‘, Ce RB33255 Library of the University of Toronto JARDIN: R? de AE culutendés Arbres, 4 ferbes Potageres : Avec Te Manicre de conferuerles Fruirs, & fai. retoutes{ortes dec Dre É Sp nes, &e gr ja ‘, fur le tay, & pres les Auguftins- à Ja “a fleur de Lys, . : ‘3 M, De. SAT CE 1 fe n'ay pas deffein de faire icy VA Panegyrique de la beante , vti. lité, @ ncceffire des paris: ils parlent afex d'eux-mefmes pour "4 fè faire eflimer : joint auffi que beaucoup de braves Hommes , tan » Anciens , que de nofire temps, fe ä i) } _— E‘PJSTRE font pleus à en defcrire Les excellen- ces , €ÿ ont employé les plus | re de leurs loifirs pour en exal- ter les beautez,, tanten Vers, qu'en Profe : mais La plafpart fe font \ Jervis du fujet plätoft pour faire \ paroifire la force de leur Genie, que pour donner quelque af a à Es je crois qu'ils n'y avotent aucune connoiffance , veu qu'ils n'ont fait qu cffleurer une matiere f? impor- tante : car apres avoir leu leurs Oeuvres, l'onadmire pléto/ff le bel ajancement en leurs Poëftes ; que l'on ne tire infiruétion de ce qu'ils ont etrir : vefèrve Monfieur de la Serre , qui a compose le Theatre d'Agriculture en Proft,avecuntel ordre, que l'on le dir € relit [ans _ aucun deégouff : maïs comme il 4 | raitré gentraleme at de tout le mé: 0 nn AVX DAMES. nage de la C arpagse il n'a p par- ticularifer ce qui ef£ neceflaire pour le lardinage, qui cff Le feul fujet que je prétens vous faire voir en ce Livre, Il porte pour tilére LE IARDINIER FRANÇOIS, â cas [E que tous ceux quii 1 Ont tr'ait- ce n'ont parle que de leur Climati parexemple, Monfreur dela Serre, 4 compose / {on Oeuvre en Langue- ) doc, qui eff un Pays bien différer. de celay de Paris &ÿ de Je: ERUITONS , pour lequel j'ay deffein d'cire , Comme ayast fait experience en ce Climat de toutce que je diray: jele dedie Avx DAMES, #ais pat- ticulierementaux renageres, d'a tant que chacune a [es inclinations pres es; les unes fe plaïlens aux charmans accords de la Mujt- | que ; Les autres en la leÆnre des 1 ÉEFER'E Romans &) belles pieces en Frofé, | n'en laiffans e{Chap per aucunes qu elles ne leur donnent rang fur La Tablette ; les autres à la Comme- | die, ©r aux doux accens des vers: | les autres affélionnent les Ta-\ bleaux des vons Maifires, les au- érès font (abinet de toutes fortes | de curiofitez, &) les autres aiment paffionnement les bonnes odeurs, €à | JSxé jonynies de quantité d'effences, €7 poudres precieufes ; ainfi diuer- fement chacune [uit [on inclination, (soutes loñables en leurs curiofisi tez ; ) mais comme elles ne les re- cherchent que pour fatisfaire les Sens , celles que ay nommées n'en regardent chacune qu'un feul: le Tardin à cette preroagatine par def À fus les autres, qu'il donne dequo) les fatis'aire touscing : l'Odorat L AVX DAMES. troune [on contentement dans la quantité des fleurs, €s des fruits qai portent odeurs : la veuë fe re- joüit en la dinerfité des couleurs qui s'y rencontrent, fi viues que tous les plus excellens Peintres demeurent court en imitant leur beautez, © les couleurs les plus fines, font ter - _ nies par leur efclat :pour ie Gouf?, ) 2l fuffit de dire, que les frians & ) delicats apres s'efire plus que fuff- famiment gorgez de plufieurs fortes . de bons mets, n'efliment pas auoir fit bonne chere s'ils ne fraffent leurs féffins par Les fruits ; qui fans offre affaifonnez que de la Na- ture ,[e trouucent neantmoins frex- cellens ,chacun en Jon efpece, qu'il fiut auoüer que les fruits [euls em- portent le prix on la fatisfation du à-Gouft : lOïie qui femble en eftre .... EPISTRE ” ex2{4fe, me fait dire pourtant qu'il #3 4 point de contentement qui ef gate ccLsy d'entendre louer labeau r5 evo fre lardin, @) particulie | *énent la groféur g} diverfité de | POS fruits : Le TalE y trouue auf] 1 | St plaifir en les manisat & pe. Liat :aucuns de[quels ont la peau fi delicate, qu'elle à beloin d'une reain J'abtile g) legere | pour la le- HEY auec plus de proprieté. Outre CIS contentemens , L'y en remarque CRCOYE LOIS tres-auantageux : le _Piemier & le plus loüable ef? celuy des prefens que vous en faites à per- ‘#65 de toutes fortes de condition, / dont vous efles amplement remer- ciées @©r loñtes dans vofêre curio(s- te: le fecond, que vofère mai{on en QE fournie, € le troifiefne ( qui V04S jéra aïmer voire menace. AVX DAMES. ment) c'ef que vons pourrez vcu- dre La leuce des fruits d'vne quan. Lis de vos Arbres a des fruitiers , | qui VOUS payeront ATECRt CoMp- tant © par aduance ,furquoy vous _ fouderez vne partie de vofire reue- an. Teconnois des Dames de gran | de condition qui en vfènt de la [or- se, © auouent que ce profit leur ) fait affeétionner dauartace leur | din, €s les rend plus libérales aux | defpenfès neceffaines qu'il y con- à uient faire. C eff pourqguoy (MES DAMES] l'efpere que vous me ) fçaurez gre, de vous auoir dreffé cette inféruition, ie l'ay fait impri. mer en petit volume, afin que vous le | pui Ifiex, porter [ans incommodi. té, pour confronter le trauail de vos lardiniers auec ce petit lure, \ c/isger de leur capacité ou negli. nbsp re di ar EPP RE gence. T'aymis a lafin du traité des Fruits, vn Catalogue tres-ample | detous leurs noms : quand il ne[6r- uiroit que pour vous en entréteni dans les Compagnies , encore en pourrez, vous retirer quelque a- greable Jatisfabfion Et pour cons- ble du feruice que ie defire vous rendre ,ie conclus par la maniere de confévuer vos fruits, tant en leur naturel, que [èchex : © par vne grande facilité de faire toutes fortes