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Aa uoO ti 4 OU 8 ne er Eat ciné & Esp si ni S US ÿ à Æc: à 4 w e , : A rtf | n # - ee pe \ IHM 4 ; Pt Per): AU à 1j JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. JANVIER AN 1874. DISCOURS PRÉLIMINAIRE, Par J.-C. DELAMÉTHERIE. LATE le vingt-troisième des Discours préliminaires, ou Rapports généraux sur les progrès de l'esprit humain , que je publie chaque année dans le premier Cahier de ce Jour- nal (1). Ces Rapports ont été accueillis favorablement , à cause de leur utilité, et parce que j'y expose d'une manière impartiale les faits nouvellement découverts dans l’année, en rendant justice à ceux qui en ont enrichi la masse de nos connoissances. Chacun voit avec plaisir l'état où est la science, et applaudit aux nobles efforts qu'on fait pour l'avancer; on est étonné des progrès immenses qu'elle a faits pendant cette époque de quelques années. (1) J’ai été chargé, en mai 17°5 , de ce Journal, qui est devenu ma pro- riété. Dans le cahier de janvier 1786 , j'imprimai le premier de ces Discours, pacte: 1e C EE Rp P et j'ai continué chaque année. 6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE C'est qu'on a suivi constamment la vraie méthode de l'a- vancer, celle de rechercher de nouveaux faits. Descartes l’avoit indiqué, en rejetant la méthode qu'on suivoit avant lui, et que quelques personnes cherchent à faire revivre aujour- d'hui, celle de s'en rapporter à l'autorité dun maitre, méthode de l'école de Pythagore, dans laquelle on disoit: le anaïître l'a dit, et qui a eu des résultats si funestes. Nous avons vu que dans la renaissance des sciences, ceux qui leur firent faire de si grands progrès, n'y parvinrent que par la voie de l'expérience et de l’observation. Il est à craindre qu’on ne s’écarte de cette route, qui a procuré de si grands succès; quelquessavans abandonnent l'expérience, et veulent tout soumettre au calcul. Ce n'est pas par le calcul, que Franklin, par exemple, a démontré que le tonnerre et tous les phénomènes qui l’accompagnent, sont des phénomènes électriques. Ce n'est pas par le calcul, que Montgolfier a découvert les aérostats. Ce n'est pas par le calcul, que les physiciens du dernier siècle ont enrichi la science de si belles découvertes sur les gaz, que les chimistes ont découvert par leurs savantes analyses, un si grand nombre de nouvelles substances ter- reuses, métalliques... Ce n'est pas par le calcul, que le galvanisme nous a appris des faits si inattendus. Na ° Dans l'art des expériences on ne peut pas suivre de meïl- leure suéthode que celle de Priestley. Dans ses nombreux travaux, il notoittousles faits nouveaux qui se présentoient à lui, et les décrivoit avec exactitude, sans chercher à les faire plier à aucun système: aussi les a-t-on trouvés constamment très-exacts. Lorsque les faits ont été constatés par un assez grand nombre d’expériences, le physicien peut les livrer au ma- thématicien pour en calculer les effets. Les brillantes découvertes qu'on fait chaque jour avec 12 pile de Volta, étendent de plus en plus nos connoissances, et tout fait présumer qu'elles produiront les plus grands changemens dans les théories générales de la science. Les alkalis et les substances terreuses paroissent être des oxides métalliques. L'alkali volatil, où ammoniaque composé de nitrogène (ou d’azote) et d'hydrogène (et peut-être d'oxigène ET D'HISTOIRE NATURELLE, 7 suivant Davy), peut être également converti en substance métalloïde ou arnmonium : d'où l’on peut conclure que tous les corps solides, les terres, les métaux, les alkalis, le soufre. .., peuvent être composés de fluides aériformes, l'oxi- gène, le nitrogène , l'hydrogène ,et de fluides éthérés, tels que le fluide galvanique , le feu, le fluide lumineux. C'est ce qu’on peut induire d’une expérience de Davy qui, avec trois substances très-volatiles , l’acide oxi-muriatique, le phos- phore et l’ammoniaque , a composé une poudre blanche, qu'il n’a pu ensuite décomposer. L'air pur, auquel on avoit donné le nom de gaz oxigène, est alkalisène, géogène...; donc il n'est ni le principe des acides , ni celui des alkalis , ni celui des terres...; mais nous développerons plus en détail toutes ces intéressantes vérités. ; DES MATHEMATIQUES. Les Mathématiques font des progrès continuels entre les mains de Lagrange. Après sa Mécanique analytique, il à donné sa Théorie des fonctions analytiques, qu'il a réunie dans un seul corps d'ouvrage, sous le titre de Ca/cul des fonc- tions. Il y a posé le calcul différentiel et intégral sur des bases inébranlables. Ce puissant génie, qui a fait faire des immenses à l'analyse, en recule chaque jour les imites. IL doit donner bientôt une nouvelle édition de sa Méca- nique analytique, à laquelle il fera des additions importantes. DE L'ASTRONOMIE. On diroit que les sciences ont des temps de repos et des temps d'activité. Herschel nous a étonnés par ses nombreuses décou- vertes en Astronomie. Il a fait connoitre la planète qui porte son nom, ses six satellites et deux nouveaux satellites à Sa- turne,etil a fait voir que son anneau étoit double. Mais ses dé- couvertes sur les étoiles, leur position, leur nombre, leuréloi- gnement, et particulièrement sur les nébuleuses , sont encore bien plus surprenantes; elle sont agrandi pour nous l'univers, au point qu'il est des étoiles dont la lumière ne peut par- venir à la terre qu'en deux millions d'années; elles nous en ont donné une idée bien différente de celle qu'on avoit avant lui. On ne soupçonnoit nullement les faits que le travail, 8 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIP, la patience et le génie de Herschel nous ont révélés, et la philosophie naturelle lui doit peut-être plus qu’à aucun autre astronome. - Piazzi a découvert Cérès. Olbers a découvert Pallas et Vesta. Harding a découvert Junon. Divers astronomes avoient découvert un grand nombre de comètes. Mais depuis quelques années les progrès de l'Astronomie paroissent stationnaires ; on n'a pas même apperçu de nou- velles comètes. Tous les travaux qu'on a faits dans ces derniers temps pour mesurer différens arcs du méridien , ont donné pour résultat général, l’aplatissemeni de la terre environ de -;, c'est-à-dire, dit Delambre , que l'axe autour duquel elle fait sa révolution diurne est de +, à fort peu près, plus court de le diamètre de l'équateur. C'est ce qu'avoient déjà in- iqué le pendule mesuré à diverses latitudes et le phéno- mène astronomique de la nutation. Cette figure elliptique, qui est sensiblement celle de la terre en grand, paroit n'être pas absolument régulière. Les quatre arcs partiels mesurés entre Dunkerque et Barcelone, indiquent tous un aplatissement; mais cet aplatissement n'est pas tout-à-fait de la méme quantité dans toute l’étendue de l'arc. Il est plus foible vers le nord, un peu moins vers le midi, et plus grand vers le milieu. On suppose que cela dépend des différens degrés de densité dans les couches de la terre. La longueur du mètre, d'après tous ces calculs, se trouve, suivant l'hypothèse de la mesure de l'arc qu’on préfère, un peu au-dessous, ou au-dessus de 443 lig. $ ; mais la diffé- rence n’est que dans les centièmes de ligne, c’est-à-dire in- sensible dans l'usage , et inférieure à celle qu'on trouve communément entre les meilleurs étalons d'une même me- sure , tels que ceux qu'on trouve en France dans les archives des tribunaux, ou ceux qui sont déposés à Londres à la Tour et à la eour de l'Echiquier. Il résulte de tous ces travaux, qu'on n’a point encore de mesure rigoureuse, ni d'un are du méridien, ni par con- séquent du ètre, et qu'on est obligé de rapporter la mesure du mètre , à la toise , au pied et à la ligne qui par conséquent sont toujours les vrais étalons des mesures. DE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 9 DE L'HISTOIRE NATURELLE. L'Histoire naturelle fait des progrès considérables, et néan- moins il lui reste encore immensément à acquérir. Le minéra- logiste découvre journellement de nouvelles substances mi- néralés. Le botaniste rapporte de chacun de ses voyages, une multitude de plantes qu’il ne connoissoit pas, et le zoo- logue fait encore des collections plus riches, parce qu'il ya plus à découvrir dans cette partie que dans les autres. Car , quoique le règne animal soit la plus belle partie de l'Histoire naturelle, peut-être est-ce celle qui est le moins avancée. La difficulté de pouvoir saisir les différens animaux, tels que les mammaux, les cétacés, les oiseaux, les reptiles et les poissons, sera toujours un obstacle difficile à surmonter pour les connoître et en étudier les mœurs. Mais cette difficulté est bien plus grande encore relafive- ment aux autres classes, celles des animaux znosseux , ou invertébrés. Nous en avons un exemple remarquable pour la classe des méduses. « Au milieu des vastes mers, dit Péron , que nos vaisseaux ont si long-temps parcourues (dans le voyage du capitaine Bau- din), nousayons découvert , M. Lesueur et moi, plus d'espèces nouvelles d'animaux de ce genre (des méduses), que les na- turalistes de tous les temps et de tous les pays n'en ont fait connoitre avant nous. » On s’étoit manmoins occupé, depuis les naturaléstes de la Grèce jusqu’à ces derniers temps, de recherches sur l'his- toire des méduses ; mais c'est au dix-huitième siècle que les découvertes les plus mémorables sur ces animaux viennent se rattacher. Réaumur fit de belles observations sur les mé- duses des côtes du Poitou. LINNAUS S ÉLEVA COMME UN GÉANT au milieu du siècle, environné des Browne, des Borlaes, des Pallas, des Forskaël, des Fabricius, des Modeer, des Spallanzani , des Muller et d’une foule d'autres observateurs célèbres. » Le Systema naturæ de ce grand naturaliste, présenta un ensemble de la science entière à cette époque. IL électrisa tous les esprits; ses savans et nombreux disciples se répan- dirent des régions glacées de la Suède dans toutes les contrées ». Tome LX XII, JANVIER an 1811. B 10: JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE habitées du globe, et apportèrent de nouvelles richesses à leur maître chéri. Celui-ci se fit un devoir sacré, en mème temps que c'éitoit un plaisir délicat pour sa grande ame, de rendre à chacun d'eux la justice qui leur étoit due. Sa manière de penser étoit trop généreuse pour chercher à s’ap- proprier le travail des autres, comme on ne l'a fait que trop souvent depuis lui. L'auteur de ce Journal, plein des idées libérales de Linnæus , s'efforce d'en propager les prin- cipes, et de conserver à chaque savant le prix de ses dé- couvertes et de ses travaux (1). On sent que toutes les richesses acquises en histoire na- turelle depuis ce géant suédois, exigeroient qu'on fit une nouvelle édition de son Systema naturæ, dans laquelle on inséreroit toutes ces nouvelles découvertes. Gmelin avoit entrepris ce travail, mais il n'y a pas mis assez de soin, et d’ailleurs depuis lui la science a fait encore des progrès immenses. ‘ DE LA ZOOLOGIE. L’étude de la Zoologie avoit peut-être fait moins de progrès que les autres parties de l'Histoire naturelle, à cause des grandes difficultés qu'elle présente; mais dans ce moment on s'y livre plus particulièrement, tous les esprits se portent vers cètte partie, qui présente des découvertes plusnombreuses et plus intéressantes. Dans les derniers siècles on étudia l'anatomie des grands animaux et leur physiologie, et on y fit les plus grands progrèê. Harvée découvrit la circulation du sang dans les artères et les veines. Postérieurement on a découvert un autre ordre.de vais- seaux, dont Mascagni a donné une si belle description, qui servent à la circulation de la limphe. L’impulsion du cœur y contribue peu. IL paroît plutôt que cette circulation s'opère par l’irritation que la limphe produit sur ses vaisseaux. Haller découvrit l'irritabilité.... (1) C’est à Linnæus qu’on doit les premieres idées sur l’utilité de la cris- tallographie pour-la connoissance des minéraux. On a voulu lui ravir cette idée. Je n’ai cessé de présenter au lecteur l’antériorité de ses droits, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 1E Linhæus donna, dans son Systema naturæ, une classifi- cation générale de toutes les familles du règne animal ; mais les découvertes faites depuis la publication de ce grand tra- vail, y ont nécessité des changemens assez considérables, surtout à l'égard des animaux inosseux. Duméril a présenté une nouvelle classification du règne animal dans sa Zoologie analytique. Shaw a entrepris une histoire de tous les animaux dans son Général Zoology, commencé en 1800 à Londres. DES ANIMAUX CSSEUX. L'édition de Buffon par Sonini, est un des ouvrages qui contient la description d’un plus grand nombre d'animaux osseux, par les additions que Sonini a faites au texte de Buffon, de tout ce qui a été découvert depuis ce grand z00- logue; mais il y auroit déjà beaucoup à ajouter et quelques erreurs à corriger. Des Mammaux. L'histoire des mammaux est celle qui nous intéresse le plus, et cependant elle est si peu avancée, que Humboldt n'a pas craint de dire que dans la seule famille des singes onn'en connoissoit peut-être pas la huitième partie. Elle a été enrichie pa: plusieurs voyageurs. Péron et Lesueur ont apporté de la Nouvelle Hollande plusieurs espèces inconnues de mammaux , et Leschenaud, plusieurs autres de Java..., mais elles ne sont pas encore décrites. [ D'autres voyageurs ont également enrichi cette partie. Des Cétacés, Les notions que nous avons sur ces animaux, qui sont ‘toujours dans les hautes mers, sont peu avancées, Il y a donc beaucoup à y ajouter et à corriger. Des Oiseaux. Les espèces d'oiseaux sont extrêmement nombreuses; leur histoire est très-difhcile à faire, parce que , indépendamment de la difficulté de les saisir , le mâle, la femelle et les B 2 12 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE petits, présentent souvent des différences assez considérables. Il a donc beaucoup à ajouter et à corriger aux histoires que nous en avons. C'est ce qu'a commencé à faire Bechstein dans son Æistoire des oiseaux d'Allemagne. Vaillant a donné une /frstoire des oiseaux d'Afrique, des perroquets, des oiseaux de paradis et des toucans. Audebert et Viellot en ont donné une des colibris et autres oiseaux dorés. Desmarest, fils, en a donné une des tangaras. Wolf, Meyer, Borkausen , Lichtammer et Beker ont écrit sur les oiseaux d'Allemagne. D’Azzara a donné en espagnol l’Ærstoire des oiseaux du Paraguay , ainsi que celle de plusieurs mammaux. C'est dans toutes ces sources et dans les relations des nouveaux voyageurs, qu'on prendra pour avancer l’histoire des oiseaux ; mais il y aura beaucoup d'erreurs à corriger. Des Reptiles ovipares. On a des Ouvrages assez étendus sur ces animaux. Schneider y a ajouté des détails intéressans. Des Porssons. L'histoire de ces animaux est très-difficile à faire, parce qu'ils habitent les eaux , et un grand nombrese trouventdans les hautes mers. Aussi y a-t-il beaucoup à ajouter, et surtout à corriger dans ce qu'on a écrit sur les poissons. DES ANIMAUX INOSSE UX. L'histoire de ces animaux est très-difficile à faire, parce que la plupart sont très-petits et habitent les lieux éloignés de l'habitation de l’homme : aussi y a-t-il beaucoup à ajouter, et surtout à corriger , dans ce qu’on a écrit sur ces animaux. On s’'étoit beaucoup occupé, dans les derniers siècles, de leur anatomie et physiologie. On ne lit jamais sans admi- ration et sans surprise, les ouvrages de Lewenhoeck, de Hoock, ceux de Swammerdan , de Lyonnet sur les chenilles, ceux de Trembley sur les polypes, ceux de Muller sur les vermicules...; mais depuis ces grands observateurs la science ET D'HISTOIRE NATURPLLE. 13 a pris une fausse direction , elle s'attache trop à la classi- fication et à la nomenclature. Des Mollusques. Cuvier a publié des détails très-intéressans sur ces animanx et leur organisation. Il a fait voir que de tous les animaux inosseuz , ceux-ci approchoient le plus par leurs organes, des animaux osseux. En conséquence il les a classés im- médiatement après ceux-ci; il n'a point eu égard à la co- uille dont un grand nombre est pourvu. Lamarck dans son Système des animaux sans vertèbres, a suivi la même méthode, Poli a publié sur les animaux à coquilles des environs de Naples, un magnifique ouvrage, où il traite de leur anatomie, et où il répand beaucoup de lumières sur leur physiologie, | Nous n'avons point d'ouvrage étendu sur ceux de ces ani- maux qui ont des coquilles, depuis celui de D'argenville, etcependant fee progrès la science n'a-t-elle pas faits depuis cette époque? Bosc, Roissy, Lheman, Mesnard.... ont donné dans les dernières éditions de Buffon par Sonini, et chez Déterville, des notions intéressantes sur ces animaux. Martini a publié à Londres, un bel ouvrage sur la Con- chiologie , lequel a été continué par Chemnitz. . Tous ces travaux particuliers devroient être réunis dans un seul corps d'ouvrage qui nous feroit connoitre plus par- ticulièrement cette classe nombreuse d'animaux, dont l’or- ganisation et la physiologie sont si intéressantes. Des Insectes. L'histoire des insectes est peutêtre celle de tous lesanimaux « inosseux qui est le plus avancée. Sywammerdam, Lyonnet.... ont fait des observations les plus intéressantes sur l'anatomie et la physiologie de ces animaux. Les insectes peuvent être considérés sous trois rapports principaux , a À raison de leurs ailes et de leurs pattes, comme l'ont fait les anciens; b À raison deleur métamorphose, comme Swammerdam , 14 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE dont les observations et le travail étonnent toujours , et ne trouvent point d'imitateurs ; c À raison des parties de leur bouche , comme l'a fait Fabricius. Les entomologistes les considèrent aujourd'hui sous ces trois rapports, parcequ'en histoire naturelle il ne faut oublier aucuns caractères. Fabricius , Olivier, Latreille, Jurine.... ont donné des histoires très-détaillées d'un grand nombre de ces animaux. Jablousky a publié à Berlin, en 1785, un Système de tous les insectes connus, lequel a été continué par Herbst. Quelques physiologistes ont soutenu qu'il n'y a point une circulation réelle chez les insectes, parce que ces animaux n ont point de cœur ni de système artériel et veineux.connus. Mais ces animaux sont très-voraces ; ils ont une bouche, un estomac, des intestins, un anus; il est évident que le chile produit de cette digestion, doit être porté dans toute la masse du corps pour le nourrir ; ee qui ne peut s'exécuter sans une vraie circulation : elle sera , à la vérité, différente de celle des animaux qui ont un cœur, comme celle des animaux dont le cœur n'a qu'un ventricule, et celle des poissons qui n'ont point de poumons, est différente de celle des mammaux; mais elle n'en sera pas moins réelle. La circulation chez ces animaux doit s'opérer à peu près comme celle de la limphe chez les animaux osseux. Quelques auteurs ont séparé de la classe des insectes, celle des crustacés et celle des arachnides. Des Vers. On distingue deux espèces de vers. a. Les uns demeurent toujours dans l'intérieur des ani- maux ; b Les autres vivent en terre, dans les eaux. Gætze, Werner, Fischer, Bloch, Rudolphi... se sont oc- cupés particulièrement de la première classe. , D'autres auteurs ont traité des autres vers. Annelides. Lamarck a donné ce nom à des vers à sang rouge, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 15 Des Meduses. Les trayaux de Péron et Lesueur ont beaucoup ajouté à l'histoire des méduses ; ils ont donné un tableau de toutes les espèces de ces animaux connus jusqu'à ce jour. Ils en ont fait deux grandes divisions : 1° Les méduses gélatineuses. 2°, Les méduses membraneuses. Les méduses gélatineuses se sous-divisent en deux grandes familles. 3°. Méduses gélatineuses avec côtes ciliées. 4. Méduses gélatineuses sans côtes ciliées. Des différences non moins importantes distinguent les méduses gélatineuses en d'autres genres. 5°. Les agastriques qui n'ont point de cavité stomachale. 6°. Les gastriques qui ont une cavité stomachale. Les méduses agastriques se sous-divisent en six genres. Les méduses gastriques se sous-divisent en deux genres. Les méduses gastriques monostomes qui ont un estomac simple avec une seule ouverture.ou bouche, se sous-divisent en dix-neuf genres. Les méduses gastriques polystones Qui ont un estomac composé avec plusieurs ouvertures ou bouches, se sous- divisent en vingt-neuf genres. Des Polypes ou Hydres. Les hydres ou polypes furent étudiésavecsoin par Trembley. Ses expériences et ses observations étonnèrent le monde savant lorsqu'elles parurent. On a peu ajouté à sontravail, et, ce qui est surprenant, peu de naturalistes s'en sont oc- cupés. On ne saurait cependant douter qu'il n y ait encore beaucoup de choses neuves à y voir. Des Vermicules ou Vers infusoires. Muller a fait sur ces animaux un grand travail auquel on a peu ajouté. Des Rotrfères. Ces animaux ont été découverts par Lewenhoeck. On a Peu ajouté à son travail, quoique Spallanzani et Rofredi s'en soient occupés, et cependant nul animal ne présente 16 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de phénomènes aussi singuliers. Il peut étre desséché et con- servé dans cet état pendant plusieurs années. Mis ensuite dans l'eau, il se meut, et recouvre la plénitude de la vie. En réunissant tous ces travaux particuliers sur la Zoologie en un seul corps, on auroit un ouvrage qui avanceroit beaucoup nos connoissances sur les animaux. Mais pour un pareil ouvrage, il faut avoir une méthode sûre. Méthode naturelle de la classification des Animaux et des Végétaux. On sent plus que jamais la nécessité de pareilles méthodes, et tous les zoologues cherchent une méthode naturelle pour classer les animaux , analogue à celle que les botanistes emploient pour classerles végétaux; ils l'ont surtout cherchée dans leur organisation et dans leurs fonctions : et c'est celle que j'ai suivie dans le grand tableau que j'ai donné de la Classification des étres organtsés (1). Je suis la division ordinaire des êtres organisés en animaux et végétaux. æ Je divise les animaux en osseux et inosseux. Les animaux osseux sont à sang rouge, chaud ou froid, ce sont : 1% Ordre. Les mammaux. 2° Ordre. Les cétaces. 3° Ordre. Les oiseaux. 4° Ordre. Les reptiles. Ils ont un cerveau, un système nerveux, un cœur, des artères, des veines, une bouche, un estomac, des intestins, un anus, des organes sexuels, des organes des sens. 5° Ordre. Les poissons. Ils ont les mêmes organes que les précédens, excepté qu’ils respirent par des branchies. On dit que leur sang est froid. Cette division est assez naturelle; mais la difficulté est plus grande pour les autres classes. On les appeloit autrefois à sang froid (quoique quelques-uns aient du sang rouge). (1) Considération des étres organisés , tome I, et dans ce Journal , tome LIX , page 231, Lamark ‘ ET D'HISTOIRE NATURELLE, 17 Lamark les a appelés zavertébrés, ou sans vertèbres ( les an- neaux des chenilles , des vers... leuren servent), c'est pour- quoi je leur ai donné le nom d'inosseux, parce que le squelette osseux ne paroit être la partie la plus caractéristique des cinq premières classes. 6° Ordre. Les mollusques se distinguent par un cerveau, un système nerveux, un cœur, des artères, des veines, des branchies , une bouche, un estomac , un anus, des organes sexuels souvent peu connus , et des organes des sens souvent peu connus. Quelques-uns de ces animaux ontune coquille à l'extérieur, d’autres n'en ont point; d’autres ont à l'intérieur des portions dures comme osseuses, telles que l’os de la sèche à laquelle aucun muscle ne s'attache. 7° Ordre. Les crustacés. 8 Ordre. Les arachnides. 9° Ordre. Les insectes. 10° Ordre. Les vers. Ces animaux sont inosseux, à sang blanc, quelquefois à sang rouge. Les crustacés ont un cerveau et des nerfs, des branchies, un cœur musculaire et des vaisseaux pour la circulation. Ils engendrent plusieurs fois pendant leur vie. Les arachnides , ils n'ont point de véritable cœur ; ils ont une bouche , ou une trompe; ils ne subissent point de mé- tamorphose, et engendrent plusieurs fois dans le cours de leur vie. Les znsectes ont des stigmates et des trachées pour !a res- piration; ils n'ont point de cerveau , mais une moëlle longi- tudinale noueuse et des nerfs; ils ont un estomac, des intestins , un anus. On ne leur connoït point de cœur pro- prement dit, ni de système artériel. D'où on avoit conclu quil n'y avoit point de circulation chez eux; mais puisqu'ils Onwun estomac qui digère les alimens , il faut bien que le chile soit porté dans le reste du corps pour la nourriture. Ainsi on ne peut y méconnoître une circulation quelconque, différente sans doute de celle des grandes espèces d'animaux. Un grand vaisseau longitudinal qu'on peut regarder comme une grande artère, en paroit l'organe principal. La plupart des insectes subissent trois grandes métamor- phoses, comme l'a fait voir Swammerdan. C'est dans la der- Tome LXXII. JANVIER en 1811. C 18 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE nière métamorphose qu'ils engendrent une fois seulement dans leur vie. Les vers ont un corps mou, alongé; leur tête n’est point adhérente au corcelet; ils ne subissent point de métamor- phose; ils n’ont point de pattes. . Ils ont une moëlle longitudinale, sans cerveau , et des nerfs. Les uns respirent par des'trachées, les autres par des branchies. Ils n’ont point de cœur ni système artériel. La circulation doit donc être chez eux analogue à celle des insectes. Les parties coupées chez la plupart, se reproduisent. Annelides. Lamark a donné ce nom à certains vers à sang rouge. 11e Ordre. Les échinodermes. Les échinodermes n'ont point de cerveau. Ils n'ont point de cœur ni de système de circulation. Ils ontcinq dents, un anus, par conséquent un estomac et des intestins. Leur circulation doit donc être analogue à celle des in- sectes. 12€ Ordre. Les asteries se rapprochent, pour les organes, des échinodermes; mais ilsont l'anus confondu avec la bouche. 13° Ordre. Les méduses. Les méduses ont le corpsou gélatineux, ou membraneux. Les unes ont un estomac, les autres n'en ont point, suivant Péron et Lesueur. Ils ont une bouche, et leur anus est souvent le même que la bouche. On ne leur connoît ni cerveau , ni système nerveux, ni cœur , ni système de circulation. La circulation du chyle et des autres liqueurs doit donc s’y opérer comme chez les insectes. Ils paroissent respirer , suivant Péron et Tilesius. 14€ Ordre. Les rhizostomes. Les rhizostomes, suivant Cuvier, se nourrissent par des organes qu'il compare à des racines; mais Péron croit que cet'animal est une espèce de méduse qui a une bouche et huit bras, et que ce que Cuvier avoit pris pour les racines ou suçoirs, n’est autre chose que ces bras. 15° Ordre. Les Aydres. Les hydres ou polypes d'eau douce sont ordinairement gélatineux ou mous; ils n’ont ni tête , ni yeux, n1 cerveau, ni moëlle alongée, ni nerfs apparens, ni organes connus ET D'HISTOIRE NATURELLE. 19 de la respiration, nicœur, ni système artériel. Ils sont pourvus d'une bouche , d’un estomac, d’un anus, qui est le même que la bouche. Ils se multiplient en les divisant; ils n'ont point d'organes sexuels connus : c'est pourquoi je les appelle agenres. 16° Ordre. Les tectonurgiens, ou polypes des coraux, des madrépores..., ne paroissent différer des hydres que parce qu'il suinte de leur corps une quantité prodigieuse de subs- tance calcaire , dont sont formés les coraux, madrépores... 17° Ordre. Les vermicules, ou vers infusoires. Leur organisation est entièrement inconnue. 18° Ordre. Les rotifères et vorticelles. On ne leur connoit aucuns organes, mais ils peuvent de- meurer long-temps desséchés sans périr, et ils s’animent de nouveau en les mettant dans l'eau. Je divise les végétaux en différentes classes; ceux qui n'ont point d'organes sexuels connus ou agenies , et ceux qui ont des organes sexuels connus. 19° Ordre. Les tremelles oscillaires. 20° Ordre. Les conferves, les byssus, les nostochs, les ulves. 21€ Ordre. Les fucus. Ces trois ordres n’ont pointd’organes sexuels connus. Je les appelle agenies , comme les polypes. Les nostochs peuvent, comme les ifères, se conserver long-temps desséchés, et ils végètent aussitôt qu'on les humecte. L'organisation des conferves... est inconnue; mais elle paroît avoir beaucoup de rapport avec celle des polypes. On sait que plusieurs naturalistes ,; tels que Vaucher, Girod- Chantran, placent les oscillaires , au moins une partie, au rang des animaux. De savans botanistes ne sachant où placer dans les mé- thodes ordinaires les tremelles, les conferves , les fucus, ont trouvé ma méthode, à leur égard, très-naturelle. 22€ Ordre. Les végétaux acotyledons. 25° Ordre. Les végétaux monocotyledons. 24° Ordre. Les végétaux dicotyledons. 25° Ordre. Les végétaux polycotyledons. Leurs organes sexuels sont connus. Quant à la méthode naturelle pour classer les végétaux, quelques botanistes suivent aujourd'hui celle qui avoit été d'abord proposée par Bernard de Jussieu, et ensuite par son C 3 20 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, neveu, Laurent de Jussieu; mais elle n’est encore adoptée que par peu de personnes. J'ai également proposé une méthode naturelle de classer les minéraux , elle est fondée sur leurs principes constituans. Je les divise en dix classes. ; 1EClasse. Les gaz. s° Classe. Les eaux. 3° Classe. Les corps combustibles non métalliques. ” 4° Classe. Les substances métalliques. 5° Classe. Les acides. G° Classe. Les alkalrs. 7° Classe. Les Terres. alkalins. 8° Classe. Les sels neutres ( métalliques. terreux. e Classe. Les substances volcaniques. 10° Classe. Les fossiles, ou débris d'êtres organisés. Chaque jour voit accroitre nos connoissances sur les ani- maux , les végétaux et les minéraux; mais on ne doit pas espérer d'en avoir jamais des notions complètes. DE LA PHYSIOLOGIE ANIMALE. De la Peau et de sa couleur. Gaultier a fait de nouvelles recherches sur“llorganisation de la peau, et sur la couleur qu’elle a chez les diverses races d'hommes. Son principe général est que La peau , les poils et les cheveux chez les hommes, sont empreints par un fluide particulier. Ce fluide est fourni par sécrétion. Cette sécrétion a pour organes les bulbes du système pileux. Les poils, les cheveux et la peau puisent la matière co- lorante dans le même foyer. La couleur jaunê, bronzée, basanée, noire et les diverses nuances qu’on remarque chez les différens peuples, dépendent des proportions de cette matière. Il n'y a de différence dans les variétés de l'espèce humaine , que par sa quantité, ou sa qualité. J'ai envisagé cette question sous un autre aspect, dans mes Considérations sur les étres organisés , tome, page 522, en parlant du système dermoïde colorant. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 21 « On a supposé chez les hommes, dis-je, entre l'épiderme et la peau, une substance particulière à laquelle on a donné le nom de corps papillaïre \tissu réticulaire. Elle sécrète une humeur particulière qu'on appelle corps muqueux. Je préfère de lui donner le nom de principe dermoïde colorant. C'est cette liqueur qui est noire chez les nègres etleurcolorela peau ; elle a d’autres couleurs chezles diverses variétés d'hom- mes qui en sont également colorés. On sait que les habitans des parties chaudes de l'Amérique ont le teint cuivré, les babitans de l Arabie ont le teint olivâtre...: cette humeur, chez les hommes blancs, est incolore : c’est ce qui fait la beauté de leur teint; mais elle se colore facilement lorsqu'ils sont exposés à l'ardeur du soleil ou à l'air. Ce prétendu corps particulier réticulaire, ne me paroit point distinct de la peau. Il me paroit qu'il existe seule- ment un principe dermoïde colorant sécrété par la peau, laquelle doit être regardée comme une membrane muqueuse particulière. Cette liqueur est composée de carbone d’oxigène et d’hy: drogène , comme toutes les matières colorantes. La lumière et la chaleur qui (lorsqu'on est exposé à l'air) pénètrent à travers l'épiderme , dissipent une partie de l’oxigène et de l'hydrogène, et la partie charboneuse demeure prédominante. C’est la cause de la couleur basanée qu'acquiert la peau lorsqu'on demeure exposé à la lumière du soleil. Quant à ce qu'ajoute l'auteur , qui pense que es poïls, les cheveux et Lx peau, puisent la matière colorante dans le méme foyer, jai avancé une opinion différente, zb/dem, page S10"..5 "et je l'ai prouvé en considérant la couieur des poils chez'les mammaux, celle des plumes chez les oieaux, celle des écailles des quadrupèdes, soit des vivipares, soit des ovipares , ainsi que celle des écailles des poissons. Chaque poil des animaux a un bulbe glanduleux à sa racine. Ce bulbe ou glande fournit la nourriture au poil, qui croît et pousse à la manière des végétaux. Il en est de même des plumes des oiseaux, des écailles des quadrupèdes ovipares ou vivipares , des écailles des poissons. Toutes ces parties sont colorées. Ces principes colorans sont donc fournis par les glandes. Les couleurs sont plus vives chez les mâles, parce que 22 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, leur fluide reproductif, plus actif que celui des femelles , est un stimulant qui donne beaucoup'd'activité à ces glandes , ou bulbes...: chez le jeune garçon mutilé, il ne pousse point de barbe... Je pense que le principe dermoïde colorant de la peau, est au contraire sécrété par la peau elle-même ; effectivement la peau des mammaux , celle des oiseaux , est toujours à peu près également blanche, quelle que soit la couleur de leurs poils, de leurs plumes... La peau du nègre sécrète un principe noir, tandis que celle du blanc sécrète un principe incolore..., comme quel- ques membranes de l'œil, par exemple, sécrètent une liqueur noire, d'autres des liqueurs incolores. De l'influence de la huitième paire de nerfs sur la respiration. Willis, Baglivi avoient déjà reconnu que la respiration souffroit chez les animaux auxquels ils avoient lié la hui- tième paire de nerfs. Dupuytren a répété les expériences de ces savans phy- siologistes sur des chiens et des chevaux, dont il a lié ou coupé les nerfs de la huitième paire. Il a vu que ces animaux souffroient ; il a eru que le sang restoit noir comme le sang veineux, quoique les mouvemens de la respiration parussent avoir lieu par les mouvemens du diaphragme et des côtes, phénomène qui eùt été bien extraordinaire. Mais d’autres expériences ont fait voir que lesang ne demeu- roit noir , que parce que la respiration n'avoit rellement pas lieu. Nous les ferons connoitre plus en détail. Du Squalus maximus. Home a donné la description anatomique du squalus maximus, etila fait voir que par la forme de son estomac, il établit un passage entre les poissons cartilagineux et les cétacés. : Blainville a beaucoup ajouté au travail de Home. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 23 De la cause du refroidissement qu'on observe chez les $ animaux exposés à une forte chaleur. Laroche a fait des recherches intéressantes sur les causes du refroidissement qu’on observe chez les animaux exposés à une forte chaleur. Il a fait un grand nombre d'expériences pour découvrir ces causes, etilen tire la conclusion suivante : Le développement du froid qui se manifeste chez les ani- maux exposés à une forte chaleur , est le résultat de l'éva- poration de la matière de la transpiration, laquelle, en raison de l'augmentation d'action du système exhalant, est d'autant plus considérable , que la chaleur extérieure est plus forte. Ïl est donc à-la-fois Le résultat et des causes physiques, et des causes vitales. - De la conservation des diverses espèces d'Animaux dans l'alcool. Péron et Lesueur ont éprouvé dans leur long et pénible voyage toutes les difficultés qu'on éprouve pour conserver les animaux qu'on a eu tant de peine à prendre et à pré- parer. L'expérience leur a appris les meilleurs moyens de les conserver dans l'alcool. Les voyageurs ne sauroient trop consulter le travail qu'ils ont fait sur cet objet. Des Générations spontanées. La grande question des générations spontanées a été dis- cutée de nouveau par M. Fray. Ila enfermé de l'eau de pluie dans des vases bien fermés, et après quelque temps, ily a apperçu des points verts qui étoient des plantes, et même quelquefois des insectes. De pareillessexpériences avoient déjà été faites par différens physiciens ; mais on y a toujours objecté que ces êtres organisés étoient les développemens de germes qui se trouvoient dans ces eaux. Par conséquent la question demeure 7 slatu quo. DE LA BOTANIQUE. Les botanistes continuent de donner les descriptions des plantes contenues dans leurs herbiers. On doit appliquer à l'histoire des végétaux ce que nous 24 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE venons de dire de celle des animaux. Chaque botaniste, chaque voyageur donne des descriptions particulières des plantes qu'il a recueillies et qu’il a observées. Cette méthod® est sans doute la seule qui puisse avancer la science, en supposant que ces descriptions sont bien faites, et que l’auteur a pris toutes les précautions nécessaires pour ne pas donner sous un nouveau nom, une plante qui a déjà été décrite. Mais toutes ces flores , toutes ces descriptions particulières, doivent être refondues pour donner un species plus complet des plantes connues , et réunir de cette manière toutes nos connoissances actuelles sur les végétaux. Péarson a commencé ee travail, et dans son Ænchiridion, il a réuni la description d'une grande partie des plantes connues à cette époaue. Mais il faudroit compléter son travail , et donner une des- cription de toutes les plantes connues jusqu'à ce moment. Tous les cinq ans, plus ou moins, on donneroit un sup- plément dans lequel on décriroit les plantes découvertes pendant cet espace de temps. DE LA PHYSIOLOGIE VEGXATALE. Cette science avoit été enrichie de beaux faits par Ruisch, Grew, Malpighi..., mais depuis ces grands observateurs elle avoit fait peu de progrès. # Darwin dans sa Zoonomie, que nous ne connoissions pas en France avant la traduction que vient d'en faire M. Kluys- kens , a considéré la Physiologie végétale sous de nouveaux rapports; il fait un continuel rapprochement de l’azzma- tion animale avec l'animation végétale, ainsi que je l'ai fait dans mes Considérations sur les étres organisés, sans connoitre son travail antérieur au mien. À Des Bourgeons. On doit considérer, dit-il, les individus du règne végétal comme des animaux d'une classe inférieure, ou moins parfaits. Un arbre, dit-il, est un rassemblement de plusieurs bour- geons vivans ; chacun de ces bourgeons a ses feuilles propres, ou pétales qui lui servent de poumons. Il produit ses des- cendans ovipares, ou vivipares, au moyen des bourgeons ou semences. Chacun de ces bourgeons a encore ses racines particuères qui descendent le long de la tige de l'arbre, où elles sont entremélées avec celles des autres bourgeons, et ÉT D'HISTOIRE NATURELLE, 25 et forment l'écorce qui est la seule partie vivante de la tige; elle se renouvelle annuellement, et est juxta-posée sur l'écorce de l'année précédente, qui meurt alors ; et avec les sucs qu'elle tient en stagnation, elle se durcit graduellement, devient bois, et forme les couches concentriques que l'on apperçoit dans le tronc de l'arbre scié en travers... D'après cela , il paroït que les bourgeons des arbres dont les feuilles tombent tous les ans , sont autant de plantes annuelles, que l'écorce est un entrelacement des'tiges de chaque bourgeon individuel, qui consiste en une feuille ou plumule au sommet, une radicule en bas et une tige qui joint toutes ces parties, et constitue l'écorce de l'arbre : et il paroît encore que le bois intérieur n'a d'autre usage que celui de soutenir ces bourgeons en l'air, et que de cette manière ils ressemblent au règne animal par leur individualité. On a fait à cette partie du système de Darwin, laquelle avoit été reproduite par Aubert du Petit-Thouars, une ob- jection à laquelle il ne paroit pas qu'on ait donné de ré- ponses satisfaisantes. Si ces bourgeons , a-t-on dit, prolon- geoient leurs racines le long de la tige de l'arbre , de manière qu'en s'entremêlant ensemble elles formassent l'écorce, et qu'en se juxta-posant chaque année , elles devinssent le bois, il s'ensuivroit que dans un arbre greffé: les bourgeons qui naîtroient au-dessous de la greffe, seroient dela même nature que ceux qui sont au-dessus de la même greffe, ce qui n'est pas : car ceux qui naissent au-dessous, conservent tous les caractères de l’arbre ou sauvageon qui aété greffé , et donnent des branches et du bois analogue à celles de ce sauvageon. De l'Irritabilité des végétaux. L'irritabilité des végétaux est constatée par un grand nombre de faits. Des trachées, par exemple, détachées de la plante, conservent leur irritabilité pendant un temps plus ou moins long, comme le cœur, par exemple, d’un animal, d'une grenouille , d'une tortue. .., détaché du corps de l'animal. De la Sensibilité des végétaux. L Les étamines et les pistils des fleurs donnent évidemment des signes de sensibilité, non-seulement parce qu'ils se rap- prochent mutuellement dans les temps de l’imprégnation, mais encore parce qu'un grand nombre d’entre eux ferment Tome LXXII. JANVIER an 1811. D 26 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE leurs pétales et leurs calices lorsque le temps est froid. Ceci ne sauroit être attribué à l’irritation; car le froid n'est qu'un défaut de stimulation de la chaleur; mais , de même que le défaut de stimulus ordinaire produit de la douleur, comme lorsqu'on a froid, faim ou soif... Ces mouvemens des végétaux qui ferment leurs fleurs , doivent être attribués à une sensation désagréable, et non à l'irritation. D'autres ferment leurs feuilles pendant l'obscurité, ce qui ne peut être attribué non plus à l’irritation, puisque le corps quon supposeroit irritant est un étre négatif, savoir, l'absence de la lumière. D'un certain degré de puissance volontaire chez les Végétaux. Que les végétaux possèdent un certain degré de puissance volontaire , c'est ce qu’on peut observer par la nécessité où ils sont de jouir du sommeil, qui consiste dans l’abolition momentanée de la puissance volontaire. Cette puissance vo- lontaire paroit être bien développée dans les mouvemens circulaires des cirrhes de la vigne, et autres plantes grim- pantes, ainsi que dans les efforts des plantes pour tourner la face supérieure de leurs feuilles, ou de leurs fleurs vers Ja lumière. De l'association des mouvemens fibreux chez les Végétaux. L'association des mouvemens fibreux s’observe dans le règne végétal, aussi bien que dans le règne animal. Les nervures des feuilles de la sensitive sont habituées à se contracter en- semble par l’absence de la lumière. Or, si par toutes autres cir- constances, telles qu'un attouchement léger ou:un petit coup, une nervure irritée se contracte, les autres se contractent aussi, parce que leurs mouvemens sont associés avec ceux de la partie irritée. Ainsi les diverses étamines de la classe de la syngénésie sont habituées à se contracter ensemble le soir , et si on en stimule une avec la pointe d'une épingle, d'après l'expérience de M* Colvolo ,elles se contractent par l'association qu'elles ont acquise, ce qui prouve en même temps, que lenombredes organes mäles et femelles qui existent dans une fleur, ainsi que le nombre des mamelles d’une chienne ou d'une truie, ou le double organe du coq ne détruit point son individualité. Cela est prouvé d'ailleurs par ET D'HISTOIRE NATURELLE. 27 les anthères , et les stigmates (1) de certaines fleurs herma- phrodites qui reçoivent probablement leur nourriture du même nectaire. Pour s'assurer que le mouvement de la sensitive, par exem- ple, n'est pas du à quelque vibration mécanique , propagée le long de la branche lorsqu'on touche une seule feuille , on fendit une de ses feuilles d'un seul coup de ciseaux très- aigus; et il se passa quelques secondes avant que la plante parût sensible à la lésion. Alors toute la branche se con- tracta jusqu'à la tige principale. Cette expérience fut répétée plusieurs fois sans donner le moindre ébranlement à la plante. Des organes des Végétaux analogues à ceux des Animaux. Les racines des végétaux sont analogues aux vaisseaux lactés des animaux. Les vaisseaux séveux au commencement du printemps, avant que les feuilles ne soient épanouies , sont analogues aux ‘vaisseaux owmbilicaux du fœtus. Les feuilles des plantes terrestres ressemblent au poumon: celles des plantes aquatiques ressemblent aux branchies des poissons. Il y a d’autres systèmes de vaisseaux végétaux ressemblans à celui de la veine-porte des quadrupèdes , ou à l'aorte des poissons. La puissance digestive des végétaux est analogue à celle des animaux; ils convertissent en sucre et autres substances, les sucs qu'ils absorbent. Les semences des végétaux ressemblent aux œufs des ani- maux. Les bourgeons et les bulbes composent leur postérité vivipare. Les anthères et les stigmates sont de vrais animaux qui, à la vérité, sont attachés à leur arbre-père, comme les polypes et les coraux, mais sont susceptibles de mouvemens spon- tanés. Ils sont affectés par la passion de l'amour, et doués (1) Ce mot stigmate des végétaux est impropre, puisqu'il est consacré à exprimer l’organe extérieur par lequel les insectes respirent. C’est pourquoi je lui ai substitué celui de cuneoke. D 2 28 JOURNAL DE PMYSIQUE, DE CHIMIE, de la faculté de reproduire leurs espèces. Ils se nourrissent de miel, ainsi que les papillons et les abeilles qui viennent piller leur nectaire. Les fleurs mâles de la vallisniéra approchent encore plus d’une animalité apparente; car elles se détachent d'elles- mêmes de la plante, et flottent à la surface des eaux à la rencontre de leurs femelles , qui elles-mêmes s'élèvent du fond des eaux pour être fécondées , et après cette opération elles s'enfoncent de nouveau au fond des eaux pour nourrif et muürir leurs fœtus ou graines. D'autres fleurs des classes monoécie, dioécieet polygamie, expulsent la poussière fécondante qui, flottant dans les airs, est transportée aux stigmates des fleurs femelles. Seroit-il possible que cela se fit par une attraction spécifique ? Les Végétaux ont-ils des idées des corps extérieurs, des sens el un sensoriumn? Comme toutes nos idées sont originairement reçues par. nos sens, on pourroit changer la question et demander si les végétaux ont des organes du sentiment? Il est certain qu’ils possèdent celui du chaud et du froid, celui de la sécheresse et de l'humidité , et un autre de la lumière et de l'obscurité ; car ils ferment quelquefois leurs pétales par la présence du froid , de l'humidité ou de l’obs- curité. Ces mouvemens ne peuvent pas être déterminés par la simpleirritation, car le froid et l'obscurité sont des qua- lités négatives. Il faut donc qu’ils soient doués de sensation , ou de volition, et cela suppose un sensorium commun, où une union de leurs nerfs. Indépendamment de ces organes du sentiment, qui ont ‘la faculté de distinguer le froid, l'humidité et l'obscurité, il est encore d’autres sens chez les végétaux. Du toucher. Les feuilles de la sensitive, de la dionée et du drosera , ainsi que les étamines de plusieurs fleurs , comme celles de l’épine-vinette, et de la classe nombreuse de la syngénésie, sont sensibles aux impressions mécaniques, c’est- à-dire qu'elles possèdent un sens du toucher, ainsi qu’un sensorium commun, au moyen duquel leurs muscles sont mis en action. æ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 29 Du sens de l'amour. Enfin dans un grand nombre de fleurs on distingue un sens de l'arnour. Les anthères s'approchent des stigmates quand elles ont atteint leur maturité, et chez d’autres l'organe femelle s'approche de l'organe mâle. Par quels moyens les anthères de plusieurs fleurs, et les stigmates de plusieurs autres se dirigent-ils vers leurs amans? Comment l’un d'eux sait-il que l’autre existe auprès de lui? Cette espèce de mariage est-il produit par une attraction mécanique , ou par un desir amoureux ? La dernière opinion est appuyée par l’analogie la plus stricte, parce que ce mariage a pour résultat la reproduction de l'espèce. De l’odorat. Mais ceci suppose un autre sens , l'odorat, qui dans le règne animal, dirige également l’enfant vers Le la source où il doit puiser sa nourriture. Du goût. Il existe une espèce de got aux extrémités des racines des végétaux, analogue à celui dont sont douées les extrémités des vaisseaux lactés, qui sert à distinguer et à choisir la nourriture appropriée à la plante. Les végétaux ont donc, dit Darwin, indépendamment de l'irritabilité, différens sens, 1° Un sens propre à distinguer les variations de la chaleur; 2° Un autre pour distinguer les variations de l'humidité ; 3° Un autre pour la lumière; 4 Un autre pour le toucher; 5° Et probablement un autre analogue à l'odorat. 6. Le sens de l'amour. On peut conclure, avec raison, qu’ils ont un sersorium commun appartenant à chaque bourgeon, qu'ils doivent quel- quefois répéter leur perception, soit dans leurs rêves, soit pendant la veille, et conséquemment posséder des idées de plusieurs propriétés des choses extérieures , ainsi que de leur propre existence. Plusieurs physiciens attribueront sans doute à l'irrita- bilité , et regarderont comme de simples effets de l'irritation, les mouvemens que Darwin regarde comme des sensations ; mais les faits paroissent favoriser son opinion. Car les mouvemens de la valisniera mäle et femelle, par oups ne peuvent étre attribués à l'irritation seule. Lorsque la valisniera femelle ressent les besoins de l’amour ; elle sagite, et par le moyen d'une longue hampe, elle s'élève du fond des eaux à leur surface; elle répand alors des éma- 30 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE nations comme les femelles des animaux, celles des chiens, des taureaux, des chevaux, des loups, des insectes..., dans les temps de leursamours. Les mâles, excités par cette odeur, accourent de très-loin vers ces femelles. La même chose a lieu dans le sein des eaux pour les poissons. Les mâles ac- courent vers les femelles qui ressentent les besoins del'amour. La femelle ‘vallisniera envoie donc également, suivant les analogies, des émanations qui arrivent jusqu'au mâle dans le fond des eaux, et pénètrent jusqu'à lui par l'odorat. L'im- pression qu'il en reçoit est si forte, qu'il brise les liens qui le retenoient fixe. 11 vient à la surface de l'eau , s'approche de tout côté de sa femelle en s'agitant amoureusement. Il lui lance son pollen, comme le font les poissons mäles...; la femelle fécondée, replie sa hampe, et redescend au fond des eaux pour nourrir et mürir son fruit. Le mâle périt après ces jouissances, comme le font les mäles de la plupart des insectes. Tous ces effets ne peuvent être attribués à une simple irritation. Ils supposent dans les végétaux des sentimens aualogues à ceux qu'éprouvent les animaux dans les mêmes circonstances. Mais , objecte-t-on, on ne connoit chez les végétaux ni muscles, ni nerfs, ni sens , ni sensorium. Je réponds que dans mes Considérations sur les étres organisés, j'ai prouvé que, 1° Les trachées des végétaux font chez eux les fonctions des muscles. Elles sont très-irritables, s'étendent , se con- tractent...; ainsi elles peuvent produire tous les mouvemens qu'on observe chez les végétaux. Leurs parties dans lesquelles on observe les plus grands mouvemens, telles que la hampe de la valisniera femelle, les anthères , les pistils, sont abon- damment pourvues de trachées. 2°. La partie fibreuse et la partie médullaire chez les vé- gétaux, sont sans cesse entremélées ; elles se ga/vanisent mutuellement, comme le font tous les corps hétérogènes de la nature. Les trachées se contractent par ce galvanisme, etexécutentces mouvemens que nous admirons... Ces parties font fonction des nerfs chez les végétaux. 5° Quant aux sens des végétaux et à leur sensorium, ne soyons pas surpris que nous en ayons si peu de connoissances. Nous n’en avons pas davantage sur les sens et sensorium ET D'HISTOIRE NATURELLE. 31 des animalcules ou infusoires , des volvoces, des monades et même sur ceux des oursins, des astéries... J'ai supposé que le sensorium des végétaux pouvoit étre placé au lieu où le tuyau médullaire se termine, à l’origine des racines; mais on sent que ce ne sont que des analogies très-éloignées. j C'est dans cet endroit que paroît étre le siège de la vie du végétal. Tous les faits nous ramènent donc continuellement à l'idée que jai développée dans mes Considérations sur les étres organisés, qu'il faut, dans la physiologie végétale, suivre l'exemple de Bichat dans la physiologie animale. Considérons donc l’ensemble des fonctions d’un végétal, et ses diverses parties, comme différens systèmes , ainsi que l’a fait Bichat par rapport à l'économie animale; par conséquent on aura chez les vegétaux, comme chez les animaux: Système des membranes séreuses. Système des membranes muqueuses. Système épidermoiïde. Système dermoïde. Système pileux. Les fonctions des végétaux doivent également se rapporter, comme celles des animaux, à quelques fonctions principales : La circulation des liqueurs. La nutrition. La respiration. La transpiration. La reproduction. Le système des forces vitales. Le système de la sensibilité. CCC otre uie, rer iats dheltetfe else jeyérils Lodtetial te Les anatomistes s’occupoient autrefois beaucoup de la des- cription des plus petits vaisseaux d'un organe, d'une glande, par exemple. Bichat a fait voir que par ce moyen on n'a- vançoit point la science, et qu'il falloit se borner à envi- sager les fonctions générales de l'organe. La veine-porte, par exemple, apporte au foie le sang de toutes les parties abdominales. Quand on suivroit les plus petites ramifications de ce vaisseau singulier , on n'avanceroit point la science. A! faut tâcher de découvrir comment se fait la sécrétion 32 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de la bile... Il en est de même du rein , du panereas et detoutes autres glandes. On ne connoitra jamais , dit Bichat, la nature d'une glande. Bornons-nous donc à en bien étudier les fonctions... Ses idées ont été assez généralement adoptées. Le botaniste qui s'amuseroit à décrire également tous les petits vaisseaux vrais ou supposés, qui arrivent à une glande végétale, par exemple aux anthères, n'avanceroit point la science. Il faut rechercher comment s'opèrent les fonctions. Les écorces de l'orange, du citron..., par exemple, con- tiennent beaucoup d'huile essentielle. ..; cette huile est sans doute sécrétée par de petites glandes qui reçoivent la sève pardes vaisseaux particuliers... C'est tout ceque nous pouvons savoir: ou il faut renoncer aux idées de Bichat sur l’ana- tomie et la physiologie animales, ou il faut adopter les miennes sur l'anatomie et la physiologie végétales...; des passions particulières s'y sont opposées, mais avec le temps la vérité triomphera. DE LA MINÉRALOGIE. La Minéralogie fait des progrès continuels. Les descriptions des minéraux sont plus exactes : leur analyse a acquis de nouveaux degrés de perfection. Klaproth nous a donné l’ana- lyse d'un grand nombre de minéraux. De l'Elektrum. Ce nom d'élektrum , dit Klaproth, a été donné à l’or qui contient un cinquième d'argent. Pline dit, lib. XXXTIT, cap. 1v, sect. 25: Omni auro inest argentum vario pondere , alibi den, alibt non, alibr octavä parte. Ubicumque quinta argenti portio est, elektrum vocatur. Homère connoissoit l’élektrum. Klaproth a analysé une mine d’or de Schlagenberg en Sibérie , et il en a retiré, Orne MIE NOR CIO ATrONE- LME LR NE NC UENROE Cette vérité qui nous étoit inconnue , il y a peu de temps, que tout or natif contient de l'argent , étoit donc triviale du temps de Pline et d'Homère. Ce qui confirme qu’on étudie peu. , De ET D'HISTOIRE NATURELLE. 33 De l'Argent natif. J'avois dit l'année dernière dansmon Discours préliminatre, page 26, qu'il faudroit également faire l’analyse de l'argent natif, du cuivre natif et des autres métaux natifs, pour savoir s'ils étoient aussi alliés à d'autres métaux. J'ignorois que le laborieux Klaproth eût fait l’analyse de l'argent natif. Voici ce qu'il en dit dans son excellent Drctionnaïre de Chimie ; traduction française de Bouillon-Lagrange et Vogel, article arzent. L'argent natifest rarement pur; il contient presquetoujours 0,05 jusqu'à 0,05 de métaux qui sont le plus souvent de \'or ou de l’arsenic. De l'Antimoine natif. L'antimoine natif contient presque toujours d’autres mé- taux. Klaproth a retiré de l'antimoine natif d'Andréasberg , Antimoine. .. j Arsent- Na Ferme EN ENANOS PE DIS A te MO Du Tellure nabif. Le tellure natif est presque toujours allié avee l'or. D'une Mine d'or du Mexique qui contient du Palladium. J. Cloud a lu à la Société Philosophique de Philadelphie, l'analyse qu'il a faite d'un lingot d’or qui paroissoit venir du Mexique ; sa couleur étoit différente de celle de l'or ordinaire. Il en retira un métal particulier qui étoit allié à l'or. Ce métal examiné par tous les procédés de la Chimie, se trouve être le même que le palladium qu'on extrait du platine. Tome LXXII. JANVIER an 1811. E 34 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE), Du Colombium. Wollaston a fait des expériences comparatives entre Île eolombium , métal particulier que Hatchett avoit eru exister dans un minérai qui avoit été apporté de Massachusset, et le tantalium découvert par Eckeberg. Il en a conclu que le colombium étoit la même substance que le tantalium. De la Platine trouvée à Saint-Domingue. La platine qu'on n'avoit trouvée jusqu'ici qu'au Pérou, vient d'être trouvée à Saint-Domingue dans les sables de la rivière de Jaki, ou Zacky , au pied des montagnes Szbuo. Elle a été apportée en France par M. Dubizi; elle présente les mêmes caractères que celle du Pérou. Les grains, éga- lement aplatis, sont en général un peu plus gros, et sa pesanteur spécifique un peu plus considérable. Vauquelin , qui en a fait l'analyse, y a retrouvé les mêmes substances que dans celle du Pérou, savoir : Le fer; Le cuivre; Le chrome ; L'osmium ; L'iridium ; Le rhodium ; Le palladium; Du titane (à ce qu'il croit); Sable quartzeux; Sable ferrugineux; Point d'or. Du Chrome oxidé vert. On connoissoit du chrome oxidé vert, qu’on observe quel- quefois sur les morceaux qui contiennent du plomb rouge. Mais Leschevin vient de découvrir l’oxide vert de chrome en grande quantité dans la montagne des Ecouchets auprès du Creuzot, du côté d'Autun. Cet oxide est d'un très-beau vert. Il l'a trouvé, 1° dans des espèces de brêches qui paroissent composées de grès, et qu'on pourroit prendre pour des espèces de granit , si on ne les examinoit pas ayec attention ; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 35 2° Dans des quartz; 5° Dans des jaspes que quelques minéralogistes ont regardés comme des agathes. Vauquelin a analysé un de ces morceaux; il en a retiré, CRDMEOITeE NS Le dE % À "0.07 Drapiez, de Lille, a retiré d'autres morceaux: Silicess sis + A0 À LONe 0.64 AltuminenttiienelinNs tt 31 OUR ls MON27 Chrome ondé mere re EM OO: Fer et manganèse , une trace. Chaux et magnésie. . . . . . . . . 0.02.5 De l'Etain trouvé en France. On avoit trouvé en 1795, du wolfram à Saint-Léonard du côté de Limoges. On avoit soupçonné qu’on pourroit aussi y trouver de l'étain, parce que le wolfram se trouve assez souvent avec les mines d'étain. Cependant le wolfram se trouve en Sibérie, où il n'y a point d’étain. L'ingénieur des mines de France, Cressac a fait de nou- velles recherches auprès de Saint-Léonard , et il a trouvé de l'étain oxidé en très-petite quantité; Descotils et lui en ont retiré un véritable étain pur. Voilà donc deux nouveaux minéraux intéressans trouvés en France. De la Botryolite. Klaproth a analysé une substance pierreuse nommée 4o- tryolite ; il en a retiré, SITES ae Me Mu te MU MUR Eee 22 PEAU et AG Ghana LINE EME 39 5 FES oMao te (ne Re DEL EMIPONES Re ANDRE RE . I Acide boracique. . à À SEE SNS FREE RME TOME M MES TRUE LE JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE De l'Elaéolite. Klaproth a donné le nom d'é/aéolite à une substance que Werner avoit appelée feisenstein (pierre grasse): il en a retiré, Silice is. UE . 46 5o Aümine: Watt 2 TM EL RTS LE Gate LL GUN PNE Hore ARR ie 75 FeRMOXLIdEEL DUT RE NN PAT Eee TER L Kalii(ou potasse EME AMEN Cats Eau... ; L Sat 2 ae . ae l'a T e0Nie) l'ex Ce Des Hydrates métalliques. Les analyses des différentes mines de zinc, surtout celles des blendes , faites par Bergman , qui en avoit toujours retiré trois, quatre , cinq et jusqu à six centièmes d'eau; celle de la calamine de Fribourg en Brisgau, faite par Pelletier, qui en avoit retiré douze centièmes d’eau (Journal de Fhysique, tome XX, page 428), m'avoient fait dire depuis long-temps que l’eau est un des minéralisateurs des substances métal. liques ( Théorie de la Terre, tome 1, page 92, ligne 5, imprimée en 1797). Métaux minéralisés par l'eau. Et j'enseigne chaque année, au Collègede France, la même doctrine. Hydrate de zine. Pelletier a retiré de la calamine de Fribourg en Brisgau, ZINC IOXITÉ RS DA Et Re Obe E CINY ANT EEE SN QUT ES DICO 2e LENS ue RENE de: CN OMOO EAU RTE CRE PEER RE Er ARENA Hydrate de cuivre. Proust ayant mélangé du nitrate de cuivre avec de Îla potasse bien délayée, de manière qu'elle domine dans le mélange, obtint un précipité volumineux d'un assez beau bleu ( Journal de Physique, tome L, page 63). C’est, dit-il, un oxide de cuivre combiné avec une portion d'eau concrète: c'est l'zydrate de cuivre. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 37 Klaproth a fait connoitre un hydrate naturel de cuivre. Il a retiré de l'eau d'une mine verte de cuivre de Sibérie ou chrysocole, CULV TS RME EU NTI AU EM TUANEA 0 Oxicenep ii... Acide carbonique. . . DDC er date elle ce ue la Mans mire RL OR MER NR ET SE (5) 274 RS EE El ETC TON MEMONCR ANSE LE CTMES Tr, Hydrate de Fer. Proust ayant analysé une ocre de fer, en retira poudre Ferrugineuse 0,88, eau 0,12. Il en conclut que cette ocre étoit un zydrate de fer( Journal de Physique, tome LXIII, page 467). Sage avoit déjà observé dans ses Æ/émens de Minéralogie docimastique, tome Il, page 195, imprimés en 1777, que la stalactite martiale brune, qu'on désigne ordinairement sous le nom d'ématite, donne à la disullauon un huitième de son poids d'eau. Klaproth a retiré de la terre d'ombre : fer oxidé 0.48, manganèse oxidé 0.20 , eau 0.14 (tome II, de ses Œuvres, page , traduction française). Il a retiré de la mine de fer en grains de Hogau , ou fer pisiforme globuliforme, Feérioxidé-t- 4 10200 Manganèse oxidé... Dire tee Alumine. , . HART 1 SAME ER RES MERE 256 SMART t PT P RON PRE SN IN AE TE bats AEU/8 D. Il a retiré du weissenerz, mine de fer des prairies, Fersoxidé hoinilnts etset ot arte late 1006 Manganèse oxidé. . . . . Acide phosphorique.l.ns 2 = CENTIGRADE. % CE CR. US) “| Maximum. | Minimum. |a Mur. Maximum. | Minimum. DA F IIDT. heures- Es o | heures. je o sé heures. mill. heures. mille mill: | 1|à 35. Polà 10 $ 1,2 TL|ATOS. ee cer. 7 4952414074 M... .50|748, 11, 2h midi + 5,4jà112s. + 2,7] + 5.4/h112s....... 71280 A7 2m -ReteC 787 00 75 14 3làa3s. + 1,210 4s- 0 NT 10,7 |A 0 RS eee 7000214 74 ID eee « 758,19|750,30 Al 3s. ! 5,6 7+m. + 251 + 50|à 925... 7b0,60409/s. 0000 749,00|759,30 5fà midi <+10,1|a 7 5m. + 6,7| Hrto,rià 9+m........ 760,60|à 3 ;5........ 769,00|760,3 6là3s + gofh1ts. + 7,5) + 87172 m.....… ..756,70[à 115..... ....745,41|754,89 7la midi + 9,ofa10s. + 6,0| + 9,01 74 m.. 746,60| 4315-52... 745,00|745,86 8la3s. + 6,7 72 m.+ 1,7] + 5,4|hg94s........ 750,47|à 7 m....... 745,30|747,48 A| olà3s. + Solaris. — 1,0] + 5,2l19%s....... .758,80|à 7 5 m,....... 794,62|756,22 jiiolaios. + 9,0à7#im. + 0,5] + 1,217 + m....... 756,00[à 105........ 743,50/751,62 Hlrrlà im. + 6,9fà 108. + 0,2] + 3,2/à 105.........757,06|à7 + m.:...... 745,00|747,33 dir àgËfs. + 9,21midi + 2,9 + 2,3là 7 2m.......790,20 à 02 5........ 751,64|756,98 Alr3lags. +Hinofà 75m. Æ 7,3/ Hio,1a 11 8........763,63|à 7 Em....... 758,72761 34 É|rgjà midi +100 7im. + 7,3] +i1o,o[\72m........761,19|à 3 s..... ....756,29|758,80 A|rola midi + 6,9[1 73m. + 6,0! + 8,3|a midi........ 759,64!à 7? m.......758,89|759,64 HitGlamidi + 7,àl111s. + 2,9] + 7,3|à 115... ..... 76725|à 7 im....... 763,60/765,76 Blrlaros. + 48/à 43 m. + 0,2] + 4,0[141m....... 768,10là 10 s........ 762,28|766,83 Al1B8a3s. + 6,1117im. + 4,5| + 58la72m......…. 757,00] à 9 5... ...... 750,00|753,52 Alrolà midi + 6,97 im. + 3,8| + 6,9/1105s....... 7HO 60|MO Secret 747,00|748,16 v0!