont la couleur est gris de fer, gris de lin, chamois et soupe-en-vin. Ces pigeons sont très-lourds, et ne s’écartent pas de leur volière. 5°. Les pigeons romains, qui ne sont pas tout-à-fait si grands que les turcs, mais qui ont le vol aussi étendu , n’ont point de huppe : il y en a de noirs, de minimes et de tachetés *. : Ce sont là les plus gros pigeons domes- tiques ; 1l y en a d’autres de inoyenné gran- deur, et d’autres plus petits. Dans les pigeons pattus, qui ont les pieds couverts de plumes jusque sur les ongles, on distingue le pattt sans huppe, dont Frisch a donné la figure, planche CXLV, sous la dénomination de * Voyez les planches enluminées, n° rro. “ \ ; / 68 HISTOIRE NATURELLE . trummel taube en allemand, et de columbeæ éympanisans en latin, pigeon-tambour en françois; et le pattu huppé, dont le même auteur a donné la figure, planche CXIIW, sous le nom de montaube en allemand, e6 sous la dénomination latine co/umba mens- 1rua, seu cCristata pedibus plumosis. Ce pi- geon pattu, que l’on appelle pigeon tambour, se nomme aussi pigeon-glouglou, parce qu’il répète continuellement ce son, et que sa Voix imite le bruit du tambour entendu de loin. Le pigeon pattu huppé est aussi appelé pr- . geon de mois, parce qu’il produit tous les mois, et qu’il n’attend pas que ses petits soient en état de manger seuls pour couver de nouveau. C’est une race recommandable par son utilité, c’est-à-dire, par sa grande fécondité, qui cependant ne doit passe comp- ter de douze fois par an, mais communément de huit et neuf pontes; ce qui est encore un très-srand produit. | Dans les races moyennes et petites de pi- geons domestiques, on distingue le pigeon- nonnain, dont il y a plusieurs variétés; sa- voir, le soupe-en-vin, le rouge panaché, le ehamois panaché, mais dont les femelles de I DU PIGEON. 169 tous trois ne sont jamais panachées. IL y a äussi dans la race des nonnains une variété qu'on appelle pigeon maurin, qui est tout noir, avec la tête blanche et le bout des ailes aussi blanc; et c’est à cette variété qu'on doit rapporter le pigeon de la planche CL de - Frisch, auquel il donne en allemand le nom de sckleyer ou parruquen taube, et en latin, columba galerita, et qu’il traduit en françois par pigeon coiffé : mais en général tous les nonnains, soit maurins ou autres, sont coif- fés , ou plutôt ils ont comme un demi-capu- chon sur la tète, qui descend le long du cou, et s'étend sur la poitrine en forme de cra- vate composée de plumes redressées. Cette variété est voisine de la race du pigeon grosse- gorge ; car ce pigeon coiffe est de la même grandeur , et sait aussi enfler un peu son jabot. Il ne produit pas autant que les autres nonnains, dont les plus parfaits sont tout blancs , et sont ceux qu’on regarde comme Jles meilleurs de la race : tous ont le bec très- court; ceux-ci produisent beaucoup, mais les pigeonneaux sont très-petits. Le pigeon-paon est un peu plus gros que le pigeon-nonnain : on l'appelle pigeoz-paor, 23 + 279 HISTOIRE NATURELLE parce qu’il peut redresser sa queue et l'étaler comme le paon. Les plus beaux de cette race ont jusqu'à trente-deux plumes à la queue, tandis que les pigeons d'autres races n’en ont que douze : lorsqu'ils redressent leur queue, ils la poussent en avant; et comme ils re- tirent en même temps la tête en arrière, elle touche à la queue. Ils tremblent aussi pen- dant tout le temps de cette opération, soit par la forte contraction des muscles, soit par quelque autre cause; car il y a plus d’une race de pigeons trembleurs *. C'est ordinaire- ment quand ils sont en amour qu’ils étalent ainsi leur queue; mais ils le font aussi dans d’autres temps. La femelle relève et étale sa queue comme Le mâle, et l'a tout aussi belle. Il y en a de tout blancs, d’autres blancs avec * On connoïît, en effet, un pigeon trembleur, différent du pigeon-paon, en ce quil n’a pas la queue si large à beaucoup pres. Le pigeon