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Rôle de la Famille, de l'Église et de l'État

Étude présentée par h camarade A. Chassé,

élève de philosophie, junior au cercle St-Alphonse de Liguori,

Séminaire de Nicolet, le 29 mai 1907

Allocutions des camarades L, Moreau et B. Boutet

11.

SÉMINAIRE DE NiCOLET "

1907' :

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ouverture ^e la séance

Allocution du président, Louis Moreau

Monseigneur, ^

Messieurs,

Bien chers Amis,

Monseigneur Bégin, dans sa magnifique lettre pastorale du mois dernier,^ a établi sur des «faits indéniables l'urgence de l'action sociale en notre pays. Cette action, pense le prélat, peut prendre plusieurs formes, dont l'une s'exerce dans le domaine des études sérieuses immédiatement préparatoires au rôle social.

Or, préparer les jeunes au rôle social par des études sé- rieuses, c'est bien le but que se proposèrent l'abbé Ferland et Gérin-Lajoie en jetant les bases de notre humble Académie, c'est bien le but que notre Société a visé toujours pendant les soixante-cinq années de son existence. (Plusieurs de ceux qui m'entendent le savent pour avoir travaillé à le réaliser.)

Nous adhérons de tout cœur à la pensée de Monseigneur l'archevêque de Québec sur l'urgence de l'action sociale catho- lique chez nous dans les temps présents. C'est pourquoi nous orientons de plus en plus nos études en ce sens.

C'est aussi le motif qui nous a déterminés à faire aujour- d'hui une étude sur un des plus puissants moyens d'action sociale : l'Éducation, Et pour le faire avec quelque ordre, nous essaierons de voir en cette matière le rôle de la Famille, de l'Église et de l'État.

1 S. G. Mgr Brunault, évêque de Nicolet.

2 Sur l'action sociale et en particulier sur l'œuvre de la presse catholique.

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C'est la thèse que M. Chassé viendra établir tout à l'heure, en résolvant les objections que M. Beaudet est chargé de lui formuler.

Du fait que notre Cercle est avant tout catholique, comme la belle association à laquelle il est affilié, nous devions traiter à la séance de ce jour une question religieuse. C'est ce que nous croyons faire en étudiant une question sociale, car ainsi que l'affirme Brunetiêre, le grand penseur qui vient de mou- rir: "Toute question sociale est une question morale; or toute question morale est une question religieuse; donc toute ques- tion sociale est une question religieuse."

En conséquence, nous ne pouvions mieux faire pour attein- dre la fin de notre Société.

Messieurs, notre affiliation vieillç de deux ans à l'Asso- ciation Catholique de la Jeunesse Canadienne-française nous vaut aujourd'hui un grand honneur: celui d'avoir parmi nous, à la présente séance, un de ses représentants.

Puis le président présente à l'assemblée M. Bernardin Bou- tet, membre du cercle Duhamel d'Ottawa, délégué ici par le Comité central de Montréal, et lui annonce qu'elle aura le plaisir de l'entendre après MM. Chassé et Beaudet.

M. Chassé monte à la tribune.

L'ÉDUCATION

Conférence donnée aux élèves du séminaire de Nicolet, à la séance publique du 29 mai 1907

Monseigneur,

Monsieur le Président, Messieurs,

C'est une plainte générale que notre siècle ne produit que des médiocrités dans tous les genres, et plus encore, des nullités complètes. Plusieurs causes expliquent ce phénomène. D'abord les classes hautes et aisées ne fournissent souvent aux collèges que des enfants faibles, amollis, incapables de toute application sérieuse, suite nécessaire d'une première édu- cation donnée par des parents sans principes religieux, hos- tiles même à toute religion. Ou, s'il y a de la religion, elle n'est pas assez forte, assez éclairée pour exclure une excessive tendresse qui énerve les âmes.

Puis, l'ingérence de l'État en matière d'éducation, la laï- cisation de l'enseignement, ces écoles nationales se con- fondent les mœurs et l'idiome, toujours au détriment de la saine formation morale.

Puis, le système des concessions, trop usité de nos jours, lequel système consiste à livrer sans défense les plus faibles à la merci des plus forts, à dépouiller de leurs droits les mino- rités catholiques, entravant par même l'éducation chré- tienne, la seule qui vaille.

Enfin, l'arrogance des hommes politiques, à l'égard de l'action sociale de l'Église: on ne veut pas l'entendre reven- diquer les droits qu'elle possède relativement à l'éducation. Sous prétexte de maintenir l'ordre, l'on voudrait étouffer ses

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plaintes trop légitimes, procédé digne de ces faux prédicateurs de modérantisme. Ils oppriment, ils traîtrisent, et pour se jus- tifier, ils bâillonnent!

C'est donc une immense question que celle de l'éducation. Je vais tâcher de préciser et de bien définir.

Qu'est-ce que l'éducation? C'est la formation de l'homme jusqu'au plein épanouissement des forces dont le Créateur a déposé en lui le germe.

Par qui doit être exercé le ministère de l'éducation (et c'est ici toute la difficulté)? Je réponds: par la société conjugale, de droit naturel parce que l'enfant est la posses- sion naturelle de ses parents ; par la société catholique, de droit positif— parce que, en conférant le baptême, l'Eglise ac- quiert sur l'enfant des droits inaliénables; par la société politique, de droit social parce que l'enfant naît dans la con- dition universelle de la société humaine, et particulièrement, dans un État, une société politique préalablement organisée.

Le philosophe n'admet pas que l'éducation appartienne aux parents de droit naturel, sans avoir une juste notion de la société conjugale. Mais si tôt qu'il a cette notion, il peut percevoir la fin de la société, et par suite déterminer ses fonctions. Et ceci, non seulement pour la société conjugale, mais pour toute société ; car les fonctions de toute société se déterminent par sa fin.

L'homme est infiniment supérieur au reste de la création, il est le seul être capable de comprendre et d'admirer les gestes divins. La raison de l'homme lui apprend que Dieu a voulu qu'il y ait toujours des hommes qui puissent rendre gloire au Créateur, en contemplant les merveilles de la créa- tion. Or, les hommes ne sont pas immortels; il faut donc qu'ils puissent se propager.

L'organisme aussi nous indique la volonté du Créateur ; c'est à cette fin qu'il a établi la différence des sexes.

Voilà donc une société voulue de Dieu, pour une fin naturelle : la propagation de l'espèce humaine; pour une fin spirituelle: la procréation d'un être moral. Car deux personnes s'enga- geant par contrat à propager l'espèce humaine, il est évident que ce contrat ne comprend pas seulement la pro-création d'un bipède organisé, mais qu'il renferme surtout la volonté de donner le jour à un être moral.

L'on peut conclure de que les parents auront le devoir de développer dans l'âme de l'enfant les germes de la vie morale, les germes de la vérité, et d'y inculquer profondément les principes qui doivent être un jour la règle de son activité morale. C'est une conséquence nécessaire du contrat conjugal. Et vouloir un contrat sans vouloir ses conditions naturelles, c'est vouloir une créature indépendante du Créateur, c'est vouloir le désordre. Le père aura donc le devoir de veiller à l'instruction, à l'éducation de ses enfants. L'instruction se rapporte à l'intelligence, l'éducation à la volonté. En d'autres termes, les parents sont naturellement responsables de la formation première de leurs enfants.

