M tr 1 HAUTES LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES LES FORMES D'HUMUS DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'AGRICULTURE LA DECOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES ET LES FORMES D'HUMUS DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'AGRICULTURE Par E. WOLLNY PROFESSEUR -D'AGRICULTURE A L'UNIVERSITÉ DE MUNICH Traduit de l'allemand par E. HENRY Professeur à l’École d'agriculture Mathieu de Dombasle et à l'École nationale des Eaux et Forêts Préface de L. GRANDEAU, inspecteur général des Stations agronomiques Avec 52 figures dans le texte BERGER-LEVRAULT ET Ci, ÉDITEURS PARIS NANCY D, RUE DES BEAUX-ARTS, D 18, RUE DES GLACIS, 18 1902 ‘} Te À s sm A Di mal — " _ PRÉFACE Depuis un demi-siècle, l'orientation des recherches sur le rôle du sol dans la végétation à passé par des phases diverses. La terre a été considérée pendant longtemps comme un simple support des plantes ; sa constitution minéralogique et les caractères physiques du sol qui en étaient la conséquence entraient, pour ainsi dire, seuls en ligne de compte dans les préoccupations des agricul- teurs. On ignorait les rapports étroits qui unissent le développement des végétaux à la composition chimique du sol. La fécondité de la terre, pensait-on alors, dépen- dait exclusivement de l'apport du fumier d’étable dont la valeur fertilisante était évaluée d’après la quantité de matière organique qu'il introduisait dans le champ. Lorsqu'en 1840 J. de Liebis, dans une œuvre magis- trale, établit que l'alimentation des plantes est essentiel- lement minérale, une ère nouvelle s'ouvrit pour l’agro- nomie. Des expériences décisives vinrent démontrer que tout organisme végétal exige, pour vivre et se développer, la présence, dans les milieux où il croit, d’une dizaine d'éléments chimiques simples, diversement associés dans le sol, dans l’air et dans les fumures. Les démonstrations s’'accumulèrent pour fixer les idées dans une voie nou- x VI PRÉFACE. velle, sur les conditions prochaines de fertilité des sols, sur les moyens d'accroître leurs rendements par le choix judicieux d’assolements réglés sur les exigences diverses des récoltes, et par l'apport, sous forme d'engrais, de ceux des éléments minéraux qui leur font défaut. La doc- trine de la nutrition minérale devenait la base solide de tout progrès agricole. L'observation a, d'autre part, montré aux cultivateurs l'influence heureuse qu’exerce sur la fertilité des terres la présence des résidus organiques (racines, feuilles, etc.), accumulés dans le sol et transformés plus ou moins com- plètement en une substance complexe qu'on nomme fer- reau où humus. La nature de cette substance à été si- gnalée vers 1802, par les recherches classiques de Th. de Saussure, à l'attention des agronomes et pendant bien longtemps on n’a eu d’autres indications sur l’humus que celles qu'on devait à l’éminent naturaliste genevois. Au cours du dernier tiers du xix° siècle seulement, de nombreuses recherches sont venues éclairer le mode de formation des différents humus, les modifications qu'ils impriment à l’action des éléments minéraux sur la nutri- tion de la plante et l'influence qu'ils exercent sur les pro- priétés physiques des sols. Enfin, les révélations de Pas- teur sur le rôle gigantesque des infiniment petits ont été le point de départ de la découverte des processus de la nitrification, de la fixation de l'azote par les légumi- neuses, de la putréfaction des matières organiques dans : le sol, des fermentations dont il est le siège, etc. Un nombre considérable de recherches ont été entre- PRÉFACE. : VII prises sur les phénomènes si complexes de la décomposi- tion des matières o’ganiques dans les sols agricoles et fo- restiers; on à étudié le rôle des micro-organismes dans les transformations des engrais introduits dans nos champs. Les résultats de ces recherches, épars dans les recueils scientifiques français et étrangers, n'avaient donné lieu jusqu'ici à aucune publication d'ensemble présentant, à côté de l'analyse des faits constatés, une discussion eri- tique de la valeur des observations. Cette publication, dont M. Ed. Henry présente aujour- d'hui une excellente traduction au publie agricole et fo- restier, à été entreprise par Ewald Wollny, professeur à l’Université de Munich, dont les travaux personnels ont enrichi si notablement ce chapitre important de la science agronomique, et que mieux qu'aucun autre savant il pou- vait mener à bien. E. Wollny, né le 20 mars 1846, à Berlin, s’est voué, dès le début de sa carrière, à l’étude expérimentale du rôle des agents physiques : chaleur, lumière, électricité, humidité de l'air, ete., sur la production des plantes de la srande culture et sur la formation et la fertilité des sols. Il à fait, dans ses travaux, une très large part à l'étude des décompositions de la matière organique dans le sol, et ses recherches originales ne forment pas le moindre appoint à l’œuvre importante que M. Ed. Henry offre au- jourd'hui au public agricole et forestier. Le lecteur qui jettera un coup d'œil sur la table des matières aura tout de suite une idée de l'intérêt consi- dérable du livre de Wollny, mis entièrement au courant VIII . _ PRÉFACE. de nos connaissances par les additions dont l’a enrichi M. Ed. Henry. L'ouvrage est divisé en trois parties. Dans la première, l’auteur étudie les réactions chimiques dont les matières organiques sont le siège dans l’érémacausis et dans la pu- tréfaction ; il décrit celles que leur impriment les micro- organismes où qu'ils doivent à l’action de l’homme et des animaux. L'auteur, en un mot, passe en revue toutes les conditions qui provoquent les divers modes de décompo- sition. L'exposé est partout clair, précis, complet. La deuxième partie traite des produits solides de dé- composition des matières organiques, c'est-à-dire des Au- mus, de leurs propriétés physiques et chimiques et de leur influence sur la fertilité des sols. Dans cette partie et dans la suivante, Wollny examine comment l’homme peut et doit intervenir dans les phénomènes pour mettre en œuvre à son profit les forces naturelles; l'agriculteur et le forestier y trouveront les plus utiles renseigne- ments ; ils apprendront à raisonner l'opportunité des tra- vaux mécaniques du sol : labour, hersage, roulage, dé- fonçage, drainage, etc., si souvent encore exécutés par routine ou à contresens, Les conditions du sol, d’humi- dité, de saison, de climat, dans lesquelles ces opérations doivent être effectuées pour donner les meilleurs résul- {ats, sont mises en lumière par de nombreux exemples. La culture des sols tourbeux est traitée avec le plus grand soin, Bien que l'étendue des tourbières soit rela- livement faible dans notre pays, ce chapitre a, pour la France, un réel intérêt, la mise en valeur et le traite- PRÉFACE. IX ment agricole de ces terrains appelant en France beau- coup de perfectionnements encore. Les agriculteurs et les forestiers étudieront avec le plus grand profit cet exposé à la fois clair, méthodique et complet de l’ensemble des connaissances nécessaires pour les guider dans leurs travaux : l’auteur indique dans sa préface le but qu'il s’est proposé : traiter le sujet assez simplement pour que l'agriculteur et le forestier, peu fami- liarisés avec les sciences naturelles et avec la chimie, purs- sent, à la suite d'une étude attentive, se [aire une idée eæacle des principes contenus dans son livre : 11 y à parfai- tement réussi. M. Ed. Henry, dont les recherches personnelles ont contribué si largement à éclairer les questions relatives à la formation de l’humus des forêts, ne s’est pas borné, comme je l'ai dit plus haut, à offrir au public francais une traduction fidèle et élégante de la dernière édition allemande, qui date de 1896. De nombreuses notes et un appendice complètent l'œuvre de Wollny, ainsi mise entièrement à jour par l'analyse de tous les travaux importants publiés jusqu'en 1900. Wollny à donné tous ses soins à la bibliographie ; très au courant des travaux étrangers, il a indiqué, avec une exactitude et une impartialité qu'on ne rencontre pas toujours chez les auteurs, la part qui revient à chacun dans cet ensemble de recherches sur l'une des parties les plus intéressantes de l’agronomie. | Wollny à revu les épreuves de l'édition française, mais il n'aura pas la satisfaction d'assister au succès que l’on 4 Par l VE " ‘ * L & e x © PRÉFACE. ET " peut, sans crainte d’être démenti, prédire à cette œuvre, fruit de vingt années d'expériences. La mort l'a frappé dans la plénitude de l’âge et du talent : il a succombé le 8 janvier 1901, après quelques jours seulement d’éloi- | snement de son laboratoire, laissant de vifs regrets à tous ceux qui l'ont connu. Sa valeur morale, son savoir et son dévouement à l’agriculture, assurent à la mémoire du savant professeur de l'Université de Munich, un sou- venir reconnaissant et durable. Paris — Station agronomique de l'Est, juin 1901. L. GRANDEAU. Dans ce livre je me suis proposé d'exposer systématiquement les résultats de mes propres recherches et de celles des autres agronomes sur les processus de décomposition des matières organiques et sur les produits solides qui en résultent, c’est-à- dire les humus, et d’en déduire les principes sur lesquels doit s'appuyer une exploitation agricole ou forestière pour arriver à un traitement et à une utilisation rationnels de ces matières organiques produites et employées en si grandes quantités par l'agriculture et la sylviculture. Dans le but de traiter à fond le sujet pour les besoins tant de la science que de la pratique et d’éveiller ainsi l’intérêt dans diverses directions, j'ai relaté non seulement les recherches faites dans le domaine de la chimie, mais encore celles qui, au point de vue bactériologique, physiologique et physique, servent à caractériser les réactions dont il s’agit. L'ouvrage que j'offre au public fournit donc des indications pour la culture du sol et aussi pour l'hygiène, la géologie et l'économie rurale; il offre ainsi un intérêt plus général. Bien que les faits établis jusqu'ici ne soient pas encore suf- fisants pour expliquer et prévoir dans tous les cas les phéno- mènes si compliqués de la nature, ils sont pourtant assez nom- breux et assez importants pour qu'on ne puisse considérer comme prématuré l'essai que j'entreprends ici de faire un tout harmonique des résultats scientifiques non coordonnés jus- ? N & Trait 4 À DR PR "Li ; + For) N ; 1 PRÉFACE DE d'aureun. } “À IE , - "a KDE EE | ne se NES qu'alors et de soumettre à la critique les opinions ou les théories qu'ils ont engendrées. ee Je me suis efforcé de traiter le sujet assez simplement pour que l’agriculteur et le forestier, peu familiarisés avec les sciences naturelles et la chimie, puissent, à la suite d’une étude attentive, se faire une idée exacte des principes contenus dans ce livre. XII Munich, 1° octobre 1896. E. WoLLny. LA DÉCOMPOSITION DES « MATIERES ORGANIQUES ET LES FORMES D’HUMUS DANS LEURS RAPPORTS AVEC L'AGRICULTURE Les matières organiques employées comme engrais sous forme de débris végétaux ou animaux (fumiers, composis) ou sous forme de plantes vivantes (engrais verts), et celles qui existent naturelle- ment dans le sol (déchets des récoltes, humus, cadavres d’animaux) ou à sa surface (couverture des furêts) sulissent des modifications chimiques diverses qui influent à un haut degré sur sa fertilité. La connaissance des réactions qui interviennent offre, à côté de son intérêt scientifique, une utilité pratique considérable, puisque, par des procédés divers, l'homme peut exercer une influence capitale sur le cours de ces réactions et sur la qualité de leurs produits ulüimes, où se rencontrent les principaux aliments des plantes. Dans leur ensemble, ces processus de décomposition des matières organiques se classent en deux séries caractérisées surlout soit par la présence, soit par l’absence d'oxygène, donc par des phénomènes d'oxydation dans le premier cas, de réduction dans l’autre. Suivant que ce sont les phénomènes d'oxydation qui dominent, MATIÈRES ORGANIQUES. Î DÉCOMPOSITION DES or. SRBANIQBES comme dans l’érémacausis ou bien ceux de réduction, comme dans la pulréfaction, l'action des détritus organiques et des humus, dernier terme de leur décomposition, sera heureuse ou néfaste. 1 Cette action se manifeste tant sur les propriétés physiques que sur la composition chimique des sols et, en raison du retentissement. profond qu’elle a sur leur puissance de production, l’agriculteur et le sylviculteur ont le devoir strict de régler l'influence des facteurs de la décomposition de manière à obtenir celle qui donne les meil- leurs résultats à ce point de vue. PREMIÈRE PARTIE PROCESSUS CHIMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES CHAPITRE I PROCESSUS CHIMIQUES La décomposition des matières organiques en présence de Pair atmosphérique donne naissance, sous certaines conditions, à de l'acide carbonique, de l’eau, de l’ammoniaque (et de l’azote libre) et les principes minéraux qui étaient en quelque sorte enfermés dans la matière organique et inassimilables à cet état deviennent hbres et passent pour la plupart sous une forme assimilable. Il se produit donc, dans ces circonstances, des aliments essentiels immé- diatement absorbables (ammoniaque, principes minéraux) ou des composés tels que l’acide carbonique dont l’action dissolvante sur les minéraux solubles du sol exerce une heureuse influence sur la fertilité. 4. — Érémacausis. Ce mode de décomposition, que l’on désigne sous le nom d’Éré- macausis *, est caractérisé par La volatilisalion de la matière orga- nique avec un résidu formé des malières minérales non volatiles passant, pour la plus grande partie, à l'élat assimilable. L'intervention de l'oxygène de l’air est prouvée non seulement par ce fait que l’oxygène contenu dans les matières organiques 1. D'après E. W. Hiccann, De ñoëua, paisiblement, insensiblement, et de xaÿs'<, combustion. 4 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. serait bien loin de suffire à l'oxydation du carbone, mais encore par celle observation faite pour la première fois par LÉvYy et Boussin- GAULT ‘et, plus tard, par J. von Fopor* que l'air occlus dans le sol s’'appauvrit en oxygène d’autant qu'il s'enrichit en acide carbonique, si bien que les volumes d’oxygène et d'acide carbonique sont tou- jours sensiblement égaux. LÉvy et BoussiNGAULT ont trouvé les rap- ports suivants : SOL. CULTURE. Co*. 0. TOTAL. SUICEUX ADI: 75 "4 40e » 9,74 10,35 120709 DOTE ere toae te MON ONE 1,06-:049 725000 Sable avec nombreux cailloux. Forèt. 0,87, A9ÿ61 20/48 Sol siliceux fumé. . . . . . Asperges 1,94 18,80 20,34 Excavation avec terre de bois. » 3,64 16,45 20,09 Muschelkalk. . . ... . . . Betteraves. 0,87: 19,11 620 Argile noire. . . . . . . . Topinambours . 0,66 19,99 20,65 Sol humide fertile... 2". Prarie - 1,79 19 A1 IR J. von Fopor a obtenu pour le taux d'oxygène et d’acide carbo- nique de l’air occlus dans le sol les chiffres suivants, moyennes de 49 analyses: C oi, O. TOTAL. Air ocelus dans le sol . .". . 2,954 15,33 20,87 Air atmosphérique. . . .« . . 0,04 20,96 21,00 Le taux d’oxygène de l’air du sol diminuant dans la mesure où croit celui d'acide carbonique, on doit en conclure que l'oxygène de l'air prend une part prépondérante à l’oxydation du carbone. Les matières azotées des débris végétaux et animaux existent prin- cipalement sous la forme de principes albuminoïdes et d’amides et subissent des modifications dont le résultat est la formation d’ammo- niaque. D'après les recherches de E. MarcHAL*, ce processus est lié à une 1. Jahresbericht der Chemie, 1852, p. 783 ; Économie rurale, par BoussINGAULT, 2 volumes. 2. Deutsche Vierleljahrsschrift fur offentliche Gesundheitspflege, 1875, vol. VII, p. 205-237. 3. Bulletin de l'Académie de Belgique, 1893, série 3, t. XXV, p. 727; Annales agronomiques, L. XIX, n° 19, p. 506. La PROCESSUS CHIMIQUES. J forte oxydation en ce sens que pour former cette ammoniaque il faut des quantités considérables d’oxygène qui fournissent autant d’acide carbonique. L’oxygène attaque la matière azotée en transformant son carbone en acide carbonique, son soufre en acide sulfurique, et son hydro- gène en eau, l’ammoniaque demeurant en quelque sorte comme le résidu. L'ammoniaque est dans tous les cas le premier produit de décom- posilion qui se présente comme aliment pour la plante. — Pourtant elle ne demeure généralement pas à cet état; elle s’oxyde en pré- sence de l'air atmosphérique et se transforme d’abord en nitrite, puis en nitrate, selon les formules : NS = 005 2" HN0;, HE 0 Ammoniaque. Oxygène. Acide nitreux. Eau. HNO, + O0 — HNO, Acide nitreux, Oxygène. Acide nitrique. Ces réactions qui constituent la nifrificalion se font très rapide- ment dans les sols perméables. Ce qui le montre c’est, d’une part, que, dans de telles conditions, le sol arable n’accuse que de faibles traces d’ammoniaque ; c’est, de l’autre, l'observation, faite par di- vers expérimentateurs, de la nitrification rapide dans le sol de l’am- moniaque des engrais. Par exemple, W. Worr’ a trouvé par hec- tare dans une couche de sol de 0",20 d'épaisseur : GRAU- SCHISTE 22 £ GRÈS AZOTE. vacre. argileux. GNEISE. GNEISS. DIABASES Loue, kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr, Azole nitrique. . 435,2 271,5 467,8 82,1 521,6 552,6 Azoteammoniacal. 19,2 26,2 27,3 6,3 89,4 27 Si l’on incorpore au sol un engrais ammoniacal tel que : fumier, purin, il survient très vite une oxydation énergique démontrée par 1. Amitsblait fur die landw. Vereine im Kônigr. Sachsen, 1872, p. {; voir aussi : von Fonor, Hygienische Untersuchungen über Luft, Boden und Wasser, 2° fase., Brauischweig, 1882, p. 60. OR RS L'EURS 6 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ce fait que les eaux de drainage renferment de grandes quantités de nitrates. Des observations de ce genre ont été faites par H. Martié- Davy”, A. Lévy?, FRankLanD°, J.-B. Lawes, GiLBerr et R. Wa- RINGTON*. MaRié-DAvy remplit un vase en verre de 2 mètres de hauteur avec un mélange de cailloux et de sable et il y versa chaque jour un litre d’eau d’égout. Les analyses de ce liquide et de l’eau qui s’écoulait du vase montrèrent nettement la transformation de l’ammoniaque en acide nitrique. Il trouva par litre dans : 1/EAU d'égout, de drainage. milligr. milligr. Azote ammoniacal. . . . . . 20,6. LT Ale (rique CC LOS 0,8 21,5 Les analyses faites par À. Lévy des eaux d’égout répandues sur le sol et des eaux de drainage s’écoulant de ce même sol sont aussi bien insiruclives sous ce rapport : MOYENNE. 8 : Me 5 Z a 5 he D 5 O "= E © a Eau ‘d'égout … , … + | 17,41 20571210) 28/7129 1132 011 5 [Asnières . . .|. 0,9/.0,8| 0,8] 0,9! 0,9| 0,8|°0,8| 0,9 en =°# JUases.. | . 2.1 10:8|.40,810/81 00/8/4100; 920: ENS œ + (, Æ 5 piay ML... 1o,8|1059| 8,9)r0,8| 0,8/t0;:8 00/8 /007) 3 | Moulin de Cage .| 0,9] 0,8]. 0,8| 0,9] 0,8| 0,8| 0,9] 0,9 1. Journal d'agriculture pratique, 1882, t. I, n° 24, p. 817. 2, Annuaire de l’Observaloire de Montsouris pour l'an 188%, Paris, p. 408. 3. River Pollution Commission, Reports of the commissioners appointed in 1868 lo inquire into Le best means of preventing the pollution of rivers. 4. Journal of the royal agricultural Society, vol. XVII, XVII et XIX. PROCESSUS CHIMIQUES. JUILLET SEPTEMBRE. OCTOBRE MOYENNE Azole nilrique, Le) Eau d'égout . © Asnières. = Cases. Epinay : | Moulin de Cage. € 8 3 6 0 7: " ÿ D » © - (ee) eu = E = LE LE 9; 9, 5| 23,2] 26,6 19,9! 20,1 19 19 = D © 1 D © À 12 t9 12 1] mm D) O1 — & + © © E 1 s= d L=| 2 Ces chiffres montrent que l’azote apporté au sol sous forme d’am- moniaque s’oxyde presque entièrement en acide nilrique. Tandis que la solution primitive ne contient que de l’ammoniaque avec traces d'acide nitrique, c’est ce dernier qu'on rencontre presque exclusivement dans l’eau qui a filtré à travers le sol. En conformité avec ces résultats, LAWES, GILBERT et WARINGTON ont montré que le sol agricole perd beaucoup d’azote par les eaux de drainage. On n’est pas encore nettement fixé sur la question de savoir si dans la décomposition des matières animales ou végétales à l'air libre, 1 se dégage de l’azote, comme on l’a souvent admis. Divers essais ont été faits à ce sujet, mais dans des conditions qui affaiblissent l’action de l'oxygène et doivent donner lieu à des processus de décomposition forménique, c’est-à-dire à ces réactions qui se passent dans un milieu où l’accès de l’air est limité. Si l’on mélange, par exemple, les ma- lières azotées en expérience avec une quantité d’eau telle que le tout forme une masse visqueuse, elles deviennent impénétrables à l'air. De même si l’on opère en vases clos, on ne se trouve plus dans les conditions normales. Quand bien même on y ferait pénétrer de l'air de temps en temps, le dispositif de l'expérience ne correspond pas aux conditions naturelles parmi lesquelles la ventilation, soit dans un sol perméable, soit dans une masse poreuse de fumier, a tant d'importance. Les essais faits suivant ces méthodes par J. KôxiG et J. KiE- 8 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sow', par À. MorGen et J. KôniG*, par DieTzeLL* et par B. GiBson*, ne sont dès lors pas concluants. La preuve que les matières soumises aux essais ne subissaient pas les processus d’oxydation est l'absence d'acide nitrique dans les produits finaux, tandis qu’on voit par ce qui précède qu'il se produit en abondance dès qu'il y a oxydation énergique. En outre, l'odeur pénétrante, désagréable, provenant sans doute d'acides gras, qui a été constatée dans presque toutes les expériences montre que ce sont les phénomènes de réduction qui ont prédominé. L'emploi de la méthode dite par différence, c’est-à-dire par pesée pour la détermination du taux d’azote dans la matière traitée avant et après l'expérience ne permet pas d’ailleurs de dire nettement si, dans l’érémacausis, de l’azote se dégage à l’état libre ; cette méthode montre seulement sil y a moins d'azote, mais non si cet élément a disparu à l’état élémentaire ou sous forme de combinaison azotée (protoxyde ou bivxyde d'azote). Les essais faits daas cette voie n’ont pas donné de résultats concordants. Tandis que B. TackEe”° trouve que la nitrification dans un air fréquemment renouvelé a pour con- séquence une perte d'azote par dégagement d’azole gazeux, et que celle perte est liée à la production d'acide nitrique, les recherches d'IMmenporrr* montrent que ces pertes peuvent aussi se produire dans Férémacausis avec aération suffisante sans qu'il y ait nitrifi- cation. L'analyse des gaz inspire une bien plus grande confiance que la méthode par différence; elle seule montre si l'azote perdu par la matière l’a élé à l'état élémentaire et permet de constater des quan- tités d'azote extrêmement faibles."Les expériences faites par À. En- RENBERG * d’après celle méthode ont prouvé que, soit dans la décom- 1. Landw. Jahrbücher, fase. U, 1873, p. 107. 2. Landw. Versuc'sstationen, fase. XXX, 1884, p. 199-216. 3. Zeilschrift des landw. Vereins in Bayern, 1SS?, fase. de mars. 4. Sur le dégagement d'azote libre duns la putréfactior, thèse, Baltimore, 1893 (en anglais). 5. Landw. Jahrbücher, fase. XVII, 1889, p. 439. 6. Landw. Jaïrbücher, vol. XXI, 1892, p. 251. 7. Zeilschrift far piysiologische Chemie, vol. XI, 1887, p. 145 et 438. PROCESSUS CHIMIQUES. 9 position directe des matières organiques, soit dans la transformation des sels ammoniacaux en nitrates, il ne se dégage pas d'azote libre quand l'oxygène est en quantité suffisante. Par contre, ImMENDoRFF ! a trouvé que, dans la nitrification de l’'ammoniaque soumise à une aération abondante, il peut y avoir perte d’azote à l’état d'azote gazeux. Quelques essais de B. TACKE et de E. GupzEwskt* ont confirmé les résultats d'IMMENDORrF. Comme lui Gopuewski trouve que la nitrification de l'ammoniaque donne lieu à un dégagement d’azote sous forme d’azole libre et non sous forme de protoxyde. On voit que ces essais, faits d’après une méthode exacte, ne sont pas non plus concordants, ce qui tient surtout aux difficultés qu’on rencontre dans la conduite des expériences. Ces difficultés résident principalement en ce que l'on ne peut maintenir l’oxydation d’une façon continue et que; dans le cours des expériences, il y a des moments où la décomposition se fait suivant le mode forménique, leque:l (on le verra plus loia) donne toujours lieu, dans certaines circonstances, à un dégagement d’azote libre. Du reste nous possé- dons actuellement trop peu d'observations pour considérer la ques- tion comme résolue. Sa solution ne sera possible que quand des recherches exactes auront précisé les conditions biologiques des microorganism:s qui provoquent ces réactions et la composition chimique de tous les produits de l’eremacausis. Tant qu’elles n’au- ront pas eu lieu, on devra considérer comme ouverte la question de savoir s’il se dégige ou non de l'azote libre dans la décomposition des matières azolées, soil directe, soil après nitrificalion préalable*. Comme toutes les oxydations, la combustion lente (érémacausis) dégage une certaine chaleur, très variable suivant les condilions OC. Cil., pe 300. LOS: .cil: © 19 . Anzeigen der Akademie der Wissenschaflen in Krakau, décembre 1892. 4. D'après des recherches récentes de Bunnt et Srurzer (Centralblalt fur Bakle- riologie und Parasilenïunde, vol. 1, 1895, n® 7 et 8, 9 et 10, 11 et 12), les ni- trates doivent pouvoir être détruits sous forme d'azote libre par le concours de cer- taiis microorganisnes, ea présence de l'air; mais, comme on le verra ci-dessous à propos de la dénitrifi:ation, ce fait n'est pas encore prouvé. 10 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. .! extérieures, Les recherches de U. Gayon® montrent que l'élévation de température qui accompagne la décomposition n'a lieu qu'en présence de l'air. Il mit du fumier dans deux caisses d’un mètre cube dont l’une était percée de trous sur toutes les faces, l'autre avant ses parois pleines. Voici les températures à diverses profon- deurs. CAISSE AÉRÉE CAISSE NON AÉRÉE | | à à à à à à à à | 10 cent. |23 cent. |50 cent. |75 cent.|10 cent.|25 cent. |50 cent.|75 cent. | mers meme CESSE mmmemmmes | cms CRE CES nn | 1°? jour midi . 0 « 21120,00122 0) MSP :MAP DNS 15° 17e L — le soir . .,.1#6 ,5| 21,01 25,0; 27.0] 20019 1S 20 2° jour midi, . . . .| 59 ,0| 68 .0| 64,0|52 ,0/15,0|./22 18 18 [ee IR SOI | 72,0 7220") 6 REINE 18 15 18 | 3° jour midi. . . . .| 72 ,0 | 70 ,0| 66 ,0 | 60 ,0 120816 17 16 | — MJes0r 2. 4072 ,01:69.55 l'É6L 0 S9E RACINES 16 15 Arjour midi.” ... .168:.,01.66 01622. 055 02 0 15 14 | — Jesoir. . . .| 67 ,5|64 ,5| 60 ,0153 ,01 12 ,0| 14 | 15 44 | o° jour midi. . . . .| 63 ,5| 60,0! 56.0] 51.51 11,513 14 13 | —. “esoir,. . . .[62.,0|58.,0|5540| 50.011 ,51"14 13 13 | 6° jour midi. 58 ,0| 53 ,0| 47 ,0| 44 .0| 11 ,5| 12 13 12 | | Re Fe CLS Ab "1 La température de l'air pendant l’expérience a varié entre 8° et 10° centigrades. Des chiffres qui précèdent il résulte nettement que l’échauffement remarquable du fumier est dû à l'oxydation puisqu'il ne se produit que dans la caisse aérée. Remarquons aussi que la température de la masse décroit de l’ex- térieur à l’intérieur, ce qui tient à la diminution progressive de l’arrivée de l'air et, par suite, de la combustion. Le refroidissement progressif s'explique par le desséchement de la masse, proportion- nellement auquel décroit la décomposition. Si l’on humecte le fu- mier, la température s’élève. 1. Journal de l'agriculture, 1884, n° 7S{, p. 507; voir aussi Tu. ScuLæsinc, C.R.;, t. CVI, 1888, p. 1293. PROCESSUS CHIMIQUES. 14 La production de chaleur dépend en outre de la quantité des matières organiques, de leur aptitude à la décomposition et des facteurs extérieurs qui influent sur ce phénomène. D'après les recherches de WaGner', l'élévation de température dans la masse ou dans le sol additionnés de matières organiques est d'autant plus accusée qu’elles sont en tas plus volumineux, qu’elles sont plus aptes à la décomposition et que les conditions extérieures (température, humidité, accès de Pair) sont plus favorables. A l’aide de monceaux de fumier, les jardiniers obtiennent sur leurs couches des élévations de température très importantes. La chaleur qui se dégage dans la fermentation de la poudre d’os doit être attribuée à ce que la matière organique s’y détruit très vite. La chaleur ainsi produite par les engrais a-t-elle quelque action sur la fertilité ? Les essais de WacxEer* ont montré que c’est seule- ment par l'emploi de grandes masses d’engrais (50 000 kilogr. à l’hectare) facilement décomposable et soumis à des circonstances favorables (temps chaud et humide) que l’on à pu observer une augmentation de température du sol. Encore n’était-elle pas très importante et ne s’élevait-elle qu’à 0,1° — 0,4 centigrades environ. Il suit de là — et de ce fait que dans la pratique on emploie de moindres quantités d'engrais dont certains (fumier de vache, engrais vert) sont rebelles à la décomposition et ne produisent qu'une aug- mentation de chaleur tout à fait minime — qu’en général la chaleur dégagée dans le sol par la destruction des matières organiques n’est pas suffisante pour avoir une influence notable sur la croissance des végétaux, d'autant plus que cette augmentation n’est que passagère, qu'elle va en diminuant progressivement et qu’elle est nulle pen- dant la saison froide où elle serait justement le plus utile. En horti- cullure et pour quelques végétaux cultivés en grand, on emploie de telles quantités d'engrais qu’elles procurent une élévation de tem- pérature bien plus accusée et bien plus durable, pouvant hâter sen- siblement la végétation. 1. Forschungen auf dem Gebiele der Agrikullurphysik, publiés par WoLrny, vol. V, 1882, p. 373-382. 2. Loc. cil., p. 383-105. 12 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 2. — Décomposition forménique (putréfaction). Quand l'air, ou plutôt son oxygène, n’arrive plus à la matière ou n'y arrive qu'au-dessous de certaines limites, le mode de décompo- sition est tout autre que dans le cas précédent. 11 se forme alors beaucoup moins de produils gazeux qui sont principalement de l'acide carbonique, du formène, de l'hydrogène, de l'hydrogène sulfuré, de l'hydrogène phosphoré, du protoxyde d'azote, de l'azote, el la malière organique conslilue une masse de leinte plus ou moins foncée, désormais très rebelle à la décomposition, qui, oulre ses principes propres non azolés, renferme diverses combinaisons azolées (leucine, tyrosine, indol, scatol, amines primaires, acides amidés, elc.), de l’ammoniaque, quelquefois des nitriles, et, en outre, des acides gras volalils (acides formique, bulyrique, acélique, pro- pionique, valérianique). La plus grande partie des principes miné- raux s'y lrouve sous une forme inassimilable. En général, le déga- gement d’ammoniaque y est faible et la destruction des matières protéiques n’aboulit qu’à des combinaisons organiques très com- plexes. Les processus chimiques de la putréfaction n’ont été que peu étudiés en général. Les résultats obtenus jusqu'ici sont d’autant moins à négliger qu'ils donnent une image au moins approchée des réactions, comme nous allons l’exposer. L’acide carbonique qu’on rencontre sans exception dans les pro- duits de la putréfaction se dégage d’une façon incomparablement plus lente que dans l’eremacausis, faute d’une quantité suffisante d'oxygène. Cela résulte clairement de la diminution considérable constatée dans le dégagement de l'acide carbonique d’un sol dès que celui-ci est gorgé d’eau et se trouve par suite privé du libre accès de l'air. L’oxygène nécessaire à l'oxydation du carbone dans la putréfaction provient d’abord des malières organiques elles- mêmes, mais aussi des éléments réductibles qu’elles contiennent, notamment des nitrates, nitrites, du proloxyde d'azote et des sels de fer et de manganèse au maximum. Les matières organiques sous- traient énergiquement à ces diverses combinaisons leur oxygène, | | | | PROCESSUS CHIMIQUES. 13 parfois en totalité. Aussi le processus dont il est question peut-il être caractérisé comme un processus de réduction à l'inverse de l'érémacausis où dominent les phénomènes d’oxydation. On doit conclure de ce qui précède que la quantité d’éléments réductibles sera en rapport avec le dégagement d’acide carbonique. C’est ce qui arrive du moins pour les sels de fer et de manganèse comme le montre l'expérience suivante. 2 grammes de fumier de cheval en poudre furent intimement mé- langés à 400 grammes de sable quartzeux et humectés soit de o0 grammes d’eau, soit d’ane même quantité d’une solution à 1/2 p. 100 de sulfate de fer et de manganèse. Le mélange était plongé dans une atmosphère d'hydrogène. Les quantités d'acide carbonique trouvées dans 1 000 volumes de gaz (à 0° et à la pression de 760 millimètres) furent (moyenne de 8 observations) : AVC CRIC ARE M ee nt an 4,376 — Je sulfate de manganèse. . . . . . 9,292 NE LE ONE CO EE CE 5,695 Ces sels avaient donc, en se réduisant, activé l'oxydation du car- bone. Cette réduction peut aller assez loin pour qu’il se forme des pyrites (FeS,), d’après les recherches de M. MArckER', par exemple dans les sols de tourbe. Comme conséquence de cette oxydation extrêmement lente, le dégagement de chaleur dans la décomposition forménique est mi- nime et ne peut être mis en évidence, dans les conditions de la na- ture, par les instruments de mesure habituels. Une partie du carbone se transforme en formène (CI, ) et la masse reste alcaline à cause d’un certain taux de carbonate d’am- moniaque. D'après F. Hoppe-SEyLer*, la cellulose, sous l’action d'un schizo-mycète largement répandu dans la vase, se transforme 1. Zeüschrift des landw. Vereins fur die Provinz Sachsen, 1871, n° 2 el 3, p. 70. 2. Archiv der gesammten Physiologie, vol. XIL p. 1; Zeitschrift fur physiolo- gische Chemie, vol. X, p. 422. 14 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. directement sous l’eau en acide carbonique et formène, suivant l'équation : CH,60,+H0—= 300, :E 3CH, Cellulose Eau Acide Formène. carbonique Suivant P. P. DEHÉRAIN" celte réaction ne semble se produire que quand on introduit de temps en temps de l’oxygène dans la masse en décomposilion. Avec absence prolongée de ce gaz le dégagement forménique cesse et il ne reprend qu'après l'addition de certaines quantités d'oxygène”. L Outre les fermentations précédentes, il s’en présente encore par- fois une autre où, au lieu de formène, c’est de l’hydrogène qui se dégage. Dans la décomposition du formiate de chaux F. HoPre- SEYLER * en a montré un exemple. Place-t-on ce sel sous l’eau avec un peu de limon d’égout, il se décomposera en donnant de l'acide carbonique et de l'hydrogène avec un résidu de carbonate de chaux. Cette réaction peut se représenter ainsi : CaC,H,0, HH,0 = CaC0O, + C0, + 4H Formiate Eau. Carbonate Acide Hydro- de chaux. de chaux. carbonique. gène. La réaction acide de la masse mise en évidence par l'apparition simullanée d'acides gras volatils, notamment d’acide butyrique (DenÉRAIN)* est caractéristique de ce processus. La présence de cet acide se reconnait aisément à la formation d’éther butyrique ainsi qu’à son odeur propre. Jusqu’alors on ne sait pas si, pour ce déga- gement d'hydrogène comme pour celui de formène, il est nécessaire que l’oxygène ait accès de temps en temps ou si ce processus repré- 1.C. R.,t. XOVIIT, 1884, n° G; t. XCIX, n° 1; Journal de l'agriculture, 1884, n° 781 ; Annales agronomiques, t. X, n° 9. 2. Voyez Horre-Seycen, Zcilschrift far physiologische Chemie, vol. VI, p. 214. SL00. CIl,, NL XD 420: 4. Annales agronomiques, t. X, n° {, p. 1. Sy » PROCESSUS CHIMIQUES, 15 _ sente celle forme de décomposition à laquelle conduit l'absence complète d'oxygène. La putréfaction des matières protéiques' se fait sans doute con- formément à la décomposition de la molécule d’albumine qui donne lieu à des dérivés amidés de la série grasse (acides amidés), à un corps azoté de la série aromatique et à un résidu de matières peptoniques et autres encore inconnues. Les produits d’altération qui se forment tout d’abord et qui sont précisément ces mêmes combinaisons (amidées) existant primitive- ment dans les matières organiques non décomposées, se transfor- ment ensuite en partie, par exemple, les acides amidés en ammo- niaque et acides gras, ceux-ci se détruisant après par la mise en liberté d'acide carbonique, hydrogène et formène. C’est ainsi que pour la leucine on a établi qu’elle subissait une fermentation où pre- naient naissance de l’acide valérianique, de l’ammoniaque, de l’acide carbonique et de l’hydrogène. Le glycocolle et d’autres acides ami- dés subissent peut-être une décomposition analogue. Dans la fer- mentation de la tyrosine, 1l se forme, d’après Nencxi, de l’indol, de l'acide carbonique, de l’eau et de l'hydrogène. La décomposition des matières azotées est plus ou moins rapide suivant les circonstances extérieures ; une assez grande partie ne se transforme sûrement que jusqu'à un certain degré; c’est ce qu’on doit conclure de ce fait que les matières soumises à la putré- faction s'accumulent sur leur lieu de formation et renferment de grandes quantités d’azote organique. L’ammoniaque formée n’appa- rait d'ordinaire qu’en minime quantité et semble par là subir des décompositions ultérieures. - Enfin, il est important pour l’agriculture que, parmi les produits de la putréfaction, on ait signalé l’azote gazeux et les degrés infé- rieurs d’oxydation de l’azote (nitrite, protoxyde d’azote). La réduction des nitrates, voire des nitrites, nommée dénitrifi- calion, a été étudiée à fond. Th. SCHLŒSING avail déjà trouvé dans ses premières expériences que l’acide nitrique disparaissait du sol dès que l’air y était remplacé par l'azote. Plus tard, U. Gavon et 1. G. FLüece, Die Mikroorganismen, Leipzig, 1886, p. 493. 16 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. G. Durerir' et aussi P. P. DEnÉraIN et L. MAQUENNE ? ont étudié. expérimentalement ces réactions. Les premiers ayant mélangé de l'urine putréfiée à de l’eau d’un canal à laquelle ils aviient ajouté 06°,02 de nitrate de potasse par litre, virent le nitrate disparaître peu à peu. Toute une série d’essais montra la possibilité de réduire 08,1 et même 0,2 de nitrate par litre. Au delà de ces limites l'eau du canal était insuffisante; mais, si on la remplaçait par du bouillon de poule neutralisé avec une solulion de potasse, on pouvait réduire complètement des solutions de nitrate à 5 p. 100. I se dégagca de l’azole pur qui formail une grande partie de l'azote des nitrates ; le reste donna de l’ammoniaque et peut-être des dérivés amidés de la matière organique employée. L’oxygène du nitrate forma de l’acide carbonique restant dans la solution sous forme de carbonate ou de bicarbonate. Les nitrates de soude, d’am- moniaque et de chaux offrirent les mêmes réactions que le nitrate de potasse. D’autres recherches des mêmes auteurs ont montré que, dans certaines circonstances, la réduction des nitrales ne va que jusqu’à la formation de nitrites. Les essais de DERÉRAIN et MAQUENNE sont en quelque sorte un complément des précédents. Ils prirent deux sols, un riche en ma- lière organique el naturellement salpêtré, l’autre pauvre en matière organique et dépourvu de nitrates. 300 grammes furent placés avec des quantités variables de ni- trates dans des flacons de 250 centimètres cubes hermétiquement bouchés et munis de tubes abducteurs ouvrant sous le mercure. La terre riche en matières organiques accusa, dans la pression inté- rieure, une diminulion qui fut suivie d’un dégagement de gaz (acide carbonique et azote). Dans la terre pauvre, la diminution de pres- sion à l’intérieur persista et ne fut suivie d'aucun dégagement gazeux. En conséquence, les nitrates peuvent exister dans les sols ordinaires en l'absence de l’air sans dégager de l'azote. Celui-ci n'apparait qu'autant que la quanlité de matières organiques aug- mente ; alors on obtient bientôt de l'azote gazeux. 1.C.R.,t. XUV, p. 644 et 1365. 9. C.R.;t. XOV, p. 691. | | PS Lé- étés sis dc à PTT PROCESSUS CHIMIQUES. 17 Après avoir élucidé le fait au point de vue qualitatif, les expéri- mentateurs, dans une seconde série d'essais, mesurèrent et éludiè- rent de plus près les gaz dégagés pendant la réduction des nitrates. Dans des tubes munis de robinets en verre tenant le vide, ils placè- rent 30 grammes de terre additionnée ou non de nitrates et de matières organiques. Au début de l'expérience, on mesura les gaz à deux reprises différentes en faisant chaque fois le vide à la trompe. Après 39 jours, on recueillit les gaz. Au lieu de l'oxygène et de l'azote que renfermaient les tubes tout d’abord, on trouva, à la fin de l’expérience, dans trois tubes remplis de divers mélanges, des proportions variables d'acide carbonique, pas d’azote et un résidu gazeux indiquant qu'il y avait eu dégagement de gaz. La proportion de gaz dégagée était plus influencée par l'abondance de la matière organique que par celle du salpêtre ; mais même quand la matière organique a élé très abondante, on n’a jamais obtenu une quantité de gaz correspondant à celle qui existait dans le nitrate. On rechercha ensuite par la méthode eudiométrique si le gaz res- tant après l’absorption de l'acide carbonique ne renfermait pas de gaz combustible et, dans les trois tubes, les gaz provenant de la ré- duction des nitrates du sol accusèrent un laux remarquable de pro- toxyde d’azote. Des déterminations exactes en montrèrent 11.75 p. 100 dans un flacon qui contenait 300 grammes de terre de jardin et 9.35 p. 100 dans un. flacon renfermant 300 grammes de terre et 10 grammes de salpêtre. . Quand les quantités de salpêtre et de matière organique sont con- venables, la réduction des nitrates a lieu avec dégagement de pro- toxyde d'azote el d'azote gazeux. Les conditions dans lesquelles le gaz hilarant prend naissance sont assez particulières ; car non seule- ment il est arrivé assez souvent aux expérimentateurs de ne pas le rencontrer dans les gaz provenant de la réduction des nitrates ; mais, de plus, SCHLŒSING, qui avait prévu la possibilité du dégage- ment des oxydes inférieurs de l’azote pendant la réduction des ni- trates dans la terre arable n’avait pu déceler leur présence dans ses travaux de 1875. MATIÈRES ORGANIQUES, Le] 18 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, Le dégagement d'azote gazeux dans la décomposition forménique n’a pas élé seulement trouvé dans les essais précédents faits en l'absence complète de l'air; mais il avait déjà été établi par des re- cherches antérieures où l'air n’était fourni à la masse en décompo- silion qu'au-dessous de certaines limites. Ainsi J. KôniG et J. KiEsow" dans la putréfaction de la poudre d’os, de la viande et du fumier de vache, B. E. DieTzEeLL ? dans celle du sang desséché, et A. MORGEN et J. KôniG* dans celle du sang, de la poudre d’os, de cuir et de corne ont trouvé qu’une plus ou moins grande portion de l'azote se dégageait à l’état libre ou, en tout cas, sous une forme telle que cet azote doit être considéré comme provisoirement perdu pour l’agri- culture. On n’est pas d'accord sur les causes de celte perte d’azote. Il fau- drait avant tout savoir si l’azole gazeux se dégage directement de la matière organique ou bien de lammoniaque qui se produit en faible quantité, ou s’il est un produit de la dénitrification. MorGEN et KôNiG admettent que la perte d’azote est due en pre- mière ligne à l'oxydation ; Pammoniaque naissante serait brûlée par l'oxygène et il se formerait de l’eau et de l'azote suivant l'équation : 2NH, 2 0, SR O0 NN Ammoniaque. Oxygène. Eau. Azote. Celle conception ne semble cependant pas admissible, car la quantité d'oxygène disponible dans une masse soustraite à l’action de l’air serait complètement insuffisante pour l'oxydation de l’'ammo- niaque, étant donné que oxygène, comme on l’a vu, est tout d’abord réclamé par le carbone de la matière organique. Quant à la question de savoir si l’azote libre se dégage directe- ment des éléments azotés, d’après divers essais concordants, elle doit être résolue par la négative. B. TAckE ‘ a trouvé que, dans la décomposition de matières orga- . Landw. Jahrbücher, vol. IH, 1873, p. 107. . Zeilschrift des landw. Vereins in Bayern, 1882, fase. de mars. . Landw. Versuchsslationen, vol. XXX, 1884, p. 199-216. 4. Landw. Jahrbücher, vol. XVI, p, 917-937. > tt] SUNMÉL 0 à: À niques azolées, mais sans nitrates, en l'absence d'oxygène, il ne se dégageait pas d'azote. Même résultat fut obtenu par Th. SCHLŒsING" qui employa pour ses expériences de la viande de bœuf, des fèves broyées, du fromage de Roquefort, des filets de sole, du fumier de cheval mêlé d'urine et une culture d’Aspergillus niger en solu- tion nutrilive. La perte d'azote gazeux fut, dans tous ces cas, si faible, qu’elle doit être considérée comme absolument insignifiante. A. EHRENDERG * soumit des matières organiques azotées (fumier de cheval) peu humides à la décomposition en l’absence d’oxygène et ne put déceler dans les gaz qui se dégagèrent que l’acide carbo- nique et le formène. 0. KELLNER et T. Yosan* se sont aussi occupés de cette question. Ils mirent à décomposer diverses substances, fèves de Soja finement moulues, farine de poisson et lait avec de l'urine putréfiée (les deux premières matières étaient mélangées d’eau) et les placèrent dans des flacons bouchés. Quelques-unes de ces matières étaient pourvues de petites quantités de gypse destiné à fixer l’ammoniaque. Dans aucun des huit cas on ne put observer une perte quelconque d’azote, bien que la putréfaction ait été poussée très loin. Il n’y eut jamais de nitrification. On doit conclure de tous ces résultats concordants que, dans la décomposilion forménique des malières organiques, il n'y a pas de dégagement direct d'azote gazeux. Ce processus ne se montre que dans la désoxydation des nitrates et nitrites, comme le prouvent non seulement les expériences rela- tées ci-dessus, mais encore celles de A. EHRENBERG, 0. KELLNER et T. Yosmur. Le premier a trouvé que, dans des mélanges organiques en putréfaction par manque d'oxygène, il y avait décomposition des nilrates grâce à laquelle une portion de leur azote s’était dégagée à l’état gazeux et qu'il se formait du gaz des marais aussitôt après leur décomposition. 300 grammes de fumier de cheval et 500 gram- mes de fumier de vache furent humectés avec une solution renfer- PROCESSUS CHIMIQUES. 19 NOR CeCYNL p. 205 et 261. . Zeilschrift fur physiologische Chemie, vol. XI, 1887, p. 438-471. . Zeitschrift fur physiologische Chemie. vol. XII, p. 95. CO 19 20 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. mant à grammes de salpêtre dans 100 centimètres cubes d'urine et placés dans un ballon rempli d’acide carbonique. L'analyse des gaz, faite de temps en temps, donna les résultats suivants : FUMIER DE CHEVAL. FUMIER DE VACHF. GAZ RECUEILLI —— ———— ————— — au bout de ST R Azote. Formène, Rs. A Azote. Formène. p- 100. p.100. p- 100. p. 100. p.100, p. 100. LOMOURS, 1 46.21 23.79 » 714.94 25.06 » ANT 69.53 30.47 » 53.18 + 40.682 » SU NAN 13-493 02872 2,85 47.64 49.04 3.34 60 ir «M 44.09 » 0.91 45.81 » 54.19 KELLNER et Yosuir ajoutèrent à une dilution d'urine humaine en putréfaction de la terre provenant de la couche superficielle du sol pour introduire le ferment nitrique. Dans ce mélange, où la mitrifi- cation se produisit avec une grande intensité, il y eut ensuite un fort dégagement d’azote qui, au bout de 6 mois, atteignit 9.6 p. 100 et, au bout de 8 mois, 10.1 p. 100. Ces expériences établissent donc que, dans les mélanges en putré- faction, l'azote se dégage à l’élat gazeux seulement en présence des nitrales. Les processus aboulissant au dégagement de l’azote sont divers et varient vraisemblablement suivant qu'il se produit du formène ou de l’hydrogëne. (Voir les expériences précédentes de Hoppe- SEYLER, p. 13.) Dans le premier cas c’est probablement l’action sur les combinai- sons amidées de l'acide nitreux libre se dégageant du milieu qui donne lieu à la formation d’azote libre (DigrzeLz ‘). C’est ainsi que la leucine en présence de l’acide nitreux se transforme en acide « leucique avec formation d’eau, tandis que l’azote se dégage molé- cule pour molécule. Cette décomposition est si rapide qu’elle est utilisée pour la détermination de l'azote de la leucine*. En faisant réagir l'acide nitreux sur les amines primaires, l’azote est mis en 1. D'après les recherches de Münrz, C. R., t. CXII, p. 1142-1146, l'acide carbo- nique peut mettre en liberté l'acide nitreux en formant un carbonate, 2, R, Sacusse, Landw, Versuchsslationen, vol. XVII, p. 327. ads: 6. à PROCESSUS CHIMIQUES. 21 liberté’ et, d’après E. Kern° et E. ScauLze‘, les sels ammoniacaux sont détruits en partie, même à froid, par l'acide nitreux avec déga- gement d’azote. Les amines primaires provoqueront aussi une éli- mination d'azote en chassant l’ammoniaque du nitrite d’ammonium. Dans le second cas, la formation de l’azote élémentaire se com- prend aisément si l’on considère que l'hydrogène à l’état naissant a une grande action réductrice et peut dès lors réduire les nitrates et nitrites en donnant de l’eau, des combinaisons moins oxygénées et de l’azote libre. Quand tout lacide nitrique libre est détruit, il se forme de l'hydrogène. Les modifications subies par les matières organiques dans leur composition élémentaire et dans leur taux de principes minéraux quand elles sont privées d’air n’ont encore été que peu étudiées; pourtant, grâce à quelques analyses élémentaires, notamment à celles de W. DETuER* sur de la tourbe de divers âges, nous pou- vons nous en faire une idée approchée. Pour voir l'influence qu’exerce sur la composition de l’humus la durée de la décom- position, DETMER fit trois analyses de la tourbe de Jessbecker : F, sur de la tourbe brune de la surface ; Il, sur de la tourbe noire prise à 2°,2; II, sur de la tourbe noire prise à 4",4. Dans la tourbe T, les débris organiques étaient encore aisément reconnaissables ; dans If et IE, ils étaient transformés en une masse homogène. Les échantillons desséchés à 120° centigrades renfer- maient (cendres non comprises) : 1m II. III. GarDONE Sr RER 0e 27,75 62,02 64,07 Hydrogène . . CR 5,43 SPA 5,01 DRM En O ST s «à 36,02 30,67 26,87 Azote 0,80 20 4,05 DORE TT Un SD PU 7,42 9,16 1. À. W. Hormanx, Ann. d. Chemie und Pharmacie, vol. LXXV, p. 363 ; V. Meyen et F. Forster, Ber. d. deutschen chem. Ges., vol. IX, p. 536; V. Meyer, J. Banpiert et F. Forster, d., vol. X, p. 130. 2. Landw. Versuchsstationen, vol. XXIV, p. 368. 3. Landw. Versuchsstationen, vol. XXV, p. 173, et vol. XXVI, p. 260. 4. Landw. Versuchsstationen, vol. XIV, p. 248. 22 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Par les progrès de la décomposition la matière organique s’enri- chit donc en azote et en carbone, parce que les éléments azotés se décomposent plus lentement que les non azotés et parce que l’hydro- gène et l'oxygène se séparent de la masse en plus forte proportion que le carbone. Les matières minérales, si elles ne sont pas lavées, restent telles quelles, mais leur taux relatif augmente par la dimi- nution de la matière organique. De ce qui précède il résulte déjà qu’érémacausis et putréfaction sont deux processus de décomposilion essentiellement différents et que l’on ne doit pas confondre comme on le fait encore souvent. La différence consiste surtout en ce que la matière organique se volatilise presque complètement dans le premier cas, tandis que, dans l’autre, la formation de produits gazeux est limitée et il reste un abondant résidu. À cet égard, l’érémacausis est caractérisée par la disparition et la putréfaction par l'accumulation des détritus. 3. — Autres modes de décomposition. Divers modes de décomposition, s’écartant à première vue de ceux qui viennent d’être décrits, rentrent après un examen attentif soit dans l’un, soit dans l’autre des processus étudiés ou bien, sui- vant les cas, circonstances extérieures, etc., se placent entre les deux. C’est le cas, par exemple, pour la pourriture qu'éprouvent dans un milieu aéré les matières pauvres en azote et suffisamment humides. Érémacausis et putréfaction peuvent se présenter simul- tanément dans la même masse, suivant que les diverses couches reçoivent de plus ou moins grandes quantités d’air (fumier d’é- table). Dans ces autres modes de décomposition devrait tout d’abord rentrer la fermentation alcoolique depuis que les recherches de A. Münrz’ ont montré que l’alcool se rencontrait dans les terres de jardin et dans les sols riches en matières organiques en assez grande proportion pour qu'on puisse l’extraire et le caractériser d’après ses 1. C. R., t, XCIÏT, p. 499. i 1 1 è | À propriétés essentielles. On n’a pas établi jusqu'alors si cette réaction se présente d’une manière générale dans la nature ‘. L'alcool (éthylique), joint à l’acide carbonique et divers autres produits en moindres quantités (huile empyreumatique, acide buty- rique, succinique, glycérine, etc.), se dégage de diverses espèces de sucre (dextrose, lévulose et maltose) soit directement, soit après inversion (sucre de canne, sucre de lait) suivant les équations : PROCESSUS CHIMIQUES. | 23 C.H,,0,=2CH.0+ 2CO. Sucre Alcool. Acide de raisin. carbonique. CG; H,; 0,, == H,0 = 4C,H,0 2e 4C0, Sucre de canne. Eau. Alcool. Acide carbonique. La fermentation ammoniacale de l'urine est plus importante pour l'agriculture. On sait que l'urine normale de l’homme et des mam- mifères domestiques prend, quand elle séjourne à l'air, une odeur ammonijacale. Cela tient à ce que l’urine se transforme par addition d’eau en carbonate d’ammoniaque suivant la réaction : CH,N,0 + 24,0 — 2(NH.)CO, Urine. Eau. Carbonate d’ammoniaque. L’acide hippurique, qui existe en grande quantité, avec l’urée, dans l'urine des herbivores, se dédouble aussi, par addition d’eau, d’abord en acide benzoïque et en glycocolle. L’équation suivante rend compte de la réaction. CH, NO, + H,0 = CH; NO, + C,0,0, Acide Eau. Glycocolle. Acide hippurique. benzoïque. Le glycocolle considéré, d’après sa constitution, comme acide 1. L'alcool provient des bactéries. Un assez grand nombre de bactéries du sol don- nent des quantités notables d'alcool éthylique aux dépens d’hydrocarbones solubles. (Trad.). 24 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. amino-éthanoïque — CH? (Az?) COOH, subit sans doute des chan- gements ultérieurs d’où résultent finalement des sels ammoniacaux. L’acide urique, qui existe abondamment dans les excréments des oiseaux, donne aussi finalement, comme l’acide hippurique, du car- bonate d'ammoniaque. Cette transformation a lieu par l’oxydation complète qui dédouble l’acide urique en acide carbonique et urée. La formation de l’ammoniaque se produit très rapidement dans l’urée, plus lentement dans l’acide urique et c’est l'acide hippurique qui se montre le plus résistant. L’oxydation de maintes matières organiques azotées ou non abou- til à la production d’acides gras volatils. L’acide formique (GH,0,) est un produit de décomposition et d'oxydalion des matières albuminoïdes et de certains hydrates de carbone végétaux ou animaux; il se forme aussi par oxydation de l’alcool méthylique, tout comme l'acide acétique dérive de l’alcool éthylique. L’acide acélique ou éthanoïque doit être compté parmi les pro- duits de décomposition des matières organiques el c’est à ce Litre qu'il existe, quoique en faible quantité, dans la tourbe, l’humus et autres substances en voie d’altération. Il se forme très facilement par oxydalion de l'alcool d’après la réaction suivante : CG H,0 + 20 = CH,0,+H,0 Alcool, Oxygène. Acide Eau. acétique, L’acide propionique (G,H,0,) se produit avec d’autres acides gras dans la décomposition de beaucoup de matières végétales, particulièrement de celles qui sont riches en albuminoïdes et en tan- nins. L’acide butyrique paraît être, comme les autres acides gras vola- üls, un produit d’altération de certaines substances végétales. Il se forme dans la fermentation du sucre par dégagement d’acide carbo- nique et d'hydrogène suivant l'équation : CH,,0,= 200, + CH,0,+ 4H Sucre, Acide Acide Hydrogène, carbonique. butyrique, : ‘ L “À + ; ”] 14 » PROCESSUS CHIMIQUES. 25 D’autres hydrates de carbone tels que: l’amidon, l’inuline, la dextrine, la dextrose, etc., se transforment d'abord en acide lac- tique qui se dédouble ensuite, à mesure que la fermentation pro- gresse, en acide butyrique, acide carbonique et hydrogène d’après l'équation : 2C,H,0, — 2C0, + C.H,0, + 4H Acide lactique. Acide Acide Hydrogène. carbonique. butyrique. L’acide valérianique (C,H,,0:) est un produit de décomposition des corps albuminoïdes et des albuminates ; il en est de même de l'acide caproïque (C,H,,0,). Parmi les acides organiques importants il faut distinguer les aci- des lactique et succinique. Ce sont surtout les sucres de canne, de raisin, de lait, la mannite, la sorbite, l’inosite, etc., qui contribuent à la formation du premier. La réaction se représente ordinairement par l'équation : GH20 = 2C,H,0, Sucre. Acide lactique. qui ne semble cependant pas exacte, parce qu'on n'y lient pas compte de l’acide carbonique qui se dégage en même temps. L’acide succinique (G,H,0,) se produit dans la décomposition de la sève des plantes qui contiennent de l’asparagine et en faible quan- tité dans la fermentation de l’alcool. | Les acides gras et les acides organiques végétaux subissent des fermentations diverses qui s’accomplissent au mieux quand ces acides se trouvent dans le substratum sous forme de sels neutres, surtout de sels de chaux", : Le formiate de chaux donne du carbonate de chaux, de l'acide carbonique et de l'hydrogène. L’acétate de chaux se décompose en carbonate de chaux, acide carbonique et formène. 1. C. Frücce, Die Mikroorganismen, Leipzig, 1886, p. 489. 26 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le lactate de chaux subit, d’après Firz, quatre fermentations diffé- rentes : 1° La fermentation en acide propionique avec lequel on rencontre, comme sous-produits, l’acide acétique, l’aide succinique et l’alcool ; 2° Une fermentation dans laquelle il se forme, avec de l'acide propionique, d’assez grandes quantités d’acide valérianique ; 3° La fermentation butyrique dans laquelle naissent, comme sous- produits, à côté du butyrate et du carbonate de chaux, des alcools éthylique et butylique ; 4° Une fermentation à laquelle est liée la formation des acides bu- tyrique el propionique. Le glycérate de chaux donne, dans un cas, de l’acétate de chaux et de faibles quantités d’acide succinique et d’alcool éthylique ; dans un autre, de l'acide formique et, comme sous-produits, de l'alcool méthylique et de l’acide acétique. Le malate de chaux fournit surtout de l’acide succinique avec un peu d’acide acétique et propionique. Mais il peut aussi subir la fer- mentation butyrique avec dégagement d'hydrogène ou lactique avec dégagement d’acide carbonique. Le tartrate de chaux donne, par la fermentation, de l'acide propionique ou butyrique et aussi, dans certaines circonstances, de l'acide acétique. Le citrate de chaux fournit, d’après Firz, de l’acide acétique en abondance, avec de l’alcool éthylique et de l’acide succinique. L'oxalate de chaux se transforme par la fermentation en carbonate de chaux. Les autres fermentations de matières organiques n’offrent pas d'intérêt à notre point de vue et peuvent d'autant mieux être pas- sées sous silence qu’elles ont jusqu'alors été peu étudiées. Par contre, il y a encore à signaler, sous le rapport agronomique, deux modes importants de décomposition dans lesquels se séparent des corps inorganiques, notamment du soufre et de l’oxyde de fer. D'après S. WinoGrapsky', il se sépare du soufre par l'oxydation de l'hydrogène sulfuré qui se forme lorsque le carbure d'hydrogène, 1. Bolanische Zeilung 1887, n° 31-37. 4 PROCESSUS CHIMIQUES, 27 tel qu'il s’en dégage dans la putréfaction, réduit, à l’état naissant, les sulfates, surtout ceux de soude et de chaux (gypse), suivant la réaction : CH, + CaSO, — CaC0, + ES + H0 Carbure Sulfate Carbonate Hydrogène Eau, d'hydrogène, de chaux. de chaux. sulfuré, La production du sesquioxyde de fer dérive de l'oxydation du car- bonate de protoxyde de fer. Cette réaction est la cause des dépôts connus sous le nom de limonite, fer des marais, etc. CHAPITRE II ACTION DES MICROORGANISMES On croyait généralement, il y a trente ans, que les phénomènes de décomposition des matières organiques étaient d'ordre pure- ment chimique ; diverses recherches récentes ont montré qu’ils sont d'ordre biologique, attendu qu'ils n’ont lieu qu'avec l’aide de mi- croorganismes. Cette démonstration peut se faire de deux manières: soit en chauf- fant les substances en décomposition ou en leur ajoutant des anti- septiques appropriés et en voyant si la décomposition cesse, soit en isolant les divers microorganismes qui pullulent dans les matières en décomposition ou en putréfaction et en étudiant les réactions qu'ils peuvent exercer sur les différents éléments des débris animaux ou végétaux. En suivant ces deux voies on a cherché à pénétrer plus inti- mement dans les faits et, malgré les lacunes des recherches entre- prises jusqu'ici, on a oblenu d’ores et déjà des résultats qui four- nissent des points d'appui solides et permettent des applications pratiques. J'ai fait, d’après la première méthode, une série d’essais dans less quels les matières soumises à l’érémacausis ont été additionnées de divers antiseptiques ou soumises à des températures assez élevées. J'y ai déterminé les quantités d’acide carbonique qui se dégageaient, toutes autres circonstances égales; elles pouvaient servir de mesure à l'intensité de la décomposition. Voici le mode opératoire que j'ai employé : Les sols riches en humus ou les mélanges de sols, imprégnés d’égales quantités de solution, furent placés dans des tubes de verre en U de 3°",5 de diamètre et d'environ 700 centimètres cubes de capacité, dont chaque extrémité était fermée par un bouchon en caout- "TT DAT LS - L' + - chouc traversé par un tube en verre courbé à angle droit. Les tubes contenant les sols étaient rangés verticalement les uns à côté des autres dans une caisse en zinc remplie jusqu’au bord d’eau constam- ment maintenue à 30° à l’aide du thermostat Soxhlet, Des deux tubes de dégagement, l'un fut relié par un tuyau de caoutchouc avec un flacon rempli jusqu’au quart d'acide sulfurique concentré, l’autre fut relié de la même manière avec plusieurs autres tubes remplis de chaux sodée. Entre le flacon d'acide sulfurique et l'aspirateur des- tiné à extraire l’air des tubes, on plaça un tube d'absorption de PET- TENKOFER rempli d’une solution de baryte. Entre les prises d’essai faites d'ordinaire à intervalles égaux (de 24 à 48 heures), les tubes restèrent nuit et jour dans la caisse de zinc à la même température et, pour empêcher l'arrivée de l’acide carbonique, furent fermés hermétiquement à l’aide de petites baguettes de verre placées dans les caoutchoucs des tubes de dégagement après qu’on avait enlevé les récipients à chaux sodée et à acide sulfurique. Ce dispositif offrait cet avantage que tous les facteurs de la dé- composition des matières organiques, tels que température, humi- dité, constitution du sol, etc., restaient constants pendant toute la durée d’une expérience. Pour enlever l'air des tubes de dégagement, au début de chaque prise d’essai, on pompait un demi-litre d’air, puis on plaçait le tube à absorption avec baryte et on extrayait l’air du sol durant une heure et demie ou deux heures dans la proportion de deux litres en bulles de la grosseur d’une lentille. Quand lair avait passé en quantité suffisante dans la solution de baryte, on enlevait la communication avec l'aspirateur et le flacon d'acide sulfurique et on versait la solution barvtique dans un pelit flacon de 250 centimètres cubes, bien fermé, qu’on gardait dans un heu tranquille et frais jusqu’à ce que le carbonate de baryte se fût complètement déposé. On prenait alors, à l’aide d’une pipette, 30 centimètres cubes du liquide clair et on titrait. Pour les essais relatifs à l’influence de la température, on prit deux échantillons de 16,3 représentant la moyenne d’une assez grande quantité de fumier de cheval finement pulvérisé ; on les humecta dans une capsule en porcelaine avec 34,7 d’eau distillée. L’un des ACTION DES MICROORGANISMES. 29 30 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, échantillons fut placé dans un tube de verre en U, l’autre dans un tube de fer de même forme qui, à ses deux extrémités, était muni de deux robinets solidement vissés et fut plongé pendant six heures dans un bain d'huile à 115° centigrades. Puis les deux tubes furent portés dans le bain-marie à 30° et traités comme les essais précédents, avec celle différence qu’au point d’entrée de l’air d'aspiration, entre les tubes à chaux sodée et le récipient du sol, on intercala un tube de verre, de 80 centimètres de long, préalablement chauffé, et qu’on remplit de coton purifié à l’éther pour recueillir les microor- ganismes de l’air atmosphérique. Pour comparer les influences des divers moyens employés sur la décomposition des matières organiques, on représenta par 400 la quantité d'acide carbonique dégagée sous l’action de l’eau pure et les autres résultats (moyennes de 6-9 prises d’essai) furent inscrits en ordre décroissant dans le tableau suivant. Les quantités des produits antiseptiques employés se rapportent à 100 parties des malières essayées pesées à l’état humide. LA MATIÈRE ANTISEPTIQUE ACIDE a été additionnée de : “A DUR Me ro Eat ER ST SERIE » 100.0 Acide salicylique . 0.030 98.4 Sulfate de strychnine 0,210 92.5 Brome | 0.045 87.9 Benzoate de soude. . , . 1.050 87.0 Chlore . . 0.045 85.0 Salicylate de soude . 1.050 80.5 Valérianate de zinc . 0.045 119 lodoforme . . 0.045 Tir Acide borique . 0.330 48,9 Sulfate de cuivre . 0.045 47.1 Acide borique . 0.670 44.9 CHIOFOTOTME er ec er » 44.3 Borate de soude , 1.050 35,6 Acide carbolique , , 0.110 33.59 lode . 0.045 33.9 Benzol , 1.050 19.1 Nitrate d'argent. . 0.045 12.1 Acide cyanhydrique . , 0.045 1176 Acide chromique , 0.045 a? Thymol, 1.050 7.8 à » e + « INT T OT ACTION DES MICROORGANISMES, al LA MATIÈRE AXTISEPTIQUE ACIDE a été additionnée de : A ne ES 28 Bichlorure de mercure, , . . 0.045 6.8 » » ACTE 0.090 m5 Bichlorure de mercure. , . . 0.180 6.1 » DAS UE 0.360 6.9 » AUS Li er 0.720 6.8 Acide carbolique … . . . .:. 1.110 D. 7 Température de 115°G. . . . » 2.3 Ces chiffres” montrent clairement que la production d'acide car- bonique est presque complélement arrélée si l'on ajoute aux subs- lances organiques en décomposilion des solutions de bichlorure de mercure, de thymol et d'acide carbolique (ce dernier assez concen- tré) ou si on les porte à une température de 115°. Ces influences ressortent encore plus nettement si l’on examine, non plus la moyenne des résultats, mais les derniers chiffres de chaque série d’expériences. Les malières analysées contiennent, en effet, souvent de l’acide carbonique provenant des processus de dé- composition antérieurs à l'addition des antiseptiques el cet acide est entrainé par l'air en quantités d’abord assez grandes, puis de plus en plus petites, si bien que l'air extrait ne renferme pas seulement l'acide carbonique formé pendant la durée de l’expé- rience, mais encore une partie de celui qui a pu se dégager aupa- ravant. Il est donc rationnel de considérer surtout les résultats finaux qui font mieux ressortir les influences étudiées et que nous donnons ci-dessous. Production d'acide carbonique. À la température ordinaire de. 100,0 Sans bichlorure de mercure. 100,0 .. L LÉTRRARERNRRIEEESRE: 1,2 Avec — - 4,9 1 Ces chiffres ne peuvent naturellement donner aucune idée générale sur l'action spécifique des différents antiseptiques, parce qu'elle dépend essentiellement de la con- centration de la solution, comme le montrent les essais avec les acides carbolique et borique, et que peu de substances ont été employées en mêmes proportions. Dans les essais précédents il s'agissait surtout de trouver un moyen de tuer les microorganismes et ce but devait pouvoir être atteint complètement, 32 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. On voit que l'oxydation du carbone, surtout par l'emploi de la chaleur, est presque réduite à 0. Les expériences précédentes ne décident pas si cette petite quan- tité d'acide résulte d’une faible réaction chimique ou plutôt d’un lent dégagement de gaz provenant de décompositions antérieures et retenu par la matière organique en vertu de son pouvoir extraordi- naire d'absorption. Pour le but que nous poursuivons, il suffit d’avoir prouvé que la production d’acide carbonique cesse presque complètement dans les substances en train de se décomposer, quand elles sont soumises à un traitement capable de tuer les microorganismes qui y pullulent. Il faut donc conclure que l'oxydation du carbone dans la décom- posilion des malières organiques doil étre considérée comme élant surloul un fait de chimie physiologique, puisqu'il est lié aux condi- lions d'existence des microorganismes. La preuve de l'intervention des microorganismes dans l’oxydation des matières organiques a été fournie aussi par Th. ScHLŒsING et A. Monrz' en ce qui concerne la transformation de l’ammoniaque en acide nitrique. Ils ont fait passer des vapeurs de chloroforme à travers un sol où la nitrification était active et qu’ils arrosaient ensuite de purin. Si la nitrification était influencée par des êtres organisés, elle devait cesser après addition du chloroforme qui sus- pend leur activité; c’est ce qui arriva. L’eau de filralion conte- nait de l’ammoniaque en plus grande quantité, mais les nitrates et les nitrites avaient diminué. Dans le dernier essai, ScHLŒsING chauffa le sol à 100°, ce qui arrêta toute production d’acide ni- trique. R. WARINGTON * confirma les résultats de ScuLæsinG et Münrz el montra que le sulfure de carbone avait la même action. Le sol était contenu dans des tubes en U. Dans un des échantillons passait, par aspiration, de Pair privé d’ammoniaque ; dans les deux autres, de 1. C. R,,t. LXXX, p. 1250 ; t. LXXXIV, p. 301; t. LXXXV, p. 1018, et t. LXXXWE, p. 892. Déjà auparavant, Pasreun (1862) et Alex. Muzer, Versuchsstationen, vol. XVI, p. 273, avaient exprimé l'idée que la nitrification devait être le résultat de l’activité de certains microbes. 2. Journal of the Chemical Society, janvier 1878. | H H : Ù : ACTION DES MICROORGANISMES. 39 l'air filtré sur une éponge imbibée, pour l'un, de chloroforme et, pour l’autre, de sulfure de carbone. L'analyse du sol donna les résultats suivants : Azote sous forme de nitrates et de nitrites par million de parties du sol desséché à l’air. I. Il. Existant primitivement. LE ROUE LEE 6,12 8,91 Après ventilation avec air pur. . . . . L 40,87 50,86 Après ventilation avec air imprégné de Fr de carbone! 6,70 9,75 — — de chloroforme . 9,48 7,86 Le fait que le sol fortement chauffé perd la faculté d’oxyder l'azote a été de même confirmé par des recherches de J. vox Fo- por’. Celui-ci chauffa un échantillon de sol à la flamme d’un four- neau et l’arrosa chaque jour de 6 à 8 centimètres cubes d'urine bouillie étendue au dixième. Sol et urine furent, en outre, préservés des poussières atmosphériques et des bactéries qui s’y trouvent. Le liquide ciar qui filtrait goutte à goutte était très différent de celui qui s'écoulait du même sol non chauffé. 100 centimètres cubes de la solution filtrée contenaient : SOL milligr. milligr. Ammoniaque. . . . . . . 175 1850 Matière organique. . . . . 19.20 84,04 Nitrate et nitrite . . . . . 92,00 0 Dernièrement, H. PLaTa * a aussi établi, par des essais concluants que la Lerre stérilisée ne peut ritrifier lammoniaque et que, en l'absence de tout organisme, les substances alcalines sont incapables de provoquer l’oxydation de l’ammoniaque à l’aide de l'oxygène atmosphérique. En présence des résultats acquis jusqu'ici, il semble légitime de conclure que la nitrification de l’ammoniaque ne résulle pas de 1. Hygienische Untersuchungen über Luft, Boden und Wasser. Braunschweig, 1882. 2. Landw. Jahrbüucher, par H. Tæiez. vol. XVI, livre 6, pp. 891-915. MATIÈRES ORGANIQUES. è 34 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. réactions inorganiques ‘, mais est liée intimement à l'intervention des microorganismes. Comme la formation de l’ammoniaque dans la décomposition des matières organiques doit être considérée, d’après MaRCHAL”, comme un processus d’oxydation, il y aurait encore à rechercher s'il doit être attribué à des microorganismes. Les essais concordants de A. Munrz et H. Coupon * nous fournissent une réponse positive. Ils ont dosé, par le même procédé, l’ammoniaque dans de la terre qui avait été stérilisée en la chauffant à 120° et dans de la terre en- semencée avec une petile portion de terre non stérilisée. I va de soi que tous les échantillons furent soumis aux conditions reconnues comme les plus favorables au maintien de lammoniaque formée. Le résultat fut que, après 67 jours, il ne s'était pas du tout formé d’ammoniaque dans le sol stérilisé, tandis que, dans Pautre, 100 grammes de terre avaient produit 41-110 milligrammes d’am- moniaque. Donc la formation de ce corps était complètement inter- rompue par l’absence des microbes, et des réactions purement chi- miques sont incapables, semble-t-il, de produire de lammoniaque. Même après deux ans et demi, la terre stérilisée n’accusait aucune augmentation d’ammoniaque, tandis qu’elle se développait abondam- ment après l'addition d’un petit fragment de terre de jardin. C’est donc exclusivement aux microorganismes qu'il faut alltribuer la formation de l'ammoniaque. Ceux-ci sont très résistants; une tem- pérature de 110° prolongée pendant une heure n’a pu les tuer; ce n’est qu'à 120° que leur activité est sûrement détruite. Les microorganismes interviennent aussi dans les processus de réduction, c’est-à-dire dans la putréfaction. Ce fait est démontré déjà par les recherches de P. P. Denérain* sur la décomposition du fumier d’étable et de la paille; la fermentation forménique y cesse totalement par l'addition de chloroforme ou par le chauffage à 85°, De même la réduction des nitratés (la dénitrification) cesse, comme . Telles que l'action de la foudre ou de la mousse de platine. (Trad.) IN MDS A: 1 2 3. C. R., tt. CXVI, 1893, p. 395. 4. C. R., t. XCVII, 1884, n° 6: t. XCIX.:n°11. 1 | l'ont montré U. Gayon et G. DuperiT', quand la solution en expé- rience est additionnée de chloroforme ou de sulfate de cuivre, ou qu’elle est stérilisée par l'élévation de la température. Ces faits ne peuvent s'expliquer qu’en admettant que des microbes interv'ennent dans ces réactions. Pour être complet, citons encore l’observation d'Alex, MULLER”? : la fermentation ammoniacale de l’urée semble liée à l’activité des microorganismes, puisque en ajoutant de l'acide sulfurique, de acide nitrique et de l'acide chlorhydrique, mais surtout de l'acide sulfu- reux, du chlorure de calcium, du sulfure de carbone et du chloro- forme, la réaction s’affaiblit dans une énorme proportion. Quoique, d’après tous les résultats précédents, on doive ad- mettre actuellement avec certitude que les processus chimiques qui se présentent dans la destruction des matières organiques sont influencés par des microbes, satisfaction n’est pas encore donnée, tant s’en faut, à tous les désidérata de la science ; on ira évidemment plus loin et, pour pouvoir porter un jugement sur les influences que l'organisme vivant exerce par ses processus vitaux, il faudra ap- prendre à connaître cet organisme lui-même, ses formes et ses pro- priélés. Dans ce but, il sera surtout nécessaire d'approfondir les relalions qui existent entre les divers organismes et chacun des processus chimiques caractéristiques. On a, jusqu'ici, relativement peu travaillé dans cette direction; on n’a guère fait que donner une idée approchée des questions à résoudre. Pour simplifier l'exposition, il semble logique de parler d’abord des réactions qui se passent en présence de l’oxygène et de mettre à la suite celles qui entrent en jeu quand l'accès de l’air est entravé ou complètement supprimé. A l’exemple de PASTEUR, on pourrait désigner, au point de vue biologique, les organismes de la pre- mière catégorie sous le nom d’aérobies et ceux du second groupe sous le nom d’anaérobies (voir le chapitre Vi). ACTION DES MICROORGANISMES. 3) L’érémacausis, qui est caractérisée, comme nous l'avons montré, par la formation d'acide carbonique, d’eau, d’ammoniaque, de 1° C. R., t. XCV, p. 644 et 1365. 2. Landw. Versuchsslationen, vol. XXXB, 1885, p. 271. 36 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nitrates et de sulfates, se fait, sans doute, avec le concours d’orga- nismes ayant une grande puissance d’oxydation. Les mucorinées n’interviennent que si la substance est faiblement acide; quand elle a une réaction neutre ou faiblement alcaline, certains schizomy- cètes jouent le rôle capital. Un petit nombre seulement a été étudié de près jusqu'alors ; ce n’est que pour la nitrification et la forma- tion de l’ammoniaque qu’on est arrivé à déterminer les organismes qui les provoquent. Th. Scuzæsiné et A. MÜünTz, qui ont montré les premiers que la nitrification dans le sol était due à des ferments organisés, se servaient de solutions dans lesquelles la nitrification se fait fort bien quand elles sont convenablement préparées et bien aérées. Ils ont employé des eaux d’égout claires ou stérilisées ou des solutions alcalines étendues auxquelles ils ajoutaient les principes minéraux nécessaires, un sel ammoniacal et de la matière organique. Les solutions étaient si claires, que l’on ne pouvait y découvrir au microscope aucun corps organisé et elles restaient telles indéfini- ment après avoir été chauffées à 110°. Mais si l’on y apportait une trace de terre en donnant un accès suffisant à l’oxygène (de l'air flambé et filtré), au bout de peu de jours, avec une température convenable, la nitrification commençait. On voyait alors au micros- cope de nombreux corpuscules allongés très petits qui offraient une grande ressemblance avec les corpuscules brillants trouvés dans les eaux par Pasreur et déjà auparavant par R. Kocn et F. Con. Si l’on portail dans d’autres solutions stériles une portion des liqueurs en train de nitrifier, on obtenait des liquides où se formaient des nitrates sans que l’on püt y trouver d’autres organismes que ceux qui viennent d’être décrits. Il paraît donc hors de doute que cet organisme provoque l'oxydation de l'azote, et ScHLæsinG et Münrz l'ont considéré comme le ferment nitrique. Ils réussirent aussi à extraire du sol des bactéries qui avaient le pouvoir de transformer les sels ammoniacaux en nitrates. De ce fait que dans l'air il n’y a pas d'organismes nitrifiants, ces savants concluaient que toutes les espèces de bactéries n’ont pas cette faculté de nitrification et qu'elle est dévolue seulement à certaines espèces vivant dans le sol et dans l’eau. ot LT; ACTION DES MICROORGANISMES. 31 Dans des recherches ultérieures, À. MENTz' a trouvé que les orga- nismes nilrifiants ne donnaient lieu qu’à la formation de sels nitreux et que, si les nitrites se trouvaient rarement dans le sol, cela tenait à leur rapide oxydation sous l’action simullanée de l’air et de l’acide carbonique, celui-ci mettant en liberté, par la formation d’un car- bonate, l'acide nitreux qui se combine directement à l'oxygène pour donner de l’acide nitrique. On ne pourrait donc pas du tout con- clure de la présence des nitrates dans le sol à celle d’un ferment nitrique spécifique. J. M. H. Munro* arrive, dans ses recherches, à cette conclusion que la nitrification s’accomplit sous linfluence de deux ferments dont l’un opère la transformation des matières azotées en ammo- niaque et l’autre l'oxydation de l’ammoniaque formée en nitrites et nitrates. Th. LEONE”, s'appuyant sur des essais de cultures pures, est d’avis que ces mêmes organismes qui produisaient de l’ammo- niaque en présence des malières organiques donnent lieu, en leur absence, aux processus de la nitrification. A. CELL et F. MariNo-Zucco* ont conclu de leurs observations que les bactéries, notamment le Micrococcus cereus, pouvaient bien provoquer la nitrification, mais qu’elles la favorisaient seulement d’une manière très active, sans en êlre la condition indispensable. Les recherches de F. UrFELMANN”° l’ont amené à ce résultat que l’acide nitreux de l’eau et du sol pouvait provenir de l'air, mais qu’il devait son origine première à un processus biologique, non à une simple action chimique de l'oxygène. En opposition avec les résultats précédents, L. ADAMETz* n’a pu trouver dans deux sols une bactérie qui eût la propriété de transformer de notables quantités d’ammoniaque en acide nilrique; il n’a pas trouvé le ferment ni- lrique. 0H, €. GXIL 1691, p., 1142. . Journ. of the Chem. Soc., 1886, p. 632. . Gazetla chemica ilaliana, t. X, p. 405. . Alli della R. Accad. dei Lincei, C. R., série 4, vol. IL, 1886, p. 519. o. Archiv fur Hygiene, vol. IV, p. 82. 6. Untersuchungen über die niederen Pilze der Ackerkrume. Inaug. Dissert. Leipzig, 1886. Be 5 19 = LP 38 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. W. Heraeus! a pu prouver que le Micrococcus prodigiosus, des bactéries radiciformes, le spirille du fromage, les bactéries de Fin- KLER, les bacilles du typhus et du sang de rate, le S/aphylococcus citreus transforment l’ammoniaque en acide nitreux. Il y aurait donc plusieurs schizomycètes capables de ritrifier. En connexion avec les résultats de HERAEUS, F. HuEpPE* à démon- tré qu'il y a certaines bactéries incolores qui peuvent, à l’obscurité, former à l’aide de carbonate d’ammoniaque un hydrate de carbone semblable à la cellulose; il se dégage de l'oxygène qu’on ne peut cependant mettre en évidence, parce qu'il est aussitôt utilisé pour l'oxydation de l’'ammoniaque en acide nitrique. Les organismes dits purpurbactéries qui dégagent de l’oxygène à l'obscurité se com- portent de même. Des bactéries de cette sorte qui, en l’absence de lumière, assimilent du carbone et dégagent de l'oxygène posséde- raient donc, en somme, le pouvoir d’oxyder l'azote de l’ammo- niaque *. Pour isoler les organismes nitrifiants, P. E. FRankLanp el G. GC. FrankLanp* ont fait, pendant trois ans, des essais infructueux jus- qu’à ce que l'emploi de la méthode par dilution leur eût donné une forme de Bacillococeus qui nitrifiait, mais qui, transporté sur la gelée de peptone, ne croissait plus, se développait pourtant abon- damment dans le bouillon de viande et, cultivé dans ce milieu, pul- lulait alors activement sur la gelée de peptone. Transporté dans les solutions ammoniacales, l'organisme isolé nitrifiait fortement, R. WariNGron‘ s’est occupé très activement, durant de longues années, de la nitrification et, après bien de vains efforts, réussit à obtenir, d’une part, un ferment organisé qui oxyde l’ammoniaque seulement en acide nitreux, mais qui, introduit dans les solutions nitreuses, ne peut former de nitrates, et, de l’autre, un ferment nitrique pur qui se développe dans les solutions minérales et trans- 1. Zeitschrift fur Hygiene, vol. I, 1886, p. 211. 2, Tageblatt d. Naturf.-Vers. in Wiesbaden, 1887. 3. Depuis, on a reconnu que de nombreuses espèces microbiennes pouvaient trans- former l'ammoniaque en nitrate, (Trad.) 4, Chemical News, vol LXI, n° 1582, p. 135. 5. On nitrification Journ. of the Chem. Soc., 1878, 1879, 1884, 1891. 4 ACTION DES MICROORGANISMES. 39 forme énergiquement les nitrites en nitrates, mais est incapable par lui-même de décomposer l'ammoniaque en nitrite ou nitrate. Ces découvertes ont été confirmées, dans leurs points essentiels, par les résultats de recherches très soigneusement faites par S. Wi- NOGRADSKY'. Il a établi que les organismes nitrifiants se multipliaient vite dans des milieux ne contenant que de l’ammoniaque et des sels minéraux sans trace de matière organique et qu'ils sont donc en état d’assimiler le carbone de l'acide carbonique. En s'appuyant sur cette notion, WiNoGRADSKY réussit, par des cultures dans des disso- lutions de silice ou de silice gélatineuse auxquelles on ajoutait de l’'ammoniaque et des sels minéraux nutritifs, à éliminer tous les autres microbes des malières organiques et à cultiver à l’état pur les organismes de la nitrification. De ceux-ci les uns pouvaient trans- former l’ammoniaque en acide ritreux seulement, tandis que les autres avaient exclusivement la propriété de transformer les nitrites en nitrates, mais sans pouvoir provoquer l'oxydation de lammu- niaque sous forme de nitrite ou de nitrate. Dans une terre de Zurich, WinoGrapsky à pu distinguer deux formes parmi les organismes nitreux isolés, une monade et une z00- glée. La première consiste en corpuscules ronds, très mobiles, avec un court flagellum, qui troublent la soiulion et ne se montrent que quand la solution est riche en ammoniaque. La seconde forme, au fond de la liqueur claire, des masses floconneuses, immobiles, sphé- riques, réunies par une substance gélatineuse qui offre un aspect non moins caractéristique. À Des sols provenant de diverses contrées de l’Europe, de l’Asie et de l'Afrique, traités de la même façon, ont donné aussi, comme fer- ments nitreux, des monades et des zooglées qui, sous les deux formes, offraient la plus grande ressemblance avec celles trouvées à Zurich. Seulement les monades de Java possédaient un plus long flagellum, ce qui rendait leurs mouvements moins actifs que ceux des monades d'Europe et spécialement de Zurich. Des sols de PA- 1. Annales de l'Institut Pasteur, 1890, n° [V et V, pp. 113 et 257; 1891, n° IX, p. 577, C. R., t. GXIII, 1891, n° 2, p. 89; Archives des sciences biologiques, pu- bliées par l'Institut impérial de médecine expérimentale à Saint-Pétersbourg, 1892, t. I, ni et 2, p. 86: 40 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. mérique du Sud et de l’Australie ont paru contenir des nitrosomi- crobes d’une tout autre sorte; mais, faute de matériel, les obser- valions n’ont pu être faites jusqu’au bout. Seulement WiNoGRADSKY a pu isoler les nitrosomicrobes d’une terre de Quito; ils étaient tou- jours plus grands que ceux précédemment décrits, ne se coloraient pas, avaient une membrane gélatineuse assez épaisse et leur mobi- lité n’a pu être mise en évidence. WinoGrapskYy les désigne sous le nom de Megalococcus; ces formes ont été rencontrées aussi dans des sols de Melbourne et du Brésil. Les organismes de la nitrification, qui consistent exclusivement en petits bâtonnets, sont très différents des précédents. Ce bacille possède à un haut degré, comme l’ont établi les récentes recherches de R. Burri et A. STuTZER, le pouvoir d’oxyder les nitrites en ni- trates avec le concours de l’oxygène atmosphérique. Ceci n’a pour- tant lieu que si le substraltum nitreux est pauvre en matière orga- nique; car, dans le cas contraire, la quantité de nitrates reste la même et le bacille se multiplie aux dépens de la matière organique. € La transformation des nitrites en nitrates ne fait probablement que produire une source d'énergie que le bacille, en vertu d’un ferment spécifique qui lui est propre et intimement lié au protoplasma, peut utiliser quand font défaut les combinaisons azolées. » WiNoGrADsky propose de désigner sous le nom de nitrobactéries tout le groupe des microbes qui transforment lammoniaque en acide nitrique. Les ferments nitreux de l’ancien monde formeraient le genre Nitrosomonas avec les deux espèces N. europœus et N. ja- vanensis; ceux du nouveau monde formeraient le genre Mitrosococ- eus. Le ferment nitrique s’appellerait Nitrobacterium. A. Müwrz et H. Coupon‘ ont cherché à déterminer si la formation de l'ammoniaque dans la décomposition des matières organiques était due à un ferment unique ou si plusieurs des espèces abon- damment répandues dans le sol y contribuaient. Ils ont isolé, dans ce but, d’entre les microorganismes du sol les plus fréquents, cinq espèces (3 bacilles, 2 micrococcus) et les ont semées ainsi que deux mucorinées (Mucor racemosus et Fusarium) sur de la terre addi- 1. C.R., t. OXVI, 1893, p. 395. tionnée d'engrais organique. Gette terre ne formait pas d’ammoniaque _ avant, tandis qu'après l’ensemencement des microbes elle en pro- . duisit et sous l'influence de tous les organismes essayés, quoique en plus ou moins grande quantité. Cette réaction se différencierait par là nettement de la nitrification qui semble n’être due qu’à un organisme bien déterminé. Beaucoup des microorganismes qui habi- tent le sol peuvent former de l'ammoniaque. Des recherches de E. MarcaL "il résulte que cette production se fait sous l’influence de divers microbes (bactéries, levures, muco- rinées) habitant les couches supérieures du sol. Dans la terre tra- vaillée, ce sont les bactéries qui dominent; dans les sols humiques, acides, ce sont les mucorinées qui contribuent surtout à cette réac- tion. Parmi les bactéries, le bacillus mycoïde (Erdbacillus des auteurs allemands), qui a été découvert par FLÜGGE et décrit plus tard très complètement par FRANKEL sous le nom de bacille en racine ( Wurzel- bacillus), s’est montré le plus actif dans cette formation d’ammo- niaque. Les cultures faites avec ce bacille dans des dissolutions d’albumine à 10 p. 100 stérilisées ont montré que dans Pair du ballon il y avait absorption notable d’oxygène avec un dégagement correspondant d’acide carbonique et que les produits gazeux de décomposition manquaient d'hydrogène comme d’oxygène. Dans la solution même, à la place de l’albumine complètement détruite, on trouva de l’ammoniaque et de l'acide carbonique avec de faibles quantités de peptone, leucine, tyrosine, acides gras et acide sulfu- rique. Les cultures avec d’autres substances azotées ont donné les résul- tats suivants. Les principes albuminoïdes, caséine, fibrine, gélatine, gluten, légumine, myosine et peptone, furent, tout comme l’albu- mine, oxydés par le bacille avec formation d’ammoniaque ; de même le sérum du sang et le lait. Même les combinaisons azotées non albuminoïdes, leucine, tyrosine, créatine et asparagine, furent trans- formées en ammoniaque; mais l’urée, qui se décompose si aisément -en carbonate d’ammoniaque, se comporta autrement. ACTION DES MICROORGANISMES. at 1. Bulletin de l'Académie de Belgique, série 3, t. XXV, 1893, p. 727. 42 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. En solution stérilisée ensemencée avec le bacillus mycoïde, l'urée n’offrit pas à ce dernier un terrain de culture favorable ; lErd- bacillus ne s'y développa point, non plus que dans les solutions qui contenaient du nitrate d’urée et des sels ammoniacaux. Quant aux mucorinées, MarcHAL' constala que, dans tous les essais où les diverses espèces expérimentées s'étaient développées abondamment, il y avait eu production d’ammoniaque. Mais dans aucun cas on ne put déceler la présence des nitrates, soit dans la solution albuminoïde, soit dans le mycélium. Les mucorinées ne peuvent donc produire des nitrates à l’aide des matières albumi- noïides. Il se forma du reste aussi peu de nitrates dans les cultures où l'azote avait été fourni aux champignons exclusivement sous forme de sel ammoniacal. Suivant cet auteur, les mucorinées jouent un rôle considérable dans la transformation en ammoniaque de l’azote combiné à l’état organique dans le sol. Si divers expérimentateurs, comme, par exemple, L. FRANKEL (chap. V), ont trouvé si peu de mucorinées dans le sol, cela tient en première ligne à la réaction alcaline des milieux de culture qu'ils ont employés. Par lPemploi de solutions acides MarcyaL put isoler de divers sols un grand nombre de mucorinées différentes dont une espèce nouvelle d’aspergillus, très répandue, qu'il nomma Aspergillus lerricola. Parmi les fermentations liées à la présence de l'air, 1l y aurait à citer ici la fermentation acétique qui est due à des microorganismes, au Mycoderma aceli (Micrococcus aceli, Bucillus aceti) d’après les anciennes données, à deux espèces de bactéries d’après HANSEN, le Bacterium aceli et le-B. pastorianum, auxquelles il faut ajouter, d’après PETERS, une autre bactérie et, d'après LaAFAR, encore un hyphomycète. D'après les résultats acquis jusqu'alors, on doit admettre que les processus de la décomposition, quand l’accès de l’air est limité, voire supprimé, sont, eux aussi, dus à l’activité vitale d’organismes infé- rieurs. La fermentation forménique que l’on constate dans la putréfaction 1. Bulletin de la Société belge de microscopie, t, XIX, 1893, p. 65-74. ACTION DES MICROORGANISMES. 43 est due, comme l’ont montré P. P. DenÉrain et U. Gayon', à des microbes dont les caractères morphologiques sont encore incom- plètement connus. D’après F. Hoppe-SEyLer”, c’est le Bacillus buty- ricus PRAZMOWKSY (Bacillus amylobacter Van TIeGHEM, Clostridium butyricum) qui doit surtout provoquer celte réaction”. Le dégagement d'hydrogène observé par DEHÉRAIN et caraclérisé par la présence simultanée de l'acide butyrique est également pro- voqué par des microorganismes qui doivent différer de ceux de la décomposition forménique, parce que leur activité n’est pas liée à l’accès de l’air, mais persiste sans interruption en l’absence de Pair. D’après DERÉRAIN, il doit y avoir deux ferments organisés dont l’un donne du formène, l’autre de l’hydrogène et de l'acide carbonique. On a soutenu, depuis, que l’un excluait l’autre, si bien qu'il arrivait rarement que les gaz dégagés dans la fermentation continssent en même temps du formène et de l'hydrogène : cela peut arriver ce- pendant. Selon H. TAPPEINER ‘, déjà dans ia panse, le bonnet et le gros in- testin du veau, il y a une fermentation de la cellulose due à des bac- téries qu'on n’a pu réussir encore à élever en culture pure. Les autres hydrates de carbone subissent de même de nombreuses transformations (ou dédoublements) auxquelles prennent part main- tes espèces de bactéries. Pour l’amidon nous savons qu’il est dissous par diverses bactéries et transformé en principe sucré soumis en- suile à d’autres transformations ou brülé en donnant de l'acide car- bonique et de l’eau. Parmi les processus en question, 1l faut penser d’abord à la fermentation lactique provoquée par le Bacillus acidi lactici ; outre ce bacille, il y a une série d'organismes (Pediococcus acidh laclici LiNDNER, bactéries lactiques de HuEPPE, Zopr, PETERS, VWEIGMANN, STORCH et QuIST) qui provoquent les mêmes réactions quoique à un plus faible degré. 1. Journal de l'agriculture, 1884, n° 781, p. 507. 2. Zeitschrift fur physiologische Chemie, vol. X, 1886. 3. Le Vibrio rugula (Spirillum rugula) est aussi à signaler. La fermentation for- ménique est sous la dépendance de divers microbes anaérobies. On ne connaît pas d’aérobie qui dégage du formène. (Trad.) 4. Zeilschrift fur Biologie, vol. XIX, p. 288 ; vol. XX, p. 52. 44 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le Bacillus butyricus gouverne la fermentation bulyrique que d’autres bactéries encore, comme, par exemple, les bacilles butyri- ques de Lisorius et HuEPPE, paraissent capables de susciter. La fermentation alcoolique est due à l’activité de diverses levures (Saccharomyces) parmi lesquelles il faut citer en première ligne : Saccharomyces cerevisiæ, S. paslorianus, S. ellipsoideus, S. Marzianus,S. exiquus et S. Ludwigii et aussi de diverses bactéries. La fermentation des acides gras et des acides organiques végétaux est causée aussi par des organismes inférieurs et principalement par des bacilles dont il reste encore à déterminer les caractères mor- phologiques. Dans la décomposition des matières albuminoïdes et des combi- naisons amidées interviennent de nombreuses bactéries dont l’in- fluence varie suivant leur qualité et leur quantité. Il est, d’ailleurs, bien nécessaire d’arriver à préciser plus exactement leurs produits, bien que les recherches effectuées fournissent déjà à cet égard des repères importants. On sait que le Bacillus putrifici coli provoque des réactions à la suite desquelles il se produit des peptones, de la tyrosine, du phénol, de l’indol, du scatol, des acides gras, de l’am- moniaque, etc. Les peptones et les gaz fétides sont produits par Proteus vulgaris, P. mirabilis et P. Zenkeri. Le Bacillus butyricus Hugppe provoque la formation de peptones, leucine, tyrosine, am- moniaque et de matières à goût amer, le Bacillus fluorescens lique- faciens, le plus grand producteur d’ammoniaque, celle de peptones, d'acides gras volalils et d’une couleur verte. Le Bacillus pyocya- neus et le B. janthinus donnent des peptones et de l’ammoniaque. La triméthylamine se forme sous l’influence du Bacillus ureæ et du B. prodigiosus, l'hydrogène sulfuré et lammoniaque sous celle du bacille de MizLer (et de maint autre), tandis qu’il se dégage des gaz fétides quand les circonstances favorisent la multiplication du Ba- cillus saprogenes I, II, III, du B. coprogenes fœtidus, du B. pyo- genes fœtidus, du Micrococcus fœtidus, etc. Les Bacillus magnus, B. spinosus, B. liquefaciens et les bacilles du chancre des fumeurs donnent dans la décomposition de l’albumine séreuse, comme gaz: de l'hydrogène et du méthylmercaptan ; comme acides gras, toute la série ; comme acides amidés, de la leucine et enfin quelques acides E ACTION DES MICROORGANISMES. 45 aromatiques. Dans la décomposition de la gélatine, les bactéries précédentes ne produisent ni tyrosine, ni indol, ni scatol, mais de l'acide benzoïque (NENCKkI'). Le Bacillus subtilis est à signaler ici seulement pour sa faculté de peptoniser l’aibumine et la gélatine, ce qui prépare ces subs- lances à recevoir d’autres organismes. Depuis que l’on a réussi à élever en cultures pures les bactéries de la putréfaction, il faut s'attendre que les recherches ultérieures élargiront le cercle de nos connaissances sur la manière d’agir de chaque espèce. Provisoirement on doit se contenter des faits qui précèdent et qui montrent déjà très nettement que la décomposition des principes azolés des matières organiques doit être attribuée à l’action des organismes inférieurs. Au point de vue agronomique, le processus désigné sous le nom de dénitrification offre un grand intérêt. D’après les recherches de U. Gaxon et G. Duperir”, il est certain qu’on doit le considérer de même que son inverse, la nitrification, comme d'ordre biologique. Ils ont trouvé dans leurs expériences faites sur des nitrates que ceux-ci disparaissaient peu à peu et que la liqueur se remplissait de microorganismes. Ces microbes sont bien la cause de la réduction des nitrates, car la solution restait claire et le mitrate inaltéré quand on la stérilisait en la chauffant ou qu’on y ajoutait du chloroforme et du sulfate de cuivre. Outre ces organismes qui réduisent ces nitrates jusqu’à l’état d'azote, ces mêmes savants on! trouvé, ultérieurement, d’autres mi- crobes qui n’extraient des nitrates que les deux tiers de leur azote et les transforment en nitrites. A ces organismes appartient en première ligne un microbe qui a pu être isolé à l’état pur et consiste en petits bâtonnets mobiles don- nant peu de spores. Ce microbe (Bacillus denitrificans), désigné par la lettre 4, fut ensemencé dans du bouillon de poule contenant 60 grammes de nitrate de potasse par litre, dans des tubes longs et étroits et dans une atmosphère ou raréfiée ou d’acide carbonique 1. Monatshefte fur Chemie, 1889, n° 10. 2. Journal de l'Agriculture, 1884, n° 781, p. 507. 46 DÉGOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ou dans le vide. À 35° l’organisme se développait rapidement et troublait la liqueur sans dégager la moindre quantité de gaz. En même temps tout le nitrate se transformait en nitrite, et une faible portion de l’acide carbonique formé pendant la réaction s'était dis- soute comme carbonate de potasse. L’oxygène contenu dans l’acide carbonique formé était en plus faible quantité que celle qu’aurait dû donner le nitrate en se décomposant. Comme aucun gaz ne s’est dégagé, la différence d'oxygène a probablement été absorbée par le microbe pour son développement. Cet organisme vit très facile- ment et a une action réductrice énergique dans le bouillon de poule ; il y vit même quand le bouillon est saturé de nitrate de potasse et 1l peut détruire journellement 40 grammes de nitrate de potasse. Mais il se développe mal dans les solutions artificielles. Parmi les organismes donnant des nitrites, il y en avait un deuxième, b, en longs bâtonnets immobiles avec des spores, et deux microbes dont l’un, c, formé de longs filaments riches en spores, l’autre, d, de petits bâtonnets immobiles avee chacun une spore. Les quatre microbes ont donné par jour dans du bouillon de poule à 10 grammes de nitrate de potasse par litre : a, 95,6 de nitrite ; b, Der 8 ; c, 68,8 et d, 56°,6. Le microbe du choléra des poules mis à l’essai de la même façon a donné 0£",5, la bactérie du sang de rate 06,1 et la bactérie septi- que 05,8 La plupart des microorganismes doivent posséder la même pro- priété, mais pas toujours à un aussi haut degré. Jusqu'ici les auteurs susnommés n’en ont trouvé qu'un seul qui, pouvant vivre dans le bouillon additionné de nitrate, ne fournisse pas de mitrite. Dans le même ordre d'idées, E. Gicray et E. H. ABersoN‘ se sont efforcés de trouver un microbe qui réduise les nitrates en nitrites, ammoniaque et azote. Le résultat de leurs recherches fut qu’à Wa- geningen (Hollande), dans l’automne de 1889 et de 1890, il y avait une bactérie très répandue dans le sol, l’eau et l'air, qui réduisait complètement les nitrates. Sa culture à l’état pur réussit facilement en exposant à l’air ou additionnant d’un extrait de sol de la gélatine ou 1. Archives néerlandaises, 1891, 1. XXV,p. 341. ACTION DES MICROORGANISMES. 47 du bouillon avec une solution nutritive renfermant par litre 2 gram- mes de nitrate de potasse, 1 gramme d’asparagine, 2 grammes de sulfate de magnésie, 5 grammes d’acide citrique, 2? grammes de phos- phate monobasique de potasse, 06,2 de chlorure de calcium et quel- ques gouttes de chlorure de fer et en neutralisant par de la potasse. Très remarquable est cette observation de E. MarcnaL' que le Bacillus mycoides (Erdbacillus), qui provoque (on l’a vu plus haut, p. #1) la formation de l’ammoniaque dans des dissolutions d’albu- mine et de combinaisons amidées, produit dans des dissolutions avec mitraltes une réduction de ceux-ci en mitrites et ammoniaque. Si l’on cultive le B. mycoides dans une solution de sucre contenant 2 grammes de nitrate de potasse par litre, on constate dans les pre- miers Jours un développement très lent du microbe; mais, au bout de 2 ou 3 jours, d’épais el nombreux flocons apparaissent dans la liqueur, qui offre la réaction de l'acide nitreux et de l’ammoniaque, ce dernier en grande quantité. Ce processus de réduction, déjà re- connu à ce microbe par d’autres expérimentateurs, est si énergique, qu'après 10-15 jours tout l’acide nitrique est transformé en ammo- niaque. Le même organisme agirait donc tantôt comme oxydant vis-à-vis de l’albumine, tantôt comme réducteur vis-à-vis des nitrates. Le B. mycoides, qui se développe en aérobie dans des dissolutions de blanc d'œuf, brûle l’'albumine au moyen de l'oxygène de l'air, tan- dis que dans les solutions sucrées de nitrates il brûle le sucre et emprunte l'oxygène qu'il lui faut aux nitrates facilement réductibles. Mais si réellement le B. mycoides peut extraire des nitrates l’oxy- gène nécessaire à sa respiration, il doit pouvoir vivre comme anaé- robie en présence de ces sels et sans oxygène ; c’est ce que l’expé- rience a montré. Cultivé en solution sucrée et nitratée, le Bacillus mycoides vit dans une atmosphère d'hydrogène ou d’acide carbo- nique aussi bien que dans l’air ordinaire. Le même cas a été observé par Th. LEONE* pour les organismes 1. Bulletin de l'Académie de Belgique, série 3, t. XXV, 1893, p. 727. 2, Gazella chimica italiana, t. X, p. 505 ; Ali della R: Accademia dei Lincei, Rendiconti, série 4, vol. VI, p. 33. 438 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nitrifiants. Il a trouvé qu’en mettant dans de l’eau où la nitrification se faisait normalement un peu de gélatine nutrilive ou d’autres subs- tances favorisant le développement du ferment nitrique, la réaction s'arrêle et l’acide nitrique déjà formé est réduit en acide nitreux et celui-ci même en ammoniaque. Si au contraire la substance organi- que est employée en totalité, les microorganismes provoquent alors de nouveau l’oxydation de l’ammoniaque en acides nitreux et mitri- que ; les mêmes organismes agissaient donc soit comme oxydants, soit comme réducteurs. Ces phénomènes se manifestèrent aussi quand à une terre de jardin on ajouta du fumier frais. La nitrifica- tion fut arrêtée par les microbes dans la terre qui nitrifiait forte- ment, et il y eut réduction des nitrates et des nitrites avec formation d’ammoniaque. Plus tard la nitrification recommença aussitôt après qu’eut pris fin la production d’ammoniaque. Quant à l'explication de ce changement surprenant de fonction des organismes nitrifiants, LEONE pense qu’en raison du développe- ment rapide des germes, l'oxydation qu’ils provoquent est si intense que l'oxygène présent n’y suffit pas et qu’une partie doit être em- pruntée aux acides nitrique et nitreux. La dénitrification a été étudiée dernièrement par R. Burt el A. Srurzer'. Ils ont d’abord répété une expérience de P. WAGNER *? montrant que les fèces du cheval provoquent une destruction de nitrate. Dans un mélange d’eau (100 grammes), de crottin (5 grammes) et de nitrate de soude (08,32), il se produisit à 30°, généralement au bout de 24 heures, une fermentation spumeuse, et après quelques Jours, tout le salpêtre disparut. Le gaz qui se dégage en même temps est de l'azote. Si, au lieu de nitrate on emploie du nitrite de soude, la décomposition du nitrite marche beaucoup plus lentement. Dans un mélange où n’entrent que du crottin et de l’eau, il n’y a pas de fermentation; mais elle apparait dès qu’on ajoute du nitrate de soude. La fermentation n’est 1. Centralblatl fur Bakleriologie und Parasilenkunde, Zweile Abtheilung, vol. I, 1895,-n° 7-8, p. 257 ; n° 9-10, p. 350 ; n° 11, p. 392; n° 12, p. 422. 2. Deutsche landwirthschaftliche Presse, 1895, n° 14, p. 123, _ hits à ACTION DES MICROORGANISMES. 49 pas arrêtée, mais seulement un peu réduite par la cuisson de la li- queur, d’où l’on doit conclure que les agents de la fermentation ap- parliennent à des espèces qui forment des spores ou qui sont très résistantes. Les auteurs susnommés ont réussi à isoler deux bactéries sous l’action simultanée desquelles s’accomplit la réduction du nitrate. Voici comme on a démontré que les deux bactéries (4 et æ) vivent en symbiose : : Des traces de a ont été semées dans du bouillon nitraté en même temps que des traces de x dans un autre vase d’égale contenance; les deux vases furent exposés pendant plusieurs jours à une tempéra- ture de 30°. Les solutions se troublèrent, mais ne dégagèrent pas de gaz. Dès qu’on mélangea les deux solutions en évitant toute contami- nation, il se produisit dans l’espace de 12 à 2% heures un vif déga- sement de gaz avec formation d’écume. Dans un autre essai, on fit sur une plaque d’agar une culture de a en strie ; elle fut croisée avec une culture de x, et, quand elles eurent commencé à se développer, on porta sur du bouillon nitraté une parcelle prise à la sortie d’une strie, une autre parcelle prove- nant de l’extrémité d’une strie croisée sur la précédente et une troi- sième provenant du point de croisement. C’est dans ce dernier cas seulement qu’il se produisit de l’écume. De ces expériences il faut conclure que la destruction des ni- trates en présence du crottin est due à une symbiose. En poursui- vant cette étude, on montra que x ne pouvait être remplacé par un autre organisme, landis qu’au contraire, au lieu de a, on put em- ployer une culture de Bacterium coli commune installée depuis longtemps au laboratoire sans qu’il y eût la moindre modification dans le cours de la fermentation. De même le bacille typhique, avec l’aide de +, amena la fermentation complète du nitrate. : L'étude approfondie de l'organisme désigné sous la lettre 4 mon- tre qu’il est identique au Baclerium coli commune, sauf pour le 1. Sous le nom de symbiose on désigne le fait très fréquent dans la nature de deux êtres d'espèces différentes vivant associés : l'un ne peut vivre sans l’autre. MATIÈRES ORGANIQUES. 4 50 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. mouvement actif des bactéries dans les jeunes cultures sur plaque, et celle mobilité seule ne suffit pas à différencier les deux espèces. Les deux auteurs précédents ne décident pas si l’on a donné à tort le nom de Bacterium coli commune à toute une série d'espèces diffé- rentes ou si la grande variabilité de cet organisme affirmée de divers côlés existe réellement; mais ils arrivent à cette conclusion que le B. coli commune, déjà signalé comme agent de nombreuses fermentations, possède encore, en symbiose avec certaines autres bactéries, la propriété de détruire d’assez grandes quantités de nitrates en dégageant de l’azole gazeux. | La bactérie désignée par la lettre z qui, associée au Baclerium coli ou au bacille typhique et, sans doute, à d’autres espèces encore, peut détruire d'importantes quantités de nitrate ou de nitrite de la façon qui a été indiquée, a été dénommée par Burri Bacillus deni- trificans 1, cet organisme n’ayant pu être identifié avec aucun de ceux déjà décrits. D’après les observations de cultures pures, le B. denitrificans T fait partie des aérobies vrais (ou obligés), tandis que le B. coli est un anaëérobie facultatif. Les résultats suivants, obtenus par les mêmes auteurs, montrent jusqu’à quel point cette propriété des deux espèces s’accuse dans les fermentations avec divers mélanges d'air. Dans du bouillon nitraté ensemencé avec le Baclerium coli et le Bacillus denitrificans, à travers lequel on avait insufflé de l’hydro- gène pendant 15 minutes, il n’y eut aucun dégagement d’azote libre : mais tout le nitrate disparut pour se retrouver, sous forme de nitrile surtout, avec un peu d’ammoniaque. Si cette expérience se répète de la même façon, mais dans un vase ouvert et à l’air libre, il y a fermentation active avec dégage- ment d'azote. On a aussi observé que tout l’azote du nitrate ne passe pas à l’état élémentaire, et qu’une partie (environ 20 p. 100) repasse dans la solution nutritive à l’état d’azote organique. Dans ces essais en présence de l'air, celui-ci n’avait qu’un accès très limité. Si l’on veut ne forcer en rien les résultats précédents, on pourrait seulement en conclure que le Bacterium coli associé au Bacillus denitrificans 1, amène dans les solutions nitratées des phénomènes ACTION DES MICROORGANISMES. 51 de réduction qui, en l’absence complète d’air, se limitent à la for- malion de nitrites, mais qui, si l’air pénètre en petite quantité, vont jusqu’à la destruction des nitrates, jusqu'au dégagement à l’état ga- zeux de la plus grande partie de azote qu’ils contiennent. Sous le rapport de l'accès de Pair, ces processus se passeraient dans des conditions qui correspondent à celles de la pourriture. Mais si Burri et STuTzEr concluaient de leurs essais que les deux bactéries, dans un milieu abondamment aéré, décomposent les nitrates en dégageant de l'azote, ce ne serait pas admissible, attendu que rien dans les faits acquis n’autorise cette manière de voir et que sa preuve directe n’a pas élé fournie. Ce n’en est pas une que le B. denitrificans 1, en culture sur plaque, se soit comporté comme un aérobie obligé, parce que maints organismes réagissent très dif- féremment en présence de l'air et que le bacille en question, s’il était un aérobie vrai, ne pourrait provoquer la fermentation du ni- trate dans une quantité très limitée d’air. Il paraît, du reste, bien invraisemblable qu'un processus de ré- duction qui ne se produit qu’en l’absence d'oxygène ou avec une faible quantité de ce gaz puisse avoir lieu dans des conditions qui, d’après toutes les observations précédentes, ne provoquent que des oxydalions. Si la conclusion que Burt et STuTZER ont tirée de leurs recherches était exacte, il faudrait donc admettre que, dans les substances en décomposition bien aérées, il y a, d’une part, des or- ganismes (ransformant l’azote en nitrate, et, d'autre part, d’autres organismes qui attendent, pour ainsi dire, le moment de détruire les premiers. Une pareille interprétation est contredite non seule- ment par toutes les observalions faites Jusqu'ici, mais encore par des faits de diverses sortes, tels que la forte accumulation de nitrates dans les matières organiques azotées (composts, mélanges de fumier d’étable et d’engrais vert) en présence d’air en excès et aussi la concordance entre les quantités d’azote contenues dans les nitrates des eaux de drainage et celles qui se trouvent sous forme d’ammo- niaque dans les eaux d’égout répandues sur les champs d'épuration. On pourrait citer aussi cette observation qu’on ne constate que très peu ou point de perte d’azote dans la décomposition du fumier quand, par l’emploi de certains procédés de conservation, d’assez 52 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. grandes quantités de nitrates y ont été formées. Ces faits suffiraient à affirmer qu'une destruction des nitrates en présence d’air en excès ne peut être opérée par les organismes précédemment décrits ou bien que, si des recherches ultérieures démontraient l’existence de ce processus dans certaines circonstances, cette réaction serait sans importance. Le dégagement d’azote donné par les nilrates quand tout accès d'air est fermé est dû à un bacille, déjà trouvé par E. BRÉAL sur de la vieille paille, ensuite isolé et bien étudié par R. Burn et A. STurzER”. On a réussi à retirer de la paille d’une vieille enve- loppe de bouteille un bacille qui prospère aussi bien au contact de l'air qu’en son absence, mais qui, à l'air, n’a aucun pouvoir de fer- mentalion. Il se trouve aussi sur d’autres débris végétaux et sur le sol. Quelques recherches de H. B. Girson* semblent confirmer cette opinion. De la viande qu’on humecta d’une goutte d’une émul- sion très diluée de viande en putréfaction ne perdit pendant la dé- composition que 2.1 p. 100 d’azote en moyenne, tandis que la perte fut de 12.1 p. 100 après addition d’un extrait de sol. Le bacille en question, désigné sous le nom de B. denitrificans IL, joue le rôle principal dans la destruction des nitrates en l’absence de l'air. Dans la fermentation ammoniacale de l’urée, l’urine claire se trouble par des organismes inférieurs, au nombre desquels peuvent se trouver divers champignons et bactéries. Le Micrococcus ureæ Coun a été d’abord découvert comme agent de cette fermentation. PasrTEUR à montré le premier que ce Micrococcus, cultivé à l’état pur dans une solution nutritive contenant de l’urée pure, provoque la même fermentation que dans l'urine. Le Micrococcus ureæ découvert par LEURE paraît être identique au premier. FLUGGE a isolé de l'urine putréfiée un autre Coccus qui, comme le précédent, fait fermenter énergiquement l’urée, mais montre certaines différences dans la culture ; c’est le Micrococcus 1. Annales agronomiques, t. XVIII, n° 4, p. 181. 2, Loc. cit. 3. Sur le dégagement de l'azole libre dans la putréfaclion. Thèse. Baltimore, 1893 (en anglais). . ACTION DES MICROORGANISMES. D3 ureæ liquefuciens. LEUBE a encore trouvé dans de Purine vieille un Bacillus ureæ qui doit transformer l’urée en carbonate d’ammo- niaque plus énergiquement encore que le Micrococcus ureæ. Le même auteur à pu constaler enfin que deux autres bacilles et une Sarcine exerçaient vis-à-vis de l’urée un pouvoir énergique d’hy- dratation. P. MiQueL ‘ a découvert qu’à côté des Micrococcus 11 fallait aussi attribuer à certaines bactéries en bâtonnet et même à des moisis- sures la faculté de provoquer une fermentation ammoniacale éner- gique, et il donne une courte description d’un bacille qu’il a trouvé et qui est désigné sous le nom de B. Duclauxti ou B. urec &. Dernièrement, R. Burri et A. STUTZER* se sont très activement occupés d'isoler les microorganismes qui produisent la fermentation ammoniacale de l’urée. Ils sont arrivés à ce résultat intéressant qu'ils n'existent pas seulement dans l'air, mais aussi en quantité notable dans le terreau tourbeux. Ils ont pu séparer en cultures pures trois bactéries en bâtonnet qui, sans parler des caractères morphologiques, sont caractérisées comme il suit : B. UREÆ I. B. URFÆ II. Fermentation . . . . . . Modérée. Énergique. Gélatine (avec urée) . . . Liquéfie. Ne liquéfie pas. MODÉRER In Te Existe. N'existe pas. B. UREZÆ III. Energique. Liquéfie. Existe. Ces bactéries de l’ammoniaque sont de celles qui peuvent se mul- plier en présence d’une grande quantité d’alcali libre. Dans un substratum nutritif neutre et surtout acide, elles ne se développent pas et ne montrent aucun pouvoir hydratant; elles ny meurent pourtant point et peuvent s’y maintenir vivantes pendant des années ; il en est ainsi, du moins, de celles qui forment des spores (B. ureæ II et IIT). Ainsi s’explique facilement la présence des bac- téries de l’ammoniaque dans le terreau tourbeux qui est acide. Les Sulfobactéries, parmi lesquelles il faut compter surtout, d’après les recherches de S. WinoGrapsky*, Beggialoa alba VAucu, 1. Annales de Micrographie, 1889 à 1898. 2. Journal fur Landwirtschaft, 42° année, 1894, p. 338. 3. Botanische Zeilung, 1887. n® 31-37. 54 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. B. roseo-persicina Zorr (Clathrocystis roseo-persicina Cou), Sar- cina sulfurata nov. sp., Ophidomonas sanguinea, Monas Okenii, Monas vinosa Eur, et quelques autres encore, amènent le dépôt du soufre par oxydation de l’hydrogène sulfuré. WinoGrapsky a mon- tré que l’oxydation qui commence par la destruction de l'hydrogène sulfuré se continue dans les cellules, tandis que le soufre qui y est séparé s’oxyde même jusqu’à l’état d’acide sulfurique. Il a pu déter- miner par des réactions microchimiques l’acide sulfurique non seu- lement qualitativement, mais presque quantitativement. Les carbo- nales contenus dans l’eau sont transformés en sulfates par l’acide sulfurique que séparent les bactéries vivantes. Cet auteur pense que le processus d’oxydation chez les Sulfobac- léries correspond à la respiration et que le soufre y joue le même rôle que les hydrates de carbone chez les autres plantes. Par la com- bustion du soufre, ces bactéries acquièrent l’énergie nécessaire pour entretenir leurs processus vitaux. Elles peuvent ainsi se con- tenter d’une très faible quantité de matière organique ; car toutes les combinaisons carbonées leur servent exclusivement comme éléments plastiques, tandis que chez les autres plantes elles sont employées à la respiration pour la plus grande partie. Les malières organiques nécessaires à la croissance des Sulfobacléries n'ont done pas besoin d’être de bons aliments, c’est-à-dire des combinaisons dégageant beaucoup de chaleur dans leur combustion ; des corps tels que les acides formique et propionique dont d’autres organismes ne peu- vent rien faire, suffisent aux sulfobactéries. Le dégagement d'hydrogène sulfuré qui se produit par réduction des sulfates et nitrates de soude en présence du formène à l'état naissant dans la putréfaction des matières organiques” est indépen- dant des Beggiatoacées, d’après WINOGRADSKY. Celui-ci a étudié aussi l’action de certaines bactéries qu’il appelle des ferrobactéries* (Eisenbacterien) et qui sont surtout représentées par Cladothrix dichotoma Coux (Leplothrix ochracea KurziG) et par Crenothriz Kuhniana Ragennorsr. Ces organismes ont la es 1. V. ante. 2. Botanische Zeitung, 1888, n° 17. | Ci! + ACTION DES MICROONGANISMES. 55 faculté d’oxyder le protoxyde de fer en le séparant de sa combinaison carbonatée. Celte adjonction de protoxyde de fer indispensable à la croissance des filaments de Cladothrix est des plus remarquables. Tandis qu’ils végèlent très vigoureusement dans de l’eau contenant du protoxyde de fer et renouvelée deux à trois fois par jour, ils ne s’accroissent plus si on laisse l’eau exposée d’abord quelque temps à l'air de façon qu’elle ne contienne plus de protoxyde. Celui-ci dont s’em- pare avidement le Cladothrix en croissance est oxydé dans le prolo- plasma et probablement donné sous forme de combinaison oxydée soluble à l'enveloppe gélatineuse qui entoure la cellule et qui re- tient le sel. Ce dernier peut d’abord facilement se dissoudre dans l’eau, même vingt-quatre heures après qu’il s’est déposé ; plus tard Poxyde de fer se transforme et devient difficilement soluble, même insoluble. Les autres ferrobactéries concordent dans leurs propriétés essen- üielles avec le Cladothrix éludié. Nous avons affaire 1ci à un caractère physiologique d’une classe de bactéries que WinoGrapsky comprend, pour ce motif, sous le nom de ferrobactéries. Ce caractère acquiert une assez grande im- portance par son analogie avec celui des sulfobactéries, Dans les deux cas, une substance oxydable est extraite par les cellules, portée dans leur plasma au maximum d’oxydation et ensuite excrétée. Ni le soufre ni le fer ne servent à la structure de ces organismes ; bien plus, ils sont rejetés par les cellules après transformation. Il s’ensuit que la proportion de matière modifiée chimiquement est très grande par rapport à celle des substances assimilées dans le même temps, Comme les ferrobactéries s’accroissent si lentement quand l’oxyda- tion du fer cesse dans leurs cellules, WinoGrapsky conclut que les réactions vilales de ces organismes sont entretenues principalement ou exclusivement aux dépens de la chaleur (ou énergie) devenue libre par l'oxydation du protoxyde de fer. Les faits que nous venons d’énumérer, tout incomplets qu'ils soient, permellent de conclure avec certitude que ces diverses réac- lions qui se présentent dans la destruction des matières organiques sont dues à toute une série de microorganismes. Elles ont lieu soit 56 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dans le protoplasma vivant, soil sous l'influence de produits inter- médiaires excrétés par les cellules sous forme de ferments. (Voir chap. VE.) Il ressort du court résumé que nous venons de faire que, suivant toute vraisemblance, chacun des processus constatés est dû non à la présence et à la multiplication d’un seul organisme, mais de plusieurs, au moins le plus souvent, Il semble légitime d’admettre que l’action de maints organismes peut être différente suivant les conditions extérieures. Pour le plus grand nombre des cas, la dé- composition n’est pas due dans toutes ses phases à une espêce déter- minée ; elle se fait par certains organismes jusqu’à une certaine limite à parür de laquelle elle se continue par d’autres. Parmi les microorganismes participant à cette destruction, il faut citer surtout les Schizomycètes ou Bactériacées et les Hyphomycè- tes; les Levures n’ont qu’une importance secondaire, en ce sens que les réactions qu’elles déterminent ne peuvent s’accomplir dans la nature que dans un faible rayon. Quand le substratum nutriüf a une réaction acide, la décomposition est surtout l'œuvre des Hypho- mycètes qui ont un pouvoir oxydant extraordinaire. À leur place on voit apparaitre les Schizomycètes dès que le milieu présente une réaction alcaline. Ceux-ci interviennent principalement, sinon exclusivement, dans la putréfaction et dans toute une série de fer- mentations qui s’accomplissent en l'absence de l'air. En opposition avec les parasiles qui ne vivent qu'aux dépens d'êtres vivants plus élevés en organisation, tous les organismes dont il vient d’être question ne peuvent croître que sur des matières mortes ; depuis 1866 on les désigne sous le nom de saprophyles. CHAPITRE IT ACTION DES ANIMAUX De nombreux animaux contribuent certainement à la décomposi- tion des matières organiques ; partout où elles existent en assez grandes quantités (terre, marais, couverture des forêts, fumier, etc.), des animaux se rencontrent en plus ou moins grand nombre et sou- vent en masse. Ce sont des Rhizopodes, des Anguillules (Némato- des), des Lombrics (vers de terre), des Crustacés, des Mollusques, des Myriapodes (Julus, Polydesmus, Scolopendra, Geophilus), divers insectes, soit à l’état parfait, soit à l’état de larves. Ces animaux dilacèrent les débris végétaux et animaux, s’en nourrissent et déposent ensuite leurs excréments dans lesquels les matières se sont déjà partiellement transformées. L'action des ani- maux est extrêmement variable suivant les circonstances locales ; elle peut être très considérable ou insignifiante. La dilacération des matières par les animaux ne paraît avoir que peu d'importance d’après les rares recherches faites sur ce sujet. Pour déterminer l'influence que peut avoir sur la décomposition la pulvérisation des débris végétaux par les animaux, P. KosrTyrs- GHEFF ‘ mit à décomposer dans des capsules de porcelaine deux lots de feuilles de diverses espèces (chêne, érable, bouleau) dont lun avait été rongé par les vers de terre et, au bout d’un mois, les deux lots furent placés dans des tubes pour déterminer la quantité d’acide carbonique qui se dégageait dans le même temps. FEUILLES oo rongées. non rongées. Acide carbonique dégagé en 8 jours. . 0,9384 0,8338 1. Annales agronomiques, t. XNII, 1891, p. 17-38. 58 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Celle quantité provenait de 75 grammes de matière desséchée. Dans un deuxième essai KosTYTscuerr fit ronger du Stipa pen- nala par des larves de Sciara. La quantité d’acide carbonique qui se dégagea de 75 grammes de matière sèche fut : STIPA © E: rongé. non rongé. Par jour, en moyenne . , . , « . à 0%,1686 0:r,1698 Des feuilles de chêne (60 gr.) rongées ou non par Julus terrestris ont dégagé FEUILLES DE CHÊNE CR rongées. non rongées. Acide carbonique®.:", PAL: 10708, QU: 05,663 0*",638 La pulvérisation n’a donc eu qu’une faible influence sur la décom- position des matières organiques. On connaît plus exactement les modifications que subissent les matières organiques quand elles passent dans l’appareil digestif des animaux terricoles, notamment des vers de terre. La nourriture de ces animaux se compose de malières végétales et animales et de terre”. Le suc intestinal des vers est de la même nature que la sé- crétion pancréatique des animaux supérieurs et peut, comme elle, émulsionner les graisses, dissoudre les matières albuminoïdes, trans- former l’amidon en sucre et même attaquer la cellulose. On peut en conclure à priori que les matières organiques absorbées par les vers subissent dans leur passage à travers le tube digestif des trans- formations chimiques multiples qui les rendent plus facilement dé- composables qu'avant. Pour le démontrer, j'ai fait les essais sui- vants : De la terre calcaire riche en humus, dont une moitié fut travaillée six mois par les vers de terre et l’autre resta intacte, fut séparée des débris en mélange à l’aide d’un tamis dont les mailles avaient 2 millimètres. On fit en mème temps une seconde expérience avec 1. Ch. Darwin, Die Büldung der Ackererde durch die Thaätigkeit der Würmer, Stuttgart, 1882 ; consulter aussi V. HeNsEN, Zeitschrift far Wissenschaftliche Zoo- logie, 28° vol, 1877, p. 361, et Landw, Jahrbücher, par H. Triez, vol. XI, 1882, ACTION DES ANIMAUX. 9 de la terre arable riche en humus qui fut, après un mélange intime, divisée en deux portions de 1000 grammes chacune qu’on plaça dans des bocaux. L’un d’eux reçut dix vers de terre. L'expérience dura trois mois pendant lesquels le sol fut arrosé d’eau distillée et l'humidité maintenue au même taux dans les deux vases. À l’au- tomne, les lots furent desséchés au soleil après qu’on eut enlevé les vers de terre, et analysés aussitôt aux points de vue de l’altérabilité des matières organiques et du taux en principes nutritifs solubles *. Pour le premier point, 150 grammes de sol séché à l'air furent humectés avec 34 grammes d’eau distillée et placés dans des tubes en U. Ceux-ci plongeaient dans un bain-marie constamment main- tenu à 30° par un thermostat Soxhlet. L’acide carbonique qui se forme dans le sol, peut, dans les conditions précédemment décrites, servir à mesurer l’aplitude à la décomposition des malières orga- niques. Déterminé suivant la méthode de PETTENKOFER, le volume d’acide carbonique contenu dans 1,000 volumes d’air du sol fut : 1er ESSAI 2e ESSAI EE avec vers, Sans vers, avec vers. sans vers. À, — (Du 7 au 16 novembre) Moyenne de 8 dosages. . 2,43 3,38 8,04 3,08 B. — (Du 19 au 28 novembre) Moyenne de 9 dosages. . 3,07 252 5,61 1,90 Le dégagement d’acide carbonique est beaucoup plus intense dans le sol muni de vers que dans celui qui n’en a pas, parce que les matières organiques s’altèrent plus facilement dans le premier cas que dans le second. On doit en conclure que la proportion d’élé- ments nutritifs des plantes qui se forment par décomposition dans la terre garnie de vers est plus grande que dans la terre dépourvue de vers. Pour déterminer les éléments solubles du sol, on mélangea 900 grammes de la terre en expérience avec 2 litres d’eau distillée soigneusement purifiée, à laquelle on avait ajouté une trace de bi- 1. Forschungen auf dem Gebicte der Agrikullurphysik, par E. Wozzxy, vo!. XII, 1890, p. 391-395. 60 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. A chlorure de mercure pour empêcher les transformations qui auraient pu survenir dans les principes azotés (ammoniaque, acide nitrique). : Ces 500 grammes restèrent pendant 14 jours dans un lieu modéré- ment chaud et furent souvent remués. Le liquide filtré fut partagé en deux portions, l’une pour le dosage de l’ammoniaque et de l'acide nitrique, l’autre pour celui des principes minéraux dissous. Les matières azotées ont été dosées par la méthode de W. Wic- LiAm !; les matières minérales, par évaporation de l'extrait du sol et la calcination du résidu. La solution était portée à ébullition avec un peu de magnésie dans un ballon muni d’un serpentin jusqu’à ce qu'il en eût distillé 250 centimètres cubes, dans lesquels on dosait l’am- moniaque avec une solution d’acide sulfurique titré. Le reste, étendu d’eau et versé dans un flacon à large col fermé par un bouchon, de- meurait 3 jours au bain-marie à 21-24°; la réduction des nitrates et des nitrites y était obtenue à l’aide d’une pile de cuivre et de zinc. Cette pile consistait en six bandes de zinc en feuille de 10 centimè- tres de longueur et 3°*,5 de largeur, sur lesquelles, après décapage de la surface, on provoquait un dépôt de cuivre en les plongeant dans une solution de sulfate de cuivre à 3 p. 100. Les lames de zine, après avoir été lavées à l’eau distillée et séchées, étaient mises dans le flacon de manière à y plonger complètement. Une partie de la so- lution était distillée après une exposition de 3 Jours à une tempé- rature de 21° à 24, et dans ce qui était distillé on dosait l’ammo- niaque. Voici le résultat des analyses, exprimé en pour-cent du sol sec : AZOTE SOUS FORME MATIÈRES S 4 — minérales À m mo- Acide niaque. | nitrique. | d’ammo- d'acide £ 7e Somme. | solubles. niaque, nitrique. p. 100. p. 100. p. 100. p.100. p. 104. p. 100. À. — Sol avec vers de terre.| 0.0200 0.01647| 0.02204|! 0.03854/0.08672 Sol sans vers de terre.| 0.0036 ; 4 1 0.00285| 0.02966| 0.0325110.63267 | B. — Sol avec vers de terre.| 0.0140 250 [ 0.01147| 0.00648S| 0.01795/0.15338 Sol sans vers de terrc.| 0.0060 .04- 0.00494! 0.01141| 0.0163510.03362 1. Transactions, 1881, 100. 4 à s) ACTION DES ANIMAUX. 61 On voit par ces chiffres que la quantité de matières azotées et minérales solubles est plus grande dans la terre habitée par des vers que dans celle qui n’en possède pas. La première renferme plus d’ammoniaque, mais moins d'acide nitrique que la dernière. En conséquence, ces recherches prouvent que la richesse du sol en principes nutritifs assimilables est augmentée par l’action des vers de terre. Cela tient à ce que les matières organiques du sol éprou- vent, en traversant le tube digestif, sous l'influence des sucs intesti- naux, des modifications qui favorisent leur décomposition. Cette ac- tion, toutes circonstances égales d’ailleurs, doit être plus accusée dans le cas où les vers se nourrissent des parties mortes des plantes (feuilles, tiges, racines, etc.). En second lieu, les vers influent sur la fertilité du sol en contri- buant essentiellement à sa porosité et à sa mise en grumeaux, abstrac- tion faite des nombreux trous qu’ils y creusent. Pour le démontrer, j'ai rempli d’un sol arable humique, humide, finement tamisé, deux vases cylindriques en tôle de zinc de 8°",6 de diamètre et 4 centi- mètres de hauteur et dans l’un j'ai mis cinq vers de terre. Après avoir égalisé la surface J'ai saupoudré chaque vase du même sol pour empêcher l’évaporation et la sortie des vers. Au bout de six semai- nes, la terre peuplée de vers non seulement était complètement mise en grumeaux, mails encore avait augmenté notablement de volume. Les chiffres suivants précisent les modifications survenues : DIAMÈTRE AUGMENTATION Re du HAUTEUR VOLUME de volume cylindre. du sol. du sol. absolue, p. 100. Y een tin. un out out, RAT EL Avec vers . . 8,6 ni 296,24 eq 97 5 Sans vers. . . 8,6 4,0 232,34 4 Le Afin de déterminer la capacité du sol pour l’air et l’eau, deux tubes de 5 centimètres de diamètre et de 35 centimètres de longueur fu- rent remplis sur 50 centimètres avec un même poids de lehm hu- mide. Dans l’un on mit 6 vers de terre au moment du remplissage. Après deux mois de séjour au laboratoire, la terre garnie de vers était à l’état grumeleux et avait subi une augmentation de volume de 6.9 p. 100. Alors on ajouta de l’eau par le dessus aux deux vases na 02 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. jusqu’à ce que des gouttes s’écoulassent de la partie inférieure fer- mée par une toile métallique, puis on laissa les vases en repos et cou- verts pendant 48 heures pour enlever l’excès d’eau. Ensuite on prit la terre dans les deux vases sur une hauteur de 30 centimètres, on la pesa après avoir ôlé les vers, et on la dessécha pour la repeser en- core. Connaissant le poids spécifique de la terre, on déduisit de ces pesées le volume du sol et sa capacité pour l'air et l’eau. Voici les résultats : soL FACULTÉ D'IMBIBITION. a 3 avec vers. sans vers. Pour.1\001en volumes "tree 28.69 48.13 Pour 100%en poils RE nn 21.36 29.89 SOL SOL VOLUME. © TT — © avec vers. sans vers. avec vers. sans vers, cent. cub. cent. cub. p. 100. p- 100. AI AU 183,9 52,7 31 :2 8.9 Sol EPP 236,5 252,8 40.2 492.9 DE RAM MATE 169,0 283,5 28.6 48.2 ROLL 589,0 989,0 100.0 100.0 Grâce à la mise en grumeaux du sol par les vers de terre, la fa- culté d’imbibition est diminuée, mais le volume de l’air ocelus est augmenté. Étant donné que les vides non capillaires sont multipliés et agran- dis par l’état grumeleux du sol, il n’y a rien d’étonnant à ce que la perméabilité pour l'air et l’eau soit sensiblement plus grande dans le sol pourvu de vers que dans l’autre. Pour le prouver, on remplit deux tubes de tôle de 5 centimètres de diamètre et de 39 centimè- tres de longueur fermés en bas par une fine toile métallique, avec du sable calcaire humide et riche en humus; l’un reçut 10 vers de terre. De mai en octobre les tubes restèrent verticaux, recouverts par une plaque de verre. Dans le dernier mois on fit passer de l'air à travers les deux tubes sous une pression de 40 millimètres d’eau et le volume d’air fut mesuré à l’aide du gazomètre. La quantité de litres d’air qui traversa le sol fut, par heure, de 432,27 (1° essai) et de 428,98 (2° essai) pour le sol peuplé de vers et de 3,65 (1* essai), 3,01 (3° essai) pour le sol sans vers de terre. ACTION DES ANIMAUX. 63 Dans les mêmes tubes on détermina ensuite la faculté d’imbibition par la méthode de Weuirscakowsky ". La quantité d’eau exigée pen- dant dix heures pour maintenir à la surface du sol une lame cons- tante de 50 centimètres fut de 74000 centimètres cubes pour le sol habité par les vers et de 2930 pour l’autre. A la fin de l'expérience, les tubes furent vidés et l’on constata que tous les vers de terre étaient encore en vie, quoique le sol fût de mai en octobre devenu presque aussi sec qu'il peut le devenir à l'air, fait qui montre, de la façon la plus frappante, la puissance de résis- tance des vers aux circonstances extérieures défavorables. Un autre essai fut fait dans les mêmes conditions avec du lehm. La quantité de litres d’air qui traversa le sol fut, par heure, de 464,51 en moyenne (463,26 — 1° essai; 465,46 — 2° essai) pour le sol renfermant des vers de terre et de 181,96 en moyenne (180,53 — 1° essai ; 183,39 — 2° essai) pour le sol dépourvu de lombries. Il résulte avec évidence de ces chiffres que l’état mécanique du sol est modifié par les vers de terre dans un sens favorable à la croissance des végélaux, parce qu'ils provoquent la formation des grumeaux du sol et le rendent plus facilement perméable à l'air et à l’eau. L'importance de ce fait frappe encore davantage si l’on con- sidère que c’est précisément dans ces localités où les vers existent en abondance (stations humides) qu’une plus forte proportion d’air coincidant avec une diminution correspondante dans la faculté d’im- bibition est très utile pour la décomposition normale des matières organiques (érémacausis). L'influence des animaux sur la destruction de ces substances et la formation de l’humus paraît être beaucoup plus active dans les pays chauds que dans la zone tempérée. Ainsi C. KELLER * rapporte qu'à Madagascar les vers de terre et le Geophagus Darwinii dé- ploient une activité extraordinaire, si bien que la terre rejetée par les vers atteindrait annuellement en chiffres ronds la somme de 1 mil- 1. Forschungen auf dem Gebiele der Agrikulturphysik, vol. X, 1887, p. 203. 2. C. Kezzen, Humusbildung und Bodencullur unter dem Einfluss lhierischer Thätigheit. Leipzig, 1887. V. aussi P. E. Muzer, Studien uber die nalurlichen Humusformen. Berlin, 1587. 64 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. liard et demi de mètres cubes. A l’île de la Réunion, d’après le même auteur, le travail des vers de terre n’est pas si frappant qu'à Mada- gascar ; mais, par contre, les Julides (Julus corallinus) doivent avoir une grande part à la formation de l’humus. Celui-ci, du reste, se trouve déjà tout préparé, sous les tropiques, dans une large mesure, à la surface du sol, surtout par les fourmis qui attaquent les arbres vaincus par leurs concurrents dans la lutte pour l'air et la lumière, les transforment en humus et fournissent ainsi au sol de nouvelles sour- ces d’alimentation. D’après CG. KELLER, c’est aux crustacés que revient la première place dans la formation de l’humus sur les récifs de coraux et sur les plages. Enfin, n'oublions pas de rappeler que les animaux plus élevés en organisation qui vivent dans le sol lui donnent en fouissant et creu- sant leurs galeries une perméabilité qui active la décomposition des matières organiques. CHAPITRE IV MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES Les organismes inférieurs qui ont été trouvés Jusqu’ici dans les restes animaux ou végétaux en train de s’altérer et qui intervien- nent, soit directement, soit indirectement, dans leurs processus de décomposition, se rangent très naturellement en trois groupes prin- Cipaux : Le premier comprenant les Hyphomycètes (champignons propre- ment dits ou Fungi) ; Le second, les Blastomycètes (Levures) ; Le troisième, les Schizomycètes (Bactériacées). Un quatrième groupe, celui des Myxomycêtes, est sans grande importance au point de vue qui nous occupe ?. {. Pour la rédaction de ce chapitre, on a utilisé surtout les ouvrages suivants : C. v. NAceur, Die niederen Pilze. München, 1877. À. DE Bary, Vorlesungen über Bacterien. Leipzig, 1885. À. ve Bary, Vergleichende Morphologie und Biologie der Pilze, Mycelozoen und Bacterien. Leipzig, 1884. ° O. Brerezp, Botanische Untersuchungen üwber Schimmelpilze, I-IV. CG. Fiôcce, Die Mikroorganismen. Leipzig, 1886. W. Zorr, Die Spaltpilze. Leipzig, 1885. W. Zorr, Die Pilze in morphologischer, physiologischer, biologischer und sysle- matischer Bezichung. Breslau, 1890. E. Kramer, Die Bacteriologie in ihren Beziechungen zur Landwirtschaft. Wien, 1890. G. FRANKEL, Grundriss der Bacterienkunde. Berlin, 1890. C. Gunther, Einführung in das Studium der Bacteriologie. Leipzig, 1891. J. Eisexsenc, Bacleriologische Diagnostik. Hamburg und Leipzig, 1891. 2. À. DE Bar, Vergleichende Morphologie und Biologie der Püilze, elc. Leipzig, 1884, p. 453. MATIÈRES ORGANIQUES. 5 66 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 1. — Hyphomycètes. Les Champignons proprement dits ou Hyphomycètes se compo- sent tout d’abord de filaments fins (hyphes) richement ramifiés, ré- pandus dans le substratum ou s’élevant en partie au-dessus. Ils ont la forme cylindrique et se divisent par des parois transversales en cellules longuement étirées munies d’une membrane tendre, sans structure, et d’un contenu protoplasmique. Ce dernier remplit uni- formément la cellule ou bien se creuse de vacuoles remplies d’eau et d'autant plus nombreuses que la cellule est plus âgée. La crois- sance des hyphes est terminale; le sommet progresse constam- ment, puis, à une cerlaine distance de lui, se forment successi- vement de nouvelles parois transversales ; les choses se passent de même pour les ramifications qui naissent par bourgeonnement latéral. L'ensemble des filaments s'appelle le thalle. Les hyphes répandus dans le substratum sont les organes destinés à absorber les matières nutritives et à les rendre assimilables ; ils constituent le mycélium. Celui-ci est de consistance floconneuse ou forme chez beaucoup d'espèces des lames parenchymateuses ou des cordons fibreux ou encore, dans certaines circonstances, des ren- flements globuleux qu’on appelle sclérotes. Sur les filaments qui proéminent à la surface du mycélium (fila- ments fructifères) et qui forment des corps reproducteurs, quand ils sont nombreux et serrés, se développent, et de façons bien diverses, les organes de reproduction du champignon, les spores. Sous ce rapport comme sous celui de la dissémination des spores, on dis- lingue : a) Des formations intercalaires : sur les hyphes en croissance se séparent certaines cellules qui ont une forme spéciale et se transfor- ment en spores ou en cellules-mères des spores. Ces productions s'appellent souvent des gemmes ; b) Des formations acrogènes, celles où les hyphes fructifères se divisent par des cloisons transversales et fonctionnent comme spores. Les pédicelles minces naissant chez beaucoup d’espèces à l’extré- e x 1. . MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES,. 67 mité des cellules fructifères (basides) et supportant les spores s’ap- pellent des stérigmates. Il se sépare une seule spore par formation d’une cloison transversale, ou plusieurs naissent en chapelet. La mise en liberté des spores a lieu soit par destruction des supports, soit par leur étranglement, soit par projection. Les spores qui se forment de celte manière s'appellent basidiospores, acrospores ou conidies ; c) Des formations endogènes, quand les spores naissent à l’inté- rieur de cellules-mères dont la paroi persiste, comme sporange, jusqu’à la maturité des spores. Ces cellules-mères sont le plus sou- vent acrogènes. Les spores y naissent par partition du protoplasma sans cloisonnement préalable. Quand les sporanges sont utriculaires ou claviformes, on les appelle asques ; ces asques contiennent en général huit ascospores. Ils se for- ment souvent au fond de petits réceptacles fructifères globuleux ou elliptiques (périthèces). Les spores sont mises en liberté par l’ouverture ou la gélification du sporange ou bien encore une grande partie du contenu est pro- jetée avec force par une fente en entraïnant les spores (éjacu- lation) ; d) Souvent il y a une sorte de fécondation sexuée qui précède la formation des spores. Elle consiste soit en ce qu’on nomme copula- tion où deux hyphes développent deux protubérances opposées qui se touchent et, après résorption de la membrane séparative, forment une zygospore, soit dans la production d'organes spéciaux, l’un mâle, l'autre femelle. Ce dernier (oogone) est installé en forme de grosse cellule sphérique sur un filament mycélien. L’organe mâle ou anthé- ridie consiste en une grosse cellule claviforme qui se colle à l’oogone en se séparant par une cloison de son hyphe de support ou qui pousse dans l’intérieur de l’oogone un tube fécondateur. Après la fécon- dation, il se forme dans l’oogone des spores rondes pourvues d’une membrane (oospores). Les spores sont des cellules ordinairement simples, parfois com- posées, de formes diverses (globuleuses, ovales, en bâtonnet), dont la membrane comprend une couche externe (épispore) et une couche interne (endospore) et dont le contenu est du protoplasma renfer- 63 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. mant des gouttes d’huile. Elles servent à la multiplication du cham- pignon en développant sur un substratum approprié un ou plusieurs tubes germinatifs dont naîtra le mycélium. Parfois la spore se trans- forme en cellule-mère de nouvelles spores (sporange). Pour le but qu’on se propose ici, il suffira de décrire quelques- uns des champignons les plus répandus dans le sol et dans les débris végélaux ou animaux en décomposition. a) Mucor. Les Mucorinées sont très largement répandues et forment sur les matières en décomposition des revêtements blancs ou bruns consis- tant en un mycélium tendre fortement ramifié (fig. 4, 3) et en fila- ments fructifères verticaux (3, b) terminés par un sporange glo- buleux (3, c, el 4). La cloison de base de ce sporange fait hernie dans l’intérieur en forme d’un tube conique qu’on appelle la colu- melle (4, b). La membrane du sporange (4, c) est hérissée de pointes cristallines d’oxalate de chaux. Dans la formation des spores (4, d) une partie du protoplasma reste inutilisée et se transforme par la suite en ce qu’on appelle la matière interstitielle, masse géla- tineuse se gonflant fortement dans l’eau. La membrane sporangiale revêtue d’une croûte calcaire est de la cellulose modifiée qui se gonfle aussi beaucoup dans l’eau et, agissant dans le même sens que la matière interstitielle, fait éclater la croûte calcaire et projette les spores. Dans beaucoup d’espèces, on a constaté des bourgeons sur le mycélium et même sur les tubes sporangifères ; ils se forment d’or- dinaire quand le substratum est épuisé. Dans les dissolutions sucrées les spores de certaines espèces développent un mycélium agissant comme ferment (M. racemosus, circinelloides, ereclus, spinosus, fragilis, Mucedo). M. Mucedo L. (Gg. 1) est une des mucorinées les plus répandues et se rencontre sur toutes les substances albuminoïdes. Les hyphes fructifères incolores ont une longueur de 1 à 13 cen- timètres. Les sporanges vont du jaune-brun au noir et leur membrane est lisse ou garnie de pointes serrées d’oxalate de chaux. Les spores MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 69 sont ellipsoïdes avec une membrane hyaline sans sculplure et un contenu jaunâtre : longueur — 7-11 p., largeur — 4-6 y. F1G. 1. — Mucor Mucedo L. (d’après BREFELD) !. i. Spores. — 2. Germination des spores : &, distension de la spore; b et ce, développement du tube germinatif. — 3. Mycélium provenant de la spore à : b, tube sporangifère terminé parle spo- range c ; d, tube sporangifère en formation. — 4. Tube sporangifère : a, avec sporange; b, colu- melle ; c, membrane du sporange; d, amas des spores. Dans les excréments on trouve de-ci de-là, dit BREFELD, des zygospores qui atteignent un volume considérable (fig. 2). M. racemosus FRESENIUS est surtout répandu sur les substances riches en hydrates de carbone. Les hyphes fructifères sont généra- lement ramifiés, plus ténus et plus courts que dans l’espèce précé- 1. Les nombres mis entre parenthèses dans les figures expriment le grossissement linéaire. 70 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dente, Les sporanges globuleux ont 30-34 y. de diamètre ; ils vont du jaunâtre au brun clair. Les spores, ellipsoïdes ou sphériques, inco- lores et sans sculpture, ont 5-8 a de long e1 4-5 y de large. F1@. 2. — Mucor Mucedo L. (d'après BREFELD). 1 représente la première phase de la conjugaison; bb, les deux rameaux de conjugaison dont les cellules qui doivent former l'œuf a a sont déjà séparées. — 2. État plus avancé : a, fusion des cellules, grossissement de l’œuf, sur lequel on voit nettement les épaississements verruqueux ec; bb, les deux suspenseurs. — 3. Zygospore mûre 4, avec ses deux suspenseurs bb, — 4. Zygos- pore germant après éclatement de l’exospore ; a, zygospore: bb, suspenseurs ; ce, endospore poussant son tube germinatif d, dont le premier filament e reste stérile; une branche latérale f s’en sépare par une cloison et porte un sporange g. Sur les vieux mycéliums on trouve d’ordinaire un abondant bour- geonnement intercalaire et terminal (fig. 3, 3-0). Ges cellules de bourgeonnement développent dans des circonstances favorables des mycéliums qui, maintenus dans l'air humide, donnent de très petits tubes sporangifères avec de minuscules sporanges. Dans des solu- tions nutritives sucrées, sur les tubes germinatifs développés soit par 1443 MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 71 les gemmes, soit par les spores et qui, dans ces conditions, sont très F1G. 3. 1. a-e, développement du mycélium de Mucor racemosus dans une décoction de jus de pruneaux, à partir de la spore a, en bourgeons courts, globuleux. — 2. Mycélium de Mucor racemosus pro- venant de la spore s dans une solution sucrée étendue; ce mycélium est formé de cellules en tonnelets munies d’articles bourgeonnants globuleux. — 3-5. Formation des bourgeons chez le Mucor racemosus. — 3. Filament sporangifère avec six bourgeons g. — 4. Filament mycélien avec deux courts rameaux latéraux terminés chaèun par un bourgeon globuleux. — 5. Filament mycélien avec trois bourgeons intercalaires. ( D'après ZoPrF.) courts, il se produit des cellules en forme de levures (fig. 3) qui 72 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. provoquent aisément la fermentation alcoolique. Les bulles d’acide carbonique qui se dégagent portent bientôt à la surface les cellules de levure, où elles constituent alors un mycélium normal. Ce pro- Q fe \ ZA D, , \ 4 (60) \ F1G. 4. — Mucor stolonifer (d'après DE BARY). 1. +, extrémité du stolon; ss, deux stolons de second ordre; p, tubes sporangifères ; #, rameaux radicellaires (nn peu grossis). — 2. z, zygospore avec ses suspenseurs d’où naît un tube sporan- gifère p, dont le sporange est dessiné schématiquement en coupe longitudinale, cessus paraît donc être un moyen pour le champignon de revenir à ses conditions biologiques normales. M. slolonifer (Rhizopus nigricans Eur.) [fig. 4]. Du mycélium naissent des tubes simples, arqués, qui s’inclinent bientôt à l’ex- trémité et ressemblent aux stolons des plantes supérieures ; ils se: fixent à leur extrémité en développant de courts rameaux radicel- laires en rosette qui pénètrent solidement dans le substratum. Des points où se trouvent ces sortes de crampons s'élèvent deux ou plu- MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 73 sieurs tubes sporangifères portant à leur extrémité les sporanges globuleux (fig. 4, 1). De chaque rosette s’élancent à nouveau 1-2 stolons qui se comportent comme les précédents. Il se forme ainsi tout un système de stolons, de crampons et de groupes de sporanges. Les sporanges sont noirs et verruqueux, les spores brunâtres et presque sphériques, de 10-20 & de diamètre. Le champignon forme aussi des zygospores (fig. #, 2) de la même manière que le M. Mucedo. La zygospore, en forme de boule ou de tonneau, possède une enveloppe très épaisse formée de plusieurs couches dont l’extérieure est grossièrement verruqueuse. A la matu- rité, c’est une cellule noire, remplie d’un protoplasma épais, riche en matières grasses, et placée entre deux suspenseurs qui s’accrois- sent en même temps et finalement se dessèchent. Ces mêmes fila- ments qui forment les zygospores portent souvent, en outre, des groupes de tubes sporangifères. Les autres espèces de mucorinées n’offrent plus aucun intérêt à notre point de vue à cause de leur rareté. b) Aspergillus. Les filaments conidifères qui surmontent le mycélium sont habi- tuellement unicellulaires, de 0"",5-1""%,5 de longueur et renflés en tête à leur extrémité. Sur cette tête naissent de nombreux petits stérigmates claviformes disposés en ombelle et dont l'extrémité pro- duit une succession de conidies rondes ou un peu ovales, 1-6 w de diamètre. Dans beaucoup d’espèces, ce mycélium, qui forme les filaments conidifères, produit normalement un périthèce dont la formation tantôt ne subit pas d’arrêt, tantôt passe par une phase de repos sclérotique pour s'achever plus tard. Les périthèces débutent par une bifurcation ténue, indislincte à l'œil nu, qui, après un allongement bientôt terminé, s’enroule en tire- bouchon sur 4-6 spires en général. Les spires se rapprochent de plus en plus jusqu’à ce qu’elles se touchent, si bien que la partie terminale se transforme en une vis creuse. Il se passe alors dans et 74 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, sur ce corps spiralé des modifications compliquées dont la descrip- tion serait trop longue et dont il ressort seulement qu’elles sont un processus de conjugaison sexuelle. A la suite de ces transformations, le corps spiralé donne rapidement naissance à un périthèce globu- leux formé d’une paroi mince (une seule assise de cellules délicates) et d’une masse épaisse de cellules solidement reliées. Par le grossis- F1G. 5. — Développement de l’Aspergillus glaucus (d'après DE Baryx et Zopr). 1. mm, filaments mycéliens ; e, filament conidifère dont les conidies sont tombées; p, périthèce ; Jf, ébauche d’un périthèce, — 2-3. Filaments conidifères avec leurs basides et leurs conidies. — 3. Plus fortement grossis. — 4, Ascogone entouré par les pollinodes. — 5. Jeune périthèce (coupe longitudinale) ; w, assise qui donnera la paroi; f, tissu de remplissage; a, ascogone. — 6. Une asque avec ses spores, — 7. Conidie en germination. — 8. Ascospore en germination, sement de ces diverses régions, ce tubercule croit assez pour être à la maturité nettement visible à l'œil nu. La surface externe de son enveloppe acquiert une assez grande solidité et une teinte d’un jaune vif. Les cellules internes deviennent pour la plupart des asques en s’isolant des cellules voisines, en prenant une forme largement ova- laire ; chacune contient huit spores qui remplissent aussitôt toute la cavité de l’asque. A la maturité, sa paroi se dissout, celle du périthèce 4 Le MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 15 se rompt et par les fentes irrégulières qui s’y produisent les asco- spores rondes et toujours incolores sont mises en liberté. Aspergillus glaucus DE Barx (fig. 5). Se présente sous forme de revêtement floconneux, d’abord d’un blanc pur, se recouvrant peu à peu d’un bout à l’autre de petits capitules finement pédicellés gris ou noirs. Conidies rondes, verruqueuses ou rugueuses, de 9-15 y. de diamètre. Très commun. Aspergillus flavus DE Bary. Masse des spores d’un beau jaune d’or, jaune verdàtre, ou brunâtre. Conidies globuleuses, de 5-7 y de diamètre, avec une endospore finement verruqueuse. Forme des sclérotes tuberculeux, noirs, jaune rougeâtre sur la surface de sec- tion et mesurant environ 0"",7. Peu abondant. Aspergillus niger Van TiEGuHEM. Filaments conidifères ayant parfois plus d’un millimètre de haut avec des capitules d’un noir brun et des conidies rondes de 3-5 à 4-5 x, à épispore verruqueuse, d’un violet brun. Forme des sclérotes globuleux ou cylindriques, d’un jaune brun ou d’un rouge brunâlre, mesurant 0"",5-1"*,5. Assez rare. c) Penicillium. Le filament fructifère est cloisonné et se divise à son extrémité en courts rameaux. Au bout du filament principal comme à celui des branches latérales naissent des basides sur les stérigmates desquelles les conidies se forment en chapelet. Au-dessous de ces basides, il peut s’en produire d’autres de la même manière, si bien que l’en- semble des conidies affecte la forme de pinceaux. On n’a trouvé de périthèces que chez peu d’espèces, par exemple chez le P. glaucum, où, d’après BREFELD, ils passent toujours par la phase de sclérote. Penicillium glaucum Link (fig. 6 à 8). Moisissure la plus ré- pandue, se développant sur les substances les plus diverses en revê- tements floconneux, d’abord blancs, puis glauques. Le diamètre des spores est d'environ 3,5 a. Les formes rabougries ne développent qu’un filament à l’extrémité duquel s’allonge un seul chapelet de conidies ; avec une végétation plus vigoureuse il se forme un plus grand nombre d’hyphes fructifères rapprochés en un faisceau épais (Coremium) ; à l'extrémité de ces filaments se développent, dans la 76 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. manière indiquée, des chaînes de conidies. Le périthèce affecte d’a- bord la forme de sclérotes qui, après une certaine période de repos, produisent des asques dont les spores, ellipsoïdales dans leur con- tour, sont en même tempsanguleuses et épaissies à l’exception d’une ligne longitudinale médiane ; elles ont 5-6 y de long, 4-4,5 pu de large. D’après BREFELD, le sclérote naît de la façon suivante: Sur un F1G. 6. — Penicillium glaucum Link (d’après BREFELD). 1. Spores. — 2. Germination d’une spore : a, spore ; b, tube germinatif. — 3. Fructifications : a, filament fructifère ; b, cellule terminale ; e, rameaux latéraux; e, stérigmates supportant des chapelets de spores, f. filament mycélien il se forme un ascogone en spirale (fig. 7, 1) qui est bientôt recouvert par des filaments adventifs naissant de la base et du mycélium et s’'agglomérant plus lard avec leurs ramifications en une pelote serrée. Tandis que cette enveloppe allonge et épaissit ses éléments périphériques, se constituant ainsi en un corps dur, l’ascogone grandit, se ramifie el ses branches pénètrent en tous sens dans le tissu médian formé de cellules à parois moins épaisses (fig. 7, 2-3). Quand on place les sclérotes mûrs sur du papier à filtre humide les filaments de l’ascogone se développent, se ramifient, poussent MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. T7 d’épais rameaux latéraux dont les branches deviennent finalement des asques (fig. 7, 4-5). En même temps se sont développés de fins et minces filaments, branches latérales des hyphes de l’ascogone, qui Ÿ À Ni Æ (5 ( QS 77 “À S S SS ae 7) PA 1] De Le DS P) i D” se | [ EC) es DS RS a À pue es RQ (A \. SS LAS EP qe REED rajeses ar RSC Re 72 SAS ECS N eg" ge rS9, CAS [Ke AR LS © at « à LC» A GEL 72 RE su ÿ ñ 5 L Ÿ CA a "> ASE CS ce OST 2 ve 4 a RE \ /830) Fi@. 7. — Penicillium glaucum Link (d'après BREFELD). 1. Organes sexuels contournés en spirale et qui se sont probablement fécondés ; l’ascogone et le pollinode proviennent d’un hyphe épais qui s’est divisé. — 2. Les mêmes au début de la forma- tion du fruit; a, ascogone se développant ; b, filaments stériles en train de le recouvrir. —3. Jeune fruit (selérote) : a, ascogone ; b, tissu stérile intérieur ; c, tissu stérile extérieur. — 4. Ascogone plus développé: a, filament de l’ascogone; b, son bourgeon qui doit produire les asques; c, hyphes. — 5. État plus avancé (mêmes lettres que 4). pénètrent dans le tissu stérile et amènent sa dissolution. Ces fila- ments fins apportent aux hyphes de lascogone les éléments nutritifs empruntés à ce tissu stérile. La dissolution finit par progresser au point qu’il ne reste plus que l’écorce périphérique, l’intérieur étant entièrement rempli par la masse des spores. 78 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ZukaL est arrivé dans ses recherches à des résultats essentielle- ment différents, tant sur la naissance du sclérote que sur les filaments de l’ascogone F1G. 8. — Penicillium glaucum Linx (d’après BREFELD). = . Sommet d’un filament ascophore. Fragment d’un filament en fructification dont les branches latérales ascophores sont mûres et en partie tombées. —- 3. Ascospores vues de côté; bet c, germination. qui, d'après lui, ne proviennent pas d’un seul, mais de plusieurs organes initiaux. d) Erysiphe (Oidium). Les Erysiphe s'installent d'ordinaire sur les plantes vivantes et y forment le tapis de moisissure connu sous le nom de Blanc’; il n’y à à citer ici comme saprophyte que lOi- dium laclis. On désigne sous le nom d’oi- dium la forme conidienne des Erysiphe. L'Oidium lactis Fres. (fig. 9) est extraor- dinairement répandu ; il est particulièrement abondant sur le lait acide, les excréments animaux, le fumier et dans le sol (ADAMETZ). [l forme des filaments solides, ramifiés dans un plan horizontal d’où s'élèvent les conidio- F1@. 9. — Oidium laetis FRBS. 1H (d'après FLÜGGE). Hyphe fructifère vieux. — 2. Plus jeune : m, mycélium ; s, chapelet de spores à côté duquel l’hyphe fructifère À se forme par ramificat:on ; a, sup- ports des anciennes spores. phores. Ceux-ci, après avoir atteint une certaine longueur, cessent 1. Le nom vulgaire allemand est Mehlthau (rosée de farine). MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 19 de croître et, dans toute leur étendue, sauf à leur base, se divisent en une rangée d'articles cylindriques une fois ou deux aussi longs que larges. Chacun représente une conidie. Bientôt après leur ébauche, elles se séparent, d’abord incomplètement, de sorte que le chapelet fait des zigzags, puis elles s’isolent entièrement. De temps en temps apparaît une ramification, tandis que l’hyphe fructifère con- tinue à croître vers le haut à côté de la chaîne de spores qui vient de se former. Les spores ont 7,7-10,8 &.. Sur un substratum conve- nable, elles germent vite et donnent aussitôt naissance à un mycé- lium qui produit à nouveau ces mêmes conidies. Les périthèces ne sont pas encore connus. C’est pourquoi l'attribution de cette forme oïdium à une espèce déterminée de champignons n’a pu être faite jusqu'ici, bien qu’on doive l’admettre avec assez de probabilité. Au groupe des moisissures appartient encore toute une série de formes saprophytes, mais qui ne sont pas aussi généralement répan- dues que les précédentes et ne se rencontrent que sur certains subs- tralums. Parmi les champignons habitant les excréments citons : Pilobolus cristallinus Tone, Mortierella Rostafinskii BREFELD, Coprinus stercorarius BuLLIARD, Sordaria minuta FuckeL, S. Bre- feldii Zuxar, S. curvula DE Bary, S. decipiens WiNTER, S. pleio- spora, S. Wiesneri, etc., Thamnidium elegans Laxx, Ascobolus pul- cherrimus CROUAN, A. denudatus FR., A. furfuraceus PERSOON, Syncephalis cordata Van TieGueM et LE Monnier, Ascodesmis nigri- cans VAN TIEGHEM, diverses espèces de Saccobolus”. Les parties mortes des plantes sont aussi habitées par de nom- breuses espèces de champignons, ainsi que les insectes morts, les vers, elc. 2. — Levures. Les Levures ou Saccharomyces consistent en petites cellules mi- croscopiques, se multipliant par bourgeonnement. La membrane se gonfle à une ou aux deux extrémités de la cellule; ce renflement 1. Voir W. Zorr, Die Pilze in morphologischer, physiologischer, biologischer ul syslematischer Beziehung, Breslau, 1890, 80 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. se remplit d'une partie da protoplasma de la cellule-mère ; quand il a pris sa forme et sa grosseur, il se sépare de la cellule-mère par une cloison transversale. Les levures proprement dites (Saccharomycètes), en dehors de ce thalle bourgeonnant, peuvent, dans certaines conditions, comme l'ont montré les recherches de Hansen”, former aussi du vrai mycé- lium ramifié et, surtout en présence de l'air, se multiplier par for- mation de spores à l’intérieur de cellules (ascospores). Donc, suivant les circonstances extérieures, la multiplication de ces organismes se fait de deux façons, par bourgeonnement ou par formation de spores. On n’a pu jusqu'alors arriver à déterminer exactement les espèces qui diffèrent entre elles au point de vue morphologique et biologique, parce qu’on n’avait pas de méthode de cullure permettant de séparer sûrement chaque espèce. Parmi les espèces connues et contribuant à la décomposition des matières organiques dans le sol (d’après ADAMETz), mentionnons jeté Saccharomyces cerevisiæ (le- vure de bière). Cellules sphé- riques ou ovales, de 8-9 p, entourées d’une membrane contenant un protoplasma fine- ment granuleux avec suc cellu- laire ; les vacuoles se trouvent surtout dans les cellules adultes. Le noyau cellulaire est relati- vement gros. Les ascospores, sphériques, fortement réfrin- gentes, ont 2, 2-6 p.. Elles sont F16. 