m »/•:.%. LECONS SDR LA PHYSIOLOGIE ET LA PATHOLOGIE DU SYSTEMS NERVEUX. i. OUTRAGES DE M. CL. BERNARD. CHEZ LES MEMES LIBKAIKES. Memoire sur le pancreas ct sur le mlr du sue pancreatique dans les ph^nomenes digestifs, particulierement dans la digestion des matieres grasses neutres. Paris, 1856, iu-4 de 200 pages, avec 9 planches gravies, en partie colorizes 1 2 fr. Iie9ons de physiologic experimentale appliquee a la medecine failes au College de France pendant les annexes 1854-1855. Paris, 1855-1856, 2 volumes in-8 de chacun 512 pages, avec figures intercalees dans le texte 14 fr. Separement, le tome II. Paris, 1856, in-8 de 512 pages, avec 78 fig. 7 fr. Courg de medecine du College de France, lS:>i>; Iiecons sur les efiets des substances toxiques et medicamenteuses. Paris, 1857, 1 vol. in-8 de 492 pages, avec 32 figures intercalees dans le texte 7 fr. Recherches experimentales sur le grand sympathique, et sp^cialement sur 1'influence que la section de ce nerf exerce sur la chaleur animale. Paris, 1854, in-8 2 fr. 50 Imprimerie de L. MARTIXET, rue Mignon, 2. J3 COURS DE rfEDECINE DU COLLEGE DE FRANCE. LECONS SDR LA PHYSIOLOGIE ET LA PATHOLOGIE SYSTEMS NEEVETJXp(Si.M PAR II. Cfiaudc BERNARD, MEMBRI3 DE L'INSTITUT DE FRANCE, Prof'esseur de me'decine au Cnlle'ge de France, Professeurde physiologic ge'ncTale a la Faculle'dessc fences, MemhredesSocie'tcsdeBiologie, Philnmutiquc de 1'jris, correspondant de TAcude'mie de me'decine i:e Tuiin, drs sciences medicates ei des sciences nalurelles de Lyon Constantinople, Edimbonrg, Stockholm, Francfoi t-sur-le-Mein, Munich, de Suisse, de Vienue, etc., etc. I Avec flgnres intercalees dans le texte. TOME I. PARIS, J.-B. BAILLIERE ET FILS, L1BRAIRES DE I/ACADEMIE 1MPER1ALE DE MEDECINE, Rue Hautefeuillc, 19. Londres, New -York, B. BAILLIEBE, 219, BEGENT-STREET. | H. BAILLIEBE , 290, BB01DWAT. 1HDHID, C. BAII.LY-BAILLIEKE, CALLE DEL PBINCIPE , H. HI DCCCLVII! L%iutrur rt ics viiitrurs se riservent \e droit de tradnrtion, AVANT-PROPOS. Dans Icur ddiveloppement, les sciences prcsentcnt lou- joiirs drtix cotes a considercr : 1'invention on la decou- vertc des i'ails iiouveaux, et la critique ou la coordina- tion des connaissances acquises. I'anui Ics hupmmesqui (;ull,iv(;iit cJiaijin; science, Ics mis si; proposoril |)our but d'cn |M)rl(U' plus loin Ics liinitcs, (;n y iiilnxliiisanl dcs notions nonvcllcs; Ics aulrus s'attachent plus particu- liri'(iij]('nt a <:niis des anciens sur ses fonctions. - De la methode experimentale. — Difficulty's de ^experimentation tenant aux tendances de Pexpiirimenta- teur. — Art experimental. — Esprit experimental. — Ide"es preconcues et idees fixes. — Role de 1'observation pure et de Phypothese. — Dan- ger des hommes a idees fixes. — Observer et experimenter. — Expe- riences comparatives. — Des relations de cause a eflet. MESSIEURS, Le systeme nerveux, qui sera cette annee le sujet de nos lecons, est de tons les systemes de 1'organisme celui que la nature et la variete de ses fonctions serablent placer au premier rang; a tel point qu'on a pu dire avec raison que les animaux etaient d'autant plus parfaits que leur systeme nerveux (5tait plus developpe. C'est lui qui met en jeu et regularise non-seulement tons les phe"- nomenes de la vie de relation ; mais nous retrouvons B., SYST. NERV. — i. 1 2 OBJET DU COURS. encore son influence dans les phenomenes de lavieorga- nique, dans tousles actes de nutrition, secretions, produc- tion de chaleur, etc. II n'y a plus de doute aujourd'hui sur la realite de ce role general : en effet, nous pouvons, par des actions sur le systeme nerveux , troubler non- seulement les actes de la vie de relation, mais modifier encore les phenomenes de secretion, de calorification ; ces phenomenes, quoiqued'ordre purement physique ou chimique, sont cependant dans une dependance etroite de 1'influence nerveuse, qui embrasse ainsi tous les actes de la vie et assure le rang le plus elevc an systeme orga- nique qui est charge de 1'exercer. Les progres dans la physiologic du systeme nerveux sont de date recente. C'est dansle commencement de ce siecle seulement que les travaux de Ch. Bell et de Ma- gendie ont montre, dans les nerfs, des conducteurs dis- tincts pour le mouvement et pour le sentiment. Bien que les anciens eussent reconnu I'importance de ce systeme, ils n'avaient que des notions assez confuses sur les proprietes et 1'agencement de ses diverses parties. L'importante decouverte de la distinction des nerfs, en nerfs sensitifs et nerfs moteurs.. est devenue le point de depart de toutes les recherches faites depuis dans cette branche de la physiologic. La nature sensitive ou motrice de presque tous les nerfs a etc determinee par un meme precede experimental quiconsiste a operer la section d'un nerf et a voir ensuite laquelle des facultes motrice ou sensitive est abolie. On a ainsi constitueune physiologic topographique du systeme nerveux. Cette etude est au- jourd'hui en grande partie faite ; elle a seulement laisse SYSTEME NERVEUX. O imentatioh n'a pas pu atteindiv. . Cette analyse expe>imentale des nerfs par la soustrac- tion de leur influence a 1'aide cle la section , et par la restitution de cette influence par certains excitants , par le galvanisme en particulier, a indique 1'usagede cbaque partie ; elle a permis de localise!1 les phenomenes, mais elle n'apprend rien sur la nature et les propriety's spe- ciales de 1'agent nerveux. L'histoire generate de cet agent est encore inconnue ; mais cependant on a commence de nouvelles etudes qui out conduit a des resultats remarquables sur la rege"ne- ration des nerfs et sur les courants divers qui peuvent s'y developper. Les anciens avaient, sur la nature clu fluide nerveux, des idees qu'il n'est pas sans interet de rappeler dans ce rapide apercu sur 1'histoire du systeme nerveux. Elle etait en realite, pour eux, aussi satisfaisante que celles que nousavons aujourd'hui. En effet, comme toutes les theo- ries, ces idees n'etaient que 1'expression d'une maniere de voir destinee a expliquer les fails, et il est remar- (juable de voir combien leur tbeorie des esprits animaux semblait en rendre compte d'une maniere satisfaisante et parfaitement lucide. Ainsi Willis parle des esprits ani- maux qui, secretes dans la partie corticale du cerveau, descendent dans la moelle allongee qui leur sert de re- servoir : en piquant ce point, on domie issue aux esprits animaux, ce qui cause subitement la mort. Dans les idees de Willis et des anciens, ce fluide, au- quel on donnait le nom rl' esprits animaux, representait /I IDKES PF.S AN'CIENS SUR I/ AGENT NERVEUX. la quintessence du sang ot flu chyle. Lc ccrveau en separait les parties les pins tonnes, qui circulaient en- suite dans le systeme ncrvcux. Ces vues rendaient tres hien compte, avons-nous dit, desfaits observes : en effet, si Ton empeehe le sang d'ar- river an cerveau. les fonctions de cet organe sont anean- ties; 1' agent nerveux n'existe plus. On trouve d'autre part, dans leseffets d'une alimentation suffisamment re"- paratriceet fortifiante, la preuve que les qualites du sang sont pour heaucoiip dans la reparation de 1'activite nerveuse. Willis explique avec detail ses idees, et, il dit comment il se fait qne Ton paralyse le diaphragme pour line liga- tureposeesur le ncrf phrenique: on empeehe, dit-il, les esprits animaux do descendre du cerveau . Que Ton vienne ensuite a exciterlenerf phreniqueau-dessus dela ligature, on ne determinera aucun mouvcment du diaphragme, parce qne les esprits animaux ne peuvent plus passer; qu'au contraire on porte 1'excitation au-dessous de la ligature, on determinera encore des contractions, parce que la petite quant ite (Vesprits animaux que la partie interieure du nerf pent tenir en reserve agis- sent encore. Si je vous rappelle ces idees qui n'ont plus cours depuis longtemps, c'est pour vous montrer qu'on a pu changer les mots, remplacer les esprits ani- maux par un fluicle imponderable, sans realiser pour cela un veritable progres. Tant qu'on n'a fait que sub- stituer une thcorie a une theorie sans preuve directe, la science n'y a rien gagne ; cclle des anciens en vaut une autre. Aujourd'hui les esprits animaux ne sont plus 111STORIQUE. 5 en cause; Ics procures do la physique et quelques ana- logies, assez sediiisantcs d'ailletirs, leur out fait substi- tuer le fluidc electrique; mais si nos connaissances sont plus avancees surce sujet, ce n'est pas que nos theories valent mienx : c'est que nous avons la connaissance d'un grand nombre de faits qu'on ignorait. Pour ce qui est cle la theorie modcnie basee sur les analogies de 1'agent nerveux avec 1'e'lectricite', noiisaurons ay revenir bien- t6t, et nous verrons que la force nerveuse, bien qu'elle soit liee a 1'accomplissement des phenomenes chimiques de 1'organisme, differe essentiellement de la force electrique; aussi a-t-on propose de lui donner un autre nom . Haller avait reellenient commence 1' etude des pro- prietes nerveuses en les examinant dans leurs relations avec les proprietes des autres tissus; c'est ainsi qu'il avait pu deja considerer que la contractilite musculaire etait due a un agent distinct de 1'excitabilite nerveuse. Depuis Haller, cesidees ont ete longuement discutees; mais nous verrons que ces questions sont elucidees aujourd'hui par des experiences concluantes. Les deux ordres de points de vue que nous venous de rappeler nous tracent le programme que nous avons a suivre. D'une part, nous aurons a envisager les proprietes generates des nerfs et les rapports de ces proprietes ge- nerales avec celles des autres tissus. Ce que nous pour- ronssavoir du tluide nerveux en lui-meme, de ses ana- logies avecle fluide electrique, etc., trouverala sa place. Ensuite, passant a Tapplication de ces notions, nous (> METHODE D" INVESTIGATION. inteiTOgei'ons chaque nert' en particulier ; dans cette etude, les observations pathologiques interviendront plus directemenl et nous serunt souvent un pivcieux moyen de montrer 1' application a 1'homme des i'aits que nous observerons directement chez les animaux soumis a notre experimentation. Nous vous exposerons les resultats les plus recents, les consequences qu'on en a tirees, cher- chant dans la discussion deces faits, dans la critique de ces consequences le point de depart d'experiences qui puis- sent ajouter a nos connaissances sur ce sujet. Quant a la methode que nous suivrons dans les re- cherches auxquelles nous nous livrerons, je n'ai plus a vous en parler . L'experimentation seule dans notre science peut conduire a des resultats serieux ; il n'y a done pas a choisir. Si nous ne 1'avons vue intervenir (pie tardive- ment en physiologic, c'estqu'elle avaitbesoin du secours incessant de sciences qui. comme la physique et la chimie, n'etaient pas dans un etat assez avance pour lui fournir les instruments, les moyens de mesure ou d'appreciation qui lui sont indispensables. Les conquetes nombreuses et variees de la physiologic moderne montrent suln'sam- ment aujourd'hui que les entraves tenant a rinsuifisance des moyens d'observation vont en diminuant de plus en plus : nous avons maintenant de meilleurs instruments, il ne faut plus que savoir s'en servir. Mais ici, messieurs, je veux particulierement ^7ous signaler des ecueils qui ne tiennent ni a la methode, ni aux moyens dont elle dispose, mais a Fexperimentateur lui-meme. Tout le monde croit etre apte ii interroger la nature METHODS EXPER1MENTALE. 7 par 1' experimentation : c'est lale plussouvent une grave erreur. Mais reniarquez bien quo cette espece de con- fiance avec laquelle on aborde les questions les plus com- pliquees ne se rencontre guere que dans les choses du domaine de la medecine et de la physiologic. Lors- qu'une personne competente traite un sujet special de chimie ou de physique , ceux qui ne sont ni physiciens ni chimistes, se taisent et evitent de se meler a une discussion pour laquelle ils se sentent incompetents. Eh bien , la meme chose n'a plus lieu quand il s'agit de medecine ; tout le monde croit pouvoir en parler et en parle. En raison meme de leur obscurite, les sujets qui toucheut a la vie ne sont done pas de nature a rebuter ceux qui les abordent sans une preparation suffisante ; aussi voyons-nous tons les jours les experiences les plus incomplete^ se produire. Ayant a vous amener a mon point de vue, je dois vous signaler les vices de methode et d'appreciation qui frappent de nullite des resultats auxquels il ne faudrait pas accorder la valeur des faits bien observes, sous le pretexte qu'ou a eu la prevention d'interroger la nature. En effet , quand on parle d'experiences, il y a deux choses a considt-rei : 1° 1'art experimental , 2° 1'esprit experimental. L'art experimental . qu'il ne faut pas confondre avec 1'esprit experimental , consiste dans la maniere plus ou moins ingenieuse de preparer un appareil, de conduire une serie d'epreuves. II s'acquiert dans les laboratories, exige des connaissances profondes en anatomie, et des notions exactes en physique, en chimie, une grande 8 OBSERVATION habitude cles manipulations, mais il ne s'enseigne pas. L'esprit experimental est tout autre chose: son his- toire meriterait d'etre faite et offrirait matiere a des considerations qui , indiquees ca et la par les philoso- phes, formeraient un des chapitres les plus curieux de 1'histoire de 1'esprithumain. Dans toute experience il faut avoir un point de depart, et ce point de depart doit donner naissance a une idee pre"coneue qu'on soumet ensuite a la verification experi- mentale; c'est toujours ainsi que precede 1'experience proprement dite. On comprend , d'apres cela, que 1'observation doive toujours preceder 1'experi mentation, et que souvent meme une experience premiere n'ait pasd'autre but que de fournir matiere a une observation, que 1'esprit interpretera de facon a en tirer une idee preconcue, qui sera ensuite verifiee par une experience ou meine par une observation nouvelle. Ce dernier cas se voit en astronomic, ou Ton ne peut pas experimenter cela arrive encore pour les observations pathologiques. On acherche a definirl'experimentation en disant que c'eHait une observation provoquee , ou bien encore que 1'observation n'etait que la contemplation des pheno- menes tels qu'ils se montrent dans 1'ordre naturel des choses , tandis que 1'experience serait leur observation dansdesconditionsparticulieresplusoumoinsartificielles ou perturbatrices. Or, comnie je le clisais, il y a des sciences ou, d'apres cette definition, on ne peut qu 'obser- ver sans experimenter. En astronomic, par exemple, on observe le cours des astres, mais on ne peut pas le trou- bler artificiellement. On execute seulement 1'observation ET EXPERIMENTATION. 9 a Faide d'iiistruments speciaux. comme les naturalistes le font dans maintes circonstances. II est vrai que dans tine experimentation il y a gene- ralement trouble des phenomenes, tandis que dans 1'ob- servation cela n'a pas lieu ordinairement; mais cependant il serait fort difficile de delimiter ainsi 1'observatiori de 1' experimentation. Je pense, quant a moi, que le precede" experimental est beaucoup plus dansle but quel'esprit se propose, que dans lesmoyens clont on fait usage. On doit, en effet, d'abord chercher a bien constater un fait et ses conditions par 1'observation , et ensuite on remonte a la recherche de la cause, c'est-a-dire de la loi du phenomene par des experiences institueesdanscebut, ou m6me par des observations qui peuvent aussi quelquefois en tenir lieu. En resume , Fobservation n'est que le resultat d'une application des sens, pour la constatation d'un faitou u'un phenomene, tandis que 1'experience suppose une idee preconcue et une serie d'operations intellectuelles, avec 1'emploi d'un raisonnement logique pour arriver a une conclusion. Ici , comme nous faisons des recherches qui reposent sur des faits deja observes, nous ferons beaucoup d'ex- periences. Mais je vous prie de ne pas confondre une idee preconcue avec une idee fixe. C'est toujours en prenant ce dernier terme en mauvaise part que Ton parle des gens a idees preconcues ; je vois la une erreur de mots. Les idees preconcues sont necessaires, indis- pensables : on ne fonde rien sans elles ; il faut savoir seu- lement les abandonner lorsqu'elles n'ont plus de raison d'etre. Ace moment, sil'ons'y rattachait, elles cesseraient 10 IDEES PRECONgUES d'etre idees preconcues pour devenir idees fixes, et con- stituer une veritable iufirmito de 1' esprit. L'idee pre- concue est toujours interrogative ; c'est tine question adressee a la nature. II faut ecouter froidement la reponse et cesser de faire la question . quand la reponse , quelle qu'elle soit, a ete donnee. II nous serait facile de vous montrer que tous les grands experimentateurs, Harvey, Spallanzani , Reau- mur, etc., out eu des idees precoucues : c'est avec des idees qu'ils out interroge 1'experience qui leur a repondu. Les homines a idees fixes n'interrogent que pour la forme ; ils out fait d'avance la demande et la reponse. Semblables a ces gens qui , bien decides sur ce qu'ils doivent faire, vous demandent des conseils qu'ils ne sui- vront pas, s'ils sont contraires a leurs idees, car au fond ils cherchent une approbation et non un conseil. Les recherches que Ton entreprend sur un sujet ont toujours pour point de depart une hypothese pure on bien une induction , c'est-a-dire une hypothese qui a un fait pour origine, comme je vous le disais tout a 1'heure. Si I'experimentateur se trouve sans aucune donnee, il fera une experience a tout hasard, observera et cherchera dans ce qu'il aura vu matiere a une hypo- these qui puisse lui fournir une idee pour etablir un systeme preconcu de recherches ; ce n'est que du mo- ment que rhypothese on 1'induction a ete formulee que 1'experimentation a un but ; avant ce ne pouvait etre que de 1' observation. Je ne puis mieux vous faire com- prendre la liaison des observations et des experiences, ainsi quelesoperations inteilectuellesqui les coordonnenl OU HYPOTHESE PROBABLE. 11 et lour domient un sens, qu'en vous rappelant 1'histoire cle la grancle decouverte dont je vous parlais an com- mencement de cette lecon. m Les anciens avaient eu 1'idee de Texistence distincte possible cle nerfs moteurs et de nerfs sensitifs. Galien avait observe des paralysies distinctes de ces deux ordres de fonctions. Lorsque Ch. Bell, dissequant les nerfs de la face, vit que les filets du facial allaient presque tons dans les muscles, et que les filets de la cinquieme paire allaient a la peau, il faisait une simple observation ; mais ensuite il fit une hypothese et se demanda s'il n'etait pas pos- sible que le nerf facial fut moteur et le trijumeau sen- sitif. — Ch. Bell, qui etait plus anatomiste qu'experi- mentateur, fit verifier la supposition par Schaw, qui opera sur des anes : 1' experience donna raison a sa supposition. Cette experience, vous le voyez, ne fut pas entreprise d'emblee et sans but. Ch. Bell observa ensuite alors avec soin les nerfs de la face sur lesquels il avait experimente : il vit que le nerf de la cinquieme paire avait sur son trajet un gan- glion, et que le facial n'en avait pas de semblable. Ce earactere faisait ressembler le nerf de la cinquieme paire aux racines posterieures des nerfs rachidiens, et le fa- cial aux racines anterieures. Les racines posterieures n'etaient-elles pas sensitives? les racines anterieures ifetaient-elles pas motrices? Telle fut la question ou 1'hypothese qui se deduisit d'une observation et qui devint 1'indication d'une uouvelle experience. II arrive souvent qu'a une me" me epoque, une meme 12 L'IDEE pRtcoNCUfi DOIT TOUJOURS EIRE SOUMISE question est u lY-lude dans diffe'rents pays, et plusieurs hommes aiors suivent la meme idee. L'experienee tut faitc par Magendie. et donna raison a 1'induction de Ch. Bell ; mais commo clans lescas les plus heureux, et celui- ci est du nombre, 1' experience a tou jours de 1'imprevu. Les experiences deMagendie rectifierent differents points del'idee preconcue du physiologiste anglais: ainsi Ma- gendie prouva, par exemple, que la cinquieme paire avait sur les phenomenes de nutrition de la face une in- fluence que n' avait pas soupconnee Ch. Bell; son ex- perience sur les ratines rachidiennes a fait disparaltre les nerfs respirateurs supposes par Ch. Bell, et a montre 1'existence de la sensibilite des racines anterieures que Ch. Bell avait e'te amene a nier par la theorie. De sorte que, ici m6me ou 1'experience a ete tres heureusement d'accord avec 1'iclee preconcue, elle a cependant en de- hors de cette idee, et meme en contradiction avec elle, apporte des connaissances qui sont aujourd'hui acquises a la science. Aussi, dans cette grande decouverte, la jus- tice exige qu'on ne separe pas le nom de Magendie de celui de Ch. Bell. Lorsqu'on se propose de resoudre experimentalement une question, on doit s'attendre a tous les cas possibles : il arrive quelquefois que Fexpe'rience repond a la ques- tion ; souvent elle repond autre chose. Je viens de vous montrer des inductions en partie justifiees par Fepreiive experimentale ; je vais maintenant vous dormer un exemple d'un resultat contraire. Quand autrefois je voulus couper le nerf grand sym- pathique dans la tete, je supposais, d'apres les idees A LA VERIFICATION EXPERIMENTALE. 13 rccuesa tort, que cottc section, diminuant riiitensitc des plK'iiomenes nutritifs dans la partie, y produirait un abaissement de temperature. Je fis ['experience, et c'est exactement le contraire qui eut lieu ; je dus done aban- donner cette premiere idee, mais j'eus soin de garder le fait. Dans cette circonstance, vous voyez V experience donner un resultat oppose a celui qu'on en atlendait. La lecture des grands experimentateurs vous montre- rail qu'en physiologic il en est presque toujours ainsi, et que le plus souvent la reponse de 1'experience n'a aucun rapport avec la question qu'on s'etait posee. On pent dire alors, comme cela arrive souvent en effet, qu'en cherchant une chose on en trouve une autre. Quand on etudie les mathemutiques, chaque pas que Ton tente en avant part d'un axiome ou d'une verite demontree : en raisonnant juste, on arrive certaine- ment a des conclusions irrefutables. Dans les sciences naturelles il n'en est plus de meme , parce que nous n'avons jamais la certitude de la valeur de notre point de depart, qui, an lieu d'etre un axiome, est toujours une hypothese plus ou moins probal)le. Le criterium des sens, precieux quand on raisonne au point de vue de 1'utile ou de 1'agreable, fait defaut lors- qu'on aborde la science purement speculative. La verite ne pent etre connue que par une experience etablissant, suivant 1'expression de Goethe, entre le?notet le non-moi un intermediaire dans lequel les operations de r esprit ont une trop large part pour ne pas exercer sur 1'apprecia- tion des fails une influence trop souvent facheuse. C'est alors que les i dees preconcues prennent un empire qui les EXPERIMENTATION SEULE constitue a 1'etatdeveritables hallucinations ;elles devien- nent les idola que Bacon a decrites au nombre de quatre, et parviennent souvent a plierles fails a leurs exigences. Je ne vous parlerai pas ici, messieurs, de ceux qui n' out pas du tout recoursal'experience pour confirmer ou modifier leurs idees; il s'en rencontre cependant. D'autres, et ceux-ci sont extr^mement nombreux, de- mandent a 1'experience la confirmation d'une id6e fixe, et ne lui demandent pas autre chose. Us experimented, non pour chercher, mais pour prouver : leurs conclusions sont posees avant que leur travail soit commence. Tout ce qui ne rentre pas dans leurs idees est consider^ comme non avenu, comme experience mal faite, etc. Ces reflexions me mettent en memoire une conversation qu'eut autrefois M. Magendie avec un membre de 1' Academic des sciences celebre, mais pas en physiologic experimentale. Ce dernier, parlant a Magendie d'un memoire qu'il preparait stir un point interessant de physiologic, disait : « Je serai incessamment en mesure de lire mon travail ; le memoire est termine, il ne reste plus a faire que les experiences. » Ceux qui veulent ainsi plier les resultats de 1'expe- rience a leurs vues, et malheureusement ils sont nom- breux , sont tres dangereux parce qu'ils sont ordinai- rement tres logiques et qu'on se laisse aller au charme de leur raisonnement, sans s'inquieter suffisamrnent de leur point de depart ou de la realite des faits qui leur servent d'arguments. Un autre danger, c'est que, assez attaches a leurs idees pour ne pas tenir compte des faits, ils mettent a les defendre une verve, un entraf- DOIT JUGER LA VALEUR DE L'lDEE PRECONgUE. 15 nement qui suflisent a persuader beaucoup de ceux qui les entendent. C'est la cette classe d'hommes voues a 1'erreur, exclusifs et passionnes : leurs iclees font grand bruit tant qu'ils sont la pour les faire valoir ; mais ils ne sauraient rien decouvrir et. en definitive, ne laissent rien. L'histoire des sciences medicates vous offre mal- heureusenient bien des hommes de cet esprit. Ils n'ont pas clu tout la conscience de ce que c'est qu'une notion scientifique ; ils veulent que tout soit clair, que tout s'explique, et qu'il ne reste pas un coin obscur dans un travail. On peut dire, quand un travail se presente avec ces apparences de clarte universelle et de logique, qu'il est faux et en partie une oeuvre d'imagination plus que d'experience. En effet, quelque heureux que Ton puisse etre dans des recherches experiinentales, on ne peut jamais arriver qu'a ^clairer partiellement un ordre de phenomenes; mais il y a toujours a cote des questions plus ou moins connexes qui restent encore obscures. Si tout etait eclaire d'un coup , la science serait finie; cela ne sera jamais, et chaque question resolue laisse tou- jours a c6te d'elle des questions nouvelles a resoudre, car, comme le dit Priestley, toutes les fois qu'une expe- rience parvient a lever un doute, elle nous en montre dix nouveaux a elucider. En opposition avec ces organisations qui ne tiennent pas compte des faits et sont entierement impropres a tirer profit de ^experimentation, vous trouverez des ob- servateurs qui, dans la crainte d'etre system atiques, ne raisonnent pas assez et concluent directement d'apres-un fait brut. 16 EXPERIENCES COMPARATIVES Mais ici une nouvelle difficult^ se presente : il ne suifit pas de voir, il fautsavoir juger et conclure. Les observa- tions, pour etre fructueuses, doiveut 6tre non-seulement verifiees par 1'experience. mais encore conduites suivant certaines regies que Fexperimentateur le plus integre ne saurait negliger sans s'exposer a des meprises regret- tables sur les relations de cause a effet. II faut d'abord, lorsqu'on observe, n'tHre pas trop cre"dule et. quand on a obtenu un resultat. le verifier toujours par une experience contradictoire. Quelle que soit la perspicacite de 1'observateur, il ne pent, quand il ne fait pas d'experiences comparatives, voir qu'un cote de la question. Bacon, qui donnait le nom ftidola tribus al'erreur des esprits qui concluent d'apres les faits isoles et sans la contradictoire, en cite comme exemple un homme qui, conduisant un voyageur dans le temple d'Esculape, luj montrait, comme preuve de la confiance qu'on pouvait avoir dans Esculape, les nom- breux ex-voto suspendus a ses autels. — Je voudrais, dit 1'autre, voir a cote les portraits de ceux qui ont fait des voeux et sont morts. Combien n'aurions-nous pas d'exemples de ce vice de raisonnement en medecine, si nous voulions puiser dans les observations donnees a 1'appui des methodes therapeutiques, qu'on preconise en ne citant que les malades gueris, sans tenir plus compte de ceux qui sont morts avec le medicament que de ceux qui ont gueri sans lui. II faut done toujours. dans notre science, 6tre dans une disposition d'esprit assez desinteressee pouretre apte a re- garder le pour et le centre. En medecine, les circonstances INDISPENSABLES POUR BIEN CONCLURE. 1? favorisent assez rarenient cette double observation con- tradictoire pour qu'on s'explique la tendance generate a s'en passer-; et la frequence des jugements errones qui, n'ayant pas laressource dese baser sur une comparaison ou une experience comparative , parteut seulement des relations de succession pour conclure a la relation de cause a effet : Post hoc, ergo propter hoc. Dans les experiences physiologiques, ou 1'observateur dispose jusqu'a un certain point des circonstances, il devient de precepte d'eviter cette cause d'erreur, la plus facile de toutes. Pour cela, il faut faire 1'experience contradictoire, car il ne suffit pas de prouver qu'une chose existe, dans certaines circonstances; il faut encore prouver que, dans des conditions opposees, le contraire a lieu. En outre, il faut souvent, pour la simple con- statation d'un«phenouiene, faire ce que nous appellerons des experiences paralleles, c'est-a-dire faire deux expe- riences semblables qui ne different entre elles que par une seule condition, afin qu'on soit bien sur que Ton ne se trompe pas dans la relation que Ton a etablie entre le phenomene et sa cause prochaine. Un autre principe experimental consiste a reduire la decision d'une question au moins grand nombre d'ex- periences possibles ; car sans cela on est expose a voir les experimentateurs discuter sur des experiences di verses sans s'entenclre. La methode experimentale physiolo- gique est en general la soustraction desorganes pour ana- lyser la fonction et savoir le role de 1'prgane qu'on enleve. Nous ne pouvons pas, en physiologic, faire la synthese. C'est cette methode d'ablation que nous em- B., SYST. NERV. — i. 2 18 EXPERIENCES PHYSIOLOGIQUES. ploierons dans 1'etude du systeme nerveux , et elle est plus simple la que partout ailleurs. La decision de la question se re"duiraen general a une seule experience, sur laquelle toutle monde discutera. Dans d'autres parties de la physiologie , il n'en est pas ainsi ; on ne pent pas enlever les organes, parce que les desordres que Ton produirait seraient tels, qu'il deviendrait impossible de demeler ce qui appartient au precede operatoire ou a 1'organe enleve. Alors on est oblige de faire beaucoup d'experiences indirectes donton tire la conclusion gene"- rale. Alors, il faut voircet ensemble si Ton veut juger la question , autrement si Ton ne prend que les resultats isoles, on peut arriver aux conclusions souvent les plus opposees. Resterait a vous parler des obstacles tenant a Finsuffi- sance desmoyens; quelques-ims penvent E IMIENOMENES NERVEUX. 21 Lorsqu'une science met au service cle la physiologie les moyens d' investigation dont elle dispose, il est rare que 1'interet qui s'attache au moyen employe ne fasse pas un pen perdre cle vue le but que Ton devait pour- suivre. C'est ce qui arrive souvent dans les recherches physiologiques entreprises par les physiciens et les chi- mistes. Elles sont en general tres exactes, mais les con- ditions physiologiques ont gene'ralement ete negligees. Ce n'est done qu'apres avoir fait les reserves ne- cessaires pour conserver au phenomene son caractere physiologique, qu'il est possible de I'etudier fructueuse- ment avec les moyens que la physique met en notre pouvoir. Quelque varies que soient les phenomenes dans les- quels il a sa part d' action, le systeme nerveux ne se ma- nifeste quo par des expressions de deux ordres : sensi- bilite et mouvement. II y a des nerfs conducteurs du mouvement, d'autres du sentiment ; ces nerfs ne sau- raient se remplacer mutuellement. II ne faudrait cepen- dant pas conclure de la que les proprietes sensitives et les proprietes motrices soient separables les unes des autres; partout ou il y a mouvement, il y a sentiment. Sans doute, 1' esprit pent pour une abstraction separer ces deux proprietes; mais voir la autre chose qu'une abstraction, serait reconnaitre une chose qui ne se ren- contre pas chez les etres doues de la vie. Aussi Cuvier faisait-il remarquer que, lorsque les poetes ont voulu impressionner par des images emouvantes, ils n'ont rien trouve de plus saisissant que d'enfermer des etres hu- mains sensibles dans une forme immobile, dans un arbre, SENSIBILITY KT MOUVEMENT. un rociier. Si done I'experimentateur analyste peut a volonte considerer ensemble on separement ces deux ordres de manifestations, la chose n'existe pas physio- logiquement; un phenomene de sentiment ne se mani- festera jamaisque par le mouvement. Voyonsmaintenantquels sont les nerfs moteurs, quels sont les nerfs sensitifs et quels rapports ils affectent entre eux. Dans cet expose, nous prendrons nos types de des- cription chez riiomme. C'est surtout dans les nerfs rachidiens que la dis- tinction anatomique eutre les nerfs moteurs et les nerfs sensitifs est nettementetablie. Ces nerfs torment trente- uiie paires, constitutes chacune par deux racines dis- tinctes qui se reunissent ensuite pour former un nerf mixte, auquel la raciue posterieure donne ses proprietes sensitives, tandis que la raciue anterieure lui donne ses proprietes motrices. On comprend a priori la relation qui peut exister entre la sensibilite et le mouvement. Sous 1'influence d'une sensation, il y atantot mouvement reflexe. tantot volontaire; mais ce n'est pas sur cette relation generale du nerf de sentiment avec le nerf de mouvement que je veux aujourd'hui appeler votre attention. Nous avons dit que, dans chaque tronc nerveux, a un element moteur correspond un element sensitif ; ils forment une veritable paire. Uh nerf moteur ou un nerf sensitif n'existe pas plus physiologiquement a Fetat isole qu'un element zinc ou un element cuivre n'existe au point de vue electrologique. Dans une pile ii n'y a que PAIRE NERVEUSE. 23 ties couples tie metaux , dans les uerfs mixtes on ne saurait voir que la reunion d'un certain nombre de paires elementaires de nerfs. La paire nerveuse est 1' ensemble constitue par deux racines correspondantes, 1'une anterieure, 1'autre poste- rieure. En examinant une paire rachidienne , plus propre a montrer clairement les origines et la solidarite ties deux racines, on voit la racine anterieure naitre par un che- velu du sillon anterieur de la raoelle (fig. 1) ; la racine posterieure nalt bfusquement du sillon poste'rieur par ties filets qui se reunissent bientot (fig. 2). Mais ce qui les fait distinguer plus facilement encore que leur origine, c'est la presence sur le trajet de la ra- cine posterieure d'un ganglion g qui manque a la racine anterieure. C'est immediatement apres ce ganglion que les deux racines se reunissent pour former un uerf mixte m. Le nerf mixte se distribue a tous les systemes de 1' economic. Car tous les appareils sont constituesa la fois par ties parties motrices ou sensibles, auxquelles se dis- tribuent les filets nerveux provenant ties racines ante- rieure et posterieure, qui se terminent finalement soit dans ties parties contractiles , soit dans des parties sen- sibles. Mais il y a deux especes de mouvernent, 1'un volontaire, 1'autre involontaire ; on trouve dans la paire nerveuse les elements excitateurs de ces deux systemes de mouvements. En effet, a chaque racine se rattachent (nous ne parlous ici que des connexions) de petits filets qui en partent ou y arrivent. Ces filets se rendent a un 2/1 RAC1XES RACHIDIENNES. systeme de ganglions, d'ou partent do nouveaux filets qui vont so distribuer, eux aussi . a des tissus moteurs d :\ FIG. 1. FIG. 2. Origins des ratines rachidiennes. Fig. 1. — La moelle est vue par sa face anterieure; A, A, A, ratines anterienres rachidiennes naissant par des divisions radiculaires qui se rennissent ensuite pour constituer les faisceaux de la racine : — P, P, P, racines posterieures ; — c, d, filaments anastoraotiques existant entre les racines posterieures; — g,g,g, ganglions des racines posterieures; — m. m, nerfs mixtes formes par la reunion de deux racines. Fig. 2. — La moelle est vue par sa face poste'rieure ; — P, P, P, racines posterieures partant du sillon posterieur par des filaments radiculaires volumineux , et naissant brusquement sans divisions radiculaires ; — A, A, racines anterieures; — c, d, anastomoses entre les racines poste"- rieures; — g. g,g, ganglions intervertebraux des racines posterieures. SENSIBILITE RECURRENTE. 25 ou sensibles , aux muscles de la vie organique et aux muqueuses. Le systeme nerveux sensitif et moteur des organes splanchniques est ce qu'oii appelle le grand sympathique. Dans le systeme de la vie de relation, les nerfs se distribuent a des organes de mouvement volon- taire et a des surfaces pourvues d'une seusibilite con- sciente. Le systeme cerebro-spinal agit par la volonte sur les mouvements qui sont sous sa dependance; les phe'nomenes soumis a 1'action du grand sympathique sont en dehors de la conscience et de la volonte. Mon but pour aujourd'hui est de vous faire voir que la paire nerveuse forme un tout, malgre les r61es diffe- rents auxquels sont destines ses filaments . et de vous montrer que les deux racines qui semblent se separer par leurs aptitudes fonctionnelles, sont cependant etroite- meut liees par des propriete's communes. Je fonderai mes arguments sur une vue qui n'avait pas ete soupconnee lorsqu'on decouvrit les proprie'tes differentes des nerfs. Ch. Bell avait cru a tort, et on 1'a repete apres lui, que les nerfs moteurs etaieut comple'temeut inseusibles. tandis que les nerfs sensitifs seuls avaient la propriete d'etre douesde sensibilite. Aujourd'hui on sait que. malgre leur r61e different , les deux ordres de racines sont sensibles, et que cette sensibilite leur vient de la rn£me source. Ce fait, decouvert et demontre par Magendie, a recu de lui le nom de pheuomene de la sensibilite recurrente ou en retour. Je crois pouvoir vous demontrer que cette sensibilite des raciues anterieures est le lien qui les unit physiologiquement aux racines posterieures correspon- dantes, de maniere a accoupler en quelque sorte, paire SENSIBILITE RECURRENCE. FIG. 3. — Figure schematique de la distribution des ratines rachidiennes et de la sensibilite recurrente. a, a1, a", a'", origine des ratines antdrieures rachidiennes a la moelle epiniere ; — p, p1, p", p"1, ratines posterieures; — P, P, peau dans la- quelle se termine spe"cialement la ratine poste"rieurc , quoiqu'elle envoieaussi quelques filets dans les muscles M, M, M, pour leur donner la sensibilite; — M, M,M, muscles dans lesquels se termine spe"ciale- ment la ratine anterieure, quoiqu'elle envoie aussi quelque filament pour les elements contracliles de la peau. La sensibilite emane de la ratine posterieure a son origine a la moelle, ct elle se propage quand les ratines sont intactes (premiere paire), dn centre a la peripherie, el revient par la racine anterieure jusqu'a la moelle ; de telle sorte que, si Ton coupe la racine ante"rieure en laissant la posterieure intacte (deuxieme paire) , le bout peripherique s reste sen- sible, et le central i est insensible. Si Ton coupe la racine posterieure en laissant ranterieurc intacte (troisieme paire), cette derniere devient in- sensible, de meme que le bout peripherique de la racine poste"rieure i\ le bout central de la racine posterieure reste sensible. Si Ton coupe a la fois les deux ratines (quatriemc paire) , tons les bouts de section sont insensibles . excepte" sur le bout central de la racine posterieure s. — g, ieure, c'est elle qui lui corresponds et qui formeraavec cette racine anterieure une paire nerveuse. J'ai vu que la sensibilite se propage toutefois, avec une intensite decroissante , de la racine posterieure a la ra- cine anterieure, et lorsqu'elle disparait, elle se retire de r anterieure vers la posterieure. II est une maniere de faire 1'experience, qui montre 30 LA SENSIBILITE RECURRENTE ce resultat sans qium soil oblige de couper la racine posterieure : ce precede, que j'ai signale deja depuis longtemps, perniet en outre d'assister au retour de la sensibilite apres 1' avoir une fois supprimee et de la sup- primer de nouveau. Pour cela, apres avoir ouvert le canal vertebral de ranimal sur lequel on opere, on le soumet a des inhala- tions (Tether ou mieux de chloroforme. On voit alors, a rnesure que les effets de Tanesthesie se prononcent, la racine anterieure devenir insensible, puis la peau, puis la racine posterieure, et enfin la moelle. Lorsqu'on cesse les inhalations, la sensibilite revient dans un ordre in- verse a celui qui a signale sa disparition : c'est-a-dire qu'on la retrouve (Tabord dans la moelle, puis a la peau ; enfin la racine anterieure redevient sensible a son tour. La meme chose peut avoir lieu sous Tinfluence de causes epuisantes tres variees, et dont quelq.ues-unes peuvent naitre des circonstances memes de 1'operation quand on a, par exemple, affaire a un animal epuise. Or, il est reel que Tepuisement qui suit une operation ou une grande fatigue quelconque, produit une sorte d'anesthesie comparable a celle qui determine Tetheri- sation. Dans ces cas encore, on peut trouver la racine anterieure insensible ou beaucoup moius sensible que la raciue posterieure ; ce qui tient uniquement a ce que la perte de sensibilite a commence a s'effectuer en sui- vant 1' ordre habituel, en se manifestant d'abord dans la racine anterieure; ce qui a pu, ainsi que nous le verrons, induire des observateurs en erreur et leur faire croire que la racine anterieure n'etait pas sensible. ASSOCIE LES NERFS. 31 Ce phenomena de la sensibilite recurrente est le fait plus important de I'histoire generate du systeme ner- veux, en ce qu'il montre le lien qui unit deux elements associes dans leurs fonctions, et qu'il etablit F unite phy- siologique de la paire nerveuse, unite que les ten- dances analytiques de la nevrologie topographique auraient pu faire meconnaitre. C'est a ce criterium nouveau que nous aurons recours pour distinguer, parmi les nerfs craniens, ceux qui jouent le role de racines an- terieures , et ceux qui jouent le role de racines poste- rieures, et le mode de leur association pour former des paires nerveuses. Un exemple vous fera immediatement voir comment une experience fondee sur cette donnee peut trancher des questions insolubles autrement. Vous savez que, dans les essais qu'on a faits pour grouper par paires les nerfs craniens, on regardait comme formant une paire le .pneumogastrique et le spinal un accessoire de Willis, le pneumogastrique re- presentant 1'element sensitif et le spinal Felement mo- teur. Or, il n'en est rien : en examinant quel nerf fournit au spinal la sensibilite recurrente, on voit que ce n'est pas le pneumogastrique. La sensibilite du spinal lui vient de la racine posterieure de la deuxieme paire cervicale. En etudiant ce phenomene sur les nerfs rachidiens, nous verrons que toujours une racine posterieure sen- sible communique la sensibilite a une seule racine mo- trice. Mais en remontant vers la tete, les choses ne se passent plus de meme, et Ton voit que la racine sensi- 32 SENSIBILITY RECURRENTE. tive peut commimiquer a plusieurs racines motrices la sensibility recurrente : ces racines, quoique multiples, ne represented done que 1'element moteur d'une seule paire nerveuse. Je voulais, avant d'aborder au point de vue pbysiolo- gique I'e'tude du systeme nerveux, vous signaler seule- meut aujourd'hui les donne"es physiologiques d'apres lesquelles nous considerons la paire nerveuse. Au com- mencement de la prochaine seance, nous vous dounerons la preuve experimentale de son unite physiologique en vous faisant 1'histoire, aussi complete que possible, de la sensibilite recurrente. TROISIEME LECON. 24 DECEMBRE 1856. SOMMAIRE : Historique de la de'couverte de la sensibilite" re"currente. — Vicissitude de cette question. — Des conditions dans lesquelles doit 6tre observe le phe"nomene. MESSIEURS, Nous avons e"tabli, clans la derniere lecon, ce qu'on doit entendre par 1'unite nerveuse, et comment elle se compose necessairement de deux elements, Tun moteur, 1'autre sensitif , qui cependant, malgre leur r61e diffe- rent, se trouvent constamment associes par une pro- priete commune. Maintenant que nous avons indique la signification que Ton doit donner a la sensibilite recurrente, nous allons vous montrer immediatement les experiences qui 1'etablissent. Mais comme il s'agit ici d'un des pheno- menes nerveux les plus importants, et d'une de ces pro- prietes fugaces qui , par son absence ou sa presence , dans des cas differents, a amene des apparences contra- clictoires dans les resultats des experimentateurs, je d6- sire vous faire connaitre , par 1'evolution m6me de la decouverte , toutes les difficultes de cette question im- portante. Nous aurons en meme temps 1'histoire des autres proprietes nerveuses dont la sensibilite recur rente est inseparable. B., SvsT. NERV. — I. 3 3/J SENSIBILITY RECURRKNTE. Je vous ai deja clit quelle difference existait entre les fonctions des ratines posterieures chargees de trans- mettre les impressions sensitives et les ratines poste- rieures chargees de transmettre 1'excitation motrice. Ch. Bell avait avance par induction, vers le commen- cement de ce siecle, que les racines posterieures devaient 6tre sensitives, et les racines anterieures motrices. Vous savez que plus tard Magendie trouva, en coupant separement les unes et les autres, que, sur ce point, les vues de Ch. Bell etaient exactes. Voila pour les fonctions. Mais Ch. Bell avait ete plus loin et avait emis theoriquement , sur les proprietes de ces organes, des vues qui ont ete ensuite reconnues inexactes. Or, tandis que personne ne discutait plus sur le r C_^ existaient toujours. Plus tard ils se reproduisirent, m^me avec persistance : il y avait la une singularity qu'on ne s'expliquait pas. C'estici meme qirexperimentaitMagendie. M. Longet, qui suivait alors le cours du College de France, frequen- tait le laboratoire et assistait aux experiences, il crut pouvoir reclamer 1'ide'e de la de'couverte, dans des Jettres adressees a la Gazette des Iwpitaux du temps. Quelque temps apres, M. Longet. apres avoir vouhi ivpeter les experiences de Magendie, ne reclamait plus rien ; il publiait, au contraire, un travail dans leuuel il etablissait que la sensibilite recurrente n'existait pas. Les resultats contradictoires qu'avait obtenus Magendie en 1822, 1829 et 1839 lui fureut alors reproches tres ame- reaient et tres injustement. Le fait est que Magendie avait dit toujours ce qu'il avait vu, sans se preoccuper des varietes que pouvait offrir le phenomene, et que i'aveu des resultats differents de rexpe'rience te'moig-nait 36 SENSIBILITY RECURRENTE. d'une enliere bonne foi et d'un grand amour de la ve- rite. dependant, chose bizarre et bien faite pour derouter 1'experimenlaleur, dans des experiences posterieures a 1839 Magendie et d'autres ne purent plus rencontrer la sensibilite r^currente. et Ton crut meme que sa non- existence devait etre definitivement aclmise. Pourtant un phenomene que Ton a observe me"me une seule fois existe. Que des resultats contraires viennent ensuite a se produire, ils ne detruisent en rien les pre- miers, et en presence de I'incertitude qu'ils peuvent jeter sur des conclusions trop affirmatives, le moyen d'arriver a la verite n'est pas de nier les resultats posit ifs au nom des resultats negatifs, ou reciproquement , mais bien de chercher la raison de leur divergence. A cette epoque (1839) je suivais le courscle Magendie, et je frequentais aussi le laboratoire. J'avais ete temoin des fails qu'il avail signales. je les avais vus de pres, je les avais touches, et bien que dans ses nouvelles experiences Magendie ne retrouvat plus la sensibilite des racines anterieures, je ne pouvais pas pour cela admettre que ce que j 'avais vu n'existat pas. Cependant, plus tard, je repetai moi-meme adiverses reprises les experiences sur la sensibilite recurrenle dans des cours de physiologic que je faisais, el pendanl plu- sieurs annees je ne la trouvais pas. Je m'arretai des lors a 1'iclee d'une propriele fugilive, donl les conditions d'existence etaienl a fixer. Mais ce ne ful que qualre ans apres, alors que la question pou- vail sembler jugee, el que les racines anlerieures elaient generalement regardees comme insensibles, que mon H1STORIQUE. 37 attention se port a sur les conditions differentes dans les- quelles les experiences avaient e'te' faites. Je me rappelai qu'en 1859, quand je suivais le cours de Magendie, on preparait 1' experience dans la ma- tinee, et que ce n'etait que dans 1'amphitheatre , apres avoir laisse reposer 1'animal, qu'on interrogeait la sensi- bilite des racines anterieures , sensibilite qui se montrait toujours tres evidente. Dans les experiences faites depuis, on pincait au contraire les racines anterieures seance te- nante, immediatement apres les avoir mises a mi. et on les trouvait insensibles. J'avais pense meme que la promp- titude etait dans cecas une condition de reussite. D'apres mes dernieres reflexions sur la situation des anirnaux chez lesquels j'avais vu la sensibilite recurrente exister, la condition contraire paraissait 6tre la raison de faits ob- serves, car dans ce cas 1'animal avait pu jouir, apres 1'experience, de quelques heures de repos, qui en faisant disparaitre la fatigue de Foperation, avaient du sensi- blement rapprocher le phenomene des conditions de sa production normale. Une autre consideration venait a 1'appui de cette ma- ni6re devoir: le facial est sensible; lorsqu'onle coupe, le bout peripherique accuse une sensibilite recurrente qui ne manque jamais. Pourquoi? — Parce qu'il est facile de couper le facial sans fatiguer 1'animal ; qu'une simple incision permet d'arriver sur ce nerf, operation qu'on ne saurait comparer a Pcmverture du canal vertebral. Mon attention s'etant portee sur ce point, je reconnus que, chez un animal auquel on vient d'ouvrir le canal vertebral, le bout peripherique du facial coupe est in- 38 SENSIBILITE RECURRENTE. sensible. Si done, operant sur les nerfs rachidiens, on ne trouvait pas les racines anterieures sensibles, cela tenail a ce que la douleur et la fatigue de 1'operation les avaieut amenes a un etat d'epuisement qui diminuc considi'rablement la sensibilite. En eflet, quand on cornmeuce r operation, on entend d'abord 1' animal crier lorsqu'on coupe la peau, qu'on divise les muscles; plus tard, quand le canal vertebral a etc ouvert, on pince la peau, on la reroud, sans faire crier Familial. Faut-il en conclure que la peau est insensible? La sensibility disparait momentanement chez un animal soumis a une cause intense et brusque d'epui- semeiit ; certaines parties perdent leur sensibilite avanl les autres : c'est la toute 1'expiication. A un moment donne, suitisamment rapproche de 1' operation, la sensibilite re'currente pent done mauquer complement , alors qu'une heure apres elle existe tres appreciable. C'est done une propriete mobile, sujette a de telles oscillations qu'on ne pent apprecier les con- ditions du phenomene, a Tetat normal, qu'en s'en rap- prochant le plus possible. De tous les syslemes organ i- ques, le systeme nerveux est celui qui sou fire le plus de I'epuisement que cause la fatigue. Le chloroforme agit dans le meme sens, et je vous ai deja dit que , sous son iniluence. la sensibilite recurrente disparaissait pour renaitre , des que les etfets de 1'anesthesie se dissipent. Cette influence de repuisement est aujourd'hui bieii etablie. et nous pouvons pre'voir assez exactenient si, dans un cas donne , on doit trouver on no pas trouver les signes de la sensibilite des racines anterieures. HISTORIQUE EXPERIMENTAL. 39 Inexperience sur la sensibilite recurrente est d'autant plus facile, les resultats en sont d'autant plus nets, qu'on a affaire a nn animal plus vigoureux, mieux nourri. C'est surtout sur des chiens que nous avons fait uos constata- tions; ils se patent mieux a V operation. Les chats peu- veut etre employes, quoiqu'il soit deja plus difficile chez eux d'isolcr les racines. Pas une seule fois je n'ai reussi chez les lapins; ces animaux meurent presque toujours pendant 1'operatiou ; il en est de mieure ne manifesta aucune douleur. Le pincement de la racine posterieure provoqua seulement une douleur obtuse, cequi tenait, sans doute, au long temps depuis lequella moelle epiniere etait mise a nu : il y avait, en effet, pres SENS1B1L1TE RECURRENTE. d'uiie heure que 1'operation etait commeneee. L' animal etait pourtant encore vivace. Sur une sixieme paire rachidieune . la racine ante- rieure fut trouvee completement insensible, et la racine posterieure etait d'uiie sensibilite obtuse. Avec une ai- guille a cataract e. on piqua alors les faisceaux anterieurs de la moelle, qui etaient completement iusensibles, tandis que la sensibility des faisceaux posterieurs persistaient encore , mais consuu-mblement eiaoussee. De 1841 a 18M, nous avons repete souvent des ex- periences analogues et toujourssanstrouver lasensibilite recurrente, que nous cherchions dans les memes condi- tions que precedemment. Cesl en i8/i4 quel'idee nous vint que les conditions dans lesquelles nous nous pla- cions devaient etre diflerentes de celles dans lesquelles Magendie avait observe la sensibilite recurrente , et que probablement il fallait laisser reposer les animaux, au lieu d'experimenter tout de suite sur leurs racines rachi- diennes. D'apres ces nouvelles vues, nous entreprimes d'autrestentatives qui ne reussirent cependantpas irnme- diatement , comme on pent le voir par les deux expe- riences qui suivent : Exp. (30 septembre 184fi.) - -Sur un chien adulte, assez vigoureux, a jeun , la portion lombaire du canal vertebral fut largement ouverte. L'operation ne dura guereqivune iiemi-heure,mais 1' animal perdit une assez grande quantite de sang. Toutelbis les mouvements du train posterieur etaient assez libres, et, aussitot qu'on delia 1'animal, il put se sauver. Une heure et demie apres 1'operation, 1'auimal etait H1STORIQUE liXPItRlMENTAT,. 43 dans le memo etat; mais le train posterieur paraissait peu sensible, et il fallait que les pincements 1'usseut ex- cessivement energiques pour provoquer des cris de donleur. On examina alors 1'etat des racines rachi- diennes. On piiu'a legerement les racines posterieures qu'on trouva donees d'une vive sensibilite. Toutefois. quand on ne faisait que les toucher, il n'en resultait pas de douleur, comine cela a lieu chez beaucoup d'ani- maux. On pinca alors une racine anterieure, ayant eu soin de laisser la racine posterieure correspondante in- tacte. On la trouva completement insensible. II faut ajouter qu'avant de pincer cetle racine du cote droit, on avait coupe prealablement deux ou trois des racines lombaires posterieures dn cote gauche. L'animal parais- sait un peu atl'aibli , et il n'y avait pas de reaction dans sa plaie. Exp. (24 septembre 1844. ) - - Sur un chien adulte, de taille moyenne, tres vigoureux. la moelle epiniere lombaire fut mise a decouvert. Aussitot apres 1'expe- rience, le train posterieur de 1' animal e'tait un peu en- gourdi, et il fle'chissait sur ses membres, specialement sur le membre droit. (dependant les deux paires etaieut restees sensibles. Pen ii peu rengourdissement disparut ; Tanimal se soutenait bien sur ses rnembres et se sauvait, quoique la patte droite posterieure restat toujours evi- demment plus faible que la gauche. Quand 1' animal s'arretait ensuite, il ne touchait pas le sol avec cette patte posterieure droite , qu'il tenait tlechie et relevee. La plaie du dos fut recousue et on laissa I'auimal jusqu'au lendemain. Alors (25 septembre) ranimal SENSIBILITY RtCURRENTE. etait couche triste et morne; il n'avait pas mange". Quand il marchait, son train posterieur etait roicle et les mouvements moins faciles que la veille. La faiblesse persistait toujours plus grande dans la patte droite. On de"cousit la plaie, on la nettoya et on examina 1'etat des racines. On constata alors, du cote droit, que la racine poste>ieure de la troisieme paire lombaire s' etait trouvee coupee dans 1'operation, tres pres de son ganglion; la racine anterieure correspondante etait intacte. On broya cette racine anterieure, ce qui ne donna aucune trace de sensibilite, tandis que le bout de la racine posterieure attenant a la moelle etait tres sensible. En soulevant un peu la moelle epiniere par un pince- ment de la dure-mere, on degagea du cote gauche une racine anterieure, et on la pinca sans obtenir aucune trace de sensibilite, tandis que la racine posterieure cor- respondante ainsi que les autres etaient tres sensibles. Alors 1'animal fut empoisonne avec 1'extrait alcoo- lique de noix vomique, introduit avec une fleche clans 1'aisselle du c6te droit. Au bout de dix minutes les con- vulsions tetaniques se manifesterent. et voici ce qu'on observadu cote de la moelle et des racines rachidiennes. Lorsque les convulsions commencerent et un peu avant leur explosion , la sensibilite de la moelle et des racines posterieures etait evidemment exageree, etle plus leger attouchernent, qui avant n'aurait determine qu'une tres legere reaction, determinait actuellement des cris et des mouvements violents. A cause de cette sensibilite excessive des parties, il fut impossible d'isoler convena- HISTORIQUE EXPERIMENTAL. 45 blement les racines anterieures pour voir si elles avaient acquis de la sensibilite . Au moment ou les convulsions et 011 la roideur tetanique existaient, la moelleepiniere, les racines posterieures, touchees ou pincees, paraissaient completement insensibles. Peut-etre cela lient-il a ce que les membres convulses ne pouvaient plusre'agir pour manifester aucun signe cle douleur. De 1844 -a 1846 nous ne puines pas revenir sur ces experiences. Ce n'est qu'au commencement de 1846 que nous recommencames une serie de recherches nou- velles qui, apres une suite de tatonnements et d'essais, nous amenerent a connaitre les conditions de Texpe- rience , et nous permirent d'etablir alors les precedes d'apres lesquels il faut se diriger pour mettre les ani- maux dans les conditions telles que les circonstances de 1'operation elle-meme ne nuisent pas au developpement physiologique des phenomenes nerveux que Ton veut observer. Comme il s'agit ici d'une des questions les plus dedi- cates du systeme nerveux, je desire que cet enseigne- ment vous soit donne comrne nous Tavons acquis nous m^me, c'est-a-dire par 1' observation directe des faits ; et c'est pour cela que je vais vous rapporter, bien qu'elle soit un peu longue, la serie des experiences que nous avons faites pour arriver a la determination des con- ditions d' existence de cette propriele nerveuse, qui pre- sente cette particularity singuliere d'avoir ete entiere- ment perdue, apres avoir ete trouvee et bien constatee. Nous suivrons, dans ce recit, 1'ordre chronologique, et vous verrez que c'est en etudiant la variete des re- 4 6 SENSIBILITY RECURRENTE. sultats obtenus, et en cherchant leurs rapports avec les conditions dans lesquelles nous nous trouvions, que nous avons pu en deduire les conclusions definitives. Exp. (10 Janvier 1846.) - - Sur un jeune chien de deux mois environ, tres vif, en pleine digestion, on ou- vrit le canal vertebral dans la region lombaire. L'opera- tion dura environ vingt minutes, mais Fanimal perdit beaucoup de sang. Un instant apres Foperation, on pinca successivement les racines anterieures, qui se montrerent bien sensibles. Toutefois cette sensibilite etait plus vive dans les pre- mieres racines pincees, et ranimal, perdant toujours dii sang, allait s'affaiblissant : la sensibilite etait devenue tres obtuse, et meme douteuse, vers la fin de Foperation. Pen de temps apres. Fain'mal finit par mourir d'epui- sement, on plutot par hemorrhagie. Ecrp. (23 Janvier 1846.) - - Sur nn chien adulte a jeun , on ouvrit le canal vertebral dans la region lom- baire ; reparation fut assex tongue ; Fanimal en parut ail'aibli. Aussitot apres Foperation, on pinca la racine anterieure. et Fanimal sembla eprouver une sensation, mais assez confuse. Les racines posterieures etaient, an contraire, donees d'une vive sensibilite. Eocp. (20 Janvier 1846.) — Sur un chien adulte en digestion, on decouvrit la moelle epiniere. L'experience, fort laborieuse, dura une heure; Fanimal, qui en etait tres fatigue, resta couche sur le flanc. On le laissa reposer apres avoir ferine la plaie; il revint pen a peu, et ce n'est que deux heures apres que 1'on examina 1'etat des racines. CONDITIONS EXPERIMENT ALES MYERSES. A 7 En pincant une racine anterieure a gauche, il y cut, couime a Fordinaire, des mouvements dans le membre ; mais 1'aninial parut en inenie temps eprouver de la dou- leur. Plusieurs racines presentment ce meme resultat, seulement c'est an pincement de la premiere racine que la douleur se montra plus prononcee. Exp. (28 Janvier 1846.) — Sur un chien adulte, a jeun depuis 3 ou II jours, on ouvrit le canal vertebral dans la region lombaire. L'experience fut assez longue (dura une demi-heure environ), et ranimal etait tres fati- gue, quoiqu'il n'eut pas perdu une grande quantite de sang. Les racines anterieures. examinees aussitot apres, ne jouissaient d'auctme sensibilite, tandis que les racines posterieures offraient les sigues d'une sensibilite tres evidente, mais cependant moins vive qu'a 1'ordinaire. L'epuisement de ranimal augmenta encore, et la sen- sibilite devint de plus en plus obtuse dans les racines posterieures. Quand on les pincait, 1'animal ne poussait plus de cris et ne se iivrait pas aux mouvements generaux par lesqueis se manifeste la douleur. D'apres les experiences ci-dessus rapportees, nous pouvons deja remarquer que , chez les derniers chiens affaiblis soil par des experiences anterieures, soit par la longueur de 1' operation^ soit par Fabstinence qui leur peruiet nioins de resisier a rout-ration , la sensibilite' recurrente emoussee ne se voyait que lardivement ou pas du tout; tandis que nous i'avons rencontree presque de suite chez un chien jeune, vif , en digestion, et qui avail mieux resiste a i'affaibiissement qui suit Toperation. Mais nous devious nous demander si , chez les ani- SENSIBILITY RECURRENTE. maux ou nous n'avons pas constate la sensibilite, elle n'avait pas disparu simplement par le fait de 1'epuise- ment provoque par 1'ouverture du canal vertebral. 