de sn Pafles, Ge- lees, Conferues , ©7 Male PARS y fans s 'embarafèr sie , Tous fuppliant d'excufèr mes defauts par tout ou vous les YencOnTeTez ; CF de neme pas condamner, qu ‘apres que VOUS arez,. experimenté ; le con- tyaire de ce que L'efüris par les ef: preunes que vous en ferez. Faites- t- | | 4 AVX DAMES. » moyau/]r la grace de croire , que ie ne me férois hazarde de mettre ce petit Oeuure en Inmiere , f°iena- vois fait les experiences de tout ce qui y eff compris. eAgrécz, donc [522 vous plaifé \ce petit trauail, qui vous efé offert auec tant ds foémifjion, Par MES DAMES, 1 Voftre tres-obey{fant feruiteur à l R. D. C.D. V. V.B, D. N. | f } Less ere PREFACE. au Lecteur. | EF Ntrez dis celardin qui que | vous foyez , Cher Leäeur, iofe bien me promettre que VOUS y trouucrez votre farisfa. étion ; Si vous eltes fcauant au lardinage, vous verrez la belle difpofition qui eft dans toute fon Enceinte, tant en nos Arbres e qu'en nos Herbages, m'afluranc que Vous aurez aflez de courtoi. fic pour approuver noftre perie Labeur: if nef Pas dreffé pour Vousin{iruire, carie fuppole que vous en fçauez beaucoup plus que moy, & m'eftimerois tres heureux (fi i'auois l'honneur de Preface au Lefteur. voftre connoiffance)que vousme vouluffez fouffrir aupres de vous pour en tirer des Lecons:cen'eft que pour ceux qui ny ont au- cune connoiflance, ou bien pe- tite, que j’ay voulu efcrice; par- ticulierement pour iñftruire tant de pauvres gens qui trouueroiét leurs iournées , s ils fçauoient vn peu fe demefler du lardin ; ie me fuis rendu le plus intelligible quil m'acfté pofhible dans les rermes les plus communs de no. ftre Languc; fi j'ay vfé fouuent de redices, c'eft afin qu'ils com- priflent auec plus de facilité ce que ie defire qu'ils fçachent, ce qui leur eft extrémement ne- ceffaire ; ils le pourrontappren- dre dans les deux premiers trai- tez. Car le troifielme ce n'e% AV LECTEFVR, pas pour Le dehors, il n'eftque pour le dedans du logis. Les Sommeliers des grandes maifons auouëéront quil ne leur eft pas | entierement inutile, pour(dans : l'embarras qu'ils ont quelque. : fois) {e reffouuenir de plufieurs gentillefles que le chigemet des faifons leur pourroit auoir fait oublier à caufe du long-cemps qu'il y peut auoir, qu'ils ne les ont pratiquées. Les perfonnes de qualiré peuuent fe diuertiren la leture de noftre Liure ; car come ils prennent plaifir à leurs | lardinages, ils pourronts'enen- tretenirauec leur lardiniers, & leur commander fort a propos ce qu'ils defirenc qu'ils executent. Les Bourgeois qui ont des Mai. {ons de plaifir proche de Paris & AY LECTEVR. & qui ne veulent faire la defpen- fe d'y entretenir vn lardinier, peuuent donner vn de ces liures à leurs Vignerons, qui caufera que ces fortes de gens / quoy que grofliers ) ne laifferont pas de fefaçonner; ce qui fera qu'ils en feront mieux feruis, & leur Jardin mieux entretenu. Brefie ne vois perfonne qui puiffe refu- {er la promenade de noftre lar- din, & à quielle ne foit neceffai- re pour fon contentement & pour l’æconomie de fes proui- fions. Ilyadmirerala bonté de l'Autheur de la Nature, qui a voulu obliger l'Homme {quoy qu'ingrat) à reconnoiftre la mul. titude de fes bienfaits, en l'in. nombrable diuerfité des Arbres, & Plantes, qui contentent la AV ELPECTEPR:. veue par leurs beauté, &: fatis2 font à l'entretien de la vie, non ! feulement pour la neceffiré mais encore iufques à l'excez : Ie le prie qu'il vous donne les faifons propresaembellir voftre lardin, &fauorife rouresvos entreprifes, eus DUR SAME EURE AMC FrsvIs Ge :1a 5 le TO ea 5600 Grocta5te Fa: st TABLE DES PRINCIPAVX. Sujets de ce Liure. PREMIER TRAITÉE’. SECTION PREMIERE. W Lieu, de la Terre © fond duTardin, auec le moyen de mettre en valeur la melchante Terre. 20 SECTION II. Des Efpaliers,Contr Efpaliers,e Buiffons. 8 SÉECTTON FEI. Des Arbres, & du choix que l’on en deit faire, 16 SECTION I, Dela Pepiniere, @ Baffardiere. 42 SECTION . Des Greffes, € ce qui eff 4 eb[erner pour les chair donnes. | 35 SELTION Vi, De le waniere de Grefere 53 | T ABLE. SECTION VIiil. Des Aibres, & Arbuffes en partieulier, de de leur gounernement &* remedes à leurs _maladees. so 4 €ATALOGVE DES NOMS Des Fruits dont nousavonsla connoiflance au Climat de Paris. Poires defquelles le Fruit eff en [a maturis te dass La fin du mois de Tuin & luiller, 72. En Luillet, @ Æouft. sdem En Aorff, & Septembre. 7 En Seprembre , & Oltebre. 7 6: Fn Offobre, & Novembre. ; 8 En Novembre, & Decembre.s 7 9: En Decembre, & l'anvier. 80: En lanvier, @& Fevrier, Sr _ En Fevrier, co autres mois fuinans iusques aux naunelles. 130 Pommiers batsfi. 83. | Pommes de garde. 85 Pruniers hatifs & tardif. 87 Pefchers & Panies. $9 Des Ceri[es, Bigarreaux E emblable, 9x Des Figuese. LA B'L_E. Des Orenges, Curons, € autres Arbres eu rieuix, ÈS 92: SECOND TRAITÉE SECTION PREMIERE. Des Aelors, Concombres, Citremilles.. autres ejpeces lemblables. 93 SECTION II. Des Artichaux, Cardons © Afperges, 109: SECTION HII. Des Choux: des Leltuës de toutes efreces.., 11 G SECTION IV. Des Racines. 13% SECTION. V. De toutes les fortes d’'Herbes Porageres. 144 SECTION VI. Des Feves, Posx, & autres legumes. 166; SECTION VII. Des Oignons , Ails, Ciboules, Poirreaux ss. Herbes Odsriferentes, & autres commodite, du Lardin; quine [ont comprifes aux Chaz pitres precedens.. | 17 TABLE I. ET DERNIER TRAITE. SECTION PREMIERE. De la maniere deconferuer les Fruits en leur | naturel, I SECTION I. Des fruits fechez. 200 SECTION 1IL. Des Confitures an Sel, & Vinaigre,. 