à 115. + 5,0 841 m.— 0,5| + 4,5là72m....... 758,50[à 11S...0.. 0... 792,06|759,32 Aizilhmidi H 9,là 1os. + 4,3] + 9,0[à 10 5......... 750,62|à midi........ 74718|747,18 22fà3s + 9,6 74 m.—+ 4,8] + 9,1[a3s.......... 755,061 7 i m....... 792,04/755,00 ll23/à midi <12,2/à 7 Em. Æ 09,9| H12,2/à7£m........753,02|à 3s..........792,01|752,98 Ni2ghhmidi + 9,9/h1025. + 5,6| + 9,9/à102+5.......754,92|à 74 m....... 747,90|747,54| Hiz5la ss. » 2È SECOND MÉMOIRE 4 NS IUTR: LA POUDRE A CANON: PAR TET PROUST. +’ c Quand je lis qu'Alladius@K IT , roi des Latins , après AEneas, inventä le moyen de contrefaire le tonnerre et la foudre, pour faire accroire à ses sujets qu’il fut Dieu : qu’à la fin la foudre prit en sa maison, et qu’il y mourut, que puis-je croire que ce fut, sinon poudre à canon? ; Flurance Rivault. Elémens d’artillerie, 1600. 0 LE Mémoire précédent avoit pour objet d'appeler l'attention sur la propriété qu'ont en général les charbons de faire dé- toner le salpêtre dans des espaces de temps extrèmement inégaux. Ces différences qui n’avoient point encore été remarquées jus- qu’à ce jour , nous ont aussi fait entrevoir la possibilité qu’il y auroit de commencer, pour ces combustibles, une évaluation ‘Tome LXXII. FÉVRIER an 1811. _P 114 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE dont la base seroit la durée même de leur détonation; eten effet, la combustion par l’oxigène du salpêtre, ne différant point, quant au fonds , de toutes celles qu’on peut exécuter avec l'oxigène de l’atmosphère , il est évident que la première pourroit nous conduire à fixer plus précisément qu’on ne l’a pu faire encore, la durée respective des charbons dans nos fourneaux, et par conséquent leur valeur réelle, si l'on peut dire ainsi. Ces résultats, à la vérité , ne nous apprendroient rien sur leur valeur respective dans le commerce ; mais ce n’est pas non plus de celle-ci dont il s’agit en ce moment, car sous ce dernier rapport, on sent bien que le prix des charbons ne peut qu'être subordonné à l'abondance ou à la rareté des bois qui les fournissent; mais en attendant qu’on vienne à re- prendre cet apperçu pour le soumettre à un nouvel examen , nous allons nous occuper dans cette seconde partie, du charbon que l'Espagne a spécialement adopté pour la confection de ses poudres. Nous dirons d’abord , que les fabriques de cette nation, tout en marchant sur les traces des nôtres , tant pour l'amélioration des procédés que pour la proportion desingrédiens, n’ont, malgré cela , point jugé convenable d'abandonner le charbon, dont elles avoient fait choix pour celui de la bourdeine, ou d’autres bois légers dont nous le tirons en France, et nous verrons bientôt qu'elles ont eu raison. Pourquoi les Espagnols nous auroient- ils imités en ce point , eux qui pouvaient au contraire se flatter de nous donner des leçons? Le charbon dont il va être question, est celui que fournit Ja chenevotte, ou la tige du chanvre , quand elle a été dépouillée de sa filasse. Il paroît que l'Espagne s’en sert depuis long- temps, peut-être même depuis l'introduction de la poudre chez elle. Col/ado et Ufano, auteurs de cette nation, qui écri- virent sur l’artillerie , le premier en 1592, et le second en 1614, les seuls Traités que j’aye pu consulter à Paris, n’en parlent pas; mais il faut remarquer que quoiqu’au service de l'Espagne, 1's firent presque toujours la guerre hors de leur patrie, c’est- à-dire l’un dans le Milanais et l’autre en Flandre. Quoi qu'il en soit, les chenevottes donnent leur charbon encore plus fa- cilement que nos bois blancs, et l’incinération qu’on pourroit avoir lieu de craindre pour une braise aussi combustible , ne l’est pourtant point dès qu’on est au courant d'une certaine routiue qui, là comme ailleurs, assure le succès de ce qu’on ET D'HISTOIRE NATURELLE. 115 pratique fous les jours dans la plupart de nos arts. Nous allons donc examiner ce charbon dans ses rapports avec la poudre, et nous nous convaincrons, J'espère, que la persévérance des fabriques espagnoles , à cet égard , ne pouvoit être mieux fondée, puisque , d’une part, elle reposoit sur des motifs réels d'éco- nomie, et de l’autre sur l’ensemble des qualités les plus par- faites qu'on puisse desirer de trouver dans un charbon destiné à la poudre. Mais avant de rien commencer, je demande au lecteur la permission de me débarrasser ici d’une courte notice sur celui de l’asfodèle , asfodelus ramosus. On me l’apporta de Mayorque, en m'apprenant qu'il pouvoit, à cause de son éminente combustibilité, mériter une place parmi les charbons qu’on examinoit alors dans les lecons qui se donnoient sur la poudre au Corps Royal d’Artillerie. Charbon d’Asfodile. C’est bien en effet le plus friable et le plus léger de tous ceux que jai vus. Ses canons sont si tendres, qu’à la moindre pression des doiotsi, ils se réduisent en poussière tellement im- palpable , que le souffle le plus léger suffit pour l’éloigner à perte de vue. Il est en second lieu si inflammable, qu'on a ‘imaginé, à Mayorque, d’en faire de l’amadoue. Les fumeurs en étendent une pincée sur leur pipe, et à la première étin- celle du briquet, il prend feu; mais quelqu'abondante que soit l’asfodèle dans cette île, et elle l’est aussi beaucoup en Espagne , il seroit embarrassant d’en faire des provisions, à cause du volume de son charbon qui est véritablement excessif. Dans la disette de tout autre pourtant , c’est une ressource qu’on ne mépriseroit pas, et dans un pays encore où le bois blanc ne se trouve pas partout comme chez nous. Au reste , relativement à la détonation , ce charbon n’a aucun avantage sur celui du chanvre, comme on l’a vu dans le tableau de leur comparaison. Ainsi ce dernier va reprendre dans notre travail la première place , parce qu’elle lui appartient sous tous les aspects. Disons encore deux mots sur un point dont le souvenir mérite d'être conservé. A l’époque désastreuse pour l'Espagne, où ses botanistes furent chargés de faire une nouvelle revue dans le règne végétal, afin de voir s'ils n’y découvriroient point encore quelque ressource oubliée pour subvenir à la disette, Cavanillès me remit des racines d’asfodèle à examiner ; mais malgré qu'en Pre = 116 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ait dit je ne sais quel auteur, je n’y trouvai rien de bon. Ces racines qui sont longuettes, assez charnues et digitées à peu près comme celles de la pivoine , ne donnèrent aucune trace d’amidon. Cuites, on ne put en manger. Leur pulpe est jaune, tendre et analogue à celle du navet pour la consistance, mais malheureusement elle étoit gâtée par une saveur amère et même nauséabonde. Quant à la belle daklia , cette plante du Mexique dont l'Europe jouit aujourd’hui, grace à l'infatigable vigilance du même botaniste, ses racines très-charnues ne donnent pas non plus d’amidon. On peut les manger cuites; elles sont douces; cependant elles ne préviennent pas agréablement. Il leur manque à mon gré, je ne sais quoi, un parfum, peut-être, qui puisse en relever la fadeur, ou les rendre au moins plus appétissantes qu’elles ne me parurent alors. C'est dans la même année qu’un jeune botaniste , élève du même maitre, Lagasoa, découvrit le Zichen islandicus dans les environs du monastère d'Harbas sur la hauteur qui domine une des riches vallées des Asturies. Cette mousse dans laquelle la médecine n’a vu jusqu'ici que des bouillons contre une ma- ladie dont on ne guérit guères , est bien autrement intéressante quand on considère qu’elle est une ressource décidément ali- mentaire aussi saine qu’elle est agréable, Charbon de Chanvre. Après le charbon d’asfodèle et avant tout autre enfin, il faut citer celui de chanvre comme réunissant au plus haut degré toutes les qualités qu'on puisse desirer dans un charbon destiné à faire la poudre, et certainement il sera aussi l’un des plus faciles à avoir dans plusieurs de nos départemeris. Premièrement point d'écorcage, comme pour nos baguettes de bourdeine, de saule et autres dont l'écorce est terreuse et rarement exempte de graviers. Point de pulvérisation pour entrer au mortier : voilà déjà deux économies, et quant à l’approvisionnement, nous verrons fout-à-l’heure ce qu’à une même époque la France et l'Espagne payoient, l'une son charbon de bourdeine, etl’autre celui de chanvre. Moins léger que celui d’asfodèle, et presqu’aussi tendre, les doigts le réduisent également en une poudre infiniment déliée. L’approche-t-on de la flamme d’une bougie, il y prend feu ET D'HISTOIRE NATURELLE, 117 comme l’amadoue et continue de brûler seul jusqu'à ce qu'il soit en cendre. Celle-ci n’arrive point à un deux-centième, et elle est presque tout silice. Il ne donne aucune trace de prus- siate quand on le traite avec la potasse; cependant il exhale sensiblement l’ammoniaque si on l’incinère dans un creuset ; mais il y a, je crois, peu de charbons quin’aient plus ou moins cette propriété. A cette température, sans doute, l'hydrogène, puis cet azote qui a été dernièrement l’objet des recherches de Berthollet, et qui pourtant se trouve là dans un état parti- culier, puisqu'il ne peut faire d’acide prussique, cet azote et l'hydrogène s’attirent réciproquement pour constituer de l’am- moniaque à l'instant même où le carbone de son côté les aban- donne : peut-être même aussi, mais, difficilement sans doute , l'azote de l'atmosphère prend part à ces résultats. Quelques personnes en France, ont hésité de croire que les Espagnols pussent tirer du charbon d’un chanvre pareil au nôtre. Elles avoient raison, assurément , si elles se représentoient ceux qu’on rencontre en Normandie , sur les bords de l'Oise et ailleurs. Ces plantes-là s’y montrent en effet si basses, si molles et si menues de tige, qu’il faut indispensablement les écraser à la broye , pour en avoir la filasse; mais avec des chanvres tels que ceux qu'on cultive à Tours, à Saumur, à Angers et dans les vallons qu’arrosent l’Authion, la Maine, la Sarthe , la Loire , etc., avec ces tiges nerveuses et rustiques de quatre, cinq et six pieds de haut , dont les filasses ne servent que dans la marine, c’est bien autre chose. Voilà la plante que l’on teille dans les longues soirées d’hiver, pour avoir de la chenevotte. Le bois de celle-ci a du corps, et bien assez pour chauffer le four, la marmite et autour d'elle, toute la fa- mille. Voilà la chenevotte qu’on charbonnoïit en Espagne pour le service des poudreries de Manresa en Catalogne, de 7’i//a- Feliche en Aragon , de l’Æ/cazar, de San-Juan dansla Manche, et dans les environs de Murcie. M. Delamétherie m’assure aussi que l’on a de ces chanvres-là dans la Bourgogne. Je vais transcrire la méthode qu’on suivoit à #7//4 Rubia de Los Ojos, petit village dont les laboureurs étoient en pos- session d'approvisionner les moulins de l’Æ//cazar de San-Juan. Je le tiens de dom Domingo Garcia Fernandez, élève de Darcetet de Chaptal en France, et depuis directeur des poudres etsalpêtres de S. M. Catholique. Fernandez est un homme que l'Espagne récompensera sans doute un jour, pour un des services les plus 118 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE signalés qu'un sujet puisse rendre à son Roi. C’est lui qui, le premier, a su faire servir les rayons du soleil à l'évaporation des eaux salpétrées. Par cette heureuse application il a res- titué aux villes et aux campagnes, ces forêts de combustible dont les fabriques épuisoient chaque année les provinces où elles se trouvoient placées. Sous sa direction, les salpêtres de Castille , de la Manche, de Murcie, etc., qui coûtoient, chose incroyable si je n’en avois les documens sous les yeux, deux, trois et quatre fois plus qu’on ne les vendoit, ont été ramenés à donner du bénéfice au Gouvernement, et dans les salpé- treries qu’il créa lui-même à Sarragosse, le salpêtre pur au point de ne pas troubler la dissolution d'argent, ne revenoit qu'à 29 réaux l’arrobe, ou les 24 livres de France : résultat qui certainement ne s’est vu nulle part en Europe; mais je me hâte de revenir au charbon. . Dans un sol de pierre calcaire, on entaille une fosse de 13 à 14 pieds de long sur huit de large, et d’environ deux pieds de profondeur. Sur ce fond soigneusement balayé, l’on étend un lit de chenevottes de trois à quatre pouces d’épaisseur. Ensuite on y met le feu en plusieurs endroits à la fois: puis au moment où la flamme commence à s'élever, on l’étouffe en la couvrant de chenevottes. Bientôt après la flamme revenant au-dessus, on la réprime avec d’autre chenevotte , et ainsi de suite jusqu’à ce que la fosse soit à peu près remplie de braise. Lorsqu'on juge le charbon fait, un homme vient en arroser légérement la superficie en remontant d’une extrémité à l’autre , tandis qu’un aide placé après lui, le soulève avec une fourche et le renverse, afin que le tout ayant part à cet arrosement, parvienne à s’éteindre à fond. Aussitôt après l’on tire le charbon sur les bords pour l’y laisser refroidir, et l’on recommence une autre combustion. Pendant ce temps-là, d’autres s'occupent à le cribler , quelques-uns même à le vanner, mais alors ils en perdent beaucoup. Ce travail dure un jour, et son produit est de 16 à 20 arrobes, ou 4 à 5 quintaux de Castille. À Villa Feliche l’on brüloit la chenevotte sur une aire sim- plement pavée en dales, et on y suivoit à peu près le même procédé ; seulement on n’y travailloit que de nuit, ou dans des jours nébuleux, parce qu'on avoit remarqué que si le soleil venoit à frapper sur ce charbon éteint, maïsencore chaud, celui- cise rallumoit quelquefois et se consumoit rapidement. Alors il falloit l’arroser de nouveau, ce qui assujétissoit à le garder plus long-temps au séchage. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 119 Au temps passé l’on charbonnoit aussi dans des jarres de terre cuite enterrées jusqu’à la bouche , et avec les précautions qui sont d'usage chez nous pour faire du charbon en fosse. Une jarre pour faire du charbon! oui! mais que cela n’étonne pas! Au Toboso, village bien connu de ceux qui ont lu Don- Quichotte,onen fabriquoit de cent, deux centset deux cent vingt- cinq quintaux.... Enfin les manipulations de ce charbonnage sont décrites dans un Traité de la chasse d’Æ/onso Martinez de ÆEspinar, imprimé à Madrid en 1644. Cet auteur recommande sur tous les autres, ie charbon de chanvre comme étant le meilleur qu'il eût trouvé pour la composition des poudres fines. M. Champy, l’un des membres de l’administration impériale d'aujourd'hui, lors de son voyage en Egypte, eut occasion d'observer qu’on l’employoit aussi à Malthe, mais pour la com- position des poudres fines seulement. On en a encore fait usage en Sicile, à Naples et même à Bologne, au rapport de Joseph Alberti dans sa Pyrotechnie, Venise 1749. Parmi les auteurs de cette science , assez nombreux en Italie, dans les trois siècles antérieurs au nôtre, je n’en trouve aucun qui fasse mention du charbon de chanvre. Quelques-uns sans doute m'auront échappé; mais chez nous je ne trouve que Æanzelet qui en ait parlé dans sa Pyrotechnie de l’an 1659. Cet auteur le re- commande également pour les poudres fines. Nous reviendrons sur ce qu’il en dit. Telle étoit enfin la manière de faire ce charbon. Les che- nevuttiers de profession, agramadores, le fournissoient en 1805, à raison de trente-deux r1aravedis , ou de cinq sous moins deux trente-deuxièmes l’arrobe de Castille, qui équivaut à 23,809 de nos livres de France, ou si l’on veut, à près de vingt-quatre livres. - Si nous comparons actuellement la foible dépense de cinq sous, prix de vingt-quatre livres de charbon de chanvre, avec celle de 144 sous, valeur habituelle de vingt-quatre livres de celui de bourdeine ou autre bois-blanc, fait dans la fabrique d’Essone, nous avons pour résultat deux sommes qui sont l’une et l’autre comme 5 est à 144, ou plus simplement, comme un est à 28,8, c’est-à-dire que le charbon que la Franceemployoit à cette époque , lui coûtoit près de vingt -huit fois plus que celui que l'Espagne consumoit de son côté pour le même objet, Assurément ces différencessont assez remarquables pour que nous essayions d’appliquer ce calcul au produit annuel des poudres de l’Empire. 120, JOURNAL DE PHYSIQUE»; DE CHIMIE Nos moulins émettent , année commune, trois millions de poudre; dans ces trois millions, le charbon de bourdeine y entre pour la quantité de 420,000 livres, à raison de 14 pour cent, au dosage de guerre. Actuellement pour rendre nos comparaisons plus faciles, nous Convertirons cette quantité en arrobes de vingt-quatre livres; alors, au lieu de 420,000 livres, nous aurons 17,500 arrobes de charbon qui , à raison de 144 sous chacune, font une somme de 126,000 francs. Mais en Espagne , pareil nombre d’arrobes de charbon de chanvre ne coûtoit qu'un égal nombre de pièces de cinq sous, c'est-à-dire 4,375 francs. Donc la dépense faite en France est a celle qu’on faisoit en Espagne pour le même objet, comme 126,000 francs sont à 4,575 francs , ou comme 28,8 est à 1. D'où l’on peut conclure , que les difficultés qu’on éprouve toujours à substituer une pratique à une autre une fois vaincue, l’on trou- Veroit un bénéfice très-réel à substituer la chenevotte à la bour- deine, qui devient chaque jour plusrare en France. Les fabriques espagnoles persistoient donc avec raison dans l'emploi de ce charbon. Dans les provinces que j'ai citées plus haut, comme dans la majeure partie de l'Espagne, le combustible étoit rare ; cette circonstance ajoutoit dès-lors un nouveau prix à la chenevotte. Le laboureur, cependant, trouvoit du bénéfice à la céder. Chez nous il trouveroit donc aussi son compte à nous l’abandonner pour en faire du charbon, et d’autant mieux que la ressource des autres chauffages est, toutes choses égales, bien moins rare dans les provinces de l’Empire , où l’on récolte les hauts chanvres, que dans celles d'Espagne où l’on s’adonnoit à la même culture. Je ne vois pas d’après cela qu’on pût élever des objections bien sérieuses contre la substitution d’un charbon à l’autre, sous le rapport d'aucune considération agricole. Au reste, quand un laboureur consent à céder pour de l’argent une denrée qui estnécessaire à sa consommation , c’est qu’à coup sûr il ne perd rien à ce marché. Il nous reste maintenant à développer ici bien d’autres motifs d'adoption. Ces motifs, unis aux raisons d'économie dont nous venons de rendre compte, pourront enfin paroître assez prépon- dérans pour que l’on soumette à la discussion le sujet qui fait la matière de ce Mémoire. e L'administration impériale des poudres et salpêtres de France, connoissoit bien l’emploi qu’on faisoit en Espagne du charbon de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 121 de chanvre pour la confection des poudres; mais jusqu'au mc“ ment où je vins à Paris avec commission du Gouvernement pour m'occuper de cet objet, elle n’avoit pas encore élé à même de fixer définitivement ses idées sur la valeur de ce charbon. Elle n’avoit eu aucune occasion de le soumettre aux essais qu'elle avoit déjà terminés sur toutes les autres espèces dont on peut disposer dans l’étendue de l'Empire. Frappée de plus en plus des avantages sur lesquels j’appelois de nouveau son attention, parce qu'ils résultoient également des recherches particulières que j'avois entreprises à Madrid, elle accueillit avec empressement l'offre que je lui fis d’en faire venir de Madrid. Fernandez, de son côté, se chargea de seconder nos vues, et peu de temps après, l’administration reçut un baril d'environ dix livres du même charbon qu’on employoit dans les fabriques royales de l’Æ/cazar de San-Juan. Cette quantité parut suf- fisante pour les épreuves auxquelles on desiroit le soumettre, et notamment pour celle de la poudre de guerre. Laissons main- tenant parler M. Robin, commissaire de la fabrique d’Essone, auquel l’administration prescrivit les essais qu’il couvenoit de faire , et dont elle a bien voulu me communiquer les résultats. Essone , 5 février 1808. « À la réception du baril, je l’ai fait défoncer : le charbon » m'a paru très-sec et en fort bon état, il laïssoit même vol- » tiger beaucoup de poussière, ce qui prouve encore mieux sa » siccité. » Hier j'ai fait éplucher avec soin ce charbon, dans lequel il » ne s’est pas trouvé plein ie creux de la main de brülots; j'ai » fait ensuite charger deux mortiers de mélange au dosage de » notre poudre de guerre, l'un avec du charbon de chanvre et » l’antre avec celui de bourdeine, pour lui servirde comparaison. » Nos deux mortiers ont été arrosés chacun avec l’eau qui leur » correspondoit. Le mortier à bourdeine a pris facilement, celui » au chanvre a eu de la peine à prendre. Z/ a soufflé pendant » quelqué temps , mais à la fin nous en sommes venus à bout. » À huit heures trois quarts, on a fait le premier rechange. » La matière au chanvre avoit bien pris, et à chaque rechange » on voyoit qu’elle prenoit plus de corps que celle au bourdeine. » Un peu avant la nuit nous avons retiré de la batterie nos Tome LXXII. FÉVRIER an 1811. Q 122 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » deux épreuves. Le mélange au chanvre avoit beaucoup plus de » consistance et promettoit plus de grain que celni à- bourdeine. » Je me propose de faire incessamment un essai en poudre fine. » Par ces premiers succès nous voyons déjà que le charbon de chanvre, quoiqu’éteint par arrosement , ne tire pourtant aucun désavantage de cette manipulation. En France elle ré- pugneroit aux idées que nous nous sommes faites de l’importance d’une parfaite siccité dans ce combustible. Malgré cela, si l’on réfléchit bien à la propriété qu'ont tous les charbons d’être for- tement hydropotes, on n’apperçoit plus autant de différence qu’on le croiroit entre ceux qui ont été éteints à l'espagnole, et les nôtres que nous garantissons si soigneusement de toute hu- midité; et en voici la raison : si les nôtres restent quelque temps en magasin avant d'entrer dans les mortiers , ils enlèvent ra- pidement, à l'atmosphère cette portion d’eau qu’il est de leur essence d’avoir dans leur état habituel, car ne perdons pas de vue que le charbon et le carbone ne sont pas la même chose. Si au contraire ils vont au mortier avant d’avoir eu le temps de satisfaire à cette tendance, l’eau qu’on ajoute au mélange les remet au niveau des premiers, Ce qui, par conséquent , revient au même. La poudre n’étant pas de sa nature un com- posé chimique, il ne faut pas croire que le charbon abjure en y entrant, la disposition qu'il a à se saturer d’eau, comme cela arriveroit à un acide ou à un alkali qui entrent en combinaison; mais le charbon de chanvre recoit immédiatement cette eau de l’arrosage par lequel on le termine: le voilà donc, par cela même, aussi à la hauteur des nôtres. A la bonne heure, ‘dira-t-on ; mais si un charbon conserve de l'humidité, com- ment compter sur un dosage rigoureux ? Une portion d’eau ne viendra-t-elle pas remplacer ici une portion de charbon? Oui, sans doute, mais le dosage de votre charbon est-il , de son côté, dans le rapport mathématique qui convient strictement à la décomposition du salpêtre que vous y mêlez? On verra dans la suite combien il s’en faut. Par ces premiers succès, l’on voit encore que la difficulté d’incorporer ce charbon qu'on ne connoissoit pas, une fois vaincue , avec un peu d'habitude, z/ prend ensuite plus faci- lement que celui de bourdeine. On voit qu’il promet aussi des récoltes de grains plus abondantes, à raison d’un empâtement plus parfait entre les ingrédiens de la composition. Quant au soufflage dont parle M. Robin , notre bon Æanzeles ET D'HISTOIRE NATURELLE: C 123 le remarqua bien aussi dans son temps. « Pour le prévenir, il » faut, dit-il, faire dissoudre un peu de colle de poisson de- » dans votre humectation, afin que votre charbon ne s’envole » en battant, page 262. » L’addition que cet auteur recommande ici, me paroît bien vue, même autant pour le charbon de chanvre que pour tout autre que ce soit. Fixer la poussière du charbon est peu de chose, sans doute, mais l'avantage de rendre le grain de la poudre plus pur, moins sujet à se dégrader par les secousses durant la marche des armées, est incontestable car c’est le transport qui réduit communément un sixième de nos poudres de guerre en poussier. Quelle perte de main-d'œuvre! mais c'est un point sur lequel nous reviendrons dans la suite. Du 21 novembre 1809. J'ai fait aussi une poudre de chasse avec votre charbon et celui de bourdeine. J'ai remarqué pendant le battage , que la poudre au chanvre prenoit corps bien plus facilement, qu'elle étoit plus aisée à conduire, que la pâte en étoit mieux liée et qu’elle se grainoit plus abondamment. 10 août 1810. ( Essai de Poudre fine. « J'ai fait peser denx charges de mortiers au dosage de poudre fine, l’une avec le charbon de bourdeine, l’autre avec celui de » chanvre. Ces matières ont été battues dans la journée suivante. » Le mortier au chanvre a été beaucoup plus facile à conduire » que celuiau bourdeine. La matière de ce derniersembloit tantôt >» trop humide, tantôt prête à souffler, tandis que celle auchanvre » se comportoit avec plus d'uniformité, etelle a paru après le » battage, avoir plus de corps que l’autre. » Dans les battages subséquens le chanvre a continué de se » conduire mieux que le bourdeine et d’acquérir plus de consis- » tance; il a aussi donné plus de grains, ce qui estun avantage » précieux. » LA Ces nouvelles épreuves achèvent donc de démontrer que le maître poudrier une fois au fait du tempérament de ce charbon, n’a plus trouvé de difficulté à l’incorporer avec les autres ingré- diens; et alors sa supériorité sur celui de bourdeine, s’est dé- ployée sous ce rapport, avec tout l’avantage que pouvoit pro- mettre une diffusibilité qui le place si fort au-dessus des autres. Plus en avant nous aurons lieu de voir que les poudres qu'en Q 2 124 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, a fabriquées M. Robin , tant celle de guerre que de chasse, se sont montrées aux éprouvettes, non pas plus fortes , parce que cela chimiquement n’est point possible, mais au pair des meil- leures de la fabrique impériale d'Essone , ce qu’il étoit aisé de prévoir, à n’en juger que d’après la rapidité avec laquelle nous avons vu notre charbon faire détoner le salpêtre. Venons-en maintenant au développement des conséquences que nous offrent les observations de M. Robin. Le charbon de chanvre unissant, comme nous l'avons dif, à tous ses autres avantages, l'attribut d’une divisibilité surpre- pante, n’a, si l’on peut dire ainsi , rien à attendre du mouvement des pilons. Le jeter au mortier avec les autres ingrédiens, c’est en quelque sorte mêler ceux-ci à un corps déjà liquéfié, tandis qu'en comparaison de lui, nos charbons pulvérisés de France ne sont que des poudres arides et graveleuses, qui ne se prêtent que tard à l’empâtement, et auxquelles , par conséquent, l'effort des pilons n’est pas moins indispensable qu’au soufre et au sal- pêtre; et comme en outre, le complément de mixtion d’où dépend bien réellement la forcé des poudres , ne s'obtient qu'autant que chacun de ses trois facteurs a acquis la division la plus exaltée , il faut en conclure que le charbon qui en jouit déja , même avant d'entrer au mélange, ne peut manquer de laisser l'action des pilons retémber toute entière sur les deux autres. Alors, comme l’a remarqué M. Robin à qui les lumières d'une long e expérience ont donné plus qu’à personne le droit de prononcer en cette matière; alors les pâtes infiniment plus duc- tiles et plus liantes, doivent, par cela même, grainer plus co- pieusement, et occasionner par conséquent, moins de poussiers et moins de rebattages. Tels sont les avantages qui méritent d'être, plus que jamais, pris en considération. Au reste, sans vouloir ‘insinuer que le charbon de chanvre doive amener la proscription de celui de bourdeineet autres , puisque nous faisons tous les jours avec ceux-ci d’aussi forte poudre qu’avec le premier, il est au moins sensible à la réflexion que, relativement aux économies, d'achat, de temps et de manipuiations, un charbon qu'on acquerroit à vingt-sept fois moins de dépense qu’un autre, qui contiendroit plus de carbone qu'eux tous, qui les surpas- seroit tous par la vitesse avec laquelle il propage la détonation, un charbon qui en outre n’assujétiroit à aucune trituration préalable , qui empâteroit plus intimement et plus vîte, ne pour- » ET D'HISTOIRE NATURELLE. 125 roit pas moins que de frapper l'attention des chimistes (1) qui ont le mieux éclairé cette partie, comme des administrations mêmes (2) qui, de concert avec eux, ont établi en principe : que la détonation la plus simultanée, jointe à l'avantage d’une commixtion parfaite, sera dans tous les temps la base fondamen- tale de l’art de fabriquer la plus excellente poudre. Et si l’on ne jugeoit pas à propos d'admettre tout-à-coup un changement de cette importance , parce qu'en effet une grande circonspection impose le devoir de l’examiner avec toute la ma- turité possible, j’opinerois toujours à ce qu’on l’essayât, du moins dans l'une des fabriques qui ont la chenevotte à leur portée. Alors on recueilleroit à l'avance les observations que ce nouvel emploi pourroit offrir, afin de les avoir au besoin pour le moment où l’on se détermineroit à le rendre général dans toutes les fabriques de l'Empire. Telle est l’image de ce qui se passoit entre deux nations voi- sines dans leur manière de confectionner la poudre. Les fa- briques de l’une jouissoient depuis trois siècles, peut -être, de tous les avantages d’un choix parfait en ce genre, tandis que, tombées sous le joug d’un préjugé (5) consacré par des ordon- nances, celles de l’autre n’avoient pas la liberté de mieux faire, et s’'entravoient même encore dans l'opinion bien particulière, que la France ne produisoit point des chanvres assez forts pour donner du charbon propre à la poudre. D'un côté comme de l’autre, à la vérité, l’on fabriquoit également bien, car que ce fût avec plus de travail, que ce fût avec moins, on n’en arrivoit pas moins au même but, c’est- à-dire à faire des poudres de même force. La nature de cette mixtion ne comporte pas d’ailleurs autre chose, surtout quand il ne s’agit que de poudre pour le service du canon, ce n’est, (1) « La meilleure poudre est celle qui s’enflamme le plus instantanément, » qui, en moindre dose, produit plus d’effet et altère le moins les armes. » Instruction sur les Poudres de guerre, par Guyton, Fourcroy, Berthollet , Chaptal , Monge, Perrier, Carny, Pluvinet, Hassenfratz , du Fourny. (2} « I est constant que le bois tendre et léger qui fournit un charbon » friable , poreux d’une combustibilité rapide, etdonnant le moins de résidu, » par conséquent plus de carbone, doit être celui qui réunit les conditions » exigées pour cet emploi. » Manière de préparer le Charbon pour la poudre ; par MM. Champy, Bottée et Riffaut , administrateurs des poudres et salpêtres de l’Empire. (3) Saint-Julien, dans ses Forces de Pulcain 1606, me paroît être le premier auteur à qui nous sommes redevables de l’opinion , que le charbon de bour- deme mérite la préférence, quoique, dit-il, ceux de saule, de coudrier et d’aune soient assez bons. 120 JOURNAL DE FHYSIQUE, DE CHIMIE, comme nous le verrons dans la suite, que relativement aux petites armes qu'il peut y avoir des poudres fortes ou foibles; mais on a pris, dira-t-on, sur l'Espagne des poudres qui se sont trouvées mau- vaises à l’éprouvette: sans doute , mais aussi est-ce avec des monnoies de mauvais aloi qu'il faut arguer contre le titre qu’un Gouvernement a adopté? Quant aux poudres fines, je n’en ai trouvé aucune parmi les échantillons d'Europe que j'ai été à même de rassembler à Madrid, je n’en ai vu aucune l’emporter en force sur celles qui furent fabriquées par Ruedu , directeur des moulins de Manresa. Je saisirai cette occasion, puisqu'elle se présente ici, de rendre à cet estimable Commissaire, une commémoration honorable pour les progrès que dans son temps il fit faire à l’art des poudres. Ses succès, il est vrai, lui coù- tèrent cher; toutes les machinations de l’envie vinrent fondre sur lui. Pauvre et surchargé de famille, il ne lui resta pour s'y soustraire, qu'à mourir de chagrin. En dernière analyse, on peut conclure de tout ceci, que relativement au rôle qu'ils ont à jouer auprès du salpêtre, les charbons de chanvre, @e euplier, de bourdeine, de noyer même , tout arriéré qu’il est en fait de détonabilité, ne diffèrent pas autant les uns des autres qu’on pourroit le penser d’après le tableau que nous avons donné. L'un résistera plus que l’autre à la division ou à l’incorporation; mais il n’en offrira pas pour cela moins de carbone au salpêtre, et les gaz qui doivent en résulter ne seront pas, de leur côté, moins nombreux. A la vérité, s'il s’agissoit de faire des poudres sans soufre, la meilleure seroit sans doute celle qu’auroit fourni le charbon qui propage le mieux l’ignitio®; mais dans celles dont le soufre fait partie, c’est autre chose : des charbons aussi combustibles que celui de chanvre, n’y sont plus aussi essentiels, sous ce rapport, attendu que le soufre introduit, de son côté, des résultats qui, par l'effet d'une influence singulière, ont le pouvoir de remonter les charbons les plus paresseux , au niveau de ceux qui détonent avec le plus d'accélération: c’est, comme on voit, un point de vue qui nous rapproche d’une opinion que Ma/thus (1) et Beaumé avoient adopté, le dernier, néanmoins, sans l'avoir appuyé sur des faits capables de se concilier l’assentiment de ses lecteurs. D RDS Es Le BETA N 2 ad Be AIR FIRE ER RER (1) Pratique de la guerre, par Malthus , gentilhomme anglais au service de la France, 1650. (La suite incessamment. ) ET D'HISTOIRE NATURELLE. 127 SUR L'INFLUENCE DE LA DIRECTION DANS LA PROPAGATION DU CALORIQUE ; Lu à la Société Philomatique les jours 5 et 19 janvier 1811: Par BARTH. pe SANCTIS. Enrectifant les expériences déjà connues, et en leur donnant une plus vaste extension , on a été souvent plus utile aux progrès des sciences naturelles, qu'en en tentant des nou- velles. J'oserois me flatter de leur avoir rendu quelque service, si de nouveaux essais d'expériences , que je vais entreprendre dans ces jours , pouvoient confirmer les résultats que j'obtins à Rome vers la fin de l'avant-dernière année, en cherchant l'influence de la direction sur la propagation du calorique. J'obtins ces résultats au moyen d'un appareil des Académi- ciens del Cimento , que je tâchai de rectifier et de rendre propre à des recherches ultérieures. Ces Académiciens ayant observé que dans les corps chauftés dans l'atmosphère, la direction verticale supérieure étoit la plus favorable à la propagation du calorique, soupçonnèrent que dans un espace vide on pourroit observer quelques variétés, dont on tireroit probablement des conjectures sur les principes de son mou- vement naturel. Pour cela ils appliquèrent dans la partie supérieure d’un tube barométrique, deuxthermomètres d’une manière très-ingénieuse, comme on peut le voir dans les Saggj di naturali esperienze fatte nell Accademia del Ci- mento. Après cela ils exposèrent ces thermomètres à l’action de deux sphères rougiesau feu (voy. fi. 1, pl. 1). Issoutenoient ces sphères à droite et à gauche de la partie supérieure du tube barométrique à égale distance de ses parois, et en rap- 28 JOURNAL DE PMYSIQUE, DE CHIMIE prochant leurs centres du plan horizontal tangent de la boule du thermomètre inférieur. Dans cette expérience ils virent que l'ascension étoit toujours plus favorable à la propagation du calorique; mais ils virent encore en opérant sur le tube rempli d'air atmosphérique , que le phénomène avoit lieu avec plus d'intensité, de manière que, toutes choses d’ailleurs égales autant que possible, la différence plus grande entre les températures des deux thermomètres, étoit dans le pre- mier cas de deux, et dans le second de cinq degrés. La séconde observation fit conclure aux Académiciens del Cimento, que les courans d'air favorisent l'ascension du calorique, pen- dant que la première les fait pencher à croire que le calo- rique tend naturellement à se propager plus vers le haut que vers toute autre direction. Mais laissant à part, que dans la recherche des lois de propagation du calorique, il ne faut pas méler ensemble les effets du calorique, quise pro- page par rayonnement avec ceux du calorique qui se propage par la faculté conductrice des corps, et que ces deux diverses manières de propagation n'auroient pas dû échapper à la sagacité desdits observateurs, s'ils avoient su tirer tout le parti qu'ils pouvoient de certaines autres expériences, il est sûr que dans l'appareil dont il s’agit , ils n'évitèrent pas l'effet perturbateur des courans de l'air extérieur , quoiquils tachèrent de le corriger en partie par la position de leurs sphères métalliques. Ajoutez à cela, que dans leur appareil il devoit y avoir toujours un peu d'air et de vapeur aqueuse au-dessus du mercure; car je me suis assuré que cela a toujours lieu lorsqu'on ne fait pas bien bouillir le mercure dans le tube avant de le renverser pour effectuer le vide : ce qui fait que les courans intérieurs , quoiqu'affoiblis, n'en sont pas éliminés autant que possible. De plus, comme le calo- rique dans cette expérience rayonne sous des angles très-petits sur les boules des thermomètres, on ne tire pas le meilleur parti de la différence de direction dans le rayonnement, dont les différens effets, s’il y en a, seront certainement plus marqués à mesure que le calorique rayonnera sous des angles de plus en plus ouverts jusqu'à 180 degrés. Enfin les Académiciens del Cimento ayant seulement observé le résultat final des températures, négligeoient de faire attention au commencement et à la marche de leur altération, ce quiest de la plus grande importance, comme on verra par la suite. Cependant l'idée d'observer les effets du calorique dans le ï vide ET D'HISTOIRE NATURELLE, 129 vide de Torricelli , bien préférable à celui de Boyle, me parut ingénieuse; et d'ailleurs il me parut digne de la plus grande attention. Le but qu’on se proposoit dans la recherche, savoir, les lois de propagation du calorique dans différentes direc- tions. Je faisois toutes ces réflexions en même temps que je répétois quelques expériences de Leslie , sur le rayon- nement du calorique en y apportant quelques modifications. Une d’entre elles me fit voir que des lamines de verre de peu d'épaisseur, superposées à des corps métalliques échauffés, non-seulement n'arrétoient pas le rayonnement, mais quel- quelois même le favorisoient. Cela me fit naître l’idée, que pour éviter l'effet perturbateur des courans extérieurs dans l'appareil ci-dessus décrit, et pour séparer, au moins pendant quelque peu de temps, l'effet du calorique rayonnant de celui du calorique conduit, on auroit pu appliquer sur le tube directement des métaux échauffés ; mais il étoit né- cessaire en même temps, d'avoir un rayonnement dans des directions plus variées et plus divergentes, que dans l'ex- périence susdite, pour voir plus marqués les effets de la direction ; et il auroit valu mieux aussi détruire l'effet per- turbateur , quoique très- petit, du peu d’air et de vapeur aqueuse qui restoient au-dessus du mercure. Pour satisfaire à ces conditions, j'imaginai un appareil à mercure bouilli dans le tube (voyez fig. 2). Dans cet appareil, j’appliquai aux hémisphères creux 2, c, d les boules de trois thermo- mètres dans un bain de mercure, en les y fixant au moyen de plusieurs couches de cire qui, du bord de chaque hémis- phère, alloient se réunir au tuyau du thermomètre corres- pendant. Alors j'appliquai de légères températures dans ’hémisphère & à l'aide d'une demi-boule de fer du même diamètre. Cette demi-boule étoit adhérente à un manche du même métal, sur lequel glissoit une petite couche de liége qui alloit couvrir parfaitement la boule et le bord de l’hémisphère qui la contenoit. J'étois dans la plus grande attention pour observer ce qui se passeroit; mes yeux par- couroient rapidement les échelles des thermomètres; etquelie fat ma surprise, quand je vis peu après le thermomètre in- férieur se réchauffer le premier, ensuite celui du milieu, et enfin le supérieur ! Pendant quelques secondes la marche des altérations suivoit encore la même loi; mais à mesure que le tube se réchauffoit, cette loi commençoit à souffrir une perturbation irrégulière, jusqu'à ce qu'enfinelle devenoit Tome LXXII, FÉVRIER an 1811, R 130 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE inverse, et se maintenoit telle jusqu’à la fin. Les refroidis- semens ensuite eurent lieu très-lentement, et sans que je pusse fixer leurs lois. Le tube étant bien refroidi, ce qui n'ent lieu que long-temps après , je répétai l’expérience, et j'en eus le même résultat. La même chose arriva plusieurs fois de suite. Cependant comme il me sembloit que la demi- boule métallique ne coïncidoit pas parfaitement bien avec son récipient dans toute son étendue, je conçus l'idée de remplir le récipient d'un lut formé d'argile et de blanc d'œuf, et de faire ensuite une ouverture jusqu'à avoir une section semi-circulaire verticale etla plussaillante dans l'hémisphère. Alors le lut étant bien desséché, j introduisis un petit mor- ceau de fer des mêmes dimensions que le trou pratiqué, au lieu de la demi-boule; et les effets, quoique plus lents et plus foibles, furent les mêmes. Pour expliquer ce phé- nomène , je me dis: ici, les altérations initiales des ther- momètres ne peuvent pas être l'effet du calorique conduit; car aussitôt que le tube se réchauffe, la loi des altérations initiales se trouble, et finit par devenir inverse. Donc elles tiennent absolument au rayonnement qui se fait de l’hémis- phère central sur les autres. Donc ce rayonnement se fait ou avec plus de rapidité, ou avec plus d’intensité vers le bas que dans le sens horizontal, et plus dans ce sens que dans la direction verticale supérieure. Ayant communiqué cette observation et ces raisonnemens à l'Académie des Lincei dans la séance du 8 mars de l’année dernière, mes confrères me firent observer que peut-être ce phénomène tenoit à ce que les hémisphères thermométriques n'étant pas parfaite- ment égaux, comme aussi les boules des thermomètres cor- respondans , il auroit pu en résulter une différence consi- dérable dans la quantité de mercure formant les différens bains , ce qui auroiït bien pu occasionner dans le commen- cement, une accélération d'altération dans les thermomètres inférieurs, si cette différence eùt été dans une certaine proportion relative; mais qu'enfin le tube étant bien réchauffé et les courans extérieurs, par conséquent, étant très-forts, la loi devoit nécessairement se troubler et finir par devenir inverse. Je sentis la Force de cette observation , mais elle étoit tout-à-Fait inapplicable dans mon cas; car s'il y avoit quelque différence dans la quantité de mercure dans les différens bains: par les raisons susdites, elle étoit d'abord très-petite par les précautions prises dans, la construction de l'appareil, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 191 et en outre elle auroit été plutôt défavorable à l'accélération de l’altération dans les thermomètres inférieurs. Cependant, pour détruire entièrement la possibilité de cette objection, je vis qu'il auroit été nécessaire de pouvoir renverser l'ap- pareil pour voir si dansle changement de position des hémis- phères , le phénomène n'auroit également lieu En attendant quelques jours après, je revins à opérer sur le même appareil, et j eus occasion d'être encore plus surpris que la première fois, voyant que le phénomène n'avoit plus lieu, comme javois obseryé quelques jours avant, ni avec le plan se- mi-circulaire ; ni avec la demi-boule de fer ; il se manifestoit au contraire dès le commencement , comme il finissoit au- paravant ; ainsi il regtroit dans la classe de ceux qu'on obserge dans les corp&chauffés dans l'air. Je fus d'autant plus frappé de cela, que toutes les parties de l'appareil étoient dans le même état que le premier jour. Mais enfin, cherchant et recherchant de nouveau s'iln y avoit pas quel- qu'altération dans l'appareil, mes yeux tombèrent sur la surface supérieure du mercure, et y découvrirent une petite couche d’eau de presqu’une demi-ligne d'épaisseur , et de là redescendant le long du tube jusqu’au bain de mercure où il étoit plongé, je vis clairement une suite de petites bulles d’eau qui très-lentement montoient vers le haut de la co- lonne de mercure, et alloient augmenter la couche d’eau. Cette observation me fit voir clairement la raison de ce qui se,passoit dans l’altération des températures; car la-vapeur aqueuse qui avait rempli le vide, avoit anéanti une des plus intéressantes conditions de l’appareil : mais d'où étoit-elle venue celte eau? car certainement il n'y en avoit pas à la surface supérieure du mercure le premier jour des expé- riences , l'ayant observée sans eau plusieurs et plusieurs fois, à l'occasion que je comparois la hauteur de la colonne de . mercure dans l'appareil, avec celle d'un baromètre dont j'étois très-sür. Et comment la vapeur aqueuse a-t-elle pu empécher la production du premier phénomène? Quant à l'origne de l'eau, je suis bien sûr qu'elle provenoit du vase de verre où étoit plongé le tube barométrique dont le diamètre étoit bien considérable, Et en effet, ce vase avoit été lavé avec de l'eau peu avant qu'on l’eùt rempli de mercure pour y plonger le tube en le renversant , et on n'avoit pas eule soin de le neitoyer. D'ailleurs les petites bulles d'eau montoient encore, et montroient clairement R 2 " 152 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE par là, leur dérivation. Enfin je m'assurai après avoir dé- monté l'appareil , que le mercure contenoit une grande quantité d'eau, quoiqu'on l'eüt fait bouillir à plusieurs re- prises dans le tube avant le renversement. Quant à la manière dont la vapeur aqueuse a pu anéantir l’effet primitif, elle me semble bien difficile à déterminer. Est-ce par l'effet per- turbateur des courans intérieurs que cela a eu lieu? est-ce parce que la vapeur aqueuse a affoibli considérablement l'in- tensité du rayonnement? mais d’ailleurs il est connu par l'expérience, que l'intensité du rayonnement est en raison inverse de la densité des gaz. Cependant cet incident ne me découragea point , au contraire, il mé donna occasion de m'occuper davantage de la recherche entreprise, et de per- fectionner de plus en plus mon apparéil; car celui-ci s'étant brisé lorsqu'on y faisoit bouillir de nouveau le mercure à l'état primitif, je pensai en en faisant un autre, à le sim- plifier davantage et à le rendre propre a être renversé pour les raisons ci-dessus exposées. La fig. 3 présente cet autre appareil. Pour l'obtenir je fis des essais si nombreux sans aucun résultat favorable, que je fus sur le point de déses- pérer tout à fait de réussir dans le but que je me proposois; mais enfin j'eus l’heureuse idée d'unir un tube d'un bien petit diamètre, et de parois bien épaisses, avec un autre plus large qui étoit fermé à son extrémité , et au milieu duquel on avoit pratiqué d'avance des hémisphères rentrans, comme dans la figure. Les longueurs des deux tubes étoiente telles, qu'après le renversement il y avoit assez du petit au- dessus du mercure, à pouvoir y appliquer la flamme dela lampe pour en détacher la partie supérieure bien fermée. L'intérieur de cette partie étoit certainement le vide le plus parfait que nous puissions obtenir avec les méthodes con- nues ; car on avoit pris dans cette construction la précaution de faire bouillir à plusieurs reprises le mercure dans l’ap- pareil avant que de faire le renversement. Cependant l'ex- périence m'ayant appris, que même dans cette construction ie refroidissement du tube séparé, quoique faittrès-lentement et avec beaucoup de ménagement, produisoit souvent la rupture d'une petite portion du petit tube à l'endroit de fa séparation, je pris le parti de le plonger aussitôt après la séparation dans un contre-tnbe rempli de cire d'Espagne bouillante. Alors le tube se refroidissant avec la cire d Es- pagne, on prévenoit, même dans un cas de rupture, l’intro- ET D'HISTOIRE NATURELLP, duction de l’air dans son intérieur; car la cire d'Espagne se.figeoit toujours bien avant l'instant de la rupture, surtout lorsqu'on accéléroit sa fixation au moyen de la glace. On voit, d'un coup d'œil , que cette construction donne une plus grande simplicité à l'appareil, et le rend en même temps propre à être tourné dans tous les sens. Mais le plaisir d’avoir réussi dans ce que je me proposois, ne fut pas soutenu par l'observation du phénomène que je cherchois ; car l’ascension étoit toujours plus favorable au calorique dans quelque direction qu'on eùt tenu le tube. Cependant le phénomène, que m'’avoit montré le premier appareil, étoit toujours pré- sent à mon esprit, et J'étois enclin à attribuer cette irrégu- larité plutôt à l'imperfection du nouvel appareil , qu'à toute autre cause. Pour m'en assurer je fis construire une quantité considérable de ces tubes vides, en variant leurs dimensions, l’é- pce de leurs parois, la couleur, la pellucidité du verre, es distances des hémisphères de maintes et maintes manières. De plus, je fis les expériences avec les hémisphères ther- mométriques remplis de mercure et sans mercure, dans ce cas , avec des boules noircies; et à l'égard des températures, je les appliquai d’une infinité de manières, depuis les plus petites au-dessus de celle de l'atmosphère, jusqu'aux plus élevées possibles. Cela me fit voir que pour la réussite du phénomène dans cet appareil, il faut une certaine combi- naison de circonstances que je ne saurois encore assigner exactement. De tant de tubes que je fis construire, il n'y en eut que deux qui répondirent à mes espérances. Dans ceux-là , je fis l'expérience en faisant appliquer aux hémis- phères thermométriques , les boules noircies de deux ther- momètres par deux assistans , pendant que je tenois l’ap- pareil d'une main et appliquois la température de l'autre. Je me passai de mercure, car je vis qu'il anéantissoit en- tièrement les effets du rayonnement; je me passai aussi du liége dans le manche qui soutenoit la demi-boule métal- lique, car je vis, par expérience, que cette mesure étoit superflue. Mais je vis bien également , qu'il n'étoit pas in- différent d'agir avec lenteur et maladresse, surtout lorsque la température étoit bien élevée ; car alors il arrivoit très- souvent que les courans aériens réchauffoient le thermomètre supérieur, avant qu'on eùt placé la demi-boule dans l'hé- misphère central. J’observai de plus , qu'il y avoit certaines températures sous l'action desquelles le phénomène étoit 154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE bien plus marqué et plus facile à reconnoître. Dans ces deux tubes , opérant avec adresse et avec exactitude, je vis toujours que la direction descendante étoit la plus favorable au ca- lorique rayonnant, dans quelque direction qu’on eût tenu le tube. Quelques essais de ces expériences réussirent bien à l'Académie des Lincei' de Rome, peu avant mon départ de cette ville le mois d'avril passé , et quelques autres aussi à l'Académie des Sciences à Munich, le mois de juillet suivant à l’occasion de mon passage par cette ville. Ayant fait construire un de ces tubes à Munich , parl'ingénieur de Physique Vaccano, je m'apperçus que si on remuoit , même légérement, le tube peu après son refroidissement, dans un endroit obscur et sec, il se manifestoit une aréole électrique dans son intérieur ; si le vide n'étoit pas.bien fait, cela n'avoit pas lieu, l'humidité de l'atmosphère nuisoit beaucoup à la production de cet effet du calorique. Avant que de laisser ce travail, je voulus voir ce qui arriveroit dans un appareil comme celui de la fig. 4 Dans cet appareil, les thermomètres placés dans l’intérieur du tube, ne me permirent pas d’y faire bouillir le mercure, de manière que le vide n’étoit pas si parfait que dans le dernier. Ayant appliqué différentes températures, je vis que l'altération des thermomètres étoit si rapide , qu'il étoit hors de toute possibilité d'observer les altérations initiales avec exactitude; les différentes finales étoient toujours en faveur du thermomètre d'en haut, comme il étoit facile à prévoir. Je pris alors le parti d'éloigner da- vantage les boules, et le même effet avoit toujours lieu. Cependant pour tirer quelque parti de ces appareils, je voulus voir ce qui arriveroit si je soumettois à des températures égales en temps égaux, le méme thermomètre, moyennant une petite lamine de fer applicable dans une certaine étendue de la surface du tube, ensorte que , roulant ie tube sur son axe placé horizontalement, il arrivât dans les différensessais, que le rayonnement eût lieu alternativement de haut en bas, et de bas en haut. Dans ces essais j’eus occasion d'ob- server un grand nombre de fois, que le thermomètre s’altéroit davantage lorsque le rayonnement étoit descendant que lorsqu'il étoit ascendant. Pour ‘appliquer des températures égales, je plongeois pendant une minute la lamine de fer dans l'eau bouillante, pour le temps de l'application j'avois choisi la demi-minute ; et la différence finale fut toujours de presqu'un degré dans les altérations du thermomètre. , ET D'HISTOIRE NATURELLE. 135 De plus, j'eus l'idée encore dé répéter dans l'appareil de la fig. 5, l'expérience du célèbre Pictet pour observer l'in- fluence de la direction dans la propagation du calorique conduit. Dans cette figure on voit le milieu de l'appareil, Gg. 5 , avec une lamine élastique d'acier, qui reste suspendue au moyen de la résistance que lui présentent, dans ses extrémités et dans son milieu , les parties les plus saillantes des trois hémisphères. L'exécution de cette construction fut d'une extrême difficulté, mais enfin elle réussit. Alors ayant formé le vide dans le tube à mercure bouilli, et l'ayant séparé, comme à l'ordinaire , je pris la précantion de couvrir de carton bien épais les surfaces extérieures des trois hé- misphères ; mettant ensuite à découvert une très-petite partie dans le milieu de chacun d'eux, qui füt presqu'égale à la partie intérieure touchée par la lamine d’acier; alors, ap- pliquant des petites boules de thermomètres au milieu des hémisphéres thermométriques, et l'extrémité d’un fil de fer légérement chauffé au milieu de l’autre , je vis que les ther- momètres s’altéroient en même temps et pour peu de chose; mais si j appliquois des températures bien élevées avec la demi-boule métallique; alors le premier phénomène avoit toujours lieu, ce qui n’est pas difficile à concevoir, lors- qu’au rayonnement de l'hémisphère central se réunit encore celui de la lamine d'acier placée intérieurement. En ren- versant l'appareil , on obtenoit les mêmes effets. De tous ces faits, il paroît que l'on peut détruire les conclusions suivantes : 1° La direction descendante est plus favorable au calo- ane rayonnant que l'ascendante, soit que cela tienne à la différence de rapidité, ou à la différence d'intensité du rayonnement. : 2°, Le calorique conduit par la faculté conductrice des corps, quelle que soit d'ailleurs la nature de cette faculté, se propage également dans tous les sens , lorsqu'il émane d'un centre calorifique, et qu'aucune cause perturbatrice n'al- tère ses effets. 5°. La direction ascendante, ou la descendante, est plus ou moins favorable au calorique conduit par les corps placés dans l'air ou dans le vide, à mesure que dans le premier cas les courans d'air sont plus ou moins forts, et dans le 136 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE second , le rayonnement des corps réchauffés plus ou moins intense. .. $ Voilà les recherches dont je m'occupai à Rome le mieux qu'il me füt possible; je m'occupai encore de bien d'autres relativement aux effets des miroirs de réflexion pour les rayons calorifiques faisant varier l'inclinaison de leur axe à l'horizon, et relativement aux effets des courans aériens à mesure qu'ils sont sous différentes directions, et qu'ils ont lieu dans des milieux plus ou moins denses, à l'air libre, ou dans des tuyaux fermés. Les premiers résultats que j'obtins dans cet autre genre de recherches , ne laissent pas de pro- mettre quelque intérêt; mais ils sont trop peu exacts pour que j'ose vous en entretenir. Mais. je ne perdrai pas de vue cette partie de mon travail, et je compte m’en occuper aussitôt que j'aurai vérifié, ou rejeté les faits que j'ai eu l'honneur de vous exposer. SUITE ET D'HISTOIRE NATURELLE, . 137 SUN TE DES OBSERVATIONS SUR LA GÉOLOGIE DES ÉTATS-UNIS (1) SERVANT A L'EXPLICATION DE LA CARTE CI-JOINTE. Par W. MACLURE,. Mon intention dans ces recherches, n’est pas de remonter à l'origine des différentes substances minérales qui composent le sol des Etats-Unis. Je me bornerai à en donner une des- cription. J emploierai la nomenclature de Werner, comme celle qui me paroit la plus exacte dans ce moment. CLASSE I. ROCHES PRIMITIVES, Représentées par le rouge vermillon. 1. Granite. 8. Porphyre. 2. Gneiss. 9. Siénite. 3. Schiste micacé. 10. Roche de topase. 4. Schiste argileux. 11. Roche de quartz. 5. Calcaire primitif. 12. Schiste siliceux primitif. 6. Trap primitif. 13. Gypse primitif, 7. Serpentine. 14. Pierre blanche. - QG) La premiere partie de ces Observations se trouve tome LXIX de ce Journal, page 204. Tome LXXII, FÉVRIER an 1811. S CE O1 [e:] JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE CLASSE IL ROCHES DE TRANSITION, Peintes en rouge rose. 1. Calcaire detransition. 5. Kiesel- schieffer , schiste 2. Trapp detransition. siliceux de transition. 9. Grauwacke. 6. Gypse de transition. 4. Grauwacke-schieffer (1). CLASSE IIL FLOETZ OU ROCHES SECONDAIRES, Peintes en bleu clarr. 1. Ancien sand-stone (grès #7. Les 3% couches (floetz) rouge, ou première forma- de grès ou sand-5ton. tion de sand-stone) peint 8. Formationde rok salt (ro- bleu foncé. che de sel) peint en verd. 2. Le plus anciencalcaireen g. Formation de craie. couche ( floetz). 10. Formationdef/oetz-trapp. 3. Leplusanciengypse(floetz). 11. Formation ndépendante 4. Le second grès bigarré(en de charbon de terre. couches ou floetz). 12. Nouvelle formation de 5. Le second gypse (foetz). flætz-trapp, ou du basalte 6. Le second calcaire ( ou et roches qui l'accompa- floetz). gnent. (i) Grauwacke-schieffer. Quand le grauwacke-schieffer se trouve en grains assez gros pour être ap perçus à la vue simple , il se divise alors en lames d’un quart de pouce jusqu’à deux pouces et même plus d'épaisseur. Mais en quelques endroits pas loin du primitif, ses grains sont si petits qu’on ne peut les appércevoir qu'avec une loupe ; et pour lors il se divise en lames tres-minces , qui constituent les schistes tégulaires , comme les ardoises propres à couvrir les bâtimens. La plupart des ardoises qu’on exploite dans les Etats-Unis , sont dé cette nature. Îl.est probable qu’elles devroient avoir un autre nom que celui de grauwacke-schieffer ; mais ayant adopté la nomen- clature de Werner, je n’ai pas cru y devoir rien changer , et il me paroït que de nouveaux noms ne feroient qu'augmenter la confusion, qui arrive trop souvent par la multiplicité des noms qu’on trouve dans chaque nouvelle description géologique. : En Minéralogie, la £:rme et la nature des principes composant chaque subs— tance minérale, en règle la nomenclature indépendamment de leur situation re- lative ; mais en Géologie il est probable que la situation relative des roches doit plus influer sur leur nomenclature , que la nature même des principes qui les. composent. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 139 CLASSE IV. ROCHES D'ALLUVION. Peintes en jaune. 1. T'ourbe. arsileux mélangé de frag- 2. Gravier, sable. mensde granite, de quartz 3. Terre grasse, argileuse. et de calcaire. 4. Mine de fer des marais. 6. Tuf calcaire. 5. (Nogelfluh ) pouding de 7. (Calc-sinter) calcaire fi- transportlié parunciment breux. Peïinte en jaune. L'examen des différentes substances qui couvrent la surface du globe, peut se commencer et se continuer de deux ma- nières, je veux dire qu'on peut arriver au mème but par des routes opposées. La première méthode consiste à commencer par la recherche exacte d'une petite partie de la surface, _ par décrire avec soin les différentes roches avec l'immense variété de leur arrangement dans la position des parties qui les composent ; on entre ensuite dans le détail des change- gemens naturels ou accidentels qui se rencontrent constam- ment dans leur situation relative ; enfin, on cherche à réduire la totalité à quelque série régulière d'arrangement, Cette méthode nécessite la réunion d'un grand nombre de ces portions , avant de pouvoir se former à cet égard des idées justes et générales. La seconde manière est de crayonner à grands traits les limites qui séparent les classes principales de roches , ainsi que leur situation et leur étendue relative ; mais l'examen de l'immense variété renfermée dans chaque classe , doit être soumis à des principes généraux qu'on aura eu soin d'acquérir antérieurement. La méthode fondée sur l'observation exacte et limitée en étendue, paroitroit étre la meilleure; elle est d’ailleurs con- firmée par l'usage où l'on est d'acquérir toutes les autres sciences de cette manière; mais en y réfléchissant davantage, il se présente des objections très-fortes puisées dans la dif- ficulté de l'exécution , relativement à l'immense variété et aux gradations imperceptibles entre une espèce de roche et une autre, qui ne serviroient qu'à rendre la nomenclature diffuse et obscure, et nécessiteroient des descriptions longues et volumineuses ; ceci conduiroit à des idées imparfaites, S 2 140 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE plus propres,à fatiguer qu'à instruire. Par exemple, il faudroit un volume pour décrire toutes les variétés de roches qui se trouvent dans un espace de 40 lieues de formation primitive, et un autre volume pour les changemens qu'éprouvent les mêmes roches dans une largeur de deux lieues, soit à droite, soit à gauche. En esquissant les traits extérieurs des différentes forma- tions dans la plupart des pays, il y a moins de confusion, et une description embarrassante devient presqu'inutile. Les limites une fois constatées , quelques pages suffisent pour en fixer les bornes et faire comprendre au lecteur leur situation relative. Par exemple , dans le nord de FEurope, la Norwège est de terrain primitif, à peu d’exceptions près : sa plus grande exception est le bassin environnant Christiania qui est de terrain de transition; la Suède est de primitif, excepté la partie méridionale dans la Scanie, et une partie de la côte du Categut, avec quelques-uns des bords des grands lacs qui sont secondaires. Les deux côtés du golfe de Bothnie jusqu’au Cap-Nord, et depuis ce dernier en traversant la Finlande , jusqu'à Saint-Pétersbourg, la formation est pri- mitive. Depuis Saint-Pétersbourg jusqu'à la pierre calcaire secondaire de la Crimée , elle est d'alluvion, excepté dans trois endroits; savoir, une couche étroite de craie à Sevrsk, 12 postes sud-ouest de Tula entre Bogouslaw et Karson, 8 postes sud de Kiosv; et d'Elisabeth-grade pendant 4 postes à Wodénaia où le primitif se montre dans les lits des rivières. La pierre calcaire secondaire de la Crimée est remplacée par le terrain de transition, à une lieue et demie environ sud de Sempheropol , et tout le rang de montagnes le long de la mer noire au sud de la Crimée, est de transition. Tout le côté sud de la Baltique est une formation d'al- luvion très-étendue, bornée dans la Pologne par le terrain calcaire secondaire au pied des monts Carpathes, dans la Silésie et la Saxe, par la lisière du calcaire secondaire qui couvre le pied des montagnes de la Bohéme, et ainsi le long des frontières de la ‘Thuringe et du Hartz jusqu'à la mer du Nord. Entre les montagnes précitées et la Baltique, il est une plaine d'alluvion continue, avec plus d'excep- tions , dont on pourroit constater exactement les limites, etles mettre plus aisément encore sous les yeux du lecteur, puisque l'omission de quelques exceptions n'influeroit pas ET D'HISTOIRE NATURELLE. TAL matériellement sur leur utilité, de même qu'en géographie une omissionest facilement rectifiée par le premier observateur qui survient. Un autre inconvénientt qui paroit résulter de la méthode d'examiner minutieusement une petite portion ou une partie d’un rang de montagnes, c'est d'établir un système qui, quoique parfaitement d'accord avec la structure du pays examiné, est trop souvent en contradiction avec la nature. et la formation de presque tous les autres; système qui par cela même qu'il embarrasse dans plusieurs circonstances le lecteur , le discrédite dans son esprit. Dans l'état actuel de la Géologie, une définition exacte des roches commu- nément trouvées réunies en masses, grandes et étendues avec les limites qui les séparent des roches des autres grandes classes et formations , seroit peut-être la méthode la plus claire et la plus sûre d'agrandir cette science , de réformer les erreurs d'une multitude de vieux systèmes , et de jeter un plus grand jour sur ceux qu’on proposera par la suite. Le peu de temps qui s'est écoulé depuis que les hommes sont capables de faire des observations exactes , le petit seg- ment du cercle immense des opérations de la nature qu’elle a montré durant ce court espace, rendent toutes les spé- culations sur l'origine de la croûte de la terre, de simples conjectures basées sur une analogie obscure et éloignée. S'il étoit possible aujourd'hui de séparer la partie métaphysique de la coliection et de la classification des faits, la vérité et l'exactitude de l'observation prendroient un vol plus élevé, et les progrès de la science seroient et plus certains et plus uniformes ; mais le plaisir de sacrifier à l’imagination, l'em- porte de beaucoup sur celui que procure le travail et la peine de l'observation ; d'ailleurs notre amour-propre est si flatté de l'idée de jouer un rôle dans la création, qu'on ne doit guère s'attendre à trouver une grande collection de faits, qui ne soit déparée par les fausses couleurs d'un système. La structure particulière du continent de l’Amérique sep- tentrionale par la vaste continuité des masses immenses de roches de la même formation , ou de la même classe, jointe à l’uniforme structure et à la régularité de leur stratification non interrompue, oblige l'observateur à fixèr son attention sur les limites qui séparent les grandes et principales classes. Il trouve en les traçant, tant d'ordre et de régularité, que 142 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, la simple collection des faits lui procure le même plaisir que s'il se livroit à la théorie ; aussi trouvons-neus que les premiers qui ont fait des observations géologiques, ont re- connu l'uniforme régularité du bord oriental du primitf nommé l'aréte sranitique, par lequel toutes nos rivières atlantiques tombent de différentes hauteurs par des caractères ou des courans plus ou moins rapides. Le caractère le plus marquant (voyez la Carte ci-jointe) de l’est du continent, est un rang immense de montagnes courant à peu près nord-est et sud-ouest des fleuves Saint- Laurent jusqu'au Mississipi : ses parties les plus élevées , ainsi que sa plus grande masse, sont composées de primitif aussi loin au sud que la rivière d'Hudson; ce primitif diminue de hauteur et de largeur à mesure qu'il traverse la province de la Nouvelle-Jersey. IL n'occupe qu'une petite partie du plat pays où il passe à travers les états de Pensylvanie et de Maryland, dont la partie la plus élevée du rang des mon- tagnes à l’ouest , est composée de terrain de transition avec quelques vallées secondaires. Dans la Virginie, le primitif augmente en largeur et proportionnellement en hauteur; il occupe la plus grande masse comme les points les plus élevés du rang des montagnes dans les provinces de la Caroline septentrionale , et dans la Géorgie où il prend une direction plus à l’ouest. Quoique cette formation primitive renferme toutes les variétés des roches primitives trouvées dans les montagnes d'Europe, cependant ni leur situation relative dans l'ordre de succession , ni leurs hauteurs relatives dans le rang des montagnes, ne correspondent pas avec ce qui a été observé en Europe. L'ordre de succession depuis le schiste argileux jusqu'au granit, ainsi que la diminution graduelle de la hauteur des couches, depuis le granit à travers le gneiss, le schiste micacé, les roçhes de hornblende jusqu'au schiste argileux , est si souvent interverti et mélangé, qu'il rend l'arrangement de toute série régulière impraticable. On n’a pas trouvé au sud-est du primitif, ni pierre calcaire secondaire, ni aucune série d'autres roches secondaires , à l'exception de quelques lits partiels de la plus ancienne formation de grès rouge qui couvrent partiellement son côté le plus bas; elle paroït ressembler, sous ce rapport, à quelques chaines de montagnes d'Europe, telles que les monts ET D'HISTOIRE NATURELLE. 