paon a été indiqué par Willughhy et Ray, sous la dénomi- nation de columba tremula laticauda ; et le pigeon trembleur , sous celle de columba tremula angus- licauda seu acuticauda : celui-ci, sans relever-ou étaler sa queue, tremble, dit-on, presque centi- nuellement, = DU BIG HO NA": 248 la tête et la queue noires; et c’est à cette se- conde variété qu'il faut rapporter le pigeon de la planche CLI de Frisch, qu’il appelle em allemand pfau-taube ou Zumreschwantz, et en latin co/umba caudata. Cet auteur re marque que , dans le même temps que le pigeon-paon étale sa queue, il agite fière- ment et constamment sa tête et son cou, à peu près comme l'oiseau appelé zorcol. Ces pigeons ne volent pas aussi bien que les autres ; leur large queue est cause qu’ils sont souvent emportes par le vent, et qu’ils tom- bent à terre : ainsi on les élève plutôt par curiosité que pour l'utilité. Au reste, ces pigeons, qui par eux-mêmes ne peuvent faire de longs voyages, ont été transportés fort loin par kes hommes. Il y a aux Philip- pines, dit Gemelli Carreri, des pigeons quE relèvent et étalent leur queue comme le paon. | Les pigeons polonois * sont plus gros que les pigeons-paons ; ils ont pour caractère d’avoir le bec très-gros et très-court, les yeux bordés d’un large cercle rouge , les jambes irès-basses : il y en a de différentes couleurs, * Voyez la planche XI de ce volume. j 292 HISTOIRE NATURELLE beaucoup de noirs, des roux, des chamois, des gris piqués et de tout blancs, Le pigeon-cravate est l’un des plus petits pigeons; il n’est guère plus gros qu’une tour- terelle; et en les appariant ensemble, ils % produisent des mulets ou métis. On distingue le pigeon-cravate du pigeon nonnain, en ce que le pigeon-cravate n’a point de demi-capu- chon sur la tête et sur le cou, et qu'il n’a précisément qu'un bouquet de plumes qui semblent se rebrousser sur la poitrine et sous la gorge. Ce sont de trés-jolis pigeons, bien faits, qui ont l’air très-propre, et dont il y en à de soupe-en-vin, de chamois, de pana- chés, de roux et de gris, de tout blancs et de tout noirs , et d’autres blancs avec des man- teaux noirs : c’est à cette dernière variété qu'on peut rapporter le pigeon représenté planche CXLVII de Frisch , sous le nom alle- mand #o#wchen, et la dénomination latine columba collo hirsuto. Ce pigeon ne s’apparie pas volontiers avec les autres pigeons, et n'est pas d’un grand produit : d'ailleurs il est petit, et se laisse aisément prendre par l’oi- seau de proie; c’est par toutes ces raisons qu'on n'en élève guère. DU PIGEON. 273 Les pigeons qu’on appelle coguille Lollan- dois, parce qu’ils ont derrière la tête des plumes à rebours qui forment comme une espèce de coquille, sont aussi de petite taille. Ils ont la tête noire, le bout de la queue et le bout des ailes aussi noirs, tout le reste du corps blanc. Il y en a aussi à tête rouge, à tête bleue et à tête et queue jaunes ; et ordi- nairement la queué est de la même couleur que la tête, mais le vol est toujours tout blanc. La première variété, qui a la tête noire, ressemble si fort à l’hirondelle de mer, que quelques uns lui ont donné ce nom, avec d'autant plus d’analogie, que ce pigeon n’a pas le corps rond comme la plupart des autres, mais alongé et fort dégagé. Il y a, indépendamment des tête et queue bleues qui ont la coquille, dont nous ve- nons de parler , d'autres pigeons qui ont simplement le nom de féfe et queue bleues, d’autres de zéte et queue noires, d’autres de déte et queue rouges, et d'autres encore, tête el queue Jaunes, et qui tous quatre ont l'extrémité des ailes de la même couleur que la tête; ils sont à peu près gros comme les pigeons paons : leur plumage est très-propra et bien arrangé. # | 274 HISTOIRE NATURELLE Il y en a qu'on appelle aussi pigeons-hi- . rondelles, qui ne sont pas plus gros que des tourterelles, ayant le corps alongé de même, et le vol très-léger : tout le dessous'de