Mais, si le père a le devoir de diriger les facultés intérieures de son enfant, il doit en avoir le droit. Or, le droit, c'est le pouvoir qu'engendre l'ordre manifesté à la raison. Donc, ces droits du père existent dans la mesure des besoins de l'enfant ; donc, l'éducation appartient aux parents de droit naturel.

Dans les premières années de l'enfant, son besoin est uni- versel, puisqu'il n'a pas même l'usage de ses facultés intellec- tuelles; c'est à l'intelligence, c'est à la conscience du père à guider l'intelligence et la conscience de l'enfant, qui, n'étant pas encore capable de poser un acte moral, est porté par son instinct à penser et à vouloir ce que pense et ce que veut son père. Le droit ou plutôt le devoir du père est ici de toute évidence : si l'enfant ne peut juger, vouloir, agir que par l'impulsion du père, il faut que celui-ci porte son enfant à juger avec vérité, à vouloir avec droiture, à agir avec honnêteté.

On v^oit par quel horrible abus font de leur autorité ces parents coupables, qui soumettent la raison naissante de

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leurs enfants à la funeste influence du vice ; ils sont en quelque sorte coupables d'un homicide moral, d'un infanticide spirituel.

Droit et devoir sont deux choses qui se complètent : le père exercera son droit en faisant son devoir. Nous savons tous quels sont les devoirs du père de famille ; un seul coup- d'œil vous les montrera. C'est d'abord de seconder la nature dans le développement des forces physiques de l'enfant, lui donner la nourriture qui convient à son âge, le soustraire aux dangers que son imprudence ne lui laisse pas prévoir. Mais ce qui a plus d'importance, au point de vue qui nous occupe, c'est la formation morale de l'enfant. La formation morale comporte plusieurs choses, dont l'énumération va nous suffire: inspirer l'horreur du vice, l'amour du vrai, la pratique du devoir, de la vertu, le travail, l'énergie, l'ambition légitime, l'esprit de dévouement, le respect, l'obéissance à qui de droit.

Or, par quels moyens les parents donneront-ils à leurs enfants cettte formation salutaire? Par la douceur quand c'est opportun, par la sévérité et la correction même corpo- relle quand c'est nécessaire. Sans doute, l'éducation la plus parfaite est celle qui arrive à sa fin par les moyens les plus efîicaces et les plus doux tout à la fois. Mais on ne peut point inférer de qu'on doive bannir de l'éducation tout moyen matériel et sensible ; si les moyens efficaces manquent de douceur, c'est un défaut dans le moyen ; mais si les moyens suaves manquent d'efficacité, c'est la fin même qui ne sera pas obtenue. Or, le plus grand défaut d'une faculté quelconque, c'est de ne pas atteindre sa fin. Donc, le plus grand vice d'une éducation sera d'exclure les moyens rigides, quand ils sont nécessaires.

Il faut donc se conformer à une théorie dont six mille ans de vie humaine ont reconnu l'opportunité.

Je conclus ici pour ce qui touche la société conjugale relativement à l'éducation. Cette société a des droits et des devoirs à l'égard des êtres moraux qu'elle engendre; mais tant qu'elle remplit légalement ses devoirs, aucune société

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n'a le droit de s'immiscer dans son gouvernement privé, aucun droit ne prévaudra sur les droits naturels du père, tant que l'enfant ne sera pas l'arbitre de ses croyances et de ses jugements.

II

(Ici, M. Alfred Beaudet se lève et demande au président la permission de poser une objection avant que l'orateur n'arrive au deuxième point de son discours.)

M. le Président. Je permets, afin de faire ressortir davantage l'intérêt de la question.

M. Beaudet.— Je ferai remarquer à M. l'orateur qu'il doit y avoir des circonstances les droits naturels des parents sont forcés de le céder à une puissance supérieure, comme je tâcherai de vous le faire voir en rapportant un fait, connu de la plupart d'entre vous, qu'il est bon, je crois, de rappeler ici.

Il y a un demi-siècle, alors que les États pontificaux floris- saient encore sous la domination du Saint-Siège, vivait à Bologne une famille juive du nom de Mortara. Cette fa- mille jouissait d'une heureuse aisance, sous les lois protec- trices du gouvernement pontifical, quand un événement, aussi soudain qu'imprévu, vint la plonger dans la désolation. Le petit Edgar Mortara, âgé d'environ deux ans, venait d'être frappé d'un mal subit, et tout faisait prévoir qu'il allait mourir.

Il se trouvait par hasard, au service de cette maison, une jeune domestique, juive d'origine, mais convertie à la foi ca- tholique. Persuadée que l'enfant devait bientôt mourir, la jeune fille ne voulut pas laisser perdre cette âme, et à l'insu de ses maîtres, elle baptisa le moribond. Mais voici que par un effet salutaire de l'eau sainte du baptême, ou pour une cause que je me garderai bien de chercher à expliquer, le petit Mortara recouvra la santé. Cinq ans plus tard, dans une circonstance à peu près analogue, la jeune servante déclara

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devant l'autorité religieuse, comment elle avait conféré le bap- tême à l'enfant de ses maîtres. Informé du fait, le Souverain Pontife comprit aussitôt le danger se trouvait le néophyte, au milieu de parents imbus de fausses doctrines. Alors, "au nom des droits de l'Église", Pie IX fait enlever l'enfant pour lui donner une instruction chrétienne, dans une université ca- tholique de Rome.

À rencontre de la thèse de M. Chassé, qui proclame le pouvoir absolu des parents sur l'éducation de l'enfant, il fau- dra, je crois, conclure, de deux choses, l'une : ou il y a des droits qui surpassent ceux des parents; ou si nous tenons pour absolue l'autorité paternelle, il faudra convenir que Pie IX a commis un attentat déplorable contre les droits les plus sacrés.

M, l'orateur nous obligerait, en donnant sur ce point un mot d'explication.

M. Aimé Chassé. Mon ami vient de me poser une objec- tion sérieuse et très délicate. Il s'agit d'une collision du droit naturel et du droit divin-positif. Je ne retire rien de l'exten- sion que j'ai donnée au droit naturel. Mais, d'un autre côté, par le baptême, l'Église acquiert des droits sur l'enfant. Il serait ridicule de prétendre que les hommes peuvent recevoir de l'Église des bienfaits inestimables et ne lui rien devoir. Donc, quand il est baptisé, l'enfant, par l'entremise du par- rain et de la marraine, cimente une alliance avec la société catholique.

La société catholique est une association d'individus qui, par un effet de leurs convictions personnelles, donnent leur pleine adhésion à tout ce que l'Homme-Dieu a enseigné, ordon- né, établi sous le rapport du dogme et de la morale. Elle doit donc son existence à une révélation positive, à un fait positif: c'est pourquoi les droits qu'elle possède sont positifs. Et parce que l'enfant baptisé lui appartient dans une certaine mesure, elle a des droits positifs relativement à l'éducation de cet enfant.

Les droits d'une société engendrent ses fonctions, et ses fonctions se déterminent par sa fin. Cherchons donc la fin de

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la société catholique, et nous pourrons déterminer ses fonc- tions. Ensuite, connaisant les fonctions, nous connaîtrons les droits sans difficulté. Car les fonctions sont comparées aux droits comme l'effet à sa cause, "et, connaissant la na- ture de l'efifet, nous pouvons déduire la nature de la cause", nous dit Zigliara.