20 6 SECTI O N 1V. Des Cenfirures an Moujten an Vin doux an Cidre, € au Miel, 2114 SECTION v. | Des Confiures liquides au Sucre, 26) : SECTION VI. Des Confitures au [ec, © Pañtes de fruits” 248 | ; SECTI O N VII. * Des Conferues gg Mafcpains, 264 BESÉRRSIRARERLRE LE JARDINIER FRANCOIS PREMIER TRAITTE: Du lieu, de la T'erre & Fond du ITardis auec le moÿer de mettre en valeur La mefchante Terre. SECTION PREMIERE. Ovs ceux quiont écrit du mé- nage de la Campagne, ont 2p- porte des fujeétions fi grandes en la difpofition des Baftimens, & autres parties du Domaine, qu'il eft du tout “impoflible de pouuoir dreffer vn Lieu comme ils vous le prefcriuent; d'autant que les fituations ne s'accordent pas toutes à leur fouhait : C'eft pourquoy ie nc vous veux aflujettir-en aucune façoa À S Lr lARDINIER à placer voftre Iardin, vous vous ferui- rez des lieux comme vous les trouuerez, s'ils font defia faits, ou bien ( auec bon confeil , vous en dreflerez un nowucau , au lieu qui conuicndra le mieux à voftre Baftiment. Quant à la Terre fi vous la rencontrez bonne, ce vous fera vn grand aduanta- ge & Vne grande efpargne , mais rare- :ent en trouuerez- vous où il n'y ai beaucoup à crauailler : car celle Terre fera bonne au deflus, qui eftant ou- uerte de la hauteur d’un fer de Befche fealement )} fe trouuera Arguilleufe deffous, qui eft vn fonds pire aux Arbres que le Tuf; parce que dans le Tuf ils peuuent trouuer A petites Vei- nes qui donneront paflase aux Racines pour chercher La fraicheur plus bas, & prendre quelque nourriture;mais la Ter- re Argilleufe, ou Franche, (quieftvne Terre auec laquelle les Boulangers de Paris font les Âtres de leurs Fours, ) eftcomme vn Plancher, qui par fa du- rete & d'enfité ne peut cftre percé par les Racines, & dans Jes grandes ardeursde l'Efté, empelche que La fraicheur de deffous ne puifle penetrer à trauers, ce qui caufe que les Arbres & autresPlantes font tellement deflechez, , qu'au lieu € FRANÇOIS. & d'auancer en leur accroiflement , ilsn font que languir, & periffent enfin. Pour remedier à ce deffaut, il n'ya qu'un feul moyen, quieft d'effondrer & rompre cette Terre de trois à quatre picds d: profondeur, commençant par vne Tranchée Jarge de quatre à cinq pieds, de toute la longueur de ce que vous voulez faire effondrer, en iettant les Terres toutes d'un cofte : & votre Tranchée eftant vuidée, & curèe iuf- qu’a la profondeur que vous defirerez, vous mettrezau fonds des longsFumiers, du Marc de Prefloir, à VinouàCidre, de la Fougere, fi vous en auez la com- modite, qui eft le meilleur de tous les Fumiers, des rueilles d'Arbres, iufques mefmes à de mefchantes Ames de Fagot, de la Moufle, & autres chofe femblables: bref, ce qui vous fera le plus facile & à moindre defpenfe : car toute l’inuention que l’on peut auoir en cffondrant, n'eft que pour tenir la Ferre creufe, afin que la Fraicheur de deffous puifle reuigou- ter les Arbres & Plantes, durant les excefliues chaleurs. Vous en mettrez enuiron demy picd de haut au fonds de voftre Trancheée, apres quoy vous en ferez va Le pareille largeur, fsilent al di di LE TIARDENIER re deflus qui eft la meilleure fux ces Fu- miers, & creufant iufques à parcille profondeur que la premiere, vous rem- plirez voftre premiere Tranchée, &c la Terre de deffous fe trouuera deflus, con- tinuant à faire de femblabies Tranches, iufques à la fin de ce que vous voudrez faire effondrer. Vous me pourrez objeéter que cette Terre qu'aurez tirée de deflous fera in- fertile : l'advoué auec vous que la pre- micre année elle ne fera paroïftre {a bon- té : mais quand par les pluyes & gelées d'un Hyuer, elle aura efte meurie (auec le peu d'amendement que l'on y mettra ) elle produira bien plus abon- damment que ne faifoit celle de deflus, qui eftant vieepar le long-temps qu'il y a qu'elle porte, a perdu vne grande par- tie de fa vertu. Toutes fortes de Temps ne font pas propres à ce trauail; car durant lesgran- des Chaleurs, cette Terre eft tellement dure & fcellée, queles Pics, & pioches n y peuuent du tout entrer : l'Hyuer y eft plus propre qu'aucune autre Saifon,d'au- cant que les pluyes d’Autonne ayant hu- . meété la Terre, la rendront plus facile à eftre befchécoufoüillée, &aufliqu'en _ cetemps-làil Pleuc, Neige, on Gele af- FRAMÇOIS. fez fouuent, ee qui aide beaucoup à cet œuure : joint aufli que les payfans n'e- ftans pas alors beaucoup occupez, fe don- nent à meilleur marché qu'és autres Tempsqu'enon trauaille aux Vignes,ou durant l’Aouft? aufquels Temps l'on ne les peut auoir qu'a peine & à force d Ar- gent. Pourcequieft du fonds où fe rencon- tre le Tuf, vous le mefnagerez, com- nous venons de dire , en le faifant rom- pre, & les pierres eftant fur le Gueret feront emportées hors du Iardin. Si le Tuf n’eftguereefpois, & qu'eftant rome pu vous trouuez du Sablon, où autre petit Tuf mouuant, il fuffira de lerom- pre,ne letirez pas hors de la Tranchée; car les Arbres ietteront affez de Racines dans ce petit Tuf, à caufe des efeoutures du Fumier qui fera deflus. Vous obferuerez qu'au fonds de la Tranchée d’où l’on aura tiré du Tuf, vous ne mettrez que de bon fumier de- my confommé, d'autant que l'Eau des pluyes, ou des arroufemens pafferoit fa- cilement à trauers, fi c'eftoit des Marcs de Preffeur de la fougere, ou autres que ray nommezcy-deuant. l'apprehende que vous ne me difiez, … que s'eft s'embarquer en et grande def= ii} 6 Le TARDINIER. penfe, que de faire effondrer entiere- ment vn [ardin : Ie l’arouë aufli auec vous mais ceft vne fois pour