leur corps est blanc, et ils ont toutes les parties supérieures du corps, ainsi que le cou, la tête et laqueue, noires, ou rouges, ou bleues, ou jaunes , avec un petit casque de ces mêmes couleurs sur la tête: mais le dessous de la tête est toujours blanc comme le dessous du cou. C’est à cette variété qu’il faut rapporter le pigeon cuirassé de Jonston et de Willugh- by, qui a pour caractère particulier d'avoir lés plumes de la tête, celles de la queue et les pennes des ailes, toujours de la même couleur, et le corps d’une couleur différente; par exemple, le corps blanc, et la tête, la queue et les ailes noires, ou de quelque autre couleur que €e soit. Le pigeon-carme, qui fait une autre race, est peut-être le plus bas et le plus petit de tous nos pigeons ; il paroît accroupi comme l'oiseau que l’on appelle /e crapaud volant; il est aussi très-pattu, ayant les pieds fort courts et les plumes des jambes très-longues. Les femelles et les mâles se ressemblent, DU PIGEON. 275 ainsi que dans la plupart des autres races : on y compte aussi quatre variétés, qui sont des mêmes que dans les races précédentes, savoir, les gris de fer, les chamois, les soupe- en-vin et les gris-doux ; mais ils ont tout le dessous du corps et des ailes blanc, tout le dessus de leur corps étant des couleurs que nous venons d'indiquer. Ils sont encore remarquables par leur bec, qui est plus petit que celui d’une tourterelle; et ils ont aussi une petite aigrette derrière la tête, qui pousse en pointe comme celle de l’alouette huppée. | Le pigeon-tambour ou g/ovglou, dont nous avons parlé, que l’on appelle ainsi parce qu'il forme ce son g/ouglou , qu'il répète fort souvent lorsqu'il est auprès de sa fe- melle , est aussi un pigeon fort bas et fort pattu; mais il est plus gros que le pigeon- carme, et à peu près de “ taille du pigeon polonois. _ Le pigeon heurté, c’est-à-dire, masqué comme d’un coup de pinceau noir , bleu, jaune ou rouge, au-dessus du bec seulement et jusqu'au milieu de la tête, avec la queue de la même couleur, et tout le reste du corps 276 HISTOIRE NATURELLE | blanc, est un pigeon fort recherché des cu- rieux. Il n’est point pattu, et est de la gTOS- _seur des pigeons mondains ordinaires. Les pigeons suisses sont plus petits que. les pigeons ordinaires, et pas plus:gros que les pigeons bisets ; ils sont de même tout aussi légers de vol. Il y en a de plusieurs sortes; savoir, des panachés de rouge, de bleu , de jaune, sur un fond blanc satiné, avec un collier qui vient former un plastron sur la poitrine, et qui est d’un rouge rem- bruni. Ils ont souvent deux rubans sur les ailes, de la même couleur que celle du plas- tron. | 11 y a d’autres pigeons suisses qui ne sont. point panachés; et qui sont ardoises de cou- leur uniforme sur tout le corps, sans collier ni plastron; d’autres qu’on appelle co/liers. jaunes jaspés, colliers jaunes maillés ;. d’au- tres, colliers jaunes fort maillés, etc. parce. qu'ils portent des colliers de cette couleur. Il y a encore dans cette race de pigeons suisses une autre variété qu'on appelle pi- geor azuré, parce qu'il est d’une couleur plus bleue que les ardoisés. : Le pigeon culbutant est encore un des plus V4 { (4 f DU PIGEON. ‘ 2y petits pigeons. Celui que M. Frisch a fait représenter, planche CXLVIIT, sous les noms de éummel taube, tumler columba gestuosæ seu gesticularia, est d’un roux brun; mais il y en a de gris et de variés de roux et de gris. IL tourne sur lui-même en volant, comme un corps qu'on jetteroit en l'air, eë c'est par cette raison qu’on l’a nommé pi- geon culbutant. Il semble que tous ses mou- vemens supposent des vertiges qui, comme _je l'ai dit, peuvent être attribués à la cap- _ tivité. Il vole très-vite, s'élève le plus haut de tous, et ses mouvemens sont très-précipi- tés et fort irréguliers. Frisch dit que comme par ses mouvemens il imite en quelque fa- çon les gestes et les sauts des danseurs