143 Carpathes, les montagnes de Bohème, de la Saxe, du Tyrol, les Alpes ou les montagnes de la Suisse, qui toutes, quoique couvertes d'immenses formations de pierre calcaire secon- daire sur leurs flancs nord-ouest, en ont néanmoins très- peu sur leurs côtés sud et est. Le plus ancien grès rouge dont j'ai parlé plus haut, couvre partiellement les parties les plus basses du primitif, depuis 12 milles nord de la rivière de Connecticut jusqu'’auprès de la Rapohanneck, ce qui forme un espace d'environ 400 milles, et quoique souvent interrompu, il conserve néanmoins dans toute cette étendue, cette uniformité de caractère si remar- quable dans les autres formations de ce continent ; la même nature de pierre de grès, des couches courantes à peu près dans la même direction est partiellement couverte par la wake et le grun-stein trap de la même nature, et renferme les mêmes substances métalliques. L'uniformité dont je viens de parler peut également s'observer dans la grande forma- tion d'alluvion qui court le long des côtéssud-estdu primitif, depuis Longisland jusqu'au golfe du Mexique, composée de sable, de gravier, etc., avec du limon de mer, de la vase , ou de l'argile qui renferment des restes de végétaux et d'animaux trouvés depuis 30 jusqu’à Go pieds au-dessous de la surface. Le long du côté nord-ouest du primitif, commence la for- mation de transition qui occupe, après le primitif, quelques- unes des plus hautes montagnes de ce rang, et qui paroit être tout à la fois plus haute et plus large à l'ouest dans la Pensylvanie, le Maryland et une partie de la Virginie, où le primitif a moins d'étendue et d’élévation. Elle ren- ferme toutes les variétés de roches trouvées dans la même formation en Europe, telles que les montagnes de la Cri- mée, etc., et ressemble à la chaine des monts Carpathes, des montagnes de la Bohême et de la Saxe, qui toutes ren- ferment une formation de transition tonsidérable, remplacée sur leurs côtés nord par un calcaire secondaire. On a trouvé l'antracite dans d'fférens endroits de cette formation, subs- tance que l'on n’a pas encore rencontrée dans aucune des autres formations existantes dans l'Amérique septentrionale. Quelques personnes ont révoqué en doute la nécessité d’une ae ou d’une division de roches, telle que celles de transition. Elle n'est pas même encore généralement ‘144 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, adoptée dans le midi de l'Europe. Cependant on tronve cette roche , et en très-grande quantité, dans tous les pays où l'on a pris la peine de l'examiner. Il n’y auroit donc que deux classes dans lesquelles on pourroit la placer, le pri- mitif ou le secondaire; mais elle est exclue du primitif, parce qu'elle renferme des cailloux évidemment arrondis par le frottement lorsqu'ils sont isolés, et des restes de substances organisées qu on yrencontre, mais rarement; cependant plu- sieurs variétés de roches de transition, telles que le grauwake schisteux, les agrégations quartzeuses se distinguent diffi- cilement du schiste primitif et du quartz lorsqu'ils sont frais. C'est dans un état de décomposition seulement , quele grain des roches de transition se montre et en facilite la distinction. Si on la place dans le secondaire, elle formera alors une autre division dans cette classe, qui n'en offre déjà qu'un trop grand nombre. En effet, la dureté, la structure schis- teuse, luisante et presque cristalline du ciment d’une grande partie des agrégations de transition , les excluroient néces- sairement d'une division telle que celle jusqu'ici définie des autres roches secondaires. Indépendamment des objections qui naissent de leur structure individuelle, la nature de deur stratification, en les éloignant encore plus du secon- daire , les rapproche davantage du primitif. En effet, on les trouve régulièrement stratifiées, plongeant généralement sous un angle au-dessus de 30, et n'excédant pas 45 degrés de l'horizon, tandis que les roches secondaires sont ou horizontales , ou suivent les inégalités de Ia surface (1). (x) Un lit de grau-wake, de grau-wake schisteux , et de calcaire de transition, court sud-ouest depuis Patomack jusqu’à la rivière d’Yadkin dans une dis- tance de 200 milles depuis un mille jusqu’à 5 milles de large , ayant la formation primitive de chaque côté et plongeant dans le même sens que le primitif , quoique les couches, qui courent dans la même direction, plongent sous un angle plus petit. Comme d’après sa situation relative , son plongement et sa stratification , il n’offre aucun des caracteres du secondaire, et qu’on ne l’a point trouve alternant avec les roches secondaires, on ne peut pas le ranger dans leur classe sans renverser l’ordre dans son entier et sans in- troduire de la confusion. Le classer dans le primitif , ce seroit renfermer dans celui-ci des agrégations composées de différentes espèces de roches ar- rondies par le frottement, et la pierre calcaire avec une fracture terne colorée par une maticre organisée, ou toute autre matière combustible qui perd sa couleur en brülant. Ce ET D'HISTOIRE NATURELLE. 145 Ce seroit peut-être ajouter à la précision de la classification, que d'augmenter cette classe en y plaçant quelques porphyres et d'autres roches qui ont une fracture plutôt terne que cristalline, mais qu'on a cependant regardées jusqu’à présent comme primitives. . Peut-être auroit-on bien fait, si, lorsqu'on a donné des noms aux différentes classes de roches, on n'avoit eu aucun Æ£xrd à la période relative de leur origine ou de leur for- mation, et si, au lieu des noms de primitifet de secondaire, on en avoit adopté d'autres tirés du caractère le plus ap- parent , ou de la propriété générale de la classe des roches que l'on vouloit désigner , tels, par exemple, que cristallin au lieu de primitif, et-léposrtion au lieu de secondaire, etc.: mais comme tous ces vieux noms sont généralement reçus et consacrés par le temps et par une longue habitude, il est plus que probable: que dans l'état actuel de nos con- noissances à cet égard, nous ne pouvons pas être autorisés à les changer. L'adoption des nouveaux noms sous prétexte de quelque propriété nouvelle découverte dans la substance, a déjà occasionné de la complication et des inconvéniens; et si les générations futures suivent cet exemple, il en résul- tera un amas de confusion qui ne pent que nuire aux progrès de la science; si nous changeons les noms donnés aux subs- tances définies par ceux qui sont venus avant nous, pouvons nous nous flatter avec raison, que la postérité respectera notre nomenclature. Sur le côté nord-ouest de la formation de transition , le long de toute la rangée de montagnes, git la grande for- mation secondaire qui, par l'étendue de la surface qu’elle couvre et par l'uniformité de ses dépositions , est égale, si même elle n'est pas supérieure à toute autre déjà connue. Point de doute qu’eile ne s’étende jusqu'aux bords des grands lacs au nord, et à quelques centaines de milles au-delà du Mississipi à l'ouest ; et nous avons tout lieu de croire d’après ce que nous connoissons déjà, que les limites de ce grand bassin à l’ouest, ne sont pas très-éloignées du pied des Szoney montains, et qu'au nord elles vont au-delà du lac supé- rieur, donnant une surface qui s'étend de l'est à l'ouest depuis le Katskill jusqu'au pied des S/oney montaïns dans un espace d'environ 1500 milles, et du sud au nord, depuis Naichès jusqu’au côté mn des grands lacs, dans un espace d'environ 1200 milles. Toîne-LXXII. FEVRIER an 1811. TE 146 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Cet immense bassin est rempli de presque toutes les es- pèces de roches qui accompagnent la formation secondaire. A l'ouest du Mississipi sa continuité n'est point interrompue par l'interposition de toute autre formation , à l'exception de celle d'alluvion formée sur les bords des grandes rivières. Le fond de presque tout le.plat pays est généralement de pierre calcaire, et les hauteurs où sommités sont le plus souvent composées de pierre de sable. Les plus hautes mon- tagnes, sur quise trouvent ordinairement les bords extérieurs du bassin , vont toujours en diminuant jusqu au centre de ce bassin. 4. Deux divisions de cette formation secondaire commune en Europe, n'ont cependant pas encore été découvertes sur ce continent, savoir, la formation de craie et celle que Werner appelle la plus nouvelle formation , floelz trap. Le calcaire diffère soit pour la couleur, soit pour le tissu de celui que l’on trouve en Europe qui suit la formation crayeuse. La pierre calcaire généralement trouvée dans ce bassin, est d'une couleur bleuâtre, parcourant toutes les nuances jusqu'au noir; elle a une fracture terne, et quel- quefois une structure schisteuse. La pierre calcaire qui suit souvent la formation crayeuse, ou qui se rencontre’dans les pays où se trouve la craie, est généralement d’une couleur blanche qui devient d'un brun clair ou foncé; elle a une fracture lisse, compacte et concoïdale , presque semblable à celle de la pierre à fusil. Dans quelques parties des couches on trorve-de petits nœuds arrondis de pierre à fusil dissé- minés sans ordre, du moins en apparence. Ces pie: es à fusil, dans quelques endroits, sont d’une couleur claire, dans d'autres d'une couleur foncée; quelques-uns de ces petits nœuds sont blanchätres sur les bords extérieurs, et noirâtres vers le centre. Une formation immense et uniforme de l'espèce de pierre calcaire dont je viens de parler , remplace la craie et couvre la formation de transition sur le côté ouest des montagnes de la Crimée; elle conserve la méme situation relative le long du côté nord du terrain de transition sur les monts Carpathes , continuant à travers la Silésie et la Bavière, le long des montagnes de la Bohême jusqu’à Ratisbonne; de 1à au-dessus du Danube et jusqu'à Schaffouse sur le Rhin, elle suit le côté nord et ouest du Jura jusqu'au Rhône. La pierre calcaire qui parcourt cette vaste étendue, est partout ET D'HISTOIRE NATURELLE. 147 semblable soit pour la couleur, soit pour la structure , et telle que je n'en ai jamais vu de pareille dans aucune partie de l'Amérique septentrionale. C'est avec cette matière que l'on fait, à Munich, ces planches sur lesquelles on prend, des impressions et des dessins si exacts. Sa structure com- pacte et homogène sans aucun grain, la rend susceptible de recevoir presque le poli des métaux. L'absence de la plus nouvelle formation floets trap qui couvre partiellement et irrégulièrement toutes les autres for- mations, qui rompt ainsi la continuité des autres couches, jointe aux effets des convulsions violentes et des tremblemens de terre, si fréquens dans le voisinage de cette formation contestée, est peut-être une des causes qui rend plus faciles les recherches géologiques dans l'Amérique septentrionale qu'en Europe. Une autre cause dont les effets sont encore plus universels et plus étendus, peut exister encore dans la différence du nombre et de la grandeur des accidens et des changemens qui ont lieu dans la stratification des dif- férentes classes de roches depuis leur formation originelle, par les effets de l’eau qui, pendant l'immensité des siècles, a enlevé les couches supérieures plus susceptibles de décom- position, et qui laissent dans leurs positions originelles des parties de la même stratification beaucoup plus dures et plus durables | ou bien par l'action longue et continue des rivières qui ont entrainé les lits, exposé à l'air les couches subordonnées , et donné à la totalité l'apparence d'une straz tification confuse et interrompue, quoique dans son état originelelle puisse avoir été uniformeet rébuliéréMes rivières également en les minant peu à peu enlèvent de leur place des masses immenses, et occasionnent un désordre et une confusion qu’il n'est pas facile de deviner. Les rivières dans l'Amérique septentrionale, n'ont pas gé- néralement coupé si profondément dans les différentes cou- ches , soit dans les montagnes, ou durant leur cours à travers le plat pays , de manière à déranger la stratification ; aussi n'y trouve-t-on point ces précipices immenses et inaccessibles qui rendent les recherches géologiques presqu impossibles, Des masses brisées et détachées d'une formation, couvrant les sommets des montagnes avec leurs côtés ou fondatio” composés de différentes classes de roches s'y rencor” rarement; et lorsqu'une irrégularité quelconque, * Ÿ s 2 148 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE confusion apparente a lieu, le voisinage permet aisément d'examiner les couches environnantes de manière à pouvoir expliquer l'accident sans nuire à l'arrangement général. La stratification des grandes chaines de montagnes en Europe , est tellement coupée et dérangée par l'action de l'eau sur les vallées environnées de précipices inaccessibles, que l’on rencontre à chaque pas quelque difficulté dont il est impossible de se rendre raison. La stratification est irrégulière et paroît contradictoire; l'alternation constante des différentes formations se joue de toutes les recherches que la nature du lieu permettroit de faire. Un travail assidu joint à un examen exact et minutieux, est-il parvenu à mettre dans un certain ordre une partie de la chaîne de ces mon- tagnes, une autre partie de la même chaîne, changée par différentes séries d'accidens, ne peut-être réduite à l'ordre d'après les mêmes règles, et l'observateur finit peut-être par se convaincre que loin d'avoir acquis la connoiïssance de la structure naturelle et de l'arrangement originel de la stra- tification, il n’a qu'une idée imparfaite de quelques chan- gemens accidentels. Il est probable que dans ce cas, il vaudroit mieux commencer par prendre une vue générale et étendue de la chaine entière, chercher à trouver la clef de l'ordre originel de la stratification qui faciliteroit l'expli- cation d'accidens qui, isolémont examinés, paroissent des exceptions quil est impossible de concilier. Laëifférence entre les rangées des montagnes d'Europe et celles’ de l'Amérique septentrionale, paroit être beaucoup plus grande relativement aux changemens accidentels et sub- séquens, que sous le rapport de l’ordre originel et de l’ar- rangement de leur stratification dans la situation relative dans laquelle elles se rencontrent fréquemment sur les bords du terrain secondaire. Non loin de celle de transition, on a trouvé les sources de sel les plus productives qui aient encore été découvertes dans l’Amérique septentrionale, courant à peu près nord-est de la rivière de Pedgions dans l'Etat de Ténésée jusqu'au lac Ondago. Sur cette ligne se trouvent les manufactures de sel d’Abgenton ainsi que d'autres sources salées que l’on n'exploite pas. Des couches de gypse ont “é trouvées dans la méme direction. Ces sources salées d ‘s couches de gypse sont correspondantes à la situation ES Sah., de Cracovie en Pologne, qui, ainsi que quel- ques autres dans le même pays, se rencontrentsur les bords ET D'HISTOIRE NATURELLE, 149 du secondaire presque touchant la grande formation de transition qui couvre le côté nord des monts Carpathes. Les contrées que baigne la Baltique, bornées par une ligne courant à l'est par le Hartz à travers la Silésie, le long des monts Carpathes jusqu'à la Crimée , et au nord par Saint- Pétersbourg , renfermant le Danemark, une partie de la Prusse et de la Russie, la Finlande, la Suède et laNor- wège , est semblable au côté oriental de l'Amérique septen- trionale ; l’un et l’autre. renferment peu ou point de basalte, ou de plus nouvelle formation foetztrap. On a trouvé (1) très- peu de sources d’eauxchaudes en proportion de la surfacedans les pays dont je viens de parler , quoique dans la partie sud de cette ligneen Hongrie‘’et dans la Bohème, la formation foetz crap et les sources chaudes soient fréquentes. En traversant les Sconey montaïns à l'ouest de l'Amérique septentrionale, entre les sources de la rivière de Missouri et Colombia, le capitaine Lewis a découvert deux sources d'eaux chaudes. Ces montagnes renferment aussi des roches de la formation la plus nouvelle de /oetz trap (basalte). On n'a pas encore examiné les coquilles , ainsi que d’autres restes de matière organisée, avec l'attention nécessaire pour en tirer des conséquences justes. Celles de ces substances trouvées sur le côté sud-est du primitif, sont presqu’exclu- sivement renfermées dans le terrain d’alluvion, dans lequel: des bancs considérables de coquilles, le plus souvent bivalves, courent parallèlement à la côte dans un lit fréquemment de substances molles; ou de vase ressemblant beaucoup à celui où l'animal se trouve aujourd'hui vivant sur le bord de la mer; ce qui fait supposer, avec assez de probabilité, que ces coquilles sont de la même espèce que celles qui vivent dans la mer. Les coquilles trouvées au nord-ouest de la rangée primitive dans la grande formation secondaire, sont généralement au- près de la surface du sol, et l’on en apperçoit rarement dans les masses solides de la pierre calcaire, beaucoup au- dessous de cette surface: cette pierre calcaire ressemble à celle quise forme journellementau fond du lac Erié. Quoique , : () On ,n’agencore trouvé que deux sources au-dessus de la chaleur du sang, à l'est du Mississipi dans l’ Amérique septentrionale. 150 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE nous ayons observé au fond de ce lacla nature dans l'acte de déposer le calcaire bleu , semblable à celui qui se trouve dans le grand bassin, avec des coquilles et des plantes aquatiques à la surface, dont une partie est incrustée dans des dépôts de cal- caire, tandis que l'autre reste dans un état organisé ; cepen- dant à quelque distance au-dessous de la surface dans la partie solide de la pierre calcaire, on ne distingue ni co- quilles, ni plantes aquatiques. Avant de tirer aucune conséquence probable relativement à l’origine de ces coquilles, peut-être seroit il nécessaire de connoître, d'abord la nature des coquillages vivans qui existent actuellement au fond de nos grands lacs ; car ces lacs, soit pour la quantité, la limpidité et l'immense pro- fondeur de l'eau , approchant beaucoup plus de l'Océan que les rivières ou les petits lacs, on peut supposer qu'ils renferment des coquillages vivans différens ; comme ils ren- ferment des poissons d'une nature différente de ceux qui se trouvent dans les petits laes et les rivières. Dans l'état actuel de nos connoissances, s'il étoit nécessaire de se former une opinion relativement à ce qui peut avoir été la cause du changement produisant les dépôts secondaires qui se trouvent aujourd'hui dans cet immense bassin, au lieu de supposer que les eaux de l'Océan l'ont couvert au- trefois, et qu'en se retirant elles l'ont laissé tel que nous le voyons, je pencherois plutôt à supposer que tout ce bassin étoit dans les siècles reculés , un grand lac qui, des- séché par une ou plusieurs brèches faites dans la chaine des montagnes dont il est entouré, a graduellement laissé les dépôts que nous y voyons aujourd hui, et sans rien in- férer ni de l'origine, ni de la nature des restes de matière organisée qui s'y trouvent, je suis d'autant plus porté à le croire, que la situation particulière , et l’uniformité des substances composant cette formation secondaire, ainsi que leur hauteur relative, eu égard à la chaîne des mon- tagnes environnantes, ainsi que les lits et les cours des rivières , rendent plus probable cetie dérhière supposition que à Toute l'étendue dont je parle & été autrefois. le fond d'un grand lac. Cette chaine de montagnes qui l’environnentet qui n'est complètement rompue qu'en trois endroits seulement par ET D'HISTOIRE NATURELLE. 15, les rivières de Saint -Laurent, d'Hudson et de Mississipi, à travers lesquelles tout le surplus d'eau quitombe sur une surface de plus de 1500 milles de diamètre, coule maintenant, sembleroit venir à l'appui de notre supposition. Le peu d'étendue de l'échelle de la carte qui accompagne ce Mémoire , ne permettant pas d'indiquer tous les lieux dont il y est fait mention comme limites des différentes formations , ainsi que quelques légères exceptions, lorsqu'il n'y a point de couleur entre les limites , ceci indique qu’elles sont incertaines et entremélées les unes dans les autres. Les raies de couleur dénotent qu'on s'est assuré, d'après les ren- seignemens les plus exacts que nous ayons pu obtenir, que ce pays est composé de la formation désignée par cette couleur. Formation des Terrains d'alluvion. Au sud-est de Long-Island commence le terrain d'alluvion qui occupe plus de la moitié de cette ile ; ses bornes au sud et au couchant sont marquées par une ligne qui passe auprès d'Amboy, de Trenton, de Philadelphie, de Baltimore, de Washington, de Fredericksbourg , de Richmondet de Pé- tersbourg, dans la Virginie, un peu à l'ouest d'Halifax, de Smithfield , d'Aversborough et de Pakersford sur la rivière Pédée; dans la Caroline septentrionale, à l’ouest de Cambden auprès de Colombia, d'Augusta sur la Savannah, de Rocky Lauding sur la rivière d'Oconée, du fort Hawkins sur la rivière d'Oakmulgée, d'Hawkinstown sur la rivière de Flint, et courant de l’ouest au sud à travers les rivières de Chata- houchée, d'Albama et de Tombigby, il joint le grand bassin d'alluvion de Mississipi un peu au-dessous de Natchez. L'Océan indique les bornes orientales et méridionales de cette immense formation d'alluvion qui s’élève considérable- ment au-dessus de son niveau dans les provinces méridio- nales, et tombe à peu près au niveau de la mer à mesure qu'elle s'approche du nord. Le flux et reflux dans toutes les rivières depuis le Mississipi jusqu au Roanoke ; s arrête depuis trente jusqu'à cent vingt milles de distance des limites occidentales de l’alluvion; depuis Appomatox jusqu à. la: Délaware, la marée pénètre à travers le terrain d’alluvion et n'est arrètée que par la chaine primitive. 152 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE L'Hudson est la seule rivière dans les Etats-Unis où le flux et reflux passe à travers le terrain d’alluvion , celui detran- sition, le primitif, et se perd dans le secondaire; dans toutes les rivières à l’est et au nord, la marée court à une petite distance dans la formation primitive. Dans toute l'étendue de cette formation d'alluvion on trouve des dépôts considérables de coquilles, et un banc de coquilles et de calcaire qui commence à la Caroline sep- tentrionale, courant parallèlement et à la distance de vingt à trente milles des bords du primitif, à travers la Caroline méridionale , la Géorgie et une partie du territoire de Mis- sissipi. Dans quelques endroits , ce banc est mou, contenant une grande quantité d'argile; dans d'autres il est dur et renferme assez de matière calcaire pour pouvoir faire de la chaux. On trouve de vastes champs de la même forma- tion auprès du cap Floride , et qui s'étendent à quelque distance le long de la côte de la baie du Mexique. Dans quelques endroits la matière calcaire des coquilles a disparu etse trouve remplacée par une couche de silex dont on fait des meules de moulin. i Des couches considérables de mines de fer des marais oc- cupent les lieux les plus bas, et quelques parties les plus élevées qui partagent les sommets entre les rivières, sont couronnées de pierres de sable et de poudding, dont le ci- ment est la même mine de fer des marais. On trouve dans cette formation en lits horizontaux qui alternent avec d'autres terres dans les mêmes places, de randes quantités d'ocre , depuis le jaune clair jusqu'au brun Fe Dans d’autres , des masses en forme de rognons, depuis la grosseur d'un œuf jusqu'à celle de la tête d'un homme, qui ressemblent beaucoup pour la forme , au caillou que l'on trouve fréquemment dans les formations de craie. Formation de Terraïns primitifs. La limite sud-est de la grande formation primitive est couverte par celle nord-ouest de la formation d'alluvion, depuis la rivière Alabama dans le territoire de Mississipi, auprès de laquelle elle est remplacée par les formations de transition et secondaire, jusqu à l'extrémité est de Longisland, à deux petites exceptions près. La première auprès d'Augusta, sur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 153 sur la rivière de Savannah, et auprès de Cambden dans la Caroline méridionale où intervient une couche de schiste ar- gileux de transition, et de Trenton à Amboy où une formation désable rouge, la plus ancienne, couvre le primitif le long du bord du terrain d'alluvion. Depuis Rhode-lsland, dont la plus grande partie est un terrain de transition , jusqu’à Boston, le primitif touche une formation de transition qui probablement s'étend à l’est jus- qu'à ce qu'elle rencontre l'alluvion le long du rivage de la mer, par l'ile Elisabeth , le cap Cod, etc., etc. ; l'extrémité à l’est du primitif, depuis Boston jusqu’à la baie de Penobscot, est bornée par l'Océan. La limite nord-ouest de cette formation d'une vaste étendue, est marquée par une ligne quicourt à l'est du lac Cham- plain, vingt ou trente milles ouest de la rivière de Connec- ticut, à l'ouest de Stockbridge , douze milles est de Poskepsy, bordant les pays montagneux, traversant alors læ rivière d'Hudson à Philippe Stown, par Sparta, à dix ou quinze milles est environ d'Eastwon sur la Delaware, trois milles est de Réading sur la Schuylkill, et un peu à l’est de Midletown sur la Susquehannah, où elle joint les montagnes bleues le long desquelles elle continue jusqu'au Magotty Gap; de là à quatre millesest des mines de plombà Anstinville, et suivant une direction sud-ouest par les $soney montains , et iron mon- tains , six milles sud-ouest des sources chaudes dans la pro- vince de Buncomb, dans la Caroline septentrionale, à l'est d'Hightown sur la rivière de la Cousée, et un peu à l'ouest de la rivière de Talapousée, elle rencontre le terrain d'al- luvion auprès de la rivière d'Alabama qui tombe dans la baie du Mexique à Mobile. En général les couches de ce terrain primitifcourent entre une direction nord et sud et une direction nordest et sud- ouest, et plongent presqu'universellement au sud-est sous un angle de plus de 45 degrés approchant 90 de l'horizon. Sa plus haute élévation est proche des limites nord-ouest, il s'abaisse graduellement au sud-est, où il est couvert par l'alluvion ; et les plus grandes masses, ainsi que les mon- tagnes les plus hautes, se trouvent non loin des extrémités nord et sud des limites nord-ouest. Les contours des montagnes de cette formation se pré- sentent généralement en pointes détachées et ondulantes avee Tome LXXII. FÉVRIER an 1811. Y. 154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE des sommets plats etarrondis, comme les montagnes blanches au nord ; ou bien elles sont coniquement ondulantes avec des sommets pyramidaux comme le pic d'Otter, et les rangées de montagnes au sud. Le climat influeroit-il sur les formes des montagnes au nord et au sud? Leur hauteur ne paroît pas s'élever à plus de six mille pieds au-dessus du niveau de la mer, à l’exception peut-être des montagnes blanches; encore est-il probable que ces dernières ne sont pas beaucoup plus hautes? Dans les limites assignées à cette formation primitive, il est un rang de secondaires s'étendant avec quelques inter- valles de la rivière de Connecticut à celle de Rappahannock,, généralement de quinze à vingt-cinq milles dans la largeur, borné au nord-est depuis Connecticut jusqu'à Newharen par Ja mer, où il finit pour recommencer au sud de la rivière d Hudson ; d'Elisabeth Town à Trenton, il touche l’alluvion. Depuis un peu au-dessous de Morrisville sur la Delaware jusqu à Norristown , Maytown , sur la Susquehannah, passant trois milles ouest d'York d’Hanovre, et un mille ouest de Frédéricktown, il est borné, ou plutôt il paroit couvrir une langue de transition qui va progressivement en diminuant jusqu'à la rivière de Dan. < Cette formation secondaire est interrompue après avoir passé Frédéricktown; mais elle recommence entre les crics Monocasy et Sénéca , la limite nord-est traversant le Potomac par l'ouest de Centerville, touche la primitive auprès de Rappahannock où elle finit. Elle est bornée au nord-ouest par le primitif de quelque distance à l’ouest de Hartford, passant auprès Woodbury, et recommençant au sud de la rivière d'Hudson, elle passe par Morristown, Germantown, etc. jar la Delaware; après quoi elle continue le long de a transition par l’est de Réading , les mines de Grub , Mid- letown , Fairfield jusqu'auprès de Potomac, et recom- mençant au bac de Noland , elle court le long du bord de la transition à l'ouest de Leesbourg , Haymarket, etc. , auprès de Rappahannock. Tout ce terrain secondaire paroît étre de la plus ancienne formation de pierre de sable rouge, quoique dans quelques endroits aux environs de Léesbourg, Réading, ete. , le sable rouge ne serve que de ciment à un poudding formé de pierre calcaire de transition et d'autre de cailloux de transition, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 155 avec quelques cailloux de quartz. De larges couches de gruns- £ein et de wacke de différentes espèces, couvrent en plusieurs endroits cette formation de pierre de sable , et forment les petites éminences, ou les longues arêtes qui s'y rencontrent si fréquemment. Dans la plupart de ces endroits la stratification est irré- *gulière et ondulante, suivant l'inégalité des surfaces, et d'autres fois elle paroit courir de l’est à l'ouest et du nord-est au sud-ouest, suivant le cours des vallées, couvrant les for- mations primitives et celles de transition danstous les endroits où l'on peut examiner leur jonction; et dans quelques autres, tels qu’à l’est de la rivière d'Hudson, où l'action de l'eau a emporté la pierre de sable , les surfaces du terrain primitif sont polies, et couvertes, à une distance considérable, de grandes masses roulées de grunstein, dont la dureté et la solidité ont très-probablement résisté à la destruction, De semblables dérangemens ne sont-ils pas une des causes de l'état d'interruption que présente cette for- mation? On trouve la prehnite et la zéolite dans le trapp de cette formation. Des dépôts considérables de fer magnétique sontenveloppés dans les mines de Grubb; ils sont en masses sphériques entrecoupées par le grunstone trap qui accom- pagne la pierre de sable, sur l’arête duquel cet immenseamas de mine de fer paroïît être placé. On a trouvé de la mine de cuivre gris dans la formation de pierre de sable rouge, auprès d'Hertford et de Washington dans le Connecticut. Dans les mines de Schenyler dans le Jersey , on a trouvé des pyrites de cuivre et du cuivre natif. Les veines métalliques sur le crie de Perkiomen qui ren- ferment des pyrites de cuivre et de la galène , sont dans la même formation. Elles courent à peu près nord et sud à travers la direction estet ouest de la pierre de sable rouge; un petit lit d’un demi-pouce à trois pouces d'épaisseur de mine de cuivre brun, est entremélé et suit la forme circu- laire des lits de fer des mines de Grubb. - Outre la formation de pierre de sable, on trouve dans l'enceinte des limites décrites du primitif, un lit de roches de transition courant à peu près du sud-ouest de la Delawarre à la rivière d'Yadkin qui plonge généralement au sud-est sous un angle de 45 degrés, à plus de l'horizon. Sa largeur V 3 156 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE est de deux à quinze milles, il court de Morrisvisse à l'est de Norristown, traverse Lancastre, York, Hanovre , Frede- ricktown , la montagne de Bullrun, Milltown , le bord de la rivière de Pig, Martinville et finit auprès du mont Piloto entre la Delaware et Rapahannock; il est partiellement cou- vert par la formation de pierre de sable rouge; il a la forme d'un coin long dont la tête touche la Delaware, et l'autre extrémité aboutit à l’Yadkin. Ce banc est composé des couches calcaires de transition en petits grains bleus, gris, rouges, blancs, alternant avec des couches de grau-wacke et le grau-wacke schiste, avec des roches quartzeuses grenues, et une grande variété de roches de transition qui n’ont encore été ni nommées, ni décrites. Une grande quantité de ce calcaire est parfaitement mélangée avec du grau-wake schisteux, d’autres portions contiennent une si grande quantité de petits grains de sable, qu'elles ressemblent à la dolomite; on pourroit même l’ap- peler dolomite de transition. Dans quelques endroits on trouve des veines et des masses irrégulières d’une espèce de pierre si- liceuse qui approche de la lydienne de différentes couleurs, mais le plus souventnoires , et l’on rencontre des couches con- sidérables d'un beau marbre blanc propre pour le statuaire. Le spath calcaïre court en petites veines et en masses détachées, à travers toute cette formation. Les unes et les autres, ainsi que le grau-wacke, contiennentune grande quan- tité de pyrites cubiques. On a aussi trouvé de la galène au- près de Lancastre, et plusieurs veines de sulfate de baryte traversent cette formation qui court environ 25 à 350 milles sud-est, et est à peu près parallèle à la grande formation detransition.Une formation semblable d'environ quinzemilles de long sur deux à trois milles de large, se rencontre sur l'embranchement nord de la rivière de Catabaw, courant le long de Linville et des montagnes de John, auprès de la col- line bleue; un lit de transition de roche commençant sur la montagne de Gréenpond à Jersey, court à travers les plaines de Suckasunny, augmentant en largeur dans la pro- portion où la rangée primitive va en décroissant, jusqu'à ce quil joigne la grande formation de transition entre Easton et Réading , à l’ouest de cette formation partielle de transi- tion , depuis Potomac jusqu'à Cataba; entre elle et la grande rangée de transition à l’ouest, intervient une suite de roches ET D'HISTOIRE NATURELLE. 157 primitives, quelquefois différentes du primitif commun et qui a la structure du greiss, avec un peu de nica, dont les écailles sont détachées et point contignës ; beaucoup dé Jfeld-spath plutôt graineux que cristallisé , du mica schisteux avec de petites quantités de mica écailleux, du schiste ar- gileux, mou et Un. Hi , la totalité ayant une fracture terne et un tissu graineux participant de celui de transition et du primitif, mais sans appartenir proprement soit à l’un, soit à l'autre. Cette roche se trouve toujours sur le bord du primitif, avant que l’on arrive à la transition, mais jamais en aussi grande quantité que dans cette rangée. Il s'en trouve beaucoup de variétés de manière à imiter la plupart des espèces des roches primitives communes, dont elles diffèrent néanmoins par leur fracture terne, leur tissu graineux, et parce qu'elles ont peu ou point de cristallisation. Cette classe de roches diffère du primitif, en ce qu'elles ont une fracture moins brillante et moins cristalline ; mais elle‘ÿ correspond dans la direction et dansla position presque verticale de la stratification. Elle diffère du terrain de tran- sition , en ce qu'elle ne renferme aucune des agrégations dont les parties ont été évidemment arrondies par le frot- tement ; et encore en ce quon nya pas trouvé jusqu ici aucuns restes de matière organisée. Quoique plusieurs espèces de schistes prises séparément, aient une grande ressemblance avec les roches schisteuses rassemblées dans la formation de transition, pour nous conformer à la nomenclature de Werner , nous les avons rangées dans le primitif comme ne convenant pas proprement à aucune des roches décrites comme transition dans ce système. Environ à dix ou douze milles ouest de Richemond dans la Virginie , il y a une formation de charbon indépendant, de vingt ou vingt-cinq milles de long, sur environ dix milles de large; elle ne paroïît pas fort éloignée de la rangée de formation de pierre de sable rouge; elle est située dans un bassin oblong , accompagnée d'une pierre de sable blan- châtre, schiste argileux , avec des empreintes de végétaux comme la plupart des autres suites de cette formation. Ce bassin pose dessus, et il est entouré de roches primitives. Il est plus que probable que dans les limites d'une si grande masse de primitif , on pourroit trouver plus de formations partielles de roches secondaires, 158 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, On trouve dans cette formation primitive, une grande variété de substances minérales, telles que des grenats dans le granit, depuis la grosseur d'une tête d'épingle jusqu'à celle d'un enfant; la staurolite, l'andalousite, l'épidote en rande quantité, la trémolite, toutes les variétés des roches “E magnésie , l'émeraude contiguë auwgranite graphique et disséminée dans le granite qui court une grande étendue de pays, l’adularia, la tourmaline , l’hornblende, le sulfate de baryte, l’arragonite, etc. D'après la quantité de divers minéraux déjà trouvés rela- tivement au peu de recherches faites jusqu'ici, on a tout lieu de croire que dans une formation cristalline aussi grande et aussi, étendue, on trouveroit sur ce continent presque tous les minéraux qui ont été découverts dans des situations semblables sur les anciens continens. Les substances métalliques trouvées dans ce primitif, sont généralement d'une grande étendue comme la formation. Les pyrites de fer courent à travers de vastes terrains, principalement de gnerss et de schiste micacé. Les mines de fer magnétique forment des lits immenses qui ont depuis dix jusqu'à douze pieds d'épaisseur ; elles se trouvent géné- ralement dans une roche d’hornblendequi occupe lesendroits les plus élevés, comme dans la Franconie, les montagnes de Newyork, le Jerseys, la montagne jaune et de fer à l'ouest de la Caroline septentrionale, etc. , etc. Des mines de fer hématite noir, brun et rouge, se trouvent dans le Connecticut et dans la Nouvelle-York, etc. Des cristaux de mines de fer octaèdre , sont disséminés dans le granit (dont quelques-uns ont de la polarité comme à Brunswick)et dans plusieurs variétés du genre magnésien. La plombagine existe en lits qui ont depuis six jusqu'à douze pieds de large ; ils traversent les provinces de la Nouvelle-York , de Jersey, la Virginie , la Caroline, etc. Les mines de cuivre natif et grisse rencontrent auprès de Stanardsville et de Nicholson Gap, dis- séminées dans une roche de Lornblende et d'épidote sur les bords d’unterraindetransition. La molybdène setrouveàBruns- wick à Maine, à Chester dans la Pensylvanie, la Virginie, la Ca- roline septentrionale, etc. Les pyrites d'arsenic ont été dé- couvertes en grande quantité dans le district de Maine. Le ruthile et la ménachanite existent dans un vaste lit formant une grande couche sur le bord du primitif, auprès de Sparte ET D'HISTOIRE NATURELLE: 159 dans le Jersey ; d'un côté il est borné par un large bane de marbre grenu avec de la ménachanite et de la negrine, et de l’autre par une roche d'hornblende. Cette couche con- tient aussi une grande quantité de blende. Des morceaux détachés d'or ont été trouvés dans des lits de quelques petits russeaux dans la Caroline septentrionale, et dans d’autres endroits, apparemment dans une roche de quartz. La man- ganèse a été trouvée dans la Nouvelle-York, dans la Caroline septentrionale, ete. Auprès des confins de la pierre de sable rouge et des formations primitives, on a travaillé des mines de cobalt blanc au-dessus de Middletown sur la rivière de Connecticut , et, dit-on, auprès de Morristown dans la Nouvelle-Jersey. La nature générale des dépôts métalliques dans cette for- mation , paroît être en couches disséminées ou en amas. Lorsqu'ils sont en couches comme les mines de fer magné- tique et la plombagine, ou disséminés comme les pyrites de fer, les mines de fer octaèdre, la molybdène, etc.; on les rencontre par intervalles à travers toute la rangée de la formation. On n'a jamais trouvé dans cette: formation des filons d’une grande étendue. ‘ Formation de Transition. Cette immense étendue de roches de transition est bornée au sud-est depuis un peu à l’est du lac Champlain jusqu'au- près de la rivière d'Alabama, par la limite nord-ouest pres- crite aux roches primitives. Au nord-ouest elle touche le tranchantsud-est desgrandes formations secondairesdans une ligne qui, passe considérablement à l’ouest du sommet qui sert de limites aux eaux courantes, dans la Géorgie, la Ca- roline septentrionale et une partie de la Virginie; mais cette limite de transition dans la partie septentrionale de cette province , ainsi que dans la Pensylvanie de la Nouvelle- York, passe à l'est proche de la ligne de division des eaux courantes. Cette ligne de démarcation court entre les rivières d'Ala- bama et de Tombigby, à l’ouest de l'embranchement sep- tentrional de la rivière de Holstein, jusqu'à ce qu'elle joigne les montagnes Alleghany auprès des sources sulfureuses, le long de ce sommet qui divise jusqu à la province de Bedforë 160 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE dans la Pensylvanie, et de là nord-est à l’est des montagnes Catskill sur la rivière d'Hudson. Cette ligne qui sépare la formation de transition de la secondaire, n’est pas aussi régulièrement et aussi distinctement tracée que dans les autres formations ; plusieurs larges vallées sont formées de pierre calcaire secondaire horizontale remplie de coquilles, tandis que les sommets de chaque côté consistent en roches de transition, etc. Les deux formations s'entre-coupent et sont dans plusieurs endroits tellement mélangées, qu'il faut beaucoup de temps et d’attention pour les réduire à leurs limites propres et régulières. Il est cependant probable qu'au nord-ouest de la ligne ici décrite , il ne se trouveroit que peu ou point de transition, quoiqu au sud-est de cette ligne il puisse se rencontrer des formations partielles de secondaire. Ÿ La largeur de cette formation de transition est générale- ment de 20 à 40 milles, ef la stratification court du nord et du sud au nord-est et au sud-ouest, plongeant généra- lement au nord-ouest sous un angle qui dans plusieurs: endroits est au-dessous de 45 degrés de l'horizon sur le tranchant du primitif; elle s'éloigne dans quelques endroits de cette règle générale, et plonge pendant une certaine dis- tance au sud-est, quelquefois dans es lieux où elle approche du primitif elle est plus verticale. Les terrains les plus é'evés sont sur les confins de la Caroline septentrionale et de la Géorgie, le long des limites sud-est jusqu’au Magotti-Gap, s'abaissant vers le nord-ouest jusqu’à ce qu'elle rencontre le secondaire. De Maggotty-Gap au nord-est, leterrain le plus élevé est sur le côté nord-ouest en s’abaissant par degrés à mesure qu il approche du primitif qui longe sa limite sud-est. Les contours des montagnes de cette formation sont le plus souvent une ligne droite avec quelques petites ondulations bornant les sommets parallèles qui sont à peu près de la même hauteur, déclinant doucement vers le côté où la strati- fication s'éloigne de l'horizon, et plus rapides du côté op- posé où le tranchant des couches se montre à la surface. Cette formation est composée de transition de calcaire un peu grenue, de toutes les couleurs , depuis le blanc jusqu'au bleu foncé, traversée par des bandes rouges dans quelques endroits, et de grau-wacke schisteux, et aussi de spath calcaire en petites veines et en taches. Des veines et des ET D'HISTOIRE NATURELLE. 161 deS masses irrégulières de pierres siliceuses approchant de la Lydienne, se trouvent dans quelques endroits tellement mélangées dans ce calcaire avec un sable fin, qu'il offre l'apparence de la dolomite. Cette substance se trouve dans des lits qui ont depuis 50 jusqu'à 5oo pieds de large. Avec Ja grau-wacke et la grau-wacke schisteuse, alterne une agré- po siliceuse ayant des parcelles d'un bleu clair, depuis a grosseur d'une tête d'épingle jusqu'à celle d’un œuf, dis- séminée dans quelques endroits dans un ciment d’un tissu schisteux, et dans d'autres, dans un ciment quartzeux. On y trouve aussi une pierre de sable à petits grainsliés par un ciment quartzeux en larges masses,souvent d'unestructureschisteuse, avec de petites écailles. détachées du mica intervenant , et une grande variété d'autres roches dont aucun auteur n’a donné jusqu'ici la description qui, d'après leur composition et leur éituation, ne peuvent être rangées que dans la transition. Les calcaires , la grau-wacke et la grau-wacke schisteuse oc- cupent généralement les vallées, les agrégations quartzeuses, les sommets. De ce nombre est ce que l'on appelle le grès de pierre à moulin qu'il ne faut pas confondre avec une autre roche nommée aussi la pierre de grès de moulin. Celle-ci est un granite un peu grenu avec beaucoup de quartz qui se trouve dans la formation Von Il y a dans la pierre calcaire de cette formation, d'immenses cavités et en grand nombre, dans lesquelles on trouve des ossemens de plusieurs animaux, ainsi que d’autres restes des êtres organisés et des coquillages (1). © Descouches irrégulières d'anthraciteaccompagnées de schiste alumineux et de crayon noir, ont été découvertes dans cette formation sur Rhode-lsland , les rivières Leheigh et la Sus- © (1) Je n’aïpas trouvé, moi-même, dans le calcaire compacte , ou à petits grains de cette formation, aucuns restes de substances organisées, et les échantillons que j'ai vus entre les mains d’autres personnes qui les avoient trouvées , m'ont paru être superficiels ou avoir été pris dans des endroits qui touchoient ou avoisinoient Îles vallées du calcaire secondaire ; mais ayant prolongé mes recherches plusieurs heures, j'ai trouvé au-dessus de l’anthracite, dans un schiste à feuillets satinés, de couleur noirâtre , se divisant en feuillets légers et ondoyans une impression du genre des fougères qui paroissoit être un asplenium : et j'en ai vu trois ou quatre autres échantillons trouvés par d’autres personnes, qui renfermoient des impressions semblables. Tome LXXII, FEVRIER an 1811. X 162 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE quehannah. Une masse immense de schiste alumineux ‘qui se rencontre sur la rivière de Jackson dans la Virginie , n'est peut-être qu’une portion d’une formation semblable. De forts filons de sulfate de baryte la traversent dans plusieurs endroits : il est granulaire , comme auprès de Fincastle, ou schisteux comme dans la province de Buncomb dans la Caroline sep- tentrionale. Le fer et le plomb ont été jusqu'ici les principaux métaux trouvés dans cette formation, le plomb sous la forme de galène en amas, ou, ce que les Allemands appellent s£ocke werck, comme aux mines de plomb sur la rivière Neuve, de la province de Wythe, de la Virginie. Le fer est dissé- miné en forme de pyrites. Des mines de fer hématique et magnétique , et des quantités considérables de mines en fer spalhique, se trouvent en lits et sont également disséminées dans la pierre calcaire. Formation secondaire. La limite sud-est de cette immense formation est bornée pe la limite irrégulière de celle de transition , depuis entre es rivières d'Alabama et de Tombigby jusqu'aux montagnes de Catskill. Du côté du nord - ouest, elle suit le bord des grands lacs, et se perd dans l'alluvion du grand bassin du Mississipi, occupant une surface de 200 à 500 milles de largeur. Sa plus grande élévation est sur la frontière sud-est d’ots elle tombe presqu'imperceptiblement au: nord-ouest, et se mêle avec l’alluvion du Mississipi, ayant les contours des montagnes droites et régulières, bornant les rangées longues et parallèles d'une hauteur qui diminuent graduellement à mesure qu'elles approchent des limites nord-ouest. Une stratification presqu'horizontale, ‘où suivant les inégalités de la surface, distingue cette formation des deux précédentes. : Des couches immenses de calcaire secondaire de toutes sortes de nuances, depuis le bleu clair jusqu'au noir, in- terceptées dans quelques endroits par des traces prolongéés de pierre de sable et d’autres agrégations secondaires, pa- roissent constituer les bases de cette formation, sur laquelle repose cette grande et précieuse formation que Werner a nommée la formation de charbon indépendant, s'étendant ET. D'HISTOIRE NATURELLE. 163 depuis la tête des eaux de l'Ohio à quelques interruptions près, jusqu aux eaux de la Tombigby, accompagnée de ses roches ordinaires, telles que l'argile schisteuse et la pierre de sable , avec des traces de végétaux , etc.; mais je n'ai jamais _ vu ni entendu dire qu’elle füt couverte ou qu'elle alternât avec des roches qui ressemblent aux basaltes ,ni méme avec aucune de celles nommées la nouvelle /loetz trap formation. Le long de la limite sud-est, non loin de la transition, on a trouvé une formation de roche qui contient du sel et du gypse. Au nord de l'embranchement de la rivière de Holstein , non loin d'Abington, et sur la même ligne sud- ouest dans la province de Gréen et sur la rivière de Pidgeon, province de l'état de Tennesse, on a découvert, dit-on, des quantités considérables de gypse. D'après ces découvertes etles nombreuses sources salées qui se trouvent sur le même rang , autant au nord que le lac Onéida, il est probable que cette formation est sur la même grande échelle com- mune à toutes les autres formations qui se trouvent sur ce continent; du moins une analogie raisonnable admet cette supposition , et nous pouvons espérer de trouver un jour en abondance, ces deux substances si utiles, qui, en général, se rencontrent mélangées, ou auprès l'une de l’autre dans toutes les provinces qui ont été examinées ayec soin. Les substances métalliques trouvées jusqu'ici dans cette formation, sont les pyrites de fer disséminées dans le charbon et dans la pierre calcaire. Les mines de fer consistent prin- cipalement en fer spathique et en fer argileux en couches, la galène soit en filons , soit en amas, ce qui est incertain, Les vastes dépôts de galène à Saint-Louis sur le Mississipi, ont été décrits comme des morceaux détachés trouvés couverts par l’alluvion de a rivière les uns après les autres, et non pas dans leur place. Tous les grands échantillons que j'a vus étoient des masses roulées, ce qui me confirme dans l'opinion qu'ils n’ont point été trouvés dans leur’ place primitive. > Sur la grande rivière de Kanawa , auprès de l'embouchure de l’Elk, il y a une grande masse de terre noire que je suppose végétale , et si molle qu'on peut y enfoncer un bâton jusqu’à 10 et 15 pieds de profondeur. De ce trou ainsi pra- tiqué, il sort fréquemment un filet de gaz hyprogène qui brûlera pendant quelque temps. Dans le voisinage de’ cet X 2 164 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE endroit il y a des filets constans de ce gaz qui, dit-on, une fois allumés brülent pendant des semaines entières. Un examen approfondi de ce lieu donneroit probablement quel- que lumière sur la formation du charbon et des autres subs- tances combustibles qui se trouvent en grande quantité dans cette formation. Non loin de Kingston sur lelac Ontario un peu au-dessous de Quebec, autant que je puis m'en souvenir n'ayant point sous les yeux mon journal, la formation est principalement primitive, et d’après tous les Re que j ai pu me procurer à cet égard, il résulte que la fre masse de con- tinent située au nord du 46° degré de latitude, et à une dis- tance considérable jusqu'à l'ouest, est presque toute composée de la même formation : d’où il est probable que sur ce con- tinent , ainsi qu'en Europe et en Asie, les contrées septen- trionales sont principalement occupées par la formation prinutive. Les observations précédentes sont le résultat de plusieurs excursions que jai faites autrefois dans les Etats-Unis , et des connoissances que j'ai acquises depuis peu en traversant et en divisant la ligne des formations principales, en 16 ou 20 en- droits différens depuis la rivière d'Hudson jusqu'à celle de Flint, ainsi que des renseignemens que j'ai obtenus de per- sonnesintelligentes qui, par leur situation etleur expérience, n'ignorent point la nature desserrains où elles résident : je n'ai pas non plus négligé de m instruire d'après les échan- tillons, lorsque les localités se trouvoient exactement mar- ques ; enfin, j'ai profité des observations faites par des voyageurs judicienx. Malgré les différentes sources dans lesquelles j'ai puisé, l'exactitude des lignes de séparation entre les formations, dépend beaucoup d’une analogie raisonnée, par exemple, entre le Magotty-Gap et Rockfish-Gap à la distance l’une de l'autre de soixante nulles, dans six endroits différens que j'ai examinés , j ai trouvé que le sommet des montagnes bleues partageoiït les formations primitive et de transition. J'en ai conclu que dans les endroits que je n’ai point examinés , ou qui Ye leur nature n’étoient pas susceptibles d'examen, que Ja chaine bleue depuis Magotty-Gap jusqu'à Rockfsh-Gap, étoit la limite des deux formations. La carte des Etats-Unis sur laquelle ces divisions sont tracées, quoique, selon moi, la meilleure de toutes celles “ET D'HISTOIRE NATURELLE, 165 qui aient paru jusqu'ici, est encore très-défectueuse quant à la situation et au rang des montagnes , aux cours et aux sinuosités des rivières, etc. ; mais comme les échantillons que j'ai ramassés à chaque demi-mille, ainsi que les bornes de différentes formations, sont tirés des situations positives des différens lieux , l’arrangement de la carte ne peut pas les changer ; mais avec le temps elle se perfectionnera, elle deviendra beaucoup plus exacte à mesure que la partie géo- graphique sera plus soignée, En adoptant la nomenclature de Werner, mon intention n'est point d'entrer dans l’origine de la première création des différentes substances , ou dans la nature et les pro- priétés des agens qui peuventavoir subséquemment modifié ou changé l'apparence et la forme de ces substances; j'ignore également les périodes relatives de temps dans lesquelles ces modifications ou ces changemens ont pu avoir lieu; ces spéculations ne sont point de ma compétence , et pas- sent mes connoissances. l'out ce que je puis penser d’une formation, c'est que c'est une masse de SHbstan tes soit adhérentes"comme les roches , ou séparées comme le sable et le gravier, uniformes et semblables dans leur structure et leur position relative, occupant des espaces étendus avec peu ou point d'interpolations de roches appartenantes à une autre série , classe ou formation ; et même lorsque de sem- blables mélanges partiels ont lieu en apparence, un examen attentif manquera rarement d'expliquer ce phénomène sans avoir égard au principe général, ou sans faire une exception à la règle. Dans le détail des métaux et des minéraux, je n'ai pas eu intention de donner un catalogue du nombre de l'étendue et des richesses des dépôts métalliques et autres minéraux. La nature de la mine ou du minéral, avec une description de sa position relative eu égard aux substances environnantes, est l'objet principal de la Géologie, qu'une recherche dé- tailléeouune analyse minutieuse de roches isolées et de masses détachées, ne peuvent pas saisir : tel seroit un peintre de por- trait qui s'appesantiroit sur un bouton qui se trouveroit, par hasard, sur une belle figure. Le devoir du géologiste est de s ef- forcer de saisir les grands traits dela nature; il doit s'instruire de ses lois générales, plutôt qu'étudier ses déviations acciden- telles, ou étendre et amplifier ses exceptions supposées qui disparoissent bientôt à l'œil de l'observateur. A CR D pt eg à AC du Lait OBSERVATIONS METEÉOROLOGIQUES FAITES £. RATE TAN ed 2 ARE € ve. A EE ds GS CIEL MAIS, AD «| THERMOMETRE EXTERIEUR = à CENTIGRADE, FR ONCEMEUESAUE TR TIQUE, > à nf RE Deer PAU PAU RE NÉE D" | Maxrvum. | Minimum. |A Max. Maximum. | Minimum a [F5 1. net À és TE Dr T9 cat LÉ ue pur nu mil: | o ci miai 6dhros 10 — 67m... 767 M6lR 10 à: en dols 8l de s[à midi — b,olà11s., — 9,6) — 5,olàrt Sicuesee 758008 75 M... 2 751,00 Je 0,6 483, — 3,4 à 7 3 me Lol 40là7 2m... HA AUTO Se. de el4e 748,52 750,43 13 °à3s — 5247: m. — CM EN) SARA 749,o0{à 7Em......, 747,90 747,61 —5,1 6 à midi — 5,0 à 7 3 M. — 6,0| — 4,0à10s......... 749:49|à 7 +M........740,00 740,04 —0,4|! 7là midi — 3,olà 10%S. — 6,0] — 3,0là1025.......701,38/à 75 m....... 790,14 750,86 —0, Blarots. — 2,5/à 7 5m. — 6,5] — 3,5là ro46.......752,21à7+m....... 751,00 751,03 —1 I ll olàmidi + 1,5là7 3m. — 20] + 1,5làros....... 756,5o|à73m....... 753,82|755,20 ES. | 10[à midi + 3,olà 7 + m. — 0,0! + dolusist ee 5.708,92 ADEME 757,80 758,56 1.0 Blirlà midi + 4ofà 73m. + 1,0] + 4,ol103s.,..... 758,12/à 3 s.,....... 757:24|757,24| 39] Mr HO OUTE 6,31à7 2m. + 1,0] + 5,8|27£m........756,2092s........ 753,40 755,20 40 MiiSlamidi + 7,57; m. + 5,8] + T2 |A DS... 756,04|à 7 3 m-:......754,96 755 44) 5,7 Niialhmidi + 9,3là7£m. + 5,2! + 0,3/à 105......... 7551obla 9 + se. ee 754:50|754,92| 6,0 15fàrs. “+Hi02là9s. + 3,9] + 9,7 los hein E7a6 08 OI Et 754,00|754,12| 6,6 HiGliom. + 3,3/à midi + oë| + oë8là9 s....... .765,81|à 7£m....... 759,501763,64| 5,3 Bli7lhtois. + 8.473 m. + 2,41 + 5,5[472m.,......702,04/à 1035... 756,10|760,20| 5,2 MiiSimidi —io,5à1oZs. Æ 2,0] +10,5|à1055s....... 759,84là midi..,.....7406,72|746,72| 7,9 Hg rs, 4x à7zm. + 0,2] + 3TDO Su. -.771072|A TE Me eee 765,86,768,50| 5,7 Dlchèots. + 2098à7im — 2,5] + 2,1 à 7Em...:...770,74là TT S......., 764,361768,78| 5,2 Rizilh3s. + r,olà 75m. — 4,5] + 0,4 ATOZS......: 763,52|à 75: m:....... 762,20|762,27| 5,2) Ri22hh3s. + 1,5à74m. — 3,6] + 0,5 ATOS ee 765,02|à 7im......,764,16|76472| 4,4 Al2îlhiors. — 1,31à71m. — 4,3] — 2,ojà10 See em » » :700,90|À 7 = M....-.. 765,50)766,16| 2,7 Mi24à3s —oslèrzs — 3,0] — 0,9 ARTE CE ieee 767,50|à 7 : m....... 766,00|766,20| 2,6 125,335. — oplà 74m. — 5,8] — 1,8|à midi........750,39|à 1035S.......768,22|760,30| 2,1 Mi2613s. — 2,4à75m. — 8,5) — 3,8/à 55m........ 765,82/à 1015........750,32/764,76| 1,7 M|27là midi # 4,4là74m. + o0,5| + 4,4là7+m........ 758,08|à 35.0... 748,72|750,64| 3,0 BI26/à midi + 37arois. — 0,9] + 3,7|à7 m........ 750,57|à 10 S?s.,.... 748,371750,24| 3,6 : 29/à midi + 1,0 MTIOS..—13,5| + TolAmOos- 02e 752,18|à 7 +mMmL...... 746,33|749,76| 2,9 H|2O/à midi + 3,273 m. — 2,0] + D AITONnE ER ee HÉnaEo) E rot tee etc 745,19|750,73| 2,6 É|31hmili + AGE 105. 5,3 + 9,8!/à 10m........ 7A1,44|a3s2.500 .02. 740,10/771,28) 5,0 “| Moyennes. + 1,6! — 2,4| + 1,3! 757,79| 53,79|756,11| RECAPITULATION. Millim. Plus grande élévation du mercure. .... 771,72 le 19 Moindreélévation du mercure......... 740,10 le 30 Plus grand degré de chaleur......... + 10,5 le 18 Moindre degré de chaleur........... — 10,3 le 2 Nombre de jours beaux....... 11 de couverts........... 20 depluie........ dore 9 de Rte SSÉleote see tie te 31 degelée.. "22e 23 de tonnerre........... Le) de brouillard.......... 20 de nelge -hesccee-rees ô degrêle.….:......-. ï Nora. Nous continuerons cette année à exprimer la température au degré du thermomètre cen- centièmes de nullimètres. Comme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu’on le thermomètre de correction. À la plus grande et à la plus petite élévation du baromètre M conclus de l'ensemble des observations, d'où 1l sera aisé de déterminer la température moyenne conséquent, son élévation au-deessus du nivau de la mer. La température des caves est également W A L'OBSERVATOIRE IMPÉRIAL DE PARIS. JANVIER 1811. | Te ER RE “ |Ere. POINTS VARIATIONS DE L’'ATMOSPHERE. d VENTS. = Le LUNAIRES. un [à midi. Lr| 62 |IN-E. P.Qàroh4o’s. | Beau ciel, brouillard.[INuageux. Couvert. > SYEUINE Equi. ascen. |Couvert,brouil.nuag.|Neige continuelle, Nuageux et troub'e. 3| 6o |N-0O. Idem, Couvert, neige. Idem 4] 76|E. Frouble et nuageux. Couvert, Neige abondante. 5| 68 [N-E, Couvert, neige. Item et neige. Couvert. 6| 69 l|N. Couvert. Couvert. Idem. 7| 66|N-E, Idem. Idem. Nuageux, | G2| laem Couvert, brouillard. |Couvert, grésil. Couvert, grésil. gl 951N. P.L.à4ha6's.| . Idem, Couvert,broul.épais.|Convert et humide. 1o| gs. Idem. et verglas. Couv. ; brouill. Gouvert. 11] 96/|S-S-E. Lune apogée, |Couv., brouillard. Nuageux. Laem pluie depuis 4 h. 12] 961S. Idem. Idem. Quelques éclaireis. 13] 97/|S-0O. Couvert. Couvert, Pluie parintervalle. 14] 961$. | Idem , petite pluie. Idem. Couvert. 15| 9610. Equi. des. Idem. Idem. Pluie par interval. 16| Ü7| Idem. Nuageux, grésil, gl. [Neige abondante. Nuageux. 17| 961$. D.Q.