iamais, & le profit que l’on tire d'vn tel trauail, recompenfe au centuple les frais que vous y aurez faits : à caufe que les Arbres en feront plus beaux n’eftans ny moullus, ny galleux, & qu'ils en portent des fruits plus gros fans comparailon, que ecux qui font plantez en une Terre qui n'eft pas effondrée ; les Artichaux, Poi- rées , & autres Legumes, y viennent monftrueufement gros , bref vous ferez-fi fatisfait voyant la difference de ce que produifoit voftre Iardin auant qu'il fuft effondré , àce qu’il produiraparapres, que vous n'aurez aucun regret à voire defpenfe. Si vous voulez pouftant eftre plus re- tenu, ie vous enfeigneray vn autre moyen d'amander voitre Iardin auec moins de fraits; mais aufli comme la defpenfe fera moindre, ce qu’il produi- ran'en viendra pas fi beau; ren traitte- ray cy-apres au plantage des Efpaliers, êt au Potage. Il y a beaucoup de Curieux qui s’éten- tent encore au delà : car ils font pafler la _ Terre par vne Claye, pour en ofter tou- tes les Pierres: ce qui fe fait en pofant FRANÇOIS. 7 ectte Claye, on Cribbe, fur le bord de la Tranchée, & iettant de paëflées de Terre fur le haut du Crible, la Terre pañle & les Pierres roulent au pied du Crible, puis on les emporte hors du Jardin. La forme de ce Crible eft vn Chaffis de menuiferie de deux grands poulces d’ef- pois, de fix pieds de haut, & de cinq de large, lequel aura deux trauerfes dans {a hauteur, de la mefme groffeur du Chaflis, & toutes les quatre pieces tra- uerfantes feront percées également de la groffeur d'une Baguette ; defquels les Chandeliers de Paris fe feruent pour fa- conner leur Chandelle, diftans l’vn de l'autre d’un trauers de doigt , dans lef- quels vous mettrez des Baguettes de Couldre, s’il fe peut: car c’eftle bois le plus ferme & dur quand il ef fec, & qui refifte le pluslong-temps fans fe rompre qu'aucun autre. 1] faut que le haut & le bas de voftre Chaffis foient percez à jour, afin que quand il y aura des Ba- guettes rompuës , VOUS En puifliez re- mettre facilement d’autres, Les arreftant auec des petits Coins par Les bouts. A iiij TS 7 £ LE JARDINIER Des Efpaliers, Contr Efpalier:, € | . Buiffons. SECTION II. | Po Efpaliers eftans le principal orne- ment des fardins, il eft raifonna- ble de feur donner le premier lieu, & en efcrire amplement : ce fera aufi Le fuiet où ie m'arrefteray le plus dans ce premier Traité, Par l'Espalier nous entendons parler . des Arbres, dont les Murs des Jardins font parez : pour le mettre en eftat il faut faire vne belle Tranchée, comme i ay dit cy-deuant , fi le fond eft d’Argille vous vous gouuernerez commeil’Argile: s'il eft de Tufcomme au Tuf, vous laife. _rez vn pied de Terre fans rompre proche du Mur, de crainte de l'endommager, puis ayant mis vn lict de fumier de dem _ -pied dè haut, ou fond de voftre Tran- chée, Vous ferez ietter deflus ce rumier, Ja hauteur d'un pied de la meilleur Ter- re qu'aurez tirée de voitre Tranchée : ce- Ja fait vous marquerez les places, où _ votis voudrez planter vos arbres, qui era à vne diftance raifonnable: celle de douze pieds me femble la plus conuena- — FRANÇO:S. 9 bie : toutefois à voftre difcretion , ie ne vous donneray point la Loy, chacun ayant fon opinion particuliere : mais mon raifonnement eft, que s'ils font plus pres, ils fe nuiront dans peu d'an- nées : fi plus loing & qu'il vienne à mou- rir vu Arbre, ou qu'il en faluft greffer: quelqu'autre , dont le fruit ne vous plat- roit pas, vous feriez ennuyè de voir fi long-temps voftre Muraille defcouuerte en cet endroit-là. Ayant marqué la place de vos Arbres, fuiuant la mefure de douze pieds, vous ferez remplir la place où vous les plante- rez ( trois pieds de chaque cofté de voftre marque ) de la meilleure Terre , que vous meflerez auec du petit Fumier de vieille Couche de Melons, ou autre qui aura feruyàefleuer les Herbages de vo- ftre Jardin, & il vous reftera vn efpace de fix pieds , dans laquelle vous ferez mettre vn fecond lit de fumier de Va- che, Porc, ou Moutonsbien confommé & bien gras : puis vous ietterez deflus le relie de la Terre qu'aurez tirée de voftre Tranchée, & dreflerez voftre Gueret, le rendant bien uny. Vous ferez faire des trous pour vos Arbres, aux endroits qu'’aurez marqué, & les planterez bien proprement, faifant ( re La JARDINTER vne petite butte dans Le milieu du trou, afin qu'ayant pole voftre Arbre deflus, vous puifliez eftendre les Racines autour de cette petite butte, les tirant en bas: puis le trou eftant remply, & la Terre dreflée, vous la marcherés tout autour de l’Arbre pour l'afleurer & empefchcer que la Terrene fe trouue creufe en quel- que endroit. Vous pourrez { fivous voulez) auant que de planter, abbatre la Terre iufques au Mur, vn pied de chaque cofté de l'en- droit où vous voulez placer vôs arbres, fans crainte d'endommager votre Mur. Vous les placerez à vn pied prés du Mur, un peuen penchant les branches contre le Mur, afin de leur donner la grace en leur accroifflement, cela fera auffi que les Racines feront plus dans le milieu de votre tranchée, pour y cher- cher leur nourriture auec plus defacilité. Prenez bien garde à ne mettre autre fumier prés les racines de vos arbres, ue de ce menu de vieille Couche, en- gore faudra-il le mefler auec beaucoup de bonne Terre; car l’'Eîe brufleroit- tout : d'autant que le grand Fumier tient toufiours ia Terre creufe , iufques à ce qu'il foit confomme : Si ie vous en fais mettre dedans les efpaces, cet que vos LA Arbresayantpristerre , & leurs Racines allant la deux ou troifiefme