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M ONSIEUR, « Le 27 du mois dernier j’ai présenté à la première Classe de Plustitut, de nouvelles observations sur la fructification des mousses, accompagnées de onze dessins contenant en totalité cinquante-huit figures et les détails de tous les genres. Ces observations, la plupart nouvelles, ou trop peu connues, me paroissent d’une grande importance pour parvenir à résoudre la question qui divise depuis long-temps les botanistes sur la véritable fructification de ces plantes. Pour constater l’époque où elles ont été présentées, et pour EU date de leur communication, le tout a été parafé par M. Delambre , l’un des Secrétaires de la Classe; mais le publie 6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et les savans étrangers n'étant pas toujours régulièrement ins- truits de ce qui se passe dans les assemblées particulières des Classes de l’Institut, et des communications qui y sont faÿtes, cette précaution deviendroit insuffisante , dans le cas où d'autres botanistes feroient les mêmes obsexvations ; ce qui est d'autant plus possible, qu’elles ne portent que sur des faits, et que des faits sont visibles pour tous les yeux qui veulent voir et qui ne sont pas aveuglés par la prévention ou l'esprit de parti. De plus, comme des faits appartiennent , en quelque sorte , à ceux qui ont eu le bonheur de les saisir les premiers, j'ai cru que je devois, en attendant que Je sois en état de publier mon ou- vrage, donner à ceux que j'indique une autre publicité. Je ne puis mieux choisir que votre Journal, recueil et dépôt précieux de toutes les observations et découvertes qui se font journelle- ment dans les sciences et dans les arts. ; Je vouÿ prie donc, Monsieur, de faire insérer dans votre plus prochain Cahier, cette Lettre et la Notice jointe. J'ai l'honneur d’être, Monsieur, avec l'estime et la consi- dération dues à vos lumières et à vos talens, Votre très-humble et très-obéissant serviteur, Pazisor, Box DE BEAUVoIs, Membre de l’Institut, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 7 SENS © EXTRAIT DE LA NOTICE Lue à la Classe des Sciences Physiques et Mathématiques de l’Insütut, dans la séance du 27 juin 1814, suivie de quelques Réflexions ultérieures sur les Organes de la Fructification des Mousses; PAR M. PALISOT, Bex pe BEAUVOIS, Membre de l’Institut. J'AI reconnu et déterminé les faits suivans, rendus aussi sen- sibles que l’art peut le permettre dans onze dessins joints à la Notice, contenant 58 figures et les détails de chacune; le tout parafé et signé par M. Delambre, l’un des secrétaires de la Classe, I. La poussière contenue dans l’urne des Mousses, et prise par Hedwig pour la graine de ces plantes, n’est, dans son ex- trême jeunesse, qu’une masse compacte, informe, semblable à de la cire ou de la pâte molle, à l’instar du pollen renfermé dans les anthères des autres végétaux, lorsqu'on l’examine dans les boutons des fleurs et quelque temps avant le développement des corolles. IT. Dans les mousses, comme dans les autres plantes, cette pâte prend successivement de la consistance; elle se divise petit à petit et finit par se convertir en poussière, TITI. Les grains de la poussière des mousses , liés et unis les uns aux autres par de petits filamenstrès-courts, sontà plusieurs loges, ordinairement trois. Ces loges sont transparentes, et paroïssent remplies d’une humeur que l’on ne peut mieux comparer qu’à l'aura serninalis , observé par Néehdam et plusieurs autres phy- siciens, dans la poussière des anthères des végétaux Phanéro- games. IV. Les grains, retirés d'une urne en maturité, et présentés 8 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE: sous une forte lentille du microscope, sont entremélés d’autres grains plus petits, opaques, isolés, ovoïdes, qu'il ne faut pas confondre avec les petits corps transparens et de formes variables, dont j'ai parlé dans mon Mémoire sur les Lycopodes (1), que mal-à-propos alors je prenois poui des bourgeons, mais qu’au- jourd’hui j'ai de fortes raisons de soupconner être sortis des grains de la poussière. Nora. Les botanistes accoutumés à étudier les rapports que les plantes et les divers phénomènes de la végétation peuvent avoir entre eux, n'apprendront pas sans intérêt que la poussière contenue dans le corps réniforme de la plupart des Zycopodes, et que l'intérieur des Zycoperdons ou vesse-loup, et des autres champignons nommés par Willdenow Gastéromiques, Gaste- romici, est d’abord de consistance de cire ou pâte molle, et passe par tous les degrés comme l’intérieur de l’urne des mousses, avant de se convertir en poussière : fait qui rend au moins vraisemblable l'opinion que j’ai émise il y a 34 ans, que cette poussière des Lycoperdons est la poussière fécondante de ces plantes (2). | V. Le petit corps placé au centre de l’urne, nommé columelle par Hedwig, varie dans presque tous les genres; mais, ce qu’il y a de fort remarquable, sa forme est généralement à peu de chose près la même dans les espèces d’un même genre. Ce petit corps, ordinairement lisse , est ou sphérique, ou ovale, ou oblong; cylindrique, tantôt sessile, tantôt pédonculé; simple, bulbeux on tuberculeux à sa base; terminé par un appendice ou espèce de chapiteau ovale ou lancéolé, obtus ou subulé, se prolongeant jusque dans l’opercule, entre les cils, et tombant avec lui, Le sac qui contient la poussière lui est souvent attaché par le bas; le haut porte les cils dans les Diplopogones, ou mousses à double péristome. Il est entouré de la poussière, excepté dans les Hyménodes (3) et quelques Æntopogones (4), dont le sac QG) Voyez Journal de Physique, année 1815. (2) Voyez Encyclop, Méthod. , article Champignon. (5) Les Hyménodes forment une tribu distincte par la membrane percée d’une infinité de petits trous et placée horizontalement à l’orifice de l’urne sous l’opercule ; tel, entre autres genres, le Polytrichum. (4) Les Entopogones sont les mousses dont l’urne n’a qu’un seul péristome interne , les bagrbula , tortula , etc. est ET D'HISTOIRE NATURELLE. à est fétragone, formant quatre loges très-prononcées et traversées par le petit corps central auquel, dans aucun cas, la poussière n'est attachée. VI. Après la chute de l’opercule et de l’appendice le petit corps central est percé à son sommet, sans doute pour faciliter la sortie des petits grains qu'il contient (r). Il résulte évidemment de tous ces faits, 1° Que la poussière contenue dans l’urne des mousses ne peut pas être la graine de ces plantes; 20 Que le petit corps central ne peut pas être une simple co- Jumelle, puisque la poussière n’y est jamais attachée, et que lui-même est rempli d’une autre poussière. RÉFLEXIONS À L'APPUI DE CES DEUX RÉSULTATS. S Ier. £a Poussière contenue dans l’urne des Mousses ne peut pas être la graine de ces Plantes. Les graines de tous les végétaux, à quelqu'âge qu’on en exa- mine le fruit, soit avant, soit après la fécondation, dans l'ovaire le plus récemment formé comme dans le fruit le plus avancé, sont isolées, distinctes, séparées les unes des autres, fixées par de petits pédoncules ou à un axe central, ou à des cloisons, ou aux parois du fruit, ou éparses dans la substance pulpeuse des baies, ou portées sur un réceptacle commun, comme dans les Zabiées, les composées. Semina sunt aut nidulantia, aut suturæ adnexa, aut columellæ affixa, aut receptaculis insi- dentia. Phil. Bot. : Si ce principe, comme on n’en peut pas douter, est vrai, admis, reconnu, incontestable, la poussière des mousses d’abord en masse compacte et informe, puis convertie en poussière dont tous les grains sont unis ensemble par de petits filamens, n’a aucun des caractères des graines ; elle réunit, au contraire, tous ceux qui doivent la faire regarder comme la poussière fécondante. Mais, dit-on, Hedwig a reconnu la poussière fécondantée dans (1) Pour l'intelligence de ce mécanisme, voyez Prodrome d’Aëthéogamie. Tome ZXXIX. JUILLET an 1814. B 10 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un autre organe qu’il nomme anthère. Telle est objection qui m'a été faite, et à laquelle je n'étais réservé de répondre dans l'ouvrage que je me propose de publier; mais j'ai pensé qu'il était important de désabuser de suite les savans qui ne sont pas {rès-familiarisés avec ces sortes de plantes, et sur l'esprit desquels J'objection aurait pu faire quelqu’impression. Je dois faire re- marquer de plus, et avant tout , que dans pareilles circonstances un fait ne détruit pas un autre fait; il ne peut y avoir de con- troverse que dans la dénégation du nouveau fait, ou dans l’in- terprétation des faits et des conséquences qu’on en déduit. ‘ Quoique depuis plus de 30 ans que j'étudie et que j’observe les mousses, avec toute l'attention et la persévérance dont je suis capable, je n’aie jamais été assez heureux pour saisir le mc= ment propice de la maturité de cet organe, le voir rempli d’une poussière qui en sort avec explosion, et le sommet s'ouvrir, se soulever en forme de capuchon, je suis très-éloigné cependant de vouloir contester un fait avancé par un savant tel qu'Hedwig, par plusieurs partisans de son système, et notamment par M. Bridel et par l’estimable M. Schweigrichen , dont la bonne-foi, égale à la modestie, ne peut en aucune manière être suspecte. Tous as- surent avoir fait la même remarque; ainsi J'admettrai avec eux ce fait comme constant; mais voyons ce qu'il peut avoir de contraire aux faits exposés ci-dessus, et s’il ne peut pas se con- cilier avec. les opinions, ou, si l'on veut, le système de Linné, celui de Dillen, et même celui que j'ai proposé. 1°. De ce que les petits corps observés anciennement par Micheli, nommés anthères par Hedwig, sont remplisde poussière, 2 De ce que cette poussière sort avec explosion par une ouverture pratiquée au sommet, S’ensuit-il que les uns soient de véritables antheres et l’autre la poussière fécondante? condo aucontrairene serait-ce pas, comme l'a pensé Linné , des capsules dont les graines sortent avec une espèce d’explosion au moment deleur maturité, comme cela arrive dans certaines plantes. Quim fructus malurus, seminadispergat. Phil. Bot. Capsulæœ elasticæ longè propellunt semina, ibid., ou, suivant Dillen, des bourgeons qui ont la faculté de repro- duire des plantes semblables. Generationes plantarum ex se- mine et gemmdé esse coævas docet gemmarum consideratio et præcocitas florescentiæ, ibid. À ‘Un fait constant, que personne ne peut nier, c'est que Jes ET D'HISTOIRE NATURELLE. ît mousses, mettant à part le petit corps central de l’urne, et sur Jequel je reviendrai dans un instant, ont évidemment au moins deux organes très-distincts et très-diflérens l’un de l’autre; or- ganes qui paroissent destinés à leur régénération, savoir l’'urne et les petits corps en question, tous deux remplis de petits grains. Or d’après ce fait constant, avoué par tous et d’après tous les principes , l’un de ces organes doit être le fécondant et l’autre le fécondé. On vient de voir que la poussière contence dans l'urne, tant par sa nature que par sa position, sa disposition et les difiérens états par où elle passe successivement, et qui sont les mêmes que ceux de la poussière des anthères des végé- taux, ne peut pas étre la graine. Or il est donc au moins pro- bable que la poussière de l’urne des mousses est l’organe mâle; et, par suite rigoureuse de cette conséquence, l’autre organe doit contenir les graines ou la matière reproductive des mousses. Rien de positif ne prouve que la poussière contenue dans ce dernier puisse être la poussière fécondante. Elle est, dit-on, lancée au dehors avec explosion ; mais nous venons de voir que la même chose a lieu dans plusieurs fruits; d’ailleurs la poussière de l’urne sort aussi par explosion. Il est constaté par mes der- nières observations, que celte poussière de l’urne ne parvient à cet état que successivement, à l'instar du pollen des autres végétaux , elle n’est dans son principe qu'une masse informe, de consistance de cire ou pâte molle. S’est-on assuré s’il en est de même de l’autre organe? tout nous porte à croire le con- traire, et que les grains de cette poussière sont originairement sous forme d’ovules, distincts et séparés Les uns des autres, par conséquent des graines. De plus, lorsqu'on m'a opposé l’existence de cette poussière dans les prétendues anthères d'Hedwig, on a dit : cette pous- sière existe je l’ai très-distinctement reconnue, c’est à cette époque, aux mois de juin et juillet, qu’elle est facile à aper- cevoir. Dès le surlendemain, j'ai cherché et je me suis procuré des polytrichum commune. Une seule et même toufle se com- posoit d’individus chargés d’urnes mûres, et dont la poussière s'échappoit en les secouant, et d’autres individus terminés par des rosettes. Les petits corps renfermés sous les écailles, ceux qu'Hedwig nomme anthères, étoient d’une couleur plus opaque, plus sombre que les filets succulens qui les entourent, mais parfaitement sains et non ouverts. J’avois déjà fait plusieurs fois la même remarque sur le polytrichum pilosum aux mois de B 2 Y2z JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mars ef avril. Une simple réflexion sur ce fait prouve tout-à- fait contre le système d'Hedwig. Si ces petits corps, renfermés sous Les écailles des rosettes, sont desanthères, comment se fait-il qu'ils sont encore pleins de leur poussière , lorsque la graine, qu'ils doivent féconder, est tellement en maturité, qu’elle s'échappe de l’urne? Germen est pericarpii seminisve rudèmentium imma- Lurum,EXISTENS PR@CIPUË EODEM TEMPORE QUO ANTHERA POLLEN DIMITTIT. Phil. Bot. Ce fait ne prouverait-il pas, au contraire, que la poussière de l’urne des mousses étant mûre et se répandant la première, la nature l’a voulu ainsi pour qu’elle puisse féconder les graines contenues dans les petits corps en ques- * tion, lesquels paroïssent étre dans les mousses quien sont pourvues, de secondes fleurs femelles, et que, dans ce système, ces mousses sont des plantes polygames. Ainsi l’objection qui m'a été faite, loin d'en être une, en admettant la réalité des petits corps pleins de poussière, devient une nouvelle preuve contre le sys- tème d'Hedwig; car, d’après tous les principes établis sur les faits, la poussière fécondante est la première müûre, et doit sortir la première pour féconder les germes. Ce seroit tout le contraire dans les mousses, si la poussière de l’urne étoit la graine. Avant de passer à la discussion du second résultat , il est es- sentiel d’examiner une dernière objection, la plus forte de toutes en apparence, mais la plus facile à réfuter. « HEDwIG, dira-t-on, a trouvé le moyen de se procurer de » la poussière renfermée dans l’urne du funaria hygrometrica ; » il l'a semée , et en a obtenu de jeunes mousses pareilles à celle » qui l’a produite.» Sans m'’attacher à rapporter tout ce qu’on peut raisonnablement opposer à l'expérience de ce savant ; sans rappeler que le funaria hygrometrica est la plus commune de toutes les mousses, qu’elle se trouve partout et dans presque tous les jardins, les cours peu fréquentées, etc.; sans m'arrêter à celte question de savoir si on s'étoit suffisamment assuré que la terre dont on s’est servi pour l'expérience, ne contenoit pas déjà de véritables graines de cette plante; si le vase dans lequel la poussière fut semée, a été suffisamment garanti pour em- pêcher des graines d'y être portées par le vent; sans m’appe- santir sur tous les motifs qui peuvent rendre l'expérience au moins douteuse , il me suffit de rappeler, 1° que le corps central de l'urne contient de petits grains, ainsi qu'il va être expliqué dans le second paragraphe; 2° que ces petits grains opaques se ET D'HISTOIRE NATURELLE. 1# trouvent mélangés avec la poussière de l’urne lorsque celle ci est sortie d’une fleur en maturité; 3° enfin qu’il est évident par mes dernières observations, que Ja poussière de lurne ne peut pas être la graine, pour se convaincre que les germinations obtenues par Hedwig ne.sont pas le produit de cette poussière, mais bien plutôt celles des petits corps opaques mélangés avec elle, et probablement sorties du petit corps central, ou de toute autre cause Inconnue. II Ze petit corps central de l’urne ne peut pas être une simple columelle. Une columelle est un axe, un placenta destiné à servir de support aux graines. Columella est pars connectens parietes änternos cum seminibus.— Semina columellæ affixa. Phil, Bot. Or la poussière contenue dans l’urne des mousses n’est jamais attachée à la prétendue columelle. Ce petit corps central est isolé : la diversité de ses formes dans diflérens genres, son uni- formité dans les espèces d’un même genre, sa contexture , lui donnent toutes les apparences d’un ovaire surmonté de son stig- male ; enfin les grains qu’il renferme, observés par Hedwig lui- même et représentés par lui fixés aux lignes d’un réseau intérieur, tout indique que cet organe a des fonctions très-différentes de la seule fonction qui convient à une columelle, et que ses fonctions sont beaucoup plus importantes qu’on ne le croit, Voici comme Hedwig s'exprime en parlant de ces petits corps observés dans le Bryum striatum Lainn., aujourd’hui orshotri- chum.—ÆExtimum eorum vesiculosum refert circulum, aquei coloris : alterum quasi reticulaturn opus, areolis oblongis co- loratioribus, offert; intimurn demum lineas, cancellos qgua- dratos formantes habet, AD QUAS SGPÈ MINUTISSIMA PUNC- TULAOPACA CONSPICIUNTUR, ut quasi pulvisculo conspersæ videantur. Hedw. Fund. Musc. frond. pars 2, pag. 28, tab, 1r, fig. 8 m. (r). (1) J’engage les botanistes à jeter les yeux sur la planche 111, fig. 10, du même auteur ; de faire attention au petit corps globuleux et pédonculé placé à la base de cette prétendue columelle; de rapprocher cette organisation et d’en faire l'application aux nouveaux faits que j'ai indiqués. Cela fait, qu’ils jugent et qu'ils pronoucent, té JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ainsi, au rapport même d'Hedwig, cet organe est composé dans l'intérieur, d’un réseau qui contient souvent de petits grains opaques, semblables à de la poussière. Je ne suis done pas le seul qui a cru voir, comme on s'est empressé de le dire, de l’imprimer, de le publier, qui a cru voir de petits grains dans cette prétendue columelle, RÉSUMÉ. Il résulte évidemment de tous ces faits, 10 Que l’on reconnoît dans toutes les mousses un organe dans lequel on voit deux parties très-distinctes, savoir, la poussière qui ne peut pas être la graine, et un petit corps central con- tenant des grains très-petits et opaques, lequel ne peut pas être une simple columelle ; 20 Que dans plusieurs mousses il se trouve un troisième or- gane assez bible par sa forme et sa contexture, au petit corps central de l’urne, qui, comme ce dernier, contient de petits grains opaques, et est percé à son sommet pour facililer la sortie de ces grains; 30 Que ce dernier organe paroît n'être en maturité et ne s'ouvrir que lorsque la poussière s'échappe de l’urne. Ajoutons à ce fait, que cet organe est toujours accompagné ou entouré d’autres petits corps nommés par Hedwig filets succulens ou adducteurs, organes qui paroissent plus nécessaires à la nutrition des graines qu'à celle de la poussière, organes enfin que l’on peut assimiler aux vrais nectaires ,'et auxquels on peut appliquer ce que Pontedera dit de la liqueur des nectaires, hunc liguorum esse colliquamentum , seu amni liguorem qui intrabat semina fœcunda, Si la poussière de l'urne ne peut pas être la graine des mousses, le système d’'Hedwig n’est donc pas admissible, puisque cette poussière ne peut être que le pollen dont elle a la forme, la consistance, les propriétés et les particularités. Si le petit corps central ne peut pas être une simple columelle, s’il contient lui - même d’autres petits grains, si par ses formes variées, par sa construction, par sa position il représente un ovaire surmonté de son stigmate, il paroît évident que cette préteudue columelle est le véritable organe femelle des mousses, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 15 Mais que devient alors le troisième organe nommé anthère par Hedwig? 11 a été prouvé que la poussière qu’il contient ne peut pas être la poussière fécondante ; dans ce cas, il faut qu’il soit ou, comme l’a pensé Linné, l'organe fécondé, ou, suivant Dillen, des bourgeons ayant la faculté de reproduire comme ceux de la Dentaire, de la Bistorte , de plusieurs Zés, etc. Ainsi en réunissant ces trois opinions de Linné, de Dillen et la mienne, les seules probables et admissibles, il s’ensuivroit que, d’après le système de Linné, l’urne des mousses est une simple fleur mâle, qu’ainsi ces plantes sont où monoïques ou dioïques; et, d’après ce même système combiné avec le mien, l’urne des mousses étant hermaphrodite, celles de ces plantes qui ont des rameaux étoilés ou en roselte, deviendroient poly- games, si les petits corps qui y sont contenus sont de vrais or- ganes femelles. Ge que je viens de dire, au reste, ne doit être pris, quant à pré- sent, que pour de simples réflexions que je soumets aux bo- fanistes. Je n'ai d'autre intention que de parvenir à connoître Ja vérité. En poursuivant mes recherches sur les mousses, j'ai reconnu de nouveaux faits. En les indiquant, je les ai accom- pagnés de quelques réflexions qui m’ont paru naturelles et con- formes à tous les principes. Ces faits paroïssent entièrement con- traires au système d’Hedwig. Ils ne détruisent pas celui de Linné auquel il suflit d'ajouter en prenant en considération le petit corps central de lurne. Ils ne sont point non plus opposés au système de Dillen. C’est maintenant aux botanistes à vérifier ces faits, à réfléchir sur les conséquences qui en dérivent, et à se prononcer. PazisoT, Box DE BEAUvoIs, Membre de l'Institut, :6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE LETTRE DE M. DUHÉRISSIER DE GERVILLE, A M. DEFRANCE, SUR LES COQUILLES FOSSILES. Valognes, le 27 octobre 1813. MONSIEUR, Les lettres H, TI et L que vous avez remarquées sur quelques étiquettes de mon dernier envoi, vous ont paru avec raison l'in- dication des carrièrès d’une nature différente de celles dont vous aviez jusqu'à présent recu de moi des productions fos- siles. Vous me demandez quelques éclaircissemens : je conçois qu'ils sont indispensables, mais je ne suis pas encore bien en mesure de vous en donner. Je me suis, à la vérité, occupé depuis un an à recueillir des notes qui pussent me conduire à la connoïssance des diflérens bancs qui offrent des fossiles dans mon département, mais ces notes sont loin d’avoir acquis le degré de maturité desirable, et, d’un autre côté, je rencontre chaque jour tant de nouveautés, que je ne vois pas trop quand J'arriverai au point de mettre mes notes en ordre; si d’ailleurs vous voulez que je vous donne provisoirement wz état de si- tuation tel quel de mes carrières, je vous engage à vous pro- curer la carte (atlas national) du département de la Manche, ou plutôt celle du diocèse de Coutances, par Mariette, carte préférable sous beaucoup de rapports, même à celle de Cassini, et voici, en suivant l’ordre alphabétique, mon détail, qui réclame toute votre indulgence. A. Banc des Cérites. Je mai pas besoin de vous faire remarquer combien il y a d’aflinité entre ce banc et celui de Grignon. Je lui donne, ainsi que je donnerai aux suivans, le nom du genre qui y est le plus commun. Il est tout entier dans l'arrondissement de Valognes; il forme une chaîne de dépôts séparés qui s'étendent dans une direction ET D'HISTOIRE NATURELLE. 17 direction à peu près esf et ouest, depuis Saint-Sauveur-sur- Ouve, ou (le vicomte), chef-lieu de canton , jusqu’à Gourbesville, canton de Montebourg, en traversant une partie des communes de Saint-Sauveur , Réhou, Sainte-Colombe, Golleville, la Bon- neville, Rauville, Biniville, Régneville, Hautteville, Orglandes et Gourbesville. Ces dépôts sont connus dans le pays depuis un temps immémorial sous le nom de marnières où marlières , nom qu’on leur donnoït dès le douzième siècle, comme j'ai pu n’en :convaincre par l'inspection du cartulaire de l'abbaye de Saint-Sauveur, qui parle, dans un acte de 1221, d’une marnière située à Rauville, dans laquelle Roger de Karetot avoit été tué, marleriam in qua Rogerus de Karetot Miles occisus fuit. Je ne prétends pas pour cela que le sable qu'on tire de ces fosses soit ce qu’on appelle maintenant de la marne ; il sert éga- lement à fertiliser les terres, mais, employé trop fréquemment, il leur seroit nuisible. Les couches de ce sable calcaire, qui semble n'être qu’un amas de coquilles broyées , sont rarement distinctes, On en fait généralement l’extraction dans les mois de septembre et surtout durant celui d'octobre, quand les pluies ne sont pas abondantes. La z2arne ou falun est généralement à fleur de terre , et cependant en plusieurs endroits les ouvriers sont arrêtés par les eaux à un mètre de profondeur ; ils ne creusent jamais au-delà de vingt-cinq pieds. Aucune gangue particulière ne sert à indiquer ce sable, souvent on en traverse les bancs; quelque- fois ils sont posés sur la glaise, sur le grès, le quartz ou la pierre calcaïre, mais plus fréquemment sur des cailloux roulés. Les falunières seules offrent plus de fossiles dans notre dépar- tement , que tous les autres bancs réunis. Depuis environ un an, ÿ y en ai trouvé plus de 300 espèces, et je ne doute pas qu’une recherche de plusieurs années n’en fit trouver le double de ce nombre. Voici un état approximatif des genres que j'y ai rencontrés, et du nombre d'espèces que chaque genre fournit. % CATALOGUE À. Genres. Espèces. Acarde, 1 Bucarde, 5 (Cadran), 3 Ampullaire, 7 Buccin, 1 Camerine, I Anomie, 2 Bulime, r Cardite, 3 Arche, 7 Bulle, 2 (Casque, 3 Astacolite, 3 Calyptrée, r Cérnite, 43 Balanite, 1 Came, 4 (Colombelle, # Tome LXXIX. JUILLET an 1814. G 18 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Cône, 4 Lime, 7 Pleurotome, 8 Crassatelle, 2 Lucine, à Porcelaine, 3 Crépidule, x Madrépore, 15 Porpite, E Cucullée, 4 Marginelle, 1 Pourpre, x Cyclolite, 1 Mélanie, 1 Pyrule, 1 Cyclostôme, 2 Miliole, x Sidérolite, I Cythérée, 2 Millepore, 12 Spirorbe, ï Dauphinule, 8 Modiole, 1 Spondile, I Dentale, 3 Mitre, 12 Strombe, ps Discorbe, 1 Murex, 12 Tarrière, 2 Emarginule, 2 Nautile, x Telline, Le Encrise, 1 Nérite, 3 Térébratule, 3 Fasciolaire, 1 Olive, 1 Trogue, 6 Fissurelle, x Orbitolite, 3 Turritelle, 4 Fistulane, r Oursin, 5 Venicrarde, 2 Fongie, 2 Patelle, 12 Vénus, b Fuseau, 8 Peigne, 2 Vermiculaire, 4 Glossopêtre, 2 Perne, zx Volvaire, I (Crapaudine), r Pétoncle, 3 Volute, 3 Huiître, 1 Planorbe, 2 P.S.Cyclade, x Isocarde, 3 N. Fragmens d'environ 60 autres espèces indéterminées. 0 B. Banc des Griphytes. Pour suivre l’ordre le plus analogue à la nature du banc qui pese , ceux que je désignerai par les lettres H et L en étant ien plusrapprochés, seroient mieux placésimmédiatement après ; mais comme je ne les ai découverts qu'après d’autres que j'ai indiqués par les lettres qui précèdent H, je laïsserai subsister cette fois ce petit désordre, et je vous demanderai la permission de consacrer les premières lettres de l'alphabet aux premières carrières que J'ai trouvées. Le terrain des griphytes est incontestablement plus étendu oo autre banc coquillier de ce département. Le ‘canton e Sainte-Mère-Église tout entier, et plusieurs communes de celui de Montebourg et de Carentan en font partie. Vous en trou- verez l'emplacement dans la carte de Cassini, n° 38, qui com- mence à Caen et s'étend à l’ouest jusqu’au bourg de Périers. En suivant la route de Valognes à Carentan, ce banc commence à Joganville, proche Montebourg, et continue sans interruption ET D'HISTOIRE NATURELLE. LC) jusqu'aux limites des paroisses de Saiïnt-Côme et de Carentan; de là en longeant vers le nord le côté gauche de l'embouchure de lOuve, 1l suit le bord occidental du bras de mer nommé le Grand-Vé, où la mer en se retirant laisse à découvert un pavé de griphytes recourbés, et d’ammonites à double sillon, tellement empâtées dans la pierre, qu’il est difficile de les en arracher, même avec le ciseau. En suivant le bord de la mer, la même espèce de pierre se retrouve partout jusqu’à Fontenay, à quatre lieues au nord du Vé, et la veine en passant au travers de Saint -Flocel, se rejoint à notre point de départ près de Montebourg. vu Vers le midi de la grande route de Carentan à Montebourg, des carrières de la même nature existent encore dans plusieurs communes des cantons de Sainte-Mère-Église. Il paroît qu’elles se terminent entre celles de Beureville-la-Bastille et Cretteville, au midi de la rivière d'Ouve; toute cette étendue de pays de pâturages, connue particulièrement sous le nom de Cotentin, en est remplie; dans beaucoup de places les griphytes y sont tel- lement à fleur de terre, que les champs labourés sont recouverts de celles que la charrue y a apportées ; souvent elles sont iden- tifiées avec les pierres, plus souvent encore elles sont dans les lits terreux qui partagent fréquemment les couches de pierre et quienrendent l’extraction extrêmement facile. Ces pierres, connues dans le Cotentin sous le nom de vives pierres, paroïissent très- compactes quand elles sortent des carrières; mais elles se dé- composent tellement, surtout à la gelée , qu’il est impossible de les faire servir aux ouvrages de maçonnerie. On en fait une chaux connue sous le nom de chaux maigre, qu'on recherche pour les constructions hydrauliques; une grande quantité a été employée depuis quelque temps aux travaux du port de Cher- bourg. J’ai remarqué que beaucoup de ces pierres ne pouvoient soutenir l’action du feu des fourneaux à chaux, sans faire une certaine explosion qui les jette quelquefois jusqu’à la distance de dix à douze mètres de ces fourneaux. Les couches de cette pierre sont généralement horizontales; De ont cependant jusqu’à dix degrés d’inclinaison, ai observé au point de contact de ce banc avec celui des bé- lemnites aux fourneaux de Blosville, que l'inclinaison passoit subitement du nord-est au sud-ouest, sans cependant qu’il y eût aucun changement sensible dans la nature de la pierre ou dans gelle des fossiles, G 2 20 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE En allant à Bayeux par la mine de Litry, j'airetrouvé la même espèce de pierre, et dans les carrières de l’'Épinay-Tesson à l’ouest de Litry, et à Longeau sur la grande route de la mine à Bayenx. Les productions fossiles sont les mêmes, et la chaux sert aux mêmes usages. Voici à peu près la liste des fossiles que j'y ai observés. CATALOGUE B. Ammonite, 3 Moule, 2 Spondile, I Entroque, 1 Nautile, x Telline, x Griphyte, . 1 Peigne, x Térébratule,, 2 Lime, 1 Perne, r Troque, 3 Millepore, 1 Pinne, 7 Vénus, 2 Modiole, 1 Serpule, r (Mye), 1 Parmi ces espèces , les ammonites, le millepore, les moules, les entroques sont les mêmes qu’une partie de celles qu’on voit dans le catalogue suivant, C,. Banc des Bélemnites. Ce banc est {clement enclavé dans celui qui précède, il se rencontre si souvent en point de contact avec lui , que j’ai balancé "à les séparer dans mon catalogue. Cependant, en examinant at- tentivement, il est facile de se convaincre combien la pierre où se trouvent nos bélemnites du Cotentin, diffère de celle où sont les griphytes. La première est d’un grain bien moins com- pacte, et cependant ne se décompose point à la gelée ; la chaux en est d'une autre nature. Je lui trouveroiïs aisément beaucoup d’autres différences; mais comme mon objet n’est pas une re- cherche minéralogique, je vais vous indiquer et le lieu où je l'ai rencontrée , et les espèces de fossiles que j'y ai observées jusqu’à ce jour. Le banc de bélemnites du Cotentin s'étend dans cinq ou six communes situées au nord-est de la presqu'’ile : il est terminé d’un côté par une lisière du terrain de griphytes contre le Grand- Vé, s'étend dans les endroits les plus élevés de Sainte-Marie- du-Mont, Vierville, Audouville, Blôville, Sebville et Carquebu. Aux fourneaux de Blosville où se fait la chaux maigre qu’on emploie aux travaux hydrauliques du port de Cherbourg, les bélemnites se trouvent pêle-mêle avec les griphytes. La pierre ÿ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 21 vw’on tire en cet endroit, se décompose aussi facilement que celle des endroits où les griphytes se trouvent sans mélange. Les couches du banc des bélemnites sont généralement horizontales, quelquefois elles offrent , ainsi que toutes les autres, une con- fusion inextricable. Les productions fossiles y sont un peu plus variées que dans le banc des griphytes. Voici à peu près celles que j'y ai remarquées. CATALOGUE C. Ammonite, 3 Donace, 2 Peigne, 3 Astacolite, rx Huitre, 2 Plicatule, 1 Avicule, 2 Millepore, x Spirorbe, I Bélemnite, 1 Moule, 2 Térébratule, ro Bucarde, 1 Nautile, 1 Vénus, I Came, 1 Entroque, z Incertaines, 6 Parmi ces espèces les ammonites, le millepore, les moules, les entroques, le nautile et quelques térébratules sont les mêmes que dans le catalogue précédent. D. Banc des Nautiles. Ce banc est loin de m’être bien connu. Je n’en ai observé qu'un petit nombre de points dans les environs de Bayeux , mais j'ai des raisons de croire qu’il s'étend au-delà de Caen; car j'ai des morceaux ramassés à Vieux, Verson et Eterville, qui sont les mêmes et de la même gangue que ceux que j'ai tirés des carrières de Vaucelle et de Sully proche Bayeux. Ce banc me semble être un composé de calcaire grossier et de calcaire compacte; celui-ci est d’une couleur généralement blanchâtre assez tendre, à grain fin, et contient peu de coquilles; l'autre, dont les hits sont entremêlés avec ceux dont je viens de parler, est d’une couleur jaune foncé sale : les grains en sont grossiers et incohérens ; les acides le plus foibles les dissolvent. 11 fourmille d’une espèce d’oolites qui indiquent au premier coup- d'œil les fossiles qu’on en a tirés. On les sépare facilement de leur gangue. Je ne doute pas qu’on n’y en trouvât plus de cent espèces : dans le cours d’un été, j'en ai rapporté plus de cinquante d’une tournée de trois jours. Il est fâcheux que ce banc ne soit pas examiné par une personne qui habite le Bessin. < 22 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE CATALOGUE D, Ammonite, 6 ÆEntroque, rx Porpite, I Alcyon, 1 Lime, 1x Telline, L Arche, 1 Millepore, 1 Térébratule, 7 Bélemnite, 1 Modiole, 1 Troque, 5 Bucarde, 2 Nautile, 1 Trigonie, r Catlran, 1 Orbulite, zx Turbo, 3 Cérite, 4 Orthocère, 1 Vénus, 2 Cyclolite, 1 Oursin, 2 Espèces incer- Dauphinule, 1 Peigne, : taines, 12 E. Terre calcaire non coquillière. Les huit. premiers articles du catalogue E se trouvent dans un grès très-dur et sans mélange de veines quartzeuses qu’on remarque dans celui qui forme généralement la base des mon- tagnes du département de la Manche; plusieurs des térébratules qu'il contient, et surtout les articles 2, 3,4 et 7 se retrouvent dans les couches supérieures de nos carrières de marbre. Le banc de ce grès suil üne direction à peu près du nord-est au nord-ouest, Je l’ai suivi dans cette direction près de trois lieues, depuis les coteaux qui dominent le bourg de la Haye-du-Puits, jusqu’au Havre de Surville, en passant au travers de la paroisse de Montgardon, Les morceaux de ce grès ne sont jamais fort gros; ils tirent tous sur la forme rhomboïdale et ont peu d'é- paisseur, Leurs côtés sont tranchés très-nettement. Une circons- tance qui m'a paru digne d’attention , et prouver que la formation de ce grès est postérieure au dépôt des fossiles qu'il contient , c'est qu’on voit assez fréquemment la moitié d’une coquille sur uue pierre et l’autre moitié sur celle qui lui est contiguë, coin- cider si parfaitement l’une avec l’autre, qu’on croiroit que la division en auroit été faite avec un instrument fort tranchant, au moment où ce grès n’avoit encore que la consistance molle de la pâte. Cette pierre est commune, l’extraction en est facile; elle sert à des ouvrages de maçonnerie, et se pose aussi aisément que la brique. Aux fossiles que j'ai observés dans le grès, je joins provi- soirement ceux qui se rencontrent dans une terre non calcaire ET D'HISTOIRE NATURELLE. 23 de la commune de Breuville, sur le grand chemin de Cherbourg à Briquebec. C’est en déblayant des terres pour élever cette route dans une vallée, qu’on a remarqué les fossiles singuliers de Breuville. Ils ne viennent d’ancune carrière ; ils se trouvent comme accidentellement dans le terrain avec des fragmens d’un schiste tendre ; ils sont en général si singuliers, que je ne sais à quel genre les rapporter. Le morceau marqué E 10 en est un échantillon ; je n’en ai pas le double, maïs je le connoïs chez un amateur qui m’a'assuré en avoir vu des centaines en faisant cette route dont il étoit entrepreneur ; j'ai mis les habitans sur la voie, et j'espère m'en procurer d’autres. E 1x est un peu moins rare, et j'en possède le double. E 12 est trois fois plus long que le précédent, il a, comme lui, trois rangs qui se continuent d’une largeur égale, et se termine par un bout lisse et percé de trous comme ceux qu’on remarque sur la cranie masque. J'ai observé en outre, dans ce terrain, quelques térébratules dont une avoit d’un côté une espèce d’entaille, comme celle qu’on remarque au ‘genre houlette. Ces dernières ont été trouvées par un ami qui m'accompagnoit dans une recherche que j'ai faite il y a peu de jours; ils les a gardées, mais les morceaux 10 et 11 que je vous envoie, peuvent vous donner une idée du reste. J'avoue que j'y perds mon latin, mais j'espère vous en dire davantage une autre fois sur ce terrain nouveau pour moi, CATALOGUE E, Ce catalogue n'étant pas terminé, est en blanc dans le ma- nuscrit, l’auteur le donnera par la suite, ( Note du Rédacteur.) F,. Marbre. Le marbre, si utile sous beaucoup de rapports, n'est pas rare dans notre département. Les arrondissemens de Cherbourg, de Valognes, de Coutances et de Saint- Lo en fournissent qui a partout Ja couleur plus ou moins foncée de l’ardoise; il n’y est énéralement employé qu'à bâtir et à faire de la chaux : on n’en polit que de celui qui se tire des carrières de Mont-Chaton proche 24 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Coutances. Sa couleur foncée et presque noire le fait recheri cher. Il est connu dans le commerce sous le nom de arbre de Coutances. Voici, en commencant par le nord , l’ordre des carrières de marbre de notre pays. L’arrondissement de Cherbourg offre dans le canton des Pieux, proche la mer, celles de Surtainville, Pierreville et Saint-Germain-le-Gaillard. Au midi des carrières du canton des Pieux, on trouve dans l'arrondissement de Valognes, en suivant la côte, celles du canton de Barneville qui en sont la continuation, Saint-Paul-des-Sablons, Beaubigny, Séneville Saint-Jean et Saint-George-de-la-Rivière: Sortoville, le Mesnil, Gouey et Portbail fournissent en abon- dance le même marbre; Saint-Paul-des-Sablons seul a une espèce particulière de fossiles, des astroïtes en grandes masses, En suivant toujours la côte occidentale de la presqu’ile, on peut suivre la même veine dans l’arrondissement de Coutances; Denneville, Omonville, Saint-Lo, d'Ourville, Canville et Sur ville en présentent une suite de carrières qui se terminent dans cette direction à Glatigny, canton de Lessay, | Avant de passer au marbre qu’on rencontre au midi de Cou- tances, revenons sur nos pas pour indiquer ce que fournissent au nord de Glatigny , les arrondissemens de Coutances et de Va- lognes, dans des communes plus éloignées de la mer. Dans le canton de Périers on en tire au Plessis, à Saint-Jores et à Pretot, canton de la Haye-du-Puits; plus loin au nord dans la forêt de Saint-Sauveur, à Nehou, à Briquebec et à Magne- ville, on en extrait encore ; au nord de Magneville on n’en re- trouve plus. La plus grande ressemblance se fait remarquer entre toutes les carrières que je viens d'indiquer. Les encrinites, les entro- ques, les térébratules, les orthocères en sont les principales pro- ductions fossiles. L’extraction en est partout difficile et ne peut généralement s’en faire qu'au moyen de la poudre. L’inclinaison des couches varie depuis 10 jusqu’à 5o degrés; la plus commune est depuis 30 jusqu’à 40. La chaux qu’on en fait est la meilleure après celle de Mont-Chaton. La veine de ce nom s'étend, du sud-ouest au nord-est, dans une longueur d’environ 3 lieues; elle commence à la mer près du Havre de Regnieville, traverse la paroisse de ce nom , celles de ET D'HISTOIRE NATURELLE. 25 de Grimouville, Urville, Montmartin sur mer, Mont-Chaton , Hyenville , Orval et Saucey , et finit à l’extrémité où cette der- aière paroisse et celle d'Ourville se touchent. Les fossiles sont rares dans cette veine, je n’en ai observé qu'à Mont-Chaton dans la carrière d’où se tire le marbre qu’on polit à Coutances; ils sont tellement inhérens à la pierre, que je n'ai pu jusqu'à présent en détacher qu’un seul , et d’une famille si singulière , que sur un assez grand nombre je ne puis assurer avoir une idée précise du genre d’un seul; j'ai cru y voir des crustacés, des caryophyllites et au moins une espèce d’ichtyo- lites ; le noyau que j'en ai tiré m'a paru être du genre téré- bratule ; il a des stries longitudinales très-rapprochées; la longueur en est de deux pouces et sa largeur de dix-huit lignes. Cette pierre a une odeur très-forte. C’est l'espèce la plus com- pacte de marbre que nous ayons. Par le temps le plus favorable on ne peut en cuire un fourneau de chaux en moins de huit jours : aussi cette chaux est-elle d’une qualité infiniment supé- rieure à toute autre espèce de ce département. L'inclinaison des couches est généralement de 30 à 40 degrés; quelquefois ces carrières offrent une grande confusion, d’autres fois Le couches sont à peu près horizontales. La carrière qui fournit le marbre de Coutances et les fossiles, est dans ce dernier cas. À une distance de huit à neuf lieues de cette veine, à deux lieues environ de Saint-Lo vers le nord, on retrouve une autre veine de marbre au bord de la rivière de Vire; elle commence à Bahais, se continue à Cavigny, traverse la Vire à la Meaufe, et se termine dans les paroisses de Moon et d’Airel; je n’y ai vu aucuns coquillages fossiles. Les couches y ont généralement beaucoup d’inclinaison, on ne peut en extraire qu’à l’aide des mines. La situation de ces earrières au bord d’une rivière na- vigable en fait un objet de commerce ; on en exporte les pierres jusqu’à la mer par Isigny. CATALOGUE F. Astroite, Caryophillie, Encrinite, Orthocere, Peigne, Térébratule, Tome LXXIX. JUILLET an 1814. D Nm ON M 26 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE G. Banc des Pectinites. A unelieue au nord de Magneville, où j'ai indiqué une des ex- trémités de la veine de marbre dansl’arrondissement de Valognes, commence le banc de la pierre connue ici sous le nom de carreau de Valognes. I paroît d’abord dans la vallée d'Yvetot, se con- tinue dans la partie de la commune de Valognes où est située la ville de cenom, passe dans les terrains les plus bas d’Alleaume et de Huberville, et finit à Saint-Germain-de-Tournebu. Dans les paroisses que je viens de nommer, le banc se prolonge sans interruption. On trouve un dépôt de la mêmenature à Orglandes, à deux lieues au midi de Valognes, un à une lieue plus loin dans la même direction et dans le même arrondissement à Pi- cauville, et enfin dans l'arrondissement de Coutances, à deux lieues au midi de Picauville. Les carrières de Beaute, Coigny, Houteville et Cretteville sont encore d’une nature à peu près semblable; ces dernières ne semblent avoir entre elles aucune communication. Les unes se terminent aux faluniéres, les autres -au banc des griphytes. Celle de Beaute, qui est la plus éloignée de ce dernier banc, est néanmoins la seule de celte espèce où j'aie vu des ammonites. Les couches de toutes ces carrières sont horizontales. Dans toutes on remarque une ou plusieurs couches ‘d’une gs bleuâtre qui sépare les assises de pierre. La chaux de ce banc est d’une qualité inférieure à celle de ceux dont j'ai parlé : néanmoins lorsqu'elle est éteinte elle ser- viroit bien plus long-temps que celle du banc des griphytes. Les coquilles fossiles y sont très-abondantes, mais peu variées. Voici les genres que j'y ai rencontrés. CATALOGUE G. Ammonite, Anomie, Huitre, Lime, Modiole, Peigne, Telline, Turritelle, Vénus, (Favagite), ŒaA ei bei et bi bei bel be bei be ET D'HISTOIRE NATURELLE. 27 H. Banc des Baculites. Ce banc semble faire la lisière de plusieurs dépôts de falun; on y voit même souvent d'assez grandes quantités de ce sable coquillier, tantôt dessus les veines de calcaire compacte qui con- tient les baculites, tantôt dessous, souvent mêlé avec lui dans diHérentes directions. Les falunières de Gourbesville ont une lisiére de cetteespèce ; à Amfreville, celles d'Orglandes, de Haut- téville et de Nehou sont bordées de la même manière; à læ ‘Bonneville, Rauville, Golleville et Sainte-Colombe; à la Bonne- ville la veine de calcaire compacte n’a pas plus d’un pied d’é- paisseur dans le lieu nommé Zes Fosses. On en enlève des masses considérables avec de longs leviers; elle est posée dans ce lieu sur une couche mince de falun, remplie de dents de squale, bien plus petites et plus noires que celles qu’on trouve dans les falunières. Outre les baculites qui sont communes dans le calcaire compacte, surtout à Sainte-Colombe, on y voit des espèces de cardites à rayons trèés-obliques, des petites huîtres et plusieurs espèces de térébratules qui semblent parti- culières à ce banc. Ce qui m'a le plus surpris, c’étoit d’y ren- contrer une ammonite à double sillon ayant 17 pouces de diamètre. Il me semble assez probable qu'il y a trois espèces de baculites, une sans vertèbres apparentes et deux avec des vertèbres, dont une porte à la surface extérieure, des ondulations en relief qui suivent une direction étrangère à celle des cré- neaux. Je laisse aux connoisseurs le soin de décider si ce caractère peut suffire pour former une espèce nouvelle. Je vous en enverrai un bon nombre d'individus, afin de vous mettre à portée de prononcer , et si ce genre vous paroît digne d'attention, je ne doute pas que plusieurs espèces de ce banc ne vous semblent également singulières. Les petites térébratules , les huîtres , les cardites ou zrigonies, tout m'en paroît d’une catégorie qui n'appartient qu'à ce banc encore trop peu connu. CATALOGUE H. Ammonite, Came? (huître), Cardite, Baculite, h NN D 2 26 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Alvéolite, Nautülite, Glossopêtre crapaudine, Millepore, Pectinite, Térébratule, OT O9 mt C9 et Pt I. Banc des Turritelles. Des carrières peu étendues dans les paroisses du Ham proche Montebourg , forment le banc que j'ai cru d’abord pouvoir réunir avec celui que j'ai désigné par la lettre G , mais nes circonstances me forcent à l’en séparer. Les fossiles qu'il con- tient sont en grande partie des genres turritelle, troque et cérite, genres peu communs dans le calcaire compacte. D’ailleurs les oolithes qu’on voit en si grande quantité dans les pierres de ce dépôt, ne se rencontrent dans aucun des autres. Voici les genres et le nombre d'espèces qu’un apercu trop léger m’a permis d'y observer. CATALOGUE Î. Bivalve, x Ë Oursin. : Ro Térébratule, I Cérite, £ d Turritelle, 2. L, Carrières de Tuf. : Depuis un temps immémorial on voit dans beaucoup de ci- metières et autour de plusieurs anciennes chapelles de ce dé- partement, une quantité considérable de sarcophages d’une pierre ae ai poreuse et grumeleuse, connue sous le nom de zuf ou tufeau dans le pays et dans plusieurs autres parties de l’ouest de la France. Le Glossaire de Ducange nomme cette pierre tufus et tufellum, et indique l'usage auquel nos ancêtres l’em- ployoient, Des pièces de monnoie trouvées dans quelques sarco- phages du Cotentin, prouvent qu'on yÿ enterroit encore au commencement du XIVe siècle ; mais ce-n’est pas de cela qu’il s’agit dans cette Lettre, il: faut en indiquer les carrières que J'ai retrouvées (je puis dire retrouvées, car on supposoit ici ÉT D'HISTOIRE NATURELLE, 2} ‘qüe la pierre des sarcophages étoit factice) : elles sont sur la route de Carentan à Périers, entre les marais de Gorges et ceux de la rivière de Taute; j'en ai observé à Sainteny, Méautis, Saint-George et Saint-André-de-Bohon , Auxais, Saint-Sébastien- de-Raïds, Saint-Germain-le-Vicomte, May et Gorges. Ces carrières de tuf sont généralement presque au niveau des marais, ce qui en empêche l'exploitation avant le mois de sep- témbre, Il ressemble, sous beaucoup de rapports, à du falun pétrifié ; comme lui, il ne présente aucunes couches, ce qui en rend l'extraction singulière. Les ouvriers sont obligés, avec un instrument tranchant, de couper d’abord perpendiculairement tout à l’entour de la masse qu’ils veulent enlever ; ils la coupent ensuite par dessous, de manière à pouvoir y introduire et fixer leurs leviers, qui n’éprouvent alors qu’une foible résistance. De cette maniète ils en obtiennent des blocs considérables et qui servent souvent à faire, d’une seule pièce , les jambages des portes: les plus élevées. C’est la seule pierre propre à bâtir qui existe dans’ cette partie du département , et comme lextraction en est limitée à l'époque de l’année où les eaux sont basses , les maisons dans ce canton sont généralement bâties en terre, celles seulement des gens aisés ont des cheminées et encoiïgnures de tuf. Dans plusieurs carrières on remarque une grande quantité de coquilles, de polypiers et de débris de végétaux. Je ne les ai pas observées avec assez d’atlention pour en faire l'énumé- ration , je n’y ai jamais trouvé une coquille qui eût un pouce de longueur ou de diamètre. Les feuilles qu'on y trouve sont, à cet égard, bien différentes; j'ai cru y remarquer des feuilles de chêne et de cerisier de grandeur naturelle. Au total, ces- carrières m'ont paru très-riches en dépouilles fossiles; elles mé- ritent d’être étudiées , et je dois convenir que je ne les connois- encore que très-superficieilement ; j'espère être un jour dans le cas de vous en rendre un compte plus satisfaisant. Celui même des autres banes est sûrement bien loin de l'être. Quoique beau-- coup trop long, si j'étois moins pressé, je commencerois par l’abréger , et puis j’attendrois que les questions qu’il vous mettra à portée de me faire , me missent en état d’envisager sous son véritable point de vue, un sujet qui., par la nature de mon pays, pourroit devenir intéressant. On retrouveroit diflicilement dans- un espace aussi circonscril , autant d'espèces diférentes de banes- de fossiles, et cependant je suis convaincu qu'il m’en reste encore à découvrir, et que mou catalogue ne fait pas plusa 3e 30 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE la moitié de ce que pourroit me donner une autre année de recherches, surtout si le temps étoit sec depuis le mois d'août jusqu'à la fin d'octobre. La plupart ne tirent de falun que dans le mois où nous sommes, et les pluies qui sont venues en abon- dance depuis un mois, ont détruit mes espérances d’ici à l’année prochaine; sur cinquante falunières on n’en a pas exploité plus de six cette année, et encore ne l’ont-elles été que superficielle- ment. Heureusement vous m’indiquez la ressource de la mer. Je vais faire tous mes efforts pour que votre attente à cet égard ne soit pas trompée. Si vous voulez que je joigne aux coquilles marines les zoophytes, les coquilles terrestres et d’eau douce et les coquilles microscopiques qui fourmillent dans le sable de nos côtes, je crois pouvoir vous aunoncer encore plusieurs centaines d'espèces nouvelles, Les fossiles, à ce que j'espère, ne manqueront pas, non plus d’ici à long-temps : nous en aurons seulement moins des grosses espèces; mais en glanant dans le falun, il y a encore bien du. nouveau en petits objets. La semaine dernière je trouvai dans une ampullaire crassatine plus de dix espèces nouvelles pour moi, dans les genres arche, lime, calyptrée, etc., vous en recevrez des échantillons marqués des numéros au-dessus de 259. | | ET D'HISTOIRE NATURELLE. 3x NOTE SUR QUELQUES COMBINAISONS DE LIODE, Lue à l’Institut, le 27 décembre 1813, Par M. COLIN, Répétiteur à l’École Polytechnique (1). JE me suis proposé, dans cette Note, d’éclaircir quelques phé- nomènes relatifs à l’action de l’iode sur l’ammoniaque et sur le mercure, et par là j'ai été conduit à examiner son action sur divers oxides. Voici quels sont les résultats de mesexpériences. On sait, d’après les observations de M. Courtois, que le mer- cure broyé avec l’iode se change en une poudre rouge extrêmement belle; cependant si les proportions ne sont pas convenablement choisies, on n’obtiendra jamais une belle couleur rouge, et je me suis assuré, 19 Qu’elle étoit au contraire d’un beau jaune quand le mer- cure y dominoit, ou même d’un vert jaunâtre s'il y abondoïit encore plus ; 2° Queces couleurs éloïent d’ailleursindépendantes de l’action de l'air et-de l'eau, puisqu’en agissant avec l’iode desséché et à abri du con!act de l'air, les résultats étoient encore les mêmes. (2) Je dois prévenir ici que c’est dans le laboratoire de M. Gay-Lussac, et presque toujours sous ses yeux, que j'ai fait les expériences dont je vais avoir l’honneur de rendre compte à la Classe; par là je me suis trouvé à portée de recevoir ses conseils et de les mettre à profit ; je prie donc M. Gay Lussac de permettre que je lui en témoigne ici loute ma reconnoissance. 32 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CMIMIE Quand on forme ces combinaisons au moyen des sels mer- curiels et des hydriodates alcalins, car elles peuvent se former ainsi, le mercure y est encore à l’état métallique ; en effet on obtient constamment un précipité rouge avec les sels mercuriels au maximum, et constamment un précipité jaune avec ces sels au »rinimum. Or les proportions de l'acide hydriodique doivent suivre celles de l’oxidation des métaux auxquels il est uni, et par conséquent la quantité d'hydrogène qu'il contient doit toujours être aussi dans le même rapport, c’est-à-dire capable d'opérer la réduction du métal, quel que soit son degré d’oxidation. Les précipités paroissent donc en tout comparables aux combinaisons qu’on opère directement entre le mercure et l’iode; on achève de le prouver en les distillant comparativement avec l'iodure de mercure ; celui-ci se sublime comme eux sans altération, sans dé- gagement d'oxigène , et sans donner aucun signe d'humidité. Il est clair, d’après cela, que les couleurs des iodures de mer cure ne dépendent que des rapports de leurs principes, ce qui se confirme aisément; car si d’une part on fait bouillir de l’eau où se trouve du précipité rouge et du mercure, on les fait passer en peu de temps au jaune et même au vert jaunâtre; puis versant au contraire sur le précipité jaune la dissolution alcoolique d’iode, on forme presqu’instantanément une belle couleur rouge. L'iodure rouge de mercure préparé d’une manière quelconque, étant soumis à l’action de la chaleur, jaunit, se fond avec une apparence onctueuse, se volatilise, cristallise en belles lames hmnbidales d’un jaune d’or, et devient par le refroidissement d’un rouge très-éclatant. Les acides et l’alcool même dissolvent ces lames, surtout à chaud, et alors ils en laissent cristalliser une partie en se re- froidissant; cependant l’eau n’exerce pas sur elles une action sensible. Les sels mercuriels solubles, au moins le nitrate, le muriate et l’acétate, les dissolvent. L’iodure et l'hydriodate de potasse les dissolvent aussi même à froid. Quant aux précipités jaunes, ils contiennent une quantité de mercure , double de celle qui constitue les précipités rouges: chauilés , ils rougissent à une foible température, mais ils rede- viennent jaunes par le refroidissement ; en chauflant davantage ils se fondent aussi avec une apparence onctueuse, bientôt après - ils se volatilisent , et si le feu est convenablement ménagé, ils sg ET D'HISTOIRE NATURELLE. 33 se subliment en un rouge permanent et laissent pour résidu un peu de mercure coulant. Mais si le feu n’a pas été bien ménagé , on est quelquefois obligé de recommencer la sublimation, si la matière étant refroidie, n'a point acquis une couleur rouge, car en la chauffant brus- quement on la sublime sans altération sensible. L'alcool nedissout pas ces précipités, cequi ne doit pas élonner, puisque le mercure qui s’y trouve prédominant n’est nuliement soluble dans ce véhicule. L'hydriodate de potasse dissout à chaud ces composés jaunes. Il en est de même du nitrate de mercure au ménimum: celui-ci les abandonne, par le refroidissement , sous la forme de paillettes Jaunes et brillantes. J'ai aussi obtenu une poudre rouge en mélant à l'iode l’oxide rougede mercure(1). On peut déterminer cette action, en mettant le mélange sous l’eau et en élevant la température jusqu’à l’é- bullition, mais elle peut s'exercer avant ce terme : on n’observe alors aucun dégagement de gaz, et si on examine séparément le dépôt et le liquide qui le recouvre, on observe d'abord que ce dernier est acide, et ensuite, que le dépôt bien lavé est un iodure de mercure. Cependant si on le calcine en vase clos, il donne de l’oxigène à l'instant où il change de couleur, ce que ne fait pas l’iodure de mercure ordinaire, et si on les traite com- parativement par l’acide Bye chere (muriatique}), lPiode du premier sera régénéré , tandis que le simple iodure de mer- cure sera dissous sans être décomposé. J’ai cru quelque temps que ces phénomènes étoient dus à un oxide ioduré, parce que l’acidité du liquide n''avoit échappé, et que j'obtenois le même composé en précipitant les dissolutions mercurielles par les iodures alcalins; mais ayant été conduit par une autre considération à l’examiner de nouveau, j'ai re- connu que j'étois dans l'erreur. :L'acide iodique n’ayant pas été obtenu jusqu'à ce jour dans l'état de pureté, j’avois pensé qu’en faisant réagir l’iode sur des oxides métalliques faciles à réduire, je lobtiendrois promp- tement. Mes essais ont été infructueux en ce point, qu’au lieu (1) Cet oxide est jaune , comme on le sait, quand il est très-divisé. Tome LXXIX, JUILLET an 1814. E 03 4 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE de l'acide que j'espérois obtenir pur, j'ai seulement obtenu avec les oxides d’or et d'argent, des substances très-acides, mais où la présence des métaux étoit manifeste : ainsi la matière acide provenant de l'or, tachoit en pourpre les substances animales, et d’ailleurs on pouvoit aisément en séparer le métal. Ces résultats m'ayant engagé à reporter mon attention sur ce qui se passoit entre l’oxide rouge de mercure et l’iode, j'ai recueilli les eaux qui recouvroient la matière rouge provenant de cette action, et je les ai évaporées après y avoir joint les eaux de lavage ; ces liqueurs étant convenablement concentrées, j'ai oblenu un sel acide se concrétant en pellicules blanches, mais dont l'acidité et la solubilité étoient loin d’être aussi fortes que celles des com- binaisons que j'ai déjà signalées , tandis que les eaux mères étoient acides d’une manière très-sensible : ainsi ces pellicules blanches n’étoient devenues moins solubles , que parce qu’elles avoient abandonné à leurs eaux l'excès d'acide qui les avoit d’abord dissoutes, Enfin chacune de ces combinaisons traitée par l'acide sulfu- reux , lorsqu'elles étoient encore dissoutes et conséquemment avec un excès d'acide, abandonnoït beaucoup d'iode, qui se rassembloit en poudre noirâtre au fond du vase. En substituant l'acide hydro-chlorique (muriatique) à l’acide sulfureux, il se formoit du chlore (acide muriatique oxigéné ) qui dissolvoit l'iode ; mais en ayant recours à l'hydrogène sulfuré ou à l'acide sulfureux, l’iode se précipitoit. Ainsi je suis porté à conclure que toutes les fois que l’on mettra en contact avec l’iode et l’eau, et à la chaleur de l’eau bouil- lante, un oxide de très-facile réduction, l’oxigène d’une partie se portant sur une portion d’iode, la transformera en acide iodi- que, et cet acide se combinera à son touravec une autre portion d'oxide qu’il préservera de la réduction par son aflinité, tandis que le métal réduit et l’iode encore libre donneront naissance à un iodure , à moins qu'ils ne soient pas susceptibles de con- tracter d'union dans cette circonstance, auquel cas ils se trou- veront simplement mélangés dans le résidu (1). Néanmoins si le mélal est susceptible de se combiner à l’oxigène en plusieurs proportions, on conçoit qu'il pourra n’éprouver alors qu'une EEE (1) C’est le cas de l’or. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 85 réduction partielle : j'avois cru trop légérement que l'oxide rouge de mercure étoit dans ce cas. à Il n’est pas besoin d'ajouter que tous les peroxides qui ne donneront pas immédiatement un oxide soluble dans les acides, n'auront aucune action sur l’iode, à moins qu’ils ne puissent se réduire assez pour devenir solubles dans ces réactifs. Je puis maintenant expliquer un fait dont je ne pouvois me rendre compte dans le principe. J'ai déjà dit Fes versant de Vacide hydro-chlorique sur l’iodure obtenu par l’oxide rouge da mercure, il brunissoit à l'instant, au lieu de se dissoudre comme liodure véritable. Je me suis assuré qu'il étoit alors mélé d’iodate, et que cette séparation d’iode étoit due à la formation du chloré qui s’emparoit du métal de l’iodure. Je confirme ce que j'avance, 1° en mélant de l'iodure de mercure pur à de l’iodate mercuriel et à de l'acide hydro- chlorique ; 20 En mélant l'iodure fait directement avec le chlorate de potasse et l’acide hydro-chlorique ; 3° En faisant passer un courant de chlore au travers d’une eau, au fond de laquelle est de l’iodure de mercure pur et bien divisé, Dans toutes ces circonstances la couleur brune-noirâtre, le dégagement de chlore, la réduction, la précipitation et la dis- solution de l'iode se sont opérés de la même manière. J'ai annoncé plus haut l'identité de cette matière rouge im- pure avec le résultat que l’on obtient en précipitant les iodures alcalins par les dissolutions mercurielles; or ce phénomène est accompagné d’une circonstance remarquable, savoir, que la couleur du précipité est indépendante de l’oxidation du sel mer- curiel employé, c'est-à-dire, que le précipité est constamment rouge si l’iodure est en excès, et toujours jaune ou vert jaunätre si le sel mercuriel domine. D'où il faut conclure que tout loxi- gène du mercure réduit est employé dans ce cas à former un iodate dont la couleur blanche ne peut altérer celle du préci- Pité, qui d’ailleurs est jaune ou rouge selon la proportion de mercure qu’il contient , et que l’oxigène peut entrer dans les sels formés par l’iode, quandil l’acidifie , en proportions variables Où au moins sous deux proportions différentes, telles que l’une Soit double de Pautre, puisqu'il y a deux fois plus de mercure dans la poudre jaune qué dans là poudre rouge. E 2 36 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Les phénomènes se représentent d’ailleurs de la même manière; soit que l’on se serve d'un sous-iodure ou d’un sur - iodure. Cependant le premier donne de plus belles couleurs; mais on ramène facilement celles du second au même degré de beauté, en les chauffant sous l’eau, parce que l’iode en excès s’exhale en vapeurs pourpres, et le précipité paroït alors avec la couleur qui lui est propre. D er L'action de l'ammoniaque sur l’iode a fourni à M. Courtois une substance éminemment détonante, que MM. Gay-Lussac et Davy ont regardée comme étant le produit de la décomposition de lammoniaque; mais comme ils n’ont cité aucune expérience directe touchant cette matière, j'ai essayé d’en déterminer la nature, ce que je crois avoir résolu comme il suit : je me suis d'abord assuré que pendant l’action de l’ammoniaque sur Ja substance nouvelle, il ne se dégageoit aucun gaz, et J'ai ensuite examiné la poudre fulminante et le liquide qui la recouvroit ; celui-ci contenoit de l'hydriodate d’ammoniaque , car il y avoit un excès d'ammoniaque sensible à l’odorat, et la présence de Pacide hydriodique s’y démontroit aisément en le rapprochant à siccité, et le traitant par le chlore ou par l'acide sulfuri- que qui régénéroit de l’iode : quant à la poudre, elle faisoit effervescence avec la potasse ou. l'acide hydro - chlorique ( mu- riatique), et donnoit de l’azote pur. Enfin quand on la chauf- foit sous l’eau , il se dégageoit de l’azote, la poudre se dissipoit en partie, il se formoit un résidu d’iode qui se sublimoit ensuite un peu plus tard, et l’eau restoit colorée par une certaine quantité d’hydriodate d’ammoniaque contenant un excès d’iode. Ainsi la poudre fulminante seroit, d’après ces expériences, une combinaison d’iode, d’'ammoniaque et d’azote, ou plutôt un simple mélange des combinaisons de l’iode avec l'azote et l’'am- moniaque; mais nous allons avoir occasion d'observer tout-à- l'heure que lammoniaque y est accidentelle. Pour déterminer clairement la cause de ces phénomènes, j'ai tenté d’unir directement l’iode à l'azote; mais cet essai ayant été infructueux, j'ai fait réagir le gaz ammoniaque bien sec sur de Piode qui l'étoit aussi, et il y a eu sur-le-champ formation d’un liquide visqueux qui n’étoit point détouant. Cette substance avoit d'abord l’aspect métallique, puis elle a perdu cet aspect, s’est transformée en un liquide moins visqueux d’un rouge-brun très-foncé, ayant une forte odeur d’ammoniaque : cette dernière ET D'HISTOIRE NATURELLE, 37 combinaison , qui est évidemment avec excès d’alcali, ne détone d’ailleurs nullement; l’eau la dissout presqu’en entier et le ré sidu est très-fulminant ; elle ne diffère du liquide visqueux que par son odeur et son aspect, et tous les deux ne sont, par conséquent, qu’une combinaison d’ammoniaque et d’iode sous deux proportions diflérentes : 1l ne se dégage en eflet aucun gaz pendant opération, et l'ammoniaque est absorbée à mesure qu'elle arrive, jusqu’à ce que l’ivde refuse d’en prendre davan- tage. Pendant cette absorption il se développe assez de chaleur, et le liquide est volatilisé à la paroi supérieure du tube où l’on opère. En lui appliquant une chaleur d’environ 109°, on en sépare une petite portion où l’ammoniaque domine, mais la majeure partie du liquide reste dans la cornue en reprenant l'aspect métallique. Si l'on continue de chaufler au-delà de 15e, il se sublime, sans altération sensible , en vapeurs violettes, et ces vapeurs ne se distinguent pas autrement de celles de l’iode, que par l’état liquide auquel elles repassent en se refroidissant. Cette combinaison est complètement soluble dans l'alcool; elle diffère encore en ce point de la poudre fulminante qui ne s’y dissout pas, ensorte que c’est un bon moyen pour les sé- parer , et pour enlever à celle-ci l’iode excédant , s’il y en avoit de mêlé. La combinaison ammoniacale est décomposée par l’eau, en hydriodate d’ammoniaque qui se dissout , et en iode azoté qui est insoluble, mais en vertu de l’affinité de l’hydriodate d’am- moniaque pour un excès diode, une portion de l’iode azoté est décomposée ; ce qui explique le dégagement d’azote foible, mais continuel qui accompagne toujours ce lavage. En continuant de: laver, même après la décomposition complète de l’iodure d’am moniaque, le dégagement de l’azote continue, l’eau ne se colore presque plus , elle ne dissout en effet qu’un peu diode , en même temps qu’elle laisse un résidu qui n’est plus fulminant s’il a été sufisamment lavé, et qui m'a paru de l’iode pur : cette action dure plusieurs jours pour de petites quantités; elle est donc ex- trêmement lente. Cela fait voir en même temps combien est foible la combinaison d’iode et d'azote, et ce qui suit le prouvera davantage; néanmoins je dois dire, avant tout, que M. Courtois avoit observé, long-temps avant moi, qu’il se dégageoit un gaz. uand il recouvroit d’eau sa poudre fulminante, et qu’au bout an certain temps, elle étoit décomposée ef l’iode régénéré;, 36 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mais j'ignore complètement ce qu'il en a déduit touchant la pature de cette poudre, et d’ailleurs cela ne regarde nullement les propriétés du liquide visqueux que personne, je pense, n'a connu avant moi, et sans lequel , ce me semble, on ne pouvoit donner de preuves suffisantes de la théorie que je viens d’a- vancer. Une fois transformé en poudre fulminante, l’iode détone même s'il est humide, même sous l’eau quand on le presse lé- gérement ; mais s’il est sec, son explosion est spontanée, et quand les détonations ont lieu dans l'obscurité, on remarque qu’elles sont accompagnées de lumière : cela étant, on ne sauroit trop s’en méfier, et l’on doit regarder cette combinaison comme aussi dangereuse que le liquide détonant découvert par M. Dulong. On peut estimer facilement la quantité d’azote nécessaire à la formation de cette poudre, en partant de cette donnée que 156 grammes d’iode prennent to grammes d'oxigène; or à 10 grammes correspondroit 18,3257 d'hydrogène qui en feroit de l'eau ; d’un autre côté, 18,3267 d'hydrogène exigent 55,8544 d'azote pour former l’'ammoniaque : donc 58,8544 d’azote sont nécessaires à la saturation de 20 grammes d'iode. En effet, 18,3267 d'hydro- gène pouvant saturer ou 156 grammes d’iode, ou 58,8544 d'azote, il est naturel de conclure que 56,8544 d’azote satureront 156 grammes d’iode, ce qui est d’ailleurs conformé aux lois de la combinaison, Après avoir soumis l’iode à l’action des combustibles et des alcalis , je l’ai mis en contact avec les sels. Il a paru donner de la solubilité au sous-carbonate de chaux, et il s'est dissous abondamment dans le sous-carbonate de soude. Cependant il ny a pas eu de gaz dégagé, ainsi il s’en est fait seulement une dis- solution dans ces sels; mais quand j'ai essayé le sous-carbonate d'ammoniaque, j'ai encore obtenu un liquide visqueux, ayant l'aspect métallique et ne donnant pas de détonation. Ce liquide lavé un grand nombre de fois, est devenu pulvérulent , brun-ver- dâtre, et il n’a pas cessé de colorer l’eau qu’on jetoit dessus en même temps qu’il se dégageoit un gaz que J'ai reconnu pour être de l'azote. Les eaux de lavage entraïnoient de l’hydriodate d’am- moniaque, et lorsque la matière a été bien lavée, surtout en élevant très-légérement la température de l’eau de lavage, la Poudre est devenue détonante. Dans cet état, ni le carbonate d'ammoniaque, ni l’'ammoniaque liquide ne l’a rendue visqueuse, D" ns RENE + We ; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 3) et je n’ai pas mieux réussi en employant l’hydriodate d’ammo- niaque. Il est évident, d'après tous ces caractères , que ce liquide visqueux ne diffère pas du précédent, et que par conséquent c’est un iodure d’ammoniaque. Je dois ajouter qu’il est nécessaire de chauffer très-légérement pour oblenir ce liquide visqueux, sans cela il se manifeste une effervescence très-vive à une température assez douce, et tout disparoît. Cette effervescence se remarque aussi pendant la formation du liquide, mais elle est assez modérée, et son produit n’est alors que de l'acide carbonique presque pur. L’hydro-chlorate d’'ammoniaque dissout aussi l’iode, cependant il ne se produit rien de semblable à ce que l’on observe sur le carbonate. 