de corde et des voltiseurs, on lui a donné le nom de pigeon pantomine, co/umba ges- tuosa. Au reste , sa forme est assez semblable à celle du biset, et l’on s’en sert ordinai- rement pour attirer les pigeons des autres colombiers , parce qu'il vole plus haut, plus loin et plus long-temps que 1 autres , et qu'il échappe plus aisément à iéiu de proie. | 11 en est de même du pigeon tournant , 24 258 HISTOIRE NATURELLE que M. Brisson, d'après Willughby,, a ap= pelé Ze pigeon batteur. Il tourne en rond lorsqu'il vole, et bat si fortement des ailes, qu'il fait autant de bruit qu’une claquette, et souvent il se rompt quelques plumes de Vaile par la violence de ce mouvement, qui semble tenir de là convulsion. Ces pigeons . tournans ou batteurs sont communément _gris, avec des taches noires sur les ailes. Je ne dirai qu’un mot de quelques autres variétés équivoques ou secondaires dont les nomenclateurs ont fait mention, et qui res- sortissent sans doute aux races que nous venons d'indiquer, mais qu'on auroit quel: que peine à y rapporter directement et sû- xement, d’après les descriptions de ces au- 1 teurs. Tels sont, par exemple, 1°. lé pigeon de Norvégse, indiqué par Schweuckfeld , ‘qui ést blanc comme neige, et qui pourroit bien être un pigeon pattu huppé plus gros "1° les autres : | æ, Le pigeon de Crète, suivant Add vande , ou de Barbarie, selon Willughby, qui a le bec très-court et les yeux entourés d'uue large bande de peau nue , le plumage bleuâtre et marqué de deux taches noirâtres sur chaque aile : DUPVT' IG ON. 279 3°. Le pigeon frisé de Schwenckfeld et d'Aldrovande, qui est tout blanc et frisé sur tout le corps : 4°, Le pigeon messager de Willughby, qui ressemble beaucoup au pigeon turc, tant par son plumage brun que par ses yeux entourés d’une peau nue, et ses narines couvertes d’une membrane épaisse; on s’est, dit-on, servi de ces pigeons pour porter promptement des lettres au loin, ce qui leur a fait donner le nom de messagers : 5°. Le pigeon cavalier de Willughby et d'Albin, qui provient, dit-on, du pigeon grosse-gorge et du pigeon messager, partici- pant de l’un et dé l’autre; car il a la faculté d’enfler beaucoup son jabot comme le pigeon grosse-gorge, et 11 porte sur ses narines des membranes épaisses , comme le pigeon imes- sager : mais il y a apparence qu’on pourroit également se servir de tout autre pigeon pour porter de petites choses, ou plutôt les rap- porter de loin; il suffit pour cela de les sépa- rer de leur femelle, et de les transporter dans le lieu d’où l’on veut recevoir des nouvelles : ils ne manqueront pas de revenir auprès de _ leur femelle dès qu’ils seront mis en liberté, 28e HISTOIRE NATURELLE On voit que ces cinq races de pigeons ne sont que des variétés secondaires des pre— mières que nous avons indiquées d’après les observations de quelques curieux qui ont passé leur vie à élever des pigeons, et parti- culièrement du sieur Fournier, qui en fait commerce , et qui a été chargé, pendant quelques années, du soin des volières et des basses-cours deS. À. S. monseigneur le comte de Clermont. Ce prince, qui de très-bonne heure s’est déclaré protecteur des arts, tou- jours animé du goût des belles connoissances, a voulu savoir jusqu'où s’étendoient en ce genre les forces de la nature : on a rassem- blé, par ses ordres, toutes les espèces, toutes les races connues des oiseaux domestiques ; on les a multipliées et variées à l’infini ; l’in- telligence , les soins et la culture ont ici, comme en tout, perfectionné ce qui étoit connu, et développé ce qui ne l’étoit pas; on a fait éclore jusqu'aux arrière-germes de la nature ; on a tiré de son sein toutes les productions ultérieures qu’elle seule et sans aide n’auroit pu amener à la lumière : en cherchant à épuiser les trésors de sa fécon- dité, on a reconnu qu’ils étoient inépui- DU PIGEON. 