Or, la fin de la société catholique, c'est de parvenir, par l'adhésion aux doctrines révélées, à la béatitude éternelle. De là, deux fonctions de la société catholique : unir extérieure- ment les hommes pour les conduire au port du salut, qui est leur fin dernière, leur fournir les moyens proportionnés à cette fin. Il est de grande évidence que l'Eglise n'a jamais failli à son rôle. Malgré les persécutions, malgré les hérésies, son action divine fut toujours la même. Le sang des martyrs, loin de restreindre sa propagande, a fait germer des milliers de cœurs généreux, qui n'ont cessé de s'enrôler sous l'éten- dard de la vérité révélée. Quant aux moyens dont elle dis- pose, il n'y a qu'à donner notre attention à l'histoire pour nous convaincre que la société catholique possède les plus abondants et les plus efficaces. Son cachet humain n'entrave en rien le libre arbitre. Il y a bien certains désordres à ré- primer, des passions à dompter dans le cœur des hommes; même dans une société divine, il faut de ces répressions. Mais ici, ce sont ses ressources divines qui viennent à notre secours; elle met à notre disposition la prière qui console, les sacre- ments qui fortifient.

C'est en vain que des déclamateurs égarés lancent l'injure à l'action sociale de l'Eglise. Elle a prouvé tous les jours de ses deux mille ans de vie, qu'elle est même le plus sûr appui de la société politique.

Or, si la société catholique est inoffensive, et si elle a pour fonction de conduire les hommes au bonheur éternel, il est juste qu'elle ait des prérogatives en raison de ses fonctions.

De fait, cette société humano-divine ne relève d'aucune autre société. Elle peut donc se gouverner suivant les prin- cipes que lui a donnés son fondateur, et se servir des moyens qui lui semblent efficaces pour former la jeunesse catholique, en

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d'autres termes, l'autorité politique n'a pas le droit de la contrarier dans l'exercice de ces fonctions.

Ce qu'elle réclame en premier lieu, c'est la liberté d'ensei- gnement; et l'on ne peut lui dénier cette prérogative sans violer le droit naturel et le droit positif, et pour le moins, blesser le droit social. Mais l'esprit révolutionnaire n'a jamais respecté les droits, il a pour fin de les mépriser, et depuis plus d'un siècle déjà, il à fallu recommencer les luttes du temps barbare pour conserver à l'Eglise la partie élémen- taire de son patrimoine: la liberté d'enseignement. La société catholique a aussi le droit de voir ses enfants sur un pied d'égalité avec ceux des sectes dissidentes.

C'est donc un principe injuste que celui d'obliger les ca- tholiques à pa3^er pour l'entretien d'écoles qu'ils ne fréquentent pas, tout en soutenant de leurs deniers leurs écoles orthodoxes. Dans la société catholique, c'est le clergé qui marche de l'avant. Or, quand les parents ne peuvent fournir eux-mêmes l'éducation à leurs enfants, il est logique que les ecclésias- tiques se chargent de la besogne ; en effet, l'ecclésiastique offre les qualités requises pour cette fonction, car l'éducation a surtout pour but la formation de la volonté, et par qui la volonté peut-elle être mieux formée que par celui qui par état doit enseigner toute vertu? (Il faut énoncer la vraie doc- trine, même au risque de passer pour ^'sectaire dans le bien" !) Les adversaires de cette doctrine semblent insinuer que l'ec- clésiastique ne connaît pas le monde, et n'a point par consé- quent l'expérience nécessaire pour former le citoA^en.

Si, connaître le monde, c'est être emporté par ce tourbil- lon de crimes et d'horreurs auquel l'on donne souvent ce nom, je laisserais passer l'objection sans élever la prétention, au nom des ecclésiastiques, de savoir ce que c'est que le monde. Mais si la marche du tourbillon peut mieux être observée par celui qui se tient à l'écart, si l'astronome étudie plus aisément le mouvement des astres que celui de la terre, il me paraît évident que personne ne peut mieux connaître le monde que celui qui, un pied appuyé sur le seuil immobile du sanctuaire, pose l'autre sur les flots orageux, comme l'Ange de l'Apoca-

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lypse. En outre, qui peut mieux connaître le cœur des hommes que celui à qui son ministère fait sonder les abîmes de la perversité humaine?

Concluons donc que le clergé a toutes les aptitudes pour donner l'éducation, et qu'il a droit de réclamer pour les membres de la société catholique la liberté d'enseignement, la juridiction scolaire et les subventions de l'Etat.

Je reprends maintenant l'affaire Mortara dont mon ami s'est servi pour appuyer son objection. Au fond, l'affaire Mortara ne fut pas autre chose qu'une question de diplomatie maçonnique, quoique nombre de catholiques s'y soient laissés prendre. Le Pape n'avait pas tort. Le jeune Mortara baptisé était devenu enfant de l'Église ; et le pape, ayant les moyens d'action comme souverain temporel en même temps que chef spirituel, ne pouvait pas laisser se développer l'intelligence de l'enfant au milieu des influences délétères de la Synagogue. C'eût été de sa part confesser à l'univers que le baptême n'im- prime pas sur le front du baptisé une marque ineffaçable qui le constitue enfant de l'Eglise; ce que le Pape ne peut pas même penser, à cause des lumières de î'Esprit-Saint qui le font in- faillible en matière doctrinale.

Mais, si le droit naturel est absolu, et si Pie IX, en en- levant l'enfant de Bologne à ses parents, n'a pas violé le droit naturel, quel est donc le point de la question qui donne raison à l'un et à l'autre ? Voici la solution. Le droit naturel est absolu de soi, mais peut devenir inférieur per accidens, par suite de la violation d'un droit civil, dans l'observance duquel le droit naturel doit s'exercer. C'est précisément ce qui est arrivé dans l'affaire Mortara. Le Pape, en sa qualité de souverain temporel, avait porté une loi qui défendait aux Juifs réfugiés dans son royaume d'avoir à leur service des domestiques chrétiens. Or, il est arrivé qu'un Juif de Bologne a enfreint cette loi, en gardant dans sa maison une servante chrétienne, qui voulut ouvrir les portes du ciel à l'enfant de son maître, parce qu'elle le cro3^ait en danger de mort. Donc, ce père Juif s'est vu appliquer la loi divine-po- sitive pour avoir enfreint une loi civile, qui était la sauve-

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garde de son droit naturel. Tout revient à dire que le droit naturel, absolue de soi, peut perdre de sa force per accidens, par des causes qui existent en dehors de lui, et dont il faut tenir compte dans Vexercice du droit naturel.

Quelle est maintenant la force objective du droit naturel et du droit divin-positif, dans l'exercice normal de l'un et de l'autre, envisagés toujours au point de vue de l'éducation?

Quand l'enfant n'est pas sorti de l'adolescence, c'est le droit du père qui prévaut; plus tard le droit de l'Église l'em- porte. Mais si le père est incroyant, et que l'enfant, dès qu'il est capable de poser un acte complet, reconnaît la foi catho- lique comme la seule véritable, ipso facto, le droit positif de l'Eglise l'emporte sur le droit naturel du père, car, en cas de collision, le droit le plus fort, c'est toujours celui qui tend vers un ordre plus universel, vers un objet plus important.