10. — Saccharomyces cerevisi® au nombre de 2-4, parfois de CES 5-6 et même d’une seule dans 1: Bourgeonnemont.— 2. Formadion de or ne ccllule-mère (fig. 10). 1. E. G. Hansen, Recherches sur la morphologie des ferments alcooliques. Ré- sumé du compte rendu des travaux du laboratoire de Garlsberg. Vol. Il, 1886, p. 106. ts" ce dé ee MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 81 Saccharomyces ellipsoideus (levure ordinaire du vin). Cellules elliptiques d'environ 6 y. de longueur, isolées ou en courts chape- lets ramifiés. Spores de 3 à 3,9 p., naissant, comme dans l’espèce précédente, ordinairement à 2-4 dans une cellule-mèêre. Agent des fermentations spontanées, no- tamment de celles du moût de vin et par suite universel- lement répandu (fig. 11). Saccharomyces glutinis (levure rosée, fig. 12). Cel- dd 259 lules globuleuses-ovales ou ne) Re : Rs PRE , Saccharomyces ellipsoideus Saccharomyces glutinis en cylndi es cours ? longueut (d’après DE BaArRY). (d’après Coux). 5-11 y; largeur 4 pu ; isolées ou jumellées. Membrane et contenu incolores à l’état frais. For- mation des spores inconnue. Forme des revêtements mucilagineux couleur de rose sur les tranches de pommes de terre et sur la géla- tine nutritive. HANSEN distingue trois espèces de levures rosées dont une forme des ascospores. On ne sait rien de la présence desautres espèces connues (Saccha- romyces conglomeratus, S. apiculatus, S. sphæricus, S. mycoderma, S. albicans, S. Pastorianus) sur les matières organiques en décom- position. Il existe, en outre, des fermes qui ne sont pas encore bien connues. Très voisins des Saccharomycètes sont encore certains organismes qui se trouvent soit dans l’air, soit dans le sol, sur les débris végé- {aux en décomposition, sur le fumier de vache, entre autres Monilia candida et 42 diverses espèces de Torula. Monilia candida Hansen (fig. 15). Thalle bourgeonnant très semblable à celui des Saccharomyces. Dans les va- cuoles des cellules, on voit un corpus- cule mobile fortement réfringent. En (/000) présence de l’air, il se forme une peau Frs. ar. Mae de moisissures (fleurs) d’un vert mat, formée d’abord d’un thalle bourgeonnant et de cellules isolées et MATIÈRES ORGANIQUES. 6 82 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. plus tard, d’un vrai mycélium à croissance terminale sur lequel se produisent des conidies latérales en forme de cellules de levure et des ramifications d’oïdium. M. candida fait fermenter directement le saccharose et le maltose, mais ne peut les invertir. Des Torula (fig. 14), champi- gnons très répandus, forment dans les solutions sucrées des thalles bourgeonnants comme les Saccha- romyces. Le mycélium typique et Na e rare 2 9 2 CU ainsi que la formalion de spores endogènes. Ce sont des fer- ments alcooliques. Quelques formes peuvent donner de l'invertine, mais celles qui ne peuvent pas invertir et faire fermenter le maltose paraissent être, dit Hansen, de beaucoup les plus répandues. 3. — Bactériacées. Les Bactériacées forment un immense groupe d'organismes très petits, unicellulaires, globuleux ou filiformes, se multipliant surtout par partilion, vivant sur les animaux ou végétaux morts ou vivants el amenant dans leur substralum, par leur nutrition et leur extraor- dinaire pullulation, les modifications chimiques les plus profondes. D’après leurs formes très différentes, on distingue essentiellement les groupes suivanis : Micrococcus, consistant en cellules sphériques ou ovales qui s’appellent Streptococcus quand elles sont disposées en rosetle et Staphylococeus si elles sont accumulées en masses irrégulières ; Bacillus, formant des bâtonnets plus où moins longs qu’on dé- signe sous le nom spécial de Clostridium quand ils sont fusiformes, renflés au milieu. Dernièrement on a proposé d'appeler Bacterium les bâtonnets courts et Bacillus les plus longs, mais on y a renoncé à cause de l'insuffisance de ce caractère. Par un plus fort allonge- ment les Bacillus forment des filaments véritables qui, en se juxta- posant suivant la longueur, donnént des cordons visibles à l'œil nu. Ces formes s'appellent des Leptothrix. On n’y à pas observé de rami- MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 8 ©2 fications semblables à celles des hyphes des moisissures. On désigne sous le nom de Spirillum ou de Spirochæte les formes enroulées en -spirale. Quand les éléments sont simplement courbés, on les appelle Vibrio. Assez souvent les bactéries se présentent sous forme de spores (cellules sphériques ou ovales), qui servent à la reproduction et donnent toujours naissance à l'organisme dont elles proviennent. Dans les solutions nutritives épuisées et sous l’influence aussi d’autres conditions, les bactéries peuvent, en outre, prendre diverses autres formes anormales provoquées par leur état pathologique (formes d'involution). Beaucoup de bactéries ont pour caractère de ne posséder qu’une seule forme végétative; chez d’autres, 1l y en a plusieurs que le même individu parcourt dans son développement suivant un ordre déterminé. Suivant l’âge et les conditions de nutrilion, les diverses espèces subissent des modifications, mais qui ne vont pas jusqu’à altérer les caractères essentiels. Les cellules des bactériacées sont formées d’une membrane qui, chez quelques espèces, est imprégnée de substances colorantes et parfois entourée d’une enveloppe gélatineuse moulée sur la mem- brane et d’un contenu proloplasmique où l’on observe souvent de petites gouttelettes d'huile. Quelques espèces et formes végélalives sont toujours immobiles, ne montrant de mouvement vibratcire que par suite de courants dans la liqueur où elles se trouvent ; d’autres sont tantôt immobiles, tantôt vivement agilées, offrant une rotation aulour de l’axe longi- tudinal ou des courbures ou des étirements, ou bien elles se meu- vent à l’aide d’un ou plusieurs flagellums. A l’état de repos, les bactéries se présentent suit isolées, soit en filaments, soit en masses dont les cellules sont reliées par leur en- veloppe gélatineuse confluente et qu’on appelle des Zooglées. Lors de la multiplication par division, la cellule croit en longueur, puis montre un étranglement dans son milieu et finalement les deux _moitiés se séparent. Chacune peut subir à son Lour de nouvelles partiions ou bien elles 84 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. forment des chapelets, des filaments apparents. C’est seulement chez quelques Micrococcus (Sarcina) qu’on a observé une partition simul- tanée ou successive dans deux ou trois direclions différentes, don- nant naissance à des paquets de 4 à 8 cellules. A côté de la multiplication par division il y a chez beaucoup de bactéries (bacilles et spirilles) une reproduction par spores. Leur mode de formation est très variable. Il peut se faire que les bacilles s’accroissent beaucoup en longueur et qu'après division du contenu en cellules dans l’ordre linéaire habituel, il se forme dans chacune une spore ronde qui devient libre par dissolution des filaments. Dans d’autres cas, les bacilles s’épaississent, prennent une forme en fuseau ou en ellipse ou en têtard ; leur contenu se trouble, une grosse goutte réfringente se sépare pour devenir bientôl une spore. in outre, sans qu’il y ait de modification appréciable dans la cel- lule, il peut y naître deux, trois ou plusieurs petils points ronds el brillants qui représentent les spores. Enfin, il y à aussi des cas où les spores se forment sur un des pôles de la cellule ou sur les deux. On distingue, outre cette multiplication par endospores, une re- production qu’on peut appeler par arthrospores et qui est moins fréquente. Certains éléments d’un chapelet ou d’un amas de cellules bactériennes ont plus de vitalité que les autres ; ceux-ci périssent, tandis que les premiers servent à la multiplication. La plupart des spores formées par mode endogène ont le caractère de spores durables (Dauersporen) plus résistantes que les cellules végétatives de la même espèce. En thèse générale, leur capacité de résistance est grande lorsqu'elles sont desséchées à l'air ; à cet. élat, elles conservent assez longtemps leur faculté germinative ; mais vis-à-vis des températures élevées leur résistance est très variable. Les spores durables des bacilles supportent généralement sans périr une température de 80°-100°, qui suffit à tuer les spores des Micro- coccus et des Spirilles. La résistance des spores aux agents chimiques est aussi très variable. Les spores ne germent qu'après un assez long repos. Ordinaire- ment une papille se forme en donnant ensuite un petit bâtonnet ou bien le tube germinatif proémine dans le sens de l’axe longitudinal es io PT CC, MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 835 de la spore, l’endospore devenant la membrane du tube germinatif, tandis que l’exospore fracturée gît quelque temps encore à côté des bâtonnets de nouvelle création. On emploie pour la classification des bactéries surtout leurs carac- tères morphologiques et biologiques. Quatre grandes divisions ont été d’abord établies d’après la forme et suivant qu’il n’y a qu’une seule forme végétative ou un cycle déterminé de ces formes, fait caractéristique d’un assez grand nombre de bactéries. A la première appartiennent toutes les espèces qui ne se présen- tent que sous la forme de Wicrococeus ; la seconde division comprend les bactéries en bâtonnets ou Bucilles, la troisième les formes en spirale ou Spirilles ; dans la quatrième on range toutesles bactéries dont le cycle de développement offre les formes végétatives les plus diverses. Les espèces décrites ci-après sont celles qui, d’après les recherches de L. ApAMETz, C. FLÈGGE, E. KRAMER, P. FËLLES et autres, ont été trouvées principalement dans le sol, dans les excréments de l’homme et des animaux et dans les matières animales et végétales en décom- position. Ce résumé n'a pas la prétention d’être complet ; 1l a essen- tiellement pour objet de donner des indications générales et de pousser à une étude plus approfondie de la bactériologie. Dans ce but et pour ne pas étendre cette exposilion plus qu’il ne convient, on ne sisnalera pas les faits de végétation sur les divers substratums, faits caractéristiques pour nombre d’espèces ; on se bornera à indi- quer l’action de chaque espèce sur la gélatine ainsi que la pro- duction des matières colorantes et l’on se servira des abréviations suivantes : PRE — liquéfie la gélatine. N. 1. g. — ne liquéfie pas la gélatine. P.c. — produit une matière colorante. N. p. c. — ne produit pas de matière colorante. a) Micrococcées (coccacées). Ces organismes sont formés de cellules sphériques ou ovoïdes qui ue se multiplient que par division et n’ont aucun mouvement spon- 86 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tané. Quand les cellules nées d’une partition restent accolées, on a un Diplococcus. Elles peuvent se séparer ou rester unies en consti- tuant ce qui a été désigné plus haut sous les noms de Streplococcus, Slaphylococcus, Zooglée et Sarcine. La zooglée s'appelle Ascococcus quand la gelée intercellulaire est très ferme et que la masse. apparaît cartilagineuse et comme con- densée. On la nomme Clalhrocystlis dans le cas où le mucilage se dissout dans la masse et où 1l ne reste plus qu’une couche extérieure entourant un espace rempli par la solution. Micrococcus aurantiacus, Gonx (Bacteridiumaurantiacum, Scurô- TER). Cellules rondes, incolores, fortement réfringentes, de 1,2- 1,4 p. Dans la solution nutritive de Coux forme à la surface un voile jaune d’or épais de 2-3 millimètres. Pigment soluble dans l'eau. Par modification des couches externes de la membrane, il se produit une malière intercellulaire mucilagineuse englobant les cellules (zooglée). Immobile. — N. 1. g. — P. c. Micrococcus candicans, FLüGce. Cellules rondes, assez grosses, associées en masses irrégulières de 0"",4-0%% 5. Immobile. — Nal.-g. NN, pc. Micrococcus candidus, Coux. Cellules globuleuses, fortement réfringentes, de 0,5-0,6 11. Forme des diplococcus, des tétrades et des zooglées. Immobile. — N. I. g. Micrococcus cereus albus, Passer. Coccus de 1,2 x isolés ou en amas, parfois rangés aussi en chaînes courtes. Immobile. — N. 1. g. — N.p.c. Micrococcus cinnabareus, FLÜGGE. Grands coccus sphériques, souvent en forme de diplococcus et de tétrades. — N. I. g. — P. c. Micrococcus fervidosus, Apamerz-WicaManx. Coccus petits, ronds, de 0,6 p., rangés en partie en diplococecus, en partie en petits amas. Immobile. — N.I.g.— N.p.c. Micrococcus flavus desidens, FLüGGg. Petits coceus, le plus sou- vent en diplococcus, mais aussi en amas triangulaire ou en courts chapelets. Immobile. — L. g. — P. c. Micrococcus flavus liquefaciens, FLÜGGE. Coccus assez gros, asso- ciés le plus souvent par deux ou trois, ou en amas. Sans mouvement. L..g. — P, c. she MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 87 Micrococcus luleus, Coux (Bacleridium luleum, ScnrôTeRr). Coc- eus elliptiques, fortement réfringents, tantôt isolés, tantôt en diplo- coccus. Longueur : 1,0-1,2 pu. Largeur : 0,8-0,9 y. Le pigment jaune sécrété est insoluble dans l’eau. Forme des zooglées. Immo- bile. — N. 1. g. — P.c. Micrococcus, rouge, Mascuex. — N. 1. g. — co g: Pc RON D Micrococcus ureæ, PASTEUR, VAN TiEGHEM (fig. 19). ê : ; Cellules rondes de 0,8-1,0 y, souvent en diplococcus, , * % tétrades et en chapelets assez longs, ne liquéfiant pas % te la gélatine et se distinguant surtout par là du Wicro- (650) coccus ureæ liquefaciens, FLÜGGE. Coccus globuleux PE de 1,25-2 y, isolés ou en chaînes de 3-10 éléments pe tres et aussi en groupes irréguliers. Micrococcus versicolor, FLGGe. Coccus petits, réunis par deux ou en petits amas. — N.l.g. — P. c. Diplococcus luteus, Apamerz. Outre les diplococcus, on trouve des cellules isolées ovales de 1,2-1,3 1; cette espèce ne forme pas de tétrades, mais des chapelets de 6-8 cellules et Re produit une couleur jaune et rouge-brun. Très pes ge 8e? : [2 mobile, — L. g. — P. c. % ‘os Sarcina lulea, Scunôren (fig. 16). Cellules 9% 2399 arcina lulea, SCHRÔTER (fig. 16). cellules Ve 914 rondes de plus d’un p., se divisant dans trois plans (Eo) perpendiculaires. Les cellules-filles restent acco- rte Sarcina lées et forment des colonies semblables à des paquets portant les empreintes des liens avant servi à les ficeler. Sécrète un pigment jaune. — L. g. (d’après FLÜGGE). b) Bacilles. Les bacilles ont la forme de bâtonnets au moins deux fois plus longs que larges. Ils passent en général par plusieurs des phases précédemment décrites et ne se présentent donc pas exclusivement sous la forme bacille, qui est cependant caractéristique pour eux en ec sens qu'ils proviennent originairement de cette forme et qu’ils y retournent. On observe chez les bacilles une phase de repos, dans 88 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. laquelle ils se réunissent souvent en filaments, amas ou zooglées, ou bien une phase de tourbillonnement qui n’a pas encore été constatée dans beaucoup d'espèces. Bacillus aceticus (fig. 17) [Bacterium aceli, Kürz]. Ferment acé- tique. Dans le cours de son développement, il présente des formes très différentes : 1° la forme micrococcus ; 2 la forme en bâlonnet court; 3° la forme en bâtonnet long; 4la forme en leptothrix, qui peuvent se trouver ensemble en z00- glées sous forme de voile (mère de vinaigre). Le dia- mètre transversal des coccus et des bâtonnets est d’envi- ron 1,9 p.. Ils ont une phase de tourbillonnement. Il est remarquable et presque ca- ractéristique pour celle es- 1. État normal: a, en bâtonnets longs, courts et en pe es tsiones longs coceus ; b, en bâtonnets courts en train de se divi- et les filaments prennent sou- F1G. 17. — Bacillus aceticus (d'après Zopr). ser; c, en chaînes de coccus. — 2. Filaments avec f 3 ME F éléments anormaux fortement renflés (formes d’in- vent une forme 1r1 eguliere, volution). — 3, Amas de coccus. — 4. Amas de bâ- : se , x RErER cylindrique avec un gonfle- ment plus ou moins accen- tué. En même temps, généralement, la membrane s’épaissit un peu. Ce sont là, probablement, des formes d'involulion, mais il peut se faire qu’elles représentent des arthrospores. È PA LT TUE Bacillus acidi lactici, Hugrre (fig. 18). Fer- a | (700 ment lactique. Cellules courtes, épaisses, au LR moins de moitié plus longues que larges et Bacillus aeidilaetié vénéralement associées par deux, rarement par (d’après FLÜGGE). quatre. Longueur moyenne des bâtonnets, d’après Huepre, 1-1,7 y; diamètre transversal, 0,3-0,4 pm; mais il y a des bâtonnets de 2,8 p. Les bacilles n’ont pas de mouvement propre. La forma- tion des spores se constate facilement dans les solutions sucrées, MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 89 plus difficilement dans le lait. Elle se fait aux extrémités des cel- lules. Bacillus albus, EisexgerG. Courts bâtonnets avec les extrémités tronquées. Mobile. —N. I. g. — N.p.c. Bacillus amylobacter, VAN TiecHeM. — V. B. butyricus. Bacilles de Bienstock sur les fèces. Trouvés régulière- ment par Bienstock dans les fèces de l’homme, semblables au PB. sublilis par la grandeur et l’aspect, mais sans mou- vement propre; il y a deux espèces qui diffèrent par le développement et la forme des colonies. — N. I. g. — Déép: c. Bacillus bulyricus, COHN (Bacillus -amylobacter, VAN Tiecueu; Clostridium bulyri- cuin, PRAzMOwsKky). Ferment butyrique (fig. 19). Bätonnets de 3-10 y. de long et de 1 y ou un peu moins de large, for- mant souvent des chapelets ou des filaments non articulés en apparence. Le plus sou- vent très mobile, mais immo- bile aussi et formant des z00- glées. Au bout de quelque à (“022) F1G. 19. Bacillus butyricus (d’après PRAZMOWSEY). . Formes végétatives : &, bâtonnets courts ; b, bâ- tonnets longs ; ce, bâtonnets courbés en vibrions. — 2. Formation des spores durables : bâtonnets : bc,avant; de, pendant; f g h, après la formation des spores. — 3. Divers stades de la germination des spores, temps, les bâtennets deviennent fusiformes ou s’élargissent en têtard à une extrémité. Le diamètre transversal atteint 1,8-2,6 pour les cellules épaissies. Alors les spores commencent à se former. Spores ovoides de 2,0-2,5 y. de long et 1 x de large, deve- nant libres après dissolution de la cellule-mère. Lors de la germi- 90 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nation, le double contour de la membrane disparail à une extré- mité de la spore allongée et en ce point proémine le tube germinatif dans la direction de l’axe longitudinal de la spore. La membrane résistante de la spore ne se vide pas; elle est souvent traînée encore longtemps par le jeune bâtonnet. — L. g. — N. p.c. Le bacille producteur d'acide butyrique cité par LiBorius n'offre morphologiquement aucune différence importante avec le précé- dent. Bacillus butyricus, Huerpe. Isolé par HuePPE du lait dans cer- taines conditions sous forme de grands bacilles, ne diffère pas mor- phologiquement de celui décrit par PRAzMowsKky. Bacillus du sol, AbamETz. Bâtonnets de 2,5-3 n de long et 0,6- 0,7 y de large. Souvent en filaments de 15-20 y de long, ayant un mouvement oscillatoire à une extrémité. Les filaments âgés sont légèrement épaissis à un bout (forme d’involution). re x — L.g. —N.p.c. CA L À Bacillus candicans, FRANKLAND. Bâtonnets courts, æ % V2 à / épais, formant souvent de courts filaments. [mmo- æ ; : bile. — N. 1. g. — N.p.c. Bacillus jaune-citron, FRANKLAND. Baciths coprogenes — Bucillus coprogenes fœlidus, ScnorTELius (fig. 20). Te Bâtonnets immobiles à bouts arrondis, presque aussi (d’après FLÜGGr). à gros que ceux du B. sublilis, seulement plus petits. Formation de spores. Les spores s’accolent en ligne. A la germi- nation, l’axe du nouveau bâtonnet est perpendiculaire sur celui de la spore. Immobile. — N. I. g. sta Bacillus culicularis, TILS. REA Bacillus denitrificans I, BurRI et STUTZER PE AE (fig. 21). Bâtonnets à bouts arrondis ayant 0,75 p danse, d'épaisseur et 1,5-2,5 y. de longueur, et de 2-3 p ; /006) quand ils sont cultivés dans du bouillon. Sur les Fra. 21. jeunes cultures sur plaque, le plus grand nombre MUR TON des bâtonnets isolés et jumellés est immobile. Quand il y a mouvement, il est très vif. Dans des cultures en bouillon vieilles de deux jours, une grande partie des bâtonnets est immobile. Le bacille est caractérisé physiologique- MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 91 ment par ce fait qu'avec le Bacterium coli commune où le B. typhi abdominalis et peut-être d’autres espèces encore vivant en sym- biose avec lui, il peut détruire d'importantes quantités de nitrate ou de nitrite avec dégagement d’azote élémentaire. —N.lg. —P.c. Bacillus denitrificans IT, Burki et STUTZER (fig. 22). Bâtonnets de 0,75 w d'épaisseur et de 2-4 y de long. Le mouvement est serpentiforme avec tremblement de tout le bätonnet. Le bacille a la propriété de faire fermenter d'assez fortes Pie, 9: TE = es , Bacillus denitrific II quantités de nitrates et de nitrites avec dégage- “aprés Bowen). ment d'azote. — N. I. g. — P. c. Bacillus diffusus, FRaNKLAND. Bälonnets minces et souples, très actifs, d'environ 1,7 y de long et 0,5 y. de large, isolés ou par deux, formant aussi à l’occasion de longs filaments onduleux. — L. g. — Nip: c. Bacille du sol (Erdebacillus). — V. B. mycoides. Bacillus erythrosporus, Era. Bacilles grêles, mobiles, à extré- mité arrondie, formant souvent de courts filaments. À la tempé- rature de la chambre naissent, dans chaque bâtonnet, 2-8 spores ovales accolées en forme de collier de perles et d’une teinte rouge sale. — N. 1. g. — P. c. Bacillus filiformis, Tics. Bacillus fluorescens liquefaciens, FiüaGe. Bacilles courts, mo- biles, réunis par deux avec étranglement au milieu. On n’a pas ob- servé de formation de spores. — L. g. — P. c. Bacillus fluorescens putidus, FriGce. Bacilles petits, courts, très mobiles, à bouts arrondis. — N. 1. g. Bacille de l’eau fluorescent, EHRENBERG. Bacillus gasoformans, EisEN8ERG. Petits bâtonnets, très mobiles. — L. g. — N.p.c. Bacille gris, MaAscHEK. Bacille vert-jaune, EISENBERG. Bacillus janthinus, Zopr. Bâtonnets plus ou moins longs pouvant tourbillonner et se séparant en éléments plus courts. Donne un pig- ment violet. Mouvement de rotation et de vibration. —L,. g.—P. c. 92 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Bacillus liquidus, FRANKLAND. Bacillus luteus, FLüGGEe. Bacille court, de grosseur moyenne, pa- raissant immobile, formant des colonies colorées en jaune. —N. I. g. Bacillus mesentericus fuscus, FLüGce. Bacilles petits, courts, très mobiles, souvent accolés par 2 ou 4; formant de petites spores brillantes, irrégulièrement divisées. — L,. g. Bacillus mesentericus vulgatus, FLüGGe (Bacille de la pomme de terre). Bacilles assez gros, à mouvement vacillant, souvent rangés en filaments. Forme des spores rondes. — L. g. — N. p. c. Bacillus muscoides, Liorius. Bacilles d’environ 1 », doués d’un mouvement lent, avec moindre aptitude à former des filaments. — N.lg.—N.p.c. Bacillus mycoides, FLÜGGE (Bacille du sol ou B. radiciforme). Bâtonnets grands et épais, formant sur plaques de gélatine des rami- fications profondes, enchevêtrées, simulant une radicelle. Ge bacille a un mouvement propre et forme des spores endogènes ovales et très brillantes. — L. g. — N.p.c. Bacillus prodigiosus (Micrococcus prodigiosus, Monas prodigiosa, EHRENBERG). Très petits bâtonnets courts, généralement immobiles, en assez grands amas de 10 éléments et plus. La formation de spores n’y a pas encore élé observée. En FN | h . présence de l'air, ce bacille produit ANA | 7/1 1) Ï Ÿ une belle couleur rouge. — L. g. 1) Bacillus pulrificus coli, BIENSTOCK (1000) (fig. 23). Bâtonnets vacillants, très Fra. 93. mobiles, d'environ 3 x de long, sou- RE OST nr plus courts, généralement ali- gnés en longs filaments. À la formation des spores, le bâtonnet se renfle en boule à une extrémité, plus rarement aux deux. La spore reste unie quelque temps au bâtonnet qu’elle traîne derrière elle dans tous ses mouvements. Plus tard, la spore, très réfringente, de- vient libre par dissolution progressive du bâtonnet et, dans des so- lutions appropriées, s’allonge de nouveau peu à peu en bâtonnet. De ceux-ci nouvellement formés naissent d’abord des chaînes de très courts bâtonnets qui s’accroissent ensuite en éléments plus longs et en filaments. — N. 1. 3. — N. p. c. 2 hr a MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 93 Bacillus ramosus (Bacille radiciforme). Bacilles courts, à bouts arrondis, environ trois fois aussi longs que larges, formant souvent des chaines et des filaments. Peu mobiles. — L. g. —N.p.c. NY 77 1 a Bacillus saprogenes 1, Rosengacu (fig. 24). Y/# à 7 Assez grands bacilles, formant une grosse spore Æ et fée à une extrémilé. 2 =, (2 Bacillus scissus, FRANKLAND. Gros bâtonnets nes immobiles, de grandeur variable, semblables au Bacillus saprogenes —. 2 (d’après FLCG&r). B. prodigiosus. — N. 1. g. — N. p. c. Bacillus slolonatus, AnamerTz-WicHManx. Bâtonnets deux fois et demie aussi longs que larges, très mobiles. — N. 1. g. — N. p. c. Bacillus sublilis, EnREN8ERG (fig. 25 et 26). Bätonnets cylindri- ques ayant Jusqu'à 6 y. de long, en moyenne trois fois aussi longs que ns) 7 NS & , \ NET ( (1208) /°000) F1G. 25. — Bacillus subtilis (d'après BREFELD). 1. Bâtonnets tourbillonnants : a, isolés ; b, en liaison lâche; ce, avec une membrane de spore. 2. Bâtonnets et filaments en végétation non tourbillonnants. larges. Dans certaines circonstances, les bâtonnets montrent un actif mouvement d’oscillation grâce aux cils qui se trouvent, soit à une, soit aux deux extrémités. L’accroissement et la division sont rapides ; on a observé un in- tervalle de 5/4 d’heure entre deux divisions consécutives à la tem- pérature de 21° et de 20 minutes à 35°. Très souvent il se forme des sortes de filaments qui tantôt laissent reconnaître nettement par leurs brisures en zigzags qu’ils sont formés de bâtonnets, tantôl ne se laissent pas résoudre. Les divers éléments d’un filament sont 94 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. généralement à différents stades de croissance et de division et, par suite, de différentes longueurs. La production des spores est amenée par l’appauvrissement du substratum en matières nutritives. La multiplication et la division des bâlonnets cessent alors peu à peu; ils deviennent immobiles et, nr p= N EN W. a, % (f200) F1G. 26. — Bacillus sublilis (d'après BREFELN). 1. Formation des spores: a ete, dans les bâtonnets ; b, dans les filaments. — 2, Filaments en train de former des spores. On ne voit pas nettement les limites des bâtonnets. La formation des spores s’y fait isolément, elle n’est pas du tout simultanée. —3. Spores mûres, yues : b, de côté; ce, par le dessus ; a, avec des restes de bâtonnets encore adhérents. — 4. Germination d’une spore jusqu’à la formation d’un filament. LA au milieu ou à l'extrémité, il se forme une spore endogène, réfrin- gente, à contour sombre, qui s’isole par disparition progressive de la membrane du bâtonnet. Les spores ont 1,2 y. de long et 0,6 x de large ; vues par le haut, elles paraissent rondes. A la germination des spores, la membrane se fend transversale- ment au milieu, mais sans se séparer entièrement; elle reste adhé- rente par un point. Le jeune bâtonnet sort verticalement de la fente suivant l’axe longitudinal de la spore. Pendant le développement du bâtonnet, même encore après qu'il a subi de multiples divisions, la MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 95 membrane de la spore vide reste adhérente au bâtonnet et l’accom- pagne dans ses migrations. — L. g. — N. p. c. Bacillus terrigenus, Frank. Bacille de 0,6-1,8 & de long, for- mant des spores, souvent aussi des zooglées. Filaments de longueur variable et d'environ 1 y. d'épaisseur. Immobile, —L,. g.—N. p. c. Bacillus thermophilus (Miquer). Bacillus ureæ, LEugE. Gros bâtonnets à bouts arrondis d'environ 2 p. de long et 1 y de large. Deux autres bacilles ayant également le pouvoir de transformer l’urée en carbonate d’ammoniaque ont en- core élé trouvés par LEURE. L’un consiste en gros bâtonnets ovales de 1,2-1,9 p. de long et 0,7-0,8 x de large; l’autre, aux extrémités coupées à angle aigu, avait 1,2-1,4 p. de long 2 et 0,6 u de large. — N. I. 9. Ne. Bacillus ureæ I, Burri (fig. 27). Bâtonnets 11 NÉ = e Le NI ayant 0,79 y de large et 10-25 y de long. Dans Rd NIg les cultures jeunes on constate toujours un - ÉD ñ mouvement oscillatoire et serpentant. —L.g. 00) oh hi — N.p.c. Al Bacillus ureæ Il, Burri. Bâtonnets de 0,9- Fra. 27. — Bacillus ureæ 1 (d'après Burt). 1 pu d'épaisseur et 2,5-4 p de longueur. Sans mouvement. Forme en certaines circonstances des spores. — N. I. g. — N.p.c. Bacillus ureæ IT, Burri. Bâtonnets de 0,9-1 y d'épaisseur, 2-5 p de longueur. Forme assez souvent de courts filaments comprenant jusqu’à 5 éléments. On ne peut constater la mobilité toujours et dans toutes les cultures. Elle est très nette pourtant dans les cultures de bouillon et urée. Produit dans certaines conditions des spores variant de la forme globuleuse à la forme ellipsoïdale. — L. g. — N. p. c. Bacillus viridis pallescens, Frick. Bâtonnets de 2-3 w de long avec un diamètre 3-4 fois moindre, très mobile. Souvent en fila- ments. — N. I. g. — P. c. Bacille blanc, EiseNBERG. (Voir B. albus.) Bacterium aerogenes, Mer. Courts bâtonnets mobiles, isolés ou par paires. — N. I. g. — N. p. c. Bacterium du sol 1, Anamerz (Bodenbaclerium D). Bâtonnets de 0,6-0,8 & de large et de 1,2-1,4 n de long, généralement accolés 96 par deux. On n’y a pas observé de filaments. Faible mouvement. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Formation de zooglées et d’une coloration bleu-vert fluorescente. — N.l.g. —P.c. Bacterium du sol IT, Anamerz (Bodenbacterium IT). Courts bacilles à bouts tronqués, souvent accolés par 2-8 cellules, sans mouvement propre. Longueur : 1,2 &; largeur : 0,8 p. en moyenne. — N.lg. —N.p.c. Bacterium coli commune, Escnericu. Courts bâtonnets légère- ment courbés de 1-5 p de long et 0,3-0,4 p de à en Emo NE | | PP (8 J0) F1G. 28. Lacterium Lineola (d’après Conn). Forme mobile. large. En symbiose avec le Bacillus denitrificans I, il décompose nitrates et nitrites en dégageant de l'azote. — N. I. g. — P. c. Bacterium lindolum, Fopor. Bacterium Lineola (fig. 28). Cellules cylindri- ques, très réfringentes, un peu arrondies aux bouts, ayant 3-4 b. de long et 1,2-1,5 p. de large. Outre les bacilles ARE - DOS à a ê ESS CREER Gao a 8 Sc Ce (e f 7 88 2" À eSS812889 û Foo 2280 8804 ÉSéarse: ER D É so ess Here se ' o à 3 à 3 a LE © B Ne) à 1 4 4 À 009 $ cg00) F1G. 29, — Bacterium merismopedioides (d’après Zopr). . Filament montrant en même temps des bâtonnets longs, courts et des coccus. — 2. Filament entiè- rement divisé en coccus. — 3. Filament dout les coceus sont déranzés et isolés. — 4. Ces coccus iso- lés réunis en une masse irrégulière. — 5-9. Phases successives de la formation des colonies tabulaires. — 10. Colonie de grandeur moyenne comprenant 32 tétrades (groupes de 4 cellules). isolés, on trouve souvent des diplobacilles. On n’a pas cons- taté la forme en filaments. Le contenu des cellules est fine- ment granuleux. D’après COnN, celte granulalion est provo- quée par le dépôt de subs- tances grasses dans l’intérieur des cellules. Le mouvement des bâtonnets est extrême- ment vif. Bacterium merismopedioi- des, Zopr (fig. 29). Cet orga- nisme forme des filaments d'épaisseur variable (1-1,5 y) qui se démembrent en bâton- nets longs, puis en courts et enfin en coccus. Ceux-ci de- viennent libres par arrondis- sement réciproque et tourbillonnent vivement. Arrivés à la phase MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 97 de repos, ils engendrent à la surface de l’eau, par divisions succes- sives dans un plan, des amas qui forment un voile superficiel et, plus tard, par division dans deux directions, les colonies tabulaires si caractéristiques composées de 64 X 64 cellules. Leur membrane se gélifie avec le temps. Quand les colonies deviennent plus épaisses, les couches gélati- neuses se fusionnent et 1l naît une zooglée continue tabulaire qui forme un voile mince, se maintenant toujours à la surface de l’eau. Dans des conditions d’alimentation appropriées, les coccus essaiment de ces zooglées tabulaires et se développent de nouveau en bâtonnets et filaments. On n’y connaît pas de spores (Zopr). Nitrobactéries de Wino- gradsky (Bactéries de la ni- trificalion). Nitrosomonas europæa (fig. 30). Dans une terre de Zurich. Cellules ovales ou ellipsoïdes de 1,2-1,8 u de Hu D ni deargese, PP nono Quand l'accroissement est | jipes outtivés en solution minérale. — 2, Mi- rapide, les cellules sont plus be on fourilomnement. — 35. foogas. — rondes; elles sont plus allon- gées quand la croissance est lente. Elles sont isolées ou groupées. Les cellules isolées sont munies d’un petit cil enroulé en spirale sur un tour et demi et se meuvent vivement. Il y a des zooglées. Toute influence défavorable pousse à la formation des zooglées (forme immobile); toute modification utile à l’organisme favorise la pro- duction des formes mobiles. On ne connaît pas de spores. Dans la terre de Gennevilliers, les organismes ne différaient de ceux de Zurich que par l’aspect quelque peu différent des colo- nies. Dans la terre de Kasan, ils étaient absolument semblables à ceux de Zurich, mais leur taille réduite de moitié ou des deux tiers, etils MATIÈRES ORGANIQUES. 1, 98 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sont considérés par WinoGRApskY comme une variété de ceux de Zurich. Dans la terre de Tokio (Japon), on n’obtint qu’une espèce à peine distincte de celle d'Europe. Dans la terre d’Afrique (quatre essais), WinoGRADSKY a trouvé un organisme qui ne doit être considéré que comme une variété de celui d'Europe. Nitrosomonas javanensis . (fig. 31) provenant d’un échan- | tillon de sol de Buitenzorg 2 (Java). Cellules de 0,5-0,6 we 4 seulement de diamètre avec cil Fa ayant jusqu’à 30 & de long. Malgré la longueur du ail, les Tr cellules ne sont pas très mo- biles. 7 Même dans la phase de tour- dre billonnement, toutes les cel- lules ne sont pas isolées, mais Frs. 31. groupées. Golonies compactes Nitrosomonas javanensis, de la terre de Java 5 ; % d (d'après WINOGRADSKY). se désagrégeant tantôt en tres 1'icrobes d'une solukon nitrifiante. — 2. Petits MIMICTOCOCCUS par crabes en tourbilonnement, — 9. 20086 fuance, tantotien COLE petites. Nitrosococcus. Genre comprenant les organismes du Nouveau- Monde. Semblable aux espèces précédentes. D’une terre de Quito WinoGrapsky à isolé un très gros coccus de 1,9- EF 1,7 p de diamètre. Es Nilrobactérie (Gg. 32). Genre comprenant les organismes qui transforment par oxydation l’acide /1000) nitreux en acide nitrique. La figure 32 représente PRET la nitrobactérie, provenant de la terre de Quito, Nitrobactérie (d'après WINOGRADSKY). que WinoGrapsky a élevée en solution nitratée. Bacterium termo, EnrENverG (fig. 33). D’abord considéré comme ferment de la putréfaction et ainsi décrit : Courts bâtonnets arrondis aux bouts, de 1,2-1,5 & de long et 0,5-0,7 y de MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES,. 99 large, isolés ou par couples, formant des amas irréguliers, ou bien rangés en ligne, ou bien encore en grosses zooglées globuleuses en grappes. Vif mouvement propre chez les individus isolés et jumellés. Aujourd’hui, la désignation de Bactlerium lermo ne doit plus être considérée que comme une appellation générale applicable à un ensemble variable de formes diverses ; il faut la laisser de côté, parce que la description s’adapte à une grande quantité de bactéries déjà connues (FLÜGGE). Bacterium Zopfii, Kurru. Coccus, bâtonnets fila- ments, ces derniers formant des pelotons spiralés. F1G. 33. Bacterium termo (d’après Cox). Forme mobile. Les-bâtonnets une fois séparés de leur association tourbillonnent. Chaque bâtonnet se partage ensuité en deux coccus qui restent généralement accolés. Zooglées globuleuses, souvent rangées en collier de perles. — N. I. g. — N. p.c. Bacterium Zürnianuim, LisT. Courtsbâtonnetsimmobiles effi- lés aux extrémités, larges de ,6-0 ,8 p. et longs de 0,2-1,5. — N.l.g. —N.p.c. Clostridium bulyricum,Praz- Mowsky. (V. Bacillus bulyri- cus.) Proteus mirabilis, HAUSER (fig. 34). Bâtonnets de 0,6 p de largeur et de longueur très va- riable, tantôt presque ronds, tantôt ayant 2-3,79 p. de long. Looglées contournées d’une fa- çon particulière. Souvent il \ F1G. 34. — Proteus mirabilis (d'après HAUSKe). Forme zooglée (95). a des formes d’involution en grands éléments globuleux ou piriformes. — L. g. Proteus vulgaris, Hauser (fig. 35). Bâtonnets de 0,6 y. de large 100 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. avec longueur variable. Suivant les conditions de nutrition, les bâ- tonnets sont courts et presque sphériques ou ont 1,25 y et jusqu’à 3,70 p de long, ou forment des filaments, parfois serpentiformes ou spiralés. Beaucoup de bâtonnets se meuvent activement ; quelques- uns montrent des cils. Il y a des zooglées, souvent aussi des formes d’involution sous l’aspect de grands éléments généralement globu- leux. — L. g. £A REC LES RER ZA SE LS. D e E Z 6 0 ‘4 an i ef Ne d hs Û] xC. ES AY F1G. 35. — Proteus vulgaris (d'après HAUSER). Ilots tourbillonnants (285). Proteus Zenkeri, Hauser. Cellules de 0,4 & de large et 1,65 w de longueur moyenne, à forme tantôt plus ronde, tantôt plus allongée. Filaments d’où essaiment des bâtonnets. Ilots mobiles formés de bätonnets et de filaments. Zooglées contournées d’une façon parti- culière. — N. I. g. c) Spirilles. On range ici tous les bacilles en forme de filaments courbés et contournés en spirale qui, en se multipliant par division, pro- duisent de nouvelles spirales el qui, généralement mobiles, se réu- nissent en essaims. Parmi les espèces qui appartiennent à ce groupe, un petit nombre seulement est intéressant au point de vue agronomique. Spirillum Rugula (fig. 36) [Vibrio Rugula, Müer]. Bâtonnets grêles, faiblement spiralés de 6-8 p de long et 0,5-2,5 y de large à 4 \ MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 101 qui ont la faculté de se mouvoir et, quand le mouvement a cessé, s’accroissent en bâtonnets courbés en arc. Puis ces bâtonnets se renflent ; leur contenu devient plus dense et à une extrémité on voit un renflement globuleux où, par contraction, se forme une spore sphérique. — L. g. Spirillum serpens (Vibrio serpens) [fig. 37]. Bâtonnets grêles (0,8-1,1 y de large sur 11-20 & de long) avec 3-4 spires très mobiles, parfois alignés, mais souvent en gros essaims. Spirillum Undula (fig. 37). Filaments de 1,1-1,4 u de large #. 2 Vs À _ Le C4 _ F1G. 36. — Spirillum Rugula FE _ (d’après PRAZMOWSKY). y 1. Filaments. — 2. Bâtonnets faiblement courbés. Fi@. 37. — 3. Bâtonnets gonflés se préparant à former des spores. — 4. Bâtonnet élargi en tête à un 1. Spirillum serpens. pôle ayant la formation des spores, — 5. Diffé- 2. Spirillum Undula (d’après FLÜGGE). rentes phases de la formation des spores. 3. Spirillum volutans (d’après CoHN). sur 8-12 w de long, avec 1,5 à 3 spires, ayant un mouvement très vif et pourvus de cils aux deux extrémités. Spirillum volutans (fig. 37). Les filaments ciliés, à 2,5-3,5 spires, ayant 1,5-2 a d'épaisseur sur 20- 30 y de longueur, sont tantôt mobiles, tantôt immo- SE biles. (500) Spirocheæte plicatilis (fig. 38), Filaments grêles à Fie. 38. Spirochæte plicatilis spires étroites et nombreuses, longs de 110-225 &, à (aaprès rLücos). mouvements très rapides. 102 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. d) Schizomycèles à formes végétatives variables". À ce groupe appartiennent quelques espèces aquatiques, étudiées dernièrement par ZopF, qui montrent un cycle de formes très variées, se présentant sous l’aspect de micrococcus, de bacilles et aussi de spirilles. Crenothrix Kühniana, RaBennorsr (fig. 39). Ses coccus sont des sphères de 1-6 y. de diamètre. Ils se multiplient par bipartitions suc- cessives et se réunissent alors en zooglées qui, de microscopiques qu’elles sont d’abord, s’accroissent jusqu’à plus de 1 centimètre et peuvent s’agglomérer dans les eaux en masses gélatineuses à un pied de profondeur. D’abord incolore, le mucilage, par dépôt d'hy- droxyde de fer, peut prendre une couleur allant du rouge-brique au brun noir. Cullivés dans l’eau stagnante, les coccus s’accroissent en bâtonnets et en filaments qui ont une épaisseur inégale et pré- sentent une gaine gélatineuse continue et solide, mais mince avec les mêmes dépôts ferrugineux que l'enveloppe gélatineuse des zooglées. A l’intérieur de la gaine, par divisions transversales successives, les bâlonnets passent à une forme à peu près isodiamétrique el s’arrondissent. Dans les filaments plus larges, les cellules alignées prennent souvent l'aspect de disques plats et se divisent par des parois dirigées suivant l’axe du filament en 2-4 petites cellules qui se dégagent finalement de leur gaine à l’état de coccus, tout comme celles des filaments grêles, en partie par gélification de la membrane sur toute sa longueur, en partie par ouverture de la gaine à son extrémité. Dans ce dernier cas, les coccus glissent d'eux-mêmes par l'ouverture et sont aidés par la poussée qu'ils reçoivent des autres éléments encore engainés et qui s’allongent. Les coccus peuvent, mais c’est assez rare, passer par une phase de mobilité pour revenir à la forme immobile de zooglée. Ge sont ceux qui s’allongent de nouveau en bâtonnets et filaments comme il a été décrit. Les fila- ments dont il a été question jusqu'ici sont assez droits. Outre ceux-là, {. Ce sont les bactéries arthrospores de DE Bany. MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES. 103 il y en a d'autres contournés en spirilles qui peuvent aussi se séparer 0280 0 LP LD LES vo 03%? 06° 2955 ET 08 080 GEL (2) 005 009 \ à) ç a 06 \ E ; à AU) Se À E L] Ê À + œ H l} irc. g H 7 D / \ À À EH/# # NN À A AN À A À \ Q EE ;, À LAN y À è À # y er — (eus LL ns] - F1G. 39, — Crenothrix Kühniana (d'après Zopr). ae, coccus ou spores ; c-e, en train de se diviser ; j, amas de coccus (zooglées) reliés par du mucilage marqué sur la figure par le contour ombré ; k, amas de coccus s’allongeant en filaments ; i-r, fila- ments de diverses tailles et formes s’appuyant à la base sur un substratum; "m-r montrent la formation de la gaine commune autour de chaque élément; get n se dissocient à la partie su- périeure en leurs éléments; r montre des cellules devenant progressivement vers le haut plus larges et plus courtes et finissant par se diviser par partition longitudinale en spores rondes (coceus) qui se dégagent de la gaine (600) ; g, zooglée de coceus. Grandeur naturelle. en leurs éléments, mais sans passer par une phase mobile, d’après les observations faites jusqu’aujourd’hui (nE Bary). 104 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Beggialoa alba, Vaucu. (fig. 40 et 41), forme des filaments qui, s'ils eo” 2 Fa (a CLe] 00000 CNT 5 22 C0 5 RER 0 co = — ERESERES ÉTEINT ME S EE] F1G. 40. — Beggiatoa alba (d'après Zopr). 1. Groupe de filaments fixés. — 2-5, Filaments de diverses épaisseurs. — 5. En train de se frag- menter. Les petits cercles à l’intérieur des cellules représentent des grains de soufre : là où ils abondent on ne voit pas bien la division transversale, mais ailleurs elle est nette, — 6-8. Frag- ments de filaments riches en soufre montrant nettement les cloisons transversales après l’action du violet de méthyle. En 8 on voit aussi la division longitudinale de quelques éléments (forma- tion des spores). — 9. Filaments se désagrégeant en spores. — 10, Spores mobiles; les petits cercles qu’elles renferment sont des grains de soufre (1 est grossi 540 fois, 2-10 900 fois). sd MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES, 105 sont intacts, se dressent verticalement sur des objets solides. Leur largeur est très variable ; elle oscille entre 1 y et 5 y. Ils consistent en une seule rangée de cellules dont le protoplasma contient en proportions variables de pelits grains de soufre très réfringents dus F1G. 41. — Beggiatoa alba (d’après Zopr). Formes contournées et spiralées, A. Groupe de filaments fixés. — B-H. Filaments spiralés. — C, D, F-H. En état plus avancé de fragmentation et immobile. — H. Chaque cellule est nettement distincte. — E. Fragment en mouvement (Spirille) avec un cil à chaque extrémité. Les grains de soufre sont représentés comme dans la figure 40 (540). à la destruction du sulfate par la plante. Avec un très fort taux de soufre il est difficile de distinguer les cloisons. Les filaments se sé- parent facilement en fragments par rupture transversale. Leurs élé- ments passent successivement de la forme étirée en bâtonnet à la forme isodiamétrique et, en outre, dans les filaments plus larges, à 106 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. la forme de disques plats qui se partagent finalement par des cloisons longitudinales en 4 quadrants (fig. 40, 6-8). Ceux-ci, de même que les éléments isodiamétriques des filaments minces, s’isolent à la fin (9) en s’arrondissant, entrent en actif mouvement (10), puis passent à l’état de repos en se fixant sur des objets solides. Ils se multiplient rapidement par bipartition et forment des zooglées en masses irré- gulières. [ls peuvent plus tard croître en bâtonnets et ceux-ci peuvent donner de nouveau les filaments décrits, après avoir assez souvent passé par une phase de tourbillonnement (DE Bary). Outre les filaments droits considérés jusqu'ici, Zopr en a observé d’autres contournés en spirale. Les filaments prennent la forme spiralée, soit au bout, soit en divers points, soit sur tout le parcours (fig. 41, A-G). Les fragments spiralés devenus libres par rupture acquièrent, dans certaines circonstances, la faculté de tourbillonner. Leur mouvement est provoqué par des cils ; ils*en ont un à chaque pôle. Les fragments droits ou spiralés qui ne sont pas en train de tourbillonner montrent une grande flexibilité et des mouvements de replalion. Les filaments flexibles ont des courbures très énergiques, souvent entrelacées et ont fréquemment la forme de délicates tresses de cheveux (Spirulines) [W. Zopr]. Beggiatoa roseo-persicina, Zopr (Clathrocystis roseo-persicina, Coun), présente les mêmes formes que B. alba, c’est-à-dire des coccus, des bâtonnets, des filaments et des spirilles. Les filaments ne diffèrent de ceux de B. alba que par leur coaleur rouge (bactério-purpurine). Les coccus sphériques formés dans les filaments se développent par bipartilions successives en zooglées ayant les formes les plus variées. Les colonies semblent tantôt peu, tantôt très mucilagineuses. Dans les eaux ferrugineuses, les gaines de mucilage sont souvent colorées en jaune par l’hydroxyde de fer. Les coccus s’allongent, dans les colonies, sous certaines conditions, en bâtonnets qui prennent assez souvent la forme de vibrion. Coccus et bâtonnets peuvent entrer en tourbillonnement après la diffluence de la gaine mucilagineuse. Les bâtonnets plus courts s’allongent et forment, en s’alignant les uns près des autres, des filaments qui, comme chez B, alba, peuvent montrer une conformation spiralée partielle ou totale. ET MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES,. 107 Cladothrix dichotoma, Cou (fig. 42), forme sur les substances solides des tapis hauts de 1""-3%%, sinon des amas floconneux nageants. Les filaments, sim- ples d’abord, se ramifient ; une cellule du fila- ment produit une petite hernie qui est l’indice du rameau latéral ; le bourgeon grandit et donne un court filament cylindrique de même largeur que le filament-mère et qui lui reste d’abord exactement perpendiculaire. En gran- dissant, ces filaments se cloisonnent transver- salement (fig. 42) et se rapprochent presque toujours du filament-mère. Comme ceux du Crenothrix is contiennent des dépôts d’oxyde de fer et ont la couleur qui les caractérise. Les accumulations de vase ocreuse qu’on ren- contre souvent dans les sources et les eaux ferrugineuses et dont les éléments filamenteux sont connus sous l’ancien nom de Leplolhrix ochracea, KÜTZING, sont formées, d’après ZoPrF, par le Cladothrix ferrugineux. Les filaments se multiplient tantôt par des fragments qui s’accroissent ensuite et qui pré- sentent des bâtonnets d'autant plus courts qu’il sont eux-mêmes plus petits, tantôt par des spores ou des coceus, c’est-à-dire des cellules courtes et arrondies qui se séparent de la gaine et s’allongent en filaments. Ceux-ci ou leurs rameaux peuvent prendre, au lieu de leur forme habituelle assez droite, une forme spi- ralée avec spires plus ou moins étroites et ascendantes et celles-ci peuvent, après un cloi- sonnement transversal, se fragmenter. Tous ces fragments, quelles que soient leur forme Les » es, ce ? Fr&. 42. Cladothrix dichotoma (d’après DE Bay). a, extrémité d’un filament vi- vant. Il a végété d’abord dans la direction r-p. Par courbure latérale et crois- sance ultérieure divergente des éléments sont nées les branches nn. A leur som- met la structure en cellules cylindriques ne se recon- naît nettement que sous l'influence des réactifs. — b,fragment de filamentavec cloisonnement distinct et gaine ; celle-ci est vide dans la moitié supérieure, où l’on ne voit qu’une cellule (600). et leur longueur, ainsi que les spores rondes et les coccus, jouissent assez souvent d’un mouvement propre, les fragments longs rampant el glissant lentement, les fragments courts tourbillonnant activement. 108 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Filaments, bâtonnets, spirilles et coccus peuvent finalement rester mélangés ou se réunir, par sortes de formes, à l’aide de mucilage, en zooglées qui prennent souvent l’aspect de belles ramifications en buisson. Les formes courtes peuvent à nouveau se dégager de la z00- glée à l’état mobile, puis croître en filaments ; pour les spirilles, cette phase ne paraît pas avoir élé observée directement (ne Bary). Outre les espèces décrites, il y a toute une série de bactéries pa- thogènes qui semblent participer de même, suivant les circonstances, surtout dans le sol, aux processus de décomposition. Ë . CHAPITRE V RÉPARTITION DES MICROORGANISMES Ce qui montre l’extraordinaire diffusion à la surface du globe des organismes qui interviennent dans la décomposition des matières organiques, c’est que partout les débris animaux el végétaux sont soumis à la décomposition qui, ainsi qu’on l’a vu, ne peut se pro- duire sans le concours de ces organismes. Leur pullulation dépend essentiellement et des conditions qui leur sont offertes et de leurs exigences biologiques. Il n’est donc pas surprenant que, suivant les localités, non seulement le nombre des organismes soit très diffé- rent, mais encore qu'ils soient représentés par des formes tout autres. Car les divers organismes résistent très inégalement aux conditions défavorables de végétation (dessiccation, températures élevées, ap- pauvrissement du substratum) et, d’autre part, dans certaines cir- constances, 1ls peuvent subir un transport plus ou moins lointain comme, par exemple, par les courants aériens ou fluviaux, les ani- maux, etc. De telles conditions jointes à l'extraordinaire puissance de reproduction des organismes inférieurs expliquent qu’ils se ren- contrent tantôt en nombre immense, tantôt réduits à quelques indi- vidus, ou même qu’ils manquent totalement. L'entrée en jeu des phénomènes de décomposition liés à la pré- sence d’espèces déterminées ne dépend pourtant pas du nombre des organismes, parce que, même au cas où il n’y en aurait qu’un seul, sa mulüplication rapide peut produire très vite un nombre d’orga- nismes suffisant pour une manifestalion intense du processus. À un point de vue plus spécial, les recherches faites sur la diffusion des organismes non pathogènes, les plus intéressants à considérer ici, ont conduit à des résultats importants pour la solution de différentes questions décisives ; ils vont être brièvement résumés ci-après. 110 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 4. — Les microorganismes de l'air. Parmi les travaux ayant trait à la détermination des germes exis- tant dans l’air, ceux de P. MiQuEL ‘ méritent incontestablement la première place à cause de leur étendue et de la méthode rigoureu- sement scientifique qui y a présidé. Les recherches ont été faites principalement dans le parc de Montsouris, quelques-unes en divers points à l’intérieur de Paris. Le nombre des bactéries dans un centimètre cube d'air a été, pour une moyenne de 10 années : Pare de Montsouris (hors de la ville) . . . . . . . 300 Place Saint-Gervais (intérieur de la ville). . . . . . 5,445 Les écarts des moyennes pour chaque mois présentent une cer- taine régularité comme on le voit par le tableau ci-dessous : NOMBRE DE BAOTÉRIES par centimètre cube d'air (moyenne de 10 ans). a ——— — Pare Place de Montsouris. Saint-Gervais. JAnVIEr 275 207.0 185 3 074 LT OS ANA 160 3 648 MAPS TRANS NET 195 4 116 ANR RME OS Ste 305 4 456 L'ÉTRER PR RRNEe 310 5 874 NN SRE 335 6 741 OO rer à 535 8 006 RONDS RTE 0e 555 8 256 DODIEMNrE ee 409 7475 OCt0DrC En 240 5 245 Novembre . . . . 190 4 639 Décembre 155 3 816 Moyenne de l'année . 300 5 445 C’est donc en août que l'air serait le plus riche en bactéries; le minimum tomberait en décembre et janvier. En comparant les di- verses saisons, on voit que l’atmosphère renferme une bien plus 1. P. Miquez, Les Organismes vivants de l'almosphère. Paris, 1883, Gauthier- Villars. — En outre : Annuaire de l'Observaloire de Montsouris. Les Microorga- aismes de l'air, par P. Miquec. Traduit par E. Eumenicu, Munich, 1889, M. Ricen, PRO LE so | RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 111 grande quantité de bactéries dans les saisons chaudes que dans les saisons froides. Les taux de mucorinées" bien plus rares dans l'air que les bactéries sont soumis à des variations incomparablement plus faibles, comme le montrent les chiffres suivants : TAUX MOYEN DE L'AIR EN ORGANISMES INFÉRIEURS par centimètre cube. — Parc de Montsouris. Place Saint-Gervais. RE Bactéries. Mucorinées. Bactéries. Mucorinées. OVER SES CA le 1850 190 3 613 1 420 BrINTeDS +. 315 145 5 691 1 515 BR Lu + - = 500 295 7 912 2 090 AHÉOMNES = + à . 195 255 4 566 1 690 Pour l'année. . . 300 205 5 445 1 680 De ces chiffres on peut conclure que : 1° Les organismes existant dans l'air, en dehors des circonstances accidentelles, consistent principalement en bactériacées et mucori- nées, les premières beaucoup plus nombreuses ; 2% L'air de la campagne (Montsouris) est sensiblement plus pauvre en microorganismes que l'air des villes (Paris) ; 3° La richesse de l’air en microorganismes est soumise (en pre- nant les moyennes) à des variations régulières ; elle est beaucoup plus grande dans les saisons chaudes que dans les saisons froides. Ces variations s’expliquent par ce fait que, toutes conditions égales, la multiplication des organismes est réglée par la température ; elle progresse dans une proportion incomparablement plus forte aux tem- pératures élevées qu'aux températures basses et, dans le premier cas, il doit y avoir un bien plus grand nombre de germes dans l’atmosphère que dans le second. Ajoutons que pendant l'hiver le sol est générale- ment humide ou recouvert d’une couche de neige, ce qui rend plus difficile le passage des microorganismes dans l'air, tandis que pendant l'été le sol et les matières organiques en décomposition qui se trou- vent à sa surface sont fréquemment desséchés et à cet état n’oppo- sent qu’une faible résistance au transport des organismes dans l'air. Les variations régulières ci-dessus indiquées ne se présentent que {. Dans les mucorinées nous comprenons tous les autres hyphomycètes (Penicil- lium, Aspergillus, Oidium, etc.). [Trad.] 112 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. pour les moyennes déduites de périodes d'observation assez lon- gues ; elles s’effacent plus ou moins, si l’on n’examine que de temps en temps, par suite de la prépondérance que prennent certaines influences extérieures et locales. Les alternatives de sécheresse et d'humidité sont tout d’abord dé grande importance au point de vue de la quantité des organismes existant dans l'air et, d’une manière très générale, cette influence se précise, d’après les observations de Miquez, par ce fait” que : 4° le nombre des bactéries aériennes, faible dans les périodes de pluie, s’élève considérablement quand, à la suite d’une période de sécheresse, toute l'humidité de la surface du sol a disparu ; 2° que les mucorinées présentent le phénomène contraire. Pour expliquer ces faits, MiQuEL montre que les bactéries adhèrent solidement aux milieux humides où elles se développent ; elles y adhèrent soit en vertu de la capillarité, soit par la formation de mucilage, si bien qu'elles ne peuvent plus être emportées par le vent, ce qui est pos- sible si le substratum se dessèche superficiellement. Si les mucori- nées se comportent tout différemment, c’est, pense MIQUEL, parce qu’elles ne fructifient activement à la surface des organismes qu'à la faveur de l’humidité ; les spores peuvent se répandre d'autant plus abondamment et facilement dans l'air par les temps humides que les fructifications se développent à la surface, tandis que ces mucorinées meurent par la sécheresse ou ne s’accroissent que lentement. Quant à cette influence de la température et de l'humidité sur le nombre des organismes aériens, il est clair que ces deux facteurs exerceront des actions très différentes suivant leurs variations mu- tuelles. Voici, d’après MiQuEL, comment elles se caractérisent : SPORES DE MUOORINÉES. BACTÉRIES, © — Jeunes. Vieilles. l { Temps humide . Rares. Nombreuses. Rares. Saison chaude. {, ne | Temps sec. . . Nombreuses. Rares. Très abondantes. gai froide | Temps humide . Rares. Rares. Rares, aison froide . | Temps sec. . . Trèsabondantes. Nulles. Très abondantes. Le vent possède aussi une influence dominante sur le taux de l'air {, Les Organismes vivants, elc., p. 216 et p. GO, RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 113 en microorganismes ; sa violence est à considérer et aussi sa direction. Son action sur la quantité des bactéries est faible dans le cas où le sol et les matières organiques gisant à la surface sont humides ; mais elle grandit dans la mesure où s’opère le desséchement superficiel et, loutes circonstances égales, croît avec la force du vent. La direction du vent a de l’importance dans le cas où des localités voisines ont des taux différents de bactéries. Ainsi, les recherches faites à l’observatoire de Montsouris, situé en dehors et au sud de Paris, ont montré” que les vents soufflant de la campagne, donc ceux du sud, du sud-est et du sud-ouest, abaissaient sensiblement le taux des mi- crobes, tandis que ceux du nord qui avaient passé sur Paris augmen- laient ce Laux, comme le montrent suffisamment les chiffres suivants : DIRECTION DES VENTS. N. N.-0. O. S.-0. S. S.-E. E. N.-E. Nombre de microbes par cen- EE Mmbtiéeuhen ss. 0.0, [24 0108 © 77 58 4% 74 134 152 Cette influence de la direction des vents diffère évidemment sui- vant la situation réciproque des points que l’on étudie. Les microorganismes transportés par le ventse déposent en partie quand le vent tombe; c’est un fait qui diminue dans une large mesure la teneur de l'air en organismes et qui se présente partout où des obstacles quelconques brisent la violence du vent. C’est, entre autres, le cas pour les forêts, qui diminuent cette violence à un très haut degré. Pour déterminer linfluence de la forêt sur la quantité de germes existant dans l'air, À. SERAFINI et J. ARATA? ont fait, dans un petit bois de la Villa Médicis, à Rome, des essais d’après la méthode de SrRAUSS, en analysant tous les jours, du 6 mai au 8 juillet, l’air pris dans le massif à 30-40 mètres du bord et l'air pris au bord du bois. NOMBRE de microorganismes par centimètre cube. Hors bois. Sous bois. MECDRÉGSERS RENAN 2 670 19726 Bactéries liquéfiant la gélatine . . . . . . 4914 4 786 Bactéries ne liquéfiant pas la gélatine , . . DSL 1 198 1. Les Organismes vivants, etlc., p. 218. 2. Bollelino della R. Accademia medica di Roma. Anno XVI, 1889-1890. Fasc. VIII. Roma, 1890. MATIÈRES ORGANIQUES. 8 114 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. En moyenne, l’air de la forêt était plus pauvre en microorganis- mes que l'air extérieur. Parfois, il est vrai, le nombre des bactéries et des mucorinées était plus grand sous bois, car il peut s’en former là ; mais, en général, c'élait le contraire. Une seule fois, les trois catégories furent plus nombreuses en forêt ; dans les 39 autres cas, toujours une ou deux catégories étaient plus nombreuses hors forêt ; les bactéries non liquéfiantes le furent 28 fois, les bactéries liqué- fiantes 23 fois et les mucorinées 25 fois. Dans 8 prises d’essai, les trois groupes furent plus abondants hors forêt. Dans 3 dosages seu- lement on obtint le même nombre de germes pour les deux milieux. De tels résultats, obtenus dans un milieu producteur lui-même de microorganismes, sont dus évidemment à ce que la forêt agit comme un filtre retenant une partie de ceux qui flottent dans l’air. Les au- teurs que nous venons de citer se croient autorisés à conclure que la forét exerce une sorte de fillration sur les organismes transportés par le vent. Ce résultat n’a rien d'étonnant si l’on réfléchit que les arbres pré- sentent de grands obstacles à la circulation des microbes et qu'ils brisent la violence du vent, si bien que les organismes sont forcés de tomber sur le sol. [ls y restent soit par manque d’une force nou- velle qui les enlève, soit fixés par l'humidité du sol. Il est probable que les différences seront d'autant plus grandes que les vents seront plus forts et les forêts plus épaisses. Quant à l'influence de la situation sur le nombre des organismes aériens, on a déjà dit qu’en général l'air est d’autant plus riche en germes que la décomposition des matières organiques est plus active, toutes circonstances égales, et l’on vient de montrer que, d'accord avec cette notion, l'air des villes est incomparablement plus riche que l'air des champs. L'air contenu dans des chambres closes et sur- tout habitées accuse encore des chiffres plus élevés. D’après MiQuEL', tandis que l'air de la rue de Rivoli contenait 3 480 germes (moyenne d’un trimestre), celui des chambres du laboratoire de Montsouris (1884) en renfermait 7420, celui des vieilles maisons de Paris (1881- 1882), 36 000, celui du nouvel Hôtel-Dieu, à Paris (1880), 40 000, et 1. Annuaire de l'Observaloire de Montsouris pour l'an 1885, p. 504. RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 115 celui de l'hôpital de la Pitié (1882), 79 000. Le voisinage des égouts ne semble pas avoir beaucoup d’influence ; on y trouve tantôt plus, tantôt moins de bactéries qu’en plein air. Ainsi, par exemple, MIQUEL a trouvé en 1891 : TAUX MOYEN PAR CENTIMÈTRE CUBE. — Air des égouts. Air du centre de Paris. EE ©" —— Bactéries. Mucorinées. Bactéries. Mucorinées. NO ARE 4 085 1 835 5 730 2 525 AITCEMDSEN ES 20. 2h12 10 615 9 235 3 515 HERO DRE As 7 559 5 000 15 310 1 535 BUTOMNE LC 22 5 615 1 360 7 225 1 840 Moyenne . : . . 4 S45 4 705 9 575 2430 On voit que l’air des égouts était plus pauvre en bactéries, mais, par contre, au printemps et en été, notablement plus riche en muco- rinées que l'air libre. La moyenne annuelle donne presque la même proportion pour ces deux catégories dans l’air des égouts, tandis qu’à l'air libre les moisissures sont bien plus rares que les bactéries. L'air de la mer et des montagnes est d’une pureté extraordinaire. Les observations faites, à l’instigation de MiqueL?, à bord du Se- négal, sur les côtes du Brésil, de l'Afrique, des îles Canaries et dans le golfe de Gascogne ont donné, pour un total de 112 855 litres d’air, 102 bactéries, ce qui correspond à un taux moyen d’un germe par centimètre cube. Au delà de 100 kilomètres des côtes, le taux tombe à 0,06 ; à des distances moindres, il est de 1,8. L'air des montagnes se rapproche de celui de la mer. Vox FREu- DENREICH”, qui a examiné l’air des Alpes bernoises et italiennes à des altitudes de 2000-4000 mètres, a trouvé, dans les années 1883-1884, une moyenne d’une bactérie par centimètre cube, tandis qu’à Berne l'air en contenait 3-400. Ce fait semble montrer que le taux des ger- mes diminue avec l’altitude, comme l’ont aussi établi les recherches de MiquEL ; l'air pris au sommet du Panthéon renfermait beaucoup moins de bactéries que celui du parc de Montsouris. Citons encore en terminant l'observation de MiQuEL, d’après la- . Annuaire de l'Observatoire de Montsouris pour les années 1892-1893, p. 471. . Annuaire de l'Observaloire de Montsouris pour l'an 1886, p. 547. . Annuaire de l'Observatoire de Montsouris pour l'an 1885, p. 504, O5: = 116 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. quelle les bactéries aériennes sont soumises à des variations quoti- … diennes régulières qui passent par deux minima (2-3 heures du ma- tin et 2-3 heures du soir) et deux maxima (7-8 heures du matin et 8 heures du soir); on a démontré que ces variations sont soumises à des influences extérieures (météorologiques), à des circonstances locales et aussi à d’autres causes encore inconnues. Quant à la nature de ces organismes, on a reconnu que les trois groupes principaux distingués plus haut (Mucorinées, Levures, Schi- zomycètes) y étaient représentés, mais à des degrés divers. Ce sont les Levures ou Saccharomycètes* qui s’y trouvent le plus rarement; les Mucorinées (moisissures) et les Schizomycètes (Bactériacées) for- ment dans l'air la majeure partie de ces germes qui parlicipent à la décomposition des matières organiques * et, d’après les recherches de MiqueL, les Schizomycètes sont plus abondants que les Mucorinées. Parmi les Mucorinées, les espèces ordinaires (Mucor, Penicillium, Aspergillus, Oidium lactis*, etc.) existent en assez grand nombre, représentées par leurs spores largement répandues. Parmi les cham- pignons se multipliant par bourgeonnement, qui existent partout mais en très petite quantité, les Saccharomycètes sont les plus rares, Monilia et Torula sont un peu plus abondants; les Saccharomyces ellipsoideus, S. glutinis, S. Pastorianus, S. mycoderma, S. apicu- lalus se voient plus souvent que S. cerevisiæ. Les Schizomycètes sont représentés par les quatre groupes définis ci-dessus. D’après MiqueL, les Micrococcus tiennent le premier rang, puis viennent les Bacilles, en troisième lieu les Spirilles et les Schizomycètes à formes variables sont extrêmement rares ou manquent. L'ordre de fréquence dans l’air est le suivant : Micrococcus ureæ, M. ureæ lique- faciens, M. cinnabareus, M. flavus liquefaciens, M. flavus desidens, M. versicolor, M. aurantiacus, Bacillus butyricus, B. sublilis, B. 1. E. C. Hansen, Mittheilungen aus dem Carlsberger Laboralorium. Fase. Il, p. {. Vienne, 1880. — G. Gisrez Er C°, Zeitschrift fur das gesammle Brauwesen. Neue Folge. V° année, 1882, p. 208, 226 et 247. 2, [1 y a aussi dans l'air des spores de beaucoup d’autres champignons, des grains de pollen, etc. 3. Rappelons que, pour plus de simplicité, nous rangeons parmi les mucorinées d’autres hyphomycètes tels que Penicillium, Aspergillus, Oidium. (Trad.) Du. RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 117 prodigiosus, B. ureæ, B. erythrosporus, B. fluorescens liquefaciens, PB. luteus, B. mesentericus fuscus, B. mesentericus vulgalus, etc. Plus rarement, on trouve Bacillus aceli, B. acidi lactici. 2 , 2. — Les microorganismes des eaux. a) Les eaux méléoriques. Les eaux météoriques sont loujours plus ou moins pourvues de Bactéries et de Mucorinées, comme le montrent clairement les re- cherches de MiQuEL ‘. L'eau du pare de Montsouris contenait, par litre : MOIS. 1883. 1884. 1885. MOYENNE. RC PR » » 8 000 8 000 REUTERS » 1 850 790 1 320 MES eu Le Ses » 3 830 2 000 2 920 INSEE RER » 3 700 4 580 2 140 LÉ CNE ET NET » 2 480 2 400 2 440 1(AETe 2 PERTE » » »00 5 700 5 600 ICE NOR EALE » » » » NOURRI se LA le » » 8 300 8 300 SODÉeMDrE Le. 2. » 6 980 4 560 5 770 OCÉODre re RUE PU 3 800 3 560 2 300 3 220 Novembre". "1.04 1 000 5 500 » » Décembre 1250 7 420 » » Moyenne annuelle. . 4 540 4 200 4 300 On voit qu’en somme les eaux de pluie étaient plus riches en bac- téries dans les saisons chaudes que dans les saisons froides. Les taux des microbes peuvent osciller entre 300 et 20 000 par litre, dans le cas où l’eau provient d’une averse abondante ayant purifié l'atmosphère. Dans la première eau recueillie à la suite d’un orage ou après une longue sécheresse, le nombre des bactéries est incom- parablement plus grand et peut s'élever à 200000 et plus par litre. Sur 100 microbes trouvés dans l’eau météorique, il y a, en moyenne, 60 micrococcus, 23 bacilles et 15 bactéries. Dans certains 1 Loc. cit: 118 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. cas, les rapports sont très différents, comme le montrent les chiffres suivants : MICROCOCCUS, BACILLES. BAOTÉRIES. TOTAL SM 1 1 PEAU ue 59 39 10 100 LAVE 15 85 0 100 Les spores des mucorinées vulgaires sont aussi très abondantes dans les eaux de pluie. Le nombre de ces germes est, en moyenne, de 4000 par litre, ce qui fait que la quantité de microorganismes vivants contenus dans un centimètre cube dépasse 8. D’après les chiffres précédents, les précipitations annuelles à Montsouris, où elles atteignent une hauteur de 600 millimètres, apportent au sol, par mêtre carré, plus de 4 500 000 organismes. Ces observations démontrent que les précipitations atmosphéri- ques font baisser le taux des microbes aériens, exercent à ce point de vue sur l'air une action d’épuralion et ramènent en partie au sol les germes que les vents et les courants aériens lui ont enlevés, surtout pendant les sécheresses. b) Eaux de sources et de rivières. Les eaux de sources, quand elles proviennent directement de nappes souterraines, doivent contenir, si on les compare aux eaux des ruis- seaux, rivières, étangs, la plus faible proportion de microorganismes. C’est ce qui arrive en effet; cela tient à ce que les eaux qui s’enfoncent profondément sont dépouillées par le sol de la plus grande partie de leurs microbes et à ce que les couches profondes du sol sont exemptes . de germes. L’extraordinaire pouvoir d'épuration du sol est démontré par ce fait (constaté par MiqueL) que l’eau de la Marne est privée du plus grand nombre de ses bactéries quand on la recueille après fil- tration dans un drain (drain de Saint-Maur). Les chiffres suivants le prouvent : BACTÉRIES dans un centimètre cube. SAISONS. 0 — Marne. de Re HIVENS ETES LUE 94 855 3 815 PrMtOMPSR AR ere 35 605 1 905 ET ete VO 1e C4 Me VU ti 21 615 1 065 AUTOMNE re Le. -vE vale 82 130 2 720 Moyenne annuelle. . . . . 58 550 2 375 RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 119 Les eaux provenant de la Vanne el de la Dhuis, désignées par Miquez comme eaux de source, emmagasinées dans les bassins de Montrouge et Ménilmontant pour l’approvisionnement de Paris, contiennent un taux très variable de microbes. La moyenne annuelle est de : BACTÉRIES dans un centimètre cube. —_—— — Vanne. Dhuis. ROSERVORS 02 as os 7-10 1 240 2 900 CAnA ER e Lier snnrchreren 9 565 3 615 Ce taux est considérablement plus élevé que celui des eaux mé- téoriques. Les eaux des fleuves sont cependant encore sensiblement plus riches, comme il résulte des observations suivantes de MIQUEL : BACTÉRIES PAR CENTIMÈTRE CUBE. Seine. Marne A Ivry. PE de A Chaillot. See DES DANVIER. . . + + » 55 500 63 345 241 510 71 590 142 525 MSYTIEL. + | « « 90 590 111515 249 075 103 129 113 863 DS - .… se 2 78 230 96 870 226 425 109 845 98 310 NE . . . . 69 260 61 410 110 100 40 835 51229 A + « » à 37 310 60 280 91 020 45 210 719 370 MM. - : » 46 300 62 985 126 875 20 765 14 135 MIE 7: 4 : 18 810 34 900 92 750 36 150 19 690 EURE ne . à e 17 985 31 450 172 500 18 560 11 375 Septembre . . . . 23 085 92 405 249 750 10 140 13 290 BEIGDEON - … - : 24 450 50 245 258 875 27 440 54 395 Novembre. . . . . 45 575 65 440 158 750 126 700 135 025 Décembre. . . . . 165 125 150 170 153 875 92 250 179 625 Moyenne annuelle. 56 185 73 500 177 625 58 550 76 545 Ces chiffres montrent que les eaux de fleuve ont une forte teneur en bactéries, qui s’accroit constamment par le passage à travers une grande ville (Seine d’Ivry à Chaillot), el aussi que celte teneur atteint son minimum en été et son maximum en hiver. c) Eaux d'égout. . Dans les eaux d’égout, le taux des bactéries s’élève dans une me- sure énorme. Ce taux a été déterminé par MIQuEL dans des échan- 4 120 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. üllons pris à la bouche des collecteurs de Saint-Ouen et de Clichy à Paris. Le tableau suivant indique les résultats : BACTÉRIES PAR OENTIMÈTRE CUBE. SAISONS. A" 1891. Année moyenne. HIVOT A NUE 28 170 000 19 870 000 PHnleMps 17 330 000 19 330 000 REA es | 25 170 000 16 635 000 AUIDINne. Ne 0 17 670 000 9 220 000 Moyenne annuelle . 22 585 000 16 270 000 Sur 100 organismes il y a 40 micrococcus et bactéries et 20 ba- cilles. Malgré leur extraordinaire impurelé, ces eaux sont très vite épurées quand elles traversent le sol; car les eaux de drainage qui s’'écoulent des champs d’épuration ne possèdent plus qu'un taux relativement très faible de bactéries. À Gennevilliers, MIQuEL a trouvé, par exemple, les chiffres sui- vants par centimètre cube d’eau de drainage à ASNIÈRES. ARGENTEUIL. MOULIN DE OAGE. ÉPINAY. 5 830 38 170 8 170 26 500 L'examen de l’eau sale, noirâtre, nauséabonde qui s’écoulait d'une fosse remplie d’immondices a donné un taux moyen de 29 645 000 microbes par centimètre cube. Quand cette eau est soumise, à l’usine de Bondy, à une tempéra- ture assez élevée, elle perd une notable partie de ses organismes ; leur nombre tombe, dans certaines circonstances, à 99 020 par cen- timètre cube. . Les bactéries les plus abondantes dans l’eau sont à peu près les suivantes * : Micrococcus flavus liquefaciens, Micrococcus flavus desidens, M. aurantiacus, M. cinnabareus, M. Luteus, M. versicolor, M. candi- cans, Diplococcus luleus et diverses autres espèces, Bacillus fluo- 1. Une liste des bactéries aquatiques se trouve dans J. Eisensenc, Bacleriolo- gische Diagnostik. Hamburg et Leipzig, 1891. L. Voss, p. 22. * " dt LS RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 122 rescens liquefaciens, B. sublilis, B. erythrosporus, B. janthinus, « B. mycoides. Beaucoup d’autres espèces s’y trouvent encore : Bac- terium Zürnianum ; en outre : Crenothrix, Cladothrix, Begqiaton. d) Eaux marécageuses et slagnanles. Les eaux marécageuses et slagnantes renferment, entre autres, Bacillus butyricus, Spirillum Rugula, S. serpens, S. Undula, S. volutans, Spirochæte plicatilis. 3. — Les microorganismes du sol. Les analyses microscopiques du sol ont montré que les couches supérieures étaient extraordinairement riches en microorganismes, notamment en bactéries. Ainsi dans un gramme d’un sol de pré jusqu’à 0,20 de profondeur, M. MiquEL ‘ a trouvé en moyenne : BACTÉRIES. RS OURISS Eu Lean er: un ia ee à 700 000 Terre arrosée d'eau d'égout, , 870 000 G illiers , us Terre non arrosée. . . . . 900 000 Les bactériacées les plus abondantes sont des bacilles. D’après les recherches du même auteur, il y aurait, dans le sol cultivé, sur 100 bactériacées 90 bacilles. A la surface de l’humus, on trouva beaucoup de micrococcus. Ces résultats sont confirmés par des recherches de KR. Kocu qui montra que, même en hiver, il y avait une très grande quantité d'organismes inférieurs dans divers échantillons de sols provenant soit d’endroits très peuplés (Berlin), soit de champs éloignés. Les bacilles y étaient aussi prédominants. Dans de la terre fraîche, on trouva, en outre, des micrococcus, mais en moindre quantité. Dans quelques cas pourtant, par exemple dans des sols pris sur des places recouvertes de tas de fumiers, les micrococcus étaient plus 2 1. Annuaire de l'Observatoire de Montsouris pour l'an 1882. 2. Miltheilungen aus dem Kaiserl. Gesundheitsamte. I. Berlin, 1881, pp. 34-36, 12? DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nombreux que les bacilles et il y avait aussi des moisissures ; mais ce n’élail qu’un accident. Dans les couches supérieures du sol des contrées habilées et partout où s’exerce la culture des champs et des jardins, les bacilles paraissent exister constamment en plus grande quantité. On les a trouvés aussi abondamment dans le jardin de l’école vétérinaire de Berlin que dans un cimetière abandonné ou dans des sols de jardins et de champs, loin de lieux densément habités. L. ADAMETZ ‘ a examiné, dans deux champs voisins, des échantil- lons de sols pris à la surface et à 20-25 centimètres de profondeur. Les deux couches présentèrent des levures et des mucorinées en quantité modérée et des bactéries au contraire en nombre immense. En employant l'appareil de THomas pour compter les bactéries, on en a trouvé dans un gramme de terre les quantités suivantes: A 20-25 CENTIMÈTRES SURFACE. de profondeur. SOIISIICOUX EP Ce 380 000 460 000 SOLATPHEUX. - ee 500 000 464 000 Le nombre des mucorinées ne s’élevait qu’à : A 20-25 CENTIMÈTRES de profondeur. Sol siliceux . . , . 50 40 SON ATRIIEUX 1... 50 50 SURFACE. Les organismes appartenaient aux espèces suivantes : 1° 6 Mucorinées (Penicillium glaucum, Mucor mucedo, M. race- mosus, M. stolonifer, Aspergillus glaucus, Oidium lactis) ; 2° 4 Levures (Saccharomyces ellipsoideus, S. cerevisiæ, S. glulinis, Monilia candida) et deux espèces nouvelles de cellules semblables aux levures : elles présentent le bourgeonnement et les vacuoles des levures, décomposent le sucre, mais ne donnent pas de mycélium comme les Mucorinées ; 3° Parmi les Bactériacées : 4 Micrococcus (M. candidus, M. luteus, 1. Unlersuchungen über die niederen Pilze der Ackerkrume. (Inaugural Disser- tation.) Leipzig, 1876. RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 12e M. aurantiacus, Diplococcus luteus), 4 Bacterium (B. n° 1, B. n° 2, B. lineola, B. termo), 3 Bacillus (B. subtilis, B. n° 2, B. butyricus) et, dans le genre Vibrio (Spirillum), le V. Rugula. En ce qui concerne la répartition des microorganismes dans le sol, R. Kocn' était déjà arrivé à ce résultat que leur taux décrois- sait très vite avec la profondeur et qu’à 1 mêtre un sol non remué est presque exempt de bactéries. Même au milieu de Berlin, sur des échantillons de sol pris dans une fouille pour fondation fraichement creusée, Kocx n’a trouvé, à 1 mètre de profondeur, aucun bacille et seulement des colonies très rares de très petits micrococcus après ensemencement sur gélatine. Dans un cas, la terre provenait d’une nouvelle construction élevée dans la Philippstrasse, au voisinage immédiat de la Panke, à 2 mêtres de profondeur, niveau des eaux de la Panke, dont l'échantillon n’était distant que de 2 mètres à peine ; néanmoins 1l s’est montré extraordinairement pauvre en microorganismes. Les résultats des recherches plus approfondies exécutées par C. FRÆNKEL ‘ concordent avec l'observation de Koca. Nous mention- nerons ici seulement les chiffres de sa première série d’essais. Sol des environs de Potsdam (1886-1887). NOMBRE DE GERMES DANS UN CENTIMÈTRE QUBE. I SS ROFONDEUR. 4 sep- 3 no- P 2 octobre. 16 mars. 24 avril.| 27 mai. | 12 juin. |9 juillet.| 14août. tembre. vembre, Surface. . » | 150 000! 110 000 300 000! 95 000! 130 000! 55 000! 80 000! 0®,50 . .| 70 000! 200000! 90000 240 000! 65 000! 100 000! 75 000!85 000 0,75 . .|] 25 000 » » 40 200! 3 000 ” 8 000 » | 1m,00 . .| 1000! 2000! 2000 80 000 40 000! 7000! 3 000! 1m,50 . .| 200! 15000! 2000 200! 300 2m,00 . . » | 2000 600! : 100 200 2m,50°. .| 250] 500 700 5 150! 3.00 . . 3000! 100 100 | D 50. . 800 5 | 4,00 . . 150 1. Loc. cit. 2. Zeitschrift fur Hygiene. Vol. II. Fasc. 3, 1887, pp. 521-582. 124 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. On voit nettement par ce tableau que les couches supérieures d’un sol vierge, non remué, sont pourvues très différemment de microorganismes jusqu’à une profondeur variant de 0,75 à 1,50, mais qu’à partir de ces limites il y a une diminution subite et géné- rale du taux des bactéries et les couches plus profondes, même celles qui appartiennent à la nappe souterraine, semblent pures de germes soit aérobies, soil anaérobies. Dans la deuxième série d'essais, FRÆNKEL obtint les chiffres sui- vanls : Sol de divers points habités de Berlin (1885-1886). NOMRRE DE GERMES DANS UN CENTIMÈTRE CUBE. PROFONDEUR. 1er no- vembre, SUTACE LC 160 000 300 000 OO LS Le 5 40 000 » 10010 00 10 000 1 000! 100 000 Dr nee ) 2 000! 180 000! 20 000 INR en 6 000 3500! 65 000! 49 000 MED SU 300! 470000! 650 SN EAN 1000! 34000! 600 SRE D LEE ve 750 4,00 . Ici encore on constate une richesse extraordinaire des couches superficielles en microorganismes et la quantité des bactéries y est sensiblement plus grande que dans le sol vierge. Néanmoins, il y a ici aussi une dépression très nette à mesure qu’on s'enfonce plus profondément, déjà parfois à 1 mètre, mais le plus souvent à 1®,90 ou 2 mètres, dépression qui, procédant par larges bonds, conduit finalement à la disparition complète des microorganismes. Parmi les nombreux organismes des couches supérieures, 1l n’y a presque pas d’anaérobies. Bien que ces observations, vu leur petit nombre, ne puissent être érigées en loi générale, il faut reconnaître que le sol qui est com- pris depuis des siècles dans le cerele de l’activité humaine, sur RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 125 lequel ont vécu de longues suites de générations, qui, pendant ce temps, a dû recevoir tous les détritus de ses habitants, se comporte absolument comme un sol intact, c’est-à-dire que ses couches super- ficielles sont riches en microorganismes variés, les couches pro- fondes (en y comprenant celles qui sont au niveau de la nappe aquifère) élant, par contre, pauvres en germes ow même n'en pos- sédant pas. Cette diminution et cette disparition des bactéries, même dans des sols habités, est attribuée par FRÆNKEL en partie à ce que le sol agit comme un filtre de sable qui ne laisse pénétrer les microorganismes qu’à de faibles profondeurs, en partie aussi à ce qu’il règne à ces profondeurs une température à laquelle beaucoup de bactéries ne se développent plus, comme l’ont montré des essais directs. Parmi les autres recherches bactériologiques, celles de P. FüL- LES * sont particulièrement dignes d'intérêt, parce qu’elles s’éten- dent non seulement au nombre des organismes et à leur nature, mais aussi aux différents états du sol. Il prit : 1° de la terre prove- nant d’un champ cultivé dont la croûte de 90 centimètres d’épais- seur reposait sur une couche solide de quartz ; 2° un sol pierreux de vignoble ; 3° un sol de forêt dont la couche supérieure, riche en bumus, épaisse de 60 centimètres, reposait sur du gneiss ; 4° un sol d’une prairie située le long d’un fleuve. Tous ces sols provenaient des environs de Fribourg-en-Brisgau. A ütre de comparaison, on analysa aussi le sol du Rosskopf (739 mè- tres) et du Schauinsland (1 286 mètres). Voici les espèces trouvées : I. Micrococcus ne liquéfiant pas la gélatine : 1° Microsoccus aurun- hacus ; 2 M. candidus ; 3° M. luteus ; 4° M. candicans ; 5° M. ver- sicolor ; 6° M. cinnabareus ; 7° M. cereus albus ; 8 M. fervidosus ; 9 Coccus rouge (Mascnek). — M. liquéfiant la gélatine : 10° 4. flavus liquefaciens ; 11° M. flavus desidens ; 1% Diplococcus luteus ; 15° Surcina lulea. IL. Bacilles ne liquéfiant pas la gélatine et non pathogènes : 1° Ba- cllus fluorescens putidus ; ® B. muscoides ; 3 B. scissus ; 4° B. can- 1. Zeitschrift fur Hygiene. Vol. X, 1891, pp. 225-252. 126 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dicans ; 5° B. diffusus ; 6° B. filiformis ; T° B. luteus ; 8 Bacille de l’eau fluorescent (EHRENBERG) ; 9° B. viridis pallescens ; 10° Bacte- rium fluorescent glauque [ (ApamErTz) ; 11° B. stolonatus ; 1% Bac- terium Zürnianum ; 13° B. aerogenes. — B. liquéfiant la gélatine et non pathogènes : 14° B.ramosus liquefaciens ; 15° B. liquidus ; 16° B. mycoides (Bacille radiciforme) ; 17° B. sublilis ; 18° B. mesentericus fuscus ; 19° B. mesentericus vulgatus ; 20° B. fluorescens liquefa- ciens ; 21° B. ramosus; 22° Bacille jaune-citron (FRANKLAND) ; 23° Bacille vert jaunà' : (EISENBERG) ; 24° B. gasoformans ; 25° Ba- cille gris (MaAscHEek) ; 26° B. prodigiosus ; 27° Proteus mirabilis ; 28° P. vulgaris ; 29° B. mesentericus vulgatus (B. de la pomme de terre) ; 30° B. cuticularis ; 31° B. albus : pathogènes ; B. œdematis maligni. En outre, il y avait deux espèces non encore décrites et ne liquéfiant pas la gélatine (Bacillus, n°° 1 et 2). Le plus grand nombre des bactériacées rencontrées est du groupe des bacilles dont on a déterminé 34 espèces ; les coccus, moins nom- breux, sont au nombre de 13 : on les a trouvés surtout à la surface et rarement dans les couches profondes. Quant à l’abondance des diverses espèces, on peut dire qu’on a trouvé très abondamment, presque dans chaque essai, les organismes suivants rangés par ordre de fréquence : Bacilles n° 16, 17, 6, 20, 4, 7; Microc. 3; Bac. 28 ; Microc. 4, 2, 19; Bac. 29, 24,10, 31 si bien que, dans la série d’essais, le bacille 16 s’est montré le plus souvent et le bacille 4 est un des moins abondants, Se présentant plus rarement, c’est-à-dire pas sur chaque plaque, viennent les Microc. 10, 5, 1, 6, 7 ; Bac. 18, 19,8, 5, 27,92, 14, 8, 22,41, 2% 49 9, 143. Quant aux Microc. 9, 11, 13, Bac. 21, 26, 30, ils ne se sont rencontrés qu'accidentellement, sur quelques exemplaires dans tout le cours de ces recherches poursuivies pendant plus d’un an. En comparant les divers échantillons de la surface de ces sols, on voit qu’en moyenne ce sont les sols de prés et de bois qui offrent le mélange le plus bigarré de bactéries ; les sols de vigne et de champ ont une population plus homogène. On ne remarque pas de diffé- rence sensible dans les sortes de bactéries suivant la profondeur. Les recherches conlinuées régulièrement montrent très nettement que certaines espèces apparaissent subitement en quantités tout à il l RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 127 fait anormales et disparaissent aussi vite pour être remplacées, soit par le mélange ordinaire de bactériacées, soit par une autre espèce devenant très prépondérante. A 1 mètre de profondeur, les mucorinées existent encore souvent en grande quantité dans un sol naturel non labouré. Les levures s'y rencontrent fort rarement ; il est surprenant que le Saccharomyces glulinis s'y trouve encore à une profondeur de 1 à 2 mètres. Les sols provenant d’une grande altitude (Rosskopf, Schauinsland) avaient une population bactérienne beaucoup plus homogène que les sols cultivés. On y trouvait presque exclusivement le B. sublilis et le B. mycoides ; on aurait dit qu’on avait mélangé à dessein et cultivé sur plaques deux cultures pures de ces deux espèces. Quant au nombre des germes des divers essais, on constate que, comparativement au grand nombre de bactériacées de la surface, il y a déjà une diminution sensible à 1 mètre de profondeur et cette diminution se fait brusquement. Généralement à 1 mètre, le nombre des bactéries est, d’un seul coup, cent fois moindre. On remarque en outre que le nombre des bactériacées dans les zones superficielles des divers sols essayés varie suivant le mode de culture. C’est le sol de forêt qui accusa la plus grande pauvreté en germes, environ 600 000 par centimètre cube en moyenne ; puis vint le sol de vigne avec un taux moyen de 1050000; celui du sol de prairie fut sensiblement plus élevé : 1400 000, et le sol cultivé en contenait plus encore : 1 500 000. Le plus fort nombre trouvé fut 6 000 000 ; le taux ne descendit pas, en général, au-dessous de 70000. A une profondeur d’un mètre, le nombre était beaucoup plus faible. Dans la série en expérience, forêt, vigne, pré et champ, on trouva dans un centimètre cube, en moyenne, 128 000, 46 000, 134 000 et 330 000 germes. Comme les recherches ne purent avoir lieu régulièrement à de plus grandes profondeurs, on ne peut plus donner de résultats comparables. Le taux moyen à 2 mètres de profondeur fut de 17000. On ne put trou- ver qu'une fois un sol exempt de germes. Naturellement les échan- üllons provenant de terrains rapportés possédaient un taux de germes notablement supérieur ; c’est ainsi qu’un centimètre cube de terre à 2 mètres de profondeur contenait environ 160 000 germes. Les sols des hautes altitudes renfermaient encore moins de germes que n’en avaient donné la plupart des autres comptages. Tandis qu’au Rosskopf (739 mètres) on en trouva 200 000, le sol de Schauinsland (1286 mètres) ne contenait que 100000 bactériacées par centi- mètre cube. Vu le petit nombre de recherches faites jusqu'ici, on ne peut poser de conclusions nettes, d'autant moins que les conditions nécessaires pour la présence et la multiplication des microbes sont soumises dans le sol à des variations extraordinaires et sont très dif- férentes suivant les localités. Ainsi, à côté des organismes cités par ADAMETZ et FÜLLES, beaucoup d’autres ont été trouvés dans les sols par d’autres bactériologistes ? ; par exemple, dans cerlaines circons- lances, on rencontre assez souvent d’assez grandes quantités de B. butyricus, B. racemosus, B. thermophilus, B. viscosus, etc.; en outre, le B. terrigenus et, parmi les espèces pathogènes, avec le B. œdematis maligni, le bacille du tétanos, le Staphylococcus pyogenes aureus, le Streptococcus septicus, le Bacillus seplicus agrigenus, le Pseudoædembacillus. L'influence de la couverture végétale et des modes de culture re- tentit de façons extrêmement diverses sur la présence des microbes. C’est dans le sol agricole travaillé que le nombre des germes est toujours le plus grand et les bactéries s’y trouvent en plus forte pro- portion que les mucorinées. Au contraire dans les sols non travaillés, où la décomposition des matières organiques se fait lentement, où s'accumulent d’assez grandes quantités d’humus acide comme dans les forêts, les prairies, les terrains fangeux, les bactéries cèdent le pas aux mucorinées, du moins dans les couches supérieures où l'air pénètre. Dans les prairies tourbeuses et surtout dans la tourbe, les bac- téries ne se présentent que disséminées ou manquent presque complètement. Sur les bactéries nitrifiantes, qui doivent être ici traitées à part, les essais de R. WariNGron * surtout donnent des éclaircissements. 128 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 1. J. EisensEerc, Bacteriologische Diagnostik, 1891. 2, Journ. of the Chem. Society. 1884, vol. XLV, pp. 637-672. dé RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 129 Dans deux séries il trouva des organismes nitrifiants jusqu’à une profondeur de 46 centimètres (dans un cas, jusqu’à 91 centimètres), mais pas plus bas. Des recherches plus récentes du même auteur, failes d’après une méthode perfectionnée *, ont montré que les bac- térics nitrifiantes se rencontrent jusqu’à une profondeur de 1,50 à 4,80, mais exercent une influence d’autant plus faible etsont d’au- tant plus rares que les couches du sol dont elles proviennent sont plus profondes. Elles se comportent donc à cet égard comme les autres microbes. Dans la nature, la nitrification n’est à considérer que dans les zones superficielles du sol, parce que les conditions de ce processus (facile accès de l'air, richesse en matières azolées) sont plus favora- bles que dans le sous-sol. Si cependant on trouve dans les eaux de drainage ou dans le sol à d’assez grandes profondeurs des quantités plus ou moins considérables de nitrates, on ne doit pas conclure qu’elles se sont formées là; elles proviennent principalement des couches supérieures el ont été entraînées dans les zones profondes par les eaux d'infiltration. De toutes les observations faites jusqu'ici, il résulte que les orga- nismes nitrifiants alteignent leur taux maximum, très variable du reste, dans les sols arables el dans tous ceux où l’air pénètre facile- ment, qu'ils manquent dans les sols de prés, de bois et de tourbe ou ne s’y trouvent que dans certaines conditions et seulement en petil nombre. Déjà BoussiNGauLT* avait montré la grande pauvreté de la plu- part des sols de forêt en nitrates; cette constatalion fut confirmée par CHABRIER*, qui trouva que le taux du sol en nitrites et ni- trates sous des épicéas était beaucoup plus faible que celui d’un sol cultivé de même nature. SCHLŒSING* ne put trouver trace de ces sels dans un sol boisé, tandis qu’un sol calcaire labourable en ren- fermait des quantités notables. De même, dernièrement, A. Bau- 1. Ibid. Vol. LI, 1887, pp. 118-129. D GR, 1857. 3. C. R., t. LXXIIL, 1871, pp. 186 et 1480. 4. C. R., t. LXXIIL, 1871, p. 1326. MATIÈRES ORGANIQUES. 9 130 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. MANN! n’a pas trouvé d’acide nitrique dans un sol de forêt, et les re- cherches d'E. EserMAYER* dans les localités les plus diverses, choisies surtout dans les montagnes de Bavière, ont toujours montré que les sols forestiers et les sols tourbeux sont exempts de nitrates ou n’en renferment que des quantités extrêmement faibles, tandis que les sols de champs et de jardins qui avaient reçu du fumier, du purin, elc., accusaient généralement une grande richesse en ce précieux aliment des plantes. Tous ces résultats autorisent à conclure que dans les sols de prai- ries, de foréls et de tourbières, les organismes nilrifiants ne rencon- trent pas d'ordinaire les conditions nécessaires à leur existence. A cette règle cependant, il y a des exceptions. Ainsi, dans beaucoup d: prairies et de sols forestiers et tourbeux défrichés, on a trouvé des doses non négligeables de nitrates, et même GREBE* a déterminé un taux élevé de nitrate dans le sable d’une pineraie. Il faut en déduire que le manque de nitrate ou son peu d’abondance dans les sols pré- cités est lié à une composition particulière de ces sols. Les travaux de A. Münrz* nous apportent sur ce point des données précieuses. Münrz employa divers sols à réaction acide (terre de bruyère, tourbe) et neutre (sol de champ et de jardin) ; il leur ajouta des ma- lières organiques animales (sang en poudre, cuir pulvérisé) et déter- mina, au bout d’un temps assez long, les quantités d’ammoniaque et de nitrate qui s'étaient formées. Voici les résultats : TERRE DE BRUYÈRE. TERRE TOURBEUSH. ne — a — ——— Re ii CURE RES Ammo- Acide Ammo- Acide RATE RTE niaque. nitrique. niaque. nitrique. milligr. milligr. milligr. milligr. 100 grammes de terre. . . . 275 0 ul 0 100 grammes de terre avec CUITE POLE nn. 28,9 0 2151 0 100 grammes de terre avec sang en poudre. . . . . 73,9 0 39,7 0 {. Ucber die Bestimmung des im Boden enthallenen Ammoniakstickstoffs und über die Menge des assimilirbaren Slichstoffs im unbearbeilelen Boden. (Habili- lationsschrift. 1886.) ?, Allgemeine Forst- und Jagdzeitung, par Loney et Leur. Août 1888. 3. Zeilschrift fur Forst- und Jagdwesen. Fasc. 19, 1885, p. 157. 4 CR.) LC, 1890 p'u208;: LÀ Dors _ . RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 131 DURÉE DE L'ESSAI. — 11 jours. 65 jours. Sol de champ. Sol de jardin. A —" , A milligr. milligr. milligr. milligr. 100 grammes de terre . . 0,1 7,0 0,9 24,4 100 grammes de terre avec cuir en poudre . . . . 0,9 312,6 29,2 135,6 100 grammes de terre avec sang en poudre. . . . 1: 281,1 23,9 99,3 Ces chiffres semblent établir suffisamment que, dans tous les cas où les sols montrent une réaction acide, il ne se forme pas de nitrate, et que les sols de cette nature (c’est le cas de la plupart des sols de prairie, de forêt et de tourbière) n’offrent pas un milieu favorable aux organismes nitrifiants. GREBE a montré qu’il y a des exceptions à cette règle ; toutefois elles ne se présentent que dans des cas où le sol n’a pas de réaction acide. Résumons les résultats des recherches consignées dans ce cha- pitre : 1° Le sol renferme en quantités variables de nombreux microor- ganismes (jusqu'à 6 000 000 par centimètre cube) qui sont des bac- tériacées, des levures et des mucorineées. 2° Ces organismes n'existent que dans les couches supérieures du sol, el déjà à 1 mètre de profondeur leur nombre diminue beau- coup ; il est nul à ? mèlres dans la plupart des cas. 3° Généralement, les bactéries sont les plus nombreuses, puis viennent les mucorinées ; les levures ne se présentent qu'à l'état sporadique. 4 Les bactériacées sont principalement représentées par divers bacilles ; les micrococcus sont bien moins nombreux et n’ont été observés avec quelque abondance que duns les couches supérieures du sol. 9° Dans les sols à réuction acide (prairies, forêts, tourbiéres), les baclériacées sont supplantées par les mucorinées, et les organismes mlrifiants ne peuvent vivre. 132 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 4. — Les microorganismes sur les substances organiques en décomposition. Les restes de plantes où d'animaux qui entrent en décomposition à la surface du sol sont, tout comme le sol lui-même, habités par des organismes extrêmement nombreux. Ce n’est pas seulement d’après les rapports bien connus des microorganismes avec la série des combinaisons des matières organiques qu’on peut parler ainsi, c’est aussi d’après diverses observations encore insuffisantes d'ail- leurs pour pouvoir indiquer exactement les espèces qui habitent les différentes substances. On a trouvé sur les fèces: Bacillus aerogenes, B. sublilis, B. thermophilus, B. muscoides, B. pulrificus coli, les bacilles de B1en- sTOCKk, B. coprogenes fœlidus, B. Zopf, etc. Ces espèces ont été aussi en grande partie observées sur le fumier et autres matières en décomposition, surtout animales, avec Bacillus saprogenes, B. mesentericus fuscus, B. bulyricus, B. fluorescens liquefaciens, B. fluorescens pulidus, B. erythrosporus, B. janthinus, Proteus vul- garis, P. mirabilis, etc. Les zones de fumier où l’air pénètre hébergent divers hyphomy- cètes, parmi lesquelles on doit citer: Pilobolus cryslallinus Tops, Mortierella Rostafinskii BREFELD, Coprinus stercorarius BULLIARD, Sordaria minula FuckeL, S. Brefeldii Zukaz, S. curvula DE Bary, S. decipiens Winter, S. pleiospora, S. Wiesneri, Thamnidium ele- gans Link, Ascobolus pulcherrimus CRouan, A. denudatus FR., À. furfuraceus PERSOON, Syncephalis cordata Van Tiecnem et LE MoN- NIER, Ascodesmis nigricans VAN TiEGHEM, diverses espèces de Suc- cobolus". Dès que les matières organiques en décomposition ont une réac- tion acide, comme c’est le cas, par exemple, pour l’humus brut (Rohhumus) des forêts, ce sont des champignons plus différenciés qui interviennent surtout ; on voit partout dans le sol forestier leur mycélium abondamment développé. D'après Næ&GELr, ce sont les hyphomycètes, encore peu étudiés, qui contribuent essentiellement à 1. Comparer W. Zorr, Die Pilze. Breslau, 1890. RÉPARTITION DES MICROORGANISMES. 133 produire les matières colorantes foncées de l’humus. P, E. MÜLLER" a décrit dans les couches d’humus brut des forêts un type de Clado- sporium qui forme des filaments de teinte foncée très résistants (fig. 43). D’après Frün, ce champignon est absolument caractéris- tique pour les dépôts d’humus brut (Rohhumus). [Voir la 2° partie.] F1G. 43.— Mycélium du Cladosporium humifaciens Rosre. (D’après MULLER.) La participation de ce mycélium aux processus de décomposition n’a pas encore été étudiée de près. Il n’est pas douteux du reste que dans les couches un peu épaisses d’humus acide s’installent les mu- corinées ordinaires. 5. — Les microorganismes sur les plantes. Sur les plantes et dans les infusions végétales, on a signalé : B. mesentericus fuscus, B. mesentericus vulgatus, B. prodigiosus, B. butyricus, B. megatherium (voir Note À), B. sublilis, B. tumes- cens, :elc. Dernièrement, E. BréAL? a trouvé un ferment dénitrifiant sur la paille, le foin de luzerne, Les tourteaux de maïs, etc. (voir p. 92). 1. Sludien über die natürlichen Humusformen. Berlin, 1887. 2, Annales agronomiques, t. XVIII, n° 4, pp. 181-195. CHAPITRE VI CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES Les organismes inférieurs ont, comme les plantes plus élevées en organisation, des exigences déterminées vis-à-vis des facteurs exlé- rieurs de la végétation; el la connaissance de ces exigences offre le plus haut intérêt, puisqu'on peut acquérir par elle une vue nette des réactions assez compliquées qui se succèdent dans la nature et des mesures pratiques à employer”. Pour la mise en jeu de ces réactions qui constituent la vie des cellules, il faut avant tout qu’il se dégage une certaine somme d'énergie, sans laquelle la vie de l’organisme est impossible. Cette énergie est fournie par les transformations qui s’ef- fectuent dans les organismes inférieurs, où, d’abord, grâce au proto- plasma vivant, les combinaisons compliquées se résolvent en plus simples, en donnant comme produit constant de l’acide carbonique. A côté de ce processus (respiration intramoléculaire) qui n’exige pas d'oxygène et qui est dans la plante la cause première de la produc- tion d'énergie, il en est un autre, avec intervention de l'oxygène, qui est nécessaire (quand l’énergie dégagée uniquement par les transfor- mations internes est insuffisante) pour satisfaire complètement aux besoins de la plante. Pour couvrir le déficit d'énergie ,.il faut de puissantes oxydations. Mais le dégagement de force qui en résulte est réglé moins par la quantité d’oxygène mise à la disposition que par les décompositions dans le protoplasma (par la respiration intra- moléculaire) qui excitent et qui gouvernent l’absorption d'oxygène. Chez beaucoup d'organismes inférieurs (bactériacées), la faible somme d'énergie dégagée par la respiration intramoléculaire est suffisante pour l’exercice des fonctions vitales, ou bien ces organismes {. On a surtout utilisé pour la rédaction de ce chapitre l'ouvrage détaillé de C. Fiüccr, Die niederen Organismen. Leipzig, 1886. CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES. 135 ont la faculté d’extraire l’oxygène de certaines combinaisons et de l'employer pour leur oxydation. « Dans le plus grand nombre des cas, la respiration intramoléculaire ne suffit pas d’ailleurs d’une manière durable à satisfaire à la consommation d'énergie des bacté- riacées, mais elles peuvent se passer d'oxygène tant qu'il y a un succédané approprié. Ce succédané est fourni notamment par la fermentation, dans laquelle une forte quantité de matière se détruit à la surface du milieu nutritif, de manière à rendre libre une somme d'énergie équivalente à celle que dégage l'oxydation. La fermenta- tion peut donc suppléer à l’oxygène. « Absorption d'oxygène et fermentation doivent être considérées comme deux faits équivalents quant à leur action sur la vie des champignons inférieurs. » (FLÈGGE.) A côté de la respiration qui exige, qu’elle se fasse avec ou sans oxygène, un afflux incessant de matériaux nutritifs destinés à la _ décomposition et à l’oxydation, il y a, en outre, dans les cellules un processus d’assimilation auquel incombe la tâche de transformer les aliments absorbés en combinaisons appropriées, soit à des dédou- blements ultérieurs, soit à la croissance et à la multiplication de l'organisme et qui possède dès lors un caractère essentiellement différent du processus de la respiration. La décomposition des ma- tières organiques sous l’action des végétaux inférieurs est réglée (pas exclusivement) par les réactions dont il vient d’être question dans le protoplasma (respiration intramoléculaire et oxydation), mais chez certaines espèces elle est encore favorisée par la sépara- tion de ferments (Enzymes) qui sont des composés organiques com- plexes, solubles, facilement décomposables et pouvant transformer des quantités relativement grandes d’autres matières organiques. Il se forme de celte façon des combinaisons qui sont solubles, diffu- sibles et peuvent servir d’aliments. C’est ainsi que le Bacillus sub- hilis et beaucoup d’autres bactéries liquéfiant la gélatine nutritive produisent un ferment qui transforme en peptone l’albumine inso- luble. Le Bacillus butyricus et le Spirillum Rugula en sécrètent un autre qui dissout la cellulose ou encore, dans les produits formés par maintes espèces de bactéries, se rencontre une diastase qui transforme l'amidon en divers glycoses (maltose, dextrose, etc.). On 136 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. doit citer aussi les ferments produisant linversion du saccharose, du lactose et du mallose en dextrose, galactose et lévulose et dont la présence a été observée aussi bien chez certaines moisissures (Aspergillus et Penicillium) que chez les levures et beaucoup de schizomycètes. Le ferment de l'urine qui dédouble l’urée en carbo- nate d’ammoniaque et l'acide hippurique en glycocolle et acide ben- zoïque provient de même de certains organismes décrits plus haut. Les réactions provoquées par les ferments sont essentiellement différentes de celles qui se passent dans les fermentations reposant sur la respiration intramolécylaire. « Les ferments sont des com- posés chimiques, solubles, qui ne sont pas nécessairement liés à des organismes vivants el qui peuvent réaliser seulement des séparations par hydrolyse, tandis que dans la fermentalion proprement dite il y a des modificalions compliquées dans le groupement des atomes, lesquelles supposent la présence constante, l'intervention immédiate d'organismes vivants. La comparaison des circonstances extérieures favorables et défavorables dans les deux processus fait le mieux res- sortir leur différence essentielle : les ferments solubles agissent avec leur maximum d'intensité vers 60° et dans un milieu acide ; d’assez fortes doses d'acide carbolique, d'essence de térébenthine n’affai- blissent presque pas leur action : dans les mêmes conditions nous observons toujours un arrêt complet de la vie ou de l’activité fer- mentative de tous les microorganismes. » (FLÜGGE.) Résumons brièvement les conditions d’existence des trois groupes d'organismes distingués plus haut. 4. — Conditions d'existence des mucorinées ou hyphomycètes :. Les mucorinées réclament essentiellement pour l’organisation de leurs Lissus des malières organiques carbonées et azotées, de l’eau el des principes minéraux. Des substances albuminoïdes surtout peptonisées, des amides (leucine, tyrosine, asparagine), des hydrates de carbone (notamment les sucres), des acides organiques (tar- 1. Nous rappeluns encore que nous considérons ici ces deux termes comme Sÿno- nymes. L | | ' | CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES. 187 trique, citrique, succinique, acétique, etc.), sont, avec les phosphates et sulfates alcalins ou alcalino-terreux, les principales sources d’ali- mentalion pour les mucorinées. L'ammoniaque et les nitrates ne leur fournissent de l’azote que s’il y a dans le substratum un composé organique non azolé, ou si l’ammoniaque y est en combinaison avec des acides organiques. L'eau est de grande importance pour les mucorinées : elle entre dans la composition de leurs tissus, elle sert de moyen de dissolu- lion ou de transport, et remplace l’eau évaporée. La végétation des mucorinées n’est luxuriante que si le substratum leur offre, outre les aliments nécessaires, une dose assez élevée d'humidité; elle diminue avec le desséchement du substratum et cesse quand le taux d’eau descend au-dessous de certaines limites. Les mucorinées sont incomparablement plus indifférentes que les saccharomycètes et les schizomycètes à la concentration du milieu nutrilif; elles prospèrent encore dans un milieu dont le taux d’élé- ments solubles serait trop faible pour permettre à ces dernières de vivre. Pourtant il y a aussi une limite qui ne saurait être dépassée sans que le développement en souffre. La réaction du milieu nutritif est d’une importance particulière pour la bonne végétation des mucorinées. Un excès d’alcali est nui- sible, non pour toutes, mais pour la plupart, tandis qu’elles pros- pérent à merveille en présence des acides, pourvu que ceux-ci ne soient pas en excès, ce qui serait dommageable; c’est l'opposé des schizomycèêtes qui, en général, sont entravés dans leur développe- ment Gu tués quand le milieu nutritif a une réaction acide. Suivant les circonstances, les mucorinées peuvent, à l’aide de ferments qu’ils sécrètent, rendre solubles des matières organiques insolubles, comme cela a été démontré, par exemple, pour le Peni- cillium et lAspergillus niger, qui produisent un ferment interver- üssant le sucre de canne et le maltose. La dissolution, souvent observée, de la cellulose par des mucori- nées ayant pénétré dans des organes végétaux doit êlre aussi attribuée à l’influence de ferments. L’oxygène atmosphérique, sans lequel les mucorinées ne peuvent vivre, a pour elles une énorme importance. À cet égard, elles sont, 133 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. suivant l'expression de Pasteur, aérobies et ne se trouvent abon- damment que là où existent, avec les aliments et l'humidité néces- saires, des quantités suffisantes d'oxygène. C’est pour cela qu’on les observe surtout à la surface des substances en décomposilion ou bien dans celles de leurs zones qui sont pénétrées par l'oxygène. Quelques mucorinées (Mucor) ont la faculté, une fois plongées dans les solutions et soustraites ainsi à l'influence de l'air, de dé- velopper des bourgeons comme les levures, et ces bourgeons se développent normalement et frucüufient quand ils sont amenés à la surface par la fermentalion qu'ils occasionnent. Chez les mucorinées comme chez tous les autres organismes, les réactions vitales sont sous la dépendance de la température. C’est par une température moyenne déterminée (oplimum) qu’elles se font le plus énergiquement; leur intensité diminue quand la température décroil (elle devient nulle pour un minimum donné), ou quand, au contraire, elle dépasse l’optimum en s’élevant jusqu’à un point (maximum) où les réactions cessent. Ce point cardinal de l'action de la température et particulièrement le minimum et le maxi- mum au delà desquels la vie s'arrête n’ont pas encore élé déterminés pour la plupart des espèces. Les voici pour le Penicillium glaucum : MINIMUM, OPTIMUM. MAXIMUM. ps 220 430 Pour l’Aspergillus glaucus, optimum est 12, le maximum 30°; pour l’A. niger, l'optimum est à 34°-35°. Autant qu’on peut en juger maintenant, les limites de température sont différentes pour chaque espèce, si bien que ce facteur fait souvent pencher la balance en faveur de telle ou telle espèce. Ainsi ADAMETZ a trouvé qu’en semant un mélange de spores, le Penicillium glaucum, aux températures inférieures à 12, l’emportait sur les mucorinées, tandis qu’à des températures plus élevées (20°-25°) le même milieu nutritif se cou- vrait d’une abondante végétation de mucors qui étouffaient les pe- tites colonies de Penicillium. Mentionnons aussi que les limites de température pour les diverses fonctions (germination, formation du mycélium, fructification) sont différentes pour une seule et même espèce. D'après FR&NkEL, le mycélium de l’Aspergillus fumigatus, # CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES. 139 par exemple, végèle encore vers 51°-5%, mais il ne peut fructifier à cette température. La formation des spores ne commence que quand la température à laquelle est soumis le champignon descend à 37°. La germination des spores est liée à la présence d’une dose d’hu- midité suffisante, d'oxygène libre et d’une température convenable. Les matières nutrilives nécessaires pour le développement du tube germinatif sont empruntées à la spore elle-même. 2. — Conditions d'existence des levures. Relativement à leurs exigences alimentaires, les levures se com- portent comme les mucorinées avec cette seule différence qu’en raison de leur taux plus élevé d'azote, il leur faut plus de matières azotées et sous une forme convenable, car elles ne peuvent utiliser l’azote des nitrates. Elles supportent moins bien que les mucorinées une assez forte concentration du milieu nutritif, et les combinaisons nourrissant mal ne peuvent être employées que très diluées, tandis que le sucre, même à la dose de 35 p. 100 dans la solution nutritive, n'arrête pas la végétation des levures. Quant à la réaction du sub- stratum, les levures montrent une grande sensibililé vis-à-vis de l’alcali en excès, mais, d'autre part, elles supportent une réaction acide ; il y a pourtant une limite au delà de laquelle celle-ci com- mence à avoir une influence nuisible, moindre que pour les muco- rinées. Les exigences des levures au point de vue de l’oxygène sont très différentes de celles des mucorinées : ces exigences se précisent par ce fait que la croissance et la multiplication de ces organismes sem- blent plus actives sous l'influence de l'oxygène, lequel devient inu- tile dès qu’on place les levures dans des conditions où elles peuvent fermenter activement. Si ce n’est pas le cas, la multiplication cesse et ne reprend que s’il survient des quantités suffisantes d'oxygène hbre. De cette propriété spéciale il résulte que les levures peuvent végéler dans l’intérieur des substances, en l’absence d'air, à condi- tion qu’elles puissent développer une fermentation. La température est aussi un facteur important pour le déveluppe- ment des levures ; elle offre, comme pour tous les autres organis- 1 mes, un minimum, un optimum et un maximum. L’eptimum semble être à 25°-30°, le maximum à 53° et le minimum à quelques degrés au-dessus de 0°. L’accroissement dépend essentiellement d2 la com- position du milieu nutritif, suivant qu’elle permet une fermentation plus ou moins intense. Tant que les aliments offerts sont de quantité et de forme telles que l’activité des cellules peut persister sans trou- ble, la multiplication par bourgeonnement continue ; si les conditions d'alimentation deviennent défavorables, elle s’interrompt et le cham- pignon se met à former des spores pour assurer son existence. Pour la germination des spores, il faut tout d’abord le concours de l’oxygène, de l’humidité et d’une certaine température: les ali- ments sont superflus dans les premiers temps, parce que les premiers bourgeons se forment aux dépens des matières de réserve accumu- lées dans les spores. 140 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 3. — Conditions d'existence des bactériacées. Leurs exigences nutritives sont extraordinairement diverses: tandis qu'aux unes il faut de grandes quantités de certaines matières albu- minoïdes et un substratum nutritif de composition bien déterminée, d’autres admettent une assez grande variété dans leur alimentation, mais prospérent seulement ouand le milieu nutritif renferme des combinaisons organiques complexes. Même au point de vue de leurs exigences relativement à une concentration plus ou moins accusée de l’aliment, on constate chez les diverses bactéries des différences très importantes. En général, les aliments des bactériacées ressemblent à ceux des mucorinées. Des matières albuminoïdes diffusibles, des combinai- sons amidées, des sucres, des sels alcalins, des acides organiques, sont ce qui convient le mieux à la plupart d’entre elles. Les sels am- moniacaux sont moins favorables, mais sont pourtant mieux sup- portés par elles que par les levures. Les bactériacées peuvent aussi prendre leur azote aux nitrates : cependant, cette réduction semble être un phénomène provoqué par des produits de dédoublement et de fermentation et ne faisant qu'accompagner les réactions intimes chez les bactéries. (FLüGGE.) Celles-ci peuvent se préparer elles- | mêmes des aliments utilisables, en sécrétant des ferments qui solu- bilisent diverses malières insolubles. D'après les recherches de WinoGrapsky, les bactéries nitrifiantes s’écartent, sous le rapport de la nutrition, de tous les autres micro- organismes en ce qu’elles peuvent assimiler le carbone de l'acide carbonique. Si cette observation se vérifiait, elle conduirait à renon- cer à l'opinion actuellement admise qu'une synthèse complète de substances organiques par des êtres vivants, indépendamment de Ja lumière solaire, est impossible, ou, du moins, 1l ne faudrait plus lui attribuer qu’une valeur limitée. (Voir Note B.) Les bactériacées sont extrêmement sensibles à un excès d’acidité du milieu nutritif; dans ces conditions, elles périssent généralement. Par contre, leur multiplication et leur activité sont favorisées par une faible alcalinité du substratum. Elles se séparent essentiellement par là des mucorinées, qui, on l’a vu plus haut, offrent le caractère contraire. Il y a cependant des exceptions; certaines espèces, comme le Bacillus aceticus et le B. bulyricus, non seulement supportent sans dommage une forte acidité, mais même, comme le champignon du vinaigre, ne prospèrent que dans des milieux nutritifs avec excès d'acide. Un excès d’alcalinité est alors nuisible à ces espèces. Beau- coup de champignons (Micrococcus ureæ, M. ureæ liquefaciens, Bacillus ureæw) supportent un degré très élevé d’alcalinité ; d’autres manifestent une telle indifférence pour la réaction du milieu, qu’on les voit commencer leur développement dans un milieu acide et le continuer avec un excès d’alcali provoqué par les transformations de leurs éléments. (FLÜGGE.) D'ailleurs, la plupart des bactériacées, comme les mucorinées el les levures, ne peuvent se développer ou ne s’accroissent que fort peu dans un miiieu nutritif où le taux, soit d’acide, soil d’alcali, dé- passe certaines limites, ou bien qui renferme une solution saline trop concentrée, de quelque nature qu'elle soit. Quant au besoin d'oxygène, on doit, d’après P. LiBorius', divi- ser les bactéries en trois classes : CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES. 141 1° Anaëérobies obligaloires, dont toutes les fonctions ne peuvent 1. Zeilschrift fur Hygiene. Vol. I, 1886, p. 115. 142 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. s'exercer qu’en l’absence d'oxygène ; quelques-unes provoquent des fermentations ; d’autres se multiplient sans fermentation; mais pour les premières, la fermentation n’est nullement une condition indis- pensable de leur multiplication. L'arrivée de l’oxygène arrête toutes les manifestations extérieures de la vie chez ces bactéries. A ce groupe appartiennent, par exemple, Bacillus butyricus, B. denitri- ficans IT, B. muscoides, Spirillum Rugula (Bacterium termo) ; 2% Anaérobies facullatives : ce sont celles qui végêtent aussi vi- goureusement que possible en présence de grandes quantités d’oxy- gène, mais qui consomment encore une portion nolable de la matière nutritive en l’absence complète d'oxygène et qui augmentent encore sensiblement, bien qu’un ralentissement dans la croissance coïncide avec la cessation de l’arrivée de l’oxygène. Dans l’état actuel de nos connaissances, on doit compter dans ce groupe : Bacillus acidi lac- lici, B. erythrosporus, B. candicans, B. putrificus coli, B. mycoides, B. stolonatus, B. aerogenes. Mais il peut se faire qu’on doive y faire rentrer une longue série d’espèces; c’est ce que l’on doit conclure de l'observation de N&GeLr que les bactéries aérobies végètent en l’ab- sence de l’air et peuvent se multiplier, si elles se trouvent dans des conditions qui leur permettent de provoquer une active fermentation. Beaucoup de bactériacées exercent des actions différentes sur le substratum, suivant qu’elles sont obligées de vivre avec ou sans air. Du moins le fait a été démontré pour le Bacillus mycoides (p. 47) qui, s’il se développe en aérobie dans les solutions d’albumine, brûle l’albumine en donnant naissance à de l’ammoniaque, tandis que dans les solutions sucrées de nitrate, en l’absence d’air, il brûle le sucre et emprunte l'oxygène qui lui est nécessaire aux nitrates facilement réductibles. Il peut se faire que d’autres bactéries aient semblable propriété ; 9° Aérobies obligatoires : ce sont celles qui, en toutes circonstances, ont besoin d’une dose abondante d'oxygène; quand elle est trop res- treinte, toutes les manifestations vitales s'arrêtent; aucune de ces bactéries ne donne lieu à des fermentations nettement déterminées. Chaque phase de la végétation est sous la dépendance de la tempé- rature du milieu ambiant ; les bactéries n’échappent pas à cette loi. D'après ce qu’on vient de voir, elles ont une large marge pour les CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES. 143 fonctions de nutrition et un optimum de température très élevé pour leur accroissement. Le Bacterium termo, par exemple, peut végéter entre ° et 40°; son oplimum est à 30°-35°. D’après Firz, le Bu- cillus butyricus a son optimum à 40° et son maximum à 45°. Pour le Bucillus aceticus, optimum gît entre 20° et 30°; au-dessous de 10°, il se développe très lentement, de même au delà de 55°, le maximum est à quelques degrés plus haut. BREFELD a trouvé que la végétation du Bacillus subtilis est très lente à 6°; qu’à 12,5, il s'écoule entre les débuts de chaque nou- velle partition 4-5 heures; à 25°, 3/4 d'heure; à 30°, une demi- heure. Les températures nécessaires à la germination semblent être plus élevées, du moins pour quelques espèces. Nombre de bactéries peuvent sans périr outrepasser à un tel degré les limites inférieures de température, qu’on peut bien dire qu’elles n’en ont pas à l'égard de la végétation. La limite supérieure après laquelle la mort sur- vient est à peu près la même pour les cellules végétatives de la plu- part des bactéries que pour la plupart des cellules végétatives des autres plantes, c’est-à-dire vers 50°-60°. Quelques-unes résistent même à des températures de plus de 100°. La formation des spores chez les bactériacées paraît dépendre des mêmes conditions que chez les levures el les mucorinées, en ce sens que la multiplication des cellules par partition se continue tant que les aliments sont à un état convenable ; mais, si le milieu nutri- tif se détériore ou s’épuise, l'organisme forme des spores ; c’est en général un fait rare dont les conditions ne sont pas encore suffisam- ment éclaircies, non plus que pour la germination des spores, à pro- pos de laquelle on sait seulement qu’il faut un certain taux d’eau, une température assez élevée, différente pour chaque espèce et, pour la plupart, la présence de l'oxygène. C’est seulement chez les anaé- robics obligatoires que cette dernière condition ne paraît pas néces- saire à la germination des spores, sans qu’elle lui nuise cependant. 4. — Concurrence entre les mucorinées, les levures et les bactériacées. La présence simultanée sur un seul et même substratum d’indi- vidus des trois groupes principaux que nous avons distingués ou de 144 - DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. diverses espèces d’un même groupe développe une concurrence dans laquelle dominent ou même règnent exclusivement ceux qui, dans le cas donné, rencontrent les circonstances les plus favorables à leur développement et à leur multiplication. Dans un cas, ce sera la composition chimique du milieu nutritif ou sa concentration ou sa réaction où son taux d'humidité qui aura linfluence prépondérante; dans un autre, ce sera l’accès de l’air, la température, etc. Ainsi, pour ciler quelques exemples, dans un mélange acide, assez pauvre en eau, où l’air pénètre, les mucorinées ou les levures auront le des- sus, Landis que les bactériacées seront plus ou meins complètement supplantées ; celles-ci, au contraire, l’emporteront si le substratum à une concentration plus faible, une composition alcaline, un taux d’eau assez élevé et si l'accès de l'air est limité ou complètement suspendu. Il peut y avoir aussi concurrence entre diverses espèces d’un seul el même groupe, concurrence dans laquelle interviennent, pour dé- terminer soit la prédominance, soit l’annihilation de l’une ou l’autre espèce, d’autres conditions que la composition du milieu nutritif. La température, par exemple, peut avoir une inflience prépondérante. Si l’on sème un mélange de spores de Penicillium et d’Aspergillus, à basse température, ce sera le Penicillium qui envahira tout le mi- lieu nutriif; avec une plus forte chaleur, ce sera l’Aspergillus. Ces exemples suffisent à montrer que, dans la nature, les divers microorganismes influent sur leurs substratums de façons extrê- mement variables, suivant les conditions d'existence qui leur sont offertes. Comme celles-ci sont très différentes pour chaque espèce et se modifient en outre continuellement, il n’est pas étonnant que le développement de chaque organisme aussi bien que les processus chimiques qu’il provoque soient sujets à de perpétuelles variaiions ; aussi la découverte des réactions qui se passent dans la nature, no- tamment des causes premières des phénomènes dans les cas con- crels, est-elle un des plus difficiles problèmes de la biologie. CHAPITRE VII CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES Après avoir jusqu'ici exposé les faits qui montrent l'intervention des organismes inférieurs dans les processus de décomposition, il faut maintenant parler des conditions auxquelles ces processus sont soumis in specie. Gomme ils sont régis par l’activité de ces microor- ganismes, On pourrait, il est vrai, conclure à priori que le cycle de ces réactions correspond aux exigences biologiques des êtres qui les provoquent, comme on l’a montré ci-dessus ; mais on se ferait ainsi une idée insuffisante des circonstances décisives, d’un côté parce que l'influence des facteurs varie de mille manières qui doivent être exposées en détail, et, de l’autre, parce que certaines conditions qui n’ont été qu'indiquées jusqu'ici jouent un rôle important dans la décomposition des matières organiques. Si, dans ce qui va suivre, il n’est question que de l’érémacausis et de la putréfaction, cela tient uniquement à ce que ces deux processus sont du plus haut intérêt pour l’agriculture, tandis que les autres modes de décomposition sont beaucoup moins importants et ont été exposés plus haut. (Voir p. 66-109.) 4. — Conditions de l’érémacausis. a) État physique et chimique des matières organiques. En ce qui concerne la décomposition en plein air, l’état de la ma- tière organique est de grande importance ; car l’intensité de cette décomposition dépend à un haut degré tant de la quantité, de la concentration et de l’état de division de ta matière que de sa com- position chimique et de son degré d’altération. MATIÈRES ORGANIQUES. 10 146 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. A) Quantité et concentration de la matière. — Pour déterminer l'influence qu'ont sur la décomposition des taux divers de matières organiques, j'ai fait quatre mélanges de sable quartzeux (380 gram- mes) avec différentes proportions de fumier de cheval en poudre (3, 10, 15 et 20 grammes), je les ai humectés avec 40 grammes d’eau et placés dans des tubes en U plongeant dans un bain-marie à 30°. L’acide carbonique dégagé en vingt-quatre heures élait mesuré chaque jour d’après la méthode de v. PETTENKOFER. La moyenne de six déterminations à donné : MATIÈRE ORGANIQUE. © — ; 5 gr. 40 gr. 15 gr. 20 gr. 1°" essai : Æ ES = FE Moyenne du volume d'acide car- bonique daus 1000 d'air. . . 41,000 54,412 56,598 57,550 Rapport Ro Tee: 1 1,32 1,38 1,40 PME TON VOlUME MOYEN ER CR CE 24,689 42,359 48,054 51,098 RADDOLU AE EN OU IC RCA l 1,72 1,95 2,07 On voit que le taux d’acide carbonique de l'air du sol qui, à cir- constances extérieures égales, peut servir à mesurer l’intensité de la décomposition s'accroît, il est vrai, avec la dose de malière orga- nique, mais dans une proportion bien moindre que la matière, si bien qu’au delà de certaines limites (15 grammes de malière orga- nique dans le cas précédent), on n’observe pas un dégagement d’a- cide carbonique sensiblement plus fort. Ce fait ne tient pas du tout à ce que, dans les essais précédents, l’oxygène nécessaire à la dé- composition aurait fait défaut ; car, après défalcation de l’acide car- bonique dégagé dans les deux essais, il restait encore une quantité d'air largement suffisante. Suivant toute vraisemblance, cette particularité doit être attri- buée aux propriélés antiseptiques de l'acide carbonique, ainsi que H. Kozee! l’a démontré. Quand cet acide carbonique s’est accumulé dans la malière en décomposition au delà d'un certain taux, l'acti- vilé des microorganismes el, par suite, l'oxydation du carbone de 1. Journal fur praklische Chemie. Neue Folge, vol. XXVI, 1882, p. 149-155. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 147 celle matière diminue. Plus le laux d'acide carbonique s'élève, plus l'intensité de la décomposition s’affaiblit. Cette règle s'applique aussi à la nitrification des matières azotées. Déjà LEONE : avait remarqué que, pour une teneur un peu forte en matière organique, non seulement la nitrification est interrompue, mais que même les nitrates et les nitrites formés pouvaient se trans- former en ammoniaque. D'après des essais récents du même auteur *?, ce résultat obtenu d’abord avec des solutions est vrai aussi pour le sol; de fortes fu- mures de matière organique mènent à une destruction de nitrates et de nitrites, ce qui n’arrive pas avec une fumure faible. Dernièrement, P. Picxarp * a étudié à fond cette question et a dé- montré que la quantité absolue d’acide nitrique formé croissait à la vérité avec l’augmentation de l'azote organique dans la matière, mais que sa quantité relative (en pour-cent de l’azote existant) dimi- nuait considérablement, tandis que la production d’ammoniaque est exactement proportionnelle au taux d’azote de la substance orga- nique. Il en résulte ce fait très important dans la pratique que le taux absolu d’ammoniaque formée augmente avec celui de l’azote organique dans la matière en décomposition, tandis que celui de l’acide nitrique diminue. D’après PicHARD, on peut admettre que la nitrification est active tant que la substance renferme 1 gramme d'azote organique par kilogramme, mais qu’au delà de cette li- mite elle décroît sensiblement au profit de la production d’ammo- niaque. Cette influence défavorable à la nitrification tient peut-être à ce que l’augmentation de matière organique entraine la production d’une plus forte quantité d’acide carbonique qui gène l’activité des microorganismes. On pourrait aussi, pour l'explication de ce fait, alléguer cette circonstance que le carbonate d’ammoniaque formé agit défavorablement sur le ferment nitrique ; mais cette explication 1. Gazelta chimica italiana, vol. X, p. 505. 2. Alli della R. Accademia dei Lincei, Ser. IV, Rendiconti, vol. VI. Roma, 1890, p. 33-35. 3. C. R., t. CXIV, p. 81-84; Annales agronomiques, t. XVIII, p. 108-119. 1 148 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ne saurait être mise en avant pour les essais de PiCHARD, parce que la terre y renfermait assez de sulfate de chaux pour transformer le carbonate d’ammoniaque. C’est seulement au cas où la quantité de chaux est insuffisante que l'influence du carbonate d’ammoniaque vient probablement s’ajouter à celle de l'acide carbonique (voir ci- après F, p. 185). P. P. DEnÉRANN ‘ a montré que la mitrification des sels ammonia- caux était fort influencée par leur quantité. 20 grammes de terre placés dans une soucoupe furent addilionnés de doses diverses de sulfate d’ammoniaque ou laissés tels quels et mis sous une cloche où l'air circulait. Du 27 septembre au 15 octobre 1884, il s’y forma les quantités suivantes de nitrates (en milligrammes) : ACIDE NITRIQUE formé. Terre telle quelle. . FR TI AT dre 12520018 Terre avec 0,010 d'azote sous forme de sulfate d'ammoniaque. 10,03 9 — 0%,030 — — = 4,50 2 Non seulement le sulfate d’ammoniaque ajouté n'avait pas été nitrifié, mais il avait empêché la nitrification de l’azote contenu dans le sol sous forme organique, et d'autant plus que la quantité de sel ajoutée était plus grande. Comme la terre employée était assez sèche, l’auteur voulut savoir si les choses se passeraient de même dans un sol très humide. Il prit un sol de jardin renfermant 32 p. 100 d’eau. Pendant trente-six jours, 100 grammes de ce sol auquel on ajouta diverses doses de sulfate d'ammoniaque formèrent les quantités sui- vantes de nitrates : AZOTE AJOUTÉ ACIDE NITRIQUE ACIDE NITRIQUE PRODUIT sous forme de produit par 100 kilogr. de terre sulfate d'ammoniaque. en 36 jours. par jour. grammes. grammes. grammes. 0,020 0,075 22,0 0,040 0,070 20,0 0,060 0,060 17,0 0,080 0,042 12,0 0,100 9,013 3,8 1. Annales agronomiques, t. XIII, 1887, p. 241-261. | nn CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 149 Une notable partie de l’azote de l’ammoniaque a été nitrifiée, mais les quantités de nitrates formées ont été d’autant plus faibles que la dose de sel ammoniacal était plus forte. Si l’on compare ces résultats avec ceux de l’essai précédent, on voit que l'humidité du sol est d’un haut intérêt pour la nitrification de lammoniaque : elle est bien plus intense dans un sol humide. Le degré de concentration des solutions nitrifiantes (urine, sels ammoniacaux) est aussi un facteur extrêmement important dont l’action s'exerce suivant une loi qui n’est que faiblement influencée par le concours d’autres circonstances. Les résultats de J. Soyxa' le prouvent : Accès de l'air limilé. p. 100. Urimepure.-. 100 | L’acide nitrique n'a pas encore paru au bout de Urine étendue à. . 50 | 4 mois. — es 10 Apparu au bout de 36 jours. — me Î — DR — En l'absence de l'air. Urine pure. . . . 100 me ANT on ; onde a 50 Pas d'acide nitrique après 4 mois. —= 2e 10 Il y a de l'acide nitrique après 7 jours. — D 1 —— — 4 — Les recherches de R. WaRiNGTon* sur les sels d’ammoniaque ont aussi prouvé que la nitrification commence toujours d’abord dans la solution la moins concentrée et qu’il y a sans doute pour chaque so- lution un degré de concentration au delà duquel la nitrification est impossible. On peut donc soit favoriser ce processus dans une large mesure, soit l’empêcher complètement, au moins pour un temps assez long. Il s’agit ici de faits analogues à ceux que l’on constate quand on augmente peu à peu la proportion d’air. B) Répartition et degré de finesse de la matière. — Pour déter- miner expérimentalement l'influence du degré de finesse et de la 1. Zeilschrift fur Biologie, vol. XIV, 1878, p. 449-482. 2. Journal of the chemical Society, vol. XLV, p. 637-682. 150 DÉGOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. répartition de la matière organique sur sa décomposilion, j'ai em- ployé' de la tourbe pulvérisée séparée par des tamis en lots de diverses grosseurs et de la paille de pois, soit broyée, soit hachée en fragments de 1 à 5 centimètres de long. Dans l'essai [, 40 grammes de poussière de tourbe ont été mélan- gés à 970 grammes de sable quartzeux et 75 grammes d’eau ; dans l'essai I, on a employé les mêmes quantités, mais avec 40 grammes d’eau seulement. Quant à l'essai [IT installé à l'air libre dans un cy- lindre en tôle d’une contenance de 50 litres, on mélangea d’une manière bien homogène 383 grammes de paille de pois à 61 grammes de sol riche en humus. Ces matières ont dégagé les quantités suivantes d’acide carbo- nique qui sont les moyennes de quatre déterminations (essai 1), de trois (essai IT) et de douze (essai ID) : Volume d’acide carbonique dans 1000 volumes d'air du sol. GRAIN DE LA TOURBE. Omim,0-Omm,95, Oum ,25-Omm,50, Omm,50-1mm 0. Lmm , 0-Zmm 0, Es 17,069 15,682 15,703 13,773 DA 54,537 48,336 39,718 41,484 IL Sol sans paille : Avec paille de pois Avec paille en fragments Avec paille en fragments pulrérisée : de { centimètre : de 5 centimètres : 4,046 11,004 12,058 11,294 De ces chiffres il semble résulter que les matières organiques diflicilement décomposables (tourbe) se décomposent d'autant mieux qu’elles sont en éléments plus fins el, par suile, mieux mélangés, tandis que, pour les substances facilement décomposables (paille de pois), la finesse des grains est sans imporlance. Dans le premier cas, l'influence de l’état de division s’explique par ce fait que, plus les grains sont fins, plus l'oxydation est facilitée. Dans le second cas, il faut sans doute prendre en considération la porosité plus grande de la matière et sa composition chimique plus favorable à la nutri- tion des microorganismes. 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 273. a û 1 4 CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 191 Il est donc avantageux de pulvériser les engrais qui n’ont qu'une très faible aptitude à la décomposition. À ce groupe appartiennent, par exemple, certains engrais animaux (cornes, sabots, poils, déchets de laines) : les rognures de cuir, la matière organique des os bruts, etc. Par la transformation de ces substances en poudre de corne, de laine, de cuir, d'os, etc., leur altérabilité est sensiblement augmen- tée ; en général, cette opération est suivie de plus d’effet si la tex- ture de la masse est rendue poreuse par des moyens plus énergiques, tels que la torréfaction, la cuisson en vase clos sous forte pression ou l'attaque par l’acide sulfurique. C’est ainsi que, d’après mes re- cherches, la cuisson en vase clos à une pression de trois atmosphères a exercé une très heureuse influence sur la décomposition du cuir et de la corne. Voici l’acide carbonique contenu dans 1 000 volumes d’air et rapporté à 1 gramme de carbone. (Les chiffres suivants sont la moyenne de six dosages.) POIDS PE correspondant rene à lgr. 5 qu te de carbone. prune p. 100 grammes. Poudre de cuir brute . . . . 48.82 2,05 9,507 — après cuisson . 47.90 2,09 14,457 Poudre de corne brute. . . . 45.40 2-20 6,119 — après cuisson . 45.34 2,25 8,509 On voit qu'après cuisson la matière s’est décomposée plus facile- ment. La torréfaction des déchets de corne et le traitement par l’a- cide sulfurique de certaines substances, telles que les déchets de laine, exercent la même action heureuse. C) Degré de décomposition de la matière organique. — Comme les substances prises à divers stades de décomposition ont un taux de carbone différent, qui augmente avec l’âge (voir p. 22) et que, par suite, en employant d’égales quantités de ces matières pour déterminer leur aptitude relative à la décomposition, on ne pourrait faire de comparaisons valables, j’ai, dans les essais cités plus haut', dosé d’abord le carbone de la substance et pris pour base une quan- 1. Journ. f. Landw., 34° année, 1886, p. 273. 192 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tité renfermant 1 gramme de carbone. La portion pesée fut toujours intimement mélangée dans une capsule de porcelaine à 400 grammes de sable quartzeux pur et à 50 centimètres cubes d’eau distillée. Le mélange fut aussitôt introduit dans des tubes en U plongeant dans un bain-marie à 30°. De cette façon, on obtenait dans tous ces essais comparatifs l'identité de toutes les circonstances extérieures. Pour rendre comparables les résultats obtenus, il n’y avait plus qu’à faire les dosages à des intervalles de temps égaux. Pour cela, le mélange des matières et le remplissage des tubes furent faits pour chaque essai de 8 à 10 heures du matin; les tubes furent laissés dans le bain-marie pendant vingt-quatre heures exactement, au bout desquelles avait lieu la première prise d’air comprenant chaque fois 2 litres aspirés en deux heures; l'opération était donc terminée pour 10-12 heures du matin, Tous les autres jours on opéra de même. La décomposition des matières se mesure par le dégagement des quantités ci-après d'acide carbonique : TAUX ee 1 gr. de 00? de carbone ge dans 1 carbone 1000 volumes p- 100”. il faut d’air?. Dee OTUS te NS RE de EN à ÉDASRIRS 4,14 13,431 rs | vieux de 8 semaines. . . . . . , 80.27 3,33 11,706 Ne vieux de 20 semaines. . . . . . 34.51 2,89 8,248 Fumier frais 0.0: 0. Are lo Faier CUS CE 2,18 10,390 de mouton à demi Lo Het, SR 37.05 2,69 8,043 ; de 102,5 à 36°n,8/de EOTÉEÉES 40.03 2,49 3,229 Tourbe Cunr de 420,1 à 732,6 — : 43.09 2,32 3,052 (Gunrau) À Ge 7gem9 n115m7 — , 43.25 2,30 2,827 de 0%,0 à 0®,2 de profondeur . . 40.12 2,49 2,934 Tourb de 0®,2 à 0,5 — à A Par LADA DE 2,34 2,124 b LUE JA deOmSaO"S — ..: 42,80 2,55 | 2,64 RADIOS) | Ge qu8 mA, = NAN 050 0 PTE de 1,"1 à 1,4 — Hate OA 24 Del 2,262 De ces chiffres on doit conclure que les malières organiques se décomposent d'autant plus difficilement que leur altération est plus avancée. Les famiers de vache et de mouton ont fourni d’autant 1. Ces nombres se rapportent à la matière séchée à l'air. 2, Moyenne de six dosages. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 195 moins d'acide carbonique qu’ils étaient plus vieux. De même, son dégagement diminue, dans la tourbe, à mesure que l’on s'adresse à des couches plus profondes, c’est-à-dire plus décomposées. L’exacti- tude de ce point est démontrée aussi par ce fait, constaté dans pres- que tous les essais, que le dégagement d’acide carbonique est le plus violent au début, puis diminue constamment pendant le cours de l'expérience. On comprend aisément que l’oxydation du carbone dans les ma- tières organiques non décomposées soit plus forte au début qu'après et plus forte aussi que dans les matières primitivement identiques par leur composition, mais déjà en train de s’altérer, si on observe que la provision latente d’énergie chimique des matières en question est d'autant plus grande qu’elles renferment plus de corps aussi voisins que possible des combinaisons formées dans les plantes sous l’action de la vie. Si des corps non altérés, c’est-à-dire ayant leur maximum d’affinité pour l'oxygène, sont soumis aux facteurs de la décomposition, ils dégageront dès le début la plus grande quantité d'acide carbonique. Quand cette première explosion est terminée, la production d’acide va constamment en décroissant jusqu’à ce qu’il n’y ait plus que des restes organiques à forme d’humus qui, par suite de leur constitution, s’oxydent lentement et contribuent à peine à la production du gaz carbonique. L’azote des principes azotés des matières organiques se comporte comme le carbone. Ainsi il résulte des recherches de A. MORGEN ‘ sur la décomposition des poudres de corne et de cuir que presque tout l'azote s’était transformé dans les huit premiers jours de la pu- tréfaction, puisque la proportion avait toujours été plus faible. Les essais de G. F. A. TuxEN * montrent d’une manière éclatante que les choses se passent dans l’érémacausis comme dans la putréfaction. Des cylindres en terre vernissée furent remplis de 5 kilogr. soit de lehm, soit de lehm argileux. Pour se rapprocher le plus possible des conditions naturelles, on ajouta à ce dernier assez d’engrais pour 1. Landwirthschaftliche Versuchsstationen, vol, XXVI, 1850, p. 51-72. 2. Undersogelser vedrorende de Kralstofholdige Gjodningsstoffers Omdannelse à Jordbunden. Tiedsskrift for Landokonomie, 1884. 154 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. élever le taux d’azote à 2 p. 100 (calculé sur Le sol séché à 100°). Ce taux correspondait à peu près à celui du lehm (1.8 p. 100). La terre fut maintenue humide afin de se placer dans les circonstances les plus favorables à la transformation des engrais azotés, mais on em- pêcha la saturation en faisant écouler l’eau en excès tout en tenant compte naturellement de l’acide nitrique qu’elle contenait. Le dosage initial de l’azote sous forme d’ammoniaque et d’acide nitrique servit de point de départ et de comparaison. Voici les résultats obtenus : Azote sous forme d'ammoniaque et d'acide nitrique exprimé en centièmes de l’azote ajouté. LEHM PLUS SABLE LEHMEUX PLUS A AZOTE DE a | n 4 se AI nl 0 DATES . Poudre | Guano | Fumier | Poudre Guano | Fumier Rien. de de . de de SOUS forme d’o8. |poisson.| cheval. d'os. |poisson.| cheval. AE UE er « 1er juin Peer 0. 0. d'ammoniaquen d'acide nitriques 1er juillet. . ! d'acide nitrique: d'ammoniaque: d'acide nitrique d'ammoniaqués He ere ner .07 | d'acide nitriqué 20 avril 1881 Ù ù 6 : 12. . d'ammoniaqué: Ne d'acide nitrique d'ammoniaques: d'acide nitriquel d'ammoniaqué: d'acide nitrique 1e? 1° septembre. | i © C2 © À © © — 1° novembre . 20 juin 0 1° septembre J Abstraction faite du sol non fumé et du sol fumé avec du fumier de cheval, on voit nettement pour les autres que la transformation des éléments azotés des engrais (poudre d'os et guano de poisson) se fait incomparablement plus vite au début de la décomposition que plus tard. Déjà au bout d’un mois, 50 p. 100 de l'azote primitif étaient transformés en ammoniaque qui, plusieurs mois après, de- CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 199 venait de l'acide nitrique. Il y a donc deux réactions successives, d’abord formation d’ammoniaque, ensuite oxydation de cette ammo- niaque en acide nitrique. L’azote de l'humus du sol non fumé n’a subi qu’une modification très lente ; celui du fumier de cheval se comporte différemment ; il contient évidemment divers principes azotés ; sa transformalion est plus facile et plus rapide dans le sable lehmeux que dans le lehm, où il parait y avoir en automne un temps d’arrêt dans la décomposi- tion qui reprend au printemps avec une nouvelle activité. D) Composition chimique de la substance. — [a décomposition des matières organiques est surtout réglée au point de vue chimique par leur taux en composés complexes (principes albuminoïdes, amidés), par la solubilité de ces composés, par leur taux de matières minérales et par la présence de substances capables d’atténuer l’ac- tion des facteurs extérieurs. Toutes circonstances égales, le taux d’azote des matières orga- niques à, dans certaines limites, une influence tout à fait prédomi- nante sur la décomposition. On voit déjà que les parties végétales pauvres en azole et riches en cellulose (paille des céréales) se dé- composent plus lentement que celles qui sont riches en azote et pauvres en cellulose (paille des légumineuses). Les chiffres suivants provenant de mes essais prouvent le fait. TAUX Pour 1 gr. Pope de carbone de carbone dans p. 100. il faut NOR 1H ECS ENT FERRER 39.75 AE) 23,673 TD OIS tee oem fee 40.75 2,45 22,156 CV ER OIe 39.S4 2,51 22,076 Paille d'orge de mars. . . . . . 41.43 2,41 19,562 RO US... 2 LM. 40.74 2,45 18,837 ——-.de blé de mars. .. .:. ... 42.54 2,39 18,560 — de seigle de mars. . . . . 41.95 9, 38 18,189 — d'avoine de mars. . . . . 39797 2,50 17,388 — de seigle d'hiver . . . . . 43.36 290 45,936 1. Moyenne de six dosages. 156 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Si les feuilles des végétaux se décomposent aussi plus vite que leurs tiges et leurs racines, comme le montre le tableau suivant, cela tient également à ce que ces murs sont plus riches en azole. TAUX Pour 1 gr. FAO de carbone de carbone dans p. 100. il faut EE feuUIess RU EN 38.42 2,60 24,294 SOJA. Le SO NAUIPES MT ie es 41.08 2,43 23,052 TACINES. : 2.,i 39.58 2,54 22,061 CO COS 38.52 2,59 24,134 Féveroles . ISSN RE UE 43.27 2,81 19,809 He ARTE 41.99 2,38 19,293 Sable d'iirer. | (CLUIeS EEE 42.10 2,31 18,211 M'DBPSE CLS en 43.05 2,82 17,019 Dans les essais que j'ai faits spécialement pour élucider le rôle des matières azotées”, J'ai placé diverses sortes de pailles réduites en poudre, soit dans l’eau, soit dans une solution d’albumine (pro- venant de blanc d'œuf) à 1 p. 100 environ; après les avoir fait macérer à basse température pendant quarante-huit heures, Je les ai desséchées sur du papier à filtre à la température de la chambre. J'ai mélangé 4 grammes de la matière ainsi préparée avec 400 grammes de sable quartzeux J'ai humecté le mélange avec 40 grammes d’eau et l'ai placé alors dans les tubes en U. Le déga- gement d'acide carbonique (moyenne de six ou huit déterminations) a été : Volume de C0? dans 1000 volumes d'air. Paille de seigle macérée dans l'eau. . . . : 10,611 — la solution d° Lise 13,812 Paille de maïs | macérée dans l'eau. .:. . ” 19,492 — la solution d° ane 1 22,145 DA A mate | macérée dans l'eau... . - 6,946 x | — la solution d° utite ; 41,559 1. Moyenne de six dosages. 2. Journ. f. Landw., XXIV, 1886, p. 287 CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 197 On remarque nettement que la décomposition des matières or- ganiques est favorisée par une augmentation du taux d'albu- mine. Cette relation entre l’aptitude des matières à la décomposition et leur teneur en azote s'explique par ce fait que l'azote joue un grand rôle dans l’alimentation des microorganismes. On serait néanmoins mal fondé à tirer de ces faits la conclusion que le taux d’azote des matières organiques détermine étroitement leur faculté de décom- position. Cette opinion serait en contradiction avec lobservation, souvent constatée, que des malières particulièrement riches en azote, comme la corne, la tourbe, etc., ne se décomposent qu'avec une lenteur extrême. En scrutant de plus près les causes de ces faits, on se convainc qu’outre l’état mécanique de la matière et son taux en principes azotés, la forme de ces principes et les autres éléments constitutifs de la matière en question influent sur son aptitude à la décomposi- tion. La corrélation entre cette aptitude et le taux d’azote se vérilie seulement quand les éléments azotés sont facilement altérables, comme c’est le cas pour la plupart des matières albuminoïdes et quelques combinaisons azotées aisément décomposables (urine, sucs digestifs). Ceci est vrai non seulement pour l’oxydation du carbone, mais encore pour la formation de l’'ammoniaque et des nitrates. Mais les substances organiques renferment, en outre, des combinai- sons azotées plus ou moins difficilement décomposables encore in- connues en général dans leur constitution intime. Si elles existent en assez grande proportion dans la matière, celle-ci, malgré son fort taux d’azote, se décomposera plus lentement qu’une autre ayant une moindre proportion de principes azotés plus facilement alté- rables. Les recherches précitées de TuxEN et MoRGEN démontrent que la transformation des malières azotées en éléments nutritifs assimi- lables présente déjà de grandes divergences, ce qui fait présumer que, suivant leur constitution chimique, elles seront aussi diverse- ment prédisposées à la décomposition. Dans les essais de TuxEN, l'azote de la poudre d’os et du guano de 158 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. poisson, par exemple, s’est montré bien plus soluble que celui du . fumier de cheval et MorGEN a trouvé que la matière azotée de la corne en poudre se dissolvait plus facilement que celle du cuir en poudre. Comme autre preuve citons l'observation de P. P. DEné- RAIN! d’après laquelle les matières azotées du fumier nitrifiaient . plus facilement que celles des tourteaux de maïs et du sol arable ; c’est dans ce dernier que la nitrification se faisait le plus lente- ment. À. SruTzER et W. KLINGENBERG* ont proposé, pour déter- miner l'efficacité de l'azote en combinaison organique, de traiter les engrais organiques azolés (poudre d’os, de sang, de corne, de cuir, guano de poisson, excréments, poudrette, engrais verts, tourbe, etc.), par une solution digestive, telle que le chlorhydrate de pepsine. Ils choisirent cette matière, qui digère l’albumine, parce que les principes azotés des os, du sang, etc., sont très voisins de l’albumine et que des essais préalables avaient donné de meilleurs résultats qu'avec le suc intestinal, qui dissout également lalbu- mine. On ne peut naturellement pas affirmer que les données acquises par cette méthode soient directement applicables à la décomposition dans le sol des matières organiques azotées et que la dissolution s’y fasse exactement de la même façon, mais les processus sont analogues, et le procédé en question peut établir d’une manière approchée la valeur relative des diverses formes d’azole combiné. D’après ces recherches, il semble y avoir, dans les engrais comme dans les fourrages, deux groupes de composés azotés nettement dis- tincts, l’un soluble, l’autre insoluble dans la pepsine. La nature de ce dernier groupe est encore à établir ; ces auteurs admettent qu'il doit son origine à la nueléine. Ce principe extrêmement réfractaire se rencontre, plus ou moins modifié, dans presque toutes les matières animales ou végétales, et même l'azote de la tourbe, ainsi qu’une grande partie de celui du sol, devraient être rapportés en dernière analyse, d’après ces auteurs, à la nucléine qui existait primitivement dans les plantes. 1. Annales agronomiques, t. XII, 1887, p. 241-261. 2, Journal fur Landwirthschaft, 30° année, 1882, p. 263-270. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 199 Voici les valeurs moyennes obtenues dans ces essais : SUR 100 PARTIES, AZOTE la pepsine DÉSIGNATION DES ENGRAIS. © total. - ne dissout. . dissout pas. Sang desséché et pulvérisé. . . . . . . 13.54 89.75 10.25 Déchets de cuir en poudre. . . . . . . 6.91 39.19 60.81 Corne en poudre, grillée . … . . . . . . 13.70 40.73 59.27 — OTUCCRRADÉCE, PE 7.06 23.43 76.57 Poudrette de Liernu, traitée par le borax . . GT 80.23 19.77 — nou traitée par le borax. 6.77 83.36 16.64 Poudrette de Metz. . . . 1.58 22.92 77.08 Déchets de laine. . 10.55 DATE 1228 É (| 4.02 95.45 4.55 Poudre d'os brute. . ME 97.95 2 05 AVE 4.31 92.74 7.26 Poudre d'os soumise à la vapeur . 9 43 go 95 11 65 Guano brut du Pérou, traité par le borax. . 11 08 94.53 5.47 Les grandes différences que ces chiffres dévoilent dans la solu- bililé de l'azote des diverses substances concordent généralement avec les données de la pratique sur l'efficacité des engrais. Elles se trouvent aussi, à peu d’exceptions près, en accord avec les valeurs que J'ai obtenues pour l'aptitude à la décomposition”. Parmi les éléments accessoires des matières organiques qui in- fluent sur la décomposition, il y a surtout à considérer les résines, les cires, les graisses et les tannins. La présence des résines est par- ticulièrement importante dans la tourbe. La lenteur avec laquelle la tourbe s’altère lient non seulement à l’état peu soluble de ses composés azotés, mais aussi à sa teneur en malières résineuses et tanniques. Les matières résineuses, solubles dans le mélange d'alcool et d’éther, existent souvent en proportion notable et d'autant plus forte que la tourbe est plus ancienne. Quand ces résines enveloppent la substance organique, elles empêchent l'action directe des facteurs de décomposition, particulièrement 1. Dans la poudre d'os traitée par la vapeur il y a relativement moins d'azote dis- sous que dans la poudre brute, parce que les matières azotées, facilement solubles, ont été extraites des os lors du traitement. Cet inconvénient est compensé par certains avantages (pulvérisation plus parfaite et par suite action plus rapide). "4 { 160 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. l’arrivée de l’eau et de l'air, et, par suite, ralentissent singulièrement cette décomposition. C’est ce que montre une expérience spéciale que j'ai faite sur de la tourbe de Schleisheim *. Le taux de résine s’é- levait à 5.12 p. 100. Il s’est dégagé : Volume d'acide carbonique dans 1000 volumes d'air. TOURBE A . l traitée par ne: l'alcool et l’éther bouillants. Moyenne de quatre dosages. . . 25,995 50,651 Il s'ensuit que la résine est un obstacle à la décomposition de la tourbe. La lenteur de la décomposition de certaines substances d’origine organique employées comme engrais a été souvent attribuée à la matière grasse qu’elles contenaient, sans que celte opinion ait été appuyée sur des chiffres. Pour faire cette preuve, J'ai pris* divers engrais riches en matière grasse, notamment du guano de Fray-Bentos (formé de déchets de viande), de la poudre de viande, de la poudre d’os, des aiguilles d'épicéa et de pin pulvérisées, des tourteaux de colza ; une partie fut laissée telle, l’autre fut privée de sa matière grasse par l’éther. Dans les essais Let I, les prises d’essai commencèrent quand l’éther fut complètement évaporé, ce qui exigeait quatre à cinq jours. Mais lorsqu'on vit que, contrairement aux idées reçues, la portion débar- rassée de la matière grasse se décomposait plus lentement que la substance fraiche et que ce résultat était peut-être dû à l’action antiseptique de l’éther, on laissa, dans les essais LIT et IV, Les échan- tillons traités par l’éther exposés à l'air libre pendant deux mois avant de les soumettre à la décomposition. Pour plus de sûreté, on plaça dans les mêmes conditions des échantillons non traités. Dans chaque essai, la quantité de substance employée était de 4 grammes, qu'on mélangeait à 400 grammes de sable quartzeux 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 289. 9, Ibid., 1886, p. 292. : CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 161 et qu’on humectait avec 40 grammes d’eau. Le tout, mis dans des tubes en U, était trailé suivant la méthode plusieurs fois décrite. Voici les résultats des dosages de l’acide carbonique. Volume de C0? dans 1000 volumes d'air, Sans Avec Sans Avec Sans Avec | sa sa sa sa sa sa | matière | matière | matière | matière | matière | matière grasse. | grasse. | grasse. | grasse. | grasse.| grasse.| mn | pos ES Gu: Poudre d’0os. de D Pains Poudre de vitnde. À TT À mm | [. Moyenne de six dosages . .[20,037121,279128,001127,184 24,577[25,967 Tourteau de colza. | Aiguilles d’épicéa.| Aiguilles de pin, © TT — © 1 Il. Moyenne de six dosages , .[15,732|18,989] 7,381110,058| 9,899112,086 Tourteau de colza. | Aiguilles d’épicéa.| Aiguilles de pin. EE a a — a III. Moyenne de neuf dosages. .117,312|17,719] 7,852| 8,277111,339|10,738 Guano de Fray-Bentos. EE IV. Moyenne de huit dosages. .119,476122,165120,941124,670121,999,22,799 Poudre d'os. Poudre de viande. Ces chiffres montrent, presque sans exception, que l'extraction des matières grasses, au lieu de favoriser la décomposition, l'a au contraire entravée. Bien que les différences dans les dosages ne soient pas très grandes, elles sont pourtant nettes. Il est difficile de décider expérimentalement si le traitement par l’éther à amené des modifications chimiques qui diminuent l'aptitude à la décom- position, ou si cette diminution est due aux propriélés anlisep- tiques de l’éther. Si l’on s’en tient aux résultats précédents, on pourrait conclure qu’on n’active pas la décomposition des engrais riches en matière grasse en les en débarrassant par le sulfure de carbone ou la benzine, comme on l’a proposé souvent dans ces derniers temps. Étant donné que les matières expérimentées sans traitement préalable ont accusé un très fort dégagement d'acide carbonique, il est juste d’admeltre que la matière grasse est à peu MATIÈRES ORGANIQUES. 11 162 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. près sans influence sur la décomposition des substances qui en sont - imprégnées. | Pour beaucoup de matières, telles que la tourbe, le cuir, les feuilles d'arbre, etc., le taux de tannin semble influer fortement sur la décomposition. Ces tannins sont par eux-mêmes extrêmement ins- - tables et enclins à s’allérer, mais avec les principes albuminoïdes ils forment des composés très résistants. Pour le montrer, j'ai broyé! finement des pailles de seigle d’hiver, de maïs, des feuilles de soja, je les ai fait macérer soit dans l’eau, soit dans des solutions tan- niques de concentration diverse pendant quarante-huit heures, puis dessécher à la température de la chambre. Après les avoir mélan- gées.à du sable et à d’égales quantités d’eau, je les ai soumises à la décomposition dans des tubes en U, à une température de 30°. La moyenne de six dosages d’acide carbonique a été la suivante : Volume de C0? dans 1000 volumes d'air. MACÉRÉ © dans dans l’eau. ne es à 1 p. 100. Paille de seigle d'hiver. . . . 10,611 6,457 Paie Ge MAIS ne 19,492 13,435 Feuilles de spa; 5. =... 28,115 12,996 MACÉRÉ = dans dans une solution de tannin — ; EE l'eau. 34 p.100. à 2 p.100. à 4 p.100. à 8 p. 100. Feuilles de soja . . . 21,565 19,907 19,008 18,052 16,029 Ces chiffres montrent que la décomposilion des matières orga- niques est sensiblement ralentie par la présence du tannin. J'ai cherché à déterminer * dans quelle mesure la décomposition est influencée par les principes minéraux que renferment les ma- tières organiques ; pour cela j'ai fait bouillir deux échantillons de tourbe et de sol riche en humus pesant respectivement 75 grammes 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 288. 2, Ibid., 1886, p. 252. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 163 et 300 grammes, l’un avec de l’acide chlorhydrique étendu, lantre vec de l’eau distillée ; après dessiccalion, je les ai humectés avec 80 grammes d’eau et jai dosé les quantités d’acide carbonique qui se dégageaient à 30° pendant vingt-quatre heures en présence de l’air. Voici les nombres trouvés : Volume de C0? dans 4000 volumes d'air. SOL RICHE en humus bouilli EE TEE TOURBE BOUILLIE avec avec acidechlorhy- avec eau. acidechlorhy- avec eau. drique. drique. Moyenne de cinq dosages. 11,342 50,658 8,037 35,904 Donc les échantillons dépouillés par l'acide chlorhydrique de leurs principes minéraux solubles ont dégagé une quantité beaucoup plus faible d'acide carbonique que ceux qui sont restés inallérés. Pour mieux éclairer ces faits, je fis encore deux essais où J’ajou- tai à des mélanges artificiels de sols des solulions nutritives conte- nant par litre 08,4 de tartrate d’ammoniaque, 0#,2 de phosphate de potasse (K H P 0), 0#,2 de chlorure de potassium, 05,1 de sul- fate de magnésie et 0#,1 de nitrate de chaux. Le taux de cette solu- tion correspondait donc à 0.1 p. 100. J’employaiï aussi une solution de concentration double (0.2 p. 100). Dans l’essai I, le mélange consistait en 400 grammes de sable quartzeux, 4 grammes de paille de seigle d'hiver pulvérisée, le tout arrosé de 40 centimètres cubes d’eau ou des susdites solutions ; dans l'essai IL il y avait 400 grammes de sable quartzeux, 4 grammes de poussière de tourbe et 60 centimètres cubes de solution. Voici les quantités d’acide carbonique dégagées à 30° : Volume de C0° dans 4000 volumes d'air. SOLUTION E A U. ——" — à 0.1 p.100. à O.2 p. 100. LRCE TES SEE 16,672 20,256 . 