11 etait difficile dejuger la question direclement, parce qu'il aurait fallu pour cela pouvoir examiner la sensi- bilite recurrente d'une meme racine, avant d'avoir ou- vert le canal vertebral et apres son ouverture. Cependant on pouvait arriver a juger la question indirectement et savoir si Touverture du canal vertebral pouvait par elle-meme rendre le nerf moteur insensible : et cela en prenant un autre nerf, le nerf facial, par exem- ple, dont on examinerait la sensibilite recurrente avant 1'ouverture du canal vertebral et apres 1'operation. C'est pour cette raison que, dans les experiences qui suivent, nous avons quelquefois examine la sensibilite du facial concurremment avec celle des racines rachidiennes. Exp. (12 fevrier IS'iG.) — Sur un jeune chien de deux mois, en digestion, tres vif, on fit 1'ouverture du canal vertebral, en 1'ouvrant aussi peu largement que possible et en enlevant seulement deux arcs de vertebres. Aussitot apres on pinca une racine anterieure, en ayant eu soin de laisser intacte la racine posterieure corres- pondante. Le pincement de la racine anterieure mani- festa tres evidemment de la douleur, que Ton put con- stater fort nettement a deux reprises differentes. Sur ce meme animal , on decouvrit ensuite le nerf facial, et on pinca sur la face les trois branches de ce nerf, qui toutes furent trouvees sensibles. Ensuite on les divisa et on pinca successivement les bouts peripheriques. Deux bouts, 1'inferieur et le moyen, paraissaient plus IIISTORIQUE EXPERIMENTAL. 49 seusibles quele superieur, qui ne 1'etait que cl'une maniere douteuse. Exp. (30 mai 1846.) — Sur deux jeunes chiens bar- bets, vifs , et tres bien portants , en pleine digestion , ages de deux a trois mois, on fit les deux experiences suivantes : 1° Sur Fun d'eux, le canal vertebral fut ouvert dans une petite etendue dans la region lombaire. L'operation rapidement faite dura tout au plus dix minutes ; mais 1'animal perdit une assez grancle quantite de sang, ce qui 1'affaiblit tres vite comme cela se \roit chez les jeunes animaux. On avait eponge la plaie avec de I'eau tiede pour ne pas refroidir la moelle. Aussitot apres 1'expe- rience, une racine anterieure fut pincee, et au moment du pincement 1'auimal , qui etait calme , poussa un gemissement qui denota la douleur qu'il eprouvait. On pinca ensuite la meme racine plus pres de la moelle epiniere, et 1'animal n'eprouva pas la moindre douleur. Puis on la pinca du cote de la peripherie, au-dessous du premier point contondu. et, cette fois, on provoqua le meme gemissement, c'est-a-dire la m6me douleur. De sorte qu'on put coustater : 1° que la racine ante- rieure etait sensible ; 2° qu' apres le premier pincement le bout peripherique etait sensible, tandis que le bout central etait insensible. Toutefois, sur la fin de 1'expe- rience, 1'animal , qui perdait toujours du sang, etait tel- lement epuise , que d'autres racines anterieures exami- nees ne manifestaient aucune trace de sensibilite. A ce moment, on mit a decouvert le nerf facial. L' animal ne manifesta aucune douleur quand on lui coupa la B., SVST. NEBV. — I. 4 50 SENSIBILITY RECURRENTE. peau ; de meme que quand on divisa les trois branches du nerf. En pincant ensuite les trois bouts peripheriques du nerf, on ne vit pas la moindre manifestation dou- loureuse. 2° Sur Fautre chien , egalement en digestion, et dans les monies conditions , mais un pen plus vif , on ouvrit la moelle epiniere dans la region lorabaire en se ser- vant d'eau tiecle pour eponger la plaie. Aussit6t apres 1'ouverture du canal , on pinca une racine anterieure , la posterieure etant reste"e intacte. Au moment du piuce- ment, I'animal eprouva une douleur vive, qu'il manifesta tres evidemment. On pinca de suite la racine au-dessus du point presse d'abord : il n'y eut aucune douleur percue. Puis, on la pinca au-dessous, plus pres de la peripberie, et alors une douleur tres evidente se manifesta. Dans toutes les epreuves, la racine anterieure etait tres bien se'paree et nullementtiraillee. On repeta 1'experience sur deux autres racines ante"- rieures sur lesquelles on trouva une sensibilite tres mar- quee persistant uniquement dans le bout periphe'rique , au-dessous du point ou ellesavaient ete pincees d'abord. A ce moment, on de'com rit la moelle epiniere dans une plus grande etendue, en remontant et ouvrant plus largement le canal vertebral, ce qui epuisa encore 1'ani- mal. J'examinai alors les racines anterieures sur les parties recernment mises a decouvert, et le pincement n'y determina aucune manifestation douloureuse. II faut remarquer qu'avant 1'ouverture du canal ver- tebral, on avait mis a decouvert snr ce cbien les trois HISTORIQUE EXPERIMENTAL. 51 branches du nerf facial. L'auimal avail manifesto une vive douleur a I'incisiou de la peau. Les trois branches du nerf etaient sensibles lorsqu'elles etaient intactes, et, apres leur division, le pincementdes trois bouts periphe- riques, produisait une douleur tres evidente. Apres 1'ouverture du canal vertebral, on verifia de nouveau la sensibilite des bouts peripheriques du facial, qui existait toujours, quoique moins prononcee. Apres qu'ou eut ouvert le canal vertebral plus largement, et lorsque familial etait tres epuise, on verifia de nouveau la sensibilite des trois bouts peripheriques du nerf facial, et on trouva que leur sensibilite5: avait completement disparue. De sorte que , dans cette experience, il y a eu un rapport evident entre la disparition de la sensibilite dans les racines anterieures, et dans les bouts periphe- riques du nerf facial. Exp. (13 juin 18/^6.) — Sur un chien de six mois environ, de taille moyenne, bien nourri, ayant bu du lait une heure avant. L'ouverture du canal vertebral fut assez difficile; les os etaient durs, et la moelle epiniere fut decouverte un peu au-dessus du renflement loin- baire, un peu plus haut qu'a 1'ordinaire. Ensuite , en voulant separer la dure-mere de la graisse qui 1'en- toure, Fanimal fit un mouvement a la suite duquel la dure-mere fut piquee. Une certaine quantite de liquide cephalo-rachidien s'ecoula par la piqure. II sembla qu'apres cet e'coulement du liquide cephalo-rachidien . 1'animal fut plus irritable qu'avant. Alors on isola une racine auterieure, en laissant la posterieure intacte et en la pincant; il y eut une douleur 52 SENSIBILITY RECURRENTE. tres evidente percue par 1'animal. II devint tres diffi- cile ensuite de reproduire l'expe>ience sur la meme ra- cine : 1'animal, turbulent, 6tait devenu tres difficile a maintenir. Cependant on put constater que la racine anterieure, sensible, avait conserve sa sensibilite dans le bout peripherique, au-dessous du point primitivement pince". On fit ensuite des essais infructueux pour arriver a constater les proprietes de la racine anterieure du cote oppose, parce que F agitation de 1'animal y mettait ob- stacle. Alors on se de"cida., pour rendre 1' operation plus facile, a ouvrir plus largement le canal vertebral en enlevant les arcs de deux vertebres de plus. Aussitdt aprescette nouvelle operation, 1'anirnal faiblit rapide- ment, et, au lieu d'etre turbulent comme avant, il de- vient parfaitement calme. Alors les racines anterieures purent facilement 6tre isolees ; mais, lorsqu'on lespincait, elles ne manifestaientpas la moindre trace de sensibilite. Alors on mit a nu les l^ranches du nerf facial, et on trouva qu'elles etaient completement de"pourvues de sensibilite. Les racines posterieures lombaires avaient toujours conserve leur sensibilite. Messieurs, toutes les experiences que nous vous avons fait connaitre jusqu'a present nous amenent graduel- lement a la connaissance des conditions sous I'influence desquelles la sensibilite re'currente peut disparaitre et reparaitre, et nous voyons combien ces notions sont diffe- rentes de celles que nous avions supposees a priori. En effet, nous avions pense qu'il fallait agir aussit6t apres 1'ouverture du rachis, tandis qu'il faut au contraire H1STOR1QUE EXPERIMENTAL. attenclre, laisser reposor les animaux un certain temps apres 1'operation, pour qu'ils puissent se remettre de la fatigue et des troubles nerveux qu'a amenes necessai- rement la denudation de la moelle. Toutefois il ne faut pas attendre trop longtemps , car le lendemain, 1'animal devenant malade et l'inflammation s'emparant des tissus, la sensibilite pent avoir disparu. Au commencement de la prochaine lecon, nous re- viendrons sur ces conditions qui vont servir de base a 1'etablissement defmitif clu precede" operatoire auquel il convient d'avoir recours dans ces experiences. QUATR1EME LECOJV. 26 DECEMBRE 1856. SOMMAIRE : Suite des experiences sur la sensibilite" recurrente. — Conditions qui en modifient les re"sullats : pertes de sang. — Contu- sions des racines postdrieures. — Doilleur excessive. — Anatomic du plexus lombo-sacre chez le chien. — Precede" operatoire. MESSIEURS, Par toutes les experiences qui ont e'te' exposees jus- qu'ici, vous avez pu voir combien il est quelquefois diffi- cile de saisir les conditions exactes d'une experience. Ici les difficultes de V experimentation physiologique sont mcomparablement plus grandes que celles qu'on ren- contre dans la physique ou dans la chimie, par exemple. Dans ces dernieres sciences, en effet, a 1'aide de certains instruments, tels que le barometre, le thermometre, etc., on pent toujours se placer dans des conditions a pen pres identiques , et reproduire les phenomenes que Ton veut etudier. Mais quand il s'agit de la nature vivante. 1'extreme complexity de ses actes, la grande mobilite de ses manifestations, s'opposent a ce qu'on puisse examiner d'une maniere complete toutes les conditions du pheno- mene, afm de pouvoir le reproduire a volonte. Vous avez vu, en effet. qu'il ne suffit pas, pour trouver la sensi- Sjilite recurrente, de prendre un animal de m&me espece, et en apparence clans le meme etat; mais une foule d'au- tres conditions, telles que raffaiblissement de 1'animal, les pertes de sang, le refroidissement de la moelle, etc., SENSIBILITY RECURRENTE. 55 constituent des circonstances dont il faut encore tenir compte, et auxquelles s'attache un caractere d'exactitude tout special quo ne pent donner pour le moment aucun instrument physique on chimique; c'est une pure appre- ciation physiologique. Ce sont la des notions fondamentales, qu'il ne faut jamais oublier quand on s'occupe de recherches appli- quees aux etres vivants ; c'est pourquoi je crois utile d'insister encore, par de nouveaux exemples, sur 1' in- fluence que peuvent avoir certains etats de I'organisme sur la seiisibilite recurrente. Constatons encore, par plusieurs exemples, que Ton trouvetoujours la seiisibilite recurrente quand on n'ouvre pas largement le canal vertebral , et quand Ton attend quelque temps pour laisser reposer 1'animal. Exp. (2 juin 18/1.7.) — Chien adulte, vivace, en di- gestion. On ouvrit la colonne vertebrate du cote droit, de facon a isoler les racines auterieures des dernieres paires lombaires. Au bout de quelque temps de repos, les racines furent trouvees tres sensibles; mais les bouts peripheriques ne presentaient cependant pas la turgescence particuliere qui a ete observee dans certains cas. Exp. — Dans le courant du mois de juin, je fis 1'experience sur quatre chiens adultes, en decouvrant toujours la moelle du cote droit. Dans les quatre cas, je constatai toujours la seiisibilite recurrente du bout peripberique de la ratine anterieure coupee. Settlement) pour voir cette sensibilite bien developpee, il a fallu attend re quelque temps. 56 SENSIBILITY RtfCURRENTE. Exp. — Chez un autre chien, jeune, tres vivace, tres bien nourri, j'ai constate une sensibility tres vive de la racine anterieure avec cette turgescence particuliere deja observee clans le bout peripherique. J'ai cm re- marquer que cette particularity s'observait chez les chiens les plus vivaces, et qui se trouvaient en general operes vers la fin de leur digestion , c'est-a-dire sept ou huit heures apres leur repas. Nous vous avons dit que les pertes de sang sont une cause d' insensibility de la racine anterieure. Voici une experience qui vous en offrira une preuve directe. Exp. — Sur trois chiens adultes, chez lesquels la sensibilite recurrente des racines anterieures existait tres manifestement, on retira par la carotide, au moyen d'une seringue, une quantite de sang assez considerable de sang pour affaiblir ranimal. Sous cette influence, la sensibilite recurrente des racines disparut bientot, tandis que celle des racines posterieures persistait toujours. Alors, pour faire reapparaftre la sensibilite, on essaya de reinjecter ie sang , sans deplacer la seringue ; mais les trois chiens moururent sur-le-champ de cette reinjec- tion. Surpris de ce resultat, je fis 1'autopsie du troisieme chien aussit6t apres la moil, pour en rechercher la cause, et je trouvai dans le lissu du coeur des ecchymoses nombreuses. Alors je pensai que la inort avait pu etre causee par le refoulement du sang du cote du coeur, refou lenient qui avait determine 1'occlusion des valvules sigmoi'des, en produisant une injection violente du sang dans les arteres cardiaques, qui naissent au-dessus de ces valvules. INFLUENCE DE LA SA1GNEE , ETC. 57 Ces accidents, clu reste, avaientete produits parce que 1' injection avait etc faite par la carotide droite. Par la carotide gauche, cet accident ne saurait avoir lieu, parce que le sang, arrivant par ce vaisseau, ne va pas centre le courant qui sort du coeur, mais suit au contraire le courant qui va dans 1'aorte. II pent arriver quelquefois aussi qu'en ouvrant le canal vertebral, on vienne a contondre uneou plusieurs racines posterieures. De la resulte necessairement une insensibi- lite de la racine anterieure, qui tire sa sensibilite de la racine posterieure contendue ou froissee. Toutefois cette simple contusion, qui a fait disparaitre momenta- nement la sensibilite, pent plus tard permettre aux phe"- nomenes nerveux de se retablir, ainsi que le prouve 1' experience suivante: Eccp. (16 juillet 1847.) — Un chien de taille moyenne age de huit mois, ayant fait son avant-dernier repas vingt-quatre heures avant et son dernier deux heures avant F operation. Le canal vertebral ouvert comme a 1'ordinaire dans la region lombaire , les racines ante- rieures furent isolees et trouvees sensibles d'une maniere evidente , aussitot apres roperation.On attacha les extre- mites des nerfs avec un fil, on recousit la plaie et on laissa reposer Tanimal pendant une heure. Apres ce temps, la sensibilite du bout peripherique de la racine anterieure etait considerablement exaltee, au point que son attou- chement produisait , en apparence , autant de douleur que 1'attouchement de la racine posterieure elle-m^me. Ce bout peripherique de la racine anterieure etait gonfle et turgide. 58 SENS1BILITE RECURRENTE. Alors on coupa une racine posterieure de la paire nerveuse situe"e au-dessous de celle dont la racine ante- rieure avail etc reconnue sensible. Puis on tirailla le bout central de cette racine posterieure, de maniere a faire eprouver une vive douleur a 1'aniinal, afin de savoir s'il en resulterait un afi'aiblisseineiit de la sensi- bilittf de la racine anterieure sitnee au-dessus; mais il n'en fut rien, car aussitot quo 1'animal fut calme, on pinca le bout peripherique de la racino anterieure prealablement examinee , et on le trouva tres sensible encore. A ce moment, on aplatit, en la comprimant avec les pinces, la racine posterieure correspondant a la racine anterieure sensible. Par cette contusion, la sen- sibilitig se trouva abolie instantanement dans la racine anterieure. On recousit la plaie, (;t on laissa 1'animal en repos. Le lendemain, vingt-quatre heuresapres, on examina le bout peripherique de la racine anterieure , qui etait devenu insensible an moment meme du pincement de la racine posterieure correspond ante, et on trouva qu'il etait extremement sensible, de so rte que le passage dela sensibilito s'etait retabli a traversla partie comprimee de la racine posterieure . Enfin , il se rencontre des cas dans lesquels les ani- maux , sans perdre en appareuce plus de sang que d'autres, subissent une sorte d'epuisement rapide de la sensibilite. II y a meme certains animanx qui semblent mourir de la douleur que produit l'op«3ration : tels sont parfois leslapins, les chevaux, etc.; ce qui est remar- quable, c'est que Ton peut, en etherisant ces animaux, VARIETES 1ND1VIDUELLES. 59 pratiquer la meme operation a laquelle ils resistent, alors qu'on a supprime 1'impression douloureuse a la- quelle ils auraient succombe sans cela. Nous dirons encore qu'il y a des chiens beaucoup plus sensibles que d'autres,suivant certaines especes^ et cela se rencontre meme chez des chiens d'une meme portee , comme on va le voir par les experiences qui suivent : Eocp. (15 mars 1847.) — On eut deux chiens de la meme portee , ages de deux mois et demi ; tons deux etaient bien nourris. 1° Sur le plus vivace des deux , on ouvrit avec les precautions que nous avons appris a connaitre le canal vertebral dans la region lombaire, et on mit la moelle epiniere a nu. On souleva avec precaution et on isola trois ratines anterieures du meme cote ; puis sans les avoir coupees, on pinca chacune d'elles, et on trouva que le pincement donnait dans toutes lieu a des signes de sensibilite bien evidents. Ensuite on coupa les racines , on examina les deux bouts, et on constata que le bout central etait complete- ment insensible, tandis que le peripherique avait conserve sa sensibilite. Du cote oppose, on constata aussi la memo sensibilite sur plusieurs racines anterieures, et on s'assura que cette sensibilite du bout peripherique de la ratine anterieure disparaissait quaud on coupait la raciue posterieure cor- respondante. L'animal etait tres vivace au debut de 1'experience ; mais toutes ces epreuves furent longues et durerent plus 60 SENSIBILITY RECURRENTE. d'une heure et demie. Pendant tout ce temps la rnoelle epiniere de Fanimal avait ete necessairement mise a nu , aussi la sensibilite s'etait-elle peu a pen emous- see; si bien que les racines posterieures devinrent de moins en moins sensibles et finirent par ne plus Fetre du tout. La moelle epiniere etait refroidie et ne manifestait plus qu'une sensibilite obtuse lorsqu'on 1'essuyait avec Fe'ponge. Neanmoins le chien robuste avait conserve encore beaucoup de vivacite et de vigueur. La perte de sensibilite de la moelle parut 6tre le resultat, non de Fepuisement de 1'animal , mais de Faction toute locale du contact prolonge de Fair et de Fabaissement de temperature. En effet, vers la fin de F experience qui avait dure plus d'une heure et demie, on decouvrit le facial sur ce m6me animal, et on constata que les branches etaient sensibles. Apres Favoir divise" , on constata que les deux bouts , aussi bien le peripherique que le central, etaient doues d'une vive sensibilite, ce qui prouva que la sen- sibilite recurrente existait encore dans ce nerf qui n'avait pas ete mis a Fair. 2° Sur Fautre chien , on ouvrit egalement la portion lombaire du canal rachidien ; mais cet animal resista tres peu a Fexperience : il faiblit tres rapidement et tomba dans un etat d'insensibilite qui resultait evi- demment de son e'puisement. On pourrait pousser les recherches plus loin sur ce sujet. Toutefois vous pouvez remarquer, messieurs, par ce seul exemple, qu'il peut y avoir de grandes diffe- CONDITIONS SPECIALES. 61 rences entre les chiens sous le rapport de la resistance qu'ils peuvent offrir aux operations. Le dernier chien n'avait pourtant pas paru perdre plus de sang que 1'autre; neanmoins I'operation 1'a afiaibli immediatement et 1'a jete dans un etat de pro- stration tres grande: c'est parce qu'on ne peut pas tou- jours expliquer ces affaiblissements par la quantite de sang perdue, que certains medecins ont dit que 1'orga- nisme peut etre affaibli par des pertes d' influx nerveux comme par les pertes de sang. Toutefois on avait re- marque que le premier chien , qui a bien resiste , s'etait toujours montre plus rnechant et plus vorace, d'ou Ton pourrait etre porte a conclure qu'il faut, pour ces expe- riences , choisir les animaux les plus vigoureux et les plus voraces. Du reste, j'ai remarque aussi qu'il y a des races de chiens qui resistent mieux les unes que les autres aux experiences. En general , on peut dire encore que , toutes choses egales d'ailleurs, les chiens en digestion resistent mieux que ceux qui sont a jeun , quoiqu'il m'ait sembte remarquer que ces derniers perdent en general beau- coup moins de sang. Enfin, quoiqu'il soil difficile de determiner rigoureusement toutes les conditions dans lesquelles doit se trouver 1'organisme, on peut dire qu'il doit etre place autant que possible dans des conditions de bonne alimentation les plus propres a favoriser le developpement de la vigueur de 1'animal. D'apres les experiences nombreuses qui ont ete expo- sees jusqu'ici, on a vu combien de conditions variables pouvaient s'introduire dans V experience et en rendre les 62 SENSIBILITY RECURRENTE. r^sultats difficiles a obtenir. Maintenant, nous meltrons a profit toutes les remarques que nous avons pu faire jusqu'ici, et nous en dtkluisons deja pour 1' experience des regies de conduite que nous pouvons resumer de la maniere suivaute : 1° Choisir pour 1'experience des animaux vigoureux, bien nourris et jeunes autant que possible ; 2° Lorsque 1'auimal n'a pas ete epuise ni affaibli par 1'operation , aussit6t apres on trouve la sensibilite recur- rente des racines anterieures ; 3° Mais si Fanimal a ete epuise pendant 1'experience, ce qui est le cas le plus ordinaire, il peut se faire qu'aussit6t apres 1'experience , les racines anterieures soient com- pletement insensibles. Alors, en recousant la plaie pour mettre la moelle a couvert, et, attendant que 1' animal reprenne un pen ses forces, on voit revenir la sensibi- lite recurrente. C'est ce que prouveront les experiences types que nous vous exposerons plus tard , experiences dans lesquelles jamais la sensibilit«3 recurrente ne man- quera, soit qu'on 1'ait trouvee immediatement apres 1'operation , soit qu'on ait du , pour la rencontrer, laisser reposer l'animal ; /j° Le procedt3 operatoire regulier consistera desor- mais a n'ouvrir qu'une moitie lat«3rale de la colonne vertebrate pour mettre a 1111 une ou deux racines jus- qu'au ganglion. De cette maniere la moelle ne se refroi- dit pas autant ; 5° II convient d'agir sur les racines anterieures les plus volumineuses. II m'a semble que cotte sensibiiite des racines ante- ANATOMIE OPERAT01RE. 63 rieures e"tait d'autant plus developpee que les racines posterieures correspondantes etaient elles-memes plus volumineuses. Chez 1'homme et chez le chien , les racines post£- rieures rachidieunes sont generalement plus grosses que les racines anterieures. Chez les grenouilles , les racines anterieures sont, au contraire, plus grosses relativement que les racines posterieures. Peut-etre est-ce a cela qu'il faut attribuer 1'impossibilite de constater chez ces an> maux les phenomenes de la sensibilite recurrente, si ce n'est par un moyen indirect , comme nous le verrons plus loin. A cette cause viendrait se joindre le peu de sensibilite propre de Fanimal. Comme le plus grand uombrc de nos experiences sur la sensibilite recurrente out ete faites sur des chiens, comme c'est sur ces animaux qu'ont ete faites egale- ment le plus grand nombre des experiences destinees a constater les fonctions des racines rachidiennes, il est utile de bien connaitre 1'anatomie des nerfs qui se dis- tribuent dans les parties sur lesquelles on experi- meute. Nousallons vous donner en consequence quelques details anatomiques qui , une fois e'tabli.:, nous serviront pour toutes nos experiences ulterieures. II y a chez le chien 1 vertebres cervicales, 13 dor- sales, et 7 vertebres lombaires. II y a consequeinment 13 cotes. II y a 8 paires de nerfs cervicaux, 13 paires dorsales, 7 paires lombaires et 6 sacrees. Toutes les racines des nerfs sont contenues dans le canal vertebral et ne sortent par le trou de conjugaison que lorsqu'elles sont deja reunies en un nerf mixte. La 64 SENSIBILITE R^CURRENTE. deuxieme paire cervicale fait seule exception ; et nous avons pu, il y a longtemps, grace a cette particularity, constater la sensibilite recurrente cle la racine anterieure dans la region cervicale. Nous verrons egalement que M. Waller a utilise cette disposition encore exageree chez le chat, dans des recherches sur le systeme nerveux dont j'aurai a vous entretenir. De me'me que chez 1'homme, les racines nerveuses chez le chien out une insertion de plus en plus oblique sur la moelle epiniere a mesure que Ton approche de 1'extremite de la moelle. C'est dans la region lombaire que cette obliquite est la plus grande et que la longueur de la racine se trouve consequemment la plus conside- rable. C'est encore dans cette region ou le canal vertebral se trouve elargi , et 1'espace qui separe la moelle epi- niere des parois du canal est plus considerable, de sorte que les experiences sont les plus faciles a executer. Chez le chien , comme chez le chat , les racines ner- veuses sont non-seulement isolees au dedans des mem- branes de la moelle, mais cet isolement continue encore au dela, chaque racine etant revetue par une gaine speciale de la dure-mere. C'est cette disposition qui permet d'agir isolement sur les racines rachidiennes, sans ouvrir la dure-mere. Cet isolement des racines ne se rencontre pas chez 1'homme ni chez le lapin. Toutefois , quoique isolees chez le chien , les deux racines sont collees 1'une a 1'autre par un tissu cellu- laire assez lache qu'il faut briser pour les separer , et dans lequel rampe ordinairement un vaisseau arteriel Lorsqu'on ouvre chez le chien la colonne vertebrale ANATOMIE OPliRATOIRK. 65 en arriere, on aperooit seulement la racine posterieure, et au-clessous d'elle se Irouve la racine anterieure, quo 1'on pent isoler en passant entre les deux racines un petit crochet mousse qui sera decrit plus loin (fig. 6). On sou- levera alors la racine anterieure ainsi isolee , tantot en dedans , entre la moelle et la racine posterieure, tantot en dehors, entre la racine posterieure et les parois du canal vertebral. L'isolement de la racine est en general plus difficile pour les dernieres paires sacrees, ou 1'acco- lement devient tres intime.Ily a deux faisceaux qui con- stituent en general la racine posterieure, ce qui rappelle la disposition qui se rencontre nonnalement chez le boeuf et chez le cheval , ou non-seulement la racine posterieure est multiple, mais ou chacune de ses divi- sions porte un petit ganglion. Cette derniere disposition pourrait amener des difficultes sans causer toutefois de confusion , car il serait toujours tres facile de dis- tinguer a ces reactions sensitives une racine posterieure d'une racine anterieure. Chaque racine nerveuse se dirige avec celle qui lui correspond vers le trou de conjugaison, et., au niveau de celui-ci , se trouve le ganglion intervertebral, im- mediatement apres lequel les deux racines se reunissent. Le nerfmixtese trouve ainsi constitue, non-seulement par cette union des deux racines, mais aussi parce que dans ce point les nerfs rachidiens communiquent avec le grand sympathique. Actuellement, il est important pour nous de con- nattre les paires nerveuses qui entrent dans la constitu- tion des differents nerfs qui emanent du plexus lombo- B., SVST. NERV. — I. ."• 6f> sKNSimi.m RWTRRKNTF. sacre, afin de ponvoir analyser les pbenomenes ner- veux par les troubles qu'on apportera dans le membre ou les nerfs se distribnent. II y a. avons-nons dit .. sept paires lombaires: la premiere lombaire sortant entre la premiere et la seconde vert&brc lombaire. et la scptieme lombaire sortant entre la derniere vertebre lombaire et la premiere piece dn sacrum. II v a six paires sacrces : la premiere ^"itant par le premier trou du sacrum, et la derniere passant entre le sacrum et le coccyx (queue . La derniere paire lombaire(7) est ordinairement la pins vo- luminense el 1'une des plus y c loti^nes : c'est sur die qne les experiences de sensibilite re- currente sont le plus faciles a executer. Les racines des paires sacrees vont en diminnant de FIG. k (1). i • ' 'ii la premiere a la derniere. Le plexus lombo-sacre est constitue par les quatre (1) Racines rachidiennes qui entrent dans la conipusifii'ui des dn wpmbrc postcricur die: le chien fee sont les qnatrieme. cinquieine, sixiemo rt septieme paires lombaires. et premiere, deuxiemt1 et troisieme paii'es sacrees). Le nerf crural CR provient des quatrieme. cinquieine cl t-ixieuie paires lombaires ; — le nerf obturateur OB, des cinquieine el sixieme paires lombaires ; — le nerf sciatique SC, des sixieme et seplieme paires lom- baires, el des premieres et deuxieme paires sacrees. \\ATOMIE OPKRATOIRE. 07 dernieres paires loin 1 mires (&, 5, 6, 7) et ies deux ou trois premieres sanves. et principalement Ies deux premieres. Du plexus lombo-sacre emanent : I Le nerf crural, a la formation duquel concourent plus specialement Ies 4% 5e et 6e paires lombaires; 2° Le nerf obturateur, qui resulte particulierement des 5e et 6e lombaires; 3° Le nerf sciatique . constitue surtout par Ies 6e et T paires lombaires et la premiere sacree ; /T Le nerf honteux, forme par Ies dernieres paires sacrees. II resulte de laque Ies trois premieres paires lombaires et Ies quatre dernieres sacrees ne concourent en rien pour donner le mouvement et le sentiment an membre pos- terieur. Mais si Ton vent detruire tout le mouvement et le sentiment dans le membre posterieur, il faudra couper necessairement Ies quatre dernieres paires lom- baires et Ies deux premieres sacrees. Lorsqu'apres avoir .xivert le canal vertebral, on voudra distinguer Ies differentes paires lesunes des autres. on pourra prendre pour point de repere la crete de 1'os des iles, ou bien, ce qui serait plus facile, le volume de la deruiere paire lombaire. Cette paire, la plus voluniineuse, peut en effet se reconnaitre facilement et servir de point de depart pour compter Ies autres. Precede operatoire. — Le chien etant fixe sur une table, un billot place sous le ventre pour faire saillir un peu la colonne vertebrale dans la region lombaire . on coupe Ies poils. puis on fait alapeau une incision B 68 SENSIBILITY RECURRENTE. de la crele des apophyses epineuses. Le milieu de cette incision correspondra an niveau de la crete de 1'os des iles, et sa longueur sera d 'environ! decimetre on im pen moins, suivanl la taille de rauimal. L'apo- nevrosequi recouvre les muscles du dos sera en- suite divisee par une se- conde incision qui pene- trera j usque sur la lame desvertebres^en rasantla I'.ice laterale des apophy- ses epineuses. On ecar- teru les muscles sur le cote autant qu'on le pour- ra, de maniere a melt re a decouverl les lames des vertebras et leurs apo- physes articulaires. II est quelquefois utile de se servir d'une rugine pour enlever une partie des tissus qui restent adherents aux (1) Instruments pour pratiquer I'ouverture du canal vertebral. — S, petite scie en crete de coq a son extremite, destinee a scier les lames vertdbrales que Ton doit enlever ensuile. — A, lenaille on cisaille destinde a ouvrir ou a elargir I'ouverture du canal vertebral ; les deux niors de cette tenaille se rapprocbent simplement. — B, dans cetle tenaille les par- ties tranchanles des niors sc croisent comme des ciseaux. On pent, avec cet instrument, ouvrir le canal vertebral chez les vieux animaux, dont les os, qui sont lies durs, ne so laissent pas scier facilement. FIG. 5 I'KOCEDE OPERATOIRE. 69 vertebres. Puis, it 1'aide d'une petite scie S clont I'extr6- mite est arrondie et garnie de dents , on clonne nn trait parallelement aux apophyses epineuses et aussi pres de leur base que possible. On divisera ainsi une ou deux lames de vertebres an nivean de Tos des iles, ce qni correspond aux deux dernieres vertebres lombaires; on aura soin de ne pas scier au dela des lames des verte- bres, pour ne pas blesser la moelle. Un second trait de scie, parallele au precedent, est porte au niveau et en dehors des tubercules apophysaires. II faut toutefois eviter de porter ce dernier trait de scie trop en dehors et de le diriger trop verticalement, dans la crainte de couper les racines au moment ou elles sortent par le trou de conjngaison , ou de blesser les sinus veineux vertrbraux. On souleve alors,, en la faisant basculer a 1'aide d?un ciseau. la partie osseuse comprise entre ces deux traits de scie , et on 1'enleve ainsi en entier ou par fragments. Quelquefois on ne pent pas facilement enlever ainsi toute la lame vertebrale, surtout quand les chiens sont de petite taille. II suffit alors d'avoir pu pratiquer une ouverture au canal vertebral, en detachant une portion de lame de vertebre, et ensuite on acheve d'e'largir rouverture sur les c6tes a I'aide de cisailles B tres tranchantes et construites pour cet usage. Pendant qu'on pratique ce premier temps de rope- ration, on ecarte les muscles sur les parties laterales avec des erigues, et Ton eponge la plaie avec de 1'eau tiede On agira loujours avec la plus grande precaution , pour • 70 SUNSIB1L1TK RKCURRENTE. eviler de blesser la moelle avec les instruments dont on fait usage , ce qui arrive quelquefois par les mouve- ments de 1'animal. Parfois il arrive que le perioste est menage quand on enleve les lames vertebrates. Immediatement au-dessous de lui, on trouveordinairemerit beaucoup de graisse qui entoure la moelle et les racines. On enleve cette graisse avec des pinces, en ayant soin de ne pas blesser les sinus veineux rachidiens , qui donneraient une hemorrhagie considerable et difficile a arreter. La moelle, etant alors mise a nu, reste neanmoins cornpletement protegee par les enveloppes. On voit aussi les deux racines de chaque paire nerveuse marcher tres obliquement entourees par des gaines fibreuses distinctes emanant de la dure-mere rachidienne. L'ouverture du canal vertebral pent quelquefois 6tre faite en moins de dix minutes, et 1'ope'ration est alors tres rapide. D'autres fois, lorsque 1' animal s'agite beau- coup, elle pent durer au dela d'une demi-heure. Mais, dans tons les cas, il arrive qu'aussitot apres rouverture du canal vertebral , 1'animal est affaisse, comme en- gourdi, au point que Ton peut, ainsi que cela resulte de beaucoup d'experiences que nous vous avons rapportees, toucher les racines posterieures , non-seulement sans produire une vive douleur, mais quelquefois sans en produire aucune. 11 faut alors se hater, et profiter de ce moment, pour isoler les racines anterieures ou poste- rieures, afin de pouvoir les examiner plus tarcl. Avec un crochet mousse et fin on ecarte un peu la racine pos- terieure, et Ton plonge plus avant pour saisir et soulever I PROCEDli OPEKATU1UE. 71 la racine anterieure, sous laquell^ on passe aussitot un fil que Tun laisse , pour la ressaisir plus tarcl , quand elle sera redevenue sensible. Voici la forme du petit crochet a Faide duquel on souleve les racines nerveuses (fig. 6). L'operation a ete pratiquee suivant le precede que nous venous de decrire, sur 1'aniinal que vous voyez ici. Depuis deux heures, il se repose, et Fepuisement dans lequel 1' operation Favait mis est actuellement repare. II marche sur ses mem- bres posterieurs sans trebucher. La peau, qui etait insensible a la fin de Foperation, est maintenant sensible. Nous allons chercher devant vous si la racine anterieure rachidienne est sensible. Vous voyez qu'en operant ainsi, nous avons laisse a la colonne vertebrate assez de solidite pour que 1'animal puisse se tenir sur ses jambes. Nous avons. au moment de Foperation , passe un fil sous la racine anterieure pour pouvoir Fisoler maintenant; si nous avions attendu jusqu'ici, le succes de Foperation eut ete rendu plus douteux, par la difficulte qu'on eprouve a isoler la racine anterieure tres sensible, masqnee par la poste- rieure , et par les mouvements de Fauimal qui exposent a casser la racine et a ouvrir des sinus veineux, ce qui occasionnerait une hemorrhagie considerable et geuante. Vous voyez ici ce fil passe sous la racine aute- rieure de la derniere paire lombaire ; ce fil nous 1ieure conserva une sensibilite tres vive. On recousit la plaie du dos, et. a chaque coup d'ai- guille, l'animal donnait des signes de douleur, ce qui n'avait pas eu lieu lors de la premiere suture de la plaie. Le 20 avril au matin, vingt-deux heures apres la pre- miere operation, on examina la plaie, qui etait cbaude, fumante, et se montraitdeja le siege de suppuration. On examina les bouts des racines nerveuses. B., SVST. NF.RV. I. (i 82 SENSIBILITY RECURRENTE. Eii pincant les bouts peripheriques, ou le ganglion rachidien lui-m£me, on ne determina aucune sensation douloureuse ; mais, en comprimant ces deux bouts en masse, on produisit a chaque pincementdes contractions dans le niembre correspondant. En pincant les bouts cen- traux, on trouva que celui de la racine anterieure etait oompletement insensible, tandis que celui de la racine posterieure avait conserve une sensibilite exquise. Eocp. (19 avril 1847). Un chien noir , de taille moyenne, de cinq mois environ, amene dansle labora- toire depuis trois ou quatre jours, bien portant, quoique ne paraissant pastres vif, ayant fait son dernier repas trois heuresavant 1' operation. On ouvrit a droite une moitie du canal vertebral dans la region lombaire, et Ton n'en- leva qu'une seule lame devertebre, afin de mettre la septieme racine lombaire a nu. On euleva ensuite le perioste, qui etait reste intact, ainsi que la graisse qui environne la dure-mere. Apres quoi on put saisir la racine anterieure avec le petit crochet et la soulever legerenient. Des qu'on la pincait au c6te externe du cro- chet, 1'animal accusait une sensibilite evidente. On coupa ensuite la racine sans que 1'animal e^prouvat de douleur; puis on pinca alors les deux bouts, et Ton constata une insensibilite parfaite pour le bout central, et une sensibilite evidente pour le bout peripherique. On recousit ensuite la plaie du dos, et ou laissa mar- cher 1'animal, qui se sauva en paraissant pen vif, quoi- qu'il ne fut cependant pas beaucoup affaibli. Quatre heures apres on decousit la plaie du dos pour reconnaitre 1'etat de la racine anterieure coupee. La KXPtiRIKNCKS. 83 plaie if etait pas fumaute, et n'offrait pas de reaction marquee; elle etait baignee an fond (run peu de sang tlin'deet sereux ; ses levres ne paraissent pas donees d'nne sensibilite bien vive. On pinca le bout central de la racine anterieure, qui se montra insensible , tandis que le bout peripherique etait done d'une vive sensibilite dans les points ou il u'avait pas etc prealablement mache. Ce bout periphe- rique de la racine anterieure if etait pas turgide, et ne differait pas sensiblement par son aspect du bout central. On constata a plusieurs reprises, et tres facilement, la sensibilite du bout peripherique ; apres quoi on coupa la racine posterieure correspondante. Au moment de la section de cette derniere, Tanimal manifesta une douleur tres graude. Alors on pinca de uouveau le bout peripherique de la racine anterieure : toute sensibilite avait disparu. On constata alors, en examinant les quatre bouts qui resulterent de la section des deux racines, que tous etaient insensibles , excepte le bout central de la racine poste- rieure, qui etait reste doue d'une sensibilite tres vive. On recousit alors la plaie sans provoquer aucun cri de Taninial; elle ne paraissait douee que d'une sensibilite assez obtuse. Le lendemain , vingt-deux heures apres 1'experience, le chien etait triste et peu vivace ; la plaie , non reunie, etait remplie d'une serosite sanguinolente dans laquelle il semblait y avoir melange de liquide cephalo-rachidien. Cette plaie etait grisatre, d'une odeurfetide, sans reac- tion et sanschaleur. Desquatre bouts de nerfs, trois etaient SENSIB1LITK RECURRENT!:. insensibles comme la veille; seul, le bout central de la racine posterieure etait encore doue de sensibilite, mais d'une sensibilite bien moins vive que la veille. On recousit la plaie sans provoquer aucune douleur. L' animal mou- rut dans la nuit. Exp. (21 avril 1847). — Sur un chien levrier. agede quatre a cinq mois, vif et bien portant, ayant fait son dernier repas sept heures avant 1'experience. A trois heures, on ouvrit le canal vertebral snivant le precede indique ; 1'operation fut tres facile, grace a la maigrenr habituelle a ces animaux. Pendant roperation, le chien renditdesmatieres diar- rheiques, et nous ferons remarquer ici que ce pheno- mene se manifests chez presque tousles chiens auxquels on pratique cette operation sur le canal vertebral. Us rendent generalement, pendant 1'operation, des excre- ments diarrheiques et une grande quantite de gaz fe- tides. Nous ajouterons encore que, lorsque les animaux ont mange depuispeu, cette operation arrete leur diges- tion, et que le lendemain on retrouve les aliments dans Testomac de 1'anhnalquandil meurtouqu'on le sacrifie. Aussitot apres 1'ouverture du rachis, on isola a 1'aide du petit crochet la racine anterieure de la quatrieme paire lombaire. Par le pincement cette racine manifesta une sensibility qui . sans etre tres vive. etait neanmoins On coupa cette racine sans produire de douleur ap- parente, etle bout peripherique, etant convenablement separe et isole , fut pince , et 1'animai s'agita pen , de maniere a laisser difficilement apprecier si ce pincement EXPERIENCES. 85 etait irelleuiciii tirs douloureux; alors on passa uu fil au-dessous de la racine auterieure de la troisieme lombaire, afin de pouvoir plus tard soulever cette racine avec facilitt1. On recousit la plaie du dos, et on laissa 1'animal se reposer pendant une heure. Des que ce chien fut delie, 11 se montra tres agile et turbulent, puis il se calma peu a pen; an bout d'une demi-heure il etait tranquille. Une heure apres 1'opera- lion, on redecousit la plaie du dos, qui offrait une reac- tion marquee, quoique peu vive encore. Le bout peri- pherique de la quatrieme lombaire etait rougeatre, arrondi , turgescent. Le pincement y determina une sensibilite vive , que Ton constata a plusieurs reprises. Le pincement du bout central n'en determina au- cune. Alors on souleva la racine auterieure de la troi- sieme lombaire. avec le fil passe prealablement au- dessous : aussitot que Ton attira cette racine . rauimal poussa des cris. ce qu'on aurait pu attribuer au frotte- ment de la racine posterieure; mais cependant. etant parvenu a pincer la racine anterieure bien isolement, on constata que le pincement ydeveloppa une sensibilite tres vive. On coupa ensuite cette racine sans y determi- ner de douleur, et le bout peripherique resta tres sen- sible, tandis que le bout central ne donna plus trace de sensibilite. Ces derniers resultats furent constates a diffe rentes reprises et d'une maniere tres nette. Alors, voulant faire disparaitre la sensibilite des ra- ciues anterieures , on pratiqua une forte ligature sur la cuisse, aussi haut que possible et tres serree. Apres cette ligature, le niembre etait comme paralyse et com- 8(> SENSIBILITY RECURRENTE. pletement insensible; en le piquant au-dessous de la ligature, il en sortit du san°; noir. Pineant alors les deux O cJ »> racines anterieures des quatrieme et cinquieme paires lombaires, on les trouva toujours sensibles. On laissa la ligature appliquee pendant environ dix minutes, et, apres ce temps, les racines anterieures furent encore trouvees sensibles. Alors on enleva la ligature , puis on coupa le n erf crural dans le pli de Paine, aussi haut que possible : puis on pinca la racine anterieure de la quatrieme paire lombaire qui entre dans la composition du nerf crural : le bout peripherique de cette racine etait toujours sensible. Je coupai ensuite cette racine aussi haut que possible dans la cuisse , et les bouts periph^- riques des deux racines anterieures, troisieme et qua- trieme lombaires, resterent toujours sensibles. Apres toutes ces operations , le membre etait paralyse et com- pletement immobile. Enfin, on coupa la racine posterieure de la cinquieme paire lombaire; cette section determina une douleur vive et de longue duree , que 1'animal accusa par des hurlements prolonges. Par suite de cette section , le bout peripherique de la racine anterieure devint com- pleteinent insensible, et le bout central de la racine posterieure conserva seul sa sensibilite ; on recousit la plaie. Le 22 avril , dix-huit heures apres 1'operation , le chien etait encore vivant ; on decousit la plaie, qui offrait une vive reaction et un commencement de suppuration. Le bout peripherique de la racine anterieure de la cin- quieme lombaire etait rougeaire et un peu gonfle. 11 pre- KXPtiRIKNGES. 87 scuta line sensibilite bien nette quand on le pinra; alors on essaya de couper entre les deux apophyses transverses le nerf crural, clans lequel se rend cette paire nerveuse; mais il est possible que cette tentative n'eut pas reussi , car le bout peripherique de la racine anto- rieure resta toujours sensible. Alors on coupa la racine posterieure correspondante, cette section determina une douleur vive et des cris pro- longes. Apres quoi on constata que la sensibilite avail completement disparu dans le bout peripherique de la racine anterieure, et son pmcementne determinait dans le membre que des contractions et pas de douleur. Ces contractions feraient supposer que le nerf n'a pas ete coupe an niveau des apophyses transverses. Eoop. (11 juillet 1847). — Un chien adulte, a jeun depuis trente-six heures, fit un repas avant. 1'operation. On mit a nu les racines du cote droit par le precede ordinaire ; une racine anterieure etant convenablement isolee au moyen d'un fil passe au-dessous d'elle , on la coupa sans que 1'animal manifestat de la douleur. Ce- pendant , en pincant le bout peripherique , 1'animal res- sentit evidemment de la douleur. On recousit la plaie du dos; la peau etait insensible aux piqures de 1'aiguille. On laissa re poser 1'animal pendant une heure. Apres quoi on examina la plaie, qui etait devenue tres sensible. de m6me que le bout peripherique de la racine anterieure, qui etait gonfle, sensible, comme erectile et doue d'une sensibilite tres vive. Avec u n fil de fer rougi a la lampe on brula le bout peripherique, qui se montra tres sensible a cette action. 88 SENSIBILITE RECURRENTE. On coupa alors line portion do ce bout peripherique, et Ton constata qif a. ce moment la section provoquait de la douleur. tandis qu'au moment ou Ton venait de faire 1'operation elle n'en avait pas donne. On isola une autre racine anterieure, situee au-dessus, et on la trouva beaucoup moins sensible que celle dont il vient d'etre question , sans pouvoir se rendre compte de cette difference de sensibilite entre les deux racines. Mais, a 1'autopsie, on constata que la racine posterieure correspondante avait ete en partie detruite par un coup de scie aupres du ganglion inter vertebral. L'animal e'tait en pleine digestion et les chyliferes bien rein pi is. Exp. ("28 juillet 18/i7). — Chien jeune, ayant fait un repas trois heures avant 1'operation , apres un jeune de treute-six heures. L'ouverture du canal vertebral fut un pen laborieuse et dura longtemps. Apres 1'ouverture du canal , on put , a 1'aide du petit crochet, separer les racines les lines des autres, sans que 1'animal temoignat la moindre douleur. On passa un fil au-dessous de la racine anterieure de la cinquieme paire lombaire, et de celle qui est au-dessus (quatrieme) ; on serra le ill sur la quatrieme , sans que 1'animal eprouvat de douleur; on coupa ensuite la racine sans qu'il le sentit davantage. A ce moment, on decouvrit le nerf facial sur la joue; labranche superieure, coupee sans douleur. offrait dans son bout central une sensibilite (''vidente, tandis que son bout peripherique n'en presentait qu'une tres obtuse. La branche moyenne coupee presenta une douleur EXPERIENCES. 89 vive. Le bout peripherique etait a pen pres insensible, tandis que le bout central etait tres sensible. La branche inferieure, coupee sans douleur, offrait un bout central peu sensible et un bout peripherique d'une sensibilite obscure. A ce moment, toutes les plaies, celle clu dos et celle de la face, furent recousues , et 1'animal fut laisse en repos pendant trois heures et deraie. Examinees apres ce temps, les plaies n'offraient pas beaucoup de reaction. Cependant le bout peripherique de la racine anterieure de la quatrieme lombaire fut trouve sensible d'une maniere evidente. La racine anterieure de la cinquieme paire lombaire non divisee etant soulevee sur le fil, puis pincee, se montra tres sensible au pincement , puis on la coupa entre le point pince et la peripherie. Cette section de- termina bien evidemment de la douleur. Enfin, on con- stata encore que le bout peripherique de la racine ante- rieure etait bien sensible, tandis que son bout central etait completement insensible. On decouvrit ensuite les bouts du facial, et les bouts peripheriques des trois branches etaient devenus parfai- tement sensibles. Mais le bout peripherique de la branche moyenne se compose de deux portions : 1'uue, insen- sible, qui estla portion du rameau auriculo-temporal de la cinquieme paire, et 1'autre sensible, plus petite, qui appartient au tronc meme du facial. Ecop. (11 aout 1847). - Chien de taille moyenne; les ratines sont mises a nu, comme a 1'ordinaire, du c6te droit. Au moment de Inexperience, irnmediatement apres la denudation de la moelle, on examina la sensi- 90 SENSIBILITY RtfCURRENTE. bilite de la racine anterieure de la sixieme ou septieme lombaire. Elle etait obtuse ; on recousit la plaie, puis on decouvrit le facial et Ton divisa les trois branches. Les bouts peripheriques presentaient tons trois une sensi- bilite obtuse; on distingua tres bien , dans le bout pe>i- pherique de la branche moyenne, la portion qui appar- tient a la cinquieme paire de celle qui appartient au facial. Quand on pincait la premiere, elle <>tait insensible et ne donnait pas lieu a des convulsions dans le museau; tandis que quand on pinrait laseconde. elle avait une sensibilite obtuse et donnait des convulsions violentes de la levre superieure. On recousit alors les plaies du clos et celles de la face, el on laissa 1'animal se reposer pendant environ vingt- cinq minutes, etant toujours fixe sur la table. Alors on trouva le bout peripherique de la racine anterieure tres manifestement sensible. Alors on etherisa ce chien, en le faisant respirer a tra- vers un tube qui contenait une eponge imbibee d'ether. L'animal n'etait pas completement etherise; cependant la sensibilite recurrente du bout peripherique de la ra- cine anterieure de la septieme paire lombaire avait disparu, tandis que la racine posterieure correspondante etait encore sensible. En cessant 1'etherisation , la sensibilite recurrente reparut dans le bout peripherique et la racine anterieure precitee. On remarqua en outre ce fait singulier que, pendant I'etherisation in complete, au moment oil le bout periphe- rique de la racine anterieure lombaire etait insensible , EXPERIENCES. M I'aniinal inanifestait encore de la douleur quand on pin- cait les bouts peripheriques du facial. 11 faut ajonterque la conjonctive etait encore sensible, et que V animal fermait les yeux quand on la touchait. Ce fait semble- rait prouver que la sensibilite nerveuse recurrente du facial s'eteint plus tard que celle des racines lombaires, de meme que la sensibilite de la cinquieme paire resiste plus longtemps a Tetherisation que celle des racines lombaires. On coupa ensuite chez ce chien le nerf vague du cote gauche, cote ou le facial avail etc denude. Lorsque le vague n'etait pas divise, il etait evidemment sensible; il fut ensuite coupe , et le bout superieur seul se montra sensible, tandis que Tinferieur etait depourvu de sensibi- lite. On attacha chacun de ces bouts de nerfs avec un fil pour pouvoir les retrouver dans la plaie le lendemain. On revint alors au facial, et Ton trouva que les bouts peripheriques etaient devenus insensibles. Comine les nerfs s' etaient refroidis. on recousit la plaie de la face. On versa ensuite de Tether sur les racines rachi- diennes, afin de voir si le froid ou Faction de Tether ferait disparaitre la sensibilite recurrente. II n'en fut rien, car on constata aussitot apres de la sensibilite dans le bout peripherique de la racine anterieure. Eufin, on ouvrit les membranes dela moelle, on donna issue au liquicle cephalo-rachidien, et Ton versa de Tether dans la cavite des membranes, qui se trouva ainsi direc- tement en rapport avec les nerfs qui constituent la queue de cheval. Apres cette epreuve, la sensibilite per- sistait toujours dans le bout peripherique de la racine 92 SENSIBILITE RECURRENTE. anterieure. On examina ensuite do nouveau les bouts peripheriques clu facial, qui etaient insensibles, de m6me que le bout peripherique du nerf vague. Toutes les plaies furent refermees , et I'auimal laisse en repos jusqu'au lendemain. Le lendemain (12 aout), on examina la racine lom- baire, et 1'on constata tres nettement que le bout central dela racine anterieure etait insensible, tandis que le bout peripherique fut trouve sensible tout autant qu'il 1'etait la veille. On divisa alors la racine posterieure corres- pondante, et aussit6t la sensibilite disparut dans la partie peripherique de la racine anterieure. Eoop. (17 aout. 1847). — Sur un chien adulte et de taille moyenne, ayant eu le canal vertebral ouvert dans la region lombaire , on trouva les racines anterieures douees de peu de sensibilite apres 1'operation. Bient6t cette sensibilite devint tres mauifeste et put elre con- statee de la maniere la plus evidente. Eoop. (19 aout 1847). — Cette experience, a laquelle assistaient M. Flourens et M. le docteur Philipeaux, fut faite sur un vieux chien ayant une maladie de la peau. On mit a nu la moelle epiniere comme a 1'ordinaire. Lors de la section de la peau et meme de Fouverture du canal vertebral, 1'animal resta immobile et ne poussa aucun cri ; aussit6t apres Touverture du canal, on separa les racines anterieures des racines posterieures sans que 1'animal poussat aucun cri. Apres avoir souleve sur un fil les racines de la sixieme et de la septieme paire lombaire, on recousit la plaie, et on laissa Familial re- poser pendant deux heures. EXPERIENCES. 93 Alors on decouvrit la plaie et Ton pinca la racine ante- rieure do la septieme paire lombaire. An moment ou Ton pineait, 1'aninial fit un mouvement general kteer, 1 o J • CJ • mais ne poussa aucun cri. En pincant le bout central , 1'animal ne fit aucun mouvement. En recommencant • sur le bout peripherique, on vit. outre la simple con- traction des muscles auxquels se rend la racine , un mouvement plus general . qui indiquait evidemment de la douleur, mais 1'animal ne poussa aucun cri. On agit alors sur la racine anterieure de la sixieme lombaire , et Ton obtint les memes resultats que ceux qui out ete signales pour la septieme. Alors on coupa la racine posterieure, ce qui produisit chez 1'animal une agitation assez grande , mais a peine quelques cris. Le bout peripherique de la racine posterieure etait devenu par suite promptement insensible , ainsi que le bout peripherique de la racine anterieure qui , par le pin- cement , ne produisit plusle mouvement precedemment indique. Le bout central de la racine posterieure avait conserve sa sensibilite. Ce chien etait done par sa nature excessivement peu sensible, comme le prouverent d'autres experiences faites sur lui dans le but d'etudier 1'influence de la moelle epiniere sur le coeur. Exp. — Sur un chien adulte , vigoureux, a jeun de- puis la veille, on mit a decouvert la moelle epiniere dans la region lombaire. comme a Forclinaire. L' animal, sans avoir perdu beaucoup de sang, etait un peu abattu et engourdi immediatement apres Toperation. On passa a 1'instant rneuie un fil au-dessous de la racine anterieure, 9/| SENSIBILITY RKCURRENTE. et on laissa le chien reposer pendant huit ou dix mi- nutes ; apres quoi on constata de la maniere la plus nette une sensibilite vive dans la racine anterieure, lorsqu'elle etait intacte. On la coupa et l'auimal criaau moment de la section ; des deux bouts , le peripherique seul resta tres sensible; alors on coupa la racine poste- rieure : Familial poussa des cris plus longtemps prolon- ges que ceux que lui avait arraches la section de la racine anterieure. Aussitot la sensibilite avait disparu du bout peripherique de la racine posterieure, et, des quatre bouts resultant de la double section des racines , le bout central de la racine posterieure etait le seul qui fut reste sensible. Cette experience, qui a presente une tres grande nettete dans ses resultats, a ete faite devantMM. Melloni, de Naples , Magenclie et Rayer. Exp. (18 novembre 1847). — M. Mianowski, de Saint-Petersbourg, assistait a cette experience. Sur un chien qui avait un tic convulsif general dans les membres , une sorte de choree , on mit a decou- vert la moelle dans la region lombaire , comme a 1'ordinaire. Les mouvements chorciques rendirent 1'ex- perience un pen plus longue et 1'animal perdit beaucoup de sang. Apres 1' operation, le chien etait affaibli, mais son tic ne parut en rien modifie. II consistait toujours dans des mouvements convulsifs survenant simultanement dans les quatre membres , dans les muscles abdominaux et dans les oreilles. Alors on coupa la racine anterieure d'une paire lorn- EXPERIENCES. 95 baire mise a nu, sans que r animal en eprouvat aucune douleur. Le pincemeut du bout peripherique determina uue douleur evidente, mais pas tres developpee. En voulanl elargir la plaie , on coupa incompletement la racine posterieure de la paire situee au-dessus; 1' ani- mal poussa des cris. Alors, apres un quart d'heure de repos, on pinca de nouveau le bout peripherique de la racine anterieure precedemment essayee, et 1'animal eprouva une douleur tres nette, plus developpee que la premiere fois. A ce moment on coupa la racine pos- terieure correspondante ; aussitot la sensibilite du bout peripherique de la racine anterieure disparut. Aussitot apres la section de ces deux racines le tic cessa dans cette jambe, mais bientot il reparut. On coupa la racine posterieure d'une autre paire lombaire, et le tic disparut de uieme pour reparaitre bientot. Exp. (15 decembre 1847). — Experience a laquelle assistaient MM. de Humboldt et Magendie. Sur un chieii adulte , bien portant, les racines lom- baires etaient deja mises a dt3couvert depuis quelque temps, lorsqu'on pinca une racine auterieure; on la trouva parfaitement sensible. Celle-ci e'tant coupee, le bout peripherique seul resta sensible. Lorsqu'on coupa ensuite la racine posterieure cor- respoudante, la sensibiiite disparut dans la racine ante- rieure. Exp. (k fevrier 1848). - - Sur un chien encore jeune, de taille ordinaire , bien nourri, on mil a decouvert les racines lombaires du cote droit, et Ton constata la seusi- 96 SENSIBILITY RECURRENTE. bilite recurrente des ratines anterieures. On coupa deux ratines anterieures; leur bout peripherique etait rest£ sensible. Coupant ensuite les deux racines posterieures correspondantes, la sensibilite disparut dans la ratine anterieure correspondante. On recousit la plaie et Ton garda 1'aniinal afin d'examiner ulterieurement ses ra- cines lorsqu'elles seraient cicatrisees. Le 22 mars, la plaie du dos etait completement cicatrisee. L'animal etait hien portant , seulement il avait maigri. L'animal ful sacrifie dans d'autres expe- riences, et Ton fit 1'autopsie de la moelle. Les racines etaient dans un magma de tissu cicatriciel qui en ren- dait 1'examen tres difficile. Relativement aux racines coupees dans le membre posterieur droit, on remarqua, aussitot apres 1' experience, qu'il y avait un affaiblisse- ment des mouvements dans le membre, une sorte de paralysie partielle. Lorsque le chien fut gueri , et la plaie cicatrisee , il n'y avait aucune trace de paralysie apparente Exp. (juin 1848). — Experience a laquelle assistait M. Homer, de Philadelphie. Sur un gros chat , la colonne vertebrale fut ouverte dans toute sa largeur. et la moelle fut niise a decouvert dans la region lombaire. On isola les racines anterieures des deux dernieres paires lombaires gauehes; on passa des fils au-dessous d'elles , apres quoi on referma la plaie sans verifier Fetat de leur sensibilite. An bout de trois quarts d'heure, on examina de nouveau les racines anterieures, et Ton constata qu'elles possedaient une sensibilite tres evidente. EXPERIENCES. 97 Exp. (1848). — Un chien auquel on avait fail 1'ou- verture du canal vertebral et chez lei juel on avail constate la sensibilitd recurrente des racines anterieures, vecut environ qninze jours apres 1'operation. On le sacrifia alors pour une aulre experience et on examina ce qn'etaient devenus les bouts des nerfs divises. II fut dif- ficile de clistinguer dans la plaie les bouts peripheriques des racines; mais il fut facile de constater sur les bouts medullaires que le bout central de la racine anterieure presentait nn renfleinent nettement indique, taudisque le bout central de la racine posterieure paraissaitcomme infiltre , mais sans presenter le renflement caracteristi- que de la racine anterieure. B. , SYST. NERV. — i. SIXIEME LEGON. 9 JANVIER 18S7. SOMMAIKE : Unite" de la paire nerveuse Stabile par les phenomenes de la sensibility recurrente. — Du point de communication de cette pro- priete" de la racine posterieure a la racine anterieure. — De 1'associa- tion des racines rachidiennes deux a deux. -- Exceptions. — De la sensibilite recurrente dans la moelle. MESSIEURS , Grace aux nombreuses experiences rapportees clans les precedentes lecons, le phenomene de la sensibilite recurrente nous est actuellement bien connu , non-seu- lement dans les conditions variees qui peuvent le mo- difier, mais aussi dans son caractere essentiel. Sous ce dernier rapport , nous voyons que la sensibilite recur- rente de la racine anterieure n'est, en quelque sorte, qu'une prolongation de celle de la racine posterieure correspondante. II faut concevoir, en tout cas, la sensi- bilite comme provenant d'une source unique, de la ra- cine posterieure et se propageant vers la peripherie, non-seulement jusqu'a la peau , mais pouvant revenir par la racine anterieure jusqu'a la moelle elle-meme, comme nous le dirons plus tard. On pourrait se representer cette distribution et ce trajet de la sensibilite recurrente de la maniere sui- vante (voyez fig. 7) : On pourrait considerer qu'en divers points de la ra- cine posterieure se rencontrent des filets de retour SENSIBILITY RECURRENTE. 