III

Objection formulée par M. Alfred Beaudet. Je suis parfaitement d'avis, avec M. l'orateur, que l'éducation de l'enfant doit d'abord appartenir aux parents, de droit naturel, et à l'Église ensuite, de droit positif. Mais d'après le témoi- gnage même de M. Chassé, il y a des parents corrompus, sans mœurs, sans principes religieux, absolument ineptes à remplir le rôle d'éducateurs auprès de leurs enfants. D'un autre côté, il est des parents qui, avec toute la bonne volonté possible, n'ont pas les ressources voulues pour procurer une éducation solide aux intelligences dont ils sont les ^ déposi- taires. Vous me direz peut-être: "C'est alors pour l'Église le temps d'intervenir". Nous sommes parfaitement d'accord sur ce point; et Dieu merci, l'Église sait se distinguer aujourd'hui comme toujours dans son rôle de gardienne des mœurs. Mais après tout, cette institution n'est pas un trésor inépui- sable en ressources matérielles. Elle ne peut donner que dans la mesure de ce qu'elle possède. Est-ce que, dans le cas ses efforts se trouveraient paralysés par une puissance

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quelconque, l'État n'acquiert pas alors des droits réels sur l'enfant ? Car, vous l'admettrez comme moi, l'État ne peut rester insensible à la formation de ses sujets. Nous n'avons qu'à ouvrir l'histoire, aux pages sanglantes des révolutions, pour trouver dans ces calamités, les suites funestes d'une éducation nulle ou malsaine. Afin de prévenir ces maux, l'État doit donc veiller, lui aussi, à l'éducation de la jeunesse. Vous avez entendu parler dernièrement d'un projet de co- opération relatif à la publication d'une série nationale de livres d'école. Les représentants des diverses provinces cana- diennes doivent, dit-on, faire l'étude de cette question à la conférence impériale de l'Instruction publique, ouverte à Londres, ces jours-ci. On annonce même pour l'automne une conférence interprovinciale, en vue d'adopter un plan d'action pratique. Si le projet trouve sa sanction, ce sera pour l'État un pas de fait vers le sentier de la formation intellectuelle, et s'il parvient à le faire, ce ne sera certainement pas le dernier. Quelle doit donc être notre attitude en face de la situation présente? Devons-nous féliciter les auteurs d'un pareil mou- vement, et partager l'enthousiasme de certains journaux qui voient dans le projet d'uniformité tout le secret de notre avenir national ? Ou devons-nous plutôt considérer cette ini- tiative comme un outrage fait aux droits légitimes des parents et de l'Eglise? Il nous ferait plaisir d'entendre M. Chassé nous exposer ses principes sur ce double sujet.

M. A. Chassé. J'aime à exposer mes principes, surtout quand on me le demande. Mon aimable interlocuteur prend le cas les parents ne peuvent eux-mêmes fournir l'éduca- tion à leurs enfants, et se demande si l'État n'acquiert pas alors des droits réels sur l'enfant. Eh bien ! non ; l'État ne peut jamais avoir sur l'enfant de^ droit positif autre que le droit social qui ne donne pas à l'État le monopole des intel- ligences et des consciences. Advienne le cas présenté par M. Beaudet, l'État a tout simplement le droit de prendre sous sa protection les droits de l'enfant ; c'est-à-dire que l'enfant a droit à l'éducation, et que l'État peut et doit lui fournir une

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éducation conforme aux désirs de l'enfant, si l'enfant est ca- pable de poser un acte complet, conforme aux désirs et à la volonté du père de l'enfant, si l'enfant n'est pas encore l'ar- bitre de ses jugements. Alors aussi, si l'enfant^ est baptisé, et que le père est sensé être catholique, c'est à l'Église de veiller au^ mode de l'éducation devant être donnée à cet enfant. L'État a le devoir de fournir les moyens, mais n'a pas le droit de déterminer le mode.

''L'État ne peut rester insensible à la formation de ses sujets", nous a dit M. Beaudet. C'est vrai; mais l'excès de sensibilité chez l'État, père sans entrailles, entraîne les consé- quences les plus désastreuses. "Nous n'avons qu'à ouvrir l'histoire pour trouver dans la mauvaise éducation des peuples l'origine des révolutions", dit encore M. Beaudet. Rien n'est plus vrai. Mais quel magistère a donné aux peuples cette mauvaise éducation, qui a déchaîné le cerbère de l'anarchie et fait couler des flots de sang? C'est l'État, par suite de sa sensibilité bâtarde, en éteignant les flambeaux de la vie mo- rale, toujours dans le but avoué de détrôner le Christ : nolumus hune regnare super nos ! Mais je ^vais déterminer d'une manière plus spéciale les droits de l'État sur l'éduca- tion, et condamner, sans parti pris, son ingérence néfaste.

Ici viennent se heurter nombre de préjugés et de faux principes, c'est pourquoi je réclame de nouveau votre attention.

La société politique a pour fin le bien temporel public : de ses fonctions, d'une manière générale, sont de protéger et d'assister les membres de la société. Mais le bien temporel réside dans la conformité de l'opération sociale avec les desseins du Créateur. Comme conséquence , les droits de l'État sur l'éducation sont subordonnés aux droits des parents, aux droits de l'Église, parce que, dans l'ordre naturel. Dieu a fait la famille avant de faire la société, et il a établi son Église indépendamment de l'un et de l'autre.

L'État a le devoir de faciliter aux individus associés l'ob- tention de leur bonheur, qui, sur cette terre, est de tendre, par les voies de l'ordre, à la possession du bien infini. Il a le devoir de prendre sous sa protection les droits des individus.

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II a le devoir de prêter un concours actif pour prévoir et sa- tisfaire les besoins des individus. S'il a ces devoirs, il doit en avoir le droit, et c'est de ce droit qu'il s'agit quand l'on parle du droit social.

Ayant établi la nature du droit social, nous verrons, en développant la théorie de l'éducation, qu'il est incompatible avec les fonctions d'éducateur.

Une éducation véritable ne peut être donnée que par celui qui possède la vérité, et d'une manière stable; mais l'Etat n'est pas infaillible. J'admets bien que chez certains peuples, assez rares aujourd'hui, le catholicisme fleurit comme au treizième siècle. Néanmoins, le gouvernement, chez ces peuples, pour tout catholique qu'il soit, ne peut pas s'arroger le mi- nistère de l'éducation, précisément parce que la direction des consciences ne relève pas de l'Etat. Tout revient à dire que le droit social ne constitue à l'État aucun privilège sur le mode de donner l'éducation.

Dans l'alternative que je prends, à savoir celle d'un Etat croyant, l'on ne voit pas les troubles et les tergiversations du gouvernement pour distribuer l'éducation. On laisse champ libre à l'Eglise, et les sujets donnent leur adhésion à ses enseignements d'autant plus volontiers, qu'ils sont bien persuadés que l'évêque ne va pas à eux, suivi de gens d'armes, ni le code à la main, mais avec l'Évangile, et au nom du ciel. Mais si tôt que les gouvernants, imbus de libéralisme, veulent s'immiscer dans les fonctions de l'Église ou du père de famille, c'est, pour ce peuple catholique, un signe imminent de décadence.