11 paroît, d’ailleurs , que ces combinaisons triples ont plus de solubilité que leurs composans. Il en est de même.des hydriodates alcalins : ainsi il existe des hydriodates iodurés , comme il existe des hyÿdro-sulfures sul- furés. Cet excès d’iode est ordinairement dissipé en réduisant à siccilé et en employant une chaleur assez douce, Les huiles fixes et volatiles dissolvent l’iode sans effervescence, comme elles dissoudroient le soufre, et il paroît qu’on ne peut plus len séparer sans opérer leur décomposition. Le soufre se combine aussi à cette substance, et il en résulte un sulfure rayonné comme celui d’antimoine dont il a à peu près la couleur et l'éclat : cette combinaison est d’ailleurs très- foible; car à peine a-t-elle été chauflée un peu au-dessous de la chaleur ménagée où elle a été formée, que l’iode se répand en fumée pourpre, et si on pousse la chaleur, le soufre se dissipe à son tour. Enfin on peut ajouter au nombre des dissolvans de l’iode, les acides sulfurique et nitrique, s'ils sont étendus d’eau, et l’acide hydro -chlorique (muriatique) qui le dissout même à froid; car les deux autres ne le dissolvent qu’à chaud. Dans tous les cas, si la dissolution a été faite à chaud et qu’elle soit salurée, l'iode se précipitera par le refroidissement, en pelites aiguilles. L’acide hydriodique le dissout encore mieux et presqu’en toutes proportions. Il résulte de ce qui précède, 19 Que liodure de mercure est jaune ou rouge, selon le rapport de ses principes ; + 49 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Que le jaune peut se volatiliser sans altération en le chauffant brusquement, sinon il abandonne du mercure et devient rouge; Que le rouge se volatilise , sans décomposition, en belles lames rhomboïdales d’un jaune d’or, tant qu’elles sont chaudes, et qui redeviennent rouges par le refroidissement. Elles sont solubles dans l'alcool, sans cependant l'être dans l’eau. Plusieurs acides et plusieurs sels les dissolvent sans altération. Ces dissolvans, hors l'alcool, dissolvent aussi le jaune; 20 Que l’iode ne se combine point aux oxides métalliques qui retiennent leur oxigène avec très-peu de force; Qu'il réduit une partie de l’oxide qui est dans ce cas, se com- bine ou se méle, selon la circonstance, au métal revivifié; tandis que l’oxigène rendu libre, se combine à l’iode et à l’oxide encore intacts, pour former un iodate acide; 3° Que dans l’action de l’acide hydro-chlorique (muriatique) sur ces iodates, il se forme une dissolution.d’iode dans le chlore; 4° Que l’ammoniaque sèche mise sur l’iode bien sec, s’y com- bine en deux proportions : les deux composés sont liquides; le prot-iodure d’ammoniaque est un liquide d’un rouge brun ayant une forte odeur ammoniacale, le deut-iodure est visqueux et se distingue d’ailleurs par un aspect métallique. Aucun des deux n'est détonant; le visqueux peut s’obtenir au moyen du sous- carbonate d’ammoniaque ; 5° Que l’iode détonant est un iodure d'azote, et qu’il se forme en versant dans l’eau celui d’ammoniaque. Cette eau détermine la décomposition d’une portion d’ammoniaque, il en résulte un hydriodate d’ammoniaque et l’iodure d’azote ou poudre fulmi- nante; cette poudre n’est pas un corps permanent, l’eau suffit pour la décomposer ; étant sèche elle détone spontanément et répand alors une lumière sensible dans l'obscurité : on voit main- tenant avec facilité, comment l’ammoniaque liquide versée sur l'iode, fournit de suite l’iodure d’azote; 6° Que l’iodure d’azote est insoluble dans l'alcool , tandis que celui d'ammoniaque s’y dissout au contraire très-bien. Ce véhicule peut donc servir à les séparer l’un de l’autre; 7° Que si 156 grammes d’iode s'unissent à ro grammes d’oxi- gène, il en faut b,8544 d'azote pour saturer ces 156 grammes d’iode; 8° Que l'hydro-chlorate d’ammoniaque dissout aussi l'iode , mais Passé ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4x mais qu'il ne forme point de liquide visqueux comme le sous- carbonate de cette base ; Que l’action de l’iode en ce point est totalement différente de celle du chlore qui, d'après M. Dulong, décompose tous les sels ammoniacaux en donnant un liquide détonant composé de chlore et d'azote; 9° Que l'acide hydriodique, suit, relativement aux oxides mé- talliques, les mêmes lois que l'hydrogène sulfuré; car il mexiste aussi d’hydro-sulfures métalliques, que ceux des métaux très- oxidables, les autres étant réduits par l'hydrogène sulfuré comme ils le sont par l'acide hydriodique ; 10° Enfin qu'ilexiste des hydriodates iodurés, comme il existe des hydro-sulfures sulfurés , et que l’iode possède aussi, comme le soufre, la propriété de se dissoudre dans les huiles. Tels sont les résultats auxquels je suis parvenu en travaillant sur liode, Je desire avoir été assez heureux pour mériter l’ap- probation de la Classe, Tome LXXIX. JUILLET an 1814. F OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES THERMOMËTRE EXTÉRIEUR 5 ; RE LY GES BAROMÈTRE MÉTRIQUE. RE I Maximum. | Minimum. |A Mix. Maximum. | Minimum. A MIDI. "WUAHIL « © & = C2 ‘IOIN V NI mA : | o [OI mill, | heures. mill. mill 1/à midi, 422,90|à 4 m. n’avoit ET D'HISTOIRE NATURELLE. 145 n'avoit point trouvé d’alcali d'aucune espèce, mais une portion considérable de chaux (x). Le natrolite a été dernièrement rencontré sous une forme cris: talline régulière, et cette forme paroît être parfaitement sem- blable à celle de la zéolite; mais M. Haüy ne s’est pas cru au- torisé par celte circonstance, à considérer ces deux corps comme de la même espèce, parce que la zéolite, dit-il, ne contient pas un atome de soude (2). J'avois trouvé, il y a un nombre d'années, de la soude dans ce que je considérois être des zéolites, que j'avois recueillies dans l’île de Staffa, ayant obtenu du sel de Glauber en les (1) Journal des Mines , n° XLIV. (2) Idem , n° CL , juin 1810, pag. 458. Il paroïît évidemment que c’est cette différence essentielle , indiquée dans leurs compositions par les expériences de deux des plus grands chimistes de l'Europe, qui a seule empêché M. Haüy de réunir le natrolite à la zéolite. . Il n’est même pas douteux que si M. Haüy avoit possédé le natrolite en cris taux suffisamment volumineux , pour admettre une application entière des principes de sa théorie , il auroit fait envers cette espèce ce qu’il avoit déjà fait dans le cas de l’émeraude. Confident dans les moyens d’une science dont il est lui-même le créateur, que ses seuls travaux ont porté à l’état étonnant de per- fection qu’elle a aiteint , et qui ne l’a point encore trompé, il eût osé en appeler des résultats de l’analyse. Il eût demandé au célebre chimiste, auteur de son incertitude , de nouvelles recherches ; et une erreur , due sans doute seulement à l’état imparfait de la science elle-même dans le temps de la première expe— rience , eût disparu dans une seconde, et fourni encore une fois un triomphe à la Crstallographie. Quoique quand les matières sont dans des états qui ne permettent pas d’en déterminer la forme propre , la Cristallographie n’offre point de moyens de les reconnoître , dans tous ceux ( à l'exception d’un petitnombre de cas particuliers) où cette détermination est possible , la Cristallographie fournit un caractièrs distinctif entre eux dont jusqu'ici aucune observation exacte et certaine na récusé la justesse. ; Il sera cependant extrêmement intéressant d'étendre les recherches, et de de= terminer si la nature a doué d’une forme particulière chacune des innombrables espèces de la Chimie , dont la forme n’est point un des solides réguliers de la Géométrie, Quand on considère que dans un certain nombre de genres de molé- cules , les dimensions respectives des faces peuvent, aussi bien que les angles, varier à l’infini, on ne peut trouver rien d’improbable dans la supposition qu’elle l’a fait. Note de M. de Smithson, communiquée à Paris, et qui n’est pas dans les Transactions Philosophiques. Tome LXXIX. AOÛT an 1814. TL 146 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE traitant avec l'acide sulfurique; et je me suis souvent, depuis, assuré de la présence du même principe dans de semblables pièces de plusieurs autres endroits; et le docteur Hutton et le docteur Kennedy avoient aussi trouvé la soude dans des corps auxquels ils ont donné le nom de zéolite. Mais il n’étoit nullement certain qu’aucun-des sujets de ces expériences, fût de la même nature ; que ce qu’avoit examiné M. Vauquelin, fût de l'espèce que M. Haüy a nommée mésotype. M. Haïüy eut la complaisance de m'envoyer dernièrement quelques échantillons de minéraux. 11 arriva qu'il y avoit parmi eux un groupe de zéolites en prisme tétraèdre rectangulaire , ter- miné par des pyramides télraèdres obtuses, dont les faces coïn- cidloient avec celles du prisme. Ces cristaux éloient élevés à une grandeur considérable et parfaitement homogène, etilsétoient” éliquelés par lui- même : « #6so4ype pyramidee du département du Puy de-Dôime.» J'ai profité de cette occasion favorable pour déterminer si la mésotype de M. Haüy et le natrolite difléroient ou nou dans leur composition, et les résultats des expériences ont été entièrement contraires à leur séparation en deux espèces, comme les détails qui suivent le feront voir. Dix grains de cette zéolite étant exposés à une chaleur rouge pour cinq minules, perdirent 0.75 de grain, et.le cristal devint opaque et friable. Dans une seconde expérience, ro grains étant exposés pour 10 iminutes à un feu plus fort, perdirent 0.95 de grain de leur poids, et le cristal se consolida en une matière dure et transparente. Dix grains de cette zéolite, qui n’avoient point été exposés au feu, furent réduits en poudre fine, et de Facide muriatique versé dessus. Dans l'espace de quelques heures, sans l’addition d’aucüne chaleur , la zéolite se trouva entièrement dissoute, et quelques heures après, la solution devint une gelée. Cette gelée fut évaporée à siccité et puis rougjie, | De Peau fut versée à plusieurs reprises sur cette matière rougie jusqu'à ce qu'elle cessa d'en rien extraire. Cette solution fut évaporée Jusqu'à siccité, et le résidu légérement rougi. 11 pesoit alors 3,15 gtain; c'étoit du muriate de soude. La solution de ce muriate de soude étant essayée avec des solutions de carbonate d'ammoniac et d’acide oxalique, ne pro- duisit pas le moindre précipité, ce qu’il n’auroit pas manqué ET D'HISTOIRE NATURELLE. 147 de faire si la zéolite eût contenu quelque portion de chaux, TH le muriate de chaux n'auroit pas été décomposé par e feu. La malière restante, de laquelle ce muriate de soude avoit été extrait, fut, à plusieurs reprises, digéré avec de l'acide murijatique, et tout, jusqu'à ce qu'il y avoit de soluble, fut dissous : ce qui restoit éloit de la silice. Après avoir été rougi il pesa 4.9 grain. La solution muriatique qui avoit été. décantée de dessus la silice, évaporée jusqu'à siccité, et puis rougie, étoit de l’alumine. Pour découvrir si aucune portion de magnésie éloit contenue parmi cette alumine , elle fut dissoute dans de l'acide sulfurique, et la solution évaporée à siccité et rougie. L'eau a, en eflet, extrait une matière saline de cette alumine rougie, mais elle n’avoit pas du tout l’apparence du sulfate de magnésie, et se trouva être une portion de sulfate d'alumine, qui avoit échappé à la décomposition; car «en y ajoutant du sulfate d’ammoniac, il a produit des cristaux en octaèdres réguliers de sulfate alu- mineux-ammoniacal. Cet alun et cette alumine furent mélés ensemble et digérés dans l’ammoniac, et le tout séché et rougi. L’alumine qui resta pesoit 3.1 grain. Etant soupconnée de contenir encore une portion d’acide sul- furique, cette alumine fut dissoute dans l’acide nitrique, et de l’acétate de baryte fut versé en excès dans la solution. Un pré- cipité de sulfate de baryle tomba , qui, aprèsavoir été lavé etrougi, pesa 1.2 grain. Si nous admettons que dans le sulfate de baryte 3 est de l'acide sulfurique, la quantité de Palumine sera. .... = 3.1—0.4—2.7 grains. D’après les expériences du docteur Marcel (1), il paroît que Fe grain de muriate de soude répondent à 1.7 grain de soude. @) Transactions Philosophiques 1807. T2 148 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ainsi, suivant les expériences ci-dessus, les 10 grains de zéolite analysés contenoient, SL ER à EAP At PERDRE MT ae IA He PAU ENee PEU aitu sde lle 2270 DORE AS er es fu. A UMNNES FIND Glace (eu conertte) ue. CR. ME TOO) 10.25 ‘Comme ces expériences avoient été entreprises plus pour dé- terminer la nature des parties constituantes de cette zéolite, que pour leurs proportions, leur objet a été considéré comme ac- compli, quoique sous ce dernier rapport une exactitude parfaite n'ait pas été atteinte. En outre, l’analyÿse que nous possédons du nalrolite, évidemment la même espèce, par l'illustre chimiste de Berlin, rendoit cette exactitude dansles proportions, superflue. Je suis porté à préférer le nom de zéolite, pour cette espèce de pierre, à tout autre nom, pour ne point oblitérer entièrement de la nomenclature de la Minéralogie, pendant que des noms arbitraires y sont retenus, toute trace d’une découverte, du grand minéralogiste à qui nous la devons, laquelle fut considérée dans le temps qu’elle fut faite, comme très-importante, et l’étoit en effet. La Minéralogie jusqu’à son temps, avoit recu toutes ses espèces des mineurs et des lapidaires. La zéolite fut la pre- mière dont elle s'enrichit elle-même, et ce fut sa découverte avec celle du nikel, et l'établissement du tungstein comme espèce particulière, quoique de principes inconnus, qui ouvrit à la Minéralogie la carrière qu’elle a suivie depuis avec tant d'éclat. Des diverses substances’ que l’état imparfait de la science dans son temps, porta le baron de Cronstedt', d’après quelques qualités communes à associer ensemble sous lenom de zéolite, c'est la présente à laquelle ce nom.a été plus particulièrement affecté, et dont les qualités ont été prises pour celles de l'espèce. Il me paroit que le nom imposé à une substance, par celui qui en a fait la découverte, devoit être tenu, en quelque sorte, sacré; et-ne-point être changé sans-une nécessité majeure. Cet égard pour le nom qu’il a imposé, n’est qu’un foible et juste retour de respect envers l’auteur d’une découverte, pour le service qu'il a rendu à la science. M. le professeur Struve de Lausanne, dont les talens en Mi- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 149 néralogie sont bien connus, m’ayant dit, dans l’une de ses lettres, que, d'après quelques expériences qu’il avoit faites, il soupconnoit l'existence de l'acide phosphorique dans plusieurs pierres, et par- ticulièrement dans la zéohte d'Auvergne; j'ai dirigé mes recher- ches vers cet objet; mais je n'ai point trouvé l'acide phospho- rique, ni aucun autre acide reconnu comme tel, dans cette zéalite. Beaucoup de personnes trouvant une grande difliculté à con- cevoir la combinaison des terres ensemble, ont été conduites à supposer l'existence des acides qui échappoient à l'analyse dans les cristaux pierreux. Si le quartz lui-même est considéré comme un acide, à quel ordre de corps ses qualités le rapprochent- elles beaucoup plus que des terres? leur composition devient facile à comprendre. Ils seront alors des sels neutres, des si/i- cates, ou simples ou composés. La zéolite sera un sel composé, un silicate hydraté d’alumine et de soude, et ainsi un composé d’alumine pas très-dissemblable de l’alun et de la topaze, dont les ingrédiens singuliers, découverts par M. Klaproth, ont excité une demande de la part du célèbre M. Vauquelin, par rapport à la manière dont ils sont unis (1), elle sera aussi un sel double, formé de silicate d’alumine et de fluate d’alumine. 22 janvier 1811. ADDITION CONCERNANT LE MINIUM NATIF. APRÈS que J'eus fait connoître au président de la Société Royale, par ma Lettre imprimée dans les Transactions Phi- losophiques pour 1806, la découverte du minium natif, j'appris que ce minéral venoit des mines de plomb de Breyÿlau en Westphalie, _ (1) Annales du Muséum d'Histoire naturelle | tome VI, pag. 24. 150 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ERRATUM. Fautes principales qui se sont glissées dans la traduction du Mémoire sur l’Ulmine , imprimé dans le Journal de Physique du Cahier d'avril, Pages. 313 314 19 Aù lieu de Klaproth, Zisez, Monsieur Klaproth. Thomson, lisez, le docteur Thomson. ses, lisez, ces , après extraordinaires, ajoutez, qu'on lui a attribués. se sépare, lisez, se divise. se coulent, /isez, se recourbent en haut. comme le muriate de potasse, lisez, cristallisa en cubes blancs qui étorent du muriate de potasse, ce qui parut en les décomposant par l’acide ni- trique. après décomposé, ajoutez, par l'acide nitrique. chauflé au rouge, Lisez, fut déflagré en pelites por tions à-la-fois. détoné, lisez , fondu. rouge, lisez, d'un roùge de grenat. et les acides employés pour lPobtenir, lisez, ni re- tenir aucune portion de l’acide au moyen duquel elle avoit été obtenue. délayée, lisez, mise. une matière cassante, lisez, une matière qui lui ressemble parfaitement, laquelle se fendille et se détache du verre, ne devient point humide, etc. Il paroît, d’après cela, que l’ulmine n’est pas un principe particulier des végétaux, etc., lisez, Ainsi il paroît que l’ulmine n’est pas un principe végétal simple de qualités tout-à-fait extraordi- naires, mais une combinaison avec la potasse d’une matière rouge, ou plutôt d’un jaune très-concentré, et laquelle , si elle n’est pas d’un genre particulier, Pages, | Liga. 314 25 31) 2 20 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 1Üx Au lieu de paroît avoir plus d'analogie avec les matières ex- tractives qu'avec les résines. néanmoins elle ne s’attache pas contre un verre de montre, lisez, laquelle se fendilla et se divisa comme fait l’ulmine séché de cette manière. Elle ne s’éleva cependant point du verre de montre en longs rubans comme fait l'espèce de silice. effacez très. promptement, lisez, fortement, après dissolution, ajoutez, filtré de cette. après reprises, ajoutez, nulle portion de la matière brune se dissolvit. effacez, facilement. à l'arbre qui le produit, etc., lisez, à ce que l'arbre, sur lequel il avoit été recueilli, étoit peut-être af- fecté de la maladie qui produit l’ulcère alcalin, auquel lorme est sujet. n'étoit pas, /isez, pouvoit n'être pas. la liqueur filtrée qui devoit contenir l’ulmine, Zisez, le mélange étant jeté sur un filtre, une liqueur claire passa, laquelle contenoit peut-être de lul- mine, mais la quantité en étoit trop petite pour admettre des résultats satisfaisans. ÆErratum communiqué par M. Smithson. 152 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, elc. DD D EN TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Recherches sur le mouvement des ondes ; par M. N. Th. Bremontier. Extrait par J.-C. Delamétherie. Pag. 73 Tableau météorologique; par M. Bouvard. 98 Astronomie théorique et pratique; par M. Delambre. Extrait par J.-C. Delamétherie. 100 Mémotre sur les combinaisons de l'iode , avec les subs- tances végétales et animales; par MM. Colin et H. Gaultier de Claubry. III Première lettre sur l'incertitude de quelques oxidations; par L. Proust. 119 Essai sur les tables de degrés de certitude et de pro- babilité des connoïissances humaines ; par J.-C. De- lamétherre. 133 Mémoire sur la composition de la zéolite ; par M. James Smithson. Traduit de l'anglais par l'Auteur. 144 e De l'Imprimerie de Mme Veuve COURCIER, Imprimeur - Libraire pour les Mathématiques, quai des Augustins, n° 57. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURELLE. SEPTEMBRE AN 1814. 2 d ; INT MÉMOIRE SUR L'IODE; Par Sir Huwrary DAVY. 1 TIRÉ DES TRANSACTIONS PHILOSOPHIQUES (1} Traduit par le Professeur DE LA RIVE (2). UXE substance nouvelle et curieuse, a occupé dernièrement l'attention des chimistes de Paris. Cette substance fut découverte accidentellement il y a deux ans, par M. Courtois, manufacturier "(r) Extrait d’une Lettre de sir H. Davy, à J.-C. Delamétherie. Geneve, 26 août. Je vous envoie la traduction de mon premier Mémoire sur l’Iode. Je vous prie d’avoir la complaisance de vous servir de cet exemplaire qui renferme quelques corrections... (2) C’està la complaisance de Sir H Davy que nous devons ce Memoire! Cet homme illustre est maintenant à Genève avec son aimable compagne , 4 Tome LXXIX. SEPTEMBRE an 1814 V 154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE à Paris et chimiste distingué. Dans le cours du procédé par lequel il se procuroit de la soude avec les cendres du vareck, il trouva que les vases métalliques dont il faisoit usage étoient rougés, et c’est en cherchant la cause de cet eflet, qu’il dé- couvrit la nouvelle substance. Il parvint ensuite, au moyen de l'acide sulfurique, à la retirer avec facilité des cendres mêmes après l'extraction du carbonate de soude. Quand l’acide est assez concentré pour produire une forte chaleur, la nouvelle substance paroïît sous la forme d’une belle vapeur violette, et se condense en cristaux qui ont la couleut et le lustre de la plombagine. Peu de temps après l'avoir découvert, M. Courtois en donna un échantillon à MM. Clément et Désormes, et le 29 novembre, ces savans lurent à l’Institut un Mémoire sur ce sujet. Ils y rendirent compte des principales propriétés de cette substance: ils avoient trouvé que sa pesanteur spécifique éloit environ quatre fois celle de l’eau, qu’elle se transforme en un gaz de couleur violette à une température au-dessous de celle de l’eau bouillante, qu’elle se combine avec les métaux, le phosphore, le soufre, les alcalis et les oxides métalliques, qu’elle forme un composé détonant avec l’ammoniaque, qu’elle est soluble dans l'alcool et beaucoup plus dans l'éther, et qu’elle forme par son action sur le phosphore et l'hydrogène, une substance possédant les caractères de l'acide muriatique ; ils n’avoient cependant pas une opinion fixe sur sa nature. M. Ampère eut la bonté de me donner une petite quantité de cette substance, et M. Clément me pria de la soumettre à l'action des réactifs chimiques : je fis sur elle plusieurs expé- riences, qui me persuadèrent que c'étoit une nouvelle substance non-décomposée encore, et que l'acide qu'elle formoit n'’étoit pas de l’acide muriatique, mais un nouvel acide qui avoit avec ce dernier une ressemblance frappante. Je fis part de cette opinion à M. Ampère et à d’autres personnes de mes amis. Le 6 décembre, M. Gay-Lussac lut à l’Institut un Mémoire dans lequel il avancoit que lacide formé par l’action de cette substance sur l'hydrogène, étoit un acide particulier. Il fit part laquelle il a dédié ses Élémens de Chimie. West venu continuer parmi nous ses savantes recherches, jouir du plus beau site que la nature-se soit plu à former, et partager la félicité d’un-peuple qui vient d’être rendu aw bonheur en recouvrant son antique indépendance, ET D'HISTOIRE NATURELLE 155 de plusieurs détails intéressans, sur la manière d’extraire cette substance, sur ses aflinités, et il la comparoit au gaz oxi-mu- riatique ou à la chlorine, et il montroit que l’on pouvoit faire usage à son égard des deux mêmes hypothèses, en la considérant soit comme un corps indécomposé, soit comme un composé d’oxi- gène. Ce savant est encore occüpé actuellement de nouvelles ex- périences sur cet objet, et on a droit d'attendre de son activité et de sa grande sagacité, des résultats nouveaux et intéressans. Cependant comme la méthode pour se procurer cette substance (1) est maintenant connue des chimistes, que ses combinaisons et ses affinités offrent un vaste champ à de nouvelles découvertes et occuperont surement l’attention de plusieurs personnes, et FRE celui qui l’a trouvée et ceux auxquels il a fait part d’abord le sa découverte, ne paroissent pas en faire une occupation par- liculière, je n'hésiterai pas à présenter à la Société Royale, le détail de mes recherches sur cet objet : et je le fais avec d'autant moins de scrupule , que la manière particulière que j'ai de considérer ces phénomènes, m'a conduit à quelques nouveaux résultats, qui probablement exciteront l'intérêt de la Société, soit par leurs rapports avec la théorie générale de la Chimie, soit par leur application possible à quelques arts utiles. Les premières expériences que je fis sur cette substance, furent dans le but de savoir si (largentane) le muriate d'argent pou- voit être produit dans sa solution aqueuse ou spiritueuse , et à cet effet je purifiai la substance en la distillant sur de la chaux. En mêlant cette solution avec du nitrate d’argent , elle dépose un précipité dense d’une couleur citron pâle. Ce précipité , re- cueilli et examiné, se trouva fusible à une chaleur rouge foible, et il prit alors une couleur rouge. Si dans cet état on l’exposoitf à l’action de l'hydrate de potasse fondu , il étoit décomposé avec rapidité, et il se formoit une substance solide ayant les carac- tères de l’oxide d’argent. La matière soluble dans l’eau séparée par le filtre donnoit par l’action de l'acide sulfurique la nouvelle substance. Une so- lution de potasse bouillie sur le précipité donnoit cette même substance, lorsqu'elle étoit traitée par le même acide. Ce précipité étoit beaucoup plus vite altéré par l'exposition (1) Poyez relativement à celte méthode le tome LVI, pag. 46, de la Biblios thèque Britannique. Q 2 1b6 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE à la lumière que le muriate d’argent, et étoit évidemment une substance diflérente. Concevant, d’après l’action de la potasse sur le précipité ; que c’étoit un composé de la nouvelle substance et de l’argent, j'essayai de le former en combinant directement ces deux corps. À cet eflet j'introduisis un peu de la nouvelle substance dans l'extrémité ferméé d’un petit tube courbé, et je plaçai, dans sa partie supérieure, de l’argent en feuilles : je chauffai l'argent hequIan rouge, puis je fis passer sur lui la substance en vapeurs ; action fut immédiate, l'argent fut rapidement dissous, et il se forma une substance fusible qui avoit tous les caractères chi- miques de celle obtenue du mélange de la solution avec le nitrate d'argent. Le moyen qui me parut le plus propre à effectuer la décom- position de cette substance par les agens chimiques, étoit l’action sur elle des métaux très-inflammables qui s'unissent avec l’oxigène et la chlorine, ou bien laction de la chlorine seule, qui en général tend à chasser Poxigène et à séparer ce principe des bases inflammables. Je chauffai un peu de potassium dans un petit tube de verre, et je passai de la substance en vapeurs sur lui : au moment que la vapeur fut en contact avec le potassium, il y eut inflammation, et le potassium brûla lentement avec une couleur bleue pâle. En répétant l'expérience avec un appareil au mercure, il ny eut aucun dégagement de gaz. La substance formée par l’action du potassium étoit blanche, fusible à une chaleur rouge , et soluble dans l’eau. Elle avoit un goût âcre et particulier , il y eut effervescence en l’exposant à l’action de l'acide sulfurique, et la nouvelle substance reparut. Il étoit évident que dans cette expérience il n’y avoit pas eu de décomposition de ce corps : le résultat parut dépendre uni- quement de sa combinaison avec le potassium. J'exposai ce corps à l’action de la chlorine dans un petit tube de verre, il absorba ce gaz et y il eut formation d’une substance qui étoit volatile par la chaleur et qui parut être un solide jaune: il étoit soluble dans l’eau et lui donnoit une couleur jaune ver- dâtre et,un goût fortement acide; quand on faisoit agir sur cette solution celle de potassenon en excès, il y avoit effervescence et production de la nouvelle substance, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 157 . L’acide formé par la solution de la substance unie à la chlo- rine, rougissoit les bleus végétaux au contact immédiat , et bientôt après les détruisoit. Quand on chaufloit la nouvelle substance dans le gaz oxigène, ou qu’on l’amenoit en contact avec de lhypéroximuriate de potasse chauffé au rouge, elle paroissoit ue subir aucun changement. MM. Clément et Désormes avoient avancé que lorsque la substance est combinée avec les métaux et dissoute, on pouvoit obtenir des oxides métalliques de ces solutions. Je soupconnai que cet effet dépendoit de la présence de l'humidité, ou de l’oxi- gène dérivé de Pair atmosphérique, et l'expérience justifia mes soupcons, Je chauffai la substance avec du fer, du mercure, de l’étain, du zinc et du plomb, en évitant le contact de l’air : elle s’unit avec ces métaux sans action violente, et elle forma des composés fusibles à une chaleur modérée, et volatils à une température plus haute. Tous ces composés, excepté celui du zinc qui étoit blanc, furent colorés de différentes teintes de rouge brun, et rouge orangé. Le composé qu’elle formoit avec l’étain étoit d’une couleur orange foncée, celui avec le fer d’un rouge brun brillant, celui ele plomb orange vif, celui avec le mercure orange approchant du rouge, et lorsqu'il étoit cristallisé il étoit cramoisi vif. Le composé de fer et de la nouvelle substance exposé à une solution alcaline , dépose immédiatement de l’oxide noir de fer : mais lorsque je le chauffai dans une petite cornue contenant du gaz ammoniac pur, il se combina avec l’ammoniaque et forma un composé qui se volatilisoit sans laisser aucun oxide. Le composé de la substance avec l’étain étoit soluble dans l'eau et avoit le caractère d’un acide : il se combinoit avec les alcalis sans déposer d’oxide. Le composé cramoisi de la substance avec le mercure , s’unis- soit de la même manière avec la potasse sans se décomposer, et par l’action de l'acide sulfurique il se formoit du sulfate de potasse, et le composé de la substance et du mercure étoit dégagé. s Quand on fait agir cette substance sur du phosphore, les deux corps se combinent avec rapidité à la température ordi- naire, il y a production de chaleur sans lumière, il s'élève du 158 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mélange une petite quantité d’un acide très-fort, par l'application de la chaleur cet acide est produit en plus grande abondance. Quand la substance est en excès , on obtient un composé fusible et volatil ; d’une couleur rouge ; mais si c’est le phosphore qui soit en excès, la plus grande partie du produit est plus fixe. J’examinai avec attention l’acide gazeux formé par l'action du phosphore. Il donne, en se combinant avec la vapeur aqueuse de l'air des fumées blanches et denses ; il a une odeur fort sem- blable à celle du composé solide de chlorine et de phosphore, laquelle elle-même a beaucoup de rapport avec celle de l'acide muriatique : il est rapidement absorbé par l’eau. Quand an le fait agir sur l’ammoniaque, il forme avec lui un sel blanc et dense, qui, par l’action de l'acide sulfurique, donne la substance particulière , et en même temps on aperçoit une odeur d'hydro- gène. Lorsqu'on chauffe du mercure dans le gaz acide, on ob- tient le même composé que celui résultant de l'action de la nouvelle substance sur le mercure , et il se dégage de l'hydrogène en quantité égale à la moitié du volume du gaz employé. Quand on fait agir le potassium sur lui, il n’y a point d’inflanmation comme dans le gaz acide muriatique; mais le potassinm se convertit en un corps semblable à celui résultant de sa combustion dans Ja vapeur de la substance, et il se dégage un gaz égal en volume à la moitié de celui du gaz acide, qui brûle de la même manière que l'hydrogène. Quand le composé aisément fusible et volatil, formé par la substance et le phosphore, est chauffé dans l’eau, il s’y dissout rapidement et forme un acide fort , lequel évaporé, laisse de l'acide hydro-phosphoreux pour résidu ; maïs si avant l'opération on le neutralise par de la potasse, puis si on le fait agir sur de Vacide sulfurique, on obtient la substance particulière. Lorsque le corps difficilement fusible, que la substance forme avec le phosphore, est exposé à l’action d’une petite quantité d’eau et est chauflé dans un tube de verre, il se dégage beau- coup de gaz spontanément inflammable, et il s'élève un sublimé blanc , lequel, soumis à l’action de l’eau froide, s’échauffe et donne une grande quantité d’un gaz qui a toutes les propriétés du gaz hydro phosphorique. La solution de cette substance cristalline dans l’eau, neutralisée par la potasse et décomposée par l'acide sulfurique, donne la substance particulière ; mais quand la solution est chauflée for: _ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 159 fement avant sa neutralisation , elle laisse seulement de l’acide hydro-phosphoreux, lequel chauflé , donne du gaz hydro-phospho- rique et devient de l'acide phosphorique. Il est aisé d’expliquer tous ces phénomènes , si l’on en excepte la production du gaz acide, lequel est un composé de la subs- tance particulière et d'hydrogène. Pour rendre compte de la production de ce gaz, il est nécessaire de supposer l'existence de l'hydrogène ou de l’eau dans la substance, ou de l'hydrogène dans le phosphore. Je fis usage de la substance distillée à travers la chaux vive, laquelle, suivant toute apparence, devoit absorber toute l’eau qu'elle contenoit. Dans ce cas, le gaz acide, qui donne l’hy- drogène lorsqu'il est décomposé par le mercure, fut produit en beaucoup plus petite quantité; le contraire arriva lorsque la substance fut mouillée. Il est possible que la petite quantité d’hy- drogène qui existe dans le phosphore, et qui paroît lorsqu'on soumet ce corps à l'électricité voltaïque, puisse influer sur le résultat ; mais Je suis porté à l’attribuer surtout à l'humidité adhé- rente à la substance, et je n'ai jamais pu réussir à produire une glus grande quantité de gaz avec le GREAT fusible, en le dis- tillant avec une nouvelle dose de phosphore. Quand le composé fusible de la substance et du phosphore est distillé avec une petite quantité d’eau, le gaz produit paroît être de la même espèce que celui produit par l'action de la chaleur pendant l: combinaison, et ces deux gaz absorbés par l’eau, donnent par l’action du nilrate d'argent, le même produit que celui qui est formé par l’action du même sel sur la solution de la substance dans l’eau. J'essayai de former un composé de la substance avec de l'hy- drogène en la chauffant à plusieurs reprises au rouge dans des tubes de verre remplis de ce gaz. Quand le gaz étoit humide, ou quand le tube contenoit de la vapeur, il se formoit un fluide fort acide de couleur jaune foncée; quand le gaz et la substance étoient secs, il y avoit une expansion de volume, et en brisant le t&be on apercevoit des fumées semblables à celles produites par Paction du gaz formé pendant l'union du phosphore et de la substance : le gaz formé précipitoit de la même manière la solution de nitrate d'argent. Get acide particulier, qui consiste d'hydrogène uni à la subs- tance, a une forte aflinité pour l’eau, et une petite quantité de 160 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ce liquide absorbe beaucoup de gaz : lorsqu'il est combiné avec l'eau , il s'élève avec elle en vapeurs, dans l’état d’acide liquide, il dissout la substance et prend une couleur de tan. La nouvelle substance, ainsi que MM. Clément et Désormes l'ont démontré, est soluble rapidement dans une solution de po- lasse : quand elle est en excès, la solution devient d’un rouge brun. En évaporant le mélange et chauflant au rouge, il se forme une substance exactement semblable à celle produite par la combinaison de la substance avec le potassium, Comme la potasse est un composé de potassium et d’oxigène» il est évident qu'atin de former avec la potasse le composé de potassium et de la substance, l'oxigène doit être expulsé; je trouvai par expérience, que les choses se passoient ainsi, et en examinant avec soin l’action des solutions des alcalis fixes sur la substance, j'établis existence d’une classe de corps précisé- ment semblables aux hypéroximuriates, composés d’oxigène, de la substance et de potassium , et formés d’une manière tout-à-fait analogue. Si l’on jette la substance dans une solution de potasse passablement forte, à mesure que la dissolution s'opère il se dépose des cristaux, et en saturant la solution avec la substance, on en obtient une quantité considérable, En versant l’eau-mère et la soumettant à l'évaporation , il se dépose encore quelques cristaux, Si tous ces cristaux sont précipités d’une solution pas trop saturée, ils sont de la même espèce, peu solubles dans l’eau, ils ont un goût analogue à celui de l’hypéroximuriate de po- tasse, ils donnent des étincelles lorsqu'on les jette sur des charbons enflammés et forment un mélange détonant lorsqu'on les com- bine avec du charbon. Fondus, ils donnent beaucoup de gaz oxigène et sont convertis dans la même substance que celle qui est formée par l’action du potassium sur la nouvelle substance. Si l’on évapore à sec la liqueur qui ne donne plus de cristaux, elle produit une quantité considérable d’une substsnce qui ne peut pas détoner avec les corps combustibles, et qui est la même que celle fournie par la combinaison de la substance avec le potassium. ù 11 est donc évident que l’oxigène contenu dans la potasse est de nouveau combiné par l’action de l: nouvelle substance, et qu'il se forme deux composés; l’un du potassium et de la nouvelle substance, et l’autre du potassium, de la nouvelle substance et de l’oxigène contenu dans la potasse, Eu de. ror MOD PTE ISTONRE NATURELLE. set En passant la vapeur de la substance dessus la potasse chauffée au rouge, et faite avec du potassium , l’oxigène est chassé, et il paroït que l’oxigène ne peut pas former un triple composé à une chaleur au-dessus de la chaleur rouge. En dissolvant la substance dans des solutions de soude et de baryte, on obtient des résultats semblables, et dans les deux cas il se forme deux composés : l’oxigène est condensé dans l’un, et l’autre est composé de la substance et d’un métal. IL n’est pas aisé de séparer entièrement le sel détonant du . sel soluble, il reste toujours dans l’eau-mère un peu de composé détonant ; mais en séparant les premiers cristaux d’une solution de potasse qui ne soit pas trop forte, et en les lavant dans de l'eau pure, le composé détonant d’oxigène, de potassium et de la substance, est obtenu assez pur. à Comme la nouvelle substance se combine avec le potassium et les métaux, avec beaucoup moins d’énergie que la chlorine, il me vint dans l'esprit que l’on pourroit la chasser de ses com- binaisons au moyen de ce dernier corps; et en effet, j'ai trouvé que cela avoit lieu dans toutes les expériences que j'ai faites: quand le composé de la nouvelle substance et du potassium est chauffé en contact avec de la chlorine, il se forme de Za po- fassane (muriate de potasse) : le gaz violet se montre, mais bientôt il se combine avec la chlorine et ils forment ensemble le composé acide particulier que j'ai décrit ci-dessus; mais vers la fin du procédé, lorsque la proportion de la chlorine diminue, la couleur violette du gaz se montre de nouveau, Quand le composé de la substance avec l'argent étoit traité de la même manière, il se formoit de l’argentane (du muriate d'argent), et la substance combinée avec la chlorine au commen- cement de l'opération, étoit dégagée dans un état de non-com= binaison vers la fin. Les mêmes phénomènes se présentent quand on soumet à l’action de la chlorine les composés de la substance avec le mer- cure et le plomb. L'action des acides sur les composés de cette substance répond à ce qu'on pouvoit attendre de son analogie avec la chlorine, Quand'on verse de l’acide sulfurique concentré sur le composé de la substance avec le potassium, une partie de cette substance se précipite, mais une autre partie s'élève en se combinant aveg Tome LXXIX, SEPTEMBRE an 1814. ZX 162 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE à: l'hydrogène et l’eau, se condense par le froid et Sos d'une couleur orange foncée, parce qu’elle a dissous un peu de la subs- tance : acide sulfurique de même paroït retenir un peu de la substance, car il reste rouge après avoir été fortement chauflé, el il est en partie décomposé , car il y a dégagement de gaz acide sulfureux, 1 est probable que cet acide est décomposé pour fournir de l'oxigène à une portion de potassium qu’il abandonne à cause de la nouvelle substance, et que l’eau est de même décomposée pour fournir de l'hydrogène à une autre portion dela substance : que l'hydrogène et la substance dans leur forme acide se com- binent avec l’eau de l'acide sulfurique qui forme le sulfate de potasse, et s'élèvent sous la forme de vapeurs. Quand l'acide sulfurique est versé sur le sel composé de la substance, d'oxigène et de potassium, la substance reparoît (1). Avec de l'acide muriatique concentré, les phénomènes que pré- sentent les deux composés alcalins, le composé binaire et le composé triple, sont très-intéressans. Lorsque l'acide est mis en contact avec le sel triple, il n’y a point d'effervescence, mais ilse forme une substance, qui paroît être un composé de chlorine et du nouveau corps : elle se dissout dans l’eau de l'acide et le muriate de potasse est précipité. Quand on fait usage du double composé , il y a une solution complète, et par l'application d’une douce chaleur l'excès d’acide muriatique est chassé, et le même acide que celui que l'on ob- tient par l’action de la substance sur l'hydrogène, reste dissous dans la liqueur. Quand on emploie des mélanges des deux sels, la substance elle-même se montre. Il paroît que dans le cas où lon emploie le triple composé, il y a non-seulement assez d'oxi- -&ène pourattirer hydrogène de la chlorine, laquelle doit se com- biner avec le potassium, mais aussi qu'il y en a suflisamment pour décomposer une portion suflisante de l'acide muriatique pour produire dela chlorine, laquelle entre en combinaison avec la totalité de la substance. Quand on fait usige du composé binaire, le résultat est an (1) J’aitrouvé depuis, que cet effet dépend d’une petite quantilé du composé double de iodine et de potassium adhérent au sel, ct que par l’application de la chaleur‘il y a une dissolution sans décomposition. v ÿ y À T's ET D'HISTOIRE NATURELLE. 163 exemple simple de double affinité; la nouvèlle substance laisse le potassium pour s'unir avec l'hydrogène de l'acide muriatique, et la chlorine et le potassium se combinent. Si l’on fait usage des mélanges des composés, l'oxigène est employé à attirer lhy- drogène de la substance à laquelle il semble adhérer avec beaucoup moins de force qu’à la chlorine. MM. Désormes et Clément ont dit que lorsque la nouvelle substance est exposée à l’action de l’ammoniaque liquide, il se forme une poudre noire qui détone par le moindre contact ou frottement. J’introduisis un peu de la substance dans de l’am- moniaque, je séparai la poudre noire de la liqueur, et je l’éva- porai à siccité : elle laissa une substance blanthe et saline, la même que celle qui est produite par l’union de l’'ammoniaque avec l’acide particulier composé de la substance combinée avec l'hydrogène ; d'où il paroît probable qu'une portion d’ammoniaque avoit été décomposée pour fournir de l'hydrogène. Je fis une expérience sur l’action d’une forte solution d'am- moniaque sur la substance avec l’appareil pneumato-chimique ; il n’y eut pas d'azote dégagé. De là je suis tenté de conclure que la poudre noire est un composé de la nouvelle substance et d'azote, semblable dans ses caractères à l'huile détonante , dé- couverte par M. Dulong, et cette conclusion est fortifiée par les résultats de sa détonation dans un tube de verre vidé d’air en partie; ces résultats sont la substance particulière, et un gaz qui n'est pas inflammable et qui ne soutient pas la combustion; et à moins que la substance ne fût humide, je n'ai jamais pu trouver autre chose; mais la petite quantité dont j'ai fait usage nem- pêche de me trop confier dans ces résultats. C’étoit un objet d'un grand intérêt que de s'assurer des pro- portions dans lesquelles la nouvelle substance se combine com- parativement avec celles, dans lesquelles les autres substances qui forment des acides par leur action sur les corps inflammables, entrent elles-mêmes en combinaison. Je fis différentes expériences sur ce sujet, je trouvai que 4 grains d’hydrate de potasse étoient saturés par 6,25 gr. de la nouvelle substance; et que 2,8 gr., qui sont la quantité du p9- tassium dans 4 grains de l’hydrate , sont à 6,25 gr., quantité de la nouvelle substance :: 75 , nombre qui représente le potassium, est à 166. De plus, r grain d'hydrate de soude demandoit 2,1 gr. de la nouvelle substance pour sa saturation, et I gr. d'hydrate X 2 s SHRET : :40R 164 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE. n… … de soude contient £ de sodium; ensorte qu’en supposant la com- binaison de la nouvelle substance avec le sodium de deux pro- portions de cette substance, le nombre qui représentera la pro- portion dans laquelle elle se combine sera près de 160. . ” . » Deux grains du composé de la substance avec le sodium dé- composé par l'acide sulfurique, donnent 1,28 de sulfate sec de soude , et en calculant d’après celte expérience , le nombre est 165,5. J'ai fait quelques expériences sur la quantité de la substance absorbée par l’'étain, le mercure et le plomb. Le mercure ab- sorbe environ + de son poids de ce nouveau corps, pour devenir la substance de couleur cramoisie, d’où il paroît qu’il doit en absorber deux proportions. Mes expériences ont été faites sur des quantités trop petites pour donner des résultats exacts; mais elles montrent que la nou- velle substance entre en combinaison dans une quantité beaucoup plus grande que deux fois celle de la chlorine , et considérée comme un élément, elle offre un nombre plus haut que ceux des corps inflammables simples, et même plus haut que ceux de la plupart des métaux. La méthode la plus correcte pour trouver le nombre qui re- présente la proportion dans laquelle cette substance se combine (en supposant que cette proportion soit délinie comme c’est le cas de tous les corps qui ont été examinés avec soin), seroit de s'assurer de la pesanteur spécifique de son COMPOSÉ gazeux ; comparée avec celle de l'hydrogène. Ce gaz, ainsi que je lai dit, donne seulement la moitié de son volume, et il me parut neutraliser un volume égal de gaz ammoniaque, ensorle qu'en supposant qu'il consiste de deux proportions d'hydrogène et seu- lement d’une de la substance, ce qui le rend analogue à la nature de l'acide muriatique, il doit être un des fluides élastiques les plus pesans. En supposant que le nombre qui représente la proportion dans laquelle la nouvelle substance se combine soit de 165, et en supposant qu’elle occupe dans le gaz le même volume que la chlorine occupe dans l'acide muriatique, cent pouces cubes de ce gaz pèsent, à une température et à une pression moyennes, 95,27 grain, en admettant que la. même quantité d’hydrogène pèse 2,27. : 6 Je ne possède pas dans ce moment un appareil propre à peser ré trier TU . "il D'HISTOIRE NATURELLE. 165 les gaz avec soin. Il faut un moyen particulier pour faire cette expérience, vu que le gaz en question ne peut pas se conserver sur le mercure; on peut le recueillir pendant l'action du phos- phore sur la substance humectée, dans un vase épuisé d’air; il peut être aussi produit en chauffant le composé de la substance et du potassium avec de l'acide hydro-phosphorique. Je trouve que la nouvelle substance n’est pas décomposée, quand on passe à travers d'elle dans l’état gazeux des étincelles vol- faïques au moyen de pointes de charbon; on voit d’abord des fumées blanches résultantes probablement de l’action de l'hu- midité ou de l'hydrogène contenu dans le charbon ou dans la substance; mais ces fumées cessent bientôt, et quand le tube dans lequel se fait l'expérience est refroidi, la substance paroît n'être point altérée. . D’après tous les faits qui ont été énoncés, il y a toute espèce de raison de considérer cette substance comme un corps non- décomposé, Dans sa pesanteur spécifique, son lustre, sa couleur, le nombre élevé qui représente la quantité dans laquelle elle entre en combinaison, cette substance ressemble à un métal ; mais dans ses affinités chimiques elle est plus analogue à l’oxi- gène et à la chlorine; elle n’est pas conductrice de l'électricité, elle possède, ainsi que ces corps, l'énergie électrique négative relativement aux métaux inflammables et aux substances alca- lines ; c’est pourquoi quand elle est combinée avec ces substances dans des ion aqueuses et qu’elle est placée dans le circuit voltaïque, elle se sépare à la surface positive. Mais elle a une énergie positive relativement à la chlorine; car lorsqu'elle lui est unie dans le composé acide que J'ai décrit, elle se sépare de cette dernière et va à la surface négative. Ceci correspond aussi avec l'énergie d’aflinité relative de ces deux substances, Ja chlorine chasse la nouvelle substance de toutes les combinaisons que j'ai soumises à cette expérience. La nouvelle substance paroît posséder une affinité plus forte que l’oxigène pour la plupart des métaux : mais elle est expulsée par lui du soufre et du phosphore. Je trouvai que si l’on passoit l’oxigène et le composé de la substance avec le phosphore , à travers un tube de verre chauffé au rouge, il y avoit formation d'acide phosphoreux et production de gaz violet. La forme solide de cette substance et son grand poids comme élément , expliquent pourquoi il y a si peu de chaleur et si nai. ‘ ) té 166 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE rarement de la lumière produite dans ses différentes combinaisons. Le potassium cependant, ainsi que je l'ai dit, brûle dans le gaz violet, et quand ce gaz est dirigé sur la flamme de l'hydrogène, il paroît soutenir $a combustion. Les pouvoirs de saturation et de neutralisalion de la nouvelle substance paroissent être plus grands que ceux de l’oxigène, et moindres que ceux de la chlorine. Elle forme , ainsi que la chlorine et la fluorine, des acides avec l’hÿdrogène ; et ainsi que l'oxigène , elle forme un acide avec la chlorine. On a proposé en France le nom de éode pour cette nouvelle substance , et cela, d’après sa couleur dans l'état gazeux ; ce nom vient du mot w#dWc violet, sa combinaison avec l'hydrogène a été nommée acide hydriodique. Le mot éodine en anglais est conforme à l’idiome de la langue, et analogue à ceux de chlorine et de fluorine. L’acide qu’elle forme avec l'hydrogène peut être nommé acide hydroionique, je propose de nommer l'acide qu’elle forme avec la chlorine, acide chlorionique , celui qu’elle forme avec l’étain, acide stannionique. Relativement aux autres composés, on pourroit les appeler Zodes, en y joignant le nom de la base, comme Zode de mercure, et les noms de proto, deuto , etc., pour désigner les proportions ; ou bien, si l’on préféroit une terminaison de la base, ainsi que je l'ai proposé pour les com- binaisons de la chlorine, la terminaison pourroit être en 72, avec les voyelles dans leur ordre usuel pour signifier les proportions, ainsi phosphorama signifieroit la combinaison d’une proportion de iodine avec le phosphore, et phosphorame désigneroit deux proportions de iodine et une de phosphore. Si ce dernier plan, qui n’embrasse pas des vues théoriques, étoit adopté, il pourroit s’étendre avec différentes consonnes aux combinaisons de la fluorine, et on pourroit faire signifier à la voyelle la proportion, et à la consonne la nature du composé. J'ai déjà proposé dans une autre occasion la voyelle qui termine le nom latin de la base, pour exprimer les composés d’oxigène, Ainsi argenta pourroit signifier le protoxide d’argent, et Jerre le deutoxide de fer. N est la consonne que j'ai suggérée pour représenter les combinaisons de chlorine, comme argentana pour le proto-chloride d'argent, et /, dans ce système, peut représenter la fluorine; ainsi calcala seroit le spath-fluor , soit une propor- + ET D'HISTOIRE NATURELLE. 167 {ion de fluorine et une de calcium, et les différentes combi- naisons de calcium avec les soutiens de la combustion, avec l’oxigève, la fluorine, la chlorine , et l’iodine en une seule pro- portion, se nommeroient calcæ, calcala, calcane, calcama. Je mets en avant ces idées, plutôt pour en faire un objet de discussion, qu'avec le desir qu’on les adopte: je souhaite aussi_ que l’attention des chimistes soit dirigée sur la nomenclature: elle devroit être fixée sur quelques principes fixes, et en nommant une nouyelle classe de composés, il faudroit faire une grande at- tention à prévenir la nécessité de quelque nouveau changement. Dans mon dernier Mémoire, présenté à la Société il y a deux mois, je me hasardai de suggérer qu'il étoit probable qu’il existât des- substances inconnues, analogues à l’oxigène, la chlorine et la fluorine. Je n’espérois pas dans ce moment-là, étre en état si vite de décrire les propriétés d’un corps de cette espèce , lequel non-seulemernt forme un acide avecl’hydrogène comme la chlorine ou la fluorine, mais aussi forme avec les métaux des corps analogues aux chlorides et aux oxides. Ces nouveaux faits, à ce que j'espère, serviront à fixer l'opinion des chimistes relativement à la nature de l'acidité, qui semble dépendre d’un mode particulier de combinaison des corps et non d’aucun principe élémentaire. CORRE 109 Il est probable que l'iodine:se trouvera: dans plusieurs com- binaisons de la nature; on doit la rechercher surtout dans les produits des végétaux marins et dans l'eau de la mer. 3 Ses composés avec les métaux formeront probablement une nouvelle classe de couleurs, et il paroît possible que les sels -triples qu’elle forme contenant de l’oxigène, pourront dans certains cas être substitués au nitre. Paris, ce 10 décembre 1813. 168 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Me SUITE DE L'ESSAI SUR LES TABLES DE DEGRÉS DE CERTITUDE, ET DE PROBABILITÉ DES CONNOISSANCES HUMAINES; Par J.-C. DELAMÉTHERIE. TROISIÈME ORDRE. CONNOISSANCES FONDÉES SUR L'ANALOCIE. L’ANALOGIE est la base du troisième ordre de nos connois- sances. Cet ordre est le plus intéressant et le plus étendu. On doit donc apporter le plus grand soin à en déterminer les divers degrés de probabilité, Car l’analogie n'a point de certitude pour nous : elle nous trompe plus ou moins souvent; mais il est assez difficile de dé- terminer les différens degrés de probabilité des faits qu’elle nous indique, pour en dresser des tables. L’analogie est fondée sur les faits que nous avons observés prenne par conséquent sa probabilité repose sur la pros abilité de la mémoire. Or nous avons vu que le zzaximum de la probabilité de la mémoire est @ — 1 où 99,999,999. Le maximum de la probabilité de l’analogie sera donc..., = B —2 où 99,999,998. L'analogie nous sert de guide dans les connoissances des faits de la nature, Sous ce rapport nous ne saurions trop l’étudier, Nous v où ET D'HISTOIRE NATURELLE. 109 Nous allons prouver que ces faits sont de diflérens ordres. Leur probabilité varie donc également. L’analogie nous conduit également dans les connoissances que nous fournit le témoignage des hommes. CONNOISSANCES FONDÉES SUR LES FAITS DE LA NATURE. Les faits de la nature nous sont connus par divers moyens. 1°, Quelques-uis sont fondés sur le sentiment, savoir, ceux que nous sentons immédiatement. Nous voyons des corps, Nous les entendons, Nous les flairons, Nous les savourons, Nous les touchons. Tous sent $. 2°. Mais c’est l’analogie qui nous donne la connoïssance du plus grand nombre des faits de la nature, de ceux que nousne senions pas immédiatement. « L’analogie, ai-je dit, Principes de la Philosophie natu- relle , tome II, pag. 454, m'apprend qu'éi existe hors de mo d'autres êtres, et me donne toutes les notions que je puis avoir sur ceux qui existent, ou peuvent exister, el qui ne Peuvent tomber sous nos sens.» ces fa . esse hienie Los ont pour nous la its certitude du sentiment pré- Elle me fait conclure de ce qui est, ou a été, à ce qui sera. Un corps grave, par exemple, gagnant constamment le centre de la terre, je conclus que la chose a constamment eu lieu, et sera encore. C’est le seul moyen de m'assurer de ce qui pourra arriver, ou de ce qui a été, en supposant que la mémoire ne puisse me fournir aucun secours. Je vois tel végétal : je conclus qu’il est semblable à tel autre que J'ai vu, que tel homme est semblable.à tel autre... Mais les analogies les plus générales ont des exceptions : on 2 # 4 ? ne sauroit donc être trop réservé sur les conséquences qu'on en déduit. Souvent les analogies paroissent contradictoires; il faut pour lors les balancer, et voir celles qui sont les plus constantes. L’analogie repose donc entièrement sur les faits de la nature; Tome LXXIX. SEPTEMBRE an 18r4, Y 170 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ceux qui se présentent toujours les mêmes, et sont constans..., passent pour une loi générale, et ont la plus grande probabilité. D’autres sont variables et ont moins de probabilité, L’analogie n’a, par conséquent, d'autre motif de crédibilité, que l’uniformité que nous observons dans la marche des êtres existans, comme nous l’avons dit précédemment. Les lois qu’ils suivent sont constantes. La zature ( c'est-à-dire ces lois) opère aujourd’hui comme elle a opéré hier, comme elle a opéré depuis un grand nombre de siècles. D’où je présume qu’elle opérera de même dans un an, dans mille ans (r). Elle paroît n’avoir qu'un seul plan, dont elle ne s’écarte jamais. Les exceptions qu’elle semble y meitre, ne sont qu’apparentes ; elles sont une suite des lois générales, comme les autres phénomènes. Des connoissances plus approfondies les font rentrer dans l’ordre naturel; par con- séquent , suivant l’analogie, tout ce qui paroît s’écarter de ces lois est impossible. - Il y a done des distinctions à faire dans ces analogies, On conclut, par exemple, de ce que le soleil s’est levé constamment depuis un certain nombre de siècles, qu’il se levera toujours. Cette conséquence est précipitée. Une autre analogie plus géné- rale, fait voir à l'observateur que tous les corps de la nature se détruisent et se décomposent, pour revêtir de nouvelles formes. On auroit tort d’assurer que plus un homme a vécu, plus l’ana- logie dit qu'il doit encore vivre. Certainement celui qui a vécu quatre-vingts ans a moins de probabilité de vivre que celui qui n'en a vécu que vingt. Des soleils ont également disparu ( la brillante étoile de Cassispée en 1572...) ; l'analogie doit donc nous laire présumer que le nôlre pourra subir le même sort. Si nous avions assez d'observations pour calculer la probabilité de la durée des soleils, comme nous en avons pour calculer la durée de la vie humaine, nous pourrions dire dans quel temps notre soleil doit s’éteindre, suivant les analogies. Les mouvemens des astres paroissent constans ; c’est sur ce principe qu’on construit les tables astronomiques. Aussi l’Æstro- nomie , dit Delambre, est à peu près une SCIENCE FAITE. ( ) Tant que cet ordre subsistera. 4h De ‘7 4 ET D'HISTOIRE NATURELLE. ! 171 Les pesanteurs spécifiques des corps sont constantes; c'est sur ce principe qu'on en a construit des tables. Enfin quelques faits de la nature ne nous sont connus que par le témoignage des hommes. Nous en parlerons ailleurs. Il faut donc distinguer différens ordres des faits de la nature par rapport aux connoissances que nous en pouvons avoir. a. Les faits constans. Les uns paroissent CONSTANS, telles sont les Jois générales de la Physique, celles de la gravitation, les lois du choc des corps. .., du mouvement des astres, de la pesanteur des corps... b. Les faits variables. Les autres sont VARIABLES, tels sont la vie des animaux, celle des végétaux..., ils naissent, ils meurent... c. Les faits dits de hasard. Enfin des troisièmes paroissent dépendre du hasard, tels sont les jeux des loteries... Les connoissances que nous avons des faits constans de la nature ont pour nous une probabilité assez grande; elles sont fondées sur des analogies constentes , telles sont les lois des phé- nomènes généraux, celles du choc des corps, le cours des astres..., la pesanteur spécifique des corps. Les connoissances que nous avons des faits variables de la pature sont fondées sur des analogies variables. On en a soumis plusieurs au calcul des probabilités, telle est la durée de la vie humaine... Les connoissances des faits qui paroissent dépendre du hasard, sont fondées sur des analogies plus ou moins éloignées qu'on ne sauroit estimer que par approximalion , telles que /es loteries... Nous allons exposer les probabilités que ces divers faits ont pour nous, et faire voir qu'on peut réduire ces probabilités en tables. CONNOISSANCES DES FAITS CONSTANS DE LA NATURE. Plusieurs faits arrivent d’une manière à peu près constante; ce sont ces faits que j'appelle FAITS CONSTANS. Ils présentent cependant quelques exceptions; par conséquent ils rentrent dans la classe des probabilités. YY2 .. 4 1°. La vue. Lorsque je me porte bien, et que j'ouvre les veux, j'apercois différens objets qui m’aflectent d’une manière à peu près constante. 172 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Nous ne connoissons lesobjets extérieurs que par nos sens. 20, L’ouie. Lorsque je me porte bien,et que j'ai les oreilles saines, J'entends des sons qui m'aflectent d'une manière à peu près constante. 30. Ze goût. Lorsque je me porte bien, et que je n’ai pas le goût vicié, les mêmes corps me procurent des saveurs à peu près constantes. 40. L’odorat. Lorsque je me porte bien, et que je n'ai pas J'odorat vicié, les mêmes corps me procurent des odeurs à peu près constantes. bo, Le 1oucher. Lorsque je me porte bien, et que n'ai pas le tact vicié, les mêmes corps me procurent des sensations du toucher à peu près constantes. 6°. La faim, la soif..., et plusieurs autres sensations m’af- feelent toujours d’une manière à peu près constante, dans des circonstances analogues. < J’en conclus par analogie, que tous ces corps m'’affecteront constamment de la même facon. Ces analogies seront exprimées pa 8 —x. Quelques-uns de ces faits paroissent frès constans, et n’ont présenté aucunes exceptions, telles sont les grandes lois qu’on observe dans les mouvemens des corps, Les lois du choc des corps soit durs, soit mous, soit élas- tiques... | Les lois de la gravitation, des pesanteurs spécifiques... Les lois du mouvement des astres. silerte Lors el etienne CRÉES OUEN TOC OR POMOME CET CCS SC Quelques autres de ces faits présentent des exceptions plus où moins considérables. La structure, par exemple, des animaux et des végétaux est à peu près constante dans chaque espèce ; cependant on y ob- serve assez fréquemment des exceptions. Quelques individus humains, par exemple, nous en offrent un grand nombre. I 4 | 1 Les uns ont des diflormités plus ou moins considérables, des bosses, des rachitismes, des Joupes , des goitres... ÿ#} * ET D'HISTOIRE NATURELLE. 173 On a vu des familles qui avoient six doigts à la main. 11 ya des albinos, des cretins.... Quelques femmes, telles que celles des Boschismaunes, ont des éxcroissances particulières, qu’on appelle zabliers. Quelques autres paroissent hermaphrodites, ... Les anatomistes ont trouvé également des diflérences assez considérables dans la structure des parties intérieures. e. L . . L2 [2 . . L2 LL L2 L2 L . LL L . L . . . . L 2 . L La probabilité qui dit que tel homme ou telle femme sont construits de la manière ordinaire, est donc seulement x. Les mêmes observations ont lieu au sujet des autres animaux et des végétaux. La probabilité et l’analogie qui disent que tel animal, ou tel végétal sont construits comme les autres animaux et végétaux de leurs espèces, sont donc x. On doit appliquer aux minéraux ce que nous venons de dire des animaux et des végétaux. La probabilité et l’analogie qui disent que telle masse minérale a les caractères et les propriétés des espèces analogues, sont donc x. La surface du globe terrestre, et les parties de cette surface que nous avons creusées, sont composées de terres diverses, de pierres, de substances métalliques, de substances charbonneuses et bitumineuses, d’eaux.... La probabilité et l’analogie qui disent que l’intérieur du globe est composé de substances analogues, sont 7. Nous allons proposer des essais de tables de probabilités sur les principaux de ces faits. TABLE Des Probabilités des faits constans de La nature, Probabilité de l’analogie qui dit que les lois générales du mouvement, auxquelles sont assujétis les êtres - existans, ne changent pas. ; 99:999,000 Probabilité de l'analogie qui dit que la loi de la gra- vitation universelle ne change pas. 99:999,000 174 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Probabilité que les premières parties de matière sont UNIES, Lovws, monos, ef éndivisibles, atomes, 99,999,000 Probabilité que chacune de ces parties premières a une force propre qu'elle ne perd jamais. 99:999,009 Probabilité que cette force propre est la cause de tous les mouvemens qui subsistent parmi les êtres existans. 99:999,000 Probabilité que c’est par l’action de cette force propre que s'opèrent toutes les combinaisons des corps, leurs décompositions, leurs actions... 99.999,00 Probabilité que dans les combinaisons des premières parties de matière, cette force ne se détruit pas, et est seulement 2 nisu. 99:999,000 Probabilité que la combinaison détruite, cette /orce | Propre qui étoit iz nisu, reparoît avec sa première énergie. d : 99:999:900 Ceai est prouvé par le sel ammoniac... Probabilité que cette force propre est la cause de toute impulsion. 99:999,000 Probabilité que cette force propre est la cause de toute attraction. 99,999,000 Probabilité que l'attraction est en raison des masses, et de l'inverse des carrés des distances. 99,999,000 Probabilité que toute attraction est produite par une impulsion de fluides quelconques, commeon le voit dans l'électricité, le magnétisme... 99:999,000 Probabilité que cette force propre est la cause de toute répulsion, comme dans l'électricité, lemagnétisme... 99,999,000 Probabilité que cette force propre est la cause de toute action galvanique. 99:999,000 Probabilité que la force dite d’ëmpulsion , ou la force communiquée à des cops par la force propre, se détruit dans les chocs, par exemple dans le choc de deux corps mous, comme dés boules d'argile. 99,999,000 Par conséquent cette force communiquée est d'une nature diflérente de la force propre, qui ne se perd jamais, 99,999,000 Probabilité que cette force F communiquée à d’autres ET D'HISTOIRE NATURELLE. 179 corps, est toujours en raison des masses M et des vitesses V, ou F=—MX V— 99:999;000 La même probabilité a lieu pour toutes les autres lois du mouvement. Probabilité que lorsque deux molécules ont des forces propres égales, et dont les directions sont opposées, ; il en résulte un tout immobile, comme le gypse, le calcaire... 99:999,000 Probabilité que lorsqu'il y a inégalité dans les forces de deux de ces molécules, dont les directions des forces sont opposées, le tout se mouvra dans la direction de la plus intense avec l’excédant de ces forces, et en ligne droite. 99,999,000 Probabilité que si dans l’hypothèse précédente, les centres des forces ne correspondent pas aux centres des masses, le tout aura un mouvement de rotation sur son axe. - 99,999,000 Probabilité que si dansl’hypothèse précédente les cen- tres des forces se trouvent dans de certains rapports avec les centres des masses, le tout se mouvra dans des courbes de différentes natures, avec des mou- vemens de rotation autour de l’axe, comme les planètes, les comètes..….. 99;999;000 Probabilité que les molécules de tous les fluides, le calorique , le lumineux, l’électrique, le magnétique, les gaz..., ont de semblables mouvemens de ro- tation autour de leur axe, ou points d'équilibre. 99,000,000 Probabilité que les molécules de lalcool, de l’eau, de tous les corps liquides réduits en fusion ou en vapeurs, ont de semblables mouvemens de rotation aulour de leurs axes. 99,000,000 Probabilité que les mouvemens de répulsion qu'on apercoïit entre les molécules de tous les fluides, sont dus à ces mouvemens giratoires, ou de rotation au- tour de leurs axes. 99,000,000 Probabilité que la formation de tous les corps qui sont à la surface de la terre, minéraux, végétaux et animaux, est une espèce de crzstallisation. 99,000,000 Probabilité que la formation des grands globes, la 5 176 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE terre, les planètes, les comètes, les soleils. . ., est due à la même cause, à la cristallisation. 99;000,000 Probabilité que les minéraux, les végétaux et les ani- maux se décomposent pour former de nouvelles combinaisons. 99,999,000 Probabilité que les grands globes, les planètes, les! comètes se décomposent également pour former *-des nouveaux composés, 99,000,009 Probabilité que le double mouvement de ces grands globes, celui de rotation autour de leurs axes, et celui de translation dans uneellipse, sont dus à la Jorce propre des parties dont ils sont composés. 99,000,000 Probabilité que ces mouvemens sont modifiés par l’ac- tion des divers fluides et de leurs atmosphères. 99,000,009 Probabilités que les perturbations, que ces grands globes se causent, sont produites par l’action de ces fluides, 99,000,000 Probabilité qu’il existe un fluide gravifique qui influe sur ces perturbations, et est la cause de la gravi- tation générale, 90,000,000 Probabilité qu'il existe un fluide lumineux répandu dans l’espace. 99,900,000 Probabilité que ce fluide produit la lumière par un mouvement qui y est excité d’une manière analogue à celui qui est excité dans l'air pour produire les sons. 99,000,000 Probabilité que ce fluide lumineux est composé de sept rayons, rouges , orangés , Jauues, verts, bleus, indigo et yiolets. ; 99:000,000 Probabilité qu’il existe un fluide répandu dans l’espace qui produit l'électricité, le galvanisme. 99,000,00Q Probabilité que ce fluide éZectrique est composé de plusieurs rayons, ainsi que je l'ai dit, savoir, des idio-électriques, des an-électriques , des pyro-élec- triques, des sunaphto-électriques, des positivo- électriques, des négativo-électriques. …. CA Probabilité qu’il existe dans l’espace un fluide #7agné- ligue , qui produit les phénomènes du magnétisme. KA Probabilité ET D'HISTOIRE NATURELLR. 177 Probabilité qu’il existe un fluide particulier qui pro- duit les nébulosités. .. Probabilité que ce fluide nébuleux produit les phos- phorescences. Probabilité que ce fluide nébuleux est la matière pre- mière (lakasch) dont sont formés tous les corps existane, 99,000,0c0 æ Probabilité que ce fluide nébuleux est composé, comme le fluide lumineux, de plusieurs rayons; car s’ilétoit homogène, onconcevroit difficilement qu’il pût for- mer les différens corps. (}oyez mes Mémoires, Journal de Physique, tome LXXVII, pag. 41, ettome LXXVIIL, pag. 165.) æ Probabilité que l'air atmosphérique terrestre ést com- posé, a d'air pur, à d’air impur ou azote, c d’air inflammable, d d'acide carbonique, e d’eau, f de miasmes. Probabilité que cet air atmosphérique, et chacun de ces airs en particulier, peut éprouver des. oscilla- tions diverses qui produisent les divers sons, 99,999,000 Probabilité que la partie pondérable de ces airs est de l’eau , comme la partie pondérable des vapeurs aqueuses. , . 99:999;009 «& Probabilité que dans la combustion de l'air pur et de l'air inflammable, l’eau qu’on obtient , est seu- lement dégagée , et n’est pas produite. x Probabilité que l'air inflammable contient une grande quantité de calorique. . 99:000,000 Probabilité que cet air inflammable se trouve dans tous les corps combustibles végétaux et animaux. g0,000,000 Probabilité que cet air inflammable se trouve égpa- lement dans tous les corps combustibles minéraux, soufre, phosphore,charbon, substances métalliques. x Probabilité que l'air pur ne contient qu'une petite quantité de calorique. 99;000,000 Probabilité que dans la combustion, l'air pur sert principalement à dégager le calorique de l'air in- flammable des corps combustibles. 99:000,000 Tome LXXIX, SEPTEMBRE an 1614. Z 178 JOURNAL:DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Probabilité que l'air pur n'est pas le principe des acides, puisqu'on connoît déjà six acides qui n’en contiennent point, l'aydrogène sulfuré, V'hydro- gène telluré V’acide prussique, la chlorine, ou acide oxt muriatique, l'acide fluorique , ’acide iodique.…. Probabilité que Pair pur dans Pacte de la respiration n'est pas le principe de la chaleur des animaux et des végétaux, Probabilité que l'air impur, l'azote, est un des prin- cipes de l'acide nitrique. Probabilitéque l'airimpur est un des principesdessubs- lances animales et de quelques substances végétales. Probabilité que ces trois airs, le pur, l’impur et l'in- flammable, ne sont que des modifications d’une méme substance, vraisemblablement l'air pur. Probabilité que le calorique est un des principes de lacide nitrique. Probabilité que le calorique est un des principes des autres acides.... Probabilité que le calorique est également un des principes des oxides nitreux, sulfureux..., et des oxides alcalins, terreux et métalliques... Probabilité que le fluide lumineux est un des principes de certains corps, tels que le gaz phosgène. Probabilité que le fluide électrique, ou galvanique, est un des principes de certains corps. Probabilité que le fluide magnétique est un des prin- cipes de certains corps, par exemple du fer. Probabilité que l’ammonium est une substance mé- tallique composée d’air inflammable, d’air impur, de calorique... Probabilité- que la potasse, la soude sont des oxides métalliques composés d’une manière analogue... Probabilité que tous les métaux sont composés de principes analogues, Probabilité que les terres sont des substances métal- liques, et par conséquent composées de principes aualogues,., 99,000,000 90,000,000 99,090,000 99,000,000 “A “A ET D'HISTOIRE NATURELLE. Probabilité que le soufre, le phosphore, le charbon... sont composés de principes analogues. Probabilité que le soufre, le phosphore, le charbon..., les substances terreuses, ainsi que les substances métalliques. .., sont produits journellement chez les végétaux, les animaux, dans les nitrières... Probabilité que ces mêmes substances se décomposent journellement par les mêmes causes. Probabilité que les corps, déts élémentaires, se ré- duisent, d’après nos connoïssances actuelles, aux grands fluides , le calorique, le lumineux, l’élec- tique , ou galvanique, le magnétique, le nébuleux, le gravifique, l'air pur, l’air impur, l'air inflam- que ; Pur, pur; mable. À Probabilité que le fluide nébuleux est la matière pre- mière de tous les corps. Probabilité que le globeterrestre est composé des subs- tances dont nous venons de parler, soufre, phos- phore, carbone, métaux, alcalis, terres qui ont cristallisé. Probabilité que les substances, qui ont formé le noyau du globe terrestre, étoient à l'éfaé aéri- Jorme lorsqu'elles ont cristallisé (1). Probabilité que les substances, qui ont formé la croûte du globe terrestre, ont cristallisé par 'une disso- lution aqueuse. Probabilité que les substances volcaniques, les Zaves…., ont cristallisé d'une manière confuse par une fu- sioir ignée. Probabilité que la surface du globe a été couverte entièrement par les eaux. Probabilité que le niveau de ces eaux s’est abaissé successivement jusqu'à l’état actuel, Probabilité que depuis ‘environ 2500 ans, l’époque de la fondation de Marseille, de celle d’Alexan- - 179 99,200,000 99:000,000 99,000,000 99999200 99,000,000 99,000,000 a (1) Voyez mon Mémoire sur les Cristallisations géologiques, Journal de Physique , tome LXXI, pag. 172. Z 2 180 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE drie..., ce niveau des eaux des mers n’a pas changé ; 8 sensiblement. x Probabilité que le globe terrestre n’a point éprouvé de catastrophe générale. zx Probabilité que les planètes sont des masses analogues au globe terrestre. 