année cher- cher la bonté de ce Fumier, qui fera confommeé , ils poufferont de plus beaux Bois, & produiront de tres-beaux & tres-gros fruits. Pour ce qui eft de dreffer vos Efpaliers, ie vous veux enfeigner plufieurs façons de les accommoder, felon l'aage de vos arbres. HA Lapremiere, ce fera de ficher de pe- titspieuxen Terre, àdemy pied de vo- fire Mur, pour commencer à conduire les tendres jets que vos arbres pouffe- ront , & S'il eft befoin d'y adioufter quelques trauerfes que l'on appelle Lat- tes, vous y en pourrez mettre ce qui fera neceflaire , liant vos ieunes jets auec de petits Oziers, ou joncs, fanslesferrer, mais feulement pour les conduire. La feconde maniere fera de faire vne Haye de Pieux, & Lattes maillez égale- ment, & bien liez, qui ayant plus de force que la premiere, obligera les arbres à prendre tel ply que l’on voudra. La troifiefme eft vn Treilliflace atta- ! le) ché au Mur, & fupporté par des Os de jambe de Cheuaux, ou par des Crochets de Fert , fcellez dans le Mur, à caufe que l’arbre montant & s'enforciffant, fe FRANÇOIS. IL 12 LE IARDINIER icttér oït tout en dehors, pour chercher l'Air, & romproit ou feroit verfer la Haye, dont les Pieux font fichez dans la Terre quife laboure, & outre ce qu'à la longueur du temps ils { pourriflent. Éa quatriefme plus forte que toutes & plus facile à entretenir, eft de faire fcel- ler dans le Mur des bouts de bois de i2 groffeur d'un fort Chevron , qui font Cquarris à huit Pans égaux, & fortiront le Mur de fix poulces feulement,aufquels ferez faire des trous de Tartiere d'vn poulce & demy de profondeur , à deux poulces prés du bout, vous le ferez fcel- ler à égale diftance, de hauteur & lar- geur : au milieu de chaque quarré en fe ra encore fcellé vn, faifantla figure d'vn. Franc de Quarreau. Vous prendrez des Efchalats que vous aurez fait faire de Jongueur de la diftance que vos bouts de Cheurons feront placez, lefquels vous. affilerez par les deux bouts pour entrer dans les trous qui feront au bout des Chevrons, & pour les yplacer, vous les. plierez vn peu en forme d’Arc, pofant. les deux bouts dans les trous qui feront vis à vis les vns des autres, & laifant- aller l'Arc, ils tiendront d’eux-mefmes fans aucune lieure : la figure qui eft au commencement de ce ‘iraité vous le raQnftre aflez clairement. FRANÇOIS 5 Quand vos arbres feront defia forts ils n'auront befoin d’eftre conduits auec tant de bois qu’en leur ieuneffe, il fuffira d’en arrefter Les plus fortes branches à cette forte d'Efpalier : Et quandily aura quelqu'vn de ces Efchalats qui fera pourry, l’on en remettra facilement vn autre, en ayant toufiours de prouifion dans la maifon. La cinquiefme, de prendre du bois de quartier vn peu plus gros qu vn Efcha- lats, le drefler des crochets de fer, ou des. os deCheuaux,comme i ay dit cydeuant, & le lier auec du fil d'archail, ou ée cuivre, cela dure extremement long- temps. | La fixiefme &derniere façon d'Efpalier Les arbres ( quieftla plus belle & la plus. agreable : maïs elle ne fe peut facilement . faire qu'aux Murs en plaftre ) c'eft de prendre de petites Lanieres de cuir,ou li- zieres de drap, auec lefquelles vous ar- refterez les ieunes branches, attachant * ces Lizieresau Mur auec du cloud, &les ! branches prendront leur ply en groffif- fant, ne pouuant l'arbre fe ietter en a- vant, ny arracher le cloud qui fe roüille dans le Mur. | Ces trois dernieres façons d'Efpalier | fe pratiquent pour bannir les limats, 14 Le JARDINIER perce- oreilles, martinets & autres in fetes qui fe mettent dans le lien des mailles, & entre lesefcorces du bois qui eftrond , & non pas de quartier. Vous-obleruerez de ne planter aucun arbre dans les coins, ou angles de vos Murs : pource qu ils ne pourroient pren- dre que demie nourriture, & que cela arondiroit la figure de voitre Jardin, & auffi que l'arbre ietteroit tout fon bois en deuant pour auoir de l'air. Le Contr Efpalier eft vne Haye qui forme toutes les all:es du Iardin : Il fe plantera de mefme maniere que l'Efpa- lier referué que la T ranct ée fera de qua- tre pieds de large, au moins; & que vous ferez jetter vos Terres, la bonne d'vn cofté, & la moindre de l’autre, afin de mettre la bonne au Fonds de voftre Fof- {c,& la moindre deflus. Vous y planterez vosarbrestous droits, & non panchez comme à l'Efpalier. Le bois quiles fouftiendra, il faut de neccffité quil foit fiché dans la Terre, & maillé de Lattes; toute la propricté & curiofité qui s’y peut apporter, eft de le faire de bois de quartier, & le lier auec du fil de Fer , ou de Cuiure. RARES vns pour efpargner la def. pe nfe de l'entretien du bois, fe conten- R ANCÇOIS. 15 tent quand les arbres font forts, de les laifer ioindre enfemble , & les lier, mais il faut qu'ils ayent efté plantez à neufpieds l’vn de l'autre, & le maleft qu'ils font fuicts à eftre ébranlez des vents. Les Buiffons, ce fontarbres que l’on plante ordinairement dans les bandes des Parteres, & dans les quarer des Po- treers, le long des Sentiers : lefquelson taille de celle figure que l’on veut, ou ronds , ou quarrez, ou plats par deflus, ou que l’on laiffe monter en forme de Cyprez: En les taillant on fe contente pluftoft de leur donner la forme, que d'elpargner les bourgeons à fruit, que l'on conferueroit aux Efpaliers , & Con- tr'Efpaliers. Vousles planterez aux lieux les plus conuenables de vosbandes &c à égale di- ftance l'vne de l'autre, obferuant ce que 1'ay dit en la façon de planter. | La maniere que ie vous viens de don- ner pour planter vosarbres, vous