Si l'éducation n'est pas du ressort du gouvernement chez un peuple catholique, à fortiori ne doit-elle pas l'être chez un peuple mixte. Ici le gouverneinent a le devoir de garder la plus stricte impartialité, parce qu'il représente un peuple for- mé par une collectivité d'hommes, de races, de mœurs et de croyances différentes. Mais, le champ d'action étant libre, l'éducation chrétienne prédominera naturellement puisqu'elle est la seule vraie.

Toutefois, dans un État mixte, le gouvernement est tenu de protéger les vérités premières; sans cela, il n'y a plus de

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société, ou il y a tous les symtômes de l'anarchie. Et c'est précisément pour le maintien de la société que le gouverne- ment d'un État mixte doit fournir un solide appui à la vérité positive, car c'est elle, cette vérité, qui rétablit l'ordre et la paix dans la société, quand elle peut y pénétrer. Le devoir de ce gouvernement se résume donc en deux mots : " loyauté, impartialité".

"Toutefois cela ne doit point empêcher un chef ou un mi- nistre catholique d'user de son influence en faveur de l'Église" (d'Azzeglio). Comme il est facile de le constater, le principe du Jésuite italien ne trouve pas grâce auprès de nos hommes politiques d'aujourd'hui. Certains que l'on encense, les yeux fermés, foulent aux pieds les droits du père de famille, les droits de l'Église, pour plaire au plus grand nombre; l'on en voit même faire de leur foi religieuse une simple question de fron- tières: conséquence fatale de l'opportunisme! Mais il n'y a pas lieu ici de s'arrêter aux devoirs d'ordre privé, et je reviens à l'ordre public. Maintien et défense des vérités fondamen- tales, liberté pour les opinions qui ne les attaquent pas di- rectement et ne compromettent pas la tranquillité publique tels sont les devoirs qui dérivent de l'hypothèse d'une société mixte telle que nous la considérons.

C'est un devoir naturel pour tout gouvernement de pro- curer dans les classes du peuple le développement d'une science proportionnée à leurs besoins et par conséquent de pourvoir à ce que le peuple ne manque pas de moyens d'ins- truction. Un gouvernement de bon aloi supplée à l'indigence du père de famille; il aide et subventionne l'instruction pu- blique; il appuie et protège tout ce qui tend à développer et fortifier morale.

Mais d'ordinaire les conflits viennent de ce que le gouver- nement s'acquitte malhonnêtement de ce devoir. Il veutpar- fois régner en despote sur l'intelligence de la jeunesse, exclure l'influence de l'Église, et usurper les droits du père de famille. Vous le savez, on fait grand tapage aujourd'hui avec les écoles nationales. Toute la question repose donc sur le mode de donner l'enseignement. Comment le gouvernement accom-

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plira-t-il, selon les lois de la justice, ce devoir d'une impor- tance souveraine? Scindera-t-il l'enseignement entre ceux qui y prétendent ? Et renouvellera-t-il le jugement de Salomon ? Essaiera-t-il, en choisissant des maîtres d'opinions diverses et opposées, de former avec justice un corps enseignant ?

On le comprend : l'on ne saurait pas plus former un en- seignement avec des doctrines opposées, qu'on ne saurait former un corps sans un esprit, et sans un esprit qui soit un. Ou bien, si vous voulez l'appeler un, parce que les membres en seront unis matériellement, ce sera l'un de ces monstres que l'on rencontre parfois dans la nature et dans lesquels deux êtres de même espèce sont unis pour leur supplice pen- dant leur vie passagère. Un tel corps enseignant est l'incar- nation d'une vivante contradiction. Il nie et affirme en même temps une même chose: chez lui, ce que l'un déteste, l'autre l'exalte. Et il est par essence incapable de produire jamais ni conviction ni persuasion dans les disciples, dont l'assentiment s'appuie avant tout sur l'autorité du maître.

Une telle société ne méritera jamais le nom de corps en- seignant capable de former les idées générales d'un peuple, car un corps enseignant composé d'éléments hétérogènes au point de vue religieux, c'est une absurdité.

Que vaudra pour le bien du peuple l'accord des professeurs sur certaines vérités premières très universelles, si dans l'ap- plication de ces vérités ils sont divisés et en contradiction ? Si l'un appelle juste ce que l'autre traite de criminel ? Si l'un condamne comme un délit ce que l'autre proclame comme un devoir? Prétendriez-vous que les élèves seront libres de choisir entre ces opinions celle qu'il leur plaira? Ce serait un abus grossier des termes: l'intelligence perd sa liberté toutes les fois qu'on lui rend la vérité inaccessible. Et quel enfant pourra résister longtemps à la parole d'un esprit subtil, si celui-ci veut enlacer ses disciples dans les rets de ses sophismes ? L'influence éducatrice d'un maître est donc irrésistible, au moins moralement; et l'on ne peut pas plus séparer l'éduca- tion de l'instruction qu'on ne peut séparer, dans l'âme, la puissance intellective de la puissance affective. Par conséquent.

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un corps d'enseignement est à la fois un corps d'éducation. Et si vous le composez d'éléments contradictoires, non seule- ment vous atteignez au cœur l'enseignement, mais vous ruinez l'éducation, ce qui est, pour l'ordre public, le plus funeste et le plus grand de tous les maux.

Un corps enseignant sans unité de doctrines est donc in- capable de remplir sa double fonction , incapable d'asseoir des principes dans l'esprit des élèves, incapable de diriger leur volonté vers le bien. Or, remarquez-le bien, dans une nation la loi accorde à chacun la liberté de penser et de publier ses opinions, il est radicalement impossible de compo- ser d'éléments homogènes un corps enseignant. Par suite, la création d'un corps enseignant, chez un peuple de croyances diverses, est absurde en raison et funeste en politique.

Tel est. le bilan de l'enseignement donné par l'État! Que les écoles s'appellent nationales ou neutres, au fond c'est toujours le terme inévitable des institutions purement maté- rielles : éteindre la vie morale. Faut-il s'étonner maintenant des ravages de l'école sans Dieu! Faut-il s'étonner de la tourmente qui bouleverse la France, quand cette nation a respiré, pendant plus d'un siècle, le poison de l'enseignement "officiel" ! L'on a renversé les institutions chrétiennes, arra- ché les crucifix, déchiré les catéchismes, l'on a poussé le fanatisme de l'impiété jusqu'à prétendre éteindre les lumières du ciel ; tout cela au nom du progrès moderne, au nom de la liberté. (O libéralisme, tu es bien la progéniture naturelle de la Réforme protestante!)

Eh! bien, quels furent les résultats scientifiques de l'éduca- tion donnée par l'État ? (Je ne parle pas des résultats mo- raux et pédagogiques ; il est universellement reconnu que la banqueroute fut désastreuse sous ce rapport, et s'il en eût été autrement, la logique ne serait plus logique.) Je laisse par- ler M. Briand, qui n'est certes pas suspect de partialité pour l'enseignement confessionnel: ^'En 1882, dit-il, la proportion des illettrés était, pour les hommes, de 14- pour cent; elle était ramenée en 1900 à 4.3 pour cent... Alais il convient d'interpréter ce chiffre. Doit-on considérer comme lettrés des

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jeunes gens sachant épeler péniblement un texte, ou ceux qui parviennent d'une main malhabile à tracer leur nom?... Si l'on faisait le décompte exact de ces lettres insuffisantes, nul doute que la proportion ci-dessus ne dût être élevée à 25 ou à 30 pour cent."