àghars. Couv. pluie, gl., neig.| Pluie fine. Pluie par intervalle. 18| 95|N-0O. Couvert, - Piaie continuelle. Superbe. 19| 69| Zaem Beau ciel , glace. Quelques nuages. Idem. 20| 6 |E.N-E Idem , brouillard: Superbe. Taerm. 21| 67|S-E. Idem. gelée blanche. |Légers nuag., brouil. |Couvert. 22| go|S-O. Idem. Ciel trouble, broul. |Ciel trouble ; brouil. 23| 92/N-O. Ta., bro. tr.-fort, gîvr.| Brouillard épais, Brouillard épais. 24! 91/|N-E. N.L.a5h55s.| dem. Couvert , brouil. Troubleet nuageux. 20) 791N L. périgé. |Beau ciel, brouillard.|Beau cel, brouiilard.[Superbe. 26| 82/)N-O. Ldem. Idem. Nuageux b7| 95|S-0. Couv., léger brouil. |Couvert, petite pluie.[Bcau ciel, 20] ©0| Idem. |Equ.ascen, |[Nuageux, prouillard.|Couvert. Neige par intervalle. 29| 671N. Neige, brouillard. Couv. et léger brouil.|Ciel volé. So| 921S-O. Couv.,brou.,neie.fin.| Idem. Couvert. 31] 961$, P.Q.à11h6/m. [Couvert , brouillard. | Zaem. 14, pluie tine, RÉCAPITULATION. VE SL AS etre Jours dont le vent a soufflé du ae HAE DRE SO:diaseasike Gb BR Oh © roux le 1° 120,087 Therm. des caves le 16 12°,031 Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 28""74— 1 p. 7 lig, EE tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, c’est-à-dire en nullimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromètre; on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, On a substitué le maximum et le minimum moyens, du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris ct par exprimée en degrés centésimaux , afin de rendre ce Tableau uniforme. 165 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE MÉMOIRE SUR LA TRANSMISSION DU CALORIQUE A TRAVERS L'EAU ET D'AUTRES SUBSTANCES; Par P. PREVOST, Professeur de Physique à l'Académie Impériale de Genève. Lu à la Socrété de Physique et d'Histoire naturelle de Genève, le 16 août 1810. $. 1. J'Arrappelé, dans mon Æssar sur le Calorique rayon- nant (1), les principales tentatives qui ont été faites pour apprécier l'effet de divers écrans, ou substances propres à intercepter la chaleur; et j'ai discuté avec soin les expé- riences exactes qui ont été faites dans le but d’apprécier la quantité de cette interception ; ou réciproquement , la. quantité de calorique qui est transmise à travers l'écran et quise fait sentir derrière la surface interceptante. MM. Scheele, Pictet, Herschel , Leslie sont ceux que j'ai principalement cités. Je ne dois pas répéter ici les remarques qui m'ont été suggérées par les observations de ces habiles physiciens. L'application avec laquelle quelques-uns d'entre eux ont suivi ce sujet, en fait assez sentir l'importance et me dis- pense d'y insister. Je crois en particulier que les idées justes que l’on se fera de la transmission, pourront jeter du jour sur la théorie de la chaleur, et que celle-ci, bien connue, influera avantageusement sur la pratique, je veux dire, sur (2) Du Calorique rayonnant , Paris , chez Paschoud , 1809. l'emploi ET D'HISTOIRE NATURELLE. 169 l'emploi du calorique dans les arts et dans les usages do- mestiques. $. 2. Mon but n'est pas, dans ce Mémoire, de traiter la matière de l'interception et de la transmission du calorique dans toutesonétendue , mais seulement de résoudre quelques questions particulièresquis'yrapportent.J'examineraid abord s'il y a transmission du calorique par l’eau , et je m'occu- perai ensuite de la manière dont s'opère toute espèce de transmission de chaleur. | $. 35. Avant d'entamer cette discussion, je dois faire men- tion des moyens que j'ai trouvés à ma portée pour faciliter les expériences dont je vais rendre compte. Les huit pre- mières ont été faites dans le cabinet de Physique de mon ami et collègue M. Pictet, qui m a offert avec empressement tous les secours qui pouvoient en assurer le succès: Les expériences suivantes ont été faites avec l’aide de M. Henri Boissier, qui a mis beaucoup d'adresse et de patience à les faire réussir et m'a suggéré souvent des moyens heureux d'exécution. $. 4. J'ai aussi quelques remarques préliminaires à faire sur les thermoscopes que j'ai employés. Ces thermoscopes sont ceux dont M. Pictet a introduit l'usage et qu'il a décrits dans son Æssai sur le feu, $S 56. On sait que cet instru- ment n’est autre chose qu'un thermomètre d'air , ayant pour indice une petite bulle d’esprit de vin coloré que l'on in- troduit dans letube, en échauffant légérement, puis laissant subitement refroidir la boule du thermomètre. Cet instru- ment a l'avantage , 1° d'étre d’une construction et recons- truction très-facile ; 2° d'être extrémement sensible. $. 5. Par quelques expériences comparatives, les quatre thermoscopes de cette espèce, employés le plus souvent dans les expériences faites avec M. Henri Boissier, se sont trouvés mesurer par leurs mouvemens les espaces suivans pour un degré du thermomètre dit de Réaumur, de la division en 80 parties (1). Le moins sensible parcourt 4 + lignes pour un degré. (1) J’aiété conduit à faire usage dans ces expériences des anciennes mesures. nil auroit été facile de les réduire aux nouvelles ; mais il m’a semblé que cette réduction étoit inutile. Tome LXXII, FÉVRIER an 1811. de 170 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Les deux moyens environ 74. Le plus sensible 22 :. Pour faire cette comparaison , je prenois de l'eau froide à peu près à la température du local où se faisoit l'expé- rience ; jy plongeois à la fois un thermomètre de Réaumur et le thermomètre de Pictet que je voulois éprouver ; ensuite je versois dans le vase de l'eau chaude. Je voyois de combien de degrés le thermomètre de R. avoit monté, et je divisois par ce.nombre l'intervalle que le thermoscope de P. se trouvoit avoir parcouru. Il falloit user de beaucoup de précaution pour que, dans cette opération, la bulle d’esprit-de-vin servant d'indice au thermoscope, ne se dissipät pas. $. 6. En faisant ces expériences, j'ai observé un phéno- mène particulier. Lorsque je plongeois le thermomètre de R. dans l'eau froide, quelquefois il restoit fixe au point de la température de l'air dont il sortoit, quelquefois il des- cendoit d’un demi-degré; mais souvent au contraire, il ar- rivoit qu'en plongeant le thermoscope de P. dans cette même eau, l'indice montoit, quoique d'une petite quantité. Ce- pendant il est arrivé aussi une fois qu’un thermoscope de P. très-sensible, est resté fixe comme le thermomètre de R. Sans cette exception, qui semble indiquer qu'en cette oc- casion les mouvemens des thermoscopes tiennent à des causes accidentelles, il y auroit eu lieu de soupçonner à cet effet, une cause permanente et digne d'être recherchée. SECTION I. De la Transmission du Calorique par l'eau. = $- 7. Je considérerai d'abord l'eau à l’état de glace. J'ai décrit dans mon Traité du Calorique rayonnant (sect. VII), les appareils de M. Leslie et ses expériences sur la chaleur rayonnante, en particulier sur la transmis- sion du calorique. Ils consistent essentiellement en un vase cubique rempli d'eau bouillante , dont une face projette son calorique sur un miroir métallique concave, au foyer duquel est la boule d’un thermoscope fort sensible. Entre le vase et le miroir, on place, sur un support, des écrans de di- verse nature. Si l'écran est de papier ou de verre, ily a ET D'HISTOIRE NATURELLE. 171 transmission du calorique, et le thermoscope en est affecté ; mais si l'écran est une fine lame de glace, le thermoscope n est point affecté (1). Cest cette dernière expérience que je me propose de discuter. $. 8. L'auteur indique très-bien la cause pour laquelle le résultat en est si différent de celui qui a lieu avec d'autres substances. Tout le courant du calorique , qui vient frapper la surface de la. glace du côté du vase chaud, s'emploie à la fondre. La température de la glace, ditil, demeurein- variablement constante, et méme les côtés de cette lame où s'opère la fusion, sont maintenus au degré zéro, ou à un degré très’voisin. $. 9. Cependant;'en envisageant la transmission du calori- que comme anaiïogue à celle de la lumière, c'est-à-dire comme se faisant par un passage instantané , conception assez fa- milière aux physiciens ; il semble que l'explication que je viens de rapporter ($. 8), préteroit aux objections; car qu'est-ce qui empécheroit qu'une portion quelconque de ca- orique traversät la glace, tandis qu'une autre la fondroit? Mais n'anticipons pas ici sur le mode et la forme de cette transmission, dont nous avons dessein de nous occuper à part; et suivons notre sujet actuel qui est la transmission à travers la glace. $. 10. Puisque l'expérience de la transmission par la glace n'a pas réussi par une température élevée, j ai imaginé qu'elle pourroit réussir par une température basse. Supposons que l'on répète cette expérience dans un lieu dont la température soit au-dessous de zéro ; on aura deux manières de procéder qui pourront prévenir l'effet de la fusion de la glace. La pre- mière manière seroit de tenter l'expérience par la voie du refroidissement au lieù de celle de L'échauffement ; car on sait que le froid rayonne en apparence comme la chaleur. Ainsi, en présentant à l'écran une cause réfrigérante, au lieu d'une source de chaleur, on pourroit espérer de voir le froid se transmettre à travers l’écran de glace, comme à travers l'écran de verre. Du moins on ne sauroit appercevoir aucune cause étrangère à La nature même de la substance , qui puisse a J'ai rapporté cette expérience dans mon Zraité du Calorique rayonnant; 101, Y 2 F72 JOURNAL DE FHYSIQUE, DE CHIMIF, introduire ici quelque différence. L'autre manière seroit , en employant une cause échauffante, de placer l'appareil dans un lieu dont la température füt assez au-dessous de zéro, pour que la source de chaleur püt échauffer la glace sans la fondre ; car alors, pendant les premiers instans, il ny auroit pas de raison pour que la transmission füt troublée. $S- 11. Quant à la première de ees manières, celle par le refroidissement , je savois que ces expériences sont plus sujettes à manquer que celles par l'échauffement. M. Leslie en avertit, et on apperçoit quelques raisons de cette diffé- rence La principale, en ce cas, est le petit nombre de degrés de refroidissement que l'on peut obtenir, comparé au nombre de degrés d'échaulfement que produit un fer chaud, ou même l'eau bouillante, Néanmoins je résolus de tenter l’ex- périence sous cette forme. $- 12. Voici le résultat de cette tentative, ainsi que de l'expérience faite par la voie de l’échauffement (1). Expérience I. L'air de la chambre étant à environ —3°R, un mélange frigorifique à -—-25°, est placé sur l'axe d'um miroir sphérique concave métallique, entre le centre et le foyer principal. Au foyer conjugué est la boule noircie d’un thermoscope. Le mélange frigorifique et la boule du thermos- cope sont éloignés d'environ 18 pouces l'un de l'autre. Une lame de glace, provenant d'une eau distillée et bien trans- parente , d'environ 2 lignes d'épaisseur, est placée, entre le mélange et la boule du thermoscope, à 24 pouces de la boule noircie. L'effet est insensible ou douteux. Expérience II. On ôte l'écran de glace. L'effet reste douteux. Expérience III. On remet l'écran de glace. On approche de la glace le mélange frigorifique autant qu'on peut le faire sans le toucher. L'effet reste douteux. Expérience IP. En recommençant à se servir du miroir, (tr) Les six expériences suivantes sont du 1% février 1810, La 7° et la 8° sont du 16 du même mois. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 173 on place à son foyer, au lieu du mélange frigorifique , la flamme dune bougie. Le thermoscope marche au chaud àtravers l'écran de glace. Expérience V. On substitue à la bougie un matras d’eau bouillante. L'effet est insensible. Expérience WT. Négligeant l'effet du miroir, on approche de l'écran de glace à la distance d'un demi-pouce, le matras rempli d'eau bouillante. Le thermoscope marche au chaud d’une manière très- évidente. Expériences comparatives. Expérience VII. L'air de la chambre étant environ à zéro, le matras d'eau bouillante est mis au foyer du miroir, et la boule du thermoscope au foyer conjugué ; on interpose un écran de verre épais d'une ligne. ° L'effet du matras sur la boule est insensible. Expérience VIII. On approche le matras de l'écran. Le thermoscope marche au chaud foiblement. $. 13. On voit donc que, par le procédé du refroidisse- ment, l'expérience n'a point donné de résultat; mais que par l’échauffement , dans un local de 3° au-dessous de zéro, il y a eu un résultat tel que l'on pouvoit l'attendre, et qu à cette température, la glace transmet la chaleur comme le verre. On ne peut étre étonné que le refroidissement n'ait pas été transmis par la glace, puisque l'expérience com- parative avec le verre n'a pas mieux réussi. 11 résulteenfin de ces expériences, quela chaleur se transmet par la glace aussi bien que par le verre, lorsque quelque circonstance particulière , telle que la fusion de l'écran, ne vient point troubler cet effet. $. 14. Considérons maintenant l’eau à l'état de liquidité. M. Leslie ayant fait à l'air plusieurs expériences sur la chaleur rayonnante, en employant l'appareil dont j'ai fait mention tout-à-l'heure ($. 7), (c’est-à-dire un vase cubique rempli d'eau bouillante, placé en face d'un miroir concave dont le foyer étoit occupé par son thermoscope), imagina, pour voir si l'eau transmettoit le calorique , de placer tout cet appareil dans une cuve, et après en avoir fixé solidement 174 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE chaque pièce, de remplir la cuve d'eau. Le résuat fut que le thermoscope, qui à l'air étoit fort affecté, ne le fut point dans l'eau. D'où 1l paroîtroit résulter que l'eau ne transmet point le calorique (1). $. 15. En examinant de plus prèsles circonstances de cette expérience, il me parut qu on ne devoit pas en conclure que l'eau ne transmet pas le calorique, mais seulement qu’une grande masse d'eau n’en transmet pas une quantité sensible. Los belles expériences du comte Rumford sur le mode d’échauf- fement des liquides , établissent, entre eux et les solidés, une différence frappante à cet égard; mais à l'égard de la transmission, cette différence peutn'avoir aucüneinfluence. Or l'eau, par sa densité, est plutôt comparable au verre qu à l'air; et certainement une masse de verre de quelques pieds ne transmettroit pas sensiblement une chaleur aussi foible, Il semble donc que l'expérience à faire seroit de construire un écran d'eau aussi mince que les feuilles de verre employées à cet usage dans les expériences de ce genre, et d'examiner si le calorique traverseroit un tel écran, ._ $. 16. C'est dans ce but que les expériences suivantes ont té faites (2), à l'aide d'un appareil fort simple dont voici les pièces principales. 1. Un petit support en bois destiné à soutenir un écran ayant l'un de ses montans mobile le long d'une coulisse, afin de s’adapter à la grandeur variable de l'écran. 2. Deux feuilles de verre exactement pareilles, disposées parallèlement à une très-petite distance l’une de l'autre, et liées entre elles sur les bords par un ciment impénétrable à l'eau , ensorte qu’elles fassent office d'un petit vase fort étroit. Chacune de ces feuilles de verre de = ligne d'épaisseur, est un carré de 4 + pouces de côté. 3. Quelques petits cubes ou parallélépipèdes de fer, des- tünés à être chauffés , et une fourchette propre à leur servir de support. En chauffant ces fers on avoit soin de ne point les faire rougir. (1) J'ai rapporté cette expérience dans mon Traité du Calorique rayonnant, S. 195. (2) Toutes les expériences rapportées dans la suite de ce Mémoire, ont éts faites dans les mois de mai, jun, juillet et août 1810. ET D'HISTOIRE NATURELLE. > 276 Expérience IX. Les deux feuilles de verre étant éloignées l'une de l’autre de = de ligne, et cet intervalle étant rempli d'eau , on place d'un côté de cette espèce d’écran la boule d'un thermoscope, et de l'autre un fer chaud à différentes distances , dont la moindre est ‘de six lignes et la plus grande de cinq pouces. La température du local étoit de 18 : degrés de R. Le thermoscope indique, après quelques instans, un ac- eroissement de chaleur. Expérience X. Pour s’assurer que la chaleur ne s'est pas communiquée par derrière l'écran , ou par dessus ou par dessous, mais qu'elle a bien été transmise par l'écran ; on substitue à celui-ci un petit bloc de bois d'ébène trop épais pour transmettre la chaleur (haut de 4 pouces , large de 2 pouces 2 lignes , épais de 1 * pouce), laissant d’ailleurs le fer chaud et le thermoscope dans la même situation. L'effet a été sensiblement nul, ensorte que le soupçon se trouve entièrement écarté. Expérience XI. L'expérience X est répétée avec un petit matras d'eau à 62° R. ; Le thermoscope marche au chaud, maïs fort lentement et fort peu. bd Les expériences IX, X, XI ontété répétées avec un écran dont la lame d'eau avoit : ligne d'épaisseur. Les résultats ont été sensiblement les mêmes. $. 17. Lorsqu'on retire le corps chaud , le thermoscope reste long-temps sans reprendre sa.première position. Frappé de ce phénomène, j'ai mesuré exactement les temps. Expérience XII. L'expérience IX est répétée. En $ de minute, l'ascension du thermoscope (produite par le fer chaud à travers l'écran composé de verre et d'eau) devient sensible ; elle continue pendant environ 2 minutes. Après qu'on a ôté le fer chaud, le refroidissement ne com- mence à être sensible au thermoscope qu'après 6 minutes; mais à l'instant où on ôte l'écran, le refroidissement est rapide. Ainsi c'est l'écran réchauffé qui ralentit le refroidissement. Pour connoître si ce phénomène dépendoit de l'eau, ou s’il avoit également lieu par le verre, j'ai fait l'expérience suivante : Expérience XIII, Une feuille de verre servant d'écran, 176 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un fer chaud fait monter le thermoscope au maximum en 2 minutes et un quart. On enlève ce fer chaud avec sa fourchette , en laissant en place le thermoscope et l'écran de verre. Le refroidissement est lent au commencement, la marche du thermoscope en baisse est lente et presque uniforme. En 6 minutes et trois quarts (le triple du temps d’échauf- fement), le refroidissement se trouve à peu près achevé. Le thermoscope est revenu à peu près à son point de départ. S'il reste un peu plus haut, c'est en partie parce que le local s'est un peu réchauffé. Cependant quand on enlève l'écran, il se fait dans le thermoscope une baisse subite, mais fort petite , attendu qu'il étoit.à très-peu près au terme auquel il devoit parvenir. Température du local, 18 : R. Il paroît donc 1° que c’est l'échauffement de l'écran qui maintient le thermoscope au même degré, et l'empêche de descendre aussi vite qu'il monte; 2° que l'écran lui-même se refroidit plus lentement qu'il ne s’échauffe. La cause de ce dernier fait est un peu compliquée, et se trouve liée à une recherche que je n'ai pas encore achevée (1). Après cette digression, où m'a entrainé le phénomène de ce lent refroidissement, je reprends la suite des expé- riences sur la transmission du calorique par l'eau. $. 18. Dans les expériences qui précèdent, l’eau étoit em- prisonnée entre deux verres (exp. IX, X, XI). 11 me sembloit qu'un écran d’eau pure auroit été plus propre à donner des résultats exempts de toute espèce d'incertitude. J'ai donc tenté de me procurer un écran de cette espèce. Expérience X1IJ. La boule d’un thermoscope est insinuée dans l'intérieur d’une bulle de savon; la bulle restant sus- penduëeau fourneau de la pipe avec laquelle on l’avoit soufflée, on approche cette bulle d'un fer chaud. Presqu à l'instant le thermoscope monte. Il paroît donc qu'une lame d'eau pure transmet le ca- lorique. . $- 19. Mais cette expérience, souvent répétée, donne lieu à quelque doute relativement à la conséquence que je viens (:) Forez la Note sur le S 34. de ET D'HISTOIRE NATURELLE, * 177 de tirer. Ne se pourroit-il pas que le fourneau de la pipe s'échauffât et communiquät sa chaleur par conductibilité à la bulle d'eau savonneuse ? Expérience XV. Un écran de fer blanc poli, est placé de manière à laisser passer le calorique rayonnant du fer chaud directement à la bulle de savon, mais non au fourneau de la pipe qui la tient suspendue. On approche la bulle du fer chaud ainsi garanti. Le thermoscope n'en monte pas moins. $ 20. Je soupçonne qu'il se fait un courant d'air chaud ascendant, qui trompe les précautions ci-devant employées. Pour apprécier ce soupçon, je fais l'expérience suivante: Expérience XV/1. Après avoir enlevé la pipe et la bulle, à l'endroit même où étoit le fourneau de la pipe , je mets la boule du thermoscope. L'indice accuse un accroissement de chaleur. . Ainsi le soupçon est confirmé. $. 21. Mais comme la convexité de la bulle cachoit le fourneau de la pipe, il convenoit pour rendre l'expérience conforme , d’opposer une convexité à peu près pareille au courant chaud, pour voir si, malgré cet obstacle, la chaleur parvenoit au sommet. Expérience XVII. Je mets un petit cylindre de fer blanc poli dans la place qu'occupoit la bulle de savon; et par dessus l’endroit où étoit le fourneau de la pipe, je mets la boule du thermoscope. Cet instrument nest point affecté. Expérience XVIIT. Je fais sur-le-champ l'expérience com” parative , en substituant à cet appareil une bulle de savon contenant la boule d'un thermoscope. Le thermoscope marche au chaud. Il semble donc que le fourneau de la pipe ne peut pas être chauffé , à moins que le calorique ne traverse la bulle d'eau pour parvenir jusqu'à lui. $: 22. Pour m'assurer toujours mieux que l'ascension du thermoscope, dont la boule est enfermée dans la bulle d’eau, ne dépend pas de l'échauffement du fourneau de la pipe qui soutient cette bulle, j'ai fait diverses tentatives: 1° j'ai répété l'expérience ayec une bulle très-grosse, ce qui rendoit toujours plus improbable cette cause d’échauffement. Par Tome LXXII. FEVRIER. an 1817. Z 178 .__ JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les plus grosses bulles, l'effet a été le même que par Îés petites ; le thermoscope a monté; 2° j'ai tâché de garantir encore mieux le fourneau de la pipe par une règle de bois servant d'écran secondaire ; mais cet appareil étoit trop im- parfait pour donner aucun résultat satisfaisant; 3° j'ai imaginé de suspendre deux bulles de savon l'une sur l'autre et d'in- sinuer le thermoscope dans la bulle inférieure; mais cette opération s'est trouvée trop difficile et n'a pu réussir. D'ailleurs il m'a paru qu’il resteroit toujours quelque scrupule sur ce genre d'expérience, provenant de ce que le courant d'air chaud ascendant peut échauffer les parois mêmes de la bulle d'eau par voie de conductibilité. $. 23. En général il résulte des expériences précédentes, qu'une lame d’eau est perméable à la chaleur, à peu près comme une lame de verre, pourvu seulement qu’elle soit assez mince pour que l'effet ne devienne pas insensible (1). $. 24. Ainsi l’eau soit à l'état de glace, soit à l'état liquide, transmet le calorique. C'est la réponse à la première des questions que je m'étois proposées. Je passe à la seconde. SECTION Il. De la manière dont s'opère la transmission du Calorique: $. 25. Dans ce que je vais dire à ce sujet, je ne parle pas de la transmission du calorique à travers les gaz, et en particulier à travers l’air atmosphérique. Il est connu que cette transmission a lieu à des distances très-grandes | au moins de 69 pieds (2)] d'une manière sensiblement instan- tanée. Si l'air, et en général les gaz, sont conçus comme des fluides discrets , dont les particules soient séparées par des intervalles vides beaucoup plus grands que le diamètre (1) Cette assertion s’est trouvée confirmée par quelques expériences posté rieures faites avec un autre appareil , dont l’idée m'a été suggérée par M. le professeur Théodore de Saussure. En prenant de l’eau, légérement savonneuse, ave un anneau métallique, on obtient une fine lame d’eau horizontale, que le calorique peut traverser: (2) Essai sur le feu par Pictet, S 64. Voyez aussi mon Traité du Calorique rayonnant , SS 1 et 96. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 179 de ces particules ; le rayonnement rapide du calorique à travers cette espèce de vide n'a rien qui étonne. Mais de telle manière que l'on conçoive le fait, il n'en est pas moins certain, et je n'ai rien à en dire: je ne parle que de la transmission du calorique à travers des corps beaucoup plus denses que l'air, tels que le verre et l'eau. $. 26. Dans les corps de cette nature, il y a deux ma- nières de concevoir la transmission du calorique : 1° cette transmission peut être conçue comme immédiate, instan- tanée et de même nature que celle de la lumière à travers les corps transparens. 2°. On peut la concevoir comme médiate , lente et opérée par l'échauffement successif des différentes couches dont l'écran est composé. $. 27. On observe assez généralement qu'il fauæun certain temps, quelquefois à la vérité fort court, pour que la trans- mission du calorique s’opère à travers des corps de la den- sité de l’eau et du verre: c'est ce que l’on peut vérifier par les expériences les plus simples, et c’est aussi ce que l'on peut conclure de celles de MM. Herschel, Leslie et Fordyce, que j'ai discutées dans mon Traité du Calorique rayonnant. Cette raison doit naturellement faire soupçonner, quesouvent la transmission, quoique rapide, n’est pas immédiate. J'avois déjà fait remarquer, il y a long-temps (1), que les expé- riences les plus exactes sur ce sujet s’expliquoient fort bien en supposant qu'il n’y a aucune transmission immédiate du calorique , ou que cette transmission est fort petite; mais cet argument n'étoit en quelque sorte que négatif, et l’on manquoit d'expériences directes pour établir, d'une manière probanfe , la vérité de l'une ou de l'autre supposition. $. 28. Outre ces argumens que je viens d'appeler négatifs en faveur de la transmission médiate, l'expérience VI qui établit la transmission par la glace moyennant un certain degré de froid , donne quelqu'appui à cette opinion; car puisque la glace à zéro ne transmet pas, tandis que celle qui est au-dessous de zéro transmet; on en peut conclure que la glace ne transmet le calorique qu'en s'échauffant couche après couche; qu'elle transmet ainsi lorsqu'elle peut s'é- s$' 8 Fi philos. pour 1802, pag. 417 et 447. Du Calorique rayonnant : 0e . Z 2 180 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHYMIE chauffer sans changer de nature, et qu’elle ne transmet pas lorsqu'en s'échauffant elle consume elle-même son calorique par la liquéfaction. $S. 29. Mais cet argument ne porte que sur une espèce de substance , et paroït laisser quelque chose à desirer. Je crus donc qu'il étoit indispensable de tenter à ce sujet quelques expériences, que j’avois projetéés depuis long-temps et qui me paroissoient propres à résoudre pleinement la question. Il s'agissoit de rendre l'écran mobile, ensorte qu'il n’eût pas le temps de s’échauffer , et d'observer si, malgré cela, il y auroit transmission. Fimaginai donc de construire l'écran en forme de cylindre, de placer le thermoscope sur l'axe, et le cylindre lui-même sur un plateau tournant sur cet axe. $. 30. Je ne rendrai pas compte en détail de toutes les expériences de cette forme. Il arrivoit que l'air contenu dans le cylindre s'échauffoit et troubloit les résultats. IE fallut soulever le cylindre pour permettre à l'air de jouer intérieurement ; mais la petitesse des cylindres nuisoit à l'ex- périence et rendoitl'observation incertaine. On n'appercevoit aucune différence dans l'effet sur le thermoscope , soit que le cylindre tournât, soit qu'il ne tournät pas. Il n'étoit pas facile d'augmenter le diamètre du cylindre , parce que les fers chauffés, qui servoient à ces expériences, étoient trop petits pour agir à une grande distance. ‘ $. 31. Il fallut donc revenir aux écrans planes. Expérience XIX. Une simple feuille de verre , interposée entre le fer chaud et le thermoscope, étoit tantôt immobile, tantôt promenée lentement avec la main dans le même plan. Ces deux manières de procéder produisirent, l'uneetl'autre, une ascension de l'indice du thermoscope. Cependant l'as: cension parut moindre lorsque l'écranétoit remué , et lorsque par conséquent il présentoit sans cesse des places froides succédant à celle qui commencoit à s’échauffer par la pré- sence du fer. Cette expérience étoit manifestement inexacte et deman- doit à être répétée avec quelques précautions nouvelles. $. 52. Expérience XX. L'expérience XIX a été répétée avec l'attention, 1° de concentrer la chaleur du fer sur le thermoscope, et par conséquent sur une seuleplace de l'écran, au moyen de deux petits réverbères demi-cylindriques; 2 de ET D'HISTOIRE NATURELLE, 181. renverser la feuille de verre , ou d’en substituer une seconde etunetroisième, après avoir fait promener la première devant le thermoscope. Sous cette forme, l'expérience a donné un résultat plus clair. Lorsqu'on fixoit l’écran queïques instans, il y avoit un échauffement sensible accusé par le thermoscope. Ce- pendant lorsque le fer étoit très-chaud , il ÿ avoit un échaut- fement sensible et même considérable , manifesté par le thermoscope , malgré le mouvement imprimé constamment à la feuille de verre qui servoit d'écran. $. 33. Expérience XXI. Le fer chaud , muni de ses réver: bères, et le thermoscope étant dans leur situation ordinaire, on interpose une feuille de verre, que l'on fait mouvoir, et à laquelle on en fait succéder une autre, puis à celle-ci une autre encore; et en les renversant, on présente ainsi successivement la surface de six écrans froids de verre, d'environ 1 + pied de long (1). Quoique l'écran soit toujours mu, il y a toujours ascension du thermoscope. $. 34: La conséquence de cette expérience est qu'on ne peut guère douter qu'il n'y ait quelque transmission im- médiate et instantanée. Il est assez prouvé d'ailleurs, que tout écran de verre est susceptible de transmettre la chaleur d'une manière lente et médiate. Ensorte qu'il paroïitroit que, par le verre, il ÿ a deux espèces de transmission , l'une immédiate et l’autre mé- diate (2). $: 35. Pour prévenir quelques objections , relativement à l'expérience suivante, il est nécessaire de rappeler ici que les corps nes transmettent fort bien le calorique: en particuliér le papier à écrire ordinaire , transmet le calo- rique un peu mieux que le verre (3). Ainsi les écrans de papier, qui sont plus faciles à construire et à manier que ceux de verre, ont pu leur être substitués dans quelques expériences de transmission. G) Cette expérience est la même que l’expérience XII , dont en l’exposant, Javois réserve ce détail pour le placer ici. (2): Ce sujet demande a être traité de nouveau , et c’est ce que j'ai entrepris de faire. Je le laisse , quant à présent, à ce point. (6) Du Calorique rayonnant, S 159. 182 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE $. 56. Dans l'expérience suivante on a fait usage d'un disque de papier de deux pieds de diamètre. Ce disque portoit un axe, dont l'extrémité s'appuyoit sur une fourchette et tournoit aisément sur ce point d'appui. On le faisoit tourner à la main avec assez de régularité. Pour employer ce disque comme un écran mobile, on faisoit passer sa partie exté- rieure entre le fer chaud et le thermoscope, de manière à les déborder d’environ 3 pouces. Expérience XXII. Tout étant disposé comme il vient d’être dit, on faisoit tourner le disque de manière à exécuter à peu près deux tours par minute; et l'on observoit les mou- vemens du thermoscope. Tant que le disque tournoit , le thermoscope restoit à peu près stationnaire, Quand on arrêtoit le disque , en très-peu d’instans le thermoscope montoit. Si on recommençoit à tourner, l'instrument descendoit; si on s'arrétoit de nouveau, il remontoit. Dans cette expérience XII, les petits réverbères étoient employés comme dans la XX°:. Pendant le cours de cette expérience XXIT, le local étoit à la température de 19: R. $. 37. On peut conclure de cette expérience XXII, que la transmission par le papier se fait médiatement et par voie d’échauffement , puisque lorsque l'écran devient mobile et n'a pas le temps de s'échauffer, la transmission n’a pas lieu, ou du moins est presqu'imperceptible. Dans cette expérience, le papier, qui est un assez bon conducteur de chaleur, a le temps de se refroidir pendant un tour du disque. Il est douteux qu'en ce même temps le verre abandonnit le léger excès de calorique qu’il auroit reçu en passant devant le fer chaud. | S. 38. Nous avons vu ($. 23) que l'eau liquide donne pas- sage au calorique; mais n'est-ce pas aussi en s’échauffant ? ou permettroit-elle le passage immédiat du calorique à travers sa substance ? Les célèbres expériences du comte de Rumford, donnent bien lieu de penser que l’eau ne transmet point le calorique immédiatement ; mais ce qui a été éprouyé sur le degré de l'eau bouillante , avec des thermomètres ordi- naires, ne se vérifieroit peut être pas sur un degré beaucoup plus haut, tel que celui que l’on obtient avec un fer chauffé fortement , quoique sans rougir , et avec des instrumens aussi ET D'HISTOIRE NATURELLE, 183 sensibles que nos thermoscopes. Pour soumettre ce doute à l'expérience, il faudroit obtenir un écran mobile d'eau pure; car l'écran formé par une couche d'eau contenue entre deux verres, est nécessairement immobile, par conséquent aussi sujet à s’échauffer. La bulle de savon même, n'offre qu'un écran immobile , où d’ailleurs l'eau est mélée de quelques parties hétérogènes. J'’imaginai de former une nappe ou feuille d’eau très-mince , en la faisant tomber d’un rebord uni, comme on le pratique souvent dans les jets d'eau. Après diverses pensées et tentatives, je men suis tenu à l'appareil suivant. $. 39. Au tuyau d’une fontaine permanente, dontunrobinet modéroit à volonté l'issue , on adapte un ajutage de fer blanc, terminé par deux lèvres, dont la distance mutuelle est d'en- viron un quart de ligne. Par ce simple appareil, on obtient une nappe d’eau trian- gulaire, à peu prés de même épaisseur que cette distance des lèvres d’où elle sort et parfaitement continue. La base du triangle, coincidant avec les lèvres de l’ajutage, étoit de 3 pouces 5 lignes; la hauteur du triangle étoit à peu près double de sa base. On comprend que cette nappe d’eau étoit destinée à faire office d’écran. Gomme cet écran se renouveloit sans cesse par la chute continuelle du liquide , aucune place n'avoit le temps de s'échauffer. L'ajutage étoit garanti du côté du Fer chaud, par un écran de fer blanc très-poli qui le préservoit complètement de toute impression de chaleur. Cette précaution est indispensable. La moindre négligence à cet égard faisoit échouer l'expé- rience. Cet écran étoit lié à un autre de même matière et plus grand, destiné à garantir le thermoscope de l'impression de toute autre cause de chaleur; en particulier de celle du corps de l'observateur. $. 40. Expérience X XIII. L'appareil étant disposé comme je viens de dire, le thermoscope est mis d'un côté de la nappe d'eau, et de l'autre côté un fer chauffé sans rougir. La boule du thermoscope est séparée du fer chaud par une dis- tance de 2 pouces 5 lignes seulement. Cette distance est moindre que celle qui avoit suffi à la transmission du calorique par une couche d’eau enfermée 284 JOURNAX DE PILYSIQUE, DE CHIMIE entre deux feuilles de verre (exp. IX). Cette dernière, avee ses verres, formoit un écran d une épaisseur triple ou qua- druple de celle de la nappe d'eau. Si donc la transmission observée avec ce triple écran étoit immédiate, il y avoit toute raison d’en attendre une plus prompte et plus con- sidérable avec la lame d’eau pure. L'appareil est resté plus de cinq minutes en expérience sans que le thermoscope ait été le moins du monde affecté par la présence de la source de chaleur. | Une autre fois, pendant six minutes, le résultat a été le méme. Expérience X XIV. Quoique les expériences précédentes ne laissassent aucun doute sur l'effet qui auroit eu lieu avec un écran immobile ; l'expérience en fut faite immédiatement après la précédente, et sans déplacer l'appareil. Le fer chauffé et le thermoscope restant done en place , une feuille de verre fut substituée à la nappe d’eau. En très-peu d'instans le thermoscope accusa un échauf- fement sensible. Remarque. I est bon d’observer que le fer, qui étoiten expérience depuis plus de cinq minutes, avoit perdu beau- coup de sa chaleur; ce qui rend plus frappant le contraste des effets obtenus dans ces deux expériences. $.41. Expérience X XF. Je substitueau fer chaud la flamme d'une bougie ; la lame d’eau servant commeci-devant d'écran, Il n’y a aucune impression sensible sur le thermoscope qui reste stationnaire très-long-temps. Au premier moment il avoit paru monter, mais ce n'’étoit qu'une oscillation ac- cidentelle. S: 42. Expérience XXVT. Conservant les mêmes appareils, la boule du thermoscope est noircie. Un fer chaud est pré- senté à cette boule à travers la lame d'eau servant d'écran: Il y a un petit mouvement quiindiquequelqu’échauffement. Expérience X XVII. Dans le même appareil, la flamme d'une bougie produit aussi un léger mouvement d'ascension, sensiblement égal au précédent. $. 43. L'échauffement indiqué par le thermoscope à boule - noircie, répond à peu près à un septième de degré de R. Car le thermoscope qui étoit en expérience, parcourt 22 + inc pour un degré R., et son ascension étoit de 5 ou 4 ignes, © S: 44. ET D'HISTOIRE NATURELLE: 185 $. 44. Il paroïit, par ces expériences, que la quantité du calorique, transmise immédiatement par l'eau, n'est qu'une partie fort petite de tout celui qui se présente pour la tra- verser, peut-être sa partie la plus subtile. Tant que la boule du thermoscope n'est pas noircie, cette partie transmise im- médiatement est insensible; elle l'est également à travers le papier. D'autres corps, tels que le verre, transmettent plus abondamment. Mais puisque tous les écrans paroissent trans- mettre plus de chaleur quand ils sont fixes , et puisque quel- ques-uns n'en transmettent point où presque point dès qu'ils deviennent mobiles ; il paroit qu’en général le calorique est plus transmis d'une manière médiate et successive, que d’une manière immédiate et instantanée. C’est la réponse à la seconde question que nous nous étions proposée, et tout ce que nous pouvons dire sur le mode de transmission du calorique. $. 45. Ces résultats, tout incomplets qu’ils sont, pourront servir à jeter quelque jour sur la nature du calorique rayon- nant, et expliquer bien des apparences qui étonnent au premier coup d'œil. _ $- 46. On peut déjà se faire quelqu'idée des mouvemens du calorique, qui sont insensibles à nos instrumens , par ceux que nous pouvons bien observer. Le thermoscope fait appercevoir des mouvemens absolument insensibles au ther- momètre. Le thermoscope à boule noircie en manifeste qui échappoient à nos yeux avec le thermoscope à boule trans- parente; et il y en a évidemment d’autres qui échappent, par leur petitesse, au thermoscope même le plus sensible. Ainsi quand on approchoit le mélange frigorifique de 25°? au-dessous de zéro, et partant de 22° seulement au-dessous de la température du local ; on n'avoit aucun effet ( Exp. IT). On en avoit un très-évident avec l'eau bouillante, qui; en la supposant même un peu refroidie , surpassoit au moins de 70° la température du local (Exp. VI). Dans des circons- tances moins favorables, où l’eau bouillante n'avoit aucun effet (Exp. V), la flamme d’une bougie faisoit marcher le thermoscope au chaud. Certaines influences de cette chaleur, diminuée au point de devenir insensible aux meilleurs thermoscopes, se mani- Festent probablement quelquefois d’uneautremanière, comme il arrive dans les expériences relatives à l'eau qui se déposs Tome LXXII. FÉVRIER an 1811, Aa 186 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE sur divers corps (1). Probablement aussi cette chaleur, qui est insensible dans nos petits appareils, devient trés-sen- sible avec des appareils plus grands, comme il arrive au passage d'un nuage dont la chaleur rayonnante se fait sentir au thermomètre ordinaire (2). $. 45. Puisque la transmission se fait en trés-grande partie par l'échauffement dé l'écran ; il n'y à pas lieu d'être étonné qu'un miroir concave, dont le foyer étoit placé fort au- delà de l'écran, n'eût pas d'effet (Exp. V), tandis qu’en approchant le corps chaud de l'écran, on obtenoit un effet très-sensible (Exp. VI). S. 43. Qu'est-ce que ces deux espèces de calorique, dont l’un traverse l'écran beaucoup plus vite que l'antre? Pourquoi le calorique, qui traverse l’eau d’une manière immédiate, ne devient-il sensible que lorsqu'on noircit la boule du ther- moscope ? Ces questions sont susceptibles de plus d’une solution. Quant à l'impression faite à travers un courant d'eau, sur un thermoscope dont la boule est noircie, j'observe que ce noircissement, diminuant la force dé réflexion du verre, facilite l'entrée plus abondante du calorique. C'est donc ici simplement un instrument plus sensible; et comme l'effet de la transmission par le courant d’eau est très- petit, il ne se manifestoit pas au thermoscope à boule transparente, dont la sensibilité est moindre. Il paroît en conséquence que l'eau ne laisse pas passer immédiatement autant de calorique que le verre, ou du moins qu’elle ne donne passage de la sorte qu’à une partie de calorique plus subtile que celle qui traverse le verre. $- 49. Les remarques de ce genre se présentent en assez grand nombre, et peuvent déjà utilement occuper le phy- sicien; mais il est surtout important de varier et de mul- tiplier les expériences qui doivent leur servir de base. om mo (1) Du Calorique rayonnant , S 195. (a) Jbid. , SS 319 etsuiv. ” ET D'HISTOIRE NATURELLE: RER ER EN RP EDEN ELA VERSET EST VENTE PETER PRRLE DEEE ERE RIRES PMR TABLE pour la mesure des hauteurs , à l'aide du Baromètre. ON a publié un grand nombre de tables pour faciliter le calcul des nivellemens barométriques aux voyageurs qui n'ont point avec eux de tables de logarithm es, ainsi qu'aux personnes qui ne sont point familières avec leur usage. En voici une très-peu étendue, quoiqu'elle suflise pour les plus hautes montagnes du globe ; très-portative, car elle peut se coller sur]le baromètre même qui sert aux observations ; son usage est très-facile, car il n'exige qu'une application absolument mécanique des trois premières règles de l’arithmétique ; enfin, elle donne les hau- teurs ayec la mème exactitude que.les formules les plus sa- vantes.et les plus compliquées (1). J'expose la manière de s'en servir. … On a deux stations, et l’on veut déterminer la hauteur de l'une au-dessus de l’autre. Les données nécessaires à la solu- tion du problème sont, pour chacune des deux stations, 1° l'élévation du baromètre, exprimée en centimètres et fraction de centimètres; 9° l'indication d'un thermomètre fixé au baromètre ; 3° celle d'un second thermomètre placé librement en plein air et à l'ombre. Les thermomètres sont centigrades. Prenez, dans la colonne des hauteurs, le nombre qui est vis-à-vis l'élévation duwbaromètre inférieur , abstraction faite de la fraction ; multipliez , par cette fraction , le nombre cor- respondant de la colonne des différences, et soustrayez Le pro- duit du premier nombre. Faites-en de méme pour l'élévation du baromètre supérieur : et retranchez ensuite, l’une de l'autre, Les deux hauteurs ainsi diminuées. Le reste serait la hauteur demandée ; si la température était partout à zéro du thermo- mètre : on opérera les corrections nécessitées par la tempé- rature réelle , à l’aide des règles suivantes. 1°. Pour le mercure des baromètres. Retranchez , l'une de l'autre, les deux indications desthermomètres fixes; augmentez Le reste de sa moitié ; et soustrayez ce nombre du résultat dejà obtenu. Si l'indication du thermomètre à la station supé- rieure était plus grande que l’autre, on ajouterait le nombre au lieu de le retrancher. 2°. Pour l’air atmosphérique. 4joutez, lune à l'autre , les deux indications des thermomètres libres ; doublez la somme ; -multpliez ce double par La millième partie du résultat pré- cédent; ajoutez le produit à ce résultat, et vous aurez, en mètres, [a hanteur cherchée. On sait que pour prendre la millième partie d’un nombre, il suffit de placer la virgule des décimales après letroisième chiffre entier, en partant de PR DC PR ER TES RER ER LS TE D (:) Ces formules , d’après lesquelles la table a été dressée et les règles ont été données, s0nk A a 2 : 4 9 à 7 f 5 4 3 2 I o + SERRES Es 188 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE , la droite. On retrancherait, l’une de l'autre, au lien d’ajouter les deux indica= tions, si une d'elles était au-dessous de o°. Quoique la table ait été calculée pour la latitude de 45°, elle peut servir dans tout l'Empire français , sans erreur notable. Au reste, la correction re- lative à la latitude se fait d’une manière bien simple dans toute l'étendue des zônes tempérées : On prend la dix-millième partie de la hauteur trouvée, on la multiplie par la différence entre la latitude des stations et 45° ; et l'on ajoute , ou retranche (de la hauteur ) le produit ; selon que cette latitude est au essous ou au-dessus de 45°. Dans la zône torride, on augmenterait les hauteurs de 2 : millièmes; et on les diminuerait d’autant dans les zônes glaciales. Si les baromètres portaient une échelle entière de laiton, on corrigerait l'effet de la dilatation de ce métal, en diminuant d'un dixième les indications des thermomètres fixes. EXEMPTE- d Soit: 75,28 et bg,10 centimètres les deux élévations barométriques; 19,6 et 5,2 degrés les indications des thermômètres fixes; 20,4 et 6,2 celles des thermomètres libres; et 41° la latitude des stations. d Je prends dans la colonne des hauteurs , le nombre 210 placé vis-à - vis 75 cent. de l'élévation (75,28 ) du baromètre inférieur ; je multiplie la frac- tion 0,28 par la différence correspondante 106 ; le produit 30, retranché de 210, donne 180: de même pour l'élévation ( 59,10) du baromètre supérieur, je prends 2194, hauteur placée vis-à-vis 59 ; j'en retranche le produit (13) de 0,10 multiplié par la différence 134. et j'ai 2111. Les deux hauteurs, ainsi diminuées (2111 et 180); soustraites l’une de l’autre, donnent 1931. (Si une des éléva- Lions barométriques était 77 cent. plus une fraction , on ajouterait, à la hauteur correspondante à l'autre élévation, le produit de 103 par cette fraction. ) Retranchant, l’une de l'autre, les deux indications (19,6 et 5,2 ) des ther— momètres fixes, on a 14,4; augmentant ce reste de sa moitié , il devient 21,6; je le soustrais de 1931; et j'obtiens 1900,4. à J'ajoute les deux indications ( 20,4 et 6,2 ) des thermomètres libres ; je double la somme , et j'ai 53,2 : je prends la millième partie de 1909,4; elle est 1,9094 ou simplement 1,909 ( dans l’usage ordinaire, on peut même se borner à deux chiffres décimaux ); je la multiplie par 53,2 ; j'ajoute le produit (101,6) à 1909,4; et j'ai finalement 2011,0 mèt. pour la hauteur cherchée. our opérer la correction relative à la latitude; on prendra 4; différence entre la latitude donnée ( 41°) et 45°; on le multipliera par 0,201: , qui est —————————————_——p x°=— 18365 [r +-0,00284 cos 2/] [r + 0,002 (2+1')] [os H—logh G-77] 4 tx — 2" G+). H et À représentent les élévations des baromètres, T'et 7’ les indications des thermomètres fixes ; 4 et t’ celles des thermomètres libres, Z la latitude du lieu , a la hauteur de la station inférieure sur la mer, et r le rayon terrestre. Les différences entre les résultats de ces formules et ceux donnés par la table, ne pouvant s'élever au-dessus d’un mètre, doivent être réputées nulles, Il en est de même relativement à notre cot- reetion pour la latitude, qui ne peut errer, même dans les latitudes extrêmes ; de 4 dix millièmes de x. Or, on ne saurait jamais répondre d'une mesure barométrique à 1 ou 2 Mètres plus r ou 2 “millièmes de la hauteur mesurée, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 189 la dix-millième partie de la hauteur; et le produit (0,8 mèt. ) , ajouté à cette hauteur, là transformera en 2011,8 mèt. Les formules, par un calcul rigoureux, auraient donné 2011,9 mèt. Si les baromètres eussent porté une échelle de laiton; les indications des thermomètres fixes, diminuées d’un dixième, auraient été 17,6 et 4,7; et la hau- teur serait 2014,1 au lieu de 2011,8. Pour la plus haute des montagnes , le Chimboraço, en prenant les observations de M. de Humbolt (1), on aurait, par la méthode ci-dessus, comme par là formule, 5857 mètres. En opérant la correction pour la latitude , notre méthode donnerait 5872 , et la formule 5873. G) H=0,76200; h— 0,37719 ; T— 25,3; T— 10,0; — 25,3; = —1,6; L = 1° 45/. NOUVELLES LITTÉRAIRES. Tables barométriques portatives donnant les différences de niveau par une simple soustraction, avec une instruction contenant l'histoire de la Formule , et sa démonstration complète par les simples Elémens de l'Algèbre, à l’usage des Ingénieurs, des Physiciens, des Naturalistes et de tous les Voyageurs; par M. Brot. Brochure in-8° de 5o pages avec 8 pages de Tables. Prix, 1 fr. 5o cent. , et 1 fr, 75 cent. franc de port. À Paris, chez J. Klostermann fils, Libraire, rue du Jar- dinet, n° 13. Nota. Il y a des Exemplaires auxquels on a joint les tables collées sur toile , de manière a pouvoir être portées dans la poche comme une Carte. La mesure des hauteurs par le baromètre, est devenue d'un usage si familier , et si universellement répandu , qu'on ne peut qu'applaudir aux efforts des Physiciens qui cherchent à rendre plus faciles les moyens de mesurer ces hauteurs. C’est ce qu'offrent les Tables que nous annonçons, données par un de nos Physiciens les plus instruits. Traité sur l'Art de fabriquer les Sirops et les Conserves de raisins, destinés à suppléer le Sucre des Colonies dans les principaux usages de l'Économie domestique, par 4. 4. Parmentier, Membre de la Légion-d'Honneur et de l'Institut de France, etc, Troisième Edition , revue, corrigée et aug 190 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mentée. Un vol. in-8. À Paris, chez Méguignon l’ainé, Libraire, rue de l'Ecole-de-Médecine. Le célèbre auteur de cet Ouvrage s'est toujours distingué par son zèle actif et éclairé pour étendre et propager les connoissances utiles sur différéntes parties de l'Économie rurale. C'est une justice qu'on lui rend généralement. Parmi ses Ouvrages on distingue particulièrement son Traité sur l'Art de fabriquer les Srrops et les Conserves de raïsins. L'accueil que lui a fait le public (puisqu'il est à la troi- sième Edition ), prouve tout le cas qu’on en doit faire. Nous avons été parfaitement étrangers aux discussions auxquelles il a donné lieu. Annales des Sciences et des Arts, contenant les Analyses de tous les travaux relatifs aux Sciences mathématiques, physiques, naturelles et médicales; aux Arts mécaniques et chimiques ; à l'Agriculture, à l'Economie rurale et domes- tique, à l'Art vétérinaire, etc.; et présentant ainsi le T'a- bleau complet des acquisitions et des progrès qu'ont faits les Sciences et les Arts, les Manufactures et l'Industrie, depuis le commencement du 19° siècle; Avec l'indication des Prix décernés et proposés par les Académies et les Sociétés savantes, la Nécrologie des Savans les plus connus, et la Notice bibliographique des Ouvrages DUBLES dans l’année ; par MM. Dubois-Maisonneuve et Jac- guelin Dubuisson, Membres de plusieurs Académies et So- ciétés sayantes. Année 1809.— Deuxième partie. — Un vol. in-8°. Prix, 6 fr. et 7 fr. 5o cent. franc de port.—AÀ Paris, chez D, Colas, Imprimeur-Libraire, rue du Vieux-Colombier , n° 26, fau- bourg Saint-Germain. Les Annales des Sciences et des Arts forment, pour les années 1808 et 1809)! quatre volumes grand in-8’, caractères de Philosophie , savoir : Année 1808.—Première et deuxième parties, 14fr., franches de port, 18 fr. Années 1809.—Première etdeuxième parties, 12 fr../ranches de port, 15 fr. 25 cent. L'année 1810 paroîtra dans le premier trimestre de 1817. Ce quatrième volume, qui forme la deuxième partie des ‘Annales des Sciences et des Arts pour l'année 1809, com- prend les analyses des travaux relatifs à l'agriculture, à ET D'HISTOIRE NATURELHLE. 191 l'économie rurale et domestique, à la médecine et à l'art vétérinaire. La liste des Académies et Sociétés savantes dont les Mé- moires ont fourni lesmatériaux de ces quatre volumes, prouve que les recherches des Rédacteurs s'étendent sur tous les points de l’Empire, et tout ce qui peut augmenter l'intérêt de leur Ouvrage sollicite leur zèle et anime leurs efforts. IX°, XIIe et dernier Cahier qui complètent la troisième Sous- cription, ou XXXIVE et XXXVe de la Collection des Annales des Voyages, de la Géographie et de l'Histotre, publiées par M. Malte-Brun. Ces Cahiers contiennent une Cartede la voie romaine entre Clermont et la Sioule ,et une gravure des anti- quités des Bains du Mont-d Or, âvec les articles suivans : Suite du Voyage en Suède, fait dans les années 1808-1809, par Thomas Harrington; traduit del'anglais parle Rédacteur; — Mémoire sur une coutume singulière des Femmes de Ba- bylone, traduit du latin de ÆHeyne, par M. Depping; — Dissertation sur la position d'un ancien lieu appelé Ubirrum, situé sur la voie romainequi conduisoit de Clermont-Ferrand à Limoges ; — Description de quelques Monumens antiques qui existoient aux Bains du Mont-d'Or, par feu M. Pasumot; — Notice sur un Recueil de Voyages, imprimé à Wisingsæ, en Suède, par M. J. B. E.;— Description de la Fête du Papegai , par M. Gasparin ; — Lettre de M. Silestre de Sacy sur une inscription grecque trouvée à Axum; — Sur l'état actuel de l'Ile de Java, observations communiquées à la Société d’Emulation de l'Ile-de-France; et les articles du Bulletin. Chaque mois, depuis le 1° septembre 1807, il paroitun Cahier de cet Ouvrage, de 128 ou 144 pages in-8°, accom- pagné d'une Estampe ou d'une Carte Géographique, souvent coloriée. Les première, deuxième et troisième Souscriptions (formant 12 volumes in-8° avec 36 Cartes ou Gravures) sont com- plètes, et coûtent chacune 27 fr. pour Paris, et 33 fr. par la Poste, franches de port. Les Personnes qui souscriventen même temps RE les quatre Souscriptions , payent les trois premières 3 fr. de moins chacune. Le prix de l’Abonnement pour la quatrième Souscription est de 27 fr. pour Paris, pour 12 Cahiers. Pour les Dé- partemens, le prix est de 33 fr. pour 12 Cahiers, rendus francs de port par la Poste. 192 JOURNAL DE PMYSIQUE, DE CHIMIE, etc. L'argentet la lettre d'avis doivent êétrea/franchis et adressés à Fr. Buisson, Libraire-Editeur, rue Git-le-Cœur, n° 10, à Paris. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Second Mémoire sur la Poudre à canon; par L.J. Proust. 113 Mémoire sur l'influence de la direction dans la propa- gation du Calorique ; lu à la Société Philomatique Les jours 5 et 19 janvier 1811. Par Barth. de Sanctis. 127 Suite des Observations sur la géologie des Etats-Unis servant à l'explication de la carte ci-jointe. Par W. Maclure. 157 Tableau météorologique; par M. Bouvard. 166 Mémoïre sur la transmission du Calorique à travers l'eau et d'autres substances ; par P. Prevost. Lu à la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Genève, le 16 août 1810. 168 Table pour la mesure des hauteurs, à l'aide du Baro- mètre. 187 Nouvelles Littéraires. 189 Erratum pour le Mémoire de M. de Sanctis. Page 129, ligne 5, attention. Le but: //sez, attention le but Page 132, ligne 11, inverse: /isez, directe Page 134, ligne 24, différentes : lisez, différences Page 155, ligne 26, détruire : Zisez, déduire Second Erratum. Page 142, ligne 6, par des caractères : Zisez par des ca= taractes. es ef des | Longitude Occidentale [TELL L'AMÉRIQUE A} ORp Pour werour x observations. vb y pus É Par W Maclure . Journ. de Physig. Fevrier 1811. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. MARS An 18711. A-T-IL ÉTÉ DÉMONTRÉ JUSQU’A PRÉSENT PAR DES EXPÉRIENCES ET DES OBSERVA- TIONS, QU'IL EXISTE DANS LES PLANTES UNE CHALEUR A ELLES PROPRE?: Par M. NAU, Conseiller à la Cour d'Aschaffenbourg. PREMIÈRE PARTIE. Recherches concernant la chaleur dans la racine, Le tronc, les branches et les feuilles (1). C'A déjà été l'opinion de plusieurs des Grecs et des Ro- mains, que vie et chaleur étoient, dans les plantes, des (1) La seconde partie aura pour sujet, l’examen de la chaleur qui se trouve dans les parties restantes des végétaux. Parmi les Ouvrages qui traitent de cetle matière, on fera bien de con- sulter de préférence les suivans : Tome LXXII, MARS an 18a1, Bb 194 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE qualités indispensables. C'est une proposition qu'Aristote et Cicéron ont admise comme certaine et prouvée, sans se donner la peine de la démontrer eux-mêmes. Dans les temps modernes on a fait des expérienees à ce sujet; la multitude de ces expériences et l'autorité de ceux qui les ont rendues publiques, n’ont plus laissé aucun doute sur la justesse de la doctrine de la chaleur propre aux plantes. A ce que je sais, M. Hunter est le premier qui ait remis. cette affaire sur le tapis. Voilà le contenu de ses premiers essais : — Philosorhical Transactions for the Year, 17795, vol. LXV, partie IT, page 446. Traduit en français et inséré dans le Journal intitulé : Observations sur la Physique, par M. l'abbé Rozier , tomeIX , page 294 ; traduit en allemand et inséré dans les Collections de Leipsic , faites pour servir à l’Histoire naturelle et la Physique. Dans ces trois Ouvrages on trouve le premier Traité de M. Hunter sur la chaleur des animaux et des plantes. Philosoph. Trans. for the Year, 1778, page g. On yÿ trouve une conti- nualion des expériences faites par Hunter. Tome XVII, page 12, Journal de Physique , par Rozier, en contient la traduction. M. Schopf a rendu publiques ses expériences dans le Scrutateur de la Nature, pièce XXIIT. Aussitôt que ce Traité eut paru , je fis imprimer mes pensées à ce sujet dans le premier volume de la Bibliothèque de toute l'His- toire naturelle , y ajoutant un précis détaillé de l’opinion de M. Schôpf. Le sentiment et les expériences de Salomé, doivent leur notoriété en Allemagne, principalement au Journal général de Chimie , et aux Archives de la Chimie d'Agriculture, vol. H, page 154, par M. Hermh-Staed. Le vol. LIL, page 47, de ces Archives si généralement aimées , contient les observations de M. Sevogk sur la chaleur des plantes. Dans le I vol., page 99, on trouve en outre, le raisonnement de M. Hassenfratz, portant : que les plantes doivent posséder de. la chaleur. M. le conseiller intime Hambstaed , dans son excellent Traité élémentaire intitulé : Principes de la Chimie financière expérimentale , page 319 , a re cueilli les diverses pensées à ce sujet, les a rédigées en un système et ex— posées avec une perspicuité qui lui est propre, Élémens de science des forêts, par M. Nau, 1 vol., Francfort 1807, etc., page 300. Mémoire de la société des Scrutateurs de la nature, à Berlin. 11° année, brochure in-4°, page 317. Sur la chaleur des fleurs on pourra consulter, Lamarck, Encyclopédie.par ordre de matières , art. 4ron , Voyage dans. les quatre principales îles des mers d'Afrique , fait par ordre du Gouverne= ment , par J.B. G. M. Bory de Saint-Vincent, tome Il. pag. 68— 84. Link , élémens , page 228. : ET D'HISTOIRE NATURELLE. 195 Des liqueurs végétales de chou et d'épinards, congelées par un froid de 29 degrés, s’étant ensuite dégelées par une température entre 29 et 30 degrés de Fahrenheit, M. Hunter les fit congeler par une température d'air de 28 degrés. Une pousse de sapin et une feuille de féve, posées sur la surface du suc végétal gelé, dégelèrent les endroits où elles étoient placées ; la pousse du jeune sapin le fit en moins de temps que la feuille de féve. Je rapporterai maintenant les expériences que j'ai faites à ce sujet. Je fis congeler du suc de chou à un froid plus grand que celui de la glace (à 9 degrés sous le point de la glace), je l'introduisis alors dans une température de 29 degrés au-dessus de zéro, où il ne se dégela pas encore; je l'y laissai durant deux heures, et j’exposai à un même froid un petit morceau de linge, un pareil de liége , un troisième de bois de pin , une figue non müre, une feuille de pelar- gonium peltatum et une autre d'odoratissimum , une fleur de tropæolum minus, une branche de prnus sylv. , une feuille de citrus aurant. Lorsque tous ces objets furent restés deux heures dans un même froid , je les plaçai avec un instru- ment sur les assiettes du suc gelé. Dix minutes après on examina les endroits qu'avoient occupés ces objets sur le suc congelé. Le résultat de cette expérience fut le suivant : La liqueur s'étoit dégelée sous chacun des corps, la quan- cité de liqueur dégelée étoit proportionnelle à la quantité des points de contact que les objets appliqués avorent pré- sentés à la glace. N'importoit si c'étotent des parties vé- gétales vivantes ou des corps morts. Tous ces corps qu'on avoit ainsi appliqués, ne produi- sirent aucun effet sur la glace par un froid de 20 à 22 et 24 degrés. Mais le même résultat eut lieu avec de l'eau ou de l'huile simplement gelée. Ilarrivesouventqu’une couchetrès-mince dela surface d'une pareille masse de glace , s’est déjà dégelée sans qu'on la dé- couvre , à la loupe même. Cela peut donner lieu à des ob- servations erronées , quoiqu il soit nécessaire , en examinant des degrés de chaleur fort inconsidérables, que la recherche s'occupe à choisir les points entre le dernier degré de con- gélation et le premier de la glace fondante. IL me paroit Bb a 196 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE presque que M. Hunter a été conduit de cette façon à des observations erronées. Pour constater son opinion , M. Hunter cite une observation d'un Anglais, M. Blagden, portant: « Qu'en hiver on trouve des branches mortes, humides, » roidies par la gelée, pendant qu'au même jardin les bran- » ches végétantes et tendres de l'arbre, ne souffrent pas la » moindre chose. Les premières se cassent comme du verre, » au contraire, celles de l’arbre sont pliantes. Par quelle rai- » son? par la chaleur. » Quiconque ajoute foi à cette réponse avec M. Blagder et M. Hunter, peut y comparer les remarques suivantes: Il y a des branches vivantes souples en hiver, parce qu'elles contiennent des liqueurs pglutineuses , huileuses ou résineuses ; ces liqueurs pour se figer, ont besoin d’un plus haut degré de froid que d'autres plus aqueuses. D’autres liqueurs se coagulent par un moindre degré de froid, pour former une substance sohide, et plutôt que du bois mort mouillé n’admet entre ces fibres des molécules gelées par un froid glaçant. La plupart des bois à feuilles en forme d’épingles, se trouvent dans le premier cas, le rhus co- riaria est un exemple du second. Ceux-là restent plians, ceux-ci sont fragiles, tous deux vivans. Prend-on en hiver un petit morceau coupé d’une branche de rhus coriaria , en le tenant dans la main qui est plus chaude alors? il sortira, après quelques minutes, des grands vaisseaux de la eirconférence d’un bois vraiment sec, une liqueur laiteuse. Le suc étoit donc figé sans avoir passé à l'état d’une masse glacée. C'est ainsi que dans les cristaux l'eau cristalline se trouve aussi sous une forme solide, sans être congelée, ni avoir passé à l’état de glace. Ces branches se cassent ,- de même que des branches mortes, dès qu'on veut les plier par une force qu'on fait agir à cet effet; cependant personne ne pourra dire qu'elles soient dépourvues de vie, parce que toutes poussent au printemps. Je procède maintenant aux expériences que MM. unter, Schüpfet Salomé ont faites plus tard avec le calorimètre, pour déterminer les degrés de chaleur dans les plantes. M. Hunter a trouvé que dans la saison froide leur tem- pérature étoit plus haute que celle de l'atmosphère , mais plus basse que celle des animaux à sang froid. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 197 M. ScA6pf a trouvé que dans les arbres percés , la chaleur étoit moindre, lorsque l'air étoit chaud, plus grande quand l'air étoit froid. M. Salomé a observé, à l'égard des arbres, que leur tem- pérature étoit toujours plus élevée que celle de l'air exté- rieur. Quand la température n'étoit que de 2 degrés ou 5 degrés, celle de l'arbre étoit de 9 degrés. Tant que la température de l’air n'étoit pas encore montée à 14 degrés, celle de l'arbre demeuroit toujours plus haute. A mesure que la température de l'air s'élève au-dessus de 15 degrés, celle de l'arbre s'abaisse de même au-dessous de 14 degrés. Suivent à présent des extraits, des observations et des re- cherches que j'ai faites à ce sujet. Je m'en suis occupé très-sou- vent cet hiver et l'hiver précédent , aussi bien que l'été passé. En hiver, par de grands degrés de froid, mèmes degrés sont indiqués sur les calorimètres introduits dans les trous faits avec un perçoir dans le peuplier d'Italie, le bouleau, le hêtre, le pin, etc. a) Supposé que les troncs soient percés au-dessus de terre ; b) Qu ils aient mêmes degrés de grosseur proportionnés à chaque espèce; c) Qu'on ait fait attention au vrai temps propre à faire la recherche des degrés de chaleur , ce qui ne se découvre que moyennant une longue pratique ; Ù d) Que les arbres soient placés de manière à avoir même exposition au vent qui souflle, au soleil, etc. De l'eau que j'ai versée dans de tels trous percés dans les arbres, lesquels ont été fermés incontinent et étroite- ment par des bouchons de liége, et en outre plâtrés avec de l'argile glaise , s'est congelée tout de même que l'eau contenue dans des tuyaux de verre, gros comme ces trous percés et pendus à l'arbre; cette expérience a été faite par un froid de 2 degrés au-dessus du point de congélation. 2, Les racines de ces troncs, ou les troncs eux-mêmes, étant percés sous terre, on y trouve 1 à 1 = degré de plus de chaleur que dans le tronc au-dessus de terre. La tem- pérature de la terre couverte de gelée et de neige, est or- dinairemeut encore plus chaude que a racine dans une même profondeur. 5. A l'égard de la température des animaux à sang froid, 198 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE comparée à la chaleur des végétaux, j'ai fait l'expérience suivante : Un grand degré de froid étant suivi d'un temps desrés. plus doux, le thermomètre s’est trouvé à zéro en plein air. À quatre pieds de profondeur dans la terre alors couverte de neige, il s'est élevé à.... 4 Dans l'eau d'un réservoir couvert de paille où vivoient environ 20 Poissons , À. . . « . «+ « « . D Dansla cavitéde la poitrined’uncyprinus carpio,à 6 , Dans le tronc d'un populus italica , betula alba, pinus silvestris, fagus silvatica, à. . . . . . . o Après ces remarques préliminaires je déclarerai maintenant les raisons des égaremens qui ont porté MM. Hunter, Schôpf et Salomé à tirer des conclusions fausses. Par exemple, le 4 de janvier 1809, la température étoit, de jour, plus haute que le point de glace. Cette tempé- rature duroit jusqu'à 4 heures et demie du soir. Le matin j'avois fait percer un trou dans un hêtre, pour y introduire un thermomètre ; dans un autre trou je fis verser de l'eau. Un tuyau de verre de la grosseur du trou percé, fut suspendu plein d’eau à l'arbre. Le même jour un thermomètre fut posé dans la racine d’un hétre, un autre en pleine terre à deux pieds et demi de profondeur. Le soir, à quatre heures et demie, j'examinai l’état des différens * thermomètres : je trouvai celui dans le tronc du hêtre un peu au-dessous du point de glace; celui dans la racine à 2 degrés au-dessus de ce point; celui dans la terre à 2 ! degrés au-dessus; le thermomètre dans l'air, à 2 degrés au-dessous de glace; l'eau dans le verre eut un peu de glace, l'eau dans l'arbre n’en eut point. Donc, c'est ainsi qu'on pouvoit maintenant conclure, z/- fait plus chaud dans l'arbre qu'à l'atmosphère, non-seule- ment dans la racine, mais aussi dans le tronc. Voilà une conclusion que plusieurs ont tirée probablement, et de là tant d'erreurs. : La température de l’atmosphère se changea plus subite- ment vers le soir ; il ne fut pas possible qu'à l'intérieur de l'arbre la température eût pu se changer avec la même vélocité. Le bois ne prend que successivement, et non pas si vite, la température d'une atmosphère froide qui l'envi- ronne, sans Jamais prendre entièrement celle de la plus ET D'HISTOIRE NATURELLE. 199 FPE chaleur atmosphérique. Voilà la raison pourquoi ‘eau dans le verre étoit déjà un peu gelée, celle dans l'arbre encore toute fluide, et que le thermomètre dans l'arbre restoit encore plus chaud. En été il se présente un cas semblable. Le matin entre 9 et 10 heures, lorsque la chaleur est déjà assez grande, un arbre gardera encore la température de la fraicheur noc- turne. Le soir à 8 heures , tandis qu'il fait déjà frais, l'arbre conservera encore la température de la chaleur méridienne ; et c'est ainsi que nous découvrons toujours des degrés dit- férens soit de froid, soit de chaleur. Ily a plus, la chaleur du soleil de l’atmosphère extérieure ne peut faire naître à l’intérieur des végétaux, sous quelque zône que ce soit, qu'un certain degré de chaleur, qui varie d'après La diversité du bois, du lieu, de l’âge de l'arbre. C'est ce qui a suggéré à M. Salomé les remarques ci-dessus alléguées et les conclwsions erronées qu'il en a tirées. Quiconque aura comparé en différentes saisons Ja tem- pérature qui règne en plein air , avec celle sous des cloches, trouvera dans ces mêmes expériences la confirmation de ce que jai avancé. Qu'on pose en été, le soir, un thermomètre sous une cloche de verre, qu'on en suspende un autreen plein air; si la nuit est claire et sereine, les deux indiqueront le matin mêmes degrés de température. La même chose aura lieu en hiver dans une serre, lorsque la température est au-dessus du point de glace. Par un grand froid, principalement d'un vent tranchant, la température est considérablement plus haute sous une cloche qu'en plein air. Par un froid de 12 degrés au-dessous du point de glace, le thermomètre sera de 4 degrés plus haut sous la cloche, sans jamais se niveler avec tel autre qu on aura placé en plein air. Ce quialieu d’un temps venteux, arrive aussi d'un temps de brouillard. Le bois, principalement lorsqu'il est vert, est un meilleur conducteur de chaléur que le verre ; le bois à feuilles larges en est un meilleur que le bois à feuilles en forme d'épingle. Quiconque ne trouveroit point, en ce qui a été dit, une raison suffisante pour invalider les conclusions que Hunter et Salomé ont tirées de leurs expériences, n'a qu'à lire 200 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE maintenant leurs expériences elles-mêmes , les comparer avec nos remarques. Veut-on trouver au milieu de l'été la chaïeur végétale dans les arbres? alors il ne faut jamais examiner les ther- momètres en expérience , plus tard que le moment avant le lever du soleil , lorsque le thermomètre de comparaison n'est pas encore tombé au moment du lever du soleil, ni remonté peu de temps après. Dans l'après-midi nn arbre a premièrement pris la plus haute température de la journée , d’après la diversité de son bois, de sa grosseur, etc. sur les 2, 3, 4, 5 heures. On ne peut que sous les mêmes rapports faire ces recherches aux autres saisons. Je tâchai d'imaginer encore d’autres moyens pour m as- surer de la justesse de mon jugement. Au milieu de l'été, d'un temps beau et serein, je choisis 6 verres à sucre, je les remplis d’eauet posai dans le n° 1, des plantes aquatiques (veronica beccabunga) ; dans le n° 2, des feuilles et des bran- ches fraîches; dans le n°3 , du bois mort; dans le n° 4, des rà- clures ou des copeaux de bois; dans len°5, du sable; dans le n°6, rien du tout. Ces 6 verres munis de thermomètres, furent posés dans de la glace; les feuilles, les branches, les plantes fraîches, rien ne garda l'ancienne température plus long-temps que ne la gardèrent aussi le bois et les räclures de bois. Aucun des verres contenant les végétaux vivans ou leurs parties, ne maintint une température plus haute, ni s’y releva après, Tout baissa peu à peu en s ap- prochant toujours du point de la glace. La température rétrograde de l'eau, que j'abandonnai le jour suivant à l’atmosphère chaude, ne fournit aucune oc- casion pour faire des remarques particulières. Les mêmes essais furent aussi faits en hiver. Les obser- vations furent continuées durant plusieurs heures sans qu’on eût pu en tirer le moindre résultat en faveur du dévelop- pement de quelque chaleur provenant des branches du pinus, ou de la veronica beccabunga. L'eau se glaça dans tous les verres par un froid de 4, 6, 8 degrés au-dessous du point de glace. Il vient de paroitre un Traité écrit par M. Hermstaedt, célèbre chimiste à Berlin , etintitulé: sur le pouvoir des Plantes vivant£es, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 201 mivantes d'engendrer de la chaleuren hiver. Au mois de mars de cette année, la saison favorable me permit de répéter les nouvelles expériences rapportées par ce savant en faveur de son opinion. « Etant occupé( y est-il dit page 317)au mois de janvier 1706, » à Harbke dans les plantations de feu M. le comte de » V’eltheim, capitaine des mines, à faire des expériences » sur le sucre que pourroient contenir différentes espèces » d'érable, je fus très-étonné, en remarquant que cette » liqueur sortoit encore en état liquide des arbres percés » dans cette vue , lors même que la liqueur déjà dégouttée, » s'étoit figée et avoit passé à l'état de glace dans les vases » sous-posés à la même température de l'atmosphère qui » environnoit les arbres. » Il y a diverses circonstances qui, par grand froid, font monter la sève dans les arbres. Le cas d’une couverture de neige glacée doit être compté ici, de méme que celui où le soleil reluit pendant plusieurs jours d'un temps très- serein, quoiqu'il fasse en même temps un froid glaçant à midi même. D'ailleurs, au printemps un temps doux per- manent fait monter la sève, qui alors continue ce mouve- ment quand méme la froidure recommence à augmenter encore après. En perçant les arbres dans le temps que la sève circule, on trouve que la racine et le suc y contenu, sont plus chauds que le tronc et Ses sucs. Nous savons que les racines sous terre ont toujours été, durant l'hiver, plus chaudes que le tronc. Cette même raison d'une plus haute température de la racine, est aussi applicable À la plusgrande chaleur du suc y contenu. Celui-ci monte de la racine dans letronc, et coule du trou percé, soit pendant qu'il garde encore la même température, soit lorsque cette température a déjà baissé à l'endroit de l’écoulement, ce qui arrive quand le trou se trouve à une hauteur plus considérable; et le suc devenant toujours plus froid, doit se geler dans les vases sous-posés. En hiver, l’eau versée dans les trous percés dans les arbres, s’y est glacée. Des mêmes degrés de froid ne peuvent point figer le suc dans les trous du tronc, puisque de la racine il en remonte sans cesse d'autre nouvellement chauffé, qui maintient toujours encore dans le tronc un certain degré de température plus élevé , pendantque dans un tronc dépourvu Tome LAXII. MARS an 1811. Cc 202 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de suc, il doit exister une température qui fait congeler l'eau. Mais, page 318, M. le conseiller intime Hermbstaedt dit : cependant ce ne sont pas les arbres tout seuls qui possèdent cette vertu d'engendrer de la chaleur, plusieurs des plantes bulbeuses , beaucoup de racines qu’on tire de la terre , sont douées de la même faculté à un certain degré. Par exemple, si l'on fixe les boules de différens thermomètres trés-sensibles et exacts dans diverses espèces de navets, ou dans des pommes de terre ,‘et que l’on compare ensuite leur température avec celle de l’atmosphère environnante; alors ces mêmes racines indiqueront toujours encore une température d’un degré de Réaumur, à un degré 5 dixièmes au-dessus de zéro, pendant que celle de l’atmosphère est déjà tombée à 6 ou 7 degrés au-dessous. à Pour faire mes expériences à ce sujet avec le plus de précision possible dans cette saison , je choisis parmi les racines /a rotabaga , ou le navet suédois, parce que c'est celle de toutes les espèces de navets à moi connues qui, vers le printemps, conserve le plus long-temps ses parties en entier, et son goût, et que conséquemment il ne paroîit point qu'il y arrive pendant l'hiver ce grand changement qui se fait remarquer dans les autres navets et les pommes de terre qui dans cette saison se distinguent par une moindre bonté ; ce qui démontre ainsi clairement qu'il y est arrivé quelqu'altération , peut-être même un léger degré de fermentation. Mes navets suédois étoient enfoncés dans la terre pendant l'hiver. Le 12 de mars, j'en tirai un tout sain , un autre le 13 du même mois le matin de bonne heure. Ils furent percés en même temps. Celui qu'on venoit de tirer de la terre indiqua un degré de chaleur de plus que celui qu'on en avoit pris 24 heures plutôt. Le soir les deux thermomètres posés dans des trous nouvellement faits dans les deux navets, eurent même chaleur; mais ils furent l'un et l’autre, de ? de degré plus froids que l’atmosphère à cause de l'eau des navets. Ces expériences furent continuées les 14, 15 et 16 de mars avec*le même succès. C'est donc la chaleur de la terre qui se communiqua aux navets, et qui produisit dans celui-là nouvellement pris de la terre, la température élevée qu’indiqua le thermomètre. On garde communément en hiver, les pommes de terre et les navets dans des caves, ou des fosses où ils restent entassés les uns sur lesautres à une hauteur considérable. La chaleur des caves. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 203 il ou fosses se communique à ces racines. Dans ce cas il n'ar- rive pas rarement qu'un certain degré de fermentation élève cette température. D'où il suit que les expériences qu'on fait en hiver avec de telles racines, ne fournissent point, dans ce cas , des résultats justes. Les expériences doivent proprement être faites en automne, au temps où ces plantes ont été tirées de la terre. Les essais que rapporte M. le conseiller. intime Hermbstaedt, sont sans date, je n’en puis donc rien dire; cependant je suis bien aise qu'un scruta- teur de la nature et chimiste si respectable, ait promis de continuer ses essais et observations sur un sujet si important, précisément dans l'hiver où je ne fis que commencer en partie, ou répéter les miens: ses résultats comparés avec les miens, quand même ils seroient différens , seront toujours instructifs pour les lecteurs et pour les observateurs futurs, quoique, dans un partage d'opinions la vérité ne puisse se trouver que d’un côté. M. Slevogt prouve la chaleur des plantes par la fonte de la neige plus subite sur des bruyères, et aux endroits où le sol est couvert de vaccinium witis idaea, ou de vinca minor, etc. « Sous de mêmes circonstances d’ailleurs , la » neige qui couvre la surface de la terre, disparoît commu- » nément en premier, autour les troncs des espèces ligneuses » qui végètent rapidement. Là où est placée une jeune plante » de pin, longue à peine d'un doigt, la neige se fond tout » à l'entour, et ouvre à l'observateur une vue jusqu à la sur- » face de la terre même, en cas que la couverture de neige _» n'y soit pas trop épaisse; car le jeune pin, en fondant » la neige la plus proche qui l’environne, fait tout autour » de soi un creux que chaque observateur pourra remar- » quer, si en hiver il veut se donner la peine de visiter » de jeunes semis ou plantes de pins. » De pareilles remarques, d'autres les ont faites par rapport à la fonte prématurée de la neige qui arrive sur des champs ensemencés de blé, pendant que sur les terres qui sont en jachère, cette fonte a lieu plus tard. Sur toutes les terres mentionnées qu'elles soient couvertes d'un tissu lâche de jeune recrue, de broussailles , ou de blé nouvellement levé, la neige y sera beaucoup moins com- pacte qu'ailleurs, au moins précisément à ces points là même où ces petites plantes se trouvent. Dans les endroits où la Ce à 204 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE neige est moins compacte, et où elle ne repose pas direc- tement sur la terre, les rayons du soleil peuvent plus aisé- ment la pénétrer et là fondre. Chaque mouvement de l’air contribue à l'éloignement de la neige de ces points élevés et peu serrés; et dès qu'est ouvert le moindre endroit où le soleil puisse pénétrér jusqu'à la terre, la fonte de la neige est une conséquence aussi subite que nécessaire. C'est pourquoi elle fond à ces points plus souvent du bas en haut que du hauten bas; fait dont les défenseurs de la chaleur dans les plantes auroient bien pu se prévaloir en leur faveur, quoiqu'il n'eùt servi qu'à les écarter encore plus loin de la vérité. Autour des tiges des espèces ligneuses qui végètent avec rapidité, la neige ne se fond pas plutôt qu'autour des bâtons de bois mort dont on enclôt les jardins, ou autour des autres espèces de bois, comme on peut aisément s’en con- vaincre, si l'on met en comparaison des perches de haricots, des échalas de vigne et d'autre bois sec avec des pieds d'arbre frais. Pour m'en assurer d'avantage, je fis attacher à trois différentes hauteurs, autour du pinus silv., betula alba et populus italica , des planches de manière qu'elles eurent autour du tronc F/cette position l’une vers l'autre. J'y fis mettre de la neige le 21 décembre 1808. Alors le froid fut déjà rigoureux, les jours suivans il augmenta encore, et la neige se condensa en une sorte de mässe glacée composée de petits grains qui furent aussi joints entre eux. Pendant que la neige se rétrécissoit ici dans sa masse, elle s'éloigna un peu du trou, mais elle se retira aussi loin des parties supérieures des petites planches. Les 1 , 2'et 3de janvier 1809, nouseümes, pendant le jour, une température de deux degrés. au-dessus de zéro; cependänt nulle partie de la neige ne se fondit, ni autour de l'écorce du bois à feuilles en forme d'épingle, ni autour celle des arbres à feuilles larges. Le 3 et le 4 de janvier, il neigea par une température modérée de zéro ; maintenant tout'se remplit de neige de soi-même, sur les planches et sur les arbres, et les choses restèrent dans cet état jusqu'au 7 de janvier 1809, où la pluie fondit toute la neige en même temps. Encore plus : je fis entasser, en forme de cercle, de la terre dutour, des arbres d'une même espèce, et à deux pieds du tronc, par un froid rigoureux qui glaçoit tout, et la terre ET D'HISTOIRE NATURELLE. 205 elle-même étant gelée, je fis répandre de l'eau près les troncs. Cette eau fut prise incontinent, en formant une glace autour des troncs d'arbre. La glace s'appliqua serrément contre les tiges; elle y étoit aussi solide qu'aux cercles de terre. Néan- moins on n'observa aucune partie qui voulüt se fondre dans le voisinage des tiges pendant les jours tempérés des 1°", 2 et 3 de janvier. Le 8 du même mois, la glace se fondit presqne également partout. Au bouleau la glace demeura encore ferme près du tronc ; elle fut fondue à la circonférence, et l'autre moitié resta encore attachée à l'écorce sous forme de solide. Il y a encore une autre raison pourquoi Ja neige se fond plutôt autour des arbres végétans et des bâtons secs, qu’en plein air. Les rayons du soleil tombent sur la neige, non-seulement dans le voisinage des pieds d’arbre, mais ils touchent aussi les troncs mêmes. Ainsi c'est là que se rencontrent plusieurs rayons, conséquemment la neige s’y fond plus vite ; et c'est pourquoi j'ai fait mes expériences en appliquant la neige aux arbres à de différentes hauteurs et dans de tels endroits qui ne fussent pas exposés à l'action du soleil. Cette expérience est encore plus frappante, quoique toute conforme aux lois naturelles, lorsqu'on pose des blocs de bois ronds et gros, dans de la neige en plein air; on les peint l’un de noir , l’autre de bleu , un troisième de jaune, un quatrième de blanc. Le soleil ayant relui pendant une heure sur ces blocs, la circonférence de la neige fondus sera. visiblement différente autour de chaque bloc. 4 OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES ñ ms = | THERMOMETRE EXTÉRIEUR | s 5 SEE pa RC LS BAROMETRE METRIQUE. >. CRE... “cn ER ———— = 4 A" Maxinum. | Minimum. |A Min. Maximum. | Mivimun. A 8 y : MIDI.| 5 ER SE RSR! LES EE EURE Reures- o | heures. 0. | heures- mill. | heures* mill. mille 1là3s. + gel 7im. + 5,5] + 8,2 à LOS MP TES OT AR CINE ae 748 50 7,3 2|a3s. : +10 ojà 7 3m. + ol Pol eme 70 60lA 0) SAMU 746,70 749,04 6,5 Ja midi +it,blaiozs. + 55] +i1,8là1045.......757.98là 7 m.........748,16 759,40 ce 4la3s., + 6,9fa1os. + 1,5] + 6,8[à3s..........764,40[à7m....... ..:702,48 764,20 70 Slà3s. Æ+67là7m + oo! + 4,8,à7m.......…. 761,48|à 10 s........755,00 750,22 5,2] 6là3s . 11,9 7 m. + 6,9 + 10,8 AIN eee eee 752,50|\ 0 £s........750,82 752.00 7,0] 7là midi Ær1,5jà115s: + 2,8] +11,5/à 17Es:......759,80à 7m......... 753,00 75572 7,8] Ba3s. +Hio,3|à 53m. + 1,5] + 9,1|à 5 3m... 759,64|à 105..... 75a,90|757,83| . 8,1 gfà3s., <+r28là7m. <+10,3| H10,9|à 105......... 7H 0b | 7m: MER 752,10/752,8Q 941 10à3s. “+Hl3,o[47m 10,1] +12,41à09+% m.. ....750.12/à 10 +S....., 75042 759 02 9,4"! ils midi +i3,dèats. + 8,4] +13,4/à7 mi. 752,68[à 102 5....... 750,14[751 06| 10,5| 12]à3s. ÆHI20/10:s. + 8,3] Hio,0|à 7m... .....747.70là 3is. "4 0 730,60 742264 9,5! | Dlrsla midi, + ojofà 105. + 2,6] + 9,0[à9:m........ 746,761 35.......:..743,66[745,78| dal Mhlr4la3s. . + 6,4/4 6m. + 4,3] + 5,5/à rr45.......752,08|à 6 3 m....... 742,50|744,12| 8,2 1o|à 10 #5, + 9,0[46%m. + 1,5] + 7,0|à7 i m,.......752,90[ù 10+s.......740,50|751,50 7,510 16(à65m. À 72h10s + 3,8] + Gala 1os......... 760,48|à 6 £m....... 788,321747,80| 7361 Mii7lass. + Sola1rs. + 044] + 9,8/à midi........765,:0/à 6 3 m....... 764 50|765,40|: "7,618 Hi as. + 47/4 6 5m. + oo] + 4,2|à 9 m......... 763; 54la LoIse TS 760:54 762,44 6,8] | llrolà 35. +143 à 6 7m. — 1,8] + 2,8|à7m..........757,93là1os...... .793,041757.03| 60 20/à 3s. Hio,3|à 6m. + 0,9] + 6,819 m...….....752,20]1 los... ...-791,00|752,04| 5,61 21fà midi + o,9fà115s. + 7,5] + 9,9/261 m........740,00|à 1135....... 798,76[746,22| 79h 22[à midi + 9,8[à9+s. + 40) + 9,60/h91s..... 70000 dE der R Re 736,10|738,80| 8,2 H|23là 3s.. <+H10,31à6 im. + 2,3] + 9,1|à mdii...... ..743,606| 62m .1..... 741,70|743,66| 8,2M 24/àa midi + 9,7là 5 ?m. + 6,0] + 9,7/[à 62 m....... 7A41,90|À 10 # S...... -737,02|730,97| 8,4M! 25/à midi + 9,4[463m. — 2,3] + 9,4/à92s..,.....740,5olà 6: m.......743,40|749,61| M DI26/à midi | Salpétre ani Charbon... . Salpètre. . . . Charbon... . . Salpètre. . . Charbon... Salpétre.,. . . Charbon... . Salpëtre. . . . Charbon... . . Salpêtre.. .:... Charbon... . . . 6o. 25 10 40 ° 267 Poids des résidus. grains" 40 12 10 10 10 égaré. Nous observerons premièrement, que toutes les fois qu'un mélange a été trituré, mal ou pendant trop peu temps, sa détonation s'en trouve singulièrement ralentie, et même bien au-delà de ce qu'on pourroit penser. Il suffit pour s’en convaincre, de comparer les durées de ce tableau avec celles qui suivent: elles ont été fournies par des mélanges qui n'ont eu qu'un quart d'heure de trituration. Mélanges. Secondes. 88 *, 5o 19 13 Résidu. 40 36 22 19 Lla 268 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ces différences sont si considérables, que l'on peut dës-lors en tirer ce principe fondamental : c'est que la détonation, en général, est d'autant plus accélérée, que les mélanges qui la subissent ont été mieux triturés. Ainsi, comme la véhémence d'une poudre, ou ce qu'on appelle communément sa force, n'est autre chose que l'effet même de cette accé- lération , il est hors de doute que la proportion des ingrédiens une fois bien arrêtée, le seul moyen qu'il puisse y avoir d'accroître cette force, consiste uniquement à porter leur mixtion au plus haut degré d’intimité possible. La poudre n'étant point une combinaison chimique, mais un mélange pur et simple, il esvelair en effet, que le moyen de la perfectionner ne peut étré aussi que mécanique : nous verrons dans la suite comment M. Robin, partant de ce prin- cipe, est effectivement parvenu à donner aux poudres de chasse, un degré de force que personne avant lui n'avoit atteint en France; tandis que dans nos fabriques, au con- iraire, on s'étoit figuré, sur je ne sais quel fondement, qu’une trituration prolongée ne pouvoit qu'altérer la perfection du mélange, et aller méme jusqu'à ramener ses ingrédiens à leur isolement primitif. N'oublions pas toutefois, de rappeler l'attention sur un principe dont nous avons déjà insinué quelque chose dans le Mémoire précédent : c'est que cet accroissement de puis- sance, cette trituration qui la procure, ne sont particuliè- rement nécessaires à la poudre , qu'à cause de l'emploi qu'il faut en faire dans les petites armes, et en voici la raison: la surface que le canon d’un fusil présente à la détonation d'une petite charge, étant , toutes choses égales, beaucoup plus considérable que celle qu'une pièce de vingt-quatre offre à la sienne, elle lui enlève aussi une portion de ca- lorique bien plus grande que cette dernière ; alors la poudre qui, lors même qu’elle est mal triturée, n'est jamais foible dans le canon, le devient très-sensiblement dans le fusil, à cause de cette défalcation. Il faut donc en conséquence, élever la puissance de la poudre à son plus haut degré, Pour réparer cette perte de ressort, pour obtenir, en un mot, une compensation sans laquelle la poudre ne pourroit plus donner qu'une impulsion länguissante au projectile dont la vitesse lui est confiée. Assurément, si celle qu'on destine au service du canon, se travailloit à part, elle demanderoit ET D'HISTOIRE NATURELLE. 269 bien aussi à étre triturée avec le méme soin que les poudres à fusil; mais alors ce seroit uniquement par des motifs qui, comme nous le dirons dans la suite, sont tout-à-fait in- dépendans de la force qu'elle doit avoir : mais comme dans nos poudreries , ces deux espèces , ou ce qu'on appelle poudre de guerre , se tire du même mortier , il faut que la tri- turation en soit complète, d'abord, afin qu’elle puisse servir dans toutes les armes indistinctement, et ensuite pour que celle qu'on destine au canon, se trouve y ,de son côté, des qualités qu'elle doit avoir en particulier. Revenons encore un moment à nos différences de durée, afin de les examiner un instant aux lumières de la théorie. Comment se fait-il qu’un mélange médiocrementtrituré, que celui qui est à + de charbon, par exemple, mette à détoner dix-neuf secondes, ou presque le double du temps qu'il y met communément quand il a été mieux trituré? Comment concevoir que dans le premier il soit resté, entre les particules du salpêtre et celles du charbon, assez de distance pour qu’au sein d’une détonation ardente, pour qu'au milieu d'une température qui sembleroit devoir tout confondre , tout ramener au centre, ces mêmes particules ne puissent pourtant s’attirer réciproquement, se rallier avec autant de vitesse que dans la détonation du second? voilà ce qui ne cesse de me surprendre, Quelle que soit au reste l’origine de ces différences, comme elle ne peut, après tout, dépendre que de causes purement mécaniques, il demeurera encore une fois bien démontré, j'espère , que la plus grande force d’une poudre, relati- vement aux petites armes, ne sera jamais que le résultat de la mixtion la plus parfaite de ces ingrédiens: alors ponr- quoi ces affinités qui sembleroient devoir prendre part aux phénomènes durant l’embrasement et anéantir ces distances, ne sont-elles ici d'aucun secours à ces mêmes particules? car c'est un fait certain, qu'un mélange à ? bien trituré, peut, même sans l'intervention du soufre, chasser une balle de fusil assez loin, tandis qu'elle s'y refuse absolument quand il a été mal trituré; mais dans les grandes armes, dans la pièce de 24, par exemple, c'est toute autre chose. Nous y verrons des poudres à peine mélangées, produire cependant des effets tout aussi prodigieux que celles qui ont été travaillées avec le plus d'attention ; c'est qu'à la 270 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE température d'un grand embrasement, d’une détonation de huit à douze livres de mélange, les affinités savent retrouver toute leur puissance, en échappant aux influences qui les maîtrisoient dans le premier cas. Le volume des gaz étant aussi, après la vitesse de la dé- tonation, l'élément le plus immédiat de la force des poudres, on pourroit craindre que les mélanges qui ne détonent qu'avec lenteur, ne contribuassent pas à ce volume avec autant d'a- bondance que ceux qui ont l'avantage de se consumer rapi- dement; mais tout au contraire, l'expérience va nous faire voir que les choses sont loin de se passer ainsi: je puis même déjà dire, que pour peu qu’on s'arrête à y réfléchir un moment, l'on découvre bientôt que ce volume ne peut manquer d'être absolument égal dans les deux cas; et voici comment: quel que soit le nombre de secondes que deux mélanges mettent à détoner, si les ingrédiens qui composent l'un et l'autre, se trouvent à la fin avoir totalement changé d'état, il est clair que les produits qui naissent de leur changement, doivent aussi se retrouver en totalité. Or,comme après une détonation lente, on ne trouve ni plus ni moins de salpètre décomposé, qu’après une détonation accélérée, il est encore évident que le volume en question ne doit pas étre moindre dans un cas que dans l’autre. D'où l'on peut, je crois, conclure: Que des deux élémens qui composent la force d'une poudre, savoir : le volume des gaz et la rapidité de leur émission, il n'y a jamais que ce dernier qui puisse manquer de con- courir à l’effet qu'on attend de sa détonation. Ainsi une poudre peut-être réellement foible malgré qu’elle fournisse à la combustion autant de gaz qu'une très-forte: c'est ne vérité que Lavoisier a découverte le premier; d’où il suit, par conséquent, que si le volume des gaz est un élément essentiel à la puissance des poudres, il n’est pourtant pas de la même valeur que celui de la rapidité. Encore un mot sur ces différences. Aussi remarquables que nous les avons trouvées entre nos mélanges bien et nfal triturés, ne pourroit- on pas soupçonner que peut-être elles n'auroient pas lieu, ou au même degré tout au moins, avec des charbons d’une autre espèce? Faisons voir le contraire. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 271 Charbon de Pin. Mélanges bien triturés. Durée. Dal triturés. Durcé. A AS SE CAR El nr a Let 40 x MMM EE 20 Lirellues ils O4 EU ne Abe NUITS he Pelete lee et 127 AS MEME NS 63 LOIS CONS TSRTS NN ec eSte ND OPEN he Rule 21 2)TEr COECIDEOLE RTE DIS LERSO DUB CSP E DES E VOGE ET C'est-à-dire quela plupart des autres charbons fourniroient yraisemblablement des résultats du même genre. Hauteur de la flamme des détonations. L'élévation dé cette flamme au-dessus des tubes est encore une circonstance qui mérite d'être remarquée : elle va nous acheminer au développement de quelques nouvelles vérités. Le mélange à ; mal trituré, lance une gerbe de 9 à 10 pouces; mais elle s'élève de 50 à 52 pouces, quand il l’a été mieux. Le mélange à £ mal trituré, gerbe de 8 à 9 pouces, et de 24 à 25 pouces après une bonne trituration. Le mélange à ; mal trituré, jet de flamme de 5 à G pouces, mais qui atteint jusqu'à 14 et 15 par unetrituration meilleure. Donnons la cause de ces différences. À mesure que le ca- lorique se détache de l’oxigène, il agit à sa manière or- dinaire sur les produits de la détonation; mais si cette dé- tonation est plus accélérée dans un cas que dans l’autre, il faut bien que le calorique accumulé sur un temps plus court, agisse aussi avec plus d'intensité sur eux: alors les flammes doivent donc augmenter de volume comme de rapidité. Re- marquons encore que ce volume est d’autant plus considé- rable, qu’il ya plus de charbon dans nos mélanges; aussi voit-on«la flamme du mélange à +, l'emporter de beaucoup en hauteur sur celle du mélange à +, et ainsi de suite. C’est cet excès de charbon qui, se joignant à des gaz inflammables, alimente la gerbe de feu d’une fusée d'artifice, et celle qu'on voit sortir d’une pièce d'artillerie. Incandescente tant qu'elle 272 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE parcourt la volée du canon, les combustibles qu’elle entraine avec elle, ne prennent véritablement feu qu'au moment où elle atteint le contact de l’air extérieur. C’est ce dont nous aurons lieu de nous convaincre dans la suite. En attendant ; tirons de ceci deux conséquences nouvelles. Plus une poudre est forte, ou, si l'on veut, plus est court le temps qu'elle met à brüler, plus aussi le cylindre de flamme qui s'allume à la bouche d’un tube est volumineux ; mais plus cette flamme s’alonge et se projette dans l'atmos- phère, plus aussi le bruit qui suit sa détonation a de force : eh bien ! en comparant le bruit de deux poudres enflammées, nous trouverons très-aisément quelle est la plus forte des deux. Et par la même raison : si une poudre forte met moins de temps à se consumer qu'une poudre foible, il nous suffira encore de comparer ces deux durées, pour arriver au méme résultat, et cette manière d'évaluer leur force, moins im- posante, moins solemnelle que celle de nos grandes éprou- vettes, pourroit bien aussi l'emporter sur êlles du côté de l'exactitude. Jetons maintenant un coup d'œil sur quelques produits de la détonation; mais pour pouvoir les bien observer, il est à propos de varier le mode de combustion dans nos mélanges. ÆArmmoniaque. Acide prussique. On suspend près du fond d’une grande cucurbite de verre, une coquille de fer blanc avec deux bras de fil de fer; ceux-ci, assez longs pour en ressortir, reposent sur les bords à l’aide d'une courbure à angle droit; entre cette coquille et le fond de la cucurbite, il doit y avoir à peu près deux pouces, pour que la chaleur des combustions ne puisse pas l'endom- mager. De cette manière on peut aisément bruler cent grains de salpêtre mélés à différentes doses de charbon; mais il faut aussi humecter à peu près comme un tabac frais, les mélanges à +, !, =et +, et ne les triturer que foiblement afin de ralentir d'autant la vivacité de leur combustion. Un mélange à parties égales brüle difficilement à Fentier, à cause de l’écartement respectif des deux substances. La combustion finie, l'odorat découvre très-bien l’ammoniaque au milieu des vapeurs, et même encore long-temps après qu'elles se sont’ condensées. Le résidu, de son côté, a cette saveur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 273 saveur de noyau Qui caractérise si bien le prussiate de potasse simple, ou celui qui n'est pas de nature à cristalliser. Mélange à :. Odeur d'ammoniaque. Saveur prussique au résidu. Mélange à +. mêmes produits. Mélange à L. Zdem. Mélange à L. Zdem. Mélange à +. Combustion ralentie ; ammoniaque peu sen- sible. Saveur de noyau moins marquée. C’est cette proportion qui laisse le plus fort résidu , et par conséquent celle qu’on doit préférer quand on veut avoir de cette espèce d'alcali sd appeloit ex{emporané : il est de 65 à 70 centièmes. i les autres mélanges n’ont pas été humectés, leur combus- tion se dépêche avec tant de rapidité, qu'il ne reste presque rien dans la coquille. On voit de là, combien les chimistes anciens se trompoient , quand ils méloient au salpètre de fortes proportions de charbon pour en avoir la potasse. Au rapport de Beaumé, l’on en tiroit à peine une once de seize, de ce sel mélé avec son poids de charbon. Pendant la combustion ôn couvre la cucurbite d’un carton ou d’un carreau de verre, afin de retenir le plus de vapeur qu'il est possible. Il s'en perd même si peu, que si on lave tout l'appareil avec de l'eau aiguisée d'acide nitrique, on retrouve aisément 95 et g8 grains de salpètre reproduit., Quant à l'acide prussique, on le fait reparoitre de la manière suivante : on sature l'un de ces résidus avec du sulfate de fer ordinaire; on redissout le précipité, puison laisse reposer jusqu’au lendemain. Alors on trouve du prus- siate bleu au fond du vaisseau; mais on peut croire qu'il y aura encore de cet acide uni aux vapeurs ammoniacales. Acide nitrique non décomposé. 1°. Le résidu du mélange à +, contient toujours du sal- pêtre, il suffit de l’éparpiller sur des charbons ardens, pour en tirer une forte scintillation. L'acide sulfurique en dégage également , et de l'acide et du gaz nitreux. Et comme d'ail- leurs on n’y découvre aucune trace de charbon , il faut encon- clure que dans cette proportion lecombustiblevientämanquer au salpétre. Tome LXXII. AVRIL an 1811. Mm % 274 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 20, Le mélange à + laisse un résidu blanc verdätre que les charbons ne font pas scintiller; mais l'acide sulfurique en tire du gaz nitreux. Le charbon, cependant, n’a point manqué ici, comme nous le verrons tout-à-l'heure. 3°. Le résidu de : contient du charbon en excès; mais l'acide sulfurique n’en dégage pas moins du gaz nitreux. 4°. Autant du résidu de +, malgré tout l'excès de son charbon. | 5°. Autant du résidu de +. G. Du résidu de +, la même chose, au milieu de tant de charbon. Remarquons qu'il est également question ici des mélanges les mieux triturés et brülés dans le tube Pareils résultats, surprennent sans doute. Ils nous obligent donc à reconnoître , que l'acide nitrique, durant la détonation, n'éprouve point de la part du charbon en excès et du charbon rouge, une résolution aussi radicale, aussi complète que Lavoisier l'avoit annoncée. Dans d'autres circonstances. ce- pendant, legaz nitreux n'échappe point à Lagtion du charbon rouge; mais tout autre charbon, dira-t-on , se comportera- t-il de même? Je pense que oui: car les résidus des mé- langes suivans, faits dans le rapport d’un sixième, donnent également du gaz nitreux. Charbons. De noyer; De paille de pois chiches; De chätaignier; De pimens doux, capsicum; De gayac; De bourdeine; r De coudrier; D'alcool tiré par l'acide sulfurique; De fusain; De pin, mais peu. Mais nous en retrouverons encore dans les gaz recueillis de leur détonation. Ainsi une partie de ce gaz se rattache conjointement avec les acides carbonique et prussique à la potasse, au moment, sans doute, où celle-ci fait partie du nuage qui suit la détonation; car si les deux derniers ne s’y sont introduits que de cette manière, l’on en peut dire autant, jecrois, du gaz nitreux, plutôt que de penser qu'il puisse appartenir à un reste de salpètre échappé à sa destruction, Ainsi, des sous-carbonates, des prussiates, des sels ammoniacaux, des nitrites, voilà ce qu on retrouve à la place du salpêtre décomposé par la plupart des charbons. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 279 L’azote éprouve dofc dans cette rencontre, une suite de déviations qui le dispersent entre toutes ces combinaisons. Peut-être même entre-t-il encore dans quelques autres que nous ne connoissons pas. Le carbone de son côté soufre aussi ses divergences. On le retrouve dans l'acide carbonique, dans l'oxide carboneux, dans l'hydrogène carburé et dans l’acide prussique. Enfin, après des soustractions aussi mul- tipliées d’azote, comment-accorder sa confiance aux pro- portions que Lavoisier nous laissa sur l'acide nitrique dé- composé par cette méthode? Il faudra bien que la Chimie reprenne ce travail , mais en y employant surtout les moyens que Thenard et Gay-Lussac viennent d'appliquer si fructueu- sementaux produits de l'organisation végétale et animale. Nous avons dit plus haut que dans la proportion de six de salpêtre contre un de charbon, ce dernier suffisoit à l'en- tière décomposition du premier. C'est maintenant qu'il con- vient d'en donner les preuves. 1°. On place sur une feuille de papier le gobelet plein d’eau avec son tube chargé et flottant, comme s'il s'agissoit de faire une combustion en présence du pendule. A l'entrée du tube et au milieu du mélange, on fixe une petite la- nière de trois à quatre lignes d'amadoue, en l'y enfonçant avec la pointe d'une alène; et de plus, comme la pro- portion + n'est pas très-combustible, on roule encore sur un peu de poudre broyée le bout de l'amadoue qui doit entrer dans le mélange, afin de n’être pas exposé à le voir s'éteindre sans y avoir mis le feu. Ensuite on l’allume et on recouvre aussitôt le-gobelet avec une cloche mouillée, d'environ 15 à 18 pouces de hauteur. La détonation finie, on laisse passer un quart d'heure, afin de laisser au nuage le temps de se rasseoir. Cela Fait, on enlève la cloche, et alors on découvre que ses parois et la feuille de papier sont semés d’une poussière noire qui, sans être bien abon- dante, annonce pourtant assez clairement que le charbon na point manqué à cette combustion. Cet excès de charbon que dans la suite nous recueillerons par un moyen plus exact, éprouve ici une diminution dont il faut encore tenir compte; c'est celle qui brûle comme une gerbe d'artifice aux dépens de l’air contenu dans la cloche, car il est aisé de juger que ce qui tombe sur les parois et sur le papier, n'est que le reste de ce qui s'est consumé de cette manière. Mm 2 276 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 2°. Lorsque nous nous occuperons d'évaluer la quantité de gaz que ces mélanges fournissent, nous aurons lieu de reconnoitre que celui qui n’est qu'à + de charbon, n'en produit pas moins que les mélanges + et !, c’est-à-dire, que ceux qui sont les plus charbonneux. S'il en est ainsi, il faut donc convenir que le salpêtre du mélange à :, est aussi complètement décomposé qu'il pourroit l'être par les pro- portions de charbon les plus fortes. D'après ces résultats on peut conclure avec toute confiance, je crois, qu'un septième de charbon pris dans son état habituel, c’est-à-dire, avec tout ce cortége de gaz étrangers et d'humidité qu'on lui connoît, suffit amplement à la décomposition de ce sel. Et comme la proportion de + ne fournit point non plus autant de gaz que celle à +, il est également hors de doute que si dans cette matière il reste une limite à fixer, elle doit se trouver entre ces deux proportions. Assurément, si dans nos fabriques on pouvoit compter sur un charbon dont les hétérogénéités fussent toujours dans un rapport constant avec son carbone, il seroit facile dé résoudre cette question au plutôt. Disons cependant, que la solution de ce point, toute importante qu'elle puisse être au progrès de l’art, n’est pas pour le moment des plus urgentes, at- tendu que le léger excès de charbon que nous entrevoyons dans la proportion de +, ne laisse aucun inconvénient à craindre pour la qualité des poudres , comme nous aurons lieu de le voir plus en avant. Au reste l’attention des chi- mistes une fois rappelée sur cet objet, l'analyse ne tardera guères à ajouter cet utile complément de nos travaux , car le charbon que la France doit préférer, une fois bien déterminé, ckanvre ou bourdeïne , l’on aura bientôt découvert si les élémens qui en altèrent la pureté, s'y trouvent at- tachés par une de ces affinités qui garantissent de la cons- tance dans les proportions , ou bien s'ils n’y sont au contraire que dans cet état variable qui a fait comparer le charbon à une éponge plus ou moins humectée, plus ou moins dé- pendante de l'atmosphère où elle se trouve. Nous voilà donc enfin parvenus à connoître le vrai rapport du charbon au salpètre , relativement à la confection des poudres: ce rapport est une donnée fondamentale, qu'il étoit indispensable d'avoir pour porter un jugement ferme sur ce qu'on appelle /e dosage, ou sur les proportions que ET D'HISTOIRE NATURELLE. 257 chaque fabrique d'Europe a cru devoir adopter : et comme d’ailleurs on ne la trouve, cette donnée , ni chez les anciens, ni dans les travaux des modernes, il est aisé de. juger qu il a fallu la chercher, avant tout, dans l'expérience, comme à sa wéritable source. Mais avant d'en faire l'application, il nous reste encore à examiner auparavant quelques autres points, afin d'éclairer de plus en plus notre objet: nous voulons parler ici des deux moyens qui ont semblé les plus propres à accélérer la détonation du salpètre. C’est maintenant leur parallèle qui va nous occuper. De ces deux moyens, l’un consiste à pousser la trituration aussi loin qu'il est possible, et l’autre à mêler au salpètre une dose de charbon beaucoup plus considérable que celle dont il a besoin pour se décomposer. Balançons actuellement les avantages et les inconvéniens de ces deux procédés , afin de découvrir si l'un peut suppléer l’autre, ou bien s’il con- viendroit plutôt d'en préférer un seul. Dans le premier , par exemple, on ne peut méconnoitre qu'une trituration portée à son maximum, ne procure aux molécules cette juxta-position , ce contact qui peut seul ga- rantir la plus grande célérité d'action, quand on les fait détoner. Dans le second, l'identité des effets porte à croire que le charbon supplée par son excès, cefte même augmentation de contact. Ainsi, quoique différens, ces deux moyens nous conduisent réellement au mémebut, la détonation la plus ra- pide d’où dépend bien certainement la plus grande force de la poudre. Maintenant, ce second moyen d'accélération peut-il suppléer l’autre dans la confection des poudres? Nous allons voir que non; mais avant d'arriver là, il est à propos de fixer plus positivement quelques idées fondamentales sur la nature du premier de ces moyens. D'abord on voit que le mélange à : mal trituré, met 30 minutes à brüler , ensuite qu'il n’en met plus que 25 quand il l’a été plus soigneusement ; mais doit-on en con- clure qu'une trituration poussée bien au-delà , soit capable d'accourcir cette durée? Non! l'expérience ne confirme pas cette idée-là, car quelque soin que j'y aie donfié, il ne m'a pas été possible d'amener la durée de ces mélanges à des termes moindres que ceux qu'ils portent sur le tableau, Ldtrituration a donc, comme les durées mêmes qu'elle dé- 278 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE termine, une limite au-delà de laquelle il n'y a véritable- ment rien à attendre en faveur de l'accélération. Voilà ce qu'il est essentiel de connoitre, afin d’avoir des idées nettes sur la valeur de ces deux moyens. Ainsi le premier où la trituration , ne pouvant amener le mélange à : à détoner dans un espace de temps aussi court que le mélange à +, mérne mal trituré, il est, je crois, bien démontré que ce moyen ne peut jamais donner à la première de ces pro- portions , l'avantage de détoner en aussi peu de temps que la seconde , ou que celle qui porte avec elle un excès de charbon. Tirons de ceci une conséquence qui fournira peut-être un jour à nos fabriques, de nouvelles méthodes pour essayer la force des poudres. Demandez, par exemple, à un commissaire quels moyens il a pour s'assurer si la trituration d'un mélange est à son point, ou autrement, si sa poudre est terminée. Il vous répondra, sans doute , qu’elle doit l'étre, si elle a été battue le nombre d'heures que les ordonnances ont fixé ; et il ne passera pas outre, à moins que ce ne soit pour ajouter: que s’il lui falloit en donner une preuve, il n'en connoit pas d'autre que celle qui lui prescrit aussi cette même ordon- nance ; et cette preuve consiste à la soumettre à l’'éprouvette, après avoir tirésa poudre des mortiers, après l'avoir essorée pendant deux ou trois jours, puis grainée, puis tamisée, puis égalisée, puis séchée, puis époussetée, etc., etc; que si elle ne satisfaisoit pas à l'épreuve, il lui resteroit encore la ressource de la jeter une seconde fois au mortier pour la triturer de nouveau, pour l'essorer ensuite, la grainer, la tamiser, l’égaliser, la sécher et l'épousseter...., c’est- à-dire de recommencer un travail qui ne peut durer moins de six jours, en supposant toutefois qu'on soit dans la belle saison..... Appelons-en aux principes, et voyons s'ils ne pourroient pas aussi nous aider d'un moyen plus expéditiF a ne l'état des mélanges avant de les tirer du moulin. 10. Si la poudre la plus complètement triturée est aussi celle qui se consume avec le plus de vélocité, il est hors de douteique l'essai suivant donnera un moyen sûr de juger Aes* DrOMES du travail. Il suffira donc d’en tirer une couple de gros, de les mettre à sécher, de les pulvériser finement et d'en brüler 8o+ou ET D'HISTOIRE NATURELLE. 279 100 grains en présence du pendule. Prenez note du nombre de secondes qu'a duré cette combustion; continuez ensuite le battage une demi-heure de plus, puis répétez cet essai comme le premier. Si le nombre de secondes à diminué, la trituration n’étoit pas complète, mais si elle étoit à son maximum , comptez que les deux combustions ne différeront pas d’un quart de seconde. Cet essai peut être pris sur la durée du battage, il ne pré- sente aucun embarras;. il est d’ailleurs extrêmement facile à pratiquer. ’ 2°, Mais par le même principe, il est de fait encore que la poudre qui se consume le plus rapidement, est aussi la plus forte: cette épreuve peut donc lui apprendre en même temps si la sienne a atteint le degré qu'il veut lui donner. Ceci répond, comme on voit, au moyen d'essayer les poudres par la durée de leur combustion, que nous avons annoncé plus haut; il s'applique avec succès aux mélanges nitro-char- bonneux , comme à ceux qui ont reçu leur soufre; et enfin aux poudres que l’on veut connoître; mais il faut d'abord les réduire en poudre fine en les triturant dans un mortier de bronze avec un pilon de fer, puis les faire sécher entre deux papiers. Revenons maintenant à ces proportions qui, telles que celles à + et ?, contiennent un grand excès de charbon; voyons si dans la fabrication de la poudre on pourroit les admettre à remplacer celle de 7, dont le défaut capital est de ne détoner qu'avec une extréme lenteur. D'abord en comparant les durées des deux proportions : et;, nous nous sommes bien convaincus que tout l'avantage à cet égard, appartient décidément à la seconde. La pre- mière met 25 secondes à brüler , tandis que la suivante n’en met que 10, c'est-à-dire , que celle-ci a sur l’autre plus que le double d’accélération:; quelle différence ! comment, d'après cela pourroit-on hésiter dans lechoix de ces deux proportions? Mais si pour ne rien ôter à la prévoyance, nous exami- nons d’un autre côté , quelle peut être l'influence d'un excès de charbon dans les poudres, nous découvrons bientôt que tout cet avantage disparoit sous le nombre des inconvéniens auxquels il expose : nous voyons tout de suite cet excès nuire si essentiellement à d’autres qualités’ qu'elles doivent indispensablement avoir, soit comme munition de guerre, soit comme matière commerciale, qu'il n'est plus possible 280 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de l'admettre à remplacer la proportion de >: entrons dans le détail de ces inconvéniens. 1°. Il ne suffit pas, par exemple, qu’une poudre brille à l'éprouvette aujourd'hui, il faut encore qu'elle ait cette qualité au bout de six mois, au bout d’une année, etsurtout après les secousses de cinq cents lieues de mouvemens et de cahotages. Il faut en outre, qu'elle résiste tout le temps possible aux impressions de l'air humide des magasins de terre et des vaisseaux Or, une poudre perd aisément tous ces avantages-là par l'excès du charbon, et d'autant plus vite encore, que cet excès se trouve plus considérable. Alors si la nécessité de les maintenir dans une intégrité parfaite, est la première loi, cette loi proscrit donc de prime abord, toute cause qui peut en amener la dégradation, et par con- séquent, tout excès de charbon. >, Ce charbon qui excède un septième, ne sauroit brûler aux dépens du salpètre, voilà un fait incontestable : à quoi donc peut-il servir ? d'abord il n'ajoute rien ou presque rien au volume des autres gaz, comme nous le verrons plus en avant. Par lui-même, il ne peut y âjouter non plus comme corps dilatable, parce qu'il ne l'est pas; si d’ailleurs il ne peut jamais brüler dans le corps du canon, il n’en sort donc que comme une poussière inutile , destinée tout au plus à faire gerbe d'artifice, etcequi ne brüle pas de lasorte, tombe à terre, ou ne sert qu'à augmenter la quantité des crasses que l’écouvillonnage à coutume d'emporter. 50. Tout excès de charbon n'est donc qu’une surcharge étrangère , une matière inerte qui n’est là que pour usurper une place destinée à pareil volume de mélange actif. Sous ce rapport, il diminue le poids réel des charges , et il rac- courcit d'autant la longueur du canon; défaut qui, tout petit qu'il soit, n'est pourtant pas nul aux yeux de l'officier d'artillerie. : 4°. Des trois ingrédiens de la poudre, on sait que c’est le charbon qui s’empâte le moins avec l’eau, son excès n’est donc propre qu'à diminuer la liaison des masses, ainsi que la consistance du grain; il le rend en effet plus poreux, partant, plus accessible à l'humidité; il le rend plus friable, plus tendre et plus exposé, par conséquent, à tomber en poussier, ce qui n'arrive déjà que trop aux poudres les mieux proportionnées. -&. Mais il est un inconvénient majeur avec lequel cet excès ET D'HISTOIRE NATURELLE, 281 excès met le comble à tous ceux que nous venons de voir, c'est celui d'en imposer sur le vrai degré de force d'une poudre : c'est celui de leur faire obtenir à l'éprouvette une portée mensongère sous deux rapports: une portée qui premiè- ment ne reparoit plus aussitôt qu'elles ont eu quelques jours de repos dans les arsenaux éloignés, ou dans les ports de mer, et qui, secondement, se trouve n'être en réalité qu'une illusion, parce que lors même qu'elle conserveroit cette force jusqu'au moment où l'on va la charger dans le canon, elle né portera pas pour cela la balle plus loin que toute autre Hatitire qui ne brille point autant qu'elle à l’é- preuve; et en sus, elle aura tous les défauts dont nous avons parlé plus haut, tandis que cette dernière l'emportera sur elle par les avantages d'une excellente conservation. Laissons cela , et résumons-nous actuellement pour de- mander quel parti prendre après tout, entre deux propor- tions dont l’uneest visiblement atteinte du vice radical d'une détonation trop engourdie, et l'autre surchargée, comme on l'a vu, de toutes les causes de dégradation qui s'opposent le plus à la durée des poudres? il me semble que le voici: se prêter un moment à l'hypothèse suivante , savoir; que l'homme n'a point encore inventé la poudre, que c’est au- jourd'hui la première fois que la Chimie s’en occupe, et qu'il est en conséquence nécessaire de faire un appel à tous ceux qui la cultivent, pour les engager à nous donner la solution de ce problème-ci. La détonation du mélange à +, ayant le défaut d’être trop lente pour pouvoir servir de base à la poudre, trouver un moyen de l'accélérer assez pour qu’elle puisse égaler et sur- passer, si on le veut, celle des mélanges qui n obtiennent cet avantage que de l’excès du charbon. Mais ce moyen doit être tel, que ceux-ci, ou les propor- tions ; et +, ne puissent en aucune manière avoir part à ce mode d’accélération , afin d'ôter par là toute tentation de les employer, en sacrifiant ainsi à l'assurance des primes que l'ordonnance accordeaux poudres fortes, la qualité de pouvoir se conserver que ce mème excès leur enlève infailliblement. _ Si l’on se donne en effet la peine de bien considérer ce pro- blème dans ses différentes parties, l’on reconnoîtra, je crois, qu'à présent même il seroitencore un des plus difficiles qu'on püt offrir à la méditation des chimistes. (La suite incessamnrent.) Tome LX XII. AVRIL an 1811. Nn CELRES ER REM ER TERRE ENTREE EP" = | THERMOMETRE EXTÉRIEUR BAROMÈTRE MÉTRIQUE > £ = CENTIGRADE. © ; 22 D Re | 5 © Maximum. | Minizmum. |A Mini. Maximum. | Minimum. A |°3 MIDI. n heures. : o |heures. ° heures mill. | heures. mill. mill. © 1fà midi + 9,6là10%s. + 4,0] + 9,8|à 10 1s........ 757,22|à 64 m....... 751,00|753,02| 0,3 2h3s. Hir,3fu6 4m. + 4,5! +ro,7liois....... 7O20 | AGE CE 758,88|760,64| 7,8 ofà midi <+ai1,2là 6 Em. + 6,3] +aiz,2là 17 ACC LE 763,00|à 61 m.......761,74 761,86] 9,7 4là midi, +12,4à 1025. + 6,5] +12,4|à915s........ 764,80|à 1045....... 762,24|764,62| 0,8 9à35s. +15,9/à 65m. + 6,4] +18,3 à 6 £m....... 757,00|à 10 £s....... 748,10|752,57| 11,0 6ja3s. —ri,21à6 Em. + 9,4] +i0,3|13 s...… #:...756,28|à6% m........ 748,30|754,90| 10,0 7lämidi +146 6%m. + 6,5] +r14,8|à 62m...7..,.758,12làg923s........ 749:40|751,42| 12,5 bla ds. 412,9 65m. + 7,2] +-11,6|à 64 m........749,00|à BE m........748,36[748,74| 10,6 | gùgs. : + 6,31à6 5m. + 4,9 9 |ANIOÏS ne pee AU 770,62|à 61 m....... 797,7417604,80| 0,4 iojà3s. Hioo!h6m. — o,1| + 8,9|à 9 m........ .772,40[à 3 s:........ 771,74|772,32| 9,6 Hlirla3zs. +13,7à 6 Em. + 1,5] +11,9|à 61 m....... 770,00|à 93 s........ 76750|769,30| 10,1 Blrola3s. —Hir,9à 6m. + 5,8] +1r,5|à 8 m..…......766,84 191 s........ 765,12]766,28{ 10,1 3 15jà 35. 13,5 6m. + 7,5] +H12,3/181m....... 764,32|à 10 +5.......762,30|763,66| 10,7 Blriaa2s. r4ola6m. + 5,0] ÆH12,5là 10 5......... 764,04|à 6 m....… ....761,48[763,68| 11,3 NROPEE 19,9[à 6m. + 2,2| + 0,9|à midi........ 766,44! à 7 m..........705,22|766:44| 10,6 l16à3s. , -Hri,ola6m. + 0,6! Æ 9,7l28£m,....... 765,90|à 10 s........768,28|765;00| 10,4 Miizlà 3s 12,ofà 5im. + 1,5] Æri,3|à o+um.......763,36[à 35.......... 761,86|762;74| 10,7 181à3s. * H-13,68[à 64m. + 0,4] Hr3,olh 105......... 703,70 AUS NI. Rae 763,00|763;36| 11,6 rojà3s +15,5à 6m. + 3,5) Æra,7là 1os......... 766,521à6 m......... 764,60|765;96| 11,8 dloonù 3s. H-17,0/à 54m. + 7,0! +15,5là gm......... 765,82|à 104 5....... 7635,68|765,48| 12,2 M2 midi +16,5/à 5 M J'ajouterai à cet intéressant rapport, qu'à la mer il est toujours facile de connoitre, au moyen du lock et de la boussole, la longueur du chemin parcouru, et de convertir pp par le quartier de réduction en ligne directe, ‘intervalle des deux stations où la mesure des deux angles aura été observée. Supposant cette base de cent mètres et les deux angles de cinquante et de soixante minutes, la diffé- rence de dix minutes sera plus que suffisante pour déter- miner et la distance et la grandeur de l’objet, car dix minutes, 328 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE différence entre les angles de 6o et de 50 minutes, est à 100 mètres, longueur de la base, comme 60 minutes, angle de la seconde station , est à 6oo mètres, distance de la pre- mière station. Ce quatrième terme de cette proportion est donné par le nombre 100 multiplié par 60 et divisé par 10. Les recherches dont je viens de rendre compte, n'ont eu pour but que celui de montrer que la disparition des images intermédiairesest parfaite dans mon micromètre, quelle qu'en soit la cause. J’ai dit précédemment, que pour le rendre propre à mesurer de plus grands angles comme le diamètre du soleil et de la lune, il falloit lui faire prendre la figure d'un parallélipipède formé par deux prismes égaux placés en sens opposés et collés avec du mastic en larmes, selon la méthode usitée par les lapidaires. Ces deux prismes doivent être taillés dans fe même quille de cristal de roche, mais leur section doit être à angle droit, le premier dans l'arête des faces du canon, et le second dans l’arête des faces de la pyramide prenant son sommet pour celui de l'angle que l'on veut donner au prisme. Faut-il attribuer, dans ce cas, la disparition des images intermédiaires à des accés de difficile transmission, d'après le système de Newton; je serois porté à croire, d'après les expériences que j'ai rapportées, que les extinctions graduelles et alternatives de ces images appartiennent au phénomène de la réflexion qui, dans certaine position, repousse en alternant le rayon susceptible d'éprouver la réfraction extréordinaire, comme celle qui subit une réfraction ordinaire. Les belles expériences de M. Malus ne me semblent pas contraires à cette assertion. Ce savant géomètre dit que lorsqu'un rayon de lumière tombe sur un verre sous l'angle de 35° 25, toute la lumière qu'elle réfléchit est polarisée dans un sens. En éprouvant la portion de lumière incidente qui est transmise, il a reconnu qu’elle est composée d'une quantité de lumière polarisée en sens contraire, et d'une autre portion non mo- difiée qui conserve les propriétés de la lumière directe, et par là le rayon se trouve décomposé comme dans la double réfraction. Les deux côtés de la lumière qui forment entre eux un angle droit, se nomment pôles, pour les distinguer l'un de l’autre, et la polarisation est la modification que la lumière éprouve en vertu de ses côtés. M. Malus a prouvé que toutes les ET D'HISTOIRE NATURELLE. 