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AMORIS ET DOLORIS

i.IIAï ILLON-SUR-SKINE.

IMP. E. CORNILLAC.

LA MERE

D'AMOUR ET DE DOULEUR

DONNÉE POUR MÈRE A TOUS LES FIDÈLES

PAR JÉSUS-CHRIST MOURANT SUR LA OROIX

"i;\ B \i,k I OHPOSE EN LATIN

PAR ANTOINE GIJMÏHER

nOC.TF.l'R EN' THÉOLOGIE, CURÉ DE BlIiF.nHAf.li

Traduit par M. TRl'CIIOT, ancien Curé Archiprêtre.

TOME DEUXIÈME

M RI S LIRRAIRIE-DE LOUIS VIVES, ÉDITEUR

13, HUE DEL A Midi B, 13

1875

MOV 1 81958

LA MERE D'AMOUR

ET DE DOULEUR.

CONSIDÉRATION XXXIX.

La B. Vierge et Mère Douloureuse n'a pas été léguée par Jésus-Christ à saint Jeau seulement pour Mère, mais à m>us tous.

ACCIPIT IN SVA.

Voilà votre Mère. (Saint Jean, 19. 27.)

\. Quand Jésus-Christ notre Seigneur s'offrit lui-même, comme Souverain Prêtre, sur l'autel de la croix à son Père éternel avec des larmes et un grand cri en sacrifice pour le saint de tous les hommes, au milieu de ses tourments ex- trêmes il ne voulut pas oublier sa pieuse Mère; mais avec, une affection vraiment filiale il la confia à son disciple bien- aimé pour qu'il en prit un soin fidèle et l'honorât comme une véritable Mère : Deinde dicit discipulo : Eccc Mater tua. Ludolphe le Chartreux s'exprime ainsi sur ce sujet : « Cette troisième parole de Jésus fut inspirée par une grande sollici- tude et une tendre piété, puisque plongé dans de si grands tourments il s'occupa de sa Mère désolée et lui donna un soutien. » Saint Jean en prit soin fidèlement suivant la recom- mandation qui lui en était faite ; il lui rendit les devoirs les [dus empressés et n'alla dans la province assignée à son II. I

•2 l-A MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

apostolat qu'après la mort de l'auguste Vierge : « Et dès cette heure le disciple la prit avec lui. »

Ce filial amour du bien-aimé disciple pour la sainte Mère de Dieu a été figuré sous un charmant symbole par le Très-Ré- vérend Arèse ; c'est le tronc d'un jeune arbre sur lequel un génie greffe un rejeton avec ces mots empruntés à l'Evangé- liste : Accipit in sua, il le reçoit avec lui.

« 0 heureux Jean, dit saint Bernard, à qui le Seigneur a daigné confier un tel trésor ! o disciple prudent et chéri de Jésus par-dessus tous, que le Seigneur a établi officier privé de son palais magnifique '. » Et voilà, àme chrétienne, le riche testament de Jésus pauvre, mourant en croix : « Car, dit saint Ambroise, sur sa croix Jésus faisait son testament et saint Jean le signait, et le témoin était digne du testateur '2. »

2. La dernière volonté d'Elie, avant d'être enlevé dans le paradis sur un char de feu, fut de léguer à son cher disciple Elisée son manteau, comme un gage de son amour 3.

Le patriarche Jacob, sur le point de mourir, donna à Joseph déplus qu'à ses frères une part de son bien, le champ de Sichar, pour lui témoigner son affection particulière \

David, sur son lit de mort, laissa par testament à son fils Salomon une grande somme d'or et d'argent : Dans ma pau- vreté, j'ai préparé pour les dépenses de la maison du Seigneur, cent mille talents d'or et un million de talents d'argent5.

Jouathas remit ses vêtements à David qu'il aimait comme son àme : « Jonathas se dépouilla de la tunique qu'il portait et la donna à David avec ses autres vêtements et son épée0. »

Le prêtre Matathias, qui seul entre les Juifs s'opposa cou- rageusement à la cruauté d'Antiochus, parvenu à sa dernière heure, fit appeler ses cinq fils auprès de lui, et après de salu- taires conseils il leur ligua Simon pour le remplacer : « Ecou- tez-le toujours, el il sera pour vous un père7. »

1 S. Rern. de l, ornent. Virg. s S. Ambr. in c. 23 Luc. 5 IV Reg. 2. I3t ' Geo. W. -'!• ' I Pur. 22. I i, ,; I Reg. 18. 5. 1 Mari,. 2. 65.

CONSIDÉRATION XXXIX. i{

Aiin- chrétienne, levea maintenant 1rs yeux vers Jésus- Christ en croix : ce qu'il donne à saint .Iran par ses dernières volontés ce n'est pas son manteau comme Elie à Elisée, un champ comme Jacob à Joseph, dos richesses comme David à Salomon, ses vêtements comme Jonathas à David ; ce n'esl pas Simon pour père comme Ifatathias à ses fils ; il Lui lègue ce qu'il a de plus cher et de plus précieux au monde, sa douce et excellente Mère : il la lui donne pour mère : « Ecce Mater tua. » Il a laissé le pardon aux pécheurs : Pardonnez-leur, 6 mon Père; an bon larron, le paradis : Aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis ; aux soldats, ses vêtements et son manteau : Ils ont partagé mes vêtements ; à Véronique, le voile sur lequel resta imprimée sa sainte face; à Xicodème, l'ampoule de s.ui saiiL:. 1rs clous, la lance, la couronne; à Joseph d'Àrimskhie, les linceuls et le suaire qui l'enveloppaient dans le tombeau ; à L'Eglise son épouse, la croix qui est son lit de fleurs; mais à saint Jean, son aimable Mère : Ecce Mater tua. Précieux testament de Jésus mourant ! s Quel honneur et quelle gloire, s'écrie le dévot Denis le Chartreux en s'adressant au disciple bien-aimé, quel incomparable trésor! le vaisseau de toute sainteté, la Souveraine du monde, la Heine du ciel, qui possède avec leljère éternel et a engendré Le même Fils duquel procède vraiment le Saint-Esprit, vous est donnée, remise, confiée, devient votre Mère, et vous êtes appelé son fils. Oh : Jésus vous aimait véritablement puisqu'il vous choisit de pré- Férence [tour une telle faveur. »

3, Niais que dis-je i? Saint Jean est-il donc le seul admis à choisir cette meilleure part? Ecoutez saint Thomas de Ville- aenve : a Jésus allait expirer; le disciple était attendant ce qui Lui serait légué. Quel héritage vous donnerai-je, ô mon bien-aimé? Voilà votre Hère; c'est ce que j'ai de plus cher, je vous la livre et vous la donue. » M prodige d'amour I ô invention de la charité qui nous rend évidente L'affectueuse tendresse de Jésus pour saint Jean, et nous montre que comme Le Père céleste ne pouvait faire au monde uu don plus excel- lent que son Fils unique : Sic Deus dilexit mundum, ut Fùtum

\ LA MÈRE d'aMOUB ET DE DOULEUR.

suum unigenitum daret, de même le Fils avant d'expirer ne pouvait donner un témoignage, plus grand de son amour en- vers saint Jean que de lui léguer sa très-sainte Mère : Ecce Mater tua.

Mais point de testament sans exception. Permettez à votre serviteur, terre, cendre, poussière, néant, de vous dire une parole, mon doux Jésus, mon amour crucifié, tout mon bien; permettez-lui de vous dire un seul mot. Mais que dis-je? Ah! pardonnez, Seigneur! le véritable amour ne sait garder au- cune limite. Moi, votre créature indigne, et avec moi tous les fidèles, nous protestons solennellement contre votre testa- ment et nous demandons exception. Quoi ! Seigneur, léguez- vous donc au seul disciple bien-aimé votre très-sainte Mère? Cieux, écoutez ma voix; terre, prêtez l'oreille à mes paroles; je proteste, oui, je proteste contre ce legs, parce que votre Mère est aussi notre Mère, à laquelle tous les fidèles doivent recourir dans toutes leurs nécessités pendant la vie et à la mort; nous ne l'accordons point à saint Jean seul : elle est aussi notre Mère. C'est ce qu'avoue Denis le Chartreux : « Saint Jean, dit-il, désigne chaque fidèle; de même donc que Jésus dit à saint Jean : Voilà voire Mère, de même il donne à tout chrétien Marie pour Mère; » sous sa protection et à son om- bre tutélaire nous pouvons espérer d'être défendus etproh contre tous les ennemis de notre âme : de ces paroles de saint Thomas de Villeneuve : « Comme les poussins, à la vue des milans voltigeant dans les airs, viennent se cacher sous les ailes de la poule, ainsi nous sommes cachés sous L'abri de vos ailes, ô Marie. .Nous ne connaissons pas d'autre refuge que \ous. Vons êtes seule l'unique espérance à laquelle nous avons recours '. »

'«. Vous me demanderez avec raison, prudent lecteur, pour- quoi la divine Vierge nous a été désignée pour Mère sur la croix et non dans l'étable de Bethléem. En effet, Rébecca ne devint-elle pas deux fois mère par un seul enfantement? « Klle

1 S. Thom. de Villanov. conc. 3. in Nativ. Virg

CONSIDÉRATION WXIX. 3

s'en alla consulter le Seigneur qui lui répondit : « Deux na- tions sont dans vos entrailles, et deux peuples sortiront de votre sein et se diviseront l'un contre l'autre 4 . » Peu de temps après, lorsqu'elle enfanta, elle mit au monde deux ju- meaux, Jacob et Esaù. /

Avant de faire la réponse à cette question, il nous faut con- sulter Rachel qui, se voyant mourir par la véhémence de ses douleurs dans son périlleux enfantement, appela son fils Bénoni au moment il sortait de son sein : « Succombant sous la souffrance et se sentant mourir, elle donna à son fils le nom de Bénoni qui signifie fis de ma douleur '. » Jacob, pour calmer sa tristesse, ne le nomma pas Bénoni mais Ben- jamin, fils de la droite ou le bien-aimé. Concevez le mystère, luichel représentait la Douloureuse Mère au pied de la croix, elle enfanta pour la vie éternelle, au milieu des plus vives angoisses, l'homme pécheur qu'elle put ainsi appeler justement Bénoni, c'est-à-dire le fils de ma douleur. Mais le Père éternel, par amour pour Marie, voulut appeler tous les fidèles qu'il savait devoir être dévoués à cette sainte Mère, non Bénoni, mais Benjamin, c'est-à-dire les fils de la droite, parce que, au jour du jugement, ils se tiendront à la droite de Jésus-Christ pour entendre la sentence consolante : « Venez les bénis de mon Père.

Vous conclurez facilement de ces réflexions, pourquoi l'Homme-Dieu n'a déclaré qu'en mourant que sa sainte Mère esl aussi notre Mère : Eccc Mater tua. C'est que, eu enfantanl Jésus-Christ à Bethléem, elle ne ressentit aucune douleur; mais en le contemplant mourir en croix pour le salut de tous les hommes, qui nous dira les tourments de son cœur? Alors elle éprouva des douleurs semblables à celles de l'enfantement et fût morte mille fois avec Rachel, si l'Esprit saint ne l'eût soutenue, a Quand une femme enfante, dit L'abbé Rupert, elle esl dans la tristesse; or, comme Marie ressentit vraiment les douleurs de l'enfantement dans la passion de sou Fils, elle

' Gen. 15. 22. - Gen. 35. lx.

b LA MERE D AMOUR ET DE DOULEUR.

nous enfanta tous à notre salut et devint complètement notre Mère à nous tous '. » Que nous sommes heureux de vivre sous la tutelle d'une telle Mère. « 0 pécheur, s'écrie Ludolphe le Chartreux, si Marie est votre Mère, Jésus est donc votre frère, et son Père votre Père ; son royaume est donc votre héri- tage, et la grâce que Marie a trouvée est donc votre trésor2. »

o. Je me suis souvent étcnné que l'Evangile, racontant la naissance de Jésus-Christ, ait dit en parlant de l'auguste Vierge Mère de Dieu : Elle enfanta son premier-né. Pourquoi, saint Evangéliste, dites-vous son premier-né et non pas son unique? A-t-elle donc eu plusieurs fils qui sont appelés les frères du Seigyicur ? Nullement ; elle est cette porte orientale toujours fermée par laquelle est entré et sorti Jésus-Christ seul notre souverain Prêtre. Pourquoi donc l'Ecriture dit-elle : Elle enfanta son Fils premier-né?

Le premier enfanté est bien un premier-né quoiqu'il soit seul et n'ait pas de frères; Jésus est donc le premier-né de la Vierge Mère. Cependant sous la croix la sainte Mère de Dieu nous ayant enfantés dans l'excès de ses douleurs à une meil- leure vie, nous pouvons être appelés les seconds-nés, et la Dou- loureuse Mère mérite plus justement qu'Eve le nom de Mère de tous les vivants. « La pieuse Mère de Jésus, dit Lansperge, devait nous enfanter au pied de la croix comme fils d'adop- tion, afin qu'étant Mère du Sauveur par nature et selon la chair, elle fût notre Mère h tous par adoption et spirituelle- ment \ »

0 Vierge sainte! ô Mère de douleur et d'amour! vous voilà convaincue, et vous ne pourrez nier que vous êtes notre Mère. Prenez donc envers nous, malheureux que nous som- mes, les vrais sentiments de Mère. Comme un entant à la vue d'un père irrite court se jeter sur le s « i m de sa mère pour es être défendu et protégé; ainsi nous nous réfugions dans nos peines et nos misères sous votre protection et dans le doux*

1 Rup. ;il)l>. lib. 11. in Joan. c. 19. *Lud. carthus. cap. 63. 3Lansp. in liumil. de B. V.

CONSIDÉRATION XXXIX. 7

sein de votre miséricorde, afin d'obtenir que pour votre amour 1"' Fila de Dieu nous pardonne, lui que nous avons tant de fois offensé par nos péchés et avec tant de malice. 0 pieuse Sou- \ «raine, une mère peut-elle oublier son enfant et n'avoir pas compassion de celui qu'elle a porté dans son sein? Comment donc, ô affligée Mère, pourrez-vous oublier ceux que vous avez enfantés dans la douleur et les gémissements au pied de la croix, vous avez inscrit vos serviteurs fidèles non-seu- lement sur vos mains, mais dans votre Cœur même transpercé du glaive de douleur et d'amour.

6. La fille de la Chananéenne étant fort tourmentée par le démoB, sa mère partit des confins de Tyr et de Sidon, suivit le chemin que Jésus avait pris, et, arrivée en sa présence, elle l'adora et lui dit à haute voix et avec confiance : « Ayez pitié de moi, Seigneur, Fils de David, car ma fille est cruelle- ment tourmentée par le démon. » Richard de Saint -Laurent compare à cette mère chananéenne la sainte Yierge, Mère de Dieu et Mère de l'homme, Mère du roi et Mère de l'exilé ; et à la fille tourmentée par le démon, l'àme p écheresse : « Marie, dit-il, s'adresse à Dieu pour sa fille, c'est-à-dire l'àme du pécheur; elle se transforme en elle pour dire : Fils de David, ayez pitié de moi. Et son Fils lui répond avec bonté : 0 femme, votre foi, est grande ; qu'il vous soit fait comme vous voulez1. » Chères âmes, si la Chananéenne a fléchi le Cœur sacré de Jésus à la miséricorde, de manière à obtenir tout ce qu'elle demandait; que n'obtiendra pas la Douloureuse Mère, qui, en sa qualité de mère de famille, suivant Niérenberg \ possède en la maison de Dieu les clefs de la miséricorde? En- leinlez encore saint Anselme pour votre consolation : Si c'est pour les pécheurs, c'est-à-dire pour moi et mes pareils que Marie est devenue Mère de Dieu, comment la grandeur de mes péchés pourrait-elle me forcer à désespérer d'en obtenir le pardon 3 ?

1 Hicli. a s. Laur. I. 6. - Nierenb. I. 2. de Ador. c. l. » S. Ânsel. de Excell. Viog. c. I.

8 LA MÈRE D^AMOtlR ET DE DOULEUR.

7. Considérez maintenant, àme chrétienne, la sollicitude des mères en faveur de leurs enfants. Rébecca prend sur elle la malédiction, tant elle aimait son fils Jacob à cause de sa bonne conduite : « Elle lui répondit : mon fils, je me charge moi- même de cette malédiction que vous craignez ; faites seulement ce que je vous conseille1. »

Jochabed, mère de Moïse, ne pouvant autrement conserver son fils, avec quelle attention elle le cache d'abord et enfin le met dans un berceau de joncs enduit de poix et de bitume pour empêcher l'eau d'y pénétrer, et l'expose sur le Nil! Et, de crainte que l'enfant ne périsse, elle en confie la surveillance à Marie s.

Bethsabée voyant Adonias s'emparer du trône, n'eut point de repos qu'elle n'eût obtenu de David le royaume et le sceptre pour son fils Salomon : « Elle entre dans la chambre du roi 3,'etc. »

La Sunamite, à laquelle son fils tombé malade d'un coup de soleil au milieu d'un champ, est envoyé par le père qui dit à son serviteur : « Prenez l'enfant et le conduisez à sa mère, n'épargna ni peines ni soins pour lui rendre la santé : Elle le mit sur ses genoux, etc. Cependant sa tendresse ne put em- pêcher ce fils chéri de mourir sur son sein *.

Que plus heureuse est l'âme qui, dans ce misérable monde, se jette sur le sein de la Mère Douloureuse ! Je n'envie pas le sein d'Abraham à Lazare, meilleur est le sein de Marie. Si le prodigue avait eu encore sa mère, il ne serait pas tombé dans cet abîme de malheurs (car ordinairement les mères ont un plus grand soin de leurs enfants que les pères), et, lorsque enfin il se repentit de sa conduite, il serait accouru sans doute vers sa mère d'abord pour qu'elle le réconciliât avec son père. Combien de fois la divine justice, pécheur invétéré, vous eût précipité dans le gouffre éternel si votre tendre Mère la Douloureuse Vierge ne vous avait préserve * de cet horrible malheur par ses prières. 0 bonne Maîtresse,

1 Gen. -27. 13. - Ezod. 2. 3. » III Reg. 1.15.— * IV Reg. 4. 19.

CONSIDÉRATION XXXIX. 0

souverainement miséricordieuse, s'écrie saint Germain pa- triarche, si vous nous abandonnez nous réfugierons- nous ? qu'en sera-t-il de nous, ô très-sainte Mère de Dieu 1 ? Souvenez-vous, je vous prie, qu'au pied de la croix vous nous avez acceptés pour enfants ; vous nous y avez en- fantés, non de votre sein mais de votre Cœur. Je finis avec !e docteur Séraphique : « Marie est un abime de bonté el de miséricorde; quand je vous regarde, ô ma Souveraine, je ne vois en vous que miséricorde, car vous êtes devenue Mère de Dieu en faveur des misérables i. Qui ne vous aimera donc, ô tendre Mère !

i S. Germ. patr. Constantinop. in adoratione zona? Ueip. * S. Bonav. in Spec. B. V.

CONSIDÉRATION XL.

La Douloureuse Vierge devenue la mère de tous au pied de la croix, et à cette ombre tutélaire elle invite tous les chrétiens.

NON EST BAC TLTIOR I Mltlt.%.

Nous vivroyis sous votre ombre. (Thren. i. 20.)

1. L'ombrage désiré d'un arbre est un grand bienfait contre les feux d'un soleil ardent pour le voyageur fatigué de sa route; il y dépose son bagage, il s'y délasse, y reprend ses forces, puis, joyeux et reposé, il poursuit son chemin.

Ame chrétienne, nous sommes tous voyageurs et pèlerins sur la terre, comme le dit saint Paul : Pendant que nous ha- bitons dans ce corps, nous sommes éloignés du Seigneur, et hors de notre patrie ', Nous n'avons point ici de ville perma- nente, mais nous cherchons celle nous devons habiter un jour 2. Il faut donc au milieu des ardeurs, des dangers, des vi- cissitudes du monde, nous choisir une ombre salutaire et vivi- fiante où nous puissions nous arrêter, respirer à l'aise et ré- parer les forces défaillantes de notre àme. Or, il n'en est point d'autre que l'ombre de Jésus crucifié. C'est ce que reconnaît le pape Jules II, qui fit peindre pour son usage, par un habile pinceau, le Rédempteur du monde cloué à un arbre touffu avec cette inscription: // n'y a pas d'ombre plus sûrs

La Douloureuse Vierge Marie nous invite tous à cette ombre, Elle dont l'Ecriture nous dit: « La Mère de Jésus se tenait de- bout près de la croix. •» Remarquons que 1 historien sacre n'a pas écrit qu'Elle était assise à l'ombre de la croix, mais debout:

i II Corinth. :i. 6. s Bebr. 13. 1 i.

i ONSlDl B \ l [ON XL. I I

Stabat. Il est dit de l'Epouse bien-aimée : « Je me suis assise à l'ombre de Celui que j'avais désiré et son fruit était doux à m. .h palais. » Elle était alors plongée dans la contemplation de son Amour crucifié et merveilleusement consolée des fruits de sa passion. Mais la Reine des épouses, la Souveraine du monde se tenait debout sous l'ombre de la croix, tant pour montrer la force de son courage que pour nous aider, nous ses pauvres serviteurs, si faibles et si inconstants quand il faut porter notre croix. Se tenir debout est la situation de celui qui veut aider; être assis, celle d'un juge. Il est dit de Jésus- Christ qu'il est assis à la droite de Dieu; cependant saint Etienne, le premier des martyrs, le vit debout pour l'animer, le soutenir et le fortifier dans sa lutte sanglante. 0 tendre Sou- veraine, debout sous l'ombre de la croix, secourez vos indignes tils, afin que dans toutes nos difficultés et tentations nous puis- sions pareillement nous réfugier à cette ombre salutaire.

2. Le Dieu bon qui dirige toutes choses à leur fin a voulu que son bien-aimé Fils en qui il s'est toujours complu, rache- tât le monde non par le fer mais par le bois, afin que le péché commis sous le bois par Adam et Eve fût expié sur le bois de La croix, et que le châtiment correspondit au délit, la satis- faction au crime, le remède à la maladie ; c'est pourquoi l'Epoux dit à sa bien-aimée : « Je l'ai réveillée sous un mauvais arbre ; ta mère y a été corrompue, ta mère y a été séduie. » Cette mère est Eve, la mère de tous les vivants, trompée et. corrompue par le serpent sous l'arbre défendu; Jésus-Christ souffranl sur l'arbre de la croix l'a ressuscite»' avec Adam à une vie meilleure, et, pélican, d'amour, il a vivifié leur pos- térité empoisonnée et sans vie, par le sang de son cœur et de ses plaies sacrées. Le Dieu de douceur infinie voulut que l'af- fligée Mère fût à l'ombre de Jésus crucifié, afin qu'elle réparai par sa présence et ses douleurs ce qu'Eve avait détruit en éeontanl le démon sous l'arbre de la science du bien et du mal. Marie nous l'ut donc à juste litre donnée pour Mère, à la place d'Eve, sous l'ombre de la croix ;e1 de même que, dans sa maison de Nazareth, elle devint Mère de Dieu sous l'ombre de

12 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

l'Esprit saint ; de même sous l'ombre de son Fils crucifié elle fut déclarée et devint non-seulement la Mère de saint Jean, mais encore de tous les chrétiens : Deinde dicit discipulo : ecce mater 'un. A. ce sujet, Sylveira s'exprime ainsi avec raison : « Il n'y .1 pas dans l'Evangile : // dit à Jean, mais au disciple : Jean ost un nom particulier; disciple, un nom commun, pour indi- quer que Marie est donnée à tous pour Mère \ » Ombre heu- reuse et féconde de la sainte croix, qui nous a laissé une mère aussi digne et auguste, et nous a faits enfants de Marie ! Ne pouvons-nous pas répéter après Jérémie : « .Nous vivrons sous votre ombre au milieu des nations? » Et avec le prophète-roi: « Les enfants des hommes espéreront sous l'ombre de vos ailes2? »

3. L'Ecriture rapporte qu'Agar ne pouvait voir mourir son fils Ismaèl, mais qu'elle s'éloigna de lui : « Elle s'assit à la distance peut porter un arc, car elle dit : Je ne peux voir mourir l'enfant 3. »

Jochabed fille de Lévi,et mère de Moïse, confia son enfant exposé sur le Nil à la garde d'une autre; pour elle, se tenant loin du rivage, elle examinait ce qui arriverait et s'affligeait du malheur de son fils : « Elle le plaça dans les joncs de la rive du fleuve, sa sœur se tenant à distance et considérant l'événe- ment *. »

Marie-Madeleine, Marie mère de Jacques le mineur et de Joseph, Marie Salomé, la mère des fils de Zébédée, Véronique, Jeanne et les autres femmes qui suivirent notre doux Rédem- pteur jusqu'au Calvaire et à la mort, se tenaient éloignées, con- templant ce spectacle sanglant et lamentable donné à l'univers sur le mont Golgotha : « Erant mdem et midiercs de longe as- picientes \ »

Il n'en est pas ainsi de la Vierge gémissante, Marie la plus affligée de toutes les mères, il n'en est pas ainsi; s'avançant au milieu des soldats, elle pénètre jusqu'à la croix de son

'SilvciiM in Joan. 19. 27. c 17. 2Ps. 3b. 7. » Gen. 21. 15. * Exod. 2. 3. 5 Marc. 15. in.

CONSIDÉRATION XI.. I :'.

Fils : Stabat autem juxta crucem; à quoi saint Àmbroise ajoute : « Elle se tenail au pied «1«' la croix, et regardait avec tendresse Les plaies de son Fils ' ; » et Le doux saint Bernard : '( S'appuyant sur les extrémités des pieds, elle élevait les mains, embrassant la croix et s'empressant de la baiser à l'en- droit par coulaient des flots du précieux sang. 0 mar- tyre immense! ô soupirs fréquents! ô cœur défaillant de la Vierge 2! » 0 tendre Marie, vraie Mère d'amour et de douleur, qui pourrait expliquer les tristesses de votre âme et vos tour- ments à l'ombre de la croix? Le Très-Haut vous a vraiment couverte de son ombre; ombre triste et fatale mais salutaire de la croix, sur laquelle vous mettrez la devise : Cette ombre porte avec elle le remède désiré. Dieu a dit autrefois : « Fai- sons l'homme à notre image et à notre ressemblance, » ou selon Oleaster et d'autres, d'après le texte hébreu :} : « Faisons L'homme à notre ombre selon notre ressemblance. » Et com- iiniit à notre ombre? Ecoutez saint Athanase : « L'homme a en lui une image de la croix comme étant l'image du Cruci- fié '. » Comment cela? Etendez vos deux bras, et vous repré- sentez votre Rédempteur. Ecoutez aussi saint Bernard : « Nous sommes une croix qui nous rappelle celle fut atta- ché le Sauveur; l'homme a la forme d'une croix et n'a qu'à ••tendre les bras pour le manifester 5. » Voyez donc, ô mon àme, comment Jésus crucifié corporellemcnt et sa Mère Dou- loureuse crucifiée avec lui en esprit, vous invitent à l'ombre de la croix salutaire dont Isaie a dit : « Elle sera un ombrage pendant le jour et la chaleur, et une retraite assurée pour les mettre à couvert des tempêtes et de la pluie G. » Que faites- \ mis, chrétiens? « Voici le repos pour tous; pourquoi clicr- cher d'autres ombrages? Aucun pécheur ne vint à celte om- bre, contrit et humilié, sans y trouver le remède qu'il désirait : On ru n In lumière //'//* In crn'i.r.

1 S. Ambr. de Instit. Virg. c. 7. - S. Bern. de Lament I?. Y. 3 Oleast. in Gen. t. Î0. l s. Athanas. Sina. I. l. Orat. contempl. in Gen. 5 S. Bern. serai. \, in Virg. Natîv. ,: l-.i. i. 6.

1 \ LA MÈRE d' AMOUR ET DE DOULEUR.

i. Quand Elie, le plus zélé des prophètes, était poursuivi par les émissaires de l'impie Jézabel pour être mis à mort, il ne trouva de refuge qua l'ombre d'un genévrier : « Etant venu sous un genévrier et s'y étant assis, il souhaita la mort et dit : Seigneur, c'est assez vivre pour moi ; relirez mon àme de mon corps, car je ne suis pas meilleur que mes pères. Et il se jeta par terre, et s'endormit à l'ombre du genévrier. » Par cet arbre, l'abbé Rupert entend la sainte croix : Elie, dit- il, se réfugie dans le bois vivifiant île la croix, il y désire la mort, il s'empresse d'y mourir avec Jésus-Christ.

Jacob, dans la persécution de son frère Esaii, se retira sous l'ombre d'un térébinthe au pied duquel il enfouit, après les avoir mis en poudre, les idoles d'or et d'argent de sa mai -on : At Me infodit ea subter terebinlhum, quss est post urbem chem. Typotius comprend la, sainte croix par ce térébinthe; il dit : Le térébinthe, cet arbre près duquel 1" patriarche Jacob enfouit les idoles, est la croix qui, parle culte d'un seul Dieu, brise Yidolomanie et répand une résine salutaire.

Lorsque Moïse conduisait ses brebis, en plein midi, à l'ombre épaisse des arbres, dans l'intérieur du désert Dieu lui ap- parut au milieu du buisson ardent, il fut élu pasteur des âmes et chef du peuple d'Israël. <( Le Verbe de Dieu dans le buisson! dit Corneille de la Pierre, est le Verbe de Dieu en croix, parce que, dans l'un et l'autre endroit, il est dans les épines. C'est à son ombre que Moïse conduisait ses brebis qui nulle part ail- leurs ne pouvaient trouver de meilleurs pâturages.

La croix est encore figurée par l'arbre de Daniel : « Il nie semblait que je voyais au milieu de la terre un arbre excessi- vement haut. C'était un arbre grand et fort, dont la hauteur allait jusqu'au ciel, et qui paraissait s'étendre jusqu'aux ex- trémités du monde. Ses feuilles étaient très-belles; el il était chargé de fruits capables de nourrir toutes sortes d'animaux : les bètes privées et les bètes sauvages habitaient desscrus ; les oiseaux du ciel demeuraient sur ses branches; et tout ce qui avait vie, y trouvait de quoi se nourrit-, n Hue cet arbre figurât la croix, Antoine de Kampeloge nous l'atteste en parlant des

I 0N8IBÉR vilo\ XI.. 15

figures de la Bible : « La croix de Jésus-Christ, dit-il, arbre grand, large, touffu, produiaanl des fruits pour apaiser la faim et satisfaire le goût par leur suavité, protège tous les lidèles contre les démons et les attaques des péchés et des vices \ » Cet arbre de la croix fut planté au milieu de la terre, suivant le texte du Psalmiste. Deits operatus est suintent in medio terne -. » La croix atteint jusqu'au ciel, parce qu'il n'est point d'autre voie pour y arriver. Heureuse l'àme qui habite a SOU ombre salutaire !

5. Considérez l'Epouse cherchant son Epoux très-aimant, candide et vermeil : « Indiquez-moi, vous que chérit mon àme, vous faites paître, vous vous reposez en plein midi. » Si nous considérons la lettre, l'Epouse était alors er- rante pour la garde de ses vignes, brûlée par les rayons ardents du soleil, et, pour s'en garantir, elle demandait à son Epoux un ombrage pour se préserver de la chaleur et se reposer. Elle trouva ce qu'elle désirait. Sur ce sujet voici ce que dit saint Drogon, évèque d'Ostie : « Je ne vous trouverai jamais si ce n'est sur la croix : c'est que vous dormez, que vous reposez sur le midi \ » Corneille ajoute * : « Entendez, par le midi, le crucifiement du Sauveur, car c'est à midi qu'il fut crucifié ; et la croix de Jésus est en etfet, pour l'Eglise et pour les fidèles, une consolation certaine et un ombrage assure contre tous les feux des persécutions et des tribulations.*»

0 Souveraine de tout l'univers! ô Mère de douleur et d'a- mour! dites à vos indignes sujets vous avez trouvé votre repos. L'Evangélistc nous l'insinue par ce peu de mots qui disent beaucoup : Auprès de la croix de Jésus. Est-ce votre repos, ma Souveraine, près de la croix sur laquelle est votre Fils? Non-seulement près de la croix, dit saint bernardin de Sienne ', mais sur la croix de son Fils mourant; et il inter- pelle de la sorte l'Evangéliste : « Vous ave/ trop peu dit, ô saint Evangéliste ; u la Mère de Jésus, dites-vous, se tenait

1 Anton. Ramp. in Bg. Bibl. I 564. - I'-. ::t. 12. 3 s. Drog. '1'' Domin Pass. * Corn. hic. s. Bern. ser. de l>. V.

16 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

près de la croix lorsqu'il y était attaché ; mais vous lui devez certainement plus qu'aux autres. Assurément, elle était plus proche de la croix que qui que ce soit, parce qu'elle ne se tenait pas seulement auprès de la croix, elle était sur la croix cru- cifiée de cœur. » 0 triste spectacle! lamentable station! ombre fatale! Comment elle se tenait, dites-nous-le, vous ô saint Jean, qui étiez aussi près de la sainte Mère; dites, comment se tenait-elle? Le bien-aimé Disciple nous répond : Je n'en peux dire davantage : Stabat, elle se tenait debout quand l'univers semblait se dissoudre à la mort de son Créa- teur sur un gibet; quand toute créature était en gémisse- ment, la terre ébranlée, le voile du temple déchiré, le soleil obscurci, les rochers fendus ; plus ferme que la pierre, la Mère affligée se tenait debout à l'ombre de la croix, hélas! dans quel océan de douleurs ? « Il n'est pas permis de penser, dit saint Bernard ', quelle fut la douleur de la divine Mère lorsque les créatures insensibles étaient dans un tel deuil, et combien s'affligeait davantage le Cœur d'une telle Mère. » 0 heureuse âme, si vous lui êtes compatissante pour être un jour glori- fiée avec elle ! Oui, heureuse si vous vous retirez avec elle à l'ombre de Jésus crucifié. trouver un repos plus sur qu^entre les bras de votre Sauveur et sous le manteau de sa Doulou- reuse Mère? Le grand évèque d'Ilippone disait : « Je veux vivre et je désire mourir sous les bras de mon Sauveur; » et le prophète-roi : « Il vous mettra à l'ombre sous ses épaules, et vous espérerez sous ses ailes 2. » Par les épaules et les ailes, les saints Pères comprennent les bras de Jésus-Christ étendus en croix. « Jésus-Christ, dit Le Blanc sur cet endroit, du haut de sa croix nous met à l'ombre de ses épaules, de ses bras et de ses mains, et il nous protège comme sous une nuée contre les feux de la fureur de Dieu; il nous cache, nous rafraîchit, nous nourrit, nous prodigue ses ca- resses : telle une poule défend et réchauffe à l'ombre de ses ailes ses poussins pour les préserver des oiseaux de proie ; ou

1 De Lament. lî. Y » ps. 90. 4.

CONSIDÉRATION NI.. 17

tel un aigle excite ses petits à voler el étend Le premier ses ailes [tour prendre son essor. « Jésus étend ses mains vers nous, dit saint Amhroise, afin de mettre sous son ombre le monde entier. Comment ne sommes-nous pas ombragés, nous çne le Crucifié défend de la malice du siècle et de l'ardeur des passions 1? » Et moi j'ajoute : Comment ne sommes-nous pas à l'ombre, nous pour qui la Douloureuse et affligée Mère de Jésus intercède auprès du Père, lui offrant comme une victime pour le fléchir, le saint et divin Cœur de Jésus son Fils unique immolé sur la croix pour sauver tous les bommes? Oh ! qu'ils font bien, ces prêtres qui chaque jour offrent au Dieu tout-puissant la victime immaculée, le corps, le sang, L'âme et la divinité de Jésus-Christ, 'pour leurs péchés et ceux de tout le peuple ; qu'ils font bien, s'ils offrent ce sacrifice sans tache par les mains très-pures de la Bienheureuse Vierge et tfère Douloureuse et dans les mêmes intentions que cette Mère d'amour et de douleur, au pied de la croix, offrait elle- même son bien-aimé Fils au Père éternel comme une victime de réconciliation! Avec tant de marques d'amour, pourrait-il y •Voir un refus?

6. Rappelons-nous cette colonne miraculeuse de nuée et de feu qui accompagnait les Hébreux à la sortie de l'Egypte et les conduisait vers la Palestine : « La colonne de nuée ne manqua jamais durant le jour, et la colonne de feu pendant la nuit. » 0 tendre Souveraine ! votre très-doux Fils en croix et brûlant (l'amour, fut la colonne de feu éclairant tout homme, parce qu'il «'tait la lumière du monde devenue plus brillante encore au milieu des ténèbres sur le candélabre de la croix ; et vous, ô Vierge Douloureuse, vous étiez figurée parla co- lonne de nuée, parce que vous nous protégez comme une nuée salutaire contre la colère de Dieu, vous qouS cachez à L'ombre de vos grâces, vous nous arrosez et nous féconde/. par vos larmes ; et voilà pourquoi, ô Souveraine, saint André de Crète vous appelle nia Colonne dénuée spirituelle d'Israël ; »

1 s. Ambr. in ps. 90.

II. 2

18 LA MÈRE DAMOUB ET DE DOULEUR.

et saint Epiphane : « la nuée d'où descend la céleste pluie qui arrose la terre. »

L'Ecriture dit que Jonas se fit un petit couvert de feuillage il se reposa à l'ombre pour voir ce qui arriverait à la ville de Ninive; mais l'ombre dura peu, car le lendemain dès le point du jour, le Seigneur envoya un ver qui, ayant piqué la racine du lierre, le rendit tout sec. Telles sont les ombres de ce siècle, sous lesquelles point de salut, point de solide refuge à espérer. Et que sont en effet les grâces et les faveurs du monde? toile lé- gère, roseau fragile, ombre fugitive, vaine fumée. Allez, pauvres mortels ; mettez votre espoir à l'ombre des princes et des enfants des hommes dans lesquels il n'y a pas de salut. Seul estheureux celui qui espère dans le Seigneur Jésus cru- cifié, et dans sa très-sainte Mère ; que tous vous abandonnent dans votre agonie, eux seuls ne vous délaisseront pas, si vous les rendez maintenant vos amis : « Regardez, mes enfants, les générations des hommes, et sachez que personne espérant au Seigneur n'a été confondu \ »

C'est pourquoi je me tourne tout entier vers vous, très-doux Jésus, cruellement cloué sur l'arbre de la croix; et vers vous, ô Mère d'amour et de douleur. Vers vous je reviens comme un enfant prodigue auprès d'un père et d'une mère, et, avec le Psalmiste, je vous adresse cette humble supplication : Pro- tégez-moi sous l'ombre de vos ailes. Si l'ombre de saint Pierre, le prince des Apôtres, a guéri des malades de leurs infirmités, que ne pourra pas faire l'ombre de mon Rédempteur crucifié, et l'ombre de Marie sa Mère crucifiée avec lui?

Suivant saint Vincent Ferrier, avant que les ténèbres se fussent répandues sur toute la terre, le bras droit de Jésus en croix ombragea un peu le larron Dismas, et, bientôt converti par la vertu de cette ombre, il fut admis à la participation de la croix du Sauveur et à sa gloire; merveille que prévoyait le prophète Osée, en disant : « Ceux qui sont assis à votre ombre se convertiront. » 0 Jésus !u. Marie! moi aussi je me conver-

i Eccli. 2. H.

I ONSIDJ RATION KL. IV»

tirai enfin à rousde toul mon cœur; puisque moi aussi, votre indigne serviteur, je m'assieds à votre ombre. Ah! qu'il me soit permis de dire avec le Psalmiste royal : « A cette omhre j'espérerai jusqu'à ce que L'iniquité soit passée '. »

1 Ps. 56. J.

CONSIDERATION XLI.

Marie, Mère Douloureuse, au pied de la croix de son Fils, est pour tous les chrétiens un miroir admirable de patience.

\0\ Il Al! II KKDARCiLTIO\Ell.

La Mère de Jésus se tenait près de la croix. (S. Jean, 19. 25.)

1. On emploie différents symboles pour figurer la patience chrétienne et le courage dans la souffrance : des roses fleu- rissant plus belles au milieu des épines et répandant plus au loin leur odeur, avec cette devise : Elles sentent meilleur; un rocher immobile au sein des flots de la mer en courroux, avec la devise : Je suis toujours le même; uncenclume nullement ébranlée par les coups de marteaux, avec la devise des Italiens : Ogni durezza vinco, c'est-à-dire je viens à bout de toutes les choses dures, ou plus brièvement : j'endurerai; un palmier s'élevant entre des poids pesants, avec l'inscription : Plus on me serre, plus je m'élance ; un roseau qui ne rompt pas sous la fureur des vents : Infirme mais ferme ; l'amaranthe : Flétrie ni par le froid, ni par le chaud; le diamant : ni par le fer, ni par le feu ; enfin une salamandre dans les flammes : Je ne suisniblessée, ni effrayée.

Parmi tous les symboles de ce genre que l'on pourrait fournir pour exprimer la patience de la Douloureuse et affligée Mère, aucun ne me plaît davantage qu'une douce brebis qui, traînée à la boucherie pour être tuée et écorchée, ne manifeste auciln signe d'impatience, ne pousse aucune plainte, ne reproche point à ses ennemis leur férocité, mais supporte tout égale- ment, même la mort, violente. C'est pourquoi, au-dessus d'une

i ONSIDÉB LTION Xl.l. -1

brebis marquée du signe T ou d'une croix, vous inscrirez ces mots du prophète royal :

Elle n'a rien à répliquer.

Voilà une figure gracieuse qui se voit réalisée dans la Dou- loureuse et affligée Mère de Jésus ; en effet, quand son Fils innocent est entraîné comme un doux agneau à la mort, elle, semblable à la plus douce des brebis, n'ouvre pas la bouche t n'a aucune plainte, ni dans son cœur ni sur ses lèvres, contre les infâmes déicides; elle suit avec la plus grande pa- tience les traces sanglantes de ce Fils souffrant, et endure les injures, les opprobres, les tourments infligés à son très-doux Fils et à elle même, avec une admirable et invincible fermeté. « Seigneur, disait-elle en son àme, vous êtes ma patience, » c'est-à-dire, c'est pour vous seul que je souffre volontiers avec vous tous ces maux, parce que, je le reconnais, toute cette affliction vient de vous, et je me soumets humblement en tout à votre très-sainte volonté. « Qu'il en soit ainsi, ô Père; puis- que tel est votre bon plaisir, » moi aussi je me plais à souffrir, a être crucifiée, à mourir avec mon Fils. « La Bienheureuse Vierge, dit Blosius, remarquant que son Fils avait souffert les horribles tourments de la passion avec la plus parfaite patience, sans le moindre murmure, avec un ardent amour pour nous et avec joie, elle endurait de son côté avec joie tout ce qui se présentait à souffrir '. » Que nous sommes loin, dans l'oc- casion, de ressembler à Jésus et à Marie dans nos souffrances !

2. Il est dit de Jacob, dans les saints Livres, que recevant la tunique de son fils Joseph, aimé plus que ses frères, teinte dans le sang d'un chevreau et déchirée : « Nous avons trouvé cette robe, voyez si ce n'est pas celle de votre fils », dans l'excès de sa douleur a il déchira ses vêtements, se revêtit d'un cilice et pleura longtemps son fils *. *

De même Job, ce modèle de patience, qui ne s'était point

1 Bios. Spirit. In>t. append. c. 2. n. .">. * Gen. 37. 35.

-22 LA MÈRE D AMOUR ET I»li DOULEUR.

laissé abattre par différents revers de fortune, lorsqu'il apprit la nouvelle de la mort précipitée de ses enfants ; oubliant son ancienne patience, « il se leva, déchira ses vêtements, et, ayant coupé ses cheveux, il se prosterna en terre et adora '. »

Et la désolée mère de l'infortuné général Sisara, lorsque, inquiète en sa maison à cause du retard de son fils, elle avait un pressentiment de sa mort et que regardant par la fenêtre elle apprit qu'effectivement il était mort, que Jahel l'avait cloué à terre en lui enfonçant un clou dans les tempes, accablée de chagrin elle fit entendre des gémissements et des cris et remplit toute la maison d'une douleur extraordinaire *.

.Nous ne voyons rien de semblable en la Bienheureuse Vierge, à la vue de son Fils, saisi, accusé, flagellé, couronne d'épines, chargé de la croix, expirant sur un infâme gibet par une mort ignominieuse ; point de murmures, point de cris, point de vêtements déchirés par un mouvement d'impatience, ni plaintes, ni désespoir, ni cheveux arrachés comme font les autres mères dans une grande tristesse; et pareille à une brebis au milieu des loups, elle surmonte tout par une patience inaltérable. « La Bienheureuse Vierge, d;t Pierre Canisius, se tenait debout pour donner à la postérité un mémorable exemple de sa vertu, et de la constance que l'on doit montrer dans l'adversité à son imitation, quand ni la tribulation, ni l'an- goisse, ni le péril, ni la persécution, ni le glaive, ni la mort, ni la vie, ni aucune autre créature ne pouvaient la séparer de la charité pour Jésus-Christ auquel elle était attachée du fond de son Cœur '. »

3. Ici se présente à ma pensée le prophète Elie de Thcsbé, vers lequel, pendant qu'il était sur le sommet du mont Carmel, le roi Ochozias, malade, envoya successivement deux capi- taines de cinquante hommes avec ordre de s'emparer de sa personne, ou par la force ou par la ruse, et de le lui amener : Homme de Dieu, le roi vous commande de descendre. Elie ré- pondit : Si je suis homme de Dieu, que le l'eu descende du

1 Job. I. 20. - Judic. ;;. 28. 3 Petr. Canis. |». 2. I. i. c. 28.

CONSIDÉRATION XLI. 23

ciel el vous dévore avec vos cinquante hommes. Aussitôt le feu du ciel descendit, et dévora le capitaine avec ses cinquante hommes.

Elisée, disciple d'Elie, sévit par un zélé, semhlahle contre des enfants qui se raillaient de lui à Béthel ; il les maudit au nom du Seigneur, el même il fit sortir du bois deux ours qui, s'étanl jetés sur cette troupe d'enfants, en déchirèrent qua- rante-deux en châtiment de leur conduite injurieuse.

Huand les deux fils de Zébédée eurent vu la dureté et l'in- gratitude des Samaritains qui, sur la fin du jour, refusaient au Rédempteur du monde l'hospitalité dans leur ville, pour y prendre le repos de la nuit, saisis d'un zèle outre, ils les me- nacèrent de la vengeance du ciel : « Seigneur, si vous vou- lez, nous dirons que le feu du ciel descende sur eux et les consume. »

L'apôtre Paul plaidait sa cause dans l'assemblée et défendait publiquement son innocence ; il entend le pontife Ànanie commander à ceux qui étaient près de lui, de le frapper sur le visage; à l'instant, de son autorité apostolique et par le zèle de la justice, il menace le pontife hypocrite des châtiments de Dieu le juste vengeur des crimes : « Dieu vous frappera vous- même, dit-il, muraille blanchie. »

Au dire de IMutarquc, une courageuse femme voyant son fils engagé dans un combat singulier avec le roi Pyrrhus, et en danger d'être frappé à mort, elle saisit une tuile et la lance avec force sur la tète du roi qui tombe mort.

Sur le Calvaire, elle a sous les yeux le cruel combat de son Fils, que la Douloureuse Vierge Mère agit différemment cou Ire des ennemis ! La parole du prophète royal se vérifiait pour elle : « Un grand nombre de jeunes taureaux m'environ- nent, et des taureaux gras m'ont assiégée. » La populace se moquai! d'elle, et une troupe insolente de soldats et de valets, pareils à de jeunes taureaux bondissants et à des taureaux ^rras, lui insultait ; les scribes et les pharisiens la montraient au doigt à la foule environnante : voilà la mère du séducteur, etc. Tons les éléments se préparaienl à tirer une juste ven-

:M LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

geance de ces impies déicides ; le soleil s'obscurcit, la terre trembla, les pierres se fendirent, les tombeaux s'ouvrirent, l'enfer même dilatait son gouffre pour engloutir vivants ces pécheurs exécrables. Mais que faisait en ce moment l'affligée et douce Vierge ? Est-ce qu'elle invoquait le feu du ciel comme Elie? Cependant elle savait son Fils plus grand qu'Elie et l'in- jure qui lui était faite infiniment plus grave. Est-ce qu'elle maudissait comme Elisée? Demandait-elle vengeance comme les fils de Zébédée appelés pour cela Boanergès, c'est-à-dire enfants du tonnerre? S'indignait-elle contre les injustes pon- tifes et l'inique juge Pilate, comme Paul contre Ananie : Dieu vous frappera? Arracha- t-elle du sol, dans son indignation, des pierres pour les lancer à la tète maudite des bourreaux, comme cette femme d'Epire? Rien de semblable dans la Douloureuse Mère, mais vous trouvez les injures, les mépris faits à son Fils et à elle-même,, endurés avec un cœur humble et patient : bien plus, elle pria pour les pécheurs, loin d'avoir des re- proches sur les lèvres. Comme l'observe le docteur Séraphique, Jésus ayant crié à son Père : Pardonnez-leur, en ce moment Marie, vraiment Mère d'amour et de douleur, se jetant à ge- noux et fondant en larmes, répéta la même prière : 0 Père, pardonnez-leur. 0 patience admirable ! ô constance à souffrir inouïe dans tous les siècles ! « Votre douleur était grande comme la mer, dit saint Bernard, et cette mer ne débordait pas par l'impatience. Tous les fleuves se jettent dans la mer, c'est-à-dire en Mari.' ; or, 1 ; mer ne déborde pas. » 0 Dieu de bonté ! est notre patience, nous qui ne pouvons supporter, je ne dis pas des coups, mais la moindre parole un peu dure, mais l'injure la plus légère. Instruisez-vous, clin-tiens, à l'école de votre Mère. La patience vous est nécessaire, pour atteindre l'effet des saintes promesses eu accomplissant la volonté de Dieu.

i. Ecs saints Pères et les hommes versés dans les saintes Ecritures, s'étonnent, et recherchent pourquoi le Sauveur ne descendit pas de la croix lorsque les Juifs le demandaient avec instance : « S'il est roi d'Israël, qu'il descende de la croix, et

CONSIDÉRATION XI. 1. 25

nous croirons en lui. » 0 bon Jésus ! c'est une belle occa- sion de convertir ces cœurs obstinés pour le salut desquels vous avez travaillé jusqu'à répandre votre sang; descendez de la croix, débarrassez îles clous vos mains et vos pieds, et t < tut est sauvé ; ils croiront tous en vous, ils vous reconnaîtront et vous recevront avec respect pour leur Messie et leur céleste Roi. Non, le très-doux Jésus reste sur la croix il désire vivre et mourir. Saint-Augustin en donne la raison : « Parce qu'il enseigne la patience il diffère l'usage de sa puissance ; si, ému de leurs paroles, il descendait, on le croirait vaincu par la dou- leur que lui causent les outrages. » Ajoutons le témoignage de saint Bernard : Qu'il descende de la croix, disent ils, s'il est mi d' Israël; non, qu'il n'abandonne pas ses titres au royaume, qu'il ne dépose pas le sceptre de son empire, lui dont l'empire est sur ses épaules, comme l'a prophétisé Isaïe. N'écrivez pas, disent les Juifs à Pilate, n'écrivez pas Roi des Juifs, mais qu'il a dit lui-même : Je suis le roi des Juifs. Et Pilate répond : Ce que j'ai écrit est écrit. Si ce que Pilate a écrit est écrit, Jésus n'achèvera-t-il pas ce qu'il a commencé? Il a commencé, et il nous sauvera. Mais ils disent encore : Il a sauvé les autres et il ne peut se sauver lui-même. Ah! s'il descend, il ne sauvera personne ; en effet, puisque ne peut être sauvé que celui qui persévère jusqu'à la fin, combien moins pourrait-il être Sau- veur sans persévérance ? Il a donc sauvé les autres ; quant à lui il n'a pas besoin de salut étant kii-méme le salut de tous. Pourquoi le Sauveur ne descendit pas de la croix, le même saint nous en donne un autre motif : « C'était pour ne pas nous donner occasion de nous soustraire à la persévérance qui seule est couronnée*. »

Je reviens à vous, ô Mère Douloureuse; vous n'étiez pas éloignée de la croix de votre Fils, mais vous vous teniez si près, i|ue son sang coulant en abondance de ses plaies sa- crées vous arrosait et vous inondait, ainsi que le démontre votre voile rougi par le sang du Sauveur et conservé reli-

S. Fiera. Serm. 1. Kesurrect. Dom.

26 LA MÈRE D AMOUR Kl DE DOULEUR.

pieusement jusqu'à ce jour dans le royaume de Bohème avec d'autres précieuses reliques. Dites, je vous prie, ô ma Souveraine, pourquoi vous avez voulu vous tenir si près de la croix?Agar ne pouvait voir mourir son fils; l'ayant déposé sous un arbre, elle se retira et s'assit à la distance un arc peut lancer la flèche : Elle disait : Je ne peux voir mourir l'enfant. Et vous, ô Souveraine, vous ne vous séparez pas de la croix, de la longueur de l'ongle. Remarquez, àme chrétienne, que l'on porte la main au cœur, à la tète, à la dent, à l'estomac, si l'on y .'prouve de la douleur. Or Marie, dont le Cœur ne faisait qu'un avec le Cœur de Jésus, voulut être près de son Fils dans toute sa passion et surtout au moment de sa mort, parce qu'elle éprouvait les mêmes douleurs que lui; par conséquent elle endura comme lui avec la plus grande patience et les douleurs et les injures qu'il endurait lui-même ; d'où les paroles de cette bien -aimée Sunamite aux femmes de Sion : Ne considérez pas que je suis brune, carie soleil ni a oté ma couleur '. 0 pieuse Souve- raine, quel soleil! et comment a-t-il pu décolorer votre beauté?

i hie la Bienheureuse Vierge ait été, de sa couleur naturelle, un peu brune, saint Epiphanc le rapporte en faisant ainsi son portrait : Elle avait le teint couleur froment, les cheveux jaune d'or, les yeux vifs, les prunelles couleur olive, les sourcils ar- qués et d'un noir gracieux, le nez proéminent, les lèvres fraîches et la parole douce, le visage avec les mains et les doigts longs. Toutefois je ne m'arrête pas à la lettre, mais je cherche le sens mystérieux.

Le soleil vous signifiera parfaitement Jésus-Christ élevé en croix. La Bienheureuse Vierge et Mère affligée, en habit de deuil, ainsi que quelques-uns le disent, demeura constamment sous ce soleil mystique depuis midi jusqu'au soir, considérant les affreux tourments de son très-doux Fils. Aussi, suivant Corneille de la Pierre, elle fut brunie moins parles rayons du soleil que par La vivacité de la douleur, quand, exempte de tout péché, elle s'entendait qualifier des noms de pécheresse, mère

1 Gant. I. :>.

CONSIDÉRATION \l.l. :27

do grand malfaiteur, le coryphée des larrons, et de nourrice d'un méchant homme de rien : affronts qu'elle supportait avec la plus grande patience; enfin, objet de mépris avec son divin Fils, elle n'eut aucune malédiction pour ceux qui la maudis- saient : Nulle réplique en sa bouche

5. Vous voyez, àme chrétienne, comment la sainte Mère a été noire dans la bouche des hommes, et toute belle en pré- sence de Dieu et des Anges : Je suis noire, mais je suis belle '. Hue nous sommes bien loin encore de la sainteté de Marie, nous qui sommes nés dans le péché et y avons grandis ! Hélas ! est notre patience dans les adversités? notre constance dans les persécutions? notre force dans les tentations? l'égalité de notre àme dans le support des injures ? notre persévérance jusqu'à la fin ? Parce que vous étiez agréable à Dieu, disait l'Ar- change au vieux Tobie; il a été nécessaire que la tentation vous éprouvât2? Job, éprouvé par la patience, fut trouvé juste3. Joseph, qui supporta patiemment les injures de ses frères et de la femme de Putiphar, fut élu vice-roi de l'Egypte 4. David, patient dans les outrages et les persécutions de Séméi et autres rebelles, et même de son propre fils, recouvra son trône et fut nommé homme selon le cœur de Dieu : J'ai trouve David fils de Jcssr, homme selon mon cœur et qui accomplira toutes mes volontés '. Eléazar, pour la fidélité à la loi de Dieu, souffrit les tourments les plus cruels avec un esprit patient et généreux '. I.t Lea vaillants Machabées7, et toute la blanche armée des martyrs, c'est encore la patience qui assure leur salut. « n fortunés que nous sommes, dit saint Grégoire le Grand, nous qui pouvons étremarlyrs, sanssubir la flamme et le fer, pourvu que nous gardions la patience dans notre àme. » Le feu dé- vore tout, consume tout; mais il éprouve et purifie l'or et l'ar- gent ; l'homme juste est éprouvé de Dieu par la patience dans l'adversité, et sans adversité la vertu Languit Si l'eau n'est pas en mouvement, elle se corrompt, elle engendre les vers

1 (..mi. l. i. i Tob. 12. 13. 3 Joli. I. et seq. ' Gen. in. m. ' II Reg. Ki. :. et Art. 13. 22. - Il Mach. 6. 24. II Biach. 7.5.

28 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

et les crapauds. Si l'atmosphère n'est pas agitée par les vents, elle cause des contagions et des pestes. Les aromates n'exha- lent leur odeur qu'après avoir été piles dans un mortier. 0 chère patience ! vous êtes le meilleur remède pour tous les maux ; vous êtes la porte de fer, qui conduit à la céleste Jéru- salem. Le centurion, ayant vu l'immense patience de Jésus sur la croix, se convertit sur-le-champ à Dieu et à la lumière de la foi : Vraiment cet homme est le Fils de Dieu. 0 chrétiens, vous aussi levez la tète, et contemplez votre amour crucifié et sa très-sainte Mère Douloureuse debout sous la croix : ils se sont faits notre exemple afin que nous marchions sur leurs traces ' . Courage ! en les suivant, vous posséderez vos âmes en paix par la patience 2.

1 I. Pet. 2. 21. 2 Luc. 21. 19.

CONSIDÉRATION XLII.

La Doaloureuse Vierge assistant à l'agonie de son Fils en croix, est la patronne de tous les fidèles agonisant-.

\0.\ E\TI\(iLETlR.

Eclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l'ombre de la mort. (Saint Luc. 1. 79.)

1. On estimait un grand prix, chez le peuple israélite, le chandelier d'or à sept branches et à sept lampes qui éclairaient la nuit le saint des saints dans le tabernacle du témoignage. Afin qu'il fût perpétuellement allumé dans la maison de Dieu et ne s'éteignit point la nuit, Dieu établit Aaron et ses fils qui devaient en prendre un soin assidu et l'entretenir, à moments fixés, d'une huile très-pure : Que la lampe brûle toujours dans le tabernacle du témoignage*. Ce chandelier d'or à sept bran- ches, orné avec soin et brûlant nuit et jour, nous représente la très-sainte Mère de Dieu, suivant saint Epiphane 2 : « L;t Vierge Maiie, dit-il, est le candélabre qui a reçu du trône éle\é le feu trois fois lumineux. » Et saint Cyrille 3 appelle la divine Mère, la lampe qui ne s'éteint pas, qui brille d'une manière ad- mirable et le jour et la nuit dans les ténèbres, c'est-à-dire dans la passion et à la mort de son Fils unique sur la croix, pour éclairer les malheureux mortels marchant dans l'ombre de la mort. C'est pourquoi, la semaine sainte, l'on célèbre dans l'Eglise, par des chants lugubres et des ornements de deuil,

1 Exod. T.. 20. "S. Epiph. de Laud. Deip. -*S. Cyrill. serm. contru Nestorium.

30 LA MÈRE D'AMOUR KT DE DOULEUR.

le mystère de la passion du Seigneur, on éteint toutes les lam- pes, excepté une seule; et, sur un candélabre triangulaire, tous les cierges excepté encoreun seul que l'on porte derrière le grand autel ;ce cierge représente l'affligée Mère de Dieu qui, pendant que toutes les personnes amies se retiraient de son Fils souf- frant, demeura seule comme une lampe ardente de foi et de cha- rité au milieu des ténèbres des persécutions, et persévéra près de lui jusqu'à son dernier soupir; la mort ne put même l'en séparer : aussi a-t-elle mérité d'être appelée la Patronne fidèle et l'Avocate de tous les bons chrétiens qui meurent dans le Seigneur. « Nous ne saurions trouver, dit saint lldephonse ', pour apaiser notre juge irrité, une patronne plus puissante que vous qui avez mérité d'être la Mère de notre Rédempteur et juge, » A cette lampe mystique aux sept branches à cause des sept glaives de douleur, et qui toujours répand sur nous l'huile de La charité, nous donnons pour devise : Pou?* ceux qui sont dans les ténèbres; ou bien, s'il vous plaît mieux :

Elle ne s'éteindra pas .

2. Oh! non; sa lumière ne s'éteindra pas pendant la nuit*, c'est-à-dire à la mort, dont Jésus-Christ a dit : « La nuit vient, dans laquelle personne ne pourra travailler. » 0 périlleuse, ô

sombre, ô redoutable nuit, il nous faudra passer, avec les dispositions dans lesquelles nous nous trouverons alors, de cette vie mortelle à la longue et très-longue éternité heureuse ou malheureuse! Laquelle hélas ! Que sera-ce, quand l'ennemi capital nous « tendra des embûches en secret, comme un lion dans sa caverne, pour saisir le pauvre '? » Que sera-ce, quand le grand dragon « dressera ses pièges au talon s, » c'est-à-dire au dernier terme de la vie, « animé d'une grande colère, sa- chant qu'il a peu de temps5? » Que sera-ce, quand « vous n'aurez pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les

1 S. lldeph. de excell. Virg. serm. de Assumpt. - Prov. 31. 18. 3 Ps. 10. 9. * Gen. 3. IS. :> Apoc. i2. 12.

I ONSIDi R \ i ION M. il. ."il

puissances des ténèbres1? » Que dire des souffrances qui ac- cableront alors votre corps et votre àme? A cette heure vous verrez « qu'il est amer d'avoir abandonné le Seigneur votre Dieu ', » qui devenu juge. juste et sévère aux portes de l'éter- nité, vous demandera un compte exact de vos pensées, de vos paroles et de toutes vos actions. 0 mon Jésus! ô amour cru- cifléi qu'en sera-t-il de moi, si vous jugez les justices mêmes 3? « Lorsque le temps sera venu, je jugerai les jus- tices. Si le juste se sauve avec tant de peine, que deviendront les impies et les pécheurs 4? » Ah! ma pauvre àme si mal- heureuse et si désolée parce que tu ignores si tu es digne de /mine ou d'amour^, que deviendras-tu à la mort où, aban- donnée de tous tes parents et amis, tu te trouveras comme une tremblante brebis au milieu de loups furieux, comme une timide colombe parmi des oiseaux rapaces, ou un faible levreau devant d'énormes dogues?

Un jour ', un lièvre, pour échapper aux chasseurs et à leurs chiens, vint se jeter tout tremblant aux pieds de saint An- selme, et, sous sa protection, conserva la vie et la liberté. me réfugierai-je daus mon agonie, malheureux que je suis, alors que dans un instant c'en sera fait de moi? 0 mon àme, bien que tu sois Benoni, l'enfant de la douleur de Marie, cou- rage ! courage ! point de crainte ! « Aucuu de ceux qui espèrent dans le Seigneur n'a été confondu. » J'ajoute : Aucun de ceux qui implorent humblement l'intercession de la Doulou- reuse .Mite de Jésus, n'a été abandonné. Comment notre Sou- veraine, qui nous a enfantés au pied de la croix, pourrait-elle souscrire à la sentence de notre éternelle damnation? « Qu'il ne parle pas de votre miséricorde, ô Bienheureuse Vierge, celui qui se souvient d'avoir été délaissé par vous après vous avoir invoquée dans la nécessité, si toutefois il en est un. Quel mal craindrons-nous, si nous avons pour nous la Mère de notre juge? Nous pouvons bien nous écrier avec le Psal-

Ephes. 6. 12. Werem. 2. 19. 8 Psal. 74. 3. —* [Pelr. fc. 18.—

es. 9. I. ,; S. Franc, de Sales, in Philoth

32 I.A MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

miste royal : « Quand je marcherais au milieu des ombres de la mort, je ne craindrai aucun mal, parce que vous êtes avec moi, » ô Vierge Douloureuse, ma patronne, mon avocate, ma M rie !

3. Le saint patriarche Jacob mettait autrefois une admirable confiance en son bâton. Il avait, durant toute la nuit, lutté avec l'Ange qui, lui ayant touché le nerf de la cuisse, le rendit boi- teux, en sorte qu'il fut obligé de s'appuyer sur un bâton dont il s'était déjà félicité d'avoir tiré un grand secours : Avec mon bâton, j'ai traversé le Jourdain; et maintenant je reviens avec ces deux troupes. »

David, roi d'Israël, se rend témoignage à lui-même qu'étant berger il tira souvent du secours de son bâton. On sait que les bergers ont une houlette pour conduire leurs troupeaux, un bâton ferré pour combattre les loups. Le Psalmiste fait al- lusion à cet usage quand il dit au Seigneur : « Votre verge et votre bâton m'ont consolé'. »

Portons nos yeux plus haut. Le bâton de Jacob et de David, suivant saint Augustin et d'autres, désigne la croix par la- quelle le souverain pasteur de nos'âmes a passé le Jourdain de la passion, et est rentré au ciel avec deux troupes, comme un autre Jacob : l'une des Anges, et l'autre des hommes ; et la baguette consolatrice de David est, suivant Adrien Lirée, la Douloureuse Vierge Mère de Jésus au pied de la croix. Elle est « la verge d'Israël qui frappera les chefs de Moab, » c'est- à-dire les démons qui sont les chefs des impies ; en sorte que, comme des chiens enchaînés, ils pourront aboyer après nous pendant la vie et à la mort, mais ils ne pourront être nuisibles et faire de morsures qu'à ceux qui le veulent ; et comme le chien craint la baguette ou le bâton qui servirent à le frapper, de même le démon redoute Jésus crucifié qui l'a vaincu par sa croix, et la très-sainte Mère Douloureuse qui lui a écrasé la tête. Aux seuls noms de Jésus et de Marie, il est promptement mis en fuite. Et ce doit être pour nous, âme chrétienne, un

1 P*. 22. i.

CONSIDÉRATION XLII. 33

grand sujet de consolation, puisque, si dans notre agonie nous les invoquons avec instance, nous en serons secourus et passerons heureusement le Jourdain dont le sens radical si- gnifie le fleuve du jugement. « L'homme, dit saint Bernard, a pour médiateurs de sa cause le Fils auprès du Père et la Mère auprès du Fils. Jésus offre à son l'ère son côté et ses plaies, Marie offre à son Fils son Cœur et son sein; et il n'est pas possible d'éprouver un refus en face de ces monuments de la clémence qui plaident pour nous plus éloquemment que tous les discours '. »

4. Dieu opéra de nombreuses merveilles par l'arche du dé- sert. Si la guerre était déclarée, l'arche précédait les guerriers : « Apportons de Silo auprès de nous l'arche de l'alliance du Seigneur, et qu'elle soit au milieu de nous pour nous sauver des mains de nos ennemis J. »

Si l'on assiégeait une ville, (comme on le voit dans la ruine de Jéricho) on portait l'arche du Seigneur autour des murs, et, aux cris de tout le peuple, les remparts à l'instant s'écrou- laient \

Fallait-il passer un grand fleuve avec l'armée, on recourait encore à l'arche; elle était portée en avant, et à sa suite on parvenait en assurance à l'autre rive. Consultez le Livre de Josué, vous y verrez par quel prodige l'arche du Seigneur, portée sur les épaules des prêtres, ouvrit un passage à pied -<•<■ à tout le peuple d'Israël au milieu du Jourdain pour en- trer en Palestine, cette terre désirée coulaient le lait et le miel \

Ame chrétienne, il nous faudra nécessairement passer le Jourdain de la mort et du jugement ; pas moyen de lui échap- pt-r : « Nous mourons tous, et nous nous écoulons comme l'eau \ » Autrefois le Jourdain s'arrêta d'un côté comme une montagne, laissant au peuple un libre passage vers la terre promise , et de l'autre côté il s'écoulait dans la mer Morte. Hélas!

1 Super Salve. * I Rois i. -\. 3 Josue. fi. H. Josue. 3. 11. 'Il Reg. 14. IV.

Il 3

:j \ LA HÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

nous-mêmes nous nous avançons tous les jours à grands pas vers la mer Morte ; prenons avec nous la vraie arche de salut afin qu'elle nous accompagne et nous conduise pour nous protéger dans notre route semée de tant de périls, parce que le démon notre ennemi, dans la dernière lutte, déploiera toutes ses forces pour nous perdre et nous entraîner dans l'abime de l'enfer. Or, cette arche de salut et de vie, c'est la Vierge Mire : « Voilà, dit saint Bernard, l'arche dans laquelle nous éviterons le naufrage. » Combien de malheureux mortels, en- durcis comme Pharaon, n'ont point échappé au bas-fond dan- gereux et ont péri submergés dans leurs péchés. Pour nous, serviteurs de Marie, apportons auprès de nous l'arche de l'al- liance du Seigneur, et qu'elle vienne au milieu de nous pour nous préserver de tomber entre les mains de nos ennemis. 11 ne saurait périr le dévot serviteur et enfant de Marie la Vierge et Mère Douloureuse : « 11 est impossible, dit saint Anselme, que ceux dont la Vierge Marie détourne les regards de sa mi- séricorde, soient sauvés; mais il est nécessaire que ceux sur qui elle abaisse les yeux en se faisant leur avocate suppliante, soient justifiés et glorifiés \ »

5. Je suis en admiration, toutes les fois que je considère la prompte obéissance du grand patriarche Abraham à l'ordre cruel et contraire aux lois de la nature, de prendre son fils unique qu'il chérissait, et d'aller l'immoler en holocauste à Dieu sur la montagne : « S'étant levé de grand matin, il s'en alla au lieu que Dieu lui avait désigné*. » Et voilà qu'au mo- ment où il levait la main pour sacrifier son fils placé sur le bûcher, arrive un messager céleste : « N'étendez pas votre main sur l'enfant... J'omets le reste, et je viens à la bénédiction qu'il obtint en récompense de sou acte héroïque : « Parce que vous avez fait cette démarche et que vous n'avez pas épargné votre (ils unique pour m'obéir, je vous bénirai, et je multiplierai votre postérité comme les étoiles du firmament et comme le sable qui est sur le rivage de la mer. Votre postérité possédera

1 S. Anselm. cit. a S. Antonin. 4. p. tit.2.1. c. 14. * Gen. i'1. 3.

CONSIDÉRATION XI. II. 35

un jour les villes de ses ennemis ; et toutes les nations de la terre seront bénies dans Celai qui sortira de vous, parce que vous avez obéi à ma voix. » Grande et magnifique bénédiction dans laquelle les saints Pères observent que, par son obéis- sance et le sacrifice de son fils, Abraham mérita que le Messie naquit de sa race, et de ce même Isaac, pour être immolé à sa place et sur la même montagne pour les péchés de tous les hommes.

Je reviens à notre Douloureuse Mère. Elle n'est pas inférieure à Abraham parla promptitude de son obéissance; en effet, elle a offert non pas en désir, mais réellement et en vérité, son Fils unique souverainement aimé; elle l'a offert à Dieu le Père sur 'autel de la croix, au sommet delà même montagne deMoria, qui est le Calvaire, et comme un holocauste agréable pour le salut, non d'une famille ou d'une nation, mais de tout l'uni- vers. Elle a donc bien mieux mérité que, en elle, par elle, et par son fils Jésus, le fruit béni de son sein virginal, toutes les nations fussent bénies et qu'elle en devînt la Mère et la souve- raine Maîtresse, a La Bienheureuse Vierge Marie, en réparant tout par ses mérites, est la Mère et la souveraine Maîtresse. En effet, Dieu est le souverain Maître de tout en établissant tout dans sa nature propre; et Marie est la souveraine Mai- tresse en rétablissant tout dans sa dignité naturelle par la grâce qu'elle a méritée \ » C'est le raisonnement de saint Anselme sur l'excellence de la Vierge, et il est dans le vrai. 0 Mire d'amour et de douleur, « parce que vous avez fait cette chose, et n'avez pas épargné votre Fils unique pour m'obéir, je vous bénirai. » Tous les catholiques l'honorent donc avec raison comme la Mère de tous les fidèles et surtout comme la patronne puissante de ceux qui meurent en Jésus-Christ. Ecou- tez ce que lui dit le Séiaphique docteur saint Bonaventure 2 : Le jour de ma mort, ô ma Souveraine, fortifiez mon àme ; con- duisez-moi à la porte du salut et rendez mon esprit à son Créateur; que votre regard gracieux m'apparaisse à mes der-

- S. Anselm. de Excel I. Virg. c. II. In Psalt. Virg.

UG LA MÈRE D'AMOUR KT DE DOULEUR.

niers moments ; que la beauté de votre visage réjouisse mon esprit à son départ. Venez, ô Souveraine, à la rencontre de mon àme, et recevez.-la à sa sortie de ce monde; consolez-la par votre saint regard, et que l'aspect du démon ne la trouble pas. Soyez-lui une échelle pour monter au royaume des cieux et une route directe pour la mener dans le paradis de Dieu. Soutenez les fidèles devant le tribunal de Jésus-Christ, prenez leur cause entre vos mains. » Je dis de plus : 0 précieuse Souveraine, la lumière de mes yeux, et, après Dieu, l'unique espérance de mon salut, prenez sur vous ma cause, car à quoi servirait le sang de votre Fils crucifié répandu pour moi avec tant d'abondance, si je descendais dans l'éternelle cor- ruption? Ah! ma Souveraine, continuez-moi votre tendresse maternelle, malgré mon indignité ; et, vous qui avez assisté à l'agonie de votre Fils sur les bras de la croix, ne m'aban- donnez pas iiuû plus à l'heure de ma mort.

G. Plutarque { rapporte de Métellus le jeune, noble romain, qu/ll demeura fidèlement attaché à la cause d'Octavien dans la guerre contre Marc-Antoine, et exposa constamment sa vie pour la cause du César. Marc-Autorhe vaincu, et la rébellion apaisée, Octavien, selon l'antique usage, entra dans Rome en triomphateur, conduit sur un char d'or devant lequel les prin- cipaux rebelles étaient chargés de chaînes. Le jeune Métellus aperçoit au milieu d'eux son propre père les mains liées der- rière le dos et condamné à mourir le jour même pour avoir pris part à une rébellion au Capitule. Que fait alors le fds? Il fend la foule des soldats et des citoyens, et s'avance sans crainte jusqu'au César triomphant, le priant, par la tendresse qu'il lui porte et en reconnaissance des services qu'il lui a ren- dus, de lui donner ce captif : « 11 a mérité la mort parce qu'il a tiré l'épée contre vous qui êtes son maître; mais moi je suis digne de récompense, car je vous ai servi en combat- tant pour le triomphe de votre cause, contre Marc-Antoine et mon propre père. » Et Auguste, touché des prières du jeune

i Plularch. de Quinto Metelto Juniore,

CONSIDÉRATION XL1I. 37

Métellus, rendit à l'instant la liberté au père et le remit à son fils.

0 pieuse Souveraine et Mère de tontes grâces ! que fera votre serviteur aujourd'hui, sinon s'humilier, s'humilier pro- fondément devant vous? Je suis un homme digne de mort ; oui, j'ai péché, je me suis révolté contre le souverain roi Jésus- Christ votre Fils. Je le confesse, j'ai mérité et la mort et l'enfer; mais vous, ô Souveraine du monde, vous êtes digne de récom- pense, puisque vous avez toujours été avec votre Fils dans toute sa passion et an sanglant combat de la croix : « Vous n'avez pas épargné votre vie au milieu des angoisses et des tribulations de votre race, mais vous avez empêdié sa ruine en présence de notre Dieu. » Ah! tendre Souveraine, dites, je vous prie, que vous êtes ma Mère; si mes mérites ne me ren- dent pas digne d'être exaucé, les vôtres intercèdent pour moi. « Autant il est agréable, dit saint Ambroi se4, aux matelots agi- les par la tempête, égarés dans leur course, ne sachant plus ils sont ni ils vont, de voir paraître l'étoile polaire au milieu d'un ciel devenu serein; autant il nous sera consolant, dans notre dernière lutte avec Fagonie, au milieu des tentations du démon et dans l'excès de la douleur, de voir le bel astre que l'Eglise invoque en ces termes : Je vous salue, étoile de la mer, auguste Mère de Dieu. »

0 Bienheureuse! on n'a jamais entendu dire qu'aucun de eeux qui vous sont dévoués ait été délaissé. Voilà pourquoi nous nous félicitons d'avoir une telle Mère qui n'est pas moins compatissante à nos misères, que puissante et terrible contre les assauts du démon. Avec saint Bonaventure, prions donc notre aimable Mère de nous daigner assister dans notre der- nier combat dont dépend notre salut éternel. « Par tous les tourments que votre Cœur a endurés, Bienheureuse Vierge, lorsque vous avez appris la condamnation de votre Fils à la mort et au supplice de la croix, secourez-nous dans la maladie quand notre corps sera tourmenté par la douleur, et notre

1 De Nativ. Virg. Ueip.

38 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

esprit resserré par les embûches du démon et les terreurs du jugement. Aidez-nous, ô notre Souveraine, en ce moment solennel, afin que la sentence de condamnation ne soit pas prononcée contre nous \ »

1 S. Bonav. tom. 6. in oftic. ad Dolor. Virg.,

CONSIDÉRATION LXIl'I.

Arec quoi chagrin la Douloureuse Mère vit son Fils expirer en croix.

MOItlIYTI* «•iiiillh IMBIM.

Elle rit son Fils mourir et rendre l'esprit sans çticune conso- lation. (L'Eglise dans l'hymne des Sept-Douleurs.)

I . L'an de Jésus-Christ dix-sept cent six, le douze du mois de mai, à l'heure de midi, nous avons vu en Europe une grande éclipse. Le ciel étant serein, le soleil, qui est l'œil du monde, fut couvert tout à coup par la lune comme d'un noir bouclier. A cette éclipse inattendue, le jour fut changé en nuit, et hommes et animaux demeuraient étonnés. Mais ce n'était rien •mi comparaison de cette prodigieuse éclipse qui eut lieu à la mort du Créateur et à la vue de laquelle' on dit que Denis l'aréopagite étant ;i Béliopolis en Egyptc; s'écria : « Ou bien le Dieu de la nature souffre, ou bien la machine du momie tombe en dissolution. Michel Syngèle'assure, dans Corneille de la Pierre ', que Denis aurait dit : « Le Dieu inconnu souf- fre, et c'est pour cela que les ténèbres couvrent tout. » Ce formidable phénomène avait été prédit par le prophète Amos :

Et voici ce qui arrivera un jour, dit le Seigneur Dieu : le soleil sera obscurci en plein midi, et je ferai que la terre sera dans 1rs ténèbres dans le moment doit luire la lu- mière '. »

L'éclipsé de soleil a lieu régulièrement quand la lune se trouve entre le soleil et nous, et plonge notre hémisphère dans

rnel. m Matth, 27. i-'i. 5 Amos. 8. 9.

40 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

l'ombre; et l'éclipsé de lune, quand la terre est interposée entre cet astre et le soleil et qu'elle empêche, par son ombre, le soleil de projeter sa lumière sur la lune, et la laisse dans l'obscurité. Un académicien a donné cette devise à la lune éclipsée :

Ombre d'un autre.

Ame chrétienne, passons de la figure à la chose figurée. Le soleil se couchant à midi, est Jésus-Christ souffrant en croix à l'heure de sexte, et mourant à l'heure de none, qui correspond à trois heures; et la lune interposée désigne la Douloureuse More se tenant devant la croix, non pas de côte comme on la représente, mais en face de son Fils expirant. Ah! quelle Mère! et qui pourrait imaginer, qui pourrait com- prendre tous les tourments qu'alors elle endura? « Se rappeler comment cette sainte àme souffrit glorieusement, et toutes les angoisses qu'elle ressentit à la mort de Jésus-Christ, s'é- crie le bienheureux Amédée ', est^un souvenir vénérable, plein de douleur et de larmes. Le visage pale de Jésus rendait pâle le visage de sa Mère; il souffrait dans sa chair, elle dans sou cœur. Enfin les affronts, les outrages des impies retom- baient sur sa tète maternelle. La mort du Seigneur fut pour elle plus amère que la mort. » Elle était vraiment : L'ombre de l'astre éclipsé.

« Je contemplais, moi infortunée, dit-elle à saint Ber- nard *, mon Dieu et mon Fils attaché à la croix et mourant d'une mort honteuse; et j'étais pressée d'une si grande tris- tesse en mon àme, que le langage ne saurait l'expliquer. » C'est que v les blessures de Jésus étaient les blessures de sa Mère ; les douleurs envahissaient son àme comme un torrent impétueux. » fut réalisée la parole de Joël : « Le soleil se changera en ténèbres, et la lune en sang 3. » Le soleil de jus-

1 Amadeus Lausan. homil. b. de Virg. Deip. S. Hern. in Lament. Virg. » Joël. 2. 31.

nVMl.l.UAIlu.N \|. m. 41

tice, qui est Jésus-Christ notre Dieu, fut ehangé en ténèbres ; et la lune, qui est Marie, en sang par la compassion; comme l'atteste saint Germain, elle répandit des larmes de sang dans l'intensité excessive de sa douleur. Hélas! qu'il est peu de chrétiens compatissant avec la très-sainte Mère aux souffran- ces de Jésus crucifié! « Pourquoi, dit saint Donaventure ' , ètes-vous plus sensible à une piqûre de votre pied, qu'à la mort de votre Seigneur? » Aimez-vous donc plus votre pied que le Seigneur votre Dieu mort sur une croix pour votre amour? L'Ecriture nous apprend qu'à la mort de Saûl qui lui était annoncée par un Amalécite, « David saisit ses vêtements et les déchira, et tous les hommes qu'il avait avee lui, furent désolés, pleurèrent et jeùuèrent jusqu'au soir à cause de la mort de Saùl et de Jouathas. » Combien de larmes, o mon âme, avez-vous versées sur la mort de votre Seigneur cru- cifié? Si dans votre cœur insensible et plus dur qu'un rocher, vous ne le jugez pas digne même d'une petite larme, pour- quoi au moins ne pleurez-vous pas vos péchés sans nombre par lesquels vous avez si souvent offensé votre Dieu et mérité l'enfer? Quoi! pas un gémissement? pas un signe de douleur? 0 monstruosité de la nature !

2. Les divines Ecritures nous racontent de Gédéon qu'avec trois cents hommes d'élite il attaqua, au milieu de la nuit, les Madianites qui étaient fort nombreux, et que ses soldats son- nant de la trompette, heurtant leurs pots de terre l'un contre l'autre et tenant leurs lampes de la main gauche, il mit un tel désordre dans le camp des ennemis que ceux-ci se tuaient mutuellement et il en périt cent vingt mille 2.

Suivant saint Augustin et d'autres, Gédéon était une figure du Rédempteur, qui, par sa croix, a vaincu le démon, dompté la mort, renversé la Synagogue, détruit les idoles, et bâti l'Eglise. Le son des trompettes nous représente sa parole di- vine, car il rendit l'esprit après avoir poussé un grand cri, parce qu'il était le Verbe et pour attirer l'attention de tous les

i Stim. div. amor. p. i. c. 2. ' Juges. '■ 10.

't2 LA MfcKE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

mortels par cette clameur puissante. Les pots de terre fragiles et brisés nous indiquent son humanité, la chair qu'il avait prise par l'opération du Saint-Esprit dans le sein de la Vierge et qui fut brisée par la mort au sommet du Calvaire. Et les lampes ardentes el brillantes sont l'immense charité du saint Cœur de Jésus. «Jésus-Christ, dit le docteur des nations, nous a aimés et s'est livré pour nous à Dieu, comme une oblation et une victime d'agréable odeur '. » Ecoutons Corneille de la Pierre : « Ce vase d'argile, qui contient en dedans la splen- deur de la lampe ardente, est un parfait symbole de l'Emma- nuel renfermant la Divinité cachée dans une chair mortelle; dès que la chair fut brisée parla Passion, la Divinité brilla de tout son éclat au jour de la résurrection : et le soleil ayant été obs- curci par sa mort, les forces de Madian, c'est-à-dire du démon et de l'enfer, furent brisées quand la terre trembla et que les pierres se fendirent 2. »

M spectacle rempli d'horreur! Dieu notre Sauveur dans la plus grande infamie, dans l'excès des douleurs, manquant absolument de tout, trois heures sur un gibet ignominieux entre les deux larrons, couvert de sang el de blessures, et lan- guissant jusqu'à la mort. Ah ! dans quel abîme de misères et de souffrances est descendu pour mon amour le Eils du Très- Haut, quand son humanité, dans la passion, a été mise en pièces comme un vase d'argile! Et vous voyez ces choses de vos yeux, ô Vierge affligée! Si les entrailles de la terre ont tremblé, si les rochers se sont fendus, par quel excès de tris- tesse fut agitée votre Ame? Comment vous fut-il possible de voir le Fils immortel de Dieu le Père, votre Fils Jésus luttant avec la mort au sommet d'une croix! Sur les trois heures, Jésus dit à haute voix : O Dieu, Dion Dieu, pourquoi ffl'avez-vous abandonné? cri plus perçant, pour le Cœur de la Mère, qu'un glaive à deux tranchants, et qui atteignit jusqu'à la division de son âme. Voici comment la Vierge affligée en parlait à sainte Brigitte : « Lorsque mon Fils eut dit : Dieu, ô mon Dieu,

1 Ephes. :;. 2. 2 Corneli. in Isa. c. 9. v. i.

CONSIDÉRATION Xl.lll. '«3

pourquoi m'avez-vous délaissé? je ne pus jamais oublier, jusqu'à mon entrée dans le ciel, ce cri que lui avait arraché moins ses douleurs que sa compassion pour moi . »

3. Les yeux de Jésus agonisant étaient obscurcis, à demi ••teints et pleins de sang-; et cependant il essayait de les ouvrir encore pour regarder sa Mère tant aimée. Sa bouche était ou- verte et saignante, son visage livide et sanglant, ses cheveux arrachés, ses dents brisées, ses joues pâles, sa langue eu sang et irritée par l'amertume du fiel, ses mains et ses pieds percés de gros clous et tendus avec violence, ses cotés et son dos dé- chirés par la flagellation, ses épaules affaissées et blessées d'une horrible plaie produite par le portement de la croix, le ventre retiré et présentant une cavité profonde comme s'il n'avait plus ses entrailles. En un mot, rien de sain dans son corps tout plaies, tout meurtrissures. Enfin, en voyant la mort arriver, afin de consoler encore sa Mère bien-aimée nageant dans un océan de douleurs, il dit : tout est consommé. Voici sur ce sujet la pensée du savant Mallonius : « Jésus donc, voulant donner une consolation à sa Mère, lui indiqua que la fin des supplices était venue, en disant : Tout est consommé.

Triste consolation ! si toutefois la Mère d'amour et de dou- leur put en avoir d'autre que l'espérance de notre rédemption, à la mort si cruelle de son Fils. David pleurant la mort d'Abner, reçut quelques consolations : a Le roi fondant en larmes pour témoigner son deuil, dit ces paroles : Abner n'est point mort

■"iumeles lâches. Vos mains n'ont point été liées, et vos pieds n'ont point été chargés de fers ; mais vous êtes mort comme les hommes de conir qui tombent devant les enfants de l'ini- quité. Et tout le monde à ces mots redoubla ses larmes. » Ame

lin-tienne, qui pourrait retenir les siennes, en considérant la Mère du Sauveur dans un si grand supplice? Affligée entre toutes les mères, elle n'eut pas la consolation de David à la mort d'Abner. Elle vit les mains et les pieds de son Fils percés de clous; elle vil sou Cœur percé d'une lance. 0 chrétien, si

1 Livre \. chapitre 70.

\\ LA MÈRE DAMODB ET DE DOLLELH.

vous avez quelque sentiment de piété, comment ne point com- patir de toute l'étendue de votre cœur à votre sainte Mère? si l'Apôtre a dit : Pleurez avec ceux qui pleurent, sont, âme pécheresse, vos larmes de compassion ? sont vos sentiments de commisération? Et pourquoi ne dites-vous pas avec le pro- phète Jérémie : « Répandez des larmes jour et nuit comme un torrent ; n'ayez aucun repos, et que votre paupière ne se ferme pas. »

4. Lorsque Abia, le premier-né de Jéroboam, était atteint d'une maladie mortelle, la reine sa mère, après avoir changé d'habits pour ne pas être reconnue, se rendit à Silo en la maison du prophète Ahias, afin de le consulter sur ce qui devait arriver à l'enfant. Or, le prophète répondit à la reine contre son at- tente : J'ai été envoyé pour vous annoncer une mauvaise nou- velle... Allez-vous-en donc, et retournez en votre maison ; et au même temps que vous mettrez le pied dans la ville, l'enfant mourra, et tout Israël le pleurera et l'ensevelira, etc. Ce fut assurément une grande douleur pour la reine, d'apprendre que son fils unique, le seul héritier du royaume, devait être en- levé par une mort prématurée. Cependant elle pouvait avoir au milieu de son chagrin, une certaine consolation dans cette parole du prophète : Tout Israël le pleurera et l'ensevelira. Au- cune consolation semblable pour notre Douloureuse Mère à la mort de son Fils unique. Bien au contraire, les Juifs impies entourant le (iolgotha insultaient à la fois et le Fils et la Mère. « Ils se tournèrent insolemment vers Marie, dit le savant Né- bride, lui reprochant par des injures et des moqueries la mort ignominieuse de son Fils; et, comme elle ne leur opposait que la patience et le silence, devenant furieux envers elle, ils l'eussent foulée aux pieds ou égorgée devant la croix, elle était presque expirante, si une sorte de pudeur ou plutôt la vo- lonté de Dieu ne les en eût empêchés 1 .

Considère, ô mon àme, l'immense affliction de la Vierge Mère qui voit mourir sous ses yeux son Fils et un tel Fils.

: Nebrid. ia fasc. imrr. c. 20.

I 0NS1DÉRATIÔN XLIII. IS

Souveraine du monde! comment avez-vous pu voir un pareil spectacle et n'en pas mourir? Si la mère de saint Calliope, ce jeune martyr qui fut crucifié la tète en bas, le vendredi saint, pour la défense de la foi, expira subitement en embrassant ce Fils chéri ; comment avez-vous pu rester en vie devant la croix de votre Fils? Que vous fûtes plus courageuse que Joab, le géné- ral en chef des armées de David, dont il est raconté au Livre des Rois qu'étant poursuivi pour être mis à mort, il se réfugia dans le tabernacle du Seigneur, et, saisissant le coin de l'autel, il résolut d'y mourir; sommé de sortir de ce lieu, il répondit généreusement : « Je ne sortirai pas, mais je mourrai ici. » Tendre Mère, c'était votre pensée de ne pas vous retirer de la croix de votre Fils, quand mille dangers vous accableraient : « Je ne sortirai pas, mais je mourrai ici. » Que si elle y con- serva la vie, un Ange en apprit la raison à sainte Brigitte : « Ce fut un grand miracle de la puissance de Dieu, que la Bienheureuse Vierge si cruellement blessée dans son cœur, n'ait pas exhalé son dernier soupir. » Que d'obligations nous vous avons, ù Mère Douloureuse, à cause de cet excès d'amour avec lequel vous avez offert la vie de votre Fils pour notre salut! Vous avez prévenu notre ruine en présence de notice Dieu, tantôt à genoux, tantôt debout, tantôt les yeux au ciel et pré- sentant votre aimable Fils à Dieu le Père en agréable holo- causte. 0 Souveraine, qui est-ce qui ne vous aime pas? S'il en est un, qu'il soit anathème !

5. Samson, le plus fort des hommes, célèbre par plusieurs faits prodigieux, et qui fut fait captif et privé de la vue, vou- lant acquérir la liberté à son peuple par sa mort, pria Dieu, au milieu de ses ennemis, de daigner lui rendre sa première force. Il la recouvra et en fit usage pour secouer violemment les deux colonnes d'un temple; il s'écria : Que je meure avec les Philistins ! et périt succombant sous sa victoire : « Il en tua plus en mourant que dans sa vie. » Samson fut une figure de Jésus-Christ qui ayant les deux mains étendues sur la croix I criant à haute voix : « Mon l'ère, je remets mon âme entre vos mains, n ('-branla et renversa tout l'édifice de l'infernal

46 i.a mère d'amour et de douleur.

Dagon avec le péché et l'enfer, et nous délivra miséricordieu- sement de leur servitude. Ecoutons encore les paroles de la Douloureuse Mère à sainte Brigitte : « Mon Fils cria vers son Père : 0 Père, je remets mon âme en vos mains. A cette voix, pauvre Mère affligée! tous mes membres tremblèrent en même temps que mon cœur éprouvait une amère tristesse; et depuis, chaque fois que j'y pensai, il me sembla entendre la même voix frapper mes oreilles. »

Pécheurs, écoutez-moi; le Sauveur mourant a aussi crié pour vous : « Jésus ayant de nouveau poussé un grand cri, rendit son àmc. » Il vous a crié, orgueilleux : de quoi vous glorifiez-vous, terre et cendre? Il s'est humilié jusqu'à la mort de la croix, se mettant au-dessous des larrons et des hommes les plus criminels ; pourquoi donc vous élevez-vous, ver de terre ? Il a crié pour vous, avare sordide, en vous mon- trant ses mains ouvertes et percées pour vous apprendre à ouvrir les vôtres aux pauvres : « Il est devenu indigent à cause de vous quand il était riche, afin de vous enrichir de sa pauvreté. » Amis des plaisirs_des sens, il a crié pour vous : Regardez et voyez s'il est une douleur semblable à sa douleur et à celle de sa Mère. « Reconnaissez, pécheurs, combien sont graves les blessures de votre àme, puisque, pour elles, il a été nécessaire que Jésus-Christ souffrit de telles blessures et mourut en crois. » Ame sensuelle, vos coupables plaisirs ont fait au Seigneur Jésus plus de cinq mille plaies, et vous trou- vez bon d'acheter encore à ce prix une honteuse volupté d'un moment? Il a crié pour vous, envieux et homme de sang, qui nourrissez la vengeance, afin que vous pardonniez à votre prochain de tout votre cœur l'injure qu'il vous a faite : O mon Père, pardonnez-leur. Le disciple est-il au-dessus du maître et l'esclave plus que son seigneur? Si vous voulezle pardon de vos péchés, pardonnez. Il a crié pour vous, gourmands et ivrognes ; voilà votre Dieu, Jésus-Christ, mourant, épuisé d'une soif ardente causée par l'abondance du sang qu'il a perdu, et n'ayant pour se soulager dans son immense amer- tume, que le fiel et le vinaigre : « Ils m'ont abreuvé de vi-

ONSIDÉB \llo\ Xl.lll. '»"

naigre dans ma soif. » Et vous passez les jours les plus saints à manger, à boire à L'excès, à vous livrer au monde et à la chair. Vous vous trompe/. : « Le royaume de Dieu ne consiste pas dans le boire et le manger. » 11 a crié pour vous, homme irascible qui, ne pouvant contenir votre colère, vous laissez aller aux blasphèmes. Voici le doux agneau qui n'ouvre pas la bouche devant celui qui le tond, ou plutôt qui l'égorgé; et vous, insensé, vous élevez la voix contre le ciel. Quel mal vous a donc l'ait le Sauveur crucifié, que vous le crucifiez de nouveau , suivant la parole de saint Paul : « Ils crucifient de nouveau en eux-mêmes le Fils de Dieu, et l'exposent encore à L'ignominie. » 11 a crié pour vous, homme paresseux et in- dolent; voilà que Dieu votre Rédempteur a travaille pour votre salut jusqu'au sang et à la mort, et que la tempête l'a fait <Irs- cendre <l>nt* les profondeurs de la mer; et vous, pour obtenir la vie éternelle, vous ne voulez pas faire un pas? 0 lâcheté! Il a crié pour vous, ingrat; et qu'a-t-il crié? v. Le. juste suc- combe t et il //'est personne qui s'en occupe. » (jue notre ingrati- tude est noire ! Les médecins disent : quand la tète soutire, les membres s'en ressentent. Si Jésus-Christ crucifié est notre tète, et nous ses membres indignes, pourquoi ne souffrons- nous pas avec lui? Pourquoi lui procurons-nous douleur sur douleur? Pour vous il a crié, homme délicat, pour que vous portiez continuellement la mortification de sa croix dans votre corps et dans votre cœur; que fut toute la vie de Jésus-Christ et de Marie sa sainte Mère, sinon une croix et un martyre? u soldat efféminé! quelle voie du ciel vous tracera votre Dieu! S'il a fallu que le Christ souffrit et entrât ainsi dans sa gloire, comment irez-vous au ciel? « Ceux qui sont à Jésus-Christ, ont crucifie leur chair avec ses passions et ses désirs déréglés. Voyez maintenant si vous êtes à Jésus-Christ, ou au démon. Enfin il a crié pour vous tous, hommes de l'univers entier, et avec un grand cri, a avec une clameur forte et des larmes. » A quoi saint Drogon, évèque d'Ostie, ajoute : « Il nous crie de sa croix : 0 vous tous qui passez par le chemin, regardez et voyez s'il est une douleur comparable à /" mienne; et il n'y a

48 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

personne qui réponde. » A son cri il a joint ses larmes : « Jésus-Christ a pleuré sur la croix, dit saint Bernard, parce que sa passion, qui suffirait à la rédemption de tous les hommes, ne profite qu'à la rédemption d'un petit nombre. » 0 tendre Vierge, vraie Mère d'amour et de douleur! placez-nous avec vous près de la croix, nous enfants de votre douleur, hélas ! bien indignes, pour que nous y apprenions enfin ce qu'est Jésus crucifié. « Ma plus sublime philosophie, s'écrie saint Bernard, est de savoir Jésus, Jésus crucifié. » Cher lec- teur, est-ce aussi la vôtre?

0. Et inclinant la tète, il rendit V esprit. Dans l'ancienne loi, quand une innocente colombe était offerte par les pauvres en holocauste à Dieu, on lui tournait avec violence la tète en arrière sur le cou, et puis il lui était fait une ouverture et une plaie par laquelle on faisait couler le sang sur le bord de l'autel. L'autel est la croix, et la colombe est Jésus- Christ inclinant la tète et s'offrant par sa mort, en holo- causte à son Père pour nos péchés. 11 a voulu rendre l'esprit, la tète inclinée, dit saint Yincerrt Ferrier, comme pour dire adieu à sa Mère. Et le d^vot Lansperge : « Il pencha la tète vers sa Mère comme pour dire une dernière fois : Je vous salue, adieu ! Ainsi, par ce signe, dans ses dernières angoisses et la multitude de ses douleurs, il indiquait qu'il recommandait à sa Mère son corps blessé, déchiré et cruellement mis en lam- beaux. » 0 pieux lecteur, comment expirerez-vous un jour? En état de grâce ? sous la tutelle de la Mère Douloureuse ? A l'ombre de Jésus crucifié? 0b! que vous êtes heureux si dès maintenant vous songez à la grande affaire de votre salut.

CONSIDERATION XLIV.

Compassion et amour de la Douloureuse Mère contemplant Bon Fils

mort sur la Croix.

DESIXIT IV LACBYHAS.

Jr vous aimais comme une mère aime son fils unique. (II Rois. 1. 26.)

1. Souvent, dans la Sainte Ecriture, le Rédempteur du monde est comparé au soleil, le roi des astres. Il est nommé soleil s'élevant sur l'horizon ; soleil de justice, portant le salul sous ses ailes; soleil qui connaît son couchant; soleil de l'in- telligence : « Xous nous sommes égarés loin des voies de la vérité et de la justice ; la lumière n'a pas lui pour nous, et le soleil d'intelligence ne s'est pas levé pour nous4. » Il est encore le soleil rétrogradant de dix degrés sur le cadran d'Achaz; le soleil se couchant en plein midi : « En ce jour-là, dit le Seigneur Dieu, le soleil se couchera en son midi, cl je couvrirai la terre de ténéhres lorsqu'elle devrait être pleine de lumière. » Quand le soleil est caché derrière une nuée chargée d'eau et épaisse, la réverhération de ses rayons produit l'arc- en-ciel, qui bientôt se tourne en pluie; aussi peut-on appliquer à l'iris cette devise :

// se résout en /armes.

Le soleil est Jésus expirant sur la croix; et l'arc-en-ciel,

1 Isa. :i8. 8.

II. 4

•v)0 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

d'après le séraphique Bonaventure, est la Douloureuse Mère qu'il appelle l'arc de la divine alliance de la réconciliation. Son soleil mystique étant voilé en croix, l'iris mystique se tourna en larmes. « Marie se tenait debout, dit saint Laurent Justinien, les genoux tremblants, la voix altérée, pleurant amèrement. » C'est pourquoi l'époux dit à son épouse : « Vos yeux sont comme la fontaine d'Hésébon, » dont les eaux coulent en silence et sans bruit. Oui, les larmes de la Douloureuse Mère, à la mort de son Fils, arrosèrent la montagne du Cal- vaire, non avec des gémissements et des cris comme il arrive aux femmes dans un grand deuil, mais avec calme et en si- lence, et néanmoins avec un cœur bien triste. Voici comment le pieux et savant abbé Arnold s'entretient avec Jésus-Christ son amour crucifié ' : « Votre Mère bénie entre les femmes, vous regarde, Seigneur, et, les yeux fixés sur vous, elle con- sidère vos blessures avec une piété maternelle : elle sait tout le bien que procure au monde votre Passion, et pourtant elle meurt avec vous dans sa tendresse de Mère, et son Cœur est pressé par l'immensité de son^chagrin. Elle soupire intérieure- ment et retient ses larmes; et plus elle les empêche de sortir, plus s'augmente son anxiété. Les gémissements parfois veu- lent éclater; elle les réprime dans son sein ils se combat- tent. Dans son àme était une forte tempête produite par la rencontre des orages qui fondaient sur elle ; ses amertumes concentrées étaient comme de la moelle en ébullition dans une chaudière. La crainte imposait silence à la douleur, et les regards menaçants des Juifs suffoquaient ses agitations ; mais elle n'en avalait pas moins l'amertume de cet Océan de douleur, et, chose lapins pénible, elle se mourait et ne pou- vait mourir. Renfermant au dedans d'elle-même l'excès de sa souffrance, elle prenait un autre air à l'extérieur, et son visage ne laissait pas voir la croix intérieure, le gibet sur lequel elle était clouée comme une hostie vivante et agréable à Dieu, comme une victime engraissée pour le sacrifice. Elle-même y

1 Arnold, alili. tract, i. de verb. Doni.

S1DÉH \ I lii.N XLIV. •"' I

mettail le feu par le ministère de sa conscience ; elle-même s'immolail sans I nui f mit cet autel intérieur, elle entretenail le bois, les flammes ei les parfums. Vous eussiez vu deux au- tels, l'un dans le cœur de Marie, L'autre dans le corps de Jésus; Jésus immolait sa chair. Mario son âme. » Telles sont les paroles de l'abbé Arnold.

De là. pieux lecteur, tirez quelques réflexions pour votre utilité. N'avez-vous pas, dites-le-moi, créé la douleur de Marie par vos péchés? Les douleurs de la Mère et du Fils ne leur sont -elles pas communes? Virgile, un jour, écrivit sur la porto de l'amphithéâtre à Home : « César partage l'empire avec le maître du ciel. » De même, Jésus a partagé sa passion avec sa Mère. 11 a souffert pour nos péchés : Propter scehts populi met percussi eum; sa Mère aussi a souffert pour nos péchés qui Vont plus tourmentée que les plaies do son Fils. 0 douce Mère, je reconnais ma faute : j'ai mérité la mort, la condamnation, l'enfer, la damnation éternelle; je me ropens de tout mon cœur; puissé-je éprouver une aussi grande douleur d'avoir offensé Dieu, que celle que ressentit votre Cœur en voyant votre Fils souffrir et mourir sur la croix. Venez à mon secours, o ma

Mère.

■2. Saint Grégoire 1«' Grand, pape et docteur de L'Eglise, con- sidérant un jour les abondantes larmes dont Madeleine péni- tente arrosait les pieds sacrés (\u Rédempteur, se mit à pleurer lui-même abondamment, ému par un tel exemple. Entendons- le : « Lorsque je pense aux larmes de Marie-Madeleine, j'ai plus envie de pleurer que de parler; quel cœur est assez dur et insensible pour n'être pas ému et excité au repentir par les larmes de cette pécheresse convertie * ? » 0 très-sainl pape, qu'auriez-vous dit si vous eussiez, vu l'affligée Mère du Sau- veur pleurant sur le sommet du (lolgotha la passion et la mort de son Fils avec des larmes amères, des Larmes de sang; qu'auriez-vous dit et pensé? Si les rochers onl témoigné leur douleur, si toute créaf ni e a gémi, que penser de la di\ ine Mère?

i S. Greg. M. homil. :t:t. in Evang.

5:2 LA MÈRE AMOUR ET DE DOULEUR.

Ne saurait-on pas dire à plus juste titre que ce pontife : « Quand je songe aux larmes de Marie la Mère Douloureuse, j'ai plus envie de pleurer que de parler; quel cœur serait assez insen- sible pour ne pas être excité à la pénitence par les larmes de cette Vierge affligée? » Ah ! vous avez vraiment un cœur plus dur que la pierre et le fer, si la piété de la sainte Mère envers Jésus mort en croix ne vous porte pas à la commisération, à rendre amour pour amour et à faire une sérieuse pénitence.