Encore M. Briand ne parle-t-il que de l'instruction la plus élémentaire! S'il fallait aller au-delà, ce serait bien autre chose. C'est dire que l'enseignement ^^officiel" n'a pas réalisé les merveilles que promettaient ses préconiseurs, voire M. Briand lui-même. Et cela, non-seulement pour la France, mais pour toutes les nations qui ont essayé le système d'é- coles nationales. C'est donc une grave erreur, plutôt c'est un délit pour l'Etat que de s'arroger le monopole de l'ensei- gnement.

Mais un Etat gangrené jusqu'à supprimer le crucifix du matériel scolaire, d'ordinaire pousse l'injustice plus loin. Quand il ne rend pas l'école neutre strictement obligatoire, il oblige tous les pères de famille à subvenir au soutien de ces écoles neutres; de manière que les dissidents paient deux contributions pour l'instruction de leurs enfants : l'une, réclamée par l'Etat, l'autre, inspirée par la conscience. Je vous le demande. Messieurs, quelle iniquité! A ce sujet, écoutons le père d'Azzeglio : ^'Voici un pays la loi protège les opinions les plus contraires. Comment le gouver- nement aura-t-il le front d'exiger de ses sujets un impôt, afin de faire la guerre à leur foi et à leur conscience? Et est-il tolérable qu'un ministre de l'instruction publique vienne m'in- timer cet ordre: ^'Yous avez une opinion que je dois respecter; cependant vous paierez une contribution pour l'entretien d'un corps enseignant qui combattra cette opinion et corrompra l'intelligence et la volonté de vos fils?" est ici l'avantage qui contrebalancera la charge dont on m'accable? Préten- dra-t-on par hasard que ce corps enseignant ne corrompra point, mais éclairera le peuple ? Ce serait refuser de protéger la liberté de penser, (^u'on dise plutôt, sans détour, que le gouvernement veut couler dans ^le moule de son idée les idées de tout un peuple, et que tout réfractaire paiera d'une amende

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le malheur de vivre sous la liberté constitutionnelle. Car enfin, est-ce autre chose qu'une amende, cet impôt levé pour le corps enseignant sur un sujet à qui sa raison, sa conscience, ses affections font un devoir d'être en désaccord avec l'ensei- gnement public, et qui, après avoir, malgré lui, contribué de ses deniers à faire vivre un adversaire et souvent un enne- mi, devra pour ses enfants payer et entretenir un maître particulier?..."

Je le répète, chez un peuple de croyances mixtes, un corps public enseignant est une institution injuste (lors même qu'il serait loisible de ne pas fréquenter ses écoles) ; et cela, pour deux raisons évidentes : la première, c'est que ce corps ne peut pas avoir l'unité de doctrine; la seconde, c'est qu'il devrait être entretenu au dépens de tous, mais au profit d'un seul parti. Si ces deux raisons sont manifestes, que dire de la criante tyrannie qui contraint des pères de famille non seule- ment à payer les frais d'un enseignement insuffisant, souvent faux et hostile à leur foi, mais encore à confier aux maîtres de cet enseignement tout ce qu'ils ont de plus cher, le corps, l'âme, l'innocence de leur fils, l'espérance, l'honneur, la paix de leur foyer!...

Une seule fois, et seulement pour l'éprouver, Dieu ose à peine demander au Père des croyants le sacrifice de son fils unique, et cela en lui promettant de multiplier sa postérité comme les étoiles du ciel. Eh bien! ce sacrifice que la raison, abandonnée à elle-même, ne pourrait comprendre, la tyrannie du monopole scolaire le requiert, l'exige, l'extorque, si je puis dire, de millions de citoyens libres. Elle veut éteindre la vie morale et souvent la vie matérielle de leur survivance. "Force vous est, dit-elle aux pères de famille, d'exposer à un naufrage certain, l'innocence de vos enfants conservée jusqu'ici avec une inquiète sollicitude, afin qu'ils perdent, avec les sentiments de la' pudeur, la santé, leur honneur, leur vertu. Vous gémissez en me les donnant, vous verserez des larmes de sang lorsque je vous les rendrai. Mais inexorable est la loi, inévitable le sacrifice. Immolez votre fils au dieu Moloch, et par surcroît, payez-en le ministre!"

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Tel est le langage que tient aujourd'hui la liberté hétéro- doxe aux nations catholiques. Ce n'est pas seulement la ruine de la véritable éducation, un tribut imposé de force pour nourrir un ennemi, c'est la violation brutale du plus sacré de tous les droits, celui de la paternité. Et ce langage tyran- nique, on a l'imprudence de l'adresser, de par la tolérance philanthropique, à des hommes qui jouissent de la liberté ci- vile. Et combien de ces hommes libres, entraînés par le cou- rant des faux principes et des intérêts de parti, humilient l'or- gueil de leur front sous l'ignominie d'un pareil joug, baisent tristement la chaîne que leur bras s'indigne de porter, et im- molent lâchement à Moloch la déplorable victime!

Après cela, ne soj^ons pas surpris des progrès alarmants de la franc-maçonnerie. Il y a quinze jours, nous avions le plaisir d'entendre M. le président de l'Académie prononcer un éloquent discours contre ces infâmes philanthropes, qui se targuent de parvenir un jour à crever le ciel comme une voûte de papier, et dont les principes infernaux portent des coups terribles à la civilisation. Toutefois, il ne faut pas désespérer du triomphe de la vérité; car la secte maçonnique doit son succès au chambardement moral, bien plus qu'à sa puissance intrinsèque. Les écoles nationales ou neutres, qui sont à la mode du jour, empoisonnent l'intelligence de la jeunesse, car la fausse instruction, c'est le poison. Et l'on ne guérit pas du poison quand il est administré à une certaine dose: ainsi les écoles neutres préparent le terrain pour y planter les idées maçonniques. Mais si la jeunesse universelle recevait une édu- cation honnête, le vingtième siècle assisterait aux funérailles de la franc-maçonnerie.

Je résume cette doctrine relative à l'éducation. Je dis que l'éducation appartient à la société conjugale. Pour quel motif? S. Thomas nous donne la solution: "C'est une loi de la nature que l'enfance pense d'abord par la pensée de son père, et l'on ne peut sans injustice soustraire l'enfant à la pensée de son père. Tant que la nature le maintiendra dans le cercle de la société domestique, il n'est permis à personne d'y pénétrer ni de disputer au libre citoyen qui la gouverne les droits que la nature lui a départis."

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Toute intervention d'un autre pouvoir, soit religieux, soit politique, est donc une violation du droit naturel, et un droit royal ne peut rendre licite la violation d'un droit naturel.

J'ai dit que l'Église même n'a pas le droit d'intervenir dans le sanctuaire de la famille proprement dit, c'est-à-dire en tant que la famille est simplement société naturelle. Ce n'est pas la même chose quand la famille est catholique, ou dans le cas d'une collision du droit naturel et du droit divin- positif: le premier tend au naturel, l'autre au surnaturel, et je ne crois pas qu'il faille démontrer la supériorité du surna- turel sur le naturel. Ici encore, je m'affirme par la plume du plus grand des moralistes catholiques: "La foi, dit saint Thomas, ne peut triompher par des moyens durs; l'Église ne peut pas l'imposer de force par une sorte de monopole ana- logue à celui dont l'État se sert pour fausser les esprits; ce serait en effet contraire à la justice naturelle, puisque le hls est naturellement quelque chose du père, aliquid patris, tant qu'il n'a pas encore jileinement l'usage se sa raison." C'est alors seulement que l'Eglise peut et doit se manifester à ces jeunes âmes inconscientes du vrai.