99,000,000 Probabilité que les comètes sont des masses analogues aux planètes. 900,000,000 Probabilité que les soleils sont composés de substances hétérogènes analogues à celles du globe terrestre. x Probabilité que ces substances se galvanisent, et qu’on doit regarder ces grands globes. lumineux , les so- leils , comme des änmenses piles galsaniques (1). 90,000,000 Probabilité que les planètes, les comètes sont égale- ment composées de substances hétérogènes qui se galvanisent mutuellement, et que ces grands corps ont également une lumière propre, {oïble, qu’on a appelée lumière cendrée. 90,000,000 Probabilité que toutes les étoiles ou soleils ont un mouvement de rotation sur leurs axes. 99,009,000 Probabilité que toutes les étoiles que nous connois- sons, ont un mouvement de progression vers la portion de l’espace où est située la constellation d'Hercule. 99,000,000 Toutes les tables que les astronomes rédigent sur les + mouvemens des divers corps célestes, ne sont fondées que sur des probabilités. On est obligé de les corriger continuellement , d’après de nouvelles ob- servations. Leur probabilité est donc 90,000,000 ‘On doit donner beaucoup d’étendue à ces tables de probabilité des /ai/s constans de la nature, dont nous venons de parler, telles sont les suivantes, Tables des probabilités des pesanteurs spécifiques des différens corps. 90,000,000 (1) l’oyez ce que j’en ai dit dans ce Journal , tome LXXVH, page 37, et tome LXXVIIT, pag. 161. € ET D'HISTOIRE NATURELLE. 18£ Tables de probabilité des cristallisations de différens corps. Tables de probabilité des duretés relatives des diflé- rens Corps. 99,000,000 æ Tables de l'électricité, de la fusibilité , de la phosphorescence, de l’élasticité, de la ténacité, de la ductilité relatives des dit- férens corps... Les lois du mouvement des corps durs, mous, fluides , élas- tigues..., peuvent également être exposées dans des tables. Tables des sinus, des tangentes, des logarithmes. : C'est à la perfection de ses tables principalement, que F'As- tronomie doit ses progrès vraiment élonnans. Les autres parties de la Physique se perfectionneront également par des tables analogues. CONNOISSANCES DES FAITS VARIABLES DE LA NATURE. Plusieurs faits varient continuellement dans la nature. Les animaux, par exemple, et les végétaux naissent chaque jour, vivent plus ou moins de temps, éprouvent des changemens plus ou moins considérables pendant le cours de leur existence, et enfin meurent et se décomposént.... Ces faits que j'appelle VARIABLES, ne nous sont connus que par les analogies : ils ont plus ou moins de probabilité, On peut donc les soumettre au calcul des probabilités. On a déjà dressé des tables de de ces faits, tels que La durée de la vie des hommes, Les rentes viagères, Les tontines, L’inoculation , La vaccine. Mais plusieurs de ces tables sont plus ou moins imparfaites : on doit donc tâcher de les corriger et de leur donner plus d’exac- titude. probabilité d’un gränd nombre LA . . + CR se Laye sheet se Les probabilités de plusieurs autres faits variables de la nature n'ont pas encore été réduites en tables, tels que les traitemens des diverses maladies, .., les probabilités des diverses tempéra- lures,.., 182 JOURNAL DE PHYSIQUE,DE CHIMIE L On doit s’elforcer de soumettre ces faïts à des résultats géné- raux, et à en dresser des tables de probabilité. Il est inconce- vable, par exemple, qu'on abandonne:si arbitrairement aux médecins le traitement de z7aladies BIEN CONNYES, ensorte que chacun a sa manière particulière de les traiter : on voit souvent des médecins également habiles, employer. dans le trai- tement de la même maladie, des traitemens entièrement op- posés. L'un emploie le traitement shénigue et Y'autre le trai- lement asthèniquess. . HEATE Qu'on äppelle auprès d'un malade dix médecins, sas qu'ils se communiquent , ils proposeront dix traitemens diflérens. Mais, diton, chacun a sa pratique. 1° Le fait est qu'une maladie doit être traitée suivant les pro- ï babilités du ineïlleur traitement; Et il ne peut pas êlre permis d'employer d'autre traitement que celui gue les probabilités disent le MEILLEUR. Dans l'état actuel des connoissances, de pareils faits ne devroient pas avoir lieu:ils b/essent l'honneur et la délicatesse de l’homme instruit et probe, Lejeune médecin instruit et délicat, appelé auprès d’un'malade, auroit ces tables’ de probabilité pour se rassurer dans L'ARRÊT DE VIE OU DE MORT quil va prononcer en ordonnant tels ou tels remèdes, HOT ST Le] | ; ided TABLES DL De probabilité de la durée de la vie humaine. roi L'homme a toujours attaché une grande importance à con- noître la probabilité de la durée dé sa vie; aussi s’est-il em- pressé d’en dresser des fables. Il y en a un assez grand nombre, Je choisis celles qu’en a donné Buffon, tome IV de ses Œuvres, édition in-12, pag. 420. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 16: DURÉE DE'LA VIÉ. DURÉE DE LA VIE. Ans. DT Men Ans. Années. te o 8 o 51 16 Q 1 95 o b2 15 6 2 38 o. 53 15 © 3 40 o 54 14 6 4 41 di 55 14, o 5 41 6 56 13 PAC) 6 42 OM 57 12 10 7 43 3 58 12 3 8 41 6 5g 11 8 9 40 10 60 11 1 10 40 2 61 10 6 11 39 6 62 10 o) 12 38 9 63 9 6 13 38 1 64 9 © 14 37 5 65 8 6 15 36 9 66 8 o 16 36 o 67 7 6 17 35 4 68 7 () 18 34 8 69 6 À 19 34 o 70 6 2 20 33 5 71 5 8 21 32 11 72 5 4 22 32 4 73 5 (e 23 31 10 74 4 * 2 24. 31 3 72 4 25 30 9 76 4 3 26 30 2 77 4 1 27 29 7 78 3 11 28 2 ) 79 3 9 29 28 80 3 7 30 28 81 3 5 81 27 82 3 3 82 26 1 83 3 2 33 26 84 3 1 34 25 85 3 o b ob OR r Or OO GO Or O0 154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ces tables ont été corrigées, étendues. . ., mais leur exactitude est suflisante. TABLES Des probabilités des rentes viagères. C'est sur les probabilités de la vie humaine que sont fondées les théories des rentes viagères. L'intérêt LÉGAL de l'argent est fixé en Europe, en général, à cinq pour cent par année; c’est.à-dire que 1000 fr. rapportent 50 fr. par an. Cet intérêt est déterminé par le profit annuel que retire de cette somme de 1000 fr., un commercant probe et intelligent. Il est encore déterminé par le profit annuel que retire de cette somme de 1000 fr., un agriculteur probe et intelligent, C’est sur cette valeur déterminée de l'argent, qu'on le prête légalement à cinq pour cent annuellement. C'est sur cette même valeur qu’un homme probe peut en aliéner la propriété à un autre homme probe. Un homme a, par exemple, 1000 fr. ; il ne veut être ni agri- culteur, ni commercant ; il veut cependant tirer un profit hon- nête de son argent; 1l le prête à condition qu’à la fin de l’année on lui rendra ro5o fr. Il peut encore le prêter à condition qu’il en perd la propriété ; mais il exige alors qu’on lui paye annuellement un intérêt qui soit plus considérable que 5o fr. * La quantité de cet intérêt Zégal est déterminée par la proba- bilité de la durée de la vie de cet homme. Il faut que la somme payée annuellement équivale probablement à la somme principale, plus à 5 par an de cette somme, c’est-à-dire à 1000 fr., plus à 5o fr. par an payés à la. fin de la vie de cet homme, puisque les 1000 fr. deviendront à cette époque la propriété de celui qui emprunte, On a donc soumis au calcul la quantité de cet excédant, eu égard à la probabilité de la durée de la vie du préteur. Un homme âgé de 62 ans, par exemple, n’a, suivant les pro=. babilités, que 10 ans à vivre. Il veut placer 1000 fr, à rente viagère. Quel intérêt annuel peut-il demander à un homme probe et solvable ? quel intérêt celui-ci doit-il lui donner? Si ET D'HISTOIRE NATURELLE, 185 S'il prêtoit ses 12500 fr. sans les aliéner, on lui paieroit cinq pour cent par an, c’est à-dire bo fr. par an. Au bout des dix ans on lui rendroit 1° ces 1000 fr. 29. Il auroit de plus recu 10 fois 50 fr., c’est-à-dire 500 fr. Plus, il devroit compter les intérêts de ces intérêts. “rt année.. . bo intérêts. . .« 2 fr. 1o DORE à le IODi Natal sos 5 SO PE le ONE ML 7 10 ASE IR N2OONITS EE LC Oo DO NOT ADO SET EMEA TS 10 CÉSAR ESM NE ORS EE gere etes dt sua: Pr 10 SPA) MO O Sr 20 COPA MMO LT ONMENMRERNENEr Lee) COS EM EME EC ONE NE 137 fr. 10 Il recevroit donc. + . . . .« . 1000 boo 137 10 Total. . ,. . . 1637 fr. 10 Il faudroit encore ajouter les intérêts des intérêts. Si cet homme veut aliéner son capital, ou sa somme de 1000 fr., on doit lui payer une somme annuelle telle, qu’au bout de dix ans, l’époque présumée de sa mort, le total fasse celle de 1637 fr. 10. Cette somme annuelle devra être à peu près 130 fr. : c’est. à-dire que l'intérêt devra être à treize par an: car Dix forserSoifont, +4 14,507, % 1900 fr, Les intérêts annuels sont, Ire année.. . 130 intér.annuel. 6 fr. ro OV file 200 es US LE ATD DER Tee PO PR eTU Eccee 10 10 ANR O2 NN EE ere 0 BED a isa O0DO) res sans ts 02 10 BED ne 070O Ne 2e 1e 12" 09 130 fr. 10 Tome LXXIX. SEPTEMBRE an 1614. Aa 186 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE D'autre/part!. .:. 14 136, fr. 10 eee RUN OLD 270 8 2 ARTE 10 ORAN PUTO2EUt PRES RS DER RME AT ITOE a Nesle ve 10 OST AN IN TIOON" SUN NO PGI, ao: Cet hommeé recevroit donc.. . 1300 356 Total. 5) 2 656 1 faudroit encore ajouter les intérêts des intérêts. On voit que l’homme âgé de 62 ans, qui aliène son capital, doit recevoir un peu moins que treize pour cent de son capital par an. Il faut observer que ces rentes viagères peuvent être onéreuses à un particulier qui n’en prendroit qu’une ou deux, parce que le préteur peut vivre au-delà du moyen terme que lui assignent les probabilités. Mais ces rentes viagères peuvent être avantageuses à un état qui en prend un certain nombre, parce qu’il y a probablement une balance dans la longueur de la durée de la vie des préteurs..., si celle des uns est plus longue, celle des autres est plus courte. TABLES des probabilités des tontines. On appelle Zontines des rentes viagères avec droit d’accrois- sement pour les survivans (r). Il y a différentes tontines qui présentent des avantages plus ou moins considérables aux prêteurs et aux emprunteurs, Telles sont celles des banques à rentes viagères ; ce sont celles-là que nous allons donner pour exemples ; elles sont toujours fondées sur la probabilité de la vie humaine. (1) Ce nom vient de Tonti qui en avoit donné le projet, dit le Dictionnaire de l'Académie française. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 187 TABLES De probabilité des banques simples et des banques à rentes viagères. On appelle banques simples des associations de personnes riches, qui ont un numéraire considérable , qu’elles échangent pour un temps déterminé, contre des effets, billets ou lettres-de- change sûrs, moyennant un escompte fixe. On soumet ces opérations au calcul, pour déterminer la somme de l’escompte, sans blesser les intérêts du banquier, ni ceux de l'emprunteur. Ce calcul est facile à faire. Supposons que la banque escompte à trois mois de terme : . Un billet de 4000 fr. rendroit pour un an 200 fr., en supposant l'intérêt à cingpour cent; Et pour trois mois 5o fr. 50 fr. sera donc l’escompte {égal pour un billet de 4000 fr. à trois mois d'échéance. Mais les bangues à rentes viagères sont fondées sur d’autres principes. Supposons cent pères de famille qui veulent placer des fonds sur la tête de leurs enfans. Supposons que les enfans soient âgés de sept ans, qui est l’âge où la durée de la vie a la plus grande probabilité. On dépose 1000 fr. sur chaque tête, à l'intérêt de à pour cent, avec la condition que ces 1000 fr. ne seront jamais remboursés. Li LAC] = Ces 100,000 fr. rapportent annuellement 5ooo fr. d'intérêt qui se divisent entre les cent individus. " = * : . . ZA ,: Mais on stipule qu’à mesure qu'il en périt un, l'intérêt qu’ percevoit se divise sur les 99 restans. Ainsi l'intérêt augmente proportionnellement aux décès des p'êteurs. Le dernier survivant a donc seul lesbooo fr. de rente, pour l’alié- nation de sa mise primitive de 1000 fr. Cette banque est donc très-avantageuse au banquier, et l’est peu au prèteur. a. Au préteur, parce que pour une petite somme il peut Aa 2 105 JOURNAL DE PHYSIQUE, DË CHIMIE avoir un revenu considérable, s’il vit de longues années; et que dans le cas contraire la perte est petite. - b. Au banquier, parce qu'au bout de quelques années, par exemple de 8o environ, il acquiert la propriété d’une somme considérable , en payant seulement l'intérêt Zégal de cette somme à cinq pour cent. Le banquier a un si grand intérêt dans cette spéculation , qu'il pourroit même donner aux prêteurs un peu au-dessus de cinq pour cent. Néanmoins les prêteurs ont une brillante perspective pour le sacrifice d’une petite somme. Les différens gouvernemens d'Europe ont offert au public diverses tontines avec des avantages plus ou moins considérables. La confiance qu’on doit avoir dans ces tontines, dépend de la confiance qu’on a dans la probité et dans la solvabilité du gou- vernement, TABLES De probabilité de l’Inoculation et de la Vaccine. Tous les hommes sont sujets à la petite vérole : C'est une loi générale dont la cause est encore cachée. L'observation a appris qu'il mouroit à peu près un septième de ceux qui en étoient atteints, et qu’un certain nombre de ceux qui ne péris- soient pas, étoient plus ou moins défigurés, el exposés à diverses maladies. Des événemens heureux ont prouvé qu’on pouvoit afloiblir ces dangers par deux moyens, l’zoculation et la vaccine. On a cherché à constater ces résultats en dressant des zables exactes de ceux qui meurent par la petite vérole , et de ceux qui sont préservés de cette maladie, soit par l’inoculation, soit par la vaccine. Le résultat des observations a été le suivant: Sur 100,000 personnes attaquées de la petite vérole, il en périt un septième, c’est-à-dire 14,286. Mais sur ces 100,000 personnes, quelques-unes ont cette ma- ladie dans un âge peu avancé, quelques autres dans un âge plus avancé. Enfin quelques-unes meurent sans avoir celte maladie, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 189 Sur 100,000 personnes inoculées, il n’en périt qu'un certain nombre, par exemple 100. Sur 100,000 vaccinées, il en périt un plus petit nombre, par exemple 10. On sent qu’il y a beaucoup moins de dangers à être inoculé, ou vacciné, qu’à s’exposer à avoir la petite vérole naturelle. On a fait différentes objections contre ces méthodes préser- vatives. La principale est celle-ci : /a personne qui meurt de l’inoculation ou de la vaccine, auroit pu: 1° N'avoir pas la petite vérole; 2° Elle auroit pu ne pas périr de la petite vérole. 11 est facile de retorquer cet argument. Une personne qui a une maladie quelconque, par exemple une péripneumonie , et qu’on traite, suivant toutes les proba- bilités, par la saignée..., peut périr. Il est néanmoins des personnes attaquées de la même maladie, qui ne périssent pas, quoique n'étant pas saignées. En conclura- t-on qu'on ne doit pas saigner dans celte maladie? Non: l’obser- vation prouve qu'il périt beaucoup plus de ces malades qui ne sont pas saignés, que de ceux qui sont saignés... On doit donc saigner ceux qui sont atteints de cette maladie. Les mêmes principes servent de règle de conduite pendant tout le cours de la vie. On suit les plus grandes probabilités. On ne doit pas s'exposer témérairement ; mais la pusillanimité ne doit pas faire appréhender des dangers éloignés. On se pro- mène dans les rues, quoiqu’on puisse être écrasé par une tuile, par une voiture... Quelques personnes sont frappées de la foudre. Ce ne doit pas être un motif pour trembler lorsqu'on entend le tonnerre. L'observation prouve qu’il meurt un assez grand nombre de femmes pendant la grossesse, dans l'accouchement, et par les ma- ladies qui en sont les suites..... Ces malheurs ne sont pas des motifs pour empêcher les femmes de devenir mères. Le principe général qui doit diriger notre conduite pendant tout le cours de la vie, est donc celui-ci: On doit se conduire suivant les plus grandes probabilités : Et c’est effectivement la règle qui dirige tous les gens sages. Par ‘conséquent l’äzoculation, et encore plus la vaccine, doivent être généralement pratiquées. 199 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE TABLES Des probabilités du traitement des diverses maladies. _ Le médecin sage observe le traitement qui réussit le mieux pour guérir chaque maladie. Il a constaté, par exemple, que La saignée est très-utile dans les inflammations véritables... les phlegmasies vraies. Le kina est très-utile dans les fièvres intermittentes.. . Les préparations mercurielles sont trés utiles dans les maladies de la peau, …. Les plantes anti-scorbutiques sont très-utiles dans le traitement du scorbut,. D fet Fait ei le eo: Voftenhe Legherrietire Te CE + Il construit , d’après ces observations, des £ables de probabilité pour le traitement des diverses maladies, et il dirige suivant ces tables le traitement qu'il fait de ces diverses maladies. Si le malade traité par cette.méthode périt, le médecin n’a point de reproches à se faire. Si au contraire le médecin suit une autre méthode, et que le malade périsse, le médecin est BLAMABLE. D’Alembert avoit déjà proposé, pour fixer la marche si in- certaine de l’art de guérir, de prendre un certain nombre de personnes attaquées de la même maladie, et dans des circons- tances semblables , autant que cela seroit possible. Les uns seroient abandonnés aux forces vitales, sans aucun traitement ; Les autres seroient traités de diverses manières. . . Les résultats indiqueroient la méthode qui auroit guéri un plus grand nombre de malades. * €e seroit celle qui seroit préférable. Le médecin devroit alors suivre cette méthode, et sa déli- calesse seroit rassurée, Il ne lui resteroit plus qu’à constater la nature de la maladie, et sa tâche seroit encore assez difficile. Il ne lui seroit plus permis de tenter des expériences, et de dire : Faciamus experimentum in anima vili. Les expériences de ce genre ne seroient permises qu'à des réunions de gens sages, consommés dans l’art. ET D'HISTOIRE NATURELLE. rot Le sage Pinel a déjà proposé des tables de probabilité pour le meilleur traitement de certaines maladies, telles que la manie. TABLES Des probabilités de la température, etc. On a toujours cherché avec empressement à pouvoir prédire la température, le beau temps, la pluie, le vent..: l'agriculteur, le voyageur, le marin. .., y ont un intérêt plus particulier. On trouve chez toutes les nations, des personnes qui prédisent aux peuples la température, le chaud, le froid, les vents, les pluies, les sécheresses, les orages. . .. On dresse partout des almanachs dans lesquels des asérologues, 2 x Q . , c'est-à-dire des ignorans fourbes, annoncent ces températures futures. Le physicien a rejeté avec raison ces annonces mensongères ; mais il a recherché si les lois de la nature pouvoient lui fournir quelques renseignemens probables. Il a observé que la marche du baromètre pouvoit lui in- diquer, quelques jours, quelques heures d'avance , la température qui doit arriver. L’ascension du mercure dans le baromètre in- dique le beau temps. La descente du mercure indique la pluie, les vents, les orages... Mais il y a un grand nombre d’exceptions. . Des marins prévoient par cet instrument, des orages qui n’ar- rivent que plusieurs heures après. On ne doit donc point négliger ces observations, auxquelles on accordera plus ou moins de probabilité, et on en dressera des tables, On aura encore égard à la marche de l’hygromètre. Mais les températures, que peut indiquer le baromètre, sont de courte durée. On a donc cherché d'autres faits de la nature, qui puissent indiquer des températures d'une plus longue durée. On s’est attaché principalement aux mouvemens des corps célestes, surtout à ceux du soleil et de la lune. On a observé que ces deux astres ont la plus grande influence sur les eaux des mers, l’intensité des marées, ou flux et reflux, n 192 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et on croit avec raison qu'ils en sont la cause. On en a conclu que les mêmes astres devoient avoir une grande influence sur l'atmosphère ‘terrestre, et sur la température à la surface de notre globe. La plus grande partie des peuples s’en rapporte, à cet égard, aux différentes phases de la lune , à la nouvelle lune, à la pleine lune, à ses diflérens quartiers. Il en est même qui ont recours aux diflérens cycles lunaires. Quelques-uns s’attachent à la période de dix-neuf ans, observée d’abord par Meton, laquelle, au bout de ce temps, ramène à peu près les mêmes positions de la lune. On a donc, d’après ces données, dressé des tables de proba- bilité des températures; ces tables, jusqu'ici, donnent de très- foibles probabilités; et les gens les plus sages n’y ont aucune, ou presque aucune confiance, Tables des probabilités de la température. On pourroit donc calculer des tables de la probabilité de la température d’après ces données. Probabilité que lors de l’ascension du mercure dans le baro- mètre, il y aura un temps sec. x Probabilité que lors de la descente du mercure dans le baro- mètre, il y aura pluie, ou vent... & Probabilité que lors des changemens des positions de la lune, il y aura changement de temps. x Probabilité que dans les équinoxes et les solstices, il y aura des grands vents. x Probabilité que dans les mois de décembre il y aura des brouillards. æ Probabilité que dans les mois de janvier et de février iltombera de la neige. x Probabilité que dans le mois de mars il tombera du grésil. x pitiet. es ent mes spfisifireimren, 87 me eisie) ot Te) fol Made ete Moïieiqie rte Néanmoins les observations ont donné des résultats si inexacts, à cet égard, que les gens instruits y ajoutent peu de confiance. Cependant il est quelques observations constantes, dont on ne doit pas s’écarter, quoique les causes en soient également ignorées. On Jet de ZA à Jp TEE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 193 On a observé, par exemple, que la même température générale wa pas lieu deux années de suite. On n'a pas ordinairement deux années consécutives, ou sèches, ou humides, ou froides... ; ainsi on peut dire : Probabilité que la même température générale n'aura pas lieu deux années consécutives. æ Probabilité que la même température arrivera tous les dix- neuf ans. Æ TABLES De probabilité d’une bonne récolte , etc. Un agriculteur éclairé se dirige dans ses travaux par le calcul des probabilités. Sèmera-t-il tel grain, ou tel autre dans tel champ? fera-til les semis à telle époque, ou à telle autre...? 11 se dirigera d’après la probabilité de la saison future : et il a recours aux faits dont nous venons de parler, qui indiquent les températures qui doivent arriver dans diflérentes années, et particulièrement daus la présente dont il s’agit. S'il veut couper ses foins, il consultera son baromètre, son bygromètre..., Toutes ces probabilités sont très-incertaines ; mais il est obligé d'agir, et par conséquent il faut qu'il se décide. Or dans ce doute il se décide, et doit se décider pour la plus grande probabilité, quoïqu’elle soit très-foible ; il n’a pour lors point de reproches à se faire, si la température est contraire. C’est d’après ces faits que je desirerois que dans chaque com- mune de campagne, il y eût chez le principal magistrat, le maire, par exemple, Un baromètre, Un thermomètre, Un hygromètre, Un électromètre. L’agriculteur viendroit consulter ces instrumens ; on lui ap- prendroit facilement les indications qu’ils donnent. (Za suite au Cahier prochain.) Tome LXXIX. SEPTEMBRE an 1814. Bb OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAI ES 3 ; PER : 5 à THERMOMETRE EXTERIEUR BAROMÈTRE MÉTRIQUE. > E = CENTIGRADE. 2 2 “ TS — où “| Maximum. | Minimum. |a Mini. Maximum. | Minimum. LS "2 heures. o | heures. o heures. Mill, | heures. mill. mil | 0 1 la midi. 429,75|à 43 m.+15,25|+20,7 |à93s........ 762,48]: 43 m....... 756,541757,40l 25,1 2la3s. —+25,00|à 4 +im.+12,25|+23,5c|à 10m........ 764,76|à 91s........ 762,54|764,40! 24,1 o[à 32s. +#+29,00|à 4 +m.+13,75M-2b,o0|à 91s........762,04|à 6 s..........76016[761,06| 25,2 q[a midi. +24 oolà 4% m. 413,15] 4-24 co[à 9 = m....... 765,16|à945.........763,50|765,04| 23,5 5[a3s. “#+-26.75|à 4 +m.+io,10[+427,75|à 4 £ m....... 761,00: à 6 s...4.1..... 757,04|758,80| 24,2 6[a midi. +22,50|à 4 £m. +13 50o|+22,50|à 9 £s........ 762,88|à 4 : m....... 756,50|759,74| 23,5 7la midi, +22,75|à 4 m.+i1,50|422,75|à 7 m......... 764,40{à 10 + s.......761,28|764,24| 23,0) 8|1 midi. H25,00|à 4 ? m.+11,50|+25,00|à7 m......... 750,64[à 3 5.,.-....... 757;70|757,82| 23,2 gl13s. —+20,35|à 104s.+12,00|+19,50[à 102 5.......764,90[à 41m........ 759,94|762,92| 22,à dliold 5+s. +18,50|à 42 m.—Hio,oo|+17,15|à 9+m....... 764,80|à 5Ès........ 763,40|764,50| 20,9 Mirsha3zs. +21,50|à 45 m. +12,00|420,50[à 9 m-.....,.,.764,20[à 4 1m...,....762,32/764,04| 21,0 12/4555. +24,00|à 4+m.+ÆHr1,25| Hod,25)à 103s....... 76482|à B3s........ 763,00|764,48, 21,4 13[13s. <+26,00|à 4 +im.<+12,75|+25,50|à 7 m.........760,82|à g9Ls........ 758,06|759 60| 22,h 14ja 94 m.—+922,00|à 42 m.+14,00|+16,75|à 9 s.......... 758,40là 9 5m....... 756,22|756,52| 21,1 19[à midi. H20,50{à à m. + 8,00|+20,50[àÀ 9 5......... 761,54|à 44 m....... 759.94/761,24| 2139 16|à midi. Æ23,00|à 4? m.+412,25|+23,00|à 7 + m........760,7olà 5 2s......., 757,00|759,60| 21,6 17[à midi +-20,25|à 5m. “+i10,25l+20,25|à 95..,........ 763,88|à 5 m........759,70|7602,00| 21,2 10[à3s. “H293,25/à 5m. 13,75] +92,50[à 9 + m....... 765,o4|à 10 5.. ...... 763,74\765,02| 21,1 Nirolà3s. +26,50!ù 5m. +r4,25|+25,50[à 5 m......,.762,40[1535........ 756,80|760,22| 23,3 Hi2oiàS Es. pour la fusion des métaux. ———— pour l'émission des rayons lumineux. ———— > pour la réflexion des divers rayons. ——— > pour la réfraction des divers rayons. a — — pour la polarisation. . L2 . . L L2 . L L . L L LA Le à Ce 4 ———— pour l'électricité des corps idio-électriques. an-électriques. pyro-électriques. sunaphto-électriques. positivo-électriques. négativo-électriques. — des forces des diverses piles galvaniques. ne ——————— des forces magnétiques. Le —————— de Ja déclinaison de l'aiguille à différentes latitudes. Maine eue TABLES De Probabilité pour les Connoissances chimiques. Tables de probabilité pour les aflinités des corps. TE pour les mélanges de diflérens corps. — pour les combinaisons de différens corps. ————— pour les alliages métalliques. —————— pour les combin. de l’oxigène ou oxides, /, 258 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Tables de probabilité pour les combinaisons de l'hydrogène. pour les combinaisons de l’azote. Se. Ne D ete SPP Sete ete les re CC] On possède aujourd’hui un grand nombre de ces tables; ca tous les chimistes exacts tâchent de réduire en tables de pro- babilité les différentes combinaisons des corps, et donnent dans leurs analyses des proportions fixes, Ils ont formé un grand nombre de ces tables plus ou moins imparfaites. C'est au temps et au travail à les perfectionner. TABLES De Probabilité pour les Connoissances médicales. Tables de probabilité des signes qui font connoître les maladies. — des pronostics. ————————— de l’eflet des médicamens. des crises. ——— de la terminaison des maladies. On à des tables de probabilité sur un grand nombre d’autres objets concernant diflérentes branches de la Physique, de la Chimie... Nous avons rappelé ci-devant les différentes tables de proba- bilité que l’on possède sur les faits dits de hasard, sur la durée de la vie humaine, sur les loteries, sur l’inoculation...…. Toutes ces diverses tables de certitude et de probabilité réunies donneront aux sciences naturelles, 2e marche sûre et imposante. Les savans doivent donc s'attacher à perfectionner ces tables de probabilité, qu'on a si heureusement commencées. Il faut les étendre à toutes les branches des sciences naturelles. \ , = . On devra également les étendre à nos connoissances morales. J'ai prouvé, Prinçipes de la Philosophie naturelle, tome I, pag. 1 à pag. 22, que tous nos sentimens, que loutes nos af- feclions sont susceptibles de plus et de moins; elles peuvent être représentées par les séries 1.2.3.4....8 ; elles peuvent être par conséquent , soumises au calcul , et on en formera des tables de probabilité de nos actions... On formera également des tables des séries des êtres... C'est un travail que je tâcherai de terminer. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 259 AN ACCOUNT OF SOME NEW, ærc. EXPÉRIENCES NOUVELLES SUR LES COMPOSÉS FLUORIQUES, ACCOMPAGNÉES D’OBSERVATIONS SUR QUELQUES AUTRES SUJETS DE CHIMIE, Par Sim H. DAVY. EXTRAIT. JE présenterai à la Société Royale dans ce Mémoire, une con: tinuation des recherches, dont les détails ont été honorés par une place dans ses Transacjions, et j'espère que les expériences et les observations que je vais communiquer, serviront à jeter quelque lumière sur des parties importantes, mais obscures, de la philosophie chimique. Dans ma dernière communication (1), je rendis compte de plusieurs expériences faites dans le but de décomposer l'acide fluorique. La conséquence la plus probable de mes résultats fut que l’acide fluorique liquide pur est composé d'hydrogène uni à une substance, laquelle, en vertu de ses pouvoirs énergiques de combinaison, n’a pas encore été obtenue dans un état de pureté, mais qui est séparée de l'hydrogène par les métaux, et qui s’unissant avec la base de l’acide boracique et de la silice, forme le gaz fluo-borique et le gaz fluorique silicé. Toutes les nouvelles expériences que j'ai faites sur les com- Ed (1) Voyez ce Mémoire dans les Annales de Chimie, vol. LXXXVIN, pag. 271. 260 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE posés fluoriques , tendent à confirmer cette idée, et toutes les diflérentes entreprises que j'ai faites depuis, pour décomposer le principe de lacide fluorique séparé à la surface négative de l'ap- pareil voltaïque, ont été sans succès. J'ai trouvé que le fluate de plomb, formé par l’action d’un sel soluble de plomb sur le fluate de potasse et sur le fluate d'ammoniaque, est immédiatement décomposé , lorsqu'il est hu- mide, par le gaz ammoniac; il se sépare une poudre blanche qui doit contenir de l’oxigène, puisque, chauffée avec du charbon, elle donne de l’acide carbonique; mais le fluate de plomb sec peut être fondu sur une capsule de platine dans le gaz ammoniac, sans éprouver la moindre altération, et la présence de l’eau, qui peut fournir de l’oxigène au plomb et de l’hydrogene au principe fluorique, paroît absolument nécessaire pour que les combinaisons fluoriques puissent produire des corps oxidés. J’obtins des résultats analogues par l'action du fluate d’am- moniaque silicé, et du fluo-borate d’ammoniaque, sur la chlorine. Quand ces sels étoient humides, ou quand le gaz n’étoit pas exempt de vapeurs, il se formoit de la silice et de l'acide bora- cique en petites quantités; mais quand l’eau étoit soigneusement chassée, ces corps ne paroissoient pas, et les résultats étoient du murjate d’ammoniaque, du gaz fluorique silicé, ou du gaz fluo-borique et de l'azote. Je portai à l’état d'intense ignition, deux pointes de charbon dans les gaz fluo-borique et acide fluorique silicé purs, et mélés avec de l’oxigène : mais il n’y eut aucun changement qui in- diquât la décomposition, le seul nouveau produit fut un peu de gaz inflammable, qui étoit probablement dégagé du charbon. Je passai de l'acide fluorique liquide pur sur du charbon chauffé au blanc dans un tube de platine, il n’y eut point d’acide carbonique formé , et il se produisit seulement une petite quantité d'hydrogène. Je fis part à la Société, dans mon dernier Mémoire, de dif- férentes expériences sur la composition des fluates; depuis ce temps J'en ai répété quelques-unes, et je vais donner les ré. sullats qui me paroissent les plus exacts. Dans les expériences sur les fluates, il est fort diflicile d'éviter toutes les sources d’in- exactitude , il est impossible de faire usage de vases de verre, et même les vases de platine et d’argent sont légérement corrodés par les combinaisons fluoriques pures solubles dans l’eau. Le F ET D'HISTOIRE NATURELLE. 261 Le spath-fluor, décomposé par l'acide sulfurique, augmente en poids de plus de trois quarts de ce qu’il étoit avant l’expérience; mais pour produire ce résultat, il est nécessaire de distiller dessus, à plusieurs reprises, du nouvel acide; le spath doit être en poudre très-fine, et les résultats doivent être pulvérisés après chaque opération. Dans une expérience faite dans un creuset de platine, et dans laquelle on employa du spath blanc du Derbyshire, très-pur, et de l'acide sulfurique distillé dans des vases de verre, et dans laquelle les produits furent chauffés au blanc après chaque opé- ration, 100 grains gagnèrent dans la première Opérations aelsins : 106! 0 904 169,4 wir Dans la seconde. . . . . . . 6,9 Dansylautroisième: ss il 88 4 42 Dans lajquafrième. qu sethanse su 5,9 Dans la cinquième. AC: ke 1 2,0 DAnsdsiiéienqn ht ss ile + 0,9 Dans la septième. 4) 4404 0 ie © 65 Dans la huitième. . . . . . . . o,o Accroissement total. . . . "75,2 Si d’après ce résultat on fonde un calcul sur la supposition que ‘le nombre qui représente le calcium soit 40, ainsi que je VPai indiqué dans mes Ælémens de Philosophie chimique, le nombre qui représentera la fluorine sera 34,2; et le spath- fluor sera censé composé de 40 calcium et de 34,2 fluorine. Dans une expérience faite avec soin, vingt-deux grains de sous-carbonate de potasse fondu, décomposés par l'acide fluo- rique liquide étendu d’eau, donnèrent 18,15 grains de fluate sec de potasse, et par une analyse exacte, on trouva que ce sous- carbonate contenoit trente-un pour cent d’acide carbonique : maintenant, si l’on suppose que le reste du sel étoit de la potasse pure, et que l’on fasse le calcul sur cette supposition, il paroîtra que le fluate de potasse doit être composé de 125,9 potassium, et de 54,74 fluorine, et le nombre qui représente la fluorine sera 32,0. — Les 18,15 grains de fluate de potasse, décomposés par l'acide sulfurique, donnoient 38,5 de sulfate acide de potasse, supposant que le sulfate acide de potasse soit composé de deux proportions Ton LXXIX. OCTOBRE an 1814. LI 262 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d'acide sulfurique 150 et d’une de potasse go, on auroit dû en obtenir 40 grains; et la perte n’est pas plus forte que celle que l'on devoit attendre dans les procédés de décomposition et d’é- vaporation. Dans quelques expériences que je fis sur la décomposition des hydrates de potasse et de soude, par l'acide fluorique, les résultats indiquoient pour la fluorine un nombre un peu plus bas. Vingt grains d’hydrate de potasse furent convertis en 10,8 gr. de fluate de potasse , et 20 gr. d’hydrate de soude, et 19,6 de fluate de soude. Mais je ne mets pas autant de confiance en ces résultats, parce qu'il y avoit toujours beaucoup de chaleur pro- duite par l’action de l’acide sur. les hydrates; et probablement une pelite quantité des hydrates pent avoir été dissipée au com- mencement du procédé. Îl paroît raisonnable de conclure, ainsi que je lai établi dans mon dernier Mémoire publié dans les Transactions Philosophiques, que le nombre qui représente la fluorine, est moindre que la moitié de celui qui représente la chlorine, savoir, environ 33. J’essayai de déterminer la composition du fluate d’'ammonia- que, en mélant de l’acide hydro-fluorique à une solution d’am- moniaque dont la composition étoit connue; je trouvai de cette manière, que 100 parties d’un&solution d'ammoniaque, de la pesanteur spécifique de 0,9162, demandoit pour sa saturation, 52 grains d'acide fluorique étendu , d’une force telle, qu’une portion égale produisoil exactement 32 grains de fluate sec de potasse. Suivant celte expérience, le fluate d'ammoniaque doit être composé de 9,7 de fluorine et de 22 d'ammoniaque; et si lon suppose que lacide fluorique liquide est composé de deux proportions d'hydrogène et d’une de fluorine, la vraie comp6- sition du fluate d’ammoniaque sera une proportion d’acide fluo- rique 33, et deux proportions d’ammoniaque 64 (1). | La volatilité du fluate d’ammoniaque rendoit impossible de s'assurer, au moyen de lévaporation, de la quantité réelle du sel solide formé pendant cette expérience : quoique la chaleur ne fût jamais plus forte que celle de l’eau bouillante, je ne pus obtenir que 12,7 de fluate solide d’ammoniaqgue. ee ————— (G) En supposant l’ammoniaque composé d’une-proportion d’azete 26 , et de 6 d'hydrogène. (A) 4 à dis: / ET D'HISTOIRE NATURELLE. 263 - Deux cents pouces cubes d'ammoniaque, qui pèsent 36 grains, condensent 100 pouces cubes de gaz fluorique silicé, qui pèsent, dans les mêmes circonstances, 110.7; et si l'on suppose que le fluate d'ammoniaque silicé contient une proportion d'acide fluorique silicé et une d’ammoniaque, älors le nombre qui re- présentera le gaz fluorique silicé sera 98,4, et l'on peut dire qu'il consiste en deux proportions de fluorine 66, et en une de la base sihiceuse 32,4. Suivant les expériences de M. John Davy, 100 parties d'acide fluorique silicé donnent 61,4 silice, lorsqu'on les décompose par la solution aqueuse d’ammoniaque. On pourroit , d’après cela, concevoir la silice comme composée de 32,4 base et de 29 oxt- gène , et ceci s’approche beaucoup de deux proportions d’oxigène. Je décomposai 20 grains de fluate d’ammoniaque silicé par la solution d’ammoniaque, et j'obtins 9,2 grains de silice : ce résultat donna des proportions qui différent très-peu de celles obtenues par les calculs précédens. J’ai fait quelques expériences, directes, dans l’espérance de dé- terminer les proportions de l’oxigène dans la silice, mais elles ont été sans succès. Je me suis cependant assuré qu’il faut plus de trois parties de potassium pour décomposer une partie de silice, ce qui montre que cette substance ne peut pas contenir beaucoup moins de la moitié de son poids d'oxigène. J’ai essayé de séparer la base siliceuse sous sa forme pure, et cela, dans le but de faire des expériences synthétiques sur sæ nature, en la brûlant dans l’oxigène; ces résultats, quoiqu’ils ne soient pas parfaitement satisfaisans, paroissent cependant dignes d'attention, et peuvent mener à des essais plus heureux. J’ai décomposé de la silice, en passant un excès de potassium en vapeurs à travers cette substance, dans un tube de platine. Le résultat de l'expérience fut principalement de l’alcali con- tenant une poudre de couleur Éovae. laquelle étoit probable- ment la base de la silice. Je fondis toute la masse avec du soufre, qui en se combinant avec l’alcali sec, produisit une ignition. J’essayai de séparer le sulfure de potasse au moyen de l’eau: alors les particules foncées se séparèrent, mais pendant leur sé- paration et même après, elles agirent sur l’eau de la dissolution, et produisirent du gaz. J'essayai de les rassembler sur un filtre, mais je ne pus en recueillir assez pour les examiner, elles éloient presque toutes converties en silice. LI 2 264 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Je chauffai cette même substance, que je m'étois procurée de ia mème manière dans une autre expérience, avec de l'hy- drate de potasse : il ÿ eut une forte eflervescence, la silice fut reproduite et dissoute par l’aleali. J'en chauflai une autre portion dans une forte lessive de po- tasse, la solution acquit une couleur olive, mais il y eut à peine aucune eflervescence; d’après cela, il paroît probable que la base inflammable de la silice, ainsi que le bore, est soluble dans les” solutions alcalines sans les décomposer. Ce corps, à la vérité, a beaucoup de ressemblance avec le bore; il ne paroît être ni volatil ni fusible; son oxide, comme Pacide boracique, possède le pouvoir, quoique foiblement, de neutraliser les alcalis, et, ainsi que cet acide, il forme des corps vitreux avec les terres alcalines. Comme le bore, la base siliceuse en se combinant avec la fluorine , constitue un acide puissant. A près mes premiers travaux sur la nature de l'acide boracique et de la. base siliceuse, je croyois probable que ces deux subs- lances étoient des métaux, et qu’on les réduiroit à cet état, si lon pouvoit entièrement les débarrasser d’oxigène; mais main- tenant il paroît probable que ces deux substances constituent une classe particulière, formant une espèce d’anneau dans la chaine des corps arrangés suivant leur analogie, et que leur place se trouve entre le charbon, le soufre et le phosphore. Il vaudroit la peine d'essayer d'obtenir la base siliceuse pure, en chauflant le corps qu'on retire de la silice, au moyen du polassium , avecde l'acide sulfurique pur, lequel pourroit peut-être détacher la potasse, en formant du sulfate acide de potasse, sans pour cela êlre décomposé par la base inflammable. a S J'ai fait plusieurs expériences dans l'espérance de décomposer la chlorine, mais elles ont été toutes inutiles, je n’ai pas pu obtenir la moindre preuve de l'existence de l'oxigène dans ce corps, lequel passe encore, dans l'opinion de plusieurs personnes, pour être un de ses élémens. Je gardai pendant quelque temps du sulfure de plomb en fasion dans la chlorine : le résultat fut de la su/furane (liqueur du docteur Thomson) et de la plombane (muriate de plomb); il n'y eut pas un atome de sulfate de plomb formé dans cette ET D'HISTOIRE NATURELLE. 265 expérience; s'il y avoit eu la plus petite quantité d’oxigène pré- sent, ce corps auroit été probablement produit. Je chauflai de la plombane (muriate de plomb).dans du gaz acide sulfureux et dans du gaz acide carbonique : H n'y eut aucun changement ; maintenant, s'il y avoit eu de l’oxigène soit dans la chlorine, soit dans ses composés avec le plomb, il y a toute raison de croire que les affinités de ces substances auroient été telles, qu'il y auroit eu production de sels insolubles et fixes de plomb, du sulfate dans le premier cas, et du car- bonate dans le second. Je n’entrerai dans aucune discussion sur les expériences dans lesquelles l'eau, dit-on, est produite par l’action du gaz acide muriatique sur l’ammoniaque. 11 n’y a aucune personne éclairée et sincère, qui après avoir élé témoin des résullats des expé- riences dans lesquelles on a distillé de grandes quantités de muriate d'ammoniaque, faites par la combinaison des gaz dans des vases clos, n’ait été convaincue qu'il n'y a pas plus d hu- midité présente, que celle que l’on sait êlre présente en petite quantité dans le gaz ammoniaque et dans le gaz acide muriatique, laquelle ne peut être considérée comme essentielle à l'existence de ces gaz, ou comme chimiquement combinée avec eux (r). Une des premières expériences que je fis dans l’espérance de découvrir lPoxigène dans la chlorine, fut d’employer sur.ce gaz Paction de l'animoniaque; je trouvai qu’il n’y avoit point d’eau formée , et que les résultats étoient simplement du muriate d’ammoniaque et de l'azote; je trouvai aussi que le muriate d’am- moniaque le plus sec, quand il étoit chauflé avec du potassium, se changeoït en muriate de potasse. Ce résultat seroit impossible, dans l'hypothèse que l'oxigène entre comme élément dans Ja composition du gaz oxi-muriatique ; car s’il y avoit uñe séparalion d'eau pendant la formation du muriate, ce même oxigène ne pourroit pas être supposé avoir élé séparé dans l’eau, et cepen- dant être resté de manière à entrer dans la composition d’un sel neutre. L - QG) Le docteur Henry a trouvé qu'il étoit fort diflicile de débarrasser en= tièrement l’aimoniaque de Ses vapeurs aqueuses, au moyen de l’hvdrate de potasse, et probablement la vapeur muriatique hydrütée, que j'ai déconverte dans le gaz acide muriatique au moyen d’un mélange frigonifique, west pas décomposable par le muriate de chaux. (A) : 266 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE S'il y avoit eu réellement formation d’eau pendant l’action de la chlorine sur l'ammoniaque, ce résultat auroit été des plus importans : il auroit prouvé, ou que la chlorine ou lazote étoient des composés , ayant pour un de leurs élémens l'oxigène, ou que lun et l’autre contenoient cette substance; mais il n’auroit pas été. prouvé que la chlorine étoit composée d'oxigène, à moins qu'on n'eût démontré, en même temps, que l'azote de l'ammoniaque n’étoit point changé pendant cette opération. Quelques auteurs continuent d'écrire et de parler d’une manière douteuse sur ce sujet , et demandent des preuves ultérieures sur la non-composition de la chlorine. IL est impossible de leur donner ces preuves, le gaz a résisté à toutes les entreprises faites pour le décomposer. A cet égard, il est sur la même ligne que Por, l'argent, l'hydrogène et l’oxigène. On peut dire que ces substances ne sont pas des corps élémentaires ; mais il n’est nul- lement philosophique de donner d'importance à cette idée, avant que ces corps aient été réellement décomposés. En suivant le même raisonnement dont on se sert pour prouver qu'il existe de l’oxigène dans la chlorine, on pourroit supposer que toute autre espèce de matière pourroit former une de ses parties constituantes, et en multipliant les mots, tous les phé- nomènes pourroient êlre aisément expliqués, Ainsi, dans la for- mation de l'acide muriatique, on dit qu'un volume de chlorine se combine avec un volume d'hydrogène, et forme ainsi deux volumes de gaz acide muriatique. Dans l'hypothèse quela chlorine contient de l’oxigène, on dit que l’oxigène de la chlorine se combine avec l'hydrogène pour former de l’eau, et que cette eau s’unit, pour produire un gaz, à un certain corps inconnu que l’on nomme acide muriatique sec. Si l’on avancçoit en outre, que la chlorine contient de l'azote, de l’oxigène et le corps in- connu; on diroit que dans l’action de l'hydrogène sur la chlo- rine, lazote et le corps inconnu, ayant tous de l’aflinité pour l’hydrogène, entrent en union avec lui et forment un composé quadruple. Le professeur Berzélius a mis en avant quelques argumens en faveur de la composition de la chlorine, tirés des lois des prô- portions définies. Mais je ne puis accorder aucun poids aux raisonnemens de mon savant et illustre ami, En transportant aux métaux, les proportions définies de l’oxigène qu'il a données à la chlorine, l’explication devient une simple expression des faits; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 267 el il n’y a point de règle générale relalivement aux multiples des proportions dans lesquelles les diflérens corps se combinent. Ainsi l'azote suit des lois diflérentes en se combinant avec chaque corps en particulier; il se combine avec trois volumes d'hydro- gène, + volume d'oxigène avec 1, 2 el 2; de ce même corps, et avec quatre volumes de chlorine. Les chimistes, dans le milieu du dernier siècle, avoient l’idée que tous les corps inflammables contenoient du phlogistique ou de l'hydrogène. Ce qui fit la gloire de Lavoisier, fut l'intro- duclion d’une Sr dans la Chimie, et d'établir qu’on ne devoit pas admettre l'existence de ce prétendu principe, ou d’aucun autre, sans l'avoir préalablement démontré. On a supposé la présence de l'oxigène dans tous les corps qui soutiennent la combustion, ou qui forment des acides; mais commeil y a différentes espèces de corps inflammables, de même il peut y avoir différentes espèces de matières qui se combinent à eux avec assez d'énergie pour produire de la lumière et de la chaleur : différens corps paroissent capables de former des acides; ainsi l’hydrogène entre dans la composition d'autant d’acides à peu près que l’oxigène, et les trois corps, l’hydrogène _sulfuré, l'acide muriatique et l'acide fluorique qui contiennent de l'hydrogène, ne sont pas connus pour contenir de l’oxigène. L'existence de l’oxigène dans l'atmosphère, son action sur l'éco- .nomie de la nature et dans les différens procédés des arts, ont fait que cet élément a surtout fixé l’attention des chimistes; .Son importance et son action constante lui ont fait attribuer plus de phénomènes qu’il n'en produit réellement. Dans les dif- férentes considérations que je viens d’exposer, je n'avance pas que l’oxigène ou la chlorine sont des élémens, mais seulement qu'ils n’ont pas encore été décomposés. En continuant ces recherches, il.est probable que l’on décou- vrira des nouveaux corps appartenäns à cetle même classe; et peut-être les différences caractéristiques de quelques substances, qui en’ apparence donnent les mêmes produits par l'analyse, dépendent de cette circonstance. Je basarderai ici une conjecture : le carbone dans le diamant west-il point uni à quelque principe très-léger et très-subtil de celte espèce, lequel jusqu’à présent a échappé à nos recherches, mais qui peut être chassé ou combiné pendant la combustion dans l'oxigène ? Londres, 10 octobre 1813. 268 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE oo EXAMEN CHIMIQUE DE QUELQUES SUBSTANCES COLORANTES DE NATURE RÉSINEUSE. Mémoire lu à l’Institut, le 27 Juin 1814. PAR J. PELLETIER. Sous le nom un peu vague de substances colorantes de nature résineuse, je comprends une série de substances colorantes in- solubles dans l’eau, de sorte que ‘pour’les employer, principa- lement dans la teinture, on est obligé de se servir d’un dissolvant non’aqueux; ou d'ajouter à l’eau une substance étrangère, ca- pable d'agir sur la matière colorante et de la rendre soluble. Dans cette série se trouvent des résinés véritables, mais on y rencontre aussi d’autres substances qui semblent différer assez de cette classe de corps, pour en être séparées; telle est la matière -colorante du santal rouge, dont je vais m'occuper dans cette première partie du travail que j'ai entrepris ; j'y joindrai quelques faits qui prouvent que les résines, en général, sont susceptibles de se combiner à certains oxides métalliques, et particulièrement à l’oxide de plomb. PREMIER MÉMOIRE, Du Santal rouge et de sa matière colorante. Le santal rouge est le bois du pterocarpus santalinus, arbre qui croît dans les Indes orientales. Le santal étoit autrefois em+ ployé en médecine comme astringent, maintenant il ne sert plus en pharmacie que pour colorer quelques liqueurs alcooliques ou quelques vinaigres composés ; mais il est encore très-utile dans ja teinture , commenous aurons occasion de le voir par la suite. On * ET D'HISTOIRE NATURELLE. 2(9 On ne trouve presque rien sur les propriétés chimiques du santal rouge, ni dans les matières médicales, ni dans les ou- vrages de Chimie. Lewis nous dit que sa matière colorante est de nature résineuse, qu’elle colore l’esprit-de-vin en un beau rouge, qu'elle est insoluble dans les huiles fixes, et que parmi les huiles volatiles il n’y a que l'huile de lavande qui ait la propriété de la dissoudre. Bergius nous apprend que son infusion aqueuse est légérement rose, qu'elle brunit par l'addition du sulfate de fer; enfin, pour compléter l’histoire chimique du santal rouge, nous ne croyons pouvoir faire mieux que de rapporter le passage du grand Traité de la Teinture de M. Berthollet, où lon trouve tout ce qui est connu sur cette substance considérée comme matière colorante. « Le santal rouge est, dit-il, un bois solide, compact, pesant, » que l’on apporte de la côte de Coromandel, et qui brunit en » restant exposé à l'air. On l’emploie moulu en poudre très-fine ; » il donne une couleur fauve brune tirant sur le rouge. Par lui- » même il fournit peu de couleur, et on lui reproche de durcit » la laine; mais sa partie colorante se dissout beaucoup mieux » lorsqu'il est mêlé à d’autres substances , telles que le brou de » noix, le sumac, la noix de galle : d’ailleurs la couleur qu’il » donne est solide et modifie d’une manière très-avantageuse >» celles des substances avec lesquelles on le mêle. » M: Veigler ayant remarqué que l'alcool délayé, ou l’eau-de- » vie, dissolvoit mieux que l'eau la partie colorante du santal, .» s’est servi de cettesdissolution, soit seule, soit mélée avec » six ou dix parties d’eau, pour teindre des échantillons de » laine, de soie, de coton et de lin, qu'il avoit auparavant pré- » pie en les imprégnant d’une dissolution de muriate d’étain, es lavant et les faisant sécher. Ces échantillons ont pris éga- » lement une couleur rouge de ponceau. Des échantillons préparés » de même avec l'alcool, ont pris une couleur d’écarlate saturée ; » préparés avec le sulfate de cuivre, une belle couleur cramoisie » claire; préparés avec le sulfate de fer , une belle couleur violette » foncée. Il teint à froid dans la liqueur spiritueuse; mais il a » employé une légère ébullition dans celle qui étoit mélée avec » de l’eau, ce mélange se fait sans que la transparence soit » troublée. » D’après ce qu’on savoit déjà sur les propriétés de la matière colorante du santal , il étoit évident qu’il falloit employer pour Tome LXXIX, OCTOBRE an 1814 Mm 270 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE l'obtenir, une liqueur spiritueuse. Cependant, comme il étoit pos- sible que le bois de santal contint aussi des matières solubles et dans Veau et dans l’alcool, j'ai cru devoir d’abord examiner les produits de la macération et de la décoction dans l’eau. L'eau froide n’a pas d’action sensible sur le santal, jai donc eu recours à l'ébullition, et pour épuiser la matière, ro grammes seulement ont d’abord été soumis à l'expérience. Les liqueurs de différentes décoctions réunies et évaporées, n’ont donné que 0,04 cent. d’une matière extractive rougeâtre, que, par plusieurs expériences faites sur une plus grande quantité, J'ai reconnue pour être composée d’une petite quantité de la matière colorante du santal, matière sur laquelle nous allons revenir avec détail ; d’un peu d’acide gallique et de cette matière colorante brune qui fait la base de la plupart des extraits, et dont les principaux caractères sont de s’unir aux oxides de plomb, de se dissoudre dans l’eau et l’alcool, et surtout de contracter avec les acides végétaux, une union plus ou moins intime. Après nous être assuré que les matières solubles dans l’eau éloient en quantité trop petite pour en tenir compte et altérer les résultats, nous avons directement traité le santal par l'alcool, dont l’action dissolvante, naturellement très-énergique, a été aug- mentée par l'ébullition : de nouvelles quantités d’alcool ont été successivement remises sur le résidu; mais, malgré la grande dis- solubilité de la matière colorante dans ce menstrue, le bois, après 12 ébullitions dans de nouvelles quantités d’alcool, étoit encore d’un beau rouge et coloroit légérement en jaune l’esprit- de-vin à l’action duquel on le soumettoit à chaud. Les liqueurs alcooliques réunies et évaporées ont donné pour 20 grammes de bois employés, 3 gr.35 cent. de matière colorante. Examen de la matière colorante. Pour reconnoître l’action de l’eau sur la matière colorante du santal, 0,50 cent. de celle-ci ont été broyés avec 25 gram. d’eau distillée, après quelques heures de contact , la liqueur a été jetée sur un filtre, elle a passé légérement colorée. Cependant par lévaporation elle n’a fourni que 0,04 gr. de résidu. La même expérience a été répétée en employant l’ébullition, Ja liqueur s’est plus fortement colorée que dans l'expérience précédente, mais par la filtration elle passoit louche; après lavoir ET D'HISTOIRE NATURELLE. 27r laissé refroidir et l'avoir filtrée, on l'a évaporée, mais on n’a pas ob- tenu une quantité sensiblement plusforte que dans le premier cas. Une longue ébullition paroît cependant altérer la partie co- lorante dissoute; car la couleur vire au jaune et la liqueur regardée par réflexion de la lumière, paroît bleue , surtout sur les bords. On sait que les décoctions de certains bois exo- tiques présentent le même phénomène, remarqué d’abord par Newton, sur une décoction de bois néphrétique, Nous trou verons ce phénomène encore plus apparent dans un autre cas. L'alcool dissout facilement et en toute proportion, la matière colorante du santal rouge, la teinture est jaune s'il n’y a que peu de substance colorante; mais par une plus grande quantité elle devient rouge, et enfin se fonce jusqu’au brun. Par lévapo- ration de l'alcool on peut retirer toute la matière sans altération, durant l’évaporation elle ne se sépare pas, mais la teinture s'é- paissit à la manière des vernis. L'eau sépare presqu'entièrement la matière colorante ainsi dissoute. L'éther est encore un excellent dissolvant de cette matière, son action est encore plus énergique que celle de l'alcool , la dis- lution varie également en couleur depuis le jaune jusqu'au brun foncé, suivant la quantité de matière dissoute. L'eau ne peut l'en séparer, mais par l’intermède de l’éther elle dissout une quantité de matière colorante plus forte que lorsque ces deux corps sont mis eu-contact à l’état de pureté. L’acide acétique jouit également de la propriété de dissoudre avec grande facilité la substance qui nous occupe. L'eau ne forme dans cette solution, de précipité que dans le eas où l’acide est très:chargé de matière colorante, dans le cas con- traire, la liqueur reste parfaitement transparente, parce que la matière rouge est assez soluble dans l’eau aiguisée d’acide acé- tique. Ici se présente une différence bien remarquable entre la matière colorante du santal et les vraies résines. Celles-ci, d’ail- leurs moins solubles dans l'acide acétique, précipitent toujours par l'addition de l’eau. Il ne faut que des atomes de résine pour donner à l'acide acétique la propriété de former avec l’eau une liqueur sensiblement opaline. Les huiles fixes ne dissolvent pas la matière colorante du santal, d'une manière sensible, cependant elles se colorent un Mm 2 272 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE peu, mais la propriété colorante de cette substance est telle, que des atomes suflisent pour imprimer une couleur assez forte. On se rappelle que le docteur Lewis a soumis le bois de santal à l'action de diverses huiles volatiles, et a trouvé que l'huile de lavande seule avoit la propriété d’en dissoudre la partie colorante. Ce résultat extraordinaire a fixé mon attention : j'ai mis en contact à chaud et à froid, la matière colorante du santal avec diverses huiles volatiles, et mes résultats ont été très-approchans de ceux du chimiste anglais: mais entrons dans quelques détails. Un gramme de notre matière colorante a élé mis dans 20 grammes d'huile de térébenthine récemment distillée ; celle-ci, décantée au beut de quelques heures, étoit entièrement incolore; soumise alors à l’action de la chaleur avec la même quantité de malière colorante, elle a pris au bout de quelques minutes d’ébullition, une teinte jaune très-légère; filtrée et évaporée, elle a laissé pour résidu 0,013 de matière colorante. Les mêmes ex- périences ont été répétées avec l'huile de lavande dans les mêmes proportions, l'huile s’est aussitôt colorée qu'elle a été en contact à froid avec la matière rouge du santal, par l’ébullition la lie queur s’est encore plus colorée, par l’évaporation de la liqueur filtrée, on a retiré 0,04 de matière, quantité encore fort petite, mais bien supérieure à celle obtenue par le traitement avec l'huile de térébenthine. Après l'huile de lavande, c’est celle de romarin qui paroît avoir le plus d'action sur la partie colorante du pterocarpus santalin. Ces expériences, et quelques autres que je ne rapporterai pas, confirment, en les précisant, celles faites autrefois par le docteur Lewis. Nous n'avons parlé jusqu'ici que des substances susceptibles de dissoudre la matière colorante du santal sans l’altérer, nous allons nous occuper maintenant de l’action qu’exercent sur elle: les principaux agens chimiques. Soumise à l’action du calorique, elle se ramollit, se fond à environ 109 degrés du thermomètre centigrade. Une chaleur plus forte la décompose à la manière des substances végétales très- hydrogénées ; il se forme cependant moins d'huile que lors de la distillation des résines; on ne retrouve aucune trace d’am- moniaque dans les produits. L’acide sulfurique concentré charbonne la matière colorante du santal, étendu d’eau, il n'a pas d'action sensible. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 273 L’acide nitrique a sur elle une action très-forte, il attaque ‘à froid et la dissout en partie, le calorique développe beaucoup cette action, et dans cette opération la matière rouge se change en une sorte de résine jaune amère, semblable à celle que donnent par le même traitement les vraies résines; mais il forme de plus une assez grande quantité d’acide oxalique, propriété que ne présentent point les résines, si lon en excepte celle de Bo- tanibey et celle de.gayac, qu’on peut déjà considérer comme des substantes particulières. Il se forme aussi, par l'action de l’acide nitrique, une certaine quantité de matière jaune amère qui ac- compagne l'acide oxalique. L’acide muriatique oxigéné détruit la couleur rouge de notre substance, on obtient une espèce de résine jaune, dans laquelle l’acide muriatique paroît être en une sorte de combinaison, car après plusieurs lavages et avoir été .desséchée, elle exhale des vapeurs muriatiques lorsqu'on la vharbonne. L’acide muriatique pur ne paroïît pas cependant avoir d'action sur cette substance, quelques atomes seulement s’y dissolvent en lui communiquant une couleur rose. Je croyois trouver dans ce peu d'action de l'acide muriatique, une diflérence entre la matière colorante du santal et les résines, les auteurs modernes annonçant la dissolubilité des résines dans cet acide ; mais l’ex- périence m'a prouvé que si les résines sont un peu plus solubles dans l'acide muriatique que la matière colorante, cette disso- lubilité est tres-foible, elle se borne à + ou -#-. Les alcals fixes déterminent très-facilement la dissolution de la matière colorante du santal, cette dissolution se fait même à froid et avec une grande facilité; elle n'éprouve dans cette dis- solution aucune altération, et on peut la précipiter avec toutes ces propriétés, par le moyen d’un acide étendu. Cependant la liqueur dont on l’a précipitée par ce moyen, conserve uneteinte jaunâtre, et, vue par réflexion, elle paroït du plus beau bleu. Par lévaporation de la liqueur on obtient un sel formé de l'acide et de l'alcali employés , et coloré en brun par une matière exlractiforme ; en la redissolvant dans l’eau elle ne présente plus le même phénomène. L'ammoniaque dissout aussi très- facilement à froid notre matière colorante, la dissolution est entière, transparente et d'u rouge violet, l’eau ne fait pas de précipité dans la liqueur. L'action des alcalis , et surtout de l’'ammoniaque, sur les résines, 274. JOURNÂL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE est bien différente; on sait qu’ils ne forment que des savonules très-imparfaits dans lesquels la résine est déjà altérée. On pourroit se servir avec avantage des lessives alcalines pour extraire en grand cette matière colorante. On pouvoit supposer que la partie colorante du santal rouge étoit formée de deux substances, l’une entièrement résineuse, l'autre d’une nature particulière et dans laquelle résidoit la pro- priété colorante ; cependant, comme aucune des dissolutions em- ployées mopéroit de séparation, lopinion contraire devenoit plus probable ; pour m'éclairer sur ce point , et pour terminer l’examen des propriétés chimiques de cette substance, j'eus recours aux précipitations que plusieurs corps opèrent dans sa dissolution al- coolique. Parmi ces substances on doit principalement placer les sels métalliques, dont les oxides ont une grande aflinité pour les matières colorantes, et en première ligne, les sels de plomb et d’élain. Mais dans tous les cas où la précipitation a lieu, les préci- pités fractionnés à diverses époques, sont tous identiques par le même agent, et la précipitation peut être parfaite en employant une suflisante quantité de matière précipitante. Le précipité formé par le muriate d’étain est d'une couleur pourpre magnifique, comme il est très-solide, on pourroit l’em- ployer dans les arts. Les sels de plomb forment des précipités violets assez beaux. Lorsque l'on traite ces précipités par l'alcool bouillant, on ne peut séparer la partie colorante , mais on dissout une petite partie de la combinaison elle-même. Le muriate sur-oxigéné de mercure, produit dans la teinture de santal un précipité écarlate ; le sulfate de fer, un violet foncé; le nitrate d'argent, un précipité rouge brun; mais ces derniers précipilés ne sont jamais purs, ils contiennent une grande quan- tité de la matière colorante non-combinée et qu’on peut extraire ar l'alcool, il paroît même certain que l'alcool détruit les com- icons formées; car la quantité se matière qui ne se dissout pas est extrémement petite, ce qui prouve encore que dans ce cas il n'y a que très- peu d’oxide fixe. Il n’en est pas ainsi de Ja combinaison avec l’oxide de plomb qui, d’après plusieurs expériences, est compoées de parties égales d’oxide de plomb et de matière colorante. Les sels alumineux en solution ne précipitent la matière co- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 275 lorante du santal de la dissolution alcoolique, qu’en vertu de leur eau de solution; les précipités, il est vrai, ont un certain éclat, mais ils se dissolvent en entier dans l'alcool, sans laisser dalumine. Pour continuer la comparaison commencée entre notre matière et les résines, je recherchoiïs quelle étoit l'action que ces dernières exercoient sur les oxides et les sels métalliques : sur ces objets, les auteurs nous apprennent peu de choses et ne sont pas même d'accord. Fourceroy, dans son Système des Connois- sances chimiques, dit formellement que les oxides métailiques ne peuvent se combiner aux résines, ce qui esl très-vrai lorsqu'on n'emploie pas d’intermède pour opérer celle combinaison. Thomson garde un silence absolu. William Henry nous apprend que si on verse une dissolution de résine dans la potasse, sur une solution métallique, le précipité qui se forme est une combi- naison de résine et d’oxide métallique. En eflet, si l’on verse une solution d’acétate de plomb dans une teinture résineuse, il se fait sur-le-champ un précipité in- soluble dans l'alcool, quelle que soit la résine, la couleur du précipité varie suivant la résine employée. Ce précipité est formé d’oxide de plomb et de résine, employé en combinaison intime si on a mis assez de sel métallique; dans le cas contraire, il y a de la résine libre, qu'on peut séparer par des lavages à l'alcool. La solution de l’acétate de plomb dans l'alcool précipite également toutes les teintures résineuses, et ici on ne peut at- tribuer la précipitation de la résine au dissolvant du sel; dans tous ces cas la liqueur devient acide. Ces combinaisons sont insolubles dans l'eau et très-peu solubles dans l’alcool bouillant, soumises à l’action du calorique, elles ne se fondent qu’à un degré de chaleur auquel déjà elles se brülent où se charbonnent. Si on les chaufle au rouge dans des vaisseaux fermés, on obtient le métal réduit ; à l'air libre, au contraire , l’oxide reste, Les acides, pour la plupart, décomposent ces combinaisons en s’'emparant de l’oxide, et laissent la résine souvent altérée par l'acide employé; l'acide acétique dissout fa- cilement les combinaisons qui ont pour base l’oxide de plomb. Celles de ces combinaisons dans lesquelles entrent la résine- gutte, doivent être remarquées pour leur couleur ; avec l'acétate de plomb et la solution alcoolique de gutte, on obtient un précipité d’un jaune brun; mais avec le muriate d’étain on a une laque d’un jaune sereiu magnifique. 276 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE J'ai recherché les proportions dans lesquelles l’oxide de plomb entre dans ces combinaisons avec les résines. Le procédé qui m'a le mieux réussi, consiste à faire bouillir la combinaison avec l'acide sulfurique, et à calciner à l’air libre le sulfate de plomb formé, la quantité de sulfate de plomb obtenue, indique celle de l’oxide de plomb contenue dans la combinaison; J'ai pris pour cette estimation, les proportions des principes du sulfate de plomb indiquées par Klaproth. L'union de l’oxide de plomb avec la résine-gutte, a lieu à parties égales, ainsi que celle de la matière colorante du santal; mais les résines incolores saturent moinsd’oxide, la combinaison de la résine de pin ne contient, par exemple, que 4 d’oxide métallique. Nous reviendrons maintenant à la matière colorante du santal, que la digression précédente nous a fait abandonner. Celle-ci, dissoute dans l'acide acétique, jouit de la propriété de former avec les matières animales, une combinaison très-sensible, elle précipite abondamment la gélatine en rouge orangé, l'alcool n'enlève pas la couleur. La solution de cette substance dans Pacide acétique produit sur la peau des taches pourpres que ne peuvent enlever ni l’éther, ni lalcool, et qui ne disparoissent qu'avec l’épiderme. Les résines ne possèdent pas la propriété de former avec les matières animales, de pareilles combinaisons; cependant la résine- gutte commence à jouir de celte propriété, le précipité que sa teinture acide fait dans une solution gélatineuse, est très-coloré, et il faut pour leur enlever cette couleur, plusieurs ébullitions dans l'alcool. Les auteurs qui se sont occupés de la teinture, disent tous que la noix de galle et les autres substances astringentes, telles que le sumac , etc. augmentent la propriété dissolvante de l’eau pour la matière colorante du santal. J’ai fait plusieurs expériences sur cet objet, et je ne me suis pas aperçu que la solubilité de la matière colorante du santal fût sensiblement augmentée; peut-être cette différence n'est-elle sensible que lorsqu'on opère en grand; peut-être aussi a-t-on confondu avec une véritable solution, la division de la matière colorante produite par la chaleur dans un liquide dont la densité est augmentée par les matières extractives qu'il contient ; car dans ce cas, si on passe la ET D'HISTOIRE NATURELLE. 277 la liqueur encore chaude à travers un blanchet, elle entraîne encore une quantité assez forte de matière colorante que l’on pourroit, en grande partie, séparer par la filtration après le refroidissement, . T1 me paroît vraisemblable que le santal employé en décoc- ion pour les teintures fauves, agit plutôt par les parties qui sont en suspension, et qu'il sert à donner une teinte rougeälre. L’acide gallique que contient aussi en pelite quantité, il est vrai, le bois de santal, peut également influer sur les couleurs pour lesquelles on l'emploie; mais je ne doute pas qu'en se servant des dissolvans appropriés, tels que les solutions alcalines et surtout sa dissolution dans l'alcool, on ne puisse, ainsi que l’a fait M. Veigler, l'employer utilement dans la teinture : sa dissolution dans l’acide acétiqué seroit surtout très-utile pour la teinture des laines et de la soie. Conclusion. Il suit des principaux faits contenus dans ce Mémoire, que la matière colorante du santal, quoiqu’analogue aux résines par beaucoup de propriétés, en diffère cependant assez sous plusieurs rapports, pour qu’on puisse la considérer comme une substance particulière dont les principaux caractères seroient , d’être pres= qu’insoluble dans l’eau , très-soluble dans l'alcool, l’éther, l'acide acétique et les solutions alcalines dont on peut la séparer sans altération ; de ne pouvoir se dissoudre en quantité notable dans les huiles fixes et volatiles; d’être un peu soluble, cependant, dans l'huile de lavande ; de donner par l'action de l'acide nitrique, les po des résines , et de plus, de l’oxide oxalique ; de pouvoir ormer avec quelques oxides , des véritables combinaisons, et d'agir, lorsqu'elle est dissoute dans l’acide acétique, comme une substance astringente sur les matières animales. Il suit de plus, que cette matière peut être employée dans la teinture comme base de quelques couleurs, et servir à la préparation de plusieurs laques. Quant aux expériences accessoires rapportées dans ce Mémoire, elles fournissent quelques détails sur les combinaisons des oxides métalliques, et en font connoïlre les principales pro- priétés, Tome LXXIX. OCTOBRE an 1814 Nn 278 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE OO DEUXIÈME MÉMOIRE. DE L'ORCANETTE ET DE SA MATIÈRE COLORANTE; Par J. PELLETIER. Parmi les substances colorantes qu’on emploie dans la tein- ture, il en est peu dont les propriétés chimiques soient moins connues que celles de l’orcanette. ( Lithospermum tinctoriur.) On sait que la matière colorante de cette racine réside dans la partie corticale, qu’elle est soluble dans les corps gras, l'alcool et l’éther auxquels elle communique une couleur rouge ; du reste, non-seulement il n'existe aucun travail ex professo sur cette matière, mais encore on recherche vainement dans les ouvrages de Chimie quelques données sur ses principales propriétés. On trouve, il est vrai, dans le LXe volume des Ænnales de Chimie, un Mémoire de M. J. F. Haussman, sur la manière d'employer en teinture la racine d’orcanette, et d’en faire des pourpres et des beaux cramoisis; mais l’auteur ne nous apprend rien sur ses propriétés chimiques, son but n'étant, comme 1l le dit lui-même, que de chercher à tirer parti des parties colorantes. « Je ne hasarderai point, dit M. Haussman, de définir la » nature de la matière colorante de l’orcanette, elle est si sus- » ceptible de se décomposer par l'action continuée de la chaleur, » même au-dessous de celle de l'eau bouillante, qu'après l'avoir » extraite par l'alcool, elle ne peut se laisser rapprocher ou » concentrer sans se détruire..... Par la distillation de la tein- » ture, l'alcool que j'obtins me paroïssoit pur, et le résidu étoit » sale et impropre à teindre. » J’ai eu tort de ne l'avoir pas mieux examiné, pour voir s’il » ne contenoit rien d'huileux ou de résineux, mes recherches » n'avoient d'autre but que de tirer parti de la matière colorante,, » et j'eus lieu d’en être satisfait. » Pour obtenir la matière colorante de l’orcanette, j'ai soumis à l'ébullition plusieurs grammes de la partie corticale de cette ET D'HISTOIRE NATURELLE. 