99 qui reviennent vers le centre par la racine anterieure motrice. Quant a la maniere suivant laquelle a lieu ce retour des filets seusitifs dans les nerfs moteurs, et quant an FIG. 7 (1). point exact ou il s'opere , les experiences ne peuveut le determiner rigoureusement ; mais .tout po.rte a penser que c'est pres de Textreniite in6me des nerfs que s'ef- fectue principalement ce retour. Nous avons vu , toute- fois , qu'en coupant le nerf sciatique dans la region de la cuisse, on ne detruisait pas la sensibilite des racines (1) Voyex IV-xpiiration, pas;o 20a 100 SENSIBIUTK RKGURRENTK. anterieures qui concourent a sa formation. Mais, dans ce cas , il restait encore beaucoup de branches an-dessus de la section qui peuvent expliquer cette persistauce de la sensibilite. Mais toutefois, quand on coupe comme 1'avait deja fait Magendie , le tronc nerveux mixte pen apres la jonction des deux racines, sans laisser aucun raineau qui eniane de cette portion du nerf mixte, on constate que la sen- sibilite recurrente a disparu de la racine anterieure correspondante . ce qui prouve que ce n'est pas au niveau memede la jonction des deux racines que s'opere, d'une maniere absolue au moins, le retour des lilets. Plus tard nous verrons, en etudiant la sensibilite recurrente sur des nerfs moteurs craniens, des nerfs mixtes, que la sensibilite recurrente revient principa- lement par les anastomoses terminates du nerf sensitif avec le nerf moteur. Lorsque la sensibilite se propage. elle s'etend done du centre a la peripherie , et de la racine posterieure a la racine anterieure; mais lorsqu'elle se retire, elle disparait d'abord dans les parties les plus eloignees, et se conserve pluslongtemps dans les troncs les plus rappro- ches de la source meme de la sensibilite. C'est ainsi que la sensibilite disparait par exemple dans la peau avant de disparaitre des troncs nerveux on dans la moelle epiniere, et on comprend que la sensibilite doive disparaitre d'abord dans la racine anterieure, qui est plus eloignee du centre sensitif que la peau elle-meme. Ainsi, on aurait done la succession suivante pour la disparition de la sensibilite: 1° insensibility des racines SA PROPAGATION. 101 anterieures , 2° de la peau, 3° de la racine posterieure, 4° de la moelle; au contraire, 1'ordre inverse serait suivi dans son retour. Celte marche de la sensibilite, quo nous avons deja etablie par nos experiences, se demontre de la maniere la pins nette el la plus facile au moyen de 1' etherisation. Nous vous avons deja signale une expe- rience a re sujet (page 90) , mais nous vous en rappor- terons encore une pour mieux fixer ce fait important. Exp. (13 juillet 1847). — Un chieu adulte, vigou- reux, de iaille moyenne, a jeun depuis trois jours, pa- raissait, malgre cela, vif et bien portant. On ouvrit conmie a 1'ordinaire le canal vertebral en faisant toutefois une ouverture un pen plus considerable et en enlevant qualre lames vertebrates d'un seul c6te". Alors on isola une racine anterieure ; on lacoupa sansque 1'auimal manifestat de douleur au moment de la section. Cependant, quand on pin rait le bout peripherique de cette racine, r animal manifestait une sensibilite tres evidente, quoique un peu obtuse. Le bout central, au contraire. etait completement insensible ; on lia alors avec un fil chacun des deux bouts de la racine, afin de pou- voir mieux les relrouver plus lard ; on recousil la plaie et on laissa re-poser Tamma!. Aussilot apres l'operation. 1<; chien , qui depuis trois jours n'avait pas bu , but con- siderablemenl. Aprcs deux heures, on decousil la piaie et on examina les bouts de la racine : la sensibilite n'avait pas tres sensiblement augmente dans le boul peripherique de la racine anterieure , oil cependanl elle exislait toujours crunemaniere l)ien evidente. 102 SENSIBILITY RJiCUKRENTE. On avait remarque, chez ce chien a jeun, qu'au mo- ment de 1'ouverture du canal vertebral les chairs clivi- sees par Poperation saignaient pen ; tandis que, chez les animaux en digestion et bien nourris , elles saignent abondamment. On remarqua de plus qu'aussitot apres 1'ouverture du rachis, la du re-mere et les membranes qui enveloppent la moelle paraissent flasques et vides de liquide cephalo- rachidieu; tandis quo deux heures apres, lorsque le chien avait bu, en ouvrant de nouveau la plaie elles etaient tendues et pleines d'un liquide transparent. Dans une autre experience analogue , on observa cette tension des membranes par le liquide cephalo- rachidien , quelque temps apres que 1'animal cut bu. Est-ce une simple coincidence, ou y a-t-ileu reellement une influence de 1'eau ingeree? Chez notre animal , les bouts de la racine divisee n'etaient pas turgescenls ; la reaction de la plaie etait faible ; on recousit la peau et on laissa reposer 1'animal. Le lendemain, 1& juillet , on redecousit la plaie, on examina les racines et on retrouva , en isolant le bout peripherique de la racine a 1'aide du fil qui la mainte- nait, que la sensibilite pcrsistait toujours dans le bout peripherique. La plaie ofirait pen de reaction et laissait couler iiu liquide sero-sanguinolent ; alors on soumit le chien a 1' etherisation, et voici ce qui arriva : La sensibilite re'currente disparut bient6t du bout peripherique de la racine auterieure, tandis que la sen- sibilite de la racine posterieure correspondante etait en- core tres vive. A ce moment, la sensibilite de la peau SA PROPAGATION. 103 avait e'galement disparu : quand on pincait la peau de la face, Tamma! no manifestait aucune douleur par cles cris, quoiqu'il y eut des mouveinents reflexes. On n'a pas examine s'il y avait des mouvements re- flexes dans les membres. En poussant retherisation plus loin, les racines poste- rieures devinrent insensibles quand on les pincait ; en les pincant alors tres legerement, il y avait des mouve- ments reflexes, quoique 1'animal ne manifestat aucune douleur par les cris. Quand on pincait une racine ante- rieure, il y avait, comme a 1'ordinaire, des contractions tres limitees dans le membre. En cessant 1'etherisation et laissant 1'auimal revenir, voici ce qu'on observa : la sensibilite revint d'abord dans les racines posterieures, et ce n'est que plus tard qu'elle apparut dans le bout peripherique de la racine anterieure, ou elle se manifesta aussi vive qu'avant retherisation; on etherisa de nouveau 1'animal, et. dansce second cas, la sensibilite disparut comme dans le premier,* d'abord des racines anterieures , puis des racines posterieures. Mais, cette fois, 1'animal succomba pendant cette etherisation ; peut-etre a-t-il moins bien supporte cette operation parce qu'il etait a jeun. Exp. (13 juillet 1847). — Chien de taille moyenne, age de six mois environ , nourri depuis quelques jours avec profusion, et ay ant fait le jour meme un repas tres copieux, cinq heures avant 1'operation. L'ouverture du canal rachidien fut pratiquee comme a 1'ordinaire. An moment m6me ou 1'operation venait d'etre faite, toutes les racines, comme engourdies, SENSIBILITli RECURRENTE, pouvaient facilement etre tonchees sans provoquer de douleur; on passa le petit crochet entre elles de maniere a les separer. On isola alors la racine anterieure de la septieme paire lombaire, en 1'attirant en dehors de la racine posterieure. On coupa la racine sans que 1'animal donnat des signes de douleur. On lia les deux bouts, afiii de les retrouver plus tarcl. On constata cependant, a ce moment de 1'ope- ration, que le bout peripherique de la racine anterieure avait une sensibilite fort appreciable quoique obtuse; le bout central etait completement insensible. La plaie du dos fut ensuite recousue sans douleur. et deux heures apres on examina de nouveau la plaie, qui etait devenue plus sensible et etait le siege d'une reaction bien plus nette, chez cet animal en digestion, que chez le prece- dent opere comparativement alors qu'il etait a jeun depuis trois jours. Le bout peripherique de la racine anterieure etait alors devenu tres sensible. Le lendemain. vingt-quatre heures apres 1'operation, la plaie etait enflammee, suppurait; tandis que, chez le chien a jeun, elle etait blafarde et n'offrait pas une reac- tion franche. Le bout peripherique de la racine ante- rieure etait toujours tres sensible, tandis quo le bout central etait completement insensible. Alors on etherisa 1'animal. On observaque, comme chez le precedent , la sensibilite des racines anterieures disparut d'abord ; puis, apres, celle des racines poste- rieures. Lorsque retherisation cessa , la sensibilite des racines posterieures revint la premiere, puis, apres, celle des racines anterieures. Deux Ibis on etherisa CAS EXCEPT10NNELS. 105 I'auimal et deux fois on obtiiit les memes resultats. On voit done, par les experiences qui precedent, que non-seulement I'etherisation met en evidence la voie que suit la propagation de la sensibilite recurrente . mais encore qu'elle n'en empeche pas du tout, la manifesta- tion. Aussi 1'etherisation est-elle un moyen qu'on peut employer avec avantage pour faire 1'operatiou sur les animaux chez lesquels on veut rechercher et etudier la sensibilite recurrente. Si nous n'avons pas iudique ce moyen dans le precede operatoire, cela tient a ce que nous avions fait nos premieres operations dans un temps ou retherisation iretait pas connue. M. Schiff, dans les experiences qu'il a faites plus recemment, ex- periences conflrmatives de la sensibilite recurrente, s'est constamment servi de I'etherisation. Actuelleinent . messieurs, apres avoir passe par une serie de longues recherches, nous sommes fixe sur la si- gnification du phenomene dela sensibilite recurrente, et nous sommes arrive a vous montrer qu'il faut voir dans ce phenomene un rapport physiologique unissant entre el les et deux a deux la racine anterieure et la racine pos- tV'i'ieure de chaque paire rachidienne. Dans les exjx-- riences tres multipliees <[ue notisavons faites, nousavons constamment trouve que la sensibilite de la racine ante- rieure est sous la de'pendance directe et exclusive de la racine poste'rieure correspondante. Deux cas exceptiotinels seulement se sont montres a notre observatitui ; ces faits ne changent rien au prin- cipe general du ph<>uoim''ne, mais ee sont des varnHrs raivs qui iiK-riteut de vousetre signal^es. 106 SENSIBILITY KECURRENTE. Exp. (12 aout 1847). - - Sur un chien d'assez torte taille, encore jeuue, on mil a de'couvert, par le pro- cede ordinaire, les sixieme et septieme paires lombaires et premiere sacree du c6te droit ; aussit6t apres 1'opera- tion, on put les toucher avec la pince, separer la racine anterieure de la posterieure avec le crochet , sans que 1'animal accusat de la douleur. On profita de cette espece d'engourclissement des nerfs pour passer des fils au- dessous des racines anterieures de la sixieme paire et de la septieme paire lombaire et de la premiere sacree. Le chien futopere a une heure, et une heure et demie apres il ful examine ; on trouva une sensibility tres evidente dans les racines anterieures des paires sixieme, septieme lombaires, et premiere sacree ; on souleva, on isola ces racines au moyen des ills prealablement passes au-dessous. Alors on coupa la racine anterieure de la septieme lombaire : le bout central devint insensible , et le p^riphe'rique conserva sa seiisibilite. On divisa ensuite la racine posterieure correspondante , et on observa ce fait jusqu'alors exception nel, que la sensi- bilite du bout peripherique de la racine anterieure per- sistait ton jours. Ce fait etait trop remarquable pour qu'on le laissat passer. A diverses reprises, on le verifia avec soin, et on s'assura que le resultat constate ne tenait pas a une erreur d'observation ; on remarqua pourtant que cette sensibilite , qui n'etait pas douteuse , paraissait un pen moins vive qu'avant la section de la racine poste- rieure. Alors on coupa la racine posterieure de la pre- miere paire sacree lombaire . et on trouva que sa racine CAS EXCEPT IONNELS. 107 anterieure correspondante devint immediatement in- sensible , mais que la sensibility du bout peripherique de la racine anterieure de la septieme paire lombaire n'en persistait pas moins. Alors on coupa la racine poste- rieure de la paire rachidienne situee au-dessus (sixieme lombaire) : aussitdt la sensibilite disparut completement dans le bout peripherique de la racine anterieure de la septieme paire lombaire: ce qui prouve que, dansce cas, il y avait deux racines posterieures qui tenaient sous leur dependance la sensibilite de la racine anterieure de la septieme paire lombaire. Dans cette experience , on examina apres Foperatiou la disposition anatomique des racines dans le canal ver- tebral, et on n'y vit rien d'anorraal en apparence ; mais il faut ajouter que cette dissection fut faite trop rapide- ment : nous experimentions ce jour-la a Famphitheatre des hopitaux de Glamart , en presence de MM. Serres et Deville. Dans une autre occasion, je retrouvai. en faisant le cours au College de France, le nieme fait sur la mdme paire rachidienne. Je dissequai cette fois avec beaucoup de soin la piece, et je trouvai que, tout pres du trou de conjugaison, dans rinterieur du canal vertebral, le gan- glion intervertebral de la sixieine paire etait soude et en partie confondu avec celui de la septieme (fig. 8). Ces anomalies que nous venous de vous signaler, et qui sont sans doute tres rares dans la region lombaire , represented un etat plus avance de 1'association des nerfs que nous retrouverons plus tard, et dans lequel nous verrons qu'un meiiie nerf moteur peut recevoir la 108 SENSIBILITY HECURKENTE. sensibilile ivcurrente de plusieurs sources sensitives. Dans la region cervicale , nous verrons cette dispo- sition nouvelle se ma- nifester pour le nerf spinal ou accessoire de Willis , qui reroit la sensibilite recurrente de plusieurs paires cervicales. Nous trouverons encore Jans les nerfs cra.nieiis line autre disposition, en quei- que sorte inverse. Un nerf de sentiment, fournira Sa sensibilite a plusieurs nerfs mo- teurs, qui represen- tent pour lui les ele- ments d'une seule ra- cine anterieure. Malgre toutes ces variations, nous de- vons saisir ici seu- lement le type phv- FlG. 8 (1). . Jl siologique d une paire nerveuse, et il reste demontre que le cas le plus simple. (1) Soudure de deux i/anglions vprrritf intcrvertebraux ay ant j/nxhiit iinc mnnnnlii' tnuis In ,1/slr/liiition dr la scnsibilitt' recurrente. — I,o ganglion qui cst stir lo trajoi <)<• la i-aciiic poslmewe do la sop- et qui appartient exdusivement a la paire nerveuse ele- mcutaire, c'est celui on une ratine anterieure reeoit sa sensibilite cxclusivement de la racine posterieure cor- respoiulante. En faisant allusion imiquement a ce cas simple, nous clirons qiieTon pent resumer ainsi qn'il suit les caracteres cles deux ratines d'unc puire rachidienne : 1° Lorsqu'on examine les deux ratines anterieure et posterieure, toutes deux sont sensibles. Lorsque, par un moyen quelconque, on epuise la sensibilite de F animal, elle disparait dans 1'ordre suivant : racine anterieure , peau, racine posterieure, moelle, pour reparaitre dans un ordre inverse , lorsque la sensibility generale vient a renaitre. 2° Lorsqu'on coupe la racine anterieure, la posterieure restant intacte, le bout central de cette racine anterieure devient seul insensible. 3° Lorsqu'on coupe la racine posterieure, la racine an- terieure devient insensible, ainsi quo le bout peripherique de la racine posterieure coupe* e. Ces caracteres distin- gueut les racines nerveuses pures avant leurs anasto- moses. S'il s'agissait desrameaux d'un nerf mixte, les caracteres deviendraient d'une tout autre nature. tieme paire lombaire i esl soucle clans le canal vertebral avec le ganglion de la sixieme paire; — S, bout peripherique de la racine anterieure coupee de la septieme paire lombaire; - - A, bout central de la memo racine; — P, bout central de la racine. poslerieure de la septieme paire lombaire ; — I , bout peripherique dc la meme racine ; — A', racine an- terieure intacle de la sixR-mc paire lombaire: — P', bout peripherique de la racine posterieure de la sixieme paire lombaire ; — C, lieu de sec- tion de la racine ; — A", racine anterieure intacte de la premiere paire sacree ; — P", bout pt'-ripherique de la racine posterieure de la premiere paire sacree ; — C1. lii-u de section de In racine. 110 SENSIBILITY RECURRENTE Quand on divise lo tronc d'un nerf mixte , les deux bouts seront sensibles, parce qu'il reste des anastomoses qui pe.uvent rauiener la sensibility dans le bout peripbe- rique. Tel est le cas du facial , comme nous 1'avons de'ja vu, et tel serait sans doutele cas d'un rameau quelconque du nerf sciatique. Mais la sensibilite recurrente ne s'arrete toutefois pas a la racine anterieure elle-meme; elle se propage jus- qu'au faisceau anterieur de la moelle , ou nous devons actuellement la poursuivre. Lorsqu'on examine la moelle epiniere, on sait qu'elle est composite de deux moities symetriques ; cbaque moitie pent etre considered comme forme'e de trois fais- ceaux: I'un anterieur, mi autre lateral, le troisieme pos- tt'i'ieur. Les racines poste'rieures naissent du sillon qui separe le faisceau posterieur du faisceau lateral; les racines anterieures naissent du sillon qui separe le fais- ceau anterieur du faisceau lateral. Prenant un animal dans de bonnes conditions, c'est- a-dire vigoureux, bien nourri, et offrant aux causes d'epuisement qu'entraine Toperation une resistance suf- fisante, on pourra chercher sur lui quelles relations exis- tent , au point de vue de la sensibilite, entre les diffe- rentes parties de la moelle epiniere. Or, lorsqu'on vient a piquer la moelle avec une aiguille a cataracte, on la trouve sensible partout. Si Ton coupe alors une racine anterieure, on trouve, tout autour de 1'insertion du bout central coupe une zone qui est devenue insensible dans une hauteur peu etendue : cette insensibilite a pour sie'ge le faisceau anterieur et une partie du faisceau late- DANS LA MOELLE IiPINIERE. Ill ral. Nous verrons plus tarcl que cette zone peut etre considered comine un centre d'ou emane la racine an- terieure. Le faisceau anterieur et une partie du faisceau lateral recevraient done leur sensibilite de la racine pos- terieure par la racine anterieure. Quand au contraire on a coupe une racine posterieure de la paire rachidienne, le faisceau posterieur de la moelle reste toujours sensible. Si , au lieu de co'uper les racines, on etherise simple- ment Familial , la sensibilite finit par disparaitre : elle abandonne d'abordles faisceauxanterieursde la moelle, la moitie anterieure du faisceau lateral et la racine anterieure; plus tard elle disparait de la racine poste- rieure, de la partie posterieure du faisceau lateral et du faisceau posterieur. Toutefois le faisceau posterieur ne devieut pas tout entier insensible, et la sensibilite m'a paru persister en arriere dans la partie la plus rappro- chee du sillon posterieur. Vous yoyez, par tout ce qui precede, que la moelle tout entiere est sensible ; qu'il faut chercher dans le faisceau posterieur seul 1'origine de cette sensibilite ; que la sensibilite du faisceau posterieur ne se transmet- trait pas directement aux autres parties de la moelle, mais qu'elle leur arriverait par un long circuit. La persistance de la sensibilite dans une partie du faisceau posterieur montrerait en outre qu'il y a, au point de vue des proprietes, communication des racines pos- terieures les unes avec les autres, tandis qu'il n'y a pas communication entre les racines anterieures. Nous avons, messieurs, insiste longuement sur 1'his- toire de la sensibilite recurrente. non-seulement parce 112 SENSIBIUTE RECURRENTE. quo c'est un phenomena nerveux de la plus haute im- portance, mais parce que nous voulions vous montrer parquelieseriede vicissitudes pen vent passer les questions scientifujues avant (Tarrivera I?6tatdev6rit FOM/rio.xs DI;S KAC.LVES Le muscle qui rtvoit un filet moteur d'une racine anterieure. nc recoit pas de la meme racine son filet sensitif. KM effet, vous savez que les manifestations sensitives se propagent de la peripherie an centre. Si les muscles tenaient lour sensibilite de la racine anterieure mixte, on devrait, lorsqifon coupe la racine anterieure retrouver mi pea de sensibilite dans son bout central. Or, il iven est Hen : on pent, en pincant ce bout central, se con- vainer*' qu'il est insensible et ne renfenne pas de fibres sensitives; le bout peripberique seul. vous le save/, con- serve la sensibilite recurrente. D'ailleurs on pent verifier que les racines anteriemvs ne sont pas niixtes par les exp('iriences dans lesquelles on a coupe les racines posterieures seules. On voit alors que les mouvements de 1'animal insensible nesont plus calcules. Leur defaut d'barmonie est, dans ce cas, nne preuve dc la perte de cette sensation uuisculairc qui les coordonne et en regie la portee. Chez les aniinaux rendus insensibles par la section des racines poste- rieures, nous observerons plus tard ce defaut de coordi- nation des mouvements musculaires. D'apres les faits, on doit done admettre que les racines anterieures president seulement a la mobilite, soit des muscles, soit des elements contractiles de la peau on d'autres organes telles que les glandes, etc. , et que les ra- cines posterieures recueillentles impressions sensibles et de la peau et des muscles et de toutes les parties du corps. Nous verrons. d'ailleurs. que cette distinction entre les propriety's mot rices et sensitives se trouvera j usque !al)le de fibres excessivement fines: ee sont les tubes nerveux on fibres primitives. Ces fibres primitives sont accolees les unes aux autres et enveloppees par une gaine commune, qu'on appelle nevrileme; cette gatne est contenue elle-meme clans une gaine plus exte- rieure, a laquelle M. Ch. Robin a donne le noin de peri- nevre. Relalivement a la constitution de la fibre nerveuse primitive, il est des choses bien etablies; d'autres son! hypothetiques : on doit avoir soin de distinguer les faits acquis a la science de ceux qui sont de nature encore douteuse. Lorsqu'on examine sous le microscope une fibre ner- .:--^~>^o", ;3?->*iVCCV ;phx^ JL STRUCTURE UES JSIiRFS. veuse chez un animal vivant , on n'y voit, en la suivanl jusque dans sa distribution, qu'im tubetres fin dontl'ap- parence homogene n'offre rien de particulier a 1'observateur. Tel est 1'aspect des divisions nerveuses que Ton pent suivre en soumettant au microscope la membrane cligno- tante d'une grenouille vivante, par exemple. Si maintenant Ton vient a couper le nerf et a 1'enlever , qu'ensuite on 1'examine en le preparant avec un liquide, meme inerte comme de 1'eau, son aspect a change, et on Ini reconnait un double contour qui semble indiquer une paroi et un contenu. En cet etat. on recon- nait a la fibre nerveuse trois ele- ments diffe rents: 1° une enveloppe transparente A B . sans structure ; 2° un contenu semi-fluide, albu- mino-graisseux , que Ton a appele la moelle nervense ; 8° au centre . ' s un filament a, corde de la fibre ner- veme, liyament primitif de Remak, cylindred'axe du tube nerveux.0\\ pense que, pendant la vie, la moelle est tluide, mais (L) A, tube uer\cux compose par ses trois elements , Penveloppe ii double contour, la moelle. nerveuse et le cylinder axis. Dans un point, Tenveloppe A a etc rompuc, et le cylinder axis est reste seul ; on voit an- f. M I'"IG. 9 (1). 122 STRUCTURE qu'aussitdt quo le nerf est separe de r animal , cette moelle se coagule, d'ou I'aspect de double contour qui accuse 1'epaisseur de I'enveloppe. Le cylindre d'axe serait forme d'une matiere albumineuse constammeut coagulee et solide. Certains re"actifs permettent de mettre en evidence ces diverses parties lorsqu'on veut mieux les observer. Ainsi les solutions alcalines font sortir, par les deux extre1 mites du tube, une matiere coagulee qui est la moelle. Pour mettre en evidence le cylindre d'axe, on emploie au contraire les acides energiques : I'acide acetique cristallisable sera choisi de preference. Sous son influence, la moelle eprouvo un retrait; elle s' ap- plique sur I'enveloppe et laisse libre le cylindre d'axe, que Ton peut des lors apercevoir plus distinctement. Les fibres nerveuses primitives ne sont pas toutes du me* me diametre. Kolliker, qui a compare leurs dimen- sions chez les animaux Sieves, a trouve pour les grosses un diametre moyen de Omm,02 ; et pour les petites, de Omm,0011. II s'en faut qu'un nieme nerf soit compose exclusi- vement de fibres primitives d'un meme calibre. Dans tons on en trouve de grosses et de petites ; toutefois les grosses fibres se rencontrent en plus grand nombre dans les racines anterieures, et les petites dans les racines poste>ieures. clessus un fragment des enveloppesBqui ont ete conservees ; — d, noyau d'une cellule nerveuse ce"rebrale multipolaire; — a, tube nerve uxr&luit a son cylinder axis; — c, c, grantilaiions moleculaires entourant la cel- lule nerveuse (figure d'apres \\. Wagner). DE LA FIBRE NERVEUSE PRIMITIVE. 123 Ces tubes nerveux, dont nous venons de voir la struc- ture, doivent necessaire- ment avoir une origine et une terminaison. Vous sa- vez deja que les fibres pri- mitives du systeme moteur se terminent surtout dans 1'appareil moteur,que les fi- bres primitives appartenant au systeme sensitif se termi- nent dans tons les organes sensibles, surtout dans la peau; que les unes et les autres naissent des centres nerveux. Avant deles suivre j usque vers leurs extremi- tes , nous devons mention- ner un autre element ner- veux, qui se rencontre dans les ganglions et dans les par- ties formees de substance grise : cet element est la cellule nerveuse. Les cellules nerveuses sont des cellules contenant un noyau entoure de sub- stance granuleuse. Elles ne different en rien, quant a la configuration, de toutes FlG jo ,4. (1) Cellules nerveuses rachidiennes (d'apres R. Wagner). — A, tube STRliCTURK les cellules a noyau; mais le point le plus interessant a observer est leur rapport avec les tubes uerveux. Les cellules nerveusessont grosses' ou petites, comine les fibres primitives ; on les trouve toujours melange'es ensemble en proportion variable. Les grosses cellules dominent dans la corne anterieure de la partie grise de la moelle ; les petites sont en plus grande quantite dans la corne posterieure. Voici , d'apres Kolliker . les diametres des cellules nerveuses : Grosses de Omm,ll a Oimu,U Petites Omm,005 a Omm,007 On les rencontre dans la partie centrale et dans la partie peripherique du systeme nerveux. Dans les ganglions intervertebraux que nous avons vus sur les racines rachidiennes posterieures , les rapports des cellules et des tubes nerveux out ete bien deter- mines par Ch. Robin et R. Wagner. Les cellules y con- stituent une sorte de renflement sur le trajet de la fibre nerveuse. On a donne le nom de cellules bipolaires a celles qui , situe'es, comme je viens de vous 1'indiquer Tig. 10), sur le trajet d'une fibre, de facon a en inter- rompre la continuity, sont en contact avec elle par deux points opposes do lour contour. On trouve ces cellules en grand nombre dans les ganglions. On rencontre encore dans les ganglions des cellules vmipolaires, desquelles nerveux gros compose de ses irois parties; — B, cellule nerveuse; — D, noyau de la cellule ; — a, petit tube nerveux ; — 6, petite cellule ; — c, d, noyaux de la petite cellule. in; LA CKI i.i'i.i; NERVKI.SK. 125 emerge line seule fibre. An sortir de ces cellules, Ic lube est toujours dirige vers la peripherie, de sorte que ces elements nerveux paraissent etre sans communica- tion avec les centres. [/existence dans les ganglions de ces cellules unipo- laires inontre qu'il sort du ganglion , du cote de la peripherie, plus de fibres nerveuses qu'il n'y en entre par la racine posterieure venantde la inoelle. Bien plus, il arrive quelquetbis quo des cellules nerveuses donncnt naissance a deux ou plusieurs tubes diriges dans le ineme sens; ce sont encore des cellules bipolaires, niais a poles iion opposes. Ces cellules , qui out ete vues chez lesanimaux eleves, out eteconstatees parM. Faiviv die/ les sangsues. On trouve encore des cellules apo- laires. o'est-a-dire qui sont isolees et ne tiennent a aucune fibre nerveusc. On trouverait done trois sortes de cellules dans les ganglions: 1° des cellules bipolaires de deux sortes: les lines formant un renflement sur le trajet d'une fibre primitive, les autres paraissant etre 1'origine de deux fibres primitives dirigees par la peripherie; 2° des cel- lules unipolaires donnant naissance chacuiie a une seule fibre primitive, toujours dirigee vers la periphe- rie ; 3° des cellules apolaires. Presque tons les anatomistes s'accordent a recon- naitre qu'il existe. en outre, des fibres primitives qui traversent le ganglion sans affecter avec les cellules aucun rapport de continuite. Recemmeiit M. Waller a fait des experiences fort interessantes qui assiguent aux ganglions un role tr£s 126 STRUCTURE DES GANGLIONS. important sur les proprietes des nerfs; nous aurons plus tard a y revenir, et nous insisterons alors sur les M±**-^ A B FIG. 11 (1). FIG. 12 (2). rapports des donnees anatomiques qui viennent de vous eire exposees avec les phenomenes physiologiques crees par rexperimentation. (1) Ganglion du grand sympathique (d'apr^sF. Leydig). — 6, b, gan- glion compost de cellules multipolaires; — a, a, a, a, fileis nerveux £inanant du ganglion. (2) Ganglion spinal (d'apres F. Leydig). — • A, racine sensible avec STRUCTURE DE LA MOELLE E"HNIERE. 127 Examinons maintenant les fibres primitives et les cellules nerveuses dans la moelle epiniere : Dans la substance blanche , on retrouve des fibres nerveuses, comme dans les nerfs; la substance grise est forme'e surtout par des cellules. Les grosses fibres dominent dans le faisceau anterieur, les petites dans le faisceau posterieur. De me"me les grosses cellules sont en grande quantite dans la come anterieure, dans la commissure grise, et les petites cellules sont plus abon- dantes dans la come posterieure de la moelle. Les cellules de la substance grise medullaire different de celles des ganglions. Elles sont, en general, multipolaires. On ad met que, par leurs p61es, elles se continuent a'vec les nerfs; mais ce rapport, infinimeiit probable, serait d'une difficult^ extreme a constater. En effet, lorsqu'une fibre nerveuse a penetre dans un centre, elle se deconi- poserait, et Tenveloppe disparaftrait apres la penetra- tion dans le centre ; le cylindre d'axe continuerait seul. Les cellules ne se trouvent done en rapport de continuite qu'avec le cylindre d'axe, et non avec la fibre complete. Or on a vu des axes de fibres nerveuses penetrer le centre medullaire ; on a vu dans ce centre des cellules d'ou partaient des cylindres d'axe; on en a conclu a la continuite de ces cylindres sans avoir pu la suivre encore completement. D'apres ce qui precede, on voit que les cellules se- raient tantot Forigine des fibres nerveuses, tantot des son ganglion compose de cellules bipolaires; — B, ratine molrice; - C, branche posterieure du nerf rachidien inixte;-- D, branche an- terieure du nerf rachidien mixte. 128 STRICTURE DE LA MOELLK EPINIERE. Granules places sur le trajet de cos fibres. On pourrait dans ces cas considerer les tubes comine les conducteurs du systeme nerveux, dont les cellules seraient V agent elaborateur on collectenr. K G f H F A FIG. J3 (1). Voyons maintenant comment les iierfs ainsi ronsli- 1 lie's, prenant naissance des cellules, ou se trouvant en contact avec elles a leur origine, comment ils se termi- nent dans les orgaues auxquels ils portent leur influence. •i (1) Coupe de la moe.lle epiniere du Salnio Salor (d'apres Owsjan- nikow). — A, sillon medullaire anlerieur ; — B , sillon inedullaire pos- terieur; — C, canal central de la moelle tapisse par un epitlieliuni cylindrique; — I), tissu celhilaire qui entoure le canal central, el qui envoie un prolongement dans le sillon anlerieur el poslerieur de la moelle; — E, racine anlerieure ; — F, fibres conslituant la commissure de la moelle ; — G, fibres de la racine posterienre ; — H, tissu ccllulaire: — I, fibres nerveuses de la substance blanche coupees transvevsalemcnl; - K. vaisseaux snnguins coupes en Iravers; — L, cellules ganglionnaires. TERMINAISONS DES NERFS. 129 1° Nerfs moteurs. En mettant sous le champ clu mi- croscope uri muscle a fibres strides (certains muscles peaussiers des grenouilles), on voit que, lorsqu'un fila- ment nerveux arrive a ce muscle, il se place transver- salement a la direction des fibres musculaires, etil arrive souvent que le tube nerveux primitif sedivise lui-meme et que lecylindre d'axe se ramifie. On a bien constate cette division, qu'on n'avait pas d'abord observee. Mais on ne peut aller au dela et saisir le rapport des fibres musculaires avec la fibre nerveuse. Que la fibre primi- tive soit entiere au moment ou on la perd de vue , ou qu'on ait pu suivre ses divisions, toujours le dernier filet qu'on a pu suivre parait cesser brusquement. Vous voyez, messieurs , que la terminaison des filets moteurs est pen connue, et quece qu'on sait des rapports anatomiques des parties qu'on peut suivre ne fait rien connaitre sur le mecanisme de leur action. En se rapprochant de son extremite terminale , le nerf parait perdreson enveloppe, et sa fibre primitive se trouve, comme a son arrivee dans les centres, reduite au cylindre d'axe, qui se con fond avecle tissu cellulaire de facon a n'en plus pouvoir etre distingue, ce qui fait qn'on ne peut plus le suivre au dela. La meme incertitude regne sur le mode de la termi- naison du nerf moteur dans les glandes. II est toutefois possible qu'un jour un reactif, qui 1'isole suffisamment du tissu cellulaire, permette de la suivre plus loin. 2° On sait mieux comment les filets sensitifs se ter- minent dans la peau. La, on voit de ces filets dis- paraitre dans des corpuscules nerveux de deux ordres, B., SVST. NKRV. — I. 9 130 TERMINAISONS DBS NERFS. qui sont les corpuscules du tact et les corpuscules de Pacini. Les corpuscules du tact se rencontrent en amas a la pulpe desdoigts, aux orteils, dans les parties enfin char- gees plus specialement de recueillir les impressions actiles. Ce sont des pelotons nerveux enroules, iuex- tricables, dans lesquels on voit penetrer une fibre ner- veuse et desquels on en voil sortir une autre. Gerlach les regarde comme un simple enroulement de la fibre nerveuse. Kollikerpense qu'ily a lade plus un tissu par- ticulier, qui sert de support au nerf ; Wagner a emis une autre opinion. Quoi qu'il en soit de ces differentes manieres de voir, il reste etabli quo les corpuscules du tact offreut un mode de terminaisoii des nerfs sensitifs dans la peau. Mais ce mode de terminaisoii n'est pas le seul , et les corpuscules de Pacini nous en montrent un autre. Les corpuscules de Pacini se trouvent surtout sur le trajet des nerfs collate1 raux des doigts, aussi leur avait-on ac- corde une part assez large dans les phcnomenes tactiles. Mais cette supposition ne saurait tenir en presence des dissections , qui ont montre des corpuscules de Pacini dans le mesentere du chat, dans les cavites osseuses des oiseaux, etc. Dans 1'etat actuel de nos connaissances, on doit s'in- terdire toute conjecture sur leurs usages. La encore nous observons un mode de terminaisoii nerveuse sans pouvoir conclure de la configuration anatomique au mecanisme de la fonction. On aclmet encore, et cette fois je crois que c'est avec TERMINAISONS DBS NERFS. 131 raison, que les nerfs du sentiment se terminent en anse. Cette vue me semble justifiee par les phenomenes de sensibility recurrente qui montrent qu'il existe entre les nerfs moteurs et les nerfs sensitifs un lien peripherique. Or, puisqu'il est demontre qne quelque chose unit les extremiU's peripheriques des deux especes de nerfs , il faut bien admottre qu'une connnunication existe entre eux, affeotant la disposition en anse. Ce serait une sorte de reflexion du filet sensitif, qui, an lieu de se termincr dans la peau, remonterait par la racine an terieure j usque dans la moelle. Cette disposition recurrente rattacherait le nerf moteur a la racine sensitive ; c'est au moius ce qu'il semble legitime de conclure des experiences que nous vous avons exposees dans les dernieres lecons. On a pense que les differentes parties du systeme ner- veux, ainsi que les differents elements qui concourent a constituer le nerf avaient cbacun un role, une destina- tion speciale. D'interessantes recherches de M. Waller out receminent enrichi la science dedonnees relatives a ces proprietes des parties elementaires. II arrive quelquefois que les nerfs s'alterent : dans cescas, c'est surtout la moelle nerveuse qui accuse une modification anatoinique profonde. Lorsqu'on coupe un nerf, on peut suivre, dans un des bouts auxquels donne lieu la section, une alteration extremernent remarquabie de la moelle nerveuse. Elle devient granuleuse , prend une coloration noire: cephenomene s'observechez Tani- mal vivant, et Falteration permet de suivre des yeux les progresde la dea;ene>escence du nerf coupe. Jiisqu'a present, messieurs, je ne vous ai entretenus iS2 STRUCTURE DE que des details anatomiques generalement admis. Je ne saurais terminer cet expose sans vous signaler une autre opinion recemment emise sur la structure des nerfs par Stilling, opinion qui differe radicalenient de ce que nous avons vu jusqu'ici. Stilling pense que le tube nerveux qui, sur 1'animal vivant, n'apparait que com me une trainee transparente, est loin d'avoir la structure simple qu'on lui reconnatt generalement; que 1'opinion qui fait de ce tube nerveux un dement anatoniique tient a ce qu'on ne 1'a pas ob- serve avec un grossissement suffisant et a ce qu'on a neglige de le soumettre a des re"actifs propres a rendre plus facilement reconnaissables les parties dont il serait eonstitue. Pour lui , 1'enveloppe du tube n'est pas une enveloppe sans structure, et il refuse d'admettre que le cylinder axis soit une tige pleine. Sur des pieces mace- rees dans 1'acide chromique, il a vu ces parties composees elles-m6mes de tubes extr^mement fins. Le cylinder axis serait forme par deux tubes emboltes, d'ou parti- raient des ramifications transversales s'etendant vers la gaine, et s'anastomosant avec les tubes innombrables dont 1'accolement formerait cette gaine. La disposition qu'il signale se voit bien sur ses pre- parations. Doit-on la regarder comme normale, ou faut-il admettre , avec quelques anatomistes, que cette apparence est due au reactif qui produit des coagu- lations, des racornissements simulant des divisions, et une structure complexe dans deux parties amorphes et homogenes. Bien que 1'opinion de Stilling soit, au point de vue LA FIBRE NERVEUSE. loo aiiatoinique, completement differente des idees aujour- d'hui recues, elle ne change rien a 1'idee generate que 1'ou se fait de 1'element nerveux an point de vue phy- siologique. Je n'insiste pas davantage aujourd'hui sur cette diver- gence, que nous aurons peut-etre occasion de discuter plus tard. Dans la prochaine seance , nous nous occuperons des proprietes physiologiques et tbnctionnelles des nerfs moteurs. HUIT1EME LEGON. o 16 JANVIER 1857. SOMMAIHE : Nerfs moteurs. - - Leur origine et leur distribution. — Inactions du nerf moteur sous IMnfluence des diflerents excitants. - — Excitant normal : la volonte". — Excitants artificiels, mecaniques, chimiques : bile, sel marin. — Electricite. - Des courants conlinus et interrompus. - - Difference dans leuv action. — Action chimique et physiologique.— Des points duplication d'un couranl sur un nerf. MESSIEURS , Nous commencerous par 1'element moteur 1'etude des proprieties des nerfs qui constituent la paire ner- veuse. Vous savez que le nerf moteur a ete reconnu verita- blement tel le jour ou il a ete constate que sa section amenait une abolition complete du mouvement sans detruire la sensibilite. Nous verrons bientot que ce caractere n'est pas le seul (|ui lui appartienne. Et d'abord , ne 1'envisageant qu'au point de vue anatomique , on voit le nerf moteur naitre de la corne anterieure de la substance grise, d'un amas de corpuscules ganylionnaires volumineux. Ce fait a ete parfaitemetit etabli par Stilling, non-seulement pour les nerfs qui naissent de la moelle, mais pour ceux qui naissent de 1'encephale, tels que le moteur oculaire commun et le grand hypoglosse. etc. L'action du nerf moteur a pour objetd' exciter uu muscle et de determiner par la un mouvement. Remarquons ici NERFS MOTEURS. 135 que 1'excitation du nerf moteur, en tantque centrifuge, est exactement limitee aux muscles auxquels elle se rend : c'est la un caractere fondamental qui differencie le nerf moteur du nerf sensitif dont 1'activite deter- mine des reactions generates. Ainsi . lorsqu'avec une aiguille a cataracte, par exemple. on pique les faisceaux anterieurs de la moelle , on determine des mouvements dans les parties auxquellesse distribue le nerf moteur le plus voisin et dont 1'origine s'est trouvee atteinte par la piqure. Autre chose a lieu lorsqu'on porte 1'irritation sur un point des faisceaux posterieurs. Dans ce cas , ou 1'excitation a porte sur les parties sensitives, la moelle en transmet Fimpression ; et le mouvement qui traduit a 1'observateiii1 la perception de cette sensation, n'est pas borne seulement a la partie a laquelle se dis- tribue le nerf sensible; c'est une reaction generale a laquelle tout le systeme pent prendre part. Un autre caractere pourra encore faire reconnaitre les nerfs moteurs. Lorsqu'un nerf moteur a ete coupe sur un animal vivant. et que, comme consequence de sa section, il y a perte du mouvement dans la partie a laquelle il se distribue avec conservation de la sensibilite de cette partie. on peut voir, si on laissevivre ranimal. que le nerf moteur coupe sera le siege d'une alteration carac- teristique differente de celle qui suit la section d'un nerf sensitif. En examinantde suite les deux bouts du nerf coupe, le bout central et le bout peripherique, on lestrouvera normaux, constitues par la reunion des tubes nerveux NERF MOTEUR, que je vous ai decrits dans la lecon pre'cedente. Mais, peu apres, au bout d'un temps qui varie de sept ou huit jours pour les animaux a sang chaud, et de quinze jours a trois semaines pour les animaux a sang froid, on voit que la structure normale a persiste flans le bout central , tandis que le bout peripherique est le siege d'une alteration toute particuliere, consistant en une decomposition de la matiere medullaire du tube nerveux qui a pris une teinte noiratre , est devenue granuleuse et s'est alteree. Or, le sens dans lequel se propage cette alteration pent caracteriser la nature fonctionnelle de la racine sur laquelle elle porte. Si c' est une racine motrice; 1'alte- ration marchera tou jours du centre a la peripherie. Si c'est une racine sensitive, nous verrons que le contraire aura lieu. Nous avons done ainsi uii caractere anatomique, le sens, 1' alteration, et un caractere physiologique, la perte du mouvement, qui permettent de distinguer sur le vivant le nerf moteur du nerf sensitif. Nous allons en trouver d'autres dans Faction des excitants mecaniques ou physiques appliques sur ces nerfs : Quand un animal est tue, tons ses tissus ne meurent pas a 1 instant : les muscles conservent quelque temps leur irritabilite; il en est de meme du tissu nerveux. Cette conservation des proprietes de tissu nous permet- tra d'etudier les caracteres physiologiques du tissu ner- veux sur des parties separees d'un animal receniment mort. Ce procede nous sera m6me tres precieux pour les etudier isolees et independamment des phenomenes SES EXCITANTS. 137 nombreux qui , chez un animal vivant, sont en corre'- lation avec les manifestations nerve uses. Les proprietes de tissu se conservent plus ou moins longtemps apres la mort, suivant la nature des animaux et les circonstances dans lesquelles on les observe. Elles disparaissent tres vite chez les mammiferes et les oiseaux, tandis qu'elles persistent longtemps chez les animaux a sang froid dont nne activite vitale moindre ralentit suffisamment le double mouvement de nutri- tion et de decomposition des organes, circonstance qui favorise la persistance de leurs proprietes. II ne faudrait cependant pas croire que cette persis- tance des proprietes de tissu fasse des animaux a sang froid des etres physiologiquement differents de ceux d'un ordre pluseleve. Non: il est telles circonstances faciles a provoquer qui permettent de combler en grande partie la distance qui les separe des animaux a sang chaud , a ce point de vue du moins. En elevant la temperature du milieu dans lequel on observe un animal a sang froid, on le rapproche des conditions fonctionnelles d'un animal a sang chaud ; on active chez lui le mouvement vital; et, si Ton vient a le tuer, on pent voir que les proprietes de ses tissus persistent beaucoup moins long- temps. La difference sera meme presque entierement effacee, si Ton compare cet animal a fonctions activees a un mammifere place depuis quelque temps dans des conditions inverses, a une temperature basse ou dans un air non suffisamment renouvele. Chez ce dernier les proprietes de tissu persistent beaucoup plus longtemps que si la mort 1'avait surpris dans des conditions plus 138 NERF MOTEUR, rapprocbees de celles de son fonctionnement normal. Si done, prenant une grenouille recemment tuee. nous excitons ses nerfs, 1'excitation des nerfs moteurs cleter- uiinera des mouvements qui nous les feront certaiue- ment distinguer des nerfs de sentiment. A 1'etat physiologique, le nerf moteur est excite par la volonte ; puisil reagit a son tour stir le muscle pour le laire entrer en contraction. Dans nos experiences nous devons, a defaut de la volonte, excitant normal, recou- rir a uu excitant artificiel. Beaucoup d'excitants out ete essayes et ont donne des resultats divers : ainsi , le froid, le chaud peuvent servir a reveiller 1'activite nerveuse ; toutefois la chaleur et le froid, qui excitent fort bien les nerfs sensitifs, n'ont sur It's nerfs moteurs qu'une influence beaucoup moins prononcee. En outre, quel que soit 1'agent que Ton em- ploie. il faut que son application soit brusque: alors seulernent il pent agir comme modificateur, et c'est a ce titre que sont tres actifs tons les excitants qui agissent sur rorganisme. On a manifesto 1'activite des nerfs moteurs au moyen d'excitants mecaniques, chimiques, et surtoutau moyen de 1'electricite. L'excitation mecanique est la plus grossiere de toutes. Voici une grenouille decapitee dont le canal vertebral est ouvert : je coupe lesracines motrices pour appliquer sur elles Fexcitant. Vous pourrez voir. que des que je pince le neri moteur, le membre auquel il se rend se contracte visiblement. Si. un instant apres, je renou- velle I'experience en appliquant dans le meme point les SES EXCITANTS. 139 mors de la pince, aucun effet ne se produit plus. En pincant plus has, dans im point plus rapproche de la Peripherie, nous produisons encore des convulsions; pincant au-dessus. vers la moelle, nous n'avons plus rien. Cette irritation mecanique n'est. done efficace qu'a la condition d'en changer le point d'application, d'aller vers la peripherie, de s'eloigner du centre qnand on agit sur des nerfs centrifuges ou moteurs. Cette pro- priete de provoquer des mouvements apres sa separa- tion de la moelle est une propriete caracteristique de la racine motrice. Au contraire, 1'excitation du bout peripherique des nerfs sensitifs ne donne jamais lieu a aucun phenomene moteur. L'inaptitude du nerf a determiner des contractions musculaires, lorsqu'on le pince dans un point qui a ete deja soumis a ce genre d'excitation, montre qu'on a detruit le nerf dans ce point el que rexcitabilite ne se transinet pins a travers les parties contuses. Cet effet est le meme que celui produit par nne ligature portee sur le nerf. Cette experience, du reste, est fort an- cienne, et je vous ai dit que Willis placant une ligature sur le nerf phrenique faisait coutructer le diaphragme en excitant le nerf au-dessous de la ligature, tandis que l'excitation portee au-dessus restait sans effet. Nous avons renonce a 1' explication qu'il donnait du pheno- mene : selon lui , la ligature empechait le passage des esprits animaux ; mais le fait reste exactement le meme, les theories et les mots seuls ont change. En experimentant sur des grenouilles, on voit que Texcitabilite du nerf pent, dans des conditions conve- t/lO NERF MOTEUR, nables, particulierement pendant 1'hiver, par une basse temperature et sous une cloche, pour empecher le desse- chementdes nerfs, persister pendant vingt-quatre heures et m£me quelquefois plus, apres la mort de 1'animal. Pen- dant 1'ete1 , durant les grandes chaleurs, cette persistance est beaucoup moindre. Dans les conditions que nous venons d'indiquer, la propriete du nerf moteur coupe se perd generalement du centre a la pe'ripherie , dans le m6me sens que se produit 1'alteration de la fibre ner- veuse lorsqu'on laisse vivre 1'animal. Quelques excitants chimiques, les acides concentres, les alcalis caustiques , detruisent le nerf sur lequel on les fait agir; d'autres produisent leur eifet sans detruire le nerf avec lequel on les met en rapport. Kolliker s'est livre sur ce genre d'experimentation a d'inte- ressantes recherches dont je vous signalerai seulement ici une conclusion interessante. Kolliker a vu que certaines substances n'agissent que sur la moelle du tube nerveux qui est crispee, racornie, sans que pour cela le nerf cesse de transmettre les ex- citations. Par ces resultats, il s'est trouve amene a conclure : que la portion efficace de I'element nerveux serait \ecylinder axis, etnon la moelle et Tenveloppe, qui devraient etre consideres comme des parties accessoires. Quand on enleve de 1'eau a un nerf, c'est-a-dire qu'il se desseche, il perd aussi la propriete de transmettre rex- citation; mais on restitue au nerf ses proprie tes en 1'hu- mectant un peu. 11 y a des substances chimiques qui detruisent sans retour les proprietes des nerfs; il y en a d'autres qui ne les detruisent qu'en enlevant 1'eau, et on SES EXCITANTS. pent les faire reparaitre en ajoutant convenablement de I'humidite' an nerf. Cette vie et cette mort alternatives du nerf par privation et restitution d'eau est un fait interessant sur lequel un de nosanciens eleves, M. le doc- teur Kunde, a insiste" avec raison. Seulement il ne taut pas que l'ope"ration de la soustraction de 1'eau ou de sa restitution soit trop brusque, sans quoi le nerf perdrait definitivement ses proprietes. A cote de ces agents , il en est encore d'autres qui excitent 1'irritabilite nerveuse sans alterer les nerfs. Deux substances ont etc signalees comme douees de cette propriety : ce sont la bile et le chlorure de sodium. Voici, sur cette assiette, uue patte de grenouille dont le nerf prepare repose dans un verre de montre. Nous versons de la bile dans ce verre de montre, et vous pou- vez voir ce membre devenir le sie'ge de convulsions qui dureront tant que son nerf moteur trempera dans le liquide biliaire. G'est la, il faut en convenir, un excitant assez singulier. La bile doit-elle cette proprie'te a ses qualites alcalines? Non , messieurs, car on lui a substi- tue", sans obtenir le meme effet, duse"rumet une solution legere de carbonate de soude. M. Budge , en isolant les acides de la bile, aurait reconnu que c'est a eux qu'on doit rapporter 1'excitation du nerf. Partant de la, il a, dans une theorie fort ingenieuse assurenient , mais qui n'est qu'une hypothese pourle moment, assigneaux elements de la bile resorb^s le r61e d'excitateurs normaux des proprie'te's du tissu nerveux. A cote de la bile se place le sel marin. Voici une se- conde patte de grenouille dont le nerf trempe dans le sel 1/|2 NERF MOTEUR, marin ; elle est, comme la premiere, le siege de mouve- ments tres appreciables. La presence clu sel marin dans I'economie a donne lieu aux memes hypotheses que celle de la bile. Quoi qu'il en soil, cesdeux substances sont les deux seuls excitants de ce genre que Ton counaisse le mieux. Dans nos experiences, nous ferons usage d'un autre agent : je veux parler de Mectricite. Outre la commo- dity qu'il y a dans son usage, son etude emprunte un vif iuteret aux esperances que la the'rapeutique a fou- dees sur lui. L'electricite est, de tous les agents excita- teurs du systeme nerveux , celui qui a sur le systeme moteur rinfluence la plus energique. (lette intluence est telle qu'on a cru pouvoir la rapprocher de 1'excitant normal de ce systeme et rapporter a des phenomenes electriques les actes de 1'innenration. Avant d'examiner le mode d'action de cet excitant, nous devons connaitre les sources auxquelles on 1'em- prunte, et les diverses conditions dans lesquelles on 1'em- ploie. Pour cela, il est necessaire que nous examinions quelques-uns des instruments que Ton met en usage. II y a longtemps que, pour la premiere fois, on a fait 1'essai du stimulant electrique; mais ce n'est que depuis ces derniers temps que Ton a quelques notions sur rin- fluence du fluide electrique comme excitant I'agent ner- veux. Dans les experiences physiologiques, dans les applica- tions therapeutiques de Telectricite , on fait usage d'une grande variete d'appareils. La pile a auges qui est devant vous me dispense de SES EXCITANTS. vous montrer la pile a colonne, la pile deWollaston, etc. C'est a ce type que se rapporte la petite pince electrique dont vous nous avez souvent vu faire usage, pince qui n'est qu'une disposition particuliere que M. Pulverinacher a donnee a la pile de Volta , disposition dans laquelle les elements zinc et cuivre, enroules c6te a cote, autour d'un billot de bois, reagissent 1'un sur 1'autre des que 1'appa- reil est mouille par une solution acide , par du vinaigre par exemple. J'avais d'abord demande a M, Pulverinacher, il y a une dizaine d'annees, lorsque j'eus 1'idee de ces pinces, de me faire une petite pince electrique, qui etait com- posee par deux branches formers de fils euroules et portant a leur extremite les poles zinc et cuivre , tandis que les deux branches se trouvaient reunies par uii anueau de cuivre faisant ressort (fig. 16). C'etait pour faire mes experiences sur le curare et pour montrer que cette substance avait la propriete que j'ai decouverte de detruirele nerf et de respecter 1'irritabilite musculaire. Mais cette petite pince , tres suffisante pour exciter le nerf, puisqu'il suifit pour cela d'un simple arc de cuivre et de zinc, montrait bien que le nerf avait perdu son ex- citabilite ; mais elle ne pouvaitpas montrer que le muscle avait conserve son irritabilite, parce qu'elle n'etait pas assez forte pour exciter une contraction en agissant sur le muscle lui-meme. C'est alors que je fis faire la pince electrique plus grande (fig. 1^1 et 15), dans laquelle les branches suntdi- visees en plusieurs couples, ce qui auginente considera- blement la tension. Aussi cette pince est non-seulemenl EXCITATION ELECTRIQUE. capable de faire contracter les muscles sans 1'intervention du nerf, mais elle decompose meme 1'eau. FIG. 14 (i). FIG. 16 (2). (1) Grande pince electrique. — C, lildecuivre ; — Z, fil de zinc. •r! (2) Petite pince electrique. — c, pole cuivre; — N, p61e zinc. Les extr<5mites de ces pinces ^lectriques P, IN sont en platine, alin qu" elles ne s'oxydent pas et que le contact soil toujours exact avec le mtftal. DU SYSTEME NERVEUX. On pourrait ilu reste affaiblir ce petit appareil au moyen d'une chainette qu'on placerait a diverses hau- teurs, et qui unirait les branches de la pince au-dessous de 1'arc de cuivre C, qui les re unit en haut. D'apres ce que j'ai dit precedemment , on voit qu'il faut une action electrique bien plus forte pour faire contracter directement le muscle que pour le faire con- tractor par I'intermediaire du nerf. Cela prouve bien que le nerf n'agit pas par relectricite qu'il transmettrait, a moins qu'on n'admit qu'il put en quelque sorte lui servir de multiplicateur, ce qui serait difficile a etablir. Si, quand le muscle contient des fibres nerveuseset qu'on agit sur lui, on pouvait le faire contracter plus faci lenient que lorsque le curare a empoison ne 1'animal et detruit par consequent toutes les radicules nerveuses motrices, ce serait un moyen de reconnaitre les muscles curare's de ceux qui ne le sont pas. Mais nous reviendrous plus tard sur ces faits interessants. II ne s'agit ici que des appareils electriques propres a exciter les nerfs. Toutes les piles dont nous venous de parler sont a courant inconstant. II faut treniper la pince electrique dans le vinaigre pour lui restituer sa force quand elle s'affaiblit. Voici un couple de Bunsen: c'est, vous le savez, la disposition la plus employee des piles a courant constant. La disposition generale est la memeqne dans les piles de Daniell, de Grove, de Becquerel. Enfin , dans ces deux bottes sont des appareils d'une autre nature , ou le courant constant donne n'est pas utilise directement; mais on 1'emploie . par une disposition speciale, a produire. un autre lS,, SYST, NERV — i. 10 EXCITANTS ELECTRIQUES rant , courant induit , qui est celui dont on se sert. L'un de ces appareils est celui de Breton : c'est une mo- dification de 1'appareil de Clarke, ou le courant est pro- duit, non plus par une decomposition chimique. maispar une action magnetique. Dans cet autre, c'est une petite pile a courant constant qui Iburnit le courant inducteur. Les physiciens admettent que , quand on fait usage de la pile a auges, dans laquelle les elements cuivre et zinc sont separes par de 1'acide sulfurique tres etendu, il y a un courant qui s'Miappe par les deux extremites, chaque extremite representant un pole de la pile. On dis- tingue un p61e positif et un p61e negatif : le pole positif est celui auquel se rend 1'oxygene quand on decompose 1'eau par la pile ; le p61e negatif est celui auquel se rend 1'hydrogene. La m&me chose se retrouve dans les piles a courant constant, ou 1'element cuivre est remplace par une tahlette de charbon prepare qui joue le role de pole positif. D'une maniere generate , le pole ne"gatif est toujours du cote du m^tal attaque. On admet encore, pour les besoins de la theorie, que le courant a un sens, qu'il va du pole positif au pole negatif, ce qui veut dire que les choses semblent se passer comme s'il en etait ainsi. On dit souvent, et YOUS trouverez dans plusieurs ou- vrages de physique, que c'est le contraire pour la pile a auges que, dans cette pile, le p61e positif; correspond au dernier element zinc, et le p61e negatif au dernier de- ment cuivre ; que, par consequent, le courant serait dirige du zinc au cuivre. M. De la Rive (1) fait remarquer que (1) Traite d'rlectricite Iheoriquc et appliquee. DU SYSTEME NERVEUX. Mil cette appreciation n'est pas exacte : si les choses parais- sent, en effet, se passer ainsi, cela tient uniquement a ce que la pile est mal construite. II semble que, pour le constructeur, le couple soit forme par les deux lames cuivre et zinc soude'es ensemble; mais il n'en est pas ainsi, et le couple electrique est forme par les deux lames cuivre et zinc, qui sont se"parees par le bain acide. II resulte de cette erreur que, a chaque extremite de la pile , le dernier element est double d'une lame de cuivre , si c'est 1'element zinc, d'une lame de zinc, si on considere Mement cuivre , qui en re"alite n'appar- tiennent pas a 1'appareil, et qu'on devrait supprimer. C'est la presence de ces elements inutiles qui en a impose et a fait dire que, dans cette pile , le pole positif corres- pondait a la derniere lame de zinc , le p61e negatif a la derniere lame de cuivre , tandis que le pole positif se trouve reellement represente par la plaque de cuivre que double la derniere lame de zinc, et le pole negatif par la plaque de zinc que double la derniere lame de cuivre. Dans notre pince Electrique, nous voyons une ex- tremite zinc, c'est le p61e negatif, et une extremite cuivre, c'est le p61e positif. Toutes deux se terminent par des aiguilles de platine. Ce petit appareil est extr6- mement commode et domie> inalgre son petit volume, des effets d'une assez grande puissance. Vous allez le voir. adapte a ce petit voltametre, decomposer de 1'eau non acidulee; effet qui ne pent etre produit par une pile a auges que si elle est puissante. Mais ces derniers appareils offrent un grave inconve- nient: celui de ne pas fournir un courant constant, ce 1/|8 EXCITANTS ELECTRIQUES qui les rend impropres aux experiences physiologiques d(\stinees a etre comparees entre elles, et pour lesquelles on doit desirer avoir ton jours un courant de la meine ('iiergie. Aussi prefere-t-on les piles a courant constant, et particulierement cellc de Bunsen. Je vous signalais tout a 1'heure les appareils dans les- quels on emploie les courants induits, courants indirects, se developpant sous 1'influence d'un courant direct pro- duit par une pile (appareils de MM. Duchenne (de Bou- logne), Legendre et Morin) , on par la rotation d'un morceau de fer doux devant un aimant (appareils de Clarke , Breton) (1). Ces derniers appareils sont aujourd'hui les plus frequemment employes. On admet que les courants induits out certains avantages sur les courants di- rects; tandis que ces derniers produisent, outre les commotions, une douleur des plus vives, les courants induits agissent tres energiquement sur le mouvement sans avoir, a beaucoup pres, sur le sentiment, une in- fluence aussi marquee. Quant aux effets therapeutiques, sont-ils les monies? On ne pent encore 1'affirmer; mais, dans Tincertitude ou Ton se trouve sur les effets et lo mode d'action des uns et des autres, on concoit la prefe- rence qui est accordee a ceux qui ne produisent qu'une douleur moindre. En outre, bien qu'on puisse employer des courants continus on des courants interrompus, on (1) Voyez Duchenne, De V electrisation localisee et de son application a la physiologic, a la pathologic et a la therapeutique. Paris, 1855, in-S. • — Bouvier, Rapport a I'Academie de medecine sur les divers appareils electriqncs (Bulletin dc I'Academie de medecine, 1856 t. XXI, p. 650). DU SYSTEMS NERVEUX. i/|9 n'emploie plus ordinairenient ces derniers. M. Remak a particulierement insiste sur Femploi des courants con- tinus, clont il dit avoir retire de tres grands avantages. Le precede que Ton mettait autrefois en usage pour appliquer des courants continus fournis par une pile a auges, avait un inconvenient : pour les appliquer, on plantait clans les chairs deux aiguilles autant que pos- sible sur le trajet des nerfs; puis ces aiguilles etaient mises chacune en communication avec les p61es de la pile. Cette operation causait une douleur tres vive; de plus, il y avait ton jours autour de 1'une des ai- guilles rubefaction de la peau , souvent avec produc- tion d'une eschare profonde et difficile a guerir. Avec les piles a courant interrompu, on n'a pas a re- douterles memes inconvenients; 1'interruption du cou- rant supprime les elfets chimiques, comme j'ai pu m'en assurer experimentalement. Pour cela, j'avais fait faire un appareil eminemment propre a montrer combien les effets d'un courant inter- rornpu different de ceux d'un courant continu. Sur le trajet du courant CIZ (fig. 17), j'avais fait dis- poser un petit voltametre V, renfermant del'eau, et une cuisse de grenouille G touchant par son nerf n an fil ti-y- verse par le courant. Un petit interrupteur I, pareii i celui de la figure II, permettait, etant place sur le trajet du courant, de le rendre intermittent. Or, on pent voir, a 1'aide de cet appareil , que, taut que le courant est continu, les effets chimiques se produisent et les effets physiologiques sont mils, ou du moins ne sont pas ap- preciables. En effet, 1'eau du voltametre est alors decom- 150 ACTION DES COURANTS FIG. 17 (1). (1) Fig. I. — P, pile a auges dormant le courar.t clectriquc ; le courant st dirige dc C pole positif en Z pole ne"gatif ; sur son trajet se irouve CONTINUS ET 1NTERMITTENTS. 