329 les fois que l’on fait naître par un procédé quelconque, un rayon polarisé, on aura un second rayon polarisé en sens opposé, et ces deux rayons suivront des routes différentes. La lumière ne recevra pas dans un sens cette modification, sans qu'une partie proportionnelle des rayons ne la reçoive dans un sens contraire. , Ainsi, lorsque je place mon micromètre devantune lunette de spath d’Islande!, n'est-il pas en mon pouvoir detrouver une position du parallélipède qui porte les rayons polarisés dans un sens à seréfléchiren totalité, tandis queles rayons polarisés en sens contraires, seront transmis et ne formeront plus que l'image unique qu'on appercevra toutes les fois quele mouve- ment circulaire qu’on lui imprime l’écartera de 90 degrés de la position où les deux images seront les plus apparentes. Dans la seconde expérience que j'ai rapportée lorsque la première image paroit au premier foyer , la seconde s'éclipse au second foyer , et lorsque par un mouvement circulaire de 90 degrés on fait disparoitre La première image, la seconde renait au second foyer, et l'on ne peut pas se méprendre sur les deux images qui se forment alternativement, parce qu'elles sont très-inégalement colorées. Dans ce cas on a quatre foyers, observation quim’aéchappéjela dois à M. Arago: quant à moi, je me suis borné à en tirer un parti utile au per- fectionnement de mon micromètre, instrument auquel j'at- tache un grand intérêt. Je viens de composer un micromètre qui, par le mou- vement circulaire de deux parallélipipèdes de cristal de roche, tournant sur un centre commun, a pour axe celui de la lunette à laquelle cet appareil est adapté. . Chaque parallélipipède est composé de deux prismes, l'un pris dans le sens du canon et l’autre dans celui de la pyramide. Il y a une position des deux parallélipipèdes où l'on ne voit qu'une image; c'est le point où l'on place le zéro, à quelque distance on voit naitre quatre images qui sont à o degrés de ce point dans leur plus grande intensité ; elles s’affaiblissent ensuite graduellement à 180 degrés, elles se réduisent à deux qui ont reçu le maximum de leur écar- tement. En continuant à mouvoir ces deux parallélipipèdes dans le même sens , on verra renaïtre les quatre images qui seront d'égale intensité à 270 degrés ; mais à 360 degrés elles se réduisent à l'image unique. C'est ainsi qu'on peut obtenir un micromètre qui donnera en même temps la mesure des Tome LXZXIZ, AVRIL an 1811. Hit 330 JOURNAL DE FHYSIQUÉ, DE CHIMIE angles en offrant les phénomènes étonnans de la disparition des images. La conséquence importante que j'ai déduite ‘de cette expérience, c'est qu'on peut multiplier les paral- lélipipèdes de manière à obtenir des images doubles dont l'écartement sera de plusieurs degrés. Ainsi avec une lunette astronomique d'un pouvoir amplifiant considérable, on pourra désormais mesurer le ‘diamètre du soleil avec un très-grand degré de précision, parce que les parallélipipèdes peuvent être placés au quart ou même au sixième de la distance focale de l'objectif. Il faut employer dans cette mesure le mi- cromètre qui se meut lelong de l'axe d’une lunette; il est, sans contredit, préférable à celui qui a pour principe le mouve- ment circulaire. Je n'ai pas besoin d'ajouter qu’il faut s’atta- cher, en employant plusieurs prismes de cristal de roche, à réduire à deux images leurs effets, et ceci explique la cause” de la rareté de ces instrumens Je ne les ai portés que très-récemment à leur perfection ; car celui qui a servi aux expériences qui ont été faites’ sur l'escadre aux ordres de Son Excellence l' Amiral Gantheaume, n avoit pas encore la taille qui donne le maximum que j'ai obtenu depuis. Cepen- dant on jugera par le rapport que je vais transcrire ici, que mon but a été assez bien rempli. Rapport fait par ordre deSon Excellence le Ministre de la Ma- rine, sur le micromètre à double réfraction de M. Rochon. . Nous, Amable Faure , leGouardun , Krohm, Clément et Duranteau, capitaines de vaisseau, chargés par M. l'amiral Gantheaume , de faire des épreuves avec une lunette armée d'un micromètre de l'invention de M. Rochon, nous avons, lorsque les circonstances l'ont permis , en présence de M. l’A- miral et de concert avec lui, fait des observations sur des objets fixes , de dimensions déterminées, tels, par exemple, que la circonférence d’un décimètre de diamètre, et lorsqu'au moyen de l'indicateur qui porte les prismes de cristal de roche qüui doublent les images des objets sans donner à ces images aucune teinte de couleurs, ou d'iris, nous avons: mis les deux images des objets en contact , nous obtenions avec précision le nombre de fois que le diamètre de l'objet que nous observions étoit contenu dans la distance où nous étions de lui. C'est ainsi qu’en mettant en contact les deux images de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 33: la girouette d'un vaisseau qui a un pied de hauteur, nous savions sur-le-champ à combien d’encablures, ou de brasses nous étions Ge lui. Lorsque nous avons voulu comparer notre marche avec celle d’un autre vaisseau , nous n'avons pas éu besoin de choisir un objet dont les dimensions fussent dé- terminées. L. voile la plus à portée.de la vue prouve, lors- qu'elle se sépate, que vous perdez, lorsqu'au contraire les imagesse doublent, vous étes assurés que vous marchez mieux, M. l'amiral nous a rappelé à la suite de ces observations, que, muni d'un semblable micromètre dans sa campagne de la Méditerranée , en l’an 9, il s’appercevoit sensiblement, chaque fois qu'il chassoit un bâtiment, s’il avoit sur lui une supériorité de marche. C’est surtout dans les chasses appuyées à la frégate /e Succès et le vaisseau /e Swistfure dont il s'empara, qu'il fut à Mo de juger du degré d’in- térêt dont cet instrument pouvoit être pour la marine. En effet, dans une armée ou dans une escadre, le général voulant éclairer sa marche pour faire chasser des frégates à une rande distance, et placer en intermédiaire des bâtimens Trois pour répéter les signaux des frégates sans craindre que les uns et les autres dépassent les distances qu'il aura prescrites ; si ces bâtimens portent en tête des mâts, des pavillons de dimensions déterminées, par le seul moyen des girouettes , les vaisseaux en ligne peuvent s'entretenir à la distance ordonnée. . » Ce n'est pas seulement à ces expériences que se borne l'usage que l'art nautique peut faire de cet instrument, nous sommes convaincus que des signes de dimensions dé- terminées à une certaine élévation de terre et à une aire de vent désigné d une roche, d'un banc ou d'un danger quel- conque près de la côte, faciliteroient beaucoup le louvoyage des bâtimens, en connoissant le point juste qu ils pourroient atteindre sans le dépasser. Il arrive souvent que les remarques des pilotes côtiers sont éloignées ou embrumées : il nait de là une incertitude qui, si elle Me fait pas courir les plus grands risques, retarde au moins la marche, multiplie les viremens de bord et fait perdre l'avantage d’une marée favorable. Si l'on manque de pilote et que l'on soit assujéti au re- lèvement du compas dans des bordées courtes, l’auxiété est encore plus grande. Dans un voyage de découvertes , ou même dans une relaxe the 332 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMTE étrangère , lorsqu'on a pris le gisement exact dg la côte, on peut facilement marquer les fonds et les dangers avec deux canots dont l'un auroit un pavillon en tête du mät. La marine peut retirer les plus grands avantages de l’usage de cet instrument. Nos ennemis qui mettent tant d'intérêt à tout ce qui peut agrandir la sphère de nos connoissances de cet art diffi- cile, qui récompensent si bien les découvertes utiles, n’ont rien produit de parfait en ce genre. Je termine ce Mémoire en donnant la Table suivante que m'ont fréquemment demandée les navigateurs qui ont le desir dé se servir de cet instrument. + TABLE (G) POUR L'USAGE DE MON MICROMÈTRE. miputes 0,0 | 0,0 0,1 02 0, 0 | 3438 | 3126 | 2855 | 264 0 1719 1637 1563 a 0 | 1146 | 1ro0 | 1054 | r042 o | 8060 835 819 800 Q 58 67 661 649 0 ê 3 5 oi o 0 | 450 42 419 14 o | 382 37 374 70 344 340 337 334 312 310 307 304 287 255 282 280 264 262 260 258 246 244 242 240 ESA CN EE PP ER OR ERP RENTREE 2456 2 1910 | 1810 1433 127 1228 | 1185 1011 929 05 582 781 732 716 702 636 Ê 583 6 495 435 09 386 66 _ 347 331 318 315 307 290 279 266 266 247. | 235 31 250 3,0 71,4 5134 | 50,8 | 50,5 (FE 59,5 | 69,3 | 66,2 | 60,0 5: Ë ë ë 58, < 58,8 59 ,0 | 55,1 | 55,0 | 57,9 | 57,8 60 ,0 | 55,2 | 55,0 | 56,9 | 56,8 (1) On a fait usage dans cette Table de Ja division du cercle en 36 o degrés. e, | QI + JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Cm DE LA DÉFENSE DES PLACES FORTES, Ouvrage composé par ordre de Sa Majesté Impériale et Royale, pour l’Instruc- tion des Eleves du Corps du Génie; par M. Canvor , ancien Officier de ce Corps, ancien Ministre de la Guerre, Membre de la Légion d'Honneur, de l’Institut de France, des Académies de Dijon, Munich, Corcyre , etc. Seconde Edition, 1°11. Un vol. in-8°. À Paris, chez Courcier, quai des Augustins, n° 57. Prix, 6 fr. pour Paris , et 8 fr, franc de port. L'art de la défense des places fortes élant beaucoup moins ayancé que ne l’est aujourd’hui celui de l’attaque , on desiroit depuis long-temps que l'équilibre entre ces deux arts s’opérât, afin d'accroître la résistance dont nos frontières sont déjà susceptibles , ou mieux'encore, pour faire renoncer d’avance tout ennemi présomptueux à des projets d’envahissement. Ainsi que l’attaque a eu des progrès dus à des vues d’agrandissement , la défense doit avoir les siens, par une sage prévoyance , en la rendant redoutable au point d'empêcher toute agression. Îl en est de ces arts comme de l'édifice des sciences où, dans la suite des âges, des hommes rares viennent poser suc= cessivement de nouvelles pierres. On n’a donc pu mieux faire que de saisir l’occasion, en choisissant un homme d’une réputation imposante par ses con- noissances dans les sciences exactes, ses grands talens militaires, adminis— tratifs et littéraires , afin d'avancer l’art de la défense. M. Carnot semble avoir atteint ce but desirable par la publication de l’Ouvrage dont je vais essayer ici de rendre compte en employant quelquefois ses propres expressions. L’épigraphe de ce livre, puisée dans l’Ouvrage même , en présente l’esprit: Dans la défense des places fortes, la valeur et l'industrie ne suffisent pas l’une sans l'autre, mais elles peuvent tout étant réunies. ; Effectivement la discipline militaire qui fait la gloire du soldat, l'importance de chaque forteresse pour la totalité de l’Empire, les ruses sans nombre de l’assiégeant, intéressé à effrayer, et qui sait bien d’ailleurs que les grands dangers pour lui l’attendent au plus pres de la place; tout prouve que l’assiégé ne doit jamais désespérer et qu’il doit demeurer inébranlable , l’aSsiégeant füt- il sur la brèche, puisque le défenseur a , ou doit avoir, des retranchemens par- delà. L'auteur prouve par une foule de raisons parfaitement déduites et tenant au principe général de l’honneur, qu’un oflicier supérieur, mort depuis en- viron 20 ans, aété tres-mal fondé lorsqu'il a voulu établir comme maxime, que telle ou telle place forte ne pouvoit et ne devoit résister à l’assiégeant que durant tant de jours , d'heures et de momens. Cette maxime , für-elle vraie, il eût fallu la taire : elle affoibliroit le courage ou l’éteindroit même avant l’é- p que où l’on en a le plus de besoin. Eh! combien celle maxime doit-elle être ET D'HISTOIRE NATURELLE, 335 aujourd'hui écartée, lorsqu'il est démontré jusqu’à l’évidence , par les calculs de M. Carnot et par l'expérience de tant de siéges récens , qu’elle est fausse , et ue l’expression scientifique de moment d’un front de fortification , n’est que Je rêve d’un homme qui faisoit de ce mot unesorte de tarif et la pierre de touche de son art. L'auteur qui nous occupe lui substilue les paroles de certain capitaine Romain : eo eundum est , milites , unde redire non necesse est. L’instruction pratique donnée daus le même Ouvrage , par l’historique d’une Toule de sièges, dont les défenses sont à jamais mémorables, est bien faite £>core pour écarter toute maxime qui tendroit'à décourager les assiégés. Leur éner£'e pourra tout , si l’on y joint l'habileté, D'où il suit que le choix à faire d’un commandant de place n’est pas chose indiférente et que les Bayards, tou- jours rares , ne se trouvent point parmi des ambitieux. De là il dérive aussi, 1° que les officiers du génie, principaux conseillers de ces commandans de place, doivent seconder leur courage et leur habileté en tout point et dans tous les temps. Ainsi, durant la paix ces officiers du génie s’occuperont à bien reconnoiître , à bien étudier le fort et le foible des places qu’on leur confie , soit en elles-mêmes, par leur site, leur tracé, leur relief, leurs magasins, leurs casernes, leurs souterrains , les localités environ- mantes , etc. , soit relativement aux forteresses de la même frontière. 2°. Qu’une place supposée en état de guerre exige de la part des officiers du génie une multitude de connoissances détaillées relatives au personnel et au matériel, toutes indispensables à la défense, ainsi qu’aux travaux qui doivent la précéder. 3°. Que lors de la mise en état de siége, ces mêmes officiers doivent inspirer toutes les mesures du génie d'opposition commandées par les circonstances d’in- vestissement , d'ouverture de tranchée, de défense éloignée , de défense rap- prochée, en reservant vers la finles plus grands moyens d’audace , d’habilete et de destruction , pour un glorieux dénouement. La conclusion de cet Ouvrage , dont ceci n’est qu’un simple appercu , justifie parfaitement l’épigraphe de l’auteur , c’est-à-dire, que la valeur et l’industrie, en harmonie entre elles , peuvent tout pour la défense des places , et qu’elles ne peuvent rien , si elles n’agissent de concert, ou si elles ne se secourent récipro- quement. 4 Au reste, dans l'exposé rapide que nous venons de faire de la conduite ferme que doivent tenir les militaires chargés de la défense d’une forteresse , ilest es- sentiellement supposé que lors de l’armement d’une place quelconque menacée d'attaque, onaura d’abord eu lesoind’enfaire sortir, avectouteslesprécautionsque l'humanité prescrit, les personnes qu’on nomme ordinairement bouches inutiles, c’est-à-direles vieillards, lesfemmeset lesenfans.Ondoitaussiinviteras’éloigner de la place tous ceux qui , ne participant pas aux honneurs et autres avantages militairés, ne sauroient avec justice être contraints à aucun de leurs engage- mens; ensorte que ces infortunés habitans n’aient du moins à gémir que des , Tigueurs de la guerre , dont les suites exposent leurs propriétés à des dangers. Il me resteroit ici à rendre compte des Mémoires additionnels dont l’auteur a enrichi son volume ; mais ces Mémoires étant très-concis, il faut leslire, et je dois presque me borner à les désigner par leurs titres. Dans le premier , l’on propose une nouvelle manicre de défendre les places par des projectiles presque verticaux , dont les effets, clairement calculés au mini- mum,nepeuyent manquer d’accabler les assiégeans. Cette méthode, que personne ! 336 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE n’avoitimaginée, doit faire époque, surtout dans le monde militaire, puisqu'elle force à présager qu’en la suivant dans les places frontières , elles deviendront inexpugnables. Le second Mémoire additionnel contient des réflexions sur les améliorations dont l'art defensif est susceptible. Les imperfections les plus marquantes de nos villes fortes étant le manque de souterrains, de retranchemens au corps de place et autres, l’auteur entre dans des détails descriptifs de constructions nou- velles pour obvier à ces inconvéniens , et reconnoissant néanmoins leur insuffi- sance dans les tracés d’usage , 11 va jusqu’à dire qu'il conviendroit de renoncer au systeme bastionné qui, tout dispendieux qu'il est, n’atteindra jamais /. perfection dont le simple système angularre est suscentible. Enfin le troisième et le dernier Mémoire additionnel contient diverses données et résultats d'expériences nécessaires à connoître pour la direction et l'exécution des travaux + où, pour le dire autrement, c’est une sorte de compendium , ou recueil abrégé de connoissances éparses et précieuses , spécialement pour ceux qui sont chargés de la conduite des travaux dans les places assiégées, qui ne doivent être étrangers à rien de ce qui a rapport aux élémens de l’artillerie , de l’art des mines et de l’architecture militaire. En nous résumant, nous conclurons que l’Ouvrage de notre ancien camarade, M. Carnot, nous paroît une production de la plus haute importance dans l’art de défendre les places, Il deviendra nécessairement , ou il est même déjà devenu un livre classique. LESPINASSE , ancien Capitaine du Génie, COMÈTE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 337 COMÈTE DÉCOUVERTE Par H. FLAUGERGUES. Le 25 mars, à 8 heures du soir, j'apperçus en parcourant le ciel avec ma lunette de nuit, une petite blancheur ronde et confuse à la poupe du navire Argo, cinq degrés environ au sud de l'étoile , de cette constellation ; cette apparence n'offrant rien de bien remarquable, je me contentai de dessiner la configuration qu'elle formoit avec quelques étoiles telescopiques, proche desquelles cette blancheur étoit placée. Le lendemain 26, je revis la mème nébulosité , mais en- vironnée d'autres étoiles que la veille ; d'où je conclus que c'étoitune comète : ayant pris de suite sa position, je trouvai, à 8 h. 59° 4" temps sidéral , son ascension droite de 120° 26° et sa déclinaison de 29° 5’ australe. Le ciel fut couvert le 27. Le 28 je revis la comète , son ascension droite avoit diminué de 32’et sa déclinaison avoit aussi diminué de 1° 2’. Cette comète, dont le diamètre apparent est d'environ cinq minutes, est extrémement difficile à observer, parce que sa lumière est très-foible, au point qu'on a peine à la voir avec les meilleurs instrumens ; elle est aussi fort confuse, n'offrant aucune apparence de noyau ni rien de précis; enfin elle se trouve placée dans une-région du ciel où il y a très-peu d'étoiles dont la position soit déterminée et aux- quelles on puisse la comparer: ce n'a été que le 30 mars que cette comète s'est trouvée très-proche d'une belle étoile de troisième grandeur dans l’écu de la poupe du navire. Le 11 avril je l’apperçus à la vue simple. Elle a une petite queue dirigée à l'es. Cetteétoilesetrouvedanslescataloguesd'étoilesdePtolomée, de Tychoet d'Helvétius, où elle estdésignée par le caractère X; mais par une fatalitésingulière, elle ne se trouve point dans les catalogues de Flamsteed , de Bradley, de Mayer, non plus que dans ceux de l’abbé de La Caille et de M. Piazzi, quoique ces célèbres astronomes aient observé et déterminé ta position £&'étoiles beaucoup plus petites qui en sont très-pro:hes. Il y a 3 ans que les astronomes n'ont point observé de Tome LXXII. AVRIL an 1811. Vy 338 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE comètes. Celle-ci est la centième dont l'orbite est connue suivant le catalogue de Lalande. : DE LA CONGÉLATION DE L'EAU PAR ÉVAPORATION. M. Les vient defaire,en Angleterre,une expérience très- curieuse.Il placesouslerécipient d'unemachine pneumatique, deux capsules de verre: l'une contient de l'acide sulfurique et l’autre.contient de l’eau pure. On fait le vide. L'eau s'évapore promptement sous forme d’ébullition , elle est aus- sitôt absorbée par l’acide sulfurique. L’évaporation continue avec rapidité, et produit un froid assez considérable pour congeler l'eau , malgré le petit degré de chaleur que l'absorp- tion de la vapeur aqueuse produit dans l'acide sulfurique. NOUVELLES LITTÉRAIRES. Eloges des Académiciensde Montpellier, recueillis, abrégés et publiés par M. le baron Desgenettes , pour servir à l'his- toire des sciences dans le dix-huitième siècle. Un vol. in-8°. - À Paris, de l'Imprimerie de Bossange et Masson, rue de Tournon, n° 6; et se trouve à Paris, chez WMequignon l'aîné, rue de l’Ecole-de-Médecine, Croulleboïs, rue des Mathurins- Sorbonne, Gabon, place de l’Ecole-de-Médecine, Crochard , rue de l'Ecole-de-Médecine, Déterville , rue Hautefeuille, n° 8, Maradan, rue des Grands-Augustins. L'Académie de Montpellier a compté, et compte parmi ses Membres, des savans très-distingués. Il suffit de nommer les Magnol, les Chicoyneau, les Sauvages, les Venel, les Lamure.... Leur éloge fait donc partie de l'histoire du dix- huitième siècle. Il a un autre avantage, c’est de servir d’'en- couragement à la jeunesse qui a du talent: & anche son pittor, dit le Corrège, en voyant un beau tableau. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 339 L'Ouvrage de M. Desgenettes, considéré sous ce double rapport , ne peut manquer d’intéresser le lecteur. Notice des travaux de l'Académie du Gard, pendant l’année 1809, par M. Tre/is, Secrétaire perpétuel. Un vol. in-8°. À Nismes, chez la veuve Bel//e, imprimeur de l'Académie. Cette Société travaille beaucoup pour les progrès des Sciences et des Belles Lettres. Son Recueil contient des choses très-intéressantes. Ouvrages nouveaux qui ont été imprimés dans le cours de 1810 et 1811, chez CourGiEr, /mprimeur-Libraire. Deluc. Traité élémentaire de Géologie, in-8. 1810. Prix 5fr. Legendre. Essai sur la théorie des Nombres, 2° édition in-4. 1809. 18 fr. Spiess. Essai de recherches élémentaires sur les premiers principes de la raison, in-6. 1609. 4 fr. Cet ouvrage est d’un grand-intérêt. Chlaäni. Traité d’Acoustique , avec 8 pl. in-8. 1809. g fr. 5o cent. Nous ne dirons rien pour le moment de cet Ouvrage qui est paru le 10 no- vembre. Sa Majesté Napoléon-le-Grand en a bien voulu agréer la Dédicace, après en avoir vu les expériences fondamentales. Garnier. Réciproques de la Géométrie , in-8., deuxieme édition, avec douze planches. 5 fr. Haiiy. Tableau comparatif des résultats de la Cristallographie et de l’analyse chimique, relativement à la classification des minéraux, in-8. 1809. 5f. 5o c. Monge. Traité élémentaire de Statique à l’usage des Ecoles de marine , in-8. Ouvrage adopté par l’Université pour l’enseignement dans les lycées. 3f. 25 c. Puissant. Traité de topographie, d’arpentage et de nivellement , avec un Sup- plément contenant la théorie des projections des Cartes, in-4. Ouvrage adopté par l’Université impériale, pour l’enseignement dans les Lycées, Ecoles se- daires , etc. « 18 fr. oëron. Histoire de l’ Astronomie, vol. in-4. 12 fr. Girrrd. Recherches sur l’eau et le vent considérés comme forces motrices , ap- plicables aux rnoulins etautres machines à mouvement circulaire, etc., sivies d'expériences sur la transnussion du mouvement et la collision des corps, par M. J. Smeaton , de la Société royale de Londres, ouvrage trad. de l'anglais, et précédé d’uné introduction 3104, 1810. 9 fr. Reynaud. Elémens d’ Algèbres, précédé de l'introduction à l’Algebre, première section, troisième édition , in-8. 1810. DIÊrs — Elément d’Algebre et Introduction au Calcul différentiel, 2° section, in-8, 1810. 5 fr. Raymond. Lettre à M. Villoteau, touchant ses vues sur la possibilité et l’utilité d’une theorie exacte des principes naturels de la Musique, suivie d’un Mé- moire et de quelques opuscules sur l’usage de la musique dans les églises, suivis de quelques réflexions sur la nécessité de rétablir le chant de l’église de Rome, par Choron, Correspondant de l’Institut de France, etc. , vol. in-8, 1811. 4fr. Berthoud. L'Art de conduire les Pendules et les Montres, quatrième édition, - 336 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, ete. augmentée d’une planche et de la manière de tracer la ligne méridienne du temps moyen, in-12 ,5 planches. 1811. 2 fr. Soc. Connoissance des temps pour l’année 1812 , in-8. 6 fr. Lefvre. Nouveau Traité de l’Arpentage , 2 vol. in-8. 1811. 12 fr. OUVRAGES SOUS PRESSE. Lagrange , Sénateur , ete. , etc. Mécanique analytique , nouvelle édition, 2 vol: in-4, pour paroître au premier octobre. Delambre. Astronomie théorique et pratique, 2 vol. in-4. Lacroix. Traité de Calcul différentiel et intégral , 3 vol. in-4. Le premier est imprimé et se vend 21 fr. Connoïssance des temps pour 1813. Annuaire de 1813, publié par le Bureau des Longitudes. Poisson. Traité de Mécanique, 2 vol. in-8. x Hellemans. Grammaire française , ouvrage posthume. Labey , Professeur de Mathématiques etexaminateur des candidats pour l'Ecole Impériale Polytechnique , Statique élémentaire , in-8. avec planches. — Traduction du Traité de Calcul différentiel d’Euler, en 2 vol. in-4. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Troisième mémoire sur la Poudre à canon; par L.-J. Proust. Pag. 265 Tableuu météorologique; par M. Bouvard. 282 T'heorie der Crystallisation, ou Théorie de la Cristal- lisation; par J. J. Prechtl, de Brunn. 84 Expériences sur la formation de la double image, et sur sa disparition dans le spath d'Islande et dans le cristal de roche, appliquées an perfertinnnement de tous les micromètres composés de ces deux substances ; par M. Rochon. 319 De la Défense des Places fortes, par M. Carnot. 334 Comète découverte par H. Flaugerpues. 337 De la Congélation de l'eau par évaporation, par Leslie. 338 Nouvelles Littéraires. Ibid, 5 Thor dy Cris, ti: ahon. | | LA RE EE Citdhsaton. Journal de Lhysig Aer 18u. ho ——— | NN ES | j fi Le 4 hr, JOURNAL DSP -H.Y.S LOU ES DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. MAI AN 18r1,. MÉMOIRE SUR L’EXTRACTION EN GRAND DU SUCRE DES BETTERAVES, ET QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LEUR CULTURE; Par MM. BARRUEL, Chef des Travaux chimiques de la Faculté de Médecine de Paris, et Maxrmin ISNARD. Publié par ordre de S. Ex. M&r. ne MONTALIVET, Comte de l'Empire, Ministre de l'Intérieur. À Paris, chez Mad. Huzard (née Vallat la Chapelle), rue de l'Épéron , n° 7. 1811. M. Barrusr, chef des travaux chimiques de la Faculté de Médecine de Paris, et M. fszard, se sont pénétrés des avantages de la culture de la betterave; ils se sont livrés à Tome LXXII, MAI an 1811 X x 54a JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE l'analyse chimique des principales variétés de cette racine, ainsi qu'à l'extraction de son sucre. M. Barruel a concouru aux dernières expériences de M. Deyeuæ sur la fabrication du sucre de betterave. Le résultat de ces expériences a donné lusieurs pains de sucre parfaitement cristallisé, d'unegrande lancheur, brillant, sonore, en un mot jouissant de toutes les propriétés du plus beau sucre.de canne. Ces deux particuliers, en suivant des procédés qui leur sont propres, viennent d'extraire de 5,000 kilogrammes de betteraves 74 kilogrammes de moscouade. Pour faire connoître le prix auquel est revenu cette moscouade , et le sucre raffiné qu'ils en ont obtenu, ils ont donné le détail de leur dépense ainsi qu'il suit: 4 Ils avoient acheté cinq voitures de betteraves qui leur coù- tèrent pour l'achat. le transport, les faire laver et nettoyer, 179 francs. En cet état la totalité pesoit 5,780 kilogrammes ; les 100 kilogrammes leur coutoient par conséquent 3 francs 6o centimes, et les 6,000 kilogrammes...... 2155fr. oc Seize journées de femmes pour râper, 1 franc DO CENUIMIES 2 et PS AE abc etete SP SEM - N2O) Treize journées employées pour presser , écu- mer, cuire et mettre à l’écume, à 2francs...... 26 Vingt pintes de lait à 4o centimes........... 8 (CARRE ed Eet uracbr ae d'a 3 Deux tiers de voie de charbon de terre, à 55 fr. 1 Voie: FRERE ERA. MEN RE 0 0 3001266 TOME Es ove nOt TA EN Qu: 246r. 66 c, En divisant cette somme par 74, c'est-à-dire par le nombre de kilogrammes de moscouade obtenu, on voit que le ki- logramme leur est revenu à 3 francs 33 centimes. Ils ont soumis au raffinage 4o kilogrammes de moscouade qui leur ont donné en sucre de diverses qualités 55 kilogrammes -# et 5 kilogrammes de sirop : cette augmentation de poids provenoit d’un peu d’eau des terrages. En portant les frais du raffinage et terrage à 26 centimes par kilogramme de moscouade, le sucre raffiné est revenu à 4 francs 4 centimes le kilogramme, prix qui seroit diminué s’il, avoit été tenu compte du produit de la vente des sirops, mélasses et des marcs, ET D'HISTOIRE NATURELLS. 343 Si l'on considère que MM. Barruel et Isnard ont payé les betteraves trois fois plus cher qu’elles ne seroientrevenues à un cultivateur , et que la main-d'œuvre seroit bien moins coûteuse en se servant d'une machine propre à räper et exprimer, il est facile de juger que les prix auxquels sont revenus la moscouade et le sucre ne sauroient être pris pour base d’une fabrication en grand; pour les porter à une juste valeur , ils ont fait le calcul des dépenses dans une fabrique qui exploiteroit 200 hectares en betteraves, et il en est résulté que le kilogramme de sucre brut ne reviendroit qu'à 85 centimes, et celui de sucre raffiné à 1 franc 4o cent. Ces renseignemens suffisent pour faire sentir les avantages de la fabrication du sucre des betteraves, outre que sa cul- ture bonifie beaucoup les terres, et Les dispose singulièrement à la récolte des céréales. .- Voici le développement des procédés et les résultats. Extraction du sucre des Betteraves. L'existence du sucre dans divers végétaux et notamment dans les betteraves, a été reconnue par Margraffil y a plus de cinquante ans; mais les procédés quil indiquoit pour en opérer l'extraction étoient trop dispendieux et les sucres de canne trop abondans à cette époque pour qu'on püt entrevoir la possibilité de retirer quelque fruit de cette im- portante découverte. Elle éprouva le sort de beaucoup d'autres qui paroissent plus curieuses qu'utiles, et ne fut envisagée que comme un fait nouveau ajouté à l'analyse végétale, lequel démontroitquele sucre n'appartient pas exclusivement au saccharum officinale : le moment d'en faire une heu- reuse application n'étoit pas encore arrivé. Ce ne fut que quarante ans après que M. Æchard, chimiste de Berlin, frappé de la grande quantité de sucre que l'on retiroit des betteraves par le procédé de Margraff, conçut la pos- sibilité de rendre cette découverte utile, et entreprit dans ce but un grand nombre d'expériences. Elles le conduisirent à un procédé au moyen duquel il assura qu'on pourroit retirer des betteraves un sucre comparable au plus beau sucre de canne, et qui, toutes dépenses faites, ne reviendroit pas au-dessus de 30 centimes le demi-kilogramme. : Un fait aussi important, annoncé par un chimiste dis- tingué, ne manqua pas de fixer l'attention de toutes les X.x 2 344 JOURNAL DÉ PHYSIQUE, DE CHIMIF Sociétés savantes, et la première Classe de l’Institut de France s'empressa de nommer une Commission pour le vérifier. Cette Commission , composée de chimistes aussi célèbres que d'agri- culteurs consommés, fit son’ rapport le 8 messidor an 8. Il résultoit de ce rapport qu'on obtenoit des betteraves , par le procédé de M. Æchard, une moscouade de bonnë qualité; mais la Commission, sans prétendre rien établir de positif relativement aux frais d'extraction qui vraisem- blablementavoient été mal calculés par M. Æchard, présuma qu'on pourroit parvenir aux mêmes résultats A des opéra- tions plus simples, et elle parvint en effet. Elle ne se dissimula pourtant pas que les procédés qu'elle avoit suivis étoient encore éloignés de la perfection, et que de nouvelles recherches conduiroient probablement à des résultats plus avantageux. Soit qu'à cette époque la Commission n'eût en vue que de constater la possibilité d'extraire des betteraves une mos- couade de bonne qualité, soit qu’elle n'en eüt pas obtenu une suffisante quantité pour la soumettre au raffinage, elle ne s’occupa point de cette opération, et elle estima seule- ment, par approximation, que le sucre raffiné ne reviendroit qu'au prix de 90, centimes le demi-kilogramme. La publication du rapport de la Commission ne donna lieu en France à aucun travail en grand pour l'extraction du sucre des betteraves. Il appartenoit au plus grand des Monarques, à qui rien n’échappe de ce qui peut être utile à son vaste Empire, d'appeler de nouveau l’attention des chimistes sur cet objetsiimportant, et S. Ex. le Ministre de l’intérieur invita ,il y a un an, la première Classe de l'Institut à faire de nouvelles recherches à cet égard. M. Deyeux, rapporteur de la première Commission, fut chargé d en reprendre les travaux, et, à cet effet, il s'adjoignit M. Barruel, chef des travaux chimiques de l’Ecole de Méde- cine. [Toutes les expériences de la Commission furent ré- pétées; on en fit de nouvelles, et, après avoir extrait une certaine quantité de moscouade , on la soumit au ralf- nage, et on obtint deux pains de sucre parfaitement cris- tallisé, d'une grande blancheur, brillant, sonore, en un mot jouissant de toutes les propriétés du plus beau sucre de canne. Un de ces pains fut offert par S. Ex, le Ministre de l’in- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 345 térieur à Sa Majesté , qui daigna le recevoir ayec cette bien- veillance qu'elle accorde à tout objet utile. Aucun doute ne restoit donc plus sur la possibilité d'ex- traire des betteraves en France un sucre d'une qualité par- * faite; il ne s’agissoit plus que de déterminer le prix auquel il devoit revenir. MM. Deyeux et Barruel ne résolurent pas cette question, parce qu'ils n’avoient envisagé leur travail que sous le rapport chimique. Il devenoit donc indispensable de le reprendre pour ïe considérer sous le point de vue manufacturier. Nous avons entrepris ce travail dont on conçoit toute l’im- portance; nous avons tenu un compte exact de toutes nos dépenses, et les plus grands soins ont été apportés dans toutes nos opérations, qui ont été faites assez en grand pour nous autoriser à assurer que les résultats peuvent servir de base aux fabriques de ce genre que l’on voudroit établir. Si, répondant aux vues bienfaisantes de notre auguste Sou- verain, nous contribuons par notre travail, comme nous devons l’espérer,, à l'établissement en France de nombreuses fabriques de sucre, nous nous estimerons heureux de l'avoir entrepris. Nous allons décrire les procédés que nous avons trouvés les plus avantageux. PREMIÈRE OPERATION. Lavage. Cette opération pourra s'exécuter de plusieurs maniéres ; c'est au fabricant à faire choix de celle qui lui paroîtra la plus convenable, suivant les localités. Après le lavage, on privera les racines de leur collet, cette partie contenant un principe âcre qui pourroit nuire à la séparation du sucre. DEUXIÈME OPÉRATION. Réduction de la racine en pulpe. Les betteraves ainsi préparées devront être réduites en pulpe. Un grand nombre de machines peuvent être propres à cette opération. C’est encore au fabricant à faire choix de celle qu'il jugera la plus avantageuse. Nous croyons cependant devoir donner la description de celle de ces machines à 3546 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIM!IE laquelle nous donnons la préférence. Elle est composée de deux cylindresen bois, disposés horizontalement , de quinze pouces au moins dediarmètre,et d'unelongueur proportionnée à la puissance du moteur, crénelés, suivant leur longueur, de manière à ce que l'angle saillant de l’un engrène dans l'angle rentrant de l'autre. Ces cylindres sont mus en sens contraires et de dehors en dedans; au-dessus est une tréimie dont l'ouverture inférieure correspond à presque toute leur longueur. Il importe de lui donner la plus grande hauteur possible, parce que les betteraves qui se trouveront dans le bas seront d'autant plutôtengagéesentre les cylindres, que la colonne de celle qui les pressera sera plus grande. Réduites en pulpe, elles seront reçues dans une auge disposée oblique- ment au-dessous des cylindres et conduisant dans un cuvier. TROISIÈME OPÉRATION. Expression. Dés que les betteraves seront réduites en pulpe, on en opérera l'expression pour en séparer le suc. Cette opération ne doit éprouver aucun retard, parce que c'est de sa promp- titude que dépend entièrement la réussite de la fabrication du sucre. Dans un grand établissement on devra exprimer à fur et à mesure de la réduction en pulpe; car si on dit- fère seulement de quelques heures, la matière noircit, le sucre se décompose en grande partie et bientôt en totalité, pour se convertir en une sorte de mucilage; le suc qu'on obtient alors, et trés-difficilement, est noir, visqueux, ne peut se clarifier, ne donne aucuns cristaux par un long séjour à l’étuve, et s'y réduit en un magma poisseux, dont on ne peut tirer aucun parti. La manière d'opérer l'expression de la pulpe est encore très-arbitraire, et les presses à crie, à vis, à coin, ete., pourront étre également employées : celle qui joindra le plus d'énergie à la plus grande célérité méritera la préférence. 100 kilogrammes de betteraves donneront 65 à 70 kilogrammes de suc, suivant la saison où on les traitera. On sent que les betteraves qui, par le temps, auront perdu une grande partie de leur eau de végétation, donneront moins de sug que les fraiches; mais aussi sera-t-il plus riche en sucre, sé ET D'HISTOIRE NATURELLE, 347 QUATRIÈME OPÉRATION, Desacidification et Evaporation. Le suc obtenu doit étre passé à travers une étoffe de laine, et de suite soumis à l'évaporation dans une chaudière de cuivre qui portera directement sur le feu. La forme de cette chaudière n’est point indifférente; celle qui présentera le plus de surface et le moins de profondeur doit être préférée, sans pourtant étendre trop loin ce principe. Les chaudières auxquelles nous donnons la préférence ont deux mètres de diamètre sur quatre-vingt centimètres de profondeur, Plusieurs personnes, avant nous, avoient regardé comme indispensable le bain-marie ou de vapeur pour la cuisson du suc. Nous nous sommes assurés que cette méthode, loin d'être avantageuse, est nuisible; qu'elle ralentit l'opération; qu'elle entraîne la décomposition d'une partie du sucre, et rend le travail beaucoup plus dispendieux et moins pro- ductif. Les fourneaux sur lesquels devront être placées les chaudières, seront construits de manière à être échauffés par le charbon de terre, si cela est plus économique. Aussitôt que la liqueur sera en ébullition, on y jettera par portion de la craie pulvérisée (carbonate de chaux) jus- qu'à ce qu'il n’y ait plus d'effervescence, et que la liqueur ne rougisse plus le papier coloré par le tournesol; on aura soin d'enlever l'écume à mesure qu'elle se rassemblera à la surface, et on continuera l'évaporation à gros bouillons jusqu à ce que le liquide ait acquis la consistance d’un sirop moyennement cuit: point de cuisson dont on acquerra bientôt la connoissance par un peu de pratique. Il seroit inexact de déterminer ce point de cuisson par l’aréomètre, puisque la densité de la liqueur n'est pas ue seulement au sucre qui y est contenu, mais aussi aux différentes matières salines que renferment les betteraves, et qui varient en quantité suivant le sol où elles ont été cultivées. Le sirop ainsi cuit sera versé des chaudières dans de grands vases coniques , que l’on placera dans un lieu frais pour lui laisser déposer ses sels calcaires; quand on jugera qu'ils sont tous déposés, ce qui a lieu dans l’espace de six à sept jours, on le décantera et on le filirera à travers une étoffe de laine. 348 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE CINQUIÈME OPÉRATION. Clarification et Cursson. On reversera le sirop filtré dans la chaudière, on y ajoutera environ un centième de son volume de sang de bœuf ou de laitécrémé , légérement aigri, mais non caillé; on agitera bien le mélange avec une spatule, et on le portera à l’ébul- lition que l’on entretiendra; on aura soin d’enleverles écumes à mesure qu'elles se rassembleront à la surface. On rappro- chera le liquide jusqu’à ce qu'il ait acquis la consistance du sirop de capillaire du commerce, ou, en terme de l'art, u’il fasse la nappe; alors on le retirera de la chaudière, et on le filtrera, encore bouillant, au travers d’une étoffe de laine. Ce sirop filtré, quand l'opération a été bien con- duite, est clair, a une belle couleur jaune-verdûtre et une saveur très-sucrée franche. On pourra le porter aussitôt à* l'étuve , ou le conserver dans des tonneaux, si les circons- tances ne permettoient pas de l'étuver de suite. SIXIÈME OPÉRATION. Etuvage et Cristallisation. 11 importe dans l'opération de l’étuvage, qui est la plus longue et la plus dispendieuse, d'économiser le temps et le combustible. Quelques considérations sur l’étuve et les vases évaporatoires trouveront en conséquence ici leur place. L’évaporation des liquides en général étant en raison de la surface qu'ils présentent, de la chaleur et de la faculté dissolvante de l'air, on doit construire l'étuve de manière à ce que ces trois princêpes y soient mis en exécution pour y établir un courant très-chaud. On pratiquera dans les fourneaux des tuyaux de chaleur dont l'une des extrémités communique avec le dehors pour y puiser l'air frais, tandis que l’autre aboutit dans l'étuve. Lorsque les tuyaux seront échauffés, l'air, venant à s’y dilater , sera poussé dans l'étuve, et celui du dehors, affluant à son tour dans les tuyaux, établira un courant d’autant plus rapide que la chaleur sera plus grande; et, par ce simple moyen, on pourra , sans une augmentation de dépense en combustible, porter ET D'HISTOIRE NATURPFLLE. 319 porter l'étuve au degré de chaleur suffisant. Comme il im- porte que le courant d'air frappe la surface du sirop, on divisera l'intérieur de l’étuve en plusieurs étages d'environ un mètre de hauteur, construits de manière à ce que le courant d'air chaud, arrivant dans l’étuve par la partie droite de l'étage inférieur, ne trouve d'issue, dans toute la longueur, que par la partie gauche opposée ; qu'arrivé ainsi au second étage par la partie gauche, il ne trouve d'issue , pour arriver au troisième, que par la partie droite opposée, et ainsi de suite jusqu’à la partie supérieure, où sera établi un soupirail destiné à donner issue à l'air saturé d'humidité. Les cristallisoirs seront faits en terre cuite ou en fer- blanc. Les dimensions et la forme de ces vases ne sont point indifférentes à la réussite de la cristallisation. S'ils nt trop de surface et pas assez de profondeur, ‘évaporation se faisant trop promptement, les cristaux n’au- roient pas le temps de se former, et le sirop se réduiroit en un magma qu'il faudroit redissoudre dans l'eau et mettre de nouveau à l'étuve, ce qui augmenteroit les frais de l'opé- ration. Si le défaut contraire avoit lieu, l'évaporation, et par conséquent la cristallisation, exigeroit un temps trop long. Pour mettre à profit tout l’espace possible de l'étuve, on donnera aux cristallisoirs la forme carrée de préférence à la forme ronde qui n'atteindroit pas ce but ,et ils auront environ onze centimètres de haut. Afin qu'ils soient d’un maniement facile, leur grandeur sera telle, qu'ils ne con- tiennent qu'environ 30 kilogrammes de sirop. Ce n'est qu'au bout de six à sept jours que le sirop mis à l étuve commence à donner quelques signes de cristallisation. Il se forme à sa surface une couche de sucre qui va eu augmentant chaque jour, et les parois intérieures des vases s’en tapissent, IL faut avoir soin de briser de temps en temps la couche su- périeure qui sans cette précaution ralentiroit l’'évaporation. L'étuve doit être tenue constamment de 25 à 28 degrés, ther- momètre de Réaumur. Lorsqu'il ne se forme plus de cristaux à la surface du sirop, que ce liquide a perdu la presque-totalité de sa saveursucrée, et qu'il en a acquis une désagréable et salée, la cristalli- sation est terminée , et c'est ce qui a lieu au bout de vingt- cinq à trente jours. On retirera alors les vases de l'étuve, Tome LXXII. MAI an 1811. Yy 350 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE on en détachera avec une spatule en fer les cristaux de sucre adhérens aux parois et au fond, et on versera le tout dans un sac de toile à claire-voie que l'on soumettra à la presse, avec la précaution d'exprimer lentement et par degrés : on retirera du sac la moscouade ou sucre brut, qu'on fera dessécher par un séjour de dix à douze heures à l'étuve. Cette moscouade , dont on brisera les trop gros morceaux, pourra être comparée par sa saveur et sa couleur à la belle cassonade blonde de la Havane, et être employée aux mêmes usages qu'elle : on pourra la livrer dans cet état au commerce ou la raffiner comme celle dela canne à sucre, avec laquelle ellæ est parfaitement identique. Si les mélasses contenoient encore un peu de sucre, on les reporteroit à l’étuve où elles cristalliseroient. Le procédé que nous venons de décrire est celui que nous avons suivi pour extraire la moscouade de 5,000 kilogrammes de betterayes, qui nous ont produit 74 kilogrammes de moscouade. Pour faire connoitre le prix auquel nous sont revenus cette moscouade et le sucre raffiné que nous avons obtenu, nous allons donner le détail de nos dépenses. Dépenses. Nous avons acheté cinq voitures de betteraves qui nous ont coûté pour l'achat, le transport, les faire laver et net- toyer, 175 francs. En cet état, la totalité pesoit 5380 kilo- grammes : 100 kilogrammes nous coûtoient par conséquent 5 fr. 6 cent., et les 5000 kilogrammes. . . . . 153£ oc. Seize journées de femmes, pour râper, à 1 fr: 2Bicent. M ULANEES AR Ar. ae 1nN LU SE 20 Treize journées que l'un ou l’autre de nous a pu employer, pour presser, écumer, cuire et mettre! à l'étuve,'à2 francs .l:%14..61 004026 Vingt pintes de laità o franc 40 centimes . . . 8 Craies eue 0 SUR UNDER LENS AE LO Deux tiers de voie de charbon de terre, à 55 fr. laverie. seu ee rapettss hu sttaretétiéqun bip liant so ki 861166 IOmADI ere ee ra eat 24 ON EMOOIC ET D'HISTOIRE NATURELLE. 357 En divisant cette somme par 74, c’est-à-dire par le nombre de kilogrammes de moscouade obtenu , on voit que le ki- logramme nous est revenu à 3 francs 33 centimes. Nous avons soumis au raffinage 40 kilogrammes de moscouade, qui nous ont donné en sucre de diverses qualités 35 kilo- 1 grammes -“ et 5 kilogrammes - sirop. Cette augmentation 10 de poids provient d’un peu d'eau des terrages. En portant les frais du raffinage et terrage à o franc 25 centimes par kilogramme de moscouade , le sucre raffiné nous revient à 4 francs 4 centimes le kilogramme, prix qui seroit diminué si nous tenions compte du produit de la vente des sirops, mélasses et des marcs. Si l’on considère maintenant que nous avons payé les betteraves trois fois plus cher que si nous les eussions cul- tivées nous-mêmes, que la dépense de la main-d'œuvre sera considérablement diminuée, puisqu'à l'aide des machines on pourra râper et exprimer, on sentira que le prix auquel nous sont revenus la moscouade et le sucre , ne sauroit être pris pour base d'une fabrication en grand; et c’est pour les porter à leur juste valeur que nous croyons devoir établir celui auquel ils pourroient revenir dans une fabrique qui exploiteroit quatre cents arpens de betteraves. Capital nécessaire dans la supposition que l'on cultiveroit soi-méme les quatre cents arpens, et où on seroit obligé de construire la Fabrique. Constructions. Deux hangars pour fabriquer. . . . . . . . . 6,o0of. Fournearietétuves 0. 5uh 0 MINI, SL 060 Sixichandières ti Sem ARTE SE TES50 Deux cylindres. ea Ju eg pe SRE UMR r 800 DenrIpresSs est ME ART PETER UT GO Vases évaporatoires, filtres, écumoires, etc. . 3,000 18,000 Noa [ei] Qt b JOURNÂÀÂL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE D'autre part. 18,000 Culture. Écyerd'anarpent:)| sen MARNE Troisdabonrs?e SCT SORA Semences MER AMANDINE ARE CR Trois sarclages et butages. . . . ....., . . . 36 Pour arracher et mettre en magasin. . . . . . . . 40 À déduire pour le produit des feuilles. . . : . . . 20 Quatre cents arpens à raison de 164 fr.. s'élèvent à... . 56,600 Total ducapirel 2 aG 5 Sur la manche du bras gauche. 57.31.59 | 73.59.18 | 9 | 50 | Double. 57.53.45 | 70.37.34 7 | 51 | Près de la main gauche. Go.21. 9! 78.21.37 8 | 52 | Près du manche de la pique. Gr1.31. 7 | 57. 7.47 [8àol 53 | Placée surlenez. 61.48. 9| 71.57.26 6 | 54 | Au coude du bras gauche. Gr.51: 9| 79. 5.53 L 55 | Près du manche de Ja pique. 63.45.26| 50.32. 8 8 | 56 | Placée sur le col. 64. 8. 9| 75.29. 9 5 | 57 | Placée sur l'épaule gauche. 64.25.41 | 77. 7.14 9 | 58 | Placée sur le nez. 64.50.12 | #80. 43. 54 15à6| 59 | Ancienne d’Hévelius, sous le fer de la pique. 65.54. 9] 77-54-40 8 | 60 | Placée sur le nez. 67.55. 9| 73.50.56 |5à6| Gr | Derrière le bras gauche. 68. 49. Oo, 73.52.37 5 | 6a | Derrière le même bras. 68.49.45| 93.53.19 |5à6| 63 | Derrière le même bras. 70.13. 54 76. 4.27 7 | 64 | A gauche près de la tête. 70.28.54 | 73.35. 4 |4à5| 65 | A la gauche du bras gauche. 71.30.41 | 78.43.21 9 66 | Sur le chapeau. 71.41.26 | 98.53.25 |5à61 67 | Ancienne d’Hévelius, au haut du chapeau. 72.56. 77.56.44 | 8 | 68 | Surle chapeau. 72.58 13 72.92. 1 4 | 69 | A gauche di s gauche. 73-13: 9 [M97.87: 7 7 | 90 | Sur le chapeau. On ne sera point fâché de trouver ici au sujet dela mention de cette constellation nouvelle, un distique du célèbre abbé Boscovich, ami de M. Messier , et qui cultivoit avec égal succès les sciences mathématiques et la poésie latine. Sidera, non messes, Messerius iste tuetur, Certe erat ille suo dignus inesse polo. * Ces vers furent traduits en 1784, ainsi qu'il suit, par M. de Chevance, curé d’Anglure, qui vit encore, et dont la paroisse étoit dans le voisinage dela terre de M. le Président de Saron. Pourquoi ces vaines fictions? C’est bien aux constellations Que ce nouveau Msssrer préside, Et par ses travaux précieux , Puisqu’il s’appropria les cieux, Il est de droit qu’il y réside. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 393 On doit au même ecclésiastique les vers latins suivant, sur le même sujet. A M. MESSIER, Mis au rang des Constellations, Qui mortalis erat celeber Messerius olim, Sidera pervolvens scrutansque arcana deorum, Nunc superum jussu sidus et ipse micat, Terra quidern tantis arctior illa viris. MÉMOIRE SUR DE NOUVEAUX PHÉNOMÈNES D’OPTIQUE, Lu à la Séance de la première Classe de l'Institut; Par M. MALUS, l'un de ses Membres, le 11 mars 1811. J'Ar annoncé à la fin de 1808, que la lumière réfléchie par tous les corps opaques ou diaphanes, contractoit de nouvelles propriétés très-extraordinaires, et qui la distin- guoient essentiellement de la lumière que nous transmettent directement les corps lumineux. Les observations que je vais avoir l'honneur de rapporter à la Classe, sont une suite de celles que je lui ai commu- niquées. Je vais donc commencer par rappeler en peu de mots le phénomène principal, afin de jeter plus de jour sur les nouvelles expériences et les nouveaux résultats dont je vais rendre compte. Dirigeons au moyen d'un héliostat un rayon solaire dans le plan du méridien , de manière à ce quil fasse avec l'horizon un angle de 19° 10‘. Fixons ensuite une glace non étamée, de manière à ce qu’elle ré- fléchisse ce rayon verticalement, et de haut en bas. Si l'on place au-dessous de cette première glace et parallèlement à elle une seconde glace, celle-ci fera, avec le rayon descendant, 394 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un angle de 35° 25’, et elle le réfléchira de nouveau paral- lèlement à sa première direction. Dans ce cas, on n observera rien de remarquable; mais si on fait tourner cette seconde glace de manière à ce que sa face soit dirigée vers l'est ou vers l'ouest, sans changer d'ailleurs son inclinaison par rapport à la direction du rayon vertical, elle ne réfléchira plus une seule molécule de lumière, ni à sa première, ni à sa seconde surface. Si en continuant à lui conserver la même inclinaison par rapport au rayon vertical, on tourne sa face vers le sud, elle commencera de nouveau à réfléchir la proportion ordinaire de lumière incidente. Dans les po- sitions intermédiaires, la réflexion sera plus ou moins com- plète selon que le rayon réfléchi s’approchera plus ou moins du plan du méridien. Dans ces circonstances où le rayon réfléchi se comporte d'une manière si différente, ii conserve néanmoins constamment la même inclinaison, par rapport au rayon incident. Nous voyons donc ici un rayon de lumière vertical qui, tombant sur un corps diaphane, se comporte de la même manière lorsque sa face réfléchissante est tournée vers le nord et vers le sud, et d'une manière dif- férente lorsque cette face est tournée vers l'est ou vers l'ouest, quoique d'ailleurs ces faces forment constamment avec la direction verticale de ce rayon, un angle de 35° 25. Ces observations nous portent à conclure que la lumière acquiert, dans ces circonstances, des propriétés indépen- dantes de sa direction, par rapport à la surface qui la ré- fléchit, mais relatives uniquement aux côtés du rayon vertical, et qui sont les mêmes pour les côtés sud et nord, et diffé- rentes pour les côtés est et ouest. En donnant à ces côtés le nom de rôLes, j'appellerai rorarisATiox la modification qui donne à la lumière des propriétés relatives à ces pôles. J'ai tardé jusqu'à présent à admettre ce terme dans la des- cription des phénomènes physiques dont il est question : je n'ai pas osé l’introduire dans les Mémoires où j'ai publié mes premières expériences; mais les variétés qu'offre ce nou- veau genre de phénomènes et la difficulté de les décrire, me forcent à admettre cette nouvelle expression, qui signifie simplement la modification que la lumière a subie en ac- quérant de nouvelles propriétés qui ne sont pas relatives à la direction du rayon, mais seulement à ses côtés con- sidérés à angles droits, et dans un plan perpendiculaire à sa direction. U ET D'HISTOIRE NATURELLE. 395 Je passe actuellement à la description du phénomène qui fait l'objet de ce Mémoire. Considérons de nouveau l'appareil dont je viens de parler. Si on présente au rayon solaire qui a traversé la première glace, et dont une partie a été réfléchie, un miroir étamé qui le réfléchisse de haut en bas, on obtient un second rayon vertical, qui a des propriétés analogues à celles du premier, mais dans un sens directement opposé. Si on présente à ce rayon une glace formant avec sa direction un angle de 35° 25’: etsi, sans changer cette inclinaison, on fait tourner alternativement ses faces vers le nord et l'est, le sud et l'ouest, on remarquera les phé- nomènes suivans. Il y aura toujours une certaine quantité de lumière réfléchie par la seconde glace; mais cette quantité sera beaucoup moindre , lorsque Îles faces seront tournées vers le sud et le nord, que lorsqu'elles seront tournées vers l’est et vers l'ouest. Dans le premier rayon vertical on ob- servoit exactement le contraire. Le minimum de lumière réfléchie avoit lieu lorsque la seconde glace étoit tournée vers l’est et vers l'ouest. Ainsi, en faisant abstraction dans le rayon de la quantité de lumière qui se comporte comme un rayon ordinaire, et qui se réfléchit également dans les deux sens. On voit que ce rayon contient une autre portion de lumière , qui est polarisée exactement dans le sens con- traire à celle du rayon vertical réfléchi par la première glace. Je n'emploie dans cette expérience un miroir étamé, que pour disposer les deux rayons parallèlement, et dans les mêmes circonstances , afin de rendre l'explication plus claire. L'action des surfaces métalliques étant très-foible , relative- ment à la polarisation du rayon direct, on peut négliger leur influence. Ce phénomène seréduiten dernièreanalyse à ceci. Lorsqu'un rayon de lumière tombe sur une glace de verre, en formant avec elle une incidence de 35° 25°, toute la lumière qu'elle réfléchit est polarisée dans un sens. La lumière qui traverse la glace est composée, 1° d'une quantité de lumière pola- risée dans le sens. contraire à celle qui a été réfléchie, et proportionnelle à cette quantité; 2° d'une autre portion non modifiée, et qui conserve les caractères de la lumière directe. Ces rayons polarisés ont exactement toutes les propriétés de ceux qu'on a modifiés par les cristaux qui donnent la double réfraction : ainsi ce que j'ai dit ailleurs de ceux-ci peut s'appliquer sans restriction aux premiers. 306 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Voiciactuellement les résultats généraux qu’on peut déduire des expériences que je viens de rapporter, et qui s'ajoutent à ceux que j'ai déjà publiés sur cette matière. Toutes les fois qu’on produit d'une manière quelconque un rayon polarisé, on obtient nécessairement un second rayon polarisé dans un sens diamétralement opposé, et ces rayons suivent des routes différentes, La lumière ne peut pas recevoir cette modification dans un sens, sans qu’une partie proportionnelle ne la reçoive dans le sens contraire. L'observation curieuse que M. Arago a rapportée derniè- rement à la Classe , sembleroit seule, au premier coup d'œil, faire exception au cas général. Il a remarqué que les anneaux colorés par transmission , présentoient le phénomène de la polarisation , et dans ce cas-ci les bandes les plus tranchantes semblent être polarisées dans le même sens que la lumière réfléchie; mais en songeant aux causes de ce phénomène, on s’apperçoitqu'il n'est pasune exception à la loi générale. Tous les corps opaques ou diaphanes polarisent la lu- mière sous tous les angles, quoique pour chacun d’eux ce phénomène soit au maximum sous un angle particulier. On peut donc dire, en général, que toute la lumière qui & éprouvé l'action d'un corps par réflexion ou par réfraction, contient des rayons polartisés , dont les pôles sont déterminés relativement au plan de réflexion ou de réfraction. Cette lumière a des propriétés et des caractères que n’a pas celle qui nous parvient directement des corps lumineux. J'ai soumis à la même épreuve les bandes colorées formées par la dispersion de la lumière, lorsqu'elle passe três- près des corps opaques; mais je n'ai encore fait sur cet objet aucune remarque qui soit digne d'être rapportée à la Classe. Je vais ajouter à ces observations les résultats de quelques recherches que j'ai annoncées précédemment sur ce sujet. J'ai déterminé sur beaucoup de substances l'angle de ré- flexion sous lequel la lumière incidente est le plus complé- tement polarisée, et j'ai reconnu que cet angle ne suit ni l’ordre des puissances réfractives, ni celui des forces dis- persives. C'est une propriété des corps indépendante des autres modes d'action qu'ils exercent sur la lumière. Après avoir reconnu l'angle sous lequel ce phénomène a lieu pour différens corps, pour l'eau et le verre, par exemple, j'ai cherché celui pour lequel le même phénomène auroit lieu à leur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 397 & leur surface de séparation lorsqu'ils sont en confact; mais ‘il reste à déterminer la loi suivant laquelle ce dernier angle dépend des deux premiers. J'ai publié , ilya unan, dans les Mémorres de la Société d'Arcueil, qu'après avoir modifié un rayon solaire, je le faisois passer à travers un nombre quelconque de substances diaphanes, sans qu'aucune de ces molécules füt réfléchie, ce qui me donnoit un moyen de mesurer avec exactitude la quantité de lumière que ces corps absorbent, problème que la réflexion partielle rendoit impossible à résoudre. Effectivement , en plaçant sur la direction d’un rayon po- larisé une pile de glaces parallèles, et formant avec lui un angle de 35° 25, j'avois observé que ce rayon ne produisoit de lumière réfléchie sur aucune d'elles, et j'en avois conclu que la lumière qui auroit été réfléchie en employant un rayon ordinaire, traverseroit dans ce-cas ci la série des corps diaphanes. Un physicien étranger, en rapportant mon expérience, observe qu il ne pense pas, comme moi, que la lumière modifiée soit transmise par les surfaces, lorsqu'elle n’est pas réfléchie, et qu’il est plus disposé à croire que dans ce cas-ci*la portion qui se réfléchit ordinairement, est entièrement absorbée ou détruite. J'ai résolu cettequestion d’une manière incontestable, par l’expérience suivante. Je fais tourner le rayon incident sur lui-même, sans le changer de place, et en lui consent la même position par rapport à la pile. Quand il a fait quart de circonférence, il est totalement réfléchi par l'action successive des glaces, et il cesse d'être apperçu à l'extrémité de la pile; enfin, après une demi-révolution sur lui-même, il commence à la tra- verser de nouveau. Cette expérience présente le singulier phénomène d'un corps qui paroît tantôt diaphane, tantôt opaque , en recevant non-seulement la même quantité de lumière, mais encore le même rayon, et sous une même inclinaison. Je n'ai pas besoin d'observer que pour faire tourner un rayon polarisé sur lui-même, j'emploie un rayon formé par Ja réfraction ordinaire d'un cristal d'Islande , dont les faces sont parallèles entre elles, et perpendiculaires à la direction du rayon. C’est en faisant tourner ces faces dans leur propre plan que je change la position des pôles du rayon sans faire varier sa direction, ni son intensité. Tome LXXII MAI an 1811. Eca -398 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Je n'entrerai pas dans le détail des conséquences qu'on -peut déduire de ce que je viens d'exposer. Tout ce que je pourrai ajouter sur cette matière ne seroit qu’une répétition des mêmes faits présentés d'une manière différente. te nn << 4 | LETTRE DE M. AUBERT DU PETIT-THOUARS, À J.-C. DELAMÉTHERIE, SUR LES BOURGEONS. MoNsiEUR, Dsruis que vous rédigez le Journal de Physique, je me suis toujours empressé de le lire à mesure qu'il a paru, et surtout le tableau des connoissances annuellés que vous produisez chaque année ; mais je vous ayouerai que j'ai été étonné l'année dernière , que vous n'ayez fait aucune mention de mes Æssais sur la végétatiom® Je comptois cependant sur l'amour de la vérité que vous prôfessez si hautement, pour les tirer de l'oubli où l’on voudroit les plonger, de plus sur votre franchise, pour voir enfin une opinion énoncée à leur sujet : c’est en vain que je le demande depuis cinq ans. Cette année, vous avez gardé le même silence, cependant vous m'avez nommé, mais c'est d’une manière très-défavo- rable , puisque, d’un côté, vous me présentez comme repro- duisant seulement l’opinion d'un autre, et que de l’autre vous regardez cette opinion comme non prouvée. Ceci me rappelle la sentence que me prononça celui qu’on veut faire passer pour l’oracle de la.Physiologie végétale en France, M. de Mirbel: ayant entendu lire la première exposition de mes idées à ce sujet, il me dit: votre système est faux et n'est pas neuf, et me tourna les talons. Je suis loin de penser que vous ayez été entrainé dans cette conformité par les mêmes motifs. Votre caractère m'est trop connu pour que je puisse vous soupçonner de malyeillance à mon égard; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 399. ensorte que je ne doute pas que vous n'insériez dans votre Journal, la réponse que je vais faire à la difficulté que vous présentez, et elle est faite depuis long-temps, puisque. je la copie littéralement de mon quatrième Essai qui a été lu à la première Classe de l’Institut, le 20 octobre 1806, C’est une des premières observations qui m'aient été faites ,. et certainement je n y avois pas pensé auparavant ,'et cepen- dant ellene m'a pas coûté beaucoup de réflexions, puisqu'elle, n'a été qu'une conséquence.des principes que j'avois posés. Je vais commencer par transcrire votre passage. æ On a fait à cette partie du système de Darwin (que les: fibres corticales n'étoient que les tiges et les racines des nouveaux bourgeons), laquelle avoit été reproduite: par Aubert du Petit-Thouars, une objection à laquelle il ne paroît pas qu'on ait donné de réponses satisfaisantes. Si ces bourgeons, a-t-on dit, prolongeoient leurs racines le long de la tige de l'arbre, de manière qu’en s’entre-mélant en- semble, elles formassent l'écorce et qu'en se juxta-posant chaque année , elles devinssent le bois, il s’ensuivroit que dans un arbre greffé les bourgeons qui naîtroient au-dessous de la greffe seroient de la même nature que ceux qui sont au-dessus de la même greffe, ce qui n'est pas: car ceux qui naissent au-dessous conservent tous les caractères de l'arbre sauvageon qui a été greffé, et donnent des branches et du bois analogues à celle du sauvageon (Ier Cahier 1811, page 25). » Voilà donc l’objection, et qui n’est pas dans toutesa force, car on ne parle ici que des bourgeons qui se développent sur le corps du sauvageon; or, suivant moi, ils ont été formés la première année de la formation de la tige, leur végétation n’est que suspendue, ensorte que lorsque par quelque circonstance elle est réveillée, il ne me paroit pas étonnant qu'ils reproduisent le sauvageon ; mais on va voir des circonstances qui la rendent plus difficile à comprendre. « 1. J'ai considéré dans mes premiers essais la végéta- tion dans le cours ordinaire de, la nature. Voyons main- tenant ce quil arrive quand elle est contrariée. Quoique ce soit le plus souvent la main de l’homme qui lui fasse violence, et que par conséquent ce soit l'effet de L’anT, les lois éternelles qui la dirigent ne sont point anéanties, seulement elles prennent une autre direction. Eee 2 400 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE » Lorsque l’écorce est encore détachée du bois, que j'en enlève un lambeau sur lequel se trouve un bouton ou bour- geon, cette écorce cède sans résistance, mais la base ligneuse du bourgeon se déchire ; par là la communication établie avec la racine est détruite; 2° ce sont les fibres formant un faisceau à la base qui l’établissent. Jai fait voir que chacune d’elles avoit une extrémité aérienne ou foliacée, et une autre ra- dicale ou terrestre : il ne me reste donc plus que l'extrémité aérienne. Si je fends convenablement l’écorce d'un autre arbre assez jeune pour qu'elle ne soit pas déjà trop épaisse, que j'introduise le bourgeon détaché, diminué le plus pos- sible de l’écorce environnante , de manière à ce que la base déchirée touche immédiatement le cylindre ligneux du petit arbre, et qu'il y soit assujetti de manière à le presser et à. ne pas se déranger, les lambeaux des fibres de ce bourgeon setrouvent donc appliqués contre d’autres fibres descendantes jusqu'aux racines : pouvant à travers les pores leur enlever les sucs qu'elles en apportent, elles retrouvent leur seconde extrémité terrestre. La communication s'établit plus vite quand le sommet du petit arbre est coupé, car le bourgeon. recueille, pour ainsi dire, une suceession et se met à la place de ceux qui sont retranchés, ou plutôt il se fait un échange également avantageux aux deux parties. » Je ne parle ici que de la greffe en écusson ou inocu- lation , et on en distingue deux espèces principales, à œil poussant ou à œil dormant. La première se fait au printemps, l'autre se pratique vers la fin de l’été. Dans le premier cas, le bourgeon pousse tout de suite, dans l’autre, ce n’est qu'au printemps suivant. Ce n'est que la première qui profite des fibres précédemment formées sur le sujet; car dans l’autre elle s’en reforme directement aux dépens du cambium sur- abondant. » Par ce moyen, ce bourgeon retrouvant une position semblable à celle qu'il avoit sur son propre trone, fait une évolution semblable ; sa pousse s'alonge, les feuilles se dé- veloppent, les seconds bourgeons qui naissent dans leurs aisselles , reçoivent à l'ordinaire leur première existence du suc parenchimateux coulant dans leur moëlle; ils cherchent ensuite à établir leur communication radicale par des fibres ligneuses; sur la pousse même, ils tirent la matière de leur accroissement de son propre cambium ; mais arrivées sur ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 l'ancien bois du petit arbre, elles y trouvent celui que ses fibres ont préparé, elles s'en emparent. Mais ici se présente quelque chose de particulier et digne de remarque. ( Voila l'objection. ) Si l'on a pris le bourgeon ou la greffe sur une espèce d’arbre et qu'on l'ait appliqué sur une autre diffé- rente, et que leur bois présente des différences remarquables dans la couleur, sic'est, par exemple, un Æmandier dont le bois est jaune, que l'on applique, ou, pour mieux dire, que l'on greffe sur un Prunier qui l'a rouge, il arrive que les fibres sont jaunes sur la nouvelle pousse, et rouges sur le prunier; mais malgré cette différence de couleur, ces fibres sont manifestement d’une seule pièce et d’un seul jet. (foyez Duhamel, Physique des Arbres.) » Cela estainsi, parce que ce cambium n’est pas un aliment comparable à la matière que l’on peut nommer première sous un certain rapport, et que puisent les racines directement dans le sein de la terre, car celle-ci est déjà élaborée, elle est, pour ainsi dire, végétalisée et prunifiée. C'est donc dans cet état que les fibres les rencontrent sur leur passage et se l'approprient. J'ai dit qu’elles s’y filoient (1tr Essai, art. 9); ainsi, pour faire cette comparaison; un fil peut étre suctessivement sans discontinuité, de chanvre, ensuite de Coton, suivant que l'on présentera ces matières au rouet, La sous-organisation vient bien du bourgeon, mais elle est obligée d'employer la matière qui lui est présentée. » Comme on peut avoir deux et trois espèces d'arbres greffés successivement l’un sur l’autre, leurs fibres sont alors de deux et trois natures différentes. Darwin, auteur anglais, célèbre comme poëte et comme physiologiste, les regarde comme de triples hybrides ou mulets (voyez Phytologia, section 7, paragraphe 3, art 2).» Telle est donc la réponse que j'ai faite à cette difficulté, elle me paroît péremptoire; mais je suis loin de penser que tout le monde la trouvera de méme: du moins, sion attaque mon opinion, on doit tenir compte de cette réponse et en démontrer la foiblesse. Vous voyez par ma dernière note, que peut-être seul parmi tous nos physiologistes français, j'avois pris connois- sance de Darwin; j'avouerai que lorsque sa Phytologie m'est tombée entre les mains , il y a quatre ans, j'ai été frappé dela quantité d'observations et d'idées nouvelles qui y étoient 402 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE répandues : j'étois prêt, comme La Fontaine, à demander à un chacun , avez-vous lu Darwin? J'aurois voulu en faire une traduction complète, mais le temps me manquant, je me bornai à esquisser celle de la première section, et j'en- gageai quelqu'un de ma connoissance à l’entreprendre: j’en avois déjà fait le tiers; mais l'ouvrage original m’ayantété rede- mandé par {celui qui me l'avoit prêté, il a été obligé d'en rester là, heureusement, puisque la traduction que vous annoncez eût rendu son travail inutile, quoiqu'il eût été parfaitement exécuté. Depuis, toutes les fois que l’occasion s'en est présentée, je me suis empressé de rendre justice à cet auteur et de faire connoitre les points où il m'a devancé, témoin ce nouveau passage. « C'est donc ce bourgeon.en qui réside toute l'énergie végétale ; aussi le regarde-t-on depuis long-temps comme un individu (Linné, entreautres). Darwin, célèbreauteur anglais, commence sa Phytologie par établir cette individualité, en- sorte qu’il regarde un arbre comme un essaim de plantes individuelles. » Enfin, dans le treizième essai que j'ai publié cette année, voici la manière dont je m'exprime. « Un Anglais justement célèbre pour avoir, comme poëte, prêté des charmes à la botanique, Darwin, après avoir: publié une Physiologie animale, sous le titre de Zoonomie, en a donné une végétale sous celui de PAytologie. C'est un des ouvrages les plus remarquables qui aient été publiés depuis long-temps sur cette partie de la science, et je suis bien étonné qu'on n'en ait pas encore donné une traduction. » Il contient grand nombre de faits très-curieux, les uns recueillis dans des auteurs anglais que nous ne connoissons as, les autres appartiennent à Darwin lui-même, étant e fruit de ses propres observations. » Suivant lui, la végétation consiste dans le développement des bourgeons; chacun d'eux est une nouvelle plante sup- portée par les anciennes (c'est l’idée de Linné)}; la nouvelle couche intérieure de l'écorce ( par conséquent le liber, quoi-. qu'il ne lui donne pas ce nom) est analogue au caudex ou tigelle qui réunit la plumule à la radicule. De cette idée si simple dans le fond , il tire des apperçus lumineux, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 403 mais bientôt il abandonne une route aussi neuve, pour rentrer dans le sentier battu, en disant que la couche de l'année précédente se détache pour former une nouvelle couche d'aubier ou de sap wood, bois à sève, comme le nom- ment les Anglais, » Ensorte qu'il adopte dans toute son étendue, l'opinion de Malpighi et de Linné, la conversion du liber en bois, Sans en fournir de nouvelles preuves. « L'écorce (dit-il) forme une enveloppe plus ou moins » épaisse à la superficie. Cette enveloppe est composée elle- » même de tissu herbacé , qui est la couche la plus exté- » rieure des couches corticales qui viennent ensuite, et du » liber qui est appliqué immédiatement sur le corps ligneux. » Ilest facile de séparer l'écorce du reste du végétal. » (f’oyez . XIIIe Essai sur la Végétation, pag. 16 et 17. Par ce dernier passage, j'établis la différence qui existe -entre ma manière de voir et celle de Darwin, c'est qu'il pensoit avec tous les auteurs précédens, que le boisse formoit par l'addition du liber ou de la couche intérieure de l’écorce. Dans beaucoup d'autres occasions je ne suis pas d'accord avec lui sur les conséquences qu’il tire, mais je lesuis presque toujours sur les faits; ensorte que si je me fusse mêlé de sa traduction, j'aurois, à la suite de chaque section , présenté la comparaison de sa manière de voir et de la mienne, et cela de la manière la plus impartiale qui m’eût été - possible : je crois que la source de notre différence vient . du point de vue que nous avons choisi. Darwin venant, dans sa Zoonomie, d'exposer la Physiologie animale , a été naturellement disposé à traiter la végétale comme une suite de la précédente , tandis que moi, je pense que si celle-ci n'a pas fait beaucoup de progrès depuis les travaux de Grew, Malpighi et Hales, c'est qu’on a pris trop à tâche de calquer les deux l’une sur l'autre. Si je trouve le même point de dissidence entre nous deux, et je vous l'avoue fran- chement , remarquez bien que je suis loin de nier qu’il y ait de l’analogie entre les deux règnes, je crois au con- traire qu’il en existe une très-grande, mais tellement mo- difiée, que nous ne sommes pas assez avancés pour la saisir sous tous ses rapports. J'ai ouvert une galerie de mine dans une montagne pour parvenir à son centre; d'autres en ont ouvert à l'opposé pour parvenir au même but: si aucun de nous ne se trompe, nous devons finir par nous rencontrer, 404 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ce treizième essai que je vous adresse avec le recueil dont il Fait partie, contient l’examen de deux opinions extraites de mon système, et que je regarde comme les plus con- traires aux idées reçues, qui sont par conséquent des para- doxes, dans le sens propre de ce mot. La première , que la moëlle une fois formée n'éprouvoit pas de diminution par la suite, ensorte qu’elle existoit dans le plus vieux tronc de même diamètre que dans la branche de l’ancien. La seconde, que les deux nouvelles couches de liber et de bois se formant tous les ans simultanément, elles ne pouvoient naître l’une de l'autre. Vous verrez, parle rapport des Commissaires de la première Classe de l'Institut, qu'ils n'ont pu se refuser à l’évidence de la première; mais que pour la seconde ils ont trouvé le moyen d’éluder une décision, quoiqu'’ils m’aient paru con- vaincus dans leur intérieur, que j’avois raison; mais ils ont remarqué que dans ces deux propositions je n'avois fait que confirmer les découvertesde sir Knight. Je n'ai jamais eu la pré- tention de dire des choses neuves, je n’ai eu que celle d'avoir fait des études d'après nature; je finirai en répétant ce que j'ai dit dans mon huitième essai : c’est ainsi que l'on avoit dit avant Copernic, que la terre tournoit autour du soleil; mais pour avoir rendu cette vérité palpable aux esprits dé- gagés de prévention, le nom de cet astronome est resté attaché à ce système. Dans la nature les extrêmes se touchent, on peut comparer les plus petites choses aux plus grandes ; j'espère qu'avant peu on regardera comme aussi absurde de dire que le liber se change en bois, que de soutenir que c'est le soleil qui tourne autour de la terre. NOUVELLES ET D'HISTOIRE NATURELLE. 