279 racine avec de l'alcool parfaitement déphlegmé. J'ai plusieurs fois recommencé l'ébullition avec de nouvell:s quantités d'alcool; les parties fibreuses ont presqu'entièrement perdu leur cou- leur en abandonnant à l'alcool leur matière colorante; ellesavoient alors diminué de + de leur poids. Par l’évaporation des solutions alcooliques, j'ai obtenu une matière d’un rouge si foncé, qu'elle paroïssoit noire; mais redissoute dans l'alcool, la couleur rouge reparoissoit avec éclat. On voit qu'ici la matière colorante ne s’est pas altérée par la chaleur, comme l’annonce M. Haussman, mais il faut remarquer que l’opération a été faite en petit et avec de l'alcool très-dé- flegmé. Dans d’autres circonstances, ayant agi avec de l'alcool moins concentré et sur une plus grande quantité, la matière colorante a été altérée comme l’a vu M. Haussman; mais ce n'est pas à la chaleur seule qu'il faut attribuer cet eflet, nous en trouverons plus bas la cause. La substance obtenue par l’évaporation de l'alcool n’est pas encore la matière colorante pure, car si on la dissout dans l'éther, il reste une substance d’un jaune brun et d’une saveur amère et salée : en évaporant l'éther on obtient la matière co- lorante beaucoup plus pure; cependant eile retient encore un peu de matière jaune qui s’est dissoute dans l’éther à la faveur de la matière colorante rouge; il faut donc réitérer plusieurs fois les dissolutions et les évaporations, pour obtenir la partie colorante rouge dans son plus grand état de pureté. On peut éviter ces longues manipulations, en traitant de prime- abord la partie corticale de l’orcanette par l’éther sulfurique. Dans ce cas, la matière jaune n’ayant pas élé détachée de la partie ligneuse par l’action de l’alcool, y reste adhérente, et par l’évaporation de l'éther on obtient la matière colorante pure. Ce procédé non-seulement abrège la manipulation, mais il est le seul qu’on puisse employer quand on veut obtenir une quantité notable de matière colorante; car lorsqu'on fait éva- porer une masse un peu forte de teinture alcoolique, il se trouve un moment où la matière colorante se sépare par la soustraction de l'alcool; alors elle se trouve dans un grand état de division au milieu d’un bain aqueux, et c’est là où infailliblement elle éprouve cette altération qu'a remarquée M. Haussman, et sur laquelle je reviendrai plus bas. $ Nn 2 280 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ; Je ne m’occuperai point de la substance jaune brunâtre, sé- parée de la matière colorante rouge, parce que cette substance est véritablement une matière extractive analogue à celle que lon retire de la plupart des substances ligneuses, et que d’un autre côté, l'examen de l'extrait forme le sujet proposé par la Société de Pharmacie, pour le prix qu’a fondé le célèbre Par- mentier. Quant à la matière colorante rouge obtenue par l’éther, je suis fondé à la regarder comme une substance pure, parce que dans les divers essais que j'ai faits sur elle, je n’ai pu en rien séparer d’étranger. Je vais donc passer à l’examen de ses pro- priétés, La matière colorante de l’orcanette obtenue en masse, est d’un rouge si foncé, qu’elle paroît brune; sa pesanteur spécifique n’est que très-peu supérieure à celle de l’eau distillée; sa cassure est résineuse; elle se ramollit facilement à une chaleur médiocre, et se fond parfaitement avant le 60e degré centigrade. On peut Ja tenir long-temps fondue sans qu’elle s’altère; mais si on aug- mente la chaleur, elle se décompose comme toutes les matières végétales. On obtient une huile, d’abord aromatique, ensuite empyreumatique, de l’eau et beaucoup de gaz hydrogène carboné et oxi-carburé; mais on ne retrouve dans le produit de la dis- tillation aucune trace d’ammoniaque. On peut donc en conclure que l'azote n'entre point dans sa composition. La matière colorante de l’ofcanette ne paroît subir aucune action de la part de l'air atmosphérique. La lumière à la longue doit l’altérer, puisque l’on sait que la liqueur rouge des ther- momètres s’altère, avec le temps, par Pexposition aux rayons lumineux. | Je passe sur l’action que l’eau exerce sur cette matière, comptant m'y arrêter après avoir examiné quelques-unes des autres pro- priétés. L’acide nitrique étendu d’eau n’a aucune action sur notre substance; mais lorsqu'il est concentré, et surtout lorsqu'on élève la température, l’action se manifeste avec force, et il se dégage beaucoup de gaz nitreux. Il faut remarquer cependant que la matière ne se dissout dans l’acide qu’à mesure qu'elle est décomposée, et qu'il faut, pour la dissoudre entièrement, em- ployer beaucoup d’acide qu’on ajoute à plusieurs reprises. Les résultats de l'action de l'acide nitrique sur la matière ET D'HISTOIRE NATURELLE. 281 colorante de l’orcanette, sont, la formation d'une assez grande quantité d'acide oxalique, et celle d’une petite quantité de subs- tance amère. Il faut remarquer que les résines ordinaires traitées par l'acide nitrique, ne donnent pas d’acide oxalique, le gayac et la résine de Botanybey en produisent , aussi les regarde- t-on déjà comme des substances particulières. L’acide muria- tique n’a pas d'action très-marquée sur la matière colorante de l’orcanette. L’acide muriatique oxigéné (chlore) a une action plus forte sur cette substance; si dans une teinturealcoolique d’orcanette on fait passer un courant d'acide muriatique oxigéné, la couleur rouge se détruit et passe au jaune sale ou au blanc grisâtre : je n’ai pu obtenir une assez grande quantité de matière décolorée pour enexaminer attentivement toutes les propriétés, parce qu’il fautune énorme quantité de gaz acide muriatique oxigéné (chlore) pour en décolorer une quantité notable; cependant j'ai vu que la matière décolorée avoit la propriété de se dissoudre dans l'alcool qu'elle coloroit en jaune; mais la liqueur, par l’addition d’un alcali, ne devenoit point. bleue, ainsi que cela a lieu avec l’orcanette non altérée, comme nous allons le dire dans l'instant. L'action des autres acides minéraux sur cette substance, est presque nulle, nous ne savons pas, il est vrai, celle que doit exercer l'acide fluorique; mais on peut, par analogie, pré- sumer qu'étendu, cet acide ne doit pas avoir d'action, tandis que concentré, il doit agir comme l'acide sulfurique. Les alcalis se combinent avec énergie à la matière colorante de Porcanette, et changent sa couleur rouge en un bleu su: perbe. Si l’alcali est en grand excès, la matière se dissout dans la liqueur alcaline. Dans le cas contraire, il se fait un partage, Une portion de la matière colorante reste non dissoute dans la liqueur alcaline, mais cependant combinée à de l’aleali, tandis que la liqueur alcaline retient en dissolution une petite quantité de la matière colorante, ; La chaux, la baryte et la strontiane se comportent avec la matière colorante de l’orcanetle comme les alcalis, seulement les combinaisons que forment ces terres sont moins solubles dans l’eau et dans l’alcool. Dans tous lés cas, on peut faire reparoître la couleur rouge en salurant la base alcaline par un acide quélconque. Toutes les substances métalliques précipitent l’orcanette de 282 - JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE sa solution alcoolique , mais cet effet est le plus souvent produit ar l’eau de dissolution du sel. Dans ce cas, le précipité formé se redissout facilement dans l'alcool ; mais il est quelques oxides métalliques dont l’aflinité pour la matière colurante est telle, qu'ils abandonnent leurs dissolvass pour s'unir à la matière résineuse et se précipiter avec elle; tels sont les oxides de plomb et d’étain., Si dans une teinture d’orcanette on verse de lacétate de plomb, il se fait sur-le-champ un précipité bleu superbe ; le précipité est plus abondant en employant l’acétate de plomb avec excès de base. Il faut avoir soin de ne pas mettre un excès d’acétate de plomb, parce qu'onredissoudroit le précipité. Le muriate d'étain forme un précipité rouge cramoisi peu éclatant, avec la teinture d’orcanette. La différence de couleur des précipités faits par le muriate d’étain et par l’acétate de plomb, provient de ce que dans l’acétate de plomb l’oxide est en excès , et alors le sel agit à la manière des alcalis, tandis que dans le muriate d’étain l’acide est toujours prédominant. Le muriate de mercure sur-oxigéné produit dans la teinture d’orcanette, un précipité couleur de chair. Les sels de fer produisent des précipités violets foncés , les autres solutions métalliques ne paroïissent pas éprouver de décompo- sition. Il en est de même du sulfate d’alumine; cependant ce sel favorise fortement l'union de la partie colorante avec la laine et Ja soie, ainsi que je m'en suis assuré après M. Haussman. La matière colorante de l’orcanette se dissout dans toutes les huiles et les corps gras, en leur communiquant une couleur rouge très-belle; on ne peut enlever la couleur ni par l'agitation dans l'eau, ni par l'agitation avec l'alcool ; cependant avec ce dernier agent on parvient à en enlever une partie, Les liqueurs alcooliques la dissolvent auss! avec facilité, mais rien n’est comparable à l’action dissolvante des éthers ; ces agens dissolvent aussi les combinaisons de la matière de l’orcanette avec les alcalis, la couleur de ses dissolutions, est le bleu souvent tirant au vert. L'acide acétique dissout aussi avec beaucoup de force la ma- tière colovante de l’orcanette, cette dissolution n’a pas la propriété de précipiter la gélatine. Nous terminerons ce Mémoire par l'examen de ce qui a lieu ET D'HISTOIRE NATURELLE. 268 lorsqu'on fait agir l’eau sur la matière colorante pure ou sur les dissolutions. Si dans une teinture alcoolique d’orcanette peu chargée, on verse de l’eau distillée, il ne se fait pas de précipité ; mais si la teinture est concentrée, le précipité a lieu sur-le-champ, cependant il n’est jamais en magmas épais comme ceux que forment les résines, la liqueur filtrée est légérement rose; mais la quantité de matière qu’on obtient par l’évaporalion, n’est pas appréciable. Lorsqu’au lieu de séparer par la filtration la matiere colorante précipitée par l’eau, on expose la liqueur à Faction da calorique, on voit la couleur tirer au violet, même avant que la température ne soit élevée au degré de l’ébullition; mais à cette époque le changement est encore plus sensible , et si l'ébul= lition est long-temps prolongée, la liqueur devient tout-à - fait bleue ; par l’évaporation on obtient la matière colorante sous forme d'une masse noire ; dans cet état, elle a éprouvé une grande altération: comme avant d’avoir subi l’action de l’eau et du calori- que, elle est soluble dans l’aicool; maislateinture au lieu d'étrerouge est lilas; elle se dissout dans les huiles, mais la solution au lieu ‘d’être rouge est d’un beau bleu, si l'huile est incolore ; avec l'éther elle donne une teinture lilas. Les acides au lieu de ré- tablir la couleur bleue, la font passer au vert; enfin si on la combine avec les alcalis, la couleur lilas qu'a sa teinture alcoo- lique, devient d’un bleu céleste; mais au lieu de rougir par l’ad- dition d'un acide, la couleur vire de suite au vert poireau. Du reste, cette matière se comporte avec l'acide nitrique et Les sels métalliques comme avant son altération. Lorsqu’on ajoute de l’eau à une solution de notre matière co- lorante dans léther, il n’y a pas de séparation, la teinture éthérée surnage ; par l'ébullition l’éther est chassé et la matière colorante éprouve par la continuation de l’ébullition, l’altération dont nous venons de parlæ ; mais il faut dans ce cas beaucoup plus de temps que dans le premier. Enfin, si on fait agir l'eau sur la matière colorante pure et sans aucun intermède, le même eflet a encore lieu, mais il faut beaucoup plus long-temps ; ce n’est qu'après une ébullition de plusieurs heures, que la matière peut avoir éprouvé dans toutes ses parties, l’altération dont nous venons de parler; il paroît que cela provient de la difficulté des points de contact. Lorsque la matière est en solution dans l'alcool, et qu’elle vient à étre 284 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE précipité par l’eau, elle est dans un grand état de division et eaucoup plus disposée à être attaquée par l’eau. Cette action de l’eau sur la matière colorante de l’orcanette, explique pourquoi l’on ne peut emplozer l'alcool en grand pour son extraction; elle explique aussi les changemens de couleur qu'obtenoit M. Haussman par lébullition et le rapprochement des liqueurs; mais il n’est pas facile de dire ce qui se passe dans cette action de l’eau ; il est probable que l'eau ne sert que d'intermède, et qu’il s'opère une réaction entre les principes qui constituent la matière colorante. 11 me paroît qu'après son alté- ration elle est plus charbonnée eti moins hydrogénée ;qu'aupa- ravant; en eflet elle moins fusible, plus solubie dans l’eau et moins soluble dans l'alcool, propriétés qu’elle doit nécessairement acquérir par la soustraction d’une partie de son hydrogène. J’ai fait quelques essais pour l'application de la matière co- lorante de l’orcanette sur la laine et la soie; mais je renvoie, pour cet objet, au Mémoire de M. Haussman, en ajoutant ce- pendant qu’on peut faire virer au bleu toutes les teintes qu’il a obtenues , ei employant une solution légère d’alcali ou un bain de savon; mais ces bleus, quoiqu’assez beaux, sont très-altérables par les acides. D’après les propriétés de la matière colorante de l’orcanette, je crois qu’on doit la séparer des résines : la manière dont elle se comporte avec l'acide nitrique, les alcalis et l’action même de l’eau, autorisent cette séparation. Maintenant que ses propriétés sont connues, on pourra tenter de l’employer dans les arts, on pourroit particulièrement en obtenir de beaux bleus pour la peinture à l'huile, RECHERCHES ET D'HISTOIRE NATURELLE. 285 RECHERCHES SUR LA PROPAGATION DU SON DANS L'AIR AGITÉ PAR LE VENT; Par M. pe HALDAT, Secrétaire de l’Académie de Nancy. Les phénomènes du son ont été, pour la plupart, étudiés par de grands géomètres et d’habMes physiciens. MM. Biot, Hassenfratz, et surtout M. Chladni, ont encore récemment ajouté à cette partie de la science, des faits importans et de curieuses théories. Cependant cette mine féconde de découvertes physiques n’est pas épuisée, et plusieurs questions sont encore neuves, Ce qui regarde la valeur du son et tient plus près à la musique, peut être considéré comme achevé; mais ce qui est relatif à la qualité et à l'intensité du son, n’a pas été examiné avec le même soin, et plusieurs questions qui s’y rapportent n’ont été qu’entrevues. Les expériences des Commissaires de l’Académie Royale des Sciences de Paris, de Thury, Maraldi et Lacaille ont fixé la loi de la vitesse du son dans l'air atmosphérique, et l'ont es- timé à 173 toises ! par seconde, lorsque Pair est tranquille; ils ont trouvé que dans l'air agité par le vent, cette vitesse doit être augmentée ou diminuée de celle du vent, selon que l’au- diteur est au-dessus ou au-dessous du courant aérien. Relati- vement à la force ou intensité du son, on sait que dans l'air tranquille elle est en raison inverse du carré de la distance; mais quelle est l'influence du vent sur l'intensité du son? On s’est con- Tome LXXIX, OCTOBRE an 1814. Oo 286 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE tenté de reconnoître comme une vérité non contestée, que le vent influe sur la distance à laquelle le son se propage, et qu’on l'enteud à une distance moindre au-dessus qu’au-dessous du vent. Quelle est la valeur, la mesure de l'influence du courant aérien sur la force ou intensilé du son, relativement à la position de l'auditeur? Ces questions étoient trop intimement liées à celles que j'ai rassemblées dans mon Essai sur l’A pplication des sciences Physiques à l'examen critique du témoignage des hommes, pour que j'aie pu ne pas m'en occuper. Îl intéresse d’ailleurs la Sociélé d'une manière si directe, qu'il mérite toute l'attention des physiciens. Les expériences que j'ai faites sur ce sujet cependant, ne don- nent pas avec une rigoureuse exactitude, la mesure de linfluence du vent sur la propagation du son, parce que les causes qui s'opposent au succès des expériences de cette espèce, sont si nombreuses, si variées, et leur influence est si difhcile à éviter, qu’il est impossible de parvenir à cette exactitude rigoureuse que comportent d’autres sujets; mais elles suffisent généralement pour atteindre le but que je me suis proposé. Elles ont été faites avec uu petit timbre contre lequel le choc d’un petit marteau mu par un rouage, produisoit un son qui, dans l'air tranquille, pou- voit se faire entendre à la distance de 150 mètres. J'ai généra- lement choisi des lieux découverts, plans, et souvent j'ai préféré des lieux élevés. J'ai employé pour distinguer les sons rendus par le timbre, et pour vérifier mes observations, des personnes dont l'oreille étoit sensible et exercée. Le plan que j'ai suivi dans ces expériences, a consisté à déterminer la vitesse du vent et à faire observer le timbre à-la-fois par deux personnes placées sur une ligne qui passoit au point occupé par le corps sonore, et qui, parcourant cette ligne, s’arrêtoit au point où elles ces- soient d'entendre les sons du timbre. Elles alternoïent ensuite de position, afin de constater mutuellement l'exactitude de leurs observations, qui étoient encore vérifiées par un troisième auditeur qui se transportoit .successivement aux lieux des observations, scizneusement indiquées par des jalons. La vitesse du vent étoit mesurée au moyen d’une excellente montre à secondes, qui délerminoit le temps qu’employoient les corps légers à parcourir un espace soigneusement mesuré, et aux extrémités duquel se placoient deux observateurs. Les corps légers abandonnés au vent, qui m'ont paru les plus propres à Mdiquer sa vilesse, sont de petites portions de duvet le plus fin, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 287 ou, mieux encore, les aigrettes de quelques graines, telle est celle du chardon lancéolé. J'ai parfois abandonné des plumes au courant aérien, du haut d’une perche de trois mètres où elles étoient fixées par un ressort que Je lâchois à volonté. D’autres fois je les saisissois seulement entre les doigts pour les aban- donner au moment où je commencois à compter, et ce procédé, qui est le plus simple, est encore plus exact. Je jugeois de la fin du temps employé à parcourir l’espace qui séparoil les deux observateurs , à un sigual, et j'en notois soigneusement la durée en secondes. Ces expériences sont si amples qu’elles semblent susceptibles de la plus grande exactitude; cependant elles ont des difficultés que j'ai cru devoir noter, afin de précautionner contre elles les personnes qui voudront les répéter, et de faire connoître les causes des inexactitudes que l’on pourroit y rencontrer. £a vitesse du vent peut, en général, s’estimer assez exac- tement. =n prenant la moyenne entre un certain nombre d’ex« périences faites avec le même soin et sur des échelles diflérentes ; mais les variations dans la vitesse du vent, qui s’observent si fréquemment, sont une source d'erreurs qu’il est impossible d'éviter absolument. Sila vitesse du vent est très-petite, les sons se distinguent fort bien; mais on peut facilement se tromper sur l'estimation de cette vitesse, à cause du peu de distance à laquelle les corps légers sont emportés dans un court intervalle. Si la vitesse du vent est très-grande , on Papprécie facilement ; mais le bruit que produit l'air en choquant le pavillon de l'o- reille, offusque l'impression produite sur l’organe par les sons du timbre, et peut introduire des erreurs considérables dans l'estimation de la distance à laquelle ils s'entendent. On peut rendre les sons égaux en intensité, en rendant égales Jes percussions qui les produisent, ce que fera toujours la tension d’un ressort appliqué à diriger le marteau qui frappe sur le timbre ; mais, relativement à la détermination de la distance à laquelle le soa peut se distinguer au-dessus ou au-dessous du vent , il y a une mullitude de difficultés qui se combinent pour rendre incertains les résultats de lPobservation. L’oreille, qui est Vinstrument propre à constater cette distance, est, comme fous les organes des êtres animés, sujette à des variations dans la sensibilité, qui rendent ses estimations peu susceplibles d’exac- üilude rigoureuse. Les inégalités du terrain, la propriété d’être plus ou moins sonore dans les diverses parties de son étendue, Oo 2 2c8 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE les différences dans les obstacles qui arrêtent, condensent ou réfléchissent le son, fournissent une multitude de causes d'erreurs aussi nombreuses que difficiles à éviter. Les lieux élevés sem- blent les plus propres à ces expériences, parce qu'ils sont plus libres d'obstacles, mais ils sont plus ordinairement irréguliers à leur surface et plus hétérogènes dans leur composition. Les timbres qui donneroient des sons d’insensité différente, pouvant permettre d’exéculer des expériences sur diflérentes échelles, semblent plus propres à les rendre exactes par leurs comparaisons; mais on ne poutroit pas beaucoup étendre l’échelle que j'ai employée, sansaugmenter les difficultés qui viennent de l'inégalité du terrain, de son hétérogénéité, des obstacles qui s’y rencontrent; et on ne pourroit pas beaucoup le diminuer sans rendre l'appréciation des sons très-diflicile. Ma première expérience a eu lieu le 11 mars 1813, Sur un lerrain élevé et assez égal. Le temps étoit beau et froid, le baromètre étoit à 27 pouces +,et le thermomètre à 6° Ho; le vent étoit grand et sa vitesse de 2 mètres par seconde. Il se trouva une différence de go mètres entre la limite de la propagation du son au-dessus et au-dessous du vent. Cette expérience fut répétée le lendemain dans un autre lieu également élevé, dé- couvert et assez plan; la hauteur du baromètre et du thermo- mètre éloit presque la même. Un vent violent souffloit du nord-est vers le sud-ouest; sa vitesse étoit de 3 mètres par se- conde, et la diflérence entre la limite de la propagation au- dessus et au-dessous du vent éloit de 60 mètres seulement ; cependant comme la vitesse du vent, qui étoit plus grande, auroit dû diminuer la limite au-dessus et augmenter celle au-dessous, j'attribue cette différence remarquable à la difficulté d’assigner cette limiteavec exactitude. Le choc du vent contre le pavillon de l'oreille, produisoit en effet un bruit si grand, qu'il rendoit l’ob- servation très-difficile et devoit ainsi diminuer la distance à la- quelle on auroit pu, par un temps calme, distinguer les sons du timbre employé. Le grand désavantage qu'il y æ d'opérer par un vent si violent, m'a déterminé à préférer ensuite un temps plus calme. Je choisis dans mon journal les observations faites par le vent dont la vitesse n’excédoit pas deux mètres par seconde, et n’étoit pas au-dessous d’un mètre dans le même temps, et Je trouva les moyennes suivantes : je ET D'HISTOIRE NATURELLE. : 289 Vitesse moyenne Limites de la propaga-[Limites de la propaga- p tion du son au-dessus| tion du son au-dessous Différences. du vent par ”. Gn vent. du vent. #7) RE RP 2mètr. ocent. 45 145 100 r | bo 6o 168 106 I o 70 | 154 | 94 D'après quoi l’on voit que la différence de la distance à laquelle le son est propagé au-dessus et au-dessous du vent, ce que je nomme limite de la propagation du son, augmente avec la vitesse du vent, lorsque cette vitesse ne dépasse pas certain terme ; qu'elle diminue ensuite quand cette vitesse devient plus grande, ce que j'attribue à la confusion du son produit par le timbre et le bruit produit par le choc du vent contre le pavillon de l'oreille. Comme la vitesse du son est la même, quelles que soient la grandeur et la force des oscillations du corps sonore, et leur nombre dans un même temps, on ne peut douter que de semblables différences ne se rencontrent entre les sons forts et foibles. Relativement à la limite de leur propagation, il est évident que par un vent d’une vitesse moyenne, la distance à laquelle le son peut s'entendre au-dessous du vent, est plus que double de celle à laquelle ïl s'entend au-dessus; mais de quelle quantité est augmentée ou diminuée la limite de la propagation du son? La solution de cette question n’est pas aussi facile qu’elle le semble : il y a, relativement aux limites de la propagation du son , une telle différence par un temps calme et par le vent, que ces deux circonstances sont difficiles à comparer, soit que le choc de l'air contre le pavillon de l'oreille dissimule trop le son pour qu'on puisse l’apprécier exactement, soit que le courant aérien disperse les rayons sonores et trouble les oscillations qui le transmettent à notre oreille ; on peut établir, en général, que la limite de la propagation du son est restreinte par le vent dans presque toutes les directions. J’ai trouvé, en effet, que par un temps calme, sur un sol très-plan et très-homogène, cette limite s’étendoit jusqu’à 150 mètres, ce qui surpasse de 5 mètres la limite de la propagation du son, dans les expériences même où la vitesse étoit de 2 mètres par seconde. Il est remarquable que dans les expériences où la vitesse du vent moindre devoit 290 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE reculer les limites de la propagation du son, elle s’est cependant accrue de 18 mètres dans une des expériences, et de 3 mètres dans une autre. Les expériences dont je viens de rapporter les résultats, nous montrent donc plutôt une diminution daus la Lmite de la propagation du son, qu’une augmentation, D’après ces faits, la limite de la propagation de la voix humaine se trouve ainsi déterminée. La voix d'un adulte qui prononce des paroles d’un ton modéré, se distingue à 75 mètres, faisant 100 pas environ, par un temps absolument calme; il y a peu à ajouter à celte distance au-dessous du vent, mais on peut en retrancher les deux tiers au-dessus et la réduire à 25 mètres. Les expériences des Membres de l'Académie des Sciences ont prouvé que Le son, dont la vitesse est augmentée ou diminuée de celle du vent, dans la direction du courant aérien, n’éprouvoit aucune altération dans la direction perpendiculaire à ce courant. Celles que j’ai faites pour constater l'influence qu'il exerce sur l'intensité ou la force du son dans la méme direction, m'ont p'ouvé que la diminution est peu considérable ; elle n’a, dans aucune, excédé + de la limiie observée par un temps calme, et a offert pour terme moyen +. Ces différences, peu considé- rables pour ces sortes d'expériences, si lon fait attention aux causes qui rendent si diflicile la comparaison de celles faites par un temps calme, prouvent assez que ces corrections ont peu d'importance lorsqu'il s’agit de la distance à laquelle se pro- page la voix humaine qui a toujours assez peu d'étendue. Les limites de la propagation du son ainsi déterminées au- dessus , au-dessous du vent, et dans une direction perpendiculaire au courant aérien, 1l sembloit facile d'en conclure la figure de l'espace dans lequel est circonscrit le son émis par un corps en vibration. Comme il n’y a pas de raison pour que les rayons sonores s'étendent plus ou moins dans une direction que dans une autre, cet espace doit être circulaire dans un air {ranquille; mais dans une atmosphère composée de courans, ce! espace paroît devoir prendre la forme d’une ellipse dont le corps sonore occuperoit un des foyers. Son grand axe devroit étre dans la direction du courant, le petit dans une direction perpendicu- laire à ce courant, et sa forme d'autant plus alongée, que le vent seroit.plus violent; mais les anomalies nombreuses que m'ont présenté les effets déjà rapportés, prouvent Je peu d’exac- tilude que Pon doit attendre de la seule théorie. J’ai donc eu de nouveau recours à l'expérience , et j'ai cherché à déterminer ET D'HISTOIRE NATURELLE. : 291 les limites de la propagation du son d’un même corps sonore, dans buit directions différentes. J'ai cherché à varier et à rendre aussi favorables que je l'ai pu, les circonstances propres à influer sur le résultat; et j'ai trouvé, ce à quoi j'étois fort éloigné de m'attendre, que l’espace qui circonscrit les rayons sonores, au lieu d'offrir une forme elliptique, présente celle d'un parallélo- gramme ordinairement alongé et angulaire, un peu déformé, ce que donne Île tracé des figures, d’après les diverses longueurs des rayons qui des corps sonores aboutissent aux points de l'espace lite leur propagation, Les axes conjugués qui se trouvent plus longs que le grand axe, donnent en effet à ces aires une forme de parallélogramme , ou du moins d’ellipse déformée qui s'approche assez de celte figure. Ces espèces de parallélogrammes deviennent parfois des carrés équilatéraux, parce que la quantité ajoutée au-dessous du vent, dans la direction du grand axe, est dans quelques-uns retranchée au-dessous, sans que la dimension dans la ligne transversale éprouve de diminution. On observe même que quand le vent diminue plus la distance au- - dessous du courant qu'il ne l’augmente au-dessus, comme il arrive lorsque le courant aérien est très-rapide, la direction dans le diamètre transversal n’éprouvant pasune diminution proportion- nelle, la figure s’accroît en largeur, c’est-à-dire dans la direction perpendiculaire au vent, ce que prouve le tableau suivant, composé des résultats des expériences qu’on peut comparer entre elles. Limites de la propagation du vent. Dans la direction des axesfconju- Vitesse moyen.| Au-dessus du|Au-dessous du|Dansladirection gués ou diagorrales du vent par ". vent. vent. perpendiculaire.| au- dessus du | au-dessons du EL vent. pan E gmèt. ocent. 45 155 9 55 160 Tr bo 160 168 150 75 178 =, 0 ° 7o 154 | 132 êr 162 Le résultat de ces expériences qui suffisent pour indiquer les variations. dans la forme de l’espace qui limite la propagation du son, et auquel la théorie ne paroissoit pas conduire direc- tement, semble s'expliquer en remontant à la cause de la for- 292 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE mation du son, à celles de son intensité. La force ou intensité du son peut dépendre de deux causes différentes, de la grandeur des vibrations du corps sonore, ou du nombre des parties qui vibrent ensemble; ensorte que deux impressions produites par les vibrations des corps sonores, seroient égales si le nombre des parties qui vibrent dans l’un, compensoit la force avec laquelle elles vibrent dans l’autre : cette égalité dans la valeur de l'impression sur notre organe, quelle qu’en soit la cause, suppose évidemment dans l’air une égale disposition à transmettre les modifications qu'il a reçues de la part du corps sonore; semblables , elles peuvent demeurer égales on devenir inégales, selon que le milieu qui les transmet les augmente ou les dimi- nue ; mais quelles sont les impressions de l'air qui peuvent ainsi modifier, altérer les impressions recues par les vibrations des corps sonores ? Dans un milieu parfaitement libre et tranquille il n’y a pas de raisons pour que les impressions soient plus fortes dans une direction que dans une autre, se transmettent à une plus grande distance sur un point que sur un autre. L’espace sonore, dans ce cas, est donc une sphère dont le corps sonore occupe le centre, et vers la surface de laquelle aboutissent, dans toutes les directions, les oscillations produites par le corps sonore que l’on peut considérer comme des rayons sonores. Que ces oscillations soient produites par une sorte d'émission, à la manière de la lumière ou à la manière des ondées, il n'ya pas de doute que cela n'ait lieu par une marche progressive du centre à la circonférence, et que tout ce qui s'oppose à cette marche ou la favorise, doit reculer ou rapprocher la limite du son, c’est-à-dire augmenter ou diminuer son intensité à la même distance du corps sonore. Les obstacles dans le milien qui transmet le son et le mouvement progressif de ce milieu, sont également capables d'en faire varier les limites, les uns et les autres en retardant ou accélérant la marche des rayons sonores, en les dévoyant de leur direction, en les dispersant ou les concentrant vers certains points de l’espace. Ces principes une fois posés, l'application en est facile, Il est manifeste que la limite de la propagation du son est augmentée au-dessous du vent, parce que ce courant aérien ajoutant sa force impulsive à celle que produisent les oscillations du corps sonore, doit reculer les limites de la distance à laquelle il parviendroit sans celte addition de force; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 293 force; que cette limite est diminuée au-dessous par des raisons contraires, Mais la puissance du vent pour diminuer la force expansive du son, où la limite de la propagation paroît plus grande que celle quil a pour l’augmenter ; car cette limite est considéra- blement diminuée au-dessus du vent et peu reculée au-dessous; mais il faut faire état de la loi de la propagation du son en raison inverse du carré de la distance. La limite de la propa- gation est diminuée dans la direction transversale, parce que le choc perpendiculaire du courant aérien diminue la force impulsive des rayons sonores, ou soustrait un certain nombre de ces co- lonnes qu'il porte dans une autre direction; c’est par la com- binaison de la force impulsive du vent à celle expansive du son, que je crois pouvoir expliquer le phénomène remarquable de l’augmentation du son dans les directions obliques au vent, ce qui donne à l’aire sonore une figure irrégulière qui se compose de différentes courbes dont l’ensemble forme une espèce d’ellipse déformée. Tant que la direction du vent est la même que celle du son, il ne peut qu’augmenter ou diminuer la distance à laquelle il se propage. Si le vent est perpendiculaire'aux rayons sonores, il doit diminuer le son en le dispersant; mais lorsque sa direction est oblique à celle de ces rayons, de cette obli- quité doit résulter une composition de forces qui doit changer la direction des rayons choqués, et ce changement de direction paroît devoir les accumuler , les condenser vers la partie moyenne de l’espace qui se trouve entre les deux axes de la figure : cette accumulation, oy condensation des rayons sonorss, doit néces- sairement augmenter l'intensité de leur action, ou reculer la limite de la propagation. Les rapports que l’on a trouvés entre les ondées et la pro- duction du sog, m'avoient fait espérer de tirer de l’examen de ces phénomènes, quelques lumières sur le mécanisme de la formation de l’espace sonore par le vent; mais mes espérances ont été déchues. Les ondées produites dans-une eau courante, offrent, à la vérité, une ellipse dont le corps qui choque le fluide occupe le foyer ; mais celte ellipse ne présente aucune altération sensible dans sa forme. Les oscillations qui s’étendent dans la direction opposée au courant, s'arrêtent les premières, celles qui sont dans la direction perpendiculaire au courant, après, et enfin celles qui sont dans la même direction que le courant, Tome LXXIX. OCTOBRE an 1614. Pp 294 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE La figure elliptique formée par les parties existantes, se laisse " ensuite entraîner au courant avec la même vitesse que toutes les autres parties du liquide, et le phénomène paroît durer autant que dans une eau tranquille. Cette différence remarquable entre les ondées qui se laissent entraîner au courant sans éprouver d’altération, et la production du son, dont l’espace reste fixé Cans des limites que le courant ne peut que modifier sans changer la position du foyer de la figure, dépend nécessairement d’un mécanisme différent dans la production de ces phénomènes; objet de curieuses et difficiles recherches, digne de nos savars géomètres. Nancy, 20 août 1814. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 295 NOTE SUR LE SQUELETTE HUMAIN FOSSILE TROUVÉ A LA GUADELOUPE; Par J. C. DELAMÉTHERIE. LE squelettehumain fossile dela Guadeloupe, décrit par Charles Konig, et dont j'ai imprimé la traduction dans le Cahier pré- cédent, intéresse tellement la Géologie, que J'ai cru devoir réunir fout ce qu’on connoît sur ce précieux monument. « Je » ne sache pas, dit Charles Konig , qu'aucun auteur en ait parlé, » à l'exception du général Ernouf, dans sa Lettre à M. Faujas- » de-Saint-Fond, insérée dans le Ve volume des Æznales du » Muséum (année 1804) , et M. Lavaisse, dans son Voyage à la » Trinité, publié en 1813. » : Je vais transcrire ici cette Lettre à M. Faujas-de-Saint-Fond, telle qu’elle se trouve, Annales du Muséum, Ve vol., p.408. Géologie par Faujas-de-Saint-Fond. « M. l’Escalier, conseiller d'état et préfet colonial de la Gua- deloupe, a bien voulu m'apporter , à son retour en France, les noyaux intérieurs de deux coquilles, l’une bivalve, l’autre uni- valve, formées en pierre calcaire grenue, de couleur blanche, et trouvées dans cette île, en faisant des excavations pour des ou- vrages de fortification vers la pointe à Pitre. » La première de ces coquilles, qui a servi de moule à la matière calcaire pierreuse, paroît avoir rapport au genre venus, ou à celui de pétoncles de Lamarck : car il est diflicile de pro- noncer avec certitude sur de simples noyaux, quoique bien conservés, tels que ceux-ci. » La seconde provient incontestablement d’une coquille du Pp 2 296 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE genre cyprea. Sa forme alongée sembleroit les rapprocher de l'ergus ou de l’exantema ; mais on ne sauroit l’aflirmer avec certitude, » M. l'Escalier m'a dit qu’on trouvoit aussi, non-seulement vers la pointe à Pitre, mais dans une autre portion de l’île d’une assez grande étendue, beaucoup d’autres coquilles pétrifiées.….. Cette indication mettra les naturalistes sur la voie de se pro- curer plusieurs de ces corps marins fossiles, pour en comparer les espèces avec celles qu'on observe de toute part sur notre continent. Les sciences naturelles doivent à M. l'Escalier beaucoup d’autres recherches faites dans ses divers voyages de long cours. Ce savant n’a jamais laissé échapper l’occasion d'être utile à l'Histoire naturelle. » Le capitaine-général Ernouf, commandant à la Guadeloupe, vient de m'adresser une Lettre sous la date du 2r messidor dernier, dans laquelle il a bien voulu me communiquer quelques observations d'Histoire naturelle, et entre autres, la notice suivante : » « Votre fils doit vous avoir fait part, à son arrivée en France, de la tournée que j'ai faite dans l'île, et vous avoir dit que j'ai visité cette fameuse côte du Môéle, où l’on trouve des cadavres de Caraïbes enveloppés dans des masses de madrépores pétrifiés. J'ai donné des encouragemens à un particulier actif et intelli- gent, dans l'intention de me procurer quelques-uns de ces sque- lettes remarquables. Je destine les mieux conservés, pour les galeries du Muséum d'Histoire naturelle. J'ai donné des nègres tailleurs de pierres, à la personne qui préside à ce travail, qui offre de grandes difficultés dans l’exécution, 1° parce que ces ossemens de Caraïbes sont adhérens à un banc de madrépores extrémement dur, et qu’on ne peut attaquer qu’au ciseau; 2° parce que la mer à chaque fois couvre lendroit où ils sont. J'espère cependant en venir à bout. » Ces restes humains sont de grande taille. La masse qu’on doit extraire avec eux, est d'environ huit pieds de longueur sur deux et demi de large, et pèsera environ trois mille livres ; mais la mer rend le transport facile. » Les opinions sont partagées sur leur origine. Les uns disent qu'il s’est donné un grand combat dans ce lieu-là, entre les na- turels de l'ile et ceux d’une autre île. Il y en a qui prétendent ET D'HISTOIRE NATURELLE. 297 que c’est une flotte de pirogues qui périt dans cet endroit où la mer brise avec violence lorsqu'il y a du vent. » D’autres enfin présument que c’étoit là un cimetière des naturels du pays, et que la mer a peut-être envahi le local : mais ce ne sont là que des conjectures. » On ne peut avoir lu cette notice sans s'empêcher de voir avec intérêt, un général français occupé, d’une part, du maintien de l’ordre et de la tranquillité dans une colonie importante, de l'autre, repousser vaillamment l'ennemi qui cherchoit à s’en em- parer, et songer en même temps à enrichir une des collections qui honore la France, par des objets aussi curieux que rares. N'est-ce pas là servir doublement la patrie? Ce bel exemple, il faut s’en applaudir, on l’a trouvé dans toutes nos armées. Tel est le contenu de cette notice des Annales, D'après ce récit, on peut conjecturer que le squelette fossile de la Guadeloupe, envoyé au Musée Britannique par Sir Alexandre Cochrane, est un de ceux que le général Ernouf avoit fait pré- parer pour le Musée francais. Mais les conjectures, que l’on rapporte sur l’origine de ces squelettes fossiles, me paroissent peu fondées. Aussi ne doit-on les regarder que comme des bruits populaires. 10. Les uns supposent qu’il s’est donné un grand combat dans cet endroit, que les pirogues ont été naufragées..., et que ces fossiles humains sont les restes des combattans qui y ont péri... Si c’étoit la véritable origine de ces fossiles, on devroit trouver des restes de ces pirogues, des restes d’armes...,et on ne dit pas qu’on ait rien trouvé de semblable. 20, D’autres prétendent que cet endroit a étéun cimetière... C’est encore une supposition gratuite , qui n’est appuyée sur aucun fait qu’on nous ait communiqué. Mais pourquoi ne pas attribuer à ces fossiles humains la même origine qu'aux fossiles des autres animaux, le mégalonix, le mégathérium , les paléothérium, les anoplothérium....? Tout d’ailleurs prouve que ces fossiles bumains ne diffèrent point de ceux dont nous venons de parler; ils sont dans une pierre calcaire remplie de madrépores pétrifiés : on y trouve des coquilles qui paroïissent marines... Mais, m'a-t-on objecté, on n’a point trouvé de fossiles dans des pierres calcaires... / 298 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Je réponds que j'ai une dent fossile de paléothérium qui est dans une pierre calcaire; Et sans doute il existe d’autres fossiles dans le calcaire... Au reste, les détails que nous avons sur ces fossiles humains de la Guadeloupe, ne sont pas assez circonstanciés, et nous devons en attendre de nouveaux. Le général Faujas qui retourne à la Guadeloupe, où il a déjà demeuré plusieurs années, est très-capable de nous les fournir : Je J'ai prié de prendre des informations exactes à cet égard, et de les communiquer au public par la voie de ce Journal. Attendons donc ces éclaircissemens. J'ai démontré ailleurs, que l'opinion des naturalistes ,"tels que Deluc, qui prétendent que l’existence de l'espèce humaine est postérieure à celle des autres mammaux, est peu fondée... On ue trouve pas non plus fossiles des débris des autres espèces de singes si nombreuses...; il faudroit donc aussi en conclure que leur existence est également postérieure aux espèces dont on trouve des débris fossiles. Des faits, des faits... et point d’hypothèses qui ne soient fondées sur des faits. ET D'HISTOIRE NATURELLE, lb (de) Le) SUITE DE L’'ASTRONOMIE DE DELAMBRE. EXTRAIT par J.-C. DELAMÉTHERIE. DES PLANEÈTES. Les planètes sont des astres errans : c’est ce que signifie le mot IAaæynræs, planètes , en grec. Les anciens mettoient au rang des planètes, la lune et même le soleil; mais aujourd’hui on ne les y place plus. Les planètes anciennes connues, sont donc réduites à six : Mercure, Vénus, La Terre, 4 Mars, Jupiter, Saturne. Les anciens ne connoissoient pas l’anneau de Saturne. Les modernes ont découvert cinq nouvelles planètes depuis un petit nombre d'années. Uranus, ou Herschel, fut découvert par Herschel en 1781. CÉRÈS, ou Piazzi, fut découverte en Sicile par Piazzi, le 1" janvier 1601. PaLLas, ou Olbers première , fut découverte par Olbers, à Bremen, le 28 mars r6802. Juno, ou Harding, fut découverte par Harding, le 2 sep- tembre 1804. VESTA, ou Olbers deuxième, fut découverte par Olbers, le 29 mars 1807. 300 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE De Mercure. Mercure est la planète la plus proche du soleil, dont, dans sa distance moyenne, elle n'est éloignée que de 15,185,465 lieues de 2000 toises, Ou environ 13,299,000 lieues communés de 2283 toises. Sa proximité du soleil est cause qu’on l’aperçoit difficilement; aussi son nom chez les Égyptiens, signifioit é/izcelant ; Son jour, ou le temps de sa révolution autour de son axe, L’a pas encore élé déterminé ; Son année, ou le temps de sa révolution autour du soleil, est de 8796925860; Sa grandeur, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 0.3038 ; Son volume, celui de la terre supposé r .0000, est de 0.0655 ; Sa masse, celle de la terre supposée 1.0000, est de 0.1627. Mercure a des phases comme la lune. $ L'inclinaison de son orbite sur le plan de l’écliptique, est de 7°. De Vénus. Vénus est, après Mercure, la plus proche du soleil. Cette planète a dû être observée la première à cause de son éclat. Lorsqu'on l’apercoit le matin avant le lever du soleil, on lui a donné le nom d’efoile du matin; on lui a aussi donnéle nom grec de @ws@popos, phosphoros, porte-lumière, ou le nom latin de Zucifer. Lorsqu'on la voit au coucher du soleil, on lui a donné le nom de e77cpoc, esperos; elle est alors l'étoile du berger. Son Jour, ou le temps de sa révolution autour de son axe, a été supposé par Cassini, être de 23 heures; Son mouvement autour du soleil s'opère en 2247/0086 140; Sa distance moyenne du soleil est 26,375,6000 lieues de 2000 toises, ou environ 24,351,065 lieues communes; Sa grandeur, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 0.9593 ; Son volume, celui de la terre étant supposé 1.0000, est de 0.6828; Sa ET D'HISTOIRE NATURELLE, 301 Sa masse, celle dela terre étant supposée 1 .0000 ,est de 0.9243. L'inclinaison de son orbite sur le plan de l'écliptique est 3° 23°. Cette planète, vuede la terre , a des phases comme la lune. De la Terre. La terre étant le lieu de notre séjour, nous intéresse plus particulièrement. C’est de sa surface que nous apercevons tous les mouvemens des astres; mais il est avoué aujourd’hui qu’elle a elle-même deux mouyemens distincts, celui de rotation autour de son axe, et son mouvement annuel: il faut donc avoir égard à ces deux mouvemens, pour apprécier les mouvemens vrais des corps célestes. Le mouvement annuel apparent du soleil est le vrai mouve- ment annuel de la terre, Ce mouvement vrai annuel de la terre s'opère en 3652563835. Le mouvement journalier de la rotation de la terre sur son axe pour revenir à la même étoile, s’opère en 23 heures 564". Sa grandeur, son volume, sa masse sont toujours supposés 1.0000 par rapport aux autres planètes. Sa distance moyenne au soleil est 39,229,000 de lieues de 2000 toises ; Ou environ de 34,357,480 lieues communes de 2283 toises. De Mars. Cette planète est très-petite; elle a une couleur rougeätre. La grandeur de Mars, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de o.b174; Son volume, celui de la terre étant supposé r.0000 , est de 0.1386 ; Sa masse, celle de laterre étant supposée 1.0000, est deo.1294; Sa distance moyenne au soleil est de 59,772,960 lieues de 2000 toises; Ou environ b2,350,340 lieues communes; Son année, ou le temps de sa révolution autour du soleil, est de 685/9795186 ; Son jour, ou le temps de sa rotation sur son axe, est supposé de 24 heures 40", suivant Cassini. Tome LXXIX. OCTOBRE an 1614. Qq \Af 802 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE L’inclinaison de son orbite sur le plan de l’écliptique est 1° 51°. Cette planète paroît n'avoir point de satellites, De Cérès. Cette planète fut découverte le rer janvier 1801, à Palerme en Sicile, par Piazzi. On lui a donné le nom de Cérès, déesse révérée jadis par- tüculièrement en Sicile. Elle est très-petite. Son diamètre, suivant Schroeter, est 2” environ, et suivant Herschel , de 0.57. Harding croit qu’on ne peut pas beaucoup s’écarter de la vérité, en supposant à Cérès un diamètre de 2"5. Sa distance moyenne au soleil paroît être 94,988,432 lieues communes; Son année paroît être de 1681/83. L’inclinaison de son orbite sur le plan de l’écliptique est environ de 100 37°. De Pallas. Cette planète fut découverte le 28 mars 1802, par Olbers. Son diamètre, suivant Schroeter, paroît être de 4504; Sa distance moyenne au soleil paroît de 95,891,726 lieues communes; Son année paroît être de 16813. L’inclinaison de son orbite sur le plan de lécliptique, est environ de 350. De Junon. Gette planète fut découverte le 2 mars 1807, par Harding. Son diamètre paroît être de 3077; Sa distance moyenne au soleil paroît être de 9r,277,824 lieues communes; Son année paroît être de 15goo7. L'’inclinaison de son orbite sur le plan del’écliptique, est de 170. De Vesta. Cette planète fut découverte le 2 mars 1807, par Olbers, et nommée Vesta par Gauss. ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 303 Sa distance moyenne au soleil paroît être de 8r,237,824 lieues communes ; Son année paroît être de 13313; F L’inclinaison de son orbite sur le plan de l’écliptique, paroît être de 7° 8’. Ces quatre petites planètes ,que Herschel a nomméesastéroïdes, parce qu’elles sont singulièrement petites , ont fait naître diffé- rentes idées aux astronomes. KEPLER apercut qu’il y avoit une plus grande distance entre ars et Jupiter, proportionnellement, qu'entre les autres pla- nètes. Mars est à 52,000,000 de lieues du soleil, et Jupiter est à 178,000,009..., tandis que la terre n'est éloignée du soleil que de 34,000,000 dellieues; il soupconna qu'il devoit y avoir une autre planète entre Mars et Jupiter. Cette idée de Képler fut adoptée par Lambert, Bode, Wurm. Les nouvelles planètes viennent confirmer cette idée de Képler. Olbers pense qu’effectivement il avoit existé primitivement une grosse planèle entre Mars et Jupiter, et qu’elle s’étoit brisée en éclats; que l’un des fragmens étoit la planète Cérès, et un autre, la planète Festa; qu'il pouvoit y en avoir plusieurs autres qui ere à la même distance à peu près du soleil (telles que Junon, Vesta). Les excentricités et les déclinaisons pouvoient être différentes, mais les orbites se couperoient toutes au même point; elles auroient des nœuds communs, où elles passeroïent toutes à chaque révolution, et ainsi les nœuds seroient les centres d’une zone étroite, où l'on pourroit chercher les autres fragmens avec plus d'espoir que dans une zone plus large, qui embrasseroit les di£- férentes orbites, vers leurs limites australes ou boréales. D’après cette idée, il sufliroit d'examiner avec soin, et chaque mais, les deux parties opposées du ciel dont nous venons de fixer la position. Cette conjecture a été presque démontrée. Lagrange en a fait le sujet d’un Mémoire qui a paru dans ce Journal,t. LXXIV, pag. 228 : il y détermine la force d’explosion nécessaire pour briser une planète, de manière qu’un de ses morceaux puisse devenir une comète. On y voit qu'un fragment ainsi détaché de la terre, seroit devenu comète directe, si la vitesse produite avoit été 121 fois celle d’un boulet de 24 au sortir du canon, Qq 2 304 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE c’est-à-dire d'environ 1400 pieds ou 233 toises par seconde, et comète rétrograde , si la vitesse eût été 156 fois celle du boulet. Pour des planètes autres que la terre, on auroit 121 ou 156 V' distance moyenne la vitesse seroit moindre pour les planètes supérieures. Une vitesse moindre feroit que le fragment pourroit décrire une ellipse. Ainsi, pour les quatre petites planètes, les vitesses dues à l'explosion, seroient moindres que de 20 fois la vitesse du boulet. J'ai supposé dans ce Journal , tome LXXVI, pag. 10, en parlant du Mémoire de Lagrange, qu’une planète pouvoit être brisée par de fortes décharges électriques. « On sait, y dis-je, » que Nelis est parvenu à briser des cylindres d’acier d’un pouce » de diamètre, par des décharges d'électricité très-fortes et mul. » tipliées. » Or jai fait voir dans mes Vues sur l’action galvanique , tome LXXVIII de ce Journal, pag. 160, que tous les grands globes sont surchargés de galyanisme ou d'électricité. De Jupiter. Jupiter est la plus grosse des planètes; aussi a-t-il un éclat assez vifqui peut le faire prendre quelquefois pour Véaus, lors- qu'on ne connoit pas le lieu où il doit se trouver. La grandeur de Jupiter, celle de la terre étant supposée 1 .0000, est de 10.8600; Son volume, celui de la terre étant supposé 1.0000, est de 1280 .9000 ; Sa masse, celle de la terre étant supposée 1.0000 , est de 308.9400 ; Sa distance moyenne au soleil est de 204,100,180 de lieues de 2000 toises; Ou de 178,692,550 lieues communes; Son année, ou le temps de sa révolution autour du soleil, est de 4332.5968076 jours ; Ou environ onze ans 315 jours; ET D'HISTOIRE NATURELLE. 305 Son jour, ou le temps de sa rotation sur son axe, est, suivant Cassini, de 9 heures 55! 50", L'inclipaison de son orbite sur le plan de l’écliptique, est de 19 167. Cette planète a quatre satellites dont nous parlerons ci-après. De Saturne. Saturne étoit la plus éloignée des planètes connues avant la découverte d'Uranus. Elle a peu d'éclat; sa couleur sombre de plomb lui a fait donner le nom de Saturne. La grandeur de Saturne, celle de la terre étant supposée 1,0000, est de 9.9825; Son volume, celui de la terre étant supposé 1.0000 , est de 974-786 ; Sa masse, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 93.271; Sa distance moyenne au soleil est de 374,196,340 lieues de 2000 toises ; Ou 327,748,720 lieues communes; Son année, ou le temps de sa révolution autour du soleil, est de 10758.969.8400 jours; Ou 29 ans 161 jours 4 heures 27"; Son jour, ou le temps de sa rotation sur son axe, est sup- posé de 10 heures, L'inclinaison de l'orbite de cette planète sur le plan de l'éclip- tique , est de 20 29 50". . Cette planète a sept satellites et un anneau dont nous parlerons ci-après. D'Uranus. Uranus est la plus éloignée de planètes connues. Il a été découvert par Herschel en 178r. Cette planète paroît comme une étoile de la cinquième grandeur; elle avoit déjà été observée par Flamsteed; mais il la regardoit comme une étoile. La grandeur d'Uranus, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 4.3314; 306 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CIMMIE Son volume, celui de la terre étant supposé 1.0000, est de 8r.26; Sa masse, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 1.690; ._ Sa distance moyenne au soleil est de 752,540,172 lieues de 2000 toises ; Son année, ou le temps de sa révolution autour du soleil, est 30688.71260872 jours; Ou 83 ans 29 Jours 8 heures 37/; Son jour, ou le temps de sa rotation autour de son axe, na pas encore été déterminé. L'inclinaison de l’orbite de cette planète sur le plan de l’éclip- tique, est 0° 46° 26". À Cette planète a six satellites dont nous parlerons ci-après. Le nombre des planètes connues jusqu’à ce moment , est donc de onze. Mais il pourroit y en avoir encore d’autres qui, par leur peu de volume et leur éloignement, auroient échappé aux obser- vateurs, comme leur avoiént échappé Cérès, Pallas, Junon, Vesta et Uranus. _nétiitel ET D'HISTOIRE NATURELLE. Tablean général du Système” planétaire. Planètes Révolutions rs 3 Demi-grands | Demi-axes sidérales. tee TR axes. conjugués. Ju lennes. Ÿ RESTE 7 415caf14° {ao | o.5870g81 | o.5768787 || @ 224.7008240 162.6.19.13. o 0.7253323 0.7258153 || ë 365.2563835 100.0. 0.45.45 1.0000000 _|_0.9996289 œ 686.9796186 | 53.2. 1.42.10 1.B256935 | :1. /71.5170707 | À 7 4332.59b3076 8.5. 6-17.33 5.2027g9z1 5.1967510 ( Pb 107589698400 3.4.23.31.36 95387705 9.5237100 | L 30688.7126872 1.2. g.b1.20 | 19.1833050 | 19.1629240 | san 2 constant j : Er Excentricités Log. excen- |! Planètes. 5 A “ en parties (+ D) pour tricité en sé Ares CRE dE du grand axe. TRS secondes. l'anam. exc. Dre 0.20551494 0.079h5444 0.09094358 4.6272686 Q o.00685298 0.004956q8 0.0029762 8.1503057 || abs. 0.01677967 0.01677976 o. __o-0072881 __3.52q2151 L Ca 0.0g313400. | 0.14190767. | 0.040561 4. 2885334 |} TL 0.04817840 | 0.2506621 0.0209399 5.997277 || D o.02616830 0.55577652 0.0244193 4- 0639164 pes _0-04667080 | 0.8g529060 0.0202830 3.9834657 Longitude moyenne : Planètes.| 1801, 1° janvier, Longit. périhélie. LonsReees Inclinaison. temps civil. nœud ascendant. ë % 5f13° 56’ 27" 2914°91" 47" 1115 5701 | NT CE OL o.10.44.35 4.08:87501 2.14.52.40 4:2520D CLR 3.10. 9-13 DTHASO MOMENT EN EP EAN E SE C4 ANA: 11. 92.94.94 1.18. 1.98 ET o ri 3.12.12.36 0112082245 3. 8.25.54 1.18.52 P 4.15.20.32 2.29. 8.59 3.21.55.47 2.929.538 FL b.97.47.18 11.17.91.42 2.12.51.14 | o.46.25 Variat. séculaire | Mouvement | Mouvemeet MERE ART Log. pour |} Planètes. de sidéral sécul. | sidéral sécul. CR : SEC + | Jes mou. l’excentricité. | du périhélie. | du nœud. DR MA Rordires: TT —o.00000.3867 | + 64356 | — 782"27 | + 181828 | 1.954504 —0.00006.2711 | — 267. à — 1869.80 | — 4.5522 | 2.0994713 | Lan CEE RE EME 7 ect POSER ONE MAOEETOEE 2.1697518 . |—+o. 00009.0176 | + 1582. 2 — 2528.44 | — o0.1525 | 2.2b95847 TT —0.00015.9550 | + 663.86 | — 1577.57 | — 22.6087 | 2.5274064 Pb —0.00081.2409 | + 1945.07 | — 2266.46 | — 15.5131 | 2.6588727 Ft | —0.00002.5072 [+ 238.60 | — 5597.96 | + 3.1331 | 2.8108005 305 Dist. moy. au soleil, lieues de 2000t. à Plarètes. .465 .6oo - 000 .960 .280 .340 .172 | Dist. moyenne à laterre. 39.229.000 39.229.000 59.772.960 204.100.280 374.196.340 792) 8. di Diamètres à la distance Planètes. 4 moyen. ©). 255.820 766 Plus grande distance ausoleil. 65.330.856 213.933.505 305.214.317 797.661.512 Plus grande distance à la terre. 58.193.567 68.457.327 105,227.117 435.101.578 107.10 826,875. C) Grandeur par rapport à la terre. o, 3838 0.9593 1.0000 0.5174 10.8600 9-9825 4.5314 111.74 0.2730 Plus courte distance au soleil. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Excentricité. |} .064.624 .181. .b7o. 142 739 3.120.841 194-498 || 658.261 |} 9.206.064 194.267.055 353.1 78. 363 717. 418. 832 Plus petite distance à la terre. 20.964.433 10.000.671 14.318.803 154. 379-794 315.291.102 678.204.515 91 -433 Volume par rapport. à la terre. 5.566.896 9.833.225 21.017.977 35.121.340 Diamètres en lieues. 1955 3158 3271 1693 35527 32655 14169 895 Masses par rapport à la terre. ——— o.0b65 o0.8828 1.0000 0.1386 1280.9 974-78 81.26 1.2 1395324 .40 0.20 0.1627 0.9243 1 .0000 0.1294 308.94 93.271 1.690 329630 o 351 0.0146 - ET D'HISTOIRE NATURELLE. 309 Toutes les masses des planètes réunies, dit l’auteur, {tome IT, pag. 617, ne font pas un huit millième de celle du soleil. DES SATELLITES. On appelle du nom de satellites , des planètes secondaires qui circulent autour d'une planète principale, et qui accompagneut celle-ci dans sa route annuelle autour du soleil. . La terre a un satellite, la lune; Jupiter a quatre satellites; Saturne en a sept; Uranus six; Les autres planètes n’en ont point. De la Lune. La lune est, après le soleil, le corps céleste qui nous intéresse le plus. En grec elle s'appelle uw”, rene, d'où l'auteur pense , A « Q qu'on a pu former le nom de mensis de mois pyroç. La lune recoit sa lumière du soleil. c Lorsqu'elle est située entre le soleil et la terre, c’est-à-dire en conjonction, on ne la voit pas de la terre; on l'appelle zou- velle lune. Lorsqu'elle est en opposition, on la voit en plein : c'est la pleine lune. Les syzigies forment la nouvelle et pleine lune. Lorsque la lune n'est qu’à 90°, on n’en voit que le quart, ce sont les guadratures. La lune tourne autour de la terre dans 27 jours et quelques heures; on distingue différentes révolutions. La révolution tropique de la lune, qui la ramène à la même longitude comptée de l’équinoxe mobile, est de 27 jours7 h. 43 4" 7183209248. La révolution sidérale , qui ramène la lune à la même étoile, est de 27 jours 7 h. 43 11" 50°. 7545. La révolution azomalistique , ou le retour à son apogée, qui la ramène au même point de son ellipse, est de 27 jours 13 h. 18° 35". La révolution syzodique, qui la ramène en conjonction avec [4 le soleil, est de 29 jours 12 h. 44° 2! 5o!”.9. Tome LXXIX. OCTOBRE an 1614. Re 310 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE L'auteur donne ensuite des tables pour calculer ces mouve- mens de la lune, et reconnoître les époques des éclipses. Les mouvemens de la lune éprouvent de grandes inégalités. Le jour de la lune, ou le temps qu’elle emploie à tourner sur son axe, est d’un mois lunaire , puisqu'elle présente toujours à la terre la même face. La distance moyenne de la lune à la terre, est de 86,35r lieues communes ; Sa grandeur, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 0.279390; Son volume, celui de la terre étant supposé 1.0000, est de o.20351; Sa masse, celle de la terre étant supposée 1.0000, est de 0.0146; ; C'est-à-dire environ un 68e de celle de la terre. La courbe décrite par la lune est un épicycloïde, parce que pendant qu’elle tourne autour du globe terrestre, celui-ci tourne autour du soleil. La lune a une lumière particulièrequ’on appelle /umière cendrée; elle lui est propre, et je crois qu’elle dépend de son état élec- trique ou galvanique. IL est vraisemblable que la terre, qui est dans un état habituel d'électricité, et qu’on en regarde comme le réservoir commun, a également une lumière cendrée. Vénus, Jupiter..., paroissent également avoir une lumière cendrée, qui est produite par les mêmes causes. Les mouvemens de la lune sont sujets à un grand nombre d’inégalités qui tiennent aux plus hautes théories. Aussi la cons- truction des tables de la lune présente de grandes difhicultés. Des Satellites de Jupiter. Jupiter est enveloppé de quatre petits corps célestes analo- gues à la lune, et qu'on appelle safellites ; ils étoient inconnus des anciens. . Ils furent aperçus pour la première fois par Galilée, le 7 janvier 1610. Les mouvemens de ces satellites ont élé les objets de grands ET D'HISTOIRE NATURELLE. 311 fravaux pour les astronomes, tels que Galilée, Marius, Hodierna, Schirlæus, Cassini, Newton, Pound.... Hodierna remarque que le plus lent ne s'écarte jamais que de 12 à 13 diamètres de Jupiter, ou modules; et comme les autres s’en écartent moins, celui-ci est reconnoissable dans ses plus grandes digressions. Le troisième satellite ne s’écarte jamais de neuf modules. Ainsi quand on voit un satellite devenir stationnaire à cette distance, on est sûr que ce ne peut être que le troisième. D'ailleurs il est Je plus gros de tous. Le satellite qui deviendra stationnaire, et puis rétrograde vers cinq ivre de -distance à Jupiter, sera nécessairement le second. Le premier ne s’écarte jamais de plus de trois modules, et son mouvement est le plus rapide. Hodierna se contentoit d’es- timer ces distances, et dans cette estime , il se faisoit aider par les personnes qui assistoient à ses observations. Depuis ce temps, Cassini et Newton ont exprimé ces distances en demi-modules, ou demi-diamètres de Jupiter, qui est à peu près de 15,555 lieues. Voici ces distances suivant tous ces auteurs. On désigne les quatre satellites par les symboles suivans C'"..« Table des distances des Satellites de Jupiter de leur planète. Satellites. |Galilée. [Marius.| Schirlæus.|Hodierna.|Cassini[Newton.| Pound. RE PAROI Er | LS 4 6.0 | 5267 Bu MUR 6” “ 14.88] 15,141/4.42. o 25.30 EE EN o 16.0 | 16.0 1v 24.0 | 26.0 C à .0 C: 10:0 | 10.0 : .0 9-00! 9:,49412.56.47 (@ .0 € .0 L'auteur a déterminé les révolutions synodiques par l’ensemble des éclipses observées pendant 140 ans; il en conclut les révo- lutions périodiques et les révolutions sidérales, . De là sont résultés les nombres donnés: par Laplace, c'est-à- dire, 5.698491... 9.066548.... 14.461895..:. 2b.435qo0. Ar 312 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Ces nombres tombent entre ceux de Cassini et de Newton. Ces distances sont à peu près en lieues communes. ser satellite," MI PME VOTE OT 068600 AeUES, CRAN ob a Me Rod Li pe AA LE HA ToN Se) DO PONTE AT STE NT OT E 22 O0 OD) des MANETTES OP ANR ODI GS Les satellites de Jupiter s’éclipsent très-souvent, et ces éclipses ont élé calculées avec beaucoup de soin. Le quatrième satellite s’éclipse 21 fois par an, suivant Hodierna; Le troisième, br fois; Le second, 103 fois; Et le premier, 207 fois. Ces éclipses des satellites de J'upiter sont déduites en tables. Elles sont d’une grande utilité pour déterminer les longitudes. C’est par les éclipses du premier satellite que Roémer parvint à calculer la vitesse de la lumière. Il observa que ces éclipses arrivoient plus tard lorsque Jupiter étoit en conjonction, c'est- à-dire au delà du soleil par rapport à la terre, que quand il étoit en opposition. Le calcul a fait voir qu'il y avoit 16! 15”; d'où on a conclu que la lumière emploie 16° 15” pour parcourir le diamètre de Porbite terrestre, ou 8’ 7" 30° pour venir du soleil jusqu’à la terre. Les temps des révolutions périodiques des quatre satellites sont à peu près, ser satellite" sr et na 03574 Dei Lelée Ua elle tie eu on TO AER () De anhonmolieh tels Les à 07-42-0250 AN EN NE EME ET DE 02-104 Les masses des satellites de Jupiter ont été calculées par Laplace, en les rapportant à celle de Jupiter. Masse de Jupiter. . «+ . . . r.0000 1er satellite..: : « . . 14,0. t'o“000017328x DE A NE EN NNE R MIO IG OCC 220020 die ADaUs lo ENT Tb ccp0864072 Eu eo = ne à + + à + + + 0.00000420991 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 3:13 Des Satellites de Saturne et de son anneau. Saturne est environné d’un anneau et de sept satellites. Galilée avoit dit avoir aperçu que Saturne étoit composé de trois parties. Mais ce fut Huyghens qui, en 1660 environ, constata que Saturne étoit environné d’un anneau. Huyghens avoit aperçu en 1655 le plus gros des satellites, c’est le sixième aujourd’hui dans l’ordre des distances. Dominique Cassini découvrit le septième en 167r. Il découvrit le cinquième en 1672. Il vit le troisième et le quatrième en mars 1684. Le deuxième et le premier furent découverts en 1789, par Herschel avec un télescope de 40 pieds. Herschel fit en même temps de nouvelles observations sur Vanneau de Saturne; il reconnut qu’il étoit double et composé de deux portions qui n’étoient éloignées que d’une demi-seconde. Cet anneau doit être considéré comme une couronne peu épaisse, qui forme comme une voûle autour de Saturne, et en est également éloignée dans tous ses points. Le diamètre de Saturne est de 28,594 lieues communes. Le diamètre de l’anneau est de 66,719 lieues. Le diamètre intérieur de l’anneau est de 47,652 lieues. Par conséquent la largeur de la portion solide de l'anneau est de 9533 lieues; Et la partie intérieure de l’anneau n’est éloignée de fa surface de Saturne que de 9529 lieues. Lorsque Saturne est à b”20 ou à 11*20, le plan de l’anneaw est tourné vers la terre, et nous ne l’apercevons pas. On voit pour lors Saturne rond et sans anneau. S L'’anneau est incliné de 30° sur l’orbite de Saturne. Son inclinaison sur le plan de lécliptique, est de 319 20’, comme celle des quatre premiers satellites. L’anneau a un mouvement de rotation comme les satellites. Ce mouvement paroît être, suivant Laplace, d'environ 10 h. Herschel estime ce mouvement de rotation de 10 h. 32’. Herschel a déterminé les mouvemens moyens des satellites de Saturne. 314 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Table des mouvemens moyens des sept Satellites. Ép. 1788.| Mouv. diurn.| Révolnt. périod. | Révolut. synod. | Distances. 381° 962 j é 28” 6689 262.707 cote 36.7889 190.798 .21.18.926. 191118 54"8 | 43.5 161565 .17.44.51. 2.17.45.51.0 | 56.0 4.10.05.11.1 | 4.10.95.65.2 | 78.0 15.22.41.13.1 | 15.23.15.20.2 | 180.0 | 79. 7.53.42.8 | 79.22. 3.12.9 | 522.0 On a estimé la distance de l'anneau et des satellites à leur planète en modules, ou flemi-diamètres de Saturne. Ce module ou demi-diamètre est environ de 14,297 lieues. Annbant eue EN RUE SIMON 9.529 1. com. 162 satellite MIRE MM NT ME 000 DO IR MER IE MERS GRO Ce 36," et ND Ne 5 Heens-MTo CEE fe alle) hole 1e 0e 200 L lle HS MIO 00O De: Feat) SALE PRE 130.000 CAEN NS EE RE ES CORCOD) Tous so 4 + 0 + + + + + + + 900.000 Les masses des satellites de Jupiter, ni celle de son anneau n'ont élé calculées. Des Satellites d'Uranus. Les satellites d'Uranus sont encore bien plus difficiles à voir, dit l’auteur, et par conséquent beaucoup plus inutiles que ceux de Saturne. Cette expression me paroît être échappée à l’au- teur. Les satellites d'Uranus sont des astres; donc ils doivent être les objets des recherches du savant. Nous sommes loin au- jourd’hui de rapporter tous les corps existans à l’homme, et de ne les considérer que par rapport à l'utilité, sous le rapport de l'utilité, dont ils peuvent être à cet animalcule, qui a eu jadis ET D'HISTOIRE NATURELLE. . 315 l'arrogance de tout rapporter à lui, Jui qui n’est qu’un point sur Ja terre , laquelle est elle-même un globe imperceptible dans l'im- mensité des globes existans. Jusquici Herschel est le seul qui ait suivi ces satellites avec quelque constance. Il résulte de ses observations, que l'orbite de ces satellites est presque perpendiculaire à l'écliptique. On y voit le soupcon de deux anneaux perpendiculaires l’un à l’autre. Ces satellites sont au nombre de six. Voici les distances et les révolutions suivant Herschel ; les élémens du second, du troisième sur des mesyres réelles. Le reste est conjectural. Les inclinaisons sont de 89° 39° ou 90° 30’. Le nœud ascendant a 5210, ou 8*90, suivant qu’on suppo- sera la première ou la seconde inclinaison. C’est ce que l’auteur a trouvé par un calcul exact des observations de Herschel. Satellites.| Distances. Révolutions. 255 bi a1t95 o" 33.09 8171-19-19 10.23. 4 44.23 HULL ND IE 50 88.46 38. 1.40 172.92 107.16.40 Les masses des satellites d'Uranus n’ont pas encore été calculées. Ces satellites sont si petits, qu’ils n’ont été observés que par un petit nombre d’astronomes. Les mouvemens des planètes et de leurs satellites sont sujets à un grand nombre de variations, dont les astronomes ont cherché les causes. L’année de Jupiter, par exemple, paroissoit plus courte dans ces derniers temps, tandis que celle de Saturne paroissoit plus longue. Laplace a trouvé dans l’année de Jupiter, une inégalité de 20" qui étoit causée par l'attraction de Saturne. La période de cette 316 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE inégalité est de 918 ans. Au bout de cette période, les temps des révolutions de Jupiter seront les mêmes. Laplace a également reconnu dans les mouvemens de Saturne une juégalité de 40° 4", dont la période est d'environ 877 ans, et dépend de cinq fois le moyen mouvement de Saturne, moins deux fois celui de Jupiter. Au bout de cette période de 877 ans, le mouvement de Saturne sera le même. Nous regrettons de ne pouvoir parler de toutes ces inégalités; mais elles tiennent aux plus hautes théories, que nous ne saurioné exposer ici. . D'UNE ET D'HISTOIRE NATURELLE. 6144 D'UNE FAMILLE QUI A SIX ORTEILS; Par J.-C. DELAMÉTHERIE. M. A. CARLISLE a communiqué à Je Société Royale de Londres, dans sa séance du 23 décembre 1813, une Notice sur l'organisation particulière d’une famille de Vermont dans l’Amé- rique septentrionale, la famille Zerah. Un enfant de cette iamille, Zerah-Colburn, qu'on voyoit à Londres, avoit six doigts à chaque pied, et cinq seulement à chaque main ; mais on voyoit au petit doigt de chaque main, un petit doigt additionnel qui croissoit latéralement hors de los du métacarpe de ce doigt ; il avoit aussi un orteil additionnel partant de los du métatarse du petit doigt du pied. Son père a la même conformation. Zerah-Colburn a cinq frères et deux sœurs. Les deux sœurs et deux des frères ont le nombre ordinaire des doigts aux mains et aux pieds, les trois autres frères sont organisés comme lui. La grand'mère des Zerah avoit la même organisation. On ne dit pas si celte organisation étoit antérieure à cette femme. On a déjà rapporté qu’une famille à Berlin, avoit six doigts. Ces variations dans l’organisation , paroissent n'appartenir qu’à l’homme social, ainsi qu'à nos animaux domestiques et à nos plantes potagères. Des taureaux domestiques sont sans cornes; et ce phénomène se perpétue de génération en génération. Des canards domestiques ont des crêtes, tels que le canard royal (anas regia de Latham); d’autres ont des caroncules, tels que le canard caronculé.... Des végétaux cultivés par la main de l’homme présentent ége- lement des parties que n’ont pas les autres, ù Le froment de Smyrne, ou blé de miracle, porte un gros épi aplati: de chaque côté de cet épi il en sort deux ou trois autres plus petits. .... Ce sontde nouveaux faits qui confirment l’analogie qui existe entre les deux règnes organisés, le végétal et l'animal. Tome LXXIX. OCTOBRE an 1814 Ss 4 t À ‘ OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES ne Hi Lie a | «| THERMOMÈTRE EXTERIEUR BAROMEÈTRE MÉTRIQUE. > = L = CENTIGRADE. e Eu) PR. NS) US ELLE ES) LE D “| Maximum. | Minimum. |A Mini. Maximum. | Miv:mun. A. |" MIDI.