286 sables , et qu'avec un seul de ses modèles , c’est-à-dire, avec une seule espèce, telle que celle du pigeon ou de la poule, on pouvoit faire un peuple composé de mille familles différentes , toutes reconnoissables , toutes nouvelles , toutes plus belles que l'espèce dont elles tirent leur première origine. Dès le temps des Grecs on connoissoit Les pigeons de volière, puisqu’Aristote dit qu’ils produisent dix et onze fois l’année, et que ceux d'Égypte produisent jusqu’à douze fois. L'on pourroit croirenéanmoins que les grands colombiers où les pigeons ne produisent que deux ou trois fois par an, n’étoient pas fort eu usage du temps de ce philosophe : il com- pose le genre co/umbacé de quatre espèces, savoir ; le ramier (palumbes), la tourterelle (turtur); le biset (sirago), et Le pigeon ( co” lumbus}); et c’est de ce dernier dont il die que le produit est de dix pontes par an : or ce produit si fréquent ne se trouve que dans quelques races de nos pigeons de volière. Aristote n’en distingue pas les différences, et ne fait aucune mention des variétés de ces pigeons domestiques : peut-être ces variétés m'existoient qu'en petit nombre; mais il 24 28 HISTOIRE NATURELLE aroit qu’elles s’étoient bien multipliées du P q UP temps de Pline*, qui parle des’ grands pi- geons de Campanie et des curieux en cegenre, qui achetoient à un prix excessif une paire de beaux pigeons, dont ils racontoient l’ori- gine et la noblesse, et qu’ils élevoient dans des tours placées au-dessus du toit de leurs maisons. Tout ce que nous ont dit les an- ciens au sujet des mœurs et des habitudes des pigeons, doit donc se rapporter aux pigeons de volière plutôt qu’à ceux de nos colom- biers, qu’on doit regarder comme une espèce moyenne entre les pigeons domestiques et les ) | * Columbarum amore insaniunt multi ; super tecta exædificant turres 1is , nobilitatemque sin- gularum et originés narrant vetcres. Jam exem- plo L. Axius eques romanus, ante bellum civile Pompeianum., denartis quadringentis singula paria venditavit, ut M. Varro tradit; quin et patriam nobiliiavere , Campanid grandissimæ proventre existimatæ. ( Plin Hist. natur. lb. X, cap- 37.) | Les quatre cents deniers romains fort soixante- dix livres de notre monnoie. La manie pour les beaux pigeons est donc encore plus srande aujour- d’hui que du temps de Pline, car nos cürieux les payent beaucoup plus chere DU PIGEON. 203 pigeons sauvages , et qui participent en effet des mœurs des uns et des autres. Tous ont de certaines qualités qui leur sont communes : l'amour de la société, l’atta- chement à leurs semblables, la douceur dés mœurs ; la chasteté, c’est-à-dire, la fidélité réciproque , et l'amour sans partage du mâle et de la femelle; la propreté, le soin de soi- même, qui suppose l'envie de plaire; l’art de se donner des graces, qui le suppose encore plus ; les caresses tendres , les mouvemens doux, les baisers timides, qui ne deviennent intimes et pressans qu’au moment de jouir; ce moment même ramené quelques instans après par denouveaux desirs, de nouvelles ap- proches également nuancées, également sen- ties; un feu toujours durable, un goûttoujours constant, et, pour plus grand bien encore, la puissance d’y satisfaire sans cesse; nulle humeur, nul dégoût, nulle querelle; tout le temps de la vie employé au service de l'amour et au soin de ses fruits; toutes les fonctions pénibles également réparties ; le mâle aimant assez pour les partager et même se charger des soins maternels, couvant régulièrement à son tour et les œufs et les petits, pour en LL .284 HISTOIRE NATURELLE. épargher Ja peine à sa compagne, pour mettre entre elle et lui cette égalité dont dépend le bonheur de toute union durable : quels mo- dèles pour l’homme, s’il pouvoit ou savoit les imiter! | OISEAUX ÉTRANGERS QUI ONT RAPPORT AU PIGEON. Ir y a peu d'espèces qui soieñt aussi généra- lement répandues que celle du pigeon; comme il a V’aile, trés-forte et le vol soutenu, il peut faire aisément de longs voyages : aussi la plupart des races sauvages ou domestiques se trouvent dans tous les climats. De l'Égypte jusqu’en Norvége, on élève des pigeons de . volière; et quoiqu'ils prospèrent mieux dans les climats chauds , ils ne laissent pas de réussir dans les pays froids, tout dépendant des soins qu'on leur donne; et ce qui prouve que l’espèce en général ne craint ni le chaud ni le froid, c'est que le pigeon sauvage ou biset se trouve également dans presque toutes les contrées des deux continens. Le pigeon brun de la nouvelle Espagne, indiqué par Fernandès sous le nom mexi- cain cehoilotl, qui est brun par-tout, ex- _ cepté la poitrine et Les extrémités des ailes, X 286 HISTOIRE NATURELLE qui sont blanches, ne nous paroît être qu’une variété du biset. Cet oiseau du Mexique a le tour des yeux d’un rouge vif, l'iris noir et les pieds rouges. Celui que le mème auteur indique sous Le nom de Æoëflotl, qui est brun, marqué de taches noires, n’est vraisembla- blement qu’une variété d’âge ou de sexe du précédent; et un autre du même pays, ap- pelé #acahoilotl, qui est bleu sur toutes les parties supérieures, et rouge sur la poitrine et le ventre, n’est peut-être encore qu'une varieté de notre pigeon sauvage, et tous trois me paroissent appartenir à l’espèce de notre pigeon d'Europe. ; Le pigeon indiqué par M. Brisson , sous le nom de pigeon violet de la Martinique , et qui est représenté * sous ce même nom de pigeon de la Martinique, ne nous paroît être qu'une très-légère variété de notre pigeon commun. Celui que ce mème auteur appelle simplement pigeon de la Martinique, et qui est représenté* sous la dénomination de pi geon roux de Cayenne, ne forment mi l’un ni l’autre des espèces différentes de celle de 1 Voyez les planches enluminées, n° 162. # Jbid. n° rar. DES OISEAUX ÉTRANGERS. . 287 notre pigeon; il y a même toute apparence que le dernier n’est que la femelle du pre- mier , et qu'ils tirent leur origine de nos pi- geons fuyards. On les appelle improprement perdrix à la Martinique, où il n’y a point de vraies perdrix : mais ce sont des pigeons qui ne ressemblent à la perdrix que par la cou- leur du plumage, et qui ne différent pas assez de nos pigeons, pour qu'on doive leur donner un autre nom; et comme l’un nous est venu de Cayenne et l’autre de la Martinique, on peut en inférer que l'espèce est répandue dans tous les climats chauds du nouveau continent. Le pigeon décrit et dessiné par rM. Edwards, planche CLXXVT, sous la dénomination de pigeon brun des Indes orientales, est Ge la même grosseur que notre pigeon biset ; et comme il n’en diffère que par les couleurs, on peut le regarder comme une varielé pro-: duite par l'influence du climat. Il est remar- quable , en ce que ses yeux sont entourés: d’une peau d’un beau bleu, dénuée de plumes, et qu'il relève souvent et subitement sa queue , sans cepeudant no à comme le pigeon- paon: 288 HISTOIRE NATURELLE IL en est de même du pigeon d’ Amérique 5 donné par Catesby sous le nom de pigeon de passage, et par Frisch sous celui de co— _ dumba americana, qui ne diffère de. nos pi- geons fuyards et devenus sauvages que par les couleurs et par les plumes de la queue qu il a plus longues; ce qui semble le rappro- cher de la tourterelle : mais ces différences ne nous pare nan pas suffisantes pour en faire une espèce distincte et séparée de celle de nos pigeons. Il en est encore de même du pigeon indi-= qué par Ray, appelé par les Anglois pigeon- perroquet, décrit ensuite par M. Brisson, et que nous avons fait représenter * sous la dé { nomination de pigeon verd des Philippines. Comme il est de la même grandeur que notre pigeon sauvage ou fuyard, etqu'iln’en diffère que par la force des couleürs, ce qu’on peut attribuer au climat chaud, nous ne le regar- derons que comme une variété dans l'espèce. de notre pigeon. ie Il s’est trouvé, dans le Cabinet du roi, un oiseau , sous le nom de pigeon verd d'Am- * Voyez les planches enluminées , n° 158. DES OISEAUX ÉTRANGERS. 