20,400 LIRE PRE 6,833 7,872 8,612 Ces deux expériences concordantes montrent que l'oxydation du 164 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. carbone des matières organiques est sensiblement favorisée par l’ad- dition d’une solution diluée renfermant tous les principes nutrilifs, sans doute parce qu’en présence de composés facilement assimilables’ (tartrate d’ammoniaque, matières organiques azotées) les microor- ganismes Intervenant dans la décomposition sont mieux nourris et pullulent davantage. LE) Décomposition des matières organiques employées comme engrais. — Les détritus animaux et végétaux employés comme en- grais présentent les plus grandes différences dans leur aptitude à la décomposition, suivant leur composition physique et chimique, par- fois aussi suivant des causes encore inconnues. Pour avoir une idée approchée de ce qui se passe à cet égard, j'ai pulvérisé les différents engrais‘, J'en ai pris des quantités correspondant à 1 gramme de carbone, Je les ai mélangées avec 400 grammes de sable quartzeux el 0 centimètres cubes d’eau et les ai soumises à la décomposition dans des tubes en U, dosant chaque jour pendant six jours par law méthode de Pettenkofer l'acide carbonique dégagé en vingt-quatre heures. La moyenne des six dosages peut donner une idée de l’apli- tude relative des diverses substances à la décomposition. Le tableau ci-dessous indique ces moyennes. Doux 1 RE “d'acide Ù MATIÈRES. de | de ed carbone Eee 1 a p- 100 Poudre d'os soumise à la vapeur . . . . 9.24 10,82 31,769 Guano de-poisson tr AAC 27.52 3,63 28,453 Poudre demande "Dee 37.59 2,66 27,528 Kunneredoi fre mn ie a 43.43 2,30 27,949 = (de DIRCON en. ue ste 29.49 3,39 26,746 = CUCIDOUIO NS 0 ee on 33.16 3,01 25,379 Goan OUT PEER 16.67 5,99 24,855 Palette S0 ANR mr AE En 39 75 2,52 23,673 En (5 10 PONT PRE CARS taff 40.75 2,45 22,156 — (eo éver0le ee CELA RTE 39.84 2,51 22,076 — d'orge de printemps... 41.43 2,41 19,562 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 274-282, CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 165 ; VOLUME ES ion MATIÈRES, de de dans carbone. IE 1 te me : BABA UE MAIS... 7... 10.74 2,45 18,837 — de blé de printemps. 12,54 2295 18,560 — de seigle de printemps. . . . . . 41.95 2,38 18,189 — d'avoine de printemps. . . . . . 39.97 2,50 17,388 Fanes de pommes de terre. . . . . . . 34.73 2,88 17,956 SATPMDUINÉTISC M es, es cite 45.95 218 475122 Palle deseigle d'hiver: : à > : , , : 43.36 2,30 45,936 MA de noroifrais. 27...) ,-. .: 30.09 2,32 14,901 — de cheval, à moitié décomposé . . 307% 2,51 12,166 de vache Arai E. 0j. 20. 4, 24.16 4,14 13,431 =—. de mouton, frais. . . . . . . . 5.94 2418 10,390 Bondeerdercuir, brute": #0: 1 . 0. 48.82 2,05 9,507 PATES EDR FL rs un oc 48.22 2,08 9,936 Rénmies der chène" "7 07. se . 1: 43.20 2,31 9,421 PB ANOLEE AS SEL ON. sn 49.22 2,03 8,424 Puudre.de corne, brute . =. : . . 45.40 2220 7,170 PA RNCRI Éd Re. Ph 2 UT 44.12 a 2 5,284 Tourbe (Cunrau), couche supérieure. . . 40.03 2,49 3,229 Tourbe (Donaumoos), couche supérieure . 40.12 2,49 2,934 En les rangeant par groupes, on voit que la poudre d’os, le guano de poisson, la poudre de viande, les excréments des oiseaux de basse-cour se décomposent le plus facilement. Après, viennent les pailles employées pour litière et les fumiers. Les cuirs et cornes en poudre et la couverture des forêts se détruisent plus difficilement, mais c’est pour la sciure et enfin la tourbe que le phénomène est le plus lent. Les différences que l'on constate entre les nombres de la troisième colonne du tableau ne peuvent donner qu’une idée approchée du phénomène, d’abord parce que les matières n’ont pas été employées dans leur état naturel, mais pulvérisées, ensuile parce que l’aptitude plus ou moins grande des excréments et fumiers à la décomposition dépend aussi bien de l'alimentation que du degré d’altération de la masse ; et, à ce propos, on peut faire ressortir que les fumiers dési- gnés comme frais étaient déjà probablement entrés en décomposi- tion; on n’a pas pu le vérifier parce qu'ils venaient de points éloignés. 166 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. En s'appuyant sur les données précédentes, ainsi que sur d’autres observations et sur les résultats de la pratique, on peut, à propos de la décomposition des matières organiques employées comme en- grais, affirmer que Lous les délritus animaux, à quelques exceplions prés, se décomposent plus facilement que les végélaux, qu'il s'agisse de l'oxydation du carbone ou de la production d'ammoniaque el de la nitrificalion. On vien! de voir que la poudre d’os et de viande, le | guano de poisson, les fientes des oiseaux de basse-cour, le guano du Pérou s’altèrent plus vite que les autres matières d’origine végétale. Il y a, d’ailleurs, dans la décomposition des détritus animaux de grandes différences que nous allons brièvement examiner. Les produits azotés de désassimilation (urée, acide hippurique, acide urique soit dans l’urine, soit dans les fientes d’oiseaux, prin- cipes azotés des sucs digeslifs rejetés dans les excréments) sont ceux qui se transforment le plus vite : les portions des excréments qui proviennent des aliments non digérés sont plus rebelles; suivant leur taux d'azote et leur état physique, elles présentent de grandes diflé- rences. Les excréments de l’homme, des pigeons et des poules se décomposent ordinairement beaucoup plus vite que ceux des canards et des oies qui sont plus aqueux el moins azotés. Ceux des chevaux et des moutons, vu leur taux relativement élevé d’azote, leur pau- vreté en eau, leur état poreux les rendant facilement pénétrables à l'air, subissent une décomposition bien plus active que ceux des vaches et des porcs qui ont des caractères opposés. Les déchets de viande (viande, viscères) des animaux domestiques, les chenilles, mollusques, larves se rapprochent sous ce rapport des excréments humains, landis que les matières azotées analogues à la corne (cornes, sabots, poils, déchets de laine, chitine des insectes, déchets de cuir) font partie de ces substances qui s’altèrent avec le plus de difficulté, même en les comparant aux détritus végétaux. Quant à ceux-ci, on constate d’une manière générale qu’à l'état vert, ils tombent plus facilement en décomposition que s'ils ont élé desséchés, puis humectés, et cette aptitude est proportionnelle à leur teneur en malières azolées. Font exception ces matières humiques qui se sont formées par le processus de la putréfaction en l'absence de l'air; exposées ensuite aux agents de décomposition, elles ne CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, 167 s'allèrent qu'avec une extrême lenteur, malgré leur richesse en azote. C’est le cas de la tourbe qui, de toutes les matières orga- niques étudiées, oppose le plus de résistance. Les causes de cette particularité ne sont pas encore bien connues et se rattachent probablement à certaines propriétés de la tourbe qui font obstacle à la pullulation des microorganismes ; elles tien- nent peut-être aussi aux matières bilumineuses et coriacées qui se trouvent dans la tourbe, diminuent l’action des agents d’altération et entravent la décomposition de la masse. Le taux d’azote de la substance n’est pas toujours proportionnel à l’intensité du phéno- mène, puisque la couverture des foréts, comme le montre le tableau ci-dessus, se décompose plus difficilement que les pailles plus pauvres pourtant en azole. Pour expliquer le fait, 1l faut en rapprocher celte circonstance que le taux de résine et de principes tanniques dans les aiguilles et dans les feuilles est un obstacle à l’altération de ces or- ganes. La décomposition lente de la couverture, telle qu’on l’observe dans la nature, lient aussi à la texture plus ou moins serrée de la masse qui diminue l'influence des divers facteurs, notamment celle de l'air. Par le mélange de matières facilement et difficilement décompo- sables, on peut fabriquer un ensemble ayant une aptitude moyenne à cet-égard ; c’est ce qui se fait en grand dans la préparation des fumiers. En mélangeant les litières avec les excréments, on aug- mente l’aptitude de celles-là à la décomposition en diminuant celie de ces derniers. C’est ce qui arrive encore quand on incorpore du fumier de cheval « chaud » à du fumier de vache « froid ». Comme conclusion, il y aurait enfin à discuter les relations à ce point de vue entre les éléments azotés et non azotés des matières organiques. Abstraction faite des détails, il résulte de nombreuses observations que, dans une matière où existent ces deux sortes d’é- léments, les non-azotés se décomposent relativement plus vite que les azotés, si bien qu’à mesure que progresse altération, le taux cen- tésimal d’azote s’élève. Ceci est vrai surtout des substances végétales. Le phénomène est influencé aussi qualitativement par les conditions extérieures de l’érémacausis. 168 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Ces relations sont mises en évidence pour les produits végétaux par une recherche de J. NEssLer* qui dosa l’azote des feuilles de divers arbres forestiers à l’automne après leur chute et au prin- temps (mai), après qu’elles avaient passé tout l'hiver sur le sol en plein air. Le taux centésimal d’azote dans ces feuilles a été : FEUILLES A — de chêne. de hêtre. Non décomposées. . , . . . . 1,70 7840 Décomposées…. +. nm 2,01 2301 L'enrichissement en azote indiqué par ces chiffres et par d’autres recherches du même genre n’est pourtant que relatif. Il s’explique par ce fait que, dans les réactions, le carbone, l'hydrogène et l’oxy- gène disparaissent en proportions relativement plus fortes que lPa- zote. Celui-ci cependant diminue par transformation en ammoniaque et acide nitrique, mais il reste finalement un résidu qui se montre plus ou moins réfractaire suivant les circonstances (comme il résulte des recherches de Tuxex relatées ci-dessus (voir p. 154). On y voit que 60-70 p. 100 des matières azotées de la poudre d'os, du guano de poisson et du fumier de cheval étaient transformées au bout de seize mois. Le reste représente-t-il les matières azotées plus diffici- lement attaquables de la substance primitive ou des composés azolés qui se transforment peu à peu en ammoniaque ? C'est là une ques- tion qui n’est pas encore résolue. Une partie de ces matières est sous forme d’amides, comme diverses observations l’ont établi”, une autre a vraisemblablement passé dans le corps des animaux et des microorganismes. Gette dernière opinion, soutenue par P. Kos- TYTCHEFF *, est très probable ; car il n’est pas douteux que les prin- cipes absorbés par ces êtres pour leur nutrition soient empruntés au substratum en décomposition et dans une mesure proportion- 1. Bericht über Arbeiten der grossh. Versuchsslation. Karlsruhe, 1870, p. 90. 2, À. Baumanx, Ucber die Beslimmung des im Boden enthallenen Ammoniak- stichstoffs und über die Menge des assimilirbaren Sticksloÿfs im unbearbeiteten Boden. Habilitationssehrift, 1886. 3. Annales agronomiques, t. XVI, 1891, p. 17-38. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, 169 nelle à leur pullulation; précisément ces produits de décomposition, tels que les composés ammoniacaux et amidés, servent très bien d'aliments aux bactéries et aux champignons. Il est donc possible que, parallèlement à la destruction des matières albuminoïdes, 1l s’en fasse par voie synthétique une reconstruction. La quantité d’al- buminoïdes retenue par ce procédé est très variable et dépend essen- tiellement des conditions biologiques des animaux et des organismes inférieurs ; mais, dans la plupart des cas, elle ne doit constituer qu’une part relativement faible de la matière primitive ; du moins c’est ce qu’on doit conclure de ce fait, bien démontré, que la plus grande partie des principes azolés des matières organiques soumises à l'érémacausis se transforme en nourriture assimilable pour les plantes. b) Conditions extérieures de l'érémacausis. Des relations ci-dessus décrites entre les agents extérieurs de la vie et les fonctions des organismes inférieurs, on doit conclure à priori que les décompositions qu’ils provoquent sont influencées par une série de facteurs. Les recherches précédemment exposées mon- trent que l'accès de l'air, l'humidité, la chaleur et certains composés chimiques ont la plus grande influence sur l’intensité de l’éréma- causis. A) Air. — L'accès de l’air doit être mis naturellement à la pre- mière place dans un processus qui est caractérisé comme étant surtout un processus d’oxydation. J’ai cherché à montrer de la façon suivante comment l’accès de l’oxygène retentit sur le dégagement de l’acide carbonique *. Un mélange de 170 grammes de sable quartzeux et de 20 grammes de poussière de tourbe fut humecté avec 30 grammes d’eau et placé dans des tubes en U où arrivait soit de l’air avec des taux variés d'oxygène, soit de l'azote pur. Les quantités d’acide carbonique dé- gagées en vingt-quatre heures sont exprimées par les chiffres sui- 1. Journ. fur Landw., 1886, p. 232. 170 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. vants (moyennes de sept dosages pour l'essai [ et de six pour l'essai ID) : Volume d'acide carbonique dans 14000 volumes d'air. L'air injecté renfermait : Essai I. 67 0. 33 O. 100 0. 33 Az. 67 Az 100 Az. — — Acide carbonique . . . 12,368 41,452 10,945 8,356 Essai II. 21 O. 15 C. 8 O. 2 O0. 79 Az. 85 Az. 92 Az. 98 Az. 100 Az. Acide carbonique. . . 12,509 10,883 10,078 3,619 3,336 On voit que l'oxydation du carbone augmente avec le taux d’oxy- gène sans lui être proportionnelle ; car au-dessus d’une certaine limite (8 p. 100 d’oxygène), l'augmentation d’acide carbonique est insignifiante, tandis qu’au-dessous sa production est fort diminuée. Elle ne cesse pourtant pas, même si l'oxygène est entièrement rem- placé par un gaz inerte, tel que l’azote. Ce fait a été mis en évidence encore par d’autres essais dus, les uns à moi, les autres à J. VON Fopor’. Il est difficile de décider si l’acide carbonique qu’on ren- contre dans ce dernier cas s’est formé aux dépens de substances réductibles (nitrates, sels de fer et de manganèse au maximum) ou si c’est du gaz produit avant le début de l’expérience et qui se dé- gage peu à peu. Il est probable que c’est à ces deux causes qu'est due la présence de l’acide carbonique dans un milieu sans oxygène. Les recherches de Th. ScaLæsiNG * ont donné les mêmes résul- lats; le dégagement d’acide carbonique s’est accru avec le laux d'oxygène, mais, au delà d’une certaine limite, il s’est montré plus ou moins indépendant de la quantité d’oxygène et n’a pas cessé, même quand le sol n’a été pourvu que d’un gaz (azote) sans action sur la décomposition des matières organiques. Ainsi dans des mé- 1. Hygienische Unlersuchungen über Luft, Boden und Wasser. Braunschweig, 1882. 2. C. R.,t. LXXNII, 1873, p.203 et 353. M A CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 171 langes d'azote et de 0, 6, 11, 18, 21 p. 100 d'oxygène, ScnLæŒsiNG a trouvé 96,3, 15"6,9, 16 milligr., 16"€,6 et 16 milligr, d’acide carbonique produit par jour dans 1 kilogr. de terre. On voit qu'ici encore, à partir de 6 p. 100 d’oxygène, la produc- tion d’acide carbonique est restée à peu près constante, quelle qu’ait élé la quantité d'oxygène introduite dans le milieu. Les différences ont même été bien moindres que dans mes essais, ce qui tient au dispositif des expériences. Tandis que dans les miennes, le mélange _d’air n’était renouvelé qu'après chaque prise, toutes les vingt-quatre heures, dans celles de ScuLæsiNG ce renouvellement était beaucoup plus fréquent pour que l’air offert au sol eût toujours la même compo- sition. Ses résultats son! moins démonstratifs, parce qu’en employant des mélanges plus pauvres en oxygène que les miens, il fournissait néanmoins par cet incessant renouvellement des quantités d’oxygène suffisantes pour la décomposition complète des matières organiques. Les travaux de Th. ScaLœæsiNG * sur l’influence de l'air dans la nitrification ont montré qu’elle dépend de la quantité d’oxygène en présence, mais peul se produire encore nettement avec un accès d'air limité. Cet auteur a fait passer à travers cinq échantillons d’un sol riche en humus (2 kilogr.) des mélanges d'oxygène et d’azote en diverses proportions. Les quantités de nitrate formées du 5 juillet au 7 novembre 1872 ont été : Proportion d'oxygène dans l'air. p. 400 1,5 6 1) 16 21 Bedernitrique. - . . .. . . milig. 45,7 95,7 132,5 246,62 162, 1 La quantité d'acide nitrique croit donc avec le taux d’oxygène, mais elle est encore assez forte même avec une faible proportion de ce gaz, circonstance qui s'explique peut-être par le dispositif de l'expérience. Pour maintenir constante la composition de l’air occlus dans le sol, on y fit passer le mélange d’air sans interruption, ce qui fait que, même avec un faible taux d'oxygène dans le mélange, il y avait d’assez grandes quantités de ce gaz disponibles pour l’oxy- dation. | 1. Loc. cit. 2. SCHLŒSING pense qu'il y a eu probablement interversion dans ces deux résultats. 172 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Les résullats suivants d’une expérience de v. Fonor’ montrent. que la nitrification s'arrête en l'absence d'air. Il remplit un large | tube de zinc avec 5 kilogr. de sol humide et le ferma par un bou-, chon de caoutchouc. Après l'avoir laissé pendant trois semaines à la température de la chambre, il l’arrosa de 100 centimètres cubes, d’eau, puis, pendant seize jours, il aspira de l’air à travers ce sol et, l’arrosa encore une fois avec 100 centimètres cubes d’eau. Il re-. boucha le tube et, au bout de vingt-trois jours, l’arrosa d’eau dis- | üillée. L'eau employée à l’arrosage fut analysée après son passage à travers le sol. 100 centimètres cubes renfermaient en milligrammes : ACIDE TT —" ——— AMMONIAQUE. nitrique. nitreux. ga a. 0,0 0:12 18,0 SADS AE RS | 0,0 0,12 16.0 . a. 4,1 0,13 10,0 AVEC AID TE | B. 3.8 0,13 8,0 À ne ot a. 0,065 0,00 (non dosé RS a 0,090 0,00 | par accident) En présence de l’air, la décomposition a donc lieu avec formation d’acide nitrique et nitreux ; mais en l'absence d’air, au lieu d’acide nitrique, il se produit de l’ammoniaque ; il n’y a pas trace d’acide nitrique; bien plus, quand l'air fait défaut, l’acide nitreux déjà formé et même la plus grande partie de l’acide nitrique sont de nouveau réduits. Les observations de BoussinGauLr° et de MiLLon”, montrant qu’un sol saturé d’eau, peu perméable à l'air, ne nitrifie pas, concordent avec celles de Fonor. En résumant les résultats précédents, on peut dire que : 1° L’intensilé de l'érémacausis (oxydation du carbone et de l'azote) augmente en général avec le laux d'oxygène fourni, mais pas pro= portionnellement ; d’abord progressive, l'augmentation devient insi- gnifiante à partir d'une certaine limite ; 1 2 L'acide carbonique peut se produire même en l'absence d'oxy- gène, mais dans une faible mesure ; ” Loc. cit. R., t. LXXXWVI, p. 22. “4 2. C. 8. CLR. tt LIX; p. 282: CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 173 3° En l'absence d'air, non seulement la nitrification ne se fait pas, mais les nitrales el les nitriles du sol se réduisent. Il était logique, dans le même ordre d’idées, de rechercher si l'influence de l'oxygène actif (ozone) sur l’érémacausis était la même que celle de l'oxygène ordinaire. Pour résoudre la question, je fis . passer‘, à travers du sable calcaire riche en humus (300 grammes) addilionné de 80 grammes d'eau, soit de l’air, soit de l’oxygènc pur, soil de l'air ozonisé. Celui-ci était préparé en faisant passer de l'air à travers un flacon rempli d'essence de térébenthine (4) ou à travers un vase dont le fond était garni d’une solution de perman- ganate de polasse additionnée d'acide sulfurique (b). La moyenne de sept dosages donna, pour le dégagement d’acide carbonique, les chiffres suivants : Volume d'acide carbonique dans 4000 volumes d'air. ATR OZONISÉ. AIR OXYGÈNE. _—— —— —— atmosphé- a. b. rique. Acide carbonique. . . 86,849 73,216 68,497 79,212 Dans un second essai, l’air fut ozonisé en le faisant passer par aspiration dans un flacon sur le fond duquel se trouvaient des bà- tons de phosphore à demi recouverts d'eau. Entre ce flacon et le tube en U contenant le sol en expérience on intercala un vase plein d’eau pour purifier l’air du nitrate d’ammoniaque naissant en pré- sence de l’ozone. Dans un cas (A), on employa de nouveau le sable calcaire riche en humus (140 grammes avec 35 grammes d’eau), dans l’autre (B), un mélange de sable quartzeux (170 grammes), de tourbe pulvé- risée (20 grammes) et de 30 grammes d’eau. Voici les résultats (moyennes de huit dosages) : Volume d’acide carbonique dans 4000 volumes d’air. A. B. CR EE RE AIR AIR AIR AIR ozonisé. ordinaire. ozonisé. ordinaire. Acide carbonique. , . 22,228 27,976 13,687 12,947 1. Journ. f. Lardw., 1886, p. 236. 174 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le sol avec tourbe donnant un résultat différent de ceux obtenus auparavant, on dut recommencer l’essai. Le dispositif fut le même, avec celle seule différence qu’au lieu de sable calcaire riche en humus cn employa un mélange (A) de 170 grammes de sable quartzeux, 2 grammes de fumier de cheval pulvérisé et 20 grammes d’eau, L'analyse de l'air extrait du sol accusa les différences sui- vantes (moyennes de six dosages) : Volume d'acide carbonique dans 4000 volumes d'air. A. B. AIR AIR AIR AIR ozonisé. ordinaire. ozonisé. ordinaire, Acide carbonique. . . 23,174 30,745 14,949 9,106 L'ozone ralentit donc en général l’érémacausis des malières orga- niques. C’est seulement pour la tourbe que le contraire se produit. Il est difficile jusqu’à présent de donner une explication plausible de ces résultats. Il est certain que l’ozone, puissant agent d'oxyda- tion, a diminué la production d’acide carbonique dans des matières organiques facilement décomposables. Ceci ne peut s'expliquer qu’en admettant que l'ozone a entravé l’activité vitale des organismes qui interviennent dans la décomposition. (Voir Note C.) Pour la tourbe, il se peut que les combinaisons carbonées qui s’y trouvent mélan- gées à l’humus en quantités assez considérables soient directement attaquées par l'ozone et que ce soit la cause de l'augmentation observée dans la production de l'acide carbonique. B) Chaleur. — Puisque la destruction des matières organiques est liée à l’activité de certains êtres, on ne doit pas s'étonner que la chaleur joue un grand rôle dans le phénomène. J. MôLLER ‘ eLJ. von Fopor * ont trouvé que le dégagement d’acide carbonique augmente en général avec la température et ne cesse pas à 60°, quoique, au delà de cette limite, il diminue. Dans mes recherches sur cette question, j'employai le même dis- 1. Millheilungen aus dem forstlichen Versuchswesen Œsterreichs. Vienne, 1878, vol. I, fasc. 2. ?. Hygienische Untersuchungen aber Luft, Boden und Wasser, 2° perle, 175 positif que dans mes précédents essais, avec cette seule différence que les tubes en U contenant les matières en expérience étaient plongés, non plus dans une cuve commune, mais chacun dans un vase spécial rempli d’eau. Dans ces vases où l’eau devait avoir une température constante de 10° se trouvait un serpentin en plomb où circulait de l’eau à 5-6°. La source de chaleur était un bec de gaz placé sous chaque vase et muni d’un régulateur (thermostat de Soxhlet). Pour le reste, il fut procédé exactement comme pour les recherches expo- sées précédemment. La quantité d’eau aspirée était chaque fois d'un litre. Voici les résultats exprimant la moyenne de 2-3 dosages : CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Volume d'acide carbonique dans 14000 volumes d'air. TAUX TEMPÉRATURE DU SOL. d'eau. 10». 20». 30. 40. 50. p. 100. IL. Terre de compost : 372 gr. 44.00 2,80 145,46 36,24 42,61 76,32 II. Sable calcaire pur avec tourbe pulvérisée: 458,0 13.09 542 44;560020;73 32,047 42/42 III. Terre de compost : 28457,0 6.79 2,03 3,22 6,86 14,69 25,17 IV. — 340%7,8 26.79 18,38 54,24 63,50 80,06 81,52 V: — 3978°,6 46.79 35,07 61,49 82,21 91,86 97,48 D'après ces chiffres, la production d’acide carbonique dans les sols augmente avec la température, d’abord très vite, puis de plus en plus lentement. Concluons donc que la décomposition des matières organiques, loutes conditions extérieures égales, s'accélère à mesure que la température s'élève. Les limites de température au-dessus desquelles l'oxydation du carbone s’arrête et dans l’intérieur desquelles se fait l’érémacausis avec une intensité croissante et décroissante, n'ont pas encore été déterminées exactement. Il ne semble pas qu’il y ait un dégagement d'acide carbonique au-dessous de 0° ; les quantités de ce gaz ré- coltées dans ces conditions provenaient de réactions survenues anté- rieurement à la gelée, à des températures plus élevées. J. MôLLEr * en a donné la preuve expérimentale. Au-dessus du 1. Il plaça 600 grammes de terre fumée dans un mélange réfrigérant de glace et de sel et dosa l'acide carbonique contenu dans un litre de l'air du sol — 50"%,4. Le lendemain le mélange réfrigérant était fondu et fut renouvelé. La terre resta alors dix heures gelée. Des prises d'air faites pendant ce temps, la première accusa dans 176 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. point de congélation de l’eau, l'oxydation du carbone augmente” constamment avec la lempérature jusqu'à un certain degré (opti-. mum) au delà duquel elle décroil pour des lempératures de plus em | plus élevées et finalement s'arréle (maximum). L'optimum et les maximum de chaleur relatifs à la production de l’acide carbonique ne sont pas encore suffisamment déterminés. D'après mes recherches et celles de J. MôLLER, l’optimum serait vers 50-60° ; mais les résul-. tats ne sont pas à l'abri des objections, parce que les observations” n’ont pas été continuées assez longtemps et qu’une plus ou moins forte portion de l'acide dosé peut provenir du gaz qui s'était dégagé avant l’installation des expériences. Les résultats obtenus par P. Kosryrscuerr * semblent plus dignes de confiance, parce qu’il a déterminé en dixièmes de milligramme les quantités d’acide carbonique que 100 grammes de feuilles fraiches de bouleau desséchées et pulvérisées dégageaient à divers degrés de température et d'humidité. Voici ses chiffres : HUMIDITÉ POUR 100. TEMPÉRATURE. ———— 78.9 64.1 38.7 417 3.6 DH ARR 1 950 2 088 2 254 43 0 CRE HE 3 785 3 445 5 184 23 0 SENS Re 14913 15 441 15 022 122 OUR CU > 188 5 494 > 544 379 59 HAN 3 821 3 957 4 132 657 102 L’optimum de température pour le dégagement de l’acide carbo- nique est donc environ 30°, le maximum dépasse 69° et giît, suivant toute vraisemblance, vers 80°. Quant à l’oxydation de l'azote (nitrification), les recherches de Th. ScuLœsinG ont appris qu’elle se fait avec une lenteur extrême à 9°, qu’elle est nettement sensible à 12°, qu’elle atteint son optimum: à 37° et qu’à 09° elle cesse complètement. un litre 443,4, la seconde 98,6, la troisième 5"8,4 et la dernière seulement 0,4 d'acide carbonique. Un second essai où Môzzer avait placé la même terre dans un mélange réfrigérant donna, pour le premier litre, 15°8,2, pour les deux suivants; aspirés à deux heures d'intervalle, 08,8 et 0%£,4, donc à peine plus qu’il n'en existe dans l'atmosphère. 1. Annales de la Science agronomique française el étrangère, 1887, t. Il, p. 165: CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 117 C) Humidité. —J. MüLLER' a cherché à déterminer par divers essais le rôle joué par l’eau dans la décomposition de la matière organique. Dans une terre fumée qui avait élé desséchée à 100°, il n’y eut aucun dégagement d'acide carbonique. Mais les analyses ci-après montrent que, par la seule influence des rayons solaires, la terre peut devenir assez sèche pour que ce gaz ne s’y forme plus. Des feuilles de charme et des aiguilles de pin noir furent desséchées au soleil, et à grammes furent mélangés à 300 grammes de sable quartzeux desséché de la même façon. On mit aussi en expérience 300 grammes de terre de compost sé- chée au soleil. Les trois sols furent placés dans des appareils tels que l'air atmosphérique ne pouvait y arriver; celui qui était introduit après les prises d’essai était dépouillé de son acide carbonique. Le tableau suivant donne les résultats exprimés en volume d’acide car- bonique pour 1 000 volumes d’air. TERRE E . AIGUILLES. HAUTE, S; 8 de compost. f3 juillet. … . À 0.87 2.60 » RÉ À PE Lait 0.55 0.99 4,38 ROME ME TERRE » » 2292 ANNÉES CE ER 0.43 0.00 0.87 se en. 007 » 0.00 Te RE 0.00 0.00 0.00 Le dernier jour, MôLLER introduisit dans chaque vase 50 centi- mètres cubes d’eau distillée, préalablement bouillie. Les dosages d’acide carbonique donnèrent alors les résultats suivants : FEUILLES, AIGUILLES, TER de compost. FA LI PÉSRPSPARS 5.45 1.30 4.58 11 RE 1.30 0.87 9.98 > 7 2817 7.58 26.44 A un : L' 36.84 10.83 20.04 TNA, 49.29 13.00 21.66 Il résulte de ces chiffres que le desséchement du sol est lié à son appauvrissement en acide carbonique, tandis que l'humidité aug- mente le dégagement de ce gaz dans une proportion considérable. 1. Miltheilungen, etc., vol. I, fase. 2, 1878, p. 136-140. MATIÈRES ORGANIQUES, 12 178 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. J. von Fonor‘ a employé, pour ses recherches sur ce sujet, des poids égaux de sable auxquels furent intimement mélangés 5 grammes“ de sucre et À gramme d’uréc ; il les arrosa de quantités variables © ? L d’eau, et obtint en vingt-quatre heures les volumes suivants d’acide » o carbonique : TENEUR DU SOL EN EAU, A 2 p.100. & p.100. 8 p. 100. 17 p. 100. 30 mai 1877 . 2.0 24.0 41.0 66.0 31 — : 3.0 18.6 44.7 74.1 9 juin 1877. 5.0 121.4 138.0 211.4 Il est évident que l'humidité hâte la décomposition des matières organiques ; mais quand l'humidité croît en progression géomé- trique, l’acide carbonique croit seulement en progression arithmé- tique. Il y a une énorme différence dans l'intensité du phénomène quand le taux d’eau passe de 2 p. 100 à 4 p. 100. Avec 2 p. 100: d’eau, il se développe à peine une trace d’acide carbonique et après un temps assez long ; avec 4 p. 100 le dégagement est déjà considé- rable ; il est 10-20 fois plus grand qu'avec 2 p.100. Il semble suffire que l'humidité d’un sol atteigne 4 p. 100 pour que la décomposition s’y fasse presque avec pleine intensité ; d'autre part, le sol n’a qu’à perdre 1-2 p. 100 pour qu’elle s'arrête. Dans mes essais *, Les sols desséchés à l’air furent mélangés avec soin et partagés en plusieurs portions de poids égal dont chacune, mise dans une capsule de porcelaine, fut malaxée avec la quantité voulue d’eau distillée de façon à avoir une masse aussi homogène que possible et fut ensuite placée dans les tubes en U. Volume d'acide carbonique dans 1000 volumes d'air. TEMPÉRATURE DU SOL (terre de compost). TAUX _ d’eau. 10». 202. 30:. 40). 50:. p. 100, 6.79 2,03 3,22 6,86 14,69 25,17 26.79 18,38 54,24 63,50 80,06 81,52 46.79 35,07 61,49 82,12 91,86 97,48 1. Loc, cil., p. 44. ‘2. Journ. f. Landw., 1886, p. 243. F CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 1179 Tous ces résultats sont concordants * et montrent que les malières organiques se décomposent d'autant plus vile qu'elles sont plus hu- mides. Ceci n’est vrai pourtant qu’à condition que l’eau n’obstrue pas les pores au point d’entraver notablement l’accès de l’air. Au delà d'une certaine proportion l’eau doit abaisser la production d'acide carbo- nique, parce qu’elle diminue l’aflux d’air (voir p. 170). Le dégage- ment d’acide ne cesse cependant pas dans un sol saturé d’eau ; fait analogue à celui qui a été observé quand, au lieu de plonger le sol dans l’air, on le met dans un gaz inerte; mais dans les deux cas il diminue énormément. J'ai prouvé qu’il en était ainsi par une expérience. De la tourbe de Kolbermoor (Haute-Bavière) fut bouillie pendant trois jours pour chasser tout l’acide carbonique et placée dans un large tube de verre rempli d’eau. À chaque dosage d’acide carbonique, on chassa de bas en haut 2 litres d’azote à travers le sol plongé sous l’eau et on fit passer le gaz dans les tubes à baryte. À la température de 30°, le volume d’acide carbonique dégagé (moyenne de sept dosages) fut de 4,683 pour 1 000 volumes d’air. Dans un second essai on procéda de même. Mais, pour pouvoir estimer en même temps la diminution provoquée par l’absence de l’air dans la formation d’acide carbo- nique, on fit passer pendant quelque temps à travers le sol, au lieu d'azote, de l’air atmosphérique sous pression, trois semaines après la dernière prise de gaz et on y dosa l’acide carbonique. La moyenne de treize dosages donne pour l’acide carbonique dégagé : En l'absence de l'air . . . 1,964 volumes pour 1 000 volumes. En présence de l'air . . . >,165 — — On peut déduire de ces chiffres que l'oxydation du carbone dans un sol complètement imbibé n’est pas arrêtée, mais elle est notable- ment diminuée. Ces faits, rapprochés des résultats des expériences faites pour mesurer l'influence de l’air, c’est-à-dire de l’oxygène, sur la décomposition, semblent justifier cette conclusion que l'acide 1. Comparez aussi les résultats des expériences de KosryTscaerr signalées plus haut, 180 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. carbonique se dégage avec le plus d’activilé, quand la substance possède un Laux moyen d'humidité (oplimum) à partir duquel, soit qu'il augmente, soit qu'il diminue, le dégagement se ralentit cons- lamment jusqu'à devenir nul quand la subslance est à l’état de complète dessiccalion à l'air, el très faible quand elle est saturée d'eau”. Cette loi s'applique à la nitrification. Son intensité s'accroît avee le taux d’eau de la substance, entre certaines limites, comme il ré- sulie de l'expérience suivante de P. P. DenÉéRaIN *. Il mit sous une cloche de verre, où se trouvait un vase rempli d’eau, de petits vases contenant 100 grammes de terre et arrosés de 5, 10, 15, 20 et 25 centimètres cubes d’eau. La terre contenait au début 08,160 d’a- zote organique et 06,015 d’acide nitrique dans les 100 grammes. Les quantités de nitrate formées en quatre-vingt-dix jours ont été les i suivantes : Quantité d’eau dans le sol. . . . cent. cub. 5: 410: 15720085 Acide nitrique dans 100 gr. deterre. millig. 25 26 27 29 37 samétcés ti Pate Dans un second essai on ajouta aux 100 grammes de terre, 0s‘,010 de sulfate d’ammoniaque. Pour le même laps de temps que dans l'expérience précédente, les quantités d’acide nitrique formées ont été : Quantité d'eau dans le sol. . . . cent. cub. DA TO CIS AUS ? Acide nitrique dans 100 gr. deterre. milligr. 19 49 57 60 53 Si l’on considère en outre qu’une terre prise en pleine nitrifica- tion perd par la dessiccation tout son pouvoir nitrifiant et que dans le sol gorgé d’eau il ne se forme pas trace d’acide nitrique, qu'au. contraire celui qui existe se réduit*, on voit que les lois trouvées pour l'oxydation du carbone s’appliquent pleinement à celle de l’a- zole, en ce qui concerne l’action de l’humidité. 1. Les travaux de KosryrscHerr, analysés dans les Annales de La Science agrono- mique française et étrangère, 1887, t. Il, p. 165, sont aussi très instruclifs à cet égard. 2. Annales agronomiques, t. XIII, 1887, p. 241-261. 3. J, von Fopon, Loc. cit. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 181 D) Lumière. — L'influence de la lumière sur les processus chi- miques de l’érémacausis n’a été jusqu'alors établie que pour la nitrification. D’après J. Soyka *, la lumière l’entrave, tandis que l'obscurité a une action favorable, De deux échantillons de sable humecté d'urine étendue, l’un fut exposé à la lumière, l’autre à l'obscurité. Pour 100 centimètres cubes d'urine, l’azote trouvé sous forme de nitrate et de nitrite s’éleva : ESSAI I. ESSAI II. milligr. milligr. Atalinmiére 25. 7. 12 19 110 BSFODSCUrIÉM EN era 86 360 R. WaRiNGToN * a obtenu des résultats analogues. E) Électricité. — On a affirmé de divers côtés qu’une solution de certains éléments du sol pouvait être influencée par un courant gal- vanique *. Comme il pouvait se faire qu'il y eût aussi influence sur la décomposition des matières organiques, je fus amené‘ à soumettre cette question à une épreuve expérimentale. Les sols imprégnés d’égales quantités d’une même solution furent placés dans des tubes en U, suivant le dispositif maintes fois employé, el dans les deux branches en contact intime avec le sol et à sa surface furent dispo- sées des plaques métalliques reliées par des fils de cuivre aux pôles d’une batterie électrique ou d’une bobine d’induction. Voici les quantités d’acide carbonique dégagées à la température de 30° à intervalles égaux de vingt-quatre heures (moyenne de huit dosages). Volume d’acide carbonique dans 1 000 volumes d'air, COURANT 2 ÉLÉMENTS 1 ÉLÉMENT SANS d’induction (2 éléments). Meidinger. Meidinger, électricité. I. Mélange de 450 gr. sable quartzeux. 2 gr. fumier de cheval en poudre et 60 gr. eau distillée . . . . 12,12 12,37 12,74 43,33 1. Zeitschrift fur Biologie, vol. XIV, 1878. 2. Landw. Versuchsslationen, vol. XXIV, 1879, p. 161-166. 3. Agronomische Zeitung, 1861, p. 550. 4. Forschungen auf dem Gebiete der Agrikulturphysik, vol. XI, 1888, p. 105-111. 182 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. COURANT 8 ÉLÉME z À : ÉLÉMENTS 1 ÉLÉMENT N d’induction Le (3 éléments). Meidinger. Meidinger. électricité. IT. Mélange de 450 gr. sable quartzeux, 2 gr. paille de seigle pulvérisée et 60 gr. d'eau distillée. . . . 7,19 7,23 7,60 7,57 HI. Mélange de 450 gr. sable quartzeux, 2 gr. poussière de tourbe d'Ol- denburg et 60 gr. d'eau distillée. 2,91 2,17 2,24 2,25 IV. 250 gr. de sol (sable calcaire riche en humus) ét 80 gr. d'eau dis- ÉCRAN Ne rnb 14,36 15,89 15,54 COURANT 5 ÉLÉMENTS SANS d’induetion (5 éléments). Meïdinger. électricité. V. Mélange de 450 gr. sable quartzeux, 2? gr. fumier de cheval en poudre et 60 gr. OA ISLE EEMPARREET ROLE AE EURE 11,89 12,96 41,41 VI. 250 gr. de sol (sable calcaire riche en humus) et 50 gr. d'eau distillée. . . . 41,32 11,88 42,45 VIT. Mélange de 450 gr. sable quartzeux, 2 gr. paille de seigle pulvérisée et 60 gr. d’eau distiliée. fus pete a ones 5,89 6,98 6,69 Ces chiffres montrent avec une parfaite concordance que la dé- composilion des malières organiques n’est influencée ni par des cou- rants d’induction, ni par des courants galvaniques d’intensités diverses. Pour déterminer l'influence d’un courant galvanique sur la nitri- fication, 2,5 de terre de jardin humide bien mélangée furent mis à l’état humide dans deux cylindres en verre qu’on couvrit d’une feuille de carton et qu’on exposa pendant trois mois à la chaleur tempérée d’une chambre. Pendant tout ce temps, on fit passer à travers la terre d’un des cylindres le courant électrique fourni par un élément Meidinger. Les deux échantillons furent à la fin épuisés à l’aide de 2 litres d’eau distillée. Dans la liqueur filtrée, on trouva les quantités suivantes d’ammoniaque et d’acide nitrique rapportées à 4 000 parties de sol sec : . o ACIDE AMMONJAQUE. nitrique. SOL ÉIOCITISC ER Re ete 0,006 0,088 Sol non électrisé . . . . . 0,010 0,077 CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 183 Ces nombres accusent une faible augmentation dans la nitrifica- tion, grâce à un courant galvanique peu intense ; mais ce résultat n’est pas très probant à cause de l’extrème pauvreté de la terre en combinaisons azotées solubles. F) Agents chimiques. — La présence des acides, des bases, des sels a une influence considérable sur les processus de l'érémacausis, et c’est là un fait des plus importants pour la pratique, puisqu'il donne la possibilité de modifier les réactions dans un sens déter- miné. D’après ce qu'ont appris les recherches faites jusqu'ici, les acides ralentissent l’érémacausis. Je l’ai prouvé‘ en dosant l’acide carbo- nique qui se dégageait en présence de l'air et en vingt-quatre heures d’un mélange de sable quartzeux (400 grammes) et de fu- mier de cheval en poudre (2 grammes) additionné de 40 centi- mètres cubes d’une solution d'acides minéraux à 0.1 p. 100 ou 0.2 p. 100 ou simplement arrosé de 40 centimètres cubes d’eau dis- tillée. Les résultats ci-après expriment la moyenne de huit dosages : Volume d'acide carbonique dans 1000 volumes d'air. ACIDE ————— Matière ajoutée . . EAU. chlorhydrique. sulfurique. nitrique, RUES _— EE — — _ p. 100. p. 100. p. 100. p. 100. p- 100. Taux de la solution. » 0,1 0,2 0,1 0,1 0.1 En pour-cent du sol. » 0,01 0,02 0,01 0,01 0,01 Acide carbonique. . 18,410 15,086 140,477 12,503 10,294 17,380 Ces chiffres montrent que l’oxydalion du carbone dans l’éréma- causis, en présence des acides minéraux, même dilués, se ralentit d'autant plus qu'ils sont plus concentrés. La nitrification, elle aussi, est non seulement amoindrie, mais arrêtée dès que le substratum est faiblement acide. Ceci s'applique même aux acides nitrique et nitreux dès qu’ils se sont accumulés à assez haute dose dans une matière en nitrification sans pouvoir se combiner. Quant à l'influence sur la décomposition des matières organiques 1. Journ. fur Landw., 1886, p. 255. 184 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de l’alcalinité de la solution qui les imprègne, j'ai pris des mélanges 4 de 400 grammes de sable quartzeux et de 4 grammes de paille de seigle pulvérisée ; les uns furent imbibés d’eau, les autres de solu- tions alcalines (40 centimètres cubes) de concentration variée ; tous furent exposés à la décomposition, de la même façon que précé- demment et à une température de 30°. Voici les résultats (moyennes de 7-9 dosages) : Volume d'acide carbonique dans 4000 volumes d'air. Matière ajoutée. . . . EAU. SOLUTION DE POTASSE. = ———————_—_—_—— p. 100. p. 100. p. 100. p. 100, p- 100. Taux de la solution . . » 0,1 0,5 Î 2 5 (En pour-cent du sol) , » (0,01): (0,05) * (0510), (6,20) Acide carbonique . . . 8,099 10,493 9,260 8,059 4,994 0,609 Dans l’essai suivant, le sol artificiel était formé de 300 grammes de sable quartzeux, 5 grammes de tourbe pulvérisée et 60 centi- mètres cubes de solution ou d’eau. Les quantités d’acide carbonique dégagées furent les suivantes : Volume d'acide carbonique dans 4 000 volumes d'air. Matière ajoutée . . . . EAU. SOLUTION DE POTASSE. — RE (En pour-cent du sol) . » (0,016) (0,033) (0,067) Acide carbonique . . . 3,605 4,083 4,518 5,005 De ces deux expériences, on doit conclure que l’érémacausis est favorisée par la présence de solutions alcalines faibles, mais que des solutions trop concentrées la diminuent, et proportionnellement à leur concentration. La cause de ce dernier fait ne tient pas, comme on pourrait le croire, à une combinaison de l’acide carbonique avec la potasse, car la quantité d’acide libre suffit parfaitement à carbonater l’alcali dans un très bref délai, même s’il s’agit de fortes doses d’alcali. On ne peut du reste accepter cette opinion, puisque les carbonates alca- lins exercent la même influence que les alcalis hydratés. Pour pré- ciser cette action, m’écarltant des concentrations employées dans mes précédentes recherches, je n’ai employé que des liqueurs très diluées. Dans l’essai I, les tubes reçurent un mélange de 400 gram- a da 4 éd ds € CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 189 mes de sable quartzeux, 4 grammes de paille de seigle pulvérisée et 40 centimètres cubes de solution ; dans l'essai Il, 1ls reçurent 300 grammes de sable quartzeux, 5 grammes de tourbe pulvérisée (d’Oldenbourg) et 60 centimètres cubes de solution. Les analyses de l'air aspiré ent donné les résultats suivants (moyenne de sept dosages): Volume d’acide carbonique dans 1000 volumes d'air. Essai I. Matière ajoutée . , . æau. RS SR RS PA A, de potasse. de soude. _ ne —— — p. 100. p- 100. p. 100. p- 100. p. 100. Concentration de la DONMIONS 2... » 0,01 0,05 0,05 0,1 0,5 En pour-cent du sol . » 0,001 0,005 0,005 0,01 0,05 Acide carbonique . . 414,289 12,321 12,541 12,014 12,093 13,187 Essai II. Mahérerajquéée. 0: , 5. « He Dr ee — Se — mm p- 100. p. 100. Concentration de la solution. . . » 0,167 0,334 En pour-cent du sol. . . . . . » 0,033 0,067 Acide carbonique . . . . . . . 3,605 4,638 5,801 Ces chiffres prouvent que des solulions élendues de carbonales alcalins favorisent la décomposition des matières organiques, sur- tout quand elles sont déjà en train de s’altérer (tourbe). L’aclion des hydrates et carbonates des terres alcalines est diver- sement appréciée. Les uns leur accordent une influence favorable à la décomposition ; les autres citent des observations d’après les- quelles ces substances entraveraient le phénomène ; tels sont les ré- sultats des essais installés par E. Wozrr ‘ et J. NESSLER *. Le premier soumit du fumier frais, préalablement analysé, à des conditions de décomposition différentes. Une portion fut abandonnée à l'air libre, deux autres furent mises à couvert, l’une telle quelle, la seconde avec de la chaux caustique (250 grammes par pied cube 1. Landw. Versuchsstationen, 1859, p. 141. 2. Berichi über Arbeiten der Grossh. Versuchsstationen. Karlsruhe, 1870, p. 93- 103. 186 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de fumier). Au bout de quinze mois, il y avait encore les quantités suivantes, exprimées en pour-cent de la teneur primitive : A COUVERT A L'AIR libre. tel quel. avec chaux. P. 100. P. 100. P. 100. Runner ITS ee rt 46.9 48.8 41.1 Matière organique. . . . 25.2 33.8 44.0 AZOTB. en ER RSR 44.1 67.6 9245 L’addition de chaux a, d’après ces chiffres, diminué la perte en matière organique et en azote et, par suite, exercé une action relar- datrice sur la décomposition. Dans les essais de NEssLER, une addition de chaux caustique à di- verses matières organiques telles que de la tourbe, de la poudre d’os brute et soumise à la vapeur a, dans les trois premiers mois, retardé la décomposition à des degrés divers; dans les neuf mois suivants, il y eut compensation ou bien augmentation d’activité, si bien qu’au bout d’un an le retard apporté par la chaux à la des- truction des matières organiques ne se montrait pas encore toujours nellement. PETERSEN ‘ est arrivé à un autre résultat : il a trouvé que les sels de chaux hâtaient la décomposition des matières contenant de l’hu- mus acide. L'expérience fut faite avec une terre de forêt feuillue de réaction très acide, dont le taux d’humus s’élevait à 58 p. 100 et à laquelle on ajouta, dans un cas 1 p. 100, dans l’autre 3 p. 100 de carbonate de chaux. Eu seize jours, des poids égaux de ce sol (205,6 à l’état sec) dégagèrent : I. I soL soL SOL avec 4 p. 100 s0L avec 3 p. 100 tel quel. de tel quel. de de Ca O, CO?. TES Ca O, CO®, milligr. milligr. milligr. milligr. Acide carbonique. 47,20 181,12 44,67 244,71 Bien qu’une partie de l’acide carbonique du sol chaulé puisse pro- venir de la portion du calcaire dont la chaux se combine avec les. 1. Landwirthschaftliche Versuchsstalionen, vol. XII, 1870, p. 155-175, CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 187 acides humiques, on constale que, même dans le cas le plus favo- rable, cette partie est moindre que la quantité observée dans le sol chaulé. En conséquence, la décomposition des matières humiques acides est activée par leur mélange avec du carbonate de chaux. Pour voir clair dans ces divergences d'appréciation, j'ai installé * une série d'expériences. Dans les tubes en U on disposa, d’une part, un mélange de sable quartzeux (400 grammes) et de paille de seigle finement pulvérisée (4 grammes), additionné de 40 centimètres cubes d’eau distillée (essai [), et, d’autre part, un mélange de sable quartzeux (300 grammes) et de tourbe pulvérisée (5 grammes), additionné de 60 centimètres cubes d’eau (essai ID). Ces sols reçurent diverses quantités de chaux caustique qui fut mise en suspension dans l’eau d’arrosage ; l’un resta tel quel. Le tableau ci-dessous contient les résultats obtenus (moyenne de huit essais) : Volume d'acide carbonique dans 4000 volumes d'air. Essai I. SOL additionné de chaux caustique. tel quel. — 0,04. O:r,2. O:r,4. O:r,8. 2:r,0. Acide carbonique. . 12,981 10,949 9,819 6,837 0,456 0,350 Essai II. sOoL additionné de chaux caustique, tel quel, ee —— 0:r,05. O:r,1. 0,2. Acide carbonique. . . . . 3,194 3,374 3,614 3,902 La chaux caustique a donc diminué la production d'acide carbo- nique dans les malières organiques non décomposées (paille de seigle) ; elle l’a au contraire augmentée dans les substances déjà altérées (tourbe). Les résultats relatifs à la paille tiennent surtout à une action spé- cifique de la chaux, et pas seulement à une combinaison de l'acide 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 261. 188 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. carbonique avec cette chaux ; car les quantités d’acide perdues par cette voie ne sont pas assez grandes pour expliquer la diminution de production de l’acide carbonique dans l'essai en question. Le sol tel quel a dégagé, pendant la durée de l'essai, au moins 596"6,8 d'acide carbonique, étant donné qu'à chaque dosage on a extrait 2 litres et, entre les dosages, 1 litre. Pour saturer 0,04, 0,9, 0,4, 0,8 et 2 grammes de chaux, il faut respectivement 18, 90, 180, 360 et 540 milligrammes, ou (en rapportant à 596,8) 3,0, 15,1, 30,2, 60,4 et 90,6. La diminution dans l'acide carbonique est, p. 100, de 15.7, 25.6, 47.5, 96.3 et 97.3. Il résulte immédiatement de là que les chiffres obtenus pour la chaux ne peuvent pas être dus seulement à une combinaison de l’acide carbonique dégagé. Dans d’autres expériences faites par moi, les sols furent placés dans des cylindres en tôle de 50 centimètres de hauteur, de 1000 centimètres carrés de section, qui furent remplis de la même ma- nière autant que possible. Chaque vase fut muni d’un tube en tôle, de 30 centimètres de longueur, recourbé vers l'extérieur, fermé par un bouchon de caoutchouc et destiné à permettre à l’occasion l’écou- lement de l’eau qui, par les grandes pluies, aurait pu se rassembler au fond. Les cylindres furent laissés à l'air libre dans une caisse en bois de 50 centimètres de hauteur. La distance entre les vases et les parois de la caisse était de 30 centimètres, et cet espace était rempli de terre jusqu’au bord de la caisse pour obtenir artificiellement l’échauffement latéral des sols à l’essai. Ceux-ci se composaient de lehm, de sable quartzeux, de sable calcaire !, mélangés au quart de leur volume avec de la tourbe pulvérisée, et enfin de tourbe pure en gros grains ?. Le remplissage des vases se fit au printemps de 1880. Les sols restèrent à l'air pendant l'hiver et furent analysés l’année suivante (1881). La quantité de chaux caustique en mélange fut toujours de 614 grainmes pour 90 litres de sol et (si on la rapporte au poids des sols séchés à l'air) de 1 p. 100 (lchm), 0.8 p. 100 (sable quartzeux), 0.9 p.100 (sable calcaire) et 3.5 p.100 (tourbe). L’air aspiré d’une 1. Sable calcaire de l'Isar contenant S4.6 p. 100 de calcaire. 2. Provenant des couches inférieures de la tourbière de Schleissheim, près de Munich. : CR SE LL sn CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 189 profondeur de 30 centimètres renfermait les doses suivantes moyen- nes d'acide carbonique : Volume d'acide carbonique dans 14000 volumes d'air. LEHM SABLE QUARTZEUX| SABLE CALCAIRE PA 1 1/4 a en + 114 +4} ui 1/4 TOURBE. #2 + | de son volume de son volume de son volume A a & © de tourbe de tourbe de tourbe = a ES D © = avec sans avec chaux. | chaux. sans chaux. avec sans chaux. avec chaux. sans chaux. chaux. avril-27 septembre{8s0. 0,900 GE 2,481 10,674 | 3,385 | 2,439 | 4,477 ayril-17 juin 1881 . 1,939 12,015| » “| 2,510/ 2,863 1 » juilet-3 octobre 1881 3,012 67 3: 3,493 ) avril-4 juillet 1881. ÿ juillet-3 octobre 1881. À cause de la lenteur de décomposition de la tourbe, J’employai l’année suivante (1882) des matières plus facilement décomposables (du fumier de cheval pulvérisé *) et, outre la chaux caustique, J'y mélangeai du carbonate de chaux chimiquement pur. Pour étudier encore une fois la manière dont les corps humiques naturels se comportent vis-à-vis des deux sols calcaires, j'ai expérimenté sur du sable calcaire non fumé riche en humus (sol du champ d’expérience). La quantité de chaux ajoutée était de 500 grammes ; celle de carbo- nate de chaux de 660 grammes pour 50 litres de sol. Voici les ré- sultats de l'analyse de l’air du sol : Volume d’acide carbonique dans 1000 volumes d'air. SABLE CALCAIRE humique ur MARS - : humique, non fumé avec fumier de cheval avec fumier de cheval NOMBRE d'analyses. sans chaux. sans avec avec chaux. | chaux. calcaire.| avec avec sans avec avec chaux. |calcaire.| chaux. | chaux, |calcaire. 19 avril-26 mai .| 3 4 juin-?4 juillel.| 4 7 août-22 sept.| 4 16,660! 0,120/16,843/10,864| 0,512 16,721124,342/14,874110,564| 8,984 4,293| 6,975] 3,382| 3,454 2,998| 0,276] 3,447) 5,388! 5,793 5,494 3,284| 2,309| 3,059 | 1. Fumier de cheval desséché, modérément décomposé. 190 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. L'action de la chaux caustique se manifeste d’abord par une dimi- nution du taux d’acide carbonique de l’air du sol, conséquence de la fixation de la plus grande partie de l'acide dégagé ; puis vient une période où ce taux s'élève jusqu’à ce que finalement la produc- tion d’acide carbonique du sol chaulé tombe de nouveau au-dessous de celle du sol non chaulé. Par l’emploi du carbonate de chaux, le dégagement d'acide est d’abord augmenté et son influence dure plus longtemps que celle de l’hydrate de chaux. Mais ensuite, il se forme moins d’acide carbonique dans le sol pourvu de calcaire que dans celui qui n’a rien reçu. Si nous résumons les faits acquis jusqu’à ce jour, nous arrivons à la conclusion que la décomposition des matières organiques non dé- composées paraît étre retardée par l'addition d'hydrale ou de car- bonale de chaux ; celle des matières déjà allérées el pourvues de plus ou moins grandes quantités d'acides humiques parait étre fa- vorisée par les mêmes circonstances. L'action de la chaux sur la décomposition des matières organiques déjà altérées repose sur ce fait que les acides humiques, à mesure de leur formation, se combinent à la chaux et que ces combinaisons, comme on l’a souvent admis, se détruisent plus facilement que les acides non combinés. Pour vérifier la justesse de cette hypothèse, j'ai pris de la tourbe de Kolbermoor (près d’Aibling, Haute-Bavière), ayant un faible taux de cendres, et je l’ai arrosée avec une solution de potasse moyennement concentrée pour avoir une solution d’acide humique. Celle-ci, fortement colorée, fut séparée par filtration en deux portions, dont l’une fut incorporée au sol sous forme d’acide humique non combiné, et l’autre fut employée à former de l’humate de chaux qu’on obtint en ajoutant du chlorure de calcium à la solu- tion renfermant l’humate alcalin. Les précipités furent lavés sur filtre à l’eau distillée chaude, séchés et pesés. On détermina la te- neur en chaux de l’humate et on prit pour les expériences des por- tions de ces deux composés renfermant même quantité d'acide hu- mique. On mélangea 86 grammes de sable quartzeux avec 115,465 d’humate de chaux, correspondant à 406,483 d’acide hbumique, et on mouilla avec à grammes d’eau (1). Gomme cette quantité d’eau était insuffisante, on en ajouta 10 grammes. 4 CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, 191 La quantité d’air extraite fut d’un demi-litre pour chaque dosage. Le volume d’acide carbonique existant dans 1 000 volumes d’air du sol à été : HUMATE ACIDE de chaux. humique. I. Moyenne de 3 dosages. . . . . 10,600 4,418 I, — Id es 2e" 16,129 8,949 L'lvumate de chaux se détruit donc bien plus vite que l'acide hu- mique pur. Par là s'explique l’action favorable exercée par la chaux, dans les précédents essais, sur la décomposition des matières orga- niques. La présence des bases ou des composés à caractères basiques (alcalis et terres alcalines et leurs carbonates) est d’une très grande importance pour la nitrification, comme l’ont montré les recherches de R. WaRINGTON‘. Dans les solutions acides, on l’a déjà dit plus haut, il ne se forme pas d’acide nitrique; #l faut qu'il y ait une base à laquelle celui-ci se combine. Quand toutes les buses disponibles sont neulralisées, la nitrification cesse. Une solution étendue d’urine fut laissée à elle-même sans autre addition que le ferment nitrique ; l'urine se transforma d’abord en carbonate d’ammoniaque que l’a- cide nitrique put utiliser comme base, mais qui s'épuisa avec le temps. Le résultat de l'expérience fut qu’il se forma la moitié seulement de l’acide nitrique qui aurait pris naissance dans les mêmes condi- lions si la solution avait contenu du carbonate de chaux et de soude ; évidemment la nitrification se serait poursuivie jusqu’à ce que toute l’ammoniaque fût transformée en nilrate d’ammoniaque, puis se serait arrêtée. D’après WaRiNGTON, il suffit d’une quantité encore faible de sel alcalin pour que la nitrification soit déjà sérieusement entravée. Le carbonate de soude commence à exercer une influence retardatrice sur le début du phénomène, quand il y en a plus de 300 milligrammes par litre. Dans des solutions qui renfermaient 1 gramme de ce sel par litre, 1l fut impossible de provoquer la nitrification. 1. Journ. of the chem. Society, 1884, vol. XLV, p. 637-682, 192 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. D’après de récentes recherches du même auteur, le carbonate de soude surtout paraît être un obstacle à la nitrification, tandis que le bicarbonate exerce une très heureuse influence, même à la dose de 1 à 4 grammes par litre. Au delà de ces limites, il a une action - retardatrice, comme cela a été observé pour un taux de 6 grammes par litre. Les résultats des expériences de F. Dumonr et F. CROCHETELLE * montrent aussi la faible influence du carbonate de soude sur la nitri- fication et, au contraire, l’action favorable assez intense du carbo- nate de potasse. Ils ont opéré sur du sol d’Avilly, qui est en pré de temps immémorial et qui contient par kilogramme 420 grammes de chaux et 68,4 d’humus renfermant 11 grammes d’azote organique et 388,2 de carbone combiné. Le 10 mai, à À kilogr. de ce sol on ajouta diverses quantités de carbonate de potasse ; le tout fut bien mélangé et arrosé à diverses reprises. Au bout d’un mois, on dosa l'azote des nitrates et on obtint les résullats suivants par kilo- gramme : Garbonate de potasse. . . . . gr. 0 Î 2 3 4 5 Azote (sous forme de nitrate) . . milligr. 70 160 230 250 130 73 tandis que le sol renfermait au début 60 milligrammes par kilo- gramme. En juillet, nouveaux dosages qui donnèrent, par kilogramme : Garbonate de potasse "027 "0"! LA 230 6 4 CRE : Azote (sous forme de nitrate). milligr. 80 98 140 1460 127 100 S5 80 60 Un troisième essai fut fait avec de la terre provenant des bords d’un fossé d'écoulement. Cette terre faisait une vive effervescence avec les acides et se formait sur les rives d’un ruisseau dans lequel. se déversaient des eaux résiduaires de toutes sortes ; elle contenait 285°,7 de carbone combiné ou 576,6 d’humus par kilogramme. 1. On nilrification. Part. IV, À report of experiments mode in the Rothamsted Laboratory. London, Harrison and Sons. 2. C.R., t. CXVIL, p. 670-673: à À CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 193 Du 20 juin au 10 juillet, il s’y forma par kilogramme : Carbonate de polasse , . . . . . CAO EMI PS2 N 72 7 rnS Azote (sous forme de nitrate) . . . milig. 8 62 91 140 1480 10 D’après tous ces chiffres, Za nitrification est activée par l'addition de petites quantités de carbonate de potasse allant jusqu’à 2.5 p. 1 000 ; de plus fortes doses lui sont nuisibles. Le carbonate de chaux et de ma- gnésie influe dans tous les cas favorablement sur la nitrification ; par contre, le carbonate d’ammoniaque en excès l'empêche, comme Wa- RINGTON l’a démontré. La solution la plus concentrée où ait jusqu'ici commencé la nitrification contenait une quantité de carbonate d’am- moniaque équivalente à 308 milligrammes d’azote. C’est l'influence nuisible d’un excès de ce sel qui empêche les solutions concentrées d'urine de nitrifier. La présence de l’ammoniaque et de ses sels est surtout un obstacle à la formation des nitrates à l’aide des nitrites. Cette antipathie des organismes nitrifiants pour l’ammoniaque ex- plique la marche de la nitrification dans des solutions ammoniacales relativement concentrées (1 gramme par litre) ensemencées avec un peu de terre. Il se forme, dans ce cas, de grandes quantités d’acide nitreux ; l’acide nitrique n'apparaît que quand la dose d’ammoniaque est notablement diminuée. L’érémacausis est fortement influencée par l'addition de sels à la matière en décomposition ; elle se modifie de diverses façons suivant la nature et la proportion du sel. Voici à peu près ce que l’on peut dire jusqu'alors sur cette question : Les sulfales semblent restreindre l'oxydation du carbone dans l’é- rémacausis ; c’est du moins le cas pour le sulfate de chaux (gypse). Le fait a déjà été constaté par E. Wozrr', qui a trouvé qu'après addition de 200 grammes de gypse par pied cube à du fumier frais, on trouvait, au bout de quinze mois, les quantités suivantes des divers principes exprimées en pour-cent de leur taux dans Je fumier frais : SANS AVEC addition. gypse. Eumier frais 1. 4:62 à 48,8 47,6 Matière organique . . . . 33,8 40,0 BAURO tnt e. CES Mie 67,6 11,5 1. Landwirthschaftliche Versuchsstationen, 1859, p. 141. MATIÈRES ORGANIQUES. 13 E Le gypse s’est comporté de la même façon dans une expérience que j'ai faile avec un mélange de sable quartzeux (300 grammes), tourbe pulvérisée (5 grammes) et eau (60 centimètres cubes). Les chiffres ci-dessous le montrent : 194 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Volume d'acide carbonique dans 4000 volumes d’air. GYPSE. RIEN. TT, 0:r,05. 0:,1. Acide carbonique . . . 3,194 3,029 2,713 L'addition de gypse a diminué la perte en matière organique et même en azole ; le gypse exerce donc une influence retardatrice sur l'érémacausis. Par contre, les recherches de P. Picaarp'. R. WARINGTON’, F. Dumonr et F. CROCHETELLE* ont montré que les sulfates ont une. aclion très favorable sur la nilrification. D’après les expériences de Picaarp, les sulfates de chaux, de po- tasse et de soude semblent être les mieux doués sous ce rapport et dépasser les carbonates. Si l’on ajoute à un sol 0.5 p. 100 de ces sels, 1l nitrifie énergiquement, surtout avec le gypse. En prenant des poids égaux des sels à essayer et, posant le pouvoir nitrifiant du gypse égal à 100, celui des autres sels s'exprime par les chiffres sui- vants (pour le sol en expérience) : SUHAtO AE ChAUR, CCE ET 100.00 sulfate de soude CS A 47.91 SUATE ENPOLASSC RE RENE 35.78 Carbonatesde chaux AR RUE 13.32 Carbonate de magnésie. . . . . . . . 12.52 Pour le climat du sud de la France, la nitrification dans les sols calcaires et gypseux est surtout active aux mois de septembre et 1. C. R., t. XCVIII, p. 1289; t. CXIV, p. 490. Annales agronomiques, t. X, p. 302: t. XV, p. 505; t. XVIII, p. 337. 2. Annales agronomiques, t. XI, p. 557. 8. C. R.,t. CXVIL p. 670. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 195 d'octobre. Dans ce laps de temps, d’après PicHaRp, il y a eu en sol calcaire 26.2 p. 100, en sol gypseux 46.3 p. 100 de l’azote total nitrifié. Cette action du gypse ne se fait remarquer que dans des sols bien perméables ; elle n’a pas lieu dans les sols insuffisamment perméa- bles ou qui contiennent trop d’humus acide, parce qu’alors le sulfate de chaux se réduit vite en sulfure de calcium et même en hydrogène sulfuré qui tous deux arrêtent la nitrification. Ces réactions peuvent cependant être évitées si avec le gypse on ajoute au sol du carbonate de chaux et si on l’ameublit à fond. On peut déduire des recherches de WaARINGTON que le gypse dé- truit l'influence fâcheuse du carbonate d’ammoniaque sur la nitrifi- cation. Dans les solutions d'urine pourvues de gypse, celui-ci dispa- rut peu à peu et à sa place il se développa sur les parois du vase des masses cristallines, consistant probablement en carbonate de chaux. Ces dépôts disparurent à leur tour à mesure que progressa la nitrification. Les essais de F. Dumonr et F. CROGHETELLE prouvent que le sul- fate de potasse à certaines doses favorise plus la nitrification que le carbonate de potasse (voir plus haut). En un mois il s’est formé par 1 000 grammes de terre (d’Avilly) les quantités suivantes d’azote ni- trique par addition de 0, 1, 2, 2,5, 5, 4, 5, 6 et8 grammes, soit de carbonate de potasse, soit de sulfate de potasse : Avec le carbonate . millig. 80 98 140 160 127 100 85 S0 60 Avec le sulfate . . — SO 150 180 220 260 240 270 340 350 Dans la terre de Gally, il s’est produit du 20 juin au 20 juillet : Azote nitrique. . . . . miligr. 78 420 456 300 pour 12 o* (o +) Sulfate de potasse. . . gr. 0 Le sulfate de potasse a donc, à certaines doses, très fort accéléré la nitrification, qui se ralentit au contraire, si on emploie ce sel en trop fortes quantités. Cette influence varie, d’après ces mêmes au- 196 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. teurs, suivant les doses d’humus en présence, comme le montrent « les chiffres suivants : Azote nitrique produit en quinze jours dans 4 000 grammes de terre. Sen TERRE ae TS avec 10sr,8 d’humus. © © milligr. milligr. milligr. milligr. HIER OOITEMEN RENE 39 En excédent 28 En excédent Avec carbonate de potasse . 68 29 32 4 Avec sulfate de potasse . . S0 A1 46 18 On voit que l’excès d’azote nitrique, provoqué par l’addition des sels alcalins, s’amoindrit à mesure que le sol est plus pauvre en humus. Le sulfate de fer, d’après P. PicHaRD *, tant qu'il ne trouve pas à s’oxyder, exerce sur la nitrification la même influence que le gypse, « quoique à un moindre degré. Dans les sols perméables, 1l empêche au contraire la nitrification, comme on peut le conclure de ce fait que les doses de nitrate du sol sont inversement proportionnelles au sulfate de fer qui s’y trouve. Ainsi M. MÆRCKER*, expérimentant sur des sols tourbeux, a trouvé, dans 100 parties de sol sec : ACIDE FER nitrique. soluble. Sol cultivé d'une manière permanente. . . 0,0956 0 SOLDONTCUIUTÉ RS ET TRE 0 1,349 SOI AUTOS CUITE 0,0088 0,298 L'action nuisible du sulfate de fer sur la nitrification, action qui ressort des chiffres précédents, tient surtout à ce qu’il fixe énergi- quement l'oxygène de l'air ambiant et se transforme en sel au maxi mum. Les phosphates ont, en général, sur l'oxydation du carbone comme sur la nitrificalion, une influence favorable, à moins qu'ils n'existent à l’état soluble en trop fortes quantités. Les chlorures possèdent, comme on sait, des propriétés antisep= 1. C. R., t. CXII, 1891, p. 1455. 2, Zeitschrift des landw. Centralvereins für die Provins Sachsen, 1874, p. 70s Va } r « CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 197 tiques et antifermentescibles très nettes ; il n’est donc pas étonnant que, même à faibles doses, ils entravent l’activité des microorga- uismes de la décomposition. J'ai montré * que le chlorure de sodium diminue fortement l’oxydation du carbone. J’ai soumis à l’éréma- causis un mélange de 400 grammes de sable quartzeux et 2 grammes de fumier de cheval en poudre, arrosé de 40 centimètres cubes d’eau distillée et de solutions de sel marin diversement concentrées. . Les quantités d’acide carbonique dégagées en vingt-quatre heures sont indiquées ci-dessous (moyenne de neuf dosages) : Volume d’acide carbonique dans 1000 volumes d'air. Matière ajoutée. . . . . . RIEN. SOLUTION DE SEL MARIN. — RS p.100. p.100. p.109. p.100. p. 100. Concentration de la solution, » 0.5 Î 5 10 20 (En pour-cent du sol) . . . » (0.050 LI (2700) 26:90) Acide carbonique , . . . . 17.288 15.316 10.737 8.237 6.174 1.753 Le chlorure de sodium, méme à faible dose, ralentit l'oxydation du carbone et d'autant plus que le taux de sel de la masse est plus élevé. Relativement à l’action du sel marin sur la nitrification, P. P. DE- HÉRAIN *, en opérant sur de la terre à laquelle il ajoutait des doses de sel variant de 0,1 à 2 grammes par 100 grammes, a trouvé que de pelites additions n’avaient pas d’effet nuisible, mais qu'avec des doses trop fortes cet effet se produisait et d’autant plus que l’expé- rience durait plus longtemps. Avec 08,5 de chlorure de sodium par 100 grammes de terre, la nitrification s’arrêtait. Le chlorure de potassium paraît avoir une action moins défavo- rable en ce sens que, d’après les recherches de F. Dumonr et F. CKOCHETELLE *, à petites doses il accélère la nitrification, quoique, comme le montrent les chiffres ci-dessous, dans une faible mesure, bien moindre que le sulfate et le carbonate. L’azote nitrique formé en un mois dans 100 grammes de terre d’Avilly s’éleva pour les 1. Journ. f. Landw., 1886, p. 271. 2. Annales agronomiques, t. XIV, 1888, p. 259-320. 3. C. R., t. GXVII, p. 670-773. 198 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. doses de 0, 1, 2, 2,5, 3, 4, 5, 6 et 8 grammes de chacun des trois « sels à : 80 75 78 100 100 78 80 70 » miligr. avec le chlorure de po- tassium ; 80 98 140 160 127 100 85 80 60 — avec le carbonate de potasse ; 80 150 180 220 260 240 270 340 350 — avec le sulfate. Dans un sol riche en humus, l’addition de 2 millièmes de ces sels a provoqué en quinze jours par kilogramme de terre les quantités suivantes d’azote nitrique : CHLORURE CARBONATE SULFATE Matière ajoutée. . . . RIEN. de de de potassium, potasse. potasse. Azote nitrique . . . . miligr. 39 57 68 80 Le chlorure de potassium n’a donc qu’une influence modérée sur la nitrification. Pour apprécier la mesure dans laquelle les nitrates influent sur la décomposition, j'ai humecté’ un mélange de 400 grammes de sable quartzeux et 2? grammes de fumier de cheval en poudre, soit avec 40 centimètres cubes d’eau, soit avec des solutions de nitrates diver- sement concentrées et j'ai trouvé les chiffres suivants, moyennes de sept dosages : Volume d’acide carbonique dans 4 000 volumes d'air. Matière ajoutée. . . EAU. SOLUTION DE NITRATE DE SOUDE. — EE p. 100. p. 100. p. 100. p. 100. p. 100. Concentration de la SOIUHON EE. » 0.5 Î 5 10 20 En pour-cent du sol. » 0.05 0.10 0.50 1.0 2.0 Acide carbonique. . 16.366 18.041 17.131 10.245 6.821 4.452 Concluons que des solutions diluées de nitrates favorisent l’oxyda- tion du carbone, tandis que des liqueurs concentrées la ralentissent, et cela proportionnellement à leur degré de concentration. Leur 1. Journ. f. Landw., 1886. p. 270. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 199 influence sur la nitrification a été étudiée par P. P. Denérain". Il prit de la terre qui conténait 2#',61 d'azote par kilogr., la mit, avec ou sans addition de nitrate de soude, dans une atmosphère saturée de vapeur d’eau et y dosa les nitrates à des intervalles déterminés. Voici ses résultats : Azote nitrique par 4 000 kilogr. SOL s0oL SOL avec O0:r,06 avec O:r,6 p- 100 p. 100 avec rien. de nitrate de nitrate de soude. de soude. gr. gr. gr. Après 31 jours, . 132 0,00 0,33 Après 39 jours, . 16222 0,33 0,00 Après 70 jours. , 1,48 0,75 0,58 Après 105 jours . 0,63 0,50 0,44 On doit en conclure qu’une assez forte dose de nitrates ajoutée au sol empêche d’abord la nitrification, mais que, comme le montre nettement l'essai avec 05,06 de nitrate, le ferment nitrique peut s’habituer peu à peu à ces nouvelles conditions. Mentionnons enfin, pour être complet, que si l’on incorpore à un sol des sels ammoniacaux en quantités croissantes, la production de l’'ammoniaque diminue aussi progressivement, comme il résulte de diverses expériences de A. HÉBERT*, dont nous citerons seulement quelques chiffres : Azote ammoniacal (en milligrammes). AU DÉBUT A LA FIN de de DIFFÉRENCE, l'expérience. l'expérience. LL US SERRE PRE 2,90 12,94 —+ 10,04 — 0%,010 sulfate d'ammoniaque. 4,09 13,33 + 9,24 —+ 07,020 — — 5,46 14,38 + 8,92 + 07,050 — — 11,54 19,77 + 8,23 + 0#,100 — — 23,18 26,65 £te.47 + 0#,150 — — 27,65 29,84 + 2,19 + 05,200 — — 39,80 38,99 — 0,81 1. Loc. cit. 2. Annales agronomiques, t. XV, 1889, p. 355-369. 200 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Ces chiffres montrent nettement que la production d’azote ammo- niacal diminue avec la quantité de sel ammoniacal ajouté et que lan formation d’ammoniaque cesse à partir de certaines limites. Si lon jette un coup d'œil d'ensemble sur les faits énoncés dans ce chapitre, on peut, en négligeant les détails, les résumer en ces quelques lois : Fe "7 1° Les acides minéraux et les solulions salines trop concentrées entravent les réactions qui se passent dans l'érémacausis (for- mation d'acide carbonique, d’'ammoniaque, nitrification) et d'au- Lant plus énergiquement que les doses de ces substances sont plus fortes ; 2 Une faible alcalinilé de la malière organique favorise l'oxyda- lion du carbone et de l'azote ; 3° La présence de bases el de composés ayant ce caractère (alca- lis, carbonales alcalins [ceux-ci à faibles doses], surtout terres al calines et leurs carbonates) sont, en dedans de certaines limites, indispensables à la nitrificalion ; 4 L’oxydation du carbone dans l’érémacausis est diminuée par l'addition de chlorures et de sulfates, augmentée au contraire par celle de phosphales et de nitrates, en admettant que la concentration de la solution ne dépasse pas certaines limites, à partir desquelles les sels ont une aclion nuisible ; 5° La nitrificution s'accélère par l'adjonction à petites doses de sulfates et de phosphales, tandis que les chlorures, surtout celui de sodium, ralentissent ce processus dans les mêmes circonstances. 2. — Conditions de la putréfaction. L'existence et l’activité des microbes de la putréfaction sont natu- rellement liées à certaines circonstances extérieures qui, par leurs variations, provoquent les phénomènes complexes de cette sorte de décomposition. En premier lieu, il y a à considérer les exigences au point de vue de l’oxygène. Les organismes dont il est ici question, qui comptent parmi les anaérobies proprement dits, comme, par exemple, le Bacillus butyricus, se nourrissent parfaitement sans oxygène ; le libre accès de l’air ralentit ou suspend leur végétation, à M. CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 201 Pourtant, quelques formes semblent ne pouvoir exister que si on leur fournit de temps en temps de l’oxygène. L'observation de Nencki et NæÆGELt est à noter, que des bactéries, agents de fer- mentation, vivent très bien sans oxygène si elles se trouvent dans une solution appropriée, apte à fermenter, mais que ces mêmes bactéries ne peuvent plus se développer qu’en présence d’oxy- gène si elles ont à leur disposition un liquide nutritif moins favo- rable. Comme chaque processus de végétation dépend de la tempéra- ture du milieu ambiant, celui des bactéries de la putréfaction est aussi essentiellement régi par les rapports de température, ainsi qu'il a déjà été exposé pour celles de l’érémacausis. D’après les faits précédents, les organismes en question peuvent végéter dans de très larges limites de température, et leur optimum est très élevé. Le Bacterium Termo, par exemple, peut végéter entre 5° et 40°; son optimum git entre 30° et 3°. Le Bacillus butyricus a, d'après Firz, son optimum vers 40°, son maximum vers 45°. Les tempéra- tures de germination paraissent être plus élevées que le minimum indiqué, du moins pour quelques espèces. Quant aux limites inférieures de température, on peut les consi- dérer comme n’existant pas en réalité, tant est grand le nombre des bactéries qui peuvent supporter, sans périr, les températures les plus basses. La limite supérieure, qui provoque la mort des cellules végétatives de la plupart des formes, est à peu près la même que pour la généralité des autres plantes, c’est-à-dire 30-60° centigrades. Quelques-unes résistent pourtant à des températures de plus de 100°. La composition chimique et physique du milieu nutrilif n’est pas de moindre importance pour la présence et le développement des di- verses espèces que les conditions de température : cela résulte de nombreuses observations. On est seulement en train de faire des recherches plus approfon- dies sur les conditions spéciales de la vie de ces microbes ; ce que nous venons d’en dire est suffisant‘. 1. Voir pour le surplus les développements du chapitre VI. 202 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 3. — Conditions des autres processus de décomposition. De même que l’érémacausis et la putréfaction, les autres fermen- tations qu’on observe dans la destruction des matières organiques sont régies par des agents extérieurs qui sont principalement l’oxy- gène, la température, l’humidité, la composition physique et chi- mique du substratum. Que sont dans chaque cas ces influences? Cela dépend des conditions biologiques des organismes participants et se peut suffisamment apprécier d’après ce qui a été dit au chapitre VI. Pour la fermentation ammoniacale de l’urine, qui offre de l’in- térêt au point de vue agricole, les recherches de A. LADUREAU ‘ ont établi que la fermentation a lieu aussi bien en présence de l'air, c’est-à-dire de l’oxygène, qu’en présence de l’azote, de l’hydrogène, du protoxyde d’azote et de l'acide carbonique; mais elle est très affaiblie dans ces derniers cas, particulièrement avec l'hydrogène et l’acide carbonique, comme le montrent les chiffres suivants : Ammoniaque par litre. APRÈS GAZ INTRODUIT. —— 20 jours. 40 jours. gr. gr. BIRT EU VU Eu PILANa 8,77 10,23 OxVEÈNe PRE ARE 2,19 8-99 AMDIO LE pe lee Re ER 8,13 9219 HyYGArOSÈNeEs A ce 3,76 6,68 Protoxyde d'azote. . . . 7,60 912 Acide carbonique. . . . 0,97 5,94 LADUREAU a trouvé qu’en ajoutant de l’acide phosphorique, du monophosphate de chaux et de la chaux caustique à une liqueur ren- fermant 2 p. 100 d’urine, la fermentation ammoniacale subit une dépression correspondant à la quantité de matière ajoutée. A. MüLLER*® dernièrement expérimenta sur de l’urine provenant d’un homme sain (soumis à une nourriture substantielle régulière et à une abondante consommation d’eau) et employée à divers degrés 1. C.R.,t. XCIX, 1884, p. 877; Annales agronomiques, t. XI, 1885, p. 272 et 252. 2. Landw. Versuchsslationen, vol. XXXII, 1885, p. 271. : CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 203 de dilution, à l’état frais ou fermenté, avec ou sans addition”. Plu- sieurs essais furent faits avec du carbonate d’ammoniaque. Parmi les principaux résultats il faut d’abord signaler que la réaction de la liqueur soit acide, soit alcaline, est décisive pour l’énergie de la fer- mentation de l'urine. L’addition de bases, à moins qu’il ne s’agisse de lessives alcalines concentrées, agit favorablement; celle d'acides gêne très nettement la fermentalion. Sous ce rapport, les orga- nismes inférieurs en question se comportent comme ceux qui inter- viennent dans les processus d’oxydation des matières organiques. 4. — Résultats généraux. En s'appuyant sur les considérations et les résultats qui précèdent on voit que la présence et l’activité des divers organismes inférieurs qui régissent les différents processus de décomposition sont soumises à des conditions délerminées. On a montré que pour les deux pro- cessus les plus importants sous les rapports agronomique et hygié- nique, l’érémacausis et la putréfaction, la qualité disponible d’air est le facteur dominant. Tant que l'oxygène peut arriver librement jusqu'à une certaine dose, ce sont les phénomènes d’oxydation (éré- macausis) qui entrent en jeu; quand l'accès de l’uir est insuffisant ou nul, ce sont les phénomènes de réduction (putréfaction). Relati- vement aux conditions dans lesquelles s’exerce chaque réaction, on peut, d’après ce qui vient d’être dit, les résumer en cette loi: Toules les fonctions des microorganismes qui participent aux décomposi- tions se manifestent à partir d’une limite inférieure (minimum), s'exal- tent jusqu'à un certain degré (optimum) pour lequel elles s'exer- cent avec le plus d'activité, puis elles diminuent au dela, à mesure que l'intensité du facleur s’accroit, pour cesser finalement lorsque celle intensité atteint un certain degré (maximum), ou prendre un caractère essentiellement différent du précédent à la suite de la pul- lulation d’autres organismes dont la multiplication et l'activité ont élé excilées par les modifications des conditions biologiques. L'influence de chaque facteur peut, d’après cela, se représenter 1. Les doses des substances ajoutées à l'urine étaient comprises entre 0,25 et 0,63 par 100 centimètres cubes. 204 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. par une courbe ascendante et descendante déterminée par un Sy tème de coordonnées où les abscisses figureraient l'intensité du fac-« teur et les ordonnées son influence. Figurons l’influence de la tem= pérature sur la nitrification. D’après ScuLæsin6, les limites extrèmes sont 9° et 99°, l’optimum est 37°. On oblient avec ces données la 18 courbe de la figure 44. Pour 7 SAR les autres facteurs et réac a RRRRPGRNRRE lions, on a des figures ana- logues. De tous ces faits il ressort avec évidence que les lois qui ont élé délerminées pour la végétation des plantes supé- rieures s'appliquent aussi à celle des organismes infé=. rieurs. I faut en conclure encore que les facteurs im portants, s’ils agissent dans le même sens, se prêteront un mutuel appui et que l’activité des orga= nismes atteindra son maximum quand toutes les conditions exté- rieures seront les plus favorables. Donc, à doses égales de matières” organiques, l’érémacausis, par exemple, sera d’autant plus intense que la chaleur et l'humidité seront à leur optimum. Une de mes expériences le montre nettement. SON GO À GO 6 y X © O0 S$ 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60€ FIG. 44. Volume d'acide carbonique dans 1000 volumes d'air. TAUX TEMPÉRATURE DU 80L (terre de compost). D'EAU p- 100, 10° 20° 30° 400 50° 6.79 2,03 8,22 6,86 14,69 25,17 26.79 18,38 54,24 63,50 80,06 81,52 46.79 35,07 61,49 82,12 91,86 07,48 Dans la nature, les influences des divers facteurs agissent rare- ment dans le même sens ; le plus souvent c’est en sens contraire, ce qui amène dans le résultat des modifications multiples. Ainsi, par exemple, l'influence de la température peut être favo- rable ou défavorable, suivant que la quantité d’eau de la matière est L de) 2 Go Le) 19 19 O2 O2 02 02 À = et 19 mi 19 O0 À (o —] re Moyenne. 2,290 | 2,172 Moyenne.| 2,978 | 2,870 2,827 En rapprochant ces chiffres des différences assez importantes dans l'humidité et la température de ces sols diversement exposés, on est frappé de voir que les différences dans les taux des produits gazeux de la décomposition (acide carbonique) ne ressortent pas nettement. Cela peut tenir en partie à ce que les échantillons n’ont été pris qu’à une faible profondeur (20 centimètres) à laquelle l’air du sol se dif- fuse facilement dans l’atmosphère. Ajoutons que les vents, en in- fluençant diversement la surface, ont pu modifier les effets de la température et de l'humidité. Au reste, sans tenir compte de ces circonstances accessoires, il faut chercher la cause du fait dans ce que les deux facteurs dominants (eau et chaleur) se contrecarrent en partie dans ces sols diversement exposés. Ceux qui regardent le sud sont les plus chauds, mais aussi les plus secs ; CEUX qui regar- A dent le nord sont les plus froids, mais en même temps les plus hu- mides. Bien souvent l’échauffement plus fort du versant sud ne pourra produire que peu ou pas de supplément d’oxydation du car- bone, parce que l'humidité nécessaire fera défaut. Inversement, dans le sol exposé au nord, la décomposition des matières organiques trouverait bien, il est vrai, un adjuvant dans l'augmentation du taux d’eau, mais la température trop basse s’opposera à ce que ce facteur rende son plein effet. Ainsi s'explique que les différences dans les taux d’acide carbonique de l’air du sol soient relativement faibles. Si l’on examine séparément les dosages, on voit que le temps a une influence décisive sur la prépondérance de l’un ou l’autre des deux facteurs étudiés. En 1880, année humide, l'air ocelus dans le sol a presque toujours été plus riche en acide carbonique sur les versants sud que sur les versants nord, parce qu’alors l'effet de l'excès de température des premiers pouvait se manifester. Dans l’année 1881, généralement sèche, l’influence de la chaleur sur la production de l'acide carbonique fut plus ou moins entravée par le manque d'humidité, si bien que le taux de ce gaz dans les versants sud descendit au-dessous de celui des versants nord plus humides. Ce n’est que dans certains cas, par exemple les 1° et 15 juin et le + septembre, quand de fortes pluies avaient bien humecté le sol, que l’échauffement relativement plus grand des sols exposés au sud amena un surcroît de production de gaz. Il résulte de ces faits que le maximum du taux d'acide carbonique de pentes à diverses expo- sitions subit des variations dans des périodes plus ou moins lon- ques ; par la sécheresse, le sol des versants nord est généralement plus riche en acide carbonique que celui des versants sud ; si le sol est bien humecté par les pluies, c’est le contraire qui arrive. Si nous considérons ici seulement les versants nord et sud, c’est parce qu'ils présentent les écarts maximums sous le rapport de l’é- chauffement et de l'humidité, et qu’on peut alors saïsir le mieux sur eux l'influence de ces deux facteurs ; on s’est dispensé d'étendre ces considérations aux versants est et ouest, parce que leurs relations avec les points étudiés se déduisent de ce qui vient d’être dit, en relenant que, sous tous les rapports, ils se placent entre les deux autres versants (nord el sud). 212 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 213 L'inclinaison ou pente amène des différences en ce sens que le sol horizontal est plus humide que le sol en pente, el celui-ci est d’au- tant plus sec que la pente est plus forte. C’est ce que montrent les chiffres suivants extraits d’une assez longue série de recherches que j'ai faites à ce sujet’: Taux d’eau du sol jusqu’à 20 centimètres de profondeur. I. Pente exposée au sud el plantée en féveroles. PENTE. - D O2. 10, 20°. 30». p. 100. p.100. p.100. p. 100. Moyenne de 4 dosages, . . 16,42 45/47 43,70 42%12 II, Pentes à diverses expositions el garnies de maïs. ANGLE DE PENTE. Nord. Sud. Est. Ouest. p. 100. p- 100. p- 100. p. 10). RD ce ASS LE en" à 19,13 16,24 17,96 18,67 BAR FEU À AE SC EE 47,81 14,59 45,07 46,43 Pendant la saison chaude, le sol à l'exposition sud et dans cer- laines limites est d'autant plus chaud, à l'exposition nord il est d'autant plus froid que la pente est plus forte, tandis que l'influence de l’inclinaison sur l’échauffement est très faible aux autres exposi- tions. Mes expériences, dont je donne ci-dessous quelques résultats, militent en faveur de cette opinion * : Température moyenne du sol à 15 centimètres de profondeur. I. Terrain nu exposé au sud. INCLINAISON. A Oo. 100. 20°. 30e. Moyenne de 60 observations. . 24,03 25,45 26,04 26,58 IT. Terrains à diverses expositions. ANGLE DE PENTE. Nord. Sud. Est. Ouest. DER RES MR RE ICE 2 24,61 25,52 25,30 24,99 SODOMIE CRE LA 24,19 26,38 ATEN (6 24,87 1. Forschungen, etlc., vol. IX, 1886, p. 1-10 : vol. X, 1887, p. 3-8. 2. Forschungen, etc., vol. IX, 1886, p. 10-70 ; vol. X, 1887, p. 8-54. 214 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Les dosages d’acide carbonique relatés ci-dessous et que j'ai faits sur des pentes exposées au sud” établissent à quel degré la décom- position des éléments organiques est influencée par les circonstances d'humidité et de température variables avec l’inclinaison de la sur- face. Taux d’acide carbonique dans l’air du sol. — Volume pour 4 000, à 20 centimètres de profondeur. — Terre nue. PENTE INCLINÉE DATKS. a —— " à 10. à 20. à 30». 22 AYrIL LOST EU 2,456 3,265 1,407 OC PASSE SRE 1,657 1,996 0,966 LATE A EE EE ne 3,472 3,746 2,500 72 NE EE ee NE ES 8 2,851 3,893 2,012 Sun RE SN RSR 2,842 4,582 2,378 LA EN RER 3,908 4,584 2,234 A RENE EU 4,461 6,524 2,869 LH] (SEE En 8,716 9,094 5,104 LITE NE PS EE 9,054 7,686 4,266 PL EE 1 à - 3,368 4,894 2,488 LLAONL- 407 LUCE PRRERS 1,232 3,254 1,620 DO Url CURE 4,461 3,431 2,471 |A septembre}. 2 LCR 1,752 3,105 1,418 28 — 2 VALEUR 1,315 2,895 1,813 Moyenne 202. CS UE 3,396 4,491 2, 393 Il ressort de là que le taux d'acide carbonique alteint son maxi- mum avec une certaine pente (20°), tandis qu’il diminue pour une pente moindre (10°) ou plus forte (30°). Si l’érémacausis n’était régie que par la température du sol, le taux de ce sol en acide carbonique libre croîtrait, dans les cir- constances précédentes, à mesure que la pente s’accentuerait. Mais comme le taux d’eau a aussi une grande importance et que le dégagement de gaz s’accroit avec lui jusqu’à une certaine limite qui n’est pas atteinte ici, on comprend pourquoi la température élevée des fortes pentes n’a pas sur la production de l’acide car- 1. Forschungen, etc., vol. IX, 1886, p. 166-170. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 215 bonique l'effet qu’elle pourrait avoir ; c’est que l'humidité fait défaut. Sur un sol plus plat, celle-ci est en quantité suffisante, mais la température est trop basse, si bien que leffet du premier fac- teur est paralysé en partie par celui du second. Avec une pente moyenne on est dans les conditions les plus favorables à la dé- composition ; — l’humidité n’y est pas en excès comme dans les terrains plats, ni en défaut comme dans les pentes raides; la température y est moins élevée que dans ces dernières et plus que dans les premières — si bien que, toutes circonstances égales, c’est là que se dégagent les plus fortes quantités d’acide carbo- nique. La loi formulée plus haut (voir p. 205), suivant laquelle la décom- position des matières organiques est gouvernée, cœæleris paribus, par le facteur qui intervient au minimum, se vérifie encore dans les résultats précédents et se vérifierait dans tous les autres cas, étant donnée sa généralité, pour toutes les influences étudiées jus- qu'ici. La constitution physique du sol a de l'importance pour les réac- tions qui s’y passent, puisque c’est d’elle que dépendent surtout la perméabilité, l'humidité et la température. Tout d’abord, c’est la grosseur des particules du sol qui déter- mine la quantité d’air qui y est occlus ; elle croît avec le diamètre de ces particules. Ce fait a été nettement démontré sur un sol sa- blonneux préalablement séparé par des tamis en lots de diverses grosseurs et pourvu de sa plus pelite capacité pour l’eau’. J'ai trouvé * les chiffres suivants pour les quantités d’air occluses dans chaque lot. 1. Les Allemands distinguent la plus petite capacité pour l’eau ou capacité absolue (dié kleinste Wassercapacität) et la plus grande capacité (die grosste ou die volle Wassercapacität). La première est la quantité d'eau qui est retenue par le sol d'une façon durable sans s'écouler dans les profondeurs. La seconde est la quantité d'eau que le sol peut retenir dans le voisinage de la nappe souterraine (Forstliche Bodenkunde, par le D' Ramann, p. 65). Voir Contribution à l'étude de la Chimie agricole, par Th. Scazæsin6, Paris, Dunod, 1888, p. 89-95. (Trad.) 2. Forschungen, etc., vol. VIII, 1885, p. 367-373. 216 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 1 000 volumes du sol renfermaient en volumes d’air : GROSSEUR DES GRAINS, EN MILLIMÈTRES. PE RES QE 0,01-0,071. 0,071-0,114, 0,1140,171. 0,171-0,25. 0,25-0,50. 0,50-1,00. 1,00-2,00. 104.4 122.7 372.1 364.1 359.7 347.8 344.0 L’argile, qui est encore plus fine que le sable de l'essai précédent, ne renfermait dans les mêmes conditions de saturation que 81.6 vo- lumes d’air pour 1 000 volumes de sol et l’humus 293.7. | Ces différences se moditient au détriment des éléments fins à me- sure que le taux d’eau augmente ; avec un taux élevé, les matières à grains fins ne contiennent que des quantités minimes d'air. Cela est vrai aussi bien du sable très fin que de l'argile et de l’humus, où les pores sont extrêmement rapetissés par l'augmentation sous l’ac- tion de l’eau des éléments colloïdaux que renferment ces divers sols. Comme l’air est rarement stagnant dans le sol, qu'il y est d’ordi- naire constamment en mouvement par suile de la pression atmo- sphérique, des variations de température et de l’action des vents, donc incessamment renouvelé, la capacité du sol pour l'air a moins d'importance vis-à-vis des réactions que sa perméabilité pour l'air, c’est-à-dire son aptitude à le laisser circuler. Pour acquérir sur ce point des notions exactes, j'ai ajouté’ diverses quantités d’eau aux lots de sable dont il vient d’être question, je les ai placés en couche de 50 centimètres dans des tubes de à centimètres de diamètre et j'y ai fait passer de l'air sous une pression de 50 millimètres d’eau. Les quantités d’air (en litres) qui ont passé par heure sont inscrites ci-après : GROSSEUR DES GRAINS, EN MILLIMÈTRES. EAU ajoutée.? 0,01-0,071, 0,071-0,114. 0,114-0,171. 0,171-0,25. 0,25-0,50. 0,50-1,00. 1-2. Cent. cubes. 80, 1,02 7,00 16,30 26,16 54,90 61,44 79,55 160. 0,69 1,08 4,48 8,83 27,00 | 29,82 "ASS 240. 0,24 0,27 3,16 4,32 12,00 25,05 43,00 1. Forschungen, etc., vol. XVI. 1893, p. 193-222. 2. Le volume du sol était de 981,5, AT D CE NL) DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 217 Il ressort clairement de ces chiffres que la perméabilité du sol pour l'air décroit à mesure qu'augmente le laux d’eau et décroi d'autant plus que le sol est à grain plus fin. Dans les sols tels que les sols argileux ou humiques qui contien- nent une assez grande quantité de matières colloïdales, aux modi- fications provenant du taux d’humidité viennent encore s’ajouter celles qui tiennent à leur changement de volume sous l’influence de l'eau. Par l'humectation les éléments colloïdaux gonflent; cette augmen- tation de volume a pour conséquence de réduire celui des pores de façon que l'air circulant dans le sol s’y meut plus difficilement qu’au- paravant. Un éclatant exemple de ce fait m’a été fourni par une sorte de tourbe (d'Oldenbourg) qui, déjà avec un taux d’eau de 33 p. 100 en volume, était complètement impénétrable à l'air, tan- dis qu’elle a pu absorber de l’eau jusqu’à complète saturation de 60-70 p. 100 en volume. Les sols argileux se comporteront de même *, on peut en être certain, et on devra conclure que fous les sols riches en substances colloïdales (humiques, argileux, ferrugi- neux, elc.) deviennent, à l’élal naturel, imperméables pour l'air déjà avec un laux d'eau qui est plus ou moins au-dessous du point de saturalion. Il est bon de remarquer que, grâce à l’humectation par l’eau at- mosphérique des couches superficielles du sol, l'accès de Pair s’y trouve diminué et entravé d'autant plus que ces couches sont plus saturées et demeurent plus longtemps à cel état, c’est-à-dire d’au- tant plus que le sol est à grain plus fin et contient plus d’éléments bumiques et argileux. Le taux d’eau du sol est, comme celui de l’air, très différent sui- vant sa conslilution physique, toutes circonstances égales d’ailleurs, c’est-à-dire pour une égale addition d’eau. En laissant de côté les détails, il résulte des recherches faites jus- qu’à présent que l’humidilé contenue dans le sol augmente avec la 1. Pour ces sols il n'est pas possible de démontrer le fait par l'expérience, parce qu'avec une faible humectation ils se mettent en grumeaux et qu'avec une plus forte ils donnent une bouillie. 218 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. finesse du grain et le taux du sol en principes colloïdaux. Ceci res- sort nettement des chiffres suivants que J'ai obtenus entre autres : : Taux d’eau du sol jusqu'à 30 centimètres de profondeur exprimé en pour-cent du volume. (Moyennes de 27 dosages faits pendant le semestre d'été.) Sable quartzeux. GROSSEUR DES GRAINS EN MILLIMÈTRES. A "© 0-0,25 0,25-0,50 0,50-1,0 1,0-2,0 2,0-4,5 4,5-6,75 1892. 24043 18.04 15.29 9.00 7.84 6.06 1593. 15.21 12.95 11.54 7.50 1.20 5.31 Du lehm renfermait dans les mêmes conditions 38.81 d’eau, soit 32.66 p. 100 en volume. De faits tels que ceux qui précèdent on doit conclure que, parmi les diverses espèces de sols, le sable accu- sera un moindre taux d’eau que l'argile et l’humus. C’est ce que montrent les chiffres ci-dessous provenant de mes expériences? : Taux d'eau du sol jusqu'à 30 centimètres de profondeur exprimé en pour-cent du volume. (Moyennes de 9 dosages pendant le semestre d'été.) SABLE SABLE OALOAIRE D de TOURBE. riche LEHM. calcaire Sn Has à quartzeux. ; grain fin. 1879... 40.99 36.79 28.31 25.74 10.39 Ces différences proviennent de ce que le nombre des interstices où s'exerce l’action capillaire ainsi que la surface mouillée par l’eau augmentent avec la finesse du grain et que les substances colloïdales s’imbibent d’eau, contribuant ainsi, comme nous l'avons vu, à un rapetissement des pores et, en même temps, à un accroissement de la capillarité. Les résistances qui s'opposent au passage de l’eau à travers le sol sont proportionnelles à la grosseur des interstices. Les eaux d'infil- tralion qui s'écoulent à une profondeur déterminée sont d'autant 1. Forschungen, elc., vol. XVI, 1893, p. 386 et 387. 2. Forschungen, elc., vol. V, 1882, p. 17. 4 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 219 moins abondantes que le sol est à grains plus fins. Cela est évident d’après les chiffres suivants empruntés à quelques-unes de mes expériences": Quantités d'eau d'infiltration à 30 centimètres de profondeur par 400 centimètres carrés de surface, en grammes. (Moyennes de 27 observations pendant le semestre d'été). Sable quartzeux. QUANTITÉ GROSSEUR DES GRAINS EN MILLIMÈTRES. AO DIUTES en LU à gr. 0,0-0,25 0,25-0,50 0,50-1,0 1-2 9-4,5 4,5-6,75 1892. 27 338 8 856 15 091 18 880 20 641 21 876 22 138 1593. 20 286 4 330 10 584 122790 13 557 15 395 15 749 L'argile et l'humus sont complètement impénétrables à l'eau quand ils sont saturés*. Remarquons aussi que la perméabilité d'un sol pour l’eau dépend exclusivement de la couche qui renferme les élé- ments les plus fins. Ainsi s'explique qu'un sol, d’ailleurs perméable, ne fournisse aucune eau d'infiltration s’il repose sur un sous-sol imperméable (roche massive, argile, sable très fin, calcaire, etc.). Dans ces conditions, l’eau qui a traversé les couches supérieures se rassemble à la surface de la zone impénétrable en constituant ce qu'on appelle la nappe souterraine (Grundwasser). Celle-ci s’élève plus ou moins suivant les circonstances et remplit d’eau complètement ou en partie les couches du sol qu’elle baigne. En ce qui concerne la température du sol dans ses relations avec sa composition physique, cette température résulte de la combi- naison des influences d’une série de facteurs qui réagissent l’un sur l’autre d’une manière si compliquée qu’on ne peut se faire une idée juste des particularités des divers sols à l’aide des moyennes d’ob- servations embrassant une assez longue période, et ce sont seule- ment les différences relatives avec la température extérieure dans _ chaque période qui offrent un point d'appui. Ceci se déduit de ce que nous venons de dire, que les divers sols, malgré leur manière d’être sensiblement différente vis-à-vis des variations de température, 1. Forschungen, etc., vol. XVI, 1893, p. 389 et 390. 2. Forschungen, etc., vol. XIV, 1891, p. 14. | L 220 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. | n’accusent généralement dans la moyenne annuelle que des écarts minimes, comme le montrent par exemple les résultats suivants ob- tenus par E. EBERMAYER ‘ : Température moyenne annuelle du sol à Münich. (Moyenne de quatre années.) SABLE INE P EUR DE — — — 80 A UNE PROFONDEUR DE dard ee LEHM tourbeux. 15 centimètres . . . 9027 8° 63 8°55 8992 30 — ONE: 921 9 10 8 74 97 60 — RSR 9 39 9 14 OM 10 16 90 —— 2 2 9,49 0223 9 16 10 03 Les caractères thermiques du sol s’apprécient bien plus nette- ment en suivant la-marche de la température dans un même sol. Les règles qu’on peut poser à ce sujet se résument à peu près ainsi : Quand la température s'élève (pendant l’insolation et la saison chaude comme pendant une journée), de tous les éléments des sols c’est le quartz qui s’'échauffe le plus, puis viennent en série descen- dante le calcaire, l'argile et enfin l’humus qui éprouve le minimum d’échauffement. Quand la température s’abaisse (pendant la saison froide et pendant la nuit), les rapports caloriques des principaux éléments des sols sont inverses des précédents ; c’est le sable quartzeux qui se refroidit le plus vite et l’humus le plus lentement, l'argile et le calcaire se plaçant entre les deux. Ces assertions se vé- rifient pour la plupart dans le tableau suivant (p. 221) emprunté à l'ouvrage de E. EBERMAYER déjà cité. Ces chiffres montrent clairement que : 1° Pendant les saisons froides (automne et hiver), le sol tourbeux (l'humus) est le plus chaud, puis vient le lehm ; le calcaire et le sable sont les plus froids ; 2° Au printemps, les rapports de température des éléments prin- cipaux des sols s'établiss ent dans un ordre inverse ; 9° En élé, le sable est le plus chaud ; après, viennent, rangés par ordre, le sol tourbeux (humus), le calcaire et le lehm. 1. Forschungen, etc., vol. XIV, 1891, p. 195. 221 “ DÉCOMPOSITION DES MATIERES ORGANIQUES DANS LA NATURE, 0c‘6 Fe TI Gp OT | &0‘0T (0 2807 | IT‘OT |r2‘6 z8°£ 10‘L cL‘q | C 79‘9 | or‘g | go‘r (|6r‘a oc‘9 À 6g'e cA1de) *OIAMOAON 16‘er | gr‘er | ee‘or |88‘6 | 80‘Tr | CT*07 z8‘or | 88‘6e | o9'8 ge‘z | 6207 sp‘s |16‘L NU EU JB LL ILE 9297 |9r‘CT gLFI | OG‘FT 8G'PT | ZLPT | FI‘PI |GC'eT gg“ GT LL‘HT |G69'FI o1quoydog pc'or | 29‘87 | 2g'er |2G‘8T 80‘91 | GG‘9I 6 2r‘or | Gg'‘2r | g1'‘8T |6F'8r gz‘ir |ecter |28‘61 go‘oz | F9*6r |8£‘6I 18‘or | gc‘2r | 9S'‘2r |egf2r Tef2r | 82°2r | 8r‘er |18'8r 1a‘8r |go‘er |28‘67 ° 1U00V ogter | or‘os |gc‘oz | sr‘zr | or‘gr | 86°8T |6S6T g2'ar | 66‘e8r | 29‘61 |8c‘08 8e‘Gr |21‘O8 |LO‘Te ‘tim£ ag‘or | 2G‘9r |29°91I 2o‘pr | gofer | 6G°CT |21‘97 drpr | or‘gr | gG‘9T |69‘9T ag‘cer |ce‘or ([gr'2T * “upnf zr‘o |r2°9 cL‘a ce‘ 869 | gs‘ | 6r8 5 18‘ 99e |#s‘6 906 5 OL‘ar |T8'‘SI 69‘0T | GG'‘TI LL‘eT GIIT NO GT |MPTACT 16‘ar |ep‘rr |TF'ST * "UN 18‘F 1g‘a |80‘9 ar9 | 68‘9 € pro | 2e‘9 | sa'2 TL CR TT * IHAY 6L°& pi'r |g6‘o | g1‘e sgte [opte |Le's * SUN cor cp'T |1c‘0 86‘8 3 o2‘r |69‘o |90‘0 cç‘e à 6g‘o |gg‘o —| 92'I 96‘o |r&‘o |6r‘o JOHAQT Fa‘ ar |re‘0 gL‘e get |OT‘O —|car — ARE 6 go‘ 9 19“ |89'T 83°F LL‘0 68‘a |v6‘r 58° gxqUSoPE *s92#op | ‘sorSop | souSop | ‘souSop | ‘s918op | ‘s918op | ‘sa ñ *s9280p | “souSop | ‘sgx8op | ‘soi8op | ‘souSop D RS CES | CERN CH mn | mm = mme | cs Les) “que p6l'iue pgl'ineo pgl'ineo cyl'au00 ggl'inoo polie Qgl'inso Gyf'in00 QG|'iu00 pg|'1000 QE |" 1000 GF1°100906 | "1080 09 | ua9 0g |’ . LE see AE se | *sanb1#0[01091gtu op anapuoyord oun & op Aanopuoyord oun & op anopuoyoid oun & ep anopuoyord oun SNOSIVS LE SION XNH4XXNOXL TOS WUU'T HAIVO'IVO HAUHVS XNOAZLUVAOd ATAVS ‘(seguue oxgenb op ouuefow) qotungg € 108 np ejensuem ouuafom oxnqexodmelz 222 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Si, au point de vue de l’activité de la décomposition, on ne consi- dère que la saison chaude (d’avril à septembre), on doit conclure, d’après les observations précédentes et d’autres encore, qu’en gé- néral ce sont les caractères thermiques de l’argile (représentée ici par le lehm) qui sont les plus défavorables, ceux du sable étant les plus favorables, et l’humus (sol tourbeux) ainsi que le calcaire se rangeant sous ce rapport entre les deux premiers. On comprend dès lors pourquoi le praticien qualifie de terres froides les sols argi- leux et de terres chaudes les sols sablonneux. Les différences en question sont la résultante des différences dans la capacité calorifique, la conductibilité et la perte de calorique par l’évaporation. La capacité calorifique du sable est moindre que celle de l'argile, parce que le sable contient moins d’eau. En outre, à cause de ce dernier motif, 1l y a moins de chaleur perdue pour l’'échauffement du sable que pour celui de l’argile ; le sable conduit bien mieux la chaleur que l'argile. Ces raisons expliquent que tous les sols sablonneux s’échauffent plus que les argileux. Mais la plus grande conductibilité du sable jointe à sa moindre capacité calorifique (comparées à celles de l'argile) sont la cause première du plus grand abaissement de température dans le sable que dans l'argile pendant la saison froide. L’échauffement relativement lent de l’humus pendant les hausses de température tient à cette circonstance que cet élément est celui de tous qui possède la plus faible conductibilité et, à cause de sa grande teneur en eau, la plus forte capacité calorifique, propriétés qui concourent à expliquer que l’humus, comparé à tous les autres éléments principaux des sols, se refroidisse et s’échauffe le plus len- tement. Comme, pour le calcaire, les propriétés dont nous venons de parler sont intermédiaires entre celles du sable et celle de l’ar- gile, ses conditions thermiques sont également intermédiaires". Pour un seul et même sol, l’échauffement dépend essentiellement de l’état de sa surface, de la grosseur de ses éléments et de son 1. Pour les détails, voir les articles de J. Aur, Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 397; de R. Uznicn, ébëd., vol. XVII, 1894, p. 1 ; de F. Wacnen, ébid., vol. VI, 1883, p. { ; de E. Wozzny, ébid., vol. IV, 1881, p. 147. sil DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 223 taux d’eau. À propos de l'influence de la surface, faisons remarquer que la dessiccation de la couche superficielle est corrélative d’une élévation dans la température du sol’, parce que, dans ces con- ditions, l’évaporation porte principalement sur la surface. À égalité de composition, la couleur du terrain a sur son aptitude à l’échauf- fement, et jusqu’à d'assez grandes profondeurs, une influence non négligeable *. En saison chaude avec insolation franche, le sol s’é- chauffe d’autant plus que sa teinte est plus foncée. Les différences de température entre les sols de teinte claire et ceux de teinte foncée s’atténuent plus ou moins dans la saison froide et par une médiocre insolation. Cette influence de la couleur décroit cepen- dant à mesure qu'augmente le taux d’eau* et les autres facteurs qui régissent l’échauffement du terrain deviennent prépondérants. Si l'état physique du sol présente d’assez grandes différences, surtout dans le taux d’humus et dans la faculté d’imbibition, l’action de la couleur sur l’échauffement du sol peut être complètement négligée. Quant à celle de la grosseur des particules, elle se manifeste, d’après les observations précédentes *, en ce que le sol est pendant l’été d'autant plus chaud, pendant l'hiver d’autant plus froid que les particules sont plus grosses. C’est ce que montrent les chiffres suivants que J'ai obtenus et qui sont les moyennes de 36 observa- tions faites le jour et la nuit : Température du sol à 10 centimètres de profondeur. Sable quarlzeux. GROSSEUR DES GRAINS EN MILLIMÈTRES. DATES, "0,0-0,25 0,25-0,50 0,50-1,0 1,0-2,0 5-8 juillet. . . 23912 249,65 299,16 25°,36 5-8 janvier . . = — 0,62 — 1,19 — 1,43 Les causes du fait mis en évidence par ces chiffres résident Surtout en ce que le taux d’eau diminue et que la conductibilité . Forschungen, etc., vol. III, 1880, p. 338-342. . Ibid., vol. I, 1878, p. 43-69. . Jbid., vol. IV, 1881, p. 327-365. . Ibid., vol. V, 1882, p. 179-208. . fe O2 19 El 224 DÉCOMPOSITION DES MATIERES ORGANIQUES. augmente à mesure que s’accroît le diamètre des particules. Les conditions thermiques du sol dépendent à un haut degré de son taux d’eau’. Dans la saison chaude, la température du sol, à com- position égale d’ailleurs, est en général d’autant plus basse que sa provision d’eau est plus grande, parce qu'il y a d’autant plus de calorique employé pour la vaporiser à la surface et que la chaleur spécifique se trouve ainsi fort augmentée. Les différences de tempé- rature sont d'autant plus faibles que l’évaporation l’est aussi et que le sol atteint la meilleure conductibilité correspondant à un taux d’eau assez élevé ; elles sont à leur minimum dans la saison froide, avec une insolation défectueuse, une température aérienne basse, l’absence de vent, une grande humidité dans l'air et un assez fort desséchement de la couche supérieure du sol; elles sont à leur maximum dans les cas contraires. L'effet du refroidissement par suite d’évaporation est, toutes autres conditions égales, d’autant plus tôt et plus facilement annihilé que le sol contient moins d’eau et que sa faculté d’imbibition est moindre ainsi que son aptitude à remplacer l’eau qui s’évapore à la surface par celle que la capil- larité Lire des couches profondes. La mesure de l’influence de l’eau sur la température du sol peut s’apprécier par les chiffres suivants : Température du sol à 10 centimètres de profondeur. LEHM SABLE QUARTZEUX EE mouilleux. humide. sec. mouilleux. humide. sec. 5-14 juin . , . . . 220,08 230,47 249,92 210,80 990,59. 230,00 EE — — I Différence , . . . 19,39 10,45 0°,79 19,31 a 2 Différence entre le mouilleux et le sec. 29,84 2%10 De la récapitulation de tous ces résultats, 1l ressort nettement que les propriétés des sols les plus importantes au point de vue de la décomposition des matières organiques s’enchevêtrent dans des rela- tions réciproques infiniment variées et donnent lieu par suite à une série de faits assez compliqués. 1. Forschungen, etc., vol. IV, 1881, p, 147-190, DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 229 Tout d’abord, les éléments principaux des sols, d’après ce qui vient d’être dit, diffèrent nettement les uns des autres par leur ma- nière d’être vis-à-vis de l’air, de l’eau et de la chaleur. Le sable, pendant la période principale de décomposition, qui est la saison chaude, est le plus chaud de tous les sols et le plus perméable, mais, par contre, le plus sec. L’argile est caractérisée par sa forte teneur en eau, sa faible perméabilité, sa faible aptitude à l’échauf- fement. Quant à l’humus, il peut retenir de grandes quantités d’eau, mais, à cause de cela, dans la nature :il est d'ordinaire difficilement perméable ; il s’échauffe lentement et n’acquiert des températures assez élevées qu’en été et au début de lautomne *. Le calcaire enfin occupe, sous le rapport des propriétés physiques en question, une place intermédiaire entre le sable et l'argile. Cette caractéristique des éléments principaux des sols montre assez que les facteurs agissant dans le sol lui-même sur la décomposition exercent sur ce phénomène des actions tantôt concurrentes, tantôt antagonistes. En s'appuyant sur la loi précédemment énoncée du minimum et du maximum, on détermine facilement quel est celui de ces facteurs qui, pour chaque cas, régit le phénomène. Dans le sable, la grande perméabilité et la grande aptitude à l’'échauffement sont, sans aucun doute, favorables à l’érémacausis. Mais le faible taux d’eau lui est, au contraire, défavorable. L’eau sera donc, pour ce sol, le facteur dont dépendra surtout la décom- position, et comme l'abondance de l’eau dépend des pluies, celles-ci ont une influence considérable sur le phénomène. Dans un climat humide, où le sol est assez souvent humecté, la décomposition de toutes les matières organiques qui s’y trouvent est bien plus intense, même souvent à ce point que, sur le sable, il ne se forme pas, à vrai dire, de dépôt d’humus. Dans ces conditions, le sable mérite à bon droit le nom d’aclif que le praticien lui donne. Tout autrement se comporte ce sol sous un climat sec, où l’eau atteint son minimum et où, précisément à cause de cette eau trop rare, la grande per- méabilité du sol et sa haute température ne peuvent que rarement 1. Ge n'est pas toujours vrai, comme en témoignent plusieurs de mes expériences non encore publiées. MATIÈRES ORGANIQUES. 15 226 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. avoir leur plein effet sur l’érémacausis. Dans ce cas, la décompo- sition marche moins vite, mais plus encore pourtant (sauf dans les cas extrêmes) que dans la plupart des autres sols. A l'argile ce n’est pas en général l'humidité qui manque, mais la quantité d'air. D'ailleurs, ce sol appartient à la catégorie des terres dites froides. La conséquence est que la décomposition sur les sols argileux dépendra surtout de leur perméabilité et, par suite, de leur température ; dans la nature, l’érémacausis y est très lente. En ce sens, un tel sol peut être appelé inerte. Dans un climät humide et avec une couche épaisse d’argile, l’accès de l’air peut être empêché au point que les matières organiques subissent non plus l’érémaucau- sis, mais la putréfaction. D'après ce qui précède, la plupart des sables sont caractérisés par de puissantes oxydations qui ne s’attaquent naturellement pas seule- ment au carbone des matières organiques, mais encore à l’ammo- niaque formée dans la décomposition. La nitrification dans de tels sols est ordinairement très énergique. Dans les sols argileux, au con- traire, l'oxydation des matières organiques non seulement est res- treinte, mais parfois complètement arrêlée, surtout par les pluies abondantes et la texture naturelle du sol. Alors, les processus de désoxydation entrent en jeu, et parmi eux la dénitrification, im- portante pour l’agriculture. Le calcaire se rapproche, soit du sable, soit de l’argile, suivant la grosseur des particules, très variable dans cette sorte de sol et ré- glant l'emmagasinement de l’eau. L'humus a des propriétés différentes, suivant les doses d’humi- dité qu'il contient. S’il est accumulé en grandes quantités et saturé d’eau, comme par exemple dans les tourbières, dans les dépôts va- seux des lacs et des fleuves, les matières organiques sont soumises à la putréfaction par suite du manque d'air. Mais s’il est débarrassé de son excès d’eau et, dès lors, perméable à l'air, les phénomènes d’oxydation prennent la place des phénomènes de réduction, et la matière organique se détruit, surtout l'été, assez activement parce que, sans parler d’une bonne aération, il se trouve généralement dans la masse une assez grande humidité et une température favo- rable. Même les éléments qui ont pris naissance par le mode de la DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 227 putréfaction se décomposent par érémacausis, mais lentement, comme on l’a dit plus haut (Voir p. 166). Les sols naturels sont ordinairement formés par le mélange des principaux éléments dont il vient d’être question ; suivant la prédo- minance de l’un ou de l’autre, leurs propriétés physiques seront très différentes et, par suite, aussi leur manière d’être vis-à-vis de la décomposition des matières organiques. En s'appuyant sur les indi- cations précédentes, l’examen de la constitution physique du sol per- met, sans grandes difficultés, de se faire une idée suffisamment exacte de ce qui se passera dans chaque cas. Pour apprécier l'influence du degré de finesse des éléments du sol, on utilise la loi maintes fois citée. La quantité d’air et de cha- leur augmente avec le diamètre des grains, mais l’humidité décroît si bien que l’eau devient le facteur influent dans les sols à gros élé- ments. Avec une humectation abondante, la décomposition marche rapidement ; elle deviendra lente dans le même sol par un temps sec ou un climat sec. Dans les terrains à éléments très fins, ce n’est pas en général l'humidité qui manque, mais c’est souvent la dose d'oxygène nécessaire pour une érémacausis active, si bien qu’avec des précipitations atmosphériques assez abondantes les processus de l’érémacausis peuvent céder la place à ceux de la putréfaction. Il résulte de ces observations que, dans la plupart des cas, des sols à éléments de grosseur moyenne et sensiblement égale offrent à cet égard les conditions les plus favorables ; ils ne sont surpassés par les sols à grains très fins que si on apporte à ceux-ci l’oxygène qui leur manque. L'influence du taux d’eau dans un seul et même sol sur la décom- position des matières organiques a déjà été signalée (Voir p. 177). Le sol gorgé d’eau provoque la putréfaction; à mesure que l’humi- dité se rapproche d’un certain taux moyen et que l'air peut arriver plus facilement dans le sol, les processus de l’érémacausis s’accen- tuent, augmentant d'intensité, puis diminuant au delà de certaines limites avec la diminution progressive du taux d’eau et enfin s’arré- lant quand la masse a atteint le degré dit de sécheresse à l’air. L’afflux de l’air dans le sol diminue avec la profondeur ; c’est là aussi un fait de la plus haute importance pour la décomposition dans 228 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. la nature et dont il résulte que l’érémacausis domine dans les zones superficielles du sol, tandis que dans les couches profondes c’est le” mode dit par putréfaction. Suivant l’expression de G. J. Mucper 4 on peut distinguer une zone d’oxydation et une zone de réduction Ces différences de réactions chimiques entre les couches superfi= cielles et les couches profondes se manifestent aussi pour les sels de fer ; tant qu'ils trouvent des quantités suffisantes d’oxygène dans le“ milieu, ils se transforment en sesquioxyde ou du moins en fer oxydulé ; en l’absence de l'air, ils donnent du protoxyde et souvent même (tourbières) de la pyrite. » La limite entre les deux zones n’est pas nettement tranchée, d'au tant plus que des circonstances extérieures peuvent influer. Mais, en dehors des faits de détail, elle dépend surtout de la composition physique et du taux d’eau du sol. Elle gît beaucoup plus bas dans les sols de texture grossière que dans ceux dont les éléments sont très fins et, dans les cas extrêmes, par exemple dans les sols argi leux friches, la zone d’oxydation peut même manquer complètement; | ceci arrive encore dans les cas où le sol est saturé d’eau, soit parce que la couche imperméable est trop près de la surface, soit par in-« filtration latérale ou par submersion persistante. À mesure que le niveau de l’eau s’abaisse et que l'air peut pénétrer davantage dans le sol, les processus d’oxydation prennent le dessus dans les zones exondées. On le constate aussi par ce fait que les pyrites se trans= forment en sulfate de protoxyde de fer et celui-ci finalement en oxyde. Tous ces points ne peuvent être appuyés par des dosages d'acide carbonique faits dans les divers sols parce que les quantités de gaz qu'on en extrairait dépendent non seulement de l'intensité de las décomposition, mais encore de la résistance que les sols oppo= sent à la sortie des gaz. Ainsi, le taux d’acide carbonique libre d’un sol sablonneux peut être inférieur à celui d’un sol de lehm ou d’ar= gile, bien que la matière organique se décompose incomparablement plus vite dans le premier, et cela parce que l’acide carbonique du sol 1. G. J. Musven, Die Chemie der Ackerkrume, édition allemande, par J. Müruen Berlin, 1862, p. 28 et 34. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 229 sablonneux se diffuse bien plus aisément dans l'air que celui du sol argileux. Tout comme la composition physique du sol, sa composition chi- mique importe aussi dans la question qui nous occupe. On peut le prévoir déjà par ce que nous avons dit à propos de l'influence des agents chimiques sur l'érémacausis. Nous y renvoyons le lecteur ; rappelons seulement ici que dans la nature c’est à la chaux qu’est dévolu le rôle principal ; comme on l’a montré, elle active beaucoup, sous forme de carbonate, l’humification des matières organiques et, sous forme de sulfate, la nitrification. Les humus acides qui se for- ment en l’absence de l'air, par la putréfaction des substances orga- niques, entravent au contraire ces réactions, Il en est de même quand de notables quantités de sels s'accumulent dans le sol, par exemple dans les régions arides (salants), ou quand certains sels, tels que le chlorure de sodium, possèdent des propriétés antiseptiques bien accusées. 3. — Formes de la végétation et couvertures mortes. Quand le sol est couvert de plantes vivantes ou de matières iner- tes (couverture des forêts, paille, fumier, etc.), sa température et son humidité sont modifiées d’une manière si tranchée, surtout pendant l’été, qu’une part prépondérante dans les processus de dé- composition revient de droit à la couverture du sol. Pour le com- prendre, il faut d’abord se faire une idée des influences qui entrent en jeu ; c’est à quoi va tendre ce qui suit. E. EBERMaYER * et moi avons cherché à déterminer dans ses dé- tails l'influence de la couverture sur la fempérature du sol. Les chiffres suivants que j'ai oblenus peuvent servir à la préciser *?. 1. E. Esenmayer, Die physikalischen Einwirkungen des Waldes auf Luft und Boden. Berlin, 1873. — Forschungen, etc., vol. XIV, 1891, p. 379-399. 2. E. Wozznv, Der Einfluss der Pflanzendecke und Beschattung auf die phy- sikalischen Eigenschaften und die Fruchtbarkeit des Bodens. Berlin, 1877. — Forschungen, elc., vol. VI, 1883, p. 198-256 ; vol. X, 1887, p. 261-344; vol. XII, 1589, p. 1-75; vol. X, 1887, p. 415-446 ; vol. XIII, 1890, p. 134-184 ; vol. XVII, 1894, p. 153-202. 3. Forschungen, etc., vol. VI, 1883, p. 220. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 230 86‘o |9r‘o [601 |c6‘e 91‘ |#yr'o [|rs‘o |89°1 DOI GO MIO" Te IeBE 6g‘o |6c‘o —|lorr —|10‘1 —| &z‘o | 90o‘o [|96‘o —|9sr —| e9‘o |er‘o —|01*r —16L°r — 67‘ lo9‘o sai —|2re —{| s8‘r | 68s‘o |co‘o (sors —|318°r |6s‘o |sr'o —|g8"e — go‘g |1o‘z ‘|za‘o go‘ —|sr'e |or‘a ler‘ [o‘o—|ce'e Îsr‘e |e1‘r |sr‘o — t49 og or ro |ler"e CERCLE 0 LCA 200 | 102, 1902 66" 4101"8 6g‘r1 [9ç'‘or |10o‘6 |o8‘9 ey‘11 | 98‘or [996 |60°‘8 #L‘ir |68‘or |59°6 |61°L ce‘oy |Le‘or [se‘er [ve‘er |'ar‘or | re‘or [acer [s'en |re‘or |re‘or [LG6‘ST |eL‘yi s6‘z1 lés‘er |is‘er [ia‘re | 6r‘2r | vr‘er |vr‘6r lo6‘or | rr°Lr |[6e‘8r |26'sr |61‘81 o6‘o1 |iL‘2y [sr‘sr lo9‘ér | os‘or | asus |6e‘sr [co‘er | es‘or [er‘zr |S8‘zr |69°21 éeL‘ey |ve‘zr lister (sé‘er | se‘er | oc‘or loo‘sr |rL‘sr | as‘er |L6‘or |rs°zr |L‘s1 estiy log‘er [ag‘er loo‘zr. | za‘ | vé‘er [6s‘r (or‘or | co‘ir loyer |60'‘S7 |y2‘91 *souSop | ‘soufep | -soaSop | -“soxfop | ‘souSop | ‘soxSop | ‘so18op | ‘souSop | ‘soxSop | -‘soxSop | ‘soxSop | ‘soxsop ee Lee ann -009 OOF|-Hu09 OZ|-1u90 O%|-nu09 OT|-009 O0T|-nue9 OZ|-nu09 0%|-Hu09 OT|-u99 OOF|-Hu29 OZ|-Hu99 O%|-1u89 OF op ep op ep op op ep op op ep ep op EE É ÉÉ uopuojoid €] y inopuoyord 7 Y AnopuOJOid BI V AN "108 “ANASSIVAA, A C‘woT 4 HXYINAX AG HAHINAON9 ‘NOZYF®D *‘T0S AG AUALYHAIANAL cree ee ee sex : - he - “yonagg | TT eee ee + coque! is EN = ÉACU EAN RC à | SE oaquojdes | een ee + ppm SUR. Ta al ele aa El "GLST EN ‘SION DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 231 Quant à l’échauffement du sol sous les arbres forestiers, mes ob- servations, relatées ci-dessous, faites dans des conditions absolument identiques, fournissent des renseignements assez précis! : Température du sol à 25 centimètres de profondeur. ÉPICÉAS se Dot M BOULEAUX DATE. sans avec LE GAZON. SOL NU. couver- couver- couver- ture. ture. ture. 3 degrés. dec, degrés. degrés. degrés. Al 1887... . : 5,71 5,11 7,15 6,44 7,06 DR 0 9582 9,83 10,73 11,44 Me? D nn 1,16. Uf4,69 PV 17,02 016 TA 1802 ARRET: 0 18,70 18,32 20,98 20,94 22,05 EU . 17,13 16,91 18,64 18,62 19,39 SeDEMDre : : . . . 14,75 14,51 15,97 15,49 16,36 Moyenne . . . . 43,57 43, 26 45, 04 14,98 455715 Le tableau ci-dessous montre quels changements les diverses cou- vertures ont amenés dans la température du sol d’après mes expé- riences ? : Température du sol à 12 centimètres de profondeur, sous une couverture de 2°",5 d'épaisseur. AIGUILLES FEUILLES | MOIS. ea FR rs rs MOUSSE. SOL NU. re É dues TS degree. FREE Fraise BE 0 1338 15:16. 013,15 13,17, 13,25 15,11 UMR 17,20 717,05 017,03 | "17,98. //18,35 A IG 270 | 16380105, 70: Mt 68000 16, 072%: 16467 0-2 0 AT, 06 Mu ET OS 163540 , 116:55.0 16,897, 17,84 Septembre . . 14,45 14,50 14,25 14,24 14,28 14,59 Octobre . . . 7,30 7,39 7,24 7,20 128 moi Moyenne. . 14,30 14,28 13,99 13,98 144,49 14,94 En examinant ces chiffres, on arrive à cette conclusion : 1° Le sol couvert de plantes vivantes ou de parties végétules mortes (couverture, fumier, paille, etc.) est jusqu'à une assez grande pro- 1. Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 154-171. 2. Ibid., vol. XIII, 1890, p. 163. 232 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. fondeur sensiblement plus froid en élé el plus chaud en hiver que le sol nu ; 2° Les différences sont surtout accusées en élé. Les influences en question se manifestent à un bien plus haut de- gré dans la marche journalière de la température que dans les tem- pératures moyennes correspondant à des périodes assez longues, comme celles que nous venons de considérer. Cette assertion ressort avec évidence de l’exemple suivant‘: Température du sol à 10 centimètres de profondeur. COUCHE de fumier de SOL NU. GAZON. 1 centimètre d'épaisseur. Minuit 6/05" 19,0 19,2 18,9 2'Henres. 6 5€ 18,6 18,7 18,0 L'AILE 18,3 18,2 17,3 6 — 18,0 18,0 16,8 BU EME 18,0 17:9 14,2 SJ JAN re 18,6 18,8 19,5 1876. \MI 19,5 20,2 23,2 2'NEUTES CRE 20,7 QT 26,8 nn 21,3 22,9 28,5 6 — 21,3 23,2 28,5 8 — 20,9 22,8 26,7 \10 — 20,4 22,0 23,4 Moyenne. . . 19,53 20, 26 22,03 Les différences de température entre le sol couvert et le sol nu sont, au moment du maximum journalier, plus grandes que dans les moyennes mensuelles. Pendant la nuit le sol nu, surtout à l'heure du minimum journalier, est généralement, sinon toujours, plus froid que le sol couvert. L’échauffement du sol, sous l'influence des diverses espèces de sols, se fait dans les couches superficielles pen- dant le jour comme il se fait dans l’été pour les moyennes mensuelles, el pendant la nuit 1l suit une courbe analogue à celle des moyennes mensuelles hivernales. L’excès de température diurne du sol nu sur le sol couvert est si prononcé que le refroidissement nocturne rela- {. E. Wozrny, Der Einfluss der Pflanzendecke, elc., p. 44. ee DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 233 tivement plus accentué du premier ne se fait pas sentir sur la tem- pérature moyenne qui, on le voit, est plus élevée que celle du sol couvert. Du reste, l’effet que la couverture exerce sur la température du sol est très différent suivant le temps, suivant la composition du sol et des objets qui le recouvrent. Si, pendant l’été, il survient une im- portante dépression dans la température, les couches superficielles du sol nu deviennent au contraire plus froides que celles du sol garni de plantes. Inversement, si, après une période de froid, la tem- pérature s'élève, le sol friche s’échauffe plus vite que le sol couvert de plantes vivantes ou de détritus végétaux. Plus est grand le nombre des jours clairs et ensoleillés, plus s’accusent les différences de tem- pérature entre le sol nu et le sol couvert; elles diminuent dans la mesure où s'accroît la nébulosité et où décroit la température de l'air. Il résulte de tout ceci que l'influence de la couverture du sol sur sa température est d'autant plus sensible que les agents exlé- rieurs de l’échauffement du sol se montrent plus favorables et vice versa. N'oublions pas de mentionner que les influences de la couverture sur l’échauffement du sol, telles qu’elles sont indiquées plus haut, se font sentir à des degrés divers sur des terrains de composition physique différente. Sur ceux d’origine minérale, comme les sols sablonneux qui conduisent relativement bien la chaleur, les change- ments de température provoqués par la couverture sont sensible- ment plus rapides que sur les sols de nature organique (tourbe) à conductibilité faible, si bien que, dans le premier cas, le sol nu s’échauffe beaucoup plus vite que celui qui est couvert quand la température s'élève et que, dans le second cas, il se refroidit plus vite quand la température décroît'. Enfin, la composition de la cou- verture, toutes autres circonstances égales, a de l’importance pour la température du sol. Si elle est formée de plantes à vie courte, les différences de tem- pérature entre les sols couverts et les sols nus sont minimes, tant que les plantes sont à l’état jeune et que l’insolation est faible (prin- 1. Forschungen, etc., vol. VI, 1883, p. 199-218. 234 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. temps); elles s’accentuent à mesure que la végétation progresse et que la température s’accroit ; elles atteignent d'ordinaire leur maxi- mum en été pour diminuer à l'automne dans la mesure où s’atté- nuent l’ombrage et l’insolation. Les arbres forestiers se comportent de même avec celte différence que, vu la lenteur de leur végétation, leurs influences se prolongent pendant un grand nombre d'années. Si ces arbres se développent assez pour couvrir complètement le sol, celui-ci subit de ce chef pendant l'été le plus fort abaissement de température. La densité des tiges a une influence assez grande sur la tempéra- ture du sol, ainsi qu’il résulte des chiffres suivants d’une de mes expé- riences : : Pois. — Température du sol à 40 centimètres de profondeur. NOMBRE DE3 TIGES PAR 4 MÈTRES CARRÉS. DATES, ES 64. 100. 144. 196. degrés. degrés. degrés. degrés. 26 1nV1878:1. 0 18,53 18,14 17,59 17,24 7 — Re te 18,25 17,95 17,38 16,93 28 — AT LS 18,61 17,94 17,53 16,94 29 == Fans 23,69 225 01 22,26 > RAC NÉ Moyenne. . . 18,78 148,29 17,76 17,23 Ces chiffres établissent que la température du sol en été est d'au- tant plus basse que les plantes qui le couvrent sont plus denses. Mes recherches? ont aussi montré que le sol en élé s’échauffe d'autant plus faiblement que les organes aériens des plantes sont plus déve- loppés. La moitié d’une parcelle de gazon fut amenée par des engrais appropriés à un développement luxuriant tandis que l’autre moitié restée sans engrais ne montrait qu'une végétation médiocre. Voie les températures du sol à 10 centimètres de profondeur dans les deux moitiés : 1882 A" I —— MOYENNE: 19 juillet. 20 juillet. 21 juillet. 22 juillet. degrés. degrés, degrés. degrés. degrés. Parcelle fumée. . . 19,42 19,83 20,15 20,12 19,88 Parcelle non fumée. 20,03 20,82 21,16 20,72 20,68 1. Forschungen, elc., vol. VI, 1883, p. 243. 2. Ibid, vol. V1, 1883, p. 227-250. ; DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 239 Un autre exemple est fourni par une expérience où l’on culliva des plants de fèves également espacés provenant les uns de grosses graines, les autres de pelites. Les plants développés proportionnel- lement à la grosseur de la semence eurent sur la température du sol une influence différente qui ressort des chiffres ci-après : Température du sol à 10 centimètres de profondeur. provenant de graines. EE Grosses, degrés. 7 juillet 1881 . 21,90 8 — = 21,10 Moyenne. . 21,50 Petites. degrés. 23,19 23,23 22, 80 U. FÈVES provenant de graines. EE Grosses, degrés. 21,20 21,59 24,93 Petites. Pour les végétaux forestiers comme pour les agricoles, la tempé- rature du sol dépend de la densité du peuplement, du développe- ment des organes aériens et du port de la plante; leur influence est d'autant plus grande qu’ils sont plus serrés et que leurs organes aériens sont plus largement développés”. L'action d’une couverture morte dépend surtout de son épaisseur comme le montrent mes essais ? : Température du sol à 145 centimètres de profondeur. MOIS. SOL NU, degrés. Avril 1884. . . 7,86 EU ONE 15,08 MD rs ne Ms 14,97 TEE 20,11 ;, MCE SENPNENE 18,92 Septembre. . . 15,44 Moyenne. . 45,40 COUVERTURE DE PAILLE a de Ocm 5 degrés. 7,16 14,11 14,58 19,42 18,33 15,17 14, 86 1. Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 168. 2. Ibid., vol. XIII, 1890, p. 163. de 2 centi- mètres. degrés. 7,64 13,76 14,43 19,06 18,23 15,25 14,73 degrés. 7,58 13,31 14,18 18,66 17,82 15,17 14,45 236 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Température du sol à 42 centimètres de profondeur. COUVERTURE DE MOUSSE Sd MOIS. S0L NU. 4e de FT de CT LA. degrés. degrés. degrés. degrés. degrés. 1 Éri) KE IREM nl 13,29 12,69 12,50 12,42 Juin Pure 18,39 17,28 16,86 16,66 16,55 INC RS PEER 16,57 16417 16,00 15,90 15,83 ADULTE 17,84 16,89 16,66 16,96 16,49 Septembre . . , 14,59 14,28 14,34 14,43 14,47 OCtODIe Re Teil TR28 7,67 8,11 8,24 Moyenne. . . 14,94 14,19 14,04 14,03 44,00 De ces chiffres il ressort que le sol est d'autant plus froid pendant la saison chaude, d'autant plus chaud pendant la saison froide que la couverture est plus épaisse. Tous ces résultats peuvent s'expliquer ainsi. Par la présence des plantes, l'influence directe de l’insolation sur la surface du sol est gènée plus ou moins suivant l’état serré des plantes et le développe- ment de leurs organes aériens, donc suivant l’ombrage. En outre, par l’évaporation extrêmement forte de l’eau à la surface des feuilles il y a beaucoup de chaleur combinée qui est perdue par le sol pen- dant la saison de végétation, et les plantes consomment de la cha- leur pour l’entretien de leurs fonctions (travail interne). Enfin, la mauvaise conductibilité tant de la couche d’air plus ou moins sta- gnante retenue entre les plantes, que du sol parcouru en tous sens par les racines et pourvu d’une grande quantité de matière orga- nique pourrait être mise en avant pour expliquer le faible échauffe- ment du sol sous l’action d’une température élevée. En hiver, la température du sol sous l’influence de la couverture présente des rapports inverses de ceux constatés dans la saison de végétation et pour les mêmes raisons. La couverture, mauvaise con- ductrice, garantit le sol contre un trop grand refroidissement. De plus, avec des plantes pérennes, il se forme à la surface, aux dépens des organes aériens morts, une couverture qui, vu sa faible conduc- übilité et sa grande chaleur spécifique, diminue l’action de la tem- pérature de l'air sur le refroidissement du sol. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 231 Cette température extérieure agit immédiatement sur les sols nus qui sont par cela plus froids en hiver que les sols couverts. Les influences des couvertures mortes sur la température du sol doivent être rapportées à des causes semblables. L'action exercée à ce point de vue par les diverses formes de la végétation se déduit dès lors d’une manière générale des faits précé- dents. Si, dans ce qui va suivre, il sera surtout question de la période de végétation, la raison en est que les processus organiques dont le sol est le théâtre sont principalement importants dans cette saison. De loutes les formes de la végétation, c’est la forét qui refroïdit Le plus le sol à cause du couvert exercé par les cimes et de la protec- tion que la couverture morte fournit au sol. La longue période de végétation des arbres, surtout des arbres verts, doit être aussi mise en avant, pour expliquer limportante dépression de la température dans le sol forestier. Après les arbres des foréts, ce sont les fourrages pérennes (luzerne, esparcelle, trèfle, prairie) qui contribuent le plus à l’abaissement de la lempérature du sol, quoique à un moindre degré que les arbres ; leur influence s'explique par leur très longue durée de végétation et par leur état serré qui ombrage bien le sol. Ce n’est qu'après la fau- chaison que cette influence diminue et fait place à un plus fort échauf- fement, comme 1l résulte des observations suivantes que j'ai faites! : Température du sol à 10 centimètres de profondeur. 26 Mar. 27 MAI. 28 Mar. 16 JUIN. MOYENNE. degrés. degrés. degrés. dégrés. degrés. Herbe non fauchée. . . 14,21 15,35 15,77 14,60 15,11 Herbe fauchée . . . . 19,04 20,32 19,22 16,09 19,53 À mesure que se développent les organes aériens, l’influence ré- frigérante de la couverture vivante augmente à nouveau et atteint son maximum quand le sol est derechef complètement ombragé. Les végélaux agricoles, cullivés pour leurs grains, leurs racines, leurs tubercules, elc., s'opposent dans une bien moindre mesure à l'échauffement du sol parce qu’à cause de leur état clair, ils ombra- gent moins le sol, parce qu'aussi leur saison de végétation est géné- 1. Forschungen, etc., vol. VI, 1883, p. 241. 238 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ralement plus courte et qu'après la récolte le sol se trouve plus ou moins longtemps à l’état friche. Les cultures agricoles présentent sous ce rapport les plus grandes différences. Ce sont les grandes légumineuses à feuillage abondant (fèves, vesces, pois), et le maïs fourrage qui dépriment le plus la température, puis viennent les navets, les betteraves et, après, les céréales, tandis que les plantes largement espacées, cultivées pour leurs racines et leurs tubercules, opposent ie moindre obstacle à l’insolation. L'humidité du sol, tout comme sa température, est modifiée par les couvertures. Parmi les nombreuses recherches que j'ai faites à ce sujet’, je citerai les résultats suivants : TAUX D'EAU DU SOL PROFONDEUR de la FE NE ane couche couche. gazon. ee à 0-1 0°m 105 20,88 34,43 10-40 15 ,19 22,30 29,98 5 9 75. 2 u ? Fonte 40-70 15,35 23,95 26,42 70-100 16,60 24,51 26,28 Les chiffres ci-dessous donnent une idée de l'influence des arbres forestiers sur l'humidité du sol? : Taux d’eau du sol en moyenne jusqu’à 0",50 de profondeur. ÉPICÉAS BOULEAU X ANNÉB. F_ ae je nee sans - GAZON. SOL NU. , couverture. couverture, Couverture. ÉCRIRE LE 13,25 15,14 12,19 12,96 16,03 (588 NA RS NAT 15,30 RAI 13,47 16,36 l'OS) 15,71 16,66 14,96 15,24 17,96 ISSUE 13,98 14,69 14,65 15,44 18,43 RCD ae 14,76 15,04 13,67 14,56 18,13 Moyenne * . 14,37 45,37 13,66 14,49 17,29 1. E. Wozrny, Der Einfluss der Pflanzendecke und Beschattung, etc., Berlin, 1877, p. 105-135.— lorschungen, elc., vol. X, 1887, p. 261-321 ; vol. XII, 1889, p. 2-31. ?. Forschungen, elc., vol. XVIT, 1894, p. 171-180. 3. Ges chiffres sont les moyennes de 117 déterminations faites pendant la saison de végttalion, à 4 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 239 Ces résultats montrent avec la plus grande netteté que: 1° Le taux d’eau d'un sol garni d’une couverture vivante est, pendant la saison de végélation, toujours plus faible que celui d’un sol nu; 2 un sol recouvert de fumier, de paille el de matières inertes analogues pos- sède, à égalité de composition, un taux d’eau plus fort qu'un sol nu ; 3° pendant l’élé, le sol couvert de paille ou de fumier est le plus humide, le sol nu l'est moins et le plus sec est celui qui est garni de plantes vivantes. Ces conclusions ont été confirmées par les recherches de beau- coup d’autres expérimentateurs ‘, si bien qu’on ne peut plus mettre en doute leur exactitude. Le desséchement du sol par les plantes tient à leur importante consommation d’eau. Par leurs feuilles qui s’étalent dans l'air sur de vastes surfaces se fait une grande évaporation d’eau provenant d'abord des cellules voisines de la périphérie ; celles-ci cherchent à combler leur perte, par imbibition et endosmose, aux dépens des cellules situées plus profondément, et c’est ainsi que se forme dans toute la plante un courant qui va des racines aux organes extérieurs. Donc, il faut que la racine tire du milieu ambiant, le sol, constamment autant d’eau qu’il s’en évapore par les feuilles, pour que les tissus restent turgescents et que les fonctions s’accomplissent sans inter- ruption., C’est le sol qui doit fournir les quantités d’eau nécessitées par la transpiration ; c’est le seul milieu par où les précipitations atmosphériques puissent arriver aux plantes. On ne peut admettre, les expériences l’ont montré, que les organes aériens des plantes absorbent l’eau en quantité appréciable, qu’elle soit en gouttelettes ou à l’état de vapeur. Pour leur consommation d’eau, les plantes sont exclusivement réduites au sol. A quel chiffre énorme s’élève cette consommation? c’est ce que Von peut mesurer par les quantités d’eau nécessaires pour former 1. G. Wicezu, Wochenblatt fur Forst- und Landwirthschaft in Würtemberg, 1866, p. 174 ; ZLand- und forstwirthschaftliche Zeitung, 1867, p. 31. — J. Buet- TENLORNER, Al/gem. land- und forstwirthschaftliche Zeitung, 1867, p. 497. — W. Scaumacner, Fühling's landw. Zeitung, 1872, p. 604-610. — Pour l'influence des arbres forestiers sur l'humidité du sol, voir surtout le travail de E. Esrrmayen dans les Forschungen, ctc., vol. XII, 1889, p. 147-174. 240 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. les produits végétaux ou bien encore par l’évaporation de sols. plantés comparés à d’autres non plantés. | Les recherches de H. HELLRIEGEL ‘ et les miennes faites suivant la première méthode ont montré que, par exemple, chez les diverses plantes agricoles, la production de 1 gramme de substance sèches exigeait de 262 à 402 grammes (233-912 grammes) * d’eau. Dans mes expériences sur l’évaporation de sols garnis ou non de végéta- tion, j'ai montré que, du 4 jain au 27 septembre 1881, il s'était éva-« poré par 1 000 centimètres carrés : D’un sol de gazon . . . 34 605 grammes d'eau. D'inSo NU ere 13 719 — et que des surfaces égales ayant reçu 57 253 grammes de pluie ont rejeté dans l'atmosphère du 15 avril au 51 octobre 1875 les quan- tités d’eau suivantes : dacnete LEHM. TOURBE. GATODE EEE ER 47 355 51 721 55 630 SOLAU FR 1891? 33 899 30 200 De ces recherches et de beaucoup d’autres du même genre il res- sort avec évidence que les sols garnis de plantes en végétation éva- porent, toutes conditions égales, de bien plus grandes quantités d’eau” que les sols nus. La surface d’évaporation du sol est en quelque sorte multipliée par les plantes un certain nombre de fois. La four- niture directe d’eau provenant du sol même est sensiblement amoin- drie par la couverture parce que celle-ci diminue beaucoup l'évapo- ration du sol; mais cette influence ne profite pas à la provision d’eau du sol, que les racines des plantes revendiquent énergique= ment pour fournir aux organes aériens l’eau nécessaire à la trans- piration, Sur le sol nu l’évaporation directe, l’évaporation de la couche superficielle, est, il est vrai, plus grande que sous les plantes ; mais dans ce dernier cas intervient l'important emprunt d’eau fait 1. H. Hezrniecez, Beitrâge zu den nalurwissenschafllichen Grundlagen des Acherbaues, Braunschweig, 1883, p. 622-664. 2. Der Einfluss der Pflanzendecke und Beschaltung. Berlin, 1877, p. 123-125: LE DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 241 par la végétation. Ajoutons que les précipitations atmosphériques pénètrent intégralement dans le sol nu, tandis que, sur le sol garni de végétation, elles sont retenues en partie par les feuilles ; en outre, au moment des sécheresses, le sol sans végétation se dessèche plus ou moins et cette croûte superficielle desséchée s’oppose à l’évapo- ration. Les arbres forestiers se comportent sous ce rapport comme les plantes herbacées. Ainsi j'ai trouvé’ qu’une surface d’un mètre carré recevant une lame d’eau de 990!,6 évaporait pa an, en litres (moyenne de six années) : ÉPICÉA = À BOULEAUX 2 sans SOL NU. sans avec ESS couverture. couverture. couverture. 860,8 877,7 754,0 482,0 L'action exercée par les couvertures mortes (paille, fumier, cou- verture, etc.) tient tout d’abord à ce que la surface d’évaporation du sol, en contact avec l’atmosphère, est diminuée par l’adjonction de ces matériaux et à ce que l'influence des agents d’évaporation est entravée. Dans ces condilions le vent et l’insolation ne peuvent plus faire sentir directement sur le sol leur action desséchante. En outre, l’abaissement de la température du sol sous l’influence des couver- tures mortes intervient dans l'explication du phénomène, comme aussi la circonstance que les matières organiques enferment une couche d’air saturée de vapeur d’eau qui est un obstacle à l’évapora- tion du sol. Mes résultats relatés ci-après montrent le degré de cette influence * Quantité d'eau évaporée (en grammes) par 1 063 centimètres carrés de surface. (Du 27 juillet au 5 août 1875.) SABLE. LEHM. TOURBE. SOUL ei 21 ÉTRE RNA 3 783 3 339 3 820 Sol couvert d'une the derfin, A Pts 4 265 4 423 4 9145 1. Forschungen, elc., vol. XVII, 1894, p. 202. 2. Ibid., vol. X, 1887, p. 297, et vol. XIII, 1890, p. 175. MATIÈRES ORGANIQUES. 16 242 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Quantité d'eau évaporée (en grammes) par 1 000 centimètres carrés de surface. SABLE OALCAIRE RICHE EN HUMUS avec une couverture de 2cm,5 SE d’aiguilles de feuilles À TT, © TT, )] MAL, MOUSSE.. Yépicéa. de pin. dechêne. dehêtre. Du 11 au 19 juin et du 20 au AD'AbUE ABSB NES Lo Ce OATE 360 480 270 270 2030 Du 12 au 20 juillet et du 1°* au {5 août 1889 2 Ne Prev oran 630 680 440 370 2 020 Le sol muni d'une couverture a donc évaporé beaucoup moins d'eau que le sol nu. L’humidité du sol, comme sa température, est diversement in- fluencée par la composition des couvertures. L'état plus ou moins serré des tiges est d’abord de grande importance, comme il résulte des observations suivantes faites par moi’: Taux d'eau du sol jusqu’à 20 centimètres de profondeur. Pois, 13 juin 1875 : Nombre de tiges par 4 mètres carrés. 64 100 144 Humidité AU SOL 20,11 44,71 11,93 Betteraves, 4 août 1875 : Nombre de tiges par 4 mètres carrés. 16 36 49 HOMUTté AU ISOLER EE 23,14 27:53 15,66 Pommes de terre, 16 juillet 1876 : Nombre de tiges par 4 mètres carrés. 16 36 64 Humidité(du's0l ER "ee 18,04 47,01 16,58 Ces chiffres montrent que le sol s’épuise d'autant plus en eau que les plantes sont plus serrées. Au reste, la consommation d’eau par les plantes est, toutes choses égales, d'autant plus forte que les plantes sont plus développées. 1. Forschungen, ctc., vol, X. 1887, p, 298. JR DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 243 Cela résulte non seulement de mes expériences’, mais aussi de celles de H. Gigert* dont voici quelques résultats : PRAIRIE Fumure non de sels Fumure fumée. ammouia- je nitrates. caux. Récolte de foin en 1870 par acre en cwt*, 5 3/4 29 1/2 56 1/4 Taux d’eau du sol à diverses profondeurs (25 et 26 juillet 1870). De O0 à ‘22 centimètres . . 10,83 13,00 12,16 De 22à 44 — 2 À 13,34 10,18 11,80 De 44à 66 — te 19,23 16,46 15,65 De 66à 88 — AtE 22,71 18,96 16,30 De 88à 110 — + 24,28 20,54 17,18 De 110 à 132 — 27 25,07 21,34 18,06 Moyenne. . . . . 19,14 16,75 15,19 En ce qui concerne la dessiccation du sol aux diverses phases de l'accroissement, la moindre réflexion indique que c’est pendant la jeu- nesse que les végétaux absorbent le moins d’eau, que cette absorp- tion augmente constamment avec leur accroissement et atteint son maximum quand la plante est entièrement développée, après quoi la consommation diminue à mesure que les végétaux approchent de leur maturité. C’est ce que mettent en évidence les résultats de plu- sieurs de mes expériences‘ et de celles de E. EBERMAYER* sur les arbres forestiers. Voici les moyennes des taux d'humidité du sol : Taux d’eau du sol entre 40 et 80 centimètres de profondeur. ÉPICÉA, EE SOL ° - s Boi Note NUL CRAN ET éxvloisblee, non boisé. 25 ans. 60 ans. 120 ans. 1884-1885. . . 16,89 45,28 18,43 20,17 1885-1886 . . . 18,65 17,30 19,71 20,46 1. Forschungen, elc., vol. X, 1887, p. 298-320. 2. On Rainfall, Evaporation and Percolation. Proceedings of the Institution of civil Engineers London. 1876, vol. XIV, 3° partie. 3. L'acre vaut 0,40, et le quintal anglais (ewt) 50%,8. (Trad.) 4. Forschungen, etc., vol. XII, 1889, p. 28. 5. Ibid., vol. XII, 1889, p. 150 et 152. 244 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Il résulte de ces chiffres que l'humidité du sol est plus ménagée pendant le jeune âge des bois que pendant leur âge moyen, puis qu'avec les progrès de l'accroissement (à l’âge d’exploitabilité) l’ex- traction d’eau du sol subit une diminution. Ces résultats confirment, au surplus, ce que nous avons dit plus baut : le sol nu renferme plus d’eau que le sol planté. L'épaisseur de la couverture morte a bien plus d'importance pour « l'humidité du sol que sa composition. Les chiffres suivants emprun- tés à quelques-uns de mes essais" montrent dans quelle mesure cette épaisseur influe sur l'humidité du sol: Humidité du sol jusqu'à 20 centimètres de profondeur. COUVERTURE DE PAILLE ÉOPENRTE de de de Ocu,5 2 centim. 5 centim. 1883 et 1884?. . . 19,88 23,39 25,49 26,18 COUVERTURE DE MOUSSE OR de de de de 2cu,5 5 centim. 7cm,5 10 centim. 1888 et 15895, . . 47,951 20,49 20,81 21,22 21,49 On voit qu'un sol muni d’une couverture est sensiblement plus humide pendant la saison chaude qu’un sol nu et d’autant plus que la couverture est plus épaisse. Celte augmentation d'humidité du” sol sous l’influence de couvertures d'épaisseur variable n’est cepen- dant pas proportionnelle à cette épaisseur; les chiffres montrent qu'elle croît dans un moindre rapport. Si l’on résume l’ensemble des résultats précédents et des obser- valions auxquelles ils donnent lieu, si l’on tient compte aussi d’au- tres expériences faites par E. EBERMAYER et par moi, on peut, au point de vue de l'influence des végétaux agricoles el forestiers sur l'humidité du sol, poser les conclusions suivantes: Parmi les plantes qui contribuent le plus à dessécher le sol pendant la saison de végétation, il faut compter certainement les fourrages 1. Forschungen, etc., vol. XIII, p. 1890, p. 172 et 173. ?, Moyenne de vingt-neuf dosages. 3. Moyenne de trente-six dosages. 34 : | DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 24 drus, vivaces, à longue période de végétation (trèfle, luzerne, sain- foin, herbes fourragères, etc.). Les prairies ne rentrent pas, en géné- ral, dans cette catégorie, parce qu’elles occupent des places plus ha- mides où l’eau leur est fournie par le dessus ou par le dessous. Les légumineuses à feuillage abondant, cultivées pour leurs graines, et quelques plantes commerciales ont de moindres exigences vis-à-vis de l'eau; à elles se joignent par ordre décroissant les végétaux forestiers. Les céréales se placent très près de ces derniers en ce sens qu’elles empruntent au sol tout autant ou quelquefois moins d’eau qu'eux. Les plantes à tubercules ou à racines, cultivées avec large espace- ment, quelques plantes commerciales qu’on traite de la même ma- nière, sont celles qui ont besoin de la moindre provision d’eau. Ce que nous venons de dire n’a qu’une valeur générale ; car non seulement il y a dans chacun de ces groupes de grandes différences, mais encore pour la même plante l'influence sur l’humidité du sol dépend des circonstances extérieures. Ce qui explique l'extraordinaire appel d’eau fait au sol par les fourrages vivaces, c’est, avant tout, ce fait qu’ils sont très drus, qu'ils se trouvent presque toujours en grande transpiration et qu’ils ont une longue saison de végétation. Les récoltes de graines emploient relativement beaucoup moins d’eau, parce qu’elles couvrent moins longtemps le sol et que, de- puis la récolte jusqu’à la culture préparatoire de la récolte suivante, le sol reste nu plus ou moins longtemps. En outre, ces végétaux uti- lisent moins d’eau au moment de la maturité. L’épuisement du sol dépend du développement des feuilles ; les légumineuses abondamment feuillées extraient de la terre plus d’eau que les céréales chez lesquelles l’appareil foliacé est bien plus ré- duit. Dans ces groupes il y a des différences nombreuses. Ainsi, le besoin en eau des espèces dressées, à vie longue, de la famille des légumineuses (féverole, haricot nain) est plus grand que celui des espèces traînantes à durée de végétation plus courte (pois, vesce) et, parmi les céréales, les espèces, telles que le maïs-graine et le sorgho, qui sont cultivées en rangs espacés tirent moins d’eau du sol que celles qui croissent à l’état serré. De ces dernières, l’avoine et le blé prennent plus d’eau que l’orge et c’est le seigle qui 246 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. est le plus frugal. La méthode de culliver les plantes à tubercules ou à racines à l’état clair entraîne un moindre épuisement de la provision d’eau du sol. Même dans ce groupe de végétaux il se produit des diffé- rences: les belteraves absorbent plus d’eau que les pommes de terre et, parmi ces dernières, celles qui ont beaucoup de feuilles en con- somment plus que celles qui ont un plus faible développement foliacé. Pour les arbres forestiers, abstraction faite de la densité du peu- plement, l'absorption de l’eau pendant toute l’année est plus grande chez les arbres verts (conifères) que chez les feuillus. Ceux-ci peu- vent sans doute épuiser davantage le sol pendant la saison de végé- tation. Quand il y a une couverture, le taux d’eau du sol est un peu plus élevé que dans le eas contraire ; mais les différences d'humidité dans le sol à ces deux états sont faibles, même nulles ou quelquefois en sens contraire parce que l’accroissement des plantes et par suite leur pouvoir de transpiration est accéléré par les principes nutrilifs formés dans la couverture lors de la décomposition des matières orga- niques et rapportés au sol par l’infiltration des eaux atmosphériques. De ce qui vient d’être dit il ressort suffisamment que les deux fac- teurs importants pour la décomposition des matières organiques, chaleur et humidité, sont modifiés par les formes de la végétation de la manière la plus variée ; il en résulte qu’il est très difficile de prévoir exactement dans chaque cas les rapports des diverses cul- tures avec les faits en question, d’autant plus qu’aux agents déjà cités il s’en Joint deux autres, le travail du sol et sa fumure. Vou- loir mesurer * l’action de ces divers facteurs par l’acide carbonique de l'air du sol serait un procédé qui conduirait à des notions trop inexactes. On détermine ainsi la quantité de gaz carbonique existant dans le sol°, qu’il soit famé ou non, abstraction faite de son état phy- sique qui agit très différemment, suivant les cultures, sur la forma- tion et sur la sortie du gaz. De plus, selon les plantes que l’on cultive, l’accumulation de la matière organique dans le sol se fait de la façon la plus variée ainsi que sa décomposition. C’est seulement dans le cas où toutes les cir- 1. E. Esenmayen, Forschungen, elc., vol. XIII, 1890, p. 23-49. 2. Ibid., vol. IX, 1886, p. 165-194. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE, 247 constances sont égales qu’on pourrait obtenir par cette méthode un résultat permettant de juger de l’influence des formes de la végéta- tion sur les processus organiques du sol. Partant de ce point de vue, il faut, pour évaluer l’action de la couverture sur la décomposition, choisir un dispositif où le sol pos- sède une composition absolument homogène et où la couverture n’ait encore amené aucun changement dans le taux d’humus. J'ai fait des essais dans ces conditions ‘. Des cylindres de tôle de 0°",5 de hau- teur et de 0,1 de section, entourés de terre et munis à la base d’un tuyau destiné à l’écoulement de l’eau en excès, furent rem- plis de 60 kilogr. de sable calcaire riche en humus préalablement mélangé avec soin. La surface dans l’un fut garnie d’une couche de paille de 1,5 de hauteur, dans l’autre d’un tapis de gazon et dans le troisième elle resta nue. L’air aspiré d’une profondeur de 0",95 pen- dant l'été renfermait les quantités suivantes d’acide carbonique : 1 000 VOLUMES D’AIR DU 80L VOLUME RAPPORTÉ renfermaient au volumetrouvé sous le gazon en acide carbonique. pris comme unité. Gazon. Paille. Sol nu. (Gazon. Paille. Sol nu. OR Te 9730 1364 26,938 0 14) "2.0E 1,84 LETTRE SPORE ET MR ER RSS RE ACT RCE NO 1°T juin 1878 . . 1,415 5,734 7,570 Î 4,05 D,39 8 ent 000 MAT OUT. 1 Lt 77 ‘2 07 15 7 0,502 0008, 7,450) {> TE 660 14,87 22 D à 3800 0 Gi dAp UE TO LIGA GS RG fi PAROISSE O0 STTS 04,540) DIS NT: (EAST) 8,925 8 — D DOS NA RONA ET Re EE (200: (3120 13 — M 088 DAME 6 148001 | 4,3%. 6:20 20 — DUT AE D 46fe 12,968. F / 4,62 5.66 27 — F0 OO Date At TG2 AN PR SATA) 4 EG 3 août 1878. . . 4,019 3,889 8,470 1 0,96 ee Li M 27: 25068 850460 -P42 L, 3.90 : 5,52 1,931 - 5,682 | 9,420 “+ “308 5,36 24 EU cat 2,401 14,628 21,760 1 6,09 9.06 =, À) 4,009 ‘f1,309 : 11,167 HAITI 7 septembre 1879. 3,428 11,233 14,005 1 3,28 4,09 17 — . 0,640 71,250 8,246 Î 11,33 12,88 21 — 2 O0 TIQU UT. 00 LT, 49 2) 09:09 , 9,73 Moyenne . . . 2,404 1,192 9,434 1 3,40 4,49 1. Forschungen, etc., vol. II, 1880, p. 1-14. 248 . DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Étant donné que le taux d’acide carbonique de l’air occlus dans le sol peut, dans les conditions précédentes, servir à mesurer l’inten- silé des processus de décomposition, on doit conclure du tableau précédent que dans le sol garni de végétation l'érémacaucis est bien plus lente que dans le sol garni d’une couverture morte; c'est dans le sol nu qu'elle est la plus intense. Ce sont des différences dans l’échauffement et l'humidité qui pro- duisent ces résultats. Puisque le sol nu, on l’a montré, est plus: chaud et plus humide que le sol garni de végétation, l’érémacausis doit être nécessairement plus active dans le premier. Si le sol muni d’une couche de paille, de fumier, ou de feuilles mortes accuse une plus faible décomposition que le sol nu, malgré un taux d’eau plus élevé, cela doit être avant tout attribué à ce que sa température est moindre. Si le sol nu avait été ameubli une ou plusieurs fois, comme on le fait en agriculture dans la jachère, et que, par suite, l'influence de l'oxygène eût été favorisée, il eût manifesté. une décomposition en- core plus active que dans les expériences relatées. Naturellement, l'influence de la couverture ne se borne pas à l’oxy- dation du carbone ; elle se fait sentir aussi sur l'oxydation de l’am- moniaque qui se forme par dédoublement des éléments azotés. Quelques expériences de R. WariINGTon' montrent qu'il en est bien ainsi. Après la récolte (1878), il dosa l'azote nitrique de sols qui avaient porté des récoltes agricoles ou qui étaient restés en Ja- chère. Il trouva les chiffres suivants : Azote nitrique en kilogrammes par acre. FUMURE COMPLÈTE SUPERPHOSPHATE SANS FUMURE = EE roc En, Fèves. Jachère. Fèves. Jachère., Blé. Jachère,. De 0 à 22 centimètres. 5,4 135 3,3 lOXO0FeRIrE 12,8 De 22? à 44 centimètres. 3,8 8,9 1,5 6,3. . traces 2,3 9,2 22,0 4,8 16,3 4,2 4bs Bien que ces résultats ne soient pas absolument démonstratifs en 1. Journ. of the Soc. of Arts, 1882, t. XXX, p. 532-544. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 249 ce qui concerne l'influence de la garniture végétale sur la nitrifica- tion, puisque, pendant leur développement, les végétaux utilisent des nitrates du sol, on peut cependant admettre que les différences accusées par les chiffres précédents ne tiennent pas uniquement à cela ; d’abord, les dosages ont été faits après la récolte, c’est-à-dire à la fin d’une période pendant laquelle les plantes prennent très peu de chose au sol ; ensuite, la parcelle en jachère avait sûrement perdu par dissolution une partie de ses nitrates (voir p. 7 et III‘ partie). Eu égard à ces circonstances, on peut attribuer, sans crainte d’une fausse interprétation, les résultats précédents aux différences dans la température et l’humidité du sol et conclure que la couverture vivante diminue sensiblement la nitrification dans le sol. Ceci n’est vrai que pour la saison chaude ; pendant la saison froide les rapports sont inverses, comme il résulte de quelques essais que J'ai faits ‘ suivant le procédé décrit un peu plus haut (voir p. 247). En hiver et au printemps, l’air du sol renfermait pour 1000 volu- mes les quantités suivantes d’acide carbonique : GAZON. SOL NU, 4 novembre 1878 . . . . 0,544 0,408 PRES PRE SARA 1,938 1,213 FOND OT res La US 0,872 0,349 LR HE ets à 1,382 0,276 Moyenne ee 1,184 0,561 Ces différences ne sont pas importantes et les taux d’acide carbo- nique sont faibles ; ce qui n’a rien de surprenant, puisque les diffé- rences de température et d'humidité entre le sol gazonné et le sol nu sont minimes en cette saison et qu’il n’y a pas assez de chaleur pour une décomposition active. Mais, cependant, ces résultats in- diquent nettement que les deux facteurs les plus importants pour la décomposition interviennent dans un sens inverse à celui de l'été. Ce qui vient d’être dit sur les rapports entre la couverture du sol 1. Forschungen, etc., vol. II, 1889, p. 9. 290 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. el sa température ou son humidité montre que la mesure dans la- quelle sont influencées les réactions dépend de la composition de celte couverture. Puisque les plantes assèchent d’autant plus le sol et le protègent d'autant mieux contre l’insolation qu’elles sont plus drues, on peut déjà conclure à priori que, toutes conditions égales d’ailleurs, le taux d’acide carbonique de l'air occlus dans le sol va- riera suivant cet état de densité. Cette hypothèse est confirmée par les résultats suivants d’une de mes expériences, 1000 volumes de l'air du sol contenaient, par 0,1, en acide carbonique, un volume de : NOMBRE DE TIGES D'AVOINE. 3 6 12 24 20 juillet 1879. . . 5.70 VE:92 LUAME ,42 ET: NOR POS 6,891 719,38" ON SES Vaoit1879 dy." 0 4806 0 n 8 0e NP Moyenne. . . 4,96 3,4b VILLERS Il résulte, en effet, de ces chiffres avec la plus grande netteté que la décomposition des matières organiques dans un sol cultivé est d'autant plus entravée que les plantes ont une végétation plus luxu- riante et l’on peut conclure que la couverture vivante diminue la décomposition des éléments organiques du sol proportionnelle- ment à l'état de densité et de vigueur des plantes qui la compo- sent. Les deux agents dominants, chaleur et humidité, ont évidem- ment une importance différente suivant que le sol est couvert ou non. Dans un sol assez sec garni de végétation, c’est l’eau qui règle, pas exclusivement mais pour la plus grande part, les processus de décomposition; dans un sol nu avec couverture morte, ceux-ci dé- pendent surtout de la température. Gette conclusion ressort en par- lie des résultats de mes expériences, mais tout simplement aussi des faits précédemment exposés sur les relations de la température et de l'humidité avec la décomposition. 1. Forschungen, elc., vol, II, 1880, p. 15. 