| à heures. © | heures ,9 heures+ z mill, | heures. mill. | mil. ° ! 1la3s. 23,00/à 5+m.H15,10|+22,75]à g-m. .....:.766,50là 5 s...,...... 765,20l766,06| 21,0 2là 315. Ho3,40là 5£m.+r1,50|+21,1o|à 9 m......... 764,64a90%s.........763,12|7C4,12| 20,6]0 Sà52s. +1900/à 54m.+11,79 ÆH17,25|à 1025.......703,53|à 345s.......: 762,32|763,06| 19,9 41à3s. +i7oofà51m.+ 7,75l416,60|à 9+ m....... 765,22|à6 s........ ..76350|765,00| 18,3k 5là3s. —kz7,50fà 51m.—+ 6,25|+16,65|à ds.......... 764.52/à 5 £ m.......763,64 764,12| 18,0| 6la3s. <+19,25[à 5 £m.—+ 7,00|+10,25|à 55 m....... 764,80 À g See... 762,80 |764,50| 16,44 7lads. Hi8,25/h9s. Æ10,75|#16,25|à 5 + m....... TOO 20 |A Sete » icmiaerte 954,74|755,80| 16,3|. 8là3s. +17,60/151m.+ 8,25]H16,50[ 93 s........ 761,20|à 55 m....... 756,561758,84| 17:74 Hi olà3s. —18,50/à 5 Lim.+10,50|+16,25|à 10 m........ 762,80|à 6 4 m.......701 78|762.72| 18,2} dliolh3s. —17,50fà 52 m.+r1,00|+16,00|à 5 5 m....... 762,041 5... 4.0. 761,62|761,92| 18,0]. 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H-21,00fù 6m. “H12,00|+21,00/16m.....,... 759,92(à9ks......... 758.20|758,82| 20,8] dl22/à midi. H16,25/à 6m. —Æ 9,75|#16,25|17 3 m....... 756,841à6 5.:........ 756,90|758,52, 18,4M 112313 s. +9,00 6m. + 0,25|+17,10[à 95 m....... 760,76|à 61s.........7È8,20|760,20| 17:4 24/à midi. 24,75|à 6m. —+15,75|24,75[à 10 m....,...757,58là 10 5......... 753,04|757,00| 20,0 H25/à midi. H24,50/6m. —+15,75|4+24,5olà 9 +s.........758,20|à 7 s..... +...-794,441799,68] 21,1}. 1|26|à midi. +22,00/6m. —15,50[+22,00[à 10 m........ 758,68|à 10% 5S....... 757,121756,54| 204 1127|à midi. H20,85|à 6 m. 14,00/+20,85|à midi... ..... 757,88|à 10 + s....... 756,40|757,38| 19,2 @|28/à midi. É2r,oo|à 6m. H15,00|[+21,00/à9s.......... 758,88|à 6 m........ 755,441757,36| 20,114 H|29/à midi. +23,5o[à 6m. “+13,00|+23,50|à 8 m.........758,34\à 3 s......,.. 756,84|757,96| 20,9M à 708 3s. “+23,90[à 5m. <+13,00|+22,50[à 1om........ 756,46[à 5 s..... .....755,20]755,94| 20,8 | Moyennes. 420,50] +:0,18|+19,66| 762,00; 759,74]76a,30| 19,2] RECAPITULATION. Millim, | Plus grande élévation du. mercure. .... 766,50 le x (4 Moindreélévation du mercure......... 553,04 le 24 Plus grand degré de chaleur......... +25,35 le 20 l Maindre degré de chaleur..... RTE + 5,75 le 17 Due de jours beaux....... 22ù \& de couverts... 8 L (à depluie.-..2......-1e 6 [ LIVES ee cable eee s 30 deigelées 21202205 o de tonnerre... ....... z Nora. Nous continuerons cette année à exprimer la température au degré du thermomètre cen: centièmes de millimètre. Gomme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu’on le thermomètre de correction. À la plus grande et à la plus petite élévation du baromètre conclus de l'ensemble des observations, d'où 1l sera aisé de déterminer la température moyenne | conséquent , son élévation au-dessus du niveau de la mer. La température des caves est également) à midi. À L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. # VENTS. N-E. Idem. Idem. Idem. Jdem, POINTS Lune périgée. SEPTEMBRE. 1814. LUNAIRES. LE MATIN. Légers nuages, br. Beau ciel, Couvert. Ciel superbe. Jadem, Nuageux, brouillard. D.Q.à4h43/m. Couvert. Pluie fine, brouillard. Couvert, brouillard. Idem. Nuageux. Idem, léger br. N.Làrh.28%.| Légers nuages, br. Ciel superbe. Idem , léger br. Jäem. Idem. Idem, Idem. Légers nuages, br. P.Q.àoh5o's.! Pctits nuages. Lune apogée. |Couvert. Brouillardépais. Couvert, lég. brouil. Très-nuageux. Couvert, léger brouil, Très-nuageux, br. Couvert. P.L.àoho’s. INuageux, brouillard. Îdem, A MIDI. | LE SOIR. Très-nuageux. Beau ciel. Couvert. Nuageux. ldem, Couvert. Petite pluie, Couvert. Très-nuageux. Couvert. Nuageux. Très-nuageux. Nuageux. Beau ciel, Idem, Idem. Idem. Idem, Idem. Idem. Pluie. Idem. (Couvert. Frès-nuageux. Idern. Idem. Couvert, Trèsnuageux. Idem. Légers nuages. RÉCAPITULATION. Jours dont le vent a soufilé du Therm. des caves ; le a°°, 120,0679 | le 16 12°,0979 YARIATIONS DE L'ATMOSPHÉRE. Beau ciel. Idem. Idem. Idem, Lég. nuages. Nuageux. Couv., par interv. Pluie fine. Nuageux. Couvert. Beau ciel, Nuageux. Beau ciel. Idem. Idem, Idem. Idem. Idem. Idem. Idem, Pluie. Beau ciel. Nuageux. Beau ciel, Pluie , tonn, à 3h. Très-nuageux. Pluie à 9 h. Très-nuageux. Quelques nuages. Beau ciel. Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 36""15=— 1 p. 4 lig. tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, c'est-à-dire en millimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromètre, on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, on a substitué le maximun et le rninimum moyens ;. du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris et pas exprimée en degrés centésimaux, afin de rendro ce Tableau uniforme, 320 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, elc. a —— | TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Suite de l'Essai sur les Tables des degrés de certitude et de probabilité des connoïssances humaines; par J.- 0, Delamétherie. Pag. 237 An accoun! of some n'w, etc. Expéricnces nouvelles sur les composés fluoriques , accompagnées d'obser- vations sur quelques autres sujets de chimie; par Sir H. Davy. Extrait. 259 Examen chimique de quelques substances colorantes de nature résineuse ; par J. Pelletier. 268 Recherches sur la propagation du son dans l'air agité par le vent; par M. de Haldat. 283 Note sur le squelette humain fossile trouvé à la Gua- deloupe; par J.-C. Delamétherte. 295 Suite de l'astronomie de Delambre. Extrait par J.-C. Delaméthertie. 299 D'une famille qui a six orteils; parJ.-C. Delamétherie. 317 Tableau météorologique; par M. Bouvard, 818 De l’Imprimerie de M"° Veuve COURCIER, Imprimeur - Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n°B7. JOURNAL LE POST OU Es DE CHIMIE (x Ga és > SMAL Hi ET D'HISTOIRE NATURELL NOVEMBRE an 1814. SECONDE LETTRE SUR : L'INCERTITUDE DE QUELQUES OXIDATIONS; Par L. PROUST. ON trouve dans le Journal de Physique, mars 18r4, une confirmation de l’oxidation de l’or dans le vide par le fluide électrique : expérience insérée dans le tome LXVII. Si cette expérience-là ne confirme pas mieux l’oxidation de l'or, que la confirmation que j'ai sous les yeux, les chimistes resteront long-temps encore avant d’être convaincus que le fluide électrique peut, à lui seul, oxider les métaux. Une expérience bien plus simple cependant, pouvoit avoir éclairci tout cela. Si la poussière purpurine que ces essais produisirent , étoit réel- lement un oxide, l'acide muriatique le plus foible en faisoit sur-le-champ la dissolution. Pensa-t-on à cette épreuve? Non: get voilà comme on fait des oxides ! Tome LXXIX, NOVEMBRE an 1814. . Æ£ , ed 323 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Pourpres de l’Or. Depuis environ cinquante ans l’on ne cesse d’accumuler des doutes sur la naturede ce pourpre; peut-être seroit-il temps, enfin, de les soumettre à la discussion. M. Thenard se contente de nous les transmettre à peu près comme il les a reçus. Les faits pourtant sont assez nombreux pour qu’on puisse en tirer déjà quelques lumières. Je vais rassembler ici ceux qui sont parvenus à ma connoissance, 10. Une chose dont j'ai été témoin à Madrid, et qu’on a vue mille fois en Europe, c’est la dispersion de l’or des cadres et des baguettes dorées, par la chute de Ja foudre. Le résultat en est toujours une dissémination de poussière violette, qui s’en va festonnant d’un côté le bord des tableaux , et de l’autre, le fond des murailles où ils étoient placés. Voici actuellement l’objection qui offre sur cela. Si la tem- pérature du coup de foudre a été capable d’oxider l'or, il faut donc supposer aussi qu’elle est en état de maintenir cetle oxi- dation au degré où elle l’a portée, puisqu’après son passage on retrouve en eflet cette poudre ou cet oxide. Mais comment con- cilier cela maintenant, avec la facilité qu’on éprouve à désoxider l'or par une température mille fois plus basse, peut-être, que celle d’un coup de foudre? 29. Depuis Comus qui-annonca le premier, je, crois, que l’or foudroyé par la grande décharge, étoit de l'or déphlogistiqué, de la chaux d’or, on s’est tellement habitué à prendre pour autant d’oxides, toutes ces poussières purpurines, ou violettes, que l’idée s’en est insensiblement aflermie, comme si elle eût reposé sur des faits parfaitement démontrés. Cette idée, d’un autre côté, n’a pas laissé que de se fortifier beaucoup aussi, par l’analogie de couleur qu’ont en général tous ces pourpres avec celui de Cassius, où l’on étoit accoutumé à ne voir que de l'or déphlo- gistiqué. Mais puisque la fulmination de l'or par l'électricité naturelle ou artificielle, n’est plus qu'une chose vulgaire aujourd’hui, un fait dont il ne nous reste plus rien à apprendre, il faut espérer enfin qu’on pensera quelque jour à fulminer l’oxide à son tour, et c’est alors, je crois, qu’on obtiendra du pourpre en abondance. 3°. Ce qu’il y a de remarquable en tout ceci, c’est de voir, ET D'HISTOIRE NATURELLE. 3293 d'un côté, que le vrai oxide d’or n’est ni pourpre, ni violet, et ensuite, que les procédés les plus éminemment désoxidans, sont justement aussi ceux qui produisent du pourpre avec le plus de facilité. Parcourons les plus connus, à la téte desquels on peut placer de suite la purpuration de l'or, ou sa pulvéri- sation par les secousses déchirantes que le passage du fluide électrique lui fait éprouver, soit dansle vide, soit dans les vais- seaux pleins d’air. . 4°. L'or qu'on chauffe sur un charbon ardent, animé d’un jet d’oxigène, se dissipe en grenailles, en poussière.et même en fumée, dont une partie retombe en pourpre sur le charbon même, Est-ce là de oxide ? 59. Celui qu’on soumet au foyer des grandes lentilles exhale aussi du pourpre, si je me le rappelle bien (zoyez Macquer ). Est-ce encore là de l’oxide ? 6°. Les dissolutions d’or teignent en pourpre et en violet la eau, la soie, les plumes, etc., et l'acide muriatique n’en en- ève point la couleur. Ce procédé-là sembleroit pourtant être du nombre de ceux qui désoxident. Ceci me rappelle une Vénus dessinée sur albâtre avec la dissolution d’or, que l’on voyoit dans le cabinet de Darcet. Les traits en étoient pourpres. L'action de la lumière avoit sans doute désoxidé l'or. 7°. Un papier mouillé de dissolution d’or, puis trempé dans de l’eau hydro-phosphorée, se teint en pourpre; mais pour en- lever cette couleur, il faut de l'acide marin oxigéné. Cela est-il un oxide? 80, L’or fulminant détoné entre des papiers, les tache de couleur pourpre, que l'acide oxigéné seul peut enlever. Est-ce là de l’oxide? Une lame d'argent doublée, dans laquelle on le fait détoner, une pièce de cuivre, la pointe d’un couteau, elc., en recoivent une dorure très-solide. 9°. Darcet et Roueille firent, dans le jardin du laboratoire de la rue Jacob, une expérience curieuse. Il s’'agissoit de ré- duire en or d’assez fortes quantités d’or fulminant : on choisit pour cela le procédé qu’on trouve dans tous les ouvrages anciens et modernes, L’or fulminant, mêlé de soufre et renfermé dans un creuset couvert, fut en conséquence placé dans son fourneau, puis chauffé convenablement ; mais au moment où la température vint à décider le transport de l’oxigène sur le soufre, il survint 1 "324 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE un mouvement brusque, une sorte d’explosion sourde, d’où partit au même instant un nuage pourpre de la plus grande beauté. La colonne se soutint pendant quelques secondes au-dessus du fourneau, puis elle finit par se perdre dans l'atmosphère. Si ce pourpre-là est encore un oxide, on conviendra, je crois, qu’il l'est contre toutes les règles. Tous ces pourpres-là, définitivement, peuvent-ils être autre chose que l’or désoxidé? Pourpre de Cassius. 10°. Je crois avoir assez fait connoître que l'or, dans ce - précipité, n’est point à l’état métallique; les expériences de M. Oberkampf viennent encore le confirmer. Concoit-on, d’après cela, pourquoi M. Thenard préfère le vague dans lequel ses incertitudes rejettent toute cette partie, aux conséquences sans réplique que les faits dictent d'eux-mêmes ? Selon les uns, dit-il, c’est de l’or à l’état métallique; pour lesautres, ce n’est point cela, mais c'est du protoxide. D'autres, ealin, tiennent pour l’oxide, pag. 575 et 596. Si M. Thenard, lui-même, ne prend aucun parti, quel sera donc celui de ses lecteurs? -Si quelque chose aujourd’hui pouvoit appeler l'attention des chimistes, ce seroit bien plutôt certaine intimité entre l'or et loxide, certain caractère de combinaison dans ce pourpre, qui passe de beaucoup toute idée de simple mélange entre ses deux élémens; et en effet, l’'ammoniaque le dissout et se teint de sa belle couleur. L’eau qui a coutume de précipiter la plupart des oxides de l’ammoniaque, n'y fait rien ; mais avec le secours d’un acide, le pourpre s’en sépare à l'entier, Ces faits-là ne conviennent certainement guères à un simple mélange d’oxide et d’or divisé. M. Thenard auroit pu rappeler un perfectionnement réel au pourpre de Cassius, annoncé par un chimiste allemand. Il con- siste à étendre la dissolution d’étain, je crois, d’un peu d’acide nitrique affoibli; le pourpre, en eflet, en sort plus éclatant. Je ne sais dans quel Journal on trouve cela, comme aussi que c'est en associant le muriate d'argent au pourpre, qu’on en tire les roses les plus beaux pour la peinture en porcelaine. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 325 Muriate d’or. M. Thenard comprend, dans un article bien court, une mul- titude de faits très-instructifs par eux-mêmes, mais qui cessent de l’étre faute d’être suffisamment développés. D'abord il n’auroit pas dû, ce me semble, annoncer que l'hydrogène réduit la dissolution d’or, à moins de s’en être assuré; pour moi, je n'ai pas pu y réussir. Il me paroît qu'il en est de méme de l'acide phosphoreux, qui n’a cette propriété qu’autant qu'il est mélé d'hydrogène phosphoré; telle est, par exemple, l'eau dans laquelle on conserve le phosphore. Quant à l'expérience du charbon, venue de la même source, M. Thenard jugera bien aussi, qu'à la température de l’eau bouillante, le carbone d’un morceau de charbon n'ira surement point s'emparer de l’oxigène, même le plus foiblement combiné, et bien moins, par conséquent, de celui de l'or qui est en dis- solution. Cet effet n’a pu appartenir qu'à quelques-unes de ces substances étrangères qui sont ordinairement contenues dans le Charbon en général, telles que , gaz réduisans, vapeur de fu- merons, sels, terres, oxides, etc. Or potable. Le muriate d’or est réduit par l’éther et les huiles, dit M. The- nard. C’est bien là un des résultats, si l’on veut : mais de quel intérêt cela peut-il être pour un médecin, pour un élève, pour un amateur, en comparaison des moyens qui ne fournissent pas moins à l'agrément qu'à l'instruction ?.[l me semble, par ex emple, que sans s'écarter beaucoup de la concision que M. Thenard s’'étoit prescrite, il auroit pu dire : C'est un fait anciennement connu déjà, que l’éther et les huiles volatiles des plantes enlèvent l'or à l’eau régale. Ces mêmes liquides ainsi chargés d’or, fournirent autrefois diflérens ors potables , dans lesquels on se flatta de trouver une médecine universelle, Jusqu'à M. Proust, on avoit cru généralement que Yor en substance passoit de l’eau régale dans ces liqueurs ; mais depuis ses recherches, on a vu que c’étoit le muriate d’or, lui- même, qui abandonnoit l'acide nitrique pour s’unir à l'éther et aux huiles : avec l’éther, cette dissolution offre des particularités curieuses. D'abord elle tombe, par l’eflet de sa nouvelle pesanteur, 326 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE au-dessous de l'acide nitrique qui alors la surnage comme de l'eau. En second lieu, si après l’avoir séparée par le siphon, on la distille, on en obtient du muriate d’or, ce qui est un premier moyen de l'avoir très-pur. ! Ces dissolutions ne sont pas d'une longue durée. L'or, au bout de quelque temps, s’en sépare en lames, en écailles, en feuillets brillans plus ou moins affectés d’un commencement de cristal- lisation. M, Sage conservoit un flacon de ce genre où s'étoient formés des octaèdres percés à jour ; peut-être le verroit-on encore dans le laboraioire de la Monnoie. Tels sont les résultats de la réduction de l’or par léther et les huiles, non moins propres à flatter la curiosité d’un homme qui se livre à la Chimie, que celui qui va suivre. Muriate a Or et de Phosphore. L'expérience est du marquis de Bullion. Il s’agit de tenir des bâtons de phosphore dans une dissolution étendue, de la renouveler à mesure qu’elle se décolore , afin de donner à l’étui qui va se former, assez de consistance pour le séparer ensuite du phosphore. Au bout de quelque temps on jette les bâtons dans l’eau bouillante, et on en retire un canon d’or pourpre, que l’on recuit, que l’on fend même dans sa longueur, pour en tirer une lame qui se prête à l’action du brumissoir. Cette lame est une espèce de réseau, dont la couleur ne s'efface que difficilement par le brunissage, à cause des vides que loutil ne sauroit atteindre. Ainsi le phosphore réduit l'or par des moyens qui méritent toujours d’être connus, et M. de Bullion, d’être honorablement mentionné pour sa découverte. Il y a, ce me semble, quelque chose de dur , d’insultant même, ä effacer, de sa propre autorité, ces faits, ces époques qui marquent sur la ligne du temps, les services rendus par ceux qui nous ont précédés dans da carrière des sciences. Que restera-t-il, en effet, à la plupart de ceux qui les cultivent, si l'on pousse la discourtoisie jusqu’à leur enlever la douceur de ces souvenirs ? seule jouissance, hélas, que la fortune trop souvent leur laisse, pour toute récom- pense de leurs travaux ! Muriate d'Or. M. Thenard dédaigne de rapporter un fait imprimé qui mérite pourtant d’être connu; le voici : une feuille d’or battu, jetée dans ET D'HISTOIRE NATURELLE. 327 un flacon plein d'acide muriatique pur, s’y dissout en assez peu dé temps, et l'argent qui lui étoitællié s’en sépare en muriate; moyen d'analyse qui peut étendre les ressources de l'art. Dissolution dans l’Eau régale. Rien de moins important, sans doute, que la graduation de deux à trois onces d’eau régale dont un professeur aura besoin pour dissoudre quelques gros d’or : mais rien de plus nécessaire à connoître aussi, dans les cas où quelques-uns de nos arts se proposeroient de le faire en grand, et c’est pour eux, je pense, que la Chimie se charge d’éclaircir ces objets. M. Thenard pro- pose une eau régale de trois parties d'acide muriatique à 22°, et d’une d'acide nitrique à 40°; mais sur cent livres de ce dis- solvant, il y a peut-être vingt livres d'acide nitrique en pure Re Voici, pour se diriger dans ces essais, des données dont . Thenard auroit pu faire usage, car elles sont aussi imprimées, _Six cents parties d’acide muriatique à 222 degrés, et 200 d’acide nitrique à 40, peuvent dissoudre 144 parties d’or; mais la dis- solution conservant un excès d’acide nitrique marqué, si on y ajoute 200 parties d'acide muwiatique, de plus, elle dissoudra encore 43 parties d’or, total 187 : après quoi la dissolution ne sera plus sensiblement acide. Ces détails donnent par leur utilité, du relief à la science. Pourquoi les laisser dans loubli? J’ai donné un premier moyen de se procurer du muriate d’or pur ; le second est plus simple; on l'a eu long-temps sous la main, et on né s’en doutoit pas : il consiste à distiller la dis- solution ordinaire dans l’eau régale; l'acide nitrique passe en entier, le muriate reste seul, cristallisant en hiver et se liqué- fiant en été. On ne savoit auparavant si le sel jaune qui reste après la distillation , étoit muriatique ou nitro-muriatique. M. The- nard devoit ces distinctions à ses lecteurs. M. Thenard nomme quelques personnes comme ayant étudié principalement le muriate d’or; mais bien avant ces personnes- lä..... tant qu'à citer, la chronologie voudroit au moins qu'on donnât à chacun son rang. Nitrate d’Or. . Nous arrivons à une suite de résultats qui, avant d’avoir été vérifiés, ne peuvent pas moins que de jeter beaucoup d’embarras 328 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE dans l’esprit des lecteurs. Ce nitrate, suivant M. Thenard, est un sel permanent jaune orangé, stiptique, incapable de cristal- liser , ete. : voilà un article évidemment copié: mais dans d’autres Mémoires, M. Thenard a pu voir que de l'acide nitrique fort, et aidé de la chaleur, ne dissolvoit que fort peu d’oxide d'or, et de plus, qu’il suflisoit d'étendre cette dissolution avec de l'eau, pour la voir se décolorer, abandonner tout l'oxide, etc. Si le but d’un ouvrage est d'instruire, M. Thenard devoit donc compte à ses lecteurs, des motifs qui l’ont déterminé à préférer les faits du premier Mémoire à ceux du second, autrement ik ouvre lui-même la porte à des idées qu’il devroit écarter. Voici, par exemple, une objection qu'il auroit dû prévenir, ce me semble. Ce nitrate ayant été préparé avec un oxide d’or, est-il bien certain que cet oxide-là n'étoit pas mêlé de sous-muriate (combinaison qu’il se contente de citer sans la faire connoître)f s'est-il bien assuré qu’un pareil nitrate étoit à l'épreuve des moyens qui servent à déceler l'acide muriatique?... Et voilà, come, faute d'appliquer une critique raisonnable aux sources où l’on puise, on s’expoçe à ne propager que des incertitudes. Sulfate d'Or. Autre sel orangé stiptique, peu cristallisable, auquel on peut appliquer la même objection qu’au nitrate. M. Thenard cepen- dant ne peut pas ignorer ce que d’autres Mémoires ont avancé, que l'acide sulfurique ne dissout point l’oxide d’or; il falloit donc ou sauver ces dissonances, ou brûler le Mémoire qui cause tant d’embarras. Or fulminant. Quelques lignes sur la détonation de cet or entre les mains de Raimond-Lulle, de Kunckel, du frère de Beaumé, etc., devenoient un trait d'histoire agréable et utile en même temps, à cause des lecons de prudence qu’il renferme. Depuis le travail de M. Berthollet, qui a fait connoître que dans la fulmination le calorique met en Jeu des élémens qu’on n’avoit pas soupçonnés avant, l’on a fait, je crois, quelques pas de plus. J’ai annoncé que l'or fulminant décomposé par l'hydrogène sulfuré, rendoit exactement 73 centièmes d’or pur. On sait, d'autre part, que l'or fixe à peu près douze sur cent d’oxigène. M. Thenard auroit donc pu faire emploi de ces données qui conduisent si naturel- lement ET D'HISTOIRE NATURELLE, 329 lement à découvrir le troisième terme de son analyse; et en effet, 73 d’or plus 8 d’oxigène égalent 8r. Donc 19 d’ammoniaque consolidé dans cette combinaison, si toutefois l’oxide n’y est pas hydraté, ce qui alors diminueroit de quelque chose le rapport de lammoniaque. . On w’a point essayé, dit M. Thenard, l'action des combus- tibles sur l’or fulminant. Il n’est pas d'auteur, cependant, qui ne parle de sa réduction par le soufre, Sulfure d'Or. Voici, par exemple , un titre capable de faire froncer le sourcil à tous les professeurs de Russie. Sulfurer l’or ! ce métal qu’on ne séparoit autrefois de tous les autres, qu'aujourd'hui même, dans les aflinages de Saint-Péters- bourg, on ne précipite de l’argent auquel il est allié, que parce qu’on le tient pour incapable de sunir au soufre... Tout cela doit causer de la surprise, ou bien M. Thenard n'auroit par- couru ni les chimistes anciens, ni même ceux de notre âge. L'opération du placmal, la purification par le sulfure d’an- timoine des siècles passés, la désoxidation de l’or fulminant par - le soufre, etc. , n’étoient pourtant fondées que sur cette opinion. + Le sulfure d’or, M. Thenard le cite, tome I, pag. 365. Je r’ai garde de contester un fait qui, mieux vu aujourd'hui, pourroit être vrai; mais pour le faire admettre dans la Chimie francaise, au moins falloit-il des autorités plus imposrntes que celle du Mémoire où M. Thenard a trouvé ce sulfure. Protoxide et Protomuriate d'Or. , Lorsque M. Thenard parle de protoxide et de protomuriate ; c'est-à-dire, de bases et de combinaisons qu’on n’a pas connues jusqu'à ce moment, il doit bien penser que pareille annonce est faite pour éveiller un intérêt tout particulier sur ces objets. Il est donc alors très-naturel de se demander quelles différences, quelles analogies y aura-t-il entre ce nouveau muriate et celui qu’on connoît déjà ? De là, une suite de questions toutes dictées, en quelque sorte, par le muriate ancien. Les voici : 1°. Le protomuriate est-il cristallisable, est-il déliquescent ? Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814, Vy 830 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 29 Sa couleur et sa saveur sont-elles analogues à celles du muriate ancien?! 39 Teint-il la peau en violet ? 49 Donne:t-il du pourpre avec l’étain ? 5° Donne:t-il de or fulminant avec l’'ammoniaque? # 6° Se dissout-il dans léther , dans les huiles volatiles? 7° L’oxide qui en fait la base n’a-t-1l d'existence que celle d’un moment, comme M. Thenard l’assure tome IT, pag. 111? et alors, comment sy est-on pris pour fixer à 4,026 son oxi- gène, de manière à mériter confiance ? 8° Et enfin, s’il ya des moyens certains pour obtenir le proto- muriale, M. Thenard ést-il bien convaincu que cette derni- ligne, tout juste moitié de la ligne 18, qu'il accorde à sa des- criplüion, pag. 594, suflira pour instruire quiconque voudioit s’en procurer ? il semble pourtant qu’un nouveau degré d’oxida- tion, qu'unecombinaison toute neuve, exigeoient quelques détails de plus, ou bien il falloit renvoyer au Mémoire d’où l'on a tiré ces faits. Et pour l'hydrate, ou gelée d’or brune, que M. Thenard cite à la dernière colonne de son tableau des oxides, pag. 32, cela demandoit aussi quelques lignes de lucidation. Il résultera de tout ceci, je crois, que nous n'avons encore qu’un oxide d’or passablement connu, qui même pourroit l'être mieux, et que le protoxide, le protomuriate, l’hydrate en gelée brune, ne sont point encore suffisamment établis pour qu’on puisse les admettge, M. Thenard a oublié de parler du dorage au bouchon, ou de l'emploi qu’on fait pour cela des cendres pourpres qu'on Ure des chiffons trempés dans la dissolution d'or, desséchés, puis brûlés ; mais il eût été plus essentiel, je crois, de prévenir lor- fèvrerie contre les pertes d’or auxquelles elle est journellement : exposée par l'usage ridicule de ces sauces qu’on fait éprouver aux bijoux, telles que, alun, sel marin, tartre, nitre, je crois, d'où résulte une véritable eau régale. (Foyez Vauqueln.) Oxides de l Antimoine. La revue suivante va nous mettre à même de juger que M. Thenard ne fait peut-être point assez usage de la critique, quand il s'agit d'admettre des oxides nouveaux. ET D'HISTOIRE NATURELLE. : 331: « On soumet, dit:il, au courant de la pile, de l'antimoine en # poudre, on continue l'expérience pendant plusieurs jours, au » bout desquels on sépare par le lavage, une poudre bleue grisâtre, plus légère que l’antimoine, qui devient d’un gris » noirâtre par la dessication, et qui n’est autre chose que le » protoxide de ce métal; il est à 4,65 sur cent, pag. 90. » Voilà un nouvel oxide : jy crois, non parce qu’on vient de le dire, maïs parce qu’on va le prouver. Voyons maintenant si les moyens de l'obtenir sont assez évidens pour produire immé- diatement cette conviction-là. Dès les premières lignes de sa description on trouve déjà matière à des doutes. Il absorbe, dit M. Thenard, le gaz oxigène à l’aide de la chaleur, et passe probablement à l'état de tri- toxide. Probablement ! l'expérience n’en a donc pas été faite? et en second lieu, pourquoi s’arrêtera-t-il, ce protoxide, au degré du tritoxide, plutôt qu'à ceux du deutoxide et du tétroxide? Tout lecteur qui en est aux élémens, n’entendra point cela, pas même ceux qui n'y sont plus. 20. La couleur bleuâtre du produit, qui est tout justement celle de antimoine étendu par un corps blanc, donnant à craindre qu'une portion de métal n’y soit restée, s’est-on assuré, par exemple, que ce produit ne conserve pas en effet un reste d’an- timoine, qui m’auroit fait qu’abaisser l’un ou l'autre des deux oxides connus (22 et 30) au terme d'infériorité (4,65) que M. Thenard lui assigne ? On n’en sait rien. 3°. Si l'application de la pile eût été prolongée jusqu’à oxider complètement tout ’antimoine qu’on soumit à l’expérience, est-il certain encore, qu’au lieu du nouvel oxide, l’on n’auroit pas trouvé l’un ou l’autre de ceux qu’on connoît déjà? On n’en sait encore rien. 4°. Et enfin, n’y aurat-il de protoxide que pour les labora- toires qui ont des piles? Voilà, ce me semble, des objections qui se présentent au remier abord; et véritablement, tant qu’on n’en donnera pas a solution, il sera, je crois, permis de douter que laction de la pile sur l’antimoine, produise du protoxide exclusivement. Mais les objections ne se bornent point là. Annoncer un oxide nouveau, ce n’est pas, comme je l’ai dit plus haut, le démontrer: et l’'admettre aussi sur parole, n’est pas chose plus sûre. Encore Vv 2 332 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE faudroit-il le voir figurer au moins dans quelques-unes de ces combinaisons , à l’aide desquelles on a coutume de se convaincre qu'il est suë generis et non pas quelque mélange; qu’il diffère des autres de sa famille, s’il y en a, qui le représentent au besoin , s’il n’est pas aisé de se le procurer; qui en contiennent en un mot, la légitimité, comme cela est en principe depuis Lavoisier jeté nous, tant pour les oxides qui servent de fon- dement à la doctrine de l’oxidation aujourd'hui, que pour tous ceux qu’on découvrira dans la suite. Encore dénuée de cette au- thenticité-à, la Chimie française ne s’empressera donc point d'admettre le protoxide, parce que M. Thenard, avant toutes choses, auroit dû, je crois, le reproduire par les autres moyens du laboratoire, afin que chacun pût s’en convaincre, prévenir les objections qu’on pourroit y opposer, et s’en rendre le garant, s’il faut dire, comme il s’en est fait l'interprète. C’est bien assez pour la science d’avoir à lutter sans cesse contre les incertitudes rebutantes d’une légion d’oxides dont les déterminations restent toujours en souffrance, sans avoir encore à se charger de ceux ui n'ont pour se faire recevoir, aucun titre de créance; et . Thenard, l’un de ses plas distingués collaborateurs en ce moment, ne voudroit pas lui-même qu’elle abandonnât, dans cette circonstance, une méthode aussi sage, pour admettre, sur parole seulement, des produits que la seule expérience a le droit de faire passer. Occupons-nous maintenant de l’examen des autres oxides de M. Thenard ; mais avant tout, rappelons ici état où en étoient nos connoissances sur lantimoine avant que M. Thenard ne s’en occupât. Et d’abord, au silence que garde M. Thenard sur bien des points de théorie que quelques chimistes n’ont pas mal éclaircis, l'on seroit tenté de croire qu’il n’a eu aucune connoïissance de leurs travaux. Malgré cela, pourtant, on reconnoît , au travers de son exorde sur les oxides d’antimoine, quels sont les auteurs dont il s’est aidé, quelles sont les citations dont il wa pas voulu surcharger son texte. Par exemple, M. Thenard dit : « Les uns » ont admis deux oxides, les autres un plus grand nombre, » mais M. Berzelius en reconnoît jusqu’à quatre. » M. Berzelius ne pouvant qu'être flatté de l'association suivante, il me semble que M. Thenard auroit pu citer aussi M. Proust au lieu des uns, et M. Berthollet au lieu des autres, puisqu’en effet ces deux chimistes sont les premiers qui aient soumis la nature des ET D'HISTOIRE NATURELLE. 333 oxides à la discussion : c’est même à partir de cette époque que l'on a vu paroître une foule de travaux dont l’objet a été d’é- tendre ces premieres recherches à tous les oxides en général ; car avant eux, en eflet, l’attention ne s’étoit encore portée que rarement sur cette partie de la Chimie métallique. On se rap- pellera même à ce sujet, quelle fut la surprise de Fourcroy , quand des observations sur son système, venues d’Espagne, lui firent remarquer que le sublimé corrosif et le mercure doux avoient chacun pour base des oxides à diflérens degrés d’oxidation. Premier Oxide. J’ai nommé oxide mineur V'antimoine oxidé à 22 sur cent, servant de base au muriate ou beurre d’antimoine, à l’oxide que procure l'acide sulfurique , au tartrite antimonial , à l’oxide hydro- sulfuré, ou kermès, au verre, aux foies, aux safrans, aux rubines, etc., dans lesquels, en effet, on ne trouve que cet oxide, dont voici d’autres caractères. Il fond à une chaleur rouge obscure, et prend en refroidissant, l'aspect d’une masse jaunâtre, opaque, nacrée, pesante, fragile et rayonnée comme certains fragmens irréguhers de zcolithe. Avant la fonte, on le désignoit autrefois sous le nom de poudre d'Algarroti, médecin napolitain; mais c’est Lémeri qui en re- connut la fusibilité, et c’est de son Traité sur l’antimoine que J'ai tiré l’oxide mineur. Cet oxide existe certainement dans la nature. J’étois à Madrid quand on annonça à Paris, l'analyse d’une mine nouvelle d'u blanc de perle nacré, excessivement fusible , qu'on prit pour du muriate d’antimoine. Depuis mon retour, j'ai oublié de m’en informer. On le connoîtra, je pense, à l'Ecole des Mines : mais aux caractères qu’on vient de voir, je ne doute plus de l’exis- tence de l’oxide mineur dans la nature. Second Oxide. Si on traite le précédent avec l'acide nitrique, on le voit dé- composer cet acide avec beaucoup de violence; et alors il s'élève de 22 à 30. L’ancienne Chimie le nommoit dans cet état bezoard minéral. Arrivé à ce second terme, l’oxide majeur n’est plus propre au tartrite, au kermès, au beurre d’antimoine. Loin de cela même, ilabandonne l'acide maria qui l’a dissous, pour cris- 334 : JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE talliser en lames blanches aiguillées qui ne retiennent pas d'acide, et qui ne diffèrent plus alors de l’oxide par combustion, ou des feurs d’antimoine. Bergmaun avoit assez bien distingué ces deux oxides, et Scheele l’avoit mis sur la voie, quand il proposa le précipité séparé du beurre d’antimoine, comme pouvant servir exclusi- vement à la préparation du tartrite ; mais quelques restes d'acides et du mercure doux en altèrent souvent la pureté. L'oxide majeur s’est trouvé en abondance à Tornavaca en Galice ; 1l provient évidemment de la transformation spontanée des sulfures, puisqu’outre qu'il en conserve souvent des restes au centre, il en a encore la forme, le volume primitif, l’arran- gement aiguillé, etc.; c'est même du peu de différence qu’il y, a entre le poids du soufre, du sulfure et celui de l’oxigène de loxide majeur, que j'ai cru pouvoir déduire cette conservation de forme entre deux corps qui ont d’ailleurs éprouvé d'aussi grands changemens. Cet oxide, M. Thenard ne l'a point vu, mais il présume qu’il existe probablement à la surface de quelques fragmens de sulfure, pag. 91. Ne l'ayant pas analysé, il juge aussi que c'est un triloxide.... Ce minéral enfin, d’un blanc jaunâtre, pourvu de toutes les qualités d’un oxide passé par lacide nitrique ,a été mis à profit, en chauffant au réverbère, des briques de mine et decharbon pulvérisées. L’antimoine couloit et on le mettoit dans le commerce. Ce même oxide fut encore découvert par Fernandez , dans une mine de mercure trouvée au canton de la Croix (la Creu, en valencien). Ce minéral, extrêmement curieux, étoit composé d’oxide rouge de fer, d’oxide majeur d’antimoine, de carbonate de cuivre et de cinabre. 11 provenoit de la décomposition d’un minéral, également trouvé dans le même endroit. Celui-ci, come posé de quatre sulfures parfaitement fondus les uns dans les autres, éprouvoit une métamorphose qui en changeoit trois en oxides, tandis que celui de mercure se conservoit à l’entier. J’ai vu peu de minéraux plus intéressans sous les rapports minéralo- giques et chimiques. Il résulte de ceci, qu'on connoissoit déjà deux oxides : Pun pouvant servir de base à une multitude de combinaisons, d’au- tant plus intéressantes, qu’elles sont presque toutes d'usage en médecine. L'autre, au contraire, ne pouvant y convenir, et com ET D'HISTOIRE NATURELLE. 335 prenant sous lui, 1° l’oxide par combustion, ou fleurs d’antimoine; 2° l’oxide appelé diaphorétique; 3° les oxides par l'acide ni- tique; 4° et'par l’eau régale ; 5° enfin, l’oxide naturel de Galice, tous impropres aux compositions. du beurre, du tartrite, du kermès, etc. Voyons maintenant le choix que M. Thenard va faire entre les difilérens oxides et ceux que M. Berzelius a dis- tingués depuis mon travail. M. Thenard reconnoît d’abord un protoxide, un deutoxide, un tritoxide et un tétroxide. 1°. Le premier, on a vu ce qu’il convenoit provisoirement d’en penser; mais ce qui pourroit embarrasser des lecteurs consé- quens, c’est que M. Thenard, dans son premier volume, a aussi fait un protoxide des fleurs d’antimoine! pag. 262. 2°, Le deutoxide, c’est notre oxide mineur, mais séparé de tous les caractères que nous lui avions assignés. 30. Le tritoxide, c’est notre oxide majeur , ou le nitrique, mais abaissé à un terme moyen entre lé deutoxide et le té- troxide, par deux procédés que M.Thenard n’a vraisembiablement point éprouvés, et auxquels il est par conséquent difficile de croire qu’il ait pu donner sa confiance. Voici le premier. Il consiste à précipiter par les alcalis une dissolution d’anti- moine dans l'acide nitro-muriatique, mais une dissolution faite avec excès de cet acide, et soutenue de l'application de la chaleur, tome IT, pag. 552 et 578. L’oxide recueilli se trouve n'être point au zaximum (37,2), mais à 27.9 seulement, malgré deux circonstances de pratique qui sembloient devoir garantir le plus haut degré d’oxidation. Il n’est pas facile de concevoir effectivement, que les deux acides qui composent le nitro-mu- riatique, c’est-à-dire le muriatique oxigéné et le nitrique (celui-ci se trouvant toujours en excès, afin d’assurer la plénitude d’oxi- génation du muriatique), et spécialement aidés de calorique, n'aient pas porté l’antimoine à son znaximum 37,2.... L’antimoine feroit donc une exception particulière entre tous les métaux, et cet oxide-là auroit donc encore aussi le pouvoir de décomposer de nouvel acide muriatique oxigéné, .ou de nouvel acide nitrique! Ce résultat, qu’on ne conteslera point, méritoit pourtant que M. Thenard s’en assurât au moins pour en sauver l’invraisemblance. Au reste, accordons à M. Thenard que son troisième oxide 336 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ne soit qu'à 27,9, comme il l'annonce, et passons à l’examen du second procédé. Celui-ci consiste à exposer à une chaleur rouge le tétroxide, ou l'oxide par l'acide nitrique; et de lui-même alors, cet oxide s’abaisse au degré de tritoxide; c’est-à-dire , que par un accord extrêmement singulier avec le premier procédé, le second arrête aussi le tétroxide juste à 27,9! Voilà, dirai-je encore, un ré- sultat qui, comme le précédent, méritoit d’autant mieux une garantie particulière, que de sa nature il amène une suite de questions qui n'ont pu manquer de ‘s'offrir aux réflexions de M. Thenard, comme elles s’offrent à ses lecteurs. Si, par exemple, une chaleur rouge abaisse à 27,9 l’oxide de 37,2, pourquoi celles qui croissent d’intensité , telles que les chaleurs qu’on appelle rouge cerise, rouge vif, rouge rose , rouge blanc, etc., ne l’abaisseroient-elles pas davantage , comme à 22 par exemple, à 17, à 10, à 7, etc.? pourquoi m’alongeroit-on pas, par ce moyen, la série des oxides de l’antimoine, de ma- nière à le faire correspondre à chacun de ces degrés, et même à remplir les intervalles par autant d’oxides fractionnaires, qui ramèneroient naturellement au protoxide, et après tout enfin, au métal lui-même? Cela enrichiroit tout de suite la Chimie d’une dixaine d’oxides de plus, seulement pour l’antimoine, et fortifieroit d’autant, un système dans les principes duquel il entre de proclamer, même les oxides qu’on n’a paint encore pu se procurer. [Voyez la note (a), pag. 70, tome II.] J'abuse de mes avantages, peut-être, quand je cherche des objections aux oxides intermédiaires que M. Thenard propose d'obtenir par voie de calcination ; car on en trouve de si fortes déjà dans son ouvrage, et notamment aux pages 200 et 210; qu'en les rapprochant il est bien diflicile de penser qu’elles n’ef- facent pas aussi de leur côté, la confiance qu’on seroit tenté d'accorder au procédé qui produit ces oxides. Et comment compter aujourd'hui pour de vrais oxides, pour des oxides sui generis, pour des: oxides réduits par contact , et au centred’autresoxides faconnés en forme decreusets? M. Thenard appelle lui-même l’attention de ses lecteurs sur ces réactions simultanées, sur celles que l'introduction des gaz charbonneux dans les creusets peut y occasionner; et si l'observation qu'il en fait à l'égard des oxides du niquel et du plomb, plus disposés à se réduire que d’autres, paroït fondée, connnent alors, ne seroit-elle LÉ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 237 seroit-elle pas dans toute sa force, quand il s’agit d’oxides qui ne se réduisent qu'à une haute température, se trouvent par cela même, plus exposés au contact des creusels et à Pimpression des gaz charbonneux? Par des températures basses, bien des réductions s’obtiennent sans être influencées par les creusets et par leur perméabilité; mais quand il agit de températures, ronge vif, rouge blanc, etc., c’est alors que la Chimie ne voit pas dans ses creusets et ses retortes de terre, toujours criblés de mille fissures imperceptibles, que des cribles ouverts à tous les gaz réduisans, des cages, en un mot , où l’on ne trouve plus d’obs- tacle à la combustion du charbon, du diamant, des métaux, de leurs sulfures , à la réduction de leurs oxides, etc., etc. Si M. Thenard veut prendre la peine de revoir.les travaux de Darcet au feu violent, ceux de Achard, de Pott, etc., il ytrouvera, je pense, bien des exemples d’oxides qui se sont abaissés , ou qui ne sont entrés en fonte que par l’eflet de semblables réactions. Encore une lecon utile en ce genre, c’est la prétendue décom- position de l’eau dans une retorte de terre, bien conditionnée d’ailleurs. Cette distillation produisit, en eflet, de tels gaz, et en si grande quantité, que l’auteur erut d’abord avoir découvert un procédé bien supérieur à celui de Lavoisier, On trouvera cette anecdote dans le Journal de Physique, mais je ne me rappelle pas l’année. 4°. Enfin le quatrième oxide de M. Thenard, ou le tétroxide, c’est, comme nous l’avons dit, celui qu’on obtient de l’antimoine par l'acide nitrique, Oxides douteux. Les suivans n’ont point été compris dans les descriptions de M. Bérzelius/ aussi ne sont-ils plus maintenant rs des sujets d'incertitude et de tâtonnement pour M. Thenar 1°. Par exemple, les fleurs d’antimoine qui sont un oxide ma- jeur , puisqu'elles ne décomposent point l'acide nitrique , ont d’abord été le protoxide de M. Thenard ; mais dans la note de la pag. gt, où il avoue son embarras, M. Thenard hasarde de les placer au moëns parmi les tritoxides. . 20. L’antimoine diaphorétique a aussi pour base l’oxide ma- jeur; c’est un point déterminé par la nature même de l’action du nitre sur les métaux. M. Thenaid, cependant, ne caractérise cet oxide en aucun endroit de son ouvrage. Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814. Xx 338 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 3°, Sulfate d’antimoine; sa base est au minimum, cela est connu. M. Thenard ne détermine rien non plus sur elle. 4°. Le kermès. M. Thenard reste indécis sur sa nature. Sa base, dit-il, est probablement l’oxide mineur ( deutoxide ). Ce doute a lieu de surprendre ; il y a des années, cependant, que ce point là est éclairci. 52. Verre d'antimoine : c’est une des combinaisons les plus cu- rieuses, en ce qu'elle fournit à la théorie l'exemple peu com- mun d’un sulfure métallique dissous dans son oxide mineur ; ce qui produit une masse transparente, jaune, vitreuse tant que le sulfure n’y est qu’en petite quantité, mais qui commence à devenir opaque aussitôt que le sulfure augmente. Cette combi- naïison s’endurcit par la fonte, en ce qu’elle dissout la silice des creusets, comme l’a fait voir M. Vauquelin. M. Thenard en fait un oxide sulfuré, au premier volume, pag. 383, tandis qu'aux pag. 13 et 371 du second, il proteste contre la sulfura- tion des oxides. Au reste, sulfuré ou non, puisque M. Thenard admet quatre oxides, il pouvoit au moins avoir spécifié quel est celui qui sert de base au verre d’antimoine. 60. Le safran des métaux est encore un oxide sulfuré pro- bablement uni à un peu de silice. On ne sait pourquoi M. Thenard = . E : . >» , met si souvent au probable ce qu’il sait bien avoir été prouvé. 7°. M. Thenard ne met aucune différence entre le verre et le safran d’antimoine; de sorte que la description qu’il donne de lun, pag. 383, tomeT, convient à l’autre, pag. 516, tome II. Le fabricant auroit pu la lui indiquer; elle consiste à calciner moins long-temps le sulfure ; mais s’il a passé le point qui donne le safran, il y ramène son oxide en:jetant daus le creuset du sulfure d’antimoine. La théorie que j'ai donnée de ces compo- sitions et leur pratique, se correspondent parfaitement. Quant à leur nature , les travaux de Vauquelin et de Proust pouvoient avoir fait connoître à M. Thenard , que puisqu'elles donnent toutes,de l'hydrogène sulfuré avec les acides, 1l faut bien qu'il y ait là du métal, car il sait qu’un oxide et du soufre ne produiroient pas ce résultat. On trouve, par exemple, dans je ne sais quel auleur, trois expériences sur l’oxide métallo-sulfuré, on ne peut plus dignes de l'attention des chimistes, en ce qu’elles manifestent une con- cordance admirable entre les résultats; malgré la grande dif- ET D'HISTOIRE NATURELLE, 339 Férence des moyens qui les ont produits : les voici. On jette d’égales quantités de sulfure d’antimoine dans trois pelitesretortes; à la première on ajoute de la potasse pure, à la seconde, de lacide sulfurique, à la troisième, de l'acide nitrique, puis on distille jusqu’à donner une chaleur rouge obscur. Les trois pro- duits sont, ...: du safran ou oxide métallo-sulfuré opaque pour la potasse, le même produit pour l'acide sulfurique, le même produit pour l’acide nitrique.... Dans le premier on retrouve de la potasse, dans les deux autres , aucune trace d’acides. Je ne me rappelle plus dans quelle proportion on emploie ces derniers, mais elle est telle, qu’elle ne suflit point à l’oxi- Se totale, autrement on n’y trouveroit plus que des oxides ancs. 8°. La sulfuration des oxides, toute désavouée qu'elle est par les principes de M. Thenard , n’en revient pas moins au sujet des mines antimoniales d'argent. L’argent rouge, pag. 285 ,t.1, et pag. 725, tome IL, dit:l, est un oxide d’argent et d’anti- moine sulfurés. M. Thenard ne lit donc pas! On a démontré depuis long-temps, que dans la nature comme dans l'art, il n’y a ni oxide d'argent, ni oxide d'antimoine sulfurés. Que pensera la Minéralogie, quand elle verra tous ces points de doc- tine replongés dans l'incertitude où les avoient laissés nos an- ciens auteurs? Les travaux des chimistes français pouvoient avoir été là - dessus fort utiles à M. Thenard; mais au peu de cita- tions qu'il en fait, il faut qu'il ne les ait pas jugés dignes de sa confiance. | 9°. M. Thenard fait du sulfure d’antimoine un protosulfure ; on ne sait pourquoi, puisqu'il ne reconnoit encore ni deuto, ni tritosulfure; c'est donc bien inutilement surcharger sa no- menclature. 10°. Je ne sais où M. Thenard aura lu que l’on commencoit à désulfurer l’antimoine avec de la fonte de fer. Dans les siècles passés, oui, pour donner aux pharmacies du régule d’antimoine martial, mais pour le commerce on s’en gardera bien; premie- rement , parce que, quelque bien proportionnée qu’eût été la quantité du fer Gin aie sortiroit pas moins ferrugineux, j'en ai l'expérience, à cause de la grande aflinité de ces deux métaux, et alors il n’auroit ni la blancheur, ni la /euille de Jfougère, qui est un signe certain de sa pureté; 2° parce qu’il ne seroit plus aussi propre à l’alliage qui fournit les caractères Xx 2 340 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE d'imprimerie; 3° parce que dans les pharmacies il donneroit de l'antimoine diaphorétique rouillé ou ferrugineux. Et quant à l’antique procédé par lequel M. Therard croit que dans les laboratoires on se procure encore l’antimoine , tome IT, pag. 715; la Chimie auroit, en vérité, fait bien peu de progrès parmi nous, si, au lieu de celui des fabriques, qui nous le don- nent à si bon marché, l’on alloit brûler son salpêtre, son soufre, son sullure, son charbon, ses creusets et son temps à pareille opération. . Résumé. On trouve au bas du tableau des oxides, pag. 33, deux re marques de M.'Thenard, qu’il est temps enfin dé rapporter, parce qu'elles vont nous donner la juste mesure de confiance qu'on peut devoir au système d’oxidation, que ce professeur admet aujourd'hui, « M. Berzelius, dit-il, n’a pas toujours déterminé directement » la proportion des oxides, il l’& conclue quelquefois des lois » auxquelles semble être soumise la composition des sels. » S'il en esl ainsi, que de choses dans ce peu de mots, contre un pareil moyen d'évaluation ! Plus bas, M. Thenard ajoute : « Les analyses d'oxides, faites par d’autres chimistes, sont » le résultat de l'expérience. » Que de choses en faveur de celles-ci! D'après ces deux modes d'évaluation, déjà jugés par M.Thenard lui-même, on peut donc assurer que le premier est loin d’ins- pirer autant de confiance que le second. Par quelle bizarrerie maintenant M. Thenard, qui n’avoit pas même la liberté du choix, puisqu'il n’a vérifié ni d’un côté, ni de l’autre, a-t-il pu donner la préférence à celui que sa raison intérieure repoussoit aussi évidemment ? Tranchons le mot, et disons, avec toute la franchise de la vérité, que M. Thenard , affecté d’une préven- Uon injuste, laisse apercevoir sur les travaux de cenx qui l'ont enrichi de leurs lumières, des opinions contre lesquelles les siennes propres auroient dû le temir en garde. Par eyemple, proposer à l'École francaise un système d’oxi- dation, dont une partie repose, comme il en convient, sur des lois qui semblent ne pas soumettre l’autre à la discussion , au moins pour sassurer de la valeur du reste, substituer enfia ET D'HISTOIRE NATURELLE. J4t dans l’enseignement, pareilles hypothèses aux résultats de l'ex- périence ; tout cela n’éloit pas déjà se mettre dans une positioi bien favorable à l’assentimeut que M. Thenard ambitionnoit d'obtenir; mais n'est-ce pas achever de détruire tout espoir d’y réussir, toute confiance, en un mot, que de chercher à soutenir ce système, par des moyens que la raison, que la délicatesse même....,la plume tombe des mains quand on voit ces choses... Voici les faits.... C’est maintenant M. Thenard que j’en fais juge. On trouve dans son ouvrage toutes les évaluations que M. Berzelius a données sur l’étain, sur l’antimoine, etc. , et cela est fort juste ; mais celles que M. Proust donna aussi sur ces objets, bien avant M. Berzelius, où sont-elles...? Quand on ne veut pas se constituer juge, est-ce donc la peine de se faire rapporteur infidèle ? Finissons, et récapitulons, au nom de la science, les progrès qu'elle va devoir à ce système. D’après le travail de M. Proust, nous avons deux oxides que l’art et la nature s'accordent à nous offrir. Ces deux oxides sont toujours faciles à reconnoître, à rectifier même dans leur éva- luation, au cas où l’auteur n’auroit pas atteint le point mathé- malique qu'il cherchoit ; et à dire vrai, c’est à quoi spécialement M. Thenard auroit dû s'attacher avant tout, faute de quoi l’on n’a aulorité en Chimie, ni pour rejeter, ni pour admettre. Mais ce qui pourra bien n'être point aussi facile à éclaircir, ce sera de savoir à quoi s'en tenir maintenant dans nos écoles, sur cette foule d’oxides qui commencent à surcharger l'horizon. Que fera- t-on, par exemple, des quatre oxides ,de M. Thenard , des deux oxides de M. Proust, puis enfin de neuf autres oxides enveloppés des incertiludes’ qui ont arrêté M. Thenard, tels que ceux du kermés, des fleurs d’antimoine, du sulfate, de l’antimoine dia- phorétique, du verre, base du tartre émétique, des foies, des sa- frars, de l’oxide natif de Galice, des prétendus oxides sulfurés naturels, de ceux qui entrent dans les mines d'argent , anlimo- * niales, de, etc.? Voilà donc, si je ne me trompe, quinze oxides à débrouiller ! confusion désespérante, si M. Thenard veut en. convenir, véritable currus 1riumphalis à désembourber pour ceux qui viendront après nous! On trouve dans l'ouvrage de M. Thenard, pag. 32, tome II, que M. Berzelius a le premier découvert que les oxides dans leur composition, étoient soumis à des lois constantes. Oh! M. Thenard! et cetle découverte aussi! lisez les Journaux de 342 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Physique , et vous y trouverez que le premier aperçu de ce travail date rigoureusement de la Lettre où l’on fit remarquer à Four- croy (1), que le mercure, dans son oxidation, étoit assujéti à des lois constantes de proportion : qu'elles donnoient, par exemple, ñ pour le premier oxide, et 77 pour le second ; que depuis cette époque , avant laquelle on ne découvre nulle trace de cette ob- servation, les Mémoires qui l'ont suivie sur les deux bleus de Prusse, sur les deux oxides du fer, sur ceux de l’étain, du plomb, du cuivre, de l’antimoine, du nikel, du cobalt, etc.,etc., sur la sulfuration de ces métaux, de leurs oxides, etc., n’ont eu d'autre objet que celui de fortifier de plus en plus cette grande Vérité, l’une des colonnes principales de la Chimie moderne au- jourd'hui; que si M. Thenard n’avoit pas le loisir de compulser les registres de la science, il pouvoit s’en rapporter sur ce point, à MM. Berthollet, Laplace, Delamétherie , Chaptal, Vauquelin, Morveau, Deyeux, Gay-Lussac.., et à M. Berzelius, lui-même, qui certainement ne partagera point son opinion. Beaucoup de choses manquoient, sans doute, à ce premier travail : il convenoit d’abord de s'assurer de ses bases, on l’a fait; et ce nouveau point de doctrine a triomphé de toutes les objections. Il falloit ensuite l’étendre aux autres métaux, per- fectionner les moyens, et tâcher surtout d'approcher de plus près des termes d’oxidation que son auteur avoit annoncés pour quelques-uns. C’est.aujourd’hui le centre où aboutissent, en eflet, les eflorts de tous les chimistes; par exemple, les recherches qu'on poursuit sur les nouveaux métaux de la potasse, de la soude , etc., sur ceux qu'on a découverts dans la mine de platine, se rattachent visiblement à cette doctrine par un point essentiel, par une concordance qui éloigne plus que jamais toute idée de pluralité dans les points de leur oxidation; que leur oxidation à terme fixe fortifie, par conséquent, de la manière la plus satisfaisante, Parmi les chimistes qui continuent ce travail avec le plus de succès, l’on doit citer M. Berzelius ; sa constance et ses talens l’étendent par les développemens les plus heureux. C’est, au reste , la marche de toute découverte; chacun y ajoute une perfection, chaque jour y apporte son tribut. Malgré tout cela, néanmoins , c’est en France qu’on l’a annoncée pour la première fois, et le laboratoire du Collége d’Artillerie de Ségovie fut son berceau. Craon, 15 septembre 1814. (1) 1801. * 1 : ; Cahier d'août, pag. 125, lig. 3, zinc, lisez, nikel. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 343 DISCOURS SUR LES PROGRES ET L'ÉTAT PRÉSENT DE LA CHIMIE ANIMALE, PRONONCÉ A L'ACADÉMIE ROYALE DESSCIENCESDESTOCKHOLM, Par J. BERZELIUS, Professeur de Médecine , de Pharmacie, etc. Traduit de l’anglais, avec des Notes, Par H. GAULTIER pe CLAUBRY (*). L’ACADÉMIE Royale des Sciences m’ayant honoré d’une marque si distinguée de sa confiance, en me nommant président pour les six derniers mois, je n’ai qu’un regret, c'est que n'étant point accoutumé à remplir cette place, je n'ai pu justifier encore le choix qu’elle a fait, malgré mon ardent desir; mais Je me suis toujours flaité que l'Académie, connoissant mes bonnes 1n- tentions, suppléeroit à ce qui me manqueroit de talens, et mon espérance n’a pas été trompée. En cédant aujourd’hui la place que j'ai remplie, à un savant (**) qui, par son âge, son expe- rience et ses connoissances, est beaucoup plus digne que moi de cette distinction, je profiterai de cette circonstance pour présenter à l'Académie quelques remarques historiques sur une science dans laquelle, par beaucoup de travaux, J'ai acquis de l’expérience et quelques connoissances, la Chimie des corps D. 0 Air ju dat > mange bee den, pb sq: - Scale» Mt: cime ALORS a ( Les notes du Traducteur sont renvoyées par des lettres à la fin de ce Discours. d (@*) William de Hisinger, 344 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE animaux, el JjauraiJ' honneur de lui faire connoître brièvement les progrès qu'a faits cette science pendant les dernières années. Les faits que l'on a trouvés sont intéressans, et leur connoissance peut étre utile à chacun, quoique la Science, dans ses détails, ne soit susceptible d'être suivie que par ceux qui font de cette branche de la Ghimie leur étude particulière. Je ne vous ferai pas l’histoire de la Chimie animale pendant lessiècles passés : car le récit des erreurs des anciens et des progrès lents que firent chez eux les sciences , intéressant dans Phistoire de l’homme, n’est que de très-peu , ou méme d'aucune importance, quand on examine l'état présent d’une science quelconque. Les anciens cherchérent de bonne heure à expliquer les phé- nomènes de la nature vivante, d'après les observations faites sur la matière inanhnée : de là se formèrent en médecine plu- sieurs sectes particulières, qui alors, comme à présent, virent leurs théories renversées par l'expérience. La composition très- compliquée des matières animales, et les produits innombrables que lon peut en tirer par divers moyens, ne devoient presqu’im- manquablement produire, dans l'enfance de la Chimie, aucune analÿse exacte de ces mêmes matières. Ce ne fut qu'après les découvertes de Black, et l'explication lumineuse de quelques phénomènes qui avoient été jusqu'alors inconnus ou méconnus; : ce ne fut qu'après les expériences exactes et nombreuses de Scheele et de Priestley, et l'établissement de la nouvelle théorie, que Lavoisier , aidé du travail de ses prédécesseurs, donna pour la Chimie, qu'il fut possible de tenter l'examen de l’économie intérieure du corps animal avec quelque espérance de succès. Les faits découverts par Black et Lavoisier, furent appliqués à la Chimie animale, quelquefois, il est vrai, avec quelque résultat favorable, mais souvent avec une confiance plus grande dans l'application générale dé Ja nouvelle doctrine, que l’expé- rience ne l’a prouvé depuis. C’est de cette iranière que furent produits plusieurs ouvrages sur ce sujet, dont l’enseignement constilua l'enfance de la Chimie animale. Les parties constiluantes des corps animaux sont quelquefois les mêmes que celles que l'on trouve dans la matière inorganique: elles retournent par degrés à leur état inorganique, en partie pendant la vie, et en partie lorsque le corps, après la mort, éprouve ses derniers changermens. Indépendamment de cela, il existe des procédés entre les matières inorganiques et les partiesélé, mentaires ET D'HISTOIRE NATURELLE. 345 ménfaires des corpsanimaux , qui n’ont quelquefois pas la moindre ressemblance avec ceux du règne inorganique. Nous pouvons con- sidérer les corpsanimaux commeun instrument qui, par la nourri- ture qu'il recoit, rassemble continuellement des matériaux par un procédé chimique, dont le principal objet est sa propre conser- vation. Mais avec toutes les connoïssances que nous possédons sur les formes du corps, considéré comme un instrument, et sur le mélange et les rapports des élémens du corps les uns avec les autres, cependant la cause de la plupart des phénomènes que présentent les corps animaux, est tellement cachée pour nous, que certainement on ne la connoîtra jamais. Nous donnons à cette cause cachée le nom de /orce vitale ; et comme plusieurs autres qui avant nous ont envain porté leur attention sur ce point, nous ne faisons usage de ce terme que pour fixer nos idées. Ce pouvoir de La vie n'appartient pas aux parties cons- tituantes de notre corps, et nous ne devons le considérer ni comme un instrument, ni comme un simple pouvoir, mais comme le résultat des actions mutuelles des parties du corps les unes sur les autres ; résultat qui varie avec chaque opération, - et qui souvent, par de petits changemens ou quelque obstacle, cesse entièrement. Quand nos livres élémentaires nous apprennent que la force vitale produit dans un endroit, au moyen du sang, les fibres musculaires, dans un autre un os, dans un troisième la matière cérébrale, dans un autre enfin, certaines humeurs destinées à être évacuées, nous en savons, après cette explication, aussi peu qu'avant. Cette cause inconnue du phénomène de la vie, réside prin- cipalement dans une certaine partie des corps, dans le système nerveux dont il constitue l’action. Le cerveau et les nerfs déter- minent entièrement les procédés chimiques qui s’exécutent dans les corps : et quoique l’on ne puisse nier que l'exercice de leurs fonctions tend à produire des effets chimiques, cependant nous sommes forcés d’avouerquecesopérations chimiques sont tellement au-dessus de la partie de nos recherches, qu'elles échappent entièrement à toutes nos observations. Nos plus savantes recher- ches et les découvertes les plus intéressantes de ces derniers temps, ne nous ont rien M NT sur ce sujet. Les travaux que les chimistes ont faits jusqu'ici, n’ont pas la moindre analogie avec les opérations du système nerveux , et ne peuventéiendre nos con- noissances dans des actions aussi cachées. Le terme de nos ex- périences est toujours quelque chose d’inconcevable, et malheu- Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1614. Yy 346 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CH!MIE! reusement ce quelque chose d’inconcevable est la principale partie de la Chimie animale, et se présente dans chaque opé- ration de la vie; et même les opérations les plus délicates auxquelles nos connoissances puissent parvenir, ne sont que la nature des produits; mais nous sommes pour jamais con- damnés à ignorer comment ils sont formés. Permettez-moi de montrer par un exemple, les difficultés qu’éprouvent ceux qui se livrent à l’étude de la Chimie animale, dans tous les cas où le système nerveux, si inconcevable, exerce son influence. 11 est bien connu que le sang, qui est toujours formé par la nour- riture que prend l'animal, est la source dans laquelle le corps vient puiser pour reproduire ses diverses parties, et que ce sang, qui est toujours de la même nature, est distribué par les artères aux différentes parties du corps. Au moyen du sang, les reins forment l'urine, les glandes parotides et celles situées sous la langue, la salive, les glandes mammaires chez la femme, le lait, et ainsi pour les humeurs des différentes parties. Les ob- servations anatomiques les plus délicates ont prouvé, sans aucun donte, que les vaisseaux dans ces différentes parties, se distri- buent et se rendent à leur terminaison, sans communiquer avec aucun autre; de sorte que les sécrétions qui pourroient altérer le sang, ne peuvent se mêler avec lui, et qu’alors ce sang n’est pas exposé à l’influence des agenschimiquesavec lesquels il pourroit être mêlé. Mais qu'est-ce qui détermine ces diflérens procédés chi- miques qui, au moyen des mêmes parties du sang, produisent là salive, le lait et l'urine? La Chimie démontre que ce ne peut être ni la forme, ni les inflexions des vaisseaux, puisqu'elles ne peuvent apporter qu'un retard plus ou moins grand dans la cir- culation, et non déterminer la formation des matières sécrétées. Il ne reste que l’influence des nerfs qui existent dans ces diffé- rentes parlies, et qui déterminent aussi bien la nature de la matière sécrétée que sa quantité; mais jusqu’à ce que nos expé- riences sur ces matières inorganisées nous aient présenté quel qu'analogieavec les fonctions des nerfs dans ces diflérentes parties, nous ne pourrons découvrir les lois de ces opérations, ni expli- quer la nature intime des divers procédés, Si la connoissance de la transformation du sang dans les différentes sécrétions, qui a elle-même quelqu’analogie avec les phénomènes chimiques, en général, est si loin de notre conception, que pouvons-nous at-. tendre pour l’explication du renouvellement des parties solides des animaux , qui soutient le corps pendant les échanges cons- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 347 tans de ses élémens? combien plus encore sont étonnantes les opérations du cerveau. Combien il est surprenant que les sublimes essors de notre esprit, quand il pénètre les secrets de la nature, ne soient que l’exercice d’un procédé chimique, qui s’il est le moins troublé dans son exactitude , distrait ce même esprit , le change en folie, ou en fait cesser entièrement les fonctions ; et cependant c’est une vérité incontestable. Mais est-il probable que l'entendement humain qui est capable d'être cultivé d’une ma- nière si parfaite, qui a calculéles lois du mouvement des différens mondes, et observé de tant de manières les beautés et les mer- veilles de la nature, et même atteint un degré de perfection dont le suprême degré est concentré en Dieu, puisse jamais se comprendre lui-même et connoître sa nature ? je suis convaincu qu'il ne le pourra pas. Pour donner un apercu de tous les efforts que l’on a faits pout expliquer des phénomènes aussi étonnans , quoique nous soyons encore aussi ignorans qu'auparavant, il faudroit faire unlivre entier très-inutile; car il n’y a rien que de simples spécülations qui n'ont pour fondement aucune expérience et qui n’expliquent d'une manière satisfaisante aucun phénomène. Il je cependant une conjecture qui mérite d'être citée, puis- qu’elle est déduite d’expériences sur les corps inorganisés, et qu’elle peut, après l’examen, étre approuvée ou rejetée; c'est Fe les nerfs sont les instrumens d'un procédé électrique qui étermine le mouvement des corps aussi bien que la nature des sécrétions et la reproduction des parties. L'action de l'électricité produit une vive contraction dans les muscles, que l’on peut comparer à l'opération de la volonté; et l’on en a tiré la con- clusion , que la volonté n’est autre chose qu’une décharge élec- trique entre les nerfs et les fibres musculaires. Ga/vani, auteur de la découverte de cette modification de l'électricité qui porte son nom, a, plus que tout autre, soutenu cette doctrine ; mais quoiqu’elle n’ait pas manqué de sectateurs (1), on reconnoît maintenant assez généralement l'insuflisance de cette hypothèse. Thomas Bunzen, danois, mit à découvert le nerf crural d’une QG) Un des physiciens qui a le plus insisté sur l’influence de l’action gal- vanique dans les phénomènes de la vitalité, est M. Delamétherie dans ses Con sidérations sur les Étres organisés , et dans ses Vues sur l’Action galvanique. (Note du Rédacteur.) y 2 348 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE grenouille, et fit ensorte de le couper obliquement , afin que l’on pût placer la moëlle immédiatement en contact avec une portion d’un muscle; il fit alors, de la manière suivante, une pile de dix à doûze grenouilles préparées ; nerf, muscle, éponge trempée dans une solution de muriate d’ammonjaque ; nerf, muscle, etc., et il obtint, au moyen de cette pile, des signes non équivoques d’une action galvanique. Il vouloit prouver par là, que les nerfs et les muscles agissent comme des électromoteurs; mais il est difficile de déterminer de quelle valeur peuvent être de sem- blables expériences pour le sujet en question ; car il est plus que probable que dans cette circonstance, l'électricité peut être produite et agir au moment où la vie cesse, sans que l'on puisse conclure de là que l’action du système nerveux d’un animal vivant, ait la moindre analogie avec cette expérience. Dernie- rement M. Everard Home a tenté d'expliquer les sécrétions anl- males, par les changemens que la décharge d’une pile produisent sur les liquides ; mais si d’un côté on prouve, par des expériences subséquentes , que l'électricité est identique avec l’aflinité chimi- que, et par conséquent, qu’un changement decomposition ne peut avoir lieu sans l’action de l'électricité ; cependant, d’un autre côté, les eflets de la pile soit sur les animaux, soit sur les l- quides inorganisés , n'ont rien d’analogue avec les sécrétions; et en cherchant à expliquer l’objet en question par l’action chi- mique, on n'y gagne pas la moindre chose. Parmi les auteurs qui ont travaillé envain sur ce sujet, je dois parler d'un savant allemand bien connu , de Reil : il sup- pose qu'il y a dans les nerfs une matière analogue au galvanisme qui, au travers d’une espèce d’atmosphère élecirique , agit à une petite distance, et de là il a fait revivre l'idée d’une awrea nervea. La manière dont il explique cette hypothèse, et les ar- gumens qu’il présente pour la soutenir, forment un essai inté- ressant, mais n’augmentent en rien le domaine de nos conuois= sances réelles, à On ne peut s'attendre à obtenir aucun résultat sur ce sujet, par l’analyse chimique de la substance des nerfs et du cerveau. Nos expériences nous convainquent suflisamment que l’action du système nerveux n'est pas produite par une décomposition mutuelle de sa moëlle et de la partie sur laquelle il agit; car en faisant la ligature d’un nerf petit, mais essentiel, nous avons trouvé que les plus grands désordres surviennent dans l’économie de l'animal, et qu’ils continuent aussi long-temps que la ligalure ET D'HISTOIRE NATURELLE. 