3. Quand Jules-César eut été frappé en plein sénat de vingt- trois blessures mortelles par Bratus et d'autres sénateurs, Marc- Antoine, s'adressant au peuple, lui montra le manteau impé- rial ensanglanté, et tous, émus de compassion, non-seulemrut versèrent des larmes, mais d'une commune voix s'écrièrent : « Qu'on tire une juste vengeance de Brutus et des autres par- ricides. »

Chrétiens, la Mère affligée ne vous présente pas la robe, le manteau de son bien-aimé Fils, teints de son propre sang, mais son corps privé de la vie, couvert de plaies nombreuses; debout au pied de la croix, ctte vous le montre en vous disant, au milieu de ses larmes : Voilà Celui que vous avez mis à mort. Que vous a faitmon Fils, àmes ingrates, que vous le conduisiez de nouveau à la mort par vos péchés? Telle est donc votre reconnaissance pour ses bienfaits : le crucifier encore et l'ex- poser à de nouvelles ignominies? Rentrez enfin en vous-mêmes, prévaricateurs, car ni mon Fils ni moi ne voulons la vengeance, mais la miséricorde: Mon Père } pardonnez-leur. Mère fidèle, le sang de votre Fils crie plus fortement vers le ciel que celui d'Abel immolé par Gain. 0 Souveraine! qui vous estimera, vous aimera, vous honorera autant que vous en êtes digne, vous qui n'avez pas hésité, devant la croix même, d'intercéder auprès du Père pour les meurtriers de votre Fils? Quel prodige de charité! Voici comment s'exprime Richard de Saint-Laurent : « Que personne ne me dise que les Juifs étaient odieux à la divine Mère parce qu'ils avaient condamné son Fils à une hon- teuse mort; les voyant se précipiter à la mort éternelle, elle ne les jugea point dignes de sa haine, mais de ses larmes et

I ONSIDÏ i; kîTON KLIV. 33

d'une grande pitié; et, participant à la charité de Jésus-Christ non moins qu'à sa croix, elle se mil à prier pour eux d'un cœur parfait: OPère, pardonnez-leur cette faute, ils ne savent ce qu'Us font. Vous qui aime/, la Mère du Seigneur, remarquez et considérez affectueusement combien elle se lamentait sur le Iriste sort des ennemis de son Fils expirant.

i. Il me vient en mémoire nu fait arrivé en Hongrie Tan I S i_\ quand une immense armée de Turcs dévastait ce royaume et par le fer et par le feu. Parmi les princes allemands réunis pour combattre les Turcs, se trouvait Maurice, duc sérénissime de Saxe, aveeses troupes. Ce prince, jeune, doue d'un beau ca- ractère et d'un grand courage, ('coûtant un jour trop son ar- deur, sortit du camp, s'avança seul, avec son écuyer, du côté des Turcs et fut surpris par un de leurs détachements. 11 fit des prodiges de valeur auxquels ne répondit pas le succès, car, ayant eu son cheval tué sous lui, il fut précipité à terre. <Jue fait alors son écuyer fidèle? À travers les sabres étince- lants, il pénètre jusqu'à son maître, se couche sur lui pour le protéger de son corps et reçoit tous les coups dirigés contrôle prince. Pendant qu'il le préserve ainsi de la mort, arrivent du camp impérial des chevaliers chrétiens qui mettent l'ennemi en fuite, sauvent le duc de Saxe et emportent l'écuyer, prodige de fidélité, criblé de blessures, dans leur camp où, épuise de Bang et de forces, il expire bientôt après, au grand regret de tous.

Rare exemple de fidélité sincère, que le serviteur n'ait pas craint de subir une mort cruelle à la place de son maître. Mais que le Maître de toutes choses ait daigné, pour un serviteur inutile, souffrir mille indignités et mourir sur une croix, c'est une chose inouïe. Dieu sans doute pouvait, de mille au lies manières, préserver de la mort l'homme déchu : un soupir, une larme, une goutte de sang était assez. Mais ce moyen ne plut pas au divin amour qui est immense ; il voulut se donner lui-même toul entier pour nous avec tout son sang el sa vie. 0 amour, combien vous nous ave/ aimés! amour! amour! prodige d'amour :

;, 'i LA MÈRE AM01 B ET DE DOl LEI R.

Et vous, ô Vierge triste, quels sentiments étaient dans votre Cœur, Lorsque vous aviez sous vos yeux, votre Fils, votre amour percé de milliers de blessures et mort sur un gibet pour de si indignes vers de terre? Julie, épouse de Pompée, lors- qu'elle eut appris que son mari avait été égorgé paF l'ennemi; et qu'elle vil ses vêtements couver! s de son sang, tomba à terre el expira. 0 Vierge affligée! que vous n'ayez pas expiré de douleur au pied de la croix en ce mémorable vendredi, ce l'ut par un miracle. Combien de fois ce cri de votre Cœur dut monter vers le ciel : 0 mou Père, puisque c'est votre hou plaisir, que votre sainte volonté soit faite; mais voyez, Sei- gneur, si ce n'est pas la tunique (la sainte humanité) de votre Fils? Si c'est bien votre Fils et le mien qui est là, mort, cou- vert de plaies et attaché sur la croix? Hélas! comment est tombé cet homme puissant qui sauvait le peuple d'Israël! Père éternel ! pourquoi êtes-vous bon envers les pécheurs, cruel et sans pitié pour votre propre Fils? Vous savez combien les flots amers de la tristesse ont troublé mon cœur jusqu'à ce jour, et que j'ai ressenti dans mon àme toutes 1rs blessures que votre bien-aimé Fils a reçues dans son corps; cependant que votre saint nom soit béni dans toutes ces choses, car il me suffit que ce soit votre volonté et que tout soit ordonné par votre providence. Ainsi donc, quoique la plus affligée de toutes vos créatures, je vous rends d'infinies actions de gi. pour les peines et les tourments que j'endure; je ne vous demande qu'une seule chose, pauvre veuve privée de mon Fils, c'est qu'après lui avoir été toujours unie pendant sa vie nous ne soyons pas séparés maintenant dans la mort.

Ainsi sans doute, ou à peu près, pensait le Cœur affligé de la Vierge. Et vous, pieux lecteur, que dites-vous? Entend.'/. ledévol Louis de Grenade: « On trouve deux personnes qui ont été particulièrement aimées de Dieu dans ce monde : Jésus- Christ, H -Marie sa Mère; tous les deux surpassent en vertu toutes les enatures. el tous les deux les ont aussi surpassées par le nombre et la grandeur des afflictions et par leur patience. Il n'y eut point ;m inonde de personnages plus excellents qu'eux

CONSIDÉRATION XI. IV. .'i.'i

deux, et l'on n'en rencontre point de pins affligés, de plus .niables de tourments. » Ames désolées et éprouvées par l'af- fliction, consolez-vous dans vos misères et vos malheurs, con- solez-vous ; Jésus-Christ a souffert dans sa chair, cl Marie dans si. n âme. Armez-vous de la même pensée, car il n'est rien de si pénible qu'on ne souffre avec modération en rappelant à sa mémoire les souffrances de Jésus et de sa sainte Mère.

5. A l'appui de cette vérité, voyons ce qui advint à Jean Péchame de l'ordre de Saint-François. Bien qu'innocent, il fut accusé par des envieux, devant saint Bonavcnture, général de l'ordre, d'une chose grave, et sévèrement puni par ses supé- rieurs. Troublé de cette injustice, il alla se prosterner devant le crucifix et l'image de la sainte Mère Douloureuse : « Sei- gneur, àisait-il, jusqu'à quand souffrir ai- je injustement? Qu'ai-je mérité? » Qu'attendez-vous, bon lecteur? Ecoutez la divine réponse : Et moi, Péchame, qu'ai-je fait de mal pour être crucifié rntre deux larrons? Et ma Mère, qui a partagé tontes mes souffrances? Me vous troublez donc point, si vous n'obtenez pas de suite ce que vous demandez à Dieu. A ces paroles du Sauveur, le religieux pleura, abandonna tout de bon cœur à la divine Providence, et trouva le remède à sa peine.

Dans les Fleurs séraphiques \ on voit que le vénérable P. Joseph de Léonisse, religieux capucin, endurait avec une grande patience, et sans jamais proférer un seul mot de plainte, toutes les contradictions pour l'amour de Jésus crucifié et de ^i Mère Douloureuse. Un jour qu'on devait lui couper un can- cer et qu'il s'agissait de le lier pour favoriser l'opération du chirurgien, saisissant avec joie son crucifix : Ai-je besoin d'autres liens? dit-il; voilà mes liens : Jésus me serrera plus fortement dans les liens de sa charité, que des chaînes de fer. Et il subit tranquillement l'amputation, en adressant souvent à la Mère Douloureuse pour laquelle il avait une grande dévotion, ces paroles : « Sainte Marie, secourez les malheureux, soute- nez les faibles. »

4 Flores seraph. tom. 2. p. :fn-_!

oG LA HÈRE d'AMOI R ET DE DOl LE1 R.

En Italie, le fils unique d'une noble veuve avait été assas- siné 1 ; le corps fut porté chez la mère, et le P. Joseph de Léo- nisse appelé pour la consoler. Hélas! il essaya en vain, elle n'écoutait aucune consolation : elle pleurait la mort de son fils, et le religieux pleurait avec elle. Enfin, saisissant l'occa- sion, il tire son crucifix, et parle à la mère en ces termes : « Si nous avons versé tant de larmes sur votre fils unique, n'est-il pas juste, madame, que nous en répandions, sinon davantage, du moins autant, sur le Fils unique de Dieu et de la Vierge Marie, qui fut cruellement mis à mort par les Juifs, lui l'aimable et doux Rédempteur de nos âmes, qui a donné pour nous son sang et sa vie. » Il dit; et par l'exemple de la Mire Douloureuse qui aimait les bourreaux de son Fils, il disposa cette veuve à pardonner aussi à ses ennemis. Com- bien ce bon office fut agréable à la sainte Yierge, on le voit par le don de guérison des malades, par plusieurs miracles qu'obtint de son Fils ce serviteur fidèle, ainsi que le zèle pour Le salut des âmes : il en convertit plusieurs milliers, entre lesquels des pécheurs tout à fait désespérés; et une bienheu- reuse mort le fit passer à une meilleure vie. J'omets plusieurs exemples qui nous engageraient fortement à compatira Jésus crucifié et à la Mère Douloureuse.

6. Voici pour conclusion un fait que je tiens de personna- ges dignes de foi et de grande autorité. \'n jeune seigneur recommandable par sa naissance et ses ancêtres, aimait une DOble demoiselle d'honneur delà cour d'un prince allemand; et comme il ne pouvait en obtenir qu'elle l'aimât et consentit à devenir son épouse, son amour lui suggéra un moyen ingé- nieux. Elant à un festin, il se fit à dessein une blessure légère au doigt avec un couteau, et, de l'index trempé dans'son sang, il écrivit sur un linge blanc : Je vous aimé, et envoya ce linge à la noble demoiselle. Elle n'eut pas plus tôt vu ces ca- ractères, imprimés avec le sang du jeune seigneur, qu'elle l'aima et devint son épouse.

Flores seraph. tom. 'J. p. 310.

eONSIO] li \l H»N \l.l\ . .)7

Loin d'ici les amours profanes; j'en cherche un autre. 0 doux Jésus! ô amour crucifié! vous êtes mon amour; en ef- fet, que crient toutes vos plaies sacrées, sinon amour? que dit votre divin Cœur ouvert par la lance? J'aime, j'aime, j'aime! £1 les flots de larmes, ô Douloureuse Mère, que vous avez répandus toute votre vie sur les souffrances et la mort de votre Fils et pour le salut de nos âmes, ces larmes que crient-elles, sinon amour? Lorsqu'ils virent Jésus pleurant sur Le tombeau de Lazare, son ami, les Juifs s'entredisaient : Voilà combien il V aimait. Je dis à mon tour : voilà comment Jésus et .Marie nous aimaient, puisque le Fils a donné tout son sang: pour nous sauver, et la Mère d'abondantes larmes. 0 amour immense, amour infini! anathème à celui qui ne VOUS aime pas. a Enfants d'Adam, disait à sa mort le V. I'. Sébastien de Champ, de la société de Jésus, aimez Marie, servez-la fidèlement, car vous savez que son intercession vous est nécessaire. » Oui, nécessaire, surtout quand il s'agit de votre salut éternel.

CONSIDERATION XLV.

La Bienheureuse Vierge et Mère Douloureuse demeure au jiied de la croix, même a^rès la mort de son Fils.

C'O.I'CI/MMIO FIRHAT.

La Mère de Jésus se tenait au pied de la croia .

(S. Jean, 19. 25.)

1. La Bienheureuse Vierge et Mère Douloureuse, plus ferme au pied de la croix que le Stylite, est avec raison appelée, par l'auteur de L'Ecclésiastique, semblable au cyprès sur /a mon- tagnede Sion. Le cyprès est un arbre couronné d'un très-beau feuillage ; il s'élève en cône dans les airs, ne perd sa verdure en aucune saison de l'année, mais la conserve toujours fraîche, ei ne peni être ébranlé par les vents et les tempêtes. Sa devise est celle-ci :

La srmassd '///r///tit.

Voilà un beau symbole de la Vierge affligée demeurant ferme au pied de la croix malgré toutes les souffrances. Son Fils meurt sur l'infâme bois, son coté et son Cœur sont percés d'une lance, tous ses amis se tiennent au loin : « Je regardais a ma droite et j'examinais, et il n'y avait personne qui me connût '. » Sa Mère seule lui est connue au milieu de tant d'ennemis furieux : « N'est-ce pas sa Mère appelée Marie? n Oui, seule avec saint Jean, tandis que l'univers

1 Psal. 141. ...

I ONSID] R \l [ON XI. V. 59

tombe presque eo raine, elle persévère à rester sous la croix, sans murmurer contre les bourreaux, sans réclamer ven- geance contre les déicides, sans donner aucun signe il impa- tience, remettant tout à la volonté de la divine Providence.

« Ayant part à la charité de Jésus autant qu'à sa croix, dit saint Âmédée, elle pria pour eux et lit monter au trône de l'Eternel les vœux les pins sincères: O Père, pardonnez-leur cotte faute1. 0 cyprès digne de larmes! « Vraie Mère, dit l'abbé Guarrique, puisque la frayeur de la mort ne lui fait pas délaisser son Fils; et comment pouvait-elle être effrayée par la mort, son amour étant plus fort que la mort même ! ? »

2. Quelques auteurs s'étonnent que saint Jean, le disciple aime de Jésus, soit demeuré constamment sous la croix, lui qui avait pris la fuite avec les autres quand Jésus au jardin des olives l'ut livré entre les mains des pécheurs : Relicto eo, omnes fugerunt. D'où vient que sur le mont du Calvaire il montre une telle persévérance jusqu'à la mort et à la sépul- ture de son Rédempteur, et qu'au jardin de Gethsémani il fuyait si promptement?

Le savant François Labata répond à cette question, que le disciple aime de Jésus examina attentivement l'ineffable con- stance de Marie suivant son Fils dans toutes ses souffrances, et qu'animé par son courageux exemple il demeura vers son divin Maître au pied de la croix et jusqu'à ce qu'il fût enseveli. Voici son texte : « Il (saint Jean) se tenait vers la croix de Jésus sans aucune crainte; s'il craignait la mort au jardin, pourquoi pas au pied de la croix? C'est qu'il voyait ici Marie animée d'une force pins qu'humaine, et fortifié par un tel exemple, il y resta sans craindre ni les juges ni leurs serviteurs '. »

Si vous avez résolu, âme chrétienne, de suivre Jésus cru- cifie, voilà dans sa sainte Mère un bel exemple: « Imitez le modèle qui vous est montré sur la montagne, » et, comme

1 s. Amad. bomil. 5. 2 Goarric. Âbbas, de l?. V. 3 Franc. Labata tu. 1. de dol. Mar.

60 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

suint Jean, suivez-la courageusement jusqu'à la croix. Ah : pourquoi fuir la croix dans laquelle se trouve uniquement le salut, la résurrection et la vie. Allons, commencez, et recevez celle qui se présente. « Voulez-vous, dit Jacques Noùet dans ses exercices spirituels, voulez-vous porter la croix avec peu de peine et beaucoup de fruit ? Aimez. C'est le glaive de douleur qui perça le cœur et l'àme de la Bienheureuse Vierge ; et l'amour fut à la fois la cause et le soulagement de sa dou- leur. Elle souffrit parce qu'elle aima ; elle endura généreuse- ment la douleur parce qu'elle aima. L'amour pour Jésus-Christ ne connaît pas le mot difficulté \ »

3. Pendant que l'invincible et pieux Josué combattait avec acharnement contre les cinq rois des Chananéens, le soleil, œil du monde, s'arrêta dans son cours, par un miracle inouï, durant tout un long jour d'été, c'est-à-dire pendant quatorze beures : « Le soleil s'arrêta au milieu du ciel, et ne se hâta point de se coucher durant l'espace d'un jour. » Les interprètes examinent si la lune, comme moindre luminaire, s'arrêta aussi dans sa marche. Or Us répondent que non-seulement le soleil, roi sérénissime des astres, suspendit son cours, mais aussi la lune et tous les autres globes ; autrement l'admirable harmo- nie des corps célestes, établie depuis la création, aurait été troublée. Passons de la figure à la réalité.

Le soleil s'arrétant au milieu de sa course est Jésus-Christ notre Dieu, soleil de justice, qui sur la croix s'arrêta au milieu de son âge; la lune suspendant aussi sa révolution est la Bien- heureuse et affligée Marie sa Mère, dont l'Evangile dit: Elle se tenait debout près de la croix, triste station s'accomplit la parole du prophète : Le soleil et la lune sont demeurés im- mobiles dans leur tente2. Voici comment le docteur Séraphi- que interpelle la Douloureuse Mère de Dieu: « U ma Souve- raine, où étiez-vous ? Etait-ce seulement auprès de la croix? Non, assurément, mais sur la croix avec votre Fils. Là, vous étiez crucifiée avec, lui ; il l'était dans son corps, vous l'étiez

1 lac. Nouel in Ëxercit. spirit. f. 100. Habac. '•». u.

CONSIDÉRATION XI. V. lil

dans votre Cœur; ses plaies étaient répandues par tout son corps, elles étaienl réunies dans votre Cœur. Là, ô Heine, votre

Cœur fut percé de la lance, couronné d'épines, abreuvé de mo- queries, d'opprobres et d'injures, rassasié de fiel et de vinaigre. O Reine, pourquoi êtes-vous allée vous immoler pour nous? La Passion du Fils était-elle donc insuffisante si la Mère n'était crucifiée avec lui ' ? »

4. J'ai souvent admiré pourquoi la Vierge sainte est com- parée par les saints Pères et par l'Eglise elle-même à l'étoile de la mer. C'est bien sous ce nom que l'Eglise l'honore dans une de ses hymnes : Ave, maris Stella, et dansuneautre prière : Stella maris succurre cadenti. Le nom de la douce Vierge a cette signification : Marie, dit saint Jérôme 2, veut dire étoile de la mer. Et comment, direz-vous, Marie peut-elle être l'étoile delà mer?

Le même saint docteur nous en donne la raison, « c'est parce que cette étoile n'a pas de coucher, et qu'elle est à une grande distance de l'occident. » Parla mer on comprend très bien l'amère Passion de Jésus-Christ. « La Passion de Jésus- Christ, dit saint Augustin, est la mer rouge consacrée par le sang du Seigneur. » Ame chrétienne, regardez la Doulou- reuse Vierge se tenant auprès de la croix de son Fils mou- rant, o vraie «'toile de la mer qui dans ce tumulte et quand le globe semble tomber en ruine, se tenait à sa place, et n'é- prouvait aucune défaillance, même dans la défaillance du divin soleil : l'étoile de la mer lia pas de coucher. 0 àme, que faites- vous ? Recourez à cette étoile à l'aide de laquelle vous pour- rez parvenir, en traversant la grande et vaste mer de cette vie, au port du salut éternel. « Marie, dit saint, Ronaven- ture, fait l'office de l'étoile marine et dirige au rivage de la céleste patrie ceux qui naviguent à travers l'océan du monde sur le vaisseau de l'innocence ou du repentir. » Et le savant Lanspergc : « Elle se tenait ferme, puisque les Apôtres ayant pris la fuite et tous les autres se retirant, quand Jésus regar-

1 S. Bonav. in Stim. amoris, <•. i. " Ad Eustoch.

Ii2 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

dait à droite et à gauche et qu'il n'y avait personne qui le reconnût, vraie gloire de toutes les femmes, elle restait avec son Fils accablé de tant de tribulations. » 0 chrétiens, ce n'ésl pas le commencement, c'est la fin qui couronne l'œuvre. Ap- prenez de la Douloureuse Mère à persévérer dans vos bonnes entreprises. Que sert à un architecte de poser les fondements d'un édifice, s'il ne peut le continuer et le conduire jus- qu'au faite ? Que sert au coureur de se lancer dans l'arène, s'il ne parvient pas à la borne et se décourage à moitié che- min ? Que sert au soldat de combattre, si après avoir tiré le glaive contre l'ennemi, tout à coup il s'arrête et prend la fuite? Soyez fermes, et réservez-vous pour la prospérité.

5. La courageuse Débora, nous le lisons dans le Livre des Juges, se tenait sur la montagne d'Ephraïm sous un palmier, et regardait de loin le combat sanglant dans lequel Baracb tailla en pièces Sisara, chef de l'armée du roi Jabiu, et l'ennemi fut presque entièrement anéanti par les Israélites. Sisara en fuite se réfugia dans la tente de Jabel, et cette femme intrépide lui donna la mort en lui traversant les tempes avec un clou: « Elle était assise sous un palmier qui était appelé de son nom entre Ramaet Bethelsur le muni Ephraïm*. »

La vaillante Débora, au témoignage de Salmeron, figurait Bienheureuse Vierge et Mère Douloureuse, qui, se tenant victorieuse sous le palmier de la croix, contemplait, non pas dans le lointain, mais de près, le combat sanglant de son Fils avec le démon et le péché. File se tenait, dit-il. comme Rachel près du térébinthe, enfantant son fils dans la douleur. FI le même : Elle se tenait sous le palmier ou tout auprès, comme la généreuse Débora, regardant le combat de Baracb contre Sisara, c'est-à-dire de Jésus-Christ contre le démon.

Oh! que cette Vierge courageuse est bien justement compa- rée, par l'Epoux de sang lui-même, àun palmier élancé : Votre taille est semblable au palmier. Car, tandis que Jésus-Christ a pu dire de sa croix : Je monterai snr le palmier, et j'en pren-

1 Juilie. 4. .'>.

CONSIDÉRATION XI. Y. 63

lirai les fruits, elle tint son cœur liant dans L'adversité, comme un palmier qui s'élève droit malgré les vents, el n'éprouva au- cune défaillance, aucune pâmoison, quoiqu'on ait dit le con- traire : De toute part elle avait sous les yeux, les insignes de la plus véhémente douleur, dit saint Laurent Justinien, et ce- pendant elle se tenait près de la croix.

Mère affligée, elle voyait son Fils la tête couronnée d'épines et ensanglantée, les mains et les pieds percés de clous, les os disloqués et séparés de leur jointure par l'extrême tension des nerfs : Et cependant, juxta crucem stabat, elle se tenait près de la croix.

Devant toute la multitude, il était dans un état ignominieux de nudité, tremblant d'horreur et de honte, moqué, mé- prisé, vilipendé et traité comme le dernier des hommes par la plus vile populace : Et cependant elle se tenait près de la croix.

Elle entendait sou Fils, dans les langueurs de la plus triste mort, et pressé d'une ardente soif produite par l'effusion de tout ce qu'il avait de sang dans les veines, pour le salut de l'univers, crier de manière à tirer les larmes : J'ai soif, sans pouvoir lui donner une gorgée d'eau dans cette extrême nécessité : Et ce- pendant elle se tenait près de la croix.

Elle le voyait hlessé dans tout son corps, couvert de plaies, en sorte que, de la plante des pieds jusqu'à la tête, rien n'était sain en lui; tout n'était que blessure, contusion et plaie en- flammée qui n'a point été bandée, à laquelle on n'a point ap- pliqué de remède, et qu'on n'a point adoucie avec l'huile; et dans toutes ces cruelles soutfrances elle ne pouvait soulager son Fils, ni lier ses blessures béantes, ni étancherle sang. Heu- reux homme de Jéricho, vous trouvâtes le bon Samaritain pour prendre soin de vos plaies et les guérir en y versant le vin et l'huile; Jésus en croix n'a pas reposer sa tète: il a été frappé à ause de nos iniquités et brisé pour nos crimes, et ce sont ses blessures qui nous guérissent. Ah! pieuse Souve- raine, Mère désolée, comment avez-vous pu supporter la vue de votre Fils mourant Bans que vous puissiez lui rendre le

64 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

moindre devoir maternel? Et cependant elle se tenait près de la croix.

Elle voyait son aimable Fils mourir, rendre l'esprit sans au- cune consolation, et, Mère la plus affligée, ne pouvait lui don- ner aucun secours ; et cependant elle se tenait près de la croix.

0 Douloureuse Mère! qui pourrait retenir ses larmes, en voyant la Mère du Sauveur dans un si grand supplice? « Le so- leil se changea en ténèbres, et la lune en sang; » la terre fut ébranlée dans ses fondements, les pierres les plus dures se bri- sèrent et toute créature fut en gémissement. Et moi seul, mal- heureux pécheur! je n'aurais pas de sentiments de compas- sion pour mon Sauveur crucifié, et pour vous, ô Mère affligée? Moi, moi seul je ne compatirais pas? Coulez, coulez, mes larmes.

6. Lorsque l'Epouse bien-aimée et gémissante eut cherché en vain son divin Epoux, candide et vermeil, dans les rues et les places publiques, elle le trouva à midi se reposant sur la croix, son lit de fleur»: « Indiquez-moi vous faites paître vos troupeaux, vous reposez sur le midi. » Voici, sur ce texte, le Révérendissime Drogon, évèque d'Ostie : « Je ne vous trouverai jamais que sur la croix. vous dormez, vous paissez, vous reposez au milieu du jour. » Reposer sur une croix, ah! c'est un lit bien dur! Epouse fidèle, vous me parais- sez semblable au lierre qui s'attache aussi bien à l'arbre sec qu'à l'arbre vert : d'où la devise de l'Epouse : Je le tiens, je /tr le quitterai pas.

U pieuse Souveraine, vraie Mère d'amour et de douleur, cette Sulamite vous représentait, vous qui n'avez pu être éloignée de la croix par la mort de votre divin Fils, et y êtes demeurer quand tous s'en éloignaient, et jusqu'à ce que vous receviez dans vos bras maternels ce précieux fardeau descendu de son gibet, et le déposiez dans le tombeau avec une affliction pro- fonde. Ecoutez, âmes tendres, filles de Sion, prêtez l'oreille aux paroles de votre Mère à sainte Brigitte : « Les autres se reti- rant, je ne pus m'éloigner, mais je fus pour ainsi dire consolée de ce que je pus recevoir le corps de mon Fils déposé de la

onsidéb \ i m\ xi. v. i;:.

croix, le placer sur mon sein, examiner ses blessures et en t'taneher le sang. » 0 consolation pleine de tristesse!

7. Ici se présente à mon esprit la courageuse mère de saint Mflithon. Lorsqu'on forçait les quarante martyrs de Sébaste en Arménie à demeurer une nuit entière dans un étanp: glacé, au milieu du plus froid hiver, et qu'étant morts, les membres brisés de la manière la plus cruelle, on les conduisait sur des chariots pour les brûler, cette femme admirable porta elle-même son fils sur le bûcher pour le joindre aux autres martyrs, et jeta son corps dans les flammes comme un agréable holocauste, afin que les quarante, unis parla même foi et le même cou- rage, ne fussent point séparés dans leurs funérailles, et entras- sent ensemble au ciel.

très-sainte Mère, ù Mère de douleurs! qui nous fera com- prendre votre invincible constance au pied de la croix? Plus ferme qu'un rocher, vous avez reçu affectueusement, dans vos bras, votre aimable Fils déposé de la croix par les disciples Ni- codème et Joseph; et forte comme la mère de Mélitbon, vous l'avez offert en holocauste à Dieu le Père, pour le salut de tout le genre humain, sur l'autel de votre cœur par le feu de votre immense amour. Ecoutons Métaphraste : La Bienheureuse Vierge aida de ses mains à le descendre de la croix, reçut les clous, le prit lui-même dans ses bras, l'étreignant sur son sein, arrosant et lavant ses plaies de ses larmes, et ne pouvant se réparer de lui.

8. La Conclusion que nous devons tirer de cette considéra- tion nous est indiquée par le Sauveur lui-même, que saint Paul nous apprend avoir répandu des larmes amères avant d'expi- rer sur la croix : « Ayant offert, avec un grand cri et avec lar- mes, ses prières et ses supplications, il a été exaucé à cause de son humble respect pour son Père.»0 bon et doux Jésus, qu'est-ce que cela signifie? Pourquoi ces larmes abondantes avant de rendre votre dernier soupir? Quelle fut la cause de ces larmes et de votre douleur?

Les interprètes nous répondent que le Sauveur Jésus mou- rant, considérant une dernière fois sa Douloureuse Mère, pleura n.

66 LA HÈRE d'àMOI H El DE DOl LEUR.

abondamment à la vue de toutes les peines qu'elle endurait avec lui dans son Cœur. En effet, s'il pleura de compassion en voyant pleurer Marthe et Madeleine au tombeau de leur frère, combien devait-il être plus attendri en faisant son der- nier adieu à une Mère plongée dans une telle tristesse. Ame chrétienne et pécheresse, Jésus et Marie fondent pour vous en larmes de sang, et vous les voyez d'un œil sec? Les Anges de paix pleurent, et vous riez? Entendez un poète crier à vos oreilles : « Tandis que la terre tremble et que la pierre se fend, l'homme reste insensible ; l'homme se montre plus dur que la terre et la pierre.

CONSIDERATION XLVI.

Douleur et amour île l'affligée Mère, quand elle \it le sacré Cœur de .lésus percé d'une lance.

VIL V 8 : lt A I 1 il Y I L V I •; Il A T

L n des soldats lui ouvrit h- côté avec sa lance, et il en sortit <i l'instant du sang '-t l'eau. (S. Jean, 19. 34.)

1. Le véritable amour ne connaît point de bornes. Voici un fait que raconte Marcel! in dans sa sixième homélie sur l'insti- tution de l'Eucharistie. Guiscard, comte palatin dans la cour de Tancrède, duc de Salerne, était à cause de ses charmes et de ses qualités, aimé de Sigismonde, fdle de ce duc, et il l'aimait aussi beaucoup lui-même ; et plus ils se cachaient leur amour l'un à l'autre, plus il augmentait dans leur cœur, lors- que enfin il éclata et devint public. Oh! que saint Thomas de Villeneuve a bien raison de dire 1 que l'amour est un feu dont l'ardeur et la flamme ne peuvent demeurer cachées, quelque soin que l'on prenne; qu'il ne peut dissimuler ni être dissi- mula ; i]iii >i l'on pouvait cacher le soleil, l'on pourrait aussi cacher l'amour. Tancrède enfin s'aperçut de l'amour de sa fille et de Guiscard. Que fait le prince outré de jalousie? limande ce dernier sous un prétexte honorable, le fait égorger dans sa chambre par des hommes apostés dans ce dessein, et lui fait arracher le cœur qu'il envoie à sa fille dans un vase d'or, par un écuyer chargé de lui dire : Voilà le ca'iir de votre amant. Qu'attendez-vous, lecteur ? J'ai dit que le véritable amour ne connaît pas de bonus, i t nue. rien n'est difficile à celui qui

1 Conc. de M Magdal.

68 LA MÈRE 1> AMOlU ET DE ItOULEl'R.

aime, parce que l'amour est fort comme la mort. A ce specta- cle, Sigismonde, d'abord étonnée et sans parole, ayant repris ses sens, s'écrie : Que te rendrai-je, ô mon cher Guiscard,pour tant d'amour? Quelle reconnaissance te puis-je témoigner, in- fortunée que je suis, à toi qui as succombé victime de ton amour pour moi, et qui me transmets ton cœur après ta mort comme une marque de ta tendresse? Comment te payer de retour? Tiens, prends mon cœur; vivre sans toi me serait une mort continuelle et un martyre. Elle dit, saisit un poignard et se l'enfonce dans la poitrine, en disant : Cœur pour cœur.

0 Vierge Douloureuse, pardonnez ce que je vais dire. Vous êtes Sigismonde la fille du prince ; après que votre Epoux de sang fut mort en croix, victime de la vraie charité, pour montrer au monde entier quel amour il avait pour vous et pour tous les mortels, il laissa ouvrir sa poitrine et percer d'une lance soa sacré Cœur. C'était de sa part, dit saint Bonaventure', une démonstration qu'il vous livrait son Cœur. Que fit alors la dé- solée Vierge , épouse et Mère de Jésus crucifié 10 mou Fils Jésus! soupirait-elle h demi-morte, dit saint Bernard2, ô mou Fils Jésus! Jésus mon Fils! quinte donnera de mourir avec vous et pour vous? Mon Fils Jésus! votre doux Cœur, trône du divin amour, prix inestimable de la Rédemption humaine, gage de la gloire future, a été transpercé par une lance, et mon cœur vivrait encore sans blessure, sans plaie, sans douleur! Glaive de Siméon, épée cruelle, que tardes-tu? Blesse, transperce d'outre en outre et mon âme, et mon cœur; car je ne vivrai pas davantage sans celui qui est ma vie. Cœur pour cœur! On peut donc donnera juste titre pour devise aux saints Cœurs de Jésus et de Marie :

La blessure de l'un blesse l'autre.

Rappelons-nous ce que les Livres saints nous racontent de Josias roi d'Israël. Ce prince, d'un caractère très-doux, cher à Dieu à cause de son zèle pour la religion et sa grande piété,

1 In Stim. amor. * De pass. Vitis myst. c. 10.

i ONSIDÉRATION XI. VI. 69

chéri de sou peuple à cause de ses bienfaits, étant occupé à combattre contre Néchao pour la défense de la patrie et fai- sant de généreux efforts pour éloigner l'ennemi, fut blessé gravement sur son char d'un trait lancé en pleine poitrine. Il en mourut à la fleur de son âge, quoique bien digne d'une plus longue vie. Le cœur de ses sujets fut blessé du même trait, pour ainsi dire, et ils lui firent des funérailles dans les- quelles ils le pleurèrent comme le père de la patrie : « Tout Juda et Jérusalem furent en deuil \ »

Levez un peu les yeux, àme chrétienne, et contemplez votre amour crucifié ; voyez dans sa personne un prince, l'inno- cence même, debout sur le char triomphal de la sainte croix et blessé par un fer cruel, non-seulement dans ses mains, dans ses pieds, mais dans sa poitrine sacrée. 0 chères âmes, si la blessure de Josias put pénétrer le cœur de tout son peuple de manière à le faire regretter longtemps et pleurer chaque année au jour de sa mort, quel ne fut pas, pour le tendre Cœur de Marie, le contre-coup de cette lance dont elle vit transpercer le sacré Cœur de Jésus, lit nuptial de la Divinité, sanctuaire de l'Esprit saint, trésor précieux de tous ceux qui sont prédestinés à la vie éternelle. Cette cruelle blessure ne faisait plus souffrir Jésus en croix, il était mort; mais elle affligea le doux Cœur de sa Mère au delà de ce qu'on saurait l'exprimer. « Après que votre aimable Jésus eut rendu l'es- prit, lui dit saint Bernard, la lance n'atteignit point son àme, mais elle perça la votre. Son àme à lui n'était plus là, mais la vôtre n'en pouvait être arrachée : la force de la douleur trans- perça donc votre àme tellement que nous pouvons vous pro- clamer plus que martyre, le sentiment de la compassion ayant i'xci •<!•■ celui de la souffrance corporelle *. »

:{. David était assis entre les deux portes de la ville ; un messager arrive et lui annonce que son fils Absalon est mort, que Joab, général en chef, l'a trouvé suspendu à un arbre par sa chevelure et lui a percé le cœur de ln»is coups de lance. A

1 II. Parai. 35. 24. '-'. S. Kern. ser. I. hoc Sis. Maffnum.

711 l.\ HÈRE U AMOUR EH DE DOl Mil R.

cette triste nouvelle, le roi étant saisi de douleur, monta à la chambre qui était au-dessus de la porte, et se mit à pleurer. Et il disait en se promenant : Mon fils Absalon! Absalon, mon fils! que ne puis-je donner ma vie pour la tienne !

i) Mère d'amour et de douleur! qui pourrait exprimer les tristesses de voire Ame, lorsque, présente au lieu de ses tour- ments, et la passion étant consommée, vous avez vu de vos propres yeux un impie soldat transpercer de sa lance le Cœur sacré et divin de votre Fils; lance cruelle qui, d'un seul et même coup, blesse les deux Cœurs du Fils et de la Mère. Marie, dit saint Anselme, serait morte mille t'ois si un dessein particulier de Dieu ne lui avait conservé la vie pour la conso- lation des fidèles. Voici les paroles de la Vierge désolée à sainte Brigitte : « Un soldat s'approchant, lui enfonça si for- tement sa lance dans un coté qu'elle sortit presque par l'autre; alors il me semblait qu'en me perçait le Cœur, en voyant percer le Cœur de mo« très-cher Fils. » Et dans un autre en- droit la divine Vierge parle de la sorte de la transfixion bar- bare du divin Cœur de Jésus : « Mon Fils avait été percé au Cœur d'une manière si triste et si cruelle, que celui qui le perçait ne cessa d'enfoncer l'instrument que la lance n'eût at- teint les cèites, et que les deux parties du Cœur ne fussent dans la lance. » La Vierge Douloureuse, observe saint Rona- venture, conjura les soldats reunis sur le Calvaire, de ne pas exercer de cruautés sur le corps de son Fils : « Il est mort, il y a une heure qu'il a quitté la vie. » Ils n'écoutèrent point ses prières ; mais l'un d'entre eux, pour mettre fin à la cruauté et rendre superflu le brisement des jambes, enfonça avec force une lance dans le côté droit de Jésus et coupa le Cœur par le milieu : Lancea latus ejus àperuit. Jésus-Christ n'en éprouvait pas la douleur, mais sa Mère présente à ce spectacle la res- sentait, parce que le Fils et la Mère n'avaient qu'un même Cœur. On peut dire que la lance blessait en même temps trois cœurs, c'est la pensée de Salmeron : Absalon percé de trois lances signifie parfaitement Jésus-Christ, percé d'une seule qui pé- nétra tout à la fuis le Cœur de Jésus, le Cœur de Marie et

I 0NS1D1 i; \ I lliN MA 1. ~ 1

celui du disciple bien-aimé. Pieux lecteur chrétien, si vous voulez être un vrai fils de Marie, la tance ne doit-elle pas blesser aussi votre cœur? Quand Jésus aurait été votre esclave, eut-il pu endurer davantage pour vous? Affligez-vous donc sincèremenl à la vue de Jésus eu croix et de sa sainte Hère, et priez-la souvent et avec instance, par le sacré Cœur de son Fils, de ne pas vous abandonner dans vos tentations et vos besoins et surtout à l'heure delà mort.

I. » Et aussitôt il en sortit du sang et de l'eau, » comme deux sources mêlées ensemble, de manière cependant que l'une pouvait facilement être discernée de l'autre; et parce que la Douloureuse Vierge connaissait la vertu de ce sang et de cette eau miraculeusement produits en Jésus-Christ, quand tout le monde fut éloigné, effrayé par le tremblement de terre et les ténèbres, elle s'avança plus près de la croix et en recueillit un vase pour sa consolation et celle des fidèles. Ecoutons Nicé- phore ' : « Lorsque tous avaient fui par la crainte des déicides, seule la divine Mère resta, ainsi que le disciple bien-aimé. Ils virent tout ce qui se passa, soit avant, soit après la mort du divin Maître, et, avec beaucoup de respect et de piété, ils reçurent dans un vase le sang et l'eau qui coulaient de son enté sacré, comme s'il était encore en vie. On raconte que sainte Marie-Madeleine en fit autant et recueillit dans une fiole en verre le sang divin mêlé à la poussière et foulé aux pieds par les déicides scélérats. On le conserve religieusement dans l'église de Saint-Maximin , en France, près de Marseille, et chaque année, le vendredi saint, après la lecture de la passion, il entre en ébullition, devient chaud et déborde.

Ame chrétienne, apprenez de la Douloureuse Mère, à esti- mer, à vénérer ce précieux sang dont une seule goutte suffi- rait à racheter mille mondes. S'il est dit des eaux du Jourdain :

\aaman y descendit, et s'y lava sept fois, selon la parole de l'homme de Dieu, et sa chair devint comme la chair d'un petit enfant, et il se trouva guéri de sa lèpre; » quel effei n'auronl

1 Niceph. i. i . i:i-t. eccl. c. 30.

72 LA HÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

pas le sang divin et l'eau de l'agneau innocent et sans tache pour laver la lèpre des âmes et l'effacer? « Venez, et plaignez- vous de moi, dit le Seigneur; quand vos péchés seraient comme l'écarlate, ils deviendront blancs comme la neige '.. »

Si les eaux de la piscine de Jérusalem, rougies par le sang des victimes immolées dans le temple, pouvaient être un re- mède pour toutes les maladies, comme il est rapporté eu saint Jea^i : «L'Auge du Seigneur descendait de temps en temps dans la piscine et en agitait l'eau, et le premier malade qui y descendait ensuite était guéri, quelle que fût son infirmité ; » que de biens nous pouvons espérer quand nous est ouvert le Cœur sacré de Jésus, la fontaine de vie d'où s'écoulent en abondance le sang qui nous rachète et l'eau qui nous lave, la vraie source ouverte à la maison de David, et aux habitants de Jérusalem pour laver leurs péchés 2.

Si le ruban d'écarlate que Rahab suspendit à sa fenêtre, ej qui figurait le sang de Jésus-Christ, suivant saint Ambroise, conserva la maison et ceux qui l'habitaient, pendant que tout le monde périssait dans la ville de Jéricho , quelle efficacité puissante aura le sang divin du sacré Cœur de Jésus trans- percé pour nous délivrer et nous sauver ! L'Eglise fut vrai- ment fondée au moment le sang et l'eau coulèrent du coté sacré du Sauveur, d'après cette parole de saint Jean : « C'est ce même Jésus-Christ qui est venu avec l'eau et le sang ; non- seulement avec l'eau, mais avec l'eau et le sang 3. » Qui ignore l'étendue de ce grand et terrible bain du déluge, qui put inonder toute la terre, mais non pas effacer les péchés ? Qu'il est donc précieux le sang de notre amour crucifié, sans lequel point de rémission ? 0 mon âme, approche de ton Jésus cru- cifié en te joignant à la sainte Mère de Dieu, et, comme elle, recueille pour toi, au moins par tes pieux désirs, quelques gouttes de cette source du Seigneur, parce que le sang de Jésus-Christ son Fils nous purifie de tout péché. Ne dis pas comme le paralytique: Je n'ai personne; tu as le Dieu fait homme

1 Isa. |. 18. 2 Zach. 13. I. 3 I Joan. .i. (i.

i |'\>1M KAIKt.V XI. VI. 73

qui est devenu ton médecin, puisque nous sommes guéris par ses blessures.

."i. Revenons à notre affligée Mère. Pardon, ô Souveraine, j'ai à vous parler, moi votre serviteur et votre indigne esclave. Vous vous souvenez des noces de Cana auxquelles vous avez daigné assister et vous avez prié, sans qu'on vous le de- mandât, votre aimable Fils de vouloir bien créer un vin nou- veau en faveur des pauvres époux qui vous avaient amicale- ment conviée : Le vin ayant manqué, Marie Mère de Jésus lui dit : Ils n'ont plus de dot. Mon heure n'est pas encore venue, répondit-il. 0 pieuse Souveraine, voici l'heure venue mainte- nant où l'Epoux bien-aimé veut ouvrir son cellier pour distri- buer abondamment à toutes les cames altérées, le vin rouge et blanc qu'il tire de son côté sacré et de son Cœur. Venez donc tous, ô mortels, achetez sans argent et sans aucun frais. « Déjà dès les noces de Cana, dit saint Irénéc, la Mère de Dieu était ani- mée d'une certaine ardeur de boire à la coupe du sang de Jésus-Christ. » Et voilà que maintenant, 6 Souveraine, vous avez le vin désiré, la coupe de sang. Ah ! une goutte, seule- ment une goutte pour nous malheureux ! Car si un peu de farine fit disparaître entièrement l'amertune qui était dans la marmite des enfants des prophètes remplie de coloquintes ; si, à la parole d'Elisée, un peu de sel rendit saines les eaux de Jéricho ; si le bois que Moïse jeta dans un lac rendit douces et potables les eaux qui auparavant étaient très-amères : que ne produira pas ce vin généreux rouge et blanc, puisé au pied de la croix et sur la croix même, par la Douloureuse Mère, dans le sacré Cœur de Jésus ? Ne crains pas, ô mon âme, qu'il manque ou puisse manquer, ce vin qui produit les vierges, ce vin, source d'eaux vives jaillissant pour la vie éternelle, car plus on s'en abreuve plus on est pressé du dé- sir de s'en abreuver encore. 0 pieuse Souveraine, je vous en prie ; je vous en supplie, une goutte, une seule goutte, pour moi misérable pécheur, surtout à l'heure amère mon âme sera sur le point d'abandonner mou corps. Oh ! une goutte seulement.

7 \ LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

6. (Juand la ville de Samarie était fortement assiégée et que la famine y régnait, des lépreux qui demeuraient en dehors de la ville, manquant de tout et mourant de faim, se dirent l'un à l'autre : « Pourquoi demeurons-nous ici, nous ne pouvons attendre que la mort? Si nous voulons entrer dans la ville, nous mourrons de faim ; si nous demeurons ici, nous ne pouvons éviter la mort, Allons-nous-en donc au camp des Syriens. » Ils y allèrent et trouvèrent de tout en abondance. chrétiens, que sommes-nous ? des gens mourants de faim et infectés de la hideuse lèpre du péché ; nous ne pouvons le nier : « Si nous disons que nous sommes sans péchés, nous nous faisons illusion, et la vérité n'est pas en nous. » Allons donc hors du camp, en portant l'opprobre de Jésus crucifié qui est notre chef, et de sa sainte Mère Douloureuse. Pourquoi mourons-nous de faim et de soif sans quitter notre place ? Voilà, sur le Calvaire, abondance de biens et de grâces. Recueil- lons avec soin le sang divin qui coule des cinq plaies et du sacré Cœur de Jésus. Pourquoi donc laissons-nous fouler aux pieds des scélérats le précieux breuvage du salut éternel ?

Que dis-je, ô mon esprit ! Hélas ! hélas ! combien se glori- fient du nom de chrétien, et crucifient en eux journellement le Fils de Dieu ? 0 malheureux endurcis ! le doux Jésus vous a-t-il donc livré son Cœur sacré pour l'outrager de nouveau, ainsi que le Cœur innocent de la Vierge ? Toutes les fois qu'elle vous voit otïenscr son Fils, elle est elle-même offensée, parce que Le zèle de L'amour qu'elle a pour lui la rend sen- sible à l'outrage, comme s'il était l'ait à elle-même.

Le soldat qui vitAbsalon suspendu aux branches d'un chêne par sa chevelure, s'empressa d'aller avertir Joab, général de L'armée; et celui-ci lui répondit : Si tu l'as vu, pourquoi ne lui as-tu point passé ton épée au travers du corps? je t'aurais donné dix sicles d'argent et un baudrier. Quand vous me don- neriez, présentement mille pièces d'argent, répliqua le coura- geux soldat, je me garderais bien de porter la main sur la per- sonne du fds du mi. chrétiens pires que les Juifs déicides el les gentils ! s'ils l'avaient connu, ils n'auraient jamais cru-

I ONSIDÉH VI [ON XI.VI. 7.8

cifié lf Seigneur de la gloire; el vous, qui le connaissez, qui croyez en lui et espérez le ciel de sa bonté, vous n'avez pas horreur d'offenser le Fils du Roi suprême, de porter la main sur lui, de blesser son Cœur Sacré par de nouveaux crimes, et de blesser en même temps le tendre <d doux Cœur de son af- fligée Mère? Le centurion et ceux; qui étaient avec lui s'écriè- rent : Il est vraiment le FihdeDieu; ils s'en <ill/iit>nt en se frap- pant la poitrine. Frappe aussi ta poitrine, chrétien pécheur, et va du vice à la vertu, de la mort à la vie.

CONSIDERATION XLVI1.

La Bienheureuse Vierge et Mère Douloureuse esl bien justement appelée par l'Église la Reine des saints Martyrs.

m 1*1: it i:hi m:t ohms

Regardez, et voyez s'il est une douleur semblable à ma douleur . (Thren. 1. 12.)

1. Un jour, dans la célèbre Académie d'Athènes, on agitait, parmi les philosophes, cette question, savoir : si la femme peut être louée. Les uns l'estimaient incapable et indigne de toute louange humaine, comme étant la cause de tout mal. Les autres, prenant un moyen terme, prétendaient que la femme ne mérite ni louange ni blâme, et que l'on doit la supporter dans ce monde comme un mal nécessaire. D'autres enfin émi- reut cette opinion plus juste et plus douce : Si la vertu peut être louée même dans un ennemi, pourquoi pas dans la femme? Par conséquent, la femme forte, laborieuse, honnête et sainte est digne de recevoir des éloges; parmi les païens on a loué beaucoup la force belliqueuse des amazones, la prudence des sybilles, la chasteté de Lucrèce, la fidélité de Mélanie, le cou- rage de Sémiramis et les vertus admirables de plusieurs autres héroïnes.

Mais que parlé-je des païens? La sainte Ecriture n'a-t-elle pas de riches témoignages en faveur de cette vérité? Ne loue-t-elle pas Sara pour sa soumission à Abraham son époux? Uébecca et la femme de Sarepta pour leur hospitalité remarquable en- vers les étrangers? Debora, Judith, et La Mère dos sept frères Machabées pour leur force d'Ame extraordinaire? Anne, mère

i iinsim RATIOM M. vil. 77

de Samuel, et Anne la veuve, fille de Phanuel, pour leur assi- duité à la prière? Abigaïl et la femme de Thécué, pour leur grande sagesse? Est lier, pour sa charité et sa compassion à L'égard de son peuple voue à la mort, et pour la délivrance duquel elle exposa sa vie au plus grand danger?

Cependant la Hienheureuse Vierge et Mère Douloureuse a surpasse beaucoup, dans tous les genres de vertus, toutes ces femmes remarquables : Multœ fîlix congrec/avcriuit dicitias, tu sujjcn/rcssa es wiiversas. « Un grand nombre de fdles ont amassé des riebesses ; vous les surpassez toutes, » parce que vous nous avez enfanté l'IIomme-Dieu, et que vous l'avez offert en holocauste pacifique à Dieu son Père sur l'autel de la croix; et comme saint Paul a dit du Père qu'il n'a pas épargné son propre Fils, mais l'a livré pour nous tous ' ; vous non plus, ô Souveraine, vous n'avez pas épargné votre Fils, mais vous l'avez livré pour nous tous comme le plus précieux de tous les dons et le plus excellent de tous les sacrifices. Nous vous proclamons donc hautement et ajuste titre plus que martyre et la Reine très-sainte de tous les martyrs. « Tout ce que les martyrs souffrirent de cruauté dans leurs corps, dit avec raison saint Anselme 2, fut léger, ou plutôt rien en comparaison de vos souffrances. » En d'autres termes, si tous les tourments des onze millions de martyrs étaient réunis en un monceau, ils n'atteindraient pas la hauteur des douleurs de Marie, et se- raient, en comparaison, légers et comme nuls. Figurez-vous, lecteur dévoué à Marie, les divers instruments de supplices qui furent employés pour torturer les corps des saints martyrs; et placez par-dessus, le saint Cœur de la Douloureuse Mère percé de sept glaives, avec cette inscription :

Elle les surpasse tous.

2. Oui, Douloureuse Vierge, vous les surpassez tous. i°Les saints martyrs ont souffert des maux humains; « mais Marie,

Hom. 8. 32. * S. Ansel. de Eicell. Virg.

7H LA MÈRE DAMOUH EX DE DOULELK.

dit saint Amédée *• a surpassé son sexe et l'humanité, elle a souffert des tourments surhumains ; elle était plus torturée que si elle l'eût été pour elle-même, parce qu'elle aimait incompa- rablement par-dessus elle-même ce qui procurait ses douleurs. » Et comme les souffrances de son Fils lui étaient communes, étant blessée en esprit des coups de fouets, des épines, des mêmes plaies, crucifiée de Cœur avec Jésus et par les mêmes clous de fer, il s'ensuit qu'elle pouvait dire à meilleur droit que l'Apôtre : « J'ai été attachée à la croix avec Jésus-Christ ; et je vis à présent, ou plutôt ce n'est plus moi qui vis, mais c'est Jésus-Christ qui vit en moi 2. »

11 y avait une admirable sympathie, une parfaite union entre la Douloureuse Vierge et le Seigneur Jésus, car il était entièrement formé de sa substance, et elle pouvait dire avec vérité : // est l'os de mes os, la chair de ma chair, et le sang de mon sang. Or, comme l'éclipsé du soleil obscurcit aussitôt la lune; de même, le soleil mystique souffrant, toute sa souf- france se communiquait à Marie, lune mystique. « Ce que pro- duisaient dans la chair de Jésus-Christ les clous et la lance, la Vierge l'éprouvait ('ans son àme par l'afrection qu'elle avait naturellement pour son Fils 3. » Ce sont les paroles de saint Bernard. 0 véritable Reine des martyrs, puisque durant toute la passion elle fut toujours étroitement unie à Jésus le Roi des martyrs. « Sa Mère était devant la croix, dit saint Augus- tin 4, et, les hommes prenant la fuite, elle s'y tenait coura- geusement ; elle assistait à ce solennel spectacle sans crainte des bourreaux; le Fils pendait en croix, la Mère s'offrait aux persécuteurs. »

Les tourments des saints martyrs étaient de peu de durée el Be terminaient par leur mort. Les douleurs de la Bienheu- reuse Vierge se firent sentir à son Cœur depuis l'instant del'an- nonciation, elle devint Mère du Dieu fait homme, jusqu'à son dernier soupir. Rien ne put lui faire oublier cette pluie de

' Aiii.mI. homil. :>. de Virg. Gai. 2. I!».— * S. Bern. Serai. <!<■ Pass. '' S. Aug. de in-t Virg. c 7.

I ONSlDÉR \ IH>\ \|. vil. T'.t

11 doux Fils, sur le monl Olivier, dans la flagella- tion, le couronnement, li' portement de croix et le crucifiement, répandil jusqu'à la dernière goutte renfermée dans son sacré Cœur. Aucun Assuérus ne pouvait consoler cette Esther affli- Dieu changea le cœur du roi, et lui inspira de la dou- ceur. Il se leva tout d'un coup de sou trône, craignanl pour l'Ile; et la soutenant entre ses bras jusqu'à ce qu'elle lut re- venue,! elle, il la caressait en lui disant : Qu'avez-vous, Esther? Je suis votre frère : ne craigniez point, n Non, aucun Âssuérus Qe pouvait consoler cette Esther désolée, parce qu'elle avait toujours présentes dans sa mémoire les souffrances et la mort de son aimable Fils; c'est pourquoi le glaive de douleur non- seulement affligeait son Cœur maternel, mais le pénétrai! in- timement. La Passion de mon Fils, dit-elle à sainte Brigitte, soit en mangeant, soit en travaillant, étail pour moi un souve- nir récent . i Et ailleurs à la même : « Je n'ai pas eu une heure sur terre sans ressëiitir les douleurs de mon cœur transpercé. » l* L'amour de la Bienheureuse Vierge pour son Fils sur- passait celui de toutes les autres créatures ; et comme l'Epouse elle pouvait dire: Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui. De même que l'âme de Jonathas était liée à l'âme de David qu'il aimait comme son âme; de même aussi L'âme de Marie fut attachée à relie de Jésus: elle l'aima donc plus que sa vie, et par-dessus toutes les choses créées. Par cet amour ardent vous comprendrez qu'elle souffrit plus que toutes les autres créatures dans la passion et la mort de sou Fils unique, car l'amour est la mesure de la douleur, et comme le dit égale- ment Bainf bénis ', a l'amant est plutôt il aime que il vit; )) d'où saint Jérôme conclut : <•■ Parce que la lî. Vierge souffrit i\r cœur, elle l'ut plus quemartyre '. > Saint Qdephonse dit la même chose: « Elle l'ut plus que martyre, parce qu'elle ne lui pas moins blessée intérieurement du glaive d'amour que du glaive de douleur :\ »

1 S. Dionys. de div. Nom. ! S. Hier. Serm. «1«' A^s. 8 s. Udeph. <i>-

SU LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

Les saints martyrs, tourmentés dans leurs corps par les plus cruels supplices, étaient merveilleusement fortifiés par Dieu clans leurs âmes, et leur amour pour le Sauveur adoucis- sait leurs tortures ; sainte Agathe courait joyeusement à la prison; saint Tiburce regardait les charbons ardents comme des fleurs et des roses; Marc et Marcellin chantaient au milieu des tourments : Nous n'avons jamais pris part à un festin si dé- licieux. Mais pour la Douloureuse Mère, l'ardeur de son amour, loin d'adoucir sa douleur, l'augmentait; car elle connaissait Celui qui sou (Trait , ses tourments , leur grandeur, et leur cruauté, qu'il les endurait pour des ingrats; et qui plus est, elle endurait avec lui clans son Cœur ses tourments excessifs. 11 était donc impossible que son àme n'en fût pas souveraine- ment atteinte. Conséquemment elle fut plus que martyre, elle fut la Reine de tous les saints martyrs ; non-seulement elle gagna comme eux l'auréole du martyre, mais elle mérita plus de dignité et d'excellence. Aussi l'Eglise célèbre la mort des martyrs par une fête annuelle; tandis qu'elle honore la sainte Mère de Dieu, non une fois l'an, mais chaque semaine le sa- medi, quand il n'est pas occupé par une autre fête, afin d'ex- citer le peuple chrétien, en lui montrant combien il doit ho- norer avec dévotion la Douloureuse Mère et se rappeler ses gémissements, ses douleurs, ses tristesses et ses larmes : « N'ou- bliez pas les gémissements de votre Mère. »

3. Qiumd Israël fut réduit en captivité, le prophète Jérémie, qui fut sanctifié dans le sein de sa mère, se retira dans une caverne près de Jérusalem au midi de la ville et non loin d'A- celdama, il pleurait la désolation et la ruine du temple ma- gnifique et de l'antique cité royale. C'est qu'il composa ses lamentations dans lesquelles il a réuni les accents les plus tristes et donné cours à toutes ses larmes : «Comment cette ville si pleine de peuple est-elle maintenant si solitaire ? Comment la maîtresse des nations est-elle devenue veuve, et la Reine des provinces a-t-elle été assujettie au tribut? Elle n'a point cessé de pleurer pendant la nuit, et ses joues sont trempées de larmes ; de tous ceux qui lui étaient chers, il n'y en a pas

l .'VMM i; viinx xi. vu. H\

un seul qui la console. » o mon esprit, qu'aurait fait Jérémie, .•t qu'aurait-il dit, s'il eût été préseul à la ruine de ce divin Temple formé parle Saint-Espril dans le sein de la Vierge el détruif par la morl de la croix? Et s'il eût vu la désolation de cette cité royale dont le prophète s'écriait : () cité de Dieu, l'on raconte de vous des choses glorieuses. Oui, qu'eùt-il dit, s'il avait contemplé des yeux du corps et de l'âme, la grande amertume du Cœur de Marie et les larmes qu'elle répandait en abondance sur son Fils, son unique trésor? N'aurait-il pas poussé ce même cri sur la plus affligée de toutes les Mères: Comment la cit.' pleine de peuple est-elle maintenant solitaire ? la maîtresse des nations devenue veuve? la Reine des pro- vinces assujettie au tribut? Elle n'a pas cessé de pleurer pen- dant la nuit, et ses joues sont trempées de larmes; de tous ceux qui lui étaient chers, il n'y en a pas un qui la console.

0 bon Jésus, si vos Apôtres, vos martyrs, sortaient pleins de joie de l'assemblée, parce qu'ils avaient été trouvés dignes de souffrir des outrages pour votre nom ; si Pierre, la veille de sa mort, dormait tranquillement sous ses chaînes ; si Paul se réjouit d'être lié, flagellé, lapidé; si André salue avec joie la croix qui lui est préparée : Salve, cruxpretiosa! si Laurent sur son gril se moque du tyran : Ma chair est assez rôtie, tourne et mange ; si Vincent sur les chevalets et dans les tourments les plus cruels est inondé d'une joie ineffable; si Boniface, écor- ché avec des ongles de fer, s'écrie: Seigneur, je vous rends grâces. Comment, ô mon Jésus, mon amour crucifié, pouviez- vous délaisser votre Mère bien-aimée dans la plus profonde désolation? Vous avez consolé le larron pénitent; pourquoi pas votre .Mire, plongée dans un océan de douleur? Anges du ciel, étiez-vous alors?

Ne soyez [tas surprise. Ame chrétienne, que le Dieu très-bon qui conduit chaque chose à sa fin avec sagesse, n'ait voulu procurer aucune consolation à la sainte Mère dans la passion de son Fils; il voulut que la Mère compatissant aux souffrances de son Fils, lui fût semblable en tout pour acquérir de plus am- ples mérites; et comme Jésus dit en croix : 0 Mien, mon Dieu, II. 6

82 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

pourquoi m'avez-vous délaissé? il fallut qu'elle vît son agonie, étant elle-même délaissée. Vous avez été plus que martyre, ô Reine des martyrs, parce que vous avez souffert plus qu'eux tous, ayant été envahie tout entière par l'affliction. Ecoutez, et méditez ces paroles de saint Bernard : « 0 ineffable récipro- cité du saint amour ! Le Fils soutire, et dans son Cœur il com- patit beaucoup à sa Mère; de son coté, Marie compatit aux souffrances de son Fils. Tel fut l'excès de la passion du Sauveur Jésus, qu'elle l'envahissait comme un torrent, le remplissait et l'enivrait ; parce que suivant le Psalmiste, Jésus, dans le chemin de cette vie, boira de l'eau du torrent (sous- entendez desa passion,) afin que. en étant rempli, il en refluât sur sa Mère souffrante, laquelle, à son tour saturée d'amertume et de tristesse, renverrait à son Fils le trop plein de son Cœur affligé1. » Ame pécheresse, vous entendez tout ce que pour votre amour ont l'ait Jésus-Christ l'Homme-Dieu, et Marie sa sainte Mère. Ah! que vos péchés ont coûté au Sauveur Jésus et àMarie! « Pour les péchés de son peuple elle vit Jésus dans les tourments. » Allez souvent à cette Douloureuse Mère et la priez avec instance de daigner vous obtenir de son Fils la vraie connaissance de vos péchés, une sincère contrition, un sé- rieux amendement, enfin de vous communiquer la douleur qu'elle eut toute sa vie et particulièrement dans la pas- sion.

I. Je ne puis comprendre pourquoi Dieu, dans L'Exode, charge Moïse de dire à Pharaon, roi d'Egypte, endurci dans ses péchés : Voici ce que dit le Seigneur: Laissez aller mon peuple pour qu'il m'offre des sacrifices, parce que cette fois je vais envoyer Imites nus plaies sur votre cœur. Comment et quand, direz-vous, le juste vengeur des crimes a-t-il envoyé

toutes ses plaies sur le cœur de Phara si des Egyptiens?

Est-ce en les submergeant dans la mer bouge pour la dureté de leurs cœurs? Ce fut particulièrement, repond le docte Qua- resme*, au massacre des premiers-nés; ils étaient le cœur de

1 S. Bern. Homil. in Et. stabat. - - Quaresm tom. :t. c. 8.

CONSID] Il M [ON XI. VII. 83

leurs parents; en effet, si les enfants souffrent, Le cœur des parents esl aussi dans la souffrance.

0 pieuse Vierge el Mère d'amour et de douleur, ne pourra- t -il pus êtredil aussi de vous: J<' rus envoyer toutes mes plaies sur votre Cœtir? surtout lorsque vous avez contemplé avec une souveraine amertume, en silence et à travers des larmes sang, votre premier-né, votre unique, le bien-aimé de votre Cœur, suspendu vivant, pendant trois longues heures, sur un gibet infâme, comme le dernier des malfaiteurs. 0 Souveraine du monde, si avec vous le soleil a pâli, si la terre a été ébran- lée jusque dans ses fondements, si les pierres les plus dures mit été brisées, qui pourra dire votre affliction? (Juel spectacle lugubre, lamentable! Le corps de Jésus reçut dans la Passion plus de cinq mille blessures, «les auteurs vont jusqu'à six mille, el 1»' saint Cœur île sa Mère les ressentit toutes. Quel instru- iii4 ' m t produisit autant de souffrances sur les corps des martyrs, que le glaive de Siinéon dans le Cœur de Marie? Voici commenl s'exprime un de ses dévots serviteurs1 : « Elle vit son Fils étroitement enchaîné, et ne put le délier; elle vit son corps chargé de plaies et ne put les panser; elle vit le sang lui couler sur les yeux, son visage couvert de crachats, e1 ne [tut les essuyer; elle le vit accablé sous le poids de la croix, chancelant, tombant, prosterné à terre, el Une lui étail pas permis de le secourir, de le soutenir, de le relever; elle le vit de ses yeux assailli par tous, traité avec barbarie, avec la cruauté de hèles féroces, el impossible a elle d'y mettre obstacle et de les éloigner; elle l'entendit «riant : J'ai suif: el n'eut pas une goutte d'eau à lui présenter; elle vit sa tète penchée, et ne put la soutenir; elle le \it triste, déseié, L'âme abîmée dans une extrême amertume, et il n'y avait personne pour le consoler; elle connut que toute force lui manquait, et pas moyen de le soulager d'aucune maiiiiie: elle le contempla expirant, et ne pouvait pas même lui rendre le dernier devoir de la piété maternelle el lui h-r- mer les yeux. « N'est-ce pas vrai que cette parole s'accomplit

' R I'. Gasp. Tansch. S .1. fol. 19.

8-4 LA MÈRE D'AMOUR ET l>£ DOULEUR.

en elle : J'enverrai cette fois toutes mes plaies sur votre Cœur' ? 0 Cœur affligé de Marie, comment ne fùtes-vous pas brisé en mille pièces? 0 triste scène ! lourd martyre du cœur! Elle fut la vraie Reine des martyrs, et tout ce qu'ils ont souf- fert est léger, comparé à ses tourments. La Genèse dit qu< toutes les eaux qui sont sous le ciel se rassemblent dans un même lieu, et que La terre apparaisse. Et il fut fait ainsi ; toutes les eaux se réunirent dans un même lieu qui fut appelé mer. » Au temps de la passion et de la mort de Jésus-Christ, les eaux et les flots de la tribulation se rassemblèrent dans l'âme et le Cœur de la Douloureuse Yierge comme dans un même lieu. 0 mer de douleur, si immense et profonde que la créature ne peut la passer: Quoniam intumuerant aquœprofunditorrentis, qui non potest transvadari 2.

Soyons dans fa douleur, mes bien-aimés frères, avec notre Douloureuse Mère; imprimons fortement les douleurs de son Cœur affligé dans le nôtre : prendre part aux tristesses et aux souffrances d'une telle Mère, c'est la marque des fils dévoués et des vrais serviteurs de Marie. 0 pieuse Reine, puisse votre douleur s'attacher désormais à mon cœur comme elle était at- tachée au vôtre. Oui, je m'attristerai et d'avoir offensé votre Fils par mes péchés et de vous avoir contristée. Pardon! ma Souveraine; j'ai fait mourir votre aimable Fils: j'ai mérité el la mort et l'enfer. Mais je ne désespère pas, parce que votre miséricorde, ô Jésus, votre tendresse, ô Marie, sont plus grandes que mes iniquités. Oui, je m'afflige de mes péchés, du fond du cœur et de toute L'étendue de mon âme. Secourez-moi, ô Mère de miséricorde, et ne laissez point périr éternellement celui (pic votre Fils a racheté au prix *U' tout sou sang.

' Excd * Ezech. iT. ...

CONSIDERATION XLVIII.

La B. Vierge et Mère Douloureuse fut la première à honorer les plaies sacrée? de Jésus-Christ, sou Fils bien -aimé.

< l ItltlB IV ODOREM.

Quelles sont ces plaies au milieu de vos mains? Et il dira: Je les ai reçues dans la maison de ceux qui m'aimaient. (Zachar. 13. 6.)

1 . La Sunamite ayant perdu, par une mort prématurée, son fils unique tendrement aimé, partit immédiatement, désolée et en larmes, pour aller trouver le prophète Elisée; et étant arri- \ ers l'homme de Dieu, sur la montagne, elle se jeta à ses pieds, et (iiézi s'approcha d'elle pour l'éloigner. Mais l'homme de Dieu lui dit : Laissez-la : son àme est dans l'amertume. 0 pieuse Souveraine, ù Mère d'amour et de douleur, votre àme l'ut dans une véritable amertume quand vous perdîtes votre Fils unique et bien-aimé, par la mort violente et prématurée de la croix. Vous accourûtes, comme la Sunamite, aux pieds non d'Elisée, mais de votre divin Fils, baisant affectueusement el ayee une tristesse ineffable les plaies sacrées de ses pieds, qne vous pouviez atteindre, suivant saint Grégoire de .\azianze1. Voici commenl ce Père, dans sa tragédie du Christ souffrant, l'ait parler la Douloureuse Vierge :

Par vu- pieda sacrés, que je baise a . «•<■ amour, ayez pilié de moi.

Sainl Germain ' rapporte qu'elle vénéra avec nne grande 1 S. Grès. Naz. in Iras, et p. Gretser. S. .1. de cruce. * In Theoria.

«G LA MÈRE D AMOUR ET l>E DOULEUR.

dévotion ot une tendresse inexplicable les saintes blessures «le Jésus déposé de la croix. « La Vierge Marie, dit-il, baisait les mains percées de clous de Jésus descendu de la croix; elle bai- sait ses liras et sa poitrine ouverte par la lance; elle baisait ses pieds percés. Elle arrosa et lava de ses larmes toutes ses plaies en pleurant sur cbacune; elle embrassait sa tète en la pressant sur son sein. » Comme une abeille industrieuse dont la de\ ise est : Elle court à l'odeur, tantôt elle baisait comme des roses du printemps les mains percées qui ont fait le ciel et la terre; tantôt bumblement prosternée devant les pieds qui pendant tant d'années avaient couru à la recberebe de la brebis perdue, elle en baisait les plaies avec respect, tantôt elle s'inclinait vers la poitrine, regardant pieusement dans ce sanctuaire ou- vert de la Divinité, et adorant avec la [dus tendre affection. < >b ! que de fois elle désira mourir avec Jésus et lui donner cœur pour cœur. Ame chrétienne, que faites-vous? pourquoi demeu- rez-vous sans rien faire? Imitez cette abeille diligent i et labo- rieuse, et, avec elle, courez à l'odeur du parfum des roses; je veux dire, des plaies de votre amour crucifié. « Imitez, dit saint Bernard, la diligence des abeilles, en confectionnant avec soin le miel de la dévotion; monte/, au paradis de la charité. 11 n'a pas été élevé en croix afin de se montrer difficile pour ceux « f 1 1 i veulent venir à lui, mais afin que tous puissent le découvrir plus facilement. Approchons donc avec confiance de ce paradis de délices, reconnaissez-le à ses bras étendus, recevez les sen- timents affectueux qu'il prépare à vos embrasaements en vous invitant aux siens à votre tour, et en vous criant : Revenez, reve- nez, ô Sunamite, afin que nous vous regardions. Entrez donc, ô âme, dans i e paradis le meilleur de tous les paradis ; entrez maintenant par la seule pensée, p >ur que plus tard vous puis- siez entrer d'âme et de corps dans le céleste paradis. Il ne faut pas jouir à la bâte de ce paradis, niais voler sur chacune de ses fleurs e1 en sucer tontes les feuilles, aller tantôt à la main droite, tantôl à la gauche qui répandent des gouttes et des ruisseaux de sang. Répétez fréquemment dans cette contem- plation : « Rendez-moi la joie de votre assistance salutaire; »

A ONSID] l: \l l(>\ XI. VIII. 87

comme une abeille qui bourdonne en voltigeant jusqu'à ce qu'elle entre dans La finir. Approchez-vous enfin du Cœur très- humble du très-élevé Jésus par la porte de son côté ouvert par ia lance. est caché un trésor de charité ineffable ; se trouve mu' nouvelle dévotion; on en retire la grâce des larmes, on y apprend la mansuétude, la patience dans l'adversité, la com- passion envers les affligés; on y trouve surtout un cœur con- trit et humilié. Jésus désire vos caresses, il les attend la tête couronnée d'épines inclinée vers vous pour vous inviter au baiser de paix : Rendez-moi la pareille, vous dit-il; soyez touché de compassion sur mes blessures, et placez-moi, tel que vous me voyez, comme un cachet sur votre < oeur, comme un cachet sur votre bras, afin que dans toutes les pensées de votre cœur et les opérations de votre bras vous paraissiez à mes yeux tel que vous me voyez vous-même '. » Telles sont les paroles du doux saint Bernard que Jésus en croix serra un jour daus ses bras, et que Marie daigna nourrir de son lait virginal.

_. [.es Pères reconnaissent en Joseph, fils de Jacob, une remarquable figure de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Joseph est dit le fils qui va toujours croissant et s'augmentant ; Jésus croissait en âge, en sagesse et en grâce devant Dieu et les hommes. Joseph accusant ses frères d'un péché, encourut leur envie; .lé-sus montrant leurs crimes aux Juifs ses frères, s'attira leur plus grande haine. Joseph fut vendu vingt pièces d'argent par Juda et ses frères; Jésus fut vendu trente pièces d'argent par Judas [scariote pour être livré à la mort. Joseph fut dépouillé de sa tunique de diverses couleurs par ses frères, et de son manteau par la femme de Putiphar; Jésus fut dé- pouillé de ses habits par les soldats : /A- se sont partagé mes rr- tements >■/ ,tut tiré mn robe au sort. Joseph mis en prison avec l'échanson ••! le panetier, y annonce ;i l'un la vie et à l'autre la mort; Jésus crucifié entre deux larrons, sauve l'un et ré- prouve L'autre. Il est dit de Joseph: Il fut humilié par les

1 s. Bern. de l' iss. Dom. V c. i \.

88 LA MÈRE D AMOUR E\ DE DOULEUR.

(•haines qu'on lui mit aux pieds, le fer transperça son Ame de douleur; oh! combien Jésus fut humilié sur l'infâme gibet de la croix les clous percèrent ses pieds et ses mains, et la lance son Cœur. Les frères impies de Joseph envoyèrent à son père sa tunique teinte de sang et déchirée : Voyez si ce ne seraitpas la robe de votre Fils. 0 Douloureuse Mère, vous aviez revêtu Jésus votre aimable Fils d'une tunique plus précieuse, vous lui aviez tissu, par l'opération du Saint-Esprit, le vête- ment de notre chair, c'est-à-dire de l'humanité. Voyez mainte- nant comment ces impies déicides vous la remettent déchirée et teinte de sang : Reconnaissez si c'est la robe de votre fils.

<> mon esprit! dites-moi quels étaient les sentiments de la pieuse Mère quand elle vit son aimable Fils déchiré, mis à îrmrt par l'impie Synagogue. « Elle était d'autant plus portée à la compassion, dit Mallonius ', qu'elle aimait plus ardemment Jésus-Christ; et par conséquent elle pouvait bien dire qu'une bète féroce avait mis en pièces et dévoré Jésus. » Avoir sous les yeux ses mains percées cruellement, les larges plaies de ses pieds, l'énorme blessure de son côté, tout le corps déchiré, ensanglanté, livide et sans vie : quelle scène lugubre et la- mentable ! « A cette vue, dit Nébridius -, elle s'approche de la tète et ôte les épines avec beaucoup de gémissements; puis, détachant son voile, elle se mit à essuyer le s tng «les yeux, à nettoyer les blessures de tout le corps. Elle allait pleurant, explorant, examinant tous les membres et les baisant. Elle examinait, au milieu de ses sanglots, l'ouverture des clous dans les mains et les pieds, et y mettait le doigt, la plaie du coté et y introduisait la main pour sonder et mesurer la pro- fondeur et l'étendue de la divine charité envers les hommes. Et comme elle n'avait pas le vin et L'huile du Samaritain, elle approchait ses yeux «les plaies et y répandait d'abondantes larmes pour les laver, ne pouvant les guérir. Enfin, de ses doigts elle lui fermait la bouche et les yeux, et pour adieu su- prême ajoutait un baiser nié!.'' de larmes. Elle .'levait souvent

' In SS. Synd c. 2. 2 In fasc. myr. o. 21.

3IDÉRÀTI0M XLVIIl. H!»

les yeux vers le ciel etoflfrail pour les hommes à Dieu le Père les blessures, le sang, les souffrances et la mort de rou Fils, »

Il est croyable que la désolée Mère de Dieu et des hommes lit monter vers le Père céleste, comme le dit saint Bernard, ces paroles plaintives ou quelques autres semblables : « Regardez, Seigneur, ù Père saint, de votre sanctuaire et de votre sublime séjour des cieux : reconnaissez la vraie tnniqne de votre (ils Joseph: une bête "•nielle l'a dévoré et a foulé aux pieds son vêtement dans sa fureur; elle a souillé toute sa beauté dans ce qui reste de son sang, et voilà qu'elle lui a laissé cinq blessures Lamentables. Tel est, Seigneur, le vêtement que votre innocent Fils a abandonné entre les mains de l'Egyptienne criminelle1.» 0 tourment accablant pour le Cœur de Marie dans lequel se réunirent toutes les douleurs, de même que toutes les eaux se réunissent dans la mer. 0 montagne de Gelboë, ou plutôt du Calvaire, que ni la rosée ni la pluie ne vienne sur toi, puisque, sur ton sommet a été mis à mort le Sauveur d'Israël. Une voix a été vrainieul entendue dans les hauteurs, voix de lamenta- tion, de deuil et de pleurs : c'est la voix de Marie, la Doulou- reuse Mi re, pleurant son Fils et ne voulant pas être consolée paire qu'il n'était plus. () mon esprit, approchez-vous aussi el considérez loul ce que l'Homme-Dieu a fait pour votre amour el le prix immense qu'il a payé en donnant son sang pour vos péchés. En retour, ô mon esprit, que rendrez-vous à votre Dieu, votre amour crucifié, el à sa très-sainte Mère?

::. I t voilà pourquoi Marie, l'affligée Mère de Jésus, doit être regardée et honorée comme ayant été la première à pratiquer la dévotion aux cinq plaies du Sauveur. Elle eut ensuite pour imitateurs Baint Jean, Joseph d'Arimathie, Nicodème, Marié- Madeleine, et quelques autres âmes pieuses présentes au Cal- vaire. Ils vénérèrent et baisèrent dévotement les cinq plaies du Seigneur avant que L'on ensevelît son corps adorable. « Il n'y a point de doute, dit Adrien Lyrée *, qu'ils n'aient vénéré par Leurs tendres baisers et les mains et les pieds détachés de la

' S, i:< in. Serm. do, Pass. l>. * De Chr. pat. I. •>. <•.'/.

90 LA MÈRE DAMODB ET DE DOULEUR.

croix, i) car ces âmes pieuses n'ignoraient pas que ces plaies sacrées fussent le prix de la Rédemption, le salut du monde, le trésor de l'Eglise, le soulagement des infirmes, le gage du divin amour, l'universel et le plus sur asile puissent se re- tirer tous les pécheurs. « Quand une mauvaise pensée m'im- portune, dit le grand saint Augustin ', je recours aux plaies de Jésus. Quand la chair m'accable, je me relève au souvenir des plaies de mon divin Maître. Si le démon me tend des embûches, je recours aux entrailles de la miséricorde de mon Sauveur, et il s'éloigne de moi : en toutes les adversités je n'ai pas trouvé de remède plus efficace que les plaies de Jésus-Christ; en elles, je dors tranquille et me repose. »

4. Dans* l'ancienne loi Dieu avait fait un commandement de racheter le premier-né : « Vous recevrez cinq sicles par tète, mesure du sanctuaire2. » Au prix de ses cinq blessures, Jésus- Christ a racheté, non le premier- seulement, mais l'univers entier, de la servitude du péché. Pécheurs, espérez tous : vous avez été achetés un grand prix; glorifiez, et />ortez Dieu dans votre corps .

Pour combattre contre Goliath, David choisit cinq pierres dans le torrent, et par elles il renversa le robuste géanl ; par ses cinq plaies Jésus-Christ a renverse, vaincu, désarm démon.

Isaie désigna cinq villes de refuge pourraient se retirer les Egyptiens convertis à Dieu quand ils auraient commis quel- que délit : En ce temps-là il y aura cinq villes en Egypte, etc 4. Ame chrétienne, si vous avez offensé bien et mérité la mort, la sainle et Douloureuse Vierge vous montre aussi cinq cités île refuge, ce sont les cinq plaies sacrées de son Bien- aimé dans lesquelles vous trouverez une retraite sûre contre toutes les incursions de vos ennemis, a trouver, dit saint Augustin, un repos assuré, sinon dans les plaies du Sau- veur '. »

' lu Matth. c. 21. 22. Num. :s. 47. " I Corinth. 6. 20. 'Isa. 19. I*. :' S. Auir. in Qonl

CONSIDÉRATION XI.VII1. !>l

... Judith et tout son peuple, dans leur (liant de victoire, se glorifiaient que les yeux d'Holopherne eussent été épris par la vue drs sandales d'une femme; ils chantaient: Ses sandales ont captivé ses veux '. Pourquoi la chaussure de Judith le cap- tiva plutôt que son regard se trouvent ordinairement plus de charmes? Elle avait misa ses sandales, répond Isidore C.lanis, cinq rubis qui représentaient les cinq plaies de Jésus- Christ, par la vertu desquelles le tyran fut saisi, surmonté et vaincu. Si vous voulez, àme chrétienne, vaincre le démon et la chair, voilà le plus efficace remède. « Telle est la vertu des plaies de Jésus-I lnïst, dit saint Bernard, que leur souvenir met en fuite toute l'armée des pèches -. »

l-'.t les cinq pains rassasiant cinq mille hommes? Voilà une figure des cinq plaies de Jésus crucifié par lesquelles il soulage l'univers. « Vous trouverez plus d'avantages, dit Thomas de Rompis, dans les plaies du Sauveur que dans la possession du monde entier '. »

In maître donna cinq talents à son serviteur pour les faire valoir et en gagner cinq autres. * Les cinq talents sont nos cinq Ben a ; par la vertu et la méditation des cinq plaies sacrées do Jésus, nous pouvons les préserver de la perdition. « Les plaies du Rédempteur, dit le I!. Pierre Damien, sont au nomhrc de cinq, parce que nous étions atteints de hlessures dans nos cinq sens, et par ses cinq plaies nous sommes rétablis pour le saint perpétuel. ■»

nui ignore combien furent célèbres les cinq portiques delà piscine probatique >•■ tenait d'ordinaire une multitude de malades dans l'espoir de recouvrer la santé du corps? Oh ! voici cinq portiques dans les plaies sacrées du Rédempteur demeurent en sûreté el sont guéries les âmes languissantes.

I. es plaies ilu Sauveur, dit saint Augustin, me fournissent un refuge assuré.»

Les cinq vierges prudentes tinrent leurs lampes garnies et

» Judith: !<;. il. 2 S. lient, serm. M. in. Gant. B Med. 22 de pass. Christi. —•Math. 25. 15.

92 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

allumées, et furent admises aux uoces célestes de l'Agneau: Et celles qui étaient préparées entrèrent arec lui aux noces. Si vous aspirez aux noces et au festin du divin Agneau, ayez soin, chrétiens, de vous pourvoir de cinq lampes ardentes, c'est-à- dire d'une dévotion sincère et constante pour les cinq plaies sacrées de Jésus-Christ : car les plaies du Sauveur, dit le même évêque d'Hippone, sont pleines de miséricorde, pleines de piété, pleines de douceur et de charité '. Quel pécheur fut ja- mais repoussé en se réfugiant avec un cœur humhle et contrit dans ces saintes et vénérables blessures? Je vis, dit le Seigneur, et je ne veux pas la mort du pécheur, mais sa vie; je n'ai pas supporté la souffrance et les blessures pour vous réprouver, mais pour vous sauver à jamais. 0 mon esprit, prenons cou- rage et espérons.

6. Je me souviens ici du fermier d'iniquité qui fut diffamé auprès de son maître pour avoir dissipé ses biens, et en con- séquence fut forcé à rendre compte de son administration: Redde rationem. Se sentant coupable, et inquiet de ce qu'il devait faire, il médita plusieurs moyens, et entre autres il se dit en lui-même : « Que ferai-je, puisque mon maître me retire la gestion de ses affaires? Je ne puis bêcher la terre, j'ai honte de mendier mon pain. » Pourquoi vous plaindre, paresseux, de ne pouvoir creuser la terre? Je vais vous la montrer toute la- bourée, vous n'avez pas besoin de la creuser davantage : Foderunt manusmeas etpedes mcos ; ils ont creusé mes mains et mes pieds. Et je vais vmis montrer aussi le sacre Comr de Jésus, votre Sauveur, votre garant, labouré parle ferdelalam-e : L'an des soldats avec sa lance lui ouvrit le côté. Entrez avec un cœur contrit et humilié dansée sillon, et vous y trouverezu n trésor avec lequel vous pourez satisfaire abondamment pour '•Mites vos dettes". Un passage de saint Bernard trouve ici sa place : « Si cela n'est pas même possible, il lui mettra devant eu\ Jésus crucifié pour le faire habiter lui-même, et sans peine, dans les cavités de la pierre dans lesquelles il n'a point

1 S. A.Ug. in .Mail. c. 21.

I ONSIDÏ R \ I [OH XLVII1. 93

hravaillé. Kl il n'est pas à craindre qu'il éprouve un refus puis- qu'il est invité à entrer : Entrez, dit-il, dans la pierre, cachez- vous dans l'ouverture de la terre, loin de la crainte du Seigneur, et de la gloire de sa majesté. A L'âme Faible et lâche qui dit avec L'homme de L'Evangile : Je ne peux labourer, fui honte de latider l'aumône, nn creux est montré pour se cacher jus- qu'à ce qu'elle soii fortifiée et en état de se creuser à elle-même des cavités dans la pierre pour entrer par la vigueur et la pu- reté du cœur dans L'intérieur du Verbe '. »

7. Tu ambassadeur avait été envoyé par Sa Majesté ^Catho- lique le roi d'Espagne à la #répuhlique de Venise. Comme au milieu de grands honneurs les Vénitiens lui montraient avec ostentation leur trésor, et en particulier de grands coffres pleins d'or, richesses qu'ils regardaient comme étant d'un prix incomparable. L'ambassadeur leur demanda en riant si les coffres avaient nn fond. A la réponse affirmative, il répliqua: Mon roi a un trésor sans nombre et sans fond; faisant ainsi allusion aux mines d'or et d'argent dans le Pérou, l'Amérique et les Indes .

Ame chrétienne, voulez- vous un trésor sans nombre et sans fond ? Approchez-vous avec Marie du Cœur profond de Jésus et vous le trouverez. Le négociant de l'Evangile vendit tons ses biens pour acquérir le champ dans lequel il avait découvert un trésor. Voilà dans les plaies sacrées du Sauveur un trésor caché plus précieux que tous les trésors et toutes les richesses do monde : Bon trésor, dit saint Bernard, que l'on découvre dans le champ labouré du corps de Jésus-Chrisl ;î. Pourquoi tanler ? Pourquoi ne pas travaillera le mettre à découvert ? Ne dites pas, comme le fermier infidèle : /e ne /mis creuser la terre; c'est le mot d'un homme paresseux et perdu. Allez, et confessez votre faute.

Bern. serm. 62. in Cant. - Portunat. Tr.de ss. Eucharist. dise. 32.

3 s. Bera. «il a l.\ r.

CONSIDÉRATION XLÏX.

I.a B. Vierge et Mère Douloureuse reçoit sur ses genoux son Fils déposé de la croix et répand des larmes ainères.

lALOR II, M 11 IHBBES,

Ils regarderont vers moi qu'ils ont percé ; et ils pleureront

amèrement, tomme onpleureun filsunique. (Zach. 1:2. 10.)

1. Je ne m'éloignerai pas de la vérité, si je compare le Cœur de la Vierge affligée, qui brûle d'amour pour son Fils souffrant et pour le genre humain, à un fourneau chimique d'où sont distillées, au moyen de syphons et sous l'action du feu, de précieuses et abondantes larmes, et sur lequel on in- scrirai! la devise : Del'ardeur infime de son Cœur ; ou, si nous préférez j celle-ci :

La chaleur produit la pluie.

C'est un élégant symbole. Ce feu du divin amour, dit le B. Pierre Damicn ', se éhange en eaux parce que la com- ponction des larmes est produite par le feu de l'amour divin. 0 précieuses larmes de l'excellente Vierge, qui lui sont arra- chées par l'amour qu'elle a pour son Fils 1 Elle a dit elle-même à sainte Brigitte : « Les larmes jaillissaient de mes peux comme !e sang qui s'échappe fies veines, n E1 l'historien Théophile*: La Vierge Marie avait tellement pleuré en se désolant, que ses yeux étaient rouges de sang et ses paupières enflées ; ses

* Opusc. 63. c. 13. - de B. Y.

i ONSIDÉR \ I ION XI. IX. 93

joues roses étaient altérées et sillonnées, et des larmes de sang coulèrent de ses yeux tant elle pleura amèrement. « 0 Lugubre spectacle '. D'un côté, le Fils de Dieu, Sauveur du monde, mort et criblé de blessures : et de l'autre, sa Douloureuse Mère, la Souveraine du monde, transpercée du glaivede la douleur H déplorant par «1rs larmes intarissables la cruelle mort de son Fils et nos péchés. Quel cœur serait assez cruel et assez dur, pour n'être pas brisé par la mort de son Sauveur, fendu par la vue de son sang divin, attendri par les larmes de sang de la sainte Mère. Le diamant, si dur, sur lequel ne peuvent rien ni le fer ni le feu, arrosé du sang d'un agneau ou d'un chevreau, peut être fendu et rompu, selon saint Isidore ' . El VOUS, pécheur, vous auriez un cœur [dus dur que le diamant : Le rocher frappé deux fois par Moïse, comme en signe de croix, dit saint Augustin *, produisit des flots abondants et comme un fleuve. Et vous, pécheur invétéré et récalcitrant, vous serez plus dur que la pierre et les rochers! si le doux Sauveur, crucifié et mort pour vous, et son affligée Mère ne vous paraissent pas dignes de vos larmes et de votre compas- sion, comment au moins ne pleurez-vous pas vos péchés sans nombre qui ont tué le Fils de Dieu et contristé sa Mère ?

2. Les saintes Ecritures disentque laSunamite, plongée dans l'affliction, prit sur ses genoux et serra contre son sein son tils unique et bien-aimé qui venait de mourir, et le pleura ami relient '

Agar pleura de même son fils Ismaël mourant de soit' dans

le désert ' .

Respha, revêtue d'un ciliée sur lequel elle se coucha, pleura nuit et jour l'indigne mort de ses fds mis en croix par les Gabaonites, et ne cessa pas depuis le commencement de la moisson jusqu'à ce que l'eau du ciel tombal sur eux '.

Anne pleurait son (ils Tohie, avec des larmes intarissables, de manière à paraître presque accablée et anéantie par la vi-

•Lib 12. et. «Tract. lO.inJoan -*TVReg. I. 20. Gen. 2t. 16. 5II Reg. 21. 10.

<)i; LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

vacité de ses gémissements et de son chagrin. Elle disait : Hélas ! mon fils, lumière de nos yeux, bâton de notre vieillesse, consolation de notre vie, pourquoi vous avons-nous envoyé faire un si lointain voyage ' ?

Eve, la mûre de tous les vivants, quand elle trouva son cher Abel tué par Gain, son perfide frère, et baignant dans son sang, le pleura dans la plus grande tristesse \

Et la femme du jugement de Salomon, quand elle entendit le roi demander un glaive pour couper en doux l'enfant vi- vant, qui était véritablement son fils, poussa de grands cris et pleura, car toutes ses entrailles étaient émues sur le sort de son enfant 8.

Cependant, ce ne sont que des ombres. Montons à la montagne de la myrrhe et à la colline de l'encens, et voyons-y la Mère affligée de l'Ilomme-Dieu assise au pied delà croix, tenant sur ses genoux le corps de son aimable Fils. 0 scène cruelle et digne de lamentations ! Qui jamais entendit ou vit un pareil spectacle ?

Quand la B. Théociie, d'après le témoignage de Métaphraste, eut vu son tils, saint Calliope, qui fut martyr sous le préfet Maxime, cloue la tète en bas sur une croix pour la foi de Jésus-Christ, et qu'elle eut reçu son corps entre ses bras, la véhémence de la douleur et de son amour maternel la fit expirer en le pressant sur son sein l.

Que dis-je, àme chrétienne? La Douloureuse Mère de Jésus ne serait-elle pas morte mille fois, alors surtout qu'elle reçut sur son sein maternel, au pied de la croix, son aimable Fils couvert de plaies dans tout son corps, ensanglanté et privé de la vie? Là, dit saint Germain , après un tleuve de larmes elle répandit enfin des larmes de sang. Voici comment Ludolphe le Chartreux fait parler la Douloureuse Mère t.-uant sur son sein son Fils mort : « Rien de plus doux pour moi que de mourir avec vous, et rien de plus amer, ù Jésus mon Fils,

1 Tob. H», i. »ExTradit. Bebrœor. supra Gen. i. " Ml Reg. 3. 26.

"Meliiphr. 7 nprilis. sApud Mail. m fol. 152.

CONSIDÉRATION XI. l.\. 97

que de vivre après votre mort. Vous m'étiez un frère, un époux, un fils ; vous étiez tout pour moi, et me voilà orpheline d'un pèrèj veuve d'un époux, privée d'un fils; j'ai tout perdu. 0 mon Fils ! que ferai-je désormais 1? »

<> chrétien, si votre cœur n'est pas ému de la cruelle et in- nocente mort de votre Rédempteur; si les larmes de sang de sa Mère ne vous fléchissent point ; je crois, je suis fermement persuadé que c'en est fait de vous et de votre salut. Le voile du temple, à la mort du Sauveur, fut déchire du haut en bas; les plus dures pierres se brisèrent, la terre ébranlée dans ses fondements trembla, les tombeaux s'ouvrirent... Et vous, chré- tien, si toutefois vous êtes digne de ce nom, vous reste/, iné- branlable : Vous ne regrettez pas vos péchés ! Vous n'avez point de compassion pour Jésus crucifié et sa désolée Mère : 0 caillou ! ô rocher ! Coulez, larmes, coulez, hélas ! parce qu'il n'est personne pour la consoler, de tous ceux qui lui étaient chers.

3. Plutarque raconte du roi Achis qu'il était doux, juste et applique à la conservation de ses sujets ; et comme il ne pou- vait souffrir plus longtemps leurs mœurs dépravées et leurs viees, il employa toutes ses peines et ses soins à remettre la chose publique en meilleur état, et à les exciter à la vertu. Mais de méchants et ingrats citoyens ne pouvant supporter le bon esprit du roi et donnant à tous ses actes une mauvaise interprétation, conspirèrent, se jetèrent sur lui à main armée et l'assassinèrent en lui faisant plusieurs horribles blessures. <>r, la mère affligée de ce bon roi, ayant appris la nouvelle du meurtre, accourut auprès du cadavre étendu sur la place pu- blique, le prit dans ses bras, le pressa sur son cœur en répan- dant des larmes, et élevant fréquemment les yeux vers le ciel, elle s'écriait en pleurant: Hélas ! mon (ils ! votre grande bonté, votre extrême douceur, et votre humanité nous ont perdus vous et moi.

Que dis-je, àme chrétienne? Voilà le corps, non d'un autre

1 In vita ChristL

II. 7

98 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

Aehis, ou d'un innocent Abel, ou d'un Amasa, gisant sur la voie publique, lacéré, couvert de boue et de sang : « Amasa était étendu, couvert de sang, au milieu du chemin ; » mais le corps adorable du Fils de Dieu, le souverain Roi, détaché de la croix et reçu surles genoux de sa virginale Mère plongée dans la tristesse. Adrichome l'assure * : Détaché de la croix, il est remis sur le sein maternel: on montre encore le lieu. Ah : qui nous expliquera la vive douleur du saint Cœur de la fidèle Mère quand elle explorait toutes les blessures de son cher Fils, détachait la couronne d'épines de sa tète avec ses mains ensanglantées, et lui rendait les derniers devoirs par ses tendres baisers et par ses larmes? Combien de fois, les yeux en sang élevés vers le ciel, on l'entendit pousser la même plainte que la mère d'Achis? Hélas ! 6 mon Fils, votre excès de bonté, votre grande douceur et votre humanité nous ont perdus tous deux : Gens ingrats, malheureux pécheurs, quel mal vous a fait mon cher Fils? Est-ce d être venu dans le monde pour vous sauver et vous délivrer du joug du démon et de la mort? Est-ce d'avoir rendu la vue aux aveugles, fait marcher les boiteux, parler les muets el entendre les sourds? Est-ce d'avoir guéri les malades, purifié les lépreux, délivré Les possédés du démon, ressuscité les morts? Est-ce parce qu'il passait sur la terre en faisant dubien à tous? Mortels malheu- reux et ingrats! qu'a-t-il pu vous faire déplus, qu'il ne l'ait fait. C'est donc pour sa récompense que vous le suspendez au gibet de l'infamie, et le déchirez de mille blessures, ce Père si aimant, le plus grand des bienfaiteurs? Telle est doue la re- connaissance qu'exigeaient de votre part ses mérites infinis? n Jésus! o Bénoni, vrai homme de douleurs, qui me donnera de mourir avec vous? Chrétiens, écoutez tons, et chacun de vous en particulier, les lamentations de votre Mère. Comment pourriez-vous ne pas vous affliger avec elle du fond de votre cœur? Quoi! dit saint Anselme ' verriez-vous donc, sans pleu- rer vous-mêmes, les larmes de votre aimante Souveraine?

1 In descript. Jerus. n. -J.j.'i. * De Excel!. Virg. c. 3.

CONSIDÉRATION XUX. 99

Vous demeurez l'œil sec, quand le glaive de douleur a trans- percé son âme ?

A. Il est dit, au Livre des Rois, que l'épouse de l'hinéès mou- rut en apprenant que l'arche de Dieu avait été prise, que son beau-père et son mari étaient morts : « Et comme elle allait mourir, les femmes qui étaient auprès d'elle, lui dirent : Ne craignez point, car vous avez enfanté un fils. Elle ne leur ré- pondit rien, n'y faisant pas même attention, mais elle appela SOU fils Ichabod, c'est-à-dire est la gloire? en disant : Israël a perdu sa gloire : ce qu'elle dit à cause que l'arche de Dieu avait été prise. » 0 affligée et Douloureuse Vierge, vraie Mère d'amour et de douleur ! dites-moi, je vous prie, combien se désola votre àme quand le corps inanimé de Jésus, des- cendu de la croix, fut déposé à terre et ensuite placé entre vos bras par Joseph d'Arimathie et Nicodème? En ce moment, ne dites-vous pas avec l'épouse mourante de Phinéès : Israël a perdu sa gloire? ou avec Jérémie : La joie de notre creur s'est évanouie; nos chants de réjouissance se sont changés en deuil'.

La couronne est-elle donc ainsi tombée de notre tète? Tel •tait le gémissement des fdles désolées de Sion, lorsqu'elles avaient tout perdu : le roi, l'empire, la ville et le temple : Ainsi donc est tombée la couronne de notre tète? 0 Heine compatissante et affligée, Mère d'amour et de douleur, vous avez perdu davantage dans votre doux Jésus enlevé par une si cruelle mort. Hélas! ma Souveraine, comment la couronne est-elle tombée de votre tète et de la nôtre?

... Au rapport de Deuter ', Argie, reine de la (irèce et fidèle épouse du roi Polvnice, apprend d'un messager que son époux ;i été tué dans un combat livré pour la défense de la patrie, après avoir reçu plusieurs blessures; plongée dans L'affliction, elle vole sans retard, au milieu même de la nuit, sur le champ de bataille et trouve parmi les morts, à. la lueur d'un flambeau, le corps de .sou époux chéri, dépouillé, livide, couvert de

1 Thren. .». 16. 2 F. 77.

100 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

blessures et souillé de poussière. Que fait-elle alors? Hélas! l'excès de sa douleur et son amour ne lui permettaient plus ni de pleurer ni de parler : elle se jette sur le corps de Poly- nice, l'arrose de ses larmes brûlantes, baise ses horribles plaies, tombe évanouie, et expire victime de sa tendresse au- près de son époux.

Ce n'est pas cette reine de la Grèce, ô chrétien, c'est la Heine de l'univers, c'est l'affligée Marie, Mère de Dieu, que je vous présente sur le mont Golgotha. Examinez cet affligeant et inouï spectacle. Celui qui redressait les vivants, est étendu sans vie et repose sur le sein de sa Mère; autour, des amis fidèles pleurant, se lamentant à la vue du corps de Jésus tout lacéré. Les yeux du Sauveur, plus beaux que les astres du ciel, étaient éteints et pleins de sang; ses cheveux arrachés et entortillés par le sang desséché, comme un filet; sa bouche froide comme la neige, le nez déchiré ; son visage que désirent contempler les Anges, pâle, souillé de crachats, contusionné de coups de poings. 0 le plus beau des enfants des hommes ! que vous êtes changé en amertume pour votre sainte Mère, lorsqu'elle contemple vos gracieuses mains, pleines d'hya- cinthes, percées de clous, vos pieds également percés de plaies béantes, votre côté ouvert, et votre sacré Cœur brisé par la véhémence de la douleur et séparé en deux par la lance du soldat ! Quel triste spectacle pour Dieu, les Anges et les hommes, qu'un tel Fils baignant dans son sang, et une telle Mère dé- faillant sous la force de son amour et de sa douleur. 0 Dieu immense! comment fut-il possible à Marie affligée de ne pas expirer comme la reine Argie. Elle fût morte mille fois assu- rément, si une grâce toute particulière de l'Esprit saint ne lui eut conservé la vie pour la consolation des premiers chrétiens. La Bi Vierge, dit saint Anselme ', eût cessé de vivre durant la passion de Jésus-Christ par la violence de la douleur, s'il ne l'eût conservée lui-même. Et saint Bernard : La langue ne sau- rait exprimer, ni l'esprit penser de quelle peine était affectée

: Lib. de Excell. Yirg. c. 5.

CONSIDÉRATION X7.IX. 101

rame de Marie *. Et moi, ô Mère désolée, je ne serais pas en peine avec vous! Simon Seigneur et mon Dieu, si sa très-sainte Mère ont tant souffert de tourments, comment moi le plus misérable et le premier des pécheurs, pensé-je devoir èlre sauvé sans douleurs, sans tourments, sans contrariétés? Prends dès ce moment, ô mon esprit, la résolution de supporter dé- sormais, toutes les adversités qui peuvent te survenir, pour l'amour de Jésus crucifié et de sa Douloureuse Mère : ils le méritent : Dit/nus est Ar/nus, qui occisus est2...

6. Pour terminer, il me vient à la pensée un fait raconté par Andrée Chesnœus dans son histoire d'Angleterre \ Le roi Henri 1er était mort, et, déposé dans un cercueil le visage à dé- couvert, on le portait avec grande pompe à son tombeau en présence des grands du royaume, lorsque tout à coup, à la vue de tout le monde, son visage se mit à suer du sang en abondance. On est dans l'étonnement, on cherche la cause de cette sueur singulière de sang, et l'on n'en trouve pas d'autre motif que la rencontre de son fils Richard, prince rebelle, qui a outragé son père toute sa vie et lui est odieux. C'est sa pré- sence qui, par antipathie, arrache au roi défunt cette abon- dance de sang.

Approchez-vous, ô mon esprit, approchez-vous du Roi de gloire, votre Père aimant, Jésus crucifié, couché, après sa pas- sion et sa mort, sur le sein très-pur de la Vierge Douloureuse. Approchez ; et , avant que son corps soit déposé dans le tombeau, lavez-le de vos larmes, parfumez-le de vos vertus; ne craignez pas, si vous êtes vraiment pénitent et contrit, une pareille sueur de sang à votre rencontre, car le sang précieux de votre Rédempteur ne crie pas vengeance, mais miséricorde et salut. Pourquoi tardez-vous donc? Approchez, et, comme sa houloureuse Mère, couvrez de mille baisers ses plaies sa- erées. Quel grand bien, quelle sécurité d'habiter dans les plaies de Jésus-Christ : Je publierai ['abondance de leur suavité tant

1 lu Um. B. V. ' Apoc. fc. 12. » Sub. .mu. U90.

102 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

que je vivrai, dit saint Bernard *; je n'oublierai jamais ces commisérations, parce que j'ai été vivifié par elles. Je finis en disant avec le dévot A-Kempis * : « Vous trouverez plus d'a- vantages dans les plaies de Jésus-Christ que dans la possession du monde entier. » 0 sainte Mère, daignez opérer en moi cette grâce, imprimez fortement dans mon cœur les plaies sacrées de Jésus crucifié.

i Serrn. de pas». D. N. J.-C. J Médit 22 de Christ, pass. c. tj.

CONSIDERATION L.

La Douloureuse .Mère prend soin que son Fils mort et détaché de la croix, reçoive nue honnête sépulture.