1 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 291 En s'appuyant sur ce qui précède, on pourra déterminer approxi- mativement quelle influence les diverses formes de la végétation et les couvertures plus ou moins épaisses exercent sur les réactions dont nous parlons, si l’on sait quelles modifications elles apportent dans l’échauffement et l'humidité du sol. Malheureusement, ces influences dues aux végétaux à longue vie (arbres foresliers, gazon, fourrages pérennes) ne peuvent se représenter par la détermi- nation du taux de l’air du sol en acide carbonique parce que, nous l'avons déjà dit et l’affirmons encore, avec ces végétaux la quantité de matières organiques dans le sol se modifie avec le temps (voir la Il° partie) et qu'en outre il est difficile de trouver un sol nu, non fumé, maintenu pur de toute végétation pendant des dizaines d'années. À cause de ces difficultés et de l'absence d’analyses com- paratives poursuivies pendant un temps suffisant et qui pourraient seules résoudre la question, on doit se borner à préjuger, d’après ce que nous venons d'apprendre, l'influence de la couverture sur la température et l'humidité du sol en tenant compte de sa perméa- bilité. Les formes de la végétation se divisent sous ce rapport en deux catégories. L'influence retardatrice que toutes les couvertures vi- vantes exercent à un degré variable sur l’érémacausis, si elle n’est pas annihilée dans la plupart des cultures agricoles par le travail du sol et par son maintien à l’état nu entre la récolte et la prépara- tion pour la récolte suivante, est en tout cas très atténuée si on la compare à ce qu’elle est dans les cultures où le sol n’est que très rarement, même jamais travaillé. Sous ce rapport, on peut dire en gros, que, cæleris paribus, la décomposition est beaucoup plus intense dans les champs labourés que dans les sols qui ne sont que rarement travaillés (oseraies, sainfoins, luzernières) ou jamais (prairies et forêts). Dans ces deux groupes se prononcent des divergences mul- tiples suivant le couvert et la durée de végétation des plantes consi- dérées. Parmi les cultures qui favorisent l’érémacausis, il faut citer en première ligne celles où les plantes sont largement espacées et où le sol est ameubli pendant la saison de végétation, telles que les plantes sarclées qui, on l’a vu plus haut, économisent relativement le mieux 252 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. la réserve d’eau du sol et permettent le plus fort échauffement de la zone ameublie. Par suite de ces circonstances favorables, la décom- position des matières organiques est à son maximum dans le sol arable et dans les limites déterminées par la couverture vivante ; alors, conformément à ce qui a été dit sur la température et l’humi- dité, viennent, par ordre décroissant, les céréales, les légumineuses à vie courte et à tiges couchées (pois, vesce), celles à tiges dressées et à vie plus longue (féverole, haricot nain), et ce sont les sols oc- cupés par des plantes vivaces (trèfle, sainfoin, luzerne, gazon) qui accusent la plus grande lenteur dans la décomposition de leurs élé- ments organiques, non seulement à cause de leur faible taux d’eau et de leur basse température, mais aussi parce qu’ils ne sont soumis à aucune manipulation tant que la récolte n’est pas faite. Dans les sols de prairie ou de forêt constamment garnis de végé- taux vivants, l’érémacausis est bien plus lente que dans les champs qui, au bout d’un certain temps, sont destinés à de nouvelles cul- tures et par suite ameublis. Dans les sols forestiers, à l’action des ar- bres vient s'ajouter celle de la couverture qui agit moins par les modifications de humidité du sol que par celles de la température. Comme on l’a déjà montré (voir p.237), cette température s’abaisse encore plus lorsque intervient l’action du couvert exercé par les arbres. Pour ces motifs, les matières organiques, toutes circons- tances égales, se décomposent bien plus lentement dans les sols forestiers que dans les sols agricoles. L'influence des végétaux forestiers dépend essentiellement de leur âge, de leur consistance et de l’épaisseur de la couverture. Dans le jeune âge, où le couvert est faible ainsi que l'absorption d’eau, les réactions se font encore assez bien; mais elles vont en diminuant constamment à mesure que les arbres se développent; elles attei- gnent leur minimum d'intensité quand le massif est bien plein et que le sol est garni d’une couverture plus ou moins épaisse. Plus tard, les conditions redeviennent plus favorables, parce que les arbres à un âge avancé transpirent moins et tirent donc du sol moins d’eau que dans l’âge moyen (voir p. 243). La densité du peuplement, qu’elle soit due à la nature ou à des moyens artificiels, a naturellement, tout comme son âge, sur les dé- | PO x ASE " 2 bd DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 293 compositions qui se passent dans le sol, une influence prononcée. Plus les arbres sont serrés et puissamment développés, plus l’humi- dité et la température du sol diminuent el par suile aussi l'intensité des réactions. Toutes les mesures tendant à établir un état plus clair du peuplement (éclaircie forte ou faible, ébranchement, etc.) provoquent dans la décomposition une augmentation proportion- nelle à l'excédent de chaleur et d'humidité qu’elles amènent dans le sol. On peut se rendre compte de la mesure dans laquelle la couver- ture, suivant son épaisseur, influe sur l’érémacausis en se rappelant qu'avec l'accroissement de cette épaisseur s’accroit aussi l'humidité du sol, d'autant que diminue son évaporation directe, mais que cette influence est plus ou moins balancée par le meilleur développement des végétaux forestiers dû à cette augmentation de la couverture : aussi faut-il prendre presque exclusivement en considération la dimi- nulion qu’elle amène dans la température du sol. Étant données les relations bien connues de ce facteur avec les processus de décompo- sition, il n’est pas difficile de répondre. Si les matières organiques contenues dans le sol forestier se dé- composent lentement, celles qui se trouvent à sa surface, dans la couverture, se trouvent dans des conditions bien plus favorables puisqu'elles sont exposées à l'air et peuvent s’oxyder énergiquement. Cependant, les réactions y sont moins intenses que dans les champs à cause du taux d’eau généralement très grand qui diminue d’autant l'aptitude à la décomposition, à cause aussi de la faiblesse de l'échauf- fement tenant au couvert des arbres. Suivant le degré de cette dernière influence, l’érémacausis s’exer- cera avec une activité variable, moindre quand le massif est fermé, plus grande quand il est clair et cela tant qu’il y aura dans la masse une humidité suffisante ; elle n’aura lieu que dans une faible mesure si, par suite de circonstances particulières de température, la cou- verture perd par évaporation de grandes quantités d’eau. C’est dans le sol des prairies que la décomposition va le plus len- tement parce qu’en raison de la présence en masse des racines du 1. Forschungen, etc., vol. X, 1887, p. 428-446. 254 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 4 gazon dans les couches superficielles, en raison de l’affluence de » l’eau dans les couches profondes, l’accès de l’air est très limité et la température du sol est basse. Aussi, les réactions y sont moins actives que dans le sol forestier plus sec où les racines s’enfoncent plus pro- fondément et ne sont pas si accumulées dans la zone superficielle ; généralement même la décomposition s’y fait suivant un mode qui doit rentrer dans la putréfaction. Dans les sols marécageux, tels que les tourhières constamment gorgées d’eau jusqu’à la surface, c’est la putréfaction seule qui inter- vient à cause de l’absence complète d’air. L'influence des diverses formes de la végétation sur la nitrification doit être discutée à part, puisqu'elle amène quelques particularités dans ce processus. Le sol agricole, fréquemment travaillé, nitrifie toujours et d’autant plus énergiquement que les plantes absorbent moins d’eau el abaissent moins la température. C’est bien certainement dans le sol garni de fourrages vivaces que la nitrification est la plus faible ; elle peut même être complètement interrompue, si le sol laissé en friche assez longtemps n’a qu’une faible perméabilité, et se trouver remplacée par la dénitrification. Les conditions nécessaires à la nitrification ne se rencontrent gé- néralement pas dans les sols de forêts, de prairies et de tourbières, puisqu'ils ne possèdent pas d'organismes nitrifiants, comme nous l'avons montré plus haut. Leur alimentation azotée doit donc être autre que celle des plantes agricoles qui utilisent principalement les nitrates du sol. Les cultures des graminées dans des solutions nutritives ne conte- nant, avec les autres sels minéraux, que de l’ammoniaque ont montré que ces plantes pouvaient absorber l'azote sous cette forme ; elles se développent aussi bien que si l’azote leur est donné en nitrate’. Il peut en être de même pour les arbres forestiers, comme le fait pres- sentir ce fait qu'on trouve dans leur sève de certaines quantités de sels ammoniacaux ”, Outre l'alimentation par les sels ammoniacaux, il y a aussi à envisager pour les plantes en question la possibilité de 1. E. Bnéar, Annales agronomiques, t. XIX, 1893, p. 274-293. 2, E. Evenwaven, Allgemeine Forst- und Jagdzcilung, août 1858. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 299 se nourrir à l’aide des éléments organiques azotés du sol. Il est vrai qu’on a jusqu'alors admis que les plantes supérieures vertes élaient réduites, pour satisfaire leurs exigences en carbone et en azote, à l'acide carbonique de l'air, aux nitrates et aux sels ammoniacaux et qu’elles étaient incapables d'utiliser dans ce but les matières orga- niques ; mais diverses observations récentes rendent très vraisem- blable l’utilisation de ces matières pour la construction de leurs tissus, utilisation qui peut être directe (graminées), ou indirecte par le concours des mycorhizes (arbres forestiers) *, revêtement de mycélium entourant les radicelles (I° partie). Pour lalimentation azotée des graminées et des arbres forestiers, les combinaisons amidées, qui se trouvent en assez grande quantité dans les sols de prairies ou de forêts, semblent jouer un grand rôle ; d'après les ob- servalions de A. BAUMANN *, l’ammoniaque qui se dégage de ces sols sous l’action d’une lessive de soude peut dépasser de 10 à 20 fois le taux réel d'ammoniaque du sol. (Voir Note D : Sur l’absorption des matières hydrocarbonées et azotées par les plantes.) 4. — Eau. Bien que dernièrement, pour décider si l’on pouvait jeter les ma- tières fécales dans les cours d’eau, on ait fait de nombreuses obser- valions sur ce que deviennent les matières organiques dans l’eau, on n’est pourtant pas encore arrivé à des résultats qui puissent être généralisés, et cela parce que d’abord on n’a pas soumis la question à une recherche systématique tenant suffisamment compte de toutes les circonstances accessoires, et qu’ensuite on a souvent, en vertu d’idées préconçues, laissé de côté les résultats de recherches faites isolément sans liaison entre elles. Dans ces conditions, on ne doit pas s’étonner que les idées de ceux 1. E. BRÉAL, Annales agronomiques, t. XX, 1894, p. 353-370. 2. À. B. Frank, Berichle der deutschen botan. Gesellschaft, vol. IT, 1885, p. 128; vol V, 1887, p. 359 ; vol. VI, 1888, p. 248-269. 3. À. BaumaxN, Ueber die Beslimmung des im Boden enthallenen Ammoniak- sticksloffs und über die Menge des assimilirbaren Stickstoffs im unbearbeiteten Boden. Habilitationsschrift, 1886. 2356 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. auxquels incombe, par devoir professionnel, la tâche de pénétrer les phénomènes soient jusqu'alors si divergentes. En présence de ces lacunes, il faut chercher jusqu’à quel pointes règles développées jusqu'ici peuvent être utilisées pour jager la question de l’état des matières organiques dans l’eau et surtout, puisque c’est le but de ce livre, au point de vue des intérêts de l’agriculture. D'abord, en l’état actuel de nos connaissances sur les phénomènes de décomposition en général, abstraction faite des détails, on peut affirmer que toutes les matières organiques des eaux sont beaucoup moins aérées que celles des autres stations, à l’exceplion des sols marécageux. Cet accès limité de Pair doit avoir pour conséquence que l’érémacausis des malières organiques dans l’eau est non seu- lement restreinte, mais souvent remplacée par leur putréfaction, c’est-à-dire par ce processus qui entrave plus ou moins la volati- lisation des matières organiques et favorise leur accumulation en masse. Dans quelle mesure lun ou l’autre de ces deux processus essen- tiellement différents l'emporte dans un cas donné, cela dépend évi- demment des circonstances extérieures, surtout du degré d’accès de l'air, puis de la quantité et de la répartition des matières organiques dans l’eau et aussi de l’utilisation de ces substances par les animaux et les plantes aquatiques. Les quantités d'oxygène que l’eau renferme sont déterminées par celles qui y sont reçues et celles qui y sont utilisées. Il est clair que, pour une eau donnée, l’arrivée de l'air est plus grande dans les couches supérieures que dans les couches pro- fondes parce que les premières sont plus près de l'atmosphère et que les courants verticaux sont très lents dans l’eau et assez souvent nuls surtout par les fortes chaleurs. Les éléments organiques en suspension se trouvent donc dans des conditions d’érémacausis plus favorables que ceux des zones profondes ou ceux qui gisent sur le fond où, en général, la putréfaction remplace l’érémacausis. Ce processus par putréfaction doit naturellement, toutes circonstances égales, s'étendre d'autant plus que la couche d’eau est plus épaisse. A hauteur égale de lame d’eau, sa vitesse d'écoulement et son DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 297 mode de mouvement ont une grande influence sur la quantité d’air absorbée et par suite sur la décomposition des matières organiques. Dans les eaux stagnantes (viviers, étangs, lacs), l'agitation de l’eau est faible et n’est produite que par les vents dont l’action est en gé- _néral proportionnelle à la surface de l’eau. Dès lors, il y a peu de matières organiques en suspension puisqu'elles peuvent aisément se déposer dans ces eaux tranquilles où elles forment avec les cadavres des animaux et les débris des plantes aquatiques une couche pius ou moins épaisse de limon. Les éléments organiques n’y sont sou- mis qu’à la putréfaction qui utilise complètement en outre la faible dose d'oxygène de l’eau. Ce qui montre clairement que ce processus intervient seul dans les circonstances données, ce sont les pratiques suivies dans l’exploitation des étangs. Par une longue stagnation, l’eau y devient de moins en moins favorable à l’éducation du pois- son, qui ne peut se passer d'oxygène. Aussi, dans une exploitation rationnelle ‘, adopte-t-on la règle de n’utiliser les étangs pour la pro- duction du poisson que pendant un certain temps et d’en cultiver le fond pendant quelques années afin de se débarrasser des dépôts qui y sont accumulés. De plus, la grande résistance qu’offrent, comme on sait, à la dé- composition les matières organiques enfouies dans la vase des étangs indique bien encore qu’elles se sont formées par le mode de la pu- tréfaction. Les eaux courantes (ruisseaux, rivières, fleuves) absorbent de bien plus grandes quantités d'oxygène que les eaux stagnantes et d’aulant plus qu’elles sont plus rapides et se mélangent plus intime- ment à l'air. L’eau courant sur un fond lisse incorpore toujours moins d’air que celle qui cascade sur des obstacles ou qui devient écu- meuse en heurtant des piles de pont ou en rebondissant sur les pierres de son lit. La proportion dans laquelle l'air dissous dans l’eau ou qui lui est mécaniquement mélangé est utilisé pour l’oxyda- tion des matières organiques dépend, dans les eaux courantes, de la 1. Comme celle du domaine du prince de Schwarzenberg à Wittingau, en Bohême, qui est placée sous la direction de M. Scsra, si compétent dans la théorie comme dans la pratique de l'élevage du poisson. MATIÈRES ORGANIQUES. 17 - 258 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. composition, de la quantité et de la répartition de ces matières. Celles qui ont une densité suffisante gagneront le fond et se rassem- bleront dans les points où la vitesse de l’eau sera moindre. Au lieu de l’érémacausis, elles subiront la putréfaction, surtout si la couche d’eau est assez épaisse. Les circonstances seront bien plus favorables à la décomposition, les matières organiques seront plus énergique- ment oxydées si elles sont finement pulvérisées et restent en suspen- sion, ne pouvant vaincre la poussée de l’eau. Dans ces conditions, si l'air est dissous dans l’eau en assez grande quantité, tous les éléments organiques soit dissous, soit en suspension, sont rapidement et complètement oxydés, en admettant qu’il n’y en ait pas trop relati- vement à la masse aqueuse et que les matières soient par elles-mêmes facilement décomposables. Pour le premier point, on peut d’abord affirmer qu’il n’y a pas de limite déterminée, valable pour tous les cas, puisque nous avons montré que l’action oxydante de l’eau est très inégale. Quant au second point, il ne faut pas perdre de vue que toutes les matières organiques animales se décomposent bien plus facilement que celles d’origine végétale. La composition chimique de l’eau a parfois aussi une action non négligeable sur la destruction de ces matières. Les eaux très cal- caires forment des agrégats : les matières en suspension s’agglomè- rent en grumeaux qui tombent au fond en formant des dépôts. Les carbonates alcalins favorisent la précipitation des particules entraïnées mécaniquement et la formation de dépôts épais de limon. Si les eaux contiennent des substances qui Luent les micro-organismes in- tervenant dans la décomposition, comme il arrive lorsqu'on jette dans les rivières les eaux résiduaires de certaines industries, les réactions cessent et ne reprennent que quand les malières toxiques ont été suffisamment diluées. Enfin, il y aurait encore à examiner la participation des animaux et des végétaux aux phénomènes en question. Les animaux emprun- tent à l’eau l'oxygène nécessaire pour leur respiration et dégagent de l’acide carbonique ; ils nuisent donc aux réactions oxydantes de l’eau. Les plantes aquatiques vertes décomposent l'acide carbonique et dégagent de l'oxygène ; mais, la nuit, elles se comportent comme les animaux. Suivant la proportion dans laquelle les organismes en DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE. 299 question et les éléments putrescibles existent dans l’eau, son taux d'oxygène sera plus ou moins influencé. En embrassant d’un coup d’œil les facteurs qui viennent d’être décrits, on ne peut nier que, dans des conditions favorables, l’oxyda- tion n’atteigne une intensité qui va jusqu'à produire la volatilisation complète de la matière organique et à déterminer cette propriété de certaines eaux connues en hygiène comme s’épurant d’elles- mêmes. Vouloir de cette observation tirer la conclusion que cette pro- priété est l’apanage de tous les cours d’eau sans exception serait aller contre tous les faits connus jusqu'ici sur les conditions de la décomposition des matières organiques ; bien plus, on doit penser que, pour beaucoup d’eaux, on ne peut admettre l'hypothèse d’une puissante oxydation et la décomposition s’y fait dès lors suivant le mode de la putréfaclion. Nous ne pouvons clore ce chapitre sans indiquer que les pro- cessus de décomposition dans les eaux sont naturellement liés à l’in- tervention d'organismes inférieurs (champignons) [voir p. 117]. Il n’est euère admissible que des algues y contribuent d’une manière notable, comme on l’a maintes fois soutenu dernièrement, parce que ces végétaux n’existent qu’à l’état disséminé dans les eaux cou- rantes, surtout dans celles qui s’épurent d’elles-mêmes, et ne peuvent dès lors influer directement sur la destruction des matières orga- niques. Le fait que les algues aient la faculté d’absorber les matières organiques et de les utiliser pour leurs tissus ne peut guère modifier notre opinion sur la « purification des eaux par les algues »: car la quantité d'éléments extraits de l’eau par ce procédé est en tout cas faible et retourne à l’eau après la mort de ces organismes. On peut en dire autant des végétaux supérieurs à chlorophylle vivant dans l’eau. DEUXIÈME PARTIE PRODUITS DE DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES ES" FUMEUS CHAPITRE I FORMATION DES HUMUS Il résulte de ce que nous venons dire sur la décomposition des matières organiques que leurs principes élémentaires se volatilisent en quantités et formes variables suivant les circonstances extérieures. Mais cette volatilisation n’est pas complète, si bien que, même dans les conditions favorables, il reste un résidu solide formé de matières organiques enfermant une partie des principes minéraux, ce résidu est l’humus, substance amorphe, généralement de teinte foncée, qui n’a pas de composition chimique définie, puisqu'elle est soumise à d’incessantes modifications et qui, dès lors, ne peut s’apprécier que par les caractères extérieurs. Quant aux dépôts d’humus, il y a d’abord deux cas à distinguer suivant que les matières organiques se trouvent ou non en présence de l'air. Dans le premier cas (érémacausis), c’est la volatilisation qui domine et le dépôt d’humus s’y fait en quantité bien moindre que dans le second (putréfaction) où, cæleris paribus, la formation de 262 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. produits gazeux se réduit et celle de composés solides, peu ou pas volatils, augmente. C’est ainsi que l’humus s'accumule en pro-« portion beaucoup plus faible dans les lieux où se trouvent réunies les condilions de l'érémacausis que dans ceux où les matières orga- niques sont soumises à la putréfachion. Entre ces limites on constate des différences plus ou moins grandes tenant aux circonstances extérieures el à certaines propriétés des substances à décomposer. Partout où, avec de l’air en suffisance, un laux moyen d’humi- dité et une température assez élevée provoquent une puissante érémacausis, l’humus ne se forme qu’en minime quantité ; dans tous les cas où l’un des facteurs importants pour l’oxydation tombe au minimum, la volatilisation de la matière organique subit une diminution correspondante, compensée par l'augmentation corré- lative des résidus solides de la décomposition. Le climat, la tem- pérature, la composition du sol, etc., ont aussi de l’influence sur les dépôts d’humus. Leur épaisseur est faible, toutes choses égales d’ailleurs, dans un climat humide et de température constante ; elle est très importante dans les régions plus froides. La chaleur favorise l’érémacausis seulement s’il y a une humidité suffisante ; sans quoi, malgré la température favorable, la décomposition est si faible, que la matière organique reste longtemps presque sans changement. Aussi, les agriculteurs des régions arides de la Cali- fornie, par exemple, sont obligés de fabriquer d’abord des com- posts avec la paille et le fumier pailleux avant de mettre ceux-ci dans les champs’. De cet exemple et de bien d’autres il ressort clairement que les conditions climatériques essentielles exercent les unes sur les autres des actions réciproques variées dont la résul- tante se manifeste dans la diversité des dépôts d’humus. En géné- ral, on peut admettre (et cela est confirmé par l'observation) que l'accumulalion des matières humiques croit avec l’abaissement de La lempérature, mais celle influence est modifiée par l'humidilé des lieux considérés. Le sol a, comme le climat, des rapports très variables avec les 1. E. W. Hixcano, Forschungen, elc., vol. XVI, 1893, p. 103. FORMATION DES HUMUS. 263 phénomènes en question. Plus est grande sa perméabilité, moins les matières humiques peuvent s’y accumuler, en supposant qu’il renferme des quantités d'humidité suffisantes pour l’érémacausis. Si ce n’est pas le cas, la matière organique ne se décompose que lentement en laissant un résidu assez abondant ; c’est ce qui arrive sur les sols à grain très fin, parce que la quantité d’air qu'ils ren- ferment est insuffisante, dans les conditions ordinaires, pour une eremacausis active. Quelquefois même l'air y peut être si rare que la matière organique se décompose par le mode de putréfaction et s’accumule dès lors en couches épaisses. Il y a tous les degrés entre ces extrêmes suivant la perméabilité des sols, et ces degrés sont re- présentés par des formes très variées, parce que la qualité dont nous parlons, quoique la plus importante, n’est pas la seule qui influe sur l’érémacausis. Vouloir entrer plus avant dans les processus qui résultent de l’action de tous ces facteurs, tantôt concurrents, tantôt antagonistes, entrainerait des longueurs qui peuvent d’autant mieux être évitées qu'il n’y a aucune difficulté à se faire une opinion sur la question en se référant à la loi citée plus haut (voir p. 205) et aux exemples qui ont élé brièvement rapportés ici. = Pour laccumulation des produits de la décomposition qui se fait en l’absence de l'air, la température a une importance parti- culière. Sous les tropiques, avec une insolalion continue, la fer- mentalion peut aller si vite, qu’il n’y ait pas de couche d’humus en quantité un peu considérable. Avec l’abaissement de la température suivant la latitude ou l'altitude, les produits de décomposition vont en augmentant, formant des couches de plus en plus puissantes de matières organiques en putréfaclion. Outre les influences en question, la quantité de la matière orga- nique produite dans les diverses circonstances locales et son altéra- bilité pèsent ici d’un grand poids. Plus les conditions naturelles sont favorables à la végétation, plus grande est la masse de subs- tance végétale produite, et inversement. C’est pourquoi, par exem- ple, il se forme plus d’humus dans les régions humides que dans les pays arides où, par suite du manque d’eau, les plantes ne fabri- quent qu’une pelite quantité de matière végétale. Ceci ressort net- 264 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tement des recherches de E. W. Hizcarp’ qui, dans les sols les plus divers de la Californie, a trouvé pour les zones humides ou sèches les quantités moyennes suivantes d'humus (matière noire de Grandeau) * : Taux moyen d'humus du sol pour 400. RÉGION ARIDE. RÉGION HUMIDE. © — Plaines. Collines. 3,04 0,99 0,75 De même, pour tous les autres cas, la formation de lhumus, toutes circonstances égales, est déterminée par la puissance de pro- duction des plantes, en ce sens que la proportion de résidus incor- porés au sol varie avec sa fertilité. Ce qui a été dit plus haut (voir p. 164) peut servir à déterminer dans quelle mesure l’altérabilité des matières organiques influe sur les dépôts d’humus. D’une manière générale, l’érémacausis est beaucoup plus complète pour les matières animales, à l'exception des parties cornées el chitineuses, que pour les produits végélauæ. Ceux-ci présentent à leur tour de grandes différences suivant leur taux en principés albuminoïdes et suivant leurs diverses propriétés physiques. Les parties sèches des plantes se décomposent plus len- tement que les parties vertes, les pailles des légumineuses plus vite que celles des céréales et celles-ci, à leur tour, plus vite que les arbres feuillus et résineux; vient ensuite le bois, et de toutes les matières végétales employées en agriculture c’est la tourbe qui se décompose le plus lentement, {ous les produits de la putréfaction parmi lesquels on comple la tourbe se distinguant par leur exlraor- dinaire fixilé, méme dans le cas où ils sont soumis aux conditions de l'érémacausis. Enfin, pour un seul et même sol, l’enrichissement en humus dépend de son mode d'exploitation. Les cultures où le sol est occupé longtemps ou toujours par les plantes (fourrages vivaces, prairies, forêts) présentent sous ce rap- 1. Forschungen, elc., vol. XVII, 1894, pp. 478-485. 2, Voir plus loin. |: 5 Che FORMATION DES HUMUS. 265 port une grande différence avec celles où la durée de végétation des plantes cultivées est courte. Dans le sol agricole travaillé, malgré l’adjonction d'engrais organiques, l’humus est en bien plus faible quantité que dans les terrains de même composition, constamment garnis de végétation (prairies, forêts), le premier réalisant, à un bien plus haut degré, les conditions requises pour une active dé- composition. Les sols nus, soit travaillés et fumés, soit en friche et non fumés, subissent à la longue une diminution dans leur taux d’humus par volatilisation d’une partie de leur matière organique, tandis que le sol garni de plantes pérennes (prairies, forêts), grace aux restes de racines mourant chaque année et ne se décomposant que lentement, compense ainsi son appauvrissement ou même s'en- richit constamment. Relativement à l’action des cultures sur le taux d’humus des sols nous possédons de nombreux documents, avec chiffres à l’appui, fournis surtout par J.-B. BoussinGauzr, TrucnoT', H. JouriE”, J.-B. Lawes et J.-. GILBERT *, P.-P. DEHÉRAIN * el moi. P.-P. DERNÉRAIN, qui a fait sur cette question des recherches approfondies, a dosé l’azote et le carbone dans quatre parcelles qui avaient reçu, de 1875 à 1877, des engrais à doses massives et qui, dans les quatre années suivantes (1878-1881), avaient porté sans fumure diverses récoltes. Les analyses, faites en 1878 et en 1881 après la quatrième récolle, ont donné les résultats suivants : Taux de carbone du sol (en grammes par kilogramme). Fumure précédente : FUMER: butée d'anipntaque, ETES: Maiïs-fourrage : RSS 0. ENT SE 12 15,2 EN ÉCRSER 8,0 ul » 16 1. Annales agronomiques, t. 1, 1875, p. 35. 2. Revue des Industries chimiques et agricoles, 1. V, 1881, pp. 350-370. 3. Ann. de Chim. et de Phys., série 6, t. Il, p. 511, et Journ. of the Agric. Soc. of England, vol. XXV, part. I. Londres, 1889. 4. Annales agronomiques, t. VIII, 3° fase., 1882, pp. 321-356, et t. XII, 1°" fase., pp. 17-24. 266 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. n NITRATE SULFATE Fumure précédente : UMÈRR. de soude. d’ammoniaque. Pommes de terre (2 années), puis céréales (2 années) : 1OTS NN. AE 14,6 17,0 ET RE » 8,8 » Sainfoin : à ASTD Rec 13,4 1290 » 12,9 Î 1SSI Te em te 12,2 254 » 13,3 ' Taux d'azote du sol (en grammes par kilogramme). Mais-fourrage : 18784 pare 2,01 1,79 1:68 1,67 1 HSAETR SL LA 1,68 1,45 1,62 1,45 Pommes de terre (2 années), puis céréales (2 années) : STORES 2,08 1,78 1,74 1,74 LS TE SIM 1,69 1,67 1,54 1,69 Sainfoin : EURE PTE 1,50 1,50 1,51 1,46 LAB ee 1,65 1,52 1,56 1,50 Dans une seconde expérience, le même auteur a cherché à déter- miner l’action du gazon succédant à celle du sainfoin, et il a obtenu les chiffres intéressants qui suivent : Taux d'azote du sol par hectare (en kilogrammes). nn FUMÉ en CULTURES. a ie Rs den NON FUMÉ. échantillons. re a Luzerne, 1870-1875. . . 1875 7 854 7 854 Betteraves, 1871-1877. . 879 D 713 5 621 Mais-fourrage, 1878. . MATE Sainfoin, 1879-1881. . . 1881 6 352 5 775 Sainfoi 2-1 5m ainfoin, 1882-1883 | 1885 Gg14 6 352 Gazon, 1884-1885 . . . À LAWESs et GILBERT sont arrivés à des résultats semblables : ils ont trouvé que le sol cultivé (champ d’orge) était moins riche en car- bone et en azote que le sol garni de plantes vivaces. FORMATION DES HUMUS. 267 L'action des diverses cultures sur l’enrichissement du sol en ma- tière organique s’est montrée plus nette dans mes expériences". 5 caisses percées en dessous, ayant 2 mètres carrés de surface et 0,50 de hauteur, en fortes planches, furent enfoncées dans le sol (essai I); dans l’essai Il, 5 lysimètres de même dimension furent, au printemps de 1886, remplis identiquement de sable calcaire con- tenant de l’humus. à épicéas de cinq ans, aussi égaux que possible, furent plantés de la même façon dans chacune des cases A et B. La case C reçut 5 plants de bouleau du même âge, la case D fut gazon- née el la case E resta nue. Sur la case B, après la plantation (prin- temps 1886), on répandit en couverture des aiguilles d’épicéa sur 10 centimètres de hauteur jusqu’au printemps de 1889 ; après, on mit une couverture de mousse de même épaisseur. Au printemps de 1892 pour les caisses en bois et à l’automne de 1893 pour les lysimètres, on ôla les couvertures et dans chaque case on prit, au moyen d’une sonde et jusqu’au fond, environ 100 échan- tillons qu’on mélangea et tamisa avec le plus grand soin. On déter- mina le taux de carbone par combustion avec l’oxyde de cuivre et celui d'azote par la méthode de Kjeldahl. Voici les résultats obtenus : Taux centésimal de carbone du sol séché à 1052. A. B. GC. D. E. ÉPIOÉAS ÉPICÉAS sans avec BOULEAUX. GAZON. SOL NU. couverture, couverture. Essai L . 2,313 2,844 2,103 2,879 1,578 HISSATATees : D 20) 2,878 2,399 2,918 1,857 Taux centésimal d'azote du sol séché à 1052. Essai IL. . 0,245 0,269 0,231 0.275 0,213 Essai II. . 0,257 0,273 0,259 0,305 0,217 On voit par ces chiffres que les sols pourvus de végétation étaient, après six ou sept années, sensiblement plus riches en carbone et en 1. Forschungen, etc., vol. XIX, 1896, pp. 161 et 165. 268 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. azote que le sol nu. Ges différences tiennent à ce que le sol nu subit une perte en matière organique par suite de sa destruction, tandis que le sol planté, où cette destruction est moindre et large- ment compensée par les racines qui meurent chaque année, s’enri- chit, au contraire. C’est ainsi que le taux élevé de carbone et d'azote du sol planté comparé à celui du sol nu accuse, au profit du pre- mier, un enrichissement en ces deux éléments *. Il est à remarquer que le sol gazonné et le sol portant des épicéas avec couverture montrent une plus forte augmentation en matière organique que le sol planté en bouleaux ou bien en épicéas sans couverture. Cela tient probablement à ce que le gazon laisse plus de racines et à ce que les épicéas se développent plus vigoureuse- ment grâce à la couverture (c'était le cas en effet”), et renferment dès lors, dans leur système radiculaire, plus de matière organique qu'il ne s’en forme dans la case sans couverture. En examinant de près les résultats des expériences précédentes, on voit clairement que la lerre qui est cullivée tous les ans s’appau- vrit en substance organique, quelle que soit l'addition de fumier ; cel appauvrissement prend fin et le sol s'enrichit quand on cesse de travailler le sol et qu'il est occupé par des plantes vivaces. Sauf en ce qui concerne l’azote, dont il sera parlé dans la troisième partie, ce fait lient en général à ce que les plantes agricoles à vie éphémère ne laissent dans le sol que peu de racines, et qui se détruisent beaucoup plus vite, vu la perméabilité du sol et l'accès facile de l'air, que dans le cas où le sol est garni de végétation d’une manière permanente. L'action exercée à ce point de vue par les diverses cultures offre des degrés variables suivant le développement, la densité et la durée de végétation des plantes. Plus celles-ci sont serrées et puissamment développées, plus leur végétation est longue, plus considérable aussi, en général, est le dépôt d’humus, parce que les résidus augmentent 1. L'enrichissement réel n'aurait pu se mesurer que si l'on avait déterminé les taux de carbone et d'azote des sols avant l'installation des expériences. Cela n'a pas été fait, parce que les essais en question avaient d'abord un autre but et qu'on ne pré- voyait pas de modifications dans la composition du sol. 2. Forschungen, elc., vol. XVII, 1894, p. 179. FORMATION DES HUMUS. 269 dans la même proportion et que diminuent d'autant les conditions favorables à une intense érémacausis (voir p. 234 et 242). Dans les cultures où l’enrichissement du sol en humus se fait sur la plus grande échelle, il s’'apprécie d’après les facteurs précédents, et aussi d'après certaines particularités des végétaux et du sol. Les arbres forestiers, qui enfoncent leurs racines dans le sol à de grandes profondeurs, étendent leur influence bien plus loin que le gazon dont les organes souterrains n’occupent que les couches su- perficielles qu’elles enrichissent à peu près exclusivement. Dans des stations modérément humides, le dépôt d’humus se fait plus vite que dans les lieux très humides, l’érémacausis se fait plus activement dans le premier cas que dans le second, où l’accès de l'air est plus ou moins entravé par la trop forte proportion d’humi- dité du sol. C’est pourquoi les prés hauts sont moins riches en humus que les prés bas. Comme l’augmentation du taux d’humus est liée à une semblable augmentation dans la faculté d’imbibition du sol, on comprend que pour les prairies, qui se trouvent déjà na- turellement dans des lieux humides, le taux d’eau du sol puisse devenir tel que l'air n’y puisse plus du tout pénétrer et que la masse d’humus accumulée en ces points soit dès lors soumise aux processus de la putréfaction. … Dans les forêts, l’humus se forme non seulement dans, mais sur Je sol ; les feuilles et les aiguilles tombées, la mousse dans les peu- plements de résineux, sont soumises à l’érémacausis, qui est plus ou moins rapide, suivant l'intensité du couvert. Dans les forêts aux- quelles on laisse leur couverture, il se produit à la surface une couche plus ou moins épaisse d’humus, parcourue par une partie des racines des arbres, et portant une végétation basse des plus variées. Dans les forêts, la production de l’humus est généralement plus abondante à la surface du sol que dans son intérieur, parce que la quantité des racines qui meurent chaque année est bien plus faible que celle des feuilles qui tombent. La proportion suivant laquelle se fait en forêt l’accumulation d'humus dépend naturellement de plusieurs influences extérieures *. 1. E. Epenuayer, Die gesammile Lehre der Waldstreu. Berlin, 1876, p. 205. 270 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Dans les massifs pleins d’âge moyen, il s’en forme plus que dans les - vieux massifs ouverts et sur le retour. Dans ceux à couvert épais … (hêtre, épicéa, sapin), il y en a plus que dans ceux à couvert léger (chêne, pin, mélèze). L'exploitation en futaie avec massifs pleins longtemps maintenus doit être plus favorable à la production de l’humus que l’exploita- tion en taillis sous futaie, laquelle vaut mieux à son lour que celle en Laillis simple, où le sol reste nu assez souvent, à de courts inter- valles. Le régime de la futaie est donc le plus propre à améliorer le sol forestier. Si, dans l’espace d’une révolution (cent à cent vingt ans), on n’a pas enlevé la couverture, on peut être sûr que même un mauvais sol est transformé en un sol forestier substantiel. Les montagnes favorisent plus que les plaines le dépôt d’humus; les versants exposés au nord et à l’ouest, les cuvettes et les dépressions sont d'ordinaire plus riches en humus forestier que les versants qui regardent le sud et l’est et que les endroits exposés au vent où les feuilles sont constamment enlevées. Dans les vides, dans les coupes à blanc étoc, dans les peuplements clairiérés, dans ceux exploités à courte révolution ou qui sont sur le retour, se montrera bientôt la pauvreté en humus. Enfin, à autres conditions égales, les sols argileux doivent être plus riches en humus que les sols cal- caires ou sablonneux. On comprend, d’après ce que nous venons de dire, que le taux d'humus des sols varie extrêmement et peut passer par toutes les valeurs possibles. Pour désigner les sols d’après leur taux d’humus, il sera bon d’adopter les termes de W. Knop’, qui a distingué les catégories suivantes ? : 0 — 2,5 pour 100 d'humus : sol pauvre en bumus. 2,5 — 5 — sol humifère. > — 10 — - sol humique. 10 — 15 — sol riche en humus. > 15 — sol excessivement riche en humus. 1. W. Knop, Die Bonilirung der Ackererde. 1871, p. 67. 2, J'ai abaissé à 2.5 p. 100 les limites des deux premières catégories que Knor avait fixées à 3 p. 100. FORMATION DES HUMUS. 271 Les chiffres suivants *, rapportés à la matière séchée à l’air, donnent une idée du taux d'humus de quelques sols : O1 me C2 12 HUMUS p- 100 Sable dieux. vignoble (d'après Frey). MN LMD Sol de désagrégation du lias, sol arable fertile (d un er}, SUR 0,628 Sol de désagrégation du grès liasique, de Hohenheim (d'après E. W Ft (05325 Sable pur de Lauenbourg, sol d'une très faible fertilité (d'après W. Kwor). 0,930 Sable argileux humique, surface d'un diluvium marneux, de Rixdorf près Berlin (d'après Ernst ScauLz). à CRAN OREU IE ES 130 Même sol, de Friedenau près Berlin Dites Ernst Sauna): SD Ut 1,230 Bon sol à blé et trèfle, de Bockwa près Zwickau (d'après Knor) . . . . 1,350 Lehm sableux, sol arable, de Mückern (d'après Knor). . . . . . . . 1,410 Excellent sol à blé et trèfle, de Mattstedt près Apolda (d'après Knor). . 1,750 Sol de lüss, Langenweddingen (Magdebourg). d Lo SONÉE 108 Diluvium sableux, pineraie, Eberswalde (d'après W. Sedtres}e 0,555-1,825 Argile rouge compacte, alluvion, Rossla dans le Harz . 2,044 Lehm, alluvion de la Saale, Benkendorf. 2,080 Sol de désagrégation du calcaire liasique, Hohenheim (& _. E. W ) 2,091 Alluvion du Nil, sol arable du Caire (d'après Kwor). + ATSPEE Lehm sableux, nn de la désagrégation du grès rouge, près Ky fhäuser. 24214 Sol fangeux marneux, Tempelhof près Berlin (d'après WAHNSCHAFFE) . 2,470 Lehm sableux, On, RRÉPAUR e la eT nee Mets 27 d''ete DETI Lehm Se alluvion, Brodau en Donne) - 2,856 Argile alluviale de Kreudorf, provenant de basalte et de HN 2,883 Sable argileux, forêt de hêtres, Danemark (d'après TuxEn) . . . 1,120-3,040 Sol sablonneux, forêt de chênes, Danemark (d'après TuxEN). . . . . . 3.080 Sol sablonneux, terre de bruyère, Danemark (d'après TuxEx) . . . 0,34-3,300 D Hleux 105; Ferbenz. Bohême: :1. : - -.. . ... . .... : … 3,515 Lehm siliceux rouge, alluvion, Nordhausen . 3,929 Lehm compact, alluvion, Neuhof en Silésie . 3,973 Lehm humique, lôss, Ploscha, Bohême . RSS PER PRE MERE APE Grès bigarré, sol arable, Neuenburg, W ro n ee oi Argile d’alluvion, Prague. - 4,173 Sol syénitique, terre à betterave, Blanska: en es 5 4,270 Lehm humique, alluvion, jamais fumé, Gruszka, Galicie . = 4,845 Diluvium calcaire, Munich (terre fine, d'après Wouenv) . . . . 2,7— 5,031 1. Ces chiffres sont tirés d'un travail de W. Ozreca : Ueber den Humus und seine Bezichungen zur Bodenfruchtbarkeit, Berlin, 1890, et de quelques analyses faites par W. Scaürze (Zeitschrift fur Forst- und Jagdwesen, 1, p. 50, et II, p. 360), par C.-F.-A. Tuxex (S/udien über die nalurlichen Humusformen, par P.-E. Muzrer, Berlin, 1887), par M. FLeiscaer (Landw. Jahrbücher, 1890), par C. Scumior (Bal- tische Wochenschrift, 1880, n°% 25 et 26, et 1881, n° 10 et 11), par P. Kosryt- ScnEerr (The Soël, Chicago) et par moi. 212 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. HUMUS p:100. —— ] 33 Sol marécageux, Oldenbourg . Ft" AR CU ES NEO AD, 34 Sol des marais de l'Oder, alluvion, Kienitz A Eee AR | 35 Sol marécageux, taupinière, Oldenbourg. . . . . . . . . . . . . . 6,012 36 Argile d'alluvion, Prague . . . . RE 37 Sol noir de marais avec sous-sol me. PTE E. Noms Ses 6,535 38 Terreau de hêtre, Danemark (d'après TuxEN) . . . . . . . . . 5- me 8,330 39 Sol marneux de marais, alluvion récente, marais de Hopfen à Teltow (d'après WAHNSCHAFFE) . . . PR RE Em 40 Sol marécageux de Dollard, Rabnneu EE Pile 12,000 41 Terre noire de Russie, Tschernosem (d'après G. Scamir et P. RSS scnerr), ordinairement 8-10 p. 100 ; limites extrêmes. . . . 5,42-16,340 42 Tourbe de bruyère, Danemark (d'après TuxEN). . . . . . . . . . . 41,500 43 Tourbe de hêtre, Danemark (d'après TuxEN) . . . . . . . . 34,70-48,510 44 Tourbe de hêtre à forme de terreau, Danemark (a ner TUXEN) . . . . 62,500 45 Tourbe de marais de Môgsjükärret près Reijmyra, Suède (d'après V. Porté 73,051 46 Marais de bas-fond, Gunrau (d'après E. Wozzny). . . . . . 69,012-74,563 47 Marais de bas-fond, marais du Danube à Neuburg, Bavière (d'après E. WOnENT}. 5 2 NE RS NE OR CS RES En général, les matières humiques ne sont pas également répar- lies dans le sol, mais, à part quelques exceptions, elles vont en diminuant à partir de la surface. On l’a démontré expérimen- talement pour les sols forestiers comme pour la terre noire de Russie. Ainsi, C.-F.-A. Tuxen ‘ a trouvé dans des sols de forêts de hêtre: Essai I. TAUX D'HUMUS DU SOL POUR 100. Sol. Sous-sol. À A Couche Couche Couche Couche supérieure. inférieure. supérieure. inférieure. 2,67 1,23 0,31 0,29 Essai II. TAUX D’'HUMUS DANS LES COUCHES ÉLOIGNÉES DE LA SURFACE de de de de 4-8 pouces. 12-22 pouces. 27-38 pouces. 36-42 pouces, 1,35 0,55 0,22 0,21 1. TuxeN, dans P.-E. Mücrrer, Die nalürlichen Humusformen. Berlin, 1887, pp. 111 et 300, FORMATION DES HUMUS. 213 La distribution des matières humiques dans le tchernosem est la même, comme le montrent les chiffres suivants: A une 1 PROFONDEUR DE : 2 8 # 5 pouces. p. 100 p. 100 p. 100 p. 100 p. 100 OS Ti: 5,42 CS 9,29 9,64 10,11 Te : 4,83 5,19 6,23 7274 6,81 Mn 3,63 3,92 4,33 6,71 5,57 Mn: 2,56 2,84 2,20 5,61 4,36 2 L ASTTAEERNENSS 2,58 ab » 3,51 3,58 SISTER 1,88 1,47 » 3,18 1,93 LT ASSURE 1,29 0,51 » 1,56 » 2 Les prairies de l'Amérique du Nord et les pampas de l'Amérique du Sud, qui appartiennent aussi aux formations de terres noires, se comportent de même *. Tous les autres sols couverts d’une végéta- tion spontanée doivent accuser une semblable répartition des ma- tières humiques. Leur diminution, à partir de la surface, tient, sans aucun doute, à ce que les racines dont sont formées les matières organiques se développent d’autant plus abondamment qu’elles sont plus près de la surface et aussi à ce que les différences à ce point de vue sont incomparablement plus grandes que celles qui se rap- portent à la décomposition des restes de racines dans les diverses zones, décomposition qui s’accroit de bas en haut. 1. P. Kosryrscaerr, Annales de la Science agronomique, 1887, t. Il, pp. 165-191 ; en outre : G. Scawint, Ballische Wochenschrift, 1880, n° 25 et 26, 1881, n° 10 et 11. — W. DoxourcnaErr, Tschernozème de la Russie d'Europe. Saint-Pétersbourg, 1879. 2. Les formations de terres noires n'existent en Allemagne que sur quelques points de la Silésie et des environs de Magdebourg. MATIÈPES ORGANIQUES. 18 CHAPITRE I CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS Les matières humiques telles qu’elles existent dans la nature ont des propriétés qui diffèrent beaucoup, surtoul suivant les circons- tances extérieures qui ont présidé à leur production, si bien que l’on peut, d’après ces circonstances, ranger les humus en groupes plus ou moins nettement délimités. Le présent chapitre ne peut donner à cet égard que des notions approchées, parce que nos connaissances sont encore insuffisantes et qu'une classification des formes d'humus répondant à toutes les exigences n’est pas possible pour le moment. 1. — Les produits de l’érémacausis. a) Humus formés dans de bonnes conditions. Les humus formés sous l’action de l'oxygène de l'air, d’une hu- midité modérée et d’une température convenable ont pour carac- tère commun de se détruire plus ou moins vite en donnant de l'acide carbonique, de l’eau, de l’ammoniaque, en laissant comme résidu les principes minéraux contenus dans la matière organique et d’a- voir une réaction alcaline ou neutre. On les désigne ordinairement sous le nom d'humus doux ; mais il serait préférable d'employer une expression plus juste, par exemple celle de Mull (terreau) pro- posée par P.-E, MÜüLLER”. Suivant le lieu où il s’est formé, on dis- tinguera un lerreau agricole et un terreau forestier. 1.-P.-E. Mürrer, Die nalurlichen Humusformen. Berlin, 1887. Nous emploierons dans ce livre le mot {erreau comme équivalent du terme allemand Mull., Les hortis culteurs et les sylviculteurs le connaissent déjà ; le terreau des jardiniers, le terreaw neutre où simplement le terreau des forestiers sont des humus doux, c'est-à-dire des Mull en allemand. (Trad.) CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 2175 Le terreau agricole provient des débris des récoltes et des subs- tances organiques apportées au sol; c’est une sorte d’humus qui se décompose extrêmement vite par suite des conditions favorables à l'érémacausis et, par suite, ne s’accumule en quantités un peu consi- dérables que dans des cas assez rares, s’il s’agit de terre arable ameu- blie, bien perméable à l'air. Ceci n'arrive que si le sol reste assez long- temps sans labours dans certaines cultures (fourrages vivaces), s’il est à grain fin el par suile peu perméable. Qu’on ameublisse de tels sols, les dépôts humiques qui s’y étaient formés se décomposent bientôt. Le terreau forestier comprend l’humus du sol (Waldmull) et l'hu- mus de la couverture (S{reumull). Le premier provient des racines des arbres qui meurent chaque année dans le sol. Dans les sols fo- resliers à texture grumeleuse, ces matières humiques se comportent comme celles des champs labourés, mais se décomposent plus len- tement, parce que la température du sol forestier est inférieure en moyenne à celle du sol agricole. C’est certainement le cas pour l’humus qui se forme dans un sol difficilement perméable. L’humus de la couverture recouvre d'ordinaire le sol en couche mince; il se présente rarement en lis un peu épais, parce que la couverture se décompose trop vite. Il est grumeleux et recouvert habituellement d’une couche meuble de détritus de faible épaisseur. Les éléments de cet humus se distinguent partout à ce qu’ils offrent un mélange intime de matières organiques avec les éléments minéraux du sol. Le taux des matières organiques est de 5 à 10 p. 100. Cet humus de la couverture est largement répandu, surtout là où le sol est couvert d’une végétation puissante et dense. D’après les plantes auxquelles ce terreau doit sa naissance, on peut distinguer le terreau des forêts feuillues (hêtre, chêne, etc.), le terreau des forêts rési- neuses (épicéa, pin, etc.), le terreau de bruyère, etc. L’humus de la couverture est habité par un grand nombre d’or- ganismes soit végétaux (myxomycètes, mucorinées, bactéries), soit animaux (vers de Lerre, myriapodes, nématodes, etc.). Les animaux concourent à la formation de l’humus en dilacérant les résidus végélaux, en mêlant leurs déjections à la masse et en y laissant leurs cadavres. Ainsi s'explique la présence dans l'humus de parties du corps des insectes difficilement altérables (chitine). 276 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. La flore caractéristique des sols à terreau comprend surtout, | d’après P.-E. MüLLER, les plantes suivantes : forêts de hêtres : Aspe- rula odorala, Mercurialis perennis, Milium effusum, Melica uniflora, Anemone nemorosa et ranunculoides, Oxalis acetosella, Phegopte- ris polypodioides, P. dryopteris ; forêts de chênes: Trifolium me- dium, Viola canina, Vicia cracca, Lathyrus montanus, Hypericum perforalum, Galium saxatile, Campanula rotundifolia et persicæ- foliu, Succisa pratensis, Holcus mollis, Adoza moschatellina, etc. Pour les pineraies, il faut signaler l’absence des bruyères, des ai- relles et en partie aussi de la fougère impériale. Enfin, on pourrait encore nommer ici le terreau de vase (Schlamm- mull, d'après H. von Posr :) qui, dans les eaux oxygénées, forme une masse très finement grenue, d’un brun gris ouvert, provenant d’ex- créments d'animaux aquatiques, de restes d’algues et d’infusoires, et décomposée par des bactéries. On n’y reconnaît plus aucune structure et généralement elle ne forme qu’une couche peu épaisse. Cet humus est d'ordinaire mélangé à de la matière inorganique et en proportion telle que son taux de substance organique dépasse rarement 20 p.100. b) Humus formés dans de mauvaises condilions. Les humus de cette catégorie forment, dans une certaine mesure, le passage entre les produits de l’érémacausis et ceux de la putré- faction, se rapprochant de l’un ou de l’autre groupe, suivant les circonstances extérieures. Ils se distinguent du terreau en ce que, là où ils existent en assez grande quantité, ils forment des couches compactes, serrées et ont une réaction acide. Il n’y a pas, jus- qu'alors, de terme convenant à ces formes d’humus ; celui de towrbe (Torf) proposé par P.-E. MÜLLER pourrait prêter à confusion, puis- qu'on comprend généralement sous ce nom les produits de la pu- tréfaction. C’est généralement le nom de Rohhumus (humus brut) qui est usité ; nous l’emploierons, faute d’un meilleur. Les conditions de formation de l’humus brut sont très diverses et se présentent chaque fois qu’un des facteurs nécessaires pour une érémacausis intense atteint son minimum. 1. Landwirthschaftliche Jahrbücher, 1888, pp. 405-420. 7 CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 211 L'humus brut se forme donc quand l'air ne pénètre pas suffisam- ment, quand la température est trop basse (pays septentrionaux) et l'eau trop abondante en même temps (bords de la mer, hautes mon- tagnes), ou quand l'humidité fait défaut (sécheresse due à la tempé- rature, à la composition et situalion du sol, au desserrement des massifs) ou quand le sol est pauvre en principes nutritifs. Toutes ces conditions défavorables à l’érémacausis peuvent provoquer le dépôt de matières humiques à un état plus ou moins décomposé, sous forme d’une couche compacte à la surface du sol. Suivant l’endroit où ils se forment, ces humus peuvent se classer dans les groupes suivants : L’humus brut des steppes forme une partie intégrante des sols des prairies, des pampas el des Lerres noires. Ces sols sont surtout occu- pés par une végétation herbacée où domine, dans les steppes russes, Stipa pennala'. On y trouve aussi, moins abondamment, Stipa capillata, Festuca ovina, Kæleria cristata. Dans les steppes kirghiz, Stipa capillata et Elymus junceus forment la majeure partie du peuplement. Le sol est formé d’une matière à grains très fins qui correspond, en général, au lôss par ses propriétés et qui renferme en proportions variables (6-16 p. 100) des matières organiques provenant de la décomposition des plantes des steppes. D’après les recherches de P. KosTyTSCHEFr, la terre noire ({schernozem) du gouvernement d'Ekaterinoslaw a la composition physique suivante : PROFONDEUR © — 0-6 6-12 12-18 24-30 30-36 36-42 pouces. pouces. pouces. pouces. pouces. pouces. p. 120 p- 100 p- 10) p- 100 p. 100 p- 109 Eléments fins . 34,9 35,3 35,7 37,0 37,1 30,3 Sable . 50,5 50,5 54,3 56,1 56,7 50,8 La finesse extraordinaire des grains du sol, telle qu’elle résulte des chiffres qui précèdent, et leur étroite juxtaposition font que l'humidité pénètre à peu de profondeur (jamais au delà de 1 mètre, même en hiver); donc peuvent seules y prospérer les plantes qui exigent peu d'humidité dans le sol et qui ont une courte période de végétation. Aussi, les forêts ne se trouvent-elles pas sur des sols de 1. Forschungen, elc., vol. XII, 1889, p. 76, et vol. XIV, 1891, p. 261. — Voir aussi The Soil, Exposition de Chicago, p. 11. 278 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. cette composition ; on ne les rencontre que sur les points où le ter- rain, grâce à son grain plus gros, se laisse pénétrer plus facilement par les pluies jusqu’à d’assez grandes profondeurs. Dans la région des terres noires, ces sols à gros grains sont occupés par les forêts, tandis que la steppe s'étend sur les sols à grain fin. C’est donc la nature du sol qui amène soit la forél, soit la steppe. P.Kosryrscuerr prouve que les différences dans les formes de la végétation des steppes ne sont pas dues à des influences climatériques. Il s'appuie sur des observations météorologiques montrant que forêts el steppes ont le même climat et que des steppes complète- ment identiques par leur flore peuvent être exposées à des condi- tions climatériques très différentes. Par contre, de nombreux exem- ples parlent en faveur de l'influence des propriétés physiques du sol sur la distribution des formes de la végétation. Ainsi, les sols à gros grain qui pénètrent dans la région des terres noires sur sa limite septentrionale présentent toujours leur végétation forestière carac- » téristique. Sur les points plus élevés où les éléments les plus fins du sol ont été lixiviés et enlevés facilement par les eaux pluviales, le sol est à grain plus gros que dans la terre noire intacte et la végétation se distribue également d’après les propriétés physiques du sol. Les forêts se présentent plus abondantes sur les hauteurs et les steppes dans les dépressions. Un examen plus approfondi des sols de cette région fournit une preuve plus convaincante des rapports qui existent entre la composition physique du sol et les formes de la végétation. D’après les recherches de DokuTCHAgFr, les sols du gou- vernement de Nijni-Nowgorod présentent la composition suivante : ÉLÉMENTS EE SABLE. HUMUS. plus fins plus gros que que 0,01 mm. 0,01 mm. — Plateau de terre noire (sols argileux p. 100 p. 100 p. 100 p- 100 compacts). HU: : 37,4 10,1 58,3 41,2 2 Vallée de terre noire (de ar te 59,4 6,3 35,9 63,2 3 Sols de forêt gris foncé (lehm compact) 66,4 4,1 28,3 70,8 4 Sols gris (lehm de compacité meyenne) 76,2 239 21,5 78,0 5 Sols de lehm léger + - « | . . . 81,4 159 17,3 81,4 6 Sols de lehm sableux. . . . . . . 87,2 1,6 9,3 ? 7 Sols de sable lehmeux . . . . . . 91,8 0 7,0 ? 8 Sols de sable quartzeux . . . . … 97:21 0,3 229 97,5 CLASSIFICATION ET PPOPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 219 Les steppes ne se voient que sur les trois premiers groupes de ces sols, peut-être aussi exceplionnellement sur ceux du quatrième groupe. Le plus grand nombre des sols de ce quatrième groupe et tous les sols des groupes suivants portent, sans exceplion, des forêts. On a fait les mêmes constatations pour d’autres points du domaine des steppes asialico-européennes. Ainsi, KRASSNOFF a trouvé dans le Tian-Schan des formations de steppes sous les climats les plus divers, depuis la zone des cultures jusqu’à la zone alpine. D’après RicaTHorEN, les forêts manquent complètement sur le lüss, et, selon WuiTney, forêts et prairies dans l'Amérique du Nord se répartissent d’après la composition du sol, qui est très voisine de celle des steppes asiatico-européennes, comme le montrent les analyses suivantes : TERRE NOIRE DE RUSSIE SES 80L DE PRAIRIE (d’après Rispolajenski et Gordjagin). (d'après Osborne). EE — EE 4 2 3 1 2 Particules plus fines que 0,01. . 47,00 24,20 32,00 44,33 37,39 —_ mudel0 0114 002,054. 45,00 "50,25 © 50,65. 41,48 43,58 de On (5 A 0m 25 Lt, 7,50 20,25 16,80 3,39 2,48 — plus grosses que 0"",25. 0,50 1,25 0,50 0,10 0,62 Le sol des pampas de l’Amérique du Sud est certainement sem- blable à ceux-là, puisqu'on sait que le lôss, partout où il se présente, a la même composition. Il résulle de ce que nous venons de dire que la forêt s'empare des sols à gros éléments, la steppe de ceux à éléments fins, quelles que soient les conditions climatériques. Cela tient à ce que, dans le premier cas, les plantes, à cause de la grande perméabilité du sol et de sa faible faculté d’imbibition, peuvent utiliser l’eau des pluies d’été, tandis que dans le second cas, vu l’insuffisante perméabilité du sol, elles sont réduites essentiellement à l’humidité hivernale, qui représente, il est vrai, au printemps des quantités d’eau assez abondantes, mais qui s’épuise vite, l’évaporation dans de tels sols étant très forte. Comme les plantes ne peuvent utiliser suffisamment l’eau des pluies d’été, elles doivent avoir une courte existence. Le fait de l’envahissement progressif de la steppe par la forêt n’est pas en contradiction avec la théorie de KOSTyTSCHEFF que nous 280 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. venons de résumer, et voici pourquoi. La pluie tombe à dose égale sur la forêt et sur la steppe ; mais pour la neige, c’est autre chose : dans les forêts et leurs environs immédiats, elle se rassemble d’ordi- naire en grande quantité, tandis que sur la steppe la hauteur de la couche de neige est déterminée par la végétation herbacée ; une grande partie de la neige est enlevée par le vent et se dépose dans les sillons et les dépressions pour de là s’écouler au printemps dans les ruisseaux et les fleuves sous forme d’eau de fonte. Aussi, le sol est-il dans les forêts et leurs environs beaucoup plus humide au printemps que dans les steppes. En outre, sur le sol des forêts s'étend la couverture morte qui empêche les herbes de croître et qui conserve au sol son humidité. C’est ainsi que se créent les con- ditions favorables à la végétation des arbres forestiers et que la forêt pénètre avec lenteur, mais aussi avec persévérance, dans le domaine de la steppe. Sous l'influence de la forêt, les propriétés physiques de ce sol des steppes à grain fin se modifient aussi et il acquiert bientôt toutes les qualités du sol forestier grumeleux. La forêt peut aussi du reste être installée artificiellement en enlevant les herbes et ameublissant le sol par un labour. L'humus brut des steppes doit donc sa formation à un état phy- sique particulier du sol; on ne peut en douter d’après ce qui vient d’être dit. Cet état s'oppose à l’humidification du sol en été et comme, en outre, l’arrivée de l’air est restreinte par la grande finesse des particules et la saturation fréquente par l’eau des couches supé- rieures, l’érémacausis des débris végétaux se fait dans des conditions défavorables. L’humidité de l'hiver agit dans le même sens en dimi- nuant par son intensité la perméabilité du sol. Dans ces conditions, l’humus s’accumule en assez grande quantité et donne au sol la cou- leur foncée qui lui a valu son nom de «terre noire ». Une fois cultivé et garni de plantes agricoles ou d’arbres, il passe peu à peu à une teinte grise et blanchâtre, parce qu’alors, bien humecté et bien per- méable, il opère rapidement la destruction des matières humiques. La fertilité extraordinaire de la terre noire doit être surtout attri- buée à la circonstance que les matières minérales solubles formées par désagrégation sont complètement à l'abri de la lixiviation : l’eau d'infiltration existe effectivement à très faible dose dans le sol à 281 ‘088 19 602 ‘À T8Rr ‘12/2408 u9y00 A 2082704 : 10 ‘O8RT ‘Jedro ‘897029 L eye &L ‘98 sa £I 69°8 S0'0 0£°0 £0°0 g9°0 1L‘0 1l°1 0y°9L 09° £8 At €0 ‘0 cI‘0 60 ‘0 cs 0 09°0 LOT 1 HAT CO‘L] £c°ss Ly'I] L0 ‘Se « Se La IL°79 1£°g9 Ga IS LI'Sc 60°0 5 à) y0‘0 &L'‘0 01°0 nl A L£‘OI 18‘£] 6£°98 19°YI L9°£ 19°6G [< 119 QE 007 ‘d CLASSIFICATION ET PROPRIÈTES DES DIVERS HUMUS. "JNP Ce ye'‘oI | LA 007 ‘d ‘51nq -U910,P 11°Y 9£°L 69°L 007 ‘d *MOJUIES 9p 98° es‘y ce°G 91°C LL‘9 00°C 007 ‘d 007 ‘d ‘’RAUJIO4 |‘UZ2U010 A ap op *d ‘MOQUE I, op 90 "0 180 c0 ‘0 cr‘ 0 09°0 16°6 69°£ 007 ‘d 007 ‘d “ASIN “tINnX, [POI0SMON ap op -IufiN op —_ TT SLNAIMWMUANHHANOD -oPruaur) Seuyr pun UO1D212P102LDMUYIS LP ULO 1400 ND F0pUNAPLIQUL) S9P PUR SUNALYLIUO OP PUNYINSALAJUN 2YO8TWIYL) : ISSUE HIOA "LAINHNS ‘9 Soide, ‘I * * ? e[qes 99 OT '£ * XNPU9 9P 9JPU0qE) ‘& ° ‘onbHinyns 9proY “onbraouydsoud oproy te + *opnog DORE 0SSt10 ° * * ‘Issue + + + + xneq 2SQUEBUEUL 9P 9PAXO * * * JoJ 9p 9pAXO + + + *ourmnty ee ee oo sonbi}1[09Z SaoueJsqns ‘TJ :e À Jr sojponbsor suep *SO[IQUIU S22ue)SqNe ° ? © No} NE 97494 * * ‘oQuIqQu09 ne TI UT] : JU9JU09 9U29SS9P [OS 9] * ‘onbidooso1$Âq ne ‘SHSOQ SLNYUNAIY 282 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. grain fin et les principes solubles sont aussitôt absorbés par le réseau très serré des racines des plantes des steppes. Ils retournent de là, pour la plus grande part, dans l’humus qu’ils contribuent à former el, quand celui-ci est soumis à la cullure du sol des steppes dans des conditions favorables à la décomposition, ils profitent en forte: proportion aux végétaux cultivés, d'autant plus que les matières organiques se décomposent alors très vite. Les analvses précédentes publiées par P. Kosryrscugrr donnent une idée de la composition chimique de la terre noire de Russie. Les nombres ci-dessous, dus également à KosTYTSCHEFF, mon- trent l’extraordinaire homogénéité de composition chimique du ichernozem jusqu’à d’assez grandes profondeurs : Terre noire du gouvernement d’Ekaterinoslav. PROFONDEUR DE LA COUCHE (en pouces). ÉLÉMENTS DOSÉS. | 0-6 6-12 | 12-18 | 18-24 | 24-30 | 30-36 | 36-421 EE = | p. 100 p. 100 p. 100 p.100 p.100 p.100 p.100 | Eau hygroscopique. . . . 7,83} Le sol desséché contient : | Humus . | Eau combinée. . Perté'au fon "1.76. 1013"62 Substances minérales. . .[ 86,38 dans lesquelles il y a : 1. Substances zéolithiques : Silice , Alumine . Oxyde de fer . Oxyde de manganèse . Chaux. . Magnésie. . Potasse . Soude, Le Acide phosphorique . Acide sulfurique. . 35,81 | 36,31 2. Carbonate de chaux . . . 1,314, TS 8. Argile et sable . . . . .1 54,82 | 53,93 | 54,88 | 55,07 | 56,74 M + CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 283 Près de l’humus brut des steppes peut se ranger une autre espèce d'humus qui se forme de la même façon et qu’on peut appeler à juste titre humus brut de vase (Schlammrohhumus). En mélange avec divers éléments minéraux à grain très fin (argile, sable, marne), il forme ce qu’on nomme le limon (Schlick), qui se dépose sur les bords et à l'embouchure des fleuves et contribue à la formation des marais (Marsch). Cette sorte d’humus provient originairement de restes organiques animaux et végétaux ; les plantes et animaux aqua- tiques se trouvent exposés à la décomposition sur des places assé- chées du lit; lors d’une crue, ils sont transportés plus loin à l’état pulvérulent et finalement se déposent en mélange avec des matières terreuses. Le taux de ces substances organiques en humates, de même que leur mode de formation, montrent qu’elles ont pris nais- sance dans des conditions défectueuses de l’érémacausis. Le taux d'humus dans les sols de marais humiques s’élève à 5-10 p. 100. L’humus brut de bruyère existe dans les régions où les conditions de sol et de climat sont si favorables à la végétation de la bruyère (Calluna vulgaris), qu’elle étouffe presque entièrement toutes les autres plantes et couvre le sol d’un tapis serré’. Sur les sols sa- blonneux, les dévastations des forêts sont la principale cause de l’in- vasion de la bruyère. Le vrai sable de bruyère se reconnaît à une couche de grès brun ou noir (Ortstein”) situé à une faible profon- deur au-dessous de la surface. Avec la bruyère on trouve, dans cerlaines contrées, le genêt à balai (Sarothamnus scoparius), divers genêts (Genista anglica, G. pilosa), l’airelle myrtille (Vacci- nium myrlillus), V'airelle canche (Vaccinium vitis idæu), l’ajonc (Ulez europœus), etc. Les régions à bruyères sont en général caractérisées par la sé- cheresse du sol; donc l’humus brut de bruyère est une variété qui se forme par la décomposition des bruyères avec défaut d'humidité. Dans les premiers stades, l’humus est de teinte sombre et de struc- ture compacte, peu fibreuse ; plus tard, il devient brun noir ou noir, 1. À. Sazrecn, Die Kultur der Haideflachen Nord-West-Deutschlands. Hildes- heim, 1870, imprimerie Gerstenberg. 2. C'est notre alios. (Trad.) 284 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de la consistance de la tourbe (tourbe de bruyère), très homo- gène, presque graisseux à l’état humide et solidement agglutiné à l’état sec. | L’humus brut forestier se forme aux dépens de la couverture quand, par suite de la température ou de la croissance des arbres, l'humidité diminue et l'air n’arrive plus à dose suffisante. De plus, les plantes qui s'installent de préférence sur cet humus (bruyères et airelles) contribuent, par leur réseau serré de racines et leurs dé- tritus propres, à l'augmentation de ces dépôts”. Les plantes caractéristiques de l’humus brut forestier sont sur- tout : la bruyère (Calluna vulgaris), lairelle canche (Vaccinium vilis idæa), 'airelle myrtille (Vaccinium myrtillus), le mélampyre des prés (M. pralense), le Mayanthemum bifolium, le Trientalis europæa dans les pays du Nord et dans les montagnes, le rhododen- dron dans les montagnes, les fougères (Pleris aquilina et diverses espèces d’aspidium), les lycopodes (Lycopodium clavatum, L. com- planalum), diverses mousses (entre autres: Hypnum Schreberi, H. purum, Hylocomium triquetrum, Sphagnum Girgensohnu, Leu- cobryum vulgare). Partout où commence à se former l’humus brut, la couverture morte se montre plus ou moins compacte, tandis qu’elle est poreuse là où naît le terreau. Donc déjà par l’état de la couverture on voit si l’on a affaire à l’une ou à l’autre espèce d’humus. L’humus brut forme généralement des couches assez épaisses qui, à l’état peu décomposé, constituent des masses fibreuses d’une structure moyen- nement poreuse et, plus tard, à mesure que l’air fait défaut, des dépôts compacts presque semblables à la tourbe (tourbe sèche) *. Dans le premier cas, l’humus brut est encore susceptible d’une dé- composition ultérieure s’accomplissant en quelques années ; dans le second, il se montre au contraire d’une grande fixité. 1. E. Raman, Forsiliche Bodenliunde und Standortslehre. Berlin, 1893, p. 2304 2. Il ne me paraît pas opportun de séparer, comme RAmaAnN l'a proposé, les dépôts désignés jusqu'ici par le nom général d'humus brut (Rohhumus). en deux groupes, bumus brut et tourbe sèche (Rohhumus et Trockentorf), parce que cette distinction n'est pas nette et que la tourbe sèche (7rockentorf) procède le plus souvent de l’humus brut (Aohhumus). CLASSIFICATION ET PROPHRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 299 Quant à la facilité et à la rapidité avec lesquelles progresse le dépôt d'humus brut, les détritus végétaux qui le forment présentent des différences remarquables. D’après E. RamaNN, les arbres se ran- gent à ce point de vue dans l’ordre suivant: hêtre, épicéa, chêne, pin. Pour le sapin, le mélèze et le bouleau, les observations man- quent encore. Le même auteur cite parmi les espèces du tapis vé- gélal : bruyère, airelle canche, airelle myrtille, fougères, mousses, surtout celles qui forment des touffes serrées. Suivant le matériel producteur, suivant le degré d’altération et les circonstances exté- rieures, l'humus brut présente une consistance et une couleur diffé- rentes. L’humus brut des prairies provient de la décomposition des ra- cines des graminées et autres plantes des prairies avec un accès d'air limité et un taux exagéré d'humidité dans le sol. Ce sol des prairies est difficilement perméable à l'air, parce qu’il n’est pas tra- vaillé et qu'à cause de sa situation dans les points les plus bas du relief il jouit d’une humidité excessive. Ajoutons que le réseau radi- culaire richement ramifié des plantes des prairies obstrue le plus grand nombre des pores aérifères. Par suite de cette texture du sol, la décomposilion des matières organiques est très lente ; celles-ci se rassemblent peu à peu en quantité plus ou moins grande sous forme d’humus brut et contribuent d’autant, vu leur grande faculté d'imbibition, à augmenter le taux d’humidité du sol. Finalement, il arrive un moment où l’accès de l’air atteint son minimum ; alors se manifestent les réactions de la putréfaction et les matières humi- ques qui se déposent se rapprochent de la composition de la tourbe (tourbe de prairie). Le sol de la prairie prend alors le caractère tourbeux qui se manifeste par la disparition des graminées et par la pullulation des herbes acides (Carex, Scirpus, etc.) et d’autres plantes de marais. Comme on vient de le voir, les matières de l’humus brut, quand elles sont soumises à des conditions défectueuses d’érémacausis, passent finalement à des produits très voisins de ceux de la putré- faction dont ils sont des formes de transition. 286 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 2. — Produits de la putréfaction. L'humus formé dans les eaux stagnantes en l’absence de l'air est ordinairement d’un brun sombre ou d’un noir brun, avec une con- sistance variable et laisse encore aisément reconnaitre la structure des plantes dont il provient. Le produit de cette humification, nommé {ourbe ou € humus acide », se signale par une grande fixité et ne subit que des changements insignifiants quand il est soumis à des conditions favorables à la décomposition (érémacausis). On ne peut admettre que des organismes inférieurs ne participent pas à ces processus, puisque, comme on l’a montré plus haut, la transfor- mation des matières organiques est liée, d’une manière absolument générale, à l’activité des champignons et qu’en outre les produits gazeux et solides résultant de la formation de la tourbe ont une composition analogue à ceux qui naissent dans la putréfaction des résidus végétaux. Le fait que la tourbe a des propriétés antisepti- ques” et l'observation signalée par plusieurs auteurs* qu’on n’a pas trouvé de bactéries ni d'êtres organisés quelconques dans la tourbe faite ne sont pas en contradiction avec cette opinion ; car on n’a pas examiné les premiers stades de décomposition dans lesquels les microorganismes, d’après ce que nous savons des processus de la putréfaction, déploient sans aucur doute leur activité. Plus tard, elle s’arrête dès qu’une certaine quantité d’acides orga- niques (acides humiques) est formée, parce qu’ils rendent difficile et finalement empêchent le développement des bactéries. C’est pour cela que la décomposition ultérieure de la matière organique se trouve en même temps entravée à un degré extraordinaire, ne s’opérant plus vraisemblablement que par des réactions purement chimiques (ulmification ou humification). Il en est de même pour l’humus brut dont la formation est liée aussi à la présence des acides humiques. Les points où se forment sous l’eau, par la putréfaction des débris 1. Garrky, Archiv für klinische Chirurgie, vol. 28, fase. 3. — Neuner, tbéd, vol. 27, fase. 4, et vol. 28, fase. 3. — G. Reinz, Prager medicin. Wochenschrift. 1886, n° 13-15. 2. J.-J, Faôu, Ueber Torf und Dopplerit. Zürich, 1883, p. 38. j * CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 287 végétaux, des couches plus ou moins épaisses de tourbe s'appellent des tourbières (Moor). Les districts ainsi couverts d’eau stagnante se trouvent partout où, à cause de l’imperméabilité du sol ou de la persistance des infiltrations, l’eau s’accumule et noie le sol d’une manière continue. Les plantes qui s'installent dans ces milieux et donnent des dépôts de tourbe par leurs touffes qui meurent chaque année sous l’eau sont différentes suivant la composition chimique et la quantité de l’eau, mais elles offrent avec leurs stations des rap- ports caractéristiques qu’on utilise pour la distinction des diverses tourbières. C’est surtout d’après la flore qu’on sépare les tourbières basses (Grünlandsmoore) et les tourbières hautes (Hochmoore) *. a) Les tourbières infra-aqualiques. Ces tourbières, que LESQUEREUX a désignées sous le nom d’infra- aquatiques”, s'appellent aussi tourbières basses, de vallées, de prai- ries, ou tourbières calcaires, tourbières à roseaux ou à cypéracées ; elles se forment sur les bords et dans les environs immédiats des eaux courantes ou encore dans les cuvettes des lacs et généralement sur les rives. Elles se trouvent surtout dans les plaines basses, plus rarement dans les pays de montagnes. La végétation y consiste essentiellement en graminées (Phragmites communis, Glyceria spectabilis et aqualica) ou en cypéracées, parmi lesquelles en remarque surtout Carex slricta, paniculala, ampul- lacex, vesicaria, canescens, paradoxa, des espèces de Juncus et de Scirpus et, en outre, des mousses (Hypnum inlermedium, giganteum, aduncum, scorpioides, slellatum, vernicosum, cordifolium, nitens, 1. F. Sirexsky, Ucber die Torfmoore Bôhmens. Prag, 1891. — On y trouve la bibliographie complète. Ouvrages importants : À. Grisesacn, Ueber die Bildung des Torfes in den Emsmooren. Güttingen, 1846. — 0. Senorner, Die Vegetationsverhaältnisse Südbayerns. München, 1854. — F. Senrr, Die Humus-, Marsch-, Torf- und Limonitbildungen. Leipzig, 1862. — J.-J. Früa, Loc. cit. — H. von Posr, Landw. Jahrbücher, vol. XVII. — E. Ramanx, Forstliche Bodenkunde. Berlin, 1893. 2, Fn allemand on les appelle Grünlandsmoore ou Niederungs-, Thal-, Flack-, Wiesen-, Rasen-, Kalk-, Rühricht-, ou encore Rohrmoore ou Moos (pl. Moser) ou enfin Riede. (Trad.) 288 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Dicranum palustre, Philonotis fontana, Gymnocybe palustris, Sca- pania undulala, Bryum pseudotriquelrum). À côté de ces plantes, dont les graminées, les cypéracées et les hypnées sont les plus impor- tantes pour la formation de la tourbe, on rencontre encore beaucoup d’autres espèces dont la liste complète ne peut trouver place ici*. Suivant l’origine, la situation, la composition et la quantité de l’eau, les tourbières basses présentent des flores différentes. Quand elles commencent à se former, ce sont d'ordinaire les Phragmites, « les Typha, les Glyceria speclabilis qui dominent et on les désigne“ sous le nom d’Arundinetum * (de Arundo Phragmiles — Phragmites | communis). Sont-ce les cypéracées (Carex, Scirpus, Juncus) qui ont" surtout contribué à leur formation, on les appellera des Caricelum, et des Hypnetum si elles doivent leur principale origine aux Hypnum que nous venons de citer. | En général, la formation de la tourbe est due d’abord aux Phrag-« miles, Typha, Glyceria, Scirpus, c’est-à-dire à des plantes qui en-« foncent leurs racines sous l’eau et développent au-dessus leurs organes aériens. Quand les restes organiques se sont accumulés assez pour que la couche de tourbe s'approche de la surface, les Carex s'installent, végétant surtout au-dessus de l’eau et élargis-« sant toujours peu à peu leur domaine. Les cypéracées couvrent souvent de grands espaces qui ont, en Bavière, en Souale, en Hon: grie, des noms spéciaux et qui, avec les Phragmites, constituent souvent les seuls points solides de la surface tremblante de la tour- bière, points qui s'élèvent de 0",4. En Bavière, ce sont les Schænus ferrugineus et nigricans qui contribuent principalement à leur for: mation ; ailleurs, c’est le Carex stricta. Quand les végétaux généra= teurs de la tourbe se répandent dans les lacs et les étangs, la surface de l’eau se rétrécit peu à peu à partir des bords jusqu'à ce qu’il ne reste plus qu’un petit espace d’eau libre au-dessus du point le plus profond de la cuvette; celui-ci même avec le temps finit par être envahi et se couvrir de végétation. 1. On trouvera dans l'ouvrage ci-dessus cité de Srrensky une liste complète des plantes des tourbières. 2, Dans certaines régions de France, on les appelle des roselières. (Trad.) r CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 289 . Par suite de cette marche de formation de la tourbe, la partie centrale reste la plus humide et le taux d’eau de la masse diminue à mesure qu’on s’avance vers la rive, caractère qui distingue déjà exlé- rieurement beaucoup de tourbières basses des tourbières hautes. Dans les bas-fonds des fleuves, les tourbières se constituent sur- tout là où les bords sont plats et où des alluvions se sont accumu- lées à la suite des inondations. Avec une pente faible, les inondations ont lieu facilement; aussi, la vitesse du cours d’eau est-elle de grande importance pour la formation de la tourbe. Malheureusement, on manque, pour les fleuves, d'observations sur la pente maxima pour laquelle se forme la tourbe sur leurs bords dès qu’ils sont plats et sur la pente minima au-dessous de laquelle les rives restent sèches. D'après les observations, d’ailleurs éparses, que O. SENDTNER a faites à ce sujet, on peut admettre que, dans les grands fleuves, la formation de la toube est déjà empêchée par une pente de 3,93 pour 10 000 ; dans les rivières à méandres, il faut 20,5, mais dans ces dernières la production de tourbe a encore lieu avec 17,39, tandis que, dans les grands fleuves, elle s'empare de la place avec 6,8 (Inn) et 3,01 pour 10000 (Danube). Quant au sens dans lequel progresse la formation de la tourbe aussi bien dans les lacs d’assez grande dimension que dans les larges cours d’eau dont la direction est nord-sud ou à peu près, il parait, d'après les recherches de J. KziNGe *, que la direction du vent do- minant est de grande importance. Cet auteur a trouvé notamment que les rivages des lacs (dans l’est des provinces baltiques, en Ba- vière, Salzburg) et aussi des fleuves (s’il n’y a pas de courant trop fort perpendiculaire à la direction du vent dominant et si, en outre, le fleuve a une largeur telle que le vent puisse produire des vagues assez fortes) forment d’abord des tourbières sur la rive protégée contre le vent dominant et c’est à partir de là qu’elles s'étendent. Le bord sud-ouest des lacs des provinces baltiques orientales est toujours celui qui se couvre de végétation ; le bord nord-est, quand Ja largeur est suffisante, est dégarni. Dans le reste de l’Europe, les rives occidentales sont préférées par la végétation côtière. Dans les 1. Bolanische Jahrbücher, vol. XI, 1889, p. 265. MATIÈRES ORGANIQUES. 19 299 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. fleuves, c’est la rive à l’abri du vent qui se couvre de végétation. C’est la direction du vent dominant qui détermine toujours le sens de la marche de cette végétation. C’est pourquoi, dans les lacs, la por- tion de la surface qui reste libre ne se trouve pas au-dessus de la plus grande profondeur qui occupe ordinairement le milieu ; elle est toujours rejetée vers le bord exposé au vent. Le fond des tourbières infra-aquatiques peut être de composition très diverse, siliceux, argilo-siliceux, marneux. Il est habituellement formé de dépôts vaseux contenant de l’humus, du calcaire, de l’ar- gile ou du lehm. Dans l’Allemagne du Nord, où ces tourbières sui- vent partout le cours des fleuves, c’est d'ordinaire le sable, plus rarement le lehm sableux, qui en constitue le fond, recouvert d’hu- mus vaseux. Dans le sud de la Bavière, elles reposent sur de la silice (limon glaciaire) qui est presque partout surmontée d’une couche plus ou moins épaisse de calcaire tourbeux (alm). En présence de telles différences dans la composition du fond des tourbières, on ne peut admettre que celui-ci ait quelque influence sur la production des plantes caractéristiques des tourbières infra-aquatiques ; les nombreuses observalions faites à ce sujet montrent que les plantes des tourbières infra-aquatiques exigent des eaux riches en éléments nulrilifs, notamment en chaux; c’est là la première condition de l'apparition de la flore typique de ces lourbières. L’épaisseur de la couche de tourbe y est très variable ; elle atteint dans le nord de l'Allemagne 1-2 mètres, rarement 2,5-3 mètres. Il en est autrement dans le sud de la Bavière où, d’après SENDTNER, la tourbière d’Erdinger a jusqu’à 6",5 d'épaisseur et celle de Neu- burg, sur les bords du Danube, offre en maints endroits des épais= seurs de 6,5 à 9,5. b) Les lourbières supra-aquatiques. Désignées aussi sous le nom de tourbières à mousses, à sphaignes, à bruyères", les tourbières que LESQUEREUX nomme supra-aquatis ques sont les tourbières proprement dites ; elles occupent généra= 1. Les synonymes allemands donnés par WozLy sont les suivants : Moos-, Sphag= num-, Haidemoore, Filze, Lohen. (Trad.) ne +: ] CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 291 lement des dépressions en forme de cuvette aussi bien dans les plaines que dans les montagnes et ont souvent une grande étendue. Dans tous les cas, elles débutent et s'étendent par des mousses nommées sphaignes, végétant à la surface de l’eau qu’elles élèvent avec elles. Déjà par là les tourbières supra-aquatiques se distinguent des autres où il n’y a pas de sphaignes. Dès que ces mousses ont pompé l’eau en excès et qu'il n’y en a plus au-dessus d’elles, il apparait sur leur masse spongieuse diverses autres plantes caracté- ristiques, notamment Calluna vulgaris, Erica tetralix, Vaccinium oæycoccos el uliginosum, Eriophorum vaginalum, Ledum palustre, Andromeda polifolia, Myrica gale, Drosera rotundifolia, longifolia et ovata, et la tourbière en formation se complète avec quelques autres mousses (Polytrichum strictum). Suivant la prédominance des espèces, la tourbière s'appelle Sphagnetum, ou Eriophoretum, ou Sphagnelo-Eriophoretum, ou Vaccinieto-Sphagnetum, Vaccinielo-Callunetum, etc. Le genre Sphagnum est extrêmement riche en espèces. Celles qu’on rencontre le plus souvent sont : Sphagnum cymbifolium, cus- pidatum, capillifolium, molluscum, acubhfolium, medium, varia- bile, subsecundum, teres, cavifolium, rigidum, molle, fimbriatum, Girgensohnii. Ces mousses sont non seulement les éléments forma- teurs essentiels de la plupart des tourbières, mais encore elles sont éminemment propres par leur structure à retenir l’eau. La tige (fig. 46) consiste au centre en cellules allongées à parois molles, incolores, autour desquelles est un anneau de cellules ponc- tuées qui sont de plus en plus étroites et à parois de plus en plus épaisses vers l'extérieur. Les cellules de la couche tégumentaire ont des parois minces, incolores et sont beaucoup plus larges que celles du centre. Ces parois présentent quelquefois de minces épaississements spiralés et sont percées de grandes ouvertures qui mettent en communication les cellules voisines. Elles ne contiennent que de l’air ou de l’eau qui y monte comme dans un appareil capillaire très actif. 1. J. Sacus, Trailé de botanique, traduit par Van Tiecnem sur la 3° édition alle- mande, Paris, Savy, 1874, p. 439. Me ice he, 292 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Les feuilles, insérées par une large base sur la tige et les rameaux! (fig. 47), sont composées de cellules de deux sortes régulièrement disposées ; les unes grandes, larges, en losanges allongés, les autres. étroites, tubuleuses, cheminant entre les premières et reliées en- semble en réseau. Les grandes cellules perdent bientôt leur contenu et paraissent incolores ; leurs parois sont munies de rubans spiralés,. étroits, irréguliers, lâchement enroulés et de grandes ponctuations Fic. 46. — Sphagnum cymbifolium (90). Fia. 47. — Sphagnum acutifolium (90) Section transversale de la tige : æ, cellules intérieures A, une portion de la surface de la feuille vnekl à parois incolores et molles ; r, cellules corticales de el, cellules à chlorophylle; j, les rubans spin plus en plus étroites età parois de plus en plusépaisses trous des grandes cellules vides. — B. Sectio 15 et plus sombres vers l'extérieur ; ee, couche tégumen- sale de la feuille ; c£, cellules à clorophylle; taire ; 2, trous par où les cellules superposées commu- cellules vides. (D'après J. SAOKHS.) niquent ensemble. (D’après J. SAOHS.) bordées chacune par un anneau d’épaississement et dans toute, l'étendue desquelles la membrane cellulaire est bientôt résorbée. Il en résulte de grands trous, le plus souvent circulaires, dans la membrane de ces cellules incolores. Les cellules étroites situées entre les premières conservent au contraire leur contenu, for- ment des grains de chlorophylle et constituent ainsi le tissu nu= tritif de la feuille, tissu dont la surface totale est néanmoins plus faible que celle du tissu incolore et inactif (SAcHs). Grâce à la forme particulière de ces cellules perforées de la tige 4 Fe CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 293 “et des feuilles, l’eau de la tourbière peut être pompée et amenée dans les parties supérieures de la plante. Il en résulte que les sphai- gnes, croissant constamment par le haut, sont humectées jusqu’au sommet comme une éponge, même quand le tapis végétal est déjà fort au-dessus du niveau de l’eau. Les propriétés de ces mousses sont telles que, dès qu’elles appa- raissent, la formation de la tourbière commence. Ce revêtement de mousses saturées d’eau est presque complètement impénétrable à l'air, si bien que les restes organiques sous-jacents sont soumis à la putréfaction, En raison de cet excès d'humidité, les sphaignes s’ac- croissent sur la surface de la tourbière comme une éponge gigan- tesque qui élève l’eau toujours plus haut et qui absorbe l'humidité atmosphérique en quantités toujours plus grandes; cette vaste éponge s'étend sur ses bords et, dans les circonstances favorables, finit par couvrir toute la vallée. Dans les lieux plats, la surface des tourbières est habituellement bombée, et c’est à celle propriété qu’elles doivent leur nom (Hoch- moor). Ainsi, d’après SENDTNER, les bords de la tourbière de Murn, près de Wasserburg, sont à 7°,3 plus bas que le milieu, et ceux de la tourbière de Panger, près de Rosenheim, à 4,5 ou 6 mètres. Dans PIsergebirge, l’Erzgebirge et les monts de Bohême, il y a, d’après SITENSKY, quelques tourbières dont le centre est de 2 à 3 mè- tres plus élevé que les bords. GRISEBACH admet que le bombement de la grande tourbière d’Arenenburg, dans la Frise orientale, atteint environ 6,4 ; celui de la tourbière de Düvel, près de Brême, s’élève vers le centre jusqu’à 11",5. Les tourbières ont donc leur maximum d’élévation au point où elles ont commencé à se former, c’est-à-dire là où les couches de tourbe sont les plus anciennes, les plus puis- santes, donc d'ordinaire en leur milieu. Ce bombement est la cause principale de leur agrandissement ; quand la couche tourbeuse a acquis une certaine épaisseur, elle presse par son propre poids sur ses bords, si bien que les limites primitives s’élargissent et qu’il se forme à la périphérie une nouvelle auréole de sphaignes. Celles-ci provoquent la formation de tourbe qui reste cependant toujours à un niveau plus bas que l’ancienne parce que celle-ci continue à s’accroitre en épaisseur. Ainsi s’explique le bombement des tour- 294 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. bières et ce fait qu’elles sont souvent plus humides sur les bords - qu’à l'intérieur. Partout où agissent sans modificalion les facteurs extérieurs (hu- midité, qualité de l’eau) dont dépend la flore des tourbières, les « dépôts d’humus des tourbières infra ou supra-aquatiques augmen- lent et, suivant les circonstances, cel accroissement de la tourbe se fait plus ou moins rapidement. Toute modification tranchée dans les conditions d’existence des plantes a, d’ordinaire, pour consé- quence une interruption dans la formation de la tourbe, parce que la végétation des plantes qui la produisent s'arrête et qu’on voit apparaître d’autres espèces (des li- chens ou des graminées frugales qui préparent peu à peu le sol à recevoir des végétaux plus exi- geants). Ces interruptions peuvent être dues : à une sécheresse anor- a —— male longtemps prolongée, à la ces- ZZ 7/0) sation de l'arrivée de l'eau par y D 7 tarissement des sources, par cor- LD f rection des cours d’eau, par drai- nage ou encore à l'emploi de sols LL minéraux en couverlure (pierres, *# sable, argile, lehm ou terre fer- .|# tile). Dans ces cas, la croissance de VA LM AAA ann r y an Aa an o cool CRE DRE RS PA ct € » tie Le z Ê 4 FN à la tourbière s’arrête, soit temporai- Fes rement, soit pour toujours, suivant Coupe de la tourbière de Reuti : # . : F t, tourbe; th, argile; k, sable. que les causes qui ont provoque l'arrêt persistent ou non. La tourbière infra-aquatique de Reuti, dans le sud de Ja Bavière, offre un exemple de ce fait ; d’après SENDTNER, la tourbe y esl sépa- rée en couches d’inégale épaisseur par de nombreux lits d’argile, comme le montre la figure 48. De pareils cas sont pourtant rares, parce que d'ordinaire les modifications persistent dans le même sens. Quand on recouvre la tourbière avec des sols minéraux ou quand l’eau fait défaut soit naturellement soit artificiellement, la formation de tourbe cesse. Sur la surface asséchée s'installent diverses herbes . CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 295 acides (Carex acula, flacca, Juncus filiformis) ou douces (Aira ceæs- pilosa, Anthoxanthum odoratum, Agrostis stolonifera, Alopecurus pratensis, Poa trivialis, Festuca pralensis) et d’autres plantes (Car- dainine pratensis, Menyanthes trifoliata, Trifolium hybridum, etc.) ou même, quand le sol est très sec, des mousses (Bryum cæspililium et inlermedium) en nombreux petits amas recouvrant toute la sur- face. Entre les paquets de sphaignes flétries on voit des lichens, sur- tout des cladonia (CL. furcata, fimbriala, ochrochlora, macilentx, uncinala et, dans les montagnes, en outre, Cl. bellidiflora, Floer- keana, deformis), d’abord à l’état disséminé, puis en quantités assez grandes. Quand la persistance de l’assèchement amène une dimi- nution constante des végétaux précédents, la surface est envahie par les Cladonia rangiferina et rangiformis. On voit aussi par place Pogonalum aloides, nanum, Pleris aquilina, Calamugrostis epi- geios. Les restes de ces plantes se décomposent souvent en compa- gnie de ceux de la bruyère en formant une masse terreuse feutrée, presque semblable à de la sciure et d’une teinte qui varie du blanc gris au jaune brun. A l’air, celte masse se transforme en un humus poudreux, d’un brun noir, contenant beaucoup de résine gluante, et que les Allemands appellent Bunkerde ou Schollerde. Sur cette couche épaisse de 15 à 45 centimètres on voil apparaître d’abord des graminées peu exigeantes (Phleum pratense, Anthozanthum odoratum, Holcus lanatus) et plus tard des espèces moins frugales (graminées et papilionacées) quand le sol s’est amélioré. Tandis que la prospérité des plantes formatrices est liée dans les tourbières infra-aquatiques à la présence d’eau riche en principes nutritifs, d’eau calcaire, celle des plantes des tourbières supra-aqua- tiques exige une eau pauvre en chaux. Les premières, en d’autres termes, ont besoin d’eau {ellurique, les secondes d’eau atmosphé- rique provenant des pluies ou des neiges. C’est cette différence dans la composition de l'eau qui entraîne celle des deux groupes caracté- ristiques des végétaux des tourbières. L'opinion de SENDTNER, que la base minéralogique des tourbières détermine leur formation et que les tourbières supra-aquatiques ne peuvent naître que sur l’ar- gile, est en contradiction avec ce fait que maintes tourbières ont un sous-sol calcaire ou siliceux. D’après les recherches concordantes 296 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de Poxorny, FrüH, LORENZ, SiTENSKY et RaMann, la majorité des tourbières supra-aquatiques provient de prairies Lourbeuses ou de dépôts d’humus, notamment dans les forêts. On a souvent observé qu’elles peuvent prendre naissance directement sur l'argile, done sur des dépôts inorganiques; mais c’est parce que l’eau de pluie reste stagnante sur ces couches argileuses imperméables et que les sphaignes s’y installent, en formant de la tourbe, comme on peut s’en convaincre dans les vieux fossés argileux remplis d’eau de pluie. Le plus souvent, le fond consiste en une couche d’humus produite par la flore d’une tourbière infra-aquatique ou par des arbres forestiers et qui se dépose aussi bien sur l'argile que sur divers autres sols minéraux (lehm, marne, sable). Une tourbière à sphaignes peut se former sur une tourbière infra- aquatique si la composition de l’eau se modifie ; qu’une tourbière de ce dernier type acquière toule l'épaisseur qu’elle peut avoir dans les conditions données, ou que, pour une cause quelconque, l’ap- port d’eau tellurique soit diminué, ou bien encore que cette eau s’appauvrisse par son épuisement plus ou moins complet en matières nutritives, surtout en chaux, sous l'influence des plantes de marais, l'accroissement de la tourbière prendra fin. Si, dès lors, il se forme dans les dépressions des accumulations d’eau atmosphérique, sur ce fond humique, très aqueux, les conditions deviennent favorables à l'apparition des végétaux qui donnent les tourbières à sphaignes, par exemple : Sphagnum rigidum, verum, compactum, aculifo- lium, etc., et d’autres mousses. Ces usb peuvent aussi se former dans les forêts de façons diverses, soit directement, soit après une phase de flore des prairies tourbeuses. Dans le premier cas, la production de la tourbe est sou- vent occasionnée par une couche d’alios interstratifiée dans le sous-sol", L’alios qui se forme dans les forêts sous l'influence de l’humus brut provoque, par son imperméabilité, l'accumulation de grandes quantités d’eau pendant la saison humide; les arbres végè- tent moins bien et meurent peu à peu. Le sol reçoit plus de lumière et de chaleur, ce qui active la décomposition d’une partie de l’humus E. Ramanw, Forstliche Bodenkunde, Berlin, 1893, p. 2 è 4 (2 CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 297 accumulé et favorise la végétation de la bruyère qui supplante les mousses. Les couches d'humus de bruyère s’accroissent constam- ment en épaisseur et comme, vu leur grande faculté d’imbibition, elles sont très humides, elles permettent l’arrivée de plantes telles que l'Erica tetralix, l'Eriophorum vaginalum, le Scirpus cæspilo- sus qui font de larges emprunts à la provision d’eau du sol. Ces plantes font reculer les bruyères sur les bords moins mouilleux de la tourbière et y forment des couches de tourbe. « Elles ne restent pas longtemps en possession incontestée du domaine. D'abord, en cer- tains points, qui vont s’élargissant, apparaissent des sphaignes et, de même que la forêt primitive a été supplantée par les bruyères, celles-ci ont été plus tard supplantées par les Eriophorum, lesquels ont été toujours plus acculés sur les bords par les mousses de tour- bières. » Dans toutes les tourbières de ce type on trouve donc, en allant des bords vers le centre, toutes les plantes qui prennent part à la formation de la tourbe et justement dans l’ordre de leur appari- tion (bruyère, Erica tetralix, Eriophorum vaginatum, Sphagnum). La figure 49 donne une coupe d’une tourbière de cette origine. CITES F1G. 49. — Tourbière d’origine forestière (D’après E. RAMANN). a, tourbe de sphagnum ; b, tourbe d’eriophorum ; ce, tourbe de bruyère ; d, restes d'arbres et matières organiques indéterminées ; e, sol minéral. À mesure que décroîit pour les plantes, avec le gonflement de la couche de tourbe, la faculté d’absorber l’eau qui leur est nécessaire, la bruyère fait invasion de nouveau et la tourbière marche vers une fin certaine. C’est ainsi que se termine presque toujours la forma- tion des tourbières dans les vallées, comme l’ont montré les re- cherches de P.-E. Müzzer’, D. Emeis? et A. BorGmaxn*. Les tour- 1. Études sur les formes naturelles de l'humus. Berlin, 1887. Traduit dans les Annales de la Science agronomique française et étrangère, 1889, t. I. 2. Allgemeines über Wald, Moor, und Haide in Schleswig-Holstein. Berlin, 1873. 3. De Hoogvenen van Nederland. Inaug.-Dissertationen. Groningen, 1890. Re- feral in : Forschungen, elc., vol. XIV, 1891, p. 274. 298 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. bières où il n’y à pas de restes d’arbres ont, comme sous-sol, un Callunetum ou, en son absence, un Eriophorelum. En montagne, la production des tourbières à sphaignes aux dé- pens des forêts est favorisée par cette circonstance que, sur les pla- teaux et les pentes, il se forme très facilement de puissantes couches d’humus brut sur lesquelles se fixent les mousses des tourbières (d’abord le Sphagnum aculifolium) et ces mousses constituent peu à - peu une tourbière à sphaignes. Celles qui prennent naissance dans les forêts par le second mode, c’est-à-dire qui ont pour sous-sol une prairie tourbeuse, sont beau- coup plus rares que les précédentes. Elles ont été observées, par exemple, dans des endroits peuplés d’aunes et de saules et qui pos- sèdent une humidité suffisante. Ici peuvent se montrer diverses espèces d’hypnum, de cypéracées et d’équisétacées qui, par leur présence en masse, augmentent l'humidité de ces places et facilitent le déracinement des arbres par le vent. « Ou bien la formation tour- beuse, partant de cuveltes, de fossés aqueux généralement garnis d'Equiselum limosum, Juncus communis, Sphagnum et autres plantes, s'étend aux environs dans la forêt sur l’humus humide et empêche les arbres de prospérer. Dans le cours des années, les tiges des arbres déracinés et tombés se sont transformées partiellement ou totalement en humus qui enrichit la tourbière et la rend particuliè- rement propre à la croissance des mousses de la tourbe. » (SITENSKY.) L'épaisseur de la couche de tourbe dans les tourbières à sphai- gnes est assez considérable. Ainsi, aux environs d’'Ems, la tourbière de Papenburg atteint une profondeur de 7",5 à 9°,4 et celle d’Au- rich de 8 mètres à 11°,5. Dans le sud de la Bavière, quelques tour- bières ont, suivent SENDTNER, une épaisseur de 8 mètres et plus. En Lithuanie, EISELEN affirme que certaines tourbières présentent des couches de tourbe de 10 mètres à 11,3 tandis que celles de l'Allemagne du Nord ont, en moyenne, d’après le même auteur, 4 à S mètres d'épaisseur. D’après LESQUEREUX, les tourbières du Jura ont des couches de tourbe épaisses de 9,5 à 13 mètres". 1. F. Senrr, Die Humus-, Marsch-, Torf- und Limonilbildungen, Leipzig, 1862, p.104. _à : CLASSIFICATION ET PROPRIÉTÉS DES DIVERS HUMUS. 299 En comparant ces données aveé ce qui vient d’être dit sur les tour- bières infra-aquatiques, on voit que les couches de tourbe dans les tourbières à sphaignes sont, en général, plus épaisses. En outre, la tourbe présente dans les deux groupes de tourbières de grandes différences, soit dans l’ensemble, soit dans chaque couche. Tandis que dans les tourbières infra-aquatiques elle est toujours poudreuse et d’un noir pur de haut en bas, dans les tourbières à sphaignes elle apparaît, à la surface, comme une masse jaunâtre laissant dis- tinguer les restes des végétaux ; elle devient d’un brun jaune ou d’un brun rouge jusqu’à une profondeur de 1",2 à 1,6, puis commence une couche plus compacte, de 3 à 4 mêtres d'épaisseur, qui devient plus dense et plus foncée à mesure qu’on s’enfonce et qui, à 6 mètres, prend une structure terreuse complètement amorphe et une colora- tion noir brun. c) Tourbières mixtes. Il peut y en avoir de diverses sortes, soit que les tourbières pré- cédemment décrites coexistent sur une même surface, soit que les masses tourbeuses aient un caractère indéterminé. On appelle tourbières mixtes (Mischmoore) celles où des espaces ou îlots plus du moins grands présentent une flore différente de celle de la portion principale. Ainsi, d’après SENDTNER, il y a dans le sud de la Bavière des tour- bières à sphaignes qui entourent des îlots de tourbières infra-aqua- tiques ou, au contraire, des tourbières de cette dernière sorte montrent sur certains points des sphaignes. Cela peut être dû à des différences dans la composition de l’eau. SITENSKY distingue deux sortes de formations tourbeuses à carac- tères mélangés. Il a trouvé l’une aux points de contact d’une tour- bière à sphaigne et d’une tourbière infra-aquatique et la considère comme une formation de passage, telle qu’on en voit sur lesdites tourbières quand les circonstances favorisent l'installation de la flore des tourbières à sphaignes. Ces modifications se constatent dans un seul et même marais, qui peut présenter ici de la tourbe infra-aquatique avec début de tourbe à sphaignes et ailleurs le type parfait de la tourbière infra-aquatique. 300 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. La seconde sorte de formations tourbeuses indéterminées com- prend les marais (Erlbrüche) avec eau stagnante de faible profon- deur qui se trouvent dans le voisinage des étangs ou des eaux cou- rantes sur fond de sable, de lehm, de marne ou de tourbe près des tourbières infra ou supra-aquatiques. Ces marais (Erlbrüche), par l’état de la végétation, sont tout semblables aux tourbières. Suivant la composition du sous-sol, on distingue les marais tourbeux à fond de tourbe, de sable, de lehm et de marne. A cause du taux élevé d'oxygène de l’eau, l’humus acide ne s’y forme d’ordinaire qu’en faible proportion. C’est ce qui fait qu’autrefois on désignait ces marais sous le nom de tourbières douces par opposition aux tour- bières acides (E. RaMANN). d) Tourbe de vase. La tourbe de vase (Schlammlorf) provient de restes de plantes ou d'animaux se déposant dans des eaux stagnantes ou à cours lent, pau- vres en oxygène et en principes minéraux solubles. On peut, d’après M les éléments constituants, distinguer la vase siliceuse, la vase argi- leuse, etc. Les matières organiques qu’elle renferme ont perdu géné- ralement leur structure et ont une teinte rouge brun ou noir brun. * CHAPITRE II PROPRIETÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS 1. — Propriétés chimiques. L'humus renferme les mêmes éléments que les restes des plantes et des animaux qui l’ont formé, mais dans des proportions qui va- rient avec le degré et les agents extérieurs de la décomposition. Dans le cours de ses transformations incessantes, il produit une substance qui n’a pas de composition stable et n’est même pas un mélange de combinaisons chimiques définies ; c’est un complexe de produits de décomposition en train de s’altérer et encore insuffi- samment définis. Tous les efforts faits jusqu'alors pour isoler de l’humus des combinaisons définies ont plus ou moins échoué. C’est notamment le cas pour les travaux de G. J. MuLDER*, qui à étudié avec le plus de soin les éléments de l’humus. Ils n’ont de commun que ieurs caractères physiques et quelques propriétés chimiques. a) Eléments organiques de l'humus. Ils consistent, d’après MuLDER : en w/mine et acide ulmique, élé- ments caractéristiques de l’humus brun, se formant aux dépens des matières organiques dès le début de l’érémacausis et de la putré- faction ; en humine et acide humique, parties essentielles de l’hu- mus noir, indiquant le point culminant de l’humification et se produisant surtout en présence de l’air; enfin en acide crénique (incolore) et apocrénique (variant du jaune au brun), qui provien- 1. G. J. Murner, Die Chemie der Ackherkrume. Berlin, 1861, I, p. 308-364. 302 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nent de l'oxydation ultérieure de l’humine et de l’acide humique el peuvent se transformer directement en combinaisons inorga- niques. Voici, d’après Muzner et W. DeTMErR', la composition élémen- taire de ces divers corps : Taux p. 400 de la substance sèche, cendres déduites. CARBONE. |HYDROGÈNE.| OXYGÈNE. AZOTE. | Ulmine de tourbe brune (DETMER). . 7.03 40.19 | Ulmine et acide ulmique fabriqués artificiellement à l'aide de sucre (SO EN AE et End | Acide ulmique de sucre (Murper). | Acide ulmique d'une vieille écorce de quinquina (HESSE). . Humine et acide humique de sucre (Murper). . ÉD LE CU | Humine de tourbe noire (DETMER). | Acide humique de tourbe noire et de sol arable. Moyenne (Dermer).| 59.74 Acide humique de divers sols de jardins et de champs (Dermen).|56.3-57. Acide erénique d'une terre arable (MucDER) er Se IR) 440-2447 Crénate d'ammoniaque d'une terre arable (MuLbER). . . . . . .[47.2-50.9 De l’examen de ces chiffres il ressort qu’on n’est pas encore arrivé à obtenir les divers éléments de l’humus à l’état chimique- ment pur; on ne peut donc les caractériser d’après leur compo- sition. Mais on voit par les analyses précédentes qu’ils sont plus riches en carbone que les hydrates de carbone et que leur taux d'hydrogène est à peu près celui qui existe dans l’eau. Ils peuvent dès lors être envisagés comme des hydrates de carbone fortement déshydratés ; cette opinion est corroborée par ce fait qu’on peut, 1. Landw. Versuchsslationen, vol, XIV, 1871. # F PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 303 en partant des hydrates de carbone, préparer, à l’aide d’acides très avides d’eau, des substances artificielles très voisines des éléments de l’humus. L'augmentation du carbone et la diminution de l’hydrogène et de l’oxygène dans la formation de lhumus se constatent aisément quand on compare la composition centésimale d’un hydrate de car- bone tel que la cellulose avec celle des éléments de l’humus, comme on le fait dans le tableau suivant emprunté à DETMER : HUMINE CELLULOSE. et acide humique. CATDONE NE M. ne 44.444 59.74 HYOLOZÈNE . she GANTS 4.48 ORVPÉNE RC 49.383 39-18 Les chiffres suivants obtenus par Wize et Meyer‘ fournissent un autre exemple : BOIS DE CHÊNE DÉCOMPOSÉ. BOIS DE OHÊKE. —— 2 Brun clair. Brun foncé. CANONS re 18 50.6 53.6 56.2 Hydrogène . . . . . 6.0 De 4.9 Oxygène et azote. . . 43.4 41.2 38.9 Ces analyses montrent que dans l’humification le taux du car- bone augmente, tandis que celui de l'hydrogène et de l'oxygène diminue. Remarquons aussi que les humus naturels contiennent de l'azote. On ne sait encore si cet azote entre dans la constitution des corps humiques, maisil est connu qu’une partie provient de l’ammoniaque combinée avec les acides de l’humus, qu’une autre plus importante appartient à des matières azotées inconnues (amides ?*?) qui se for- 1. Archiv der Pharmacie, Il° série, vol. LXX, 273. — Pharm. Centralblalt, 1852, p. 522. 2, À. Baumanx (Ueber die Bestimmung des im Boden enthallenen Ammoniak- stickstoffs und über die Menge des assimilirbaren Sticksloffs im unbearbeileten Boden. Habilitationschrift, 1886) a montré qu'en traitant le sol à froid avec une lessive de soude ou à chaud avec de l'acide chlorhydrique, la quantité d'ammoniaque obtenue dépasse souvent le taux réel d'ammoniaque du sol. 304 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ment aux dépens des éléments azotés des déchets animaux et végé:- taux. Get azote de l'humus est sous une forme difficilement assimi- lable qui, d’après A. Mayer, est probablement semblable à celle de l’azote des lignites et des houilles. Suivant une autre opinion, beaucoup des principes albuminoïdes des plantes sont à comparer pour l’inaltérabilité à la corne des animaux et sont encore protégés par leur mélange avec les acides de lhumus, qui ont beaucoup de ressemblance avec les tannins. La résistance à la décomposition d’une partie des éléments azotés de l’humus est attribuée par quel- ques auteurs (H. von Posr' et P. E. MuLzer *) à ce que les nom- 7 breux insectes qui en vivaient laissent à leur mort dans l’humus les parties chitineuses de leur corps, et on sait que la chitine est rebelle à la décomposition. Cette manière de voir est très plausible, car le taux de chitine peut être assez élevé dans certains humus (humus brut forestier, tourbe *). Dernièrement P. Kosryrscuerr* a montré que beaucoup des éléments azotés des matières soumises à la dé- composition étaient utilisés par les myriades d'organismes inférieurs (bactéries, champignons) qui se nourrissent des principes albumi- noïdes et de l’ammoniaque et les emploient à former leurs tissus. Jusqu'à quel point ces diverses opinions correspondent-elles à la réalité, c’est à quoi l’on ne peut répondre avec certitude pour le moment. Pour notre but, il suffit d’avoir prouvé que les éléments azotés de l’humus se trouvent en grande partie sous une forme peu soluble. (Voir Note E.) Depuis que W. DETMER a établi que l’ulmine, l’humine et leurs acides correspondants montrent une grande concordance dans leur composition et leurs propriétés, on sépare les éléments organiques de l’humus en deux groupes, suivant leur réaction vis-à-vis des alcalis : les uns, insolubles dans les solutions alcalines, se trans- forment peu à peu en acides de l’humus : ce sont les matières humi- Î{. Landw. Jahrbücher, 1888, p. 405. 2. Sludien über die natürlichen Humusformen. Berlin, 1887, p. 173. 3. V. Posr appelle ces humus coprogènes, par opposition aux humus végétaux ordi- naires. 4. Annales agronomiques, t. XVII, 1891, p. 17-38. ED FER PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 305 ques (Humusstoffe) ; les autres, facilement solubles dans les'alcalis, peuvent être séparés de leurs dissolutions par des acides minéraux plus énergiques : ce sont les acides de l’humus (Humussäure). Les matières humiques (ou humus indifférent : humine et ulmine) sont des composés dont la teinte va du brun au noir, qui sont inso- lubles dans les milieux les plus divers, se gonflent dans les liqueurs alcalines et ne possèdent aucune propriété chimique saillante. Les acides de lhumus* sont plus ou moins solubles dans l’eau pure et dans les acides faibles (phosphorique, borique), mais ils sont insolubles dans l’eau salée ou contenant de l'acide chlorhydrique et sulfurique. Ils forment avec les terres alcalines (chaux, magnésie), avec les oxydes de fer et de manganèse et les oxydules correspondants, comme avec l’alumine, des combinaisons *? appelées humates, insolubles dans l’eau et dans les solutions alcalines moyennement concentrées, mais qui se redissolvent en présence soil d’un excès d’acides, soit de carbonates alcalins. L’humate de chaux humide se décompose plus vite que l'acide humique pur (voir p. 190) en donnant du car- bonate de chaux. Celui-ci peut alors se combiner avec de nouvelles quantités d'acides de l'humus. C’est sur celte propriété que repose surtout l’active décomposition des matières humiques dans les sols riches en terres alcalines. L’insolubilité de l’'humate de chaux expli- que la clarté des eaux calcaires qui sont en contact avec des sols humiques. Les acides de l’humus forment avec les alcalis (ammoniaque, potasse, soude) des combinaisons solubles dans l’eau, comme le prouve la couleur brune* des eaux qui traversent des tourbières 1. C. G. Eccerrz, Sludien und Unlersuchungen über die Humuskorper der Acker- und Moorerde. Meddelanden fran konigl. Landbruks-Akademiens-Experimental- Jält, n° 3. Stockholm, 1888, p. 1-66. — Biperman“'s Centralblalt für Agrikultur- chemie, 1889, p. 75. 2. D'après Musver, il se forme alors des humates doubles d'aleali et de chaux, ma- gnésie, oxyde de fer, oxydule de fer et de manganèse ou d'alumine (Chemie der Ackerkrume, 1, p. 333). 3. Ce n'est pas toujours le cas, la teinte brune pouvant provenir aussi de la disso- lution de l'acide humique pur. MATIÈRES ORGANIQUES. 20 306 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ou d’autres sols riches en matière organique. Dans ces solutions alcalines, les acides minéraux forts produisent un précipité volumi- neux qui se réduit beaucoup par la dessiccation et donne un produit amorphe, brun, difficilement soluble dans l’eau. Les acides faibles (carbonique, borique) ne donnent aucun précipité. Les réactions des acides de l’humus sur les alcalis et des humates alcalins sur les acides minéraux rendent possible leur extraction soit du sol, soit de toute matière contenant de l’humus. La méthode employée par L. GRANDEAU*, méthode par laquelle il extrait du sol une substance appelée malière noire, importante à plusieurs points de vue pour la fertilité des sols, consiste à traiter la masse humique par l’acide chlorhydrique étendu pour mettre en liberté la chaux avec laquelle sont le plus souvent combinés les acides de l’humus et, » après l’avoir lavée à l’eau distillée, à extraire la matière noire par l’ammoniaque diluée. La solution, évaporée à sec, donne une masse charbonneuse noire qui est la matière noire. D’après les recherches de C. G. EGGERTz, ce résidu se dissout presque entièrement dans le carbonate ou oxalate ou phosphate d’ammoniaque, ainsi que dans le carbonate de potasse ou de soude, mais pas dans le chlorure d’ammonium, le nitrate et le sulfate d’ammoniaque, ni dans le sulfate ou phosphate de potasse. Avec une solution de chlorure de calcium ammoniacal, les dissolutions « Ê 4 k Fr , 2 des acides de l’humus donnent des dépôts complètement insolubles M dans l’eau et les alcalis caustiques, mais solubles en partie dans le chlorure d’ammonium, mieux dans le nitrate et mieux encore dans le sulfate d’ammoniaque. Les dépôts de chaux sont détruits par l’oxalate et le carbonate d’ammoniaque, le carbonate de soude et« le sulfate de potasse, avec formation d’un composé soluble d’humus et d’alcali. L'humate de chaux est dissous par le phosphate d’am- moniaque en une solution brune sans qu’il y ait de précipité de phosphate de chaux. L’acide obtenu de l’humus par précipitation avec les acides mi=M uéraux contient toujours de l'azote, même quand il est à nouveau {. Recherches sur le rôle des matières organiques du sol dans les phénomènes de la nutrition des plantes. (Annales de la Station agronomique de l'Est, 1872.) PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 307 issous dans l’alcali et reprécipité par les acides. Il subit ainsi, il st vrai, une décomposition partielle, mais l'azote ne s’en sépare as, car les nouveaux précipités sont toujours plus riches en azote que les matières dont 1ls proviennent. Même après une distillation de 4 heures et demie, avec une les- ive de soude, tout l’azote n’a pas été chassé, d’après les essais VEccerrz. Dans 8 échantillons contenant de 5.80 p. 100 à 10.70 ». 100 d’azote, il en est resté de 2.12 p. 100 à 5.30 p. 100. Les précipilés renfermaient toujours, en outre, des principes fixes qu’on doit considérer comme faisant parlie intégrante du complexe organique. C’est le cas pour le soufre, le phosphore, le fer et aussi pour l’alumine et la silice, comme EGGErTz l’a prouvé. La composilion des 13 précipités qu'il a analysés variait comme il suit : LEE ER RSR RO DE MORE 40.86-56.18 p. 100 ÉMOTOMÈNE 20. Daisies des eue: 4.33- 6.63 — JEPOTC RM PRREEPRE 25.09-37.98 — Azote . 2.59- 6.43 — Silice . 0.37-10.47 — Phosphore . 0.15- 7.58 — Soufre . re 0.55- 2.09 — Alumine et oxyde de fer . 0.38- 3.90 — Il est important, sous plusieurs rapports, de noter que l’acide humique est à ranger parmi les substances colloïdales. Ceci ne ré- sulte pas seulement de sa manière d’être vis-à-vis des solutions nutrilives (voir p. 327), mais encore des modifications que ses dis- solutions subissent par congélation. Dans ce dernier cas, l'acide humique se sépare de ses dissolutions sous forme d’une poudre de teinte foncée qui ne se dissout plus que très difficilement‘. Il est donc très vraisemblable que les acides de l’humus se com- portent dans l’eau comme l’empois d’amidon, comme la silice géla- üneuse, etc., ce qui n'exclut pas pour eux la possibilité de former 1.1l est dificile de déterminer si ce processus joue un rôle important dans la for- mation des marais tourbeux, comme on l'a souvent soutenu. FLE 308 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. | des sels, ainsi qu'il arrive pour d’autres acides se gonflant en gelée | à l’état libre (silice, acide stannique). | Parmi les éléments organiques de l’humus, il faut enfin si-" gnaler les principes cireux et résineux qu’on trouve dans tous les“ dépôts d’humus, en quantité très variable d’ailleurs. C’est l’hu-. mus doux qui en renferme le moins, puis vient l’humus brut, et ce sont les tourbes qui en contiennent le plus, jusqu’au delà de 20 p. 100. | Dans la tourbe de Dachau-Schleissheimer, près Munich, jai trouvé p. 100 de principes solubles dans l’alcool et l’éther. . D’autres recherches * ont fourni les quantités suivantes : PRINCIPES ——— RÉSINE. cireux. résineux, P p. 100. p.100. p.100. Tourbe amorphe noire (Bencswa) . Re D a CURE GE — Tourbe en exploitation de Hagenbruck Fr ji 6.20 4"5017 Tourbe de débourbage de Hagenbruck (WiEcmAnN).. 0.25 0.43 2.25 G. J. Muzper * a obtenu les résines d’une tourbe de la Frise en la traitant par l'alcool bouillant après l'avoir épuisée par l’eau. Par refroidissement il se déposait une poudre d’un blanc brunâtre. De deux autres principes restant dissous dans l'alcool, l’un, de cou- leur noire, se combinait avec l’oxyde de plomb et l’autre, d’un» vert sale, ne s’y combinait pas. Enfin, on obtint de la tourbe déjà épuisée par l’alcool une quatrième résine d’une teinte brun foncé en la traitant par le pétrole. GREBE a montré qu’on obtenait sou“ vent aussi de notables quantités de ces substances dans les sols de sable. On ne sait rien sur la formation de ces principes cireux et rési= neux. Il est probable qu'ils proviennent en plus ou moins grande partie des plantes génératrices de l’humus. Ils influent grandement 1. F. Senrr, Die Humus-, Marsch-, Torf- und Limonitbildungen. Leipzig, 186% p. 135. 2. Enpmann's Journ. fur praktische Chemie, vol. XVI, 1839, p. 495, et vol. XVII; p. 444. 4 PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 509 sur les modifications que subissent les matières humiques, en ce sens qu’ils ralentissent notablement la décomposition, ainsi qu'on l’a vu plus haut. (Voir p. 159.) b) Eléments minéraux de l'humus. Tout humus naturel renferme, à côté des principes organiques ou combustibles, une certaine proportion de matières minérales ou fixes provenant des plantes qui l'ont formé. À mesure que la matière se volatilise, elle devient naturellement plus riche en principes miné- raux, en admettant que les précipitations atmosphériques n’en dis- solvent pas une partie. Les recherches faites jusqu’alors ne permet- tent pas d'apprécier exactement dans quelle proportion le fait se produit, parce que, d’après la composition centésimale de la matière, soit fraîche, soil décomposée, on ne peut évaluer la perte absolue due au phénomène dont il s’agit. Elles montrent seulement que, parmi les éléments des cendres, c’est la polasse, la magnésie et l'acide sulfurique qui se dissolvent en plus grande proportion, la chaux et l’acide phosphorique beaucoup moins; le fer et la silice résistent le mieux à la lixiviation *. Diverses circonstances extérieures, telles que le processus de la décomposition, la nature du sol, la situation, le climat, influent suc cette perte par dissolution. Partout où les matières organiques sont soumises à une décomposition intense, la perte en principes miné- raux est nécessairement très forte, puisque les éléments des cendres passent à l’état soluble proportionnellement à la volatilisation de la matière organique. Si les conditions de décomposition sont défavo- rables, plus faible est la diminution des principes minéraux, leur passage à l’état soluble se trouvant entravé dans la même mesure que la décomposition, et sûrement ils alteindront leur maximum là où domine la putréfaction, là où les matières organiques ne s’altèrent qu'avec une extrême lenteur. Il va de soi que la perméabilité du sol, 1. J. Scarôner, Forstchemische und Pflanzen physiologische Untersuchungen. Dresden, 189$. — E. Esermayer, Die gesammle Lehre der Waldstreu. Berlin, 1876, .p. 277. — E. Ramanx, Forsiliche Bodenkunde. Berlin, 1893, p. 276. 310 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. { les conditions du ruissellement, l'intensité et la répartition des pré- cipitations atmosphériques exercent une grande influence sur la dis= solution des éléments minéraux de l’humus. c) Composition des dépôts naturels d'humus. Elle varie beaucoup suivant la matière qui les donne et les agents extérieurs de la décomposition. L’extraordinaire pénurie d'analyses ne permet d'établir à cet égard que quelques données générales qui peuvent se résumer comme il suit : = Toutes choses égales d’ailleurs, le rapport entre les combinaisons solubles dans les alcalis et l’humus dit indifférent dépend des condi- tions extérieures de la décomposition. On peut admettre en général que le terreau renferme le moins d'acide, l'humus brut déjà plus el que la tourbe est la plus riche. Plus est intense l'intervention des facteurs favorables à la décomposition (air, humidilé, chaleur, agents chimiques), plus la malière se transforme facilement en combinaisons chimiques simples et en éléments nutritifs assimila- bles pour les végélaux. C’est pourquoi le terreau (Mull) disparaît peu à peu plus ou moins complètement, la matière organique se volatilisant en acide carbonique, eau, ammoniaque (puis acide ni- trique), tandis que les principes minéraux passent à un état facile- ment assimilable. ]l ne se produit donc pas, avec cette sorte d’humus, dans ces circonstances favorables, d’accumulations importantes de détritus. L’humus brut se décompose plus difficilement en combi- naisons solubles et volatiles, aussi produit-il déjà des dépôts trop considérables. C’est dans la tourbe que la volatilisation de la matière organique est la plus faible ainsi que la transformation des principes minéraux en éléments solubles ; la tourbe est la forme d’humus la plus rebelle à l’altération. Les quantités d’azote et de principes mi- néraux qui y sont contenues se transforment très difficilement, même dans le cas où la tourbe est soumise aux conditions les plus favorables. L'état de l’azote dans les divers humus est particulièrement cas ractéristique et important sous plus d’un rapport; il dépend des circonstances extérieures. Tandis que, sous l'influence de doses 4 Li 164 ’ à + PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 911 suffisantes d’air, d’eau et de chaleur, l'azote des détritus animaux et végélaux se transform: presque entièrement en ammoniaque et acide nitrique, 1l s’accumule en partie sous forme de combinaisons difficilement lransformables, encore inconnues pour la plupart, dès que l’un des facteurs de l’érémacausis atteint un minimum, c’est-à- dire agit avec une intensité insuffisante pour une décomposition complète. Les recherches de E. W. Hizcarp' sont un éclatant exemple de ce fait; la matière noire des sols de la région aride est incomparablement plus riche en azote que celle de la zone humide, comme le montrent les chiffres suivants : TAUX D’AZOTE IF IE. ; no SD CRMPPENTE pour 109 d’humus. Région humide . . . . . . . 9.24 Région aride (plaines) . . . . 10.03 Région aride (collines). . . . 15.87 Au premier coup d'œil, ces chiffres accusent une différence extra- ordinaire dans le taux d’azote de l’humus suivant le degré d’humi- dité du sol. Quand le taux d’azote dans les sols humides types varie de 3 à 6 p. 100 pour atteindre en moyenne 5 p. 100, le taux dans l’humus des sols arides s’élève entre 12.5 et 19 p. 100, arrivant en moyenne aux environs de 16 p. 100. Donc le rapport entre les taux moyens de l’azote de l’humus des sols des deux régions est d’envi- ron 1/5. Exceptionnellement, il est de 1/6 et les chiffres maxima pour les humus arides dépassent même le taux d’azote des matières protéiques. Le manque de chaleur à autant d’influence sur le taux d’azote de l’humus que le manque d’eau. Mais c’est le défaut d’air qui semble agir, de la manière la plus saisissante, sur l'enrichissement en azote des produits de décomposition; car, de tous les humus, ceux qui se forment en l’absence de l’air (mode par putréfaction) ren- ferment, toutes choses égales, le taux le plus élevé d’azote. En généralisant ces faits, on arrive à cette conclusion : Le taux d'azote des humus est d'autant plus fort que les conditions de décomposition 1. Forschungen, etc., vol. XVIL p. 475. 9312 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sont plus défavorables el inversement. En général, le taux des ma- tières minérales des humus marche du même pas que la décompo- sition, en ce sens que, enfermées en quelque sorte dans la masse organique, elles ne peuvent se solubiliser que dans la mesure où celle dernière se décompose. On ne peut d’ailleurs, jusqu'alors, donner de chiffres, du moins pour le plus grand nombre des dépôts d'humus. Il en est de même de linfluence qu’exerce la compo- sition physique et chimique des détritus sur la composition chimique des humus. Dans cette voie, on ne connaît que quelques faits de détail. On sait, par exemple, que les détritus des hêtres forment plus facilement des acides libres que ceux des chênes et des épicéas, tandis que de tous les arbres forestiers c’est chez les pins que cette propriété existe au moindre degré. Les détritus des bruyères et des airelles fournissent au contraire des doses importantes d’acide. Enfin, la durée de l’altération influe sur la composition chimique des humus, surtout de ceux qui se sont formés dans des circons- tances défavorables. Diverses observations faites dans les tourbières, montrent que la masse s'enrichit en carbone à mesure que la pro- fondeur augmente. Dans de la tourbe séchée à l'air, j'ai obtenu” comme taux de carbone : A UNE PROFONDEUR DE — “© 10cu,5-36cmn,8 42cm,1-73cm,6 78cm,9-115cm,7 Tourbière de Cunrau . . 40.03 43.09 43.25 A UNE PROFONDEUR DE PT O",0-0m,2 Om,2-Om,5 O,5-0n,8 On,8-1m,1 4n,1-1n,4 Tourbière du Danube. 40.12 42.64 42.80 44.05 45.24 Les recherches plus approfondies de W. Dermer* font aussi connaître les variations des autres éléments et des cendres avec les progrès de la décomposition. Trois échantillons de tourbe de Jess- 1. Journ. für Landwirthschaft, XXXIV® année, 1886, p. 176. 2, Landw, Versuchsslationen, vol. XIV, 1871. : PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 313 beck (Schleswig-Holstein), séchée à 120°, renferment (en rapportant à la matière combustible seule) : COUCHE RE A 7 PIEDS. A 14 PIEDS. RARDONO A ER nee, 57.75 62.02 64.07 ENATOSÈNE.. 4 0 5 1 oo à 5.43 5.21 o.01 DSTI EL EC Pr 36.02 30.67 26.87 LOUER EN ERRRTENTEEE 0.S0 2210 4.05 LOST ONE ER ets (72) (7.42) (9.16) Donc, à mesure que l’altération progresse, les produits deviennent plus riches en carbone et en azote, plus pauvres, au contraire, en hydrogène et en oxygène; le taux des principes minéraux s’augmente aussi à mesure que la matière organique se volatilise. A l'exception de la tourbe, on ne possède que peu de résultats utilisables sur la composition des dépôts naturels d’humus. Celui-ci est d'ordinaire mélangé, surtout dans les terreaux et les humus bruts, avec une assez forte proportion d'éléments terreux dont on ne peut le séparer, si bien que les analyses se rapportent non à l'humus pur, mais à un mélange d’humus et d'éléments minéraux. Ce que j'ai appelé terreau (Mull) n’a pas encore été étudié fond. C.-F.-A. Tuxen donne, pour le terreau de hêtre séché l'air, un taux d’humus variant de 5.10 à 8.33 p. 100 ; dans un échantillon de Store Hareskov, il a trouvé 0.268 p. 100 d’azote et 1.494 p. 100 d'éléments minéraux solubles dans l'acide chlorhy- drique. Quelques analyses de l’humus brut des forêts ont été faites par A. EumerinG et G. Loces'. De l’humus de hêtre renfermait en pour-cent de la matière séchée à l’air : D ©- UMUS AS SPP AE 27 RadRen AN re le Le 0.387 Pont a 1, se 0.032 CAR PNR 7 Le 0.089 MagnéSien se pu ss 005 0.030 Acide phosphorique . . . 0.C45 1. Vereinsblall des Haide-Kultur-Vereins fur Schleswig-Holstein, X[° année, 1883, p. 107 ; XV° année, 1886, p. 65. 314 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dont | LR Ch CR Re 0.019 AZOTE es TR TE ee 0.0019 POTASSE NCA TRE 0.001 Chaur 0 Le 0,0015 Magnbsls "2 da ” 1 Acide phosphorique . . . 0.00053 | étaient solubles dans l’eau. i Dans d’autres essais, les mêmes chimistes ont obtenu les chiffres suivants : Pour 100 de substance sèche il y a : .… HUMUS BRUT de hètre sur lehm. HUMUS BRUT HUMUS BRUT | de de feuilles mélan-| bruyère sur sable.| géessursable HUMUS BRUT acide de hêtre, ÉLÉMENTS DOSÉS. En totalité. dans l’eau, En totalité. En totalité, dans l’eau. Eau combDin66. Ne ras 3.05 » 2.93 » 2,10 » 3.87 Le CON ONE PEN Ge DL 7.44 | 0.368 | 63.16 | 0.107 6.30 | 0.833 | 14.70 | 0.84 PNR RONA LE + + «| 0.37 | 0.0075] 1.47 | 0,0372] O0.145| 0.0070! 0,591! 0:022/ TD ee de 0.325 | 32.44 | 0.741 | 91.46 | 0,076 | 80.84 | 0.265 100.00 » 100.00 » 100.00 » 100.00 » Ceux-ci contiennent : Pofasse . ©. ...::,.1 1:426/| (0-0086h 02399 | 10<0081 0.594 | 0.0010! 0.711 SOU, Pre CL Neue st 0,668 | 0.0033| 0.317 | 0.0103! 0.649 | 0,0015| 0.517 2 Chaux. . . . . . « + + + + -| 1.247 | 0.0079| 0.194 | 0.0007! 0.466 | 0.0014| 0.526 "0% 28 Magnésie . . . , , . . , . | 0.557 | 0.0007| 0.149 | 0.0007| 0.310 | 0.0007| 0.355 | 0:00k Oxydo dofer-n 2 Enr. .1 2.346 | 0.00231 0.292 | 0.0088|] 0.200 | 0,0003| 1.285 AluMNE. LR FES . LT 0DT » 2.879 » 3,374 » 7.854 Acide phosphorique. , . . . ,| 0.143 | 0.0003| 0.091 | 0.0169] 0.026 | 0.0007| 0.073 ) Acide sulfurique. . . . . . .| 0.570 | 0.0098| 0.087 | 0.0052| 0.073 | 0.0017| 0.308 | 0.00 Acide silicique. . . . . .« . .[71.064 | 0,0043128.058 | 0.0060/86.521 | 0.0005168.683. 100 parties d’humus contiennent : AZOÉG 1e 4 MEME Er ce oi NOT, » 2.321 » 2,301 » 4.025 Sur 100 parties d’humus pur, il se dissout dans l’eau. . . , . , . .| 0.495 » 0.169 » Sur 100 parties d’azote total, il se dissout dans l’eau : Sous d i + 592 } , Sous ra d DRE rs 2 0.2029 0.0661 02539 Sous forme d’azote organique. | 0.1337) 0.1818 E. RamanN', dans ses recherches, a eu surtout en vue les matières. 1. Die Waldstreu, Berlin, 1890, p. 29. — Zeitschrift fur Forst- und Jagdwesen, 1883. ET PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 319 minérales. Donnons cependant, pour être complet, les chiffres ob- tenus. 100 de subtance sèche contiennent: HUMUS BRUT mm — HUMUS BRUT de pin ÉLÉMENTS DOSÉS. de pin sylvestre. Le de hêtre. ce ie | Pare Gin: langé. |bruyère. Biesenthal. brück Hohen- | Apen- Le LL: biück. rade. es | —————— ] . —— | —— Potasse . 0.655| 0.242 0.514) 0.283! 0.404| 0.921| 0.781 Soude. . 0.042| 0.242! 0.119| 0.325| 0.160] 0.059! 0.890 Chaux. . 2.623) 1.450| 1.785 2,130! 1.306| 3.090! 2.393 | Magnésie. : 0.116! 0.524| 0.606| 1.280! 2.600 1.302] 0.984 Alumine . . 6.105| 3.507| 4.869110.700! 7.410! 6.402,110.094 | Oxyde de fer . 3.227| 1.731| 1.300| 3.280| 1.150! 3.565] 4.879 | Oxyde de manganèse . 0.104| 0.443! 0.210! 0.203] 0.213] 0.360| 0.036 Acide phosphorique . .| 1.109! 1.450| 1.475| 2.140) 2,280) 2.558| 1.696 Acide sulfurique. . 2,060! 1.864] 1.350) Chlore DE 240 ESS 1 1.110! - : > | 1e 0 .:..126.4%1)14: 411110.850 | | E- Puce: af: 80 20:89 bas] | On pourrait difficilement tirer de ces chiffres des conclusions générales, parce que, d’une part, la composition des matières est extrêmement variable et de l’autre le nombre des analyses est encore insuffisant. Grâce à l’activité de la station d’essais de Brême, nous possédons des recherches plus approfondies sur la tourbe des tourbières infra et supra-aqualiques relativement aux substances qui intéressent la mise en culture de ces terrains. Citons les chiffres suivants, lirés des publications de M. FLEISCHER *. 1. Landwirthschaftliche Jahrbücher, vol. XX, 1891, p. 378. — MEnTzEL und Lexcerke‘scuer Landw. Kalender, 1888, p. 48. Voir aussi F. Senrr.. Die Torf-, Humus-, Marsch- und Limonilbildungen, Leipzig, 1862, p. 135. — F. SITENs&y, Ueber die Torfmoore Bôühmens, lrigue, 1891, p. 207-215. 316 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Composition des sols des tourbières à sphaignes ou supra-aquatiques de l'Allemagne du Nord en pour-cent de substance sèche. MATIÈRES EE © LOCALITÉS. combus- mi- tibles. | nérales, a. Couche supérieure, (Humus de bruyère). Tourbière de Lilienthal. . . . Tourbière de Hellweg . . Tourbière de Bourtang. . . Tourbière de Papenburg . . b. Couche profonde. (Tourbe de sphaigne). Tourbière de Lilienthal. . Tourbière de Hellweg . . Tourbière de Bourtang. . . Tourbière de Papenburg . . MATIERES SABLE L a LOCALITÉS. : et combus- mi- tibles. |nérales.| argile. Nickwarzbruch (Prusse occidentale). Iserauer Wiese (Prusse occidentale). Landsdorf, près du lac de Trieb (Po- méranie) . Cunrau (Saxe) . . . Fienerbrach (Saxe) . | Dresow, près de Gr. Justin (Pomé- ranie) . . Lalesie, près de Nakel Dior : Sammenthin, près d'Arnswalde (Bran- debourg) . Pœtzig, près de Scheiée re, bourg) . Celte composilion accuse, entre les divers éléments, des diffé- rences importantes qui apparaissent plus grandes encore par com- PROPRIËTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 317 paraison avec les analyses précédentes. Ces différences dans la com- position des deux groupes principaux de tourbières prennent plus d'importance par ce fait que les tourbières plus riches en pour-cent - d'azote, chaux et acide phosphorique possèdent en général une plus grande densité, si bien que, pour une surface et une profondeur déterminées, elles renferment beaucoup plus de matières solides que les tourbières pauvres. Les moyennes ci-dessous, calculées sur un assez grand nombre d’analyses de M. FLeiscHER*, donnent à cet égard une meilleure idée du fait. 100 parties de substance sèche contiennent : à 25 ACIDE AzOnE- ne CHAUX. phospho- NI TASSE. rique. nérales. Tourbière à sphaigne. TR = = = = Humus de bruyère (couche supé- MEME Dar Se amd 4027 0:05.°0 0:35 0520 Tourbe de sphaigne. . . . . . 0.8 2.0 0.03 0.25 0.05 Tourbière infra-aquatique. Tourbière de vallée . . . . . . 2.5 40.0 0.40 4.0 0.25 Tourbière de montagne. . 2:00 "520 “0-10 "F0 0.20 Une couche de 20 centimètres renferme par hectare : POIDS PO- AOrDE total. RE TT Re port Tourbière à sphaigne. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. Humus de bruyère (couche ANUÉTIENRC) > . 240 000 2 880 100 840 240 Tourbe de sphaigne . . . . 180000 1450 54 450 72 Tourbière infra-aquatique. Tourbe de vallée . . . . . 500000 12500 500 20000 1250 Tourbe de montagne. . . . 360000 7 200 72 3600 720 À mètre cube de sol frais contient en substance sèche : Tourbière à sphaigne. Humus de bruyère (couche supérieure). . . 120 kilogr. Tourhe dersphaignes +: 20 Am. 20: 90 — Tourbière infra-aquatique. Fourbe desvaléen tnt tie 250 — ROUTE Te MONAENC EE - ere ee << 180 — 1. Menrzez und LeNcerke'scuer Landw. Kalender, 1892, p. 14. 318 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. De la comparaison de ces chiffres, il ressort nettement que : 1° Le taux de chaux est la différence caractéristique entre les lourbières infra el supra-aqualiques, les premières élant beaucoup plus riches en chaux que les secondes. Les causes de ces diflérences ont déjà été indiquées plus haut (p. 290 et 295) ; 2° Les lourbières infra-aquatiques sont plus riches aussi en prin- cipes minéraux el surtout en acide phosphorique ; 3° La pauvrelé en polasse est un caraclère commun aux deux grands groupes de tourbières. Les infra-aquatiques contiennent en général, il est vrai, un peu plus de matières nutritives, mais la diffé- rence est trop faible pour être caractéristique et pour désigner, comme riches en potasse, les sols formés par les tourbières infra- aquatiques. Cette pauvreté en potasse tient probablement à ce que celte base forme, avec les acides de l’humus, des sels facilement solu- bles qui sont vite lessivés. En se fondant sur les précédentes analyses de cendres de tourbe, on voit que le Laux de soude est généralement inférieur, mais par- fois aussi supérieur à celui de la potasse. La magnésie se com- porte comme la chaux. L’oxyde de fer, l’alumine, l’acide sulfurique et la silice ne manquent jamais dans la tourbe, mais s’y montrent en proportions très variables. On peut admettre en général que l'alumine et la silice diminuent en proportion de l’oxyde de fer et de l’acide sulfurique. Parmi ces derniers principes minéraux, c’est habituellement l’oxyde de fer qui domine; il y en a 70 p. 100 et plus dans les cendres. Il résulte aussi des analyses de cendres de tourbe que : 4 Les lourbières infra-aquatiques sont en moyenne nolablement plus riches que les autres en sels de fer. Si nous passons aux matières organiques, on reconnait très nette- ment, d’après les données ci-dessus, que : o° La malière organique combustible existe dans les lourbières à sphaignes en proportion beaucoup plus forle que dans les lowr- bières infra-aqualiques, les éléments minéraux (incombustibles) présentant le rapport inverse. Ainsi s'explique pourquoi la tourbe des tourbières supra-aquatiques est bien plus combustible que celle des infra-aquatiques. Quant aux corps simples, les recherches de * PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 319 FLeiscHER et de SiTENSkY n’accusent de différences importantes, entre les deux groupes, que pour l'azote ; 6° Les lourbières infra-aquatiques se distinguent des autres par un taux d'azote bien plus élevé. L’altérabilité de la tourbe, très faible comme nous lavons dit maintes fois (p. 166 et 286) présente, dans les deux groupes de tour- bières, des différences non négligeables qui peuvent se préciser ainsi : 7° Avec des circonstances favorables, la décomposition de la ma- hère organique se fait mieux dans les tourbières infra-aquatiques que dans les autres. Ceci peut se déduire du fait établi d’abord par M. FLEISCHER‘ que, à conditions égales, l’air occlus dans le sol est plus riche en acide carbonique, ce produit final de la décomposition, dans les tourbières infra-aquatiques que dans les tourbières à sphai- gnes, comme le montrent les moyennes suivantes : 100 litres d’air confiné dans le sol renfermaient, sur 30 cen- timètres de profondeur : sou SOL MÉLANGÉ avec couverture de sable de sable, à la surface. grammes. grammes. Tourbière supra-aquatique. . . . 9,333 CO? 8,876 CO? Tourbière infra-aqualique. . . . 35,260 — 23,379 — L'air contenu dans le sol, riche en chaux, de la tourbière infra- aquatique de Cunrau, contenait donc trois à quatre fois plus d’acide carbonique que celui d’une tourbière supra-aquatique, pauvre en chaux. Dans mes expériences, les différences ont été plus faibles, mais dans le même sens. 1 000 volumes d’air confiné dans le sol? sontenaient, sur 30 cen- ümètres de profondeur, un volume d’acide carbonique de : 1892. 1898. 1894. Tourbière supra-aquatique (Haspel). , . . 4.471 3.420 3.547 Tourbière infra-aquatique (Schleissheim). . 6.743 6.074 6.278 {. Landw. Jahrbücher, vol. XX, 1891, p. 884. 2. Moyenne de 26 dosages. 320 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. M. FLeiscHer' a montré aussi que l’eau extraite de la tourbe. élait soixante-dix fois plus riche en acide nitriqué dans une tour- bière très calcaire que dans une autre pauvre en chaux, ce qui tient sans doute à la différence des taux de chaux dans les deux groupes. de tourbières (p. 187 et 191). Mentionnons enfin que l’azote dans les tourbières existe presque exclusivement sous forme organique; quand, par le desséchement, l'air peut pénétrer dans le sol, une partie relativement faible de l'azote se transforme en ammoniaque qui, dans certaines conditions encore à préciser, passe à l’état d'acide nilrique. 2’est le moment d’ajouter quelques remarques sur les : Minéraux des tourbières, ; d'autant plus que quelques-uns seront étudiés spécialement lorsqu'il sera parlé, au chapitre IE, de la culture de ces sols. | Parmi les minéraux d’origine organique, il y a tout d’abord à citer la Dopplérile? (Haidinger), sorte de charbon résineux de tourbe, produit homogène, à formation très lente, qui a été rencontré jusqu'alors dans quelques tourbières de la Suisse, de la Carniole, de la Bohême et de la Frise orientale. La dopplérite mûre se montre uniformément noire, élastique, de consistance gélatineuse, de teinte jaune brun, translucide comme une mince membrane ramollie de gutta-percha. La dopplérite en voie de formation est grenue et diffère par là de la précédente quant à ses propriétés opliques ; sa couleur varie du brun de cuir au jaune- rouille ; quand elle est très humide, elle devient gélatineuse. Ce minéral n’est pas de nature simple ; il est formé, comme la tourbe, d’un mélange variable de combinaisons organiques et minérales et, comme elle, contient presque sans exception de l’azote. Les prin= cipes minéraux y varient en qualité et quantité suivant la tourbe où la dopplérite a pris naissance. Les bases sont combinées pour la plus grande partie à la matière organique et, pour une faible part, {. Menrzez und Lencenkr'scuen Landw. Kalender, 1888, p. 50. 2, J, J. Fnün, Ueber Torf und Dopplerit, Zurich, 1883, p. 64-84. PROPRIËTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 321 aux acides minéraux qui s’y trouvent en même temps. La dopplérite consiste donc essentiellement en humates avec quelque peu de sels } VÉTSUT DS de de di inorganiques appartenant surtout aux sulfates, phosphates et sili- _cates. Suivant les conditions de production, la composition oscille entre certaines limites comme il ressort des chiffres suivants : Composition de la dopplérite séchée à 140°. (Le caleul est fait sur la matière débarrassée de ses cendres.) Gendres hs !:4, : 2.23-14.3 Carbone 3,2. 51.11-58.25 Hydrogène : : :”. 5.14- 6.29 Oxygène. en 34.16-42.49 ROLE MR EU TR 0:0°- 2:27 La dopplérite existe toujours dans la tourbe infra-aquatique qui se compose d’hypnums, de carex et de phragmites difficilement SERRE Se À & e. PART 01 7 7 F1&. 50. — Coupe idéale à travers une tourbière supra-aquatique des Préalpes (d’après Früx). E, terrain erratique; R, tourbe de gazon; H, tourbe de sphaigne; m”, jeunes noyaux de dopplé- rite ; S, grès; W, racine ou tige d'épicéa; les traits noirs indiquent la dopplérite sous des formes variées. décomposés (fig. 50). Ainsi s'explique le fort taux de chaux de ses cendres. La Fichtélile (Bromeis), qui, d’après FIckENSCHER, existe dans la tourbière desséchée de Redwitz, en Bavière, et aussi, d’après Güp- PERT, dans les tourbières d’Eger (Scheerérite), se forme aux dépens MATIÈRES ORGANIQUES, 21 d DDR " . 322 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de la résine des tiges de pins et d’épicéas enfouies dans la tourbe *. On la trouve dans les fentes de l'écorce et entre les anneaux ligneux sous forme de lamelles cristallines ou de croûtes minces, plus rare- ment en aiguilles. Elle est nacrée, Inodore et insipide, plus légère que l’eau et plus lourde que l'alcool et se dissout très facilement dans l’éther. D’après sa composition élémentaire, sa formule est CH, (Bromeis). Parmi les composés inorganiques des tourbières, il faut mention- ner d'abord la terre de diatomées (Kieselguhr) qui appartient du reste plutôt aux fossiles qu'aux minéraux. | D'après SiITENsky, les diatomées abondent dans la plupart des tourbes de Bohême qui se forment sur fond argileux dans et près les étangs. Ces tourbes ont d’ordinaire une teinte plus ou moins grise, se dessèchent vite el sont friables. Sur beaucoup de points la terre de diatomées n’est pas mélangée à la tourbe, mais se montre en couches plus ou moins étendues ayant jusqu’à 90 centimètres d'épaisseur, ou en amas de la grosseur de la tête ou plus petits, soit sur les fonds argileux au bord des tourbières, soit même en veines plus ou moins épaisses incluses dans la masse ou en nodules à sa surface. Le calcaire des lourbières (Moorkalk, Moormergel) est plus im- portant. Il se présente en nodules intercalés dans la tourbe, ou en couche continue plus ou moins épaisse, dans le fond de la tourbière, à la surface du sous-sol minéral, Dans le sud de la Bavière, le cal- caire des tourbières * forme, dans beaucoup de tourbières infra- aquatiques (Erdinger, Dachau-Schleissheimer), une couche généra- lement continue qui repose sur le diluvium glaciaire parfaitement perméable et qui est recouverte par la masse de tourbe. Le calcaire des tourbières (Alm) est blanc et à grain extrêmement fin, ce qui fait qu’il a une grande faculté d’imbibition et une très faible per- méabilité, Il forme avec l’eau une masse visqueuse. A l’état sec, il est friable et se délite à l’air en une masse pulvérulente, très meuble. Il consiste surtout en calcaire amorphe comme il résulte des ana- 1. Jahrbuch der Mineralogie, 1841, p. 848. 2. Que l’on appelle A!m dans ce pays. di à) PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 323 lyses suivantes de l’A/m de Memmingen faites par H. VoceL ‘ sur la matière séchée à l’air : ACIDO CRFROMIQNE 2 Un à ee 41,060 HU EN EM SE TE 50,307 Magnésie . ET Ti al ST à 0,098 Alamine’et oxyde de fer! : . . » - . . 0,864 LT RER RENE EE RE 0,250 BONE SERIE," 44. 4 +208 ea 20 0,463 SISTER lame et M: 0,513 [TT ONE ACC: EE RON EG PE 0,366 Matière 'organiquest 2". un dat 0 5,000 98,911 L’acide phosphorique ne s’y trouva pas une fois à l’état de trace; le chlore, l'acide nitrique et l’ammoniaque y existaient en quantités minimes. L'origine de ce calcaire des tourbières n’est pas encore suffisam- ment établie. En tout cas, il se trouvait d’abord à l’état de dissolu- tion; du moins sa forme montre qu’on doit le considérer comme un précipilé. E. RaMANN * croit devoir admettre, d’après ses obser- vations, que le calcaire des tourbières provient de la dissolution des coquilles par les acides de l’humus ; leur chaux se montre là où agissent des influences extérieures (air atmosphérique ou eau du sous-sol) et où par oxydation l’humate de chaux peut se détruire en reformant du carbonate de chaux. O. SENDTNER * pense, au con- traire, que la formation du calcaire des tourbières précède celle de la tourbe ; du moins cherche-t-il à expliquer ainsi la naissance sur fond de galets des tourbières du sud de la Bavière. D’après lui, l’eau chargée de bicarbonate de chaux s’infiltrant à travers les cailloux doit déposer peu à peu à leur surface une couche de calcaire par suite du dégagement d’une partie de l’acide carbonique ; il se forme ainsi un fond imperméable sur lequel la tourbe peut se déve- lopper. 1. Berichte des Augsburger naturhislorischen Vereins, 1885, p. 166. 2. Forstliche Bodenkunde, p. 128. 3. Die Vegetationsverhaltnisse Sudbayerns, 1854, p. 622, L 324 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. | Cette explication est très vraisemblable pour les localités en ques- tion; mais il se peut aussi, comme le reconnaît SENDTNER, que la production du calcaire des tourbières soit ailleurs postérieure à la tourbe. | Un autre minéral très répandu dans les tourbières est la pyriles qui existe sous ses deux formes, pyrile et marcasile, et provient de l’action réductrice des détritus organiques quand de l’eau lerrugi-s neuse rencontre du sulfate de chaux. Il se forme alors, par réduc- tion, du sulfure de fer dont la formule est FeS,. Ce composé, déjà si nuisible à la végétation, peut devenir néfaste quand 1l est en con« tact avec l'air, parce qu’il se transforme alors en sulfate ferreux et acide sulfurique qui, dans la proportion où ils existent parfois, dé truisent toute végétation”. Ce dédoüblement peut être représenté par l’équation chimique suivante : FeS, + 0, +H,0 = FeS0, + S0,H, | Pyrite. Oxygène. Eau. Sulfate Acide | ferreux. sulfurique. | Le sulfate ferreux peut souvent s’oxyder plus et devenir du sulfate ferrique. Celui-ci existe en effet dans les tourbières mais en bien. moindre quantité que le premier. Dans cette réaction 1l se forme des l'acide sulfurique libre avec production de sulfate de fer 5-basique” et séparation d’hydroxyde de fer ? | Le sulfate ferreux se produit AP en si grande quantité, qu’on peut obtenir facilement de l’extrait aqueux ce sel en cristaux. Sous’ l’eau, en l'absence d’air, le sulfate peut être de nouveau réduit pars les matières humiques et ramené à l’état de pyrite. Celle-ci se pré= sente dans les tourbières et dans leurs substratums à l’état finement disséminé, ne se laissant pas reconnaître à l’œil nu, ou bien en no= dules et en fortes et larges plaques (marcasite) ou en écailles minces brillantes et en petits grains (pyrite) ou souvent comme minéralisa= tion de débris végétaux (SITENSKY). 1. M. Mæncken, Zeitschrift des landw. Centralvereins der Provinz Sachsen, 1874, p. 70. — M. Feiscuen, Landw. Jahrbücher, vol. XV, 1886, p. 78, et vol. XX; 1891, p. 955. — W. Ta. Osswazo, Landw. Jahrbücher, vol. VI, 1877, p. 391. 2. E. Heinen, Lehrbuch der Düngerlehre, Stuttgart, 1866, vol. I, p. 411. op . 1 PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 329 Le sulfate ferreux et l'acide sulfurique provenant de l’oxydation de la pyrite subissent dans les tourbières de nombreuses transfor- mations qui donnent lieu à des composés divers. À ceux-ci appar- tient d’abord l’hématile brune provenant de la transformation du sulfate ferreux et du calcaire sous l’action de l’eau et de l'oxygène. Cette réaction peut s'exprimer par l’équation suivante : 2FeSO, + 2CaC0, + 3H,0 + O0 — Fe, 0,H, + 2CaS0, + 200, Sulfate Carbonate Eau. Oxygène. Hydroxyde Sulfate Acide ferreux. de chaux. de fer de car- (hématite chaux. bonique. brune). Très souvent l’hématite brune dans les tourbières est due à l’ac- tion physiologique des colonies de Crenothriz et Cladothriz, hôtes habituels des eaux de source. Elle se présente, généralement souil- lée de matières organiques et même minérales, surtout argileuses, sous forme de terre ocreuse, colorée en jaune foncé ou en brun rouge ; elle est soit en nids, soit en veines, soit en couches variant de plusieurs centimètres à quelques décimètres d'épaisseur (SITENSKY). Dans les parties les plus profondes des tourbières on trouve très souvent la limonite ou fer des marais, formée surtout d’hydroxyde de fer mélangé à du protoxyde de fer, de la silice, de l’argile, de la chaux, de la magnésie, de l’humus et du phosphate de fer. Le taux d'oxyde de fer varie de 23.24 p. 100 à 82.38 p. 100, celui de la silice de 2.80 à 12.60, celui de l'acide phosphorique de 0.19 à 10.99". La limonite constitue des masses solides, dures, de teinte brune ou noire, de forme sphérique, globuleuse ou stalactitique, se présentant en amas ou en couches continues. Elle est parfois tachée en vert ou en beau bleu par du phosphate de fer en mélange. Ce phosphate, nommé vivianile, existe aussi dans les tourbières en masses lerreuses d’un bleu verdâtre ou en nodules ou en pelli- cules, ou comme pseudomorphose de tiges ligneuses ou comme remplissage de coquilles. Selon SENFT, il peut se produire par l’ac- üon sur le carbonate ou l’humate ferreux dissous de l’acide phos- phorique formé par l'oxydation du phosphore des matières azotées 1. F. Senrr, loc. cél., p. 174. J 326 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. des végétaux des tourbières, ou encore par l’action du sulfate ferreux sur le phosphate de chaux contenu dans le bois et dans les détritus animaux. Dans la Frise orientale, le phosphate ferreux est considéré comme le signe d’une bonne tourbe”. Signalons enfin, pour être complet, le fer humique (Modereisen) formé d’humate de fer, d’eau, d’un peu d’oxyde de fer et de sulfate de magnésie et constituant dans les fossés d'écoulement une masse opaque, noire, d'éclat résineux, durcissant par la sécheresse. C’est à la présence du sulfate ferreux et de l'acide sulfurique libre dans la tourbe que beaucoup de minéraux doivent leur nais- sance. Nommons d’abord le gypse qui procède de l’hématite brune et de l’action de l'acide sulfurique sur le calcaire. Cette réaction est caractérisée par l’équation suivante : SO,H, + CaCO, — CaS0, + C0, + H,0 Acide Carbonate Sulfate Acide Eau. sul- de de car- furique. chaux. chaux. bonique. Le gypse se rencontre dans presque toutes les tourbières pyri- teuses el calcaires en croûtes formées de petits cristaux sur les parois desséchées des trous d'extraction et sur les briques de tourbe. L'action de l’acide sulfurique sur le silicate de magnésie donne dans la tourbe du sulfale de magnésie; quand l’acide agit sur un sous-sol argileux ou schisteux, il se forme dans les couches profondes argileuses du sulfate d'alumine*. Le soufre se trouve plus rarement sous forme d’un revêtement blanc jaunâtre. Il peut se déposer par l’action des algues sulfuraires (Beggiatoacées) ou par la destruction du sesqui-sulfure de fer Fes, qui se produit par la réaction de l'hydrogène sulfuré sur l’hydroxyde de fer et qui dans l’air humide se transforme très vite en un mé- lange d'oxyde de fer et de soufre *. 1. On l'appelle dans ce pays Stifel. 2. SITENSKY, loc. cil., p. 218. 3. M. Mæncken, Zeitschrift des landw. Centralvereins der Provins Sachsen, 1874, p. 69. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 321 Comme conclusion à ces considérations sur les propriétés chimi- ques de l’humus, étudions maintenant labsorption des principes nutritifs par l’humus. d) Absorption des principes nutrihifs par l'humus. Il faut tout d’abord ne pas perdre de vue que les matières hu- miques formées de substances organiques et inorganiques sont très complexes, et par suite les phénomènes qui s’y passent. La matière organique de l’hamus ne peut évidemment avoir d'action chimique que par les acides qui y sont contenus en pro- portions variables et, dès lors, elle ne peut exercer une absorption notable que sur les bases comme les terres alcalines (chaux, magné- sie), l’oxyde de fer et l’alumine qui forment avec les acides de l’hu- mus des combinaisons insolubles. Il ne peut y avoir absorption des . alcalis (potasse, soude, ammoniaque) par ce procédé, puisque les humates correspondants sont solubles dans l’eau. Mais comme lhumus renferme plus ou moins de principes minéraux, il y a, en général, aussi une forte absorption de bases alcalines paraissant tenir surtout à ce qu'il se forme des sels doubles insolubles d’hu- mates alcalins et d’humates alcalino-terreux (p. 305). Il s'ensuit que dans la nature l’humus possède, vis-à-vis des alcalis, des terres alca- lines, de l’oxyde de fer, de l’alumine, un pouvoir d’absorption con- sidérable, en n’envisageant que les processus purement chimiques. Les acides sulfurique, chlorhydrique et phosphorique au contraire ne sont pas absorbés de cette façon. Les matières humiques ont encore la propriété d’absorber par un procédé purement mécanique, à l'instar des substances colloïdales, les acides, les bases et les sels. La solution des acides de l’humus est de nature colloïdale, comme celle qu’on obtient par dissolution de la substance coagulée provenant d’une solution alcaline préci- pitée par un acide. À cet état, comme l’a démontré si nettement J. M. Van BEMMELEN', ces malières peuvent fixer certaines quantités d’autres substances provenant de la solution d’où on les a séparées ; 1. Landw. Versuchsstationen, voi. XXXV, p. 69-136. — Recueil des travaux chimiques des Pays-Bas, Leide, 1888, t. VII, p. 37. 328 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. si elles sont séparées à l’état pur et mises ensuite dans une solution d'autres matières, elles peuvent en absorber une partie. L'auteur précité nomme ces composés des combinaisons d'absorption. L’alinité est relativement faible, mais pourtant suffisante pour permettre de séparer de la gelée par de l’eau souvent renouvelée (dia- lyse) ou par lavage lent ces combinaisons qui restent dans l’eau de la gelée. Les molécules d’eau et les molécules d’acide, etc., ont entre elles une affinité plus grande que l'attraction exercée sur elles par le reste de l’eau présente. Les sels absorbés par la gelée peuvent, dans les dissolutions d’au- tres sels, provoquer non seulement des décompositions ou de véri- tables combinaisons, mais encore des substitutions chimiques. Les matières colloïdales de l’humus donnent des combinaisons d'absorption avec les acides et les sels et plus facilement encore avec les bases. Les sels et les acides sont absorbés en faible quan- tité et les bases en quantité plus grande, Les alcalis sont fixés plus énergiquement que la chaux, mais le sel de chaux est moins so- luble. Si, donc, on traite l’humus par une dissolution d’un sel al- calin, il se fixera une certaine quantité d’alcali en substitution à de la chaux et de la magnésie. Mais si on traite la combinaison soluble d’humus et d’alcali avec une solution de chaux, il se formera une certaine quantité d’humate de chaux insoluble. Quand on extrait l’humus par un acide étendu et qu’on détruit ainsi les combinaisons colloïdales de l’humus avec ses bases, on obtient le minimum d’ab- sorption. Il résulte de ces quelques faits que l’humus peut absorber sur- tout des bases en assez grande quantité soit chimiquement, soit mécaniquement. S’il contient des matières minérales, ce qui arrive d'ordinaire, en proportion plus ou moins grande, à l'absorption par l’humus vient s'ajouter l’absorption par ces matières minérales, qui est un processus analogue à l’absorption par les zéolithes. Il ré- sulte, comme lui, d’un échange de bases. De lhumus forestier provenant d'arbres creux d’une forêt de hêtres fut mis par Rau- TENBERG dans une solution de chlorure d’ammonium contenant 1. R. Sacusse, Lehrbuch der Agrikulturchemie, Leipzig, 1888, p. 176. ÉTRAAT 1,1 J F PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 329 18,605 de chlorure dans 300 centimètres cubes ; il absorba 0#,0845 d’ammoniaque. Il s'était dissous une quantité de chaux (0#°,1044) et de magnésie (080394) presque équivalente à l’ammoniaque absorbée. La quantité d’ammoniaque exactement équivalente serait 0e,0968. En faisant bouillir l’humus avec de l’acide chlorhydrique étendu, sa puissance d'absorption diminue d’un quart. Les humus pourvus de plus fortes doses de malières minérales sont naturellement capables aussi d’absorber des acides. L’acide phosphorique est fixé en proportion d'autant plus forte que les humus contiennent plus de principes minéraux pouvant former avec lui des sels insolubles”. C’est pourquoi les tourbières infra-aquatiques plus riches en terres alcalines que les tourbières à sphaignes ont un pouvoir d'absorption plus grand et plus énergique. La silice n’est absorbée qu’en pré- sence de bases entrant en combinaison avec elle. Aussi reste-t-elle souvent dissoute dans les sols humifères, tandis que la base qui lui élait associée (potasse) est absorbée. Ce fait remet involontairement en mémoire l’influence que les débris végétaux en décomposition exercent sur le développement des plantes exigeant beaucoup de silice (roseaux, prêles, herbes acides dominant dans les marais tourbeux et acides). Si on chaule de tels sols, ces plantes disparaissent, parce que la silice se combine à la chaux qu’on apporte. 2. — Propriétés physiques des humus. a) Propriétés physiques générales. A) La couleur de lhumus varie beaucoup et dépend de lespèce et du degré de décomposition, de la composition de la matière pre- _mière et du taux d'humidité. Les humus formés par érémacausis ont une teinte qui varie du brun foncé au noir, tandis que les produits de la putréfaction ont une couleur plus rouge brun. Celle-ci, par dessiccation, passe au brun noir et au noir de jais, surtout chez certaines tourbes qui, au 1. À. Kônic, Landw. Jahrbücher, vol. XI, 1882, p. 1-49. 330 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. bout de peu de temps, offrent ce changement de coloration par suite de l’action de l’oxygène. Plus la décomposition est avancée, plus la couleur se fonce. Cette couleur dépend aussi de la matière pre- mière ; ainsi les tourbes infra-aquatiques sont toujours plus foncées que les tourbes à sphaignes, lesquelles sont Jaunes, jaune rouge ou brun clair suivant le degré de leur décomposition. Des tourbes de carex et de roseaux lavées et peu décomposées sont souvent comme blanchies. A l’état humide les humus montrent une colora- lion beaucoup plus foncée qu’à l’état sec. B) La structure ou texture des couches d’humus est extrêmement variable suivant la composition des plantes formatrices, suivant la compression et suivant le degré de la décomposition. Le terreau (Mull) à toujours une texture poreuse. L’humus brut est tantôt fibreux (bruyères, pins, hêtres, airelles), tantôt terreux (steppes, fougères, etc.) et plus ou moins compact. Dans les tourbes infra-aquatiques encore peu décomposées l'humus est un tissu lâche, feutré, à fibres enchevêtrées (tourbe fibreuse), tandis que la tourbe supra-aquatique est spongieuse et friable, se réduisant en grumeaux. Par les progrès de l’altération, les diffé- rences entre les variétés de tourbe s’effacent peu à peu; les couches deviennent plus denses, plus compactes et quand la tourbe est très vieille elle présente un aspect graisseux, poisseux (tourbe poisseuse) et forme une masse plastique amorphe. Le plus ou moins de compa- cité des couches dépend de l’âge, mais aussi de la pression qu’elles supportent et de l’eau qu'elles contiennent. Souvent les tourbières présentent des stratifications qui, d’après F. Sirexsky', se montrent en Bohême le plus nettement dans la tourbe d’hypnum parmi les parties non encore complètement humi- fiées, et qui, dans les points les plus bas et les plus aqueux, sont surmontés souvent par à mètres et plus de tourbe compacte, presque amorphe, Une tourbe se formant ainsi avec excès d’eau sous la pression des couches supérieures a une stratification par- faite ; tant qu’elle est humide, les plantes qui la composent se laissent 1. F. Sirexsky, Ucber die Torfmoore Bühmens, Prague, 1891, p. 190. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 39. séparer en feuillets très minces. La tourbe provenant de plantes herbacées est toujours, dit cet auteur, beaucoup mieux stratifiée que celle qui est due aux airelles, callunes et plantes analogues. Celle-ci, desséchée, se fragmente en petits morceaux, tandis que la première manifeste sa stratification par les fentes qui s’y produisent au desséchement. La structure schisteuse de la tourbe n’est parfai- tement nette que quand elle est pressée par d’autres couches. Avec une faible pression, la tourbe conserve sa texture primitive tant que la décomposition ne la modifie pas. Assez souvent, surtout dans les tourbières infra-aquatiques, la stratification est troublée par les nom- breux rhizomes ou racines de monocotylédones aquatiques et d’é- quisetums qui traversent verticalement les couches. Dans la tourbe de roseaux pure ou mélangée, les lits sont perforés par les rhizomes jaune clair, gros comme un tuyau de plume ou même le doigt, du Phragmites communis ou du Glyceria spectubilis. Ces rhizomes gardent leur aspect même quand le reste de la tourbe a déjà pris une teinte brune, presque noire. Par la gelée l’humus devient plus poreux, parce que l’eau con- tenue dans les pores et entre les lames de la tourbe se dilate en se transformant en glace qui sépare les particules les unes des autres. Cette action n’amène pas toujours un émiettement complet de la masse, mais provoque toujours un certain gonflement. Une partie de l’eau se trouve, de la sorte, isolée et s’évapore plus vite que quand elle était absorbée par l’humus. Ainsi s'explique que les morceaux de tourbe congelés se dessèchent plus rapidement que les autres. A la suite du desséchement des tourbières, leur masse devient aussi plus poreuse, puisqu'une partie de l’eau a disparu par cette opération qui accélère l’aération des parties desséchées. Grâce à la décomposition plus active des couches d’une tourbière exposées au jour et au desséchement, les débris végétaux se frag- mentent plus ou moins complètement et forment alors une masse terreuse feutrée, semblable à de la sciure et possédant une texture poreuse (terre de tourbe) (p. 295). C) Les changements de volume des masses humiques sont en gé- néral très accentués ; elles se gonflent par l’humectation et se con- 992 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tractent beaucoup par le desséchement. L’intensité de ces change- ments varie suivant la substance et son degré d’altération. L’humus résultant de l’action de l'acide sulfurique sur le sucre n’éprouve par l’humectation et le desséchement que des changements de vo- lume insignifiants ; 1ls sont relativement plus forts chez la tourbe privée de ses éléments minéraux et résineux par l'acide chlorhy- drique et le mélange d’éther et d'alcool ; mais les plus remarquables sont ceux que présentent les humus naturels et à un degré d’autant plus élevé que leur décomposition est plus avancée. Voici quelques chiffres que j'ai obtenus en expérimentant sur des bumus et sur des sols minéraux : Augmentation du volume par humectation rapportée à 100 de la masse sèche. Hutaus ue SUCre NES RSR PRET EN ETARENS 4.814 Tourbe traitée par l'acide chlorhydrique et l'éther . . . 15.928 Tourbe naturelle (des tourbières du Danube) : Der0REORMOD 2 0e SPI0IONTeURE RE PR 46.793 De0 ,2à0 ,5 — PA tre ARTE 50.154 De0 ,5à0 ,8 — RONA RRN 60.979 De 08 ae" 1 — fée Ta LE 83.820 Sable QUATIzEUX ETOSSIeP LS PL CEE ARR TE 0.000 AGO (LAON) RES Hole de are MAS 36.608 Carhqnate dei ChaAUx PAPE SENTE AN EME TEE 5.093 Il résulte de ces chiffres que : 1° l’humus artificiel comme celui qui est traité par l'acide chlorhydrique et l’éther augmentent beau- coup moins de volume par l’humectation que l’humus naturel ; 2 celui-ci se dilale bien plus que l'argile qui occupe à cet égard la première place parmi les éléments minéraux, et 3° l’humus naturel éprouve des changements de volume d'autant plus importants que sa décomposition est plus avancée. Le gonflement considérable des humus naturels par l’humecta- tion et leur retrait, considérable aussi, par la dessiccation tiennent en partie à leur taux en matières colloïdales qui se gonflent beau- coup en absorbant l’eau et se rétractent fortement en la perdant. Avec les progrès de la décomposition, les changements de volume de l’humus sont d’autant plus accusés que le taux des substances colloï- OR Tr t E | PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 999 dales augmente davantage. Mais il est certain que les autres éléments de l'humus et les parties des plantes encore peu décomposées pos- sèdent des propriétés analogues. Cette contraction de l’humus par le desséchement fait que les tourbières desséchées se raffermissent peu à peu et d'autant plus que la tourbe y était plus décomposée et plus aqueuse. F. SITENSKY", par exemple, a observé qu’un bombement de 2°,3 s'était abaissé en trois ans à 4",90 et que, dans une autre tourbière, il s'était réduit presque au tiers. Une tourbière formée presque entièrement de Sphagnum cymbifolium s’est réduite environ à moitié de son vo- lume primitif par le desséchement, une autre (Hypnelo-cariceluin) très décomposée au quart et une tourbe de vase au cinquième. Il se forme assez souvent, par ce retrait, des fentes et des failles surtout aux bords des tourbières et parfois sur 100 mètres et plus de longueur (SITENSKY). Par suite de l'inégalité des diverses couches de tourbe au point de vue de l’état physique, de la faculté d’imbibition et du taux d’eau, ces couches chevauchent souvent l’une sur l’autre ; elles peuvent même glisser quand le fond est en pente. Au printemps, époque où la tourbière est saturée, on observe que les parois des trous d’ex- ploitation et surtout les couches aqueuses de Sphagnum bombent. A d’autres places, on voit la couche inférieure poisseuse (Hypnelo- cariceltum) aplatie et refoulée par la pression des assises supérieures plus compactes, de façon qu’il se forme, sur les parois des fossés d'exploitation, des fentes parallèles pouvant amener l’effondrement de Lout un côté”. Ces fortes modifications dans le volume de l’humus à la suite des alternatives de sécheresse et d'humidité, surtout de gel et de dégel en hiver, exercent une fâcheuse influence sur les plantes cultivées en les exposant au déchaussement. Les plantes ont leurs racines peu à peu soulevées hors de terre; elle perdent leur assiette, gisent sur le sol et sont tuées par la gelée. C’est pour cela que la culture des plantes hivernantes est exclue des sols très humiques. 1. Sirensky, loc. cit., p. 189. DPoc-sctle, D- 193. 334 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. D) La cohésion des humus, la force avec laquelle adhèrent leurs particules, est relativement faible. On peut la mesurer par la résis- tance que le sol oppose à se laisser pénétrer par un instrument tran- chant, soit par traction (cohésion relative), soit par pression (cohé- sion absolue). Des essais faits selon ces deux procédés par H. Puca- NER’, avec de la tourbe pulvérulente et des sols minéraux artificiels montrent nettement que l'humus possède la plus faible cohésion, l'argile la plus forte, le sable se plaçant entre les deux. Pour rompre un cylindre de terre * de 3 centimètres de hauteur et 2 centimètres de diamètre, il a fallu, avec un taux d’eau égal à 60 p. 100, 40 p. 100, 20 p. 100, 0 p. 100 de la faculté d’imbibition totale : 60 p. 100. 40 p. 100. 20 p. 100. O p. 100. grammes. grammes. grammes. grammes. ATOIIE Sen. re 19 224 21 158 23 641 32 949 Sable 2 ESA re 4 403 4 679 3 805 7175 HOMES = 1 292 1 000 542 47 Ces trois éléments principaux des sols se rangèrent dans le même ordre au point de vue de la résistance au couteau. Les poids néces- saires pour faire pénétrer dans le sol un coin d'acier de 2 centimè- tres de large et 1 centimètre de haut avec une ouverture d’angle de 15° furent les suivants : Teneur relative des sols en eau. (La quantité d’eau nécessaire pour l’imbibition complète étant 100.) 100 p.100. 80 p. 100. 60 p.100. Æ4O p.100. 20 p. 100. 0 p. 100. grammes, grammes, grammes. grammes, grammes. grammes. Argile. . 1140 404 9:537 11 5870 15 037 20 037 Sable. . 167 2 937 4 237 5 137 8 370 2870 Humus . 115 1 404 1 904 1 804 870 487 Si, pour mieux se rendre compte, on prend les moyennes pour tous les états d'humidité des matières employées en supposant la {. Forschungen auf dem Gebicte der Agrikullurphysik. Édité par E. Wozuny. Vol. XII, 1889, p. 195. 2. Les cylindres étaient fabriqués avec des matières saturées puis desséchés jusqu'au taux d'eau voulu. C'est ce qui explique que le sable quartzeux et l'humus séchés à l'air ont pu garder leur forme primitive. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. POUR LA COHÉSION ABSOLUE. oo EE Un Rapport Un Rapport poids de à l'argile. poids de à l’argile. Argile . 24 9251 100.00 9 833 100.00 Sable . 3415 14.08 3 870 39.36 Humus. . 720 297 1 097 11.15 POUR LA RÉSISTANCE A LA RUPTURE. 330 cohésion absolue de l'argile et sa résistance à la rupture égales à 100, on trouve : Il résulte de ces chiffres que La cohésion de l'humus est très faible relativement à celle des autres éléments du soi et surtout de l'argile. Les données précédentes ne s’appliquent qu’à l’humus pulvéru- lent qui se trouve en mélange dans le sol ou plus ou moins divisé par l’érémacausis ou par une opération mécanique. Dans les dépôts importants, Lels que les tourhières, la cohésion de l'humus s’écarte sensiblement de ce qui vient d’être dit. Tant que la tourbe forme une masse continue, elle est toujours molle à l’état humide, mais elle devient plus dure à mesure qu’elle se dessèche. Le durcissement de la tourbe par le desséchement est en général d’autant plus accusé qu'est plus forte la contraction, c’est-à-dire l’humification et la pres- sion supportée par les couches. Au reste, la consistance de la tourbe dépend des plantes qui la forment, de son mélange avec les parties du sous-sol, des éléments minéraux qui ont élé charriés ou des mé- langes qui se sont produits par intervalles. Le mélange d’éléments minéraux fait subir à la tourbe une diminution de cohésion ; quand de la pyrite est répartie dans la masse, une tourbe assez compacte se fragmente si elle est restée exposée un an à l’air et que le sulfure soit décomposé ; elle prend une texture pulvérulente. E) L’adhérence de l'humus, sa propriété d’adhérer plus ou moins aux instruments en bois ou en fer, est relativement faible et ne peut se constater que dans les sols saturés. D’après les essais de J. ScHacaBasraN’, pour faire tomber une plaque de 100 centimètres carrés reposant à plat, il a fallu les poids 1. Forschungen, etc., vol. XIII, 1890, p. 193. 336 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. suivants, avec un taux d’eau de 100 p. 100, 80 p. 100, 60 p. 100 Fe pouvoir maximum d'imbibition : 100 p. 100. 80 p. 100. 60 p. 100. grammes. grammes, grammes. Sur de l’acier poli : ATEN Te ee 3 347,4 5 212,8 3 623,6 SADIC EU CHU. 1 956,8 0 0 Humus .. 2% 1 492,6 0 0 Sur du bois : ADOBE RS. 3 997,0 4 362,0 1954,0 SADIES EN AR 1 653,2 0 0 EUMUS NE R 1 349,6 0 0 Il en résulte que l’humus n’adhère à l'acier et au bois que quand il est saturé el avec une force bien moindre que l'argile, voire que le sable. d F) Les essais concordants de J. ScHAcHBASIAN * ont établi que leg | coefficient de frottement * pour la tourbe était intermédiaire entre ceux du sable et de l'argile et qu’il diminuait avec le taux d'humidité, « comme le montrent les chiffres suivants : | OORFFICIENT DE FROTTEMENT, SURFACE DE FROTTEMENT. ————— Argile. Humus, Sable. A l’état humide. ACIOTIDON NE NAME ue 0,4335 0,6545 0,5250 BOIS NPMMERTRS SEe 0,5345 0,5110 0,8120 A l’élat sec. ACIET DORE RASE PAS 0,3320 0,3930 0,3830 Pois . 0,4195 0,4810 0,5860 G) Le poids spécifique (rapport du poids du corps à un égal volume d’eau pris pour unité), déterminé au pycnomèlre en employant la pompe à air, a élé trouvé, dans mes essais”, de 1,462 pour l’humus*, 1. Forschungen, etc., vol. XIII, 1890, p. 214. 2. C'est le nombre qui exprime le rapport du frottement à la pression. 3. Forschungen, etc., vol. VIII, 1885, p. 341. 4. Tourbe pulvérulente traitée par l’éther et l'alcool, reprise par l'acide chlorhydrique. > LL -* PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 331 de 2,503 pour l'argile et de 2,622 pour le sable. D’autres recherches ont donné des résultats semblables, comme en témoignent les chiffres suivants : POIDS SPÉCIFIQUE D de l’humus. de l’argile. du sable. D'après G. ScHüBLER!'. . . . 1,370 D'après G. TRoOMMER*. . . . 1,246 2,653 533 ,452 2,739 Donc, parmi les éléments constitutifs du sol, l’humus possède une densité notablement moindre que les principes minéraux. Les humus naturels ont une densité plus grande à mesure qu'ils sont plus mé- langés d’autres substances. Plus une tourbe est riche en cendres, plus forte est sa densité et réciproquement. Ce qui contribue sur- toat à l’élever, c’est la présence des sels de fer si lourds, tels que le fer des marais dont la densité varie de 3,4 à 4,5 et la pyrite qui va de 5,0 à 5,2. H) La densité apparente de l’humus s'éloigne encore beaucoup plus de celle des éléments minéraux du sol que le poids spécifique. Pour celui-ci, on ne considère que le volume plein du sol sans les vides qui séparent les particules, tandis que la densité apparente tient compte de ces vides. Ceux-ci étant extrêmement nombreux, vu la texture poreuse de l’humus dont le poids spécifique est déjà faible, la densité apparente de l’humus devient minime. Pour les princi- paux éléments du sol chimiquement purs supposés séchés à l'air et en couches modérément compactes, j'ai trouvé les nombres ci-des- SOUS ? : DENSITÉ APPARENTE. TT — """ Humus. Argile. Sable. 0,3349 1,0108 1,4485 La densité apparente de l’humus est donc trois et quatre fois plus petile que celle de l'argile et du quartz. Naturellement elle se mo- 1. G. ScaüBcer, Grundsätze der Agrikulturchemie. 2° édition, Leipzig, 1838, PAvol., p. 61. 2. C. Trommer, Die Bodenkunde, Berlin, 1857, p. 258. 3. Forschungen, etc., vol. VIII, 1885, p. 349. PAR MATIÈRES ORGANIQUES, 1) La] 338 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. difie suivant la cohérence plus ou moins grande des particules et suivant le degré de décomposition qui augmentent ou diminuent le poids spécifique. Des modifications se produisent dans le même sens par les éléments minéraux mélangés à l’humus et dont la densité est beaucoup plus forte que celle de l’humus. Pour ces mouifs, il n'est pas étonnant que la densité apparente des humus naturels soit parfois plus faible, mais généralement plus élevée que les chiffres ci-dessus ; on constate le mieux ces écarts en comparant les densités apparentes des différentes variétés de tourbe. D'après F. SirenskY ‘, les tourbes non ou très peu décomposéess et formées soit de sphaignes, soit d’eriophorums et de sphaignes,« ont une densité apparente de 0,18 à 0,27 prise sur la substance sé- chée à l'air. Elle est un peu plus grande pour la tourbe nan humifiée faite d’hypnums et de carex (0,25-0,54). Les tourbes bru- nes, plus fortement humifiées, pures de mélanges minéraux, telles | que la plupart des tourbières supra-aquatiques ont une densité appa- rente moyenne de 0,30 à 0,60. Ce sont les vieilles tourbes infra ou supra-aquatiques plastiques, plus ou moins dures à l’état sec et souil-« lées par le mélange des éléments minéraux du sous-sol, qui présen-« tent les chiffres les plus élevés (0,90-1,50). Les formations tourbeuses renfermant du fer des marais ont une densité apparente qui dépasse 2. D’après les recherches de M. Fceiscuer *, la densité apparente, prise sur la matière complètement sèche, varie, pour l’humus de bruyère qui se trouve à la surface des lourbières à sphaignes jusqu’à 15 centimètres de profondeur, entre 0,107 et 0,211 ; la moyenne de 39 essais a donné 0,140 ; la tourbe de sphaigne oscille entre 0,048 et 0,098. L'humus saturé d’eau a une densité bien plus élevée qu’à l’état sec ; l’eau exerce sur cette substance une influence beaucoup plus grande que sur les autres éléments du sol; cela va de soi, puisque l’humus est de tous celui qui possède la plus grande faculté d’imbi- 1, F, Sirensky, Uber die Torfmoore Bühmens, Prag, 1891, p. 195. ?, M. Fceiscuen, Landw. Jahrbücher, par H. Tac, vol. XX, 1891, p. 378 et suivantes. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 339 bition. Les nombres suivants, tirés de mes expériences, mellent ce fait en lumière : DENSITÉ APPARENTE AUGMENTATION TT du poids à à par l’état sec. l’état saturé. humectation. HOUSE ne 0,356 1,1024 209,2 p. 100 |: FC ARMENREeRS 1,0395 1 ,6208 FAT ARE SAUNA 1,4508 1,8270 25,9 — F. Sirensky a constaté des différences semblables, comme le montrent les chiffres ci-dessous : DENSITÉ APPARENTE EE à l'état sec. l’état tie Humus de sphagnum. . . . . . . . . . 0125 0,893 Humus de sphagnum et polytric . . . . . 0,18 0,73 Humus de callune et d’airelle . . . . . . 0,40 0,61 M. FLEISCHER a trouvé pour 39 échantillons d’humus de bruyère une densité apparente moyenne de 0,140 à l’état sec et 0,869 à l’état humide. J) Quant à la facilité de cullure des sols humiques, on peut la pré- juger d’après les propriétés décrites aux paragraphes D, E, F, H. Parmi les résistances qu’il y a à surmonter dans le travail mécanique des terres, il faut surtout considérer la cohésion, la ténacité, le frot- tement et le poids. D’après ce qui vient d’en être dit, on peut les représenter d’une manière approchée de la façon suivante : ARGILE. SABLE. HUMUS. RE EL 1 208 2 Au rs forte faible faible Ténacité (60 °/, du pouvoir maximum d'imbibition). forte faible faible Frottement (sur acier et bois). . . . . . . . faible fort moyen Densité apparente. . . . . . . . . . . . . moyenne forte faible En somme, dans le travail du sol, l’humus offre les plus faibles résistances, l'argile les plus fortes et le sable se place entre les deux. 1. Tourbe pulvérisée, traitée par l'acide chlorhydrique et le mélange d'éther et d'alcool. 340 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. b) Rapports de l'humus avec l'eau. La quantité d’eau du sol dépend d’un certain nombre de proprié- tés physiques dont chacune doit ici être étudiée de près, si l’on veut comprendre les processus compliqués qui se passent dans la na- ture. A) Circulation de l'eau dans le sol. — Comme tous les corps po-. reux, les divers humus ont la propriété de conduire l’eau à l’état capillaire. Elle s’y meut ainsi, lentement d’ordinaire, surtout si la masse esi compacte ‘ ; à mesure que le taux d'humidité augmente, les conduits capillaires se rétrécissent sensiblement par suite de l'augmentation de volume des particules. Dans ces conditions, la circulation capillaire y est plus lente que dans l’argile qui, de tous les éléments minéraux des sols, oppose le plus de résistance au mouvement de l'eau. Quand les particules sont en couches plus meubles, que la substance est à l’état pulvérulent, la circulation est notablement activée, mais n’alteint pas encore la vitesse qu’elle a dans le sable quartzeux, tout en étant supérieure à celle de l’argile®?. En ce qui concerne la vitesse de circulation, ce qui influe surtout c'est la texture plus ou moins compacte. L’humus exerce une in- fluence marquée sur la hauteur à laquelle l’eau peut s'élever; pour- tant c’est seulement dans certains cas et dans des circonstances favo- rables que lhumus pur, d’après les observations faites jusqu'ici, pourrait élever l’eau par capillarité à plus de 1,50 ou 2 mètres de hauteur. La circulation capillaire ne se produit qu’avec un taux d’eau assez élevé. Elle cesse dans l’humus quand le sol ne contient plus qu’en- viron la moitié de son taux d’eau maximum, et elle est remplacée par un mouvement beaucoup plus lent provoqué par le passage d’une particule à l’autre de l’eau retenue énergiquement à leur sur- face, Quand la couche d’eau qui entoure chaque particule descend au-dessous d’une certaine limite, toute circulation s’arrête. 1. H. v. KzEnze, Landw. Jahrbücher, 1877, 1° fascicule. 2. E. WozLny, Forschungen, elc., vol. VIII, 1885, p. 209. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 341 La pénétration de l’eau dans la masse, son mouvement de haut en bas, se fait aussi très lentement dans l’humus. Dans les couches saturées, les pores se rapetissent par gonfle- ment des molécules et opposent au mouvement de l’eau une éner- gique résistance. Quand les couches sont plus meubles, qu’elles possèdent d'assez gros interslices, l’infiltration de l’eau est plus prompte. Dans les dépôts naturels d’humus (tourbières), la circulation de l’eau ne se fait remarquer que quand la tourbe s’est éloignée du plan d’eau par les progrès de son accroissement ou quand ce niveau des eaux souterraines s’est abaissé par le desséchement. Dans ces conditions, la capillarité est extrèmement variable ; elle dépend des plantes qui ont formé l’humus et de leur degré de décomposition. En général, la tourbe des tourbières à sphaignes est, toutes cir- constances égales, capable de pomper l’eau à un bien plus haut degré que celle des tourbières infra-aquatiques. Ces différences tien- nent surtout à la structure anatomique des plantes. Comme nous l'avons dit plus haut, les tiges de sphagnums des tourbières supra-aquatiques forment un amas de tubes cylindriques extrêmement étroits qui conduisent très bien l’eau grâce à leur grande capillarité. Ces tiges se ramifiant chaque année deviennent toujours plus drues. L’eau y est bien mieux pompée que dans les tourbières infra-aquatiques, où manquent les cellules capillaires des tiges et où le nombre des tubes capillaires est beaucoup plus res- treint. Du reste, la circulation de l’eau dans la tourbe des deux groupes de tourbières peut être différente ; elle dépend, disions- nous, tant de la structure et de la densité des plantes formatrices que de leur degré de décomposition. Quand cette décomposition est peu avancée, l'eau circule bien mieux que dans le cas contraire. La pulvérisation mécanique de la tourbe favorise singulièrement La ca- pillarilé et d'autant plus que les fragments sont plus fins. Ce fait est de grande importance pour la culture de ces sols, comme on le montrera dans le troisième chapitre. B) La facullé d'imbibition est la propriété que possède le sol de retenir l’eau plus ou moins avidement. Ces quantités d’eau s’expri- 342 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ment utilement en pour-cent du volume du sol pour des raisons qui ne peuvent trouver place ici”. L’eau, après cessation de tout mouvement, est retenue dans le sol tant par l'attraction de surface que par la force capillaire et par l’ab- sorplion qu’exercent les substances colloïdales. Si l’on examine une tranche de sol humide quand toute circula- tion y est arrêtée, on voit que le taux d’eau augmente de haut en bas et devient constant à partir d’une certaine limite, quand la tran- che de sol est suffisamment épaisse, La cause de ce fait tient à ce que l’eau dans les couches superficielles n’est retenue que par l’attrac-M lion de surface ei les plus fins capillaires, tandis que les espaces moins étroits se vident. Plus la couche est profonde, plus il y a de ores assez larges qui contribuent à retenir l’eau jusqu’à ce qu’enfin O , h dans la partie la plus basse, des colonnes d’eau se forment mème dans les larges vides ; alors le sol est saturé. C’est en se fondant sur cette observation que l’on distingue une faculté d’imbibition absolue ou minima qui est celle des couches superficielles, dans les sols pro- fonds, due à l’intervention des plus fins capillaires et une faculté d’imbibition complète ou maxima pour laquelle tous les espaces ca-x pillaires du sol sont remplis d’eau. | | | ; | Voici d’ailleurs les différences que j'ai trouvées pour les prinei- paux éléments du sol” à l’état pur et pulvérulent : Faculté d’imbibition en pour-cent du volume. MAXIMA. MINIMA. HUMUS EN e 74.59 LEE ES ATOIO ue ALLIE 58.13 58.19 SADIE ER At ER 37.62 33.04 Ces chiffres prouvent que La faculté d'imbibilion est la plus forte pour l'humus, ensuite pour l'argile et qu’elle est la plus faible dans le sable. Cette faculté extraordinaire d'imbibition de l’humus, qui ressort des chiffres précédents, est due, d’une part, à la ténuité de ses ca- 1. À. Maven, Landw. Jahrbücher, 1874, p.753, et Füuzinc's Landuw. Zeilung, 1875. 2. Forschungen auf dem Geb. der Agrirulturphysik, vol. VII, 1885, p. 195 et 1984 D 4 CA wr PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 343 pillaires, d'autre part, à la porosilé des éléments du sol et à sa te- neur en substances colloïdales. Les particules résultant de la décom- posilion des végétaux sont comme traversées par des capillaires très fins, qui absorbent énergiquement l’eau à leur portée. Il en est de même des substances colloïdes qui, en s’imbibant, augmentent de volume et diminuent le diamètre des capillaires en les comprimant, d’où résulte un ralentissement du courant. Bien que la faculté d’imbibition des humus qui existent dans la nature en grande masse (tourbières) soit aussi très élevée, elle oscille pourtant dans de larges limites. Ces différences dépendent surtout des propriétés des plantes constituant l’humus, du degré de décom- position et de pulvérisation de la masse, et enfin de sa compacité. On peut s’en rendre compte d’ailleurs en constatant que la tourbe des tourbières à sphaignes possède une faculté d’imbibition supé- rieure à celle de la tourbe des tourbières infra-aquatiques formée surtout de carex. Dans la première, entre en ligne de compte non seulement la ca- pillarité déja mentionnée des tiges de sphaignes, mais encore la faculté d'imbibition de leur enveloppe, notamment des cellules hyalines des feuilles, dont les pores nombreux permettent la péné- tralion facile de l’eau qui y est retenue grâce aux fibres en bande- lettes ; tandis que dans la seconde catégorie de tourbes, toutes ces conditions manquent. Pour montrer à quel point différent les facultés d'imbibition des tourbes hautes et des tourbes basses, il n’y a qu'à consulter mes chiffres ci-dessous. Les matériaux utilisés pour mes recherches se trouvaient à l’état compact et finement pulvérisés ; ils furent employés de telle façon que, toutes choses égales d’ailleurs, les chiffres obtenus expriment la faculté moyenne d’imbibition. Faculté d’imbibition. VOLUME POIDS VARIETES DE TOURBES : p. 100. p. 100. Tourbières hautes : + Tourbe de Oldenbourg, peu décomposée, fine (<< 1m), 78.6 454. Tourbe de Oldenbourg, peu décomposée, fine (<< 1"), 10-504 Tourbe de Oldenbourg, peu décomposée, fine (<< 1"), 81.8 621. Tourbe de Oldenbourg, peu décomposés, grosse (> 4m), 79.7 465. Tourbière de Haspel (Mull), plus décomposée, fine RE RL 0.0 17058) 339.4 WÙ GG tt © 344 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. VOLUME POIDS ÿ ÉTÉ E BES : VARIÉTÉS DE TOURBES p. 100. p- 100. Tourbières basses : = Tourbière de Schleissheim, très décomposée, fine (> 1m), 55.5 128.8 Tourbière de Schleissheim, très décomposée, fine (> 1®m). 62,4 149.7 Tourbière de Schleissheim, très décomposée, fine (> 1mm). 55,2 163.5 Tourbière de Schleissheim, très décomposée, grosse (er AR rte à: 0 IEEE, de EPS TETE l Tourbière du Danube, très décomposée, fine (<< 1"%®) , 67.2 153.1 a ox or C9 19 —_ D'après ces’'chiffres, les tourbes des tourbières haules ou supra- aqualiques possèdent une facullé d'imbibition supérieure à celle des lourbes des tourbières basses. Les matériaux employés ayant été com- plètement séchés au préalable absorbaïent beaucoup moins d’eau que s'ils avaient été humides ; les chiffres précédents ne donnent donc que les différences relatives entre les deux sortes de tourbes et nullement des valeurs absolues. En réalité et dans les conditions naturelles, la faculté d’imbibition absolue est beaucoup plus grande. La tourbe de sphaignes non ou peu décomposée peut, dans certaines circonstances, absorber de 1000-2000 p. 100 d’eau en poids, tandis que dans les mêmes conditions la tourbe infra-aquatique n’en absorbe que de 390-600 p. 100”. On voit donc que la faculté d’imbibition peut beaucoup varier pour les deux espèces de tourbe. Ceci s’ex- plique très simplement par les différences entre les plantes qui les constituent et par les différences dans leur état et leur végétation. La facullé d’imbibilion de la tourbe diminue à mesure que pro- gresse la décomposition de ses végétaux. Cette assertion de prime abord paraît plutôt bizarre, et en réfléchissant qu’avec l’humification il se produit une quantité de substances colloïdales attirant l’eau, 1. Les différences dans les facultés d'imbibition relativement au volume sont natu- rellement beaucoup plus légères, puisque les taux sont toujours inférieurs à 100. Une tourbe de sphaignes peu décomposées, par exemple, peut contenir sous une densité apparente de 0,050, 10 p. 100 d'humidité hygroscopique, et sous un poids spécifique de 0,3,98.50 volumes d'eau pour 100 volumes (état de saturation). La faculté d'imbi- bition est done en volumes de 98,5 p. 100, tandis que, suivant la densité, dans les mêmes circonstances, elle est de 1.973 p. 100. Dans les mêmes conditions, la faculté d'imbibition avec une densité apparente de 0,150 serait, rapportée au volume, de 95.52 p. 100 et, rapportée à la densité, de 637 p. 100. À saturation, le volume d'eau absorbé est d'autant plus petit que l'espace occupé par les particules solides est plus grand, c'est-à-dire que, sous volume égal, la faculté d'imbibition de l'humus est inver- sement proportionnelle à sa densité apparente. (4 H PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS, 345 on serait porté à admettre le contraire. Cependant, il est connu que ce sont les plantes intactes ou peu décomposées qui possèdent au plus haut degré la propriété d’absorber l’eau. Au fur et à mesure qu’elles se détruisent et deviennent amorphes, leur faculté d’imbibi- lion subit une diminution qui ne peut être compensée par l’accrois- sement concomitant, mais peu important, des substances colloïdales. A côté du degré de décomposition des végétaux, la densité de la tourbe ainsi que son émiettement ont aussi leur influence sur la faculté d’imbibition. Plus la tourbe est dense, plus, à égalité de com- posilion, sa facullé d'imbibition est faible, el réciproquement. Par une pulvérisation mécanique on augmente d’autant plus cette pro- priété que les particules sont plus fines. Dans une tourbe pulvérisée en partie amorphe, renfermant encore des feuilles de sphaignes non décomposées, la faculté d’imbibition sera d'autant plus grande qu’il y aura plus de feuilles et de cellules corticales de sphaignes dont l’humification sera peu avancée ; ceci s'explique par la structure des sphaignes (F. SiTexsky). Cette der- nière espèce de tourbe absorbe, grâce à son état meuble, propor- tionnellement à sa densité, plus d’eau que la tourbe plus compacte, ce que prouvent d’ailleurs mes chiffres. Faculté d'imbibition en pour-cent du poids TOURBE RE d'Oldenbourg. de Haspel. de Schleissheim. Es a. "© — fine. fine. fine. grossière. p. 100. p- 100. p- 100. p- 100. Couche meuble. . . . . . 599.9 483,5 202.3 181.4 Couche compacte. . . . . 497.2 339.4 163.5 (ove La faculté d’imbibition rapportée au volume augmente à mesure que les particules sont plus serrées ; voici mes chiffres : Faculté d'imbibition en pour-cent du volume. TOURBE CRT d'Oldenbourg. de Haspel. de Schleissheim. = = —— —— fine. fine. fine. grossière, p. 100. p. 100. p. 100. p. 100. Couche meuble. . . . . . 64.4 68.4 54.7 59.3 Couche plus compacte. . . 1023 70.3 55.2 66.6 La faculté d’imbibition varie encore suivant le taux d'humidité de 346 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. la tourbe. En général, plus elle est sèche, plus l'absorption est diffi- cile. Tandis que les matières peu ou pas décomposées, malaxées avec l’eau, s’en saturent, quoique lentement, la tourbe fortement humifiée n’absorbe pas d’eau quand elle est sèche ; elle devient inimbibable. On peut s’en convaincre dans les tourbières fortement desséchées dont les couches amorphes ne s’imbibent jamais. Elles ne font pas remon- ter l’eau des couches inférieures et les précipitations atmosphériques s'infiltrent à travers les vides non capillaires sans humecter leurs parois. La cause de ce phénomène est encore peu connue. Il est pro- bable que les éléments de la tourbe desséchée sont recouverts d’une fine couche de résine, qui empêche l’imbibition‘. Enfin il ne faut pas oublier que la gelée provoque dans les sols tourbeux humides des modifications liées à une diminution de la faculté d’imbibition. D’a- près FLeiscrEer ? un échantillon de sol tourbeux qui contenait 1 631 grammes d’eau à perdu après la première gelée 125 grammes et après la seconde 25 grammes, soit en tout 150 grammes d’eau ou 9.1 p. 100 de son taux primitif. Plus les vides produits par la gelée dans la tourbe sont grands, plus sa faculté d’imbibition diminue. CG) La perméabilité (à l’eau), c’est-à-dire la quantité d’eau capable de filtrer dans un temps donné à travers une couche de sol d’épais- seur déterminée est extrêmement faible pour l’humus pulvérisé. La quantité de liquide exprimée en litres, filtrée dans l’espace de 10 heures sous une pression de 100 centimètres cubes d’eau, à travers une couche de 30 centimètres de haut et de 19,634 centimètres carrés de seclion est, suivant mes recherches, pour les tourbes de *: | GROSSEUR DES PARTICULES en millimètres. Aibling (Bavière du Nord). . . . . 0,01-0,114 0,018? OMENDOUTE ER EEE 0,01-0,250 0,2582 Argile \ka6ffls ne 2 ic er 23 » 0,000 Dale CREME EE Neon 0,01-0,250 2,586 {. Lonenz, Drilles Programm des K. K. Gymnasiums. Salzburg, 1853. Moore von Salzburg. Flora 1838. Wiecmann (Uber die Enlslehung, Bildung und das « Wesen des Torfes, Braunschweig, 1837, p. 17) fait observer que l'acide humique complètement sec n'est que très dificilement soluble dans l’eau. 2. M. Fsuiscaer, Landwirthschaftliche Jahrbücher, vol. XX, 1891, p. 784. 3. E. Woziny, Forschungen, etc., vol. XIV, 1891, p. 16. +4 PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 347 Donc l’humus pulvérisé est presque imperméable à l’eau. La per- méabilité augmente avec le volume des particules, mais elle n’at- teint jamais celle des sols minéraux à particules égales. La cause de celte propriété de l’humus est sans contredit celle-ci: par suite de l'imbibition, les particules gonflent et s'étendent en tous sens au détriment des espaces capillaires qui se rétrécissent et finissent même parfois par s’oblitérer complètement. Dans la nature, où lhumus se trouve en grande masse, comme, par exemple, dans les tourbières, la perméabilité est en général un peu plus grande que ne l’indiquent les chiffres ci-dessus, parce que d’abord il existe dans la masse de grands espaces qui se vident rapidement et que, par la dessiccation, il se forme d’autres vides dus à la contraction de la matière. La perméabilité dépend d’ailleurs de la densité plus ou moins grande de la masse. Ainsi, moins la tourbe est dense, plus les quantités d’eaux filtrantes sont grandes, el vice versa. D) La facullé d'évaporation se mesure par la quantité d’eau que l'unité de surface évapore dans l’atmosphère. Elle dépend, d’une part, de la richesse du sol en humidité, d’autre part, de la manière suivant laquelle cette dernière est remplacée à la surface par capiliarité. En considérant que l’humus a une faculté d’imbibition très grande et une conductibilité faible, mais suffisante pour élever l’eau à d’assez grandes hauteurs, on comprendra que l’évaporation acquiert une certaine importance dans les sols humiques. On peut d’ailleurs s’en convaincre en jetant un coup d'œil sur les chiffres suivants ' qui montrent en même Lemps les différences avec les autres éléments des sols à l’état finement pulvérisé : Quantité évaporée par 1 000 centimètres carrés exprimée en grammes. SOLS DRAINÉS. TOURBE. ARGILE. SABLE. Du 5 juin au 6 juillet 1883. . . . . . 7 078 5 248 4 465 Du 11 septembre au 17 octobre 1883. 4 449 AN? 3 328 On voit donc d’après ces résultats que l’humus est de lous les élé- ments des sols celui qui possède la plus grande facullé d'évaporation. Ceci, d’après d’autres osservations, n’arrive que quand, comme 1. G. Eser, Forschungen, etc., vol. VIT, 1884, p. 81. 348 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dans les recherches précédentes, la couche de sol est peu épaisse ! | et finement pulvérisée. Mais lorsqu'elle est plus épaisse et que les grains sont plus gros, l'humus s’évapore moins que l'argile, car en ce cas il ne conduit plus assez rapidement l’eau à la surface et ses grandes lacunes en ralentissent encore l'ascension *, C’est ce qui arrive par la dessiccation des couches superficielles. Dès qu’elles sont desséchées, l'influence des facteurs de l’évaporation sur l’hu- midité du sol diminue considérablement*. Cet asséchement des couches superficielles ne se montre que quand la richesse en eau du sol est tombée à 50 p. 100 environ de sa faculté d’imbibition maxima et que l’ascension par capillarité a cessé. L’évaporation est d'autant plus favorisée, au contraire, que le sol contient plus d’eau au delà de cette limite. En se basant sur ces phénomènes, on explique facilement le fait suivant. A la suite d’une dessiccation prolongée, l’évaporation d’un sol humide diminue constamment pour arriver à un minimum, dès que l’action de la capillarité s’ar- rête, par diminution de la provision d’eau en dessous d’une limite déterminée. Cette couche superficielle desséchée protégeant ainsi le sol contre une dessiccation plus profonde, fait que, s’il est nu, son taux reste désormais constant et assez considérable. A côté de la grosseur des particules constituant l’humus, leur degré de cohésion joue aussi un rôle au point de vue de l'évapora- tion. Elle est d’autant plus forte que la masse est plus dense et la conductibilité plus grande et réciproquement. Lorsqu'il y a satura- tion, les différences entre les facultés d'évaporation des diverses es- pèces de sols disparaissent, puisque chacun est, dans ces conditions, pourvu à peu près de la même dose d’humidité et fournit à l’évapo- ration des quantités égales *. E) L'influence globale des facteurs de l'humidité du sol se fait sen- tir dans la nature différemment, suivant l’état de l'atmosphère. Par un temps humide, le sol, après avoir absorbé la quantité d’eau que 1. 10-20 centimètres. 2. E. Wociny, Forschungen, etc., vol. VIT, 1884, p. 283. 3. E. Wozzny, Forschungen, etc., vol. II, 1880, p. 325. i. C. Esen, Forschungen, etc., vol. VII, 1884, p. Si. —E. WorLny, Landwirth- schaflliche, elc., vol. V, 1876, p. 457. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 349 lui permet sa faculté d’imbibition, laisse filtrer le surplus dans la pro- fondeur. Par un temps sec, au contraire, le sol perd par l’évaporation une plus ou moins grande quantité d’eau d’imbibition qui est exacte- ment remplacée jusqu’à saturation par les pluies qui surviennent, leur surplus s’écoulant toujours dans la profondeur. De là des variations et des osallations continuelles du degré d'humidité du sol, dépen- dant de sa composition physique et de l’état atmosphérique. Mes recherches’ au moyen du lysimêtre en donnent une idée suffisante. Taux moyen d’eau, en pour-cent du volume, jusqu'à une profondeur de 0",30. TOURBE. LEHM. SABLE. Du 1°* avril au 30 septembre 1882. . 43.90 34.35 11.68 Du 5 avril au 30 septembre 1884. . . A2 12 34.23 12 Moyennes des 2? années. . . . 43.01 34.29 42.01 HAUT AUS SC TE 3.28 2,835 Î Nous voyons donc, d’après ces chiffres, que l’humus (tourbe) con- tient le plus d’eau ; vient ensuile l'argile et en dernier lieu le sable. La tourbe contient trois fois et demie, l'argile presque trois fois plus d’eau que le sable. Évidemment, la faculté d’imbibition est de la plus haute impor- tance pour la teneur du sol en eau; on peut déjà le prévoir d’après ce fait que les matériaux employés dans les recherches précédentes se rangent d’après leur taux d’eau en volume dans le même ordre que d’après leur faculté d’imbibition. Plus celle-ci est grande, plus l’in- filtration dans les couches profondes diminue nécessairement el vice versa. C’est pour cela que la quantité d’eau qui s’infiltre dans les sables est supérieure à celle qui s’infiltre dans l’humus et dans l'argile. L’inverse a lieu pour l’évaporation, puisque les pertes d’eau par la surface augmentent ou diminuent avec le taux d’eau du sol et que les couches superficielles se dessèchent dans le même rapport d'autant plus lentement ou d’autant plus vite et protègent plus ou moins efficacement les couches sous-jacentes contre l’évaporation. Les deux facteurs, filtration, évaporation, qui avec la faculté d’im- bibition règlent le taux d’eau du sol, varient suivant la composition 1. E. Wozrny, Forschungen. elc., vol. XVIII, 1895, p. 36. 390 .. DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. mécanique des matériaux. Dans le sable, la filtration Pemporte sur l’évaporation, tandis que le contraire a Jieu dans l’humus et dans l'argile, Cela résulte clairement de la comparaison des résultats ob tenus ci-dessous : TOURBE. LEBM. SABLE, | AT = — à 1882 : cent. cubes. cent. cubes. cent. cubes. Évaporation par surface de 400 centim. carrés. 13 216 15 718 7 893 Infiltration par surface de 400 centim. carrés \ Sur 05 He /DroloneEure AMP MERE 10415 51395 16 63S 1884 : | Évaporation par surface de 400 centim. carrés. 11 186 14 373 7 198 Infiltration par surface de 400 centim. carrés SUP OMES Te PrOTON TUE EE CET 8 888 5 991 13 256 Be ces chiffres il ressort nettement qu’en moyenne, abstraction faite de la marche de l'humidité du sol, les effets de l’évaporation et de la perméabilité se contre-balancent, c’est-à-dire qu’à l’augmenta- tion de l’un fait contrepoids la diminution de l’autre, de telle sorte que les sommes de ces chiffres sont égales et que, par suite, la fa- culté d'imbibition trouve sa principale expression dans la provision d'humidité du sol. Pour bien apprécier ces rapports, 1l ne faut pas oublier que dans un seul et même genre de sol l’humidité est régie par la grosseur“ des grains *. La tourbe à gros grains, employée dans les recherches précédentes, aurait eu un taux d’eau plus élevé si les particules» avaient été plus fines. De même, l'argile pure, formée des plus fines particules du sol, aurait eu une faculté d’imbibition plus grande que le lehm employé à sa place. Il est certain enfin que, pour le sable aussi, les résultats auraient été différents avec des éléments plus fins. Donc pour avoir une image exacte des rapports de chaque sol avec l’eau, il faut tenir grand compte de son état mécanique. Les diffé- rences respectives seront, dans chaque cas concret, en partie autres que celles que nous avons trouvées, mais elles présenteront néan- moins les faits dans le même ordre, car, comme nous l’avons montré plus haut, l'humus et l’argile absorbent, en toutes circonstances, plus d’eau que le sable. {. E. Worzny, Forschungen, elc., vol. XVI, 1893, p. 384. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 201 F) La couverture vivante, on l’a prouvé précédemment avec dé- tails (p. 238), provoque une absorption notable d’eau qui augmente à mesure que les plantes poussent plus serrées et que les circonstances extérieures sont plus favorables à l'évaporation. C’est pour cette rai- son que, pendant la saison chaude et en l'absence de pluies, l'humidité dans les sols humiques peut descendre, Jusqu'à une assez grande profondeur, à un taux nuisible à la végétation d'autant plus facile- ment que le degré d’humidilé, pour lequel les plantes peuvent végéler le mieux, donner leur maximum de produit, esl beaucoup plus haut pour l'humus que pour les aulres éléments constituants du sol. Je l'ai démontré : en cultivant une seule et même plante dans trois sols wariant par leurs propriétés physiques (sable, lehm, tourbe) et munis d’un taux d’eau variant de la même manière pour chacun des trois sols. La perle d’eau par l’évaporation à été remplacée par des arrosages quotidiens, de sorte que, pendant toute la durée des recherches, le sol de chaque pot avait presque constamment le degré d'humidité indiqué ci-dessous. Voici les résultats : Orge de printemps (5 plantes). (Volume du sol : 3550 centimètres cubes.) TAUX D'EAU j . LEHM. SABLE. du sol outre = = | —————| VYhumidité : Poids de la récolte b Poids de la récolte j Poids de la récolte hygroscopique. en grammes. RE — en grammes. en grammes. Nombre des grains Nombre des grains | Grains. Nombre Grains. Total. | Paille, © © & 0 [=] © 1 2 mn _ - 1] Où © À & F C9 æ © = Pr Ot © © © © 00 D 00 & © QD 1 O1 or a 9 C2 19 OO O1 19 © Le] 2 _ _ D em 1 . m 7 Der À À —J © O1 © © © D © «© oO o ou + à ww me © © $ es : 9 9 © 19 OO I NW & © Fr Ut O (1 © © © D œ w © W Ut & © ND ND À ©» 0,4 0,6 5,3 6,1 758 9,2 1,4 2 CS CO D 1 — © © A WW + OO 1 1 À © mn mn Le] mn 2 1. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. XV, 1892, p. 427. 392 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. | D'après ces chiffres, nous voyons nettement que les plantes peu- vent végéter et donner une récolte dans le sable déjà avec un taux. d’eau de 5 à 15 p. 100 en volume, tandis que dans le lehm et la, tourbe ce taux était insuffisant pour faire germer les graines ou les porter à un degré de développement appréciable. Avec 20, 95 et 30 p. 100 d'humidité en volume, le sable l’emportait encore sur les deux autres et ce n’est qu'à partir de 35 p. 100 en volume que le contraire commençait à s’accuser dans les récoltes. Ce qui est re-: marquable, et que nous voyons d’après les récoltes, c’est que dans le sable avec un taux d’eau de 50 p. 100 on dépasse déjà la teneur correspondant à la récolte maxima, tandis que, pour la tourbe et le lehm, ce n’est qu'avec cette provision d’eau que le maximum de production a été atteint. Nous pouvons donc conclure que, pour arriver à leur maximum de développement, les plantes végétant dans l'humus (lourbe) ou dans l'argile (lehim) exigent une plus forte teneur du sol en eau que dans le sable, loules conditions égales. Pour l'explication de ce phénomène, il est bon de remarquer qu'aux forces en vertu desquelles les plantes puisent l’eau du sol par leurs racines (osmose, faculté d’imbibition du protoplasma des cellules de la racine, etc.) s'opposent celles qui résident dans le sol et qui dépendent de sa structure mécanique (attraction de la part des élé- ments du sol, capillarité, etc.), si bien que les actions réciproques qui se passent dans la nature en sens divers entre ces forces doivent différer suivant l'énergie avec laquelle l’eau est retenue par le sol. Celle-ci étant, comme il résulte de ce qui précède, plus élevée pour l’humus et l'argile que pour le sable, les deux premiers élé- ments offriront une résistance bien plus grande à l’absorption des plantes que le dernier. Ge fait doit être pris en considération tout: spécialement au point de vue du desséchement des sols humiques. mouilleux, comme nous le montrerons plus loin. | La dessiccation provoquée par les plantes a, sur les sols d’'humus pur (tourbières), non seulement l'inconvénient d’abaisser leur humi-t dité jusqu’à un taux insuffisant au développement des plantes, mais. encore elle peut avoir un effet nuisible en ce que le sol, fortement desséché à de grandes profondeurs, persiste dans cet état désavan= tageux lors de l’arrivée.des grandes pluies. N’étant plus imbibable, PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 393 il laisse écouler l’eau rapidement à travers ses grands vides sans s’humecter. C’est pour ce motif qu’il faut, lors du desséchement de ces sols, prendre des dispositions qui permettent de maintenir leur humidité dans certaines limites. c) Rapports de l'humus avec l'air et les gaz. A) La porosité s'exprime par le rapport existant entre le volume des vides du sol (pores) et le volume total (— 100). Le volume des pores de l’humus varie dans de larges limites, surtout si ce dernier est à l’état sec, entre 60-83 p. 100. L'humus séché à l'air possède, en comparaison avec les autres éléments du sol, la plus grande porosilé, comme on peut le voir dans les recherches de A. vox Scawarz ‘, dont voici les résultats : Porosité en pour-cent du volume. TOURBE. ARGILE. LEHM. SABLE. 84.0 92.7 45.1 39.4 Mes recherches”, faites avec des substances pulvérisées, ont donné les résultats suivants : TOURBE. ARGILE. LEHM. SABLE. 72.38 57.26 92.99 41.50 Les différences tiennent aux variations de l’état mécanique des matières humiques. La porosité est donc dépendante des propriétés des plantes ou parties de plante constituant l’humus, ainsi que du degré de décomposition et de la densité de la masse. La tourbe de sphaignes est, par exemple, plus poreuse que la tourbe infra-aqua- tique. Plus la décomposition avance, plus le volume des pores di- minue, à mesure que la matière passe à l’état amorphe. Naturellement, la porosité diminue à mesure que le taux d’eau L2 1. À. von Scawarz, Erster Bericht über Arbeiten der K. K. landwirtschaftlich- chemischen Versuchsstation in Wien aus den Jahren 1870-1877, Wien, 1878, p. 51. 2. E. WozLny, Forschungen, elc., vol. VIII, 1885, p. 369-370. \ MATIÈRES ORGANIQUES. 23 394 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. augmente, et ceci à un degré notable pour l’humus qui, comme uous l’avons vu, peut absorber des quantités considérables d’eau. Voici les chiffres pris dans mes recherches précédemment citées : Porosité en volume p. 100. AVEO SA FACULTÉ D'IMBIBITION SÉCHÉE A L?AIR. mo mm minima. maxima, Tourbe . . . 712.38 29.37 0.0 Le volume des pores de l’humus diminue donc à mesure que lex taux d’eau augmente; \l est réduil à zéro lorsque l'humus esl« saluré. B) La perméabilité à l'air se mesure d’après les quantités d'air passant à travers le sol dans des conditions déterminées. Voici ce que j'ai pu trouver‘ comme différences pour les éléments du sol à l’état sec, en expérimentant sur une couche de sol ayant 50 centi= mètres de haut, 5 centimètres de diamètre sous une pression de 100 millimètres d’eau : | Quantités d'air passées par heures et exprimées en litres. Ka lin se EU ATEN RENE 0,175 Sable 0mm,01 -0mm,071 . . . . . . . 0,390 an PR OTIE0 CNE à eee 7,050 =) UD, 1710 EN ee 15,425 = 0e OT 19260... Rae 28,000 NON ODA 71,650 1100 01-200. 55 CRENREN 3,400 TOUSDO SRE D CA NE, RONA 32,740 D’après ces chiffres, on peut conclure que l’humus desséché an l'air, comparativement aux éléments minéraux du sol, possède une très grande perméabilité, touchant de près celle des gros sables. La provision en eau du sol a une très grande influence sur sa perméas= bilité, ce dont on peut se convaincre par les chiffres ci-après. A travers une couche de sol de 50 centimètres de haut, dé 5 centi= 1. WoLLny, Forschungen, etc., vol. XVI, 1893, p. 202. # PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 39 mètres de diamètre et sous une pression atmosphérique égale à une colonne d’eau de 50 millimètres, il a passé : Quantité d'air exprimée en litres par heure en volume p. 100. AVEC UN TAUX D'EAU DE ——— © (e) 8.15 16.30 24.45 32.60 40.75 Tourbe d'Oldenbourg en poudre. 146.37 7.86 4.25 1.14 0.03 0.00 La perméabilité diminue donc à mesure que le taux d’eau de l'hu- mus augmente, et elle tombe à zéro avant même que le degré de saturation de ce dernier soit atleint, car la tourbe dans nos recher- ches pouvait absorber de 60-70 volumes p. 100 d’eau. La diminution de la perméabilité par suite de l’augmentation du taux d’eau s’explique parce que l’eau prend la place de l’air dans les pores et que, par l’imbibition des substances colloïdes, les pores se rétrécissent. La perméabilité dépend encore de l’origine, du degré de décom- position et de la densité des éléments de l’humus. La tourbe de sphaignes, non décomposée et peu dense, est plus perméable à l'air qu'une tourbe infra-aquatique qui sera très humifiée et compacte. C) Diffusion des qaz à travers le sol. — Les pores du sol contien- nent, outre de l’air atmosphérique et de la vapeur d’eau, divers gaz parmi lesquels l’acide carbonique est le plus important, vu qu’il se trouve dans le sol en plus grande quantité que les autres. L’acide carbonique provient de la décomposition des matières organiques et, suivant que le sol est plus ou moins riche en matières humiques, il existe en quantité variable, mais toujours bien plus grande que dans l’atmosphère. Il n’est donc pas étonnant que, même sans aucune influence extérieure, il y ait un mouvement continuel dans les gaz du sol produit par la diffusion, c’est-à-dire par la tendance du gaz ocelus à se mettre en équilibre de tension avec celui de l'atmosphère. La diffusion de l’acide carbonique, de l’ammoniaque et des autres gaz existants dépend surtout, à température constante, de la somme des pores de la coupe transversale et non de leur grandeur‘. Aussi, 1. F. HANNEN, Forschungen, etc., vol. XV, 1882, p. 6. 396 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. plus la somme des volumes des pores est grande, plus les quantités absolues des gaz qui se diffusent sont considérables, et vice versa. Toute diminution du volume des pores, comme celle qui arrive par augmentation soit de la densité du sol, soit de son taux d’eau, a pour conséquence une diminution dans la quantité de gaz diffusé. En ce qui concerne l’humus, on pourra conclure, d’après ces lois générales et d’après ce que l’on sait de la porosité de cet élément, qu'il est très favorable à la diffusion des gaz quand il est sec, et qu’il offre une résistance assez grande, au contraire, lorsqu'il est humide el surtout saturé. D) La facullé que possède le sol de condenser les gaz est une pro- priété moléculaire et, entendue ainsi, elle embrasse toutes les causes . qui reliennent les molécules gazeuses dans et sur les corps solides. Il est d'usage de distinguer entre hygroscopicité et absorption des gaz ; mais au fond ce sont des phénomènes identiques. Si l’on considère que les substances humiques sont douées d’une » porosité extraordimaire et offrent par suite aux gaz une très grande surface, on peut prévoir déjà que leur faculté de condenser les gaz, avec lesquels elles sont en contact, atteindra un haut degré d’inten- sité. En effet, c’est ce qui arrive, comme on peut s’en convaincre d’après les recherches nombreuses faites à ce sujet *. L'’hiygroscopicité ou facullé de condenser la vapeur d’eau qui se trouve dans l’air est considérable chez l’humus, ainsi que le prou- vent les recherches suivantes de A. VON DOBENECK. Dans l’air saturé, 100 grammes de sol condensent à 0° et sous la pression atmosphérique de 760 millimètres : CARBONATE HYDROXYDE SABLE. de KAOLIN. de HUMUS. chaux. fer. 05,159 087,224 287,558 1587,512 1557,904 OU jgzems 278cms 3 72cm 19 236003 19 7220m3 de vapeur d’eau. 1. G. Ammox, Forschungen, elc., vol. Il, 1879, p. 1. — A. von DoBENECK, Forschungen, etc., vol. XV, 1892, p. 163. i F D’après ces chiffres, nous voyons que l’humus dépasse de beau- coup, au point de vue de l'hygroscopicilé, tous les éléments miné- raux du sol, sauf l'hydroxyde de fer. En fait, l’hygroscopicité, dépendant et des agents extérieurs et de la composition de la substance, oscille dans certaines limites. Elle diminue à mesure que la température s'élève et que la tension de la vapeur d’eau augmente. La régularité de la condensation de la va- peur d’eau dans un air saturé n’est modifiée que par ce fait que le taux d’eau absolu augmente avec la température. Dans ce cas, l'influence de la température est presque compensée par le taux croissant d'humidité de Pair. Mais si ce taux d’eau ab- solu de l’air reste constant même avec des températures variables, la loi énoncée ci-dessus, relativement à l’influence de la tempéra- ture, garde toute sa valeur. Par température constante l’hygrosco- picité augmente avec le taux relatif de l'humidité dans l'air. La composition de la substance influe sur la quantité d’humidité qu’elle absorbe ; celle-ci est d'autant plus grande que la substance est plus poreuse et plus meuble. C’est pour cela que la tourbe de sphai- gnes possède en général une faculté de condensation supérieure à la tourbe infra-aquatique, et cette faculté va en diminuant à mesure que la décomposition progresse. Enfin, certains éléments acces- soires, les hydrates de fer, de silice el d’alumine notamment, influent aussi sur Phygroscopicité ; elle est d’autant plus grande qu’ils sont plus abondants”. Agissent de même quelques sels? qui condensent énergiquement la vapeur d’eau et s’y dissolvent, comme on peut l'observer, par exemple, dans la tourbe contenant du fer oxydulé ou de lepsomite*. D’après ce que nous venons de dire, on comprend que l’humus à l’état sec contient des quantités très variables d’eau hygroscopique et qu'il se comporte à cet égard fort différemment suivant les cir- constances extérieures. D’après F. Sirensky ‘, la teneur des différentes tourbes de la PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 391 1. E. W. Hiccano, Forschungen, etc., vol. XVIII, 1895, p. 351. 2. F. Srrensky, loc. cit., p. 201. 3. L'epsomite est du sulfate de magnésie naturel. 4. F. Sirensxy, loc. cil., p. 208-211. 398 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Bohême oscille entre 4.45 et 15.14 p. 100 et peut s'élever, d’après À. v. Scawarz, à 21.6 p. 100. Quant à l'importance de l’hygroscopicité pour la végétation, on a souvent soutenu que les plantes pouvaient absorber l’eau par cette voie et se maintenir ainsi en vie surtout dans les périodes de séche- resse. Il existe pourtant une série de motifs qui empêchent d’ad- mettre cette opinion ; d’abord l’impossibilité pour les racines d’ab- sorber la vapeur d’eau condensée, puisqu'elle n’est pas liquide. Ceci ne serait possible que si, par suite d’un fort abaissement de la tem- pérature, il se produisait une liquéfaction de la vapeur d’eau de l'atmosphère saturée. Des faits de ce genre se voient rarement dans la nature, et seulement sur le sol nu par un fort rayonnement et pendant la nuit, tandis que sous les plantes la température du sol ne s’abaisse pas assez pour amener la liquéfaction de l’eau conden- sée *. En outre, la condensation de la vapeur d’eau n’a lieu, d’après S. Sixorski?, que dans les couches superficielles (3-5 centimètres), et l’eau condensée pendant la nuit retourne à l'atmosphère pendant le jour par suite de l’élévation de la températare et de la diminution de l'humidité aérienne. Si déjà les faits exposés montrent clairement que l’idée d’un effet 2e 2220000 2 rate à ee Re utile de l’hygroscopicité du sol sur la végétation n’est pas exacte, on « s’en convainc en examinant de plus près les circonstances suivant lesquelles la condensation de la vapeur d’eau se produit, ainsi que le minimum d’eau nécessaire à l’existence des plantes. Évidemment il ne peut y avoir condensation que lorsque toute l’eau liquide du sol a disparu et que celui-ci est passé à l’état sec. Mais alors les plantes ne peuvent se maintenir en vie, comme le montre le résultat obtenu par R. Heinricu, A. Mayer et d’autres auteurs, d’après lequel les plantes commencent à se faner déjà avec un taux d’eau qui dépasse sensiblement la limite à laquelle se montre surtout l’hygroscopicité. Les chiffres obtenus dans ma recherche précédente (p. 391) mon- trent nettement aussi que, dans l’humus par exemple, la végétation n’a été possible qu’en ajoutant 15 p. 100 d’eau en volume au sol 1. E. Worzny, Forschungen, elc., vol. XV, 1892, p. 111. 2. S. Sixonski, Forschungen, elc., vol. IX, 1886, p. 415. EP PPOPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 399 desséché à l’air et par suite ayant son maximum de pouvoir hygros- copique. Mais, au reste, l’eau apportée par hygroscopicité est sans signifi- cation sur la végétation, parce que, d’un côté, même dans les cas les plus favorables (4 millimètres de hauteur pour l’humus), elle est très petite, insignifiante, relativement au besoin d’eau des plantes, et que, d’autre part, juste aux périodes sèches où une telle humec- tation pourrait être d’une certaine utilité, la faculté condensatrice du sol, par suite du faible taux d'humidité de l’air et de la tempéra- ture élevée qui rêgne, se trouve non seulement amoiïindrie, mais encore le sol rend à l’atmosphère de notables quantités d’eau con- densées dans la période précédente. D’après tout ceci, il semble rai- sonnable d’effacer du tableau des propriétés utiles du sol l'hygros- copicité au point de vue de l'apport d’eau aux plantes. L’absorplion des gaz (au sens strict) par l’humus est en général, comme celle de la vapeur d’eau, très élevée. Voici les chiffres trou- vés par A. von DoBENECK pour l’ammoniaque et l’acide carbonique : A 0° et sous 760 millimètres de pression, 100 grammes de sol absorbent : CARBONATE OXYDE SABLE. de KAOLIN. de fer HUMUS. chaux. hydraté. à : 027,107 08,256 Osr,721 gr 004 185,452 Te j45ems 39gms g4Tmi 5975m 24 228cm M Don 027,023 87,028 0%7,329 657,975 257, 501 cide carponique. {2cm3 14003 46623 3 52603 1 264°m3 Si nous comparons les quantités de gaz condensées par chaque espèce de sol, nous voyons que pour l’ammoniaque l’humus d’abord, ensuite l’hydroxyde de fer, possèdent la plus grande faculté conden- satrice, le sable et le carbonate de chaux la plus petite, et le kaolin tient le milieu entre ces deux groupes. Pour l'acide carbonique, la faculté condensatrice des sols est moindre que pour l’ammoniaque, mais s’exerce dans le même sens, sauf pour l’hydroxyde de fer qui prend la place de l’humus. La condensation du gaz des marais (CH*) et de l’hydrogène sul- furé est, d’après les recherches de G. AMMON, très intense pour l'hydroxyde de fer et l’humus, tandis que les autres éléments cons- 360 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tituants du sol restent de beaucoup en arrière. En réunissant tous ces faits, nous pouvons dire que l’humus se distingue par sa facullé condensatrice très forte pour l’ammoniaque, le gaz des marais, l'hy- drogène sulfuré, et iln'est surpassé par l'hydroxyde de fer que pour les deux derniers gaz. Ce que nous venons de dire ne s’applique qu’à la matière complè- tement sèche et probablement aussi à celle qui est séchée à l'air. Il reste à déterminer quelles seront les différences avec une substance humide. Les recherches de A. von DoBenEcx ont montré que l’ab- sorption de l’acide carbonique, relativement faible dans le sol sec, diminue jusqu’au minimum lorsqu'il est humide, et qu’au contraire la condensation de l’ammoniaque est extraordinairement augmentée dans cette dernière condition. Voici les chiffres : À 20° centigrades, 100 grammes de sol condensent : SABLE. Ca CO, KAOLIN. Fe HUMUS. AUVOIATISeC MR RUE EE 037,055 05,130 05,422 287,649 108,515 ASTétatinumide ee mu2 021 192428 1 TE 23 ,93 38 ,895 Donc, avec l’état humide des substances, les quantités de gaz ab- sorbées sont très supérieures à ce qu’on trouve à l’état sec. [ei aussi l’humus est en tête des autres éléments. L'influence, exercée ici par l'humidité, tient surtout à ce que le gaz ammoniac est absorbé par la solution du sol. Lorsque les éléments sont humides, la condensa- tion du gaz dans l’eau du sol vient prendre la place de celle pro- duite par les forces physiques. d) Rapports entre l'humus et la chaleur. Les sources de chaleur du sol sont: la chaleur produite par les processus chimiques ou la condensation des gaz, la chaleur centrale de la terre et enfin la chaleur venant du soleil. La chaleur produite par l’érémacausis des matières organiques est, comme nous l’avons vu plus haut (p. 10), insuffisante pour pro- duire une élévation notable de la température du sol. C’est seulement quand les matières organiques sont en grande quantité et facilement PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 361 décomposables (par exemple : fumier de cheval, plantes vertes fanées, plantes sèches humectées) que, par suite de la décomposition, il se produit une élévation notable de la température; elle peut être utile dans les cultures sur couches ou dans la dessiccation des fourrages (foin brun). Au point de vue de la chaleur du sol, celle qui est produite par l’arrivée de l’eau ou par la condensation des gaz et de la vapeur d’eau est encore bien moins importante que celle qui se développe dans l’érémacausis, bien que cette dernière puisse être momentané- ment assez élevée, surtout dans l’humus qui, à ce point de vue, sur- passe Lous les autres éléments du sol. C’est ainsi que, par exemple, les recherches de A. STELLWAAG ‘ nous donnent pour : ÉLÉVATION DE TEMPÉRATURE de la matière séchée à l'air 2 absorption de: ÉLÉMENTS DU SOL. EEE Vapeur d’eau Gazammoniaque (à + 30°C). (à + 120 C). 52 doser. een Sable (fin pulvérisé). . . . . . . 1,08 0,80 Garbonate de chaux. . . . . . . 1,47 0,80 DAME US SET TR SET ere 2,63 2,50 Hvdroxyde defense 20,27: 9,30 18,05 Humus (tourbe)... 7. . . . … . 12,25 28,30 On voit que le calorique, devenant libre par la condensation de la vapeur d’eau et des gaz, peut être considérable, surtout pour l'hu- mus ; son action sur le sol dans la nature est quand même très lé- gère, parce que les processus ci-dessus ne sont pas continus et que lrès rarement on rencontre les conditions auxquelles sont liés ces processus de condensation. Par suite de la mauvaise conductibilité de la croûte terrestre, le sol ne reçoit qu'une quantité insignifiante de la chaleur centrale. Aussi, cette faible source de chaleur est à peu près égale pour tous les sols. Nous pouvons donc conclure que les différences dans l’échauffe- ment du sol observées dans la nature sont provoquées par le soleil seul, puisqu'il n’existe pas d’autres sources de chaleur que celles 1. AT. SEELWAAG, Forschungen, etc., vol. V, 1882, p. 210. 362 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. que nous avons mentionnées. Pour comprendre ces phénomènes assez compliqués, il faut d’abord parler de chacun des facteurs qui influent sur eux. A) Pouvoir absorbant et émissif du sol. — Il n’a pas été fait de recherches sur le pouvoir absorbant du sol pour les rayons calori- ques proprement dits, c’est-à-dire pour les rayons ultrarouges invi- sibles du spectre solaire ; sur l’absorption des rayons lumineux la couleur du sol nous renseigne. On peut donc dire qu’à égalité d’ac- tion des rayons obscurs, les sols, à capacité calorifique égale, s’é- chaufferont d'autant plus que leur couleur sera plus foncée. L’humus, par suile de sa couleur, aura un très grand pouvoir absorbant, ce qui est vrai en effet. Sous l’action directe du soleil, la température d’un sol humique peut à la surface surpasser de 10° celle des sols minéraux de couleur claire, et atteindre parfois 50-60° centigrades. Sur le pouvoir émissif la couleur du sol ne donne aucun rensei- gnement; la loi de Kircanorr dit que le rapport entre le pouvoir absorbant et le pouvoir émissif est le même pour tous les corps, mais ceci n’est vrai que pour des rayons ayant une longueur d’onde égale à la même température. Les sols absorbent sous l’influence de l’insolation un mélange de rayons de toute réfrangibilité et de toute température, mais n’émettent jamais que des rayons d’une faible réfrangibilité et d’une faible température. Les rayons absorbés sont donc autres que les rayons émis, d’où il suit qu’il ne faut pas juger de plano le pouvoir émissif d’après le pouvoir absorbant (A. von LIEBENRERG). D'après les recherches” faites jusqu'ici, nous pouvons actuelle- ment accepter que la couleur du sol n’a aucune influence sur l’émis- sion des rayons calorifiques et que les différences du pouvoir rayon- nant des divers éléments du sol sont relativement faibles. Soit 100 le rayonnement du noir de fumée, celui des éléments du sol sera, d'après J, Au * : POUR LE SABLE, POUR LE KAOLIN. POUR L'HUMUS. 96,5 91,5 89,8 1. J. Aun, Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 397. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 363 Donc, d’après ceci, nous voyons que l’humus à l’élal sec est celui des éléments du sol qui a le plux faible pouvoir rayonnant; vient ensuile l'argile (kaolin), tandis que le sable possède ce pouvoir au plus haut degré. Si Von pense que dans ces recherches l’erreur moyenne probable est de + 1,4, et que dans les sols mélangés les chiffres obtenus sont très approchés, on doit conclure que les diffé- rences de rayonnement des divers sols ne sont pas très importantes. Comme le pouvoir rayonnant de l’eau est supérieur à celui des élé- ments du sol, le taux d’eau influera naturellement sur ce pouvoir, l’augmentant si lui-même augmente, et dans les divers sols dimi- nuant les différences existant à l’état sec d'autant plus que ce taux d’eau est plus grand. B) Perte de chaleur par l’évaporation à la surface du sol. — La quantité de chaleur solaire reçue par le sol est en partie perdue pour le réchauffement des couches profondes, parce que la chaleur est liée à l’évaporation. Cette perte de chaleur augmente ou diminue suivant le degré de l’évaporation, et elle a pour résultat un abaisse- ment notable de la température du sol. Ce résultat peut se mesurer en comparant les températures de la surface des sols humides et des sols secs. Mes chiffres ‘ peuvent en donner une idée suffisante : TEMPÉRATURE MOYENNE des sols à leur surface. en degrés centigr. en degrés centigr. — Tourbe = ES — saturée. humide. Duv15 au 23 juin 1875 . . . . 16,69 16,83 17,43 Saturée. Séchée à l'air. Du 2 juillet au 9 juillet 1875. . 19,73 29% 11 24,63 Donc {à surface du sol s'échauffe, toutes choses égales d’ailleurs, d'autant plus que son taux d’eau est plus faible, et réciproquement. C) Conductibilité du sol pour la chaleur.— La chaleur reçue par les couches superficielles se transmet aux couches profondes par conductibilité. Les différences de température entre les couches su- 1. E. Wozrny, Landwirthschaftliche Jahrbüucher, vol. V, 1876, p. 441-468. 364 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. perficielles et les couches profondes tendent à s’atténuer ; mais il faut un certain temps, ce qui explique une série de phénomènes que l’on observe dans l’étude des sols au point de vue thermique. La marche de la chaleur, de haut en bas aussi bien que de bas en haut, est la plus lente pour l'humus, la plus rapide pour le sable, l'argile tenant le milieu entre les deux. D’après F. Wacner’, l’aug- mentation moyenne de température d’une colonne de sol, de 24 cen- üimètres de haut, de 10 centimètres de diamètre, celle du sable étant égale à 100, était : POUR L'HUMUS. POUR L'ARGILE. POUR LE SABLE. 80,6 84,5 100,0 Plus les particules du sol sont étroitement juxtaposées, plus sa conductibilité est grande. Les différences à cet égard sont en géné- ral d'autant plus grandes que le taux d’eau de la masse est plus élevé. L'eau augmente la conductibilité du sol dans une assez forte proportion, et d'autant plus que le taux d’humidité est plus grand et que les éléments sont meilleurs conducteurs, et vice versa. C’est pour cette dernière raison que l'influence de l’eau sur la conducti- bilité de l’humus est incomparablement plus faible que celle qu’elle exerce sur les sols minéraux, surtout le sable ?. D) La capacilé calorifique (chaleur spécifique) du sol, comme la faculté d’imbibition, se rapporte au volume et s'exprime par la quantité de calories nécessaire pour élever d’un degré la tempéra- ture d’un volume donné de sol, en comparaison avec un volume égal d’eau dont la chaleur spécifique est — 1. La chaleur spécifique des sols à l’état sec est seulement 1/6 à 1/3 environ de celle de l’eau. ; Des divers éléments du sol, l'humus a la plus petite chaleur spé- 1. J. Wacwer, Forschungen, elc., vol. VI, 1883, p. {. V. aussi E. Porr, Die landwirthschafllichen Versuchsstationen, vol. XX, 1877, p. 273 et 321. 2. Comparez E. Porr, loc. cit., p. 339. 3. À. von Liesensenc, Unlersuchungen über die Bodenwärme. Habilitationsschrift. Halle, 1875, p. 13-25. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 365 cifique, le sable la plus grande, l'argile tenant le milieu entre les deux, comme le prouvent d’ailleurs les chiffres de R. ULricu : Chaleur spécifique, rapportée au volume. HUMUS. ARGILE, SABLE. 0,1647 0,2333 0,2919 La chaleur spécifique du sol augmente naturellement avec l’élé- vation de son taux d’eau. Elle est donc pour le même sol d’autant plus grande que son hygroscopicité et sa faculté d’imbibition sont plus élevées. Les chiffres de R. ULricu le montrent clairement : CHALEUR SPÉCIFIQUE rapportée au volume, TAUX D'EAU DES ÉLÉMENTS. Humus, Argile. Sable, RO DS ER OU 2 en acc 0, 16470 072933870299 Dane es la ep ira ae) OR É0 60 026280 0:2962 10 p. 100 de la faculté d'imbibition maxima . . 0,2427 0,2945 0,3300 20 — — . + 0,3207 6,3558 0,3682 30 —- — . . 0,3987 0,4170 0,4063 40 — — . «+ 0,4767 0,4783 0,4445 20 — — + + 0,5548 0,5395 0,4826 60 — — . «+ 0,6328 0,6008 0,5208 70 _ _ . . 0,7108 0,6620 0,5589 80 — = 10188800; 72390 0,5979 90 — — - - (D,86600M10 718122076353 100 = _ . . 0,9449 0,8458 0,6735 La chaleur spécifique, avec un taux d’'humidilé assez élevé et une égale saturation relative d’eau, est donc la plus grande pour l'hu- mus ; vient ensuile l'argile et enfin le sable. 11 faut ajouter que la chaleur spécifique augmente dans le même sol avec sa compacité. E) Action générale des facteurs de la température du sol. — La température du sol, observée dans des conditions déterminées, est la résultante des actions de chacun des facteurs énumérés. Les in- fluences qui résident dans le sol même réagissent entre elles d’une manière si compliquée, qu'il est impossible de se faire une idée exacte des propriétés spéciales des différents sols par des moyennes obtenues dans des observations de longue durée, et que seules les 1. R. Urrica, Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 1. 366 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. divergences (pour des périodes déterminées) avec les variations extérieures de température peuvent fournir des notions précises à ce sujet. Cela résulte de ce fait que, à conditions extérieures égales, les divers sols, malgré leur manière d’être sensiblement différente” vis-à-vis des varialions de température, n’accusent, pour la moyenne annuelle, ou aucune ou seulement une très faible différence. Ceci s'explique encore mieux quand on voit que les différences, pour ces diverses périodes, sont telles qu’elles s’équilibrent en addition= nant. Les états thermiques du sol ne se laissent donc nettement saisir que lorsqu'on considère la marche de sa température. Poux caractériser les rapports des différentes espèces de sols avec la tem- pérature reportons-nous aux chiffres suivants! : Moyenne des pentades du mois d'août 1882 (degrés centigrades). PROFONDEUR de la boule -5, 5 16-20. | 21-25. | 26-31. du | thermomètre. SE ————— centimètres. Température de Mr DOUÉ 14,01 | 14,07 16,95 | 16,67 17,12 |°16,89 LOUTDE EE ES Ô 5 17,68 | 16,88 | 18,25 | 17,20 18,55 | 17,45 16,34 | 16,08 16,43 | 16,36 Leon 11.20 16,57 | 16,38 16,80 | 16,47 16,93 | 16,41 15,93 | 16,06 16,07 | 16,39 16,17 | 16,61 16,31 | 16,63 16,41 | 16,58 SE: 1. F. Wacnen, Forschungen, etc., vol. VI, 1883, p. 50. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 367 Observations quotidiennes du 41 au 15 août 1882 (degrés centigrades). PROFONDEUR de la boule © a oo un 0 du thermo- |Matin.| Soir. |Matin.| Soir. |Matin.| Soir. |Matin.| Soir. mètre. centimètres. Température de l'air. . 12 ox Q9 12 — O1 2 - Soie] 19 © = © mi me 19 12 tt œ FR A O1 12 À 1 12 mi mt 9 19 1 © © 1” mi 19 1 19 19 ==" = _ (o © _ a > © © 2 1] © ‘on 19 @ 19 19 1 1 19 19 192 1 1 19 19 12 1 OO = mm 1 À 1ŸY 12 9 © KW mn 12 © © © Le e= . 1] © © < En | Es " © ©" © © D 1 1 + © 19 O9) D 02 RE A C9 M © … © .=1 1 1 _ ot 12 12 1 1 1 > ex t2 œh Oet et pb ei A © © ©! t © " 19 19 19 1 1 Co À . 12 12 1 1 19 mn ne bd et et (o] OO mm À 4 19 D 19 19 1 1 WW 19 19 tt tt RQ LQ M et © © À ot s mi 19 O2 C2 © WW [SA] ot 1. Les chiffres de la température de l'air donnent le minimum et le maximum. Si l’on jette un coup d’œil sur les chiffres du premier tableau, on voit que le sable, dans presque toutes les couches, subit, de la première à la troisième pentade, une élévation de température plus considérable que la tourbe ; le lehm (ou l'argile) tient le milieu entre ces deux éléments extrêmes. Quant à l’abaissement de la température de la troisième à la sixième pentade, nous voyons que l'humus se refroidit beaucoup plus lentement dans toutes les cou- ches du sol que ne le ferait le sable. Le lehm tient encore ici le milieu. Cette marche de la température n’a pas seulement lieu 368 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. pour une période, mais encore pour un seul jour, comme on peut s’en convaincre par les chiffres du second tableau. L’abaissement de Ja température pendant la nuit exerce une influence très dépri-« manie sur celle des différentes couches de sable, tandis que la tem- pérature du sol de tourbe est relativement peu altérée (comparez « les observations du matin). L’élévation de la température de l'air pendant le jour augmente beaucoup la chaleur du sable jusque dans les couches profondes, l’humus au contraire ne subit que très len-" tement l’action des rayons solaires (comparez les observalions du soir). Ces lois, qui ont été trouvées pour les périodes chaudes et froides d’un même Jour, s'appliquent aussi aux variations de tempé- rature des saisons. Il est donc permis de conclure que pendant l’élé- vation de la température (insolation ou saison chaude) l’humus est de tous les éléments du sol celui qui s’échauffe le moins ; vient en- suile l'argile, le sable se réchauffant le plus ; pendant l’abaissement de la température (nuit ou saison froide), les rapports caloriques des différents éléments du sol sont renversés, c’est-à-dire que l'humus se refroidil le moins vile, le sable le plus vite, l'argile tenant le mi- lieu. Nous voyons par là que, avec une marche normale de la lempéra- ture, l'humus est en moyenne plus froid que le sable en élé, plus chaud en hiver, l'argile tenant le milieu entre les deux. Cette règle souffre cependant quelques exceptions par des temps anormaux, pour des périodes plus ou moins longues. Ainsi, lorsque pendant l'été il se produit fréquemment des abaissements de température, et que celle-ci est en général fraîche et humide, la température moyenne de l’humus peut être supérieure à celle du sable. De même pendant les hivers doux, ensoleillés et secs, l’humus peut avoir une température inférieure à celle du sable. Les précédentes données sur les rapports thermiques des divers éléments du sol montrent encore que les oscillations de la lempé- ralure sont les moins amples chez l’'humus, les plus amples chez le sable, et moyennes pour l'argile. Ces différences, qui diminuent avec la profondeur, sont très considérables, comme on peut le voir d’ailleurs d’après les observations du matin et du soir du deuxième tableau. our oi ie —v pe PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 369 Les chiffres suivants! donnent une idée encore plus nette à ce point de vue : Oscillations mensuelles moyennes. A 10 CENTIM. DE PROFONDEUR 1880. Tree (degrés centigrades). Lehmn. Sable. Avril. Fa 5,30 8,98 10,25 PNR ES ro 9,08 ‘ 14,20 15,90 Juin . 7,31 11,43 13,34 Juillet . 6,91 11,93 13,98 FUTURE 4077 8,91 12,01 Septembre. 4,93 12617 9,87 Ce qui concerne la pénétration de la gelée dans le sol et son dégel peut être prévu d’après ce qui vient d’être dit sur les rapports des sols avec la chaleur. Il est clair que plus l'effet de la température exté- rieure sur les éléments du sol sera entravé, plus le gel et le dégel de l’eau du sol se fera lentement, et réciproquement. Les recherches de , À. Perir* nous renseignent sur les lois qui régissent ce phénomène. Cet auteur s’est servi de caisses cubiques de 8 litres de contenance et faites avec des planches d’une épaisseur de 3 centimètres. Il les a remplies avec des sols à l’état de saturation capillaire, qu'il a expo- sés d’abord au froid à l'air libre, puis qu'il a fait dégeler dans une chambre à température assez élevée. Les lectures faites à une pro- fondeur de 10 centimètres donnent les résultats suivants : Congélation du sol. TEMPÉRATURE TEMPÉRATURE DES SOLS. TEMPS. de © / l'air. Sable, Argile. Tourbe. Premier jour. 10 heures matin . = ET 3,60 3,39 2,65 2 heures soir . . = fi 0,05 0,59 1,80 6 == FE 2 —. 8,3 0,00 0,00 0,20 Deuxième jour. 6 heures matin . — 11,7 — 9,10 — 0,30 D 710 10 — , 6 moon — 5,10 — 0,70 2 heures soir. . — 6,0 ie 02 — 7,30 — 0,10 4 — LE — 6,1 — 8,65 D; — 040 1. E. Worcxy, Forschungen, etc., vol. VI, 1883, p. 205-210. 2. A. Perir, Forschungen, elc., vol. XVI, 1895, p. 285. MATIÈRES ORGANIQUES. 12 = 370 TEMPÉRATURE TEMPS. de l’air. Sable. Troisième jour. 8 heures matin . — 10,8 — 12,50 8 heures soir. . MA) 1:90 Quatrième jour. 8 heures matin . — 8,9 — 40,20 Dans la nature ces trois éléments du sol se comportent de même, comme le prouvent mes chiffres que voici : Re TOURBE. DATES. — RATURE Décembre de 10 centi-| 40 centi-| 70 centi-| 10 centi-| 40 centi-| 70 centi-| 10 centi- | 40 centi-| 7 1879. l'air. mètres. | mètres. mètres. mètres. mètres. + 0,59 2e 36 j 7 ë — 0,33 + — 1,33 — 3,66 — 4,59 — 4,37 Voici les résultats de A. Perir sur la marche de la température dans le sol congelé, sous l'influence d’une température élevée de l'air. Dégel du sol. TEMPÉRATURE TEMPS. de l'air, Sable, Premier jour. 9 heures matin. es doi "10,15 10 — + 23,1 — 6,90 11 — + 24,2 — 2,60 12 heures (midi). + 25,0 — 0,60 { heure soir. —+ 24,6 — + 0,15 ur Lc93 0 0,00 ARD C eo f06 0,00 4 — "+ 20,0 0,00 Bu + 19,4 0,00 ge + 19,3 + 0,05 8 — + 17,4 + 0,20 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. TEMPÉRATURE DES SOLS. Tourbe. Argile, — 11,90 2,20 "5600 D SN — 9,60 — 8,50 Température moyenne du sol (degrés centigrades), à une profondeur de mètres, | mètres. | mètres, + 2,46 + 1,74 SV: + 0,49 01 — 0,85 TEMPÉRATURE DU SOL. ——— Argile, Tourbe. — 9,65 - =800 — 850 Se — 5,75: —6,30 — 3,70. 650 = 9 AO EE — 1,70 — 3,65 — 1,95, (=8R — 0,95 — 3,05 — 0,75 — 2,85 — 0,60 9,70 — 0,50 - — 92,40 PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 371 TEMPÉRATURE TEMPÉRATURE DU SOL. TEMPS. de — 0 — l'air. Sable. Argile. Tourbe, Deuxième jour. 5°,30m matin . + 10,5 + 3,50 — 0,20 — 1,80 D A07 — AÉNTES ŒT ONES(N OU2U - =270 | | F' INNENESES POP S Fe 10N ) 2 #00 Em a TI 0 = #60 DD — ER 8 Je er 8-40 000: 2 22 4250 10,30 — nt Lg 70 Mod 1.40 Il ressort de ces chiffres que la gelée pénètre le plus lentement dans l'humus, le plus rapidement dans le sable, l'argile tenant en- core le milieu ; et qu'au point de vue du dégel au printemps ces élé- ments du sol conservent les mêmes relations. Les causes des phénomènes précédents résident surtout dans les différences que présentent les sols dans leur chaleur spécifique et leur conductibilité. Dans l’humus, la surface libre du sol, surtout à l'état sec, peut, en raison de la forte absorption de rayons solaires résultant de sa couleur foncée, s’échauffer par le soleil beaucoup plus que la couche correspondante d’un sol minéral ; mais la chaleur reçue ne profite pas aux couches profondes, à cause de la mauvaise conduclibilité et de la grande chaleur spécifique de ce sol à l’état hu- mide. Ge sont encore ces deux dernières propriétés qui sont causes, comme nous l'avons montré d’ailleurs, du refroidissement très lent de l’humus. Le sable conduit très rapidement dans la profondeur la chaleur qu’il reçoit, et quand la température s’abaisse, il se refroïdit aussi très rapidement, parce qu’il est, nous l’avons vu, parmi tous les éléments du sol, celui dont la conductibilité est la meilleure, et que, d’autre part, en raison de son faible taux d’eau relatif, il pos- sède la chaleur spécifique la moins forte. C’est pour cela que la perte de chaleur produite par l’évaporation est relativement légère pour celte espèce de sol. Comme les propriétés de l'argile tien- nent le milieu entre celles des deux sols précédents, la température dans les sols argileux se meut aussi entre les deux autres courbes. On doit enfin mentionner ici, à propos des sols humiques (tour- bières), un fait très important pour la culture ; c’est que, dans ces sols, les gelées nocturnes du printemps et de l’automne non seule- ment sont plus fréquentes, mais encore apparaissent plus tôt et plus ra A2 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tard que dans les sols minéraux. Les plantes sensibles aux basses températures voient donc leur existence menacée au plus haut de- gré dans ces sols tourbeux. On a trouvé les causes de ce fait, d’une part, dans le froid pro- duit par l’évaporation abondante, d'autre part, dans le plus grand rayonnement des sols tourbeux comparés aux sols minéraux. On a encore exprimé l’opinion que l’évaporation et le rayonnement s’unis- sent pour refroidir pendant les nuits claires d’été et d’hiver la sur- face des sols tourbeux et la couche d’air qui l’avoisine, à un degré tel que les plantes sensibles gèlent*. Mais ces explications sont en contradiction avec la réalité, et ne peuvent aucunement s’appliquer à ces phénomènes, comme nous allons essayer de le démontrer. Le froid produit par l'évaporation ne peut être la cause réelle de ces gelées nocturnes, puisque des sols minéraux qui évaporent au- tant d’eau et même plus que ceux dont on parle, comme, par exem- ple, les sols de lehm et d'argile (p. 347), n’éprouvent pas du tout ou n’éprouvent que rarement à la surface un refroidissement nuisible aux plantes. On ne peut pas non plus faire valoir que le pouvoir rayonnant supérieur des sols humiques dû à leur couleur foncée abaisserait la température superficielle au-dessous du point de con- gélation, puisque, d’une part, la couleur d’un corps n’est pas déci- sive pour son rayonnement (p. 364), et que, d'autre part, l’humus ne possède pas un pouvoir rayonnant plus grand, mais au contraire plus petit que tous les autres éléments du sol. Le rayonnement est, il est vrai, la cause la plus proche des gelées nocturnes qui peuvent se produire uniquement par un fort rayonne- ment comme on le constate dans des nuits claires, calmes et pures ; mais cette cause ne peut être prise en considération dans la ques- tion qui nous occupe, car les conditions extérieures qui influent ici doivent exister sur tous les sols, lorsque leur surface se refroidit outre mesure. Il s'agit donc de préciser pourquoi, en cas de gelée, un refroidissement nuisible se produit plutôt dans les couches in- férieures de l’atmosphère sur les sols humiques que sur les autres. {. M. Freiscuen, Landw, Jahrb., vol XX, 1891, p. S53. tn Ut: CS 2: 1 NUE Et ES . + \ 1 i d . F” “{ ‘ * . 3 [A PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 313 Nous avons vu que l’humus possède un pouvoir rayonnant non pas plus grand, mais plus faible que les autres éléments du sol. Cette loi ne peut servir de suite à résoudre la question, puisqu'elle n’a de valeur que pour des égales différences de température des sols que l’on compare. Dès qu’elles changent, le chiffre du rayonnement change. Si l’on chauffe un corps à des températures de plus en plus hautes, non seulement l'intensité des rayons caloriques qu’il envoyait tout d’abord s’accroit, mais encore il s'ajoute de nou- veaux rayons d’une autre largeur d'onde. C’est pourquoi, à pouvoir émissif égal, les corps fortement chauffés perdent plus de chaleur ‘par le rayonnement que ceux qui sont moins chauffés et la quan- tité de chaleur rayonnée est proportionnelle à la température pour des différences de température allant jusque 60° centigrades. Un sol bumique dont la surface est chauffée à 50° centigrades perdra, pour les causés que nous venons d’énumérer, malgré son faible pouvoir rayonnant, plus de chaleur par rayonnement qu’un sol ar- gileux, par exemple, chauffé à 30° centigrades seulement. On se de- mande si, d’après cela, les différences ci-dessus indiquées ne se- raient pas en cause dans l’abaissement de la température. Pour décider la question, il n’est pas superflu d’expliquer un peu plus clairement les circonstances dans lesquelles se produisent les gelées . tardives sur les sols tourbeux. La simple observation nous apprend que Les gelées nocturnes destructives du printemps ou de l'automne ne se font sentir dans les sols lourbeux. que quand les couches su- perficielles sont desséchées . En tenant compte de ce fait, on peut expliquer ainsi les causes du phénomène en question. Le sol tourbeux sec, chauffé fortement pendant l'insolation, se re- froidira pendant les nuits claires par rayonnement beaucoup plus vite que le sol argileux, humide, à température moins élevée, et atteindra bien vite la température de ce dernier. Mais à ce moment le sol tourbeux rayonnera moins de chaleur que l’argile, puisque, à température égale, comme nous l'avons vu, son pouvoir rayon- nant est plus pelit. Pourtant si, comme l’expérience et l’observation 1. E. Wozrxy, Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 286. 314 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. le montrent, la température de l’humus tombe beaucoup plus bas que celle de l'argile, il faut évidemment admettre, pour l'explica- tion de ce fait, d’autres causes que celle du rayonnement. En fait, ces relations dépendent en première ligne de la provision de cha-« leur du sol, laquelle est en rapport avec sa chaleur spécifique, et de la plus ou moins grande aptitude du sol à transmettre la chaleur par conductibilité ". La couche superficielle de l’humus desséché ayant une faible chaleur spécifique et une mauvaise conductibilité, ne peut pas remplacer la perte de chaleur due au rayonnement ; il est donc obligé de se refroidir avec l’air extérieur, beaucoup plus que ne le ferait l'argile qui, elle, est capable, tant par sa plus grande chaleur spécifique que par sa meilleure conductibilité, de dégager plus de chaleur et de remédier ainsi au refroidissement des couches d’air inférieures. Avec une surface humide, le sol humique se tire mieux d’affaire, parce qu’il possède alors, par suite de son taux d’eau plus élevé, une plus grande chaleur spécifique et une meilleure conductibilité. 3, — Autres propriétés des humus. Parmi les autres propriétés de l’humus qui ne sont ni physiques ni chimiques, on doit compter l'odeur, le goût, les propriétés anti- sepliques £t surtout la combustibilité (notamment pour la tourbe dans les pays à tourbières). A) Odeur. — La plupart des tourbes fortement décomposées, principalement les tourbes infra-aquatiques riches en eau, ont une odeur plus ou moins marquée, due probablement aux gaz qui y sont contenus, tels que le formène, l’éthylène, l'hydrogène sulfuré, etc., et qui peut être perçue même à d'assez grandes distances quand on déplace la tourbe en grandes masses. Il faut encore citer l’odeur propre de la terre, odeur presque aromatique qui se perçoit surtout dans les sols très humiques (terre de jardin) après une petite pluie chaude. D’après les recherches de {. J. Ann, Forschungen, elc., vol. XVII, 1894, p. 436. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 319 BERTHELOT et ANDRÉ', elle est due à une matière organique neutre de la série aromalique qui s’évapore avec la vapeur d’eau et qui possède une odeur camphrée pénétrante, presque piquante, Cette matière n’est ni un alcali, ni un acide, ni un aldéhyde. Elle est pré- cipitée de la solution aqueuse concentrée par un carbonate alcalin en formant un anneau de résine. Chauflée avec de la potasse, elle donne une odeur pénétrante semblable à celle d’une résine d’aldé- hyde. La quantité obtenue par les chimistes précédents était trop faible pour qu’il fùL possible de mieux déterminer sa composition chimique. F. L. Parpson* croit devoir attribuer l’odeur de la terre à des matières organiques voisines des huiles éthérées qui, pendant les saisons sèches et chaudes, sont absorbées par la terre poreuse et se dégagent à nouveau quand elle est humectée par des pluies chaudes, comme cela arrive quand on souffle sur l'argile et la marne. Il obtint de la craie poreuse la substance odorante qui ne fut absorbée que par l’eau de brome. Le même chimiste isola l'odeur du bois de cèdre et montra dans ses propriétés physiques et chimiques de grandes ressemblances avec la cédrine bromée dérivant de l'huile de cèdre. Dernièrement W. RuLLMANN* réussit à oblenir la substance odo- rante sous forme de petits cristaux aciculaires. Après avoir trouvé à propos d’autres recherches qu’un champignon schizomycète, le Cladothrix odorifera, dégage en culture pure une forte odeur de terre, il éleva ce champignon dans du bouillon stérilisé pour séparer la matière odorante, disuilla quand l'odeur se fut développée, agita le produit de la distillation avec de l’éther, reprit après évaporation le résidu par de l’eau contenant de l’acide chlorhydrique et obtint les cristaux dont il vient d’être question après évaporation complète de la solution. D'autre part, l’auteur obtint avec le produit de la distillation acidulé par l’acide chlorhydrique et après addition de chlorure de platine, un sel de platine qui, évaporé, cristallisa sous 1. C. R., t. CXII, p. 598-599. 2. Chemical News, vol. LXIIL, 1891, p. 179. 3. W. Ruzrmanxx, Chemischbacteriologische Untersuchungen von Zwischenful- lungen mit besonderer Berüucksichtigung von Cladothrix odorifera. München, 1895. 316 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. forme d’octaèdres à angles émoussés. L'on a ainsi la certitude d’ob- tenir la matière odorante en quantités assez grandes pour pouvoir déterminer exactement sa composition chimique. Ce sera d’autant plus facile que le Cladothrix odorifera, cultivé dans l'urine stérilisée à la proportion de 1/5, dégage déjà l’odeur terreuse au bout de huit Jours. On ne peut encore dire s’il y a une seule ou plusieurs espèces de microorganismes qui produisent cette odeur ; mais il est certain que le Bacillus subtilis et le B. mycoides, si fréquents dans le sol, ne la dégagent pas d’après les observations de W. RULLMANN. L'espèce précédente n’est pas morphologiquement distincte du Cladothrix dichotoma, mais elle en diffère par ses propriétés bio- chimiques, celle-ci ne dégageant jamais l'odeur terreuse. B) Saveur. — Parmi les divers humus, la tourbe seule possède une saveur propre, plus ou moins acide. Elle est styptique comme celle de l’encre si la tourbe contient du sulfate de fer. C) Propriélés antiseptiques de la tourbe. — Par suite de l'absence presque complète de microorganismes et de la présence de certains composés organiques solubles (acide humique, huiles résineuses, etc.), la putréfaction de toutes les parties charnues de l’homme et des animaux enfouis dans la tourbe est arrêtée. Elles se transfor- ment seulement, en général, en gras de cadavre (adipocire). Les diverses observalions qui ont prouvé la faculté de conservalion de la tourbe ont conduit naturellement à se demander si la tourbe avait la propriété d'empêcher la pullulation des bactéries et de les tuer. Un grand intérêt s'attache à cette question, parce qu'on a fait des objections, au point de vue sanitaire, aux essais récents relatifs à l'emploi du terreau de tourbe comme agglomérant pour les excré- ments humains et à son utilisation sous cette forme comme engrais ; on prétendait qu'il pouvait y avoir là un danger par la propagation des bactéries pathogènes. Cette objection était d'autant plus fondée que les anciennes observations n’avaient pas permis d'y faire une réponse calégorique. En raison de l'importance du sujet, la commission des engrais de PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS. 371 la Deutsche Landwirthschafts-Gesellschaftl" a fait instituer par divers savants (FRÆNKEL à Marburg, GÆRTNER à Iléna, LŒFFLER à Greifs- wald, STuTzER à Bonn) une série de recherches qui ont d’abord conduit à ce résultat que le terreau de lourbe possède un pouvoir désinfectant assez considérable ; car les bactéries pathogènes qu’on y a mélangées, entre autres les bacilles du choléra, y ont élé tuées. Ce résultat concorde avec cette observation que la tourbe employée comme bandage prévient la suppuration des blessures et amène leur prompte guérison et avec la conclusion de quelques anciennes expé- riences de Garrky*, NEUBER* et C. REINL*, d’après lesquelles la tourbe empêche la multiplication des bactéries et arrête complète- ment leur développement. Cela tient sans doute principalement à ce que la tourbe contient des acides libres qui, on l’a vu, arrêtent le développement des bactéries. Mélangée aux excréments humains, la tourbe perd plus ou moins ses propriétés désinfectantes, parce qu’a- lors ses acides se combinent au carbonate d'ammoniaque qui se dégage surtout de l’urée et que la masse, devenant alcaline, présente une composilion chimique favorable à la pullulation des bactéries. En réalité, comme l'ont montré les résultats des expériences de la Deutsche Landwirthschafts-Gesellschaft, Yadjonction de terreau de tourbe ne tue pas d’une manière certaine les germes des maladies contagieuses contenus dans les matières fécales. Ce résullal ne peul étre alleint qu'en ajoulant à la tourbe assez d'acide pour que la masse ait une réaction acide et tue les bacléries qui transforment l'urée en carbonate d'ammoniaque. D) La combustibilité de La tourbe varie énormément suivant sa composition ; elle dépend surtout de son taux de carbone, d’eau et de principes minéraux. La puissance calorifique de La tourbe, toules choses égales d’ailleurs, croit avec son taux de carbone. N en résulte 1. L'action microbicide du terreau de tourbe. Quatre expériences faites sous les auspices de l1 comuission des engrais, avec explications par J. H. Vocez. Arbeiten der deutschen Landwirthschafts-Gesellschaft, 1°* fascicule, Berlin, 1894. 2. Garrkv, Archio fur klinische Chirurgie, 28° volume, 3° fascicule. 3. NeuBer, idem, 27° volume, 4° fascicule, et 2S° volume, 3° fascicule. 4. C. Reixc, Prager medicinische Wochenschrift, 1886, n° 13-15. 3178 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, qu’elle est d'autant plus élevée que la tourbe est plus vieille (p. 312). | A mesure que les taux d'eau et de cendres augmentent dans la tourbe, La chaleur qu'elle A 5 en brûlant diminue, ainsi que l'attestent. ; les chiffres suivants" : 4 T'kilogr. de tourbe à 60 p. 100 de carbone, 6 p. 100 d’hydrogène et 34 p. 100 d'oxygène développe : | : CALORIES. TEMPÉRATURE. degrés. Avec 0 p. 100 de cendres, à l'état sec . . 5 451 2 100 — 5 — — mt 5 179 2 092 4 — 10 — — AS 4 906 2 081 \ — 20 _— — 5 4 360 2 042 N = 10 D LOU ATRAT LCA ER 4 906 2 052 3 — 95 _ 4 089 1933 l — 15 p. 100 d'eau et 10 OU dE centres, 4 089 1 967 : — 30 — 20 — À 2 725 1 761 $ Plus la tourbe renferme d’eau, plus se réduit la partie pratique ment utilisable de la chaleur dégagée, puisqu'’une portion de la chaleur produite doit être employée à volatiliser l’eau de la tourbe. Il s'ensuit que, dans une même tourbière, la valeur calorifique des la tourbe augmente én général avec la profondeur et que celle de la tourbe supra-aquatique est plus grande que celle de la tourbe infra aquatique, parce que celle-ci renferme plus de cendres (p. 316). Lan première est donc très supérieure comme combustible. ; Remarquons aussi que ses couches superficielles n’ont qu une faible valeur calorifique à cause de leur incomplète décomposition, tandis qu’elles ont un grand pouvoir d'absorption pour l’eau et les gaz ; il est donc logique d'utiliser les couches superficielles de ces tourbières à sphaignes comme litière et les couches profondes seu lement comme combustible. | 1. G. et K. Binnsaum, Die Torf-[ndustrie und die Moorkullur, Braunschweig, 1880, p. 195. CHAPITRE IV INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL Les influences si compliquées de l’humus sur la fertilité des sols présentent, suivant que l’humus entre comme partie intégrante ou comme couverture, des différences telles qu’il est bon de les étudier séparément. 4, — L'humus comme élément du sol. Son influence sur la végétation varie suivant la quantité que le sol en renferme. C’est un fait d'expérience qu’un taux modéré d’hu- mus exerce l’action la plus favorable sur la fertilité, tandis qu’un excès dans le sol est en général tellement nuisible que seules les plantes sans valeur peuvent y prospérer. Les limites entre les- quelles l’humus agit avantageusement sont difficiles à préciser parce qu’elles différent suivant les propriétés des autres éléments du sol. Que dans une terre peu fertile viennent à s’accumuler quelques centièmes d’humus, cela pourra déjà avoir une grande impor- tance, étant donnée la mauvaise composition de cette terre. Une faible dose d’humus suffisante pour faire désigner un sol sablon- neux comme riche en humus fera qualifier de pauvre un sol fer- tile de lehm ou d'argile qui possède toutes les conditions requises pour une abondante production d’humus. Dans de tels sols un taux de 5 à 6 p. 100 peut être considéré comme le minimum exi- gible pour qu'ils soient dits riches en humus. Chez les sols agri- coles les plus fertiles la Leneur en humus dépasse rarement 15 p. 100 et la plupart des champs n’en contiennent pas plus de 2 à 9 p. 100. 380 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. L'influence qu’exerce une dose semblable sur la fertilité du sol = est avantageuse sous plusieurs rapports. Elle à trait aux propriétés. chimiques et physiques du sol. A) L'humus agit chimiquement en contribuant directement et indirectement à enrichir le sol en matières nutritives assimilables et « en les soustrayant à l’action dissolvante des eaux d'infiltration. Les combinaisons humiques du sol sont-elles absorbées par les plantes ou sont-elles inutiles à la formation des matières organiques, c’est là une question qui a été souvent agitée mais qui n’a pas encore reçu une solution définitive. On a plusieurs fois soutenu que des combinaisons organiques ne pouvaient être absorbées par les végé- taux supérieurs puisqu'elles ne sont pas diffusibles. Cette objection n'est pourtant pas inattaquable ; car, d’après les recherches de A. PerErmaNN?, il y a dans le sol des matières organiques qui diffu- sent à travers une membrane de parchemin, comme le montrent les chiffres ci-dessous : 100 grammes de terre fine ont laissé diffuser au bout de 10 jours les quantités suivantes de matière organique (grammes). re —— sableuse. T: II. sablonneux. 0,0328 0,0125 0,0660 0,1811 0,0255 0,0384 La nature des éléments organiques dialysables du sol n’est pas encore connue; mais elle diffère en tout cas de la matière noire de GRANDEAU (p. 806) puisque celle-ci ne traverse ni le parchemin ni la membrane des cellules végétales ; elle diffère aussi de l’acide humique et de l'humate d'ammoniaque qui ne se diffusent pas. Bien qu’en ce qui concerne la dialyse du sol les essais avec le par- chemin ne puissent être appliqués de plano aux cellules végétales, il est permis de conclure de ces essais à la possibilité de l’absorption par les plantes de certaines matières humiques et d'y trouver une 1. W. Dermer, Landwirthschafttiche Versuchsslationen, vol. XIV, p. 294. 2. À. Perenmanx, Bullelin de l'Académie royale de Belgique, t. II, 1882, n° 1: de ET . L'ia D 4 Étl of L' nu" am p . INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 381 confirmation des travaux depuis longtemps oubliés de E. RisLer'. Celui-ci admetlait, contrairement à la doctrine de LieiG, que les plantes prennent une partie de leur carbone aux mätières orga- niques du sol. P. P. Denérain” a fait à ce sujet des essais avec deux betteraves dont l’une provenait d’un sol riche en matière organique et l’autre d'un sol pauvre sous ce rapport, mais bien pourvu de principes minéraux et de nitrates. | Voici les différences présentées à la récolte : TERRE PAUVRE TERRE RICHE en en matière organique, matière mais riche en Sante matières CEE LC minérales. Poids de toute la plante . . . . . gr. 730 165 Rardsdesiracines en MP CERN OT. 410 92 Sucre dans 100 p. de jus. . . . . 15.04 1 ES Sucre dans toute la plante ., . . . gr. 61,60 10512 La betterave venue dans le sol pauvre en matière organique avait donc, malgré une forte provision d’eau et de principes nutritifs, fourni une récolte bien moindre que celle qui provenait d’un sol riche en matière organique. DEHÉRAIN conclut de là que la différence constatée dans les récoltes ne pouvait tenir qu’à la différence dans le taux de matière organique des deux sols et que la betterave doit sans doute trouver pour son développement normal, outre les prin- cipes minéraux et les nitrates, des matières organiques solubles dialysables. Ceci s'accorde avec les recherches de A. PETERMANN. Il peut se faire, ajoute-t-il, que quelques autres plantes se com- portent de même tandis que d’autres peuvent se passer de ces ma-. tières. Les analyses précédentes n’autorisent cependant pas une pareille conclusion parce qu’on n’a pas montré qu'il y à absorption directe de la matière organique ni que la quantité des substances dialysables . E. Riscer, Archives de la Bibliothèque de Genève, 1858. . P. P. Denénain, Annales agronomiques, t, XV, 1889, p. 481-505. (1° IS 382 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. diffère dans les deux sols. Ajoutons que, eu égard à la grande diffé- rence dans le développement des plantes analysées, 1l semble hasardé ” de tirer une conclusion à si grande portée de recherches faites sur deux spécimens seulement. : Divers essais de famure dus notamment à J. B. LaAwes et J. H. GiL- BERT ont montré que les plantes agricoles végétant dans un sol riche « en matières organiques, c’est-à-dire fumé au fumier de ferme, don- nent des récoltes sensiblement plus abondantes que celles des terrains pauvres en humus mais pourvus de sels nutritifs par l’épandage « d'engrais minéraux. E. BRÉAL' a fait dernièrement des expériences dans le but de prouver l'absorption directe des matières humiques par les végétaux supérieurs. Les jeunes plantes développées : 1° dans l’eau ordinaire addition- née de nitrates et de phosphate de chaux; 2° dans l’eau ordinaire avec humate de chaux ; 3° simplement dans l’eau ordinaire, ont pro- duit dans leurs organes tant aériens que souterrains les poids suivants de substance sèche (en grammes) : 1 Er 3 100 plants de lentilles . . . 2,250 4,000 2,750 10 we blé TE 0,475 1,050 0,450 CR (1 MI CCE IE 6,250 10,250 » L'humate de chaux a donc favorisé sensiblement la croissance des jeunes plants. En outre, E. BréaL fit des essais sur le Poa annua; il en arracha une touffe, enleva les racines et mit les plantes dans un vase sur le fond duquel était une mince couche d’eau pour pro- voquer la formation de nouvelles racines. Quand elles furent dé- veloppées, il partagea la touffe en deux parties égales et les mit toutes deux dans une solution d’humate de potasse mais en sépa-n rant dans l'une des moitiés les racines des tiges. Au bout de deux ou trois jours, l'humate de chaux avait complètement disparu dans la solution où les racines attenaient aux tiges, tandis que dans ler 1. E. BnéaL, Annales agronomiques, t. XX, 1894, p. 353-370. | A INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 383 vase où les racines gisaient séparées la solution était restée inal- lérée. En analysant les solutions à l’aide du bichromate de potasse et de l'acide sulfurique, on vit que dans le premier vase les ra- cines avaient absorbé une quantité de carbone correspondant à 08:,20 d’acide carbonique (— 06,055 C.). L’humate de soude agit de même. Le même savant disposa sur le fond d’un vase contenant un peu d’eau de source une bande de papier à filtre trempée dans l'acide humique et y enfonça les racines d’un Pou. Là où les racines tou- chèrent le papier, elles imprimèrent leur trace dans la couche d'acide humique comme l'avaient fait sur la plaque de marbre les racines de fèves dans la célèbre expérience de J. Sacas. Enfin E. BRÉAL a montré que les plantes (Poa annua) pouvaient absorber le sucre par leurs racines (voir Note D). Ces résultats prouvent que des matières organiques peuvent être utilisées par les végétaux supérieurs à chlorophylle; pourtant, on ne peut encore en conclure que ces matières sont absorbées telles quelles par les plantes ; car, d’après les recherches de H. Morisc* sur les excrétions des racines et leur action sur des matières orga- niques, il se pourrait que les matières en question subissent avant leur absorption une modification chimique plus ou moins profonde. H. Mouisca montre que la racine par son excrétion acide ne corrode pas seulement les plaques de pierre polie, mais agit encore sur les corps organiques et même d'une manière plus intense que sur les minéraux puisqu’au lieu d’une simple dissolution elle provoque ici une transformation chimique. Cette excrétion de la racine peut être considérée comme un auto- oxydant qui amène la combustion des substances facilement oxyda- bles, donc aussi des matières humiques. L’érémacausis des matières organiques du sol doit être favorisée par les sécrétions des racines ; ne sait-on pas que les engrais végétaux se transforment plus vite dans un sol pourvu de racines que dans un sol qui n’en contient pas ? L'action favorable de l’humus sur la crois- 1. H. Mouscn, C. R. de l’Académie des sciences de Vienne. Math-naturw. Klasse, XCNI. 3, p. Si-109. 384 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sance des plantes peut donc être attribuée aussi bien à une absorp-« tion directe qu’à l'assimilation de matières nutrilives provenant de transformations chimiques de cet humus. 1 B. Frank! a fait dernièrement une découverte Toners re=h lative au mode particulier d'absorption des matières organiques, probablement albuminoïdes, par certains arbres. Il a trouvé que certains arbres, notamment les cupulifères et les conifères, ne se nourrissent pas directement du sol mais vivent en symbiose* dans tout leur syslème radiculaire avec un mycélium qui joue le rôle dem nourrice el transporte à l'arbre la nourriture qu'il a puisée dans le sol. « Si sur l’un quelconque de nos hêtres, chênes, charmes, cou driers, châtaigniers, pins”, etc., on examine les petites racinesM absorbantes, elles se montrent généralement formées de deux élé- ments hétérogènes ; une partie centrale représentant la racine elle- même et une écorce soudée aux Lissus sous-jacents et formée dem filaments mycéliens. Ce manteau de mycélium enveloppe complète- ment la racine, même son point végélatif; il s’accroit avec elle pars l'extrémité et se comporte à tous égards comme un tissu périphé- rique appartenant à la racine et lui étant organiquement lié. L’en- semble n’est donc ni uniquement une racine d’arbre ni un champis gnon; mais c’est, comme le thalle des lichens, une association de deux êtres différents en une entité morphologique que l’on peut appeler une racine à champignon ou mycorhize. » Le champignon apparait après la germination tout d’abord sur les racines latérales de premier et de second ordre. C’est chez le charme que son inva- sion est la plus rapide; des plants d’un an ont déjà toutes leurs racines absorbantes transformées en mycorhizes. C’est chez le chêne que l’apparition du champignon se fait le plus attendre ; souvents des plants d’un et deux ans ou bien encore certaines portions des 1. B. Frank, Berichte der deutschen bolanischen Gesellschaft, 1885, p. 128-145, et vol. VI, p. 248-249. — Biologisches Centralblatt, 1885, vol. V, p. 225-228. 2. On entend par symbiose le fait très répandu dans la nature de deux êtres d'espèces différentes s'associant pour vivre en commun. 3. Forslwissenschaflliches Centralblatt, 26° année, 1894, p. 185-190. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 339 racines de plants plus vieux ne sont que partiellement champi- _gnonnés. | Les racines absorbantes dépourvues de mycélium possèdent alors, comme celles des autres végétaux, des poils absorbants qui man- quent toujours aux mycorhizes. Celles-ci s’accroissent très lente- ment en longueur, mais grossissent plus et ont une plus grande tendance à la ramification qui souvent prend laspect coralliforme ; la ramification est endogène et monopodique. Comme les racines absorbantes, les mycorhizes ont une durée de vie limitée, et les plus grosses, celles qui deviennent des ramifications lignifiées et durables du système, perdent leur manteau mycélien qui est propre aux parties jeunes, à celles qui jouent un rôle dans la nu- trilion. B. Frank a constaté la présence régulière du champignon à tous les âges, sur toutes les racines, dans tous les sols et tous les pays, chez Carpinus betulus, Corylus avellana, Fagus silvatica, Quercus pedunculata, Q. sessiliflora, Q. rubra, Caslanea vesca, Salix, Populus, Pinus, Abies et Picea. Par contre, les mycorhizes n’ont jamais été rencontrées sur Betula, Alnus, Ulmus, Morus, Platanus, Juglans, Pirus, Cratægus, Prunus, Robinia, Tilia, Acer, Rhamnus, Cornus, Fraxinus, Syringr, Sambucus. Le mycélium radiculaire fait donc un choix rigoureux entre les espèces; dans une forêt de bêtres, les racines de hêtre seront seules envahies et pas celles de Hedera, Acer, Anemone, Oxulis, ete. Voici les motifs qui portent à croire que les mycorhizes des arbres jouent le rôle de nourrices : 1° La mycorhize existe partout, ce qui n’est pas le fait du pa- rasilisme ordinaire, toujours accidentel. Le fait que cette sym- biose est universellement répandue, affectant partout et toujours Chaque individu, lui donne le caractère d’une adaptation de la plante à l’activité du champignon, activité dont elle tire un eertain profit. ; 2 La présence des mycorhizes dépend du taux d’humus. Elles se rencontrent loujours dans le sol forestier ordinaire riche en humus et manquent partout où manque l’humus d’arbre. Elles sont pro- duites par l’humus naturel forestier et le mycélium qui y croit. MATIÈRES ORGANIQUES. 25 386 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Inversement, si l’on transporte des plantes avec mycorhizes dans un sol absolument privé d’humus, les racines perdent peu à peu leur mycélium. Ce n’est donc pas dans les racines vivantes que celui-ci trouve ses conditions d’existence, mais bien plutôt dans l'humus des arbres. 3° La symbiose de la racine et du champignon présente une série de particularités qui concordent pleinement avec l’idée que le cham- pignon est un fournisseur d’aliment pour l'arbre et qui forcent à admettre cette manière de voir. Ainsi c’est toute la région de la racine capable d’absorber qui est revêtue d’un manteau mycélien continu intimement lié à la racine à laquelle la nourriture arrive par son entremise. Ce manteau, dans les circonstances naturelles. ordinaires, ne manque dans aucune saison. Pendant un temps assez long, plusieurs saisons de végétation, la mycorhize est pour la plante un organe en fonctionnement, adapté à l'assimilation de l’humus. La façon dont plante et champignon sont associés corres- pond exactement aux exigences auxquelles doit satisfaire la myco- rhize considérée comme organe puisant dans l’humus par son, champignon des aliments pour la plante. L'action des champi- gnons des mycorhizes sur le sol forestier est très importante, car l'humus forestier est constitué pour une bonne partie par une innombrable quantité de mycéliums vivants qui le traversent en tous sens. Les mycorhizes ne renferment pas trace d’acide nitrique (même si le sol et les végétaux qui y croissent en contiennent), ni les racines, tandis qu’on le décèle dans les racines absorbantes des arbres non mycorhizés. La combinaison azotée assimilée par le champignon de la mycorhize est inconnue ; il paraît absorber l'azote sous une forme autre que l'acide nitrique. L'importance de celte symbiose consisterait donc en ce que le champignon serait à même de puiser à des sources d’azote inutilisables sans lui par les végélaux supérieurs. « Chez les plantes à chlorophylle les cham= pignons des mycorhizes agissent surtout en absorbant l'azote de l'humus. » 4° Les résultats de diverses expériences et observations militent encore en faveur de l'alimentation des arbres par l’humus, grâce aux champignons des racines. De jeunes chênes et hêtres peuvent INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL, 387 bien vivre dans des solutions nutritives et dans un sol dépourvu de champignons ; mais leur nutrition est meilleure quand elle se fait avec l’humus par l'intermédiaire des mycorhizes. Des plants de hêtre venus de semis moururent en partie déjà à la fin du premier été à la suite d’une alimentation sans humus ni champignon ; les autres vécurent chétivement encore une année puis périrent l’un après l’autre. Le hêtre sans mycorhize se nourrit mal comme le montrent les cultures faites parallèlement en sol stérilisé et non stérilisé. Dans le premier les plants meurent peu à peu. On a observé aussi que le pin sylvestré en sol normal de bonne qualité ne se développe pas s’il n’y a pas de champignon de racineet si, par suite, la formation des mycorhizes se trouve entravée, tandis que dans le même sol et les mêmes conditions extérieures il se développe puissamment s’il possède des mycorhizes. « Tous ces faits viennent à l'appui de la thèse suivante. L’humus du sol forestier est vivifié par des champignons” qui ont la propriété de faire passer dans l’organisme végétal le carbone et l’azote des dé- tritus des arbres et de les employer directement à son alimentation. Les arbres forestiers qui ne jouissent pas par eux-mêmes de cette fa- cullé utilisent ces mycéliums de l’humus (grâce à la symbiose que leurs racines contractent avec eux) pour reprendre aussitôt et aussi complètement que possible les éléments précieux de leurs propres déchets. » (B. Frank.) L’arbre serait donc, à proprement parler, un parasite de ces champignons saprophytes ; mais il est plus probable qu'il y a bénéfice réciproque (non encore déterminé) et que le champignon retire de Ja racine de l’arbre la récompense de son ser- vice. En raisonnant d’après tous ces faits, on arrive à ce résultat que les végétaux supérieurs à chlorophylle ont la faculté d’absorber el d’uuliser certains éléments de l’humus. Il ne faut cependant pas conclure à leur indispensabilité puisque de nombreux essais ont prouvé que les plantes vertes peuvent atteindre leur maximum de rendement même en l’absence de matières organiques et prendre 1. On ne peut encore déterminer sûrement la place de ces champignons dans la clas- sification. Ils appartiennent probablement aux Tubéracées et aux Hyménogastrées. 388 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dans l’atmosphère tout le carbone dont elles ont besoin. Même en laissant de côté ses fonctions comme aliment, l’humus garde toute sa valeur au point de vue de la fertilité des sols parce qu’il exerce, en outre, l’action la plus favorable sur leurs propriétés physiques et chimiques, comme nous allons essayer de le démontrer plus loin. Nous avons dit, au début de ce livre (p. 5), que la décomposition des matières organiques, quand elle se fait dans les conditions de l’érémacausis, donne naissance, en dehors de l’eau et de l’acide car- bonique, à de l’ammoniaque, qui se trans!orme en nitrate par oxy- dation ultérieure, et à des principes minéraux solubles originaire- ment contenus sous forme inassimilable soit dans le sol, soit dans les détritus végétaux ou animaux”. Donc, à mesure que les matières humiques se décomposent, le sol s'enrichit en ammoniaque (et ni- trates) et en principes minéraux qui peuvent être utilisés par les plantes. C’est une circonstance favorable, dans l'emploi des engrais d’origine organique comparés aux engrais artificiels à sels très so- lubles, que les principes nutriufs ne se forment pas tout d’un coup dans les transformations de l’humus, mais peu à peu, ce qui fait que les matières, surtout les azolées, sont protégées très efficacement contre la dissolution. Des recherches de E. Simon ? il résulte que l'acide humique entre eu combinaison avec cerlains minéraux du sol, entre autres l'acide. phosphorique. On produit ces combinaisons entre l'acide phospho- rique et la matière organique en mélangeant une dissolution d’hu- mate d’ammoniaque avec une dissolution étendue d’acide phospho- rique. Déjà L. GRANDEAU* était arrivé à penser qu'il existe des combinaisons entre les matières organiques et minérales du sol, et ces composés, dans les idées de ce savant, sont une des principales causes de la fertilité des sols. {. Remarquons qu'une partie des éléments minéraux des détritus végétaux est dissoute par les excrétions des racines et absorbée par cette voie, si bien qu'après l'érémacausis des malières qui existaient d'abord sous forme insoluble, comme des minéraux non décomposés, passent sous une forme facilement soluble. 2. BixpenmanN's Centralblall fur Agrikullurchemie, vol. VIE, 1875, p. 74. 3, Journal d'agricullure pratique, 1872, n°% 14-17, 20 et 43. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 389 L'action indirecte de l’humus consiste surtout en ce que les corps qui se forment dans l’érémacausis ont la faculté de rendre solubles certains principes minéraux insolubles. Ainsi, selon F. SeNFT\, les silicales alcalins et alcalino-terreux, les phosphates de chaux et de fer sont décomposés et rendus solubles par un contact assez pro- longé avec l’humate d’ammoniaque. MErscarscnEerRsKY ? a montré en outre que l’orthose est attaqué par l’humus et Ercnnorx * a éta- bli par de nombreuses recherches que des terres humifères renfer- mant des acides humiques libres mettent en liberté les acides des solutions de sels neutres et déterminent une acidité plus accusée que celle qu’on constate sans l'intervention de ces sels. Cette mise en hberté intéresse surtout les phosphates ; aussi acide phosphorique et phosphates entrent en solution. L'humus favorise donc l’utilisation des substances minérales du sol en les mettant dans un état assimilable et en accélérant ainsi évi- demment la végétation. L’humus exerce une action indirecte très importante par la grande quantité d'acide carbonique qui se produit dans l’érémacau- cis et agit sur divers minéraux du sol en les dissolvant. Cette action s’exerce tant sur les carbonates alcalino-terreux (chaux et magnésie) qui se transforment alors en bicarbonates que sur les minéraux des silicates alcalino-terreux ou alcalins'ou de protoxyde de fer. Ces der- niers sont décomposés lentement, mais graduellement, sous l’in- fluence de l'humidité d’un sol riche en acide carbonique ; la silice hydratée est mise en liberté et il se forme des carbonates qui se dis- solvent dans l’eau et servent à la nutrition des plantes. Les recher- ches de Th. Dierricu * montrent dans quelles limites s'exerce cette action ; il traila des sols et des roches soit avec de l’eau distillée, soit avec de l’eau contenant de l'acide carbonique et dosa les minéraux dissous. 1. F. Senrr, Lehrbuch der Gesteins- und Bodenkunde, 2° édition, Berlin, 1877, 951. . 2. Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, vol. XVI, p. 2283. 3. Landwirthschaftliche Jahrbücher, vol. 1, 1877, p. 957. 4. Ta. Diernicu, Journal für praktische Chemie, vol. LXXIV, p. 129. 390 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Voici les résultats qu’il obtint : Poids total en grammes des minéraux dissous dans 200 grammes. LEHM LEHM POR- BA- PHOSPHO- GRAU- GaRÈS humifère. calciné. PHYRE. SALTE. rire. ONEISS. Licke, rouge. Eau distillée. . 0,039 0,085 0,020 0,016 0,032 0,067 0,133 0,013 Eau avec acide carbonique. . 0,072 0,171 0,040 0,298 0,072 0,340 0,166 0,467 Dans les expériences de A. SrôckHarDT ‘ sur 10 000 parties en poids de roche pulvérisée il s’est dissous dans PORPHYRE, BASALTE, Rire FaUTSHIee RE ET 10 8 42 Eau avec acide carbonique. . . 20 149 85 C'était de la potasse, de la soude et de la chaux. K. Hausnorer ? a pu constater que d’un granit pulvérisé prove- nant d’Unter-Rôslau dans les Fichtelgebirge il s’est dissous sur 1 000 parties dans Hahypüres Seite rte 0,062 Eau avec acide carbonique. . . . OAIT2 Les recherches faites par A. Cossa° sur du gneiss, de la phono- lithe, du trachyte, du basalte, etc., ont conduit à un résultat absolu- ment semblable. Th. DierricH a montré que l'acide phosphorique est dissous par l’acide carbonique de combinaisons difficilement solubles telles que la phosphorite. Une phosphorite d’Annaberg a perdu en acide phos- phorique dans DÉUBOIONICONE MMS TS traces. Eau avec acide carbonique. . . . 0,0019 D'après tous ces résultats, l’humus exerce sur le sol une action 1. À. Srücknanpr, Chemischer Ackersmann, 1873, p. 230. 2, K. Hausnorer, Journal fur praklische Chemie, vol. 103, p. 121. 3. À. Cossa, idem., vol. 106, p. 3S1. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 391 utile en ce que, grâce à l'acide carbonique formé, il favorise la dé- composition el la dissolulion de certains minéraux insolubles et contribue ainsi à augmenter la réserve nutrilive du sol. La décomposition par l'acide carbonique des silicates précédents a pour conséquence la production non seulement de matières nutri- tives solubles, mais encore d’une certaine quantité d'argile et de si- lice qui forment avec les alcalis et les terres alcalines des sels dou- bles particuliers (zéolithes) et ces sels jouent un rôle important dans le sol lors de l'absorption chimique des matières nutritives. Comme l’acide carbonique l’ammoniaque produite dans l’éréma- causis provoque la dissolution de minéraux encore intacts, surtout si l’eau contient en même temps de l’acide carbonique. Ceci a été prouvé par Th. Dierrica qui a obtenu les chiffres suivants : Quantité totale en grammes de matières minérales dissoutes dans 200 grammes. = À= o - Re RON ELU anaistllée.:.. : . : . :0,039:-0,0835,0,020" 0,016 0,020 0,032 Eau distillée avec carbonate d'ammoniaque . . . . . 0,073 0,066 0,038 0,534 0,013 0,035 Eau avec acide carbonique et carbonate d'ammoniaque. 0,128 0,118 0,058 0,667 0,045 0,050 De la phosphorite il s’est dissous dans ACIDE phosphorique: Eau distillée. . . . . : St HE DORE 0,0019 Eau distillée avec La bpdute d AMMOMAUE 0,0052 Eau avec acide carbonique et carbonate d'ammoniaque . . 0,003? Enfin, parmi les influences chimiques de l’humus, celle qu'il exerce en vertu de son pouvoir absorbant pour les matières nutriti- ves est de la plus haute importance. L’énergie avec laquelle elles sont retenues par l'humus et soustraites à l’action dissolvante des eaux d’in- filtration est très considérable, comme nous l'avons montré plus haut (p. 327). Cette influence se fait surtout sentir dans les sols pauvres en argile, donc dans les sols légers, sablonneux qui, sans l’humus 392 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. fournissent de grandes quantités d’eau d'infiltration (p.218 et 350). Les sables riches en humus sont déjà, par ce seul fait, beaucoup plus ferules que ceux dont le taux de matière organique est faible ou nul. B) Fonctions physiques de l'humus. — Presque dans tous les cas l’humus exerce sur les propriétés physiques des sols minéraux une aclion extrêmement favorable, quoique différente. Relativement à la cohésion du sol, les expériences de H. Pucuner! montrent nette- ment que l’hurmus diminue la cohésion dans tous les sols argileux. Avec un taux d’eau de 0,20, 40 et 60 p. 100 de la faculté d’imbibi- tion totale, la cohésion absolue d’un cylindre de terre de 3 centimè- tres de hauteur et 2 centimètres de diamètre a atteint en moyenne. avec VC 2/3 vol. Kaolin. 1/3 vol. Kaolin. Kaolin. 1/5 vol. Humus. 2/3 vol. Humus. 24 251 gr. 21 708 gr. 4 G44 gr. La ténacité du sol argileux diminue donc à mesure qu'il ren- ferme plus d'humus. Avec le sable quartzeux, dont la cohésion est faible, on remarque une influence analogue de Phumus, mais dans ces sols elle est évidemment de peu d'importance. L’humus diminue aussi la résistance que les sols, les sols compacts surtout, opposent au travail mécanique des instruments aratoires. La résistance aux instruments tranchants s’abaisse d’autant plus que la proportion d’humus dans le sol est plus grande. Avec un taux d’eau s’élevant de 0 p. 100 à 20 p. 100 de la faculté d’imbibition totale (de 20 p. 100 en 20 p. 100) la résistance à la rupture a été en moyenne pour Er ae 2/8 vol. Kaolin. 1/3 vol. Kaolin. Hu 1/3 vol. Humus. 213 vol. Humus. 9 833 gr. 5713 gr. 2 281 gr. L’adhérence de la terre aux instruments aratoires diminue aussi à mesure que le taux d’humus augmente. Par exemple, dans les ex- périences de J. ScHacrBAsIAN *? sur l’adhérence entre une plaque 1. H. Pucunen, Forschungen, etc., vol. XII, 1889, p. 195. 2, J. ScnacnBaAsiAN, Forschungen, elc., vol. XIII, 1890, p. 193. Da rie PUS 7e Le INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 393 d'acier poli de 400 centimètres carrés et un sol modérément pressé contre elle, il a fallu pour la rompre un poids en grammes avec 2/3 vol. Kaolin. 1/3 vol, Kaolin. 2/3 vol. Quartz. 1/3 vol. Quartz. aolin. Ç 'ÉZ. ? proln 1/3 vol. Humus. | 2/3 vol. Humus. TE 1/3 vol. Humus. | 2/3 vol. Humus. | | Pour un taux d'eau — 400 p. 100 de la faculté d’imbibition totale. 3 347,41 *2 068,4 | 1913,8 [1 956,8] {1 810,6 | 1 632,2 Pour un taux d’eau — 80 p. 400 de la faculté d’imbibition totale. “4 2954,8 | 116,6 L'influence du taux d’humus sur le coefficient de frottement se manifeste, d’après les recherches du même auteur, de la manière suivante : Coefficient de frottement en volume, 2/3 Kaolin. | 1/3 Kaolin. = ME Sable, 1/3 Sable. 1/3 Humus. | 2/3 Humus. Fe ù 3 Humus. FRE 3 Humus. | Humide. Kaolin. Acier poli . . .10,4335| 0,4495 0,4850 Lo, 8250| 0,7930 o | 0,105 Nous voyons, d’après ces chiffres, que pour le kaolin (argile) le frottement augmenta d’une manière insignifiante avec le taux d’hu- mus, tandis que le coeflicient de frottement du sable, au contraire, baissa considérablement et proportionnellement au taux d’humus. En comparant tous ces résultats, on arrive à conclure que l’humus rend plus légers, plus faciles à culliver, les is minéraux, surlout les sols compacts. Une certaine proportion de matières organiques permet, en outre, l'établissement d’une structure normale du sol, comme celle qui consiste dans la mise en grumeaux, c’est-à-dire dans la formation de particules meubles et c’est pour l'obtenir qu’il faut une culture rationnelle du sol. D’après les recherches de Tu. SenLæsinG" les humates ont la pro- 1. Comples rendus, t. LXXIV, 1872, p. 1408. 394 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. priété de réunir en grumeaux les particules d’argile, de sable et de calcaire en jouant le rôle de ciment. Déjà 1 p. 100 d’acide humique, mélangé à de la chaux ou à de l’argile, était suffisant pour donner aux sols en question le degré de perméabilité en rapport avec la mise en grumeaux, et pour augmenter ainsi remarquablement leur perméabilité à l'air et à l’eau. De ces faits l’on peut conclure que l’humus, outre ses autres bonnes qualilés, possède encore celle d'ameublir les sols compacts. Parmi les autres effets qu’un taux variable d’humus exerce sur l'état physique des sols minéraux, ceux qui ont trait à la manière dont les sols se comportent vis-à-vis de l’eau, méritent une attention spéciale. Mes recherches® au moyen de lysimètres de 400 centimètres carrés de surface et de 0",50 de haut ont donné, du 1* avril au 30 septembre, les résultats suivants : 3/4 Lehm. |1/2 Lehm. |1/4Lehm. 3/4 Sable. [1/2 Sable. |1/4 Sable. Année. | Lehm. : u able. 1/4 Humus.|1/2 Humus.|3/4 Humus. 1/4 Humus. |1/2 Humus.|3/4 Humus! Taux d’eau moyen des sols en volume p. 100. 1882 | 3 £. 38.96 39.48 ACL ML GARD A7 29.78 38.93 1884 |3 36.93 37.28 38.991 12,34 |: 19:72 | 2a:21 34.09 Eau d'infiltration (en grammes) par 400 centimètres carrés de surface. 1882 5 375, 8 637 9013 | 10117 | 16638] 17 217 4228 | 12207 1884 | 5901 7295 | 709$ | 7506 | 13256] 14065 5 | 11044 Quantité d'eau évaporée (grammes) par 400 centimiêtres carrés de surface. 1882 | 15718] 1: 1584 | 14373| 1 4 294 13 808 13 324 7 893 6 S54 9 503 11687 2 949 13 256 12 409 7 198] 6039 6 706 9 060 Les mélanges ont été faits d’après le volume; l’humus a été employé sous forme de poudre de tourbe: Ces chiffres montrent avec évidence 4° Que l’élévation du taux d’humus dans des mélanges de lehm et de sable a pour résultat une augmentation de l'humidité de la masse, augmentation beaucoup plus grande dans le sable que dans le lehm. 1. E. WozLny, Forschungen, etc., vol. XVIII, 1895, p. 27. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 395 Ceci se constate lorsqu'on calcule les rapports (pour 1884) des chiffres précédents au lehm ou au sable pur : 3/4 Lehm. 1/2 Lehm. 1/4 Lehm. 1/4 Humus. 1/2 Sable. 3/4 Sable. 3/4 Sable. 1/2 Sable. 1/4 Sable. 1/4 Humus. 1/2 Hurmus, 3/4 Humus. Lehm. Sable. 1 1,07 1,09 É, 12 1 1,60 2,05 2,76 La cause de cette progression caractéristique que nous observons dans ces chiffres lient essentiellement à ce que les facultés d’imbi- bition du lehm et de l'humus se ressemblent beaucoup plus que celles du sable et de l’humus. Ces deux éléments du sol doués d'une grande faculté d’imbibition s’influenceront dans leur mélange beau- coup moins que le feraient le sable et l’humus, dont le premier absorbe très peu et le dernier beaucoup d’eau. Pourquoi Phumus n’a-t-il exercé qu’une si faible influence sur la faculté d’imbibition des mélanges de lehm, c’est ce qui n’est pas encore suffisamment élucidé, car les différences dans la faculté d'imbibition des éléments considérés sont encore assez grandes. La raison pour laquelle, dans le mélange d’humus et de lehm, le taux d’eau varie moins tient à ce que la terre a formé alors des grumeaux bien nels qui ont dimi- nué la faculté d’imbibition et augmenté la perméabilité du sol pour l’eau. On peut encore conclure des chiffres précédents que : 2° Dans les mélanges avec lehm les quantités d’eau qui s’infiltrent sont d'aulant plus grandes que le taux d’'humus est plus élévé, tan- dis que dans les mélanges avec suble c’est le contraire qui a lieu. Si la perméabilité des mélanges avec lehm augmente avec le taux d’humus, cela tient d’une part à la plus grande perméabilité de l’hu- mus comparé à l'argile, et de l’autre à la formation de grumeaux produite par l’humus. Quant au sable, le fait s'explique parce que la faculté d’imbibition augmente avec te taux d’humus, et que la per- méabilité du mélange diminue dans la même mesure. Si dans le mélange de 3/4 de volume de sable et 1/4 de volume d’humus il y a eu plus grande perméabilité que dans le sable pur, c’est parce que Justement dans ce mélange la mise en grumeaux a été plus accentuée. Enfin, nous concluons que : 3° Dans les mélanges avec lehm les quantités d'eau évaporée sont 396 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. d'autant plus petites qu'ils sont plus riches en humus, et qu’au con- traire dans les mélanges avec sable l’évaporalion augmente avec le taux d'humus. Pour l'explication de ces faits, rappelons que la circulation de l’eau dans le lehm se ralentit à mesure que le taux d’humus aug- mente, el que l’eau évaporée est plus difficilement remplacée. D'abord, l'humus conduit l’eau moins rapidement que le lehm et, en outre, le sol se dispose en grumeaux qui entravent l'ascension de l’eau vers la surface. L’évaporation est donc mversement propor- tionnelle à l’infiltration, de sorte qu’en moyenne leurs effets s’équi- librent presque, et dans le taux d’eau des substances c’est surtout leur faculté d’imbibition qui s'exprime. L'effet de l’humus sur le plus ou moins d'humidité des sols de culture se manifeste surtout, d’après ce que nous venons de voir, par ceci que les sols légers, dans lesquels les plantes souffrent facile- ment du manque d’eau, deviennent plus humides et par conséquent plus fertiles, tandis que ceux qui sont compacts et qui retiennent bien l’eau deviennent plus perméables. La température du sol se modifie suivant son taux d’humus comme on le voit par mes chiffres” ci-dessous : Lehm. TEMPÉRATURE DU SOL A 15 CENTIMÈTRES JUILLET de profondeur. EEE OSCILLATION DE LA TEMPÉRATURE. 1583. 3/4 Lehm. |1/2 Lehm. |1/4 Lehm. Lebm. |1}4 Humus.|1/2 Humus.|3/4 Humus. 21,80 29,44 20,97 15,34 15,93 15,40 = mm ©] Cr { 2 _ or [Sa Sa) © 12 re 9 2 20,95 1! ox ©2 C1 18,54 1. L'humus a été employé sous forme de tourbe pulvérisée. Les températures ont été prises quotidiennement à 7 heures du matin et à 4 heures du soir. Juillet 4883 : 1-5 6-10 11-15 16-20 21-25 26-31 Moyenne es À — | ————— | —— Moyenne INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. Sable. TEMPÉRATURE DU SOL A 15 CENTIMÈTRES de profondeur. EE 3/4 Sable. |1/2 Sable. |1/4 Sable. Sable. 1/4 Humus.|1/2 Humus.|3/4 Humus. 23,79 23,75 21,62 15,22 16,46 16,12 23,60 23,62 91:74 15,41 16,40 16,08 93,44 23,51 21,74 15,46 16,27 15,88 22,86 23,10 21,83 15,65 16,13 15,82 397 OSCILLATION DE LA TEMPÉRATURE. A ——— | 3/4 Sable. |1/2 Sable. |1/4 Sable. Sable. 1/4 Humus.|1/2 Humus |3/4 Humus. a D WW Dm WW © NU 581 19.36 |? 19:27 M 19:12 [20 CO SES TS 3/4 Lehm. |1,2 Lehm. |1/4 Lehm. LL 1/4 Humus.|1/2 Humus.|3/4 Humus. Puel T22 | 7,80 | 17,34 Man 7,600 1,71 |2,7,176 NTNRER TL 4,01 4,22 1,29] 1,65 1,70 1,87 2,42 2,68 2761 2,69 2,57| 2,99 2,94 3,01 TEMPÉRATURE DU SOL A 12 CENTIMÈTRES DE PROFONDEUR. "À 3/4 Sable. |1/2 Sable. Sable, 1/4 Humus.|1/2 Humus. 1/4 Sable. 3/4 Humus. iv 6; der | 07,20 7,26 HEC EE CE M EE 7,68 d:19 544 3,93 4,39 1,58| 1,65 1,8i 1,98 2,374 2,451). 965 2,59 2,98| 2,98 | 2,96 2,94 Si l'on considère d’abord les observations faites pendant la saison chaude, on voit que l'influence de l’humus sur la température du sol est très faible dans les pentades et dans les moyennes mensuelles. Avec l'augmentation du taux d’humus on remarque une tendance à l'élévation de la température dans le lehm, et à son abaissement dans Je sable ; mais les différences sont très légères. Que pourtant il doive y avoir des différences notables dans la marche de la chaleur du sol, c’est ce qui ressort clairement des chiffres relatifs aux oscillations de la température ; on les voit diminuer à mesure que le taux d'humus augmente dans le sol. Il doit donc se trouver dans le réchauffement 398 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. du sol certaines singularités qui ne ressortent pas dans les moyennes. En effet, c’est ce que l’on voit lorsque l’on jette un coup d’æil sur le tableau suivant où on a noté séparément les observations du soir et celles du malin. Température du sol à 15 c2ntimètres de profondeur. JUILLET 1883. Moyenne . Différence. 3/4 Lehm!, 1/2 Lehm, 1/4 Lehm. 1/4 Humus. 1/2 Humus. 3/4 Humus. À © © Matin. Soir. Matin. Soir. Matin. Soir. Matin. Soir. Lehm. JUILLET 1883. 1- 5 6-10 11-15 16-20 21-25 26-31 Moyenne . Différence. . 3/4 Sable 1/2 Sable. 1/4 Humus. 1/2 Humus. 8/4 Humus. ER À _ © TT, Matin. Soir. Matin. Soir. Matin. Soir. Matin. Soir. Sable, 18,72 | 28,86 | 19,46 | 27,74 | 19,82 | 27,06 | 20,56 19,84 | 27,66 | 20,48 | 26,76 | 20,82 | 26,20 | 21,38 18,66 | 24,58 | 19,08 19,36 | 24,12 | 20,18 13,60 | 16,84 | 1. 14,30 | 16,62 | 14,92 14,60 | 17,94 | 15,08 13,96 | 17,80 | 14,59 17,04 | 21,50 a 4,46 2,92 Ces chiffres prouvent que le maximum de la température (soir) est d'autant plus élevé que le sol contient moins d’humus, et réci- INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 399 proquement le minimum (matin) est d'autant plus élevé que le taux d'humus du sol est plus grand’. Comme l’échauffement du sol varie avec les changements de temps et de saisons, suivant que la tempé- rature monte ou descend, on peut dire, d’une manière générale, que, par une lempéralure croissante el élevée, le sol se réchauffe d'autant plus faiblement, et, réciproquement, par une température décroissante el basse le sol se refroidit d'autant plus lentement que les quantilés d'humus dans le sol sont plus grandes. Suivant les circonstances extérieures, la variation de la température du sol avec divers taux d'humus sera très inconstante ; néanmoins, en général, l’échauffement du sol sera d’autant plus ralenti par les temps chauds, d'autant plus prolongé par les temps froids” que l’humus existera dans le sol en plus grande quantité. D’après tout cela, l’action de l’humus sur la chaleur du sol peut se résumer ainsi : à} diminue, dans certaines limiles, les oscillations de la température du sol provenant des variations des facleurs exté- rieurs. Il reste encore à élucider si la couleur foncée, produite par l’addition de certaines quantités d’humus, a une influence favorable sur l’échauffement du sol*. Elle est réelle, tant que le taux de subs- tances organiques ne dépasse pas une certaine limite, c’est-à-dire tant que, par l'addition d’humus, on n’augmente pas sensiblement la chaleur spécifique du sol ni qu’on ne diminue pas sa conduc- tüibilité. Mais si le taux d’humus est assez élevé pour influer sur ces deux propriétés, alors le sol minéral clair peut, comme nous l'avons vu plus haut, être plus favorisé par les températures crois- santes el élevées, et l'influence de la coloration peut être sans action. C) La fermentation du sol (Bodengahre) peut être légitimement étudiée ici puisque c’est un état du sol agricole qui est principa- 1. C'est pour cela que la différence entre le maximum et le minimum de la tem- pérature du sol diminue à mesure qu'augmente le taux d'humus. 2. Comparez les observations de la température de novembre 1883. 3. E. Woixy, Forschungen, clc., vol. I, 1878, p. 43. >, 7 + P)e A. 400 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. lement dù au concours de ses éléments organiques, el qui se ramène à une modification des propriétés physiques el chimiques favorable au développement des plantes. Si différent que paraisse cet état de celui qu’on nomme « Ackergahre », ce n’est en réalité" qu’un seul et même phénomène, c’est-à-dire un certain degré de porosité et d'humidité des sols après une fumure fraiche ou après qu'on a déchaumé ou retourné les prairies naturelles ou arlifi- celles. Le sol apparaît friable et grumeleux; il est facilement perméable à l’air, se distingue par son taux d’eau normal et modéré, enfa il est pourvu plus ou moins abondamment des substances nutritives nécessaires à l'accroissement des plantes utiles. Comme cause de cette modification des sols agricoles, on invoque souvent un ameublissement spontané qui serait dû à une décomposi-. tion accélérée des éléments humiques ou des engrais d’origine orga- nique et à l’action des grandes quantités d'acide carbonique qui en résultent. Une pareille distension du sol ne serait possible que si ce dernier, semblable à ia pâte de pain, formait une masse s’oppo- sant à la sortie de l’acide carbonique. Mais ce n’est pas le cas; le sol, grâce à la porosité provoquée par cette fermentalion, est dans un état qui justement facilite considérablement la sortie de l'acide carbonique ; il est donc impossible d’admettre l’idée d’un ameu- blissement spontané du sol. L'expérience montre au contraire et diverses recherches * ont établi par des chiffres que le sol arable meuble, qui n’est pas labouré pendant un certain temps, voit son volume diminuer constamment par la pression des couches supé- rieures sur celles siluées au-dessous, et surtout par l’effet méca- nique de la pluie ; il devient plus compact, de sorte qu'il est souvent nécessaire de le labourer fréquemment, s'il n’est pas couvert, pour lui conserver son ameublissement. Si nous réfléchissons au fait déjà mentionné (p. 247), que, par suite de la température relativement plus élevée et du taux d’eau su- périeur des sols nus ou couverts d’une couche de fumier, la décompo- sition des matières organiques s’y produit plus vite et plus intensément 1. E. Woziny, Forschungen, etc., vol. XII, 1889, p. 31. Her 1 moin SR * - | 4 INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL, 401 que dans le sol couvert de plantes vivantes, nous pourrons conclure de suite que ce que l’on nomme Ackergahre” désigne un élal phy- sique du sol de cullure, provoqué surlout par le maintien de lu ja- chère ou d’une couverture morte el par un ameublissement consé- cutif en temps ulile el au moyen de la charrue el de l'extirpateur, élat qui favorise la décomposition des éléments humiques ou du fu- mer . - Tous les auteurs agronomiques sont d’avis que la jachère est la condition la plus importante pour arriver à cet état particulier du sol qui ne s'obtient point par force en peu de temps et par de sim- ples travaux aratoires, mais qui exige une période plus ou moins lungue. Le sol arable est donc obligé de se reposer pendant un certain temps avant d’être apte à cet état particulier. Pour connaitre com- ment agissent dans ce cas les forces de la nature, prenons l’exemple suivant. Qu'on se figure un chaume de trèfle en sol compact. Celui-ci, par suite de la forte évaporation du trèfle et de la sécheresse, est tellement durci qu’il est impossible d’y pénétrer avec le soc de la charrue. Ce sol doit être mis en état d’ameublissement (Gahre) à parür de la fin de juin jusqu’à l’automne. Dans ces conditions il pa- rait logique d'après le procédé recommandé par SCHWERZ et plus tard par DE ROSENBERG-Lipinskt de racler superficiellement le sol, afin d’en détruire la couverture végélale. Il se forme ainsi à la surface une couche riche en vides dits « non capillaires » et en débris végétaux, qui laissera passer facilement l’eau des pluies tout en diminuant considérablement l’évaporation pendant la séche- resse. Le sol qui est au-dessous de celte mince couche labourée devien- dra avec le temps plus humide, surtout si l’on a eu soin de la herser pour l’ameublir. Tandis qu’au début il était impossible d'enfoncer un bâton dans ce sol durci par la sécheresse, on le peut maintenant, non pas, comme l’admet DE ROSENBERG-LiPiNsKi, parce que le sol s’est ameubli de lui-même sous sa couverture, mais parce qu'il est 1. Ce terme n'a pas d'équivalent en français. (Trad.) MATIÈRES ORGANIQUES. 26 402 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. devenu plus humide et n'offre plus à cet état de résistance sé- rieuse ‘. Quand l'humidité a pénétré assez profondément, on laboure le sol qui possède alors son taux normal d'humidité, celui qui lui donne la plus faible adhérence ; le mieux est de labourer en sillons aussi étroits que possible et à pleine profondeur ; on l’amène ainsi à un état grumeleux, poreux que l’on cherche à conserver, surtout si de fortes averses l’ont altéré, en employant les extirpateurs qui parais- sent très propres à cet usage. Le sol a ainsi reçu indirectement par la jachère et par la couche superficielle retournée formant obstacle à l’évaporation l’eau qui lui manquait, et par un labour en temps utile il a acquis la structure grumeleuse des sols ameublis. Il reste dans la suite constamment humide, plus ou moins, parce que le maintien en Jachère et l’état grumeleux du sol le préservent d’une trop forte dessiccation. Les substances organiques, aussi bien celles qui se trouvent primitive- ment dans le sol que celles, telles que le fumier, qui y sont incorpo- rées par la charrue, peuvent facilement se décomposer et fournir jus- qu'au moment des semailles d'hiver d’assez grandes quantités de matières nutritives solubles ; car le sol se trouve alors dans l’état physique le plus favorable : il est perméable et, en outre, humide, puisqu'il ne possède pas de couverture. De cette manière, le sol a vu non seulement s'améliorer considérablement sa composition méca- « nique et son taux d’eau, mais encore 1] est devenu plus riche en ma- tières nutritives assimilables. Les explications qui précèdent montrent les conditions nécessaires pour mettre le sol dans l’état le plus favorable au développement des processus organiques. Ces conditions sont applicables non seu- lement aux cas précités, mais encore à tous ceux où il s’agit d’une culture rationnelle de la couche végétale. Ce traitement sera d’un très grand intérêt non seulement pour les sols compacts, c’est-à-dire argileux ou autres semblables, qui ont déjà par eux-mêmes une ten- dance à se mettre en grumeaux, mais encore il est recommandable pour les sols légers qui ne se mettent pas en grumeaux, en ce qu'il 1. H. Pucaner, Forschungen, etc., vol. XII. 1889, p. 208, ) gen, : ; INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 403 augmente le taux d'eau du sol et son aptitude à l’échauffement et provoque même sur ces sols, d’après les praticiens, une sorte de fermentation (Gahre). Tant que, parmi les praticiens, régneront, au sujet des influences de la couverture végétale et de la jachère sur les agents de la dé- composition des matières organiques, les idées les plus embrouil- lées en contradiction avec les faits réels et que les résultats des nombreuses recherches faites sur ces questions resteront méconnus, il sera impossible d’avoir une vue nette des phénomènes. Aucun sujet d'économie rurale n’a fourni matière jusqu'ici à autant d’ineplies. Cela s'explique parce qu’on part de l’idée complètement erronée, ne reposant sur rien, que la couverture végétale maintient le sol hu- mide, tandis que la jachère le dessèche (p. 238). Dès lors 1l n’était pas possible d'expliquer d’une manière simple comment la jachère favorisait la décomposition des matières organi- ques et l’ameublissement du sol, et il fallait recourir à l’hypothèse que l’ameublissement du sol aurait pour cause une condensation de la chaleur, de l’air et de l'humidité, même dans les cas où le sol n’a pas été cultivé et se trouve à l’état naturel. Si l’on considère que les gaz atmosphériques et l’humidité ne sont condensés en quantités un peu importantes que par un sol déjà meuble et que la vapeur d’eau de l’atmosphère ne mouille nullement le sol arable, puisqu'elle s’éva- pore à nouveau quand la température augmente”, on ne comprend pas comment, dans un sol compact, ameubli seulement à la surface, il puisse se produire une condensation d’air et d'humidité, ou com- ment un sol ameubli, mais sec, puisse s’humecter au degré néces- saire pour la mise en train des processus organiques. De même, les opinions sur ce qu’on appelle « la fermentation à ombre » (Beschaltungsgahre) ne correspondent pas à la réalité des faits. En partant de l’idée fausse que la couverture végétale maintient l'humidité du sol, on a cru pouvoir conclure que la décomposition des substances organiques est particulièrement active dans le sol la- bouré el provoque ainsi l’ameublissement spontané du sol. 1. S. Sixonsxt, Forschungen, etc., vol. IX, 1886, p. 413. 404 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Mais nous avons vu plus haut (p. 247) qu’en réalité c’est le con- traire qui se passe et que, grâce à la dessiccation du sol par les plantes et à la basse température, l'intensité des processus organiques dimi- nuait notablement. Si c'était possible, l’état meuble du sol sous une couverture végétale épaisse ne pourrait être provoqué par une « fer- mentation » (Gährung). On ne pourra constater une augmentation du degré d’ameublissement du sol sous les plantes, mais seulement son maintien plus où moins constant. L’ameublissement produit avant les semailles par le travail mécanique du sol diminue aussi bien dans le sol ombragé par les plantes que dans celui qui est en jachère, pas à beaucoup près cependant autant dans le premier que dans le der- nier ; il diminue d’autant moins que les plantes sont mieux dévelop- pées et plus drues”. Cela tient à ce que la couverture végétale atténue considérable- ment l'effet des pluies qui démolissent la structure grumeleuse du sol. La pluie tombant d’abord sur les plantes stille ensuite goutte à goutte sur le sol : lorsqu'elle le frappe directement avec violence, elle désagrège les particules de terre qui, alors, forment une croûte superficielle. , Il ne peut donc être question d’une fermentation provoquée par les plantes et d’un ameublissement qui y serait lié, mais seulement du maintien de l’état mécanique originairement favorable du sol, grâce à l'obstacle mis par les végétaux à la démolition des particules par les pluies. D) L'effet nuisible de quantilés excessives d'humus sur la fertilité du sol doit être surtout attribué aux trop grandes accumulations d’eau qui se produisent dans ces conditions et à leurs conséquences (dimi- nution de l’accès de l’air). Il se fait remarquer principalement quand le sol n’est pas cultivé (prairies), ou qu’il se trouve dans les conditions favorisant l’accumulation d’eau en excès (marais). Dans ce cas, les malières organiques sont soumises à la putréfaction, mode de décom- position qui diminue singulièrement, come nous l’avons vu plus haut (p. 13), la formation des éléments nutritifs assimilables qu’elles 1. E, Woziny, Forschungen, elc., vol, XII, 1889, p. 31. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 405 peuvent contenir et qui favorise au contraire la production de com- posés nuisibles à la végétation, tels que les acides humiques, le sulfate de fer, etc. , E) L'importance de l’humus pour la cullure du sol peut s’appré- cier suffisamment d’après ce que nous venons de dire. Tant qu’il se trouve mélangé aux sols minéraux dans certaines limites, son rôle est d’une telle importance pour la vie des plantes que l’on peul considérer, dans lu majorité des cas, la conservation el l'augmen- tation du taux d'humus comme le devoir le plus important de la cullure du sol. Cette conclusion paraît pleinement justifiée si l’on se rappelle les nombreux effets favorables de l’humus sur la fertilité du sol. Ainsi que nous l’avons vu, c’est lui qui augmente directement et indirec- tement la richesse du sol en matières nutritives assimilables, et qui, par sa lente décomposition et son pouvoir absorbant considérable, obvie efficacement à la perte des éléments nutrilifs par la lixi- viation. On a montré en outre que l'humus, mélangé aux terres, les rend plus meubles et plus faciles à travailler ; les sols compacts deviennent perméables, plus faciles à s’humecter ; les eaux d’in- filtration diminuent donc et les conditions thermiques sont modi- fiées heureusement par l’atténuation des extrêmes de tempéra- ture. (Voir Note F. Sur l'humus et la fertilité du sol.) Il suffit de se représenter toutes ces influences pour comprendre qu’en réalité il est absolument nécessaire, pour obtenir des récoltes maxima, que le sol possède un taux d’humus assez élevé. En même temps on saisit l’importance de {ous les engrais d’origine organique (fumiers, compost, engrais verts, etc.). Puisque c’est par eux seule- ment que l’on peut satisfaire à la nécessité de maintenir et d’aug- menter le Laux d’humus dans le sol arable, on doit les considérer comme les engrais principaux indispensables. Dans les sols très hu- miques on n'aura pas besoin de ces engrais, et l’on pourra conser- ver à ce sol son plus haut degré de fécondité en employant exclusi- vement des engrais aruificiels ; dans lous les autres cas, de beaucoup les plus nombreux, on n’atteindra le maximun de récolles qu'en em- 406 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ployant d'une facon continue des engrais riches en matière orga- nique. (Voir Note G. Sur la dénitrification par le fumier.) L'inobservation de cette règle fondamentale et l'emploi exagéré d'engrais artificiels qui, d’après ce que nous venons de dire, ne peu- vent être considérés que comme des engrais accessoires auxquels on a recours dans certaines insuffisances de composition des engrais principaux, pour salisfaire aux exigences des plantes à cultiver, ont amené, dans beaucoup d’endroits, une diminution considérable dans la production de sols autrefois fertiles, bien qu’ils continssent encore une riche provision de substances nutritives. Cela ne tient pas seu- lement à l’appauvrissement du sol en matière organique et à la dé- térioration de ses propriélés physiques et chimiques qui en est la conséquence, mais encore à ce que les sels facilement solubles con- tenus dans les engrais arlificiels influent défavorablement sur la structure de la couche arable. Les recherches de A. Mayer‘ et de E. W. Hizcarp* montrent que les carbonates et les phosphates alcalins provoquent la compa- cité des sols et empêchent leur mise en grumeaux, tandis que les chlorures (sels de Stassfurt) et les nitrates (salpêtre du Chili) la fa- vorisent tant qu’ils se trouvent dans la solution du sol; mais, dès qu'ils sont dissous par l’eau d'infiltration (ce qui est d’autant plus facile que le sol n’exerce pas sur eux son pouvoir absorbant), il en résulte la formation désavantageuse d’un limon compact”, tellement compact qu'il est complètement inaccessible à l'air et à l’eau, ce qui amène une diminution considérable de la fertilité. Ces changements défavorables se montrent clairement par exemple dans l’état physi- que des sols argileux qui ne reçoivent Jamais que des nitrates. « Un sol forcé de cette manière donne, on le sait, au début, de belles ré- coltes, puis subitement apparaît une diminution qui, d’aprèsles pra- liciens expérimentés, ne peut plus être simplement combaltue par un engrais complet comme pour les sols sablonneux. Ce sol est pour longtemps ruiné dans son état physique, et c’est pour cela que les A. Mayer, Forschungen, elc., vol. II, 1879, p. 251. . J. W. Hincan», édem, vol, 11, 1839, p. 441. . À. Maven, Journal für Landwärtschaft, année XXVII, 1879, p. 3S9. © 1 — { 3 dé INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 407 Anglais, très experts en agronomie, ont complèlement abandonné les fumures de nitrates. » (A. Mayer.) Les chlorures agissent de la même façon. L'emploi exclusif ou principal d'engrais artificiels est doublement nuisible à la fertilité surtout des sols argileux et à grains fins, d’abord parce que, par cette pratique, les terres s’appauvrissent en humus, qui se détruit peu à peu, ensuite parce que l’état physique de ces sols subit, comme on l’a vu plus haut, une transformation très défavora- ble au point de vue de la décomposition des matières organiques et de la croissance des plantes. On ne peut remédier à ces défauts qu'en prenant soin de conserver et d'augmenter le taux d’'humus dans le sol par des mesures appropriées. Dans les cas enfin où un excès d’humus est nuisible à la crois- sance des plantes utiles, il faut veiller ou bien à diminuer cet excès ou bien à transformer les propriétés nuisibles de l’humus de ma- nière qu'il réponde aux exigences des végétaux que l’on cultive. Quant aux moyens à employer, nous les verrons dans la troisième partie de ce livre. 2. — L’humus comme couverture. A) Formation de la couverture. — En forêt, il se forme, grâce aux déchets du peuplement (feuilles, aiguilles, rameaux, écailles de bourgeons, cônes, mousses, gramens, plantes herbacées, sous-ar- brisseaux, etc.), une couverture qui, par la décomposition de ces organes végétaux morts, se rapproche peu à peu de la composition de Phumus. La formation de cette couverture morte dépend de di- verses circonstances extérieures et suivant le peuplement se fait d’une manière différente. La composition chimique et physique du sol et les conditions cli- matériques sont, parmi les circonstances extérieures, celles qui influent le plus sur les quantités de déchets qui s'accumulent à la surface. Sur des sols compacts, riches, profonds et humides, les cimes des arbres sont non seulement mieux développées, mais encore les feuilles, éléments essentiels de la couverture, sont plus grandes et plus nombreuses que sur les sols maigres et secs, en 408 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. supposant que le massif ne soit pas trop serré et que la lumière soit suffisante. Les conditions climatériques ne sont pas de moindre importance pour le développement du feuillage; car celui-ci, toutes choses égales d’ailleurs, est d'autant plus luxuriant que les pluies sont plus abondantes et le climat plus chaud. | Cette dernière influence est nettement mise en évidence par ce fait (dont la constatation est due à R. Weger ‘) que la surface des feuilles de hêtre diminue à mesure que l'altitude augmente. Les chiffres ci- » dessous le montrent : SURFACE LOCALITÉ. ALTITUDE. de APN mètres carrés. mètres. ASCRATENDUNE Re PRE 133 3,414 Hohenau (forêt de Bavière) . . . . 685 1,500 — = Res 1 344 0,910 D'autre part, le degré, la densité du feuillage dépend de l’espèce. Les essences de lumière (chêne, pin, mélèze et bouleau) ont une cime plus éclairée et sont par suite moins feuillées que les essences d'ombre (hêtre, charme, sapin et épicéa). Enfin, l’aptitude des feuilles ou aiguilles à la décomposition a une influence sur le poids de la couverture. Des feuilles charnues se décomposent plus vite que celles des hêtres ou des chênes, par exemple, tandis que la couver- ture d’aiguilles se détruit le plus lentement. Il ne se forme en général de couverture un peu épaisse avec les déchets des arbres seuls que dans les forêts de hêtres ou dans les jeunes massifs pleins de résineux et, à un moindre degré, sous les charmes, les chênes et les bouleaux. À un âge plus avancé, les herbes, les sous-arbrisseaux (bruyères, airelles) et surtout les mousses prennent part à la formation de la couverture et souvent en forte proportion. Suivant le taux d’humidité du sol apparaissent des mousses variées : aux places très humides, des sphaignes et des po- lytries : aux endroits frais, des polytrics et des hypnums : dans les 1. E. Esenmayen, Die gesammte Lehre der Waldstreu, Berlin, 1876, p. 39. LE, À: Su INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 409 stations maigres et ensoleillées, des dicranums. En montagne il y a beaucoup plus de mousses qu’en plaine. De même, dans bien des cas, la production de mousse est incomparablement plus grande dans les forêts fraiches de sapin et d’épicéa que dans les peuplements plus clairs et plus secs de pins et de mélèzes. En réfléchissant au grand nombre des facteurs qui influent sur la quantité des feuilles ou aiguilles et sur la couverture de mousse, on ne doit pas s'étonner que le poids des déchets qui arrivent annuel- lement au sol soit très variable suivant les localités. Pour s’en faire une idée approchée, considérons les moyennes des déterminations faites pendant quatre années avec des conditions différentes (dans les forêts de l’État bavaroïs) sous la direction d’EBERMAYER !. COUVERTURE ANNUELLE PAR HECTARE ee en Ci en kilogrammes. Minimum. Maximum. Moyenne. Hétre. Perchis de 30-60 ans. . . . à 2 998 6 396 41382 Peuplement presque exploitable de 60- 90 à ans. 3 269 o 180 4 094 Peuplement exploitable de plus de 90 ans. . 2 852 5 032 4 044 Épicéa. Jeune peuplement au-dessous de 30 ans . . 4 110 6 047 5 258 Perchis de 30-60 ans. . .’. 1157 6 090 3 964 Peuplement presque exploitable _ 60- 90 à ans. 1 962 6 016 3 376 Peuplement exploitable de plus de 90 ans. . 1 685 6 864 3 273 Pin sylvestre. 4230 3 397 »12 4 055 3 491 787 6 038 4 229 Perchis de 25-50 ans. Peuplement presque exploitable f- 50- 15 à ans. Peuplement exploitable de 75-100 ans . 92 19 192 CS Quand on enlève la couverture à des intervalles de plusieurs années, le poids s’abaisse relativement d'autant plus que l'intervalle est plus long ; c’est-à-dire qu'il n’est pas égal à la somme des poids des couvertures annuelles, mais plus petit. Ceci se comprend si l’on 1. Esrnmayen, loc. cil., p. 44. 2. Les chiffres se rapportent à la couverture complètement desséchée à l'air. 410 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. considère que par l’érémacausis la matière organique se volatilise d'autant plus qu’il s'écoule plus de temps entre les récoltes de cou- verlture. Les chiffres ci-dessous, encore empruntés à EBERMAYER , donnent une idée tant de la grandeur des différences dans le poids de la couverture suivant les intervalles de récolte que de son poids dans les massifs vierges de tout enlèvement. POIDS DE LA COUVERTURE PAR HECTARE en kilogrammes oo PEUPLEMENT. 44 dans annuelle. triennale. sexennale, des massifs vierges. Massif plein de hêtre . . . . 4 107 8 160 8 460 10417 Massif plein d'épicéa. . . . . stoe/ 7 591 9 390 13 S57 Massif plein de pin sylvestre . 3 706 8 987 13 729 18 279 Ces chiffres montrent d’abord qu'après trois et six ans la couver- ture qu’on peut ràteler n’est pas devenue trois fois, six fois plus lourde, mais que, dans la forêt de hêtre, au bout de trois ans, elle n’est que le double de la couverture annuelle et, après six ans, elle a le même poids qu'après trois ans. Dans la forêt d’épicéa, après trois ans, sa récolte est 2,2 fois et après six ans, 2,7 fois ce qu’elle est annuellement. Dans la pineraie, ces nombres deviennent 2,5 et à. De ces faits on doit conclure que, pour l’érémacausis des feuilles de hêtre, pour leur transformation en humus, il faut en moyenne trois ans. Le poids au bout de six ans peut n’être pas beaucoup plus fort qu’au bout de trois ans ; car on ne trouve à la fin de la sixième année que la couverture des deux années précédentes, les feuilles plus anciennes sont en très grande partie déjà transformées en humus et même complètement détruites. Quant à la couverture d'épicéa, sa décomposition est presque aussi rapide que celle de hêtre ; la couverture sexennale n’est guère que le double de l’an- nuelle. Si, comme l’indiquent les résultats, elle s'élève au triple de la couverture annuelle, cela tient uniquement à ce qu’elle contient beaucoup de mousses qui se sont développées dans cet intervalle de SIX ans. 1. EBEnmaAYEn, loc. cél., p. 52. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL, 411 La décomposition des aiguilles de pin sylvestre est plus lente que celle des aiguilles d’épicéa et des feuilles de hêtre, puisqu’au bout de trois ans le poids de la couverture égale non pas 2 fois, mais 2 fois et demie le poids de la couverture annuelle. Les aiguilles de pin mettent en moyenne trois ans et demi pour se transformer en humus. L'augmentation relative du poids de la couverture sexennale comparé à celui de la couverture triennale doit être attribuée, chez le pin sylvestre comme chez l’épicéa, à la mousse qui se produit dans l'intervalle des récoltes. Dans les massifs vierges de tout enlèvement, le poids de la cou- verture atteint, dans les hêtres, 2 fois et demie, dans les épicéas 4 fois et dans les pins sylvestres 2 fois celui de la couverture an- nuelle. B) Composition chimique de la couverture. — Parmi les ma- üères organiques qui forment les 78 à 86 p. 100 de la couverture complètement desséchée à l’air, les composés non azotés (hydrates de carbone, matières grasses, acides organiques, matières extrac- tives, etc.) forment la majeure partie de la masse ; les principes azotés sont beaucoup plus rares. D’après les rares analyses de H. Krurzscu” et de R. Hormann° sur ce sujet, les matériaux de la couverture contiennent en pour-cent de matière complètement sèche : FEUILLES AIGUILLES MOUSBES a _ de de 7 Spin Vivde poly- cli- S = d’épicéa. syl- Le” hypnum. = : hêtre. chêne. vestre. Mmélèze. trichum. marium, BAulE 0:80 1.06 -1.35 1.89 ‘0.88 0:99-1.81 1.07 1.69 Si l’on compare ces taux à ceux des pailles employées dans la fabrication de fumiers, lesquelles renferment 0,3 — 0,9 (en moyenne 0,6) d’azote, on voit que les éléments de la couverture sont plus riches en azote. On a plus de renseignements sur les principes minéraux qui, d’a- 1. H. Kaurzscn, Chemischer Ackersmann, 18S6, p. 158 et 162. 2. R. Hormanx, Landwirthschaftliche Versuchsstationen, vol. 1, p. 270. 412 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. près les travaux de E. Erermayer ‘ et de E. Wozrr?, existent dans les matériaux de la couverture et dans les pailles avec les propor- tions suivantes : 1000 parties de matière séchée à 100° contiennent : > a 4 © Lo) POTASSE. MAGNÉSIE OXYDE DE FER. phos- phorique. sulfurique. SILICE. Couverture { Maximum . . de feuilles { Minimum . , de hêtre. Moyenne.| 55. Couverture { Maximum . . d’aiguilles 4 Minimum . , d’épicéa. Moyenne. Couverture | Maximum . . | d'aiguilles { Minimum . . de sapin. D mm © © © # © 1 Moyenne. Aiguilles de mélèze tom- bées . . Feuilles tombées, . , 76 02 94 de chêne. !mortes. . . . Aiguilles in = 1 Qt Le] a de pin Minimum . . 2. 6. 1. 2. 0. 1. mé © Pr © 19 be D Vo Me crumel ais Oo D © sylvestre. Moyenne. | Branches de pin sylvestre mortes , « | Maximum . Le Mousses ï Minimum . . diverses. Moyenne. | Fougères . , (moyennes). Bruyère commune. . . Joncs et carex CC CR RTE PE Roseaux , . Genêt à balai 19 À = de ON O1 © On © mé 19 O1 mé Où D O © 19 Paille de blé . . — de seigle 19 19 19 19 — d'orge . SO00O0 20.00 mO M = © NN © Hi bé bi bé — d'avoine . . L'examen de ces chiffres* montre que, parmi les éléments miné- raux nutritifs, les terres alcalines et surtout la chaux dominent dans 1. E. Esenmayen, loc. cit., p. 108. 2, E. Wourr, Aschenanalysen von landw. Produclen. Berlin, 1871. 3. Ces chiffres ne donnent naturellement qu'une valeur approchée ; car la compo sition chimique des végétaux varie extraordinairement suivant les localités, el INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 413 la couverture des forêts, tandis que les alcalis sont en faible propor- tion ; la comparaison avec les pailles agricoles fait ressortir la plus grande richesse de celles-ci en alcalis et leur plus grande pauvreté en terres alcalines. Seules les mousses de forêt et surtout les fou- gères et les cypéracées font exception; elles sont très riches en potasse. Les taux d’acide phosphorique de la couverture des forêts et des litières agricoles n’offrent pas de différences saisissantes. C) Propriétés physiques de la couverture. — Pour l'appréciation d’un certain nombre de points importants en pratique, il faut sur- tout connaître les rapports de la couverture avec l’eau et la chaleur. Les rapports de la couverture avec l'eau s'apprécient le mieux quand on opère dans des conditions aussi rapprochées que possible de celles de la nature sous la libre influence des éléments atmosphé- riques. J’ai fait des essais à ce sujet! dans des lysimêtres protégés contre l’échauffement latéral et disposés de façon qu’on püt aisément déterminer l'humidité de la matière en expérience ainsi que les quantités d’eau évaporées et infiltrées. Les déterminations ont été faites chaque semaine pendant une saison de végétation (du 1*° avril au 30 septembre). Voici les résultats obtenus : Taux d'eau de la couverture en pour-cent du volume. ÉPAISSEUR DE LA COUCHE. SAISON 5 centimètres. 30 centimètres. de EE Ï Feuilles Aiguilles Feuilles Aiguilles Re 0 de pin |Mousse. syl- vestre. 1586 .| 57.26 Æ. le 25.43 1887 .|44.28 3. DESDT 1888 .| 37.31 | 31.99 | 34. 2.88 | 31.69 tion. de chêne. Moyenne . 46.28 | : 27.41 45.42 | 39.81 41.65 | 1. E. WozLzny, Forschungen, etc., vol. X, 1887, p. 428, et vol. XIIL, 1890, p 134. 414 __ DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Taux d'eau sous des épaisseurs diverses de couverture. ÉPAISSEUR FEUILLES DE CHÊNE. AIGUILLES D'ÉPICÉA. MOUSSE. de la couverture ne — ER — #8 en centimètres. 1886. | 1887. | Moyenne | 1886. | 1887. |Moyenne.| 1888. 50.77-| 44.75 | 33.21 | 38.98 52.99 | 48.71 | 32.80 | 40.76 » » » 42.83 | 39.23 | 41.03 » » 39.29 | 41.65 On conclut de ces chiffres que : 1° Le feuillage de chêne a le plus fort taux d’eau, puis viennent en décroissant les feuilles d'épicéa, de hétre et de pin sylvestre; la mousse a le Laux le moins élevé ; 2 Les différences s'allénuent quand l'épaisseur de la couverture augmente ; 3° En moyenne, le taux d’eau de la couverture augmente avec son épaisseur jusqu'à une cerlaine limile (20 centimètres), à partir de laquelle il diminue. Des déterminations isolées qu’on omet ici pour abréger il résulte que . 4 Les oscillations du taux d'eau de la couverture Suivant les influences atmosphériques sont d'autant plus faibles que celle cou- verlure est plus épaisse ; . D° Aucune couverture ne subit sous une faible épaisseur (5-10 cen- limélres) une aussi grande varialion dans son laux d'eau que la couverture de mousse. Les nombres précédents n’expriment pas la faculté d’imbibition, mais seulement le taux d’eau après qu'une portion de l’eau de pluie s’est infiltrée et qu’une autre s’est dégagée par évaporation. Il faut donc tenir compte de ces deux portions pour avoir une idée exacte du phénomène, | INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 415 Eau d'infiltration exprimée en millimètres. 1 ÉPAISSEUR DE LA COUVERTURE : ÉPAISSEUR DE LA COUVERTURE : | SAISON QUANTITÉ 5 centimètres. 30 centimètres. | A — — | de de : : Pin Pin | végétation. | pluie. | Chêne. | Hêtre. | Épicéa. | sylves- | Mousse.| Chêne. | Hêtre. | Épicéa. | sylves-| tre. tre. | 1886 . .| 713,2] 439,8 » 444,8 » 374,8] 526,5] 526,5| 486,71493,3 D | 466,3] 197,3] » 216,3 » 181,5] 331,8| 339,3] 347,8,244,6 1888 . .| 823,0] 528,6| 524,8] 595,1! 529,5] 448,3 » » » » Moyenxxe .| 667,5] 388,6 , 418,7 » 334,8] 429,1 a 417,2,368,9 | Eau d'infiltration sous des épaisseurs diverses de couverture, ÉPAISSEUR FEUILLES DE CHÊNE. AIGUILLES D'ÉPICÉA. MOUSSE. À — de la couverture en centimètres. 1886. 1887. Moyenne. 1886. 1887. Moyenne. 1888. M 490,8 | ‘197,23 | 248,6 RE 0 | 487,0 |''185,8 | :335.,4 D. » » » A 0 | 529,0 | 423,8 | 476,4 » 331,8 444,8 | 216,3 | 330,6 | 418,3 481,9 | 183,9 | 332,9 | 465,0 » » » 299,2 188,1 | 365,3 | 426,7 | 592,6 » » » 429,1 347,8 | 447,3 On peut déduire de ces chiffres que : 1° 4 égalité d'apports atmosphériques et de toutes les autres con- ditions, les taux de l’eau qui s'infiltre après avoir traversé des feuilles de chéne, de hétre ou des aiguilles d'épicéa et de pin syl- vestre sont sensiblement les mêmes et notablement plus grands que ceux que fournit la mousse ; 2° La quantité d’eau d'infiltration augmente avec l'épaisseur de la couche jusqu'à une cerlaine limite (20 centimètres) à partir de laquelle cette quantité décrott. 416 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Les pertes par évaporation de ce même matériel sont consignées dans le tableau suivant : Eau évaporée exprimée en millimètres. ÉPAISSEUR DE LA COUVERTURE : ÉPAISSEUR DE LA COUVERTURE # SAISON QUANTITÉ 5 centimètres. 30 centimètres. a LE * Pin Pin végétation. | pluie. | Chêne. | Hêtre. | Épicéa. | sylves- | Mousse. Épicéa. | sylves- tre. 1886107182 55,0! 216,7|198,0 1887 . .| 466,3 104,7/2(5,9 1888 | 1828:0 MOYENNE . AIGUILLES D’'ÉPICÉA. MOUSSE. EE _ ÉPAISSEUR de la couverture en centimètres. : , 1886. 1887. Moyenne. 1888. 259,8 380,9 254,6 358,2 » 295,9 139,4 230,6 » 226,3 160,4 224,9 Il ressort de ces chiffres que : 4° C’est La couverture de mousse, qui évapore le plus d'eau; aprés, vient celle de pin sylvestre, puis les autres avec de faibles diffé- rences ; 2 En moyenne, les quantilés d’eau évaporée sont d'aulant moin- dres que la couverture est plus épaisse ; mais, à partir d’une cer- laine limite (20 centimètres), elles restent à peu près constantes, quelle que soit l'épaisseur. Avec ces données sur l’eau d'infiltration et d’évaporation, on peut INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 417 se rendre approximativement compte des causes qui font varier le taux d’eau des couvertures. Tout d’abord, en comparant les chiffres, on voit que l’eau infiltrée est inversement proportionnelle à l’eau évaporée, si bien qu’en les additionnant on retrouve presque exactement la quantité d’eau tom- bée pendant la durée de l’expérience. Donc, c’est en général surtout la faculté d’imbibition qui est à considérer pour l'évaluation des quantités d’eau retenues par la cou- verture. Si on compare son taux d’eau avec celui des sols minéraux, on voit que cette faculté d’imbibition est assez élevée (p. 394). Les nombres qu’on aurait trouvés pour le taux d’eau d’une couverture partiellement décomposée ou transformée en humus seraient encore plus grands que ceux de mes expériences, où je n’ai employé que des couvertures fraiches dont la décomposition élait à peine com- mencée. C’est surtout l’évaporation qui agit pour diminuer les taux d’eau dans les diverses périodes comme c’est la perméabilité de la cou- verture qui agit pour l’augmenter. Survienne une pluie, l’eau est d’abord employée à remplacer celle qui vient de s’évaporer jusqu’à ce que le matériel soit saturé. Au delà, l’eau s’infiltre. Il est clair que plus il y aura d’eau perdue de ces deux façons, moins il en restera dans la couverture. Les observations précédentes montrent qu’en général Pinfiltration, toutes choses égales, est plus intense sous les couvertures de feuilles ou de résineux que sous la mousse. Celle-ci retient plus d’eau que les feuilles et les aiguilles. Si pourtant la mousse contient moins d’eau que les autres couvertures, cela ne peut tenir qu’à son plus grand pouvoir d’évaporation. La couverture de mousse perd dans les périodes de sécheresse incomparablement plus d’eau que les cou- vertures de feuilles ou d’aiguilles ; il n’est pas rare que, dans les cas extrêmes, elle en perde tant que son taux s’abaisse au minimum, à celui qui correspond à sa complète dessiccation à l'air. Ces diffé- rences de taux tiennent surtout à des différences de capillarité. Dans les couvertures où les feuilles gisent horizontalement, la poussée capillaire est constamment interrompue, si bien que l’eau ne peut arriver à la surface. MATIÈRES ORGANIQUES. 27 418 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Dès lors, les couches superficielles de feuilles se dessèchent et il se forme ainsi une croûte sèche qui s'oppose énergiquement à l’éva- poralion en empêchant l’action directe des facteurs qui régissent ce phénomène. La couverture d’aiguilles se comporte de la même façon ; la présence de vides non capillaires retarde l’ascension ca- pillaire de l’eau et facilite ainsi le desséchement des couches super- ficielles. Les aiguilles de pin, moins étroitement serrées que celles d’épicéa et par suite plus perméables, évaporent comparativement plus d’eau et c’est probablement à cause de cela que la couverture d’aiguilles de pin sylvestre contient moins d’eau que celle d’aiguilles d’épicéa. Quant à la mousse, elle est pourvue de nombreux et étroits espaces capillaires et bons conducteurs, de sorte que la perte de l’eau superficielle par l’évaporation est plus vite et plus facilement réparée que dans toute autre couverture. Si le taux de l'humidité ainsi que celui de l’eau d'infiltration aug- … mentent dans certaines limites (jusqu’à 20 centimètres) avec l’épais- seur de la couverture, tandis que le taux de l’eau évaporée diminue, cela tient à ce que les parties les plus humides sont situées d’autant plus profondément que la couverture est plus épaisse. Avec une faible épaisseur, les couches les plus humides sont si près de la sur- face, que la perte par évaporation est facilement remplacée par la montée capillaire de l’eau, ce qui amène l’évaporation de plus fortes quantités d’eau qu'avec une plus grande épaisseur où les couches les plus humides sont si éloignées de la surface que la capillarité ne s’y exerce pas ou ne s’y exerce qu'imparfatement. La couverture mince se desséchant plus que la couverture épaisse, les doses d’hu- midité et d’eau d'infiltration doivent y être moindres que dans les dépôts plus épais, parce que, dans ceux-ci, une moins grande fraction des précipitations atmosphériques est employée à remplacer l’eau évaporée. Si, au delà des limites indiquées, le taux d’humidité de la masse diminue ainsi que celui de l’eau infiltrée, cela tient évidemment à ce que l’eau apportée se répartit dans une couche plus épaisse qui cède moins d’eau par le dessous, parce que des quantités d’eau très importantes sont retenues dans un volume relativement grand. Les relalions de la couverture avec la température ont été mesu- INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 419 rées par moi de la façon suivante *. Des cadres en fortes planches de 35 centimètres sur 35 centimètres et 20 centimètres de hauteur furent enfoncées jusqu’au bord dans une place libre du champ d’ex- périences et remplis de diverses couvertures ; la température fut mesurée à 10 centimètres de profondeur, chaque jour, à 7 heures du matin et à 5 heures du soir. Pour pouvoir comparer, on remplit un cadre avec du sable calcaire humique à grains fins. Voici quelques chiffres extraits de la série obtenue. TEMPÉRATURE A 10 CENTIMÈTRES TEMPE- de profondeur. VARIATIONS DE LA TEMPÉRATURE TRE 7 _— —— de Pin Pin Terre. | sylves-| Épicéa. Mousse sylves-| Épicéa. tre. l'air. 1,30] 8,89| 8,27 9,88] 11,82| 12,42 15,95] 19,28| 19,75 19,73| 23,03! 22,80 16,28] 18,95! 19,23 16,21] 15,11| 15,56 | Moyenne. . » 16,18| 16,34 Ces nombres font voir que : 1° La terre est en moyenne plus froide que les matériaux des couvertures, à l'exception de la mousse ; 2 C'est la couverture d’épicéa qui s’échauffe le plus, puis le feuillage de chêne et les aiquilles de pin sylveslre ; c’est la mousse qui s'échauffe le moins ; 9° Les variations de température sont sensiblement moindres dans la couverture des foréts que dans le sol. En général, ces chiffres accusent des différences de température relativement faibles entre la terre et les diverses couvertures. Ce qui frappe surtout, c’est le faible échauffement de la terre comparé à celui des couvertures. En y réfléchissant, et en consi- dérant les différences très importantes ci-dessus dans les oscillations 1. E. Wozcxy, Forschungen, elc., vol. X, 1887, p. 417. 420 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de température soit de la terre, soit des couvertures, on arrive à penser que, dans le cas précédent comme dans beaucoup d’autres semblables, on ne peut, à l’aide des moyennes de température, se faire une idée exacte sur les rapports thermiques des matériaux étudiés ; la marche de la température doit y être autrement repré- sentée. I n’est sans doute pas indifférent, pour juger ces divers rapports, de savoir de quelles déterminations isolées est faite la température moyenne ; car, une même moyenne peut être formée de valeurs extrêmes très différentes. Îl vaut mieux, pour avoir une idée nette de la marche de la température, représenter les oscillations dans « l’échaufflement comme on le voit dans le tableau suivant qui donne les moyennes mensuelles des observations du matin (M) et du soir (S) avec leurs différences (D). Température à 40 centimètres de profondeur. PIN SYLVESTRE. ÉPICÉA. CHÊNE. nn 5 — a — S. D: À « D. M. S. Avril . . .| 6,27|11,5 11,22/5,90 5,87/11,12/5,26 Mad, <|:90:48 7 14,58/3,92 10,90/14,02|3,12 Juin. . . .[15,88/22,66/6,7 21,66|3,82 3,95/19,19/22,24|3,05 Juillet. . . [19,57|26,48 24,37/8,11|5 22,04/24,76|2,72 Août . . .115,67/22,24/6,; 20,66|2,86 17,7520,78|3,03 Septembre. [12,60|17,62|5,0: 16,69/2,27 14,24/16,55/2,81 Moyenne.|13,24|19,11 18,16,3,65 15,00/18,24/3,24 De ces nombres il résulte que : 1° Le refroidissement nocturne el l'échauffement diurne sont plus grands pour la terre que pour les diverses couvertures ; 2 Les oscillations journalières de température sont donc sensi- blement moindres dans ces dernières ; 3° Parmi les couvertures, c’est celle d'aiquilles d'épicéa qui s'é- chauffe le plus dans le jour et celle de mousse qui s’échauffe le moins ; les deux autres, celles de chêne et de pin sylvestre, tenant le milieu ; | INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL, 421 4 Le refroidissement nocturne est maximum dans la couverture de pin sylvestre ; puis viennent celles de mousse, d'épicéa et de chéne. En somme, les matériaux de la couverture se comportent vis-à-vis de la chaleur comme l’humus, c’est-à-dire que l'écart entre les Llem- péralures extrêmes est bien moindre que dans les sols minéraux ; les couvertures s'échauffent moins que ceux-ci quand la température s'élève, elles se refroidissent moins quand elle s’abuisse. Les causes de ces faits résident dans des différences de conduc- tibilité. Les matériaux de la couverture, enfermant une assez grande quantité d’air par suite de leur texture plus ou moins poreuse, con- duisent plus mal la chaleur que la terre où les particules sont étroi- tement juxtaposées et emprisonnent beaucoup moins d’air. Ajoutons que la matière organique dont est faite la couverture a une conduc- tibilité plus faible que les matières minérales qui constituent la masse du sol (p. 364). Il faut en outre tenir compte de cette circonstance que les couvertures, à cause de leur taux d’eau plus élevé, ont une plus grande capacité calorifique et exigent dès lors, pour s’échauffer d’un degré, plus de chaleur que la terre dont la chaleur spécifique est plus fable, vu son moindre taux d'humidité. La mauvaise conductibilité des feuilles et des aiguilles des arbres forestiers est aussi la principale cause de leur moindre refroidisse- ment nocturne comparé à celui de la terre. La composition des divers éléments des couvertures et la façon dont ils sont empilés ont une influence prépondérante sur les difté- rences qu'elles présentent au point de vue de la température. Les courtes aiguilles d’épicéa se juxtaposent plus étroitement et forment une masse moins poreuse que les éléments des autres cou- vertures. Elles ont donc une meilleure conductibilité et s’échauffent davantage. La couverture de feuilles de chêne se comporte de même ; les feuilles gisent horizontalement et s’empilent en couches serrées, tandis que les aiguilles de pin sylvestre, à cause de leur longueur, et les hypnums à longue tige forment une masse plus poreuse et en- ferment une assez grande quantité d’air qui s'oppose à un fort échauffement. 422 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Si le refroidissement nocturne n’atteint pas le même degré dans le cas où les matériaux sont étroitement juxtaposés, cela tient sur- tout à ce que l’abaissement nocturne de la température ne dépend pas seulement de la conductibilité, mais encore de la résistance qui s’oppose à la pénétration de l'air froid de la nuit dans la couverture. Étant donnée la porosité de la couverture d’aiguilles de pin, l'air chaud qu’elle contient y est plus facilement remplacé la nuit par Pair froid que dans les couvertures plus compactes d’aiguilles d’épicéa et de feuilles de chêne. Ces dernières se refroidissent donc moins la nuit. Les différences signalées plus haut ne se présentent pas les mêmes partout et dépendent essentiellement du mode de superposi- tion des matériaux. D) Dans la couverture des forêts la formation de l'humus se fait de différentes manières suivant les conditions extérieures, comme on l’a déjà montré précédemment (p. 275 et 284). Si elles sont favo- rables à l’érémacausis, il se forme du terreau en couche mince, parce que l’active décomposition des détritus végétaux s’oppose à une forte accumulation de dépôts, tandis que l’humus brut et la tourbe sèche se présentent généralement en couches épaisses, parce que les agents de décomposition, ne pouvant développer leur plein effet à cause des conditions de climat et de végétation des arbres, provoquent la putré- faction des matières organiques. La transformation en humus se fait plus ou mains vite pour les divers arbres, généralement en 2-3 ans pour les feuillus et en 3-4 ans pour les résineux, quelquefois même en 5-8 ans. E) Influence de la couverture sur la fertilité du sol forestier. — L'action bienfaisante de l’humus en forêt tient à plusieurs causes, d'abord à ce que les arbres y étendent leurs racines et y développent de nombreuses radicelles absorbantes, grâce auxquelles ils s’appro= « # prient les matières nutritives de l’humus. Cette absorption ne se fait pas directement, mais, comme nous l’avons vu plus haut (p. 384), par l'intermédiaire de champignons vivant en symbiose avec les ra- cines (mycorhize). En outre, l’humus de la couverture enrichit le sol et surtout les ni me INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 423 couches supérieures en matières organiques, amenant dans la com- position physique et chimique du sol ces modifications heureuses qui résultent surtout du mélange des matières humiques avec les éléments minéraux et dont il a été suffisamment question précé- demment. Ces matières humiques du sol forestier ne proviennent pas du reste exclusivement de la couverture, mais aussi, quoique pour une plus faible part, des racines qui meurent chaque année (p. 269 et 275). Les fonctions chimiques les plus importantes de la couverture résultent sans conteste de ce que, par sa décomposition, les prin- cipes minéraux et azotés (sels ammoniacaux, amides) facilement assimilables sont utilisés pour lalimentation des arbres après qu'ils ont été dissous par les précipitations atmosphériques et mis ainsi à portée des racines. Les arbres, grâce à leur puissant système radi- culaire s'étendant plus loin et plus bas que celui des plantes agri- coles, peuvent extraire beaucoup plus de nourriture des combi- naisons insolubles qui se trouvent dans le sol; mais la quantité absorbée par cette voie reste bien en dessous de celle qui est fournie par l’érémacausis des matières organiques de la couverture. En général, les essences forestières ne s’alimentent convenable- ment, la production ligneuse ne s’améliore en quantité et en qualité que si l’on rend au sol lintégralité des matières nutritives contenues dans tous les détritus forestiers (feuilles, aiguilles, branches mortes, mousses et autres restes végétaux). Les malériaux de la couverture et l'humus qui en provient sont l'engrais naturel du sol forestier. Quelques recherches faites par J. ScarœpEr ‘et E. RAMANN * mon- trent comment se comportent les matières minérales vis-à-vis des eaux atmosphériques. Le premier a trouvé qu’il n’était pas nécessaire que la couverture füt entièrement décomposée pour que les matières minérales passassent dans le sol ; une bonne quantité est déjà aupa- ravant dissoute par les eaux météoriques, comme le montrent les 1. J. Scarœper, Forsichemische und pflansenphysiologische Untersuchungen. Dresden, 1878. 2. E. Ramanx, Forsiliche Bodenkunde und Standortslehre. Berlin, 1893, p. 276. 494 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. chiffres suivants exprimant (en centièmes de chaque substance) les éléments dissous : sul- .| furique. D'une couverture de hêtre . .| 52.6 De branches mortes d'épicéa SANS ÉCOTCES Ne ee RAT TD On voit que la potasse et l'acide sulfurique sont dissous le plus facilement, l'acide phosphorique et la magnésie en quantité moindre; c’est la chaux et le fer qui sont les plus rebelles. L’objection que les modifications éprouvées par la couverture mise en contact avec de grandes quantités d’eau n'étaient pas com- parables à celles qu’elle éprouvait dans les conditions naturelles à été détruite par les recherches de E. Ramanx, qui laissa des feuilles de chêne et ensuite des aiguilles d’épicéa exposées sur un pluvio- mètre à toutes les intempéries, et montra que l’action des pluies était semblable à celle d’un lessivage dans une certaine quantité d’eau. 1 000 parties de couverture complètement desséchée ont perdu au bout d’un an : AUDE CENDRES POTASSE. | CHAUX. |[MAGNÉSIE.| phos- phorique. Feuilles de chêne . .| 2.0: ; 0.: 0.63 Aiguilles d'épicéa . . . 8 .18 0.07 En un an, 40 p. 100 de la potasse existant primitivement dans les feuilles de chêne ont été dissous et une proportion plus grande encore (20 p. 100) dans les aiguilles d’épicéa. Il est probable que la première portion des sels solubles se dissout vite ; on peut le penser d’après un de mes essais où, en mélangeant des feuilles de hêtre avec une quantité d’eau égale au triple du poids de la substance sèche, j'ai obtenu, déjà en 24 heures, la dissolution INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 495 de 49.5 p. 100 de la potasse totale et de 22.1 p. 100 dans les deux jours suivants. En forêt, l’érémacausis va si vite, qu’elle dépasse la lixiviation, puisque les feuilles décomposées sont plus riches en principes miné- raux que celles qui viennent de tomber. C’est ce que montrent les chiffres suivants empruntés à une expérience de E. RaManN : Composition centésimale de la substance sèche. acné EE CENDRES | phos- | siLICE. phorique. onsbés AT CE .501 | .200 |5. .210 | Feuilles (à leur chute. . 2 de chêne | 2 ans après. ; 2 Aiguilles | à leur chute. . . . .31! 02084120 .765 0 d'épicéa. | 1 an 3/4 après . 2099 425; .520 On ne possède encore aucune expérience relative à laction dis- solvante de l’eau sur l’humus acide qui se forme dans des conditions défectueuses de décomposition. E. RAMANN pense que, dans ce cas, la dissolution est bien plus active et s’étend même aux terres alca- lines quand la décomposition est très ralentie. L'influence qu’exerce la couverture sur la composition chimique des couches profondes du sol forestier est très différente suivant que les détritus se décomposent dans des conditions favorables ou non, suivant donc qu'il se forme soit du terreau, soit de lhumus brut ou de la tourbe. C’est à C. Emris', P. E. MüLier* et E. Raman ° que nous devons la connaissance de ces différences. La modification qu’éprouve un sol de terreau se manifeste dans les analyses suivantes faites sur un sol de sable diluvien de l’inspec- 1. C. Emeis, Waldbauliche Forschungen und Betrachtungen. Berlin, 1876. 2. P. E. Müurer, Séudien über die natürlichen Humusformen. Berlin, 1887. 3. E. Ramanx, Der Ortslein und ühnliche Secundaärbildungen in den Diluvial- und Aluvialsanden (Jahrbuch d. k. preuss. geologischen Landesanstalt fur 1885. Berlin, 18S6). — Ueber Bildung und Cullur des Ortsleins (Zeilschrift fur Forst- und Jagdwesen 1886. 1°* fasc.). — Die Waldstreu und ihre Bedeutung fur Boden und Waid. Berlin, 1890. — Forstliche Bodenkunde und Standorlsiehre. Berlin, 1893, p. 234. 496 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tion d'Eberswalde peuplé de pins bien venants de 100-120 ans, avec un sous-bois de hêtres de 40-60 ans. Coupe du sol : 16 centimètres de sable humique, puis 30 centi- mètres de sable jaune brun sur du sable blanc. 100 parties de sol renferment : SABLE SABLE s { à SABLE BLANC. faiblement humique. jaune brun. ÉLÉMENTS EE EE Soluble Soluble Soluble dans Inso- dans Inso- dans l'acide l'acide Total.| l’acide chlorhy-|luble. chlorhy- |luble. chlorhy- drique. drique. drique. Potasse "va 02020 0. Chaux "10409 0.041 Magnésie . . . .| 0.025 x 0.055 Oxyde de fer. . 1 0.197 | 0. : 7 .98] 0.241 0. 0. dosés. 048 | Alumine. 2: 0.174 132 030 Acide phosphorique| 0.010 On voit que c’est la couche superficielle qui s’est décomposée le plus; la lixiviation l’a appauvrie en principes minéraux ; la zone suivante est la mieux pourvue en matières nutritives solubles et à un taux moyen de substances insolubles, tandis que le sable blanc re- présente le sol brut encore peu attaqué. Les sols de lehm offrent des rapports analogues, quoique moins nets, parce que la pénétration de l’eau est bien plus lente. Quand le sol est couvert d’humus brut, la décomposition des miné- raux est incomparablement plus intense que dans le sol de terreau, parce que, sous l’influence des acides humiques dissous, les silicates sont énergiquement décomposés et les alcalis ainsi que les terres alcalines entrent en solution. Comme le pouvoir absorbant du sol est diminué par la présence des acides, les matières solubles sont faci- lement entrainées dans la profondeur, surtout dans les sols sableuxs où linfiltration est considérable. « La couverture d’humus brut provoque une décomposition rapide du sol et favorise la lixiviation des principes minéraux solubles. » (E. Ramanx.) Les chiffres suivants, tirés d’une expérience de E. Ra- INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 427 MANN, fournissent un bon exemple des réactions dues à l’humus brut, car les prises d’échantillon ont eu lieu à quelques pas de distance, et néanmoins la couverture d’humus brut a amené des différences très nettes dans la composition chimique du sol : dan lee neo. A — — ÉLÉMENTS DOSÉS. Sol Sol couvert Sol couvert Do e de AN Eee per ET CE SEE EEE DURRE À 0,0107 0,0107 0,0092 Re nr ae à 0,0063 0,0071 0,0069 LD RER PE 0.0875 0,0508 0,0360. Magnésie . PE 0,0440 0,0333 0,0130 Oxyde de manganèse, . . 0,0500 0,0240 0,0150 Here/des fer. 7e 272 € 0,487 0,4287 0,3375 Alumine. . . . JE dt 0,5625 0,4287 0,3487 Acide phosphorique RER 0,04S9 0,0320 0,0296 Tor. | 1,2974 1,0163 0,7959 L'action dissolvante des eaux sur le sol couvert d’humus brut est nettement démontrée par ces chiffres. Elle est naturellement d’au- tant plus intense que le taux de l’eau en humus acide est plus élevé. Par la décomposition et la dissolution la couche superficielle s’ap- pauvrit en principes minéraux solubles et subit des modifications déjà visibles à l'œil nu. Elle apparaît fortement décolorée, le sable est de teinte claire et les silicates sont décomposés, transformés en grande partie en kaolin blanc. L’humus, abondant à la surface, di- minue à mesure qu’on s’en éloigne et le sol prend une couleur gris clair. C’est ce qui a donné l’idée d’appeler de tels sols sable gris ou sable gris de plomb (Bleisand). Cette zone partiellement ou presque complètement épuisée confine par le bas à celle qui n’a encore subi qu’une perte très faible et qui . se décompose lentement. Il y a donc dans les sols sablonneux deux couches tout à fait différentes et nettement délimitées : le sable gris où la décomposition est presque achevée et le sable jaune où elle se fait. Entre les deux il se forme parfois une couche plus ou moins compacte qu’on appelle alios (Ortslein ou Orterde), due à la précipi- tation, dans la zone de décomposition du sol, des acides humiques 428 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dissous par les eaux météoriques en s’infiltrant. Pour comprendre ce qui se passe, il faut considérer que, tant qu’il y a dans le sol des sels solubles, les matières humiques ne sont pas garanties contre la dissolution, maisqu’elles sont dissoutes et entraînées dans la profon- deur par les eaux atmosphériques dès que ces sels ont été enlevés par la lixiviation. Ces conditions sont réalisées dans le sable gris lessivé. Les matières humiques y sont dissoutes par l’eau atmosphé- rique et gagnent avec elle le sous-sol où, se trouvant en contact avec des couches encore non lessivées dans lesquelles la décomposition amène de nouvelles substances, elles se précipitent recouvrant les grains de sable d’une mince couche de matière organique. L’alios est donc du sable agrégé par des matières humiques d'abord dis- soules qui se précipilent à nouveau. (E. RAMANN.) E. Ramanx à démontré d’une manière irréfutable que la cause de la formation de lalios résidait dans les réactions précédentes et il a appuyé sa démonstration de divers exemples, parmi lesquels nous ne citerons que lé suivant : ; Alios de l'inspection de Hohenbrück en Poméranie. 1. Sable gris, 15-20 centimètres d'épaisseur avec 1.05 p. 100 de matière organique. < Alios, 5-8 centimètres d'épaisseur avec 7.28 p. 100 de matière Dr 8. Sable jaune brun au-dessous de l’alios. SABLE GRIS. . SABLE JAUNE BRUN. Soluble Soluble - Soluble | Iu- ÉLÉMENTS DOSÉS. dans | “°luble dans | “°luble dans | “°luble l'acid dans ; l'acide dans 3 l'acide dans aC1CS | Jaeide | Total. Acide | pucide | Total A l'acide chlorhy- |ehlorhy- chlorhy-|enlorny- chlorhy-|ehlorhy- drique. | drique. drique. | drique. drique. | drique. p. 100. . 100. | p. 100. | p. 100. | p. 100. | p.100 | p.100. | p. 100. .0076 .618 .62610.0178 .7154 .717210.0085 .103 .0Ot11 .617 .17810.0033 .360 .363[0.0213 .528 Pp Potasse . 0 0 .0110! 0.060! 0.07110.0194| 0.170! 0.18910.0254| 0.225 0 0 0 Il soude Chaux .020 .02310.0137 .028S .04210.0401 .064 .060! 0.06310.0044! 0.047! 0.05110.006S! 0.026 .0964| 0.450! 0.54610.1936| 0.690! 0.88410.344S| 0.760 .0268| 1.650! 1.67711.5256 320 84510.4000! 3.210 .0052| 0.043 .04910.2966 .042| 0.33810.0281 Cine de manques .0032 Oxyde de fer. Alumine. Acide phoëghortine Toraz . .10.1616| 3.068, 3.23312.0744, 4.411, 6.48410.8750 0 0 10 Magnésie . . . .10.0026 0 0 .|0 0 Sn OO OO OO 10 NO Oo IOrO oO INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 429 . Tout d’abord, ces chiffres présentent de bien plus grandes diffé- rences entre la composition des diverses couches que ceux qui sont relatifs au sol de terreau (p. 427) ; ils montrent spécialement que le sable gris est une zone presque entièrement décomposée et appauvrie en pfincipes minéraux solubles, tandis que Palios, qui est proprement la zone de décomposition active du sol, renferme la plus grande pro- portion de matières minérales facilement solubles et une proportion moyenne de ces matières non décomposées; quant au sable infé- rieur, il est encore peu altéré; c’est lui qui est le plus richement doté en principes encore inaltaqués. F1G. 51. — Cavités de l’alios à divers degrés de formation (d’après E. RAMANX). a, sable humique; b, sable gris; €, alios; g, sable jaune (de décomposition), d-f, cavités à divers degrés de formation (dessin schématique). L’alios subit des modifications ultérieures complexes, parmi les- quelles les formations de cavilés (Topfbildungen) offrent un intérêt particulier. Ce sont des enfoncements de la couche d’alios dans les zones inférieures, et on peut les suivre dans toutes leurs phases (fig. 51 et 52). Les limites de ces cavités sont le plus souvent peu nettes ; on observe même des veines de sable humique qui traver- sent le sable inférieur, et ces veines partent aussi bien des cavités que de la couche normale d’alios (fig. 52). L'intérieur de ces cavités est rempli de sable gris et la zone qui les limite n’est autre que le prolongement de la couche d’alios. Elles peuvent être dues à ce que l’eau qui se rassemble à la sur- face de l’alios mouille et attaque cette couche en certains points et 430 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. provoque ainsi une dissolution des éléments humiques et leur re- précipitation à la face inférieure de l’alios, ou bien à ce que l’alios a été percé par quelques racines et s’est reformé à ces places. Par là de grandes quantités d’eau s’infiltrent en provoquant dans ces zones inférieures des dissolutions et des décompositions, et'en remplissant à nouveau les conditions nécessaires à une formation d’alios. C'est d'abord du sable gris qui remplit ces trous, puis, autour, se forme « Fra. 52. — Cavités dans l’alios avec remplissage de sable gris (d'après E. RAMAXN). a, sable humique; b, sable gris; ce, alios; d, sable jaune de décomposition; e, veines d’alios. une gaine d'éléments du sol avec matières humiques à la limite su- périeure du sable de décomposition. L’alios a donc cette propriété | (qui le distingue de toutes les autres roches) que toute fente pro- duite par les racines ou la décomposition est bouchée à bref délai par une formation nouvelle, si bien que l’alios se montre toujours en couche continue ne semblant pas avoir subi de modification. Les parois des cavités doivent par suite être considérées comme la con- tinuation normale de l’alios. Toutes les ruptures qui s’y produisent ne servent qu’à le reconstituer plus profondément. D’après les réactions précédentes, on doit conclure qu'il peut se former de lalios là où il n’y en a pas encore. Ce sera le cas pour les points où des modifications, soit naturelles, soit artificiellement Léa s d'a INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 431 provoquées, de la couverture amèneront les conditions nécessaires à la formation de l’humus brut (E. RAMANN). Bien que l’alios doive toujours sa naissance aux mêmes causes, sa manière d’être varie, notamment au point de vue de la consistance. E. Ramanx distingue trois formes : 4° L’alios bitumineux, formant une masse friable, riche en matière organique et située à une faible profondeur ; ® L’alios proprement dil, dur comme la pierre, de teinte brune ou noire, avec un taux moyen de matière organique, en couche d'épaisseur modérée sur des sols encore friables ou meubles. Cette forme domine dans l'Allemagne du Nord ; 3° L’alios demi-brun ou brun, très compact, extrêmement difficile à travailler, généralement très épais et recouvert d’une couche d’alios foncé moins compact. Cette forme domine dans le Schleswig-Holstein et le Danemark. Exposé à l'air et surtout à la gelée, l’alios s’effrite en une masse brune qui prend peu à peu une teinte plus claire par la destruction de sa matière organique. D’après les analyses complètes faites par E. RaManNN, voici les va- riations constatées dans la composition chimique des divers alios : SOLUBLE s0oL (POUR 100). dans l’acide chlorhydrique (pour 100). oo — Maxi- Maxi- Minimum Moyenne.|Minimum Moyenne. mum. mum. Silice (sable) . . . . . .| 89.9 94.26 Perte au feu (humus). . HAS Le BONE: … Chaux. . st Magnésie. . . . - . Oxyde de manganèse . Oxyde de fer . Acide phosphorique. . Alumine . .674 .307 .059 .038 .696 .089 .889 2837 0483 | 6613 Ares ee RÉ in PDO Sen M pPe RSS. On voit que l’alios est richement pourvu des éléments indispensa- 432 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. bles aux végétaux. Il est d'autant plus étonnant qu’ils aient une vé- gétation chétive sur les sols d’alios. En général, au bout de quelques années, les branches supérieures des arbres meurent et finalement les arbres eux-mêmes. Un examen attentif montre que les fines radi- celles ne se développent que dans les couches humiques supérieures et à la surface de lalios. Si des racines des arbres le traversent çà et là, ce ne sont géné- ralement pas les pivots, mais plutôt quelques racines accessoires qui se ramifient dans le sable de décomposition et fournissent à l'arbre sa principale nourriture. L'action nuisible de l’alios tient tout d’abord à ce qu'il oppose un obstacle mécanique à la pénétration des racines dans les couches profondes et ensuite à ce que sa très faible perméa- bilité entrave la circulation de l’eau dans le sol, si bien que, dans fa saison des pluies, l’eau stagne à la surface et que, dans les longues périodes de sécheresse, quand toute l’eau de la couche supérieure à l’alios est évaporée, 1l ne peut plus en remonter par capillarité. L'influence physique la plus importante de la couverture réside surtout dans son action sur la texture, la chaleur et lhumidité du sol forestier. Sous le rapport de la texture, la couverture ralentit beaucoup la pénétration de l’eau dans le sol et atténue l’action coagulante des pluies. Un sol muni de sa couverture sera par suite plus meuble, plus poreux que le même sol privé de couverture. Le durcissement que le sol éprouve à la suite de l’enlèvement prolongé de la couver- ture et qui se manifeste par la diminution du volume des pores est démontré par les chiffres suivants dus à E. RAMANN : PARCELLE RATISSÉE. PAROELLE NON RATISSÉE. a — Couche Couche Couche Couche supérieure. profonde. supérieure, profonde. 0-11 centi- 20-31 centi- 0-11 centi- 20-81 centi- mètres. mètres. mètres. mètres. p. 100. p. 100. p. 100. p. 100. I. Volume des pores . 44.2 45.1 6.7 46.1 If, — : A7. 45.0 51.0 45.1 Le degré de porosité du sol forestier dépend au reste du mode de décomposition de la couverture, s’il se forme du terreau doux ou de l’humus brut. Jusqu'à une assez grande profondeur, le sol à terreau | $ ' INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 433 doux a une lexture grumeleuse, landis que le sol forestier a, sous une couverture d'humus brut, une texture plus compacte. C’est ce que montrent, par exemple, les chiffres ci-dessous empruntés à RAMANN : VOLUME DES PORES DU SOL COUVERT ee de de 2 centimètres de 7 centimètres terreau doux. d’humus brut. d’humus brut. 55,4 Li 46,2 Si l’on compare ces chiffres avec les analyses ci-dessus données (p. 427) des mêmes sols, on se convainc que les différences dans le volume des pores sont proportionnelles à celles des sols en sels solu- bles ; La compacilé s'accentue à mesure que s’abaisse le taux des sels solubles. Cela tient à ce que, en présence des différents sels solubles, les particules du sol gardent leur tendance à former des agrégats (des grumeaux). Cette action des sels ne peut guère se prouver directe- ment dans le sol en place ; mais elle se démontre indirectement par ce fait que la mise en grumeaux, provoquée par les changements de volume du sol dus à la gelée ou aux modifications de l'humidité, per- siste plus ou moins, tant qu'il reste des sels solubles dans la couche que surmonte la couverture ; c’est le cas pour les sols à terreau doux. Les grumeaux ou agrégats sont au contraire facilement détruits par l’eau d'infiltration quand les sels sont lessivés sous l'influence des acides humiques de l’humus brut, comme on l’a montré plus haut (p. 427). Celui-ci amène une diminution de la porosité, autre- ment dit une détérioration du sol au point de vue physique. E. EBERMAYER et moi? avons cherché à nous rendre compte par de nombreuses expériences de linfluence que la couverture exerce sur l’échauffement du sol. Les tableaux suivants, résultats de mes es- sais, font ressortir cette influence. En les examinant, on constate que : 1° Le sol avec couverture est plus froid que le sol nu en élé et quand la température s'élève ; il est plus chaud en hiver * et quand la température s’abaisse ; 1. E. Eenmayen, Forschungen, etc., vol. XIV, 1891, p. 379. 2. E. Wozrny, Forschungen, elc., vol. XIII, 1890, p. 143. 3. Voir les observations d'octobre, MATIÈRES ORGANIQUES, 28 434 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 2% L'influence de la couverture sur la tempéralure s'accroil avec son épaisseur, c’est-à-dire que la température du sol est d'autant plus basse pendant l'été, d'autant plus élevée pendant l'hiver que la couverture est plus épuisse ; 3° La température du sol nu est plus basse à l'heure du minimum diurne, plus élevée à l'heure du maximum diurne que celle du sol pourvu d’une couverture ; % Les variations de température dans le sol nu sont notablement plus fortes que dans le sol avec couverture ; elles diminuent d’am- plitude à mesure qu'augmenle l'épaisseur de celle couverture ; 0° À égalité d'épaisseur, les diverses couvertures ont sensiblement la même action sur l’abaissement ou l'augmentation de chaleur du sol. Marche mensuelle de la température du sol. F AIGUILLES FEUILLES MOUSSE. TEMPÉ- RATURE de de r de : Le , 5 centi- 10centi chêne. | hêtre. | 2cm,5 7cm,5 1) ni l'air. 2cm,5 | 2m5 mètres. mètres. Température de l'air à 12 centimètres de profondeur. Mai. .| 13,23] 15,111 13,38] 13,16] 13,15] 13,17| 13,25] 12,69] 12,50] 12,42 Juin .| 16,41| 18,35] 17,34] 17,20] 17,05] 17,03] 17,28] 16,86) 16,66| 16,55 Juillet.| 15,04! 16,57| 16,27| 16,38] 15,70) 15,68] 16,17| 16,00| 15,90| 15,83 Août .| 15,60! 17,84| 17,06) 17,04] 16,54! 16,55] 16,89] 16,66| 16,56| 16,49 Sept. .| 12,82! 14,59| 14,45| 14,50] 14,25] 14,24] 14,28| 14,34] 14,43] 14,47 Octob.| 5,33| 7,211 7,30] 7,391 7:24] 7,20! 7,28) 5,67| 81100 Moyenne. | 13,07| 14,94] 14,30! 14,28] 13,99] 13,98] 14,19] 14,04] 14,03| 14,00 Varialions de la température. Mai. .| 13,23 , 3,071 8,27..| 3,43 | 8,37 Juin .| 16,41 4,83 | 5,35 | 5,73 | 5,28 Juillet.| 15,04 5 | 3,48 | 3,63 | 3,40 | 3,38 Août .| 15,60 4,13 | 4,13 | 4,071 4,10 Sept. .| 12,82 8,13 | 3,85 | 3,65 | 3,18 Oct. .| 5,33 5 2,68 | 3,20 | 2,92 | 2,47 Le) _ 1 D À © 1 _ 12 er - _ _ ©! _ = 19 19 19 © tt] mn 2 © 1 © 192 1 _ D = NN = _- uw © «© or Ph me 19 re NO en] = © 13 _ à O1 or Moyenne. | 13,07 3,55 | 3,90 |:3,87 | 3,63 LE Ces œ LE 1Q rs 1m - LE ; IF [ ee TE Par ir HR * | 6L'61| 06 y to fer | ae°r | rs ‘y 6L°a1 |'ouuotog £s°L 9c°L 20 9 10 "6700100 6C°r] &L‘yl 06‘Y] LS'GT |" ‘ ‘oxquedes [: &L‘91 ‘0 60‘L] &9“L] 6 AU FE ONNT (i : y6°cI | yg‘or|9c 619 |9y°c ec '‘y1 |: ° Jon cs'9I 9g'‘Lr|c 81°8] ASC RO 4 1 99'‘&1|S L0°£] L6‘£81 | 1 6&°&l EI TT, — ‘woOT *G'woZ, ‘w9G *G'uog ‘YZSS0nO0ON "AYSSNON ‘AssNnoN ‘HsSsSNnON *NN 108$ 6L° gr l'ouuokoy *21407920 gL'‘£] , 19‘91 * “o1quo)dos gc ca'9l : | 00‘08 TA NE ITU cy 09‘G] LY'SI ; Joimf | TR 3£‘9] 6c'911 vr'o |gc'la ‘umf 9y 91‘Y1|Sr'c] cs‘ a "IN 7 °Œ S ‘K À a INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. ‘Q'uog G'ug ‘G'uoZ *G'usg "AALAH AQ SAVTIONA "ANYHO GA SAITIQNA “VAOIAN,A SATTINAOIV “NIAVS GG SHATINDIV ‘10S np oxnjesodwe ej op oxerqeuanol oyorex 436 DÉCOMPOSITION Les phrases ci-dessus ont sol de la couverture seule ; DES MATIÈRES ORGANIQUES. trait à l’influence sur la température du elles ne peuvent s'appliquer de plano à la couverture telle qu’elle se trouve dans la nature, parce qu’il y a à tenir compte des arbres. Mais dans ces conditions l’action sur lé- chauffement du sol est la même, comme l’indiquent les chiffres sui- vants que J'ai obtenus * : TEMPÉ- RATURE de l'air. AND RAS EP 0 Ma, 720.70 0/0009,88 DNS NU PAU 2e le HUEt. 75 2 au UT TS ADD Er ee tai) MD Septembre... +. 12,21 Moyenne . satin 28 TEMPÉRATURE DU SOL VARIATIONS à 25 centimètres de profondeur. oo —— """" — Épicéas Épicéas 2 a de la température. sans avec | Solnu.| sans avec | Sol nu. couver- | couver- couver- | couver- ture. ture. ture. ture. Her el 9,82| 9,83 15,14 18,70 17,13 14,75 pes 12 oO 1! 5] 1 © “co [o2) mn 19 em me 19 9 - 13,57 Donc, en moyenne, la couverture a provoqué une diminution dans la température du sol pendant l’été et dans l’amplitude des varia- tions. La façon dont cette température est influencée par la couver- ture ressort encore plus nettement si l’on considère la marche de la température pendant que varient les circonstances extérieures. Voici les différences qu’on obtient : DATES 1887. 11-15 avril . 16-20 — 21-25 — LE SOL PLANTÉ en épicéas et garni TEMPÉRATURE de sa couverture était plus froid (—) ou plus chaud (+) que de l’air. le même sol sans couverture de la quantité suivante. 5,19 — 0,48 2,95 + 0,14 11,76 0507 1. E, Wozrny, Forschungen, etc., vol. XVII, 1894, p. 154. dédié INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL, 437 TEMPÉRATURE DATES 1887. 6-10 mai, 11-15 —. 16-20 —. 21-25 —. ., 26-31 — . 6-10 août 11-15 — 16-20 — 21-25 — 26-31 — de l’air. 10,47 6,77 9,70 6,04 11,62 29,33 15,66 13,81 12,53 18,67 LE SOL PLANTÉ en épicéas et garni de sa couverture était plus froid (—) ou plus chaud (+) que le même sol sans co uverture de la quantité suivante. SEE [++ © © © © © CONGO ER NS Or — 0,15 0,46 0,10 0,29 © - EN D mn ee] 2 re + 7 Le sol avec couverture était donc plus froid pendant l’ascension de la température que le même sol sans couverture ; il gardait au contraire mieux sa chaleur dans les périodes de refroidissement. On doit conclure de ces observations comme des précédentes que la couverture diminue les extrêmes de température dans le sol et d'au- tant plus qu’elle est plus épaisse. Quant à l'influence de la couverture sur l’humidité du sol non garni de végétation, elle se manifeste par une augmentation sensible de cette humidité, ainsi que le montrent les chiffres suivants : Taux moyen d'humidité du sol pendant le semestre d'été. 1883. ——— —— SOL AVEC COUVERTURE NOMBRE de 5 centimètres formée de feuilles d’épicéa chêne. hêtre. EE — NOMBRE .|dosages, 16,59 1884. SOL AVEC COUVERTURE de EE de mousse. 19,57 à centimètres de d’ai- feuilles guilles hêtre. |d’épicéa 1, E. Wourny, Forschungen, elc., vol. XII, 1890, p. 171. FEUILLES AIGUILLES NOMBRE EE EE NÉES. des S : à PSC de piu ANNÉ € SOL NU de de d’épicéa ne hêne. | hêtre. +, cm 5. cm em dosages. : D MS Gem, | 7cm,5, | 10 cm, 2em,5. | 2em,5. | 2,5. | ous 16,66] 20,29) 20,08! 19,57, 20,41| 20,45, 20,92! 21,43,21,40 17,99| 49,22! 49,74] 49,40) 20,16| 20,54! 20,75) 21,40/24,54 I est clair, d’après ces chiffres, que : 1° Un sol avec couverture est notablement plus humide en élé qu'un sol nu de méme composilion ; ® Que le taux d'eau d'un sol garni d’une couverture s'accroil avec l'épaisseur de celle-ci, mais pas à proportion. Cette influence de la couverture tient surtout à ce qu’elle atténue l'influence directe sur le sol des facteurs de lévaporation ; le vent et l’insolation, entre autres, ne peuvent plus exercer directement leur action desséchante et le peuvent d'autant moins que la couverture est plus épaisse. Dans ces matières d’origine organique qui recouvrent le sol, est emprisonnée une couche d’air saturée d'humidité et plus ou moins stagnante qui diminue aussi l’évaporation du sol. Les résultats ci-dessous accusent la diminution d’évaporation due à la couverture. Eau évaporée (en centimètres cubes) par 1000 centimètres carrés de surface. FEUILLES. MOUSSE, Re EN de chène. de hètre, | d’épicéa, À sylvestre, a 0. À | Lt À 11 En 20 jours de pd et août 1388. . 40| 80! 160| 200 ; 480! 510! 270] 550! 2702 080 En 22 jours de ‘juillet et août 1889, . . . . . . 160| 250| » | 410! 730| 1C80| 630] 1160, 630] 670} 440] 390! 3702 020 On voit que le sol garni de couverture évapore notablement moins d’eau que le sol nu et la diminution due à la couverture est d'autant plus forte que celle-ci est plus épaisse. On devrait pouvoir conclure de ce qui précède que le taux d’hu- 439 midité du sol couvert s'accroît considérablement avec lépaisseur de la couverture. Cela n’est vrai pourtant que dans des limites res- treintes, puisque les chiffres des essais précédents montrent avec la plus grande netteté qu’une couverture de 2°%,5 d'épaisseur suffit pour maintenir dans le sol sous-jacent un taux d’eau élevé et que son humidité n’est pas sensiblement augmentée par une plus forte épaisseur de couverture. 2%,5 suffisent à atténuer assez l’évapora- tion pour que le sol reste dans un état voisin de la saturation. Si la couverture dépasse ces limites, le taux d’eau du sol n’augmente pas, bien que l’évaporation continue à diminuer, parce que le sol reste saturé et que l’eau en excès s’infiltre, ou que la couverture retient une quantité d’eau qui croit avec son épaisseur. Pour éclaircir ce point, il faut tout d’abord examiner l’influence de la couverture sur les quantités d’eau qui s’infiltrent dans le sol. Les recherches que J'ai faites * avec des lysimètres ont donné les résultats suivants : INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. Quantités d'eau d'infiltration en millimètres. MOUSSE Hyp- num) MOUSSE Le AIGUILLES Dicranum) de hêtre. morte. EE 2em, | 5m, | 40cm. | Creer 488,95 | 508,64 5cm, 10 avril- -30/ 604,71/271,37 490,66 508,95 | 514,75 sept. 1882 .) 6 avril-30/ 4 sept. 1883 .) Moyenne. . Eee 23 1er avril-31) nov. 1885 .| En 339,25 303,21 AIGUILLES — —— Ve = de pin d’épicéa. P sylvestre. Re À À 1 ( 461,8[723,5/756,81655,11676,8 528,66 | 490,10 | 537,04 509,66 | 483,59 | 522,99 491,41 | 523,30 520 ,18 | 517, : “> ï FEUILLES de chène, de hètre. 2 — 104,1| 830 | 680 1. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. XIIL, 1890, p. 176. 705,5/629,1/65 MOUSSE MORTE (Hypaum). A — :4,669,1!6 440 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Les chiffres ci-dessus montrent immédiatement que : 1° Pour une même quantilé de pluie pendant la saison de végéla- tion, 1 y a dans un sol nu sensiblement moins d'eau s'infiltrant dans la profondeur, que dans ce même sol garni d'une couverture ; 2 Une couverture d'un centimètre suffit déjà pour augmenter à un degré extraordinaire la quantité de l'ex d’infillralion; celte quantilé a une faible tendance à s'accroitre avec l'épaisseur de la couverture jusqu'à une certaine limite (environ 5 centimètres), au delà de laquelle elle reste constante, malgré l'épaisseur croissante de la couverture, ou elle subit une diminution continue ; 9° La quantité d’eau qui s'infiltre dans le sol est sensiblement plus diminuée par une couverture de mousse vivante que par de la mousse morle de même espèce. Le résultat indiqué sous le numéro 1 doit être attribué à la dimi- nulion de Pévaporation du sol par la couverture et au maintien de son humidité, qui en est la conséquence. Puisque le sol couvert garde un plus fort taux d’eau que le sol nu, les quantités nécessaires pour remplacer la perte par évaporation sont naturellement plus faibles dans le premier cas que dans le second, d’où il résulte qu'il s'y accuse un excès d’eau de drainage plus tôt et en plus grande quantité que dans le sol nu. Du reste, pour l’explication des résultats de ces essais, 1l n’y a qu'à se reporter à la manière dont la couverture se comporte vis-à-vis de l’eau (p. 412). Comme, à épaisseur égale, les quantités d’eau éva- porée et infiltrée sont sensiblement les mêmes pour les couvertures de feuillus et de résineux, et comme l’évaporation est plus forte avec la mousse et l’eau qui s’en égoutte plus faible que pour les matières précédentes, les quanlilés d'eau qui s'égouttent d'un sol sous une cou- verlure de feuillus ou de résineux sont plus grandes que sous une couverture de mousse. Les influences de couvertures d'épaisseur variable sur la cireula- tion de l’eau du sol sont beaucoup plus difficiles à expliquer que les précédentes, parce qu'entre ces relations et celles de la couverture vis-à-vis de l’eau il y a parfois des anomalies. D'après les résultats des essais rapportés plus haut (p. 414), la quantité d’eau d'infiltration sortant de la couverture s’augmente avec + Tai L< : on rt . = É 4 . INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU S80L, 441 son épaisseur jusqu’à 20 centimètres. On devrait donc conclure de là qu'aussi l’eau de drainage sortant du sol recouvert d’une couche d'épaisseur variable doit être d'autant plus abondante que cette épaisseur est plus grande, jusqu'à cette même limite, le sol étant saturé d’eau avec une couverture de à centimètres de hauteur et se maintenant à cet état avec de faibles variations, comme on l’a mon- tré. Ce n’est point le cas cependant ; car, d’après les résultats con- cordants d'expériences précédemment rapportées, les chiffres relatifs à l'eau qui s’égoutte du sol garni d’une couverture ayant plus de 5 centimètres (jusqu’à 10 centimètres) sont si peu différents, qu'ils peuvent être considérés comme égaux. Cette circonstance et aussi ce fait que l'augmentation de leau d'infiltration provenant du sol avec une épaisseur de couverture de 1 à 5 centimètres se fait dans une bien plus faible mesure qu’on ne devrait s’y attendre d’après les essais sur l’évaporation et l’infiltration relatives à la couverture même, ren- dent vraisemblable que les rapports de la couverture avec l'humidité sont partiellement modifiés par le sol sous-jacent. Cette modification consiste en ce que de plus fortes doses d’humidité sont retenues par la couverture quand elle repose sur un sol que quandil n’y a pas de sol. On comprend la possibilité de cette modification si l’on réfléchit que le sol saturé oppose un obstacle mécanique à l’infiltration de l’eau de la couverture et que son passage de la couverture meuble dans le sol compact est ainsi rendu plus difficile, tandis qu'il n’y a pas d’obstacle quand la couverture repose directement sur le sol percé de trous du lysimètre. Sous le bénéfice de ces observations, les résultats des précédentes expériences peuvent être résumés ainsi : 1° L'humidité et par suite l’eau de drainage augmentent faiblement avec l'épaisseur de la couverture jusqu'à ce qu’elle alteigne environ 5 centimètres, parce que l’évaporation du sol est diminuée dans la même mesure el que celle diminulion est supérieure à la quantité d'eau retenue par la couverture ; 2° À partir de celle limite jusqu’à 10 centimètres, les chiffres rela- Lifs à l'humidité du sol et à l’eau de drainage restent sensiblement égaux, parce que l’évaporalion de la couverture et sa faculté d'imbi- bilion se compensent ; 442 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 3° Au delà de 10 centimètres, l’eau de drainage diminue constam- ment, parce que l'évaporation du sol est fort diminuée, mais les quan- tilés d’eau relenues par la couverture même deviennent si grandes, que le sol couvert relient une quantité d’eau constamment décrois- sante à mesure qu'augmenlte la couverture. Le résultat signalé sous le numéro 3 peut s'expliquer seulement par ce fait que la couverture de mousse vivante a lancé plus d’eau dans l'atmosphère que la mousse morte. En comparant les chiffres obtenus, on voit qu’il y a de très notables différences. Ce résultat est en contradiction flagrante avec ceux de F. OLTMANN * sur le mouve- ment de l’eau dans les mousses et son influence sur la distribution de l’eau dans le sol ; d’après lui, il ÿ aurait concordance parfaite entre la mousse morte et la mousse vivante sous le rapport de l’évapora- tion et de son influence sur le taux d'humidité du sol. Il faudra de nouvelles recherches pour éclaircir ces contradictions. Ces diverses influences de la couverture sur l’humidité du sol et les eaux de drainage se manifestent-elles de la même façon en forêt ? Mes essais * montrent que dans ces conditions les lois générales pré- cédentes subissent quelques modifications très importantes. L'action de la couverture (couche de mousse morte de 10 centi- mètres) sur l'humidité d’un sol portant un peuplement serré d’épi- céas * fut la suivante : Taux d'eau moyen du sol pendant le semestre d’été jusqu’à 50 centimètres (en pour-cent du poids). NOMBRE ÉPICÉAS ÉPICÉAS ANNÉES. des sans avec dosages. couverture. couverture. 1887 . 24 la 15.14 1888 . 23 14.14 15.30 18859 . 23 Lol 16.66 1890 . 2? 13.98 14.6) 11 0) ne 25 14.76 15.04 MOYENNE 0 14.37 45.37 1. Inaugural Dissertation der Universilat Strassburg. 1884. Dans Beiträge zur Biologie der Pflanzen, par F. Goux, vol. IV, fase. 1, 2. E. Wozrny, Forschungen, elc., vol. XVII, 1894, p. 171. 3. La surface de chaque lot était de 2? mètres carrés. Le sol avait été d'abord soi- gueusement mélangé et avait été garni au printemps de 1886 d'épicéas de 5 ans plantés à égale distance dans les deux lots. INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DU SOL. 443 Le sol couvert a donc accusé un taux d'humidilé plus élevé que le sol non couvert ; mais la différence est bien plus faible que dans les expériences en sol non planté, ce qui tient surtout à la différence de végétation des arbres suivant que le sol est muni ou non d’une cou- verture. Dans le premier cas, les végétaux forestiers se développent dans leurs organes aériens et souterrains plus puissamment que dans le sol non couvert, puisqu'ils trouvent plus d'humidité et plus de matières nutritives grâce à la décomposition de la couverture. Ce résultat se voit à l'œil nu déjà, mais je l’ai traduit en chiffres en pe- sant ces arbres abattus au printemps de 1899, âgés alors de onze ans, et en mesurant leur hauteur et leur circonférence. Voici les résultats obtenus pour 5 plants de onze ans. à séchés à l'air. —— V'étatfrais. piges. Branches. Aiguilles. Total. Épicéas sans couverture . . 18350 3690 3820 3100 10610 Epicéas avec couverture . . 23700 3980 5070 4500 13550 Done, le poids des épicéas avec couverture a été plus fort que celui des épicéas sans couverture de 29.2 p. 100 à l’état frais et de 27.7 p. 100 à l’état sec. La hauteur des tiges était en moyenne de 1",52 pour les épicéas sans couverture et de 1%,55 pour ceux avec couverture. La circonférence, mesurée au quart, à moitié et aux trois quarts de la hauteur, a été trouvée de : AUX TROIS AU QUART. AU MILIEU. quarts. MOYENNE. Épicéas sans couverture . . . 14,12 9960 6:080./10725 Epicéas avec couverture . . . 14,92 11,10 7,74 41,25 La couverture, on le voit par tous ces chiffres, a favorisé la crots- sance des épicéas et surtout celle des organes de transpiration dont le poids a été de 45.2 p. 100 plus fort que chez les épicéas sans couverture. En résumé, l'influence de la couverture sur l'humidité du sol en forêt est diminuée par ce motif que la présence de cette couverture favorise la végétation et par suite l’absorption de l’eau du sol. C’est ce que montrent les essais précédents où l’on voit, dans les périodes LA 444 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. de forte évaporation, le taux d’eau du sol garni d’une couverture descendre au-dessous de celui du sol qui n’en a pas et l'influence de cette couverture diminuer d’année en année. Le sol des épicéas avec sa couverture fut plus humide que le sol sans couverture : De 14,26 p.100 en 1887 De 5,08 p.100 en 1890 De AS:240 Le 11886 Dé. 1 5000 ral De 6,05 — 1889 Cette décroissance continue de l'influence de la couverture sur l’humidité s'explique très simplement par la végétation plus vigou- reuse des épicéas et laugmentation corrélative de leur transpiration; ce qui amène à croire que, dans les périodes ultérieures de végéta- tion des arbres, elle est probablement nulle, puis s'exerce en sens contraire à mesure qu'ils croissent plus activement grâce aux matiè- res nutrilives qui leur sont apportées par la décomposition de la couverture et les eaux d'infiltration. L’essai fait sur le sol garni d’épicéas a donné ce résultat frappant au premier coup d'œil que l’eau de drainage n’est pas augmentée par la couverture, comme on devait s’y attendre d’après les résultats obtenus sur des sols non plantés, mais qu’elle est au contraire dimi- nuée. Voici les chiffres moyens obtenus par saison dans une période de six ans (1887-1893) : EAU D'INFILTRATION z PLUIE RS RAPPORTÉE À 100 DE PLUIE. en millimètres. SAISONS en — — a milli- Épicéas | Épicéas Épicéas | Épicéas (météorologiques). sans avec Plui sans avec mètres. couver- couver- que? couver- couver- ture. ture. ture. ture. Printemps. : 2%) 185:07 1200, 5201004606 BHO, 2 TE CADRE OT ER MEERt lAutomne. . . +,1270,42 23,06 19,98 ISO NT Nr 127,99 39,64 | 33,09 | Somme ou Moyenne .| 985,19 | 124,74 | 107,99 Ces chiffres montrent que La présence d’une couverture diminue, dans un sol planté d'arbres, la quantité d'eau d'infiltration. Cela est dù, avons-nous dit, à la plus grande activité de la végétation et de INFLUENCE DES HUMUS EUR LA FERTILITÉ DU SOL. 445 la transpiration. En effet, la lame d’eau annuelle a atteint, pour la moyenne des six années 1887-1895, 990%*,6, dont 860"",8, soit 86.9 p. 100, ont été évaporés par les épicéas sans couverture et 877% ,7, soit 88.6 p. 100 par les épicéas avec couverture. Il y a sans doute encore d’autres influences secondaires, notam- ment celle-ci : l'absorption complète des petites pluies par la couver- ture et l'obstacle mécanique qu’oppose à la circulation de l’eau le système de racines relativement plus développé sous l'influence de la couverture. (Voir Note H.) L’amportance de la couverture pour la fertilité du sol forestier s'explique, d’après ce qui précède, par ces deux faits que les prinei- pes nutritifs qu’elle contient, rendus assimilables par sa décomposi- tion, servent à nourrir les arbres et qu’elle exerce. en outre toute une série d'actions favorables sur la texture, la température et l’hu- midité du sol forestier. L'action fertilisante apparaît surtout quand les circonstances extérieures favorisent l’érémacausis des détritus forestiers ; par contre, si la décomposition est anormale, s’il se forme de l’humus acide surtout en sol siliceux, la fertilité se trouve grave- ment compromise, tant par la dissolution intense des matières nutri- tives dans les zones superficielles que par la formation d’une couche d’alos résultant de l'agrégation des grains de sable par des matières humiques et arrêtant la croissance des plantes par l’obstacle qu’elle oppose à la pénétration des racines. Le maintien d’une certaine per- méabilité dans le sol forestier est lié à la formation du terreau, tandis que le sol se durcit dès que les matières organiques se transforment en humus brut. Sur la température la couverture influe avantageu- sement en diminuant les extrêmes. Son action sur l'humidité se fait sentir en la maintenant dans le sol par la diminution de l’évaporation, . mais en diminuant aussi la quantité d’eau du sol lorsque la végéta- tion des arbres s'accélère grâce aux matières nutritives apportées par la couverture. La couverture peut exercer une influence nuisi- ble, se traduisant par un fort appauvrissement du sol en eau dans le cas où son épaisseur s’exagère démesurément, si bien qu’elle absorbe la plus grande partie des précipitations atmosphériques et que pres- que toute sa masse subit la transformation tourbeuse. TROISIÈME PARTIE INTERVENTION DE L'HOMME DANS LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES Appuyés sur les faits précédents, nous allons pouvoir établir les règles à l’aide desquelles on obtiendra, dans la pratique agricole, le meilleur mode de décomposition des matières organiques. Pour at- teindre ce but, il faut d’abord déterminer quels sont les points de vue généraux à envisager pour arriver à une utilisalion aussi parfaite que possible des principes nutritifs contenus dans les détritus organi- ques. CHAPITRE I CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES Les faits exposés dans la première partie de ce travail montrent nettement que les deux processus les plus importants pour l’agricul- ture et la sylviculture, l’érémacausis et la putréfaction, diffèrent profondément dans leurs causes comme dans leurs résultats et ne peuvent donc être identifiés ainsi qu’il arrive très souvent. Tant que l’oxygène a libre accès dans les matières organiques, la décomposi- tion se fait surtout par oxydation (érémacausis) ; ce sont au contraire des réductions qui se manifestent (putréfaction) quand l'air n’arrive plus ou n’a qu’un accès très limité. Comme la production de ma- tières assimilables (et en tout cas non nuisibles) aux dépens des restes organiques en voie de décomposition ne se fait que par Péré- macausis, tandis que la putréfaction ne donne le plus souvent naïis- sance qu’à des composés peu ou pas assimilables (voire nuisibles) et à des pertes d’azote (à l’état d'azote libre), 1l faut d’abord poser en principe que l’on ne peul en pratique agricole utiliser parfai- lement les éléments nutrilifs contenus dans les matières organiques el empécher la formation de composés nuisibles que par des me- sures favorables à l'érémacausis de ces matières et s’opposant à la putréfaction. En outre, le praticien devra s’efforcer de réduire au minimum toutes les pertes d’aliments, qu’elles soient produites par la vola- tilisation d'éléments précieux ou par la dissolution de principes nu- tritifs facilement solubles provenant de la décomposition des détritus organiques. Dans l’érémacausis des matières azotées, il se forme de l’ammonia- que qui peut se volatiliser facilement. If s’en perdra plus si ces matié- res se décomposent vite et dégagent en peu de temps de grandes CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. 449 quantités d’ammoniaque volatile, comme il arrive pour certains composés azotés de l’urine de nos animaux domestiques qui se trans- forment très vite en carbonate d’ammoniaque gazeux, soit directe- ment (urée), soit indirectement, c’est-à-dire après transformation préalable en d’autres composés (acide hippurique). Empêcher cette évaporalion d’ammoniaque est un des principaux buts qu’on doit se proposer dans la fabrication des fumiers. Quand la décomposition se fait par érémacausis, il n’y a pas à se préoccuper du dégagement d'azote libre ; car tous les essais où on l’a constaté se sont faits dans les conditions non de l’érémacausis, mais de la putréfaction, En ce cas, de nombreux essais l’ont montré, il se dégage de l’azote libre; mais peu nous importe, puisque ce mode de décomposition doit être évité dans les opérations agricoles qui ont pour but de régulariser les processus de décomposition. La dissolution des principes nutritifs, surlout des nitrates qui ne sont pas relenus par le sol, est généralement si intense que, dans une exploilalion rationnelle, il faut y accorder la plus grande alten- lion. Les pertes subies chaque année de cette façon par le sol en un des principes les plus précieux sont si importantes, d’après les re- cherches de J. B. Lawes et J. H. Gizserr ‘ et de P. P. DEHÉRAIN *?, qu’il faut les empêcher par tous les moyens possibles ; c’est un devoir strict pour l’agriculleur. Les nitratesse forment surtout dans les couches superficielles du sol, parce que là se trouvent le plus d'éléments azotés et les conditions les plus favorables à la nitrification (air, présence d'organismes nitrifiants en plus grande abondance, etc.). Plus la température est élevée (dans certaines limites, jusqu’à 37°), plus la nitrification est intense, à condition que le sol soit humide. Dans un sol sec il n’y a point de nitrification, pas plus que dans un sol mouilleux, où au contraire les nitrates se réduisent et dégagent de l'azote libre. C’est dans des con- 1. J. B. Lawes et J. H. Giceenr, Journ. of the royal agric. Soc. of England, xol. XVII, part. I et IT; vol. XVIIL, part. IL et IV. 2. P. P. DenéraIN, Annales agronomiques, t. XVI, p. 337; t. XVII, p. 49; BXNII, p. 273 ; t. XIX, p. 65: t. XX, p. 21; t. XX, p. 449; t. XX, p. 193. MATIÈRES ORGAN'QUES, 29 450 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ditions moyennes d'humidité que la nitrification se fait le plus éner- giquement. Sous l’action des pluies les nitrates se-dissolvent (surtout le nitrate de chaux) et, comme ils ne sont pas retenus par le sol, ils sont en- trainés dans les profondeurs et apparaissent en plus ou moins grande quantité dans les eaux de drainage. D'après les recherches de J.-B. Lawes et J.-I. GiBerr la perte annuelle en azote nitrique par les eaux de drainage dans un sol nu (lchm compact avec sous-sol d'argile sableuse) fut par hectare pour une période de quatre ans avec une épaisseur de sol de : 49cm y gem 1470m 54ks 0 40%5,7 48%s, 4 ou, en moyenne, 466,6. Au prix de 1 fr. 60 c. le kilogramme d'azote, la perte s'élève à 75 fr. 70 c. par hectare. Tant que le sol nu reste assez également humide, la chaleur influe tellement sur la nitrification, qu’en été les quantités d'azote dissoutes sont plus fortes que dans les autres saisons, bien que le volume de l’eau de drainage soit fort diminué. La formation des nitrates est très activée par la chaleur ; aussi est-ce généralement de juillet à octobre que les eaux de drainage sont le plus riches en nitrates ; c’est d'avril à juin qu’elles sont le plus pauvres, du moins sous le climat de l’Angleterre. Mais ce n’est pas toujours le cas ; il faut que la chaieur puisse faire sentir son plein effet, c’est-à-dire que le sol soit humide et perméable. Étant donné que dans le sol nu, en jachère, la quantité des eaux de drainage varie comme celle des pluies”, il ne faut pas s'étonner que l’abondance des précipitations ait tant d'influence sur les pertes du sol en azote. Plus le volume des pluies et par suite des eaux de drainage est considérable, plus intense est, en général, la dissolution des nitrates et inversement. Ceci est vrai des années entières comme. des saisons. Les quelques résultats ci-dessous obtenus par LAWES et GILBERT 1. E. Wozuny, Forschungen, elc., vol. XI, 1888, p. 59, CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. 451 montrent nettement la relation qui existe entre les pertes en nitrates et la hauteur des pluies. SUR 49 CENTIMÈTRES SUR 98 CENTIMÈTRES SUR 147 CENTIMÈTRES ANNÉE de profondeur. de profondeur. de profondeur. EE A EE du 1er octobre Perte Perte = Perte ges d’azote dr d'azote. + d'azote au 30 septembre. PRES par EE par ne par drainage. hectare. drainage, hectare. CS hectare. centim. kilogr. centim. kilogr. centim. kilogr. 1879-1880 . SR À BEM ET 3007 22:91. 34:56 1877-1878. So Te ADD A0SGSS ARE à 188.67 609 1878-1879. GA 698 2 65.997" L6E AN 61,71 70,9 Les quantités d'azole extraites d’un sol nu varient comme les quantités d'eaux de drainage, qui sont en rapport à leur tour avec les quanlilés de pluie. La perte d'azote dans le sol nu dépend de la répartition moyenne et saisonnière des précipitations. Dans les climats où dominent les pluies d’été (Europe moyenne), c’est en été que le sol laisse écouler le plus d’eau; c’est en automne pour les climats où dominent les pluies d’automne (Angleterre). La dissolution des nitrates est en rapport avec ces faits; elle atteint son maximum dans les saisons indiquées quand se présentent en même temps les conditions les plus favorables à une nitrification énergique. Pendant la période froide où les eaux d'infiltration sont moins abon- dantes et les oxydations moins intenses, la quantité d’azote perdue est moindre ; dans les régions où l’hiver est rigoureux (Allemagne), il s’infiltre peu d’eau à cette saison et déjà beaucoup au printemps, tandis que dans les climats doux (Angleterre) c’est l’inverse et c’est au printemps que l’infiltration atteint son minimum. Ces différences s’ex- pliquent simplement par ce fait que dans les climats doux le sol gèle rarement l'hiver et la neige fond facilement, tandis que, dans les cli- mats rudes, le sol gelé l’hiver ne laisse rien passer ; ce n’est qu’au prin- temps qu’il dégèle et laisse s’infiltrer les eaux de la fonte des neiges”. Le sol garni de plantes agricoles présente avec le sol nu des diffé- rences très importantes tant sous le rapport de la grandeur de la déperdition d’azote provenant de la dissolution des nitrates que de 1. E. WocLxy, Forschungen, etc., vol. XI, 1838, p. 59. 452 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. l’époque à laquelle elle se fait. Dans les terres cultivées, à condition qu’elles ne soient pas fumées avec des sels ammoniacaux ou des nitrates, la quantité de nitrates perdue est incomparablement plus faible que dans le sol en jachère. D’après LAWES et GILBERT, la perte d'azote dans des champs cultivés en blé a été, pour une moyenne de trente ans, de 4*6,56 à 56,44 par hectare, donc bien moindre que dans le sol nu. Cette différence tient, d’une part, à ce que les plantes assimilent les nitrates du sol et aussi à ce que, pendant la saison de végétation, c’est-à-dire pendant Ja saison chaude, elles absorbent tant d’eau que la portion qui s’infiltre est extrêèmement-réduite. Aussitôt après la récolte les nitrates apparaissent dans l’eau de drainage et sont enlevés en assez grande quantité en dehors de la saison de végétation. La déperdition d’azote dans les champs cultivés est considérable, les recherches de LAwWESs et GiLBerT le montrent, quand les plantes ont une végétation languissante par défaut d'aliments ; cette perte diminue dès que par des engrais appropriés on favorise la croissance des végétaux. Du reste l’intensité de dissolution des nitrates dépend et de l'aptitude des plantes à s'approprier les nitrates du sol et de leur durée de végétation. C’est dans les cas où, comme dans les prairies permanentes, le sol est constamment couvert de végétation, que la plus grande proportion de nitrates sera utilisée par les végé- taux et qu’il en disparaitra le moins dans les eaux de drainage. Pour les autres cultures, la déperdition d’azote est d'autant plus grande que la période de végétation est plus courte. Les expériences de P. P. DEHÉRAIN font pénétrer encore plus avant dans ces questions ; non seulement elles confirment les résultats de Lawes et GizBerr, mais elles les complètent sur bien des points importants. Celles des deux années 1893-1894 et 1894-1895 sont surtout intéressantes parce qu’en raison des différences climatériques la végétation des plantes et l’arrivée des eaux de drainage ont pré- senté des différences considérables. Du mois de mars au mois de mars de l’année suivante, les condi- tions climatériques des deux années différèrent d’abord en ce que la hauteur des pluies de 1893-1894 fut plus grande (490"",7) que celle de 1894-1895 (419,8). Leur répartition mème présenta des diver- ä CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. 453 gences sensibles ; d'avril à juin 1893 il tomba 62°%,5 et 126°%,5 en 1894. Aussi les récoltes furent-elles beaucoup plus belles cette année- là que la précédente. De juillet à septembre les pluies de 1894 (194%%,6) ont été aussi plus favorables aux betteraves que celles de 1893 (169"*,7). Les pluies d’hiver ont été au contraire plus abon- dantes en 1893, 258"",7, contre 98"",7 en 1894. Tandis que, par suite de la sécheresse du printemps et de la faible quantité de pluie en été, les drains ne donnèrent pas d’eau en 1893 du 2 mars au 9 octobre, même dans la parcelle nue, il y eut en 1894 un assez fort écoulement d’eau souterraine. Nul au printemps, il ne se produisit qu’au commencement d’août, quand les pluies de Juillet eurent saturé le sol et il se continua en septembre. L'hiver sec qui suivit occasionna une très faible infiltration. La quantité d’eau de drainage fut très petite en 1894 dans les sols cultivés à cause de la vigoureuse végétation des plantes. Elles absor- bèrent presque toute l’eau tombée en été, si bien qu'après la récolte le sol ne possédait qu'un faible taux d'humidité. Pour ce motif et parce que les précipitations furent peu abondantes en automne et en hiver, il ne s’écoula que peu d’eau dans la saison froide. En 1893 Pinfiltration fut importante à partir d'octobre. Le tableau suivant fournit des indications sur les récoltes, sur l’eau de drainage et sur les nitrates qu’elle a entraînés : 1893-1894 Poids CULTURES de : drainage en . en en milli- | kilogr. milli- | Lilogr. (1893). mètres. par [el 894). mètres. par | la récolte la récolte bectare. hectare. Jachère nue (moyenne de 4 essais) . . . » 107,3 | 101,8 » (Graio : ; _ (Grain : 23qm,0 * Vpaille : 264,5) EL {Paille : 971m,50 (Grain : 13qm,8) 9 a (Grain : 409m,6} IPaille : 37qm,5| e 7" paille : 931m,1) Betterave à sucre (moyenne de 3 essais).| 23,833 ks 2 23,1 38 333 ke Betterave pour semence (moyenne de 3 es- Blé (moyenne de 3 essais). . . . . Avoine et trèfle (moyenne de 3 essais). , Grain : 1,760ks 31,8 [Grain : 1 533% Pomme de terre (moyenne de 3 essais). .| 28,833 ke 39,6 » Ray-grass (1 essai) 36,9 5 625 ke RS OM Me ESS CRE RENE MSN CEE eee 1 454 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Il résulte de ces chiffres avec la dernière évidence que léva- cuation de l’eau souterraine et la dissolution de nitrates qui lui est corrélative sont très importantes dans les sols nus en comparaison des pertes subies dans les mêmes conditions par les sols cultivés et que, d’autre part, le poids de la récolte, autrement dit le degré de développement de la plante et les circonstances climatériques règlent le phénomène. Dans l’année 1893-1894, la quantité d’eau de drainage et de nitrate dissous fut très grande, parce que la séche- resse calamiteuse du printemps entrava la croissance des plantes qui ne donnèrent que de faibles récoltes et qu'après la saison de végétation il tomba de grandes pluies. Dans Pannée 1894-1895, les plantes végétèrent très vigoureusement, grâce à la répartition con- venable des pluies pendant la période de croissance, et purent ainsi extraire du sol beaucoup d’eau, ce qui réduisit à presque rien le volume de l’eau de drainage et la dissolution des nitrates dans les parcelles plantées; en outre, l’apport par les eaux atmosphé- riques dans la période qui suivit la récolte fut relativement faible et insuffisant pour saturer le sol préalablement desséché par la végétation, si bien que l’eau ne put s’infiltrer abondamment en cette saison. La vigueur de végétation étant, avec l’abondance des pluies, d'importance capitale pour la quantité des eaux de drainage et pour les pertes d'azote qu’elles provoquent, la fumure doit jouer aussi un rôle dans la question quand elle accélère la croissance des plantes. Quelques essais de A. PETERMANN ‘ montrent qu’il en est ainsi en effet. Il remplit d’une même terre des vases de 1,20 de profondeur et 1 mètre carré de surface, les garnit de bette- raves à sucre, puis mesura et analysa l’eau de drainage. De ces quatre vases [ ne reçut pas d'engrais, II reçut des engrais miné- raux, III de l'azote (nitrate de soude), IV des engrais minéraux et de l’azote (nitrate de soude). Le tableau suivant indique les récoltes (racines et feuilles) et le volume d’eau de drainage obtenus dans les diverses années. 1. À. Perenmann, Bullelin de la Station agronomique de l'État à Gembloux, n° 45, 1889. 46/21 HAUTEUR de pluie en milli- mètres. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. 1 Récclte en kilogr. 3,850 2,600 3,200 2,460 —— À Eau de drai- nage en milli- mètres. 156 ii 54 40 I Récolte en kilogr. 4,575 3,260 4,440 3,850 x, Eau de drai- nage en milli- mètres. 116 80 III. Récolte Récolte en en milli- | kilogr. mètres. kilogr. 7,180 5,180 5,940 5,880 108 65 36 20 EE Eau de drai- nage en milli- mètres | | | Plus les pluies sont abondantes et les récoltes faibles, plus est grand le volume de l’eau de drainage et inversement. La perte d'azote par dissolution des nitrates a été, par hectare, en kilogrammes de : 1 ET II III ET IV sans azote. avec azote. 1882. 14,8 11,9 1881. 13,6 10,9 1886. ,6 4,4 1884. 3,0 2,1 Malgré l'addition d’azote, la quantité de nitrate exportée a été plus fable que dans les vases sans azote, ce qui s’explique par une plus forte production de matière végétale qui à entrainé une plus grande absorption d’azote et d’eau. Ges résultats montrent en outre que les doses d’azote extraites par l’eau de drainage varient dans le même sens que les pluies. Il n'arrive pas toujours, comme l’ont prouvé aussi bien les re- cherches de LaweEs et GILBERT que celles de DEHÉRAIN et de PETER- MANN, que la fumure diminue la dissolution des nitrates. LAWES et GILBERT ont trouvé que la déperdition des nitrates dans l’eau de drainage croit avec la quantité de sels ammoniacaux ajoutés au sol et d’une manière très sensible ; mais ces résultats ne peu- vent s'appliquer de plano à la grande pratique, parce qu’on a em- ployé des doses massives d’engrais. L'autre fait mis en lumière par ces expériences est important : les fumures minérales qui activent 456 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. le développement des végétaux diminuent la dissolution des mi- trates. Dans les essais de DERÉRAIN où l’azote fut ajouté sous forme de nitrate de soude, la perte d’azote fut considérable, comparée à celle des parcelles qui n'avaient rien reçu ou seulement du fumier de ferme. Comme LaAwes et GILBERT, DERÉRAIN à trouvé ce fait impor- tant dans la pratique que l'azote du fumier ou des engrais organiques est beaucoup moins facilement exporté que celui des sels ammonia- caux ou du nitrate de soude, évidemment parce que, dans le premier cas, l’azote ne devient assimilable que peu à peu, au fur et à mesure de la décomposition. Signalons aussi les résultats d’une expérience faite par A. PETER- MANN avec des lupins mis dans des vases qui avaient été conditionnés comme il suit: I. Sol (sable) non fumé ; Il. Fumure minérale; If, Même fumure avec microbes ; IV. Mème fumure avec nitrate de soude ; V. Même fumure avec sulfate d’ammoniaque ; VI. Fumure minérale et sang en poudre. L’azote ajouté s'élevait à 275,6 dans les vases IV-VT; le sol primitif en contenait 6€,5786. Voici les résultats qui nous intéressent dans cette expérience : RÉCOLTE Hotala E AU AZOTE AZOTE (organes aériens de dans ess rap ipries drainage. la récolte. drainage. grammes. millimètres. grammes. grammes. PÉRONE 68,4 281,64 0,8952 0,2290 See 236,9 237,80 4,8453 0,1764 1 CRE 293,5 238,53 4,6509 0,2280 INHSEere 415,0 190,88 8,0459 19,0254 Vwr2e 447,8 184,75 8,0416 12,8697 NI EuRee 809,0 145,05 10,0044 4,5196 Ici encore la quantité d’eau de drainage s’est montrée inverse- ment proportionnelle au poids de la récolte, mais pas aux quantités d'azote draimées. Ceci ne se présenta que sur les parcelles fumées uniquement avec des engrais minéraux ; celles qui avaient reçu du nitrate de soude et du sulfate d’ammoniaque accusèrent au contraire une forte dissolution de nitrate (et partiellement aussi d’ammoniaque pour le n° V), parce qu’une partie seulement de l'azote de ces en- » CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. ù 457 grais fut utilisée par les plantes et que l’autre passa aisément dans l’eau de drainage, vu la grande perméabilité du sol. La perte fut très importante ; elle atteignit 190 kilogr. d’azote par hectare pour le nitrate de soude et 129 kilogr. pour le sulfate d’ammoniaque. Dans les expériences de Lawes et GILBERT la déperdition dans des champs de blé fumés à raison de 96,4 d’azote (en sels ammonia- caux) s’éleva pour une moyenne de trente ans à 34*,7 quand on ajoutait une très forte fumure minérale et à 48,4 avec les sels ammoniacaux seuls. Les essais de PETERMANN montrent de nouveau que l’adjonction d’azote sous forme organique (sang en poudre) entraîne une bien moindre déperdition de nitrate que sous forme de sels solubles ‘ riches en azote comme le nitrate de soude et le sulfate d'ammoniaque. Tous ces faits, importants pour la pratique à divers points de vue, peuvent se résumer ainsi : 4° Les champs cultivés éprouvent chaque année, par lixiviation des nitrates, lesquels ne sont pas absorbés par le sol, des pertes d'azote plus ou moins grandes, qui peuvent aller jusqu’à 120 kilogr. d’azole par hectare et plus ; 9° Celte déperdition par les eaux de drainage est d'autant plus forte que le sol reste plus longtemps en jachére el que les précipita- tions atmosphériques sont plus abondantes el inversement ; 3° Sur les sols garnis de végétaux l'entraînement des nitrates dans la profondeur décrott d'aulant plus que les plantes se sont plus dé- veloppées grâce à des conditions climatériques favorables, à une fumure appropriée ou à une culture rationnelle et que leur durée de végétation est plus longue et inversement ; 4 Le danger d’une forte déperdition par celte voie est d'autant plus à craindre que les conditions sont plus favorables à la nitri- fication, que la perméabilité du sol est plus grande el que les végélaux ont moins besoin des quantités d'azote contenues dans les fumiers ; 1. Le faible pouvoir absorbant du sol employé (sable quartzeux) explique que, dans les essais de Petermann, une partie des sels ammoniacaux énergiquement fixés par le sol d'ordinaire a été entrainée. 458 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 5° Les nitrales provenant des engrais azolés sont d'autant moins entrainés que la végétation est plus luxuriante soit par elle-mé soit par l'addition d'engrais minéraux ; 6° En employant des engrais d’origine organique, les pertes de nitrates sont bien moindres qu’en apportant l'azole sous forme de sels solubles (nitrate de soude et sulfate d'ammoniaque). $ Avec ces règles on peut, comme on va le montrer par la suite, raisonner les moyens de limiter avec succès les pertes en l’un des principes les plus précieux des sols arables. CHAPITRE IT COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES EN MODIFIANT LES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DU SOL 4. — Travail mécanique du sol. On a déjà démontré dans une autre occasion que la décomposition des matières organiques sur les divers sols se fait très différemment suivant leur état physique. Dans les sols à grain fin, tant qu'ils ne subissent pas de modifications appropriées, c’est la putréfaction qui domine, tandis que dans les sols à gros grain c’est en général l’éré- macausis. Cette différence tient à ce que les premiers, à cause de l'extraordinaire finesse de leurs pores et de leur saturation par les précipitations atmosphériques ne laissent pas pénétrer l'air en assez grande quantité pour qu'ils provoquent d’énergiques oxydations. Il s'ensuit que les détritus enfouis dans le sol ou les engrais organi- ques qu’on lui incorpore sont soumis à la putréfaction, c’est-à-dire à ce processus par lequel le passage à l’état assimilable des matières nutritives contenues dans ces matières se fait d’une manière très 1m- parfaite, par lequel aussi, sans parler de la formation de principes nuisibles aux plantes (acides humiques, sulfate de fer, etc.) se réa- lisent des pertes d'azote par réduction des nitrates et dégagement final d’azote gazeux. Les sols à gros grain, au contraire, jouissent, à cause de l’active circulation de l'air dans leur masse, d’une composi- lion telle, que la destruction de toutes les matières qui s’y trouvent suit un cours normal (l’érémacausis), à condition qu'ils aient l'humi- dité nécessaire. Ces sols ont le plus souvent une constitution défec- tueuse sous ce rapport. Avec une humidité suffisante, l’'érémacausis y est si rapide que les matières nulrilives qui s’y forment ne sont pas 460 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. LA à suffisamment fixées par le sol, pas complètement absorbées par les plantes, si bien qu’elles sont lessivées plus ou moins, d'autant mieux que, dans ces sols si perméables, l’infiltration est d’ordinaire très abondante. Remarquons aussi que, dans le terrain laissé à lui-même et se tas- sant de plus en plus, l’air nécessaire au cours normal de l’érémacausis se raréfie à mesure que les couches sont plus profondes. Non seule- ment la décomposition subit un ralentissement proportionnel, mais elle se modifie d’une façon désavantageuse pour la formation des principes nutritifs assimilables et d'autant plus que l'air a moins libre | accès. On arrive pour le point considéré à cette conclusion qu'aux opérations mécaniques agricoles incombe la lâche de retourner d’abord le sol, d'amener à la surface les couches profondes, de rendre perméables à l'air les sols à éléments fins et de mettre les autres en élat de conserver le plus possible de l'eau qu'ils reçoi- vent. Les moyens les plus divers s’offrent au praticien pour atteindre ce but. Le travail à la charrue a tout d’abord pour but de mettre la plus grande surface possible des couches profondes en contact avec lat- mosphère ; il faut donc pour cela retourner la couche arable, tra- vail auquel est seul apte l'instrument en question ; il s’agit en outre d'ameublir le sol, ce qui est d’autant plus difficile que le sol est plus compact, tant à cause des obstacles que les instruments ont à vaincre que du choix des moyens à employer pour amener la struc- (ture normale ; il faut, avant de se décider, examiner soigneusement tous les facteurs qui peuvent avoir de l'influence. C’est pour cela que la question de savoir comment et jusqu’à quel degré la couche arable doit être travaillée dans ces sols compacts pour que la décom- position des matières organiques suive son cours normal doit fixer d’abord lattention. Sous le rapport de la texture, les sols présentent des différences importantes suivant que leurs molécules, isolées comme dans une poudre, sont simplement juxtaposées ou bien qu’elles se réunissent en agrégats plus ou moins volumineux (grumeaux, mottes), laissant entre eux d'assez grands vides qui amènent diverses modifications très COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 461 tranchées dans l’état physique du sol. Comme, dans le premier cas où les molécules sont incohérentes, la grandeur des vides intersti- tiels servant à la circulation de Pair et de l’eau dépend surtout de la grosseur et de la forme des molécules, on désigne cette sorte d’agencement des éléments du sol sous le nom de texture pulvé- rulente. Dans le second cas où la réunion en grumeaux ou agrégats a tant d'influence sur la constitution mécanique du sol, on se sert du mot : texture grumeleuse. La formation des grumeaux ne se fait guère que dans les sols compacts et riches en humus. Dans les sols sablonneux ou à gros grains les agrégats qui se forment parfois se détruisent très vite‘. La formation de grumeaux, telle qu’on l’observe dans les terres bien travaillées, modifie profondément les rapports du sol avec l'air, l’eau et la chaleur, comme il résulte de l'essai suivant fait avec des sols à l’état pulvérulent et à l’état grumeleux. Il y a d’abord une notable différence entre ces deux groupes de sols au point de vue du taux d’air occlus. Exprimé en pour-cent du vo- lume, il est dans un sol de lehm* : AVEC SA FACULTÉ D'IMBIBITION SÉCHÉ A LALR, — minima. moyenne, maxima. Texture pulvérulente . . . 52:99 127 CE 0.61 Texture grumeleuse , . . 55.76 25.88 212 147292 Le sol à l’état pulvérulent contient donc moins d'air que le méme sol à l’élal grumeleux et la différence croît avec le taux d’eau. Cela tient surtout à ce que par l'addition d’eau dans le sol pulvérulent les pores se remplissent d’eau, tandis que dans le sol grumeleux les vides entre les agrégats sont plus grands et restent remplis d’air. Après des pluies abondantes un sol désagrégé en ses plus fines molécules peut se saturer d’eau à un point tel que sa capacité pour l'air tombe à Zéro. 1. E. W. Hiccaro, Forschungen, etc., vol. I, 1879, p. 441. 2. E. Wozzxy, Forschungen, elc., vol. VIII, 1885, p. 369. 462 ._ DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. La texture influe extrêmement sur la perméabilité du sol; avec « une texture grumeleuse il est beaucoup plus perméable à l'air qw'à l'état pulvérulent. Les chiffres suivants le montrent’. 80L SÉOHÉ A L'AIR. QUANTITÉ D’AIR FOURNIE PAR HEURE EN LITRES. => RS Pression de l'air en millimètres d'eau . . 20. 40. 60. 80. 100. Épaisseur de la tranche de sol : 25 centimètres. Lehm en poudre (0mm,0-0mm,25) , . . 2,04 3,38 4,72 6,06 1,40 Lehm en grumeaux (0m,5-4mm,00) . . 139,2 270,1 385,6 473,3 549,8 Épaisseur de la tranche de sol : 50 centimètres. Lehm en poudre (0mm,0-0mm,25). . . . 2,00 3,33 ( Lehm en grumeaux (0"m,5-4mm 00) . . 69,6 139,2 208,8 263, Les différences de perméabilité exprimées par ces chiffres exis- tent aussi quand le sol est humide et par la raison déjà donnée. À l’état pulvérulent, le sol peut être amené à une imperméabilité complète quand il est saturé, comme il arrive par les grandes pluies. Pour l’eau comme pour l'air, une modification importante est ap- portée au sol par sa mise en grumeaux. Quant à la circulation de l’eau dans le sol de bas en haut (ascension capillaire) comme de haut en bas, le lehm a présenté, dans quelques- uns de mes essais, les différences suivantes, selon qu’il était employé en poudre ou en grumeaux. | L'eau monta par capillarité jusqu’à une hauteur de : APRÈS 0 1 5 10 20 29 jour. jours. jours. jours. jours. J centim. centim. centim. cenutim. centim. Lehm en poudre (0%%,0-0mm,25) . . . . 925,1 62,2 72,9 88,3 1000 Lehm en grumeaux (0"M,5-9 millim.) . . 22,0 42,2 51,3 61,4 67,5 {. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. XVI, 1893, p. 212. ” COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 463 L'eau s’enfonça jusqu’à la profondeur de : APRÈS A 22 47 59 heures. heures. heures. heures. centim. centim. centim. centim. Lehm en poudre (0mm,0-0mm,25) , , , . 23,4 HO = 8752) ICE Lehm en grumeaux (0"®,5-9 millim.) , . 24,1 100,8 » » On voit par là que l’eau monte plus vite et plus haut dans le sol pulvérulent que dans le sol en grumeaux et que dans ce dernier l’eau s'enfonce plus vite. Ces différences tiennent à ce que dans les sols grumeleux les interstices sont trop larges pour que la force capillaire puisse s'exercer. L’eau monte donc uniquement par les pores que contiennent les grumeaux eux-mêmes. Tandis que, dans le sol pul- vérulent où tous les vides sont capillaires, l'ascension se fait par le plus court chemin, ce processus est lent dans le sol en grumeaux, l’eau ne circulant que d’un grumeau à l’autre, donc avec des interruptions continuelles et après force détours. Cet obstacle à l’ascension de l’eau, obstacle d'autant plus grand que les vides non capillaires sont eux- mêmes plus grands, fait que l’eau ne peut monter ni si vite ni si haut que dans les sols pulvérulents. Les vides non capillaires retardent le mouvement ascensionnel de l’eau. Parmi les autres propriétés qui ont trait à l'humidité du sol, il faut aussi considérer la faculté d’imbibition qui s’exprime par la quantité d’eau retenue dans l’unité de volume du sol. Les expériences que j'ai faites à ce sujet * m'ont donné les résultats suivants : FACULTÉ d’imbibition absolue. vol. p. 100. Lehm en poudre (0mm,0-0mm,25), , . . .. 42.91 Lehm en grumeaux (0"",5-9mm.0). . . .. 31.93 La faculté d’imbibition du sol est sensiblement plus faible dans le sol grumeleux que dans le sol pulvérulent, parce que dans le pre- mier les vides non capillaires restent remplis d’air après l’humecta- tion ; dans le second presque tous les pores exercent l’action capillaire 1. E. Wozcny, Forschungen, elc., vol. VIII, 1885, p. 198. 464 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. et se remplissent d’eau. Quant à l’influence de la texture sur l’évapo- « ration, on peut dire que le so! pulvérulent évapore plus d’eau que le sol en grumeaux. Les chiffres suivants empruntés aux expériences de C. Eser! le montrent. EAU ÉVAPORÉE (en grammes) par 1 000 centim. carrés de surface. LEHM. ES . Texture 2 pulvérulente. grumeleuse. Du 17 août au 1°" septembre 1883. . 4 033 3 124 Cette différence s’explique facilement par des différences dans la circulation capillaire et dans la faculté d’imbibition. Comme le sol pulvérulent est plus humide et l'ascension de l’eau plus rapide, la perte par évaporation superficielle y est plus vite réparée que dans le sol grumeleux mions humide et dans lequel les espaces non capil- laires entravent la montée de l’eau. Cette dernière circonstance fait aussi que, dans les sécheresses, la surface du sol en grumeaux est bien plus facilement desséchée que celle du sol en poudre et qu'il y à moins d’eau perdue dans le premier par évaporation, l'influence .des facteurs qui la régissent étant fortement diminuée par la couche desséchée de la surface ?. J'ai cherché* par diverses expériences à déterminer quelle est sur l’humidité du sol l’influence globale, c’est-à-dire telle qu’elle s'exerce dans les conditions naturelles, des facteurs que nous venons de dé- crire. Pendant la saison d'été, le taux d’eau moyen du sol fut pour le TEXTURE LEHM. © pulvérulente, grumeleuse. vol. p. 100. vol. p. 100. CÉSAR 38.80. 23.39 LÉ, pr A 0e lon Nr Vent hi 32.66 20.53 Taux PÉAUES 2 100 61.20 1. G. Eser, Forschungen, elc., vol. VII, 1884, p. 66. 2. G. Esen, Forschungen, elc., vol. VII, 1884, p. 43. 3. E. Wozcy, Forschungen, elc., vol, XVI, 1893, p. 395. jt 2 A | VO ONSNIT AS" COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 465 L'humidité du sol a donc diminué de plus d’un tiers par la mise en grumeaux. Les quantités d’eau perdues par le drainage et par l’évaporation sont inscrites ci-dessous : TAUX RELATIF SAISON PLUIE Texture. Texture d'été en ———— + éte. millimètres. pulvérulente. grumeleuse. pulvérulente. grumeleuse. Eau de drainage en millimètres. 1882. 505, 2 134,9 238,7 100 177,03 1883 . 638,1 185,6 264,3 100 142,38 MOYENNE 5 100 159,70 Eau évaporée en millimètres. 1882 . 505,2 313,9 251.0 100 19,88 1583 . 638,1 417,6 346,5 100 82,90 MOYENNE 0.0: 1090 81,39 D’après ces chiffres la mise du sol en grumeaux a eu pour résultat d'augmenter de moitié le volume de l’eau de drainage et de diminuer l’évaporation d'environ un cinquième. Dans la marche de l’humectation il est à remarquer que les varia- tions du taux d’eau sont plus grandes dans le sol pulvérulent que dans le sol grumeleux. Cela tient à ce que le premier sol, en raison de la lente infiltration de l’eau, s’imbibe plus lors des grandes pluies et évapore plus par la sécheresse à cause de sa meilleure capillarité que le second plus perméable, mais où l’ascension capillaire est ralentie. Par la mise en grumeaux du sol on obvie donc aussi bien à un excès nuisible d'eau dans les périodes humides qu'à un man- que d’eau dans les périodes sèches. Enfin les conditions thermiques des sols de texture diverse ont encore leur importance dans la dé- composition des matières organiques. J’ai montré‘ que le sol gru- meleux s’échauffe plus et se refroidit plus que le sol pulvérulent et présente par suite de plus grandes variations de température. En 1. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. V, 1882, p. 191. MATIÈRES ORGANIQUES. 30 466 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. moyenne, le sol grumeleux est plus chaud, comme il résulte des chiffres ci-après : TEMPÉRATURE DU S0L à 10 centimètres de profondeur. Texture ) pulvérulente. grumeleuse. Du 30 août au 6 septembre 1879 . . .. 18,91 19,72 EE DiFFÉRENCE . © . . \ 1. 0,81 Variations de température . . . . . . . 2:22 10,19 Durs au Suit A88 1 ARE ENTER 21,45 22,45 EE DiFRÉRENCEN LC) A PNEU 1,0 Variations de température. . . . . . . . 8,80 5,13 Dans le sol grumeleux la capacité calorifique est plus faible, la conductibilité calorifique plus grande et la perte de chaleur due à l’évaporation est moindre qu'avec l’état pulvérulent. Toutes ces différences vis-à-vis de l'air, de la chaleur et de l’eau amènent à la conviction que c’est dans le sol grumeleux seul que se fera la décomposition normale répondant au but que l’on vise. Quand le sol est à l’état pulvérulent, l’accès de l'air est limité et même arrêté par les temps humides où il y a saturation et dès lors la décomposi- tion se fait suivant le mode anaëérobie, par putréfaction. Dans le sol en grumeaux au contraire, l’air ayant libre accès et l’humectation du sol restant sensiblement égale dans les variations cli- matériques, il se manifeste une oxydation énergique qui décompose les matières organiques suivant le mode aérobie, par érémacausis. Comme celle-ci tend à rendre assimilables les principes nutritifs con- tenus dans les détritus, il en résulte que, dans lous les sols peu per- méables et enclins à se saturer, 1 faut se préoccuper avant tout de rétablir la texture grumeleuse et d'éviter que le sol ne prenne l’élat pulvérulent. Il n’est pas toujours facile d'amener le sol à la texture normale ; indiquons brièvement les règles dont la stricte observation conduit au but en employant la charrue seule. Proclamons d’abord qu’il est non seulement ulile, mais absolument COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 467 indispensable de labourer aussitôt après l'enlèvement des récolles. Cette opération est nécessaire, car la perméabilité que possède le sol après la récolte se perd plus ou moins vite par les précipitations atmosphériques, dès qu’a disparu le couvert protecteur des végétaux (p. 404). Le sol se tasse de plus en plus, il devient d’autant plus diffi- cile à labourer et à mettre en grumeaux que le labour est plus tardif. Une seconde règle à suivre est de faire le premier labour seule- ment quand le sol a un certain degré d'humidité, si lon n’a pas lin- tention de le laisser en sillon brut pendant lhiver. Il résulte avec évidence des recherches de H. Pucuner” que le sol, même le plus compact, peut être transformé en une masse grumeleuse quand il a un taux moyen d'humidité (environ 40 p. 100 de sa faculté d’imbibi- tion). On doit ou labourer les terres quand elles sont en bon état, comme on dit, ou ne pas les toucher si l’on ne veut détériorer leur état physique pour plusieurs années ; car, si elles sont trop humides ou trop sèches, elles ne se mettent pas en grumeaux ; dans le premier cas, la terre colle, comme du mastic, au soc de la charrue, la surface du sillon est graisseuse; dans le second, on ne retourne que des mottes dures qui, sous l’action de brise-mottes et de rouleaux, se brisent en une masse de petits fragments durs, mais jamais en une couche arable de texture normale. C’est pourquoi toute précipitation comme tout retard dans les labours entraîne les plus grands préju- dices, et l’observation d’un laps de temps détrminé pour ces travaux est de la plus haute importance. D’après ce que l’on vient de dire, il est facile d'établir le degré d'humidité le plus convenable pour lequel le sol se laisse travailler le plus aisément ; chaque cultivateur devrait le connaître exactement pour tous ses champs. Si on ne veut se livrer à cette recherche, il faut s’aider d’autres moyens moins sûrs. Ainsi quand le sol, essayé à la bêche, se met en grumeaux, qu'il ne colle pas à l’instrument, que la terre retournée n’a pas la surface polie et brillante, qu’elle montre de nombreuse fentes et saïllies ou qu’une motte malaxée dans la main ne s’agglutine plus, mais se brise en fragments, cela prouve en général que le sol est assez desséché pour que la charrue puisse commencer avantageusement son œuvre. 1. H. Pocuxer, Forschungen, elc., vol. XII, 18S9, p. 239. 468 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. On doit aussi apporter la plus grande attention à ce que les sillons, lors-du premier labour, soient aussi étroits que possible (10-12 cen- timètres). C’est seulement dans ces conditions que l’on arrive, autant qu'on le peut avec la charrue, à faire foisonner convenablement le sol. En outre, au lieu de la charrue qui est peu propre à ameublir la terre, on se servira utilement pour l’ameublissement et le mélange de la houe à cheval ou de lextirpateur. Laisser le sol après un labour brut exposé à la gelée pendant l'hi- ver est aussi un moyen de lui donner son degré normal de porosité, parce que les particules sont énergiquement séparées quand l’eau qui les imprègne se distend par la gelée. Au printemps, les sols de lehm et d’argile se montrent dans un excellent état de culture, tel qu'il pourrait être à peine obtenu par l'emploi le plus soigné de la charrue ou de l’extirpateur. L'action de la gelée nous fournit le moyen le plus simple de mettre en grumeaux les sols qui exigent beaucoup d’efforts et tout praticien devrait labourer dès l’automne les champs destinés aux cultures d'été. Dans ce cas, on peut labourer même quand la terre est détrem- pée, parce que l’excès d’eau disparaîtra bientôt par suite des change- ments mécaniques du sol sous l'influence du gel et du dégel. Pour les manipulations des terres au printemps, il faut observer quelques précautions si l’on veut qu’elles gardent leur bonne texture. On doit notamment laisser le sol, une fois dégelé et émietté par la gelée, atteindre aussi dans ce cas son taux d'humidité convenable avant d’y mettre la charrue et on doit le travailler ensuite aussi peu que pos- sible, parce qu'il pourrait facilement se résoudre en une masse pul- vérulente à cause de la trop grande friabilité des grumeaux. Le plus souvent une seule culture suffit au printemps et il est préférable d'employer l’extirpateur. Dans les sols compacts les règles énoncées ont pour but de favo- riser la pénétration de Pair dans le sol et de le préparer à emmaga- siner de fortes provisions d’eau ; mais, pour les raisons déjà mention- nées, elles ne s'appliquent pas aux sols légers, peu aptes à la mise en orumeaux. Îl sera au contraire indiqué d'employer des moyens propres à diminuer laccès de l'air dans ces sols et à retenir leur faible provision d’eau. En outre des opérations dont il est parlé plus COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 469 loin, ce résultat peut être obtenu en évitant les labours répétés si usités dans la pratique et l’abandon du sol en sillons bruts qui favo- risent le desséchement et exagèrent la porosité à un degré excessif. Des labours fréquents sont parfaitement inutiles dans de tels sols, parce qu’ils possèdent dès le début le degré de porosité nécessaire pour la décomposition normale des matières organiques ; une seule culture à la charrue est suffisante. Assez souvent même on pourra l’éviter et obtenir avec l’extirpateur la texture désirable. Outre le retournement et l’ameublissement dus à la charrue et à l’extirpateur il y aurait à examiner aussi influence que le hersage, le houage et le raclage du sol exercent sur les agents de la décomposi- üon des matières organiques. Les recherches que j'ai faites à ce sujet! ont montré que l’ameublissement superficiel diminue l’évaporation de La couche arable et augmente par suite son taux d'humidité. Les opérations susnommées favorisent l’évaporation des parties exposées à la lumière et amènent la formation d’une croûte sèche qui s'oppose à l’évaporation, parce que les gros vides non capillaires qui la parsè- ment ralentissent beaucoup l'ascension capillaire de l’eau à la surface. C’est dans les sols garnis de végétation que l’influence de l’opéra- tion se fait le mieux sentir par l’ameublissement de la couche super- ficielle, comme 1l arrive, par exemple, quand on déchaume les prés, les trèfles et les luzernes, ou quand on passe la houe entre les lignes des récoltes pour enlever les mauvaises herbes. Dans ce cas, en effet, on détruit en même temps la couverture vivante qui dessèche tant le sol, et de ses débris il se forme une couverture morte qui atténue sensiblement l'évaporation. Le hersage s'emploie avantageusement dans le but d’aplanir et . d’émietter le sol; 1l faut l'entreprendre surtout lorsqu'on a à craindre, dans les terres labourées, une dessiccation nuisible (sols légers) ou un dureissement (sols compacts) quand la sécheresse se met sur pied. Dans le premier cas, la surface évaporante est diminuée ; dans le second, on détruit mécaniquement les mottes, c’est-à-dire qu’on pro- voque la mise en grumeaux ; on ne l’obtiendra du reste que si le sol qu'on herse est Aa humide. 1. E. WozLny, Forschungen, etc., vol. II, 1880, p. 539. 470 LÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le roulage influe sur la décomposition des matières organiques en diminuant la capacilé du sol pour l'air et sa perméabilité propor- lionnellement à la pression exercée". Son action sur la chaleur du sol se manifeste, d’après mes observations*, en ce que le sol roulé est en moyenne plus chaud que le sol non roulé pendant la saison chaude ; le volume de l'air, mauvais conducteur, occlus entre les éléments, est diminué et la conductibilité du sol est ainsi augmentée. En ce qui concerne l’humidité?, le sol roulé évapore plus que le sol non roulé. Cela tient à ce que les grumeaux du sol se rapprochent par la pression, si bien qu'une partie des vides non capillaires qui s’opposaient à l'ascension de l’eau deviennent capillaires et leau peut monter plus facilement“. Du fait que le roulage augmente l’évaporation du sol on a souvent conclu que dans toutes les circonstances cette opération diminue le taux d’eau du sol. Ce n’est pourtant le cas que s’il ne pleul pas après le roulage. S'il est au contraire suivi de précipitations abondantes, le sol roulé devient plus humide que le sol non roulé. Dans le sol ameubli la pluie pénètre facilement et elle est vite entraînée dans les profondeurs par les vides non capillaires, tandis qu’elle s'écoule len- tement dans le sol roulé et reste plus longtemps dans la couche arable. Donc la faculté d’imbibition du sol est augmentée”® par le roulage et sa perméabilité pour l’eau est diminuée. La plus forte teneur en eau du sol roulé persiste si la sécheresse survient après la pluie, parce que la supériorité d’évaporation du sol roulé ne suffit généralement pas pour égaliser les taux d’eau”. En se fondant sur les règles précédentes et sur les exigences aux- quelles doit satisfaire, en vue des matières organiques, le traitement des sols arables de composition physique variée, il devient clair que le roulage se justifie sur tous les sols légers de faible faculté d’imbi- 1. E. Worzny, Forschungen, elc., vol. VIII, 1885, p. 369 ; vol. XVI, 1893, p. 215. PE 0 Cr) PA EE EE 3. C. Esen, Forschungen, elc., vol. VIT, 1884, p. 68. 4, E. Wozcxy, Forschungen, elc., vol. VIT, 1884, p. 291. o. 1d., vol. VII. 1885, p. 199. 6. 1d.; vol. V, 1852,°p° 81: ep C/O PR EE NN ie 1 COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 471 bition et de grande perméabilité pour l'air et pour l’eau et qu’au contraire cette opération est nuisible pour la décomposition des ma- lières organiques sur tous les sols compacts, à moins qu’ils ne se trouvent dans un état d’ameublissement excessif, parce qu’elle dimi- nue leur capacité pour l'air et provoque l'accumulation de grandes quantités d’eau. Sur les sols fumés avec le fumier de ferme ou les engrais verts et possédant en même temps une texture très poreuse, le roulage régularise la décomposition des matières et obvie à la volatilisation et à la lixiviation des principes nutritifs. Cela se comprend si l’on consi- dère que l’on diminue ainsi l’air occlus dans le sol et qu’il y a contact plus intime entre ce sol et les substances qui lui sont incorporées. La décomposition se fait alors non seulement plus régulièrement, mais plus lentement que dans le sol plus poreux. Le fait que le sol roulé est plus chaud que le sol non roulé ne modifie rien, parce que l'influence du volume d’air occlus l'emporte sur celle d’une tempé- rature plus élevée. Par suite du contact plus intime entre le sol et les substances en décomposition, les principes nutritifs solubles et volatils qui en proviennent sont mieux absorbés par le sol dans les terres roulées et la dissolution des nitrates est plus empêchée que dans les terres plus meubles où l’on court le danger d’une volatilise- tion partielle de l’ammoniaque formée dans l’érémacausis et de l’en- trainement des nitrates dans la profondeur, vu la perméabilité excessive du sol pour l’air et l’eau. Le défonçcage donne un moyen de favoriser puissamment la décom- position des matières organiques, non seulement dans les couches profondes du sol, mais même dans la zone superticielle. Par cette opération les couches profondes où l'absence d’air amène le processus par putréfaction et la formation de principes nuisibles à la végétation deviennent perméables ; il s’y fait dès lors de fortes oxydations, grâce auxquelles les matières organiques subissent l’érémacausis, et tous les produits nuisibles de réduction sont détruits. La répartition plus égale de l'humidité du sol provoquée par le défonçage exerce en outre la plus heureuse influence sur ces réac- üons. Les précipitations atmosphériques peuvent humecter bien mieux le sol avec labour profond qu'avec labour superficiel ; car, dans ce 472 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. dernier cas, elles s'accumulent volontiers à la surface de la zone que la charrue n’a pas touchée, surtout dans les terres compactes, et provoquent ainsi un excès d'humidité. Ajoutons que le sol labouré profondément se maintient plus humide pendant la sécheresse, parce que les zones les plus humides sont situées plus bas, que la perte par évaporation superficielle est plus difficilement remplacée, et que la surface se dessèche plus vite que dans le sol avec labour superfi- ciel*. Ainsi, le sol défoncé se maintient plus humide dans les périodes de forte évaporation, ne se sature pas autant par les grandes pluies et possède un taux d'humidité plus régulier que le sol superficielle- ment labouré. Ces influences, jointes à l'augmentation de perméabi- lité qui amène une meilleure décomposition des matières organiques et une augmentation corrélative dans les principes nutritifs assimi- lables, parlent en faveur du défoncement, surtout dans les terres imperméables. Parmi les autres procédés employés dans le travail mécanique du sol, le butlage mérite spécialement l'attention. Le sol, dans les buttes, est plus perméable ; dans la saison chaude, 1l s’'échauffe plus et est moins humide que le sol travaillé à plat? ; aussi la décomposition y est-elle plus intense pour toutes les terres compactes, gardant des ‘excès d’eau. Il en résulte que sur de tels sols cette opération est incontestablement avantageuse pour les réactions dont il s’agit, et son emploi mérite d’être généralisé. I] n’y à pas à craindre ici de dessic- cation nuisible du sol, parce qu’à cause de sa grande faculté d’imbi- bition il conserve généralement assez d'humidité provenant des pluies qui ont précédé la sécheresse, et la capillarité fait monter aisément des couches profondes une quantité d’eau suffisante. Dans toutes les terres qui se dessèchent facilement, au contraire, le buttage est nui- sible, parce que le sol déjà sec, déjà très perméable, perd encore plus d'humidité, devient encore plus perméable, si bien que, par les temps secs, la décomposition marche trop lentement et par les temps humides trop rapidement. Dans cet exposé des rapports des différents procédés pratiquement 1. E. Woziny, Forschungen, elc., vol. XVI. 1893, p. S. 2010, VOUS RUANANUTE COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC, 473 employés pour la manipulation des terres avec l’activité des microbes du sol, il reste enfin à résumer l’influence exercée à ce point de vue par les diverses méthodes de culture. Dans la culture en ados, comme on l’a déjà vu (p. 210), la distribution de la chaleur est très irrégulière ; la pente nord est plus froide que la pente sud, les pentes est et ouest ayant un degré intermédiaire. Mèmes différences pour l'humidité dont les taux les plus faibles sont à l'exposition sud et les plus forts à l'exposition nord, les orientations est et ouest (dont la première est la plus sèche) se placent entre ces deux extrêmes. La conséquence de cette distribution différente des deux facteurs essen- tiels de la décomposition des matières organiques est que les réactions marchent d’un pas inégal suivant les diverses expositions, et influen- cent dans cette même mesure la fertilité du sol. Quand les pluies sont suffisantes, c’est du côté sud que la décomposition est la plus rapide, du côté nord qu’elle est la plus lente. Si le temps se main- tient sec, ces rapports changent en partie ; à l’exposition sud, malgré la température élevée, les réactions sont entravées faute d'humidité et c’est à l’exposilion nord, où la chaleur est la moins accusée cepen- dant, que la décomposition se fait le mieux à cause du taux plus fort d'humidité. De pareilles différences se remarquent pour les versants est et ouest, ceux-ci se prêtant plus que ceux-là à une active trans- formation des détritus organiques. Dans le sol labouré à plat, la cha- leur et l’eau sont également réparties ; la décomposition y marche partout du même pas, et les principes nutritifs qui passent à l’état assimilable sont partout en égale quantité. Pour ces raisons déjà, la culture à plat l'emporte sur la culture en ados. (Voir Note J). 2. — Jachère. On se rend aisément compte de l'influence de la jachère sur les réactions chimiques du sol si l’on considère que le sol nu est, pendant la saison de végétation, sensiblement plus humide et plus chaud que le sol planté (p. 229) et que l’intensité de la décomposition varie avec la température et l'humidité. Une augmentation dans l’humi- dité, dans l’échauffement et aussi dans l'accès de l'air (si l’on ameu- blit en même temps le sol) doit donc favoriser la décomposition des 474 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. matières organiques qui sont contenues dans le sol nu ou qui lui sont artificiellement incorporées (matières humiques, résidus des récoltes, famier de ferme, engrais verts, ete.). C’est en réalité ce qui arrive, comme on peut le déduire de ce fait que l’air occlus dans un sol en jachère possède un taux d'acide carbonique bien plus élevé que celui d’un même sol planté (p. 247). Cette différence considérable est la meilleure preuve de l'exactitude de l'hypothèse qué nous venons de faire, car l'acide carbonique est un des produits finaux de l’érémacausis et son taux, toutes conditions égales d’ail- leurs, peut servir de mesure à l’intensité de la décomposition. S'il n’est pas douteux que celle-ci soit grandement favorisée par la jachère grâce à l’augmentation d'humidité et d’échauffement qu'elle amène dans le sol, il s'ensuit que le sol s’enrichit dans la même mesure, soil directement, soit indirectement, en principes nutriufs assimilables, directement parce que la décomposition des matières organiques fournit de l'ammoniaque et des composés mi- néraux solubles, indirectement parce que l’excès d'acide carbonique formé dissout les matières minérales insolubles et en fait passer une partie à l’état assimilable (p. 389). Les conditions nécessaires à une puissante oxydation de l’ammo- niaque formée dans l’érémacausis se trouvant réunies (humidité, température élevée), il se fait pendant la jachère une énergique nitrification, comme R. WaRINGTON l’a démontré (p. 248). En somme, la jachère rend disponible une plus grande quantité de principes minéraux nultrilifs, de nitrates et d'eau et, comme ils ne sont pas absorbés par une végélation, ils s'accumulent el aug- mentent la fertilité du sol. Ce n’est cependant pas toujours le cas ; le sol peut, dans certaines circonstances, subir du fait de la jachère des pertes d'aliments plus ou moins fortes. Pour comprendre ceci, rappelons-nous que le sol en jachère fournit des quantités d’eau de drainage beaucoup plus grandes que le sol garni de végétation. En calculant mal le temps de la jachère, on inflige facilement au sol une perte en matières nutritives et surtout en nitrates, sels qui ne sont pas retenus; cette perte sera d’autant plus sérieuse que le sol restera plus longtemps en jachère, que son pouvoir absorbant pour les principes nutritifs sera plus faible, que COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 475 sa perméabilité sera plus grande et que les pluies seront plus abon- dantes. Donc, pour raisonner scientifiquement l'emploi de la ja- chère, il faudra prendre en considération, en chaque lieu, les qualités physiques et chimiques du sol, le climat, la durée de la jachère, etc. En tout cas, pendant une longue jachère (jachère pleine), durant toute une année, le sol perd une plus ou moins grande partie des matières nutritives solubles, surtout des nitrates, formées dans cette période, parce que le sol, même s’il était préalablement desséché, est complètement humecté au bout d’un certain temps et que les pluies qui surviennent alors amènent un écoulement d’eau de drai- nage d'autant plus abondant que l'apport atmosphérique et la per- méabilité du sol sont plus grands. Dans les courtes jachères, telles qu’il s’en présente pour toute culture entre l’époque de la récolte et celle du labour en vue de la récolte suivante, l’action sur la fertilité dépend et de l’état du sol après la récolte et de la durée de la jachère. Quand la jachère succède à une récolte qui a profondément des- séché le sol, en général on n’a pas à craindre la dissolution des nitrates si la culture pour la récolte suivante est faite à l'automne, parce que les précipitations atmosphériques servent exclusivement à humidifier à nouveau le sol et il ne s'écoule pas d’eau de drainage. Dans ces conditions, la jachère exerce au contraire une très heureuse influence sur la fertilité en constituant une réserve d’eau et d’ali- ments; elle semble commandée dans bien des cas, comme, par exemple, quand on sème du blé d’hiver après du trèfle. Le blé végé- terait mal, si l’on voulait ne culbuter le trèfle qu’à l’automne pour semer aussitôt, parce que le sol desséché par le trèfle qui transpire à haute dose ne contiendrait que peu d’eau et que la décomposi- tion des racines de trèfle serait peu avancée. Il sera au contraire avantageux de rompre le trèfle après la première coupe (jachère de la Saint-Jean) et de laisser le sol en jachère jusqu’au labour pour la semaille du blé; le sol aura ainsi le temps de s’imbiber à fond et d’accumuler des matières nutritives à l’état soluble qui se forment par la destruction déjà avancée des résidus de la récolte de trèfle. L'expérience montre suffisamment que cette pratique a la plus heu- 476 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. reuse influence sur la végétation du blé. Si, par contre, le sol au début de la jachère possède déjà une assez forte humidité ou s’il doit rester tout l’hiver jusqu’au printemps sans végétation, on ne peut éviter une perte plus ou moins grande, surtout si le temps est très humide et le sol très perméable. Ces sols perméables (sols sablon- neux) possèdent d'ordinaire un faible pouvoir absorbant pour les principes nutritifs, si bien que la dissolution peut s'étendre non seu- lement aux nitrates, mais encore aux éléments minéraux. Dans les sols compacts et riches en humus, la jachère n’entraîne pas, si la terre est humide, de pertes aussi grandes que dans les sols légers, parce qu'ils ont un pouvoir absorbant beaucoup plus fort et une moindre perméabilité. Cependant on ne doit pas perdre de vue les dommages causés à la provision des principes nutritifs, et en pre- mier lieu des nitrates, même sur ces sols, surtout s'ils passent tout l'hiver sans végétation. LAWES et GILBERT ont montré que, même sur les sols compacts, les pertes d’azote peuvent encore être impor- tantes. À cet égard il y a plusieurs circonstances à envisager. Les nitrates qui se sont formés pendant l’été sont pour la plus grande par- tie retenus dans le sol jusqu’à l'hiver, attendu que la nitrification se fait presque exclusivement dans les couches superficielles et que l’émigration des nitrates dans le sous-sol exige un certain temps. C’est ce qui arrive aussi quand il survient un hiver sec. La récolte suivante trouve alors dans le sol une provision de nitrates équiva- lente à une forte fumure azotée. Mais si un hiver humide succède à l’été ou à l’automne pendant lequel le sol est resté en jachère, une crande partie des nitrates est perdue avec l’eau de drainage et la récolte profite peu de la jachère. Pour empêcher ou diminuer les pertes, surtout en nitrates, il semble indiqué d'occuper la jachère avec des végétaux qui, à l’au- tomne, seront enfouis à l’état vert. L'utilité de cette pratique résulte, d’une part, de ce que les nitrates existants dans le sol sont trans- formés en composés organiques, qui, pendant l'hiver, passent de nouveau à l’état assimilable, et, de l’autre, de ce que, pendant la végétation des cultures dérobées, la nitrification est atténuée par la diminution de l’humectation et de l’échauffement. Dans la jachère pleine, comme dans le cas où les récoltes sont n COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 477 faites à maturité, on doit recommander la culture des papilionacées (vesces, lupins, serradelle), qui enrichissent le sol à la fois en ma- lières organiques et en matières azotées. Pour des jachères courtes, on choisit des plantes végétant aussi vite que possible comme, par exemple, la moutarde blanche ou la spergule. C’est la moutarde blanche (Sinapis alba) qui remplit le mieux le but, à cause de sa rapidité de végétation. Cette pratique recommandée sera d’applica- tion étroite si la jachère dure plus d’une année ou s’étend depuis l'été jusqu’au delà de lhiver suivant, ou si le sol est saturé d’humi- dité au début de la jachère, s’il possède une grande perméabilité, et si l’on est sous un climat humide. Quand le sol a été fortement asséché par la récolte précédente et que la jachère ne dure que jusqu’à l’automne, la culture dérobée semble non seulement super- flue, mais nuisible, parce qu’alors le but principal de la jachère, qui est l'accumulation de l’humidité dans le sol, ne serait pas atteint. (Voir Note 1.) 3. — Drainage. Dans les endroits mouilleux, les matières organiques sont, par suite de l'absence d’air, soumises à la putréfaction qui a pour con- séquence l'accumulation d’humus acides et la formation de produits de désoxydation. L’expulsion par le drainage de l’eau en excès et l'arrivée d’air qui en est la suite auront d’abordpour effet de mettre un terme au mode de décomposition jusqu'alors en vigueur et de supprimer par l'oxydation divers composés nuisibles (sulfate de fer) ainsi que les phénomènes de démitrification qui sont liés à un déga- gement d'azote libre. Il ne faut pourtant pas s’attendre à une active érémacausis de ces matières organiques formées en l’absence- d’air, parce qu’elles sont, comme on la vu (p. 166), très résistantes à l'action de l'oxygène. C’est seulement quand le sol, préalablement labouré, présente une grande surface à l'air, et que les humus acides sont détruits par le chaulage, que les matières organiques formées dans le sol (résidus des récoltes) ou incorporées artificiellement de- viennent aptes à se décomposer. Le drainage, à côté de l’aération qu’il procure, exerce une action favorable sur les conditions thermiques du sol, dont la température 478 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. moyenne s’accroit à mesure que le taux d’eau baisse (p. 225), ce qui favorise d’autant la décomposition. Quant à l’humidité, qui joue un si grand rôle dans tous les pro- cessus organiques, elle est aussi modifiée favorablement par le drai- nage, mais seulement si cette opération est légitimée par les propriétés du sol. Dans beaucoup de terrains et à certains états, le drainage enlève tant d’eau que, pendant les périodes sèches, le desséchement du sol nuit à la décomposition des matières organiques et à la végé- tation des récoltes. On le comprend si l’on réfléchit que les procédés de drainage (fossés, tuyaux souterrains) enlèvent aux sols toute Peau que ceux-ci ne peuvent retenir fixement, et que, par suite, ceux qui n’ont qu’une faible faculté d’imbibition (sols légers) ou qui évaporent beaucoup (tourbières, sols avec végétation permanente), ne gardent plus une réserve d’eau suffisante pour maintenir leur humidité pen- dant les longues sécheresses. Pour obvier à ces insuffisances qui se manifestent par une activité moindre dans la décomposition des matières organiques et, par suite, dans la croissance des plantes, il faut se préoccuper de fournir de l’humidité au sol pendant la période de forte évaporation (été). Le procédé le plus simple dans le drainage à fossés ouverts con- siste à installer des vannes d'arrêt dans les fossés ; on les ferme après l’écoulement des eaux du printemps, ou suivant les besoins; le pro- cédé le plus parfait dans le drainage souterrain consiste dans l’emploi de certains appareils de fermeture, qui permettent de régler parfai- tement l'humidité du sol. 4. — Irrigation. L'apport d’eau est important pour la décomposition dans le cas où le sol, par suite de certaines conditions climatériques, manque de l'humidité qu’exigent ces réactions. Geci peut arriver soit par défaut de pluie, soit par excès d’évaporation dû à une haute température, à des vents desséchants, à un air trop sec. Suivant les circonstances, la limite de la quantité de pluie au-dessous de laquelle l'irrigation est utile à la végétation des plantes cultivées varie. Pour les régions où l’évaporation est forte, où la faculté d’imbibition du sol est faible, COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 479 on peut admettre que l'irrigation du sol est nécessaire quand la hau- teur de pluie n’atteint pas 600 millimètres. Dans le cas contraire, une lame d’eau de 400 millimètres peut être indiquée comme une limite au-dessous de laquelle le sol ne contient plus assez d’eau pour une érémacausis intense et pour une végétation vigoureuse. Quant à la manière de pratiquer cet arrosage, il faut surtout prendre garde de lessiver le sol et de le transformer en marécage. L’immersion empêche vite tout accès de l’air, ce qui donne lieu à la décomposition par putréfaction et convient moins en général que les procédés, tels que l’irrigation par rigoles qui laisse le sol acces- sible à l’air. En tout cas cette irrigation doit être conduite de façon qu’elle n’amène pas une forte quantité d’eau de drainage et que les pertes d'éléments nutrilfs forcément liées à ces expulsions d’eau se réduisent au minimum. L’oxygène contenu dans l’eau des rigoles oxyde le sol des prairies, puisque l’eau de drainage contient non seulement moins d'oxygène, mais aussi plus d’acide carbonique et d’acide sulfurique que l’eau des rigoles. C’est ce qui faisait dire à J, KôniG ‘, qui a récemment mis ce fait en évidence, que l’influence de l'irrigation pour les prai- ries était la même que celle du labour pour les champs. Cette inter- prétation est cependant exagérée, parce que les quantités d'oxygène contenues dans l’eau qui imbibe le sol sont infinitésimales comparées à celles qui circulent dans une couche arable ameublie, L’observa- tion montre en effet que le sol des prairies irriguées s'enrichit en humus, moins, il est vrai, que celui des prairies non irriguées, mais beaucoup plus que celui des champs cultivés, et la composition de cet humus n’est pas telle qu’on puisse l’envisager comme le produit d’une énergique oxydation. 5. — Mélange avec d'autres sols. Les propriétés du sol les plus importantes pour la décomposition des matières organiques peuvent, dans certains cas, être profondé- ment modifiées par le mélange de ce sol avec d’autres qui se com- 1. J. Kôxic et GC. Krauck, Landwirthschaftliche Juhrbücher, vol. XI, 1882, p. 203. 480 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ; portent mieux ou autrement vis-à-vis de l’eau, de l'air et de la chaleur. Les sables et les terres sablonneuses sont éminemment propres à l'amélioration des sols, argileux ou de ceux qui leur ressemblent. En les incorporant à l'argile on la rend plus poreuse, plus perméable ; son excessive faculté d’imbibition est en même temps diminuée ; elle devient plus chaude et plus facile à travailler. L'amélioration dans Pameublissement se montre surtout lors des labours tardifs et s’ac- cuse par la facilité plus grande avec laquelle l'argile se laisse mettre en grumeaux. L’humidité des sols compacts est nettement influencée par le mélange de sable, ainsi qu'il ressort des chiffres suivants * : Taux d'eau moyen en pour-cent du volume. FRS RES 3/4 vol.lehm. 1/2 vol. lehm. 1/4 vol. lehm. PR. a JEHM. ! À saison d'été. 1/4 vol. sable. 1/2 vol. sable. 3/4 vol. sable. 18820 34,35 2 1884 . 34,23 2 Le taux d’eau du lehm diminue à mesure que le taux de sable augmente. L'influence que le mélange avec le sable exerce sur les conditions thermiques du lehm se manifeste dans le tableau ci-après : Température du sol à 15 centimètres de profondeur en juillet 1883. 6-10 | 11-15 | 16-20 | 21-25 | 26-31 | MOYENNE FL RE - : / ; VE 21,24 | 14,94 | 15,82 | 15,37 1 3/4 vol. lehm + 1/4 vol. sable. 22,57 121,38 /| 1 15,93 | 15,43 1/2 vol. lehm <- 1/2 vol. sable.| 22, ; 3 | 21,44 16, 11101066 1/4 vol. lehm + 3/4 vol. sable. | 23,54 | 23,32 | 21,60 | 1: | 15,87 Sable... 4 à 2 2 0 Ne Foro lo8275l 9162/1529 | 16 26) 16 0e Ces chiffres établissent que, pendant la saison chaude, la tempé- | rature du lehm s’accroit à mesure qu’augmente son taux de sable. 1. E. WozLny, Forschungen, elc., vol. XVIII, 1895, p. 33. VAS UN CUP: Re. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 481 Le lehm et l’argile subissent, par leur mélange avec le sable, comme on le voit, des modifications relatives à l’air, à l’eau et à la chaleur qui favorisent la décomposition des matières orga- niques. En fait, dans un sol ainsi amélioré, toutes les substances d’origine végétale et animale se décomposent bien plus vite. Sur les sols sablonneux, légers, on emploie avec succès, pour améliorer leurs propriétés physiques, des terres argileuses à élé- ments fins (marnes) qui ont une plus forte faculté d’imbibition, un plus grand pouvoir absorbant pour les principes nutritifs et une plus faible aptitude à l’échauffement. Elles sont donc particulièrement aptes à augmenter la fertilité des sols sablonneux. Dans les sols riches en humus et dans les sols humiques, le sable joue un rôle améliorant en diminuant leur faculté d’imbibition excessive et en augmentant leur aptitude à l’échauffement (p. 394 et 396). L'activité décomposante des sols humiques ainsi améliorés se trouve dès lors augmentée. 6. — Fumure. La fumure par engrais d’origine organique influe sur la fertilité des sols en ce qu’une plus ou moins grande partie des principes nu- tritifs y est à un état non assimilable et passe peu à peu sous une forme assimilable par les progrès de la décomposition. Ainsi se trouve diminué le danger de voir se perdre par dissolution les éléments précieux. L'utilisation des aliments qui y sont contenus dépend essentiel- lement du degré d’altération des matières et de leur mode d’em- ploi. Pour le premier point il est à remarquer que sur les sols où la décomposition est lente et où l'eau d'infiltration est en même temps rare (sols compacts), les engrais organiques doivent, pour produire leur plein effet, être incorporés au sol à un degré de décomposition déjà avancé, c’est-à-dire à un état où ils contiennent une forte pro- portion de matières nutritives toutes formées. Au contraire, pour les sols où la décomposition est facile, où l’eau d'infiltration est MATIÈRES ORGANIQUES. 31 Au à retro 482 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. vor abondante, il sera avantageux d'employer les engrais en question à un état peu décomposé, afin d’obvier le plus pratiquement à une ue solution de principes nutritifs. De même, quant à la quantité du fumier, à l’époque et à la pro- fondeur de son enfouissement, 1l faut considérer l’état physique du sol pour donner aux plantes une nourriture suffisante tout en em- pêchant qu'elle se perde inutilement. En donnant aux terres sablon- neuses, légères, de fortes doses de fumier de ferme, il se forme en peu de temps, grâce à une décomposition rapide, tant de matières nutritives, qu’elles peuvent se perdre par dissolution en plus ou moins grande proportion, vu le faible pouvoir absorbant de ces sols et Pabondance de leur eau de drainage. D’après ces considérations, il semble indiqué : 1° de fumer les sols sablonneux non fortement et une seule fois, mais souvent et faible- ment; 2 d'apporter et d’enterrer le fumier peu de temps avant les semailles ; 3° de l’enfouir plus profondément que dans les autres sols. Ces règles doivent être d’autant plus strictement suivies que la dé- composition du fumier est plus avancée. Sur les sols compacts qu laissent passer peu d’eau de drainage, où l’humification des matières organiques est lente, où, en général, le pouvoir absorbant est con- sidérable, on observera les règles opposées. Il faudra incorporer le fumier à plus forte dose, plus rarement et plus longtemps avant les semailles que sur les sols légers, prendre garde en outre de ne pas l’enfouir à plus de 8 à 12 centimètres ; c’est seulement dans ce cas que la décomposition progresse nor- malement. À plus grande profondeur, le manque d’air amènerait facilement la putréfaction et la formation sans profit d’un magma tourbeux qu’on retrouverait encore dans le sol après de longues années. En laissant le fumier longtemps étendu sur le sol avant de l’enfouir, on peut exercer sur la décomposition des matières organiques que contient ce sol une action analogue à celle de la jachère. Par la di- minution de l’évaporation, le sol est, sous la couverture de fumier, plus humide que sous le sol nu ; mais la chaleur y est moindre. L’ac- tion de cette couverture sur l’humification dépend surtout des con- ditions climatériques. En 1878, le sol garni d’une couverture de COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 483 paille m'a donné, en moyenne, moins d'acide carbonique que le sol nu, tandis qu’en 1884 j'ai obtenu un résultat contraire. Le taux d'acide carbonique dans l'air du sol a été en moyenne (pour 1000 vol.) : SOL avec couverture SOL NU. de paille. L'EST SR MC ORAN AR 6.750 8.530 RS DER PNE Es Va A FRE >.067 4.681 Ces différences doivent être attribuées aux circonstances climaté- riques. En 1878, les pluies furent plus régulières et plus abondantes qu'en 1884; par suite, les oscillations du taux d'humidité furent moindres dans la première année que dans la seconde, où il y eut souvent des périodes sèches et de hautes températures. En 1878, la température plus élevée du sol nu, comparée à celle du sol couvert, activa la décomposition des matières organiques qui fut ralentie, au contraire, en 1884, par la trop grande sécheresse du sol, si bien que le sol couvert, étant plus humide, prit le dessus. Concluons que l’érémacausis est plus intense dans les années humides sur les sols nus que sur les sols couverts et que c’est le contraire dans les années sèches. Les différences ne sont pourtant pas très grandes ; en somme, l’in- fluence d’une couverture morte sur les processus de décomposition peut être comparée à celle de la jachère, et l’on doit employer ce procédé pour les mêmes motifs que la jachère. Il rendra les meil- leurs services quand le sol a été fortement desséché soit par une sé- cheresse persistante, soit par des plantes en massif serré exigeant beaucoup d’eau. Le maintien de l'humidité normale dans le sol sous la couverture de fumier et l’obstacle à la formation d’une croûte influencent directement et indirectement la végétation de la récolte suivante. Grâce au libre accès de l'air, à l'humidité presque constante du sol en contact, l’érémacausis est active dans la couche de fumier et les aliments qui s’y forment, dissous par les pluies, se disséminent parfaitement. On à objecté que l’ammoniaque contenue dans le 1. E. Wourxy, Forschungen, elc., vol. IL, 1880, p. 7, et vol. IX, 1866, p. 851. 484 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. fumier ou se formant par la décomposition se perdait dans l’atmos- phère ; les recherches de H. HELLRIEGEL ‘ ont montré que les quan- tités ainsi volatilisées étaient négligeables. Le sol restant humide sous le fumier absorbe intégralement le gaz qui s’en dégage. C’est seulement quand on épand en plein été du fumier très consommé qu'on ne peut éviter une perte, et aussi quand le sol est compact et en pente, parce qu’alors, par les grandes pluies, les eaux de ruissel- lement entraînent les matières nutritives. On remédie à cet inconvé- nient en ameublissant le sol avant de le couvrir de fumier et en faci- litant ainsi la pénétration de l’eau. Quand le sol, au moment de l’épandage du fumier, est déjà très humide, cette pratique peut amener des pertes assez importantes, sur- tout en nitrates. On a vu plus haut (p.439) que la couverture augmen- tait le volume de l’eau de drainage et, par suite, le danger d’entraine- ment des principes nutritifs avec l’eau d'infiltration quand le sol est fortement imbibé. Cette perte sera d’autant plus grande que la faculté d'imbibition du sol et son pouvoir absorbant seront plus faibles et aussi les pluies plus abondantes. Aussi cette pratique ne devrait sur- tout pas être employée sur les terrains sablonneux ou de constitution analogue, ou bien seulement au cas où ils souffrent de sécheresse. Sur des sols compacts dont la perméabilité est faible et le pouvoir absorbant élevé la perte en question est moindre ; mais il y a des inconvénients d’une autre sorte qui doivent faire renoncer à l’épan- dage d’une couche de fumier si le sol est bien humecté. De l'eau en excès s’accumule alors dans la couche arable, puisque l’évaporation est très diminuée ; elle entrave l’érémacausis des matières organi- ques et rend bien plus difficile la formation du sol en grumeaux par les travaux ultérieurs. Quand la couche de fumier passe l'hiver sur ces sols compacts, il en résulte encore un autre inconvénient : l'influence de la gelée sur l’ameublissement du sol est très atténuée, parce qu'il est protégé par. celle couverture de fumier contre les variations brusques de tempé- rature *. {. H, Hecruecer, Chemischer Ackersmann, 1855, p. 39, et 1856, p. 87. 2, E. Wozuny, Forschungen, elc., vol. VI, 1883, p. 198. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 485 La question de savoir si l’on doit répandre et laisser le fumier à la surface doit être résolue, pour chaque localité, d’après des considé- rations analogues à celles qui viennent d’être exposées. (Voir Note Æ.) Ce que nous avons dit plus haut (p. 193-200) fait prévoir dans quelle mesure l’érémacausis et la nitrification seront influencées par l’adjonction des sels contenus dans les engrais chimiques. Dès que la solution du sol est portée par eux à une assez haute concentra- tion, érémacausis et nitrification subissent une diminution notable. Si la dose d’engrais contenant des sels facilement solubles est exces- sive, ou si le sol possède un taux d'humidité médiocre et que les pluies ultérieures soient rares, il y a dommage causé. Dans ces conditions, la décomposition des matières organiques et l'absorption de l’eau par les plantes sont entravées et la fertilité du sol est désavantageusement influencée de ces deux côtés. C’est pour cela que, par exemple, le purin, riche en carbonates d’ammoniaque et de potasse, employé sur des prairies dont le sol est sec, nuit à leur végétation et peut même les faire périr. On a observé des effets analogues quand les sels des fumures étaient ré- pandus à trop haute dose sur des sols trop peu humides et quand il faisait ensuite un temps sec. Érémacausis et nitrification sont, suivant la dilution de la solution du sol, influencées par les fumures dans diverses directions. Sous la condition d’une dilution suffisante, l’addition de carbonates et phosphates alcalins et alcalino-terreux favorise ces deux processus ; les chlorures agissent en sens contraire. Les sulfates entravent loxy- dation du carbone et activent au contraire la nitrification. La chaux caustique et le carbonate de chaux retardent, il est vrai, la décomposition des matières organiques inaltérées, mais accélèrent celle des matières en train de s’altérer (p. 190) et aussi la nitrifica- tion (p. 193). Sur les sols où, par suite de l'excès d’eau (marais, tourbières) ou bien de la grande finesse des particules (sols argileux), les matières organiques subissent la putréfaction, où 1l se forme, en conséquence, de grandes quantités d’acide humique libre, les chau- lages ou les marnages influent énergiquement sur la fertilité en mettant cet acide en combinaison. Comme l’humus acide est nui- sible, on comprend que la chaux caustique soit déjà utile en le sup- 486 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. primant. Ajoutons que les composés qui se forment se décomposent plus vite que l'acide libre (p. 191) et fournissent denc de plus fortes doses de principes nutritifs. Cette action s'étend aussi au sulfate de fer qui se rencontre sou- vent dans ces circonstances et qui est nuisible à la végétation. Par l’adjonction de chaux (hydrate ou carbonate) il se forme du gypse et du protoxyde de fer hydraté des plus oxydables qui, en présence de l'air, se transforme bientôt en peroxyde indifférent à la végétation. Il est à remarquer qu’en outre la nitrification est en même temps favorisée ; car elle est nulle tant qu'il existe du sulfate de fer dans le sol (p. 196). Venors enfin à l’action que les engrais exercent sur l’état physique du sol et les processus de décomposition qui en dépendent. L'humus qui s’accumule en plus ou moins forte quantité dans le sol, à la suite des engrais organiques qu’on y met (p. 393), favorise grandement la mise en grumeaux dans les sols compacts et augmente la faculté d’im- bibition dans les sols sablonneux légers ; dans les deux cas il améliore les qualités défavorables à l’'érémacausis. De même les sels contenus dans ces engrais, même à petites doses, ont nécessairement aussi une action importante, puisqu'elle influe sur la texture des sols (p. 461). Les travaux de Ad. Mayer, E. W. Hizcarp et W. J. A. Buiss’ nous donnent de précieuses indications sur la part que prennent certains sels à la texture des sols argileux à grain fin. Si l’on délaie de l’argile dans l’eau, en faisant bouillir pendant plusieurs jours du kaolin fin avec de l’eau et en remuant souvent, puis qu’on laisse re- poser, les éléments se déposent suivant leur densité. Si l’eau contient de petites quantités d’alcalis, de phosphates et carbonates alcalins, cetle précip:tation est accélérée ou même elle se fait en masse. Dans le dépôt, les particules sont étroitement juxtaposées (texture pulvé- rulente). Il en va tout autrement si l’on mélange à l’eau de faibles 1. An. Mayer, Forschungen, etc., vol. Il, 1879, p. 251. — E. W. Hircano, ébid., vol. I[, 1879, p. 441. — W. J. À. Buss, Physical Review, vol. Il, n° 2, 1895, p. 241. — Voir aussi An. Mayen, Journal für Landwirtschaft, vol. XXVII, 1879, p.339. — Tu. ScuLæsin6, Journal de l'Agriculture, 1874, n°5 287-290.— G. REINDERS, Lan lwirthschaflliche Versuchsstalionen, vol. XIX, 1876, p. 190. — W. Donna, Chemical News, t. 37, n° 949, et t. 30, n° 767. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 487 doses d'acides minéraux, chlorhydrique, nitrique, sulfurique ou de leurs sels. Alors l'argile se précipite en flocons, les éléments se réunis- sent en agrégats (texture grumeleuse). Le dépôt est par suite plus meuble et occupe un plus grand volume que si l’on a employé de l'eau pure ou des solutions étendues d’alcalis ou de carbonates alca- lins. Les sédiments dont les éléments ont la finesse de ceux de Pargile se comportent comme elle. Il résulte de là que les engrais qui renferment des carbonates alcalins rendent plus difficile et quelquefois impossible la formation du sol en grumeaux. E. W. Hizcarp' cite à ce sujet un curieux exemple. En Californie il y a des sols que tout le monde appelle sos alcalins : « Ils contiennent tant de sels facilement solubles, que ceux-ci vien- nent s’effleurir à la surface. Ceux qui renferment des carbonates alcalins se reconnaissent aisément à leur compacité, à la difficulté, la presque impossibilité de leur donner une couche arable propre. Souvent une excellente terre alterne avec ces parties alcalines de telle sorte qu’on ne peut cultiver l’une sans l’autre. Le champ est parsemé de taches. Si on le laboure en croix, puis qu’on le herse jusqu’à ce que l'instrument n’ait plus d’effet, les parties alcalines se transforment en un tas de mottes arrondies depuis la grosseur d’un pois jusqu’à celle d’une bille de billard ; mais il n’y a pas de couche arable. Avec le mème travail les parties plus hautes, sans alcalis, ressemblent à un amas de cendres. » La solution d’un brun noir extraite de ces sols alcalins a donné 0,251 p. 100 de résidu solide, dont 0,138 était soluble dans l'eau. La partie soluble consistait en CARBONATE CHLORURE SULFATE PHOSPHATE de de de de soude. sodium. soude. soude. 52,74 38,08 13,26 1,55 La dose du carbonate de soude s'élevait pour la masse du sol à 0,08 p. 100. Cette faible quantité a suffi pour donner à la terre la texture compacte dont on vient de parler. 1. Loc. cit. — Noir aussi Forschungen, elc., vol. XVI, 1893, p. 131. Fevr 488 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. « Dans ces cas, l'addition d’une dose de gypse, suffisante pour opérer une double décomposition a un effet frappant, qui s’observe en petit, mais qui, naturellement au bout d’un certain temps et après un travail répété, améliore en grand l’état physique. L'influence caus- tique du carbonate sur les graines et les plantes est tellement an- nihilée par l'addition de gypse, que le blé et le maïs poussent sans difficulté là où ne végétaient que l'herbe alcaline (Brizopyrum) et les chénopodées. » L'action du gypse est facile à comprendre ; il réagit sur le carbonate de soude pour former du sulfate de soude qui n’a plus les propriétés caustiques du carbonate. Quant aux autres sels, on devrait pouvoir conclure des expériences précédentes que leur adjonction doit aider à la mise en grumeaux du sol. Cela n’arrive pourtant que s'ils se trouvent dans la solution du sol. Dès qu’ils sont dissous par les eaux météoriques qui s’infil- trent, ce qui se fait d'autant plus vite que la plupart de ces sels ne sont pas absorbés par le sol, la terre se tasse à ce point qu’elle de- vient presque imperméable pour l’air et pour l’eau et qu’elle peut amener directement ou indirectement une très notable diminution de ferulité. Cette action nuisible ne se manifeste pas tout d’abord ; au contraire, leur emploi donne souvent des récoltes élevées jusqu’à ce qu'il se produise un recul subit quand la plus grande partie des sels sont dissous et ne peuvent plus influer sur la texture grumeleuse du sol. D’après ce qui précède il n’est pas douteux que des fumures abon- dantes avec des matières contenant de fortes doses de chlorures et de nitrates, voire de phosphates et de sulfates, comme aussi les inon- dations d’eau salée ont une action nuisible directe ou indirecte sur la fertilité de tous les sols à éléments très fins, notamment des sols argileux, parce qu’ils prennent pour longtemps un état physique (texture pulvérulente) défavorable à l’érémacausis et à la végétation. Ce fait se manifeste nettement, par exemple, dans la détérioration mécanique des sols argileux par des fumures répétées de nitrates seuls. « Un sol ainsi forcé donne d’abord, on le sait, de superbes récoltes, puis il survient subitement un recul qui, au jugement des praticiens exercés, n’est pas enrayé simplement par une fumure complète comme dans les sols sablonneux. Le sol est ruiné physiquement pour long- COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 489 temps ; aussi les Anglais, si perspicaces en matière agricole, ont frappé d'interdiction les fumures nitratées. » Les chlorures agissent de même. De tous les engrais employés dans la pratique, la chaux caustique exerce la plus heureuse influence sur l’état mécanique du sol. Il s’y forme alors des agrégats meubles (grumeaux) qui résistent longtemps, souvent plusieurs années, à toutes les causes extérieures de destruc- tion. L'expérience montre que le chaulage rend les sols argileux plus faciles à travailler ‘. HiLGaRD a trouvé que, « si l’on fait passer du gaz acide carbonique pendant 24 heures à travers un magma d'argile mélangée de chaux caustique, où dès lors toute réaction alcaline a disparu, la plasticité n’y est pas rétablie même après la dessiccation et la disparition de la solution de chaux carbonatée. » Pour amener, par ce moyen, un effet heureux sur l’état mécanique du sol, il faut de plus grandes quantités de chaux caustique que dans le cas où la chaux doit être ajoutée comme matière nutritive ou pour provoquer dans le sol des combinaisons chimiques. Si l’on veut améliorer physiquement les sols argileux, il faut employer de 5 000 à 10000 kilogr. de chaux caustique par hectare et plus, suivant la compacité. Ces chaulages doivent être répétés tous les 6 ou 8 ans. Le carbonate de chaux produit le même effet que la chaux caus- tique, mais à un bien plus faible degré. En mélange avec d’autres terres (marne) et surtout avec du sable il agit favorablement par ses grosses particules sur l’état physique des sols argileux. 7. — Culture des sols humiques a) Prairies. Les prairies permanentes subissent avec le temps des modifications qui consistent essentiellement en un accroissement continu de ma- üières organiques sous forme d’humus acide, si bien que les couches superficielles du sol prennent un caractère tourbeux (tourbe de 1. Fr. Scauzze, Poggendorf's Annalen, vol. 129, p. 366. — Fr. HABERLANDT, Forschungen, elc., vol. 1, 1878, p. 148. 490 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES. ORGANIQUES. prairie). À ces accumulations d’humus correspond une augmentation du taux d’eau à cause de la faculté extraordinaire d’imbibition de ces humus. La conséquence de ces modifications du sol des prairies est une diminution constante, non seulement dans la quantité de la récolte, mais encore dans sa qualité ; les bonnes plantes disparaissent pour faire place aux herbes acides. On peut le mieux se rendre compte des causes qui amènent cette modification désavantageuse du sol des prairies en comparant dans les champs et les prés la destinée des détritus organiques qui restent enfouis. Dans les champs, le sol est rendu perméable par les fré- quents labours ; les matières organiques sont soumises à l’éréma- causis et peuvent se volatiliser. Ce mode de décomposition est encore favorisé par ce fait que le champ reçoit une température plus élevée, à cause de l’état moins serré des plantes, et aussi pendant le temps de jachère qui s'écoule entre la récolte de la première culture et l’ensemencement de la suivante. Il en va tout autrement des prairies. Comme le sol n’y est jamais ameubli, l’accès de lair y est plus ou moins entravé, non seulement parce que le sol y est plus compact, mais aussi parce qu'un lacis serré de racines obstrue tous les interstices. Ajoutons que le sol, constamment couvert de plantes vivantes, se maintient à une température relativement inférieure. Ces deux circonstances, accès limité de l'air et faible échauffement, font que les racines qui meurent chaque année se décomposent non par érémacausis, mais par putréfaction, mode caractérisé par lac- cumulation d’humus acide (tourbe). À mesure que ces matières humiques augmentent, la fertilité du sol diminue ; car, pour la rai-: son déjà donnée, l'humidité augmente dans la même proportion, si bien que le terrain arrive finalement à l’état marécageux et devient impropre à porter des récoltes satisfaisantes. Divers procédés ont été proposés pour obvier à ces inconvénients. Ils reposent essentiellement, soit sur le drainage et l'apport de subs- tances propres à enlever lexcès d’eau et à combiner les acides humiques, en détruisant les produits nuisibles de désoxydation, soit sur l’ameublissement plus ou moins profond du sol par le labour de la prairie, avec ou sans destruction du gazon. ANA NID .. DU Lt SAR ES LP: ra “ as s ' Eh ñ s : on, COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 491 En tout cas il est d’abord nécessaire de régulariser l'humidité du sol, ce qu’on obtient par le drainage en se conformant au besoin d’eau des graminées, qui est plus élevé que celui des plantes agri- coles. Ces différences dans le besoin d’eau ne tiennent pas à la nature spécifique des plantes, mais à leur état plus serré et à leur durée de végétation. Les plantes agricoles, beaucoup plus espacées et à durée de végétation plus courte, absorbent par suite beaucoup moins d’eau que les graminées. Si l’on veut des chiffres, on peut admettre, en se fondant sur les expériences précédentes, que les céréales exigent 40 à 60 p. 100 et les graminées 60 à 80 p.100 des quantités d’eau que le sol peut contenir quand il est saturé. Eu égard à ces grandes exigences en eau des herbes des prairies, le drainage pré- sente quelques difficultés, parce que, en employant les procédés habi- tuels (fossés à ciel ouvert et tuyaux de drainage), on enlève facilement au sol des quantités d’eau telles que le taux d'humidité descend au- dessous des limites qui donnent le maximum de récolte. Aussi, pour traiter convenablement le sol des prairies, doit-on se préoccuper de lui fournir une humidité suffisante à l’époque de la plus active crois- sance, c’est-à-dire de la plus haute exigence des plantes en eau. Dans le procédé à ciel ouvert, on y arrive de la façon la plus simple en munissant les fossés de vannes d’arrêt qui peuvent, suivant le besoin, et surtout pendant la saison chaude, empêcher l’écoulement ; dans le drainage souterrain, on emploie des systèmes de fermeture qui permettent de régler parfaitement l’humidité nécessaire aux plantes, quelquefois avec le secours de l’eau souterraine. Les résultats obtenus par le drainage ou le chaulage sont en général insuffisants pour détruire cet état défavorable du sol, par la simple raison que ces opérations n’en suppriment qu'incomplète- ment les causes. Les fossés à ciel ouvert ou les tuyaux souterrains suppriment à la vérité l’excès d’eau ; les chaulages font passer l'acide humique à l’état combiné et les composés ferrugineux solu- bles du sol (sulfate de fer) deviennent inoffensifs ; mais ces modifica- tions sont insuffisantes pour augmenter la fertilité, parce que, après comme avant, bien qu’à un moindre degré qu'avant, Paccès de l'air dans le sol est toujours entravé d’une façon dommageable. Tant que cet élat persiste, les fumures avec principes nutrilifs appropriés ne 492 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sortent pas leur plein effet et ne rapportent généralement pas leur rente. Pour améliorer le sol à fond, il est à recommander de retourner la prairie. On peut le faire soit en détachant la couverture de gazon, en la mettant de côté, en labourant le sol, en lui donnant les engrais nécessaires, puis en y faisant passer le rouleau après avoir remis le gazon en place, soit en détruisant tout:le gazon, en cultivant le sol pendant une ou plusieurs années comme terre de labour et réense- mençant en herbe. Le premier procédé ne trouve son emploi que quand le gazon est essentiellement constitué de bonnes graminées avec peu de mauvaises herbes et que le sol n’a pas encore revêtu l’état tourbeux à une grande profondeur. Dans le cas contraire, il sera plus logique de détruire: le gazon et de ne rendre le sol à sa première destination qu'après une culture transitoire de plantes agricoles, d'autant plus qu'il n'est pas possible, en utilisant l’ancien gazon, d’exposer, comme ce serait désirable, longtemps le sol à l'air atmosphérique. En outre, les frais occasionnés par l'emploi de ce procédé sont très élevés et ne peuvent que rarement être payés par un supplément de récolte. Là où la couverture de gazon doit être réappliquée, on procédera pour le mieux de la manière suivante. L’enlèvement du tapis de gazon se fait à l’aide d’une charrue ordinaire ou d’une charrue à gazon jusqu’à 10 centimètres de profondeur. Dans un terrain inégal les sil'ons de la charrue sont divisés à la houe en morceaux de 30 à 40 centimètres de longueur ; dans les terrains plats, on a avantage à se servir, pour ménager le travail manuel, d’un rouleau découpeur qu’on fait marcher perpendiculairement aux sillons ou qui tranche le tapis de gazon devant la charrue perpendiculairement à sa direc- uon. L’instrument consiste essentiellement en un rouleau de bois autour duquel sont adaptés des couteaux circulaires de 10 centi- mètres de hauteur et espacés de 30 à 40 centimètres. Le rouleau doit être très lourd et pas trop long pour que les plaques de gazon soient tranchées aussi régulièrement que possible. Ces plaques de gazon sont mises de côté ; on fume alors le sol, on y fat passer la charrue, l’extirpateur et la herse, et on remet le COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 493 gazon en place. Pour hâter sa reprise, on le comprime avec un fort rouleau. Dans le but de simplifier ce procédé, LaACkE a construit derniè- rement une charrue qui ameublit la couche sous-jacente au gazon de la manière suivante : « Le gazon est découpé au moyen de deux couteaux en une bande aussi épaisse que l’on veut et qui passe sur une planche cintrée au-dessous de laquelle se trouve une herse à pointes tranchantes. Pendant que le gazon glisse sur la planche cintrée, la herse ameublit le sol compact sur lequel il reposait, puis le gazon $e replace dans sa position primitive sur le sol travaillé. » Bien que l’on fasse ainsi un bon travail, il est cependant beaucoup moins efficace que celui qui est exécuté, comme nous venons de le dire, avec une charrue ordinaire ; aussi les résultats obtenus res- tent-ils loin en arrière de ceux que donne un ameublissement: plus profond. Quand le sol est fortement tourbeux, ce procédé ne suffit plus à amener une amélioration importante dans la fertilité, parce que le temps pendant lequel le sol reste exposé à l’air est trop court. Dans ce cas, on obtiendra un bien meilleur résultat en détruisant complè- tement le gazon et en utilisant le sol comme terre de labour pen- dant une ou plusieurs années avant de le remettre en pré. On peut détruire le gazon, soit en le brûlant, soit en l’enfouissant par la charrue. Si l'on adopte le premier procédé, on labourera le sol au prin- temps ou à l’automne jusqu'à 10 ou 15 centimètres de profondeur, suivant l’épaisseur de la couche de tourbe. Par temps sec, ce qui a élé labouré à l’automne peut être brûlé en mai, et ce qui a été labouré au printemps peut être brülé en automne (août ou septem- bre). On met le gazon sec à feu en allumant les mottes du côté opposé au vent et en y jetant constamment avec force la terre brûlante. Après environ seize à vingt-quatre heures, la couche de gazon est complètement incinérée. Si le temps est défavorable à la dessiccation des mottes, on les découpe en morceaux, comme on vient de le dire, en en plaçant deux l’un contre l’autre en forme de toit pour exposer à l’air la plus grande surface possible et amener une prompte dessiccation. 