349 existe, quoique le nerf, au-dessous de la partie où l’on a fait la ligature, retienne la même quantité de substance nerveuse qu'auparavant, Si on coupe la ligature et que l’on rétablisse la continuité de la moëlle, les désordres cessent; mais pourquoi cette continuité est-elle si nécessaire dans un canal dont les parties qu'il contient restent toujours dans le même état? Il est clair que cela indique un effet produit par la transmission, comme ceux de l'électricité, quoique ce que nous connoissôns jusqu'ici sur cette électricité ne puisse servir à l’expliquer. Dans l’état actuel de nos connoissances, je considère comme un mérite pour un amateur de la seience, de faire bien voir ce qui est connu réellement, et de déterminer avec précision ce qui est encore inconnu pour nous, sans remplir les vides par des conjectures. Les idées problématiques conduisent, comme on le sait, à la vérité, et je ne prétends pas le nier quand on se les propose soi-même pour les examiner ; mais quand ces théories scientifiques sont mêlées avec la masse des faits, elles conduisent souvent hors du vrai chemin, le lecteur même le plus intelligent, qui ne peut ensuite, qu'avec beaucoup de travail et d'application, se débarrasser de cette illusion. La Chimie ani- male est plus exposée à ce mélange d'hypothèses qu'aucune autre science, soit parce qu'il y reste beaucoup à faire, soit parce qu’il y a beaucoup d’objats que certainement on ne découvrira jamais. Il est possible, à la vérité, en appliquant à cette science les théories médicales, plus ou moins ridicules, sur le système nerveux et la nature intime de ses fonctions, de composer un tout qui ait une apparence vraiment scientifique; mais tout ce qu'on a tenté dans ces derniers temps sur ce sujet, et que l’on a appelé un point de vue philosophique de la plus grande im- portance, a seulement fait honneur-à l'imagination de l'auteur, sans faire avancer les connoissances humaines d’un seul pas vers la vérité. Ceux de nos contemporains qui ont soumis à leurs expériences quelques parties du système nerveux, sont, Thouret, Fourcroy, Jordan , et sous quelques rapports même, Bichat. Les premiers nous ont donné une analyse de la matière cérébrale qui, en con- sidérant le temps oùelle a été faite, a un mérite réel; elle cons- titue tout ce que la Chimie animale possède jusqu'à présent sur ce noble organe; mais dans l’état actuel de l'analyse chi- mique, elle a besoin d’être répétée et rectifiée (a). Bichat a examiné la membrane des nerfs (le zevrilème) ; à proprement 350 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE parler, il n'’étoit pas chimiste; mais dans l'intention d'étendre ses travaux physiologiques, il essaya, sur plusieurs parties du corps humain, l'effet des agens chimiques généraux, comme l'air, l’eau, les alcalis et les acides minéraux; et les expériences qu'il a faites sur le nevrilème, sont tout ce que possède la Chimie sur cet objet. La découverte de la possibilité de dissoudre par le moyen des alcalis caustiques, la partie médullaire des nerfs, de sorte que la membrane reste comme un tube creux, a procuré un bon moyen de séparer cette membrane, et nous a donné quelques connoissances sur la nature du canal que forme le zevrilème. Après le système nerveux, le sang et les vaisseaux par lesquels il circule jouent le principal rôle daus le corps des animaux. Les extrémités de ces vaisseaux sont entremélées avec les der- niéres ramifications des nerfs et forment dans celte union, par l'expansion du sang, toutes les fonctions des corps animaux. L'’attention des chimistes a été de bonne heure dirigée sur le sang et sur ses propriétés dans diverses maladies, et ils entre- prirent plusieurs suites d'expériencessur ce liquide. Hales chercha à déterminer la quantité d’air qui se dégage dans la distillation du sang. Zemery et Menghini en le calcinant, trouvèrent dans ses cendres du fer comme partie constituante; et ce dernier crut même pouvoir en extraire du sang desséché, au moyen du barreau aimanté. Hoffmann examina les diflérentes substances qui se séparent dans la coagulation du sang. Langrèsh, Cheyne et Schvenke publièrent de leur temps des analyses assez passables du sang. Gaubius les surpassa tous pour l'exactitude. Rouelle , le jeune, détermina assez exactement les sels contenus dans le sang. Hewson décrivit avec précision plusieurs propriétés de ce liquide. Bucquet examina les parties constituantes du cruor, et,il ya peu d'années, Deyeux et Parmentier, dans un Mémoire pour le prix proposé par la Société de Médecine de Paris, ont donné une analyse exacte du sang, dans l’état de santé.et dans plusieurs maladies. Fourcroy et Vauguelin ont ajouté depuis à ces connoissances, des recherches sur la matière colorante du sang; mais tout ce que nous avons appris depuis la publication de l'excellent Mémoire de Deyeux et Parmentier, n'a été, pour ainsi dire, que l’éclaircissement de quelques points erronés , sans nous donner beaucoup de nouvelles connoissances positives. J’ai tenté aussi de faire une analyse détaillée du sang entier; aidé, comme Je l'étois, par l'avancement de la science dans ces derniers ET D'HISTOIRE NATURELLE, 35r temps, j'ai peut-étre été plus heureux que la plus grande partie des chimistes qui m'ont précédé, pour bien distinguer les parties constituantes du sang, et même en faire connoître quelques-unes qui leur avoient échappé, ainsi que pour déterminer d’une ma- nière plus exacte, les caractères des principes qui étoient connus; de sorte que dans les analyses que l’on fera des autres sécrétions de différentes parties du corps des animaux, on pourra les re- connoître par leurs propriétés. Ainsi, par exemple, j'ai fait voir que la fibrine de la matière colorante et l’albumine peuvent se combiner avec les acides minéraux en excès, et former des com- posés insolubles et d’une nature particulière (2); mais que quand on enlève l'acide, ils deviennent solubles dans l’eau; que ces substances se dissolvent facilement dans les acides acétique et phosphorique, et que ces acides empêchent la coagulation du Sang par la chaleur; que la fibrine, quand on la Fan bouillir dans Peau, se dissout en petite quantité, et que la partie non attaquée se raccornit et devient insoluble dans l’acide acétique; que ces trois substances, par l’action de l'alcool et de l’éther, se changent en partie en une espèce particulière de gras, qui, selon le menstrue employé, a une odeur piquante particulière, et d’autres propriétés. Les substances jusqu'actuellement connues, que J'ai trouvées dans le sang, sont le sous-lactate de potasse et quelques substances animales particulières qui dans toutes ces sécrétions accompagnent le lactate, et qui, à mon avis, doivent leur existence dans le sang , à l’absorption des parties qui sont destinées à être séparées par le moyen de la sécrétion. J’ai aussi réussi à corriger plusieurs erreurs des chimistes qui m'ont pré- cédé, On croyoit, d’après les expériences de De Haën, que le Sang contenoit de la gélatine de la même nature que celle qui se produit quand on fait bouillir les os et les cartilages avec l'eau; mais j'ai prouvé que la gélatine ne se rencontre pas dans les substances animales, et que De Haën et tous ceux qui l’ont Suivis ont regardé comme gélatine, l’albumine dans un état de demi-coagulation. Quelques auteurs ont classé le soufre parmi les parties constituantes du sang, parce que quand onévapore ce sang dans des vases d'argent, ces vases deviennent noirs. Cette conclusion est cependant inexacte, puisque le soufre est partie consfituante de l’albumine, et qu’il se sépare de cette albumine par l’effet de l’ébullitionet l’action de lalcali caustique. Deyeux et Parmentier ont cru que la couleur rouge du sang étoit due à une solution du fer dans l’alcali libre qui y existe. Fourcroy 352 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et Vauquelin ont essayé de prouver que c'étoit une solution de sous-phosphate de fer rouge dans l’albumine. Ils ont trouvé que l’albumine ou le sérum triturés avec le sous-phosphate hu- mide, le dissolvent et prennent une couleur rouge, et que cette couleur est encore avivée par l'alcali caustique. D’après ces ex- périences, la coloration du chyle à l’air serait due au changement de phosphate de fer, de phosphate neutre de protoxide et sous- phosphate de protoxide. J'ai répété, en me défiant de moi-même, les expériences de ces chimistes, les plus célèbres detoute l'Europe, et mes résultats étant constamment diflérens de ceux qu'ils ont obtenus, J'ai été forcé de considérer leur opinion comme une erreur, et de déclarer que quant à la manière dont le fer est uni à la partie colorante du sang, nous ne savons rien de plus maintenant, que quand on y a découvert ce métal. J’ai essayé de faire voir que la matière colorante du sang, quoiqu’elle res- semble beaucoup à l'albumine, ne peut être cette substance, et que comme ZLeeuwenhoeck et Hartsoeker l'ont démontré, il y a long-temps, par des observations microscopiques, elle n’est pas dissoute dans le sang, mais qu’elle y existe dans un état de suspension; Car si on triture dans le sérum le cruor coagulé, une partie de la matière colorante s’en sépare, et le sérum prend une couleur rouge; mais si on le laisse reposer dans un tube de verre, la matière colorante se précipite lentement au fond, et le sérum qui surnage, devient clair comme auparavant (c). J’ai prouvé que les oxides métalliques, et principalement ceux de fer, peuvent, jusqu'à un certain point, être dissous dans le sérum, qui se colore alors plus ou moins, mais qu'aucun de ces oxides ne donne la couleur du sang, et que le sérum tenant en dissolution de l’oxide de fer, ne manifeste aucune des propriétés caractéristiques de la matière colorante. Comme aucun des réac- tifs les plus délicats ne découvre la présence du fer dans la matière colorante, je me crois en droit de conclure que ce métal ne s’y trouve pas à l’état salin, et comme on sait qu’il est impossible, même par les acides les plus forts, d'extraire, du sang ou de son charbon, du fer ou un phosphate terreux , que contiennent si abondamment les cendres de ce liquide; il s’ensuit qu'aucune de ces substances n’y existe à l’état de sel, et qu’alors il est probable que le sang en contient les élémens unis d’une manière différente de leur combinaison dans les sels. J’ai conclu , de là, que le sous-phosphate ou 4erre des os, que l’on a supposé être contenu dans le sang, n'y existe pas réellement, puisque J'ai ET D'HISTOIRE NATURELLE. 353 J'ai trouvé qu'on ne peut l'extraire du sang desséché par le moyen des acides étendus, et qu’au contraire la /crre des os est {toujours une production de la décomposition des principes immédiats du sang, et qu’elle est formée précisément au moment où l’on en cherche la présence. On a fait quelques expériences sur la cause de la coagulation de la fibrine, quand le sang est hors de la veine de l'animal. On a gardé avec soin le sang à la même température, on l'a conservé dans des gaz ne conleuant pas d’oxigène, et dans le vide. Le sang a été gelé rapidement , et ensuile dége'é ou mêlé avec de l’eau; mais dans toutes ces expériences il s'est loujours coagulé plus on moins promptement. La cause de cette coagu- lation est entièrement inconnue pour nous, et l’on conjecture que c’est seulement son mouvement dans les vaisseaux qui la prévient. Quelques savans ont attribué à la fibrine une irrita- bilité vitale, à cause du mouvement de tremblement que l’on remarque dans quelques gouttes de sang exposées à l'action du galvanisme : mais Heidman a prouvé que celte idée éloit en- tièrement erronée, et a fait voir que le mouvement provient du retrait de la fibrine elle-même lors de la coagulation. L’exa- men chimique de la fibrine, de l’albumine et de la malière co- lorante a prouvé que ces trois substances ont des propriétés chimiques à peu près semblables ; leur composition doit donc être à peu près la même, elles sont susceptibles d'être changées l’une en l’autre, par le moyen de légères altérations dans l'animal vivant ; ou elles sont employées à produire les mêmes substances ans lesæexcrétions ou dans la reproduction des parties solides, Pour remplacer celles qui ont été détruites ou portées au-dehors. x En comparant le sang humain avec celui d’un jeune bœuf, } ai trouvé entre eux une similitude étonnante. Les mêmes parties constituantes dans les deux, les mêmes proportions et à peu près les mêmes propriétés chimiques expliquent facilement les ré- sultats avantageux de plusieurs expériences que l’on a faites pour la transfusion du sang des animaux herbivores dans le corps humain, d’où l’on relire en même temps une certaine quantité de sang. J'ai observé cependant une diflérence remar- quable dans quelquescaractères des principes du sang dans l'homme, avec ceux que j'ai trouvés au sang d’un jeune bœuf. La fibiine, la matière colorante et l’albumine du sang humain, après avoir été desséchées, se réduisent plus facilement en cendres, et le charbon du sang humain n'exige ni une température aussi élevée, Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1614. Zz 394 | JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ni une chaleur aussi long-temps continuée pour être réduit com- plètement en cendres, que celui du sang d’un jeune bœuf. Cette différence dans la facilité de la combustion, indique clairement use plus grande proportion d'azote dans les parties constituantes du sang du jeune bœuf, ce qui est plus clairement prouvé encore par la propriété qu'a ce dernier sang, quand on le calcine len- tement, de donner constamment du carbonate d'ammoniaque, quoique chauflé dans un vase ouvert et exposé à Pair libre. Cette indication d’une plus grande quantité d'azote dans les parties constituantes du corps des animaux herbivores, que dans celles du corps humain, est surprenante, puisque la nourriture de l'homme contient, en général, plus d’azote; tandis que ce corps, qui a été regardé jusqu'ici comme corps élémentaire, ne se trouve qu’en très-petites proportions dans les végétaux qui servent de nourriture au bœuf, Nos connoissances, sur ce sujet , recevront probablement un grand accroissement de l'examen de la nature si contestée de-l’azote. Le sang se sépare lui-même dans lesramificationsles plus déliées des artères, en une portion colorée qui reporte au travers des veines les particules de la matière colorante en suspension, et une portion incolore qui pénètre les ramifications les plus fines. Nous appellerons, avec Bichat, vaisseaux capillaires, ces dernières ramifications des artères. La matière colorante change de couleur dans cette circonstance ,et devient brune foncée ou noirâtre; mais nous ignorons éntièrement quelle influence ce changement de couleur produit sur le fluide incolore qui passe au travers des vaisseaux capillaires. Comme la matière colorante du sang n’est pas dissoute, mais seulement mêlée mécaniquement avec le sang, on peut considérer la séparation du sang artériel en liquide coloré et incolore, comme uae véritable filtration, qui permet seulement à la matière colorante de passer dans les veines, tandis que, d’un autre côté, le sérum seul pénètre dans les vais- seaux les plus déliés, Il seroit d’une grande importance pour la Chimie animale, d'examiner le sérum dans l’état où il pénètre dans le système capillaire, mais je ne concois pas comment on pourroit en re- cueillir, même la plus petite quantité. Il est probable que cette sécrétion est le sérum ordinaire qui contient aussi de la fibrine dissoute; et si cetie supposition est exacte, il s'ensuit que la fibrine dans les vaisseaux, peut aussi être dissoute par le sérum, et ne pas être comme la matière colorante qui y existe en sus- ET D'HISTOIRE NATURELLE, 355 pension : c’est toujours ainsi que J'ai considéré la composition du sang; mais à l'exception des expériences sur la sécrétion des Vaisseaux absorbans qui confirmercient celle opinion, je n'en connois aucune qui puisse confirmer où infirmer celte supposition. Les vaisseaux sanguins ont été jusqu’à présent peu examinés, quaut à leurs propriétés chimiques, et à l'exception des expé- rieuces de Bichat, sur la macération de leurs diverses mem- branes, nous n'avons aucune recherche sur ce sujet. La mem- brane fibreuse des artères qui, sans aucun doute, est la plus remarquable de toutes , a été long-temps regardée comme com- posée d'anneaux musculaires. C’éloit l'opinion de Haller, etil fonda sur cette supposition sa théorie du pouls, qui est adoptée de nos jours dans tous nos livres élémentaires. John Hunter combattit l’idée de Haller sur l’action musculaire des artères, regardée comme la cause de leur pulsation. Bichat tenta d'ir- riter les artères des animaux vivans, avec quelques stimulans chimiques et mécaniques qui agissent sur la fibre mu:culaire, mais sans parvenir à exciter le changement le moins perceptible dans leur mouvement, et il conclut de ses expériences , que la pulsation devoit son origine à celle du cœur; qu’elle ne consiste pas dans une dilatation, mais que c’est simplement un déran+ gement de sa première place, ou, comme il l'appelle lui-même, une locomotion. L'examen chimique de la membrane fibreuse des artères devenoit d’un intérêt tout particulier, comme le seul moyen de décider si la fibre de l'artère étoit de la même nature que celle du muscle, J’ai entrepris cet examen , et j'ai obtenu des résultats très-satisfaisans et tres-décisifs. Il est hors de doute, d’après les expériences que j'ai faites, que la membrane fibreuse des artères ne peut être un muscle ; car tandis que la dernière est molle et flasque, et qu’elle contient plus des trois quarts de son poids d’eau, la fibre musculaire a les mêmes propriétés chimiques que la fibrine du sang : comme de se dissoudre dans l'acide acétique, et de former avec les acides sulfurique , nitrique et murialique , des composés à peine solubles dans l’eau; tandis que la fibre artérielle jouit de propriétés tout opposées, comme d’élre insoluble dans l’acide acétique , de se dissoudre facilement dans les acides minéraux étendus d’eau jusqu'à un certain degié, el de ne pouvoir être précipitée de celte solution par le moyen des alcalis, ou des prussiates alcalins, qui sont de bons réactifs pour décou- vrir la présence de la fibrine dans un acide, elc. En consé- quence, comme la fibre artérielle n'a pas la structure du muscle, Zz°2 306 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ni ses propriétés chimiques, ni sa composition, elle ne peut être un muscle, et ne peut en jouer les fonctions; ce qui devient plus évident encore, à cause de son élasticité. Cependant cette élasticité dans les artères, compense pleinement le pouvoir mus- culaire. La description du pouls par Haller, est exacte, excepté son opinion sur la cause de la eontraction artérielle, que l’on a prouvée être inexacte. Au contraire, l’idée de Bichat, que le pouls ne consiste pas en une dilatation dessartères, mais seule- ment en une /ocomotion occasionnée par leurs nombreuses in- flexions quand le cœur presse le sang, ne peut être erronée, quoiqu'’eile soit contraire aux lois de l’hydrostatique. Comme l'analyse chimique a parfaitement prouvé que la mem- brane fibreuse des artères n’est pas un muscle, et par conséquent qu'elle ne peut éprouver une contraction spontanée, et que l’on voit clairement, par son élasticité, qu’elle doit être dilatée pen- dant le systole du cœur, et reprendre sa forme pendant le dias- tole ; il s'ensuit que la vitesse du pouls, dans le même individu, ne peut jamais varier dans les diflérentes parties du corps. Toute autre diflérence, excepté celle-ci, est possible, Plusieurs auteurs de Médecine ont fait connoître des cas où lon dit avoir observé cette vitesse inégale ; mais nous devons considérer ces observations comme des erreurs, depuis que nous avons vu l'impossibilité de semblables cas. La décision de cette queslion long-temps agitée, est de la plus grande conséquence pour la Médecine, puisqu'elle prouve que le spasme ne peut exister dans les plus grandes artères, et que toutes les observa- tions dans la circulation du sang , attribuées généralement à cette cause, dépendent uniquement de la nature musculaire du cœur et de sesoreillettes, et jusqu’à un certain point , des fibres muscu- laires qui entourent l’origine des veines caves. J’ai dit que les ramifications les plus déliées des artères, à cause de leur finesse, sont appelées vaisseaux capillaires. L’ana- tomie de ces vaisseaux est presque inconnüe, et l’on ignore com- plètement la manière dont ils se terminent. Il a été jusqu'ici impossible de faire aucune analyse chimique de leurs tégumens, parce qu'on n'a pu les séparer des parties avec lesquelles ils sont entremélés. Ces vaisseaux ont probablement le pouvoir d’ex- pulser lentement les sécrétions qui y sont contenues, mais le mécanisme de ce procédé sera probablement long-temps un secret. C'est dans ces vaisseaux que s'exécute le procédé inexplicable ET D'HISTOIRE NATURELLE. 397 de la sécrétion et de la reprodaction des solides par la coopé- ration des nerfs. La même nature, qui est incompréhensible pour nous quand elle s’étend dans l'immensité, n'échappe pas moins à notre pénétration quand elle est resserrée dans des limites aussi étroites. À ces deux extrémités sont placées des bornes à notre expérience, qui peuvent s'étendre selon les divers âges, mais sans que nous puissions Jamais tout comprendre. Cigna a examiné avec quelque succès , le procédé qui dans la res piration change le sang veineux noir en sang artériel d’un rouge vif; ensuitenotre illustre compatriote Schcele ayant fait connoître la composition de l'air atmosphérique, a démontré la nécessité de l’un de ses principes constituans pour soutenir la vie, comme: Finsuflisance de l’autre. Le changement de l'air dans les pou- mons a été expliqué d’une manière très-satisfaisante , par Za- voisier, Mengies et Goodwin. Ils ont trouvé que l’oxigène étoit absorbé, et qu’à sa place on trouvoit du gaz acide carbonique; ils ont vu aussi que l'air expiré contient une grande quantité de vapeur aqueuse. Lavoisier a conclu de là, que le sang veineux noir contient une combinaison de carbone et d’hydrogène qui lui donne sa couleur foncée; que ce sang exposé à l'air, s’oxigène et forme de l’acide carbonique et de l’eau; qu'une artie de l’eau que contient l'air expiré est formée, tandis que autre portion s’évapore de la membrane humide des poumons. Il a tenté de déterminer la quantité de ces produits; mais les nombres qu’il a donnés excèdent un peu la vraie moyenne, parce que dans ce temps on avoit estimé la quantité d’oxigène dans l’air, plus grande qu'elle n’est réellement , et alors ses ex- périences eudiométriques ne peuvent pasêtre parfaitement exactes. 1] trouva enfin qu’il n’y avoit pas d’azote absorbé par le sang. On a fait depuis des hrs avec d’autres gaz que Pair atmosphérique ; parmi les hommes qui ont le plus travaillé sur ce sujet, le docteur Beddoës s’est distingué d’une manière par- ticulière. 11 tenta de guérir quelques maladies par le moyen de linhalation, et il eut plusieurs cas où les résultats semblèrent avantageux. Cependant une expérience multipliée a fait voir qu'on avoit moins gagné qu'on ne l’avoit d’abord cru, par l'usage de ces inhalations. 1l avoit trouvé comme résultat concomitant de ses expériences, que l'hydrogène et lazote pouvoient être respirés sans produire des effets délétères dans le commencement ; et qu'en respirant ces gaz, ils produisent un eflet agréable, semblable à celui des liqueurs spiritueuses. Il est nécessaire , 308 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE que ces deux gaz soient dans un grand état de pureté. Toutes les autres espèces de gaz sont nuisibles et ont même une action destructive. Beddoës employa dans ses expériences Humphry Davy, jeune homme d’une grande espérance, qui a depuis sur- passé de beaucoup son maïtre en mérite et en célébrité. Davy découvrit la propriété enivrante du gaz oxide nitreux [ protoxide d'azote] (d), et montra que pendant la respiration il étoit ab- sorbé par le sang, auquel il donne une couleur pourpre, et en dégageoit une portion du gaz précédemment absorbé. Il étendit ensuite ses expériences sur la respiration dans l'air atmosphé- rique, et il crut que le sang absorboit une partie d’oxigène dans l'air, de sorte qu'il y avoit trois ou quatre pouces cubes d’ab- sorbés.par minute. Henderson et Pfaff ont répété ces expériences avec les mêmes résultats. On a cependant découvert depuis une erreur dans ces expériences, parce qu’elles ne sont pas d’ac+ cord avec les lois qui règlent le mélange des gaz avec les liquides. À peu près dans le même temps, ces erreurs furent découvertes parJohn Dalton, physicien très-ingénieux, qui publia, quelques temps après, ses expériences. Une de ces règles est, que quand un liquide est en contact avec un gaz , il en absorbe une quantité déterminée; que si on le met en contact avec un autre gaz, il en absorbe aussi une certaine quantité, mais qu'il se sépare une partie du premier gaz absorbé, jusqu'à ce que le gaz qui entoure ce liquide.et la partie de Pautre qu’il a absorbée , ar- rivent à un certain degré d'équilibre. Comme dans toutes ces expériences le même air expiré étoit constamment respiré, 1l s’ensuit que la quantité relative d’azote doit augmenter, et pro- duire par là une double cause d’erreur, soit parce que le gaz qui reste dans les poumons contient plus d'azote, soit parce qu'à mesure que l'air dans les poumons approche du sang con- tenant plus d'azote, le sang lui-même, ou plutôt l’eau contenue dans ce liquide, absorbe une nouvelle quantité d'azote pour approcher de la saturation de ce gaz ; de même que d’un autre côté, pendant l'absorption des gaz qui ne contiennent pas d’azote, le sang doit continuellement perdre une portion de celui qu'il avoit absorbé d'abord, et cette circonstance a été pleinement confirmée dans l'expérience. La cause de cette erreur ne pouvoit donc donner lieu à des expériences inexactes ou faites avec peu de soin, mais c’éfoit la conséquence nécessaire de l’état de la science au moment où elles ont été faites. Les expériences sur la respiration ont été répétées dernièrement par deux chi ET D'HISTOIRE NATURELLE. 359 mistes anglais, Æilen et Pepys, avec toute l'étendue possible, et avec une précision qui surpasse tout ce qu’on avoit fait jus- qu'à ce moment. Ils ont. eu l'avantage de se servir dans ces expériences , de deux excellens gazomètres d’une grande dimen- sion ,appartenans à l'Institution royale de Londres, et leur prin- cipal résultat est que pendant le moment de la respiration, le volume de l'air diminue de telle manière, que l'absorption réelle monte à plus de deux tiers pour cent de son volume. D'un autre côté , ils ont trouvé que le gaz acide carbonique formé, a précisément le même volume que le gaz oxigène con: sommé. Comme on savoit déjà que pendant la transformation en gaz acide carbonique, l’oxigène ne changeoit pas de volume, et conséquemment , que 100 pouces cubes de gaz oxigène, dans lesquels on a brûlé du charbon , produisent également 100 pouces cubes d'acide carbonique , les expériences d’Æ/len et Pepys ont bien démontré qu'il n’y a pas d'hydrogène brûlé dans les poumons, que l’oxigène n’est employé qu'à la combustion du charbon, et que le sang, d’après les expériences , n’est pas oxidé, mais qu’il perd seulement du charbon , ou qu’il est décarbonisé. Ces chimistes-n’ont trouvé aucun autre changement dans l'air expiré, il n'a pas perdu d'azote, et il ne contient aucun autre gaz que l’acide carbonique : il renferme environ 8 + pour cent de son volume d'air, qui augmente jusqu’à 10 pour cent si on le respire plusieurs fois ; mais quelque long-temps prolongée que soit la respiration de ce même air, cette quantité n'augmente pas. Cependant dans quelques cas où la respiration se faisoit avec difficulté, il y avoit plus d’oxigène absorbé que de gaz acide carbonique produit : ces deux savans eurent la bonté de me faire passer une copie de leur Mémoire imprimé dans les Fransac- tions Philosophiques pour 1808; je pris la liberté de leur pro- poser quelques recherches nouvelles; car quoiqu'il fût aké d'ex- pliquer la perte d'azote dans les expériencés de Davy ,'et qu’on ne pût douter de l'exactitude de leurs observations, parce qu’il n’avoit pas disparu d'azote pendant la respiration , j'ai conservé pendant quelque temps. l'idée de la possibilité de l’absorption dû gaz azote par le sang des animaux herbivores : d’où proviendroit la quantité de ce gaz que l'on y retrouve et qui n'existe pas dans leurs alimens. Je proposai donc à MM. Æ//en et Pepys d examiner aussi la respiration des animaux herbivores, parrappont à l'absorption de l'azote. Ils tentèrent ces expériences et obtin- rent des résultats inattendus; ils employèrent pour leurs expé- 360 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE riences un cochon d’Inde qu’ils placèrent dans le gazomëlre ; ils l'y laissèrent à peu près une heure , après quoi ils firent des ex- périences sur l'air. En employant l'air atmosphérique, ils trou- vérent que la quantité d'azote n’avoit pas diminue, ‘et que la quantité d’oxigène consommée étoit remplacée par une quantité correspondante d’acide carbonique, comme chez l’homme. Ils firent alors respirer à cet animal, du gaz oxigène pur dans un appareil disposé de telle manière, que le gaz pût êlre remplacé par d'autre à mesure que l'animal y respiroit,etque celuidans lequel l'animal avoit respiré, pût être séparé pour l’examiner. Ils trou- vérent qu'il contenoit une grande quantité de gaz azote, qui va en décroissant de plus en plus jusqu’à la fin de l'expérience. Ils firent ensuite un mélange de 78 parties de gaz hydrogène pur et de 22 d’oxigène; ils placèrent pendant une heure un cochon d'Inde dans cet air artificiel, dont ils avoient auparavant me« suré le volume avec la plus grande exactitude, et ils obtinrent le même résultat : l'air expiré étoit mêlé de gaz azote, dans Une proportion décroissante; mais la quantité de gaz azote ob- tenue dans cette expérience, excédoit quelquefois le volume de l'animal. Ils trouvèrent aussi que l'animal, au bout d'une heure, devenoit tout assoupi, sans donner de signe de souffrance, et que pendant cet espace de temps il se produisoit moins d'acide carbonique. Comme dans ces expériences il y avoit plus de gaz azote dégagé que les liquides de l'animal ne pouvoient en contenir, au moment où on l’introduisoit dans le mélange de gaz, à l'état de gaz absorbé, il paroît qu'après qu’une portion de gaz azote s’étoit dégagée du sang , d’après la loi ci-dessus rapportée pour la combinaison des gaz mélés avec les liquides, une nouvelle quantité de gaz azote se dégageoit des parties constituantes du sang, qui semble avoir une tendance à se com- biner avec une quantité excédante d'azote; et cette quantité se dégage pour se diriger ellemême entre le sang et le gaz dans les poumons, Si cette conjecture se trouve par la suite ap- puyée par l'expérience, on devra toutefois considérer, comme particulier et très-rare, le procédé chimique par lequel le gaz azote est dégagé sans un changement dans la composition du sang, quand on considère que ce gaz ne se dégage ordinaire- ment que dans des opérations plus ou moins destructives, comme, par exemple, par l’action des acides minéraux. Voilà tout ce que nous connoissons sur le changement de l'air par la respiration, L'influence que l'air exerce sur le sang, et les ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 36r les changemens qui surviennent dans la composition de ce liquide, sont toujours inconnus pour nous, Tout ce qu'on a pu faire a été de s'assurer que le sang noir devient rouge, et l’on en a conclu, d’après la nature de l'air respiré, que le sang noir a perdu une portion de son carbone; mais on na pas encore examiné si aucune partie du sang n’éprouve d’allération dans ses propriétés, quoiqu'il soit probable que par l'analyse chimique on obtienne des résultats très-intéressans, par la comparaison du sang veineux avec le sang artériel. On a cru généralement que toutes les parties du sang éprouvent une action de la part de l'air, qu’elles absorbent loxigène et dégagent du gaz acide car- bonique; mais cela mest pas. Le sang dans lequel la matière colorante est contenue, absorbe très-lentement le gaz oxigène quand on l’expose hors du corps, à l’action de l'air atmosphé- rique ; il retient aussi en même temps une portion de lacide carbonique produit; d’un autre côté, le sérum qui ne contient pas de matière colorante, ne fait pas éprouver d’altération à l'air atmosphérique avant sa putréfaction. Le principal effet sur l'air est dû à la matière colorante, et comme cette matière ne pénètre aucun des vaisseaux capillaires de la nutrition, et fort peu de ceux de la sécrétion, il paroiît que la fonction principale de la matière colorante est la pro- duction de la.chaleur animale. Crawford a établi, d’après ses expériences, que la chaleur spécifique du sang artériel est plus considérable que celle du sang veineux, dans la proportion de 115 à 100. En prenant ces nombres comme base, il s'ensuit que quand le sang veineux devient rouge dans les poumons, il doit se refroidir d’environ 5 degrés. Les idées sur la distribu- tion de la chaleur dans le corps furent d’abord très - vagues, et l’on considéra les poumons comme un foyer dans lequel la chaleur se dégageoit, pour être portée ensuite avec le sang dans toutes les parties du corps. D’après l’idée de Crawford, le sang artériel, pour se maintenir à la même température que le sang veineux, a besoin exactement de la quantité de chaleur dégagée de l’air par conversion du gaz oxigène en acide carbonique, et alors, quand le sang artériel redevient sang veineux dans une autre partiegdu corps, la chaleur qu’il retenoit se dégage et rétablit celle qui a été perdue par le moyen de la transpiration et par l’action de l'air ambiant, afin que le corps conserve toujours la même température. Si la matière colorante est la principale cause de cet effet, il est facile d’apercevoir pourquoi Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814. Aaa 352 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE le corps , après des pertes abondantes de sang, devient plus froid, et pourquoi la saignée, même dans les fièvres asthéniques , diminue la violence de la maladie : dans ce cas, l’effet ne peut ‘être dû seulement à la diminution de volume des humeurs, puisque le premier diamètre des vaisseaux se rétablit par l'ab- sorplion de nouveaux fluides du canal alimentaire ; mais la di- minution de la matière colorante du sang, et la reproduction de la chaleur qui en dépend, doivent aussi jouer un grand rôle dans cette circonstance. Les médecins praticiens observeront, sans doute dans leur pratique , des circonstances qui donneront une grande probabilité à cette idée. En connoissant la quantité d'acide carbonique qui se forme Journellement par la respiration, on peut à peu près exactement déterminer la quantité de chaleur qui est nécessaire pour main- tenir dans le corps, l'équilibre de température. Æ/lez et Pepys ont trouvé qu’une personne d'une taille moyenne, expire dans 24 heures 39,534 pouces cubes (0m,03257) de gaz acide car- bonique, qui pèsent 19,683 grains ou 39 onces (10145,472), et qui contiennent 11 onces 1 dragme (3426,268) de carbone: d'où il suit qu'une personne de moyenne stature perd en 24 heures, pour conserver la température du corps à 90° Fahrenheit (+ 32° centigrades), autant de chaleur qu'une livre de char- bon en dégage pendant sa combustion. 11 est probable aussi que le carbone dans le sang étant à l’état liquide, peut pro- duire plus de chaleur par sa combustion que quand il est à l'état solide. Cependant, on a si peu de prétention à regarder ces calculs comme exacts, qu’on les a faits plutôt dans l'intention d'approcher de la vérité, que dans la vue de les faire considérer comme tels. Pour moi, j'avoue que si les expériences d’Æ4/len et Pepys sont exactes, 1l est très-difficile de concevoir comment le corps peut compenser la consommation extraordinaire de car- bone qui, outre qu’elle provient d’autres parties, suppose au moins de 8 à 10 livres de nourriture par jour, ce qui, en général, est plus qu’une personne n’en consomme, Quoique les changemens que le sang subit pendant la respi- ration, semblent, selon toute apparence, être les mêmes que ceux produits sur le liquide hors des corps, par l’airgu l'oxigène , cependant on a aussi attribué au système nerveux une influence sans laquelle ces changemens n’auroient pas lieu : Dupuytren, dans une expérience sur les chevaux et les chiens, divisa la huitième paire près de l'œæsophage, et observa que quoique la ET D'HISTOIRE NATURELLE. 363 respiration fût complète, l'animal mouroit en peu de temps par le défaut d’oxidation, Si on ouvroit une artère et que l'on divisât ensuite les nerfs d’un seul côté, le sang qui sortoit de l'artère avoit, pendant quelques instans, une couleur foncée, mais il devenoit bientôt rouge. Si on divisoit les nerfs des deux côtés, le sang qui couloit de l'artère devenoit veineux et l'animal mouroit, et l’on trouvoit l’épiderme de l'intérieur de la bouche et du nez, devenu noir. Si au lieu de cela on comprimoit seulement ces nerfs, le sang artériel devenoit noir, et continuoit de rester dans cet état aussi long-temps que la compression avoit lieu ; mais il prenoit une couleur pourpre aussitôt que l'on cessoit de comprimer. Ces expériences prouvent d’une manière décisive, si elles sont exactes, l'influence des nerfs sur le changement du sang dans les poumons. On sait que Baglivi et Bichat ont fait en même temps les mêmes expériences, et qu'ils ont obtenu des résultats entièrement différens. En outre, un compatriote de Dupuytren, Ducrotay de Blainville, a répété ces expé- riences, et il a trouvé que l’animal meurt quelquefois après que la huitième paire a été divisée, mais par une autre cause que la cessation de changement du sang pendant la respiration. Ce sujet a depuis occupé Emmert, qui y a porté toute l'exactitude que l’on pouvoit attendre d’un homme aussi habile, et :l a prouvé, d'une manière satisfaisante, que la division de la hui- tième paire de nerfs n’a pas d'influence immédiate sur le chan- gement du sang dans les poumons , mais qu’elle aflecte la res- piration, qui par degrés devient plus ou moins difficile; après quoi le sang des artères devient noir, de sorte que quand l’animal meurt , après plusieurs beures on trouve les artères remplies de sang veineux, parce que la respiration a cessé. Nous avons à peine quelque idée sur la différence du sang dans les différens âges et pendant les diverses maladies, On a supposé que le sang des fœtus subit dans le placenta un chan- gement semblable à celui qui a lieu dans les poumons après la naissance, et qu'il revient au travers des veines du cordon om- bilical ; mais des auteurs dignes de foi assurent que l'œil ne peut distinguer le sang veineux du sang artériel dans le fœtus. Le pracinal objet de la fonction des poumons est de maintenir a chaleur animale; mais le fœtus tire sa température du milieu environuant, et par conséquent il ne manque jamais d'une source de chaleur : au contraire, il doit toujours avoir une tem- pérature un peu plus élevée que les mammifères ne l'ont en Aaa 3 304 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE général. Celte circonstance décide complètement contre le chan- gement de la matière colorante dans le placenta, quoique nous devions avouer que le séjour du sang doit avoir quelque des- ünalion importante. Fourcroy a publié quelques observations sur le sang des fœtus, mais elles paroissent avoir été faites par hasard et n’ont pas être déduites d'expériences. Deyeux et Parmentier ont examiné les différences que pré- sente le sang dans plusieurs maladies; le résultat de leur examen a été, que la différence du sang, de l’état de santé à celui de maladie, n’est pas si considérable, que dans l’état de la science on devoit s'attendre à le trouver. Dupuytren, Thenard et Nicolas ont fait des expériences sur le sang des diabétiques, et ils ont prouvé qu’on ne peut y découvrir la plus petite quan- üté du sucre qui existe si abondamment dans l'urine des per- sonnes attaquées du diabètes (e). ; Tout ce que nous possédons sur le sang et larespiration a principalement été fait sur l’homme. Nous n'avons pas d’expé- riences comparatives sur le sang des animaux, et la Chimie animale ne nous a rien appris sur les caractères extérieurs qui en Zoologie constituent une partie de la distinction des difté- rentes classes d'animaux. On n’a fait aucune expérience sur la respiration des oiseaux et des amphibies. Nous savons seulement que les oiseaux exigent un air très-pur, et que dans l’atmo- sphère dans laquelle un oiseau meurt, une souris peut vivre sans éprouver aucune incommodité sensible, On a fait plus d’expé- riences sur la respiration des poissons. Il est certain que c’est dans les ouïes que l’oxidation du sang a lieu, par le dégagement du gaz oxigène dont l’eau contient au moins + de son voluine; mais cette espèce de respiralion n’est pas d'une aussi grande importance pour les poissons que pour les mammifères, puisque les poissons peuvent vivre plusieurs jours dans l’eau qu'on a privée d’air; mais ils meurent à la fin, si on ne leur rend pas d'air, et on n'a pu observer que par leur respiration il ÿ eût la moindre décomposition de l’eau. Les poissons ont un orgaue que l’on appelle leur vessie natatoire, et que l’on a considéré, quoique probablement cela ne soit pas, comme partageant l’ac- tion des ouïes sur le sang , tandis qu’elle ne semble destinée qu’à régler la pesanteur spécifique du poisson, de manière qu’il peut sans difficulté s'élever ou redescendre dans l’eau. Dans les oissons d’eau douce, cette vessie contient , d’après les expériences d'£rman, du gaz azote mêlé avec différentes proportions d’oxi- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 365 gène, qui ne s'y trouvent cependant jamais dans lès mêmes que dans l'air atmosphérique. Béot a trouvé, au contraire, que la vessie natatoire des poissons d’eau salée, contient du gaz oxigène, dont la proportion augmente en raison de la plus grande pro- foudeur à laquelle l'animal vit ordinairement; de sorte que dans les poissons que l’on pêche à 1000 mètres de profondeur , l'air contient de # à & d’oxigène. Dans la vessie de quelques poissons l'air est si comprimé par la pesanteur de la colonne d’eau, que quand on les retire de l’eau, la vessie se gonfle et force l’es- tomac à sortir par la bouche. Ærman a observé dans une espèce de poisson, le cobitis fossilis, une double respiration; dans Veau contenant de l'air, l'animal respire à la manière accou- tumée au moyen de ses ouïes; mais si l’eau est privée du gaz oxigène qu'elle contient, le poisson s'élève à la surface, prend de l’oxigène dans sa bouche et l’avale ; cet air pénètre dans les intestins, dont il sert à rougir les vaisseaux sanguins; et quand il a perdu la portion d’oxigène qu’il contient , le poisson le rend par le rectum ( f). La respiration des insectes a été examinée avec le plus grand soin par Âaussmann, qui a trouvé qu’ils absorbent du gaz oxi- gène qui est converti en acide carbonique, Il a même examiné Ja respiration de quelques vers, et il a vu qu'ils changent aussi l'oxigène en acide carbonique. Spallanzani à observé la même choselong-temps avant; maisila cru aussique plusieursmollusques absorbent du gaz azote, circonstance que nous devons laisser en doute, jusqu’à ce qu'elle ait été confirmée ou rejetée par des expériences subséquentes. J'ai remarqué plus haut, que la portion de sang qui sert à la reproduction des diflérentes parties du corps, est privée de matière colorante, et pénètre les ramifications les plus déliées des artères, d’où elle ne peut plus retourner dans l’intérieur du corps, et qu’elle exsude au travers des vaisseaux capillaires. C’est précisément à cet endroit que se forment les parties qui doivent être reproduites, après quoi la portion restante est ab- sorbée par un système particulier de vaisseaux, qui tirent de leurs fonctions le nom de vaisseaux absorbans, et qui se vident par le moyen des sécrétions et des excrétions. Ces vaisseaux sont placés dans toutes les parties du corps, leurs extrémités sont ouvertes et s'emparent, non seulement de la portion du sang décoloré après la reproduction, mais aussi des parties qui ont été détruites en exécutant leurs fonctions respectives, et con- 366 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE duisent par les intestins, les matières qui ont été préparées pour la régénération du sang. Ces vaisseaux qui sont si importans, quand on considère leurs fonctions, sont extrêmement petits et, par là même, très-difficiles à examiner anatomiquement, et plus difficiles encore à étre soumis à des expériences chimiques : nous n'avons, par là même, aucune connoissance de leur com- pe ni de l’action mécanique par laquelle ils conduisent es sécrétions. Leur sécrétion propre, la Iymphe variant beaucoup selon l'endroit d’où on l'extrait, est aussi peu connue. Nous n’en avons jusqu'à présent qu’une seule analy+e, qui nous a cependant procuré quelques connoissances importantes. Emimert£ et Reuss avoient établi que la lymphe ressemble au sérum pour les propriétés physiques, et que quand on lobserve au micros- cope composé, on voit que c'est une solution chimique com- plète, mais qu’elle s’épaissit au bout de quelque temps, et forme un coagulum qui est entièrement semblable à la fibrine du sang. Cette sécrélion contient, par conséquent, de la fibrine en disso- lution, d’où nous pouvons conclure que le sérum qui pénètre les vaisseaux capillaires de la nutrition, en contient aussi, et que si la fibrine se coagule dans une solution parfaite, la même chose doit avoir lieu pour le sang. Il seroit d’une grande conséquence pour la Chimie animale, de pouvoir comparer l'humeur des vaisseaux capillaires avant la sécrétion, et cette même humeur après qu’elle est passée dans les vaisseaux absorbans. 1] n’ÿ a pas de doute que l’on trouveroit des différences selon les diverses substances sécrétées ou pro- duites. Un autre objet du plus grand intérêt , qui nous manque dans l'examen du fluide des vaisseaux absorbans, c’est de con- noître la nature des parties sans usage qui ont été absorbées par ces vaisseaux , et l’on ne peut y parvenir que par ce moyen. L’examen du liquide des muscles et de l'urine me orte à croire que plusieurs substances se changent en acide actique ou phosphorique, et quelques autres substances ani- males qui sont solubles dans l’eau et l'alcool, et qui accompa- gnent les lactates dans les liquides du corps, et constituent lex- trait sirupeux que l’on obtient dans leur analyse. Si cela est, les liquides des vaisseaux absorbans, après la coagulation de l’albumine par l'ébullition et l’évaporation de l’eau, doivent donner une plus grande quantité d'extrait sirupeux que de sérum. Cette portion des liquides des vaisseaux capillaires, qui n’est pas destinée à être ramenée dans le sang, est portée au-dehors au ET D'HISTOIRE NATURELLE. 367 moyen des organes appelés sécréteurs et excréteurs. Les nou- veaux liquides qui sont formés dans ces organes au moÿen des parties constituantes du sang, ont souvent les propriétés les plus différentes; mais en les comparant plus exactement les unes avec les autres, jai trouvé qu’elles contiennent toutes un principe caractéristique, et que parmi elles la plus grande partie retient queique caractère de l’albumine ou de la fibrine qui servent à les former. Je leur ai donné des noms selon les humeurs dans lesquelles on les trouve, comme matière bilieuse, matière La- crymale, etc. Le liquide dans lequel ces substances caractéris- tiques se trouvent dissoutes, contient les sels du sang, et souvent ses alcalis, dans les mêmes proportions que dans le sang. Quel- ques-uns des liquides sécrétés sont aussi concentrés que le sang, par exemple la Die; d’autres sont beaucoup plus aqueux, mais aucun n'est plus concentré que le sang. Ces liquides sont alca- lins, quand avant d’être portés au-dehors du corps, ils doivent servir à quelque usage, ce sont les sécrétions; ils sont acides quand ils doivent être portés immédiatement hors du corps, ce sont les excrétions, comme /a sueur, l’urine, le lait; et Pacide libre qu'ils contiennent est toujours l'acide lactique. Ce que j'ai dit jusqu'ici constitue la somme de nos connois- sances, relativement aux deux systèmes d’où dépendent princi- palement la vie des animaux, {es nerfs et les vaisseaux san- £guins. En outre, les diverses parties du corps exécutent diflé- rentes opérations auxquelles elles sont destinées, et qui échappent É conséquent à notre vue, aussi bien que la manière dont eurs fonctions s’exécutent ; el nos recherches sont bornées à l’exa- men des substances qu’elles forment. Les parties intérieures du corps sont intimement liées les unes aux autres, et laissent seulement quelques inlerstices remplis d’une matière particulière qui, à cause de sa structure, porte Je nom de zissu cellulaire. Pour nous former une idée de cette matière, il faut la considérer comme un milieu destiné à em- pêcher qu'aucun espace ne vienne à se vider. Ce tissu cellulaire s’élend par conséquent sur tout le corps, se lie avec lui dans toutes ses parties, il est lui-même uni avec les portions inté- rieures de plusieurs de ces parties, par exemple avec les mus- cles. Sa nature n'a été jusqu'ici examinée qu'imparfaitement, et ce que nous en savons n’est pas le fruit de recherches par- ticulières, mais une collection d'observations faites par hasard , et d'où l'on a conclu que le tissu cellulaire, quand on l'a fait 368 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE bouillir lentement, se dissout peu à peu en grande partie, et que la solution se prend en gelée par lerefroidissement et contient e la gélatine. Plusieurs aulres matières animales, comme le cartilage et la peau, ont la même propriété; elles n’ont cependant pas la même texture et probablement la même composition, puisqu'elles ne se dissolvent pas complètement avec la même facihté, Cette gélatine ne doit pas exister dans les malières ani- males, c’est le produit de l'action de l’eau et de Pébullition. On a cherché, au moyen de linfusion de noix de galle, à s'assurer si l'opinion de l'existence de la gélatine dans le corps vivant, et sa présence dans les sécrétions, éloit erronée. Quoique plusieurs matières animales, autres que la gélatine, soient précipitées par le tannin, cependant le précipité formé avec la gélatine, a une propriété caractéristique qui ne permet pas de la confondre avec aucune autre, c’est de se réunir en une masse élastique qui, quand elle est sèche, devient dure et ca$sante. On ne peut obtenir avec Ja noix de galle, aucun précipité dans les diflérentes liqueurs animales, excepté l'urine, quand on les fait bouillir quelque temps avec un alcali; et alors la matière animale extraite de l'urine- par l'effet de lalcali et de l'ébullition, approche proba- blement davantage de la nature de la gélatine. Le tissu cellulaire contient dans de petites cellules, un liquide particulier que l’on peut , avec beaucoup de probabilité, regarder, quoiqu'il n'ait pas été examiné, comme de la même nature que celui qui se forme dans les différentes parties du corps dans l'hydropisie, les cloches des vésicatoires, etc. Il contient aussi dans quelques endroits, une graisse demi-fluide, dont la consis- tance varie dans les différentes parties, mais qui, pour ses pro- riétés chimiques, ressemble aux huiles grasses des végétaux. Dans les différentes manières de préparer celte graisse pour les arts, elle recoit quelques mélanges de matières étrangères, et éprouve quelques changemens de composition peu sensibles, mais qui lui font présenter plusieurs propriétés différentes. Une connoissance exacte de ces circonstances, quoiqu’elle ne soit pas essentielle à la Chimie animale, seroit cependant d’une grande con- séquence pour procurer avec plus de facilité un plus grand nombre d’espèces de graisses utiles. Parmi les produits de la distillation de la graisse, on obtient une eau acide fétide, que Cartheurse considéra comme un acide particulier qui, combiné avec l'huile, constitue la graisse. Segner et Xnape ont aussi examiné cetacide, et Von-Crell a écrit sur ce sujet un Traité particulier, dans lequel ET D'HISTOIRE NATURELLE. 369 lequel il examine ses propriétés et le nomme acide sébacique. Plusieurs autres chimistes ont ensuile proposé de nouveaux moyens pour l'obtenir, 1henard a montré, en dernier lieu, que cet acide consiste en un mélauge d'acide acétique et muriatique avec une huile empyreumatique d’une odeur très désagréable, qui y est dissoute. il a trouvé aussi dans cette huile un véri- table acide, que l’on obtient en faisant bouillir dans l’eau la graisse distillée : cet acide se précipite par le refroidi:sement, en petits cristaux granulaires. [1 la considéré comme étant d’une nature particulière, et il lui a donné le nom d’acide sébacique. Je lui ai trouvé depuis, à l'exception de quelques caractères extérieurs, toutes les propriétés de l’acide benzoïque, et j'ai regardé cet acide sébacique de Thenard, comme de l'acide ben- Zoïque imprégné de quelques produits de la distillation, qui lui donnent de l’edeur ainsi qu'à ses sels, et qui modilient leur saveur, . Quand une portion du tissu cellulaire est enflammée, celte inflammation prend le nom de phlegmasie. Ce tissu cellulaire commence alors à suppurer , la plus grande partie de ce qui est enflammé se change en une humeur particulière à laquelle on a donné le nom de pus, qui dissout les parties adjacentes, et qui, quand sa position le lui permet, se fait un passage au travers de la peau, On a fait sur ce pus plusieurs expériences chimiques, dont le but étoit seulement de le distinguer du mucus expectoré dans les maladies des poumons, et que les médecins regardent comme le meilleur caractère de la nature de la ma- ladie; mais, malgré toutes ces expériences, on n'est parvenu à aucun résultat satisfaisant. Cependant le mucus de la trachée- artère et des bronches a des caractères chimiques très-distincts de ceux du pus, puisqu'il est plus facilement soluble dans les acides, et qu'il y reste en dissolution, tandis que le pus demande des acides plus concentrés, et qu'après la dissolution il peut en être précipité par l’eau. La raison pour laquelle la méthode proposée par Darwin, Bruggmans, Grasnuyer el d'autres, ne donne pas de résultats certains, c'est que l'on n’a pas établi de distinction bien marquée entre le mucuset le pus. Ils ont toujours considéré comme mucus, Ja matière jaune que l’on expectore après la crise de l’inflammation des poumons, tant qu'il n'y a pas destruction d’une partie de cet organe. D'un autre côté, ils considèrent seulement comme pus, l'humeur produite dans ua abcès ou dans un ulcère suppurant des poumons. C’est Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814. Bbb 970 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE cependantune erreur, car ces deux substances sont du pus (formé EE le sang coloré qui pendant l’inflammation est porté dans. es vaisseaux capillaires) qui exsude des membranes de la trachée, mélé avec du mucus, qui n’a d'autre issue dans le tissu cel- lulaire, que celle qu’il s’ouvre lui-même par la dissolution des parties environnantes : alors, quand on l’analyse chimiquement, on trouve qu’il contient plus de principes constituâns que la matière produite sur lamembrane muqueuse. Je me suisconvaincu que par un examen comparatif on peut découvrir la différence de ces deux humeurs, et que le médecin, aidé de l'analyse de la matière de l’expectoration, peut déterminer & elle provient d’un ulcère ouvert et suppurant, ou si elle est formée seulement par la membrane muqueuse; mais jusqu'ici nous n'avons aucun travail sur ce sujet. George Pearson a décrit dernièrement les différentes espèces d’expectorations muqueuses, et il a parfaite- ment examiné l’action qu’exercent sur elles la chaleur, l’eau, l'alcool et l'acide acétique : il a aussi tenté sur leur analyse, quelques essais qui montrent des recherches soignées et exactes; mais comme il ne connoît pas plusieurs de ces substances qui se trouvent généralement dans les liquides animaux, et qu'il semble avoir manqué d'expériences, qui dans toutes les recher- ches sont si nécessaires pour se former un jugement sain sur ce que l’on voit; ces recherches analytiques n'ont pas produit les résultats que l’on auroit pu en attendre, si elles eussent été faites par un chimiste qui eût analysé d’autres fluides animaux. Il a cependant, parmi ces résultats, quelques-uns qui méritent d'être remarqués. Il a observé dans le mucus expectoré dans de longues toux catarrhales, délayé dans l’eau , et examiné avec un bon microscope, des amas de petits corps globulaires qui s’agitent de côté et d'autre , comme s’ils étoient doués d’un mou- vement spontané. Ces globules sont un peu plus gros que ceux de la matière colorante du sang, et ne peuvent étre détruits ni pas la trituration, ni par l’ébullition, ni en les desséchant ou les redissolvant, ni par la coagulation avec les acides mi- néraux, l'alcool, l’alun, l’éther, le tanniu, ni par l'addition d’une petite quantité d’alcali caustique; de sorte que cette liqueur reste trouble, et que les globules ne sont pas détruits, même de un commencement de putréfaction; mais ils le sont par ‘acide sulfurique concentré, ou par leur alcali caustique, quand on en emploie une assez grande quantité pour rendre la solution claire, ou en chauffant la matière sèche jusqu’à ce qu’elle com- ET D'HISTOIRE NATURELLE. 37€ mence à être charbonnée. L'auteur trouva aussi ces globules dans le pus expectoré dans les cas de consomption bien carac- térisés; mais la supposition qu'il fit que c'étoit du carbone or- ganisé, ne nous semble pas heureuse. 11 a vu aussi que plus les expectorations provenoient de mal:dies récentes, plus elles contenoient de sels, et que plus la maladie éloit ancienne, plus les expectorations attiroient l’humidité de l'air; mais cette der- nière circonstance n'étoit probablement qu’une conséquence de la petite quantité de matières fixes dont les parties constituantes étoient entourées, qui attiroient l'humidité Quand le docteur Pearson trouva dans ses expériences l’extrait sirvupeux, que J'ai Poe dans les analyses du sang, de la chair musculaire, du ait et de l’urine, être composé de muriate de soude, de lactate alcalin et d'une matière animale particulière, il le considéra comme un oxide animal particulier qui possède Ja propriété commune, à tous les acides, de neutraliser une certaine quantité d’alcali, si complètement, qu'on ne peut le découvrir par aucun réactif. Il trouva en outre dans les cendres du pus, de la silice et de Poxide de fer. Les pertes que font journellement les humeurs du corps par les excrétions, et celles qu'éprouve le sang par la reproduction des diverses parties, sont réparées, jour par Jour, par la nourri- ture que prennent les animaux. On a beaucoup cherché à ex- pliquer chimiquement les changemens qui ont lieu daus l'estomac et les intestins; et dans ce cas, comme pour tout le reste, on a été obligé de s'arrêter là où le système nerveux déte’mine action chimique. è Les beaux travaux de Pichat sur les meï*branes, nous ont donné quelques connoissances plus précises sur les vaisseaux dans lesquels s'exécute le procédé de la digestion, et nous ont mis à même de connoître d’une manière plus exacte, la composition chimique des membranes des vaisseaux. Tout le canal intestinal et tous les réservoirs avec leurs canaux excréteurs qui se lient avec lui, sont recouverts à l'intérieur d’une membrane muqueuse, ainsi appelée , parce qu’elle est elle-même couverte d’un mucus qui la défend de l’action des corps avec lesquels elle se trouve en contact. Bichat a examiné d'une manière satisfaisante, la composition chimique du mucus de cette membrane : son prin- cipal caractère est son insolubilité dans l’eau bouillante : on ne peut en tirer de gélatine, comme des membranes séreuses et du tissu cellulaire ; et de toutes les parties du corps , excepté le cer- Bbb 2 372 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE veau, elle est la plus promptement détruite par la macéralion dans l’eau froide ou laction des acides, Le mucus qui recouvre la membrane est presque le même dans toutes les parties, quant aux caractères physiques; mais pour toutes les propriétés chi- miques, il diffère selon la nature des substances avec lesquelles il doit être en contact. Je me suis moi-même assuré par des expériences sur le mucus, que pour plusieurs propriétés chimi- ques, il est diflérent dans le nez, la trachée-artère, la vésicule du fiel, la vessie et les intestins, qui ne pourroient sans cela remplir les fonctions auxquelles ils sont destinés. Le mucus n’est pas une solution, mais il contient un corps solide qui a la propriété de se gonfler dans l’eau et de former une masse coriace et demi- liquide qui ne se dissout pas dans une grande quantité d’eau, et que l’on peut priver de ce liquide en la plaçant sur du papier brouillard, et qui devient alors plus dense. Le liquide dont le mucus est pénétré, n’est autre chose que du sérum, qui a ce- pendant perdu presque toute son albumine, et qui ne retient que ses autres parties constituantes. La substance particulière qui forme la base du mucus, par exemple de celui du nez, est soluble dans les acides et les alcalis, quoique souvent plus len- tement dans ces derniers corps; tandis que celui de la vésicule du fiel est très-facilement dissous par les alcalis et complètement précipité par les acides. À cause de cette propriété, le mucus dissous dans la bile, est précipité par les acides dans le chyle, quand la bile est décomposée pendant la digestion. Si le mucus de la vésicule du fiel avoit les mêmes propriétés que celui de la trachée-artère et du nez, il resteroit en solution dans le chyle, et par là il seroit moins utile dans l’économie animale. Plusieurs auteurs ont parlé d’un mucus animal différent du mucus des membranes, et ont supposé qu’on le trouvoit dans les fluides animaux. Je puis dire que dans aucune de mes expériences Je n'ai rencontré aucune matière à laquelle on pût donner cenom, ou qui eût des propriétés semblables à celles de la substance que Hatchett, Bostock, Jordan et d’autres ont désignéesous ce nom. Il me paroit probable que plusieurs auteurs ont donné le nom de mucus à des matières qui n’étoient pas bien connues. Le célèbre Fourcroy a fait, quelques temps avant sa: mort, un Traité sur le mucus, considéré dans le sens que J'ai donné jus- qu'ici à ce mot; mais son Traité n’étoit.pas le résultat de re- cherches directes, mais simplement d'observations détachées ; et par là, il est tombé dans une erreur, qui n'étoit pas rare chez ET D'HISTOIRE NATURELLE. 373 lui, c’est de tirer des conclusions générales et étendues, d’ob- servations souvent incertaines et quelquefois inexactes, de sorte que le lecteur crédule et sans expérience étoit trompé par ces généralités ingénieuses et intéressantes. Dans ce Traité, il a gé- néralisé de telle manière l’idée de mucus, que d’après lui, l’épi- derme, les ongles, la soie, les poils et d'autres substances qui possèdent des propriétés chimiques et physiologiques très-diffé- rentes, ne seroient autre chose que du mucus durci. Outre la membrane muqueuse, le canal intestinal est entouré par une membrane musculaire et par une dense et cellulaire, qui ressemblent, pour leurs’ propriétés chimiques, celle-ci au üssu cellulaire, celle-là aux muscles. Dans toute sa surface ex- térieure, depuis la gorge jusqu’au rectum, il est entouré par la membrane séreuse de l’abdomen. Ces membranes séreuses qui exis- tent dans toutes les cavités du corps (à eh juger par les expériences. chimiques incomplètes que l’on a faites sur elles), sont formées de la même base que le tissu cellulaire : on les appelle sérerses, parce qu’elles sont continuellément humeéctées' par un liquide séreux qui les empêche d’adhérer. Ce liquide ÿ existe en quantité considérable ; on l’aprincipalementrecueilli dans les hydropisies, et jamais on ne l’a examiné dans l’état de santé : nous avons lieu de croire, cependant, que sa composition ne varie pas dans ces circonstances, D’après quelques expériences que j’aï ifaités moi- même sur ce liquide, il consiste en sérum qui a perdu la plus grande partie de son albumine, dont il rétient cependant une assez grande quantité, pour se coaguler légérement péndant. l’ébullition. Lorsqu'on l’évapore, il s’en dépose du sel commun qui cristallise, et de la matière extractive brune qui enduit les cristaux, et qui est formée d’alcali , de lactate alcalin , et de la matière animale extractive qui les’accotmpagne constamment. 3 : EN \ {: > £ CLILANOA } o NOTES DU TRADUCTEUR. . (a) M. Vauquelin, dans un beau Mémoire publié.il y a deux ans (Annales du Muséum d'Histoire naturelle, tome VIT), a donné une analyse très-exacte «de la: matière cérébrale; ellé contient deux matières Igrassés de nature) particulières] l’une blanche et l’autré rouge, de losmazône, de l'albumine, des sols ;: du phospliore et-du soufre: * li : 374 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE La matière animale blanche est molle, poissense, concrèté, son aspect est brillant et satiné; elle tache le papier comme de l'huile; elle fond à la chaleur, se fonce en couleur; elle est so- luble dans l'alcool chaud et se dépose presqu'entièrement par le refroidissement ; exposée au soleil, cette substance prend une couieur jaune; sa dissolution alcoolique brûle avec flamme et fuligiaosité, le résida de la combustion contient de l'acide phos- phorique, et comme on ne rencontre dans cette substance, ni acide phosphorique, ni phosphate, elle doit, comme Ja laite de carpe, contenir du phosphore. : La seconde matière grasse a une couleur rouge brune, son odeur est la même que celle du cerveau, elle a une saveur de graisse rance; quand on la triture avec l'eau , elle forme une espèce d'émulsion homogène, la matière grasse ne s’en sépare que len- tement, et les acides, ainsi que la noix de galle, en précipitent des flocons blancs opaques. L'alcool la dissout, exceplé quelques flocons; mise sur les charboss, elle fond, se boursouffle, donne d’abord une odeur de matières animales brûlées, puis enfin, celle de la graisse. en vapeurs. Quand on la calcine dans un creuset de platine, elle donne de l'acide phosphorique, et par conséquent elle doit contenir du phosphore, (@) M. Thenard avoit annoucé il y a iong-temps (Mémoires d’Arcueël, t. 11,p.23), la propriété qu'ont la matière caseuse , le pycromel, l’albumine, la gélatine et l'urée de se combiner avec les acides. Le caseum se combine facilement aux acides et peut être pré- cipité du lait par le moyen de ces substances, mais en le lavant on peut lui enlever l'acide qu'il contient. L’albumine se combine plus facilement aux acides : si l'acide est saturé d’eau, il en résulte des combinaisons plus ou moins insolubles qui se dissolvent quand on les traite par l'ammoniaque ou tout autre alcali, et dans lesquelles lalbumine n'est pas al- térée. Quand l’acide est concentré et très-puissant , les précipités sont acides, et l’albumine y est au même éclat que lorsqu'on la coagule par le feu : en les traitant par l'ammoniaque étendue, on enlève l'acide , et l’albumine reste sous forme de magma épais. Le pycromel se combine facilement avec les acides; quand d n'y a pas d’excès d'acide, la combinaison est insoluble, elle est Soiuble, au contraire, quand il y en a un excès. Les acides ET D'HISTOIRE NATURELLE. 379 sulfurique, nitrique et muriatique forment principalement des composés solubles. ; ; L'acide nitrique se combine facilement avec l’urée, comm on Pavoit observé. . il La gélatine se combine surtout avec le chlore (gaz muriatique oxigéné); quand on fait passer un courant de ce gaz dans une dissolutson de gélatine, elle se trouble, précipite des flocons filamenteux , nacrés, très-flexibles et très- élastiques. Zouëllon- Lagrange les avoit regardés comme de la gélatine oxigénée, mais c’est une combinaison; elle est insipide, insoluble dans l’eau et l'alcool, imputrescible, foiblement acide; elle dégage pendant plusieurs jours du chlore (gaz muriatique oxigéné), et surtout par la chaleur ; enfin elle est soluble dans les alcalis et il se forme des muriates. (c) M. Brandt est parvenu, il y a quelque temps, à obtenir la matière colorante du sang : c’est une matière animale parti- culière ; on l'extrait en traitant le caillot du sang par de acide sulfurique étendu de quatre ou cinq fois son poids d’eau, et ex- posant le mélange à une douce chaleur, la matière colorante se dissout; on la précipite par le moyen de l’alcool, et on l’obtient alors dans son état de pureté; elle a une belle couleur rouge, et peut former des teintures solides en se combinant avec le muriate d’étain et le tannin. ic (d) Quand M. Humphry Davy fit ses expériences sur la res- piration du protoxide d'azote (gaz oxide nitreux), il annonça qu’il procuroit une joie extraordinaire; M. Vauquelin répéta l'expérience et se ‘trouva très-incommodé après avoir respiré unè douzaine de pintes de gaz; M. Thenard qui en avoit avalé à peu près huit pintes, eut aussi un grand mai de tête; Il paroît que ce gaz ne:produit pas'le même effet sur tous Les individus qui le respirent. | (e) Le docteur Wollaston (Annales de Chimie;t.LXXXIV, pag. 226 ) s'est assuré, par de nouvelles expériences, qu'ilen'existe pas de sucre dans le sérum du sang des diabétiques, ou du moins qu’il n’en contient pas le trentième de ce qu'it en a retiré de l'urine du même individu. | ) (SF) MM. Hümboïdt etProvencal (Mérroires d’Arcueil, tome IT, pag. 359) ont fait des expéitiences ‘trës-étendues sur Ja réspiration des poissôns + près avoir déterminé, le plus exac: tement possible , la nature de air contenu dans un volume d’eau 376 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE connu, ils en ont rempli des cloches où ils ont placé les poissons ; interceptant la communication de l'air avec du mercure , ils ont laissé les poissons plusieurs heures dans cette eau; puis la chauflant, ils en ont retiré l'air pour l’analyser. La quantité d’air que contient l'eau s'élève à 2Z du volume de ce liquide, et il y existe #2 d'oxigène. Les poissons souffrent quand leur respiration est suspendue quelques instans, mais ces soufirances paroissent dues plutôt à là diminution ra pide de l’oxigène dissous, qu’à l’acide carbonique produit, puisque, quoique cet acide agisse fortement sur le sys- ième nerveux de ces animaux, soit à l’état de gaz, soit quand leurs branchies touchent l’eau qui en est chargée, ces effets mont lieu que quand l’eau en contient 3, et souvent le dégagement de l'acide carbonique est au-dessous d’un centième. Quand l’eau est parfaitement privée d’air, elle agit sur les “Poissons comme une substance délétére ; au beut de peu de temps 1ls souflrent, éprouvent ensuite des convulsions , et enfin restent sans mouvement, et meurent si on ne les replace dans une eau contenant de l'air. Cependant les poissons peuvent encore respirer dans une eau ne contenant que 0,0002 de son volume d'oxigène dissous. La quantité d'acide carbonique produit ne représente pas plus des+ de l’oxigène absorbé, et souvent l’oxigène absorbé est double de l'acide carbonique produit, Les poissons absorbent aussi de l'azote par leur respiration, cette absorption est à celle de loxigène :: 1 : 2 et quelquefois ide 4 Il est prouvé par l'expérience suivante, que les poissons res- pirent non-seulement par leurs branchies , mais aussi par le corps et la queue, On a fait passer la tête de tanches très-vives dans des colliers de liége doublés de toile cirée, on a placé ces poissons dans des vases cylindriques, de manière que le collier en formoit le cou- vercle et que la tête ne touchoit pas l'eau, on a recouvert le tout d’une couche de mercure; les tanches ont vécu peu souf- frantes pendant 5 heures; l’eau distillée a donné un air que l’on a analysé, et l’on a vu que la respiration étoit la même que par les branchies, seulement qu’il y avoit une diflérence dans les quantités ET D'HISTOIRE NATURELLE. 377 quantités d'azote et d'oxigène absorbés et d’acide carbonique produit, Les poissons placés dans une pelite quantité d'eau en contact avec l'air, absorbent d'abord loxigène de celte eau, puis ils aspirent une portion de l'air à l’état élastique, mais ils souflrent dans ce cas. Placés dans l'air, les poissons absorbent des quantités d’oxigéne égales à celles qu'ils consument dans le même temps, mais ils ouvrent leurs opercules bien plus que dans l'eau, et doivent souffrir, parce que dans l'air l’oxigène est vingt fois plus con- densé que dans l’eau. Ils expirent promptement quand leur corps seul est plongé dans l'air ou l’oxigène. Îls meurent promptement dans l’acide carbonique, et soufirent davantage dans l'hydrogène que dans l'azote; ils ferment leurs opercules comme pour se garantir de leur action. (La suite dans le Cahier suivant.) Tome LXXIX. NOVEMBRE an :8r4. Ccc “be _OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES : _ cr ï 5 D | © CENTIGRADE. Dre 5 = D NS “| Maximuw. | Minrmum. |A Mrnr. Maximum. | MiNnimun. CURE mMipi.| # heures. o | heures: ° heures. mill, | heures. mill. mill. e 1là3s. +17,00|à 64 m.—+1o,50|#16,25|à91s........ GO) EE CHORERS 755,30|756,00| 18,7 21a3s. <+14,75|à 65m.+ 5,50|+12,75|à 104 s.......760,18[6+m........757;64|758,58| 16,1 3là3s. +14,50/à 6Ëm.+ 4,25|+12,40/à 17 À s....... 763,62|à 6 + m.......760,80|761,68| 15,3 gla3s. +H15,25à61m,.—+ 5,25|+13,25|à 10 m........763,52|à minuit... .761,84|763,44| 15,5 5[à3s. <+16,70|à 64 m.+ 4,00|+13,85|à 7 3 m....... 761,05 A9 25... 758,62|760,24| 15,9 6|à 3s. +17,10|à 6 Em. + 6,00|+16,25|à9+ m....... 757,521à 6 s........ ..755,92/756,84! 16,1 7là midi. H13,75làos. + 8,00|+-13,75|à 5£s........ 757,80|à 6 £ m...... .756,40|757:38| 15,7 Ba 3s. +12,00à 61 m.+ 4,50|HL12,00/à9 ks......….759,72[à 3 s..........758,08|759,48] 15,4 glà midi. +11,75|à 6 Fm.+ 2,00|+11,75|à 11 5..... *...763,00|à 6 Fm....... 760,00|761,06, 14,6 1o|à 3s. <+11,50[à 62m. 1,90/+10,00|à midi........ 765,40|à 6 À m....... 764,06|765,40| 13,9 11fà3s. 13,256 m.— 0,50|+12,00|à 6: m.......763,50|À 9 s......... 759,00/762,40| 13,5 liolàds. —+18,65/à 61 m.+ 2,00|+16,40|à 8im....... 756,34|à 104s....... 754,54|756,16| 13,9 13]à3s. +19,10[à6 Lm.+ 5,25 +18,40/à 8£m....... 754,22]À 9215...... ..750,00[752,72| 15,2 14jà 35. +-19,00|à ro 15.413,25] +18,75|à 10 £ s...,... 750>5O| A 315.422. 749.58|750;08| 17,2 19/à 35. <+17,50|461m.—+10,50|+16,65/à midi. ......755,20|à 10 5......... 751,80|755,02| 16,6 16|à midi. 14,750 ? s. + 7,50] +14,75là9%s3......2.. 758,02|à 6 : m....... 750,20/753:80| 16,1 17/à midi. +14,50|à 62 m.+ 4,75] +14,50là 6 1 m....... 756,80|à 101 s.......753,54|755:96| 15,0 18,855. +16,00|26m.—+ 4,00|+16,25|à 6: m....... 750,18[À 5 2s........ 746,90|748,80! 15,5 19]Jà midi. +14,50|à 62 m.+ 9,00!+r4,50 à 35.......... 746,28] à 9 s.......... 743261745152) 15,7 AI2oyà 3 s. <+13,60/a92s. + 6,00+12,25|à9%s........ 752,12|à 6 $£m.......74692/749:32| 14,5 21/à midi. Æ12,75|à 62m. 1,75|+12,75à92s........757,72l262m....... 754,10|795,88| 13,5 22/à midi. 415,25/à 6 Ÿ m.—+ 4,75|15,25/à 8 5 m....... 758, 44là os. ....:. 756,00/758,10| 14,7 d|23/à midi. +13,25|à 115. + 6,75|13,25|à 115.. ...... 753,20|à midi. .......751,30|751:d6| 14,9 24|à midi, 411,25|à 63 m.+ 3,25|r1,25|à 10m........757,20|à 92s........ 755,08|75720| 13,7 25|à midi, Ær1,50là9?s. Æ 4,o0l+1x,50là 7 m........748,50|à 3s52......... 741,88/742 32| 13,3 [26/à midi. + 9,007 m. + 4,75|+ 9oc[à9s......... 750,18|à 7 m........745,28|747:50| 12,5 27|à midi. + 7,6|à 7m. + 7,00|+ 7,6o[à 105..,......757,12/à7 m.........792,28|72420| 11,6 AI261à3s.: + 8,007 m. + 1,50 7,00|à8 + m....... 759,04|à 9 3 S........ 755,86|756;22| 10,7 Hi20/43s. “+io,75à7m. + 7,50|Hro,oojà 94s.........754,90|à midi. ....... 