6 1 SI ItUAT IX OKTDI

Joseph ayant reçu le corps de Jésus, V enveloppa dans un linceul blanc et le mit dans un sépulcre tout neuf. (Matth. 27. 59)

l . Ce n'est pas sans raison et sans mystère que le Répara- teur de l'univers daigna se comparer au grain de blé : « Si le grain de froment ne meurt après qu'on l'a jeté en terre, il demeure solitaire, mais quand il est mort il porte beaucoup de fruit l. » Il est vrai, o mon doux Jésus, vous étiez le grain de froment : dans votre sainte incarnation, lorsque, venu du ciel, vous avez été déposé par l'Esprit saint dans le champ virginal que le Seigneur avait béni. -2° Yous étiez le grain de froment dans votre admirable nativité, vous avez voulu venir au monde, non dans l'enceinte d'une ville, mais dans la campagne exposé ans vents, au froid, aux intempéries el in- commodités de toute espèce, absolument comme le grain de blé. Vous étiez le grain de froment dans votre circoncision; ru effet, il esl blanc au dedans et un peu rouge au dehors, et vous, n mon Rédempteur, dans celte cérémonie doulou- reuse, vous êtes blanc et vermeil, et L'époux de sang de votre Eglise. Grain de froment dans la présentation au temple, alors que, comme un premier épi forme, ou une première gerbe, vous étiez offert a votée Père céleste par votre tendre

1 Juan. 12. 24.

JOi LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

Mère, d'après cette loi : « Vous porterez au prêtre une gerbe d'épis, comme les prémices de votre moisson : et le lende- main du sabbat, le prêtre élèvera devant le Seigneur cette °-erbe, afiu que le Seigneur vous soit favorable en la rece- vant *. » Grain de froment dans la persécution d'Hérode et de vos autres ennemis. Quoi de plus vil qu'un grain de blé, el en même temps quoi de plus utile au monde? 0 mon Sei- gneur, vous aussi vous paraissiez vil et méprisable, un ver de terre et non un homme * ; et cependant l'Eglise universelle et les Anges chantent : Vous êtes le seul saint, le seul Sei- gneur, le seul Très-Haut. Vous étiez le grain de froment à la dernière cène, où, sous l'apparence du pain, vous vous êtes donné vous-même en nourriture à vos fidèles, et vous ne cessez de fortifier, par le pain eucharistique, le cœur de l'homme fatigué. Vous étiez grain de froment enfin dans la passion, la flagellaton, le couronnement d'épines, le cruci- fiement, dans votre mort et sépulture, puisque, comme le grain dans l'aire, vous avez été battu de verges, hersé avec des épines, foulé aux pieds des impies, mortifié par la croix et enfin enseveli dans un jardin pour en sortir vivant, comme le grain de blé qui a germe, et produire trente, soixante, cent pour un. Jésus, dit saint Augustin, se disait lui-même le grain de froment. 11 était le grain qui devait être mortifié et multi- plié; mortifie par l'infidélité des Juifs, multiplié par la foi de tous les peuples \ Un poète a donc dit avec raison du Sauveur mort et déposé dans le sépulcre :

« Quoique ce grain généreux soit tombé sur le marbre, aucune » terre ne produira un germe plus abondant. »

C'est pourquoi vous pouvez vous représenter une main qui sort d'une nuée et sème du blé dans un champ, avec l'ins- cription :

Pour qu'il s'élève en sortant de terre.

1 Levit. -i'-\. |i>. - p>. 2i. 7. 3 S. A.ug. iu Joan.tr, ->i.

OMSIDÉRATION L. 105

•2. 0 tendre Souveraine, ù .Mère d'amour et de douleur, il est passé un peu l'hiver bêlas : bien rigoureux; elle est passée cette grande pluie de sang par laquelle tout l'univers est lavé et purifie du péché, Votre Kils est mort sur la croix, et son >a«iv Gœur a été percé par un fer cruel; maintenant les ca- taractes du ciel sont fermées, et tout ce qui avait été dit de lui paf les prophètes est consommé. 11 est temps de confier à la terre cet utile grain de froment, et de l'inhumer dans un tom- beau honorable. Il arriva sur le Calvaire, à la Vierge affligée, la même chose que plus tard à saint Antoine dans le désert de Thébalde \ Il trouva le corps de saint Paul, premier ermite,

- noux, la tête droite, les mains élevées ; et comme il n'avait pas de bêche pour creuser une fosse, il était inquiet comment il pourrait confier à la tombe le saint vieillard ; quand deux lions accourent avec vitesse de l'intérieur du désert auprès de son corps, lui témoignent leur douleur et leur vénération par des rugissements et des pleurs, et de leurs pattes creusent la terre pour lui servir de tombe. Et saint Antoine en chantant les hymnes et les psaumes usités, y descend la dépouille mor- telle de saint Paul enveloppée de son manteau, et l'inhume à la manière des chrétiens. Voici donc ce qui arriva à la Dou- loureuse .Mère après la passion de son Fils : inquiète et pres- que anéantie de chagrins, elle était jusqu'au soir auprès de la croix, n'ayant personne pour en descendre le corps inanimé de Jésus et le confier au tombeau, et regardant autour d'elle avec tristesse sur le mont Golgotha, Tout à coup elle voit ar- river deux lions généreux : c'est d'abord Joseph d'Arimathie le noble décurion, qui, ainsi que l'observe saint Anselme ', dans le but de consoler l'affligée Mère de Dieu, alla hardiment trouver Pilate et lui demanda le corps de Jésus au nom même de la Douloureuse Mère. Entre autres raisons, il lit valoir, aux yeux du président romain, que L'innocente Mère allait expirer de chagrin au pied de la croix, qu'il lui accordât donc la consolation de pouvoir enlever le corps blessé et sans vie

1 Hrev. Hum. \>. Jan. l S. Ansel. dialog. de Pas». I».

106 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

de son Fils unique, le presser dans ses bras, le baiser, le bai- gner de ses larmes et lui donner une sépulture convenable. « Alors Pilate commanda qu'on le lui remît \ »

Le noble décurion fut bientôt suivi de Nieodème, prince des Juifs, autre courageux lion, auparavant disciple secret du Sauveur, et maintenant offrant, sans la moindre crainte, ses bons services à la Douloureuse Mère avec une charité parfaite. Ecoutons les paroles de la Vierge à sainte Brigitte - : « Des- cendu de la croix, je le reçus sur mes genoux semblable à un lépreux et tout livide. Car ses yeux étaient éteints et pleins de sang, sa bouche froide comme la neige, sa barbe comme une corde, son visage contracté ; ses bras étaient si raides qu'ils ne purent être que* faiblement abaissés. Tel il était sur la croix, tel je le reçus sur mes genoux, comme un homme dont tous les membres se sont retirés. » Combien les bons offices de ces deux personnages illustres et courageux furent agréables à la Vierge désolée, elle nous l'apprend encore : « Ce me fut une consolation quand je pus atteindre son corps descendu de la croix, le recevoir sur mon sein, examiner ses blessures et les laver 3. » Jacob, blessé au nerf de la cuisse, et en éprouvant sans doute une grande douleur, ne voulait pas lâcher celui qui luttait fortement contre lui, sachant bien cependant que c'était Dieu; et il disait en pleurant : Je ne vous lâcherai pas *. Et moi Mère, ou plutôt malheureux simulacre de pauvre veuve, je vous lâcherai, vous mon Fils! Vous mon amour crucifié! vous mon Dieu et tout mon bien, je vous éteindrai dans mes bras et vous serrerai plus fortement : Je le tiens, je ne le quitterai pas; Tenui eum, nec dimittam*.

0 mon esprit, voyez et considérez ici l'amour et les gémis- sements de votre aimante Mère. Elle pleurait le malheureux sort de son Fils, mais notre triste état l'affligeait beaucoup plus; aussi répandait-elle ses plus amères larmes sur nos pé1 cIh-s, qu'elle savait être la première cause des tourments par-

i Miittli. 27. 58. - Revel. 1. I. c. m. - Revel. lib. i. c. 7. et lib. 7. c. 2:;. *Gen. :\-i. 26. Cant. :!. i.

I ONSIDÉRATIOM !.. 107

tagés par elle avec lui pendant tout le cours de sa vie. 0 mes larmes, êtes-vous? Que ne coulez-vous avec celles de la divine Mère? Si les larmes, au témoignage de saint Ambroise, lavent 1rs péchés et éteignent le feu de L'enfer, ô mes larmes, étes-vous? « La B. Vierge, dit le doux saint Bernard, priait si tendrement et s'affligeait si amèrement qu'elle en fit pleurer plusieurs malgré eux par la piété de ses larmes ; sa douleur pénétrait de douleur tous ceux qui la voyaient; ils ne pouvaient retenir leurs larmes à la vue des siennes1. » Et moi le plus grand des pécheurs, digne de mille enfers, je demeure encore insensible! 0 ma Souveraine, faites que je m'attriste et pleure avec vous, tant que durera ma vie. Qui donnera une source de larmes à mes yeux pour pleurer jour et nuit le Fils de la fille de mon peuple, que l'on a mis à mort ' ?

Je verserai des pleurs, Mais non point par faiblesse ; Car il est pour les cœurs Une mâle tristesse.

3. Dieu, dans la loi ancienne, ordonnait que tout lépreux, désirant d'être guéri de cette affreuse maladie, fût aspergé du sang des victimes : « Le prêtre fera sept fois les aspersions avec ce sang sur celui qu'il purifie, afin qu'il soit légitimement purifié 3. » Le même Dieu plein de bonté, prescrivit que dans l'oblation des victimes et l'immolation des holocaustes pacifi- ques, surtout au moment se renouvelait l'alliance entre Dieu et le peuple, le sang des victimes fût répandu sur le peuple par Moïse : « Alors prenant le sang, qui était dans les coupes, il le répandit sur le peuple, et il dit : Voici le sang de l'alliance que le Seigneur a faite avec vous *. » Quant au reste du sang des victimes, selon la volonté de Dieu, * il le répandit sur l'autel. » Remarquez une chose, prudent lecteur: Une seule goutte de sang suffisait à chacun pour l'expiation,

1 S. Bern. in Lam. H. V. - » Jerem. ». 1. -- 5 Levit. li. 7. Kxod.

t'i. '■>.

108 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

parce que, comme dit saint Paul aux Hébreux1, « selon la loi, tout se purifiait avec le sang, et les péchés n'étaient point remis sans effusion de sang. » Mais enfin tout le reste du sang fut répandu sur l'autel de l'holocauste: Partem autcm residuam fudit super altare. Il y a un grand mystère auquel je vous prie de faire attention.

Dites-moi, je vous prie, si le genre humain n'était pas in- fecté de la lèpre du péché. Eh bien, pour l'expier, le Père choisit une innocente victime, son Fils, agneau sans tache; et en recevant l'aspersion de son sang adorable, non pas une fois mais sept fois, nous avons été guéris de la lèpre du pèche : Quo asperget itfum, qui mundandus est, septics, ut jure pur- getur ; il fera l'aspersion sept fois avec ce sang, sur celui qui doit être purifié, afin qu'il soit légitimement purifié. Or les sept aspersions furent les sept circonstances coula le sang divin du Sauveur, savoir : la circoncision, l'agonie, la flagellation, le couronnement, le dépouillement des vête- ments, 6° le crucifiement, et l'ouverture du côté et du Cœur. Oh! que la rédemption est abondante auprès du Sei- gneur! Au peuple d'Israël, pour l'expiation et la formation du nouveau pacte avec Dieu, une seule goutte de sang suffit ; et pour nous le doux Sauveur Jésus donne tout son sang. 0 excès d'amour !

Observez encore une chose. Dans les ablutions, Moïse mêlait de l'eau avec le sang, de peur que le sang pur ne se coagulât et afin qu'en demeurant liquide il fût plus facile à être distri- bué par l'aspersion et jeté sur le peuple nombreux. Belle figure du sang et de l'eau qui sortirent du roté et du Cœur de Jésus, et qui nous lavent de la lèpre du péché : « Il nous a aimés, et il nous a lavés de nos péchés dans son sang \ »

// répandit l'autre partie sur l'autel . A ce sujet le savant Finéti dit admirablement1: La Vierge Maria était le (premier autel, sur lequel, suivant saint Paul, le premier sacrifice fut

1 !>. l%,— 2 Apnr. •_>. ;;.

1 In. reflex, spirit. de interne B. V. martyrio.

CONSIDÉRATION L. 109

offert au Tout-Puissant par Jésus-Christ : sur son soin virginal, l'enfant Jésus s'offrit, comme un sacrifice du matin, pour le salut du monde: « En entrant dans le monde, il dit: Vous n'avez point voulu d'hostie et d'oblation, mais vous m'avez forme un corps. Les holocaustes ne vous ont pas été agréables pour le péché, alors j'ai dit: Me voici1. » La passion consom- mée, il s'offrit au sommet du Calvaire, comme un sacrifice du soir, sur le même sein de la Vierge Mère ; dont le Cœur fut l'autel mystique sur lequel fut répandu tout ce qui restait de son sang : Partent au ton résidu an/ fudit super al turc. Ecoutons le pieux Tanière * : Votre Cœur, ô Vierge, ne fut pas déchire une fois seulement, mais plus de cent fois ; pas une injure n'a été faite à votre Fils sous vos yeux, qu'elle ne vous ait percé le Cœur, surtout quand vous l'avez reçu à la descente de la croix et que vous avez contemplé de près toutes ses blessures. Alors, alors votre Cœur fut un véritable autel des parfums d'où Ja plus suave odeur s'élevait jusqu'au Cœur de Dieu.

4. Lucien, prêtre d'Antioche et glorieux martyr3, célébra sa dernière messe sur l'autel de son cœur. Il était enfermé avec d'autres chrétiens dans un affreux cachot, et l'on devait le faire mourir le lendemain avec ses disciples captifs. Il voulut célé- brer la messe pour recevoir le saint viatique, le donner à ses compagnons du martyre et se préparer au combat ; et comme on n'avait pas d'autel dans cette horrible prison : L'autel, dit- il, ce sera ma poitrine; et il y fit la consécration de l'hostie en s 'offrant ensuite comme victime de sa foi.

U Douloureuse Mère, quand vous pressiez sur votre sein Jésus détaché de la croix, votre saint Cœur ne fut-il pas aussi un autel vivant, sur lequel vous offriez au Père éternel son bien -aimé Fils en sacrifice du soir? S'immolant elle-même, dit un auteur, e?le réunissait sur l'autel, et le bois et la flamme. L'autel était sur le corps du Fils \ n sacrifice qui ar- rache des larmes! o spectacle douloureux à l'excès ! Le Corps

i Ilflir. ut. :;.— - <■.. ik » Justin Miechov. 0. P. in Litan. B. Y. lit. Regina martyr.— » Arnold. Carnot. de 7. rerbis Uom.

i 1 0 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

du Fils de Dieu, déchiré, couvert d'innombrables blessures, sur la poitrine de sa gémissante Mère avant d'être mis au tombeau ! Venez, mortels, et voyez s'il est une douleur pa- reille à celle de la Vierge compatissante. Ecoutons encore le poëte :

« Pourrais-je, sans être attendri, vous voir, ù Mère affligée, te- » nant dans vos bras les membres sanglants de votre Fils? Pourrais- » je contenir mes larmes, en voyant les vôtres couler sur son vi- » sage? La nature entière pleure avec vous sur son Créateur: elle » partage votre douleur; et, moi seul, insensible, je pourrais con- » templer *e deuil universel, et voir d'un œil sec vos yeux fondant » en larmes! Ob! puissé-je partager votre tristesse! Heureux, si je » puis en mourir ! »

5. Mais déjà c'est le moment de confier au tombeau le dé- pôt précieux du corps adorable. Le jour baissait et la nuit ap- prochait, lorsque Joseph d'Arimathie et Nicodème, dans la crainte de transgresser la loi du sabbat, s'ils tardaient davan- tage, prièrent avec instance la Douloureuse Vierge de leur per- mettre, ainsi qu'à des amis présents au même endroit, d'em- baumer et d'ensevelir son bien-aimé Fils. Alors, nouveaux sanglots, nouveaux gémissements ; cependant elle y consen- tit car elle était toujours soumise à la volonté divine; c'est pourquoi elle détacha elle-même, de ses mains couvertes de sang, le diadème royal hérissé de cruelles épines. Ce fut l'ac- complissement delà prophétie d'Osée : Le sang toucha le sang '. rendant que l'on dépose sur une pierre blanchâtre le corps le Jésus, et que, selon l'usage de la nation, on le prépare à la sépulture en l'embaumant de précieux parfuma, la Vierge affligée, ainsi l'attestent Métaphraste et Nébride *, recueillit les <'/tiiics et la poussière arrosées par le so?n/ et l'eau surfis de son côté et les conserva. La même chose est confirmée par le sa-

i Os. 4. 2. 2 Metaph. die 15 Aug. apud. Baron, n. 132. Nebrid. c. 21.

I ONSIDl l; \i ION l.. III

vaut Quaresme : La Vierge sacrée, dit-il, recueillit avec un grand respect tout le sang qu'elle put. Elle prit aussi les clous qui avaient attaché à la croix le corps sacré de Jésus, d'après le même Huaresme * et saint Bonaventure 2, et les garda tou- jours avec elle pour sa consolation, en sorte qu'elle pouvait moins se souvenir de la mort de son aimable Fils que l'avoir journellement présente sous les yeux.

Dès qu'il y eut assez de parfums, la sainte Mère enveloppa Le corps d'un linceul neuf. 0 mou esprit! si vous eussiez vu cette procession triste dans laquelle était porté au tombeau, sur un brancard, ou plutôt sur des bras d'amis, Celui sous lequel se courbent ceux qui portent le globe, et qui sur trois doigts soutient la masse de la terre, qu'auriez-vous pensé? qu'auriez- vous dit? On fait la levée du corps, et il s'élève entre ces pre- miers serviteurs iidèles du Sauveur une aimable dispute, non pour savoir quel est le plus grand d'entre eux, mais qui pourra toucher le premier le cercueil et le porter de ses mains au tom- beau qui lui est destine. On se remplaçait souvent, afin que chacun put se glorifier que le Sauveur du monde avait élé porté par lui à sou sépulcre. Ils allaient tous pleurant, et la malheureuse Mère plus que tous les autres, parce qu'elle ai- mait davantage. Ah ! combien de fois elle fit monter sa plainte vers le ciel : Mon Fils Jésus! mon Fils! qui me donnera de mourir pour vous et d'être ensevelie aujourd'hui avec vous dans le jardin!

(1. La veuve de Naîm suivant de près le cercueil de son fils enlevé par une mort prématurée, mérita dans le chagrin de son âme d'entendre cette parole consolante du Sauveur: Ne pleurez pas '. Pour l'affligée .Mire accompagnant au tombeau son Fils unique, aucune consolation; si les Anges de paix, qui suivaient invisiblementle cortège funèbre, pleuraienl eux- mêmes amèrement, comment auraient-ils pu consoler le Cœur accablé de la Vierge en qui étaient réunies toutes les douleurs comme les eaux dans L'océan? 0 glorieux Prince du ciel, mes-

1 Tom. 2. c. 2. sect. I . - * In Médit, vit. Chr. c. h\ . s Luc. 7. 19.

]|2 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

sager du salut de l'homme, paranymphe de l'Esprit saint ! G saint archange Gabriel! je vous interpelle. N'avez-vous pas salué la Vierge sainte à Nazareth par ces paroles : Je vous salue, à pleine de f/rdce, le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie outre toutes les femmes? Comment pleine de grâce, quand maintenant elle surabonde de douleurs? Comment le Seigneur avec elle, puisque tant de maux l'accablent? Comment bénie entre toutes les femmes, elle dont le Fils est devenu malédic- tion sur un infâme bois? Mais un profond silence régnait au ciel. Cependant, àme chrétienne, remarquez que les jugements de Dieu différent de ceux des hommes; ainsi il plut à la divine Providence que la Mère du Rédempteur fût la dernière des femmes pour mériter ensuite d'être exaltée au-dessus des neuf chœurs des Anges. Apprenez à vous humilier, vous terre et cendre. Apprenez à souffrir de bon cœur avec la compa- tissante Mère toutes les adversités, parée que le ciel est à ce prix; les souffrances de ce monde n'ont point de propor- tion avec cette gloire future qui sera un jour découverte en nous 1.

Enfin arrivés au tombeau creusé dans un rocher, ils l'y dé- posèrent. « Que volontiers, dit la Douloureuse Vierge à sainte Brigitte, je me serais mise toute vivante avec mon Fils, si Dieu lavait voulu! » Et encore à la même : « Je puis dire avec vé- rité que pour ainsi dire deux cœurs étaient dans ce même tom- beau. N 'est-il pas dit : est votre trésor, est aussi votre cœur? Ainsi mon cœur et ma pensée étaient continuellement dans le sépulcre de mon Fils. » Quand tout fut achevé, Harié se tournant vers les assistants les bénit avec tendresse et leur adressa ses humbles remerciements pour un si grand service, se servant, je me l'imagine desparoles de David aux habitants de Jabès qui avaient donné la sépulture au roi Saiïl : « bVnis soyez-vous du Seigneur, de ce que vous avez usé de cette hu- manité envers votre Maître, et qui' vous l'avez enseveli. Main- tenant donc le Seigneur vous le rendra selon sa miséricorde

i Hum. s. [8.

I ONSID] K VI [ON 1-. I 13

el sa vérité; et moi-même je vous récompenserai <lc cette action que vous avez faite '. »

Vous entendez, cher lecteur! Aimez la Douloureuse Mère ; elle vous en tiendra compte.

1 il Reg. 2. 6.

il.

CONSIDERATION Ll.

Marie-Madeleine, compagne inséparable de la Douloureuse Mère durant la passion de son Fils pleure son amour crucifie. i

A LACBYMIK CA\l>OK.

Au même endroit. Marie-Madeleine et F autre Marie étaient assises auprès du sépulcre. (Math .27. 01.)

1. Un jour, dans le palais de Darius, roi de Perse, ce pro- blème était propos.' et disent.''1 : ce qu'il y a déplus fort dans l'univers. Est-ce le vin, le roi, la femme, la vérité ? Le vin esl tort : voyez Noé, après le déluge, enivré dans sa vigne : Lot h surpris par l'excès du vin ; Holopherne enseveli dans le vin, et une foule d'autres don! L'Ecclésiastique a .lit : Plusieurs sont morts par les excès du vin. Le roi est fort, et de sa volonté dépend toutun royaume. Le Livre premier desMacha- bées raconte d'Alexandre le Grand, qu'il s'avança jusqu'aux extrémités du globe, s'empara des dépouilles d'une multitude .le nations et que la terre fut en silence à son aspect. La femme est forte; interrogeons Samson le plus fort de tous les mortels, David le plus saint, et Salomon le plus sage des rois, tous les trois joués et vaincus par les femmes. La vérité est forte, et si nous consultons Zorobabel, elle l'emporte et prévaut surtout.

Quoi qu'il en soit de cette question, la charité est plus grande et plus forte encore que tout cela : elle est plus puissante et plus victorieuse, elle a enchaîné le Dieu tout-puissant pour

1 Esdrœ lib. :<. c. ::. v. le.

I 0NSID1 li \ l EON l.l. I 13

le taire descendre sur la terre, s'incarner, souffrir d'indignes traitements pour le salul des nommes, H mourir sur un gi- bel ignominieux, victime de son amour. « Quoi «le plus fort que l'amour? «lit saint Bernard, il triomphe de Dieu même'.» Kt au Cantique, l'amour est appelé fort comme la mort*. C'est pourquoi tant de saints donl la charité était insatiable ont dé- siré très-ardemment de subir n'importe quelle mort pour Jésus- Christ : parce que, plus ils aimaient leur amour crucifié, plus ils désiraient de L'aimer encore davantage, car la mesure oVai- ///'■/• Dieu est <!<■ C aimer sans mesure, dit le même saint Bernard.

i e>t ainsi qu'aimait le Sauveur Marie-Madeleine, la péche- resse, miroir fidèle de tous les pénitents/ ce que démontrent les ruisseaux de larmes qu'elle répandit pour pleurer ses pé- chés depuis le jour de sa conversion jusqu'à sa mort. Et si les Juifs disaient un jour, "ii voyant le Sauveur pleurer surson ami Lazare: I royez combien il l'aimait ; nous pouvons conclure la même chose des larmes de Madeleine : Voyez combien elle ai- mait Jésus qu'elle n*a jamais abandonné pendant toute sa ■ion, se tenant toujours à côté de la Douloureuse Mère, et dont elle a, comme au festin, arrose de nouveau de ses larmes les pieds sanvs perces «le clous. Kilo répandit des pleurs abondants sur les pieds du Sauveur, dit le bienheureux Dainien. Ces! pourquoi nous donnons ajuste titre pour sym- holeàcette bienheureuse pénitente, une toile blanche exposée sur l'herbe aux rayons du soleil, et arrosée de gouttes d'eau, a\ ec la devise :

/' \r 1rs larmes I" candeur.

Oh ! les bonnes larmes, s'écrie saint Ambroise, dans les- quelles on trouve la rédemption des péchés. Elles ne deman- dent point pardon, el le méritent : elles ne plaident point, et obtiennenl miséricorde. La candeur vient des larmes.

S.. Bern jenn. de Pas». J Gant. s. 6,

11 G LA HÈRE i/aM01"R KT DE DOULEUR.

2. Après que Dieu, juste vengeur des crimes, eut pu- rifié par le déluge universel la terre couverte d'iniquités sans nombre, Noé, pour le remercier de l'avoir préservé mi- séiïeordieusemeut lui et toute sa famille, lui offrit au milieu "d'un champ, en plein soleil, un sacrifice d'animaux purs. Pendant que la fumée et l'odeur des holocaustes s'élèvent vers les cioux, une nouvelle faveur en descend, gage de la paix établie et confirmée entre Dieu et l'homme : l'arc-en-cicl, d'une splendeur merveilleuse, apparaît dans la région supérieure de l'atmosphère et ne présagea Noé, à ses fils et à leur postérité que le bonheur et l'allégresse : « Yoilà le signe que je vous donne de l'alliance entre vous et moi, et à tous les vivants. » Par Farc-en-ciel est figuré Jésus-Christ, Jésus-Christ crucifié, par qui le genre humain fut réconcilié avec Dieu. En effet, l'arc-en-ciel est formé par les rayons du soleil réfléchis dans une nuée chargée de rosée. Quand il parait à midi, dit Séne- que1, il annonce une grande abondance de pluie ; et le soir, la rosée. Mon esprit, reportez un peu vos regards sur la Dou- loureuse Mère et sa compagne de douleurs Marie-Madeleine, toutes les deux se tenant auprès de la croix ; que voyez-vous sinon un nuage de rosée, et de la pluie, tombant en abondance et des plaies de Jésus crucifié et des yeux de ces pieuses âmes. Madeleine, dit Tihnanus en ses allégories, était nuée de rosée et pluie. Pluie salutaire ! Si au banquet de Simon, elle ar- rosa de larmes les pieds du Sauveur, elle mérita d'entendre de la bouche de la Vérité : Beaucoup de péchés lui sont remis parc' quelle a beaucoup aimé; qu'éprouvez-vous, pieux lecteur, en la voyant pleurer devant la croix, maintenant, qu'elle est pu- rifiée et blanchie par le sang de l'Agneau? « Voici, dit saint Chrysologue, 2, l'ordre des choses renversé : le ciel donne ordinairement la pluie à la terre, et voilà que la terre arrose le ciel : Elle aiTosait ses pieds de larme*. Oh! quelle force dans les larmes des pécheurs ! elles arrosent le ciel, lavent la terre, éteignent l'enfer, o Ame chrétienne ! quoique coupable de

1 Senec. lih. I. Nat. quœst. c. n. S.'Chrysol. serm. P3.

CONSIDÉRATION l.l. 117

péchéâ nombreux, pourquoi fuir Jésus crucifie? Comnn1 Ma- deleine, en toute confiance avec un neur contrit et humilié, approches de votre amour crucifié : « C'est lui qui vous par- donne toutes vos iniquités, qui guérit toutes vos infirmités et qui racheté votre vie de la mort ' . » Marie-Madeleine pleurait dans la maison du pharisien, mais elle ignorait alors que les péchés, qu'elle pleurait, le Seigneur devait les effacer au prix immense de son sang. Maintenant qu'elle a vu son Bien- aimé, qu'elle croit fermement Dieu et homme, attaché à la croix sur le Calvaire, et le sang couler à flots des cinq canaux de ses plaies sacrées pour la rémission de ses péchés, qui nous dira combien s'accrut la douleur de son àme et son amour envers JéSUS. Voilà, âme chrétienne, l'exemple quevous devez imiter. Dès qu'elle eut reconnu sa faute, elle n'offensa plus Dieu ; et vous, malheureuse, helas! que de fois vous retombez !

:i. nui ne sna surpris, en y réfléchissant, que Marie-Made- leine ait été intime et familière avec la sainte Mère de Dieu, et comme de sa maison. La Vierge sans tache et plus pure que les Séraphins ne dédaigna pas de vivredans l'intimité avec la péchôresfte convertie; et, de même que le Fils ne repoussait pas les publicains et les pécheurs mais mangeait et conversait avec eux, de même la Uienheureuse Vierge Mère de douleur et d'amour accueillit avec bonté la pécheresse devenue plus blanche que la neige, et l'eut pour compagne durant plusieurs années ; et, même pendant la passion du Sauveur, Madeleine ne voulut point se séparer de la compatissante Mère. Voici com- ment saiid Anselme fait parler divine Mère, au moment elle voit son très-aimé Fils, condamné à mort et chargé tic sa croix, monter au (iolgotha entre deux voleurs : « Marie-Ma- deleiue et moi, nous courûmes pour traverser la place auprès d'une fontaine, afin de nous trouver sur son passage; et arrivées vers cette Fontaine nous eûmes devant nous mon Fils défiguré, accablé de douleur, qui me dit, en s'inclinant avec bOttté : .le VOUS salue, me. Mère : comme s'il eut dit :

1 I'- .il. I0& 3.

UN LA MERE b AMOUR ET DE DOULEUR.

0 vous que j'ai choisie pour ma Mère, je vous dois des ac- tions de grâces pour tous vos nombreux bienfaits et pour toute la peine que vous avez prise, dans abjection de la pau- vreté, de soigner le temple de mon corps maintenant sur le point d'être détruit. Parmi les affronts et les opprobres, vous ne dédaignez pas, vous ne craignez pas de me suivre, malgré que nous soyons pour tous un objet de mépris1. »

L'af>ôtre Pierre avait promis à son Maître une fidélité qu'au- cun péril, aucun tourment ne pourraient rompre : Seigneur, je suis prêt à aller avec vous et en prison et à la mort. Thomas s'offrait de même spontanément à mourir avec Jésus- Christ : Nous aussi allons, et mourons avec lui. A la dernière cène, tous les autres disciples se prononcèrent de même. Main- tenant, voyant la face des choses changée, leur Maître captif, lié conduit à la mort : Tous les disciples l'abandonnèrent et prirent la faite. Marie-Madeleine n'agit pas de la sorte avec la Douloureuse Mère : « Je me lèverai, dit-elle, je parcourrai la ville, je chercherai dans les rues et les places publiques Celui que chérit mon àme. Je l'ai cherché sans le trouver. Les gardes de la ville m'ont rencontrée; je leur ai dit : Avez-vous vu Celui que mon cœur aime? Peu de temps après les avoir quittés, je trouvai Celui que mon Cœur aime. Je le tiens, je ne le quitterai pas. » Dites, ô Madeleine ! Pavez-vous trouvé? Dans sou lit de repos. Et quel est-il, le lit de repos de votre Bien-aimé? Le lit fleuri de moa Nazaréen couvert de fleurs n'est pas autre que la croix. C'est que je le possède et ne m'en séparerai pas. Là, assise à ses pieds j'écouterai sa pa- role. Là, à l'ombre de Celui que j'avais désiré, je m'asseoirai, et son fruit sera doux à mou palais. Là, mon Roi .prenant son repos, mon parfum répandra son odeur. <> fortunée pécheresse! vous avez vraiment pris la meilleure part en choisissant Jésus crucifié. « (iràces vous soient rendues, dit saint bernardin \ ô bienheureuse pécheresse ! Vous avez montré au monde un lieu de sûreté pour les pécheurs, les pieds de Jésus qui ne mé-

i S. Anselm. indialog. de passione. - Serm. Y.\ in fer. 6. parasc.

ONsiD] i; \ no» il i 19

prisent personne, ne roulent H ne repoussent personne, mais reçoivent tout le monde. » Que faites-vous ici, cher lecteur? I. On raconte du pape saint Clément ' qu'ayant convertie Rome un grand nombre de païens par sa vie sainte et sa doc- trine, l'empereur Trajan L'envoya eu exil au delà du Pont- Kuxin il trouva, dans les solitudes de la Chersonese, deux mille chrétiens condamnés par le même empereur à y extraire et tailler le marbre. Or, comme ils souffraient extrêmement de la soif, il leur montra sur la colline, l'Agneau divin sous les pasduquel coulait une source vive pour les rafraîchir.

Aine chrétienne, jetez les yeux sur le Calvaire, et vous y venez l'Agneau sanstache immolé pour le salut de tous sur l'autel de la croix, et sous ses pieds une même .source vive, la fontaine de larmes de sa gémissante Mère et de Marie-Made- leine versant ensemble des ruisseaux de pleurs sur leur amour crucifié. V.\\v< pleuraient surtout quand le corps de Jé- sus fut déposé de la croix, placé sur la pierre privé de tout son sang, et embaumé de parfums précieux. Ce lieu, dit Saint-Laurent Justinien *, retentissait de leurs cris, était arrose de leurs larmes et rempli de leurs gémissements. 0 lugubre spectacle! L'affligée Mère contemplant son Fils mort, lu pressant sur son sein, lui fermant la bouche et les yeux, exa- minant toutes ses blessures, arrachant de sa tête la couronne dont les épines lui déchirent les mains et les ensanglantent. Jean l'évangéliste accourant, dit saint Anselme 3, se précipite sur la poitrine de Jésus, en pleurant et en s'écriant : Hélas! hélas! sur cette poitrine hier je puisais les douceurs, aujour- d'hui 1rs tristesses. » Selon sa coutume, Madeleine se tenait aux pieds du Sauveur. La Vierge embrassait la tête, dit saint Bernardin l, Madeleine Les pieds. Et Simon de Cassia ajoute 5 : Elle eut bientôt reconnu Les pieds du Seigneur près desquels, quand elle s'en étail déjà approchée, elle avait reçu le pardon de beaucoup de péchés. Or, si la Sunamite, prosternée aux

1 Brev. Rom. 23 oov. - s. Laur. Just. de agon. Cbr. c. 21. Inselm. tr. de pass. I>. ' Serai. i'> in fer. 6. parasc. - Lib. 9. c, 33.

1:20 LA MÈRE D'AMOUR ET Mi DOULEUR.

pieds du prophète Elisée et pleurant la mort prématurée de sou enfant, mérita d'obtenir sa résurrection; que faut-il penser de Marie-Madeleine qui ne pouvait se rassasier de baiser les pieds sacrés du Seigneur percés de clous, et de les baigner de ses larmes. Madeleine, dit encore saint Bernard, se prosterna aux pieds du Sauveur pour les baiser, leur faire un bain de ses larmes, et elle s'écriait : 0 pieds très-saints, vous m'avez en- seigné comment je dois fuir et échapper des mains du démon.

Ame chrétienne, que faites-vous? Madeleine, partout elle se trouva avec le Sauveur, prit place à ses pieds : Au repas chez le prince des pharisiens, elle les arrose de ses larmes ; au souper de Déthanie, elle répand des parfums sur sa tète et ses pieds; dans la maison de Marthe, elle écoute ses paroles assise à ses pieds; au tombeau de Lazare, c'est prosternée à ses pieds qu'elle lui dit : Seigneur, si vous aviez été ici, mon frère ne serait pas mort; sur le Calvaire, elle se tenait avec la Mère Douloureuse au pied de son amour crucifié, et elle y est m- core après sa descente de croix pour les laver dans ses larmes. « Madeleine, dit saint (irégohv de Nissc ', fit pénitence dans tous ses sens et tous ses membres par lesquels elle avait péché ; quant à nous, nous promettons la pénitence eu paroles; mais, en fait, aucun effort, aucun travail de notre part; nous vivons de la même vie qu'auparavant. » Si, comme Madeleine, nous avons offensé notre Dieu, pourquoi ne pas aller, comme elle, nous prosterner aux pieds de Jésus crucifie. Elle fit, dans un désert pendant trente ans, la plus austère pénitence, devant l'effigie de la croix que saint Michel avait érigée devant elle; continuellement elle pleurait ses péchés quoiqu'elle en eût ob- tenu la rémission. Et nous, plus coupables que Madeleine, hélas ! sont nos larmes? est notre vraie et sérieuse péni- tence? Qu'en sera-t-il de nous?

5. 0 sainte et illustre pénitente, autrefois esclave d'un fol amour, maintenant devenue l'Epouse de Jésus-Christ, à quoi vous comparer? Si le Sauveur crucifié est l'aimant, vous étiez

1 Oratio in eos qui acerbius alios judicant.

CONSIDÉRATION 1.1. 121

Le fer attiré vers lui par je ne sais quelle secrète sympathie d'amour. Le fer d'Elisée, tombé clans l'eau, surnagea pour aller se rejoindre au bois; semblable à ce ter submergé, Ma- deleine, par une admirable impulsion d'amour, surnage et s'é- lève vers le bois de la croix. L'Eglise chante : « Elle ne craint pas d'être devant la croix, elle est fréquemment au tombeau dans la tristesse ; elle n'a pas horreur des cruels soldats ; l'a- mour chasse la crainte. » Oh! si nous chérissions autant notre Amour crucifié! .Nous voyons tous les jours Jésus en croix, et nous ne sommes touchés d'aucune compassion envers lui !

Si le Sauveur crucifié est la fontaine prédite par Zacharie : En ce temps-là il y aura une source ouverte à la maison de David, et aux habitants de Jérusalem pour laver le pécheur; vous, ô sainte pécheresse, vous avez été la gazelle altérée et blessée d'un trait d'amour, courant haletante à cette source des grâces, mêlant vos larmes avec le précieux sang de votre Rédempteur et emplissant un vase de ce sang divin pour votre soulagement. Spectacle plein de tristesse ! La terre nageait dans le sang de Jésus; les yeux de Madeleine nageaient dans larmes. Que vous eussiez volontiers répandu votre sang ;i\ ec le Sauveur, si telle eût été la volonté de Dieu. 0 mon cœur! vous pleurez la perte d'un objet futile, et vous n'éprouvez pas de douleur avec Jésus crucifié! Jusques à quand screz-vous dur à son égard? Quoi ! n'aurez- vous donc pas une petite larme en signe d'un sincère amour?

Si le Sauveur crucifié est ce marchand de l'Evangile, qui vend tous ses biens pour acheter une perle précieuse, VOUS] sainte pénitente, a "lis avez été cette perle d'un grand prix pour Laquelle le négociant céleste a donné tout ce qu'il avait, et jusqu'à la dernière goutte de son sang; d'où ces paroles de L'Église : La drachme perdue est cachée dans le trésor du roi, etc... S'il est époux de sang, vous êtes l'Epouse de ce Bien- aimé dont le sang a orné vos joues. S'il est le bon Pasteur qui BUT la croix a donne sa vie pour ses brebis, VOUS êtes la première 1 rebis qu'il a trouvée, lave et purifiée dans son sang. ' ' > chrétiens, disait l irigène, imitons L'affection de celle

122 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

femme pour obtenir le même effet. Que chacun pleure auprès de Jésus et le cherche fidèlement, puisqu'il ne s'est point dé- robé aux recherches d'une pécheresse. Homme pécheur, ap- prenez de la pécheresse, à qui cependant ses péchés avaient été remis, apprenez à pleurer l'absence de Dieu, et à consi- dérer sa présence. Apprenez de Marie à aimer Jésus, à espérer en Jésus, à chercher Jésus en suivant ses traces, à ne craindre aucune adversité, à ne recevoir aucune consolation en dehors de Jésus, à tout mépriser pour Jésus \ o

6. Il est raconté au deuxième Livre des Machabées i commeni une eau boueuse fut changée en feu : Le soleil qui était aupa- ravant rfaché par un image ayant commencé de luire, il s'al- luma un grand feu, qui remplit d'admiration tous ceux qui étaient présents. Eh bien, j'ose dire que les larmes de Made- leine pénitente furent changées en feu, car elle a 'été tout enflammée de charité à partir du moment Jésus doux soleil de grâces, eut brillé à ses yeux dans le banquet; et, depuis cette époque, ni les mers ni les fleuves des souffrances et des douleurs qu'elle endura avec Jésus et sa compatissante Mère ne purent éteindre les flammes de son Cœur. Remarquez, dit saint Thomas de Villeneuve 3, toute sa tendresse pour le divin -Maître; après qu'il est mort elle s'expose à la mort pour lui, aussi empressée que pendant qu'il vivait encore.

Le doux Réparateur de l'univers dit à la veuve de Naïm: Ne ///curez pas; nous ne lisons pas de Marie-Madeleine qu'il ait jamais blâmé ses larmes ; il l'encouragea plutôt à en répandre, en la défendant contre les murmures des pharisiens : Vous ne m'avez pas donné d'eau pour laver mes pieds; elle, depuis mon entrée, les arrose de ses larmes et les essuie de ses cheveux. C'est que la veuve de Naïm pleurait, non ses péchés, mais la mort prématurée de son fils, et de pareilles larmes ne plaisent pas au Sauveur; Marie-Madeleine, au contraire, re- grette ses péchés avec sincérité et amertume, surtout quand elle voit et contemple le Sauveur du monde arrêté par des

1 Origen. homil de M. Magd. * Cap. I.v. 20. * In conc.de S. Magd.

I 0NSID1 B LTIOfi I.I. \2'.i

impies, a cause des péchés qu'elle a commis et de ceux de tous les hommes, flagellé, couronné d'épines, condamné à mort, attaché a la croix et y rendant le dernier soupir. Elle ne répan- dit pas son sang, dit la bouche d'or, mais elle versa des fon- taines de larmes, et effaça ses péchés1. 0 bienheureux ceux qui pleurent de la sorte! Ame pécheresse, pourquoi hésitez-vous? Quoi! vous vous consumez d'une sotte douleur pour des choses temporelles; pour des fruits qu'on vous a dérobés, [tour une bagatelle d'enfant, vous vous désolez. Et après avoir perdu Dieu parle péché, vous riez. Rien n'est digne de larmes en ce monde, que le péché, dit Paul de Palatio *. Et le doux abbé de Clairvaux ': Pleurez au pied du Crucifié, car Celui qui a tant souffert pour vous, est prêt à vous sauver. A lacrymis, eandor. ; la blancheur de l'âme vit-ut des larmes.

1 S. Chrysost. serm. 93. lu cap. 5.Matth. * Decœna Dom.

CONSIDERATION LU.

On examine les raisons pour lesquelles la B. Vierge et Mère Douloureuse ne fut pas immolée avec son Fils.

HERJUA \<)\ 111 IU.III II.

Je ne mourrai pas y mais je vivrai et je raconterai les ouvres du Seigneur. (Ps. il". 7.)

\ . Le prophète royal a comparé la passion de Jésus-Christ à la mer. Le doux Réparateur de l'univers y fut jeté comme au- trefois Jonaspour préserver les autres de la mort. Ecoutons ce prophète parlant lui-même daiis la personne du Sauveur: Les eaux sont entrées jusque dans mon âme: je suis tombé dans I" profondeur de la mer, et la tempête m'a submergé '. On voit par ces paroles que le Psalmiste assimile le Rédempteur à un naufragé qui, d'un vaisseau brisé par la violence de la tempête, est tombé dans L'abîme. Revenu sur l'eau, il n'a pour dernière consolation qu'un débris de vaisseau, qu'il saisit avec empres- sement dans l'espoir que par ce moyen il parviendra à se sau- ver. Mais poussé de plus en plus par la force de la tempête et le poids des flots, il roule jusqu'au fond du gouffre. C'est bien ce qui arriva au divin Rédempteur de nos âmes, lorsque, après avoir été agité par la tempête des persécutions, des peines, des douleurs pendant toute la passion, saisissant enfin le bois de la croix pour sauver le genre humain perdu par le bois de la science du bien et du mal, il tomba dans les pro-

1 Ps. 68. I.

I ONSIDJ R \l ION LU. I 23

fondeurs « 1 * la mer et fut englouti par la cruelle tempête : Veut i/i aiHtudmem maris, et tempestas demersit me.

A st m bien-aimé, dans le naufrage de sa passion, se joignit comme compagne inséparable et fidèle, la 1>- Vierge et Mère Douloureuse, dont l'affliction fut si vive que le prophète Jéré- mie lui dit: Votre douleur est vaste comme la mer*. Remar- quez bien, prudent lecteur, que ce prophète a d'abord déclaré ne savoir quelle comparaison employer : « A quoi vous com- parerai-je, disait-il, à qui vous dirai-je semblable, o fille de Jérusalem? A qui vous égalerai-] e, ô Vierge, fille de Sion? » Si je veux vous mettre en parallèle avec la baguette d'Aaron? Hélas ! pendant la passion et la mort de votre Fils vous êtes devenue sèche et aride. Si à la fleur des champs et au lis des vallées? maintenant la Heur est tombée et le lis languit. Si à la rose de Jéricho? An ! il n'en reste que les épines. Si à la femme revêtue du soleil? Voilà le soleil obscurci. Si à la lune dans sa plénitude? 0 cieux, affligez-vous ; elle est changée en sang. Ecoutez le poète : « La lune est devenue pale, il en tombe de la pluie; et vous seul, ô pécheur, êtes la cause de son deuil it île sa douleur. »

A quoi donc vous comparcrai-je, o Vierge Mère la plus affli- gée? Et le prophète ajoute : Votre douleur est grande comme la mer. Ace sujet, Hugues de Saint- Victor s'exprime ainsi : Il est très-remarquable qu'il raconte que son malheur ne puisse être comparé à aucune chose; et aussitôt après il le met en parallèle avec L'étendue delà mer. Pourquoi cela? Le même Hugues répond: a Comme la mer surpasse toutes les eaux- douces par sa masse et son amertume ; ainsi aucune calamité ne saurait égaler votre douleur 2. » Et cependant, dans ce vaste océan de souffrances, la tendre Mère ne trouva point la mort au milieu des flots furieux, mais elle revint sur l'eau et la vie lui fut conservée jusqu'au temps marqué par le Père. Pour représenter cette affligée Mère, figurez-vous une poule d'eau,

1 Thren. 2. 13. * Hug. a S. Vict. quem citât Fineti in reflex. Spirit.

de II V.

l;2i; LA MÈRE D AMOUR ET HE DOULEUR.

qui, à la vue du danger, s'enfouce immédiatement dans l'eau et en sort longtemps après saine et sauve: avec la devis»' :

Submergée elle ne périt pas.

Voilà le symbole de la Douloureuse Vierge que Dieu, dans la passion de son Fils, ne voulut pas laisser succomber avec lui, bien que pourtant, au témoignage de saint Anselme, à chaque instant la douleur ait été suffisante [tour lui enlever la vie si elle n'eût pas été conservée par un miracle spécial du ciel.

û. Dans l'ancienne Loi, Dieu avait fait le précepte suivant au sujet des oiseaux: Si en marchant dans un chemin vous trou- vez sur un arbre, ou à terre, le nid d'un oiseau et la mère sur ses petits ou sur ses œufs, vous ne retiendrez point la mère avec ses petits : mais ayant pris les petits, vous la Laisse- rez aller, afin que vous soyez heureux, et que vous viviez longtemps *.

Dieu avait aussi fait cette ordonnance pour La purification du lépreux; deux passeraux devaient être offerts au prêtre, dont l'un pour être immole dans un vaisseau de terre, sur de l'eau vive; quanta l'autre, dit le Lévitique : Le prêtre le trempera vivant, avec le bois de cèdre, l'écarlate et t'hyssope dans le sang du passereau qui aura été immolé; il fera sept luis les aspersions avec ce sang sur celui qu'il purifie, afin qu'il soil légitimement purifié. Après cela il Laissera aller Le passereau vivant, afin qu'il s'envole dans les champs l.

Pour la même raison, Dieu, dans le Livre de l'Exode, or- donna aux Israélites de ne pas immoler, en un même jour, l'agneau avec sa mère, mais d'épargner la mère après avoir égorgé son agneau \

0 très-affligée Souveraine : Vierge Mère et Mère Vierge : cet oiseau que protège la Loi, et que Dieu ordonne de protéger

Deut. 22. f,. » Levit. t4.fi.— Exod. il. 19.

i 0NS1DJ i; \ i ION LU. I 27

dans son nid; ce passereau, trempé dans le sang de l'autre;

que Dieu permet «i** laisser envoler en liberté dans les champs; cette brebis mère à Laquelle sou agneau a été enlevé pour le •>.t. i i ti<t' : ce sont mitant de claires ligures qui vous désignent , ù vous que le Dieu bon a voulu conserver eu vie longtemps encore après vos grandes souffrances. Or voici ses raisons : il l'a voulu 1" parce que tel était le lion plaisir de sa divine ma- jesté; et sa très-sainte volonté mérite ici, comme en toutes choses, notre plus grand respect, quoique L'esprit humain ne puisse la comprendre. -2" Il l'a voulu, parce qu'il eût été trop dur pour les Apôtres et les premiers fidèles d'être prives en même temps de leur soleil et de leur lune mystique. ',i° Il l'a voulu, afin qu'après la mort du Père du genre humain toutes !<■> âmes affligées, surtout dans l'Eglise primitive, eussent en sa sainte M ire Douloureuse, un secours et un asile au milieu des cruelles persécutions et dans toutes leurs nécessités. Kl en effet, c'était, pour l'Eglise militante, une grande consolation de pouvoir contempler cette divine Mère, dont le Fils était Dieu et homme, auteu r de la vie, vainqueur de lamort, enfin le juge souverain de tous par la volonté de son Père. Vincent Bruni de l,i société de Jésus s'exprime dans les termes suivants : " Le motif, pour lequel le Seigneur a voulu laisser Marie dans le inonde, i'ut que les fidèles eussent un secours et Une conso- lation dans Les ennuis , les troubles et les persécutions du inonde : de t rainle que, prives de ce bienfait, ils ne parusM'iit

tout a fait abandonnés par Jésus-Christ; carie petit troupeau n'avait pas sur la terre qui put l'encourager ei L'affermir, en- vironné comme il l'était de loups cruels au milieu des peines et des croix. Il voulu! donc leur laisser .Marie pour Mère et

Maîtresse, afin que sa douce présence fût pour tous une cou solation dans le chagrin, une Lumière dans la doctrine, une for,,- dans la persécution, un secours particulier à l'Eglise nais- sante. Et certainement il était très-nécessaire à l'Eglise nais- sante «pie cette colonne solide ne l'ut pas tout à COU potée de sa place, mais demeurai immobile pour consolider et suppor- ter tout L'édifice spirituel. Voyez ici. à mon esprit, comment

12H LA MÈRE b AMOUR ET DE DOULEUR.

la Mère Douloureuse se fit tout à tous pour les gagner tous. Réveillez-vous; estimez et aimez une Hère si aimable et quia tant à cœur votre salut.

3. Une femme, dit l'evangéliste saint Luc, avait dix drach- mes; en ayant perdu une, elle remue tout dans sa maisoq pour la chercher; et comme elle ne pouvait la trouver, malgré sa peine et ses recherches, elle allume sa lampe, et a le bon- heur de la découvrir

Observez, prudent lecteur, que, dans le même discours, Celui qui est la Vérité donna d'abord la parabole du bon Pas- teur courant avec une tendre sollicitude à la recherche de sa brebis égarée, et la prenant sur ses épaule^, après l'avoir trouvée -. Jesus-Christ, figuré parce pasteur, a trouvé la bre- bis perdue et l'a mise sur ses épaules quand il daigna mou- rir en croix pour ses brebis. « Ses épaules, dit le Séraphique docteur, sont les deux bras de sa croix: il a placé sur ses épaules la brebis égarée, parce qu'il a porté tous nos pé- chés :!.

De là, o mon esprit, vous comprendrez facilement quelle fut cette femme de l'Evangile, qui laisse les neuf drachmes, allume sa lampe et cherche la dixième avec au zèle infatiga- ble, o douce Vierge, vraie Mère d'amour et de douleur! elle vous représentait vous qui, laissant les neuf chœurs des Anges vers lesquels vous pouviez monter avec votre Fils, unique- ment occupée de la dixième drachme perdue, c'est-à-dire de l'âme de l'homme, n'avez cessé, après l'ascension glorieuse de votre Fils, de la chercher durant vingt-quatre années avec le plus grand soin, jusqu'à ce que, parvenue à Y'kgQ de soixante-douze ans, cinquante-huitième année de votre en- fantement virginal, vous ayez quitté cette vie mortelle par vo- tre assomption dans la gloire. Ecoutons sainte Brigitte, dont les révélations jouissent d'une grande autorité dans l'Eglise : a A l'ascension du Sauveur au ciel, il fut permis à la Vierge Marie de rester en ce monde pour consoler les bons et re-

1 Lnc 15. x. 2 Luc. 15. '■>. 3 S. Bonav. hic. in Lue.

I 0NSID1 i; \ i m.N in. | i><.)

rpendre 1rs âmes errautes. Elle fut la Maitresse des Apôtres, ta Force des Martyrs, L'institutrice des Confesseurs, le brillanl miroir des Vierges, la consolation des époux, la salutaire con seillère H I"' partait soutien de tous dans la foi catholique. » Reconnaissez, âme chrétienne, L'immense charité de la Vierge Douloureuse pour tout le genre humain, en consentant à être privée, plus longtemps, de la gloire céleste, pour se rendre utile aux malheureux, aux affligés, à tous les états de l'Eglise, et procurer le salut i\rs premiers fidèles. Que ne fera-t-elle pas pour vous, maintenant qu'elle règne dans le ciel, si vous l'ho- nore/ et l'aimez d'une affection filiale?

i. Souyenez-vous de l'Epouse du Cantique, languissante d'amour, et disant à sou Bien-aimé : Attirez-moi; et nous courrons qprès vous à l'odeur de vos parfums '. Il courait vile, ce bien-aimé Epoux de sang, et s'élançait à pas de géant dans sa carrière; et comme l'Epouse savait très-bien qu'il faut un secours particulier, la grâce pour être entraînée au divin amour, c'est pour cela qu'elle lui dit instamment : Attirez- moi à votre suite. Accoutumée à lui donner la main, à marcher du même pas, pourquoi ne le prie-t-elle point de l'attirer avec lui au lieu de demander à marcher à sa suite? Pour éclaircir cette pensée, il faut recourir aux auteurs qui ont commente paroles. Selon eux, l'Epouse est la B. Vierge qui toute sa vie courut la première après Jésus et le suivit de plus près, imitant sa conduite, sa vie, ses souffrances, par-dessus tout autre, et le représentant dans ses actions; car elle fut la copie vivante de Jésus crucifié, et la première qu'il attira par sa grâce parmi les élus : « Moi-même, quand j'aurai été élevé en croix, j'attirerai tout à moi '-. » Mais quand il s'agit de la glo- rieuse ascension de l'Epoux dans le ciel, L'Epouse lui dit : Attirez-moi après rous. Bienheureuse Vierge, pour.juoi ne pus dire: Attirez -moi avec vans? Notre bien-aimé Fils et Epoux a attiré dans le ciel avec lui L'âme du bon larron ; et vous sa mère, son excellente et tendre Mère, qu'il estime et. chérit par-dessus

1 c.int. t. :;. - Joan. 12. 32.

II. '.i

130 l.\ mère d'amour et lie douleur.

toutes les créatures, il vous laisse dans ce monde pervers pour y gémir et souffrir de nouvelles douleurs!

Le Cœur de. Jésus el le Cœur de Marie ne faisaient qu'un, ils n'avaient qu'une même volonté; et comme Marie cherchait uniquement le bon plaisir de Dieu et de son Fils, sa charité lui conseilla, le Sauveur s'élevant au ciel après avoir triomphé de la mort, de demeurer sur la terre encore quelque temps, pour la consolation de l'Eglise naissante, récemment fondée par le sang de Jésus : Attirez-moi après vous. « Elle ne dit pas : At- tire^moi avec vous, mais, après vous ; montrant ainsi claire- ment sa charité envers le genre humain. Elle ne demande pas ;i s'élever au ciel avec son Fils; elle sait, il est vrai, qu'elle éprouvera ici bas beaucoup d'ennuis et de chagrins en l'ab- sence de son Fils; mais elle préfère les avantages de l'Eglise aux siens propres, et ne voulait pas la laisser privée de ses entretiens qui pouvaient l'instruire pleinement du mystère de l'incarnation, et de ses exemples utiles au progrès spirituel. <> Ainsi parle Guillaume commentant le Cantique. Oh! que l'Eglise universelle est redevable à la sainte Vierge sa Mère! Et si saint Paul fit faire des salutations amicales à cette femme qui avait travaille avec zèle à la propagation de l'Evangile parmi les

peuples: Saluez Marie aai a beaucoup travaillé au mi/ira le

vous*; vous aussi, ô chrétiens, saluez Marie qui a fait beaucoup plus pour vous.

5. Consultons saint Pierre, le prince des Apôtres ; a] avoir, par crainte de la mort, renié Celui qui est la vie. il se mit à pleurer amèrement son crime, dans le creux d'un rocher, sans perdre l'espérance et son amour filial envers la Mère de miséricorde; et, le vendredi soir, au rapport de saint Anselme, quand la passion tut terminée, il \mt au Calvaire : Alors ar- riva Pierre, et il se prit à pleurer très-amèrement d'avoir renie Jésus !. » D'autres ont écrit qu'il se rendit au mont Sion, demeurait alors la Douloureuse Mère, qu'il implora humble- ment sa protection, qu'il fut accueilli avec boute et affermi

1 Rom. Iti. (i. - S. Ansel. in tract, de pass.

i ÛNS1DÉB \ rlOfi LU. l-'il

dans la foi et dans ses bons sentiments. Il se montra plein de reconnaissance envers La sainte Vierge, lorsque , évangéli- saut la Syrie, il lit élever en son honneur une belle chapelle pp's de la ville de Tortose, et la dédia sous son nom suivant 1rs rites apostoliques. Oh! si Judas le traître lut venu trouver la sainte Mère avec un cœur aussi humble et contrit, elle lui aurait, sans doute, obtenu pardon et miséricorde auprès de son doux Fils. Respirez, pécheurs, la Mère des grâces vit en- core. « Que cherchez-vous de plus, dit sainl Thomas de Ville- neuve, qui' désirez-vous davantage de la Vierge? Une chose vous suffit: elle est Mère île Dieu'. »

L'exemple du prince des Apôtres lui suivi par les autres dis- ciples du Sauveur et par les premiers chrétiens qui, dans les doutes de la foi. 1rs peines, les persécutions, les afflictions et 1rs embarras, recouraient toujours à la sainte Mire de Dieu comme à leur digne Mère et a la colonne ferme de la foi; par la raison qu'ils voyaient en elle, dit saint Amhroise 2, la forme de la discipline, la règle des vertus, le modèle de toute droi- ture. Saint Denis avoue que sa présence et ses entretiens lui firent éprouver intérieurement une consolation qui excédait et le corps el l'esprit; et Lorin'fait cette observation que saint Etienne premier martyr fut fortifié parla Bienheureuse Vierge d'une manière admirable, et que les pierres dont on l'accablait lui parurent douces parce que, durant son supplice, à genoux sur uni- pierre, elle priait Dieu pour lui H lui obtint la grâce finale el le don de persévérance. Saint Etienne, dit Corneille \ doit à Marie sa couronne de martyr, de même que saint Paul lui doit sa conversion que lui obtint aussi sainl Etienne en mouiant.

('). La sainir Mère i\>- Dieu consola aussi 1rs absents par srs lettres. Lucius Dexter, contemporain <lr saint Jérôme, rapporte que saint Ignace, évêque et martyr, souffrant de graves persé- cutions pour la foi. si. ns l'empire *h- Trajan, «die lui écrivit

'S. t'iinm. Vill. serm. 2. de nativ. Virg. "S. Ambr. lib. -! <-!<-■ Virg. ' In cap. ', Acf. Apost. Corn, in Act. Apost. fol. lin.

i;j2 J.A MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

cette; lettre pleine de consolation : A Ignace bien-aimé disciple, l'humble servante rie Jésus-Christ. Ce que Jean vous a dit et enseigné touchant Jésus, est vrai. Croyez ces choses, et que votre conduite et votre vie y soient conformes. J'irai, avec Jean, vous voir ainsi que ceux qui sont avec vous. Tenez-vous ici nie dans la foi et agissez avec courage; que la cruauté d<> la persécution ne vous émeuve point, mais que votre esprit soit fort et se réjouisse en Dieu voire Sauveur. Amen1.

Vers cette époque, les habitants de Messine ayant appris par les discours de saint Paul, que le Fils de Dieu s'était fait homme pour sauver le monde, et que sa sainte Mère vivait encore à Jérusalem, lui envoyèrent une députation pour le prier humblement de recevoir leur ville sous sa protection. Et la douce Vierge Mère se rendit à leurs vœux et leur adressa, avec une tendresse maternelle, une lettre en hébreu dont voici la teneur :

« Marie, lille de Joachim, de la tribu de Juda, de la famille de David, humble Mère de Jésus crucifié, à tous les citoyens de Messine, salut et bénédiction du Père éternel.

» .Nous avons appris que vous avez envoyé des gens de grande foi et éloquents, qui confessent avec pleine connais- sance que mon Fils est Dieu et homme, Fils unique du Père cterne!, et qu'après sa glorieuse résurrection, il est monté au ciel; qui en tout connaissent le vrai chemin de la vérité, par la doctrine et la prédy&tion de notre apôtre Paul. C'est pourquoi nous vous accordons la bénédiction à vous et ;'i notre ville, el promettons de toujours vous proléger et défendre -.»

i) p.clieurs, affligés, désolés de toute sorte, que faites-vous? Reprenez courage, et accourez avec la plus grande confiance auprès de votre Douloureuse et sainte Mère. De même que Jésus-Christ veut que tous les hommes soient sauvés et par-

'Jo.ad Web. de arte dise, fonte 30.- 2 Idem loc. cit. et places ali'i cutn P.Lexana. f. 12.

I ONSIDÉB \IION LU. I 33

viennent à connaître la vérité; de même Marie accepte de bon cœur la protection de Ions les malheureux e! des pécheurs. (lu disait <lti Sauveur : // reçoit les pécheurs et prend ses repas avec eua : Marie ne repousse pas non plus les pécheurs pour lesquels son Fils a enduré tanl d'horribles tourments. Si un lièvre poursuivi par les chiens trouva un refuge sous le man- teau de saint Bernard; un cerf sous celui de saint Hubert, évêque; une biche sons celui de saint Egide; un agneau sous celui du séraphique saint François : pourquoi, nous chrétiens, ne trouverions-nous pas un asile sous le manteau de laB. Vierge et Mère Douloureuse? L'enfant qui craint quelqu'un ou redoute la colère d'un père, ne sejette-t-il pas sur le sein de sa mère afin qu'elle le protège? Ainsi, nous tous, ô mortels, et avec la même confiance, allons à notre sainte .Mire, et nous y trouve- rons le secours désiré dans tontes nos tribulations. Voulez- vous, dit saint Bernard, avoir une avocate auprès de Jésus- Christ? Recourez à Marie; assurément le Fils exaucera sa Mère . Kt Louis de Blois 2 : 11 est impossible qu'un humble et dévoue serviteur de Marie périsse, u cher lecteur, ce fidèle ser- viteur, vous voulez l'être.

1 Serni. de nn'iv. lî. V. - In canon, vitae spirit . I. IN.

CONSIDÉRATION LUI.

Le saint Cœur de Marie, après la passion, est consolé par Jéîii^-Christ ressuscité.

: M I RGERE M \ I I A I O It II F. Il

Vos consolations ont rempli <l<- joie mon rime, u proportion du grand nombre de don leurs qui ont pion' t mon cœur. (Psal. 93. 19.)

i, Après que les eaux du déluge curent inondé tonte la terre pendant près d'un an, et que l'arche portée sur les eanx, se fut arrêtée, à leur décroissance, sur une montagne d'Armé- nie, Noé, pour savoir si les eaux ne couvraient plus la terre, ou- vrit la fenêtre de l'arche et lâcha une colombe qui revint à lui le soir, en portant dans son bec une branche d'olivier.

Noé représente le Père céleste ; l'arche, la primitive Eglise de Dieu, s'arrètant sur la montagne de Sion quand les flot ^ de la persécution 's'apaisaient un peu ; et enfin la colombe lâ- chée., la suinte àme du Sauveur dont l'Evangeliste a dit pour indiquer sa mort : Emisit spirilum , il envoya son esprit ou son àme. Apivs trois jours, il réunit sa sainte âme à son corps, et, ressuscité glorieusement, il apporta comme la co- lombe de Noé, l'olivier désiré de la paix à sa sainte M< re, lui apparaissant à elle la première après le déluge de ses souf- frances : La paix soit avec vous, ô ma Mère, l'.t voilà ce qu'exprimerait une gravure représentant une colombe tenant en son bec un rameau fleuri d'olivier et volant vers l'arche, avec la divise : Les flots se sont retirés; ou bien si l'on

I ONSIDI R \\\<>s LUI. I 38

veut ; Commencement d'un monde meilleur', ou si l'on aime mieux :

Elle annonce que ^univers est délivré des eaux*

Si vous voulez un autre emblème, représentez-vous un cas que de fer posé sur une table, et dont les abeilles ont l'ail leur rucbe, avec la divise d'Alciat, homme d'un esprit cultivé dans tmites Les sciences : Mella ]><>st follet : le miel après la guerre. C'esl bien cela pour Jésus-Christ : le miel après la guerre. Oo ne lit pas que dans le cours de sa vie il se soi! nourri de miel, ou de quelque autre douceur. Ce n'est qu'après sa mort e1 résurrection qu'il est dit : Ses disci- ples lia présentèrent un peu de poisson et mi r.ayon de miel. Ainsi que l'observe Tertullien, sur la croix il goûta le fiel, après sa glorieuse résurrection il mange le doux miel ; pour nous apprendre qu'un peu de fiel de la trihulation opère en nous un poids d'éternelle gloire et se change en un délicieux océan de nectar céleste.

-2. Sur ce sujet, remarquons une élégante ligure. Samson, le plus fort des hommes, sans contredit, attaqua, avec un merveilleux courage, le lion qu'il rencontra dans une vigne, et le mit en pièces comme s'il eût été un chevreau. A quelque temps de là, repassant par la même vigne il trouva dans la gueule du lion un essaim d'à! ici Iles et un rayon de miel exquis. Il ne vn ni ut pas le manger seul, et en fit part à sa mère : Venions adthatrem, dédit eipartem.

Voilà un trètf-beau type qui s'est réalisé en .lesus et Marie. En effet, après que, dans le sanglant combat de le passion, il eut terrassé la mort, :«' démon li<>n infernal, et le péché par lequel la mort est entrée dans le monde, u'a-t-il paa trouvé dans \r gosier de la mort, un rayon de miel, une immense élévation dans la gloire? Nous avons \ u Jésus, dit le docteur des nations, couronné de gloire et d'honneur après ses souffrances1 .

' Hebr. 2. 9.

136 LA MÈRE d'aMOUB ET r»F. DOULEUR.

Mais il ne voulut point garder pour lui seul cette gloire, ce rayon de miel ; allant trouver sa Mère, il lui en donna une portion. Glorieux et triomphant, il lui apparut avant tout autre, et il la consola, par sa présence, de toutes les amertumes de la passion. Elle put alors dire comme le Prophète : "Vos consolations ont rempli mon âme de joie, à proportion du grand nombre de douleurs qui ont assailli mon cœur \ Oh ! qui dira de quel océan de joie fut alors inondé le saint Cœur de la Vierge Mère ! Dans la passion et la mort de son Fils, l'amour avait été la mesure de la douleur ; et main- tenant la douleur, à son tour, est la mesure de son immense joie, quand, à la vue de Jésus, son Cœur tressaille et se réjouit bien plus que celui d'Abraham en prévoyant ce jour de grâces: «Abraham a désiré avec ardeur de voir mon jour : il l'a vu, et en a été comblé de joie -. »

'.i. Je veux vous rappelerici le laborieux patriarche Jacob. Lorsqu'il eut appris que son cher fils Joseph, qu'il croyait mort depuis longtemps dévoré par une bête féroce, vivait encore en parfaite santé, et qu'il était vice-roi d'Egypte, il eu eut une joie si grande qu'il parut ravi hors de lui-même : « Ils lui annoncèrent la nouvelle en ces termes : Votre fds Joseph est vivant, et il a l'autorité sur tout le pa^ s d'Egypte \ » Quelle en fut la suite ? Ecoutez l'Ecriture : Il reprit ses esprits et dit : Je n'ai plus rien à souhaiter, puisque mon fils Joseph vit encore ; j'irai, et je le verrai avant que je meure. Et quand il arriva dans la terre de (iessen et qu'il aperçut le vice-roi son fils venant au-devant de lui avec une pompe royale, il s'écria ravi : « Je mourrai maintenant avec joie, puisque j'ai vu votre visage. »

Elevez plus haut, âme chrétienne, les yeux de votre esprit. Si Jacob, à la vue de Joseph qu'il avait cru mort, tressaillit ainsi d'allégresse, quelle dut être la joie de la sainte Mère quels ses transports envoyant ce bien-aimé Fils, que non-seu- lement elle avait cru mort, mais qu'elle avait vu de ses yeux

1 IV 93. 19. -Joan 8. 56. 3 Gen. 13. 26.

i 0NSID1 H \ll(i\ LUI. i.'î"

dévorer par une bête cruelle, maintenant ressuscité, environné d'une gloire immense et Lui apparaissant au milieu d'un mil- lion d'Anges. Vraiment le glaive de douleur qui avait jusque- transpercé s. m âme, lui changé en un trait d'orel tic fou, en nu glaive d'amour, en un incendie de joie; et, plus juste- ment que l'Epouse du Cantique, elle pouvait dire : Mon âme a été liquéfiée quand ilm'a parié1. Âme chrétienne, que sera-ce, quand, au sortir de cette triste et malheureuse vie, vous ver- res pour la première fois le roi de gloire couronné de sou diadème? Que sera-ce, quand vous contemplerez le principe de toutes les choses créées, le doux Rédempteur, votre Dieu vous invitant, après les travaux, les peines et les afflictions, à son éternelle gloire e( à ses tendres embrassements? 0 mon âme, travaillez maintenant, combattez, souffrez toutes les adversités qui peuvent vous survenir en cette vie mortelle, « sachant, dit saint Paul, qu'après avoir été associé à la souffrance, vous le serez à la consolation \ »

4. Je vois .Marie dans la même situation qu'autrefois Anne, mère du jeune Tobie. Ce fils, que le père avait envoyé avec un billet à liages, ville des Mèdes, auprès de (iabélus pour rece- voir dix talents d'argent, elle allait tous les jours sur le som- met de la montagne, d'où elle pouvait voir au loin, et elle l'at- tendait avec impatience et dans une grande tristesse. Enfin elle L'aperçut dans le lointain venant avec sa nouvelle et riche fa- mille, et, rersantdes larmes de joie, elle accourt auprès de sou mari, et lui annonce i'heureuse nouvelle : «Voici que votre fils arrive *. »

Laissons les ombres; dans la réalité nous avons mieux que Tobie «| Aune. Quand Le Sauveur Jésus eut pris le billet de notre condamnation, et que, payant pour tous le prix de son Bang, il l'eut attaché avec lui à la croix, il s'en alla vers Les justes détenus dans les limbes il demenra jusqu'au troi- sième jour, pendant qu'à chaque moment sa Douloureuse Mère L'attendait. Combien <\r fois, comme la mère de Tobie,

Cant. ... 6. - ' Il Corinth. I. 7. Tob. H>. 8.

138 LA HÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

elle <lit en gémissant : « 0 lumière de nos yeux, pourquoi vous avons -nous envoyé si loin? Montrez-moi votre visage, et que votre voix se fasse entendre à mes oreilles'. »

Et voici qu'au troisième jour au moment doré de l'aurore, heure vraiment d'or! la Bienheureuse Mère lève les yeux et voit une multitude d'Anges formant la famille de Jésus-Christ, et qui la saluent par ce «•liant joyeux : Reine du ciel, réjouissez- vous, alléluia; parce que Celui que vous avez mérite de porter, alléluia, est resuscité comme il avait dit, alléluia. Et pendant qu'ils chantent solennellement, apparaît le Roi de gloire, le vainqueur de l'enfer, Jésus-Christ rendu à la vie; non plus homme de douleur environné de gardes, de bourreaux, d'une multitude poussant des cris de mort comme dans la passion, mais escorté d'Anges sans nombre, de la troupe des âmes justes délivrées des limbes et du purgatoire, revêtu des splen- deurs de la divinité et adressant ces paroles à Marie, d'après saint Anselme ' : Réjouissez-vous grandement, ô ma Mère, parce que, vous qui m'avez enfante, moi, Dieu et homme, m'avez allaité de vos mamelles, et vu attaché à la croix, vous me verrez régnant dans les cieux, vous contemplerez toute la profondeur des choses du ciel, de la terre et des enfers, incli- née devant la majesté de votre divin Fils. Qu'attendez- vous, lecteur dévoué à Marie? <> certainement, il ne put se contenir, son doux Cœur» envahi subitement par un océan immense de consolations ctde délices; aussitôt donc elle se jette à ses pieds pour les baiser et pour adorer ses plaies. Mais son divin Fils, la soutenant par les mains, lui présente la plaie de sa poitrine et de son côté, el de plus, colombe mystique, il l'invite à entrer dans son Oeur : Levez-vous, ma bien-aimee Mère, et venez dans le trou de la pierre et dan.- le crenx de la muraille; voila mon Cœur ouvert pour vous qui êtes mon cœur; entrez dans toute la joie de voire Fils.

5, 1 1 mère de la belle dilection, de la science et de l'espérance sainte, vous n'êtes plus désormais Mère du Bénoni ; (c'esi

1 Cant. ■-'. li - Cit. ab. Anton. de Rampel. in lis- 13kl »1 .

I ONSID] H \llo\ LUI. I 39

ainsi que Rachel en mouranl avait appelé son ûla : Bénoni, c'est-à-dire, enfant de la douleur. \ ous l'étiez, il 3 a trois jours,

an pied il«' la croix; aujourd'hui le Père céleste \ous donne IIP autre nom, et vous appelle Mère de Benjamin, ou du fils do La droite, parce que Le doux Jésus, votre Fils, exalté par la mort de la cn»i\, et qui doit aller s'asseoir à la droite du Père, est établi juge de tous les hommes. Quels sont vos sentiments, excellente Mère, souveraine de l'univers? quels sont vos senti- ment.-, ainsi appuyée sur votre Bien-aimé? Vraiment, la droite du Seigneur a t'ait éclater sa puissance; et il était convenable que la Mère qui, plus que toutes Les créatures, avait aimé son . * Comme une mère aime son unique enfant, ainsi je ruas aimais, el qui avail contribué beaucoup à procurer le salut hommes, il convenait, dis-je, qu'elle fût honorée avant toute autre créature par la présence de son Fils ressuscite, re- vêtu d'un corps glorieux, et qui était loin d'oublier ses grands îinrites; il convenait qu'elle fût nommée la digne avocate de tout le genre humain. Voici de quelle manière saint Anselme, déjà cité, l'ait parler le Sauveur à sa très-sainte .Mère en lui ap- paraissant dans sa chambre : « 0 toujours Vierge à jamais bénie, combien grande est votre charité: combien grande vo- tre bonté! Vous êtes la gloire de Jérusalem, la joie d'Israël, l'honneur du peuple de Dieu. Soyez la -Mère de Miséricorde et l'Avocate des pécheurs, atiu que tous se réjouissent auprès de vous, soient consolés par vous1... »

0 bienheureuse \i irge Mère! vraie Mère d'amour et de dou- leur, qui ne vous honorerait pas? Qui ne vous aimerait pas? Quel est le chrétien qui ne vous choisirait pas pour sa mère chérie, ea souveraine et sou avocate? Bl nous, 0 mon esprit, que ferez-vous? el pourquoi former des retards? Empressea- vous de féliciter une si bonne mère, et de la vénérerj exaltes- la autant que possible, bien qu'elle soit au-dessus de toute louange. Humilie/ -.mis en présence d'une si grande Souve- raine, Heine du ciel et de la terre, et de nouveau consacrez-vous

' S. Anselm. p.spisc. loco citato,

1 il) LA HÈRE D AMOUR ET l'K DOULEUR.

à son service : Vous ne pouvez périr, si une digne Mère sup- plie pour voire salut auprès d'un tel Fils. « 11 aura pitié de lui, dit Job, si un Ange parle en sa faveur, » à plus forte raison si c'est la Reine même des Anges. Ecoutons saint Bernard : « Notre lieu de pèlerinage a envoyé Marie pour avocate; et comme elle est Mère de notre Juge et mère de miséricorde, elle plaidera humblement et efficacement les affaires de notre salut '. » Faites attention à ce mot efficacement.

G. Je veux que vous rappeliez à votre souvenir, âmes chré- tiennes, le glorieux patriarche Abraham a qui Dieu ordonna de lui immoler en holocauste son fils unique Isaac. Il se leva la nuit, et se dirigea aussitôt vers le lieu que le Seigneur lui avait indiqué. Or, les saints Pères demandent si Sara son épouse était instruite de la mort de son fils.

Le grand saint Augustin répond qu'elle en avait connais- sance, et nous en avons fait mention dans la considération sur les adieux de la Douloureuse Mère. Elle vit donc partir son unique et cher fils avec un profond chagrin, et, le voyant aller à la mort, elle versa d'intarissables larmes. Mais cessez de pleurer, Sara; il n'y a pas lieu de vous tant désoler, voici une bonne nouvelle : Votre fils Isaac, que vous chérissez, n'est point mort; il deviendra le père d'un grand peuple, et toutes les nations de la terre seront bénies dans sa postérité. Quelle fut la joie de cette tendre mère quand elle revit son Isaac après l'avoir cru immolé depuis trois jours! Sara, dit l'historien Jo- sèphe, dans les Antiquités des Juifs, ressentit une joie incroya- ble en voyant son fils revenir vivant de son sacrifice. Imaginez par tout l'excès d'allégresse que dut éprouver la sainte âme de la Bienheureuse Vierge Marie Mère de Dieu, lorsque, après les horribles tourments de la passion et la cruetfe mort de la croix, elle vit son unique et bien aimé Fils Jésus, redevenu vivant, non pour être, comme Isaac, héritier d'une étroite possession, mais le souverain Maître du ciel et delà terre, et qu'elle le contempla et le serra dans ses bras au milieu des

1 S. Bein serm I. de Ass. B. V.

i ONSIDEB \l l'i.N LUI. I ! 1

joyeux applaudissements des Anges et des âmes bienheu- reuses. Ce fui l'accomplissemenl de cet oracle du prophète royal : Les plews se répandront le soir, et la joie viendra ait

mutin '.

7. Vous eussiez vu, âme chrétienne, avec quelles marques d'honneur les saints patriarches, qui avaient été les figures

du Sauveur el avaient désiré si ardemment le salut d'Israël, vénérèrent, le jour de la Résurrection, cette sainte Mère de Dieu en leur qualité de ses ancêtres, et avec quels magnifiques élo- ils L'accueillirent : « Un grand nombre* de corps des saints qui étaient morts, ressuscitèrent, et, sortant des tombeaux, vinrent dans la ville sainte et apparurent à plusieurs. » C'était d'abord Adam, te père du genre humain; combien il se félici- tait en voyant pour la première fois la sainte .Mère de Dieu, issue de sa postérité mais exempte de la fctache originelle! Voilà, voilà, disait-il, la femme forte qui dès l'origine du monde a brisé la tète au serpent insidieux. Ipsa cont<>rct caput tiaun. Voilà, disait Abraham, la vraie Sara qui nous a enfantés. Attende ad petram unde excisi estis. Voilà, disait Isaae, la véri- table Rébecca, qui mit au monde le vrai Jacob et le revêtit de vêtements tout neufs et parfumes, en formant de sa chair vir- ginale'à notre Sauveur l'humanité par Laquelle il nous a rachetés sur la croix. Voilà, ajoutait Jacob, la gracieuse échelle de ma vision le Seigneur était appuyé sur le sommet, les Anges descendaient et remontaient : c'est par elle que les pécheurs doivent monter au ciel. Voilà, disait Moise, le buisson ardent el incombustible au milieu des flammes, que j'ai vu sur le mont Horeb. Voilà, répondait Aaron, la branche d'amandier toujours demie et qui portera des fruits en abondance. Voilà, disait Gédéon, la toison étendue dans l'aire, sur laquelle est descen- due la rosée du ciel: Ros in solo vellere. Voilà, s'écriait David, la Reine que j'ai vue en ombre debout à la droite de Dieu en vêtements dorés et ornée de diverses couleurs. Voilà la tige de Jessé, disait Isaie, sur laquelle s'est formée une fleur qui

1 Ps. 29. v. (i.

[i2 LA HÈRE D AMOUR il l>h DOULEUR.

dit en parlant d'elle-même: Je suis la fleur des champs, sur laquelle s'est reposé l'esprit du Seigneur, l'esprit de sagesse, d'intelligence, de conseil, de force, de science, de piété et de crainte de Dieu. Voilà, disait Jérémie, la sainte femme dont j'ai prophétisé : Le Seigneur a créé une merveille sur la terre : une femme environnera un homme. Voilà, répliquait Ezéchiel, la porte du sanctuaire par.laquelle Dion seul entrera : « Cette porte sera close, on ne l'ouvrira pas, et l'homme n'entrera point par elle parce que le Seigneur Dieu d'Israël y est entré. » Voilà, s'écriaient-ils enfin tous, celle qui surpasse toutes les femmes; les filles de Sion l'ont vue et l'ont proclamée Bien- heureuse, et les reines l'ont louée...

i) Mère vraiment Bienheureuse! alors l'ut réalisée votre pro- phétie: Toutes les générations m* appelleront BienJieiireiise. Dans la passion et la mort de votre Fils Jésus, vous avez été une mer, hélas! une mer bien amére; aujourd'hui, vous voilà mer de toutes grâces, océan de joies et de 'miséricordes. Ils se sont retires, les flots que le Seigneuravait amoncelés sur vous, et les consolations ont remplivotre âme de joie, à proportion du grand nombre de douleurs qui avaient pénétré votre Cœur. Ah! glorieuse Souveraine, nous qui sommes vos pauvres clients, faites-nous participeF à vos consolations et à vos joies, surtout au moment critique noire âme quittera ce corps morte), pour recevoir la récompense ou le châtiment selon qu'elle aura mérité pendant sa vie. Ah! très-douce Mère, comment pourrez-vous souscrire à la sentence de notre éter- nelle damnation? Vous ne le pourrez pas; non. non. VOUS ne le pourrez pas. parce que vous êtes 1,1 Mère de miséricorde, et que vous nous avez enfanté la miséricorde. Par conséquent, éternellement nous chanterons vus miséricordes.

CONSIDERATION LIV.

La B. Vierge contemple smi Pila montant aux cieux sur le mont des Olives sa passion avait commencé.

TIL.IT l>» IIDAII TiKTAUl.

Etant monté au plus haut des deux, il a conduit arec lui une grande multitude <lc captifs , et il a répandu ses dons sur les hommes. (Ephes. i. 8.)

i. Le plus sage des rois a dit ' : Trois choses sont pour moi difficiles, et il en es! une quatrième que j'ignore complètement: la iroie de L'aigle dans Le ciel, La voie du serpent sur un rocher, la voie du navire au milieu des mers, et la voie de l'homme dans sou adolescence. Elles sont en effet dignes d'admiration. Kt qui n'admire l'aigle au cerps pesant, prenant son essor dans les airs el jusqu'aux nues, appuyé sur ses ailes? Oui ne s'é- tonne < 1 * - voir Le serpent, privé de pieds et d'ailes, l'avançant et glissant avec vitesse à travers les pierres et sur les rochers escarpés ? Qui ne s'arrête à considérer un vaisseau, chargé de marchandises et des [dus lourds bagages, nageant sur les îlots de la mer comme un poisson, sans laisser aucune trace de son passage? Quant à la quatrième chose, qui échappait à l'intelligence de Salomon, c'est la voie de L'homme dans son adolescence, cetàge volage et plein d'instabilité; et cependant L'adolescent est un homme qui, dans sa première jeunesse, devance les années par son courage précoce et surpasse son Age.

' Prov. 30. 18.

I ï i LA MÈRE D'AMOUR El )>E DOULEUR.

Il y a un sens caché. La voie de l'homme dans l'adoles- cence, signifie l'incarnation du Verbe. Dans ce mystère, le Sauveur est un homme parfait dès le premier instant de sa conception dans le sein de la Vierge immaculée. La voie du vaisseau au milieu de la mer. c'est la croix de Jésus-Christ qui fut comme un navire pour lui dans la mer Rouge de la passion, et l'est toujours pour nous sur ce grand océan du monde à travers lequel elle nous conduit en assurance au port du salut éternel. La voie du serpent sur la pierre, c'est Jésus-Christ; exempt du venin du péché, il a pris néanmoins la forme du pécheur, et il a expié nos pèches dans son sang quand il fut élevé en croix, comme le serpent d'airain placé sur un poteau dans le désert. Enfin, la voie de l'aigle dans les airs, c'est L'admirable ascension de notre Rédempteur. Remarquez, dit Albert le Grand, que l'aigle, dont il est question, figure le Fils de Dieu qui, par l'ordre de son Père, s'éleva dans son ascen- sion, et plaça son nid daus les sublimités des cieux '.

L'aigle, roi des oiseaux, a un regard perçant, et quand il plane dans les plus hautes régions des airs, il aperçoit Je plus petit poisson qui nage au fond de la mer, ou le lièvre cache dans les profondes vallées sur lequel il s'élance avec agilité et l'enlève pour le partagera ses aiglons, h Jésus-Christ, dit l'Apôtre, étant monte au plus haut des deux, a mené avec lui une grande multitude de captifs, et il a répandu ses dons sur les hommes. Mais pourquoi est-il dit qu'il est monte, sinon parce qu'il était descendu auparavant dans les parties les plus basses de la terre, » c'est-à-dire dans les limbes, pour en retirer les justes, et, glorieux vainqueur, les conduire dans le ciel? Nous donnerons pour devise, à cet aigle mystique, les paroles que chante l'Eglise dans l'hymne de la sainte croix :

// enlève lu proie de l 'enfer.

2. nue la sainte Mère ait vu, avec les Apôtres, sur la mou- 1 B. AI!.. Mag ^. I. .le Ascens. h

SSU>ÉKATIOfl I.l\ . I ,.',

Fila dans ehose hors de doute parmi les orthodoxes qo'on déduit s A - 5 Apôtres i saint La parle ainsi : - partirent de la mon* - a Oliviers - de Jéru-

u chemin qu'on peut faire le jour du sabbat; et ils s'en re nt à Jérusalem. Us persévéraient tous una-

nimement en prières, avec les femmes et Marie Mère de Jésus. "r. si Marie revint, du lieu de l'as isî tu, au cénacle sur la monl - 3 les Apôtres et les saintes femmes,

donc elle était pi - i L'ascension de son cher Fils. Et com-

ment aurait-elle pu manquei - 'lieux triomphe, elle qui

avait suivi son Fils toute sa vie autant qu'elle avait pu, sans

tns sa passion et à sa mort? Corneille quelques autres avec lui, qu'ils furent bien doux s entretiens de Jésus el - sainte Mère. Pour aug- menter la foi, l'espérance, l'amour, le respect dans le cœur de 5ci] s, le divin Maître leur tit baiser à tous les plaies saint s et glorifiées le ses mains et de ses pieds, dont la suave odeur les comblait d'une joie extraordinaire. Quant à sa Mère, dit le V. P. Louis du Pont '. il lui offrit aussi à baiser la plaie elle desirait se renfermer et se cacher pour monter ainsi avec Jésus-Christ dans le ciel. '_> bon Jésus, dit saint Anselme, comment avez-vous pu, en remontant dans le royaume de - vous le Fils d'une si tendre Mère, la

^es misères de ce monde, et ne pas l'emmener -

Les jugements de Dieu diffèrent de ceux des hommes. Par

un dessein plus prudent et plus digne, continue le même saint',

uliei la pi pour lui préparer un lieu d'immorta-

~ votre royaume, venir à sa rencontre accompagné de

et l'élever auprès de vous sur un trône

sublime, comme il convenait a votre Mi re. Ainsi le Sauveur

voulut. ; i et justes raisons, la laisser encore

•rn. hic m Aetus. - Lud. de Puiitr- Med. de Aicens. I). J S. Au- ?el. de Excell. V. e.

II. tu

146 LA MÈRE D'AMODB Kl l»K DOULEUR.

quelque temps dans ce bas monde, afin qu'elle fût pour l'Eglise une ferme colonne, qu'elle instruisit les Apôtres plus à fond, consolât les premiers chrétiens dans les fréquentes persécu- tions, nourrit les don veaux convertis qui avaient besoin du lait d'nne mère, portât ses mérites au comble de la gloire par l'exercice continuel des vertus, et pour que sa couronne qui devait être éternelle dans le ciel s'embellit de plus en plus. VQyez, ô mon esprit, combien la divine Sagesse conduit avec prudence toutes les eboses à leur fin. Qui dira ou qui pourra Comprendre toute la tendresse des adieux du Fils à sa Mère avant de monter vers son l'ère céleste. bien aimé disciple de Jésus, pourquoi n'en fîtes-vous aucune mention?

3, Les saintes Ecritures racontent de Jacob, que ce saint pa- triarche passa le fleuve rapide du Jourdain par le secours de son bâton, et revint heureusement dans sa patrie avec deux troupes après une longue servitude chez Lahan : «■ In ba&tlo meo transivi Jordanem istum, et nwtc cum chiaàw Utrmisregrt- dior. » Par ce bâton, les Pères communément, entre autres saint Augustin, entendent la sainte croix sur laquelle le Sau- veur a franchi heureusement sa passion, et avec deux troupes, l'une des Anges et l'autre des hommes, est retourné dans la céleste patrie d'où il était sorti. In baculo meo, etc.

11 plut à notre divin Rédempteur, avant de s'élever au .iel, rie manger avec les Apôtres dans le cénacle du mont Si on. Le repas terminé, il conduisit au mont des Oliviers sa sainte Mère, les autres Maries et les disciples au nombre de cent vingt. Les chœurs des Anges, et les âmes bienheureuses qu'il avait déli- vrées, par sa mort, de la prison des limbes, lui faisaient cor- tège comme deux troupes glorieuses, quoique invisibles aux yeux humains, et rendaient plus Bplendide et plus pompeux le triomphe *\w puissant vainqueur de l'enfer, de la mort et «lu péché. Le bien-aimé Jésus, dit saint bernardin, est au milieu de ces deux plialangcs, se les unissant l'une et l'autre par un merveilleux amour. Il a franchi le Jourdain de notre mortalité avec le bâton de la sainte croix; maintenant, de ces deux cohortes saintes, l'une est transformée en lui par la grâce; il

. 0NSLD1 H \i i"\ i.i\ . 147

la laisse pour un temps sur la terre : l'autre est glorifiée en lui ou béatifiée par la gloire; il l'associe à son ascension, puis il retourne dans les cieux ' .

Ahulensis observe que le Seigneur, avanl de remonter vers son Père, «-ut avec sa Bainte M sre et les autres disciples, tant sur le chemin de Béthanie qu'au monl des Oliviers, un long discours dans lequel il les consolai! tendrement de sou départ, leur exposant qu*il sVu allait il»' ce monde à sou Père dans Le ciel pour leur préparer une éternelle demeure, leur envoyer bientôt le Saint-Esprit, et devenir leur perpétuel avocat auprès de Dieu. Le doux entretien terminé, et leur ayant donné sa béné- diction suprême, le même auteur poursuit : « De Ja région éthé* rée il descendit nue petite nuée jusqu'aux pieds du Sauveur, ft elle se tonna en espèce de troue ou siég-e à porter, comme pour y asseoir Jésus. I m-, la nuée s'élevait peu à peu, et il mon- tait aussi avec «'lie comme s'il y était assis: cependant la plus grande partie de son corps n'était pas cachée par la nuée, et les disciples pouvaient contempler encore son visage '. »

'.. Le doux Sauveur s'éleva d'abord insensiblement dans les airs, pour la consolation de son aimante Mère et doses chers disciples; parvenu à la région supérieure de L'atmosphère, il disparut à leurs \ eux en un clin d'œil, et pénétra, à travers tous les cieux, à la droite de sou Pi re En comparaison de l'ascen- sion de Jésus, l'enlèvement d'Enoch n'est rien : Et non appar mit. quia in/it eum Dominus, L'enlèvement d'Elie sur un char de feu, n'est rien : Ecçe currus igneus, et equiignei diviserunt utrumque; etascendil Elias per turbinem incœlum. Rien l'en- lèvement d'Habacuc, saisi tout ;'i coup par un Auge qui le trans- porte de Judée à Babylone : Et apprehendit eum Angélus Do- mini in vertice ejus ; etportavit eum capilio <<ii>itis gui. posuitque eum m Babylone supra lacum in impetu spiritus sui. Rien, l'enlèvement de l'apôtre Philippe qu'un Ange transporte subi- tement de Gaza jusqu'à A.zote. à unedistauoede quarante milles,

1 s Bernardin, to. 3. s. t. art. I. c. I. de Ascens. - Atari. Partd. 5 c. 16.

148 LA MÈRE D'AMOUR Kl DE DOULEUR.

comme on le voit aux Actes des Apôtres. Rien encore, le trans- port des Apôtres sur une nuée pour les réunir à Jérusalem au trépas de la très-sainte Vierge : « Lorsque le moment de sa mort était proche, dit saint Damascène, la Mère de Celui qm est

la vraie vie, était couchée dans sou lit sur le mont Sion. Alors le Fils rassemble ses disciples en les taisant venir portés sur une nuée pour rendre les derniers devoirs à son corps vé- néré \ » C'est par le ministère des Anges que tous ces person- nages furent tout à coup transférés dans un autre lieu. Mais ■c'est par sa [impie vertu et sa puissance divine que Jésus, le Fils de Dieu et de Marie, s'élève au-dessus de tous les deux : ce qui t'ait dire au Psalmiste royal : Elevez-vous, Seigneur, en faisant paraître votre puissance; alors nous chanterons et nous publierons par nos cantiques les merveilles de votre pouvoir;

5. Ce fut l'accomplissement de ce que dit l'Ecclésiaste : Le soleil se lève, et il se couche et retourne à son lieu; et renais saut il revient au midi et incline vers le nord,, parcourant dans sa course tout l'univers. Ce soleil de justice est Jésus-Christ imtie Dieu, dans l'étahle de Bethléem, dont Hfalachie à pro- phétisé : Le soleil de justice se lèvera pour vous qui craignez mon nom. 11 s'est couché sur la croix le salut est <hms ses ailes, c'est-à-dire dans ses liras ('tendus en forme de croix pour nous mettre tous à son ombre. Il est retourné à son lieu, dit saint bernardin -, par son ascension, il a repris ce jour une nouvelle naissance en ce qu'il nous a fait renaître par l'eau et l'Esprit saint, et après avoir bu l'eau du torrent dans le chemin de sa passion, il a enfin élevé sa tète.

fut vérifie le grand prodige opéré en faveur d'Ëzéchias pendant sa maladie : le soleil rétrogradant de neuf degrés jus- qu'au dixième, c'est-à-dire jusqu'à la croix X, sur l'horloge d'Achaz; et de il reprit sa course et sa marche première; et le roi, transporté de joie et guéri, chanta à Dieu son Sauveur 4

1 S. D;im;i<c in Orat. du Dormit. SS. Deip. ' S. Bernardin, t. :t. ser. I.

CONSIDÉRATION LIV. 149

tout -puissant un cantique tractions de grâces qu'il fit graver sur les registres publics. Cette rétrogradation du soleil Ûgurait Jésus-Christ descendant par neuf degrés, qui sont les ueuf chœurs des Vnges. Il les a descendus dans son incarnation, il a donné par sa morl la saute à l'univers malade, et, sortant du tombeau avec une plus grande splendeur,il a repris sa course par son admirable ascension dans la gloire du ciel. <»h: avec quelle magnificence el quelle majesté! a vea quels joyeux con- certs de tous les célestes esprits! Kilo représentait, dit Cor- neille, Jésus-Christ qui devait descendre de dix degrés, c'est- à-dire, bien au-dessous des (lueurs des An.ues et au-dessous des hommes, dans les souffrances de sa passion, pour s'élever ensuite jusqu'à son Père.

Alors furent accomplies ces belles figures qui présageaient la glorieuse ascension et l'exaltation de notre doux Rédempteur. Joseph humilié, maltraite par ses frères, vendu comme esclave, incarcère, enchaîné; puis élevé au-dessus de tous : Le roi le fit monter sur son char, (de.

Uardochée, méprisé de l'impie Aman, destiné à mourir sur une potence; et ensuite appelé aux honneurs les plus grands de la pari du roi : Ainsi sera lionoré, celui que le roi veut honorer.

Sam -on le plus fort des hommes, trompe et environné par les Philistins; mais brisant les portes d'airain de Gaza et les emportant au sommet de la montagne: Il saisit les deux bat- tants delà porte, les enleva a\ec leurs gonds et la serrure, et, les chargeant sur ses épaules, il les transporta au plus liant de la montagne voisine.

David, auparavant méprisable, mais triomphant de tous ses ennemis après qu'il eut terrassé le géanl : <>r, comme David revenait, quand il cul frappé le Philistin, les femmes sortaient de toutes les villes d'Israël au-devant du roi Saul, eu < bantant et en dansant, manifestant leur joie.avecdes tambours et des cymbales1.

' I Rég. \H. ii.

130 l.\ MÈRE H AMOUR ET DE DOULEUR.

.lob, homme de douleur et le dernier des hommes, couvert d'affreuses plaies de la plante des pieds jusqu'à la tète; mais à qui le Seigneur a rendu le double de ses biens perdus: Ei addidit Doptînus omnias qusBcumque fuerant Joù, duplicia. Tirin fait cette réflexion : Job endura tous les malheurs, sauf la mort, avec une patience, une humilité, une constance admi- rables; Jésus Christ souffrit même la mort, et la mort de la croix. Job recouvra lout au double; Jésus-Christ au centuple, puisque toute puissance lui a été donnée au ciel et sur la terre* Oui, toute puissance a été donnée à Celui qui s'était humilié en se faisant obéissant jusqu'à la mort, la mort de la croix : c'est pourquoi Dieu l'a exalté, et lui a donné un nom au-des- sus de tous les noms. > humilité ! c'est vous seule qui élevé/.: qui ne descend pas, ne saurait monter.

(>. One faisait la très-sainte Vjerge en voyant monter vers les cieux son bien-aimé Fils avec tant de gloire et de majesté? Marie conservait toutes ces merveilles pour les méditer en s. m cœur. Je crois qu'avec l'Epouse bien-aimee elle s'écriait : Atti- rez-moi après vous, et nous courrons à l'odeur de vos par- fums. Quel langage pourrait exprimer, quel esprit humain comprendre, quelle intelligence saisir les sentiments «le ten- dresse, les désirs, les larmes d'amour avre lesquels elle sui- vait sou Fils s'elevant dans les cieux? Israël fut pénétré d'une grande joie, en se voyant arrivé sain et sauf sur le rivage, pendant que Pharaon ('tait englouti dans les eaux de la mer Rouge avec toute son armée : Abus Moïse, et tous les enfants d'Israël cbantèrenl un cantique au Seigneur, et dirent : « Chan- tons au Seigneur, car il a fait éclater sa gloire avec magma-* eence; il a précipité dans la merles chevaux et les cavaliers* » Quelle joie plus vive et plus grande se répandil dans le Cceur de la Vierge quand elle contempla de ses yeux les ennemis Infernaux noyés dans la mer rouge du san,ur de son Fils, les

saints Pères délivrés de la sombre prison des limbes, et revê- tus de la robe île L'éternelle béatitude, son Fils impassible, immortel, environné d'une lumière resplendissante, couvert d'un vêtement blanc et pourpre, selon Corneille, comme puis-

CONSIDÉRATION LTV. 151

sant triomphateur de la mort, du monde, du péché et du dé- mon, montant majestueusement ver* le ciel empyrée par la perfection de l'agilité? Si Abraham était réjoui de voir ce jour, pourquoi, «lit saint Anselme, la divine Mère ae tressaillerait pas d'allégresse ineffable, quand elle voit son Fils unique pénétrer dans les cieuz an dominateur et s'asseoir à la droite If Dieu tout-puissant.

7. Lorsque Alexandre le Grand, vainqueur de Darius, der- nier roi des Perses, entra dans Babylone en glorieux triom- phateur, pour honorer ce grand dominateur de l'univers, les habitants jonchèrent les rues de fleurs odorantes et de cou- ronnes; ils érigèrent autour des places publiques des autels d'argenl chargés d'encens, de parfums et d'autres odeurs pré- cieuses; el le peuple, taisant retentir l'air d'applaudissements. criait : Vive le Roi.

Les ombres sont disparues: Princes, ouvrez vos portes; élevez-vous, portes éternelles, et le roi de gloire entrera. Que si vous demandez, ô princes du ciel, Anges el archanges, quel est ce roi de gloire, je répondrai: C'est le Seigneur fort et puissant : le Seigneur puissant dans le combat il a vaincu, brisé, broyé tous les ennemis. Que si vous demandez encore : Quel est ce roi de gloire? Ce roi brillant d'une gloire et d'une majesté immenses, qui s'élève au-dessus de tous les globes célestes avec l'illustre cortège des âmes justes, il est aussi le prince de tontes vos phalanges : Le Seigneur des vertus, voilà ce de gloire. 0 joie immense des Anges et des âmes bienheureuses : Qui dira, qui exprimera toul l'hon- neur et tout l'amour avec lesquels le Péri éternel reçut son Fils bien-aimé? Levez-vous donc, Seigneur Jésus, Fils de Dieu et Fils de Marie : Levez-vous pour entrerdans votre repos, vous el l'arche de votre sainteté, votre humanité sainte, naguère Buspendue en croix, maintenant exaltée par-dessus tous les chœurs des Vnges. Oh qu'il est différent, le cortège de Jésus s'élevanl glorieusement dans le ciel, qu'il est différenl de celui du Calvaire, il montait portant sa croix au milieu des lar- rons et des bourreaux :

152 LA MERE DAHOUB ET DE DOILEIR.

0 Mère d'amour et de douleur ! quels étaient vos sentiments en voyant votre Fils, forme dans votre sein par l'opération du Saint-Esprit, élevé à une si grande gloire? Si la Heine du Midi ne se possédait plus d'étonnemcnt quand elle contempla toute la gloire du plus sage des rois : Non habebat ultra spiritum; que dirai-je de vous, ô Heine du monde entier, de vous qui suivant l'opinion probable des Théologiens, avez vu l'essence de Dieu dans l'incarnation du Verbe, à la résurrection et à l'ascension? Il était convenable et juste, dit Paul de Barry \ que celle qui avait été plongée dans un océan de douleur en voyant les tourments atroces de son Fils, fût aussi absorbée parle torrent d'une volupté divine en contemplant le triomphe de ce même Fils sur la mort. 0 mon esprit, humiliez -vous en présence du Fils et de la .Mère; félicitez-les, vénérez-les, exal- te/les autant qu'il vous sera possible.

1 Paul. <1p Barry. c ."î. in anno Mnr.

CONSIDÉRATION LV.

Le jour de la Pentecôte, les consolations du Saint-Esprit réjouissent l'Ame de la i'>. V. .Marie en proportion de ses douleurs.

DILCE l!l Hth.l itll il.

Mm, oui, moi-même y je vous consolerai. (Isa. M. 12.)

1. Lorsque Jésus-Christ, Réparateur de l'univers et Père plein de prévoyance pour le bien de l'Eglise sa tendre fa- mille, fui monté au ciel, il voulut laisser vivre encore quelque temps sa Mère bien-aimée pour être la mère de cette famille sainte, et pour tenir sa place auprès des Apôtres et de tous les fidèles. Etant donc revenue delà montagne des Oliviers au mont Sion, la 15. Vierge y demeura dix jours dans la prière soit mentale soit vocale, avec les premiers chrétiens au nombre rie ceni vingt, et par ses ferventes supplications elle bâta beau- coup lu venue du Saint-Esprit. Hue ne pouvait pas obtenir du Père celle qui étail sa fille chérie? du Fils, sa tendre Mère? et de l'Esprit saint, son Epouse bien-aimée? Dieu, dit saint Vin- cenl Ferrier ', fil dépendre l'envoi de l'Esprit saint des prières instantes de la H. Vierge. C'est à quoi l'ait pareillement allu- sion l'Evangéliste, en écrivant que les Apôtres, avec Marie, se préparaient a recevoir le Saint-Esprit par de communes et ferventes prières : Erant persévérantes in oratione cum Maria Matre Jesu. La douce Vierge leur expliqua sans doute les ad- mirables dons du Saint-Esprit, qu'elle connaissail si bien par expérience, se proposant ainsi de 1rs exciter a prier H implo-

1 s. Vinc. Ferr. éerm. de Pentec.

Io4 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

rer ce divin Esprit avec plus d'ardeur. Et quand enfin brilla le jour heureux Dieu devait remplir les vœux ardents de ces âmes pieuses, l'Esprit saint descendit du ciel sous forme de feu, se reposant d'abord sur la tète virginale de Marie, puis sur chacun des autres : Et repleti sunt omnes Spiritu s/meto. Pour emblème, qu'on se représente la rosée du matin, qui tombe par un temps serein et tranquille, et rafraîchit les fleurs languissantes des jardins, les prairies desséchées, et les champs brûlés par les ardeurs du soleil. La devise est : récompense de la nuit endurée patiemment: ou, si vous pré- férez :

Dnt/.r rnfrmrh issem oit.

Marie, sans aucun doute, et avec elle l'Eglise naissante, languissait de l'absence de son divin Epoux majestueusement assis à la droite du Père; mais aussitôt que l'Esprit paraclet leur eut apparu à la troisième heure du jour, non-seulement il les enflamma d'amour pour Dieu et le prochain, mais de plus il répandit dans leurs âmes languissantes comme due douce rosée de consolation : Ero quasi ros Israël.

2. La colombe apportant l'olivier de la paix consola grande- ment \oé de tous ses travaux, et lui fit oublier toutes les eaux du déluge. .1/ illa venit ad cum a<l vesperam, portant rn- iiiiim ûlivsê vitentibus foliis in ore stio.

Agar, pleurant amèrement le triste sort de son fils ïsmaël et la mort qui le menaçait dans le désert, fut fortifiée par l'Ange consolateur : L'Ange de Dieu appela Agar, en lui di- sant : Agar, que faites-vous? Ne craignez pas. Dieu a exaucé la voix de l'enfant.

Joseph consolait paternellement ses frères effrayés de [eur crime à son égard : Ne craignez point, je vous nourrirai vous et vos enfants. Et il les consola et leur parla avec bonté et douceur.

Uutb. accablée par la faim et glanant dans le champ de ^<>ii parent, trouva une grande consolation dans Booz : Elle

CONSIDÉRATION I.V. IStS

dit : J'ai trouvé grâce à vos yeux, ô mon seigneur qui m'avez consolée.

Tobie, durant l;i captivité, ayant trouvé grâce devanl le roi Salmanazar, adoucissail par ses ingénieuses paroles et * 1 "

toutes manières la tristesse de ses frères captifs : 11 allait tous les jours visiter ceux de sa parenté, et les consolait.