405 NOUVELLES LITTÉRAIRES. Des Erreurs et des Préjugés répandus dans la Socrécë, par J. B. Salgues; avec cette épigraphe: Bene adhibita ratio cernit quid optimum sit; Neglecta, mulris implicatur erroribus. Cic. Tuscul, Tome premier , de 580 pages in-8°, seconde Édition, revue et corrigée. Prix 6 francs broché, et 7 francs 80 cent. franc de port par la Poste. A Paris, chez Æ. Buisson, Libraire, rue Git-le-Cœur, n° 10. Le tome second du même Ouvrage, se vend 5 fr. broché, et 6 fr. 60 cent. franc de port. L'accueil que le public a fait à cet Ouvrage, a obligé l'auteur d’en donner une seconde édition revue et corrigée. Corriger les erreurs et les préjugés répandus dans la Société, est une tâche difficile, ou plutôt impossible à remplir. Une erreur, un préjugé détruits font ordinairement place à d’autres erreurs, à d'autres préjugés souvent plus nüisibles que les premiers. La seule jeunesse qui a été élevée dans les principes du juste et de l'honnéte, est indignée de ce qu'elle voit se passer journellement dans la société; son jeune cœur en desire vivement la réforme, et elle emploie toute son activité et toute son énergie à tonner contre des actions si coupables, et dont la réforme lui paroît si facile; mais, hélas! à mesure qu'elle avance en âge , elle voit bientôt que ce sont des rêves d'une belle ame, et que... Encourageons néanmoins ces généreux efforts : que les ames honnêtes continuent de chercher à détruire les erreurs et les préjugés, qu'elles ramènent à la vertu, principalement par leurs exemples; qu'on ne puisse pas leur faire les re- proches faits à Sénèque et qu'il avoit mérités si justement, qu'après avoir déclamé contre l'abus des richesses, des hon- neurs, des priviléges, des distinctions...., il fut ensuite des premiers à chercher, ces richesses, ces honneurs, ces de ces priviléges....; elles auront rempli leur tâche... Tome LXXII., MAI an 1811. FES 406 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Bulletin de la Société d'encouragement pour l'industrie nationale, publié avec l’approbation de S. Exc. le Ministre de l’intérieur. Neuvième année. Un vol. in-4°. A Paris, de l'Imprimerie de Mad. Huzard, rue de l'Eperon Saint-André-des-Ares, n°7. Ce Bulletin qui est composé déjà de neuf volumes in-4°, contient la plus grande partie des découvertes qui ont été faites dans les arts depuis plusieurs années. Ces découvertes doivent d'autant plus intéresser, qu'elles sont en général : fondées sur les principes les plus sains de la Physique et te ia Chimie, parce qu'aujourd'hui ce sont le plus souvent dés personnes instruites dans ces sciences qui sont à la tête des manufactures. Mélanges de Botanique et de Voyages, par Aubert du Petit-Thouars, Directeur dela Pépinière impériale du Roule, Membre des Sociétés d'Agriculture et Philomatique de Paris, et de l'Académie Phytologique de Gorenki , avec une Carte et 18 Planches, Premier Recueil. Un vol. in-8°. A Paris, chez Ærthus Bertrand, Libraire, rue Hautefeuille, n° 23. Ce volume ëst composé de plusieurs morceaux détachés dans lesquels on reconnoit toujours le savant botaniste et le bon observateur. Dictionnaire de Chimie, par MM. M. H. Klaproth, Pro- fesseur de Chimie, Membre de l’Académie des Sciences de Berlin, Associé étranger de l'Institut de France, etc.; et F. Wolff, Docteur en Philosophie, Professeur au Gymnase de Joachimstal. Traduit de l'Allemand avec des Notes, par E. J. B. Bouillon-Lagrange , Docteur en Médecine, Pro- fesseur au Lycée Napoléon et à l'Ecole de Pharmacie, Membre du Jury d’Instruction de l'Ecole Vétérinaire d'Alfort, de plusieurs Sociétés savantes Françaises et Etrangères; et par H. A. Vogel, Pharmacien de l’Ecole de Paris, Préparateur général à la même Ecole, Conservateur du Cabinet de Phy- sique au Lycée Napoléon , et Membre de plusieurs Sociétés savantes. Tome IV* et dernier, in-8° de 600 pages , imprimées sur caractères neufs de Philosophie, et papier carré fin d'Au- vergne. Prix 7 fr. broché, et 8 fr. 75 cent, franc de port. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 L'Ouvrage complet en IV volumes, 25 fr., et 32 fr. francs de port. À Paris, chez J. Klostermann fils, Libraire-Fditeur des Annales de Chimie, rue du Jardinet, n° 13. Voici le dernier volume de ce savant et utile Ouvrage qui manquoit en France, et que nous devons au zèle des tra- ducteurs pour enrichir notre langue. Ils ont mis à la fin de celui-ci des corrections et des additions. Ces additions renferment principalement les découvertes faites depuis l’im- pression du travail de Klaproth et de Wolff. Des Révolutions du Globe, conjecture formée d'après les découvertes de Lavoisier, sur la décomposition et la recom- sition de l’eau; par M. Morel de V'indé, troisième édition augmentée de piusieurs Notes nouvelles. Brochure in-8:, Prix à fr., et 1 fr. 15 cent. franc de port. Paris 1811. De l'Imprimerie et dans la Librairie de Mad, Auzard, née Vallat la Chapelle , rue de l'Eperon Saint-André-des-Arcs, n° 7, IVe Cahier de la quatrième Souscription , ou XL de la Cellection des Annales des: eyages, de la Géographieetde l'Histoire, publiées par M. Malte- Brun. Ce Cahier contient une Gravure, avec les articles suivans: Notice sur la ville etle gouvernement de T'ombuctoo ; traduit de l'anglais; — Mémoire sur Pompeiopolis où Tasch-Kouprou, avec quelques remarques sur T'ovata ou Voyavat, lu à la troisième Classe de l'Institut ; par M. P. 7. F...., Consul général de France; — Fragmens sur Madagascar, extraits des papiers de feu M. Chapelier, voyageur du Gouvernement français dans cette île ; — Nouveaux renseignemens sur les opérations militaires des Wahabis ;— Voyage de découvertes autour du monde, exécuté par ordre de l’empereur de Russie, ar M. de Xrusenstern: et les articles du bulletin. V£et VI® Cahiers de la quatrieme Souscription, ou XLI® et XLII° de la Col- Jection des Annales .des Foyages , de la Géograplieet de l'Histoire , publiées par M. Malie-Brun. Ces deux Cahiers contiennent deux Planches grayées en taille-douce , dont une coloniée, avec les articles suivans : Description de la ville de Stabræk , dans la Guyane, traduite de l’anglais par Madame Bol}y; — Notice historique sur Aboul-Fédä et ses Ouvrages, par M. 4m. Jourdain; — Sur le Tatouage en général, et particulierement sur celui des Insulaires de Noukahiva;—Mémoire sur les Ismaélis et les Nosairis de Syrie, adressé à M. Silyestre de Sacy par M. Rousseau , Consul - Général de France à Alep;— Surune coutume de Madagascar, dont parle Flacourt; par M. E. Colin, de l'Ile-de-France ;—Description des Montagnes de Tingar , dans l'Ile de Java; par M. Leschenault de La Tour; — Détails sur l’état actuel de la Chine , extraits du Voyage autour du Monde, par M. de Krusenstern; — Extraits de la Relation du Maroc, par M. Jackson, de la Relation de lord f’alentia et d’autres Ou- vrages. — Lettre sur une nouvelle Carte de la Principauté de Neufchätel , par M. d'Osterwald; — Réponse à la Diatribe de J, G. Dentu. Chaque mois, depuis le 1er septembre 1807, il paroît un Cahier de cet Ouvrage, de 128 ou 144 pages in-8°, accompagné d’une Estampe ou d’une Carte géographique quelquefois coloriée, 408 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, etc. Les première , deuxième et troisieme Souscriptions (formant 12 vol. in-8° avec 36 Cartes ou Gravures) sont complètes, et coûtent chacune 27 fr. pour Paris , et 53 fr. par la Poste franches de port. Les personnes qui souscrivent en même temps pour les quatre Souscriptions , payent les trois premières 3 fr. de moins chacune. < Le prix de l’ Abonnement pour la quatrieme Souscription est de 27 fr. pour Paris, pour 12 Cahiers. Pour les Départemens, le prix est de 53 fr. pour 12 Cohiers rendus francs de port par la Poste. L'argent et la lettre d’avis doivent être af/ranchis etadressés à Fr. Buisson, Libraire-Editeur, rue Git-le-Cœur , n° 10, à Paris. A BE E DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Mémoire sur l'extraction en grand du Sucre des Bette- raves, et quelques considérations sur leur culture; par MM. Barruel et Maximin Isnard. Pag. 34t Tableau Météorologique , par M. Bouvard, 396 Mémoire sur quelques-unes des combinaisons du Gaz oxi-muriatique et de l'oxigène, et sur les rapports chi- miques de ces principes avec les corps inflammables; par Humphry Davy, lu devant la Société royale, le 15 novembre 1810. 358 Notice sur une nouvelle Constellation créée dans le ciel par M, de Lalande, en 1774, sous le nom de messier, custos messium, à l'occasion de la comète qui parut près du péleboréal, observée cette année par M. Messier. 387 Mémoire sur de nouveaux Phénomènes d'optique, lu & la Séance de la première Classe de l'Institut, par M. Malus. 393 Lettre de M. Aubert du Petit-Thouars, à J.-C. Dela- mnétherie, sur les Bourgeons. 39 Nouvelles Littéraires. 405 SES RG SARL Et à nd —— e à à ST _— SE ss Li Z # } à = +: NS Ls 084 5% 4o 45 æ =‘ ji Grave d'après Le dessin de M. Mersier . Grandeur des Etoiles 25 Jo 35 LE ZX 27] PARU A ÉTAT 1 22 CONSTELLATION 20 Jeurn de L’hys. SEE pe FM SFA SET es JOURNAL D P A: YS LOUE, DEF'CHIMTIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. JUIN An 1811. MÉMOIRE SUR DES TERRAINS QUI PAROISSENT AVOIR ÉTÉ FORMÉS SOUS L'EAU DOUCE (1); PAR ALEXANDRE BRONGNIART, Correspondant de l'Institut, Ingénieur au Corps Impérial * des Mines, Administrateur de la Manufacture Impériale de Porcelaine de Sèvres. L'IMMENSE quantité de corps organisés qu'on voit dans certaines couches pierreuses, au milieu de nos plus vastes continens , a toujours été l'objet des méditations des hommes a ——_———— ———…" — —— — ——————— — ——————————————————— (1) Extrait des Annales du Museum d'Histoire naturelle, Nous desirions depuis long-temps faire connoître ce Mémoire à nos Souscrip- teurs, lequel nous avoit été demandé par plusieurs d’entre eux. Des circons- tances particulières l’ont retardé. Tome LXXII, JUIN an 1811, Ggeg 410 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE qui les ont remarqués. La plupart de ces débris de l’ancien monde appartenant à des animaux dont les genres ana- logues vivent actuellement dans nos mers, on a conclu, peut-être un peu trop promptement, que tous les terrains qui renfermoient des corps organisés avoient été formés sous les eaux de la mer. Une conséquence qui paroissoit si na- turelle et qui étoit déduite d’une aussi grande masse d'ob- servations, a trop pleinement satisfait les naturalistes, et les a souvent empéchés d'examiner si les débris des corps organisés renfermés dans les couches de la terre avoient tous réellement appartenu à des animaux marins, et si plusieurs terrains ne pouvoient pas avoir été formés ailleurs que sous des eaux marines. On avait bien remarqué, il est vrai, quelques débris de végétaux et de mammifères, et même quelques coquilles dont les genres analogues habitent actuellement ou nos marais d'eau douce , ou la surface de nos continens; mais les naturalistes, pénétrés de l’idée que tous les terrains se- condaires étoient d'origine marine , avoient supposé que les débris d’une autre origine , qu'on pouvoit y frouver, y avoient été apportés par des causes que les géologistes les plus ré- servés s’avouoientinconnues, et queles autres faisoient varier suivant le système qu'ils avoient adopté. Les recherches que nous avons faites, M. Cuvier et moi, aux environs de Paris, nous ayant fait connoître des ter- rains d’une immense étendue, entièrement composés de débris de corps semblables à ceux qui vivent encore sur la terre ou dans les eaux douces, nous avons dû être conduits à penser que dans un temps où la mer formoit des marbres, des schistes, etc., les eaux douces pouvoient bien aussi avoir eu la propriété de déposer des couches pierreuses et d'y envelopper les animaux et les végétaux qui y vivoient dans leur sein ou sur leurs bords (1). Au reste, mon but n'est pas d'établir ici un nouveau (1) Nous avons dit dans l’Æssai sur la Géographie minéralogique des en- virons de Paris, que nous avons publié M. Cuvier et moi en 1807, que M. Coupé avoit très-bien reconnu les coquilles d’eau douce dans le sol de ce canton. Je citerai plus bas plusieurs personnes qui ont fait ailleurs des ob:>ryations analogues. ET D'HISTOIRE NATURÉLLE . 4x système de formation pierreuse, mais d'offrir aux naturalistes la réunion des caractères propres aux terrains qui ne ren- ferment que des débris d'animaux et de végétaux terrestres ou d’eau douce, de faire connoître l'étendue et la position de ces terrains par rapport aux autres, de décrire les lieux où on les a observés, les fossiles qu’ils renferment, et de faire ressortir les nombreuses et remarquables ressemblances qu’ils ont entre eux, quoique situés à des distances con- sidérables les uns des autres. Quand même il seroit vrai, ainsi que le prétendent quelques personnes, que la mer ait formé ces terrains, comme cette mer auroit été exclu- sivement habitée par des êtres qu'on ne voit plus à présent que dans l’eau douce , il en résulteroit toujours pour les na- turalistes une nouvelle sorte de terrain d'une origine au moins fort singulière. Les terrains que nous nommerons £errains d'eau douce, et que nous connoissons jusqu'à ce jour, sont tous com- posés de trois sortes de pierre : ou de calcaire, ou de silex, ou de gypse. Ils sont déposés en couches successives dans les mêmes lieux, ou isolément dans différens lieux. Le calcaire d'eau douce est celui qui se présente le plus communément, le mélange de silex et de calcaire vient en- suite; les grandes masses de silex sont les plus rares. Le gypse d'eau douce offre des masses considérables et fort étendues, mais il paroit moins répandu que le calcaire de même origine. Les pierres siliceuses du terrain d’eau douce sont tantôt un silex pyromaque pur et transparent (Triel, St.-Ouen ); tantôt un silex à cassure résineuse, transparent ou opaque (St.-Ouen, Orléans, Aurillac); tantôt un silex opaque à cassure terne, largement conchoïde et semblable à celle du jaspe (Triel); tantôt c’est un silex carié , opaque, à cassure terne et droite qui a tous les caractères de la meulière proprement dite, mais qui est généralement plus compacte que la meulière sans coquille (forêt de Montmorency, St.- Cyr, etc.); tantôt enfin c'est un vrai grès à grains plus ou moins fins, disposés en rognons ou couches minces (Longjumeau ). Les caractères de ces pierres siliceuses ne diffèrent donc pas de ceux qu'on leur connoit; leur origine n'est décelée que par celle du terrain au milieu duquel ils se trouvent eu par les coquilles qu'ils renferment. Ggg a 412 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Il n’en est pas ainsi du calcaire d'eau douce. Celui-ci a souvent des caractères propres et qui peuvent suffire pour le faire reconnoître indépendamment des coquilles qu’itren- ferme. Il ne faut pas cependant se figurer que ces caractères se manifestent toujours, ni qu'ils soient très-tranchés. Il faut avoir acquis un peu d'habitude de voir ee calcaire pour les remarquer. Tout le calcaire d’eau douce que nous avons vu jusqu’à présent est ou blanc, ou d'un blanc jaunâtre, ou d’un gris jaunâtre plus ou moins foncé. Il est tantôt tendre et friable comme de la marne ou de la craie, tantôt compacte, solide, à grain fin et à cassure conchoïde; dans ce dernier cas il se brise facilement et éclate en fragmens à bords aigus à la manière du silex, en sorte qu'il ne peut pas se laisser tailler : les ouvriers le nomment souvent c/icart (Mantes- la-Ville); tantôt enfin il est trés-compacte, à grain très-fin, criblé d'un grand nombre de petites cavités irrégulières qui sont remplies en grande partie d’infiltrations spathiques. Cette dernière variété est ordinairement susceptible de poli (Château-Landon , près Nemours; Nonette, près d'Issoire en Auvergne), Le calcaire d’eau douce, ou marneux ou compacte, pré- sente très-souvent des cavités cylindriques irrégulières à peu près parallèles, quoique sinueuses. On prendra une idée assez exacte de la forme et de la disposition des cavités, en se représentant celles que devroient laisser dans une vase épaisse et tranquille des bulles de gaz qui monteroient pendant un certain temps de son fond vers sa surface. Les parois de ces cavités sont souvent colorées en vert pâle, et elles sont elles- mêmes quelquefois en partie remplies de limon argileux. Le calcaire marneux contient souvent des rognons siliceux , cariés et caverneux, qui sont intimement mélés et comme pétris avec lui. Les cellules de ces silex sont remplies de la même marne calcaire qui l'enveloppe (plaine de Trappe, Charenton, St.-Ouen). Quelquefois le silex, soit pyromaque, soit résinite , y est disposé en couches horizontales ét paral- lèles, marquées de veines de diverses nuances horizontales ou à peu près circulaires. Ces deux dispositions, et surtout cette dernière, sont très-remarquables près d’Aurillac, dans le département du Cantal, Le calcaire d'eau douce, quelque dur qu'il paroisse au ET D'HISTOIRE NATURELLE, 413 moment où on le retire de la carrière, a souvent la pro- priété de se désagréger par l'influence de l'air et de l’eau. De là, l'emploi considérable qu'on en fait comme marne d'engrais dans la plaine de Trappe, près Versailles, dans toute la Beauce, dans la plaine de Gonesse, etc. Le gypse d'eau douce n'a été connu jusqu'à présent que dans un trop petit nombre de lieux, pour qu’on puisse savoir s’il a des caractères extérieurs qui lui soient propres et qui puissent le faire distinguer indépendamment des fossiles qu’il renferme. Tout le gypse des environs de Paris, depuis Château-Thierry jusqu'a Cormeil et Meulan, appartient à la formation d'eau douce. On en trouve une description suf- fisante dans le travail que nous avons fait, M Cuvier et moi, sur la géographie minéralogique des environs de Paris, et qui est maintenant sous presse. Mais ce qui caractérise essentiellement le terrain d'eau douce, c’est la présence habituelle de coquilles fossiles presque toutes semblables pour les genres à celles qui vivent actuel- lement dans nos fleuves, dans nos marais et sur la surface de la terre. : Ces coquilles sont des limnées, des planorbes, des pota- mides ou cérites de fleuves, des cyclostomes, des bulimes, des helix, des gyrogonites. À ces coquilles, qui sont toutes d’eau douce, se trouvent quelquefois réunis des bois fossiles dicotylédones, des graines de plantes terrestres ou aquatiques, mais point marines, des tiges de graminées ou de roseaux, ou d'autres de plantes terrestres et aquatiques, n'ayant aucun des caractères des plantes marines. Nous allons donner la description détaillée de tous ces fossiles; mais il est nécessaire de faire connoître auparavant la position géologique de ce terrain. Le terrain d'eau douce est souvent l’un des derniers dépôts pierreux qui se soient formés sur le globe. IL se présente ordinairement immédiatement à la surface du sol, ou n’est recouvert que par la terre végétale et quelquefois par le sol d’atterrissement. Cette formation n'est cependant pas toujours la dernière; nous ayons reconnu, M. Cuvier et moi, que ce terrain s'étoit déposé à deux reprises différentes dans les environs de Paris, et que ces deux dépôts avoient été séparés par une formation marine très-distincte et souvent 414 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE très-puissante. Malgré la singularité de cette succession, nous n'avons pu nous refuser à l’admettre. C'est, au reste, une observation facile à vérifier : ce phénomène est exposé aux yeux de tous les savans distingués qui habitent ou viennent visiter une des villes les plus éclairées de l'Europe, aux portes mêmes de Paris. En allant, soit à Montmartre, soit encore mieux au cap de la colline de Belleville, qu'on nomme /4 butte Chaumont, on reconnoît en montant de la base au sommet de ces collines la succession suivante de couches. D'abord, des bancs épais de gypse qui ne renferment aucun fossile marin, mais des os de quadrupèdes terrestres , et des portions de carapaces de tortues que M. Cuvier a reconnues pour appartenir au genre £rionyæ (1). Il contient quelque- fois, mais très-rarement, des coquilles terrestres qui ap- partiennent, comme nous allons le prouver, au genre cyclostome. Au-dessus de cette masse gypseuse viennent des marnes calcaires, et notamment un banc desmarne blanche qui ne renferme que des limnées et des planorbes : c’est ici que finit la première formation d’eau douce; elle est presqu’im- médiatement recouverte par plusieurs couches de marnes argileuses , jaunâtres ou grisâtres , de sables et de grès friables qui renferment des cythérées, des cérites marines, des car- dium , des nucules, des huîtres, des balanes, des os de raies, @tc., etc., et une multitude d'autres corps marins fossiles (2). (1) Ce genre, de la famille des tortues, habite les fleuves et les marécages. Il a été dermerement établi par M. Geoffroy-de-Sti.-Hilaire, Æan. du Muséum d'Hist. nat., tom. XIV, pag. 1. (2) On trouvera dans le #/émoire sur la Géographie minéralogique des en- sirons de Paris , que M. Cuvier et moi venons de terminer , une description très-détaillée de cette suite de couches dans les différentes collines gypseuses des environs de Paris, avec la détermination des principales espèces de coquilles que chaque couche renferme. On y trouvera de nouveau la preuve qu’il n’y a aucune couche de calcaire marin proprement dit, au-dessus-du gypse. On ne sait sur quelle autorité M. Brard a pu avancer que cette formation d’eau douce a été couverte par le calcaire ordinaire analogue à celui qui constitue le sol de la ville de Paris. M, Héricart de T'hury, qu'il cite à cette occasion , n’a jamais avancé cette as sertion, L'absence du calcaire ordinaire, c'est-à-dire , de La pierre à bätir des ET D'HISTOIRE NATURELLE, 415 Le sommet de ces collines gypseuses, à la butte Chaumont, mais surtout à Sanois, à Montmorency, etc., est recouvert de silex et de meulière, pétris de limnées, de planorbes, de gyregonites, etc. Non-seulement ces formations sont distinguées par leur position, mais il paroît qu'elles le sont aussi par les espèces de fossiles qu'elles renferment; car nous croyons avoir re- connu, M. Cuvier et moi, que la plupart des espèces de coquilles du terrain d’eau douce supérieur sont un peu dif- férentes de celles du terrain d'eau douce inférieur. Cependant nous n’avançons cette opinion qu'avec timidité. Nous ne pos- sédons pas encore un assez grand nombre d'observations pour regarder ce résultat comme certain. La description que je vais donner des fossiles qui se trou- vent dans ces deux terrains fera connoître avec plus de pré- cision les faits sur lesquels nous fondons ce soupçon. Description des Fossiles qu'on trouve dans les terrains d'eau douce (1). CYCLOSTOME. CxcLosTOME ÉLÉGANT ANCIEN, pl. 1, fig. 1 (2). Cyelostoma elegans antiquum (3). , Nous n'avons vu que le moule de l'extérieur de cette co- quille, mais il suffit pour montrer qu'il y a entre elle et Parisiens , au nord et pres de Paris , sa position constante au-dessous du gypse, quand ces deux formations se montrent ensemble dans le même lieu , sont des vérités tellement reconnues des naturalistes et des carriers , que nous n’eussions pes relevé cette erreur de fait, si M. Héricart de T'hury ne nous en avoit prié. (1) Les coquilles d’eau douce ne different généralement entre elles que per des nuances de forme qu'il est difficile de saisir, maïs qui sont cependant cons- tantes. Une description , quelque longue qu’elle soit, ne peut donner aucune idée de ces différences; voilà pourquoiïje neles ai souvent decrites que tres-brié- vement. Des figures, mais des figures tres-exactement et trés-purement faites, peuvent seules faire sentir ces différences. Des figures mal caractérisées sont absolument inutiles dans ce cas. (2) Les planches des Annales étoient payées par le Gouvernement. Nos jour naux ne pourroient subvenir à ces frais. Nous sommes donc obligés de sup- primer ces planches et de renvoyer aux Annales. (Note du Rédacteur.) (6) Nous ajouterons l’épithete d'ancien, 1° au nom spécifique des especes 416 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE la coquille terrestre qu’on nomme cyclostoma elegans, la plus grande ressemblance, comme on peut en juger par la figure. Les moules de cette coquille se voient dans un calcaire grisäâtre assez dur qui se trouve dans la forêt de Fontaine- bleau , sur le plateau de la table du Grand-Maitre, et dans un calcaire marneux trouvé près du Mans, par M. Menard- la-Groye. CxcLosromE MOMIE, pl. 1, fig. ». Cyclostomamumia, Lam arer, Ann. du Mus., t: IV, p. 112. Melanie effilée, Brarp (1). Les cyclostomes seront probablement un jour séparés en deux genres, l'un contiendra les cyclostomes aquatiques et les autres les cyclostomes terrestres. Les deux espèces que nous venons de nommer appartiennent à la seconde division. Le cyclostoma mumia diffère du cyclostoma elegans, mais se rapproche du cyclostoma patulum et du striatum. Nous ne le connoissons encore que dans les terrains d’eau douce inférieurs ou de première formation , et si, comme nous le soupçonnons, il ne se rencontre pas dans les terrains d’eau douce de la seconde formation, il servira à caractériser les premiers. C'est un fait à constater. On le trouve dans les marnes blanches qu'on a percées en creusant des puits au pied de la colline de Belleville (2), et dans le haut de la rue de Rochechouart. On le trouve aussi à St.-Ouen, dans la couche qui paroît étre la suite qui sont tellement semblables aux espèces actuellement vivantes qu’on ne puisse y trouver des caractères spécifiques différentiels ; 2° aux noms provisoires que nous donnerons à des coquilles trop mal conservées pour être décrites et dénommées particulièrement, mais qui paroîtroient avoir de grandes analogies avec des espèces vivantes. (1) Nous n’aurions pu reconnoître cette coquille ni à la description, ni à la figure qu’en a données M. Brard , si nous n'avions eu entre les mains, et de M. Brard lui-même, l'individu qui a servi à sa description. Les melanies ont la bouche ovale sans rebord , et le péristome interrompu sur la columelle. La coquille que nous décrivons, qui a la bouche circulaire, le péristome con- tinu , etc. , est un cyclostome parfaitement caractérise. (2) Je l’ai vu sur un morceau de cette marne qui vient du puits de M. Fessard, et qui m'a été donné par M. Héricard de T'hury. de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 417 de la précédente, à Montmartre dans le gypse même (1); à Pierrelaie, à Mantes-la-Ville, immédiatement au-dessus des dernières assises calcaires. M. de Lamarck la cite près de Grignon: or il faut savoir qu'il ne se trouve pas dans la couche des coquilles marines de Grignon, mais dans une marne calcaire d'eau douce, grise et assez dure, qui recouvre le calcaire marin prés de Grignon, et qui renferme des limnées. POTAMIDE. « Coquille turriculée, ouverture presque demi-circulaire, » comme pincée à la base du columelle et terminée par » un canal droit très-court qui est à peine échancré; point » de gouttière à l’extrémité supérieure du bord droit, mais » la lèvre externe dilatée. » Nous proposons d'établir ce genre, qui est fondé plutôt sur les habitudes des animaux qu il renferme, que sur l'im- portance des caractères extérieurs : il diffère, en effet, très- peu des cérites ; mais on remarquera que dans le genre des cérites, établi par Bruguière, il y en a qui sont habitantes ou des marais voisins de la mer, ou des eaux saumâtres de l'embouchure des fleuves : or celles de ces espèces que nous avons vues, ont les caractères que nous attribuons au genre potamide, aussi avoient-elles été toutes placées dans la di- vision du genre cérite qui a pour caractère distinctif 7 canal droit et très-court. Nous donnons ici la liste des coquilles du genre cérite que l’on désigne dans divers auteurs comme habitant les marais ou les embouchures des fleuves (2). eg (1) I n'y a point de doute pour nous que la coquille noire que nous possé- dons, et qui est encore engagée dans un morceau du gypse où on l’a trouvée, n’appartienne au cyclostoma mumia de Lamarck. (2) Cerithium atrum. Brug., n.18.—List., tab. 115, f. 10. Les Indes orientales dans les eaux douces. Ce cérite qu’on assure être entièrement d’eau douce, diffère et des cérites et des potamides. Cerithium ralustre. Brug., n. 19.—List., tab. 836, f. 62. Marais des Indes orientales qui communiquent avec la mer. Cerithium muricatum. Brug.— List., tab. 121, f. 17. Vers les embouchures des fleuves du Sénégal. Cette espèce ressemble par tous les caracteres de la bouche et de la forme gé- nérale, au potamide de Lamarck ; elle en diffère par la longueur des tubercules, €Cerithium moluccanum. Linn.-Gm. ù Tome LX XII, JUIN an 1811, Hhh 418 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Cette liste fait voir qu'il est possible de trouver, parmi les coquilles d'eau douce, des coquilles qui appartiennent véritablement au genre cérite, tel qu'il a été établi par tous les conchyologistes, sans qu'on puisse en conclure que les limnées, les planorbes, etc., aient été des coquilles ma- rines , ni que par les révolutions dont on ne voit aucune trace, une immense quantité de coquilles d'eau douce aient été emportées et mêlées dans la mer avec quelques coquilles marines. Poramine pe Lamarcer, pl. 1, fig. 3. Cérite tuberculée, Brarp. Potamides Larmnarkii. . On trouve quelquefois ce potamide avec son test et ses couleurs : il est alors roussâtre ou brunätre. On voit trois rangées très-distinctes de tubercules à peu près égaux, sur la partie extérieure de chaque spire; la partie inférieure , qui n’est visible qu'au dernier tour, est marquée de trois ou quatre sillons profonds; on compte quatorze tours de spire. Cette coquille a beaucoup de ressemblance avec le ceri- thium radula, figuré par Lister au,nombre des coquilles fluviatiles ; elle a aussi quelque ressemblanceavec le bulimus auritus de Bruguière qui est de l’intérieur de l'Afrique. Elle se trouve aux environs de Paris, dans les silex opaques qui recouvrent, à la descente de Longjumeau, le banc de sable sans coquilles; elle a laissé dans ces silex le moule de sa cavité intérieure et l'empreinte très-nette de sa forme ex- térieure; elle y est accompagnée:de limnées renflés, de limnées ovoides, de gyrogonites et de tiges grèles, cylin- driques et articulées. Les morceaux qui renferment des bois fossiles et des graines, ne paroïissent pas contenir ces coquilles. On trouve encore ce potamide dans la forêt de Montmo- rency au-dessus de St.-Leu: il y a conservé son test et la couleur brun-roussätre qui appartient généralement aux co- quilles fluviatiles. Dans les marais des îles Moluques. Cerithium fuscum. Linn.-Cm. Dans les fleuves, sans lieu natal. Il y en a plusieurs autres citées dans Gmelin, mais elles y sont par double emploi et doivent être rapportées aux trois premières espèces. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 419 Enfin j'ai trouvé cette même coquille, toujours accom- pagnée et uniquement accompagnée dé corps organisés ter- restres et d'eau douce, 1° dans le départemenf du Cantal, dans le calcaire du-coteau qui est à l’est d'Aurillac : elle y est mêlée avec des limnées cornés et renflés, de grands planorbes arrondis, et des tiges de roseaux parfaitement re- connoissables. 2°. Dans le département du Puy-de-Dôme, à Nonette près .d'Issoire , dans des couches calcaires très-épaisses, compactes, grises et susceptibles de recevoir le poli comme le calcaire d'eau douce de Château-Landon. On ne trouveque les moules intérieurs de cetté coquille ou ses moules extérieurs remplis de calcaire spathique. Ce potamide estaccompagné de l'hélice de Cocq, voisin de. l'helix nemorum. PLANORBE, Praxorse ARROND1: (1), pl. 1, fig. 4 et 5, Plan. rotundatus. Cette espèce, qui a de grands rapports avec le planorbe corné , en diffère par les tours de spires qui sont plus cylin- driques , qui diminuent plus graduellement de grosseur, en- sorte que la coquille est moins creuse sur chacune de ses faces que celle du planorbe corné. ki Il-y a cinq tours de spire. Nous réunissons peut-être sous ce nom trois espèces ou trois variétés; mais les individus que nous avons pu étudier n’étoient pas assez entiers pour présenter des caractères nets et distinctifs. La variété À est grande et se rapproche un peu du plan. corneus. On trouve dans le Cantal, près d'Aurillac, et dans le Puy-de-Dôme, près d'Autézat, une autre variété de cette espèce, encore plus grande et qui présente absolument le volume des tours de spire et les stries longitudinales qu'on peut remarquer sur les individus bien conservés du plan. corné. La variété B, fig. 5, plus petite, a la plus grande ressem- blance avec le P/, orrentalis d'Olivier. Le (1) Planorbe arrondi, Branp, Hhh 2 420 JOURNAL PE PHYSIQUE, DE CHIMIE Le planorbe arrondi se trouve aux environs de Paris, à Milon près Versailles, à Palaiseau, dans la forêt de Mont- morency, sûr le sommet de la colline de Triel, dans les meulières d’eau douce des plateaux élevés et dans le calcaire d’eau donce de la forét de Fontainebleau ; il paroit done appartenir plus particulièrement à la seconde formation d'eau douce. Nous soupçonnons cependant d'après quelques frag- mens, qu'il se trouve aussi dans la première. Pranonse corner (1), pl. 1, fig. 6. Ælanorbis cornu. Ce planorbe a , au plus, quatre tours de spire. Le dernier tour devenant tout de suite beaucoup plus volumineux que les autres, fait paroître cette’ coquille profondément om- biliquée. Ce planorbe a beaucoup de ressemblance avec le planorbe hispide de Draparnaud ; il a à peu près la même forme de bouche, et en l'examinant avec soin à la loupe, on y voit les mêmes stries longitudinales et transversales, Mais le dernier tour de spire est moins volumineux par rapport aux autres que dans le planorbe hispide. Il se trouve avec l'espèce précédente. Pran. De Brévosr (2), pl. 1, fig. 7,;a, b,c. Plan. Prevostinus. L Ce planorbe n’a, comme Îe précédent, que quatre tours de spire. Le dernier tour est incomparablement plus grand que les autres et, les cachant presqu'entièrement, produit un ombilic petit, mais profond. Il diffère encore du planorbe cornet en ce quil est beaucoup plus aplati. Il n’est cepen- dant pas caréné comme le planorbe lentille. Nous l'avons trouvé dans les silex d’eau douce, près de Palaiseau , et nous en avons vu des échantillons avec leur test noir; la fig. 7, c, est celle du moule intérieur. Il ap- partient à la seconde formation d’eau douce. (x) PI. carré. Brarp? (2) Trois jeunes naturalistes, MM. Desmarets, Leman et Prévost, nous ont fréquemment accompagnés dans nos courses et ont contribué par leurs re- cherches et leurs communications à la perfection de notre travail. Les coquilles : qui portent leurs noms ont élé trouvées par eux. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 421 4 (3) PLANORBE LENTILLE (1), pl. 1,fg. 8. Plan. Lens. Ce planorbe est plutôt bombé et lenticulairequ'ombiliqué : il a, au plus, quatre tours de spire. Cette espèce diffère beaucoup du planorbis carinatus , mais il a les plus grands rapports avec le planorbis com planatus de Draparnaud. 4 Nous ne l'avons encore vu que dans la marne calcaire des puits de la rue de Rochouart et de Belleville, et dans les marnes blanches qui recouvrent le gypse à Pantin et à la butte Chaumont; il paroît donc appartenir à la première formation d’eau douce. LIMNÉE. Limnée EFFILÉ (2), pl. 1, 6g. 9. Limneus longiscatus. Ce limnée a les tours de spire peu renflés, ce qui le rend plus long que les autres ; la bouche est ovale et alongée. Nous ne le connoissons que dans la première formation d’eau douce, dans les puits de Belleville et de la rue de Rochouart, et à St.-Ouen. Limxée ÉLaANcÉ, pl. 1, fig.10. Limnéus strigosus. Ce limnée ressemble beaucoup au précédent; mais quoi- que plus alongé que les limnées connus, il l’est moins que le limnée effilé, et présente sur le bord columellaire de la bouche un petit renflement que nous n'avons pas remarqué sur le précédent. On le trouve dans le terrain d'eau douce de première for- mation : nous ne le connoissons encore qu’à Pantin, dans la marne blanche qui recouvre le gypse. Liun£e pornru. Limneus acuininatus , pl. 1, fig. 11. Les tours de spire de cette espèce sont très-prononcés et — (1) Planorbe anguleux? Brann. (2) Limnée eflilé, Brano. 422 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE comme cordés ; la spire, composée de six tours, est alongée et pointue, mais le dernier tour est très-renflé et le pli de la columelle fort marqué. Ce limnée se trouve dans le sable qui recouvre le grès marin inférieur à Pierrelaie, et il est quelquefois mêlé avec les coquilles marines de ce grès. Nous soupçonnons quil appartient à la première formation d'eau douce, Liuxée conné, pl. 1, fig. 12. Limneus corneus. Il paroît que ce limnée n'a que cinq tours de spire au plus : le dernier est très-grand'et renflé, son bord antérieur est un peu dilaté et légèrement recourbé extérieurement. Nous avons souvent vu ce limnée avec son test qui est mince, strié, noir et d'un lujisant corné; ce test est entière: ment silicifié comme le noyau méme de la coquille, car il est indissoluble dans l'acide nitrique. Le test de la plupart des coquilles fossiles reste ordinairement calcaire. On le trouve dans les silex de Milon et des hauteurs de Palaiseau , avec beaucoup d’autres coquilles terrestres et d'eau douce. Il appartient donc à la seconde formation d’eau douce. Limnée ovoiïne, pl. 1, fig. 13, À. B. Limneus ovurr. Ce limnée est généralement ovale, un peu ridé. Il a six tours de spire. Il ressemble un peu au Z. pereger, DR., mais est moins renflé et a plus de tours de spire que lui. Nous l'avons trouvé dans les sables de Pierrelaie. Limvée DES MARAIS, ANCIEN, pl. 1, fig. 15, À, B. Linneus palustris antiquus. Il n'y a entre l'individu dont nous donnons la figure et le L. palustris actuel qu'une très-légère différence de forme; et quelques raisons nous font même soupçonner que eet individu, quoique blanc, n'est pas réellement fossile. IL renferme cependant le sable de Pierrelaie, et’il n’y a point de marais dans ce lieu. Nous donnons le trait, fig. 15, B, du L. palustris vivant. Cette espèce nous paroît caractérisée par un grand nombre de méplats donton n'a point faitmention dans les descriptions. ET D'HISTOIRE NATURELLE, , 423 Ban IMNÉE FÉVEROLLE , pl. 1, fig. 16. Limneus Fabulum. Ce limnée, assez court, n’a guère que quatre tours de spire : le dernier est très-grand, la spire est courte, mais pointue: l’ouverture n'a pas les deux tiers de la longueur de la coquille. Cette coquille fossile a la plus grande res- semblance avec le Z. pereger, fig. 37, de Draparnaud. On la trouve dans les meulières de la seconde formation d'eau douce, dans la forêt de Montmorency au-dessus de St.-Leu , etc. On n'en voit ordinairement que le moule intérieur. Liuxér VENTRU, pl. 1, fig. 17. Limneus vertricosus. Cette espèce diffère de la précédente en ce que la spire est beaucoup plus courte, ce qui fait paroitre la coquille ventrue; la longueur de l'ouverture est plus grande que les deux tiers de la coquille. Nous la tenons de M. Defrance qui l’a trouvée à Maurepas. Lime RENFLÉ, pl. 1, fig» 18. Limneus inflatus. Celui-ci a une forme toute différente des précédens, les tours de la spire sont plus arrondis ; il ressemble beaucoup au limnée ovale de Draparnaud, f. 33. L'ouverture est à peine plus grande que la moitié de la coquille. Il est très-commun dans les meulières du terrain d'eau douce au-dessus de St.-Leu, à Sanois, etc. BULIME. BuzimME PYGMÉE, pl..2, fig. 1. B. prgmeus (1). Il est assez exactement conique; on y compie cinq tours de spire. Ils sont striés très-finement et parallèlement au bord de la bouche. a —__—_—_—_———…_.—————…— (1) Bulime pygmée, Brar». Il n’est ni de l’espèce, ni même du genre des pe- ttes coquilles qu’on trouve dans les étangs de Magueloneetdans ceux du Hävre. 424 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Nous avons trouvé cette espèce avec son test noir et Juisant dans les silex d’eau douce de Palaiseau. Elle se trouve aussi dans toutes les meulières d'eau douce de Montmorency, etc., et appartient par conséquent à la seconde formation d’eau douce. M. Menard-la-Groye a trouvé près du Mans, dans un calcaire d’eau douce, souvent assez dur , et qui renferme des Jimnées, etc., un petit bulime qui ressemble presque com- por à celui-ci. Il m'a paru un peu plus court , et avoir e péristome moins nettement interrompu sur la columelle. Bouime vis, pl. 2, fig. 2. Bulimus terebra, Ce bulime, beaucoup plus gros que les précédens , est court et renflé. Le sommet paroît obtus et comme tronqué. Il a quatre tours de spire légérement striés parallèlement au bord de la bouche. Nous l’avons trouvé abondamment danslessilex de Fontenay-sur- Bois près de Vincennes, et de Quincy près Meaux; mais nous n'avons pu le voir avec son test et sa bouche. Il appartient à la formation d’eau douce supérieure, BuziME NAIN, pl. 2, figa3. B. pusillus. ‘ On compte six tours de spire à ce bulime qui est assez alongé. Les trois avant-derniers sont à peu près d'égale gros- seur. Mais le dernier est subitement plus gros, ce qui donne à cette coquille une forme assez remarquable et la fait res- sembler un'peu au bulimus lineatus de Draparnaud. Nous l'avons trouvé dans les marnes d'eau douce de Saint- Les bulimes ont la bouche ovale et le péristome non-continu ; ils ne sont point operculés. Les coquilles de Maguelone et du Hävre ont la bouche presque ronde , le péristome continu , et d’après l’observation de M. Beudant, ils sont operculés. Elles se rapportent donc au genre cyclostome et à la division de ce genre qui vit dans l’eau. D’ailleurs dans les coquilles de Maguelone les tours de spire vont de six à sept ; ils sont plus convexes que dans Je bulime pygmée et la coquille est presque ombiliquée. Les petites coquilles qui composent la chaîne de collines du Weissenau près Mayence, ne doivent pas non plus être rapportées aux bulimes, mais aux cy- clostomes. Ouen, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4 425 Ouen, il y est par myriades; dans celles du Mesnil-Aubry, etc. Il paroit qu’il appartient à la première formation d’eau douce. Buzime ATOME, pl. 2, fig. 4. B. atomus. Ce petit bulime n’a que quatre tours de spire. Il est plus renflé que le bulime pygmée, mais plus conique que le pré- cédent. Ce dernier caractère m'empéche de le regarder comme un jeune individu du bulime vis. On le trouve avec le bulime nain, à St.-Ouen, etc. MAILLOT. Marrror pe Derrance, pl. 1, fig. 19. Pupa Defrancir. Ce petit maillot n’a que cinq tours de spire. Il diffère principalement en cela du maillot à trois dents quien a de six à sept. Sa bouche a une dent et un pli, ce qui lui donne la figure d'un trèfle. Il nous a été donné par M. Defrance, qui l'a trouvé à Milon avec des planorbes arrondis, des limnées cornés, etc. HÉLICE. Héuice pe Ramowp, pl. 2, fig. 5. Helix Ramondi. Cettegrande hélice n'a que quatre tours de spire; le dernier tour s'élargit très-sensiblement vers la bouche. Toute la co- quille est couverte de stries très-creuses ou plutôt de cane- lures très-fines. Elle a quelques rapports avec l'Aelix guttula. Ouiv. Elle se trouve dans les: marnes calcaires dures qui sont mélées par couches ou par fragmens en forme de brèche, dans le tuf de Vake, imprégné de bitume, de Pont-du-Chäteau près Clermont. Il paroît, d'après les empreintes que j'ai remarquées sur des pa calcaires que M. Bigot de Moroguesnousa envoyées, qu'il se trouve aussi au Montabuzar, près d'Orléans. Tome LXXII. JUIN an 1811. lii 426 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Hèucr pe Coco, pl. 1, fig. 6. H. Cocquis. Cette hélice est moyennement plate ; ses tours de spire, au nombre de cinq ou cinq et demi, sont assez exactement cylindriques et marqués de stries inégales parallèles au bord de la bouche (1). On la trouve à-Nonette, près d'Issoire, dans un calcaire dur et même assez compacte pour recevoir le poli; elle y est accompagnée du potamide de Lamarck. Il paroît, d’après quelques empreintes que j'ai remarquées sur des pierres calcaires que M. Bigot de Morogues nous a envoyées, qu'elle se trouve aussi aux environs d'Orléans. Hérrcr DE Morocuss, pl. 2, fig. 7. Helix Moroguest. à Cette hélice a cinq tours de spire ; elle est presqu'orbi- culaire, et m'a paru très-lisse. Elle se trouve aux environs d'Orléans avec l'espèce suivante. Hérice ve Tristan (2), pl. 2, fg. 8. {elix Tristan. Elle est presque orbiculaire avec une carène peu élevée qui ne paroit que sur le mieu du dernier tour de spire. lle est lisse et ses tours de spire sont peu séparés les uns des autres et peu convexes. Elle a beaucoup de rapports avec l'’Aelix cinctella de Draparnaud. Celle-ci a cinq tours et demi de spire ; ces deux espèces se trouvent dans le calcaire d’eau douce de la route de Pithiviers, à trois lieues d'Orléans; elles y sont accom- pagnées de planorbes qui paroissent appartenir à la var. B du planorbe arrondi. * Elles m'ont été communiquées par M. Bigot de Morogues. Il ya dans le même calcaire une hélice globuleuse plus (1) Elle ressemble beaucoup à une hélice des environs de Crest, qui m'a été envoyée par M. Faure-Biguet,, sous le nom d’helix terrestris , et qui est elle méme tres-voisine de l’helïx carthusianella. (2) M. Tristan a concouru avec M. Bigot de Morogues à faire connoitre la nature du terrain des environs dOrleans. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 427 petite que le moroguest, plus grande que le tristant etn'ayant pas d'ailleurs la caréne de ce dernier, je n'ai point tronvé de caractères suffisans sur les échantillons mal conservés que j'ai vus, pour en faire une espèce particulière. Hérice pe Leman, pl. 2, fig. o. ÆHelix Leman. Elle ressemble assez à l’hélix de Cocq, mais elle est plus bombée, et le dernier tour de spire, comparé aux autres, est volumineux; elle nous a paru aussi moins striée; elle est ombiliquée. Des silex d'eau douce de Palaiseau, et par conséquent de la seconde formation d’eau douce. Hérice DE DEswaresr, pl. 2, fig. 10. Helix Desmarestina. Cette petite hélice, extrêmement plate, semble avoir un grand nombre de tours : il n'y en a cependant que six ou six et demi. Ces tours diminuent insensiblement de grosseur, et le dernier, vä en dessus, n'est pas beaucoup plus large que l'avant-dernier. Ce caractère et sa forme aplatie le dis- tinguent suffisamment des autres espèces. Elle nous a paru parfaitement lisse. Cette hélice, aux stries près, a la plus grande ressem- blance avec l’Lelix rotundata. On la trouve avec la précédente. Hérice De Menanp, pl. 2, fig. 11. Helix Menardi. Cette espèce a un peu la forme d'un #rochus. Elle n’a que cinq tours de spire qui sont à peu près égaux. Les spires sont marquées de stries ou côtes coupantes, trans- versales et obliques. Je tiens cette jolie espèce de M. Menard-la-Groye qui l'a trouvée près du Mans, dans le lieu spécifié plus bas, GynoconiTe menicactnuse, pl. 2, fig. 12, À, B, C. G. medicaginula, LAMARCK. : Jusqu'à présent toutes les descriptions et figures des gyro- gonites n’ont eu pour objet que le noyau de ce singulier Tia 428 JOURNAL DE PHYSIQUE, DEP CHIMIE corps. M. Desmarest fils l'a trouvé entier; il l'a fait fisurer et 1l va en publier la description. 11 a'eu la bonté de me permettre de joindre cette figure à mon travail. Les végétaux fossiles ou les corps qui leur ressemblent et qui se trouvent dans les terrains d'eau douce, sont beau- coup plus difficiles à déterminer, et on peut direque, dans la plupart des cas, il faut se contenter d'en donner la des- cription sans prétendre vouloir les rapporter aux genres analogues actuellement vivans. Nous avons déjà indiqué quel- ques-uns de ces fossiles, nous allons en donner ici une énumération plus précise, et une courte description. N° 1. Bois d'un arbre monocotylédon qui paroit être un palmier. Dans les marnes qui recouvrent presqu’immédiatement le gypse à Montmartre. N° 2. Bois d’un arbre dicotylédon à couches concentriques épaisses. A Longjumeau et à Palaiseau en masses interrompues, disposées cependant sur une même ligne horizontale. N° 5. Tiges plates de graminées ou d'arumdo, ou de t7pha. Avec les mêmes bois, mais à Longjumeau seulement et avec les potamides, près d'Aurillac. - Il y en a peut être plusieurs espèces, mais il ne m'a pas été possible de lés déterminer clairement. N° 4. Petites tiges cylindriques, percées d'un canal dans le centre ; ce canal est divisé par des cloisons transverses, et ses parois sont percées de tubulures fines, parallèles au canal du centre, pl. 2, fig. 13. À Longjumeau , avec les bois, les arundo et les coquilles d'eau douce décrites précédemment. N° 5. Epi d'une plante qui pourroit avoir quelque res- semblance avec certaines espèces de paspalum, pl. 2, fig. 14. Imprimé en creux sur les silex de Longjumeau. N° 6. Tiges articulées, à articulations dentelées en scies. Mamelons à couronnes cireulaires et saillans entre les arti- culations, pl. 2, fig. 15. Cette empreinte a quelque ressemblance avec celle que laisseroit une racine d’equisetum. Dans les silex de Longjumeau: N° 7. Graines ovoïdes pédiculées, pl, 2, fig. 16. Dans les silex de Longjumeau. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 429 N° 8. Graines cylindroiïdes canelées, pl. 2, fig. 17, A,B, C. Ces graines ont une forme très-remarquable. M. Correa et les autres botanistes que j'ai consultés, ne peuvent les rap- porter avec vraisemblance à aucun genre connu. M. Fortis les a décrites autrefois en les comparant à une larve d'in- secte. Elles se trouvent dans les silex opaques de Longjumeau, de Palaiseau, de Villeginis, de Villiers près de Pontchartrain, de la Chapelle Milon près de Chevreuse. Elles sont accom- pagnées de limnées, de planorbes, de pupa, de potamides, de bois fossiles, mais elles ne pénètrent jamais dans le corps du bois (ces dernières observations sont de M. de France). N° 9. Corpsen forme de dattes avec des canelures sinueuses sur la partie qui pourroit être considérée comme la réunion des deux cotylédons, si ce corps étoit une semence analogue aux noix, et surtout aux noix olivéi-formes d'Amérique, pl. 2, fig. 18. Il se trouve dans un calcaire d’eau douce gris, assez com- pacte, quoique criblé d'une multitude de petites cavités, et il est accompagné de petits limnées. Il vient des carrières de Chanau, près de Bois-le-Roy, dans les environs de Ne- mours, et ma été né par M. de Montlosier. On trouve dans ès de Longjumeau des cavités dont les parois sont recouvertes de saillies mamillaires qui parois- sent avoir été disposées symétriquement. Ce même grès ren- ferme des petits corps alongés, canelés, qui ressembleroient assez bien à des pointes d'oursins, s'ils n'étoient pas en même temps articulés. Ces corps sont trop mal caractérisés pour que nous puissions les rapporter avec quelque vraisemblance à un corps vivant. ' En récapitulant les fossiles que renferment ces terrains d'eau douce , et rapportant à chaque formation les fossiles qui paroissent lui être particuliers, on pourra attribuer à la première formation d'eau douce les espèces suivantes : Gyclostoma mumia. # Planorbis lens. Limneus longiscatus, ——-— stTigosus. ——— acuminatus. ——— oyum. Bulimus pusillus. atomus \ 430 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Le bois de palmier fossile. Et à la seconde ou à la formation supérieure, les fossiles suivans : Cyclostoma elegans antiqum. Potamides Lamarkii. Planorbis rotundatus. cornu. Prevostinus. Limneus corneus. Jabulum. ———— ventricosus. _— 1nflatus. Bulimus pygmeus. —terebra. Pupa Defrancit. Helix Lemani. ——— D'emarestina, et probablement les quatre autres espèces. Enfin tous les végétaux fossiles que j'ai énumérés plus haut, excepté les palmiers. Les gyrogonites appartiennent aux deux formations; nous les avons vues dans les marnes blanches des gypses et dans les silex des hauteurs. Il sera intéressant d'étudier le gisement des différens bois fossiles eonnus et d'examiner s’il est’ falement semblable à celui des environs de Paris; c'est-à-dire, si des végétaux qui, par leur nature, ne peuvent être marins, sont devenus fossiles dans le lieu où ils ont vécu, et alors on doit souvent les trouver accompagnés de coquilles terrestreset d'eau douce; ou s'ils ont été chariés dans la mer, ce qui paroît évident pour quelques-uns d’entre eux, et alors ils doivent être accompagnés de coquilles et d'autres productions marines (1). C'est une question que notre position ne nous permet pas de résoudre, mais que nous faisons aux naturalistes. Quant aux autres coquilles que je viens de décrire et qui ne sont point comprises dans la liste précédente, je n'en ai pas fait mention, parce que je n'ai point de renseignemens suffisans sur leur gisement. Les lieux où l'on a reconnu le terrain d'eau douce sont déjà assez nombreux, quoique cette formation ne soit connue (1) M. Héricart de Thury, inspecteur général des carrières, vientde me faire voir des morceaux de bois pétrifiés en silex et trouvés aumilieu du bane à cérithe du calcaire marin. Ce bois est percé de tarets et en est encore rempli. / ET D'HISTOIRE NATURELLE 431 que depuis peu de temps. Je n’entrerai dans aucun détail sur les terrains d'eau douce qui occupent aux environs de Paris un espace considérable : la description spéciale des cantons où ils se trouvent est l'objet du Mémoire que nous publions dans ce moment, M. Cuvier et moi. On y voit que nous connoissons le terrain d'eau douce, tant de première que de seconde formation, de l'est à l'ouest, depuis Provins et Damerie-sur-Marne jusqu’à Mantes, c'est-à-dire, dans un espace de plus de 40 lieues, et qu'on le rencontre du nord au sud , dans différens points, depuis Luzarche jusqu’à deux ou trois lieues au-delà d'Orléans, ce qui offre encore une étendue de près de 40 lieues. De l'est à l'ouest il ne se présente , entre les limites que nous venons de fixer, que par cantons. Le plus étendu de ces cantons est la plaine St-Denis, en ÿ comprenant les sommets des collines gypseuses qui s'élèvent dans son milieu et sur ses bords. Mais de Paris à Orléans, il est presque continu; toutes les marnes de la Beauce appartiennent à ce terrain; tout le calcaire, souvent épais et compacte, qui recouvre le grès de la forêt de Fontainebleau (1), celui de Bois-le-Roy, près Nemours, reconnu par M. de Montlosier, celui de Château-Landon qui se présente en masses iminenses dans le même canton, qui appartiennent également à l’une des formations d’eau douce, et très-probablement à la dernière. Il paroit qu'à Château-Landon les bancs de ce caleaire sont fort puissans, puisqu'on en extrait des pierres de taille d’un très-gros volume. Elles ont servi à la construction du pont de Nemours, et sont employées dans ce moment à celle de l'arc de triomphe de l'Etoile. C'est en se transportant à l'Etoile, sur le chantier où sont amenées ces pierres, qu'on peut prendre une idée très-nette des caractères que présente ce calcaire considéré en grandes masses. Il est gris et assez compacte pour recevoir le poli : on y reconnoit cependant ces petites cavités irrégulières, ces tubulures sinueuses qui caractérisent si ordinairement le calcaire d'eau douce. On (1) Le calcaire d’eau douce n’est point en morceaux épars dans la forét de Fontainebleau. I y forme des bancs continus et puissans qu’on exploite en car- riére pour en faire de la chaux dans plusieurs parties de la forêt. (Descente de Fontainebleau , descente de Bouron , etc., etc.) 432 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE voit sur les grandes faces sciées et presque polies de ces grosses pierres que ces cavités cylindroïques et sinueuses sont très-souvent parallèles, et semblent partir du même plan; elles sont quelquefois remplies par des infiltrations de calcaire spathique. Les coquilles fossiles y sont rares; mais cependant on Y découvre , en les examinant avec attention , des planorbes et des limnées dont je ne puis encore déterminer les espèces. M. Bigot de Morogues vient de donner un Mémoire sur la nature du terrain qui entoure Orléans , à plusieurs lieues au nord , à l'est, à l'ouest et méme au sud, dans les environs d'Olivet. Partout il y a reconnu le calcaire d'eau douce, criblé, dans quelques endroits, de limnées, de planorbes et de deux ou trois espèces d'hélice. Les coquilles se trouvent principalement de Beaugency à Boissot, aux environs de Toury, à Viabon, sur la route et dans les environs de Pi- thiviers, où elles sont très-abondantes. Il a eu la bonté de nous envoyer des échantillons de ce calcaire renfermant les coquilles que je viens de nommer et des os du paleotherium que M. Cuyier avoit déjà décrit, et il m'a permis d'aug- menter mon travail dela description descoquilles fossiles qu'il a découvertes et recueillies dans ce canton. On voit dans ce calcaire tous les caractères du terrain d’eau douce, c'’est- à-dire les cavités irrégulières, les tubulures sinueuses et les infiltrations de silex résinite quil'accompagnent souvent. M. Menard-la-Groye a recueilli plusieurs espèces de co- quilles d'eau douce Las un calcaire tantôt marneux, tantôt solide, gris et rempli de cavités; il a observé les couches de ce calcaire à une demi-lieue du Mans, entre la Sarthe et la route d'Alençon, sur la droite de cette route, presque vis-à-vis le village nommé /e lieu des Ruelles. Les échan- tillons de ce calcaire qu'il m'a confiés, renferment deslimnées trés-semblables au lorgiscatus et à l'ovum, des planorbes très- yoisins du planorbis rotundatus, l'helix Menardi, etc. ; ils sont comme pétris du bu/imus pygmeus, mentionné plus baut. On y voit aussi quelques gyrogonites et des empreintes qui paroissent être celles du cyclostoma mumia et du cy- clostoma elegans antiqua. Un autre échantillon du même lieu, renfermant aussi des bulimes et des gyrogonites , pré- sente en outre des potarnides différens du Lamarkir et en- tièrement semblables au cerithium lapidum, Lam. W faudroit visiter de nouveau cé lieu pour apprécier, s'il est possible, £ les ET D'HISTOIRE NATURELLE, 435 les causes de ce mélange, ou savoir quelles étoient les ha- bitudes du cerithium lapidum qui ne se trouve que dans les assises supérieures du calcaire marin. J'ai reconnu le terrain d'eau douce dans plusieurs parties du Cantal et del'Auvergne , et je puis avancer que je n'ai vu aucun vestige de calcaire marin sur toute la ligne que j'ai parcourue, depuis Aurillac jusqu’à Clermont. Je vais en faire connoître les points principaux. Les deux collines qui dominent Aurillac, à droite et à gauche, sont composées à leur base de calcaire et de marne argileuse. La marne dure, argileuse , est inférieure, le cal- caire la surmonte : il est en zônesdhorizontales sur la colline de l'est, et en zônes obliques dans quelques endroits sur celle de St.