Et l'État, lui ? il faut aussi lui rendre justice. Eh bien, l'État n'a pas sur l'enfant un droit qu'il n'a pas sur le père ; de même qu'il ne lui est pas permis d'imposer ses idées, ses croyances, sa manière de voir au père de famille, il n'a pas non plus ce droit, cette mission à l'égard de J'enfant. Le citoven est redevable à l'État, dans une certaine proportion, de sa liberté, que l'État lui garantit; mais il n'en est pas de même de sa paternité. C'est de Dieu et de la nature qu'il tient son droit de père, comme son âme, comme sa conscience, comme son intelligence, et quand l'État fait intervenir la main de sa police ou la férule de ses pédagogues entre moi et mon enfant, il viole ma liberté dans son asile le plus sacré, et il commet envers moi l'usurpation la plus flagrante.

Quel est donc le droit de l'État dans l'enseignement ? Celui de la surveillance générale pour tout ce qui touche à la liberté d'autrui et à la sécurité publique. Tout le monde est d'accord là-dessus. Il a même un autre droit: c'est celui de

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suppléer à la négligence ou à l'indigence du père de famille. Mais de à se substituer partout et toujours au père de famille, c'est-à-dire à^ établir le monopole de l'enseignement, il Y a un abîme que l'État ne peut franchir sans violer le droit naturel du père et le droit positif de l'Église.

Cet abîme, l'État l'a franchi en France, depuis plus d'un siècle; il a voulu le franchir en Belgique et en Allemagne; il l'a franchi en Angleterre, mais il a reconnu son erreur; il l'a franchi aux États-Unis; Messieurs, cet abîme, l'État l'a fran- chi au Canada !

Au Canada, la Constitution de 1867 reconnaît d'une ma- nière formelle à tous les citoyens le droit de posséder des écoles primaires particulières à leur culte et subventionnées par les fonds publics. Nous pouvons donc légitimement revendiquer des droits que le fanatisme des sectes a fait violer au Manitoba et dans l'Ouest canadien. Tous les Canadiens, j'en suis sûr, sentent le besoin de lutter pour ces droits. Jus- qu'ici, il est vrai, des raisons de prudence et des attachements politiques les ont forcés à des concessions déplorables ; mais, il faut l'espérer, ce n'est qu'une trêve. C'est là, nous en sommes sûrs, la conviction des hommes d'État qui nous gouvernent ; ce doit être, à tout le moins, celle de la jeunesse catholique qui grandit. Messieurs, on fait la paix le lende- main d'une victoire, on fait la paix le lendemain d'une défaite, on ne fait pas la paix sur le champ de bataille sans préju- dice pour la cause que l'on défend. Et pour une cause sacrée comme celle de l'école catholique séparée, pour une cause qui ne meurt pas, un homme de cœur ne doit pas craindre de mourir ; car les seules causes qui meurent sont celles pour lesquelles on ne meurt pas!

Que notre jeunesse ne nous empêche donc pas de nous convaincre des périls de l'heure présente. Ce que le maçon- nisme a conquis dans l'Ouest, il songera tôt ou tard à l'em- porter dans notre province. Tout dépendra de nos convictions, alors. Et puisque c'est le temps de se former pour servir la cause canadienne-française, plaçons-nous dès aujourd'hui au-dessus des préjugés politiques ou des intérêts personnels.

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Oui, marchons sous le même drapeau, la main dans la main, comme des frères soucieux des mêmes libertés, héritiers du même patrimoine.

Qu'on me permette ici des paroles d'amour pour le drapeau Carillon-Sacré-Cœur, sous les plis duquel marcheront désor- mais les cohortes fières et élégantes de la jeunesse canadienne. C'est le drapeau qui symbolise les aspirations de notre race : "conquérir le sol canadien au Cœur de Jésus". C'est le drapeau qui a flotté sur le berceau de l'A. C. J. C, c'est le drapeau ([ue nous baiserons avec confiance, si jamais des jours de deuil viennent assombrir notre existence nationale. Mais non! c'est le drapeau qui nous conduira à la gloire, à la vic- toire, si nous savons lui être fidèles.

Un homme très pondéré, et s'appuyant sur les événements passés d'ailleurs, me disait dernièrement que nous sommes destinés à l'émiettement . Nous autres. Canadiens français, destinés à l'émiettement ! je proteste. Le jour notre race serait anémiée, nous pourrions dire que c'est notre faute, et nous aurions certainement manqué notre vocation. Mais il n'y a pas à désespérer, si l'on prête l'oreille au concert patriotique des jeunes Canadiens, se redisant l'un à l'autre la devise de toute bonne action sociale: "Dieu et la patrie!" Tout ce qu'il nous faut, c'est du courage et de l'énergie pour lutter contre les idées, contre les faits et gestes qui pourraient nous conduire à l'émiettement.

M. Beaudet nous a parlé du projet de coopération relatif à la publication d'une série nationale de livres d'école. J'aime à croire qu'il a fait mention de ce projet purement et simple- ment pour mettre plus au jour les dangers qui nous menacent, et non pour faire injure à l'orthodoxie catholique. Qu'y a-t-il au fond de ce projet ? C'est une conjuration antipatriotique et immorale. Il faut nous tenir en sentinelles vigilantes pour conserver notre patrimoine de libertés civiles et religieuses. N'oublions pas que le serpent se glisse sous les fleurs par les plus simples détours, et par les insinuations les plus flatteuses. Au reste, ce n'est pas la première tentative que l'on fait pour mutiler l'âme de notre peuple. De chétifs avortons des idées

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luthériennes ont déjà subi plusieurs naufrages sur le navire de la Réforme, ici même dans notre province de Québec. Mais ces farouches hébétés semblent mus par une rage d'enfer: l'on en voit même qui applaudissent encore dans les colonnes de certains journaux le projet immoral de " l'éducation aux mains de l'État ". " Si l'État fait ce premier pas, dit M. Beaudet, cène sera certainement pas le dernier"; non, c'est l'école neutre qui s'ensuivra infailliblement. "Quelle doit être notre attitude?" demande M, Beaudet. 11 le sent comme moi, et le veut comme moi. Nous avons le devoir de protester contre les empiétements de l'État, contre toutes les mesures qui tendent à immoler nos traditions nationales et religieuses. Car, on ne déforme pas sans péril l'âme de tout un peuple; on ne l'arrache pas sans mutilation profonde des assises la foi et l'idiome l'ont enraciné. S'il est vrai que notre voix est encore trop faible pour parvenir aux oreilles des bourreaux de nos institutions, nos protestations confinées dans les murs du séminaire auront néanmoins l'heureux résultat de nous apprendre que nous avons des luttes ardues à soutenir pour le maintien de nos traditions, et de nous aguerrir pour ces luttes: luttes contre les maux dont souffre déjà notre patrie, luttes contre les causes qui pourraient nous en amener de plus grands encore. Le plus sûr moyen d'éviter les effets, c'est de supprimer les causes, car il n'y a pas d'effets sans causes : luttes contre l'école neutre donc, puisque les esprits éclairés ont trouvé dans l'école neutre la solution des maux qui affligent aujourd'hui la société.