Job, parlant de Lui-même, dit : Lorsque j'étais assis comme un roi an milieu des gardes qui m'environnaient, je ne lais- sais pas d'être le consolateur des affligés. 0 bon .Irsus qui maintenant élevé au-dessus de tous les chœurs des Anges, êtes assi> dans !•• fiel à la droite du Père, comme Roi des rois et Seigneur des seigneurs, environné de toute l'armée les anges, dont un million vous servent, et mille millions assistent 'devant vous: vous n'avez pas cessé d'être le conso- lateur de votre Mère triste et affligée, vous l'avez consolée avec bonté par l'Esprit saint le meilleur et le plus grand con- solateur : Ego, ego ipse consolabor te; moi, moi-même je vous consolerai, et non pas un Ange, un ambassadeur, un homme. ou toute autre créature; et je changerai tout votre chagrin en une joie inexplicable. Citons Sophronius : Pensez, examine/, de quelles douleurs était affectée la B. Vierge après l'ascen- sion de Jésus. Considérez quels tourments sou amour lui fai- sait souffrir, quel désir embrasai! son cœur quand elle rap- pelait a smi souvenir tout ce qu'elle avait entendu, vil et connu; de quels feux la consumait l'ardeur de Bon pieux amour. Pleine de L'Esprit saint, quels élans la portaient vers les secrets célestes, parce que, quoiqu'elle aimât Jésus de tout son oœur, de toute son âme, et de tout son esprit, cependant chaque jour elle riait enflammée de désirs nouveaux de le voir, désirs d'autant plus torts qu'elle était favorisée intérieu- rement de divines visites; elle comblée de la grâce de l'Esprit saint , •'! que le divin amour embrasait toute entier»; sans laisser la moindre place a nue affection terrestre; elle enfin vivant dans une ferveur continuelle, h dans l'enivrement de son amour '.

1 ^oplirnn. serm. dfl kMttatpl

156 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

.'}. A la descente du divin Paraclet en elle, cette parole de l'Epouse fut accomplie : Le Roi m'a fait entrer dans son cel- lier, il a établi en moi la charité. Ce cellier n'est autre que la maison la sainte Vierge était réunie aux Apùtrcs du Sei- gneur pour la prière, ils furent tous abreuvés d'un torrent de délices, enivrés de la grâce de l'Esprit saint et du divin amour. Il y a quelque temps elle était dans un océan de dou- leurs à l'ombre de la croix, et voilà qu'en ce jour, remplie de consolations célestes, elle repose à l'ombre de l'Esprit saint que l'on appelle ordinairement l'ombre de Jésus-Christ, et peut dire comme l'Epouse : Son fruit est doux à mon palais ; et avec le Psalmiste royal : Vos consolations; ont rempli mon âme <lf foie, à proportion du grandnombre de douleurs qui ont pénétré mon cœur. C'est le fruit de la passion, la récompense des tri- bulations endurées. Je suis rempli de consolation, dit l'apôtre saint Paul, je surabonde de joie dans tontes mes tribulations, parce que le Saint-Esprit lui était comme les arrhes du salut. Si le gage, que le Seigneur donne à ses serviteurs, est si grand, si délicieux, quel sera l'héritage qu'il doit accorder un jour à ses bien-aimés.

La réception du Saint-Esprit réalisa les paroles du Roi-Pro- phète: Un fleuve réjouit la cité de Dieu par L'abondance de ses eaux. Marie la sainte Mère de Dieu, dit saint Jean Cbrysos- tome ', est la rite vivante de Dieu, cité sainte, belle, solide, fortifiée, ornée de toutes sortes de vertus et de grâces, dans laquelle pendant neuf mois le Fils de Dieu a fait sa demeure. Maintenant que les soulfrances sont passées, l'abondance des eaux du fleuve, je veux dire. l'Esprit saint, a réjoui merveil- leusement la cité de Dieu et l'a comblée de ses grâces el de ses dons. « L'Esprit saint, dit saint A.thanase, descendit sur la Vierge avec toutes les vertus essentielles qui sont en lui par la raison de son principat divin, la remplissant de grâces afin qu'elle les possédât en toutes choses à un tel point qu'elle en surabondât parla plénitude reçue del'Espril saint "-. »

1 S. Chrysost. in oral, do Annunt. 2 S. Athanas. homil. de SS. Deip.

i DNSIDJ H M lo.s i.\ . I.'m

Aine chrétienne, si Marie abonde de toutes les grâces de. l'Esprit saint ; si en elle esl la grâce de toute voie et de toute vérité : si nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce, pourquoi dans nos tentations, nos tribulations, qos né- sitéa ne nous adressons-nous pas à la Bière des grâces pour qu'elle nous obtienne de L'Esprit saint La grâce efûcade ? Les mondains recherchent avec zèle les lionnes grâces des prin- ces. Rappelez- vous Aman et bien d'autres. Cependant la t'«i\ eur des grands ne sauve pas toujours. Or Marie est lu Mère de tnus les vivants, pleine de la grâce de L'Esprit saint, Mère qui ne rejette pas les pécheurs mais les accueille avec bonté. Elle a ilit à sainte Brigitte ': Je suis la Mère, non point des justes seulement, mais aussi des pécheurs qui veulent revenir à de bons sentiments, et je leur donne secours. Courage, mon .une, courage. Quiconque, ajoute le docteur Séraphiqne, désire recevoir les scpts dons du Saint-Esprit, qu'il cherche la (leur même de ce divin jEsprit sur la tige qui est la Vierge. Par la Vierge qous parvenons à la fleur, par la fleur à l'Esprit qui repose sur elle ; par Marie nous arrivons à Jésus-Christ, ' par Jésus-Christ nous trouvons la grâce de l'Esprit

saint -.

i. Dans l'ancienne loi Dieu prescrivit de quelle manière le prêtre devait immoler un veau pour l'expiation des péchés : il voulut que le prêtre, trempant le doigt dans le sang de cette victime, aspergeât sept fois l'autel du propitiatoire qui était dans le tabernacle, afin que ceux qui entraient parce moyen dans le tabernacle, trouvassent la rémission de leurs péchés. C'étaienl la des figures; or elles sont écrites pour nous corri- ger bI nous Instruire.

Jésus-Christ est le prêtre qui est entre une fois dans le sanc- tuaire, non avec le sang des houes et des veaux, mais avec son propre sang, nous ayanl acquis par ce sang une rédemption éternelle, l'ai- le jeune veau, entendons son humanité immolée pour les crimes des hommes : et, par l'autel, le saint Cœur

1 Revel. lih. 14. c. i :is. * S. Bon. in Spec. c. B.

I5B LA HÈRE 1> AMOUR Kl DE DOULEUR.

de la Douloureuse Vierge Mère, sept fois arrose avec le sang adorable du Rédempteur son Fils : dans la circoncision, dans l'agonie au jardin, qu'elle n'ignora pas, 3" dans la flagellation, au couronnement, au dépouillement des habits, 6* au crucifiement, àfouverture du cœur; d'où saint Jérôme a dit, avec beaucoup de vérité, dans unde ses sermons: Autant de lésions dans le corps de Jésus-Christ, autant de blessures dans le cœur de sa Mère; autant d'épines piquantes, autant de clous perçants ; autant do coups meurt tissant la chair, autant de flèches entrant par les yeux de la Vierge Marie et blessant son Cœur et sou àme, afin qu'elle dise : Je n'ai pas péché, et mon œil demeure dans l'amertume et la tristesse1.

Vous demanderez, prudent lecteur, pourquoi le prêtre trem- pait son doigt dans le sang de la victime égorgée et asper- geait sept fois l'autel, le tabernacle et le voile derrière lequel étaient cachés les secrets divins dans le temple. Remarquez que ledoigt désigne le Saint-Esprit par lequel les grâces nous sont données. L'Eglise l'appelle ainsidansl'une de ses hymnes: Vous êtes le '/ni</t de droite de Dira. Et l'abbé Rupert * : Trem- per Le doigt dans le sang, c'est donner le Saint-Esprit par sou sang, car cet Esprit divin est appelé le doigt de Dieu. Et voilà l'immense bonté de l'Esprit saint: le saint Cœur de la Dou- loureuse Vierge, autel animé fut aspergé par sept effusions du sang précieux de Jésus-Christ ; au jour de la pentecôte, l'Es- prit saint à son tour comble abondamment de ses sept dons ce Cœur immaculé de la précieuse Mère de Dieu, et l'enrichit tellement que saint Bernard s'écrie : 0 Marie, Mère de Dieu qui seule ave/ possédé toute la grâce de l'Esprit saint : I- 1 saint Jérôme * : D'autres reçoivent la grâce par portion, mais la plénitude entière de la grâce tut répandue tout d'un coup dans Marie. Ma tendre Souveraine, une petite goutte de la grâce dont vous êtes remplie, une petite goutte pour nous malheu-

1 S. IliiMoii. cit. ah Ant. Rampelogo. Theol. in sig. Bibl. 2 Lil>. I. iu Le vil. " S. Bern. in Salve Reg, * In quodam. llvmno.

< OMStlrf H\ l ION i.\ . in!»

ii'ii\. et c'esl umz [ > « »iit- nous procurer an doux rafraîchis- sement.

Je nu' rappelle La petite goutte d'eau que demandait a Ibraham te mauvais riche au milieu des flammes de l'enfer il était tourmenté par de grands supplices et par une soir ardente : Père Abraham, ayez pitié "le moi, et envoyé/. Lazare tremper L'extrémité de smi doigt dans l'eau pour ra- fraîchir ma langue, parce que je souffre horriblement dans ces flammes. Voyez et admirez, ô mou esprit, la douceur et L'humilité de ce riche, devenu si malheureux, qui ne demande pas les iluts de la mer et des fleuves pour éteindre les ar- deurs de L'enfer, mais nue seule goutte d'eau au bout du doigt. 0 misérable impie, quel soulagement peut te donner une goutte ? Tons les abîmes des eaux et même l'océan ne sau- raient étouffer une étincelle de l'enfer.

Saint Augustin, surce sujet, dit que par cette goutte d'eau il tant entendre la grâce de l'Esprit saint dont une goutte seu- lement présentée au mauvais riche par L'extrémité du doigt aurait suffi pour apaiser l'ardeur de l'enfer et même pour éteindre tous les tourments des damnes. Per extremum digiti, oetmmùnam operatwnem sègnificat, quaper Spirùum sanctum mtévenitur ' ...

Concluez maintenant, âme chétienne, l'inénarrable douceur dont Fut rempli le trèa«aint Cœur de la Vierge Marie Mère de Dieu, Lorsqu'elle reçut, non point une goutte, mais toute la plé- nitude de '• grâce du Saint-Esprit. La Bienheureuse Vierge, dit saint Antonio \ l'ut pleine de grâce eu quatre manières: pre- mièrement, parce qu'elle eut au [dus haut degré toutes les grâces générales et particulières de toutes les créatures; secon- dement parce qu'elle eut les grâces dont toute créature man- qua, troisièmement, parce que s;i grâce l'ut ^i grande qu'une pure créature n'est pas capable d'eu recevoir une plus abon- dante ; quatrièmement parce qu'elle posséda en elle la grâce io

1 [n queest Evangel. Iil>. 2. <•. :is -s Antonio 1. part. tit. 15. c. 2. parag. lô.

IbO LA .mère d'amour et de DOL'LEL'K.

créée, c'est-à-dire Dieu : de toute manière elle fut doue pleine de grâce. 0 malheureux mortels, pourquoi aimez-vous la vanité et cherchez-vous le monsonge? Pourquoi soupirez-vous

si ardemment après les faveurs des princes ? Jusqu'à quand courrez-vous après les délices mondaines, les biens fugitifs et les voluptés sensuelles ? Une seule chose est nécessaire : re- chercher la grâce de l'Esprit saint, sans laquelle, dit saint Paulin, vous êtes de vivants cadavres. Regardez le figuier maudit par Jésus-Christ et qui se dessécha : Et arefacta est continuo fîculnea ; voilà ce que vous êtes, sans la grâce du Saint-Esprit ; la sève de sa grâce une l'ois soustraite, vous sé- chez et périssez nécessairement. Employez donc tous vos efforts et tous vos soins à chercher la grâce du Saint-Esprit, et cherchez-la par Marie la Douloureuse .Mère. Qui que nous soyons, dit le patriarche Philothée ', qui désirons voir de nos yeux les rayons projetés par la grâce de L'Esprit saint, c'est- à-dire, la clarté de la lumière divine qui n'a pas de couchant, il faut que nous)accourrions tous à la source de grâce, à Marie .Mère du Créateur ; à son désir Dieu communique aux fidèles tous les plus grands dons.

G. Il plut à l'Esprit saint de se manifester sous diverses fi- gures. A l'origine du momie, lorsque la terre était encore toute nue et sans ornements : l'Esprit du Seigneur était porté sur les eaux. L'expression hébraïque indique l'action de l'oiseau cou- vant ses petits. Il était sur les eaux leur communiquant par sa puissance la force de produire afin que les oiseaux, les reptiles, les poissons et les germes, et tous les cieux fussent produits par les eaux.

Quand le premier homme était à terre, étendu comme une statue formée de boue, privé île sentiment, de mouvement, de. vie et de raison, Dieu, le souverain créateur de tontes choses, souffla stlr son visage un spiraclede vie, ri l'homme dé- fini vivant et anime. Le mot inspiravit n'indique pas seulement qu'il lui donna une àme, mais ainsi que l'observent plusieurs

i philotk. Patr. ex Menol. 10. juliiode3.

< ONSIDi i; \ i [ON iv. 1 tll

Pères, il désigne encore l'Esprit sainl comme spiracle de vie, avec ses dons, ses fruits, L'innocence et la justice origi nelle.

Lorsque le peuple Israélite était tiré «le la dure servitude de Pharaon par le ministère de Moïse, l'Espril sainl voulut être leur conducteur et Les accompagner sous La forme d'une co- lonne de Duée et de t'en.

L'Ange qui désigna Gédéon pour chef contre les Madianites, étendil pour le sacrifice, est-il dit dans L'Ecriture, L'extrémité de sa baguette contre la pierre, et Le feu s'éleva de la pierre et consuma les chairs et Les pains azymes. La pierre dénotait Jé- sus-Christ* suivant saint Paul : Petra autan erat Christus; et l'Esprit saint était désigné par le feu sortant de la pierre. La pierre, dit l'abbé Rupert ', dont nous tirons le feu eu la frap- pant, signifie Jésus-Christ qui, frappé de la croix, a répandu sur nous le Saint-Esprit.

ABathazar, roi sacrilège, au milieu d'un festin, apparurent des doigts, et comme la main d'un homme, qui écrivait près du chandelier sur la muraille de la salle du palais : et Le roi voyail le mouvement des doigts de la main qui écrivait. Ce doigt écrivant la sentence de condamnation du roi plongé dans Les excès du vin, indiquait, dit la ('dose, le Saint-Esprit qui est le doigt de la main de Dion, et dont le Sauveur a dit : Je 'liasse les démons par le doigt de Dieu. 0 mortels, ne contris- tez pas l'Esprit saint. Saint Thomas de Yilleneuve ajoute * : st-a-dire, ne 1«- mettez pas en fuite, ne le chasse/, pas par Le péché. El saint l; trnard ' : Ce divin Esprit déteste les souil- lures, et ne peut habiter dans un corps sujet aux péchés. Aussi je ne m'étonne pas que tonte la plénitude de la grâce de l'Esprit saint se soit répandue dans le Cœur de la Vierge Marie, qui jamais n'a été soumise a aucun péché. Il habitait dans smi Cœur très-pur, comme la Divinité dans son temple, comme un roi dans bob palais, comme un pilote sursoii navire, comme

1 Rnp. l. '■> <l<- div. office. 28. - S. Thora. Villanovan. > 3. 1 s. Bero. m fest. Penti

II. Il

Hi~2 HÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

un jardinier dans son jardin, comme un maître dans sa maison. Et c'était la maison que la Sagesse s'est bâtie, elle a taillé sept colonnes, immolé des victimes, mêlé le vin et préparé une table. La maison dont parlent les Proverbes, dit le B. Pierre Damien 1, nous désigne très-bien la P>. Vierge, vraie maison soutenue par sept colonnes, enrichie des sept dons du Saint- Esprit

7. Isaïe, le plus grand des prophètes, y faisait allusion dans cet oracle sur le Sauveur : Et sur lui se reposera l'Esprit du Seigneur, l'Esprit de sagesse et d'intelligence, l'Esprit do conseil et de force, l'Esprit de science et de piété ; et l'Esprit de crainte du Seigneur le remplira. Ces dons et ces grâces (pie Marie reçut au même instant avec la grîice justifiante, lui furent de nouveau accordés en plus grande abondance le jour de la pentecôte par ce divin Esprit. C'est ce qu'insinuait le messager du salut, l'archange Gabriel, et d'une manière évi- dente quand il la consolait dans son trouble par ces paroles : L'Esprit saint surviendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. Remarquez le mot surviendra qui suppose que le Saint-Esprit était déjà venu en Marie. Cette expression il surviendra ai vous, est fort juste, dit Li- ran -, puisque le Saint-Esprit était déjà venu en elle dès le premier instant de son existence dans le sein de sa Mère en la préservant de la tache originelle. Il y vint encore au moment de l'incarnation du Verbe la vertu du Très-Haut la couvrit de son ombre, en formant en elle la parfaite humanité de Jé- sus-Cbrist, et en l'unissant à la personne du Verbe d'une ma- nière ineffable ; et enfin, le jour de la pentecôte, il y survint, et par son avènement, au témoignage de saint Ildephonse '. le Cœur de la Vierge s'était emflamméde l'amour divin comme le fer s'échauffe dans le feu. 0 tendre Souveraine, pleine et surpleinc de la grâce du Saint-Esprit, allumez aussi dans nos cœurs, hélas! si tièdes et si froids, le feu de ce divin amour

1 lï. Dam. S. de Nat. M. V. - 2 In Luc. I. 3.1. T> S. Ildepli. S. 1. de Assumpt.

CONSIDÉRATION LV. !•>•'*

(Iinit le Sauveur a «.lit : .le suis venu répandre le l'eu sur la terre, et que veux-je, sinon qu'il s'embrase.

En terminant cette considération, rappelons-nous l'enfant prodigue repentant, à qui son père fit remettre un anneau : a Mette/, un anneau à sa main. » <> père, ce n'est pas un an- neau, mais du pain qu'il faut à un affamé qui n'a plus que, les os. Saint Augustin ' répond que c'estavec raison qu'on lui mil un anneau au doigt : L'anneau à la main; dit-il, est le gage de l'Esprit saint à cause de la participation à la grâce. 0 très- sainte Vierge! ô ma Mère! je suis un enfant prodigue, j'ai péché contre le ciel et contre vous, mais j'ai regret par-dessus tout d'avoir offensé Dieu ; ah ! malheureux que je suis, ob- tenez-moi cet anneau, la grâce de l'Esprit saint, et éternel- lement je chanterai vos miséricordes.

1 S. August. qnsst. Evangel. 33

CONSIDERATION LVI.

L'exemple de la Mère Douloureuse nous apprend comment nous devons prier Dieu, pour le faire comme il faut et avec fruit.

RECTA A RECTO.

lis persévéraient tous ensemble dans la prière avec Marie, Mère de Jésus. (Act. 1. 14.)

Un jour la veuve Salomé, mère des fils de Zébédée, était venue trouver le Rédempteur pour le supplier humblement, comme étant plein de bonté, de daigner accorder à ses fils Jacques et Jean les premières places dans son royaume et de mettre l'un à sa droite et l'autre à sa gauche. A cette demande, que répondit le doux Sauveur? Il répondit, non pas à la mère, mais à ses fils : Vous ne savez ce que vous demandez. Pour- quoi cela, Seigneur? Pourquoi les renvoyez-vous sans exaucer leur prière? Est-ce que vous n'avez pas dit : Demandez, et vous recevrez; cherchez, et vous trouverez; frappez, et l'on vous ouvrira? Et voilà que cette pauvre veuve vous demande et ne reçoit pas; elle cherche, et ne trouve rien; elle frappe, et il ne lui est pas ouvert. Seigneur, sont donc vos anciennes promesses?

Saint Chrysostome répond que cette mère essuya un refus parce qu'elle ne priait pas bien et contre le propre salut de ses enfants, en demandant pour l'unie ciel, et pour l'autre l'enfer. Et comment cela? C'est que, prudent lecteur, la droite, dans le royaume de Jésus-Christ, est Le côté de ses élus, et la gauche, celui des réprouvés el des damnés : Et il placera les brebis à sa droite, et Les boucs à sa gauche. Elle demandait donc pour

i ONSIDÉB \l [OH LVI. 165

l'un te ciel, et pour L'autre L'enfer. C'est doue avec raison que la mère e1 ses Ois furenl repousses dans leur prière : Vous

tavez ce </ue vous demandez ; comme s'il eût dit, continue le même docteur ' : Je vous ai appelés à ma droite, ri vous, dans vos projets, vous courez à la gauche. Voyez, âme chré- tienne, commente! de quelle manière vous priez : Vous de- mandez, dit saint Jacques, et vous n'obtenez pas, parce que \ OUS demandez mal.

La Mère du Fils de Dieu ne priait pas comme la mère des Bis de Zébédée : file ne demanda jamais ni la droite ni la gauche dans le royaume de Dieu, mais qu'en tout s'accomplit la vo- lonté divine qu'elle considérait uniquement. C'ost pourquoi elle obtint toujours de Dieu ce qu'elle demanda dans sa prière, Elle dont la vie entière, si vous y faites attention, ne fut autre chose qu'une prière et un entretien familier avec Dieu qu'elle commença dès le premier instant de sa vie à adorer, à servir et glorifier. La Bienheureuse Vierge, dit saint Bernardin de Sienne, fut tellement éclairée, lorsqu'elle était encore dans le sein de sa mère, que non-seulement elle fut pleine de raison, mais encore douée d'une haute contemplation, et tellement élevée qu'elle contemplait Dieu, même avant qu'elle fût née, avec plus de perfection que les autres ne le font dans un âge parfait, et que, dans le sommeil, elle surpassait en contem- plation les autres dans la veille. Elle fit progrès dans la prière et les louanges divines pendant toute sa vie, et engageait les autres au zèle pour la prière autant qu'il lui était possible. La bénie .Mère de Dieu, dit un autre Bernardin surnommé Busti, animait les autres à la prière ; et, dans les Actes, il est dit des Apôtres qu'ils se tenaient en prière avec Marie, précisément pour nous faire conclure que leur persévérance dans l'oraison venait surtout de la présence et des exhortations de Marie. C'est pourquoi vous pouvez parfaitement comparer le saint Cour de la tendre et Douloureuse Mère de Dieu à l'équerre que les architectes mit assidûment en mains pour ne pas se

1 S. Chrysost. apud «'.uni. in Rlatth. c. 25 \. '<'■.

166 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

tromper dans leurs travaux, et au moyen de laquelle leurs constructions s'élèvent dans toutes les règles, en ajoutant cette devise :

Recta a recto : La droiture produit la droiture.

2. Ses yeux étaient comme ceux des colombes, toujours fixés vers le Seigneur, sans compter les autres qualités ca- chées au dedans d'elle-même, entre autres l'intention de son Cœur toujours dirigée vers Dieu présent partout, et en pré- sence duquel elle marchait toujours. Nous tenons, dit saint Antonin ', une chose pour certaine, c'est que toutes les actions et les intentions de Marie avaient Dieu pour objet, soit à l'âge de trois ans dans le temple où, jusqu'à quinze ans, moment de la conception du Verbe, elle s'appliquait à Dieu nuit et jour par l'oraison tant mentale que vocale; soit pendant les trente- quatre ans qu'elle passa dans la compagnie de son Fils depuis l'instant de son incarnation jusqu'à sa passion et sa mort sur la croix; soit depuis l'ascension après laquelle elle vécut sur la terre environ vingt-deux ans, par la volonté de Dieu, pour la consolation des premiers fidèles : toujours croissant en dévo- tion et en mérites, elle monta à une perfection consommée et au sommet de la sainteté; et nous recevons tous quelque chose de sa plénitude.

L'Ecriture nous dit de Judith, cette noble veuve aussi ver- tueuse que belle, qui fut choisie de Dieu pour accomplir un fait héroïque et délivrer Israël : « Elle s'était fait dans le haut de sa maison une chambre secrète, elle demeurait ren- fermée avec les filles qui la servaient; et ayant un cilice sur ses reins, elle jeûnait tous les jours de sa vie. » Or c'était pour être appliquée uniquement à Dieu et à la prière.

Type admirable de la Vierge Marie Mère de Dieu, devenue veuve aussi, faisant choix, après l'ascension de Jésus, d'une chambre secrète sur le mont Sion elle s'appliquait de toutes

v. Antonin. 4 part. Ht. l.'>. c. Si.

I ONSIDl i; \i 10» i.\ i. | tiT

orces .1 servir Dieu dans la méditation assidue, le jeûne, la mortification «lu corps, la pratique du silence, dans une chasteté plus qu'angélique el dans l'oraison la plus fervente. Expliquant ce passage des Cantiques : Je dors, mais umn cœur

veille, Denis le Chartreux parle ainsi de la sainte Mère de Dieu ' La très-sainte Vierge a pu éminemmenl dire ces paroles, parce qu'elle a mené la vie la pins contemplative, et que, s'abstenanl du tumulte extérieur, de tout bruil déréglé, «les soins superflus et de tonte inquiétude blâmable, elle vaquait à Dieu seul dans la pins grande vigilance, elle priait pour l'E- glise, et toujours elle était appliquée aux actes de vertus les plus parfaits par l'excellence de leur tin. Enfin son Cœur était tout à fait vigilant pendantle sommeil corporel; et par l'ha- bitude parfaite qu'elle avait acquise de s'occuper des choses divines, par l*ex< çcice de la charité la plus ardente, par la la plus abondante, qui lui était infuse, par la contem- plation durant le jour, laquelle se prolongeait presque conti- nuellement durant le temps du sommeil, elle était unie de cœur avec Dieu, <'t ne cessait de veiller pour l'Eglise confiée 1 ses Bollicitudes. » Si la prophétesse Anne ne quittait pas le temple, servanl Dieu nuit et jour dans les jeûnes et les suppli- cations, combien pouvons rions admirer davantage dans la sainte Mère son assiduité à l'oraison, la ferveur de son âme el Ifs intentions de son espril incessamment tourné vers Dieu. Les saints Pères l'ont donc bien justement nommée encensoir <l'i)i\ H Autel des parfums sur lequel les plus suaves aromates étaient présentés a l'Eternel dans son temple. Et notre prière a nous, oh: qu'elle esl tiède! C'est une grande injure que je fais a Dieu, dit saint Bernard *, lorsque je le prie d'écouter la prière que ]•■ lui adresse el que moi-même je Q'écoute pas. Je le prie de faire attention à moi, et moi je ne fais attention ni a lui ni a ce que je lui dis. Imitez donc, du moins autant qu'il vous est possible, la très-sainte Vierge, et, avant la prière, préparez votre âme el ne soyez pas comme un homme

! lu Cant. r. .,. __ - s. Bern. m Médit c. s.

]|,S LA M II! M D AMOUR ET DE DOULEUR.

qui tente Dieu. Ecoutez le conseil que vous donne la Vérité elle-même : Quand vous voudrez prier, entrez dans votre chambre, et après avoir fermé la porte, priez votre Père dans l<' secret, et votre Père qui voit dans le secret, vous accordera \ otre demande.

3. Je me rappelle ici le divin Epoux des Cantiques invitant amoureusement sa chère Epouse à sortir de sa demeure et de la ville, et à se rendre à la campagne pour se reposer dans les cavernes ombragées, creusées sous les rochers : Veni, columba mea, in fora minibus pcltw, in caverna macerix. Pourquoi donc, je vous prie, l'Epouse bien-aiméc, la colombe im- maculée dans les creux du rocher, et dans la caverne de la muraille.

Cet époux est Jésus-Christ, qui, dit Corneille1, s'est caché-, en se taisant homme, dans le sein virginal de Marie, et, à sa naissance, dans la grotte de Bethléem creusée dans la pierre en dehors de la ville; il est mort sur le rocher du Calvaire lut plantée la croix, et a été enseveli dans le tombeau de pierre d'où il ressuscita glorieux. C'est à ces lieux sacrés que l'Epoux bien-aimé invitait son Epouse chérie, la Bienheureuse Vierge sa Mère; et, continue le même auteur, elle les visitait fré- quemment avec piété, allait de l'un à l'autre et paraissait pres- que en faire sa demeure. <> que de ferventes prières elle y ré- pandit devant Dieu et son Fils! Que de soupirs ardents elle lit monter vers le ciel! De combien de larmes elle arrosa ces lieux vénérés teints du sang du divin A.gneau! elle était assise .1 l'ombre de Celui qu'elle avait désiré, repassanl dans sod esprit tout ce qu'il avait Bouffert pour les hommes, et son fruit semblait deux à son palais. Tel est le résultat de la prière et de la pieuse méditation des souffrances du Sauveur. Ecou- tons l'évêque d'Hippone ' : « Une j'ai pleuré, ô bon Jésus, dans la méditation de votre douloureuse mort, ému par un tel pro- dige de miséricorde! La douceur de votre clémence coulait dans m ;œur, elle échauffait mes all'ections pieuses, mes

Cornet, m Cant. 2. li. -s. Aug. in Uanual.

- ONSIDÉRATION I.V1. IG9

larmes s'échappaienl el je m'en trouvais bien. » Voilà comment la douceur naît de l'amertume.

Voulez-vous savoir, ô mon esprit, les prières que faisait Marie, les sujets qu'elle méditait en parcourant ces lieux sa? crés? Elle l'a enseigné elle-même à la vénérable Catherine île Ricci ' et lui a prescrit de les faire tous les jeudis au coucher du soleil et de les chanter dévotement avec ses religieuses. l'est comme un abrégé de la passion de Jésus, que la Doulou- reuse Mère avait tin'1 des saintes Ecritures pour son usage et qu'elle nous propose à méditer aussi.

Mes amis et mes proches se sout avancés contre moi et se sont arrêtés.

J'ai été livré, et je n'ai pu échapper : mes yeux ont été languissants par l'excès des pleurs que j'ai versés.

Et ma sueur est devenue pareille à des gouttes de sang qui coulent à terre.

Des chiens nombreux m'ont environné, l'assemblée des méchants m'a assiégé.

J'ai livré mon corps à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m'insultaient.

Je n'ai pas détourné ma face de ceux qui me blâmaient et me couvraient de crachats.

J'ai été prêt à la tlagellation, et ma douleur est toujours devant moi.

Ils ont percé mes mains et mes pieds, ils ont compté tous mes os.

Pour nourriture ils m'ont donné du liel, et dans ma soif ils m'unt abreuvé de vinaigre.

Tous ceux qui me voyaient m'ont tourné en dérision, ils ont parlé du bout des lèvres et ont branlé la tète.

IN m'ont considéré et regardé; ils se sont partagé mes vêtements et ont tiré ma robe au sort.

Je remets mon âme entre vus mains; Seigneur Dieu de vérité, vous m'avez racheté.

Seigneur, souvenez-vous de vos serviteurs quand vous serez dans votre royaume.

Jésus ayant poussé un grand cri, rendit son àme.

1 Adrien. Lyr. de Christ, pat. apud me fol. 50 I.

170 LA MÈRE 1) AMOTR ET DE liOULEl'R.

Je chanterai éternellement les miséricordes du Seigneur.

Il a vraiment pris toutes nos langueurs pour lui, il a porté lui-même nos douleurs.

Il a été blessé pour nos iniquités, il a été brisé à cause de nos crimes.

Nous étions tous comme des brebis égarées; chacun s'en allait dans sa voie.

Le Seigneur a placé sur lui les iniquités de nous tous.

Levez-vous, Seigneur, pourquoi sommeillez-vous? Levez-vous, et ne nous repoussez pas pour toujours.

Voici que Dieu est mon Sauveur; j'agirai avec confiance et je ne crain- drai pas.

Nous vous en prions, Seigneur Jésus, secourez vos serviteurs que vous avez rachetés par votre précieux sang.

y Ayez pitié de nous, ô bon Jésus.

R) Qui avez souffert pour nous avec douceur.

ORAISON.

Daignez, Seigneur, nous vous en conjurons, jeter un rpgard de miséri- corde sur cette famille pour laquelle Jésus-Christ n'a pas hésité de se li- vrer entre les mains de ses bourreaux et de subir le supplice de la croix.

Lecteur dévoué à Marie, si vous aimez votre salut, rendez- vous familière cette oraison qui a été formée parla Douloureuse .Mère. Le B. Albert le Grand assure que le simple mais pieux souvenir des souffrances de Jésus est plus utile à votre àme et plus agréable à Dieu que de vous flageller tous les jours jus- qu'au sang, de jeûner pendant une année au pain et à l'eau, ou de réciter quotidiennement le psautier de David. La Mère Douloureuse vous fournit donc une méthode facile de prière et de méditation; si vous l'aimez, imitez-la.

I. En voulez-vous davantage? et désirez-vous un modèlel Ce sera Jésus-Christ lui-même priant sur le mont des olives, qui va vous servir d'exemple. Il pria éloigné de ses Apôtres de la distance l'on peut lancer une pierre : Cherchez la so- litude pour l'aire votre prière. Il pria à genoux, prosterné la tare contre terre : Apprenez à vous humilier dans la prière,

CONSIDÉRATION I.vi. 171

vous qui n'êtes que terre et cendre. Il pria avec une entière réslgnatidn à la très-sainte volonté de sou Père : faites de même. 11 pria plus longuement dans son agonie : observez la ferveur et la constance dans la prière. Il pria jusqu'à éprouver une sueur de sang: remarquez que la mortification est néces- saire pour bien prier. Il pria avec larmes : non-seulement ses yeux, dit saint Bernard1, mais pour ainsi dire tous ses mem- bres semblaient pleurer, afin que l'Eglise, qui est son corps, lût purifiée par les larmes de tout son corps : sont vos larmes quand vous priez? Voilà la règle et le modèle, serviteur de Marie. Voilà de quelle manière il faut prier pour imiter Jésus et sa sainte Mère. Elle aussi elle pria, mais le plus sou- vent senle, aimant uniquement la solitude. Etant seule, dit saint Ambroise', dans un lieu retiré l'œil d'aucun homme ne pouvait la voir, l'Ange uniquement put la trouver, sans témoin, de peur que sa ferveur ne fût altérée par un entretien étranger, c'est alors qu'elle est saluée par l'archange Gabriel. Elle pria à genoux, on le voit par les traces qui en sont restées sur la pierre elle intercédait pour la persévérance d'Etienne3. Elle pria toujours dans une complète soumission à la divine volonté : La Yierge sans tache, dit saint Bernardin *, eut tou- jours en vue le bon plaisir de Dieu. Elle pria longuement et constamment, comme le prouvent les paroles de saint Luc: Ils persévéraient tous dans la prière avec Marie Mère de Jésus. Ellf pria avec larmes : Et lacrymse ejus in maxillis ejus. Elle pria même jusqu'au &ang pendant la passion et la mort de son Fils, ainsi qu'elle l'atteste à sainte Brigitte : De mes yeux s'échap- paienl des larmes comme le sang des veines. Et qui pourrait mettre eu doute qu'une telle prière n'ait pas pénétré les cieux et ne soit point parvenue en présence du Très-Haut? La prière de l'humble, dit le fils de Sirac, s'élèvera au-dessus des nues, et il ne se retirera pas que le Tout- Puissant ne l'ail regardé et exaucé \

1 S. Bertt. s. :t. in Ram. t'ai. - s. Ambr. I. •!. in Luc. 3 Adrichom. in deseript Terr. sancttr-. * s. Bernardin, t. J. 51. s Kccli. 35. 2i.

172 LA HERE D AMOUR ET DE DOULEUR.

."i. Quelle est noire prière à nous? Comme elle est distraite, tiède, sans dévotion, aride, faible, et faite sans aucune prépa- ration ! Et d'où vient cette tiédeur, demande saint Thomas de Villeneuve? D'où vient cette négligence dans l'action? 11 se répond : De l'oubli de Dieu, parce qu'on ne marche pas en sa présence1. Quand Abraham devait aller prier et sacrifier sur la montagne, il commença par écarter tous les obstacles qui pouvaient le distraire : Attendez- ici avecl'àne, après que nous aurons adoré nous reviendrons à vous. Pourquoi ne faites- vi m s pas de même, chrétien, lorsque vous entrez dans le temple pour prier Dieu, ou pour lui offrir un sacrifice? Pourquoi ne laissez-vous pas chez vous l'âne et toutes les préoccupations inutiles ? Le grand roi Salomon étant en prière avait fléchi les deux genoux, et tenait les mains élevées vers le ciel. Quelle position prenez-vous pour prier? Les Bethsamites, pour avoir porté sur l'arche de Dieu un regard de curiosité, furent frapppés de mort subite; et vous, n'ètes-vous pas prêt à regarder curieu- sement tout ce qui se passe? à tourner la tète au moindre bruit? à rire et causer? Est-ce prier? Lorsque vous vous entretenez, dit saint Jean Chrysostome ', avec le Roi des rois, que les Anges servent avec crainte, abandonnant le discours que vous lui adressiez, vous parlez de boue, de poussièrr et de toile d'araignée ! Une telle prière ne se change-t-elle pas en péché? Si la prière est une élévation de l'àme à Dieu, com- ment votre Ame pourra-t-elle être dans le ciel pendant qui1 vos mœurs sont dans la boue? Si la prière du juste, suivant saint Augustin s, est. la clef nul ouvre le ciel: La prière monte, ci lu miséricorde divine descend; comment s'ouvriront pour vous les portes du ciel, quand vous offrez à Dieu des prières si pâles et si froides? Ignorez-vous que maudit est celui qui fui/ l'œuvre dr Dieu avec négligence? Quelle est votre prière? Une lampe sans huile, une noix sans L'amande, une tige de blé sans grains, une meule sans farine, une fleur sans fruit,

' S. Th. Vill. *. de S. Mi.li . - S. Chrysost. bom. 1. de verb. Isaia?. 3 S. Auu. s. I. Dom in iirt. Pasch.

I "\>ii>i i: mOM l.Vl. I7.'{

un corps sans àme. Si vous êtes ' raisonnable el estimez le

salut éternel de votre àme, suivez le conseil du Sage : Avant la prière, préparez votre àme. Commencez par un acte de contri- tion, formez une bonne intention, demande/, la grâce pour prier avec piété, attention et utilité; dans le cours de votre prière, pensez à la présence de Dieu, à la passion de Jésus- Christ et à ses mérites infinis, pour produire des actes de foi, d'espérance, de charité, d'humilité, de reconnaissance, etc. Enfin présentez à Dieu vos prières par les mains de la Douloureuse Vierge Marie, dans les mêmes intentions qu'au pied de la croix elle offrit au Père éternel son Bien-aimé Fils. Quand vos prières seront appuyées sur ces marques d'amour et sur les mérites du Fils et de la Mère, alors vous ne pourrez éprouver un refus.

ti. Dites-le-moi, est-il une méthode do prière et de médita- tion plus efficace et plus utile que de plonger vos pensées dans le sang de l'Agneau, à l'exemple de la Douloureuse Mère et de suivre le double modèle qui vous est présenté dans la prière ? Que la passion du Sauveur, dit saint Bonavcnture, soit la règle de nôtre vie, et nous serons d'autant plus consolés que nous nous conformerons davantage à Jésus-Christ, de même que nous serons d'autant plus désolés que nous nous éloignerons davantage de ce modèle et de cette ri gle1. L'Ecclésiaste a dit : L'œil du Bage est sur sa tète; or, notre tète est Jésus cruci- fié sur qui nous devons assiduement fixer les yeux de notre esprit, comme la Douloureuse Mère, dans nos prières et toutes nos actions. Voici les paroles qu'adressa Jésus-Christ à sainte Gertrude : « Ma fille, celui qui me regarde en croix avec dévo- tion pendant sa vie, je le regarderai d'un œil favorable à sa mort. » Lorsque vous lésirez prier avec fruit soit vocalement soit mentalement, mettez-vous donc en présence de votre Amour crucifié et de sa Mère Douloureuse comme l'enfant prodigue qui se repent et revient à son père: J'ai péché, ô mon père, contre le ciel et contre vous, je suis plus digne

Stim. c. 4.

174 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

d'être appelé votre enfant. Ou comme le publicain qui n'osait pas lever les yeux au ciel, mais se tenant éloigné, frappait sa poitrine en disant : Seigneur, ayez pitié de moi, parce que je suis pécheur. Ou bien imitez le lépreux qui de loin priait le doux Sauveur de le guérir de sa lèpre : // se prosterna à ses pieds. Ou bien encore imitez le serviteur qui devait dix mille talents à son maître, en disant comme lui: Patientez, je vous prie, et je vous rendrai tout. Ou enfin, à l'exemple de la femme pécheresse, jetez-vous aux pieds de Jésus en pleurant vos péchés avec des larmes d'amour : Elle se mit à arroser de ses larmes les pieds du divin Maître. Ensuite tournez vos yeux vers la Douloureuse Mère et la priez avec instance, par les plaies sacrées et par le doux Cœur de Jésus, de daigner vous assister dans la prière et toutes vos actions, en sa qualité de tendre Mère qui vous a été léguée par Jésus-Cbrist mourant; alors il sera impossible que vos prières ne soient pas exaucées. « Le Fils exaucera la Mère, dit saint Bernard, et le Père exaucera le Fils. Mes chers enfants, voilà l'échelle des pécheurs, voilà celle qui fait ma plus grande confiance, voilà toute la cause de mon espérance. Eh quoi ! le Fils peut il refuser ou être refusé? Le Fils peut-il ne pas écouter ou n'être pas écoute? Xi l'un ni l'autre n'est possible. Vous avez trouvé la grâce auprès de Dieu, dit l'ange Gabriel; or, la grâce est ce qui nous manque' . »

7. Pour couronner cette Considération, nous citerons un fait arrivé à Bologne en Italie à un novice de l'Ordre de Saint- Dominique. Il était d'une noble famille, avait été élevé dans les délices et était plein d'amour de lui-même; mais ayant beaucoup de pénétration, il eut bientôt compris que personne ne peut servir deux maîtres, Jésus-Christ et le monde; c'est pourquoi, après mure délibération sur ce sujet, il résolut de dire adieu au monde et d'entrer dans la famille dominicaine. Il se rendit à Bologne il s'adonna pendant quelques mois à la ferveur dans son couvent célèbre de Saint-Dominique.

1 S. Bern. serai. Nativ. Fi. v.

CONSIDÉRATION l.VI. 175

Mais comme la rigueur monastique, la discipline sévère, le pain Doir mendié par la ville commençaient à déplaire à son estomac délicat el même a lui causer do dégoût, il prit le parti de s'adresser à la Douloureuse Vierge, son unique re-

fuge. Il alla donc se prosterner devant une image de la sainte Mère tenant sur son sein son Fils déposé de la croix, el eu fondant en larmes il lui adressa cette prière : Grande Reine et pieuse consolatrice des affligés, cet habit de laine grossière que je porte, l'exercice continuel de la discipline au chapitre, les veilles prolongées dans la nuit, l'assiduité au chœur, le silence perpétuel : tout cela m'afflige exces- sivement; mais ce qui me coûte le plus et que je ne peux vaincre , c'est le pain que je mange : on ne le fait point ici, il nous faut le mendier en ville de porte en porte, par morceaux, non auprès des grands mais des gens du peuple : pain noir, dur, dégoûtant, que je ne peux manger, ni même sentir. Je vous prie donc de ne pas trouver mauvais si je dépose à vos pieds cet habit religieux ; je désire beaucoup de le porter, mais je n'en ai pas la force '. Que fit la Dou- loureuse Vierge? Vraie Mère d'amour et de douleur, elle consola le novice avec une tendresse maternelle : Comme une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai. L'image tend le bras, prend le pain noir que lui présente le jeune homme, le trempe dans les plaies sacrées et le côté de son Kils, lui recommande de prendre courage, de goûter, mâ- cher et manger maintenant ce pain. Il obéit, le porte à sa bouche, le mange tout entier avec avidité, le trouve si bon et se sent tellement consolé qu'il change d'avis et de- meure dans le couvent. Il y persévéra jusqu'à la fin et supporta avec joie tout ce qu'il y avait de plus dur, de plus difficile et. de plus gênant, jusqu'à ce qu'il échan- geât la vie mortelle avec la vie éternelle. Tel fut le profit que ce jeune religieux retira de son recours à la Doulou-

i Ailrian. Lvr. de pat. Jesil, lib. 7. c. 9., et Quaresm. t. .;. f. ITil. exempt. '.

]76 LA MÈKE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

reuse Mère dans sa tentation. Imitez- le, serviteur de Ma- rie; si la tentation vous presse, allez à elle et dites -lui : < Montrez que vous êtes ma Mère, et que Celui qui a bien voulu naître de vous pour nous sauver reçoive par vous nos prières. »

CONSIDÉRATION LVI1

La H. Vierge et Mère Douloureuse, par l'exercice continuel des vertus,

nous ilouue uu admirable exemple du bon emploi du temps.

1)1 U (AU I.

Voulant que nous avons le temps, opérons le bien. (liai. 6. 10.)

1. Saint Bernard dit avec raison : « Rien de plus précieux que le temps, mais hélas ! rien aujourd'hui de moins estimé; les jours de salut passent, et personne ne refléchit et n'avoue que les instants qui ne reviennent pas sont perdus pour lui. » Considérez comment le soleil dans l'espace d'un quart d'heure parcourt cent vingt 'millions de lieues, suivant l'opinion des astronomes. Examinez la régularité de la lune, des étoiles et de tous les globes célestes; voyez comment ils exécutent leurs révolutions et les recommencent. S'ils s'arrêtaient dans leur course, tout serait bouleversé, anéanti. Il est nécessaire qu'ils conservent leur mouvement jusqu'à la fin des siècles ; certain auteur leur donne pour devise : Assiduo in motu.

0 chrétien qui aimez Marie, faites-y attention, et par ces créatures privées de raison comprenez quelle règle doit vous guider dans votre état et vers votre fin. Si vous ne courez pas dans la carrière, si vous n'avancez pas dans la vertu et ne laites pas un bon emploi du temps pour votre salut, né- cessairement vous tomberez en défaillance el périrez. La Vérité a dit: Il faut toujours prier, c'est-à-dire, toujours bien taire, et ne jamais cesser, parce que ce n'est point ici Le temps du repos mais de la lutte et du continuel exercice.

1 1 I ■!

I 7 S LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR .

Je vous ai placés, dit encore la Vérité, pour que vous alliez en avant, que vous portiez du fruit et que votre fruit soit durable. Je ne vous ai point placés pour mal employer le temps de salut, et pour être comme le figuier infructueux que le maître fit couper et jeter au feu parce que, après avoir attendu long- temps, il ne produisait aucun fruit : Coupez-le; pourquoi occupe-t-il une place inutile ?

Par quel merveilleux et constant exercice de vertu brilla pendant tout le cours de sa vie, et surtout après l'ascension de son Fils, la Bienheureuse Vierge et Mère d'amour et de dou- leur, qui dans tous ses actes, depuis l'aurore de sa vie, fit à chaque moment de nouveaux progrès dans la sainteté et la justice, jusqu'au beau jour de son entrée dans l'éternelle gloire suivant cette parole de Salomon : Le sentier des justes se déve- loppe comme une splendide lumière, et croît jusqu'au jour par- fait. Aussi l'abbé Rupert ' avance avec raison que « la Vierge dans sa première sanctification fut comme l'aurore, dans la conception de son Fils comme la lune, et dans la mort comme le soleil. » Vous en concilierez facilement, lecteur dévoué à Marie, comment cette Vierge très-sainte nous a donné à tous un admirable exemple du bon emploi du temps dans l'intérêt de notre salut, car quand le fer est chaud il faut le battre, d'où la devise :

Dum calkt. Pendant qu'il est chaud.

-2. Vous avez très-bien dit, ô le plus prudent des rois : La femme sage édifie sa maison. Telle fut Huth la moabite qui édifia la maison et la famille de Looz lequel lui a rendu ce té- moignage : Tout le peuple qui habite dans l'enceinte de ma ville sait que vous êtes une femme de vertu. Telle fut cette autre femme qui parla en faveur de sa patrie et de ses conci- toyens devant Joab assiégeant la ville d'Abela, et empêcha, par son éloquence persuasive, qu'elle fût dévastée. Elle cria

1 Rup. 1. 6. Cant. ab initio.

I ONSID] RATION LV1I. 179

du haut des remparts : Ecoutez, et dites à Joab : Approchez- vous et je vous entretiendrai. Telle fat Rébecca, industrieuse et prudente mère de famille qui procura la bénédiction pater- nelle à son Fils Jacob et de plus lui fit éviter avec adresse la colère de son frère Esaft. Telle fut aussi Abigaïl qui, par sa prudence el ses présents, apaisa David irrité et sauva sa fa- mille d'une ruine entière : David reçut de sa main tous les dons qu'elle avait apportés et lui dit : Retournez en paix dans votre maison; j'ai fait ce que vous m'avez demandé, et c'est en considération de votre personne que je l'ai fait.

Quittons les ombres et les figures. La femme sage qui bâtit sa maison fut surtout la Bienheureuse Vierge Mère de Dieu qui a bâti L'Eglise par Jésus-Christ son Fils, et lorsqu'il fut monté an ciel, prit un soin particulier de tous les chrétiens avec une sollicitude maternelle. « En vraie Mère de la nouvelle et sainte famille, dit Bruni ', pour gagner tout le monde elle s 'accommodait à tous par ses paroles, ses écrits, ses œuvres. Bes prières continuelles ; elle montrait sa charité immense et son zèle ardent pour le salut de tous. Elle s'affligeait avec affligés, relevait ceux qui étaient tombés, affermissait ceux qui étaient debout, soutenait les faibles, prenait soin des pé- cheurs, excitait les pusillanimes, offrait ses secours aux in- firmes et aux pauvres. Et comme elle savait parfaitement que la plénitude de la loi et le lien de toute perfection consistent dans la charité, elle ne dédaignait pas de converser avec les humbles et les gens de basse condition et de partager leur manière de vivre. Enfin, par ses conseils et ses réponses remplis de la Ba£esse divine, elle était pour la primitive Eglise un grand appui et un ornement. » Si saint Paul avait une charité admirable envers les chrétiens néophytes qu'il avait engendrés en Jésus-Christ, et s'il les portait continuellement dans sou cœur : <''> ouod habeam vos in corde; et dans un autre passage : Nous êtes dans mon cœur à la morl et à la vie; de quel amour brûlait le Cœur de Marie envers tous ses entants

1 Vin. Bruni S. J. Médit. « B. V.

180 LA MÈRE It'AMOLK ET DE DOULEUR.

spirituels : « De même que Jésus-Christ, dit Denis le Chartreux ', est notre Père et notre miséricorde, ainsi la Vierge est notre Mère, notre Souveraine, la porte de la miséricorde. Et comme une mère a une plus grande tendresse pour ses enfants dont l'enfantement lui a coûté de plus grandes douleurs ; ainsi la J». Vierge et Mère Douloureuse, qui nous enfanta péniblement au pied de la croix, nous chérit d'un amour indicible, et ché- rissait de la même manière pendant sa vie les premiers chré- tiens , dont tous les biens étaient communs. Par ses bons exemples, son travail, la sainteté de sa vie, elle brillait à leurs yeux et les éclairait, comme autrefois la colonne de feu pour les Israélites à travers la mer Rouge et le désert, quand ils s'acheminaient vers la terre promise : Ut dux esset itineris utro- que tempore.

3. Le plus sage des rois avait aperçu en esprit cette forte et courageuse Vierge, et il la comparait au navire du marchand qui apporte son pain des contrées lointaines : Facta est quasi navis institoris de longe portans panem suum. En effet, la Bien- heureuse Vierge a apporté dans sa maison, qui est l'Eglise, Jésus-Christ, disant de lui-même: Je suis le pain vivant des- cendu du ciel. Elle nous Ta donné dans l'Eucharistie pour nous nourrir et nous fortifier chaque jour. Elle se nourrissait journellement elle-même de ce pain eucharistique après l'as- cension; et comme elle avait un amour ardent pour son Fils, elle employait tous ses efforts dans l'Eglise naissante pour qu'il fût aussi reçu fréquemment par tous les fidèles. Les Actes nous l'indiquent: Ils persévéraient à écouter la doctrine des Apôtres et à participer à la fraction du pain. Et c'est dans ce but que les premiers fidèles, lorsque commençaient les per- sécutions dans l'Eglise de Dieu, pour se fortifier et se prépa- rer à souffrir généreusement le martyre, emportaient chez eux la sainte Eucharistie suspendue à leur cou et appliquée sur leur poitrine. Telle fut la cause de leur courage, de leur sain- teté, de leur perfection; la Reine des martyrs fut la première

1 Dion. Carth. in Cantica, art. 27.

CONSIDÉRATION I.V1I. 181

à leur en donner l'exemple. 0 henrense et diligente abeille : Aristote a dit ' : « L'abeille est un animal très-pur; » quoi de plus chaste et de plus pur que la Mère de Dieu! L'abeille est assidue au travail; le Sage dit delà B. Vierge : Elle a saisi la laine et le lin, et elle a travaillé de ses mains. L'abeille pré- pare et confectionne le miel; la B. Vierge nous a préparé la table eucharistique plus douce que le miel, et le sucre, pour nous fortifier contre tous ceux qui nous attaquent. La femme de l'Evangile prit son levain et le cacba dans trois mesures de farine. 0 tendre Souveraine, elle vous figurait, vous qui avez joint ensemble et réuni trois eboses, d'une manière admira- ble, dans votre chaste sein: le corps, l'àme et la divinité qui forment la personne du Verbe. C'est la pensée de saint Ber- nard \ Saint Chrysologne ajoute 3 : « La femme prend soin du levain à la maison et prépare le pain, parce que l'homme est occupé aux travaux du dehors et que les soins du ménage retiennent la femme à l'intérieur. » Jésus-Christ était l'homme qui, en dehors de la cité, en plein air, a travaillé sur la croix pour notre salut; et la femme est sa sainte Mère travaillant, après l'ascension, dans la maison de Dieu, l'Eglise nouvelle- ment fondée, pour y propager la foi, et prenant soin des Apô- tres, des disciples, et des autres membres récemment réunis à la religion chrétienne, dont elle se montra la Mère pleine de Bollicitude. Le Sage dit encore : « Elle a considéré un champ et l'a acheté ; et du fruit de ses mains elle a planté une vigne. » Corneille 4 dit fort élégamment sur ce sujet : « Elle a cultivé le champ et la vigne de la primitive Eglise par sa sagesse, sa prévoyance, ses mérites et ses exemples, et l'a rendue telle- ment fertile qu'elle a fleuri en toute sainteté, a produit les hommes apostoliques, les martyrs, les vierges, et que de plus les fidèles ont mené une vie, non-seulement chrétienne, mais religieuse par la pauvreté, la chasteté el l'obéissance. » Le Sage ajoute : « Elle a ceint ses reins de force el affermi son bras : »

1 Aristotol. lib. '». s. Bern. I. :;. de Consid. '-> s. 99. " lu Prov. 31. Iti.

182 l-A MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

ce fui en assistant à la passion et surtout au crucifiement, elle souffrit tous les divers tourments de son Fils. Mais une fois revêtue de la vertu d'en haut en recevant le Saint- Esprit, alors dans la souveraine plénitude de la force, conti- nue le même Corneille, elle soutint toutes les douleurs des Apôtres, toutes les croix des fidèles, et tout le poids de l'Eglise: elle fut donc l'Atlas de l'Eglise primitive, comme elle l'est pour l'Eglise moderne.

4. Partout ce que nous venons de dire, comprenez, prudent lecteur, combien Marie a travaillé pendant toute sa vie pour le salut de l'Eglise, et qu'il n'est pas une heure, même dans son sommeil, qu'elle n'ait employée pour la gloire de Dieu et le salut des hommes. Apprenez d'elle à bien agir, apprenez à travailler et à faire un bon usage du temps, parce que la nuit vient personne ne peut agir. Les Cantiques nous mon- trent l'Epoux frappant à la porte et disant : Ouvrez-moi, ma sœur, mon Epouse. Or, comme cette Epouse paresseuse tardait un peu à se lever pour lui ouvrir, il s'en alla et dis- parut. Combien de fois, âme chrétienne, votre doux Rédemp- teur et époux vous a visitée par ses saiutes inspirations! Combien de fois il vient frapper à la porte de votre ccaur ! Me voici, et je frappe à la porte ; si quelqu'un écoute ma )ix et m'ouvre, j'entrerai chez lui. Et vous, faisant la sourde oreille, vous abandonnez votre Dieu qui vous avertit, vous appelle, et vous parle au plus intime du cœur.' Cependant les jours de salut passent, et avec eux la grâce divine tant de fois méprisée et repoussée; et, en ne faisant rien el même en dormant, vous marchez à grands pas vers la longue éternité. Hélas! que sera-ce à la mort lorsqu'il n'y aura plus de temps? Je crains bien qu'il ne vous arrive malheureusement comme à Esaii re- venant de la chasse. Ecoutez cette histoire digne de votre attention.

Comme Uaac accable de vieillesse et près de mourir, dé- siraii bénir ses deux Mis. il lit venir l'aine qui était fort adroit à la ebasse, et lui dit : Prenez vos armes, votre carquois et votre arc, et sortez, etc. Pendant son absence qui se prolongea,

I ONSIDÉRATION I.VII. I S3

Jacob survint et supplanta son frère pour la bénédiction pa- ternelle et pour le droit de primogénitare. Esaû enfin de retour

eut beau réclamer avec larmes la bénédiction de son père mourant, il ne put l'obtenir pour avoir négligé le moment favorable.

Allez maintenant, malheureux pécheurs, allez consumer le temps de votre salut, comme Esaû, à chasser, jouer, folâtrer, manger, boire, vous livrer aux plaisirs criminels, et sachez que l'on rendra compte au jour du jugement même d'une pa- role oiseuse. sont, dites-moi les années que vous avez vécu? Elles ont passé comme l'ombre, comme le messager qui marche avec rapidité, comme le navire qui fend les Ilots et dont il ne reste aucune trace. 0 Dieu ! ainsi donc s'en- vole le temps irrévocable! Ainsi s'écoulent les heures et nous vieillissons sans nous en apercevoir ! Que saint Grégoire le Grand1 a bien raison de dire : Notre vie ressemble à un navigateur; une fois sur mer, il est debout, assis, couché, il marche et avance parce qu'il suit l'impulsion du vaisseau : il en est ainsi de nous : que nous veillions, que nous dormions, que nous gardions le silence ou que nous parlions, nous marchons chaque jour et à chaque instant vers la fin.

5. Saint Jean raconte, au Livre de l'Apocalypse, qu'il vit un Ange ayant le pied droit sur la mer et le pied gauche sur la terre ; il avait à une main un petit livre ouvert, et il éleva l'autre main vers le ciel, comme on le pratique lorsque L'on fait un serment ; et il prit le Dieu Tout-Puissant à témoin de ses paroles : Et il fit serment par Celui qui vit dans les siècles des siècles. Pourquoi l'Ange fait-il un serment, et pourquoi prend- 1- il Dieu à témoin en levant la main au ciel? est caché un grand mystère; écoutez l'Ecriture : Il jura qu'il n'y mirait plus de temps, savoir, quand un jour le cours de la vie sera consommé. U prix immense du temps! Tout le temps que Dieu vous accorde, dit saint Bonaventure \ il vous demandera

1 S. Gng. M. I. t). ep. ad Andream.

2 S. Mon. s. ï. Doill. I . quadr.

18 i MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

compte de son emploi. Et saint Jean Chrvsostome ' : « Il vaut mieux perdre tout plutôt que le temps; perdez de l'or, vous pouvez le recouvrer ; le temps perdu, jamais. » Rapportez- vous-en aux cinq vierges folles : elles perdirent le temps fa- vorable, le temps du salut, et pendant qu'elles dormaient l'Epoux arriva, et la porte fut fermée.

Hélas ! que de gens perdent le temps du salut éternel dans une honteuse oisiveté ou de vaines affaires : semblables à des enfants qui bâtissent des maisons de boue, vont à cheval sur un bâton, ou font d'autres enfantillages, et se croient très- occupés, tandis qu'ils n'y gagnent que la faim et la fatigue. Telles sont la plupart des affaires des hommes, leurs soucis, leurs travaux, leurs sueurs : s'ils ne les rapportent pas à Dieu comme à leur fin dernière, ils diront un jour : « Nous nous sommes fatigués dans la voie de l'iniquité et delà perdition, nous avons marché dans des chemins difficiles, nous avons méconnu la voie du Seigneur : à quoi nous a servi notre orgueil? Que nous a rapporté l'ostentation des richesses? Toutes ces choses ont passé comme une ombre 8. » Voilà combien le temps est précieux : les instants que vous perdez, vous ne les recouvrerez jamais. Que de gens délicats, vaniteux et mondains diront en soupirant à la fin de leur vie : Oh! si Dieu me rendait les années écoulées! Un poëte à dit : « Pas de plus grand voleur que celui qui nous prend letemps ; on peut restituer toute autre chose, lui seul ne peut être rendu. »

G. Nous lisons dans saint Marc que saint Pierre, au mont des Olives, étant tombé dans un profond sommeil, en fut repris par le Sauveur de préférence aux autres disciples qui cependanl dormaient aussi : Vous dormez, Simon? Vous n'avez pu veil- ler une heure avec moi? Seigneur, les autres disciples ne s'étaient-ils pas aussi endormis? Pourquoi saint Pierre est seul réprimandé? S'il est permis de le dire, je pense que saint Jean méritait mieux le reproche, lui qui, l'instant avant, dans la dernière cène avait pris un si doux repos sur la poitrine de son

1 I loin . :)7 mperJoan. - Sap. .ï. 7.

I 0NS1D1 R \ l [ON I.V1I. IS.'i

divin Maître. Pourquoi donc saint Pierre est seul repris quand son âge avancé semblait réclamer pour lui de préférence un peu de repos? Serait-ce qu'étant le premier et le chef des Apô- tres, il leur devait le bon exemple? Saint Pierre Chrysologue le pense; mais il y a une autre cause mystérieuse. Saint Luc, chapitre cinquième, verset cinquième, nous apprend que saint Pierre employa toute une nuit à la pèche sans prendre aucun poisson : Maître, nous avons travaillé toute la nuit et nous n'avons rien pris. Il a pu s'appliquer une nuit entière à des intérêts temporels, se priver de sommeil pour une chose de vil prix au milieu des périls de la mer, et le temps ne lui paraissait ni long ni pénible; et cependant, malgré ses peines et ses sueurs, il n'a rien trouvé dans son filet. Maintenant qu'il s'agit du salut éternel, de prière, de méditation, de souffrance el de rédemption du genre humain, une heure lui pèse! 0 Pierre, igr.orez-vous qu'il n'est pas de peine plus amère que le Bouvenir du temps perdu?

Combien de fois Jésus n'a-t-il pas fait cette exhortation : Veillez, parce que vous ne savez pas le jour ni l'heure? Combien de fois la Bienheureuse Vierge nous dit : Bienheu- reux l'homme qui m'écoute, et qui veille journellement à ma porte '. Uuc de fois notre Ange gardien nous excite par cette inspiration : Tandis que nous avons le temps faisons le bien? Que de fois les prédicateurs, du haut de la chaire, ou le di- recteur de notre conscience, nous ont dit : Cherchez le Sei- gneur pondant que vous pouvez le trouver ? Que de fois notre conscience elle-même, ce moniteur fidèle, cette règle ilt coque nous devons faire ou ne pas faire, nous réveille quand nous dormons dans la voie du salut et nous crie : Ne tardez pas do vous convertir au Seigneur2? Et nous restons sourds à tous ces avertissements et dormons d'un profond sommeil.

7. La fourmi, nous dit Salomon, prépare ses provisions pen- dant L'été et ramasse pendant la moisson de quoi vivre pen-

1 Prov. s 38. - '■ Bccli. -'i. 8.

186 LA .MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

dant l'hiver. Imitez, dit saint Cyrille \ la fourmi qui réunit ses vivres, et amassez des fruits de bonnes œuvres pour les siè- cles futurs. C'est maintenant la moisson et le temps de récolter pendant que vous êtes jeune, bien portant et vigoureux; ne différez pas à l'hiver, ut non fiât fucja tua in hyemc, c'est-à- dire au temps de la mort les forces du corps, la santé, les biens, les plaisirs, les aises, les amis vous abandonnent avec la vie, et vous allez comparaître seul au tribunal de Dieu pour entendre la sentence souveraine et sans appel. Qu'il est à re- douter de tomber entre les mains du Dieu vivant!

Imitez Madeleine entrant bon gré mal gré chez Simon le lé- preux pendant le repas. Dès qu'elle connut, dit saint Luc, que Jésus-Christ élait à table dans la maison d'un pharisien, elle y apporta un vase d'albâtre plein d'huile de parfum, et se tenant derrière lui à ses pieds, elle commença à les arroser de ses larmes. Pourquoi cette importunité? Pourquoi cette entrée dans la maison sans être appelée? Pourquoi ces pleurs et ces gémissements dans un festin? Gardez-vous, 6 femme, gardez- vous bien de molester les convives, et choisissez une autre oc- casion plus commode pour parler à Jésus le médecin de votre àme. Saint Augustin "2 excuse Madeleine. Elle agissait, dit-il, avec beaucoup de prudence puisqu'elle employait bien le temps de son salut; elle était importune pour les convives, mais avait choisi le moment favorable au bienfait qu'elle sol- licitait. Elle savait la grandeur de son mal, et ne voulut point, différer un seul instant. Dès quelle connut que Jésus était au repas, elle se prépara pour aller le trouver et obtenir le pardon de ses péchés et la grâce divine. Imitez cet illustre exemple, àme chrétienne, et dans l'affaire de votre salut ne mettez pas un moment de retard, car justice sera rendue à ceux qui se- ront vigilants, et quiconque se met en retard nuit à sa cause. Il est juste, disait Jacob à Laban, qu'après vous avoir servi pendant vingt ans, je songe à établir ma maison. Sur ce sujet.

1 S. Cyrill. Cathec. H.

* S. Aug. 1. 50, hom. 23. tom. 10.

CONSIDÉRATION i.vil. 187

saint Ghrysostome1 dit avec beaucoup do justesse : Vivons un peu pour Dieu après avoir vécu entièrement pour le siècle; donnons quelques jours à notre àme; il est temps de pourvoir à notre maison, puisque le soir approche et que le jour est sur son déclin.

Pour conclusion, profitons de l'exemple de ces deux aveu- gles qui, étant assis en dehors de la ville de Jéricho, apprirent que Jésus passait près de et se mirent à crier : Seigneur, ayez pitié de nous. La foule, empêchée parleurs cris d'écouter les enseignements du Sauveur, ne pouvait souffrir leur voix, et les sommait de se taire. A cela que firent les deux aveu- gles *. Ils crièrent [dus fort. Mendiants importuns, aveugles ennuyeux, pourquoi ces clameurs insensées? Celui qui a fait votre oreille ne vous entend-il pas? Saint Augustin répond qu'ils avaient hien raison de crier parce qu'ils craignaient que Jésus-Christ ne passât outre 2. Et Luc de Bourges : Ils crièrent fort de peur que Jésus ne leur échappât et qu'ils fussent privés de son secours. Les paroles et les reproches des hommes leur importaient peu. Agissez de même, àme chrétienne, mainte- nant que Jésus passe près de vous, que sa grâce vous est of- ferte, qu'il vous appelle par ses saintes inspirations, qu'il frappe à la porte de votre cœur en vous disant : Ouvrez-moi, nia sœur, mon épouse ; maintenant que sa sainte Mère vous est propice, elle à qui saint Anselme adresse ces paroles ' : 0 Ifarie, vous n'abhorre/, pas les pécheurs sans lesquels vous n'auriez jamais été digne d'un tel Fils. Maintenant enfin, qu'il esi encore temps, veillez à l'affaire de votre salut. Ame mal- heureuse, ne tardez pas un seul instant, n'endurcissez pas vo- tre cœur. Tour finir, imitez l'abeille qui, prévoyant un vent violent, se leste d'un petit gravier pour mieux lui résister, et [«•litre ainsi en sûreté dans sa ruche, d'où la devise : Le poids donne des forces. Imitez-la, ô mon esprit ; un \ent violent vous

1 s. Chrysost. ser. 1 2.

1 S. Aug. <'t Lucas Hurgens. in l's. 93. '••• 3 S. Anselm. in Prolog. I. p. çpuBSt. 25. n. •>

188 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

menace à votre agonie; il vous faudra partir, hélas! pour aller où? Pour n'être pas poussé par le tourbillon jusqu'au fond du tartare, lestez-vous de la pierre détachée de la montagne sans le secours des mains : Attachez-vous à Jésus-Christ votre Dieu et à sa sainte Mère.

CONSIDÉRATION LVIII.

La B. Vierge, même après l'Ascension de son Fils, méditait son amère Passion.

GEMIT DILECTLH SLUM.

Je méditerai comme la colombe. (Is-. 38. 14.)

4 . La colombe, ayant perdu son colombeau, vit seule et se réfugie dans la solitude elle gémit le reste de sa vie. « Rien de si ami des gémissements, dit saint Augustin, que la co- lombe; elle gémit nuit et jour. » C'est à quoi fait allusion Isaïe le plus grand des prophètes, quand il compare à la co- lombe gémissante et méditative les soupirs, les cris et les pleurs des âmes saintes qui vivent dans cette vallée de larmes: Nota gémirons et nous soupirerons comme des colombes ' . Un poète profane * a dit aussi : « La tourterelle ne cessera de gémir perchée sur un ormeau qui s'élève dans les airs. » Nous avons cru devoir donner pour devise à Marie, colombe mys- tique, tourterelle solitaire dans le désert de la vie : Elle ne cesse de gémir ; ou bien :

Elle pleure son bien- aimé.

Oui, la Douloureuse Mère, privée de Jésus son Fils et son Epoux, est une colombe plaintive et solitaire qui, depuis son ascension au ciel, le pleura avec des gémissements ineffables tout le reste de sa vie, au souvenir de sa passion, de sa croix

190 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

et de sa mort cruelle. Et très-souvent, comme elle l'a dit à sainte Brigitte1, elle visitait avec une pieuse dévotion, le mont Calvaire et les autres lieux sacrés delà Palestine son aimant Fils avait laissé des traces de ses souffrances : « Tout le temps que j'ai vécu après l'ascension de mon Fils, j'ai visité les lieux il a souffert et manifesté ses merveilles. Sa passion était tellement fixée dans mon Cœur que, soit en mangeant, soit en travaillant, elle était comme récente dans mon souvenir. »

Et c'est ce qu'atteste l'Epoux dans les Cantiques : Ma co- lombe est dans les ouvertures de la pierre, dans le creux de la muraille. La pierre est Jésus crucifié ; les ouvertures de la pierre sont les plaies de ses mains et de ses pieds ; et le creux de la muraille, son doux Cœur ouvert par la lance. C'est dans ces saintes blessures que, jusqu'à sa mort, la B. Vierge Mère habita par la méditation, la contemplation et la compassion. La B. Vierge, dit Cornélius 2, visitait fréquemment et avec dé- votion le sépulcre du Sauveur, taillé dans le rocher, le mont Calvaire sa croix avait été fixée dans la pierre, et les autres lieux dans lesquels il avait souffert; elle y revenait si souvent qu'elle y paraissait faire sa demeure. Ame chrétienne, imitez la divine Mère : Smjez comme la colombe qui fait son nid dans les plus hautes ouvertures du rocher* ', je veux dire dans le sacré Cœur de Jésus. Qu'y a-t-il de plus doux que de méditer les préceptes du Seigneur, et surtout, à l'exemple de Marie, la vie et passion de Jésus?

2. La veuve de Sarepta, dans son délaissement, disait à Elie: Je viens ramasser ici deux morceaux de bois pour aller apprê- ter à mangera mon fils et à moi, afin que nous mangions et que nous mourions ensuite. L'abbé Rupert 4 fait cette réflexion, que cette veuve pauvre et délaissée, était bien inspirée dans son extrême indigence de ramasser les deux morceaux de bois qui figurent la croix du Seigneur composée en effet de deux morceaux, l'un vertical et l'autre transversal, et qui

fil». 6. Revel. c. 56. - Corn, in Cant. 2.14. 3 Jérémie, 48. 28. Rup. alh. de Trinit. 1. ;>. c. 7.

CONSIDÉRATION I.V1II. 191

est l'unique consolation des malheureux pendant la vie et à la mort. Voici, (ainsi la fait parler L'abbé Rnpert), voici que je ramasse deux morceaux de bois, etje console mon indigence en embrassant la croix.

observez, àme chrétienne, que cette élégante figure a été accomplie en la sainte Bière, la veuve et la délaissée de Jérusa- lem, qui, après le retour de Jésus dans le ciel, n'eut pas de plus grande consolation que de visiter les lieux saints et de recueillir par la méditation les deux morceaux de bois de la croix; c'était sa nourriture et sa boisson de chaque jour jus- qu'à son assomption.

Ruth s'en alla dans le champ du riche Booz au temps de la moisson, pour recueillir les épislaissés parles moissonneurs, et dés que cet homme l'eut aperçue, il l'invita très-amicale- ment à tremper son pain dans le vinaigre.

Innocente et pauvre veuve, la sainte Mère de Dieu, par la méditation, glrna bien plus que la Moabite et autant qu'elle put le reste de la vie, non dans le champ de Booz mais sur le Calvaire, les épis de la passion, le vrai grain de blé qui fut battu sur la croix par les Juifs; et elle mangea chaque jour le pain mystique trempé dans le vinaigre des amères souffrances, sans oublier les paroles du prophète ' : Mettons-lui du bois dans son pain ; effaçons-le de la terre des vivants, et qu'on ne se souvienne plus de son nom. Àme chrétienne et religieuse, la Douloureuse Vierge Mère vous montre ici quelle doit être votre nourriture quotidienne. Ecoutez saint Bernard et imitez- le ! : Qoe Jésus soit toujours dans votre Cœur et que jamais l'image du Crucifié ne sorte de votre esprit. Qu'il soit votre nourriture, votre breuvage, votre douceur et votre consolation, votre miel et votre désir, votre prière et votre contemplation, votre vie, votre mort, votre résurrection.

3. Pour engager sa bien-aimée à lui garder un continuel amour, l'Epoux divin la prie de porter toujours son image dans son cœur et dans son Esprit, dans ses bras et toutes

1 Jerem. 11. I<>. * S. Bern. cit. a le Blan<:. tom. in Ps. 150. 8. 5.

192 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

ses actions, et d'eu être marquée comme d'un cachet: Pone me ut signaculum super cor tuwn, ut signaculiun super bra- chiiim tuum1.

0 Bienheureuse Vierge ! cette Epouse c'est vous ; et l'Epoux votre Fils, vous l'avez toujours porté comme un cachet sur votre Cœur, non point seulement moralement par un amour plus que maternel, mais encore physiquement sur votre bras; non pas uniquement dans son enfance lorsque vous le pressiez sur votre sein, l'approchiez de votre Cœur, le portiez en Egypte, etc ; mais quand, déposé de la croix, vous l'avez reçu et placé comme un cachet sur votre cœur et votre bras : cachet qui jamais ne fut effacé pendant toute votre vie, mais fut tous les jours renouvelé par de nouvelles empreintes. « La Vierge Marie, dit Alain dans Corneille de la Pierre % plaça Jésus-Christ sur son Cœur comme un cachet, parce qu'elle fut conforme à lui par l'imitation et scellée par sa grâce. Ce fait fut ignoré du démon et connu de l'Ange. Sur votre bras, c'est-à-dire vous vous souviendrez de moi dans toutes vos œuvres. Le Bien- aimé est placé comme un cachet sur le Cœur et le bras de la Vierge, parce que dans ses pensées indiquées par le cœur, et dans ses actions désignées par le bras, elle imite son Fils. »

Vous pouvez en conclure facilement, prudent lecteur, que les douleurs du saint Cœur de Marie durèrent jusqu'à la fin de sa vie ; conséquemment elle pouvait dire avec le prophète des Lamentations : Je repasserai toujours ces choses dans ma mémoire, et mon âme séchera en moi-même. Entendons saint lldephonse 3 : « Si nous voulons savoir ce que faisait la Mère de Dieu après la résurrection du Seigneur, et avant qu'elle montât elle-même auxcicux, le voici: Sans doute, par- courant fréquemment les lieux de la nativité, de la passion, de la sépulture et de la résurrection, elle ne soupirait qu'après eux, les arrosait de larmes et y déposait les plus doux baisers de sa sainte bouche. » Et certes, elle le faisait avec tant d'amour et de douleur, tant de piété et de sentiment que,

* Cànt. 8. 6. * Alanus in Gant. 8. 6. * Serm. 5. de Assumpt. B. V.

I 0NSID1 RATION I.VIU. 193

d'après le témoignage du bienheureux Albert le Grand4, elle,

serait morte dans ces contemplations et ces pieux pèlerinages, vu la vivacité «le sa tendresse, le saisissement que lui cau- sai.-ut les souffrances de son Fils, et la compassion qu'elle éprouvait pour lui ; elle serait morte, si Dieu, par un miracle, iif l'eût soutenue pour la plus grande consolation des pre- miers fidèles. Allez maintenant, chrétien tiède, qui vivez sans penser à la passion du Seigneur. Pourquoi êtes-vous chrétien, répondez-moi, si vous n'avez aucun souci d'imiter Jésus-Christ et sa sainte Mère? « C'est sans cause que je suis chrétien, dit saint Bernard, si je ne marche pas à la suite de Jésus-Christ, » Kt le docteur des nations ne dit-il pas : « Pensez donc en vous- mêmes à Celui qui a souffert une si grande contradiction de la part des pécheurs qui se sont élevés contre lui, afin que vous ne vous découragiez point, et que vous ne tombiez point dans l'abattement, Car vous n'avez pas encore résisté jusqu'à répandre votre sang, en combattant contre le péché 2? Faites attention, tiède chrétien, à l'expression dont l'Apôtre se sert : Recogita te, comme s'il disait : Ne vous contentez pas de penser une seule fois, mais, à l'exemple de Marie et des premiers chrétiens, ayez souvent à la pensée Jésus crucifié. L'Ange, messager de la résurrection, ne lui donne pas d'autre nom : Vous cherchez Jésus te Nazaréen crucifié. Il ne dit pas: Le Sei- gneur, le Roi de gloire, le Juge de tous, mais: le Cruèi/ié, même après sa glorieuse résurrection. « Il ne rougit pas du nom de crucifié, » ce sont 1rs paroles de Victor d'Antioche, caï en ce nom est renfermée la somme de tous nos biens3. » i. Saint Paul, ce grand amant et imitateur de Jésus crucifié, se rend ce témoignage : Je suis attaché à la croix avec Jésus- Christ :.j'' vis, OU plutôt »••' n'est plus moi qui vis ; mais Jésus- Christ vit en moi '. Si le disciple parle ainsi de son Maître, que devons-nous penser de la très-sainte Mère du Sauveur crucifié, dont toute la vie fut une croix et un martyre avec son Fils?

i 15. Ail». M. sup. Musas. 5 lli-l.r. 12. '■>. 3 Vict. Antioch. in c. 16. S. Mare. Gai. J. 19 et 20.

n. ia

194 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

Saint Epiphane a bien raison de l'appeler cruciforme \ car tant Qu'elle vécut elle fut unie à Jésus crucifié et ne pensa qu'à lui : Mon Bien-aimé est à moi, et moi je suis à lui. 0 mon esprit, sont nos pensées quand nous prions et méditons? Que de fois nous disons: Mon Dieu, je vous aime! mon Amour est cru- cifié! vive Jésus mon Amour, et Marie sa Mère! et en même temps nous tournons notre pensée vers les créatures. C'est la voix de Jacob, et les mains d'Esau, puisque nous parlons d'une façon et agissons d'une autre. 0 misérables paresseux! que de fois nous passons devant le crucifix, que de fois nous regardons la sainte image de notre Rédempteur et la Douloureuse Mère au pied de la croix, et nous rions, et nous ne sommes touchés d'aucun sentiment de commisération ! Si nous souffrons avec Lui, nous serons glorifiés avec Lui ; est notre compassion. Saint drégoire de Nysse observant un jour un tableau qui représentait la sévère piété d'Abraham prêt à immoler son fils couché sur le bûcher, se mit à fondre en larmes : « J'ai vu sou- vent, dit-il, cette peinture, et je n'ai pu la quitter sans pleurer, quand elle me représentait si efficacement et au vif le fait historique '. » Hélas! sont nos larmes, ou du moins nos sentiments de compassion et notre amour à la vue de l'image de Jésus en croix et de son affligée Mère ? Chrétien, si l'un de vos amis vous avait délivré de la mort au prix de tant de sang, quelle reconnaissance ne lui témoigneriez-vous pas ! Et vous négligez votre Dieu!

Un jour que sainte Elisabeth, fille du roi de Hongrie, était occupée à méditer attentivement cette vérité, ayant jeté les yeux sur le crucifix qui était dans l'église, elle tomba aussitôt en défaillance entre les mains de ses suivantes, et quand elle eut repris ses sens, elle s'écria : « Oùétais-je jusqu'ici, ô amour cru- cifié ! Vous êtes sur une croix nu et méprisé, vous le Seigneur du ciel et de la terre, et moi terre et cendre, j'aurais de l'or- gueil ! Vous êtes couronné de cruelles épines, et moi d'une couronne d'or enrichie de pierres précieuses ! Vous, mon

' S. Epiph. de Laud. B. V. a In Cornel. f.en. 22. 12.

CONSIDÉRATION I.Ylll. 198

Epoux, nagez ilans le sang-, et moi je serai vêtue de la pour- pre royale et de tissu d'or ! Vous ave/, vos mains percées de cloD8, et j'aurai âmes mains des gants précieux! Votre coté el votre Cœur sacré sonl percés d'une lance, et moi j'aurai un cœur dur envers vous et envers les pauvres! Vous, dans la plus grande pauvreté, et moi dans l'opulence ! Vous le dernier des hommes, et moi je désirerai d'être exaltée ! Vous dans la faim et la soif, et moi dans les festins exquis ! Vous dans d'extrêmes douleurs, et moi dans les délices royales ! 0 très- aimant Jési:s ! comment avez-vous pu souffrir jusqu'à ce jour avec tant de boute un fardeau si inutile à la terre? Désormais ou vivre autrement ou mourir; oui, vivre pourvous, ou ne plus vivre*. » Elle dit, et, remplaçant ses vêtements royaux par des habits communs, elle vécut de la plus sainte vie jusqu'à sa bienheureuse mort: tant elle sut tirer profit d'un pieux regard vers Jésus crucifié. Et vous, ô mon esprit, vous voyez fré- quemment la :roix le long des chemins, dans l'église, dans votre appartement, et vous n'éprouvez aucune émotion, aucun sentiment d'amour pour le Sauveur crucifie !

ri. Enéas Sylvius -, qui fut pape sous le nom de Pie II, rapporte que Pachor, jeune homme de noble famille, fit passer à Lucrèce, de même condition que lui, un bouquet de fleurs avec un billet conçu en ces fermes : « Pensez à moi; je pense à \<>us. » Jésus-Christ le plus noble époux, étant monté aux cieux, ne put cependant oublier la sainte Epouse, la Vierge sa Mère; il lui laissa un bouquet de fleurs avec cette épi- graphe : Pensez à moi, je pense à vous. Ecoutez la divine Epouse : Mon Bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe ; et dans un autre endroit : Je suis à mon Bien-aimé, et il se tourne vers //toi. Combien de fois, dans cette vallée de larmes, après L'ascension, cette chaste tourterelle, cette veuve dé- laissée, fit parvenir ces mots au ciel vers son doux Fils : Pensez à moi, je pense à vous.

Lorsque, depuis, elle visita la caverne de Bethléem, elle

1 Mancin. in Prolog. dePass. Dom.— * Cit. ab Engelg. Dom. Quinqnag.

196 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

donna un Sauveur au monde et l'allaita de son sein rempli d'un lait miraculeux, en prévoyant dès lors que les gouttes de ce lait virginal devaient être changées en sang qu'il ré- pandrait sur la croix pour le salut de tous, cette Bien-aimée soupirait : 0 mon Jésus, pensez à moi, je pense à vous. Si elle allait voir le pays de ses pères, le lieu elle conçut le Verbe dans ses chastes entrailles à la parole de l'Ange, elle l'éleva et vécut avec lui plusieurs années dans une admi- rable pauvreté et les travaux : Ah ! qui nous dira l'excès de l'amour maternel qu'elle avait pour son bien-aime Nazaréen? Je crois et me persuade fermement que, s'adressant aux Anges qui formaient cortège autour de leur Reine, la Mère de leur Souverain suprême, elle dut souvent dire : « Je vous en conjure, o filles de Jérusalem, si vous avez trouvé mon Bien-aimé, annoncez-lui que je languis d'amour. » Si elle portait ses pas au mont des Olives, l'époux bien-aimé de son àme avait répandu son sang en abondance pour le salut de l'univers et laver les taches de tous les péchés ; où, triom- phant de la mort, de l'enfer et du démon, il s'éleva glorieux au ciel : avec un sentiment ineffable de piété, elle baisait ses vestiges sacrés imprimés miraculeusement sur la pierre, s'écriant des milliers de fois avec saint Paul : Je désire d'rtrc dégagée des liens du corps, et d'être avec Jésus-Christ. Si elle parcourait les autres lieux sacrés, illustrés par les miracles ou arrosés du sang de son Fils, et particulièrement le mont Calvaire le Seigneur de l'univers fut crucifié, la vie et la mort se livrèrent un combat singulier; qui pourrait exprimer par la parole de combien de larmes amères elle arrosait cette terre sainte? Si elle se dirigeait au saint sépulcre, il me semble que, toute fondue en amour pour Dieu, la sainte Epouse criait aux célestes esprits ; « Soutenez-moi avec des fleurs, fortifiez- moi avec des fruits, car je languis d'amour. »

0 Douloureuse Mère ! votre Bien-aimé était un vrai bouquet de myrrhe ; il restait sur votre sein, je dis plus, dans votre Cœur. Après la mort de la Bienheureuse Claire de Mont- Falcon, on trouva dans son cœur un faisceau composé des

CONSIDÉBATTON I.VI1I. 197

diven instruments de la passion avec l'image de Jésus cru- cifie; à plus forte raison aurait-on pu trouver dans votre Cœur sacré, ô Bienheureuse! toute la vie de Jésus-Christ, la passion et la croix gravées par le doigt de Dieu. Oh! si Jésus Christ crucifié était une fois sculpté dans mon cœur, et qu'il fût seul l'objet de mes pensées, de mon amour! Seigneur, pour l'y graver, il faudrait un poinçon de fer.

6. L'historien Rho raconte de la vénérable Ursule Bénincasa, vierge napolitaine dont saint Philippe de Néri, par l'ordre du souverain pontife, éprouva l'esprit de diverses manières sans rien trouver qui ne fût digne d'approbation ;il raconte, dis-je, que désirant beaucoup, pour satisfaire sa dévotion, une image de Jésus soutirant sur la croix peinte en vives couleurs, et que nul artiste, quelle que fût son habileté n'ayant pu réussir à son gré et la satisfaire, cette vierge qui jamais n'avait tenu un pinceau ni manié des couleurs, tenta de peindre un crucifix dans lequel elle exprima au vif, avec un art admirable, les douleurs de Jésus souffrant, son amour. Elle peignit si bien Cette image, dit Rho, qu'au milieu des douleurs elle repré- sentait la divine promptitude de la charité avec laquelle il ap- portait le salut aux hommes. Une leçon de l'amour divin l'a- vait rendue artiste '.

Ah ! si la Bienheureuse Vierge Mère d'amour et de douleur avait saisi le pinceau et représenté en tableau son très-cher Kils blessé et mourant sur la croix pour notre amour, quel mortel aurait pu apprécier cette peinture? Cette seule image aurait attiré l'amour de tous. 0 Douloureuse Vierge! prenez le pinceau et peignez dans mon cœur l'image de votre Fils souffrant et crucifié, afin que désormais ma mémoire ne me rappelle autre chose que Jésus crucifié ; que mon intelligence De s'occupe que «le Jésus crucifié ; que ma volonté ne se porte que vers Jésus crucifié ; que Celui qui est ma vie soit toujours suspendu devant moi ou plutôt en moi ; et qu'enfin je puisse dire avec l'Apôtre : J'ai été attaché à la croix avec Jésus-Christ ;

1 Rho. hist. virt. lili. 3. c. 7. parai;. H».

198 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

je vis, non, je ne vis plus, c'est Jésus-Christ qui vit en moi '. Ah ! plaise à Dieu que par cette méditation s'échauffe en moi le feu de la douleur, le feu de l'amour, pour que je puisse m'écrier : Aimer le Fils de Dieu et sa très-sainte Mère Doulou- reuse, oh ! le bienheureux incendie !

1 Gai. 6. 19.

CONSIDERATION LIX.

La B. Vierge et Mère Douloureuse nous enseigne la manière dont il faut que nous méditions la passion de son Fïls.

ACIITIR I\ l> Il i: Ml II

Courons par ta patience dans la carrière ouverte devant nous, jetant les yeux sur Jésus, fauteur et le consommateur de la foi, gui, dans la vue de la joie éternelle qui lui était pro- posée, a souffert la croix. (Hébr. 12. 1. 2.)

1 . L'auteur de l'Ecclésiastique a dit avec raison : N'oubliez pas la reconnaissance que vous devez à celui qui s'est fait votre garant, car il adonné sa vie pour vous'. Juda s'était fait garant pour benjamin en disant à son père : Je réponds de l'enfant, redemandez-le-moi2. Jésus-Christ a fait plus; vraie caution du nouveau Testament, il a répondu devant son Père pour toutes les dettes que nous avions contractées par uns péchés; et comme nous n'étions pas solvables, il a pris nos dettes sur lui et il a satisfait pour elles par une abon- dant rédemption. Il ne nous a pas rachetés à prix d'argent, il a payé de sa personne en supportant toutes sortes de peines et enfin la cruelle mort de la croix. Oh! quelle fidèle caution ! Chrétiens, n'oubliez pas la reconnaissance envers un tel ga- lant, car il a donné sa vie pour vous; et, quand il pouvait, par la première goutte de son sang, vous racheter de la mort. VOUS et mille mondes, il a donné jusqu'à la dernière goutte pour vous témoigner l'excès de son amour infini. De cet

i Eoeli. 29. •-'<>. ' Gen. *:t. '.».

200 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

avertissement de saint Paul ' : Pensez donc attentivement en vous-mêmes à Celui qui a souffert une si grande contradiction de la part des pécheurs élevés contre lui, afin que vous ne vous découragiez point, et que vous ne tombiez point dans l'abattement, car vous n'avez pas encore résisté jusqu'à ré- pandre votre sang en combattant contre le péché. Paroles par lesquelles il nous prévient, selon la force du mot recogl- tate, de penser sérieusement, de considérer et peser tout ce que Jésus-Christ a souffert de tourments et de contradictions pour notre salut de la part des Juifs, des Gentils et des pé- cheurs, afin que, animés par son exemple, nous désirions donner pour Lui nos biens, notre sang, notre vie, nous por- tions continuellement sa passion dans nos cœurs et nous ap- pliquions à l'imiter dans notre conduite. Saint Pierre le dit - : Jésus-Christ a souffert pour nous, vous laissant ainsi un exemple afin que vous marchiez sur ses pas. Et saint Paul 3 : Jetez les yeux sur Jésus, l'auteur et le consommateur de la foi, qui, dans la vue de la joie qui lui était proposée, a souf- fert la croix en méprisant la honte et l'ignominie attachée à ce supplice.

En tète de tous ceux qui ont suivi les pas de Jésus souf- frant et se sont appliqués à retracer en eux sa passion et sa mort sur la croix, la Vierge Mère Douloureuse se montre la première. Pendant toute sa vie et après la glorieuse ascension de son Fils elle s'adonna chaque jour à cette dévote médita- tion. Marie, dit un auteur *, repassait sans cesse en son âme tous les mystères de la vie et de la passion du Sauveur ; toutes les paroles qu'elle prononçait rappelaient Jésus-Christ; ses pensées, ses soupirs avaient pour objet Jésus-Christ. Lors- qu'elle marchait, c'était en compagnie de Jésus-Christ; chaque fois qu'elle versait des larmes, c'était sur les douleurs de Jésus-Christ et à cause de Jésus-Christ. Si elle se réjouissait, c'était de Jésus-Christ et pour Jésus-Christ. 11 n'y avait rien en

« Hebr. 12. 3. 5 Petr. i. 2. 21. » Bebr. 12. 2. * Just. Miech. 0. P. m Litan. B. Y.

I "\siiii nvriON mx. 204

elle qui ne ressentit et ne représentât Jésus-Christ. Elle était toute unie à Dieu, toute dévouée à Jésus-Christ. » Il continue un peu plus loin : « Elle ne pouvait un seul moment oublier la vie et les souffrances de son Fils, quand son Cœur était un clair miroir de sa vie, de sa passion et de sa mort. » Animés par l'exemple de la divine Mère, les Apôtres et les martyrs, ayant tes yeux fixés par la méditation sur l'auteur et le con- sommateur de la foi, qui, dans la vue de la joie qui lui était proposée, a souffert la croix, se sont précipités courageu- sement au milieu des supplices ; tels que de généreux élé- phants, excites par le jus de raisin, s'élancent aux combats. « Ils montrèrent aux éléphants, dit le premier Livre des Ma- chabées, du jus de raisin et de mûres afin de les animer; » saint Antonio ajoute ' : De même à la vue, et par la médita- tion du sang de Jésus-Christ, foulé comme le raisin dans le pressoir de la croix, les chrétiens luttant contre les tentations du monde, de 'a chair et du démon sont animés à combattre et à résister. » La devise sera donc : Le sang augmente la force; ou plutôt celle-ci de Piccinelli :

Il est excité au combat.

•1. Or, c'est ce qu'avait en vue l'Epoux, quand il compa- rait les cheveux de sa Rien-aimée à la pourpre royale : Comœ oipitis tut sicut purpura Régis*. Ei c'était bien avec raison. En effet, la chair de l'Epoux était rouge du sang répandu dans sa passion, et les pensées de Marie étaient aussi en même temps rouges comme la pourpre des rois, pour ainsi dire, par le sang de sa compassion pour Lui. « Vos pensées, ô B. Vierge, dit le cardinal Guillaume ', teintes dans le sang de la passion du Sauveur, étaient toujours comme si vous aviez encore sous les yeux le sang jaillissant des blessures. » L'E- glise * dit de sainte Brigitte qu'ayant vu le Sauveur en croix

1 F\ i. Tit. 3. c. 7. 3 Caut. 7. ii. 3 Gllill. hic. '• Urev. Rom. 8 octoh.

202 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

arrosé de son sang nouvellement versé, elle ne pensa jamais à son Amour crucifié sans fondre en larmes. « Depuis ce moment, elle était tellement affectée par la méditation des souffrances de Jésus, qu'elle ne pouvait y penser sans pleu- rer. » Que dirons-nous de la Douloureuse Mère, qui vit la cruelle passion de son Fils, fut présente à sa mort, recul son corps à la descente de croix, le baigna de ses larmes, et l'en- sevelit? «Ce spectacle, a-t-elle dit à sainte Brigitte, était tou- jours récent dans ma mémoire. »

L'Ecriture sainte nous apprend qu'Isaac s'en allait sur le déclin du jour méditer dans la campagne : Et egrcssus fucrat ad meditandum in aqro, inclinata jam die *. Il méditait, sui- vant Corneille de la Pierre, les merveilles de la nature, le mouvement et le cours des astres, mais surtout Dieu qui les a créés et les fait mouvoir. Alcuin enseigne qu'Isaac fut en cela le type du Sauveur se retirant souvent sur une montagne pour y passer la nuit dans la prière et la méditation. La Dou- loureuse Vierge suivit leur exemple : tant qu'elle demeura à Jérusalem après l'ascension, dans le désir de se procurer à la fois une consolation et un aliment pour sa douleur et son amour, elle visitait les lieux consacrés par les souffrances et la mort de son Fils, repassant dans son Cœur ce qu'elle avait vu, entendu, éprouvé pendant tout le cruel supplice. Qui nous redira la ferveur, le zèle, la dévotion, les sentiments d'amour, d'admiration, de reconnaissance, de compassion, d'imitation, dont la Vierge sainte était animée en méditant les souffrances du Sauveur! « Elle montait au Calvaire que Jésus avait ar- rosé de son sang précieux, dit Justin que nous avons déjà cité, elle arrosait ce lieu de ses larmes. » 0 terre bénie! qui avez été consacrée par le sang de Jésus crucifié et les larmes de sa Douloureuse Mère! Que de fois, en voyant de loin cette montagne, elle poussa ce cri vers le ciel : L'odeur qui sort de mon fils est semblable à celle d'un champ plein des fleurs de toutes les vertus et des fruits de grâces ; autrefois vous étiez

* (ien. -2*. 83.

I 0NSID1 R \ 1 1".N I.IX. 201]

une terre maudite, et maintenant vous ries une terre bruit1 du Seigneur Celui qui sauvait le peuple d'Israël a été im- molé. Vous êtes vraiment L'innocent Abel, ô mon Fils, qui avez voulu mourir, non dans la ville, mais en dehors pour donner à loua un libre accès auprès de vous, et avez soufferl en dehors de la porte pour sanctifier le peuple par votre sang. Vous êtes la vraie fleur des champs, et non des jardins : celle- ci est plantée, arrosée, enfermée ; celle-là est en évidence pour tous, et si on la froisse elle exhale une odeur agréable. Oh I vous n'êtes plus Bénoni ou le fils de la douleur, mais le doux Benjamin dans l'étonuement. Oui, vous étiez, ô Jésus, dans rétonnemrnf . in mentis excessu, quand vous voulûtes souffrir tous ces tourments affreux sur une croix pour l'homme in- digne. Filles de Sion! filles de Jérusalem! Anges de Dieu: annoncez à mon Bien-aimé que je languis d'amour pour lui. 0 chrétiens : nous aussi sortons du camp avec la Douloureuse Mère, emportait C ignominie de la croix et considérant d'un cœur reconnaissant et dévoué la passion de son Fils.

3. Vous est-il agréable, ô mon esprit, de voir la manière dont la Douloureuse Vierge méditait Jésus souffrant, et son amour crucifié? Ecoutez sa voix. Il est de foi que l'affligée Mère fut présente au crucifiement et à la mort de sou Fils. Elle se tenait debout auprès de la croix de Jésus, dit Adrien Lyrée \ non par côté, comme on la peint, mais en face, afin qu'elle pût voir plus commodément et mieux contempler le \i^age du Sauveur souffrant et mourant. Elle considérait sur- tout quel était Celui oui souffrait: le Dieu de souveraine el infinie majesté, à qui tout obéit et de qui tout dépend. Ce qu'il ■souffrait : des ignominies, des affronts, des opprobres, les fouets, les épines, les clous, la croix, la mort. Oie: dans le lien le plus abject, par la puanteur des cadavres, les châtiments et la mort infâme des criminels. Pour qui : pour les plus in- grats el Us plus vils des hommes qui ne reconnaîtront jamais une charité si immense. Pourquoi : non-seulement pour

' Adrian. Lyne. <lf f'.lir. patient, 1. 269.

204 LA MÈRE It'AMOUK ET DE DOULEUR.

livrer par sa mort l'àme coupable de l'homme des peines éternelles de l'enfer, mais encore pour le sauver éternellement. Comment: avec un amour excessif et le plus grand dévoue- ment du cœur, quoique abandonné de tous, même de son Père céleste, et devenu l'opprobre de tous et l'abjection du peuple. Dans quel but: afin de donner aux Apôtres, aux martyrs, à tous les chrétiens l'exemple de ce qu'ils doivent faire pour imiter le modèle qui leur est montré sur la montagne du Calvaire.

A cette méditation qui dura de midi jusqu'au soir, la Dou- loureuse Mère ajouta sans doute de pieuses affections. De foi d'abord : en croyant fermement, quand tous étaient ébranlés dans la foi, que cet homme, suspendu à un gibet infâme entre deux larrons, était le Dieu d'infinie majesté, le Créateur et le Juge de l'univers. D'admiration : qu'une si immense majesté ait pu s'abaisser au point de souffrir des traitements si horri- bles, si indignes, si inouïs pour des gens si ingrats et si im- pies. De charité, n'ignorant pas ce que la plume de l'Apôtre écrivit plus tard pour le monde : La charité de Jésus-Christ nous presse, ou selon une autre version : La passion de Jésus- Christ nous presse de l'aimer de tout notre cœur et de toute l'étendue de notre âme. De reconnaissance : comment pourrions- nous témoigner d'une manière assez digne notre reconnais- sance envers un tel bienfaiteur qui nous aime d'un amour éternel. De zèle pour les âmes: zèle qui lui faisait désirer avec ardeur de procurer le salut de toutes les âmes par les mérites et la passion de son Fils unique et uniquement aimé. De com- misération, qui lui faisait éprouver, du plus intime de son cœur maternel, les mêmes douleurs que son Fils et la rendait pleine de compassion pour toutes ses misères. Enfin sentiments d'i- mitation : elle ne désirait autre chose que souffrir, être affli- gée, méprisée, crucifiée et mourir avec Jésus-Christ. Enten- dons saint Ephrem qui a réuni en un faisceau quelques affec- tions pieuses des méditations de Marie1. « La Vierge très-pure

t S. Ephr. cum S. Hein, in Laraent. V.

CONSIDÉRATION LIX. ^0."i

au pied de la croix, regardait le Sauveur suspendu au gibet, elle pensait à ses plaies qu'elle avait sous les yeux, elle voyait les clous et entendait ses plaintes, elle se rappelait les souf- flets et les coups de fouets de la flagellation, puis, avec de grands soupirs, des larmes et îles gémissements, elle s'écriait: Mon très-doux Fils, mon Fils bien-aimé, comment endurez-vous le supplice de la croix ? Mon Fils et mon Dieu, comment souf- frez-vous les crachats, les clous et la lance, lés soufflets, les dérisions, les injures, la couronne d'épines, le vêtement de' pourpre, l'éponge, le roseau, le fiel et le vinaigre? Comment ètes-vous suspendu en croix dépouillé de vos vêtements, vous, mon Fils, qui couvrez le ciel de nuages ? Comment supportez- vous la soif, ô créateur de la mer et de toutes les eaux? Com- ment mourez-vous innocent au milieu des scélérats? De quoi ètes-vous coupable, et en quoi avez-vous offensé les Hébreux? Pourquoi vous ont-ils crucifié, ces méchants, ces ingrats dont vous avez guéris les boiteux et les malades ? Vous mourir, mon très-doux Fils, Dieu magnanime ! Je tombe de défaillance de vous voir suspendu à ce bois, cloué, couvert de plaies ; mon Fils, est votre beauté? est votre splendeur? Hélas! le soleil a obscurci sa lumière et il est devenu tout autre qu'il était. La lune brillante s'est changée en ténèbres, les pierres ont été fendues et les tombeaux se sont ouverts, le voile du temple s'est déchiré en deux, les créatures insensibles ont connu Celui qui les a faites, et ces Hébreux pervers ont bou- ché leurs oreilles, fermé leurs yeux, pour ne pas voirie soleil qui n'a pas de couchant. 0 mon Fils ! Admirable Siméon, voici que le glaive que vous m'avez prédit transperce maintenant mon Cœur. Voici le glaive, voici la blessure, ô Dieu mon Fils! Votre mort est venue jusqu'à mon Cœur, mes entrailles sont brisées, ma lumière est obscurcie, et ce glaive douloureux a traversé ma poitrine. Je vois votre horrible passion, mon Fils et mou Dieu, je vois le supplice que vous n'avez pas mérité et je ne puis vous secourir. Pleurez tous avec moi, disciples du Seigneur, en voyant ma douleur et ma blessure profonde. » s'arrête saint Kpbrem ; quoique un peu long dans ce

2Uti LA HÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

discours, nous devons cependant l'écouter d'une oreille atten- tive. Aux affections pieuses qu'il prête à Marie, ajoutez, cher lecteur, un sentiment de contrition parfaite. Mettez-vous de- vant le crucifix ou devant le saint Sacrement, et demandez ' : Quelles sont ces plaies au milieu de vos mains ? Qu'est-ce que ce cœur ouvert, ces pieds dans lesquels sont enfoncés des clous, ces blessures nombreuses par tout le corps? Et il vous répondra : J'ai été ainsi traité dans la maison de ceux qui m'ai- maient, et particulièrement par vous, qui dites que vous m'ai- mez, tandis que votre cœur est loin de moi. Examinez si ce n'est pas vous que vous aimez, plutôt que moi, votre Seigneur et votre Dieu. 0 Jésus crucifié! j'avoue mes fautes, je mérite la mort, la condamnation, l'enfer; cependant je ne désespère point tant que votre Cœur et vos plaies me sont ouverts. Je me repens sincèrement de vous avoir offensé jusqu'à ce jour, vous qui êtes tout mon bien ; et la seule cause de mon regret c'est parce que vous êtes digne de tout amour. Mère d'amourél de douleur, je vous conjure, par la charité que vous avez eue pour votre très-cher Fils mourant sur la croix, de m'obtenir le pardon et la grâce.

4. Voilà les fruits produits par la sérieuse méditation de Jésus crucifié; voilà pourquoi saint Augustin i assure qu'en toutes choses il n'a pas trouvé de remède plus efficace que les plaies du Sauveur. Une telle méditation est la manne qui nour- rit notre àme affamée : Cibavi te manna in solitudine. C'est la rosée qui rafraîchit notre àme languissante : Ero quasi vos : Israël germmabit. C'est le miel de la pierre, l'huile du rocher coulant pour le salut du peuple choisi de Dieu : Pctra autetn erat Christus. C'est la fontaine de vie, que Jésus fatigué promit à la Samaritaine : Aqua, quam cf/a dabo ci. /ict in eo f m* aqiue salientis in vitam mternam. C'est la mer Rouge, dont les eaux sont très-arnères, mais si on les puise, elles deviennent douces et bonnes à boire : dans le oommeneement, la méditation sur Jésus soutirant et sa Douloureuse Mère vous paraîtra aussi

Zach. 13. 6. 2S. Aug. man. c. 12.