efpar- gnera la defpenfe de faire efondrer tout voftre lardin , les Allées n’en ayans pas beaucoup de beloin : car auant que les arbres ayent pouflé leurs Racines jufques aux allées, ils auront pris force; & les perceront aifement où ils MS) Sud AR 2 | Le 16 LE IARDINIER trouueront la bonne Terre. Vous ne laifferez pourtant vos allées en friche, ains les ferez nettoyer d'herbes, & fur tout ofter le Chiendent iufques au der- nier brin, renuerfantla Terre de la hau- teur d’vn fer de Befche ; en fecoüant le Chienden : & fi apres ce labour il re- poufloit quelque peu, vous le ferez cher- cher profondement enraciné qu’il foit, pour le bannir entierement de voftre _ Lardin comme tres-nuifble. Des Arbres, € du choix que l'on en doit faire. SECTION HIT. C? n'eft rien fait d’auoir bien preparé voftre Terre, fi vous ne la plantez de beaux & bonsarbres, que vous pour- rez choïfir dans les Pepinieres de gens qui font en reputation d'eftre fidels : car fa mp rt de ceux qui en vendent, trom- pent fouuent les acheteurs. A ceux-cy &e ne vous confeille d'en prendre aucun, que vousnc voyez le fruit deflus, & les retenir dés ce temps-là en les cachetant auec de petites bandes de Parchemin, {ellées de voftre Cacher, pour en les le. want citre afluré d’aueir ce qu'aurez FRANÇOIS. \# ‘4 achete : à ceux-là qui liurent fidelle- ment, vous ne ferez pas fiexact, il eft bon pourtant de les cacheter aufli,quand ce ne feroitque pour faire voir à ceux qui en acheterontapres vous que ce font ar- bres retenus. Si vous voulez remarquer les efpeces , vous le pourrez en deux façons , l'vne en pendant de petites ardoifes , où le nom de l’arbre fera en efcrit, & l'autre en y mettant des bouts de Laine teinte de plufeurs couleurs , dont vous ferez vn memoire ; cela feruira à difcerner vos arbres en les plantant, afin que diftin- guant ceux d'Efté d'auec ceux d'Hyuer, … vos Efpaliers, Contr'Efpaliers & Buil- | fons en foient plus agreables à voir» n’eftans pas denuez entierementparen- / droits, où il n'y auroit que des fruits ) . d'Efté, & aufli que vous n’en mettrez point deux d’yne mefme forte proches l’yn de l’autre. el Les fruits que vous choïfirez, parti- 1 culierement quantaux Poires )fivousen voulez vendre , ce fera Bon Creftien d’'Efté, & d'Hyuer, le Mufcat haftifgros & petit, le Portail, la Bergamotte d'E- fté & d'Hyuer , faint Lezin, Adamotte, Bezidairy , Double fleur, gros Roufle- let de Rheims, parfum , Bœure des deux = bi EE 18 LE JARDINIER fortes, Meflirelean de Cire, Cadillae ; & autres que vous fçaurez qui fe vendent le plus cher. Pour les Pommiers, la Reinette de plufieurs fortes, le Co#r-pendu , Cal- uil-Rouge dedans, Chaftaigner , Apis gros & petit, Pigeonnet ou de Judée, & autres. Autant aux Pefches & Abricots ils fe vendent toufiours bien, mais ces deux fortes de fruits ne fontgucres propresen Efpalier, à caufe que les branches meu- rent tantoft d'vn bras, tantoft d'vn au- tre, & bien fouuent entierement : ce qui eft fort defagreable à voir fur les bref- -chesque: cela fait à vos Efpaliers : Celle - que l'on eftime le plus font les Auant- Pefches, ou Pefches de Troye. Alberges, … Pawies, Pefches, Cerifes, Violettes, de Pau, srignons & autres. Pour les Cerifes & Bigarreaux, d'autant qu'il s'en fait des plants particuliers, ie n'en feray autre menticn, finon dedire que celles à Courte-queuës & à petit noyau , pareilles à eelle de la Vallée de Montmorency font les plus excellentes. Il'ya les Precoces qui fe plantent à grand abry & belafpcét du Midy, ou fe mettent dans des Quaiffes , pour cftre Le ferrées pendant l’Hyuer aucc les Orcu- f | | 4 af FRANÇOIS. 19 gers, mais c'elt pluitoft pour là curioñce que pour le profit Retournons à l’Eleétion de nosarbres, & que cette digreflion ne nous efloigne point d'en dire tout ce qu'il {e pourra, particulierement des Poiriers , comme portant le fruit le plus precieux de vo- I {tre Lardin. | L'Arbre greffé fur la Coignaile eft à preferer à tout autre, d'autant qu'il rap- porte pluftoft & fait le fruit plusgros, & plus beau, eftant rouge du cofté du So- leil, & jaune de l’autre coité qui eft om- bragé par fon efpoiffeur. Ceux fur Franc font eftimez porter des fruits de meilleur gouft, mais ils ne viennent fi gros, ny fi beaux en couleur que ceux qui font greffez fur la Coigna®= le, qui eit ce que nous recherchons pour la vente, d'autant que les autres Poires reftent toufours vertes en couleur. Pour l’âge que deuez choifir vos ar- bres, quatre ans ou enuiron eft la plus belle grandeur, d'autant que plus ieu- nes ils ne garniroient pas voftre Efpalier promptement : & plus vieils ils auront jette de groffes Racines, que l’on rom- pra, ou efclattera en les replantant au grand preiudice de lArbre, qui fera long-temps à recouurir fa playe, & fau- #6 LE TARDINIER dra qu'iliette beaucoup de nouueauCke- uelu, auant quedebienfaire. L'opinion de beaucoupeft, qu’il n’eft que de planter gros, & qu’vn arbre eft trop long-temps à venir : ie ne fuis pas de leur aduis , car i’eftime que vn arbre bienchoifi, & de belle venuë, de l'âge | que ay dit, icttera de plus beau bois, qu'vn autre plus vicil, qui ne pouffera que de petit bois quoy qu’en quantité. Pour la forme, vous prendrez garde qu'ils ne foient point Mouilus ny Affou- chis, maisde belle venuë, le bois gros ëc bien clair, que l’Efcuflon ou la Fente ayent bien recouvert leur Sauuageau, - qu'il foit garny désle bas pour eftre plus agreable en Efpalier. Vous les ferez leuer en voltre prefence, afin que l'on rompe le moins qu'il fe pourra de cheuelu, & que l’on n’efclate ñy coupe aucune racine s’il fe peut. Choïfiffez vn beau jour enuiron la faint Martin : car depuis que la fucille com- mence à tomber il n'ya aucun peril à le- uer des arbres : vous les ferez emporter . Je'plus doucement qu'il fe pourra, fur le dos des Hommes , ou fur des beftes Af. nes, & les planterez le pluftoft qu'il vous fera poffible; de peur qu’ils ne fa- tiquent,& que Le petit cheuelune fedef. FRANCOIS. 