151 posee pur le couraut, tandis que le membre de grenouille reste parfaitement immobile. Mais des qu'on vient, au moyen de rinterrupteur, a rendre le couraut intermittent, tout change ; la decomposition de 1'eau s'arrete dans le voltametre, etla cuisse de grenouille entre dans de vio- lentes convulsions. Cet exemple des conditions differentes dans lesquelles se uianifesteut Faction chimique et Faction physiologique est certaiuement fort remarquable. Ici (fig. 17, II), lachainec nousdonueun courant ac 6, sur le trajet duquel est place un interrupteurl, permet- tant ou d'interrompre le couraut, oude former le circuit de maniere a avoir un courant continu, ou enfm de 1'ou- un petit vollauietre V plein d'eau , et ensuite le petit interrupteur 1, el cnfin le nerf n tenant a la cuisse d'une grenouille G recemment morte. Ici Tappareil s'est trouve" represente pour line aulre experience ; rinterrupteur dans le cas actuel devrait etre place" a droite du voltametre. Ouand rinterrupteur Ifonctionne et que le courant est interrouipu, on voit la cuissede la grenouille entrer en convulsion, et le voltametre rester en repos; aucune bulle de gaz ne se de'gage. Si, au contraire, le courant devient conlinu, aussitot la cuisse de la grenouiile reste en repos, et le voltametre donne lieu a un degagement tres actif de gaz. Fig. IV. — Kegulateur de rinterrupteur i qui peut remplir divers cffets. Quand 1'indicateur S est porte" sur I, il y a interruption complete ; sur B il y a une interruption tres rapide sur 2 interruptions tres lentes, et enfin sur 5 il y a continuite du courant sans interruption. Fig. II. —11 y a une chaiiie electrique 6, C, a qui fournit 1'electricite. Le courant a Fr passe par le petit voltametre H et par la tige de cuivre F", puis par le nerf n et par le fil F. Au moment de 1'interruption du cou- rant, il y a contraction de la cuisse de grenouille M en M', et rien dans le voltametre. Lors de la continuite du courant, il y a flaccidite de la cuisse de grenouille en Met degagement considerable de gaz dansle voltametre. Dans la figure III on a grossi la par tie de Tappareil ou le nerf de In cuisse de grenouille est en contact avec le courant ; — n n, nerf; — /, lil de laiton communiquant avec un pole de la pile ; — f /", iil conducteur communiquant avec Pautre pole. 152 ACTION DES CO U RANTS vrir et de le termer a des intervalles de temps rappro- ches, de facon a avoir un courant intermittent. Al'inter- rupteur sont annexes un petit voltametre H conienant de 1'eau destinee a etre decompose par le courant, et une cuisse de grenouille M, en contact avec les conduc- teursFF", parson nerf w. Le voltametre fournit la mani- fest;!': en des effets chimiques, et les contractions de la patte de grenouille accusent les effets physiologiques. Dans ce moment, le courant est suspendu, et vous pouvez voir que la patte de grenouille M est en repos, que 1'eau ilu voltametre n 'est pas decomposed. Nous rendons main- tenant le courant intermittent : la patte de grenouille est violemmeiit convulsee. Vous la voyez se roiclir en M' et etre agitee de secousses tetaniques. Nous rendons main- tenant le courant continu : alors seulement la decompo- sition de 1'eau commence ; quant a la patte de grenouille, vous la voyez entrer en repos ; nous 1'avons vue seule- rnent agitee de quelques secousses, au moment ou le changernent du courant a eu lieu. En faisant usage de cette chaiue de Pulvermacher, nous aurous un develop- pement d'electricite considerable, et le phenomene est tres observable. Vous voyez, en effet, que dans cet appa- reil qui fonctionne, le courant restant continu, la de- composition de 1'eau s'effectue tres bien, lemembre de la grenouille reste toujours en repos. En retablissant 1'intermittence du courant , nous faisons maintenant cesser la decomposition de 1'eau ; tandis que les con- vulsions recommencent a nous manifester 1'action phy- siologique de 1'appareil. Sur ce lapin, je vais maintenant vous rendre tcmoin CONT1NUS ET INTERM1TTENTS. 153 ties efl'ets de I'^lectrisation continue que je vous signalais tout a 1'heure. On a rase les polls dans deux places; nous y enfoneons des aiguilles; puis nous meltons cha- cune de ces aiguilles en communication avec l'un des poles de notre pile a auges d'une vingtaine d' dements. Aussitot 1'animal pousse des cris et accuse une vive dou- leur. Presqu'en meme temps la rubefaction que je vous ai annoncee parait autour de 1'une des aiguilles: c'est autour de celle qui correspond au p61e negatif. Passons maintenant a 1'etude des nerfs moteurs au moyen des excitants dont je viens de vous entretenir. On croyait autrefois que les nerfs seuls etaient con- ducteurs de 1'electricite. Cette cause d'erreur a long- temps empeche de tirer, des experiences auxquelles on se livrait. des conclusions legitimes. Voici comment on operait dans les premiers essais : prenant un membre de grenouille, on appliquait Fun des rheophores sur le nerf, et 1'autre a Fextremite du membre ; on determi- nait ainsi des contractions. On partait alors de la pour admettre que le courant parcourt le nerf dans toutes ses ramifications; ce qui est completement faux. C'est ainsi que Seubert a obtenu des contractions par 1'excitation des racines posterieures, comme par 1'excitation des ra- cines anterieures; maisce n'est pas le nerf qui dans ces casestmisen jeu, car ilesttres peu conducteur. Mueller s'est assure que 1'electricite passe plus facilement a tra- vers les muscles qu'a travers les nerfs. On obtiendrait aussi des contractions en galvanisant sur une racine pos- terieure avec un courant trop energique. Jamais il ne faut, pour faire agir un nerf, faire passer ACTION DE L ELECTRICITE I'electricite ailleurs que par le nerf lui-meme. On re- connaitra la necessity de cette precaution en operant sur un animal dont les nerfs sont dature. Mais chose remarquable, c'est que, comme vous avez pu le voir dans une experience precedente, les reactions qui accusent cette exquise sensibilite ne traduisent que les changements qui surviennent brus- quement dans 1'influence de I'agent excitateur. C'es^ ainsi que les muscles ne se contractent sous 1'influence des nerfs moteurs galvanises que quand on commence a faire passer le courant ou qu'on I'augmente ou le diminue SUR LES NERFS MOTEURS. 159 subitement. La meme chose a lieu pour les nerfs sen- sitifs qui, soumis a des actions calorifiques diverses, n'ac- cusent que les variations de la temperature , et cela par un mecanisme sur lequel j'insisterai longuement quand nous nous occuperons des mouvements reflexes. II n'est pas toujours necessaire d'interrompre le cou- rantqui traverse un nerf : en en faisant seulement varier I' intensity soit en plus, soit en moins, des contractions musculaires accuseront encore ces variations. NEUVIEME LECON. ipherique. nous avons la double con- traction obtenue tout a 1'heure sur un nerf plus recem- ment prepare. Ceci nous prouve que ces phenomenes peuveut etre excessivement variables, et qu'ils n'out pas du tout I'imporlance physiologique qu'on avoulu leur attribuer. C'est ce qui sera etabli un peu plustard. Mais d'abord je dois vous exposer la nature des caracteres que Ton a invoques comme distinctifs des nerfs moteurs purs ou associes a des fibres sensitives. Nous savons qu'en faisant traverser un nerf par un courant galvanique, des convulsions sont produites dans les muscles auxquels se distribue ce nerf; que ces con- vulsions, dans des circonstances que nous vous avons indiquees, se manifestent tanlot au moment de la fer- meture, tantot au moment de Finterruption du circuit que parcourt le courant. Cette pile cleBunsen, qui est faible et a courant con- stant annexe a Tappareil que nous avons de'crit (p. io6, fig. 19), nous a servi a donner la preuve du fait que nous SUR LE NERF MOTEUR. 167 voyons en ce moment se reproduce tel quo vous avez pu dejii 1" observer. Dans un memoire oil sont relatees des experiences de cette nature. MM. Matteucci et Longet out dit que. gal- vanisanl un nerf moteur. on obtieut des resultats diffe- rents selon qu'on galvanise le nerf mixte on le nerf pur de toute association a des fibres sensitives, c'esi-a-dire avaiit sa reunion a la racine posterienre. Ces experimentateurs ont dit qu'en galvanisant les racines anterieures de facon que la racine fut traversee de la peripbe'rie an centre par un courant ayaut ainsi une direction centripete. on obtenait des convulsions seulement au moment de Tentree du courant. c'est-a- dire a Finstant ou Ton ferniait le circuit. Us disent qu'au contraire, en disposant le courant de maniere que la raciue fut parcourue du centre vers la peripberie. cou- rant centrifuge, on n'avait de contraction qu'au moment de i'interruptiou du courant. En d'autres termes, le couraut centripete ou courant inverse donne . en tra- versant les racines anterieures, des convulsions a Ten- tree ; tandis que le courant centrifuge, ou courant direct, donne des convulsions a la sortie. En operant. non plus surles raciues motrices. mais sur les nerfs mixtes, le pheuomene se presentait . d'apres MM. Longet et Matteucci, dans un ordre inverse. Le cou- rant direct, centrifuge, donnerait des convulsions a Ten- tree, et le courant inverse, centripele, en donnerait a la sortie. Ainsi Ton pourrait. operant alterralivement, obtenir une contraction a Tentixe et une a la sortie. 168 ACTION DE Nous vous avons ditdoja avoir repete ces experiences et avoir vu que les phenomenes e taient plus complexes. Pour juger de ce qui se passe dans ces diverses circonstances,il est indispensable d'examiner les nerfsdans diverses con- ditions et de tenir cbmptede 1'influence de ces conditions. Au lieu d'agir sur des troncons de nerfs, nous avons voulu experimenter sur r animal vivant. Nous avons pris une grenouille, nous avons decouvert son nerf crural, qui a ete place sur les deux p61es des rhe"ophores de notre appareil a courant faible et constant. Lorsque le nerf est aussi normal que possible, et dans les condi- tions les plus rapprochees de celles de son fonctionne- ment hubituel, nous avons vu qu'on n'a jamais qu'une convulsion, et on 1'a toujours au moment de la ferme- ture clu circuit, a Tentn'-e clu courant. Vous pouvez voir, sur cette grenouille preparee comme il vient d'etre dit, qu'en changeant les poles, on n'a toujours qu'une contraction a 1'entrce, que le con- rant soit direct on inverse, centrifuge on centripete. Nous avons verifie ce fait sur des lapins et sur des chiens, et, dans les epreuves qui ont ete repetees a satitite, le nieme result at a i-ti; constamment obtenu. Nous aliens maintenant changer les rapports du nerf en le coupautde nianierequ'il ne tienneplusala moelle. Le voici coupe apres sa reunion u la racine posterieure. de sorte que la section porte sur le nerf mixte. Une serie de phenomenes differents de ceux que nous avons ob- serves tout a I'heure va se produire. Et d'abord vous voyez querexcitation passagere par le m6me courant, applique tres pen au-dessous de la section, determine deux con- SUR LES NEUl'S MOTEURS ET MIXTES. 169 tractions : une a 1'entre'e, 1'autre a la sortie du courant. C'est la 1'indice d'un premier etat de fatigue du nerf. Tout a 1'heure il serait encore plus epuise, et nous n'au- rions plus qu'une contraction a 1'entree ou a la sortie. Vous voyez, d'apres ces seules experiences, qu'il est impossible d'admettre que ces caracteres puissent dis- tinguer un nerf mixte d'un nerf moteur pur.puisque ici, sur un meme nerf, nous les avons tous successivement observes. Cette seule remarque me parait une objection fondamentale aux conclusions dont nous parlions tout a 1'heure et quiauraientpour objetde distinguer par ces ca- racteres le nerf moteur a Tetat de purete ou de melange. Nous avons dejii fait des experiences qui nous out montre qu'une serie de periodes doivent etre distinguees dans lesdifferents etats par lesquels lenerf experimente peut passer et que. chns toutes ces experiences, on n'a otudie que des conditions purement physiques sans se preoccuper de la periode physiologique , qui est restee completement inconnue. Nous aurons encore lii un exemple lemarqiiable de la tendance qu'ont les physiciens, dans les recherches physiologiques les plus interessantes et les plus inge- nieusement conduites, a fairepredominerle phenomene physique sur le phenomene physiologique. Le reproche que nousadressons aujourd'hui aux phy- siciens, nous 1'avons deja adresse aux chimistes, aux anatomistes, a tous ceux qui, trop confiants dans 1'ex- ccllence d'un precede de recherches, neconsiderent que les conditions qui se rattachent a ce moyen d'investiga- tion sans se preoccuper des conditions physiologiques. DIXIEME LECON. o 23 JANVIER 1857. SOM \1AIRE : Critiques nouvelles sur Pexcitabiiile <51eclrique des nerfs moteurs purs ou mixtes. -- Experiences. — Conditions clans lesqnelles il est ni;cessaire de se placer pour conserver anx phenomenes lenr caractere physiologique. — Fatigue du ncrf par excitation , dessicca- tion, contusion, section. — Reactions qui correspondent, anx ditterentes pgriodes de son aflaiblissement. — Difficulty's dc Fexpe'riineniation lorsqu'on agit directement sur les racines. — i)ans la mort lente , le nerf moteur peril de la peripherie an centre, et uon du centre a la pe'riphe'rie. MESSIEURS, Nous vous avons, dans la derniere lecon, entretenus de la difficulte et meme de 1'impossibilite qu'il y avail a distinguer les nerfs moleurs purs des nerfs mixtes par 1'excitation qu'y determine le galvanisme. Depuis lors un de nos auditeurs, M. Em. L. Rousseau (de Verzy), ancien eleve de 1'Ecole normale superieiire, licencie es sciences mathematiques et physiques , nous a com- munique des observations encore inedites qu'il a faites. et qui sont de tout point d'accord avec ce que nous vous disions en terminant la derniere lecon. Je vais vous indiquer les resultats de ces recherches, d'apres la note meme qui m'a ete remise par M. Rous- seau. « Nos recherches demontrent, dit M. Rousseau, que les courants eleclriques agissent de la meme maniere sur ACTION DE L'ELECTRIQTE SUR LES NERFS. 171 les filets nerveux moteurs des nerfs mixtes, et sur ceiuo des ratines anterieures rachidiennes,res\i\tal contraire aceux obtenus par MM. Longet et Matteucci. » Nous signalerons en meme temps, continue le meme auteur, les causes d'erreur qui expliquent com- ment out pu se tromper des observateurs aussi habiles que MM. Longet et Matteucci , et nous indiquerons les precautions experimentales indispensables pour se mettre a 1'abri de ces causes d'erreur. » A 1'etude de ces precautions se rattache la decou- verte de quelques faits nouveaux : » 1° De i'existence (dans presque toutes les experiences ou Ton a fait agir 1'electricite sur les nerfs) de courants derives tres influents sur le sens des resultats; » 2° Et surtout de ce fait assez remarquable qui ex- plique 1'influence et rend indispensable 1'observation des courants derives, savoir : » De deux courants de sens oppose qui agissent simul- tanement a une hauteur difference sur un nerf (renfer- mant des filets moteurs seuls ou meles a d'autres\ le cou- rant le plus pres de la periphene inanifeste sent son action par des contractions dans les muscles animes par ce nerf; il s'oppose comme une barriere a la transmission (a travers la portion du nerf quil excite] de V action nerveuse developpee plus haul par le courant de sens oppose. » Ainsi, le but principal de notre travail, dit M. Rous- seau, est de rectifier une erreur de MM. Longet el Mat- teucci, en prouvant (contrairement aux resultats an- nonces par ces physiologistes) qu'un courant galvanique 172 ACTION DE L'ELEGTRlGlTfi qui traverse une portion de la longueur clu nerf agit de la meme maniere sur les mouvemenls isoles des muscles auxquels le nerf se distribae , que ce nerf soil mixte , c'est-a-dire a la fois moteur et sensitif (comme un nerf sciatique) , ou qu'il soit exclusivement moteur (comme une ratine spinale anterieure). » Notre travail aura encore un autre resultat : celui de faire connaitre quelques fails nouveaux qui expliquent les differents resultats de MM. Longet etMatteucci. (Test la decouverte de ces faits qui nous a permis d'e'viter nous-memes les causes d'erreur que nous signalerons dans les experiences. » Je n'ai pas besoin de rappeler que. si Ton re' unit les deux poles d'une pile au nioyen d'un corps conduc- teur, il s'etablit dans celui-ci 1111 courant qui va dupole posit ifau pole vegatif. » On sait egalement que, si ce corps conducted? in- terpos^ aux deux poles de la pile est une portion de nerf, on appelle le courant direct ou inverse, suivant qu'il cir- cule du centre nerveux a la peripherie, ou de la peri- pherie au centre nerveux : qu'ainsi on a un courant direct quand le pole positif de la pile est plus rapproche de Forigine du nerf que le pole negatif, et qu'on a un courant inverse dans le cas contraire. » Mais il importe de fixer son attention sur un fait bieu etudie dans les cours de physique, et qu'on oublie souvent dans les applications physiologiques de Telec- tricite ; nous aurons a 1'invoquer a chaque instant pour Texplication des resultats d.e nos experiences. Void ce fait : SUR LES NEUVS MOTKURS ET MIXTES. 1 75 » Si en deux points P ol N d'un corps couducteur PNAP (fig-. 20) formant un circuit ferme, on applique Ics deux poles d'une pile, il s'etablit dans ce corps conducteur deux courants : Tun qui va de P en N par le chemin le plus court (on Fappelle courant principal), 1'autre qui suit le chemin plus long PAN (on 1'appelle courant derive). » An contraire , il n'y a qu'un seul courant PN, si le corps conducteur ne forme pas un circuit complet commeBPi\A(figv21). » Ces preliminaires poses, arrivons aux resultats ex- perimentaux : » Premier cas. — 1° Quand . dans un nerf mixte ac encore adherent (fig. 23) on non (fig. 22) au centre nerveux cerebro-spinal, on fait passer un courant di- rect ou inverse pvu de temps apres que le nerf a et~ FIG. 22. FIG. 23. decouvert , des contractions surviennent dans les mus- cles auxquels il se rend , a i etablissement el a la rupture 17 A ACTION DE L^LECTRICITfi du circuit; c'est ce qu'ont bien vu MM. Longet et Matteucci, ainsi que leurs pre"decesseurs. On a alors : Commencement. Fin. Conrant direct .... 1 1 Courant inverse. ... 1 1(1) » Le merne resullal seproduitsur les ratines anterieures. » Notons encore , avec MM. Longet et Matteucci, que les resultats de cette premiere periode se reproduisent (assez longtemps apres que la seconde a commence) si Ton vient a augmenter la force du courant employe", ou a agir sur une nouvelle portion du nerf. » Deuxieme cas. — 2° An bout de quelque temps, on voit apparaitre une autre periode dans laquelle les contractions n'ont plus lieu qu'aw commencement de Vun des couranls et a I' interruption de i'autre. MM. Longet et Matteucci sont d 'accord encore avec leurs predecesseurs pour les nerfs mixtes, mais ils s'en separent pour les racines anterieures et etablissent la loi represented par ce tableau : N* I. Commen- cement. Fin Nerfs j Courant direct . 1 0 mixtes. Couranl inverse. 0 1 II. Commen- cement. Fin Ratines I Courant direct . 0 1(1) anter". ( Couranl inverse. 1 0 » Ici, continue toujours M. Rousseau , nous cessons d'etre d'accord avec les physiologistes que nous venons de citer, et nous allons montrer : » A. Que la loi de la colonne n° I est egalement vraie pour les racines anterieures et pour les nerfs mixtes; on en obtient les resultats quand on se soustrait a 1'in- fluence de tout courant derive. (1) Le chiffre 1 indiquani contraction dans les muscles auxquels se distribue le nerf, et 0 Tabseuce de contraction. SUR LES NERFS MOTEURS ET MIXTES. 175 » B. Que les norfs mixtcs, comme les racines ante- rieures, donneut les resullats de la colonne n°H. dans certains cas hien determines de derivation electrique. Cette difference n'est dn reste qu'apparente , et nous ferons rentrer ces resultats dans la loi generate de la colonne n° I, en montrant qne dans tons ces caseri appa- rence contradictoires,iesphenomenes sont dus ami cou- rant derive de sens oppose a celui du courant principal. » Commencons paries nerfs mixtes,donU'etude est la pins facile, et faisons varier les conditions experimentales pour montrer comment et pourquoi les resultats chan- gent la disposition de I' experience.. » Apres avoir bien saisi la loi du phenomene, de ma- niere a pouvoir prevoir dans chaque cas ce qui va se passer, nous referons la meme serie d'experiences siir les racines anterieures (i). » 1° Patte galvanoscopique a (fig. 24) separee du tronc ; nerf sciatique AB souleve par un ill de soie b (attache FIG. 2/i. FIG. 25. a son bout central libre B; , on reposant sur un taffetas assez large bien sec et bien isolant. Commencement. Fin. N, courant direct. . . 1 0 (1) Pour ne pas compliquer le langage et les figures, nous n'indique- rons dans chaque experience que celui des deux couranls qui agit en comuaencani ; il sera sous-emendu que i'autre agi> a sa rupture. 176 ACTION DL: L'^LECTRICITI- » 2" Patte galvanoscopique separee du troiie; nerf AB sow /ere' en ience dela figure 2ft.avec cette diftV-rence qu'on laisse retomber le bout B jusqu'au contact des muscles); on a, comme dans le cas pre"- cedent : PN, nmnint inverse ... 1.0. » Quelle est done la difference entre ('experience re- presentee dans la figure 2'\ et celle de la figure 25 (ou FIG. 26. de la figure 26), qui clonne un resultat tout oppose, si ce n'est que dans ces deux dernieres le nerf et les muscle8 sous-jacents ferment, nn circuit ferme, et par suite de 1'application des deux poles aux points PetN, il s'etablit dans ce circuit deux courants, un courant principal P N inverse et un courant derive P/J Bi\ qui est direct dans les deux portions du nerf qu'il traverse PA et BJ\ (fig. 25 et fig. 26). » C'est le courant derive qui produit la contraction en suivant la loi de la colonne n°I, tandis que Faction du courant principal ne se manifesto pas. SUR LES .\EUFS MOTEURS ET MIXTES. 177 » ti° Coinme une preuve plus eviclentede la verite de 1'action que nous attribuons a ce courant derive. » Interrompons le circuit dans un point quelconquc D (fig. 27) de 1'intervalle AB, en coupant la cuisse de la grenouille, de maniere que les deux fragments ne tien- neut plus que par le nerf sciatique AB souleve en anse par un fil de soie; separons les deux fragments par un corps isolant, un morceau de taffetas bien sec place sous toute la patte; il n'y a plus de courant derive : le courant principal agit seul. et la contraction so manifesto alors suivant la loi generale : PN, courant direct. ... 1 . u. » 5° Dans cette experience de la figure 27 si Ton retablit le courant derive en fermant le circuit par un pen de papier mouille D (fig. 28), ou un pen d'ean sur le taffetas, immediatement le resultat change, et la contraction a lieu au commencement quand le courant principal est un : Courant inverse. . . 1 . 0. » Maintenant, rechercbons comment ce courant derive peut etre assez fort pour einpecher la manifestation du courant principal , qui generalement est plus intense quo le courant derive. ^L JB FIG. 29. » A. Est-ee parce qu'il traverse deux portions du nerf NB et PA, et que la sommc de ces deux portions forme une longueur plus considerable que la portion P N ; B., SYST. NBRV. — i. 12 178 ACTION DE L'ELECTRICITE non, car nous pouvons ecarter P etN davantage (fig. 29), et comprendre entreeux plus de la moitie de la longueur du nerf , sans cesser d'avoir le meme resultat : PN, courant inverse ... 1.0. » B. L'action du courant derive sur la portion du nerf NB la plus rapprochee du centre nerveux est-elle necessahe a la production du phenomene? Non, car nous pouvons poser 1'un des poles au point B d'e" mer- gence superieure du nerf (fig. 30), et le resullat reste le me*me : PN, courant inverse ... 1.0. » C. Mais alors ce ne peut etre que Tact ion du courant derive sur la portion du nerf PA, plus rapprochee de la peripherie et des muscles qu'anime le nerf, qui arr&te celle du courant principal PN, plus eloigne que lui des muscles a mouvoir. » Si notre conclusion est juste, en placant 1'un des p61es de la pile au point A (point d'immergence inferieur du FIG. 31. nerf dans le membre), nous devons retrouver Faction du courant principal (fig. 31). En effet, nous obtenons (malgre le courant derive superieur BP) : PN, courant direct. ... 1.0. » Arre" tons-nous un peu sur ce resultat : nous voyons (fig. 30) un courant derive PA qui annule Faction d'un SUR LES NERFS MOTEURS ET MIXTES. 179 courant principal PN (ES MUSCLES moyen du curare. Je vous ai (lit, en outre, qu'il fallait une quantite beaucoup plus grande d'clectricile pour exciter le muscle a la contraction en agissant sur s^n tissu qu'en agissant sur le nerf moteur qui s'y rend. Si Ton agissait sur le muscle avec un couraut faible, lors me" me que les nerfsqui s'y dis!ribuent seraient intacts, il est probable que le courant electrique n'agirait pas sur eux, parce que le tissu muscclaire est nieilleur con- ducteur que le systeme nerveux. Nous reviendrons, du reste, sur ce sujet a propos du muscle et de ses propri^tes de tissus. Mais cette mort du nerf procedant du centre a la pe- ripherie doit etre regardee comme un phenomene anor- mal qui ne s'observe que quand le nerf a ete coupe. Tant que le nerf tient a la moelle. il m'a semble qu'il perd ses propriety's dans un ordre inverse, c'est-a-dire en proce- dant de la p^ripherie au centre. Sur cette grenouille de- capitee, nous avons mis a decouvert le nerf crural a la cuisse et au mollet : nous n'avions deja plus de contrac- tions, en galvanisant le nerf au niveau du mollet, que nous en obtenions encore en le galvanisant a la cuisse. Maintenant la giilvauisation du nerf crural n'eveille plus la contractilite musculaire; cependant, en suivant le nerf en remontant etle prenant dans la region lombaire, si on le palvanise. on a des convulsions. Cette pertc cie la propriete exciiatrice du nerf moteur de la pcripherie au centre s'observe quand Tanimal pei'it par heinorrhagie ou est empoisonne par le curare, daus les cas, ei fin, ou la inort des tissus survient pen- dant que le nerf tient encore a la moelle. ET DES NERFS MOTEURS. 195 Mais si on coupe les nerfs lonibaires d'un c6te sur une grenouille, ct qu'on empoisonne I'anin'ial par le curare, on voit que tie ce cote le nerf perd plus vile ses proprietes que de 1'autre , et qu'il les perd alors du centre a la peri- pherie, et non de la peripherie au centre, conmie cela a lieu du cote ou les nerfs lombaires n'ont pas ete coupes. En resume, nous pensons, relativement aux proprietes des nerfs moteurs : 1° Que les phenomenes que le nerfpresente sous 1'in- fluence d'un excitant, different beaucoup selon qu'il est contus, lese, coupe, ou selon qu'il est frais et dans des rapports normaux; 2° Que tout ce qu'on a dit des differents sens dans lesquels peut se faire la contraction, ne s'applique pas au nerf sain, qui otfre toujours les inemes reactions, quel que soit 1'excitant auquel on le soumette, et de quelque facon que 1'on applique cet excitant; 3° Que, lorsqu'il tient a la moelle, le nerf moteur perd ses proprietes de la peripherie au centre, et non du centre a la peripherie. ONZIEME LKCON. 28 JANVIER 1857. SOMMAIRE : Des rapports de 1'action musculaire avec rexcitabilite" ner- veuse. _ Distinction de ces deux propriete"s.— Experiences nouvelles a 1'aide du curare. — Le curare de"truit le systeme nerveux moteur. — Des diverses sources et des diflerents mecanismes de la paralysie. — Action des nerfs sur les muscles de la vie de relation , sur le coeur. La proprie*te contractile des muscles involontaires n'est pas diffe'rente de la contractilite" des muscles qui sont sous Hnfluence de la volonte. — Influence de la chaleur sur la contractilite musculaire. MESSIEURS, Jusqu'a present nous nous sommes occupes des pro- prietes du nerf moteur sans parler de celles du muscle. Nous ne saurions aller plus avant sans vous presenter quelques considerations sur 1'action musculaire, dont les rapports avec 1'excitation nerveuse sont trop etroits pour que ces deux sujets puissent etre separes. Cette question des rapports de 1'excitabilite nerveuse et de la contrac- tilite musculaire est a 1'etude depuis Haller, qui avait deja indique qu'il y avait la deux proprietes bien dis- tinctes, verite qu'il ne put faire generalement admettre, et qui trouve encore aujourd'hui quelques dissidents. Le muscle est forme par un tissu compose d'elements de formes non identiques. Les fibres striees et les fibres lisses, avecou sans noyau, n'en sont pas les seuls aspects ; il y a encore des cellules contractiles; mais si la forme change, les attributions fonctionnelles restentles rnemes, et le muscle se contracte de la meme facon, quel que soit PROPRIETIES DU TISSU MUSCULAIRE. 197 la forme dominante de I'el^ment histologique, qu'il soit fibre on cellule. La contractilite caracterise le tissti mus- culaire physiologiquement , independamment de la forme ; aussi verrons-nous plus tard le systeme nerveux moteur agir sur des elements contractiles qui n'auraient aucune apparence musculaire si Ton s'en rapportait uni- quement a la forme. On ne sait pas comment les nerfs se terminent dans la fibre musculaire? Seulement on est fonde a admettre que les rapports des dernieres ramifications nerveuses avec la fibre musculaire ne sont que des rapports de contact, comme cela a lieu d'une facon generate toutesles fois qu'un systeme organique se termine dans un autre. Haller emit le premier Popinion que 1'element mus- culaire avait sa contractilite par lui-meme, et indepen- damment de 1'influence du nerf. II admit done que le muscle separe du nerf conservait la propriete de se con- tracter, le nerf n'intervenant dans les contractions physiologiques qu'a litre d'excitant. A 1'appui de cette maniere de voir, Haller avait donne beaucoup de bonnes raisons : il avait montre, entre autres, le peu de rapport qu'il y a entre le volume des nerfs et la puissance con- tractile des organes auxquels ils se rendent. Ainsi le coeur, celui de tons les muscles qui a certainement la contractilite la plus remarquable , a des nerfs extr^me- ment greles. Depuis Haller cette question est restee en discussion, bien que des experiences aient et£ instituees pour en donner la solution. Miiller, Sticker et Longet experi- menterent en coupant sur des chiens les nerfs d'un 198 DISTINCTION DES PROPRIETES membre. Le membre etait paralyse ; mais, en excitant le bout peripherique du nerf coupe, on determinait des convulsions dans ce membre paralyse. Deux ou trois jours apres, portant 1'excitation galvanique surle m&me point, on n'obtenait plus rien;mais, suivant le nerf vers la peripherie, on voyait que, galvanise plus has, il pouvait encore provoquer des contractions. Le nerf fut ainsi suivi aussi loin qu'il fut possible , et alors que ses dernieres ramifications isolables ne donnerent plus de contractions irusculaires, on appliqua directement sur le muscle 1'excitation galvanique,qui y produisit des con- vulsions. La propriete" nerveuse se retirant du centre a la peripherie dans le nerf coupe, on regardait cette expe"- rience comme insuffisante , parce qu'on pouvait encore admettre que les dernieres ramifications nerveuses, per- dant leur propriete motrice d'autant plus lentement qu'elles sont plus e"loignees du centre, avaient conserve le pouvoir de faire contractor le muscle, sous 1'influence d'une stimulation qui, bien que portee sur celui-ci, ne pouvait manquer de les atteindre. Depuis quelques annees, j'ai appele 1'attention surun agent qui permet de resoudre experimentalement cette question. Ceux d'entre vous qui ont suivi nos lecons de 1'annee derniere savent que c'est du curare que je veux parler, et que les experiences institutes dans le but d'etudier les rapports dela contractilite musculaireavec 1'excitation nerveuse ne laissent aucun doute sur rinde- pendance de ces proprietes (1). Le curare, en eflet, tue (1) Voyez mes Lemons sur les effets des substances toxiques el medi- cainenteuses. Paris, 18o7, p. '207 et suiv. NERVEUSE ET MUSCULAIRE. 199 completement le systeme nerveux nioteur sansdiminuer en rien raptitudeqifout Ics muscles a se contracter. Vein une grenouille vivante sous la peau de laquelle nous introduisons un peu de curare : dans cinq on six minutes, cette grenouille sera empoisonnee. En voici une autrequi nous servira de point de comparaisonavec la premiere : nous la decapitons et preparons les nerfs loiiibaires, dont nous conservons les rapports avec le train posterieur. Maintenant quela grenouille empoisonnee avecle cu- rare est morte, nous la preparons de la meme facon. Puis nous suspendons ces deux trains posterieurs par les nerfs lombairesa un conducteurquenousfaisons traver- ser par un courant. En faisant ainsi passer un courant electrique a travers les nerfs lombaires de ces deux gre- nouilles. nous voyons que, cbez celle qui a ete empoi- sonnee par le curare, les nerfs out perdu lapropriete de determiner des contractions musculaires, tandis qu'ils 1'ont conservee chez celle qui a peri par la decapitation. En portant ensuite 1'excitation eitctrique non plus sur les nerfs mais sur les muscles, nous voyons que chez la grenouille empoisonnee, dont les nerfs niotei.is out pe.du leurs proprietes. les muscles se coi true-tent ai.ssi bien que cbcz celle dont les cerfs ont cohserve leur activite. Nous avons vu meme que, cbez la grer.ouille empoi- sonnee, cette proprk'te du tissu n.uscuiai.e | eisiste [ ILS longlempsque chez celle qui a ete dicuj iUe. LULS ctlte appi'tciation, nous avoi.s vouluuous n tttie a I'al ri(;cs causes d'erreur qui pourraiei.i tenir aux difle.rehces (le 200 DISTINCTION DES resistance a la mort des proprie"tes organiques qui exis- tent d'une grenouille a une autre. Pour y reussir, nous avons institue sur une meme grenouille notre experience comparative, en garantissant, par une ligature, un de ses membres de l'intoxication a laquelle nous la faisions succomber. Ce membre preserve perdait plus vite la contractilite musculaire que le membre empoisonne". Toutefois cette experience n'indique pas une action speciale du poison pour entretenir ou pour augmenter la contractilite musculaire ; cela prouve seulement qu'elle n'est pas diminuee. Et si, dans 1'experience institute comme nous venons de le dire, la contractility a dure moins longtemps dans le membre ou le poison n'a pas penetre, cela tient a ce que le sang a cesse de nourrir ce membre des 1'instant ou la ligature a etc faite; tandis que, dans le membre empoisonne, la circulation a conti- nue" encore un jour ou deux, qui font justementla dif- ference qui existe entre la dure'e de la contractilite dans 1'un et 1' autre membre. Mais si, aussitdt apres 1'empoi- sonnement par le curare, on fait la ligature des vaisseaux d'un membre qui, n'ayant point ete lie prealablement, a pu etre empoisonne, on empeche le sang d'y penetrer davantage, on voit que la contractilite y cesse dans le me" me temps que dansle membre dont on avait lie pri- mitivement les vaisseaux pour empecher le poison d'y arriver. L'anatomie elle-meme nous apprend qu'il existe beau- coup d'animaux inferieurs contractiles, chez lesquels on ne trouve pas d'elements nerveux. Ce qui ne tient pas a I'insuffisance des moyens optiques, 1'element histologi- NERVEUSE ET MUSCULAIRE. 201 que nerveux et musculaire e"tant generalement de la meme grosseur dans les animaux et aussi facile a carac- teriser chez la mouche que sur 1'elephant. L'independance de la contractility musculaire et de 1'incitation motrice des nerfs est done un premier fait bien e'tabli experimentalement. La question de savoir si la contractility musculaire et 1'excitabilite nerveuse sont une seule et meme propriete on si ce sont deux proprietes distinctes etant done re- solue, des lors nous devons etudier separement ces deux proprietes. C'est le seul moyen d'arriver a analyser le phenomene complexe du mouvement, et de faire a chaque organe musculaire la part qui lui revient dans 1'accomplissement de cet acte. Les anatomistes n'ont jamais indique non plus aucun caractere qui puisse faire distinguer Felement nerveux moteur de r element nerveux sensitif. II est de meme des physiciens dont les observations s'appliquent gene- ralement an nerf considere en masse. La encore la phy- siologie devait prononcer, et c'est toujours le curare qui lui a permis d'etablir cette distinction par Tobservation des eff'ets uniques jusqu'ici de ce singulier poison. Je vous rappellerai que, si nous empoisonnons une gre- nouille avec le curare, elle nous offre tous les signes d'une paralysie complete, bien capable d'en imposer pour une destruction absolue des proprietes du systeme nerveux. 11 y a quelques annees, lors de mes premieres experiences sur le curare, je crus meme a cette etendue de la lesion physiologique , et je ne m'attachai alors qu'a separer la contractilite musculaire de 1'influence 202 SEPARATION DES DEUX PROPRIETES nerveuse considered en masse. Plus tard, cette ques- tion fut reprise ici : flans cles experiences faites sur des aninmux elevens (sur cles chiens) quelques particula- rites sernblaient incliquer que ('intelligence et la volonte survivaient an mouvement. Le chien qu'on empoisonnait ne tardait pas a s'affaisser et a offrir tous les signes d'une paralysie complete, immobility, insensibility apparente a Faction des excitants, etc. ; cependant quand on appe- lait 1'animal, on le voyait remuerles yeux et agiter la queue. II y avait done lieu de chercher si les faculte's mo trices et sensitives etaient abolies en meme temps, ou bien si la paralysie tenait seulement a une perte du mou- vement assez complete pour rend re impossible toutes les reactions par lesquelles peutse manifester la sensibility. Chez une grenouille empoisonnee par le curare, para- lysee, immobile, y avait-il ou non sensation? Ici Tab- sence de mouvements quand on vient a la pincer pou- vait reconnaitre trois causes : 1° la perte du mouvement et de la sensibilite ; 2° la perte du mouvement avec conservation de la sensibilite ; 3° la perte de la sensi- bil te seule. Pour reconnaitre a laquelle de ces trois causes de- vait etre attribute rirnmobilite, nous avons resolu d'em- poisonner ranimal en preservant toutefois de Faction toxique une partie de son corps qui put, si la sensi- bilite etait conservee, reagir de facon a le fuire recon- nai're. (Test dans le systemecapillairequ'agissent les poisons, c'est sur les dernieres ramifications nerveuses que por- tent d'abord les effets cles substances toxiques qui s'aclres- DU SYSTEMS NERVEUX. 203 sent an systeme nerveux. La ligature des vaisseaux qui se rendent a une partie est done le moyen de conserver intacts les nerfs de cette partie. Prenant une grenouille, nous avons, a la partie inferieure du tronc, pose une liga- ture F qui embrasse tout except^ les nerfs lombaires N. De cette facon , les communications vasculaires entre le train posterieur e*taient supprimees; seules, les commu- nications nerveuses e"taient conservees. L'animal etait alors empoisonne par une solution concentric de curare injected sous la peau du dos. Voici une grenouille a laquelle on vient de faire subir cette preparation, etchez laquelle vous pou- vez voir la m6me immobilite que chez cette autre qui a ete empoisonnee tout entiere. Cependant, tandis que celle qui a ete empoi- sonnee en entier ne reagit aucunement sous 1'influence des irritants mecaniques, vous pouvez voir 1'autre, em- poisonnee seulement dans le train anterieur, reagir par de violents mouvements du train posterieur centre les 20/1 SEPARATION DES DEUX PROPR1KTKS irritations portees soit sur son train posterieui lie" , soit sur son train anterieur empoisonne et paralyse. Nous pincons,en effet, la patte anterieure de cette grenouille: cette patte, vous le voyez , ne reniuc pas ; la sensation est percue cependant, car elle se manifeste par les mou- vements des pattes postmeures. Cette experience peut 6tre variee dans la forme. Ainsi, voici une autre grenouille empoisonne'e encore par le curare. Chez cette grenouille, au lieu d'isoler tout le train posterieur, nousn'avons lit' qifun nienibre de facon a le priver de ses communications vasculaires tout en lui laissant les com- munications nerveusesN. Ici une seule patte a 6t6 pre"- servee des elTets du poison ; nous y determinons des mou- vemcnts en pincant 1'autre, incapable de se mouvoir elle- meme , mais parfaitement sensible puisque les excita- tions portees sur elle sont le point de depart de mouve- ments reflexes tres violents. Nous pourrions, dans ces em- poisonnements partiels, em- p^cher 1' empoison nement d'un seul muscle en liant ses vaisseaux ; ce seul muscle alors reagirait par ses mou- vements pour manifester toutes les sensations. Cette experience, messieurs, est fondamentale : seule N-- DU SYSTEME NERVEUX. 205 elle assigne exactement son r61e a cheque systeme orga- nique, a chaque systeme physiologique ; seule elle nous fait connaitre la variete des sources de la paralysie. Nous voyons, en eiFet, que la perte du mouvement peut tirer son origiue ou d'une lesion du systeme musculaire, paralysie musculaire ; ou d'une lesion du systeme ner- veux, paralysie nerveuse. La paralysie nerveuse, a son tour, reconnaitra trois origines possibles, selon que les systemes sensitif et moteur seronttous deux atteints a la fois, ou selon qu'ils seront chacun atteints separement. Bien que dans 1'accomplissement normal des actes physiologiques la sensibilite, 1'excitation niotrice et la contractilite musculaire soient toujours associees, nous les isolerons pour en e"tudier les qualites propres. Et d'abord le muscle peut, nous venons de le voir, etre considere independamment du systeme nerveux. Chez les animaux qui trouveut dans le milieu ambiant les excitations determ in antes de la contractilite muscu- laire, il n'est pas besoin de nerfs; et, en effet, on IT en trouve pas. Le systeme nerveux n'est qu'un harmonisa- teur general , necessaire seulement dans les organisnies un peu compliques, pour obtenir des effets d'ensemble. Quelle que soit la valeur de ces raisons pour porter a admettre Findependance du muscle, elles valent cepen- dant moins que les experiences dont je viens de vous rendre temoins. Le systeme nerveux regulateur doit done etre con- sidere comme 1'excitateur physiologique normal du sys- teme musculaire dans les animaux. Dans certaines cir- constances il peut etre remplace par d'autres excitants. 206 ACTION DU NERF et nous savons que parmi ces excitants exte"rieurs Mec- trieite est le plus puissant cle tous. Actuellement la question que nous aurions a nous poser serait celle cle savoir en quoi consiste, en general, Faction d'un excitant sur un muscle. L' excitation des muscles par 1'electricite determine dans ces organesdes effete constants, effets deja Studies, et qui nous paraissent pouvoir se reduire a ceci : que 1'electricite, agissant sur les muscles, y produit toujours un etat inverse de celui dans lequel ilsetaient au moment de son action, les faisant contracter s'ils etaient au re- pos, arretant leurs contractions s'ils Etaient en convul- sions. Sur cette grenouille, empoisonne"e tout a 1'heure avec du curare, nous avons des muscles au repos ; mais il y en a d'autres qui se contractent encore quand le systeme nerveux moteur a £te detruit; le cceur est dans ce cas. En galvanisant le cceur, que vous voyez se con- tracter, il s'arrete ; lorsqu'au contraire nous galvanisons les muscles im mobiles, nous les faisons entrer en con- vulsion. Get arret du coeur sous 1'influence du galvanisme se produit encore lorsqu'au lieu de galvaniser le coeur lui-m^me, on fait chez un animal non empoisonne passer le courant a travers le pneumogastrique. C'est un fait qu'ignoraient des observateurs qui ont propose , il y a quelques annees, de galvaniser le coeur detache" de 1'animal, pour etudier le jeu des valvules. Une experience d'Eckhard demontre que le galva- nisme n'agit pas seulement ainsi sur les contractions du coeur, mais que la proposition que nous enoncions tout a 1'heure semble generate ets' applique aussi bienaux mus- SUR LE MUSCLE. 207 clesde la vie de relation qu'n ceux qui se contractent sans y £tre sollicites par une excitation nerveuse clirecte. Eckhard a fait voir que, lorsqu'un muscle est traverse- par un courant galvanique, il ne pent entrer en U'tanos et que, reciproquement, lorsque le courant trouve le muscle en tetanos, il arr&te ses convulsions. Son experience re- pose sur une observation que nous avons signalee dans une des lecons precedentes. Vous savez que, lorsqifon fait tremper le nerf d'uu membre dans de 1'eau salee ou dans de la bile, les muscles de ce membre entrent en tetanos. Que Ton vienne alors a appliquer sur ce nerf les deux poles d'un courant dectrique, le tetanos cessera pour reconmiencer des que le nerf ne sera plus traverse" par le courant £lectrique. Les muscles du membre, pla- ces alors dans les memes conditions que celles qui nor- malement president aux mouveinents du coeur se corn- portent done de m6me. Cette experience a une grande valeur physiologique, en ce qu'elle tend a prouver que la propriete contractile des muscles involontaires n'est pas differentede la con- tractilite des muscles qui se trouvent sous 1'influence de la volonte. Elle etablirait ainsi T unite physiologique du systeme musculaire que des raisons histologiquesavaient dans un temps fait nier. Voyant que la galvanisation arretait les mouvements du co2ur et des intestins, tanclis qu'elle excitait les con- tractions des muscles volontaires: — considerant , d'autre part, que chez les animaux superieurs, sur les- quelson operait, les muscles volontaires etaient formes de fibres striees, tandis que les muscles de la vie orga- 208 ACTION DU NERF MOTEUR nique etaient formes par des fibres lisses; on avait, rap- prochant ces deux ordres de vues, admis que le tissu musculaire reagissait diffe'remment sousl'influencegal- vanique, suivant qu'il etait compose de fibres striees ou de fibres lisses. On s'etait ainsi trouve" conduit a croire a 1' existence de deux systemes musculaires doues de proprietes differentes. Je ne reviendrai pas ici sur les considerations anatomiques que je vous ai deja presen- tees sur 1'identite physiologiquedel'element contractile, fibre ou cellule : je vous rappellerai seulement que la distribution des fibres lisses et des fibres striees, et leur existence dans Fun seulement des appareils organ iques ou locomoteurs, ne sont pas un fait constant, que les fibres striees peuvent quelquefois passer du systeme exterieur dans le systeme splanchnique, qu'on les ren- contre notamment clans les intestins de la tanche. Voici 1'experience qui prouve que les secousses te- taniques des muscles sont arre"lees par le galvanisme : Sur cette plaquede verre est etendue une cuisse degrenouille dont le nerf est place dans un verre de montre conte- nant une solution de sel marin. Vous pouvez voir ce membre de grenouille agite d'un mouvement convul- sif continuel. Or, ce mouvement s'arrete des qu'avec notre appareil nous faisons passer un courant continu a travers le nerf, pour recommences de nouveau des qu'on enleve 1' action de Mectricite. On va, du reste, vous faire passer ces objets, et vous pourrez repeter 1'experience vous-memes. II est un autre agent physique qui exerce sur la con- tractilite inusculaire une influence fort remarquable ; ET DE LA. CHALEUR SUR LES MUSCLES. 209 nous voulons parlor do la chaleur. L'action do la tempe- rature sur les muscles ot suv les nort's a eto otudiee par M. Picford. En soumettant le tissu musculaire a une temperature plus elevee quo sa temperature norniale, et jusqu'a une limitc qui variera avec les especes animates, on trouvera qued'abord I'lrritabilite musculaire est augmentee, mais on arrivera bientot a un certain degre ou elle dispa- rail entitlement. Nous verrons que, pour les mammiferes vivants, Tirritabilite semble disparaitre de 56 environ a 60 degres centigr. dans un milieu sec ; une chaleur 1m- mide la ferait disparaitre avant d'atteindre ce degre d'elevation. Sous I'iniluence de la chaleur, tons les muscles ne perdont pas leurs proprietes egalement vite : les extenseurs resistent moins que les flechisseurs, etc. Soumis directement a une temperature de plus en plus elevee, le coeur d'une grenouille perd, comme les antres muscles, la propriete de se contracter : les mou- vements sont d'abord plus rapides, mais plus tard ils se ralentissent et perdent de lour energie. Yous savez. messieurs, que la temperature des ani- maux a sangchaud est a pen pros constante; on dit que, lorsque la temperature du milieu dans lequel ils sont places s'eleve, la transpiration devenant plusabondante, 1'evaporation opere un refroidissement qui empeche le corps de s'echaujffer ; lorsqif on place ces animaux dans un milieu plus froid , ils transpirent moins, perdent moins de la chaleur qu'ils n'en produisent, et se main- tiennent ainsi it une temperature sensiblement tini- forme. Avec Magendie , en soumettant des animaux a B., SYST. NEHV. — i. 14 210 ACTION DE LA CHALEUR SUR LES MUSCLES. une temperature croissants dans une etuve seche, nous vtmes que leur corps s'echauffait reellement et qu'ils perissaient lorsque 1'elevation cle temperature avait amene leur sang a avoir 3 ou 4 degres au-dessus de sa temperature normale. En faisant I'autopsie cle ces ani- maux immediatement apres la mort, on voyait souvent que le coeur avait cesse de battre, et 1'excitation galva- nique n'y determinait que des contractions a peine per- ceptibles, ou menie le laissait completement immobile. II faudrait experimenter directement pour voir si une temperature de kh degres sufflrait pour detruire 1'irrita- bilite du coeur. S'il en etait ainsi, il faudrait penser qu'une chaleur excessive est une cause de mort par avret du coeur. Dans ce cas, 1'elevation de temperature arreterait-elle le cceur en agissant sur sa fibre musculaire ou sur ses nerfs? En resume, nous voyons que deux agents physiques out une action evidente sur le systeme musculaire ; que 1'electricite Fexcite et le modifie suivant 1'etat de repos ou de mouvement dans lequel il se trouve ; que la tem- perature 1'excite d'abord , mais que, ])ortee a un certain degre , elle detruit 1'irritabilite. 11 nous reste encore a examiner dans leurs rapports les phenomenes de la contractility musculaire et de 1'ex- citabilite nerveuse. Dans cette etude se place 1'examen des experiences tres interessautes qui out ete faites sur ce que Ton a appele les courants propres des nerfs et sur le courant musculaire , phenomenes qui semblent offrir beaucoup de rapports avec les actions electriques. La encore, nous aurons a rechercher jusqu'a quel point ces phenomenes out part aux actions physiologiques. DOUZIEME LECON. o 30 JANVIER 1857. SOMMAIUE : Comparaison des phenomenes nerveux avec les pheno- menes electriques. — Constatation dc deux couranls dislincts , Tun nerveux, 1'autre nuisculaire. -- Experiences de Galvani, de M. Matteucci. — Experiences de AI. du Bois llcymond. — Independance du courant nerveux et du courant nuisculaire. — Le nerf moteur tire ses proprie"tes de la moelle. — Differences entre la propriete nerveuse motrice et relectricite". MESSIEURS, Nous devons maintenant nous occuper d'un pheno- mene dont 1'etude ne saurait etre separee de celle de 1'excitation nerveuse motrice : ce phenomene, c'est la contraction musculaire. Comment expliquons-nous la contraction du muscle? — Quels rapports existent entre cette contraction du muscle et 1'excitation nerveuse ? On a pu croire que I'eleetricite sufflrait a expliquer la contraction musculaire et a rendre compte de rinlluence du nerf. Deja Galvani avait vu qu'en reunissant le nerf d'un membre de grenouille aux muscles de ce membre par un arc metallique, on determinait des contractions. Bien plus, les objections de Volta qui faisait jouer dans ce phenomene le role principal an conducteur metal- lique, amenerent Galvani a voir qu'on obtenait des con- tractions par la simple application du nerf replie sur les muscles. 212 CONTRACTION MUSCULA1RE. Cettc experience, que nous allons repeter devant vous, vous montre des contractions tres evidentes (jnand on opere sur les membres d'une grenouille recemment tuee. Mais si , apres avoir prepare separe'ment les deux membres posterieurs d'une grenouille. nous tenons sus- pendue et isolee par son extremite digitale 1'une de ces pattes, lorsque le nerf crural de cette patte vient a toucher les deux coupes des muscles de 1'autre patte isolee, vous voyez la premiere se convulser violemment. Pour expliquer ce second plienomene, on admet que le nerf se trouve dans le courant d'electricite dont le muscle est la source. Le nerf serait excite par cette elec- tricite, et on ne saurait admettre ici que la contraction des muscles soit due a 1'electricite qui circulerait dans le nerf. M. du Bois Reymond a montre que le muscle est le siege d'une production d'electricite qui se propagerait de la surface du muscle a son centre. Dans 1' experience que nous venous de faire, nous avons vu, en elfet, le nerf de la patte tenue entre les doigts etre excite par le contact des coupes du muscle comme il 1'aurait etc par le galvanisme. Line experience analogue pent se repeter dans des conditions diffe'rentes qui semblent tres propres a con- firmer les vues d'apres lesquelles on attribue le role principal a 1'electricite qui se produirait par letissu mus- culaire. Ainsi, nous allons, sur cette plaque de verre, etendre le train poste'rieur d'une grenouille. Transversalement a CONTRACTION MUSCULA1RE. 213 tine cuisse. nous iHendons une atitrc patte do grenouille, no iaron quo le norf c de la seconde repose sur les mus- cles mde la premiere. Lorsque, appliquant les deux p61es il'iine pile sur le nerf lombaire / de la premiere patte, nous faisons contractor les muscles, vous voyez se con- viilscrla seconde qui, cependaut, ne communique avec elle quo par son nerf etendu sur les muscles. An lieu de faire 1'experience avec deux pattes, on pourrait en avoir un plus grand nombre qui se convulseraient toutes sous 1'influence de la galvanisation du nerf de la premiere. FIG. 36. II m'a semble dans un cas remarquer des contractions determiners par le contact des nerfs sur des muscles entrant en convulsion par la strychnine. M. Matteucci, qui voit dans ces phenomenes une preuve du developpement d'electricite par le fait de la contrac- 2U CONTRACTION MUSCULAIRE. tion musculaire, a donno le nom de contractions in- duites a ces contractions secondaires qni se produisent sous r influence d'une excitation galvanique portee non directement sur le membre ou elles se manifestent, mais developpee par le muscle sur lequel le nerf repose an moment de sa contraction. M. du Bois Reymond a construit un appareil hion connu propre a montrer qu'il se developpe des cou rants electriques dans le tissu musculaire. Voici un autre appa- FIG. 37 (l). reil de M. le professeur Jules Regnauld qui offre , dans sa construction, des modifications importantes que nous vous indiquerons tout a 1'heure : Deux conducteurs sont fixes a un galvanometre, des- (1) G, galvanometre: — VV, vases remplis de sulfate de zinc; — Z, plaque de zinc pur plonge dans le liquide et communiquant avec les deux Tils du galvanometre;— P, coussinets de papier humides plongeant dans le liquide et sur lesquelson place le muscle; — s, s, supports en bois. COUIUNT MUSCLLAIRE. 215 tine a accuser par ses deviations la direction et 1'inten- site d'un couraut ^lectrique qui parcourra ces conduc- teurs. Chacun des conducteurs plonge dans un vase en partie rempli de liquide ; puis, les deux vases VV sont munis de coussinets p de papier mouille plongeant par une de leurs extremites clans les vases. Si, entre les deux vases, c'est-a-dire sur les deux coussinets. on pose, de 1'un a 1'autre, un corps capable de donner nais- sance a un courant electrique , le courant passera par le papier mouille, par le liquide des vases, puis s'ecou- lera par les conducteurs qui represented ainsi les rheo- phores d'une pile dont 1'element actif serait place au milieu du pont de papier qui reunit les deux vases. Or, des qu'un muscle frais est convenablement place sur les deux coussinets, on voit que 1'aiguille du galva- nometre est device. Cette deviation, qui, pour notre cuisse de grenouille , est ici de 60 degres, indique, par le sens dans lequel elle a lieu, que le eourani TU de la surface du muscle a sa coupe, ou, suivant I' expression de M. du Bois Reymond, de la coupe longitudinale du muscle a sa coupe transversale. Ce sens du courant electrique est fixe, et, si nous re- tournons le morceau de cuisse de grenouille qui nous a donne cette de-viation de 60 degres, nous voyons 1' ai- guille du galvanometre revenir d'abord a zero, puis poursuivre samarche et offrir rnaintenant une deviation en sens oppose. Simaintenantnous enlevons notre masse musculaire, le galvanometre revient au zero. Dans 1'appareil dont il faisait usage pour cette expe- rience, M. du Bois Reymond remplit les deux vases et 216 COURANT MUSCULA1RE. mouille le papier qui les tail communiquer avec une solution de sel inarin; tie plus, les extremites des con- ducteurs plongeant dans les vases sont en platine. Dans ccs conditions, le contact de la solution saline avec le platine suffisait a produireun courant capable de de- vier d'une facon tres appreciable 1'aiguillo du galvano- metre, courant dont V action devait etre notee pour etre ajoutee a la deviation electro-musculaire ou pour en etre retranchee. M. Jules Regnauld a evite cet inconvenient en terrninant les conducteurs par des lames de zinc pur plongeant dans une dissolution saturee de sulfate de zinc. On n'obtient ainsi aucune polarisation secondaire. (ialvani, vous le savez, admettait que lesnerfs etaient des conducteurs dans lesquels circulerait une electricite particuliere. Vous connaissez deja une experience , que nous repetons ici et qui consiste a determiner des con- vulsions dans un membre de grenouille recemment tue'e en mettant le nerf de ce membre en contact avec les muscles d'un autre membre. On suppose qu'il se deve- lopperait de Telectricite dans les muscles do la cuisse qui repose sur ma main : je tiens le nerf du membre qui formerait 1'autre pole , do 1'autre main , et au moment du contact du nert'et des muscles il se produitune sorte de decharge electrique qui les fait contractor. (^est Iti r experience de Galvani ; seulenlent il n'est pas necessaire, comme vous le voyez , de reunir le muscle au nerf par un arc motalliquo. Le corps de 1'observateur qui tient dans ses mains les pattes de grenouille en ex- perience , etablit entre clles une communication con- ductrice necessaire. C'UiRANT r Cette communication, disons-noiis, est indispensable pour line le phenomene se procluise. Si , en effet , on 1'empeche , comme nous le faisons ici, en cessant de tenir a la main la patte qui se contrac- tait tout a 1'heure, et en I'introduisant dans un tube de verre T qui 1'isole, le phenomene ne se procluit pins. Le FIG. 38. nerf n qui sort dn tube dans lequel a etc engagee la patte, peut etre mis en contact avec les muscles de 1'autre patte sans determiner la moindre convulsion dans le membre auquel il se rend. Et cette absence d'excitation motrice ne tient pas a ce que le nerf est fatigue, car nous pou- vons en aviver la coupe sans obtenir aucun effet; tandis que, retirant la patte du tube et la prenant a la main, nous la voyons se convulser energiquement chaque fois que son nerf est mis en contact avec un muscle. Les effets que nous voyons se produire dans les expe- riences precitees ont etc attribues a ce qu'on a appele le courant propre du nerf, courant qui circulerait de la pe'ripherie au centre. Ce courant ne doit pas etre con- fondu avec le courant musculaire ; car, s'il y a une elec- tricite propre an nerf. il faut admettre aussi une elec- tricite musculaire. L' experience de Galvani mettrait done en evidence le courant propre du nerf. 218 COURANT PROPRE Or, nous avons vu que ce courant propre n'appartienl qu'au nerf moteur. Nous savons deja que les nerfs mixlcs donneut des contractions quand on les met en contact avec un muscle. Pour nous rendre compte de I'influence qu'exerce chacun des elements nerveux sur cetle propriete du nerf mixte, nous avons essaye separement les racines anterieures et les racines posterieures. La racine aiite- rieure, mise en contact avec un muscle, a donne" des contractions comme le fait le nerf mixte. La racine posterieure seule ne donna absolument rien ni par son bout peripherique, ni par son bout central. Ce courant e'lectro-nerveux serait done exclusif a la racine motrice. Si, dans Inexperience precedente , on vient a substi- tuer au nerf moteur une coupe de la moelle, il semble qu'on doive obtenir les monies resultats, puisque les nerfs naissent de la moelle. Cependant ayant denude la moelle d'une grenouille, et toucbant un muscle avec la surface d'une coupe faite sur cette moelle, nous n'avons pas obtenu de contractions dans le membre dont les nerfs tenaient a cette coupe de la moelle. Nous touchions cependant les deux faisceaux ante- rieurs d'ou naissent les racines motrices; et ces racines jouissent de la propriete de donner lieu a la contraction electrique par leur contact avec un muscle. Pourquoi done une coupe du faisceau anterieur ou naissent les origines nerveuses motrices, ne donne-t-elle pas lieu au phenomena? Afm de nousedifier sur la signification du fait qui se presentait a notre observation , nous avons repris 1'experience en essayant de baut en bas la moelle OU COURANT NERVEUX. 