CONSlhklSAIlON UX. 207

amère; mais, courage, ô mon esprit, de cette mer pleine d'amertume sortira pour vous la douceur même, la consolation dans l'adversité, et, après la mort, le salut éternel : « Dans la participation aux souffrances du Sauveur, dit saint Léon ', <\st l'attente assurée de la béatitude promise; » pas d'indice plus remarquable de notre prédestination que le souvenir assidu et pieux de la passion; son oubli au contraire est un signe de réprobation.

Ezéchiel vit à Jérusalem un Ange vêtu d'une robe de fin lin; il avait une écritoire sur les reins, et, traversant les rues et les places, marquait d'un signe ceux que Dieu voulait préserver de la ruine générale : Passez au travers de la ville, au milieu de Jérusalem, et marquez un tbau sur le Iront des hommes qui gémissent et sont dans la douleur de voir toutes les abomina- tions qui se font au milieu d'elle. Au lieu de : Marquez un f/ifiu, saint Jérôme lit d'après le texte syriaque : Marquez une croix, comme ayant été depuis lors la marque de vie et le signe d'élection pour la vie éternelle. C'est aussi ce que vit saint Jean dans son Apocalypse, quatre Anges, auxquels, comme ministres de la justice divine, il fut donné pouvoir de nuire à la terre et à la mer, ne purent cependant nuire aux hommes marqués du signe du Dieu vivant, c'est-à-dire du signe salu- taire de la croix : Xolite noccre terrée et mari, neque arborions, quoadusque signemus servos Dei in frontibus eorum. Bienheu- reux donc ceux que le Seigneur, à sa venue, trouvera marqués de ce signe d'élection! Oui, bienheureux ceux qui pendant leur vie comme la Douloureuse Mère se seront exercés dans la méditation de Jésus crucifié! Recueillez pour votre consolation les paroles du doux Rédempteur à la Bienheureuse Angèle de Fulgina : Bénis soyez-vous de mon Père, vous qui conserve- rez le souvenir pieux et compatissant de ma passion qui est la merveille de tous les siècles, le salut et la vie des pécheurs; parce que vous serez avec moi les vrais participants et héri- tiers de la résurrection, du royaume et de la gloire que j'ai ac*

' S. Léo de Pass. ser. 0. * Ainaldus in vita B. Angeles.

208 LA MÈRE D'AMOUR ET HE DOULEUR.

quis par elle. A l'heure terrible du jugement vous entendrez ces paroles : Venez, bénis, possédez mon royaume.

5. Ici me revient à la mémoire l'échanson du roi, emprisonné avec Joseph* et préservé de la mort parce qu'il avait vu, dit l'Ecriture, un cep de vigne, il y avait trois provins qui pous- saient peu à peu, premièrement des boutons, ensuite des fleurs, et à la fin des raisins mûrs ; et qu'il avait dans la main la coupe de Pharaon. L'Ecriture continue : Je pris ces grappes de raisins, je les pressai dans la coupe que je tenais, et j'en donnai à boire au roi. Quant au songe du grand panetier, qui croyait porter sur sa tète trois corbeilles de farine il y avait tout ce qui se peut apprêter avec la pâte pour servir sur une table et que les oiseaux venaient manger, il tourna à sa perte : « Les trois corbeilles signifient que vous avez encore trois jours à vivre, après lesquels Pharaon vous fera couper la tête. » Pourquoi, me direz-vous, le panetier est-il condamné à mort, et l'échanson préservé et rétabli dans son honneur et ses fonctions? « Dans trois jours le roi se souviendra de votre ministère et vous rétablira dans votre charge. » En quoi donc ces deux officiers avaient-ils offensé le roi?

L'Ecriture ne dit pas quel avait été leur crime ; il est pro- bable cependant qu'étant préposés aux provisions de bouche, ils avaient dérobé quelque chose, et qu'ils avaient été mis en prison pour ce motif. Quelques auteurs pensent qu'ils avaient été soupçonnés de préparer du poison à Pharaon, l'un dans sa coupe, et l'autre dans son pain. Quoi qu'il en soit, l'échanson est délivré et l'autre est condamné; pourquoi cela? Remar- quez, prudent lecteur, que tout arrivait en figure dans l'ancien Testament, comme le dit saint Paul, et que tout est écrit pour nous servir de leçon. L'abbé Rupcrt ' prétend que ces deux of- ficiers du palais mis en prison doivent nous désigner deux es- pèces d'hommes, les élus et les réprouvés, au milieu desquels est Joseph, c'est-à-dire Jésus-Christ promettant le ciel au bon larron et réprouvant le mauvais pour toujours; sauvant l'un

* Rup. al»b. hic in (ien.

« 0NS1DJ B \ I ION l-l.X. 209

par sa grâce, et damnant L'autre en L'abandonnant à L'enfer par justice. Mais que L'éehanson ait été sauvé de préférence à L'au- in'. L'éminent cardinal Bugues ' ajoute que ce fut parce qu'il mit tout Bon espoir et sa confiance dans le cep de vigne, Le

raisin, et la coupe de s. m maître <»r, la coupe du maître, est Le calice de La passion du Seigneur, Le raisin est Jésus-Christ foulé dans le pressoir de La croix comme une vraie grappe de Cypre ; et Le cep de vigne est la Douloureuse Mère qui dit d'elle- même : « Homme une vigne j'ai porté un fruit d'agréable odeur. » Corneille dit sur ce texte : « La Bière de Dieu est une vigne qui a produit un précieux raisin, Jésus-Christ : foulé dans le pressoir de la croix, il en est sorti un vin qui enivre tous les titleles \ »

Serviteurs de Marie, faisons comme l'éehanson, et plaçons tonte notre confiance dans le calice delà passion de notre Seigneur et dans la puissante protection de la Douloureuse Vierge, à condition toutefois que nous nous efforcerons de les imiter. « Bienheureux, dit la Sagesse éternelle, l'homme qui veille chaque jour à mes portes, et se tient en observa- tion au seuil de ma demeure 3. » Par ces portes, saint Bona- venture entend les plaies sacrées de Jésus-Christ, auprès des- quelles nous devons veiller sans cesse pendant notre vie, avec La Mère Douloureuse, par la méditation dévote et assidue; et, qui trouvera Jésus crucifié et sa sainte Mère, aura trouvé la vie et puisera le saint auprès du Seigneur. * 0 aveuglement des enfants d'Adam, s'écrie ce saint docteur, ô aveuglement des entants d'Adam qui ue savent pas entrer en Jésus-Christ par ses blessures! Ils travaillent en vain au delà de leurs t'or- quand ce] endant les portes du repos sont ouvertes. [gnorez-A ous que Jésus est la joie des Bienheureux ? Pourquoi tardez-vous d'entrer dans cette joie parles ouvertures de sou corps? La béatitude des Anges est à votre disposition, le mur esl renversé, et vous négligez d'entrer M »

1 Bogo card. hic. * Cornet, in Eccli. U. 23. -- 3 Prov. s. 34. v Bonav. tom. 1 . Su'mul. araor. c, l.

II. L

210 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

6. Les saints docteurs demandent pourquoi Job offrait cha- que jour des sacrifices pour le salut de ses enfants : Consur- gensque diluculo offerebat holocausta pro singulis1. Origène 2 répond qu'il agissait ainsi afin que ses fils, pénétrés de crainte à la vue de ces victimes immolées, s'éloignassent de tous les péchés qui tuent et perdent l'àme. Ah! combien plus, par la vue et la méditation de Jésus crucifié, victime immolée pour notre salut sur l'autel sanglant de la croix, et par la con- sidération de son innocente et Douloureuse Mère préseute à ce spectacle, nous devons réprimer tous nos sens pour ne pas tomber dans des fautes qui non-seulement tuent l'àme, mais crucifient de nouveau Jésus-Christ, suivant saint Paul : ttursus crucifie/entes sibimetipsis Filium Dei, et ostentui Im- bentes. S'il est dit du pauvre Lazare : Les chiens venaient au- près de lui et léchaient ses blessures ;je vous en prie, ne soyons pas plus ingrats que les chiens qui vous aiment pour un os que vous leur jetez. Léchons donc par la méditation les plaies sacrées, les ulcères du Sauveur, et soyons pleins de compassion pour sa sainte Mère : Si nous prêtions part à leurs souffrances, avec eux nous serons glorifiés.

1 Job. l.o.— * Oripr. 1. i. in Job.

CONSIDERATION LX.

La Mère d'amour et de douleur nous instruit comment nous devons toujours marcher dans la présence de Dieu.

INTIMA L.I STKAT.

Jr voyais le Seigneur^ ri je t 'avais toujours présent dorant moi.

(Ps. 15. 8.)

I. Voulez-vous savoir, Ame chrétienne, le plus court che- min pour arriver au ciel, et la source de toute perfection? Reoutez l'avertissement que Dieu donnait à son serviteur Abraham : « Je suis le Seigneur tout-puissant : marchez en ma présence, et soyez parfait. » Sur quoi Lyran * fait celte réflexion : Marche/, en ma présence, c'est-à-dire comportez- vous comme si vous me voyiez toujours présent; et soyez parfait. » <> bienheureuse l'àme qui partout vénère Dieu pré- sent ; dans cet unique bien se trouve toute la perfection, le vrai n pos de l'esprit, et le centre de notre cœur. « C'est le seul moyen, dit Clément d'Alexandrie2, pour ne jamais tom- ber, que de nous figurer Dieu toujours présent avec nous. » Il n'y a rien de meilleur pour vaincre les tentations que le souvenir de Dieu qui est partout et qui voit tout; ce qui lait dire au Sage : « Pensez à lui dans toutes vos démarches et il guidera vos pas \ »

Et c'est ce que nous a enseigné par son exemple l'excel- lente Vierge et Mère d'amour et de douleur pendant sa vie

1 Lyran. in Gen. 17. I . - - Clem. Alex. l. :t de Pœdag. c. '■>. :l Prov.

:t. 6

21:2 l.\ HÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

mortelle elle eut toujours, même dans le sommeil, le sou- venir de la présence de Dieu. Elle parvint ainsi à une si grande perfection qu'elle surpassait en sainteté toutes les créatures : Tu upergressa es universas. Aussi les saints Pères et les Théo- logiens lui ont-ils appliqué ces paroles des Cantiques : Je dors, mais mon cœur veille ; parce que, quand ses sens étaient assoupis par l'action du sommeil, elle élevait encore son à me vers Dieu et l'aimait plus que toutes choses. Toute sa vie fut une méditation continuelle de la présence de Dieu; en effet, si les bons Anges, depuis leur création, ne se sont jamais dé- partis de l'amour actuel de Dieu, à plus forte raison peut-on dire et croire la même chose de la divine Mère, Heine et Sou- veraine des Anges. Comme l'observent saint Bonavenlun , saint Bernardin et d'autres, elle passait les nuits entières à prier et à méditer; et comme le Fils avait l'habitude d'em- ployer le temps de la nuit à s'entretenir avec Dieu, de même la Mère, vivant de peu de sommeil, louait sans cesse Dieu présent, uniquement appliquée et attentive à lui sou souve- rain bien. C'est pourquoi vous pourrez avec justesse compa- rer 1«' saint Cœur de cette excellente Vierge à un diamant lr s- pur que le soleil pénètre et traverse de ses rayons, et lui donner cette devise :

liih/ii'i lustrât.

■2. Il me semble qu'après l'ascension la pieuse Vierge était comme l'héliotrope qui se tourne pour suivre le mouvement du soleil, soit par Le temps serein, soit, chose plus admirable, par un ciel nébuleux. Aussi vous donnerez à cette fleur la devise empruntée au Livre des Cantiques : Je suis à mou bien- aimé, et il se tourne vers moi '. Telle la Bienheureuse Vierge, divine héliotrope, vécut parmi les mortels : Elle avait son regard uniquement vers le soleil de justice, le Sauveur notre Dieu, elle marchait en sa présence et no recherchait que sa

1 Cant. 7. H».

COfl SlDl l: \ i ION I.N. J I 3

gloire. L'abbé Guillaume lui applique d'une manière élégante les paroles de l'épouse : Ego dilecto meo} et ad me conversio ejus. Voici 1«' langage qu'il lui prête : « Je mourais tout à fait avec mou Bien-aimé par ma tendresse maternelle, de sorte que son martyre retombai! sur moi el me rendait martyre avec lui. J'étais alors à mon Bien-aimé pour lui déclarer mon amour; et il se tournait vers moi pour m'indiquer son amour filial. Il me montra très-bien, au moment de sa passion, combien il m'aimait, lorsque nous ayant vus, moi sa tendre Mère et le disciple qu'il chérissait, il se tourna vers moi et me dit du liant de la croix : Femme, voilà votre Fils; et au disci- ple : Voilà votre Mère. Assurément, son doux regard se tour- nant vers moi au milieu de si grandes douleurs, indiquait excellemment quelle tendresse tiliale il me portait \ »

Qu'il fut triste également, et pour l'Epoux et pour l'Epouse de sang, ce regard ûxé l'un vers l'autre : Je suis à mou Bien- aimé, et il s'" tourne vers moi. Quand il fut remonté au ciel, la Mère d'amour et de douleur ne put mettre en oubli son Fils, sou Amour crucifié, elle le contemplait toujours comme sus- pendu à la croix ou déposé dans le tombeau; d'où ces paroles de Sophronius* : «Nous croyons que, par l'excès de son amour, elle habitait le lieu il fut enseveli, en ce sens que sa ten- dresse aimait à y porter les yeux de son esprit, non pas pour le chercher vivant parmi les morts, mais pour trouver sa con- solation dans ces pieux regards; elle embrassail en pensée Celui qu'elle avait enfanté. L'amour qu'elle avait pour Jésus- Chrisl produisait le regret d'eu être séparée, etee regret crois- sant était comme adouci par de nouvelle! ardeurs. » Si nous avions ce souvenir de bien présent partout, et de Jésus cru- cifié, comme il fut L- sujet continuel des méditations et des penses de la Douloureuse "\b re, (pic nous serions bientôt parfaits ! Mais, malheureux, nous sommes semblables à l'au- truche, animal stupide, ayant un grand corps, el une tête presque aussi petite que celle dune oie; quand un danger la

1 Oui. hic -u|i Cantic. ' Sophron. ser. de \ umpt,

-2\ \ LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

menace, elle cache sa tète dans le sable, dans l'herbe ou der- rière un arbre, et croit n'être pas vue quand elle ne voit per- sonne. La perdrix fait comme elle, et, à l'approche de l'oise- leur, cache sa tète dans le gazon. Tels font aussi les enfants; ils cachent leur tète sous un voile ou leurs yeux derrière leurs mains, et s'imaginent qu'on ne peut les apercevoir. Erreur funeste ! personne ne nous voit! donc Celui qui a fait nos oreil- les ne nous entend pas, et Celui qui a fait nos yeux ne nous voit pas ' !

3. Je me rappelle ici le glorieux et pieux empereur Léo- pold Ier qui, pour symbole, choisit un aigle volant dans les airs et fixant les rayons du soleil, avec cette épigraphe em- pruntée au Prophète royal : Mes yeux toujours vers leSeiyneur *, Le prudent prince faisait allusion aux divers événements, aux revers de fortune arrivés sous son règne, et dont il était sorti heureusement parce qu'il avait mis sa confiance en Dieu seul et l'avait toujours vénéré présent partout. Il pouvait donc chanter avec David: « Toujours mes yeux vers le Seigneur, parce qu'il dégagera mes pieds des lacets; » ou bien encore : « Je voyais le Seigneur, et je l'avais présent sans cesse devant moi, parce qu'il est à ma droite pour empêcher que je ne sois ébranlé 8. »

0 pieuse Vierge! je ne m'écarterai pas du sentier de la vé- rité, si je vous compare à l'aigle quand vous contempliez, les yeux immobiles, Dieu, le soleil de justice ; saint Bernard l'a fait avant moi en vous assimilant à un aigle aux grandes ailes. Vous viviez corporellement sur terre, et d'esprit vous étiez toujours au ciel auprès de votre Bien- aimé : Toutes les actions de Marie, dit saint Antonin, toutes ses intentions étaient sans cesse dirigées vers Dieu. Vous pouviez donc aussi dire avec le Psalmiste : « Mes yeux toujours vers le Seigneur, » bien plus fortunée que la reine de Saba qui se croyait heureuse d'avoir pu jouir de la présence, de la vue et des entretiens de Salomon le plus sage des rois. Que votre bonheur est plus

1 Dan. 13. 20. Ps. 93. 9. ! Ps. 24. i.i. 3 Ps. lo. 8.

C0NS1DÉB \ 1 1 m N LX. 2\ 5

grand, mon excellente Mère ! Chaque jour, pendant plus de trente bas, vous avez pu voir el contempler présenl devant voua te plus beau des enfants des hommes, infiniment plus que Salomon, et VOU8 entretenir avec lui comme Mère. « Marie, dit saint Bernard, a entendu taid de l'ois son Fils parler au peu - pic en paraboles , révéler à ses disciples les mystères du royaume de Dieu; elle l'a vu faire des miracles, elle l'a vu at- tarde en croix; elle l'a vu expirer, elle l'a vu ressusciter, mon- ter au ciel, etc ' . » Et quoiqu'il fût au ciel, néanmoins elle pouvait lui dire comme le Psalmisle, d'une manière particu- lière: Mon âme est attachée â cous, oh! si notre âme était attachée delà sorte à Dieu présent partout, qui est en nous suivant le docteur Angélique, par essence, en coexistant inti- mement en nous, et en pénétrant tout; par puissance, en opé- rant tout en nous: en lui nous avons !" vie, le mouvement et l'rtrc: et par prescience en voyant et pénétrant les plus petites choses: 11 n est, dit L'Apôtre, aucune créature invisible pour lui; tout est nu et à découvert à ses yeux. Sur ce sujet, le grand saint Augustin s'exprime ainsi : Dieu est tout œil, tout main, tout pied; tout œil, parce qu'il voit tout; toul main. parce qu'il opère tout; tout pied, parce qu'il est partout \

i. Ah: si L'apôtre Pierre avait considéré Dieu présent par- tout, et s'il lut toujours demeuré le compagnon Ûdèle de Jésus sans a'éloignerde sa personne, il n'aurait jamais renié le Sei- gneur son Dieu : mais il le renia devant tout le monde, en disant : Jene sais pas ce que '->>us me dites. Saint Ambroise en tire la raison de ces paroles de l'Evangéliate : Pierre suivait Jésus île /"///; et il les commente ainsi: C'est bien de loin qu'il suivait Jésus, puisqu'il allait si tôt le renier: car il ne L'eût pas renié s'il s'était attachée lui de près; des qu'il »'nt de nou- veau Jésus présent, il pleura amèremenl '. <di ! que le souve- nir de la préaence de Dieu nous est nécessaire! « Certaine- ment, dit sain! Jérôme, si nous pensions que Dieu nous voit et

1 S Bern. s. »ig. MagD. '-' s. Aug. epit. 3. ad Fortnahanum, ' S. Ambr.

1. l<>. ,

216 LA MÈRE D AMOUR ET l'E DOULEUR.

que nous sommes eu sa présence, nous ne ferions jamais ce qui lui déplaît. » Et un peu après il ajoute : « Le souvenir de Dieu exclut toute action criminelle 1. »

Si l'enfant prodigue avait toujours marché en présence de son père, il ne serait jamais tombé dans la misère au point de désirer de se nourrir des glands que mangeaient les pour- ceaux : Et cupiebat implere vmtrem suum desiliquis, quasporci manducaèant, et nemo Mi dabat. Le grand saint Augustin nous en donne la raison: Remarquez, dit-il, qu'il partit pour un pays éloigné. Cette région lointaine, poursuit-il, c'est l'ou- bli de Dieu, et la famine qui y survint est l'indigence de la parole de vérité -. Voilà le misérable état du pécheur qui,ou- bliant la présence de Dieu, et délaissant son Père céleste par le péché, s'en va dans un pays lointain, passe du règne de Dieu sous l'esclavage de Satan, et du ciel à l'enfer il souf- frira pour jamais une horrible faim, 0 quel aveuglement pro fond, s'écrie Cassiodore, de n'avoir pas Dieu présent devant soi 3.

Si les Juifs impics et déicides avaient mieux considéré dans la maison de Ca'iphe le visage divin du Sauveur, cette auguste face que les Anges désirent contempler ; s'ils ne l'avaient pas couvert d'un voile ignominieux, peut-être n'auraient-ils jamai crucifié le roi de gloire. Et veiaveruni eum ; et cceperunt qui- dam conspuere eum, et velare faciém ejus. Pourquoi ces scé- lérats couvrirent-ils d'un voile honteux la face de Jésus-Christ? Saint Jérôme repond : parce que la majesté du Sauveur brillait sur son visage; et Jansénius cité par Corneille : c'était pour le frapper et le tourmenter plus à leur aise, et n'être pas rete- nus et effrayés par son visage el ses yeux divins *.

C'est ainsi, dit saint Augustin, qu'agissent les méchants,

les chrétiens tièdes ou impies, qui se livrent à nue vie relâcl

et voudraient que Dieu fût aveugle : Dixerunt enim in corde suo : Oblitus estDcus, avertit faciem suam, nevideat infinem.

1 S. Bieron. I. 3. sup. Ezech. c.:> -' S. A.ug. I. 2. qusest. Evang. q. 33. 3 Cassiod. super I'.-. 9. v. 26. * Cornel. in Matin. 26. 67.

CONSIDÉRATION LX. - I "

i i - chrétiens pervers, pires qne <\<-* païens el des idolâtres, craehenl de nouveau sur Le visage de Jésus, et Luidonnenl des Boufflets, repoussant et voulant en quelque sorte anéantir sa présence.

:i. L'Ecriture dit, parlant d'Ophni et Phinéès : <»r, les Qla d'Héli étaient des enfants de Bélial qui ne connaissent pas le Seigneur. Et comment, direz-vous, pouvaient-ils ne pas con- naitre le Seigneur? Ils n'étaient point idolâtres, ils ne s'étaient point départis de la foi au Créateur, ils étaient même chargés d'instruire les autres en qualité de docteurs de la loi. Comment donc pouvaient-ils ignorer le Seigneur? Mendoza observe ici qu'il y a deux connaissances de Dieu, l'une pratique etl'autre spéculative. Or ils connaissaient Dieu spéculativement, mais non pratiquement puisqu'ils vivaient comme si Dieu n'était pas, en profanant les choses saintes, en foulant aux pieds la loi et violant les sacrifices. Ainsi, dit Mendoza, ils agissaient comme t'ont ceux qui ne connaissent pas le Seigneur1.

Hélas! dans le malheureux siècle nous vivons, combien de chrétiens qui ont la connaissance spéculative de Dieu, pro- fessent qu'il est partout et pénètre le fond du cœur, mais qui n'ont pas la connaissance pratique, puisque dans leur conduite ils méprisent ses commandements, et se livrent à toutes les impiétés. La première cause de tous ces malheurs est qu'ils ne w sont point proposé Dieu devant les yeux, et il arrive de que /'/■■ quité <ih<>n<li> avec l'oubli de Dieu, que la charité $'est refroidie. Dites-moi, je vous prie, pourquoi tant de gens affranchis de tout frein? tant de catholiques, ni froids ni chauds, dignes d'être rejetés delà houche du Sauveur? pourquoi tant de tromperies dans la politique, d'injustices dans les tribunaux, de désordres dans les deux sexes? L'esprit est épouvanté quand il considère que cette contagion infeste presque toute l.i terre et comble l'enfer. Combien de gens ignorent îles ar- ticles de foi qu'ils sont tenus de savoir el de croire explicite- ment? Combien vivent dans l'insouciance de leur salut, tout

1 Mendoza in I Rea. 2.

218 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

appliqués à briguer de vains honneurs, à bâtir des maisons, à cultiver leurs champs, leurs vignes, leurs jardins, à amasser des richesses ! Combien s'avilissent dans des rixes, des que- relles, des haines sans fin, et pensent rarement à la présence de Dieu et à la vie éternelle. 0 chrétiens, si toutefois vous mé- ritez ce nom, de vous le Seigneur se plaint à juste titre : mon peuple m'a oublié des jours sans nombre1. Ah! malheureux! réveillez-vous enfin.

6. Aussitôt après son péché. Adam, le premier père du genre humain, se cacha dans le paradis terrestre à l'ombre des arbres touffus : Abscondit se Adam et nxor ejus a facic Domini. Saint Chrysostome2, expliquant ce passage, dit : Voyez combien le pécheur agit follement, il cherche à se cacher de Dieu présent partout. Enfants d'Adam, que de fois, hélas! nous imitons la folie de notre premier père.

Caïn n'osa pas commettre son horrible fratricide en présence de ses pareuts ; il sortit pour aller il ne voyait personne ; et quand il fut au milieu des champs, il se jeta sur son frère A.bel et le tua. 0 impie exécrable, iras-tu, pour que Dieu ne te voie pas? Il y a un témoin qui te crie d'en haut : qu'as-tu fait ? la voix du sang de ton frère s'élève de la tertre jusqu'à moi. Allez donc maintenant, pécheur, et cherchez un lieu Dieu ne puisse vous voir pécher. Si vous voulez pécher, dit saint Augustin, allez Dieu ne vous voie pas, et faites ce que vous voudrez \

David, un jour après midi, ayant pris son repas et dormi, se promenait sur la terrasse de son palais, lorsqu'il aperçut Beth- sabée, femme d'Urie, d'une grande beauté, qui se baignait dans son jardin ; et comme il n'eut pas soin de veiller sur ses yeux et de détourner ses regards, il se laissa bientôt aller à de mauvaises pensées. 0 David, détournez vos yeux afin qu'ils ne voient pas la vanité ; fuyez, fuyez l'attaque du démon du Midi : si vous voulez obtenir la victoire, prenez la fuite. David

1 Jerem. -1. .Vl. 2 S. Chrysost. hom. 17 in (ien. 5 S. Aug. s. 46. de verb. Dom.

CONSIDÉRATION LX. 819

dit eu Lui-même : Personne ne nous voit; allez, allez vite, el

dites-lui à l'oreille que le roi désire qu'elle vienne. L'ordre est exécuté: Etmissis ntmtiis tuliteam. 0 chute malheureuse dans

un roi si saint ! Or, quelle en fut la cause? Je l'ai dit : Il vit une femme, et pendant qu'il contempla sa beauté, il détourna son

esprit de la présence de Dieu. Etce fut le motif de ses pleurs dans la suite: ExitUS aquarum deduxerunt QCulimeV : mes yeux ont répandu des ruisseaux de larmes. Oh! que le doc- teur Angélique a eu raison de dire : « Si nous pensions que le Seigneur est partout présent, qu'il voit tout et doit tout juger, nous ne pécherions jamais ou du moins rarement2. »

Pourquoi Joseph, dans la maison de Putiphar, tant de fois sollicité au mal par la femme de son maitre, repoussa toutes ses attaques, et abandonnant son manteau dans sa fuite, aima mieux perdre la vie que sa chasteté? C'est qu'il craignait Dieu et se tenait eu sa présence \ « Comment donc puis-je com- mettre ce crime et pécher contre mon Dieu? » On lit dans les Septante : « Coram f)co, en présence de Dieu. » Voilà comment ul souvenir de Dieu présent donne la victoire sur toutes lr> tentations. « Souvenez-vous de Dieu, disait souvent sain! Ignace, martyr, et vous ne pécherez pas. Et saint Ephrem : Devant le souvenir habituel de Dieu, les honteuses passions se retirent comme des malfaiteurs quand arrive le magistrat 4.

7. .le reviens à la Mère d'amour et de douleur qui a parfaite menl accompli cette parole de, la Vérité : Il faut toujours prier et ne jamais cesser, tlomment, direz-vous, pouvait-elle toujours prier et ne jamais cesser? N'a-t-elle pas uni !a vie contempla- tive a la vie active? .Ya-t-elle pas cherché à gagner de quoi se nourrir et vêtir par le travail de ses mains et son industrie.' « Elle était, dit saint A.mbroise ', économe de ses paroles, ap- pliquée a la lecture, diligente au travail, jamais sans rien faire. »

De grand matin, dit Jérémic Drexelius'', elle s'adonnait à de

î i».. us. |36. 2 s. Thom. opusc. 58. ci -i. » Gen. 39. 9. - * S. Ephr. Tract, devirtut s. A.mbr. <i>' Virginib. n Drex. de Rosis B. V. c. s.

.2:20 LA HÈRE d'amOUB ET I>K DOULEUR.

sainies occupations. Son premier travail était de prier, puis d'aller au temple assister au culte divin jusqu'à neuf heures, suivant notre manière de calculer le temps; ensuite son travail et ses occupations consistaient à filer, raccommoder, tricote* la laine, préparer le lin et la soie pour L'usage du temple, jus- qu'à trois heures après midi. Ensuite elle lisait et priait encore jusqu'à ce qu'un Ange vint lui apporter sa nourriture. o.C'esl L'opinion constante de célèbres écrivains 1 qu'elle confectionna, de ses mains industrieuses, la tunique sans coulure de notre Seigneur, laquelle était d'un seul tissu depuis le haut jusqu'en bas, et que les soldats au pied de la croix n'osèrent point cou- per en plusieurs morceaux; ainsi que la nappe qui couvrait la table sur laquelle notre Seigneur institua l'adorable sacremeul de l'Eucharistie; et que la sainte Mère de Dieu l'avait ornée de lis entrelacés : elle est encore aujourd'hui religieusement con- servée à Lisbonne dans la chapelle des Jésuites. Je pass*e sous silence plusieurs au'res objets que la J>. Vierge confectionna de ses propres mains; nous renvoyons au K. P. Antoine Spi- nelli -, de la société de Jésus, qui en parle longuement dans son ouvrage le trône de la Mère de Dieu. Tout cela prouve, conclurez -vous, que la Bienheureuse Vierge ne pouvait pas prier sans cesse.

Le vénérable Dède répond3 : « Celui-là prie toujours qui travaille toujours en vue de plaire à Dieu et vénère sa présence en tout lieu; » ce que faisait Marie d'une manière particulière el avant tout, en marchant continuellement dans la présence de Dieu et en travaillant l'esprit toujours élevé vers lui : « Je voyais le Seigneur et je l'avais sans cesse présent dr\ ant moi. » Ame chrétienne, apprenez de la Mère d'amour et .le douleur à marcher toujours avec précaution et à vous tenir en présence i\r Dieu. Llle-mème vous dit : J'ai accompli mon ministère en sa présence dans sa maison sainte 4. Ensuite vous ferez tout .i son exemple avec le plus grand soin parce que vous le ferea

' Walterua .le triplici cœna 1. 3. o. 38. - Spinelli c. 29. 3 B apud Corne! in Luc. ls. I. - ' Eccli. -.'i. li.

0ONS1DÉRATION IX. 22\

pour Dieu et que vous travaillerez en sa présence. « Voyez ce que vous faites, disait le sage Ezécfaias à ses ministres; que la crainte du Seigneur soft* avec vous, et faites toutes choses avec soin '. » Le païen Sénèque a reconnu et dit la même . bose : a Vivez avec les hommes comme si Dieu vous voyait, et parlez avec Dieu comme si les hommes vous écoutaient '. » s. Au reste la Bienheureuse Vierge a souvent été représen- tée par i'i spril saint sous la figure d'une baguette : Par la baguette deJoseph, \ ice-roi d Egypte, que vénérait humblement Jacob avaut de mourir : Adoravitque fastigium virgse ejus, •2n Par le sceptre d'Àssuérus que ce roi étendit vers Esther pour lui donner une marque de sa bienveillance : Quœ accédons osculata est summitatem vwg& ejus. Parla baguette d'Àaron «|ui fleurit et au moyen de laquelle il opéra de nombreux pro- diges : [nvenit germinasse virgnm Aaron in dorno Levi; et tur- gentibus gemmis eruperant flores. Par la baguette qui conso- lait David en t< atesses tribulations : Virga tua et ôacuàts tuus, ijiï'i me consoiata sunt. Enfin, par la tige que vit en esprit Isaïe le plus grand des prophètes, de laquelle devait sortir le Nazaréen fleuri, la vraie fleur des champs, Jésus-Christ notre Dieu : Et egredietur virga de radiée Jessc, et //os de radiée ejus ascendet. Pourquoi, demanderez-vous avec raison, la B. Vierge oat-elle si souvent comparée à une baguette? Saint Antonio répond 1 : « Parce qu'elle ae fui jamais inclinée vers les choses terrestres, mais toujours droite et élevée vers le ciel. » En ef- fet, une tige ae croit point en bas, ne descend pas en terre, mais s'élève toujours vers le ciel; de même la sainte Mère, c'est ce que veut dire saint Aulouin, ne se pencha point vers les objets passagers et terrestres, mais, comme une tige droite, elle B'élava vers Dieu, sa un dernière, eu mar- chant continuellement en sa présence : Providekam Domi- iiiini m conspectu meo semper. Kilo fit bien toutes choses; œuvres tant actives que contemplatives furent parfaites,

1 II l'.u-il. I'i. c. -' s.-m-iM i-p. in. "• S. Antonio, part, i, lit. 15. c. ii. para(

222 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

et tout son corps fut lucide parce que son œil était simple. Voyez par là, ô mon esprit, comment le souvenir de la pré- sence de Dieu conduit l'homme à la perfection. Si donc vous voulez être plus parfait que vous ne l'avez été jusqu'à ce jour, à l'exemple de la Douloureuse Mère et des saints, pensez que Dieu vous est présent partout : Ambula coram me, et esto per- fectus, ou selon plusieurs interprètes, eris perfectus. C'est ce souvenir qui fit parvenir Elie à un si haut degré de sainteté qu'il fut enlevé vivant au ciel sur un char de feu. Ces paroles lui étaient familières : Vive le Seigiicur en présence duquel je suis. Disciple fidèle, Elisée imita son maitre et respectait aussi la présence de Dieu : Vive le Seigneur des armées en présence duquel je suis. Parce qu'il marchait avec Dieu, c'est-à-dire, se- lon Corneille, parce qu'il vécut aussi saintement que s'il avait eu Dieu sous ses regards, Hénoch fut transféré vivant dans le paradis par les Anges : Et non apparuit, quoi tulit cum Domi- nus. Parmi toutes les grandes tribulations qu'il eut à souffrir, Jérémie pensait toujours à Dieu présent : Le Seigneur est avec moi comme un vaillant guerrier. Je termine avec Tobic, qui, an moment de sa mort, donnait à son fils cet avertissement sa- lutaire, que je vous recommande, excellent lecteur, de toutes mes forces : « Tous les jours de votre vie, pensez à Dieu, pre- nez garde de consentir jamais au péché et de transgresser les préceptes du Seigneur notre Dieu. » Observez-le, et vous vivrez.

CONSIDÉRATION LXI.

La B. Vierge .Mère d'amour et de douleur nous apprend à mépriser les choses de la terre et à ne désirer que celles du ciel.

il» SIOEHA SUBSUM.

Quand viendrai- je? et quand paraîtrai- je devant la face de mon Dieu. (Ps. il. 3.)

I . Qu'est-ce que le monde ? La superbe statue du roi Na- buehodonosor. dont la tète était d'or, la poitrine d'argent, le ventre d'airain, les jambes de fer et les pieds de fer et d'argile. « Et une pierre fut détachée de la montagne sans la main d'au- cun homme, et frappant la statue dans ses pieds de fer et d'ar- gile, clic les mit en pièces. Alors le fer, l'argile, l'airain, l'ar- gent et l'or se brisèrent tout ensemble. » 0 vanité ! les quatre monarchies des Chaldéens, des Perses, des Grecs et des Ro- mains, figurées par cette statue, sont-elles maintenant?

Qu?eet-ce que le monde? Le siège du grand-prêtre Héli du haut duquel, en apprenant la triste nouvelle que ses deux fils avaient été tués et L'arche prise par L'ennemi, il tomba à la renverse en arrière, se brisa la tète et expira. Pourquoi en arrière? Parce [ue Le siège n'avait pas de dossier pour servir d'appui. Voilà l'image du monde : point de siège solide, aucun appui. sont maintenant les cent vingt-sept puissants empereurs qui ont été à la tète de l'empire romain ? les soixante-quinze monarques de L'Espagne? les soixante rois très-ebrétiens de la France ? les grands, les princes, les puis- Banti de ce siècle ? Leurs ministres, adulateurs, serviteurs, soldats el sujets? <>n sont tous Les mortels qui on! paru dans

2i'i LA MÈRE d'âMQUR ET DE DOULEUR.

le monde jusqu'à ce jour? Ecoutez la réponse du Sage : Ils ont passé tous comme une ombre' : 0 vanité des vanités !

Qu'est-ce que le monde ? Une toile d'araignée ; ainsi l'appelle Job. Avez-vous quelquefois considéré l'araignée dans son travail, comme elle s'exerce avec soin, va et vient, et tire de son sein sa substance jusqu'à ce qu'elle ait achevé sa toile pour prendre au piège une mouche. Mais le balai d'une ser- vante suffit pour détruire son ouvrage et son tissu, et la pau- vre araignée est écrasée sous les pieds. Tels sont les soins, les labeurs, les études du monde s'ils n'ont Dieu pour objet et ne sont dirigés vers lui. Ils ont tissu, dit Isaie, une toile (V araignée"-.

(Ju'est-ce que le monde? Le lierre du prophète Jonas, un jour fleuri et le lendemain desséché. «Jonas, à cause de ce lierre, éprouva une grande joie ; mais Dieu prépara un ver qui en piqua la racine et il se dessécha. » Cet arbrisseau mnite qu'on lui applique cette parole de l'Apôtre : Ce qui ré- jouit ne dure qu'un instant. Telle est la fin et la récompeii>e des amateurs de ce monde : en jouant, riant, badinant, et se livrant à l'oisiveté, aux festins, aux plaisirs sensuels, ils perdent le royaume des cieux, et dans un clin d'œil, descen- dent en enfer.

(Ju'est-ce que le monde ?Un hameçon pour prendreles pois- sons, un lacet pour prendre les oiseaux, d'après le sage Ecclé- siastc : « L'homme méconnaît sa fin dernière : il se laisse prendre à l'hameçon comme les poissons, au piège comme les oiseaux, dans l'occasion mauvaise aussitôt qu'elle se pré- sente '. » 0 combien d'âmes malheureuses, pour avoir suivi le monde, sont tombées dans le lacet de perdition que leur a préparé et tendu le chasseur infernal : « Les pécheurs tombe- ront dans ses rets*. » Mais voyez la suite de ce verset : « Je demeure seule, jusqu'à ce que je passe outre. » C'est la Bien- heureuse Vierge Mi are d'amour et de douleur qui est demeu- rée exempte du piège du pèche originel et du péché actuel.

i Sap. 59. 9. - 5 [sa. •'.'•. B. 3 Eccl. 0. 12. - * Psal. I -i0. II.

CONSIDÉRATION LXI. 22ï>

Elle n'était pas de ce monde, mais toujours fut unie à Dieu seul, parce qu'elle vivait déjà dans le ciel. D'où la devise :

Ah SIDERA si ksi m : Là-hmit <hm* 1rs eicu.r.

2. .le me demande avec étonnement pourquoi saint Jean, disciple bien-aimé du Sauveur et fils adoptif de Marie, nous représente cette sainte Itère ayant le soleil pour manteau et la lune bous ses pieds : Multerarnùta soie, et lunasub pedibus ejtts*. Pourquoi est-elle appelée femme revêtue du soleil? Ecou- tons saint Bernard1 : « N'est-elle pas la femme revêtue du so- leil, puisqu'elle est la Mère de Jésus ? Le soleil a la chaleur et la lumière d'une manière stable. La lune n'a que la lumière, rt encore est-elle incertaine et changeante, ne demeurant jamais an même état. Marie, qui a pénètre d'une manière in- croyable l'abîme profond de la sagesse divine, est donc bien dite avec rais.. 1 revêtue du soleil, et c'est du vrai soleil de justice, .lesns-C.hrist notre Dieu ; ce qui fait dire au même doc- teur : « Le soleil de justice demeure en vous, et vous en lui ; \..iis lt- revêtez et vous êtes revêtue par lui : vous le revêtez de la Btlbstance île la chair et il vous revêt de la majesté de sa gloire; vous revêtez le soleil d'une nuée et vous êtes revêtue vous-même du soleil; » Mais pourquoi, direz- vous, saint Jean rt'ptvse ntr-t-il la sainte Mère foulant la lune sous ses pieds; El hma $ub pedibus tfus ? La lune, astre changeant et ne de- meurant jamais dans un même état, désigne les choses mon- daines, temporelles, transitoires que la très-sainte Vierge toola aux pieds pendant sa vie, n'ayant pour eux que du mé- pris et B'attachanl à Dieu seul de toute son àme. Et comme Sun l ils choisit la pauvreté pour épouse et n'eut pas repo- ser sa tête ; de même sa sainte Mère, tille unique et héritière de riches et nobles parents, préféra anx richesses la pauvreté volontaire. Elle dit à sainte Brigitte: « Joseph et moi ne nous réservâmes des richesses que le nécessaire à la vie pour l'hon-

1 Apoc. 12. 1. - s. Bern. serm. in Apoc. 12.

II. 15

2'HJ LA HÈRE b AMULK ET UE DOULEUR.

neur de Dieu ; et pour l'honneur de Dieu nous abandonnâmes le reste \ » Une autre fois elle lui dit encore: « Dès le prin- cipe, je fis vœu dans mon Cœur de ne jamais rien posséder dans le monde... Et tout ce que je pus avoir, je le donnai aux indigents et ne réservai que peu pour le vivre et le vête- ment 2. » C'est pourquoi, après l'ascension de son Fils, olle ne demeura pas dans la maison de Lazare, de Joseph d'Arimathie, du prince Xicodème ou d'autres personnages nobles et riches qui eussent reçu leur Souveraine avec tan! de plaisir ; mais, ainsi que l'observent Denis le Chartreux :1 et plusieurs autres, elle prit soin de cent vingt jeunes filles qui résolurent d'observer, sous sa règle et sa conduite, la chas- teté perpétuelle et la pauvreté évangélique. Par ses paroles et ses exemples, elle forma cette troupe de vierges aux vertus et à la sainteté. C'est de cette première assemblée religieuse de vierges que saint Ignace martyr écrit dans une de ses épi très: «Je salue la congrégation des vierges1. » 0 heureuse- vierges élevées par une telle maîtresse qui ne leur prescrivait pour toute leçon que d'aimer Dieu de tout leur cœur et de mé- priser le monde : Nolitc diligere mundum , neque ca qui in mtmdo s mit 3.

3. Saint Paul si détache du monde et si plein de mépris pour lui, certifie que tout ce que le monde adore et estime, richesses, faveurs, délices, honneur, gloire, éloquence, digni- tés, plaisirs et tout ce que l'univers renferme de plus pré- cieux n'est rien à ses yeux à côté de Jésus-Christ : « Tout me semble une perte au prix de cette haute connaissance de Jésus-Christ pour l'amour duquel je me suis privé de tontes choses, et je les regarde comme du fumier, afin que je gagne Jésus-Christ. » Voyez à quelle hauteur s'élevait l'esprit de ce grand Apôtre dans, son Kpitre aux Philippiens, chapitre m, verset huitième.

1 Kevol. S. Birgit. lib. 7. c. 25. - Lib. i. c. 10. 3 Dionvs. Carth. in 1. sententia, dist. fi. qu. 2. '' S. [gn. M. ep. :i ad Philipp. ' S. Joan. 2. 15.

I 0NS1DEB \ I ION I.XI. -2.11

Mais l'excellente Mère de Dieu u'avait-eUe paa des senti- ments plus élevés encore ? Eo comparaison de L'éminente con- naissance et de l'amour de son Fils, ne regardait-elle pas, plus que l'Apôtre, tous les biens de la terre comme du fu- mier, pourvu qu'elle gagnai Jésus-Ghrist? Kl si le docteur des nations a <lit : Le monde est crucifié pour moi, comme je suis crucifie pour le monde ; le monde me tourne le dos et |e tourne le dos au momie; le monde m'est odieux et je suis odieux au monde ; le monde est pour moi comme un mort, et je suis un mort pour le monde, tellement que le monde et moi nous sommes attachés à une seule et même croix; combien plus la divine Mère était en droit de dire : Le monde est cru- cifié pour moi, et je le suis pour le monde, puisque mon seul amour est Jésus crucifié? Lui était-il difficile de mépriser le monde, quand, dés l'aurore de sa vie, elle apprit à se mépriser .1 .1 se regarder comme rien?

Ce n'est pas ainsi qu'agissait Judith, cette sainte et noble veuve illustre par sa chasteté. L'Ecriture nous raconte que, dépouillant les vêtements de son veuvage, elle se parfuma d'excellente myrrhe, arrangea ses cheveux avec art, mit une belle coiffure sur sa tète, et, revêtue des habits de ses jours d'allégresse, elle se rendit au camp des Assyriens. Et quand elle eut fait lever le siège de lléthulic et terrassé l'ennemi, L'Ecriture ajoute qu'elle parut en public avec, grande pompe. accompagnée de tous les principaux personnages de la ville : Erat a h !<• m diebus festii procedens cum magna gloria. lie même Esther, pieuse et sainte femme, pour plaire au roi As- suérus, voulut paraître en public parfumée de précieux aro- in. îles et ornée de ses habits royaux : Die autem tertio induta est Esther regalibus vestimentis. Kuth la Moabite, pauvre et modeste veuve, reçut de Noémi ce conseil : « Lavez-vous et parfumez-vous d'huile de senteur, et prenez vos plus beaux habits. » Voyez, prudent lecteur, comment des femmes, quoique vertueuses, sont néanmoins amies de la toilette et ap- pliquées à tuner leur corps. Vous le remarquerez encore dans cette antre veuve bien pauvre et accabler de dettes, à laquelle

■2'2 S LA MÈRE L> A.MULK ET DE DOULEUR.

Elisée obtint une huile abondante afin qu'elle put payer ses créanciers : « Elisée lui demanda : Que voulez-vous que je Casse pour vous ? dites-moi, qu'avez-vous dans votre maison? Elle lui répondit : Votre servante n'a pas autre chose qu'un peu d'huile pour se parfumer. » Elle était bien pauvre, et chargée de dettes, et malgré cela elle avait cependant et con- servait un peu d'huile. Pourquoi? Pour se parfumer. 0 mon Dieu! cette pauvre vieille femme voulait encore être belle. Voyez les misères et les erreurs des femmes, et craignez de vous laisser prendre dans ce piège.

0 pieuse Vierge, Souveraine de tout l'univers! quels étaient vos parures? vos habits précieux les plus beaux? Epiphane, Nicéphore , Cédrénus et d'autres \ observent que les vête- ments de la sainte Mère de Dieu étaient tout simplement de laine en sa couleur naturelle sans aucune teinture, et même couleur cendrée. Ame chrétienne, comprenez par l'opinion que la sainte Vierge, avait d'elle-même et du monde ! Cepen- dant le fin lin et la pourpre n'étaient-ils pas non vêtement, comme le dit l'Esprit saint dans les Proverbes? Oui, dit Cor- neille , le fin lin, qui est de couleur blanche, désigne sa vir- ginité plus qu'angélique ; la pourpre , son ardente charité envers Dieu et le prochain; les parfums exquis, ses excel- lentes vertus ; et la suave odeur de ses vêtements, les bons exemples qu'elle a donnés au monde : « Et odor vestimentortàn luorum sicut odor thuris. » Mais, chose remarquable! les vê- tements de la Douloureuse Veuve, Mère du Sauveur, étaient couleur de cendre; pourquoi? sinon pour indiquer le mépris du monde vis-à-vis duquel elle était déjà morte, disant avec l'Apôtre : « Ayant les aliments et de quoi nous vêtir, soyons contents de ces choses *. »

4. Mais hélas ! que le monde est loin de penser ainsi ! Et qu'il y en a qui suivent aujourd'hui l'impie et fière Jézabel dont l'Ecriture nous dit : « Elle se para les yeux avec du fard, mit ses ornements sur sa tète et regarda par la fenêtre. »

i Apud Drexell. tom. i. apnd me fol. I20fi. * I Tim. C. 8.

I o.NSII'ï NATION FAI. 220

Quelle en est la suite? « La chair de .lé/abel sera comme le fumier sur la face de la terre. » Aile/ maintenant, mondains et mondaines, délicats et délicates; allez, sépulcres blanchis qui paraisse/, splendides au dehors, mais au dedans remplis de puanteurs, de vers et d'ordures; vous oubliez Dieu votre créateur, que vous arrivera-t-U à la mort? « Dites-moi, s'écrie saint Bernard, sont les amateurs du monde qui étaient avec nous il y a peu de temps? Il n'en reste que des cendres et des vers. Considérez ce qu'ils sont, ce qu'ils ont été. Ils furent hommes comme vous ; ils ont mangé, bu, ri, passé leurs jours daus l'abondance, et dans un instant ils sont descendus en enfer1. » Voulez-vous donc les suivre?

Ohl qu'il vaut mieux mépriser le monde comme la Doulou- reuse Mère, el avec elle désirer les seuls biens du ciel et recher- cher Dieu de tout notre cœur! « Les grâces sont trompeuses et la beauté est vaine 2. » Souvenez-vous d'Aman : qui plus que lui est élevé tu gloire? Il est assis à un festin royal, dine en compagnie du roi et de la reine, et, à la fin du repas, il est pendu à une potence : sxispensus est itaqiœ Aman in patibnlo fjuod paraverat Mardochœo '. Telle est la fin des faveurs humaines et de l'amour du monde : « Ne vous confiez pas dans les princes, ni dans les enfants des hommes qui ne peuvent vous sauver '. » La faveur est donc vaine ; mais la beauté lVst aussi. Absalon, ce prince jeune et beau, en est pour nous une démonstration. Il ambitionnait le trône de son père; et il a pour trône un gibet. Il désirait le sceptre avec ardeur, et il est percé de trois lances en guise de trois sceptres. Il convoitait la couronne royale, et, au lieu de porter le di;idèm<\ il est suspendu par les cheveux à un chêne. Il était orgueilleux de sa superbe chevelure, et elle est devenue un lacet pour le prendre el le taire mourir. Oquam /><itirns redditor est Altissi- mus- l C'est la peine du talion : c'est ainsi que le monde récom- pense s.s serviteurs. « Kl ils emportèrent Absalon et le

4 S Ben. in Médit, c. 2.—« Pror. :tt. 30. -■ Eath. 7. in. TV I4S.2. 5 Eeeli. .'i. î-.

•22H

LA MÈRE 1) AMULK 1 DE DOULEUR.

Elisée obtint une huile abondai 3 afin qu'elle put payer ses créanciers : « Elisée lui demai a : Que voulez-vous que je fasse pour vous ? dites-moi, qu',rez-vous dans votre maison? Elle lui répondit : Votre servaie n'a pas autre chose qu'un peu d'huile pour se parfumer. Elle était bien pauvre, et chargée de dettes, et malgré ce! elle avait cependant et con- servait un peu d'huile. Pourquo? Pour se parfumer. 0 mon Dieu! cette pauvre vieille ferma voulait encore être belle. Voyez les misères et les erreur des femmes, et craignez de vous laisser prendre dans ce pi

0 pieuse Vierge, Souveraine c tout l'univers! quels étaient vos narures? vos habits préeien les plus beaux? Epiphane, Nicephore , Cédrénus et d'autre ', observent que les vête- ments de la sainte Mire de Die étaient tout simplement de laine en sa couleur uaturelle sas aucune teinture, et même couleur cendrée. Ame chrétienne comprenez par l'opinion que la sainte Vierge, avait d'ell-mème et du monde ! Cepen- dant le fin lin et la pourpre ntaient-ils pas son vêtement, comme le dit l'Esprit saint dan les Proverbes? Oui, dit Cor- neille , le fin lin, q> est de coueur blanche, désigne sa vir- ginité plus qu'angélique ; la parpre , son ardente charité envers Dieu et le prochain; lesDarfums exquis, ses excel- \ nt°s vertus ; et la suave odeuide se vêtements, les bons exemples qu'elle a donnés au mode : « Et odor vestimentorum tuorum sicut odor thuris. » ?rais lose remarquablej^s \> tements de la Douloureuse Veuvi Mère du Sauvj couleur de cendre; pourquoi? sion pour inc du monde vis-à-vis duquel elle tait déjà^ l'Apôtre : « Ayant les aliments e< contents de ces choses *.

4. Mais hélas ! que le mond^ qu'il y en a qui suivent aujoj dont l'Ecriture nous dit : « El mit ses ornements sur sa

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1 Apud Drexell. tom I. apudi

CONSIDÉRATION F-XI.

Quelle en est la sue? « La chair de Jézar fumier sur la la terre. » Allez mainte**,

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Oh! qu'il vaut miux mépriser le monde reuse Mère, et ;r ec.ee désirer les seuls biens cher Dieu de tout ncre cœur! « ' es grà< la beauté est va ouvrez-vous d"

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230 LA MÈRE D AMOUR ET 1»E DOULEUR.

jetèrent dans une grande fosse qui était dans la forêt, et ils entassèrent sur lui un grand monceau de pierres A . » Voilà combien est vaine la beauté du monde ; la plupart du temps on se fabrique une beauté factice au moyen du fard, tandis que in- térieurement, on est plein de souillures et de puanteurs insup- portables. Tels sont les honteux plaisirs; et quel sera leur partage, sinon le feu éternel ? Ecoutons Job, le modèle de patience : C'est une chose illicite et une très-grande iniquité : c'est un feu dévorant jusqu'à l'entière perdition, et qui détruit toutes les générations*.

Après nous avoir dit : La grâce est trompeuse et la beauté est vaine, le Sage ajoute: « La femme qui craint le Seigneur est celle qui sera louée. » Cette femme craignant le Seigneur et accomplissant en tous points sa sainte volonté n'est pas autre que la sainte Mère de Dieu, qui, bien que remarquable par la perfection de son corps et douée d'une merveilleuse beauté telle que nous la dépeignent les images de saint Luc n'eut que répulsion et mépris pour la frivole et fausse beauté du monde, contente de Dieu seul son souverain bien, l'unique objet de son amour, de ses recherches et de ses désirs. Aussi pouvait-elle dire plus justement que l'Epouse du Cantique : Mon bien-aimé est à moi et il demeurera sur mon sein ; en d'autres termes: Pleine de mépris pour toutes les choses de la terre, je ne vis que pour Celui pour qui tout vit ; je ne sers que Celui que tout sert et dont tout accomplit la volonté : je m'attache uniquement à Celui qui est ma vie, mon espérance, mon amour et ma grande récompense. Filles de Sion, enfants de la céleste Jérusalem, saints Anges : Dites à mon bien-aimé que je languis d'amour. 0 doux amour! qu'il est avantageux d'aimer uniquement, comme la Douloureuse Mère, Jésus crucifié! Et si saint Paul se glorifie de porter en son corps les stigmates du Sauveur Jésus, combien plus justement Marie put dire : Je porte dans mon corps les stigmates de Jésus-Christ ; je les ai même portés sans cesse dans mon Cœur pendant toul

' 2 Iles. I* !"• ! Job. ch. xxm, v. II.

ONSIDÉRATIOti LX1. -'Ml

le cours de ma vie, »'t voilà pourquoi le monde est vil à mes yeux et tout ee qu'il y a dans le monde. Que de fois, en cette vallée de larmes, la tendre veuve, après la rentrée de son Fils ni ciel, lança vers Dieu les soupirs du prophète: « Bêlas! que mon exil est long! Je vis avec les habitants de Cédar; mon âme est longtemps étrangère. Quand viendrai-je, et quand paraitrai-je devant la l'ace de mon Dieu1 ? » Son amour ac- quérait chaque jour de sa vie de nouvelles' ardeurs. « Non, B'écrie Denis le Chartreux *, le patriarche Jacob apprenant que son tils Joseph dominait en Egypte, n'eut pas un désir de le voir aussi ardent que celui qu'éprouvait Marie de contempler son Fils Jésus régnant glorieux dans le ciel; car plus son amour pour Jésus selon les deux natures était intense, ardent, in- comparable, plus elle désirait du fond de son cœur de le voir face à face, d'être admise à l'union immédiate et intime, à la vision béatifique : surtout parce qu'elle avait éprouve glorieusement et fréquemment sa suavité qui l'excitait à la goûter pleine et entière suivant ce que dit la Sagesse incréée : <( Ceux qui me goûtent auront encore soif. »

.'i. Combien était ardent le désir de Moïse, après les quarante ans dans le désert, de voir enfin la terre promise et d'y entrer, les Livres saints nous le font comprendre. Cependant, pour une faute légère, son désir ne fut point satisfait; âgé de cent vingt ans, jouissant encore de ses forces et de l'usage de sa vue qui n'avait point baissé, comme il arrive d'ordinaire aux vieillards, et possédant toutes ses dents, il ne put voir la terre promise que de loin, du sommet de la montagne, o Et le Seigneur lui dit : C'est cette terre au sujet de laquelle j'ai t'ait serment à Abraham. Fsaac et Jacob en leur disant: Je la donnerai à votre postérité. Vous la voyez de vos yeux, mais vous n'y entrerez pas. El Moise, serviteur du Seigneur, mou- rut là dans la terre «le Muab, par l'ordre du Seigneur '.

Jugez par là, âme chrétienne, le vif désir dont Marie brûlait de voir au ciel sou Seigneur el son Dieu et de jouir du sou-

i \k, i m. ;;. Serai, de Assompt. M. V. :' l>'Mit. :ti. i.

232 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

verain bien. Pendant les vingt-deux ans qu'elle demeura sur la terre pour consoler les chrétiens de la primitive Eglise fumait encore le sang du Sauveur nouvellement répandu, oh ! qu'elle dut fréquemment gémir vers le ciel et s'adresser à son bien-aimé Fils ! « J'ai cherché sur mon lit de repos pendant les nuits Celui que mon cœur aime ; je l'ai cherché et ne l'ai point trouvé. Je me lèverai et parcourrai la ville ; je chercherai dans les rues et les places Celui que chérit mon âme. Je l'ai cherché et ne l'ai pas rencontré *. » 0 très-doux Jésus ! vous qui aviez aimé votre très-sainte Mère plus que les autres créa- tures, et ne cessiez pas de l'aimer, pourquoi lui causàtes-vous un martyre si long, si cruel? Vos jugements sont des abîmes \. 11 voulut laisser si longtemps son excellente Mère comme atta- chée à la croix, afin, nous l'avons déjà dit, qu'elle put accroître ses mérites qui devaient être récompensés dans toute l'éter- nité. Salomon mettait la sagesse humaine au-dessus de tous les trésors du monde : « Je l'ai préférée, dit-il, aux trônes et aux royaumes, et j'ai regardé les richesses comme rien à côté d'elle3. » Oh! combien plus la Bienheureuse Vierge pouvait parler ainsi de tous les biens en comparaison de la divine et éternelle Sagesse et de la possession prochaine du souve- rain bien après lequel elle soupirait de toutes ses forces ! Tous les trésors les plus précieux de l'univers n'étaient rien dans son estime ; posséder Dieu seul était son unique désir. :< Maintenant quel est l'objet de mon attente, sinon le Sei- gneur 4 ? »

6. Apprenez delà Douloureuse Mère, àme chrétienne, à mé- priser tous les biens de la terre, à n'aspirer qu'à ceux du ciel. « Il faut, dit saint Bernard, que le monde devienne amer pour celui qui commence à comprendre les douceurs de Jésus- Christ. » 0 monde impur, qui peut t'.iimer? Tues semblable à Jahel qui présente du lait au général Sisara et en même temps lui enfonce un clou dans la tète. Hélas ! misérables mor- tels, que de fois pour une goutte de lait, pour une satisfaction

1 Gant. 3. 2. * Paal. 35. 7. 3 Sap. 7. 8. '• ?s. 38. 7.

I ONSLDÉR \ nOH I.X1. 233

coupable, nous perdons la vie éternelle! Enfants des hommes, jusqu'à quand aurons-nous le cœur dur?

i) monde Impur! tu es semblable àDalila; pendant que sans défiance Samson dort sur ses genoux il est dépouillé «le sa force,

saisi, privé des yeux et réduit à nue servitude plus amère que la mort. Et maintenant, mondains, fiez-vous à votre Dalila, au monde pervers et méchant. Quel serpent est caché sous L'herbe! <> triste sort du genre humain! s'écrie L'évêque d'Ilippone, le monde est plein d'amertume, et on l'aime ! s'il avait dos douceurs, comment L'aimerait-on? Il est plein de troubles, et on l'aime ! que serait-ce s'il était tranquille? Com- ment cueilleriez-vous ses fleurs, vous qui n'éloignez pas la main de ses épines ?

<i monde impur! tu es semblable à Bel, l'idole de Babylonë, d'or à L'extérieur et de terre en dedans, comme le disait Daniel au roi. Tels sont les empires et les royaumes : splendides au dehors à l'œil le l'homme, mais de boue en réalité. Témoin Auguste-» >t'tavien, empereur des Romains et maître de l'uni- vers, qui d'après Suétone, prononçait ces mots en mourant : « J'ai été tout, mais rien ne sert; j'ai été tout, mais je ne suis plus rien. » Le prophète Uaruch confirme cette vérité. « sont, dit-il, les princes des nations qui dominaient surlesbétes de la terre, qui se jouaient des oiseaux du ciel, qui amassaient dans leurs trésors l'argent et l'or auquel les hommes mettent toute leur confiance et qu'ils désirent avec une passion qui n'a point de bornes ' ? » Et un peu après il répond : « Ils ont été exterminés, ils sont descendus dans les enfers; et d'autres sont venus prendre leur place. » U petitesse! ô vanité! ô longue éternité !

7. 0 monde impur! tu es semblable à Achitopliel, ce courti- siin rusé et impie dont l'avis était estime par tous comme le plus prudent et presque divin. Sachant s'accommoder avec ar- tifice au temps el aux personnes, il donnait tantôt un bon con- seil à David et tantôt un mauvais à Absalon. Que gagna ce

1 Baroch. 3. 16.

234 la mèrk d'amoub et DE douleur.

vaiu rechercheur d'honneurs et de richesses? Ce que gagnent les chiens affamés en cherchant à saisir une mouche qui us peut apaiser leur faim. Or, dit l'Ecriture, Achitophel voyant que sou avis n'était pas suivi, mit ordre à sa maison et alla se pendre. » Que de vide dans les affaires et les soucis des hommes !

0 monde impur! tu es semblable à Amnon assis à un festin, raillant, buvant, faisant bonne chère. Qu'arrive-t-il? « Frappez- le et le tuez. » Tu es semblable à Baltbazar mangeant et dan- sant, pendant que le glaive de la divine justice était suspendu sur sa tète: «La même nuit fut tué Baltbazar roi des Cbaldéens.» Tu es semblable à ce riche dont le champ produisait des fruits abondants, et pendant qu'il pensait à élargir ses greniers, il entend cette sentence suprême : « Insensé, cette nuit on va te redemander ton àme ; et les biens que tuas amassés, pour qui seront-ils?» Tu es semblable à Adonias ambitionnant Les honneurs de la royauté pendant la vieillesse de David s<«n père : « Il s'élevait en disant: Je régnerai. » Et qu'aniva-t-il? « Aujourd'hui Adonias sera mis à mort. » Tu es semblable à Jonathas qui, conduit à la mort par l'ordre de son père, s'écria: « Je n'ai fait que goûter un peu de miel au bout de ma ba- guette, et voilà que je meurs! » 0 goutte de miel, que tu en as trompés ! Hélas ! que de personnes diront en soupirant à à l'heure de la mort : « J'ai goûté un peu de miel, et je meurs ! » 0 courtes satisfactions coupables ! ô peines éternelles ! « Vous auriez, dit saint Isidore ' , la sagesse de Salomon, la beauté d'Absalun, la force de Samson la longévité d'Enoch, les ri- chesses d'Ancus, la puissance d'Octavien, à quoi vous servi- raient-elles, si finalement votre corps doit être livré aux vers et votre àme aux démons pour être tourmentée sans fin avec le mauvais riche? Qu'il vaut donc mieux mépriser le momie. comme la Douloureuse Mère qui le dédaigna dès l'âge de trois ans avec toute sa pompe.

Pour terminer, allons à la source de tous les biens, allons

' Ibid. cit. à Pépin, &erm. de S. Barthol

I ONSIDÉR \l [i'\ i.\i. ilij.i

au Fils de la Douloureuse Mère, à Jésus-Christ crucifié. Otrès- doux Sauveur, amour crucifié, dites-moi, je vous prie, pour- quoi eu mourant sur la croix vous avez crié : J'ai soif. Pour- quoi ave/vous soif? Est-ce parce que « votre force vous a abandonné et que votre langue s'est attachée à votre palais ! » par la diminution de votre sang que vous aviez presque tout répandu? Voici la réponse de l'abbé Kupert :< « Il meurt en souffrant la soif pour nous montrer qu'il n'est rien dans le monde qui apaise la soif. » Oui, mon Jésus, rien au monde, absolument rienne peut nous satisfaire, que vous seul qui êtes notre Dieu; aussi notre cœur n'a-t-il pas de repos sinon en vous. Tout passe, tout disparait, tout périt. « J'ai vu la fin de toutes les choses les plus parfaites; » seul votre royaume, ô Jesus-Christ, que vous nous avez acquis au prix immense de votre sang, n'a pas de fin. Avec la Douloureuse Mère, as- pirons donc à ce royaume, cherchons-le, et méprisons le monde qui tout entier est plongé dans la malice. Heureux celui quia pu mépriser le monde. « Le monde passe, et tout ce que la concupiscence y trouve d'aimable passe avec le monde ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternelle- ment ". »

« P^. 21. tti. s I Joan. 2. 17.

6

CONSIDERATION LXII.

Heureuse mort, funérailles et sépulture «le la Douloureuse Vierge Marie, .Mère de Dieu.

(II'IO 1MS90L.Y1.

Je désire d'être dégagé des liens du corps, et d'être avec Jésus-Christ,

1 . Après avoir examiné au long, dans le livre premier des Tusculanes, si l'homme vertueux doit désirer la mort ou la fuir, Cicéron, l'oracle de l'éloquence romaine, finit par adop- ter ce sentiment : « Les bons doivent désirer la mort, et les méchants la fuir. »

Oui, la mort est désirable aux bons, parce que « la mort des saints est précieuse devant Dieu. » Voyez Abel mis à mort par son frère à cause de ses bonnes œuvres ; Abraham mourant plein de jours dans une heureuse vieillesse; Moïse quittant la vie au pays de Moab par l'ordre du Seigneur et dans la paix avec lui ; Judas Machabée succombant sur le champ de ba- taille pour le salut de la patrie ; Eléazar laissant par sa morf un noble exemple de vertu et de courage.

La mort est au contraire à fuir pour les méchants, et souve- rainement à craindre, parce que la mort des pécheurs est af- freuse. Témoin Cain tué par Lamech ; les habitants de Sodome et de (iomorrhe détruits par une pluie de soufre et de feu ; Pharaon avec son armée englouti dans les eaux de la mer Rouge; Choré, Datan, Abiron et leurs complices, révoltés eontre Moïse, précipités vivants en enfer ; Achitophel se don- nant la mort en se pendant lui-même: Absalon suspendu eu

COlfSlDÊBATiOM i.xn. -2M

l'air aux brandies il'un chêne ; A gag fendu par le milieu du corps parle glaive de Samuel : « Faut-il qu'une mort amère me sépare ainsi de tout? » J'en omets un grand nombre d'autres. C'en est assez pour démontrer que la mort est dési- rable pour les justes et à craindre aux méchants.

Or, qui des mortels l'ut plus vertueux, [dus pur, plus saint qne la Douloureuse Vierge. « Quand il s'agit du péché, dit saint Augustin \ je veux qu'il ne soit fait aucune mention d'elle. » On pcul donc croire qu'elle n'eut aucune horreur de la mort temporelle, et que plutôt elle la désira de tous ses Vœux ; car elle souhaitait vivement d'être pour toujours avec son Fils qu'elle chérissait plus que sa vie et dont les souffrances ne purent la séparer. Son désir allait s'augmentant de jour en jour quand après l'ascension elle se vit sur la terre pour un long terme de vingt-deux années; mais, Vierge très-prudente, toujours soumise à la volonté divine, elle se soumit humble- ment à l'étera die Sagesse.

J. Enfin la sainte Mère de Dieu était parvenue à l'âge de soixante-douze ans, et le terme approchait pour elle de s'en allerde ce monde à son Fils bien-aimé. Oh ! que de fois dans des prières mêlées de larmes, elle offrit son Cœur ardent en sa- crifice à son divin Fils ! Que de fois elle fi! monter au ciel ces paroles de David : « Comme le cerf altéré soupire après les eaux de la fontaine, ainsi mon àme soupire après vous, à mon Dieu. » Combien de fois, dans son désir si vif de posséder le souverain bonheur, elle fit retentir ces paroles aux oreilles de son bien-aimé : « Délivrez mon àme de la prison de mon corps. Telle une colombe attachée par un fil, avec cette de- vise : Je désire être dégagée.

Si, brûlant en désir de voir son fils Joseph, Jacob s'écriait : Puisque mon fils Joseph vit encore, c'est assez pour moi, j'irai et je le verrai. Si L'Epouse, soupirant vers son bien-aimé, <li- > ; t i I : Vvez-vous vu Celui que mon neurainie? Si saint Paul embrasé du divin amour, après ses travaux apostoliques, écri-

1 S. Aug. lib. de natura et gratia. * Ps. 14t. T.

i>.*{8 I.A MÈRE 1) AMOUB ET DE DOULEUR.

vait aux fidèles : « Je me trouve pressé des deux côtés, car je désire d'être dégagé des liens du corps et d'être avec Jésus- Christ... » Si saint Jean le disciple bien-aimé du Sauveur, dans sa vieillesse, n'avait, en terminant son Apocalypse, d'autres paroles dans son cœur et sa bouche que celles-ci : « Venez, Seigneur Jésus-, » combien la divine Vierge Mère, après l'ascension de son Fils, soupirait avec plus d'ardeur et d'avi- dité pour sa réunion avec lui : Je désire d'être dégagée des liens du corps et d'être avec Jésus-Christ. Et s'adressant aux Anges, qui visitaient souvent la Mère de leur Souve- rain et formaient comme sa cour, elle leur répétait ces pa- roles de l'Epouse : « Je vous conjure, filles de Jérusalem , si vous rencontrez mon Bien-aimé, de lui dire que je languis d'amour '. »

3, Lorsque enfin fut venu le jour si désiré l'aimant Fils devait transférer sa sainte Mère des misères de la vie mortelle au royaume de la gloire céleste, il envoya l'archange Gabriel qui, resplendissant de lumière et tenant en sa main une branche de palmier, adresse ces mots à la Vierge : « Le Roi du ciel est charmé de votre beauté; et le Seigneur Jésus votre Fils attend sa vénérée Mère, etc. » 0 quelle agréable nouvelle ! <( Ayant ainsi connu son départ, dit Nicéphore *. une lumière lui est apportée, elle met ordre à sa maison, fait venir ses plus proches parents, comme il était convenable; avec ordre et piété on dispose tout ce qui regarde son dernier passage : elle expose à ceux qui l'entourent le message qu'elle a reçu, et de plus montre le trophée de victoire sur la mort, le ra- meau de palmier. » L'Archange lui présentait à bon droit une palme, parce qu'aucun mortel ne remporta jamais plus Illustre victoire que la très-sainte Vierge sur le monde, la chair et le démon. Si l'on donne aux saints martyrs en signe de victoire une palme à la main : palmse in maniàus eorum ; n'etait-elle pas mieux due à la Heine des martyrs qui souffrit dans son âme plus qu'eux tous ensemble, comme nous l'avons déjà

1 Gant. ... 8. Niceph. lib. 2. histor, c. U.

CONSIDÉRATION I.XII. 239

.lit? n La seule àme de Marie, dit Niéremberge ', surpassâtes supplices ft les tourments de tous les martyrs, a Et bien qu'elle n'ait pas répandu son sang pour son Fils, elle porta dans son cœur le glaive «le douleur jusqu'à la fin de sa \ ie, en mourant avec lui chaque jour par ses sentiments de com- passion et en se préparant à une sainte et heureuse mort par la méditation de Bes souffrances. Ecoutez ce qu'elle disait à sainte Brigitte '■ : «Je me préparais à la mort' en parcourant habituellement tous les lieux mon Fils avait souffert parce que leur vue me faisait comprendre plus efficacement ce qu'il avait enduré. » Ame chrétienne, apprenez ici de la sainte M. re combien le souvenir el la méditation de la passion du Sain. Ma- est une excellente préparation pour obtenir une bonne mort. <( La participation aux souffrances de Notre Seigneur, «lit saint Léon pape, est une attente certaine et sûre de la béatitude promise \ »

i. Venez maintenant, tilles de Jérusalem; venez, filles de Sion : venez et voyez votre Reine languissante et toute liquéfiée par la grandeur et la force de son amour pour son Bien- aimé. Invitée par son Epoux, à se rendre au cellier, c'est-à-dire dans le divin Cœur de Jésus, l'Epouse fut tellement enivrée du divin amour que, sou Epoux l'ayant quittée, elle tombait de défaillance, de sorte qu'elle appela ses compagnes à son aide pour la soutenir et lui présenter des fleurs et des fruits afin que leur odeur et leurs parfums lui rendissent ses forces : Fulcitc rhe floribits, stipate me malis, quia amore langueo.

0 Bienheureuse Vierge! cette épouse c'est vous, dans Mitre âge avancé, succombant peu à peu parla tendresse de votre amour, étendue sur votre pauvre lit, absorbée eu Dieu par la douceur ineffable de votre Cœur et même toute transformée en votre Bien-aimé. u Tel est votre amour, dit saint Augustin, tel vous êtes ; vous aimez la terre? vous êtes terre. Vous aime/ Dieu? que dirai-je? Vous serez Dieu. » Or, qui, plus que lu

i Nieremb. de amore lt. V. e. \<. ' S. l!irur. I. 6. <•. n-2. - "• s. Léo. serm. 0 <!•• qnadi i_r.

240 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

Mère de la belle dilection, aima Dieu d'un amour non inter- rompu pendant toute la vie? 0 phénix d'amour qui, par un souvenir assidu, ramassant les deux morceaux de la croix et les instruments de la passion pendant votre vie, avez été con- sumée par les rayons ardents du soleil de justice pour renaîtra à la vie éternelle. « Certainement, dit saint Bernard, une flèche d'amour transperça l'àme de la Vierge pour que l'amour ar- rivât jusqu'à nous, que nous reçussions tous de sa plénitude et qu'elle devint la Mère de la charité \ »

5. L'Ecriture nous apprend que le grand patriarche Jacob, près de passer de cette vie mortelle à une vie meilleure, eut le bonheur de voir tous ses fils réunis devant lui, et qu'à chacun d'eux il donna des conseils paternels et sa bénédiction.

Considérez, ô mon esprit, la nouvelle consolation que le Seigneur daigna procurer à sa sainte Mère languissante d'a- mour : il voulut que tous les Apôtres, alors dispersés dans les diverses parties du monde, arrivassent miraculeusement à Jérusalem et fussent présents à la mort de sa Mère bien- aimée. Avec les chrétiens fidèles, ils environnèrent comme de jeunes plants d'oliviers le lit sacré de la Vierge, en ré- pandant des larmes de tendresse et de douleur de ce que l'E- glise non encore affermie allait recevoir une cruelle blessure par l'absence de la sainte Mère, la souveraine conseillère. Marie les consola avec la plus grande bonté. Voici comment s'exprime Siméon Métaphraste 8 : ((Quand fut venu le moment marqué par le Très-Haut, la Mère de celui qui est la vraie vie était étendue sur son lit au mont Sion; le Fils fait venir ses disciples sur une nuée pour donner la sépulture à son corps vénéré. Des que la divine Mère les aperçut, elle comprit le motif pour lequel ils étaient tous venus; elle écouta les demandes de chacun d'eux, et les combla de bénédictions. » Nicéphore ajoute : Lorsqu'ils eurent reçu de la bouche de la Vierge des paroles consolantes, en particulier l'assurance qu'elle se sou-

1 S. Bern. ?er. 2fl in Cant. * Metaph. ©rat. rie Dormit Deip. 3 Ni- ceph. lili. 2 liist. c. 21.

« ciNSIIU.UA I H >.\ I.XII. 2 41

viendrait toujours d'eux auprès de son Fils, et après qu'elle leur eut promis d'être leur avocate et leur patronne et d'in- tercéder pour eux, ils se soumirent plus volontiers à la divine volonté. » <> pieuse Souveraine! et nous aussi nous sollicitons humblement votre bénédiction maternelle, surtout pour l'heure quittant cette vallée de larmes nous devrons entrer dans la longue éternité.

6. Quand David transportait de la maison d'Àbinadab en celle d'Obédédom l'arche de l'ancienne alliance qui jusque-là avait été sur la terre étrangère et la plupart du temps sous la tente, il réunit toute l'élite d'Israël, au nombre de trente mille hommes, pour assister à cette l'été solennelle au chant des cantiques accompagné de toutes sortes d'instruments. « Il s'en alla, ayant avec lui des principaux de la tribu de Juda, pour amener l'arche de Dieu qui porte le nom du Seigneur des armées, et au-dessus de laquelle il est assis sur les Chérubins. »

La Douloureuse Vierge Mère est l'arche animée de Dieu, habitant sur la terre étrangère, sous la tente, dans l'exil, les chagrins, les misères presque continuels. C'était l'heure où, le cours de sa sainte vie terminé, elle devait être transportée de la captivité d'ici-bas au royaume céleste; et voilà que 11011- seulementdes millions d'Auges, mais le Roi des rois lui-même daigne venir à sa rencontre. L'amour d'un tel Fils pour une telle Mère demandait qu'il n'abandonnât pas maintenant à L'heure de sa mort celle qui, vingt-deux ans auparavant, avait assisté si courageusement à son crucifiement et à sa mort. « Il vint donc, dit saint Anselme ', escorté de millions ou plutôt d'innombrables bataillons d'Anges, à la rencontre de sa M. iv très-pure quittant ce monde; la Bienheureuse Vierge Le reçut du visage le plus joyeux et avec une allégresse incom- parable; et comme la colombe ne cherchait pas d'autre repos contre les embûches de l'ennemi que d' habiter dans les eavités de la pierre et les ouvertures de la muraille, ainsi, colombe, mystique s'envolant de ce monde, dès qu'elle entend la voix

i s. anselm. de Excell. Vir. <•. 8.

Il Ifi

•24~2 LA MÈRE d'aMOIH ET DE DOILELK.

de son Bien-aimé lui dire : Ouvrez-moi, ma sœur, ma bien- <iu/tec, mu colombe, mon immaculée ; elle ne désire d'autre repos que d'habiter à jamais dans les cavités des douces plaies de son Bien-aimé et dans la caverne de son divin Cœur. Il est donc très-croyable, comme le disent Bruni et d'autres, qu'à la présence de son Fils la très-sainte Mère renouvelant en quelque sorte ses forces, se leva de son lit, et que, s'agenouillant et plaçant les bras sur sa poitrine, elle prononça pour dernières paroles : « Mon Fils, je remets mon âme entre vos mains », après lesquelles elle remit son àme très-pure aux mains ou plutôt dans le Cœur de son cher Fils, au milieu de la joie et des cantiques des Anges.

0 mort heureuse! ù sort fortuné ! S'il est dit : Bienheureux ceux qui meurent dans le Seigneur, combien l'est davantage la Mère du Seigneur qui a donné le jour à l'auteur de la vie! Ames malheureuses, désolées, accablées de mille chagrins, venez à la sainte Mère, votre avocate et votre patronne, venez et approchez de ce trône de la grâce avec une grande con- fiance, car aucun de ceux qui ont espéré en elle n'a été con- fondu; aucun de ceux' qui lui ont été dévoués n'en a été aban- donné dans le malheur et surtout à la mort. Si le démon vous dresse en secret des embûches, comme un lion retiré dans sa caverne pour ravir le pauvre, vous, enfants de Marie, ayez confiance en la protection de votre puissante Mère : elle a vaincu le monde, elle a brisé la tète au serpent infer- nal et dans sa nativité et à sa mort. Ecoutons Louis de Blois, le grand docteur de la théologie mystique ' : « La Vierge Marie ne méprise personne, ne se refuse à personne, elle ouvre à tous le sein de sa tendresse, et, si peu qu'on l'invoque, elle est prête à exaucer. » Et ailleurs : « Le ciel et la terre périront plutôt qu'elle abandonne celui qui l'implore sérieu- sement *. »

7. Venons maintenant aux funérailles qui lui furent faites. Joseph, vice-roi d'Egypte, ensevelit dans la terre de Chanaau,

'Lud. Bios, in canon, vitae. spirit. c. 18. * Id. in spec. spirit. c. 10.

CONSIDÉRATION UUI. 243

au milieu d'un grand deuil, le corps de sou père Jaeob après l'avoir r.iit embaumer ; sepl jours furent consacrés à cette lu- gubre cérémonie. Tout Israël pleura Moïse décédé dans 1»; pays de Ifoab, et leur deuil dura trente jours. Judith pendant

sept jours fut pleurée par sou peuple, la- vaillant et pieux Judas Hachabée, tué en combattant pour le salut de sa patrie, fut pleun- par ceux de sa nation. Saint Etienne ayant été la- pidé dans la première persécution contre l'Eglise, des hommes timorés prirent soin de sa sépulture et lui firent un grand deuil. Le prophète Zacharie avait dit d'avance de Jésus-Christ mort sur la croix : « Ils porteront leurs regards sur moi qu'ils auront crucifié; et ils me pleureront comme on pleure sur un premicr-né. »

Il n'en fut pas ainsi à la bienheureuse mort de la Vierge Marie: il n'en tut pas ainsi : On n'y entendit point de cris, de pleurs, de gémissements. « Les Anges, dit Sophrone, assis- taient à ses funérailles, formaient son cortège et félicitaient toute la cour céleste \ » Et saint Ildephonse "2 : « Je vis des- cendre du ciel la nouvelle Jérusalem qui venait de Dieu, pour emporter avec elle dans les sublimités de la gloire Marie Heine du monde. » Et saint Laurent Justinien, avec saint Inselme, sainl Antoine, saint Vincent Ferrier, le Bienheureux Pierre Damien et plusieurs autres, assurent que dans son bienheureux trépas, l'auguste Mère de Dieu fut honorée par tous les Anges et Les célestes esprits qui lui rendirent les plus humbles hommages : « Toute l'année des Anges, des Arcban- ges et des antres Vertus qui sont les ministres de Dieu, vint à sa rencontre : son corps virginal et sans vie était comme en- dormi; il y eut un joyeux concert, de douces louanges, une harmonie céleste, des réjouissances réciproques. » Oh ! quelle différence entre la mort et la destinée des justes et des im- pies : i. impie, dit le Sage, est repousse dans Ba méchanceté, mais le juste espère a sa mort. » Or, le Seigneur Jésus voulut rendre cel honneur a sa sainte Mère, parce qu'elle L'avait ac-

lirun. s. de Aasumpt. - s. Udeph. s. I. de \

244 LA MÈKK b AMOUR ET UE DOULECK.

compagne fidèlement à la croix. En effet, elle y éprouva vrai- ment les douleurs de la mort, par conséquent il était convena- ble que, victime d'amour, elle mourût sans aucune douleur, et qu'étant devenue la dernière des femmes, comme Jésus le dernier des hommes, elle fût maintenant établie par son Fils la première de tous les élus. « Elle s'était montrée la servante de tous, dit saint Bernard ', elle méritait de devenir la Souve- raine de tous.

8. Cependant les saints Apôtres se disposent à confier à la terre, avec tous les honneurs possibles, le saint et immaculé corps de la Vierge. Auprès du cercueil il était déposé, ac- courut, au témoignage de Nicéphore, une multitude innom- brable, et en le regardant seulement ou en le touchant, tous ceux qui étaient atteints de quelque maladie, étaient guéris sur-le-champ. On se range en procession solennelle avec des torches et des flambeaux, aux chants des hymnes et des cantiques, et les saints Apôtres prennent sur leurs épaules le corps sacré, et le portent au milieu de la ville de Jérusalem, dans le plus pompeux triomphe, au pied du mont des Olives, près du jardin de fîethsémani dans la vallée de Josaphat. « Mais voici un nouveau miracle, dit saint Mélite *, une bril- lante nuée en forme de couronne apparut sur le cercueil, comme on voit apparaître un grand cercle qui entoure la splendeur de la lune, et une troupe d'Anges dans les nuées faisait entendre les plus doux cantiques; en sorte que tout le peuple sortant de la ville disait avec admiration : Quelle est cette harmonie qui a tant de suavité?

Vous désirerez savoir, lecteur dévoué à Marie, pourquoi la sainte Mère de Dieu voulut avoir, dans la vallée de Josaphat entre le mont Sion et le mont des Olives, son tombeau, au- dessus duquel, comme nous l'apprend .lu vénal, évèque de Jé- rusalem, on entendit pendant plusieurs jours les concerts angéliqucs retentir dans les airs. C'est de là, Forère le pense, que vint l'usage du trentième jour après le décès, parce que

1 S. Bern. sign magn. - S. Melit. episc. b. dp Ass. R. v.

CONSIDÉRATION I.X1I. 24S

les fidèles après le passage de la Vierge employèrent ce nom- bre de jours a chanter les louanges divines auprès de son tombeau, usage qui du temps des Apôtres est venu jusqu'à nous. Jésus-Christ son Fils bien-aimé a choisi son sépulcre dans le jardin de Joseph d'Âiimathie : « <»r, il y avait, dans le lieu il fut crucifié, un jardin, et dans ce jardin un sé- pulcre tout neuf dans lequel personne encore n'avait été dé- posé; ils y placèrent Jésus. » Pourquoi Jésus fut-il enseveli dans ct> jardin et Marie dans la vallée de Josaphat?

Voici l'explication. Le premier Adam avait péché dans un jardin de délices ; le second Adam commença et finit sa passion dans un jardin. C'est dans un jardin que nous avons été perdus ; c'est dans un jardin que nous avons été régénérés. Dans un jardin la mort, dans un jardin la vie, afin que la vie reparût la d'où la mort s'était levée. Voilà pourquoi la Sagesse incarnée a choisi un jardin pour le lieu de sa sépulture. Mais la lîien- heureuse Vierge voulut être ensevelie dans la vallée de Josa- phat parce que avaient été enterrés les saints Pères, parce qu'elle était le lis des vallées, et surtout parce que c'est dans ce lieu que tout le genre humain, justes et pécheurs, seront rassemblés pour le jugement dernier, « afin que chacun re- çoive ce qui est aux bonnes ou aux mauvaises actions qu'il aura faites pendant qu'il était revêtu de son corps. » Elle choi- sit donc cette vallée pour sépulture pour montrer qu'elle était la Mère du genre humain, l'asile et le refuge des pécheurs. 0 vous tous qui êtes pécheurs, ayez confiance; elle reçoit les pé- cheurs.

CONSIDERATION IAIII.

La B. Vierge, non plus douloureuse, mais glorieuse, est élevée à la gloire céleste par son bien-aimé Fils.

l.\.\I\A ASCE\DIT.

Quelle est celle qui monte du désert comblée de délices, appuyée sur son bien-aimé? (Gant. 8. 5.)

1. Le Dieu béni dont les miséricordes sont sans nombre, la puissance et la grandeur sans limites, qui conserva Jouas d'une manière surnaturelle dans le ventre du poisson ; Daniel dans la fosse aux lions sans qu'il fût dévoré par ces animaux affamés ; les trois jeunes hommes dans la fournaise ardente même leurs vêtements demeurèrent intacts ; dont le bon plaisir et la volonté ne laissent pas périr un seul cheveu de la tète de ses saints : ce grand Dieu pour qui rien n'est impos- sible, n'aurait-il pas conservé sa sainte Mère exempte de toute corruption et dans son àme et dans son corps? Que les enne- mis de Marie gardent le silence! qu'ils se taisent, les malheu- reux! Qu'ils ferment la bouche, tous ceux qui parlent contre la sainte Mère de Dieu et refusent d'admettre son assomption corporelle dans les cieux! Si, d'après l'Evangile, « plusieurs corps des saints, qui étaient dans le sommeil de la mort, res- suscitèrent, et sortant de leurs tombeaux après la résurrection vinrent en la ville sainte et furent vus de plusieurs per- sonnes 1 ; » et si, comme l'attestent saint Jérôme - et d'autres saints Pères cités par Corneille, ils s'élevèrent au ciel avec leurs corps : pourquoi refuser cette grâce à la sainte Mère de Dieu

1 Matth. 27. 52. 2 Vide hic Cornel.'

CONSIDÉRATION I.XIII. :2'i7

qui fut pleine de grâces? Si, selon saint Augustin, la chair de t-Christ, dont Le prophète a dit : *< Vous ne laisserez pas votre Saint voir la corruption, » est lu chair de Marie, nous pouvons dire en toute justice : « Vous ne laisserez pas votre Sainte voir la corruption. »

L'autel que Dieu lit construire, d'après le Deutéronome, était eu pierres que le fer ne toucha point. Dans la construction du temple de Salomou, on n'entendit le bruit ni du marteau, ni de la hache; ni d'aucun instrument en fer. Le roi Salomon se fit construire un siège en bois incorruptible du Liban. L'arche de l'alliance du Seigneur était aussi en bois incorruptible, ornée au dedans et au dehors de l'or le plus pur. Dans la prise de Jéricho la seule maison de Hahab fut préservée de la dévasta- tion générale.

0 glorieuse Vierge! vous étiez figurée sous ces ombres de l'ancien Testament; il ne fut donc point convenable que votre corps immaculé fût soumis à la corruption du tombeau. Aussi est-ce une juste et pieuse croyance des fidèles que, le troisième jour après votre mort, votre Fils unique escorté d'innom- brables Anges, descendit des cieux, avec votre àme très-pure, au champ de Gethsémani dans la vallée de Josaphat était votre tombeau au pied du mont des Oliviers, et que, par sa divine vertu, il réunit votre àme innocente à votre corps virgi- nal. Oh! que ce fut une grande joie pour les Anges et les es- prits bienheureux, que dans un instant sa très-sainte àme ait été unie à son corps revêtu des quatre qualités glorieuses et resplendissant comme le soleil ! Entendons les paroles douces et pleines d'amour du Fils à sa Mère : « Levez-vous, mon amie, mon éclatante beauté, et venez : que votre voix se fasse en- tendre à mes oreilles, car votre voix est douce et votre visage est beau. Venez du Liban, venez, vous serez couronnée '. » Et la glorieuse Vierge : « Voici que je viens, ô mon Dieu, pour Caire votre volonté. » o L'immense, l'ineffable joie qui sur- passe tout Bentimentl Qui pourrait dire, qui pourrait l'airr

1 Gant. 2 et. et \. 8.

248 LA MÈHE D'AMOUR ET DU DOULEUR.

comprendre avec quelle douceur le Fils embrassa sa très-sainte Mère ! avec quelle bonté il la reçut, et au milieu de l'allégresse solennelle il l'éleva au céleste royaume !

2. Après que Judith, cette femme admirable et courageuse, pleine de sollicitude pour le salut du peuple d'Israël, eut exposé sa vie au péril de la mort pour sauver Béthulie, et tué le gé- néral Holopherne, ennemi acharné des Juifs, elle rentra en ville et vint rejoindre ses concitoyens, en criant de loin aux soldats de garde : « Ouvrez les portes, car Dieu est avec nous. » En la voyant apporter la tète d'Holopherne enveloppée dans un linge, le pontife Ozias et tout le peuple l'exaltèrent par les plus grandes louanges : « 0 fille, vous êtes bénie par le Sei- gneur, le Dieu Très- Haut, par-dessus toutes les femmes qui sont sur la terre. » Mais qu'ils étaient plus beaux les applaudisse- ments avec lesquels les célestes esprits et les élus recevaient leur Reine venant delà grande tribulation et entrant dans son palais victorieuse de l'ennemi du genre humain! « Quelle est celle-ci, s'écriaient-ils tous étonnés de la grandeur de la Vierge, quelle est celle-ci qui monte du désert, comblée de délices, appuyée sur son bien-aimé? »

Elie monta au ciel sur un char de feu : « Comme ils pour- suivaient leur chemin et s'entretenaient en marchant, un char de feu et des chevaux de feu les séparèrent l'un de l'autre : et Elie s'éleva au ciel dans le tourbillon '. » Jésus-Christ, Sauveur et Rédempteur du monde, s'éleva sur une nuée bril- lante : « Pendant qu'ils regardaient il s'éleva, et une nuée le déroba à leurs yeux. » Lazare fut porté dans le sein d'Abraham par le ministère des Anges. Mais la B. Vierge, Mère de la belle dilection, fut élevée au ciel empyrée appuyée sur son Fils pour montrer davantage sa majesté et la splendeur de sa ma- gnificence : Ascendit innixa super dilection suum. Voici sur ce sujet les paroles de saint Bernard - : « La très-heureiiM' Mère est appuyée sur le bien-aimé, et assise sur le siège de la divine Majesté, elle repose entre les bras de son Epoux

' IV Rpg. -2. H. * S. Rern. in Gant. 8. 5.

ONSIUÉII \ PIOH I.XI1I. -' 19

ou plutôt de son Fils. S'appuyer sur Celui que les puissances angéliqoes servent avec respect, quelle dignité! quelle gloire extraordinaire! Pour emblème nous nous représentons un oisean do paradis appuyé sur un autre, les deux s'envolanf ensemble dans le ciel avec la devise tirée des Cantiques : In- in in super dilectum; ou si vous préférez :

Elle imnitr appuyée.

:\. Je me rappelle l'opulente reine de Saba, dont parle le Livre des Hois, laquelle vint à Jérusalem, entourée d'un nom- breux et splendide cortège des grands de son royaume et de serviteurs, pour voir de près la sagesse de Salomon et établir dans l'Ethiopie son pays ce qu'elle aurait remarqué de bien dans le royaume de ce prince : « Elle entra dans Jérusalem avec une suite nombreuse et de grandes richesses, les cha- meaux portant des aromates, une grande quantité d'or et de pierres précieuses, et arriva auprès du roi Salomon '. »

Mais nous avons ici bien plus que Salomon et que la reine de Saba. Au milieu d'un noble cortège formé d'Anges et d'Ar- changes, la sainte Vierge appuyée sur son Fils fait son en- trée dans la céleste Jérusalem pour être inaugurée, reine de tout l'univers par la très-sainte Trinité. Ses richesses sont les dons célestes et les grâces dont elle a été comblée par Dieu trois en personnes et un en nature ; la grande quantité' d'or est l'immense charité qui lui fit aimer Dieu par-dessus toutes eboses, et son prochain comme elle-même pendant toute sa vie ; par les parfums odoriférants dont parle l'Ecriture : « Jamais on n'apporta des aromates si nombreux que ceux que la reine de Saba présenta au roi Salomon, » il faut en- tendre ses incomparables vertus dont l'agréable odeur attira Dieu en elle. La. *.$ pierres précieuses indiquent les prérogatives et les mérites qui lui donnent la prééminence sur tous les saints tt toutes les créatures. 0 pieuse Vierge ! dites-nous quelle fut

i III Retr. 10. !.

250 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

votre émotion à votre entrée dans le ciel des deux et à la pre- mière vision du souverain bien? Naguère océan de douleurs pendant la vie et les souffrances de Jésus; Mère diffamée d'un Fils chargé d'infamie mourant sur une croix; objet de mépris et de dérision pour les pontifes, le peuple et les bourreaux, et presque foulée sous les pieds sacrilèges de gens impies. Maintenant « les consolations ont rempli votre àme de joie à proportion des douleurs nombreuses qui avaient pénétré votre Cœur 1 ; » l'océan inépuisable de toutes les grâces, de toutes les félicités remplit votre àme ; l'auguste Trinité répand sur vous la plénitude de tous les biens et de toutes les grâces, a Qui peut imaginer, dit le doux abbé de Clairvaux *, de quelle gloire était revêtue la Reine du monde en nous pro- cédant en ce jour, et dans quels sentiments de dévotion toute la multitude des légions célestes s'avançait au- devant d'elle? Par quels cantiques elle fut conduite au trône de la gloire ? Les divins embrassements de son Fils la recevant et l'élevant au-dessus de toute créature, avec l'hon- neur dont une telle Mère riait digne, avec la gloire qui con- venait à un tel Fils? Qui racontera la génération de Jésus- Christ et l'assomption de Marie? » Àh ! ma Souveraine : obtenez une parcelle de la grâce efficace pour moi pauvre pé- cheur; vous aimez, ce n'est pas pour abandonner; vous êtes Mère, et vous ne sauriez oublier votre enfant tout indigne qu'il soit.

i. Auguste Fille de Sion, à quoi pourrai-je encore vous comparer? 0 clémente, ô pieuse, ô douce Vierge Marie, que dirai-je de plus à votre honneur? L'arche de Noé longtemps ballottée sur les flots du déluge, au décroissement des eaux s'arrêta sur les montagnes d'Arménie, le point le plus élevé de toutes les parties du monde : Requievtique super monte* Aiuwriiœ. 0 Vierge Bienheureuse et sans tache! l'arche de Noé vmis désignait; ballottée pendant soixante-douze ans sur la mer orageuse de ce monde, maintenant que les eaux de la

1 Ps. 93. 10. 2 S. Reru. serm. de Assompt. B. V.

I ONSID] l; ITION l.XIll. ^:i|

douleur, des tribulations et dos persécutions se sont retirées, vous vous reposez tranquillement sur les montagnes <T Armé- nie dans la céleste gloire, élevée au-dessus de tous les chœurs des Anges.

Alors fut vérifiée la parole que Dieu avait dite au premier Adam pour qu'il ne fût pas seul dans le paradis terrestre : Donnons-lui une aide qui lui soit semblable. Il convenait d'ad- joindre au second Adam Jésus-Christ, pour compagne dans le paradis céleste, sa sainte et innocente Mère qui régnât avec lui en corps et en âme, afin que corps et âme participassent aux mêmes joies du ciel comme ils avaient participé à toutes les douleurs pendant la vie. Et puisque le corps de la Vierge, comme l'affirme Le savant Suarez 1 a procuré le commence- ment du salut de l'homme en fournissant le sang par lequel furent formés le corps et le sang du Sauveur qui devinrent sur la croix le prix de notre salut, il suit de là, d'après le même Suarez, qu'il é&iit parfaitement conforme à la raison que ce corps de la Vierge eût part à la rédemption d'une manière spéciale et qu'elle s'élevât glorieuse dans le ciel en corps et en âme. Entendez saint Augustin : « Voici la promesse de Jésus- Christ : je suis, aussi sera mon ministre. Si telle est la décision générale pour tous ceux qui sont les ministres de Jésus-Christ par la foi et les bonnes œuvres, combien doit-elle être plus spécialement appliquée à Marie? En effet , tout homme raisonnable comprend que, par le fait qu'elle a enfanté, nourri, allaité, soigné, élevé Jésus-Christ, et de plus par la sin- cérité inébranlable de sa foi, Marie a été ministre de Jésus- Christ par-dessus tous les hommes. Si elle n'est pas de corps le Sauveur veut que ses ministres soient, sera-t-elle donc? Si elle y est, n'est-ce pas enrichie d'une [dus grande faveur que tous Lea autres ministres, par la résurrection an- ticipée de la chair? Car, si elle a seulement une faveur égale à «•elle .le-, ailliez .serviteurs de Jésus-Christ , es) la justice de Hieu qui donne a chacun selon ses mérites? Si La grâce a

' Saarez :t. p. tom. 2. «lise. 21. sec.t. ■_'.

2b'2 LA HÈRE D'AMOUR ET J»L" DOULEUR.

été donnée justement par-dessus tous à Marie pendant qu'elle vivait, lui sera-t-elle donc diminuée après sa mort? Non, non ; parce que si la mort de tous les saints est précieuse, plus pré- cieuse encore assurément est la mort de Marie environnée de si grandes grâces qu'elle est appelée Mère de Dieu et l'est réellement '. »

5. Que si nous voulons pousser plus loin, l'arche d'alliance du Seigneur ne ful-elle pas transférée, par le plus sage des rois, avec une pompe, une majesté, une solennité incroyable, en présence de tout le peuple, dans le temple le plus magni- fique et placée dans le sanctuaire? « Alors tous les anciens d'Israël s'assemblèrent, asec les princes des tribus et les chefs de familles des enfants d'Israël, auprès du roi Salomon à Jéru- salem, pour transporter l'arche de l'alliance du Seigneur 2. » Oh ! la sainte Mère, arche vivante de Dieu, fut transférée et introduite dans le sanctuaire du ciel, par Jésus-Christ le paci- fique et véritable Salomon, avec plus de solennité, d'applau- dissements, de pompe et de joie de la part de toute la cour céleste. « Levez les yeux, dit le B. Pierre Damien, vers l'as- somption de la Vierge, et sans blesser la majesté du Fils, vous trouverez l'entrée de sa Mère au ciel beaucoup plus digue (lue son ascension : les Anges seuls purent venir au-devant du Rédempteur, mais le Fils vint lui-même à la rencontre de sa Mère avec toute l'assemblée des Anges et des justes, et re- leva à la participation de son bienheureux repos '. » Et de même que Jésus-Christ dans son admirable ascension a mené une multitude de captifs en conduisant au ciel avec lui toutes les âmes des fidèles sorties des limbes, ainsi, dit le chancelier Ger- son, le purgatoire devint vide à l'assomption delaB. Vierge *. Quelle grande et douce allégresse pour toutes ces âmes !

Quant à nous, quelle joie, quelle consolation pouvons-nous retirer de la glorieuse assomption de la Vierge sacrée ? Le doux saint Bernard va nous l'apprendre : « Notre lieu de pè-

' s. Aug. lili. de Assumpt. Virg. tom. !». operum. - lit Reg. 8. I. ' B. Dam. serra, de Assumpt. l Gers tr. î saper Magnificat.

I 0NS1DJ HA llo.N I.XUI. ^o."{

Ifiiiia^e a envoyé aujourd'hui une avocate qui, en sa qualité .le Mère «lu Juge et de Mère de miséricorde, traitera hum- blement et avec efficacité les affaires de notre salut. » Aussi le prophète royal la vit, non pas assise à la droite de son Fils, mais debout : Astitit Rcyina a dextris tuis in vcstilu deaurato. Se tenir debout, c'est être prêta aider; on est assis pour juger, a La Vierge, dit Hugues de Saint-Victor ', est dite se tenir à la droite de son Fils pour nous insinuer son patronage et la protection qu'elle prend de nous devant le tribunal suprême de son Fils dans le ciel. »

L'invincible Josué qui fut aussi un pieux général, établit dans la terre promise, par l'ordre du Seigneur, en deçà et au delà du Jourdain pour servir d'asile, six villes de refuge dans lesquelles pouvaient demeurer en assurance les coupables poursuivis par la justice. Le vrai Josué, Jésus-Christ notre Dieu, a aussi préparé pour les pécheurs qui ont abandonné sa loi, s'ils veulent se repentir, six villes de refuge ils peu- vent se retirer toutes les fois qu'il y en a besoin : ce sont d'abord ses cinq plaies sacrées dans lesquelles, colombe gémissante, l'âme habite en pleine sécurité contre l'ennemi qui la poursuit : et le sixième lieu de refuge est la sainte Mère Douloureuse, exaltée dans les cieux au-dessus de toutes les créatures. Aussi est-elle appelée avec raison par saint Damase 2 la cité vivante du Roi des armées, et la cité de refuge. Et Louis de Hlois ' : « La Vierge Marie, dit-il, reçoit les pécheurs qui recourent à elle avec des sentiments de piété et d'humilité, les accueille, les protège et les réconcilie avec son Fils. » C'est votre faute, ô chrétien plongé dans la tiédeur, si vous n'avez pas recours à temps à cette eité de refuge ; vous faites injure à Dieu, si vous méprisez cette sainte Mère à laquelle s'est soumis le Fils de Dieu. « Si la miséricorde de Marie, dit saint llonaventure, a été grande envers les malheureux pendant qu'elle vivait dans

! HllgO a S. Vict. lib. i. de l.au-l. V.

1 Damas, de Dormit. V.

8 Lad. Bios, in connu, vite spirit. c. i*.

254 LA MÈRE p AMOUR ET DE DOULEUR.

l'exil de ce monde, sa miséricorde envers eux est bien plus grande encore maintenant qu'elle règne au plus haut des cieux ». »

6. Il a plu au Sauveur que sa sainte Mère, dont le corps sacré reçut la sépulture non dans l'endroit le plus profond de la vallée de Josaphat, mais au pied du mont Olivier près du jardin de Gethsémani, fût élevée à la gloire céleste, avec ce corps glo- rifié, au même endroit qu'il s'éleva lui-même triomphant. Pourquoi au pied du mont des Olives? Pourquoi pas sur la montagne du Thahor Jésus fut transfiguré? Pourquoi pas sur le mont Sion fut institué le sacrement de la sainte Eucharistie, dans le lieu qu'habita plusieurs années de son veuvage la divine Mère, recevant tous les jours la sainte com- munion? ou sur le mont Carmel apparut une toute petite nuée type de la Vierge?

Saint Cyrille de Jérusalem répond : « Jésus-Christ est monté aux cieux sur la montagne des Oliviers : commenta la grande lutte dans son agonie ; il fut couronné après tous les com- bats 2. » Il s'éleva en étendant ses bras en forme de croix pour nous montrer le chemin qu'il faut suivie : per cruccm ad lx- cem ; à A/ lumière par In croix. 11 lui a plu d'accomplir en ce lieu et seulement un peu plus bas l'assomption de sa sainte Mère* afin qu'après avoir été associée à toute sa passion, elle le fût à la consolation, au triomphe, à la gloire ; et que, comme, les souffrances de Jésus-Chris! avaient abondé en elle, de même en elle abondât par Jésus-Christ une consolation qui ne dût jamais finir. 0 heureuse croix qui avez élevé si haut le Fils de Dieu et sa très-sainte Mère ! « II s'est humilié jusqu'à la mort, la mort de la croix, et c'est pourquoi Dieu l'a exalte. » Et nous hommes de peu de foi, pourquoi craignons-nous encore la croix? Est-ce que Dieu nous montre une autre voie, pour aller au ciel, que celle de son bien-aimé Fils et de sa lloulou- reu seMère ?

1 In spec. c. s.

2 S. Cyrill. Hierosol. cathec. 14.

i ONSIDl H \ 1 1«»\ i.xin.