21 feiche : en les plantant vous couperez le petit bout des racines , pour ofter feule- ment ce qui pourroit eftre deffeiché, _ Vous ne les taillerez qu’en la faifon', pour les caufes que ie vous diraycy-apres. __ Aux Poiriers Greffez {ur franc, illeue faut couper le piuot : afin que les autres Racines prennent force, & s'eftendent tout autour en cherchant la meilleure Terre. : Les autresarbres de toutes fortes fe- ront arrachez, replantez, & gouuernez de la mefme facon que les Poiriers, n°y ayant aucune diftinétion à faire en cet endroit. uant 4 la Taille des Arbres, le vray temps pour ceux qui font vieils plantez , ef dans le decours de la Lune de Ianvier, qui eft aufli le temps que l'on cueille des * Greffes pour la Fente & Couronne. Et. pour ceux qui font nouueaux replantez, ilsne feront taillez qu'alors que La Séue commence à monter, afin que la playe fe recouure pluftoft : car fi vous les tail- lez dés l’'Hyuer, le bois fe deffeichera par les gelées à l'endroit de la taille, & fe- roit vn Argot de bois mort iufques à l'œil qui poufferoit le plus proche de la taille. . Pour ce qui eft de lier, & dreffer les 22 Le TARDINIER Arbres , le mois de Fevrier y eft plus propre, d’autant que les plus grandes gelces cftant pañlces, l'onne feint point de couper le fuperfluss & aufli que la Sêue n’eftant pasencore montée, l’on eft hors de danger d’ébourgeonner les yeux qui font noüez à fruit. La principale fuicétion de bien dref- fer des arbres, eft de les eftendre en forme d’efuentail ouuert : ceft à dire que comme les baftons d’yn efuentail ne fe croifent point lesvns fur les autres, aufli les branches de vos arbres feront conduites de meime facon. . La plufpart des lardiniers du commun tombent dans cet erreur de les croifer , à caufe que l'onne les à jamais repris, s'émancipans de vouloir gouuerner les arbres, qui eft vne connoiilance toute particuliere, qui ne s’apprend pas chez les planteurs de Choux ; ils font encore des fautes notables, c’eft qu'ils fagot- tent vne quantité de menuës branches routes dans vn lieu, ce qui ne fe peut fouffrir fans les en reprimander : car l’on ne doit laifler que l’épaiffeur d’vne bran- che par tout l'arbre : & pour comble de leur ignorance, ils Sal & repaf- fent les branches autour du bois que l'on à mis pour les drefler, ou mettent Le coatnte 6: ii — bé. FRANÇOIS. 23 l'Arbre derriere, & le bois en deuant, qui font des fautes fi grandes, quelles ne fe peuuent pafler fans leur reprocher leur incapacité : Ie les pris charitable- ment de donner vne année de leurtemps au feruice de quelque bon Ilardinier , où ils pourront apprendre à gouuerner les arbres, & profiter de ces corrections. S'il fe rencontroit pourtant quelque place àl'arbre qui ne fut'pas garnie, vous pouuez en cette neccfliré-là croifer quel- que petite branche pour couurir ce vui- de, mais quece foitrarement, & faites en forte que l'on ne s'en puille pas aifc- ment apperceuoir. Il eft necelfaire de donner quatre Îa- bours à vos arbres par chacun an, & vous ourrez faire femer fur ces labours de erites herbes qui fe leueront d'vn labour à l’autre, comme Laïdtuë, Pourpier, GCerfueil, chicorée, mefme y efleuer de jeunes Choux pour replanter, breftout ce qui fe leue, & ne feiourne pas long- temps en vn endroit : vous y pourrez auf- fi replanter des Laictuës pour pommer, de la Chicorée pour blanchir; & du Pourpier pour confire au Sel, & pour la Graine, cela vous portera double pro- fic,car vos arbresoutrele Labour feront arroufez par le lardinier, qui aura foin 14 La IARDINTER d'efleuer ces petits Herbages. Vous ne mettrez pres de vos Arbres aucune Racine telle qu'elle foit, tant à caufe qu'elles veulent feiourner long- temps dans Terre pour leur accroifle- ment, qu’à caufe qu ellesemmaigriffent, ou cffritent beoucoup la Terre. Les Choux à Pommes , autres grands Choux, & les Poirées pour tirer des Cardes, en ferontaufli bannis. 11 fera neceflaire aux arbres vicils plan- tez, de trois en trois, ou de quatre en quatre ans, de les defchaufer, & au bout des Racines hors dela Terre qui eft en Labour, faire vne Tranchée & ÿ met- tre de bon fumier, vous laifferez pour- tant quelque peu de Terre fur les Raci- nes, de crainte que le hâle de l’Efté ne les brufle : le vray temps pour cet œuure eftau commencement de l'Hyuer, dau- tant que le fumier fera demy confommé auant les chaleurs. De la Pepiniere, & Baflardiere. SECTION I. ment de l’efleuement des Arbres, il cf neceflaire de vous donner l’inftru- } ion | és Pepiniere eftant le çcommence- FRANÇOIS. 