494 ._ DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Si le temps est humide, il faut rassembler les morceaux de gazon en petits tas, et les brûler dès qu’ils sont secs. Pour empêcher que le feu ne pénètre trop profondément dans la couche de tourbe, on recommande de remplir d’eau les fossés d'assainissement et d’hu- mecter le sol avec cette eau. | Tandis que, par l'emploi du premier procédé, les matières orga- niques sont complètement détruites et qu’il ne reste que les matières incombustibles sous forme de cendres, ces éléments organiques et les gaz qui se forment, notamment l’ammoniaque, restent en partie dans la combustion en tas. À ce point de vue, ce derniér procédé doit présenter de plus grands avantages, d'autant plus que le but à atteindre, qui est la destruction des herbes, est en même temps rempli. Avec les mottes de gazon desséché on dresse des tas en forme de ruches d’abeilles, hauts de un mètre et ayant un mètre de diamètre. Les vides intérieurs sont reliés à l’air extérieur par un petit trou pratiqué au ras du sol du côté du vent. Avant de finir le tas, on y met du combustible (menu bois, bruyère, paille, etc.) et on laisse enfin dans le revêtement du tas une fois terminé un petit trou d’aérage. Les gazons ne: doivent pas être trop serrés l’un contre l’autre; on dispose, à côté, des mottes de gazon humide pour les jeter sur le las quand 1] est allumé, et régler ainsi la combustion. Les tas sont allumés au moyen de la paille qui se trouve dans le trou. Dès que le feu est bien pris, on couvre le trou du haut avec du gazon de manière à ne laisser qu'une petite ouverture et à forcer la. flamme à pénétrer par les vides à travers les gazons. Si la flamme devient trop forte sur un point, on le recouvre aussitôt avec une des mottes préparées à cet effet. Il faut surtout prendre garde que les las ne brülent trop vite; ils doivent s’éteindre lentement, peu à peu. Finalement on les réduit en fragments, s'ils ne s’émiettent pas d’eux- mêmes, et l’on couvre la place du foyer avec les mottes qui gisent encore sur le sol pour les brûler. Les cendres obtenues par l’une ou l’autre de ces méthodes, ainsi que les détritus à demi brûlés, sont répartis également sur la surface et enfouis par un labour à plat. Pour incorporer au sol les cendres dès qu’elles sont obtenues, on place les tas en ligne et on n’en COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 495 allume qu'autant qu'il faut pour qu’on puisse enfouir les résidus dans la soirée du même jour. Quelques jours après, on herse ; on laboure ensuite à pleine charrue et on installe des récoltes sarclées (betteraves ou pommes de terre). La culture de ces végétaux se recommande, parce que, grâce aux fréquents labours qu’exige leur végétation, le sol reste exposé à l'air sous la plus grande surface possible. Si le sol est très tourbeux, on continuera la cuiture agricole l’année suivante, et, s’il le faut, la troisième avec des vesces, de l’avoine, des pois, etc. Puis, après une fumure, on procède au réen- semencement avec des fourrages appropriés. . Quand l’état du sol est moins défavorable, c’est-à-dire que le caractère tourbeux est moins accusé, une modification aussi profonde que celle qui résulte de la combustion d’une partie du sol n’est pas nécessaire et 1l suffira dès lors de l'utiliser pendant quelques années comme terre de labour. On effectue, dans ce cas, la destruction du tapis de gazon en raclant superficiellement sur trois ou quatre cen- timètres d’épaisseur, en émiettant la couche ainsi raclée par plusieurs coups de herse, et, une fois le gazon desséché, on laboure profon- dément le sol avec une charrue munie d’un coutre. Le sol ainsi traité doit être cultivé de la même façon que le sol écobué dont il vient d’être question ; il faudra, pour les motifs déjà donnés, garnir ce sol de plantes sarclées. Les règles que nous recommandons iei sont exactement celles que l’on applique dans la culture des prairies par alternance. Étant donnés les avantages de ce système, il doit paraître étonnant qu’il soit si rarement pratiqué. Le mode de culture actuellement en usage, mode par lequel le sol fournit constamment du foin, est irrationnel en ce sens que, par suite du manque d’air et de l’abaissement de la température, il se fait une accumulation de matières organiques qui nuit grandement, soit directement, soit indirectement, à la fertilité de ces cultures si importantes dans l’économie agricole. Puisque les moyens ordinairement employés (assainissement, chaulage, fumure) se sont montrés insuffisants, l'expérience l’a prouvé, pour détruire cette mauvaise composition du sol des prairies, il serait bien temps de rompre avec ce système et de le remplacer par un autre plus logique. De tous les procédés proposés, celui qui offre incontesta- 496 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. blement les plus grands avantages consiste à alterner la culture de la prairie avec une courte culture agricole, à des périodes plus ou moins longues suivant l’état du sol. Sont évidemment exceptées les prairies exposées à des inondations régulières. Mais, toutes les autres, qui forment la majeure partie, devraient être soumises à . ce traitement, le seul qui permette d’obtenir le maximum de pro- duction. b) Tourbières. Dans le défrichement des tourbières, comme dans toutes les entre- prises de cette espèce, on ne peut évidemment voir réussir les moyens employés que s'ils modifient ces propriétés du sol qui s’op- posent à la bonne végétation des plantes cultivées. Comme les tour- bières présentent à cet égard de grandes différences, les opéra- tions à faire ne doivent pas être effectuées d’après un plan général, mais spécialement pour chaque cas. En outre, on ne pourra s’em- pêcher de prendre en considération les circonstances économiques qui sont aussi d’un grand poids dans le choix des méthodes de cul- ture. 11 faut chercher les causes de la faible fertilité des sols tourbeux aussi bien dans les propriétés physiques que dans certaines proprié- tés chimiques (p. 300 et 329). Parmi les propriélés physiques défavorables, on doit d’abord signa- ler les rapports de ces sols avec l’eau; ils l’emportent sur tous les au- tres parleur faculté d’imbibition (p. 340). Il s'ensuit qu’il s’accumule dans les tourbières de grandes quantités d’eau ; mais ce grand pou- voir d’imbibition n’est pas, comme on l’a souvent admis, la cause prin- cipale de leur état mouilleux, puisqu'elles éprouvent un desséchement nuisible à la végétation dès qu’elles sont soumises à un assainissement intense atteignant une grande profondeur. L'état mouilleux est bien plutôt provoqué, soit par limperméabilité du sol sous-jacent, soit par l’afflux latéral (p. 289) ; il est nuisible dans la culture des tour- bières, comme dans celle de toût autre sol, par l’obstacle qu’il ap- sorte à la pénétration de l'air : il arrête l’érémacausis et donne lieu à F I ; la formalion de substances nuisibles à la végétation. D COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 497 En outre, les grands changements de volume du sol tourbeux, lors des alternatives de sécheresse et d'humidité, de gel et de dégel, exercent en hiver un effet nuisible sur les plantes, en soulevant peu à peu leurs racines et en provoquant ce que l’on appelle le déchaus- sement. Les plantes perdent petit à petit leur assiette solide dans le sel et gisent à la surface ou bien elles sont menacées dans leur exis- tence par la gelée. C’est pour cela que les cultures d’hiver sont gé- néralement exclues des sols tourbeux non transformés. Sous le rapport de la chaleur, les tourbières ont une composition défavorable à la végétation. Ce sont surtout les ge'ées nocturnes du printemps qui, plus fréquentes et plus tardives que sur les sols miné- raux, causent souvent de grands dommages (p. 372). Les plantes sensibles aux basses températures sont pour cela facilement compro- mises sur les tourbières. Quand la température s'élève, la tourbe s’échauffe peu en comparaison des autres sols, tant à cause de sa faible conductibil té que de la dépense de calorique due à sa forte évapo- ration (p. 369). Cette faible conductibilité est aussi la cause du lent dégel des tourbières au printemps et de la conservation de leur cha- leur quand la température s’abaisse ; c’est le seul côté favorable à la végétation que présentent les conditions thermiques de la tourbe. Parmi les propriélés chimiques de ces sols, il y a surtout à consi- dérer le taux en principes nutritifs et l’aptitude à la décomposition. Comme on la déà montré (p. 316), les tourbes se distinguent par leur pauvreté en potasse, mais sont dotées d'éléments nutritifs en proportions variables suivant leur mode de formation. Les tourbières supra-aquatiques ont en général une composition plus régulière que les tourbières infra-aquatiques, mais elles sont sensiblement plus pauvres en éléments les plus précieux pour l’alimentation, tels que l’azote, la chaux et l’acide phosphorique. Ajoutons que l’éréma- causis par laquelle les matières nutritives passent à l’état assimilable est bien plus lente dans les tourbières supra-aquatiques que dans les autres. La tourbe contient parfois des principes qui sont inoffensifs par eux-mêmes, mais qui, après absorption d’eau, forment des combi- naisons nuisibles à la végétation. Tel est le sulfure de fer (Fe S?) qui, lorsqu'il vient en contact avec l’air, peut devenir si néfaste. Il se MATIÈRES ORGANIQUES. 32 498 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. transforme en su'fate de fer et en acide sulfurique, deux substances qui, dans la proportion où elles existent parfois, détruisent toute vé- gétation. De ce que nous venons de dire il résulte que, dans la mise en cul- ture des tourbières, il faut envisager l’amélioration aussi bien des propriétés physiques que des propriétés chimiques. En tout cas, avant toute autre amélioration, il faut songer à assainir le sol, car son état mouilleux est la première cause de son infertilité. Il n’y a pas de terrain qui offre autant de difficultés à l’assainisse- ment et qui exige plus de précautions. Ceci se comprendra si l’on considère qu’avec l’abaissement du plan d’eau par les procédés ordi- naires (fossés ou tuyaux souterrains) on soutire aisément au sol de telles quantités d’eau qu’il n’en a plus assez et prend alors un état aussi peu propre que l’état mouilleux à l’obtention du maximum de récoltes. On doit surtout chercher la cause de ce desséchement ex- cessif dans la faculté extraordinaire d’évaporation de la masse tour- beuse (p. 347). Avec une sécheresse persistante, la provision d’eau peut diminuer à un tel degré que les plantes meurent de soif. Une fois arrivé à cet état, le sol est ruiné pour longtemps, parce que la tourbe, à cause de son inhumectabilité, ne se laisse plus humidi- fier du tout ou seulement avec la plus grande difficulté. Pour ces raisons l'assainissement doit être conduit de manière que la végéta- tion dispose, dans tous les cas, de la provision d’eau reconnue néces- saire pour l’obtention du maximum des récoltes. On devra surtout se préoccuper d’abaisser convenablement le plan d’eau et de garder la possibilité de le régler suivant les exigences des cultures en eau et les circonstances climatériques. On ne pourra en général s’attendre à un haut rendement que si le sol tourbeux reste toujours bien hu- mide ; car on sait, abstraction faite des exigences variables des récoltes, qu'il doit contenir plus d’eau qu'aucun autre sol pour ame- ner les plantes à leur complet développement (p. 391). Si l’on veut des chiffres, on peut dire qu'il suffit que le plan d’eau soit, sous le gazon, à 0",5-0",7 et, sous les champs, à 0",8-1 mètre au-dessous de la surface. En outre, il faudra s'arranger pour que l’on puisse arrêter le fonctionnement des appareils d'assainissement dans les périodes de sécheresse ou bien dans celles où une stagnation ie COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 499 d’eau est nécessaire. On y arrive simplement en installant des vannes à des places déterminées du système d’assainissement. Étant donnée l’horizontalité des tourbières, l’assainissement s’en fait le plus commodément par des fossés espacés de 20 à 30 mètres dans les tourbières infra-aquatiques et de 10-15 mètres, au plus de 20 mètres, dans les tourbières à sphaigne, plus aqueuses. La pro- fondeur se règle d’après le niveau que doit garder la nappe souter- raine après l’assainissement, d’après la profondeur de la base miné- ralogique dans les cas où elle est employée à l'amélioration des qualités physiques de la tourbière. Pour y arriver on à employé deux procédés : l’un consiste à rejeter sur la tourbe le sable provenant du creusement des fossés et à le mélanger avec elle ; dans l’autre méthode, essayée par Rimpau à Cun- rau et avec grand succès, on recouvre le sol d’une couche de sable de 10-12 centimètres qui reste telle quelle sans qu’on la mélange ja- mais à la tourbe sous-jacente *. Pour juger des avantages de l’un ou de l’autre procédé, il est évi- demment utile de savoir dans quelle mesure ils peuvent améliorer les sols tourbeux. M. FLeiscuer* d’abord et moi ensuite * nous avons fait des essais propres à éclairer le jugement à cet égard. Ils ont trait aux modifications qu’éprouve le sol tourbeux dans ses rapports avec humidité et la chaleur sous l’influence du sable en mélange ou en couverture. Pour déterminer comment se comportaient, vis-à-vis de l'humidité, des sols traités de diverses façons, J'ai employé des lysimètres de 90 centimètres de hauteur et de 400 centimètres carrés de section ; ils étaient garantis contre l’échauffement latéral ; on les pesait chaque semaine. Le poids des sols séchés à l'air étant connu, ainsi que les volumes des eaux d'arrosage et d'infiltration, on pouvait calculer ai- 1. Le domaine de Cunrau, situé au nord de la province de Saxe, dans l’Altmark, aux sources de la Jeetze, a fait l'objet d'une importante monographie due à M. PIERRE DE Maizzanp et insérée dans les Annales de la Science agronomique française et étran- gère, 1891, t. Il, p. 417-472. (Traduction.) 2. M. Fueiscrer, Landwirthschaftliche Jahrbücher, par H. Triez, vol. XX, 1891, p. 771-804. Voir aussi : F. SEvFERT, même recueil, p. 854-871. 3. E. WozLxy, Forschungen, etc., vol. XVII, 1594, p. 229. 200 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sément la quantité d’eau existant dans les sols en expérience ainsi que l’évaporation d’une pesée à l’autre. Les sols placés dans des conditions identiques ont renfermé pen- dant la saison d’été (1% avril-30 septembre) les Laux moyens suivants d’eau exprimés en grammes : SOL D’'UNE TOURBIÈRE à sphaigne infra-aquatique ANNÉES. mélangé SET mélangé a - tel quel. ES 10 centim. tel quel. HE 10 centim. sable PA sable. es OP pc 5 495 4 885 5 599 5 537 4 619 328 CRETE Or 4 834 4 205 o 695 4 740 3 7178 5 160 —————* ——— ——…"— " —_———…—…”"— _ ——_— — Moyennes. . . 5464 4545 5647 5439 4199 5244 Rapport . . . 100 88,0 109,4 100 81,7 102,2 Il ressort de ces chiffres que Le sol couvert de sable contient le plus d'eau, puis vient la tourbe telle quelle, et c’est la lourbe mélée de sable qui a le moins d'humidité. Ces différences n'apparaissent pourtant que dans les moyennes et subissent, suivant les conditions climatériques, des modifications multiples qui, d’après les observations isolées qu'il serait trop long d'insérer, se résument en ceci: par la sécheresse la tourbe non couverte se comporte à peu près comme celle qui est mélangée de sable ; elle est un peu moins humide pourtant ; mais par les temps très pluvieux et froids c’est elle au contraire qui absorbe le plus d’eau et qui dépasse sensiblement sous ce rapport la tourbe avec sable en mélange ou en couverture. Concluons que les variations d'humidité sont sensiblement plus grandes dans le sol lourbeux non modifié que dans celui qui est mélé de sable, où elles sont, à leur tour, plus im- portantes que dans la tourbe recouverte de 10 centimètres de sable. Pour bien comprendre la raison de ces faits, il faut examiner de plus près le rapport du sol avec l’eau. Comme le taux d’eau de cha- que sol, dans les conditions de la nature, à précipitations atmosphé- riques égales, abstraction faite de la faculté d’imbibition, dépend essentiellement de lévaporation et de l’infiltration, ce sont ces deux propriétés qu'il faut considérer. RAR Li COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 901 L'infiltration, dans les essais en question, se fit de la manière sui- vante : EAU D'INFILTRATION EN GRAMMES. 0 © —, Sol de tourbière à sphaigne Sol de tourbière infra-aquatique EE ANNÉES. PLUIE. RS couvert ; . couvert LE mélangé x En mélangé Fe de 10 centim. de 10 centim. modifié. de modifié. de re sable. once sable. EAU 2027338 - «6099 10 763 13 998 10 124 14 902 16 464 1893 . . 20286 2911 5919 10 020 5 421 7314 11611 Moyennes. 23812 4505 8171 12009 71898 11108 14038 Rapport . — 100 181,4 266,5 100 142,3 179,8 Ces chiffres montrent que c’est la tourbe non modifiée qui laisse passer le moins d’eau ; il s'en écoule bien plus sous la tourbe dont les couches supérieures sont mélées de sable et bien plus encore sous la tourbe couverte de sable. Quant à l’eau évaporée, elle a été calculée comme il suit : EAU ÉVAPORÉE EN GRAMMES. Sol de tourbière à sphaigne. Sol de tourbière infra-aquatique. _————— — ——— EE ANKÉES. PLUIE. , A couvert A A couvert Ton mélangé de Ton mélangé Le de 10 centim. de 10 centim. modifié. de modifié. de sable. sable. ne sable. REP se 279338 20 555 15 474 11 734 16 057 11 406 8 924 1693-00. 1.20 286 15 325 12 877 9 526 12-995 11 812 7 935 Moyenne. 23812 47940 14176 10630 14526 11609 8430 Rapport . _—- 100 78,9 59,3 100 79,9 58,0 Nous concluons de là que c’est La tourbe non modifiée qui évapore le plus, puis vient la tourbe mélangée de sable à la surface, el c’est la tourbe garnie d’une couverture de sable qui lance le moins d’eau dans l'atmosphère. Pour discerner les causes des faits qui précèdent, il faut d’abord examiner la faculté d’imbibition des sols. Évidemment celle de la tourbe non modifiée est plus grande que celle de la tourbe mêlée de sable, puisque, dans ce cas, la masse de la tourbe est moindre et que la différence est comblée par du sable à faculté d’imbibition 502 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. très faible. De ces tourbes avec sable, celle qui en est couverte emmagasine plus d’eau que celle qui en est mélangée, car la couche de tourbe dans le premier cas est plus épaisse (20 centimètres) que dans le second (10 centimètres) et la différence que ceci provoque dans limbibition de tout le sol n’est pas compensée par la plus grande faculté d’imbibition du mélange de sable et tourbe comparé au sable pur. Les chiffres ci-dessous (entre autres), obtenus le 8 septembre 1892 à la suite d’une pluie de 128"",6, montrent que le sol tourbeux mélangé de sable sur les vingt premiers centimètres ne peut absorber autant que la tourbe couverte de 10 centimètres de sable. NON MÊLÉ COUVERT COUVERT. DE SABLE. DE SABLK. Sol de tourbière à sphaigne. . . . 6 444 5 401 6 062 Sol de tourbière infra-aquatique . . 6 {41 4 938 » 829 Dans ces périodes de grandes pluies, les sols se saturent; la tourbe non modifiée retient le plus d’eau et la tourbe mêlée de sable le moins, l’autre étant intermédiaire entre ces deux. Mais ce classement se modifie s’il survient une période sèche et surtout favorable à l’évaporation. Alors le taux d’eau de la tourbe non modifiée s’abaisse dans une énorme proportion, parce que c’est elle qui possède le plus grand pouvoir d’évaporation (p. 347). Cette forte diminution dans la provision d’eau fait qu’elle descend fort au-des- sous de celle qui reste dans le sol muni d’une couverture de sable, C’est lui qui, dans tous ces cas, est le plus humide, grâce à ce que l’évaporation y est entravée à un degré extraordinaire. Le sable se dessèche très vite par les temps secs et forme à la surface une couche plus ou moins épaisse de sol sec qui atténue énormément l'influence des facteurs de l’évaporation sur les couches humides sous-jacentes (p. 347). Même quand toute la couverture de sable est desséchée, l’humidité reste dans le sol tourbeux, parce qu'elle ne passe pas dans le sable *. Dans le sol mélangé de sable, la couche de tourbe sableuse possède une meilleure capillarité et évapore par suite plus d’eau que le sable, tout en restant en dessous de la tourbe pure. 1. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. VIT, 1885, p. 211. “—" craffiite die Gt 27 AC) DE 2 ce COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 503 Comme l’eau de drainage n'apparait que quand le sol est saturé, il n’y a rien d'étonnant à ce que le volume de l’eau de drainage soit inversement proportionnel à celui de l’eau emmagasinée et de l’eau évaporée. Plus sont grandes les facultés d’imbibition et d’évapora- tion, moins il y a d’eau de drainage et inversement. Aussi est-ce la tourbe pure qui en donne la plus faible quantité. Dans les tourbes mêlées de sable, l’eau emmagasinée et l’eau évaporée ne sont pas vis-à-vis l’une de Pautre dans le même rapport que dans la tourbe non modifiée. Si c'était la première qui dominât, la tourbe mêlée de sable devrait perdre plus d’eau par infiltration que celle qui est cou- verte de sable. C’est le contraire qui arrive ; d’où l’on doit conclure que c’est l’évaporation qui règle surtout l’infiltration. De ce que la tourbe mêlée de sable évapore beaucoup plus que la tourbe recou- verte de sable, il résulte qu’il lui faut une plus forte proportion de pluie pour réhumecter le sol et elle donnera moins d’eau de drai- nage que la seconde. Si l’on objecte que, dans ces essais, la couche de sol (30 centi- mètres) était trop mince pour qu’on püt transporter les résultats à la grande culture, nous répondrons que c’est dans les couches supérieures, où les plantes étendent surtout leurs racines, qu'il importe de connaître les éléments de fertilité et que, en outre, c’est là que se montrent surtout les différences dans le taux d’eau des sols ; les zones profondes sont peu ou pas influencées par les di- verses opérations culturales. Ceci est confirmé par M. FLeiscner qui à établi que, pour les couches inférieures et même moyennes des sols tourbeux diversement traités à la surface, les différences dans les quantités d’eau emmagasinées sont nulles ou peu impor- tantes. L'étude de l'humidité dans un sol épais de 30 centimètres formé en bas de tourbe et en haut de sable ou de tourbe sableuse ne per- met même pas de juger de la valeur des procédés considérés ; car les différences trouvées dans ces conditions ne s’appliquent pas à la couche superficielle, la plus importante pour le premier développe- ment des plantes. Considérons seulement les 10 centimètres de la surface; 1l est certain, d’après ce que nous avons dit plus haut (p. 34), que la tourbe telle quelle renfermera le plus d’eau ; après 504 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. viendra le mélange de sable et tourbe et c’est le sable qui sera le . plus sec. Donc, dans cette couche, l’eau est autrement répartie que dans une tranche plus épaisse formée inférieurement de tourbe pure. Outre l’action due à la composition physique de la masse, il faut tenir compte de celle de la couverture du sol. Pour déterminer la température du sol on se servit de caisses sans fond, de bois, de 1 mètre carré de surface et 42 centimètres de hau- teur, remplies de terre sur 40 centimètres ct reposant sur un sous- sol de gravier absolument perméable. On lisait la température chaque jour, le matin à 7 heures, le soir à 5 heures sur des thermo- mètres divisés en dixièmes de degré et dont la boule plongeait à 15, 20, 25 centimètres au-dessous de la surface. Nous donnons dans le tableau ci-après les moyennes mensuelles obtenues dans un sol de tourbièré infra-aquatique. TEMPÉRATURE DU SOL EN DEGRÉS CENTIGRADES, |TEMPÉ- 222 mm" A 15 ceNTiIMÈTRES, A 20 CENTIMÈTRES. A 25 cENTIMÈTRES, a RATORE | | — | , S Sol Sol Sol Sol = (1890). de Sel | couvert Sol ; cuve : a mélangé! 4e mélangé mélangé n l'air de 10 cent.| ?°2 de a de modifié .| sable, me modifié .| sable, du modifié .| sable, Avril . .| 7,94 | 9,18 | 9,65 | 9,27 | -8,79 8,59 | 8,64 | 8,63 Mai. . .| 13,62 | 15,32 | 16,49°| 16,23 | 11,62 96 | 14,03 | 14,75 Juin. . .| 14,08 | 16,31 | 17,87 | 16,93 | 15,83 5 | 15,32-| 16,28 | Juillet. .! 16,38 | 18,08 | 18,65 | 18,59 | 17,58 50 | 17,05 | 18,08 Août. . .| 17,44 | 19,42 | 19,59 | 19,52 | 19,21 18,91 | 20,12 Septemb.| 12,02 | 13,67 | 13,95 | 13,87 | 13,55 3,30 | 13,43 | 15,58 Moyennes 13,32 | 15,36 | 15,98 | 15,77 | 14,97 14,92 | 14,53 | 15,31 OSCILLATIONS MOYENNES DE LA TEMPÉRATURE DU SOL. — —— _ 3,62 | 8,56 | 9,86 | 2,40 | 5,55 4,63 | 1,94 On voit par ces chiffres que : 1° La température du sol tourbeux pendant la saison de végéta- lion s'élève sensiblement par la couverture ou le mélange de sable el plus par le mélange que pr la couverture ; 2 L'influence du sable sur l'échauffement de la tourbe diminue COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 505 avec la profondeur et plus dans le cas de la couverture que dans celui du mélange ; - 8° Les oscillations de la température sont plus fortes dans la tourbe avec sable que dans la tourbe pure. Pour l'intelligence de ces lois, considérons d’abord les conditions thermiques des sols étudiés (tourbe et sable). A cause de sa teinte foncée, le sol tourbeux s’échauffe au soleil plus que le sable blanc, du moins à la surface, mais moins dans les zones profondes, tant à cause de sa plus grande capacité calorifique tenant à sa forte teneur en eau (p. 364) que de sa faible conducti- bilité. Lors du rayonnement nocturne, la tourbe perd par ces raisons moins de chaleur que le sable, qui se refroidit alors bien plus, parce qu’il possède comparativement une conducübilité beaucoup plus grande et une moindre capacité calorifique. Donc, l’échauffement de la tourbe est moindre que celui du sable pendant le jour et quand la température s'élève, de même que son refroidissement est moindre aussi pendant la nuit et quand la température décroît. Les oscillations de la température du sol sont, par suite, beaucoup plus faibles dans la tourbe que dans le sable. Quand la tourbe est mélangée de sable, sa faculté d’échauffement, d’après ce qui précède, doit augmenter ainsi que les oscillations de la température du sol, C’est ce qui arrive, en effet, comme les chif- fres ci-dessus le montrent nettement. Il est moins simple d'expliquer les différences d’échauffement entre la tourbe mélangée de sable et celle qui en est simplement couverte. La couche de sable qui recouvre la tourbe s’échauffe très fort par l'insolation et la haute température de l'air, et cela à cause de sa faible capacité calorifique (puisqu'elle est peu aquifère) et de sa bonne conductibilité ; mais cette température élevée ne profite que peu à la tourbe sous-jacente et jusqu’à une profondeur presque insi- gnifiante, parce que la tourbe conduit mal la chaleur. Dans le sol tourbeux mélangé de sable sur 20 centimètres, l’échauffement est moindre que dans le sable par suite de la faible conductubilité et d'une capacité calorifique un peu plus grande ; mais la chaleur se propage plus profondément, parce que le sable, meilleur conducteur, descend plus bas dans le sol. 206 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le refroidissement de la couverture de sable en dehors du temps d'insolation et pendant l’abaissement de la température est plus ac- centué que celui de la tourbe mélangée de sable pour les raisons qui amènent son plus fort échauffement dans les circonstances contraires ; mais il peut ne pas s'étendre aussi profondément que dans la tourbe mélangée de sable, à cause de Ja faible conductibilité de la tourbe que recouvre le sable. On voit par là que le sol tourbeux sous la couche de sable, pen- dant linsolation et par température croissante, s’échauffe moins fort que la couche correspondante de la tourbe mélangée de sable et que ces rapports s’inversent quand l’insolalion cesse et que la tempéra- ture fléchit. Les extrêmes de température du sol sont donc, dans ce premier cas, plus rapprochés, autrement dit les oscillations sont moindres que dans le second cas. Pour la température moyenne, les chiffres mon- trent que l'excédent présenté pendant l’insolation et pendant le temps de végétation par le sol mélangé de sable sur celui qui est couvert de sable n’est pas égalé par le refroidissement plus fort qui se fait Ia nuit par température décroissante, et même qu’il reste contenu en- tre certaines limites. Ce fait s’explique aisément : par le mélange de sable, une masse plus volumineuse est portée à une plus haute tem- pérature que par la couverture de sable et il y a plus de chaleur emmagasinée pendant les longs jours de la saison chaude. Avec la décroissance persistante de la température, le refroidisse- ment l’emporte et le sol devient d’autant plus froid que sa conducti- bilité est meilleure. Dans ces conditions, la température du sol tour- beux avec sable s’abaisse au-dessous de celle du sol tourbeux non modifié et souvent plus dans la tourbe mélangée de sable que dans celle qui en est couverte, parce que la première conduit la chaleur plus profondément. D’après ce qui précède, la valeur des procédés d'amélioration pro- posés pour la culture des sols tourbeux se laisse mesurer, du moins en tant que le taux d’eau des sols et leur température entrent en Jeu. Le procédé par couverture offre, tout d'abord, celle conséquence que la couverture de sable atténue sensiblement les oscillations du laux d’eau des sols tourbeux. Pour les climats secs ce procédé sem- re fm nr 4 NÉ, COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 507 ble étre le meilleur, car le sol est énergiquement protégé contre le desséchement, comme le montrent les résultats de l’expérience de 1893. Dans les climals humides, par suile de la géne apportée à l'évaporalion, il pourra provoquer l'accumulation d'une quantle d’eau excessive nuisible à la végétation, surtout dans les tourbières à sphaigne, qui ont une faculté d’imbibition bien plus grande que les tourbières infra-aquatiques. Le procédé par mélange, qui amène dans tous les cas, on l’a vu, une diminution du taux d’eau dans les couches supérieures de la tourbe, pourra, de ce chef, entratier des désavantayes pour la ve- gélalion dans les climals secs et sera d'autant mieux adapté aux climats humides auxquels, on le comprend, il convient mieux que le procédé par couverture. Remarquons, du reste, que les défauts inhérents à l’un ou Pautre procédé lors de certaines conditions climatériques peuvent être cor- rigés, sinon complètement, du moins dans une large mesure, par un assainissement sagement compris. Les observations faites sur les eaux d'infiltration montrent jusqu’à quel degré l'amélioration est possible. Puisque la couverture de sable provoque une infiltration plus forte que le mélange de sable et tourbe, le niveau de la nappe souterraine doit, toutes choses égales d’ailleurs, s'élever moins haut dans le premier procédé que dans le second, et comme c’est la tourbe non modifiée qui donne le moins d’eau d'infiltration, c’est sous elle que la nappe souterraine atteindra son niveau le plus élevé. C’est ce qui arrive en effet, comme le montrent mes observations ci-après se référant à des sols qui étaient assainis jusqu’à 1 mètre de pro- fondeur : NIVEAU DE LA NAPPE SOUTERRAINE EN CENTIMÈTRES au delà du 00 qui est à 1 mètre de profondeur. ————— © ©" DATES Sol de tourbière à sphaigne Sol de tourbière infra-aquatique — — — — ——— — (1594). non mélangé DFE non mélangé ere : de 10 centim. de 10 centim. modifié. de odifié. de sable. able no sable. de fon ,8 10,2 14,3 13,8 15,6 215 15 juin . . . 25,3 31,3 38,8 39,7 44,8 50,2 15 juillet. . . 30,3 40,5 56,6 53,0 63,0 70,3 Ps août - . . 48,0 64,8 74,7 76,8 91,0 105,2 15 septembre . 49,0 65,6 79,0 70,4 83,7 86,1 D08 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. On peut donc obvier aux inconvénients qu'entraine, au point de vue de l’humidilé dans cerlaines circonstances (climat humide ou sec), l'applicalion aux sols tourbeux des diverses méthodes de cul- ture en amenant par l'assainissement, suivant les besoins, le niveau de La nappe souterraine entre certaines limites ; avec la tourbe cou- verle de sable ce niveau est le plus abaissé ; c’est sous la tourbe non modifiée qu'il est le plus élevé; la tourbe mélangée de sable tient le milieu à cet égard. Du reste, on peut parer à l'inconvénient qu'offre le procédé par mélange sous les climats secs en employant comme amendements des matières qui ont une plus grande faculté d’imbibition; par exemple, de la marne, du lehm ou de largile. Malheureusement ces matières sont très rares dans les sols des tourbières infra-aquatiques qui seraient surtout indiquées pour ce genre d'amélioration. En résumé, les divers procédés de mise en culture présentent des différences importantes pour l’humidité du sol, différences qui peu- vent être compensées par certaines dispositions, si bien qu’à ce point de vue ils se valent à peu près. Sous le rapport de la chaleur, le procédé par mélange est netle- ment supérieur au procédé par couverture; l’échauffement y est meilleur. Les deux ont sensiblement la même valeur en ce qui con- cerne les gelées printanières. Comme on l’a montré plus haut (p. 372), l’aptitude des couches supérieures de la tourbe à se refroidir tient surtout à sa mauvaise conductibilité; celle-ci s’améliorant par le sable, soit en couverture, soit, plus encore, en mélange, il en résulte, sans plus, une atténuation sérieuse du danger des gelées. Si l’on examine maintenant les autres influences qu’exercent ces deux procédés sur la fertilité des sols tourbeux, on voit que, sous certains rapports, ils se valent et, sous d’autres, le procédé par cou- verture est le moins bon. Ainsi par les deux on obvie avec le même succès aux changements de volume excessifs et à l’élal trop poreux de la tourbe. Mais le procédé par couverture est inférieur au pro- cédé par mélange au point de vue de la croissance des plantes dans la jeunesse, de l’influence sur l’érémacausis et de la part de pro- duction qui revient au travail mécanique du sol. A la germination l’humidité fait souvent défaut aux plantes dans COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 509 le sable en couverture par les temps secs ; par les temps humides ce sont les matières nutritives nécessaires pour une végétation luxu- riante qui manquent, même si le sol a reçu une riche fumure. Ceci se comprend si l’on considère que, dès la cessation des pluies, le sable perd de grandes quantités d’eau, et que, d’autre part, sa grande perméabilité et son faible pouvoir absorbant pour les prin- cipes nutritifs l’exposent à subir de grandes pertes d’engrais par les temps humides. On sait que les jeunes plantes se développent lente- ment et faiblement dans le sable tant qu'il ne s’y est pas accumulé une assez forte provision de matières organiques ; elles ne végêètent vigoureusement que quand leurs racines ont pénétré dans la tourbe sous-jacente. Mais plus tard, si les circonstances extérieures sont favorables, elles peuvent regagner ce qu’elles avaient perdu dans leur jeunesse. Avec des températures extrêmes certains végétaux n'arrivent pas à se développer dans la couche de sable, comme 1l est arrivé au printemps de 1892 avec mes essais de colza d’été. Les plantes levèrent, puis périrent par persistance de la sécheresse. La tourbe dont la surface est mélangée avec du sable offre de bien meilleures conditions pour un développement normal, en ce sens que la superficie est d’abord plus riche en eau, puisque sa faculté d’'imbibition est plus élevée, mais aussi en principes nutritifs parce que les particules d’humus mêlées au sable ont un fort pouvoir absorbant pour ces principes qui ne sont plus exposés à être dissous comme dans le sable. La végétation initiale des plantes dans la tourbe mêlée de sable est, par suite, meilleure que dans la tourbe couverte de sable, comme cela se voit aisément à l’œil nu. Elles sont bien mieux protégées contre la sécheresse persistante; dans l’essai en question le colza d'été a pu, par ce procédé, surmonter la période de sécheresse. Le procédé par couverture de sable a encore des inconvénients ; cette couverture empêche presque complètement l'air d'arriver à la tourbe sous-jacente, d'autant plus que celle-ci est encore comprimée par le poids du sable. Dans ces conditions l’érémacausie est fort entravée, la tourbe étant en même temps imprégnée d’eau. Cet ar- oument est surtout de poids pour les. tourbières à sphaigne qui possèdent une très faible aptitude à la décomposition et une grande 510 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. faculté d'imbibition. A ce point de vue, le procédé en question n’est pas applicable à ces sortes de tourbières. Sous ces derniers rapports aussi, le procédé par mélange présente sur l’autre de grands avantages qui sautent aux yeux; les particules d'humus étant bien mieux en contact avec l’air, se décomposent plus vite, parce que d’abord elles sont mélangées à du sable perméable, et qu’ensuite les couches supérieures du sol sont ameublies jusqu’à une assez grande profondeur. Ce dernier argument est celui qui, on ne peut le nier, parle le plus en faveur du procédé par mélange, parce que, abstraction faite des avantages inhérents au labour profond, le mélange de deux sols dont chacun agit défavorablement par plusieurs côtés sur la végé- tation et la neutralisation désirables de leurs propriétés opposées, peuvent être obtenus de la manière la plus parfaite par une culture profonde. | Si l’on peut opposer à ce que nous disons que le procédé Rimpau (par couverture) a donné des résultats excellents et soutenus, 1l ne faut pas oublier qu’en admettant qu'il n’y ait pas d'avantage quant au poids des récoltes, le procédé par mélange lemporterait au point de vue de la certitude des récoltes. C’est ce que confirment non seulement des expériences dans les tourbières hollandaises et divers résultats de M. FLEISCHER, mais encore mes observations qui prouvent que, du moins sous le climat du plateau bavarois, on obtient de plus hauts rendements par le sable en mélange que par le sable en couverture. Enfin, quant à l’objection, maintes fois sou- levée contre la convenance de ce procédé, que le sable pénètre dans les couches profondes de la tourbe, on peut affirmer au con- traire que ce fait (qui ne se passe que lentement et aussi du reste dans la tourbe couverte de sable) est avantageux plutôt que nuisible, parce que des couches de plus en plus profondes du sol deviennent perméables. Un sable à gros grain sans mauvaises herbes parait le plus propre à l'amélioration du sol tourbeux, parce qu’il oppose le moins d’obs- tacle à la perméabilité si nécessaire, ce qui importe surtout dans le procédé Rimpau. Du sable à petit grain ne conviendrait point, parce qu'il serait trop facilement enlevé par le vent. D’autres matériaux à Te D FL FAN OC RETT 8 _. shbe ‘ « - COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 511 grain fin, tels que le calcaire des tourbières, la marne, le lehm, lar- gile, ne sont pas utilisables à cause de leur faible perméabilité ; mais ils peuvent être avantageusement employés en mélange avec la tourbe, . Si le sable renferme du sulfure de fer, on pourra néanmoins l’em- ployer, à moins que la dose de pyrite ne soit trop forte. Il se forme, au contact de l'air, de l'acide sulfurique et du sulfate de fer qui se détruisent par l’addition de chaux ou de marne très calcaire des tourbières en donnant du sulfate de chaux et de oxyde de fer inof- fensif. Le sable peut ne pas provenir uniquement du sous-sol de la tour- bière ; il peut être apporté du voisinage. En ce cas, l'emploi de petits chemins de fer portatifs semble commandé; ils permettent d'étendre les améliorations à des tourbières qui, à cause de l’ex- trême épaisseur de leur couche de tourbe, ne pourraient être traitées par les procédés ordinaires”, En tout cas, il faut, pour l'application de cette culture scientifique, certaines conditions. D'abord, la couche de tourbe ne doit pas dépasser 1°,5 ; avec une plus forte épaisseur il serait trop coûteux de fouiller jusqu’au sous-sol pour le ramener à la surface, excepté s’il s’agit des bords des tourbières, où l’on peut apporter de la terre du voisinage. C’est avec une épaisseur de tourbe de 0®,4 et au-dessous que l’on peut le plus convenablement opérer avec des fossés. Il faut aussi tenir compte de la composition de la tourbe. Il n’y a guère que les tourbières infra-aquatiques qui puissent être traitées par le procédé en couverture, parce qu’elles ont une plus grande aptitude à la décomposition que les tourbières à sphaigne. Celles-ci ne peuvent voir s’améliorer sûrement leurs pro- priétés physiques que par leur mélange avec des terres minérales. Il faut aussi tenir compte des conditions économiques. Là où les produits se vendent mal, où les salaires sont élevés, on devra se demander si les capitaux seront rémunérés. Les circonstances sont plus favorables dans la culture des tourbières exploitées pour la tourbe ( Veencullur) où, comme on sait, la tourbe est enlevée et la couche 1. Pour les détails relatifs à ces deux procédés, il faut se reporter aux ouvrages spéciaux : E. et K. BinaxBaum, Die Torf-Industrie und die Moorkultur, Brauns- chweig, 1880 : Fr. Krey. Die Moorkultur, Berlin, 1885, etc. 512 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. supérieure fibreuse mise de côlé est mélangée au sable du dessous. Dans ce cas, la vente de la tourbe compense les frais de mise en culture. Mais partout où les prix des produits agricoles sont trop bas, les frais sont généralement plus élevés que les bénéfices, si bien qu’on renonce avec raison à l'emploi des procédés soit par couverture, soit par mélange. Maintenant surtout, en raison du bas prix des denrées, des entreprises agricoles coùteuses ne paient plus leur rente. Si, par suite de la mauvaise composition de la tourbe ou pour les autres raisons susindiquées, les procédés en question ne sont pas applicables, doit-on renoncer à toute autre culture des tourbières ? : Non, attendu qu’on peut aussi, sans avoir recours au mélange avec du sable, obtenir de ces sols des récoltes qui paient les frais de cul- ture. En beaucoup de contrées où il se produit des dommages par les changements de volume du sol et où l’on doit renoncer à aug- menter la compacité par l'addition d'éléments minéraux, on peut néanmoins obtenir des récoltes rémunératrices par un traitement approprié et une exploitation rationnelle. On commencera tout d’abord par dessécher le sol non suivant un mode uniforme, comme on fait d'habitude, mais en ayant égard aux exigences des plantes en eau et aux conditions climatériques. Ensuite il faut détruire tous les végétaux un peu élevés, ce qui se fait le plus simplement par le feu. On laboure en munissant les pieds des animaux de trait de sortes de raquettes (Moorschuhe), si la tourbe est trop molle. I faut travailler le sol jusqu'à ce que la tourbe soit réduite en fragments d’une certaine dimension ; on emploie pour cela des extirpateurs et des herses tranchantes en évi- tant d'amener le desséchement de la couche superficielle. Dès que ce desséchement commence à se produire, il faut aussitôt passer le rouleau pour diminuer autant que possible la surface d’évaporation et augmenter la capillarité. Quand on a fourni au sol, sous forme d'engrais arüficiel, les principes nutritifs dont il a besoin et qu'on lui a confié la semence, on le roule enfin avec un lourd rouleau. Cette énergique compression du sol réduit en menus fragments a la plus heureuse influence sur sa fertilité. L'eau est ainsi attirée COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 913 des couches profondes vers la surface, ce qui prévient le desséche- ment, surtout au printemps. On évite du même coup les dommages de la gelée qui, on l’a vu (p. 373), se font surtout sentir quand la surface de la tourbière est desséchée. En outre, grâce au rouleau, Ja conductibilité et la capacité calorifique du sol sont augmentées, puisque les grumeaux sont plus rapprochés et que la provision d’eau est plus grande. L'eau fournie aux couches supérieures par celles du dessous est utile à la végétation. Les changements de volume ne sont d’ailleurs pas détruits par le roulage ; mais ils sont d'importance se- condaire dans des climats où la distribution des pluies est régulière et où la neige forme l'hiver une couche épaisse. La compacité du sol n’est que faiblement augmentée par l'emploi du rouleau, si bien que pour le défruitement l'emploi des chemins de fer portatifs est nécessaire. Les essais faits en grand sur diverses tourbières du sud de la Ba- vière, ainsi que mes derniers résultats dont Je vais citer quelques-uns, montrent la convenance de ce procédé, du moins dans les climats humides. Les cases d’expérience avaient un mètre carré de surface et 0*,40 de profondeur, et la tourbe reposait sur un sous-sol très per- méable: 1892. 1893. 1894. RE | me << de SEIGLE D'ÉTÉ. COLZA D'ÉTÉ. | SEIGLE D'HIVER. CAMELINE. POIS. culture. EE a — Grain. | Paille. | Grain. | Paille. | Grain. | Paille. | Grain. Paille. | Grain. Paille. ee RES ue rem Se CS SR ne, es | Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Tourbe de sphaigne. QE 2. +: 427,0! 870 | 103,9| 850 | 234,5] 720 159,6] 595 | 348,0! 670 Sol mélangé avec du sable . 423,5] 850 | 104,2! 645 | 218,9] 640 | 85,8] 322 | 344,1] 545 | Sol couvert de sable , . , . 313,5! 760 89,3] 580 | 194,6] 540 65,7| 213 | 307,8| 435 Tourbe infra-aquatique. Sol tel quel . . . . . . ,. 605,3] 1050 | 348,0] 670 [ 318,0] 970 | 156,6| 553 » » Sol mélangé avec du sable .| 529,0] 890 | 344,1] 545 | 271,7] 850 | 139,8| 417 » » Sol couvert de sable , , . . 501,5| 920 | 307,8] 455 | 220,0] 740 108,7| 330 » » Ces chiffres montrent que, sur un sol non mélangé de sable, avec des engrais appropriés et des manipulations convenables, on obtient MATIÈRES ORGANIQUES. 33 914 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. des produits même p'us élevés que sur la tourbe avec sable. On avait répandu des superphosphates, des nitrates et de la kaïnite (chlo- rure de potassium). Voilà la preuve que les tourbières peuvent porter divers produits agricoles sans l’adjonction de sols minéraux. Le sol tourbeux, amélioré dans ses propriétés physiques, exige, à cause de sa pauvreté en principes assimilables, une fumure qui doit s'adapter naturellement à sa composition chimique. Les tour- bières infra-aquatiques se décomposent plus vite et sont plus riches ; aussi renferment-elles d'ordinaire une provision d’azote pleinement suffisante pour une végétalion vigoureuse. Une fumure azotée ne semble indiquée que dans le cas où la tourbe est recouverte de sable, parce que, tant que les plantes sont dans le sable, elles souffriraient du manque d’aliments azotés. Après quelques années, il s’est formé à la surface du sable une couche suffisante d’humus provenant des récoltes précédentes, laquelle per- met généralement de laisser de côté la fumure azotée. Dans des cas exceptionnels il faut ajouter de la potasse qui, sur la tourbe pure, se met sous forme de kaïnite ou de carnallite, ou aussi de chlorure de potassium sur la toufbe améliorée par des mélanges minéraux. En outre, une fumure phosphatée est nécessaire dans la plupart des cas; ce sont les scories de déphosphoration (Thomas) qui conviennent le mieux. Leur phosphate de chaux se décompose sous l'influence de l’humus et l'acide phosphorique passe peu à peu à l’état assimilable. Ce phosphate a même souvent un meilleur effet que le superphos- phate, plus cher, qui ne semble approprié qu’aux sols tourbeux couverts d’une couche de sable. En tout cas il est bon de déterminer dans des champs d’expérience si le phosphate est ou non nécessaire ; il pourrait être superflu. Les fumures de potasse (400-1 000 kilogr. de kaïnite par hectare) et, éventuellement, d’acide phosphorique (200- 600 kilogr. de phosphate Thomas en poudre) doivent être apportées chaque année et aussi tôt que possible dans l’année, même déjà à l'automne pour les cultures de printemps. On les enterre à la char= rue ou à la herse. Sur les tourbières à sphaigne où la tourbe se décompose avec une. lenteur extrême, où les principes nutritifs sont en quantité insufi- sante, il faut apporter non seulement de la potasse et de l'acide Mu & dt WE" COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 91 Qt phosphorique, mais encore de la chaux et de l'azote. Il y a de ce chef un supplément de dépenses qui, en général, n’est pas en pro- portion avec les récoltes obtenues, Si l’on ajoute que l'état phy- sique du sol de ces tourbières est beaucoup moins favorable à la végétation que celui des tourbières infra-aquatiques, on peut se demander si l’on doit s’occuper d’une amélioration quelconque d’un tel sol. En fait, on renoncera très légitimement dans la plupart des cas à la culture des tourbières à sphaigne, parce qu’elle n’est pas rémunératrice. On les utilisera mieux en exploitant les couches su- perficielles comme litière et les couches profondes comme combus- tible (p. 378). Quand les circonstances permettent à l’agriculture de s’exercer sur les tourbières à sphaigne, on emploie, outre la potasse et l’acide phosphorique, les engrais déjà indiqués pour les tourbières infra- aquatiques. On donne la chaux sous forme de chaux caustique (5 000- 10 000 kilogr. par hectare) ou de marne. Il semble préférable de chauler peu et souvent que de faire un fort et unique chaulage. La fumure azotée sera soit du nitrate de soude, soit des composts et du fumier de ferme. Le fumier frais est mauvais, parce qu’il augmente la perméabilité de la tourbe. Dans la culture des marais, en Hollande, on emploie comme fu- mure aussi bien des boues de ville que des limons de mer. Les pre- mières sont un mélange du contenu des égouts et de déchets de cuisine, cendres, boues de rues, etc. Cet engrais, récolté et mis en tas par les villes elles-mêmes, est acheté au poids aux enchères par les colonistes. Le limon qui se dépose en vase fine à l'embouchure des fleuves, et qu’on récolte par draguage, a aussi une action phy- sique et une action chimique sur le sol. Sous ce dernier rapport, il vient après les boues de ville; sous le premier, il leur est égal. Mais comme, à cause de son moindre prix, il est employé en plus grande quantité, il mérite la préférence sur les boues de ville pour l’amé- lioration des propriétés physiques du sol. Une manière de fumer le sol, très répandue dans les tourbières du nord de l'Allemagne et dont nous allons dire quelques mots pour compléter le sujet, consiste dans la combustion d'une partie de la malière organique, combustion qui fait passer à l’état assimilable 516 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. les principes minéraux qu’elle renferme. Souvent on répète cette pratique jnsqu’à épuisement du sol. Pour appliquer ce procédé’ on assèche d’abord la tourbière en creusant un fossé principal de 1°,25 à 1,90 de profondeur dans lequel débouchent, à angle droit et à 24-30 mètres de distance, d’autres fossés ayant 90 centimètres de profondeur et 1,30 de lar- geur et alimentés à leur tour par-de plus petites rigoles de troisième ordre, éloignées de 6 mètres, profondes de 40 à 60 centimètres et larges d'autant. La terre extraite des fossés est également répartie sur le sol, puis on le cultive à la bêche ou à la houe. Il passe tout l'hiver à cet état et, quand le temps est favorable, on met le feu comme nous l'avons indiqué. On sème le sarrasin dans les cendres encore chaudes et on enterre la graine avec une herse faite d’un fagot d’épines. Quand un champ a été ainsi écobué, on peut recommencer au bout de 3, 4 ou 5 ans et continuer tant que la tourbe remuée à la houe se laisse brüler. Cela devient finalement impossible, parce qu'il se forme à la surface une croûte dure qui ne se laisse plus ameublir et brüler. La fertilité, que les récoltes amoindrissent et qu'aucune fumure n’entretient, diminue à tel point, après ces combustions ré- pétées, qu'il n’y a plus avantage à continuer l'opération. Le sol épuisé doit subir une jachère de 30 à 40 ans avant qu’il se forme une nou- velle couche propre à l’écobuage. Dans les tourbières basses dont la tourbe n’a qu’une faible com- bustibilité, dans les stations humides, et là où pénètrent les bêtes de trait on emploie aussi le procédé qui consiste à découper des pla- ques de tourbe à l’aide d’instruments spéciaux et à les disposer en tas que l’on allume. La combustion présente divers avantages. Par le feu l’humus est détruit et donne des cendres qui, mélangées au sol, améliorent ses propriélés physiques et chimiques. En outre, des éléments nuisibles tels que le protoxyde de fer perdent leur nocuité en se transfor- mant en oxyde au maximum. Ces actions bienfaisantes se limitent à 1. E. Binnsaum, Ucber das Moorbrennen und die Wege zu sciner Besciligung, Glogau, 1573. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 517 la couche en contact avec le feu et à celle qui est mélangée aux pro- duits de la combustion. Les couches inférieures gardent leur état pri- mitif désavantageux. Dès que les matières nutritives devenues solubles ont été absorbées par les plantes, le sol reprend son infertilité. Ce qui démontre le mieux les inconvénients de cette méthode, c’est l’état misérable des cultivateurs qui la pratiquent. Même dans les années ordinaires ils ne peuvent qu’à grand’peine soutenir leur existence ; quand elles sont mauvaises, ce qui arrive souvent, ils en sont réduits à s'adresser aux pays voisins. Aussi a-t-on déjà souvent agité la question de l'interdiction de l’écobuage dans les tourbières, sauf à occuper leurs colons d’une autre façon ou à les indemniser. Ce qui pousserait surtout à cette résolution, ce serait le fait que la fumée de la tourbe est nuisible au climat et à la végétation‘. Cepen- dant tout ce qui a été dit à ce sujet n’est pas inattaquable ; il y a, au contraire, des raisons de croire que, dans certaines conditions, celte fumée peut être utile aux végétaux cultivés. On ne peut lui attribuer de nocuité que parce qu’elle est gènante pour l’homme et les animaux. Il en est autrement si l’on se place au point de vue agricole. La culture après combustion est, il est vrai, un mode préparatoire de culture avantageux à plusieurs égards pour la fertilisation ; mais c’est une culture vampire?, car elle consomme le peu de force pro- ductive du sol sans lui rendre par des fumures les principes enlevés par les récoltes; à chaque combustion le sol devient plus pauvre, les rendements diminuent jusqu'à épuisement complet et stérilité. Alors il faut s'installer sur d’autres cantons pour les traiter de même. Quand ceux-ci sont trop éloignés des habitations, les colons sont vbligés de les quitter. pour s’en construire d’autres à proximité de leurs terrains de culture. De plus, les récoltes sont incertaines, parce qu’on ne cullive guère que le sarrasin (plus rarement le seigle, lavoine, les pommes de terre, les betteraves) et que les récoltes de sarrasin sont facilement 1. M. À. F. Presrtece, Ueber das Moorbrennen in Ostfriesland, den Morrauch, die weile Verbreitung deslelzeren in Europa, elc., Gôttingen, 186$. — W. von LaER, Der Morrauch und seine Beseitigung, Münster, 1871. 2. E. BinnBaum. loc. cit., p. 43. 518 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. endommagées. Le bien-être des colons dépend donc de la réussite — très chanceuse — du sarrasin. Comme il n’y a pas de fourrage, on ne peut pratiquer l'élevage, qui est la base de l’agriculture, et l’on est privé de tous les avantages qui résultent de l’union de l’agricul- ture et de l'éducation du bétail. Le feu s’avance souvent plus loin qu’on ne le veut ou bien il est éteint par une pluie persistante, si bien que la combustion est incom- plète, la semaille entravée, impossible même parfois, et que l’on a travaillé pour rien. | La culture des tourbières par combustion doit être rejetée sans hésitation, non seulement parce qu’elle ne donne qu’un rendement faible et très incertain, qu’elle épuise le sol, qu’elle est mcompatible avec une exploitation fructueuse prolongée et qu’elle ruine le pays, mais encore parce qu’elle exerce, au point de vue moral, une in- fluence pernicieuse. La monotonie du système de culture, loisiveté temporaire qui en résulte, l’insuffisance d’occupations, surtout pen- dant l’hiver où toutes les relations sont interrompues parce que les tourbières sont impraticables, enfin la difficulté d’améliorer sa situa- tion, tout contribue à enfoncer l’homme dans la paresse et l’indiffé- rence. Ajoutons encore la mauvaise nourriture, le manque de viande et l’excès d’aliments non azotés. C’est à cela que tient en grande partie le manque d’activité et d’énergie des habitants des tour- bières. Les inconvénients de la culture des tourbières gisent donc moins dans le désagrément ou la nocuité douteuse de la fumée que dans les conditions désavantageuses économiques et morales où se trouve la population. Elles suffiraient seules à justifier l’abandon de ce pro- cédé, La question d’une autre culture rationnelle des tourbières ou d'emplois ou d’indemnités à donner à ceux qui les cultivent est si peu avancée, que le procédé par écobuage durera longtemps encore, I re pourra être délaissé que quand on aura créé les ressources suË fisantes pour une meilleure exploitation. Pour apprécier le rendement des autres méthodes de culture dont il a été question, il faut tenir compte de certains côtés, tels que l’or- ganisation de l’exploitation et le choix des végétaux cultivés. Dans les tourbières améliorées par des sols minéraux et une fumure ra- COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 519 tionnelle, on peut cultiver toutes les plantes adaptées au climat *. Sur les autres, traitées seulement par la fumure et les opérations culturales, il faudra faire un bon choix des végétaux à cultiver en tenant compte du climat. Évidemment, sur de tels sols pauvres en principes nutritifs assi- milables, il sera indiqué d'adopter un assolement aussi peu exigeant que possible, dans lequel devra dominer la culture herbagère asso- ciée à l'élevage du bétail. Ge sera d’autant plus avantageux que la culture des plantes fourragères sur les terrains tourbeux procure dans les récoltes une plus grande garantie que celle des autres plantes cultivées. Les espèces qui conviennent le mieux pour créer des prairies sur les sols tourbeux sont : Phleum pralense, Avena elatior, A. pubescens, Dactylis glomerala, Festuca arundinacea, F. rubra, Poa serotina, Lolium italicum, en outre Agrostis vul- garis (A. stolonifera), Holcus lanatus, Cynosurus cristatus, Poa pralensis, Festuca ovina. Ces dernières espèces s’introduisent plus tard toutes seules. Parmi les papilionacées il y a surtout à citer : Medicago lupulina, Lotus corniculatus, L. uliginosus, Trifolium repens, T. pratense, Lathyrus pralensis. Les principaux grains qu’on y cultive sont : le seigle, l'Avena stri- gosa, le sarrasin, le pois, la vesce, la féverole, le lupin; parmi les racines il faut citer d’abord la pomme de terre, puis la betterave. La plupart des légumes réussissent très bien si on fume suffisam- ment, et surtout les légumes-racines. La culture forestière y offre en général peu de chance de succès; elle est du reste irrationnelle partout où l’on peut transformer les tourbières en bonnes prairies, en bonnes terres. Il peut cependant y avoir des circonstances où l’on ait à boiser certaines parties. Les essais faits jusqu'ici ne font pas concevoir de grandes espérances. II est vrai que certaines plantations en chênes, épicéas et pins syl- vestres” ont bien prospéré au début; mais leur développement ulté- 1. On y a jusqu'alors cultivé de préférence l'avoine, l'orge, le seigle, le colza, la pomme de terre, la betterave, les légumes, le raygrass d'Italie. Le blé même y réussit, mais il souffre souvent de la rouille. 2. K. Brünixcs, Der forstliche und der landwirthschaftliche Anbau der Hock- moore millels! des Brandfruchlbaues, Berlin, 1851. 520 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. rieur a été défectueux, sans doute parce que les racines ont souffert dès qu’elles ont atteint la tourbe profonde acide et pauvre en oxy- gène. C’est seulement là où la tourbe n’est pas profonde, où le sol a été desséché à fond que certaines essences peuvent se développer plei- nement. Au reste, il faudra faire encore de nombreux essais avant que la question de l'utilisation des tourbières par la culture fores- lière soit définitivement résolue ‘. Parmi les végétaux ligneux, les saules seuls, semble-t-il, méritent l’attention ; ils ne réussissent bien que sur le sous-sol sablonneux, pas sur la tourbe même. Mais, comme dans beaucoup de tour- bières ce sous-sol se présente et que les bords des fossés, avec leur faible épaisseur de tourbe, sont aptes à la plantation, on peut ins- taller des haies de saules plus ou moins étendues. Leur principal avantage est de procurer du travail à de nombreux ouvriers pen- dant une grande partie de l’année. La coupe des osiers exige assez de force ; mais l’enlèvement et l’écorçage peuvent être confiés à des femmes et des enfants qu’on occupe aussi à nettoyer les ose- raies. Si, en outre, cette matière première est mise en œuvre par les habitants des tourbières, ils trouvent là de l'occupation pour l'hiver. Pour planter une oseraie, on défonce le sol à une profondeur de 40 à 60 centimètres ; on le divise en planches de 4 mètres de large et on enfonce à 45 ou 60 centimètres de distance des boutures de saule viminal ou de saule pourpre ou de leur hy- bride. La première année on fait une récolte sarclée avec fu- mure (betteraves ou pommes de terre) qui maintient le sol propre. La seconde année commence l'exploitation qui se répète tous les ans ?. | 1. D'après certaines observations, il faudrait faire surtout appel aux essences sui- vantes : chêne, épicéa, aulne, bouleau (B. pubescens, B. nana, B. humilis), frêne, peuplier (P, {remula, P. nigra, P. canadensis), noyer. 2,3. À. Kraur, Lehrbuch der rationellen Korbweidencullur, Aachen, 1884; R. Scnuzze, Die Korbweide, ihre Cullur, Pflege und Benutzung, Breslau, 1885; F. M. Scaurzen, Korbweidencullur, Lehranstalten für Korbflechterei und die Wei- den, Trier, 18843 R. Fiscnen, Die Feldholzzucht, Berlin, 1878; A. Derus, Milthei- Lungen über die Cullur der Flecht und Bandweiden. Im Anhang zu : Die Cullur der Wiesen und Grasweiden, Halle, 1874. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 521 c) Sols forestiers. Pour ces sols la question capitale est tout d’abord linfluence de l'enlévement de la couverture. Les opinions des spécialistes sont _ assez divergentes à cet égard et ne peuvent guère être critiquées avec autorité, vu l'insuffisance des expériences. C’est seulement quand on aura les résultats des nombreuses places d’essai installées dans tout l'empire allemand qu’on pourra se faire une idée exacte de cette influence. Jusque-là il faut se contenter d’un jugement approché basé sur les essais actuels. On ne peut douter, d’après ce que nous avons dit précédemment, de l'influence de la couverture sur le sol (p. 407-445), que lenlève- ment de cette couverture n’exerce une action le plus souvent consi- dérable sur la fertilité du sol et la végétation des arbres, action qui a trait tant à la teneur en principes nutritifs qu'à l’état mécanique du sol, à ses rapports avec l'air, la chaleur, humidité, et qui varie de la manière la plus complexe suivant la composition et la situation du sol, suivant la flore, l’âge et la densité du peuplement, etc. Étant donné que les éléments de la couverture, devenant solubles à mesure qu’elle se détruit, sont amenés dans le sol par les eaux atmosphériques et qu’il n’y a pas d’autre source aussi importante d'alimentation pour les plantes, on peut affirmer à priori que tout enlèvement continu de la couverture appauvrit nécessairement plus ou moins le sol. Cette influence sera évidemment différente selon la richesse du sol et le drainage souterrain. Les recherches de A. SrôckHaRDT ‘ et de E. RamaNN* montrent combien peuvent être grandes les différences à cet égard. Le premier s’est adressé à deux parcelles voisines de même composition et même situation. Le sol était du sable de 1. À. Srôcknannr, Landw. Versuchsstalionen, vol. VIT, 1865, p. 235. 2. E. RAmANN, Die Waldstreu und ihre Bedeutung für Boden und Wald, Berlin, 1890; Zeitschrift fur Forst- und Jagdwesen, 1883, 11° et 129 livr., p. 577 et 663. Voir en outre : R. Weser, Unlersuchungen über die agronomische Statii des Wald- baues, München, 1877. Inaug. Disserlation; J. Hanamann, Vereinschrift des boh- mischen Forslvereins, 1881, p. 48. | D22 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. bruyère ; l’une des parcelles était peuplée de pins de 50 ans; l’autre, précédemment garnie de pins de même âge, était nue au moment de la prise d'essai. L'analyse chimique du sol donna par hectare, sur une couche de 47 centimètres, les résultats suivants exprimés en kilogrammes : MINÉRAUX MINÉ-| MA- solubles dans l'acide chlorhydrique. RAUX | TIÈRE so- |organi- Acide | Acide | lubles| que. Les sulfu- | dans | (Hu- rique. | rique. | l’eau, | mus.) Ma Silice. ésie. Sol intact. Couverture (50600 kg.). .[ 113 181 126 101 72 16970! 242 Sol (16 millions dekg.). .| 813 | 451 | 163 | 451 439 45 500 | 2 110 Sous-sol (8 mill. de kg.). .| 4550 | 3578 975 811 1709 77 200 | 6 002 Total ee mel 4210 | 1264 1563 2 139670 | 8394 |1 315 Sol ratissé. Couverture (9940 kg.) . . 7 56 28 36 33 26 Sol (16 millions de kg.). . 553 521 65 780| 269 F 1 073 Sous-sol (8 mill. de kg.). .| 3250 | 2280 | 244 650| 4 230 9 3 660 3 810 | 2857 337 1466| 4 832 j 4759 | 576000 Excédent du sol intact. Pour la couverture. . . . : 65| 152 216 Pouriloisal 1.100500: c — 329] 113 g 5 1037 Pour le sous-s0l 161| 320 É 2 342 — 103| 585 3 595 Il ressort de ces chiffres que le sol forestier subit par lenlève- ment de la couverture une diminution notable en aliments miné- raux solubles, en matières organiques et azotées et en éléments fins. La faculté d’imbibition du sol intact est aussi plus grande que celle du sol ratissé en raison du taux plus élevé d’humus et de terre fine. E. RamanN a fait des expériences sur un sol de sable diluvien garni de pins ayant un très faible accroissement. La parcelle ratissée était privée chaque année de sa couverture depuis 16 ans. Les éléments calculés en kilogrammes pour une surface COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 523 d’un hectare sur 1,50 d'épaisseur sont réunis dans le tableau ci- dessous : SOLUBLE DANS TAUX EN ÉLÉMENTS | paux|LA COU- VERTURE contient © © = cou- |2n moins | verture| Ouen Le sol plus que le sol ratissé. | l'acide chlorhydrique. solubles et insolubles. |dans la! ÉLÉMENTS. Le sol . Sol Soi ratissé Sol Sol ralissé en- contient contient | levée, + ou — + ou — | intact.|ratissé. intact.|ralissé. Mn 2 .. à | do — 1033| 23 010! 16280 — 1919! — 1501110125| 8325|— 853 — 302] 4747| 4117| 992 — 214] 1462| 1372| 7 299 — 29282] 13275| 5130 | ne 7-0. de. « «| TE L9! — 1161| 73372 66 307 | Protoxyde de fer et alumine.| 18 430 — 3416| 86 647! 71437 Sesquioxyde de manganèse . 558 2|— 156| 2025! 7%65| Acide phosphorique . , . . 850 48| 2340| 1102 Acide sulfurique 180 9|— 131 14 850 — 2183 Total soluble dans l'acide chlorhydrique . . . . . .| 41 267 — 6352 RTORD ER S ut se + » On voit que l’enlèvement de la couverture amène une perte impor- tante en éléments minéraux solubles. Même l’alumine, d’ordinaire si résistante, a beaucoup diminué. Quelques substances, telles que l'acide phosphorique, ont subi une perte dans l’ensemble, mais une partie a passé de l’état insoluble à l’état soluble. Un coup d'œil jeté sur les trois dernières colonnes montre que la perte subie par le sol dépasse de beaucoup la quantité de matières minérales enlevées avec la couverture, quantité réellement insignifiante vis-à-vis du taux du sol. On en conclut que ce n’est pas l’enlèvement de la couverture qui amène l’appauvrissement du sol ratissé ; ce sont d’autres causes, parmi lesquelles on doit tout d’abord signaler la désagrégation plus rapide et la lixiviation plus forte dans le sol privé de sa couverture. Les précédents essais et divers autres prouvent d’une manière éclatante que les sols légers, pauvres, sont fortement atteints dans leur fertilité par l'enlèvement réqulier de la couverture. Sur les sols argileux, compacts, riches en principes nutritifs, comme les sols de lehm ou d’argile, les pertes causées par le ratis- 524 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sage de la couverture sont incomparablement moindres que sur les sols sablonneux. C’est ce que montrent quelques résultats obtenus par A. SrôckHARDT ‘ et E. RAMANN*. Voici les chiffres trouvés par STÔckHARDT pour un sol de lehm : 100 000 parties de sol renferment en éléments solubles dans l’a- cide chlorhydrique : Res M PO- MA- phos- MENTS CHAUX. : dns sul- SE TASSE. GNESIE. . . rique. furique. AU Lo La Du sol intact. 152 67. 002 2A0E 61 - 56,9 D ACb ES et Du sol ratissé. 144 62 18 159 75 24,5 ; Du sol intact. 110 65 25 110 60 50,1 Sous-s0l. . . . : à e Du sol ratissé. 92 09 2€ 140 58 48,4 ER | Sol intact . 262 132 47 306 121 53,3 Ut | Sol ratissé, ." “296 (at CA 000 L'impression que produisent ces chiffres est tout autre que s’il s’a- gissait de sols sablonneux ; la différence entre le sol intact et le sol ratissé est infiniment moindre que dans le sable, toutes circonstances égales ; elle est même si faible, qu’on peut à peine en tenir compte. E. RAMANN, opérant sur un sol provenant de laltération superti- cielle d’une marne diluvienne reposant sur du lehm et du sable leh- meux et peuplé de pins de 40 ans, obtint des résultats analogues. Il fit deux essais; le premier donna pour le sol la comparaison suivante : SOL RATISSÉ SOL INTACT. chaque année depuis 20 ans. ÉLÉMENTS. Sol : Sous-sol Sol Sous-sol À 35 centim. 65 centim. 20 centim. 80 centim, de de de de lehm. lehm. lehm. lehm. FOTASSE RES 2,36 1,74 0,80 2,69 Soude . 0,61 0,34 0,26 01e CHAUX ee rer 2 11,07 2,36 13,82 Magnésie. 0,82 1620 0,73 0,79 Oxyde de fer . . 4,45 ,08 5,44 o,04 AINMINP Er TETE En ue 112 5,41 7,65 5,38 Acide phosphorique. . 0,19 0,156 LE 221 0,16 Acide sulfurique . 0,018 "r0; 0150 018 107018 Silice soluble dans les alcalis. 7,91 7,49 8,44 9,89 1. À. SiôücknanDoT, Tharand, Jahrbuch, vol. 9, 1864, p. 280. 2, E. Raman, Die Waldstreu, elc., p. 83. Voir aussi : Gouncuen, Zeëtschrift far Forst- und Jagdwesen, 1585, p. 121. E + COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 525 A l’exception de la potasse qui paraît exister dans ces sols en quantité très variable, les analyses répondent aux prévisions, L’ana- lyse de la surface intacte y montre une plus forte désagrégation (39 centimètres de lehm contre 20 centimètres pour le sol ratissé) et en relation avec ce fait, un taux moindre de principes minéraux, no- tamment de chaux facilement soluble, tandis que la dose d’acide sulfurique reste absolument la même. Le second essai a montré exactement les mêmes rapports, comme lindiquent les chiffres suivants : SOL INTACT, SOL RATISSÉ CHAQUE ANNÉE. 2 EE — " — Sol 70 centim. Sous-sol 30 centim. Sol 53 centim. Sous-sol 47 centim. de sable lehmeux. de lebm. de sable lehmeux. de lehm,. Soluble dans H CI. Soluble Résiau insoluble. insoluble, dans H CI. insoluble Soluble dans H CI. insoluble, dans H CI. © [=] Qt ns © © A © © = O0 =] © Q © ES Magnésie , Oxyde defer. . , Alumine:!. : .. : . Acide phosphorique . Acide sulfurique . . . Silice soluble. . . A l’exception des alcalis qui sont en moindre quantité dans le sol ratissé, il n’y a que de faibles différences entre les deux sols. Le taux en éléments solubles est un peu plus fort dans le sol ratissé, mais le taux total est sensiblement le même. Donc l’enlévement de la couver- ture pendant vingt ans n’a pas amené de modification importante dans la composition du sol. Si cette pratique a une bien moindre influence dans les sols de lehm que dans les sols sablonneux, cela tient, d’une part, à la richesse beaucoup plus grande des premiers en principes minéraux et, de l’autre, à leur moindre perméabilité. Considérons maintenant son action sur l’arrangement des parti- cules du sol, arrangement qui se mesure par le volume des pores. Ce volume s’amoindrit dans les pineraies pauvres par l'enlèvement 526 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. prolongé de la couverture, tandis qu’on ne constate pas de modifica- tion sur les bons sols *. Quant à la teneur en eau des sols, les recherches de E. RAMaANx ? montrent que le sol non ratissé n’est plus humide qu’à la surface ; au-dessous (de 25 à 80 centimètres) il est au contraire plus sec que le sol ratissé. Ge savant explique ces différences par la pénétration plus facile de l’eau dans le sol ratissé et par sa moindre évaporation. Cette dernière opinion ne semble cependant pas justifiée par ce fait que, s’il se forme sur le sol ratissé une couche mince de feuilles tombées, l’évaporation y est plus forte que sur un sol garni de mousse (p. 438). Le moindre taux d’eau du sol non ratissé peut bien plutôt être attribué, en dehors de la pénétration plus difficile des petites pluies, à ce que, par le maintien de la couverture, la crois- sance des arbres est activée et par suite leur absorption d’eau (p. 443). Les chiffres suivants, obtenus par Scawappaca*, montrent que le sol non ratissé, surtout s’il est originairement pauvre en principes nutritifs, provoque un accroissement plus fort que le sol ratissé : ACCROISSEMENT ACCROISSEMENT EN HAUTEUR. EN VOLUME. a — —— —— — > 1856-65 1866-76 1877-86 1856-65 1866-76 1877-86 centim. centim. centim. centim. centim. centim. Sol non ratissé. ... … & 0,29. O,21, 0:15) ATOS ARS Sol ratissé chaque année. . 0,27 0,15 0,11 16,43 5,97 , 4,51 Ces chiffres accusent un ralentissement sérieux de l'accroissement par l’enlèvement de la couverture pendant vingt ans. E. EBERMAYER ‘ donne les résultats ci-après sur la perte d’accroissement des hêtres dans les stations d’essai bavaroises, lorsqu'on enlève la couverture chaque année : Triage Gefaell (Rhôn). — Massif de hêtre de quatre-vingt dix ans sur sol basaltique; I. Classe de fertilité : perte d’accroissement de 1866 à 1892 — 8.1 p. 100. 1. E. Ramanw, Die Waldstreu, elc., p. 65 et 92. 2. E. RAMANN, p. 70 et 91. 3. Zeilschrift für Forst- und Jagdwesen, 1887, p. 401; E. Raman, Die Wald- streu, elc., pe 78. 4, E. Esenmayen, Forstlichna!urwissenschaflliche Zeitschrift, 1894. _ LÉ COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 527 Triage Hundelshausen (Steigerwald). — Massif de cent vingt-cinq ans sur lehm sableux du keuper ; IL. Classe de fertilité : perte d’ac- croissement de 1862 à 1892 — 32.2 p. 100. Triage Hôchberg (Würzburg). — Massif de soixante-seize ans sur lehm calcaire du muschelkalk; IT. Classe de fertilité : perte d’ac- croissement de 1861 à 1888 — 38.8 p. 100. Triage Rothenbuch (Spessart). — Massif de soixante-six ans sur sable lehmeux du grès bigarré; IE. Classe de fertilité : perte d’ac- croissement de 1861 à 1888 — 41.87 p. 100. Triage Wiesen (Spessart). — Massif de soixante-dix ans sur sable lehmeux du grès bigarré; IT. Classe de fertilité : perte d’accroisse- ment de 4862 à 1892—55.8 p. 100. Triage Hain (Spessart). — Massif de cent quarante ans sur sable lehmeux du grès bigarré; classe de fertilité entre IT et IV : perte d’accroissement de 4861 à 1888 — 50.32 p. 100. Triage Hundelshausen. — Massif de quatre-vingt-onze ans sur lehm sableux et pierreux du keuper; IV. Classe de fertilité : perte d’accroissement de 1862 à 1892 — 39.0 p. 100. L’enlèvement périodique de la couverture a donc eu une influence désastreuse sur l'accroissement du hêtre. Cela est prouvé d’une ma- nière éclatante par les taux précédents, qui montrent encore que le dommage causé est en général d'autant plus grand que le sol est plus pauvre. Quand, par exemple, les hêtres du Spessart accusent une perte d’accroissement de 40 à 55 p. 100 par suite de l’enlèvement annuel de la litière, ceux du Rhôn en sol basaltique très fertile ne subissent qu'un recul de 8 p. 100. Du reste, ÉBERMAYER a montré que l’ac- croissement ligneux se déprime d’autant plus que la couverture est ratissée plus souvent. Ainsi, dans le triage de Hain, la perte d’accroissement a été de 90.32 p.100 en vingt-sept ans sur la parcelle ratissée chaque année, et seulement de 10 p. 100 là où on n’enlevait la couverture que tous les six ans; dans le triage de Rothenbuch, les chiffres furent 41.87 p. 100 et seulement de 13.98 sur le sol ratissé tous les trois ans. Ces observations et d’autres semblables montrent que l'effet nui- sible de l'enlèvement de la couverture sur la végétation des arbres Ne vw — Tir LL _ : Los “ 528 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. est d'autant plus accusé que le sol est plus pauvre en principes nu- trihifs et plus perméable et que celle pratique se renouvelle plus sou- vent. On peut en déduire qu'il est bon de renoncer à l'enlèvement de la couverture sur tous les sols pauvres, surtout sur les sols sablonneux, tandis qu'il peut se pratiquer sans inconvénient, mais avec modéra- tion, sur des sols riches et compacts, le taux des principes nutritifs y étant plusieurs milliers de fois plus grand que dans la couverture. La dissolution des éléments précieux y est moindre aussi que dans les sols de la première catégorie, parce que infiltration de l’eau s’y fait à un bien moindre degré. L’enlèvement d’une plus ou moins grande partie de la couverture apparait comme une excellente mesure dans tous les cas où elle ac- quiert une épaisseur excessive, où bien où elle nuit aux réactions chimiques du sol. Comme on l’a vu plus haut (p.440), une trop forte couche de mousse nuit au sol en le privant d’une certaine portion des eaux de pluie, laquelle est absorbée par la couverture et ren- voyée par l’évaporation dans atmosphère. Suivant les conditions de climat et de sol, l’action nuisible de la couverture se fera déjà sentir dès que son épaisseur dépassera 9-10 centimètres. Si le tapis de mousse est plus épais, il sera toujours avantageux pour la végétation d'enlever l'excédent. Quant à la composition de la couverture, nous avons prouvé plus haut (p. 427) que le sol par elle se détériorait beaucoup si les détritus se transforment en humus brut. La suppression des accumulations de ce dernier doit fatalement exercer une influence très favorable sur la fertilité du sol forestier ainsi que toutes les mesures par lesquelles on empêche leur formation (p. 276). L'influence de l'enlèvement de la couverture dépend non seule- ment de la composition physique et chimique du sol, mais aussi de son épaisseur et de sa situation. Si le sol est superficiel, le dommage sera plus grand et inversement. On devra, d’ailleurs, considérer en même temps la richesse du sol en principes nutritifs. Ainsi, un sol basaltique superficiel souffrira moins du ratissage de la couverture qu'un sol profond de sable quartzeux qui, au bout de peu d’années, accusera le triste effet de cette opération. Elle sera plus admissible COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC, D29 s’il se trouve, à quelque distance, une nappe aquifère qui apporte aux racines, par capillarité, l’eau et les sels nutritifs. La. situation topographique est aussi à considérer. En terrain ho- rizontal ou peu incliné, le ratissage de la couverture n’amènera pas l'entrainement des éléments fins, ce qui arrivera, au contraire, sur les fortes pentes’. S'il s’est formé des accumulations d'humus brut qu’il y ait intérêt à enlever, on le era par larges bandes parallèles aux courbes de niveau. L’enlèvement de la couverture est moins nuisible sur les pentes humides exposées au nord et à l’ouest que sur les versants sud et est. Les sommets et les pentes exposés aux vents desséchants et in- complètement boisés doivent être particulièrement protégés contre tout enlèvement. En ces points, l'interruption de l’érémacausis par la sécheresse provoque facilement des accumulations d’humus brut. Si elles s'étendent sur de grandes surfaces, il faudra examiner s’il y a lieu de les enlever ou si l’on peut y obvier par des règles de cul- ture. Quant à l'extraction de la couverture qui s’accumule en quan- tités considérables dans les gorges étroites, il y a d’autant moins à s’en préoccuper qu'une opération de ce genre est plutôt utile que nuisible. Les exigences des végétaux, exigences variables suivant l'espèce et l’âge, sont aussi à considérer. En général, l'enlèvement de la cou- verture est moins nuisible à la végétation du résineux frugal qu'à celle du feuillu plus exigeant. Dans leur période d’active croissance (bois jeunes et moyens), les arbres souffrent bien plus de cette pratique que dans un âge plus avancé. Le maximum d’absorption annuelle varie avec les espèces d'arbres et arrive plus tard sur les sols pauvres que sur les riches. On-peut admettre en gros que le pin sylvestre absorbe le plus d’élé- ments minéraux entre quinze et trente ans, l’épicéa entre trente et cinquante, et le hêtre entre quarante et soixante. Pour le pin syl- vestre, par exemple, les différences aux divers âges sont telles que ses exigences à cent ans ne sont même pas la moitié de ce qu’elles hi WozLiny, Forschungen, elc., vol. XVII, 1895, p. 195. TOME 2. E. Wozzny, Forschungen, elc., vol. X, 1887, p. 3. MATIÈRES ORGANIQUES. 34 530 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sont à vingt ans, C’est donc dans la jeunesse que les massifs exigent le plus du sol, et c’est à cet âge que l’enlèvement de la couverture est le plus dommageable. C’est pour les peuplements exploitables qu'il l’est le moins. Ajoutons, cependant, que de tels peuplements qui doivent être régénérés dans quelques années doivent garder leur couverture et leur humus dans l'intérêt des jeunes semis (E. EBEr- MAYER), Le mode d'exploitation ne doit pas être perdu de vue dans cette question de la couverture. « Le taillis simple et le taillis sous-futaie ont besoin d’être plus protégés que la futaie, parce qu'ils ne produi- sent guère que des bois de faible dimension (rondins, fagots), exi- geant plus de principes minéraux que les gros fûts. En outre, comme la révolution est beaucoup plus courte, le sol est bien plus souvent découvert que dans la futaie. » (E. EBERMAYER.) D’après ce que nous venons de dire, les règles relatives à l’enlè- vement de la couverture peuvent être formulées à peu près comme il suit : L'enlévement de la couverture diminue généralement la fertilité du sol foreslier et n’est tolérable ou commandé que dans des condi- - tions déterminées. On doit ABANDONNER celle pratique partout où le sol est pauvre en principes nulrilifs, superficiel et perméable, où le terrain présente de fortes pentes, exposées à l’est el au sud, où les arbres sont dans la période d’uctive croissance, où les feuillus constituent le peuple- ment el où la révolution est courte (laillis simple ou sous-fulaie). On peut la TOLÉRER sur les sols compacts, profonds, riches en principes nutrilifs, sur les versants ouest ou nord, dans les peuple- ments âgés el serrés, dans les futaies lorsque les condilions de l’ac- croissement sont favorables. Elle semble cOMMANDÉE là où se trouvent dans les résineux des lapis de mousse trop épais, là où s'accumule la couverture dans les fonds de vallée el aussi là où se forme trop d'humus brut. En tout cas, on ne doil pas ratisser la couverture à de trop courts intervalles, et dans les points où, après un mûr examen des condi- lions locales, celle pratique peut étre admise, il faut la soumettre à une périodicité de quatre à six ans. Elle doit se limiter à l'enlève- COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 531 ment de la couverture fraïche en éprrgnant autant que possible la couche d'humus. Aussi ne doit-on employer que des instruments en bois; les râteaux de fer doivent étre proscrits. La meilleure époque de récolle esl un peu avant la chute des feuilles”. Puisque nous venons de parler du meilleur traitement de la cou- verture en forêt, il est intéressant de connaître comment on peut s'opposer à la formation de l'humus brut si nuis:ble au sol (p. 427). Il sera évidemment plus avantageux de l'empêcher de se constituer, eu égard aux difficultés de son enlèvement. Comme il se forme soit par manque, soit par excès d’humidité, on doit conclure que la densité du massif est tout d’abord à considérer. Il est clair que toutes les opérations conduisant à un état de massif normal empêchent la formation de l’humus brut. Donc, dans les forêts exposées à ce danger, il faudra éviter l’état clair, et, dans les endroits peu ensoleillés et où, pour ce motif, il y a souvent excès d'humidité, on devra plus espacer les arbres. Ce sont les conditions locales qui indiquent les mesures à prendre. Il faudra toujours se garer d’un desséchement de la couverture comme d’une excessive humidité. Si l’on obtient un taux moyen propice à l’éréma- causis, on favorise en même temps la vie animale qui vient activer encore la décomposition. Vient ensuite le travail du sol dans le but d’écarter l'influence dé- savantageuse de l’humus brut; mais, malheureusement, en pratique forestière on ne peut employer ce moyen en grand. Tout au plus s’en rapproche-t-on en laissant divaguer en forêt les porcs et les ru- minants. Le dommage que causent ces animaux en broutant ou en lésant les racines n’est rien à côté du service qu'ils rendent en fouis- sant et bouleversant le sol et en y laissant leurs excréments. Les chaulages, qui font passer en combinaison l’acide humique nuisible et qui favorisent l’érémacausis des matières organiques de la couverture, feraient aussi bon effet. On les a employés avec suc- cès dans quelques forêts danoises”. 1. On le comprend aisément si l'on réfléchit que, dans l'intervalle des deux récoltes, certains principes minéraux, la potasse notamment, sont dissous de la couverture par les eaux météoriques et s'incorporent au sol. 2. E. Ramanw, Forstliche Bodenkunde und Slandortslehre, Berlin, 1893, p. 457, 532 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Enfin, il est possible, quoique dans une mesure limitée, de lutter contre l’humus brut par un choix judicieux d’essences. Ce choix est commandé, il est vrai, par le sol et le climat; mais on peut, dans certaines circonstances, s’écarter de la règle ordinaire en vue du but à atteindre. Ainsi, dans les cantons exposés, on mettra le sol dans un meilleur état en cultivant le hêtre (dont les feuilles font facilement de l’humus brut) en mélange avec des essences de lu- mière (pin sylvestre) dont les détritus sont bien plus favorables à l'érémacausis. L'influence nuisible de lhumus brut sur le sol peut être aussi en- visagée au point de vue de l’alios qui entrave fortement la végétation, nous l’avons vu (p. 432), en s’opposant à la pénétration de l’eau et des racines dansles couches profondes du sol. C’est pour cela que dans la culture de l’ulios, il faut, avant tout, songer à briser cette couche ; c’est ainsi seulement qu’on paralysera ses inconvénients. Alors, les racines auront à leur disposition des zones plus profondes, plus riches en eau et en principes minéraux et la végétation des pins sylvestres et des épicéas, qui conviennent le mieux à ces pauvres sols, s’en trou- vera bien améliorée. Il y a aussi cette circonstance favorable que les amas d’eau lors des grandes pluies et le desséchement du sol par les sécheresses persistantes ne se présenteront plus après qu’on se sera débarrassé de l’alios. La rupture de l’alios peut s’opérer de diverses manières, soit en creusant des trous pour y mettre les végétaux, soit en le brisant par bandes ou en plein, soit en formant des plates-bandes”. Dans la culture par trous, on perfore la couche d’alios sur les points où l’on doit planter le pin sylvestre : les trous ont 30-40 cen- timètres ou plus. Ce procédé est le plus économique ; mais il ne rem- plit que très imparfaitement le but visé. Dans les premières années, il est vrai, les plantes se développent passablement; bientôt elles sèchent en cime et meurent peu à peu. Cela tient à ce qu'il se forme dans les couches profondes au milieu desquelles l'arbre se trouve et 1. H. Buncxknanor, Säen und Pflanzen nach forstlicher Praxis, Hannover, (855, p. 146; J, Wessezv, Der europaische Flugsand und seine Cultur, Wien, 1873, p. 203; E. Ramaxx, Zeilschrift für Forst- und Jagdwesen, 1886, fase. I. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 033 à partir des bords du trou, un manchon d’alios qui empêche la péné- tration des racines dans le sol (p. 429). Même si l'arbre réussit bien, on trouve à la prochaine exploitation, au lieu d’une faible couche d’alios, un trou profond ({opf), et toute nouvelle culture y est presque impossible sans un travail profond du sol. Il en résulte que cette culture par trous entraine une détérioration persistante du sol, Même si la première récolte réussit, les suivantes pâliront. Ce mode de culture de l’alios paraît donc devoir être rejeté. C’est seulement dans les sols de forêts qu’on améliore la végétation des massifs par ce procédé, parce que les feuilles mortes donnent d'assez grandes quantités de principes minéraux et que la composi- tion de l’humus devient plus favorable. Dans la culture par bandes, l’alios est brisé soit sur toute sa sur- face, soit par bandes. Le premier procédé n’est pas à recommander à cause de son prix, d'autant plus que le second, bien plus écono- mique, donne des résultats pleinement satisfaisants. Si l’alios est assez superficiel pour que la charrue puisse l’attein- dre et s’il n’est pas trop dur, on peut le briser aisément à la charrue. L’alios est ensuite ameubli avec une défonceuse et laissé en place ou ramené à la surface par une charrue retourneuse, ce qui vaut mieux ; car si l’on se contente de pulvériser l’alios sans le mélanger à l’autre sol, il se recimente bientôt. La culture par bandes avec mélange complet des couches du sol offre pour l’avenir une grande sécurité. Il se forme bien aussi, sur les bords des bandes, des lames (Tôpfe) d’alios, comme il arrive chaque fois qu’on le rompt; mais, au lieu de former une cavité close comme dans la culture par trous et de reconstituer une nappe con- tinue, une surface importante au milieu des bandes reste libre d’alios, et 1l se forme ainsi pour longtemps, sinon pour toujours, un sol de bonne qualité. Il ne faut pas que les bandes soient trop étroites, car il pourrait se faire que les larnes d’alios qui se forment sur leurs bords se rejoignissent. D’après les expériences faites à ce sujet, les bandes doivent avoir À mètre de large et mieux 2 mètres. Quand lalios est trop profond pour être atteint par la charrue, il faut faire le travail de main d'homme. On creuse d’abord des fossés de 1-2 mètres de large jusqu’à l’alios que l’on brise ensuite à la 1 an. 534 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. pioche et que l’on ramène à la surface. Quand l’alios est décomposé, on recomble les fossés en mettant l’alios par-dessus. Si les fossés sont près l’un de l’autre, on jette la terre d’un fossé dans celui qui précède et on le remplit de façon que l’alios soit à la surface. La culture par bandes, telle que nous venons de la décrire, mérite la préférence sur tous les autres procédés, parce que les arbres peu- vent enfoncer leurs racines dans les couches plus profondes et, qu’en outre, le sol s'enrichit des principes nutritifs solubles formés dans la décomposition de l’alios. Mais cette culture exige des terrains secs; dans les sols mouilleux, c’est le mode par plates-bandes qui est indi- qué, parce qu'il permet de s’affranchir de l’humidité en excès. Dans ce procédé, on dispose des plates-bandes de 4 à 5 mètres de large et l’on creuse de chaque côté des fossés de 1",25 à 1",50 de large allant jusqu’au-dessous de la couche d’alios. On jette la terre de ces fossés sur la plate-bande de façon que l’alios soit à la surface. On facilite ainsi l'écoulement de l’eau et on évite l’état mouilleux, mais on expose les cultures au danger du desséchement pendant les périodes sèches. Il peut ici encore se former des lames d’alios nouveau; mais, si les fossés sont assez larges, elles ne peuvent se rejoindre en une couche continue. On ne doit pas conseiller de boiser les surfaces où l’on rencontre « l’alios brun inférieur » (RAMANN'), à cause de la grande épaisseur de cette formation, de son gisement profond et de sa difficile décom- position. Rarement, on pourra briser ces couches dures; une simple culture par bande est de même insuffisante. C’est seulement sur les points où la nappe souterraine est dans de bonnes conditions que le produit en bois pourra payer à la rigueur les frais élevés de culture. On devra se demander si la culture agricole ne donnera pas un meil- leur revenu à frais égaux ou moindres. Il nous reste maintenant à décrire brièvement les meilleurs procé- 1. Cet « alios brun inférieur » se présente dans les bruyères mouilleuses, Il a pour caractéristiques sa dureté et sa couleur (du jaune au brun) plus claire que celle de l'alios ordinaire. Exposé à l'air, il résiste bien plus longtemps aux actions atmosphéri- ques; il se montre en couches bien plus épaisses que l'alios ordinaire qui le recouvre d'habitude en lames plus minces. COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC, 535 dés relatifs au défrichement des sols forestiers, à leur transformation en sols agricoles. Quand une telle transformation se présente comme avantageuse, les travaux ultérieurs de préparation du sol sont bien facilités si l’on abat les arbres tout d’une pièce avec leurs racines plutôt que de procéder par lexploitation rez terre à la hache ou à la scie suivie de l’arrachage des souches. Entre autres avantages’, le premier procédé a celui d'extraire du sol la plus grande partie des racines qui ne pourraient être enlevées qu'avec des frais dispropor- tionnés. L'exploitation du sol après l’arrachage des racines peut se faire de diverses manières. On est naturellement guidé dans ce choix avant tout par la composition du sol et celle de l’humus qui le recouvre. Meilleures elles sont, plus on pourra faire de fortes dépenses avec espoir de rémunération et inversement. Sur des sols de qualité moyenne (lehm sableux ou lehm), on sera généralement récompensé d’une préparation soignée par les récoltes ultérieures, tandis que sur les sols légers (sable lehmeux et sable) on ne rentrera dans ses frais que s’ils sont très modérés. La composition de l’humus doit aussi être prise en grande consi- dération. Si c’est du terreau neutre, la fertilité du sol est bien mieux garantie que si c’est de l’humus brut et de la tourbe, beaucoup plus rebelles à la décomposition et contenant des substances nuisibles telles que les acides de lhumus et les sels de fer au minimum. Il s'ensuit que les humus de ce dernier groupe donnent en se dé- composant moins de principes nutritifs que le terreau et ont une action nuisible sur la végétation tant qu’ils ne sont pas complètement transformés. Pour supprimer leurs inconvénients, il faut employer les chaulages et tous les procédés permettant la plus large aération de ces matières. La manière la plus simple de travailler le sol consiste à herser le terrain défriché au printemps avec une lourde herse sans le labou- rer et à y semer de l’avoine. On l’enterre par un hersage ; on ra- masse toutes les racines ; on herse encore une fois et on roule. On laboure à l'automne et au printemps suivant on peut y mettre à nou- 1. Voir K. Gayer, Die Forstbenulzung, Berlin, 1894. 4 à ‘4 D KT D RARES C} 4 1 L ca È % ÊTES . + ch ANA" nn 2 2 : é r rs À de L ; 536 __: DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. - veau de l’avoine. La troisième année, il est bon de semer du fourrage vert. On doit semer dru pour étouffer les mauvaises herbes. Pour les ensemencements ultérieurs, on choisit les récoltes qui convien- nent au sol. | Le labourage du terrain défriché, préalablement aplani, exige une dépense de force extraordinaire et l’emploi de charrues très solides ; et il est tellement inégal que ces instruments se brisent faci- lement. En même temps, il faut enlever les plus fortes racines et les pierres avec des outils à main. Le travail à la charrue serait très facilité si on parcourait le sol par sillons croisés avec des instruments tranchants, parce que, du moins, les racines ne briseraient plus les instruments. Après le labour on herse énergiquement. II est indis- pensable d'obtenir par les manipulations ultérieures un mélange parfait des éléments, et pour cela mieux vaut l’extirpateur que la charrue. Sur de bons sols on doit préférer à la charrue la culture par ban- des, bien qu’elle coûte plus cher. Suivant la qualité du terrain, le défoncement des bandes doit être fait jusqu’à 40, 90 centimètres. Par ce procédé, le sol est d’abord complètement purgé de racines et de pierres et, de plus, il est mis le plus vite possible en état de porter des récoltes. On creuse un fossé de 90 centimètres de large le long du champ et on transporte la terre à l’autre bout pour rem- plir avec elle, plus tard, le dernier fossé. Quand le fossé est achevé, on enlève et on met de côté la couche d’humus existant sur la bande que l’on va creuser et l’on jette le reste de la terre dans le fossé préalablement creusé qu’on recouvre avec la couche d’humus. On continue ainsi jusqu’à ce qu’on arrive à l'extrémité du champ. Les travaux doivent être faits au printemps, après les gelées, parce que le sol peut encore donner une récolte c2lte même année. C’est la composition du sol surtout qui décide de l’assolement. Comme première culture, l’avoine est la plus avantageuse, puis on meltra de l’avoine encore la seconde année, ensuite des fourrages verts, ou des pommes de terre, ou du seigle. En général, on fumera le sol la seconde année ou, au plus tard, la troisième avec des en- grais chimiques, parce que le fumier de ferme, les composts ne sont Gates 214 8$ COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION, ETC. 537 pas sur place et coûteraient Lrop cher. Le plus souvent on peut aisé- ment s’en passer, puisque le sol forestier renferme beaucoup d’hu- mus et de matières azolées. Il suffit d'apporter de la kaïnite et des scories phosphatées. C’est seulement quand il y a peu d’humus ou que les matières organiques sont difficilement décomposables qu’une addition d'engrais chimiques azotés (nitrate de soude) est nécessaire. S'il y a de l’humus brut ou de la tourbe, on devra chauler la pre- mière année. Si le champ n’est prêt que tard au printemps, le mieux est d’y mettre comme première récolte un mélange de seigle de bois (1 partie)" et d'avoine (3 parties). Le premier, on le sait, ne se met pas en épi dans l’année où on le sème, il ne fait que taller, et c’est la seconde année qu’il arrive à maturité. L'avantage de ce procédé consiste en ce que l’on a deux récoltes avec un seul ensemencement. 8. — Plantes à cultiver. D’après ce que nous venons de dire, l'influence des diverses cul- tures sur celles des propriétés physiques du sol (perméabilité, taux d’eau, température) qui règlent la décomposition des matières orga- niques et les pertes d'azote se comprend d'elle-même (p. 229), si bien que nous avons ici peu de chose à en dire. Rappelons d’abord ces deux points : l'humidité du sol et sa tem- pérature s’abaissent d'autant plus, la décomposition, par suite, est d'autant plus lente que les plantes sont plus serrées et se dévelop- pent plus vigoureusement, que leur saison de végétation est plus longue et que l'intervalle entre la récolte et l'installation d’une nou- velle culture est plus courte. Généralement l'intensité de l’éréma- causis en même’ temps que le lessivage des nitrates diminuent quand on cultive des fourrages permanents ; par contre, ces processus sont favorisés par les végétaux qui, comme les plantes sarclées et diverses plantes industrielles, sont largement espacés et sont buttés. Les au- tres végétaux se placent sous ce rapport entre ces deux extrèmes suivant le développement de leurs organes aériens et souterrains et suivant la durée de leur végétation. Il ne faut pas non plus perdre de vue l'influence de la durée de la 1. Seigle suffrutescent ({ Wald- oder Staudenroggen). 933 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. jachère. Pendant l’état de jachère, l’érémacausis est à son maximum ainsi que la dissolution des nitrates (p. 474). On doit évidemment tenir compte de tous ces facteurs pour que les principes nutritifs contenus dans les matières organiques agissent de la manière la plus parfaite et pour que les pertes soient le pi . possible évitées. Quant à l’assolement, il paraît rationnel de faire précéder les plantes dont la culture provoque une forte destruction de la matière organique par suite des ameublissements fréquents, de leur grand espacement ou de la jachère prolongée, de les faire précéder, dis-je, par des plantes telles que les céréales, qui exigent une riche provision de matières assimilables. Par la culture de papilionacées vivaces qui augmentent sensiblement la dose des matières organiques du sol (p. 265), on assurera la réussite d’une récolte subséquente particu- lièrement exigeante comme alimentation. En faisant alterner les plantes épuisantes et les plantes accumulatrices, sans parler d’autres procédés appropriés, on utilisera au mieux les forces productives du sol et on remplira un desideratum de l’agriculture moderne qui est d’abaisser les frais de production sans diminuer les rendements. Il va sans dire qu’on doit tenir compte aussi dans l’assolement de la durée des jachères. Quand cette durée est telle qu’on doive crain- dre une perte de principes nutritifs et qu’un changement dans la sole paraît inopportun pour des raisons économiques, il faut employer les moyens précédemment indiqués. Enfin, n'oublions pas que la culture de végétaux pérennes peut, à côté de multiples avantages, avoir aussi des inconvénients pour la fertilité des sols, surtout s’ils sont compacts. L'insiallation d’oseraies, de luzernières, etc., a sur de tels sols une action défavorable, parce que, ne subissant aucune culture pen- dant plusieurs années, ils deviennent de plus en plus serrés ; finale- ment, la quantité d’air nécessaire pour une décomposition normale des matières organiques y fait défaut et alors entrent en jeu les pro- cessus de désoxydation qui restreignent la fertilité. C’est pour cela que sur des terrains de cette nature il faut éviter de cultiver des plantes qui aient une trop longue végétation. CHAPITRE HI ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS 1. — Excréments des mammifères domestiques. Les excréments des mammifères domestiques (fèces et urine) qui sont employés pour engrais, soit directement comme dans le pâturage et le parcage, soit le plus souvent indirectement en mélange avec diverses lilières, sous forme de fumier, ont une composition physi- que et chimique différente suivant le genre auquel ils appartiennent, suivant aussi la qualité et la quantité des litières. Cette composition importe pour l’érémacausis. On peut admettre, d'après A. MAYER’, que ces excréments ont en moyenne la composition centésimale suivante : MOUTON. CHEVAL. ÉLÉMENTS. 1.5-2.8| 9-14 0.3-0.4| 0.5-0.6 1.0-1.5| 34 | Contenant en acide phos- | | | phorique 0.3 = .32| .3| 0.17 0.1 |0.1-0.2 Et en potasse 19) 2: = : ,6| 0. - . = 0,7-0.8| 0.5 | Abstraction faite des variations dues à l’alimentation et à la faculté 1. À. Maven, Die Düngerlehre, Heidelberg, 1895. [b 1 40 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. assimilatrice des animaux, on peut déduire de ces chiffres qu’en gé- néral le fumier de mouton est le plus pauvre en eau, mais le plus riche en matières nutritives; vient ensuite celui de cheval, tandis que le fumier de vache et plus encore celui de porc contiennent la plus grande quantité d’eau et la moindre de principes organiques, miné- raux et surtout azotés. L’intensité de la décomposition est corrélative de la concentration des excréments ; le fumier de mouton et celui de cheval se décomposent le plus vite; celui de vache vient ensuile, et c’est le fumier de porc qui est le plus rebelle. Les propriétés physi- ques et chimiques des excréments interviennent dans l'explication de ces différences. La décomposition rapide du fumier de cheval, si rapide qu’elle provoque dans le tas un fort échauffement, tient à ce que les fèces forment une masse poreuse, peu cohérente. De même si le fumier de mouton se fait vite, cela n’est pas dù seulement à sa grande concentration et à la richesse de l’urine en azote, mais encore à ce que le crollin contient peu d’eau et offre une large surface à l'air. La décomposition difficile du fumier de vache tient d’abord à son état aqueux et gluant qui, par le desséchement, forme une croûte impénétrable à l'air. Il en est de même pour le fumier de porc. Le taux d'éléments précieux dans les excréments dépend de la quantité et de la composition de la nourriture et des substances em- ployées à la formation des produits animaux (viande, graisse, lait). En général, le fumier est d’autant plus riche en principes nutritifs que les aliments sont eux-mêmes plus riches sous ce rapport et inver- sement. Ceci est vrai pour les quantités non seulement relatives, mais encore absolues des matières excrémentitielles, comme pour les animaux faisant de la viande ou du lait, parce que, d’après une loi générale de nutrition, un surcroit de production correspond à une transformation égale de matières dans le corps des animaux. La faculté assimilatrice des animaux est en rapport avec le taux des éléments contenus dans les excréments. Chez les animaux de trait (cheval, bœuf) et chez ceux qui produisent de la laine (brebis à laine) — on peut les mettre dans ce groupe, puisque le taux de ma- tières contenues dans la laine est très faible par rapport à celui du fourrage — tous les principes azotés et minéraux reparaissent dans ACTION DES ENGRAIS D’ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. D41 les excrétions. Chez les bêtes jeunes, ou à lait, ou à l’engrais, ou en gestation, une certaine partie des éléments de la nourriture est em- ployée à produire des muscles, de la graisse ou du lait et ne se retrouve pas dans les déjections. Quant à la composition des excréments, il importe de savoir que les éléments azotés des fèces sont principalement sous forme de ma- tières albuminoïdes et de leurs dérivées qui se décomposent bien plus difficilement que celles de l'urine presque entièrement formées d'acide hippurique (herbivores) ou d’urée (porc). Ces principes, très vite après l’évacuation, subissent une fermentation (p. 23) qui les transforme en carbonate d’ammoniaque volatil, d’où perte d’un aliment de première importance. La décomposition est d’autant plus rapide que l’urine est plus concentrée. C’est pourquoi la fermentation de l'urine de cheval et de mouton se fait bien plus vite que celle de vache et de porc. En considérant les autres éléments, on arrive à la conclusion que l'urine est plus importante dans la nutrition des plantes que les dé- Jections solides, parce qu’elle est plus riche en principes azotés et potassiques assimilables ; l’acide phosphorique, chez les herbivores, se trouve uniquement dans les fèces. Donc, un fumier complet, doté de toutes les substances nutritives, doit contenir les deux sortes de déjections. Quand le fumier renferme principalement de l'urine, il agit par ses propriétés nourrissantes ; s’il est surtout riche en excré- ments solides, étant donnée la décomposition bien plus lente de ses éléments, c’est avant tout sur la formation de l’humus qu'il influe. Les déjections sont presque toujours accompagnées de litières for- mées de pailles ou d’autres déchets végétaux de composition analo- gue. Ces matières ne servent pas seulement à absorber les excré- ments, à les enrober et à faire ainsi qu’il ne s’en perde pas; elles ont aussi pour but de modérer leur décomposition et d’enrichir la masse en substances formatrices d’humus. Relativement aux déjections animales, les litières ont une bien plus faible aptitude à la décomposition, qui s’augmente dès qu’elles sont mélangées à ces déjections. Elle est du reste très variée. Parmi les litières les plus employées, la paille des légumineuses, à cause de sa forte teneur en matières azotées, se décompose le plus facilement ; 542 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. on l’utilise mieux comme fourrage. La paille de céréales et de colza, moins azotée, est moins altérable, et la litière forestière (feuilles et « aiguilles des arbres) l’est encore moins. C’est la litière de tourbe qui, « malgré son taux élevé d’azote, est le plus rebelle à la décomposition, si bien que l’azote et les principes minéraux de la tourbe ne doivent pas entrer dans le calcul de la richesse du fumier (p. 166 et 286). Ce n’est pas le cas des autres litières qui, outre qu’elles augmentent le taux du fumier en matières organiques formatrices d’humus, con- tribuent encore, par les principes assimilables naissant dans leur décomposition, à élever le taux des éléments nutritifs de la masse. Les chiffres suivants de A. Mayer’ donnent une idée approchée du taux centésimal de matières organiques et d’éléments nutritifs apportés au fumier par les litières : PAILLE FEUILLES | AIGUILLES d'arbre | fraiches d’épicéa et de pin sylvestre ÉLÉMENTS. [prove à l'au- fèves tomne, 14-22 18 14 13-15 47,5 76 18 79-81 78-81 52 : 157 1.4 2.0 . 0.8-1.4 | 0.5-0.9 Potasse .D-1. c 1.8 0.3 |1.7-2.3 «D |0.15-0.4| 0.03-0.1 Acide phosphorique . . .] 0.2-0.: Æ 0.3 0.1 |0.8-0.5 2 0.2-0 3 | 0.1-0,2 Cendres 3- 3 5-9 3.9 |4.6-7.0 | 3. 4.2-5.7 0.8 + La valeur variable des litières tient non seulement à leur teneur en azote, mais encore à leur plus ou moins grande aptitude à absor- ber les déjections et à former avec elles une masse bien liée. A cet égard, c’est la paille des céréales qui convient le mieux parce que, en raison de ses tiges creuses et des vides qu’elles maintiennent dans leur masse, elle absorbe le mieux les matières volatiles pré- cieuses et que, d'autre part, à cause de la consistance des chaumes, elle amalgame très bien les excréments solides. Les feuilles et les aiguilles de la couverture forestière sont bien loin de la paille sous ce rapport, non pas déjà qu’elles soient moins aptes à absorber {. À. Mayer, Lehrbuch der Agricullurchemie, Heidelberg, 1856, vol. Il, p. 186 ele ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS., D43 l'urine, mais parce que, gisant en une couche compacte, elles for- ment avec les excréments une masse difficilement perméable et que, d'autre part, elles sont peu cohérentes et difficiles à charger et à manipuler. Par animal adulte la quantité de htière à donner par jour est : MOutAn TAC 0,25-0,35 kilogr, Cheval ET 2,00-3,00 — MACON MS moe 4,00-6,00 — OS IE NA RE 3,90-4,00 — S'il s’agit de litière de tourbe il faut : SAUT NN CAMERA » CNEVARR EE T AN 2,50 kilogr. MACHOGe a Per 3,00-3,50 — AA EP ERMENQRES E 1,00-2,00 — Dans les années où la paille est chère il est bon de mélanger à la paille de là tourbe qui absorbe principalement les déjections liquides. Il faut évidemment avoir soin que le sol des écuries, que les rigo- les emmenant l’urine, que le sol des places à fumier, ete., soient imperméables *. Le fumier, ainsi traité, s’accumulant peu à peu en grosses masses, subit, sous l'influence de nombreux microorganismes, des modifica- tions qui présentent, outre leur intérêt scientifique, un intérêt prati- que tel que la composition et l’action du fumier diffèrent énormé- ment suivant les réactions qui s’y passent. Si l’on n’emploie généralement pas le fumier à l’état frais, c’est parce qu’il ne contient qu’une faible quantité de matières assimila- bles, quantité qui s’augmente à mesure que les matières organiques se décomposent. Le fumier n'aura de puissance nutritive sérieuse que quand sa décomposition aura atteint certaines limites. Mais jamais elle ne doit aller si loin que la plus grande partie des matières organiques soit perdue par volatilisation ; car le fumier n’agit pas seulement par ses éléments solubles, il forme aussi de Phumus par 1. Voir F. ENGEL, Handbuch des landwirthschaftlichen Bauwesens, Berlin, 1895, p. 409, 544 - DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ses éléments insolubles; pour qu’il améliore ainsi le sol d’une façon durable, il faut conserver dans le fumier une plus ou moins grande partie des matières organiques. A cet égard comme à celui du degré de décomposition auquel lex fumier doit être employé, ce sont les exigences des végétaux et la nature du sol qui doivent décider ; il est très désirable aussi — étant donné que dans les transformations chimiques de la masse il se. produit facilement des pertes notables en principes importants, sur- tout en azote — de découvrir des moyens permettant de régler complètement les processus de décomposition du fumer. La règle générale à observer résulte des considérations exprimées. au début de ce chapitre. Il faudra évidemment faire en sorte que, dans le traitement du fumier, l’érémacausis seule puisse se mani- fester et écarter toutes les circonstances qui pourraient amener la putréfaction. C’est seulement ainsi qu’on obtiendra un fumier conte- nant les éléments nutritifs à un état facilement assimilable et four- nissant de l’humus apte à se transformer en combinaisons, chimiques simples, tandis qu'avec le mode par putréfaction une plus ou moins grande portion des matières organiques passe en composés peu ou point altérables et les éléments nutritifs y contenus ne sortent pas leur plein effet (p. 12). Ajoutons que dans l’érémacausis il ne se dégage pas d'azote élémentaire ou très peu, et que, dans la putré- faction au contraire, ce processus a lieu sur une assez grande échelle et amène une diminution notable de la provision d’azote (p. 18). Il n’est pas démontré jusqu'ici que les bactéries dénitrifiantes décou- vertes par R. Burt et A. SrurTzER (p. 48) dégagent de notables quantités d'azote libre sous l’influence de l’oxygène (érémacausis) ; c’est d'autant plus invraisemblable que la nitrification est lente dans une masse exclusivement formée de matières organiques et n’est rien auprès de la production d’ammoniaque, qui est surtout impor= tante dans ces conditions (p. 148). Dans le fumier en tas il y a d'ordinaire deux réactions, l’éréma- causis dans les couches supérieures, poreuses, perméables et la pu- tréfaction dans les couches inférieures, compactes, généralement saturées d’eau et de purin. Elles le sont même quand l’eau qui tombe dans la cour est détournée de la place à fumier et qu’il n’ar- Lg É Le ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. D49 rive à la masse que l’eau apportée par les précipitations atmosphéri- ques, parce que l’humidité pénétrant dans le fond se rassemble sur la sole imperméable et de là ne gagne que très lentement la surface inclinée, à cause de la faible perméabilité des couches du fumier. Des pertes sérieuses par dégagement d'azote élémenta' re dans les zones soumises à la putréfaction sont alors inévitables, les nitrates dissous dans les couches supérieures el amenés vers le fond étant détruits par les bactéries dénitrifiantes qu’il contient (p. 90). De ces considérations on pourrait conclure qu'il est très avan- tageux de mettre le fumier dans un état aussi meuble que possible puisqu'on favorisera ainsi l’accès de l’air nécessaire à une active érémacausis. Ce serait cependant une mauvaise opération parce qu’une grande partie de la matière organique serait détruite par la combustion extrêmement rapide, sans parler des autres pertes pro- voquées par l’excessive perméabilité de la masse. Pour parer à ces inconvénients, il faudra limiter l'accès de l'air dans les tas de fu- mier en disposant des couches compactes de facon que l’érémacausis puisse s’y faire lentement, mais que l'air arrive quelque peu et em- péche la putréfachion de se produire. On atteint sûrement ce résultat en répandant et tassant le fumier régulièrement chaque fois qu’on vide les écuries et en ayant soin qu'il n’y ait pas d'humidité en excès dans les interstices. Sous ces conditions le fumier reste perméable à de grandes profondeurs et il n’y à pas de putréfaction. D’ailleurs, on pourra modifier les moyens à employer d’après les usages suivis par les praticiens. Le maintien d’une certaine quantité d’air dans le fumier n’est pos- sible que si l’on emploie comme litière de la paille de céréales en quantité suffisante. Avec la litière forestière on obtient presque tou- jours une masse imperméable. Le meilleur moyen d'entretenir une humidité égale et modérée est de diminuer artificiellement l’évapo- ration et d'empêcher l’arrivée de l’eau en excès. Ces deux conditions sont remplies quand le fumier reste sous les animaux parce qu’il est _soustrait à l’évaporation et aux précipitations. Sous le rapport de 1. Voir R. Heinricn, Zweiter Berichl über die Verhällnisse und Wirksamkeit der landwirthschaftlichen Versuchsstation zu Rostock, Berlin, 1894, p. 239. MATIÈRES ORGANIQUES. 35 546 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. l'humidité le fumier en plein air est moins bien placé, car il y a de. grandes variations suivant les circonstances atmosphériques et, de plus, il se produit dans les couches profondes des décompositions anormales. Pour maintenir une humidité sensiblement égale, il est utile d’humecter la masse à l'entrée des périodes sèches ou de la couvrir d’une mince couche de paille, de terre ou de tourbe et, pour enlever l'excès d’eau des couches inférieures, il faut user de procé- dés permettant l’égouttement aussi parfait que possible des couches profondes. On suffirait à toutes les exigences en entassant le fumier soit à l’étable, soit sur la place à fumier, sur une grille en ménageant des- sous un espace qui serait muni sur le fond et les côtés de parois imperméables. Le fond serait en pente pour que le purim püt être emmené par une rigole. On pourra ainsi parer à l'accumulation de liquides en excès et permettre à l’air de pénétrer la masse dans cer- taines limites. Avec les procédés ordinaires où le fumier repose di- rectement sur une sole imperméable, l’égouttement des liquides accumulés au fond est empêché, même si la sole est en pente, parce que le mouvement latéral du purin est extrêmement difficile. Le mélange des diverses sortes de fumier semble commandé si l’on veut obtenir des conditions favorables à l’érémacausis, à moins que des circonstances particulières (divers états physiques des sols) n’indiquent comme plus rationnelle la mise en tas par sortes dis- ünctes. Les fumiers aqueux de vaches et de pores donnent facilement lieu aux réactions de la putréfaction. Si on les mélange avec du fumier de cheval plus sec et plus perméable, on a une masse qui se prête bien mieux à l’érémacausis. Le traitement rationnel des tas de fumier exige le maintien d’un taux moyen d'humidité ; donc, quand la sécheresse se met sur pied, sécheresse aussi nuisible que l’excès d'humidité, il faut arroser la surface avec le purin. On ne devra pas se contenter d’observer les règles précédentes qui ont pour but d’amener des conditions normales de décomposi- tion, parce qu’elles n’obvient pas du tout aux pertes d'azote et qu'avec elles on n’obtient pas encore la régularité désirable dans la marche de l’érémacausis. Pour atteindre ces buts il faut employer des pro- ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 947 cédés chimiques sans lesquels il n’est pas de traitement rationnel des fumiers. Les méthodes de conservation ont pour but, d’une part, d’empé- cher la perte d’azote, provoquée par la volatilisation du carbonate d’ammoniaque qui se forme dans la fermentation des éléments azotés de l’urine et peut-être par sa dissociation à l’état d’azote libre, et, d'autre part, de régler le cours de la décomposition. Les moyens employés atteignent ces buts soit partiellement, soit complètement. Voici les conclusions qu’on peut tirer jusqu'alors des recherches faites sur ces réactions extrêmement complexes. L'emploi d'acides minéraux (acides sulfurique et chlorhydrique) est tout indiqué pour la fixation du carbonate d’ammoniaque volatil ; bien que le but visé soit ainsi parfaitement atteint, on doit renoncer à l'emploi général de ces acides à cause du danger qu’ils présentent et du dommage qu’ils causeraient aux parois des récipients du purin. Quand au gypse usité depuis longtemps dans ce but, les expé- riences ont donné des résultats contradictoires. Tandis que celles de H. Grouven (Landw. Centralblatt von Wilda 1861, p. 283) et de R. He:nricH montraient que la transformation prévue du carbonate d’ammoniaque et du sulfate de chaux en sulfate d’ammoniaque et en carbonate de chaux était parfaitement obtenue par le mélange du gypse avec le fumier, d’autres expérimentateurs, tels que H. IMMEN- DORFF, MünTz et GIRARD, ainsi que A. STUTZER et ses collaborateurs, ont trouvé que le gypse ne pouvait fixer qu’une certaine partie de l’'ammoniaque et qu’une forte portion se volatilisait. On peut en con- clure que très probablement des circonstances extérieures influent sur l'efficacité du gypse, sans doute déjà son état et la façon de l’employer. 1. Voir surtout : F. HozperLeiss, Un'ersuchungen über den Slallmist, Breslau, 1889. — Münrz et Giranr, Die Slickstoffverluste und deren Verminderung. Analyse par H. Vocez. — H. Immenvonrr, Journal fur Landwirthschaft, vol. 41, 1893, p. {. — R. Heixnicu, Zweiler Bericht üwber die Verhaältnisse und Wirksamkeil der landw. Versuchsslationen zu Rostock, Berlin, 1894, p. 239. —R. Burt, E. HERFELDT et À. STuTzER, Journal fur Landwirtschaft, vol. 43, p. 1. — À. SruTzen, Leilfaden der Düngerlehre, Leipzig, 1895, p. 34. — J. Küxie, Wie kann der Landwirth den Stickstoÿ-Varralh in seiner Wirlhschaft erhalten und vermehren ? Berlin, 1893. — À. Mayer, Die Düngerlehre, Heidelberg, 1895, p. 53. D48 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Le but visé pourra être atteint si le gypse est à grain fin et s’il reste longtemps en contact avec le fumier ; cette dernière condition est le plus facilement obtenue en le répandant déjà dans l’étable par-dessus le fumier. On se demande si le sulfate de chaux ne perdrait pas plus ou moins de son influence par ce fait qu'il se réduit dans le fumier soumis à la putréfaction (p. 195). En outre, il peut intervenir des réactions qui gênent la fixation de l’ammoniaque par le gypse. C’est le cas s’il y a du carbonate de chaux qui provoque un retour partiel du sulfate d’ammoniaque en carbonate d’ammoniaque, si bien que les quatre sels, sulfate et carbonate de chaux, sulfate et carbonate d’am- moniaque, peuvent coexister (Münrz et GIRARD). Un ne peut encore dire si ce fait est lié à des conditions déterminées. Il est possible enfin que le pouvoir de fixation du gypse subisse une diminution, seulement alors si la volatilisation de l’ammoniaque est favorisée par de hautes températures et si l’eau de dissolution est en faible quantité, tandis qu’il aura sa pleine action par des températures basses et avec un taux d’eau élevé (A. MAYER). Il serait plus simple et peut-être plus conforme à la réalité d'admettre que le gypse, vu sa lente action due à ce qu’il est difficilement soluble, ne peut fixer assez vite l’ammoniaque quand les éléments azotés de l’urine se décomposent activement, mais peut très bien suffire dans le cas où les réactions se font plus lentement. Concluons de tout ceci que l’in- fluence du gypse sur la fixation de lammoniaque n’est pas encore suffisamment éclaircie et que, d’après les résultats obtenus jus- qu'ici, on doit attribuer à ce moyen de conservation un rôle douteux. Le produit vendu par les fabriques d’engrais sous le nom de su- perphosphale gypseux à une action beaucoup plus sûre que le gvpse. C’est un superphosphate avec un fort taux de gypse ; on ajoute au phosphate tant d’acide sulfurique qu’une partie notable (6-13 p. 100) de l'acide phosphorique se trouve à l’état libre. Les expé- riences de H. IuMENDoORFF et de À. STUTZER montrent que l’ammo- niaque est fixé de la manière la plus parfaite; sous ce rapport le superphosphale gypseux doit être regardé comme le meilleur pro- cédé de fixation. L’acide phosphorique passe à l’état de phosphate d'ammoniaque qui doit, avec le sulfate de chaux existant en grande _ iii ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 249 abondance, se transformer en formant du phosphate acide et basique de chaux’. Les réactions sont représentées par les équations sui- vantes : 9 AzH, H, PO, + CaS0, + 2H,0 — (AzH,), S0, + CaH, (PO,),, H,0+H,0: (1) (Az H,), HPO, + CaS0, + 2H,0 — (AzH,), S0, + CaHPO* + 2H,0; (2) 9 (A2H,)° PO, + 3CaS0, — 3 (AzH,), SO, + Ca° (PO,).. (3) La moins-value résultant de la formation du phosphate neutre et basique de chaux n’est rien à côté de l'utilité qu'offre l’emploi du superphosphate gypseux pour fixer l’ammontaque. Une retransfor- mation du sulfate d’ammoniaque suivant le mode indiqué plus haut ne serait pas à craindre ici parce que l’action du carbonate de chaux est annihilée par l'acide. Avec un taux assez fort (0.4 p. 100 et plus d’acide phosphorique soluble dans l’eau) non seulement, d’après A. STuTzER, les bactéries ammoniacales vivantes sont tuées, mais encore leurs spores (p. 97), ce qui interrompt la fermentation de l’ammoniaque et limite indirec- tement la perte de cet élément. Mentionnons encore que le superphosphate gypseux qui ne ren- fermerait pas d'acide phosphorique libre et contiendrait surtout peu d'acide phosphorique soluble dans l’eau, dont l'acide phosphorique serait au contraire pour la plus grande partie à l’état tribasique, ne pourrait fixer le carbonate d’ammoniaque. La quantité de superphosphate gypseux qui doit être répandue chaque jour dans les écuries est, d’après les expériences précédentes et suivant le taux du produit en acide phosphorique soluble : Boustun cheval ." "+." 0,40-0,75 kilogr. POUTIDNEMNACRe EC ete. 0,50-1,00 — ÉQurun porc EN 0 Ur 0,10-0,20 — Pour dix moutons . . . . . 0,75-1,50 — A défaut de superphosphate gypseux on pourra employer avec un 1. L. Scnccur, Die Fabrikation des Superphosphats und Thomasphosphatmehls, : Braunschweig, 1894, p. 108. _ r 550 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. égal succès du superphosphale ordinaire ayant environ 16 p. 100 d'acide phosphorique soluble et en même quantité que le superphos- phate gypseux à taux élevé. H. VOGEL' à recommandé pour la fixation de l’ammoniaque le phosphate dicalcique sous la forme dite gypse précipité (mélange de gypse précipité avec phosphate bibasique de chaux). L'auteur est parti de lhypothèse que l’acide phosphorique libre et le phosphate monocalcique du superphosphate gypseux acide seraient vite trans- formés en phosphate dicalcique dans la masse en fermentation et que celui-ci serait avec le gypse l'élément actif du superphosphate evpseux. Mais les essais de H. IMMENDORFF et À. STUTZER ont prouvé que le phosphate dicalcique ne remplissait pas le but et que seul l'acide phosphorique soluble dans l’eau était l'élément actif de ce superphosphate. Dans les cas où l’on a besoin aussi d’une fumure potassique on recommande, au lieu des sels précédents, les sels de potasse (kaïnite, carnallite, krugite) qui renferment la potasse et la magnésie sous forme de sulfate et de chlorure. Ces sels ont accusé beaucoup moins d'aptitude à fixer l’ammoniaque que le superphosphate gypseux. Cela se comprend si l’on considère que, dans la transformation du carbonate de potasse avec le sulfate de potasse et de magnésie, il s'établit bientôt un équilibre chimique et que les sels, ne pouvant achever leur transformation, restent tels quels, le carbonate d’am- moniaque aussi, qui alors se volatilise. « Quand une partie de ces sels volatils à disparu, par leur disparition même léquilibre chi- mique sera détruit et se reformera peu à peu à l’aide du carbonate de potasse et du sulfate d’ammoniaque précédemment formés. » (A. Mayer.) Si les divers sels de potasse ne peuvent fixer qu’incom- plètement l’ammoniaque, ils ont en revanche le pouvoir de diminuer indirectement la perte d’azote, en ce sens qu’employés en quantité suffisante ils entravent la fermentation ammoniacale. Enfin, des recherches de F, HozperLEIss on doit conclure qu'outre 1. Journal für Landwirthschaft, 36° année, 1888, p. 247. — Die Wirkung der gas-formigen Zersetzungs producle faulender organischer Subslansen auf die ’10sphorsaure und ihre Kalksalze, Berlin, 1593. . +. û ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. DD1 les moyens chimiques précédents, la terre peut diminuer les pertes d'azote si on l’emploie en couverture. Pour la conservation de l’a- zote la couverture de terre s’est montrée si appropriée que l’azote a été complètement ou presque complètement retenu. Semblable se- rait l’action d’une couverture de tourbe qui possède à un haut degré (on l’a vu ailleurs, p. 361) la facullé d’absorber les gaz et, par conséquent, le carbonate d’ammoniaque qui est volatil. On n’a pas encore établi si la tourbe exerce une action sur la formation même de l’ammoniaque par son emploi comme absorbant de lurine. Pour apprécier lutilité pratique des divers procédés de conserva- tion il faut envisager, outre leur action sur la fixation de l’ammo- niaque, celles qu'ils exercent sur la forme de l’azote restant dans le fumier. Car les pertes d'azote peuvent être supprimées non seule- ment par la fixation du carbonate d’ammoniaque volatil, mais encore par la transformation de cet azote en principes non volatils (nitrates et nitrites) ou par l’arrêt de la fermentation. A cet égard les re- cherches, rapportées plus haut (p. 183), relatives à l’influence des sels sur la décomposition des matières organiques, de même que les essais de F. HoLperLeiss sur le fumier de ferme, offrent des données précieuses. On peut admettre en général que les phosphates et les sulfates favo- risent la nitrification si, par leur addilion, la concentration de la solu- tion ne dépasse pas une certaine limite (p. 194). Cela concorde avec l’observation de F. HoLDEFLEISs que, dans le fumier traité au super- phosphate gypseux, 1l y avait une assez forte dose d’acide nitrique qui s’était sans doute formé par oxydation de l’ammoniaque (p. 6). Par contre, la kaïnite, qui renferme, à côté du sulfate de potasse et de magnésie, du chlorure de magnésium, a, dans ces expériences, en- travé non seulement la nitrification à un degré extraordinaire, mais sensiblement aussi la formation d’ammoniaque. La contradiction entre ce résultat et ceux d’autres expérimentateurs n’est qu’appa- rente et s'explique par ce fait que les chlorures (de magnésium et de sodium), vu leurs propriétés antizymotiques, affaiblissent et arré- tent les réactions chimico-physiologiques (formation d’ammoniaque et d’acide nitrique) reposant sur l’activité des micro-organismes, et que tous les sels solubles ont le même effet quand ils se trouvent FEES NN ER OR D & 292 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. en solution assez concentrée. Aïnsi semble justifiée cette 1Éèse que, - dans les expériences de HoLperLeIss et autres, les influences af buées aux sels de potasse et de magnésie peuvent aussi bien et même plus justement être provoquées par les chlorures ou par la. forte concentration de la solution saline. Des raisons analogues É. méêénent en même temps à celte conclusion que les expériences. actuelles sur la conservation des fumiers, expériences où les ma- tières employées consistaient en un mélange de divers sels et où on ne tenait presque aucun compte de la concentration des solu- tions, sont absolument insuffisantes pour éclairer la question. On n’en possédera toutes les faces que quand on aura déterminé sépa- rément les influences de chaque sel suivant la concentration de leur solution. Pour le moment, en attendant le résultat des recherches exactes à poursuivre dans cette direction, on doit admettre, en se fondant sur diverses expériences de laboratoire, que les sulfates faiblement con- centrés (sulfate de potasse, sulfate de chaux et de magnésie) favori- sent la nitrification, mais qu'ils l’arrêtent, comme tout autre sel, à l'exception naturellement du sulfate de chaux, difficilement soluble, quand ils sont en solution trop concentrée (p. 195). Remarquons ce fait, affirmé par F. HoLpEFLEISs et qui concorde avec les observations de P. Picuarp (p.147), que le fumier recouvert de terre a éprouvé une forte nitrification. Elle était plus intense dans le fumier simplement humecté de purin et par conséquent plus per- méable que dans le fumier saturé ; mais, même dans ce dernier, elle était encore considérable. La nitrification fut même plus accusée avec la couverture de terre qu'avec l’addition de superphosphate gypseux. Des faits que nous venons de résumer, il ressort que les divers procédés de conservation employés jusqu'ici parent aux pertes d'azote dans le fumier de ferme de façons fort différentes, soit : | 1° En fixant le carbonate d’ammoniaque volatil ; 2° En favorisant la nitrification ; 3° En diminuant l’activité des micro-organismes producteurs d’ am- moniaque et de nitrate. Ces trois modes devront être spécialement étudiés dans les recher- 4 à « LL dé NT LR ce. » A R sn - D V1 " ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 593 ches à faire sur ce sujet pour qu’on voie clair dans ces réactions si im- portantes pour la pratique. Les résultats acquis concernant l'influence de certains procédés sur les pertes d’azote et la nitrification dans la décomposition du fumier donnent déjà des indications quant à leur action sur le dégagement d'azote libre. On ne peut douter qu'il n’ait lieu plus ou moins abondamment dans les tas de fumier quand ils sont saturés et, par suite de Pab- sence d’air, Soumis à la putréfaction. Une autre question est de sa- voir si, même avec l'accès de l’air, les bactéries dénitrifiantes décou- vertes par A. SruTzer et R. Burrt (p. 48 et 89) peuvent agir assez activement. D’après les recherches de HoLpErFLeïss, on doit répondre catégoriquement non à cette question, parce que c’est Justement quand la formation des nitrates se faisait sur la plus grande échelle qu’il y avait le moins de perte d’azote ou même pas. Si, comme on l’a vu, en couvrant le fumier avec de la terre ou en le mélangeant à du superphosphate gypseux, il s’y forme d’assez grandes quantités d'acide nitrique, on devrait constater, surtout avec l’emploi de la terre‘, un dégagement plus ou moins fort d’azote élémentaire, si les bactéries dénitrifiantes avaient manifesté une activité notable. Comme ce n’est pas le cas, comme l’azote est resté parfaitement fixé, on devra conclure que, du moins dans les circonstances en question, on ne doit attribuer aucun rôle aux bactéries dénitrifiantes. Il reste maintenant à rechercher dans quelle mesure la décompo- sition des principes carbonés du fumier, ceux qui forment surtout l’humus, est influencée par les divers procédés de conservation. Avec le mode habituel, qui se passe de ces procédés, le fumier subit une perte importante en matière organique, perte qui est de 30 à 60 p. 100 et plus, suivant les circonstances extérieures et la durée de la décomposition. Une diminution si rapide des éléments formateurs de l’humus sera d'autant moins à souhaiter qu’on attribuera plus de prix, suivant les cas, à Paction améliorante du fumier. C’est pour 1. Quant au fumier traité avec le superphosphate gypseux, on pourrait objecter que, par suile de la réaction acide due à l'acide phosphorique soluble, l'activité des bactéries dénitrifiantes est suspendue. 554 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. cela que, dans maintes circonstances, la question des moyens à em- ployer pour empêcher ces pertes prend une importance toute spé- ciale, Par l’addition d’acides et de sels à doses suffisantes pour donrier à la masse une réaction acide et à la solution une assez forte con- centration, on atteint le but cherché, comme on l’a montré plus haut (p. 183 et 192). Bien que les acides minéraux répondent à toutes les exigences au point de vue qui nous occupe, on ne les emploie pas à cause des rai- sons purement pratiques déjà exposées. Au contraire, on pourra penser à employer le superphosphale gypseux pour entraver la décomposition de la matière organique. Les essais de HOoLDEFLEISS montrent qu’on perd ainsi moins de matière humifiante qu’en ne mettant rien dans le fumier, mais que la perte est encore très consi- dérable. L'action du superphosphate gypseux est très différente sui- vant la dose qu’on emploie, et probablement on obtiendrait de meil- leurs résultats avec des doses plus fortes. « La litière de tourbe acide », qu’on prépare depuis peu et qui contient 2 à 3 p. 100 d'acide sulfurique, devrait aussi faire bon effet ; mais on manque jusqu'alors sur ce point d'observations exactes. La chaux caustique et la poudre de phosphate Thomas sont nui- sibles. Il est vrai que la décomposition du fumier frais est retardée par elles, comme on le comprend d’après les résultats signalés précé- demment (p.187); mais celle du fumier déjà en train de se décom- poser est considérablement activée (p. 190), si bien qu’une grande partie de la matière organique est perdue. De plus, dans ces circons- lances, l’'ammoniaque déjà formée est presque entièrement volati- lisée ; car on sait que la chaux détruit rapidement ses combinaisons et met en liberté l’ammoniaque. Il n’y a qu’un cas où la chaux puisse jouer un rôle utile : c’est quand l’ammoniaque ne peut se volatiliser dans l'atmosphère à cause de la couverture de terre ou de tourbe; dans ces conditions, la chaux favorise beaucoup la nitrification de l’ammoniaque retenue par ces couvertures (p. 191). Le sulfate de chaux entraverait probablement la décomposition des matières orga- niques, mais pas notablement (p. 194). Comme les cendres végétales sont formées en partie de carbo- [s " F ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE £UR L'ÉRÉMACAUSIS. D99 pates alcalins qui, on l’a montré (p.185), accélèrent beaucoup l’oxy- dation des matières riches en carbone, elles provoquent une destruc- tion rapide des matières organiques et leur emploi est par là contre- indiqué. Les carbonates alcalins, non seulement ne sont pas aptes à fixer l’ammoniaque, mais ils peuvent même amener sa volatili- sation. Les sels maintiennent le mieux les éléments humiques du fumier quand leur dissolution dans la masse atteint un assez haut degré de concentration. On peut employer n’importe quel sel, même le sel de cuisine, qui est utile encore par ses propriétés antizymotiques. Ce- pendant il ne faudrait pas s'en servir trop largement, parce qu’il exerce facilement dans le sol une action nuisible sur la germination des graines et amène, dans les sols riches en chaux, la formation de composés (chlorure de calciun) nuisibles à la végétation. Il vaudra mieux en général, pour conserver les matières organiques du fumier, se servir de sels de potasse, qui sont d’ailleurs indispensables à la plupart des cultures. 11 ressort des recherches de HoLpeFLEIss qu’ils sont éminemment aptes à retarder l’érémacausis dans les tas de fumier. Il en faut de 06,75 à 1 kilogr. par tête de gros bétail, un peu moins pour un cheval. Quand le fumier est couvert de terre, la perte en matière orga- nique est, d’après HoLnEerLeIss, absolument la même que dans un fumier non mélangé, qu’il soit seulement mouillé par la pluie ou qu'il soit arrosé de purin. Les indications précédentes doivent être modifiées à certains égards pour le fumier conservé à l'écurie. Quoique, même par ce procédé, il y ait une partie notable de la matière organique qui se volatilise, la perte est pourtant beaucoup plus faible que si l’on dispose le fumier en tas par couches successives. Dans les expériences de Hoz- DEFLEISS, la perte de matière sèche a été de 13 p. 100 environ dans le fumier à l’étable et de 30 p. 100 dans le fumier à l’air libre. En employant le superphosphate et le sel de potasse, la matière orga- nique est restée presque intacte. Ce procédé se montre donc par là extrêmement utile et a par lui-même une si heureuse influence que, sans autre substance, on arrive à restreindre la perte en matière organique aussi bien que peut le faire l’addition la plus efficace sur 556 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. le fumier en tas. Souvent, on pourra très bien se passer d'employer. des moyens chimiques, notamment là où il s’agit plus de linfluence nourrissante du fumier et où l’on s'inquiète moins de l’action qu'il exerce sur les propriétés physiques. Si l’on veut cependant satisfaire à des exigences assez élevées à cet égard, on arrivera au but en ajoutant du superphosphate ou du sel de potasse à dose moitié ou aux trois quarts moindre de celle qui est nécessaire pour la conser- vation du fumier sur les places à fumier. Quant à Ja fixation de l’azote dans le fumier à l’étable, les procé- dés de conservation (superphosphate gvpseux et sels de potasse) n’ont pas, dans les essais de HorperLEIss, produit de meilleur effet que si l’on n’ajoutait rien. Dans tous les cas les taux d’azote concor- daient presque complètement. Mais il y eut quelques différences dans les combinaisons sous les- quelles l’azote se présentait dans les diverses masses traitées. Sous l'influence du sel de potasse il ne s’était formé, comme à l'air libre, que des traces d’acide nitrique, mais d’assez fortes doses d’ammo- niaque. Le superphosphate gypseux à différemment agi, suivant que le fumier était plus ou moins compact. « Quand le fumier à l’étable était piéliné constamment par de lourdes et grosses bêtes occupant toutes les stalles, la nitrification était très faible, sans être supprimée, que l’on ajoute ou non du superphosphate gypseux. Mais, quand le fumier n’était pas suffisamment piétiné, qu’il n’y avait que de jeunes bêtes dans l'écurie et en nombre insuffisant, il se formait d’assez fortes doses de nitrates. » De ce que nous venons de dire, il ressort suffisamment qu'il y a avantage à laisser le fumier sous les bêtes plutôt que de le trans- orter à l'air libre. Si l’on considère en outre que, dans le premier | cas, il faut toujours entretenir le tas de fumier et la fosse à purin, que l'on évite la perte de purin par évaporation et les travaux de vi- dange, d'épandage et d'arrosage du fumier, on reconnaîtra que la conservation du fumier à l'écurie est préférable à tout autre pro- cédé. Mais il faut remarquer que les écuries où le fumier peut rester : sous les animaux doivent être pourvues de certains dispositifs ‘ qui 1.F. Excez, Handbuch des landwirthschafllichen Bauwesens, Berlin, 1895, p. 301. is : ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. D97 ne peuvent guère s'installer que dans les écuries nouvellement cons- truites. C’est pourquoi on est forcé le plus souvent d’entasser, comme on l’a fait jusqu'ici, le fumier sur une place spéciale. Les moyens de conservation employés dans l'écurie peuvent-ils nuire au bien-être des animaux? Constatons d’abord à cet égard que le superphosphate gypseux et la litière de tourbe acide (avec 2 à 3 p. 100 d'acide sulfurique) n’est nuisible en aucune façon, d’après les essais pratiques précédents, à la peau, ni au pis, ni au sabot, ni au pied des animaux, mais que des accidents de ce genre peuvent arriver par l’emploi des sels de potasse. Par exemple, quand les bêtes ont faim de sel, elles mangent avec avidité le fu- mier assaisonné de sels de potasse, ou bien des parties sensibles peuvent être irritées. Pour parer à ces inconvénients, il semble logique de vider les écuries le plus souvent possible et de ne mé- langer le sel que sur la place à fumier. Dans les cas où le fumier reste sous les animaux, on éloignera le plus facilement l’inconvé- nient signalé en ne répandant la paille qu'après avoir répandu le sel, pour que celui-ci soit aussitôt recouvert et ne touche pas le corps des animaux. Il faut prendre pareille précaution sur les tas de fumier si on y lâche les animaux pour les piéliner ; après les avoir saupoudrés de sel, on les recouvrira d’une couche de fumier frais. | De l’ensemble des observations précédentes, on peut tirer les con- clusions suivantes importantes pour la pratique : 1° Le fumier laissé tel quel subit en se décomposant une perte en matière organique, perte variable avec la durée et le mode de con- servation. Elle est d'autant plus forte que le fumier est plus vieux ; elle est beaucoup plus importante (30-60 p. 100) quand le fumier est mis en tas dehors que s’il reste à l’étable (13 p. 100). Dans le premier cas, avec la matière organique disparait une partie de l’azote, surtout par volatilisation du carbonate d’ammoniaque qui se dégage des éléments azotés de l’urine, tandis qu’en laissant le fumier sous les animaux, la diminution de l’azote est réduite à son mini- mum. Par les deux méthodes de conservation la nitrifieation se fait très difficilement. 11 ne se forme des quantités notables d’acide ni- trique, quand le fumier reste sous les bestiaux, que s’il est insuff- 558 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. samment piétiné par un trop petit nombre de jeunes animaux de. faible poids ; 2 Les acides minéraux (acide sulfurique, chlorhydrique) exercent | une action retardatrice sur la décomposition du fumier si cette addi- tion lui donne une réaction acide ; ils sont surtout propres à fixer l’ammoniaque. Seulement, il y a un obstacle à leur emploi dans la pratique ; c’est qu’ils sont dangereux à manier et qu'ils corrodent les parois des rigoles et des fosses à purin ; 3° En mêlant à du fumier frais de la chaux caustique ou des subs- tances qui en renferment (phosphates Thomas en poudre), on sus- pend vraisemblablement la décomposition des matières organiques, tandis que cette opération la favorise si le fumier est en train de s’altérer ; elle favorise aussi la déperdition d’ammoniaque parce que la chaux met en liberté l’ammoniaque dé;à formée. C’est pour cela qu’on doit rejeter ces matériaux quand il s’agit de la conservation du fumier ; 4° L'emploi de carbonates alcalins sous forme de cendres accélère probablement la décomposition du fumier et les pertes d’azote ; il faut donc y renoncer ; 9° L'action du gypse sur la fixation de l’ammoniaque est en géné- ral insuffisante ; peut-être suffit-elle si le sulfate de chaux est à grain très fin et si son action est prolongée. Celle-ci se manifeste par une faible diminution des éléments carbonés du fumier et par l’aide qu’elle fournit à la nitrification ; 6° Le superphosphate gypseux, avec un taux élevé d’acide phos- phorique libre et de phosphate monocalcique importe pour la con- servation du fumier en ce sens qu’il influe de la manière la plus parfaite sur la fixation de l’ammoniaque, entravant sa formation et accélérant la nitrification ; par contre, il ne peut faire sérieu- sement obstacle à l’oxydation des principes hydrocarbonés du fu- mier. On atteint mieux, quoique insuffisamment, ce but si la quan- lité employée dépasse les limites paraissant raisonnables dans la v 1 pratique agricole. À la place du superphosphate gypseux, on peut employer avec un égal succès du superphosphate à dose assez forte. Le phosphate de chaux précipité (phosphate dicalcique) est à re- jeter pour la fixation de l’ammoniaque et ne doit exercer non plus e ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. DD9 aucune influence sur la décomposition des matières organiques du fumier ; 7° Par le mélange de sels solubles (sels de potasse ‘, chlorure de sodium, etc.), en quantités suffisantes pour que leur solution ait une concentration assez élevée, la décomposition des matières organiques du fumier, la formation d’ammoniaque et d’acide nitrique sont consi- dérablement ralenties; mais on n’est pas sûr d'empêcher la volatilisa- tion de l’ammoniaque. Le fumier obtenu est plus pailleux et, sauf les sels ajoutés, il est relativement pauvre en principes nutritifs solubles ; 8° Quand le fumier reste sous les animaux, il y à moins d’impor- tance à se préoccuper des moyens de conservation ; on peut, sans inconvénient, les négliger si le fumier est fortement piétiné par des animaux lourds et en nombre suffisant ; mais ils sont nécessaires dans le cas contraire ; 9 Un fumier couvert de terre se comporte au point de vue de la décomposition comme un fumier non traité; mais il s’en distingue essentiellement en ce qu'il conserve presque entièrement son ammo- niaque et offre les circonstances les plus favorables à une nitrifica- tion intense. Pareil effet pourra être provoqué par la litière de tourbe, qui possède à un haut degré le pouvoir d’absorber l’ammoniaque, surtout si elle est imprégnée d’acide sulfurique. Dans ce dernier cas, il doit y avoir aussi diminution dans la décomposition des éléments carbonés. Le fumier couvert de terre est, il est vrai, relativement pauvre en principes formateurs de l’humus, mais il est riche en élé- ments nutritifs solubles facilement assimilables, tant azotés que mi- néraux (voir Note L). Ce qui précède indique nettement à l’agriculteur quels sont les moyens à sa disposition pour arrêter les pertes d’azote inévitables avec les procédés actuels de conservation des fumiers et pour agir sur l’érémacausis. Il fixera naturellement son choix d’après les cir- constances locales. Dans les cas où on peut installer les dispositifs nécessaires, on aura toujours les plus grands avantages à laisser le fumier sous les bestiaux. Dans les autres, on emploiera l’un des pro- cédés pratiques pour le traitement du fumier en tas et il faudra tenir 1. Kaïnite, krugite, carnallite, sulfate brut de potasse et de magnésie, etc. 560 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. compte tant de la nécessité de l adjonction de tel ou tel principe nu- tritif que de l'influence de la fumure sur les propriétés physiques du sol. | 3 Quant à ce dernier point, il-est important de savoir si le fumier doit être employé dans un état plus ou moins décomposé suivant les cas. Pour cela, il faut avant tout considérer la manière dont se compor- tent les malières organiques dans des sols de composition physique différente (p.209). Dans les terrains tels que les sols compacts, où l’é- rémacausis est lente, un fumier peu décomposé n’aurait qu’une faible action. En général, il faut y mettre des fumiers faits, bien pourvus de principes nutritifs assimilables. Mais la décomposition ne doit jamais être arrivée jusqu’à l’état graisseux, parce que l'apport de matières humifiantes si importantes pour de tels sols serait insuffisant F (p. 392): Le degré d’érémacausis auquel on doit employer le fumier a se mesure du reste d’après le taux du sol en matière organique ; le fumier traité avec de la terre convient pour les sols riches et les sols humiques (tour bières), et celui qui est trailé au supenphos pale pour les sols pauvres en humus. Les terrains sablonneux, légers, où l’érémacausis est très intense, où la présence de grandes quantités de principes nutritifs amène facilement des pertes importantes par lixiviation, auront avantage à recevoir un fumier peu décomposé tel que celui qui est resté sous les animaux ou celui qui est traité aux sels de potasse. L’objection, -plusieurs fois soulevée, qu’il manque à de tels sols humidité néces- -saire pour une décomposition intense du fumier pailleux, n’est pas fondée si l’on prend soin par un traitement rationnel de restreindre l’évaporation (p. 468) et si le fumier est enfoui assez profondément. I n’y a pas à craindre alors que les sels de potasse empêchent la dé- composition du fumier enfoui; car leur dissolution est assez diluée pour ne pas entraver l’érémacausis. C’est par des considérations de ce genre qu’on résoudra la ques- tion de savoir quelles sortes de fumier doivent être employées sur les différents sols. Des fumiers chauds, se décomposant vite (fumier de cheval, de mouton), conviennent essentiellement aux terrains compacts et pas aux sols légers. Dans ceux-ci l’érémacausis serait si active, pour peu que les conditions fussent très favorables, que, dans ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 561 un temps relativement court, il se formerait de grandes quantités de principes nutritifs solubles qui seraient en partie perdus par lixivia- tion, vu le faible pouvoir absorbant et la grande perméabilité du sol. On ne peut parer à cet inconvénient qu’en se servant de fumiers froids, à décomposition lente (fumier de vache et de porc). Ceux-ci ne fourniraient, sur les sols compacts où toutes les matières organi- ques se décomposent lentement et dans l'intervalle où les plantes peuvent les utiliser, qu’une dose de principes nutritifs insuffisante à une végétation vigoureuse. Ces règles n’ont, du reste, aucune im- portance pratique parce que le plus souvent l’agriculteur n’a pas de choix à faire, les champs présentant rarement des différences telles qu’il soit nécessaire de séparer les diverses sortes de fumier. On sera d'ordinaire forcé, au contraire, pour obtenir un fumier aussi homo- gène que possible, de mélanger les famiers, excepté ceux de mouton qui restent toujours dans les bergeries. Le purin qui s’écoule du fumier provient originairement de l’urine des animaux, mais par son contact avec les éléments du fumier il subit maintes transformations chimiques en même temps qu'il se dilue par la pluie. Il est donc toujours plus aqueux et moins riche en azote et en potasse que l’urine. Il n’y à pas à tenir compte du taux insignifiant d'acide phosphorique qu’ik renferme et qui provient de son contact avec les excréments solides. Donc potasse et azote sont surtout les éléments actifs de l’urine. La potasse est sous forme de carbonate ; elle ne subit aucun changement ; mais il n’en est pas de même des éléments azotés dont une partie se perd par volatilisation de l’ammoniaque et dégagement d’azote libre. Pour obvier à ces pertes il y a divers moyens. D'abord on empé- che la production de trop grandes quantités de purin en ltiérant abondamment -et en employant la tourbe. Si la litière ne suffit pas à absorber l'urine, les rigoles et les fosses à purin doivent être étan- ches et couvertes. On peut se passer de moyens chimiques (acide sulfurique, superphosphate, sulfate de fer, etc.) pour fixer l’ammo- niaque et prévenir la fermentation si le fumier est mélangé à du su- perphosphate gypseux et si le purin est employé à arroser le tas de fumier. Il n’y a besoin de rien ajouter si l’on emploie de la litière de tourbe acide. MATIÈRES ORGANIQUES, 36 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ©: [er] Lu) 2. — Excréments d'oiseaux. Citons d’abord dans ce groupe les excréments des oiseaux domes- tiques qui, d’après les analyses encore très incomplètes de A. MAYER et E. HeipeN, ont à peu près la composition suivante : PIGEONS. POULES. CANARDS. OIES. p- 100. p- 100. p. 190. p. 100. Hat 2 sc. AC 62 59.7 23.0 82.0 Matière organique . . 31-32 20,4 1400 14.0 AZOCE NS RER ee 1.2-2.4 0.8-1.4 0.8 0.6 4.0 Cendres ren Per 6-7 8.4 ta On voit que les excréments de pigeons et de poules sont sensible- ment plus riches en matières organiques azotées que ceux des deux autres espèces. Il en est de même des principes minéraux, surtout des phosphates et même des sels alcalins. Ces différences s’expliquent aisément si l’on considère la nourriture de ces oiseaux. Puisque les pigeons et les poules se nourrissent surtout de grains riches en azote et en acide phosphorique, leurs déjections doivent nécessairement être plus riches en ces principes que celles des canards et des oies dont les plantes vertes herbacées constituent la principale nourriture. En conformité avec cette richesse en éléments azotés, la décomposi- tion des excréments est plus rapide chez les oiseaux granivores que chez les herbivores. + L’azote s’y trouve en grande partie sous forme d’acide urique qui, par oxydation complète, se dédouble en urée et en acide carbonique et l’urée finalement se dédouble encore en acide capote et en carbonate d’ammoniaque. Leur grande richesse en principes nutritifs facilement assimila- bles signale les excréments des pigeons et des poules comme des engrais concentrés qui, pour n'être pas nuisibles, doivent être seule- ment donnés à petites doses. Alors ils ont une action intense et “us sur la végétation. Vu la faible quantité qu’on en obtient dans les exploitations, on les emploie bien rarement seuls, tout au plus en-horticulture. Ils sont particulièrement propres, comme ceux des canards et.des oies, L Li +4 s- « ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 263 à la fabrication des composts en les mélangeant avec divers déchets, au cas où on ne préfère pas les mélanger au fumier de ferme. Au groupe dont il est question se rattachent les déjections des oi- seaux de mer, déjections qui avec les cadavres de ces oiseaux et les détritus de poissons forment des couches épaisses dans les contrées à climat chaud et sec et sont vendues dans le commerce sous le nom de guano. Puisque les oiseaux de mer se nourrissent de poissons, il est natu- rel que leurs excréments soient riches en éléments azotés et en phos- phates et l’emportent beaucoup sous ce rapport sur ceux des pigeons et des poules. Ajoutons que, dans les circonstances actuelles, leur érémacausis est presque entièrement arrêtée puisque, par la forte insolation qu’ils subissent, ils se dessèchent vite et restent en cet état vu le manque de pluie. Get engrais est donc richement doté en élé- ments nutritifs précieux et, par suite, ne peut être employé à fortes doses, pas plus que celui des pigeons et des poules. Le tableau suivant, fait d’après les analyses de W. Ivisox-MAca- pAm*', donne une idée de la composition de divers guanos : GUANO GUANO GUANO GUAKO GUANO | d'Afuero. | d'Hilifax. de d’As- 2 de l'ile des 41. | 2 cension. |Pingouins.| Patagonie. d'Ichaboe, Ç | me 12,5-17,0 .1-22. 2.2 16.5,16.6 6 7-11.0 .5-21.8|10.6-21.2 | Matière organique azotée et| . | ammoniaque 15.4-13.7 : 8138.6140.1|27.5-36.8 21.6-34. Ammoniaque 3.17-13.4 : .4111.9112.8| 8.8-12.3| 4. 4.8- 6. Phosphates 10,1-36.1 1112.0! 9.4124.9-34.2| 16, 2119.4-29. L | Sels alcalins | 7.0-16,3! : .6110.1| 8.4 .8- 9.4! 6. .2| 5.6- 8. S'il pleut où s’il y a des embruns, les déjections se décomposent rapidement, les éléments azotés et potassiques solubles sont dissous. Mais si le sol sur lequel reposent les excréments est calcaire, les phosphates solubles se transforment en phosphate tricalcique qui, grâce à-sôon insolubilité, résiste à la lixiviation et se dépose en cou- _ ches plus ou moins épaisses. Telle est l’origine des guanos d’appa- RL [visox-Macanan, Journal of the Society of chemical Industry, 1888. » 564 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. rence pierreuse, rappelant les phosphorites, tels que les guanos de Baker, Phœænix, Lacépède, Avola, de lile Humon, d’Ashmore, des iles Bahama et Guanahani. Ils renferment surtout du phosphate de chaux (53-79 p. 100) et n’ont qu'un faible taux de matières organi- ques azotées (1-14 p. 100). Les éléments lessivés sont souvent entraînés par les flots, mais quelquefois ils restent sur place et forment une masse poreuse brune. Un exemple en est fourni par le guano de Mejillones qui contient en- viron 60.5 p. 100 de phosphate basique de chaux et 18 p. 100 de phosphate semi-acide de magnésie avec de petites quantités de ma- tière organique. On peut joindre à ce groupe d’engrais, à cause de l’identité de leur formation et de leur composition, les déjections des chauves- souris qui s’accumulent dans certaines grottes en grandes quantités et qui sont vendues sous le nom de guano de chauves-souris. Voici leur analyse d’après E. HEIDEN : aus der eee ne 13.3-23.4 p. 100. Matière organique. . . . . 56.5-73.0 — AYDIB SR ete eee mu 9.4-12.3 — Acide phosphorique . . . . 2.39 2 — SES 6 PO(ASSP EEE... 1.6- 2.1 — AMMONAQUE. 1 eh... 5.3-14.8 — Les excréments des chauves-souris sont donc plus pauvres en acide phosphorique que ceux des oiseaux de mer, mais ils ont pour le reste une composition très voisine. Une plus ou moins grande partie des matières azotées et de l’urine se décompose aussitôt avec for- mation d’ammoniaque. 3. — Excréments humains. Dans les excréments de l’homme comme dans ceux des mammi- fères domestiques qui ne donnent pas de produits animaux on re- trouve, à l’exception d’une partie des matières non azotées qui est utilisée pour la respiration et qui se dégage sous forme de gaz (eau et acide carbonique), tous les principes non assimilés. Il en résulte que la composition des déjections humaines dépend entièrement de la nourriture; celle-ci étant très variée, le taux des déjections en | ‘ ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 269 principes nutritifs varie aussi. C’est pour cela que les moyennes d’a- nalyses ne peuvent donner qu’une idée approchée de la valeur ferti- lisante des déchets humains. C’est avec cette restriction qu'il faut prendre en considération les chiffres suivants dus à J. H. VoceL*. Taux centésimal moyen des excréments humains à l’état frais. FÈCES. URINE. MÉLANGE. RULES NE MA TE 77.20 95.50 93.70 Matière organique . . . . . 19.60 3.30 4.90 DEN ES MEN der er Ur au Le 3.20 120 1.40 ZONES PNR Pole 1.30 0.50 0.85 Acide phosphorique. . . . . 