7. Il est dit, au premier livre des I \ < » i -; , « j n«> David livra aux Amalécites un eombat acharné qnî dura « !•• i » 1 1 i s le soir jusqu'au lendemain soir, et dans lequel, outre la victoire remportée, il reconvra toul le butin enlevé par Siceleg. <>r, une dispute étant survenue dans Le camp sur la manière dont seraient partagées ces riches dépouilles, David avec prudence décida qu'elles se- raienl divisées également entre ceux qui avaient pris part au combat el ceux qui étaient demeurés dans le camp pour garder les bagages.

Ame clin-tienne, rappelez à votre mémoire le conflit san- glant que Jésus-Christ fils de David livra dans sa passion, sur- tout du haut de sa Croix, avec le démon, le péché, le monde, la chair, les Juifs et les lientils; combat était présente sa sainte et Douloureuse Mère assistant à la lutte de son Fils : elle ne combattait pas elle-même, elle ne répandait pas son sang, elle -ardait pour ainsi dire les bagages. Le vaillant triompha- teur Jésus vainijs.it l'enfer et tous les ennemis par sa mort et sa résurrection; et, comme un glorieux vainqueur, il entra au ciel avec la dépouille arrachée aux limbes : Ascendens in altum captivam duxit captivilatem ; et il partagea également entre les Bienheureux la dépouille gagnée, la gloire essentielle du ciel. Mais, ô doux Jésus: est votre sainte Mère? Il convient de ne pas l'oublier et de partager avec elle à portion "'gale, car tous les tourments que vous avez endurés dans votre corps, elle les a ressentis dans sou âme. Et que dis-je? La mère partage r empire avec son Fils; el comme il est entré avec son corps et sou âme dans la gloire immense et sans fin, il a voulu que son excellente Mère fût élevée à la même gloire avec son corps et son àme. Ce fui l'accomplissement de ce que raconte l'Ecriture du pacifique Salomon : n Le roi se leva pour aller au-devant de sa mère, il la vénéra, s'assit sur son trône, et fit placer un trône pour la mère du roi qui s'assit à sa droite. » 0 Marie, puissante Reine des Cieux, que peut tain; autre chose votre indigne serviteur, sinon s'humilier profondément devant votre Majesté, convaincu de mes iniquités cl de mon néant. « 0 Mère de miséricorde, rassasiez-vous de la gloire de votre Fils,

25B LA MÈRE D AMOUR ET DK DOULEUR.

mais envoyez les restes à vos pauvres enfants. Vous êtes assise à la table du Seigneur, et nous sommes sous la table comme de petits chiens; abaissez vos regards sur nous afin que votre famille affamée reçoive de vous l'aliment de vie et qu'éternel- lement nous vivions avec vous l. »

1 Gufiric. abb. serm. 4. de Assumpt.

CONSIDÉRATION LXIV.

La B. Vierge, autrefoia douloureuse et maintenant glorieuse, reçoit au ciel, de la très-sainte triuité, une triple couronue.

tlHSl MMIIM.I'.iO.

Venez <lu Liban, mon Epouse, venez du Liban i rené, zvnus

serez couronnée. (Cant. 4. 8.)

I. Le grand saint Augustin formait trois vœux : Voir Jésus- l.hrist vivant dans sa chair, saint Paul prêchant, et Rome en un jour de triomphe. S'il est permis de comparer les petites cho- ses aux grandes, pour ma part je désirerais (qu'on me le laisse dire), contempler à travers les fentes des cieux un incompa- rable triomphe : la glorieuse Vierge, non plus Mère de douleur mais de la belle dilection, de la crainte, de la science et de l'espérance sainte, montant au ciel appuyée sur son bien-aime Fils entre des myriades d'Archanges et de célestes Esprits, puis couronnée d'une triple auréole par la très-sainte Trinité. Qui nous racontera combien ce spectacle fut majestueux? qui pourra le concevoir?

autrefois ' les puissants empereurs étaient ceints et ornes d'une triple couronne. J'en citerai un entre autres, Charles- Quint, l'Hercule invincible des Germains, qui, l'an de notre saint 1520, le -1W octobrl , fut couronné d'une couronne de fer i Aix-la-Chapelle, ensuite à Milan, d'une couronne d'argent, et enfin à Bologne en Italie, le 24 février l.'i.'U), par le pape Clé- iin-nt VU, d'une couronne d'or dans la magnifique église de Saint-Pétrone, au milieu d'une cérémonie solennelle.

1 Philipp. Cla?er <-i alti in rita Imp.

II. 17

258 LA MÈRE d'aMOUB ET DE DOULEUR.

Il y a plus de pompe dans l'exaltation et le couronnement de Marie, Mère de Dieu, autrefois douloureuse mais devenue glorieuse .En vivant parmi les mortels, elle avait observé exacte- ment le conseil de son Fils : Mettez-vous à la dernière place ; aussi voulut elle être nommée et regardée comme la dernière entre tous : a Ils persévéraient tous unanimement dans la prière avec les femmes et Marie, Mère de Jésus. » Elle mérita donc à juste titre d'entendre sou doux Fils lui dire : Montez- plus haut, montez au-dessus de tous les chœurs des Anges et des Bienheureux, comme la plus honorée de toutes les créatu- res. En effet, ils étaient tous des serviteurs et des sujets, mais elle est la Mère de Dieu et la Reine de tous, et le Fils lui a été soumis ; c'est pourquoi elle était digne de recevoir de son Fils un noble diadème, et même trois auréoles, trois couronnes : la couronne des Yierycs, parce que par un empire parfait sur la chair elle a surpassé de beaucoup toutes les vierges ; la cou- ronne des Docteurs, parce qu'elle était le Docteur des Docteurs, des Apôtres, des Evangélistes et de tous les chrétiens; et lu couronne des Martyrs, parce que, si vous avez égard à l'objet, elle a souffert plus qu'eux tous, pris même collectivement, et doit être justement appelée leur Reine.

2. (l'est à cela que faisait agréablement allusion l'Epoux candide et vermeil : « Venez du Liban, mon Epouse, venez du Liban ; vous serez couronnée ; venez du haut d'Amana, du sommet de Sanir et de celui d'Hermon, des retraites des lions, des montagnes des léopards. » Il est bien vrai, ô glorieuse Vierge, jusqu'à présent vous avez passé toute votre vie sur la terre au milieu d'ennemis et de persécuteurs, dans les antres des lions, sur les montagnes des léopards, Mère dif- famée d'un Fils diffamé auprès des Juifs, entourée de douleurs sans nombre ; car vous avez été sur la croix avec votre Fils depuis le moment vous l'avez conçu dans vos chastes en- trailles jusqu'à votre mort. « Comme un signe que crucifiée vous auriez à enfanter un crucifié, dit saint Bernardin de Sienne, la souveraine sagesse de Dieu a voulu que vous ayez conçu le Sauveur le même jour qu'il souffrit la mort. » Les deux fils

i 0N8IDÉR \ l ION I.X1V. 359

de Respha avant été mis en croix par les Gabaonites à cause d'âne faute qoi leur était étrangère et afin de servir d'expia- tion pour t«>ut le peuple dans la famine et la sécheresse, leur mère courageuse, prenant an cilice, ['étendit sur une pierre,

el demeura là, depuis le commencement de la moisson jus- qu'il ce que l'ean du ciel tombal sur eux; et elle empêcha les oiseaux de déchirer leurs corps pendant le jo,ur, et les hèles de les manger pendant la nuit. Plus ferme que Respha, la pieuse Vierge fut crucifiée toute sa vie avec son Fils, et fut par conséquent hien digne d'entendre la très-sainte Trinité lut dire Venez ; vous serez couronnée, non d'une seule mais d'une triple couronne ; c'est ce que signifie l'invitation amicale du divin Epoux trois fois répétée: Venez, venez, venez.

J'ai dit que les Empereurs étaient ceints d'une triple cou- ronne d'argent, de fer et d'or. La très-sainte Vierge est ceinte de la couronne d'argent dans les mystères joyeux, de la cou- ronne de fer dans les mystères douloureux, et de la couronne d'or dans les mystères glorieux. Lecteur dévoué à Marie, récitez avec soin votre rosaire, et vous aurez déposé sur la tète de la sainte Mère ce triple diadème. Entendons Corneille de la Pierre : « La II. Vierge a été appelée du Liban, d'Amana, d'Ilermonet de Sanir quand elle fut appelée de la Judée et de ce monde auprès de Jésus-Christ dans le ciel, et y fut cou- ronnée Heine du ciel et de la terre avec les trois couronnes de l'éminente virginité, du doctorat et du martyre : elle fut en effet la première des vierges, des docteurs et des martyrs : » Cette triple couronne, je vous la représente, ami de la Vierge Marie, dans l'emblème qui précède avec l'inscription :

La course achevée. Cursu completo.

« Otez les combats des martyrs, dit saint Amhroise, vous

/. enlevé leurs couronnes ; ôtez leurs tourments, vous

avez enlevé leurs béatitudes. Il a fallu de même que le Christ

souiiïit, ainsi que sa douloureuse Mère, de telle et telle ma-

nière, et qu'il n'entrât pas autrement dans sa gloire. El \ous,

^(30 LX MÈUE h AMOL'K El DE DOULEUR.

soldat plein do délicatesse, vous chercheriez une autre voie? « il y est parvenu par les tribulations, dit saint Chrysostome, et vous voulez y arriver par le repos ? Comment donc mar- cherez-vous après lui, en ne le suivant pas? » Comment, si vous ne combattez pas, seriez-vous couronné ?

3. La sainte Ecriture nous apprend qu'Esther, pour les belles qualités du corps et de l'esprit, sa modestie, la grâce et la sainteté de sa vie, surpassait toutes les femmes de son temps ; et c'est pourquoi Assuérus, puissant monarque des Perses, l'aima et la chérit plus que toutes les autres, la choi- sit, non-seulement pour épouse, mais pour reine, et lui mit de ses propres mains la couronne sur la tète : Et posait dia- defnaregni in capite ejus.

Voici une créature plus excellente qu'Esther. 0 pieuse Vierge ! vous êtes la femme toute belle, douée d'une incroya- ble beauté, gracieuse et aimable, que le Père éternel, a choisie pour fille, le Fils pour Mère et le Saint-Esprit pour Epouse. Vous avez donc reçu trois diadèmes: Le Père vous a couron- née de la couronne delà puissance; le Fils de la couronne de la science et de la sagesse, et l'Esprit saint de la couronne de la charité et de la piété. « La reine Es'her, dit saint Bonaven- ture ', est la B. Vierge Marie qui fut conduite, au jour de son assomption, clans la chambre du Roi, dans la chambre du repos éternel ; elle a les bonnes grâces du vrai Roi entre toutes les femmes, c'est-à-dire au-dessus de toutes les intelli- gences angéliques et de toutes les Ames bienheureuses, en sorte que les grâces de Marie l'emportent sur celles de tous les Bienheureux : en effet, le Roi des rois lui a mis sur la tète un diadème royal si inappréciable, si délectable, si admirable, qu'aucune langue ne peut le dépeindre, aucun esprit le con- cevoir. »

-i. Rappelons-nous la couronne que David reçut des grands, des princes et des gouverneurs des provinces de son royaume après la prise de Rabhath. Voici ce qu'en raconte l'Ecriture :

1 S Bonav. in Spec c. 7

CONSIDÉRATION LXIV. 2H|

David rassembla tout sou peuple et se dirigea vers Habbath, qu'il attaqua et prit. Il enleva de dessus la tête do roi le dia- dème qu'il portait, du poids d'un talent d'or, orné de pierres très-préeieuses, et il fut placé sur la sienne, etc.

Dirai-je L'inauguration, le sacre et le couronnement du plus sage des rois d'Israël ? « Le prêtre Sadoc tira du taber- nacle une liole d'huile et sacra Salomon ; on sonna des trom- pettes, et tout le peuple dit: Vive le roi Salomon. Et toute la multitude les suivit. Plusieurs jouaient de la flûte et don- naient toutes les marques d'une grande joie, et la terre reten- tissait de leurs acclamations. »

Parlant de Mardochée, l'Ecriture dit: « Sortant du palais et d'avec le roi, Mardochée parut dans un grand éclat, portant une robe royale de couleur d'haveinthe et de bleu céleste, ayant une couronne d'or sur la tète, et un manteau de soie et de pourpre. Toute la ville fut transportée de joie.»

L'arche de l'alliance du Seigneur, revêtue au dedans et au dehors de l'or le plus pur, fut aussi ornée d'une précieuse ronronne parBéséléel: KtfecitiUi coronam auream per gyrum.

Mais laissons de côtelés ombres. La IL Vierge Mère de Jésus ■tait l'arche animée, revêtue de l'or le plus pur de la charité, renfermant en elle la douce manne et le pain vivant qui des- cendit du ciel, après les labeurs et les peines de ce monde, qui furent si nombreux dans sa vie, la très sainte Trinité ré- solut de la couronner comme digne Reine du ciel et de la terre ; et de quelle couronne !

« Et sur su tète, dit le disciple aimé du Seigneur, une cou- ronne de douze étoiles ; pour signifier qu'elle mérite autant de couronnes que tous les prédestinés ensemble indiqués parles douze étoiles brillantes, o Bienheureuse Vierge! ô digne Mère de Dieu! ô notre pieuse Bière! que vous êtes mainfenaut diffé- rente de ce que vous ave/ été! Autrefois dans la croix, main- tenant dans la lumière; autrefois la dernière des femmes, maintenant la première; autrefois maudite avec votre Fils crucifié, mainfenaut bénie entre tous; autrefois mer de dou- leurs, maintenant océan de joies; autrefois plongée dans les

262 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

larmes, maintenant dans de divines délices. Combien vous avez surpassé toutes les créatures. Vous êtes ce signe prodigieux qui apparut dans les deux : la femme revêtue du soleil, et la lune sous les pieds. « Vous êtes une créature telle que Dieu n'en peut faire une plus grande, dit saint Bonaventure '. Dieu peut faire uu monde plus grand, un ciel plus grand; mais faire une mère plus grande que la Mère de Dieu, Dieu ne le peut. » 0 Souveraine ! il est enfin accompli votre oracle : « Toutes les nations m'appelleront Bienheureuse ; le Tout- Puissant a fait pour moi de grandes choses, et son nom est saint ; » car, ainsi couronnée par la très-sainte Trinité , vous avez reçu la domination sur toutes les créatures, et qui sert Jésus-Christ votre Fils est aussi votre serviteur : Servi tui su- 7nus; quœcumque jusseris, faciemus. 0 Souveraine de tout l'u- nivers ! Impératrice du ciel et de la terre! toute puissance vous a été donnée par votre Fils, et la vie et la mort sont en votre main. « Dites, je vous prie, que vous êtes notre sœur, afin que nous soyons bien traités à cause de vous, et que nous vivions par votre faveur. »

5. L'an de notre salut 1690, le 19 janvier, nous avons vu nous-mème à Augsbourg les applaudissements joyeux des Sirénissimes Electeurs , la pompe des Grands d'Allemagne, l'allégresse du peuple au couronnement de l'impératrice des Romains, Sa Majesté impériale et royale, Sérénissime Eléouore- Madeleine-Thérèse , auguste et digne épouse de Léopold Ier, empereur des Romains, toujours auguste. Quaud tout fut pré- paré, selon l'usage, pour rendre brillante cette grande solen- nité, et que le saint office eut été chanté jusqu'à l'Evangile inclusivement par le premier Eminentissime Electeur, L'Arche- vécue de Mayence, assisté du Sérénissime évèque de Cologne, de l'Eminentissime évèque de Trêves et de plusieurs autres Evêques et Prélats, le puissant empereur, le pieux et juste Léopold, se leva de son trône, portant sur sa tète uue cou- ronne d'un prix inestimable, tenant en sa droite le sceptre

1 S. Bonav. in Speculo B. V. c. 8.

I 0NS1DÉRATION I.XIV. 263

royal et conduisant par la main à l'autel la Sérénissime Heine Bon épouse pour être couronnée impératrice par L'Eminentis- sime Evêque de Mayence, prélat consécrateur assis sur son Irène et assisté des Evèques ci-devant nommés de Trêves et de Cologne. L'Empereur adressa ces paroles au Pontife eon- Bécrateur d'une voix haute et grave ' : Nous vous demandons, Très-Révérend-Père, que vous daigniez bénir et décorer de la couronne impériale notre compagne, l'épouse que Dieu nous a unie, et que vous le fassiez pour la louange et gloire de notre Sauveur Jésus-Christ. A ces mots le Prélat bénit la Reine en récitant les prières du Pontifical romain, et de la part du Dieu Tout-Puissant lui souhaita toutes les félicités et tous les biens ; ensuite il lui fit avec l'huile des catéchumènes une onc- tion au bras droit et une autre aux épaules ; puis, aidé des Eminentissimes Archevêques et Electeurs de Cologne et de Trêves, il lui mit sur la tète la couronne impériale, eu disant: « Recevez la couronne de gloire, afin que vous sachiez que vous êtes associée au gouvernement, que vous devez toujours prendre soin des intérêts du peuple de Dieu, et que plus vous êtes élevée plus vous devez aimer l'humilité en Jésus-Christ notre Seigneur. » Ce couronnement achevé, le pontife consé- crateur mit le sceptre dans la main de la Reine, en lui disant: (> Recevez le sceptre de la vertu et de la vérité et soyez pour les pauvres miséricordieuse et affable ; prenez grand soin des veuves, des pupilles et des orphelins, afin que le Dieu Tout- Puissant vous augmente sa grâce, lui qui vit et règne dans les siècles des siècles. » Toutes ces cérémonies accomplies avec la plus grande solennité, l'Impératrice en manteau d'or, fut conduite à son trône', pendant que l'on entendait de nouveau les applaudissements et les félicitations des grands et du peu- ple réunis dans la cathédrale : que la Sérénissime et Clémen- nssime impératrice vive de longues et heureuses années!

Ame chrétienne '■ '•levons-nous plus haut, et montons en •-.prit de l'Eglise militante à l'Eglise triomphante. Hue vois-je?

' Ei Rom. Pontificali.

264 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

Voilà qu'un trône est préparé pour la Mère du Roi. Quelle est cette Mère du Roi céleste ? Celle qui se tenait au pied de l'ignominieuse croix, et qui, durant les persécutions de la primitive Eglise, habita sur le mont Liban, c'est-à-dire à Jéru- salem sur la montagne de Sion, dans les retraites des lions, sur les montagnes des léopards au milieu d'ennemis cruels, jouet des pontifes, des bourreaux et du peuple; aujourd'hui, sous l'étendard triomphant de la croix , cette glorieuse Mère de Jésus est invitée à son couronnement par l'Esprit saint son Epoux et par toute la cour céleste: Venez du Liban, mon Epouse, venez du Liban, venez : vous se?'ez couronnée. Le pon- tife consécrateur est le Père éternel auquel le Fils assisté de l'Esprit saint, amène sa sainte Mère en la tenant par la main pour être couronnée et proclamée Reine et Impératrice des Anges et des hommes. « Révérendissime Père, nous sollifi- tons que vous daigniez bénir celle que vous nous avez donnée pour notre compagne et notre mère, et la décorer de la cou- ronne impériale et céleste, pour l'honneur etla gloire de votre très-saint nom. » Oh! qui nous dira avec quels sentiments affectueux la Bienheureuse et humble Vierge adora la sainte Trinité et lui rendit ses hommages ! Quelles actions de grâces elle lui rendit pour tous les dons qu'elle eu avait reçus, et quelle l'ut sa soumission parfaite à la volonté sainte des trois person- nes divines ! Je le crois, sa sainte àme fut alors toute liquéfiée par l'étendue de la suavité et de l'inestimable joie qu'elle éprouva. Qui comprendra la charité affectueuse avec laquelle le Père éternel la bénit? « 0 ma Fille, vous êtes bénie par le Seigneur, le Dieu Très-Haut, plus que toutes les femmes qui sont sur la terre. Béni soit le Seigneur, qui a créé le ciel et la terre, qui a conduit votre main pour trancher la tète au chef de nos ennemis. Il a rendu aujourd'hui votre nom si célèbre, que lesbommes, se souvenant éternellement de la puissance du Seigneur, ne cesseront jamais de vous louer, parce que vous n'avez pas craint d'exposer votre vie, en voyant l'extrême affliction votre peuple était réduit ; mais vous vous êtes pré- sentée devant Dieu pour empêcher sa ruine. » Quand Ozias,

I ONSIDÉB \ 1 1< > n i.\i\ . 263

prince du peuple d'Israël, eut autrefois dit ces paroles à la glo- rieuse Judith rentrant victorieuse, tout le peuple éleva la voix et répondil : Ainsi soit-il, ainsi soit-il; Fiat, fiât. Je crois et me persuade fermement que toute la cour [céleste répondit aussi par cette acclamation en l'honneur de son Auguste Im- pératrice : Fiat, fiât. Alors tous adorant le Seigneur, dirent à Marie: Le Seigneur vous a bénie; il vous a .soutenue de sa force; et il a renversé par vous tous nos ennemis. Alors, comme l'atteste le Prophète royal, le Père céleste lui fit l'onc- tion de L'huile sainte : « Vous avez chéri la justice et haï l'ini- quité, c'est pourquoi votre Dieu vous a oint d'une huile de joie, d'une manière plus excellente que tous ceux qui ont part à votre gloire. » Et il lui mit sur la tète le diadème royal: Et pusuit diadema regni in capite cjus. Et il lui présenta eu main le sceptre de la puissance : « Recevez le sceptre de la vertu et de la vérité, et soyez pour les pauvres alfable et miséricor- diense, ayez grand soin des veuves, des pupilles et des orphe- lins. » Enfin, revêtue d'un manteau d'or orné richement, elle l'ut placée sur un troue pour être la Reine de l'univers : Posi- ton est tronus Matri Régis, quae sedit ad dexteram cjus. 0 ten- dre Souveraine ! A tous les applaudissements des célestes es- prits et des habitants joyeux delà sainte cité, nous joignons nos félicitations les plus sincères, nous, vos pauvres serviteurs et sujets. Vraiment, o Souveraine, vous avez choisi la meil- leure part qui ne vous sera jamais ôtée. Souvenez-vous, je vous prie, que vous avez été élevée à une si haute dignité a cause de nous. Secourez donc les malheureux , aidez le - faibles.

ti. (Juand une Reine est couronnée et placée sur le troue royal, grands, nobles, sujets et vassaux viennent lui rendre nommage et promettre fidélité. Oh! si vous eussiez vu, mon esprit, tous les chœurs des Anges el les ordres des Bienheu- reux, faire leur .soumission, rendre le cuite d'byperdulie àleur puissante Reine et lui promettre fidélité I Les vingt-quatre vieil- lards de L'Apocalypse n'étaient pas les derniers, et, avec une affectueuse soumission, « ils déposaient leurs couronnes

266 LA .MÈRE d'âMOUB ET DE DOULEUR.

devant le trône. » Par ce trône, Pierre de Cluni 1 entend la très-sainte Mère de Dieu qu'il appelle trône de toute Déité; et saint Bonaventure la nomme « Trône de la (/race de Dieu. » Le V. P. Antoine Spmelli 2 dit la même chose : « Comme ces vieillards en ont reçu tant de bienfaits qui les rendirent vain- queurs, ils apparaissent maintenant couronnés; c'est pourquoi, pénétrés de vénération, ils ne félicitent pas seulement la Vierge de sa gloire et de son bonheur, mais proslernés devant elle ils l'honorent comme Dieu le veut, lui rendent des actions de grâces immortelles et lui font hommage de leurs triomphes; c'est ce qu'ils avouent et professent en déposant leurs couron- nes devant Dieu et devant le trône, c'est-à-dire devant la Vierge. »

Et nous, serviteurs de Marie, que faisons-nous au milieu de la commune joie des habitants descieuxqui félicitent et applau- dissent leur Sérénissime Reine couronnée par la très-sainte Trinité? Les louanges, les cris d'allégresse retentissent dans les rues et les places de la sainte cité formée de l'or le plus pur et de pierres précieuses ; tout proclame les louanges de Marie : « Rejouissons-nous, tressaillons d'allégresse et rendons gloire à Dieu, etc. » Et nous, que faisons-nous? « Adam et Eve nos premiers parents, dit saint Jean Damascène 3, s'écrient joyeusement : 0 notre fille, vous êtes bienheureuse de nous avoir délivrés des peines que méritait notre désobéissance. Avec le corps mortel que vous tenez de nous, vous nous ave/ produit un vêtement d'immortalité. Née de notre race, vous nous avez donné la béatitude, effacé nos douleurs, brisé les liens de la mort. Vous nous avez rappelés à notre ancienne place en nous remettant dans l'état d'où nous étions déchus. Nous avions fermé le paradis; voua avez ouvert le chemin pour aller à l'arbre de vie. De joyeuses les choses étaient devenues tristes par notre faute; et par vous, de tristes elles sont rede- venues plus joyeuses qu'auparavant. Vous êtes la fontaine de

1 Petr. cluuiac. lib. .S. ep. I. Ant. Spinelli S. J. in Tron. Deip. c. )7. fol. '210. B S. Juan. Damasc. de Dormit. Virtf. mat. 2.

ONSIDl R \M<>\ i.xiv. i(J7

vie, et L'échelle du ciel; vous êtes vraiment heureuse par-des- bus toutes Les femmes, et tout à fait bienheureuse. » Et nous, que faisons-nous? a Ses enfants, c'est-à-dire tous les saints qui sont les enfants de Marie, se sont levés et font proclamée

Bienheureuse. » Et nous, que faisons-nous? 0 Souveraine de tout L'univers ! <v> Sérénissime Reine! nous vous félicitons tous ensemble, quoique pauvres, exilés de la patrie, accablés de mille misères. Vous êtes notre Mère, et après Dieu, l'unique espérance de notre salut. 0 Souveraine! tournez vers nous vos yeux compatissants et maternels, et, au sortir de la vallée des larmes, montrez-nous Jésus le fruit béni de votre sein.

CONSIDERATION LXV.

Du culte que nous devons ù la grande et auguste Mère de Dieu. et de sa paissante protection dans le ciel.

(Il IIOVOHEM. ItOAOltl \l.

( elui qui honore sa mère est semblable à un homme qui

amasse an trésor. (Ëccli. 3. 5.)

1 . De même que Ion voit les chiens aboyer après l'astre de la nuit, ainsi les hérétiques déblatèrent contre Marie que l'E- criture appelle pulchra ut luna, belle comme la lune. J'en ai connu un qui dans un discours public comparait la très-pré- cieuse Mère de Dieu a une bourse : quand elle est pleine d'or, disait-il, elle est en honneur, mais quand elle est vide on la méprise. Ainsi, ajoutait cet ennemi de la Vierge, doit être honorée Marie : quand elle portait le Verbe en sou sein, elle méritait les honneurs et les respects des Anges et des hommes comme Mère de Dieu. Depuis qu'elle a donné le Sauveur au monde, on ne doit plus s'en occuper. Dites-moi, malheureux : si la bourse dont vous parlez était tissue de perles rares et de pierres précieuses, la rejetteriez- vous? Or, quoi de plus pré- cieux que la Mère de Dieu, choisie par celui qui est la spleu- deur, et saluée respectueusement par un Auge en ces termes : Je vous salue, à pleine de grâce, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre toutes les femmes? Pourquoi méprisez-vous celle que l'Ange exalte si liant? Ou'avez-vous à reprochera « la Mère de la belle dilection, de la crainte, de la science et de l'espérance sainte? Si Jésus-Christ, comme nous l'apprend l'Evangile, «lui était soumis, » pourquoi \«»ns, impie, venez-

I oVMhl II A I l«>.\ l.\\ . £69

vous aboyer contre elle? Lorsque Jésus-Christ vivait parmi les

hommes n'a-t-il pas observé exactement le décalogue? Il a ilonc accompli à la lettre le quatrième commandement; il a honoré Ba Mère. Et quand le Fils de Dion l'a lui-même tant honorée »'t aimée, vous lui refusez toute espèce d'honneur! Pour, entrer dans noire sujet représentons-nous pour emblème l'arche de Dieu type jie la Vierge), en présence de laquelle l'immonde Dagon, renversé de son trône, tomhe à terre, et donnons-lui la devise tirée de L'apôtre saint Paul :

[.'honneur à qui est C honneur '.

oui. « à qui la crainte, la crainte; à qui l'honneur, L'hon- neur, i La Vérité a dit : « Si quelqu'un me sert, mon Père l'honorera *. d Or, qui a plus servi Jésus-Christ que sa très- sainte Mère qui ne le quitta pas même à la croix? Sa fidélité lui mérita d'être designée, par son Fils mourant, Mère de tous les chrétiens, en vertu des paroles dites à saint Jean qui ré- présentait alors toute l'Eglise : Voilà votre Mère. L'entendez- vous, fier hérétique? Si vous ne voulez pas reconnaître Marie pour Mère, vous n'aurez point Jésus-Christ pour Père, car qui méprise la Mère, méprise le Fils : « Ecoutez, mon enfant, le conseil de votre Père, et n'ahandounez pas la loi de votre Mère 3. »

■2. Salomon, le plus sage des rois, se leva pour aller à la rencontre de Bethsabée sa mère, en signe de respect, et s'in- clina devant elle. Comhien plus Jésus-Christ honore dans le ciel sa digne Mère? « Celui qui a dit : Honorez votre père et votre mère, a rendu toute grâce et tout honneur à sa mère pour observer lui-même son commandement. » Ainsi parle llippolyte *. Et vous hérétique et tiède chrétien, quel honneur rendez-vous à la très-sainte Mère de Dieu?

Quand le général Holopherne assiégeait Béthulie, il essaya

1 Rom. 13. :. - - In.m. II. •_>»;. ' Pro*. l. 8. * Orat. de sanctifi- es tione.

270 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

de détourner les eaux pour prendre les Juifs par la soif : « En faisant le tour de la montagne il trouva que la fontaine dont les eaux coulaient dans la ville, avait du côté du nord un aqueduc qui était hors des murailles; et il commanda qu'on coupât l'aqueduc 1 . »

Tel est le stratagème du démon ; il coupe l'aqueduc en dé- tournant le chrétien du culte, de l'amour et de l'estime en- vers l'auguste Mère de Dieu. Elle dit elle-même par la houche de l'Ecclésiastique : « Je suis sortie du paradis comme un aqueduc; j'ai dit : j'arroserai mon jardin J. » Sur ce texte Corneille s'exprime ainsi : « La B. Yierge, comme un aque- duc, a reçu la sagesse divine, la personne même du Verbe, pour l'enfanter et la répandre parmi les hommes. » L'ennemi rusé du genre humain s'efforce d'obstruer ce mystique aque- duc pour l'âme fidèle afin de la réduire sous sa puissance, car le signe le plus probable de réprobation éternelle, est d'être lâche et négligent dans le culte, l'amour et la vénération pour la Mère de Dieu, tandis que la dévotion à Marie est un signe de la divine prédestination. Cher lecteur, sondez votre cœur et voyez s'il est vraiment et sincèrement dévoué à la très- sainte Mère. Si cela est, que vous êtes heureux ! vous possé- dez le signe de votre future prédestination, et aux derniers jours vous trouverez le repos.

3. Il me souvient de la maison d'Obédédom merveilleuse- ment bénie par le Seigneur, parce que l'Arche de Dieu y avait été déposée pendant trois mois : Et benedixit DoniinusObede- dom et omnein domum cjus. Bénie est la maison, bénie est la famille, bénie est la personne habite l'arche mystique du Seigneur, je veux dire se trouvent la piété et la dévotion envers Marie, la très-sainte Mère de Dieu ; elle sera remplie de l'abondance de tous les biens du ciel, car la Yierge aime cvus. qui l'aiment. Dieu, dit saint Bernard, a mis en Marie la pléni- tude de tout bien, afin que ce qu'il y a en nous d'espérance, de grâce, de salut, nous sachions qu'il vient d'elle 3.

1 Judith. 7. r,. « Eccli. 24. 41. 3 S. Bern. ser. de Nativ. B. V.

CONSIDÉRATION l.XV. '21 \

Quand le grand patriarche Jacob vit l'échelle merveilleuse atteignant de la terre au ciel, les Anges descendant et mon- tant, et le Seigneur du ciel et de la terre appuyé sur l'échelle, il B'écria étonné : Vraiment, ce n'est pas autre chose ici que la maison de Dieu et la porte du ciel ! 0 Bienheureuse, dit à ce sujet André de Crète, vous êtes la porte du ciel dont Jacob disait : Que ce lieu est terrible et saint! c'est la maison de Dieu et la porte du ciel '. » Et saint Augustin parlant en la personne de la Vierge : Je suis devenue la porte du ciel, je suis devenue la porte pour le Fils de Dieu. Voilà pourquoi l'Eglise la salin' : « Auguste Mère du Rédempteur, qui demeu- re* la porte ouverte du ciel. » Mortels, que faites-vous tous? La porte du ciel vous est ouverte, pourquoi n'entrez-vous poinl par elle? Vous avez l'échelle de Jacob par laquelle vous pouvez atteindre jusqu'au ciel, et arriver en présence du Très-Haut. « Marie, dit saintFulgence, est devenue l'échelle céleste, parce que '.>ieu est descendu par elle sur la terre, afin que par elle les hommes méritent de s'élever aux cieux 2. »

4. L'Ecriture nous apprend que le roi Salomou se fit faire un trône de l'ivoire le plus blanc, et de l'or le plus pur; puis elle ajoute : « On ne fit jamais un pareil ouvrage dans tous les royaumes. Le docteur Séraphique fait celte réflexion : Le trône de Salomou, c'est Marie tout à fait merveilleuse en grâces et en gloire '. » Heureux ceux qui plaident leurs causes devant ce trône de grâces, car dans aucun royaume il n'existe un pareil ouvrage. Ezéehiel vit un trône construit de pierres précieuses de saphir, et un homme assis dessus, environné de feu t:t d'une merveilleuse splendeur. Le saphir, selon Pline, est île couleur bleue céleste, constellé de points d'or. « 0 II. Vierge, dit saint Bonaventure \ vous êtes le trône de saphir élevé sur le firmament angélique. » L'homme qui y est assis, environné d'une grande splendeur, désigne Jésus-Christ qui demeura neuf mois assis sur ce précieux trône et que les

Amlr. Creten*. orat. '2. -s. Pulg. de Laudibus Virgin, 3S.Hou. in Sjipr. iî. V. c. J. ' lu spec. '■ H.

270

LA MERE D AMOUR ET D 1h >['LEUR.

de détourner les eaux pour prendre 1 Juifs par la soif : « En faisant le tour de la montagne il trova que la fontaine dont les eaux coulaient dans la ville, a^it du côté du nord un aqueduc qui était hors des muraille: et il commanda qu'on coupât l'aqueduc 1 . »

Tel est le stratagème du démon ; i coupe l'aqueduc en dé- tournant le chrétien du culte, de 1' nour et de l'estime en- vers l'auguste Mère de Dieu. Elle dit Ile-même par la bouche de l'Ecclésiastique : « Je suis sortit du paradis comme un aqueduc; j'ai dit : j'arroserai monardin \ » Sur ce texte Corneille s'exprime ainsi : « La B. erge, comme un aque- duc, a i eu la sagesse divine, la pe>onne même du Verbe, pour l'enfanter et la répandre parmi s hommes. » L'ennemi rusé du genre humain s'efforce d'obs-uer ce mystique aque- duc pour l'âme fidèle afin de la réduii soi s sa puissance, car le signe le plus probable de réprobaon éternelle, est d'être lâche et négligent clans le culte, l'amar et la vénération pour la Mère de Dieu, tandis que la dévotin à Marie est un signe de la divine prédestination. Cher leceur, sondez votre cœur et voyez s'il est vraiment et sincèrment dévoué à la très- sainte Mère. Si cela est, que voua èU heureux ! vous possé- dez 1 signe de votre future

jours vou trouverez le repos.

3. Il me souvient de la, ment bénie par le Seign< été déposée pendant tre dom et omnem domm famille, bénie esi^ Seigneur, je vei envers Marie, lj l'abondance di qui l'aiment, tude de t( de grâce

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DEKATION LXV.

271

Quand le grand h ?he Jacob vit l'échelle merveilleuse atteignant de la tern h ciel, les Anges descendant et mon- tant, et le Seigneur « 3l et de la terre appuyé sur l'échelle, il s'écria étonné : V 1 it, ce n'est pas autre chose ici que la maison de Dieu el rte du ciel ! « 0 Bienheureuse, dit à ce sujet André de Crè vous êtes la porte du ciel dont Jacob disait : Que ce lieu 1 t rrible et saint! c'est la maison de Dieu et la porte du c 3I . » Et saint Augustin parlant en la personne de la Vierg i te suis devenue la porte du ciel, je suis devenue la por pur le Fils de Dieu. Voilà pourquoi l'Eglise la salue : « Aug te Mère du Rédempteur, qui demeu- rez la porte ouverte 1 l el. » Mortels, que faites-vous tous? La porte du ciel vous st ouverte, pourquoi n'entrez-vous point par elle? Vou rez l'échelle de Jacob par laquelle vous pouvez atteind squ'au ciel, et arriver en présence du Très-Haut. «Marie saintFulg ace, est devenue l'échelle céleste, parce que Dieu 1 . t descendu par elle sur la terre, alin que par elle les hommes néritent de s'élever aux cieux 2. »

4. L'Ecriture noiu q rend que le roi Salomon se fit faire un trône de l'ivoire le ris blanc, et de l'or le plus pur; puis elle ajoute : « On ne ii ïamais un pareil ouvrage dans tous les royaumes. » Le »« ur Séraphique fait cette réflexion : t Le trône de Saiom > 1, est Marie tout à fait merveilleuse en grâces et en gloire '.1 ureux ceux qui plaident leurs causes devaat ce trône de gv; r dans aucun royaume il n'existe

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1~1 LA HÈRE d' AMOUR ET DE DOULEUR.

Mages trouvèrent siégeant sur les genoux de sa Mère : « Les Mages, dit saint Jean Chrysostome, trouvèrent l'Enfant avec Marie qui le plaça sur ses genoux ; » ce qui fait dire à saint Ephrem parlant à Marie : « Je vous salue, trône glorieux de mon Créateur; » et à saint Epiphane : « Je dis qu'elle a été un ciel, un trône et une croix, car en étendant les bras elle a porté le Seigneur : trône de chérubin, trône en forme de croix, trône céleste. »

Isaïe le prince des prophètes vit un jour le Seigneur sur un trône élevé, et devant le trône de Dieu des Séraphins debout, qui de deux ailes voilaient sa face, et de deux ailes ses pieds. Yatable et d'autres lisent : de deux ailes ils voilaient leurs faces, et de deux ailes ils voilaient leurs pieds. Pourquoi cela? C'est un grand mystère. Ils cachaient leurs faces, comme l'expose élégamment saint Chrysostome, en signe de respect, n'osant pas porter leurs regards vers le Seigneur et son trône ; et ils cachaient aussi leurs pieds par respect, parce que, à la vue d'une si grande dignité, leurs yeux avaient vu l'imperfec- tion dont les pieds sont le symbole. Par le trône, saint Da- mascène comprend la très-sainte Mère : « Vous êtes ce trône royal, devant lequel assistaient les Anges, considérant leur Maître et Créateur qui y était assis4 . »

De tout ce que je viens de dire vous conclurez facilement le culte et la vénération, l'amour et le respect que les fidèles doivent à la très-sainte Vierge. Les saints Pères rappellent culte d'hyperdulic. Certainement les Anges n'osent passer de- vant le trône de leur Sérénissime Reine, sans saluer, fùt-il vide, et ils n'y passent qu'en inclinant la tète devant elle et en flé- chissant le genou. Et nous, chrétiens tièdes et négligents, est l'honneur et l'amour que nous rendons à la grande Reine du ciel et de la terre, à l'auguste impératrice des Anges et des hommes? Elle est la très-digne Mère de Dieu, que voulez-vous de plus? Après Dieu, peut-il y avoir rien de plus excellent et de plus sublime? «Proclamer, dit saint Anselme, que la sainte

1 S. Dam. orat. 2. de Dormit* V.

CONSIDÉRATION I.XV. 273

Vierge est Mire de Dieu, surpasse toute élévation qui puisse être dite ou imaginée après Dieu '. » Bienheureux les servi- teurs tt enfants de Marie qui honorent, aiment et vénèrent di- gnement leur pieuse Mère! « Qui l'honore dignement, sera justifié; qui néglige de l'honorer, mourra dans ses péchés. » Ce sont les paroles de saint Bonaventure 2. Hérétique, les en- tendez-vous?

5. Les interprètes des saintes Ecritures examinent si Oza, Béli et ses deux fils Ophni et Phinéès sont damnés. Le second Livre des Rois raconte qu'Oza ayant voulu soutenir l'arche qui chancelait, en fut puni par une mort subite. « Le Seigneur fut irrité contre Oza, et le frappa à cause de sa témérité : il mourut auprès de l'arche de Dieu s. » Le texte sacré rapporte que le prêtre Béli, en apprenant la prise de l'arche de Dieu par les Philistins, tomba en défaillance de douleur et de crainte, se renversa de son siège, se brisa la tète et expira. Quant à Ophni i-t Phinéès, qui étaient partis avec l'arche de Dieu pour aller combattre les Philistins, le même livre des Rois ajoute : « il y eut un grand carnage, trente mille hommes furent tués du côté d'Israël, et les deux fils d'Héli, Ophni et Phinéès res- tèrent parmi les morts. » On demande, ai-jc dit, s'ils sont éternellement damnés.

Angelome, Abulensis, Denis et plusieurs autres, pensent qu'Oza ne fut puni que par la mort temporelle et qu'il ne subit pas de peine éternelle, et qu'Héli ne fut puni de Dieu si sévè- rement en cette vie que pour être épargné dans l'autre. Ils pensenl des deux fils d'Héli que, bien qu'ils aient péché dans L'exercice de leur ministère, ils n'ont pas été rejetés de Dieu pour toujours, parce que, comme l'observe fort bien Justin liiéchoviensis 4 et d'autres, ils étaient occupés pendant leur vie du soin et de l'honneur dus à l'arche d'alliance ; or, l'arche était la figure de la B. Vierge Marie Mère de Dieu. « Marie, dit saint Udephonse, est nommée l'arche du nouveau Testament,

« S. Anselm. lib. de Excell. Virg. c. 2.— * In Ps. Virg. 3 II Ite«. 6. 7. * Justin. Miechov. in Litan. B. V.

11. 18

274 LA MÈRE d' AMOUR ET DE DOULEUR.

dans laquelle s'est montré le vrai Dieu, non pas en figure et en énigme, mais en réalité \ »

L'arche était pour le peuple d'Israël, l'asile de tous, et l'u- nique refuge dans toutes les afflictions : « L'arche, dit saint Athanase *, était pour eux un secours suffisant dans tout combat. » Marie, l'arche vivante, est une protection bien plus puissante pour ses fidèles et dévoués serviteurs. « Vous êtes un homme digne de mort, disait Salomon à Abiathar, mais aujourd'hui je ne vous ferai point mourir, parce que vous avez porté l'arche du Seigneur. » Vous aurez la même chance, ô mon âme, vous ne mourrez pas, vous ne serez pas réprouvée, vous ne subirez pas l'éternelle damnation, si vous honorez dé- votement Marie, arche mystique. Ecoutez-la parlant à sainte Brigitte : « Il n'est personne, si froid qu'il ait été dans l'amour de Dieu pendant sa vie, dont le démon ne se retire à l'instant, s'il invoque mon nom avec le ferme propos de faire péni- tence. »

6. Ce figuier infructueux depuis plusieurs années, quand le Sauveur eut dit de le couper et de le jeter au feu, trouva quelqu'un pour le protéger : « Seigneur, laissez-le encore une année. » Voilà votre situation, ô mon âme; si vous n'avez pas été coupée comme un arbre stérile, et livrée au feu de l'enfer, rendez-en grâces à la B. Vierge. Mère compatissante, elle a con- servé son enfant prodigue, parce que peut-être vous lui avez adressé quelques prières. « Elle est, dit Césaire, la conserva- trice de l'univers, la consolatrice des affligés, la défense fidèle de ses serviteurs; par elle les pécheurs sont éclairés et ceux qui désespéraient avouent leurs fautes 3. »

Ezéchiel se plaignait qu'il n'y eût pas un homme pour s'in- terposer auprès de Dieu en faveur de la terre, et le supplier de ne point la perdre. Rendons au Dieu tout-puissant des louanges infinies ; nous avons au ciel une femme qui se présente à Jésus- Christ notre Dieu et notre juge pour plaider notre cause. 0

1 S. Ildeph. s. de Assumpt. B. V. * S. Athanas. lib. de Interpret. Ps. s Cesariuslib. 7 Mirac. c. I.

CONSIDÉRATION I.XV. J7."i

Vierge sacrée! vous êtes la femme forte qui liez les mains au Tout-Puissant pour l'empêcher de nous punir selon nos fautes. Le prophète Isaie disait avec gémissements : « Il n'est personne qui se lève pour vous retenir '. » Mais saint Ronaventure s'é- crie : « 0 Bienheureuse Vierge, vous retenez votre Fils de peur qu'il ne frappe les pécheurs 2. » Rébecca s'interposa entre Isaac et Jacob, la Thécuite entre David et Ahsalon, Esthcr entre Assuérns et Mardochée, Abigaïl entre David et Nabal : pour vous, ô sainte et douce Vierge, vous êtes devenue média- trice entre Dieu et l'homme, entre Jésus-Christ Juge et le pé- cheur ; aussi concluons-nous avec raison en disant comme les Egyptiens pressés par la famine à Joseph : « \otre salut est dans votre main. » « Oui, dit Richard de Saint-Laurent, notre salut est dans la main de Marie 3. »

7. Et qu'y a-t-il que nous ne puissions espérer de la Vierge sainte ? Elle nous aime parce qu'elle est Mère de Jésus ; or Jésus est notre frère, donc elle est aussi notre Mère; elle est nos os et notre chair, tirant comme nous son origine des pre- miers parents du genre humain, a Je sais, ô Souveraine, dit le IL Pierre Damien, que vous êtes très-bonne et nous aimez d'un amour invincible, nous que Dieu votre Fils a aimés en vous et par vous avec une tendresse souveraine *. » Si la sage Esther a aimé son peuple et sa race au point d'entrer chez le roi Assuérns sans être appelée, exposant sa vie pour sauver sa na- tion et la délivrer de la mort : « Donnez-moi la vie que je sol- licite, et celle de mon peuple pour lequel je vous supplie; » »>li : que la précieuse Vierge nous a plus aimés sur la terre, et qu'elle nous aime davantage dans le ciel, en pensant combien elle nous est liée. Ainsi, elle ne cesse de supplier son béni Fils d'avoir égard à nos misères. Nous pouvons donc lui faire justement la prière que, dans leurs malheurs, les habitants de Béthulie adressaient à Judith : « Priez pour nous, parce

1 Isa. C>4. 7. * S. Ronav. opusc. de spe. R. V. 3 Rich. a S. Laur. lib. 2. i p. de Virg. ' I'. Dam. s. 1 de Nativ.

21 G LA .MÈKE D A.MOUK ET DE DOULEUR.

que vous êtes une femme sainte. » 0 hérétiques, que répon- dez-vous à cela?

Nous pouvons en outre mettre notre espérance en sa puis- sante protection, parce qu'elle est plus agréable et plus chère à Dieu que toutes les créatures ensemble ; elle est Mère de Dieu : l'abîme des grâces et l'océan des miséricordes sont à sa disposition. De vient que tous les saints et les bienheu- reux dans le ciel lui vouent comme Reine le plus profond respect et le plus grand amour, suivant cette parole de David : « Tous les riches du peuple vous offriront leurs humbles prières. » Si Job a pu dire de lui-même : « La compassion a grandi avec moi dès mon enfance, et elle est sortie avec moi du sein de ma mère, » à plus juste raison pouvons-nous affir- mer de la très-sainte Mère de Dieu que la miséricorde a grandi avec elle dès les premières années de sa vie pour notre plus grand bien. Elle est donc justement nommée par l'Eglise Mère de la miséricorde, et c'est d'elle que Salomon a dit : « La loi de clémence est dans sa bouche. »

Nous pouvons de plus espérer en son intercession, parce qu'elle est puissante : « Le Tout-Puissant a fait pour elle de grandes choses, lui dont le nom est saint. » Oui, puissante, puisqu'elle nous dit : « Ma puissance s'étend sur Jérusalem. » Il faut entendre par Jérusalem non-seulement l'Eglise mili- tante, mais encore l'Eglise triomphante dans laquelle la puis- sante Mère du Créateur parait avoir une autorité plenière en sa qualité de Mère de Dieu. Voici comment s'exprime le doct^ir Séraphique : « Parce que le Seigneur tout-puissant est puis- samment avec vous, vous êtes toute-puissante avec lui, toute- puissante par lui, toute-puissante auprès de lui, en sorte que vous pouvez dire en vérité : Ma puissance s'étend sur Jérusa- lem *. » 0 mortels! pourquoi tous vos retards? Allez, aile/ à cette puissante et clémente Reine, allez à votre Mère. « Allez à Joseph, » disait autrefois Pharaon pendant la cruelle famine. Et Jésus-Christ vous dit : Allez à ma Mère; elle est aussi

i S. Bonav. in'spec. B. V. c. 8.

i ONSIDÉR \ TIO* l.W. 277

la vôtre. « Esther, que désirez-vous? disait Assuérus, quel est l'objet de votre demande? quand vous demanderiez la moitié de mon royaume, je vous la donnerais. » Et Marie, Souveraine de tout L'univers, aurait moins de pouvoir auprès ilf Dieu son Fils qu'Esther sur le cœur d'Assuérus! « Qui pourrait sonder, ô Vierge bénie, s'écrie saint Bernard, la lon- gueur, la sublimité et la profondeur de votre miséricorde? Sa longueur s'étend, pour ceux qui l'invoquent, jusqu'à leur dernier jour; sa largeur remplit tout l'univers, afin que toute la terre suit pleine de votre miséricorde; sa hauteur s'élève jusqu'aux élus de la cité supérieure, et sa profondeur descend jusqu'à obtenir la rédemption de ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l'ombre de la mort'. »

s. nue dirai-je de plus de cette clémente Reine du ciel et de la terre? Que d'autres louent, je le veux bien, l'indus- trieuse Bébecca, fille d'une grande beauté et très-compatis- sante, qui secourut le vieux serviteur d'Abraham, fatigué de Bon voyage, en lui donnant de l'eau pour étancber sa soif, ainsi qu'à sa suite et à ses chameaux : Quœ respondit : Bibc, Domine mi; celeriterque déposait hydriam super ulnam suam, et dédit ei potion. Que d'autres élèvent la pieuse Sunamite, qui reçut avec bonté le prophète Elisée à son passage, le nourrit, lui dressa un lit, une table, lui prépara une chambre et un candélabre. Que d'autres recommandent Tabithe chère aux veuves et aux pupilles, remarquable par ses œuvres de charité et de miséricorde, que saint Pierre ressuscita pour le soulagement des pauvres. Quant à moi, je recommande, je loue, j'exalte par-dessus tout Marie Mère de la miséricorde. « La misère du pécheur ne peut être si grande, dit le cardinal Hugues, que la miséricorde de la Vierge ne soit plus grande encore. » Recueillons, pour notre consolation, ces paroles de sainte Agnès à sainte Brigitte : « Marie eut une latitude exces- sive, c'esl SB miséricorde ; elle fut et elle est tellement tendre et compatissante qu'elle préféra toutes les tribulations à la perte

1 S. M'-rn. s l . ri*' Assampt.

278 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

des âmes. Maintenant réunie à son Fils, elle n'oublie point sa bonté naturelle, mais elle étend sa miséricorde sur tous, même sur les plus pervers; de manière que, comme les corps céles- tes et terrestres sont éclairés et échauffés parle soleil, ainsi il n'est personne qui n'éprouve par elle des sentiments de piété, si on les lui demande * . »

Que nous reste-t-il donc à faire, sinon de féliciter de tout notre cœur la sainte Vierge notre Souveraine? Si le pasteur après avoir trouvé sa brebis égarée, et la femme sa drachme perdue, invitèrent leurs amis pour se réjouir avec eux d'avoir retrouvé ce qu'ils avaient tant regretté ; n'avons-nous pas, nous serviteurs dévoués de la sainte Mère notre avocate, à la féliciter d'avoir trouvé auprès de Dieu la grâce non-seule- ment pour elle mais encore pour le genre humain? Saint Jacques lui dit donc à juste titre dans sa liturgie : 0 pleine de grâce, les Anges, les hommes, toutes les créatures vous adressent leurs félicitations. » Finissons avec saint Bernard : « 0 vous, bénie par la grâce que vous avez trouvée, obtenez, par votre médiation, que celui qui a daigné se faire partici- pant de notre humanité et de notre misère, nous fasse aussi participer, par votre intercession, à sa béatitude et à sa gloire; Jésus-Christ votre Fils, notre Seigneur, qui, avec le Père et le Saint-Esprit, vit et règne aux siècles des siècles \ »

1 Revel S. Birg. lib. 3. c. 30. 2 S. 13ern. serm. 4. de adventu.

CONSIDÉRATION LWI.

Le culte principal envers la B. Vierge Mère Douloureuse, est l'imitation assidue

de ses vertus.

Mil ( I I I H «|l O (»MIMM\I.

Soyez mes imitateurs, comme je l'ai été de Jésus-Christ. (t Corinth. 4. 16.)

1. Les saintes Ecritures nous font connaître assez longue- ment toutes les merveilles qu'opéra autrefois Moïse avec la baguette ou bâton pastoral dont il s'était servi pour conduire les troupeaux de son beau-père. C'est par elle qu'il fit tant de choses prodigieuses en Egypte, en présence de Pharaon et de ses serviteurs, et qu'il changea en sang toutes les eaux du Nil. Eccc percutiam virga, quœ in manu mea est, aquam fluminis, et vertetur in sanguinem. C'est par elle qu'il divisa la mer Rouge et qu'il conduisit à pied sec le peuple israélite se dirigeant vers la Palestine : « Pour vous, élevez votre baguette, et étendez votre main sur la mer, et la divisez, afin que les enfants d'Israël marchent à sec au milieu de la mer. » Quand le peuple choisi de Dieu n'avait pas de quoi étancher sa soif et celle des bêtes de somme, dans cette terre déserte, sans route et sans eaux, par le moyen de sa baguette il fit jaillir des sources abondantes : Pcrcussit petram, et fluxerunt aquse. Or, Moïse frappa le rocher à deux reprises. « 11 leva la main, et ayant frappé deux fois la pierre avec sa baguette, il en sortit une grande abondance d'eau, en sorte que le peuple eut à linire et toutes ses bêtes aussi. « ha pierre, dit saint Augustin ',

1 S. Aujr. tr. .'il. in Joan.

280 LA MERE D AMOUR ET DE DOLLEl.R.

fut frappée deux fois; cette double percussion représente les deux morceaux de la croix. » Mais Richard de Saint-Laurent, par la baguette, entend la très-sainte Vierge Mère de Dieu : « Elle est, dit-il, la baguette de Moïse, par laquelle il opéra ses prodiges en Egypte, et à laquelle il avait recours dans toutes les circonstances pressantes1. » A cette baguette prodigieuse qui divise la mer Rouge, qui ouvre et montre au peuple un passage vers la rive opposée, donnez la devise suivante :

llluciter, quo ostendam. Suivez la voie que j'indiquerai.

Oui : suivoris la voie indiquée; car, passaient Jésus- Christ et sa sainte, Mère, il faut que nous les suivions nous- mêmes ; « Jésus-Christ, dit saint Paul, a souffert pour nous, vous laissant son exemple, afin que vous suiviez ses vestiges » Le peuple hébreu sortant de la terre d'Egypte, ne suivait pas uniquement la baguette conductrice de Moïse, il avait encore pour guide la colonue de nuée pendant le jour, et de feu pen- dant la nuit. Par la colonne de nuée et de feu, saint Epiphane ' sous-entend la B. Vierge : La nuée légère dans laquelle le Seigneur s'élève, est Marie qui nous protège contre les ardeurs du divin soleil de justice. C'est d'elle qu'Isaïe a prophétisé : « Voici que le Seigneur s'élève sur une nuée légère. » Marie est aussi la colonne de feu qui nous éclaire dans la nuit, c'est-à- dire aux approches de la mort: La nuit vient, dit la Vérité, personne ne pourra travailler. Bienheureux serons-nous, en- fants de Marie, si alors cette mystique colonne de nuée et de feu, brillante par ses mérites et luisante par ses exemples, nous montre le chemin de l'éternelle béatitude : llluc iter, quo ostendam. je Vous trace la route.

2. Dieu ayant appris à Moïse, guide et législateur de son peuple, comment il devait fabriquer l'arche et le propitiatoire avec les deux chérubins, lui prescrivit enfin la forme du taber- nacle avec ses vases et ornements, et ajouta : « Considérez bien

1 Rich. a S. Laur 1. 12. de Laud. B. V. ' S. Epiph. de Laud. V.

i n\MI>i:UAHHN J.XVl.

281

ce que je vous dis, el Faites selon le modèle qui vous a été montré sur la montagne, » c'est-à-dire, sur le Siuaï, Moïse .tant resté quarante jours avec Dieu, vit et apprit beaucoup de choses secrètes pour se conduire et l'aire conformément au type el au modèle qu'il avait vu.

Serviteur de Marie! ce n'est pas seulement Jésus attaché à la croix sur le mont Calvaire, qui vous est, proposé pour modèle; c'est aussi Marie sa Douloureuse Mère debout devant la croix : « Regardez bien, et faites selon le modèle qui vous est montré sur la montagne. » Considérez en elle l'exemple de toutes les vertus : Obéissance, foi, espérance, charité, [latience, force, persévérance, humilité, pureté, mépris du monde. Kt ce n'est pas assez déconsidérer ce type; si vous l'aimez sincèrement, il faut aussi imiter ses vertus, du moins autant qu'il vous est possible. « Pour obtenir, dit saint Bernard, le suffrage de sa prière, ne cessez pas de suivre l'exemple de sa vie '. » Et saint Augustin : « La religion consiste principalement à imiter ce que nous honorons \ »

Le fidèle écuyer de Jonathas suivit son maître sur les rochers escarpés, sans la moindre hésitation, et fut son com- pagnon inséparable dans le combat : « Il lui dit : Allez bon vous semble, je serai avec vous partout vous voudrez. » Bthaï s'attacha au roi David fuyant devant Absalon, et lui dit généreusement : « Vive le Seigneur, et vive mon Moi ! par- tout où vous serez, ô mon roi, sera votre serviteur, à la vie et à la mort 3. » Les compagnons d'Abimélech le suivirent dans tous les dangers et imitèrent sa conduite : « Ayant saisi une hache il coupa une branche d'arbre, et ia mettant sur son épaule, il dit à ses gens : Ce que vous me voyez faire, faites- le sur-le-champ; et à l'instant coupant chacun une branche d'arbre, ils suivent leur chef 4. »

Enfants de Marie! montons, nous aussi, sur la montagne du Calvaire, et regardons le modèle qui nous y est montré par

1 S. Bera. >er. t. hoc Sig. Magnum. J S. Aog. s. I. Uum. 3 II. Reg. I ;. U. * Judic. (t. 48.

282

LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

le Crucifié et sa Mère. Considérons surtout la foi que cette Douloureuse Mère a professée publiquement au pied de la croix, au milieu des plus grands tourments et, pour ainsi dire, sous les yeux, de l'univers, en reconnaissant que l'homme suspendu à un gibet infâme, couvert de blessures, de plaies, de sang et plus semblable à un animal écorché qu'à une créature humaine, était son Fils et le Fils de Dieu, vrai Dieu de vrai Dieu. Voyez au contraire la foi vacillante de Pierre ébranlée au moindre souffle. Marie est debout, immobile, quand la terre tremble, que les rochers se brisent et que tout penche vers sa ruine; elle est debout, croyant plus fermement, espé- rant avec plus de confiance qu'Abraham et aucun autre mortel; aussi peut-on lui appliquer les paroles dites de ce patriarche : « Elle espéra contre toute espérance et crut qu'elle deviendrait la Mère de plusieurs nations. \>

Que dirai-je de la résignation à la volonté divine et de l'obéissance de la Douloureuse Vierge? Par le seul pat à l'in- carnation du Verbe, suivant la pensée de saint Bernardin de Sienne, elle a plus mérité que tous les hommes par leurs ac- tions. La raison est que, par cet acte, elle a mérité, au moins de congruo, comme parle l'école, la dignité de Mère de Dieu, dignité plus grande que d'avoir reçu le gouvernement du monde entier. De plus, par ce fiai elle donnait son assenti- ment à toute la passion que son Fils devrait souffrir pour le salut des hommes : d'où il suit que son obéissance et sa ré- signation surpassent les dispositious d'Abraham s'apprètant à immoler son fils en holocauste à Dieu sur un bûcher; en effet, en disant : qu'il me soit fait selon votre parole, elle of- frit son très-digne Fils en sacrifice agréable au Père éternel pour la rédemption du genre humain. Apprenez ici, ô mon esprit, à obéir à Dieu et à vos supérieurs mêmes dans les choses difficiles. Voyez et considérez comment la désobéissance de la reine Vasthi fut pour tous une pierre d'achoppement, et l'o- béissance de la Douloureuse Mère pour tous un bon exemple. Apprenez à produire souvent des sentiments de ferme foi en Dieu, vertu qu'accompagnent les bonnes œuvres, car les ser-

I 0NSID1 R Mli»N l.xvi.

283

ritrurs de Dieu ont un double vêtement, est-il dit au livre des Proverbes ; à quoi Richard de Saint-Laurent ajoute : « Les vêtements des serviteurs de Marie sont la foi et les œuvres ; la foi, vêtement intérieur qui orne l'àme aux yeux de Dieu; les œuvres, vêtement extérieur qui, en présence des hommes, nous rend semblables à Jésus souffrant ' . » Apprenez en outre à vous confier pour tout à la divine volonté. « La Vierge im- maculée, dit saint Bernardin cité plus haut, eut toujours en vue le bon plaisir de Dieu et la prompte obéissance \ » Faites cela vous-même et vous vivrez.

3. Et que raconterai-je de l'immense charité de la sainte et Douloureuse Vierge envers Dieu et le prochain? Dieu avait prescrit que l'arche de l'ancien Testament fût couverte de lames d'or tant au dehors qu'au dedans, et qu'elle fût sur- montée d'une couronne d'or régnant tout autour. La table des pains de proposition était couverte d'un or très-pur. Le pro- pitiatoire était pareillement fait d'un or très-précieux. Le trône du plus sage des rois d'Israël brillait d'un or affiné. Le can- délabre à sept branches servant à l'usage du temple était formé de l'or le plus beau.

Toutes ces choses étaient des figures pour l'ancien peu- ple; mais à nous, disciples de Jésus-Christ, ils ne nous dési- gnent que la sainte et immaculée Marie Mère de Dieu, notre vraie Mère d'or, parce que ce métal précieux est le symbole de l'amour; et elle est la Mère de la belle dilection. Elle a été l'arche, puisqu'elle a renfermé en elle la divine manne; arche vraiment toute couverte d'or, c'est-à-dire pleine de charité pour Dieu et le prochain, en sorte qu'elle pouvait s'appl quer cette parole : a II a ordonné en moi la charité. » Elle était la laide des pains de proposition brillante de toute pureté et res- plendissante de l'or le plus éclatant, c'est-à-dire de la charité la plus fervente, table nous présentant le pain de vie, le pain (1rs Anges. Elle était le propitiatoire d'or, qui désignait parti- culièrement l'ardent amour de la Vierge Douloureuse envers

1 Rich. i s. Lanr. I. 2. p. I. - s Bernardin tom. -2. Serm. 51. l

282 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

le Crucifié et sa Mère. Considérons surtout la foi que cette Douloureuse Mère a professée publiquement au pied de la croix, au milieu des plus grands tourments et, pour ainsi dire, sous les yeux, de l'univers, en reconnaissant que l'homme suspendu à un gibet infâme, couvert de blessures, de plaies, de sang et plus semblable à un animal écorché qu'à une créature humaine, était son Fils et le Fils de Dieu, vrai Dieu de vrai Dieu. Voyez au contraire la foi vacillante de Pierre ébranlée au moindre souffle. Marie est debout, immobile, quand la terre tremble, que les rochers se brisent et que tout penche vers sa ruine; elle est debout, croyant plus fermement, espé- rant avec plus de confiance qu'Abraham et aucun autre mortel ; aussi peut-on lui appliquer les paroles dites de ce patriarche : « Elle espéra contre toute espérance et crut qu'elle deviendrait la Mère de plusieurs nations. v>

Que dirai-je de la résignation à la volonté divine et de l'obéissance delà Douloureuse Vierge? Par le seul/?«/à l'in- carnation du Verbe, suivant la pensée de saint Bernardin de Sienne, elle a plus mérité que tous les hommes par leurs ac- tions. La raison est que, par cet acte, elle a mérité, au moins de congruo, comme parle l'école, la dignité de Mère de Dieu, dignité plus grande que d'avoir reçu le gouvernement du monde entier. De plus, par ce fiât elle donnait son assenti- ment à toute la passion que son Fils devrait souffrir pour le salut des hommes : d'où il suit que son obéissance et sa ré- signation surpassent les dispositions d'Abraham s'apprètant à immoler son fils en holocauste à Dieu sur un bûcher; en effet, en disant : qu'il me soit fait selon votre parole, elle of- frit son très-digne Fils en sacrifice agréable au Père éternel pour la rédemption du genre humain. Apprenez ici, ô mon esprit, à obéir à Dieu et à vos supérieurs mêmes dans les choses difficiles. Voyez et considérez comment la désobéissance de la reine Vasthi fut pour tous une pierre d'achoppement, et l'o- béissance de la Douloureuse Mère pour tous un bon exemple. Apprenez à produire souvent des sentiments de ferme foi en Dieu, vertu qu'accompagnent les bonnes œuvres, car les ser-

CONSIDÉRATION 1.W1. 'IH'A

ritrurs de Dieu ont un double vêtement, est-il dit au livre des Proverbes ; à quoi Richard de Saint-Laurent ajoute : « Les vêtements des serviteurs de Marie sont la foi et les œuvres ; la foi, vêtement intérieur qui orne L'âme aux yeux de Dieu; les œuvres, vêtement extérieur qui, en présence des hommes, nous rend semblables à Jésus souffrant '. » Apprenez en outre à vous confier pour tout à la divine volonté. « La Vierge im- maculée, dit saint Bernardin cité plus haut, eut toujours en vue le bon plaisir de Dieu et la prompte obéissance \ » Faites cela vous-même et vous vivrez.

3. Et que raconterai-je de l'immense charité de la sainte et Douloureuse Vierge envers Dieu et le prochain? Dieu avait prescrit que l'arche de l'ancien Testament fût couverte de lames d'or tant au dehors qu'au dedans, et qu'elle fût sur- montée d'une couronne d'or régnant tout autour. La table des pains de proposition était couverte d'un or très-pur. Le pro- pitiatoire était pareillement fait d'un or très-précieux. Le trône du plus sage des rois d'Israël brillait d'un or affiné. Le can- délabre à sept branches servant à l'usage du temple était formé de l'or le plus beau.

Toutes ces choses étaient des figures pour l'ancien peu- ple; mais à nous, disciples de Jésus-Christ, ils ne nous dési- gnent que la sainte et immaculée Marie Mère de Dieu, notre vraie Mère d'or, parce que ce métal précieux est le symbole de l'amour; et elle est la Mère de la belle dilection. Elle a été l'arche, puisqu'elle a renfermé en elle la divine manne; arche vraiment toute couverte d'or, c'est-à-dire pleine de charité pour Dieu et le prochain, en sorte qu'elle pouvait s'appl quer cette parole : « Il a ordonné en moi la charité. » Elle était la table des pains de proposition brillante de toute pureté et res- plendissante de l'or le plus éclatant, c'est-à-dire de la charité la plus fervente, table nous présentant le pain de vie, le pain ilts Anges. Elle était le propitiatoire d'or, qui désignait parti- culièrement l'ardent amour de la Vierge Douloureuse envers

1 Hich. a S. Lanr. I. 2. p. I. "S Bernardin t<>m. 2. Serm. SI . J

284 LA HÈRE d'AMOUB ET ]»E DOULEUR.

le genre humain; parce que son Fils est devenu la victime de propitiation pour nos péchés, elle est, dit saint Ephrem, le propitiatoire de toute la terre '. Elle était le trône du vérita- ble et pacifique Salomon, élaboré avec l'ivoire le plus pur de la virginité et revêtu de l'or brillant de la charité ; trône royal sur lequel s'est reposé Jésus-Christ qui est bien plus que Salomon. Enfin elle était le chandelier donnant la lumière de la charité à tous pendant sa vie, surtout quand les ténèbres se répandirent sur toute la terre. Alors que le soleil, œil du monde, détourna ses regards pour ne point voir mourir son Seigneur, vous, ô précieuse Vierge, comme une lampe placée non sous le boisseau mais sur la montagne du Calvaire, vous avez éclairé par la splendeur de vos vertus l'univers plongé dans le mal. 0 charité immense que ne purent éteindre ni les fleuves ni les flots des persécutions, ni l'océan de la passion la plus cruelle! « Et, ce qui ajoute le comble aux feux de son amour, dit le Y. P. Drexelius -, elle vit, elle entendit son Fils sur son cruel gibet priant et répandant des larmes pour ses ennemis, pour ceux qui se moquaient de lui, pour des parri- cides. Aucune mère n'imita le Fils plus heureusement que cette divine Mère. Oh! elle fit plus que saint Paul qui désirait être anathème pour ses frères. Jésus-Christ, en effet, est de- venu en croix malédiction pour nous, et sa Douloureuse Mère, présente à ce spectacle, entendait de tous côtés les reproches qu'on lui adressait de Fils maudit et infâme; oh! vraiment elle était elle-même une Mère infâme et maudite. 0 mon àme, apprenez ici de quelle fervente charité vous devez être em- brasée pour Dieu et le prochain! « Ne cherchez point, dit l'Apôtre, votre propre avantage, mais celui de plusieurs dans l'intérêt de leur salut. » Et le disnple aimé de Jésus : Celui (pu n'aime pas, demeure dans la mort.

i. Voulez-vous que je multiplie les arguments sur ce sujet? Ecoutez, retenez, grave/, dans votre coMir d'une manière inef- façable ce que je vais vous dire. Joseph était inquiet et voulait

1 S. Ephr. orat. de Laud. Virg. "P. Drexel. Opusc. 13. c. 1. parag. "2.

CONSIDÉRATION l.XVI. i>8.*>

s'éloigner de Marie en secret. Que fait alors l'humble Vierge?

Elle garde le silence et confie tout à la divine Providence. Bile

sur le point d'enfanter, et n'a pour se retirer qu'une pau-

\ iv étable : il n'y a pas «le place peur eux «lans les hôtelleries ! La douce Vierge garde encore le silence et souffre patiem- ment la pénurie de toutes choses. Arrive le jour où, dans la circoncision, le divin enfant doit répandre les premières gout- tes de son sang; Siméon prédit le glaive de douleur et la croix : « 11 est placé pour la ruine ou la résurrection de plu- sieurs en Israël, et un glaive transpercera votre âme. » Hérode pnpare la mort à l'enfant, il faut fuir en Egypte et y subir un exil de sept ans : la patiente Mère garde le même silence et supporte tout sans la moindre plainte. « Ne pouvait-elle pas dire à l'Ange, observe saint Jean Chrysostome : « La chose est incertaine et tout à fait ambiguë; vous m'aviez dit qu'il sauverait son peuple, et il ne peut se garantir lui-même du danger, il nous faut fuir et entreprendre un voyage lointain? Les faits sont absolument contraires aux promesses ' . » Mais non; la prudente Vierge n'allègue aucune de ces raisons, n'i- gnorant point qu'autres sont les vains jugements du monde et autres ceux de Dieu. Aussi se soumet-elle avec une entière résignation à la divine volonté malgré tous les obstacles.

Ce n'est pas tout. Elle perd son Fils au temple à l'âge de douze ans et le cherche en pleurant pendant trois jours ; in- nocente victime, Iran-Baptiste tombe sous le glaive impie : triste et affligeante fut pour la divine Mère la nouvelle du meurtre de son parent ! Son époux le chaste Joseph est malade, en danger de mourir et fait ses derniers adieux à son épouse virginale : « Jésus et Marie, dit saint Bernardin 2, assistaient à sa mort. » La pieuse Mère voit que son Fils par sa doctrine et ses miracles ne gagne que reproches, mépris, dérisions, menaces, calomnies et lapidations. «N'est-ce point le Fils du charpentier? Sa Mère n'est-elle pas nommée Marie? Et ils se

1 S Joan. Chrysost. homil 8 in Matin. 2 S. Bernardin, toni 3. a. 2. c. 3. p. 462.

286 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

scandalisaient à son sujet. » La douce Vierge supportait tout avec une incroyable mansuétude. Enfin, c'est son bien-aimé Fils lui-même qui prend congé de son aimante Mère pour aller subir la mort la plus ignominieuse sur l'infâme gibet de la croix; prosterné contre terre dans le jardin, il est dans une angoisse mortelle jusqu'à la sueur de sang ; Judas, le traître et le per- fide, le livre entre les mains des pécheurs en le saluant et le baisant comme un ami ; il est saisi, traîné parle torrent de Gédron ; on frappe impudemmentau visage le Sauveur de tous; on lui voile la face, on le charge de coups et d'affronts pen- dant toute une nuit ; on le conduit malgré son innocence chez le président Pilate ; Hérode le fait revêtir d'une robe blanche comme un insensé ; un juge romain le fait lier à une colonne et flageller d'une manière atroce ; on lui met sur la tète une couronne d'épines ; accablé de blessures par tout le corps, on le montre à une multitude immense qui pousse une horrible clameur : Cnœi fiez-le, crucifiez-le; on met sur ses épaules fati- guées et ensanglantées une lourde croix ; il tombe à terre sous la pesanteur du fardeau; on lui arrache ses vêtements, et pour tout soulagement on l'abreuve de l'amertune du fiel ; on le cloue sur le gibet des criminels; le voilà maudit et sus- pendu au bois pour guérir les blessures de tous : hélas! l'au- teur de la vie meurt pour nous rappeler de la mort du péché à la vie éternelle ; après sa mort, on lui perce le cœur avec une lance cruelle ; descendu de la croix, son affligée Mère le reçoit dans ses bras. 0 tendre Yierge ! qu'éprouviez-vous alors ? quel sentiment ? quelle tristesse? Le dise qui le peut, pour moi je ne saurais l'expliquer. Cependant parmi tous ces tourments nombreux, la plus affligée des mères ne laisse pas échapper un signe d'impatience ou d'indignation, elle ne respire pas la moindre vengeance, elle ne souhaite aucun mal aux enne- mis, mais avec son Fils elle prie pour eux : « Père, pardon- nez-leur, ils ne savent ce qu'ils font. »

5. Ame chrétienne, trouvez-moi une Mère qui, obligée de voir tant de tourments si grands concentrés sur un unique et bien-aimé fils, n'ait pas l'esprit accablé de chagrin et de

CONSIDÉRATION LXVI. -2X1

douleur. Comment vous fut-il possible, ô ma Souveraine, d'épui- ser cet immense océan ? Ecoutez-en la cause : la Vierge sainte fut toujours étroitement unie de volonté avec le bon plaisir de Dieu ; combien de fois ne dit-elle pas dans le cours de sa vie, surtout pendant la passion : « Qu'il en soit ainsi, ô Père, puisque c'est votre volonté ; voici la servante du Sei- gneur, qu'il me soit fait selon votre parole. » Apprenez, qui que vous soyez, à imiter les vertus de votre sainte Mère, car en vain l'appelleriez-vous votre mère, si vous êtes son enfant dégénéré. Non, il ne suffit pas de célébrer ses fêtes par ma- nière d'acquit, de réciter le rosaire ou certaines prières en son honneur, de visiter ses chapelles ou de faire quelques pèle- rinages, d'observer le samedi une légère abstinence, de porter le saint scapulaire, le cordon de son esclavage ou celui de sainte Monique, si, en même temps, peu soucieux de votre progrès et de l'imitation de ses vertus, vous menez une vie sensuelle et coupable, comptant sur sa puissante protection pour le succès de votre salut ; toutes ces pratiques sont insuf- fisantes, parce que la sainte Mère veut des serviteurs qui expriment ses vertus non en paroles mais en action : La louange ne plaît pas dans la bouche du pécheur. Efforcez-vous donc d'avoir une meilleure conduite. Dès que Rébecca eut aperçu son époux dans un état humble, contemplant la campagne, allant à pied, elle descendit de son chameau et se voilant le visage par modestie, elle se jeta aux pieds d'Isaac. Votre Epoux, candide et vermeil, âme chrétienne, s'est humi- lié jusqu'à la mort de la croix, et comme lui votre divine Mire s'est abaissée; il a été le dernier des hommes, elle la dernière des femmes; et vous serez assis sur le chameau des honneurs, des dignités, des richesses, de l'estime, de l'ambi- tion, des plaisirs? Non non: descendez, descendez et humi- liez-vous. * Soyez vil, dit saint Bernard1 , autant que vous le pourrez ; jamais vous ne serez plus vil que Jésus-Christ: Roi des rois, Seigneur des seigneurs, il a été vendu à vil prix ;

* S. Bern. in Cant. Cant.

288 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

il a souffert les plus vils traitements delà part de la plus vile populace ; il a été livré dans le lieu le plus vil à la plus vile mort comme un voleur et entre deux voleurs; il a été traité avec, le plus grand mépris parmi les hommes les plus mépri- sâmes : Seigneur plein de bonté, on le saisit comme un malfaiteur ; la douceur même est liée comme un furieux ; le Sauveur est accusé comme un homme dangereux; Celui qui est la vie des hommes est condamné et livré à la plus hon- teuse mort comme un homicide ; on traite comme lépreux et immonde Celui qui purifie de tous les crimes, on le pousse hors des murs, comme un criminel que tous doivent cou- vrir de confusion et de mépris ; il est dépouillé de ses vête- ments, il est élevé nu en croix, il est conspué, il est foulé aux pieds comme un vil vermisseau, et il est Dieu. « S'il a souffert ainsi pour vous, que devez-vous faire pour lui ? Si toutes les douleurs de Jésus-Christ souffrant furent partagées par sa sainte Mère compatissante, que devez-vous faire pour elle ? Est-ce que vous ne faites pas une grave injure au Sauveur si vous vivez dans l'oubli de sa passion et vous plongez, comme un animal stupide, dans les mauvaises convoitises, les voluptés et les vices ? De même, faites-vous injure à la Bienheureuse Vierge Mère Douloureuse, et vous vous mon- trez serviteur bien ingrat, si vous ne partagez pas ses sen- timents de compassion en fils qu'elle a engendré sous la croix par Jésus-Christ avec tant de douleur et de larmes.

6. Jean Piérius 1 raconte d'une pie que dés qu'elle eut en- tendu à Rome des gens qui sonnaient de la trompette, éton- née au dernier point de cette nouveauté, elle garda le silence pendant quelques jours, et qu'enfin, ayant l'air de sortir du sommeil, elle imita le son, l'harmonie, la mesure des airs à la grande admiration de tous. Les brebis deLaban, qui avaient assidûment sous leurs yeux les baguettes bariolées de Jacob placées dans les canaux elles allaient s'abreuver, produi- saient des agneaux semblables par leur forme variée. Que ne

i Joan. Pior. Hierogl. lib. 23. c. 17.

CONSIDÉRATION l.Wl. ^H'.»

[auvent, sur les brebis raisonnables, les exemples de Jésus- Christ crucifié et de sa sainte Mère Douloureuse, si elles con- templent avec une attention sérieuse leur conduite et leur vie ? L'ombre a cela de particulier qu'elle imite exactement les gestes et les pas de l'homme, les signes el tous les mouve mentfl «lu corps; aussi, sur ce passage des lamentations : Xm/s vivrons à votre ombre, Origène a-t-il dit : « Nous vivrons à l'ombre de Jésus-Christ, c'est-à-dire à son imitation \ » De Ruth l'Ecriture raconte qu'elle glanait derrière les moisson- neurs. Nous aussi glanons les restes des vertus de la Douloureuse Vierge Marie : force, obéissance, charité, patience, résignation, pauvreté, ferveur dans le bien , mansuétude , contemplation, silence, mortification, pureté, etc. Et comme les peintres exa- minent souvent leurs modèles pour les représenter le mieux possible, nous de même, serviteurs et enfants de Marie, consi- dérons continuellement les vertus dont la pieuse Mère est le modèle afin que nous puissions les imiter : imitation des ver- tus, voilà le culte principal. « Marie, dit saint Grégoire le Thaumaturge 2, est le soutien de ceux qui croient, et le par- fait modèle des âmes pieuses ; » et le docte Idiot : « Marie est le modèle des vertus. »

7. Saint Philippe Bénili va terminer cette Considération. Comme un jour de vendredi-saint, lui et ses premiers com- pagnons méditaient pieusement les tourments de notre divin Rédempteur et les douleurs de sa sainte Mère, la divine Vierge lui apparut accompagnée d'Anges portant les instruments de la passion. Elle tenait dans l'une de ses mains le vêlement noir et lugubre qu'ils devaient porter désormais en mémoire de ses douleurs, et dans l'autre la règle de saint Augustin qu'ils auraient à suivre, a Tel sera votre habit, dit-elle, et votre aom sera serviteurs de la Vierge Marie. » Ce bel ordre fonde l'an du Seigneur 1231, s'appelle encore aujourd'hui, ordre des serviteurs de Marie. Quand les sept premiers

1 Origen. in Catena. »up. Thren. V. w. - s. Greg. Thaum. 2 de Anntratiatione.

II. 19

290 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

fondateurs entraient à Florence, un enfant dans les bras de sa mère s'écria ainsi que plusieurs autres enfants : « Voilà les serviteurs de Marie. » Pour voir la bienheureuse mort de ces pieux serviteurs de la Douloureuse Mère de Dieu, consultez le R. P. Gaspar Tausch de la compagnie de Jésus, dans son ou- vrage sur la Vierge, page 600 dans l'édition que je possède. Vous y trouverez plusieurs pratiques en son honneur.

Et maintenant, lecteur dévoué à Marie, qu'avons-nous autre chose à faire , que d'honorer par une sincère dévotion la Vierge sainte établie au pied de la croix mère du genre hu- main, qui répandit dans la passion, par son Fils, le sang qu'elle lui avait donné dans l'incarnation; et qui, blessée par le glaive de Siméon, collabora au salut des hommes autant qu'il fut en son pouvoir. Plaise à Dieu que cette dévotion en- vers la Douloureuse Vierge croisse partout dans l'Eglise, et qu'on érige en plusieurs lieux des associations en son hon- neur. Bienheureux ceux qui meurent sous la protection salu- taire de la Douloureuse Vierge !

CONSIDERATION LXV1I.

Tous les chrétiens doivent avoir nue grande confiance en Notre-Danie-du-Saint-Rosaire.

IIAC DLCE Tl TA VIA EST.

Ce sera votre droite qui me soutiendra. (Psal. 138. 10.)

1. On connaît parfaitement le labyrinthe de Crète, que Dédale, ouvrier athénien très-renommé, construisit par l'ordre du roi Minos pour enfermer le Minotaurc qui dévorait cruel- lement les voyageurs engagés dans ses tlétours nombreux et inextricables. Il arriva que Thésée, fils d'Egée roi d'Athènes, y pénétra pour tuer le monstre, et qu'aidé par Ariane, fille de Minos, qui lui tendit un fil, il égorgea cette bète horrible et sortit sain et sauf du labyrinthe.

Qu'est-ce que le monde, sinou un labyrinthe pareil? A l'ex- térieur il montre quelque apparence agréable; en réalité il ne fait que vous tromper et vous perdre. « 0 monde, s'écrie saint Augustin le grand astre de l'Eglise d'Afrique, ô traître monde : tu promets tous les biens, et présentes tous les maux ; tu promets la vie et donnes la mort ; tu promets la joie, et donnes la tristesse ; tu promets le repos, et voilà que tout est agitation et trouble; tu promets d'être stable, et bientôt tu te retires : tu n'es donc pas digne d'être aimé, ù monde, car tu es passager et ta convoitise s'évanouit comme la fu- mée '. » Il faut donc au milieu de tant de périls et de risqua pour le corps et pour l'âme nous confier comme Thésée à

1 S. Au-. Serm. :j ad ftattres in Eremo.

292 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

une fidèle Ariane qui nous enseigne le vrai sentier du salut parmi ces mille détours embarrassants et difficiles et qui de plus nous conduise par une voie sûre à la céleste patrie. Cette prudente Ariane est Notre-Dame du Rosaire; Douloureuse Mère. elle connaît les maux, elle a appris à secourir les malheu reux; dès son commencement elle a brisé la tète de l'infernal Minotaure. Ecoutons un poète chrétien :

« Que Thésée sut bien diriger ses pas, au moyen du fil conducteur, quand il terrassa de son glaive le monstre moitié homme et moitié taureau! Vous savez comment, dans ces immenses détours, venant à bout de se dégager des sentiers incertains, il parvint à sortir du danger. Hélas! un chemin difficile à suivre nous sépare de la patrie dont 'nous sommes éloignés; un labyrinthe nous environne'de toute part. Mais, qui marchera en tenant le fil salutaire que lui présente la Vierge Mère, vaincra les ennemis et arrivera en assurance au ciel. »

Nous avons donné pour texte à la présente Considération les paroles de David : Votre main me soutiendra. Et l'on peut se représenter la devise suivante, au-dessus d'un labyrinthe la main de la Vierge du Rosaire, en lui tendant un fil, conduit le voyageur à la vie éternelle :

Sons sa conduite la voie est sûre.

2. Il est bien vrai : sous votre direction, la voie est sûre. Quand Agar avec Ismaèl s'écartait de son droit chemin dans le désert, un Ange, venu du ciel, la remit dans la bonne voie. Un homme enseignaà Joseph errant dans la campagne le chemin pour aller à Dothaïm auprès de ses frères. Et la brebis égarée loin du troupeau, le bon pasteur la prit sur ses épaules et la rapporta dans le bercail.

0 tendre Souveraine ! que de myriades de pécheurs marchant dans la labyrinthe des plaisirs criminels, errant loin du ciel, ont été remis dans le sentier de la céleste patrie par votre saint Rosaire ! Un cordon d'écarlate suspendu à la fenêtre fut le salut

CONSIDÉRATION I.XVII. 293

•If toute la famille de Rnhab dans la dévastation de Jéricho. Le saint Rosaire de Marie a été aussi une source de salut pour plusieurs, ou plutôt pour une multitude sans nombre de pé- cheurs. N'est il pas dit dans la sainte Ecriture qu'un triple lieu est difficile à rompre? C'est une belle figure du saint Rosaire qui se compose des trois sortes de mystères, joyeux, doulou- reux et glorieux, et forme un abrégé du nouveau Testament et delà doctrine chrétienne; en effet, on y passe en revue par une pieuse méditation tous les mystères de notre salut, et la vie de Jésus-Christ et de sa sainte Mère.

Par conséquent, ce que fut pour la courageuse femme de Tbéba le fragment de meule dont elle se servit pour briser la tète de l'impie Abimélech ; ce que fut dans la main de Judith le glaive avec lequel elle trancha la tète à l'orgueilleux Holo- pherne dans le camp des Assyriens ; ce que furent pour le jeune David sa fronde et le caillou du torrent, au moyen des- quels il terrassa le géant Goliath, cette tour de chair; ce que fut pour Jahel le clou qu'elle enfonça dans la tète de Sisara pendant son sommeil; enfin ce que furent pour Joab les trois lances dont il transperça le cœur de l'impie et parricide Absa- lon suspendu à un chêne : le saint Rosaire est tout cela pour nous chrétiens. C'est un fragment de meule pour briser la tète au démon insidieux ; un glaive pour humilier les ennemis de l'Eglise notre Mère ; une fronde et une pierre pour nous faire prévaloir sur la chair, le monde et le démon; un clou de fer pour enfoncer dans les tentations et les passions mauvaises; une triple lance pour combattre contre tous les ennemis de l'âme et du corps. « Celui, dit Michel des Iles ', qui s'est offert de tout son co?ur à servir la Vierge dans cette confrérie, qui l'aura tant de fois saluée, qui tant de fois aura invoqué avec dévotion le doux nom de son Fils, ne saurait périra la fin. i 0 paroles consolantes!

.1. Allons plus loin. Quand les eaux du déluge se furent reti- rées, et que le Seigneur oui reçu en odeur de suavité le sacri-

1 Midi. ;ili l nsulis in», il.- confrat. Rosar.

294 LA MÈBE D'AMOUR ET DE DODLEDÏl.

fice de Noé; il plut à sa divine Majesté de donner l'assurance qu'il n'y aurait plus de déluge, et dans ce but il fit paraître l'arc-en-ciel dansles nues. Par ce signe Corneille delà Pierre1 entend le Verbe incarné, voilé sous la cbair; par les trois prin- cipales couleurs qui composent l'iris, il entend: par le vert, la fleur des grâces et des vertus du Verbe; par le rouge, sa sanglante passion ; et par le bleu, qui est la couleur du ciel, sa contemplation et sa prière assidue.

Ajoutons que l'arc tricolore est un admirable symbole du saint Rosaire consistant en trois couleurs principales, les mystères joyeux, douloureux et glorieux. Que désigne la cou- leur verte, sinon l'incarnation du Verbe qui fit apparaître la première lueur d'espérance pour le monde, espérance du salut qui brille particulièrement dans les mystères joyeux qui sont les cinq premiers? Que figure la couleur pourpre de l'iris si ce n'est les cinq mystères douloureux de la passion dans lesquels le Sauveur Jésus répandit tout sou sang pour notre salut, e\ sa Douloureuse Mère fut changée en sang, comme le dit le B. Albert le Grand * : B. Virgo conversa est in sanguinem, quando intellexit dulcissimum Filium suum tradition et captum. Et que représente le bleu céleste, tant soit peu mélangé d'autres cou- leurs, sinon les cinq mystères glorieux qui annoncèrent la joie au monde entier? Ame chrétienne, comme le dit l'Ecclésias- tique, « regardez l'arc-en-ciel, et bénissez celui qui l'a fait, » car il a été établi, cet arc mystique, en signe de paix et d'al- liance entre Dieu et l'iiomme, entre le ciel el la terre. « Pour ceux qui ont de la dévotion envers elle (Notre-Dame-du-Saint Rosaire,) dit le B. Alanus, c'est une grande marque de prédes- tination à la gloire '. »

4. Quand Moïse menait paître les brebis de Jethro, comme on le voit dans l'Ecriture, il les conduisit un jour dans l'inté- rieur de la solitude pour vaquer avec plus d'attention, dans le recueillement et le silence, à la prière et à la contemplation.

1 Cornel, in Geu, 9. 13. 5 B. Alb. M. serm, Dom. advent. 3 B. Ala- nus. p. o. c. 4.

CONSIDÉRATION LXV1I. 2ÎK)

Parvenu au pied du mont Iloreb dans renfoncement du désert, tout à coup il aperçoit un buisson ardent que le feu ne consu- mait pas : Apparuitquc ci Dorfiinus in flamma i'/tiis tl<> medio ruhi: rt vidcbat quod rubtu ardcret, et non combureretur. Ce feu était une vision du ciel qui cachait un grand mystère. « Le feu dans le buisson, dit Corneille ', est Dieu l'ait homme, ouïe Verbe fait chair. » Quel est ce buisson dans lequel le Seigneur (Théodoret pense que c'était le Fils de Dieu) apparaît au berger Moïse? Quelques-uns pensent que c'était un lieu couvert de broussailles, d'autres un vrai buisson, ou arbre épineux, qui blessait si on le touchait. Mais Eucher, expliquant ce passage, affirme que c'était un bouquet de rosiers sauvages chargés de roses. C'est donc au milieu d'églantiers qu'il plut à la bonté divine de se rendre visible à Moïse pour le consoler, lui et les Juifs affligés succombant presque alors sous le joug insuppor- table des Egyptiens : Vidi af/lictioncm eorum, etc.

Voilà, serviteur de Marie, un beau type du saint Rosaire. La fleur de l'églantier a cinq feuilles distinctes ou pétales qui forment sa corolle, et le Rosaire se divise par cinquantaines. Cette espèce de roses est employée à des remèdes pour guérir le corps; le saint Rosaire est plus salutaire pour l'àme. Quoi- que non cultivée, la rose églantine répand une odeur agréable; le Rosaire porte jusqu'aux extn-mitt-Sjde la terre le suave par- fum de la vertu. Par ses trois sortes de couleurs, blanche, rouge, jaune, l'églantine ne figure-t-elle pas admirablement les trois espèces de mystères du saint Rosaire? 0 Rienheureuse Vierge, Reine du saint Rosaire, vous fûtes désignée vous-même par ce buisson de rosiers dans lequel apparut le Seigneur à Moïse : De même que cet arbrisseau entretenait le feu et ne brûlait pas, de même la Vierge enfante la lumière et reste in- tacte2. Quelle confiance, ô serviteurs de Marie, nous pouvons placer en la sainte Mère de Dieu, si nous l'honorons et l'aimons Comme notre Mère et notre reine. « Salue/. Marie qui a beau coup fait parmi vous, n

1 Corn. E.\ud. :î. 2. S. Greg. Nyss. oral, dr Christi nativ.

296 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

o. David avec sa harpe mit en fuite l'esprit malin qui agi- tait Saùl. « Il prenait sa harpe et en jouait, et Saùl était sou- lagé et se trouvait mieux, car l'esprit s'éloignait de lui. » Voilà encore une figure du saint Rosaire. Prenez cette harpe mystique, si les tentations du démon ou de la chair vous pres- sent. Si des maux viennent vous surprendre, jouez autant que vous pourrez et le mauvais esprit vous quittera et vous vous trouverez mieux. « C'est un grand bonheur de louer le Sei- gneur, de célébrer votre nom, ô Dieu Très-Haut, au son des instruments ; d'annoncer dès le matin votre miséricorde et votre vérité durant la nuit, par les sons du décacorde, parles cantiques unis à la guitare. »

Qui ne sait l'efficacité des prières de Moïse qui obtinrent le salut de tout le peuple d'Israël. Dieu irrité à cause du veau d'or, voulait perdre ce peuple : « Laissez-moi faire, afin que la fureur de mon indignation s'allume contre eux et que je les extermine. » Moïse répondit : «Souvenez-vous d'Abraham. d'Isaac et d'Israël vos serviteurs, etc. » Qu'arriva-t.-il ensuite? « Alors le Seigneur s'apaisa pour ne point faire à son peuple le mal dont il venait de parler. » Voyez, considérez comment la prière du seul Moïse lia les mains au Tout- Puissant pour l'empêcher d'effacer de la terre tout un peuple rebelle et liviv à l'idolâtrie. Si la prière d'un seul juste eut tant de puissance auprès de Dieu, combien n'en auront pas celles de plusieurs justes. Dix justes dans Sodome auraient empêché la destruc- tion de la ville par le feu du ciel. Non delebo propter dccem. Or, il y a certainement plusieurs àmcs justes et innocentes dans la grande association du saint Rosaire répandue de l'o- rient à l'occident; quel pouvoir auront donc auprès de Dieu tant d'âmes pieuses?

La prière de Josué arrêta le soleil ; la prière d'Ezéchias fit rétrograder de dix degrés ce même astre; la prière d'Elie ob- tint une pluie abondante. La prière de Jonas pénétra du fond de la mer et du ventre du poisson jusqu'au Seigneur et le délivra de la mort. La prière de Suzanne dépourvue de tout secours humain parvint au ciel, la sauva et lui rendit son

CONSIDÉRATION I.XVII. 297

honneur. Oh ! que ne fera pas auprès de Dieu une multi- tuilf nombreuse inscrite dans la confrérie du saint Rosaire! « Il est impossible, dit saint Ambroise , que les prières réu- nies d'un grand nombre de personnes ne soient pas exau- cée *. » Et quand elles no le seraient pas, toujours est-il que le Fils exauce sa Mère. « Voulez- vous une avocate auprès de Jésus-Christ ? dit saint Bernard, adressez-vous à-Marie; le Fils exaucera certainement sa Mère *. »

6. Remarquons de quelle manière Moïse apaisa le Seigneur et le pria pour le salut de son peuple. Il lui disait : Souvenez- vous d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. C'est encore une figure admirable réalisée dans le saint Rosaire. Abraham re- présenta les cinq mystères joyeux; c'est à lui que furent faites les promesses de l'incarnation du Verbe : « Il ne s'est pas rendu le libérateur des Anges, mais de la race d'Abraham. » Jésus-Christ, la Vérité, a dit de ce même patriarche : Abraham votre père a désiré avec ardeur de voir mon jour ; il l'a vu, et il en a été comblé de joie. C'est à lui aussi que Dieu procura un sujet de ris et de joie en lui donnant Isaac. Voilà les mys- tères joyeux. Souvenez-vous d'Isaac, n'était-il pas l'image des cinq mystères douloureux du Rosaire, quand il s'offrit à Dieu comme une victime volontaire, et porta sur ses épaules à la montagne le bois de son sacrifice? Voulez-vous les mystères glorieux? Souvenez-vous de Jacob, lequel, après la longue per- sécution de son frère Esaii, se réfugia en Mésopotamie, et vit, une nuit pendant son sommeil, l'échelle merveilleuse le long de laquelle les Anges montaient au ciel et en descen- daient, et le Seigneur appuyé au sommet lui adressant des paroles consolantes. A son réveil, il s'écria pénétré de joie et ilY-tonnement : i Le Seigneur est vraiment en ce lieu-ci... C'est véritablement la maison de Dieu et la porte du ciel. » Voilà la figure du Rosaire et de tous les mystères qu'il renferme.

Ame chrétienne, si vous désirez lier les mains au Tout- Puissant, comme Moïse, l'empêcher <le vous punir selon vos

1 S. \nilu\ iup. ep. arl llom. * S. lîrni. -l'ini. ()>- Vitiv. Virer. M.

298 LA MÈRE Ij'aMOUR ET DE DOULEUR.

péchés, de vous rejeter à jamais et de dire : Laissez-moi faire, afin que ma colère éclate ; vous avez à votre disposition un lien très-fort, le saint Rosaire. Imitez donc cette manière de prier par les quinze mystères : Souvenez-vous, Seigneur, Dieu du ciel et de la terre, de votre Fils incarné. Souvenez-vous de votre Fils qui a souffert, a été crucifié. Souvenez-vous de votre Fils ressuscitant glorieux, et de Marie sa sainte Mère qui a pris part à ces quinze mystères; et, en souvenir de leurs mérites, par- donnez-nous tous nos péchés. * La prière de celui qui s'humilie ainsi pénétrera au delà des nues, et ne descendra pas sans que le Très-Haut l'ait reçue. »

7. Pour confirmer cette vérité se présente le siège mer- veilleux de Jéricho, et la manière dont l'invincible et pieux Josué s'empara de cette ville fortifiée. « Tout le peuple ayant jeté un grand cri, et les trompettes sonnant, la voix et le son n'eurent pas plus tôt frappé les oreilles de la multitude, que les murailles tombèrent; et chacun monta par l'endroit qui était vis-à-vis de lui; ils prirent ainsi la ville. » Si, pour at- taquer les remparts, Josué avait employé les béliers en fer dont se servirent plus tard les Romains pour renverser les murailles ; s'il avait fait usage de canons, comme dans les guerres de notre temps ; s'il avait opposé les contre-mines aux mines des ennemis, et par le secours de la poudre renversé à terre les murs, les tours et les édifices, je ne serais pas étonné de voir Jéricho subitement détruite, renversée, dépeuplée; mais que, par les seuls cris du peuple et le son des trom- pettes, les murs soient tombés tout à coup, la chose mérite un plus grand examen.

Remarquez bien ceci : « Jéricho, dit Lyran *, signifie ville de faute, que bâtit l'amour de soi même poussé jusqu'au mé- pris de Dieu; » ville dont les murailles sont renversées moins par ce Yerbe de Dieu que par la clameur du peuple, et le son des trompettes, c'est-à-dire, selon le même auteur, « par le cri d'une dévote prière; » comme, par exemple, quand les

1 Lyran. in Jos. fi. 20.

CONSIDÉRATION iwii. :2!>!l

membres de la confrérie du saint Rosaire élèvent ensemble et en même temps leurs voix au ciel, et récitent avec un cœur dévot, cmifiit et humilié, la couronne de la Vierge ou le cha- pelet : prière publique se vérifie La parole du Sage : « Le frère aidé par sou frère, est comme une ville forte. » Et si la bouche de la Vérité même a dit : « Lorsque deux d'entre vous s'unissent ensemble snr la terre, quelque chose qu'ils deman- dent, elle leur sera accordée par mon Père qui est dans les cirux ; car, en quel lieu que se trouvent deux ou trois per- sonnes assemblées en mon nom, je m'y trouve au milieu d'elles ; à plus forte raison seront exaucées les prières, si tant de milliers de confrères et sœurs s'unissent dans le saint Ro- saire, et les offrent à la sainte Trinité par l'entremise de leur pieuse Mère et Reine. « Tout ce que vous avez l'intention d'of- frir, dit saint Bernard, souvenez-vous de le confier à Marie, si vous ne voulez pas éprouver un refus '. »

8. Terminons par l'exemple de deux reines. Rethsabée, la première, «Mitra auprès de son fds Salomon afin de demander qu'Adonias put prendre pour épouse Âbisag la Sunamite; elle éprouva un refus du roi qui lui dit : « Pourquoi me demander Abisag la Sunamite pour Adonias? Que ne demandez-vous pour lui tout mon royaume? » Esther, la seconde, obtint du roi Assuérus bien au delà de ce qu'elle osa demander : « 0 roi, si j'ai trouvé grâce à vos yeux, et si tel est votre bon plaisir, je vous conjure de m'aceorderma propre vie, et celle de mon peuple pour lequel j'implore votre clémence. » Non-seulement le roi se rendit h son désir, mais de plus il lui offrit en pur don et de son plein gré la moitié de son royaume : Etiamsi dimidlam partem règni mei petieris, impetrabis. Pourquoi la demande de l'une est-elle rejetée, tandis que l'autre obtient plus qu'elle n'a demandé?

C'est que' l'intercession de Bethsabée n'était point conve- uable, attendu qu'Adonias parce mariage aspirait en secret au trône même de Salomon; aussi pour ce sujet fut-il tué ce

1 S. Bern. lib. II. Flonun, c. >'<.

300 LA MERE D AMOUR ET 1>E DOULEUR.

jour-là par les ordres du roi. Mais la reine Esther, agréable aux yeux de tous, se montra la figure de Notre-Dame-du- Rosaire, comme on le voit par ce passage : « Cependant, avec, un teint vermeil, et des yeux pleins d'agréments et d'éclat, elle cachait la tristesse de son âme. Remarquez le teint ver- meil ; en effet, Marie est comparée à une rose plantée à Jéricho. « Marie, dit sur ce sujet Richard de Saint-Laurent ', est appe- lée rose de Jéricho, parce qu'il croit dans ce pays de très- belles roses ayant cent cinquante pétales à leur corolle, » autant qu'il y a d'Ave Maria dans le Rosaire entier. Que vous êtes heureux, si vous avez souvent couronné la Reine du saint Rosaire d'une telle couronne de roses! « Ecoutez-moi, mon fils, dit le Sage, ne vous dérobez pas à la loi de votre mère, afin que vous ajoutiez une grâce à votre tète et un collier à votre cou. » Le saint Rosaire est ce collier formé des beaux chaînons des différentes vertus, et entremêlé de pierreries précieuses l'on voit briller les grands du ciel qui ont été serviteurs de Marie. A l'œuvre! prudent lecteur, qui que vous soyez : dans la divine Vierge, louez Dieu; donner louange à Marie, c'est la donner à Dieu. Prenez vos armes et votre bou- clier, le saint Rosaire, et le récitez tous les jours en l'honneur de votre auguste Mère, afin d'ajouter une grâce nouvelle à votre tête et d'arriver enfin à la vie éternelle.

1 Rien, a S. Laur. lib. 12. de Laud. V.

CONSIDÉRATION LXVIII.

La B. Vierge est pleine de bonté pour cette vie et pour l'autre envers ceux qui l'honorent par la dévotion au saint Scapulaire.

l'Il IMI.II \l ET DEUX.

C'est un bouclier pour ceux qui mettent leur confiance en elle. (Prov. 30. 5.)

\ . David, beau jeune homme, qui n'avait pas moins de force que de grâce, se dirigeant vers Goliath, le géant philistin, pour combattre seul contre lui, commença par se munir de son bâton de berger, de cinq cailloux limpides, de sa fronde et de sa panetière : puis, confiant dans ces armes, et surtout en la protection de Dieu, il attaqua son ennemi avec un géné- reux courage et le vainquit. Ecoutons l'Ecriture : « Il mit la main à sa panetière, y prit une pierre, et l'ayant lancée avec sa fronde qu'il fit tourner, il en frappa le Philistin au front. »

Ame chrétienne, la vie de l'homme sur la terre est un com- bat. Bon gré, malgré, il vous faudra combattre avec le démon, la chair, le monde, les maladies, les tentations, des périls, des misères sans nombre, et enfin avec la mort. Par conséquent veillez de bonne heure à l'affaire de votre salut, et prenez soin de vous pourvoir des armes nécessaires pour vaincre vos en- nemis. Les armes du chrétien sont principalement le bâton, cinq pierres, la fronde et la panetière. Le bâton c'est la croix, suivant saint Augustin '; les cinq pierres sont les cinq plaies du Sauveur; la fronde, c'est le saint Rosaire, et la panetière le saint Scapulaire. Muni de ces armes spirituelles, vous vieu-

1 S. Aug. serai. 107.

302 LA MÈRE li'AMOlR ET DE DOULEUR.

drez facilement à bout de vaincre le démon et tous vos enne- mis.

On lit dans les annales d'Angleterre ', que le roi Arcture s'était fait faire un bouclier sur la face intérieure duquel était peinte par un artiste habile l'image de la Bienheureuse Vierge tenant l'enfant Jésus. Lorsque, dans les combats, quelque danger le menaçait, le roi jetait un coup d'ceil sur la sainte Mère de Dieu, et après avoir imploré son assistance avec fer- veur, il triomphait glorieusement des ennemis. Un jour, dans une bataille sanglante, ses soldats se disposant à fuir, il arriva que le roi, retournant son bouclier, leur montrala sainte image de la Yierge Mère en leur criant à haute voix : Voilà celle par qui nous combattons. A la vue de la Mère et du Fils, les sol- dats reprennent courage, se précipitent sur les bataillons en- nemis, les enfoncent, en font un grand carnage et remportent une pleine victoire. Le roi voulut après que Ton gravât ces mots sur son bouclier : Marie, salut de la patrie.