219 a divcrses hauteurs, la divisant couche par couche par des sections transversales successives. Nous sommes ainsi arrive, dans la region lombairc, a trouver une coupe qui, mise au contact d'un muscle, donnait des contrac- tions dans le train postmeur. Sur ces pieces qui ont mace re dans 1'alcool, apres avoir servi a 1'experience que je vous signale, vous pourrez voir que le phenomene s'est produit ge'neralement pour des sections faites au meme niveau. On voil , en examinant avec un peu de soin, que la section correspond au point du renflement lombaire de la moelle d'ou partent les racines ante- rieures qui donnent le mouvement aux membres poste- rieurs. Si done, dans ce cas, on obtient des convulsions, cela tient a ce que Ton a agi sur les racines anterieures au point oil elles penetrent dans la moelle. Cette experience montrerait que les faisceaux ante- rieurs de la moelle ne se comportent pas pour le mou- vement comme les posterieurs pour le sentiment. On ne saurait done assigner une origine centrale commune aux racines anterieures dont les manifestations sont iso- lees. Les recherches anatomiques de Stilling sont d'ail- leurs confirmatives de ce fait ; les racines anterieures semblent naitre de centres isoles et independants. Le courant electrique propre du nerf moteur lui serait done tout a fait special et n'existerait pas dans la moelle. Un fait important et sur lequel je dois encore insister, c'est la variete des reactions que Ton obtient suivant que le nerf est isole, coupe, ou qu'il a conserve ses rapports physiologiques normaux. En operant chez un animal vivant, sur uu nerf assez 2-20 COURANT NERTiUiX. long, on pent, le denudaut dans un espacesiiffisantpour en isoler une anse, incttre cette anse en contact avec un muscle. Or, dans ce cas du nerf tenant a la moelle, on observe de fortes convulsions dans le membre anquel il se rend. Les convulsions se prodnisent egalement lors- qu'on separe le nerf de la moelle , soil en le conpant , soit en 1'etreignant par nne ligature. Dans d'antres cas Dependant, la section on la ligature du nerf y amene un trouble qui semble favorable pour e'tablir une sorte de polarite et rendre visible un courant qui no se niani- festerait pas a 1'etat physiologique. Je crois meme, et c'est un fait a verifier experimen- talement, qu'on se fait une idee fausse de la direction de 1' agent nerveux. On le regarde comme dirige de la peripherie au centre. C'est vrai quand le nerf est coupe, mais je serais tres dispose a penser quo 1'inverse a lieu quand le nerf n'est pas coupe. L' excitation volontaire est centrifuge, et il me parait tres probable que cette direc- tion centrifuge est celle de toutes les excitations dont le nerf est dans les conditions normalcs de 1'organe de transmission. Quoi qu'il en soit de cette vue, que jc ne vous presente que comme une idee a verifier, la presence d'une solu- tion de continuity dans le nerf qui produit des contrac- tions par decharge musculaire , ne parait pas une con- dition indispensable. Nous pourrions revenir plus tard sur ce fait. Je vous ai deja signale 1'existence d'un courant mus- culaire propre, que vous avez pu voir mettre en mou- CO LIRA NT Ni-RVLUX. vement raiguille (run galvanometre. Je viens mainte- naut de vous parler iFun courant electriquc propro an nerf moteur. 11 me rcste a etablir quo ces deux mani- festations electriques sont physiologiquement dislinctes Tune de Tautre, que ce sont deux phenomenes indepen- dants;c'est le curare qui me permettra encore de vous donner la demonstration de ce fait bien remarquable. Ce que Ton a nomine le courant propre de la gre- nouille est done une propriete du nerf. Quant an cou- rant musculaire, il est dirige de la surface non coupee a celle qui Test, de la coupe longitudinale a la coupe transversale. C'est un phenomena distinct du prece- dent. Ce courant musculaire, nous pouvons cependant 1'utiliser pour produire des contractions. Pour cela il faut, ainsi que vous le savez deja, avec le nerf du membre que nous voulons faire contracter , autrement dit avec la grenouille galvanoscopique, toucher a la fois la sur- face musculaire coupee et la surface longitudinale de ce muscle, de facon a mettre le nerf dans le trajet du courant. Le membre pent alors se contracter, quoique isole dans un tube de verre, parce que c'est le courant musculaire qui excitera le nerf et fera contracter le membre. Je viens de vous dire que Ton pourrait, au moyen du curare , montrer qu'il y a de Telectricite dans le nerf, qu'il y a aussi dans le muscle une propriete electrique, et que ces deux manifestations physiques sont comple- tement independantes Tune de 1'autre. En effet, si Ton empoisonne une grenouille, on voit bientot apres que ses muscles ont conserve leurs pro- 222 COURANT NERVEUX prietes physiologiques et elect riques, ils font clevier 1'ai- guille du galvanometre et excitent des contractions dans le membre de grcnouille dont on promene le nerf sain sur eux. Rencontrant dans le nerf cette singuliere propriete electro-motrice. on est conduit a se demander si clle ne Ini vient pas du muscle. Or, on voit sur nne grenouille empoisonnee par le curare que la propriete du nerf mo- teur a ete detruite sans que celle du muscle ait ete atteinte; bien plus, la destruction du nerf, le muscle res- tant sain , a lieu de la peripherie an centre. Le courant propre du nerf ne vient done pas du muscle. Nous avions deja ete conduit a regarder le nerf moteur comme ne sY'tendant que des muscles a la moelle epi- niere, dans la([iielle il ne prolongeait pas ses proprietes, qui s'y arretent an contraire d'une maniere assez nette. L'epreuve physiologique vient confirmer cette vue et montrer la parfaite independance des proprieties du muscle, de celles de la moelle et de celles du nerf moteur. En examinant 1'origine medullaire de ce nerf limite, nous le voyons naitre d'un amas cellulaire gris qui seinble etre son centre nutritif et fonctionnel. Le nerf moteur, en effet, tire ses proprietes d'une partie limitee de la moelle epiniere. Le curare, detruisant le nerf moteur parlaperipherie, semble soutirer par les extremites Faction nerveuse in- suffisamment reparee par 1'influence centrale. Un fait vient a 1'appui de cette maniere de voir : Si Ton examine ce que devient le nerf d'une grenouille empoisonnee par le curare, on peut admettre, que pen- ET COURANT MUSCULAIRE. 223 dant que les faculh's s'affaiblissent, la moelle lui fournit de 1'influx encore pendant quclque temps. En effet, si Ton coupe ou si on lie ce nerf, il est beaiicoup plus vite empoisonne. II semble qu'alors il perisse plus vite, parce qu'il ne peut plus etre repare par la moelle. Eocp. — Voici deux grenouilles sur lesquelles nous allons nous livrer a 1'examen cornparatif cles proprietes des nerfs et des muscles , selon que ceux-ci auront on ivaurout pas ete empoisonnes par le curare. Sous la peau du dos de Fiine d'elles, nous injectons un pen d'une dissolution concentree de curare. Quatre ou cinq minutes apres elle est morte. Nous preparons alors les pattes pos- terieures de ces deux grenouilles , laissant le nerf sciati- que deborder les parties musculaires, et nous voyons : 1° Qu'en touchant avec le nerf de la patte saine tin muscle empoisonne, les contractions se montrent dans cette patte extremement energiques , meme plus ener- giques que si le muscle n'avait pas ete empoisonne; 2° Qu'en touchant le muscle empoisonne avec le nerf d'une patte empoisonnee, aucune contraction ne se produit dans le membre . parce que le nerf est detruit physiologiquement ; S° Exposant successivement le nerf d'une patte saine et celui d'une patte empoisonnee a 1'actioii cl'un muscle sain, nous voyons qu'avec le nerf de la patte saine seul nous avons des contractions, mais moins energiques que celles qu'il donnait tout a 1'heure , et qu'il donne encore au contact du muscle empoisonne par le curare. Nous placons maintenant sur Fappareil (voy. fig. 37) un morceau de muscle empoisonne , et vous pouvez le 22/1 COURANTS NERVEUX ET MUSCULAIRE. voir deviertres evidemment 1'aiguiUe du galvanometre. En serait-il do meme avec le nerf empoisonne? Quel est done 1'agent qui produit ces phenomenes? Est-ce relectricite ? II taut bieii I'admettre, en voyant le tissu musculaire amener la deviation de 1'aiguille du galvanometre. Ce- pendant, en considerant ces phenomenes dans les nerfs, on se trouve conduit a reconnaitre qu'ils ne sont pas physiologiquement essentiels. Vous nous avez vu nombre de fois determiner des contractions dans un membre de grenouille en mettant son nerf en contact avec un muscle , en ayant soin de former le circuit. La necessity de cette derniere condi- tion dispose a penser que c'est bien un courant elec- trique qui se produit alors. Toutefois, il est difficile de comprendre pourquoi le phenomene cesse d'avoir lieu quand on lie Textremite trainante du nerf avec un fil mouille, avec un fil metallique, ou (ju'au lieu de la Her on la contourne seulement entre les mors d'une pince. On peut alors promener le nerf sur un muscle sans produire de contraction. Or, les causes qui viennent dans ce cas emp^cber les contractions de se produire ne sont pas du tout un obstacle a la communication elec- trique. Tous ces phenomenes, auxquels on donne le nom de courant propre de la grenouille ou de courant musculaire^ bien qu'ils traduisent des faits bien observes, il me semble difficile de leur donner aujourd'hui un sens pliy- siologique bien nettement determine dans 1'accomplisse- ment desplienomenesnerveuxcbezraiiimal vivant. C'est COURANTS NERVEUX ET MUSCULAIRE. 225 pourquoije me borncrai a vous resumerces phenomenes, en vous indiquant quelques vues qui nous out etc inspi- re"es par les experiences que nous avons faites. Le courant musculaire est un courant electrique qui se developpe de la surface longitudinale du muscle re- gardee comnie positive a sa surface transversale consi- deree comme negative. II n'y a rien a ajouter a re'tudo physique du phenomene, qui a ete si bien faite par MM. duBoisReymdnd, J. Regnauld, etc. Je n'examinerai ici que les conditions pbysiologiques du phenomene. On ne peut pas nier que ce courant existe pendant la vie, mais nous avons vu qu1il existe aussi apresrempoisonne- ment par le curare. L'observerait-on de ineme apres I'empoisonnement par le sulfocyanure de potassium, quand le muscle est incapable de se contractor? Toutefois on ne le constate plus sur des muscles morts depuis pen de temps, sur des muscles d'animaux superieurs,d'oiseaux ou de lapins qui ont cesse d'etre excitables par 1'electri- cite. D'apres ces faits, on serait done autorise a penser que le courant musculaire est lie d'une maniere directe au phenomene de la contraction musculaire , puisque nous voyons ce courant musculaire cesser d'exister quand la contraction musculaire s'est eteinte, et que les muscles sont a FtHat de roideur cadaverique. D'ou il suit que le courant musculaire serait un phenomene physique en rapport sans doute avec les mouvements d'alteration chi- mique qui se passent dans le muscle vivant. Mais bien que ce courant soit capable d'exciter le nerf d'une grenouille galvanoscopique , nous ne saurions conclure a ce qui se passe pendant la vie entre le muscle et le nerf. B., SVST. NEBV. I. 1") 226 COURANTS NERVE UX ET MUSCULAIRE. Quan d au courant propre, c'cst un courant electrique qui se propagerait dans le nerf dans un sens centripete, c'est-a-dire des extremites musculaires du nerf vers la moelle epiniere. 11 resulterait de la que la patte gal- vanoscopique repre"senterait une pile dont Textremite du nerf coupe formerait un pole, et les muscles de la patte 1'autre pole. Si maintenant on vient, a la maniere de Galvani , a joindre le nerf et le muscle par un arc metallique , on fermerait le circuit et on aurait une contraction musculaire. Si, au lieu de se servir d'un arc metallique, on se borne encore a rabaltre le nerf sur la cuisse, on aurait encore une contraction au moment ou le nerf touche le muscle parce que le circuit se trouverait ferme. Enfin si, tenant deux pattes galvanoscopiqucs de chaque main, on vient a toucher les muscles de 1'une avec le nerf de 1'autre, on a aussitot une contraction, parce qu'alors le circuit serait ferine par le corps de I'experimentateur ; et ce qui le prouverait, c'est qu'en iso- lant une patte dans un tube de verre, le phenomene n'a plus lieu parce que le circuit ne pourrait pasetre ferme. Tons ces faits sont exacts , d'une maniere generate et ordinairement assez facile a constater ; rnais il y a ce- pendant des cas dans lesquels il semble que Felectricite, au lieu de se comporter ainsi dans la patte de la gre- nouille ou dans son nerf, provient du contact de ce nerf avec ie corps etranger que Ton touche. Ainsi j'ai vu quelquefois, lorsque les grenouilles sont tres vivaces, des contractions avoir lieu au contact du muscle avec la patte galvanoscopique isolee dans un tube de verre ; de meme si le nerf est fatigue, lie, ou trempe par son oxtremite COURANTS NERVEUX ET MUSCULAIRE. 227 clans la potasse cm do 1'acide sulfurique, etc. , les contrac- tions cessent d'avoir lieu , quoique la patte ne soit plus isolee. Vous voyez, par exemple, ici que nous developpons encore des contractions en touchant avec le bout clu nerf la surface du mercure place dans un verre; seulement il semble qu'il faille que le contact ait lieu sur deux points, et cela reussit inieux si Ton fait un petit pont avec un corps isolant, de maniere que deux points du nerf toucherit separement le mercure. Si de meme nous touchons un nerf en deux points avec u n autre metal, nous avons aussitot nne contraction vive dans la patte. Je tiens ici Textremite du nerf sciatique avec une pince de fer, et je touche un point quelconque de la patte avec une autre pince de fer, et il y a une contraction. Y a-t-il la electricite developpee au contact du nerf et du metal ? II semble difficile de le prouver, car le phenomene est ordinairement tout aussi intense avec une pince de fer, de cuivre on de zinc, qu'avec des pinces de platine ou d'argent, metaux nroins oxydables. Ce phenomene a lieu non-seulement sur une patte se- paree du corps, mais aussi dans certains cas sur un nerf tenant a la moelle epiniere. Ici, je saisis avec une pince de cuivre le bout central du nerf sciatique sur une gre- nouille vivante, mais decapitee. Si je touche avec une autre pince une partie du corps, la tete par exemple. il y a aussitot contraction dans les muscles du tronc. Dans tous ces cas , le corps de Fexperimentafeur ferine evidemment le circuit d'un courant qiii traverse le nerf et la tete de la grenouille ou la patte separec; en 228 COURANTS NERVEUX ET MUSCULAIRE. effet, si Ton substitue a une des pinces unc baguette de verre, la contraction n'a pas lieu. Dans ces cas 1'electri- cite est-elle developpee par le contact du metal ? J'ajou- terai qu'il n'est pas necessaire de toucher avec les deux pinces deux tissus differents , car si Ton touche le nerf en deux points rapproches avec les deux pinces, la con- traction s'opere de m6me. Lorsque 1'animal a ete empoisonne par le curare, le phenomene cesse d'avoir lieu, non pas que le nerf cesse d'etre condueteur de I'electricite, mais sans doute parce qu'il n'est plus excitable et que le courant electrique, qui aurait pu faire contractor les muscles par 1'iuterme- diaire du nerf sain , ne pent pas les faire contractor en agissant directement sur le tissu musculaire. De me" me cette electricite, developpee et agissant an contact avec le nerf, n'a plus lieu si Ton mache le nerf; c'est surtout quand on touche avec deux pinces le nerf d'une grenouille vivante qu'il se produit des contractions dans le membre. Vous voyez en defmitif, messieurs, que tous ces phe- nomenes, sur lesquels nous reviendrons encore, sont tres delicats , et que , bien qu'ils aient ete etudies avec beaucoup de soin , il est encore necessaire de les ap- profondir. J'ai voulu surtout vous faire remarquer ici que nous ne pouvons encore en retirer que peu d'utilite* par 1'explication des phenomenes du systeme nerveux pendant la vie de l'animal. .^ On a signale une autre difference entre les manifes- tations nerveuses et les phenomenes electriques. Cette MESURE DE LA CONTRACTION MUSCULAIRE. 2%29 difference ressortirait cle la comparaison des vitesses de propagation des deux agents parcourant des conduc- teurs. Les re'sultats des experiences institutes pour con- stater ces differences ne doivent pas toutefois etre acceptes sans reserve; on se tromperait en pensant qu'ils peuvent etre donnes comme 1'expression parfaitement physiologique du phenomene. M. Helmholtz, qui a institue ces experiences, a fait d'abord usage d'un appareil pour mesurer la rapidite avec laquelle s'effectue la contraction musculaire. On agit avec un muscle gastro-cnemien de grenouille qui est fixe a 1'appareil par sa partie superieure. Inferieure- ment Ton a fixe a son tendon une petite pointe de verre destine'e a ecrire le raccourcissement du nerf sur une surface plane recouverte d'un enduit noir pen adherent. MM. Volkmann et Helmholtz faisaient usage d'une epingle glissant sur uu carreau noirci a la lampe; M. deBoecker se sert d'un index de verre frottant d'une facon tres egale sur la surface destinee a recevoir 1'im- pression des contractions musculaires. Cette surface est une feuille de papier noircie a la fumee d'une lampe et collee sur un cylindre tournant. Voici quelques-unes des planches ainsi obtenues parM. deBoecker lui-meme; les indications de 1'appareil out ete, apres 1'experience, fixces sur le papier au moyen de 1'essence de tereben- thine. M. deBoecker a reconnu, comme on pent le voir sur ces courbes, que la contraction du muscle est d'abord brusque, ce qui se traduit par une ligne droite verti- cale; puis le relachement suit, moins rapide, represente 230-' , VITESSE DE LA TRANSMISSION par une lignc oblique. C'est la le type de la contraction musculaire normale. Quand le muscle se fatigue, la ligne qui represente la contraction devient oblique vers sa partie superieure ; puis on voit celle qui represente le relachement devenir de plus en plus oblique. En laissani le muscle se reposer alors pendant quelque temps , il reprend une partie de son energie, et les lignes obtenues sont differentes. Ayant dispose son appareil de facon a pouvoir e"tudier ccs phenomenes de contraction au point de vue de leur duree, M. Helmholtz est arrive aux resultats suivants : il a vu que chaque contraction se faisait en trois temps : Le premier est marque par 1'intervalle qui s'ecoule entre 1'excitation electrique et la contraction : sa duree est de l/100e de seconde environ; Le deuxieme temps est celui pendant lequel le muscle se contracte: il dure 18/100es de seconde; Le troisieme temps , celui pendant lequel le muscle contracte revient a 1' extension, dure 20/100es de seconde. La duree totale d'une contraction serait done, en y comprenant le temps ne'cessaire a 1' excitation nerveuse, de30/100esde seconde. Maintenant, en agissant sur le nerf a differentes dis- tances de son point d'entree dans le muscle , on trouve, en calculant la vitesse, que Fagent nerveux se transmet dans nn nerf de grenouille avec une vitesse de 15 a 20 metres par seconde. II ivy aurait la , vous le voyez, aucun rapport a etablir entre cette vitesse et celle de 1'electricite. Ces experiences ont ete reglees avec un soin extreme DE L'INFLUX NERVEUX. 231 et on n'a aucune objection a faire anx conditions physi- ques de leur institution. II faut Dependant etre tres re- serve sur les conclusions a en tirer, car si physiquciuent elles sont satisfaisantes, on ne peut disconvenir qu'elles soient insuffisantesa resoudre la question physiologique. Dans re"tat actuel de nos connaissances, nous regardons comme mauvaise ou au moins comme anticipee la ten- dance qui porte a soumettre a la mesure des pheno- menes dont les conditions organiques ne sont pas suffi- samment connues. Nous en resterons la, messieurs, sur les proprietes du nerf moteur. L'examen auquel nous nous soinmes livre relativement aux travaux dont leurs proprietes et leurs fonctions out ete 1'objet, s'il ne nous renseigne pas completement a cet egard, nous apprend au moins combien la question est difficile et de combien d'in- fluences il faut tenir compte dans les experiences de ce genre. Comme resultat general des experiences qui ont pu etre accomplies dans des conditions physiologiques, nous pouvons admettre que le nerf moteur est un organe particulier auquel sont devolues des fonctions nerveuses bien determine'es ; qu'il a des proprietes speciales capables de le caracteriser physiologiquement; qu'intermediaire a la moelle et au tissu musculaire, ses proprietes etabl is - sent entre lui et ses aboutissants une ligne de demarca- tion bien tranchee. Dans la prochaine seance, nous aborderons Fhistoire du nerf sensitif. TREIZIEME LECON. o 4 FEVniER 1857. SOMMAIRE : Racines sensitives. — Leurs caractercs anatomiques. — Ganglion inter vertebral. — Experiences sur le role physiologique des ganglions intervertebraux. MESSIEURS , Les racines sensitives rachidiennes, dont nous allons maintenant nous occuper, sont, comme les racines mo- trices auxquelles elles sont toujours associees, au nombre de 31 paires chez 1'homme. Elles naissent de la partie posterieure de la moelle pour se reunir bientot aux ra- cines anterieures. Leur volume est variable suivant la region dans laquelle on les examine el suivant les ani- maux. Un fait interessant pour le physiologiste est le rapport de lour volume a celui des racines anterieures. Ce rapport, sensiblement constant chez un meme indi- vidu. chez une meme espece, pent varier conside'rable- mcnt d'une espece a 1'autre. Pour ne vous citer que deux cas pris dans les extremes, nous vous rappellerons que, chez rhomme, les racines posterieures , sensitives, sont generalement plus volumineuses que les racines ante- rieures, tandis que le contraire a lieu chez la greuouille, par cxemple. II pent done, suivant les especes, y avoir predominance de Fun des elements nerveux sur 1'autre. Les nerfs sont, vous le savez, constitutes par 1'accole- mcnt de tubes nerveux elementaires de deux sorles : les uiis fins, les autres plus volumineux. Dans les nerfs DU NliRF SENS1TIF. 233 nioteurs, ies tubes larges predominent ; le contrairc a lieu clans les nerfs sensitifs, ou les tubes fins se trouvent dans line proportion plus considerable. Ici, messieurs, nous arrivons a un caractere plus im- portant, et qui differencie mieux que tous les autres les nerfs nioteurs des nerfs sensitifs : la presence d'un gan- glion sur le trajet de ces derniers. C'estla un fait capital, d'abord en raison de la valeur anatomique de ce carac- tere, ensuite parce que des experiences recentes out montre que le ganglion joue un role tres important dans les phenomenesnerveux. Le ganglion, situe sur la racine posterieure, toujours avant le point ou elle se re unit a la racine anterieure, est forme principalement de cellules nerveuses (voy. fig. 11 et 12, p. 126). Nous vous avons deja dit que ces cel- lules, les unesbipolaires, d'autresmultipolaires, d'autres, enfin, apolaires, sont des cellules a noyau qui composent la substance grise de la moelle et les renflements gan- glionnaires. II serait des lors tres important d'etre fixe sur le role physiologique de ces cellules; peut-etre pourrait- on conclure des ganglions a la substance grise medullaire. Le ganglion nerveux se continue avec le nerf du cote de la moelle et du cote de la peripherie ; le nerf semble y entrer et en sortir. Que devient dans ce trajet la fibre nerveuse elementaire ? Diverses opinions out ete emises a cet egard, opinions qui ne s'excluent pas et qui peuvent etre toutes admises taut qu'ellessont basees sur robservation. MM. Ch. Robin et R. Wagner out decrit une disposi- tion dans laquelle la fibre nerveuse penetre dans une »U GANGLION NERVEUX cellule pour en sortir par le point oppose. Dans cette disposition, observee surtout chez les plagiostomes, la cellule nerveuse serait une intumescence de la fibre, line sorte de ganglion elementaire situe sur le trajet de la fibre nerveuse. On rencontre encore dans le ganglion des cellules unipolaires, a prolongement ordinairement centrifuge, mais aussi, d'apres Kolliker, quelquefois dirige vers le centre medullaire. Le ganglion renferme encore des cellules apolaires; M. Faivre en a reconnu 1'existence chez les animaux inferieurs (1). En resume, le ganglion nous offre une agglomeration de cellules ayant avec les tubes nerveux elementaires les rapports les plus divers. Laissant la les cellules pour suivre les fibres, nous voyons que celles-ci contractent ordinairement dans le ganglion divers rapports de contiouite avec les cel- lules, mais que ce cas n'est pas le seul, et que d'autres fibres traversent le ganglion sans y avoir avec les cellules nerveuses d'autres rapports que des rapports de contact. Cette disposition a ete figuree par Kolliker chez le chien. Mais , messieurs , ce n'est pas ici le lieu de nous etendre sur les caracteres anatomiques du ganglion. Ce que nous avons a etudier, ce sont surtout ses usages. Or, tandis que les fonctions des racines anterieures et des racines posterieures etaient depuis longtemps assez exactement connues , tandis qu'on avait fait presque complete la topographic du systeme nerveux. on etait (1) Etudes sur I'histologie corn-par ee du systeme nerveux chez qucl ques animaux inferieurs. Paris, 1857, in-/i, fig. DES NliRFS SENS1T1FS. *235 reste sur le r61e cles ganglions dans I'ignorance la plus complete; aucune experience ne permettait de former a ce sujet me'me de simples conjectures. Recemment M. Waller a public des experiences tres importantes, experiences dont les rfsultats remarquables nous paraissent devoir etre le point de depart de re- cherches qui seront faites idterieurement dans cette voie encore pen exploree. Les experiences de M. Waller sont fondees sur ce fait, auquel il a le premier donne une signification , que , lorsqu'on coupe un nerf , qu'on le separe de son centre, il s'altere , chez les animaux superieurs , suivant une direction determinee. Nous \ous avons deja dit que , quand on coupe une racine anterieure, c'est le bout peripherique qui se desorganise. II etait interessant de faire la meme chose pour la racine posterieure , et de voir ce qui a lieu selon que la section est operee entre le ganglion et la moelle , on au dela du ganglion. Ces experiences ont ete pratiquees par M. Waller sur la deuxieme paire rachidienne cervicale des chiens, et surtout des chats. Les racines rachidiennes sont cachees dans le canal "vertebral, et ce sont deja les nerfs mixtes qui sortent par les trous de conjugaison. La deuxieme paire rachidienne fait exception a cette regie : le gan- glion de la racine posterieure sort du canal vertebral, en dehors duquel a par consequent lieu 1' union des deux racines. C'est a cette disposition que cette paire doit d'avoir ete choisie de preference a toute autre. Et si les 2oG DES PROPRIETIES ET DES USAGES experiences out ete faites surtout sur des chats, c'est que chez eux cette disposition est encore plus prononcee. Ces raisons ne sont pas indifierentes, car les animaux devant survivre a 1'operation, il faut que le precede experimental n'expose pas a les faire perir presque inevitablement. Voici ce precede : On fait une incision verticale sur la crete de 1'apo- physe epineuse de la deuxieme vertebre cervicale ; on souleve les muscles , et on les rabat en haut et en de- hors; par ces deux temps la lame de la vertebre est mise a nu; on voit en haut de 1'espace decouvert le gan- glion intervertebral et les deux racines rachidiennes. On isole autant qu'on le pent le ganglion, en respcctant les vaisseaux et les sinus rachidiensqui 1'entourent. On coupe les deux racines simultanement ou separement, sui- vant 1'eftet que Ton veut obtenir ; dans ce dernier temps on doit eviter de couper des vaisseaux. Get accident, souvent difficile a eviter, donne lien a des he'morrhagies tres graves, et aussi quelquefois a 1'eutree de Fair dans les sinus rachidiens. Ces indications etant posees , voyons quels sont les resultats de Texperience. Supposons d'abord que Ton coupe les deux racines a la fois: Fanterieure, avant sa reunion a la posterieure ; la posterieure, avant le ganglion, c'est-a-dire entre ce- lui-ci et la moelle (fig. 39, 6). Apres cette operation, la ratine ante'rieure ne s'allere pas dans le bout qui tient a la moelle. Apres quelques jours, le bout central de la ratine posterieure presente au contraire la coloration noiratre caracteristique de sa DES GANGLIONS INTER VERTI::BR AUX. 237 disorganisation. DCS strics Iransversales partagent la substance medullaire do la fibre ncrveuse; bient6t une veritable segmentation s'opere de la moelle nerveuse, donnant finalement lieu a des granulations noiratres, indices de 1'alteration confirmee. La conclusion a tirer de cette observation, c'est que la continuite avec la moelle ne met pas obstacle a la di- sorganisation de la racine posterieure , tandis qu'elle empeche 1'alteration de la racine anterieure. (i) Alterations nerveuses consecutives a la section des ratines de la deuxieme pctire rachidienne cervicale. — Fig. 39, 1. La section a porte sur la racine posterieure avant le ganglion. La portion A, comprise entre la section et la moelle, est le si sur la cuisse un petit lambeau de peau pour niettre a nu la surface musculaire a qui a une electricite positive , tandis que toute la surface de la peau possede une electricite" negative. De sorte que si Ton place une patle galvanoscopique dans le trajet d'un arc con- ductetir allant de la surface musculaire positive a a la surface de la peau c negative, par exemple, on aura une contraction a I'entree du courant. Le courant se dirigeant de a passe par le doigt de rcxperimenta- teur, puis par la patte de la grenouille , puis par le nerf lui-meme f. Au moment ou 1'anse du nerf dont le bout est releve" en b vient a toucher la peau, il y a convulsion dans la patte, parce que il y a reconstitulion dcs deux electricites. Si, au lieu de faire toucher 1'anse du nerf en c sur la face exterieurc de la peau, on la fait toucher de f en c' sur une autre surface musculaire, on n'aura pas de convulsion dans la patte galvanos- copique, parce que les deux surfaces se trouvent positives, et il ne pent y avoir de courant. 312 COURANT MUSCULO-CUTANfi rimcntateur louche la surface museulaire do la cuisse a, il y a contraction an contact du nerf et de la surface cu- FIG. 46 (1). tanee. On pent agir inversement en touchant avec le nerf f de la patte galvanoscopique en c, tandis que le (1) Courant muscitlo-cutane de la grenouille. — Sur une grenouilic vivante ou tres recemment morle,on place le nerf de la patte galvanos- copique dans les di verses conditions pour monirer Texistence d'un con- rant allant de la face externe du muscle a la face exlerieure de la peau. T. La patte p est isole'e, le nerf est souleve en c avec une tige de verre; le bout du nerf b et son anse a toucheni la pcau ; il n'y a pas de courant et on n'a pas de convulsion dans la patte. T'. La patte p' isolee ; le bout du nerf a louche sur la surface du muscle mise a nu, le nerf est souleve en c, 1'anse louche ensuile en f, et alors il y a convulsion dans la patle a I'entree du courant, qui est direct et va de d en /'. T". La patle p'' isolee; le bout du nerf g louche d'abord la face ex- torieure de la pcau ; il est souleve en i , puis 1'ansc du nerf louche la DE LA GRENOUILLE. 313 doigt d toucherait la surface cutanee de la cuisse. Dans lo premier cas, ily a un courantquiva de la surface mus- culaire a positive a la surface de la peau c negative, et c'est le corps on la main de 1'observateur qui servent de conducteur ; de sorte que , si Ton isole la patte galva- noscopique, le phenomene cesse d'avoir lieu, parceque le courant entre la peau et le muscle est interrompu. Mais, quand la patte est isolee dans un tube de verre (fig. 46), on peut avoir la contraction pourvu que Ton place le nerf dans le courant qui va des muscles a la peau. II suffit de faire toucher le nerf aux muscles et de faire tomber 1'anse nerveuse sur la peau. II y a done un courant musculo-cutane qui va de la surface longitudinale des muscles, consideree comme positive, a la surface de la peau consideree comme ne- gative. Jene sache pas que la direction de ce courant ait ete signalee. Je Fai constate d'abord avec la patte gal- vanoscopique , puis eusuite avec M. J. Regnault, a 1'aide de son appareil (voy. fig. 37). Voici , en resume, surface musculaire en h. II y a convulsion dans la patte galvanoscopique le plus ordinairement a la sortie, parce que le courant est ici indirect et va de h en g. T'". La patte p"f est isolee ; au lieu de faire toucher le bord du nerf, on a fait d'abord toucher 1'anse k sur la peau , puis le nerf souleve en I, on a fait toucher le bout in sur la surface musculaire. On a la contraction an moment de la fermeture du circuit, parce que, malgre cette inversion dans le precede operatoire, le courant est toujours reste direct, c'cst-a- dire dirigtf du centre a la pe"ripherie par rapport an nerf. T"". La patte p1'" est isolee; icile nerf a ete applique successivement et lentement de la surface musculaire a la surface externe de la peau. 11 n'y a pas de convulsion dans la patte, parce qu'il n'y a pas de pont isolant forme sur le trajet du nerf. OOIJKAM MISCm.O-CUTAN'l n- (jut; nous fivons observe. Kn placant uno cuissc do L(ronouillo deponilloc do s;i pcau d'un cole el plaoee do Idle racoii<|iio lapoau loueliat mi oonssinet, el la surface iiinscnlairc raiilre, on avail, LIMO dovialion Ires marquee qui allaiten sens inverse <|uaud on invorsail ies surfaces de conlael. La direction du <;onranl s'esl inonliV-o con- slanlo des innseles a la |>eaii. II y a ensnilo 1111 conranL (jiii va do la snriaoo inloriie de, la jieau positive a la face exlerne ni'^aliv*;. On le conslale ;i Taidt- de la ^ronoiiilN- gaWftDOSCOpique Mi;j. AC>. l*"'!*""!^),^!.;1! Kaido du iar la tare interne rl I'aiili'e par la Face, exlerne de, la poaii, on a line d(''\ialion Ires evidenle dans le sens (Tun oourant (|in va, d(! la lace interne de la peau a sa lace oxlrrno. De Ions ces conranls (''lecl.riijiios, le couranl, inusoii- laii-eoslleplusrorl, le inusculo-culain', cl leciilaii(;e,nsuito. Knlin, il peul y avoir aussi nn couranl (''led ri(juo dans mi soul muscle, <|iii i j-a.il, du lendon a la siiltslance mns- oulaireou ,i nn iniiscli; a Taulre (fiy. /jfi, T', T"J. II osi, l)ien reraarquable que Ies organes glanctulaires paraissent compl^temjBnt d^pourvus de ces courants^lee* lri(|ii(!s..rai ossayo avoe la patte galvanoscopique le, I'oio, Ics reins, etc., Ies leslicnles, le,s pouinons, sans 1'ion ohlc- nir. Cependant, en plaeanl I*; neii sur l(^ loie (;l, sur la prjui die/. IIIK; mrenoinllo, j'ai vii survenii' il«;s eonl.i'ao lions, do uiAmeanssi sur la lan,mio de la L--reiiouillc. .I'ai essaye dir Vi'-i'ilier Toxislonco do cos cmirants choz des animaux ol isoK'-c ; nn l.unluMii dc pr.iu i-iilovt'- a mis .'i nn la snr- taco exk'-ncmv drs nuisrlos ill1 l.i rui>M'. l,f bonl iln iii-rl' nomenede sensibilite qui tantot se passe a la surface encephalique sous 1'influence d'un souve- nir, d'une sensation anterieure, d'une impression causle par 1'afflux du sang, ou par toute autre cause, tant6t se passe a la pi'ripherie du corps sous 1'influence d'une ex- citation exte"rieure. L'anatomie donnerait encore un appui a cette ma- niere de voir, car, a 1'extremite' des nerfs de sensibility peripherique , on a trouve, dans un tres grand nombre de cas, des cellules nerveuses terminales analogues a celles qui se rencontrent dans 1'encephale. Quoi qu'il en soit de ces vues que 1'avenir jugera, nous devons actuellement passer a 1'examen des mouvements reflexes ou involontaires, qui out bien evidemment pour point de depart et pour organe de transmission au centre nerveux un nerf sensitif. Voici, par exemple, une grenouille dont la moelle a ete coupee qui reste immobile, les pattespendantes, quand on la tient suspendue. Cette grenouille, lors- que Ton vient'a pincer son train posterieur, execute des mouvements bien evidemment involontaires. En voici une autre dont la moelle n'a pas encore ete coupee, mais a ete mise a nu dans ce but ; cette grenouille, lorsque nous la tenons de la meme facon, retire vo- lontairement ses membres posterieurs, et leur fait exe- cuter les mouvements les plus propres a la debarrasser d'une etreinte qui la gene. Les mouvements involontaires que vous avez vus chez 0/lS MOELLfcl lii'lNlERli. la premiere grenduille, elre la consequence d'niie sensa- tion non percue , d'ahofd etudies par Prochaska , par Legallois, plus tard, en 1833, par Miiller et Marshal Hall, sont ce qu'on a appele des mouvements reflexes , mou-^ vements produits par 1'excitation sensitive, mais sans que la conscience intervienne. Ces mouvements, dus nniquement a I'infliience qu'exerce la racine sensitive sur la raciue motrice, sont les plus simples de tous. L'excitation portee sur le nerf sensitif arrive a la moelle, se propage par la moelle a la racine anterieure, et par cette derniere aux muscles. L'experience demontre que tel est bien le trajet suivi par 1'excitation sensitive. En effet, si 1'on coupe la racine poste'rieure et qu'en- suite on irrite la peau, on n'a rien. Apres cette section, Firritation du bout central' de la racine posterieure donne lieu an mouvement reflexe, comme si Ton avait agi sur la peau. Si, laissant la racine poste'rieure intacte, on coupe la racine anterieure, 1'irritation sensitive ne donne plus lieu an mouvement reflexe. Cette absence de la reaction reflexe tient dans le pre- mier cas au defaut de transmission de 1'excitation sensi- tive ; elle est due dans le second an defaut de transmis- sion de 1'excitation motrice. La moelle, d'ailleurs, est necessaire a la communica- tion physiologique que ces experiences montrent exister entre les racines posterieures et anterieures , car, si on la detruit, les phenomenes de mouvement reflexe n'ont ordinairement plus lieu. MOUVEMENTS REFLEXES. Ccs experiences nous montrent dans sa plus grande simplicity 1'ensemble des actions neryeuses. Nous y voyons irois manifestations distinctes, trois temps dans raccomplissement de 1'acte nerveux complet : 4 ° sensa- tion ; 2° transformation cle cette sensation en excitation motrice; 3° mouvement. Le second temps, transformation tie 1' excitation sen- sitive en excitation motrice, s'accomplissant avecou sans Intervention de Fintelligence. En observant ce phenomene, on s'est demande com- ment pouvait se produire ce retour, cette reflexion cle 1'influence nerveuse, comment la communication etait etablie de la racine posterieure a la racine anterieure, et comment, dans ce trajet, ^excitation changeait de nature. On a done etudie a ce point.de vue la moelle, et sur- tout celui de ses elements auquel semblait etre attribue* le r61e principal, la cellule nerveuse. D'apres les travaux les plus recents, il est evident que les racines anterieures naissent dans la moelle de cellules ganglion nai res. Tons les anatomistes admettent qu'il n'est pas de fibre motrice qui ne soit en rapport de con- tinuite avec une de ces cellules ganglionnaires que nous avons vues former 1'el^ment conducteur qui etablit la communication physiologique entre les deux racines. On a reconnu une grande quantite de ces cellules dans la corne anterieure de la substance grise. En est-il cle me" me dans la corne posterieure? La question n'a pas etc encore resolue d'une maniere complete. On y a bien decrit des cellules ganglionnaires plus petites et plus 350 MOELLE EP1NIERE. rares que celles de la corne anterieure, mais leur nature nerveuse a ete contestee, et recemment on a pretend u que celles qui sont dans la substance gelatineuse de Rolando appartenaient au tissu cellulaire. On ne salt done pas encore si les fibres de la racine posterieure sont ou ne sont pas en communication avec les cellules speciales. La question pour nous est de savoir s'ily a des cellules entre les deux ordres de ratines. On a , d'apres lenr existence , construit une theorie d' accord avec les faits observes : La racine posterieure entre dans les faisceaux poste- rieurs. Y est-elle en communication avec des cellules nerveuses ? Nous venous de vous dire quelles difficultes empechaient de resoudre cette question. Dans tons les cas, les cellules de la corne posterieure, nerveuses ou purement celluleuses , communiqueut avec les cellules ganglionnaires, d'ou partent les fibres de la racine an- terieure, du nerf moteur. De ces cellules de la corne anterieure , on voit partir des filaments dont les uns se portent dans le cote oppose de la moelle, tandis que d'autres remontent vers le cerveau et que d'autres descendant sur les parties si- tuees inferieurement. Toutes les cellules de la substance grise communiquent done enlre elles. 11 faut voir neces- sairement dans chacune d'elles 1'image d'un veritable centre. Yoyons maintenant comment ou pourra, partant de la, expliquer le phenomene physiologique. Chez cette grenouille dont la moelle est coupee trans- versalement au-dessus des membres anterieurs, on observe, quand on pince une patte posterieure, des MOU YEMENIS REFLEXES. 351 mouvements dans cette patte, bien que 1'animal ne puisse pas la mouvoir volontairement. On peut ne conserve!1, dans cette experience, qu'un troncon de nioelle; pourvu qu'il soil intact, 1'excitation des nerfs seusibles qui s'y rendent s'y transformera en excitation motrice capable de determiner des mouve- ments reflexes dans les parties auxquelles se rendeut les nerfs moteurs qui emanent de ce troncon. Nous venous de voir une grenouille, privee par la sec- tion de la moelle de mouvements volontaires des mem- bres posterieurs , retirer ueanmoins sa patte quand on la pincait. Nous avons vu , dans la derniere lecon , que la sensi- bilite du membre etait augmentee par cette section de la moelle ; le repos agit dans le meme sens et contribue a augnienter le mouvement reflexe. Voici une grenouille dont la moelle a ete coupee au- dessus des membres auterieurs, apres quoi on 1'a laissee en repos. Je pense que ce repos a dure assez longtemps pour que nous puissions noter les effets de Thyperes- thesie.En effet,en pincant une de ses pattes poste- rieures, nous voyons que la retraction porte non plus seulement sur la patte pincee , mais sur les deux mem- bres posterieurs. Si on eut attendu plus longtemps, les mouvements reflexes se seraient montres dans les quatre membres, comme nous vous le ferons voir sur une autre grenouille. Vous pouvez voir, par cette experience, que, pour ce qui est de la transmission des sensations dans les centres nerveux, eiles s'y generalisent et produisent des mou- 352 MOELLE liPIXIERE. vements generaux el non bornes a la paire nerveuse qu'on a pincee. Cherchant a reconnaltre comment se fait dans la moelle la transmission de i'impression sensitive et sa transformation en excitation motrice, nous avons etc" amene a distinguer deux cas. . Tandis qu'en piucant la patte poslerieure chez une grenouille saine, nous delerminons un mouvement general consistanl en efforts pour fuir, nous oblenons, chez une grenouille dont la moelle a ete coupee, un simple mouvement de re" traction. Quand, par. la section de la moelle, la voloute a ete supprhnee nous avons, dans ce mouvement inconscient et sans but, un exemple de mouvement purement reflexe. Si maintenant nous passons a 1'exanien des particula- rites qu'offre ce genre de manifestations, nous voyons que le mouvement produit n'est pas du loul en rapport avec 1'etendue de la surface irritee. Force nous est done d'admettre que I'impression sensitive se generalise. Comment comprendre cetle generalisalion.? — Est- elle due a la continuile des fibres ou a lalransmissibilile de 1'impression a Iravers les cellules? C'esl, vous le savez, a celle derniere idee qu'il faul s'arreler : la sub- stance grise est 1'intermediaire physiologique qui dans les phenomenes reflexes, unit les racines posterieures aux racines anlerieures. Quant a cette generalisation, nous aliens vous mpn- trer qu'elle se fait par 1'element sensitif et non par 1'e- lement moteur. Voici une grenouille sur laquelle une ligature embrasse MOUVEMENTS REFLEXES. 353 une paltc posterieure, do facon a 1'isoler du tronc. Le ncrf seul n'a pas ete compris da;::; la ligature, ce qui a ainsi prive le inembre de ses vaisseaux, ou plutot de la circula- tion, en lui laissantson innervation. Nous empoisonnons cette grenouille avec le curare. Bientot elle est immo- bile; ses proprietes motrices sont aneanties; elleacepen- dant conserve ses proprietes sensitives, et grace a ellesla moelle aura conserve la propriete de transmettre les impressions , comme on pent le reconnaltre aux mou- vements qui , a la suite d'une excitation portee sur le train ante'rieur empoisonne et prive de mouvement, se montrent dans le membre auquel la ligature a conserve ses proprietes motrices en le preservant de I'intoxication. . La sensibilite peut done ici se transmettre a travers la moelle jusqu'au point ou elle doit agir. Si chez une grenouille, em poison nee par le curare, ' nous menageons tout le train posterieur, nous voyonsque ses mouvemeuts sont coordonnes, quece sont des mouve- ments de saut, mouvements qui semblent volontaires. Si , au lieu d'employer un poison qui agisse sur le mouvement, nous avons recours a une substance qui detruise le sentiment, les choses ne se passeront plus de nieme. Un seul nerf sensitif empoisonne empoisonnera tous les autres ; ici Faction se generalise. La sensibilite se generalise done, etelle se propagepar la moelle. Est-a-dire. pour cela que, du point influence, Texcita- tion se transmette a chacun des nerfs de mouvement en particulier? On ne saurait admettre qu'une fibre sensitive soit char- B., SYST. KEHV. — i. 23 354 MOELLE EPINIERE. gee de transmettre directernent le mouvement a une ou plusieurs fibres motrices. II parait y avoir clans ce pheno- menetoute autre chose qu'une transmission fibre a fibre. On doit, ce me semble, voir des centres particuliers en rapport les uns avec les autres, et etablissant entre les actions des differentes parties certains rapports de soli- darite ou d'antagonisme. Ainsi, en touchant certains points de la moelle, on prodnit des groupes de mou- vements determines. Lorsque, comme cela a lieu chez cette grenouille de- capitee. on voit une excitation simple provoquer des mouvements complexes, il faut bien admettre qu'il existe un centre de reunion pour les nerfs moteurs, centre dont 1'excitation est necessaire a la production du mou- vernent coordonne qu'il tient sous sa dependance. De meme chez cette autre grenouille, qui a et£ empoi- son nee par le curare , et dont le train posterieur a etc preserve de rempoisonnement par une ligature, 1'irri- tation d'un point quelconque de la peripherie de 1'ani- mal suffit pour exciter le centre ; mais cette action n'a de retentissement que dans les nerfs conserves. Quant a cette transmission , nous pouvons nous assu- rer qu'elle se fait bien par la moelle ; car, si nous la coupons vers la region lombaire, 1'excitation de 1'une des pattes anterieures ne produit plus rien. L'actiou nerveuse motrice se limite done essentielle- ment a chaque nerf ou a chaque systeme de nerfs ; Fac- tion sensitive se re"pand a tons de proche en proche. Yoila pour les actions reflexes se manifestant exte- rieurement. MOUVEMENTS REFLEXES. 355 Si Ton epuise successivement 1'animal, on voit qu'a mesure que la sensibilite s'affaiblit, les mouvements de- viennent plus circonscrits et finissent, avant de dispa- raitre. par etre moins etendus et finalement limites a la racine anterieure correspondante. Ilsemble, d'apres cela, qu'il faut qu'il y ait dans les nerfs sensibles une sorte de tension de la sensibilite. Les cellules communiquant avec le nerf sensitif trans- mettent 1'impression sensible plus ou moins loin, suivant son intensite. C'est ainsi que la reaction motrice reflexe peut se generaliser ou se restreindre suivant 1'intensite qui la met en jeu. Les mouvements reflexes, mouvements involontaires tels que nous les avons vus, peuvent etre considered comme etant de deux sortes, selon que leur action porte sur les muscles de la vie de relation ou sur les muscles de la vie organique. (rest apres avoir fait 1' etude experimental^ de ces phenomenes que nous pourrons jeter quelque jour sur une des questions les plus interessantes de laphysiologie : je veux parler de 1'influence reciproque de ces deux proprietes motrices Tune sur 1'autre. Aucun sujet, s'il etait elucide, n'interesserait clavan- tage le praticien et ne serait, en medecine, capable de recevoir de plus larges applications. DIX-NEUVIEME LEGON. o 27 fEVRIER 1857. SOMMA1RE : Mouvements reflexes internes; leur varie"te". — Les mou- vements internes sont rc'flechis par le memc centre que les moiivements reflexes exteriies. — Quelques moiivements internes ne paraissent cepenclnnt pas obe"ir a une impulsion venant de la moelle. — Expe- riences. — De quelques moiivements pe"ristaltiques parliculiers. — Mouvements intestinaux, MESSIEURS, Apres avoir constate 1'existence des moiivements re- flexes qui ont pour point de depart le tegument externe, et pour resultat final -la contraction des muscles qui sont sous 1'influence de la yolonte, nous clevons examiner, comme leur repondant, les moiivements reflexes in- ternes, c'est-a-clire ceux qui ont pour point de depart la surface d'uhe membrane muqueuse, et pour resultat final la contraction des muscles qui ne sont pas soumis a la volonte. Ces derniers mouvem.ents sont excessivement nom- breux et comprennent toutes les actions motrices qui se passent dans les organes splanchniques. II suffira de les enumerer, car ils sont connus et admis de tous les phy- siologistes. Toutes les secretions, par exemple, se font sous 1'in- fluence d'un mouvement reflexe, et il pent arriverque t-ant6t la sensation qui en est le point de depart soil consciente, et tan tot qu'elle soit inconsciente. Ainsi, la MOUVEMENTS RKFLEXES INTERNES. 357 secretion salivaire qui a lieu sous I'lnfluence du vinaigre introduit dans la bouche, est une secretion qui succede a line sensation avec conscience. Les secretions du sue gastrique, du sue pancreatique, de la bile, qui out lieu quand des aliments passent dans le tube digestif, succe- dent au contraire a des sensations sans conscience. II en est de meme des phenornenes purement nio- teurs des organes splancbniques qui peuvent succeder a une sensation tantot consciente, tantol ineonseiente. Lorsque les mouvements de mastication et de deglutition s'operent, ils out pour point de depart une sensation consciente. Lorsqu'au contraire il s'agitdes mouvements de 1'estomac et des intestins, ils out leur point de depart dans une sensation inconseiente. Nous ne nous arreterons pas plus longtemps a signaler tons les mouvements reflexes qui peuvent exister dans les organes involontaires, parce qu'ils sont parfaitement connus. Nous nous arreterons seulement a la question de savoir s'ils sont soumis aux memes conditions que les phenomenes reflexes de la vie de relation, et si la moelle epiniere ou un centre nerveux cerebro-spinal est abso- lurnent necessaire a leur accomplisseraent. Bichat et beaucoup d'autres apres lui avaient autrefois pense que les ganglions nerveux du grand sympathique presidaient aux mouvements des organes non soumis a Tinfluence de la volonte. De sorte que les mouvements reflexes qui se passent dans les organes auraient pu s'accomplir sans 1'intermediaire de la moelle epiniere, et seulement par des filets sensitifs qui se transformaient en filets moteurs dans le ganglion lui-ineme. o58 MOUVEMENTS RiiFJJiXES INTERNES. Celte vue a etc completement abandonnee ; elle a ete surtout combattue par les experiences de Herbert Mayo, sur le ganglion ophthalrnique. On avail pense, par exemple, que les mouvements involontaires qui se passent dans 1'iris avaient leur centre d'action dans le ganglion ophthalmique ; que la lumiere, par exemple, arrivant sur la retine, qu'un corps etranger, qu'une excitation directe arrivant sur la conjonctive on sur la cornee transparenle. produisaient une excitation qui e"tait recueillie par le ganglion , d'ou partaient ensuite des nerfs moteurs qui produisaient la contraction de la pupille. Cette explication a ete renversee par 1'experience qui aurait appris qu'apres la section de la cinquieme paire, ou aprescelle du nerf moteur oculaire commun, tous ces phenomenes cesseut, montrant ainsi qu'ils sont sous la dependance de Tun ou 1'autre de ces nerfs. Depuis lors on a generalise ce fait en admettant que toutes les actions reflexes se passent dans les centres nerveux ce- phalo-rachicliens, et jamais exclusivement dans les gan- glions du grand sympathique. On pense que les mouve- ments reflexes externes et les mouvements reflexes internes ont le meme centre commun. II est certain que, lorsqu'on a detruit la moelle epi- niere , toute espece de mouvement reflexe externe se trouve aboli : mais les mouvements reflexes internes le sont-ils? Cela parait beaucoup moins evident, parce que souvent il arrive que les mouvements peristaltiques de 1'inlestin deviennent excessivement violents, et que, quand ils sont absents, on les developpe en touchaut MOUVEMKNTS PltRISTALTIQUES. 359 I'intestin, qui est separe do rabdomen. On ne pent pas par consequent supposer que la moelle epiniere inter- vienue comuie centre dans ces contractions. II en est de meine d'autres mouvements sur lesquels nous reviendrons tout a 1'heure. Cependant il est positif qu'il existe des mouvements reflexes des intestins qui paraissent avoir pour centre la moelle epiniere. Nous avons dcja cite, dans le deuxieme volume de nos Lecons, uue experience dans laquelle cette intervention de la moelle comme centre est evidente. Nous allons repeter cette experience devant vous. Sur ce jeune dogue qui vient d'etre sacrifie par la section du bulbe afin de faire cesser tons les mouvements volontaires, nous ouvrons la poitrine et nous galvanisons le ganglion cervical superieur. Bientot on voit les mou- vements de 1'intestin grele devenir tres violents sans qu'il y fin ait dans les autres parties de 1'intestin. Lors- que nous galvanisons les ganglions du plexus solaire , nous voyons des mouvements peristaltiques tres actifs se moiitrer dans le gros intestin seulement. Si mainte- nant nous voulons nous rend re compte de la maniere dont s'opereut ces mouvements, nous ne pouvons pas admettre que Tirritation portee sur le ganglion cervical superieur se transmette par les filets qui partent de 1'extremite inferieure de ce ganglion et arrivent en suivant le trajet des nerfs grand et petit splanchnique, a faire contracter les muscles de 1'iutestin. Inexperience prouve, an contraire, que 1'impression galvanique passe du ganglion a la moelle epiniere et se transmet par oGO MOUVEMKNTS RKH.EXES. elle et par action reflexejusquaux nerfs qui vontdirec- tement dans les intestins. En effet, si 1'on coupe la reunion des filets qui ema- nent de la partie inferieure dti ganglion premier thora- cique, de maniere a avoir deux bouts constitute, Fun superieur par le ganglion lui-m^me, 1'autre inferieur par les filets qui en emanent, et qui font partie de la chaine sympathique ; alors si Ton galvanise le bout infmeur, on n'obtient aucuri resultat, tandis que la galvanisation du bout superieur produit des contractions de 1'inte.stin grele, exactenient comme cela avail lieu lorsqu'on'gal- vanisaitle ganglion intact. Ceci prouve evidemment que c'est par la moelle que passe 1'intluence nerveuse. C'esl, en elTet, le seul conducteur qui semble rester cntre Te ganglion el les intestins greles. Ce que nous venous de dire du premier .ganglion Ihoracique s'applique an plexus solaire. On pent voir toutefois, d'apres celte experience, que la contraction des intestins recoil son excitation de par- lies du systeme nerveux situees beaucoup au-dessus des organes qui se conlractent. Mais si Ton admet mainle- nant que les fibres sensitives qui produisent cette con- Iraclion naissent des parties situees au-dessus de celles qui se contractenl , on verra que les nerfs sensilifs qui Iransmeltent 1'impression excilante ne sont pas ioujours dans les organes me'ines qui se meuvent. Ainsi , par exemple, une irritation portee sur les nerfs de rintestin grele fait contractor le gros intestin. Ainsi une irritation portee sur les nerfs de 1'estpmac fail con- tracter 1'intestin grdle. MOUYIvMl'NTS' PK1USTALTIQUKS. 361 II s'agirait toutefbis de savoir si les nerfs .quc Ton galvanise sont reellement cles nerfs de sentiment, ou si Ton n'aurait pas affaire a des nerfs de mouvement appartenant an syrnpathique, qui rentreraient dans la moelle epiniere. Ge sont la antant de questions particulieres qui seraient a traiter dans 1'histoire spe- ciale du grand sympathique, etudie dans les differents organ es. Nous signalerons enfin certaines formes de mouvement qui existent dans les intestins ou dans d'autres organes splancbniques, et qui sont evidemment independantsdes nerfs, quoique, dans certains cas, ces mouvements puis- sent etre determines par 1'influence nerveuse. Ainsi lorsque, par exemple, on a un oesophage ou une portion d'intestin dont toils les nerfs moteurs ont ete d^truits, soitpar Fabiation de 1'organe, soitpar 1'empoi- sonnement a 1'aide du curare, et lorsqu'on pique Foaso- phage avec la pointe d'un bistouri, de maniere a irriter la fibre musculaire dans un point determine, on voit le resserrement du conduit musculaire avoir lieu, non- seulement dans le point touche,.mais on le voit se pro- pager ensuite au-dessous, jusqu'a une distance tres eloi- gnee, qui est sa limite naturelle. II en est de meme del'iiretere : lorsqu'on le pique avec la pointe d'un bistouri , it se manifesto une contraction peristaltique qui , debutant dans le point louche . des- cend par la partie inferie'ure j usque vers la vessie, mais jamais he remonte vers le rein. II y a clone la, dans tous ces cas, une transmission de 1'irritation dans un sens determine, transmission qui 362 MOUVEMENTS REFLEXES. parait se propager entre les fibres musculaires saus Pin- tervention du^systeme nerveux. II y a d'autres mouvements qui semblenl encore in- dependants du systeme nerveux. Tels sont, par exemple, les mouvements de contraction rhythmique qui se pas- sent dans les conduits biliaires de quelques oiseaux ; tels sont les mouvements peristaltiques continuels qui exis- tent dans la partie inferieure de 1'cesophage . et qui ne sont pas toujours immediatement paralyses apres la sec- tion des pneumogastriques. Tel est le muscle sphincter dela vessie, qui n'est pas paralyse en meme temps que les fibres de la vessie , et dont la contracture persiste encore longternps apres qu'on a detruit les nerfs. Enfm,pour indiquer encore (juelques particularites relatives aux mouvements peristaltiques des intestins, nous dirons que ces mouvements sont fort obscurs pen- dant la vie, et qif ils ont meme £te nies; que leur mani- festation a lieu apres la mort , particulierement quand la circulation cesse de s'effectuer dans les vaisseaux de Pintestin. Pendant la vie on pent observer ce pheno- mene cbez les lapins, quand on a pique on coupe la moelle epiniere un pen au-dessous des nerfs phreniques, operation qui ralentit considerablement la circulation intestiuale. Le mouvement peristaltique qui amene 1'expulsion des matieres fecales se compose de deux series d'actions que j'ai souvent eu Foccasion d'observer dans le gros intestin des lapins. II y a une contraction de Pintestin, qui se resserre derriere le bol fecal et le pousse vers la partie inferieure. Mais en meme temps il y a uu rela- MOUVEMENTS PKRISTALTIQUES. 363 chement aussitot ei nne sorlc de dilatation qui se mani- feste par Felargissement de la portion de 1'intestin qui precede immediatement le bol fecal ; puis, quand le bol fecal a franchi cette partie elargie , elle se retrecit der- riere lui ; une autre s'elargit au-devant-et ainsi de suite. Ces mouvements de dilatation, qui sont ici tresevidents, sont tres dilficiles a comprendre ; l>eaucoup de physiolo- gistes les nient. Nous aurons plus tard a chercher a comprendre leur mecanisme. Toutefois nous devons encore ajouter que les mou- vements peristaltiques n'existent pas au meme degre chez tous les animaux , et qu'ils ne sont pas en rapport avec 1'organisation plus ou moins elevee de l'animal, car on les voit difficilement chez les oiseaux et chez les reptiles. C'est chez les mammiferes que ces mouvements paraissent surtout developpes. Ces mouvements appa- raissent surtout apres la mort, chez les animaux qui sont mods en digestion. Lorsque les animaux meurent a jeun, ils sont moins violents et peuvenl meme manquer com- pletement si l'animal est mort apres une abstinence longtemps prolongee, et alors les intestins prennent une forme speciale. J'ai vu? chez un chien sacrifie apres une abstinence de quinze jours, les intestins prives a pen pres complete- ment de mouvements peristaltiques, et presentant une fornie aplatie au lieu de la forme arrondie qu'ils out normalement. II faut ajouter que ces intestins etaient comme exsangues par le fait meme de 1'abstinence. Sur un herisson en hibernation, .observe au mois de mars, et etant en hibernation probablement depuis deux MOUVEMENTS PER1STALT1QUES. on trois mois. j'ai rencontre ce merne fait do 1'absence des mouvements pcristaltiques dans les intestins apres la mort, meme apres qu'ils avaient ete enleves de 1' ab- domen. II y avail egalement la meme forme aplatie des intestins ; mais lelendemain, en examinant ces intestins restes a la temperature ordinaire, ils avaient tres lente- ment change de forme et etaient devenus arrondis, et leur diametre bien inferieur a celui dela veille. Nous pourrions donner beaueoup d'antres exemples des vane" tes de mouvement qu'on pent rencontrer dans les organ es interieurs; mais ce que nous en avons dit suffit pour prouver qu'il y a la des conditions particu- lieres qui se rencontrent dans les organes musculaires de la vie interieure , et qui doivent rendre 1'etude des mouvements reflexes qui se produisent dans le grand sympathique beaueoup plus difficile. Aussi 1'etude de ces moiiveir>ents reflexes interieurs est-elle, quoi qu'on en ait dit, encore entouree d'une grande obscurite. Nous ajouterons enfin que, s'il est prouve que dans certains cas les ganglions du grand sympathique no semblent pas agir comme centre dans les mouvements reflexes, il y a des cas dans lesquels ils semblent avoir cette influence. Ainsi, lorsque Ton a coupe le filet cer- vical du grand sympathique et qu'on irrite avec une pince son bout superieur , on produit des mouvements de deglutition par action reflexe , mouvements dont le ganglion cervical superieur paraitrait etrele centre. Quand on galvanise les pneumogastriques , le co3ur s'arrete, et avec cet arret du cceur coincide ordinaire- ment, chezle chien, 1'apparition des mouvements peris- MOUYl'IMKNTS FKRISTALTIQUES. 