753,72,75372 11,1 Disoh3s. +12,25)à 7m. +10,50|H11,90|à midi........ 757,90|à 104 5S....... 756,54 757190| 12,0 {|31là midi. +Hiooco!à9o1s. Æ 8:75l+10,00là 9£s.........756,54là 7 m......... 755,30 756,20 11,8 Moyennes.+13,85! + 5,63|+13,10| 756,72; 753,961755,57| 14,5} EEE 6 © © | RECAPITULATIO N. Millim. Plus grande élévation du mercure. .... 765,40 le 10 Moindreélévation du mercure......... 741,86 le 25 Plus grand degré de chaleur.......... +19: le 13 Moindre degré de chaleur............ — 0,5 le 17 Nombre de jours beaux....... 12 de COUVERIS.. 2e 19 deplures. ee 0... 19 déivent-- CEE Peee 31 GE OS 20066200 3 de tonnerre......... SE de brouillard. ......... 23 deluele serrer o de grêle told Spas Le Nora. Nous continuerons cette année à exprimer la température au degré du thermomètre cen- centièmes de millimètre, Comme les observations faites à midi sont ordinairement celles qu'on le thermomètre de correction. À la plus grande et à la plus petite élévation du baromètre conclus de l'ensemble des observations, d’où il sera aisé de déter la température moyenne conséquent, son élévation au-dessus du niveau de la mer. La température des caves est également A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. | POINTS VARIATIONS DE L'ATMOSPHÉPE. : |Hyc. Uk a | VENTS. ee). A PE LUNAIRES. TE | Ë À 7 LE MATIN. A MIDI. | HERSOEUR 1h I N.E. fort. Bcau ciel, Lég. nuages. eau ciel, 2 Nuagcux. Légères vapeurs. Idem, 3 Superbe. Superbe. laem. 4 Idem. Îderr, ldem. 5 L 2 Idem , léger br. Nuageux. Couvert. 6| 82/S-0. D.Q.àoh8’s.| Couvert, petite pluie, | Idem, Nuageux, 7| 92 laem. Lune périgée, | Pluie fine. Pluie. Idem. ë| 6910.-N-0, Nuageux, brouillard.|Nuageux. Idem. ol 711N. Idem , gelée bl]. Très-nuageux. Beau ciel, 10| 7o| Idem. Superbe, br. , gel. bl. | Zdem. Idem. 11] 611S-E. Nuageux, brouillard.|Nuaseux. Idem. 12] 88|E. Ciel voilé , brouillard. |Ciel voilé. ldem. 13] 77 |S-S-E. N.Làroh57m| Vapeurs , brouillard.|Légers nuages. Pluie à 6h. E 14] 8 |S. Pluie, \ég. brouillard.|[ Nuageux. Pluie par intervalles.|Ë 15| 821S-0. Nuageux. Idem. Nuageux. 16| 79 |N-0. Pluie, brouillard. Très-nuageux. Idem. 17| 60 1[S. Nuageux, brouillard.| Légérement couvert.| Jam. 18| 8515. fort, Idem. Légers nuages. Pluie à 7 b, 19] 84| Idem, Pluie , brouillard. |Nuageux. Pluie. ù 20] 8o|S-0. Lune apogée. |Couvert, Idem. Pluie , tonn., éclairs. 21] 64| Zdem. |P.Q.38h58m.| Nuageux, brouillard,| Jdem. Nuageux. 22) 91 Idem Idem. Idem. Pluie. 23] 84]0-S-0, Pluie fine, brouillard.| dem. Nuageux, grêle à 3h. 24] 7810. Nuageux, brouillard.| Jde. Couvert. 25] 85|S-0. Pluie , brouillard. Idem. Très-nuageux. 26| 84 /|N-E. Idem. Idem. Couvert. 27| 92/N-0. Idem. Pluie. Idem. 28| g1|S. Brouillard épais. Couvert, brouillard. | Pluie. 29| 101 |E. P.L.ioh25/m.| dem. Pluie. Idem. 30| 97|N-E, Idem. Couvert, brouillard. |Couvert, brouillard. 31} 9olE. Couvert, brouillard. | Idem. Idem. Li DE RÉCAPITULATION. h'AÉOSCO OOo CE 02 ÉD TAC tootc 7 1Horoccotonetide 2 Jours dontle veat a soufflé du = Fes AT en e SOLE en met : 7 (DASE HE Shen 3 NEO Sarre encre 2 le 1° 12°,0976 Therm. des caves le 16 12°,0976 Eau de pluie tombée dans le cours de ce mois, 33*"o=— 1 p. 2 lig. 6 dixièmes. tigrade , et la hauteur du baromètre suivant l'échelle métrique, c'est-à-dire en millimètres et emploie généralement dans les déterminations des hauteurs par le baromètre, on a mis à côté et du thermomètre, observés dans le mois, on a substitué le #7axzimum et le minimum moyens, du mois et de l'année, ainsi que la hauteur moyenne du baromètre de l'Observatoire de Paris et par exprimée en degrés centésimaux , afin de rendre ce Tableau uniforme. 380 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE EE | SUITE DE L'ESSAI SUR LES TABLES DE DEGRÉS DE CERTITUDE, ET DE PROBABILITÉ DES CONNOISSANCES HUMAINES ; Par J. C. DELAMÉTHERIE. Nous avons vu précédemment ( Cahier d'août, pag. r41) que l'être sensible ayant un unique sentiment d’en éprouver plusieurs, doit être un, moyws, monos. Nous allons développer les qualités que les analogies nous disent appartenir à ces êtres sensibles 720705. Je sens que mes sensations sont susceptibles de plus ou de moins d'intensité. Probabilité de l’analogie que la série des nombres naturels 1.2.9.... $ peut exprimer ces sensations. S —2 Probabilité de l’analogie que les sensations des autres hommes sont également susceptibles de plus et de moins. 8 —z Probabilité de l’analogie que les animaux des classes supé- rieures, les oiseaux, les mammaux...,tels que l'éléphant, les chiens, les singes..., éprouvent des sensations ana- logues à celles des hommes , et également susceptibles de plus et de moins. D Probabilité de l'analogie que les degrés d'intensité des sen- sations de ces animaux peuvent également être exprimées par la série des nombres naturels 1.2.3... $ ÿ —2 Probabilité de lanalogie que quelques animaux des classes inférieures, tels que les polypes, les radiaires... ne pa- ET D'HISTOIRE NATURELLE. roissent pas avoir le même nombre de sens que ceux des classes supérieures, les oiséaux, les mammaux..., Probabilité de l’analogie que les végélaux, tels que les ére- mnelles..., éprouvent des sensations. Probabilité de l’analogie que les sensations des végétaux ont , toutes choses égales d’ailleurs, moins d'intensité que celles des animaux. Probabilité de l’analogie que les sensations des animaux des classes inférieures ne sont pas susceptibles des mêmes degrés d'intensité, que celles des animaux des classes supérieures, Probabilité de l’analogie que certains animaux des classes inférieures peuvent n'avoir qu’un sens, et par conséquent n'éprouver qu’une espèce de sensation. Probabilité de l’analogie que les sensations de ces dernières espèces d'animaux ont très-peu d'intensité. Probabilité de l’analogie qu’il y a sur les autres globes si nombreux , des êtres organisés analogues à ceux qui vivent sur le globe terrestre. Probabilité de Panalogie que parmi les êtres organisés de ces autres globes, il y en a qui ont un bien plus grand nombre de sens que ceux qui sont sur le globe terrestre. Probabilité de l’analogie que parmi les êtres organisés des autres globes, quelques-uns ont tous les sens possibles, et par conséquent sont affectés de toutes les sensations pos- sibles. Probabilité de l’analogie que ces grands globes sont des animaux = 00,000,001. Probabilité de l’analogie que la série des êtres sensibles S qui existent sur ces diflérens globes, peut être exprimée par la série des nombres naturels 18.28.3S... $S. Celui de ces êtres sensibles qui a le moins de sensations sera 15. | Celui de ces êtres sensibles qui éprouvera toutes les sensations possibles, et à tous les degrés, sera &@S. Probabilité de l’analogie que les êtres étendus, ou, CORPS, couæ, soma, difièrent les uns des autres par leur vo- lume, par leur masse, par leur figure, par leurs forces propres, 38t «A 382 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Probabilité de l'analopie que ces différens êtres étendus ou corps peuvent être exprimés comme les êtres sensibles, par la série des nombres naturels 1.2.3,..$. æ Probabilité de l’analogie que la mémoire dépend entièrement du corps, puisqu'elle en éprouve toutes les influences. x Probabilité de l’analogie que l'hypothèse des EIDOLONS, faite par les anciens philosophes, n’est pas fondée. T Les anciens philosophes, tels que Hornère , Socrate, Platon, Cicéron... supposoient que le principe sentant, intelligent, le Auyn, le pseuche, le vwc, le nous, mens, ame, le @peos, le phreues, V’'entendement, l'animus, l'esprit... étoient uuis à deux corps. L'un éloit le corps grossier qui naît, périt.... L'autre étoit un corps aérien composé de substances aéri- formes, de feu, d'air, dit Platon, liv. x des Lois. Homere appelle ce corps ad'olev, eidolon, image, parce qu'il ressembloit entièrement au corps grossier dont il étoit l'image. Cet eidolon demeuroit, après la mort, toujours uni au 5 ie s S phrenes, au pseuche...,et lui conservoit la mémoire, Da Homère, Zliade, liv. xxXI11, en racontant qu'Achille vit en songe son ami Patrocle qui avoit été tué, et qui lui parloit, dit : « [le voyoit, il le serroit dans ses bras, il l'embrassoit , lui » parloit...;» et ensuite il se réveille, et ne voyant plus rien, il s’écrie : « Il est donc vrai que les ames subsistent encore É ; he » dans les Enfers après Jeur mort; mais elles ne sont que l’image » adwAar des corps qu’elles ont animés, dun xei adorer. » Homère , en racontant (Odyssée, liv. x11) la descente d'Ulysse D s A , 12 aux Enfers, dit : Ulysse y reconnoît tous les héros qu'il a vus au siége de Troie, et qui y ont élé tués; 1? leur parle, ils lui répondent, ..; mais ce ne sont que leurs eidolons , leurs inages. Orphée descendant aux Enfers, y voit sa chère Eurydice..., mais ce n’est que son eëdolon... son image. C’est sur ces fictions, des eidolons, qu’étoit fondée toute la philosophie des anciens sur ces objets. Ils supposoient des eidolons , c'est-à-dire des corps aériens aux sylphes, aux génies, aux gnomes.... Ces eidolons étoient ordinairement invisibles aux hommes. . G£ cependant dans quelques circonstances ils pouvoient en être ÉT D'HISTOIRE NATURELLE, 583 äpercus, comme dans les songes, dans les visions, les apparitions des morts...: c'étoient les ombres, les fantômes. Mais j'ai fait voir dans mon ouvrage sur la Nature des Etres existans, où j'ai développé ce point fondamental de la phi- losophie des anciens philosophes de la Grèce, qui paroissoient lavoir puisé chez les Égyptiens, que cette hypothèse des e/dolons n'étoit appuyée sur aucunes preuves. Probabilité de l’analogie qu’il existe des eidolons, zéro. o Probabilité de l’analogie que les événemens arrivent sui- vant la volonté des êtres sensibles en raison de leur intelligence. 2 L'observation nous prouve que les animaux qui ont le plus d'intelligence, arrivent plutôt à leur but que les autres...: c’est un fait. Probabilité de l’analogie que l'être sensible n’agit que pour ce qui lui paroît dans le moment lui procurer du plaisir, d’après ce que lui rappelle la mémoire. x Probabilité de lanalogie que les principes de la vertu sont les plus sûrs moyens pour rendre l’homme heureux. #8 —2 C’est ce que j'ai prouvé dans mon ouvrage de l'Homme con- sidéré moralement, C’est d’après ce principe que j'ai prouvé qu'on peut soumettre au calcul toutes nos actions. Je veux, par exemple, aller au spectacle : La mémoire me dit que j’y aurai tel plaisir — 100. Ce plaisir rappelé par la mémoire, sera moindre que 100 : supposons que la force de la mémoire dans celte circonstance ne soit que +: ce plaisir ne sera donc que — 50. Supposons que les peines à éprouver pour aller à ce spectacle soient x. La volonté pour aller à ce spectacle sera done — 5o — x. C’est d’après ces principes que j'ai prouvé qu'on peut sou- mettre au calcul la grandeur d’ame (Principes de la Philoso- phie naturelle, tome I, pag. 77). « Des sentimens très-vifs, dis-je, en détruisent d'autres qui le sont moins: par conséquent un être sensible soufirira volontiers une petite douleur pour se procurer de grands plaisirs. C’est ce 384 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE qui constitue la grandeur d’ame ou magnanimité ; elle sera égale le plaisir rappelé par la mémoire, moins la douleur présente qu’on a à soufrir pour obtenir. ce plaisir. Ainsi la grandeur d'ame sera proportionnelle au degré d'énergie de la mémoire, qui rappellera avec plus ou moins de force le plaisir futur pour détruire l'impression de la douleur présente, Lorsque Ja mémoire sera trop foible, ce sera la pusillanimité ou défaut de grandeur d’ame, Soit le plaisir qu’on espère 2S X 7e X d (c'est-à-dire des sen- timens agréablesæS multiplié par Jeur nombre z. multiplié par leur durée d), égal cent = 100 : Que le degré de la mémoire soit au maxèmum, par conséquent ne fasse rien perdre aux sentimens : Que la douleur D pour obtenir ce plaisir égale dix = 10. On aura dans cette hypothèse, pour expression de la grandeut d'ame, 100 —10— 90. Appelant M cette magnanimité, On aura M—100—10—90. Mais si la mémoire au lieu d’être maximum, n'en étoil que Ja moitié, le plaisir à espérer ne seroit plus que = 50; donc êlant 10 pour Ja douleur, M=—50—10— 40. Enfin sila mémoire avoit vingt fois moins de force, le plaisir à espérer ne seroit plus que 5. Ainsi M feroit —=5—10——+ 0, c'est-à-dire que la pusillanimité p seroit — 2. Nous ne connoissons point ; ni ne pouvons connoître le @Péves » le phrenes, le Juxn, le pseuche , le væs , le nous, l'anëmus..-. l'esprit. Nous ne connoissons point comment il sent, comment il se souvient..,. Nous savons seulement que nous sentons, que nous nous res- souvenons...: ce sont des faits. Nous ne connoissons point les êtres étendus , les corps.... Nous sentons seulement de l'étendue... Nous voyons, nous sentons que ces étendues... se meuvent et se meuvent avec différentes vitesses. ,., que ces mouvemens sont communiqués. ..: CE SOnÉ des faits. Mais quelle est la cause de ces mouvemens ? 4 Cette cause, qu'on désigne par le mot de force, nous estin- connue , ainsi que celle de la sensibilité. | Mais ET D'HISTOIRE NATURELLE. 385 Mais la force et la sensibilité existent : ce sont des faits. Je renvoie sur toutes ces questions le lecteur à mon ouvrage Sur la Nature des Etres existans, et à celui des Principes de la Philosophie naturelle. Je rappelle seulement ici les principales analogies que nous avons sur ces objels. t . = , ‘ s L , o Je ne donnerai pas ici plus d’étendue à ces tables, qu'on doit relire toutes, pour en suivre les liaisons; mais ces essais démon- trent qu’on peut soumettre au calcul des probabilités, toutes les Connoissances humaines, Ces essais sont encore très-imparfaits, mais on doit chercher à perfectionner ces tables, comme l'ont été les tables des mou- vemens des corps célestes : et les autres sciences feront les mêmes progrès qu’a faits l’Astronomie, Tome LZXXIX. NOVEMBRE an 1814, Ddd ‘ 386 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE RAPPORT FAIT À LA PREMIÈRE CLASSE DE L'INSTITUT, SUR UN MÉMOIRE DE M. J. BINET, RELATIF À LA COMPOSITION DES FORCES, DES MOMENS ET DES AIRES. LA Classe nous a chargés, M. Lacroix et moi (M. Poinsot), de lui reudre compte d’un Mémoire présenté par M. Binet, sur la compo- sition des forces et sur la composition des momens, Cette partie fondamentale de la Mécanique est aujourd’hui bien connue; la théorie en est claire, et les propositions $ y enchaînent avec autant de rigueur que les élémens de la Géométrie. On peut dire, en effet, qu'après la définition de la force, et cette demande ou axiome, que deux forces qui tirent un même point dans le même sens en font une seule égale à leur somme, tous les théorèmes de la Mécanique rationnelle ne sont plus que des théorèmes de Géométrie; aussi M. Binet ne s’occupe-t:il point de la théorie dans son Mémoire : il se propose uniquement d’en exprimer les résultats par des formules nouvelles qui peuvent servir dans quelques problèmes, et que nous allons faire connoître en peu de mots. Dans la Mécanique, on a coutume de rapporter les forces et les mouvemens que. l’on considère ; à d’autres estimés suivant trois axes quelconques perpendiculaires entre eux en un point de l’espace qu’on appelle l'origize. De celte manière on trans- forme le système des forces proposées en trois groupes de forces parallèles à ces trois axes. Les considérations sur l’équilibre et la composition des forces deviennent plus simples ; et, par exemple, la résultante générale s'obtient sur-le-champ en fonc- tion des composantes et des cosinus de leurs mnclinaisons sur les ET D'HISTOIRE NATURELLE. 387 {roisaxes coordonnés: c’est à Maclaurin qu’ondoit celte méthode facile, adoptée depuis par tous les géomèlres, et qui répand beaucoup de clarté dans les théorèmes et d’uniformité dans les calculs, Cependant il peut étre utile en certains cas, d'exprimer im- médiatement la résultante par les forces proposées et par les angles mêmes que leurs directions forment entre elles. C’est ainsi qu’en Géométrie, quelques auteurs, et particulièrement M.Carnof, ont donné plusieurs théorèmes exprimés par les élémens immédiats de la figure, et sans aucune considération étrangère de ces axes ou de ces.plans fixes qu’on emploie ordinairement dans Ja méthode des projections. M. Binet a eu la même idée pour l'expression des théorèmes qui regardent la composition des forces et la composition des momens. La recherche en est facile, et la méthode ordinaire le conduit directement aux expressions qu’il a en vue; car, pour la résultante générale, il suflit de déve- lopper les carrés des trois résullantes partielles relatives aux trois axes, d'ajouter ces carrés; et si lona égard à cette équation connue qui exprime l'inclinaison mutuelle des deux droites par leurs inclinaisons respectives sur les trois axes rectangulaires, on obtient sur-le-champ ce théorème: Le carré de la résultante de tant de forces qu’on voudra ap- pliquer à un point suivant des directions quelconques, est égal à la somme des carrés de toutes ces forces, plus à la somme de leurs doubles produits deux à deux par le cosinus de leurs inclinaisons l’une sur l’autre. Cette formule symétrique entre les forces et leurs inclinaisons mutuelles, pourroit être regardée comme une extension remar- quable de l’expression connue de la base d’un triangle par les deux côtés et le cosinus de l’angle compris; mais elle a été donnée dans toute sa généralité pour des polygones quelconques, plans ou gauches, c’est-à-dire dont tous les côlés sont ou non situés dans le même plan. Elle s'étend même aux polyèdres, et c’est ce qu'on peut voir dans la Géométrie de position de M. Carnot, où il paroît, d'après l’auteur lui-même, qu'à peu près dans le même temps, M.Simonl’Huillier, de Genève, avoit trouvé de son côté des théorèmes semblables. Or on sait depuis long-temps , que si des forces sont parallèles et proportionnelles aux côtés successifs d’un polygone quelconque, leur résultante est parallèle et proportionnelle au dernier côté qui ferme ce Ddd 2 Le 388 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE \ polygone; de sorte que si le polygone est fermé de lui-même, la résultante est nulle, et les forces sont en équilibre autour du point qu’elles sollicitent. L'expression du côté d’un polygone par les autres côtés et par leurs inclinaisons mutuelles , s’appliquoit donc immédiatement à la résultante de forces quelconques qui agissent Sur un point; mais cette expression se présente si fa- cilement en Mécanique, comme on la vu plus baut, que M. Binet a pu la trouver directement sans s’'appuyersur le théorème de Géométrie qui lui répond d’une manière si parfaite. . D'ailleurs, M. Binet en fait aussi l'application à la composi- tion des momens. On trouve, en effet, par la théorie des cou- ples, que les momens de forces quelconques rapportés à un même point de l’espace, se composent successivement par les mêmes lois que les simples forces appliquées à un point : on à donc de la même manière, et sans nouvelle démonstration , le carré du moment résultant , égal à la somme des carrés des mO= mens composans, plus à la somme de leurs doubles produits deux à deux, par le cosinus des inclinaisons de leurs plans l’un sur l'autre; de sorte qu’il ne reste plus dans l'expression du moment total que les forces données, leurs bras de levier ou distances au point que l’on considère, et les inclinaisons mu- tuelles de tous ces plans; c’est-à-dire qu'il ne reste plus que les données immédiates de la question dans le système qu’on avoit en vue. Pour qu'il y ait équilibre entre les forces, il faut que la ré- sullante et le moment résultant soient séparément nuls. En éga- lant donc à zéro les deux formules précédentes, on aura l’ex- pression directe des deux conditions générales qui sont néces- saires et qui suflisent pour l'équilibre d’un corps ou système quelconque invariable de figure. Sil n’y a point équilibre et qu’on cherche la condition néces- saire pour que toutes les forces appliquées soient réductibles à une seule, on trouve encore, par la théorie des a que la résultante de toutes ces forces transportées parallèlement à elles-mêmes en un point quelconque de l’espace, doit être pa- rallèle au plan du moment résultant par rapport au même point; ainsi, en égalant à zéro le sinus de l'inclinaison de la résultante sur le plan du moment résultant, on a l'expression analytique de la condition cherchée; et M. Binet exprime ce sinus, non par les forces et les momens rapportés aux trois axes, | | ET D'HISTOIRE NATURELLE. 389 comme on l’avoit fait, mais directement par les forces et les moinens considérés dans l’espace, et par les angles des directions de ces forces avec les plans de ces momens. Si le point auquel on rapporte les momens se meut suivant une ligne parallele à la résultante, le moment ne change point de valeur et son plan demeure parallèle à lui-même; mais si le point s’écarte de cette droite, le moment change et le plan s'incline sur sa première position. Ainsi lon trouve une position unique où le moment est un zirnimum, et l’on a déterminé la valeur de ce moment et la direction du plan qui le contient, lequel est perpendiculaire à la résultante générale du système. M, Binet exprime encore cette valeur par une formule élégante, et qui est la somme de tous les produits des forces deux à deux par les sinusde leurs inclinaisons mutuelles et par leurs plus courtes distances dans l’espace, le tout divisé par la résultante générale. Actuellement toutes ces diverses formules sont applicables à la Dynamique. En effet, dans le mouvement d’un système de corps liés entre eux, comme on voudra, mais libres de toute action étrangère, la force résultante de tout le système et le moment résultant demeurent constamment les mêmes, malgré les Variations qu'éprouvent les mouvemens individuels des diférens corps, et soit que ces mouvemens changent par degrés insensibles, soit qu’il y survienne des changemens brusques par l’action réciproque des corps, ou par toute autre liaison nouvelle qu’on élabliroit entre eux. C’est ce qu’on appelle, en général, la con- Servalion des forces et la conservation des momens : et comme dans la nature la force est mesurée par le produit de Ja masse et de la vitesse, on peut substituer aux forces les quantités de mou- vement, et à leurs momens par rapport à un point, les produits des masses par les aires que tracent leurs rayons vecteurs autour du même point. Les principes précédens répondent donc à la Conservation du mouvement du centre de gravité, et à la con- servation des aires qui sont décrites par les rayons vecteurs autour d’un même foyer. Ainsi lon peut dire que dans le mou- vement d'un syslème de corps liés -comme on voudra, la somme des carrés de toutes les quantités de mouvement, jointe à la double somme de leurs produits deux à deux par les cosinus des angles que leurs directions forment entre elles à chaque instant, est toujours une quantité constante ; el cette constante est le carré du produit de la masse totale du système par la vitesse uniforme du centre de gravité de tous les corps. Pareil- lement, la somme des carrés de leurs aires autour d’un foyer, 390 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ajoutée à la double somme de leurs produits deux à deux par les cosinus des inclinaisons mutuelles des plans de ces aires, est toujours la même en temps égal pendant le mouvement du système. Cette dernière quantité est le carré de l'aire la plus grande entre toutes celles qui seroient projetées sur l’infinité des plans conduits par le même foyer; et c’est le plan du maximum des aires que M. Laplace a le premier reconnu, qu’il a nommé le plan invariable, et dont il a déterminé la positiondansle Système du Monde. M. Binet applique aussi sa formule au système des corps cé- lestes, et parvient facilement à un théorème que l’on peut énoncer de cette manière : Si à des époques quelconques ou lrace dans le plan de l'orbite de chaque planète, une aire égale à celle de l'orbite multipliée par le rapport de la masse de la planète au temps de sa révolution , la somme des carrés de toutes ces aires et de leurs doubles produits deux à deux par les cosinus des inclinaisons des orbites, sera toujours la même. Si l’on ne considère que deux planètes qui tournent autour du soleil, cette équation est, à quelques diflérences près dans l'énoncé, celle que donne M. Poisson à la fin de son Mémoire sur les Inégalités séculaires des moyens Mouvemens des Planèles. Tel est l’objet très-simple du Mémoire de M. Binet. C’est une conlinuelle application d’une même formule à la composition des forces et des momens, et par conséquent aux propriélés gé- nérales qui leur répondent dans le mouvement des systèmes ; propriétés qui ont été rapprochées et réduites à une même théorie dans le Mémoire que l’un de nous a lu depuis long-temps à Ja Classe, et qui est imprimé dans le tome VI du Journal de l'Ecole Polytechnique. Le travail de M. Binet n’ajoute donc rien à la science des forces considérée en elle-même; mais il offre avec quelques remarques intéressantes, une suite d’expres- sions nouvell:s qui peuvent être utiles, qui sont au moins cu- rieuses et qu’on est bien aise de trouver réunies; et sous ce point de vue, nous pensons que ce Mémoire mérite d’être approuvé par la Classe et inséré dans le Recueil des Savans étrangers. Signé Lacroix, Poinsot, rapporteur. La Classe approuve le Rapport et en adopte les conclusions. { M ET D'HISTOIRE NATURELLE. 391 ————— ASTRONOMIE DE DELAMBRE, grec. SUITE DE L'EXTRAIT, Par J.-C. DELAMÉTHERIE. DES COMÈTES. LES comètes sont des astres analogues aux planètes ; elles se meuvent dans des orbites très-excentriques, et ne deviennent visibles pour nous, que vers leurs passages au périhélie, c’est- ä-dire près du soleil. On les appelle comètes, c’est-à-dire astres chevelus, du mot grec xoun, coma, chevelure. Cette atmosphère, ou chevelure, prend quelquefois diverses figures qui, suivant les circonstances, ont fait donner par les historiens, aux comètes, des noms dif- férens , tels que ceux de pogonéas , ou astres barbus, /ampadias, ziphias, pithètes, acontias...,astre qui ressemble à une lampe, à une épée, à un tonneau, à un javelot. Les comèles paroissent sous différentes formes; elles sont or- dinairement assez petites pour qu’on ne les distingue point des étoiles. Mais quelquefois elles paroissent très-grosses et accompagnées de queues plus ou moins considérables. Sénèque dit ( Question VII liv. xv): A la mort de Démétrius, roi de Syrie, il parut une comète aussi grosse que le soleil. Justin rapporte, liv. xxxvir, qu'à la naissance de Mithridate, 122 à 130 ans avant notre ère, on vit pendant 8o jours une comète dont l'éclat surpassoit celui du soleil; elle occupoit un quart du ciel, et elle employoit quatre heures à se lever et à se coucher. ‘ Une comète fort remarquable encore , quoique moins extraor- dinaire, est celle qui parut- pendant sept jours à la mort de César, 82 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Il en parut encore une à Constantinople, fort remarquable, année de la naissance de Mahomet. Une autre parut en 1240 lors de la grande irruption de Ta- merlarn. On a conclu à tort de ces faits particuliers, que l'apparition des comètes présageoit quelque événement remarquable. Du nombre des Comètes connues. Le nombre des comèêtes qui ont été vues est très-considérable , et presque tous les ans on en apercoit qu’on n'avoit pas encore vues. Riccioli en compte 154, citées par les historiens jusqu’à l’année 165r. Pingré réduit à 380 les apparitions des comètes, qui lui pa- roissent certaines. Lambert conjecturoit qu'il pouvoit y avoir plus d’un million de comètes ; mais ileroyoit qu'elles passoient d’un système solaire, ou de celui d’une étoile, dans un autre. Lalande en compte 78 jusqu’à l’an 1790. Aujourd’hui les astronomes observent avec beaucoup de soin, les comètes qui paroissent ; ils en ont donné différens catalogues. Celui que Delambre donne des comètes observées jusqu’en 1813, se monte à 117. Catalogue suivant Delambre, des 117 Comètes observées jusqu’en l'année 1813. Comites. Années. Comètcs. Années, I 240 novemb. 12 1801 octobre. 2 539 octobre. 13 1337 Juin. 3 565 juillet. 14 1301 novemb. 4 837 mars. 15 1302 mars. > 989 septemb. 16 19391 août, 6 1097 mai. 17 1472 ociobre. 7 1097 septemb. 18 1532 octobre. ( 1251 Janvier. 19 1595 Juin. 9 1264 Juillet. 20 1577 octobre. 10 1299 mars. 21 1560 novemb. 1E 1301 septemb. 22 1582 mai, 23 ET D'HISTOIRE NATURELLE. 393 Comètes. Années. Comites. Années. 23 1585 octobre. Gr 1753 juin. 24 1590 février. 62 1759 novemb. 25 1593 octobre. 63 1729 décemb. 26 1596 octobre. C4 1702 mai. 27 1618 août. 65 1763 novemb, 28 1618 novemb. 66 1764 février. 29 1652 novemb, 67 17606 février. 30 1664 décemb. 68 1766 avril. at 1655 avril. 69 1769 octobre. 32 1672 mars. 70 1770 août. 33 1677 mai. 7t 1770 novemb. 34 1678 août. 72 1771 avril. 25 1680 73 1772 février. 35 1682 septemb, 74 1773 septemb. 36 1683 juillet, 75 * 1774 août. 37 . 1684 Juin, 76 1779 janvier. 38 1686 septemb. 77 1780 septemb. 39 1689 décemb. 78 1760 novemb, 4° 1695 novemb. 79 17861 novemb. 41 1698 octobre. 80 1781 novemb. 42 1699 janvier, Br. 1783 novemb, x 43 1701 octobre. 82 1784 Janvier. 44 1072 mars. 63 1764 mars, 4 1706 janvier. 64 1765 janvier. 46 1707 décemb, 85 1765 avril. 47 1718 janvier. 86 1786 juillet. 48 1723 septemb. 87 1787 mai. 49 1729 juin. 688 1788 novemb. 50 1737 Janvier. 89 1788 novemb. DE 1737 juin. 9° 17Q0 janvier. 52 1739 Juin. CL: 1790 janvier. 53 1742 février. 92 1790 mai. 54 1743 janvier. 93 17092 janvier. 55 1743 septemb. 94 1792 décemb, 56 1744 mars. 9 1793 novemb. 57 1747 février, 96 1793 novemb. 58 1748 avril. 97 1795 décemb. 59 1748 Juin. 98 1799 avril. 60 1757 octobre. 99 17)7 juillet. Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814. Eee _ 394 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Comètes. Années. Comètes. Années. 100 1798 avril. 109 180 décemb. 101 1798 décemb. ,; 110 1807 septemb. 102 1799 septemb. rl 1808 Juillet. 109 1794 décemb, 112 1810 octobre. 104 1801 août. 119 1811 septemb. 105 1802 septemb. 114 1011 septemb. 106 1804 février. 115 1812 septemb. 107 180 novemb. 116 1813 mars. 108 1805 décemb. 117 1813 mal. On remarquera que dans ces derniers temps, le nombre des comètes observées est beaucoup plus considérable,que dans les temps antérieurs; €est que les astronomes aujourd'hui sont oc- cupés continuellement à ces recherches , au lieu qu’antérieu- rement ils n’y apportoient pas la même attention. Le catalogue des comètes-fut commencé par Halley, il ne contenoit que 24 comètes en commençant par celle de 1337, et finissoit par celle de 1698. Il a été successivement reproduit par les astronomes qui Pont suivi. Des Mouvemens des Cornèftes. Les astronomes se sont fort occupés à déterminer les mouve- mens des comètes; néanmoins leurs travaux n’ont pas encore élé couronnés d’un plein succès. Ils ont reconnu que ces mouvemens s’opèrent dans une courbe des sections coniques. Le plus grand nombre , et Delambre est de ce nombre, sup- posent que cette courbe est une e/lipse plus ou moins alongée, dont le soleil est un des foyers. D’autres supposent que cette courbe est une parabole. De troisièmes supposent qu’elle peut être une hyperbole. Mais pour la commodité du calcul, lorsqu'on recherche à déterminer l'orbite d'une nouvelle comète qui paroît, on sup- pose qu’elle se meut dansune parabole. Hévélius avoit vu le premier que l'orbite des comètes devoit être une courbe. Newton examina, avec sa sagacité ordinaire, l’orbite de la comète de 1680; il trouva qu’une portion d’ellipse très-alongée, , ET D'HISTOIRE NATURELLE. 395 ou une portion de parabole, convenoit parfaitement à toutes les observations faites sur cetle comèle, pourvu qu'on supposât les aires proportionnelles aux temps, comme dans les mouvemens planétaires, conformément aux lois de Képler. Dès-lors il ne douta plus que les comètes ne fussent des corps semblables aux planètes , et dont les mouvemens fussent agalogues , et que le soleil est un des foyers des courbes qu’elles décrivent. Halley fit Papplication de cette théorie à la comète de 1680, et tâcha de prouver que c’étoit la même comète qui avoit pro- duit le déluge rapporté par la Genèse. Il supposoit que le temps de sa révolution étoit à peu près de 575 ans; d’où il s’ensuivroit qu’elle avoit dû paroître en 1106, en 531, ensuite 44 ans avant l'ère vulgaire, puis en 619 ans, en 1194 (il paroît que Homère parle de cette apparition, f/iade, lib.1v, vers. 75), puis en 1769, et enfin en 2344, année qui, suivant lui, correspond à l’époque du déluge universel rapporté par Moïse, W'isthon supposa que cette comète avoit dû passer assez près de la terre, pour que sa queue atteignit notre globe, et l'inondät par les vapeurs qu’elle contenoit. Mais, suivant lui, ce déluge arriva en 2349 ; d’où il s’ensuit que le mouvement de la comète avoit été, par des perturba- tons, retardé de cinq ans. Effectivement on a prouvé par le calcul, que cette comète pouvoit s’approcher beaucoup de la terre. Les astronomes se sont particulièrement occupés des mouve- mens de la comète de 1682. On supposoit sa révolution de 75 années, et par conséquent qu'elle devoit reparoître en 1759, dit Halley. Mais cette comète devant passer très-prés de Jupiter et de Saturne , son mouvement devait en étre dérangé. Effectivement Claïraut trouva” que la révolution de la comète de lan 1682 à la prochaine , devoit être de 611 jours plus grande que celle de 1607 à 1682, dont 100 jours étoient attribués à l’action de Saturne et br1 à celle de Jupiter. La comète ne passa eflectivement qu’en 1758; mais il y eut un mois d'erreur. Clairaut fit voir que cette erreur se réduisoit à 22 jours. La comète fut apercue, les 25 et 27 décembre 1758, par un paysan nommé Palitzch, à Problis près de Dresde. Ece 2 “ 396 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Comète de 1770. C’est la seule, dit l’auteur, dont on ait pu jusqu'ici calculer les mouvemens. Lexell a prouvé qu’elle se meut dans une ellipse, et que son année est de 5 ans, 58513, et son demi-axe de 3.1478600. Burckhardt a confirmé ce résultat. Cette comète a passé entre Jupiter et ses satellites sans y pro= duire aucune perturbation sensible, Comète de 1811, découverte le 25 mars par Flaugergues : il suppose le temps de sa révolution bog ans 8665. Ainsi il pense que cette comète est la même que celle de 1301. Bessel est d'un avis contraire. Cette comète fut remarquable par sa queue et la durée de son apparition. Elle fut revue plusieurs mois après dans la capitale des Co- saques. On a supposé que des comètes dans leurs courses pouvoient rencontrer la terre, ou au moins en approcher assez pour causer, par leur attraction, quelques fortes marées qui produiroient des inondations, comme Wisthon la supposé pour la comète de 1680. Mais on a répondu qu'une comète qui passeroit si près de la terre, iroit d’un mouvement si rapide, que son attraction n’auroit pas le temps nécessaire pour vaincre l’inertie des eaux, et que ses effets seroient très-médiocres. Aussi Delambre dit-il que l'hypothèse de Wisthon est regardée aujourd'hui comme an roman scientifique. Halley avoit dit qu’il seroit possible qu'une comète choquât la terre. Lalande, en 1774, répéta quelque chose d’analogue : ce qui causa de grandes frayeurs. Duséjour fit voir que toutes ces craintes n’éloient point fon- dées; il a supposé qu’une comète s'approche de 13,000 lieues de la terre : et il a fait voir qu’elle n’y produiroit aucun effet sensible, parce que sa vitesse seroit si grande, que son attraction n’auroit pas le temps d'agir. D'ailleurs la masse des comètes paroît extrèmement petite par rapport à la masse du globe terrestre. Car la comète de 1770 est de toutes les comètes connues, celle qui s’est le plus approchée de la terre : et elle en étoit encore à 600,000 lieues, Elle n’a produit aucun effet sensible, ni sux ET D'HISTOIRE NATURELLE. 397 les mouvemens du globe, ni sur les mers et les marées, ni sur l'atmosphère et ses mouvemens. Elle a passé entre Jupiter et ses satellites, et n'ya causé aucune perturbation sensible. .: Sa masse étoit donc extrêmement petite par rapport à tous ces corps. On a conclu de tous ces faits, qu'il n’y a nulle probabilité que, 1° Une comète puisse choquer la terre, comme l’appréhendoit Halley. 20. La masse des comètes est si pelite par rapport au globe terrestre, qu’une comète qui passeroit près de lui n'y produiroit aucun eflet. 30. La vitesse de la comète à cette époque, ne lui donneroit pas le temps d'exercer aucune action sur la terre. 4°." La queue d’une comète ne pourroit produire aucun effet sur la terre. Maupertuis a pensé qu’une comète passant auprès de la terre, ” pourroit l’entrainer et la rendre elle-même comète. Mais il faudroit pour cela, que la masse de la comète fût plus considérable que celle de la terre. Il a dit encore que la comète pourroit plus facilement nous enlever notre lune , et qu’elle pourroit aussi être entraînée par la terre et devenir pour elle une nouvelle lune; enfin, que votre lune pourroit bien avoir été au commencement une petile co- mète qui, pour s'être trop approchée de la terre, s’y est trouvée prise. Mais la constitution de la lune, dit Delambre, paroït trop différente de ce que nous connoiïssons en général des comètes, pour que nous puissions regarder cette conjecture, autrement que comme une réverie qui mérile peu d'élre sérieusement discutée. De la nature des Comètes, de leur Atmosphère et de leur : Queue. Il est démontré, dit l'auteur? par les divers retours de Îa comète de 1759, que son orbite est elliptique. Rien ne démon 398 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE jusqu'ici qu'aucune orbite de comète soit parabolique. . .; il est encore moins démontré qu'aucune orbite soit kyperbolique... Les comètes seront toujours des corps qui décriront des sec- . tions coniques, DONT LE SOLEIL OCCUPE UN DES FOYERS. Ainsi elles formeront avec les planètes une méme famille. On voit que l’auteur n’admet pas l'hypothèse des astronomes qui pensent, avec Lambert, que les comètes que nous aper- cevons, passent de notre système solaire dans d’autres systèmes solaires. Les différences les plus remarquables qu’on observe dans les comètes sont, jusqu'ici, la grandeur de l’excentricité et celle de l'inclinaison qui, pour les planètes, ne passe pas encore'35 (l'in clinaison de Pallas), et qui, pour les comètes, peut aller à 1800; mais ce n’est qu'une variété peu sensible. Les comètes, quant à leurs corps, diffèrent assez des planètes; elles ont peu de masse, sont en général petites et beaucoup moins grosses que les anciennes planètes connues; elles rapprochent davantage, à cet égard, des nouvelles planètes, Cérès, Pallas. ... Les comètes sont environnées d’une nébulosité remarquable: mais les nouvelles planètes en sont également enveloppées, et elles forment la transition entre les unes et les autres. Les comètes doivent être sphériques, et rien ne prouve le contraire, Elles doivent avoir des phases. On en avoit annoncé pour la comète de’1682, dans les registres de l'Observatoire de Paris : si on ne les observe pas plus souvent, c’est à cause de la nébu. losité dont elles sont entourées. Les comètes doivent être opagues. Elles n’ont point de lu- mière propre, non plus que les planètes. Herschel croit néan- moins que les comeétes, les planètes, les satellites ont une lu- mière foible analogue à celle de la matière nébuleuse. J’ai prouvé dans ce Journal, tome LXXVIT, pag. 37, que cette /umière cendrée qu’ont les astres, est un EFFET DE LEUR ÉTAT GALVANIQUE...- Quelques astronomes, tels que Herschel, ont dit avoir vu des étoiles au travers du corps ou noyau des comètes... Delambre dit que ces apparences peuvenk être des illusions d'optique pro- duites par la nébulosité, ou des eflets de réfractions de la lue mière, - ET D'HISTOIRE NATURELLE. , 399 L’atmosphère des comètes paroît plus étendue que celle des planètes ; elle augmente beaucoup au périhélie, lorsque la comète approche du soleil ; la chaleur alors réduit en vapeurs les parties les plus volatiles qui s’éloignent du corps de la comète. Dans cet état, s2 ces parties volatilisées viennent à étre Jrappées, dit l'auteur, par les rayons du soleil, elles cèdent à cette impulsion , quoique foible, et forment derrière la comète cette longue traînée connue sous le nom de gueue. Cette queue se divise quelquelois en plusieurs parties, ou rayons, qui sont toujours courbes, Chezeaux dit que la comète de 1744 avoit une queue divisée jusqu’en six rayons, sous-divisés eux-mêmes. Delambre en donne la figure. Cette queue des comètes, disent les astronomes aujourd’hui, est toujours dans la partie opposée au soleil; d’où ils concluent qu'elle est produite par lémpulsion des rayons solaires qui la frappent; mais Tycho observa le contraire dans la comète de 1577. Sa queue étoit opposée à Vénus et non au soleil. J'ai prouvé que la gueue de la comète n’est point produite par l'impulsion des rayons solaires. 10. Nous ne connoissons aucune action semblable aux rayons lumineux. L 20. Cette queue est un effet du mouvement de la comète dans un fluide quelconque; la flamme d’une bougie allumée, qu’on meut dans 1e avec une cerlaine vitesse, forme une queue dans une direction opposée à celle du mouvement de Ja bougie. * Or on reconnoît aujourd’hui généralement, qu'il y a un fluide quelconque dans les espaces célestes. Laplace en convient... 3°. Si la lumière en choquant la queue de la comète pouvoit lui donner une telle impulsion, quels eflets ne produiroit-elle pas sur les corps des planètes , leurs atmosphères.. .? 4°. En supposant, avec Euler..., que la lumière est un ébran- lement d’un fluide répandu dans l'espace, comme le son est un ébranlement de l'air..., on n’a aucune de ces difhicultés. On ne sauroit donc dire que la lumière puisse donner une direction à la queue des comètes. On a demandé si les comèles étoient aussi anciennes que les autres astres du système.solaire, Pingré est pour Paflirmative; mais Herschel pense qu'il peut se former journellement des co- mètes par la condensation de la matière nébuleuse. \ 400 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE En supposañt cette formation des comètes par cette conden- sation, celte matière nébuleuse lors du passage de la comète au périhélie, en s’approchant suflisamment du soleil, pourroit étre volatilisée au point de laisser traverser les rayons Jumineux, et on pourroit alors distinguer les étoiles au travers du noyau de la comète , comme l'a observé Herschel. On a encore demandé si les comètes sont aussi durables que les autres planètes. Delambre répond qu’on ne sait rien de positif à cet égard; mais à chaque fois qu’une comète passe au péri- hélie, elle perd toute la matière qui compose sa queue, sa cher velure...; si cette queue se détache et reste disséminée dans l’espace , la comète diminueroit à chaque périhélie, et pourroit se réduire à rien, à moins que dans sa route elle ne trouvât de quoi réparer ses pertes. Newlon croyoit que ces vapeurs détachées des comètes, pou- voient réparer les pertes journalières, qu'il supposoit que fait le soleil; mais, dit Delambre, aucun fait ne vient à l’appui de celte assertion. Nous n’avons aucun moyen de constater, ni de mesurer les pertes que peut faire le soleil, ni aucune idée des moyens qu'il peut avoir de les réparer. Mais j'ai prouvé que le soleil devoit étre regardé comme une énorme pile galvanique, qui donne lumière et chaleur (dans ce Journal, tome LXXVIIT, pag. 161). Dès-lors il ne fait au- cune perte, et il n'a pas besoin de se réparer. L’analogie dit qu’à La surface des comètes, ainsi qu’à celle des planètes, il peut y avoir des êtres organisés comme à la surface de la terre. Cette analogie a toujours été regardée comme très-probable, on peut la supposer + &. DES ÉTOILES. Les étoiles sont regardées comme des astres analogues à notre soleil. On les appelle FIXES , parce qu’on avoit cru qu’elles con- servoient toujours la même position. Les astronomes les distinguent en raison de leurs grandeurs apparentes relativement à nous. Les étoiles de la première grandeur sont celles qui nous pa- roissent les plus grosses, et avoir Le plus d'éclat ; telles que Sirius, égulus. s… Les ES TS ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 Les étoiles de la seconde grandeur sont celles qui sont les plus grosses après les premières. Il y a ensuite des étoiles de la sroisième grandeur, de la quatrième, de la cénguième, de la sixième, de la septième, de la huitième, de la neuvième, de la dixième... grandeur. Herschel dit avoir observé avec son grand télescope de 40 pieds , des étoiles si petites, qu’il les suppose de la 1342e grandeur. Il croit que leur lumière ne peut parvenir jusqu’à la terre qu'en deux millions d'années environ. On en doit conclure, puisque nous voyons ces étoiles, qu’elles existent au moins depuis deux millions d'années. On sait que la lumière vient du soleil à la terre en sept à huit minutes, c’est-à-dire qu’elle parcourt dans ce temps environ 34,000,000 de lieues, ou 68,000,000 de lieues dans un quart d'heure. Des Catalogues des Étoiles. Les astronomes se sont toujours occupés de déterminer le nombre et la position des étoiles; ils les ont divisées en certains groupes qu’ils ont appelés constellations , et en ont dressé des catalogues, Ptolémée avoit divisé les étoiles en 48 constellations, et y avoit placé 1022 étoiles. Ulug-Beig avoit conservé le même nombre de constellations, et y placoit seulement 1017 étoiles. Tycho, qui avoit un observatoire plus seplentrional, n'offre dans son catalogue, que 45 constellations et 777 étoiles. Le catalogue de Riccioli contient 1468 étoiles. Hévelius donna un catalogue de 1888 étoiles. Flamsteed est le premier astronome qui ait observé habituel- lement les ascensions droites et les déclinaisons au méridien, aveé un pendule et un mural. Son catalogue contient 2884 étoiles. La Caille a donné un catalogue de 10,000 étoiles observées au cap de Bonne-Espérance, et comprises entre le pôle austral et le tropique du Capricorne. Piazzi a donné à Palerme, un catalogue de 6500 étoiles. Le Francçais-Lalande a déterminé à Paris, la position de 50,000 étoiles. Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1614. FIEF 402 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Plusieurs astronomes, tels que Mayer, Maskeline, Zach, Bode, Harding, Delambre..., se sont attachés à détermier avec la plus grande exactitude, la position des principales étoiles, aux- quelles ils rapportent ensuite toutes les observations. Ptolémée divisa le ciel en 48 constellations auxquelles il donna diflérens noms. Postérieurement ce nombre des constellations a beaucoup été augmenté par diflérens astronomes , tels que Halley, Hévelius, Bayer, La Caille.... Des Étoiles changeantes et perdues , et des nouvelles. Les astronomes ont observé plusieurs étoiles qui ont changé et disparu, d’autres qui ont paru nouvellement. Lalande en donne une histoire, tome Î, pag. 250. Homère et les plus anciens auteurs ne comptoient que six étoiles dans les Pléiades; postérieurement Hipparque, Ptolémée..., en comptoient , comme aujourd'hui , sept. Hipparque, dit Delambre, aperçut une étoile nouvelle, et c’est, dit-on, la cause qui l’engagea à former un catalogue de toutes les étoiles visibles. On parle d'une étoile qui parut tout-à-coup auprès de l’Aigle en 389 : elle fut pendant trois semaines aussi brillante que Vénus, et disparut pour toujours. Une autre étoile fut vue dans le Scorpion pendant quatre mois. Sa lumière étoit un quart de celle de la lune. Une des plus célèbres des étoiles nouvelles a été celle de 1572, observée dans la constellation de Cassiopée. Elle intéresse d’autant plus, qu’elle a été observée par le célèbre T'ycho-Brahé. Son éclat surpassoit celui de Sirius. On la voyoit de jour; elle s’afloiblit peu à peu , et au bout de seize mois elle disparut pour toujours. La nouvelle étoile qui parut le ro octobre 1604 dans le Ser- pentaire, fut à peu près aussi brillante que celle dont nous venons de parler : elle fut observée par le célèbre Képler. L’ap- parition de cette étoile ne fut que d’un an. Un grand nombre d’étoiles ont présenté des phénomènes ana- logues. es » » - » : ’ . 2112 Ces faits prouvent que plusieurs étoiles, après avoir brillé d’un éclat plus ou moins vif, ont disparu. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 403 On a conclu de la disparition totale de ces étoiles, sans avoir paru changer de place, qu'il y a dans l’espace plusieurs de ces grands corps opaques, sans éclat lumineux, et qui rapprochent plus ou moins de l'état de nos planètes. Ê D'autres étoiles changent de grandeur, au point de devenir quelquefois presqu’invisibles. La changeante de la Baleine dans une période de 333 à 334 jours, éprouve tous les changemens possibles , depuis la deuxième grandeur jusqu’à la dixième, et moins encore. Algol, ou la tête de Méduse, passe, en deux jours 48 ou 4/4 de la deuxième grandeur à la quatrième, ou à la cinquième. .B de la Lyre passe , en 6 jours 9 heures et demie, de la troi- sième à la cinquième grandeur. y d’Antinoüs a des changemens pareils dont la période est de 7 jours 4 heures et un quart. 7 de Céphée a une période de 5 jours 8 heures 37. Ces faits prouvent que la lumière de plusieurs étoiles varie. Maupertuis a supposé que ces étoiles étoient très-aplaties, et qu’elles avoient un mouvement de rotation. Lorsqu’elles nous présentent leurs côtés peu épais, leur lumière diminue, et peut même disparoître, DES ÉTOILES DOUBLES, TRIPLES, etc. Plusieurs étoiles paroissent doubles, triples.... La première étoile, y du Bélier , parut double à Robert Hook. Dominique Cassini fit la même observation. L'étoile &, qui est à la tête des Gémeaux, lui a paru égale- ment double, Mayer avoit observé 72 étoiles doubles. Herschel a observé un grand nombre d’étoiles doubles, triples, quadruples , quintuples, sextuples. ..…. DE LA VOIE LACTÉE ET DES NÉBULOSITÉS. Enfin on a observé dans le ciel, des espèces de taches blan- châtres, lumineuses, qu'on appelle zébulosités. Huyghens avoit observé avec beaucoup de soin, la belle né- buleuse d'Orion. Herschel, dans ces derniers temps, a fait avec ses grands FfF 2 404 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE télescopes, un travail immense sur les nébulosités; il distingue deux espèces de nébuleuses. Les zébuleuses proprement dites, ne sont que des nuages ex- tièmement rares et foiblement lumineux (x). Les Nébuleuses étoilées. Dans quelques nébuleuses il distingue des points plus denses, et qu'il regarde comme des centres-d’attraction, autour desquels le reste de la nébulosité se réunit peu à peu. Par cette conden- sation et ce déplacement, il se forme des corps qui peuvent circuler autour du centre de gravité. Ces points de concentration forment les éfoiles nébuleuses ou les zébulosités étoilées, qu'on ne peut distinguer qu'avec les télescopes. je Toutes les étoiles ont été formées par la même condensation. Une condensation de la matière nébuleuse, portée à un plus haut point, a produit les comètes. Une condensation plus grande encore, a pu donner naissance aux planètes. Ainsi il suppose tous les corps célestes composés de cette matière nébuleuse. « Nous ne ferons, dit Delambre, aucune réflexion sur ces » apercus, qui ne peuvent être considérés que comme des pro- » babilités très. foibles. » La voie lactée doit être regardée comme une immense né- bulosité ; elle fait à peu près un grand cercle de la sphère qui coupe l’écliptique vers les points solsticiaux, et s’en écarte d’en- viron 60° au nord et au midi: elle se divise en deux branches vers le Sagittaire. Herschel a distingué dans le ciel un grand nombre de nébu- losités ; il en porte le nombre à plusieurs mille. On croit quechaque nébulosité est composée d’un grand nombre d'étoiles, qui se monte peut-être à plusieurs mèlliards , dit Laplace. Chacune de ces nébulosités est un centre autour duquel cir- culent toutes ces éloiles. - (1) Voyez son Mémoire sur les Nébuleuses, inséré dans ce Jourmal, tome LXXV, pag. 121. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 405 La voie lactée, par exemple, est regardée comme une nébu- leuse qui renferme toutes les étoiles que nous appelons de pre- mière grandeur, et notre soleil. Toutes ces nébuleuses se trouvent à différentes distances les unes des autres, ensorte qu’on doit dire que les étoiles forment différens groupes qui ne sont pas à des distances égales. Du nombre des Étoiles. Le nombre des étoiles qu’on aperçoit à la vue simple est prodigieux ; mais il paroît bien plus considérable, lorsqu'on se sert des télescopes. Herschel avec ses puissans télescopes, qui pénètrent si avant dans la profondeur de l’espace, en a découvert qu'on r’avoit pas soupconnées. Leur nombre n’a pu être calculé. On suppose aujourd’hui que chaque nébuleuse est un centre autour duquel sont des milliards d'étoiles. Et comme on connoît déjà un grand nombre de ces nébu- leuses , on sent que le nombre des étoiles doit être des milliards de billiards..…., Et si on ajoute que plus les télescopes ont de force, plus on distingue d'étoiles , on conclura par analogie, que leur nombre est encore bien plus considérable que nous ne pouvons le sup- poser , et que nous ne saurions avoir d'idées du nombre des êtres existans, Des mouvemens des Etoiles, On doit considérer, dit Lalande, n° 2720, six espèces de mou- vemens vrais où apparens dans les étoiles : 1° La précession, 20 L’aberration, 3° La nutation, 4° Le changement général de latitude, 50 Les changemens particuliers à différentes étoiles; 6° La parallaxe annuelle que plusieurs astronomes y ont, soup- £onnee, 2 “ 4% JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 1 De la Dininution de l’obliguité de l’Écliptique, ou du général de la latitude des Étoiles. La distance qu'il y a entre l'équateur et l’écliptique dans les points équinoxiaux, s'appelle obliguité de l’écliptique. Hipparque Favoit déterminée à 23° 49/; Mais elle diminue continuellement : on l'estime aujourd'hui à 23 27 3. Par conséquent la latitude des étoiles a éprouvé les mêmes De la Précession des Éguinores. - Les étoiles paroïssent emportées d'un mouvement commun d'occident en orient. c'est ce qu’on appelle la précession des équinozes, qui fut découverte par Hipparque. Ce mouvement paroit être d'environ 50" par année. Le mouvement total paroït s’'opérer en 25,695 ans, ensorte qu’au bout de ce temps l'équinoxe sera au même pomt. - : De T Aberration. L’aberration est un mouvement apparent observé dans les étoiles, par lequel elles semblent décrire des ellipses de 40” de diamètre. Il est causé par = mouvement de la lumière, combiné avec le mouvement annuel de la terre. L’angle de l'abérration est la quantité dont une étoile paroït éloignée de sa véritable place par l'effet du mouvement de la terre et celui de la lumière. Bradley en a déterminé la valeur. De la Nufation. La nutalion, ou déviation, est un mouvement apparent des . étoiles qui paroït s’exécuter en 18 ans. Sa quanüté est de g”. Il est causé par l'attraction de la lane sur le sphéroïde de La terre, Effectivement la révolution des nœuds de la lune s'opère en 16 ans et contre l'ordre des signes. NI ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 De la Parallaze des Étoiles, ou de leur distance à la Terre. La distance des étoiles à la terre est si considérable qu'elles mont point de parallaxe sensible. | L'astronome Pound vient de faire à l’Observatoire de Green- wich, une longue suite d'observations sur la Zyre; d'où il con. clut que si cette belle étoile a une pærallaxe, elle ne peut surpasser c"26, et qu’elle est par conséquent dans la limite des erreurs possibles. Les astronomes supposoient que les étoiles les plus proches de la terre en étoient éloignées 200,000 fois plus que le soleil. Or, en supposant la distance du soleil — 34,000,000 de lieues, celle de Sirius seroit donc — 34,000,000 X 200,000, ou 6,800,000,000,000; mais Herschel la suppose plus que du double. Quelle seroit donc celle des étoiles les plus éloignées ? On peut à peine la concevoir. DES MOUVEMENS PARTICULIERS DE QUELQUES ÉTOILES. Les étoiles sont emportées d’un mouvement commun d'orient en occident dans les vingt-quatre heures, et elles paroissent toujours dans la même situation les unes par rapport aux auires; c'est pourquoi on les appelle FIXES. Cependapt cette apparence est erronée. La plupart des étoiles ont des mouvemens parti- culiers, et peut-être toutes en ont de semblables. Aldébaran, suivant Halley, devroit être 15’ plus au nord de lécliptique, que du temps de Ptolémée , et il estz0' plus au süd. Sirius devroit être 20’ plus au nord , et il est 22’ plus au sud. Arclurus, qui devroit avoir à peu près la mème latitude, est 33’ plus au midi Cassini ayant comparé ses observations avec celles de Richer à Cayenne, trouva que depuis 1672 jusqu'en 1738, Ærcturus s’étoit rappr&ché de l’écliptique de 2’ : ce qui fait 3’ 2" par siècle. Tobie Mayer en comparant les observations de Romer sur les étoiles en r7c6, avec les siennes propres en r;56, conclut que sur 8 étoiles 1l y en a une quinzaine qui paroissent avoir quelque mouvement. 40B JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Maskeline, Delambre et presque tous les observateurs ont observé des mouvemens particuliers dans plusieurs étoiles. On en peut conclure par analogie , que presque toutes les étoiles ont des mouvemens analogues, mais qu'ils n’ont pas encore été constatés sur les petites étoiles qui sont à de si grandes distances. On a attribué la cause de ces variations, dit Lalande, aux attractions des corps célestes; mais le déplacement du système solaire que j'ai démontré, a servi à M. Herschel pour les ex- pliquer, ensorte que ces mouvemens pourroient encore être pu- rement apparens. Cependant celui du soleil peut donner lieu à croire qu'il y en a de semblables dans quelques étoiles. Nous avons vu que le soleil a un mouvement propre et qu’il cireule dans une ellipse. On croit aujourd’hui que tout notre système solaire a un mouvement lent vers la constellation d'Hercule, par les 260° d’ascension droite, environ , et les 27° de déclinaison boréale. On regarde également comme probable et conforme à l'ana- logie, que chaque étoile a un système particulier de. planètes et de comètes, analogue à celui de notre soleil. Les anciens philosophes, tels que les Sahéens, les Égy ptiens, Platon...,croyoient que ces grands globes, le soleil, les étoiles, les planètes. .., étoient eux-mêmes organisés, et étoient de grands animaux ayant beaucoup de perfections...; mais ces analogies sont rejetées aujourd’hui comme trop foibles.... Les astronomes ont développé plusieurs autres analogies sur les étoiles, les planètes et les comètes ; elles doivent être sou- mises au calcul des probabilités, et placées dans les tables que j'ai proposées. De la nature des Corps célestes. J’airappelé que les Brachmanes, philosopheshindoux, eroÿoient que le ciel et les astres étoient composés d’une matière parti culière qu'ils appeloient akasch. C’est ce que dit Strabon, lib. xv+ Preter quaiuor elementa, (aerem, aguam, ignem, terram) guintam AKASCH quœædam naluram esse, EX QUA CŒLUM ASTRAQUE CONSTANT. Cetteldoctrine futcommuniquée par Alexandre, et, même avant lui, aux philosophes de la Grèce qui regardèrent cette substance comme ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4ëg comme celle des EsPRiTS, et ils l’appelèrent céleste et divine. Voici ce qu’en dit Cicéron, Tusculan., $ XxVI. Sin autem est quinta quædam natura, ab Aristotele primüm #nducta, HÆC EST DEORUM, ET ANIMORUM. Le mot akasch paroît signifier empyrée, ciel, dans les anciennes langues orientales, m'a dit M. Langlès. Herschel a reproduit une opinion analogue à l'ekasch, au sujet de la matière nébuleuse. Cette matière nébuleuse , propre- ment dite, lui paroft un nuage extrémement rare et foiblement lumineux, DONTILCROIT QUE SONT COMPOSÉS LES ASTRES. Cette matière nébuleuse peut se condenser autour de différens centres d'attraction, dit-il, et former des corps qui peuvent cir- culer autour de ce centre de gravité. Cette matière peu condensée forme les rébulosités étoilees et les étoiles. Cette condensation, portée à un plus haut point, a produit les comètes. Une condensation, encore plus considérable, a produit les planètes. Les comètes à leur périhélie, proche du soleil, acquièrent pa la chaleur une chevelure, une queue plus ou moins considé- rable, et en général très-lumineuse...; c’est la matière nébu- leuse rendue à son premier état. Les comètes en s’éloignant du soleil, perdent leur lumière, leur chevelure, leur queue.... ; On croit qu’elles éprouvent un grand froid qui condense la matière nébuleuse. Les soleils paroissent d'immenses piles galvaniques. La plupart ont des mouvemens propres qu’on a observés. -_ Quelques-uns acquièrent une vive lumière pendant quelques instans , cette lumière s’affoiblit et enfin disparoît. Il peut donc y avoir dans l’espace un grand nombre de ces étoiles qui ont perdu leur lumière. Les planètes doivent également être regardées comme des piles galvaniques moins intenses, dont la lumière est cendrée. Enfin la matière nébaleuse, dont paroïssent composés les corps célestes, peut se condenser pour former ces corps : elle-peut être volatilisée de nouveau et décomposer ces corps formés. Tome LXXIX. NOVEMBRE an 1814. Geg 4to JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Les étoiles qu’on croyoit FIXES, ne le sont pas. Quelques étoiles acquièrent un éclat momentané considérable et ensuite disparoiïssent. C’est un effet de leur action galvanique qui éprouve des va- riations.... Les comètes éprouvent les changemens les plus considérables au périhélie, à l'aphélie.... 7 Les planètes en doivent éprouver également. Il est possible que quelques-unes puissent se briser, comme celle dont ‘ont été formées Cérès, Pallas.... Le globe terrestre doit être exposéà desaltérations analogues... Que l’astronome continue donc avec assiduité et constance, ses observations : il nous dévoilera des faits nouveaux de la plus haute importance. Des faits, des faits... en Astronomie, comme dans les autres parties de la Philosophie naturelle. Les faits que nous découvre l’'Astronomie aujourd’hui sur les différens corps célestes, nous en donne une idée bien différente de celle qu’on en avoit autrefois. Leur nombre est immense, et on peut à peine concevoir les bornes de l'univers, ou des limites de l’espace qu’occupent les êtres existans. Nous ne pouvons nous faire aucune idée des distances où sont ces grands corps les uns des autres. On avoit supposé que les étoiles étoient à peu près FIXES; mais un très-grand nombre d'étoiles, et peut-être toutes, ont des mouvemens particuliers. L'éclat lumineux d'un grand nombre varie pendant des durées plus ou moins longues. Enfin quelques-unes cessent d’être lumineuses, et doivent for- mer dans l’espace des corps semblables à nos planètes. Ce sont des faits favorables à l'opinion des philosophes qui pensent que le globe terrestre a pu être un soleil qui a perdu son éclat lumineux. Les planètes sont des globes plus où moins gros, qui n'ont qu'une /umière cendrée. Cette lumière cendrée est produite par leur état galvanique. Ë Mais ces corps peuvent être brisés, si on suppose, avec Olbers, | ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4vt te les astéroïdes, ou petites planètes, Cérès, Pallas, Junon et Va: sont des débris d’une grosse planète qui a été brisée. Les comètes sont peu connues, Plusieurs faits rendroient pro- bäble qu’elles sont le produit d’une matière aériforme qui a été condensée, et qui peut reprendre son état aériforme au périhélie, à leur approche du soleil. Les comèles que nous apercevons paroissent faire partie de notre système solaire : le soleil paroît être un des foyers de la courbe qu'elles décrivent, suivant l'opinion de Newton. L'opinion de Lambert, qui croyoit qu’elles pouvoient passer dans d’autres systèmes solaires, n’est appuyée d’aucun fait. J'ai donné un Extrait un peu long de cet ouvrage, parce que l'histoire des corps célestes est nécessaire à l'homme pensant, pour lui faire voir les ÉTRES EXISTANS sous leur vrai point de vue , et dissiper les préjugés qu'il contracte en ne considérant que le petit, et très petit globe qu’il habite, et dont il n’est qu’un très petit animal, qui a cru autrefois que tous ces globes si nom- breux, si volumineux..., existoient uniquement pour lui. Si on compare l’état actuel de l’Astronomie en 1813, décrit par Delambre, avec celui où elle étoit en 1781, lors des premiers travaux de Herschel, et avec celui où elle étoit en 1792, décrit par Lalande (1), on admirera les progrès étonnans que cette science a faits dans ces 32 ans. 1°. Uranus découvert en 1781 par Herschel, et ses six sa- tellites découverts quelques temps après. 2°. Les quatre nouvelles petites planètes, Cérès, Pallas, Junor et Vesta. 30. Deux nouveaux satellites de Saturne découverts par Herschel. 4°. Il a reconnu que l’anneau de Saturne est double. bo. Trente-sept comètes nouvellement observées ; car en 1781 on n’en avoit observé que 80, et aujourd’hui Delambre en compte 117. 6°. Un nombre inmense d'étoiles nouvellement observées par Herschel. i G) L oyez V'Extrait que je donnai de son Astronomie , tome XLIV de ce ournal, Geg 2 412 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 7°. De nouvelles observations sur la zzatière nébuleuse, pax Herschel. 8°. Une multitude d’autres faits intéressans sur les corps célestes. CC . 0 Quels progrès admirables n’a donc pas faits l’Astronomie dans cette période de 32 ans? ; Quels progrès ne fera-t-elle pas dans la suite des siècles, si on persiste à la cultiver avec le même zèle ? L'admiration augmente encore, lorsqu'on pense à l'horrible révolution qui, pendant ce temps, a bouleversé l'Europe et dé- tourné les savans de leurs travaux ; mais un Francais remarquera avec douleur , que les Français n’ont eu presque aucune part à ces brillantes découvertes. On en reconnoîtra facilement plu- sieurs causes. On a, par exemple, un beau télescope de 22 pieds dont on ne se sert pas, parce qu'il y a quelques réparations a 3 faire, tandis qu’il y a des fonds pre net pour l’Obser- vatoire, le Bureau des Longitudes...; mais on peul en assigner une autre cause, la situation de l'Observatoire est dans Paris même, dont lair est le plus souvent brumeux.... C’est pourquoi J'ai proposé depuis long-temps de le transporter sur le Mont-Valérien ( le Calvaire ) ; on y construiroit un obser- vatoire digne de la nation; on y placeroit tous les meilleurs ins- trumens connus, et surtout de grands télescopes, tels que ceux de Herschel...; des astronomes zélés , qui neseroient point distraits par le tumulte de la ville, y suivroient avec constance les ob- servations. Je proposai (Journal de Physique, tome XLIV, pag. 4, en parlant d’un monument pour avoir un type d’une mesure cons- tante) de faire au haut du Mont-Valérien (ou Calvaire), ce mo- nument qui ne seroit pas dispendieux. On couperoit le sommet de cette monticule de manière à représenter la base d’une grande pyramide : on revétiroit en pierres dures, de granit par exemple, les côtés de cette pyramide, auxquels on donneroit une longueur et une largeur bien déterminées et bien orientées. On auroit de celte manière une mesure invariable , ou un prototype en grand de mesures fixes. On établiroit sur cette base un observatoire dont je viens de parler. Ce seroit l’uranibourg de Tyclio-Brahé perfectionné. ET D'HISTOIRE NATURELLE, 413 a RECHERCHES ANALYTIQUES SUR L’ARRAGONITE; Par M. STROMEYER, Professeur à Gottingue. EX T'RATTF, Daxs la séance du 3r juillet 1813, M. Stromeyer a lu à la Société Royale des Sciences de Gottingue , un Mémoire ayant pour titre : De Arragonile ejusque differentia à spatho cal- careo rhomboïidali chemica. La différence frappante que l’on avoit remarquée dans l’arra- gonite et le spath calcaire rhomboïdal, par rapport à sa dureté, sa pesanteur spécifique , sa réfraction, et surtout par rapport à sa texture , fit présumer aussi une différence dans sa composition chimique. Les chhnistes n’étoient cependant pas encore parvenus à trouver une dissemblance dans les principes de ces deux fos- siles. Les analyses de Klaproth, Fourcroy et Vauquelin, Proust, Bucholz, Trommsdorff, Thenard et Biot parurent mettre hors de doute que ces deux substances étoient analogues dans leur nature chimique , et même jusque dans les proportions de leurs principes. Quoique cet exemple fût le seul où les résultats de l’analyse chimique se trouvent en contradiction manifeste avec la Cristallotomie, il fit douter plusieurs chimistes, et entre autres le célèbre auteur de la Statique chimique, à la vérité de la doctrine d'Haüy, et à l’utilité de fonder une méthode sur la structure des minéraux. MM. Thenard et Biot , persuadés d’avoir épuisé toutes les ressources que les sciences nous offrent, se crurent déjà autorisés de conclure que les mêmes principes chimiques pouvoient, en s’unissant dans les mêmes proportions, former des composés différens dans les propriétés physiques, soit que les molécules de ces principes aient, par elles-mêmes, la faculté de se combiner ensemble de plusieurs manières, soit qu'elles acquièrent celte faculté, par l'influence d’un agent 4T4 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE étranger qui disparoît ensuite, sans que la combinaison se détruise. Plusieurs minéralogistes, et notamment M. Bernhardi, es- sayèrent de déduire la eristallisation de l’arragonite du spath calcaire rhomboïde, pour mettre fin à cette discussion dans les deux doctrines. Mais M. Haüy fit voir de nouveau, qu'il étoit mathématiquement impossiblede reconduire la forme cris- talline de l'arragonite à celle du spath calcaire, parce que leurs cristallisations étoient telles, qu'on ne pourroit pas les réunir sous le même système de lois de la structure. Il démontra de plus, que les elorts de M. Bernhardi, et de quelques autres minéralogistes, étaient basés sur des suppositions arbitraires, qui ne pouvoient pas soutenir l'épreuve des calculs cristallographi- ques, et que, d’après cela, les deux fossiles devroient être re- gardés comme des espèces différentes, quoique l'analyse chimique paroisse encore contredire ceci, L'état des choses étoit ainsi, lorsque l'hiver dernier, M. Stro- meyer fut occupé de Panalyse d’un fossile découvert à Braunsdorf près de Freyberg en Saxe, pris par les minéralogistes , tantôt pour de. la strontianite, tantôt pour de l'arragonite : il concut l'idée de soumettre l’arragonite elle-même à une nouvelle analyse chi- mique. Le fossile de Braunsdorff dont nous venons de parler, fut. reconnu pour un carbonate de strontiane, mais retenant en même temps quelques centièmes de carbonate de chaux. En ré- pétant les analyses de la strontiane d’Ecosse, faites par Klaproth et Pelletier, M. Stromeyer y trouva de même quelques cen- tièmes de carbonate de chaux, ce qui l’engagea de voir si les carbovates de chaux naturels ne renfermoient pas aussi un peu decarbonate de strontiane. La ressemblance extérieure de la strontiane avec l’arragonite engagea l’auteur d’analyser d’abord le dernier de ces fossiles, encouragé tou-tà-la-fois par lespoir de résoudre le problème dans le cas où l’arragonite contenoit de la strontiane. 1l ne parut pas tout-à-fait invraisemblable à M. Stromeyer, que la forme cris- talline de l’arragonite peut être déduite de celle du carbonate de strontiane; car plusieurs analyses de chaux carbonatée ma- gnésifère et de stahlstein , lui avoient donné la persuasion que l’idée ingénieuse de M. Hausmann, de l'influence de la force spécifique de cristallisation de certaines substances sur la forme cristalline de quelques autres combinées ensemble , étoit réelle- ment fondée dans la nature, et que des substances douées d’un ET D'HISTOIRE NATURELLE. 