-Etienne, à l’ouest. Ce calcaire renferme des silex pyromaques et résinites qui y sont disposés en rognons ow en zûnes assez continues. L'une de ces zônes présente à la colline de St.-Etienne une suite de couches elliptiques et concentriques assez remarquable : le calcaire est marneux, rempli de cavités et de tubulures irrégulières, comme presque tous les calcaires d'eau douce, et renferme, ainsi que les silex, des limnées et des planorbes que nous avons décrits plus haut. Au milieu de cette masse de calcaire et de marne qui a plus de dix mètres de puissance, il y a des lits minces d’un calcaire plus dur qui ne renferme que des empreintes du potamide de Lamarck (1). Au-dessus de ce banc calcaire on voit une belle brèche volcanique employée à Aurillac comme pierre de taille, ét au-dessus de la brèche , une masse considérable de lave com- pacte remplie de cristaux d’amphibole, Ces trois différens terrains , le calcaire d'eau douce, la brèche volcanique et la lave compacte, semblent faire trois étâges “distincts sur les collines. Cette disposition se continue ainsi jusques vers Thiézac. Je n'ai pas pu voir le terrain sur lequel repose le calcaire d'eau douce ; mais je suppose qu'il est appliqué im- imédiatement sur le sol primitif, car près de Thiézac, lorsque ce calcaire disparoît, il est remplacé-par un schiste micacé sur lequel le terrain volcanique est placé sans intermédiaire. (1) I1 y a dans ia@ollection du Conseil des mines de très-beaux échantillons de ces différens calcaires , des silex qui les accompagnent et des coquilles qu'ils renferment ; ils ont été donnés par M. Grasset. M. de Lezer m'a donné un silex résinite venant du même canton, qui renferme des gyrogoniles. Tome LXXII. JUIN an 1811. Kkk 454 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE De ce point jusqu'à Nonette près d'Issoire, en passant? par Murat, St.-Flour et St.-Germain-Lambron , je n'ai vu aucune trace de calcaire, ni de marne calcaire, tout est. primitif ou basaltique ou volcanique. Mais aussi on s'élève pour traverser les collines qui séparent la vallée du Cer, vers l'extrémité de laquelle est Aurillac, de la vallée de l'Allier, dans laquelle nous allons retrouver le terrain d'eau douce. À Nonette, sur la rive droite de l'Allier entre St.- Germain-Lambron et Issoire, on voit une colline dont la base est formée d'un psammite dur (ou grès à parties hété- rogènes ), composé de quartz et de feld-spath en gros grains, sans aucun corps organisé; ce psammite est surmonté de plusieurs lits de marres dures, de marnes friables et de calcaire blanchâtre, compacte et susceptible de poli. Ce cal- caire renferme des empreintes du potamide de Lamarck, remplies de calcaire spathique transparent; la marne renferme aussi cette même coquille et des hélices de Coeq; mais elles y sont souvent comprimées et déformées. Rien ne recouvre ioi le calcaire d'eau douce ; MM. Desmarest fils et Prévost m’accompagnoient : nous avons, à nous trois, visité cette colline dans beaucoup de points, nous avons examiné avec attention tous les blocs de pierres qu'onen a extraits, et nous n'avons pu reconnoitre aucune autre espèce de coquilles que celles que je viens de mentionner. Après Issoire et Coude, on descend sur un plateau qui est encore assez élevé, et où est situé le village d'Authezat; ce plateau est entièrement composé de couches horizontales de calcaire d'eau douce qui renferme une quantité prodi- gieuse de planorbes et de limnées. Nous n’y avons pas vu d’autres coquilles. Le calcaire est toujours supérieur au psam- mite granitique qui forme la base de toutes les collines des bords de l'Allier dans ce canton. Le Puy-de-Corent qui est situé près de Vayre, toujours sur la route d'Issoire à Clermont, est calcaire à sa base. Nous n'avons d’abord vu dans la partie de cette base qui est du côté de Vayre, aucune espèce de coquille, ni marine, ni fluviatile, quoiqu’elle présentât tous les caractères du cal- caire d'eau douce. Mais après avoir passé par-dessus son sommet, nous avons retrouvé le banc calcaire du côté du village de Corent, un peu au-dessous de ce village , iei il contient une immense quantité de limnées et de planorbes. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 455 Nous avons pu très-bien reconnoitre la constitution de la montagne, et par conséquent la position du calcaire d'eau douce par rapport aux autres roches. La base de la colline, presqu’au niveau de l'Allier, est formée d’un calcaire compacte dans les fissures duquel suinte une grande quantité de bitume. Ces mêmes fissures sont sou- vent remplies de baryte sulfatée en gros cristaux et d'arra- gonite. On ne voit point de fossile dans cecalcaire compacte, - qui ne présente d'ailleurs aucun des caractères du calcaire d’eau douce. Au-dessus est un banc puissant de psammite granitique, souvent très-dur ; ses assises inférieures renferment du bi- tume et de l’arragonite fibreuse. Le calcaire d'eau douce recouvre le psammite. Il est lui- même "A par le basalte et par les roches volcaniques qui forment le sommet du Puy-de-Corent. Telle est la succession des couches qui composent géné- ralement ce canton de l’Auvergne et la place qu'ytient le calcaire d’eau douce, le seul que nous ayons pu voir. Je ne décrirai point la situation du calcaire du Puy-de-Monton, du Crest, de Gergovia, des environs de Clermont, elle est généralement la même. Nous n'avons pu reconnoitre aucune coquille d'eau douce dans le calcaire de ces derniers lieux, mais nous n'y avons découvert non plus aucune coquille marine (1). On trouve aux environs de Clermont, vers le sommet du Puy-du-Jussat, des côtes de Clermont, etc., un dépôt cal- caire assez abondant et assez puissant, d’une toute autre sorte que ceux que je viens de décrire, mais qui n'offre encore aucune trace d'origine marine. Il est formé d’une multitude de tubes droits et courts d'environ trois centimètres de lon- gueur sur cinq à six millimètres de diamètre. Ces tubes sont composés ou de petits grains de sable de diverse nature (1) M. Cordier, ingénieur des mines , m'a remis un morceau de calcaire de Gergovia, qui paroît entièrement composé de débris de coquilles ou de petites coquilles bivalves, Il ne m’a pas été possible de déterminer à quel genre pou- voient avoir appartenu ces débris. D'ailleurs ce minéralogiste qui a étudié parti- culiérement le sol de l’Anyergne ne se rappelle pas yavoir rencontré de coquilles marines, Kkk 2 436 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE où de petites coquilles , le tout réuni par un ciment calcaire. Ils sont souvent agglutinés parallèlement les uns aux autres; quelquefois ils se croisent dans tous les sens, d'autres fois enfin ils sont divergens et disposés de manière à former des espèces de bassins circulaires de & à 6 décimètres de diamètre. M. Bose, qui a le premier fait connoître ce singulier fossile, l’avoit trouvé près de Moulin. Il le regarde comme des tubes formés par des animaux analogues aux larves des friganes, et l'a nommé ?ndusia tubulata. M. Ramond en a fait mention dans la Notice qu'il a donnée sur la cons- titution minéralogique des principaux points de l'Auvergne, dont il a mesuré la hauteur , -et il admet cette origine. Quelques naturalistes cependant ne veulent pas considérer ces tubes comme des demeures d'insectes, ils les regardent comme des résultats d'une concrétion calcaire qi auroit enveloppé une multitude de brins de végétaux détruits par la suite. Il est certain qu'une infiltration calcaire, postérieure à la formation de ces tubes, les a réunis dans beaucoup d'en- droits plus solidement qu'ils ne l’eussent été sans cette cir- constance, et a tapissé leurs parois tant extérieures qu’inté- rieures de manière à les déformer. Mais nous ne pouvons admettre qu’ils soientuniquement le produit d’une concrétion. Leur nombre immense, leur parfaite ressemblance, en forme, en grosseur et en longueur; leur disposition régulière, la manière dont une de leurs extrémités est constamment ter- minée en une calotte hémisphérique, indique pour leur fôrmation une cause plus régulière qu’une concrétion faite sur des brins de végétaux’qui auroient dû étre jetés am basard , et varier à l'infini dans leur longueur et dans leur grosseur. Enfin je possède plusieurs de ces tubes dont la cavité n'ayant point été enduite de l'infiltration calcaire, laisse voir la disposition régulière et en forme de mosaique des petits grains de sable dont ils sont formés. Les parois intérieures sont parfaitement unies, et il y a ressemblance parfaite entre ces tubes et ceux que forment certaines larves de friganes. On voit que ce calcaire, dont la position m'a paru un peu différente de celle de l’autre calcaire d'eau douce, n'offre aucun caractère d’une origine marine, et qu'on peut le re- ° : ET D'HISTOIRE NATURELLE, 437 garder encore comme déposé dans l'eau douce. Je sais bien que les sabelles, et surtout les amphitrites, construisent des tubes qui ont la même forme et la méme structure; mais quani elles agglutinent des coquilles, ce sont des coquilles marines , tandis que M. Bosc et moi n’avons vu dans celles quicomposent quelquefoisles indusia,que des coquilles d'eau douce qui m'ont paru étre du genre des ampullaires. | La formation d'eau douce se montre encore en Auvergne, dans un autre point non moins important, c'est à Vertaison et à Pont-du-Chäteau, lieu célèbre parmi les minéralogistes, par les belles calcédoines mâmelonnées enduites de bitume qu'il fournit. La colline qui les renferme est une brèche composée d’une pierre que je rapporte à l'espèce de la vake,, et de calcaire gris assez dur quoique d'apparence marneuse. Le bitume coule abondamment dans les fissures de cette brèche, et c'est aussi dans ces fissures que se trouvent les exudations mamelonnées de calcédoine, etc. Cette même brèche renferme de grandes masses de calcaire compacte bi- tumineux, également recouvert de calcédoine et de quartz, et des fragmens: de granite. Elle est plus désagrégte vers la surface du sol qué dans la profondeur , et en perdant son agrégation, elle prend , comme certains basaltes, une forme sphérique. Cette brèche alterne avec du calcaire marneux et en est recouverte. Vers le sommet de la colline les couches calcaires sont inclinées , plus minces, plus feuilletées que vers sa base, et elles alternent un grand nombre de fois avec du grès im- prégné de bitume. Aucun de ces calcaires ne renferme de coquilles marines ; mais, au contraire, le calcaire marneux en bancs renferme la grosse hélice striée que j'ai nommée plus haut hélice de Ramond. On ne trouve ordinairement que le moule intérieur de cette hélice et l'empreinte de la surface extérieure de sa coquille. La coquille elleméme a été transformée en bitume friable , ou , pour parler plus exactement, elle a disparu et a été remplacée par du bitume qui s'est moulé dans la cavité qu'elle avoit laissée. On voit par les descriptions précédentes faites sur les lieux avec MM. Prévost et Desmarest, et quelquefois même avec M. Ramond et M. Cocq, qu'il n’y a aucune trace de la mer dans toute la partie du Cantal et de l’Auvergne que j'ai 438 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE traversée. M. Cocq, qui connoît si bien ces montagnes, n'a pu m'indiquer dans ces mêmes cantons aucun point où il ait vu du calcaire évidemment marin. Je ne sais pas comment les choses se comportent dans les autres pays volcaniques où l’on a observé le calcaire et les productions volcaniques alternant à plusieurs reprises. 11 paroït, d’après les descrip- tions données par MM. Faujas, Fortis, Dolomieu, etc., que dans le Vivarais et dans le Vicentin, ce calcaire est marin ; mais on voit qu'il ne faut pas comprendre les parties de l'Auvergne et du Cantal dont je viens de parler, dans l'hy- pothèse qui attribue au retour de la mer, plusieurs fois répété, les couches calcaires qui alternent avec les déjections volcaniques. \ Tels sont les lieux où j'ai observé le terrain d'eau douce. Je sais qu'il en existe dans d’autres endroits. Le Bastberg, près de Strasbourg, où l’on trouve des os de paleotherium, renferme aussi des coquilles d’eau douce. M. Passinge avoit déjà remarqué, en 17097 (1), des coquilles d’eau douce dans des marnes du département de la Loire, c'est-à-dire, dans les vallées parallèles à celle de l’Aïlier; il cite dans les plaines de Roanne un tuf calcaire blanc et tendre, renfermant des petits coquillages d'eau douce, sans dire à quel genre ils peuvent être rapportés. e Lamanon dit avoir observé dans les montagnes de Provence des bancs énormes de coquilles fluviatiles sur des bancs de coquilles marines, et il est probable que l'éveil que nous avons donné aux naturalistes sur cette formation, la fera bientôt reconnoitre dans beaucoup d’autres parties du globe. En se bornant pour l'instant aux cantons que je viens de décrire, on voit que la formation d’eau douce n’est point un petit dépôt particulier à quelques points des environs de Paris, mais qu’elle a couvert dans des lieux situés à de grandes distances , des étendues considérables de terrains, qu'elle s'y montre toujours la même en conservant ses mêmes caractères , et j'oserai dire ses caractères les plus minutieux. On y voit toujours les mêmes coquilles, et quoique situées à plus de 200 lieues les unes des autres, il ne m'a pas paru que les limnées , les planorbes, etc., du Bastberg , d'Orléans, (1) Journal des Mines, n° 35 et suivant, ET D'HISTOIRE NATURELLE, 439 de Paris , de l’Auvergne et du Cantal, fussent d'espèces dif- férentes. Une différence de quelques mètres dans la direction verticale apporte quelquefois plus de changemens dans les espèces, qu'une différence de 200 lieues dans une direction horizontale. Les gyrogonites, ces corps microscopiques d'une structure si remarquable et d’une nature encore inconnue, l'accompagnent constamment et ne se trouvent qu'avec elle. Partout le calcaire d'eau douce présente ces cavités et ces tubulures sinueuses qui le font reconnoitre au premier aspect: presque partout il renferme des silex qui ont généralement l'apparence résineuse. Malgré la présence de ces silex, l’a- nalyse chimique n'indique presque point de silice dans les parties calcaires du même banc, lorsqu'on a soin de les choisir exemptes de silex visible. Souvent mème ce calcaire est très-pur, ne renfermant point de quantités notables ni de silice, ni d'alumine, Il ne faut donc pas le confondre avec les marnes, et si je l’ai quelquefois nommé ainsi dans le cours de ce Mémoire, c'est pour me conformer à l'usage reçu; c'est aussi parce que n'ayant pu encore analyser toutes les variétés que j'ai recueillies, je ne puis pas affirmer qu'il n'y en ait aucune de réellement marneuse, c'est-à-dire mélée de silice et d'alumine, fusible, etc. Nous pouvons donc dire que jusqu’à présent la formation d’eau douce a offert l'exem- ple d’un terrain particulier, dont les caractères sont d’une simplicité et d’une constance remarquables. On voit aussi que cette formation n’a pas toujours été la dernière, puis- qu'elle a été recouverte aux environs de Paris par une for- mation marine , et en Auvergne, par de puissantes couches de matières volcaniques qui y ont été répandues à plusieurs reprises et certainement à des époques différentes. On ne peut donc l’attribuer en aucune manière à des marais dessé- chés dans les premiers temps historiques. Après avoir établi par des preuves et des observations assez multipliées , l'existence d'une nouvelle sorte de terrain, es- sentiellement composée de coquilles d'eau douce, il me reste à prévenir par quelques développemens, les objections qu'on pourroit faire contre la formation spéciale et contre l’origine présumée de ce terrain. J'ai fait voir que les coquilles et les autres débris qu'on. trouve dans les terrains dont on vient de faire l’histoire, ap- partiennent à des animaux semblables à ceux qui habitent 4%o JOURNAL DE PHYSTQUE, DE CHIMIE actuellement nos continens etinos eaux donces. Je dois mon trer à présent que les couches qui renferment des débris de coquilles marines, ne contiennent généralement point de coquilles d’eau douce , et que les coquilles qu'on y dé- signe sous des noms de genres qui renferment des coquilles d'eau douce, sont presque toujours mal placées dans ces genres. J'ai examiné dans ma collection, dans celle de M. Defrance et dans celle de M. de Lamarck, les coquilles de Grignon, rapportées aux genres plauorbe, eyclostome,"cyclade, mé- Janie et ampullaire. Je me suis assuré que toutes ces espèces différoient des coquilles d’eau douce placées dans le même genre, non-seulement par des caractères spécifiques, mais encore par des caractères génériques souvent très-tranchés. M. de Lamarck en convient, et quoiqu'ii ait déjà porté cette branche de la Zoologie à un haut degré de perfection, je sais qu’il s'occupe de subdiviser encore ces genres, de manière à opérer la séparation complète des coquilles marines, des terrestres et des fluviatiles. Ainsi, les espèces de cérites qui habitent l'embouchure des fleuves et les marais des bords de la mer, diffèrent peut-être assez des autres cérites pour qu'on puisse en faire un genre ou au moins un sous-genre particulier, comme nous l'avons développé plus haut. Le genre turbo paroît être généralement marin, ou tout au plus habitant des étangs d'eau saumätre qui communi- quent ayec la mer: aussi n'en connoissons-nous pas dans le terrain d’eau douce. C’est à tort qu'on a rapporté à ce genre la petite coquille des étangs du Hävre et de Maguslone. Les patelles et les crépidules fluviatiles diffèrent à peine par la coquille, des espèces marines, mais l'animal des patelles marines est différent de celui des patelles d'eau douce. Le genre cyclostome doit être divisé en deux genres, les cyclostomesterrestres et les cyclostomes aquatiques (i).Parmi ces derniers il paroit qu'il y en a qui habitent les étangs d’eau saumätre. Tous les cyclostomes indiqués à Grignon, diffèrent des vrais cyclostomes qui sont operculés et qui ont (1) M. de Lamarck vient d'exécuter cette division, Il nomme les derniers paludines, le ET D'HISTOIRE NATURELLE ‘! 44t le bord de la bouche réfléchi (D Quelquefois cependant le cyclostoma mumia se trouve mêlé avec des coquilles marines, ou placé immédiatement au-dessus des coquilles, mais on ne le voit ainsi que très-rarement ettoujours dans les derniers lits de la formation marine, comme à Pierrelaie, à Grignon même où on le trouve tout-à-fait au-dessus du banc de coquille, éte. (2). Le genre Dulime, tel qu'il a été limité par M. de Lamarck et par Draparnaud , est bien caractérisé. Il ne renferme plus aucune coquille marine. Les bulimes marins qu'on cite à Grignon différent par des caractères génériques des vrais bulimes et doivent former des genres à part , ou être réunis aux phasianelles, coquilles marinés solides ét operculées qu'il faut prendre gaärde de confondre avec ce genre et avet le suivant. : Les lymnées bien caractérisés constituent un genre essen- tiellement d’eau douce. Le /ymnæa palustris que M. de Lamarck cite à Grignon, sé trouve, ilest vrai, près de ce hameau; mais hors de la couche marine, et dans le terrain d’eau douce qui le récouvre à quelque distance, il acecoi- pagne le cyclostoma mumia. 1 J'ai vu presque toutes les mélanies que M. de Lamarck cite à Grignon : elles différent des mélanies d’eau douce de manière à présenter des caractères suflisans pour l’éta- blissement des nouveaux genres que M. de Lamarck s'occupe même à former: Ainsidans les melanta costellata et unisul- cata, le péristome est continu, la bouche n'est cependant point circulaire et elle est éntiérement détachée de l& colu- melle: vers son bord supérieur. Dans le mélania cochlea- rellæ, la lèvre est prolongée en cuiller, etc., etc. Le 77e- lanta marsinata a le péristome garni d’un rebord remar- quable, ete. M: de Lamarck pense aussi que le genre auricule doit être séparé en plusieurs genres, dont l'un séra uniquement () M, de Lamarck fait remarquer qu’il n’y a queles coquilles terrestres qui aient le bord ou péristome réfléchi, Ainsi les petits bulimes déerits page 376 et suivantes ne sont pas terrestres. (2) Geci n'infirmme pas ce que nous avons dit plus haut sur le gisement de cette coquille prés de Grignon! nous n'avons pas vu ce dermier gisément ; mais nous avons, vu les échantillonsqui-en venoïent et quiandiquent un lerrain d’une toute autre malière que celui de Grignon ,que nous ayons étudié à plusieurs reprises. Tome LXXII. JUIN an 1811. LI1 442 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE composé des auricules terrestres, et les autres des auricules marines ; il m'a fait voir dans sa collection le projet de cette utile réforme. Il en est de méme des ampullaires. Les ampullaires fluviatiles ont la bouche plus étroite, plus ellip- tique, que les ampullaires marines , elles sont aussi plus minces , le bord columellaire de la bouche est coupant, etc. L'ampullaria ampullacea (bulimus ampullaceus) de Bru- guière seroit le type de ce genre. Nous ne connoissons au- cune de ces ampullaires dans les couches marines. M. de Roissy a très-bien senti ces différences , et insiste à l’occasion de ce genre sur la nécessité de séparer les coquilles marines des autres. Le genre kelix habite exclusivement la terre et les plantes des marais. Il est tellement tranché qu'on n'y a introduit jusqu'à présent aucune coquille marine. On a vu combien il étoit commun dans certains terrains d'eau douce. Des trois planorbes cités à Grignon , aucun ne peut se rapporter exactement à ce genre , et le carinata à beaucoup de rapport avec les delphinules. Les nérites fluviatiles et les nérites marines doivent former deux genres distincts : ces dernières ont la lèvre interne dentelée, tandis que les premières ne l’ont pas. Ainsi,quoique parmi les coquilles il y en ait peu qui se ressemblent plus que les nérites fluviatiles et les nérites marines, on voit qu'il y a encore des différences sensibles. Les maillots (pupa) marins et terrestres se ressemblent complètement par la coquille; on ne connoit pas l'animal des premiers, mais M. de Lamarck doute que les pupa uvæ et n7umia qu'on indique comme marins, le soient réelle- ment; au reste, un conchyliologiste habile saura presque toujours distinguer par le portet par les caractères spéci- fiques les espèces marines des autres espèces du même genre, dans le cas où les différences seroient trop peu caractéris- tiques pour servir à diviser les genres. Le nombre des genres de coquilles bivalves qui habitent les eaux douces, est, comme on sait, réduit à trois; il est cependant assez remarquable que nous n’ayons pas trouvé une seule coquille de ces genres dans le terrain d'eau douce. Il est vrai que M. de Lamarck cite un cyclade dans le terrain de Betz qui est de formation marine; quoique la coquille qu’il a décrite sous ce nom se rapproche en effet un peu du genre cyclade , elle en diffère essentiellement par la forme ET D'HISTOIRE NATURELLE, 443 générale et même par la disposition des dents dela charnière, comme on peuts'en assurer en étudiant celles que nous avons vues dans la collection de M. Defrance, et en les comparant avec les cyclades de nos marais, En supposant maintenant qu'on trouvât dans le terrain d’eau douce des coquilles tout-à-fait différentes de celles qui habitent nos marais et nos fleuves, on ne devroit rien en conclure contre l'origine de ces coquilles: car il est très- possible qu'il existät autrefois des espèces de coquilles ter- restres ou fluviatiles, très-différentes de celles qui vivent actuellement. Ces races de l’ancien monde auront étééteintes, comme cela nous paroit certain pour un très-grand nombre de coquilles marines. D'ailleurs sans recourir à cette supposition, fondée cepen- dant sur l'analogie la plus complète, ne trouve-t-on pas dans les eaux douces des autres parties du globe, des co- quilles tout-à-fait différentes de celles qu'on connoit en Europe. Ainsi les bulimus Dombeianus, octonus, et Lerebraster de Bruguière , et bien d'autres espèces de ces genres qui habitent l'Asie, l'Afrique ou l'Amérique, nous offrent des coquilles très-turriculées avec un pe nombre de tours de spire. D'autres ont une forme conique, comme le bulimus trochoïdes de Bruguière, etc. Le genre mélanie dont les formes sont si singulières, est peut-être entièrement étranger à l'Europe proprement dite. M. Olivier a apporté de son voyage en Orient des coquilles fluviatiles et terrestres qui ne peuvent se rattacher exacte- ment à aucun genre connu , et qui ont plus de ressemblance avec des buccins qu'avec aucune coquille fluviatile. Il les a décrites sous les noms de mélanie bulimoïde de Scio, de mélanie à côtes de l’Oronte, etc. Son cyclostome caréné des canaux de l'Esypte, l'hélice crénelée des environs d’'A- lexandrie, le cyelostome bulimoïde du même lieu, s'éloi- gnent par leurs formes et leurs caractères génériques de toutes les coquilles d'eau douce que nous connoissons. Cer- tainement si l’on eût trouvé ces coquilles à l'état fossile , on n'eût pas différé de les regarder comme marines. Mais il faut réfléchir quelque temps, il faut examiner son sujet sous tous ses rapports avant de décider qu'une coquille fos- sile étoit marine ou fluviatile. Il y a donc des cas dans lesquels on ne pourroit démontrer Lil 2 444 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE si des coquilles fossiles sont marines, fluviatiles ou terrestres: Aussi n'est-ce pas sur la présence de quelques coquilles dou- teuses que nous avons jugé que certains terrains devoient avoir été déposés dans l'eau douce; mais c’est sur la pré- sence constante d'une immense majorité de coquilles qu'on n'a jamais vu âilleurs, c’est sur l'absence constante de tout corps marin que nous ayons porté ce jugement. Car jusqu à présent on n'a trouvé Îles coquilles marines.et les coquilles d’eau douce réellement mélées ensemble qu'aux carrières de grès de Beauchamp près Pierrelaie. Nous avons visité ce lieu et nous croyons avoir apperçu la eause locale de ce singulier mélange; nous l'avons expliqué dans notre mémoire sur la géographie des environs de Paris. ]l me suf- fira donc de répéter ici que dans ce lieu le terrain calcaire d'eau douce, qui forme la surface du sol, repose immédia- tement sur le sable marin qui en fait le fond. Il est assez naturel qu’il y ait eu mélange des deux terrains dans ce point de contact. Un fait analogue se présente à Montmartre, dans le fond de la troisième masse, et se présentera peut-être ailleurs. Dans ce lieu le calcaire marin coquillier fofmoit une espèce de mamelon ou de côte relevée; le gypse en se déposant immédiatement sur ces derniers bançs qui sont poreux et friables, a enveloppé les coquilles marines qui s'y trouvoient. Rien ne nous prouve d'ailleurs que le gypse ne puisse pas se déposer dans une eau marine. Nous avons même des ob- servations qui l'indiquent. La formation marine supérieure renferme de distance en distance des petits lits de gypse, et les huitres sont souvent couvertes de cristaux de sélénite, comme en le yoit en Angleterre près d'Oxford. Il n'est pas possible d'admettre l'hypothèse du transport, des productions terrestres dans la mer au moyen des fleuves. Ce transport, peut bien avoir amené dans la mer quelques débrisde végétaux etquelques coquilles fluviatiles ét terrestres; mais alors les terrainsiqui en sont composés, doivent présenter les formes et tous les caractères des terrains, de transport, c’est-à-dire un mélange de toutes sortes de matières hétéro- gènes, plus de débris que de corps entiers, des sables gros- siers , des couches inégales et sans suite. On ne voit rien de semblable dans les terrains d'eau douce ; le calcaire y est presque pur; tout yest en place et parfaitement entier ; les coquilles les plus délicates s'y présentent parfaitement conserÿées; à peine même y trouve-t-on quelques débris de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 445 tes coquilles , tandis qu’on en voit une si grande quantité dans les couches marines. Cette observation, qui est aussi constante que tous les autres caractères du terrain d'eau douce, doit faire supposer une grande tranquillité dans les eaux au milieu desquelles ces coquilles ont vécu. Elles sont déposées en bancs, souvent très-minces et parfaitement ho- rizontaux, comme les assises du calcaire et les zônes du silex qui les renferment; les silex y sont en bancs souvent continus et jamais en morceaux roulés (1). Les dégasemens de gaz indiqués par les tubulures se sont presque toujours faits verticalement et sont souvent partis d’un même plan, ce qui est encore une preuve de la tranquillité du liquide et de l’homogénéité du terrain. Enfin l'immense étendue de ces dépôts qui occupent, comme on l’a vu, des espaces de plus de 1200 lieues carrées , et qui ne présentent sur une aussi grande surface aucune image de désordre, rend cette hypothèse absolument inadmissible. L'étendue de ces masses d'eau douce ne doit pas nous éton- ner, nous en connoissons qui sont au moins aussi vastes dans l'Amérique septentrionale. Si les lacs Supérieur, Mi- chighan, Huron, Érié et Ontario avoient la propriété de déposer des couches pierreuses sur leur fond et qu'ils vinssent à se dessécher, ils laisseroient des terrains d'eau douce plus grands qu'aucun de ceux que je viens de décrire. Qu'on ne croie pas, d'après l'exemple que je viens de Tap- porter, que nous adoptions l'hypothèse des lacs, proposée par Lamanonet par d’autres naturalistes. Nous possédons trop eu de faits pour établir aucune hypothèse raisonnable sur L formation de la terre. Nous nouscontentons d’annonceraux naturalistes « qu’il existe des terrains formés avant les temps »historiques,quisonttouscomposésdelamémemanière, qu'ils » présentent les mêmes caractères, quoique situés à de grandes » distances les uns des autres, et que ces terrains au lieu de » renfermer des productions marines, ne contiennent généra- » lement que des productions terrestres et d'eau douce. » EEE ————_.—._ "|" — — ————— (1) Rien n’annonce aux environs de Paris que les silex et les coquilles qu'ils contiennent aient ététransportés péle-méle avec le sable quiles renferme.'T'out, au contraire, est en place et parfaitement conservé. Le calcaire est exempt de sable et méme de silice. Les bancs y sont souvent conlinus, de même épaisseur et étendus horizontalement sur une surface de plusieurs lieues carrées. (Mont- morency, hauteurs de lOuy, plaine St-Denis, Longjumeau, Palaiseau, Vil- Jegenis, toute la Beauce , toute la forêt de Fontainebleau , tous les euvirons d'Orleans, etc., ect.) OBSERVATIONS METEOROLOGIQUES FAITES THÉRMOMETRE EXTÉRIEUR Î 4 © PR CN ES AROMETRE METRIQUE. £ : 5 heures. ° heures. o heures- mille | heures. mill. ul ° 1[àa3s. —H21,6|à 45m. 12,0] +21,oftimidi........ FO 572) ANGTS ER cette 752,40/755,72| 15 2[à midi H18,5{à 1125. 12,3] +18,9[à 11 1s....... 762 16| 4m... 755,00|757,92| 14 3là3s +18,68/à 4 2m. + 8,9] +16,0[à8im......... 763.90|à91s..:...... 762,22|763,44| 16 qlà3s. Æ-r10,9{à 4 Em. +rr1,0] H18,0/à midi. ....... 76272|à 45: m........ 761,40|762,72| 16 SRB s. +19,4fà 4 à m. 126] +14,8/à 95 s........ 760,02|à 3 s..... .....756.60,757,80| 161 6a3s +#17,5/à 43m. +-11,0| H17,2|à 6 Em.......762,10/à 105.........759,00|761,90| 16: | 7là midi 14,8 à115s. + 8,0] +14,6]à 11 Es...... 756,32] à+midi.-..... 795,42|755,42| 15/0 8[à 3 s. +iB,ofà4 Em. + 7,6] +#+17,5/à 7 im... 7D6D2 ALTO See etes 754,42 75636 16, gfadrs. Hi73làrrs. + 8,6] +19,5fà 11 5....... PO 00 DIM RES ele SE 749,:70|749,8° 15,4 10[à3s. +z2r,2là 44m. + 7,3] +20,8/à 8 m.….......757,00!à 3s.......,..754,60|755,60] 16% | 11[A9S. +20,8|à4: m. + 9,9] +22,o[à 7: m...... TOP TA AO RISEe Eee ee 755,64|757,29| 1748 ofà midi H25,ofà 47m. +126] +25,0 à 4:m.......759,84|à 35.......... 755,08|752,84! 19] 19/4 35. +26,ofà 4 Em. 12,7) +24,8|à 4 Fm...... 749,20|à 10 25,...,.. 746,52|748,38| 20,2 | Igjà3s. “+H22,0olà1os.. 11,0] +10,3|[à 104 s.......7b9,80|à 43 m.......747,50|792,09 18,2 | 19[à 3s. —Hz2o,ofà 44m. + 8,0] +22,5|à 85 m...... 754,42|à 6 s ‘-.-.792,50|753,70| 1958 | 16[à midi Hz21,3là4im. Hrr,o] +21,ofà114s...... 754,82|à 43 m........ 752,52|794,20 19,4 ! 171435. +23,o[à 44m. 11,5] +22,3|à midi. .......759,92|à 4 + m....... 7$4:90|755,04| 194 16f4midi —<+23,9|à 4 Em. +r4,7| +23,9là 10 s.....,.. 756,10|à 4 m........774600|755,76| 19,01] Alrolà3s. © minué.... » La même chose aura pu avoir lieu pour des gypses. » Il est certain que plusieurs carrières de gypse ont été » formées dans des lacs, comme nous venons de le voir dans les lagonis de Toscane. » Des lacs particuliers auront pu contenir dés sels phos- » phoriques calcaires , ou phosphates calcaires (comme les » phosphates de l'Estramadure). » D'autres lacs, tels que la Mer-Morte, auront pu tenir » en solution des subtances bitumineuses ; elles se déposeront » suivant les lois des affinités, et formeront des couches » de charbon. » Il est également possible que des substances métalliques » aient été tenues en solution dans les eaux de quelques lacs. » On ne peut douter que plusieurs mines de sel gemme » ne se soient formées dans des lacs, comme nous le verrons » dans les lacs de Tozzer, d'Ardea.... » ENFIN 1L EST CERTAIN QU'UN GRAND NOMBRE DE PHÉNO= » MÈNES GÉOLOGIQUES ONT ÉTÉ OPÉRÉS DANS DES LACS (d'eau » douce), page 141.» Tous les autres géologues ont reconnu des faits analogues ceux-ci. Tous ces faits prouvent que les géologues, en général, et moi en particulier, avons reconnu qu £/ y avoit des terrains formés sous l'eau douce. Si les lagonis de Toscane se desséchoient , on y trouveroit du gypse formé sous l'edu douce. Ce gypse contiendroit vrai- semblablement du spath boracique. On y trouveroit aussi des pierres calcaires... Si les lacs de Tozzer, d'Ardéa.... se desséchoient, on y trouÿeroit des mines de sel gemme formées sous l'eau douce. D Se Mar era Foret te eh16 aile: 87e 1e) ele / st te . CHRCRECNREC EEE SE RS) La question n'est donc plus de savoir s'i/ peut se former des terrains sous les eaux douces. C'est un fait incontestable; mais il faut rechercher, 1° Si on peut avoir des caractères assurés pour reconnoître ces terrains. 2°, Quels sont ces caractères. 464 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 3°. Si en particulier les gypses de Montmartre et tous les terrains dont 1l est parlé dans le Mémoire précédent, ont été formés sous les eaux douces. Cette dernière proposition a été contestée par plusieurs naturalistes qui l'ont combattue par des faits positifs. Nous allons soumettre au lecteur les faits dont on s'appuie de part et d'autre. Ceux qui prétendent que les gypses de Montmartre et les autres terrains qu'on appelle dans le Mémoire, formation sous les eaux douces, ont été réellement formés sous les eaux douces, fondent leur opinion sur la nature des fossiles, et principalement celle des coquilles qu’on y trouve, qu’on dit être des coquilles d'eau douce. « Ce qui caractérise essentiellement le terrain d'eau douce, » dit Brongniart (Mémoire précédent, page 413), c’est la » présence habituelle des coquilles fossiles presque toutes :» semblables, pour les genres, à celles qui vivent actuellement » dans nos fleuves, dans nos marais, ET SUR LA SURFACE 3» DE LA TERRE, » Le gypse de Montmartre (dit-il, :brd., pag. 414) contient » quelquefois, mais très-rarement, des coquilles terrestres » qui appartiennent au genre cyclostome. » Ceux qui sont d’un avis contraire se servent des mêmes coquilles fossiles pour soutenir leur opinion , et disent qu'il n’est pe prouvé que ces coquilles qu'on prétend avoir vécu dans les eaux douces, y aient réellement vécu... Premièrement , on a trouvé dans les gypses de Montmartre des coquilles marines : Desmarest et Prevost y en ont trouvé qu'on avoue être marines. Brard , comme nous venons de voir, a réuni un grand nombre de faits qui prouvent la même opinion. J'ai trouvé dans la haute masse de plâtre de Montmartre, qui est la plus pure jun spare, poisson qui vit ordinairement dans les eaux marines. Secondement, j'ai fait voir (Journal de Physique ,t. LXXI, pag. 391) qu'en admettant que quelques-unes de ces coquiiles fossiles ne soient pas marines, cela ne prouve point que ces terrains ont été formés sous les eaux douces; car on ayoue que parmi ces coquilles fossiles de Montmartre, il y en a de terrestres , telles que des cyclostomes. Or ces coquilles n'ont pu être apportées dans les couches gypseuses, que par des causes ET D'HISTOIRE NATURELLE. 465 causes extérieures, telles que des courans. Nous venons de voir que Brongniart dit que ce qui caractérise essentiellement le terrain d'eau douce , est la présence habituelle des co- quilles fossiles qui vivent actuellement dans nos fleuves, dans nos marais et sur la surface de la terre. Plus loin, il dit avoir trouvé dans le gypse de Montmartre un cyclostome terrestre. Dès qu'on reconnoît que plusieurs de ces coquilles fossiles sont terrestres, il faut convenir qu'elles n’ont pu être ap- portées dans ces gypses que par des courans, comme les os des mammifères, des marmoses, des palothérium, des anoplotherium. Le Si ces coquilles fossiles terrestres ont été apportées dans les gypses par des courans, pourquoi celles qu’on appelle fluviatiles n'y auroient-elles pas été également apportées ? Ces faits rapportés par les auteurs en faveur de leur opinion, ne sont donc point concluans, et ne prouvent point que ces terrains n’aient pu être formés dans les eaux des mers. T'roisièmement , j'observerai que la connoissance des co- quilles est encore si peu avancée, que les savans les plus instruits , tels que Lamarck en France, n'ont encore aucun caractère certain pour determiner même les genres, Ainsi ils divisent aujourd'hui en plusieurs genres, des coquilles dont ils n'avoient fait autrefois qu'un genre; tel est le genre du cyclostome. On divise aussi le genre cérite, et on en fait un nouveau genre qu'on appelle potamide, habitant les marais et les embouchures des fleuves. Lamarck sous-divise aussi les auricules, les ampullaires, les nérites..., en /luviatiles, en terrestres et en marines, ainsi que le dit Brongniart. C'est ainsi que l'on fait de nouvelles sous-divisions, et qu'on établit de nouveaux genres suivant qu’on en a besoin. Brongniart , lui-même, convient (Mémoire ci-dessus , pag. 444, lig. 4) « qu’il est des cas dans lesquels on ne » pourroit démontrer si des coquilles fossiles sont marines, » fluviatiles ou terrestres. » Enfin il avoue qu'il est des terrains, comme aux carrières de Beauchamp (Mémoire précédent, pag. 444) où les co- Lies marines et les coquilles d'eau douce sont réellement mélées. Tome LXXII. JUIN an 1811. Ooo 466 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Comment peut-on fonder des systèmes sur des notions si peu avancées? « Nous connoissons encore trop peu Îles coquilles, me » disoit Bosc, pour dire que telle coquille fossile diffère » d’une autre, parce qu'elle est un peu plus renflée, un peu » plus alongée, qu’elle est marine, fluviatile ou terrestre... » Aussi m'a-t-il beaucoup engagé à soumettre à la discussion des savans, dans ce Journal CONSACRÉ A LA VÉRITÉ, la ques- tion des coquilles fossiles et des terrains formés sous les eaux douces. Mais examinons plus en détail le système des auteurs. Ils disent (Æssaisur la Géographie minéralogique des envi- ronsde Paris, Annales du Muséum , VI année, IV Cahier), 1° Une mer a déposé les craies avec plusieurs coquilles particulières , des ananchites, des bélemnites, des pinnes... Ces dépôts cessent, des couches d’une toute autre nature, savoir, d'argile, succèdent. (Ils n'ont point parlé des dépôts de bois bitumineux, que je fais observer tous les ans à mes élèves.) 2°. Une autre mer revient, elle forme ces banes puissans de pierre calcaire, qui contiennent les mêmes coquilles qu’à Grignon. -3 mais peu à peu cette production de coquilles cesse tout-à-fait. 5. Alors le sol se couvre d'eau douce. I se forme des couches alternatives de gypse et de marne qui enveloppent et les débris des animaux que nourrissent ces lacs, et les ôssemens de ceux qui vivent sur leurs bords. 4°. La mer revient une troisième fofs et produit quelques espèces de coquilles bivalves et turbinées. 5°, Mais bientôt cette mer ne donne plus naissance qu'à des huîtres. 6°. Enfin, les productions de la seconde mer inférieure reparoissent, et on trouve au sommet de Montmartre les mêmes coquilles qu’à Grignon, dans les carrières de Gentilly, de Meudon.... 7°. De nouvelles eaux douces ont dû revenir déposer les planorbes, les lymnées, qu’on trouve dans les terrains su- périeurs. Je fais observer depuis douze ans ces terrains à mes élèves, et je les ai décrits (Journal de Physique, tome LXVI, p.309). ET D'HISTOIRE NATURELLE. 467 On n'a pas parlé de mon travail, quoiqu'on cite les plus minutieux détails de celui des autres. j Brogniart dans le Mémoire précédent surles terrains formés sous les eaux douces, a encore donné de l'étendue à ces suppositions , et a cru retrouver ces terrains formés sous les eaux douces dans une grande partie de la France. J'ai répondu à ces observations (Journal de Physique, tome LXXI, page 383), et j'ai dit que, a Les gypses de Montmartre, comme la plupart de ceux du reste de la surface du globe, me paroissent avoir été formés dans le sein des mers. * D. Les suppositions qu'on fait d'allées et venues des eaux desmers, sont des hypothèses qui me paroissent inadmissibles. c. On ne conçoit pas davantage comment des mers ayant déposé les craies et les pierres calcaires, des eaux douces seroient survenues pour déposer les gypses ; comment ces eaux douces auroient disparu, et comment les mers seroiïent revenues une troisième et quatrième fois déposer les huitres et les mêmes coquilles qui se trouvent dans le calcaire. Mais, dit-on, ce sont des faïts, je réponds que les sup- posant exacts, il vaut mieux comvenir quon en 1gnore la cause, que d’en assigner de semblables, et dire: JE NE SAIS pas. d. Mais il me semble qu'on peut assigner une autre cause de la présence de quelques coquilles fluviatiles dans ces terrains; il vaut mieux supposer qu'elles y ont été transportées par des eaux courantes, ainsi qu'on est obligé de le dire pour les cyclostomes terrestres. e. On peut encore supposer qu'en divers endroits de la France, dans lesquels on trouve des coquilles fluviatiles , ces terrains qui ont fait partie de bassins, de lacs écoulés. C’est à l'observation à le décider. ASE J: Quelques auteurs proposent une autre explication de ces faits. « MM. Cuvier et Brongniard , dit Brard, suppo- » sent deux fluides , un salé et un d'eau douce, qui ont déposé » dans ces terrains des coquilles fossiles soit marines, soit » fluviatiles. » : è Lui,aucontraire, suppose avec Faujas un seul fluide d’eau saumâtre, telle qu'elle est à l'embouchure de plusieurs fleuves dans les mers, dans les lagunes de Venise..., dans lesquelles ont pu vivre ensemble ces diverses coquilles. Ooo 2 468 - JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE D'après tous ces faits on peut conclure que, 1°. ÎL N’EST PAS DOUTEUX QUIL AITÉTÉ FORMÉ DES TERRAINS SOUS L'EAU DOUCE DANS LES BASSINS DES LACS. Et ces terrains deviennent portion des continens, lorsque ces lacs s’écoulent. 2, On reconnoitra ces terrains, parce‘qu'ils ne contien- dront point de coquilles fossiles marines, mais seulement des fluviatiles et terrestres. 30. Il est donc possible, en admettant avec Lamanon , que le bassin de Paris et de ses environs ait été un grand lac, que les terrains qui contiennent aux environs de Paris, des planorbes , des lymnées..., décrits par Coupé, aient été formés sous des eaux douces , en supposant qu'il n’y ait point de coquilles marines au-dessus de ces terrains, ni dans ces terrains, et que la mer n’est pas revenue couvrir ces terrains. La méme chose a pu avoir lieu dans plusieurs autres endroits, comme dans le bassin du lac qui s'étendoit depuis Lyon jusqu'en Bourgogne le long de la Saône... (Théorie de la Terre, tome IV), dans les bassins des grands lacs de l'Amérique septentrionale en partie écoulés .. 4°. Mais il paroïit difficile de concevoir que les gypses de Montmartre que les auteurs du Mémoire appellent for- mation d'eau douce, aient été réellement formés sous des eaux douces, puisqu’au-dessus de ces terrains on reconnoît qu'il y en a d'autres de formation marine. On reconnoit que la mer est venue différentes fois recouvrir ces terrains gyp- seux pour y déposer des tellines, des huîtres, des cérites..….. 5°. On avoue que dans ces terrains qu'on regarde comme de formation sous les eaux douces, il se trouve des coquilles terrestres. Ces coquilles terrestres ont dü y être apportées, sans doute, par des courans, comme les débris des animaux terrestres qu on y trouve. 6°. Il se trouve également dans ces terrains des poissons marins, des coquilles marines.... qu’on convient généra- lement avoir été déposés par des eaux marines. 7°. Dans des terrains reconnus de formation marine, tels que Grignon...; on trouve parmi les coquilles marines une assez grande quantité de coquilles qu'on croit être d'eau douce. Lamarck, dit Brard, en compte jusqu à cinquante espèces de ces dernières à Grignon. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 459 Pourroit on dire d'après ce fait, que Grignon a été formé sous les eaux douces? Non. D’autres faits ont fait dire gé- néralement que Grignon a été formé sous les eaux marines; mais on dit aujourd'hui qu’à côté des couches marines de Grignon , il y a des couches formées dans les eaux douces... C'est une supposition. Par la même raison , en supposant qu'il y a dans le gypse de Montmartre des coquilles fuviatiles, on ne pourroit pas en conclure que ces gypses ont été formés sous les eaux douces. 8. Nous avons vu que les connoissances sur les coquilles ne sont pas encore assez avancées pour savoir si telle co- quille est marine, fluviatile ou terrestre. .., et qu’on en fait tous les jours de nouvelles sous-divisions. D Mais rapportons les paroles de Brongniart. « Il y a onc des cas, dit-il (Mémoire précédent, page 444 lig. 4), » dans lesquels on ne pourroit démontrer si des coquilles » fossiles sont marines, fluviatiles ou‘terrestres. Aussi n'est- » ce pas sur la présence de quelques coquilles douteuses » que nous ayons jugé que certains terrains devoient avoir » été déposés dans l’eau douce; mais c’est*sur la présence » constante d’une immense majorité de coquilles, qu'on n’a » jamais vu ailleurs : c’est sur l'absence constante de tout > corps marin, que nous avons porté ce jugement; car » jusqu'à présent on n’a trouvé les coquilles marines et les » coquilles d’eau douce réellement mélées ensemble, qu'aux » carrières de Beauchamp près Pierre-Laie... » L'auteur rapporte ici des faits qui prouvent que son opinion est bien éloignée d’être démontrée. a. Il est des cas, dit-il, où on ne pourroit démontrer si des coquilles fossiles sont marines, fluviatiles ou terrestres. Donc on ne sauroit tirer de ces coquilles des conséquences pour avancer que les terrains où ces coquilles se trouvent, sont marins, fluviatiles ou terrestres. b. On a trouvé dans les carrières de Beauchamp les co- quilles marines, et les coquilles d’eau douce réellement mélées. Pourroit-on tirer la conséquence de ce fait que ce terrain a été formé sous les eaux douces ou marines. c. Cest sur l'absence constante de tout corps marin que nous ayons dit qu'un terrain est de formation d'eau douce. 450 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Or on a trouvé dans le gypse de Montmartre des poissons et des coquilles marines: donc il n'est pas prouvé que ces gypses sont de formation d’eau douce. d. Nous avons jugé que certains terrains avoient été dé- posés dans les eaux douces par la présence constante d’une immense majorité de coquilles qu'on n'a jamais vues ailleurs. Si on ne les à jamais vues ailleurs, comment peut-on savoir si elles sont fluviatiles, terrestres ou marines...... Tels sont les faits principaux qu’apportent les savans pour décider si tel terrain est de formation marine, ou de for- mation d'eau douce. C'est aux observateurs à démontrer par de nouveaux faits, de quel côté paroit être la vérité. La discussion doit être calme, faite de bonne for et sans humeur. Je continuerai de présenter au lecteur les nouveaux faits et les nouvelles observations que cette discussion fournira: et sans doute elle en fournira d’intéressans; car on se livre aujourd’hui avec la plus grande ardeur à l'étude des coquilles fossiles, qui avoit été trop négligée jusqu'ici. Les naturalistes des autres contrées , et particulièrement la Société géologique de Londres, ne manqueront pas de faire des recherches analogues. Tous ces travaux réunis nous fourniront de nouvelles con- noissances sur ces questionsimportantes. On connoîtra mieux les coquilles, et on sera plus à même de juger si tels ter- rains ont été formés sous les eaux douces ou sous les eaux marines. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 47? MÉMOIRE SUR LE STRYCHNOS TIENTE ET L’ANTIARIS TOXICARTA, Plantes venéneuses de l’ile de Java avec le suc desquelles les indigènes empoisonnent leurs flèches, ET SUR L’'ANDIRA HARSFIELDII, Plante médicinale du méme pays; Par M. LESCHENAULT , Naturaliste-Voyageur, pensionné du Gouvernement. EXTRAIT. Daxs les régions équatoriales, dit l'auteur , les sues des plantes , sans cesse élaborés par l'effet d'une végétation con- tinuelle, ont un degré d'intensité bien plus grand que dans les contrées tempérées. Les plantes salutaires ou nuisibles ont plus de vertu. L'auteur, qui a demeuré long-temps à Java, a fait des recherches particulières sur le poison fameux dont se servent les Indiens des Moluques et des îles de la Sonde, connu sous le nom d’ipo, ou upas. Ces deux mots signifient dans ces îles poison végétal. On a débité sur ce poison, beau- coup de choses inexactes; mais il est parvenu à avoir des renseignemens plus sûrs, Je me suis procuré, ajoute-t-il, non-seulement tes deux espèces de poisons, ou pas, qui s- recuellent et se pré- parent à Java ; mais encore ceux desiles Borneo et Macassar, ce qui étoit assez difficile, parce que les naturels tiennent secrètes ces préparations. 472 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Il existe deux espèces d’upas à Java. Les naturels’ en en- duisent les pointes de leurs flèches qui sont faites de bambou. Les plantes qui les produisent ne paroissent croitre que dans la province de Bagnia-Vangni. L'un de ces poisons se nomme pas antiar. Et l’autre wpas tienté. Ce dernier est le plus violent. M. Deschamps a observé l'arbre qui fournit l’upas antiar. Il fournit une gomme-résine avec laquelle les naturels pré- parent le poison connu sous le nom d'upas antiar. L’antiar est un arbre monoïque d’un genre nouvèau, que l'auteur nomme antraris toxicaria. Il est très-grand, a jusqu'à 100 pieds de hauteur et 18 pieds de circonférence, et n'est point nuisible aux autres végétaux qui croissent autour de lui. É Ses feuilles sont ovales , coriaces, ordinairement crispées, d'un vert pâle, d'une consistance sèche , rudes au toucher, couvertes de petits poils courts et rudes. Fleurs mâles et fleurs femellessur des pédoncules distincts, axillaires souvent séparées, quelquefois geminées. Ses /leurs mäles sont réunies en grand nombre dans un calice commun renversé, ayant la forme d’un champignon. Les étamines sont portées sur un réceptaclecommun, petites, nombreuses , entourées d’écailles. Les anthères ont deux loges, sont presque sessiles. Les écailles du réceptacle sont repliées à leur sommet, et cou- vrent Îles étamines. Les fleurs femelles. Calice épais, uniflore, formé d’environ douze écailles. Un seul germe surmonté de deux styles qui s'écartent l'un de l'autre. Stigmates aigus. Semence. Une seule. Recouverte par le calice qui est per- sistant. Fruit. Le calice se change en drupe de la grosseur d'une prune renflée davantage d’un côté. L'antiar est de la famille des orties, et voisin du genre brosimum. Le suc de cet arbre est très-visqueux, d’une saveur amère; celui des jeunes branches est blanc, celui du tronc est jaunûtre. Les émanations de ce suc,comme celui durmancenillrer, sont dangereuses pour certaines personnes, tandis que d’autres n’en sont pas même affectées. Un Javan que je fis monter sur un de ces arbres, ne put parvenir que jusqu’à 25 pieds, il ET D'AISTOIRE NATURELLE, 473 il fut incommodé et obligé de descendre, tandis qu'un autre fut jusqu'au sommet de l'arbre sans être incommodé. Je fis abattre un de ces arbres. J’eus les mainset ïe visage couvert de sa gomme-résine sans en être incommodé. J'ai vu des lézards et des insectes sur le tronc de l'antiar, et des oiseaux perchés sur ses branches. L'’upa de Macassar est fourni par le même arbre. Le tienté ( strychnos tiente), espèce nouvelle. C'est une grande liane qui n'est nuisible ni aux végétaux, ni aux animaux ; elle s'élève jusqu'au sommet des plusgrands arbres. Il ne découle de sa tige aucun suc; mais ses racines, grosses comme le bras, sont recouvertes d’une écorce mince d’un brun-rougeâtre, d’une saveur amère. Cette écorce fournit la gomme-résine dont on prépare l'upas. On obtient cette gomme-résine par ébullition. L’auteur n’a vu la plante ni en fleurs, ni en fruits. Voici sa phrase descriptive : plante sans épines ; tiges sar- menteuses , feuilles elliptiques , aiguës à leur sommet; vrilles rares , simples et épaisses. Je crois, dit l'auteur , que tous les poisons que l’on prépare dans les îles de la Sonde et les Moluques, et même les Philippines, doivent se rapporter à ceux que fournissent les strychnos tienté et l’antiaris toxicaria. Quant aux diverses préparations que lui donnent les in- sulaires, elles lui paroissent inutiles, puisqu'il a obtenu les mêmes effets avec le suc seul, et que les ingrédiens qu'y mélent les insulaires n’ont aucune qualité vénéneuse. L'andira , espèce nouvelle, est une plante qui se trouve dans les montagnes de T'ingar, district de Passourouong. Les indigènes la nomment prono-dijivo, mots qui peuvent se traduire par ceux-ci, qui donne de la force à l'ame. Les Javans regardent les fruits de cette plante réduits en poudre, et mélangés avec les alimens, comme propres à pré- venir une foule de maladies, à donner de la force à l'estomac, à arrêter l'effet des poisons. J'ai donné à cette plante le nom spécifique de Æarsfieldir, du nom de M. Harsfeld, médecin et botaniste américain qui, à Java, s’est principa- lement occupé de la connoissance des végétaux. Voici les caractères de l’andir Harsfieldir. Flores papilionacei, calix urceolatus, basi gibbosus, limbus 5—dentatus subæqualis,/vexillumerectumalis æquale, carina Tome LXXII, JUIN an 1811. Ppp 474 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 2—petala , stamina 10 diadelpha, stamen superum liberum; anthera parvæ, germen oblongum stipitatum , stylus unicus brevis, legumensiccum, non dehiscens ,olivæforma , nitidum, violaceurm , 1—spermum semen,membranulé vestitum. L'andira est un arbuste de 3 à 4 pieds de hauteur, dont l'écorce est brune, ses feuilles alternes , pennées, sans stipules à leur base, 3—5 folioles opposées, avec impaires, ovoïdes et glabres, les fleurs blanches terminales, en épi, inodores, papilionacées ; le calice est en forme d’urne, gibbeux à sa base, le limbe est à 5 dents presque égales, l'étendart est droit, de la même longueur que les ailes, la carène est à deux pétales, il y a dix étamines, neuf sont réunies, la supérieure est libre , les anthères ont deux loges et sont très- petites ; le germe est oblond et stipité; il n'y a qu'un style court; le fruit est une gousse sèche en forme d'olive, violette et luisante; la graineestentourée d'une membrane très-mince. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 475 NOUVELLES LITTERAIRES. Zoonomie , ou Loïs de la vie organique ; par Érasme Dar- win, Docteur en Médecine, Membre de la Société royale de Londres , Auteur du Jardin botanique, de la Phytologie , etc. Traduit de l'anglais sur la troisième Edition, et augmenté d'Observations et de Notes ; par Joseph François Kluyskens, Professeur de Chirurgie à l’Ecole élémentaire de Médecine, et Chirurgien en chef des Hospices civils de Gand, Membre Correspondant de la Société de l'Ecole de Médecine de Paris, - et de plusieurs Sociétés savantes. Un vol. in-8°, tome second. A Gand, chez P. F. Degoesin de Verkaegke , rue Haute- Porte, n° 220; et à Paris, chez Gabon, Libraire, place de l'Ecole de Médecine. Recherches sur l'état actuel de la Distillation du Vin en France, et sur les Moyens d'améliorer la Distillation des Eaux-de-V'ie de tous les pays, avec cinq planches en taille-douce. Par M. 4. S. Duportal, Docteur en Médecine, Conser- vateur à la Faculté de Montpellier, Professeur de Physique et de Chimie à l’Académie impériale de la même ville, Membre de plusieurs Sociétés médicales, et de celle de Phar- macie de Paris. Lues à la première Classe de l'Institut de France. Prix, 3 fr., et 3 fr. 6o cent. franc de port par la Poste. À Paris, chez J. Xlostermann fils, Libraire - Editeur des Annales de Chimie, et du Nouveau Bulletin des Sciences, rue du Jardinet, n° 13. Manuel des Propriétaires ruraux et de tous les Habitans des Campagnes ,, ou Recueil! par ordre alphabétique, de tout ce que la Loi permet, défend ou ordonne dans toutes les circonstances de la Vie et des Opérations rurales. On Y à joint tout ce qui a rapport aux Bois et Forêts, à la Chasse, à la Pêche, aux Etangs et aux Constructions rurales. Avec des Modèles et Formules de Baux, Loyers, Procès- Verbaux et autres Actes usités à la Campagne dans différens cas, Par C. S. Sonnini, ancien Collaborateur de l'Histoire Ppp2 476 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE naturelle de Buffon et du Cours d'Agriculture, Membre de plusieurs Sociétés savantes. Seconde Edition, revue, cor- rigée et augmentée d’après les nouveaux Codes, les Avis du Conseil d'Etat, les Lois, Décrets Impériaux, etc. Un vol. in-12 de 360 pages. Prix, 35 fr. broché, pris à Paris, 3 fr. 75 cent. franc de port par la Poste. À Paris, chez F. Buisson, Libraire, rue Git-le-Cœur, n° 10. Bulletin des Sciences par la Soctété Philomathique de Paris. Tome troisième renfermant, 1° les 6°, 6€, 7€ et 8€ années du n° 49 au n° 96 inclusivement qui termine ce Bulletin. 2°. La table du troisième tome. 5. Un tableau par ordre de Sciences des objets énoncés tant dans la table des 1® et 2° tomesetson Supplément, que dans celle du troisième tome. 4. Supplément et un errata à la table des deux premiers tomes paginés 225, et que le relieur doit placer à la suite de la première table, tome 2. A Paris, chez Klostermann fils, Libraire, rue du Jardinet, NaPTO. à On connoit toute l'utilité des tables pour trouver dans les Ouvrages de long cours, les objets qu’on cherche. Celle-ci remplit parfaitement son objet. Introduction à la Philosophie des Mathématiques, et Technie de l'Agorithmie; par Wronski, ci-devant Officier supérieur au service de Russie. Prix, 12 fr.,et 14 fr. franc de port. À Paris, chez Courcier, Imprimeur-Libraire , quai des Augustins, n° 57. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 457 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Mémoire sur des Terrains qui paroïssent avoir été formés sous l'eau douce ; par Alexandre Brongniart. Pag. 409 Tableau météorologique; par M. Bouvard. - 446 Æroisième Mémoire sur les Coquilles fossiles des environs de Paris, qui appartiennent à des genres fluviatiles ou terrestres; par P. Brard. 448 Observations sur les Terrains qui parorssent avoir été formés sous l’eau douce ; par J.-C. Delamétherte. 460 Mémoire sur le Strychnos tiente et l'Antiaris toxt- caria, plantes venéneuses de l’île de Java avec le suc desquelles lesindigènes empoisonnent leurs flèches, et sur l'Andira Harsfieldit, plante médicinale du méme pays; par M, Leschenault, 472 Nouvelles Littéraires. 475 478 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. HISTOIRE NATURELLE. Discours préliminaire, par J.C. Delamét herte. Pag. 6 Suite des Observations sur la géologie des Etats-Unis servant à l'explication de la carte ci-jointe. Par W. Maclure. 137 Extrait d'une lettre de Philadelphie, sur le Zircon. 219 Voyage d'Alex. de Humboldtet Aimé Bonpland. Extrait. 220 Lettre de M. Aubert du Petit-Thouars, à J.-C. Dela- métherie, sur les Bourgeons. 398 Mémoire sur des Terrains qui paroissent avoir été formés sous l'eau douce; par Alexandre Brongniart. 409 Troisième Mémoire sur les Coquilles fossiles des environs de Paris qui appartiennent à des genres fluviatiles ou terrestres, par P. Brard. 448 Observations sur les Terrains qui parotssent avoir été formés sous l'eau douce ; par J.-C, Delamétherie. 460 Mémoire sur le Strychnos tiente et l'Antiaris toxr- caria, plantes vénéneuses de l'ile de Java, avec le suc desquelles les indigènes empoisonnent leurs flèches, et sur l'Andira Harsfieldii, plante médicinale du méme pays; par M, Leschenaule. 471 PHVYSTOU E. Tableau Météorologique , par M. Bouvard, Décembre. 108 Janvier, 163 Fevrier. 206 ET D'HISTOIRE NATURELLE. Mars. April. Wa. Mémoire sur l'influence de la direction dans la propa- gation du Calorique ; lu à la Société Philomatique Les jours 5 et 19 janvier 1811; par Barth. de Sanctis. Mémoïre sur la transmission du Calorique à travers l'eau et d'autres substances ; par P. Prevost. Lu à la Société de Physique et d Histoire naturelle de Genève, le 16 août 1810. Table pour la mesure des hauteurs à l'aide du Baro- mètre, Æ-t-il été démontré jusqu’à présent par des expériences et des observations, qu'il existe dans les plantes une chaleur propre? par M. Nau, Conseiller à la Cour d'Aschaffenbourg. Theorie der Crystallisation, ou Théorie de la Cristal- lisation; par J. J. Prechtl, de Brunn. Expériences sur la formation de la double image, et sur sa disparition dans le spath d'Islande et dans le cristal de roche, appliquées au perfectionnement de Lous les micromètres composés de ces deux substances ; par M. Rochon. De la Défense des Places fortes, par M. Carnot. Comète découverte par H. Flaugergues. De la Congélation de l'eau par évaporation, par Leslie. 193 184 319 334 337 338 Notice sur une nouvelle Constellation créée dans le ciel par M. de Lalande, en 1774, sous le nom de messier, custos messium, à l'occasion de la comète qui parut près du péleboréal, observée cette année par M. Messrer. Mémoire sur de nouveaux Phénomènes d'optique, lu à la Séance de la première Classe de l'Institut, par M. Malus. CHIMIE. Second Mémoire sur la Poudre à canon; par L. J. Proust. ÆExpériences sur le sucre de lait; par MM. Bouillon- Lagrange et Vogel, 387 393 113 208 480 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CMIMIE, etc. Recherches physico-chimiques; par MM. Gay-Lussac et T'henard. Extrait. Troisième mémoire sur la Poudre à canon; par L.-J. Proust. Mémoire sur l'extraction en grand du Sucre des Bette- raves, et quelques considérations sur leur culture; par MM. Barruel, Chef des travaux chimiques de la Faculté de Médecine de Paris, et Maximin Isnard, publié par ordre de son Exc. Mor. de Montalivet, Comte de l'Empire, Ministre de l'Intérieur. Mémoire sur quelques-unes des combinaisons du Gaz oxt-muriatique et de l'oxigène,et sur les rapports chi- miques de ces principes avec les corps inflammables ; par Humphry Davy, lu devant la Société royale, le 15 novembre 1810. | Nouvelles Lictéraires. 110 , 189, 262, 338, 405 228 265 3AI 358 479 ROORONRE RS RSS RÉ SSS = == DES RARE LEVSES