305 taltiques de 1'intestin. C'ela tient-il a ce qu'on a empeche le sang d'arriver dans les intestins. Quand on a coupe la nioelle epiniere au-dessous des nerfs phreniques, et que ces mouvements peristaltiques se manifestent, se pourrait-il qu'on eut diminue con- siderablement 1'impulsion du coeur; de sorte que, dans les deux cas, ce phenomene tiendrait a la meme cause. Ce sont la quelques cas des nombreuses observations dont il nous reste a chercher rexplication. VINGTIEME LECON. 9 4 MARS 1857. SOMV1AIRE : Solidarity des phenomenes de sensibility et de mouvement de la vie organique et de la vie exte"rieure. — Influence des sensations internes sur les mouvements exlernes. — Experiences. — I'henomenes reflexes produits par I'irritation du pneumogastrique. -- Inlluence des sensations externes sur les phenomenes de la vie de nutrition. — Etat convulsif du pneumogastrique. MESSIEURS , La question la plus interessante serait maintenant de savoir si les phenomenes de sensibilite et de mouvement, exterieurs ou interieurs, sont comple'tement separes, et si, malgre une cornmunaute d'origine anatomique, les nerfs de la vie organique different physiologiquement de ceux de la vie de relation. Dans certaines circonstances, notamment quand les phenomenes nerveux sont exaltes de part ou d'autre. il y a une confusion entre les reactions volontaires et les reactions reflexes : ce qui porterait a croire que la diffe- rence des aptitudes fonctionnelles n'est pas complete, que la separation n'en est pas absolue. II arrive souvent que ces phenomenes reagissent les uns sur les autres, et que les mouvements reflexes d'un organe splanchnique deviennent le point de depart de contractions, de convul- sions des muscles de la vie de relation. On a indique , entre autres sympathies de cette nature, les convulsions qui seraieiit prociuites, chez les enfants, par la presence de MOUVEMENTS REFLEXES SYMPATI1IQUES. 367 vers dans le tube intestinal, par le developpement des dents, causes internes de convulsions exterieures. Ces reactions peuvent d'ailleurs etre produites artifi- ciellement : si sur UH animal recemment mort on excite son plexus solaire, Ton voit bientot des mouvements agiter le gros intestin ; mais tout ne s'arrete pas la, et souvent on observe en meme temps des mouvements dans les membres et le thorax. L'excitation du plexus solaire pent done etre suivie d'une reaction generate. Les reactions du systeme de la sensibilite organique ne sont pas constamment localisees dans 1'organe d'ou est partie 1'excitation ; elles portent sur un organe plus ou moins voisin de celui primitivement affecte ; quel- quefois meme elles peuvent 6tre generates et retentir sur toute reconomie. Certaines susceptibilites individuelles qu'on appelle idiosyncrasiques prouvent a la fois la grande variete de cessensibilites internes et des sympathies organiques dont les manifestations peuvent changer non-seulement d'un organe a unautre organe. maisquelquefois d'un individu a un autre individu . Ne perdons pas cependant de vue qu'a 1'etat physiologique , dans les conditions normales, les sensations de ces organes profonds ne sont pas percues, et que jamais la volonte ne peut agir sur eux pour y determiner des mouvements. Nousallons vous citer cles experiences seulement pour etablir la possibilite de produire des mouvements dans les muscles de la vie de relation, en agissant sur le sys- teme du grand sympathique splanchnique. Nous citerons ensuite des exemples de 1'action inverse, c'est-a-dire des 368 MOU YEMENIS REFLEXES 'SYMPATHlQUliS. fails montrant la possibility d'agir sur les phenomenes cle la vie orgauique, en s'adressant an systeme cerebro- spinal. Exp. (-4 novembre 1845). — Sur un chien bien portant'et a jeim, chez lequel la mort avait ete" deter- minee par la section clu bulbe rachidien, puis les deux pneumogastriques coupes et 1' abdomen largement ou- vert,. on continua la respiration artificielle. Alors on irrita le ganglion semi-lunaire gauche clu plexus solaire, ganglion quise trouve place immediate- ment au-dessous de la capsule surr^nale correspondante. En irritant ce ganglion avec une pince ou la pointe d'un bistouri, on vit aussitot se m.ani fester des contrac- tions musculaires dans les muscles pectoraux, et jusque dans le cou et la patte du merne cote. On observa aussi des contractions musculaires tres. sensibles dans le dia- phragme et dans les muscles coupes de la paroi abdo- .minale. On constata des mouvements analogues quand on deplacait le rein, ce qui amenait necessairement .un tiraillement des plexus mesenteriques. Au bout de dix minutes apres qu'on eut cesse la respiration artificielle, •ces mouvements avaient cesse de pouvoir etre produits. .Exp. (20. novembre 1845). — Chez un chat want, dont 1' abdomen avait ete ouvert etant en digestion, on irrita les ganglions du plexus solaire, et Ton n'obtint . aucun mouvement dans les membres ni dans le tronc. Alors on coupa les deux nerfs vagues dans la region du .cou, et Ton ouvrit la trachee en vue du cas ou la suffo- cation aurait pu se produire. Apres la section des yagues, on irrita. de nouveau les ganglions du plexus MOUVEMEXTS REFLEXES SYMPATHIQUES. 360 solaire, el aussitot on observa, commc resultat, des mouvemenls convulsifs violents dans les muscles du tronc el dans les muscles des membres posterieurs. Exp. (29 novembre 1845). — Sur un chien mouton jeune , on enleva les deux ganglions solaires par line large plaie faite a la paroi abdominale. Quand on se bornait a toucher les ganglions solaires, ils nedonnaient lieu a aucune manifestation douloureuse; mais quand on irritait fortement lesnerls cle ce plexus de manierea les faire vibrer comme des cordes tendues, il en resullait des mouvements involonlaires, saccades, qui se mani- festaienl dans tout le tronc, el surtoul dans les mem bres posterieurs : mais il n'y avaitaucune douleur percue ; et ce n'esl quelorsqu'on saisissait fortement les ganglions avec des pinces et qu'on les tiraillait pour les arra- cher, que ranimal eprouvait de la douleur et poussait des cris. Chaque fois que Ton conlondait ainsi un ganglion du plexus solaire ou un des gros nerfs qui en parlent, la partie nerveuse contuse restait noiratre et comme ecchy- mosoe, ce qui n'a pas lieu pour les nerfs du systeme cerebro-spinal. A la suite des tiraillements qu'on fit eprouver au plexus solaire, ranimal fut pris immediatement d'eva- cuations diarrheiques tres abondantes. D'apres les experiences qui precedent, on voit qiit; Tirritation des nerfs du grand sympathique. et particu- liefemeiit celle 386 MOELLE sal ions qui ne soiH synchrpnes ni entre elles ni avec le coeur sauguin. Lorsque nous avons detruit la moelle, le coeur sanguin continuera a ballre ; les coeurs lymphati- ques s'arreteront completement. II est curieux de voir que les mouvements de ces coeurs sont sous 1'iufluence de la moelle epiniere, tandis que ceux du coeur sauguin sont jusqu'a un certain point, indepenclants de cette influence. L'arret du cceur lymphatique de la grenouille quo nous venous de voir suivre la destruction de la moelle, s'observe aussi quand on empoisonne un de ces aui- maux avec le curare. Voici une grenouille qui tout a 1'heure a ete empoi- sonne"e par Finstillation sous la peau , de quelques gouttes d'une solution concentree de curare. Le coeur central continue a battre ; les coeurs lymphatiques sont arretes. Mais chose curieuse, les coeurs lymphatiques sont turgides et pleins de sang. Comment cela se fait-il? c'est ce qu'il serait interessant de rechercher. Quoi qu'il en soit, nous constatons que les mouvements de ces coeurs ne sont pas independants de 1'action du systeme nerveux cerebro-spinal. Ces coeurs supplemeutaires ne se rencontrent pas seu- lement chez les grenouilles : on en rencontre deux annexes aux arteres axillaires de la chimere. On Irouve aussi, dans la queue de 1'anguillc, un coeur veineux qui, comme le coeur sanguin parait independant de Faction de la moelle. II ne faudrait done pas generalise!' les conclusions que nous venous de tirer du phenomene observe" chez les grenouilles, et vouloir les etendre a SON ACTION SUR LES COEURS. 387 tous les occurs supplementaires quo Ton rencontre chez les animaux. La moelle, agissant com me centre, exerce encore d'autres actions. Je vous ai deja dit que Pourfour-Dupetit avait ob- serve' Faction du sympathique sur 1'oeil. Aujourd'hui nous savons que c'est dans la moelle t'piniere que se trouve le centre de cette action. Nous n'avons aucune notion sur le mecanisme des phenomenes que nousproduisons, lorsque nous piquons un point actif de la moelle. Cependant les desordres que nous observerons en detruisant un pfkloncule ce're'- belleux, porteraient a penser que dans ces lesions on rompt 1'equilibre entre des actions qui ne sont regu- lieres qu'a la condition de conserver entre elles une certaine solidarite. Certains points de la moelle sont en rapport avec des mouvements d'une nature de"terminee. II y a des regions dont Finfluence porte sur les mouvements d'extension, d'autres sur les mouvements de flexion ; quelques-unes tiennent plus specialement sous leur dependance les mouvements des membres anterieurs ou ceux des mem- bres posterieurs. Nous vous avons deja dit qu'on ne saurait admettre que le mouvemeut reflexe fut le resultat de la conti- nuite directe entre la fibre sensitive et la fibre motrice. Vous comprenez maintenant comment les phenomenes reflexes peuvent s'expliquer sans recourir a cette hypo- these : il y a dans la moelle des centres sur lesquels convergent des systeines de fibres motrices; Firrita- 388 MOELLE EPIMKRE tion de ces centres prod nit un mouvement determine. Je me bornerai a vous citer ici le resume des obser- vations de Mueller, Engelhart, Poletti, sur ces divers points de la moelle qui agissent comme centres. 1° Lorsqu'on irrite sur une grenouille une partie com- prise entre la premiere et la quatrierne ou la cinquieme vertebre cervicale, on produit des mouvements de flexion du membre posterieur. 2° L' excitation de la moelle, a partir de la quatrieme ou cinquieme vertebre cervicale, jusqu'a son extremite infe'rieure, produit 1'extension desmembres posterieurs. 3° En irritant la partie comprise entre la deuxieme et la troisieme vertebre cervicales, on determine 1'adduc- tion des membres anterieurs. li° Le reste de la moelle clonne, lorsqu'on 1' irrite, un ecartemeut des membres anterieurs. II nous reste & examiner 1'influence qu'exerce la moelle, considered comme centre, sur les mouvements respiratoires. Quand ici je vous parle de la moelle, je veux vous indiquer son prolongement au-dela du trou occipital. Le centre respiratoire, en effet, se trouve au-dessus d'un plan qui couperait la moelle. entre 1'occipital et 1'atlas, plan qui, nous 1'avons vu, est la limite que les anato- mistes assignent a la moelle. La moelle a cependantsur les actes respiratoires, une influence qu'on ne doit pas meconnaitre. Ainsi, quand on la de"truit dans la region lombaire, la respiration continue a s'effectuer, le thorax se dilate, le diaphragme fonctionne fort bien, mais les parois abdominales para- SON INFLUENCE SUR LA RESPIRATION. 389 lysees ne viennent plus prendre part aux mouve- inents d'expansion on de resserrement de la cavite tho- racique. Si on fait une plaie a 1'abdomen, on voit que par cette plaie les iutestins ne s'^chappent plus. L'air entre dans la plaie, et en sort ensuite, aspire d'abord puis re- pousse par le jeu clu diaphragme. Si on de'truisait la partie dorsale de la moelle, on abolirait les mouvements respiratoires de la meme ma- mere, en paralysant les parois thoraciques, mais dans ce cas encore, la moelle n'agit pas comme centre, et l'animal qui auraitsubi cette operation, pourrait encore respirer par le diaphragme, comme nous 1'avons vu chez ce lapin, auquel nous avions fait la section de la moelle entre le plexus brachial et le plexus cervical. La destruction de toute la portion cervicale de la moelle, amenerait une abolition complete des mouve- ments respiratoires. Depuis longtemps on sait qu'il est un point de la moelle allong^e qui preside aux mouvements respira- toires. Galien en parle ; et Willis, qui signale ce point comme celui ou s'accumulent les esprits auimaux, ajoute Comme preuve de 1'exactitude de cette assertion, que la mort est la consequence necessaire de sa bles- stire. Le fait s'est toujours montre le meme dans les experiences de LegaHois, deM. Flourens, etc. On peut blesser toutes les autres parties de la moelle sans amener un arret immediat des mouvements respi- ratoires ; mais si Ton vient, par un instrument introduit entre 1'occipital et 1'atlas, a produire une plaie de la 390 MOELLE ALLONGEE partie situee entre les origines apparentes des pneumo- gastriques, on cause immediatement la moil de 1'animal parTarret cornplet des mouvements respiratoires. Lors- qu'on veut tuer rapidement un animal, c'est le moyen incontestablement le plus expeditif. Les 6quarrisseurs I'emploient quelquefois pour abattrc les chevaux ; ils appellent cela les enerver. Les Toreadors essaient, pour abatlre le taureau, de lui planter une lance entre 1'occi- pital et Tatlas. Toutefois pour produire cet arret des phenomenes respiratoires, une solution de continuite quelcouque est necessaire ; la simple piqure avec une aiguille fine ne suffirait pas. On a fait beaucoup d'experiences pour arrivera limi- ter exactement ce point dont la lesion an^antit la res- piration en laissant intacts tous les nerfs qui y pre- sident. Lorsqu'on examine la moelle allongee chez un animal, on voit, autour du bee du calamus scriptorius, deux pe- tits amas de substance grise, au-dessus desquels nais- sent les pnqumogastriqu.es, Chez le lapin, le centre ([ui tient sous sa dependance les mouvements respiratoires, est limite de 2 ou 3 millimetres au-dessus, a k ou 5 mil- limetres au-dessousdel'origine des pneumogastriques. Ce centre fespiratoire est d'autant plus delicat et plus facile adetruire, que les animaux sur lesquels on op6re occupent un rang plus eleve dansFechelle zoologique etque Tabo- lition de la respiration est suivie chez eux d'une moil plus prompte. C'est ainsi que la piqure de ce centre, appele par M. Flourens le nceud vital, fait perir imme- diatement unoiseau, tandisquechez les mammiteres qui SON INFLUENCE SUR LA RESPIRATION. 391 viennent de naitre et qui, vous le sa\ez, resistent mieux a Tasphyxie, cette lesion n'ameue pas une mort imme- diate. De inline, un animal malade pe'rira moins rapi- demeiit qu'un animal bien portant. t'est-a-dire, que d'une facon generate, la piqure du noeud vital sera rendue moins rapidement mortelle par toutes les causes qui aident a supporter 1'asphyxie. L'.rsqu'oii tue les animaux par la seclion du bulbe, on n'arrive pas toujours a les tuer ihstantanement et sans qu'ils fassent ensuite aucun mouvement. Si la section a porte juste sur 1'espace intermediate anx origines des deux pneumogastriques. tout mouve- inent respiratoire esl immediatement aboli. En piquant un pen an-dessus ou un peu au-dessous, la mort est moins instantanee. Lorsqu'on a pique un peu au-dessous, quelques mou- veuients respiratoires peuvent encore se montrer, mais seulement dans la tete. Si Ton a. an contraire, pique un pen plus haut, quelques mouvements respiratoires peu- vc:it encore se voir dans le thorax. Eufiu, noussavons que Charles Bell avait avancequ'il existait dans le faisceau intermediaire de la moelle al- longee une propriete respiratoire. supposition , que rien n'a jiistifie. Bien que vous nous ayez vu souvent sacrifier des animaux par la section du bulbe, toutes les fois que nous voulons produire une mort rapide, nous allous repeter ici cette experience avec les precautions neces- saires pour vous faire voir sur quel point doit etre porte rinstrunient. 392 MOELLE ALLONGEE. Voici le lapin sur lequel nous avons, dans la derniere lecon, coupe d'un c6te le filet cervical du grand syin- pathique. Pour vous faire voir que I'abolition des mou- vements respiratoires dans la section du bulbe, n'est pas clue a la lesion des pneumogastriques, nous allons chez ce lapin, lesluicouperd'abord ; etvous verrezque cette section ne procluira pas la mort bien qu'elle amene un pen de gene dans la respiration. Nous faisons ensuite, a la partie superieure et poste- rieure du con, une incision qui nous conduit sur une membrane qui reunit Poccipital a Patlas. La gene apportt^e dans la respiration par la section des pneumo- gastriques fait que nous sommes genes par une he'mor- rhagie. Nous ouvrons maintenant la membrane, puis nouspiquons la moelle allongee avec cette forte aiguille a bords tranchants ; immediatement les mouvements respiratoires cessent. Ainsi, de me" me que la moelle epiniere, la inoelle allongee sert non-settlement deconducteur aux impres- sions sensitives et motrices, mais elle ae;it encore comme ' c_/ centre, d'ou partent les excitations respiratoires ; mais son r61e, comme centre, ne se borne pasal'influence que nous venous de lui reconnaitre sur les mouvements res- piratoires. Un peu plus haut que le centre respirateur, ou noeud vital, et tout pres de lui on en rencontre un autre. Ce nouveau centre commence au-dessus de 1'origine du pneumogastrique, au point dont la piqure n'abolit plus les actes respiratoires, et s'etend jusque un peu au-dessus de 1'origine du nerf auditif. II agit sur la circulation abdo- MOELLE JiPlNlERE. 393 minale, c'est lui que nous piquerons quand nous ren- drons les animaux diabetiques dans la prochaine lecon. Messieurs, nous nous sonirnes deja arretes longtemps sur un fait singulier d'augmeiitation cle la sensibilite par suite de la section d'une moitie laterale de la moelle; nous vous avons dit que cette augmentation de sen- sibilite n'interessait pas seuleraent la peau, mais qu'elle porlait aussi sur les nerfs, et que la sensibilite recurrente etait auginentee. Void une experience tres nette a ce sujet, experience que je dois vous faire connaitre, bien qu'elle n'arrive pas ici precisement en son lieu. Exp. — Sur un jeiine chien, on mit a nu.la moelle ppiniere dans toute la region lombaire; puis on passa les tils au-dessous des racines rachidiennes pour les isoler les unes des autres. Apres cette operation, Tanimal etait tres affaibli et dans T impossibility de mouvoir ses mem- bres posterieurs. Alors on coupa la moitie de la moelle e'piniere du cote droit. La section, qui produisit beau- coup de douleur, avait peut-etre legerement depasse la ligne moyenne. Immediatenient apres cette section, 1'animal etait de- venu en apparence completement paralyse du train pos- terieur, et Tinsensibilite etait devenue complete dans le membre correspondant du c6te de la moelle coupee, tahdis qu'elle avait persiste a un certain degre dans le c6te oppose. La plaie etant recousue et 1'animal etant laisse en repos, la sensibilite revint peu a peu dans le membre posterieur droit (c6t6 dela section). Cette sen- sibilite , d'abord moins considerable que celle du cote 394 MOELLE EPINIERE gauche sain , augmenta progressivement et df^passa bient6t celle du c'6te oppose. Alors on examina la sensibility des deux racines anterieures rachidiennes correspondantes , I'liuc du c6te" sain , 1'autre du c6te ou la moelle avait etc coupee. Du cote ou la section de la moelle avait ete operee et au-dessous de la section, la sensibility rdcurrente etait tres evidente dans la racine anferieure. Celle-ci etant coupee, le bout central etait insensible, et le bout peri- pherique restait sensible. Du cote gauche, sain, la racine anterieure correspondante etait completement insen- sible, de sorte que la sensibilile recurrente n'existait que du c6te ou la moelle avait ete coupee. La plaie fut recousue, et plus tard on la decouvrit de nouveau, et Ton constata que la plaie etait plus chaude et que la sensibilite recurrente existait tres nettement des deux c6tes, sans qu'il qu'il fut possible d'y recon- naitre uue difference dans Fintensite, comme cela avait lieu pour les membres. Alors on incisa la dure-mere au-dessous du point ou elle avait ete coupee transversalement lors de la section dela moelle; cette membrane paraissait tres sensible. II s ecoula du liquide cephalo-rachidien mele de sang. On toucha alors les faisceaux medullaires anterieurs, poste- rieurs et lateraux, qu'on troiiva tous insensibles des deux cotes de la moelle, probablement a cause de la dou- leur procluite au moment de Touverture de la dure- mere. En effet, aubout de quelques instants de repos, la sensibilite revint. On vit aussi qu'en pinrant une SA SENSIBILITY. 395 racine anterieure sensible , elle cessa d'etre sensible a une excitation portee sur elle immediatement apres; mais il suffisait de la laisser reposer quelque temps pour que cette sensibilite revint, ce qui donna a penser qu'il y avail dans les racines nerveuses im epuisement tout a fait local. Du cote ou la moelle epiniere avait ete coupee, on avait divise ensuite une racine posterieure, et la racine ante- rieure correspondante, qui etait sensible, etait immedia- tement clevenue insensible. Aussit6tap res la section de la racine posterieure, tres sensible , il y avait eu diminution generale de la sensi- bilite, d'ou il iTsultat qu'en pincant la racine pos- terieure situee au-clessus, elle parut insensible ; puis elle reprit sa sensibilite apres quelques instants de repos. Apres toutes ces operations, on excita la surface exterieure de la moelle du c6te coupe, et Ton ne trouva nulle part de sensibilite bien developpee. En piquant les faisceaux medullaires, le posterieur seul denotait de la sensibilite. Le lendemain r animal etait mort, et Fautopsie montra que la moelle etait coupee au niveau de la pre- miere vertebre lombaire, et que le faisceau posterieur du cote droit etait seul coupe. Le foie de 1'animal ne contenait pas de sucre, non plus que son liquide cephalo-rachidien, qui parut nioins alcalin qu'a 1'ordinaire. Cette experience est interessante en ce qu'elle montre toutes les variations de cette sensibilite nerveuse 390 MOELLE EPINIERE. ct les conclusions contradictoires qu'on en pourrait tirer. si Ton ne considerait les phenomenes que dans une de leurs periodes. Je tiens essentiellement a fixer votre attention sur de pareils faits, parce qu'ils sont de nature a vous montrer la variability et la complexite des phenomenes physiologiques, et qu'ils pen vent seuls nous donner la clef des dissidences qu'on remarque si sou vent cntre les physiologistes. VINGT-DEUXIEME LECON. i3 11 MARS 1857. SOMMAIRE : Blessure de divers points de la nioelle allong<5e. — Piqflres du plancher du quatrieme ventricule. — Lapins rendus diahe*- tiques. — Experiences. — Determination du centre actif. — Propa- gation de rinfluence de la piqure par la nioelle <;piniere. MESSIEURS , Dans la moelle allongee, a c6te du centre respira- toire, nous examinerons aujourd'hui une influence de la moelle agissant comme centre d'une action qui est des plus interessantes. Cette influence agit stir les organes abdominaux et particulierement sur leur circulation ; il en resulte un phenomene sur lequel nous avons deja appele 1'attention depuis longtemps, le passage du sucre dans les urines ou le diabete artificiel. J'avais cru d'abord, et on 1'a repute apres moi, que dans ce cas, le diabete tenait a la piqure du centre res- piratoire, d'ou suivait, dans le poumon, une combus- tion incomplete du sucre arrivant dans le sang ve:- neux. C'etait la une vue theorique, qui m'a fait ikV couvrir la presence du sucre dans 1'urine des foetus ; mais applique au diabete artificiel, j'ai reconnu que cette explication etait completement en disaccord avecles faits. Les sympt6mes observes lorsque le centre respiratoire est atteint n'ont aucune ressemblance avec ceux qui se voient lorsque nous rendons un animal diabetique. Les ph^nomenessoni bien tranches et se presentent avec des caracteres trop nets pour qu'il soit permis de voir dans 398 PLANCHER DU QUATRIEME VENTRICULE le cas qui nous occupe une simple diminution dans 1'intensite des accidents produits par la piqure du noeud vital. Les animaux rendus diabetiques par la piqure du quatrieme ventricule, detruisent aussi bien le sucre que ceux chez lesquels on n'a pas produit cette lesion. Placant, en effet, un cle ces animaux dans un milieu confine en comparaison avec un animal sain , nous avons deja vu que le premier rend autant et meme un peu plus d'acide carbonique que le second. Les centres mention nes plus haut ne sont pas les seuls que Ton rencontre dans la moelle allonge"e; et je suis convaincu qu'en les cherchant avec soin on y en decou- vrirait d'autres. Ainsi, en portant plus haut 1'aiguille, on arrive encore quelquefois a agir sur d'autres fonctions. Cette variete de phenomenes a ete souvent produite dans nos experiences, alors que n'ayaut pour nous guider que les points de rep6re fournis par les saillies osseuses, la lame de 1'instrument s'egarait parfois au dela des parties que nous avions 1'intention d'atleindre. La piqure du milieu de 1'espace compris entre 1'ori- gine des pneumogastriques et celle des nerfs auditifs, determine en ineme temps une augmentation de la quantite de 1'urine, et Tapparition du sucre dans 1'urine. Piquant un peu plus haut. 1'urine est rnoins abon- dante, moins chargee de sucre ; mais elle renferme sou- vent de 1'albumine. L'exageration de la quantite d' urine, le passage du sucre ou de Falburnine dans cette urine, nous ont sensible" etre des phenomenes independants les uns des autres et pouvant etre produits separ^ment. Ainsi, en piquant la SA PIQURE. 390 moelle allonge'e un pen au-c!essous do 1'origine cles ncrfs audit ifs. on a line exageration cle la quantite d'uriiie sans passage dans cette urine de snore ni d'albumine. Remontant plus bant, vers le pont de Varole, un peu en arriere de Forigine cle la 5e paire, on rencontre un centre secretaire, dont la piqure imprime une grande activite a la secretion salivaire. II nous est souvent arrive, en vonlant rendre des animaux diabetiques, de determiner d'un seul cote une salivation abondante. Dans ces experiences, le dernier centre que nous ve- nons de vous signaler avail ordinairemenl ele lese du m6me c6t£ que celui ou se manifestail rbypersecretion. Et cette exageration de la secretion salivaire etait in- dependanle de la secretion du c6te oppose ; car cette derniere, reslee intermittente, pouvait etre provoquee au rnoyen des excitants ordinaires, comme le prouve F experience suivante. Exp. — Sur un jeune chien, bien portent el en digestion, on avait pique le plancher du quatrieme veu- tricnle pour produire le diabete. Une heure et dernie apres, Turine contenait du sncre, eU'animal presentait une salivation abondante. On mil a decouverl les conduits salivaires sous- maxillaires et parotidiens, et Ton y introduisit des tubes. On remarqua d'abord que Tecoulement par la glande sous-maxillaire etait plus abondant que par la glande parotide; on observa ensuite que la glande sous-maxillaire droite donnait une secretion continue et beaucoup plus abondante que la glande sous-maxil- laire gauche. Alors on coupa des deux c6tes le uerf AGO PLANCHER DU QUATR1KME VENTRICULE lingual au-dessous du ganglion sous-maxillaire, et 1'on en irrita successivement les bouts pe'ripheriques et centraux. Lorsqu'on excitait les bouts peripheriques, il n'y avait augmentation de la secretion sous-maxillaire ni a droite ni a gauche. Lorsqu'on pincait les bouts centraux, il y avait augmentation de se^crtHion des deux c6tes; mais le pincement du bout central du nerf lin- gual droit provoquait un ecoulement de salive tres considerable de ce cote^, agissant faiblement sur le cote oppose. Quand, au contraire, on pincait le bout central du nerf lingual gauche , on provoquait un ecoulement mode're de salive de ce c6te^ et un ecoulement tres con- siderable du c6te droit. A Tautopsie de la tete, on trouva que la piqure, oblique, avait porte a droite, et que, coimnencant im- mediatement au-dessus de 1'origine du pneumogas- trique, elle se prolongeait jusque vers 1'origine du facial et de la cinquieme paire de ce cote, ce qui est'en rap- port avec Thypersecretion salivaire observee a droite. II resulterait de cette observation que la glande sous- maxillaire droite etait devenued'unesensibilite exageree pour la secretion. En effet, dans Mat normal, lorsqu'on irrite le bout central d'un nerf lingual, il y a secretion par action reflexe plus intense sur la glande du c6te correspondant que sur celle du c6te oppose. Ici nous voyoris que la secretion etait toujours au contraire plus abondante dans la glande droite, alorsm^me qu'on irri- tait le nerf lingual gauche. Arrivons maintenant a la piqure qui determine le diabete artificiel. SA PIQURE. Commc toutes ces actions sont des choses nouvelle- raent connues et que leurs etudes laissent encore beau- coup de points a elucider, il est important de vous donner les faits tels qu'ils out ete observes afin qu'ils puissent servir de point de depart a des rechercbes ul- te'rieures. Quoique ce sujet ait deja ete traite, dans un de nos cours, au point de vue du diabete artificiel, cependant je crois utile de revenir ici sur quelques details relatifs aux points precis des centres uerveux qui se trouvent leses, et aussi sur certains phenomenes ou troubles ner- veux qui coincident avec cette singuliere apparition du sucre dans les urines. Nous avons dit ailleurs par quelle serie de considera- tions hypothetiques nous avions e"te amene a faire la piqiire du quatrieme ventricule, dans le but de produire le diabete artificiel (tome I" de nos lecous); nous vous indiquerons ici d'une maniere succincte la serie des procedes operatoires par lesquels nous avons passe. On pent compter trois procedes. Le premier que nous ayons employe consiste a ouvrir la membrane occipito- atloi'dienne, et a faire penetrer rinstrument piquant par Torifice inferieur du quatrieme ventricule. Ce precede, qui exige la section des muscles de la nuque, amene des delabrements qui ne permettent pas aux animaux de survivre longtemps. On pourrait cependant penetrer par le trou occipital , en arriere , sans faire la section des muscles de la nuque ; mais alors on est force de tra- verser obliquement presque toute 1'etendue de la moelle allongee. B., SYST. NERV. — T. i. 26 /|02 P1QURI- DU I'LAXCIIER Le second precede a consiste a fain? pe'netrer rinstru- rnent piquant par la partie anterieure de la moelle allongee, entre 1'occipital et 1'atlas. Ce precede ofi're Favantage de conduire 1' instrument plus pros du point ou la moelle doit etre piquee; de sorte qu'il suiFit de lo diriger un pea en haul et en avant pour arriver sur le lieu dont la blessure determine le diabete artificiel. Enfln le troisieme precede, decrit ailleurs (tome I"), consiste a pereer avec un petit trocart, ou avec rinstru- ment meme qui sort a la piqiirc, 1'os occipital, et a arri- ver ainsi directenient. en traversant le cervclet. sur lo plancher du quatrienie vontricule. Quant aux instruments qui ont servi a faire la piqure. ils peuvent otre de formes ires variables. Nous avions d' abort! employe un petit instrument en forme de cisoau fit tres trancliant par son extremite; ensuite, pour agir sur les deux cotes de la moelle allongee , nous avions fait un instrument en forme de fourche(fig. 49). Enfin nous avons adopte un autre instrument, muni d'une pointe, afin de ne pas couper toute Fepaisseur de la moelle lorsqu'on 1'attaque par sa partie superieure (fig. 50). On pourrait encore , pour simplifier la fabrication de rinstrument, tailler son extremite en biseau (A, fig. 48), on placer sur un de ses cote's la pointe qui ailleurs est an milieu du tranchant (voy. B, fig. 48). Tous les precedes et tons les instruments peuvent reussir. Nous avons fait un certain nombre de piqures par la partie inlerieure de la moelle allongee, et, en general, aussitot apres ces piqures, les animanx sent aplatis sur leurs mcinbres ante'rieurs, de telle facon quo DU QUATRIEME VENTRICULE. /jOo lour thorax porle sur le sol. Bientot ils sc relevent ct peuvent marcher, en presenlant des desordres varies. II y a souvent aussi salivation Ires abondanle, et quelque- fois, lorsque la piqure ne porte pas exactement sur la ligne mediane, des troubles sem- blables a ceux -qu'on trouve dans les autres precedes. Nous avons vu, a ce propos, un lapin chez le- quel la moelle allongee avail ete Iraversee obliqueraent a gauche. , B depuis le trou occipital jusqu'a 1'origine de la cinquieme paire. L'animal avail toujours de la ten- dance a tomber du cole gauche ; et, comme il voulait se retenir, il offrait ce phenomene singulier d'urie progression Iran sversale de droite a gauche ^ sur les quatre membres, sansavancerni reculer. Apres la piqure par ce precede, le sucre apparait dans F urine, en general, de deux heures a deux heureset demie apres 1'operation. La piqure de la moelle allon- gee, en penelranl par le trou oc- Me. AS. FIG. 49. FIG. 50. cipilal avec un instrument simple ou double, amenr egalement le diabete, el il nous a semble que 1'apparition du sucre etait plus rapide lorsqu'on faisait usage de 1'in- strumenl a deux poinles (fig. 49). Relativement a la region precise qu'il convient de 404 PIQURE DU PLANCHER blesser pour produire le diabete artificiel, nous ne pou- vions la connaitre a priori, et sa determination n'a pu 6tre que le resultat de 1'examen comparatif de toutesles piqures que nous avons produites et des resultats auxqucls elles ont donne lieu.Cette indication ressortira d'ailleurs des experiences m6mes que nous aliens citer, et qui sont faites par divers precedes. Nous ajouterons enfin que ces piqures ont toutes ete faites sur des animaux bien ])ortants; car, chez les animaux affaiblis par 1'abstinence ou la maladie, toutes circonstances qui amenent une diminution de Tactivite glycogenique du foie, il n'y a ])as possibility de produire le diabete artificiel , quelque I »ien dirigee que soit la piqiire. Parmi le grand nombre d'experiences que nous avons oxecutees, en voici quelques-unes qui nous presenteront les faits sous les aspects les plus varies que nous ayons observes : une premiere serie d'experiences montrera qu'il^y a eu, avec des grandes varietes symptomatiques, constamment production du sucre dans les urines. Nous verrons en m^me temps quelles sont les limites exactes de la partie de la moelle allongee qu'il faut atteindre pour determiner Fapparition du sucre dans 1'urine. L'experience suivante montrera qu'en blessant les deux olives a droite et a gauche, on a du .sucre dans 1'urine. On pourrait avoir le meme resultat en n'en blessant qu'une; seulement 1'animal aurait des mouvements convulsifs qui ne se rencontrent pas quand on a neu- tralise Faction d'un c6te par une lesion faite en meme temps sur le cote oppose. . (6 mars 1849). — Sur un lapin de petite taille, DU QUATR1EME VENTRICULE. /|05 nourri de carottes et tie navels, ayant 1'urine claire et nettement alcaline, on a blesse par rintervalle occipito- atloidien, le corps olivaire a la base du pedoncule cere- belleux droit; 1'animal touraaitadroite. Alors jeblessai, par le meme procede, 1'olive et le pedoncule cerebel- leux du cote oppose, et 1' animal alors tourna a gauche. On blessa de nouveau le pedoncule droit et on amena 1'animal a ne plus tourner ni d'un c6te ni de 1'autre. Alors 1'animal resta couche comme dans une sorte de coma :les respirations d'abord accelerees furent ensuite profondes, stertoreuses et enfin tres faibles. Une heure apres cette double operation, on commenoa a examiner les urines, et voici le resultat qu'on obtint de cet examen : 1° Avail t la piqure : urine alcaline, claire, limpide, ne contenant ni sucre, ni albumiiie ; 2° Une heure apres : urine claire., limpide, abon- dante, contenant du sucre tres evidemment mais pas d'albumine ; 3° Trois heures apres : urine tou jours alcaline, con- tenant beaucoup de sucre et pas d'albumine ; 4° Cinq heures apres : urines claires, toujours abon- dantes, un peu moins alcalines, contiennent toujours beaucoup de sucre et pas d'albumine ; 5° Six heures apres : urines abondautes, claires, peu alcalines, paraissant contenir moins de sucre. Le leudemain matin 1'animal etait mort. L'urine trouvee dans sa vessie etait alcaline, trouble ; elle etait albumineuse et ne renfermait plus aucune trace de sucre. Les corps olivaires et les pedoncules du cervelet avaient ete atteints des deux cote's ainsi que le prouva 1'autopsie FIG. 51 (1). A 06 PIQURE DU PLANCHER de latete (fig. 51); la lesion plus profonde a droile, avail cause chez 1'animal une paralysie de la 5e paire de ce cote. II existait un epanche- ment sanguin conside- rable, ce qui expliquait 1'etat comateux. Les poumons etaient sains ; le foie etait pale ; son tissu broye donna une decoction jaune, tres claire , limpide. qui ne contenait pas de sucre. Exp. (9 mars 1849). — Un jeune lapin a ete pique" par Tespace occipilo-atloi'dien, sur le plancher du qua- trieme ventricule, exactement sur la ligne mcdianc. La piqnre avait produit une lesion assez etendue a cause desmouvements de 1'animal. Le lapin lomba aussitotsur le tlanc, resta sans mouvement, se refroidit peu a peu, et an bout de quelques temps, rendit du sucre en grande quantite dans ses urines. L'etat de l'animal s'aggrava peu a peu, et six heures apres 1'operalion, l'animal etant tres refroidi, respirant tres lentement, on constata que ses urines ne contenaient plus de sucre. A Fautopsie (fig. 52), on trouva dans la partie piquee une dechirure (1) Plancher du quatrieme ventricule chez le lapin. — a, a, lobes du cervelet dearie's; — b, 6, tuberculcs de Wenzel a 1'origine des nerfs acoustiques ; — c, c, corps olivaires ; — d, bee du calamus scriptorius ; — g, aqueduc de Sylvius ; — h, tubercules quadrijumeaux; — V,V, ori- giue des pneumogastriques ; — TP', lesions qui ont ete faites par I'ope ration. DU OUATRlliME VEXTRlCULi:. /1 07 avec ('•panchement sanguin dans la partie emironnaittr. Lc foie ne fut pas examine. Exp. (11 mars' 1849). — Sur un lapin chez lequel on ouvrit la membrane occipito-atloi'dienne pour decou- vrir \e quatrieme venlricule, on fit une incision super- ficielle. longitudinale, sur la ligne mediane depnis 1'entiw. FIG. 52 du quatrieme ventricule jusqu'im pen en avant du bee du calamus scriptorius. L'animal ne parut en eprouver au- cune douleur. On recousit la plaie et 1'animal garda ses mouvements libres, quoiqu'i fut sorti du liquide cephalo- rachidien; cela tenait a 1'integrite des musclesde la nuque. Les urines de 1'animal qui furent examinees durant toute la journeedans laquellel'operation fut pratiquee, ne presentment aucune modification ui dans leur quantito ni dans leurqualite relativement a la presence du sucre. Sur un autre lapin. on pratiqua la meme operation cxcepte que Ton fit penetrer 1'incision AB (fig. 53) profondement. A mesure que rinstrument penotrait, 1'animal inanifestait une douleur \7ive et ses yeux devin- A08 PIQURE DU PLANCHER rent clignotants. L'animal laisse libre tomba sur le flanc et fut pris de mouvcments comme epileptiformes ; sa respiration, d'abord acceleree, devint ensuite plus lente a mesure que sa temperature baissait. Avant I'experience, les urines etaient alcalines, et ne contenaient ni sucre, ni albumine.. Deux heures apres reparation, les urines rares etaient acides et contenaient enormement de sucre. Cinq ou six heures apres 1'operation , 1'animal allait toujours en s'afTaiblissant , et les urines dans la vessie etaient devenues gluantes, se prenaient en gelee par le refroidissement, et contenaient beaucoup de sucre. On sacrifia 1'animal en lui ouvrant la poitrine et on recueillit le sang qui s'echappait du cosur. Le sang se coagula bien , et il s'en separa un serum opalin qui contenait beaucoup de sucre. Exp. (18 mars 18/|9). — Sur un gros lapin, nourri avec des pommes de terre crues et des carottes, ayant les urines troubles et alcalines, sans sucre ni albumine ; on divisa la membrane occipito-atloi'dienne eton insinua rinstrument par 1'orifice inferieur du quatrieme ven- tricule, de maniere a aller piquer aussi haut que pos- sible et sur la ligne mediane le plancher de ce ventricule. Aussitot apres la piqure, le lapin tomba dans une syncope reellc et resta sur le flanc ; les mouvements res- piratoires etaient completement arretes. L'animal revint pen a peu, et les respirations se montrerent bientot tres accelerees et tres vibrantes. II y avait des tremblements dans la face, mais rien dans les yeux. Trois quarts d'heure apres I'operation, les urines etaient devenues DU QUATRIKME VENTRICULE. 609 acidcs et transparentes, et contenaient une grandc quan- tite de sucre, mais point d'albumine. Quatre heures apres, les urines elaient toujours abon- dantes, le sucre y existait en quantite enorme, les yeux de ranimal etaient saillants et la respiration tres rou- flante. surtout quand on agitait ce lapin. II y avait en- core des mouvements de defecation frequents, sa tem- perature, prise clans le rectum, etait de 37 degres cent. L'animal, ope're a onze heures du matin, fut observe jusqu'a cinq heures du soir. Le lendemain, vingt-quatre heures apres 1'ope'ration, le lapin vivait encore. L' urine prise dans la vessie etait claire; ellene contenait pas de sucre ni d'albumine. La temperature avait baisse ; elle n'etait plus alors que de 30 degres dans le rectum. On sacrifia ranimal et on fit son autopsie. Le tissu du foie broye donna une decoction claire, jaune, qui ne contenait pas de sucre ou tout au plus des traces douteuses. L'au- topsie de la tete montra que la piqure P, assez etendue en forme de sec- tion , siegeait a la partie superieure de 1' olive droite pres de 1'origine du nerf acoustique (fig. 54). Exp. (23 mars i 8^9). — On piqua dans le quatriemc ventricule un lapin a jeun depuis la veille, et ayant deja. par suite de 1'abstinence, les urines acicles. FIG. 54. PIQURE DU PLANCIIER Aussitot apivs 1'operation, 1'animal toml)asur le flanc et presenta Ics symptftmes ordinaires. II avail ete opere a huit licures et clcmic du matin, puis on revint a onze heurcs et cloniio. A ce moment., on rctira des urines qui etaient claires, limpides, abondantes, legerement acides et contenant enormement de sucre. Avant 1'ope- ration. les urines etaient acides, gluantes, se prenant en une espece de mass<3 gelatinense par le refroidisse- ment, comme cela a lien souvent chez les herbivores a jeun ; elles ne contenaient point de sucre. Amidi et demi, 1'urine recucillie etait toujours abon- dante et trte faiblement acidc, presque neutre ; clle eonlenait du sucre , mais en quantite e\7idemment moindre que les urines recueillies une heure avant. A une heure et clemie, 1' urine recueillie etait claire, abondante, neutre an papier reactif, et ne contenait plus de sucre. Le lapin etait toujours vivace; il avait, comme cela arrive souvent dans ces cas, des defecations presque continuelles. On sacrifia 1'animal en lui ouvrant les veines jugulaires et les arteres carotides pour recueillir le sang. Avant de le sacrifier, on avail pris sa tempera- ture dans le rectum; elle etait de 38 degres, tempera- ture qui peut etre consideree comme la temperature normale des lapins lorsqu'ils sont a jeun. Le sang recueilli des vaisseaux contenait a peine des traces de sucre. Autopsie : tous les organes etaient exsangues a cause de la mort par he'morrhagie. Lc foie donna par Pebu'lli- tion, une decoction d'un jaune clair et contenant beau- coup de sucre. DU QUATRlfcME VENTRICULK. f|U On voit done quo cctte operation a ete faite sur uu animal .a jeun qui ost devenu neanmoins diabetique; mais Ic sucre a paru sc montrer moins longtemps dans les urines, puisqu'au bout do trois hcures il avail en partic disparu et qu'il n'cn restaitplus que des traces. Nous ajouterons relativement a ce lapin, qu'en inci- sant la membrane occipito-atloidienne mise a nu, il n'y eut qu'une tres petite quantite de liquide cephalo-racbi- dien qui s'echappa. C'est cc qui arrive ordinairement chez les animaux a jeun, taudisque chez les animaux en digestion la proportion dece liquideparaitbeauconp plus considerable. Exp. (8 avril 18/|9). — Sur un chicn nourri depuis deux jours avec de la viande et ayant servi a une expe- rience cardiometrique, on ecarta les muscles de la nuquc et on piqua le planeher du quatri^me.vcntricule. L'ani- mal, qui (3tait tres vivace, tomba aussitot sur le flanc, dans 1'immobilite et tournant la tete du cote droit. Dans ee cote de la face, 1'ocil offrait un strabisme interne tres fort, le globe oculaire etait devenu saillant, mais avait Dependant conserve sa sensibilite. Les paupieres etaient immobiles et la septieme paire seniblait paralysee dans ce cote de la face. L' animal avait fait un repas de viande a huit lieures du matin ; il fut opere a trois heures du soir, et, a cc mcme moment, on retira du sang de la jugulaire et do 1'urine de la vessie. L'animal resta toujours couche sur le flanc ; mais environ une demi-heure apres la piqure il fut prisd'une sorte d'aboiement continuel. Void ce que donna Fexamen des urines : au moment PIOURE DU PLANCHER de 1'operation , les urines etaient claires, acides, d'une couleur ambree foncee et ne contenaient pas de sucre. Vingt minutes apres 1' operation, les urines presentaient les memes caracteres, seulement il semblait y avoir des traces de sucre. A six heures dusoir, 1'urine recueillie etait claire (1), limpide, peu coloree, acide, et contenait une grancle quantite de sucre. A ce moment, on retira du sang par la meme veine jugulaire. A neuf heures du soir, les urines de F animal etaient toujours claires, aqueuses, acides, et contenaient beau- coup de sucre. La temperature dans le rectum de 1'a- nimal etait 39°, 5. Quelque temps apres, il fut pris d'un tremblement general, quoique la temperature fut tou- (1) L'urinc est recticillic au moyen d'unc sonde de goinme elaslique qui doit etre fine , et dont rintroduction est rcndue assez difficile chez les chiens a ca use du re trecisscmentdu canal dans 1'ospenial. La sonde doit etre munie d'un mandrin en fer, el lorsqu'on est parvenu au coude quc forme le canal de I'urethre chez les chiens, il serait impossible de faire passer la sonde dans la vessie. Maisalors on retire tin peu le mandrin de fa con que le bout de la sonde soit rendu flexible, et puisse s'engager en haul dans la vessie. A mesure qu'on retire le mandrin , on pousse la sonde lentement et on parvient ainsi assez facilement dans la vessie pour avoir de I'lirine en laissant la sonde a demeure, si Ton veut. J'ai remarque quc Tintroduction de la sonde est toujours beaucoup plus facile chez le chien apres la piqure, de memc que remission de 1'urine est aussi plus facile chez le lapin par la pression operee sur le venire. Chez les chiennes, il m'a etc impossible d'obtenir 1'urine a volonte par le calhete'risme. Comme la pression sur 1'abdomen ne peut pas etre employee, le procdde" qui m'a paru le plus convenable consiste a boucher exaclement avcc la main les narines de 1'animal, de maniere a produirc un commencement d'asphyxie , et il arrive toujours, lorsque Tasphyxie commence a se manifester, qu'il y a emission de 1'urine. Ce precede peut etre employe egalement chez les chiens, lorsqu'ils sont trop petits pour qu'on puisse introduire une sonde dans leur urelhre. DU QUATRIEME VENTRICULE. &13 jours dans le rectum de 39°, 5 ; temperature normaledu chien. On examina alors le sang prisdans la veine jugu- laire. Le sang recueilli le premier etait bien coagule ; le serum etait opalin, alcaliu, et contenait seulement des traces de sucre. Le sang recueilli a six heures etait egalement bien coagule, seulement le serum etait limpide et contenait beaucoup de sucre. Le lendemain (4 avril), le chien etait a peu pres dans le meme etat. On retira de 1' urine de la vessie; elle etait janne, d'une couleur ambre'e, peu abondante; elle ne contenait pas de sucre mais beaucoup d'uree. On saigna alors de nouveau ranimal par la meme veine jugulaire ; ce sang se coagula avec une grande rapidite, et donna un serum clair qui accusait a Fexamen direct des traces evidentes de sucre. On ingera dans 1'estomac une seringue de bouillon chaud ; mais bientot le chien en vomit la plus grande partie. On lui injecta ensuite du bouillon froid qu'il ne vomit pas. Dausle vomissementranimal rendit des frag- ments de tete de mouton qui etaient ramollis et seulement en partie digeres : ce qui prouverait que la digestion de ranimal avait ete arretee par 1'influence dela piqure. Le meme jour, k avril, atrois heures du soir, on re- tira de rurine en petite quantite, elle etait de couleur ambree et ne renfermait pas de sucre. 5 avril. Le chien etait dans le m&me etat. On lui in- gcra un quart de litre de bouillon gras. L' urine ne con- tenait pas de sucre. 7 avril. Me" me etat, le chien ne prit rien. PIQURE DU PLAXCHER 8 avril. II etait toujours dans un mauvais etat; onlui ingera cle 1'eau clans 1'estomac ; les yeux etaient chas- sieux et purulents. 9 avril. 11 mourut. Autopsie. Poumons a pen pres sains, coeur gorge de sang, intestins et estomac n'offrant rien d'appreciable. Les reins paraissaient hyperemies, la vessie etait pleine cT urine. On examina avec soin duraut toute cette experience les urines que Familial avait rendues. ainsi que celles qui etaient dans la vessie an moment de la mort. Voici le resultat de 1'exainen comparatif de tontes ces urines : 1° Urine anssitot apres la piqure : couleur jaune am- bree, odcur forte d'urine dechien, reaction acide. Par acide azotique : pas d'albumine, mais precipita- tion en masse de nitrate d'nree. A 1'arcometre, marquait 5°, 25; pas de sucre. !2° Urine vingt minutes apres la piqiire : couleur jauue ambree, odeur forte, reaction acide. Par acide azotique : pas d'albumine, precipite encore en masse du nitrate d'uree. A 1'areometre, marque 5°, 5, traces de sucre avec le liquide cupro-potassique. 3° Urine trois It cures apres la piqiire : couleur pale, odeur faible, reaction acide. Par Facide azotique : pas d'albumine. mais se pre- nant en masse en nitrate d'uree, seulement lorsqu'on les placait dans un melange refrigerant. Marquait a rareometre 10°, 5, donnait avec le reactif (•upro-potassique enormement dc sucre. DU QUATRIEME VENTRICULL. /[1 5 ll° Urine six heurcs apres la piqiire : plus culoree que la precedente. ocleur un pen plus forte, reaction acide. Par 1'acide nitriquc : pas d'albumine, iiiuis pivcipite direct en masse tie nitrate d'nive. Marquait a I'areometre 10°. 25, le liquide cupru- potassique accusait eiiormement de sucre. 5° Urine tin k avril, onze heitres du matin : couleur jaune ambree, ocleur forte. Par Tacide azotique : pas d'albumine, prise en masse du nitrate d'uree. Pas de sucre par le liquide cupro-potassique. 6° Urine du k avril, quaire heures du soir : couleur jaune ambree, ocleur forte, reaction acide. Par i'action azotique : pas cTalbumiue, prise en masse cle nitrate d'uree. Par le liquide cupro-potassique. pas cle sucre. Cette urine et la precedente out ete ajoutees ensemble ii cause de leur petite quantite; on en prit la densite a I'areometre; on trouva 6,5. 7° Urine du 9 avril prise dans la vessie apres la mort. En grande cjuantite — jaune ambree, acide. contenait cles cristaux c[ui se deposaient an fond clu verre. Par 1" acide nitrique, pas d'albumine, precipitation en masse de nitrate d'uree ; a I'areometre marquait 5,5. L' urine essayee avec le liquide cupro-potassique, reduisait enormement en gris ardoise par le refroidisse- ment. Si Ton ajoutait an liquide bleu un grand exces de po- tasse, la reduction se faisaitplus facilement et leproduit de la reduction prenait une teinte rouge. PIQURE DU PLANCHER Cette urine, soumise a la fermentation avec de la levure de biere ordinaire, donna quelques bulles d'acide carbonique; mais cette fermentation fut tres douteusc. Les cristaux qui s'etaient deposes au fond clu verre paraissaient etre des cristaux d'acide urique. II s'agirait maintenant de savoir si la reduction qu'on a observee dans 1'urine, apres la mort, de m6me que la fermentation douteuse qui s'y est developpee, sont des caracteres suflisants pour faire admeltre la presence du sucre? — Je nele pense pas,et voici pour quelle raison. D'abord la reduction n'avait lieu qu'apres avoir fait fortement bouillir le liquide et au moment dn refroidis- sement,a inoins qu'on n'y ajoutat un grand exces de po- tasse. L'urine dans laquelle il se faisait ainsi un precipite abundant qui indiquerait la presence d'une grande quantite de sucre, ne donne que 5,5 a 1'are'ometre, c'est-a-dire a une densite qui n'etait pas plus grande que celle de 1'urine normale du chien, tandis que nous avons vu cette densite augmenter jusqu'a 10 et 10.25 lors- que, sous 1'influence de la piqure, il y avait du sncre. Enfin, cette urine ayant ete precipitee par Facetate de plomb continuait toujours a donner la me'm.e reduction au liquide cupro-potassique ; mais examinee a Tappareil de Soleil, elle ne deviait auciinement la lumiere pola- risee, tandis que 1' urine sucree, recueillie 3 et 6 heures apres l'operation,la deviait tres manifestement. Ce qu'il y a de remarquable, c'estque la decoction du foie donnait exactement les m^mes reactions que 1' urine apres la mort. II est difficile de decider a quelle substance on avait affaire, soit dans la decoction du foie, soit dans DU QUATRIEME VENTRICULE. 417 ruriue prise dans la vessie apres la mort. On a pu seu- lement etablirque cc n'e'tait ni de 1'acide urique ni du dvcose. » En resume, nous avons vu par cette experience, que la piqure du quatrieme ventriculc avail produit chez ce ehien 1' apparition du sucre dans les urines; mais celte ap- parition n'a ete que momenlanee et elle n'a pu se repro- duire, malgre qu'on ait essaye de nourrir 1'auimal avec du bouillon, ce qui tient sans doute a 1'etat de maladie • Inns lequel s'est trouve le chien par suite de la piqure. E.rp. (18 avril 1849). — Sur un gros lapin nourri dlierbes, on piqua le plaucher du ({iiatrieme ventricule r I'LANCIIER On decouvrit alors la carotide ct la jugulaire de 1'ani- mal ; le sang, rutilantdans la carotide, etait noir dans la jngulaire. On recueillit ensuite le sang de la carotide, ce qui fit perir le lapin par hemorrhagie. Le sang se coa- gula, donna un serum clair <|ni contenait a peine des traces de sucre. Les pou- mons etaient sains et 1'au- topsie montra les piqures suivantes : P, premiere pi- qure;P'P'', deuxieme et troisieme piqure (fig. 56). Le foie ne fut pas exa- llliiu';. Exp. (28 avril 1849). — On piqua en percant Focci- pital, le plancher du quatrieme ventricnle d'un lapin: rinstrunientallajnsqu'aros. Au moment oul'iustrument traversa la moelle, Taninial manifesta de la douleur et des fremissenientsmuscnlaires. Aussitot apres la piqure, 1' animal tomba comme paralyse de ses quatre membres, surtont des anterienrs qni etaient ecartes de maniere que la poitrine de r animal touchait le sol. Peu a pen le lapin se remit , settlement il etait devenu tres exci- table ; aussit6t qu'on le touchait il s'agitait violemment, tombait, tournait. et quand il tombait, il avait plus de ten- dance a le faire sur le c6te gauche. La tete avait de la propension a tomber comme si F animal voulait dormir. II y avait un ecoulement eonsid^cable de salive. Les deux yeux etaient sensibles, seulement celui du cote gauche etait un peu convulse en bas. DU QUATRIEME VENTRICU.LE. Avant Inexperience, los urines etaient troul)les, jau- natres, alcalines, ne contcnaiit pas de sucre. Trois quarts d'heure apres, les urines encore troubles et alcalines, et en petite quantite, renfennaient cleja tres iiettement du sucre. Trois heures apres, les urines etaient devenues claires, faiblement acides, toujours en petite quantite et con- tenant enormement de sucre. Quatre heures apres : urines claires, tres acides, tou- jours en petite quantite, contenant un pen raoins de sucre que les precedentes. Du reste, a ce moment le lapin allait mieux, il ne tremblait plus, se tenait bien sur ses pattes et ivoffrait plus rensemble des desordres de mouvement qu'il presentait lorsque les urines etaient tres chargees de sucre. Sept heures apres 1'operation, le lapin allait tout a fait bien ; il n'y avait plus du tout de sucre dans les urines ; il mangea avec avidite de I'herbe qu'on lui donna. En resume, on voit d'apres cette experience, que la piqure a produit un diabete momentane, mais que Furine quoique tres sucree, etait toujours restee pen abondante; de sorte qu'il y a en les pbenomenes du diabete, sans ceux de la polydipsie. On voit egalement que 1'appari- tion du sucre dans les urines a coincide avec une irrita- tion nerveuse tres grancle qui a cesse lorsque le sucre ne s'est plus montre. Le lendemain ce lapin etait revenu a son etat normal. Apres r avoir sacrifie pour uue autre experience, on a constate que la piqure avait porte en P comme cela est indiquec dans la figure suivante (fig. 57). /l28 PIQURE DU PLANCHER Exp. (fevrier 1850). — Sur un jeune lapin en di- gestion cle carottes . on piqua le plancher du quatrieme ventricule; aussitot 1? ani- mal toiuba sur le flanc ayant les yenx fermes quoiqne sensibles.il rtait d'abord dans un (Hat d'agitation. puis lomba dans le coma. II resta dans cet etat pendant deux heures, apres quoi on examina les urines qui ne contenaient pas de sucre. Alors, supposant que la piqure avail ete faite trop en avant,P premiere piqure, on repiqua de nouveau le plaucher du quatrieme ventricule plus en arriere, P' deuxieme piqure (fig. 58). Trois quarts d'heure apres cette seconde piqure, le lapin etant toujours dans le meme etat. ses urines con- tenaient tres manifestement du sucre. Avant toute operation, les urines etaient troubles, al- calines et blanchatres comme cbez les lapins en diges- tion. Apres la premiere piqure, les urines n'avaient pas change de caractere. Apres la seconde piqure, elles de- vinrent moins troubles, plus abondantes, en meme temps qu'elles contenaient du sucre. On fit pisser le lapin environ toutes les demi-heures; les urines recueillies deux heures apres la seconde pi- qure etaient toujours sucrees. Le lapin pendant tout ce temps etait reste dans un DU QCATRIKME VENTRICULK. coma profond, presque mouranl; il s'etaitrefroidi, avail un tremblement general , avec de 1'agitalion et do la tendance a tourner sur son axe. L'animal e'tant dans col (Hal el presque mourant, on ouvrille venire el Ton vit que le foie etait gorge de sang, la veine porte etail gonflee par le sang, de meme que la veine cave inferieure an niveau des veines renales. On recueillil le sang de la veine porte. du cceur el de la veine cave inforieure; puis, lorsque lesang fut coagule, on examina le serum qui en e'lail separe.Le serum de la veine cave inforieure elail alcalin, legerement opalin el tlonnail unereduclion Ires prononcee avec le liquide cu- pro-potassique. Le sang de la veine porte ne se coagula pas: il etail Ires alcalin el il roduisail tros faible- ment le liquide cupro- potassique.Dans le co?ur, le si TII in roduisail e'gale- monl le liquide cupro- potassitpie mais moins que le sang de la veine cave inforieure. Lo lissu du foie, broyo dans un mortier. donna une decoction Ires opaline qui reduisil ahoiKlammenl le liquide cupro-potassique. Exp. (8 fevrier 1850). - - Sur un autre lapin, nonrri egalement avec des carottes, se trouvant dans les memes conditions quele precedent, ayant aussi les urines Irou- bles et alcalines, on fil une premiere piijure P^fig. 58) qui deux heures apresn'avait pas encore donne de sucre. FIG. 58. 