L'an de notre salut 1620, le roi Arcture eut un imitateur à la bataille de Prague \ Ce fut le Vénérable P. Dominique de Jésus-Marie, supérieur général des Carmes déchaussés, homme remarquable par l'innocence de ses mœurs et sa réputation de sainteté. Dans cette bataille sanglante, le mot d'ordre donné par le duc Maximilien de Bavière était sainte Marie, non-seu- lement il portait en avant le Seigneur des armées élevé en croix, comme pour ouvrir la marche, mais de plus il avait sur sa poitrine l'image de la Yierge Marie en guise de bouclier et de cuirasse. Les bataillons ennemis furent repoussés, leur armée taillée en pièces, et une insigne victoire couronna la journée à l'avantage de la catholicité. C'était le jour de l'octave de la Toussaint, le vingt-deuxième dimanche après la Pen- tecôte où se lit l'Evangile : « Rendez donc à César ce qui ap- partient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu. » A,la suite de cette affaire mémorable, Maximilien, Sérénissime Duc

1 Ann. Anglise lib. 7. c. 5. - P. Andr. à S. Tlieres. Carm. et pluies ulii.

CONSIDÉRATION LXV1II. .'tO.'i

de Bavière, et peu après Electeur, orna cette image delà Mère

de Dieu de l'inscription suivante : « C'est un bouclier pour ceux qui espèrenl en elle. « Donnez pour emblème à la divine Vierge Mère, gloire du CarmeTet protectrice de l'Église catho- lique, un bouclier terminé en pointe, avec la devise : Il protège et il arme-, ou bien le bouclier dont se servait Josué en atta- quant Haï, élevez votre bouclier contre In ville de liai, avec la devise :

Secours et ornement.

Oui, Bienheureuse Vierge, dans le saint Scapnlaire, vous êtes pour nous un bouclier et une cuirasse, une arme offen- sive et défensive, un secours et un ornement.

2. David, si vaillant à la guerre, une fois élevé sur le trône, construisit à Jérusalem près de la forteresse de Sion une tour très-forte en pierres de taille liées ensemble d'une manière in- dissoluble avec du fer et du plomb, et environnée de remparts pour en défendre les approches; et il y fit suspendre, non des épées ou des lances, non des arcs ou des javelots ou d'autres instruments de guerre, mais de simples boucliers : Mille rhjpei pendent ex ea;omnis armatura forthtm. Pourquoi mille boucliers dans la tour de David? À la lettre, ce n'était pas tant pour la terreur des ennemis que pour la splendeur de sa cité qu'il les suspendit au lieu le plus élevé de la tour. Mais, géné- ralement avec l'Eglise, les saints Pères, par la tour de David, entendent la sainte Mère de Dieu qui est terrible connut' oui- <tr- mée rangée en bataille, et à laquelle sont suspendus mille bou- cliers : « ces mille boucliers, dit le docteur Angélique, sont mille remèdes qui nous viennent delà Bienheureuse Vierge con- tre tous les dangers. »

Le cavalier couvert d'une excellente armure, qui combattait contre l'impie Ib'-liodore, pendant que les hfachabées étaienl en prière, paraissait tn-oir <les armes (for. Dans un autre pas- sage il est dit que Ton aperçut dans les airs pendant quarante jours ' des chevaux rangés par escadrons, qui couraient les

304 LA .MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

uns contre les autres; des combats de main à main; des bou- cliers agités; une multitude de gens armés de casques et d'é- pées nues; des dards lancés; des armes d'or toutes brillantes et des cuirasses de toutes sortes. » Et encore ailleurs : « Le so- leil frappa de ses rayons les boucliers d'or et d'airain, il en re- jaillit un éclat sur les montagnes d'alentour qui brillèrent comme des lampes ardentes. » 0 divine Vierge ! dans l'archi- confrérie du béni Scapulaire, vous êtes pour vos dévoués serviteurs plus qu'un casque et une cuirasse; vous êtes un bouclier d'or : le casque, en effet, ne protège que la poitrine et les épaules, mais le bouclier défend tout le corps. Les anciens boucliers étaient d'une telle grandeur qu'un seul pouvait faci- lement couvrir un homme et défendre toute sa personne contre les traits . Oui, vous êtes, ô Bienheureuse Vierge du Carmel, un pareil bouclier couvrant de votre protection et l'Eglise et le monde entier: « Depuis longtemps, dit saint Fulgence ', le ciel et la terre seraient tombés en ruine, si Marie ne les sou- tenait par ses prières.» Et saint Antonin 2 0 Souveraine, toute puissance vous a été donnée au ciel et sur la terre afin que vous puissiez faire tout ce que vous voulez. »

3. Au reste, chaque peuple faisait peindre ou sculpter divers symboles sur ses boucliers et étendards. L'empereur Winceslas avait fait graver sur son bouclier un vaisseau avec la devise: Il faut obéir aux vents. Otton de "NYittelspach, le cheval de Troie avec l'inscription : De l'audace. Alexandre de Medieis, premier duc d'Etrurie, un rhinocéros, avec l'épigraphe: Je ne reviens que vainqueur. Stanislas Hossius, amateur de la chasse, un chasseur portant un cerf sur ses épaules: Mon far- deau est le'r/cr. Olympia l'rsina fit représenter sur son bou- clier une flamme s'élevant en pointe : Jamais en bas. Le bouclier des Lacédémoniens portait : Sur lui ou avec lui. Celui de Mwtile : Secours ne faisant jamais défaut. Les Vénitiens sur leur bouclier représentaient un chien armé d'un collier à pointes aiguës, et la devise était : // blesse et il défend. Le

1 S. Fulg. iib. 't. Mvtliulog. * S. Antonin. serm. 2 do coronat. Maria-.

CONSIDÉRATION I.XMII. 30,*»

eomte d'Abensperge, confiant, dans la ville de Ratisbonne, ses trente-deux lils pour servir dans Les armées de Tempe- reur, leur donna pour armoiries un aigle avec ses petits con- templant le soleil, et la devise : Fidèles /<>/ts, vaillants fous. Les Romains encore aujourd'hui gravent sur leur bouclier natio- nal ces quatre lettres: S. P. Q. H. Voici, d'après Jean Car* thagéna ', l'origine de cet emblème : Les Sabins, nation gé- néreuse et guerrière, faisant une guerre cruelle aux Romains, avaient fait mettre sur leurs boucliers et leurs étendards, ces quatre caractères : S. P. Q. R. Saùino Populo Quis Iie- sistet? signifiant : Qui peut résister au peuple sabin ? De leur cùté les Romains, en réponse à cette provocation, mirent sur leurs étendards et leurs boucliers : S. P. Q. R. Sénatus Populus Que Romus : le sénat et le peuple romain. La bataille s'en- gage, les Sabins sont subjugués, et les Romains pour perpétuer le souvenir de leur insigne victoire, conservent les quatre lettres S. P. Q. R. gravées sur le bouclier national au Capitole ; on les remarque aussi, dans toute la ville, inscrites sur les portes des palais.

Ame chrétienne, arrêtez-vous un instant et considérez les temps actuels, vrais siècles de fer Dieu dans sa justice nous punit de nos péchés par le fléau de continuelles guerres. Ne dirait-on pas que le souverain vengeur a inscrit sur son étendard les mêmes lettres : S. P. Q. R. Sériera Punituro Quis Resistet? Qui peut résister à Dieu quand il a résolu de punir les crimes? Ni les Anges, ni les Saints, ni tous les hommes ensemble. Rappelez-vous la Pentapole détruite, l'u- nivers submergé dans le déluge, et une infinité d'autres fléaux par lesquels il a puni dans tous les temps le monde rebelle, re qui faisait dire à Ralaam : « Sa force est semblable à celle du rhinocéros. » animal féroce qu'aucun homme ne peut dompter. « Sa puissance est pareille à celle du rhinocéros, •lit aussi le Deutéroneme, il enlèvera en l'air tous les peuples jusques aux extrémités «le la terre. »

1 Jnan. Cartliatr. et alii.

II. -'"

30(3 LA MÈKE b'AHOUB Kl 1>E DOULEUR.

Cependant, enfants de Marie, ayez confiance, vous surtout qui portez le saint Scapulaire, oui, ayez confiance : voici la Bienheureuse Vierge du Mont Carmel qui vient à vous comme une mère honorée et respectée ; et à Dieu irrité ainsi qu'à son doux Fils, elle montre un autre bouclier portant les quatre mêmes caractères en or : S. P. Q. R. comme pour dire : Mon Fils, si vous ne consultez que la justice, sans la miséricorde, qui vous résistera? Vous détruirez le genre humain. Scelera Punituro Quis Resistet ? Mais mes frères vous présentent dans le saint Scapulaire un bouclier, un étendard de salut il y a en réponse : S. P. Q. R. c'est-à-dire : Scapulare Portons Qitando Rogat. Qui vous résistera? Celui qui porte le scapu- laire quand il prie. De même que le cordon d'écarlate fut un signe de salut pour Rahab et sa famille à la prise de Jéricho ; ainsi le béni Scapulaire est pour celui qui le porte dévotement et vit en pieux chrétien, un signe de préservation, un salut dans les dangers, un gage de paix et d'alliance éternelle.

4. Dans l'archiconfrérie du saint Scapulaire, la sainte Mère de Dieu m'apparait avec toute la sollicitude et la tendresse qu'avait Rébecca pour procurer à son fils Jacob des habits tout neufs et parfumés, afin qu'il obtint plus facilement la su- prême bénédiction de son père mourant. Les soins de Rébecca eurent un plein succès, car aussitôt qu'Isaac sentit l'odeur des vêtements parfumés, il bénit Jacob et lui dit : L'odeur qui sort de mon fils est semblable à celle d'un champ plein de fleurs, que le Seigneur a comblé de ses bénédictions. Que Dieu vous donne une abondance de blé et de vin, la rosée du ciel et la graisse de la terre.

Admirable figure ayant son accomplissement dans les reli- gieux du Mont Carmel et dans les associés du saint Scapulaire, auxquels, comme à ses enfants privilégiés, la Vierge, en mère tendre, a préparé de très-beaux habits qui exilaient l'odeur des vertus, et qu'elle couvre du Scapulaire comme d'un bou- clier. Voici qu'elle fut l'origine de cette confrérie. L'an 1240, florissait dans l'Eglise de Dieu le Bienheureux Simon Stock, biglais, prieur général du saint ordre dos Carmes. Comme il

CONSIDÉRATION I.XVIIl. .ÎOT

avait une grande dévotion pour la divine Mère, il la supplia très ardemment de daigner lui montrer quelque signe de son amonr. La sainte Vierge alors lui apparaît accompagnée d'une troupe d'Anges et toute resplendissante de Lumière, et lui présente le Scapulairc de l'ordre en lui disant : « Recevez, mon cher fils, ce Scapulairc de votre Ordre, comme un signe de ma confrérie et un privilège pour vous et tous les Carmes. Celui qui mourra revêtu de cet habit ne soulIVira pas les peines éternelles «le l'enfer. Voilà le signe de salut, la préservation dans les périls, le gage de la paix et de l'alliance éternelle. » Revêtu de ce céleste habit, le Bienheureux Simon se mit à faire connaître ouvertement cette faveur insigne, gage d'a- mour envers lui et son saint Ordre. Depuis lors, non-seule- ment les habitants des villes et des campagnes, mais empe- reurs, rois, ducs, grands seigneurs, personnages illustres et nobles de l'un et l'autre sexe, et les souverains pontifes eux- mêmes entrèrent dans l'association et reçurent le saint Scapulairc DeLezanafaitremarqueravecraison que les paroles précitées de la fi. Vierge ne doivent pas être entendues à la lettre et dans le sens absolu; Marie promet son efficace in- tercession aux confrères qui vivent non en païens mais en chrétiens, qui observent les commandements de Dieu et por- tent dévotement le saint Scapulairc en accomplissant les rè- glements et statuts de la confrérie. Ce sont les vrais enfants de Marie, la céleste Rébecca ; c'est à eux qu'elle obtiendra toutes les bénédictions de la part de Jésus-Christ son bien- aimé Fils : Ecce odùr i'ilii mei sicut odor agri plcni, eut be- in', Il lit Dnuiinus.

5. Cependant la sainte Mère de Dieu ne favorise pas uni- quement en cette vie ses serviteurs qui portent le saint Scapulairc; elle leur est encore propice après la mort par sa puissante intercession. Caleb en mariant sa fille Axa au COU- rtgenx Othoniel, lui donna pour héritage une terre arrosée d'eau. « Donnez-moi votre bénédiction, et accordez-moi une grâce : Vous m'avez donné une terre exposée, au midi el toute sèche : ajoutez-y-en une attire il y ait des eaux en

308 LA .MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

abondance. Caleb lui donna donc une terre dont le haut et le bas étaient arrosés d'eau. » Ayez confiance, confrérie du saint Scapulaire dédiée à la Mère de Dieu ; vous êtes comme Axa : le Seigneur vous a donné pour dot une terre dont le haut et le bas sont arrosés. En haut, sur cette terre, pour les confrères et sœurs pendant leur vie, de nombreux privilèges : Commu- nion de bonnes œuvres, de prières, de suffrages et autres biens spirituels ; et en bas dans les flammes du purgatoire, la délivrance le premier samedi qui suivra la mort. Pour con- firmer cette assertion, voyons le diplôme du pape PaulV : « Le peuple chrétien peut pieusement croire aux Pères Carmes re- lativement au soulagement promis aux âmes des Frères et as- sociés de la confrérie de Notre-Dame du Mont Carmel, savoir : que la Bienheureuse Yierge aidera de son intercession conti- nuelle, de ses pieux suffrages, de sesméritesetdesaprotection spéciale après leur mort, surtout le samedi, jour qui lui est dédié par l'Eglise, les âmes des Frères et des associés déeédéfl dans la charité, qui pendant leur vie auront porté le Scapu- laire, vécu dans la chasteté de leur état et récité le petit office de la sainte Vierge; ou, s'ils ne savent le réciter, auront ob- servé les jeûnes prescrits par l'Eglise et l'abstinence le mer- credi et le samedi, excepté en la fête de Noël, si elle tombait l'un de ces jours. »

L'Ecriture nous apprend que l'on jeta Jérémie dans le puits de Melchia il n'y avait point d'eau, mais de la boue, afin qu'il y mourût plongé dans la vase jusqu'au-dessus des épaules. Mais Abdémélech en eut compassion, lui fit descendre avec des cordes de vieux morceaux d'étoffes pour mettre sous ses aisselles et le fit sortir de ce lieu de misères et de boue : Et extraxerunt Jercmiam fitniôus, et eduxerurU ami de lacu. Par cette obscure et horrible basse-fosse, entendons le purgatoire dans lequel nous faisons descendre les moyens de délivrance, quand nous prions Dieu, par le saint Scapulaire et les mérites de Marie, de daigner les faire sortir de ce lieu de peines et de les retirer des ombres de la mort pour les placer dans le séjour de lumière et de paix. Citons aussi la

COlfSIDEBATIOM I.XVIIl . ;{llit

bulle de Clément VII : « Le samedi qui suivra le jour de la

mort des confrères ou sœurs, ou des religieux, et leur entrée

dans le purgatoire, la glorieuse Vierge Marie, If ère de Dieu,

les visitant, délivrera leurs âmes des peines du purgatoire. »

.le me rappelle ici saint Pierre, prince des Apôtres, qui

n'ayant pas de quoi payer le tribut dans la ville de Capliar-

naum, sur l'ordre du divin Maître jeta sa ligne à la mer et

trouva une pièce de monnaie dans les entrailles d'un poisson :

Ymle ad marc, et mitte hamwn. Ame chrétienne, imitez-le,

prenez la ligne, c'est-à-dire le Scapulaire, et le jetez dans la

mer, je veux dire dans le purgatoire qui, selon saint Thomas,

est une vraie mer amère, « parce qu'il n'y a pas dans le monde

entier de tourments plus amers que ceux qu'on y endure \ »

et vous pécherez des âmes.

6. Avec le manteau qu'Elie lui avait laissé pour souvenir comme à son disciple fidèle en s'élevant au ciel, Elisée divisa le Jourdain et le passa à pied sec : Et levavit pallium Elise, i/i/od ceciderat ci : reversusque stetit super ripam Jordanis, etc. Si vous voulez passer tranquillement à votre mort le fleuve du Jourdain ou du jugement (c'est ce que signifie ce mot), saisissez le manteau d'Elie, le béni Scapulaire, observez-en les règles, vivez chrétiennement, et vous comparaîtrez sans crainte au tribunal de Jésus-Christ.

Les Anges conseillèrent à Loth, frère d'Abraham, de se reti- rer sur la montagne s'il voulait conserver sa vie : lu munir sakntm te far, ne et tu simui perças. Ce monde, plein d'iniquité n'est-il pas semblable à Sodome? « Le monde entier, dit le disciple aimé du Seigneur, est sous L'empire de l'esprit mauvais. » Corneille dit, expliquant ce passage : « L'expé- rience nous apprend que le monde, comme Sodoinc, esl plein de cupidité, d'orgueil, de fraude, de luxure, de gourmandise, d'avarice et de toutes sortes de maux. » Eh bien, si vous voulez sauver votre àme au milieu de tant de périls et de tentations, réfugiez-vous sur la montagne, de peur que vous

1 S. rimiii. in suppl. tertue partis.

310 LA MÊBE D AMOUR ET DE DOULEUR.

lie périssiez aussi vous-même avec les autres. » C'est sur le moût Carmel que je veux dire, au moyen de la dévotion au Scapulaire, bouclier de défense et signe de salut : « Celui qui en sera revêtu à sa mort ne souffira pas les flammes éternelles. »

Le prêtre Abiathar qui conspira contre Salomon avec Adonias et donna l'onction royale à ce dernier, méritait la peine de mort pour crime de lèse-majesté, mais parce que, autrefois, il s'était montré fidèle à David et avait porté l'arche du Seigneur, Salomon lui fit grâce de la vie. « Le roi dit au prêtre Abiathar : Retirez-vous dans Anathod est votre pro- priété. Yous êtes, il est vrai, un homme digne de mort, néanmoins je ne vous ferai point mourir cette fois, parce que vous avez porté l'arche du Seigneur en présence de David mon père. » 0 chrétiens ! toutes les fois que nous avons commis un péché mortel, nous sommes devenus coupables de lèse-majesté divine ; et si de fait nous n'avons pas eu à subir les peines du feu de l'enfer, rendons-en grâces à Jésus-Christ notre juge, qui, par l'intercession de sa sainte Mère, nous a miséricordieusement laissé le temps de faire pénitence, « parce que nous avons porté l'arche du Seigneur, » le saint Scapulaire.

7. La pieuse femme de Sarepta, comme on le voit aux annales des Rois, ne se contenta pas de donner l'hospitalité au prophète Elie fuyant la colère de Jézabel, elle lui fournit à manger au péril même de sa propre vie : « Levez-vous, allez à Sarepta, ville des Sidoniens, et demeurez : j'ai commandé à une veuve' de vous nourrir. » Un auteur grave, Arnold Bostius ', s'empare de ce fait pour parler ainsi à la sainte Mère de Dieu : « Yous êtes la femme de Sarepta; vous four- nissez à Elie, dans la personne de ses enfants, et le logement et la nourriture. » Elle le fait, soit dans ce monde, en prenant soin des fils d'Elie dans la confrérie du Scapulaire, soit dans l'autre, en leur procurant le plus tôt possible les joies éternelles.

1 Arnold. Bost. in suo de Patronat Virg. lib. cap. I.

I 0NSID1 R M [OH I.XVIII. 31 1

Ecoutei avec attention, serviteur de Marie, l'assurance con- solante qu'on pieux auteur, Louis de Mois ', nous donne ;ui nom de Marie elle-même : « Tous ceux qui me servent en vivant pieusement et saintement, je veux être fidèlement présente à leur mort, les protéger et les consoler comme une tendre Mère. » Il y a plus encore : après la mort elle est tou- jours bonne Mère pour ses dévots serviteurs dans les flammes expiatrices du purgatoire; elle l'a dit en ces termes à sainte Brigitte : « Je suis une Mère pour tous ceux qui sont en purgatoire ; et toutes les peines que l'on doit y souffrir en expiation des péchés, sont adoucies en quelque sorte à chaque heure par mes prières. » Ainsi donc, ô chrétien, qui que vous soyez, suivez le conseil donné par ses serviteurs à Naaman le Syrien, homme riche et puissant, mais lépreux : « Père. quand le prophète vous aurait ordonné quelque chose de bien difficile, vous auriez néanmoins le faire; combien donc devez-vous plutôt lui obéir lorsqu'il vous dit : Allez vous laver, et vous deviendrez net. » Je vous dis de même : Si je vous avais recommandé une chose difficile, vous auriez la faire ; combien plus devez-vous m'obéir quand je vous dis : Prenez le Scapulaire, observez les règlements de cette œuvre, et VOUS ne souffrirez pas les feux éternels.

'Lud. Mos. ni Honil. c. \'2.

CONSIDERATION LXIX.

La Mère d'amour et de douleur doit être particulièrement invoquée pour qu'elle daigne nous assister à l'heure de la mort.

ITIVA» SECt.\DA.

Défendez-nota contre l'ennemi, et recevez-nous à l'heure de notre mort. (L'Eglise dans une hymne de la B. V.)

1. C'est l'habitude des serpents cachés dans l'herbe, comme l'observe l'abbé Rupert, de ne pas attaquer les personnes à force ouverte, mais par la ruse, par derrière en cherchant à les mordre au talon, et de leur donner ainsi la mort par leur venin qui s'infiltre dans tout le corps ; de cette parole de l'Ecclésiastique : // mord en silence. Telle est à peu près la tactique du vieux serpent, du démon, l'ennemi déclaré du genre humain : il dresse ses embûches au talon de l'homme, et s'efforce de le mordre comme par derrière. C'est son habi tude surtout de chercher à inoculer tout ce qu'il a de venin à l'homme quand il est sur le point de quitter cette vie mortelle pour aller paraître au jugement et entrer dans la longue éternité. « Malheur à la terre et à la mer, dit saint Jean, parce que le diable est descendu vers vous, plein de colère, sachant le peu de temps qui lui reste » pour travailler à vous perdre. Il n'est rien qu'il ne tente pour sortir vainqueur de la lutte. C'est à quoi fit allusion Dieu la Vérité même, quand il pro- nonça contre lui cette sentence dans le paradis terrestre . après qu'il eut séduit notre mère Eve : « Tu lui dresseras des embûches au talon. » Pourquoi pas aux yeux? David fut pris par les yeux en voyant la beauté d'une femme. Pourquoi pas

I ONSIDl RAI ION I.X1X. :! I 3

ans oreilles? Eve prêta facilement L'oreille an tentateur qui

lui disait : Vous serez comme des dieux. Pourquoi pas à la bouche et à la gourmandise? Le mauvais riche aimait la bonne chère et vivait chaque jour splendidement. Pourquoi pas aux mains et aux pieds? Achan déroba quelque chose de ce qui avait été soumis à l'anathème. Pourquoi pas au cœur? « C'est du cœur que sortent les mauvaises pensées, les homicides, les adultères, les fornications, les larcins, les faux témoignages, les blasphèmes : et telles sont les choses qui souillent l'homme. » Pourquoi donc le Seigneur dit-il que le démon dressera ses embûches au talon de l'homme? Et tu insidiabe- ris calcaneo cjus.

« Le talon, qui est la dernière partie du corps, dit saint Vincent Ferrier, désigne la mort. » Et le savant Alcuin : « Le démon nous dresse des embûches au talon, parce qu'il attaque plus vivement h fin de notre vie. » Mais louanges immor- telles et infinies à Jésus-Christ l'Homme-Dieu, de ce que, en mourant sur la croix, il nous a recommandé sa sainte Mère pour être notre puissante patronne contre la mort : Ecce Mater tua. Pendant qu'elle assistait courageusement , mais non sans une grande angoisse, à la mort de son Fils sur la croix, un privilège particulier lui fut accordé, savoir, d'assister ses enfants spirituels à l'article de leur mort, de les secourir, de les défendre des attaques des démons. Et de même que Dieu a créé la lune pour présider à la nuit, comme il est dit dans la Oenèse ; de même au moment de la mort, comparée juste ment à la nuit, la sainte Mère de Dieu, lune pleine et parfaite- éclaire de ses rayons ses serviteurs bien-aimés. Entendez Im- minent Tolet sur ces paroles : Femme, voilà votre /ils : « Il nous recommande tous aux soins, à la protection, à l'i ut ereession de la Vierge ; et il nous communique la confiance, afin que nous ayons recours à elle dans toutes nos difficultés comme à notre Mère et notre Souveraine, n Et saint Bernard : « Etendez grâces i "lui qui, eu votre faveur, adoué d'une si grande compas- sion une telle médiatrice, qui BC roua délaissera pas à La mort, mais vous viendra au-devant comme une mèrecomblée

314 UA HÈRE AMOUR ET DE DOULEUR.

d'honneur : Une mère peut-elle oublier son enfant et ne pas avoir compassion du fils qu'elle a porté dans ses entrailles? L'Eglise lui dit donc avec raison dans ses hymnes : « Marie, Mère de la grâce, douce Mère de la clémence, défendez-nous contre l'ennemi, et recevez-nous à l'heure de la mort. » Qu'il soit ainsi, ô Souveraine, qu'il soit ainsi : Recevez-nous à F heure de la mort. L'emblème représentera une horloge sur laquelle un doigt montre la deuxième heure, qui en latin signifie aussi heure propice, heureuse, favorable; et la devise sera :

«Plaise à Dieu que je meure à une heure propice!*

2. Le faux prophète Balaam souhaitait cette heure favorable pour le moment de sa mort, sachant bien que l'éternité dépend du dernier instant de la vie. 11 disait : Que je meure de la mort des justes, et que la fin de ma vie ressemble à celle de ces hommes. C'est ainsi que des méchants, des impies, des athées désirent une mort heureuse, et fuient la bonne vie. Balaam eût tenu un langage et plus prudent et plus utile pour lui, s'il avait dit : que je vive de la vie des justes, et que je meure de leur mort. Hélas! fauteur et vénérateur des idoles, il ne la trouva point cette mort précieuse et sainte. Que vous êtes plus heureux, ô serviteurs de Marie, vous à qui le Sauveur mou- rant sur une croix laissa pour mère, en la personne de saint Jean, sa très-sainte Mère. Ce n'était pas assez pour lui de vous avoir faits enfants de son Père céleste, si, pour vous unir à lui d'une manière plus étroite, il ne vous faisait encore enfants de sa Mère bien-aimée : vos Filii exeeki omnet.

Elie, élevé au ciel dans un tourbillon sur un char de feu, laissa son manteau à son cher disciple Elisée. Jésus-Christ a fait davantage; quand, brûlant d'une immense charité poul- ies hommes, il s'est élevé par le tourbillon de ses souffrances sur le char de feu de sa sainte croix, il vous a légué, vénéra- leurs de Marie, sa divine Mère qui l'avait revêtu d'un corps humain et avait été comme un manteau pour le couvrir en If portant dans ses chastes entrailles. Avec le manteau d'£Ue,

CONSIDÉRATION l.\l\. il-i

Elisée passa le Jourdain à pied sec; vous, avec l'aide de la Vierge, vous pouvez espérer une heureuse mort et une sen- tence favorable au jugement : « Vous ne pouvez trouver, dit saint Jldephonse, une avocate plus puissante pour apaiser la colère du juge, que celle qui a mérité d'être Mère de co juge, votre Rédempteur. »

3 Quand le vaillant général Barac conduisait son armée contre Sisara pour lui livrer bataille, il voulut d'abord con- sulter la sage et prudente Débora, et lui dit : ' « Si vous venez avec moi, j'irai ; si vous ne voulez point venir avec moi, je n'irai point. Débora lui répondit : Je veux bien aller avec roua ; mais la victoire pour cette fois ne vous sera point attri- buée, parce que Sisara sera livré entre les mains d'une femme. » Barac partit, et fortifié' par la prophétesse Débora, il attaqua l'ennemi avec confiance et eut un plein succès ; l'apôtre a fait l'éloge de sa foi dans l'épitre aux Hébreux. Un combat nous est réservé, enfants de Marie, combat décisif d'où dépend une éternité heureuse ou malheureuse : c'est le dernier moment de Dotre vie. Oh! de quelle importance est cette affaire! Près d'elle^les grandes affaires des empereurs, des rois et des princes, ne sont rien : elles n'ont pour heureux résultat qu'une prospé- rité temporelle ; mais de celle-là dépend l'éternelle béatitude. Recourons à une courageuse et prudente Débora qui se mêle avec nous de la bataille « nous n'aurons pas à combattre contre des hommes de chair et de sang, mais contre les prin- cipautés et les puissances infernales ; contre les princes du monde, c'est-à-dire de ce siècle ténébreux ; contre les esprits de malice répandus dans l'air : « c'est pourquoi prenez toutes les armes de Dieu, afin que vous puissiez résister au jour mau- vais4. » Notre Débora, c'est la très-sainte Vierge, Bière de Dieu, qui depuis longtemps a brisé la tète au vieux serpent. Cette saint.- et puissante héroïne qui était autrefois présente au combat du Calvaire, Satan tut vaincu et l'univers racheté, invitons-la souvent avec humilité, invitons-la tons les jours

1 Judir. \. R - Ephf- 8 I -'.

316 LA MÈRE h AMOUR ET DE DOULEUR.

avec ardeur à notre dernière lutte, afin qu'elle tire le pauvre des mains de ceux qui sont plus forts que lui, et qu'elle arrache l'indigent et le pauvre à ceux qui les dépouillaient.

i. Au Livre des Nombres, il est rapporté comment Dathau et Abiron, s'opposantà Moïse et Aaron, furent engloutis avec leurs familles, et plongés dans les gouffres de l'enfer : Descen- deruni vivi in in/crnum. Pourquoi ensevelis vivants? Parce que la terre s'entrouvrit sous leurs pieds. Richard de Saint- Laurent fait cette belle réflexion ' : « La terre, c'est Marie ; si elle manque pour nous soutenir, nous descendons vivants en enfer comme Dathan et Abiron. » 0 Marie, o terre bénie dont le prophète a dit : a Que la terre s'ouvre, et qu'elle germe le Sauveur. »

Le Prophète Jérémie \ que Dieu dans sa clémence envoya vers son peuple, aux approches de la captivité de Babylone, pour l'exciter à la pénitence par ses discours, eut un jour une admirable vision : « Le Seigneur me parla encore et me dit : Que voyez-vous, Jérémie ? Je lui répondis : Je vois une verge qui veille. » D'autres lisent et exposent ainsi : « Je vois une verge qui a des yeux, ou qui a les yeux ouverts et vigilants. » Pour- quoi, je vous prie, cette verge vigilante et ayant des yeux? C'est Marie qui est ainsi représentée ; Marie, rejeton de la tige de Jessé, veillant toujours pour notre avantage, et poul- ie salut éternel de ses serviteurs, et de laquelle Balaam a prophétisé : « Une étoile sortira de Jacob ; un rejeton s'élèvera d'Israël, et il frappera les chefs de Moab ; il ruinera tous les enfants de Seth, c'est-à-dire toutes les puissances de l'enfer; car Assur, ou le démon avec toutes ses légions infernales, qui frappait les autres et cherchait à nuire aux serviteurs de Marie au moment de leur mort sera lui-même frappé do cttte verge et tremblera '.

Moïse, avec sa baguette au moyen de laquelle il opérait tant de prodiges, divisa la mer Rouge, et conduisit pieds secs le peuple de Dieu vers la terre promise : Eleva virgam

' Midi, i S l.nur. I. de LatuLV. c. 3. s Jerem. III.— 3 haie. M. 31.

I ONSIDRRATION I.XIX. i! 17

tuam et extende maman tuam super mare, et divide Uluil, ut gradUmtur filii Israël in malin mari per siceum. 0 Bienheu- reuse Vierge I Mère des vivants et dos mourants, La baguette de Moïse vous représentait, vous par qui nous pouvons fran- chir et la mer agitée de ce monde, et la mort même, et par- venir à la désirable patrie coulent le miel et le lait. « Or Marie, dit le B. Pierre Damien ', est cette baguette au moyen de laquelle sont repoussées les attaques des démons ; la verge d'Aaron qui opère des signes merveilleux, c'est le bâton de la croix, qui non-seulement a blessé, mais a tué l'homicide insatiable qui se repaît de la mort des bommeset s'en nourrit. Dans .Marie et dans le bâton de la croix sontl'es- poir et la consolation des malheureux ; comme le sublime pro- phète le déclare allante voix : votre baguette et votre bâtoo ont été pour moi le sujet d'une grande consolation \

5. Le Prophète royal vit un jour en esprit le trône de l'Eter- nel, et à sa droite une reine dans une admirable spleudeur, vêtue d'un habit enrichi d'or et environnée de ses divers or- nements : Adstitit Regina a dextris tuis in vestitu deauratocir- cumdata varie tate. Quelques auteurs par cette reine ont entendu l'Eglise ; mais saint Àtbanase, saint (Jregoire de Néo- « .saiée, Hugues le cardinal, Alpbonse et d'autres cités et suivis par Thomas le Blanc, comprennent la sainte Mère de Dieu, Reine du ciel et de la terre : Adstitit Regina a dextris tuis. Pourquoi le Prophète royal l'a-t-il vue debout à la droite du Koi du ciel, et non pas assise sur un trône comme la reine Bethsabée a la droite du roi Salomon ? Posilusque est tronus nui tri Régis, (juœsctlit ad drrtcrain ('jus.

.Nous répondons avec saint Augustin 3 : « Se tenir debout indique qu'on est prêt à secourir, et désigne la fonction d'à vocat. n Donc, puisque Marie, la puissante Heine des cieux et de L'univers a été vue, non assise, mais debout à ta droite i\r Jésus-Christ le souverain Juge, c'est qu'elle a pris sur elle L*of

1 15. Pet. Dam. serm. de Assumpt. Virg.— ' Ps. 22. i. 'S.Am

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:J18 LA MÈRE d'AMOUB ET I>E LOULEUR.

fice d'avocate. « Elle se tient justement debout à votre droite, dit Hugues de Saint-Victor ', comme notre patronne, pour arrêter le glaive prêt à frapper le pécheur. Et le savant Idiot i: Marie n'est pas assise, elle est debout pour venir en aide aux pécheurs, pour protéger surtout dans leur dernier combat ceux qui ont à lutter contre toute l'éternité ; dans ce dangereux péril, la Yierge se charge d'en prendre un soin particulier. Oh! si les cinq vierges folles n'avaient pas seulement crié : Domine ! Domine! Seigneur! Seigneur! si elles avaient dit aussi : Domina! Domina! Souveraine! Souveraine! ouvrez nous ! sans aucun doute elles eussent été admises aux noces de l'a- gneau. Mais comme elles étaient venues trop tard, sans mettre de l'huile à leurs lampes, et que la porte était déjà fermée, elles furent réprouvées à jamais : Je ne vous connais pas! Parole terrible qui lit tomber sur elles l'éternelle malédiction commeun coup de tonnerre ! « Neseio vos! ces mots prononcés, dit saiut Chrysostome, il ne reste plus que l'enfer et ses into- lérables supplices; ils sont même plus lourds que l'enfer \ »

Et quelle faute avaient faite ces vierges imprudentes? Je l'ai dit avec l'Evangile, « elles n'avaient pas mis l'huile dans leurs lampes ; » Votre nom est une huile répandue, ô Bienheu- reuse Yierge. « Et la porte fut fermée; » selon Mansi 4, celte porte est Marie, elle est l'entrée du ciel, elle est la porte céleste. Malheur donc à celui pour qui sera fermée cette heureuse porte au moment de sa mort; mais, bicnlicureux l'homme q ni veille chaque jour à ma porte et demeure en observation au seuil de ma demeure. Celui qui me trouvera, aura trouvé la vie, et il puisera le salut auprès du Seigneur.

6. Le jeune berger David avec une des cinq pierres limpides qu'il avait prises dans le torrent pour aller au combat, eut le bonheur de terrasser le robuste géant philistin. Eh bien, pen- dant qu'il en est temps, choisissez, cher lecteur, cinq pierres limpides; choisissez le saint nom de Marie composé de cinq

1 De Laud. V. 1. 4 . * De contempl. Virg. 3 S. Chrysost. in Mattli. 2.:i, II.—" Mans, in fc>to Purif. dis. 8,

CONSIDÉRATION I.X1X. 319

lettres comme de cinq petites pierres précieuses ; et par la vertu de ce saint nom vous renverserez le démon dans votre dernière agonie. « se trouve le nom de Marie, dit saint Bernard, toul moyen de nnire est enlevé aux démons, parce que Marie est terrible comme une armée rangée en bataille '. »

Les saints docteurs ont cherché à expliquer pourquoi notre saint Rédempteur, Jésus-Christ, suspendu en croix entre deux scélérats, tournait le dos à Jérusalem et avait visage vers l'occident: Dorsumet non faciem ostendam eis in die perdu tionis l ; pourquoi aussi l'affligée Vierge Mère choisit, auprès de la croix, sa place au nord.

A la première demande, Antoine Spinelli répond3 : « Ce n'est pas sans mystère que Jésus en croix regardait l'occident; c'est qu'il combat contre la mort qui est désignée par le cou chant : par cette position, il avait l'œil de sa miséricorde tourné vers les nations situées à l'occident et dont la ville principale était Rome desti.-'-e à être le siège perpétuel de son vicaire. Le prophète avait dit : Oculi ejus super gentes respiciunt. » Quant à la Douloureuse Mère de Jésus, elle s'était placée au nord parce que, suivant Jérémie, « c'est de l'aquilon que les maux viendront fondre sur tous les habitants de la terre, » surtout à l'heure ils ont à lutter avec le démon, la mort et l'éternité. Alors, ô pécheur, vos ennemis vous environneront et vous presseront de tous côtés ; alors la crainte de la mort jettera dans le trouble celui qui péchait chaque jour et ne se repentit pas ; alors votre àme sera lasse de la vie parce que vous n'aurez point connu le temps de votre visite. Oh! quelle horrible agonie vous est réservée ! quelle formidable lutte, si la mort vous saisit dormant dans le péché : 0 mon àme, si vous connaissiez vous aussi, et dès cette heure, ce qui peut vous procurer la paix, et quelle assurance vous donnera au moment de la mort une vraie et sincère dévotion envers Marie votre sainte et Douloureuse Mère! Invoquez la souvent, avec instance; priez-la tous les jours, par le très-doux Cœur

' S. Sera, in Gant. - Jerem. 18. 17, :' In Tron. B. V. c. 15.

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LA MEME ItA.MniK I |»E I.olhhll;.

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la Yierge se charge d'en rendrt m soin particulier. Oh! si les cinq vierges folles n'avaient j s seulement crié : Domine ! Domine! Seigneur! Seigneur si elles avaient dit aussi : Dominai Domina! Souverain! Souveraine! ouvrez nous ! sans aucun doute elles eussent é admises aux noces de l'a- gn u. Mais comme elles étaienVenues trop tard, sans mettre de 1 huile à leurs lampes, et qi- la porte était déjà fermée, elles furent réprou\ees à jam s : Je ne vous coîinais pas! Parole terrible qui tit tomber si elles l'éternelle malédiction comme un coup de tonnerre ! « V cio ros/eesmots pronon dit saint Chrysostome, il ne rest plus que l'enfer et ses int< lérables supplices; ils sont mèn plus lourds que l'enfer3.

Et quelle faute avaient faite es vierges imprudentes? J l'ai dit avec l'Evangile, « elles nvaient pas mis l'huile dai leurs lampes ; » Votre nom est ne huile répandue, o Bienrn reuse Vierge. « Et la porte fut fanée; » selon Mansi \ n est Marie, elle est l'entrée à ciel, elle est la porte célt Malheur donc à celui pour qusera fermée cette heur' porte au moment de sa moi ; n . bienheureux l 'homm veille chaque jour à ma porte e en observation au

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320 LA MÈRE 1) AMOUR ET DE DOULEUR.

Jésus son aimant Fils, de daigner vous assistera votre mort, peut-être très-prochaine, comme elle assistait au Calvaire Jésus agonisant. Pour votre consolation, écoutez Antoine Spinelli déjà cité : « Par un bienfait particulier de Dieu, la Vierge sainte a été donnée en aide au genre humain, et c'est pour nous le faire comprendre que, au pied de la croix, elle se tenait vers cette partie d'où viennent les maux, c'est-à-dire vers le nord, pour réprimer la fureur des démons; elle était comme une . forte cité de refuge les pécheurs, fuyant devant l'aquilon, peuvent se réfugier en assurance. »

7. Ici me revient en mémoire cet enfant des prophètes, qui, du temps d'Elisée, quand une grande famine désolait le pays, récolta dans la campagne des coloquintes ou courges sauvages, pour en préparer un repas à lui et aux autres prophètes. « Dès qu'ils en eurent goûté quand elles furent cuites, ils poussè- rent un cri en disant : Homme de Dieu, il y a dans ce pot quelque poison mortel. » C'est que ce mets était amer, détes- table, dangereux, et comme contenant un poison qui pouvait procurer la mort. Que fit Elisée? « Apportez-moi, dit-il, de la farine ; » et quand il l'eut mise dans le vase, « il ne s'y trouva plus aucune amertume. »

Dites-le moi, quoi de plus amer que la mort pour l'homme qui place son bonheur et sa paix dans ses richesses? La triste mort doit-elle donc m'en séparer? Ah ! quelle frayeur, quelle consternation quand lui seront représentés et le jugement iné- vitable, et les tourments éternels de l'enfer dus à ses pèches. Ce sera bien le cas de dire : Mors in olla; la mort est là-dedans ; car toules les sensuelles voluptés passées lui paraîtront sem- blables au fiel amer des dragons et au venin mortel de l'aspic. Que faire donc dans une chose de si grande importance périr une fois c'est périr pour toujours? Le prophète disait : Apportez-moi de la farine qui adoucisse l'amertume du mets comme de l'amidon, en enlève le poison, et le rende agréable au goût et bon à manger. Par cette farine, quelques-uns des docteurs et des interprètes entendent la Mère de Dieu, Marie, la Vierge sans tache qui a soin d'adoucir merveilleusement

I 0NS1D1 B \ l ION I.X1X. 32\

pour ses serviteurs les angoisses de la mort, ei d'apaiser la colère du souverain Juge; d'où cette parole de L'Epoux à son épouse : Voire sein est comme un monceau de fromenl entouré

ilt- lis. I»u fromenl l'on t'ait une farine très-blanche, et un pain excellent qui fortifie le cœur de L'homme. Heureux celui qui, .1 sa dernière heure, aura deux avautages : le saint viatique et L'assistance de la Douloureuse Mère! Il n'y aura pour lui aucune espèce d'amertume dans Le vase de La mort.

s. Bienheureux le (ils de la Sunamite qui mourut sur le soin de sa mère! Peu de temps après, Elisée étanl arrivé, « l'enfant bâilla sept lois, et ouvrit les yeux. » Le mort était revenu à la vie, Beureux l'enfant et le serviteur de Marie qui pourra exha- ler son dernier soupir sur le sein de sa mère! à bienheu- reux! parce qu'il mérite la résurrection à une vie meil- leure et éternelle! Si un ami ne délaisse point un ami, à plus forte raison la Douloureuse .Mère ne vous abandonnera pas, si vous l'honores, comme un ami fidèle et comme un fils, o Non, dit le dévot Blosius, il ne se peut qu'il périsse l'humble et as- sidu serviteur de Marie '. »

Pour terminer, parlons du bien-aimé disciple du Sauveur. Plusieurs écrivaius de grande autorite '- rapportent qu'après la glorieuse assomption de Marie, il fut saisi d'un vif désir de contempler enfin dans la gloire des cieux la Souveraine (pic Jésus-Christ du haut de sa croix lui avait léguée pour Mère. Admis à réaliser son vœu, et ravi hors de lui-même, il vit Jésus ••! sa sainte Mère dans une immense gloire, s'eutrete- liant ensemble des grands tourments de la passion, de la croix et de la mort, ha conversation terminée, la Mère supplia le Fils >\r vouloir bien accorder une grâce particulière à tous ceux qui se souviendraient, dans de pieux sentiments, de ces grandes souffrances. Le bien-aimé Fils accueillit celle demande et pro- mit les quatre dons suivants : « 1" Que tous ceux qui prieraient la Vierge par ses douleurs, obtiendraient une vraie douleur

1 Bios, in Canon. Vitœ spirit. c. 18. 2 Pomer. lit». 3, de lî. M. V. p. i, et Justin. Miechov. tom. 2, dise. 379, et alii.

II. 21

322 LA HÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

de leurs péchés avant la mort. Que surtout aux approches du trépas, ils seraient munis de sa protection. Qu'il grave- rait lui-même ses supplices dans leurs cœurs, et leur accorde- rait un jour, à cause de cela, une grande récompense. Enfin, qu'il donnait à sa Mère tout droit et toute faculté de leur obte- nir quelle grâce que ce soit. » Si vous êtes prudent et sage, et n'avez pas entièrement renoncé à toute foi humaine, profitez de cet illustre exemple; et n'oubliez jamais les gémissements de votre mère, si vous désirez qu'elle vous soit propice à votre mort. Oh! que bienheureux vous serez alors, si vous remettez votre àme entre les mains de Dieu, à l'ombre et sous la protec- tion de Marie ! Je finis avec saint Ephrem priant ainsi la Vierge sainte : « Assistez-moi maintenant et toujours, ô Vierge Mère de Dieu, Mère de miséricorde, douce et clémente Mère; soyez pour moi, clans le cours de ma vie, une protectrice fervente, une puissante auxiliatrice qui éloigne de moi toute attaque ennemie, me place dans la voie du salut, et conserve ma pauvre àme au dernier instant démon existence \ »

1 S. Ephrem in Orat. ad Virg.

CONSIDÉKATION L\\

Amour bienfaisant de la Mère d'amour et de douleur, vraie Mère de miséricorde, envers les âmes du purgatoire. ,

VE\Il\T AU II < EU.

Regardez-nous et montrez-nous la lumière de vos miséricordes.

(Eccli. 26. 1.)

1. On compte diverses manières de pécher. Il y en a qui pèchent avec une nasse dans Laquelle les poissons enlrent faci- lement, mais d'où il leur est difficile de sortir. Ainsi pèche le monde. « 0 jeunes gens, dit Socrate, les poissons qui ne sont pas encore dans la nasse veulent y entrer, et ceux qui sont entrés veulent sortir; prenez garde à ce que vous faites, de peur que la même chose ne vous arrive '. »

Il en est qui pèchent à la ligne en mettant à l'hameçon un ver qui sert d'appât pour attirer et prendre les poissons. L'Ecelésiaste dit : Comme les poissons se laissent prendre à l'hameçon, ainsi les hommes sont surpris dans l'occasion mauvaise. Le démon pêche de cette manière; il attire les hommeset Les saisil parles honteuses voluptés de la chair. Voici comment saint Augustin s'exprime Là-dessus ' : « Le poisson se réjouit, lorsque, ne voyant pas L'hameçon, il dévore l'appât ; mais quand le pécheur commence a Le tirer à lui, ses entrailles sont torturées, <■( il soit ,1e sa joie pour sa perte, par la nourriture même qui a l'ait sa joie. Tels sont ton-, ceux qui se croient heureux dans la jouissance <\<^ biens temporels :

1 Socrat apudDiez.2. p.VerboMalrinion. ' De Agone christiaoo, c. 7.

32 4 LA MÈRE D AMOUR ET DE DOULEUR.

ils ont avalé l'hameçon et s'en vontçà et avec lui. Viendra le temps ils sentiront quel sujet de tourments ils ont dévoré. » Le prophète Flabacuc a dit : « Vous traiterez les hommes comme des poissons de la mer. »

D'autres retirent leur proie de l'eau au moyen de filets, comme le Sauveur l'ordonnait aux Apôtres : Laxatc relia vestra in capturant. La divine Providence prend encore aujourd'hui de la sorte, dans ses filets, les élus, c'est-à-dire les prédestines; il faut observer que les filets sont, par leur contexture, en- tremêlés de véritables croix; car ceux que la divine miséri- corde ne peut prendre par les bienfaits, elle les force à venir à elle par les tribulations et les croix qu'elle leur envoie, véri- fiant ainsi ce que dit saint Grégoire le Grand : « Les maux qui nous pressent, nous forcent d'aller à Dieu. >>

Beaucoup de pécheurs se servent de verveux, filets soute- nus d'espace en espace par des cerceaux; et, avec des bâtons, ils font entrer par force les poissons dans ces instruments. Tels on voit les prédicateurs et les confesseurs, animés d'un saint zèle, prendre les âmes plongées dans les profondeurs'de L'abîme et dans la boue du péché : Compelle intrare, a dit la vérité, forcez-les d'entrer.

Une autre manière de pécher est celle qui se pratique dans les étangs l'on metle poisson ordinairement pour trois ans : après avoir lâché l'eau qui s'écoule par des rigoles, on prend facilement à la main les poissons palpitants sur la vase ou sur le sable. Ainsi péchait le roi Cyrus, au rapport de l'historien Hérodote : ainsi encore de notre temps le font les nobles et les grands : ils creusent dans leurs propriétés de petits lacs, dans lesquels ils prennent à la main le poisson, une fois les eaux détournées. Spectacle agréable, qui cependanl est émouvant pour tous ; car c'est ainsi que la mort, connue un pêcheur géné- ral, prend tous les hommes qui nagent dans l'océan de la vie et les emporte en triomphe : h Le royaume des cieux est sem- blable à un filet jeté dans la mer, et qui prend des poissons de toutes espèces : quand il est plein, on le retire, et assis sur le rivage, on met les bons dans des vaisseaux, et on jette de-

I ONSIDÉRATION I.XX. 'A-2o

hors les mauvais. Il en scia de même à la fin du monde. » Enfin une antre manière de pêcher, c'esl d'allumer an flam- beau sur une barque, au milieu d'une nuit calme et tranquille ; à l'éclat de La lumière, les poissons sortent en roule de leurs retraites, et deviennent la proie despêcheurs. C'esl ce dernier mode qui sera, notre emblème, avec L'inscription :

Ils viennent à la lumière.

La I!. Vierge, Mère d'amour et de douleur, n'est-elle pas une lumière, une lampe ardente, un flambeau qui ne s'éteinl pas? Lumière pleine \ ditle Sinaïte ', quijamaû no fuit défailli lampe, dit saint Cyrille s, dont In lumière 'brille sans cesse; flambeau, dit saint Ephrem \ de tout l'univers, vers lequel les âmes s.- tournent et soupirent, du fond des ténèbres et dos ombres de la E?ort, et du milieu des flammes du purgatoire, en lui disant : Jetez sur nous vos regards, et montrez-nous la lumière de vos miséricordes.

2. L'Ecclésiastique a très-bien figuré cette vérité, quand il a prophétisé en ces termes au sujet de la Reine du ciel et de la terre, Mère de la miséricorde : a J'ai fait seule le tour des cieux, et j'ai pénétré le fond de l'abîme : j'ai marché sur les Ilots de la mer. » Comment cela, ô Bienheureuse! quel abîme avez- vous pénétré? Sur quels flots de la mer avez-vous marché? Que la divine Mère ait été, pendant sa vie mortelle, la patronne particulière des âmes du purgatoire, aucun homme sens»'- ne pourra le nier. Cette opinion plaît à lierson, par la raison que, suivant le témoignage des divines Ecritures, a c'est une

sainte et salutaire pens le prier pour Les morts, afin qu'ils

ut délivrés de leurs péchés, i II en conclul fort prudem- ini'iit que l'esprit de Marie était occupe de ces saintes et salu- taires pensées, et qu'elle répandit fréquemment des prières devant Dien pour la délivrance des fidèles trépassés. Mais,

1 Sinaita I. 6contempl. 2S. Cyrill. ho. 6 contra Nestor. 'S Ephr. de Laud. V.

326 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

après sa glorieuse assomption, qu'elle ait faille tour du ciel, pénétré le fond de l'abime et marché sur les flots de la mer, voilà ce qui est merveilleux et imperceptible à nos sens.

Pour concevoir et résoudre cette question, entendons saint Bernardin de Sienne ' : « La Bienheureuse Vierge a la souve- raineté dans le royaume du purgatoire, c'est pourquoi elle dit : J'ai marché sur les flots de la mer. Les peines du purgatoire sont comparées à des flots parce qu'elles sont transitoires, et aux flots de In mer, parce qu'elles sont pleines d'amertume. La Bienheureuse Vierge délivre de ces tourments surtout ses serviteurs dévoués ; or, c'est en les visitant et en les secourant dans leurs nécessités et leurs souffrances, ainsi que tous ceux qui y sont détenus, parce qu'ils sont ses enfants, étant enfants de la grâce, confirmés en grâce et certains de leur gloire. » Tel est l'excellent sentiment de saint Bernardin de Sienne.

Herson2, dont nous avons déjà parlé, affirme la même chose, et nous assure que la sainte Mère, le jour elle fut enlevée au ciel pour être placée dans la gloire au-dessus des neuf chœurs des Anges parla très-sainte Trinité, obtint une grâce particulière de son Fils, savoir, que tout le purgatoire serait évacué. « PiecredOyDei privilegioin Virginis assumptione eva- cuatum esse purgatorium : dum enim Princeps coronatur riuntur carceres; quanlo magis in coronatione Deiparae. C'est pour moi une pieuse croyance, que, par un privilège de Dieu, le purgatoire fut évacue au jour de l'assomption de Marie : car si, busqué l'on couronne un prince, on ouvre les prisons, à plus forte raison au couronnement de la Mère de Dieu. »

Dans les autres principales fêtes de l'année, Marie visite aussi le purgatoire. « La Bienheureuse Vierge, dit Denis le Char- treux \ chaque année le jour de Noël descend dans le pur- gatoire avec une multitude d'Anges, et en retire un grand nombres d'âmes, à cause que c'est dans la nuit qui précède <etie solennité qu'elle a enfanté Jésus-Chrisl le Roi de gloire.

1 Serai. 3 do Noraine Mariœ. 2 Sup. Magnificat. 3 Dionys. Carth.

S. 9 de Assumpt.

l 0NS1DÉRATI0N l.XX. .127

Elle a coutume aussi d'y descendre la nuit de l'àijucs pour eu délivrer des âmes, parce que le Sauveur cette même nuit lit sortir des limbes Les saints Pères. » .'}. OMère attentive qui prend un si grand soin de ses enfants

et de ceux qui la servent ! Jochabed déploya nue grande solli- citude envers son fils Moïse: elle le cacha dans un berceau de jonc bien fermé et enduit de bitume, et le déposa sur le bord du Nil pour que toute la famille n'encourût pas la fureur de l'impie Pharaon; elle eut La précaution «le le placer dans îles herbes marécageuses etdes joncs, de peur qu'il ne fut entraîne parle courant des eaux. La pieuse Vierge .Marie aune sollicitude plus grande pour Les âmes du purgatoire ; elle ne les laisse pas exposées aux flots des peines, mais les en retire dans sa douce clémence. « Je suis, dit-elle ù sainte Brigitte, la Mère de tous ceux qui sont en purgatoire, puisque toutes les peines qui leur sont dues pour expier leurs péchés sont pour ainsi dire adoucies à chaque heure par mes [trières. »

La Sunamite, cette femme digue de louanges, célèbre par ses richesses et sa piété, ayant perdu son fils par une mort prématurée, n'eut pas de repos qu'elle n'eût trouvé un sou- lagement à sa douleur: « Lorsqu'ils furent arrivés auprès de l'homme de Dieu sur la montagne, elle se jeta à ses pieds. Giézi s'avança pour l'écarter; mais L'homme de Mien lui dit: Laissez-la faire, car son âme est dans l'amertume. » Kt aussitôt qu'Elisée L'eut vue et examinée, compatissant à ses peines, il rappela son fils à la vie par un grand prodige. La .Meie d'amour et de douleur aime bien davantage ses enfants spirituels; si, par la justice de Dieu, ils sont condamnés, pour un temps aux flammes du purgatoire, elle ne cesse de s'in- terposer comme médiatrice auprès de la divine clémence, jusqu'à ce qu'elle les ait conduits de ce lieu de ténèbres à la vie bienheureuse et à la lumière éternelle.

Au moment '"us les Juifs étaient destinés à une 111« > l t certaine, Esther se montra vraimenl pour eus une mère pleine île sollicitude, en s'exposantde son plein gré pour leur saint a la fureur du roi. « Prince, lui dit-elle, si j'ai trouvé grâce à

328 MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

vos yeux, je vous conjure de m'accorder, s'il vous plaît, ma propre vie, et celle de mon peuple, pour lequel j'implore votre clémence. » Bien plus qu'Esther, Marie est la consola- trice et la Mère de tous les atlligés, surtout des âmes du pur- gatoire, et elle leur vient eu aide avec une tendresse plus que maternelle. La Vierge clémente le fit connaître à son serviteur le vénérable père Jérôme Carvalli, de la société de Jésus, qui s'inquiétait beaucoup sur le salut de son âme ; elle lui dit que/le est Mère non- seulement dans cette vie, mais encore dans l'antre.

4. Heureux le mendiant, que l'on portait tous les jours à Jérusalem, parce qu'il était boiteux dès le sein de sa mère, à la belle porte du temple, ainsi nommée parce qu'elle était plus élégante que les autres, construite en airain de Corinthe, et que c'était la principale entrée du temple ! <»n le déposait dans cet endroit pour demander l'aumône à ceux qui entraient ; à la place de l'aumône, saint Pierre lui rendit la saute et le guérit entièrement par la vertu du saint Nom de Jésus. 0 âmes du purgatoire, âmes pauvres et misérables, délais- depuis longtemps peut-être à la belle porte du temple céleste; boiteuses, parce que vous ne poyvez vous soulager vous- mêmes; mendiantes, parce que vous ne pouvez rien mériter <x\ qu'il vous faut vivre de la miséricorde d'autrui ; infortunées, parce que vous ne reposez pas dans un lit, comme le boiteux, mais dans les flammes. « Le feu du purgatoire, dit saint Augustin, est plus rigoureux que tout ce que l'on peul souffrir en cette vie. » Votre seule consolation, c'est qu'il vous est permis, comme au boiteux, de recueillir l'aumône à lu belle porte. Et la belle porte, c'est la H. Vierge Marie. Saint Bonaventure l'appelle porte de m lil>rrt<:\ saint Ephrem, porte des cieua ■■ ; L'Eglise, porte brillante de lu lumière, et, heureuse porte du ciel. Tendre Mère, elle ne vous abandonnera pas, si vous l'ave/, aimée et honorée d'une manière convenable pendant votre vie; Jésus lui-même en est témoin dans ces paroles rapportées par sainte Brigitte: « Vous êtes ma Mère, la Heine du ciel, la Mère de miséricorde, la consolatrice de

CONSIDÉRATION I.XX. .'{)2J>

cens qui sont dans te purgatoire. » Pour confirmer cette vérité, saint.- Brigitte raconte que l'âme d'un soldai qui avait coutume de jeûner les veilles «les fêtes de La Vierge et de réciter souvent son office, fut délivrée, par l'intercession de In sainte Mère de Dieu, de trois grands tourments qu'il avail à subir dans le t'en expiatoire ; et que le Sauveur Jésus donna cette âme a sa douce Mère en ces termes: « Bénie soyez-vous, Mère chérie; rien ne peut vous être refusé; que votre volonté s'accomplisse, et qu'il soit fait selon votre demande. »

.">. Heureux paralytique! Depuis trente-huit ans vous étiez sur le bord de la piscine probatique, ne trouvant personne pour vous descendre dans sou eau salutaire, apr s (pie L'Ange l'avait agitée. La cause d'un si grand retard dans le recou- vrement de la santé, c'est que vous n'aviez personne : « Ho- minem non habeô. o Mais cesse le secours de l'homme, commence le secours divin; le Fils de Dieu lui-même dai- gna venir en aide à ce pauvre malade, par la raison, obser- vent Guillaume de Tyr et Cajétan, qu'il était étendu près de i.i piscine, remarquable figure de la Bienheureuse Vierge Mère de Dieu, (.'est là, en effet, qu'elle vint au monde, au témoignage de saint Damascène : /// lucem editur Virgo in domo probatica. Oh! quel grand tourment, d'être retenu pour tant d'années dans la prison de feu, et d'y attendre jusqu'à ce que ton ait payé la dernière obole. Le vénérable Bède, sur ces paroles du psaume trente-septième : « Seigneur, ne me reprenez pas dans votre fureur, » enseigne avec raison, que ce châtiment ''-t plus grave que ce qu'ont souffert le3 malfai- teurs ou les saints martyrs, et ce que l'on peut imaginer de pins rigoureux! 0 tourment! Hélas! combien dr pauvres âmes gémissent dans ce lieu été peines, comme le paralyti- que! Eommem non habeo\ je n'ai personne qui s'intéresse. à moi. Cependant, consolez-vous, chèresâmes, consolez- vous ; vous ave/, la Mère de Dieu qui vous secourra promptement et adoucira vos peines, si vous l'avez aimée en dévoués servi- teurs. Klie a dit a sainte Brigitte : « Il n'est aucune peine dans le purgatoire, qui par moi ne devienne plus douce «•! pins

330 MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

facile à endurer. » Rappelons-nous Jean Ximène de la société de Jésus : étant en prière le jour de la Toussaint devant une image de la Vierge, il eut une inquiétude sur son trop peu de compassion envers les âmes du purgatoire, lorsqu'il entendit la Bienheureuse Vierge lui dire à haute voix : Ximène, souve- nez-vous des âmes du purgatoire; et aussitôt il répondit : Je ne les oublierai pas. A partir de ce moment, jusqu'à sa bien- heureuse mort, il offrit toutes ses bonnes œuvres pour leur soulagement. 0 cher lecteur, si l'avertissement de Marie ob- tenait donc un même effet sur vous : Ximène, n'oubliez pas les âmes du purgatoire.

6. Heureux homme de Jéricho, qui étiez tombé entre les mains des voleurs; ils vous dépouillèrent de tout et vous firent de graves blessures; mais le doux Samaritain vint à votre se- cours : // s'approcha de vous, banda vos plaies, après y avoir versé l'huile et le vin. 0 chères âmes au milieu des flammes expiatrices, comme cet homme vous êtes tombées entre les mains des voleurs, les démons; mais, heureuses dans votre malheur, quoique exilées de la Jérusalem céleste vous n'en êtes pas exclues, et vous avez un bon Samaritain, Jésus cruci- fié, qui sur vos blessures verse le vin de son précieux sang pour votre rédemption, et par ses plaies guérit les plaie vos péchés. Vous avez aussi sa Mère Douloureuse debout de- vant la croix, pour vous administrer L'huile de la miséricorde, car son nom est une huile répandue ; et de même que l'huile rend clairvoyants les plongeurs qui cherchent .les perles dans le fond de la mer; ainsi, Mère de miséricorde, elle adoucit les ilôts amers du purgatoire, elle montre le chemin par les âmes, précieuses perles, pourront parvenir en assurance à la Lumière éternelle. Associes de Marie, il ne vous faut pas imi- ter L'inhumanité du prêtre de L'ancienne loi, qui recula d'hor- reur à la vue des plaies du moribond: ni la dureté du lévite, rar. si vous ne donnez pas secours aux trépasses, vous vous le refuse/, a vous-mêmes. Ils auraient pris soin de votre salut auprès de Dieu dans le ciel, s'ils étaient parvenus à l'immen- sité de la gloire par vos prières et vos bonnes œuvres. Il

CONSIDÉRATION LXX. 33 I

faillira donc prier souvenl el avec ardeur pour les âmes déte- nues dans Le feu de l'expiation. « Prions, dit Le pape sainl Clément, pour nos frères qui reposent en Jésus-Christ, afin que Dieu, qui a reçu l'âme du défunt, lui remette toute la peine due à sou péché. »

Prions aussi la Mère de miséricorde pour qu'elle emploie son efficace intercession. L'Eglise nous y exhorte dans ses prières pour les défunts, elle recommande à la sainte .Mère de Dieu toutes les âmes fidMes qui ont quitté ce monde : « Par l'intercession de la B. Marie toujours Vierge, dit-elle, accor- dez-leur de parvenir à la possession de l'éternelle béatitude. » Le Y. P. Roboald, des Frères prêcheurs, en fit 1 expérience : offranl un jour sur l'autel de la B. Vierge le saint sacrifice de la messe pour un frère défunt du même ordre, il vit La Reine descieux, environnée d'une immense splendeur, portant dans ses bras maternels l'àme du religieux. « Voilà, disait-elle, l'âme de votre ami pour qui vous avez célèbre; le sacrifice terminé, aile/ trouver votre prieur et lui dites ce que vous

avez VU. »

7. Serviteur de .Marie, que la reconnaissance des Ames des fidèles trépassés soit pour vous un motif île les secourir. Non, dans la gloire céleste elles n'oublieront jamais leur bien- faiteur, et seront pleines de zèle pour lui aider à faire son salut. Assuerus était reconnaissant envers Mardochée qui L'a- vait délivré des pièges de Bagatha et de Thara : « Mardochée

sortant du palais e' d'avee le Roi, parut dans un grand éclat, portant une robe loyale de coi. leur d'hyacinthe et de bien ce- leste, ayant nue couronne d'or sur la tète, et un manteau de soie et de pourpre. Toute la ville fut transportée de joie en le voyant ainsi comblé de gloire. » Plus reconnaissante sera dans le ciel, envers son bienfaiteur, l'àme délivrée; elle le secourra avec bonté dans tous ses besoins, et particulièrement dans le moment de son agonie 'l'on dépend son salut éternel. Interrogez le V. P. Chérubin de Spolète auquel à sa dernière heure saint Jérôme apparul glorieux en lui montrant soixante

mille âmes par lui délivrées dll lien de peines et qu'il avait.

332 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

pendant sa vie, gagnées à Dieu par ses exhortations pleines de zèle. Elles vinrent au secours de leur bienfaiteur à sa mort, et accompagnèrent son àme avec joie dans la céleste patrie. Heureux ceux qui, pendant qu'ils vivent, se font de tels amis qui h la fin les recevront dans les tabernacles éternels!

Le Roi de Sodome était reconnaissant envers Abraham parce que, avec ses trois cent dix-huit serviteurs, il reprit les sujets de ce prince faits prisonniers par les ennemis et les lui rendit. Le roi fut si touché de ce service qu'il offrit à Abra- ham, en signe de sa gratitude, toutes les richesses de ceux qu'il avait délivrés. Melchisédech. roi de Salem, vint aussi bé- nir le vainqueur et le féliciter de la liberté rendue à tant de monde : « Et lui présentant du pain et du vin, car il était prêtre du Très-Haut, il le bénit en disant : Qu'Abraham soit béni par le Dieu Très-Haut, qui a créé le ciel et la terre. » Qu'elles seront plus reconnaissantes envers leur libérateur, les âmes chrétiennes délivrées d'une si malheureuse captivité et arrachées à de si grands supplices : A jamais elles loueront son nom ; à jamais elles le vénéreront comme leur protecteur, l'aimeront comme un père.

Josué et tout le peuple choisi de Dieu étaient reconnaissants àl'égard de Rahab, habitante de Jéricho, qui avait sauvélesgens envoyés pour explorer le pays. Dans la ruine de la ville ils épargnèrent sa maison et toute sa famille : Domum patris ejus, et omnia qus habebat, fcrit Josue vive?'e.

Le grand-prètre Joacim, le prince Ozias et tout le peuple de Béthulie, étaient reconnaissants envers Judith, leur chère et grande bienfaitrice, la mère de la patrie ; par son secours et son «Mit reprise hardie, elle les avait délivrés du carnage ; en gage de leur bienveillance, ils lui offraient, sur le butin en- lise aux ennemis, tout le trésor d'Holopherne et autres choses précieuses.

Elles ne sont pas moins reconnaissantes envers leurs bien- faiteurs, les âmes une fois sorties du purgatoire, que ne le fut le peuple israélite à l'égard de Judith ; elles ont des sentiments

CONSIDÉRATION I.XX. .'{.'{.'{

plus vifs de gratitude ; et, devenues par leur délivrance, les épouses chéries du Roi des rois, elles ne cesseronl de supplier Jésus-Chrisl etsa sainte Mère pour leurs sauveurs et pères qui les ont engendrées au ciel, et le conjureront pour que, délivrés de tous les maux, ils soient à leur tour élevés à l'immense gloire céleste. Ajoutons que la sainte Mère de Dieu, Urine des Elus, éprouve une très-grande tendresse pour les âmes du pur- gatoire, dont elle est la Mère : par conséquent, ce que vous aurez fait pour les moindres d'entre elles, serviteurs de .Marie, vous l'aurez fait pour Marie elle-même. VA de même que Jésus- Christ, l'Homme-Dieu, est le Père des miséricordes et le D'un de toute consolation ; ainsi Marie est une Mère de misé- ricorde dont l'amour pour les âmes des fidèles trépassés surpasse l'amour de toutes les mères. Je finis comme j'ai commencé: Jetez vos regards sur nous et montrez-nous la lumière de vos miséricordes.

EPILOGUE.

Comme la Mère Douloureuse, il faut que nous entrions dans le royaume de Dieu par beaucoup de tribulations.

\0\ 1IERGITLR SED EXTOLLITLR.

L'arche se imposa sur les montagnes d' Arménie. ((Jen. 8. 4.)

1. Point' de victoire sans combat, point d'honneur sans charge, point de paix sans guerre : saint Chrysostome a dit : «Il n'y a pas de couronne sans lutte, pas d'été sans hiver, de moisson sans travail, de royaume de Jésus-Christ sans croix.» Les saints docteurs demandent pourquoi Jésus, le doux Ré- dempteur de l'univers, goûta un rayon de miel après sa glo- rieuse résurrection d'entre les morts? At illi obtulerunt ei par- tent piscis assi, et favum mellis. La chose est facile à compren- prendre, dit Jacques de Yitri ; dans la passion et sur la croix il avait goûté l'amertume du fiel : Etdederunteivinum libère cum felle mistum; après les grandes peines et horribles tourments, glorieux triomphateur de la mort, il mange le doux miel, pour nous faire comprendre que

Ne mérite pas les douceurs Qui n'a pas goûté l'amertume.

Après Jésus-Christ, dites-moi qui, plus que Marie, a bu au calice d'amertume? Joseph, gouverneur de L'Egypte, procura du blé e1 île l'argent à tous ses frères pendanl la famine ; mais il fit mettre en secret- sa coupe dans le sac de Benjamin le plus jeune d'entre eux : Scyphum autan meum argenteum

i ru. E.

pone in ure sacci junioris. Pourquoi ? Est-ce que Joseph ne

l'aimait pas par-dessus t. .us les autres ? Pourquoi donc le fit-il passer pour uu voleur, et le traita-t-il plus durement qu'eux? Ce tut l'effet de L'amour, dit saint Ambroise ; par la même qu'il l'aima davantage, il le lit plus souffrir. Scyphum misit ut fratrem, quem diligebat pia fraude revocaret; reum sta- tuai rapinœ, ut obsidem teneret grattas. 0 tormenta misericor- diêBj "//tut et cruciat ! Quel fils aima jamais sa mère plus que le doux Jésus? Le Cœur de Jésus n'était-il pas le Cœur de Marie ? « Je dis hardiment, ce sout les paroles de la B. Vierge à sainte Brigitte, je dis hardiment que sa douleur était ma dou- leur,parce que son Cceur était mon Cœur.» Pourquoi donc traita- t-il si durement en ce monde sa sainte et innocente Mère, et lui eommuniqua-t-il, la première entre tous, le calice de sa passion mêlé du fiel amer ? 0 tormenta misericordùe ! umat et cruciat /0 tortures de la miséricorde ! elle aime et fait cruel- lement souffrir : Pour l'élever plus haut dans le ciel, et pour rendre immenses ses mérites qui devaient être couronnés dans toute l'éternité, il l'humilie et la fait souffrir plus que tous.

Considère/, l'arche deXoé; agitée par tous les flots du déluge, elle n'a pas été hrisée par leur choc impétueux, elle s'est élevée plus haut. Quand enfin, au septième mois, les eaux commen- cèrent a décroître, elle s'arrêta tranquillement sur les hautes montagnes <\< l'Arménie. Vous pouvez donc bieu lui donner pour devise : Elle s'élève t<m<lis qu'elle est battue des flots. Ou celle-ci do Piccinelli: L'eau P agite et s'élève; ou mieux cette autre :

Elle n'est pas submergée, mais élevée plus haut.

« L'arche Balutaire de Npé, dit Hésichius, est la sainte Mère do Dieu, agitée pondant sa vie sur l'immens seau des tribu- lations, maintenant d'autant plus exaltée dans le ciel, qu'elle fut [dus abaissée sur la terre. » L'arche >\<- Noé, dit saint Ber- uard. signiflail l'arche de la grâce, savoir, l'excellence de Marie, lie même que par celle-là la famille du juste échappa

336 LA MÈRE Ii AMOUR ET DE DOULEUR.

au déluge, de même par celle-ci tous évitent le naufrage du péché. Noé construisit la première pour se sauver des eaux; Jésus-Christ, notre paix et notre repos , se prépara la seconde pour racheter le genre humain. Par l'une, huit personnes seu- lement furent préservées ; par l'autre, tous sont appelés à la vie éternelle figurée par le nombre octavaire. La délivrance de peu de monde eut lieu par celle-là ; par celle-ci, le salut du genre humain. L'une est fabriquée en cent ans; dans l'autre est la perfection de toutes les vertus. L'une est faite de morceaux de bois travaillés et polis; l'autre de vertus consommées. L'arche de Noé était portée sur les eaux ; Marie n'a pas ressenti le naufrage du péché. » Ajoutons une pensée a ce parallèle : L'arche antique et figurative, après la longue et horrible inon- dation du déluge, s'arrêta paisiblement sur les hautes monta- gnes d'Arménie : Requiert/ arca saper montes Armenias ; après le déluge des cruels tourments de la passion, Marie, l'arche de la nouvelle alliance, élevée au-dessus de tous les chœurs des Anges, repose tranquillement et triomphe, près de Dieu, dans une immortelle paix sur les sommets des montagnes et des collines éternelles. Voilà comment vexavit etextulit.

2. Vous vous étonnerez, prudent lecteur, que les saints Evangélistes, qui ont décrit si exactement la passion de Jésus- Christ, aient raconté si peu de choses de sa Douloureuse Mère. Le seul saint Jean eu fait mention, comme en passant : a Auprès de la croix de Jésus se tenaient sa Mère, et la sœur de sa Mère, Marie de Cléophas, et Marie-Madeleine. » Pourquoi si peu? Comprenez-le: les Ecrivains sacrés, éclairés par le Saint- Esprit, savaient parfaitement qu'ils ne pourraient trouver au- cune expression suffisante pour rendre dignement la vivacité des douleurs et des afflictions de la pieuse Mère de Dieu ; c'est pourquoi ils aimèrent mieux se taire que parler. Mais Saint- Jean, son très-aimant serviteur, consultant les intérêts de l'hu- manité, a représenté en termes laconiques la Douloureuse Mère debout devant la croix : Stabat attfem, jii.rta crueem Jesu, Mater ejus. Par ce peu de mots, il donnait implicitement à entendre au long et en détail toutes les douleurs de l'affligée Mère du

ÉPILOGUE. 337

Sauveur. La raison nous en est donnée par le Révérendissime Frédéric Forner, évéque d'IIébron et suffragant de Bamberg : « Les blessures de Jésus-Christ souffrant, dit-il, étaient aussi le* blessures de sa Mère compatissante, et tous les coups portés au corps du Sauveur se répercutaient dans lame de la Vierge; elle était comme une cire sous le cachet dans laquelle se gra- vaient au vif toutes les souffrances ; elle étart un écho par lequel résonnaient les gémissements, et pour ainsi dire une copie sur laquelle étaient reproduites, sans qu'il en manquât une seule, toutes les douleurs de Jésus . » Une seule pa- role suffisait donc à saint Jean : Stabat, elle était debout. Il nous faut observer en outre, que le disciple bien-aimé a nommé la sainte Vierge la première avant de faire mention des autres femmes: « Près de la croix de Jésus, se tenaient Marie sa Mère, et la sœur de sa Mère Marie de Cléophas, et Marie-Madeleine. » Dans d'autres passages de l'Ecriture, les Evangélistes placent la sainte Mère de Dieu après les hommes et les femmes : « Ils persévéraient tous unanimement en prières, avec les femmes et Marie Mère de Jésus. » Pourquoi, je vous prie, saint Jean la place-t-il la première auprès de la croix? Sylveira nous en donne le motif: « Quand il est ques- tion de l'ignominie de la croix qui retombe du Fils sur la Mère, Marie est la première nommée parce qu'elle a participé principalement et la première à ses opprobres ; en dehors de cette occasion, son excessive humilité lui fait choisir le der- nier rang. » Ainsi donc elle a été exaltée jusqu'au trône de Dieu , au-dessus de toutes les créatures, précisément parce qu'elle s'était le plus abaisser.

Et de même qu'il est dit de Jésus-Christ : Il boira dans le chemin, de l'eau du torrent (delà passion); et c'est pour cela qu'il élèvera sa tète (dans la gloire); de même la précieuse Vierge, parce qu'elle a bu au même torrent que son Fils, élève maintenant sa tète au-dessus des chœurs des Anges. C'est l'accomplissement de ces paroles de la Genèse : « Les eaux s Y-tant accrues , élevèrent l'arche en haul au-dessus de la terre. » Aine chrétienne, apprenez à \ ou s humilier avecl'hum-

II, 22

338 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

ble servante du Seigneur; apprenez à vous soumettre; ap- prenez à supporter patiemment les contrariétés, parce que le ciel en sera -la récompense. « Les souffrances de la vie pré- sente n'ont point de proportion avec cette gloire qui sera un jour découverte en nous. »

3. Ici me revient à la mémoire David avec sa harpe, qui était son unique consolation dans tous les revers de sa fortune. Lorsque Saùl était saisi d'une noire mélancolie, David appelé prenait sa harpe et en jouait; et Saûl en était soulagé, et se trouvait mieux; car l'esprit malin se retirait de lui. Un jour que Saùl, devenu ennemi acharné, s'avançait à la tète de trois mille hommes pour perdre David et le faire mourir, David aus- sitôt se réfugie avec sa harpe dans la caverne du désert d'En- gaddi, et, renfermé dans cette retraite comme dans une obs- cure prison, il chante avec un cœur joyeux et plein de courage les louanges du Dieu Tout-Puissant: « Mon cœur est préparé, ô Dieu; mon cœur est préparé : je chanterai vos louanges, et je les ferai retentir sur les instruments. Levez-vous, ma gloire ; excitez-vous, mon luth et ma harpe. » Que faites-vous, David ? De tous côtés les maux vous pressent ; combats au dehors, craintes au dedans ; et vous jouez de la harpe?

Par cette harpe, saint Bonaventure comprend la sainte Mère de Dieu, qu'il appelle la harpe du Saint-Esprit toujours d'ac- cord avec la divine volonté dans toutes les situations. Bien que cette harpe mystique, lorsque son Fils souffrait d'indignes traitements de la part des hommes ingrats, fut changée en de tristes plaintes et ses instruments de musique en des voix lu- gubres \ ce qui fait dire élégamment au Bévérendissime Forncr : Cet instrument angélique se tut tout à fait, et dégénérant en accords tristes, il ne rendit et ne fit plus entendre que gé- missements, soupirs, sanglots et larmes; cependant, le jour glorieux de la résurrection de son Fils, elle ressuscita pour ainsi dire elle-même : « Levez-vous, ma gloire; réveil- lez-vous, mon luth et ma harpe ; je me lèverai de grand matin. » La seule gloire de la précieuse Vierge était son bien-aimé Fils régnant au ciel dans son corps glorieux, im- 1 Joli. 30. 31.

ÉPIL0G1 E. 339

mortel et impassible, après avoir été crucifié entre des mal- faiteurs. Quel changement merveilleux !

Ame chrétienne, élevez un peu vers le ciel les yeux de votre esprit, et considérez l'immense gloire et l'ineffable joie dont maintenant sont pénétrées les entrailles de la douce Vierge Marie. L'hiver est passé, la pluie de la passion a cessé et s'est retirée ; maintenant le soleil et la lune se tiennent dans leur demeure; les étoiles se réjouissent et brillent avec allégresse pour Celui qui les a faites et pour sa sainte Mère. 0 Mère, non plus Douloureuse, mais joie de toute la terre, mer de douceur et torrent de délices. Femme revêtue du soleil, contentement des Anges et couronne des élus, la croix vous a enfanté cette gloire immense : Compatissant autrefois à votre Fils dans la souffrance, maintenant régnant avec lui pour jamais. 0 mon came, voyez le terme de la tribulation supportée patiemment avec la Douloureuse Mère. Lorsque la mère héroïque du jeune saint Symphorien voyait ce glorieux martyr de Jésus-Christ traîné au lieu de son supplice, elle l'exhortait ainsi : « Mon fds, ô mon cher fils, souviens-toi de la vie qui t'est préparée dans le ciel; vois aussi Dieu là-haut qui t'invite à l'éternelle gloire; non, on ne va pas t'arracher la vie parles supplices, mais elle sera changée en une vie meilleure et plus heureuse. » Tel est le langage que vous adresse la Mère de douleur et d'a- mour, serviteur de Marie! courage donc, et combattez le bon combat.

4. Le berger David eut à combattre avec Goliath, avant de devenir gendre du Roi. « Que donnera-t-on, disait le coura- geux jeune homme, que donnera-t-on à celui qui aura frappé ce Philistin et etfacé l'opprobre d'Israël? » Les soldats, dans le camp de Saiil, lui répondaient : « A l'homme qui l'aura frappé, le roi donnera de grandes richesses, et sa fille en ma- riage. • Cette promesse lui donna le courage d'attaquer seul, au mépris du péril de sa vie, le géant redoutable, et il remporta sur lui une victoire qui jamais, en aucun temps, ne sera assez, célébrée. Chrétien, il vous sera donné davantage qu'à lui, si vous combattez vaillamment les ennemis de votre àme, et si

340 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

vous imitez la Douloureuse Mère au moins selon vos forces : Celui qui vaincra possédera ces choses, et je serai son Dieu, et il sera mon Fils; qaivicerit, possidebit hœc, et ero MiDcus, et Me erit mihi filins ' .

Jacob, avant d'épouser la belle Rachel, dut subir une dure servitude chez Laban pendant sept années, et ces jours lui paraissaient courts en comparaison de la grandeur de sa ten- dresse. Regardez le ciel, ô mon âme, et dans l'adversité, con- sidérez cette éternelle béatitude. Il y a plus ici dans la sainte Mère de Dieu, que dans la belle Rachel. Toutes les fois donc que la peine vous semblera dure, et le service long, consolez- vous avec saint Augustin: « De quel travail est digne une ré- compense qui n'a pas de fin? »

C'est uniquement par les tribulations que Joseph parvint en Egypte à une si haute dignité. D'abord, « il fut humilié par les chaînes qu'on lui mit aux pieds ; » ensuite, « le Roi envoya dans la prison, et le tira des fers; ce souverain de tant de peuples le mit en liberté. Il fit plus : il l'établit le maître de sa maison, et le prince de tout ce qu'il possédait. » Quelle ré- compense vous est réservée, ami lecteur, si vous souffrez un peu de temps avec patience, comme la Douloureuse Mère, les peines et les tribulations, qui opéreront en vous un poids éternel de gloire. Dieu lui-même sera votre récompense infini- ment grande. Etre le Fils et le cohéritier de la pieuse Mère de Dieu et de la puissante impératrice des cieux; être dans la joie pour l'éternité avec le Fils de Dieu et la Vierge sa Mère : oh ! quelle félicité ! « Que pourra-t-il vous manquer, dit le saint évêque d'Hippone, quand vous serez est Dieu à qui rien ne manque? » Ajoutons : Quand vous serez est la Mère de Dieu, la Mère d'amour et de la belle dilection, que pourra-t-il vous manquer, vous son protégé, son dévoué, son enfant? N'a-t-elle pas tout pouvoir au ciel et sur la terre? Oh ! que vous serez heureux alors de pouvoir entendre ses entretiens, d'être aimé d'elle, et de vous réjouir avec elle dans la possession de

1 Apocalyp. 2t. 7.

ÉPILOGUE. 341

tous les biens pendant toute l'éternité ! Ostcndam omne bonum tihi. Que désirez-vous de plus?

5. Le bois que Dieu montra autrefois à Moïse, dans le désert de Sur, adoucit toute l'amertume des eaux. « Ils arrivèrent à Ifara, mais ils ne pouvaient en boire les eaux, parce qu'elles étaient amères. C'estpourquoi on avait donné à ce lieu un nom qui lui était propre, en l'appelant Mara, c'est-à-dire amertume. Alors le peuple murmura contre Moïse, en disant : Que boi- rons-nous? Mais Moïse cria au Seigneur, lequel lui montra un certain bois qu'il jeta dans les eaux; et elles devinrent douces. » Ce bois ne représente pas seulement la croix du Sauveur, mais bien aussi la Vierge Mère Douloureuse, qui changea en douceur toute l'amertume de nos misères, soit en enfantant l'Homme-Dieu, soit en devenant, au pied de la croix, notre médiatrice, notre avocate et notre Mère : Ecce Mater tua. L'Eglise lui dit donc à bon droit en l'invoquant : « 0 douce Vierge Marie. » Saint Bernard s'écrie : « 0 vrai bois de l'arbre dévie, qui seul fus digne de reproduire le fruit du salut. » Et si le fruit de vie du paradis terrestre, comme le veulent Corneille et d'autres, pouvait par sa vertu naturelle prolonger à jamais la vie de l'homme; combien plus la douce Vierge et Mère Douloureuse, devenue glorieuse dans le ciel, pourra nous obtenir la vie éternelle, et changer toute notre amertume en une désirable douceur ! 0 protégé de Marie, ho- norez beaucoup votre sainte Mère, et à la fin vous verrez la vérité de ce que dit saint Bernard : « De notre Souveraine, les coupables reçoivent le pardon, les justes la grâce, les Anges l'allégresse. »

Que dire davantage de vous, ô tendre Marie ! Vous êtes le siège de Salomon, dont parle le Cantique des Cantiques : « Le roi Salomon s'est fait une litière de bois du Liban; il en a fait les colonnes d'argent, le dossier d'or, le siège de pourpre; et il a orné le milieu d'affection pour les filles de Jérusalem. »

Par cette litière, ù très-sainte, vous étiez figurée, parce quo vous ave/. p<»rté dans votre sein et dans vos bras le vrai Salomon, le pacifique Iloi des rois, Jésus-Christ. Les colonnes

342 LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

d'argent furent vos deux bras dans lesquels vous avez serré votre bien-aimé Fils en son enfance et à sa déposition de la croix. Le dossier est votre poitrine reposa cet aimant Fils vivant et mort. Le siège de pourpre fut votre martyre; et vous avez été plus que martyre, la Reine de tous les martyrs si souvent empourprée du sang de votre Fils. Et il établit au milieu la charité à cause des filles de Jérusalem. Le texte hébreu porte : Lui-même tient le milieu, embrasé d 'amour •; c'est-à-dire, dit' Corneille, Jésus-Christ, qui est tout amour et tout ardeur, occupe le milieu de votre cœur, il y est assis comme sur un trône royal, et il répand la charité à cause des filles de Jérusalem, les âmes dévouées qui ont recours à vous comme à leur mère dans toute espèce de difficultés, et auxquelles vous venez en aide avec bonté en votre qualité de médiatrice entre Dieu et les hommes. « Elle est, dit saint Bernard, notre mé- diatrice ; c'est par elle que nous avons reçu votre miséricorde, ô mon Dieu. » En conséquence, il convient que nous véné- rions cette Reine du ciel et de la terre de tout le plus intime de notre cœur et de tout ce qu'il y a en nous de sentiments af- fectueux ; parce que, dit le même saint, telle est la volonté de Celui qui a voulu que nous ayons tout par Marie.

6. Vous tous, ô mortels, et vous en particulier serviteurs de Marie, que faites-vous? Si Marie est la source du paradis terrestre, dont nous parle Moïse : // s'élevait de terre une source qui arrosait toute la surface, et dont le B. Albert le Grand dit : « Cette source est Marie, s'élevant de la terre de misères et de ténèbres dans son assomption, et arrosant de grâce, de pardon et de gloire, toute la surface de l'univers, » pourquoi donc ne courez-vous pas à cette source de grâces et de béné- dictions?

Si Marie est la citerne limpide située près de la porte de Bethléem, abondante en eaux pures et salutaires, et que David un jour désirait avec tant d'ardeur, en s'écriant : « Oh ! si quelqu'un me donnait à boire de l'eau de la citerne qui est à Bethléem auprès de la porte! » A quoi saint Méthode ajoute : « Bienheureuse Vierge, vous êtes la citerne de Bethléem que

ÉPILOG1 i . 343

désira David comme restauratrice «le sa vie, el de laquelle a

coulé pour tous une boisson d'immortalité; » s'il en est ainsi, dis-je, pourquoi, malheureux mortels, ne pas soupirer après cette citerne salutaire, avec le même sentiment, le même

amour, le même désir que David?

Si Marie est l'arbre très-élevé que Daniel vit planté au milieu delà terre, « arbre grand ei fort, dont la hauteur allait jus- qu'au ciel, et qui paraissait s'étendre jusqu'aux extrémités du monde; » pourquoi, serviteurs de Marie, ne vous réfugiez- vous pas à l'ombre de cet arbre mystique? « V arbre au milieu de la terre, dit saint Bernardin de Sienne, est Marie au milieu de toutes les créatures. » Tous ont part à son fruit béni, le ciel et la terre, les Anges et les hommes, les justes et les pé- cheurs, u Elle ouvre à tous, dit saint Bernard, le sein de sa miséricorde, afin que tous reçoivent de sa plénitude, le captif son rachat, le malade la santé, celui qui est triste la consola- tion, le pécheur la grâce, l'Ange la joie. » 0 tendre Marie! qui ne vous aimera pas d'un cœur sincère? Qui n'aura pas pour vous vénération et estime? Si l'arbre se connaît par son fruit, comme l'a dit la Vérité même, se peut-il qu'il y ait un fruit meilleur que Jésus le fruit béni de votre sein? 0 poëte, vous avez eu raison en disant :

Qui la Vierge ne sait chérir, Le pardon ne peut acquérir.

7. Nous finirons notre petit opuscule en citant les paroles de l'apôtre saint Jacques. Pour encourager à la patience les fidèles affligés, il leur propose l'exemple de Job, des prophètes. et du Sauveur Jésus, afin qu'avant les yeux sur eux comme sur un miroir, ils [missent corriger leur vie et la conformer à la règle : 'i Voilà le juge qui esta la porte; prenez, mes Frères, pour exemple de la patience dans les maux et les afflictions, les prophètes qui ont parle au nom du Seigneur. Vous voyez. que nous les appelons bienheureux de ce qu'ils ont tant souf- fert. VOUS ave/, appris BUSSi quelle a été la patience de Joli ; et

3ii LA MÈRE D'AMOUR ET DE DOULEUR.

vous avez vu la fin du Seigneur, car le Seigneur est plein de compassion et de miséricorde. »

Je dis de même, âmes chrétiennes, et pour vous et pour moi. Voilà le juge, vengeur sévère des crimes, qui couron- nera votre patience ; le voilà déjà à la porte. Vous avez appris la patience de Job, (et nommant la réalité après la figure, il ajoute) et vous avez vu quelle a été la fin du Seigneur, la vie, la passion, la mort de Jésus-Christ en croix, et la compassion de sa sainte Mère se tenant auprès de la croix. Nous les appe- lons bienheureux de ce qu'ils ont tant souffert. Allons donc, âmes fidèles, s'il a fallu que Jésus-Christ votre juge, et sa très- sainte Mère souffrissent et entrassent ainsi, oui ainsi, de cette manière même et non point par une autre voie, dans l'éter- nelle gloire, certes, Dieu s'il vous aime, ne vous ouvrira pas un autre chemin pour aller au ciel. « Persévérez dans la patience, mes frères, jusqu'à l'avènement du Seigneur. Vous voyez que le laboureur, dans l'espérance de recueillir le fruit précieux de la terre, attend patiemment que Dieu envoie les pluies de la première et de l'arrière-saison. Soyez ainsi pa- tients et affermissez vos cœurs par l'espérance d'un prompt secours; car l'avènement du Seigneur est proche. » Oh! qu'alors vous serez heureux si vous avez imité Jésus-Christ souffrant et sa sainte Mère compatissant à ses souffrances.

C'est lorsqu'il dormait sur la pierre nue que Jacob vit le ciel ouvert; tulit de lapidibus qui jacebant, et suppoiiens capiti suo, dormivit in eodem loco. Vous ne verrez pas le ciel ouvert en dormant sur un lit mollet. Avant d'approcher de Dieu qui lui apparaissait dans le buisson ardent, Moïse dut quitter sa chaussure : Ne appropies /nœ, solve calceamenlum de pedi- bus tuis. C'est afin que ce lieu désert étant rempli de ronces et d'épines, tous comprissent que pour aller à Dieu, il ne faut pas s'étonner s'il est nécessaire de marcher sur les ronces et d'ensanglanter ses pieds. Ce n'est que le fiel amer qui rendit la vue à Tobie à qui l'Ange disait : « Parce que vous étiez agréable à Dieu il a été nécessaire que la tentation vous éprouvât. » Prudent lecteur, recueillez cette leçon pour vous :

ÉPILOGUE. 345

Si vous êtes agréable à Dieu, il est nécessaire que la tentation vous éprouve. Terminons par ce conseil du dévot Thomas à Rompis, à ses novices : Si vous désirez être consolés dans toutes vos tribulations, allez à Marie, Mère de Jésus, et toutes vos peines disparaîtront aussitôt, ou deviendront plus légères. De préférence à tous vos parents et amis, choisissez la bénigne Mère de Jésus pour votre mère de prédilection et votre avocate avant la mort, et adressez-lui souvent la salutation de l'Ange, salutation qu'il lui est si doux d'entendre. Marie priera volon- tier pour vous à cause de sa clémence, et Jésus exaucera vo- lontiers sa Mère à cause de son respect pour elle.

Amen. Ainsi soit-il.

FIN.

TABLE

DES CONSIDÉRATIONS

CONTENIEZ DANS LE SECOND VOLUME

Pages.

Considération XXXIX. La B. Vierge Mère Douloureuse ne fut pas léguée pour Mère a. saint Jean seul, mais à nous tous I

Consid. XL. La Douloureuse Vierge, debout à l'ombre de la croix, devient Mère de tous les bommes. A la même ombre, elle invite tous les cbrétiens 10

Consid. XLI. Marie, la Mère Douloureuse, debout devant la Croix de son Fils, est un miroir admirable de patience pour tous les cbré- tiens 20

Consid. XLII. La Douloureuse Vierge assistant à l'agonie de son Fils en croix, est la patronne sûre de tous les tidèles agonisants. . . 29

Consid. XLIII. Avec quel cbagrin la Douloureuse Mère vit expirer son Fils attacbé à la <roix 39

Consid. XL1V. Commisération et amour de la Douloureuse Mère contemplant son Fils mort sur la croix 49

Consid. XLV. La B. Vierge Mère Douloureuse demeure au pied de la croix, même après la mort cruelle, de son Fils, avec une grande fermeté 58

Consid. XLVI. Douleur et amour de l'aftligée Mère en voyant le Sacré Cœur de Jésus percé d'une lance 07

Consid. XLVII. La B. Vierge Mère Douloureuse est justement appe- lée Reine des Martyrs "6

Consid. XLVIII. La B. Vierge Mère Douloureuse fut la première i honorer les plaies sacrées de Jésus-Christ son Fils bien-.iimé . .

348 TABLE DES CONSILÉRATIONS.

Pages.

Considération. XLIX. La B. Vierge Mère Douloureuse reçoit dans ses bras son Fils déposé de la croix, et le pleure amèrement. ... 94

Consid. L. La Douloureuse Mère prend soin que son Fils, déposé de la croix, reçoive une sépulture convenable 103

Consid. LI. Compagne inséparable de la Douloureuse Mère pendant la passion, Marie-Madeleine pleure son Amour crucifié .... 114

Consid. LU. Pourquoi la B. Vierge Mère Douloureuse ne fut pas im- molée avec son Fils 124

Consid. LUI. Après la passion, le saint Cœur de Marie est admira- blement consolé par Jésus-Cbrist, son Fils, ressuscité des morts . 134

Consid. LIV. La B. Vierge contemple son Fils montant au ciel sur la montagne des Oliviers la passion avait commencé .... 143

Consid. LV. Les consolations du Saint-Esprit réjouissent le saint Cœur de la Vierge en raison de ses nombreuses douleurs . . . Ib3

Consid. LVI. L'exemple de la Mère Douloureuse nous enseigne com- ment nous devons prier Dieu avec bonne intention et avec fruit . 164

Consid. LVII. La B. Vierge Douloureuse nous a montré, par l'exer- cice assidu des vertus, la manière de bien employer notre temps. 177

Consid. LVIII. La B. Vierge, même après l'ascension de son Fils, méditait avec soin son amère passion 189

Consid. LIX. La B. Vierge et Mère Douloureuse nous apprend com- ment il nous faut méditer la passion de Jésus-Cbrist 199

Consid. LX. La Mère d'amour et de douleur nous enseigne comment nous devons toujours marcber en la présence de Dieu 211

Consid. LXI. La B. Vierge Mère d'amour et de douleur nous apprend à mépriser les choses terrestres et à désirer seulement les choses célestes 223

Consid. LXII. Bienheureuse mort, funérailles et sépulture de la Dou- loureuse Vierge Marie, Mère de Dieu 236

Consid. LXIII. La B Vierge, non plus Douloureuse mais Glorieuse, est reçue dans la gloire du ciel par son Fils bien-aimé 246

Consid. LXIV. La B. Vierge, autrefois très-Douloureuse et mainte- nant très-Glorieuse, est couronnée d'une triple couronne par la très-sainte Trinité 257

Consid. LXV. Culte que nous devons à l'auguste Mère de Dieu, et

son intercession puissante dans le ciel 268

Consid. LXVL Le meilleur culte à rendre à la B. Vierge et Mère Dou- loureuse est l'imitation assidue de ses vertus 279

TABLE DES CONSIDÉRATIONS. 349

Page»

Considération. LXVII. Tous les chrétiens doivent avoir une grande confiance en la protection de la B. Vierge et au saint Hosaire . . 291

Consid. LXVIII. La B. Vierge est une bonne Mère, dans cette vie et dans l'autre, pour ses enfants du saint Scapulaire 300

Consid. LXIX. La Mère d'amour et de douleur doit être particuliè- rement invoquée pour qu'elle daigne nous assister à l'heure de notre mort ' .... 312

Consid. LXX. Amour bienveillant de la Mère d'amour et de douleur, vraie Mère de miséricorde, pour les âmes du purgatoire. . . . 323

Epilogue. Comme la Mère Douloureuse, il nous faut entrer dans le royaume de Dieu par beaucoup de croix et de tribulations . . . 33 i-

TABLE

DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES. DES FIGURES BIBLIQUES

ET DES MATIÈRES PRINCIPALES CONTENTES DANS CET OUVRAGE

Le chiffre romain indique la Considération, le chiffre arabe le Numéro dans la Considération.

àaron'. Couronné d'une tiare précieuse, type de Jésus-Christ.

Considération xxx% numéro 5. Aaron. Comment il est choisi pour époux de la Synagogue.

ix. i. Abeille. Diligente est la B. Vierge dans le temple, vi. 5. Abeille. Marie est une abeille industrieuse, xlviii. 1. Abeille. Pourquoi elle se leste d'un gravier contre la temp'te.

xiv. 3. Abeille. Visite les fleurs, mais ne les vicie pas. xiv. 4. Abeilles. Nous devons les imiter, xlviii. 1. Abel, Noe, Isaac, Moïse, David, etc. Figures de Jésus-Christ.

XXXII. 5.

Abiathar. Portant l'Arche, pourquoi il est préservé de la mort.

xui. 7. et lxviii. G. Abigail. Remarquable figure de la B. Vierge Marie, xxn. 7. Abîme. Attirant abîme ; quel en est le sens, xxxiv. i. Ahnf.b. Ayant été tué, David n'iï'bre ses funérailles par ses

larmes. Pourquoi? sxill. .'{.

352 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Abraham. Porte le glaive en ses mains pendant trois jours seulement ; Marie le porte dans son cœur toute sa vie xvm. o.

Abraham. Bienfaisant à l'égard des étrangers, xiv. 1.

Abraham. Pourquoi il est comparé à la pierre d'où nous avons été tirés. Exhortation. 2.

Abraham. Offrant son fils à Dieu est béni de Dieu. xlh. 5. 11 excite les saints aux larmes et à la compassion, lviii. 4.

Absalox. Percé de trois lances, type de Jésus-Christ, xlvi. 3.

Achab. Changeant son vêtement dans le combat, type de Jésus- Christ, xv. 5.

Achis. Tué, comment la reine sa mère le pleure, xlix. 3.

Achitophel. Type de Judas Iscariote. xxvi. 3.

Achitophel. Type de la fausseté du monde, lxi. 6.

Adam. Pourquoi après sa faute, il se cache dans les bosquets du paradis terrestre, xxxv. 6.

Adieux. A Barula, enfant martyr, par sa Mère chérie, xxiv. 6.

Adieux. De deux nobles sœurs, xxiv. 5.

Adieux. De la douloureuse Mère, xxiv en entier, de Tobie, dTsaac, de David, Jonathas, saint Paul, etc. xxiv. 1. Paroles échangées entre Jésus-Christ et la Mère Dou- loureuse dans leurs adieux, xxiv. 3.

Adieux. De Thomas Morus. xxiv. 4.

Adomas. Digne de mort ; pourquoi il est sauvé en se réfugiant à l'autel, xxxvi. 5.

Agab. Ne pouvait voir mourir son fils Ismaël. XL. 3.

Agneau. Conduit à la boucherie, racheté par saint François, xx vu. 1.

Agneau. Dans le buisson, type de Jésus-Christ couronné d'é- pines, xxx. o.

Agneau. Enlevé par un loup, type de Jésus-Christ saisi par ses ennemis, xxvn. 1.

Agneau. Pourquoi dans l'ancienne loi il n'était pas immolé avec sa mère. lu. 2.

Agneau. Pourquoi souvent Jésus -Christ lui est comparé, xx vu. i.

'"NI r\i ES DANS CEI 01 VRAG1 . 353

Agneau. Vu par le pape saint Clémont, t'.iit jaillir une source

sous ses pieds, li. ï. Aide. Marie est pour Jésus-Christ un aide semblable à lui.

XII. 4. et LXIII. I.

Aigle. Contemplant le soleil éclipsé, symbole de la Mère Dou- loureuse, xxxiv. 1.

Aigle. Type de Jésus-Christ montant au ciel. lit. I.

Aigle. Type de l'àme qui médite et contemple Dieu. lx. 3.

Alphonse. Pourquoi il consent à la mort de son lils. xxxvn. \.

Aman. N'obtient rien d'Esther. xiu. G.

Aman. Type du monde, lxi. G.

Amateurs. Vrais de la Douloureuse Mère peu nombreux. Exhor- tation, i.

Ami:. De l'homme comparée à une barque, xxxvi. 1.

Ames. Du purgatoire semblables aux poissons venant à la lu- mière dans les ténèbres, i.xx. 1.

Aminadab. Le premier après Moïse, entre dans la mer Rouge. xxx vu. 3.

Amitié. Du monde trompeuse ; on le voit eu Joab, Aod, et autres, xxvi. 1.

Ammon. Type du monde, lxi. G.

A.mo. (J'aime.) Écrit sur un vase avec le sang, excite l'amour, xuv. 6.

Amasa. Inonde de sang, type île Jésus-Christ, xxxii. 3.

i;. De la Douloureuse Mère tort comme la mort. xxxu. 5.

Ana. Découvre les premières eaux thermales, xxn. •">.

Analogie. De la Nativité et de la Passion de Jésus-Christ.

xv. .'!.

Ano. Comment cette reine pleure la mort de son fils Aidas.

XUlI. i.

Arbre. De Daniel protégeant tous les humains, type de la Mère

Douloureuse. Epilogue, g. Arbre. De vie dans le paradis terrestre, représente la Mire Doù.

loureuse. x.w\ . î et g. Arbre. On le connaîl par son fruit, m. i;. Aiu:-i..\-i ni.. Jésus crucifie] li. 2.

11. 23

354 TABLE DES CHOSES ET PENSEES REMARQUABLES, ETC.

Arciii:. Admirable opérant des prodiges, type de la B. Y.

xu. 4. Arche. D'alliance transportée à Jérusalem avec grande pompe.

LXII. 6.

Arche. De Dieu, pourquoi ceux qui la portaient furent sauvés.

LXV. 5.

Arche. De Noé conservée dans le déluge, type de l'Immaculée Vierge, n. 5.

Arche. De Noé, figure de la B. V. ix. 7.

Arche. De Noé ; la Douloureuse Vierge, xxxv. 4.

Arche. Élevée par les flots sur les montagnes, figure de la B. Vierge Douloureuse, lxiii. 4, et dans l'emblème de l'E- pilogue.

Arche. Passant le. Jourdain, type de la B. V. Marie, xiv. 2.

Argie. Reine de la Grèce, expire sur le cadavre de son époux Polynice. xlix. 5.

Arrhes et dot de la B. Vierge : la croix et le glaive, xv. 1.

Ascension i>e Jésus. Quelle joie elle procure au Cœur de Marie.

LIV. 7.

Ascension de Jésis-Ciihist. Comment elle eut lieu. liv. 3.

Dans son ascension, Jésus-Christ avait été figuré

par Elie, Henoch et d'autres, liv. \.

Jésus élevé au ciel, figuré par Joseph, Mardochée,

Samson, David, Job, etc. uv. 5.

Assuérus. Pourquoi il étend son sceptre sur Esthcr. n. 2.

Assuérus. Pourquoi Esther seul lui plut. ni. i. Pourquoi il la choisit pour reine de préférence à toutes les autres, vm. 1. Pourquoi il lui offrit la. moitié de son royaume, xxxv. .">.

Augustin (saint). Évèque, ses trois désirs, i.xiv. 1.