L'expérience l'atteste, l'école neutre arrache les fils à leur père, au nom de la science qu'elle ne leur donne pas, et de la vertu qu'elle leur ravit! Car le nom seul de neutralité existe, la chose est impossible. On n'est jamais neutre, et vis-à-vis de Dieu surtout. On l'aime ou on le hait, on le combat ou on l'adore! Nul catholique ne peut, sans renier les serments de son baptême, se désintéresser de la croisade entreprise contre ces écoles d'apostasie nationale et religieuse, que les orangistes seuls ont intérêt à imposer à nos frères. C'est l'heure pour tous ceux qui ont une âme fière et grande, et

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surtout pour les jeunes, de répéter la parole d'Urie, général des gardes de David : " Tant que l'ennemi sera aux portes, je ne dormirai pas dans un palais; je coucherai sous ma tente, comme un soldat, toujours prêt à recevoir et à porter l'attaque ! "

Allocution du Délégué du Comité central

A la suite de cette étude, M. Bernardin Boutet, venu sur la demande de M. Versailles, adresse la parole à des auditeurs anxieux d'entendre le délégué du Comité central. Après avoir félicité le camarade Chassé, il constate avec plaisir que les membres du cercle Saint - Alphonse de Liguori ne craignent pas d'entreprendre des études sérieuses pour chercher la solu- tion des problèmes religieux et sociaux, qui s'agitent dans notre pays et desquels dépend l'avenir de notre race. Il con- tinue à peu près en ces termes:

"M. l'abbé Sylvio Corbeil, directeur du cercle Duhamel, me disait à mon départ : " Partout vous irez, dans la province de Québec, vous entendrez des expressions différentes ; mais partout rayonne l'action de l'A. C. J. C. vous recon- naîtrez le même esprit et le même cœur." Voilà, en effet, ce que j'ai rencontré, et vous poursuivez comme nous le but glorieux de l'A. C. J. C. Ce but quel est-il? Aujourd'hui on crie de tous côtés, comme autrefois: "Il n'y a pas de place pour le Christ!" Ce cri, les Juifs le jetèrent contre Lui à Bethléem, puis en Judée, pendant sa vie publique, jusqu'à ce qu'ils l'eussent fait mourir sur une croix, parce qu'il n'y avait pas de place pour lui en Judée. Aujourd'hui, il n'y a plus de place pour les Juifs dans leur patrie, et les Sémites errent, dispersés par toute la terre.

"Aujourd'hui, les sectaires et les libres-penseurs font en- tendre le même cri : "Il n'y a plus de place pour le Christ dans la société"; mais nous, les membres de l'A. C. J. C, nous demandons et crions: "Place pour le Christ!" Il faut qu'il règne dans notre vie publique comme dans notre vie privée!

"Notre association veut travailler à nationaliser la pensée et les aspirations des jeunes Canadiens catholiques ; elle veut, par la piété, l'étude et V action, en faire des lutteurs et des

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vainqueurs. L'avenir est sombre, l'orage est menaçant et nous ne savons pas de quoi demain sera fait. Mais il ne faut pas nous effrayer de la lourde tâche qui nous incombe ; ce que nous savons, c'est que nous lutterons pour les bonnes causes, toujours pour crier: "Place au Christ, il faut qu'il règne en notre patrie!''

M. Boutet remercie le supérieur de la maison et le corps enseignant de leur dévouement à l'instruction et à la forma- tion de la jeunesse. Puis il assure que les membres de l'A. C. J. C. suivront toujours la direction des prêtres-éducateurs qui modèlent leur dévouement sur celui des Jésuites.

Il remercie aussi les camarades nicoletains de l'accueil cordial qu'ils lui ont fait, et exprime le vœu que la conférence du camarade Chassé soit publiée, présumant que le cercle Duhamel contribuera même pécuniairement à l'impression de ce travail.

Il termine en nous présentant les salutations cordiales du cercle Duhamel.

Clôture be la séance

Allocution du président, Louis Moreau

Monseigneur,

Messieurs,

Bien chers Amis,

Notre programme est exécuté. Ceci fait, j'ai le devoir de formuler, au nom des membres de notre Académie, des remer- ciements à ceux à qui nous en devons pour la présente séance.

Merci donc à M. Boutet d'être venu ici représenter si dignement le Comité central de l'A. C. J. C, merci à lui pour le plaisir et l'honneur qu'il a fait à notre cercle par sa visite et ses bonnes paroles.

Merci à Monseigneur le Préfet des Études, aux autres prêtres et aux ecclésiastiques qui ont rehaussé de leur pré- sence la solennité de notre fête et donné une nouvelle preuve de leur attachement envers les jeunes.

Merci à M. le Directeur de la fanfare et à ses musiciens qui contribuent pour leur bonne part au succès de notre séance.

Forts de l'encouragement qu'ils reçoivent aujourd'hui, les Académiciens du Séminaire de Nicolet redoubleront d'ardeur dans leurs études, par lesquelles ils se préparent à aller plus tard à l'ombre du drapeau Carillon-Sacré-Cœur culbuter l'ennemi dont ils voient de jour en jour grossir les rangs en notre pays.

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Plus hardiment que jamais ils marcheront à leur but, lequel sera toujours le même. "Ils croient que c'est dans le sol du pa3^s que leur patriotisme doit avoir ses racines et que le Canada français doit l'emporter dans leur amour sur toute autre région."^

Leur patriotisme, ils le veulent "nationalisé", pour me servàr de l'expression d'un certain journaliste, et ils veulent en donner une marque en s'unissant à la grande majorité de nos évêques et de nos prêtres, à nos citoyens les plus considé- rables et à la masse du peuple pour manifester le désir de voir flotter partout, sur les bords du Saint-Laurent, le Carillon- Sacré-Cœur.

Et leur patriotisme, ils le veulent encore fécond; pour cela ils entendent marcher de concert avec les autres jeunes de leur race qui veulent atteindre la fin de l'A. C. J. C. la préparation à l'action catholique sociale.

Pour l'heure présente, nous donnons toute notre admira- tion à l'œuvre de la presse catholique, car nous la croyons essentielle pour la vie de notre peuple comme canadien-fran- çais et catholique, et si plus tard certains d'entre nous tiennent une plume comme journalistes, ce ne sera pas pour verser l'injure sur les nôtres en y semant la discorde, mais pour dé- fendre dignement ce qui tient à leur existence nationale.

Qu'on me permette de nous appliquer à nous ce que M. Versailles disait au nom des jeunes de l'A. C. J. C. au con- grès de 1904, alors qu'il était président: "Que nos compa- triotes reconnaissent en nous des jeunes hommes qu'ont en- vahis tout entiers les irrésistibles dévouements de l'action catholique sociale et qui appartiennent à la cause avant d'appartenir à eux-mêmes!"

Je finis par des paroles du même camarade en la même occasion: "Nous avons mis notre espoir en celui dont nous prononcerons toujours le nom sans respect humain: dans le Christ "qui aime les jeunes"!

1 Les vœux du congrès, art. 3, 1904.

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