289 boine, qui n’est pas celui que M, Brisson a donné sous ce nom, et que nous avons fait représenter *. Cet oiseau est d’une race très- e— voisine de la précédente, et pourroit bien même n’en être qu'une variété de sexe ou d'âge. | Le pigeon verd d’'Amboine, décrit par M. Brisson, est de la grosseur d’une tourte- relle; et, quoique différent par la distribu- tion des couleurs de celui auquel nous avons donné le mème nom, il ne peut cependant être regardé que comme une autre variété de l'espèce de notre pigeon d'Europe, et il y a toute apparence que le pigeon verd de l'ile Saint-Thonas, indiqué par Marcgrave, qui est de la même grandeur et figure que notre pigeon d'Europe, mais qui en diffère, ainsi que de tous les autres pigeons , par ses pieds couleur de safran, est cependant encore une variété du pigeon sauvage. En général, les pigeons ont tous les pieds rouges ; il n’y a de difference que dans l'intensité ou la viva- cité de cette couleur, et c’est peut-être par maladie, ou par quelque autre cause acci- dentelle, que ce pigeon de Marcgrave les * Voyez les planches enluminées, ne 163. Oiseaux, AVe 28 290 HISTOIRE NATURELLE avoit jaunes; du reste il ressemble beaucoup aux pigeons verds des Philippines et d'Am= boine de nos planches enluminées. Théve— not fait mention de ces pigeons verds dans. les termes suivans : « Il se trouve aux Indes, «à Agra, des pigeons tout verds, et qui ne. « diffèrent des nôtres que par cette couleur. « Les chasseurs les prennent aisément avec « de la plu. » | Le pigeon de la Jamaïque, indiqué par Hans Sloane, qui est d’un brun pourpré sur. le corps, et blanc sous le ventre, et dont. la grandeur est à peu près la même que celle 1 de notre pigeon sauvage, doit être regarde. comme une simple variété de cette espèce, : d'autant plus qu’on ne le retrouve pas à la Jamaïque en toutes saisons, et qu’il n’y est que comme oiseau de passage. Un autre qui se trouve dans le même pays de la Jamaïque, et qui n’est encore qu'une variété de notre pigeon sauvage, C’est celui | qui a été indiqué par Hans Sloane, et en- suite pat Catesby, sous la dénomination de pigeon à la couronne blanche. Come il est. de la même orosseur que notre pigeon sau- vage, et qu’il niche et multiplie de même ME en Sel , , : L'hbazin rh c:rnatmos Les perdrix rouges: + La pe de où ve TE l'erécque; 158000 sl no Çà La perdrix rouge d'Europe, ot 2 La perdrix rouge-blanche , AE Le francolin, 176 PR NC CIE Le bis-ercot, 085 urios Toul : EG în Le gorve- ubéte et la perdrix ronge Afriquel 186. Oiseaux étran gers qui ont rapport aux perdrix; 188. La perdrix rouge de Barbare, 1bid. La perdrix de roche, ou de Ja see 189 La perdrix perlée dé la Chine, 241d. | La perdrix de la nouvelle Angleterre! r90. FE. 7 à / T A 7 L E, 327 La caille, 1926 4 Le chrokiel, ou grande caïlle de de Pologne, 223, La caille blanche, 224. 12€ La caille des îles Malouines, 225. La fraise, ou caille de la Chine, 226. Le turnix, ou caille de Madagascar , 228 Le réveil-matin, ou la caille de Java, 229. Oiseaux étrangers qui- paroiïssent avoir du rapport avec les perdrix et avec les cailles, 232. Les colins, 1h14. Le zonécolin , 236. Le grand colin, 2014. Le cacolin, 237. Le coyolcos , 1b1d. Le colenicui, 238. L’ococolin, ou perdrix de montagne du Mexi- que, 24r. Le pigeon, 243. Oiseaux étrangers qui ont rapport au pigeon, 285. NX : Le ramier, 292. Oiseaux étrangers qui ont rapport au ramier, 300: Le founingo | 302. Le Hent 303. La Pntedles 1308. Go FE Le «7 FRS 28 DABRR ON à Oiseaux étrangers ie ont sp à. jan tovae , xeHE 3, 315... ‘fe fourocco s do La tourtelette ; z6:de. . 2oft softs Le turvert, 319... Le + stiTée: to À La iourte., Smet 11 09 Un Le cocotzin,, 323% æht “ 2 -4 tes lust, pont: per 1 DE L'IMPRIMERIE DE PLASSAN: | AR A PA a ONE 7 = > K , a) Va" M \ # | As ù 1 WA ME He à | Eve (l ANNE TC Wa ver PARA DLL 3 9088 00769 6701