Aurore a son lever. Comment la B. Vierge mérite ce nom à sa naissance, iv". Toute cette Considération. Aurore finis- sant la lutte entre Jacob et l'ange, type de Marie, iv. 5. Aurore, pourquoi heure d'or. iv. 6.

Autel. Animé, cœur de la Mère Douloureuse, nxxvi. 5.

Autel. Sept fois arrosé du sang de la victime, type de la Mère Douloureuse, l. 2. et suivants.

CONTENUES DANS CEI OUVB IGI , 353

Ai rRDCHE 1' esl le type des pécheurs insensés, i.x. -2.

Ave. Pourquoi L'ange dit à .Marie Ave et non Salve, su. i.

el m. 5. Baguette d'Aaron seule fleurissant. Type de la I?. V. Hère.

ii. 5. Baguette la de Moïse représente Marie, xxx. î. Baguette (la) frappant les chefs de Moab. Est la Vierge

Douloureuse, xi.i. 3. Baguette qui veille. Montrée à Jérémie, type de la 15. V. Marie.

LXIX. i.

Baguettes. La Vierge Douloureuse est comparée '\ diverses ba- guettes, i.x. 8.

Bagi ritha défendani de son manteau Jonathas et Â.CHIHAS. Type de la B. V. xxxvi. \.

Barula (saint.) enfant martyr. Comme il fut présenté à la mort par sa [frère, xxiv. G.

Bâton et verge consolent Dayid. Pourquoi, xxxvi. 6. xlu. 3.

Bâton. Sert à Jacob pour passer le Jourdain. Comment.

XLU. 3.

Beauté de Marie. Plusieurs figures, vu. 5. Bel. Le monde est semblable à cette idole, lxi. 7. Benjamin. Saint Jean l'a été pour Jésus-Christ, xxxvm. i. Benoni. C'est-à-dire enfant de la douleur; tous les chrétiens le

sont [tour la Douloureuse Mère, xxxix. \. Bi rzelai i u)èle a david. Type de saint Jean L'Evangéliste.

xxxvm. 1. Bethsabée élevée m raoNE. Type de la B. V. Marie, i.xv. 2. Bethsabée. Quelle précieuse couronne elle donne à son (ils.

xxx. 3. Bois idoucissani l'eai amére. Type de Jésus-Christ et de sa

sainte Mère. Epilogue. ■*>.

lîuis \lill;wi il i i i; Dl FOND DE L'EAU. Type 'le la DouloU-

reuse Vierge, \x.w. 3. Bois RENDANi saines les eaux kMÈREs. Ce qu'il signifie, xlvi. 5. Boucs. Commenl Marie prend soin des brebis el des boucs.

xxxvi. ::.

356 taule des choses et pensées remarquables, etc..

Bruits ami ingrat envers César, xxvi. 1. Calice. Pourquoi Jésus- Christ au jardin demande qu'il s'éloi- gne de lui. xxv. 5. Calliope. Sa mère expire de douleur en l'embrassant crucifié.

XL11I. -4.

Candélabre a sept branches. Type de la Douloureuse Mère.

XLII. 1.

Captivité de Jésus-Christ. Combien douloureuse à la B. V.

Mère. xxvi. 2. Caution. Jésus-Christ est notre caution en croix, lix. 1. Chagrin d'Israël, de la veuve de Naim, de Rachel et de la Su-

NAMITE, etc. XXIV. 2.

Chagrin de Marie a la perte de Jésus pendant trois jours. xx. 2.

Champ. Marie, champ plein que le Seigneur a béni. îx. G.

Charron de feu. Le Verbe Incarné ; et tenailles d'or, la B. Vierge. Pourquoi ? xiu. 7.

Charité de la B. Vierge envers Dieu et le prochain, lxvi. 3. Est la plus forte des choses, li. I .

Charles- (S1.) Borromée invoquait tous les jours la Mère Dou- loureuse, xxxvi. 4.

Chastes (louange et figures des âmes), vu. Dans toute la consi- dération.

Chercher. Commenl nous devons chercher Jésus avec sa Dou- loureuse Mère xx.

nous devons le chercher, xx. 3.

Figures de Marie cherchant Jésus : Anne, l'épouse

du cantique, le bon Pasteur, la femme de la drachme, Ruben. xx. ï. Chérubin (le). Devant la porte du paradis terrestre ; commeut

il en a été éloigné, xxxiv. 5. Chérubins (les deux). D'or, type delà B. Vierge et de saint Jo- seph, ix. (i. Chérubins (les deux. Jésus-Christ crucifié et la Mère Doulou- reuse. Exhortation, o.

CONTENUES DANS CET 01 VR UJ1 357

Cheveux de la Sainte Vierge. Pourquoi comme un troupeau

de chevreaux ? xix. I. Chien cruellement frappé excite la compassion. Pourquoi pas

Jésus-Christ flagellé ? xxvii. 5. Christ le). A porté la partie la plus lourde de la croix, il ne

nous laisse que le pied. xxxn. ... Christ (le). En croix immolait sa chair, Marie sou âme.

xxxiii. 5. Christ (le). Fut crucifié, la croix étant déjà plantée en terre.

xxxiii. 2. Christ (le). Pleura en croix, de compassion pour sa très-sainte

Mire, xxxiv. 2. Christ (le). Pourquoi comparé à un faisceau de myrrhe et à

une grappe de raisin de Cypre. xm. .*>. Christ (le). Pourquoi soleil de justice, xm. I. Christ (le). Pourquoi il expira la tète Inclinée? xxxvi. 7 et xun. 6.

Pourquoi il ne descendit pas de la croix à la demande

des Juifs? xu. 4.

Pourquoi il dit en croix : Tout est consommé?

XLIII. 3.

Pourquoi il dit : Père, je remets mon àme entre vos

mains9 xi.iu. o.

Pourquoi il expira en poussant un cri? xuii. ...

Pourquoi il partagea sa passion avec sa sainte Mère?

xi.iv. I

Comment il fut au fond de la mer? lu. 1.

Pourquoi il rendit son esprit en endurant la soif?

i.xi. <;.

Dr quel côté il tourna sa face en mourant? i.xix. 6.

Pourquoi, après sa passion, il mangea d'abord un

rayon de miel ? Epilog. t .

Comment il est pélican, grappe de raisin et myrrhe?

XXV. I.

Il ne détourna jamais sa face de ^;i sainte Mère.

m. t.

358 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Christ (le). Types de Jésus-Christ emprisonné: Jérémie, Joseph, Daniel, etc. xxvm. o.

Pourquoi il a dit à sou Père : C'est vous qui m'avez

tiré du sein de ma Mère? vu. 3.

Comment il a lavé son vêtement dans le vin et son

manteau dans le sang du raisin ? xxix. 4.

Jésus-Christ crucifié, couvert de plaies, et tout en

sang, quel spectacle lamentable pour la Mère Dou- loureuse! xxxiii. Toute cette considération.

En croix il est notre meilleur sujet de méditation.

xxxiii. 4.

Comment Marie médita son Fils crucifié? xxxm. o.

Comment il est monté sur l'arbre de la croix? xxx. 1

et suiv. . Diverses figures de Jésus-Christ crucifié, xxxiii. 2 et suiv. Jésus-Christ le jour de sa résurrection apparut d'arord a sa sainte Mère. lui.

Pourquoi il a voulu être circoncis? xvi. 1. et suiv. Cierge sur le candélabre triangulaire de la semaine sainte.

Pourquoi on ne l'éteint pas ? xlii. 1. Circoncision. Jésus-Christ l'a subie comme la vigne, xvi. 1.

11 y répandit du sang et de l'eau, xvi. 2.

Elle fut un glaive pour le Cœur de la Douloureuse

Mère. xvi. 2.

Le sang qu'il y répandit fut conservé par sa Mère.

xvi. 3.

Comment elle fut considérée par la sainte Mère de

Dieu ? xvi. 4.

Jésus-Christ y renouvelle à son Père son vœu de

souffrir, xvi. 5.

Causes morales de la circoncision de Jésus-Christ.

xvi. 6. Cité. Marie est la cité de refuge, xxxv.

Six cités de refuge. Pourquoi? lxiii. o. Claudia. Vestale, traîne seule un vaisseau chargé, vi. 5.

COK i IM l s DANS CI l 01 vi; \.,i . 3.'i!>

ClOTILDE ENVOIE a sii.n FRÈRE i\ LINGE IRROSÉ DE SON SANG.

Pourquoi ? xxix »'•. Cœur de la Mère Doi loi rei se. Comment miroir de la passion de Jésus-Christ. Exhort. prél. 5.

Marie consacre à Dieu son cœur en holocauste à

l'âge de trois ans. vi. 1 . Casi i; de Marie. Autel le feu perpétuel est conservé, vi. 2.

Siège du Saint-Esprit, vu. 2.

Arche d'alliance dorée au dedans et au dehors, vu. 2.

Vaisseau d'élection, palais de Dieu, cité de Dieu,

fontaine deSiloë, arc-en-ciel, mer inépuisable. vu. 5.

Lune eu son plein, x. .'i.

Autel de propitiation. x. ti.

Autel lt4 Fils s'offrit à son Père en sacrifice, xn. A.

Plein de miséricorde, xiii. 6.

Rempli de joie à la résurrection de son Fils. lui.

Consolé à l'ascension, liv. 7.

Le Saint-Esprit le remplit de nouvelles grâces à la

Pentecôte, i.v.

Semblable à une toile blanche. Pourquoi? xix. I.

Creuset du chimiste, xi.ix. 1.

Colette (sainte). La Mère Douloureuse lui montre son Fils

coupé en morceaux, xviii. <>. Colombe aimée i i châtiée. Type de la Douloureuse Mère. xx. 2.

Dans les creux de la pierre. Vierge Douloureuse

après la résurrection de Jésus, i.xu. 6.

Une lâchée et l'autre immolée, type de Jésus e1 de

Marie, xxiv. •'».

Au milieu des vautours ; Mère Douloureuse, xxxv. :{.

De \oe, pourquoi ne trouva pas un lieu sur la terre.

VI. .').

De No.'- , type de paix et de Jésus ressuscitant.

XXXV. I .

Colonni petite de fumée d'aromai es.Type delà B.V.Marie.vi.i.

Colonne de s\ êe i.i de rei . Type de la Mère Douloureuse, iv. 6. eu. '.i. i.xvi. l .

360 table des choses et pensées remarquables, etc.

Congratulation a la Mère Douloureuse sur son Fii.s retrouvé

au temple. xx. 11. 8. Constance de la Mère Douloureuse au pied de la croix, xlv.

tout entière. Corbeau. Pourquoi il trouve une place après le déluge ; et non

la colombe ? vu. 2. Cordon de pourpre suspendu a la fenêtre de Rahar. h. 3.

xlvi. 4. Coré. Dathan et Abiron engloutis vivants, xxvi. 5. Couronnement de Marie au ciel. lxiv.

De David, Salomon, Mardochée, Arclie d'Alliance.

ibid. 4.

De l'impératrice à Augsbourg. ibid. "i.

De la sainte Vierge par la sainte Trinité, ibid. 5.

Marie couronnée de douze étoiles, ibid. 4.

Hommages de tous les saints, ibid. (5. Couronnement des Rois. xxx. 2.

De Jésus-Clirist bien différent, xxx. 2. Marie y as-

siste. 3.

Pourquoi Jésus voulut être couronné d'épines, xxx. 4.

Ce qu'éprouva sa Mère. xxx. 5.

Cracher au visage de Jésus. Quelle ignominie ! Plusieurs fign: s

l'expliquent, xxvm. 3. Crocodile. 11 pleure et dévore ; type de Judas et de ses frères.

XXXVI. 1.

Croix de Jésus-Christ notre vaisseau. Exhort. prélim. 1. et xxxv. 2.

Le droit chemin du ciel. Ëpil.

Fut toujours dans leCieurde la Y. Douloureuse, xxi. 2. Culte de la Mère Douloureuse. Â.gréable a Dieu. x\xiv. I. Culte rende a Marié par l'Eglise. Défendu contre les héré- tiques, i.xv. 1.

Ci lie. Lequel est à la grande Mère de Dieu. lxv. entière. Culte principal rendu a marie. Est l'imitation, i.xvi. entière. Culte rende a Marie. En vivant dans le péclié, lui est inju- rieux, x. 0.

CONTENUES D kNS CET 01 NT. M,l.. 301

Cyprès. Symbole de constance, xi.v. I.

Dagon. Pourquoi son idole tombe devant l'Arche, lxv. I.

Dali la. Figure du monde, un. 6.

Darius roi. Pourquoi s'efforce « 1 « * sauver Daniel, xxxi. 5.

Dathan. Coré et Abiron. Pourquoi descendent vivants en

enfer. David lrrache ses brebis de la guei le des lions, 'xxxv. (*». David. Ce qui l'anime à combattre Goliath. Epilogue. \. David divise les dépouilles également entre tous ses soldats. David passe en fuyant le torrent de Cedron. Type de J.-C.

XXVI I. \.

David. Pourquoi danse devant l'arche, xiv. 6. iv. 3.

David. Pourquoi il immola tant de victimes devant l'Arche.

David refuge des affligés, xxii. 6.

David. Sommes amassées pour construire le temple, vi. 6.

David ti \\i Goll'.th. Comment l'imiter, xvn. 5.

Débora. Comment elle est type de la Mère Douloureuse, xi.v. n. 5. et ux. n. 3.

Dépouillement de ses habits. Douloureux à Jésus- Christ. xxxiii. 3.

Diable. 11 imite Ilolopherne coupant l'aqueduc, i.xv. n. 2. Comment il est lion rugissant, n. n. \.

Dieu apparaît terrible au Sinaï et doux au mont Roreb. Pour- quoi? xiv. n. 6.

Dieu. Comment il aime l'homme et le châtie, xx.

Dieu. Mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné? Douleur pour Marie. Consid. xun. n. ~2.

Dii.i . Ne iloit pas être cherché dans Les délices, mais parmi les épines, xx. n. 3.

Dismas. Sa conversion merveilleuse en croix, xxxvi.

Douleurs du Fils. Communes à sa Mère, xi.vn. n. 2. et suiv.

Douleur di i \ Vierge in uroi \m les injures faites a son Fils.

XXIII.

Douleurs de Marie changées eh douceur \ la résurrection de

.Ii si s-Christ. lui. Douleurs de Maru m peuveot être expliquées, xlix. n. 5.

302 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Douleurs j>e Marie. Nous les rappeler souvent. Exhort. prélim. Douleurs. Marie les supporta toutes avec calme, xxm. n. 4. etc. Ecce homo. Spectacle lamentable pour la Mère Douloureuse,

XXXI.

Echelle (Marie est 1') et la porte du ciel. exv. 3.

Echelle de Jacob. Type de la croix, xxxvm. 7.

Ecureuil naviguant sur un bâton, xxxv. I.

Ecuter (1') iie Maurice. Duc de Saxe, conserve la vie à son

maître, xliv. n. 4. Egypte. Fuite de Jésus, xix.

Eléphant. Est animé au combat par la vue du sang. i.ix. n. 1 . Elie nourri par une veuve. Type de la Vierge Douloureuse, xxii. n. 5.

Fortifié par un ange, type de Jésus en son agonie.

xxv. n. 6.

La femme de Sarepta le secourant est la figure de

Marie, lxviii. n. 7. Elièzer. Pourquoi il donne des boucles d'oreilles à Rébecca. xv. n. 1.

Rébecca lui donne à boire. Elle est la figure de Marie.

xxii. n. 1. Elisabeth. Reine, s'amende à la vue d'un crucifix, lviii. n. \. Eloges donnés par les Péris a Marie, xii. n. 1. lui. n. 7. Elzéar. La Mère Douloureuse lui est donnée pour mère, xxxvm.

n. 6. Emblèmes de l'Immaculée Vikrge. m. n. 8.

De la B. Vierge naissant, iv. n. 5.

Du saint Scapulaire de Marie, lxviii. n. 3.

Delà patience, xli. n. 1.

Epouse (T) cherchant son bien-aimé. Type de La H. V. Doulou- reuse, xx. 3. xxvin. I.

Epouse de Puînées accouchant et mourant. Pourquoi? xi.ix. 4.

Epouse (1') invitant son ri en -aime a venir un son jardin. Com- ment type île' la ]]. Vierge, xn. 3.

Epouse (P) portant le cachet de l'Epoux su; son cœur ei sur son rras. Est un type delà Douloureuse Mère. lvi. 1.

I <>\ i l.M l S DANS CET 01 VB kGE. 363

Epouse. Pourquoi dit-elle : Entraiaez-moi, e( mous courrons

après vous. lu. i. Epoux (T). Pourquoi paissanl smi troupeau et se reposant à midi, pendant que L'Epouse le cherche? xi.v. (i.

ESAl VEND SON DROH D'AINESSE. XXVI. II. 5.

Espérance. On place son espérance avec grand profil dans la

protection de la V. Marie, i.xv. 7. Esprit (1') saint réjouit a son avénbmeni le saini cœub di la

Vierge Doi loureuse. lv. Tout entier. Esprit (1') saint introduit l>. Vierge en son cellier après tant

de doi iii as endurées, lv. i. Esprit saint (la grâce de V) est la goutte d'eai que demande

en enfer le mai vais riche, lv. o. Esprit (1*) saint représenté par le doigt trempé autrefois dans

LE SAM. DE L'HOLOCAUSTE. LV. 4.

Esprit saint (1'). Pourquoi il apparut sous diverses figures.

LV. G.

Comment les sept dons du Saint-Esprit furent commu-

niqués à la Mère Douloureuse, lv. 7. Esther conservant su\ peuple. Figure de Marie. XXXVI. 11. 4.

Tenant le sommet du sceptre d'or, figure de Marie.

x. n. 5.

Parfumée d'aromates, figure de Marie, vi. n. ij.

Accompagnée de ses deux suivantes, tigure de Marie.

v. n. 3.

Couronnée; comment figure de Marie, lxiv. n. 3. Etoile. La Douloureuse Vierge est l'étoile du malin, de la mer

et du soir. xxxn. \.

Pourquoi la Mère Douloureuse est nommée étoile de

la nier. xi.v. i.

Comment est-elle étoile polaire. Exhortation. 1. Eucharistie. La recevoir, c'esl Be nourrir aussi de La chair et

•lu sang de Marie, eu. n. 2.

Marie la recuit Le jeudi* el en est fortifiée, sxv. n. 6.

EVANGÉLISTES. Pourquoi ils ontéciil si prude Marie, i. u. 1. Epilog. n. -2.

364 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES. ETC.

Eve. Sara, Rébecca, Rachel, Judith, etc., pourquoi ne furent

pas choisies pour Mère de Dieu ? vm. n. 1 . Eve. Vase de perdition ; Marie, vase d'honneur, in. n. 2. Evêque de nos âmes. Jésus-Christ; comme il sacrifie sur l'autel

de la croix? xxxm. n. o. Ezéchias. Pourquoi, dans sa maladie, il se tourne vers la mu- raille pour prier? xt. n. 6.

Mourant, fut guéri suintement en voyant l'ombre du soleil s'arrêter au dixième degré; Pourquoi? xxxiv. n. 1. Faisceau de myrrhe. Fut pour la Douloureuse Vierge son

hien-aimé Fils. xvn. n. 1, et lviii. n. 5. Femme a qui forent données des ailes. Type de la B. Vierge.

vi. 7. Femme cachant du levain dans trois mesures de farine. Type de

la B. Vierge. *lvii. 3. Femme (la) de Sareptha ramassant deux morceaux de bois. Type

de la Mère Douloureuse en son veuvage: lviii. 2. Femme enfantant dans l'Apocalypse. Type de la Douloureuse

Mère. xv. 3. Femme entourant un homme. Comment Marie est cette femme.

xii. n, 4. Femme (la) est ordinairement amoureuse de sa beauté. Comme

on le voit en Judith. Esther. Ruth, la veuve se parfumant

d'huile, lxi. 3. Femme forte (la) et la plus forte. C'est la Mère Douloureuse.

xxxvn. la Considération entière. Femme forte que chercha Salomon. xxxvn. 1. Femme (la) peut-elle être louée? xi. vu. I. Femme retrouvant la drachme perdi e. Type nr la Mère Doulou- reuse, lu. 3. Femme (la) sage édifie sa maison. Telles furent plusieurs fem- mes, entre autres la Vierge Douloureuse, i.vn. -2 et suiv. Fermier (le) d'iniquité. Pourquoi dit-il : Je ne puis creuser la

terre? xlviii. 6. Fiançailles de la B. Vierge avec saint Joseph, ix.

C0N1 i M LS DANS CET 01 VK LGE. 365

Cérémonies de ces fiançailles, ix. n. 2.

Fn.i n 1; im t,i i n m \. Symbole du pécheur, i.w. d. <i.

Figures delà P>. Vierge. L'Arche revêtue d'or, la table des pains de proposition, le propitiatoire, le trône, le candé- labre, la lampe allumée, i.xvi. n. 3.

Fils de la Sunahite. Type du serviteur de .Marie mourant entre ses bras. i.xi.x. n. 8.

Flagellation de Jési s-Christ. Ses causes, xxix. n. 5. Klle était une infamie chez les Romains, xxix. n. 3. .Marie y assistait, ibid. Combien ce supplice était cruel, il», n, 4. l'ut une piscine salutaire, ibid.

Fleur des champs. Pourquoi Jésus-Christ est ainsi nomme? xxx. n. I.

Flots. Dieu réunit tous les flots sur Marie, xxxvii. n. 3.

Force des héroïnes Jahel, Judith, la femme de Tliebès, Jeanne,

et de Salniu.- M( iv .ies Ma hahres. XXXVII. 11. 2.

Fontaine de piété. Marie, xxxv. n. IJ.

Fontaine doi ble a la mort de saint Canut, xvi. n. 2.

Fontaine petite devenant un fleuve. Jésus-Christ dans la Cir- concision, xvi. -2.

Fontaine s'élevant du milieu de la terre. Type de Marie. Epilog. G.

Frères de Joseph. Combien cruels, xx.xi. n. 7.

l'i ni: en Egypte, xix. Pourquoi pas ailleurs? ibid. n. .'$.

(yAHRIRL' INSTRUn LA l>. VlERGE DELA PASSION DE JÉSUS-CHRIST.

xv. n. 1 . Génération de Jésus-Christ. Comment le roi Ezéchias l'entre*

voit. xn. n. I . Glaive de Joab. xviii. n. 0. Glaive de Siméon. Marie l'a toujours porté dans son Cœur.

xviii n. ."{. et suiv.

Uni a préparé ce glaive? xvhi. n. r>. Glaive di Chéri bin. D'Aod, de Samuel el d'Abraham, xviii. ■>. Grâce. Comment Mariées! pleine de grâce, x. Abigaîl trouve

grâce devanl David, Ruth devant Hun/, Ësther auprès d'As-

suéruSj Marie auprès de bien. x. n. 2.

366 TAULE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Grâce. Les chrétiens doivent plus d'actions de grâces à Marie,

que les habitants de Réthulie à Judith, xxxvn. n. 6. Grain de blé. Pourquoi Jésus-Christ s'est assimilé au grain de

blé. l. n. 1. Grappe de Chypre foulée au pressoir. Représente Jésus-Christ

crucifié, lix. n. 1. Grégoire le Grand (S.) considérant les larmes de Madeleine,

verse des pleurs, xliv. n. 2. Grenadille. Ou fleur de la Passion, xxi. Guiscard. Son cœur après sa mort est présenté à Sigismonde.

xlyi. n. I. Hameçon amorcé. Type de la chair et du monde, lxi. n. I. Harpe de David. Type de Marie. Epilogue, n. 3.

Pourquoi David en sa tristesse joue de la harpe.

xxix. n. 1.

Dans la Passion, Jésus et Marie sont deux harpes

mystiques, xxix. n. 2. Héli. Apprenant la prise de l'arche, tombe et expire, xwi. 6.

Pourquoi il meurt en tombant en arrière, lxi. n. 1. Héliotrope. Marie lui est comparée, lx. n. 2. et xix. n. 1. Henri. Roi d'Angleterre, éprouve une sueur de sang après sa

mort, en présence de son Fils dénaturé, xlix. n. 6. Hérode. Pourquoi il se hâte de prendre les moyens de faire

mourir l'Enfant-Dieu. xix. n. 1. Héroïnes. La Mère d'amour et de douleur est la première

entre toutes, x.yxyii. n. 2. Heure. Il faut désirer une heure favorable pour l'article de la

mort et la demander par Marie, lxix. 1 et suiv. Heure de la Passion. Jésus y pense même aux noces de Cana.

xxii. n. 3. Hibou solitaire sur on toit. Type de Jésus-Christ arrêté par ses

ennemis et objet de leur dérision, xxvni. 4. Hirondelle, xx.w. 2.

Holda i.a prophétesse. Figure de Marie, x. n. 4. Holocauste de Noé. Le saint Cœur de Marie plus agréable à

Dieu. vi. n. 1 .

« ON l i \i i s DANS CEI 01 \ H \.,l . 367

Homme. Comme un animal devant Dieu. w. n. 6. Honivh h rendi \ i.\ Mère Doi loi rei si . Très-agréable à Jésus- Christ, xxxiv. n. l . ei Exhortation, u. i. Horloge d'Achaz. Pourquoi figure de ta I». V. Marie. \n. n. i. IIi milité. Fondement de tontes les vertus, a élevé la lî. Vierge à la pins liante dignité, vin.

Cette vertu est l'are dans le monde, vin. n. (i. Ignace (S.) êvêque et martyr a Rome exposé dans l'amphi-

raÉATRE, xxxiir. n. 1 . Ignace (S.) Fondateur de la compagnie de Jésus, portait sur

sa poitrine une image de la Douloureuse Mère. Exhortation.

n. 2. Imiter (il nous faut) la V. Douloureuse comme l*ecuyer imite

JONATUAS, ET Kl 11 \I DAVID. LXVI. U. 1.

Si nous n'avons du zèle pour imiter Marie, nous

l'honorons en vain, i.xvi. n. 5.

Le chrétien doit imiter la Mire Douloureuse, i.xvi. 6. Impatience di patriarche Jacob. De Job et de la mère de Sisara.

xi. i. n. û.

D'Elie, d'Elisée, des fils de Zébédée, de Paul, etc. xli.

n. 3. Impatiente. La Mère Douloureuse ne le fut jamais, xli. Incarnation m Verre figurée pah l'échelle de Jacob, xi. n. l.

Aurait-elle eu lien si Adam n'avait pas péché?XI. 2.

Doit être attribuée aux mérites de la II. Vierge, xi.

n. 2.

Révélée à Adam pendant son sommeil, xi. n. .'{.

Lamech, Noé, Abraham, etc., en mit en connais-

sance, xi. n. .'{.

Figurée par la rosée du ciel. xi. n. .'i.

Dieu dans le buisson en était un type, ainsi que l'ange

dans la fournaise, si. n. 6.

Elle fui un souverain bienfail pour le genre humain.

xi. n. 6.

Elle surpasse tons les prodiges; diverses figures le

démontrent, xi. n. 7.

368 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Incarnation de Verbe. Marie l'a méritée de congruo. xn. n. 5.

Le Fils de Dieu incarné, aussitôt la B. Vierge sentit

le glaive de douleur, xu.

Avant l'incarnation, Dieu était terrible à l'univers;

on le prouve par plusieurs figures, xin. n. I.

Dans l'incarnation du Verbe, la sagesse s'est bâti une

maison, xn. n. 3. Innocents (le massacre des SS). blessa profondément le saint

Cœur de la Vierge Doilolreuse. xix. n. 6. Intention (l-) le la Y. Douloibeuse fdt toujours dirigée vers

Dieu. lx. n. 7. 8. Iris. Autour du trône, est la Mère Douloureuse, xxxv. n. 3.

Se résolvant en pluie au coucher du soleil, type de la

Douloureuse Mère. xliv. n. 1. JsAAc. Pourquoi il ne fut pas immolé, lix. n. 2.

Comment il est la figure de Jésus-Christ dans son

oraison mentale, lix. d. 2. Jacob passant le Joubdain avec son bâton. Figure de Jésus- Christ, liv. n. 3.

Il revit en voyant son fils Joseph, lui. n. 2.

Dormant sur la pierre, est un modèle de patience.

Kpilog. n. 7.

Désire ardemment de voir Joseph régnant en Egypte.

i.xi. n. 4. Jacob. Pourquoi il envoie des présents au vice-roi d'Egypte. vi. n. \.

Pourquoi il prend son sommeil sur la pierre, s vu.

n. 3. Jahel. Figure du monde, lxi. n. »'.. Jardin de Gethsémani. Pourquoi il est choisi par Jésus-Christ

pour y commencer sa passion, xxv. 2.

Marie y fut-elle présente à la sueur de sang de son

Fils? xxv. n. 2 et suiv. Jean-Baptiste (S.) Pourquoi il tressaillit de joie dans le sein île sa mère. xiv. n. G.

CONTENUES DANS CET 0UVKA6E. 369

Jean l'ëvangéliste S. . Pourquoi il pritla fuite à l'arrestation de Jésus, et se montra constant dans sa persé- vérance au mont Calvaire. XLV. n. 2.

Pourquoi il esi comparé à Berzellai. xxxvm. n. 1.

Comment son héritage esi devenu beau, xxxvm. tout

entier.

Pourquoi il est assimilé à Ethaï. xxxvm. n. 3.

Pourquoi Jésusconûe sa sainte Mère à saint .Iran, et

non pas à saint Pierre ou à un autre disciple, xxxvm. n. 2.

Comment la Mère Douloureuse lui fut confiée par

Jésus mourant, xxxvm. n. 3.

Il est compare àl'écuyerde Jonathas. xxxvm. h.

11 est le vrai Benjamin de Jésus-Christ, xxxvm.

n. 4. 5.

Son intercession est puissante auprès de Dieu, xxxuu

n. .».

Ses devoirs continuels envers la Mère Douloureuse.

xxx îx. n. 1 et suiv.

Il voit Jésus et Marie s'entretenant au ciel de la pas-

sion, lxix. n. 8.

Comment et à quelle fin Jésus légua Marie à saint

Jean, xxxix. n. 3.

Pourquoi il est appelé le disciple de Jésus mourant.

xi., n. 2. Jean Péchame esi consolé par Jésus crucifié, xi.iv. n. 3. Jbpthé la fille de). Pourquoi elle pleure sa virginité, vu. n. 1. Jérémie. Pourquoi fut-il envoyé chez un potier? m. n. -2.

Comment il déplore la ruine de Jérusalem, xi.in.

n.3. Jérusalem. Sennachérib ne pouvait lui nuire, ni. n. 4. .h - \ia.i . Type du monde lxi, n. 3.

JOAB VOULUT MOURIR EN rENANl LA ( >RNE DE L'AUTEL. Pourquoi?

XI. II. II. I

■l"\-. Pourquoi seul il est conservé quand on fait mourir tous les jeunes princes, six. n. 6.

il. -it

370 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Job. Pourquoi il offrait tous les jours à Dieu des sacrifices pour

les péchés de ses enfants, lix. n. G. Joie (la) de Marie ex ce monde fut toujours mêlée d'amertume

XXI.

Joie inénarrable de Marie a la résurrection de sox Fils. lui. Joxas. Figure de Jésus-Christ, xv. n. o. et surtout xxxi.

n. i. Joxathas. Comment il est un type des mondains, lxi. n. 7. Joseph (S.). Pourquoi choisi pour père nourricier de Jésus- Christ, xxi. n. 6.

Plus digne d'être Epoux de Marie que Aaron de la

Synagogue, ix. n. 1.

A quel âge il devint Epoux de la B. V. ix. n. i.

Il trouva la femme forte dont parle Salomon. ix. n. 3.

11 conduit son Epouse à Nazareth, ix. n. 3.

Pourquoi il voulut quitter sa sainte Epouse, ix. n. i.

Est le vrai serviteur fidèle et prudent que le Seigneur

a établi sur sa famille, ix. n. o.

Dieu lui laisse une bénédiction spéciale et un pré-

cieux héritage, ix. n. G. Joseph d'Abim athie. Comment il obtient de Pilate le corps de

Jésus. Exhort. n. 3. Joseph de Léonissa. Zélé serviteur de la Douloureuse Mère.

xliv. n. 5. Joseph, le patriarche, fils de l'accroissement. Type de Jésus- Christ par toute sa vie. xlviii. ii. -2.

Vendu 20 pièces d'argent, il figure Jésus-Christ vendu

par Judas, xxvi. n. 4.

Sa beauté, xxx. n. 1.

n fut élevé à la dignité de vice-roi d'Egypte parles

tribulations. Epilog. n. i. Josias (le Roi) blessé ai coedr. Type de Jésus-Christ percé

d'une lance, xlvi. n. 2. Jourdain. Pourquoi il retourne en arrière en présence de

l'Arche, h. n. 4. Judas. Comparé au crocodile, n. 1.

CONTENUES DANS CET OUVRAGE. 'M I

•h das. Il estime le parfum de Madeleine plus que Jésus- Christ. \.\\ i. n. 5.

Judith. Ne s'épargnanl poinl pour le salut de ses concitoyens, type de la Mère douloureuse, xxxvii. n. ii.

Priant et méditant seule en sa chambre, est le type

•le la li. V. Marie, i \ i. n. 2. Juifs. S'ils eussent connu le Seigneur de la gloire, ils ne l'eus- sent pas crucifié, xi.vi. n. 6.

Quoique christieides, étaient aimes par la Doulou-

reuse Mère, xuv. n. 3. •Ii lia. Meurt subitement à la vue des vêtements ensanglantes

de Pompée son époux, xi.iv. n. i. Labyrinthe de Crète. Type du monde, lxvii. n. I. Lait de la 15. Vierge amollissant une pierre, xix. n. 4. Lamentations de la Doi loi reuse Mère, xxviu. n. d.xlix. n. 3. Lan< i. de Longin. Clé du Paradis, xxxiv. n. 5.

Le cœur de la Mère Douloureuse sentit la douleur du

coup de lance, xi.vi. Larmes. Pourquoi Jésus-Christ mourant sur la croix en ré- pand, xi. v. n. S. Larmes de la Douloureuse Mère. Combien elles doivent nous attendrir, xxix. n. 6.

Combien elles sont précieuses, xi.ix. tout entier.

Plusieurs turent de sang dans la Passion de son

Fils, xi.ix. n. I . et 2. Larmes de la Sun amite, D'Agar, Respha, Anne, Eve et autres

femmes, xi.ix. n. 2. Larmes de Madeli ine péni i i m i . Combien efficaces, li.

LARRON [le) OBTINl LE PARDON il I \ GRACI PAH L'INTERCESSION DE

la Mère l>"i loi bi i se. xxxv. n. I . Larron (le bon) semblable \ l'écureuil. Comment, xxxv. n. _'.

Il obtint plus de Jésus qu'il n'osa demander. \\\.

n. 5.

Quelle étail sa patrie, xxx. n. .*'».

Lépreux (des se réfugieni w camp ennemi pendant li biégi de Samarie. l.t commenl il faut lesimiter.xi.vi. n. 6.

372 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Lettrés que Marie a tracées de sa main. lu. n. G.

Libéralité de la B. Vierge qui secourt même sans qu'on la

PRIE. XXII.

Lierre de Jonas. Type du monde, lxi. n. 1.

Lions (deux) creusent la eosse de saint Paul, premier ermite.

l. n. 2. Li'J des vallées. Jésus-Christ, xxx. u. 1.

Entre les épines ; la Mère d'amour et de douleur, xxx.

n. 1. Lit de Salomon. Comment type de la B. Vierge, n. n. 5. Litière de Salomon. Comment type de Marie, xlv. n. o.

Epilog. n. 5. Livre (le) découvert sous le règne de Josias inspira de la ter

REUR. I. II. 4.

Livre de la génération de Jésus-Christ. Comment Marie est ce

livre, i. n. 1. et suiv. Livre écrit avec une plume de fer. La Mère Douloureuse est ce livre, i. n. 1.

Comment lire ce livre mystique, i. n. 3.

Comment Marie est un livre doux et amer. i. n. 3. Livre (le) précieux nu Décalogue est perdu. Il n'en reste pas

une lettre, i. n. i. Livre (la Mère Douloureuse est un) très-utile dont la lecture

et la méditation assidue peuvent nous rendre dociles \i X

enseignements de Dieu. i. n. 3 et G. Lucien (S.) prêtre célèbre le sacrifice su; son cœur avant de

subir le martyre, l. n. I. Li MiNAiRE. Comment Marie est le luminaire moins grand, xxxv.

n. 4. Lune. Si elle s'arrêta comme le soleil, pendant le combat de

Josué. xlv. n. 3. Lune m lipséE. La Mère Douloureuse, xliii. n. 1. Lune noi velle se levant poi r les Juifs en ësther. Figure de la

B. Yiergc Marie naissant. îv. n. 2. Lune pleine. Comment ligure de la 1!. V. Marie, x. n. 1.

CONTENUES DANS CET OUVR M31 , 'Ml]

Madeleine Sainte . Compagne inséparable de la Mère Doulou- reuse, i.i. n. ."{.

Nuée de rosée. li. .). 2.

Ses larmes salutaires, i.i. en entier.

Plus ferme que les disciples, pendant la Passion, li.

n. 3.

Ne peut cesser d'embrasser el d'arrdser de Bes lar-

mes les pieds de Jésus déposé de la croix, li. n. ï.

Jésus crucifié l'attire comme l'aimant attire le fer. li.

n. 5.

Comme un cerf altéré, elle soupire après Jésus cru-

cifié, fontaine de vie. LI. n. 5.

Perle perdue; Jésus est le marchand qui la trouve, li.

n. 5.

Brebis égarée; Jésus le lion pasteur, li. n. 5.

Kau épaisse; Jésus est le soleil de justice l'enflam-

mant, li. n. G.

Pourquoi Jésus n'arrêta point ses larmes, comme il

le fit pour la veuve de Naïm. li. n. 6. Mages (les saints) furent instruits dans i.a foi orthodoxe par

la H. Vierge, xvn. n. t;. Maison d'Orédédon. De Laban, de Putiphar, et de Zachée;

pourquoi bénie, xiv. n. 6. Manteai de Marie piguré par i.i: manteai d'Elie. lxix. -2. Marie Mère de Dieu, exempte du tribut comme souveraine, m.

<;. Sa dignité surpasse toute grandeur humaine el an-

gélique. lxv. I. Marie. La première t'ait vœu de virginité, vil. entière.

Aime ceux qui l'aiment, m. n. s.

Pourquoi elle est comparée ;'i la terre, vin. n. 8.

Pourquoi elle fut troublée au salut de l'Ange, vin.

II. '..

Pourquoi elle ne découvrit pas à saint Joseph Pin-

carnation du Verbe, vm. \. ix. ■».

Par humilité elle voulu! passer pour être au-dessous

de toutes les créatures, vm. •'».

374 TAULE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Marie. Paradis, lit rie Salomon , plante de virginité, coupe merveilleuse , trésor de sainteté , monde abrégé des grâces, xn. 1.

Milieu de la terre Dieu a opéré notre salut, xii. G.

Pourquoi elle ne laissa pas son Fils au temple, comme

la Mère de Samuel, xvm. 1.

Pourquoi elle ne nous fut pas donnée pour Mère à

Bethléem, mais au Calvaire, xxxix. 4.

Pourquoi il est dit qu'elle enfanta son premier-né. et

non pas son Fils unique, xxxix. 5.

Comment elle apaisa Dieu irrité, xin.

Chaque jour, au temple, elle assistait au sacrifice du

matin et du soir. vi. 7.

Entrant au ciel, surpasse de beaucoup la pompe de

la reine de Saba. lxiii. 3.

Arche animée, placée dans le Saint des Saints, lxiii. 5.

Pourquoi fut élevée au ciel au pied du mont des Oli-

viers, lxiii. 5.

Pourquoi elle est couronnée d'une triple couronne

par la Sainte Trinité, lxiv. et suiv.

Pourquoi elle est comparée au trône de Salomon,

d'Ezéchiel et d'Isaïe. lxv. i.

Pourquoi elle règne au cielencorpscten àme. lxiii L.

Pourquoi elle interpose une barrière entre Jésus-

Christ juge et le pécheur, lxv. <i.

Pourquoi elle nous aime plus qu'Esther n'aima sa

nation, lv. 7.

Très-bénigne, surpasse de beaucoup par sa miséri-

corde toutes les femmes de l'Ancien Testament.

LXV. 5.

Pourquoi toutes les créatures doivent la féliciter.

lxv. 8.

Elle est la baguette de Moïse ouvrant le chemin de

la céleste Palestine, i.xvi. I.

Elle est le modèle qui nous est montré sur la mon-

tagne, r.xvi. -2.

I <»\ i i mi 8 DANS I ri 01 vu \.,i . .'{T.")

Marie. Invoquée dévotement, elle secourl ses serviteurs dans leur agonie, i.x ix .

Pourquoi il est dit qu'elle se tient près du trône At'

Dieu, «d non qu'elle est assise, i.xix. .'i.

Est la patronne des âmes du purgatoire, i.xx.

Est la première près de la croix, ailleurs la dernière.

Epilog. 2.

Etait-elle à l'ascension de son Fils. i.iv. 2.

Après l'ascension de son Fils-, pourquoi fut-elle laissée

si longtemps sur la terre. i.iv. 2.

Sa disposition à l'ascension de Jésus, i.iv. G.

Elle nous apprend la meilleure manière de prier, i.vi.

Elle pensa continuellement à Jésus-Christ son Fils.

i.viii. 5.

Pourquoi elle peut être dite ce qu'il y a de plus grand

et ?eplus petit dans ce monde, vin. 2. Marie SŒUR de Moisi:. Type de la B. Vierge, vu. i. Marie l'Egyptienne convertie pab la Douloureuse Mère. xxvi. 6. Marteau. Pourquoi ne fut pas entendu pendant la construction

du temple, ni. 4. Martyrs (les saints) allaient joyeux a i \ soi n rance. Mais non

la Douloureuse Mère. Pourquoi? xi.vii. .'{. Matathias. Sa douleur en voyant le temple dévasté, xxvi. 6. Méditation. Il nous faut apprendre de Marie la manière de

méditer, i.ix. :{. Les fruits de la méditation indiqués par

plusieurs Bgures. lie. \. Mélithon (S.). Sa mère admirable, xi.v. ". Membre. Quand un membre souffre, les antres souffrenl aussi.

XXIII. I .

Mer. Comment le S. Cœur de Marie fui une meramère. xi.vn. l. Mère 1i Douloureuse, comparé! \ S\ii\. Pourquoi? Exhorta- tion. 2.

Ml l:i DOULOUREUSI amOUr de lai POUB il GENRE HUMAIN.

Exhort. .'{.

Souffrit plus en quelque sorte que son Fils. Exhort. 6.

Rose, olive, Inné pâle, etc. Comment? xxv. '•.

376 T4BLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Mère Douloureuse. Sa douleur, son amour à la captivité de sou Fils. xxvi. 6.

Comment elle suivit son Fils charge de sa croix.

xxxii. -2.

Ses derniers adieux à son Fils portant sa croix au

mont Calvaire, xxxii. 1 et suiv.

Comment elle imite le fidèle Etbaï en montant au

Calvaire, xxxii. 5.

Sa conduite au crucifiement de son Fils. xxxm.

Si elle était au palais de Caïphe. xxvni. 4.

Comment elle est la coopératrice de notre salut.

xxviii. i.

Arrosée du sang précieux de son Fils, xxxiv. 2.

Pourquoi Dieu a voulu qu'elle assistât à toutes les

douleurs de son Fils, xxxiv. 3.

Au pied de la croix elle répare ce qu'Eve avait détruit

devant l'arbre du paradis terrestre, xxxiv. S.

Pourquoi elle se tint à gauche de la croix, xxxiv. 3

et xxxvi. 3.

Au pied de la croix, elle est pour tous un refuge.

xxxiv. 3.

Ses sentiments au pied de la croix, xxxiv. \.

Pourquoi tout près de la croix, et non pas éloignée.

xxxiv. 4;

Est léguée pour Mère à sainte Meethilde par Jésus

crucifié, xxxiv. 5.

Nous enseigne comment il nous faut méditer Jésus-

Christ crucifié, xxxiv. \.

Grand prodige qu'elle ne soit pas morte au pied de

la croix, xxxiv. \.

Prosternée à genoux, «die disait avec son Fils :

Mon Père,pardonnez-feur... xxxv. 3.

Elle obtint le paradis au larron, xxxv. ri.

Ses sentiments quand son Fils promet le paradis au

bon larron, xxxv. 5.

Vraie martyre de la charité, xxxvu. 3.

< <>\ i i m i S DANS CET 01 \ l: kGE. 'Ml

Mii;i Douloureuse. Pourquoi fut-elle confiée à saint Jean.

XXXVIII.

Kilo est L'échelle de .lacob pour nous faire monter au

ciel, xxxviii. 7.

Mlle est confiée pour Mère oon-seulemenl à saint

Jean, mais à tous les chrétiens, xxxix.

Elle est très-puissante pour intercéder en notre fa-

veur. XXXVIII. 7.

Pourquoi elle fut présente à presque toute la Passion

de son Fils, xxxvn. \.

Est une Mère pleine de sollicitude pour nous obtenir

le salut éternel, xxxix. 7.

Est donnée pour Mère à tous parJésus-Christ mourant.

XL. 2.

Pourquoi elle est devenue notre Mère à L'ombre de

la cre;x. xl. \.

Pourquoi elle était tout près de la croix, xli. i.

Comment elle fut décolorée par le soleil, xli. 4.

Elle est la très-fidèle Mère des Associés des agoni-

sants. XI. II.

Elle est L'Arche très-sure nous pouvons éviter le

naufrag-e éternel de notre àme. xi.u. I.

Pour l'oldation de son Fils, plus bénie qu'Abraham.

XLII. 5.

N'abandonne pas ses clients fidèles, xlii. »1.

Modèle de constance en toute adversité, xlv.

Donne à Jésus Cœur pour Cœur. xlvi.

Recueille dans un vase le sang de son Fils crnciflé.

XLVI. i.

Est justement appelée par L'Eglise, la reine des

martyrs, xi.vii.

Est la cité de Dieu que Jérémie pleine sous la figure

de Jérusalem ruinée, xlvii. •"{.

Ne pouvait embrasser assez Les pieds de son amour

crnciflé. xlviii. i •■( suiv.

Prend soin <\r la sépulture de sou Fils. i.. 2.

378 TABLE PES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Mère Douloureuse. Sa consolation, quand elle reçoit le corps de son Fils sur ses genoux, l. 2.

Pourquoi elle ne fut pas immolée avec son Fils. lu.

Elle est représentée par un plongeon, lu. i.

Son affliction grande comme la mer. lu. 1.

Après la mort de son Fils, fut l'unique consolation de

l'Eglise primitive, lu. 2.

Toute sa vie, elle médita Jésus crucifié, lix.

Pourquoi elle visitait fréquemment le mont des Oli-

viers et du Calvaire après l'Ascension de Jésus. lix. 2.

Comment avec son Fils elle but l'eau du torrent.

Epilog. 2. La Mère pesMaciiabées sept fois martyre. Type de la Mère Dou- loureuse, xxxiv. 2.

De la Chananéenne, type de la Mère Doulou-

reuse, xxxix. 6.

Les Mères sont pleines pe sollicitude pour leurs enfants. Jo- chabed et autres, xxxix. 7.

Métellus. Comment il conserva la vie à son père. xlii. 6.

Miel. Pourquoi Jésus-Christ ressuscité en mangea, lu. 1.

Miracle (ce fut un grand) que Marie ne mourut ras lla passion et mort pe son Fils, xliii. i.

Miroirs. Jésus crucifié et la Mère Douloureuse sont deux mi- roirs placés en face l'un de l'autre, xxxiv. i.

Moïse vit pe loin la Palestine. Mais il n'y entra pas. lxi. 5.

Pourquoi il dut ôter sa chaussure pour s'approcher

du buisson ardent. Epil. 7.

Exposé dans une corbeille de jonc, il est le type de

Jésus naissant, xv. 5.

Pourquoi il fut seul préservé de la mort. xix. (i. Monde. La Mère Douloureuse nous apprend à mépriser le

monde et les choses de la terre, lxi.

Figures du monde inconstant et trompeur, lxi. 1. 6. 7.

S. Paul, remarquable contempteur du monde, lxi. .'{.

Ne satisfait pas notre soif. lxi. 7.

CONTENUES DANS < FT GIVRAGE. 379

Mon] kGNE de l'ii ii . La Mère Douloureuse, xxxv. 4. Moribond, angoisses « i « * L'homme à la mort, xxvii. 3.

Mol;l DANS LA MARM1T1 DES ENTANTS DES PROPHETES. Est éloignée.

F.X1X. 7.

Mort (la) de Jésus crucifié fut un spectacle lamentable pour

sa Douloureuse Mère, xi.m. Moin- (la) de la Douloureuse Mère fut précieuse devant Dieu. lxii. 3.

Il n'y eut pas de deuil comme à la morl de Jacob, de

Moïse, de Juda Machabée. lxii. 7. Mort (la) bonne désirable. La mauvaise est à craindre, lxii. I.

Mi-lîT(la) EST RENDUE DOUCE PAR I.A MÈRE DOULOUREUSE. XI. II. 2.

Mi 'i;ui ii ation. Elle nous est très-nécessaire, xvn. ï. Myrrhe. Pourquoi les femmes en portaient autrefois sur Leur poitrine, xvn. ! .

Marie lai.-se l'or et l'encens, et prend la myrrhe, xvn.

Pourquoi les Mages offrirent de la myrrhe à Jésus et

à sa sainte Mère. xxn. -2. 3.

Signe de mortification, xvn. 4. Naaman. Comment il fut guéri de la lèpre, xxix. \. Naruchodonosor. Choisit les jeunes gens les mieux faits pour

sa cour. ni. I. Naissani i de la B. Vierge à Jérusalem près de la piscine pro- batique. iv. 7.

Sa naissance est figurée par l'aurore, rv. I

Est représentée par diverses figures, rv. 3 et suiv. Naissance de Jési s-Chrisi . xv.

Nk.oiii mi i i Joseph. Emus «les larmes delà Douloureuse Mère,

ensevelissent le corps de Jésus, i . _> . Noble. Tins une personne est noble, plus l'injure est grave.

XXVIII. -1.

Noces Di Canà. Commenl douloureuses pour la B. Vierge. xxn. 3. xi. vi. 5.

Pourquoi Jésus et Marie y assistaient, rail. 2.

Non di Jésus. La B. Vierge L'impose à sou Fils dans la cir- concision, xvi. 7.

380 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Nom de Jésus. Ce nom fut doux et amer pour la sainte Vierge, xvi. 7.

Pour n'avoir pas voulu adorer le nom de Jésus, les

anges apostats furent chassés du ciel.xvi. 7.

Ce nom a converti saint Paul, guéri le mendiant à

la porte du temple, renversé Goliath, relevé Job, fortifié les martyrs, xvi. 7. Nom (le). De Marie et les cinq pierres que prit David pour combattre Goliath, lxix. 6.

Pourquoi le nom de la B. Vierge fut Marie, et non

Eve, Sara, Rachel, Esther, Anne, etc. v. 1.

Nom de Marie semblable à l'orange, fruit doux et

amer. v. 1 .

Pourquoi l'ange ne prononça pas ce nom en la

saluant, v. 2.

Ce que ce nom signifie, v. 4.

Comment Marie est l'étoile de la mer. v. ri. Nom de Marie. Tour fortifiée, v. 5.

Myrrhe de la mer. v. 6.

Équivaut à cinq pierres précieuses, v. 7.

Novice. La V. Douloureuse présente à un novice un pain trempé dans le coté de son Fils. lvi. 7.

Nudité d'Adam, de Noé, des ambassadeurs de Da\id, de l'en- fant prodigue, xxiii. 3.

Niée (petite). S'élevant sur la mer, type de la B. Vierge. îv. 3.

Nuée (petite). Comment type de Jésus-Christ, xvi. \.

Niée. Pourquoi la V. Douloureuse est appelée une nuée légère, xix. 2.

Marie est une nuée féconde, xix. 2.

Nuit de la passion. Combien elle fut amère pour Jésus et sa

Mère Douloureuse, xxvin. Obédédom. Déni à cause de l'arche, lxv. 3. Obéissance (T). De la Douloureuse Mère fut exacte, i.xvi. 2. Océax. Le Cœur de Marie fut un océan de souffrances, eu. 1. Oiseau. Pourquoi L'ancienne loi ordonnait de renvoyer la mère

prise en son nid. lu. 2.

' ON 1 1 m i:s DANS I 1:1 01 \ i; \.,r. .'{SI

Olivier. Pourquoi cel arbre demeure seul intact au milieu «lu déluge, n. 5.

Olivier des champs, type de la Douloureuse Mère.

xxxv. i.

Pressoir au mont des Oliviers, xxv. 2.

La Mère Douloureuse entra-t-elle au jardin des Oli-

viers pendant l'agonie, xxv. 3. Ombre (l*). De la sainte croix nous est très-salutaire pendant la vie et à ootre mort. xi. en entier.

Du genévrier, salutaire pour Élie. Pourquoi ? xl. \. Du térébinthe, choisi par Jacob pour y enfouir des

idoles. Pourquoi ? xl. '».

Moïse, à L'heure de midi, cherche l'ombre avec ses

troupeaux. Pourquoi ? xl. 5.

L'ombre eie l'arbre de Daniel profite aux hommes et

aux bêtes. Pourquoi? i.x. 4.

L'Epou>e cherche l'ombre à midi. Pourquoi? xl. 5.

Comment l'ombre de la croix est un repos pour l.i

Douloureuse .Mère, qui n'y fut point assise mais debout, xl. 1 et 3.

L'ombre d'un arbre nuisit à Eve et au genre hu-

main ; mais à l'ombre de la croix, Marie répare ce qu'Eve avait détruit, xl. 3.

Comment chaque homme est l'ombre ou l'image

<\i~ Jésus en croix. XI.. 3.

Jésus crucifié était une ombre salutaire et sur,- pour

le pape Jules II. xi.. I .

L'ombre du lierre de Jouas n'eut pas de durée ; tel

est l'abri que prêtent les mondains, xi., (i.

L'ombrede saint Pierre guérissait les malades. xl.6.

L'ombre du bras droit de Jésus-Chrisl en croix l'ut

très-salutaire an Larron. On lis. !.'• grand-prêtre, type de Jésus-Christ, xxxn. -2. ii/.\. Heli, Ophni el Phinées sont-ils damnés, lxv. 5. Palme. Symbole de paix et d'amitié. x«v. l.

Marie choisi! la palme de la croix, xi.v. .'i.

382 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Panetier et Echanson de Pharaon ; pourquoi celui-ci sauvé et celui-là perdu, xin. 6.

Paradis terrestre. Pourquoi fut-il si beau? xn. 7.

Passereau. L'un immolé et l'autre renvoyé vivant; pourquoi? lu. 2.

Passion (la) du Fils toujours présente à la mémoire de la Dou- loureuse Mère, xxxiii.

Jésus-Christ s'entretient souvent de sa Passion avec sa douloureuse Mère. xx:n 2.

Patience chrétienne. Symboles, xli. 1.

De la Douloureuse Mère devant la croix, xli.

Par la patience est éprouvé l'homme : Tobie, Job, David, Eléazar, les Machabées, tous les saints, xli. o.

La patience est la porte de fer conduisant à la céleste

Jérusalem, xli. o.

Patience de la Douloureuse Mère pendant toute sa vie.

lxvi. 4.

La patience nous est nécessaire pour avoir part aux

promesses. Epilog. 7. Patriarches. Louanges qu'ils donnent à la Mère Douloureuse

le jour de la Résurrection de Jésus-Christ, lui. 6. Paie (S.) était toujours crucifié avec Jésus ; à plus forte raison

sa très- sainte Mère, lviii. \. Pauvreté de la Douloureuse Mère dans l'exil de sept ans.

xix. 5. Pécher. Diverses manières de pécher, et moralité qu'on en

tire. lxx. 1. Pécheurs. La Mère d'amour et de douleur est leur refuge, xi.v.

Elle est la Mère des pécheurs vraiment repentants.

XXXVI.

Persévérance. Nous devons l'apprendre de la Mère Doulou- reuse. XLV.

Phare. La Mère Doulouieuse est un phare et un port pour tous ceux qui sont en danger, xxvi. I.

Philippe (S.) Bcniti aime et honore la B. Y. Mère Douloureuse.

LXVI. 7.

CONTENUES DAN8 u i 01 VB \u . 383

Pie imitant des instruments de musique.

Pu Gi du démon ; Marie seul y échappe, m. T.

Pierre S. lpotre. Pourquoi repris seul par Jésus-Chrisl au

monl des oliviers, i.vu. 6.

Après sa chute, il est consolé parla Mère Douloureusi .

LU. V.

Pierre immobile au milieu des flots, représentant la Mère

Douloureuse, xxxvn. 1. IV, im. probatique, type du sang de Jésus-Christ, xxv. î. Plaies. Pourquoi Dieu a mis toutes les plaies dans le cœur de

Marie, xi.vii. \ . Plaies (les cinq) de Jésus-Christ ; Marie fut la dm mière à les honorer, xi.vm, en entier.

Les cinq plaies de Jésus-Christ représentées par di-

verses figures : par les cinq sicles ; les cinq pierres de David : leg cinq villes de refuge ; les cinq rubis de Judith; les cinq pains ; les cinq talents ; les cinq por- tiques de la piscine ; les cinq lampes allumées, xlviii. •4, et suiv. Plaintes de la Douloureuse Mère envers les pécheurs, xvui. U.

(loutre Judas le traître xxvi. 3.

Contre les Juifs ingrats et déicides, xux. 3.

Porte d'or dans le temple le paralytique demandait l'au- mône, type de lai!. V. M. xn. 7.

Porte toujdura dose et aspergée du sang de l'agneau, est la Vierge Douloureuse, m. 1.

Portement de la lourde croix par Jésus-Christ, .mu, 3.

Prémices des fruits; pourquoi autrefois offertes ;'i Dieu. vi. 2.

Préseni i de Dieu La) avec la Douloureuse Mère en toute occa- sion nous est proposée à imiter, lx.

Ceux qui repoussent la présence de Dieu périssenl mi-

sérablement. LX. •'.

Le souvenir de la présence de Dieu préserve du péché.

i \. u.

11 sanctifia AJbraham. lx. l .

384 TABLE I>ES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Présence de Dieu. L'oubli de lu présence de Dieu fut cause de la chute de Pierre, de l'égarement de l'enfant pro- digue, et du crime des Juifs, lx. A.

11 fit tomber Adam, Gain, David, ex. o.

La pensée de Dieu partout rendit parfaits Elie, Elisée,

Enoch, Jérémie et Tobie. ex. 8. Présentation de la B. Vierge au temple ; comment elle fut

faite, vi. Présents (les) des Mages expliqués selon l'état de chaque

homme, xvn. u. Présents des. trois rois mages expliqués pour toutes les coiuli-

tions. xvn. 6. Pressoir de la passion ; Marie la Mère Douloureuse l'a foulé

avec son Fils. xxv. 1 et suiv: Prière. Ce qu'elle doit être pour mériter d'être exaucée de Dieu. lvi.

Pourquoi notre prière est si tiède, lvi. 2 et 5.

Prière de la Mère Douloureuse après la résurrection

de sou Fils. lvi. 4.

Nous devons apprendre de Jésus et de Marie la ma-

nière de prier, lvi. i.

Diverses figures des bonnes prières, lvi. G.

Nous pouvons toujours prier, lvii. 1.

Gomment la prière de Marie était assidue, lx. 7. Prières me Josuè, Ezéchias, Elie, Jouas, Suzanne, furent effica- ces, lxvii. 5.

La prière est la trompette de Josué faisant tomber les

murailles de Jéricho. LXVin. 7. Procession douloureuse de Jésus-Christ portant sa croix au

Calvaire, xxxn. 3. Purgatoire. La Mère Douloureuse est la fidèle patronne des

âmes du purgatoire, lxx.

Elle leur est plus utile que Jochabcd à Moïse, la Su-

namite à son fils, Esther à son peuple, lxx. 3.

Anus du purgatoire comparées aux poissons s'ap-

prochant la nuit de la lumière, lxx. 1.

'"MEMES DANS CET OUVRAGE. 385

Purgatoire. Le pauvre demandant l'aumône à la porte du tem- ple, type de l'àme en purgatoire, i.xx. I.

Et aussi le paralytique depuis trente-huit ans. lxx. 5.

Et de même l'homme de Jéricho tombé entre les

mains des voleurs, lxx. G.

Les âmes délivrées de leurs peines, sont reconnais-

santes envers leurs bienfaiteurs ; figures, lxx. 7.

La B. Vierge souvent visite le purgatoire, lxx. 2.

Peines adoucies par son intercession, lxx. o. Rachel pleurant ses enfants, type de la Mère Douloureuse.

XXVII. 2.

Rachel cachant ses idoles, image de Marie, xv. 2.

Comment cela? ibid.

La beauté de Rachel console et encourage Jacob.

Epilog. 4. Rébecc.a couvrant Jacob de peaux de chevreaux, type de la Douloureuse Mère. xv. 4 et lxviii. 4.

Obséquieuse envers les étrangers, type de la B. V.

Marie, xxn. 1.

Conservant son fils Jacob menacé de mort par Ésaù,

type de la B. V. Marie, xxxvi. 4. Reine. Marie est la reine des martyrs à plusieurs titres, xlvii. Regina cûîli l.etare. Les anges l'ont chanté les premiers à la

résurrection de Jésus-Christ en l'honneur de la Douloureuse

Mère. uii. i. Reine (la) du Saint Rosaire obtient plus qu'Esther et Beth-

sabée. xlvii. 8. Règne divisé entre Jésus-Christ et Marie pour les douleurs et

les joies, v. 3. Règne de Jésus-Christ par le bois de la croix, xxxn. 6. Religieuse (une) désertant sa congrégation, est réprimandée

parla B. V. et punie par Jésus-Christ, xxxv. 0. Résignation '!'■ la Douloureuse Mère à la volonté de Dieu.

xix. xxiii. xxxn, et ailleurs. Ri.si RRECTION (la) de Jésus-Christ fut un sujet de joie inexpri- mable pour Marie, lui, en entier. II.

386 TABLE DES CHOSES ET PENSÉE!- ŒMARQUABLES , ETC.,

Rosaire de la Vierge. Est le fil d'riane. lxvi. 1.

Le cordon de Rahab ; le ti Die lien difficile à rompre ;

la pierre de la femme e Thébès ; le glaive de Judith ; la fronde de Dav ; le clou de Jahel, etc. 2. L'arc tricolore. 3.

Il ramène à Dieu 1< péc urs. 2.

C'est le buisson ardent. La lyre de David. 5.

Les trois sortes de mystèjs du Rosaire sont figurés

par Abraham, Isaac et -hob. 6.

C'est la trompette de Josi:. 7. Rosé1 ;ur la toison seule, ni. 4.

Ruth glanant les épis, type de la M-e de douleur et d'amour.

LVIIl. 2.

Saba (la reine de) et Lsther frappes d'étonnement, type de

la Mère douloureuse. Comment xxxi. 6. Saba (la reine de) entrant avec ompe à Jérusalem , type

de la B. V. lxiii. 3. Saba (la reine de) présentant à balmon de l'on

tes, type de la B Sacrifice d'Abrah^

celui de Jeptl

SaORI 'CES

gnaient Sacrifice

Yiergj Salomi

Saloj

aroma-

r»i'

jûCfllll

le a rompre;

«al figurés

il, type de ]em, type

F. ES DANS CET OUVRAGE.

387

Samson tuant plus d type de Jésus-Chr Sang (le) de Jésus p Sang (le) de Jésus-C Sang (le) de Jésus-Cli

■i émis en mourant que pendant sa vie,

1 vLIII. O.

ir mieux que le sang d'Abel. xvi. 3. r . Combien il est efficace, xxxiv. 2. I plus médicinal pour l'àme que le Jour- dain pour Naai la piscine pour le paralytique, xlvi. 4. Sang (le) de l'Agneau )igna de la B. Vierge toute espèce de

faute, m. 1 et 4. Sara. Combien e I jouit en revoyant son fils Isaac qu'elle

croyait mort. Sareptha (1 femm 1 Pourquoi type de la B. Vierge Dou- loureuse. XXII. Scapclaire corn vers boucliers, dont plusieurs corol-

laires, lxviii. 3. Scapulaire de la B. V bouclier dans l'adversité, lxviii, tout entier.

Bouclier i n Arcture, et de Josué contre Haï.

lxviii. I.

Bouclii id. lxviii. 1.

Scapulaire donm 1 B. Vierge au B. Simon Stock, général

des Carmes. ix\ Scapulairi fie) est le cdon avec lequel n retira Jérémie de la foss. n i. 5.

Il est Tuai i ur prendre les âmes, lxviii. :;.

Il est figuié jr le manteau d'Elie. lxviii. g. ^ Scapulaire figuré par 1 panetière de David, lxviii. \. Scapulaire profitable ai: âmes du purgatoire, lxviii. 5. Sédécias (le roi, prisonier et abandonné de tous, tvpe'

Jésus-Christ. xx\

Sein de la Vier.;; s,nt comité a un monceau de bll

environné de lis. vu l. Sentence portée contre ésus-Cbrist. xxxi. 5. Sentence de mort porte contre Jésus-Christ, Marie J'entend

xxxi. 5.

Sépulture. Jésus-Christ st conf- é à la sépulture par la Doulou- reuse Mère. l. 5.

386 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.,

Rosaire de la Vierge. Est le fil d'Ariane, lxvi. 1.

Le cordon de Rahab ; le triple lien difficile à rompre ;

la pierre de la femme de Thébès ; le glaive de Judith ; la fronde de David ; le clou de Jahel, etc. 2. L'arc tricolore. 3.

Il ramène à Dieu les pécheurs. 2.

C'est le buisson ardent. 4. La lyre de David. 5.

Les trois sortes de mystères du Rosaire sont figurés

par Abraham, Isaac et Jacob. 6.

C'est la trompette de Josué. 7. Rosée sur la toison seule, ni. i.

Rlth glanant les épis, type de la Mère de douleur et d'amour. lviii. 2.

Saba (la reine de) et Esther frappées d'étonnement, type de la Mère douloureuse. Comment, xxxi. 6.

Saba (la reine de) entrant avec pompe à Jérusalem , type de la B. V. lxiii. 3.

Saba (la reine de) présentant à Salomon de l'or et des aroma- tes, type de la B. V. vi. i.

Sacrifice d'Abraham. Pourquoi il fut agréable à Dieu, et non celui de Jepthé. vi. 3.

Sacrifices (tous les) offerts autrefois dans le temple dési- gnaient Jésus-Christ qui devait être crucifié, xx. 1.

Sacrifice très-agréable à Dieu était le Cœur de la Douloureuse Vierge, vi. 3. et suiv.

Salomé. Veuve et mère des fils de Zébédée ; pourquoi elle n'ob- tint rien de Jésus-Christ par sa prière, lvi. 1 .

Salomon immola des troupeaux entiers de brebis et de tau- reaux, vi. \.

Samson brisa ses liens ; pourquoi Jésus-Christ ne brisa pas les siens, xxvn. A.

Samson brisant les portes d'airain et les portant sur la monta- tagne, type de Jésus-Christ ressuscitant d'entre les morts. lui. 2.

Samson. Pourquoi il osa combattre avec un lion dans une vi- gne, h. \.

CONTENUES DANS CET OUVRAGE. 387

Samson tuant plus d'ennemis en mourant que pendant sa vie, type de Jésus-Christ, mu. ."i.

Sang le de Jésus parle mieux que le sang d'Abel. xvi. 3.

Sang (le) de Jésus-Christ. Combien il est efficace, xxxiv. 2.

Sam; (le) de Jésus-Christ plus médicinal pour l'àme que le Jour- dain pour Naaman, et la piscine pour le paralytique. xr,vi. 4.

Sang (le) de L'Agneau éloigna de la H. Vierge toute espèce de faute, ni. 1 et 4.

Sara. Combien elle se réjouit en revoyant son fils Isaac qu'elle croyait mort. un. »'>.

Sareptua (la femme de). Pourquoi type de la B. Vierge Dou- loureuse, xxii. 'i.

Scapolàire comparé à divers boucliers, dont plusieurs corol- laires, lxviii. 3.

S. \i'i laire de la B. V. bouclier dans l'adversité, lxviii, tout entier.

Bouclier du roi Arcture, et de Josué contre liai.

lxviii. 1.

Bouclier de David, lxviii. 1.

Scaitlaiiu: donné par la B. Vierge au B. Simon Stock, général

des Carmes, lxviii. \. Scapulaire (le) est le cordon avec lequel on retira Jérémie de la fosse, lxviii. ri.

Il est l'hameçon pour prendre les âmes, i.xvm. o.

Il est figuré par le manteau d'Elie. lxviii. G. Scaiti.aire figuré par la panetière de David, lxviii. !.

S. \iti.\ike profitable aux âmes du purgatoire, lxviii. .*>.

Sédécias (le roi) prisonnier et abandonné de tous, type de .I''sus-Christ. xxvii. G. '

Sein ni; la VlEBGB. Comment comparé à un monceau de blé environné de lis. vu. I .

Senti mi i portée contre Jésus-Christ, xxxi. .'J.

Sentence de mort portée contre Jésus-Christ, Marie l'entend. xxxi. 5.

Si "i i.:i ré. Jésus-Chrisl esl confié à la sépulture par la Doulou- reuse Mère. l. 5.

388 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.,

Serpent élevé dans le désert, type de Jésus-Christ, xxxm. 1. Serpent. Pourquoi il dresse des embûches au talon de

l'homme, lxix. I. Servante (la) du prince Xaaman, type de la B. V. l'humble

servante du Seigneur, vm. 7. Serviteurs (les) de Marie sont vêtus d'un double vêtement.

lxvi. 2. Siège de David promis par l'Ange à la B. Vierge, xxxu. 6. Siège d'IIéli n'ayant pas de dossier, figure du monde, lxi. 1. Siméon (pourquoi) prédit à la Mère Douloureuse la passion de

son Fils, xviii. 3. Siméon (pourquoi) à la vue de Jésus enfant souhaite de mou- rir, xvni. 2. Simulacres (pourquoi les) tombèrent à l'arrivée de Jésus en

Egypte, xix. 2. Soleil arrêté sur le dixième degré, type du Christ en croix.

XXXI ii. 1. Soleil (le) au signe de la Vierge tempère la chaleur, ce qu'il

signifie, xni. 1. Soleil (le) se couchant en plein midi : Jésus-Christ crucifié.

xliii. 1 et xliv. 1. Soufflet donné par Malchus à Jésus ; la Mère Douloureuse

l'entend, xxvn. 6. Statu; de .Xabuchodonosor, type du monde, lxi. I. Station de la Mère douloureuse au pied de la croix ; ce qu'elle

signifie, xliii. 5. Seaire (le) dans lequel fut enveloppé le corps de Jésus-Christ,

frappe l'esprit du spectateur, xxix. 7. Sulamite (la). Comment elle est le type de la B. Vierge, vi. 1. Sunamite (la) figure de la Mère Douloureuse ; comment.

xi.vm. 1. Symbole de Léopold Ier, glorieux empereur des Romains, lx. 3. Sympathie parfaite entre Jésus et sa Douloureuse Mère. xxm. 1

xxvn. .'). Temps. Celui qui le perd est un grand voleur, lvh. 5. Temps. La fourmi nous apprend ;i bien l'employer, i.vn. 7.

CONTENUES DANS CEI 01 VH m.i . 389

Temps. Parce que l'Épouse n'y lit pas attention, le Bien-Aimé

s'éloigoa d'elle, lvii. I. Temps. Parce que Pierre ne l'employa pas bien au jardin des

oliviers, il en fut réprimandé par Jésus, lvii. »i. Temps. Pour l'avoir négligé, Esaù fut privé de la bénédiclion

de son prie. lvii. 4. Temps (le) qui est si précieux, la B. Vierge ei Mère douloureuse

sut toujours très-bien l'employer, lvii. en entier. Temps m sai.it. Les deux aveugles de Jéricho l'observèrent

parfaitement, lvii. 7. Temps du salit. Marie-Madeleine sut le saisir et en profiter.

LVII. 7.

Temps du s mat. Pour l'avoir négligé, les vierges folles furent

réprouvées, lvii. 5. Ténèbres en Egypte. Type du monde avant la naissance de la

l>. Vierge, iv. i. Ténèbres et ellipse du scleil et delà lune. Leur cause, xlui. 1. Terre sacerdotale. Seule exempte d'impôt, n. 5. Testament de Jésus-Christ en croix, xxxix. 1 et suiv. Testament d'Elie, de Jacob, de David, de Jonathas, de Mata-

thias. xxxix. 2. Testament (le) de Jésus-Christ mourant est pour chaque fidèle.

xxxix. 3. Thécuite (la) prudente est l'image de la B. Vierge Marie.

XXII. 5. XXXV. 1.

Théoclie tombe morte en embrassant son fils suspendu à nue

croix, xi.ix. 2. Trésor. Le sacré-cœur de Jésus est un trésor sans fond.

xi.vni. 7. Trône (le) de Salomon est un type de la H. Vierge ; ainsi que le

trône d'Ezéchiel, d'Isaie, etc. lxv. \. Tobie. Pourquoi devenu aveugle. Epilogue. ~. TOBIE mourant recommande a son fils d'avoir soin de sa mère.

Kxliort. 6. Toge (la) de César, assassin.' au sénat, excite la compassion ef

Les larmes du peuple romain, xi.iv. .'5.

390 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.,

Toile d'araignée. Figure du monde, lxi. 1.

Tollé, tollé ! Combien ce cri fut lamentable aux oreilles et au cœur delà douloureuse Mère. xxxi. 4.

Tourterelle. Figure de la Douloureuse Vierge, xx. 2. lviii. 1.

Travailler (il faut) à l'exemple de la Mère Douloureuse, pen- dant qu'il en est temps, lvii. en entier.

Trois choses sont difficiles pour Salomon, et il en ignore com plétement une quatrième. Ce que cela signifie, liv. 1.

Tulipe. Fleur languissant au coucher du soleil, xxvm. 2.

Tunique multicolore de Joseph. Application a Jésus et à sa Mère Douloureuse, xxi. 3.

Urbain III, Pape, meurt en apprenant la prise de Jérusalem. xxvii. 2.

Ursule Benincasa peint avec un art merveilleux Jésus-Christ crucifié, lviii. 6.

Vaisseau. Comment la Mère et Vierge Douloureuse est le vais- seau du marchand, xiv. 6. lvii. 3.

Vase (de Gédéon) brisé. Comment il est un type de Jésus-Christ mourant sur la croix, xliii. 2.

Vasthi. Pourquoi cette reine est répudiée, lxvi. 2.

Vêtement (le) de la Douloureuse Mère était de laine pure cou- leur de cendre, lxi. 3.

Victime immaculée devait être immolée à Dieu. m. i.

La B. Vierge. Comme elle méditait la future passion de Jésus- Christ, xviii. 3. et suiv. Pourquoi Dieu la traite si durement, xx. 6. et suiv.

Comment, souverainement aimée de Dieu, elle

est cependant exposée à tant de douleurs. xx. 5.

Après. l'Ascension de son Fils, elle est à la tète

de cent vingt vierges, lxi. 3.

Elle donna aux pauvres ce qu'elle put avoir.

lxi. 2.

Elle portait continuellement en son cœur les

stigmates de son Fils. lxi. \.

CONTENTES DANS CEI OUVRAGE. .'t!U

La B. Vierge. Son désir ardent de voir Dieu, i x i . .i.

Elle ne craignit point la mort, mais la désira.

i.xii. 1.

Elle souhaite la fin de son existence pour rire

avec Jésus-Christ, un. en entier.

Elle languit d'amour pour son divin 1 ils.

LXIl. i.

Elle voulut voir h sa mort les saints Apôtres,

auxquels elle donna sa bénédiction mater- nelle, lxii. 5.

Son àme monte au ciel en grande pompe.

un. 6.

Comment elle fut ensevelie, lxii. S.

Pourquoi voulut-elle être ensevelie dans la val-

lée de Josaphat V lxii. 8.

Son corps fut préservé de toute corruption ;

figures et raisons qui le prouvent, uni. \.

Comment son àme s'unit de nouveau à sou

corps, lxiii. 1.

Avec quels applaudissements elle fut reçue par

tous les habitants du ciel, lxiii. û.

Pourquoi elle ne monta pas au ciel dans un

char de feu, comme Elie, mais appuyée sur son bien-aimé Fils, lxiii. 2. Vigne élégamment comparée à Jésus-Christ, xvi. !. Vin. Le sang de Jésus-Christ est un vin généreux, xlvi. 5. Virginité. Eloge de la virginité et du cœur pur. vu. 3. Virginité. Moyen de conserver la virginité, vu. 6. Virginité (belle auréole (he la) vu. 6.

Combien la virginité est aimée de Dieu. VU. <>. Voile (le) de la Douloureuse .Mère, arrosé «lu sang de Jésus

crucifié, est conservé en Bohême, xi.i. i. Volonté (la) de Dieu en tout l'ut La première règle «le la Dou-

loureuse Mère. six. i . Xi.MhM s S. .1. esl averti par la B. Vierge de soulager les âmes du purgatoire, xx.t. ...

392 TABLE DES CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES, ETC.

Yeux (les) de la Douloureuse Mère comparés a la fontaine

d'Hesebon ; pourquoi, xliv. 1. Zacharie (comment) reçut la B. Vierge en sa maison, xiv. 1.

FIN DE LA TABLE DEs CHOSES ET PENSÉES REMARQUABLES

TABLE

DES SUJETS A PRÊCHER LES DIMANCHES DE L'ANNÉE

ET LES FERIES DU SAINT TEMPS DE CAREME

Ier Dimanche de l'Aveu i .

Scitotc quoniam prope est regnwn Z)«VLuc 21. 31.

Il faut chercher le royaume de Dieu, et mépriser les choses mondaines et terrestres. Considération lxi.

IIe Dimanche de l'Avent.

Tu es, qui venturus es, an alium expectamus? Matth. 11. 3.

De la venue de Jésus-Christ dans la chair, et du souverain bienfait de l'Incarnation. Consid. xi.

IIIe Dimanche de l'Avbnt.

Ego vu clai/tontis in deserto. Joan. 1. 23. De la vertu do vraie et sincère humilité qui nous est souve- rainement nécessaire. Consid. vin.

IV* Dimanche de l'Aveu i .

Et videbit omnis caro salutare Dei. Luc. 1. 6. Jésus-Christ, dans le sein de la Bienheureuse Vierge, s'est merveilleusement adouci ;i l'égard des pécheurs. Consid. un.

Le Dimanche dans l'octai t di Noël.

Ecce posùus est hic in sigmtm, cui contradicetur : et tuam ipsius animam pertransibitgladius, Luc. 2. 34.

394 TABLE DES SUJETS A PRÊCHER LES DM. DE L'ANNÉE

Comment le glaive de Siméon blessa l'àme et le cœur de la Douloureuse Mère. Consid. xvm.

Ier Dimanche après l'Epiphanie.

Eccc pater tuus et ego dolentes quœrebamus te. Luc. 2. 48. Douleur et amour de l'affligée Mère cherchant pendant trois jours son Fils perdu à l'âge de douze ans. Consid. xx.

IIe Dimanche après l'Epiphanie.

Dicit Mater Jesu ad eum : Vinum non habcnt. Joan. 2.3. Sollicitude de Marie qui, sans être priée par eux, vient en aide aux époux de Cana dans leurs besoins. Consid. xxn.

IIIe Dimanche après l'Epiphanie.

Domine, puer meus jacet in domo paraît/ ticus et maie torque- tur. Matth. 8. 6.

La Mère d'Amour et de Douleur prend un soin particulier des malades et des agonisants. Consid. xlii. et lxix.

IVe Dimanche après l'Epiphanie.

Ecce motus magnas factus'est m mari, ita ut navicula ope-

riretur /luctibus. Matth. 8. 24.

Toutes les joies dans ce triste monde sont mêlées d'amer- tume. Consid. xxi.

Ve Dimanche après l'Epiphanie.

Cum autem dormirent homincs, venit inimicus ejus, et super- seminavit zizaniam. Matth. il. 2o.

Parmi tant de périls, nous n'avons pas à dormir, mais fai- sons le bien pendant que nous avons le temps. Consid. lvii.

VIe Dimanche après l'Epiphanie.

Cum autem creverit, majus est omnibus oleribus, et fit arbor.

Cet arbre est la croix de Jésus-Christ, sur laquelle font leur nid les oiseaux du ciel, c'est-à-dire les âmes pieuses. Con- sid. XL.

et les feries m saint temps de careme 39o

Dimanche de la Septuagêsime.

Ih et uos in vineam meam. Matth. 2<>. 7.

Il ne faut point demeurer oisif en ce monde, mais, par beaucoup de peines et de sueurs, il faut, de la vigne de l'E- glise, entrer dans le royaume de Dieu. Consid. xi.v. et Epilogue.

Dimanche de la Sexagésime.

Fructum affermit in patientia. Luc. 8. 16. La patience, à l'exemple de la Douloureuse Mère, nous est nécessaire pour avoir part aux saintes promesses. Consid. xi.i.

Dimanche de la Quinquagésime.

Ecce ascendîmus Jerosolymam, et consummabuntur omnia, quse scripta sunl perprophetas de Filio hominis. Luc. 18. 31.

Les persécutions et les injures endurées par Jésus-Christ avant sa passion, augmentent la douleur de sa pieuse Mère. Consid. xxiii.

Le mercredi des Cendres.

Fecit Tobias vale matri suœ. Tob. 5. 22. Les adieux faits par Jésus-Christ à sa très-sainte Mère au moment de la quitter pour aller à sa cruelle passion. Cons. xxiv.

Le vendredi après les Cendres.

Factus est sudor cjus sicutguttm sanguinis decurrentis in ter- rant. Luc. 22. 24.

De l'agonie de Jésus au jardin, agonie cruelle que n'ignora pas sa Douloureuse Mère. Consid. xxv.

Le samedi après les Cendres.

Confestùn accedens adJesum dixit : Avet Rabbi; et osculatus est cum. Mat. 26. 19. La Douloureux Mère entend dire que s. m Fils esl vendu

et livré aux Juifs pour être mis à mort. Consul, xxvi.

394

TABLE DES SUJJ

Comment le glai^ Douloureuse Mèrei

Ecce pater t^ Douleur et jours son Fil]

mt pen

,nt en

jt maie torquc-

m soin particulier lu. et lxix.

IPHAXIE.

1 mari, ita ut navicula ope- is monde sont mêlées d'amer-

l'Epiphame.

whomuu venit inimicus ejus, et super- Itth. 1 1 .

Is, nous n vous pas à dormir, mais fai- ■E que n<5u avons le temps. Consid. lvii.

«manche ai' - l'Epiphanie.

wcrit, majus et omnibus oleribus, et fitarbor. la croix de Jés -Christ, sur laquelle font leur ) ^V ciel, c'est- dire les âmes pieuses. Con-

Cûnsid. am.

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ES m \l\l M.MI'S DE CARÊME

395

V Ski'tlagésime.

'/?iMatth. 20. 7. demeuil oisif en ce monde, mais, par Tes et ( 1 1 leurs, il faut, de la vigne de l'E- rle royaumeie Dieu. Consid. xlv. et Epilogue.

Dimanche i la Sexagésime.

triint inpatic? a. Luc. 8. 10. l'exemple c la Douloureuse Mère, nous est Ir avoir part au saintes promesses. Consid. xli.

DlMANI I V QuiNQUAGÉSIME.

Jcendimus Jerosoh/mm et cou- immabwitur omnia,

f/jta sunt per pr< F/uo hominis. Luc. 18. 31.

^persécutions et les irures endurées par Jésus-Christ

sa passion, augmentât la douleur de sa pieuse .Mère.

Tsid. xxiii.

Le mercrei des Cendres.

Fecit Tobias vole matri sm Tob. 5. 22. Les adieux faits par Jésu-Christ à sa très-sainte Mère au moment de la quitter pour ail ù i cruelle passion. Cons. xxiv.

Le vendredi /rès les Cendres.

Factus est sudor ejus sicut uttœ sanguinis decurrentis in ter- rant. Luc. 22. 24.

De l'agonie de Jésus au ja lin, agonie cruelle que n'ignora pas sa Douloureuse Mère. Cosid. xxv.

Le samedi Ai i';s les Cendres.

C on f es tim accède ns adJesui dixit : Ave, Rabbi; et osculatus est eum. Mat. 20. 49.

La Douloureuse Mère entud dire que son Fils est vendu et livré aux Juifs pour être i s a mort. Consid. xxvi.

396 TABLE DES SUJETS A PRECHES LES DIMANCHES DE LANNÈE

Ier Dimanche du Carême.

Christus Dominus eaptus est in peccatis nostris. Thren. 4. 20. La Douloureuse Mère cherche pendant la nuit son Fils captif et traîné chez les pontifes. Consid. xxvn.

Le mercredi après le Ier dimanche dd Carême.

Plorans ploravit in nocte, et lacrymse e jus in maxillfc cjus. Thren. 1.2.

La Douloureuse Mère, présente d'esprit, considérait les tourments que son Fils endura pendant la nuit. Consid. xxvin.

Le vendredi après le Ier dimanche du Carême.

Et fui flagellatus tota die, et castigatio mea in malutinis. Psalm. 72. 14.

La Douloureuse Mère présente, voit la flagellation de Jésus- Christ son Fils. Consid. xxix.

Le samedi après le Ier dimanche du Carême.

Imponunt ci plccicntcs spineam coronam, et cœperunt salutare

eum : Ave, rex Judœorum. Marc. 15. 17.

La Douloureuse Mère contemple son Fils couronné d'une couronne d'épines. Consid. xxx.

Le IIe dimanche du Carême.

Dicit eis : Ecce ho/no. Cum ergo vidissent eum ponlifices et ministri, clamabant dicentes : Cruei/igc, crucifige cum. Joan. 19. o.

La Douloureuse Mère entend la sentence de mort prononcée contre son Fils parle président romain. Considérât, xxxi.

Le MERCREDI APRÈS LE IIe DIMANCHE Dl CARÊME.

Bajulans sibi crucem, cri rit in cum, qui dicifur Calvarix locum. Joan. 19. 17.

La Douloureuse Mère accompagne au mont Calvaire son Fils portant sa croix. Consid. xxxu.

Kl LES l il; 1 1 s DU SAINT TEMPS DE CARÊMI Lk VENDREDI APRÈS LE II" DIMANCHE Dl CARÊME.

Postquam venerunt in locwn, gui dicitur Calvarùe, ibieru- ûifixerunt eurn. Luo. 23. 33.

Avec quel chagrin la Douloureuse Mère assiste au crucifie- ment de son Fils. Consid. xxxm.

Lk samedi après le IIe dimanche du Carême*.

Attenuati sunt oculi mei, suspicientes in excelsum. Isa. 3S. I ï . Avec quelle affection maternellr la Douloureuse Mère con- templa son Fils crucifié. Consid. xxxiv.

Le IIIe DIMANCHE DO CARÊME.

Amen, dico uobis: Hodie mecum cris m paradiso. Luc -2.',. 13.

La Douloureuse More devint une excellente médiatrice entre son Fils en croix et le Larron crucifié à sa droite. Considéra tion xxxv.

Le mercredi après le IIIe dimanche du Carême.

Ex quo facta sum coram eo quasi paeem reperiens. Cant. 8. 10.

La Douloureuse Mère, debout devant la croix, est devenue un refuge particulier, non-seulement pour le larron Dismai . mais encore pour tous les malheureux pécheurs. Consid. xxxvi.

Le vendredi après le IIIe dimanche dk Carême.

Mu/icr, eccc Filins tuus. joan. 19. 2G. Pourquoi la Douloureuse Mère, debout au pied de la croix, n'est point appelée Mère par son Fils, mais Femme. Consid.

XXXVII.

Le samedi après le III dimanche de Carême.

Deinde dicit Discipulo : Ecce Mater tua. 19. il.

Pourquoi la Douloureuse Vierge Mère l'ut recommandée

398 TABLE DES SUJETS A PRÊCHER LES DIM. DE L'ANNÉE

par Jésus à saint Jean d'une manière particulère. Consid. xxxvm.

Le 1Yc dimanche de Carême.

Ecce Mater tua. Joan. 19. 27.

La Douloureuse Mère a été donnée et confiée pour Mère par Jésus-Christ en croix, à tous les chrétiens aussi bien qu'à saint Jean. Consid. xxxix.

Le mercredi après le IVe dimanche de Carême.

In umbra tua vivemus. Thren. 4. 10.

La Mère Douloureuse, avec une affection maternelle, invite tous ses serviteurs à l'ombre de la sainte croix, xl.

Le vendredi après le IVe dimanche de Carême.

Tu es patientia ?nea, Domine. Psal. 70. o.

La Mère Douloureuse, debout devant la croix de son Fils, est un admirable miroir de patience pour tous ceux qui sont dans la tribulation. Consid. xli.

Le samedi après le IVe dimanche de Carême.

Non relinquam vos orphanos. Joan. 14. 1 8.

La Mère Douloureuse assiste à l'agonie de son Fils sur la croix; et c'est pourquoi elle est la fidèle Mère de ses serviteurs dans leur agonie. Consid. xlii.

Le dimanche de la Passion.

Viditsuum dulcem natum, morientem, désola tum, dum emi- sit spiritum. Ecclesia in hymn.

Douleur et tristesse de la Douloureuse Mère, en voyant son doux Fils expirer sur le gibet de la croix. Consid. xliii.

Le mercredi après la Passion.

Doleo super te, fratcr mi Jonatha, décore nimis, et sicut ma- ter unicum amat Filiitm suimi, ita ego te diligebam. II Reg. \. 26.

1.1' l.F.s PERLES m s MM' TEMPS DE CARÊME 399

Compassion et sentiment maternel de la Mère d'Amour et de Douleur contemplant son Fils mort entre les bras de la croix. Consid. xi.iv.

Le vendredi après la Passion.

MuKerem fortem guis invenictl Prov. 34. 10.

La constance et la force inexplicable de la Mère Douloureuse restant au pied de la croix après Ja mort si cruelle de son Fils. Consid. xi.v.

Le samedi après la Passion.

Vnlnerasti Cor mcum, soror mea, sponsa, ulnerasti Cor metan. Cant. 4. 9.

En blessant le Cœur de Jésus, la lance du soldat blessa aussi le Cœur de sa Douloureuse Mère. Consid. xlvi.

Le dimanche des Rameaux.

Tu supergressa es universas. Prov. 31. 29.

La Douloureuse Mère est la vraie Reine des Martyrs. Par sa douleur, elle a beaucoup surpassé leurs douleurs. Consid. xi.vii.

Le lundi de la semaine sainte.

Quid surit placjx istee in medio manuum tuaruml Et dicei : Bit playatus sum in domo eorum, qui diligebant tnc. Zach. 13. G.

De quelle manière, et avec quelle tendresse maternelle la Douloureuse Mère vénéra les cinq Plaies de Jésus-Cbrist son bien-aimé Fils. Consid. xlviii.

Le mardi de la semaine sainte.

Postât tilium il/a super genua sua usque ail meridiem. i\. Reg. 4. 20.

La Mère Douloureuse reçoit sur son sein et pleure amère- ment son Fils descendu de la croix. Consid. xi.ix.

400 table iif.s sujets a prêches les dimanches de l* annee Le mercredi de la semaine sainte.

Erat autcm in loco, ubi crucifixiis est hortns, et m horto mo- numentum novum; ibi ergo posuerunt Jesum. Joan. 19.41.

La Mère Douloureuse prend soin que son Fils déposé de la croix reçoive une sépulture convenable Consid. l.

Le jeudi saint.

P langent eum planctu quasi super unigenitum ; et dolebuut super eum, ut doleri solet in morte primogeniti. Zach. 12. 10.

Les ferventes larmes que répandirent la Douloureuse Mère et Marie-Madeleine au tombeau de Jésus leur Amour. Consid.

LI.

Le vendredi saint.

Xon moriar, sed vivam ; et narrabo opéra Domini. Psal. 117. 17.

Pourquoi l'affligée Mère ne mourut pas et ne fut pas immo- lée en même temps que son Fils. Consid. lu.

Le samedi saint.

Aspicientes in Auctorcm fidei, et consummatorcm Jesum, qui proposito sibi gaudio sustinuit crueem, confusione contempta. Tlebr. 12. I.

La Mère Douloureuse nous enseigne la manière dont nous pouvons méditer avec fruit les souffrances de Jésus son Fils. Consid. lix.

Le jour de Pâques.

Et silucrunt fluctus cjus. Psal. 106. 29. La Douloureuse Mère est visitée et consolée la première par Jésus-Christ ressuscité, un.

Le lundi de Pâques.

Norme hsec oportuit pati Christ um, et ita intrare in gloriam sua m. Luc. 24. 20.

Il LES KÉRIES M SAIM I I EMPS DE - IR] î < > !

On n'arrive point au royaume de Dieu par les plaisirs, mais par la croix et la souOrance, a\ ec Jésus e1 sa Douloureuse Mère. Epilogue.

Le dimanche de Quasimodo, I' après Pâques.

Ostendit eis manus et lattis. Joan. Jo. :>o. Ou peut direà juste titre que la Mère Douloureuse fut la pre- mière qui honora les cinq plaies sacrées de Jésus. Consul.

XI.VIII.

Li: II" DIMANCHE Al'K, S PAQUES.

Bonus Pastor animam suam dat pro ovibm suis. Joan. 10. 11.

Comment, à L'exemple de la Mère Douloureuse après la Ré- surrection et L'Ascension de son Fils, nous pouvons méditer les souffrances de Jésus avec \\\\ grand profit. Consid. lviii.

Le 111" DIMANCHE APRES PAQUES.

Quid est, quod dicit modicum ? Joan. ic>. 18. Tout est peu de chose, tout est léger et vain, excepté aimer Dieu et le servir lui seul comme la Douloureuse Mère. Consid.

LX l .

LE IV* DIMANCHE APRÈS PAQUES.

Vaa\ ad eum. qui misit me. Joan. L6. ■>. Avec la Douloureuse Mère, nous (levons toujours marcher dans la présence de Dieu pour parvenir au Père en assurance.

Consid. j.x.

la v DIU VNI m. kPRl - l'\oi i S.

Si quid petieritis Patrem in Vomine meo, dabit vobis. -I 'an. 16.

L'exemple *\r la Douloureuse Mère nous instruit commenl nous devons prier Dieu pour obtenir ce que nous désirons. Consid. i.vi. il

40:2 table des sujets a precher les dimanches de l annee La fête de l'Ascension.

Ascendensin altum captivam duxit captivitatem. Ephes. 4. 8.

Joie et consolation de la B. Vierge lorsqu'elle contempla son Fils montant au ciel et emportant la proie enlevée à l'enter. Consid. liv.

Le VIe dimanche après Pâques.

Hsec locutus sum vobis, ut, cum venerit hora, cor ton remi- niscamini. Joan. 16. 4.

Ne vivons jamais sans le souvenir de Jésus-Christ souffrant et la compassion de la Douloureuse Mère. Par l'intercession de Marie nous pouvons obtenir plus facilement le Saint-Esprit et tous les biens. Voyez l'Exhortation préliminaire, et la Con- sidération. LXV.

La Pentecôte.

Et repleti sunt omnes SpirituSancto. Act. 2. 4.

L'Esprit-Saint envoyé aux apôtres ; et comment il remplit de toutes les consolations le Cœur de la B. Vierge Mère de Dieu. Consid. lv.

POUR LES FÊTES PENDANT L'ANNÉE.

Fête de la Circoncision.

Postquam consummali sunt dics octu, ut circumciderctur puer. Luc 2. 21

Comment se conduisit la B. Vierge à la Circoncision de son Fils; et du saint Nom de Jésus que la Douloureuse Mère lui imposa. Consid. xvi.

il Ll B il Mi B il s\l\ i i i.Mr> m < LRÊME. 103

Fête de l'Epiphanie,

Obtulerunt et mitnera, aurum, thus et myrrham. Mat th. 2.

il.

Des trois présents, la Mère de Jésus se réserve la myrrhe. Consul, xvii.

Il M DT MAKI \i,i DE LA II. VlERGK.

Cunt cssrt desponsata Mater ejus Maria Joseph. Matth. i.

18.

Comment, et pourquoi la H. Vierge l'ut donnée pour épouse à saint Joseph. Consid. îx.

Fête de la Purificatiom de la 15. Vierge.

Et benedixit Mis Simeon, ri durit ml Mariam Matrem ejus : Ecce positus es/ hic in ruinant, etc. Luc. il. 34.

Lorsque la I!. Vierge présentait son Fils au l'ère céleste dan^ le temple, Siméon lui prédit un glaive de douleur. Consid.

XVIII.

Il l h DE S. .M A 1 11 1 AS, APOTRE.

Disette a ///■■, quia mitis sum ethumilis corde. .Matth. 1 1 . 29. Sur le cœur de Jésus transpercé par la lance, et le C<eur de Marie par le glaive de douleur. Voyez Consid. xi.vi.

Fête de S. Joslhi.

Joseph, /il/ David, i><>ii timere. accipere Mariam conjugem tuam. Matth. l. 20. Pour cette fête, voyez les Consid. 'rations ix, aux et xx.

Fin M i.'Awon, i \ i [OH DE LA I!. VlERGl .

.1"-. gratta plena. Luc. i . -2H.

l'arec que Marie est pleine de grâce, '■!!<• peut obtenir la île Dieu en notre faveur. Consid. x.

404 table i»es sujets a pbêcheb j.es dimanches de l'année

Même fête.

Descendit de cœiis, et incarnalus est de Spirity Sanctoex Maria Virginc, et homo factus est. Symb. Niccn. Sur ce profond mystère de l'Incarnation, voyez Consid. x\.

Même fête.

Cuncti dies ejas doloribus et œrumnis pleni swit. Eccle. 1. 23.

Dès l'instant qu'elle fut devenue Mère de Dieu, la B. Vierge porta dans son âme la croix et le glaive de douleur. Consid.

XII.

Fête de l'Invention de la sainte croix.

Sub umbra illius, quem dèsideraveram, sedi; et fructus ejas dulcis gutturimèo. Cant. 2. 3.

En ce jour, tous les chrétiens sont invités à l'ombre de la croix. Consid. xl.

Fête de la Visitation de la B. Vierge.

Benedictus fructus ventris fui. Luc. 1. ;i2. La B. Vierge, ayant le Verbe dans son sein, apaisa Dieu irrité par nos pécbés. Consid. xm.

Même fétu.

Inlravitin domum Zachariœ, et salutavit Elisabeth. Luc. 1.

40.

Sur la Visitation et la Salutation d'Elisabeth, voyez Consid.

XIV.

Y et e . de s a i n te Maki e -Madel e i n e .

Lacrymis cœpit rigare pedes ejus. Luc. 7. 38.

Marie-Madeleine, fidèle compagne de la Mère Douloureuse pendant la passion, pleure avec des larmes amères son Amour crucifié. Consid. u.

il l i:s PÉRIES DU SAINT TEMPS DE CARÊME. IY II Dl i ' ASSOMPTION DE LA B. VlERGE.

Optimam partent elegit Maria, aux non auferetur ab ea. Lu»'. 10. 12.

I>e L'heureuse fin ei précieuse morl de la I». Vierge Marie. Consid. i.xii.

Même fête.

Intravit in quoddam castellum. Luc. 10. 38.

La H. V. Mère d'Amour et de Douleur est enlevée au royaume céleste par son Fils au milieu de la grande joie de tous les bien- heureux. Consid. i.xiii.

Même fête.

Veni <le LibanOj sponsamea, veni de Libano, vent; corona- beris. Cantic. \. 8.

Dans quelle cérémonie pompeuse la B. Vierge fut couronnée au «ici par la très-sainte Trinité. Consid. i.xiv.

Même fête.

Et sicut qui thesaurizat, ita et qui honorificat Matrem suam. Eccl. 3. ri.

Culte et vénération que nous devons à la grande Reine du ciel. Consid. i.xv.

Ml ME FÊTE.

[mîtatores mei estote, sicut et ego Christi. I Corinth. '». 16.

Celui qui honore vraimenl la lî. Vierge, doil imiter ses ver- tus. Consid. i.xvi.

Même fête.

/V' noi "l> hoste protège, et h<>r<i mortis suscipe. Ecclesia in hymn. I». \ .

Commenl la lî. Vierge s art a L'heure de la mort ses dé- voués ser\ iteurs. Consid. i.xix.

•400 TABLE DES SUJETS A PRÊCHER LES DIMANCHES DE l'aXXÉE

La Nativité de la B. Vierge.

Quse est ista, quas progreditur quasi aurora consurgetisl Cant. 6. 9.

Pourquoi laB. Vierge naquit à l'aurore et près de la fontaine probatique? Gonsid. iv.

Même fête.

Liber generationis Jesu Christi. Matth. 1.1. La B. Vierge Marie est le livre de la génération de Jésus- Christ. Consid. i.

Fête du saint Nom de Marie.

Et Nomen Virginis, Maria. Luc. 1. 27.

Pourquoi la B. Vierge fut-elle nommée Marie ? Consid. v.

Fête de saint Mathieu, apôtre.

Misericordiamvolo, et nonsacrificium. Matth. 9. 13. Conversion des pécheurs et miséricorde de Jésus crucifié. Consid. xxxv et xxxvï.

Fête de"saint Michel.

Quicumqiœ ergo humiliaveril se, sicut paroulus iste, hie est major in regno cœlorum. Matth. 18. i,

Plus vous êtes humble, plus vous êtes chéri de Dieu et agréable devant lui. Consid vin.

Fête de saint Simon et De saint Jude, apôtres.

Odio habuerunt me gratis. Joan. 15. 25.

Des injures et des persécutions suscitées contre Jésus-Christ

par les Juifs. Consid. xxm.

Fête de tous lis Saints.

Bcati, qui persecutionem patiuntur propter justifiant. Matth.

5. 10.

F.T LES FERIES DC BAWT TEMPS DE I MÊME. 'i07

Par la croix, l'on arrive à la Lumière, et par Les travaux et

les tribulations au royaume <lu ciel. Epilogue.

I 0MMÉM09 \isn\ m 9 i 1 1 >i l i s [RÉPASSl 8.

Respice m nos, et ostende nobis lucem miserationum tuarum. Eccli. 26, 1 .

Amour bienveillant de la B. Vierge envers Les âmes du pur- gatoire. Consid. lxx.

Fête de la Présentation de Marie ai temple.

Odoratus estDominusodoremsuavitatis. Gen. 8. 21. Marie présentée au temple à l'âge de trois ans, consacre son Cœur eu holocauste d'amour à la sainte Trinité. Consid. vi.

Même fête.

Adducentur régi virgirtes post eam. Psalm. 44. \6. La Bi Vierge Marie fut la première qui fit le vœu de virgi- nité. Consid. vu.

Même fête.

Cum essemparvula, placui Alti&simo. Ecclesia in off. B. V. Parce que la B. Vierge fut très-humble, maintenant elle esl levée, et la très-digne Mère de Jésus. Consid. vin.

[•'•I r de saint André, apôtre.

Salve, Crux pretiosa. Ecclesia in offîc.

Sur la Croix, voyez plusieurs choses dans les Consul, xxxii. xxxiii. xi., etc.

Fête m-: l'Immaculé] Conception de Marie.

Ipsa conterct caput tuum. Gen. :i. 15.

Pourquoi la B. Viergfl fut exempte de toute tache originelle? Consid. ii.

•408 TABLE DES SUJETS A PRÊCHER LES DIMANCHES DE l'àNNÉE

Même fête.

Qnœrçtur pcceatum illius, et non invenictur. Psalm. 10. 15. La B. Vierge fut aussi exempte de tout péché actuel. Consid. m.

Fête de saint Thomas, apôtre.

Infer digitum tuum hue, et vide manus meas. Joan. 20. 27. Des cinq plaies sacrées de Jésus-Christ à honorer dévote- ment.

Même fête.

Affcr manum tuam, et mitte in latus mewn. Joan. 20. 27. Du côté de Jésus, et de son sacré Cœur hlessé. Consid. xevi.

Fête de la Naissance de .Iï.sis-Chiust.

Etpeperit Filium suum primogenitum, et panis cun> invoivit,

et reclinavit eum in praesepio, (juin non crut cis locus in dUver- sorio. Luc. 2. 7.

Sur l'admirable naissance de Jésus, voyez la Consid. xv.

Fête de saint Etienne, pkoto.martyr.

Ecce video cœlos apertos, et .lésion stantem a dextris virtutis Dci. Act. 7. 55.

La présence de Dieu qui voit tout, fortifia Etienne pour sou- tenir avec joie la lutte sanglante. Consid. lx.

Fête de saint Jean, èvangéliste.

Dcinde dicit Discipulo : Ecce Mater tua. Joan. 19. 27. Pourquoi Jésus mourant en croix recommanda sa sainte Mère à saint Jean? Consid. xxxvin et xxxix.

Fête des Saints Innocents.

Surgc, cl accipe Puerum et Mafrem ejus, etfuge in /Egyptum.

Math. 2. 13.

ET LES nuis m SAIN1 u.Mi'S ni: CARÊME. 109

De la fuite et des incommodités endurées pendanl Bept ans en Egypte par Jésus, la B. Vierge et Baint Joseph. Gonsid.

XIX.

Fête du saint Rosaire.

Fitnicuhts triplex difficile rumpitur. Eccl. i. 12.

Puissante protection de Notre-Dame du Rosaire. Gonsid.

LXYII.

* Fête i»i saint Scapdlaire.

L'h/pcus est sperantihus in se. Prov. 30. o. Uue le saint Scapulaire de Marie est un solide bouclier. Consid. LXVHI.

Fête de Notre-Dame des sept douleurs.

Gemitus Matris tux ne obliviscaris. Eccl. 7. -2\).

Voyez, sur ce sujet, l'Exhortation préliminaire et toutes les Considérations sur les souffrances de Jésus-Christ et la Com- passion de sa Douloureuse Mère.

Louange à Dieu et à la Vierge Mère de Dieu ; à nous la confusion.

FIN DE I.A TABLE DES SUJETS A PRÊCHER.

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ERRATA DU TOME I.

Page 30, ligne î, lisez : le tabernacle.

Page 105, en litre, au lieu de : ASCENDO, lisez : ASCENDENDO.

Page 3"23, ligne 2"2, au lieu de : sage, lisez : visage.

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