1efIG 0.16 0.26 ÉMRASAO NE CE uate 0.40 0.19 0.21 De nombreuses observations montrent que l'évacuation annuelle s’élève par tête à 438 kilogr. d’urine et à 485,5 de fèces. C’est donc l'urine qui constitue la majeure partie de l’engrais; elle renferme deux fois plus de matière organique, six fois plus d’azote, deux fois plus d’acide phosphorique et presque quatre fois plus de potasse que les déjections solides. Ajoutons que les éléments de l'urine sont directement assimilables ou se transforment facilement en combinai- sons assimilables, tandis que les éléments non digérés et peu trans- formés qui se trouvent dans les fèces doivent subir toute une série de réactions avant de pouvoir être utilisés par les végétaux. Ceci n’est pas vrai seulement pour les principes minéraux, mais encore pour les matières organiques qui se rencontrent dans l’urine sous forme d’urée surtout et à bien plus faibles doses sous forme d’acide urique ou d’autres matières azotées, et dans les fèces sous forme de principes albuminoïdes et de leurs dérivés. Quand les excréments sont conservés, par exemple, dans des fosses, leurs éléments organiques subissent des modifications parmi lesquelles la fermentation de l’urée est la plus intéressante, puisque, grâce à elle, il se forme beaucoup de carbonate d’ammoniaque vo- latil. Une partie des matières organiques est naturellement perdue par les réactions de l’érémacausis, tandis que les principes minéraux restent en admettant que les fosses soient bien étanches. L’engrais 1. J. H. Vocez, Die Verwerthung der slädtischen Abfallstoffe. Arbeiten der deulschen Landwirthsciaftsgesellschaft, fase. Il, Berlin, 1896, p. 15. 566 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. des fosses d’aisances, auquel se réunissent les eaux ménagères, aura une composition qui ne diffère pas essentiellement de celle des dé- jections fraiches. Les différences peuvent s’apprécier d’une manière approchée par les moyennes suivantes (d’après J. H. VoceL) : EXCRÉMENTS FOSSES FRAIS. D'AISANCES. HAUSSE MEET TS 93.70 96.35 Matière organique. . . . . 4.90 DT CeNUrES Let ra Re 1.40 1.39 AZOLOS AR IP ATEN 0.85 0.37 Acide phosphorique . . . . 0.26 0.16 Potasse EUR EEE 0.21 0.15 En rapportant au même taux d’eau, la perte en matière orga- nique serait donc de 41.8 p. 100 et en azote de 55.3 p. 100. Sou- vent, surtout quand les matières sont conservées trop longtemps, la perte d'azote est encore plus grande ; elle peut aller jusqu’à 70 p. 100. En général, les récipients qui renferment les excréments ne sont pas élanches, si bien qu'une partie des liquides s’infiltre dans le sol et que des matières minérales sont ainsi perdues. De quelle manière peut-on obvier à ces inconvénients? Cette ques- tion se lie étroitement à celle du meilleur procédé pour éloigner des villes les déjections humaines; elle est d'autant plus difficile à ré- soudre qu’à côté des intérêts de l’agriculture, visant surtout le trans- port commode de lengrais si riche dont il est question, il y en a d’autres qui, se référant aux influences nuisibles de ces matières en putréfaction sur la santé publique, cherchent à éloigner les déjections humaines de leur lieu de production. Malgré d’incessants efforts et de nombreux essais, on n’est pas encore arrivé à trouver un système qui réponde parfaitement à tous ces desiderata. Il n’en paraît pas moins indiqué, vu l'importance du sujet, de faire connaitre les considérations générales par lesquelles on jugera les méthodes employées en vue de l’obtention du résultat qui s’est montré jusqu'ici le plus favorable *. 1. Pour le but que nous poursuivons, il suffit d'un court résumé des divers essais. Pour les détails, voir : E. Heinen, À. Muzrer, K. von Lancspourr, Die Verwerlhung der Städtischen Fakalien, Hannover, 1885. — J. H. Vocer, Die Verwerthung der Sladtischen Abfallstoffe. Arbeiten der deutschen Landwirthschaftsgesellschaft , fasc. Il, Berlin, 1896.— A. Mayer, Lehrbuch der Düngerlehre, Heidelberg, 1895, p.71. ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. ©67 Le système des fosses encore souvent employé est à rejeter aussi bien au point de vue économique qu’à celui de l’hygiène : il se perd ainsi beaucoup de matières nutritives et l’air comme le sol sont infec- tés. L'emploi de tonneaux ou tinettes est bien préférable ; infection du sol est supprimée; celle de l'air n’a lieu que dans une faible me- sure et l’engrais est plus riche en principes nutritifs que celui qu’on retire des fosses. Pour obvier aux pertes d’azote il est bon de mélanger les déjec- tions fraiches avec du terreau tourbeux (poudrette tourbeuse). Non seulement on les rassemble ainsi de la manière la plus parfaite et on empêche toute perte de substance, mais encore on écarte les incon- vénients inhérents au système des tinettes (infection de lair, etc.). On peut affirmer que ce procédé est le meilleur tant pour l’hygiène que pour l’utilisation économique des matières nutritives contenues dans les déjections humaines; aucun autre n’est préférable (J. F. Vo- GEL). Vu les frais élevés de transport de cette poudrette dans les champs, ce système n’est pas applicable aux grandes villes ; on le comprend aisément si l’on réfléchit que la production de poudrette croît tellement avec le nombre des habitants qu’il faut consacrer à son utilisation des régions toujours plus éloignées. Il mérite, au con- traire, pour les raisons données, toute considération dans les pays plats et dans les villages ou les petites villes. Au cas où, pour alléger le transport, les déjections sont réunies dans des tinettes sans aucun mélange, l'emploi du terreau de tourbe sera du moins à conseiller sur le lieu de vidange pour qu’on puisse ma- nier les matières. La fabrication du compost de matières fécales exige des appareils mécaniques. Ceux qui ont été proposés par H. CLASSEN d’Ansbach méritent particulièrement l'attention. S’il y a des germes de maladies dans les déjections, le terreau de tourbe acidulé par l'acide sulfurique tue vite et sûrement tous les microbes pathogènes et doit être employé de préférence à la tourbe ordinaire (p. 377). Dans les grandes villes qui disposent de ressources plus grandes, les déjections humaines, diluées avec de l’eau, sont envoyées dans des canaux souterrains où elles sont entraînées par de l’eau courante qui les rend inoffensives et permet leur emploi agricole par épan- -dage sous forme d’eaux-vannes à la surface des champs ou des prai- 68 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ries. Quoique l'assainissement des villes puisse être parfaitement atteint’ si les canaux sont soigneusement exécutés, l'excellence de ce procédé doit être mise en doute au point de vue agronomique. IL y a tout d’abord à considérer que l'installation des canaux pour conduire les eaux-vannes sur les champs et acquisition des surfaces à irriguer exigent des dépenses qui ne paient pas leur rente, étant donnés les prix actuels des denrées agricoles, prix qui diminueront encore selon toute vraisemblance. Ajoutons qu’une grande partie des éléments azotés qui sont les plus précieux se perd par décompo- sition et que, la surface des champs d’épuration étant généralement beaucoup trop petite pour les matières à absorber, 1l y a un gaspil- lage extraordinaire de principes fertilisants et une saturation du sol qui retentit très désavantageusement sur la végétation des récoltes. C’est ce manque d'équilibre entre l’apport et l’utilisation qui, au point de vue agronomique, est le principal inconvénient de ce pro- cédé, abstraction faite de tous les autres. En prenant pour base une forte fumure (30 000 kilogr. par hec- tare) calculée pour trois ans, il faudrait environ 1 000 mètres cubes d’eaux-vannes pour faire l'équivalent; avec une fumure double qui paraît encore admissible si l’on veut obtenir des récoltes extraordi- naires, il en faudrait donc à peu près 2 000 mètres cubes par hectare et par an; or, les champs d'épuration en reçoivent à Berlin quatre fois plus, à Breslau douze fois plus, à Danzig seize fois et demie plus, et à Paris vingt-cinq fois plus. Dans ces conditions la majeure partie des principes nutritifs, 75 p. 100 à Berlin, 92 p. 100 à Breslau, 94 p. 100 à Danzig et 96 p. 100 à Paris, n’est pas utilisée. En présence de ces chiffres on peut affirmer que ces champs d’épuration n'ont aucun but agricole ; ils servent seulement à recevoir les eaux d’é- gout. D'autre part, si l’on voulait mettre fin à l'énorme gaspillage de matières nutritives précieuses, gaspillage équivalant presque au dé- versement des eaux d’égout dans les fleuves, et donner aux champs d'épuration une extension conforme à l’utilisation agronomique des engrais, la création de ces énormes surfaces de terrains filtrants au 1. G. W. Poonr, Ueber die Nachtheile einiger neueren sanitaren Methoden, Graz. 1892. | Hd es aire Le e ù ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 969 voisinage des villes offrirait souvent des difficultés insurmontables et provoquerait une telle augmentation de dépenses! que l’entreprise ne rentrerait pas dans ses frais. Parmi les autres difficultés qu'offre le système de l’épandage des eaux d’égout, il faut compter la création d’un sol propre à la fois à entretenir les réactions de l’érémacausis et à absorber de grandes quantités de liquides. Les sols sablonneux conviennent seuls à cet usage parce que, seuls, ils permettent l’oxydation énergique des matières organiques et l’infiltration rapide des eaux-vannes. Tous les autres sols, à grains plus fins, n’absorberaient pas les quantités d'eaux d’égout que l’on emploie ; l’érémacausis serait empêchée et ce serait presque exclusivement la putréfaction qui entrerait en jeu. Aussi devra-t-on souvent renoncer, par suite du manque de sols ayant une composition convenable, à l'établissement de champs d’é- puration pour l’utilisation des eaux d’égout. = Outre la saturation du sol par les matières nutritives, saturation nuisible à la végétation, il y a souvent cet inconvénient qui se pré- sente sur un rayon plus ou moins grand en rapport avec l’eau d’é- oout, que les matières organiques solides en suspension sont retenues dans les pores du sol; sa perméabilité pour l'air et l’eau, qui est sa principale qualité, diminue constamment. On peut remédier, 1l est vrai, à cet inconvénient en clarifiant les eaux d’égout avant de les épandre sur les champs; mais l’installation des appareils nécessaires? exige des frais importants qui diminuent d'autant le rendement de l’entreprise. En examinant ces divers points on pourra difficilement s'empêcher de reconnaître que l’épandage des eaux d’égout sur les champs ou les prés ne peut être préconisé au point de vue agronomique et vanté comme un moyen rationnel*. Si ce procédé doit être cependant maintenu à cause de ses avantages sous le rapport sanitaire, il faut 1. D'autant plus que le prix des champs à acheter est d'ordinaire très fortement majoré par les propriétaires. 2. J. H. Vocez, loc..cil., p. 229. 3. C'est aussi l'opinion de M. Grandeau. Voir son article : La fertilisation des champs par la désinfection des villes (Annales de la Science agronomique francaise et élrangère, 5° année, t. I, p. 1-24). [Traduclion.] 570 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. admettre que c’est exclusivement ce point de vue qui décide la ques- üon et nullement le résultat financier auquel on devra renoncer dans la plupart des cas. Cet inconvénient peut être d'autant mieux accepté que la santé de l’homme et les exigences de l'hygiène doivent sans conteste occuper la première place. Quant au système de LiErNur, intermédiaire, en quelque sorte, entre la canalisation et la vidange directe, c’est jusqu’alors à Ams- terdam qu'il a été appliqué sur la plus vaste échelle. Les déjections, diluées par les eaux ménagères, de fabrique et de pluie, sont réunies dans des tubes en fer et sont poussées pneumatiquement sur un point où on les rassemble pour les travailler complètement. Malgré la perfection technique de ce système et ses avantages hygiéniques, il est peu employé, à cause des frais très élevés d’installation, d’une part, à cause aussi de la trop grande dilution des matières fécales. Parmi les autres méthodes qui ont pour but de rendre les déjec- ions moffensives et de les faire en même temps servir à l’agriculture, sont surtout intéressantes celles qui transforment les matières en un engrais concentré commercial (poudrette) susceptible d’être trans- porté à longue distance. Bien que les nombreux essais faits dans cette voie n'aient pas jusqu'ici donné un résultat pleinement satisfai- sant parce que l’évaporation de la grande quantité d'humidité qui imprègne les matières fécales exige des dépenses excessives, on doit espérer qu’on arrivera à résoudre ce problème d’une manière satis- faisante, d'autant plus qu’on a déjà pu surmonter en partie les diffi- cultés. Ceci s'applique particulièrement au système de v. PODEWILS, à Augsburg *, dans lequel les matières traitées par l’acide sulfurique en excès sont évaporées d’abord dans une bassine, puis dans un tam- bour-séchoir jusqu’à 20 à 30 p. 100 d’eau ; la dessiccation s’achève dans un concentrateur formé de trois bassines placées l’une dans l’autre. L'ancienneté de l'établissement de v. PopewiLs semble déjà montrer que la fabrication de la poudrette d’après ce procédé est rémunératrice ; on ne peut pourtant pas le savoir nettement, parce que la poudrette n’est généralement pas livrée telle quelle, mais en mélange avec divers engrais chimiques (superphosphate, sulfate 1. J. H. Vocez, loc. cël., p. 346. NT. Pre L dE Qi #1 Rd ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 211 d’ammoniaque, poudre d’os), sous la dénomination de guano fécal, superphosphate fécal, superphosphate ammoniaco-fécal, guano d’os fécal ; on ne sait si le gain ne doit pas être attribué pour la plus grande part à ces matières précieuses en mélange. Du reste, le taux d’eau des matières sert de mesure certaine à la rentabilité de ces en- treprises. Le contenu peu dilué et peu décomposé des tinettes et des fosses s’adaptera incontestablement le mieux à la fabrication de la poudrette *, tandis que les matières délayées et très fermentées, sans mélange d’eaux ménagères, dans le cas où la dilution ne dépasse pas 100-150 p. 100, sont plus rationnellement traitées par le sulfate d’ammoniaque *. Non seulement tous les faux frais doivent être cou- verts par la fabrication de ce dernier produit et de la poudrette, mais il doit rester un bénéfice suffisant, en supposant que la ville supporte les dépenses qui lui incombent et que les matières arrivent sans frais à la fabrique. Les déjections très diluées, telles qu’on les obtient dans le système de LIERNUR, ne semblent pas propres à la fabrication de la poudrette et tout au plus à celle des tourteaux de poudrette et de sulfate d’ammoniaque (voir Note M). La fabrication de ces engrais, là où les matières sont amenées non ou modérément diluées, satisfait, non point parfaitement, mais suffi- samment, aux exigences hygiéniques et économiques. Pour détruire sûrement les microbes pathogènes des matières fécales, il n’y a qu’à traiter celles-ci par le sulfate d’ammoniaque ou qu’à ajouter, lors- qu'on fabrique la poudrette, un excès d’acide sulfurique (voir Note N). 4, — Déchets d'origine organique. Il y a un assez grand nombre de déchets qui se produisent, soit dans les exploitations agricoles, soit dans les industries annexes, telles que les abattoirs, les fabriques de conserves, etc., et qui sont utilisés comme engrais, soit directement, soit après avoir subi cer- taines préparations. Ces déchets sont d’origine animale ou végétale et peuvent dès lors être partagés en deux groupes. 1. Les matières fécales traitées par v. Ponewirs sont rassemblées dans des tinettes sans mélange d'eaux ménagères. 2, J. H. Vocez, loc. cil., p. 392. 572 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. a) Déchels animaux. Ceux qui proviennent des bêtes que l’on abat sont les plus impor- tants. Ce sont les os, la peau, les poils, la corne, les sabots et une partie des intestins. Les os consistent surtout en matières minérales où domine le phosphate de chaux, les matières organiques étant en faible propor- tion. Les os ne sont jamais employés bruts ; après avoir été torréfiés à haute pression, on les pulvérise ; souvent encore on enlève leur graisse avec la benzine et on les livre au commerce sous forme de poudre fine et sous le nom de poudre d’os torréfiés, ayant la compo- sition suivante (d’après W. Ivison Macapam) : Eat a rer 5.2- 9 8 p. 100. Matière organique azotée . 15.1-21.8 — Azote ammoniacal . 2.0- 3.6 — PHOSPhAeS ARE TOUS ARE 58.2-67.9 — Carbonate de chaux . 5.9-11.5 — SOIS ICT UNS RE 0.4- 0,9 — Les matières organiques se décomposent facilement dans le sol humide (p. 165) et il se forme des quantités notables d’ammoniaque. Pour ce motif, il serait logique de n’apporter la poudre d’os que peu de temps avant la culture, s’il n’y avait d’autre part à considérer le phosphate de chaux, qui est l’élément le plus important. Comme il est difficilement soluble, son action dans ces conditions serait faible. Aussi doit-on donner la fumure de poudre d’os assez longtemps avant la semaille, donc déjà à l'automne pour les récoltes d’été, ou bien il faut la soumettre à une décomposition préalable si lon veut qu’elle exerce une action rapide. Pour cela, on la dispose en tas dans lesquels les diverses couches minces qu’on applique successive- ment les unes sur les autres sont arrosées avec de l’eau ou du purin; puis on les recouvre d’une couche de terre de 10 à 15 centimètres. Les matières organiques subissent alors une décomposition active, liée à l’échauffement de la masse, décomposition où l’ammoniaque se développe en abondance et où une partie du phosphate de chaux basique est dissous. Quand le tas est revenu à la température exté- rieure, on le mélange avec la couverture et on l’emploie comme ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 213 engrais. Ce mode de préparation de la poudre d’os est très à recom- mander si l’on veut obtenir avec elle une action rapide. Les autres déchets de l’abat des animaux ont une composition très différente. La viande a un taux d’eau de 74 à 80 p. 100 et renferme surtout des matières organiques où dominent les principes albumi- noïdes. Le taux de matières grasses est de 1 à 2.5 p. 100 et celui d'acide phosphorique de 0.5 à 0.7 p. 100. Le sang est riche en élé- ments azotés. Les formations épidermiques (poils, corne, sabot) con- sistent essentiellement en matières organiques riches en azote, tandis que, comme dans la viande et le sang, il y a peu de matières miné- rales. Les autres déchets, notamment la panse et les intestins, sont, comme engrais, d’une bien moindre valeur que les matières précé- dentes et même que le bon fumier de ferme. La transformation de ces déchets en engrais commerciaux sera plus avantageuse déjà par ce motif qu’ils sont transportables au loin et qu’on est plus assuré de la mort des microbes pathogènes qui pour- raient s’y trouver. Ceci est vrai surtout des déchets d’abattoirs et d’équarrissage, dont la meilleure utilisation est la transformation en poudrette en les traitant par 2 à 3 p. 100 d’acide sulfurique et en les évaporant à une température dépassant parfois 100°. La masse desséchée (poudrette), comparée aux déchets frais, présente, d’après une analyse de J. H. VoGEL *, la composition suivante : DÉCUETS F POUDRETTE. ÉCRIRE d'abattoir. p. 100. p. 100. ITR MS CRE 9.54 81,34 Matière sécher 750. 90.46 18.66 Azote organique . . . . . 1.68 0.50 Azote ammoniacal, . . . . 0.64 0.04 BzOteitotal st 4e 0. 2.32 0.54 Acide phosphorique . 152 0.31 Acide sulfurique . . . . . 1.73 traces. Il ne se produit pas de perte importante en principes nutritifs dans la transformation en poudrette, comme le montrent les chiffres sui- vants, pour le calcul desquels on a pris comme base un poids égal 1. J, H, VoceL, Loc. cit., p. 469. 514 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. d de substance sèche en déduisant de la poudrette la quantité d’acide sulfurique : rouraree, QÉnERS p. 100. p. 100. Azote organique. . . 2-02 2.68 Azote ammoniacal. . . . . . 0.78 0.21 Azote total. . Jour e 2.80 2.89 Acide phosphorique . . . . 1.49 1.66 Les frais de fabricalion sont couverts par la vente de la poudrette et, dans les circonstances favorables, il reste encore un bénéfice rai- sonnable. Dans la transformation des déchets d’équarrissage, le gain est d’autant plus assuré que l’on obtient encore la graisse comme sous-produit. Parfois, avec les déchets des abattoirs ou des fabriques dans les- quelles on traite certains produits animaux (laine, baleine, etc.), on confectionne des engrais pulvérulents, tels que sang ou viande en poudre (guano de Fray-Bentos), corne en poudre, déchets de laine (Shoddy) et baleine en poudre. Ces engrais ont, d’après W. Ivisox Macapam, la composition centésimale suivante : | BALEINE ÉLÉMENTS en poudre! dosés. . Matière organique . . . 86,92 .3-62. 5. 9: 70. 9. 30 .: k : Azote ammoniacal . . . 17.24 i Sels alcalins (Sels : 2.52) GS TIGE at .26 æ 3 : | Phosphates QE : . k “i 54. R | Carbonate de chaux . ÿ : 4 1. En comparaison avec les matières brutes, les analyses du guano de Fray-Bentos, de poudre dè : j | corne et de baleine montrent un taux tout à fait anormal de phosphates qui ne s'explique que par un mé- x lange de substances riches en acide phosphorique. Cette adjonction devait consister en poudre d'os comme 4 on peut le conclure du taux élevé de ces engrais en carbonate de chaux. 4 E, » Les deux premiers de ces engrais sont seuls employés directement ; les autres, à cause de leur lente décomposition, sont mieux utilisés en mélange avec d’autres déchets. Le guano de Fray-Bentos, préparé \ ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 219 avec les restes d'extraits de viande, peut être employé à l’état pur pour l’engraissement des porcs et trouver ainsi une plus haute utilisation. Depuis peu, il apparaît sur le marché des engrais de grandes quantités d’un produit nommé guano de poisson, préparé avec les déchets de divers poissons de mer (sardines, harengs, morues, cabil- lauds, etc.) ou avec des animaux entiers (harengs, crabes). Ces engrais sont caractérisés par leur forte teneur en matières organiques azotées et possèdent encore d'importantes quantités de phosphates, comme le montrent les analyses suivantes de W. Ivison Macapam et E. HEIDEN": GUANO GuANO | GuAnO | GUAxO | GUANO | Lo de de de ÉLÉMENTS DOSÉS. oisson oisson P . P de poisson es Norvège. d'Écosse. | France, 6.1-10.7 Matière organique azotée. . .|42.7-76.0 Azote ammoniacal 5.2-11.8 Sels alcalins 0.6-10.9 Phosphates 12.9-29.4 Carbonate de chaux 3.1-24.3 Les substances organiques de ces engrais se décomposent relative- ment vite et on peut les employer directement comme les poudres de sang et de viande. Leur action est d’autant plus sensible qu’elles sont à grain plus fin. C’est sur les sols légers qu’elles ont le meilleur effet ét on doit les enterrer profondément parce que les plus gros mor- ceaux sont déterrés par les corbeaux et les chats attirés par l'odeur. Etant donné que l’action de ces engrais ne s'étend pas à de grandes distances, 1l est bon de les mélanger au sol à l’aide d’un extirpateur. Les déchets de cuir, vu leur extraordinaire résistance à la décom- position (p. 164), ne peuvent être employés comme engrais qu'après avoir subi une préparation. On les fait bouillir à haute pression, puis on les dessèche et on les broie. Le cuir en poudre ainsi préparé, conte- nant énviron 9 p. 100 d’azote et 17 p. 100 de phosphate, se décom- ‘pose néanmoins encore si lentement qu’il vaut mieux le mettre d’abord __en-compost. S . he E. HEIDEN, Lehrbuch der Duüungerlehre, Stuttgart, 186$, vol. IE, p. 287. 5716 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Enfin sont propres à la fabrication de composts les hannetons, larves, ete., préalablement tués dans l’eau bouillante. Ils sont riches en principes azotés parmi lesquels la chitine, difficilement altérable, entre, chez les hannetons, pour une forte proportion. L'emploi de la chaux vive sera ici utile pour les raisons déjà indiquées à propos des produits cornés. b) Déchets végétaux. Les déchets végétaux obtenus dans les exploitations et les industries annexes trouvent leur meilleur emploi dans les composts (p.578). Les mauvaises herbes, qu’on amasse parfois en grandes quantités, doivent être mises fraiches, si c’est possible, sur les tas de composts, en ad- mettant qu’elles ne portent pas de graines, parce qu’elles se décom- posent bien plus vite ainsi que sèches (p. 165). Les balayures des granges et des greniers qui sont d'ordinaire très riches en semences de mauvaises herbes doivent, avant d’être portées au tas, être versées et agitées dans l’eau bouillante pour détruire la faculté germinative de ces semences. Mais, comme ce moyen n’atteint pas toujours le but et exige des frais supplémentaires non justifiés par la valeur fertilisante des matières en question, il vaut mieux et il est plus sûr de les jeter au feu. Sur les bords de la mer, les tangues et les algues apparte- nant aux familles des fucoïdées et des floridées, de même que les zostères, sont utilisées pour la fabrication de composts actifs. Voici, d’après les analyses de A. von SENGEBUSCH" et de À. MAYER”, la com- position de ces plantes : Dans cent parties de matière sèche. ZOSTERA FUCUS ALGUES à de la mer maritima. vesiculosus. du Nord. Matière organique . . . 85.11 79,28 83.77 2.956 0.88 LR 1.57 ‘0.42-2.43 Lee Acide phosphorique . 0.87 1.21 0.17 ROASSO NS Er. 2.58 2 .05 0.86 {. À. von Senceguscu, Deutsche landwirthschaftliche Presse, 1894, n° 94, p. 879. 9, À. Mayen, Lehrbuch der Düngerlehre, Heidelberg, 1895, p. 102. A & 4 à Li re 4 . 0 ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 277 Les plantes marines ont donc une composition variable et ces va- riations tiennent à la plus ou moins grande quantité d'animaux marins qu’elles hébergent. Mais on peut dire qu’en gros elles constituent un fumier riche en éléments azotés et possédant en outre un taux assez élevé de potasse et d’acide phosphorique. Ici, encore, il sera avanta- geux dans la préparation des composts d'employer ces plantes à l’état frais en tenant compte de ce que les algues et les tangues se décom- posent plus vite que les zostères. La plupart des déchets qui se produisent dans les industries an- nexes de l’agriculture sont plutôt employés comme fourrage que comme engrais. C’est seulement quand ils ne peuvent servir au pre- mier usage, parce qu'ils sont avariés ou mélangés à des substances nuisibles, qu’on les utilise comme engrais. C’est ce qui arrive, par exemple, pour les drèches et les tourteaux de colza gâtés, les germes de malt salis, les déchets de féculeries, etc. Quant aux déchets des sucreries, des distilleries de vin et de fruits, des huileries et des ma- nufactures de tabac, etc., ils ne peuvent servir que d’engrais et sont le mieux utilisés en composts. Le tableau suivant, d’après E.-Wozrr et E. HEIDEN, donne une idée de la composition centésimale de ces matières : DÉCHETS : : É ET des féculeries. ICE Ë TOURTEAUX ÉLÉMENTS EE DRÈCHES. GERMES DE MAL#T. Riz (pressé. ) sucreries. des raffineries des manufactures 10.70]76.10 S0186.00 4 78.10/23.60)80.60113 605 4.67| 0.78 .491 0.13! 1.79 Acide phosphorique . .57| 2.90! 0.39] 1.24 /|Cendres|Cendres Cendres Potasse : : 0.21] 0.01] 1.41] 0.4 | 0.7 1. Avec un taux d'huile de 23.5 p. 100 et 27.7 d’acide sulfurique. 2. Il y a 38.54 de sable et d'argile, L’érémacausis dans toutes ces matières est assez rapide. Les chiffres précédents donnent une idée suffisante de la proportion de principes nutritifs assimilables qu’elles contiennent. MATIÈRES ORGANIQUES. 37 5178 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. 5. — Composts. La fabrication des composts a pour but de faire passer à l’état assimilable les principes nutritifs contenus dans les divers détritus d’origine organique. On y arrive en les meltant dans des conditions où elles subissent une décomposition plus ou moins intense suivant leur aptitude à cet égard. Étant donné que les détritus ainsi traités se putréfient surtout dans les derniers stades et qu’il se perd alors d'assez fortes quantités d’azote sous forme d’ammoniaque, on em- ploie pour les composts de la terre et, de préférence, une terre hu- mique (terre de limon ou de tourbe) grâce à laquelle la masse reste accessible à l’air dans certaines limites en même temps que l’ammo- niaque est protégée contre l’évaporation et qu’on obvie aux pertes en matières minérales solubles qui pourraient avoir lieu par lixivia- tion. En général, on fabrique les tas de façon que les divers détritus soient disposés par couches alternant avec la terre. Quand le tas est achevé, on le recouvre d’une couche de terre de 30-40 centimètres qui sert à absorber l’ammoniaque et à empêcher le desséchement. Au cas où le compost doit être transporté l'hiver sur les prés, il faut, pour empêcher la gelée de pénétrer, le couvrir de matières mau- vaises conductrices, telles que pailles, fanes de pommes de terre, chiendent, ramilles, etc. #18 Pour entretenir les réactions dans la masse, il faut la maintenir quelque peu humide et perméable. Dans ce but, on humecte le tas avec de l’eau ou du purin ; quand il est bien préparé, c'est-à-dire qu'on a employé de la terre fine (curures de fossés, boues de route, limon de ruisseaux ou d’étangs), et quand on l’a laissé intact assez longtemps, on le change de place. Cela se fait en l’entamant vertica- lement et en le remettant à nouveau en couche près de l’endroit précédent. | Par ce traitement, les détritus animaux et végétaux subissent dans le tas une érémacausis dans laquelle les matières organiques se vo- latilisent en grande partie et les principes azotés et minéraux passent peu à peu à l’état assimilable. Ces combinaisons solubles sont -absor- 5e die , - ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 279 bées par les particules terreuses et on obtient finalement un mélange richement pourvu d'éléments humiques et de principes nutritifs so- lubles, c’est-à-dire un compost ou fumier mélangé. Les réactions sont considérées comme terminées quand les restes organiques incor- porés ne sont plus reconnaissables. À cause de la différence que présentent les détritus dans leur ap- titude à la décomposition, il est rationnel de faire plusieurs tas et de ne mettre dans chacun que les détritus dont l’altéralion marche du même pas. Cette mesure est recommandable parce que le compost a besoin d’un temps assez long pour mürir, c’est-à-dire avant d’être employé et qu’il renfermerait les détritus à divers stades de décom- position si l’on voulait préparer les tas successivement à mesure que les matériaux se présentent. Aussi faut-il prendre soin d’avoir tou- jours plusieurs tas d'ancienneté (ou de maturité) différente. Ceux qui contiennent des déchets divers et ont, par suite, des taux dif- férents de principes nutritifs, peuvent être mélangés avant l'emploi dès qu'ils concordent suffisamment par le degré de décomposition. Il y a des détritus qui doivent subir une préparation avant d’être mis en compost. Ainsi, la chair des animaux abattus doit être d’abord séparée des os. Pour cela, on cuit les morceaux pendant deux ou trois heures; alors la chair se sépare aisément; on obtient ce résul- tat encore plus vite par la vapeur. La graisse qui surnage est écumée du bouillon qui sert ensuite à arroser le compost. Les os, à moins qu’on ne préfère les vendre, sont pulvérisés et cuits et on ajoute à Peau, comme dans le cas précédent, un peu d'acide sulfurique. Les productions cornées sont aussi pulvérisées et traitées avec de la chaux fraîchement éteinte. On fera de même des hannetons qu’on dispose en couches minces sur le tas entre deux feuilles de chaux vive de 2 millimètres d'épaisseur. Pour faire les composts de gazon, on dis- pose les mottes par couches, les racines en l'air, et entre chaque couche on saupoudre de la chaux éteinte pour combiner les acides humiques et favoriser l’érémacausis. Quand on aura des détritus qui dégagent beaucoup d’ammoniaque (déchets azotés), il pourra être bon d’employer des moyens de con- servation (superphosphate gypseux, terreau de tourbe acidifié). Du . reste, c’est le rapport entre la quantité de terre et celle des déchets 580 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. animaux et végétaux qui règle le sort des combinaisons formées dans la décomposition des éléments azotés des matières organiques (p.148). Moins il y a de terre, plus il se forme d’ammoniaque, tandis qu'avec des proportions plus grandes l’ammoniaque formée nitrifie sur une plus grande échelle. On peut admettre, d’après P. Picaarp, qu'avec 2 ou 3 grammes d’azote organique par kilogramme de matière, c’est surtout de lammoniaque qui se forme, tandis que si l’azote diminue jusqu’à 1 gramme par kilogramme, on a les conditions les plus favo- rables pour une nitrification énergique s’il y a suffisamment de chaux en présence. On peut donc influer à volonté sur la transformation des éléments azotés dans les composis; on peut, dans un cas, fabri- quer un fumier riche en ammoniaque, et, dans l’autre, un fumier pourvu surtout de nitrates. Mais, en pratique, cette différence n’a pas grande importance parce que l’ammoniaque nitrifie assez vite dès que le compost est mêlé au sol. La production artificielle d’azote nitrique est, du reste, limitée et, dans l’espace de six mois, avec les meilleures conditions, elle ne s'étend qu’à la moitié de l'azote orga- nique existant. 6. — Engrais verts. La fumure en vert est le procédé qui consiste à incorporer au sol des plantes vertes non arrivées à maturité. En général, ces plantes sont cultivées dans ce but et enfouies sur place. Rarement on utilise dans ce but des plantes sauvages ou des plantes ayant crû ailleurs. La fumure en vert exerce une action sur la fertilité du sol en l’enri- chissant surtout en matières organiques, formatrices d’humus et, là où les plantes sont enfouies, la lixiviation des principes nutritifs, sur- tout des nitrates, est arrêtée (p. 451 et 475). La culture des plantes pour engrais vert se fait, soit comme cul- ture principale, soit comme sous-culture, soit après la récolte prin- cipale (culture dérobée). Dans le premier cas, on sème au printemps, pour enfouir à l'automne et on renonce à toute autre récolte pen- dant la durée de la végétation. Dans les deux autres méthodes, cet inconvénient est évité, les plantes étant semées soit sous, soit entre celles de la culture principale ou seulement après la récolte prinei- Fo AY, <<” à ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 981 pale’. Ce sont les conditions de végétation qui, dans chaque lieu, décident du procédé à employer. Dans un climat où les pluies sont irrégulières et sur un sol de faible faculté d’imbibition (sols sablon- neux), le semis par-dessous n’est pas à récommander parce qu'il extrait beaucoup d’eau du sol et nuit ainsi à la récolte principale. Dans ces conditions, et surtout dans la culture extensive ou en dehors de l’assolement, le premier procédé donnera les meilleurs résultats et, en bien des cas, plus sûrs que la culture dérobée dont la réussite dépend de l'humidité qui reste dans le sol après la ré- colte principale ou des pluies qui ont lieu par la suite. Le semis par-dessous ne convient qu'aux sols qui retiennent bien l’eau. Là où, par suite de circonstances favorables de sol et de cli- mat, l’eau est en quantité suffisante ou bien là où il s’agit de limiter la dissolution des nitrates, le semis, après la récolte principale, doit être préféré à tous les autres procédés. Pour obtenir le maximum d’effet de la fumure en vert, il faut que les plantes aient leur maximum de développement. Outre l'humidité, il y a à considérer la provision de matières nutritives, la façon de semer et le choix des plantes. Une fumure n’est nécessaire que quand les plantes sont cultivées dès le printemps. On donne alors au sol du phosphate Thomas en poudre et de la kaïnite, même de la chaux sil en manque, pour développer vigoureusement les papilionacées dont la culture produit ici les plus grands avantages. Quand on sème sous la culture principale ou après sa récolte, on ne fume pas dans les exploitations rationnellement conduites, parce que la récolte princi- pale a dû être assez richement dotée pour que les plantes vertes trouvent dans le sol ce qu’il leur faut. Quant à la façon de semer, remarquons avant tout que les plantes fournissent d'autant plus de matière organique que l’ensemencement est plus précoce et que le semis de graines mélangées, les unes à enracinement profond, les autres à enracinement superficiel, permet d'obtenir plus sûrement une récolte abondante que le semis d’une seule espèce. Pour le choix des plantes destinées à être enfouies en vert, on don- 1. Scuucrz-Lurirz, Zwischenfruchtbau auf leichtem Boden. Arbeiten der deut- scien Landwirthschaftsgesellschaft, Berlin. 1895. 582 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nera généralement la préférence à celles qui ont la faculté de com- biner l’azote atmosphérique, donc aux légumineuses. Sur les sols sablonneux légers on choisira en premier lieu le lupin jaune (Lupi- nus luleus), puis la serradelle (Ornithopus sativus), le pois d’Espagne (Lathyrus clymenum), la vesce velue (Vicia villosa), la minette (Medicago lupulina), le trèfle hybride (Trifolium hybridum) et aussi, suivant les cas, le pois (Pisum sativum); aux sols de compacité moyenne (sable lehmeux et lehm sableux) paraissent convenir le lupin bleu (L. angustifolius), le lupin blanc (L. albus), le pois, la vesce (Vicia saliva), la vesce velue, le Pisum arvense; enfin, aux sols compacts, la vesce, la fève de marais (Faba vulgaris) et aussi, d’a- près les recherches récentes, la vesce velue, le Pisum arvense, la minette, le trèfle hybride et le trèfle de Bokhara. On peut obtenir des données certaines sur la réussite de chacune de ces espèces par des essais en petit dont on doit d’autant moins se passer, si l’on veut se rapprocher le plus possible du but à atteindre, que, dans chaque exploitation, les règles générales relatives aux différences de végéta- tion subissent de nombreuses exceptions. À côté des exigences de chaque espèce pour le sol et le climat, il faut, pour déterminer son choix, considérer la façon de semer et la durée de la saison de végé- tation. Ainsi, parmi les plantes citées, peu sont aptes au semis par- dessous; celle qui convient le mieux est la serradelle, puis viennent les trèfles et, éventuellement, le lupin jaune. Pour le semis, après la culture principale, la considération déterminante est le temps qui s'écoule entre la récolte de cette culture et la semaille de la suivante. Les papilionacées répondent à toutes les exigences quand la récolte, comme celle des céréales d’hiver, colza, etc., est faite à temps ou quand le premier labour pour la récolte suivante ne doit se faire qu’au printemps; mais, à cause de leur croissance relativement lente, elles conviennent moins pour la fumure en vert dans les cas où la récolte a lieu à l’arrière-saison ou bien où le semis d’une récolte d'hiver doit s’exécuter à l’automne et où la jachère est courte (p. 472). Alors la culture de plantes à croissance rapide, bien que non fixa- trices d'azote, offre plus d’avantage que celle des légumineuses, sur- tout s’il s’agit d'arrêter à bref délai la lixiviation des nitrates, c’est- à-dire de transformer les combinaisons azotées solubles du sol en 008 Viet ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. 983 principes organiques moins solubles (p. 475). Parmi les plantes particulièrement utiles à ce point de vue, citons la moutarde blanche (Sinapis alba), la navette (Brassica rapa oleifera), le radis (Raphanus sativus oleiferus), la spergule (Spergula arvensis et S. maxima) et le sarrasin (Fagopyrum esculentum). Les chiffres suivants’ donnent une idée du poids vert à l’hectare de ces plantes et de leurs principaux éléments : : E N NT EN N POIDS VERT 109 PARTIES RENFERMA EN MOYENNE PLANTES. à l’hectare _— en quintaux. Eau. die Azote. Cendres. Lupin jaune. + . . . 120-140 \e ON ECO 150-300 [55.0 143 LA D gi Vesce ordinaire. . . . 160-240 82.0 16.2 0.56 1.8 M Vence velne”. . : :. 160-32000/83.9 15:50 0709 122 POSE SA 120-240 19 17.0 0.51 129 Pisum arvense, . . . 120-240 63.2 15.6 0.56 122 Pois d'Espagne? . . . 100-250 77.6 » 0.83 » Fève de marais. . . . 160-210 86.1 12287) 0.48 155 SERA RER EN M ee 120-300 81.0 Le ge 0.59 1.8 Minelte sr ser. 80-180 80.0 18.5 0.56 15 ‘Trèfle hybride . . . . 120-240 82.0 16.2 0.53 D 0 Trèfle de Bokhara. . . 160-320 87.5 10.4 0.46 2e Moutarde blanche . , . 120-240 ST 15.9 0.34 1.4 Navette ever. 160-200 85.9 12.8 0.45 19 TS UT 60-140 80.0 le MODESTE 120 0 1970: 0 38 1.4 SANTASINS A: en Use 100-240 85. - Ces chiffres ne donnent pas, évidemment, de renseignements pré- els, d'autant plus que, dans ce tableau, on n’a considéré que la partie aérienne des plantes et non les organes souterrains également actifs, et aussi à cause du nombre msuffisant d'analyses exactes. Les poids de récolte se rapportent à des conditions de fertilité moyenne ; les limites supérieures sont assez souvent dépassées, et de beaucoup (de 90 p. 100 et plus), sur des sols riches soumis à une culture inten- sive, comme le montrent les résultats des essais faits à Lupitz. La décomposition des engrais verts se fait généralement assez vite 1. Calculés sur les données relatives à la composition des fourrages inserites dans le calendrier agricole de MenTzez et LENGERKE d'après les tables de E. Wozrr. 2. D'après J. H. VoceL ; comparez Scaurrz-Lurrrz, loc. cél. 584 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. parce que les plantes sont enfouies à un degré de développement (floraison) où elles sont encore peu lignifiées et où la décomposition de ces matières organiques vertes est rapide. La température, cela va de soi, influe aussi sur ces réactions. Son action est, en général, défavorable, parce que les plantes vertes sont le plus souvent enfouies à une époque tardive et que leur décomposition doit se faire pendant les froids. Pour favoriser l’érémacausis, il est bon, d’après les expé- riences de ScauLTz-Lupirz, d'ajouter un peu de fumier de ferme à l’engrais vert, lorsqu'on l’enterre, si le terrain doit être occupé au printemps par des pommes de terre, par exemple. On fournit ainsi au sol un grand nombre de micro-organismes qui aident à la décom- position des plantes vertes. On a dernièrement exprimé plusieurs fois l'opinion que l’enfouis- sement des engrais verts devait se faire dès la fin de l'hiver et l’on faisait valoir que les plantes prenaient, sous l’influence de la gelée, une consistance molle qui les appropriait mieux à leur enfouissement ultérieur ou bien que la couverture formée par ces plantes favorisait beaucoup la fermentation du sol. Pourtant, si l’on considère que le but principal de la fumure en vert est l’enrichissement du sol en matières humifiantes, on ne pourra prendre la défense de cette ma- nière de voir; car, pendant l'hiver, une grande partie de la matière organique se détruit et il y a aussi, on peut l’assurer, une perte plus ou moins grande d’azote qu’on a tout intérêt à empêcher. Ce procédé offre, en outre, cet inconvénient majeur qu’on renonce aux grands avantages que présentent le labour du sol à l’automne et l’action de la gelée sur lui pendant l’hiver (p. 468). De plus, comme le fait ressortir N. von THUEMEN", en laissant les chaumes passer l’hiver, on favorise la multiplication des insectes nuisibles contre lesquels le labour du sol à l’automne est un bon moyen d’action. Si l’on remar- que, enfin, que la transformation de l’azote des plantes vertes en- fouies en azote nitrique a lieu, d’après P. P. DEHÉRAIN*, seulement à la fin de l’été quand on enfouit au printemps, et déjà au printemps, au contraire, si l’on enterre à l’automne, on devra conclure qu’on = 1. N. von TuuemEN, Deutsche landwirthschaftliche Presse, 1895, n° 68, p. 616. 2. Annales agronomiques, t. XIX, 1893. p. 305. AÛTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. D89 ne peut attendre un effet complet des engrais verts que si on enterre les plantes à la fin de l'automne. Lors de l’enfouissement des plantes vertes, surtout dans le cas où le sol doit être encore occupé à l’automne avec une récolte d'hiver, il faudra songer à recouvrir l’engrais vert d’une couche plus épaisse de terre pour que les plantes qui se développent ensuite ne souffrent pas du manque d’eau. Car l'ascension capillaire de l’eau des couches inférieures du sol est interrompue par les plantes enfouies”, si bien qu’en l'absence de pluies après la semaille, la surface du sol peut éprouver un desséchement nuisible à la germination. Pour l’empé- cher, il faut, surtout sur les sols légers, enfouir complètement et profondément l’engrais vert et comprimer fortement le sol à l’aide d’un pesant rouleau. Dans le sol ainsi traité, les plantes se décompo- sent mieux (p. 470), l’appel de l’eau vers la surface est plus facile et on pare mieux aux inconvénients relatifs à la germination qu'avec un état plus meuble du sol. Il faut, en outre, laisser le sol se reposer quelque temps après l’enfouissement avant d’ensemencer. Sur les sols compacts l’engrais vert, tout comme le fumier de ferme, doit être enterré plus supérficiellement (p. 482). Avec des plantes bien développées, il n’est pas besoin le plus sou- vent de les faucher et de les coucher dans le sillon avec des outils pour obtenir un enfouissement parfait. D’après N. von THUEMEN*, ce résultat est obtenu sûrement de la façon suivante, tout en éludant la fauchaison. Le champ est parcouru par un pesant rouleau lisse per- pendiculairement aux sillons futurs ; lacharrue est munie d’un coutre circulaire mis en rotation par la marche de l’instrument et qui coupe net les plantes couchées en travers. Un autre procédé recommandé par l’auteur consiste à attacher l’une derrière l’autre deux herses de fer et à leur faire parcourir le champ dans la direction qu’auront les sillons. La première, munie à l’avant d’un bec rabattant les plan- tes, les presse sur le sol; la seconde les peigne et les prépare ainsi à l’enfouissement par la charrue. 1. Voir F. H. Kinc, Tenlh Annual Report of the Agricultural Experiment Station of Wisconsin, Madison (Wäsc.), 1884. p. 194. Lac cil: = he CR à ce s LL: x, ’ AA +2 d D85 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES: 7. — Les détritus des récoltes. Les détritus qui restent dans le sol (racines, chaumes, feuilles) sont des engrais organiques, puisque le sol éprouve par eux un erri- chissement effectif en matières humifiantes et même en principes azotés s’il s’agit de légumineuses (p. 581). On peut aisément se con- vaincre de l’action fertilisante de ces détritus par un essai compa- ratif où, les laissant sur une parcelle, les enlevant sur l’autre, on cultive la même plante sur les deux. On obtiendra, dans le premier cas, de plus belles récoltes et, en étendant ces essais, on verra que les différences dans les produits varient suivant les plantes dont pro- viennent les détritus. Cela n’a rien d’étonnant si l’on considère que le développement des organes souterrains est très différent suivant les espèces et suivant la durée de végétation. Une expérience faite par H. Weiske”, dont on verra dans le tableau suivant les princi- paux résultats, donne une idée approchée de ces différences. PAR HECTARE EN KILOGRAMMES. PLANTES. Chaumes Matières Matières Acide et : Azote. cé Potasse. phos- racines. ©rganiques. minérales. phorique. HUE RE VO 3 988 2 738 21 2 1 250 7.) PES 13,6 MAIRIE Nr ae 6 038 4 148 15,12 1 890 36,0 2952 ONE VER RES 2 284 1 848 26.40 436 (IE 13,8 Ayoine. |: 4% 4981 2267811 130.72 000600 026 DORE SATA. 0.2, 2518 1.984 54,96 534 10,6 12,6 Cola "nue 51140 2400 NES 714 519 0868 Hopin see nan 4054 3422 71,52 632 19,6 11H60 Poiss + 212 47, 4184810067 0020 NS 7170. 13: 020TRR Serradelle. . . . . 3590 1964 74,40 626 10,21 2128 Anthyllide. . , , . 5 740 4 622 117,36 1118 29,8 27,6 Trèfle TOUS EE NCRS 10 232 8 030 220,08 2 202 93,8 86,0 Luzerne . , . . 11088. 59712 156,48: 143764270492 Esparcette . . . . 6802 5628 141,60 1174 49,9 34,2 Ces restes végétaux contiennent donc des quantités assez impor- tantes de matière organique et d’azote, beaucoup plus grandes chez les plantes pérennes que chez les autres (p. 265). On ne peut tirer 1. H. Weiske, Die landwirthschafllichen Versuchsstalionen, vol. XIV, 1871, p. 105. ‘a & ACTION DES ENGRAIS D'ORIGINE ORGANIQUE SUR L'ÉRÉMACAUSIS. D87 de ces chiffres d’autres conclusions parce que les chiffres varient sûrement beaucoup suivant les circonstances locales. Chez les plantes pluriannuelles (trèfles et herbes des pâturages) une plus ou moins grande portion des racines est décomposée au moment où l’on retourne le sol, puisqu'on sait qu’une partie de ces racines meurt chaque année. Elles ne subissent d'ordinaire qu’une décomposition lente et se transforment en matières humiques assez résistantes parce que le sol où elles se trouvent, n’étant pas travaillé, se lasse peu à peu et devient moins perméable. Aussi semble-t-il avan- tageux de fumer le sol avec de la chaux vive pour favoriser la décom- position des détritus en train de s’altérer; on favoriserait en même temps la nitrification de l’azote et l’assimilabilité des principes miné- raux, ce qui rend le sol particulièrement apte à porter des céréales. Le sol s’enrichit par les feuilles et tiges des plantes à bulbes et à racines comme par les racines et les chaumes des plantes à graines et des fourrages. Les chiffres suivants (calculés d’après E. WoLrF) montrent dans quelle proportion la fertilité du sol est influencée par ces détritus : FEUILLE : PAR HECTARE EN KILOGRAMMES. et tiges PLANTES. en > kilogr. Matière . Matière | Acide Potasse, phospho- |par hectare, organique. minérale, | rique. Re de d DEN RSR APR D M me er Pomme de terre, . .|4000- 8000, 841.2-1682. | 19.6 39.2| 78.8-1517. .2-34. 5.412.8 Topinambour. , . . | 4000-19000!| 742.0-1855. 21.2-53 o! 58.0-145. | 12.4-31.0| 2 4-0 Betterave | 6000-12000| 482 4- 964. 18.0-36.0! 87.6-175.2) 27.0-54. 6.0-12.0 Carotte 4000- 8000| 616.4-1232.8| 20.4-40.8| 95.6-191.2| 11.6-23.2| 4.0- 8.0 4600-10000! 335 6- 964. 13 6-34.0| 78.4-196 .2-28. .0-20.0 4000-10000! 360 4 901. 12.0-30-0! 47.6-119. .2-28. 3.6- 9.0 Comparées aux végétaux du tableau précédent, les plantes à bulbes et à racines fournissent moins de matières organiques, azotées et minérales. Si l’action de ces détritus sur la fertilité du sol n’est pas meilleure, elle est du moins plus prompte que celle des plantes ci- dessus indiquées parce qu’ils se décomposent plus vite en raison de leur taux d’eau élevé. CHAPITRE IV INFLUENCE DE L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES N Presque tous les fourrages obtenus dans l’agriculture ou dans les industries annexes sont si aqueux qu'ils ne peuvent être conservés à l’état frais; 1ls sont trop exposés à la pourriture. Il faut employer certains procédés qui leur permettent de résister un certain temps aux agents extérieurs de décomposition. Les méthodes employées pour la conservation des fourrages ont pour but, soit de les priver de l’eau en excès et de les faire passer à l’état de foin sec, soit de provoquer dans la masse fraîche des fer- . mentations amenant la production de principes microbicides s’oppo- sant à l’érémacausis (foin fermenté). La dessiccation des fourrages verts s'obtient en les exposant, sous la plus grande surface possible, à l'air et au soleil et les protégeant contre une nouvelle humectation par la rosée ou par la pluie. Avec une température favorable, on obtient du foin dit sec ou vert qui contient, presque sans altération, tous les principes initiaux. Seuls, les trèfles très feuillés perdent beaucoup de feuilles quand on les retourne souvent; encore ces pertes peuvent-elles être évitées pres- que entièrement par le séchage sur des claies. Si ce procédé par dessiccation, pratiqué dans les conditions indiquées, répond à toutes les exigences et peut passer pour le plus convenable, il présente, quand le temps est humide et pluvieux, de nombreux désavantages : on w'obtient pas du tout ou seulement avec de grandes difficultés du foin sec par ce procédé ; la pluie dissout plus ou moins d'éléments précieux où même, dans les cas extrêmes, toute la masse pourrit. Ce sont ces gros inconvénients qui ont amené à trouver des moyens de conservation permettant de soustraire les fourrages en tout ou en EE - | | L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES, D89 - partie à l’action des précipitations atmosphériques. Il était indiqué, pour hâter la dessiccation, d'utiliser la chaleur qui se développe spon- tanément dans les fourrages mis en tas. D’après un premier procédé inventé par T.J. KLAPMEYER ?, les fourrages, exempts de pluie et de rosée, sont mis en gros tas, en ayant soin de les bien presser couche par couche et on les laisse ainsi jusqu’à ce que la lempérature du tas s’élève à 60°-70° ; alors on le bouscule et on étend le fourrage en une couche épaisse ; après refroidissement on le retourne et, s’il n’est pas encore assez sec, on le remet en tas. Le foin prend ainsi une couleur brune. Bien que le produit soit de bonne qualité, comme l’ont prouvé les recherches de H. WEiske, la méthode de KLAPMEYER ne s’est pas répandue dans la pratique parce que, à l’entrée de la mauvaise sai- son, le séchage du fourrage est difficile et qu’il y a là un travail considé- rable. Il vaut beaucoup mieux préparer du foin brun, comme on le fait dans maintes régions à climat humide (îles, bords de la mer, montagnes); on évite ainsi les inconvénients précités. Le fourrage fané est disposé en gros tas par couches soigneusement pressées. Puis, pour empêcher la pénétration de la pluie, le tas est aussitôt recouvert d’une couche de paille suffisamment épaisse et laissé tel quel. Grâce à la forte chaleur qui se développe dans la masse, toute l’eau de végétation s’évapore et le foin, quand la réaction est termi- née, est devenu complètement sec. Il a pris une couleur brune et une odeur de miel particulière. Étant donné que la réussite de la préparation du foin brun dépend essentiellement du développement de la chaleur dans le tas, exami- nons de plus près les causes qui provoquent l’échauffement spontané du fourrage. On sait que dans la respiration des plantes et des ani- maux 1l y a absorption d'oxygène et dégagement d’acide carbonique. Cette réaction est masquée pendant le jour chez les plantes par un phé- nomène d’assimilation consistant dans l’absorption d’acide carbonique et le dégagement d’oxygène. Mais à l’obscurité, donc aussi chez les plantes encore vivantes entassées dans le tas, la respiration normale a son plein effet. L’oxydation du carbone, qui y est liée, engendre 1. T. J. KiarmEyer, Von Kleebau und Verbindurg desselben mit dem Getreide- bau, Mietau, 1794. 290 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. nécessairement de la chaleur et c’est elle qui provoque d’abord l’élé- vation de température dans la masse des fourrages entassés ; car la transpiration qui empêche l’échauffement des plantes à l’air libre est ici extraordinairement diminuée. Dès que l’oxygène contenu dans la masse a été très réduit ou complètement utilisé par la respiration normale, il intervient à la place de celle-ci une oxydation, également liée à un dégagement d'acide carbonique, que l’on a désignée sous | le nom de respiration intramoléculaire. Elle dure tant que les cel- lules végétales sont vivantes et se montre très énergique dans la masse déjà fort échauffée, parce que la température optima pour cette réaction est d’environ 40°, donc plus élevée que l’optimum de la respiration normale qui est de 25° à 30°. Dans les produits de cette dernière réaction on constate la présence de l'alcool. (Voir Note 0.) Les réactions provoquées par la respiration intramoléculaire ne doi- vent pourtant pas être de longue durée, parce que, avec l’accrois- sement continu de la température, l’activité vitale des cellules est détruite, ce qui arrive vers 90°, sinon déjà avant. À mesure que les plantes meurent, la pullulation et l’activité de nombreux microbes préexistant dans la masse s’augmentent et il survient toute une série de réactions pour la plupart encore inconnues par lesquelles diverses combinaisons organiques, tant azotées que non azotées, passent à des formes plus simples en dégageant un certain nombre de calories. Avec la production de ces produits de fermentation qui, comme les acides, entravent l’activité et la multiplication des micro-organismes et notamment des bactéries, done avec la diminution de l'énergie chimique de dissociation la fermentation diminue constamment jus- qu’à cessation complète. De ce qui précède il résulte que la température dans les tas de foin augmente d’abord jusqu'à une certaine limite, puis diminue Jjus- qu’à ce qu’elle soit égale à la température extérieure. Le degré et la durée de l’échauffement dépendent de diverses conditions, surtout de la quantité et de la composition des plantes entassées, de la pénétra- tion de l'air et des dispositions prises pour obtenir le dégagement de chaleur. (Voir Note P.) En général, à conditions égales, l'élévation de température est d'autant plus grande que les tas sont plus gros et inversement. Cela L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. 591 s'explique si l’on considère que l’action de l'air froid extérieur se restreint à mesure que le tas est plus volumineux. Le dégagement de chaleur est en outre d’autant plus intense que l'activité vitale des cellules est plus grande, c’est-à-dire que les plantes sont plus fraiches et plus charnues ; car leur respiration sera d'autant plus énergique et il y aura une plus grande réserve de forces chimiques de dissociation. C’est pour cela que l’échauffement est faible quand les plantes ont déjà perdu beaucoup d’eau ou quand elles ont été lavées par des pluies répétées. Mais cela arrive aussi lorsque les fourrages sont chargés sur le tas, imprégnés de pluie ou de rosée ; les stomates sont obstrués par l’eau et la respiration se trouve ainsi diminuée. La chaleur qui se dégage dans ces conditions est insuffi- sante à évaporer l’eau en excès ; la masse reste dans un état plus ou moins mouilleux ; s’il y a manque d’air, elle subit la putréfaction ; si l'oxygène arrive abondamment, elle subit l’eremacausis avec produc- tion de nombreuses moisissures. Du reste, l’échauffement est d’autant plus fort, toutes choses égales d’ailleurs, que les couches de foin sont moins pressées, parce que l’accès de l’oxygène est facilité d'autant. Il y a pourtant à considérer que les plantes riches en eau, quand elles ont péri par l’élévation de la température, sont destinées à l’érémacausis si elles sont en cou- ches poreuses ; elles offrent une nourriture appropriée aux nom- breuses moisissures qui se présentent et sont dès lors perdues. L’élé- vation de température dans les tas dépend enfin de leur protection contre le refroidissement. À conditions égales, les fourrages entassés dans un espace clos s’échauffent plus que ceux qui sont en plein air. Des considérations précédentes sur les causes de l’échauffement spontané des fourrages mis en tas se dégagent quelques données pour le traitement le plus rationnel du foin brun. Il y a du reste encore beaucoup de lacunes dans nos connaissances sur les processus intimes de l’échauffement, parce qu’il n’a été fait jusqu'alors aucune recherche systématique à ce sujet. Il faudrait avant tout établir pour une seule et même matière l'influence que la masse, son taux d’eau, son degré de pression exercent, soit par eux- mêmes et dans les complications possibles à ce point de vue, soit sur les propriétés chimiques du produit. À cet égard on ne pourrait ob- - 592 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. tenir de données intéressantes pour la pratique qu’en déterminant la quantité des éléments qui se perdent. Des analyses de fourrages sur échantillons recueillis dans des conditions non déterminées ne sufñli- sent évidemment pas à combler les lacunes dont nous parlons *. D’après ce que l’on sait actuellement, la préparation du foin brun ne réussit que dans le cas où le fourrage, lors de la mise en tas, est fané et fortement pressé, couche par couche. A l’état frais, l’échau*- fement semble être trop fort et la fermentation trop intense, incon- vénient auquel on peut parer par une compression plus énergique que celle qui est possible par l’action des pieds. En aucun cas la tem- pérature ne peut s'élever dans Ja masse à un point tel qu’on ait à craindre l’inflammation spontanée du foin, parce que l’eau est si abondante que la chaleur développée suffit seulement à l’évaporer. On a observé ce phénomène uniquement dans le cas de fourrages peu humides, presque séchés à l’air et mis en couches relativement per- méables. Mais on ne sait pas encore nettement comment prennent naissance les hautes températures nécessaires pour produire Fin- flammation. Les recherches de H. Ranke* ont bien montré qu’en chauffant du foin à 280°-320°, il se forrmait un charbon pyrophorique c’est-à-dire inflammable à l’air; mais on ne sait pas du tout ce qui peut amener une telle élévation de température. En tout cas, il ne s’agit pas de processus de fermentation, parce qu’elle prend fin à une température beaucoup plus basse. Il ne reste que l’hypothèse de réactions purement physico-chimiques dans des circonstances don- nées, ce qui n'avance pas beaucoup l’explication du phénomène. D'autre part, on ne peut obtenir de foin brun normal avec un taux d’eau excessif comme il arrive quand les plantes sont imprégnées de pluie et de rosée ; dans ce cas elles sont pour la plus grande par- tie perdues, comme on l’a déjà dit. On peut donc seulement affirmer que, d’après l'expérience, les fourrages doivent, pour la préparation du foin brun, être employés fanés. Pour les mettre à cet état, il suffit, quand les andains sont secs par-dessus, de les retourner et de les {. F. Fauke, Die Braunheubereitung. Arbeiten der deutschen Landwirthschafts- gesellschaft, fase, 9, Beriin, 1895. 2, H. Rankr, Die landwirthschaftlichen Versuchsslalionen, vol. XVI, 1573, p. 347. POST TT IR MST e d — J pa = L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. 993 laisser exposés à l’air jusqu’à ce que le dessous soit aussi sec. Dans quelques contrées ces andains fanés sont mis en petits tas et y restent 1-2 jours avant d’être travaillés comme foin brun. La nécessité de faner avant de conserver est un désavantage quand le travail est in- terrompu par les pluies. Pourtant il est plus facile, dans un climat humide ou dans une période pluvieuse, de préparer les fourrages pour faire du foin brun que pour faire du foin sec. L'expérience a montré que les dimensions les plus convenables à donner aux masses de foin brun sont 4 à 6 mètres de diamètre avec une hauteur de 4 à 7 mètres. Il n’est pas à recommander de les mettre dans des espaces clos, parce que l’eau, ne pouvant s’évaporer, se condense sur le foin et donne facilement naissance à de la pourri- ture ; de plus, il peut se produire un très fort échauffement par sup- pression du refroidissement par l'air extérieur. Enfin, il faut avoir soin de comprimer les diverses couches le plus possible. Comme protection contre l’action nuisible de l’eau de con- densation et de la pluie, 1l faut recouvrir la masse d’une forte couche de paille, mais ne pas la maintenir avec des poutres qui seraient une voie de pénétration pour l’eau de pluie; mieux vaut employer de forts fils de fer tendus par des pierres. L’échauffement et la fermentation de la masse durent de trois à cinq semaines, suivant les circonstances extérieures. Le refroidisse- ment se fait lentement et ne se termine qu’au bout de dix à douze semaines. Selon la matière employée et son degré d’échauffement, le foin a une couleur qui varie du brun clair au noir. A conditions égales, les plantes qui se prêtent facilement à la compression (les graminées par exemple) se colorent plus que celles à tiges grossières (trèfles). Mentionnons enfin un dernier procédé usité en Schleswig-Holstein et donnant un produit qui tient le milieu entre le foin sec et le foin brun. D’après F. Fazke’, il se distingue parce qu’au lieu de gros tas on n’en fait que de moyens et les fourrages sont entassés quand ils ne sont pas encore complètement secs. « Quand le foin est fané pen- dant un à trois jours par la dessiccation en andains qui, avec des temps 1. Loc, cil., p. 17. MATIÈRES ORGANIQUES. 38 594 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. favorables, ne sont retournés qu'une fois, il est mis en petits tas ; ceux-ci, au bout de deux à trois jours, sont réunis en de plus gros tas hémisphériques contenant la charge d’une voiture ou d’une voi- ture et demie. » Pour la conservation de la seconde coupe, les tas sont un peu plus gros et équivalent à quatre ou cinq petites voitures. A cause de la dessiccation déjà très avancée du foin, son échauffement ne peut qu'être faible. Le faible diamètre des tas permet une aéra- tion facile et un refroidissement plus prompt que dans les tas de plus forte dimension. Le produit obtenu ne peut généralement pas être exactement désigné sous le nom de foin brun. Il n’en a la com- position que si les végétaux possédaient, lors de la mise en tas, un taux d’eau assez élevé ou une texture telle qu’ils pussent s’empiler en couches serrées. Ce dernier cas se présente pour la seconde coupe parce que les fourrages ne se fanent que difficilement et qu'ils s’entassent mieux, étant plus feuillés. Comme la préparation du foin brun exige un fanage préalable et ne peut dès lors être toujours faite convenablement, on a cherché des méthodes qui permissent de conserver le foin à l’état frais et de le soustraire complètement aux influences atmosphériques. Telle est la préparation du foin acide qui se fait en empilant dans des silos secs, par couches fortement pressées, les plantes fraîchement cou- pées. Quand le silo est plein, on recouvre le tas d’une forte couche de terre dont on bouche soigneusement toutes les fentes à mesure qu’elles se produisent. La masse ainsi traitée éprouve, il est vrai, par suite du dégage- ment d’acide carbonique, un échauffement, mais qui, vu l'absence complète d’air, n’approche jamais, même de loin, de celui qu’on constate dans le foin brun ; aussi l’évaporation de l’eau y est-elle moindre. Il s’y produit très vite, grâce aux micro-organismes, des fermentations donnant surtout naissance à de l’acide lactique et à des acides gras volatils (acides acétique, butyrique, valérianique, propionique, capronique, etc.). Aussi le produit devient acide et prend une odeur pénétrante; caractéristique du foin acide. La multi- plication des champignons de la pourriture est entravée par ces acides et le foin à cet état peut se conserver assez longtemps. On ne peut obtenir le foin acide que si le fourrage est aussi com= È nn - a nr L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. D95 primé que possible et s’il est soigneusement garanti contre l’arrivée de l’air et de l’eau de pluie ou de fond. Dans le cas contraire, il serait sûrement perdu. Si l'oxygène de l’air pénètre plus ou moins, les moisissures et le ferment de l’acide acétique gagnent la surface, tandis que la fermentation lactique est refoulée. Il se produit alors aussi une forte fermentation ammoniacale dont les conditions ne sont pas encore bien connues ; la masse prend une réaction alcaline et un état favorable à la pullulation de nombreuses bactéries putré- fiantes. S'il arrive d'assez grandes quantités d’eau pour boucher les vides existant entre les plantes et pour fermer complètement l'accès de l’air, la pourriture progresse de dehors en dedans et le fourrage est perdu comme dans le cas précédent. De ce que nous venons de dire résultent les précautions à prendre pour préparer du foin acide normal’. L’ensilage dans des espaces complètement imperméables est préférable à la mise en silos dans lesquels la garantie nécessaire contre l’air et l’eau est moins assurée. Par linfiltration de l'humidité qui s’évapore, il y a souvent d’assez notables quantités de fourrage perdues, inconvénient complètement évité dans le premier cas. Des fosses revêtues de briques et enduites de ciment conviennent le mieux; pour empêcher un trop fort échauffement dans le fourrage, elles doivent être aussi étroites que possible (2 mètres à 2°,50), mais profondes (2",50 à 3 mètres) et lon- gues. Les parois ont un léger fruit pour que le fourrage reste bien en contact avec elles lors de son tassement. Les fourrages à conserver sont entassés par couches dont chacune est fortement pressée et, en en outre, on les charge de pierres posées sur des planches. La sur- face des fourrages ainsi traités ne doit pas être mise de niveau avec le bord des fosses, parce qu’il Se produirait dans le milieu de la chape de terre, par son tassement, une dépression où s’accumulerait de l’eau qui ferait pourrir le fourrage. Pour parer à cet mconvé- nient, il semble indiqué de donner à la surface du tas un fort bom- bement par lequel on prévient en même temps la production de - 1. J. Küux, Das Einsäuern (Einmachen) der Futtermittel; MENTzEL und x. LEN- GERKE'S landwirthschafllicher Kalender, Berlin, 1888, p. 313; E. Porr, Die lan1- # acier Eutlermittel, Berlin, 1889, p. 96. 596 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. fentes dans la chape, puisqu’à mesure que le volume diminue, elle devient plus serrée et plus compacte. Il faut du reste boucher toutes les fentes qui s’y produisent. La couverture de terre doit avoir une épaisseur de 0",60 à 0,80 et d’un mètre s’il s’agit de terre sablon- neuse ; elle doit être appliquée par couches bien triturées formant une sorte de pisé. On ne doit jamais employer la paille pour revêtir les parois des silos ou pour couvrir le tas (procédé qui est souvent employé dans les silos nus) parce que l'air enfermé dans la paille favorise la pro- duction dans le foin avoisinant d’acide acétique et de moisissures. Certains fourrages, tels que le maïs, les betteraves, les pommes de terre, doivent être auparavant découpés pour pouvoir s’entasser convenablement. Souvent, en outre, on fait cuire les pommes de terre, précaution nécessaire quand elles sont gelées ou prêtes à pourrir. Les réactions pour la formation du fourrage acide durent de six à huit semaines. Après ce laps de temps, on peut ouvrir la fosse et employer son contenu. Il faut prendre la précaution d’enlever la consommation journalière par tranches verticales et de garantir la surface nue par des bottes de paille ou des planches pour empêcher l’accès de l'air. Si l’on doit employer le foin acide régulièrement et en grande quantité, il est rationnel de faire des silos tels qu'ils puis- sent être consommés en quelques jours. On est sûr ainsi qu’une partie du fourrage ne sera pas perdue par moisissure. En partant de l’idée que les microbes qui provoquent la fermenta- lion spéciale du foin acide sont tués par les hautes températures, on a cru dernièrement pouvoir conserver les fourrages à l'abri de la fermentation en les laissant d’abord s’échaufler spontanément dans des tas faits à l’air libre et, après que les hautes températures ont agi un certain temps, en les soustrayant par énergique compression mécanique aussi complètement que possible à l’action de Pair’. On pensait oblenir avec cette opération un fourrage doux (sweet ensi- lage), sans acidité, dans lequel les éléments n'auraient subi que de {. À. Gorranr, Manuel de la culture et de l’ensilage des mais et autres four- rages verts, Paris, 1877; G. nv, 7he Theory and Praclice of Sweet Ensilage, Lon- don, 1885 ‘ à T ner à | « L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. 997 fables modifications ; l’événement a montré qu’on s'était trompé. Cependant on est arrivé par cette voie à une méthode qui, bien con- duite, permet d'obtenir un fourrage dont la préparation offre en certains cas plus d'avantage que celle des fourrages déjà décrits. Comment les microbes qui provoquent la fermentation des four- rages verts mis en {as sont-ils influencés par le procédé dont il est question et qu'on peut dénommer la préparation du foin vert pressé? Avant d'entrer dans des explications à cet égard, il faut d’abord parler d’une recherche sur plusieurs points importants de laquelle nos connaissances offrent encore beaucoup de lacunes. La fermentation lactique, on l’a montré au début de ce livre (p. 42), est provoquée par divers organismes qui ne sont pas essentiellement différents par leurs conditions de vie et de nutrition pas plus que par les produits qu’ils forment. On peut admettre cependant que le fer- ment lactique décrit par HuEpre, le Bacillus acidi lactici, est le plus répandu et contribue donc le plus à la fermentation en question. C’est un anaérobie facultatif et peu sensible à l'absence d'oxygène. Quant à l’influence de la température, on a trouvé que le bacille ne se multiplie pas au-dessous de 10° C, que sa température optima est de 30° à 45° et qu'il peut supporter 60° et plus sans périr. Pour la plupart des organismes producteurs d’acides gras volatils, les limites de température sont moins étendues. Ainsi le champignon aérobie de l’acide acétique prospère le mieux entre 18 et 35°, le microbe anaérobie de l'acide butyrique entre 35° et 40°, tandis qu'ils sont tués, le premier vers 50° et le second vers 60° ou peu au delà. Les microbes producteurs des autres acides gras se comportent de même. Ces faits font pressentir les mesures à employer pour arrêter dans les fourrages entassés le développement des bacilles à l’activité des- quels est liée la production des acides gras. Et pour se mettre dans les conditions d’une fermentation lactique aussi pure que possible, il est évident qu’il faut d’abord laisser s’échauffer les fourrages verts mis en tas peu serrés. Quand la température s'élève, les microbes des acides gras sont tués, tandis que le ferment lactique résiste. Après que l’échauffement a produit un certain temps son effet, si l’on comprime alors fortement le tas, la température s’abaisse néces- 298 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. sairement puisque l'air n'arrive plus que difficilement ; mais cette baisse se fait lentement, vu la mauvaise conductibilité des fourrages, et proportionnellement à la pression que l’on a fait subir à la masse. Il est ainsi possible de maintenir quelque temps la température au degré le plus favorable au développement du ferment lactique. Dans la masse pressée il doit donc se former une certaine quantité d’acide lactique, mais pas au delà d’un taux déterminé parce qu’il arrive finalement un moment où la pullulation des bacilles s’arrête à cause de l’augmentation d’acide lactique qui agit comme un poison. À côté de la fermentation lactique, il y a toujours encore quelques ferments d'acides gras qui agissent ; car le foin ainsi pressé contient toujours, outre l’acide lactique, un certain taux d’acides gras vola- üls, mais très faible en comparaison de celui du foin acide. La diffé- rence est manifeste dans les chiffres suivants, dus à G. Fry, relatifs à deux espèces de fourrages fermentés de trèfle incarnat : La substance sèche renferme : FOINPRESSÉ. FOIN ACIDE. . p.100. p-100. Acides volatils libres (calculés en acide acétique). 0.30-0.34 1.704 Acides libres non volatils (acide lactique). . . . 1.53-1.93 1.873 Suivant les circonstances extérieures, la composition du foi vert pressé est différente’. Une teinte vert clair, généralement accompa- gnée d'acides plus odorants, montre que la température n’a pas atteint les-environs de 60°. Si la couleur est brune, c’est un signe que l’échauffement a dépassé les limites prévues. L’odeur du foin normal pressé est rapprochée de celle du pain, du miel, du gros pain bis, du tabac à priser, etc., tandis que le foin rendu acide par un échauffement insuffisant dégage une odeur semblable à l'odeur trop forte du foin brun ; elle chatouille et irrite la muqueuse nasale. Quant à la texture du fourrage, elle est peu modihée si l’échauffe- ment n’a pas dépassé la limite indiquée. Les exceptions aux faits précé- dents indiquent toujours des fautes dans la préparation du fourrage. Le pressage du fourrage s'obtient le mieux par des appareils mécaniques, parce qu'avec eux la température se règle bien plus {. F. Ausenr, Unlersuchungen über Grünpressfuller (Jahrbuch der deutschen Landwirthschaftsgesellschaft, 1891, 1°° partie). L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. D99 facilement que dans les silos souterrains. Suivant la manière dont on exerce la pression, ces appareils se distinguent en deux groupes : les presses à action continue (presses automatiques) et les presses à pres- sion variable (agissant non automatiquement)". Les recherches de F. AzBerT n’ont pu établir la supériorité d’un système déterminé de presses. Pour qu’on puisse songer à installer ces presses, il faut d’abord que la quantité de fourrage à conserver soit assez grande, parce que sa préparation ne réussit qu'à cette condition et que le déchet sur les bords, qu’on ne peut empêcher, serait trop grand par rapport à la masse. Comme quantité minima, F. AL8erT donne 30 000 kilogr. et G. CALBERLA 100 000. On n’est pas d'accord sur le taux d’eau avec lequel les plantes doivent être portées sous les presses. Les uns recommandent de les presser fanées, les autres aussi fraiches que possible. Comme F. ALBERT le fait remarquer justement, on doit, pour résoudre la question, tenir compte de l’état de la matière sous d’autres rapports, parce que le taux d’eau n’est pas seul décisif dans le cours des réactions de la fermentation. Des plantes à grosse tige, comme le maïs, qui permettent à l’air une large entrée dans la masse pressée pourront être employées avec un taux d’eau plus élevé que d’autres fourrages à tiges plus menues qui s’entassent plus vite et mieux. Si l’on a des matières trop aqueuses, on peut diminuer le taux d’eau en interstratifiant des matières appropriées, telles que de la menue paille ou de la paille. Du reste, un assez fort taux d’eau ne semble pas nuire du tout au succès de l’opération ; on peut le conclure déjà de ce fait que, d’après les rapports concordants de la pratique, même avec une pluie persistante, le foin pressé se prépare avec une composition norma:e, tandis qu’un taux d’eau insuffisant peut être très désastreux*. Il est important que les plantes soient placées dans les balles pressées aussi uniformément que possible et que les bords de ces balles soient bien lisses. Avant de mettre le tas 1. Le travail précédemment cité de F. AzBEerr contient une description détaillée des différentes presses. 2. Voir F, AL8enT, loc. cil., p. 59, et E. Wozrr, Landwirthschaftliche Jahrbucher, vol. XXI, 1892, p. 45. “ MAC LT Re PRE NES ER ENT PILES LS Fhb 600 . DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES, de foin sous presse, on l’entoure d’une couche de paille dont l’épais- seur doit être d'environ 0",50 après le pressage. Cette couche de: paille servira à empêcher l’humidité du sol et le mélange de terre. Quand la confection des tas est terminée, il s’y produit très vite- un fort échauffement. Dès qu’il a atteint 60°-65°, il diminue rapi- dement jusque vers 50° par augmentation correspondante de la pression et se maintient assez longtemps entre 40° et 50°. Alors la température s’abaisse peu à peu et s’égalise finalement avec la tem- pérature ambiante’. Pour se rendre compte de la marche de la tem- pérature, ce qui est indispensable, on le comprend aisément, on se sert de thermomètres, dits d’ensilage, construits à cet effet?. Comme complément aux précédentes explications sur les diverses méthodes de conservation et sur les principes qui leur servent de bases, il reste à traiter une question importante pour la pratique : quels changements qualitatifs et quantitatifs ces différentes mani- pulations font-elles subir aux éléments primitifs du fourrage ? Tout d’abord, étant donné ce que nous savons sur la respiration et la fermentation, on doit admettre forcément qu’une partie de la ma- tière organique éprouvera dans ces divers traitements non seu- lement une diminution par dégagement de produits gazeux, mais encore nécessairement une transformation chimique. Quelle perte la matière organique subit-elle par l’échauffement et les réactions de fermentalion ? Cette question ne peut être résolue -que par l’obten- tion de chiffres exacts, et les recherches précédentes, qui ont trait uniquement à la détermination de la composition centésimale des divers fourrages, laissent beaucoup à désirer sous ce rapport. Celles qui se rapprochent le plus de ce que nous cherchons sont celles de H. WeiskE*. Il a opéré avec du sainfoin dont un lot fut séché avec soin et dont l’autre fut préparé en foin brun et acide. 1. Voir F. Ausenr, loc. cél., p. 17 et 24. 2. Quant à l'observation que par l'emploi de hautes températures on diminue dans une large mesure la digestibilité du fourrage, F. ALbent admet qu'une température de 409-509 convient mieux qu'une de 60°-66°, ‘parce qu'on évite ainsi la formation d'acide acétique. On n’a pas encore démontré d'une manière certaine si on proyoque ainsi une meilleure utilisation des principes nutritifs. | 3. H. Weiske, Journal für Landwirthschaft, 1877, p. 170. L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. (601 D’après les résultats analytiques et en tenant compte de l’importance _dé la récolte, la quantité de matière nutritive par coupe se calcule ainsi qu'il suit pour un hectare en kilogr. : MATIÈRE PROTÉINE + ÉLÉMENTS MATIÈRES CELLULOSE extraites organique. brute. non azotés. par l’éther. brute. Foin bien séché. 5531.6 1092.4 2272.0 170.0 1997 0 Foin brun. . . 1458.6 991.8 1 680.8 233.4 15222 Foin acide. . . 41394 914.0 1381.0 269.2 19713.2 Comme on le voit, la préparation du foin brun et du foin acide entraine une perte importante de substance qui se répartit sur tous les éléments, sauf ceux extraits par l’éther. La perte centésimale est de: MATIÈRES CELLULOSE MATIÈRE PROTÉINE ÉLÉMENTS A F : P extraites organique. brute, non azotés. par l'éther. brute. Foin brun, . 19.4 92 26.0 + 37.2 22.3 Foin acide. . 25.4 16.3 39.2 58.4 2152 Ce sont les éléments non azotés qui subissent la plus forte perte, puis vient la cellulose brute ; la protéine brute diminue le moins, mais encore notablement. L'augmentation des matières extraites par l’éther tient à la dissolution des acides gras volatils formés dans la fermentation. On voit nettement que la perte est plus grande pour le foin acide que pour le foin brun. Dans certains cas, les pertes par fermentation peuvent être plus grandes, mais pas beaucoup plus petites que celles qui viennent d’être indiquées’. HoLnerLeiss, d’après ses observations sur l’ensi- lage du maïs vert, admet que la perte en matière organique est de 40 à 50 p. 100. Dans les essais faits en Saxe à l’instigation de M. MŒRCKER, sur des betteraves hachées, les pertes de poids par l’ensilage ont varié de 17.7 à 62.1 p. 100 (moyenne : 37.5 p. 100) et pour les divers élé- ments de : 14.6 à 56.5 (moyenne : 37.8 p. 100) pour les principes non azotés, 8.9à 51.8( — 29.6 p. 100) pour la cellulose brute, 4,5 à 39.7 ( — 24.5 p. 100) pour le protéine brute. 1. E. Porr, Loc: cét., p. 100 à 105. 602 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. Un essai d’ensilage fait par le même auteur avec des pommes de terre préalablement coupées a donné une perte de 53.6 p. 100 en poids total, de 22.7 p. 100 en substance sèche, de 24.6 p. 100 en principes nutritifs non azotés, de 25.9 p. 100 en cellulose brute et de 07 p. 100 en éléments azotés. Mais on a fait aussi des expériences dans lesquelles les pertes étaient beaucoup moindres. Ainsi G. Lies- SCHER a trouvé que des betteraves hachées n’avaient perdu que 5.2 à 7.3 p. 100 de leur poids et A. STUTZER, en préparant du foin acide avec du trèfle de Suède (Trifolium hybridum), n’a constaté qu’une perte de 5.7 p. 100. Il y a aussi à considérer, pour juger de l'aptitude des fourrages à ces diverses préparations, outre les modifications de composition, celles de digestibilité qui ont un grand intérêt. Comment cette digestibilité est-elle modifiée dans la préparation du foin brun et du foin acide, c’est ce que les essais de H. Weiske indiquent nettement. Il fit con- sommer par des moutons des foins d’esparcette différemment prépa- rés et obtint les coefficients de digestibilité ci-dessous : MATIÈRE PROTÉINE PRINCIPES MATIÈRES C&LLULOSE : extraites organique. brute. non azotés, par l’éther. brute. Foin soigneusement séché. 61.82 7e 24 76.32 66.46 39.28 Fomibrun ee true Mois 63.51 67.04 19 04 45.29 Fonratide ERA 5 7 50.25 23.20 74.14 28.77 Ces nombres accusent une diminution notable de digestibilité pour le sainfoin préparé en foin brun ou en foin acide et surtout pour ce dernier. Seuls, les éléments solubles dans l’éther y ont été utilisés en plus forte proportion que dans le sainfoin simplement séché. Si, d’après ces données, on calcule en principes réellement digérés les quantités obtenues par hectare et par coupe, on obtient les chiffres suivants qui représentent des kilogrammes : MATIÈRE PROTÉINE PRINCIPES MATIÈRES CRLLULOSE organique. brute. non azotés. Mer brute. Foin séché avec soin. . 3409.6 118200173240 113.0 784.4 Fo brun ee 0265621 629.9 1126.8 10 702.9 Foin acide Re 1846.2 459.3 734.7 199.6 452.6 Les modifications subies dans les deux derniers modes de prépa- L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. (603 ration des fourrages par les principes digestibles se calculent donc comme il suit en taux centésimal. MATIÈRE PROTÉINE PRINCIPES MARS CELLULOSE organique. brute. non azotés. par l’éther. brute. Foin brun . . — 22.7 —19.1 — 35.0 + 56.2 — 10.4 Foin acide . . — 45.9 — 40.9 — 57.6 + 76.7 — 42,3 Les pertes par échauffement et fermentation ressortent encore plus nettement dans ces chiffres que dans ceux qui sont calculés d’après la composition des fourrages et l’on voit que la quantité d’éléments utilisables est bien plus diminuée dans le foin acide que dans le foin brun. Le foin vert pressé obtenu par une méthode semblable à celle des deux foins fermentés précédents doit nécessairement se comporter d’une manière analogue. C’est en effet ce qui arrive, comme le mon- trent les résultats de F. Albert’. Ils sont rassemblés dans le tableau de la page suivante où on n’a porté que les quantités de foin pressé réellement utilisables, tous les déchets ayant été comptés comme pertes avec celles dues à la fermentation. Ainsi, par cette méthode comme par celle du foin acide, on subit une perte importante et la digestibilité des matières albuminoïdes est sensiblement diminuée. Ces pertes dans le foin vert pressé sont dues non seulement à l’échauffement spontané et à la fermentation, mais encore à la sève qui s'écoule au moment du pressage et à la couche gâtée, inutilisable, qui recouvre le bord des balles. Pour simp'fier le tableau, on n’y a fait figurer que les modifica- tions quantitatives. Il en est aussi dans la qualité des produits ; la diminution de digestibilité des éléments du foin fermenté comparés à ceux du foin frais ou desséché avec soin le prouve déjà. Jusqu’alors on ne possède sur ces transformations que des observations éparses. Celles qui inspirent le plus de confiance ont trait aux principes azo- tés. Ceux-ci, par les divers processus de décomposition, se transfor- ment en combinaisons plus simples, comme on pouvait le prévoir ; finalement une partie des éléments azotés se volatilise sous forme 1. F. ALBERT, loc. cil., p. 84. di A D © Z A MATIÈRES ORG MPOSITION DES DECO 604 “oinaq euros ef ap 007 d £°GF ‘# T°Ts 66€ 9° LL 9"88 9°es « G'TI F9°9 ‘007 ‘4 “our -nqiep “ainaq outg1oid ef op 007 ‘d 5e "€ “eniq oug101d ef op 007 LE 24 2 ‘einaq outgoid 8j ep 00} ‘d £'CF‘} « G'L2G 0'8L « LA L' 6°6L « LA 1 9°68 0°88 T'0L ‘0074 ‘eniq au9101d ap a —" aqseñip onseq —“ ‘AHOHS HONVLSHNS V'T HG NOILISOANON9 Lu « ‘1801rx “anberu -OUIUE p So[liR]OA suosIeu -Iqu07) L'L9 P'PIS L'816 g'#€ c‘g9s 1‘807 £'v9 L‘06 0‘ PCs 9'# g‘98T 96ST 8°6€ 8‘68 1°ç9 "1#0r04 *aplou -lunqe uou dTQUEN 1°29 6‘ce6 T'OFr& G'Ie g‘2TG 9‘ccL £°8L L‘G8T 8‘c1g LAC 1‘06F L‘T88 6'1ÿ 9‘F08 L‘FEC “180114 “ourtu nqTy a : OUHAJUAI 2Jn1q eura1041d 97107) 0°aç F'LECT S'8Ir £ 1°0€ 6° 808 8‘2CTIT 0‘I£ c°2166 S'GSTT 6°G€ 6899 £‘FFOT L'1Y 8°Sr£ s°68c "180[14 *ayniq au1g1014 £'67 6169 6‘F8L ST #°9g 8‘80c 9 ‘869 8T g'GL c'ecz g‘TFI 8 6'Gz F‘ce9 g'ece a LATE) gG£OT 0‘600 £ ‘180px 1'#9 6‘10c& 8‘TLF g'£y 6‘F06 & g‘T689 0°c9 8‘ yL8 9‘96F & (Dr 44 0‘926 L'OYST 0°0 9° c06 L'OT8T ‘10114 L'97 &‘09L8T G'FLLSI 8°8ç 1‘88c 8‘TIFI z'SL 8‘£g9r r‘099 8°67 L‘eLe 8‘gre c'8y c‘£98 L'TIG “1#0nx A LCL F& 066 TF l'I 662 0T F60 88 ÿ°IL FEI & 88F L ÿ'IL FAI 8 c‘908 € 6°9g 8cc G'CI6 CG "1#011x 6°8q G66 89 Gag ST 0'09 GLS Gr Ces FIT & 08 0029 cgs 66 t'08 0029 SIG 8T ÿ°L9 097 & 089 OT “sorts ‘891078 uou “a1niq *Sa1pu2!) "08 280[n][9!) QLLELICE | “sr QUE nn ‘IVLOL Sal104 * * * 007 ‘d wo oyu94 o1qustpnn 9sso1d wo * OUOIUI] 91Q1NEI * *. * 007 ‘d u9 97294 a[qUSIEn 98s01d urOT 7? * eUOIEIF 91013 * * * 0017 ‘d uo 97204 2TAUSI[IIN 9Sso1d wo x * OUOIPAJ 219 1JUIU © * * 007 ‘d uo oy10q a[qusiiqn oss01d uloÿT * * * OU9ICAIJ 9191UN * * * 007 ‘d ua oyueq4 2[qeSIIIn 9ssa1d u10,7 * * * OUOIUIJ SIQUEN *‘Jorunyç ep S0AU19)}0f ‘ * HOTUNQ OP SI oprTA qu *SrzqQ29) 9p 93n01 OJO1L, | | | “Horn ep | | *31Zq019) 9p 9q10H L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES, 609 d’ammoniaque et probablement aussi parfois sous forme d’azote libre. Ce sont principalement les matières azotées non albuminoïdes (amides) qui sont l’objet de ces transformations. Quant aux matières albuminoïdes, diverses observations ont montré qu’une plus ou moins grande partie se transforme en principes non albuminoïdes dans la fermentation ; cela se déduit particulièrement de ce fait que les dif- férents fourrages fermentés sont relativement plus riches en ces der- niers principes et plus pauvres en matières albuminoïdes. Par exemple, A. STUTZER : a trouvé, pour le trèfle rouge, que sur 100 parties en poids de protéine brute, il y avait: DANS DANS le foin sec. le foin pressé. Amides. . PET a ce SN Sd ET: 43.3 Principes albuminoïdes facilement digestibles. 51.8 35.9 Les modifications des matières extractives non azotées et de la cellulose brute n’ont pas été jusqu'alors étudiées. Une portion de ces deux groupes est naturellement employée pour les réactions d’oxy- dation et les matières extractives servent en partie à former des acides volatils et non volalils. En résumé, de ce que nous venons de dire 1l ressort nettement que, dans toutes les préparations de fourrages où l’on preyoque l’échauffement spontané et la fermentation, il y a des pertes notables sur tous les éléments, sauf ceux qui sont solubles dans l’éther; qu’en même temps la digestibilité des éléments nutritifs subit une impor- tante diminution et que la composition primitive se modifie de telle façon que le pouvoir nutritif du fourrage s’amoindrit. D'ailleurs, dans le procédé ordinaire (séchage du foin), même avec des temps favo- rables, on ne peut éviter une perte de matière, par exemple par la chute d’une partie des feuilles, surtout chez les trèfles ; mais cette perte, quand le foin est convenablement manipulé, est sensiblement moindre que celle qu’éprouve le foin fermenté. Si l’on tient compte de l’incertitude de la réussite de tous les procédés reposant sur l’échauffement spontané et la fermentation, on ne pourra s’empêcher de reconnaître que le séchage à l'air, quand le temps est suffisam- 1. E. Porr, loc. cil., p. 112. 606 DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES. ment favorable, doil étre toujours préféré à toutes les aulres mé- thodes de conservation ; on ne doit avoir recours à la confection de foin brun, de foin acide, de foin vert pressé, que dans les cas de besoin pressant, quand les conditions climatériques sont extréme- ment défavorables. Ces procédés ne sont de mise que par des temps extraordinaire- ment mauvais ; mais on peut se mettre à l’abri de l'influence de l’hu- midité nuisible à la préparation du foin sec. De nombreuses expé- riences faites montrent que l’emploi de claies écarte sûrement la dissolution des principes nutritifs ou la pourriture du fourrage quand son séchage se fait difficilement. Le foin ainsi préparé a non seule- ment la composition du foin brun, mais une valeur d’utilisation bien plus grande, à cause de la plus grande digestibilité de ses éléments ; ceci a été prouvé par une expérience de G. Kuan'. Le taux centésimal des deux sortes de foin était : : MATIÈRES PROTÉINES EE me CET MIO NE brute. extractives grasses brute. CHNPEPES non azotées. brutes, Trèfle séché à la claie, 18.94 40.09 2.79 31.43 6.75 Tree DRn er Ier 00 39.49 2103 33.0! 6: tn La digestibilité des divers éléments était : O MATIÈRES UNE MATIÈRE PROTÉINE "mm CELLU- TANOE ; Ms extractives grasses LOSE sèche, Oréanfque. | Brute. Vésnon LES Trèfle séché à la claie . 52. Trefle D'un eo Ce qui correspond pour : È SUBS- MAmÈRE PROTÉINE RS RES CELLU TANCEKE : b extractives grasses LOSE LT CL CE ie azotées, brutes. brute. L le trèfle séché à la claieà 52.7 5l:d 14,447 :25/14 1.42 13.36 Æ le trèfle brun. . . . . 45.0 44.2 6.98 22.00. "D'S8 ALES L en calculant la quantité d'éléments digestibles dans 100 parties. J 4,2 1. G. Küan, Landwirthschaftliche Versuchsstalionen, vol. XLIV, 1894, p. DS F ee" # ur L'ÉRÉMACAUSIS DANS LA CONSERVATION DES FOURRAGES. 607 Donc, à l’exception de la cellulose brute, la digestibilité des élé- ments s’est montrée # ADS 8 Aa - 1% PRE LT TT SE PORTA APPENDICE. 625 Dans leur récent mémoire (Ann. agronom., 1900, p. 273-295), MM. De- hérain et Dupont, S'appuyant sur les analyses des gaz confinés dans les tas . de fumier expérimentés, ont cherché à répondre aux questions suivantes : 1° L’atmosphère du fumier est-elle habituellement assez chargée d’acide carbonique pour qu’on n'ait pas à craindre la dissociation du carbonate d’ammoniaque ? Les chiffres constatés dans les tabléaux montrent clairement que les pertes d’ammoniaque sont insignifiantes si l’on incorpore chaque jour les litières à la masse du fumier, et si on les maintient humides par des arro- sages ; 2 La férmentation aérobie est-elle assez fréquente, dure-t-elle assez longtemps pour entrainer la dislocation complète de la matière azotée avec dégagement d'azote libre? Et s’il en est ainsi, existe-t-il quelque moyen de restreindre la durée de cette fermentation aérobie ? IL faut chercher à diminuer cette fermentation aérobie, extrèmement active à la partie supérieure de la masse, soit par un piétinement fréquent provoquant un tassement énergique, soit par des arrosages au purin ; 3° La fermentalion hydrique se produit-elle habituellement dans le fumier en place? Quelles sont les matières qui la subissent? Peut-on la > restreindre ? F Cette fermentation, caractérisée par le dégagement d'hydrogène, semble ne se produire aisément que dans un milieu neutre ou légèrement acide et cesser dès que les arrosages au purin rendent le fumier alcalin. À Cette fermentation hydrique étant parfois accompagnée d’un dégage- . ment d'azote libre, il importe de la restreindre; on y réussira par des _arrosages copieux de purin ; ; > 4° Enfin, comment peut-on favoriser l'établissement de la fermentation ; forménique qui ne paraît accompagnée d’ancun dégagement d'azote libre? - ‘Un fumier en fermentation forménique ne perd plus d’azote. Il importe - donc de favoriser son établissement, ce à quoi on réussit par les arrosages au purin; ils créent un milieu alcalin dans lequel les bactéries produc- trices de méthane restent seules en activité. NOTE M a Système Guillaume pour a traitement des engrais organiques. r - (Voir p. 561.) . Depuis 1883 fonctionne à Aubervilliers, près Paris, un système de trai- . tement des vidanges, imaginé par M. Guillaume, qui repose sur les mêmes MATIÈRES ORGANIQUES. 40 626 | APPENDICE. principes que le BE de ?. Podewils, à Augsbourg, mais qui lui est | supérieur en ce sens qu'il supprime tout contact.des matières premières et de leurs produits de transformation avec l'atmosphère, depuis l'arrivée des vidanges à l'usine jusqu’à la sortie des engrais obtenus. M. Grandeau en rend compte dans les Annales de la science agronomique fi francaise à 14 = étrangère, 1888, t. [°° (p. 1-24), et en signale tous les mérilés. « C'est, | dit-il, une application industrielle complète du. principe du travail € en. vases clos: recommandé par H. Sainte-Claire Deville en 1880. Encourag par les conseils et l'appui de Sainte-Claire Deville, l'ingénieur inventeu de ce système a résolu pratiquement et économiquement | le problème du traitement salubre des vidanges.… Il arrive à dessécher, en vases hermé-. tiquement clos, des matières infectes sans déversèr dans l'atmosphère aucune quantité de gaz... Tous les desiderata exprimés dans le” rapport E de la commission d'assainissement de Paris m'ont paru réalisés : par TES procédé Guilltume, qui me semble constituer le plus grand progrès : qui ail été accompli he le traitement des vidanges, et résoudre la questions hygiénique de ce traitement d’une manière complète. Depuis 1883, cette usine à fourni à l’agriculture des quantités De ce ps drette. » NOTE N Sur la désinfection des engrais liquides. RE (Voir p. 561.) Se à ts ARTE Le D' van Ermengem, professeur à l Université de L'État à Gand, a fait quelques recherches expérimentales dont les résultats pement quer aux agriculteurs les substances dont l'emploi comme désinfectant peut être recommandé. PR TEE Les conclusions de ce travail, qui a paru dans les. PR 72 la science agronomique française et étrangère (2° série, 1896; t'Te » Sont les Sui- vantes : KT l « Les engrais liquides, désinfectés au moyen “de substances très: actives 4 au point de vue bactériologique, telles que le sulfate de cuivre, de RTE le lysol, ete., gardent leurs propriétés fertilisantes et n "exercent “aucune 4 action nuisible sur la végétation. 2 VESSIE «Le sulfate de cuivre et le sulfate de zinc conviennent surtobt: pour cette désinfection, à la dose de 20 kilogr. pour 20 mètres cubes de mas" tières de vidanges, purin, etc., chaque fois qu'il s’agit d'une utilisatic agricole des excréments, ET ehtes FEù Qi = se “= … ras h. 4 NT uit "CU SH UE - APPENDICE. , 627 BA usage du sulfate de zine, environ 20 p. 109 moins cher que le sul- + fate-de euivre, mérite particulièrement d’être proposé. » ue … Quant à l'acide sulfurique, encore moins cher et Se actif, il est d’un emploi lrop difficile et trop dangereux dans les ménages et les fermes È pour qu DIE PASSE le econener, NOTE O __ Sur la production d'alcool chez les plantes supérieures, _ pendant la fermentation intramoléculaire. (Voir p. 580.) = “Non seulement on a constaté la présence de l'alcool, comme le dit le - D° Wollny, mais on a mesuré les quantités d'alcool oe MM. God- _ lewski et Folseniusz! ont déterminé avec une grande précision les quan- _ fités d'acide carbonique et d’alcool dégagées par des pois abandonnés dans le vide. Les gaz fournis par la respiration intramoléculaire sont formés exclusivement d'acide carbonique, et la quantité d’alcool produite corres- pond “exactement à la formule de la fermentation alcoolique : oe ni -- CNET H°0 + 2 CO. -D'apres cetté formule, à 100 parties de C0* dégagé correspond la for- mation de 104,5 de C ‘HO: la moyenne des chiffres trouvés par les “auteurs est de 105,5 4 En présence d'une solution de siucose, les phénomènes augmentent # d énergie et le glucose pren part à la production d'acide carbonique et É . d'alcool. Avec une solution de saccharose, il n'y a d’abord pas de change- 2 “ent d dans l'intensité de la respiration; mais le saccharose disparaît pour faire place à du ‘glucose, grâce auquel alors les quantités d’acide carbo- nique et d'alcool augmentent. Donc, en l'absence d'air, les cellules des plantes supérieures sont ca- pables d’invertir le saccharose et de le transformer ensuite en alcool et acide carbonique. C’est un-nouveau point de contact entre le ferment et la cellule végétale. + ) -1Anseiger der Ak. d. Wissensch. in Krakau, juillet 1897. (Analysé dans Annales … agronomiques, t. XXIV, 1898.) 628 APPENDICE. NOTE P Sur la marche de la température et de la fermentation dans l’ensilage des fourrages verts. {Voir p. 580.) Dans les Annales de la science agronomique française et étrangère", MM. Vauchez et Marchal ont publié une excellente étude, très approfon- die, sur l’ensilage d’un mélange de maïs et de pommes de terre. Toutes les conditions de l’expérience ont été minutieusement notées, ainsi que le tassement, la marche de la température et les produits de la fermen- tation qui ont été soigneusement analysés aux diverses époques et à di- verses profondeurs du silo. Cet ensilage spécial avait surtout pour but de pousser jusqu’à ses dernières limites la fermentation des fourrages. Les auteurs ont atteint une température de 84° avec production, en ce point, d’un ensilage absolument noir. Nous ne pouvons ici que donner une partie des conclusions qu'ils ont été amenés à formuler, renvoyant, pour le sur- plus, le lecteur au mémoire lui-même. « L’agriculteur, disent-ils, dispose de deux moyens pour la conserva- lion du fourrage : 1° la dessiccation ou le fanage ; 2° l’ensilage. « Ce dernier mode a sur le premier les avantages suivants : «1° Conserver au fourrage ensilé son eau et une valeur alimentaire plus grande, en augmentant sa digestibilité ; le trèfle incarnat, par exemple, ne fournit, fané, qu'un médiocre fourrage ; le maïs, lui, ne saurait être conservé autrement que par la fermentation ; «2° Donner à l’agriculteur l'indépendance vis-à-vis des circonstances météorologiques pour recueillir et sauver sa récolte; «3° Permettre de varier toute l’année la nourriture du bétail. «On peut définir l’ensilage : La conservation des fourrages verts par des antiseptiques produits par La fermentation elle-même. « Cette définition ramène la question de l’ensilage à une question de fermentatien. « Savoir régler la fermentation, c’est savoir ensiler. «Nous avons établi d’une façon indéniable le rôle important, essentiel même, joué par l'oxygène. De l’accès plus ou moins facile de l’air dans la masse ensilée dépendent la nature, lintensité et la durée de la fermen- lation. « La conduite d’un silo consiste donc à régler l'intervention de l’oxy- sène suivant la fermentation que l’on veut obtenir. Et nous savons pouvoir 1. Voir 2° série, 1900, t. Il, p. 1-32. dà De # APPENDICE, 629 arriver à ce résultat en agissant sur les facteurs facilitant les échanges de la masse ensilée avec le milieu extérieur, c’est-à-dire : «4° Par la forme du silo ; «2 Par la pratique de la mise en silo du fourrage ; «3° Par le chargement du tas à l’aide de matériaux. » Suivent des instructions détaillées pour effectuer ces trois opérations dans les meilleures conditions possibles. En les observant, il est facile d'arriver à un excellent ensilage. Il suffit de surveiller la température de la masse, température qui est un guide sûr, ne trompant jamais, à la condition qu’on sache interpréter les don- nées recueillies. Par des arrosages, par des chargements plus ou moins importants, par des tassements sur le fourrage, on peut régler la température et l’ensilage. On peut obtenir des produits très divers, allant depuis le gris verdätre jus- qu’au noir, en passant par les diverses teintes brunes. À chacune de ces couleurs correspond un ensilage particulier. Les deux fermentations ex- trèmes (gris verdâtre et noir) sont à éviter. INDEX ALPHABÉTIQUE A Abattoir (Déchets d'), 574. Absorption (Pouvoir d') : — du sol pour les gaz, 356; — du sol pour les rayons solaires, 360; — de l'humus pour les matières nutritives des plan- tes, 327, 391. Acétate de chaux, 25. Acétique (Fermentation), 42. — (Formation d'acide), 24, 594, — (Acide), 12, 24. Acide (Préparation du foin), 594. Acides (Herbes), 285, 287. — (Amidés), 12. — (Gras volatils), 12. — (Action) : — sur l'érémacausis, 183; — sur les mucorinées, 137; — sur les bactériacées, 140 ; — sur l'état physique du sol, 487. . Acrogènes (Formations), 66. Acrospores, 67. Activité du sol, 225. Adipocire, 376. Ados (Culture en), 473. Aérobies (Microbes), 35. Afuero (Guano d'), 563. Agents chimiques (Leur influence sur la décomposition), 183. Air (Taux en microorganismes de l'), 110. — (Influence de l') : — sur l'érémacau- sis, 169; — sur la nitrification, 171. Air dés champs (Taux en microorganismes del}, 111. Air dés montagnes (Taux eu microorga- _X *-nismes de Tr), 115. Air des villes (Taux en microorganismes de l), 110. Albuminoïdes (Matières) : — dans l'éré- macausis, 4 ; — dans la putréfaclion, 15; — dans la décomposition, 44 ; — leur influence sur l'érémacausis, 155. Alcool (Formation de |) : — dans le sol, 23 ; — dans le fourrage fermenté, 590. Alcool éthylique, 23. Alcoolique (Fermentfafion), 22, 44. Alcalins (Influence des carbonates) sur la décomposilion, 487. Alcalis (Influence sur l’état physique du sol), 487. Alcalis et acide humique, 305. Alcalis hydratés (Influence sur la décom- position), 184. Alcalinité des matières organiques (In- fluence sur la décomposition), 185. Alcalines (Influence des terres): — sur la décomposilion, 186; — sur la nitri- fication, 191. — (Terres) et acide humique, 305. Aldéhyde (Résine d'), 375. Algues (Influence des) : — sur la décom- position, 259; — sur la préparation des composts, 576. Alios, 206, 427. — (Rupture de l') par trous, 532. — (Formation de l'), 428, 431. — (Gomposition de l'}, 428, 431. — (Décomposition de l'}, 431. — (Formation de « cavités » dans l°), 429. — (Culture de l'}, 532. Alternance des prairies, 495. Fa 632 INDEX ALPHABÉTIQUE. Alumine (Humate d'), 305. — (Sulfate d'), 326. Ameublissement du sol, 460. Amidées (Gombinaisons) : — dans l'hu- mus, 303; — dans l'érémacausis, 4; — dans la putréfaction, 12, 15; — dans la décomposition, 39; — dans le sol forestier, 255. Amines primaires, 12. Ammoniaque (Formation de |’): — dans l'érémacausis, 4; — dans la putré- faction, 12,.15.. — (Bactéries de l'}, 3, 9: 53. — (Nitrification de l'), 36. — (Absorption par le sol de l'), 359. — (Influence des matières organiques sur la formation de l'), 147. — (Influence du sulfate de chaux sur la formation de l’), 148. — (Carbonate d°) : — sa production, 547, 048 ; — sa nitrification, 147; — son influence sur la nitrification, 193. — (Sulfate d'), sa nitrification, 148. Ammoniacale (Fermentation) de l'urine, 23, 35, 52, 199. Ammoniacaux (Influence des sels) sur la production de l'ammoniaque, 199. Anaérobies (Microbes), 35. Anchois (Guano d'), 575. Anguillules, 57. Animaux (Intervention des) dans la dé- composition, 57, 258. Anthéridies, 67. Antiseptiques (Substances), 30. — (Propriétés) de la tourbe, 376. Antizymotiques (Substances), 30. Apocrénique (Acide), 301. Aptitude du sol à se laisser fravailler, 339, 392. Aquatiques (Influence des plantes) sur la décomposition, 259. Arbres (Nutrition des), 384. Arbres (Feuilles des), leur action sur l'hu- midité du sol, 246. — (Feuilles des), terreau des, 196. Argent (Nitrale d') antiseptique, 30. Argileux (Amélioration des sols), 479. Arides (Formation de l'humus dans les ré= gions), 262. Ascension (Guano de l'ile), 563. Ascobolus denudatus, T9, 132. — furfuraceus, 19, 132. — pulcherrimus, 79, 132. Ascococcus, SG. Ascodesmis nigricans, 79, 132. Ascospores, 67. Ashmore (Guano des bancs d'), 564. Aspergillus, 73, 144. — flavus, 75, — glaucus, 75, 122. = nâger, 15, 118. — terricota, 42: Asques, 67. Assainissement du sol, 477.1 Avoïne (Composition de la paille d’}, 412. — (Décomposilion de la paille d'), 165. Avola (Guano d'), 564. Azotate, azotite, azolique, ete. Voir Ni- trates, Nitrites. Azote libre (Dégagement de 1) : — dans l'érémacausis, 7; — dans la putré- faction, 16. Azote (Protoxyde d'), 12, 15. — (Taux d'): — de l'humus, 302. 307, 311; — des tourbières, 316. — (Influence du taux d') des matières or- ganiques sur l'érémacausis, 155, 157. — (Plantes accumulatrices d'), 582. — (Perte d') dans la décomposition des matières organiques, 448$. Azotée (Alimentation) : — des herbes des prairies, 255; — des arbres fores- tiers, 255, 384. B Bacilles, 82, S7. — dans l'air, 110. — dans les eaux, 117. — dans le sol, 121. — dans les matières organiques en dé- composition, 132. — dans les plantes, 132. | — (Morphologie des), 87. rs - à “ } | + + 4 D-1 “ nc 15 el: À AO sh dotées - À is, à = INDEX ALPHABÉTIQUE. Bacillus acidi lactici, 43, 88, 117, 142. — ageticus, 42, 88, 141, 143. — aerogenes, 132, 142. — albus, 89, 126. — amylobacter, 43, 89. — de Bienstock, 89, 132. — blanc, 95, — butyricus, 43, 44, 89, 116, 121, 123, 128, 132, 133, 142. —- candicans, 90, 128, 142.7 — citron (jaune-), 90, 125. . — coprogenes fœlidus, 44, 90, 132. — culicularis, 90, 126. 6 — denilrificans, 45, 50, 52, 90, 142. — diffusus, 91, 126. — Duclaurii, 53. — erythrosporus, 91, 117, 121, 132, — filiformis, 91, 126. | — fluorescens liquefaciens, 44, 91, 117, 121,126," 132: — fluorescens pulidus, 91, 125, 132. — des eaux fluorescentes, 91, 126, — gasoformans, 91, 126. — gris, 91, 126. — janthinus, 44, 91, 121, 132. — liquidus, 92, 126. — luteus, 92, 117, 126. — magnus, 44. — megalherium, 133. — mesentericus fuscus, 92, 117, 126, 132, 133. _— Mmesentericus vulgalus, 92, 117, 126, 133. — muscoides, 92, 125, 132. — mycoides, 41,47, 92, 121, 126, 142, 376. — œdematis maligni, 126, 128, — prodigiosus, 92, 117, 126, 133. — putrificus coli, 44, 92, 132, — pyocyaneus, 44. — pyogenes fœlidus, 44. — ramosus, 93, 126. — saprogenes, 44, 93, 132, — scissus, 93, 125. — seplicus agrigenus, 128. — du sol, 192. — spinosus, 44. 633 Bacillus stolonalus, 93, 126, 142. — sublilis, 45, 93, 116, 121, 126, 132, +316, — lerrigenus, 95, 128. — lelani, 128. — thermophilus, 95, 128, 132, — tumescens, 133, — ureæ, 44, 52, 53, 95, 117. — vert-jaune, 91, 126. — viridis pallescens, 95, 126 — viscosus, 128, Bactériacées, S2. — (Distribution), 110, 117, 121, 132, 2193 — (Conditions d'existence), 140. — (Espèces), 82. — (Concurrence avec les mucorinées et les levures), 143. Bactéries (Présence des), 108, 116, 118, 132, 133. — (Ammoniacales), 41, 52. Baclerium aceti, 42, 88, — aerogenes, 95, 126. — auranliacum, 86. — coli commune, 49, 50, 96. — de Finkler, 38. — lindolum, 96. — lineola, 96, 123. — luleum, 87, — merismopedioides, 96. — paslorianum, 42. — radiciforme (Wurzel), 38, 93. — du sol (Bodenbacterium), 95. — termo, 98, 123, 142. — Zopfii, 99, 132. — Zurnianum, 99, 121, 126. Bahama (Guano des îles), 564. Baker (Guano de), 564. Baleine (Poudre de), 574. Basides, 67. Basidiospores, 67. Beggiatoa, 121, 326. — alba, 53, 104. — roseo-persicina, 54, 106. Benzoïque (Formation d'acide), 23. Benzol (Antiseptique), 30. Blastomycètes ou levures, 65, 79. 634 Blé de printemps (Décomposition de la paille), 165. — d'hiver (Composition de la paille), 412. Borique (Acide), antiseptique, 30. Bourgeonnement chez les champignons, 66. Brassica rapa oleifera (comme engrais vert), 583. Brome (Antiseptique), 30. Bruyère (Gomposition}), 412. — (Tourbières de), 291. — (Terreau de), 275. — (Humus brut de), 283. — (Tourbe de), 284. Buttage, 472. Butyrique (Acide), 12, 14, 25. — (Fermentation), 44. GC CGalcaire des tourbières, 290. Calorifique (Capacité) du sol, 364. Canalisation des eaux d'égout, 567. Canards (Excréments de), 562. Caproïque (Acide), 25. Carbo'ique (Acide), antiseptique, 31. Carbone (Taux de) de l'humus, 302. — (Sulfure de), 32. Carbonique (Acide) : — (Absorption. par le sol de l'}, 359. — (Propriétés antiseptiques de l'), 146. — (Influence sur les éléments minéraux du sol de l'}, 389. — (Formation de l') : — dans l'éréma- causis, 3; — dans la putréfaction, 12, 15. — (Taux dans l'air du sol de l'), 4. Carbonates (Influence des) : — sur la dé- composition, 485; — sur l'état phy- sique du sol, 487. Carex (Espèces de), 285. Caricelum, 288. Carnalite (Conservation du fumier), 550. Cédrine bromée (de l'huile de cèdre}, 379. Céréales (Influence des) sur la température du sol, 237. INDEX ALPHABÉTIQUE. Céréales (Action des) : — sur l'humidité du sol, 245; — sur la décomposi- On 2082. Cellulose (Fermentation de la), 13. Chaleur (Action de la) : — sur les mucori- nées, 138 ;. — sur les levures, 139; — sur les bactériacées, 142; — sur la décomposition, 31, 174, 204 ; — sur la nitrification, 180. — (Exigences des microorganismes pour la), 138, 139, 142. — (Conductibilité du sol pour la), 363. — (Sources de) pour le sol, 360. — (Perte de) par évaporation, 363. — (Rapports de la couverture des forêts avec la), 419. Champignons, 66. Champs d'épuration, 569. Chancre des fumeurs (Bacilles du), 44. Charrue (Travail de la), 460, 467. Chaulage des prairies, 491. Chauve-souris (Guano de), 564. Chaux (Malate de), 26. — (Formiate de), 14, 25. — (CGitrate de), 26. — (Humate de), 190, 305. — (Lactate de), 26. — (Oxalate de), 26, 68. — (Tartrate de), 26. — (Carbonate de). Influence sur la décom- position, 186. — (Hydrate de). Influence : — sur la dé- composition, 186; — sur Ja nitrifi- cation, 191; — sur la fermentation de l'urine, 202; — sur l'état phy- sique du sol, 489. — (Hydrate de) dans la conservation du fumier, 554. Chaux vive (Influence de Ja) : — sur la décomposition, 188, 258, 465; — sur Ja nitrification, 191; — sur la fermentation de l'urine, 202 ; — sur l'état physique du sol, 489. — (Comme moyen de conservation), 554. Chêne (Feuilles de) : — (Composition des), 411, 412. — (Décomposition des), 165, 168. tr. mt hier > éco ariquédt, si Pl LS L© 2 Chêne (Feuilles de) : — (Taux d'eau des), 413, 414, 415. — (Chaleur dégagée des), 419. — (Influence des) : — sur la température du sol, 231, 435; — sur l'humidité du sol, 437, 438, 439. — (Terreau des), 276. Cheval (Fumier de) : — composition du, 53); — décomposition du, 154, 165. — [Urine de). Composition, 939. — (Crottin de). Composition, 539. Chimiques (Influence des agents) sur la décomposition, 455. — (Propriétés) du sol, 228. — (Fonctions) de l'humus, 380. Chitine, 576. — (Dans le terreau forestier), 275. Chlore (Antiseptique), 30. Chloroforme (Antiseptiquel, 30. Chiorures (lufluence des) : — sur la dé- composition, 4S5; — sur l'état phy- sique du sol, 487. Chlorure de potassium (Influence du) sur la nitrification, 197. Chlorure de sodium (Influence du) sur la d'composilion et la nitrification, 197. Chromique (Acide). Antiseptique, 30. Cireuses (Matières) : — de la tourbe, 295: — dans l'humus, 308. — (Influence des matières) sur la décom- position, 113. Gitrique (Acide), 26. Cladosporium humifaciens, 33; Cladothrix, 121, 825. — dichotoma, 54, 107, 376. — odorifera, 375. Claie pour sécher les fourrages; 606. Clathrocystis, 86. — roseo-persicina, 54, 106. Climarium, A1. Climat (Influence du) : — sur la décom- position, 206 ; — sur les dépôts d'hu- mus, 262. Clostridiun butyricum. Voir Bacillus bu- tyrècus. Cohésion du sol, 392; — de l'humus, 334. INDEX ALPHABÉTIQUE. 639 Colloïdes du sol et de l'humus, 217, 307, 327. Columelle, 68. Colombine (Composition), 562. — (Décomposition), 164. Golza (Composition des tourteaux de), 277. Combinaisons entre les matières organi- ques et minérales, 358. Combustibilité de la tourbe, 377. Combustion du sol des prairies, 493. Compacité du sol, 334, 392. Composts, 578. Compost de poudre d'os, 572. Concentration des substances (Influence de la): — sur la décomposition, 145 ; — sur Ja nitrification, 149. Condensation (Pouvoir de) du sol pour les gaz), 396. Conditions d'existence : — des microor- ganismes, 134; — des mucorinées, 136: — des levures, 139; — des bactériacées, 140. | Conidies, 67. Conservation du fumier à l'étable, 546,556. — des matières fécales, 567. — des fourrages, 58. — (Procédés de) des fumiers, 547. Coprinus stercorarius, T\, 132. Coprogène (Humus), 304. Copulation, 67. Corne, 573. — (Déchets de), 279. — (Composition de la poudre de), 574. — (Décomposition de la poudre de), 151. 159, 165. Corpuseules brillants, 36. Couleur du sol, 223, 329. Couverture sur les sols tourbeux, 507, 514. Couverture des forêts : — (Composition de la), 412. — (Formation de la), 407. — (Humification de la}, 421,422: — (Produit à l'hectare de la), 40). — (Action de la) : — Sur la porosité du sol, 432; — Sur l'humidité, 241, 438, 442; — sur la température, 229, 433; — sur la fertilité, 422, 445. 636 Couverture des forêts : — (Rôle chimique de la), 423. — (Rôle physique de la), 432. — (Influence de l'enlèvement de la), 521, 522, 526, 530. Couverture (Terreau de), 274. — (Tourbe de), 378. Couverture du sol, 232, 351. — (Formation en forêt de la), 407. — (Influence de la) : — sur la décompo- sition, 246, 253; — sur la nitrifica- tion, 248; — sur l'humidité du sol, . 237; — sur la chaleur du sol, 228, 234; — sur le taux en CO? de l'air du sol, 247. Crangon vulgaris (Guano de), 575. Crénique (Acide), 301. Crenothrix, 121, 325. — Kühniana, 54, 102. Crustacés, 57. Cuivre (Sulfate de). Antiseptique. 30. Cupulifères (Nutrition des), 384. Culture du sol (Méthodes de). — (Évaporation), 239. — (Absorption de l'eau), 242. — (Influence de la) : — sur la décompo- sition, 251; — sur la formation de l'humus, 264. Culture à plat, 473. Cultures (Influence des) : — sur la décom- position, 251 ; — sur l'accumulation d'humus, 265 ; — sur la dissolution des nitrates, 450. Gyanhydrique (Acide). Antiseptique, 30. Cypéracées, 287. ; D Déchaumage des terres, 469. Déchaussement des plantes, 333, 497. Déchets d'origine organique, 571. — d'origine animale, 572. — d'origine végétale, 576. — de féculerie, 577. — des raflineries d'huile, 577. Décomposition (Aptitude des matières or- ganiques à la), 165, 408. INDEX ALPHABÉTIQUE. Décomposition (Conditions de la), 145, 169, 200, 205. — dans les circonstances naturelles, 206; — climat, 206; — s01, 209; — formes de végétation, 229; — eau, 255: — (Influence) : — du travail mécanique. du sol, 460 ; — de la jachère, 473; — du drainage, 477; — de l'irriga- tion, 478; — du mélange de divers sols, 479. — (Influence du degré de) des matières organiques sur leur altération, 151. Décomposition du sol sous l'influence de l'humus, 388, 426. — (Degré de) du fumier, 560. — (Sable de), 427. Défonçage, 471. î Défrichement des tourbières, 496. 4 — des forêts, 535. 4 Dégel du sol, 369. Dénitrification, 147. — (Processus chimiques de), 16. — (Participation des microorganismes à la), 45. — en l'absence de l'air, 173. — dans le sol, 226. Dérobée (Récolte), 581. Désoxydation (Zone de) dans le sol, 227. — (Processus de) dans le sol, 226. Dessiccation des fourrages, 588. Dialysables (Matières organiques), 350. Diastase (Ferment), 135. Diatomées (Terre de) dans la tourbe, 322. Dicalcique (Phosphate) pour la conserva- tion du fumier, 550. Dicranum, 409. Diffusion des gaz dans le sol, 355. Digestibilité des fourrages, 602. Diplococcus, 86. — Luteus, 87, 120, 122, 125. Dopplérite, 320, Drainage (Eaux de}: — taux en microor- ganismes des, 120; — composition | des, G. — du sol, 477. — des prairies, 490. Drainage des tourbières, 498. Drèches, 577. -Durcissement du sol par l'enlèvement de la couverture, 432. E Eau (Taux de microorganismes de |), 117. — (Processus de décomposition dans l'), 255. — (Influence de l): — sur les mucori- nées, 136; — sur la décomposition, 177, 205. — (Absorption de l') du sol par les plan- tes, 239. — (Exigences des plantes en), 238. — (Mouvement de l‘) dans l'humus, 340. — (Taux d') du sol, 210, 218, 243, 349, 351, 394, 465; — influence sur les rapports thermiques, 224, 364; — — influence sur la décomposition, 228. — (Pénétration de l') dans le sol, 340; — influence de la texture. 462. — (Absorption de la vapeur d') par l'hu- mus, 35. — hygroscopique (Quantité d') dans l'hu- mus, 355. — oxygénée (Antiseptique), 136. Eaux d'égout (Irrigation avec les), 485. — (Taux en microorganismes des), 119. — de pluie (Taux en microorganismes des), 117. — de source (Taux en microorganismes - _des), 118. — météoriques (Taux en microorganis- mes des), 117. — de rivières (Taux en microorganismes des), 118. — stagnantes ct eaux d'étang (Taux en microorganismes des), 118. — stagnantes (Décomposition dans les), 251. + Écobuage (Terre d'), 431. — (Culture après), 493, 510. : Égouts (Air des). Leur taux en mieroorga- _ - nismes, 115. INDEX ALPHABÉTIQUE. | | | | | 637 Éjaculation des spores, 67. Électricité (Influence de l') sur la décom- position, 181. Émissif (Pouvoir) du sol, 362. Eudogène (Formation) des spores, 67. Engrais humain, 565. Engrais d'origine organique : — aptitude à la décomposition, 164; — influence sur l’état physique du sol, 482, 486; — leur nécessité en agriculture, 405 ; — leur préparation, 539; — leur emploi, 481, 482. Engrais en couverture (Influence des) : — sur la température du sol, 230; — sur l'humidité du sol, 238; — sur la décomposition, 247 ; — sur le sol, 482. Ensilage, 595, Enzyme, 135, 136. Épaisseur de la couverture (Influence de l}: — sur la température du sol, 235; — sur l'humidité du sol, 239; — sur la décomposition, 253, Épicéa (Influence des aiguilles d°) : — sur la température du sol, 231, 435 ; — — sur l'humidité du sol, 437, 438. — (Aiguilles d'): — composition, 411, 412 ; — décomposition, 409 ; — pro- duction à l'hectare, 409; — taux d'eau, 415, 414, 416; — chaleur dégagée, 419. — (Influence de l): — sur l'humidité du sol, 243 ; — sur la température du sol, 251. — (Terreau d'), 275. Épispore, 67. Épuration naturelle des rivières, 259. Érémacausis : — processus chimique, 3; — conditions, 36, 146, 169. — (Produits de l’): dépôt, 262; — ter- reau doux, 274; — humus brut, 276. — dégagement de chaleur, 9; — dans diverses espèces de sol, 216; — dans l'eau, 256; — son importance pour l'agriculture, 448. Eriophorelum, 291. 638 Erysiphe, 78. Étangs (Processus de décomposition dans les), 257. État plus ou moins serré des plants (In- fluence de l'}: — sur l'humidité du sol, 241; — sur la tempirature du sol, 234; — sur la décomposition, 250, 253. Évaporation des plantes, 239. — du sol, 240, 347,363, 394, 438, 444, 464, 501. — de la couverture, 416. Exposition du sol (Influence sur la décom- position), 209. Extirpateur (Action de l'), 468. F Fabrique (Eaux de), 258. Facteus de l'humidité du sol, 348. Fécal (Superphosphate ammoniaco-), 571, — (Guano), 571. Fécales (Matières), 571. — (Enlèvement des matières), 567. Fer humique, 326. — (Oxyde de), sa formation, 27. — (Sulfate de), sa réduction, 13. — des marais, 8. — hydroxydé, 325. — dans les marais, 318. — (Phosphate de) ou vivianite, 325. — (Sulfure de), 324. — (Sulfate d'oxydule de), 378 : son in- fluence sur la nitrification, 196; — sa destruction dans le sol, 486. Fermentation de la poudre d'os, 572, — du sol (Ackergahre), 400. — comme source d'énergie, 134. — des fourrages, 588. Ferments, 135, Ferrique (Influence du sulfate) sur la ni- trification, 196. Ferrugineuses (Bactéries), 54. Fève des marais (comme engrais vert), 982. — (Décomposition de la paille de), 164. Fichtélite, 321. INDEX ALPHABÉTIQUE. Flore des steppes, 277. — des lourbières, 257, — du terreau forestier, 27. Floridées, 576. Foin brun, 589, — sec, 588. — ver{ pressé, 96. Forêts (Action des) : — sur le taux des microrganismes de l'air, 113; —sur la formation des tourbières, 296. — (Formation de la couverture des), 407. — (Produit de la couverture à l'hectare), 409, — (Sol des) : — perméabilité, 432; — — conditions thermiques, 433; — — humidité, 437; — microorganis- mes, 127, 128; — décomposition, 252; — nitrification, 254; — enri- chissement en matières organiques, 267: — importance Ce la couverture, 422, 415; — procédés pour com- battre l'humus brut, 531; — culture de l'alios, 532 ; — défrichement, 53». — (Couverture des) : — formation, 407, produelion de l'humus, 422 ; — pro- priélés chimiques, 4 1 { ; — propriètés physiques, 413; — aptitude à la décomposition, 167, 40$; — rôle chimique, 423; — rôle physique, 432; — importance pour la fertilité du sol forestier, 422. — (Humus des) : — formation dans la couverture, 422; — dissolution des principes minéraux, 424. — (Terreau des), 275 ; — sa transforma- tion, 425. — (Humus brut des), 284; — sa trans- formation, 427. a — (Mousse des), 408 ; — sa composition, 412. ; — (Arbres des) : — nutrition, 384, 414; — influence sur l'humidité du sol, 238; — influence sur la température du sol, 237; — influence sur les dé= pôts d'humus, 264. Forestiers (Influence des végétaux) sur la décomposition, 252. | ce . F Formène, 12, 14. _ Forménique (Fermentation), 12, 42, Formiate de chaux, 14, 25. Formique (Acide), 12, 24. Fosses (Vidange, Système des), 567. Fougère (Gomposition de la), 412. Fourmis, 64. Fourrage (Influence du) : — sur la tempé- rature du sol, 237 ; — sur l'humidité du sol, 244; — sur la décomposition, | 251; — sur les dépôts d'humus, 264. Fourrages (Conservation des), 358$, — (Modifications chimiques des) cor- servés, 601. Fray-Bentos (Guano de), 574. Frottement des sols coutre le bois et le fer, 336. Fucoïdes, 576, Famée de tourbe, 517. Fumier (Épandage du), 482. — (Production de chaleur par le), 11. — d'étable : — décomposition, 186; — taux en microorganismes, 132; — préparation, 539; — traitement, 545; — conservalion, 547; — in- fluence sur la température du sol, 10 ; — laissé sous les animaux, 549, 556. Fumure en vert, 580. — des sols tourbeux, 515. — ([nflnence de la) : — sur l'état physique du sol, 481 ; — sur l'humidité du sol, 243. Fusarium, 40. G Gaz (Faculté de l'humus de condenser les), 3906. — des marais, 12. Gazon (Couverture de), 230. — (Mottes de), 579. Gel des récoltes, 333. — du sol, 468. Gelée (Pénétration de la) dans le sol, 369. — (Influence de la) : — sur l'humus, | 331: — sur les solulions d'humus. 307; — sur la faculté d'imbibition du z: sol, 346. INDEX ALPHABÉTIQUE, 639 Gelées printanières sur les sols tour- beux, 571. — nocturnes sur les sols tourbeux, 372. Gemmes, 66. Genêt à balai, 412. Geophagus Darwinii, 63. Geophilus, 57. Glycérate de chaux, 26. Glycocolle, 23. Gras (Acide) : — production, 24; — fer- mentation, 25, 44. Grasses (Influence des matières) sur la décomposition, 161. Gris (Sable), 427. Grumeaux (Mise en), 461. Grumeleuse (Structure) du sol, 461; — son influence : — sur lhumus, 395 ; — sur la perméabilité du sol, 459, 465; — sur la température du so!, 465; — sur l'humidité du sol, 463, 466; — sur la décomposition, 459. — (Obtention de la), 460. Guanahani (Guano de), 564, Guanos (Sortes de), 563, 564. Gypse (Influence du) : — sur la décompo- sition, 194; — sur la production d'ammoniaque, 47. — (Production du) dans les tourbières, 326. Gypse précipité pour la conservation du fumier, 550, H Halifax (Guano d'), 563. Hanneton, 576, 579, Herbes productrices de la tourbe, 287. Hersage, 469. Hêtre (Terreau de), 277. — (Feuilles de) : — composition, 411, 412; — décomposition, 165, 168, 177, 409; — production à l'hectare, 410; — taux d'eau, 413 ; — évapo- ration, 416; — perméabilité pour l'eau, 415; — influence : sur la tem- pérature du sol, 232, 435 ; — sur l'humidité du sol, 414, 415, 416, 437, 438. 640 Hippurique (Décomposition de l'acide), 23 Houage du sol, 469. Humates, 305. — (Influence des) : — sur la décomposi- tion, 191, 4S5; — sur la nitrifica- tion, 193, 485; — sur l'état physi- que du sol, 487. — dans la conservation du fumier, 553. Humides (Dépôt d'humus dans les régions), 262. Humidité (Influence de l}: — sur la dé- composition, 177, 204; — sur la ni- trification, 180. — (Rapports de l'humus avec l), 349. — (Rapports de la couverture des forêts avec l'), 413. — du sol (Influence) : — de l'exposition, 210; — de l'inclinaison, 213; — de l'état physique, 217; — de la végétation, 243 ; — des couvertures mortes, 244, 437; — des cultures, 244. — (Action sur la décomposition), 1774 Humine, 301. Humique (Acide), 301. Humiques (Sols), 339 : — amélioration, 351; — fertilisation, 489. Humon (Guano de l'île), 564. Humus (Formation des), 261. — Influence : du sol, 262; — du cli- mat, 262; — de la sécheresse, 263. — dans les forêts, 268. — dans les sols agricoles el les prairies, 264. — (Espèces d'), 274: — terreau agri- cole, 275; — terreau de forèt, de couverture, 275; — terreau de vase, 2763; — humus brut des steppes, 277; — humus brut de vase, 283; — humus brut de bruyère, 283; — humus brut de forêt, 284; — humus brut de prairie, 285 ; — tourbe in- fra-aquatique, 287 ; — tourbe de sphaigne, 290; — tourbes mixtes, 299. INDEX ALPHABÉTIQUE. Humus (Propriétés chimiques), 301 + éléments organiques, 301; ments minéraux, 309 ; — minér li des tourbières, 320: ; — pouvoir ab- sorbant pour les matières nutritives, * 321. — (Propriétés physiques), 329 : | ports avec l'eau, 340; — 000 s avec l'air et les gaz, 3533; — rap ports avec la chaleur, 360. “2 — (Autres propriétés), 374. - — (Taux d°) dans les sols, 270. — Influence sur la fertilité des sols: - . 1° Comme élément en mélange, 380; — ‘4 rôle chimique, 380 ; — rôle physique, 392 ; — fermentation du sol, 4003: … — action nuisible de l'humus en ex- cès, 404; — importance de l'humus pour la co 405. RES 2° Comme. couverture : formation de la couverture, 407 ; — composition de + la couverture des forêts, 411 ; — ses # propriétés physiques, 4133; — for- ; mation de l'humus dans la couvers ture des forêts, 422; — influence de ;, la couverture sur la fertilité du sol forestier, 422; — rôle chimique de 2 la couverture, 423 ; — son rôle phy- sique, 432. — (Dépôts d'), 261, 301. Fe — (Acides de l'), 305. + — (Adhérence de l'), 335. Humus brut (Rohhumus) : 276; — composition, 313. — Diverses sortes : humus brut des step- pes, 277; — de vase, 283; —"de bruyère, 283 ; — de forêt, 2543; — de prairie, 285; — sa transforma- tion, 426; — moyen d'empècher sa formation, 531. . — Hydrogène : dans la putréfaction, 12, 145 — dans la fermentation, 43. LS — Son taux dans l'humus, 302, — phosphoré, 12. — sulfuré, 12. Hyménogastrées, 387, ME Hyphes, 66. production, —Distribation, 111, 117,121, 132, 133. = — Conditions d'existence, 136. - — Espèces, 66. . — Leur concurrence avec les levures et les bactériacées, 143. Hypnelum, 288. Pre 408. 4 ’ QD ep te. fhatt I dt ee Tchaboe (Guano d’), 563. + Inclinaison du sol; son influence sur la décomposition, 213. Indol, 12. Industrielles (Plantes) ; influence : la température du sol, 237 ; l'humidité du sol, 244. Infiltration (Eau d'), 394, 415, 442, 441, MÉETTE Inflammation spontanée du foin, 592. Inondation du sol, 479. sectes, 57. lode (antiseptique), 30. lodoforme (antiseptique), 30. | lulides, 57. Julus terreslris, 58. — corallinus, 64. LE 2e — SUE Sur «4 , a J #* Jachère (Influence dela) : — sur l'humi- : dité du sol, 238; — sur la tempé- rature du sol, 230; — sur la décom- position, 247; — sur la nitrification, 248 ; — sur les pertes d'azote, 448 ; — sur la fermentation du sol (Bo- + dengahre), 399. — (Action de la), 473. L# Jonc Et du), 412. Ro pr 7 æ à Kaïnite (Consebration du paniers 550, FU: 7551, L É Krugite (Conservation du fumier), 550. een de), 567. MATIÈRES ORGANIQUES. = INDEX ALPHABÉTIQUE. G41 L Lacépéde (Guano de), 564. Lacs (Décomposition dans les), 257 Lactique (Acide) : sa formation, 25, 594; — ses bactéries, 43; — sa ferment tion, 43. Laine (Poussière de) ou shoddy, 574. — (Déchets de), décomposition, 163. Lathyrus clymenum corame engrais vert, 582. Légamineuses (Influence des) : — sur la température du sol, 238 ; — sur l'hu- midité du sol, 245 ; — sur la décom- position, 252. Leplothrix, 82. — ochracea, 54, 107. Lessivage de la couverture des forêts, 424. — des éléments nutritifs du sol, 447, 481. Leucine, 12, 20. Levures (Champignons des), 56, 79. — (Distribution des), 111,117, 120, 132, 133. — (Conditions d'existence des), 139. — (Espèces de), 80. — (Concurrence des) ayec les mucorinées elles bactériacées, 143. Liant donné au sol par le carbonate d'am- moniaque, 547. Liernur (Système de vidange de), 570. Lin (Composition des tourteaux de), 577. Litières diverses, 543. Localité (Influence de la) sur le taux des microorganismes dans l'air, 114. Lombrics. 57. Lumière (Influence de la) : macausis, 181: tion, 181. Lupin jaune comme engrais vert, 582. — bleu comme engrais vert, 582. — blanc comme engrais vert. 582. Luzerne lupuline comme engrais vert, 582. — sur l'éré- — sur la nitrifica- Magnésie (Carbonate de); influence sur la nitrification, 194. — (Sulfate de), 326. 41 642 Magnésie potassée (Conservation du fu- mier), 250. Mais (Décomposition de la paille de), 165. Malique (Acide), 26. Malt (Composition des germes de), 577. Manganèse (Humate de), 305. — (Suifate de); sa réduction, 13. Marais, 300. — (Fer des), 324 Marcasite, 324. Marécageux (Sols), 283. Marne des tourbières, 322. Massifs pleins (Influence des) : — sur la décomposition, 253; — sur l'accu- mulation de l'humus, 270. — protégés ; production de la couverture, 410. Matière noire, 262, 306, 380. Mécanique (Travail) du sol, 459; fluence sur la décomposition, 466. Medicago lupulina comme engrais vert, 582, Meyalococcus, 40. Mcjillones (Guano de), 584. Mélanges de divers sols, 479. — de sols dans lés tourbières, 514. Mélasses, 577, Mer (Taux de l'air de la) en microorga- nismes, 119. Mercure (Bichlorure de), antiseptique, 31. Méthane, 12. Méthylmercaptan, 44. Micrococcées, 85 ; — dans l'air, 110 ; — dans l'eau, 117; — dans le sol, 121. Micrococcus aceli, 42. — in- — auranliacus, S6, 116, 120, 123, 125. — candicans, 86, 120, 125. — candidus, 86, 122, 125. — cereus albus, 86, 125. __ cinnabareus, 86, 116, — fervidosus, 86, 125. — flavus desidens, 86, 116, 120, 125. — flavus liquefaciens, 86, 116, 120, 125. — fœtidus, 44. _— luleus, 87, 120, 122, 125. — p'odigiosus, 117. 120, 195 INDEX ALPHABÉTIQUE. Micrococcus rouge, 87, 125. —ureæ, 81: 116: — urcæ liquefaciens, 87, 116. — versicolor, 87, 116, 120, 125. Microorganismes (huetes dés sur la dé < composition, 28. 7510 — (Morphologie des), 65. : 0 — (Distribution des}, 109. ARTE — (Gonditions d'existence des), 134. — (Absence des) us la tourbe, 286. Miller (Bacilles de}, 4 Minérales (Matières) » Fa lhumôé: 307, 309; — des tourbières, 316; — de la couverture des forêts, 412; — leur état dans l’érémacausis, 3 ; — 2 leur état dans la putréfaction, 19: S leur influence sur la décomposition, 163; — leur dissolution par les aci- des humiques, 390, 427; — leur . dissolution par l'acide carbonique, 390. Minéraux de la tourbe, 320... — (Acides) : production d'ammoniaque, 947; — moyen de conservation. du Ë fumier, 554. 1 Monas Olkenii, 54. — prodigiosa, 92. — vinosa, 54. Monilia, 116. — candida, St, Monocalcique (Phosphale) : — influence sur la fermentation de l'urine, 202; — production d'ammoniaque, 549; — conservation du fumier, 554. Mortierella Rostajinshii, 79, 132. Morue (Guano de), 575. Mousses (Composition des), 412. — (Rapports des) : — avec la chaleur, 419; — avec l'humidité, 413. — (Influence des): = sur la température du sol, 231,435 ; — sur l'humidité du 122: sol, 437. à à — (Production des) en forêt, 408, | — (Tourbières à), 291. 2 Moutarde blanche (engrais vert), 583. Mouton (KFumier de) : décomposition, 155, 16. «WT Lg ; 22 Es “ EM TTR = — stolonifer, — (Influence des) : Nitrification : = (Bactéries de la), 97 ; uton (Urine de) : composition, 539. CE (Excréments de), 539. _ Mucor, < S — circinelloides, GS. + — erectus, 68. — fragilis, 68. "68. — mucedo, 68,.122. — racemosus, 40, 69, 122 — spinosus, 68. 1%.192; Mycélium, 66. Mycorhizes, 255, 384. Myriapodes, 57. AHRONYGEUS, 75, 2 M. N Navette (engrais vert), 583: Nématodes, 57, 275. Nitrates (Formation des) dans l'érémacau- sis, 5. — dans la décompo- sition, 195; — dans la nitrification, 199. — (Dissolution des) dans Le sol, 449, 474. — (Influence des) sur l’état physique du sol, 481. — (Réduction des), 17 processus chimiques, 5, 148. — (Parlicipation des microorganismes à la), 32, 36. — Influence : — de l'air, 171; — de l'humidité, 180; — de la chaleur, 176; — de la lumière, 181; — de la quantité des matières organiques, 147; — de la concentration de la substance, 149 ; — des acides, 183; — des alcalis, terres alcalines et car- bonates, 191; — des sels, 192; — des sels ammoniacaux, 148, 149 ; — des sulfates, 193, 195 ; — des chlo- rures, 197 ; — des phosphates, 196; _— des nitrates, 198. — leur distri- bution, 129: — leur alimentation, INDEX ALPHABÉTIQUE. os 643 Nitrites (Formation des) dans l'érémacau- Sis, 5 ; — dans la putréfaction, 12, 16. Nitrobactéries, 97. Nilrobaclerium, 98. Nilrosococcus, 98. Nilrosomonas, 97, — europæa, 97. — javanensis, 98. Nocturnes (Gelées) dans les tourbières, 371. Nucléine, 158. [e) Odeur ge l'humus, 374. OEillette (Gomposilion des tourteaux d'), 971. Oïdium, 78. — MACHS, 218, 122. Oies (Excréments d°), composition, 165. Oléagineux (Composition des tourteaux), D 17 (e Oogone, 67. Oospores, 67. Ophidomonas sanguinea, 54. Organiques (Acides); leur fermentation, 25, 43. — (Engrais), 539 : emploi, 405. — (Matières) : — leur érémacausis, 3 : — leur putréfaclion, 12; — leur ap- titude à la décomposition, 152. Organismes inférieurs ; leur participation à la décomposition, 28. Orge (Composition de la paille d’), 412. — (Décomposition de la paille d’), 164. Ornilhopus salivus (engrais vert), 582, Os, 436. — (Poudre d°) : — composition, 572; — décomposition, 154, 159, 164. Oxalique (Acide), 26. Oxydation (Zone d') du sol, 228. — (Processus d’) dans le sol, 227. Oxygène (Action de |’) : — dans l'éréma= causis, 172; — sur les mucorinées, 137; — sur les levures, 139; — sur les bnctémaetes 141. 062; — leur dé- — nécessité de Jeur G44 Oxygène (Taux de l) dans l'humus, 302. Ozone (Influence de l') sur la décomposi- tion, 173. 15 Pailles (Décomposition des), 167. Pampas (Sol des), 273, 277. Patagonie (Guano de), 563. Pediococcus acidi lactici, 45. Penicillium, 75. — glaucum, 75, 122. Pérennes (Influence des plantes) : la température du so], 237 ; — sur l'humidité du sol, 244; — sur les dépôts d'humus, 264. Périthèces, 67. Perméabilité du sol, 216, 346, 353, 462. Pérou (Guano du) : — composition, 563 ; — décomposition, 159, 164. Perte d'éléments nutritifs dans la décom- position, 448. — par fermentation dans la conservation des fourrages, CO. Phœnix (Guano), 564. Phosphates (Action des) : — sur la dé- composition, 196, 485; — sur la nitrification, 196; — sur l'état phy- sique du sol, 486. Phosphorique (Action de l'acide) : — sur la fermentation de l'urine, 202; — sur la production d'ammoniaque, 548. Physiques (Propriétés) du sol, 215. Physique (Rôle) de l'humus, 392; — de la couverture, 433. Pilobolus cristallinus, 79, 132. Pin sylvestre (Aiguilles de) : — composi- tion, 412; — décomposition, 165, 177, 409; — production à l'hectare, 409; — taux d'eau, 413; poration, 416; — perméabilité pour l'eau, 415 ; — chaleur dégagée, 419 ; — action sur la température da sol, 231, 435; — action sur l'humidité du sol, 437, 438. — (Branches de), 412. HUE — Éva- INDEX ALPHABÉTIQUE. Pin sylvestre (Terreau de), 275 AE Pingouins (Guano de l'ile des je 568. Pisum arvense et salivum (engrais ver, 582. +3 Plantes (Besoin des) en eau, 239. *$ — (Cendres des) dans la conservation dû : fumier, 554. : nie de la structure des). sur la décomposition, 537. — (Couverture formée par des), 234, — (Influence des) : — sur la température du sol, 229, 234; — sur l'humidité, 238; — sur la décomposilion, 245; — sur la nitrification, 248; — sur le taux d'acide carbonique du sol, 246. — cultivées (Influence des) : — sur 0 température du sol, 230; — sur l'humidité du sol, 238, Podewil (Système de vidange de), 570. Poils, 573. 4 Pois (engrais vert}, 582. | — (Décomposition de la paille de), 164. Poisseuse (Tourbe), 330. Poisson (Guano de) : — décomposition, 151, 164. Polydesmnus, 57. Polytrichum, 408, 411. Pommes de terre (Décomposition des fanes de), 165. Pore (Fumier de) : composition, 165. — (Urine de) : composition, 539. — (Excréments de) : composition, 539. Pores (Volume des) de l'humus, 354. Porosité (Influence de la) du sol sur l'hu- mus, 393. Porosité de l'humus, 353. Potasse (Sels de), 550, 555. — (Carbonate de), influence sur la nb fication, 192. — (Sulfate de), influence sur la nitrifica- tion, 198. ; Poudrette, 510, 573. — (Décomposition de la), 159. Poules (Excréments de) : — composition, 562; — décomposition, 165. Pourriture, 22. 579: pe * e _; nus brut, , a ries, 287, 489. Presse à fourrage, 598. 2 | Prairies : * — accumulation d'humus, 268, … «+ 404; — décomposition des matières PSS organiques, 2213; — nitrification, 2 130, 254; — culture, 489; — hu- 285; — tou:be de prai- Propionique (Acide), 12, 26. Proleis, 99. — Mirabilis, 99, 126, 132. — vulgaris, 99, 126, 132. — Zenkeri, 100. Pseudo-ædembacillus, 178. Pulvérisation (Degré de) des matières or- ganiques ; influence sur la décompo- sition, 150. Purin, 485. Patréfaction : — processus chimiques, 12; — conditions, 200; — dans le sol, 227; — dans les eaux, 256: — dé- pôt des produits de, 26{: — son importance en agriculture, 448. — (Produits de), 286 : — dans les tour- bières infra-aquatiques, 287 ; — dans les tourbières à sphaignes, 290. Pyrite, 324. R Racines (Plantes) ; intuence : — sur la température du sol, 237: — sur l'humidité du sol, 245; — su: la décomposilion, 252. Raphanus sativus oleiferus (engrais vert), 583. Rayonnement (Pouvoir de) du sol, 362. Récolte dérobée, 581. Récoltes (Détritus des), 586. Répartition des matières organiques dans le sol, 251; — son influence sur l'érémacausis, 150. Résine, 30$S ; — son influence sur la dé- composition, 159. Résineux (\rbres) : — leur influence sur l'humidité du sol, 246: — terreau d’, 275. Respiration des plantes supérieures, nor- male et intramoléculaire, 590. INDEX ALPHABÉTIQUE. | a EE de d 645 Respiration intramoléculaire des microor- ganismes, 134. Restes animaux et végétaux ; leur aptitude à la décomposition, 166. Retrait de la tourbe, 333. Rhizomes dans li tourbe, 331. Rhizopodes, 57. Rhizopus nigricans, 72. Rimpau (Système de culiure des tourbiè- res), 499. Roseaux (Tourbière; à), 287. Roulage des sols agricoles, 470. S Sable en couverture (Influence du) : — sur l'humidité du sol tourbeux, 500; — sur la température du sol tour- beux, 504; — sur la décomposition, 509. — en mélange (Influence du) : — sur l'hu- midité du sol tourbeux, 500 ; — sur la température du sol tourbeux, 504 ; — sur la décomposition, 509. — gris au-dessus de l'alios, 427. Sabots des animaux, 573. Saccharomyus albicans, S1. — apiculalus, 81, 116. —Cerevisi®, 4 +150, 116,122. — conglomeralus, Si. <— ellipsoideus, 44, 81, 116, 122. — exiJUUS, 41. —"glutinis" 81, 116, 122, 427: — Ludwigii, 44. — Marxianus, 44. — Mmycoderma, 81, 116. — Paslorianus, 44, Si, — sphæricus, S1. Saccharomycètes, 7). Saccobolus, 79, 132. Salicylate de soude (antiseptique), 30. Salicylique (Acide), antiseptique, 30. Salpêtre (Décomposition du), 165. 116. Sang (Composition du), 573. — desséché : — composition du, 574: — décomposition du, 159, 165. Sapin (Composition des aiguilles de), 412. ” 646 Saprophyles, 56. Sarcina, 53, 84, SG. — lulea, 87, 125. — sulfurala, 54. Sarclées (Influence des plantes) sur la dé- composition, 251. Sarolhamnus scoparius du), 412. Sarrasin (engrais vert), 583. Saveur de l'humus, 376. Scalol, 12. Scheerérile, 321. Schizsomycèles, 65, 82. Sciara, 58. Scirpus, 285. Sciure (Décomposition de la), 165. Scléroles, 66. Scolopendre, 57. Sécheresse (Influence de la) sur la forma- tion de l'humus, 263. Seigle d'hiver (Composition de la paille de), 165, 412. Seigle de printemps (Décomposition de la _ paille de), 165. Serradelle (engrais vert), 582. Silice, 308. Sodium (Chlorure de), influence sur la nitrification, 197. Soja (Décomposition de la paille de), (Composition 164. Sol (Enrichissement du) : — en humus, 264: — en carbone et azote, 265, 266. — (État de la superficie du), 223. — (Gomposition chimique du), 229. — (Taux d'humus du), 271. —— (\Nitrification du), 226, 248. — (Zone oxydable du), 228. | — (Zone de désoxydation du), 228. — (Dénitrification du), 226, — actif et inactif, 226. — (Propriétés physiques du), 215. — (Situation du), 209. — (Volume des pores du), 216. — (Perméabilité du), 216. — (Humidité du), 217. — (Chaleur du), 219. INDEX ALPHABÉTIQUE. Sol (Couvertures vivantes et mortes du), 229. — (Taux des microorganismes du), 121. 2 — (Action sur la décomposition du), 209, 220: 229, — (Travail du), son influence sur la dé- composition, 459. — (Importance de l'humus dans la cul- ture du), 405. — arable (Microorganismes du), 128. — (Décomposition dans le), 250. — (\itrification dans le), 254, — (Fermentation du), Ackergähre, 400. — (Terreau du), 274. Sordaria Brefeldii, 79, 132. — curvula, 79, 132. — decipiens, 79, 132. — ninula, 79, 132. — pleiospora, 79, 132. — Wiesneri, 79, 132. Soude (Carbonate de); influence sur la ni- trification, 192. — (\itrate de), influence : — sur la dé- composition, 198; — sur la nitrifi- cation, 199. — (Sulfate de) ; influence sûr la nitrifica- tion, 194. — (Borate de), antiseptique, 30, — (Salicylate de), antiseptique, 30. — (Benzoate de), antiseptique, 30. Soufre (Formation du), 26, 54, 106. Source (Taux des eau de) en microorga- nismes, 118. Spécifique (Poids) de l'humus, 336. — (Chaleur) du sol, 364. Spergule (engrais vert), 583. Sphagnacées, 290, 291. Sphagnelum, 291. Sphaignes (Espèces de), 291, 408. — (Tourbières à), 290. Spirilles, 100. Spirillum Rugula, 100, 121, 123, 142. — serpens, 101, 121. — undula, 101, 121. — volulans, 121, Spirochæle, 83. — plicalilis, 101, 121. ni. CS. nil dns “A8 | FÉES. En INDEX ALPHABÉTIQUE. 647 Sporange, GT, 68. - Spores (Formation des), 66. Slaphylococcus, 82, 86. — Cilreus, 38. — pyogenes aureus, 128. … Steppes (Herbes des), 277, .— (Humus brut des), 277. Slérigmales, 67. Slipa pennata, 58. Slolons, 72. Streptococcus, 82, 86. — seplicus, 128. Structure moléculaire du sol. Voir Texture. Strychnine (Sulfate de), antiseptique, 30. Succinique (Formation d'acide), 26. Sucre de canne, 23. — de raisin, 23. Sulfates (Influence des) : — sur la décom- posilion, 193; — sur la nitrification, 194, 551. Sulfate d'alumine, 326. Sulfobacléries, 53. Sulfure de fer, 13. — d'hydrogène, 12. Superphosphate gypseux (Influence du) : — sur la production d'ammoniaque, 548: — sur la nitrification, 551. — dans*la conservation du fumier, 553. Symbiose, 384. Syncephalis cordala, 79, 132. 7 Tangue, 576. Tannique (Influence de l'acide) sur la dé- composition, 162. Tartrate de chaux, 26. Tchernozem, 273. 282. Température (Rapports de la couverture des forêts avec la), 419. — (Influence de la) sur le taux de l'air en microorganismes), 112. — du sol (Influence de la) : — de l'ex- position, 209; — de l'inclinaison, 213; — de l'état, 220, 396, 466; — de la végétation, 231; — des . couvertures mortes, 231, 433: — des cultures, 237. Température (Action de la) sur la décom- position, 174. Térébenthine (Huile de), antiseptique, 136. Terre (Comme moyen de conservation du fumier), 551, — (Odeur de), 374. — (Résine de), 308. — noire, 273, 277 ; — composition, 281, 282. Terreau, 274. — (Composition du), 313. — de champ, 274; — de forèt, de cou- verlure,, 275 ; — de vase, 276. — (Transformation du), 425. Texture de l'humus, 330. — du sol (Influence de la) : — sur les propriétés physiques du sol, 461 ; — sur le volume des pores du sol. 462; — sur la perméabilité, 462, — sur l'eau d'infiltration, 463; — sur l'évaporation, 465 ; — sur la faculté d'imbibition, 463; — sur le taux d'eau, 465; — sur la température, 466. — (Influence de l'humus sur la), 393. Thalle, 66. Thamnidium elegans, 132. Thomas (Phosphates) pour la conservation du fumier, 554. Thymol, antiseptique, 50. Tinettes (Système de vidange par), 567. Torula (Espèces de), S1. Tourbe (Formation de la), 286, 294. — (Sortes de), 287, 299, 299, 300. — (Décomposition de la), 152, 165, 167, 286, 319. — (Poids spécifique de la), 336. — (Poids spécifique apparent de la), 337. — (Action de la gelée sur la), 331. — (Retrait de la), 332, 333. — (Propriétés antiseptiques de la), 376. — (Moyen de conservation du fumier), »»1. — (Utilisation pour la fabrication de com- posts de), 578. — (Compost de) fécale, 567. — (Résine de), 160, 308. PE TONI 5e VERS Tourbe (Épaisseur dés pris de), 290, | hot ere EE ET 298. — (Mousses de la), 291. — (Litière de), acide pour la conserva- tion du fumier, 555, 557. — (Mélange de) avec les excréments, 567. — sèche, 284. — (Combustibilité de la), 31S, 377. — (Inhumectabilité de la), 346, 352. Tourbe infra-aquatique (Gomposition dela), 316. — (Décomposition de la}, 319. — (Poids spécifique apparent de la), 338. — (Volume des pores de la), 354. — (Hygroscopicité de la), 356. — (Circulation de l'eau dans la), 341. — (Faculté d'imbibition de la), 343. — (GCombustibilité de la), 378. Tourbe supra-aquatique ou de sphaigne (Composition de la), 316. — (Décomposition de la), 319. — (Poids spécifique apparent de la), 338. | — (Volume des pores de la), 353. — (Hygroscopicité de la), 358. — (Gireulation de l'eau dans la), 341. — (faculté d'imbibition de la), 343. — (Combustibilité de la), 378. — (Emploi de la) pour litière, 378. Tourbeux (Humidité des sols), 489. — (Caractère) du sol des prairies, 490. Tourbeuse (Terre), 578. Tourbières (Gulture mixte sur les), 507. — (Culture des) d'après le système Rim- pau, 499, 507, 513. — plates, infra-aquatiques, 287. — supra-aquatiques ou à sphaignes, 290, 296: , — calcaires, 287. — neutres et acides, 299. + — pauvres où riches en chaux, 318. — (Sortes de) : — tourbières à sphai- gnes, 290 ; — tourbières infra-aqua- tiques, 287; — tourbières mixtes, 299% — (Composition des), 316. — (Décomposition des), 254. — (\itrilication des), 254. ‘ INDEX ALPHABÉTIQUE. . Trèfle hybride (comme engrais vert), 582. Ulmification, 286. — rAJGutUreS dès) : — assainissement, | 498; — couverture et mélange avee du FN 499 : — culture sans l'em- ploi de sols minéraux, 512;—ceulture par écobuage, 5163; — exploitation, 518. | 4 Transpiration des plantes, 239. Travail du sol (Influence du) : — sur la décomposition, 251 ; — sur l'aceu- mulation Eten 268. 3 Trèfle de Bokhara (comme engrais vert), 82. Triméthylamine, 44. Tubéracées, 387. Q Tubereules (Plantes à), influence : — sur. la température du sol, 237 ; — sur 4 l'humidité du sol, 245; — sur la décomposition, 252. Typhus (Bacilles du), 38, 49. Tyrosine, 12. U Ulmine, 301. Wie (Acide), s04: 14 Urée, 562, 565 ; — $a oo 23, È + A4, 1663 202. 20800 A Urine e mani Pees domestiques, 539. — de l'homme, 565. — (Formation d'ammoniaque dans m} | #0 24, 52..202, =* (Nitrification de l'}, 149. Urique (Acide), 562, 565; — ‘sa décome position, Pa à ARE. 7 Fe Vaccinielo-Ca'lunetum, 291. Vaccinielo-Sphagnetum, 291. d Vache (Famier de), 5393 — sa décomp sition, 152, 165: Ft NI US Valérianique (Acide), 12155258 Vase (Terreau de), 276.2 — (Humus brut de), 283. — (Tourbe de), 800 + 1! … M Le LE M, 1 12 Pre " "sf Y. Vase (Eaux de), taux en microorganismes, 172 _ Végétation (Formes de), 229. — (Formes de), influence : — sur la température, 230 ; — sur l'humidité, 239 ; — sur la décomposition, 251 ; — sur la nitrification, 254; — sur les dépôts d'humus, 264. Vent (Influence du) sur le taux de l'air en microorganismes, 113. Vers blancs, 576. — de terre, 57. Vesce (engrais vert), 582, Viande, 573. — (Poudre de), 574; — sa décomposi- _ tion, 165. — d'animaux abattus, 579. Vibrio, 83. 74 | INDEX ALPHABÉTIQUE. Vibrio serpens, 101. — rugula, 100, 123. Vicia saliva (engrais vert), 582. — villosa (engrais vert), 582. £ Vignoble (Taux de microorganismes dans le sol d'un), 127. Vinaigre (Ferment du), 42. Vivianite, 325. Volume (Changement de) de l'humus, 331. Z Zéolithes, 391. Zinc (Valerianate de), antiseptique, 50. Lincique (Acide), 308. Looglée, 83, 84. Zostera marilima, 576. Zygospores, 67. TABLE DES MATIÈRES Pages. PRÉTACE. io RTE CNP RE RO ER A TT Rte \ PREMIÈRE PARTIE PROCESSUS CHIMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES CuarirRe I, — PROCESSUS CHIMIQUES 1° La décomposition à l'air (érémacausis) : ses produits, oxydation du car- bone, formation d'ammoniaque, nitrification, dégagement d'azote libre, production de chaleur, son influence sur ia température du sol. . . . 2 2° La décomposition forménique (putréfuction) : ses produits, oxydation du carbone, dégagement de formène et d'hydrogène, dénitrification, déga- CUIDeDEIAeAZOLe IDR Re 2 Re fee cine ii 3° Autres modes de décomposilion : pourriture, fermentation alcoolique, fer- mentation ammoniacale de l'urée, fermentation des acides urique et hippurique, formation d'acides gras volatils (acide formique, acétique, propionique, butyrique, valérianique), formation d'acide lactique et suc- cinique, fermentation des acides gras et des acides organiques (acide formique, lactique, glycérique, malique, {artrique, citrique, oxalique), séparation du soufre et de l'oxyde de fer . 1) 19 CuaprtTRe I. — ACTION DES MICROORGANISMES Action de divers antiseptiques et des températures élevées sur les processus de décomposition, Érémacausis : oxydation du carbone et de l'azote. Putréfaction : fermentation ammoniacale de l'urée ; relations entre les divers organismes inférieurs et les processus chimiques de décomposi- tion. Érémacausis, nitrification, production d'ammoniaque, fermentation acétique. Décomposition forménique, fermentation forménique d'hydro- gène, butyrique, alcoolique, des acides gras et organiques, décomposi- tion des matières albuminoïdes et des combinaisons amidées, dénitrifi- fication, fermentation ammoniacale de l'urée, bactéries sulfureuses, ÉCCICITEUSES ER EL FREE Ne Ne CERN SEA LE (#2) 692 TABLE DES MATIÈRES. CnariTRE IT, — ACTION DES ANIMAUX Dilacération des débris végétaux par les animaux, activité des vers de terre, leurs excréments, modification des propriétés physiques du sol sous l'influence des vers de terre, formation de l'humus dans les pays chauds. CHAPITRE IV, — MORPHOLOGIE DES MICROORGANISMES {. Hyphomycèles. a) Mucor . b) Aspergillus . c) Penicillium. d) Erysiphe (Oidium). : : 2. Levures, saccharomyces, monilia, un à 3. Baclériacées . Ron a) Micrococcées (coccacées). b) Bacilles . c) Spirilles . Le s ae ; d) Schizomycèles à formes dame var lables Cnaerrre V, — RÉPARTITION DES MICROORGANISMES DE LA DÉCOMPOSITION — Les Microonganisines delai a M EN RE TR IR 2 DCS MiCTROONOANISMIES LES COUT EN EN NC IE 117 a) Les eaux. méléoriques::57."5 0408 SEE ER b) Faux-de‘sources ét de rivières.t. 9. SAME RM PUCES ” 2 c)' Huron AU 2 28e RE M Me d) Eaux marécageuses et FH APR TO PEN 3. Les Microorganismes du sol. . . . . . . 5 «(CL 4. Les Microorganismes sur les substances tes en PR : 132 5.0LestMicrooronnismesesumles plantes RON EN ES CnapitRe VE, — CONDITIONS D'EXISTENCE DES MICROORGANISMES Transformations de la matière et de l'énergie chez les organismes inférieurs. 134 . Condilions d’exislence des mucorinées ou hyphomycètes . . . . . . .… 136 Conditions d'eniSlenceldeSleDUTES PR RE 139 . Condilions d'existence des baclériacées . . . . ° Fe 140 4, Concurrence entre les mucorinées, les levures el ds Ésciériauies ROULE 143 œ D — Cuarirre VIL — CONDITIONS DE LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES . Conditions de l'érémacausis. , . à ebre ee RES ETERRNENEERRRS 145 n: État physique et chimique des adiee OTSADIQUES hs APN MCE 145 A) Qualité ‘et eoncentration de la matiére "RC 146 ) B) Répartition et degré de finesse de la matière. . . . . . . . . . . 149 C) Degré de décomposition de la matière organique . . . . . . . . . 151 D) Composition chimique de la substance. . . . . . . . . Sn 5 E) Décomposition des matières organiques employées comme engrais. . . 164 TABLE DES MATIÈRES. 653 Pages | b) Conditions extérieures de l'érémacausis. . . . . . . . . . . . . . 169 ; ar Re AT NT EN Te Pate CU AE SAR 169 EE ON CRAN EE EP ON An 5 7 OT dE PS EL Gnt ae 208$ NS ER RE RC NT CU, NET PE URI E) Électricité, . . . . TE SUR UEsAUAE 181 F) Agents chimiques boite “te Énes es 1) DR A tte Te UE 2. Condilions de la putréfaction . . . . ART Er. un en LUI, 3. Condilions des autres processus de notion Ci TMS 0 Ua 202 RE LT TER EONUUL NUE vs à Lee tn DT elle MAUR CuariTRe VII, — DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES DANS LA NATURE Le Climat el température . 206 SOLS. PARA UTUE PR 209 3. Formes de la éoctauon el ne es mortes. 229 4. Eau. 255 DEUXIÈME PARTIE PRODUITS DE DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES LES HUMUS CuartTRe 1. — FORMATION DES HUMUS Conditions de la décomposition, climat et situation, sol, végétation, cultures, taux d'humus de divers sols, répartition de l'humus dans le sol . . . 261 CnarrrRe I. — CLASSIFICATION ET PROPRIÉTES DES DIVERS HUMUS 1. Les Produils de l’érémacausis. . . . 274 a) Humus produits dans des condilions ne Lien Re Fos Fe tier, de vase) . . . 274 b) Humus produits dans d. ete défavorables. de br ds tes “ee pes, de vase, de bruyère, des forêts, des prairies). . . . . . . . . 276 2. Produits de la putréfactlion. Tourbe et tourbières. . + . . . . . . . 286 a) Tourbières basses ou infra-aquatiques. . . . . .« + . . . . . . . . 287 b) Tourbières hautes où supra-aquatiques . . . . . . . . + . - . . . 290 PR TOURIPS ES nn tes ls A PRE EE LR Sn LR AR IN 29S GONE C'ENFÉCENSRRRR RES ER RC ER PE CARE) 654 TABLE DES MATIÈRES. Cuarrrne LL — PROPRIÈTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DES HUMUS E Propriélés chimiques. ; a) Éléments organiques nn A tree ee mr, thé d'azote de l'humus naturel, humus neutre, acides de l’humus, matières rési- neuSES eLICITEUSES rot le MR ee Ce Et b) Éléments minéraux de l'Humus è c) Composilion des humus naturels (terreau, Ms 1 ua Minéraux des tourbières (dopplérite, fichtélite, terre “ dits. done des tourbières, pyrite, limonite, fer des marais, vivianite, gypse, epso- mite, sulfate d'alumine, soufre) . . è d) Absorption des principes nutritifs par l'humus . 2, Propriélés physiques des humus…. . a) Propriétés physiques générales A) Couleur. B) Structure. C) Changement de ol D) Cohésion. els TE ORNE ATEN RENE ER ER E) TénACiEe UE se à ei ee OR RIM ET EN EE F) Frottement . G) Poids spécifique . RE ed H) Densité apparente ALERT 1) Facilité de culture. . b) Rapports de l'humus avec qe : A) Circulation de l'eau dans le sol . B) Faculté d'imbibition . C) Perméabilité pour l'eau . D) Évaporation. ct LE E) Influence globale des faetèurs delhumidité “ oi s Le Ne F) Couverture vivante. . . . . TIR Le Done ie c) Rapports entre l'humus et l'air et a GAZ NN RC CCI A) Absorption de l'air . B) Perméabilité pour l'air. . PAU CG} Diffusion des goz: 04 00 RE RO RE RER SEE D) Condensation des gaz . . . . SR M d) Rapports entre l'humus et la TUTO | A) Pouvoir absorbant et émissif du sol « B) Perte de chaleur par l'évaporation à la surface du sol SOUS PAS ST G) Gonductibilité du :s0l tr. are TI ME MERE D) Capacité calorifique du sol . Ê E) Action générale des facteurs de la Fr de a Se de 1 température. gelées nocturnes AE NN 2, Autres :propriélésides RuMUuS EU TM TE TE NT ER ERON RM D B)' PATATE SC Le NES tsar C) Propriétés tort LH DR ET CR Re | à D) Gombustibilité.... ln, SU a RL RONA Pages. 301 = nu TABLE DES MATIÈRES. 659 Cuartrre IV, — INFLUENCE DES HUMUS SUR LA FERTILITÉ DES SOLS Pages. 1. L'humus comme élément du sol. , . . . : SE 379 A) Les fonctions chimiques de l'humus (absor nr de sa es PA par les végétaux, matières nutritives de l'humus, combinaisons entre l'humus et les matières minérales, dissolution des principes minéraux du sol par l’humus, action de l'acide carbonique et de l'ammoniaque dégagés par l'huaus sur les principes minéraux du sol, influence de l'humus sur le pouvoir absorbant du sol pour les éléments nutritifs. . 380 B) Les fonctions physiques de l'humus; son influence sur la ténacité, l’adhérence aux instruments, la facilité de culture, la texture, l'humi- He Hempérature deSiSOIS TRINÉTAUL 2"... ue sat. 0 OZ G}Xa fermentation du sol (Bodengahre). + . . . . . . . . . : . … 399 D) Effet nuisible de quantités excessives d'humus . . . . . . . . . . 404 E) Importance de l'humus pour la culture du sol , . . . . . . . . . 405 2, L'humus comme couverture. . . . RE Rs Be PS de LT A) Formation de la couverture en forêt Mr SUR 4 cel AS Le Ur PLUS SANS COTE B) Sa composition chimique. . . . RD ARC RE TS C) Ses propriétés physiques (Rumidité, ES MR TE Me mule D) Formation de l'humus dans la couverture. , . . 2H VA RO URSE E) Influence de la couverture sur la fertilité du sol Forestier fre fonctions chimiques, terreau, humus brut, alios, ses fonctions physiques, influence de la couverture sur la Ai one la température et l'humidité du sol forestier) . : ; F) Importance de la couverture pour la fertilité du ni rie : Fr CS 19 Qt TROISIÈME PARTIE INTERVENTION DE L'HOMME DANS LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES Cuavirne L — CONSIDRATIONS GÉNÉRALES Nécessité de provoquer l'érémacausis et d'empêcher la putréfaction, moyen de prévenir les déperditions d'azote par volatilisation de l'ammoniaque et lixiviation des nitrates en agriculture . . . . . . . . . . . . . . 448 CnaprrRe IL — COMMENT ON INFLUE SUR LA DÉCOMPOSITION DES MATIÈRES ORGANIQUES EN MODIFIANT LES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET CHIMIQUES DU SOL : 1. Travail mécanique du sol (retournement et ameublissement par la charrue, obtention de la texture normale, hersage, houage, raclage, roulage du sol, défonçage, buttage, méthodes de eulture). . . . . . . . . . . 459 "as » , CÉSAR PRE Er FES sà MSIS ER Note H: Sur l'influence de diverses couvertures sur ls propriétés physiques KM" du sol . Al nt at el dl d-4 2e tre EC PS PRE Les te L': Re ne UN. in. NS Dern Note J + Sur le travail mécanique du sol . . . . . « . . . . .". . Le, Vote K : Sur l’épandage et l'enfouissement du fumier de ferme. . . . . . . ( 25 + Sur la conservation du fumier et sur les fermentations qui S'y produi- Me. . . Ne RE RE RM RER UE AE - CE te M: Système Cine) pour le nent de engrais organiques . DE e N: peur la désinfecuen des ‘engrais liquides. . . .:. . .- æ + . = . . Etre MOI ture ECS ne 2 ef ve ego al tte À pe sur P: Sur la marche de la température et de la Hoour dans l’ensilage CET as nigea nent en + Je à di. rte = D... 0 = Le ——_—_—————————— Nancy, impr. Berger-Levrault et Ci. ” | 5.74 Radée: Sur l'absorption des matières hydrocarbonées el azotées par les plantes. , 613 : Sur les substances azotées qui accompagnent l'acide humique dans les ” ? . 614- 615 616 BINDING SECT. NOV 2 2 1982 PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY S Wollny, Enald 598 La décomposition des W76 matièrs organiques et les formes d'humus BioMed DIT NON TER 1 | LU Bu } ii Le ‘à Hs HU * +1 »€! fN NE 1: ain +4 tlhA Que Li VERT RUPRES TAN SPA * 122 27 3 Éaiiun “ nn jai re CHIC il HAE (HAN ñ HOT TIENNE HAyAN ut riens Cest F Fi} CHITR Î ir He ta] (4H: U ni LA Phnie A L eee tres DNPETAR van? 4 25: ji PAIE run if RAM El ga MIÉMOET TI! La SE ver he TOUT) her N PANNE ACRON: rt ATOME WITH PARAMETERS Et TU QE ? None Hs de mt J FR NUE HA SE » d'a 47h ere GENE ASIN DU TUITENAE D'ANPIAI HR ANNEE RHONDUNT twin ni NY ser Fvye #4 CAE CHE 4? UHR IMAUT DEEE ALT M ve LT PARU CAE? vu #4 RL LT] JE 4 ét RE LS DETE noie . Rae La Fe sers e nt Ant ve KA RUE ue ÿ LANCIA: VO A us: Le Sur L La SEE MT is (12712 EYE VAUT be sut vu ER RURUNE UNE MAIRIE Hit FOR MANS > ACL LU Eh pannes Ho % 4 Eat HA Fa dieu is Hnh y À ptits ATETEe put mat 3 HA Ha LEUN M4 or HR ur Etr LAIT A ï ve er HAT HER EH HR EPNT ATEN DRE CET s: HIT TN » Es CMP TIC ONENC CT RTAN TE DT ER ET CAEN WA try DTA It HIRITAEEX CU hp Ma 5) peus il ra Li ele ht # nr tr4 W Ne rt Rte JIM NET AL Y LUTTE a Hat s4; ANA A HET NEA Le HUE IP ATIR in ETNTTEN RTC AH ts ‘ A À { MALTE ROULE PTT 47 HAE ATEN M HA RAT TOMATE 1} RL ut} pu LIL n) LE ne RUTARILEE] “ LT HACARENNNT PART } it LAUANIRNTEUT DORE LRU ou ui 4 V4 [it htt CAEN D A CRRTEUT Eu MAS MES + ANIONN He ‘ st ns di: dl fil in Fi «y j «it ‘ \arace HA . is ie qi uvre sy w os l u+ At) Hvh ut it nas ri 4 ML + % à . NORE Pa à Ra là RE tt ft EE ji RER RS qui ie bye MAR une j in nr ii pi * re us UU iutes k CROIRE AA VHOUN PR! HI HU ja UN ot DU ni HIS # fn mais AE |? 1? N W | TRUC Li Hs CHEN 4 tu ji ‘ PRE