430 PIQUKE DU PLANC11ER Toutcfois cette piqure u'avait que pen aflecte 1'aninial, an moment meme, il etait tombe surle flanc, s'etaitagite. mais deux on trois minutes apres, il s'etait releve, con- servaut seulement un peu de faiblesse dans les membres anterieurs. Alors on piqua dc nouveau 1'animal plus en arriereP' Tig. 59), aussitot il tomba sur le flanc et ne se releva pas; scs poils se herisserent et il fut pris (run tremble- ment general. Trois quarts d'heure apres la seconds piqure, les urines contenaient beaucoup de sucre. Avant laseeonde piqiliv, les urines etaient rares, trou- liles et alcalincs. Apres, elles resterent alealines, devin- rent moins troubles et beaucoup plus abondantes. Le sang contenait du sucre dans le cu'iir droit et dans le coeur gauche; mais plus abondamment en apparence dans le co?ur droit. Le lapin mourut pen- dant la nuit. Le lendeinain , on fit la decoction du tbie qui etait opaline et conte- nait beaucoup de sucre. Toutes les urines du lapin qui avaicnt ete recueillies furent melangees; puis on dosa la quantite de sucre qu'elles contenaient et on la trouva egale a isr,012 pour 100. Exp. (12 fevrier 1850). — Sur un lapin maigre et (1) P, premiere piqure ; P', deuxieme piqure. Fie. 59 (1). DU QUATRIKME VENTR1CULE. /1 31 chelif, on fit une piqure ; on pcnsa que cettc piqure elail sur la ligne mediane. car Panimal ne chaiiccla n i (Vun cote n i de I'autre. Dans le premier moment qui suivitla piqure. ilrcsta d'abord immobile, puis, ensuitc, les membrcs posterieurs s'agiterent violemment tandis que les ante'rieurs fnrent Ires faiblcs et reslerenl e'cartrs sans ponvoir supporter le corps. L'anhnal avail de la tendance a aller en avanl ; il poussail son corps dans cette direction a 1'aicle de ses mcmbres posterieurs. Une demi-heure environ apres la piqure, 1'animal paraissait malade: il avail le frisson et les poils herisses. L'urine examinee avant 1'operation etait pen abon- ilaule, trouble, alcaline, et ne contenait pas de sncre. Trois heures apres la piqure, 1'animal etant tonjours dans le meme e'tat, on recueillit son urine qui etait trouble, alcaline et contenait beaucoup de sucre. On abandonna ensuitc 1'auimal a Ini-meme. Le lendemain on trouva le lapin se promenaul, gai, et dans un parfait e'tal de sante. L'urine examinee no contenait pins du tout de sucre. Ce symptonie du diabete avail cesse ainsi que Ions les aulres : frissons el Iremble- ments musculaires qui accompagnent generalemenl le diabete artificiel. Le 111 fevrier. le lapin se porlail tonjours bien; on le piqua du nouveau ; mais a la suite de celte nouvelle pi([ure, il resta sur le flanc, s'agita el elail greloltanl avec les poils herisses. Apres trois heures, 1'animal etanl lou- jours dans le meme etat, on recueillit 1'urine qui, de meme qu'avanl 1'operation, elail trouble el alcaline, mais de plus elle contenail Ires nellemenl du sucre. FIG. GO. 2 T'lQURE DU PLANCHER Le 15 au matin, I'animal etait mort. Voici 1'autopsie de sa tete : P, premiere piqure:, P', deuxieme piqure. Eocp. (\b3L\ri\ 1850). — Sur une chalte qui, quelques jours aupara- vant, avait servi a une experience sur les neris spinaux. on piqua direc- tement le plancher du quatrieme ventricule. Aussitot apres la pi- qure , la respiration fut tres aceree ; pnis peu a pen apparnrent lessymptomes quisnivent lapiqnreet 1'hor- ripilation caraeteristique. On ne put ni faire pisser la <-haite, ni la sonder. Alors on lira du sang de la vein*1 ju- gulaire et on constata qu'il renfermait beaucoup de sucro. Le lendemain matin . la chatte etait ton jours tres vi- vante ; elle fut tuee par heinorrhagie, et son sang alors ne contenait plus sensiblement de sucre. On retira de la vessie de 1'urine acide qui contenait beaucoup de sucre; le dosage indiqua k pour 100. Le foie ne fut pas examine. Cette chatte avait cinq petits dans les comes de la matrice. et Ton constata qnc leliquide renferme dans le perichorium et rallaiitqide renfermait du sucre d'ime maniere tres evidente. Toute- fois, ce sucre n'elait pas le resultatde la piqure, puis(}ue nous avons monti'e ailleurs que ce phenomene se ren- contre normalement; ceia prouve seulement que la piqure n'avait pas fait disparaitre ce sucre foetal. mi QUATRIKME VENTR1CULE. Toutefois, le suciv avail disparu du sane; le lende- niain de I'operation, parce que 1'animal etait clevenu malade, ce qui arrive tres faci lenient chez les lapins; or il faut toujours, pour que le diabete se produise, ainsi que nous 1'avons dit. qu'ily ait inte'grite' des phenomenes de la nutrition. Exp. (30 jnin 1850). — Sur un jeune lapin vif, bien portant, on piqua le plancher du quatrieme ventricule. An bout dedeux heures, les urines contenaient du sucre d'une maniere evidente; niais le diabete ne dura pas longtemps, parce que la piqure (Hait pen profonde. Le 3 juillet , Fanimal etant tres bien portant . parfaitement retabli de sa premiere piqure, on piqua de nouveau le plancher du quatrieme ventricule. Au bout d'une heure et demie il y avait du sucre dans les urines; on sacritla 1'animal et on fit 1'au- topsie pour constater la place des piqures. P, premiere piqure ; P deuxieme piqure. Exp. (26 novembre 1851). — Sur une grosse lapine tres bien nourrie, tres vigoureuse et en pleine digestion, on piqua directement le plancher du quatrieme ventri- cule. Aussitot apres la piqure, 1'animal affaisse sur ses pattes marchait comme en rampant, sans toutefois devier ni d'un cote ni de 1'autre. Bientot 1'animal futcomplete- ment re mis. seulement sa respiration etait tres acceleree. B., SVST. NEUV. — i. 28 FIG. 61. /1 3/1 PIQURE DU PLANCHER Apres une demi-heure, 1'urine du lapin contenait des traces de sucre, et uneheure etdemie apres, 1'animal, tou- jourstres bien portant, et ne paraissant avoir subi aucuiie operation, rendaitdes urines fortementsucrees; toutefois, bientot apres, le sucre cessa de paraitre dans les urines. Get animal eut a peine, an moment ou il rendait du sucre, un pen de tristesse. Enfin, cette experience est une des mieux rtfussies, parce que la glycosurie a cHe le seul symptome tres saillant, 1'animal aya.nt d'ailleurs a pen pres conserve ses allures normales. De plus, il faut ajouter que la piqure bien placee n'interessait que les. deux tiers de la moelle, de sorte que la partie anterieure n'avait pas e'te blessee ; ce qui explique 1'absence de troubles du mouveinent, bien que la piqure P (fig. 62), ne fut ])as situee exactement sur la ligne mediane. Cette seule experience suffirait pour montrer que le pissement du sucre est complete- ment independant des troubles de mouvement qui sui- vent la piqure. Nous allons abreger les experiences qui suivent : Exp. (30 avril 1851). — Lapin vigoureux. Oii le piqna entre 1'occipital et 1'atlas avec I'instrument a double pointe : affaissement , tendance a tomber du cote droit, respiration plutot ralentie qu'acceleree, salivation. Le sucre apparut trois quarts d'heure apres FIG. 62. 1)U QUATRIEME VENTR1CULK. dans 1'urinc clout la quantite (Halt augmentee ; elle devint transparentc. On sacrifia Taninial au bout d'une demi-heure. A 1'autopsie, on trouva que les piqures etaient obliques; Tune (a) entrait par le corps resti- forme et allait obliqneinent en haut jusqu'a 1'origine de la cinquieme paire ; 1'autre (a1) entrait par la ligne me- diane (fig 63). Le tbie coutenait du sucre et donna une decoction opaline. (30 avril 1851). — Lapin adulte. Piqure avec 1'in- strument a double pointe en perforant 1'occipital, desorte que les piqures etaient directes et non obliques : affaisse- ment de 1'animal qui tomba sur le cotedroit; saliva- tion, apparition du sucre dans 1' urine au bout d'une heure environ. Les urines, toujours troubles et alcalines, n'avaient pasdu toutaugmente de quantite. A 1'autopsie, la double piqure portait au niveau des tubercules de Wenzel, au-dessus des olives (c, c', fig. 63) ; le foie con- ten ait beaucoup de sucre. (J> mai 1851) . — Sur un lapin, on ouvrit la membrane occipito-atloi'dienne, on donna issue au liquide cephalo- rachidien et on piqua la moelle allongee avec 1'in- strument a deux pointes. obliquement et en remontant vers les olives. L1 animal fut aneanti; la respiration lente, profonde et saccadee; il y eut augmentation le- gere de la quantite d" urine, puis apparition du sucre dans T urine trois quarts d'heure apres la piqure. L'ani- mal mourut au bout de trois heures, ayant toujours du sucre dansl'urine. Lefoie donna une decoction sucree et tres opaline. A 1'autopsie. les deux piqures etaient situees : la droite (d), sur 1'olive; et lagauche (rf'), un peu plus en /| 36 PIQURE DU PLA.NCHER dedans (fig. 63). On trouva, en outre, une bemorrbagie qui avait occasionne 1' introduction du sang dans le canal central de la moelle ou il formait un caillot filiforme. (10 mai 1851). — Gros lapin vigoureux. Piqure a la partie superieure de la moelle allongee avec 1'instru- ment a double pointe enfonce en percant 1'occipital. On traversa avec 1'ipstrument tout le cervelet, sans causer de douleur comme cela a lieu ordinairement. La douleur se manifestalorsqu'on atteignit la moelle allon- gee; mais il n'y eut pas de convulsion produite parce que n'etant pas alle jusqu'a la surface de 1'os basilaire, on n'avait pas blessc les faisceaux anterieurs. II convien- drait mejne d'agir toujours ainsi, si Ton pouvaitetre sur d'avoir pe"netre assez profondeinent. Apres 1'operation, le lapin se soutcnait tres bieii sur ses pattes ; il marchait en equilibre; seulementses mouvements etaient raides et comme convulsifs. Le lapin, qui paraissait du reste tres bien portant, mangea des feuilles de chou qu'on lui preseuta. Toutefois Panimal semblait un pen triste et avait de la tendance au repos. Deux beures et demie apres, on retira de lavessie des urines qui etaient un pen plus blancbatres et contenaient enormement de sucre ; elles n'avaient pas augmente de quantite. Huit ou neuf beures apres, les urines qui n'avaient pas pendant tout ce temps augmente de quantite con- tenaient toujours du sucre, mais moins abondamment. Le lendemain. vingt-quatre heures apres 1'operation, 'es urines ne renfermaient plus de sucre, Tanimal pa- ••aissait bien porlant quoiqu'il eut pen mange: on le sacrifia. Son foie donna une decoction non opaline, par- DU QUATRICME VENTRICULE. /1 37 faitement transparente etcependant sucree. A 1'autopsie de la tete, on trouva que les piqures, qui etaient verti- cales, avaient porte tres haut, entre les tubercules de Wenzel etles tuberculcs quadrijumeaux (/", f, fig. 63) . En cxaminant la profondeur des piqures, on vit qu'elles etaient tres verticalement dirigees, et que leur extremite inferieure correspondait un pen en arriere du niveau du pout de Varole. Les pyramidesanterieures n'avaient pas du tout ete atteintes par I'instrument qui n'avait tra- verse que le faisceau intermediaire, ou innomine de la moelle allongee. (19 mai 1851). — Sur un gros lapin, bien portant, on piqua la moelle allongee avec I'instrument a deux ,, pointes, en perforant la partie superieure de Toc- cipital. L'animal ne per- dit aucunement rcquili- bre apres 1'operation ; seulement ses membres devinrent raides. et ses mouvements tres lents et comme circonspects. line heure apres, 1'u- rine contenait tres evi- demment du sucre. La , , r • , •. FIG. 63. quantite d urine n avait pas sensiblement augmente. Le lapin mangeadesfeuilles dechou qu'on lui donna. Troisheures apres la piqure, les urines avaient toujours beaucoup de sucre. /| 38 PIQURE DU PLANCHER Le leudemain . 20 mai , le lapin allait toujoursbien, mais ses urines ne reiifermaiont plus de sucre. A 1'autopsie, on trouva les deux piqures symetriques (6, &', fig. 63) n'interessant que deux tiers de 1'epaisseur de la moelle allongee. Les pyramides anterieures n'avaient pas ete atteintes. (30 juin 1850). — Sur un jeune lapin vif, bien por- tant, en digestion, oil fit une piqure simple en perforant Foccipital. Au bout de deux heures les urines etaient tres sucrees; le diabete avait dure peu de temps. (3 juillet 1850). - - Sur le meine lapin, tres bien re- tabli de la premiere piqure, on repiqua parle meme pro- cede. Le lapin avait de la tendance a tomber du c6te droit. Au bout d'une heurc et clemie les urines etaient tres sucrees. A 1'autopsie, ou retrouva les deux piqures (la premiere a et la seconded, fig. 64). (2 juillet 1850). — Jeune lapin, vigoureux, bien por- tant, en digestion. Piqu6 par la partie superieure de 1'occipital, un peu du c6te droit. Tend a rouler a droite, grelotte comme nous 1'avons vu dans la plupart des cas.- Une heure et demi apres les urines etaient sucrees. On obtint 111 centimetres cubes d'urine qui, etant doses, domierent O'r,35 de sucre, soit 2-"', 50 p. 100. Le foie pesait 31gr, sa decoction etait laiteuse et le sucre qu'il contenait, etant dose, donna Ogr,4/i- pour tout le foie, soit l«r,41 p. 100. (!i juillet 1850). - - Surungroslapm on piqua la moelle allongee en penetrant par 1'occipital. Un mouvement de 1'animal causa des lesions graves et par suite le coma. OU QUATRlfcME VENTRICULE. Apres une he ure et dcinie il y avail du sucre dans 1' urine. Alors ontua ce lapin. Lefoie pesait 52 grammes, donna nne decoction laiteuse et contenait 2,15 p. 100 de sucre. La piqurc portait au-dessus du tubercule de Wenzel (6, fig. 64); elle etait etendue et irreguliere (25 novembre 1851). - Lapin jeuneauqiiel on avait trois on quatre jours auparavant coupe le filet sympathique au con ; il est pique en penetrant directement par le trou occipital, sans niettre a nu prealablement la mem- brane occipito-atloi'dienne. Aussit6t 1'animal tomba comme moil; la respiration fut suspendue, puis elle re- prit bient6t, d'abord ronflante et saccadee. Le lapin resta couche sur le c6te droit , tomba dans le coma, de- vint grelottant, etc. Les respirations, avant 1'operalion, etaientdesoixante par minute; aussitot apres, de quatre- vingts; plus tard. elles tomberent a cinquante-deux. Au bout d'une heure et demie, les urines, devenues abon- dantes, Contenaient du sucre : le sang etait tres rutilant dans les arteres quoique 1'animal fut dans le coma. A 1'autopsie on trouva que la piqure etait placee tres bas (c, fig. 6/i) ; mais, en la suivant, on la voyait remonter dans 1'epaisseur de la moelle allongee jusqu'au-dessus deVorgme du vague correspondant. On voit par la qu'il ne faut pas s'en tenir a 1'examen du point d'entree de 1'instrument. Dans ce cas, par exemple, une piqure di- recte sur le point c n'eutpas donne de sucre. (26 novembre 1851). — Grosselapineen pleine diges- tion, bien portante. On piqua la moelle allongee par la partie superieure de 1'occipital. Aussitot apres la piqure P1QURE DU I'LANCHER 1'animal se tenait en equilibro et courait sur sos quatre pattes. Apres une heure, on Irouva deja clu sucre dans 1'urine ; apres une heure et demie, il y en avail beau- coup. L'animul etait toujours tresbien portant, on le sa- crifia. A Tautopsie, on trouva que la plaie (rf) n'interessait pas toute lY'paisseur de la moelle allongee etqu'elle n'avait pas atteint les faisceaux anterieurs. (lcr novembre 1851). — Sur mi lapin , on coupa un pedonculc ce- rebelleux apres avoir di- vise le grand sympathi- que et !e vague au cou des deux cotes. L'animal FlG- 6/<- tournait comme al'ordi- naire sur son axe. Examinee avant Toperation , 1'urine ne contenait pas cle sucre; examinee une demi-heure apres, on la trouva tres abondante avec traces de sucre; une heure et une heure et demi apres, urine toujours abondante mais tres sucree; alors on tua 1'animal par hemorrhagie. Son foie donna une decoction laiteuse qui etait tres sucree ; le sang contenait beaucoup de sucre. A 1'autopsie, on constata que le pedoncule gauche etait tres bien coupe de me" me que le vague et le sy m pa- th i que. DU QUATR1EME VENTRICULE. Celte experience prouve que la section flu pneumo- gastrique n'empeche pas le diabete; elle semble meme le favoriser, comrnenous le verrons encore dans d'autres experiences. (Novembre 1851 . — Sur un lapin, bien nourri, on determina une apoplexie en coupant le cerveau en t ra- vers, an devaut des pedoncules cerebraux ; apres quoi on fit la section des vagues : il avait apparu du sucre dans 1'urine quelque temps apres, quoique en petite quantite. Nous avons cite ailleurs des animaux chez lesquels nous avions determine des lesions cerebrales, et amene par suite 1'apparition du sucre dans leurs urines. Quant a 1'action de la piqiire du plancher du qua- trieme ventricule, sur laquelle nous aurons bientot a nous expliquer, elle s'opererait done par la moelle epi- niere et non pas par les vagues. Nous aliens vous rappor- ter des experiences qui etablissent ce fait, et vous verrez en m&me temps que la section de la moelle a une in- fluence directe sur la quantite de 1'urine emise. 1° Sur un lapin adulte, on coupa la moelle epiniere a lapartie superieure de la region dorsale. An moment de la section les respirations furent accelerees, puis pen a pen elles seralentirent ; 1'animal etait paralyse de tout le train posterieur. Trois heures apres, on observades mou- vements peristaltiques del'intestin, tres visiblesa travers les parois abdominales. Les oreilles de 1'animal etaient tres chaudes, ce qui tenait probablement au point ou la moelle avait ete coupee. L'animal fut sacrifie cinq heures apres la section de la PIQURE DU PLANCHER moelle epiniere. Le foie contenait clu sucre en petite quantite, et sa decoction etait transparcnte ; il n'y avait par consequent pas de matiere glycogene. Le densi- metre donna 1 degre. L'autopsie montra que la moelle etait incompletement coupee et seulement contuse entre les deuxieme et hui- tieme vertebres dorsales, au bas dela region cilio-spinale. L'urine qu'on trouva dans la vessie etait acide et non sucree. En comparant cette experience aux sections faites plus haut, dans la region cervicale, il semblerait que c'est le renflement brachial qui exerce surtout son in- fluence sur les fonctions du foie. II faudrait egalement savoir si ces resultats auraient lieu quand la moelle est detruite plus ou moins completeinent. 2° Sur un lapin adulte et bien portant, on piquale plan- cher du quatrieme ventricule par le procede ordinaire. Apres une heure et dernie, 1'iirine du lapin contenait beaucoup de sucre sans que la quantite de 1' urine fut aug- mentee, le sang de la veine jugulaire etait sucre. Alors on fit la section de la moelle epiniere a la par- tie inferieure de la region cervicale, apres quoi 1'animal fut paralyse des parties situees au-dessous de la section. La respiration ne se faisait plus que par le diaphragme. Apres cette operation, la formation de 1' urine fut completement arr6tee? et il ne fut plus possible d'eu retirer de la vessie. Deux heures apres la section de la moelle, on sacri- fia 1'animal : son sang contenait encore du sucre, mais en moindre quantite. Le foie enrenfermaitexcessivement DU QUATRIEME VENTRICULE. pen; inais il dnnmiit une decoction tres opaline, indice d'une grande quantite de matiere glycogene. L'autopsie de la t£te montra que la piqure etait faite tres haul , au-dessus des lubercules de Wenzel, ce qui etait en rapport avec la non-augmentation de 1' urine. Cette experience montre done que la section de la moelle, dans la region indiquee, a arr&te la production de 1' urine ; que le sucre semble diminuer dans le foie , mais que la matiere glycogene y existe abondamnient ; ce qui n'est pas le cas des lapins qui ont ete rendus dia- b&iques par la piqure de la moelle allongee. II seraitinteressant desavoirsi, danscettecirconstance, il n'ya paseu formation de matiere glycogene duea lasec- tion de la moelle. Cela rie pourrait se juger qu'en faisant la section de la moelle le lenclemain, par exemple, alors que le diabete a disparu et que la matiere glycogene se trouve ordinairement absente. 3° Sur un lapin bien portant, on coupa la moelle e'pi- niere a la partie inferieure de la region ceiTicale. Apres quoi, on relira du sang de la veine jugulaire; puis on piqua le plancher du quatrieme ventricule. L'animal etant paralyse, on vida la vessie de F urine qu'elle con- tenait et on laissa 1'animal en repos. Une heure et demie apres, on saigna de nouveau 1'a- nimal par lameme veine ; car on constata qu'il ne s' etait pas forme d'urine dans la vessie depuis la section de la moelle. En examinant les deux saignees, on trouva du sucre dans tout.es deux, sans qu'il fut possible de dire qu'il y en cut plus dans Tune que dans 1'autre. l\l\[\ P1QURE DU PLANG11EU Trois heures et clemie apres la section de la moelle, 1'animal etant toujours clans le meme etat , on retira de nouveau du sang dela veine jugulaire, etl'on constata qu'il etait completemenl depourvu de sucre. Dans ce moment, la temperature de 1'animal avait considerablement baisse; elle etait de 23 degres dans le rectum, tanclis qu'avant elle e"tait de 38 degres. Alors on sacrifia ce lapin par hemorrhagie, et on constata de nouveau dans la masse du sang qu'il n'y avait pas de sucre. Le foie donna une decoction tres opaline qui etait com- pletement depourvue de sucre. On constata, en outre, que la piqure avait ete faite dans un point qui devait donner du sucre dans 1' urine, et que la moelle epiniere avait ete bien coupee. II resulterait done de cette experience, que la sec- tion de la moelle arrete reflet de la piqure, et que, non-seulement 1'animal ne clevient pas diabetique, mais que le sucre disparait de son sang. Ce qui differencie ce cas dela disparition du sucre par suite d'un etat maladif, c'est qu'ici la matiere glycogene se rencontre dans le foie en grande quantite. Get effet est d'autant plus re- marquableque cette matiere glycogene pent etre changee en sucre apres la mort de 1'animal. II semblerait clone que pendant la vie Taciion de la moelle emp6che le contact entre cette matiere et le ferment qui doit la transformer. l\° Sur une lapine pleine, on fit la section de la moelle immediatementau-dessusdu renflement brachial. L'ani- mal paralyse presenta des mouvements reflexes tres violents dans le train posterieur, sans en presenter dans les membres anterieurs. IHI QUATRIKME VENTRICULE. Sept heures apres la section de la moclle, 1'aniraal elait refroidi. rendait une grancle quantite d'excrements, et remuait continuellement la queue. Ace moment on le sacrifia, et on observa ce fait quo le coeur battit tres long- temps apres la mort. Le foie donna une decoction lai- teuse, il contenait une grancle quantite de matiere glyco- gcne, et pas sensiblement de sucre. Cette decoction donna 5 degres au densimetre. Le lendemain, on fit une decoction avec une meme quantite du foie abandonne a lui-meme : cette nouvelle decoction etait a pen pres transparente et la quantite du sucre y etait tres con- siderable. Toutefois 1' indication du densimetre n'avait pas sensiblement varie. On observa un autre fait assez singulier : c'est que la premiere decoction du foie, celle qui ne contenait pas de sucre, mais seulement la matiere glycogene, etait tres alcaline, tandis qu'elle devenait acide quand la matiere se changeait en sucre. Les resultats precedents montrent que la section de la moelle amene des modifications profondesdans lesphe- nomenes chimiques qui s'accomplissent dans le- foie. 5° Sur un lapin, on coupa la moelle epiniere tout a fait a la partie inferieurede la region cervicale, immediate- ment au-dessus de la vertebre proeminente. Lesoreilles s'echaufferent beaucoup. II y eut des mouvements re- flexes tres forts dans le train posterieur, et f animal executait des mouvements avec les membres anterieurs. Quatre heures apres 1' ope" ration, on tua Tanimal par la section du bulbe rachidien, et on observa qu'au mo- ment de la mort il y avail des mouvements violents dans PIQURE DU PLANCHER le train posterieur paralyse; c'est un phenomene qui s'observe aussi lorsqu'on asphyxie des animaux dont la moelle epiniere a ete coupee au dos. Le foie donna une decoction excessivement laiteuse, mais contenant encore du sucre. 6° Sur un cochon d'Inde bien portant, la moelle epi- niere fut coupee a la partie inferieure de la region cer- vicale. Les membres anterieurs etaient encore doues de mouvement; tout le train posterieur etait paralyse. Le lendemain, 1'animal qui etait vivace courait a I'aide de ses membres anterieurs. II avait tres pen mange depuis 1' operation et fut sacrifie par hemorrhagie. Le foie examine donna une decoction laiteuse alcaline, ne contenant pas de sucre. Une autre portion du foie, crue, abandonnee a elle-meme jusqu'au lendemain, donna une decoction moins opaline, acide et accusant la presence d'une grande quantite de sucre. 7° Un autre cochon d'Inde, dont la moelle epiniere avait e"te coupee vers le tiers inferieur de la region cervicale, fut paralyse de ses quatre membres. L'animal, aban- donne a lui-meme, fut trouve mort le lendemain. La decoction du foie etait linipide et tres sucree. II y avait done absence de matiere glycogene ; ce qui tenait sans doute a ce qu'elle avait ete changee en sucre apres la niort de I'auimal. 8° Un autre cochon d'Inde eut la moelle coupee au niveau de la deuxieme vertebre dorsale. L'animal, paralyse du train posterieur, rnarchait avec les membres anterieurs. II resta vif et mangea comme a 1'ordinaire. Le lendemain , on le tua par hemorrhagie et Ton exa- t)U QUATRIKME VENTtUCULE. mina son foiedont la decoction alcaline ne oontenait pas de sucre. On conserva nne partie du foie jusqu'au len- deinain pour savoir si le sucre y apparaitrait, et on con- stata qu'il n'y en avail pas plus que la veille. II est bien interessant, si ces experiences se con- finnent , que la section de la moelle dans la region dorsale arrete la production de sucre dans le foie alors meme que Fanimal continue a manger. Toutefois, lors- qu'on divise la moelle epiuiere it la partie inferieure de la region dorsale, la digestion parait pouvoir se faire, ainsi que nous 1'avons vu sur un chien qui continuait a manger, et chez lequel la secretion du sucre persista. 9° Sur un lapin en digestion, bien portant, ayantseule- ment subi, quinze jours auparavant, 1'extirpation d'un ganglion cervical superieur, on coupa la moelle epi- niere vers le niveau de la premiere vertebre lombaire. Le lapin fut paralyse aussitot du train posterieur. On piqua ensuite la moelle allongee. Trois heures apres la piqiire, le lapin, qui etait restecouche sur le flanc, donna de 1'urine sucree. Quatre heures apres, cette urine etait encore plus fortement sucree; Tanimal grelottant etait couche sur le flanc; il donna beaucoup d'urine. Le lendemain 12 novembre, 1'animal fut trouve mou- rant. Cependant son sang arteriel etait toujours ruti- lant, et le sang veineux dans la jugulaire etait noir. L'urine etait en grande quantite dans la vessie et elle etait toujours sucree. VINGT-TROISIEME LECON. 13 MARS 1857. SO.VIMAIRE : Lesions du plancher du quatrieme ventricule qni ne pro- duiscntpasle diabete. — Experiences. — Cauterisations. — Le"sion des corps resti formes. — Suppression de I'urine. — La section des vagues et du grand sympatbiqne nVmpecbe pas la piqure du quatrieme ven- tricule de prod uire le diabete. -- Piqure entre les tubercules quadri- jumeaux. — Experiences sur des pigeons. — Arret de la digestion. MESSIEURS , Nous continuous aujourd'hui le sujet qui nous a occupes clans la lecon precedente. II nous reste a vous montrer que toutes les lesions de la moelle allongee ne sont pas toutes egalement susceptibles de prod uire le diabete ; que non-seulement il est necessaire que la lesion porte sur un certain point, mais que sa nature meme n'est pas in- differente, que les cauterisations, par exemple, ne don- nent pas les memes effets. Exp. (11 mars 1SA9). — Sur un lapin de taille moyenne, on decouvritla membrane occipito-atloi'dienne en ecartant simplement les muscles de la nuque sans les couper en travers. On perca la membrane : il sortil du liquide cephalo-rachidien comme a 1'ordinaire. Alors on porta a 1'entree du quatrieme ventricule, avec une pince fine, un fragment de nitrate d'argent fondu, gros comme la tete d'une epingle. Aussitot le lapin s'agita, tourna la t6te, tomba sur le ilanc, executa quelques mouvements convulsifs et mourut environ cinq minutes apres. DU QITATRIEME VENTRICULE. 449 A 1'aulopsie, on trouva quo les organ es abdominaux paraissaientplus congestionnes, et les ureteres plus rem- plis d'urine. L'examen de la lete montra Pentive du quatrieme ventricule profondement cauterisee aiusique la partie interne des pedoncules cerebelleux. L'urine examinee ne contenait pas de sucre ; mais en admettant m6me que Feffet habituel des lesions du plan- cher du quatrieme ventricule cut etc produit, le sucre n'aurait pas eu le temps de passer clans 1'urine. Eaop. (12 mars 1849). — Sur un lapin , on mit a de- couvert Ten tree du quatrieme ventricule et, avec un fil de fer rougi an feu, on cauterisa exactement le milieu de la face inferieure du ventricule. D'abord, tant que la cauterisation fut superficielle, Fanimal ne sentit aucune douleur, mais, en apprcchant de la partie inferieure vers le bee du calamus scriplo- rius, il y eut des manifestations de douleur tres evi- dentes. L'animal, apres cettc operation, paraissait para- lyse de tout le train posterieur ; tontefois, peu a peu, il se remit sur ses pattes et marcha en tendant toujours a s'incliner un peu du c6te droit. Les yeux etaient cligno- tants, les pupilles clilatees; Tnrine etaitacide (parce que 1'animal etait nourri d'avoine) et ne contenait pas de sucre apres Toperation. Le lendemain, 1'animal etait toujours vivant et ses urines ne contenaient pas de sucre. Exp. (15 mars 1849). — Sur un lapin nourri d'herbes, ayant les urines claires et alcalines, on de'couvrit Tentree du quatrieme ventricule, pres de 1'origine des pneunio- gastriques. On fit autant que possible la cauterisation B., SYST. NERV. — i. 29 /1 50 LESIONS DU PLANCHER sur la partie moyenne, mais cependant, a la suite cle celte cauterisation, il y eut une paralysie de la cin- quieme paire ducote droit. Apres cette operation, 1'ani- mal resta sur le flanc. II etait pris parfois de tournoie- ment; on put obtenir a peine de 1'urinedont F excretion paraissait suspendue; elle ne contenait pas de sucre. Cinq ou six heures apres, 1'animal se refroidit, il tournait de temps en temps et salivait beaucoup. Le lendemain, dix-huit heures apres Foperation, Fa- nimal tut trouve mort et froid. 11 y avait un epanche- ment sero-sanguinolent dans les ventricules lateraux; on constata que la partie cauterisee etait situee un peu au-dessous de Forigine des pneumo-gastriques, et que la cauterisation avait atteint en ineme temps le pedoncule cerebelleux droit. Les pournons etaient engoues et mar- bres en noir par du sang. Le foie etait friable, son tissu broye donna une decoction claire qui ne renfermait au- cune trace de sucre. Sur un autre lapin, on decouvrit egalement Pentree du quatrieme ventricule et on cauterisa avec un fit de fer rougi au feu, applique" sur le plancher du ventricule, et autant que possible sur la ligne mediane. Apres Fopcration, 1' animal tomba sur le flanc et de- meura aneanti. La cinquieme paire n'etait paralysee ni d'un cote ni de Fautre. L'urine, claire et alcaline avant 1'operation, ne con- tenait pas de sucre. Apres I' operation, Texcretion uri- naire parut suspendue, et on put a peine retirer quel- ques gouttes d' urine qui n'etait pas naodifiee dans sa composition et ne renfermait pas de sucre. DU QUATRItiME VENTRICULE. !\ 51 Cinq ou six heures apres la cauterisation , 1'aninial s'affaissa cle plus en plus et sa temperature baissa; le lendemain on le trouva mort et raide. On vit, a 1'autopsie, que le point cauterise repondait exactement a la partie moyenne du quatrieme ventri- cule, au niveau meme de 1'origine des vagucs et descen- dait un peu au-dessous. La decoction du foie broye etait a pen pres claire et ne donnait que des traces de sucre. On trouva dans Fes- tomac des pommes de terre et enormement de glycose, qui peut-elre etait la cause de la presence du sucre dans le tissu du foie. En effet, lorsque le foie ne fait plus de sucre, sa decoction est generalement claire, et le sucre qirilcontientprovient ou de la transformation de la nia- tiere glycogene preexistante, ou bien, comme ici, de 1'imbibition ou de 1'absorption du sucre contenu dans 1'estomac ou dans les voies digestives. Le coeuravait toutes ses cavites pleines d'un sang noir, mal caillebote, qui se coagula ensuite plus completement dans un verre. La vessie etait absolumeiit vide. Exp. (14 mars 18/1.9). — Sur un lapin, dont 1'entree du quatrieme ventricule avait ete mise a decouvert par la section de la membrane occipito-atloi'dienne , on divisa, avec la pointe de ciseaux tres fins, les deux corps restiformes pres du calamus scriptorius. Aussit6t apres 1'operation, 1' animal ne parut pas s'en apercevoir; il marchait bien, sans chanceler. Mais envi- ron dix minutes apres, 1'animal tomba dans un col- lapsus complet; il etait affaisse, mou, ne pouvait plus marcher, respirait lentement et avec beau coup de peine. /1 52 LESIONS DU PLANCHER Lu sensibilite des membres posierieurs persistait encore, sans qu'on put reconnaitre s'il ne s'agissait pas seule- nient de sensibilite reflexe. L'animal refroidi resta dans ce collapsus complet , jusqu'a la mort. II ne rendit pas d'urine; 1'excretion urinaire parut arretee pendant les six ou sept heures que 1'animal went. On obtinl seulement, deux on trois heures apres l'ope"ra- tion, quclques gouttes d'urine qui ne contenaient pas de sucre. A 1'aulopsie, 1'appareil digestif offrait seulement a noter un fait deja observe sur d'autres lapins : c'est que le sue intestinal devenait visqueux par la potasse. On retira du ventricule droit du sang noir et mal coagule. La vessie etait vide; quelques gouttes d'urine en furent extraiteset ne reduisirentpasle liquide cupro-potassique. L'examen de la tete montra un pen d'epancbement sero-sanguiuolent dans les ventricules. La lesion avait porte pres du calamus scriptorhis des deux cotes, en com- prenant les deux especes de bandelettes nerveuses qui le bordent. Elle siegeait par consequent assez loin de 1'origine des pneumogastriques, origine qui se trouve a peu pres au niveau du bord inferieur du vermis. Le foie avait sa couleur ordinaire ; il etait friable , et sa decoction, tres opaline, contenait enormement de sucre. En resume , chez ce lapin , la lesion des corps resti- formes n'a pas donne lieu au diabete; il semble, au contraire, y avoir eu suspension de 1'excretion urinaire. Celte lesion a produit, du reste,un affaiblissement con- siderable et unr mort assez rapicle. DU QUATR1UME VENTRICULE. Messieurs, il etait naturel, apres avoir constate que la blessure du plancherdti quatrieme vcutricule produisait le diabete, de rechercher le mecanisine par lequel il s'opere. Nous avions pense, dans nos premieres expe- riences (et cette idee nous avail memo conduit a les pratiquer). que 1'irritalion produile a I'origine des vagues etait conduitc par lepneumo-gastriquejusqu'au foie; mais, en cherchant a verifier cette supposition par 1'experience, vous savez qu'il nous a etc facile de voir qu'il n'en etait pas ainsi , et que c'etait par la moelle epiniere que devait se transmettre Faction de la partie irritee sur 1'organe excite. Nous allons vous fournir ici de nouvelles preuves de ce fait important. Exp. (12 mai \ 8/1.9). — Un lapin, nourri a la luzerne, ful pique au plancher du quatrieme ventricule, en tra- versant le cervelet. II y eut d'abord desordre des mouve- ments : les pattes anterieures etant ecartees, le poitrail de 1'animal portant sur le sol et son train poste'rieur res- tant eleve. Avant 1'experience, les urines etaient troubles, blan- cbatres et alcalines, et elles conserverent ces caracteres pendant trois heures que dura la glycosurie d'une facon prononcee. Six heures apres, Tanimal etait reta- bli ; il mangeail comme a 1' ordinaire , et ses urines ne contenaient plus de sucre. Qualre jours apres , 1'animal etant bien portant , je resequai les deux vagues dans la region ducou, en mena- geant les filets cervicaux du grand sympathique ; puis je piquai 1'animal au plancher du quatrieme ventri- cule. Cette piqure produisil d'abord un pen d'affaiblissc- /|5/| SECTION J)ES V AGUES ment passager dans les niouvements des membres ante- rieurs. Trois heures apres la piqure, on trouva seulement des traces de sucre dans 1' urine. Le lendemain 1'animal etait mort . presentant les phenomenes ordinaires de la section des vagues; ses poumons etaient ecchymoses; son foie ne contenait pas de sucre. A 1'autopsie de la tele , on trouva les deux piqures : la premiere piqure, qui avait donne beaucoup de sucre, etait cependant situee au-dessous de 1'origine des vagues, mais probablement oblique en haut. Exp. (14 mai 1849).- - Sur un lapin de taille moyenne, mangeant de la luzerne, ayant des urines troubles, blanchatres et alcalines. on fit une piqure du plancher du quatrieme ventricule, apres avoir coupe les deux vagues et les filets sympathiques. Apres rope- ration, les urines resterent troubles et alcaliues. et le lapin pissa du sucre. Neanmoins il sembla en rendre une moins grande quantite qu'un autre lapin , chez lequel les nerfs vagues n'avaient pas ete coupes. Le lendemain, 1'animal etait mort. Son foie conte- nait beaucoup de sucre , et donnait une decoction claire. Un autre lapin, dans les monies conditions, eut prealablement les deux filets cervicaux du grand sym- pathique coupes, et les vagues divisees. Le lapin pique, apres cette section des nerfs, a pisse beaucoup de sucre, les urines restant troubles et alcalines. Le sang etait reste rouge dans 1'artere carotide, AViiC I'lQUIlI-: 1)U OUATKIKMIi YiiNTKlCULE. A 55 ainsi qu'on 1'a constate'4 pendant que 1'aninial rendait du sucre. II reste prouve, d'apres les experiences, que la sec- tion des nerfs vague et grand sympathique n'empechent pas la glycosurie apres la piqure du plancher du qua- trieme ventricule. Exp. (8 avril 1850). — Sur un lapin adulte, vigou- reux. on piqua par 1'occipital le plancher du quatrieme ventricule, et 1'aninial fit un mouvement qui donna a la plaie plus d'etendue. Aussitot apres, 1' animal tomha comme en syncope; puis il revint pen a pen , et resta couche sur le flanc avec la narine paralysee d'un c6te. Avant 1'operation, les urines, troubles et alcalines, ne contenaient pas de sucre. Deux heures et demie apres , elles en renfermaient beaucoup. Les urines etaient devenues limpides, mais elles etaient restees alca- lines. Le lapin etait toujours reste sur le flanc, grelottant, le poil herisse, comme cela arrive le plus souvent, L' urine dosee renfermait 5 pour 100 de sucre. La temperature, dans le rectum, etait de 36°. A ce moment, on coupa les deux vagues an lapin dans la region du cou. Les respirations, deja ralenties, ne le furent pas beaucoup par Toperation ; seulement 1'animal fit entendre le rhonchus caracteristique a la suite de la section des nerfs. Une heure apres la section des vagues, 1' urine, claire et alcaline, contenait toujours beaucoup de sucre. Dosee, on trouva qu'elle en renfermait 6 pour 100. Trois heures environ apres 1'operation, 1'urine con- lenait toujours du sucre. 458 SECTION DES VAUUliS La temperature, dans le rectum, clait de 38°. Alors on tua r animal par hemorrhagie , et on fit 1'autopsie. Lefoie pesait 66 grammes. Le lapin pesait lk,550gr. Le tissu du foie , broye et epuise par 1'eau a chaud , donna 112 centimetres cubes d'un liquide qui donna Oer,95 de sucre pour le contenu du foie, ce qui fait 1,44 pour 100. Exp. (9 avril 1850). - - Un lapin, nourri de choux, fut pique par le precede ordinaire. Aussitot 1'animal devint flasque dans tous ses membres et tomba en syncope. Pen a pen il revint, se releva; la respiration e"tait acceleree, maisil se tenait bien sur ses quatre pattes, seulement avec une propension a aller toujours en avant. Au bout d'environ deux heures seulement, le lapin fut pris de frisson , resta dans un coin , les poils herisses, et a ce moment son urine contenait beaucoup de sucre. Mais plus tard, apres une heure ou deux, le lapin cessa d'etre dans cet etat et 1' urine ne contenait plus de sucre. Exp. (10 avril 1850). — Sur un gros lapin, on coupa les deux pneumo-gastriques dans la region moyenne du con, et Ton piqua directement le plancher du quatrieme ventricule. Au moment de la piqure, 1'animal fit un mouvement brusque qui fit devier 1'in- strument. Le facial semblait paralyse du cote gauche, a la suite de cette piqure. L'animal resta sur le flanc. L' urine etait trouble, alcaline, avant 1' operation. Trois quarts d'heure apres la piqure, elle contenait des traces ^ de sucre. Examinee une heure, deux heures, trois AVEC PIQURE DU QUATR1EME VENTRICULE. /l57 heures, quatre heures apres, elle rcnfermait beaucoup de sucre. Le lapin etait toujours clans le m6me etat, coucbe sur leflanc et faisant entendre un rhonchus con- siderable. La respiration paraissait difficile; elle etait profonde, quoique assez rapide. Cinq heures apres la piqure, 1'aninial fut tue par he'morrhagie. Son sang, qui se coagula rapidement, donna un serum tres sucre. Le foie fut examine le len- demaiu de la mort ; il pesait 74 grammes, le lapin pesant 2k,050. Le foie, broye et cuit, donna une decoction tres opa- line, contenanl beaucoup de sucre ; le dosage en incli- qua3,l pour 100. L'autopsie de la tete montra que la piqure etait bien situee. Eocp. (11 avril 1850). — Sur un lapin fort et vigou- reux, on piqua le cervelet. L'animal n'ayant pas remue, la piqure fut tres nette. Apres 1'operation , le lapin ne cliancelapas du toutet n'eut pas de lesion apparente des mouvements ; cependant, quelque temps apres, 1'aniuial se blottit dans un coin. II prit une espece de frisson ; ses poils se herisserent, et une heure apres 1' urine con- tenait tres evidemmentdu sucre, quoiqu'en petite quan- tite. Le lapin reprit bientot ses allures, et le sucre disparut de ses urines; de sorte que le diabete a ete, dans ce cas, excessivement fugace. II a dure une demi- heure environ, sans doute parce que la piqure avait ete le'gere. Le lendemain 12 avril, sur le intone lapin, tres bien revenu de son operation de la veille. jecoupai la moelle SECTION DE LA MOKLLE EPIN1ERE epiniere a la partic inferieure de la region cervicale. II yeut aussitot paralysie de tout le train posterieur; les respirations ne se firent plus que par le diaphragme. Alors on piqua le plancher du quatrieme ventriculc par le precede ordinaire. Auparavant. I'urine ne conte- nait pas de sucre; une heure apres la piqure, I'urine recueillie ne contenait pas de sucre non plus. On essaya ensuite. a diffe" rentes reprises, de faire uriner le lapin, et il fut impossible d 'avoir aucunc trace d'urine. Le lapin presentait tous les caracteres qui accompagnent la piqure; il etait . tremblotant, couche" sur le flanc. Lors- qu'on essayait de le faire pisser, la compression do la vessie produisait des mouvements reflexes tres violents dans les mernbres posterieurs. Le lendemain 1'animal etait m or t. Son foie donna une decoction opaline qui contenait beaucoup de sucre : le dosage en indiqua une propor- tion de 3 pour 100 environ. En resume, on n'a pu, dans cette experience, savoir si 1'urine coutenait du sucre; il a etc" impossible d'en extraire, de sorte que la section de la moelle semblerait arreter la formation de I'urine. Exp. (28 mars 1849). — Un gros lapin fut pique sur le plancher du quatrieme ventricule a travers la mem- brane occipito-atloi'dienne, mise a nu. La piqure s'egara trop en avant, par suite d'un mouvement de raiiimal. Aussitot le lapin se raidit, tomba sur le flanc ; les yeux firent saillie hors de 1'orbite, et raiiimal parut aveugle. Les mouvements respiratoires furent d'abord tres acce- leres. L'animal etait en digestion de carottes; ses urines AVEC PIQURK DU QUATFUKME VENTRICULE. ft 59 etaient troubles et alcalines. La piqure fut faite a huit heures et demie ; on revint a onze heures et demie : le lapin venait d'expirer. La vessie contenait une grande quantite d'urine acicle, ne renfermant pas de sucre. A 1'autopsie, on trouvadans latete que la piqure avait porte au milieu des tnbercules quadrijumeaux. Le foie presentait une coloration noiratre, et son tissu, bouilli avec de 1'eau, donnait une decoction claire qui ne contenait pas de sucre. Les poumons etaient sains: le coeur etait rempli d'un sang noir danstoutes ses cavites. Sur plusieurs lapins, apres avoir fait la section du pedoncul e cerebelleux , de facon a produire la rotation qui en estla consequence, j'ai observe qu'il survenait au bout de quelque temps (deux, trois , quatre ou cinq heures apres) une modification telle dans 1'urine , que celle-ci etant avant reparation trouble, alcaline, depour- vue de sucre et d'albumine, devenait par suite claire, neutre, puisacide avec presence de sucre et d'albumine. J'ai voulu faire des experiences pour verifier de nou- veau ces faits. Exp. (3 mars 18/|9). — On piqua en arriere le pe- doncule cerebelleux cbez un lapin de taille moyenne. On ne put pas avant 1'operation lui prendre d'urine ; mais un autre lapin , nourri de meme, avait les urines alcalines. Ce qui fait penser qu'elles clevaient etre alcalines chez le lapin en experience. Aussitot apres la piqure 1'animal se mit a tourner sur son axe du meme c6te. Une heure apres 1'operatiou , on retira facilement de 1'urine de la vessie (les piqures produisent un relachement qui rend toujours 1'emissiou &M) LliSlONS DU TLANCHER de I1 urine plus facile). Celte urine etait acidc, liinpide et de couleur ambree ; ellc ne donna pas de trace de sucre par le tartrato cupro-potassique. Deux heures apivs, memes caracteres ct traces de sucre. Cinq heures apres la piqure du pedoncule, I'lirinc retiree de la vessic etait claire, limpide, acide, et donnait des quantitcs consi- derables de sucre; par 1'acide nzotique, il n'y avail pas de precipite dans 1'urine. Par la chaleur, il y avail un pen d'opalescence qui disparaissait avec legere efferves- cence par raddition d'un pen d'acide azolique. La res- piration de 1'animal etait saccadee, et sa temperature avail evidemment baisse. Le lendemain Familial etait moil, on fit son autopsie. On ne rencontra rien de particulier dans ses organes. La bile etait rougeatre el conlenail evidemmenl du sucre. L'eslomac, reinpli de carottes et d'herbes, offrait une reaction acide, tandisque 1'intestin grele presenlail nne reaction alcaline. On relira de la vessie de 1'urine qui elait opaline, jau- natre el tres nettement alcaline. Par 1'acide nitri(jue, de meme que par la chaleur, elle donnaillieua une coa- gulalion evidente qui paraissait 6lre de ralbuniine. Elle reduisail considerablemenl le litjuidc cupro-potassique, el fermentait tres activemenl avec lalevurede biere. Le lissu du foie cuit donna une decoclion Ires opaline qui contenait beaucoup de sucre. Les vesicules seminales etaienl remplies d'un licjuide limpide Ires alcalin, redui- sant abondammenl le liquide cupro-potassique. Le sang dans le coeur elait noirelassez mal coagule ; il devenait rulilanl a Tair. Ce sang etant cuit avec de 1)11 Qi;\THlKMK VKNTRICUI.E. /|(Jl 1'eau . hi (In'odion wnlenail 6videminent du snore. L'autopsie do la tote de raniinal montra que la bles- suiv avail do laitc un pen en arriero du prdoncule cerebelleux. E.vp. (oclobre 18A9X — J'ai pique sur le cerveletau- dessus du vague, comme pour les mammiferes, chez un pigeon encore jeunc et no inangeant passcul. Lo pigeon manifesta d'abord quohiiu's desonlres dans les niouve- inenls. Chose curicusc, la digestion s'arreta complete- nient. A 1'aulopsie, le foie contonait du sucre el donnait urn; (h'-oDction a peinc louche. Sur un second pigeon , a la suite de la inline pi([ui'e, il ne se manifesto pas de sucre dans les excrt3ments, inais la digestion fut encore completeinent arr^tee en ce sens quo le jabot ([iii etait plein de graines resta dans le nit-inc etat juwiu'ii la inort, qui cut lieu quatre jours apifes. A I'autopsie, on trouva iiue les graines cnntcnues dans le jabot etaient excessivement seches. Les intestins etaient ires reln'icis, et contenaient de labile verte. Le foie contenait du sucre, et donnait une decoction claire. On voit, d'apres ces experiences, que la piqurc chcz les oiseaux ne parait pas produire le ineine eflet cjue chez les main niit'r res, inais qiril existe un phenomene singulier qui consiste dans 1'arret de la digestion. Exp. (13 fevrier '1850). — Sur un jcune lapin on fit une piqure aussi exactenient que possible sur la ligne nu'diane, ct on niaintint quelques secondes T instrument dans la plaie. A 1'instant nienie le lapin Tut coninie /1 62 PIQURE DE LA MOELLE ALLONGEE. ane"anti; ile"tait flasque, immobile, ne respirait plus ; la conjonctive etait insensible; cependant la cornee n'avait pas la teinte terne qu'elle prend apres la mort. On fit alors quelques insufflations pulrnonaires. Au bout d'une demi-minute environ de cet aneantissement, les muscles du lapin se raidirent, et ces sortes de convulsions du- rerent pendant une minute environ : elles n'existaient que dans les meuibres posterieurs, tauclis que les membres anterieurs etaient immobiles, e'cartes, et ne pouvant pas supporter 1'animal. Peu a peu le lapin sereleva, d'abord en chancelant, puis ensuite plus solidement : il se mit dans un coin , resta calme, le poil herisse, comme sont les animaux piques pendant la periode diabetique. Au bout d'une demi-heure au plus de cet etat, 1'animal reprit le poil luisant, redevint parfaitement gai , et se mit a manger. Cette experience prouve que lorsqu'on blesse des parties tres importantes a la vie, comme la moelle al- longee, par exemple, on pent apporter dans la partie un trouble qui cause la mort, independamment de la lesion anatomique qui a ete produite. Ici, en effet, le lapin etait mort et ne serait pas revenu sans la respiration artificielle ; maisune fois lesfonctionsretablies, Panimal s'est comporte absolument comme s'il n'avait pas eu de piqure, ce qui prouve que celle-ci, en tant que lesion anatomique, n'etait pas susceptible de gener beaucoup les tbuctious et de produire la mort par elle-meme. VINGT-QUATRIEME LECON. 18 MARS 1857. SOMMAIRE : Influence de la piqure du plancher du quatrieme ventri- cule sur la circulation abdominale et sur la secretion du foie. — Meca- nisme de cette secretion. - - Fonction glycoge"nique. — Preexislence (I'une matiere glycogene au Sucre. - Son isolement , ses caracleres pliysiologiques et chimiques. — Sa transformation en sticre. — Meca- nisme piiysiologique de cette transformation. — Influence du systeme nerveux sur la transformation de la matiere glycogene et, par suite, sur sa production. MESSIEURS, Les phenomenes que nous avons vu precedemment se p rod u ire chez des lapins peuvent aussi s'observer chez les grenouilles. Nous avons etendu ces obser- vations a des phenomenes moteurs ou sensitifs de la vie exterieure. Nous allons aujourd'hui continuer a appeler surtout votre attention sur ce qui se passe dans les organes interieurs et specialement sur la fonction glycogenique. Une semblable etude pent aussi se faire sur des grenouilles, car, recemmeut Schiff a fait ces experiences, qui sont faciles. On arrive immediatement sur la moelle allongee : on la pique, et la grenouille de- vit'nt diabetique coiume les lapins. L' excretion urinaire est plus abondante, rnais il faut neanmoins pour obtenir une quantite d'urine suffisante pour les essais, operer sur plusieurs grenouilles. Apres la piqure les lapins de- viennent souvent malades, et les phenomenes diabetiques cessent alors chez eux ainsi que nous 1'avons vu. Chez DIABETE CHEZ LES GRENOUILLES. les grenouilles, qui sont bien moins affectees par cette lesion que les animaux a sang chaud, on peut analyser plus exactement les differentes parties de 1'observation du phenomene. On a par exemple pique douze grenouilles. Chez six d'entre elles, les vaisseaux du foie avaient ete lie's. Chez les six autres dont les vaisseaux n'avaient pas ete lies on trouva au bout de deux ou trois heures du sucre dans les urines ; on n'en rencontrait pas chez les autres. On defit alors les ligatures, et . au bout de deux ou trois heures, on trouva que ces grenouilles etaient aussi de- venues diabetiques. ce qui prouve evideminent que Ton avait empeche la production du diabete en arretant la circulation dansle foie et que, en retablissant ensuitele passage du sang, les symptomes du diabete s' etaient montres. Ces observations m'amenent a vous parler de la ma- niere dont on doit comprendre Faction des nerfs, lors- qu'elle intervient dans les phenomenes chimiques de la vie, et par exemple, dans la production du diabete. On ne saurait admettre que les nerfs exercent surles phenomenes chimiques de 1'organisme une action di- recte ; ilsne les modifient qu'indirectement, en vertu de leur influence surles agents mecaniques de 1'organe se- creteur, ou des organes circulatoires qui s'y distribuent. Et ici j'insiste sur ce point, parce que le mecanisme des secretions estgeneralement mal compris, et qu'a cet egard, il regne dans la science les opinions les plus con- traires a la saine intelligence de ces phenomenes impor- tants. THEORIES DKS SECRETIONS. Les chimistes voient generalement clans la secretion im dedoublement direct du sang-, une separation des elements immediatsde ce liquide, tel qu'ou pourraitse le representer par une equation entre le sang qui penetre dans la glande d'une part, et le sang qui en sort, ajoute au produit de secretion, d'autre part. Toutes les theories qui out ete proposees pour expliquer la formation du sucre dans Torganisme animal sont toutes concues dans le meme esprit : Schmidt voit dans la produc- tion du sucre un dedoublement de la matiere grasse du sang, un acide gras et un radical sucre analogue a la glycerine. Frerichs admet que le sang de la veine porte se dedouble, que 1'un des produits de ce dedou- blement est le sucre ; quant a 1'autre, il pense que c'est rure"e, afin d'utiliser 1'azote. Lehmann, qui a constate dans le foie une diminution de la fibrine et de 1'albu- mine, admet que le sucre nait du dedoublement de ces substances, dont 1'azote serait employe dans la formation de la bile. Toutes ces theories, ainsi que vous le voyez. font servir directement le sang a la composition du produit de secretion. Berzelius . qui comprenait la difference qui peut exister entre les phenomenes chimiques et les pheno- menes physiologiques, disait que les considerations hypo- thetiques n'appartenaient qu'a une physiologic de pro- babilites , ce qui veut dire que, de ce qu'une chose pourrait se passer d'une certaine maniere, il ne s'ensuit pas qu'elle se passe re'ellement ainsi, et que quelque pro- bable que soit une hypothese, il faut tou jours en cher- cher la verification experimentale. B., SVST. NERV. ~ i, 30 /j66 PREEXISTENCE D'UNE MATIERE Les idees th^oriques sur les secretions rappele"es plus haul, sont cellos avec lesquelles j'entrepris mes pre- mieres recherches sur la secretion sucree du foie. Mais bientot je dus reconnaitre qu'elles n'etaient point en rapport avec les faits. J'ai trouve", en effet, que si on enleve le foie chez un animal, etsi onPexamine, il contient dusucre. Si vingt- quatre heures apres on 1'analyse de nouveau , il en contient bien davantage. Nous savons aussi qu'en cou- pant la moelle a uu lanin a une certaine hauteur, le sucre disparaft de son foie, mais qu'il y reste une ma- tiere qui pent se changer en sucre. Ces faits monlrent jusqu'a Pevidence que le sucre qui se produit dans le foie n'y est pas abandonee immedia- tement par le sang qui traverse Porgane. D'autres ex- periences, enfin, qui out ete rapportees ici, m'offraient des resultats incomprehensibles par un dedoublement du sang. La theorie ancienne devait done etre aban- donnee. Je vous ferai grace de tous les tatonnements par les- quels il m'a fallu passer pour arriver a la solution de la question. Des essais nombreux et varies me conduisirent a penser que la formation du sucre dans le foie (et toutes les autres secretions sont dans ce cas) n'etait pas un phe- nomene direct. La production du sucre n'etait que le resultat d'une serie de transmutations organiques, et la secretion devait necessairement donner autre chose que du sucre, c'est-a-dire une matiere qui se changeait en sucre. Je fusainsi amene a voir dans toute secretion des phenomenes de deux ordres , les uns vitaux, les autres GLYCOGENE DANS LE SUCRE. /|67 chimiques : un phenomeiie vital ccssant avec la vie, un phenomene chimique pouvant continuer apres la mort. La vie produit dans le foie la matiere qu'une transfor- mation change ensuite en sucre ; cette transformation peut se continuer apres la mort cle 1'animal dans un foie lave de son sang, mais non debarrasse cle la matiere glycogene. Cette matiere qui se change en sucre, la voici isolee. C'est une substance blanche onraiit les caracteres d'une matiere aniylacee. Sur un animal qui mange de la viande, pas plus que chez les vegetaux, il ne se fait done de secretion directe de sucre : chez les animauxcomme chez les vegetaux le sucre est le produit de 1'action d'un ferment sur Farnidon. Voici dans ce flacon la. matiere glycogene ou amidon animal : nous allons vous indiquer les moyens de Fob- tenir. On pourrait sans aucun doute imaginer , pour extraire la matiere glycogene du foie, une foule de moyens qui ofFriraient des avantages varies. Je me bor- nerai a indiquer le procede auquel je me suis arrete. On prend le foie encore chaud et saignant chez Fanimal bien nourri et bien portant, aussitot apres qu'il a ete sacrifie. On peut employer le foie d'un animal quelconque, soumis aux alimentations ies plus diverses. Mais, pour simplifier la question sur ce point, je dirai qu'il ue s'agit ici que d'experiences faites avec des foies de chiens nourris exclusivement avec de la viande. On divise le tissu du foie en lanieres tres minces qu'on jette aussitot dans de Feau maintenue constamment l>ouil- 468 PREPARATION lante. afin que le tissu de 1'organe soit subitement coa- gule et que la matiere glycogene qui se trouve en con- tact avec son ferment n'ait pas le temps de se changer en sucre, sous 1'influence d'une temperature qui s'ele- verait trop lentement. On broie ensuite les morceaux de foie coagule dans un mortier ; puis on laisse cette espece de bouillie he'patique cuire pendant environ un quart d'heure ou meme moins, dans une quantite d'eausuffi- sante seulement pour baigner le tissu, afin d'obtenir de cette facon dans la decoction concentree une plus grande quantite de la mature susceptible de se changer en sucre. On exprime ensuite dans un linge on sous une presse le tissu du foie cuit , on y ajoute un pen de noir animal qui precipite une partie desmatieres organiques, et aussi une petite quantite de matiere glycogene, et Ton jette sur un filtre le liquide de decoction qui passe avec une teinte opaline. Ce liquide est aussit6t additionne de quatre ou cinq fois son volume d'alcool a 38 ou 40 degre"s, et on voit se former sous son influence un precipite abondant floconneux, d'un blanc jaunatreou laiteux, qui estconsti- tue par la matiere glycogene elle-meme, retenant encore du sucre, de la bile et d'autresproduits azotes indetermi- n^s. Tout le precipite, recueilli sur un filtre, estalors lave plusieurs fois a 1'alcool, de maniere a le ddpouiller le plus possible du sucre et des materiaux biliaires solubles. A cet etat, ce precipite desseche revet 1'apparence d'une substance grisatre, quelquefois comme gommeuse, a la- quelle on pourrait donner le nom de matiere glycogene brute. Elle possede la propriete de se redissoudre dans Veau. a laquelle elle communique toujours une teinte I>E LA MATIEUE (iLYCOGENE. fortement opaline et d'ou elle est entierement precipita- ble par 1'alcool (1) concentre. Pour purifier cette matiere glycogene et la debarras- ser des matieres azotees, ainsi que des moindres traces de glycose qu'elle aurait pu encore retenir, on la fait bouillir dans une dissolution de potasse caustique tres concentree pendant un quart d'heure on une detni- heure, operation qui ne 1'altere pas, et n'en change pas les proprietes fondanientales, puis on filtre en ajoutant un peu d'eau, et toute la dissolution est precipitee de notiveauparl'addition de quatre on cinq fois son volume d'alcool a 38 ou 40 degres. Agitant alorsavecune ba- guette de verre, la matiere precipitee se divise, ayant d'abord une grande tendance a adherer aux vases. Par des lavages repetes avec de grandes quantites d'alcool, on enleve autant que possible la potasse, la matiere gly- cogene se presente alorssous une forme d' une substance comme grenue, presque pulverulente. Toutefois cette matiere ainsi preparee retient toujours avec elle une certaine quantite de carbonate de potasse : qu'on ne pent 'pas enlever par les simples lavages a 1'alcool; il fautpour cela redissoudre la matiere dans 1'eau, satu- rer le carbonate de potasse par 1'acide acetique et trai- ler de nouveau par 1'alcool qui precipite la matiere et (1) La dissolution aqueuse de cette matiere glycogene brute et avant d'avoir e"te" traitee par la potasse, se colore par Tiode, ne reduit pas les sels de cuivre dissous dans la polasse, ne fermente pas avec la levure de biere. Cependant, abandonnee pendant longlemps a elle-meme, cette substance m'a paru dans quelques cas pouvoir se changer partiellement en sucre; c'est sans doute quand elle reste melee encore a des matieres etrangeres. h 70 PREPARATION la separe cle 1'acetate de potasse qui reste soluble dans la liqueur. La matiere glycogene perd alors sa forme gre- nue pour reveiir 1'aspect d'une substance blanche, tres finement tomenteuse lorsqu'elle est en suspension dans 1'alcool, pulverulente et comme farineuse quand elle est dessechee. Ainsi preparee, cette matiere hepatique glycogene possede un ensemble de caracteres qui la rendent tout a fait analogue a de 1'amidon hydrate" ayant deja subi un commencement d'alteration. C'est une matiere neutre, sans odeur, sans saveur, donnant sur lalangue la sen- sation de 1'amidon. Elle se dissout, ou peut-6tre plus exactement, se met en suspension dans 1'eau a laquelle elle communique une teinte fortement opaline. L'exa- men microscopique n'y montre rien de caracteristique. L'iode y developpe une coloration qui peut varier en intensite, depuisle bleu violet fonce jusqu'au rouge mar- ron clair ; rarement la coloration est nettement bleue. Quand on chauffe jusqu'au rouge avec de la chaux sodee, cette matiere hepatique ne degage pas d'ammoniaque, ce qui indique qu'elle ne renferme pas d'azote (1). (La matiere glycogene brute traite'e de la m6me maniere degage tres nettement des vapeursammoniacales.) Elle (1) Lorsqu'on broie le tissu du foie frais et qu'on coagule a froid la pulpe lit^patique par une quantite" suffisante d'alcool a 38 ou ZiO degre"s, on precipile la matiere glycogene avec son ferment. Apres avoir, par des lavages a 1'alcool repetes, enleve" le sucre et fait secher la matiere, qui se re"dint a une sorte de pouclrc du lissu du foie, si on la replace dans 1'eau froide, on obtient une dissolution opaline qui contient la matiere glyco- gene hepatique et son ferment. Ce qui le prouve , c'est que cette disso- lution abandonnee a elle-meme se charge de sucre tres rapidement. DE LA MAT1ERHI GLYCOGENE. ne reduit pas les sels de cuivre dissous dans la potasse, ne subit pas la fermentation alcoolique sous I'influence de la levure de biere, est entierement insoluble dans 1'alcool fort et precipitable de sa solution aqueuse par la sous-acetate deplomb, lecharbon animal en exces, etc. Mais la propriete de la matiere hepatique qui nous interessele plus est celle qui est relative a son change- ment en sucre. C'est la que les analogies physiologiques de cette substance avec 1'amidon hydrate se montrent clans tout leur jour. On voit, en effet, que toutes les influences, sans en excepter une, qui transformed 1'amidon vegetal en dextrine et en glycose, peuvent ega- lement changer la matiere glycocene du foie en sucre, en passant par un intermediaire analogue a celui de la dextrine. C'est ainsi que 1'ebullition prolongee avec les acides mineraux etendus d'eau , Faction de la diastase vegetale et celle de tons les ferments animaux analogues, tels que le sue on le tissu pancreatique, la salive, le sang, etc., transformed tres facilement la matiere gly- cogene en sucre. An moment ou cette transformation graduelle s'opere, la dissolution de la matiere glygo- gene, d'opaline qu'elle etait, devient pen a peu trans- parente et perd en meme temps la faculte d'etre coloree par 1'iode. Mais bientot apres, et seulement quand le Quand la transformation en sucre est achevee , on pent precipiter par Talcool le ferment qu'oh separe du sucre et qu'on obtient alors isole. Mais quand on ajoute de 1'alcool a la dissolution avant que le sucre appa- raisse, on precipitp la matiere glycogene avec son ferment. Quand on fait bouillir la matiere ainsi obtenue avec de la potasse causlique, il y a un degagement evident d'ammoniaque qui provient de !a destruction de la matiere azote"e du ferment me"lange a la matiere glycogene. /1 72 PROPRIETIES changenlent definitif en sucre a ete effectue, la dissolu- tion acquiertles proprietes de reduire les sels de.cuivre dissous dans la potasse, de fermenter sous 1'influence de la levure de biere en donnant de 1'alcool et de 1'acide arbonique. J'ajouterai quel'action des ferments diasta- siques opere cette transformation en sucre en quelques minutes quand on a le soin de maintenir les liquides a une temperature voisine de celle du corps, entre 35 et 65 degres. La dissolution aqueuse de la matiere glyco- gene hepatique ne se change pas spontanement en sucre ; elle ne s'altere que tres difficilement quand elle est abandonnee a elle-meme et resiste en partie a la putre- faction du tissu du foie cuit. La torrefaction , 1'action limitee des ferments et des acides mineraux changent la matiere glycogene en un corps qui offre des caracteres tout a fait semblables a ceux de la dextrine. Cette substance est insoluble dans 1'alcool concentre, se dissout dans 1'eau en donnant une dissolution trans- parente ; elle ne se colore plus sensiblement par I'iode, ne reduit pas les sels de cuivre dissous dans la potasse, ne fermente pas avec la levure de biere et clevie a droite le plan de polarisation. Sur une dissolution aqueuse tres peu chargee de cette matiere examinee a 1'appareil de M. Biot, au Col- lege de France, dans un tube de 320 millimetres, on a constate un pouvoir rotatoire tres bien caracterise vers la droite, avec des developpements de teintes tres marques autour du minimum d'intensite de •!' image extraordinaire. DE LA MATIERE GLYCOGENE. /l?3 D'apres toutes les experiences qui ont ete prece"dem- inent rapportees, il reste done parfaitement etabli que le foie des chiens nourris exclusivement avec de la viande possede la propriete speciale, et exclusive a tout autre organe du corps, de creer une matiere glycogene tout a fait analogue a 1'amidon vegetal et pouvant comme lui se changer ulte'rieurement en sucre, en passant par un etat intermediaire a celui de la dextrine. Sans aucun doute, Tetude de la matiere glycogeue du foie ne devra pas se borner la. II faudra connaitre exactement sa composition ele"mentaire et sa constitu- tion ; savoir si cette matiere se change totalement en sucre et si, dans cette transformation, il n'y a pas d'au- tres produits qui prennent naissance, et soumettre en un mot a une etude plus approfondie le parallelisme si apparent qu'offre la transformation en sucre de cette matiere glycogene du foie avec la transformation en sucre de 1'amidon vegetal. Lessoins de cette etude ap- partiennent aux chimistes. II me suffit, quant a present, d'avoir prouve r existence de cette substance speciale qui precede toujours 1'apparitiou du sucre dans le foie, pour avoir etabli un fait qui est susceptible d'eclairer puis- samment le mecanisme physiologique de la formation du sucre dans les animaux, et de fournir en meme temps des conclusions qui interessent au plus haut degre la physiologic generate. Relativement a la formation physiologique du sucre chezles animaux, elle doit etre necessairement envisa- gee, ainsi que je le disais, non comme un phenomene de dedoublementchimique direct des elements sanguinsau MtfCANlSME CU1M1QUE moment du passage du sang dansle foie, maiscomme une fonction constitute par la succession et 1'enchaine- ment de deux actes essentiellement distincts. Le premier acte entierement vital, ainsi appele parce que son accomplissement n'a pas lieu en dehors de 1'in- fluence de la vie, consiste dans la creation de lamatiere glycogene dans le tissu hepatique vivant. Le second acte, entierement chimique et pouvant s'accomplir en dehors del'influence vitale, consiste dans la transformation de la matiere glycogene en sucre a 1'aide d'un ferment. Pour que le sucre apparaisse dans le foie , il faut done la reunion de ces deux ordres de conditions. II faut que la matiere glycogene puisse etre cre'ee par 1'activite vitale de 1'organe ; il faut ensuite que cette matiere soit amende au contact du ferment qui doit la transformer en sucre. La matiere glycogene se forme, comme tous les produits de creation organique, par suite des phejio- menes de circulation lente qui accompagnent les actes de nutrition. Quanta decider si, parmi les nombreux vaisseaux sanguins dont est pourvu le foie, il en est qui sont plus specialement charges de cette circulation nutritive, tandis que d'autres seraient plus specialement en rapport avec les phenomenes de transformation chi- mique de lamatiere glycogene, c'est une question phy- siologique que nous n'avons pas a aborder ici pour le moment. II nous suffira d'indiquerd'une maniere gene- rale comment le contact entre la matiere glycogene et son ferment peut s'operer chez 1'animal vivant. I)K LA FORMATION J)U SUCRE. J'avais d'abord pense que le ferment etait special an foie, com me la matiere glycogene elle-meme ; j'etais meme parvenu a Fobtenir a Felat d'isolement. Mais, voyantensuite quele liqnide possede la propriete de trans- former cette matiere glycogene en sucre avec une tres graudeenergie, ildevint impossible desonger a une loca- lisation du ferment, celui qu'on peut extraire du foie ve- nant tres probablement du sang lui-meme. De sorte que si en dehors de Forganisme nous avons plusieurs ferments pour operer la transformation de la matiere glycogene en sucre, chez r animal vivant il suffit d'en admettre un represent^ par le sang, qui du reste possede aussi la pro- priete de changer rapidement Famidon vegetal hydrate en dextrine et en sucre. Sans entrer dans le mecanisme intime de ce contact et dans I' explication des causes physiologiques qui en font varierl'intensite. ce qui nous entrainerait dans des descriptions d'anatomie microsco- pique et de phenomenes de circulation capillaire qui trou- verontailleursleurdeveloppement, nous nousbornerons a dire que Fobservation des phenomenes physiologiques apprend que dans le foie, parallelementacette circulation lente et nutritive, il faut encore en considerer une autre, intermittente, variable et dont la suractivite coincide avec 1'apparition d'une plus grande quantite de sucre dans le tissu del'organe. Chez les animaux en digestion, la circulation dans laveine porte est surexcitee, et alors la transformation de la substance glycogene est beaucoup plus active, quoique la formation de cette matiere ne paraisse pas correspondre a ce moment-la. Cette suractivite circula- /I.76 MECAN1SME PHYSlOLOGlQUli toire peut aussi etre reveillee en dehors de la digestion ; et alors le m6me phenomene de transformation de la matiere et de 1'apparition du sucre a egalement lieu. Chez les animaux hibernants ou engourdis, comme les grenouilles par exemple, le ralentisseraent de la circula- tion, qui est lie al'abaissement de la temperature, amene une diminution et quelquefois une disparition a peu pres complete du sucre dans le foie. Mais la matiere glyco- gene y est toujours, ainsi qu'on le prouve en 1'extrayant. II suffit alors de mettre les grenouilles engourdies a la chaleur pour activer leur circulation et voir hient6t le sucre apparaitre dans leur foie. En placant de nouveau les animaux dans une basse temperature, on voit le su- cre diminuer ou disparaitre pour se montrer de nou- veau quand on remet les grenouilles dans un milieu ou la temperature est plus elevee. J'ajoute qu'on peut re- produire plusieurs foisces singulieres alternatives d'ap- parition du sucre, sans que Tanimal prenne aucun ali- ment et en agissant seulement sur les phenomenes de la circulation par rintermediaire de la temperature. Chez les animaux a sang chaud, on peut agir aussi, au moyen du systeme nerveux, sur les phenomenes de la circulation abdominale etseconclairement ensuite sur la transformation de la matiere glycogene dans le foie. J'ai montre que quand on coupe ou qu'on blesse la moelle epiniere dans la region du cou, au-dessousde 1'ori- gine des nerfs phreniques , on diminue considerable- ment Factivite de la circulation hepatiqiie, au point qu'apr6s quatre ou cinq heures, il n'y a plus de traces de sucre dans le foie del'animal, clout le tissu reste cepen- l)i: L.