415 grand pouvoir de cristallisation, même lorsqu'elles sont com- binées en petite quantité avec d’autres corps, peuvent les forcer en quelque sorte, d'adopter leur forme cristalline particulière. A la vérité, MM. Bucholz et Thenard, guidés par le soupcon de Kirwan sur la présence de cette substance, avoient déjà cherché la strontiane dans l’arragonite, sans y trouver une trace’ de cet alcali; mais comme le mode d’analyse, employé par les deux chimistes, ne parut pas suffisant à M. Stromeyer, il en- treprit d'examiner l’arragonite sur la strontiane. La première expérience faite sur l'arragonite de Vertaison en Auvergne, répondit déjà entièrement à l'attente de l’auteur. Comme le nitrate de strontiane étant parfaitement neutre, est insoluble dans l’alcool absolu, et comme le nitrate de chaux se dissout entièrement dans ce menstrue, M. Stromeyer employa ce moyen pour séparer les deux sels. Déjà, par le refroidissement de la dissolution de l’arragonite dans l'acide nitrique, ilse déposa des octaëdres insolubles dans lalcoo! , qui consistoient en nitrate de strontiane. Plus de vingt expériences failes avec des cristaux purs d’arragonite, ont donné les mêmes résultats; de sorte qu'il ne resta aucun doute à l’auteur, que l’arragonite ne renferme réellement quelques céntièmes de carbonate de strontiane. Ges expériences ont été répétées avec un grand nombre de variétés d’arragonite, notamment avec l’arragonite prismatique de Mi- grunilla dans le royaume de Valence, avec celle de Molina en Aragon, avec l’arragonite seapiforme de Dax en Béarn, de Iberg au.Harz, de Neumarckt dans le Haut-Palatinat, de Mordklinge près Loewenstein en Suabe, et de Ferroë. Il doit le plus grand nombre de ces fossiles à la complaisance de ses amis, MM. les professeurs Hausmann et Bonterwek. Toutes ces espèces d’arragonites donnèrent, comme celle d'Auvergne, du nitrate de strontiane. Il n'y a que deux fossiles considérés comme des arragonites , dans lesquels M. Stromeyer n’a pas pu trouver de la strontiane , dans la eisenblulh et dans le faserkabs que lon rencontre à la Porta Westphalica. Le premier étoit un carbonate de chaux pur, et le dernier contenoit quelques centièmes de sulfate de chaux; mais la texture de ces deux fossiles, quoique leur extérieur ressemble à l’arragonite, en diflère beaucoup et s'approche infiniment du spath calcaire rhomboïdal. M. Cordier a dit avoir trouvé des stalactites dites //os ferré, qui éloient des arragonites ; mais celles que j'ai examinées, wavoient aucun des caractères de l’arragonite, 416 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Pour s’assurer si le carbonate de strontiane devoit être regardé comme une partie essentielle de larragonite, M. Stromeyer soumit un grand nombre de spaths calcaires à l'analyse , mais aucun d’eux ne lui a oflert de la strontiane. Il n’y a que quelques variétés scapiformes dont la dissolution du nitrate par l'alcool étoit un peu trouble, ce qui peut provenir d’une trace de ni- lrate de strontiane; car un peu d’eau rendit la liqueur claire, et le muriate de baryte ne troubla pas la dissolution de ces spaths calcaires dans l'acide nitrique. L'auteur a cependant observé, comme une chose digne de remarque, que dans ces deux spaths calcaires scapiformes, il y avoit çà et là des indices d’une cassure conchoïde. D’après ces expériences, M. Stromeyer croit pouvoir admettre que l’arragonite ne diffère non-seulement du spath calcaire par ses propriétés physiques, mais aussi par sa composition, et que cetle différence réside dans le carbonate de strontiane qui est chimiquement combiné avec le carbonate de chaux, en formant use combinaison naturelle triple de ces deux sels, tandis que le spath calcaire rhomboïdalne consiste qu’en carbonate de chaux. L'analyse complète que l’auteur a faite de trois principales variétés d’arragonite, de Béarn, de Molina et d'Auvergne, en comparaison avec le spath d'Islande et du Harz, donnés par MM. Blumenbach et Hausmann, ont amplement confirmé l'opinion énoncée ci-dessus. Il a vu que la quantité de carbonate de strontiane varioit, à la vérité, dans les différentes arragonites, qu'elle étoit cependant toujours constante dans la même variété. L'auteur présume que les quantités de ce sel existent dans les différentes arragonites, d’après lesmêmes proportions déterminées, comme cela a lieu selon ses propres expériences, avec le car- bonate de magnésie dans les spaths amers, les dolomies et les bitterkalken. C’est ainsi que les arragonites de Béarn et d’A- ragon contenoient le double de carbonate de strontiane que celle d'Auvergne, et cette dernière parut en renfermer une fois autant que l’arragonite de l’Iberge et de l’ile de Ferroë. - L'auteur a trouvé aussi dans l’arragonite une quantité moindre d’acide carbonique que dans le spath calcaire, soit qu’il la trouva par la perte du poids après la calcination du triple, ou par le volume du gaz développé par des acides, ou bien enfin d’après le carbonate de chaux obtenu en faisant passer le gaz dans l’eau de chaux. Outre la différence principale dans la nature chimique de l’arragonite ET D'HISTOIME NATURELLE. 417 - l’arragonite et du spath rhomboïdal, lauteur, dans le courant de ses recherches, trouve encore un antre caractère: entre les deux fossiles. L’arragonite renferme une petite quantité d'eau chimiquement combinée, dont la perte occasionne Paspect d’émail, et l’eflorescence que subit le fossile par ‘une foible chaleur. Le spath calcaire rhomboïdal, au contraire, ne contient pas d'eau chimiquement combinée. Ce fossile conserve, à la température capable de faire effleurir l’arragonite, son éclat, sa transparence et sa forme, qu'il ne perd -qu'avec le dégagement de l'acide carbonique. La petite quantité d’eau qui se dégage par Ja chaleur de plusieurs spaths calcaires, y est retenue mécaniquement entre quelques lames; car il n’y a que le spath calcaire qui déerépite au feu, qui donne de l’eau, et plus 4 décrépite, plus sa quantité d’eau est grande. M. Stromeyer l'appelle eau de décrépitation, et pense que la décrépitation provient uniquement du dégagement de l’eau ou de l'air retenus entre les lames, et que celte dé- crépitation ne doit pas être envisagée comme une propriété Ca- ractéristique d’une substance. Il croit aussi que la belle‘trans- parence par laquelle le spath d’Islande se distingue du spath calcaire rhomboïdal d’autres contrées, doit être attribuée à 1 ab- sence totale de cette eau; car il ne décrépite pas au feu et n'éprouve pas de changemerit ni de perte en poids, quand même, lorsqu'il est chauffé à une température qui est près de celle de la chaleur rouge. L’efllorescence de l’arragonite donne d’après cela, comme Haüy la fait remarquer, un caractère certain pour le distinguer dé suite du spath'éalcäire rhomboïdal. Outre les carbonates de chaux et de strontiane, l'arragonite contient encore une très-grande quantité d’oxide de manganése et de fer. L’oxide de manganèse y est probablement uni à l'acide carbonique, et chimiquement combinéavec les deux autres carbo- nates : mais que cet oxide ne fait pas une parlie esseñtielle de l’arragonite, résulte déjà de ce que l’arragonite d'Auvergne n’en contient pas. ME > SD Quant à Poxide de fer, il paroît y être en état d’hydrate et mécaniquement renfermé entre les lames; ceci est du moins le cas avec l’arragonite d'Espagne qui en contient le plus el d’où lui provient sa couleur. Lorsque l’on fait dissoudre ce fossile dans des acides ,-la solution est blanche et transparente, tandis que l'hydrate de fer oxidé se détache des lames. Cet oxide est quartzeux et contient du sulfate de. chaux, lesquelles deux substances ne se trouvent pas dans. l'arragonite. Tome ZLXXIX. NOVEMBRE an 1814. Hhh 418 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Voici le résultat des analyses de M. Stromeyer. 19. L’arragonite de Bastinc près d'Ax dans le département des Landes, contient : Carbonate de chaux. . . . . . . 94,8249 Carbonate de strontiane. . , . . 4,0836 Manganèse oxidulé avec une trace de fer oxidé hydraté.. . . . . 0,0939 Eau de cristallisation. . . . . . 0,9831 ? 99:9855 Oubien, Chaux, 4. 22 APE , 53,3864 SÉTOTHiANE SN ORNE AR EE as 2,8808 Manganèse et fer oxidé.. . . . . 0,003g Acide carbonique. . . . . . . . 42,806) Eau de cristallisation. . . . . . . o,983r 100,2111 29. Dans 100 parties d’arragonite prismatique de Molina eu Aragon, ont été trouvés, Carbonate de chaux. . . . . . . 94,5757 Carbonate de strontiane. . . . . ,9062 Hydrate de fer, quartz et sulfate de chaux mécaniquement mélés. . . 0,7070 Eau de cristallisation.. . . . . . 0,3000 99,5489 Ou bien, en faisant abstraction de l’'hydrate de fer : Ghauxanb en oh era aan 53,6255 SON LIANESS FA FAUNE ANT. MAS 2,3187 Acide carbonique. . . . . . . + 42,4446 Eau de cristallisation. . . . . . o,302r 991909 3°. L’arragonite de Vertaison en Auvergne, contient : Carbonate.de chaux. . . 4 . . . 07,7227 Carbonate de strontiane. . + « . 2,055z Hydrate de fer oxidé.. . :,.. + 0,0098 À Eau de cristallisation. . . , . , . o,2104 99-99bE ET D'HISTOIRE NATURELLE. . 419 Ohbion, Chaux... Mie de 1 660178 STONE. fie ss ie « Nue 4400 Acide carbonique. , . . . . . . 43,2896 Her MTS te ile 0: EMI O:0008 Eau de cristallisation.. . . . . « 0,2104 99:9774 D'après l'analyse de l’auteur, le spath d'Islande contient : GRaGx A MO ONE EME EURE ET D90 Manganèse oxidulé avecune trace de TON Ale ARTE RAR. CT OT 500 Acide carbonique. . . . . . . 43,7000 100,0000 Le spath calcaire rhomboïdal d’ A ndreasberg au Harz, contient : (Ghauienir MUCH, 170 21765,9802 Manganèse oxidulé et fer. . . . o,3563 Acide carbonique. . . . . . . 43,5635 Eau de cristallisation. . . . . . o,10c0 100,0000 Ces rapports de parties constituantes dans le carbonate de chaux naturel, s'accordent bien avec ceux du carbonate artificiel in- diqués par MM. Berzelius et Stomeyer , et nous donnent une nouvelle preuve que les combinaisons naturelles sont formées d’après les mêmes proportions invariables que les composés ar- tificiels (1). AV, NOTE DE J.-C. DELAMÉTHERIE. M. Tennant m’a fait part d’une expérience qui va paroître dans les 7rans- actions de la Société Géologique de Londres , laquelle confirme l'opinion de M. Stromeyer à l'égard de l’union chimique de l’eau avec les autres substances dans le carbonate destrontiane. Cette expérience est due à M. Holme ;'il a trouvé que l’eau est plus fortement combinée dans le carbonate de strontiane, que dans le carbonate calcaire; car en fixant le calcaire dans le mercure bouil- lant , l’eau faisoit éclater la pierre, et éparpilloit le mercure , au lieu que le carbonate de strontiane ne se brisoit pas, mais retenoit-son eau malgré une ébullition da mercure soutenue aussi long-temps qu’on le souhaitoit. 432 JOURYWAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE, elc. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER. Seconde Lettre sur l'incertitude de quelques oxidations ; par L. Proust. Pag. 32: Discours sur les progrès et l'état présent de la Chimie animale, prononcé à l’Académie des Sciences de Stockholm, par J. Berzelius. Traduit de l'anglais avec " des notes, par Gaultier de Claubry. 343 Tableau météorologique; par M. Bouvard. 378 Suite de l'essai sur les tables des degrés de certitude et de probabilité des connoïssances humaines; par J.-C. Delaméthertie. 380 Rapport fait à la première Classe de l'Institut, sur un Mémoire de M. J. Binet, relatif à la composition des forces, des momens et des aïres. 386 Astronomie de Delambre , etc. Suite de l'extrait, par J.-C. Delamétherie. 391 Recherches analytiques sur l'arragonite ; par M. Stro- meyer. Extrait. 415 De l'imprimerie de M®° Veuve GOURCIER, Imprimeur - Libraire pour les Mathématiques et la Marine, quai des Augustins, n°57. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE ET D'HISTOIRE NATURÉLLE.. DÉCEMBRE AN 1814. SUITE DU DISCOURS SUR LES PROGRÉS ET L'ÉTAT PRÉSENT DE LA CHIMIE ANIMALE, PRONONCÉ AL’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES DE STOCKHOLM, Par J. BERZELIUS, Professeur de Médecine , de Pharmacie, etc. Traduit de l’anglais, avec des Notes, Par H. GAULTIER pe CLAuBRY (*). Les autres Ziguides qui contribuent d'une manière ou d’une autre à la digestion, sont, la salive, le suc gastrique, la bile, la liqueur du pancréas et.celle des intestins. Fourcroy et EE (9 Les notes du Traducteur sont renvoyées par des lettres à la fin de ce Discours. Tome LXXIX. DÉCEMBRE an 1814. lii zC 422 - JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE Vauquelin ont examiné la salive ; elle a été analysée par Bostock, et en dernier lieu, j'ai cherché à, en (cofnoître la cômposition. J'ai trouvé qu’elle étoit un des liquides les plus agueux du corps; elle contient en suspension une matière muqueuse blanche, qui se sépare facilement quand on dissout de la salive dans l’eau, et qui se dissout! favilement-dans les alcalis, mais non dans les acides. Je crois avoir des raisons pour croire, jusqu’à un certain point au moins, qu’elle se forme dans la membrane muqueuse des conduits salivaires et dans | intérieur de la bouche. L'autre partie de Ja salive contient, outre les sels du sérum, une matière par- tüculière, remarquable en ce qu’elle ne peut se coaguler par l'ébullition, ni être précipitée, par le tannin oulle sous-acétate de plomb. La salive forme avec l’eau une solution mousseuse ; mais il faut observer qu’elle doit cette propriété de filer, au mucus avec lequel elle est mêlée. On a considéré la viscosité de la salive, comme destinée seulement à mêler de petites quan- tités d'air avec les matières que l’on mâche. Je crois que c’est une erreur. Cette viscosité doit avoir pour but de former avec les alimens soumis à la imastication, une masse cohérente et glissante, afin d'en faciliter la déglutition; mais on ne sait pas Jusqu'à quel point elle peut contribuer à la solution des alimens. Quand une portion de mucus de la bouche reste, sur! lés dents, il s’épaissit, se colore, et forme ce que l'on appelle sartre : j'en . ai trouvé de deux espèces : quand) il est récent, ce n’est rien autre chose que du mucus épaissi; mais quand le mucus se détruit, on aperçoit insensiblement sur l'émail de la dent du phosphate de chaux, qui y forme quelquefois une croûte GENE à + ligne d'épaisseur. Ce ;phosphate contient environ 3 de son poids de mucus qui s’est desséché au milieu de la masse terreuse. ES I DURE ; nl Plusieurs physiciens anciens et modernes, comme Sfevens, Réaumur, Spallanzarii, Scopoli, Brugrratelli, Carminati , Vauguelin,.etc., ont tenté de connoître la composition du suc gastrique ; mais comme les fluides animaux ont été, en général, peu examinés, et que la plus grande partie de ces savans n’avoient pas .de connoissances en Chimie, il en résulie que toutes leurs recherches n’ont pas produit des résultats avantageux, puisque l'on n’apu comparer les substances obtenues du suc gastrique, avec les parties constituantes des autres liquides. 7’auguelin a toujours rencontré l'acide phosphorique dans le suc gastrique des animaux herbivores, tandis que celui de l'homme et des car+ . " r ET D'HISTOIRE NATURELLE, 423 nivores ne présente aucune trace d’acide ou d'alcali libre. Une des propriétés chimiques les plus remarquables du suc gastrique est la facilité avec laquelle il dissout les alimens que prennent les animaux, et coagule le lait et les substances albumineuses. Ces dernières exigent une si petite quantité de cette matière, que Foung a trouvé que quand on lave avec de l’eau, puis avec une forte solution alcaline, la mémbrane intérieure de l’estomac, et qui, après la mort de l’animal, retient dans des vaisseaux une portion du suc gastrique qui étoit prêt d’être sécrété au moment de sa mort, l’eau même qui a servi à cette opération, a là propriété de coaguler le lait et le sérum. On ne sait pas encore quelle est la substance qui donné au suc gastrique de semblables propriétés. Cependant plusieurs savans ont observé que la viande enveloppée dans un morceau de linge fin, et placée sous les aisselles et entre les orteils, etc., se trouve dissoute de la même manière que par le suc gastrique (a). Le suc pancréatique n'a jamais été examiné chimiquement ; on a supposé, cependant, à cause, de la structure de la glande qui ressemble aux glandes salivaires, qu’il étoit analogue à la salive pour la composition. La 2z/6, au contraire, a souvent été “un objet de recherches. Boërhave j Bianchi, Verlugen, Hoffmann, Drelincourt, Hartman , Murheer,,Barchhuzen , Schroeder et d’autres physiciens de l’ancienne Ecole, s’en sont beaucoup occupés ; mais Cadef a donné la première analyse un peu exacte de ce liquide; et, quelques années après, Fan Bochant entreprit des recherches sur le même sujet. Enfin, Ha- clurg, Fourcroy, Powel, et en dernier lieu Therard, ont fait des expériences sur la bile. Les anciens qui ont travaillé sur la bile, l’ont considérée comme une espèce de savon composé de soude caustique et d’une résine verte amère, d’une nalure par- ticulière, qui ne pouyoit être précipitée par les acides. Ils ont cru aussi qu’elle contenoit de l’albuminé qui ne pouvoit être séparée par l'alcool : cependant Thenard a montré que la bile contient, outre de la résine, une matière douce et amère parti- culière, sous forme d’extrait, à laquelle il a donné, à cause de sa saveur, le nom de pycromel, et qui, avec l’alcali, contribue à tenir Ja résine en dissolution. Quelques circonstances des expé- riencés de Thenard:, qui me paroissoient improbables, nT'enga- gèrent à entreprendre aussi une analyse de la bile, dont les ré- sultats m’ont prouvé qu'aucun des chimistes qui avoient travaillé aÿant moi, n'en avoient bien connu là composition. J’ai trouvé lii 2 424 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE:CHIMIE qu’elle ne contient pas de résine, que les sels et la soude y sont dans la même proportion que dans le sang, et qu’elle contient une matière particulière, amère et ensuite sucrée, qui partage les propriétés de la fibrine, de la matière colorante et de l'al- bumine du sang, qui servent à, lui donner naissance dans le foie. J'ai trouvé aussi ,; qu’elle forme avec les acides minéraux une substance particulière, difficilement soluble dans. l’eau, qui est entièrement. précipitée . par ‘un excès d'acide, et qui possède tous les caractères de la résine, c’est-à-dire d’être insoluble dans l'alcool, fusible par la chaleur, et de former avec l'oxide de plomb un composé analogue aux emplâtres, etc. Une petite quan- tité d’acide forme au contraire un composé plus soluble : on peut rendre à la résine qui a été précipitée par l’acide sulfurique, ses propriétés premières, en la, traitant par le carbonate de baryte, et alors elle forme une solution semblable à la bile. Cette matière particulière ressemble aussi à l’albumine et à la fibrine du sang, en ce qu'elle ne peut être précipitée par l'acide acétique : dans plusieurs animaux, comme dans plusieurs cir- constances différentes pour chaque animal, elle a de la tendance à former, avec les acides, des composés plus insolubles; et J'ai conclu des expériences que j'ai été à portée de faire, qu’un long séjour dans la vésicule augmente sa tendance à former une résine avec les acides. Tous les chimistes qui ont travaillé avant moi sur la bile, disent que la bile contient de l’albumine; mais comme la substance à laquelle ils ont donné ce nom est précipitée par l'acide acétique, et ne peut se redissoudre dans un excès d’acide, ce ne peut er être. J’ai fait voir, dans un examen du mucus des différentes membranes du corps, que c’est une portion du mucus de la vésicule qui s’est dissoute dans la bile. Cependant la bile n’en contient qu’une petite quantité, car, même quand elle est très-épaisse, elle ne donne qu’un résidu à peine plus sensible après lévaporation, que quand elle est bien claire (8). © Voilà tout ce que:nous savons sur. les liquides qui ont quelque rapport avec la digestion, et quoique cette fonction soit plus indépendante du système nerveux que la plupart des autres, elle est loin d’être connue. On croyoit depuis long-temps que la fonction de l'estomac dans Ja digestion; n’étoit qu'un effet mécanique de ses membranes. dans la trituration des alimenss mais les expériences de Szevens,. Réaumur et Spallanzani ont p'ouvé l’inexactitude de cette supposition. Ils firent avaler à.des ‘ET D'HISTOIRE NATURELLE. ! 425 animaux, des tubes creux et des balles de métal percées de petits trous, destinés à contenir les fluides de l’estomac ; ils placèrent dans ces petits appareils , des substances nutritives, et ils trouvèrent que les alimens étoient, au bout d’un certain temps, changés en chyle, aussi bien que ceux qui étoient dans l'estomac : l'effet mécanique de l’estomac ne. peut donc être la cause de la digestion. On eut alors recours à Ja fermentation pour expliquer ce phénomène ; mais quand on eut trouvé que les alimens renfermés dans de petites balles de métal n’éprou- voient pas de changement dans l'estomac, et que de petits osétoient dissous et avoient perdu leur cohésion, on abandonna la théorie de la fermentation, et l’on adopta l'opinion, qui est encore con- sidérée, comme la plus probable, qu’il existe dans l’estomac une sécrétion particulière, que l’on a nommée suc gastrique! qui a la propriété de dissoudre les substances alimentaires qui sont portées dans cet organe, et qui les prépare, par cette dis- solution, aux changemens qu'ils doivent subir dans le duodénum. Par suite de ces idées, Spallanzani fit un grand nombre d’ex- périences pour connoître la nature et les propriétés du suc gas- trique; mais la répétition de ces expériences ne produiroit pas maintenant d'aussi grands avantages qu’on s’y éloit attendu de son temps. Englesfield Smith essaya de prouver par des-expé- riences sur les grenouilles, que c’étoit la bile et non le suc gas- trique qui opéroit la dissolution des alimens, puisqu'on les trouvoit sans altération dans l'estomac, quand on avoit lié le canal cho- Jédoque, mais que si on venoit à administrer de la bile où à couper [la ligature, la digestion se faisoit bientôt. Quand même ces expériences seroient exactes pour les amphibies, la même chose n’a pas lieu chez les mammiféres; ear nous avons des exemples de chyle parfaitement élaboré, dans lequel on n’aper- cevoit pas de bile; et quand la bile se trouve mêlée avec le chyle dans l'estomac de l’homme, il est bien prouvé par expé- rience , que c’est un signe certain de maladie. Everard Home voulut prouver, il y a peu de temps, que l'estomac, durant la digestion , est divisé en deux parties, par le moyen de :2s fibres musculaires. Il supposa que la portion la plus rapprochée de l’œsophage est destinée à contehiles ali- mens liquides, et que c’est dans celle qui en est la plus éloignée que les substances solides se trouvent dissoutes: 1l'suppose que cette division de lestomac pendant la digestion, qui ne semble pas probable, est destinée à transporter la plus grande partie 426 / JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE partie de ces liquides au travers d’un canal inconnu , de l'estomac dans la rate ; qui en opère le matt avec le sang beaucoup “plus promptement ‘que par le cours des vaisseaux absorbans du canal intestinal. Home a essayé de prouver par des expériences qui, dans le cas où elles seroient exactes et où les travaux sub- séquens les confirmeroient , doivent prouver complètement ce fait, l'existence de ce passage qe ne devroit pas être inconnu à ceux qui se sont occupés de recherches très-exactes , que l’on a faites dans le principe pour découvrir une voie directe de l'estomac aux reins (c). [l trouva , par exemple, que quand un homme prend une légère infusion de rhubarbe, la matière colorante paroît environ vingt minutes après dans lurine, mais que cette couleur disparoît bientôt, et qu'elle ne reparoît que plusieurs heures après, quand le reste de Finfusion de rhubarbe a passé dans le canal thoracique. Quand on fait prendre à un animal de l’infusion de rhubarbe, et qu’on le tue peu de temps après, on trouve l’infusion dans le sang de la rate, mais non dans celui du foie, etc. Il trouva aussi que la rate renferme un grand nombre de petites cellules remplies, pendant la digestion, d’un fluide incolore, mais qui, dans d’autres momens, sont resserrées et presque imperceptibles. D’autres savans anatomistes avoient fait, avant Home, des observations semblables relativement à la structure de la rate. De cette manière, le chyle acquiert toujours une consistance déterminée, puisque le superflu du liquide qui avoit été avalé, s'écoule sans se, mêler avec lui, tandis que le chyle passe au travers du pylore , dans le: duodéum où il se trouve en contact avec la bile. Les changemens quetla bile subit alors sont inconnus ainsi que:ses usages. Nous pouvons conclure'qu’elle est décomposée réellement, de ce qu'on. ne la trouve pas à l’état de bile dans les matières que contient le canal intestinal, Au lieu de cela, on y trouve la matière de cette bile, changée en une espèce de gras adipocireux verdâtre ou jaune, qui donne à ces substances leur couleur foncée. On avoit cru qu'il ne pouvoit se former de chyle, sans lintermède de la bile, et gdoiqu'on ne puisse nier cette opinion, il y a cependant des exemples de personnes chez lesquelles, pendant le cours d’une jaunisse chronique, l'écoulement de la bile a cessé pendant deux ou trois semaines, et qui ne sont pas mortes faule de nour- riture, Quand la bile et le suc, pancréatique se sont mêlés aveg le chyÿme, on le trouve changé en une espèce d’émulsion. blanche qui, à cause de sa couleur, porte le nom de Wuide laiteux ou 1: ÆT D'HISTOIRE NATURELLE. 42} chyle, et en une portion insoluble d’un jaune léger ; qui est des- tinée à former les excrétions, Cette portion insoluble: est com- posée de foutes les parties des alimens, qui ne peuvent être dissoutes par le suc gastrique ,et de la matière bilieuse précipitée sous forme d’adipocire coloré, et qui probablement dans cet état, est unie avec quelques parties de chyle qui, par leur af: finité, en ont déterminé la précipitation. Ils sont alors mêlés en- semble. Les vaisseaux absorbans qui existent sur la surface veloutée de la membrane muqueuse, absorbent la partie dissoute et laissent la portion qui n’est pas dissoute ; mais commie par le moyen de cette absorption la masse devient enfin très- sèche avant que tout le chyle en ait été séparé , un liquide clair sé- crélé sur Jes parois des intestins, s’unit avec cetle masse ét dissout le chyle qui est ensuite absorbé en passant dans les intestins, de sorte que quand les matières fécales arrivent au sphincter, il n’y existe souvent pas la moindre portion de chÿle, a nature de cette masse après l’excrétion, a élé peu examinée par les’ anciens chimistes, et les expériences de Fauquelin et de Sage ne peuvent être considérées comme complètes. Einhof et Thaër ont fait une analyse très-exacte des excré: mens du bœuf, et j'ai depuis examiné ceux de l’homme, sous un point de vue plus physiologique que ceux qui ont travaillé avaut moi. Ces excrémeus contiennent à peu près les trois quarts de leur poids de liquide, dans lequel, outre ia petite portion de bile non décomposée , il existe une solution des sels du sérum, une certaine quantité de phosphate de magnésie, et une matière animale particulière sous forme d’extrait. La masse solide est formée des substances qui n’ont pas été dissoutes dans l’estomac, ou qui ont été précipitées dans le duodénum, et de mucus des intestins qui est divisé dans toute la masse. Vauquelin a fait sur la quantité de terre qu’une poule re: türoit de l’avoine dont on la nourrissoit, et la quantilé em ployée à former la coquille des œufs, ou rejetée par les excrémens, des expériences comparatives, d’après lesquelles il paroît que la quantité de phosphate de chaux étloit, dans le, dernier cas, double de ce qu’elle étoit dans le premier, outre la quantité de carbonate de chaux existante dans j'avoine, et que la quantité de silice éloit, quoique d’une manière peu considérable, dimi: nuée dans les excrétions de la poule. Ces expériences, qui sont malheureusement très-embrouillées par la numération décimale inexacle et les erreurs de calculs, semblent prouver ce que des 428 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE expériences ultérieures sur les végétaux confirmeront que les terres sont susceptibles d’être composées et décomposées, quand il est nécessaire, par les procédés de la Chimie organique. Le chyle, tel qu’il existe dans les intestins grèles et les pre- imières branches des vaisseaux absorbans, n’est pas connu dis- tinctement, Sa couleur et sa propriété de se coaguler par la chaleur, l’avoient fait comparer au lait, et l’on a long-temps supposé que sa principale partie constituante étoit le sucre de lait. Cette erreur est maintenant rectifiée. Quand le chyle arrive dans le canal thoracique, sa couleur Jaiteuse devient de plus en plus foible, à mesure qu'il est délayé par la lymphe des autres vaisseaux absorbans. En général, c'est un mélange de jaune et de gris, ilse coagule à l’air, et le coagulum prend, par degrés, une couleur rouge. Nous avons alors lieu de considérer la ma- tière blanche et grise du chyle comme une matière colorante he n’est pas achevée, et à laquelle il manque, pour être parfaite, “avoir le contact de l'air. Les expériences sur le chyle par Halle, ÆErnmert et Reuss, se rapportent toutes en ce point , que celiquide, à l'exception de la couleur, ressemble au sang, mais qu'il est beaucoup plus étendu. Fourcroy ayant annoncé que la matière colorante du sang étoit une combinaison de sous-phosphate rouge de fer et d’albumine, il s’ensuivroit que la matière colorante blanche du chyle devroit être de l’albumine unie au phosphate neutre de protoxide de fer qui, dans son mélange avec le sang, acquerroit un excès de base par l’action de l’alcali du sang, et seroit porté dans les poumons, de l’état de protoxide à celui de péroxide ; mais comme on ne peut découvrir aucune trace de sel ferrugineux dans la matière colorante du sang , toute cette supposilion séduisante tombe d’elle-même. On peut donner en peu de mots une idée sommaire de la Formation du chyle par la digestion : les alimens sont exacte- ment triturés dans la bouche, passent dans l'estomac, où par l'action du suc gastrique+ils sont convertis en un liquide ho- mogène qui est précipité par la bile dans le duodénum. La liqueur filtre dans les intestins par le moyen des vaisseaux absorbans, et la matière précipitée est lavée par le liquide intestinal, qui est à son tour absorbé (de la même manière que Jon édulcore des précipités dans nos filtres ordinaires), après quoi la masse elle-même est évacuée. L On n’a pas examiné la composition de la rate et du foie; on a seulement ET D'HISTOIRE NATURELLE. 429 a seulement observé que le foie, quand il se putréfie, loin de partager les propriétés de la bile, peut être changé, dans quelques circonstances, en une substance qui ressemble à l’adipocire. La texture et les parties constituantes des os n’ont été bien connus que de nos Jours, quoique l’on eût découvert, il y a long-temps, qu’ils contiennent une partie animale combustible et une partie terreuse inorganique , qui ne ressemblant à aucune terre alors connue, fut appelée zerre des os ou terre animale: Papin, Herissant, Lessone, et avant tous, Haller, ont prouvé que la partie animale étoit un cartilage qui pouvoit être réduit en colle par l’ébullition. La nature et la composition des os ont été découvertes par un savant que nous avons le bonheur de posséder aujourd'hui parmi nous, notre collègue G. Gahn. Cette découverte, comme beaucoup d’autres qu'il fit, a été attribuée à Scheele et à Bergman, parce ces savans, auxquels on étoit accoutumé de rapporter tout ce qu’ils publioient, furent les premiers à faire connoître cette découverte, sans avoir l'intention de cacher son nom. Il suflisoit à ce savant modeste que la vérité fût connue. Il ne prétendit pas à l'honneur de la dé- couverte, puisqu'il lui étoit indifférent que l'on supposât que ce fût son premier maître ou son ami qui eussent fait ce qu'il avoit lui-même découvert; mais la postérité ne manquera pas de réparer l’omission ou la négligence de ses contemporains. Scheele, dans son Traité sur le spath - fluor et son acide, dit « que d’après des découvertes récentes, on a trouvé que la terre » des osest formée d’acide phosphorique et de chaux; » et cette expression a donné lieu à l'erreur, puisque la découverte avoit été faite par Gahn. Fourcroy a prouvé long-temps après, que les os des animaux herbivores contiennent du phosphate de magnésie , qu’il a re- cherché envain dans les os de l’homme : et dans ces derniers temps, Morichini, savant italien, a découvert que l’ivoire et l'émail des dents renferment du fluate de chaux. Outre les parties constituantes des os humains connues jusqu’à présent, j'y ai découvert, par une analyse exacte, du fluate de chaux et du phosphate de magnésie (d), et j'ai prouvé que le sulfate de chaux que l’on y rencontre après la combustion, n’y existe pas dans l’état de vie. J’ai trouvé que le cartilage des os forme environ le tiers de la masse totale. Il y en a un peu moins dans les dents, et il n’en existe pas dans leur émail. Fourcroy et Tome LXXIX. DÉCEMBRE an 1814, Kkk 439 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE V'auguelin ont trouvé 0,27 de substance combustible dans l'émail, Pepys, seulement 0,16, et je n’en ai trouvé que o,2. Merat- Guillot a fait un examen comparatif des os de plusieurs ani- maux, mais ces résultats sont bien inexacts. J'ai, par exemple, trouvé dans les os de l’homme et du jeune bœuf les mêmes parties constituantes el à peu près dans les mêmes proportions, et d’après lui, ceux-là contiennent 0,93 de phosphate de chaux, et ceux-ci, 0,67 du même sel. Le cartilage, qui est la partie animale des os, est si intimement uni avec le phosphate de chaux, qu’ils forment un out d'une texture telle, qu’elle résiste aux impressions les plus fortes, et d’une composition chimique telle, que quand les os n’ont pas été exposés à l'humidité, ils se conservent sans altération pendant plusieurs siècles. On a profité dans ces derniers temps, de la belle découverte de Papin, pour extraire des os une nourriture bonne et agréable, qui de son temps étoit négligée. Papin fit en présence de Charles IT; roi d'Angleterre, des expériences qui prouvoient que l’on pouvoit extraire de la gélatine des os, et il s’engagea à préparer en 24 heures, avec onze livres de charbon, 159 livres de gelée, dont il recommandoit l'usage dans les ateliers et les hôpitaux. Le Roi étoit disposé à donner à ce projet l'attention qu’il méritoit , quand , venant un jour pour diner , il trouva des pétitions sus- pendues au cou de ses chiens, par lesquelles ils le prioient de ne pas les priver d’une nourriture qu’ils avoient jusque-là considérée comme leur propriété. La raillerie devoit faire rire, mais la dé- couverte de Papin fut perdue pour ce siècle. Z. Proust rappela l’at- tention sur cet objet, et proposa au Gouvernement espagnol de se servir des os pour fairela soupe des soldatset celle des pauvres dans les hôpitaux , et son projet fut adopté. Le Gouvernement français, voyant les progrès de ses voisins, ordonna de rechercher ces os avec soin dans toute la France , où l’en en fit bientôt un usage qui se propagea dans toute l'Europe. Plusieurs savans s’occu- pèrent des moyens d'extraire complètement le cartilage des os, el le trouvèrent presque impossible, à moins d'employer le di- gesteur de Papin, auquel on fit quelques changemens, de sorte qu’on peut l’employer maintenant sans danger. Quelques-uns de ces savans allèrent si loin dans leur zèle pour la soupe d’os, qu'ils considérèrent les os comme plus nourrissans , et par con- séquent d’une plus grande valeur qu’un poids égal de viande. Cela n’est cependant pas exact, pour les raisons que j’ai établies dans l'analyse de Ja chair musculaire. ET D'HISTOIRE NATURELLE. 431 Nous n'avons pas d'expériences satisfaisantes sur la compo- silion des os dans les différens âges, non plus que sur la diffé- rence des os dans les diverses classes d'animaux. Hatchett à examiné les tégumens ou la couverture des testacés, que l’on doit considérer comme les os de ces animaux, et il les a trouvé ‘composés d'une matière animale particulière, dont il n'a pas déterminé très-exactement la nature et les propriétés, de car- bouate et de phosphate de chaux. Tandis que les os des mam- mifères sont formés de phosphate de chaux et d’une petite quantité de carbonate , ceux des testacés, au contraire, consistent en carbonate de chaux avec quelques centièmes de phosphate. La moëlle ou la graisse qui est contenue dans les os longs, paroît, d’après mes expériences, être semblable à la graisse des autres parties du corps; et les propriétés différentes qu’elle ac- quiert quand on la fait bouillir renfermée dans les os, dépendent entièrement des liquides contenus dans les vaisseaux de la mem- brane propre de la moëlle, et qui s’en séparent quand la graisse sort de ses cellules. La composition des cartilages est exactement la même que celle du cartilage des os. Ils se dissolvent par l’ébullition dans l’eau, sont changés en gélatine, et les veines, ainsi que les nerfs, ue sont point attaqués, Margueron, chimiste français, a examiné la synovie liquide, contenue dans les cavités articulaires. Il paroît que c’est presque complètement du sérum qui retient une portion de fibrine , puis- qu’elle se coagule à l'air : cependant ce coagulum n’est pas coloré , et le liquide est entièrement semblable au sérum du sang coagulé. Quand Margueron annonça que la quantité de fibrine s’élevoit à 0,12, il la pesa probablement humide et telle qu’on l'obtient par la coagulation : cette fibrine n’a pas les mêmes propriétés que celle du sang; mais on ne peut, d’après l'analyse de Margueron ,avoir aucune connoïissance précise des différences qui existent entre elles. Il paroît que Fourcroy croyoit qu'il y existoit de l'acide urique, et qu'il fondoit son opinion sur ce que les concrétions goutteuses, qui se forment souvent près des articulations et en génent les mouvemens , sont composées d’urate de soude. . - Les muscles (ou ce qu'on nomme généralement la chaër) ont été moins examinés que les autres matières animales. Geoffroy essaya de déterminer combien on en extrait de matière par l'eau, Kkk 2 - 432 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE et les quantités relatives de substance nutritive que l’on obtient de la chair des différens animaux. Thouvenel fit ensuite une analyse de la chair musculaire, qu'il considéra comme composée de fibres musculaires proprement dites , et d’un extrait particulier soluble dans l'alcool et dans l’eau. J'ai trouvé depuis, que la chair contient à peu près les trois quarts de son poids de liquide, que ce liquide renferme un acide libre, et que l'extrait dont parle Thouvenel, est cette même masse sirupeuse acide que l’on trouve dans le lait et ’urine , et qui est formée d’acide lactique, de lactate alcalin, de muriate de soude et d’une matière animale unie à ces sels sous forme d’extrait. J’ai cheïché à prouver que cet extrait n’est pas une partie constituante de la chair, mais qu'il est dû aux vaisseaux absorbans, et qu’il est principalement formé de matières absorbées par ces vaisseaux, ou prêtes à l'être quand la vie a cessé. Les liquides de la chair contiennent beaucoup plus de cet extrait sirupeux et de phosphate de soude que le sang, et j'ai conclu de là, que ces substances qui sont formées par la destruction de quelques parties, sont absorbées et intro- duites dans le sang pour êlre rejetées avec l’urine, dans laquelle on en trouve une quantité considérable. La fibre musculaire solide dans l’état de vie, est, comme l’anatomie le démontre, entremélée de tissu cellulaire, et pourvue, même dans les parties les plus intérieures, de vaisseaux et de nerfs. Cette fibre a les mêmes propriétés que la fibrine du sang; elle se dissout dans l’acide acétique , à l’exception de la portion de tissu cellulaire des vais- seaux et des nerfs qu’elle contient. La fibrine de la chair éprouve par l’action de l’eau bouillante, les mêmes changemens que celle du sang; elle devient insoluble dans l’acide acétique, et donne à l’eau dans laquelle on l’a fait bouillir, un principe constituant distinct, qui a une saveur de viande forte et. agréable, et qu'on ne peut réduire en gélatine. Quand cette matière est dis- soute avec le tissu cellulaire et mêlée avec la portion non coa- gulable des liquides de la viande, elle forme ce qu’on appelle bouillon, dont la force dépend , non-seulement du tissu cellulaire dissous et gélatinisé, maïs aussi de la fibrine dont elle conserve Ja saveur. La différence entre la soupe insipide d’os et le bouillon, avoit été attribuée d’abord à la substance extractive; mais cela n’est pas exact, car on sait que la viande dont a extrait les liquides, donne un bouillon très-agréable et très-nourrissant , mais sans couleur (e). On a fait diverses expériences pour découvrir la nature intims ET D'HISTOIRE NATURELLE. 433 du mouvement des muscles. Carlisle essaya de prouver par plusieurs moyens très-ingénieux, qu’un muscle, tandis qu'il se contracte, augmente en poids et en volume, et par conséquent qu'il se pénètre d’une nouvelle quantité de liquide. L'idée la plus probable sur le mécanisme intérieur qui produit le mouvement des muscles, paroît être que les fibres se tordent elles-mêmes en spirale et que les vaisseaux sont plus distendus, de sorte que le muscle dans un endroit déterminé, se rétracte et devient plus épais. Il est nécessaire que la nature cherche à réparer, par le mécanisme de son action intérieure, les pertes qu'elle fait par le mécanisme de l’action extérieure, et qui s’exécule toujours d’après des principes entièrement contrairesà ceux d’après lesquels nos machines sont généralement conduites. Le muscle fait, par lemoyen de très-pelites contractions , un mouvement très-étendu, ‘et par conséquent exerce son pouvoir près du point d'appui de los, tandis que le contre-poids est à l'extrémité opposée du même os. La nature paroît avoir distribué les pouvoirs. avec une grande libéralité, puisque chaque muscle fait un beaucoup plus grand eflet qu'il ne seroit nécessaire dans des circonstances opposées, et cet accroissement de pouvoir doit certainement être balancé par les moyens employés à rétracter les plus petites fibres dans un muscle qui agit. J’ai souvent voulu examiner avec un microscope composé, les contractions d'un muscle dont on a fait la section sur un animal vivant, bien convaincu que par ce moyen on obtiendroit une meilleure explication de ce procédé sublime et d’un si grand intérêt dans le mécanisme animal ; mais j'en ai toujours été détourné par une aversion insurmontable à voir un animal blessé souffrir sous la main d'un expérimen- tateur, quoiqu’en même temps je connusse l'importance des vérités physiologiques que l’on pourroit découvrir par ce moyen. Les tendons et aponévroses sont des portions des muscles qui servent à les fixer aux os éloignés ou à leurs points déter- minés d’attache. Ils ont une force mécanique très-considérable, et sont formés de la même base fondamentale que le tissu cel- lulaire et les cartilages dont ils ne paroissent différer que par leur structure. Ils s’amollissent par degrés par l’action de l'eau bouillante, et forment enfin une gelée, de sorte qu'il ne reste que.les veines qui ne se dissolvent pas. La Chimie n’a eu long-temps autre chose sur les #1embranes de l’œilet les humeurs qui y sont contenues, que les observations faites par hasard par les anatomistes. Chenevix a donné, il wy L A34 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE a pas long-temps , une analyse des humeurs de œil , et j'ai depuis examiné leur colfiposition ainsi que celle des membranes. La sclérotique qui revêt l'œil à l'extérieur, est composée comme les tendons; elle se dissout dans l'eau par une longue ébullition, et la solution se prend en gelée par le refroidissement. La choroïde qui tapisse la surface interne de l'œil, est composée de la même manière que la précédente; comme elle, elle se dissout dans l'eau bouillante, à l'exception de ses nombreuses veines et de la matière colorante noire qui la recouvre. Cette substance noire est insoluble dans l’eau chaude ou froide et dans les acides, mais elle est soluble dans les alcalis caustiques, et le précipité formé par les acides, n’est pas aussi coloré ; elle brûle comme une matière végétale et laisse des cendres ferrugineuses comme la matière colorante du sang, d'où elle a probablement été sécrétée; les veines de la choroïde transmettent seulement la partie incolore dans la substance de l’œil. La cornée est aussi convertie en gelée par l’ébullition dans l'eau. L’iris, au con- traire, a toutes les propriétés d’un muscle, et ses parties cons- Uluantes sont les mêmes que celles de la fibre musculaire: comme ses fonctions ressemblent aussi à celles de ces organes, il paroît plus que probable qu’on doit la considérer comme un muscle, et comme un de ceux qui, dans l'homme, ne sont pas sous l’empire de la volonté, quoique d’un autre côté, son mou- vement dans quelques oïseaux (comme ceux du genre chouette ou perroquet) semble en dépendre. Les humeurs qui remplissent le globe de l'œil sont de trois espèces, l'humeur aqueuse, le cristallin et l'humeur vitrée. La première et la dernière de ces huméurs sont très-liquides , ef ressemblent, pour leur composition, au liquide des membranes séreusés ; mais elles s’en distinguent en ce qu’elles sont abso- lument incolores, et que l'humeur aqueuse paroît contenir une petite quantité d’albumine. Le cristallin, au contraire, est très- remarquable, soit par sa texture, soit par sa composition. Sa densité est peu considérable à la sarface, mais elle augmente jusqu’au centre , et Chenevix a trouvé, en enlévant successivement les diverses couches, que sa pesanteur spécifique augmente à mesure que l’on approche du centre, Quand on agit sur un cristallin pesant 30 grains et d’une pesanteur spécifique de 1,076, il ne reste que 6 grains pour les couches extérieures, la pesanteur spécifique du noyau élant de 1,94. Chenevix et, après lui, Fourcroy ont avancé que le cristallin consiste en albumine et ET D'HISTOIRE NATURELLE. 435 gélatine, mais il ne contient ni l’une ni l'autre de ces deux substances ; il est presque entièrement soluble dans l’eau, et la solution se coagule par l’ébullition, mais la masse coagulée ne ressemble pas à l’albumine; elle est graveleuse et opaque, exac- tement semblable à la matière colorante du sang, à laquelle elle ressemble aussi par sa facile dissolubilité dans l'acide acé- tique après la coagulation. Le coagulum est aussi blanc que la neige, et laisse après la combustion une petile quantité de cendres ferrugineuses. À en juger autant que nous le pouvons, elle ne diffère de la matière colorante du sang, que parce qu’elle m'a pas de couleur. Il est probable que la matière colorante se divise en principe colorant, proprement dit, qui se dépose dans la choroïde, et en substance albumineuse incolore qui va former le cristallin, quoiqu’elles ne recoivent pas le sang de la même branche artérielle, mais de deux branches séparées de l'artère ophtalmique. Quelques tentatives que j'aie faites pour changer un cristallin en matière colorante, en y ajoutant du phosphate de fer sous différentes formes, je n’ai pas obtenu des résultats plus avantageux, qu'en faisant les mêmes expériences sur le sérum. Le cristallin forme la limite entre les humeurs de l’œil et la matière animale solide. 11 contient un peu plus de la moitié de son poids d’eau, et diffère des autres fluides sécrétés, en ce qu’il est moins aqueux que le sang. Il donne par l’ana- lyse une certaine quantité d'extrait acidule, dans lequel il res- semble à une matière animale privée de son alcali. Reil a trouvé que quand on traite le cHitalltn par l'acide nitrique, il se con- vertit en une masse fibreuse jaune comme de la soie écrue, dont les fibres divergent du centre à la circonférence dans un ordre régulier, Ilconclut de là, que le cristallin est un muscle dont on rend seulement les fibres visibles par ce traitement : mais quoique la composition intérieure du cristallin soit encore trop peu connue pour chercher à expliquer le mécanisme de ce phénomène, il est clair cependant, par la solubilité de la masse dans l’eau et sa coagulation, que le cristallin ne peut avoir les propriétés d’un muscle. F Fourcroy et Vauquelin ont examiné les Zarmes; elles res- semblent beaucoup aux liquides des membranes séreuses et aux humeurs de l'œil, mais avec cette différence, qu’au lieu d’al, bumine, elles contiennent en solution une matière particulière, qui ne se coagule pas par la chaleur de l'eau bouillante, ni par les acides, mais qui, par une évaporation lente dans l'air 435 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE atmosphérique, se change en un mucus insoluble comme celui du nez, dont nous avons parlé. Si la matière particulière que dans mon Traité de Chimie animale j'ai appelé érémne ou matière particulière des larmes, possède les caractères que les chimistes français lui ont attribués, ils doivent parfaitement servir à les reconnoître. Si leurs expériences se trouvent con- firmées, le mucus du nez doit alors, comme les larmes, êlre sécrété à l’état de liquide très-clair, et être converti en mucus par l'action de l’air pendant la respiration. Cela suppose une dif- férence essentielle entre la formation du mucus dans le nez et dans les autres parties où il n’est pas en contact avec l'air, et où il doit être sécrété à l’état de mucus parfait. Le cérumen des oreilles a été examiné par ’auquelin. Quand on observe cette substance après un long séjour dans le conduit externe, elle est sèche, et consiste en une matière grasse particulière ressemblant à l'huile, qui prend l'apparence d’une émulsion, par sa Combinaison avec la matière albumineuse. Dans le premier moment de la sécrétion, elle forme un liquide jaunâtre qui s’é- paissit à mesure qu’il perd son eau. Nous n'avons jusqu’à présent que des notions chimiques très- imparfaites sur la peau et les parties qu’elle contient. Ce que nous savons est presqu’entièrement le résultat d'observations faites par hasard dans les opérations du tannage et de la fabri- cation de la colle. La pean se change, par une longue ébullition, en une gelée qui est d'autant meilleure et plus tenace, que la peau se dissout plus difficilement. Le tannage consiste à combiner la masse de la peau avec la substance tannante des végétaux, Cette substance tannante, extraite de plusieurs végétaux , diffère souvent autant de nature que la peau des divers animaux, et alors les résultats varieront selon les végétaux que l'on emploiera pour tanner. La peau exige, pour être soumise au tannage, une préparation dont l’objet est de pénétrer et d’en gonfler toutes les cellules au moyen d’un liquide, afin d'ouvrir des espaces suffisans pour recevoir ‘la substance tannante. Les alcalis afloiblis produisent plus d’eflets que Peau, et les acides réussissent encore mieux que les alcalis. Les acides végétaux sont préférables aux acides minéraux. La quantité d'acide peut étre très-légère, et encore elle produit un grand eflet. La principale précaution à observer dans le tannage, c’est de le faire très-lentement, et de n’employer que des infusions foibles dans le commencement de Popération. Plus lentement l'opération est conduite, meilleur est ET D'HISTOIRE NATURELLE. 437 est le œuir; tandis que par un procédé très-prompt les parties extérieures du cuir se sursaturent de principe tannant, et les conduits des parties intérieures sont obstrués, de sorte que l'on n'oblient qu'un cuir sec, cassant et peu épais. Le tissu muqueux, ou réseau de Malpighi, qui constitue les organes sécrétoires de la peau, et dans lsquel sont divisés les nerfs et les vaisseaux absorbans, n’a pas été examiné : on sait seulement que la couleur noire que l’on observe dans la peau des nègres, peut être blanchie an bout de quelques jours, par l'application de l'acide oxi-muriatique. La texture de l’épiderme est très-remarquable : il ne se dissout pas dans l’eau par une longue ébullition, mais ilest dissous par les acides et les alcalis caustiques, et pour plusieurs de ses propriétés il ressemble aux cheveux et aux ongles. La substance grasse qui le recouvre n’a pas été examinée chez l’homme; mais Vauguelin a fait une expérience sur celle qui adhère à la laine des moutons, et il a trouvé qu’elle contient outre du carbonate de soude, de Jal- bumine ét des acétates de chaux et de potasse, une combinaison savonneuse particulière, formée de potasse, de chaux ét d’une substance grasse résineuse. Il attribue le gras de-la laine et de la peau à une partie de l'huile qui a été séparée de sa com- binaison avec l’alcali, par l'acide carbonique de Pair. Il paroit cependant contradictoire de supposer que l'humeur graisseuse contienne en même temps du carbonate de soude et de la chaux en solution. Fauguelin et Bunivæ ont trouvé sur la peau du fœtus, une matière graisseuse ressemblant au fromage, et qui défend l’épiderme de#l’action des eaux de l’amnios. La peau est un organe de sécrétion qui se distingue de tous les autres, en ce qu’il présente une très-grande surface sur laquelle Ja plus grande partie des matières sécrétées se dissipe par le moyen de l'évaporation. On a fait autrefois beaucoup d'essais pour déterminer la quantité de la transpiration, Sanctorius con- tinua ses expériences pendant trente ans, et depuis, beaucoup de savans, comme Dodart, Keil, Robertson, Rye, Lining, et en dernier lieu Lavoisier et Seguin en France et Cruiskshanks en Angleterre, ont travaillé sur le même sujet. Mais toutes leurs expériences ont seulement servi à faire connoître la quantité d'humidité perspirée, sans donner aucune notion sur là nature de la matière de la transpiralion, En prenant la moyénne de ces expériences , on perd 4 x livres par jour par la transpiration. La' sécrétion est plus abondante pendant le temps de la digestion Tome LXXIX. DÉCEMBRE an 1814. Li "438 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE et le moins possible immédiatement après le repas. Cruiskshanks ayant renfermé sa main dans un vase de verre, rassembla l’eau de la transpiration et trouva qu’elle étoit pure. Il y avoit dans l'air une certaine quantité d’acide carbonique qui avoit proba- blement été formé par l’action de ce gaz sur la matière trans- pirée, puisque le volume de l'air n'étoit pas augmenté. Comme il obtint plus d’eau dans une basse température que dans une plus élevée, il en conclut que la transpiration de la peau étoit plus grande dans une plus basse température ; mais il paroît qu’il n’a pas pensé qu'il se déposoit plus d’eau sur le verre par le froid , et que le pouvoir de l'air pour recevoir de l’eau qui s’évapore, augmente par l’échauffement qu'y produit la main. Thenard a rassemblé de la matière de la transpiration dans des gilets de flanelle , et a trouvé, après l'avoir extraite par l’eau ét avoir éva- poré cette eau ajoutée, qu’elle contenoit un acide, des sels et un extrait sirupeux : il regarda l’acide libre comme de l’acide acélique, par suite de ses expériences sur l'acide lactique qui l’avoient déterminé à regarder cet acide comme de jacide acétique. , La sueur est toujours acide, elle rougit très-distinctement Le “papier de tournesol. J’en ai rassemblé quelques gouttes dans un verre de montre et je l'ai fait évaporer à siccité, elle a donné des cristaux de muriate de soude et des traces visibles de l'extrait acide que l’on trouve dans les sécrétions : par l’ad- dition de l’eau, elle laissa un résidu insoluble, qui, fortement chauflé, a l’odeur d'albumine brûlée. Il reste cependant beaucoup à faire au.sujet de la transpiration, avant de découvrir les dif férentes matières qu’elle: sécrète dans le corps, et les diverses modifications dont elle-est susceptible selon les circonstances. Les ongles qui sont une continuation de la peau, sont exac- tement de la même nature que l’épiderme, mais ils ont plus de consistance. Les sabots, les serres, les griffes et les autres parties qui chez les animaux remplissent les fonctions des ongles, sont au$si de la même nature. Les cheveux sont d’une nature particulière. Æatchett et Achard ont fait plusieurs expériences sur cette substance, et Vauquelin en a donné une analyse complète. Le résultat de son analyse est,. que la masse des cheveux, esf"insoluble dans l’eau froide ou l'eau bouillante, mais qu’elle peut étre dissoute dans le digesteur de Papin : le liquide qu’elle donne ne se prend -::ET D'HISTOIRE NATURELLE. 439. pas ‘en gelée, mais devient visquéux à mesure qu'’il.se sèche. Dans cetie liqueur, ou quand on fait dissoudre les cheveux dans une solution alcaline étendue, où dans l'acide nitrique, il se produit une huile qui a la couleur des cheveux. Wauquelin attribue à cette huile les couleurs diflérentes des cheveux, et il a trouvé dans les cendres des cheveux noirs, outre les selside chaux ordinaires, des oxides de fer” et. de manganèse et de la silice. Lesycheveux' roux, qui contiennent plus de soufre que les noirs, laissent moins d’oxides de fer et de magnésie dans leurs cendres ; et les cheveux blancs en donnent encore moins, mais on trouve dans leurs cendres une quantité notable de magnésie, L’urme a été soumise à plus de recherches chimiques que les autres matières animales. Fan-Helmont a publié les pre- mières expériences sur ce sujet, dans son Traité sur la Pierre. Brandt et Kunckel, trente-cinq ans après, découvrirent le phosphore, qu'ils préparoient avec l'urine. Boyle, en consé- quence de leur découverte, tenta l’analyse de ce fluide, et en retira du phosphore qu'il fit ensuite préparer par Haukwits, apothicaire de Londres, pour tous les savans de l’Europe. À peu près dans le même temps , un ilalien, nomuné Lorenzo Bellini, fit une autre analyse de l’urine, et la trouva composée d'eau, de terre et de sels. Elle fut ensuite examinée var Boërhaave, dont l'analyse, en considérant le temps où elle a été faite, éloit un travail remarquable, Plusieurs autres savans, comme Marc- graff, Pott, Haupt, Schlosser, Schocknitz, Bergmann, Klaproth, etc. examinèrent les phosphates contenus dans l'urine, et essayérent de perfectionner les moyens d’en extraire le phos- phore. L'analyse de Rouelle le jeune : est -enfcore maintenant un travail d’un grand intérêt. Il en découvrit.la partie cons- Utuante particulière et caractéristique, qu'il appela extraif sa- vonneux : il détermina les sels qui s’y trouvent, compara l'urine de l'homme avec celle des animaux herbivores, et montra que l'urine de ces derniers ne contient pas de phosphate, mais du carbonate de chaux et de l'acide benzoïque. Quelques années après, Scheele découvrit que l'urine de l’homme contient du phosphate de chaux dissous dans un excès d'acide, de l'acide urique jusque-là inconnu et de l’acide benzoïque qni cependant le plus ordinairement ne se trouve que dans fe des enfans, Cruiskshanks que Rollo avoit chargé d'examiner l'urine d'un dia- bétique, fit ensuite une analyse exacte de l'urine dans l’état de Lil 2 410 JOURNAL DÉ PHYSIQUE, DE CHIMIE santé et dans les diverses maladies, et il obtint des résultats trés-Importans. Il décrivit l'urée, montra sa propriété d’être précipitée par l'acide hitrique, êt donna plusieurs moyens pour déterminer avec précision les quantités relatives des diflérens Principes de l’urine, Ses expériences sur l’urine dans les maladies, opt fourni aux médecins de bons signes diagnostiques que ne doit ignorer aucun de ceux qui pratiquent la Médecine. 1l a trouvé, par exemple, ;üe l'urine’, pendant un accès de fièvre, acquiert la propriété d’être précipitée par le sublimé corrosif. Das ün accés violent, elle précipite par le moyen de l’alun, et dans un accès plus violent encore, elle précipite par l’acide nitrique. I1l_a trouvé de l’albumine en quantité considérable dans lurine des hydropiques, et dans celle que lon rend pen- dant une indigestion, quoiqu’en moindre quantité; etil a vu que la quantité augmente dans les hydropisies enkystées, ete. Criisk- Shanks publia son ouvrage en 1797, en même temps qu'une Partie du Traité de Ro/lo sur le diabète sucré. Trois ans après, Fourcroy et V'auquelin publièrent une analyse plus complète et plus exacte de lurine, et Fourcroy avance à eette occasion (dans son Système des Connoissances Chimigues), que lui et Fauguelin connoissoient, plusieurs années avant Cruiskshanks, ce qui donne le plus de prix à son analyse. Fourcroy et Fau- guelër ont exasiñé le phénomène de la putréfaction de l'urine, ainsi que les décompositions -et les nouvelles combinaisons qui ont lieu dans cette opération : leur travail étoit l'analyse de la Chimie animale la plus complète que l’on connût alors. Proust a fait depuis quelques expériences sur l'urine, et il ÿ a trouvé de l'acide carbonique, du carbonate de chaux et une résinè particulière semblable à celle de la bile; qui paroît cependant avoir été formée pendant l'opération. Thezard a essayé de prouver aussi depuis, que l'acide libre de l'urine m'est pas de l'acide phospborique , mais de l’acide acétique, Enfin j'ai entrepris des recherches sur le même sujet, et j'ai obtenu des résultats qui avoient échappé à ceux qui me précédérent dans cette carrière, J’ai trouvé que l'acide libre de ARRIE n’est pas de l’acide acé- tique, ni de l'acide phosphorique, mais qu'il y en existe deux, l'acide lactique et Pacide urique, et j’ai prouvé la présence du premier dans lurine, par des expériences que je crois dé- cisives. J'ai trouvé dans le phosphate de chaux tenu en solution dans lurine par l'acide libre, comme dans les os mêmes, du fluate de chaux; et en comparant l'urine avec le sang , il patoît ET: D'HISTOIRE NATURELLE. 441 que les reins, dans la formation de l'urine, oxident une portion : des principes les plus cachés du sang ,et produisent plusieurs acides, des alcalis ou des terres que l’on ne rencontre pas dans le sang lui-même, ou qui y existent en quantités extrêmement pelites. Ainsi, par exemple, j'ai trouvé dans l’urine une quantité con- sidérable d'acide phosphorique et d'acide sulfurique, tandis que l'on ne peut démontrer dans le sang la présence du premier, et que le dernier n’y existe qu’en très-petite quantité. La portion des sels terreux et'alcalins que contient l'urine, est aussi très- considérable , tandis que dans le sang elle est très-petite. J’ai trouvé les sédimens qui se précipitent de l'urine par le refroi- Issement, uniquement composés de mucus de la vessie, qui existe toujours dans l'urine, en partie suspendus et en partie dissous, où une combinaison de ce mucus et d'acide urique, mais ne contenant pas de phosphate terreux..J’ai essayé de prouver la nééessité d’une distinction entre le sédiment qui est abondant dans le catarrhe de la vessie et qui sort de cet organe, “Ou celui qui a lieu quand le phosphate de chaux se précipite dans la sécrétion de l'urine, par défaut d'une quantité suflisante d’acide pour le dissoudre. J'ai trouvé que l’urée, telle que l'ont décrite les savans qui m'ont précédé , est une combinaison d’urée Proprement dite, et de plusieurs substances déliquescentes qu'ils n-en avoient pas séparées. L’urée que j'ai obtenue dans mes expériences n’a pas de couleur, et donne des cristaux prisma- ques très-distincts, comme le nitre : elle est cependant com- Dinée intimement avec acide lactique, le lactate d'ammoniaque et cette substance animale dont j'ai parlé plus haut, qui accom- Pagne toujours cet acide et ces sels, et qui. est probablement toujours formée en même temps qu'eux. Cette substance ani- male a une couleur jaune brunâtre, et sa combinaison avec l'acide lactique et les sels, donne à l'urine sa couleur. Elle se dissout facilement dans l’eau et l'alcool, et c’est à cette subs- tance et non à l’albumine qu'est dû le précipité que forme le tanmn dans Purine. La matière qui dans l'urine précipite le sublimé corrosif, n’est pas seulement de l’albumine (dont la présence est très-probable dans le cas de maladie), mais con- Uent'aussi une substance animale particulière qui ne se dissout pas dans Palcool, et qui; comme celle soluble dans l'alcool, accompagne toujours l'acide lactique et ses sels. Elle ne se pré- cipite pas de l'urine des personnes à l’élat de santé, tant qu'il y a de lacide libre, et le défaut d’acide a peut-être quelque 442 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE part dans la précipitation que produit le sublimé dans l'üriné rendue pendant un accès de fièvre, Outre ces matières animales dont les savans qui m'ont précédé n’ont pas reconnu les propriétés, Jai trouvé: aussi dans l'urine une substance minérale qui leur avoit échappé, c’est la silice. Cette terre qui se rencontre dans Farine, et probablement dans tous les liquides du sang, quoi- qu en très petites quantilés, a été introduite dans le corps, soit avec l’eau qui sert à préparer les alimens, soit dans les boissons; et comme il n'existe pas dans le corps de procédé susceptible de la séparer, elle doit accompagner les liquides jusqu’à ce qu’elle soit évacuée par les excrétions. L’altération de l’urine, par laquelle elle forme de la matière sucrée au lieu durée, et qui avoit étési bien examinée par Cruisk- shanks, a donné lieu à des recherches plus exactes encore de Nicolas, Sorg, Thenard, Bostock, ete. Les résultats de leurs analyses varient beaucoup, ce qui prouve que l’état maladif n'est pas toujours de la même nature; mais ils sont toujours d'accord, en ce que le nouveau sucre produit se détruit faci- lement pendant les expériences, et qu'on ne peut le découvrir dans le sang. J'ai eu occasion d'examiner une urine de diabé- üque, dans laquelle on ne trouvoit pas de sucre et où il m’existoit cependant pas d’urée, En traitant cette urine par l’alcool, après l'avoir évaporée avec soin, il se dissolvoit une matière brune qui, après l’évaporation de l'alcool, donnoit une certaine quantité d'extrait sec, dans lequel il existoit de acide lactique, et où Von pouvoit découvrir des traces de lactate et de muriate d’am- Mmoniaque : cependant cet extrait étoit presqu’entièrement formé de cette matière animale qui accompagne les lactates, il étoit précipité par le tannin, et laissoit après la combustion, une pois quantité de muriate de soude et de légères traces d’alcali libre. Rouelle, Fourcroy, Vauguelin, Brande, Chevreul, etc. ont examiné l’urine des diflérentes espèces d'animaux; on peut ajouter à ces expériences, les analyses faites par Fourcroy, Vau- guelin et Klaproth, des excrémens d’un oiseau de la mer du Sud, appelé gwano, dans lesquels ils trouvèrent une grande quantité d’acide urique. Brande croit avoir trouvé ce même acide dans l'urine du chameau, et Vauquelin la rencontré dans une pierre de la vessie d’une tortue : d’où il paroît que l'homme n'est pas le seul animal dans le corps duquel cet acide sa forme (f). ET D'HISTOIRE NATURELLE. 443 - On n’a pas examiné les reins, dans lesquels se forme urine, et nous ne connoissons pas les propriétés chimiques de leur pa- renchyme. La vessie et ses conduits sont de la même nature que les intestins; mais le mucus de la vessie, tel qu’il se dépose avec l'urine, ne ressemble pas au mucus des autres parties. 1] est presque transparent et forme de petits grains qui, rassemblés sur un filtre, laissent un mucus gluant et sans couleur, qui devient souvent rouge en séchant et présente des traces. d'acide urique. Après avoir été humecté avec de l’eau, il ne peut plus devenir visqueux. * Les concrétions qui se forment dans la vessie ont été dans les temps les plus reculés, l’objet de conjectures et d’expériences. Depuis Gallien jusqu’à Paracelse, les idées relatives à ces con- crétions, furent absurdes. Van-Helmont les compara au tartre;, et après lui elles furent décrites par un grand nombre d'auteurs ; parmi lesquels nous devons distinguer Hales, Boyle, Boërhaave et Ssare. Enfin notre immortel compatriote Scheele soumit à quelques recherches, des calculs de la vessie. 11 découvrit bientôt lâcide urique, en décrivit les propriétés, et comme il le trouva constamment dans l'urine rendue à l'état de santé, il en conclut que cet acide étoit toujours la partie principale de ces calculs. ÆEnosuite Henry fit mieux connoître cet acide, et les recherches de Scheele furent’suivies par plusieurs savans , comme Austin, Walker, Brugnatelli et Pearson. Enfin le docteur #ollaston publia dans les Transactions Philosophiques. pour 1797, son analyse des concrétions de la goutte et de l'urine, qu'il divisa en quatre espèces; celles formées 1° d’acide urique, 2° de ‘phosphate ammoniaco-magnésien, 3° d’oxalate de chaux, 4° de phosphate de chaux, et 1l donna en même temps une courte description de leurs formes et de leurs propriétés. En 1800, ou trois ans après la publication du travail de Wollaston , Fourcroy et Vauquelin publièrent sur ces concrétions, un'{#avail plus étendu, dans lequel ils confirmèrent les découvertes de #ollaston, mais sans en parler , soit dans leurs Mémoires, soit Fourcroy dans son Système des Connoissances chimiques , en nommant ceux qüiavoient travaillé sur ce sujet; mais malgré cette omission, c’est à Wollaston qu'est due la première découverte des diverses Parties constituantes de ces concrétions : cependant comme les chimistes, français analysèrent à peu près 600 variétés de cal- culs , et purent.avant de publier leur travail, le comparer avec celui de #Follaston, il contient des nouveautés importantes et 444 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE présente un plus grand nombre de modifications dans la com= position des pierres. Outre les espèces de Wollaston, Fourcroy et Wauquelin en trouvèrent deux autres, Furate d’ammoniaque et la silice; cette dernière espèce ne se présenta que deux fois a eux, et Brande a essayé de prouver, il y a peu de temps, que la première espèce n’est autre chose que l'acide urique com- bine avec l’urée ; mais je ne considère pas comme satislaisantes, les raisons qu'il apporte en faveur de son opinion (g). Fourcroy et Vauqguelin ont tenté de détruire la pierre sans faire l’opé- ration, en injectant dans la vessie, des solutions alcalines où acides très - étendues, selon que la concrétion étoit formée d'acide urique ou de sels terreux ; mais je ne crois pas que leurs expériences aient obienu aucun succès. Ils ont essayé aussi de découvrir Les circonstances qui donnent lieu à la formation des calculs urinaires ; mais ces circonstances restent pour nous un secret, et nous ne savons rien de plus que ce qu’une longue Pratique médicale nous apprend touchant l'effet plus ou moins nuisible de la nourriture du malade. On a trouvé, par hasard, que les solutions alcalines, prises à l’intérieur, produisent un bon efet en calmant les douleurs dans le cas de calcul, et que les acides végétaux les aggravent quand les calculs sont composés d'acide urique ; mais malgré cette expérience, il est souvent im- possible de diminuer l'acidité de l’urine par le moyen des al- calis, chez les personnes chez lesquelles 1l se forme un excès d'acide urique; et j’ai moi-même essayé envain les effets des acides pour neutraliser ou aciduler une urine alcaline. Un homme d'un moyen âge étoit attaqué de Ja goutte, son urine étoit trouble et alcaline, tenant en suspension des phosphates terreux, je luiadmi- nis{ ‘ai de l’acide sulfurique sans obtenir aucun changement , puis l'acide phosphorique, qui ne produisit d’eflet que quand la dose en fut portée jusqu’à devenir laxatif, Purine devint alors acide et déposasde l'acide urique tant que l’ellet laxatif eut lieu, mais elle ne continua pas plus long-temps quand cet état fut passé, quoique la quantité d’acide fût toujours la même : enfin J'administrai l'acide acétique avec aussi peu de succès. Brande a voulu prouver, il y a peu de temps, l'inefficacité des alcalis comme remède dans le cas de calculs formés d'acide urique : et comme Je docteur Henry avoit trouvé que les urates alcalins ne précipitent pas le muriate de magnésie, et par con- séquent que cette terre forme avec l'acide urique un sel faci- lement soluble, il proposa de faire une expérience avec la magnésie ET D'HISTOIRE NATURELLE. 445 magnésie (h) : cette expérience, d’après Brande, réussit parfai- tement, de sorte que par l’emploi de quinze à vingt grains de magnésie, matin et soir pendant deux semaines, tout l'acide urique excédant fut détruit et le malade fut complètement guéri. Cette découverte est encore trop récente pour être considérée comme suflisamment prouvée par l'expérience (1). Nous ne connoissons encore que très-peu de choses sur les procédés par lesquels se fait la propagation des animaux, et les substances qui ont une action dans cette fonction. La liqueur séminale a été analysée par V’auquelin. Sa composition change immédiatement après l’émission, elle dépose peu à peu du phos- phate terreux, qui provient probablement de sa décomposition: Sa partie constituante principale, qui dans le premier moment paroît être du mucus, devient, quand elle est hors du corps, claire et liquide dans tous les gaz et même dans le vide, et d’alcalin qu'étoit le sperme au moment de l'émission, il devient acide par degrés. Parmi les liqueurs séminales des autres animaux, nous ne connoissons que Ja laite des poissons, par les expériences de Fourcroy et Fauquelin : cette laite renferme une matière particulière très-remarquable , insoluble dans l’eau et l'alcool , et qui, distillée dans des vaisseaux clos, donne du phosphore qui se sublime en partie, et dont le reste se dissout dans l'huile empy- QG) Le docteur /Vollaston a décrit, dans les 7ransactions Philosophiques pour 1810, une espèce rare de calculs contenant une substance particulière, à laquelle il a donné le nom d’oxride cystique. Ces calculs, sous forme d’une masse jaune, confusément cristallisée et demi-transparente, sont insolubles dans lalcool et dans les acides acétique, tartarique et citrique ; le carbonate saturé d’ammoniaque n’a aucune action sur eux, mais ils se dissolvent dans les alcalis et les acides concentrés : avec les acides , ils donnent des cristaux spéculaires minces, rayonnant d’un centre commun : avec les alcalis , ils forment de petits cristaux granulaires : la substance par- ticuhière qu’ils contiennent se présente sous forme de plaques hexagones, quand on la précipite lentement par l’acide acétique , d’une dissolution dans la potasse. Le docteur /follaston a trouvé une grande quantité d’acide urique dans la fiente des oiseaux , et d'autant plus, que ces animaux se nourrissent davantage de matières animales , et il pense, d’après cela, que l’on pourroit peut-être obvier à la tendance à déposer des calculs d’acide urique ou des