\ FORMATION DL SUCRE. 477 dant encore charge do matiere glycogene. II est a remar- quer qu'a la suite de cette operation la temperature cles organes abdominaux s'abaisse beaucoup, en m6me temps qu'il y a d'autres troubles sur lesquels je n'ai pas a m'arre'terici. J'ai prouve egalement qu'en blessant Faxe cerebro- spinal dans la region du quatrieme ventricule, on pro- duit des phenomenes exactement opposes; la circulation abdominale est tres acceleree et consequemmentlere- nouvellement du contact de la matiere glycogene avec son ferment considerablement etendu. Aussi la trans- formation de la matiere glycogene devient-elle si active et la quantite du sucre.emportee par le sang si conside- rable, que 1' animal, comme on le sait, devient diabe- tique dans ce cas, c'est-a-dire que 1'exces de sucre verse dans le sang par le foie surexcite passe dans ses urines. Dans les deux cas precites, le systeme nerveux agit evidemment sur la manifestation purement chimique d'un phenomene physiologique. Mais quand on analyse son mode d'action, on recommit que ses efFets n'ont etc que mecaniques et out porte primitivement sur les orga- nes mote.urs de la circulation capillaire, qui ont eu pour effet tantot d'amoindrir ou d'empecher, tantot d'^ten- dre ou d'augmenter le contact de deux substances ca- pables par leurs proprietes de reagir 1'une surl'autre; elles donnent ainsi naissance a un phenomene chimi- que que le systeme nerveux regie indirectement, inais sur lequel il n'a pas d'action directe et primitive. Cette vue n'est pas specialepour le foie, et je prouverai plus 478 ANALOGIE tard que les influences chimiques que Ton recommit au systeme nerveux en general sont le plus ordinairement de cet ordre purement mecanique. Quant aux conclusions que nous pouvons actuelle- ment deduire, au point de vue de la physiologic gene- rale, du mecanisme que nous avons indique pour la for- mation du sucre dans le foie, il est impossible de ne pas etre frappe de la similitude qui existe sous ce rapport entre la tbnction glycogenique du foie et la production du sucre dans certains casde Torganisme vegetal. Dans une graine, par exemple, qui produit du sucre pen- dant la germination, nous avons aconsiderer egalement deux series de phenomenes bien distincts : Fun primitif, entierement vital , est constitue" par la formation de 1'amidonsous Tintluence de la vie du vegetal ; 1'autre consecutif, entierement chimique, pouvant se passer en dehors de I'influence vitale du vegetal, est la transfor- mation de I'amidon en dextrine et en sucre par Faction de la diastase. Lorsqu'un foie separe de 1'animal vivant continue encore un certain temps a produire du sucre, il est de toute evidence que le phenomene vital de crea- tion ou de secretion de la matiere glycogene a cesse ; mais le phenomene chimique continue a se produire si les conditions d'humidite et la chaleur necessairea son accomplissement se trouventrealisees. De m^me, dans la graine separee de la plante, le phenomene vital de la secretion de 1'amidon a cesse avec la vie vegetale ; mais, sous 1'influeuce des conditions physico-chimiques favo- rables, son changement en dextrine et sucre, a 1'aide de la diastase, peut s'operer. Enfin il est facile de voir, par ENTRE LA GLYCOGENE ANIMALE ET VtiGETALE. ces observations paralleles, que la formation du sucre dans le foie des animaux passe par trois series de trans- formations successives tout a fait analogues a 1'appari- tion de 1'amidon, de la dextrine et du sucre dans la graine des ve'ge'taux. En resum^, d'apres tous les faits que nous venons de rappeler, nous pouvons conclure que la question de lapro- duction du sucre dans les animaux a realise un progres important, par suite de 1'isolement de la matiere glyco- gene qui preexiste constamment au sucre dans le tissu du foie. Mais il reste encore a determiner la forme organi- que de cette matiere glycogene, ainsi que les conditions anatomiques et physiologiques exactes de sa formation dans ses rapports avec les phenomenes de developpe- ment et les divers etats physiologiques du foie. Des experiences que j'ai dejaentreprises a ce sujet me per- mettent d'esperer qu'il sera possible d'aller plus avant dans la question glycogenique et delocaliser la formation de la matiere glycogene dans des elements speciaux de 1'organe hepatique. Chez les animaux arrives au terme de leur d6veloppe- ment. lesysteme nerveux de la vie organique n'inter- vient done que pour regularise!', par une influence toute mecanique, des actes chimiques qui en sont indepen- dants dans leur essence ; ces actes chimiques de 1'orga- nisme adultesont en effet analogues aux phenomenes de developpement qui, a une cpoque anterieure, s'accom- plissaient de la m^me facon, alors que le systeme ner- veux n'existait pas encore. INFLUENCE DES NKRFS SUR LES ACTIONS CHIMIQUES. Quant aux experiences comparatives dont 1'apprecia- tion nous a conduit a cette digression, on voit qu'elles etablissent bien nettement, qu'outre son r61e d'organe conducteur de 1'agent nerveux , la moelle agit encore comme centre , soil pour deprimer, soit pour exalter certaines manifestations organiques. VINGT-CINQUIEME LECON. 20 MARS 1857. SO.MMA1RE : Anlopsie cranimaux operes dans i:ne lecon pre"cedente.— Inlliionce de la moelle sur ccrtaines circulations locales. — Section (In lilet cervical du grand sympalhique. — Lesion des ptkloncules ce"rebelleux. - .Mouvements de rotation. - - Mouvements e"pilepti- formes consecutifs a certaincs lesions de la moelle dpiniere. — Mouvemenls de progression, en avant ou en arriere, determines par des lesions des centres nerveux. — Ablation des hemispheres ce"re"braux. — Experiences. MESSIEURS , Les experiences dont vous avez ete temoins dans les lecons precedentes, montrent que dans les pheno- menes relatifs a Faction de la moelle sur les manifesta- tions organiques, il y a differentes parties de la moelle agissant specialement sur certains points des organes splanchniques. A 1'appui de cette proposition, nous vous avons cite deux experiences principales. Dans 1'nne, la moelle avail ete coupee au-dessous des nerfs phreniques; dans 1'autre, une piqure avait ete faite au niveau du qua- trieme ventricule , delabrement moins etendu , afin de ne pas faire succomber immediatement 1'animal. II semble qu'apres cette solution de continuite de la totalite ou d'une partie restreinte de la moelle, 1'agent nerveux s'accumule dans la partie situe'e au-dessous, et que tons les organes correspondants en tirent une activite plus considerable. B., SYST. NERV. — u 3j INFLUENCE DES LESIONS DE LA MOELLE Avant de chercher a expliquer comment ces pheno- menes peuvent se produire avec cles caracteres aussi differents, je dois vous indiquer quelle aete la suite des experiences commencees ici dans la derniere seance, et terminees au laboratoire par I'autopsie des deuxlapins, autopsie qui a confirme tous les resultats qui vous avaient e"te an nonces. Chez le lapin qui, ayant eu la moelle coupee au- dessus du plexus brachial , et qui nous avait offert des mouvements peristaltiques semblables a ceux qui se pro- duisent chez I'animal apres la mort, nous avions port£ votre attention vers les modifications fonctionnelles du foie qui, au bout de trois ouquatre heures, ne devait plus couteiiir de sucre. Chez 1'autre lapin, les phenomenes etaient tout diffe- rents; on n'avait pas vu de mouvements peristaltiques mais il y avait une telle augmentation de sucre que I'animal etait devenu diabetique. Or, au bout de trois heures, quand ces animaux furent sacrifies, on trouva que le foie du lapin qui avait eu la moelle coupee au-dessus de la region dorsale etait ex- sangue et jaunatre. II y avait stase sanguine dans les vaisseaux abdominaux. Le sang de la veine porte ainsi que celui des organes splanchniques etait rouge comme celui des veines renales. La temperature prise dans le rectum s'etait abaiss^e de 38 degres, temperature normale, a 23 degres. Nous avons alors examine le foie dont la decoction ne renfermait pas de sucre ; mais nous y avons cherche et trouve en grande quantite la matiere qui se transforme SUR LA CIRCULATION ABDOM1NALE. &S3 en sucre , matiere que vous voyez isolee dans cette eprouvette. Dans le foie du lapin diabetique. nous avons trouve" du sucre en grande quantite. Nous y avons rencontre aussi, inais en quantite bien moindre, la matiere dont la transformation donne le sucre. Le foie du premier lapin etait exsangue. Chez lui, la circulation abdominale etait extraordinairement ra- lentie puisque la temperature prise dans le rectum a pu s'abaisser a 23 degres. Get affaiblissement de la circulation avait probablement rendu le contact du sang avec la ma- tiere glycogene insuffisant pour que cette derniere flit transformed en sucre. La matiere transformable existait, car vous voyez dans cette eprouvette que nous en avons obtenu une grande quantite. La premiere condition du phenomene, la production vitale, se trouvait done encore remplie. Si la seconde, la transformation chimique, ne s'est pas trouvee effectuee aussi, c'est que le trouble de la circulation abdominale a enipeche ce contact de la matiere feimentescible et du ferment , apportant ainsi un obstacle physique a la manifestation de la reaction chimique entre les deux substances. Chez 1'autre lapin, les choses se sont passees tout au- trement. La circulation a ete activee : une grande quan- tite de sang traversait le foie ; le contact de la matiere glycogene avec le ferment etait frequemment renou- vele; le sucre produit par ce contact etait rapidement entraine hors du foie, dans lequel sa production s'est trouvee ainsi assez activee pour que r animal devint dia- betique. Le sang contenait ainsi un exces de sucre par h 84 ACTION LOCALE DBS NERFS suite d'une influence nerveuse agissant simplement sur les phenomenes mecaniques de la circulation. Relativement a cette action s'exercant clans le foie Iui-m6me, je vousrappellerai que nous avons signale des fibres musculaires dans les veines hepatiques et dans la portion de la veine cave qui traverse le foie. Ces fibres musculaires agissent de facon a comprimer le foie qui se vide alors comme le ferait une eponge que Ton presse. II nous resteraita expliquer les mouvements peristal- tiques qui, apres la section de la moelle entre le plexus cervical et le plexus brachial , apparaissent dans les intestins de notre premier lapin. II faut voir la encore une action sur la circulation , action qui ne se manifeste pasquand on pique la moelle plus haut. Quand on tue un animal par la section du bulbe et qu'ensuite on lui ouvre 1' abdomen, on observe des mouvements peristaltiques qui cessent des que, par la respiration artificielle , on retablit le cours du sang, et reparaissenj aussit6t qu'on cesse les insuffla- tions. Si Ton remonte a la cause deces troubles circulatoires et qu'on veuille en cHudierle mecanisme, on se trouve arrete par des difficultestresserieuses. Toulefois 1'action du systeme nerveux sur le systeme vasculaire est pure- ment motrice. S'il y a dans ces actions des manifestations locales, desdesordresdela circulation circonscrits, il faut les expliquer par Faction circonscrite des nerfs. On ne peul pas concevoir autrernent comment une parf»e de SUR LUS I'UEXOMl-NUS CIRCULATOIRES. 1'appareil circulaloire peut etre inodifiee sans que les autrcs le soient. Si au lieu d'agir sur la moelle on agit sur le grand sympathique, surle premier ganglion dorsal par excmple qui recoil de la moelle une racine motrice, on oblient exactement les memes effets. Lorsque d'un cote seulemenl on detruit le filet qui de de ce ganglion remoule vers la tete, on a, comme je 1'ai montre, une acceleration dela circulation dans toute la moitie correspondante de la tete. Nous avons done encore la un exemple de modification locale. Jusqu'ici ces phenomenes sont encore completement inexpliques dans leur nature. Nous avons coupe sur des chevaux le filet du grand sympathique et nous avons egalement note d'abord Factivite plus grande des phenomenes circulatoires, puis nous avons alors regarde quelle etait la pression avant et apres 1'operation ; cette pression dans les vaisseaux etait plus considerable apres 1'operation. L'appreciation de cette pression doit etre faite avec certaines precautions , et avec 1' instrument special hemomelre differenliel que nous avons decrit ailleurs (15e lecon, p. 282). Messieurs, de la moelle epiniere a laquelle nous nous etions arrete d'abord nous avons passe a la moelle allon- gee. Continuant maintenant amonternousverronsqu'il existe dans 1'encephale des parties sur lesquelles des experiences ont ete faites. Nous verrons qu'elles in- diquent que des r61es tres importants leur sont assignes. Nous vous avons deja signale clans le pout de Yarole, 486 BLESSURE I)U PEUONCULE CEREBELLEUX. pres de Forigine de la cinquieme paire , un point dorit la piqiire active la secretion salivaire. On a vu encore qu'il existe dans le pont de Varole et dans les prolongements qui 1'unissent au cervelet, des parties dont la lesion amene des desordres de mouve- ments constants. Magendie a observe' en 1822, quo la blessure du pe- doncule inferieur du cervelet est suivie chez 1'animal sur lequel on la pratique, de mouvements de rotation suivant 1'axe du corps, mouvements irre"sistibles et se produisant toujours dans un sens determine. L'animal tourne sur lui-meme jusqu'a ce qu'il se trouve arr6te par un obstacle ou jusqu'a ce que ses forces soient epui- sees. Dans ce dernier cas, les mouvements se reprodui- sent apres quelques instants de repos. Des mouvements combines d'une assez grande com- plication s'executent done sous 1'influence de cette pi- qure. Depuis Magendie on a etudie ces mouvements sans avoir rien ajoute d'essentiel ace qu'il avait observe. D'ail- leurs la simple observation du phenomene offrait deja quelques difficultes; les tentatives que Ton a faites pour 1'expliquer sont restees tout a fait steriles. Magendie avait vu qu'en blessant le pedoncule cere- belleux inferieur, le tournoiement se faisait du c6te correspondant au pedoncule lese. Ce fait, il ne 1'avait pas mis en avantpour justifier une theorie ; c'est en essayant de couper la cinquieme paire dans le crane, en introdui- sant 1'instrument en arriere dans la fosse occipitale qu'il avait produit les symptoines que je viens de vous rappeler et constate a 1'autopsie la lesion du pedoncule TOURNOIEMENT SUIVANT FAXE DU CORPS. cerebelleux. En rapportant le resultat de son observa- tion, il etait rest($ dans les termes d'une simple enon- ciation de faits examines sans idee preconcue. Plus tard , des experimentateurs ont repute ces experiences avec les memes resultats. D'autres ont vu que 1'animal tournait du c6te oppose a la lesion et sont partis de la pour attaquer la realite des faits rapportes par Ma- gendie : c'etait I'accuser de n'avoir pas su distinguer la droite de la gauche. Et ici, messieurs, je vons rappelle- rai une regie qui devrait tou jours etreobservee dans les discussions scientifiques : on ne doit pas venir opposer une delegation a un fait et avancer legerement qu'un observateur s'est trompe; le debat n'y gagne rien en precision, il y percl en dignite. La science n'a rien a gagner avoir poser des contradictions mais seulement a les eclaircir. II faut reconnaitre que si Ton voit autre chose que ses predecesseurs c'est que les conditions dans lesquelles on s'est place ne sont plus les memes, et 1'etude de ces conditions peut seule conduire a des appreciations utiles a la verite. II fallait done ici chercher a savoir pourquoi, dans la blessure du pedoncule inferieur du cervelet, dans certains cas 1'animal tourne a droite; pourquoi dans d'autres il tourne a gauche. En agissant ainsi on aurait vu, comme je 1'aimontre. quecela depend de la partie du pedon- cule qui a ete coupee. La portion de ce pedoncule qui se trouveen avantde 1'origine de la cinquieme paire, et celle qui se touve en arri6re de cetteorigine, donnent, lorsqu'on les blesse, des effets opposes. /j88 BLESSURE I)U PKDONCULE CEREBELLEUX. La partie posterieurc, qu'avait blessee Magendie en introduisant son instrument par Foccipital, lui donna la rotation du mfone c6te. La partie anterieure qu'on blessa lorsqu'on arriva en avaut en perforaut le temporal, donna la rotation du c6te oppose note par MM. Lalargue etLonget. J'ai essaye ici sur un lapin de savoir ce qui arriverait si Ton coupait tout lepedoncule, mais je n'ai pas reussi. L' animal n'a pas tourne, et il est, com me vous le voyez, completement paralysed Quoique les delabrements fussent considerables, 1'autopsie que nous faisons montre quela section etait incomplete; c'est done une experience a tenter de nouveau avecles precautions necessaires. M. Schiff, de Berne, a ohteiui les mernes resultats qne nous, relativement a la partie du pedoncule qu'il faut blesser pour obtenir une rotation du corps dans un sens determine. On a voulu ensuite expliquer le mecanisme par lequel se produit ce mouvement de rotation. L'explication de Lafargue ne saurait etre acceptee : il pensait qu'on pro- duit une paralysie de tout un cote du corps, hemiplegie croise'e telle <{ue F animal, tombant sur le c6te paralyse, tournerait en raison des efforts que fait le cote qui a con- serve le mouvement pour luttercontre cette chute. Cette explication n'a aucune valeur, les choses se passent tout autrement dans cette rotation rapidede Familial. Quant a Fhemiplegie invoquee, je ne Fai jamais rencontree chez les animaux, et je ne sache pas que personne Fait jamais vue. J'ai cunsulte a cet e'gard plusieurs veteri- naires eminents ; tons avaient observe frequemment ties ROTATION SUIYANT L?AXE DU CORPS. 489 paraplegics chez les animaux mais jamais une hemi- plegie reelle. Si Ton tenait absolument a se faire une idee de la nature de cephenomene, je.pense qu'on devrait se bor- ner a le considerer commc e'tant du a la rupture d'un e'quilibrephysiologique. Ce defaut d'equilibre tiendrait- ila uue diminution de la force motriced'un cote ou bien e une exageration de la force niotricedel'autrecote? — II nous semble probable qu'il y a plutot exageration, car nous avons vu des lesions de la moelle amener une aug- mentation absolue de la sensibilite qui pouvait etre net- tement constatee au moyeu des procedes indiques par M. L. Tiirck. On sait aussi que, lorsqu'on a coupe completement la moelle, la sensibilite se trouve augmentee; alorsen effet la strychnine, qui porte son action specialement sur la sensibilite, agit plus rapidement sur les parties hyper- esthesiees que sur les autres. Enfiu, un autre fait tres interessant a ete ajoute par M. Brown-Sequard a cette serie de resultats que nous de- vons pour le moment enregistrer soigneusement , en attendant le jour ou, ils seront assez nombreux pour qu'on puisseleur assignor une signification physiologique. Lorsque, sur un cochou dlnde, on coupe dans la re- gion dorsale une moitie laterale de la moelle, 1'animal une foisgueri, la cicatrisation etant terminee, on produit, en pincant certaines parties de la face, et du cou, des mouvements convulsifs, epileptiformes. L'irritation du raineau sous-orbitaire de la cinquieme paire les produit leplussurement. 400 EFFETS DE LA BLESSURE C'est la un fait que, dans 1'etat actuel de nos connais- sances, on doit encore renoncer a expliquer d'une ma- nieresatisfaisante. Jecroisneanmoins qu'il faut toujours voir dans ces phenomenes des exagerations de 1'activite nerveuse. Nous possedons encore quelques autres faits relatifs anx suites de lablessure de differentes parties de Tence- phale. A la suite de la lesion des pedonculescerebraux, on observe des mouvements de manege, mouvements de course circulaire dirigee tantot de droite a gauche, tan- t6t de gauche a droite, selon que le pedoncule droit ou le gauche a ete blesse. Quelquefois ce mouvement se reduit a une simple rotation du train anterieur mobile autour du train posterieur fixe. Dans les nombreuses experiences qu'ils ontfaites au- trefois sur les propriety's des diverses portions de 1'en- cephale, Magendie et M. Flourens (1) ont encore ob- serve des mouvements de progression soit en avant soit en arriere. Le recul serait determine par la blessure du pe"don- cule posterieur du cervelet : il est toutefois difficile a produire. D'apres Magendie, la blessure des corps stries de"ter- minerait des mouvements de progression en avant. Nous avons vu arriver ces mouvements de progres- sions irresistibles en avant, quand on asphyxie un ani- mal, en lui liant la trachee , par exemple , et en lui laissant la liberte des mouvements. (1) Recherches experimentales sur les proprietes et les fonctions du systems nerveux. DE DIVERSES PARTIES DE l^ENCEPHALE. 491 Des cas pathologiques ont ete signales, clans lesquels ces mouvements, observes plus haul , se sont retrouves. M. Serres a le premier remarque des malades atteints de mouvements de rotation suivant 1'axe de leur corps; ces malades, dans leur lit, tournaient de facon a s'en- rouler de leurs draps. Nous avons vu quelque chose d'analogue chez des animauxqui survivaient alapiqure du pedoncule cere'belleux ; ils se roulaient dans la paille de maniere a paraitre avoir ete empaquete's. On a egalement note" chez des malades les mouve- ments de recul ou de propulsion en avant. Magendie a cite'le casd'un de ses malades, quimalgre lui marchait en avant ; quand il voulait s'arr6ter, il etait oblige de fixer devant lui sa canne terminee par une pointe de fer. Pour se retourner, il etait done oblige* de s'arr^ter et de changer ainsi sa direction, apres quoi il marchait de nouveau devant lui. On peut vivre quelquefois longtemps avec des lesions de ce genre, et je ne sache pas qu'on ait jamais ete a meme de faire d'autopsies dans ces cas. Mais il est tres probable qu'elles montreraient des lesions anatomiques qui confirmeraient les faits physiologiques dont nous avons parle*. Messieurs, nous avons du nous borner a la simple enumeration des faits dont je vous ai dernierement en- tretenus. car leur signification nous echappe. Peut-etre, dans la deuxieme partie du cours, aurons-nous quelque occasion d'y revenir et de vous presenter a ce sujet des vues nouvelles et plus completes. Pour vous montrer de quelle nature sont les mouve- h 02 ABLATION meats de rotation que je vous ai signales aujourd'hui, et afin que vous voyez -combien il est impossible de les expliquer par une heiniplegie simple , nous allons essayer de piquer sur ce lapin le pedoncule cerebelleux. L'operation est assez difficile parce qu'on n'a plus, comme pour la section de la cinquieme paire, la ressource de diriger rinstrumentsur une surface osseuse. Les points de repere manquent ici. Nous voici entre 1'occipital et 1'atlas, et nous poussons rinstrunient dans la direction que nous presumons 6tre celle qui convient. L'animal, apres cette blessure, tombe du cote lese, mais il ne tourne pas encore tres viyement ; nous allons reintro- duire 1'instrument et faire une blessure plus elevee pour ainener une rotation plus complete. L'experience est nette maintenant : 1'auimal tourne bien, mais quand il est affaibli et fatigut^, il ne recom- mence a tourner qu'autant qu'on 1'excite en le pincant. Nous devons citer encore ici une deviation des yeux qui sont diriges dans le sens ou se fait la rotation. L'operation que nous venous de \7ous montrer est generalement plus facile a produire chez les jeunes la- pins. Avant de terminer ces considerations sur les pro- prietes des differentes parties des centres nerveux, nous devons vous indiquer que les experimentateurs qui en ont etudie les proprieties ne se sont pas bornes a des pi- qures ou a des sohitionsde continuite de peu d'etendue. On a fait aussi des ablations, et vu que certaines parties peuvent manquer sans que la vie soit immediatement detruite, tandis qu'il ri'en est pas de meme pour d'autres. DES HEMISPHERES CEREBRAUX. La moelle allongoe ne pent etre enlevee chez un animal e'leve sans quo 1'animal perisse aussitot : c'est 1'organele plus important du centre nerveux, celui dont le rdle est le plus necessaire a la vie. Quant a la moelle et au cerveau, on a pu en enlever des portions assez considerables sans produire uue mort rapide. On a re- connu, par exemple, en enlevant les hemispheres cere- braux, que ces organes ne sont pas necessaires a la vie organique, mais qu'ils sont indispensables aux manifes- tations de la vie animale. M. Flourens, qui a fait surtout ses experiences sur des oiseaux, a pu, sans les tuer, enlever les lobes cere- braux. Chez ces animaux, le sang est done d'une grande force plastique, il se coagule facilement, cequiempeche Fhemorrhagie de les tuer. Les jeunes mammiferes sont encore dans ce cas. Ainsi, voici de petits chats qu'ou a ap- portes dans mon laboratoire, ils sont malades et n'ont pas tete depuis longtemps; neanmoins nous aliens vous montrer qu'ils peuvent survivre a 1'ablation du cerveau. Une incision mediane de la peau nous amene sur la calotte cranienne ([lie nous detachons avec des ciseaux; puis, avec le dos d'un bistouri, nous detachons le cerveau, respectant la moelle allongee et aussi le cervelet , a cause del'intimite de ses rapports avec le pontde Varole. Ce petit chat ne meurt pas immediatement, il res- pire librement. ses cris se font entendre, il pourrait teter. Toutefois ses mouvements ne sont pas volontaires et doivent etre attribues a une reaction inconsciente pro- voquee par diverses excitations exterieures, ou par la secousse de 1'operation. ABLATION DES HEMISPHERES CEREBRAUX. M. Flourensapu voir sur des poulesqui ontsurvecu plu- sieurs mois a 1'ablation des hemispheres ce>ebraux que ces animaux completeinentimmobiles, priveesdelavue, trituraient neanmoins, avalaient et digeraientles graines qu'on leur mettait dans le bee; jetees en 1'air elles vo- laient, mais leurs mouvements avaient perdu toutespon- taneit^. II semblait qu'on leur avail simplement euleve la volonte. Si notre petit chat avait sa mere, il pourrait teter et vivre encore quelques jours, assez pour perir, non de 1'operation immediate, mais de ses suites. VINGT-SIXIEME LE^ON. 25 MARS 1857. SOMMAIRE : Du liquide cephalo-rachidien. -- Son sie"ge. — Ses pro- prie"te"s physiques et chimiques. — Phe"nomenes conse*cutifs a son abla- tion. — Titubation due a la section des muscles de la nuqtie. — Kile n'a pas lieu chez les oiseaux. — Hole protecteur du liquide ce"phalo- rachidien. — Son role regulaleur de la circulation dans les centres ner- veux. — Facilite' avec laquelle il se reproduit. MESSIEURS , Une question importante nousreste a examiner : celle relative au liquide cephalo-rachidien qui eutoure les centres nerveux dans les trois premieres classes des ver- tebres, et qui est remplace chez les poissons par une matiere d'aspect graisseux plus consistante. L'histoire anatomique et physiologique du liquide cephalo-rachidien se trouve tout entiere dans les tra- vaux de Magendie. Contrairement a 1'idee de Bichat qui le placait entre les deux feuillets de I'arachnoide, le liquide cephalo-rachidien est place au-dessous du feuillet visceral de cette sereuse. J'ai autrefois, etant interne de Magendie , eu souvent a le montrer sur rhomme; voici comment je procedais : Le cadavre etant incline, la tete haute, le bassin plus bas, j'ouvrais le canal vertebral dans sapartieinferieure, et j'enlevaisla calotte osseuse du crane sans interesser la dure-mere; cette derniere operation permettait a 1'air exterieur d'exercer sa pression. Le liquide s'accumulait 496 LIQUIDE CEPHALO-RACHIDIEN a la partie mfe"rieure clu canal rachidien ou on le voyait tres facilement. Alors, soulevant la dure-mere avec des pinces, j'incisais avec des ciseaux la lame soulevee, et avec elle le feuillet parietal de 1'arachnoi'de dont elle est tapissee. On trouve alors le liquide dans la cavite de I'arachnoi'de; aucun ecoulement de liquide n'a lieu : ce n!est qu'en incisant le feuillet profond que Ton donne issue au liquide cephalo-rachidien accumulederrierelui. Depuis longtemps deja, tout le monde reconnait que le liquide cephalo-rachidien est exterieur a 1'arachnoi'de ; il n'y a plus aujourd'hui de doute a eel egard. A quoi sert ce liquide? Magendie avait pense d'abord que la regularite des mouvements etait liee a sa presence. II Tavait enlevepar une solution de continuity de la membrane occipito- atloi'dienne, et avait vu son ablation etre suivie d'une titubation rappelant assez bien celle de Fivresse. Magendie racontait dans ses cours que plus tard il lui arriva, faisant Fexperience sur des cochous d'Inde, d'etre derange au moment ou, apres avoir coupe trans- versalement les muscles de la nuque, il se disposait a pouctionner la membrane occipito-atloi'dienne mise a nu. Lorsque, quelque temps apres, il revenait pour terminer son operation, il etait bien surpris en trou- vant chez rauimal cette titubation qu'il avait d'abord attribute a la soustraction du liquide cephalo-rachidien. II recon nut aussitot son erreur. Plus tard, M. Longet repeta ces experiences , et vit egalement que la section des muscles seuls de la nuque amene la titubation. Chez les oiseaux il n'y a pas de titubation produite Kl'TKTS !>!•; SON ABLATION. !\{M par la section des muscles de la nuque. mais ces animaux no peuvent plus voler. (Test ce qui semblerait re'sulter do 1' experience suivauto. J'ai coupe les muscles de la nuque sur un pinsoii. Apres 1'operaliou, 1' animal marchait Ires bien, sautait sans ti- tuber, maisil no pouvait plus voler. Lorsqu'on le mettait sur la table et qu'il arrivait an bord, il tombait a terre conimo une masse inerte sans chercher a voler. Onaouvert ensuitela membrane occipito-atloklionno et Panimal est mort aussitot; peul-elre avait-on louche le bulbe rachidien? Je n'ai pas eu 1'occasion de repeter cette experience chez d'aulres oiseaux ; il serait inleressanl cependanl de voir si chez tous les oiseaux on detruirait ainsi la faculte du vol par la section des muscles de la nuque. J'ai fait quelques experiences sur la souslraction du liquide ce])halo-rachidicn ; olles m'ont conduit a recou- naitre qu'ii est possible d'enlever ce liquide sans couper les muscles de la nuque, de telle facon que 1'animal ne soit pris d'aucun accident immediatement apparent. Pour enlever le liquide, je fais 1'incision en arriore sur la ligne modiane , dans le rapho qui sopare les masses musculaires de la nuque ; ensuite je perce la membrane occipito-atloi'dienne. L'animal n'eprouve aucun effet bien sensible. Le liquide s'ecoule cependanl, car nous verrons plus lard qu'il est soumis dans le canal rachidien a une pression qui n'est pas aussi conside- rable que celle du sang. Alors done quel'airpeutentrer librement par la plaie, 1'ecoulement du liquide cephalo- rachidien ne produit pas immodiatement d'accidenls; B., SYST. NtRV. — i. 32 /l(J8 LIQU1DE CtiPIULO-RACHIDIliN. mais cette soustraction pent avoir des suites tres graves lorsqu'on empeche Faeces tie Pair en meme temps qu'on aspire le liquidc. (Test ce qui se produit, lorsqu'au lieu d'inciser la membrane on la ponctionne obliquement avec mi trocart fin, et qu'on retire le liquide par 1'aspi- ration d'uue seringue adaptee au trocart. L'aspiration du liquide n'est d'abord suivie d'aucun pheiiomene marque, mais bientot, quand la quantitr enlevee devient un pen considerable, Familial s'afiaiblit d'abord, puis il tombe quelquelbis comme frappe d'une paralysie generate. A 1'autopsie, j'ai trouve que dans la moelle de ces ani- maux (qui, bien entendu, iravait pas ete blessee par le trocart) etaient dissemines une infinite de petits points apoplectiques. La moelle etait comme tumefiee. Son canal central, assez difficile a apercevoir pour qu'on en ait nie 1'existence a une certaine epoque, pent parlbis dans ces cas recevoir dans sa cavite un stvlet ordinaire. a) Dans un cas oil, en faisant cette experience, nous avions blesse les sinus veineux de la moelle et produit une petite he'morrhagie, ce canal central de la moelle etait rempli par un caillot qui en occupait toute la lon- gueur etlerendait tres visible par cette sorted'injection, Les lesions que nous venons de signaler, ne peuvent s'expliquerparle defaut depression sur les centres ner- veux resultant de I'ablation du liquide ce'phalo-rachidien . Nous verrons en effet, comment, par un mouvement de flux et de reflux , ce liquide regularise la circulation dans la moelle en exercant sur les vaisseaux une pression qui fait equilibre a celle du sang ([u'ils venfennent. Cette conlre-pression venant a manquer, les hemorrhagies so KI-'FETS Dh SV SOUSTRACTJO.V /|(.M) produisent dans hi substance nerveuse comme so pro- duisent los ecchymoses dans uu membre qu'on placerail dans lc vide, coiinne so produisent encore dans un air raretie, les he'morrhagies pulmonaires on nasales. Magendie a le premier precise la situation du li- quide cephalo-rachidien et attire I'attention sur sespro- prietes; il a niontre quo ce tluide ditfere essentielleinent do la serosite. Malgn; cola vous verrex tous les jours noter, dans des relations d'antopsie, qu on a trouvo do la serosite dans les ventricules, et attriluier a cetto sero- site une origine pathologique. ())• ce liquide qu'on trouve dans les ventricules ivest pas de la serosite : c'est du liquide cephalo-rachidien . produit physiolo- gi([ue «{ue Ton pi-end a toi't pour un produit d'origino pathologique. Place dans la cavite sous-araclinoi'dienne, separe des centres nerveux sen lenient par lour membrane vascu- laire. la pie-mere, le liipiide cephalo-rachidien reni})lit tout le vide qui existe entre la moelle et le canal verte- bral. 11 ne taut done pas s'en rapporter a cortaines planches d'anatomie, dont beaucoup, memo assex. r«'- centes, montrent le canal vertebral rempli par la moelle. Un espaee assez considerable la separe des paro is du canal, espaee d'autanl plus grand quo Ton consider une partie de la colonne vertebrale jouissant de mouve- ments plus etendus. Au niveaudu quatrieme Ventricule, le li(juide cephalo- rachidien penetre d til>ord dans ce ventricule et sc I'epand successivement dans les autres. L'aqueduc de Sylvius lui donne passage du quatrieme dans le troi- ; i! passe de la, par les trous de Moiiro . dans 300 UOUim-; CEPHALO-RACHIDIEN. les ventricules lateraux, d'ou il s'etend j usque dans les veutricules olfactifs cliez les animaux qui en out, chez les chiens, par exemple. On peut avoir une preuve de la realite des communications que je viens de vous indi- quer en appliquant une couronne de trepan au niveau (lu ventricule olt'actif d'un chien, et en versant dans cc ventricule un peu d'un liquide colon*, dont la teinte s'etendra de proche en proche au liquide, situe d'abord dans les ventricules, puis autour de la moelle. Souvent j'ai vu que, dans ce cas, le liquide injecte par les ventricules olfactifs passait dans le troisieme et dans le quatrieme ventricule et dans 1'espace sousarachnoi'dien, sans penetrer dans les ventricules lateraux. Magendie avail compare les centres uerveux proteges par le liquide qui les baigne a 1'exterieur et a 1'iute- rieur, au foetus dans I'amnios, comparaison qui donne une idee exacte du role protecteur du liquide cephalo- rachidien, et montre de quelle nature sont ses rapports anatomiques avec les centres. Mais la ne se bornent pas ses usages : constamment en mouvement, il agite eon- tinuellement les organes nerveux centraux. Le liquide cephalo-rachidien est, en effet, soumis u des oscillations qui repondent aux mouvements respiratoires, et dont nous allons etablir le rapport avec ces mouvements. Le centre nerveux est, nous le savons, entoure par un reseau de vaisseaux arteriels et veineux qui se ra- mifient dans la pie-mere; outre cela, il possede un sys- teme vasculaire veineux particulier, le systeme des sinus. Ce sont eux qui , se remplissant et se vidant alternativement , produisent les mouvements du liquide cephalo-rachidieih SES MOUVEMENTS. 501 Au moment do I'inspiration, il y a appel de sang dans les poumons, les veines se vident; uiais bientot, pen- dant que se prolonge ['expiration, le sang est chasse du poumon et la circulation s'y ralentit, alors le sang stagne et s'accumule dans les veines qu'il distend. Toutefois, il no faudrait pas croire que 1' aspira- tion du poumon amene une vacuite relative de tout le systeme veineux; elle ne fait sentir ses effets que dans les vaisseaux veineux les plus rapproches du thorax. M. Poiseuille a fait, pour reconnaitre jusqu'ou cette aspiration pouvait faire sentir ses effets, des ex- periences qui , d'accord avec les observations d'en- tree accidentelle d'air dans les veines, montrent que cette action aspirante ne s'etend pas loin clans les membres. Mais cet appel du sang veineux dans le poumon, par les mouvements d'inspiration, n'est pas la seule cause de sa progression dans les veines. A une distance plus grancle du poumon, les petites veines sont videes dans le sens de la circulation par la compression queleur font pprouver les mouvements des parties dans lesquelles elles sont situees. Si la circulation veineuse generate est aidee par ces deux ordres de causes, il n'en est plus de me'me pour la circulation de la moelle. Ici les mouvements muscu- laires sont nuls pour comprimer les tissus. Des deux causes de progression du sang que nous venons d'exa- miner, une seule agit done : 1'aspiration du poumon. Or, la disposition des sinus, systeme de veines ton jours beantes, permet a cette aspiration d'agir fort loin , et de supple" erainsi an defaut des mouvements. C'estdonc la 502 LIQUIDE CEPHALO-RACHIDIEN. respiration qui regie ici la circulation veiueuse des centres nerveux, Lorsqiron a etudie I'irithience des mouvements respiratoires surla circulation veineuse, on n'a passonge a etudier quelle modification elle eprouvait par la dis- position des sinus. Ces modifications, quo j'ai signalees, sont 1' extension a tout le systemede Inspiration pulmo- naire, extension necessaire en raisou de 1'insuffisance des antres agents de propulsion du sang dans le systeme veineux. Le gonflement des sinus vertebraux pendant I'expira- tion chasse en haut, autour des hemispheres et dans les ventricules, le li([uide rephalo-rachidien. Leur vacuite au moment de I'inspiration lui permet de redescendre. Le mouvement de has en haut correspond done a 1'ex- piration , celui de haut en has. a I'inspiration. Dans les plaies de tele, il y a souvent issue du liquide rephalo-rachidien. M. Laugier, qui en a signale pln- sieurs observations, a vu qu'il sYrhappait en suivant les mouvements de 1 expiration. On coinprend puree role du liquide cephalo-rachi- dien, destine a comhler les vides que laisse le sang dans ses oscillations, comment, dans une expiration prolon- gee, 1'accumulation du sang dans le systeme des sinus pent, augmentant la pression du liimide cephalo-rachi- dien, determiner sur renc<'phale des phenomenes m6nie de compression , ([ui ne sont pas toujours sans inconve- nients. Lorsque la colonne vertehrale perd ses mouvements dans les especes oil elle esl un axe rigide, chez la plupart des poissons, 1' intervention protectrice du liquide ce- phalo-rachidien est moins necessaire; aussi disparait-il SKS MOUVEMENTS. 503 plus on moins oompl&ement pour etre remplaoe par uno nmtiei'e particuliere plus consistante. Les experiences physiologiques et les cas patholo- g'iques ofl'rent encore a notre observation un fait cu- rieux, rclatif it la facilite avec laquelle ce liquido se reprocluit. A la suite des fractures du rocher, il pent y avoir un ecoulement considerable du liquide cephalo-rachidien. J'ai vu a l"H6tel-Dieu un malade en perdre plusieurs litres en vingt-quatre heures. II etait impossible cFadmettre que cet ecoulement fut sereux,qu'il representatle serum provenant d'une hemorrhagie. Les caracteres chimi- ques du liquide ecoule le differenciaient d'ailleurs du serum , et le rapprochaient du liquide cepbalo-rachi- dien; il ne coagulait pas par la chaleur, ne contenait par consequent pas d'albumine. La quantite du liquide ct'pbalo-racbidien est va- riable :elle m'a seiuble etre moindre pendant Tabsti- nence. Sa determination dans les cas particuliers est sans interet ; il faudrait, pour que cette estimation eut quelque valeur, pouvoir en fixer les limites extremes et reconnaitre comment elles varient suivant la taille et 1'espece des sujets. Je desire vous montrer aujourd'hui ce liquide, afm (pie vous ne puissiez plus le confondre avec la serosite. Pour cela, nous avons pris ce chien , mis a nu la membrane occipito-atloi'dienne, en ecartant simplement les muscles. Maintenantla dure-mere est a nn, et Ton pent la voir soulevee de temps en temps par les oscilla- tions du liquide cephalo-rachidien. En piquant la dure- mere avec un tube effile et aspirant, nous en avons une LloriDK Ci;PHAU>-R.VCHIl)IE\. petite quantite ; mais il est melange de sang, et se trouve ainsi prive cle son caractere le plus remarquable : celui d'etre un liquide non album! neux. On va preparer un lapin sur lequel nous essayerons d'en obtenir dans de meilleures conditions. Voici un lapin sur lequel nous allons recueillir du liquide cephalo-rachidien. Notre but etant simplement d'avoir ce liquide , nous allons couper transversale- ment les muscles du cou pour avoir une plaie plus large, plus facile a observer. Notre seule precaution est main- tenant d'eviter la blessure des sinus veineux, qui ferait perir 1'animal par introduction cle Fair dans le systeme veineux. Ce petit tube effile , engage sous la dure-mere , nous a permis de recueillir une certaine quantity de liquide cephalo-rachidien qu'on va vous faire passer , et que vous verrez parfaitement limpide. Nous en recueillons encore ici une autre petite quantite, toujours sans as- pirer, afm d'eviter d'amasser du sang. Le tube etant en place, vous voyez, a chaque expiration de l'animal , le niveau du liquide s'y elever un peu. Ce liquide, chauffe, ne coagule pas; il s'est seulement un pen desseche . abandonnant sur les parois du tube une partie des sels qu'il tenait en dissolution. Quant au liquide mele de sang que nous avons tout a 1'heure recueilli sur le chien , vous voyez qu'en le chauffant il nous donne un coagulum albumineux qui, bienevidemment, appartient ausang avec lequel il a ete melange. Le liquide cephalo-rachidien renferme egale- ment du sucre, mais nous nous sommes occupe ailleurs de cette question (tome Ier cle iws Lemons de physiologic.) VINGT-SEPTIEME LECON. 27 MARS 1857. SOMM/VIRE: Du systeme nerveux chez les inverle'bre's. -- Recherches anatomiques el physiologiques de 1\I. E. Faivre. — Anatomic des ele"- incnts nerveux. — Leurs formes les plus simples. — Constitution du sys- teme nerveux des rotatoires. — Son perfeclionnement en remontant la s(-rie. —Systeme nerveux de la sangsue, du lombric, des dytisques. — Experiences sur lesmouvements de relation chez les dytisques. — Les types anatomiques du systeme nerveux des invertebre's ont leurs analogues dans la periode embryonnaire des animaux superieurs. MESSIEURS, Apres avoir etabli les distinctions qu'il convient de faire entre les proprietes et les fonctions du systeme nerveux; apres avoir pousse plus loin la separation, et vous avoir montre que des caracteres bien tranches de- vaient faire admettre des divisions dans les fonctions. il est utile de voir si les faits constates chez les vertebres peuvent etre etendus aux animaux des classes infe- rieures, et consideres ainsi comme tout a fait generaux. L'induction ne saurait ici suffire : en effet, quelqne demontree que soit une proposition, 1'induction et I'ana- logie ne doivent jamais etre considerees comme des raisons suffisantes pour la generalise!1; la conclusion ne saurait venir qu'apres une verification experi- mentale. Recemment des etudes directes ont ete entreprises sur les animaux invertebres. On a repete sur eux quel- ques-unes des experiences qui avaient ete faites sur les 50G SYSTEME NERVEUX animaux vertebres. En detruisant certaines portions du systeme nerveux, et voyant les troubles quo cos des- tructions amenent dans le jeu des fonctious, M. le doc- tour Ernest Faivrc (1) est arrive a des resultats pleins d'inte're't, resultats dont je veux aujourd'hui vous entre- tenir, etque j'aurai a comparer a ceux qui s'obtiennent lorsqu'on opere sur des animaux superieurs. Vous verrez par la que quelle que soit Vanalogie, quo quelque legi- times que puissent paraitre, au premier abord, les vues de 1'induction, on trouve toujours de 1'imprevu dans les resultats de Fexpmence. Et d'abord , comparons la constitution du systeme nerveux chez les animaux inferieurs a celle qu'il nous a presentee chez les animaux superieurs. Examinant les elements nervenx pour chercher Fex- pression morpbologique la plus simple de ce systeme, on trouve deja les elements plus simples chez les in- vertebms que chez les vertebres. La premiere expression que Ton observe est une reu- nion de quelques cellules bipolaires avec leurs prolon- gcments, constituant a elle seule tout le systeme ner- veux. Chez certains rotateurs, F. Leydig a vu tout le systeme nerveux 6tre constitue par trois on quatre de ces cellules independantes les unes des autres. A un degre de perfectionnement un pen plus avance , ces cellules sont reunies dans une enveloppe commune ; on a alors un ganglion. En remontant la serie, on trouve ensuite que ces ganglions, qui out d'abord augrnente en nombre, (1) Etudes sur I'hystologie compares du systeme nerveux chez les invertebres. Paris, 1857. in-/i. DES ANIMAUX IN VKRTEBRt S . 507 out line tendance it so disposer sous la forme d'uiir double chaine, do laquelle emanent des filets lateraux. Chez ces animaux, deux chaines longitudinales et paral- Irles de ganglions soul reunies par des commissures latorales. A mesuro que 1'organisation s'eleve. les deux ganglions lateraux correspondants se rapprochent et se confondent. En s'elevant encore davantage, on trouve nn cerveau rudimentaire dans un ganglion superieur. place au-dessus de Foesophage. Ce ganglion superieur est relie a un ganglion sous-oasophagien , cerveau inftv riour, dont nous aurous bientOt occasion d'examiner le r61e. Ce systeme de ganglions, que nous voyons se for- mer, s'etendre, se perfectionner a mesure que nous rernontons dans la serie animale , sont les analogues du systeme central cerebro-spinal des animaux eleves. Le perfectionnement de ce systeme semble resulter d'nur double tendance de rapprochement lateral entre les ])ar- ties correspondantes des deux chaines antero-postV1- rieures, et de rapprochement antero-posterieur entre les parties constituantes de ces chaines laterales. Voyons comment en sont constitutes les differentes parties. Chez le lornbric et chez la sangsue , toute la face inferieure de la chaine ganglionnaire est celluleuse; toute la face superieure est fibreuse. Le cerveau offre une texture analogue. Dans les ganglions de ce systeme, ces cellules de la face inferieure sont toutes apolaires on unipolaires. De ces ganglions partent des filets lon- ^itudinaux destines a les relier entre eux et a en former une chaine, et des filets transversaux qui vont. se n;- pandre dans les organes et fouruissent la commissure 508 SYSTEME NCRVEUX qui re'unit deux ganglions correspondants. Chez la sang- sue, on trouve une cellule /"entre les deux filets de chacun de ces troncs lateraux (fig. 65). FIG. 65 (1). Messieurs, les fibres nerveuses des animaux inverte- bres ne sont pas composees comme les fibres des verte- bres. Nous avons vu que , chez ces derniers , trois ele- ments concouraient a la structure du tube nerveux elementaire, le cylindre d'axe, la moelle et 1'enve- loppe. Chez les invertebres, le tube nerveux primitif affecte (1) Ganglion de la sangsue medicinale vu par sa face superieure (d'apres M. Faivre.) — aaaa, ganglion constitue par des cellules ner- veuses qu'on distingue par transparence ; — c, c, c'c', connectifs anterieurs et poste'rieurs ; — d, d', nerf interme'diaire ; — eeee, troncs nerveux ; — /", f, cellules bipolaires placees en de'nors de 1'enveloppe, entre les ironcs nerveux late"raux auxquelles elles envoient des prolongements. DKS AMM.YIX INVERTEBRtS. 500 plusieurs tonnes. Dans la sangsue , la fibre primitive ressemble a uu tube. Kile renferme une substance nni- tbrme'ment granuleuse; il est impossible d'y distinguer deux elements, d'y voirun cylinclre d'axe et nne nioelle. Toiitefois, cette matiere granuleuse peut representer le melange de deux substances de nature differente, et le nerf de la sangsue s'offrir ainsi dans les memes condi- tions que la fibre primitive des vertebres. On trouve, en effet, que le contenu des tubes primitifs de la sangsue est forme d'une matiere azotee analogue a celle qui constitue le cylinclre d'axe, et d'une matiere grasse qui represente ici 1'element medullaire. Chez d'autres especes, le lombric-, par exemple, les tubes primitifs sont formes par une serie de renflements fusiformes relies entreeux par des parties plus effilees. Chez les insectes et les crustaces, on ne distingue plus de tubes primitifs isoles, mais une seule gaine renfer- mant une matiere granuleuse et des noyaux. Avant de passer a 1'examen des propriete's de ces tubes nerveux , je desire vous montrer quelques expe- riences sur les masses cerebrales et ganglionnaires de ces animaux, afin de vous faire inieux sentir que s'il y a des analogies avec ce que nous avons vu chez les ani- maux siiperieurs, il exisle aussi des differences assez remarquables. Chez lesdytiques, le cerveau est represente par deux renflements ganglionnaires : un superieur, sus-ocsopha- gien, forme de deux lobes, constitue le cerveau supe- rieur; un autre, median et sous-oesophai-ien, est le cerveau interieur. 510 SYSTKME NERVIiUX Lorsqu'oii enleve un lobe clu ceryeau superieur, la direction des niouvements se trouvc tronblee : ainsi I' ablation de I'hemisphere droit amene la rotation a gauche, el reciproquement. Et ici Ton ne pent pas voir, dans cette tendance a la rotation , le resultat de 1'affai- blisseinent d'un cote du corps : la rotation est le resultal de iiiouveinents d'ensemble, parfaitement coordonnes. et n'accuse pas du tout la predominance (Time moitie du corps, ayant conserve son energie. sur 1'autre iiioitie qui serait paralysee. Lorsqu'on a enleve un des ganglions cerebraux superieurs, et qu'ensuite on en coupe un des connectifs (;ntre le mesothorax et le inetathorax. on observe ton- jours la rotation du rot<;> oppose a celui ou on a enleve le ganglion; mais cette rotation se produit par un ni(;- canisme different, scion que le connectif coupe ensuite Ta ete d'un cote on de I'autre. Yoici deux dytiques. Sur le preriiier, on a coupr lo connectif droit; le lobe droit clu cervcau otait enleve. L" animal tourne a gauche en se servant des pattes gaudies, qui 1'attirent dans le sens de la I'otation ii ef- lectuer. Chez cct autre dytique, dontle lobe droit a ete enleve. et qui par consequent doit tourner a gauche, on coupe le connectif gauche. Ehbien! ranimal tourne toujours a gauche; seulement . comme les pattes droites sont les seules dont 1'usage lui reste , il s'en sert pour se pousser. Dans un cas, le dytique tourne en s'attirant avec les inembres du cote ou se fait la rotation: dans I'autre , J)ES AMMAUX INVERTKBRES. 511 il toiirne en so poussant avec les membres du (-Ate oppose. Le cerYeau superieur des iuscctes agit (lone sur la direction des mouvements. Des phenomenes analogues, determines chez les aniinaux superieurs par 1'ablation des lobes cerebraux, nous out inontre qu'il en etait ainsi chez les vertebres. M. Faivre a enleve chez cet autre dytique le ganglion cerebral inferieur. L'animal reste completement immo- bile; il a perdu tonte spoil taneite et n'offre plus que des mouvements reflexes , qui apparaissent lors([ii'on vient a 1' exciter. Nous trouvons encore la quelqne analogic avec ce qui se passe chez les animaux eleves, lorsqu'on a detruit chez eux le bulbe rachidien. Si des organes centraux nous passons aux organes peripheriques. nous voyons des differences apparaitre : 1'experimentation nous oblige actuellement a ne pas pousser plus loin les analogies entre les proprietes du systeme nerveux chez les vertebres et chez les invcr- telires. De chacun des ganglions lateranx. parteiil sur les organes pe'ripheri(|ues deux tilets dans lesquels I'analn- gie porterait a voir des nerfs purenient moteurs et pu- rement sensitifs. Or, des experiences mnltipliees VINGT ET CNIEME LECON. — De la moelle epiniere considered comme organe nerveux central. Isolement artificiel d'une partie de la moelle. — Section de la moelle entre le plexus cer- vical et le plexus bracbial. — Effets de cette operation sur la circulation abdominale. - - La moelle n'agit pas d'une maniere ne"cessaire sur les mouvements du coeur. — Coeurs supplemen- taires de la grenouille, de la chimere, de Tanguille. — De Tin- fluence de la moelle, comme centre, sur certains mouvements de la vie de relation. — Influence de la moelle sur les actes meca- niques de la respiration 376 VINGT-DEUXIEME LECON.-- Blessure de divers points de la moelle allonge'e. — Piqures du plancber du quatrieme ventricule. — Lapins renclus diabetiques. — Experiences. - - Determination du centre actif. — Propagation de I'influence de la piqure par la moelle epiniere 397 VINGT-TROISIEME LECON. — Lesions du plancher du quatrieme ventricule ne produisant pas le diabete. — Experiences. — Cau- terisations. — Lesion des corps restiformes. -- Suppressions de Purine. — La section des vagues et du grand sympalhique n'em- 520 TABLE DES MATIERES. peche pas la piqtlre du quatrieme ventriciile de produire le dia- bete. — Piqure entre les tuberculcs quadrijumeaux. — Expe- riences sur des pigeons. — Arret de la digestion 668 VINGT-QUATRIEME LECON. — Action de la piqilre du plancher du quatrieme ventriciile sur la circulation abdominale et sur la secretion glycogenique du foie. — Me'canisme de cetle secretion , opinions des chimistes. — Fonction glycogenique. — Preexistence de la maliere glycogene an sucre. — Son isolement,sescaracteres physiologiques et chimiques. — Sa transformation en sucre. - Mecanisme physiologique de cette transformation. — Influence du systeme nerveux sur la transformation de la matiere glycogene et, par suite, sur sa production 663 VIIVGT-CINQIJIEME LECON. — Autopsie d'animaux opc'ree dans une lecon prece"dente. — Influence de la moelle sur certaines circu- lations locales. — Section du filet cervical du grand sympathique sur des chevaux. — Lesion des pedoncules cere'braux. — Mou- vemcnts de rotation. — Mouvemenls (-pileptiformes conse"cutifs a cerlaines lesions de la moelle (Brown-Se'quard). — Mouvements de progression , en avant on en arriere , determines par des lesions des centres nerveux. - - Ablation des hemispheres cere"- braux. — Experiences 681 VINGT-SIXIEME LECON. — Du liquide cephalo-rachidien. — Son siege. — Ses caracteres physiques et chimiques. — Phenomenes consecutifs a son ablation. — Tibulaiion due a la section des mus- cles de la nuque. — Elle n'a pas lieu chez les oiseaux. — Role pro- tecteur du liquide cephalo-rachidien. -- Son role regulateur de la circulation dans les centres nerveux. — Facility avec laquelle le liquide cephalo-rachidien se reproduit 695 VINGT-SEPTIEME LECON. — Uu systeme nerveux chez les inver- tebre's. — Recherches anatomiques et physiologiques de M. E. Fai- vre. — Anatomie des elements nerveux. — Leurs formes les plus simples.— Constitution du systeme nerveux des rotatoires. — Son perfectionnement en remontant la se"rie. — Systeme nerveux de la sangsue, du lombric , des dytiques. — Experiences sur les mouvements de relation chez les dytiques. — Les types anato- tomiques du systeme nerveux des inverte'bre's ont leurs analo- logues dans la pe"riode embryonnaire des animaux superieurs . . 506 FIN DE LA TABLE DES MATIERES DU TOME PREMIER. : - -4r- r- L J