2$ Tion enrierc de quelle maniere elle veut cftre gouuernée. C'eft pourquoy nous commencerons par les Semences. Toutes Semences defirent vn lieu frais, non eftouffé d'arbres, nyremply de Ra- cines : elles veulent eftre abriées du So- leil de Midy par quelque Mur, vous le pourrez facilement trouuer dans voftre Jardin. en vous feruant du lieu en la- bour où fera voitre Eipalier du cofté du Midy : vne année eule fufhira pour vous fournir amplement de toute forte de Plan, -& plusque vousn'en aurez de be- foin. Ayant fait amas de Pepins, & de Noyaux durant toute vne année, à me- fure que vous mangerez des fruits : & | Hyuer eftant paflé, vers la fin de Fe- vrier, vous femerez vos Pepinsenrayon, chacune efpece à part : & vos Noyaux au Plantoir, à quatre bons doigts l'yn de l'autre, ie prefuppofe que la Terre où vous les mettez aura efté labourée au commencement de l'Hyuer , & qu’elle le fera wne feconde fois quand vous fe- merez. Les Pepins & Noyaux poufferont dés la mefme année, quiplus forts, qui plus foibles : il n'importe, ils feront toufiours affez bons à replanter; ce n’eft - pas que fi vous les auiez femé dans vne Æ B 26 Lr TJARPINIER planche derriere voftre Contr'Efpalier,, ( du mefme cofté du Midy, poureftreau moinsabriezle Matin, & le Soir) ilsne font meilleurs de deux ans que d’vn, pour eftre replantez, mais tels qu'ils fe- ront , vous ne laiflerez d'en faire voftre Pepiniere. Noyaux de Pefches fe plantent auf au temps qu’elles font en maturité, les enterrant afin que l'on cueille la Pefche de l'arbre, c'eft à dire auec fa chair, & faudra mettre de petits baftons à l'en- droitoù les aurez mis, de crainte qu’en labourant on ne rompe le Germe. Pour commencer donc voftre Pepinie- re, vous choifirez quelque partie de voftre Iardin que ferez labourer, & bien dreffer: par apres vous la ferez marcher pour affermir la Terre, puisferezfaire de petites Rigolesdela hauteur, & lar- geur du fer d'vne Pefche, diftantes de deux pieds & demyl'vn de l’autre, iet- tant laT erre toute d’yn cofté {ur le bord du rayon : cela fait vous poferez voftre Plan dans le rayon, l’appuyant de l’au- tre cofté que vous aurez mis la Terre qu'aurez tirée, & luy ayant auparavant LA . 24. rogne le Piuot, vous ne le mettrez qu’à demy pied l’vn de l’autre, chaque efpece à part , lespoiricrsauecles poiriers, les | D RO * oo me — ee oo mn É…. FRANÇeIS. 27 pommiers auec les pommiers, & ainfi des autres : puis vous remplirez le rayon de fa Terre , & marcherez deflus pour l'affermir , de crainte que le Plan ne s'éuente, & ferez foigneux que l'Herbe n’eftouffe le Plan, le faifant labourer , & farcler , quand il en aura befoin. Vous ne rognerez vo re [lan que quand la Séue voudra monter, & le fe-- rez éboursconner iufques à vn pied de haut , afin qu'il ne fe trouue point de nœuds en l'efcorce , qui vous nuiffent quand il les faudra grefrer. Si dés l'annce mefme que vous les au- rez plantez il s'en trouuoit d affez forts pour efcuffonner, & qu'ils éuflent de la Seue , ne faites aucunes difficulté de les greffer : mon opinion eft, que l'on ne {cauroit cfcuflonner les Sauuageaux & Francs tro Jeunes, pourueu que lon puifle placer l'Efcuflon, il fufñit : ma raifon cft que le Sauuageau & fon Efcuf- fon, prennent vn accroiffement égal des leur icunefle, que la taille de l’Argot en cft pluftoft recouuerte, & qu ils pouflent de plus grande force, que ceux que l’on efcuflonne fur des plus forts, qui font des deux outrois ans à recouurirla place où on aura ofté l'Argoc, & dont fouuenc de l’autre cofté de l'Eifcuflon l’efcorce du Le B :i; > 28 LE IARDINIER Sauuagcau mourant de trois ou quatre doigts plus bas que l'Efcufflon, qu’il faut vn grand temps à l'arbre pour recouurir ce manque. Joint que l'Efcorce d’vn vieil Sauuageau ne fe colle pas fi bien auec celle de l'Efcuflon, & qu'ils s’y fait vn gros bourrelet facile à decoler, ce qui n'arriue pas quand les deux Efcorces font toutes deux tendres. | Vous ferez aufli vne Pepiniere de Coi- gnailes , femblable à celle des Francs, quev ous gouuernerez de la mefme forte. Les vrayes Coïgnafles ( qui eft ce que ie vous nomme Sauuageaux ) font celles qui ont le fruit en Calle-baffe; & non pas celuy qui eft gros derriere, & abou- titen pointe par deuant. Quant aux Pefchers que vous auez fe- me de Noyaux, ie fuis d’aduis que vous en fafliez vn quarré de votre Iardin à part, pour les caufes que ie vous ay di- tes, qui font que les mettant en Efpalier, ou Contr'Efpalier, il meurt tousles ans quelque branche, ce qui eft fort defa- greable à voir. C'eft pourquoy ie vous confeille qu’en l’vn des quärrez les plus cfloignez du logis, (pour ne pas empef- cher la veué de tout voftre Jardin ) du co- fté du mauuais vent, quieft la Bize, ou Septentrion, vous y logiez vos Pefchers FRANÇOIS: 19 que leuerez de voftre Seminaire, & vous les placerez à fx pieds l’vn de l’autre, en diftances égales de tous coitez, ce qui fe nomme planter à la Quinconcesëc là vous en recueillerez abondance de fruits, à canffe de la quantité d'arbres. Vous ferez foigneux de leur faire don- ner aufli quatre labours, faire ofter le bois mort, & couper aux deux, outroi- Gefme nœud , les ieunes iets qui pouf- fans de trop grande force, attireroient à eux f-ulstoutela Seue de l'arbre, & laif- feroient languir les vicilles branches, qui faute de nourriture mourroient en peu de temps, car tenez pour vRe ma- xime que la Seue monte toufiours aux jets les plus tendres, ) vous pouvez aufli au mefme lieu entremefler quelques Abrigotiers que vous gouuernerez de la mefme façon que les Pefchers & Pauies. La Baftardiere fera auffi placée en quel- que Carré de voitre Iardin le plus recu- lé du Logis, à caufe qu’elle vous cache- roit la veuë des autres carrez, paroiflant comme vn bois taillis. Lelieueftant deftiné, & la Terre bien nettoyée de toutes herbes & racines, vous ferez faire des trous tirez au cor- deau de deux pieds de large en tout fens, 8 de deux autres bons picds de profone | B ii) 3 LE TARDINIER deur, diftans de quatre pieds l’vn de l’au- tre, & lesrangs aufli éloignez de quatre bons pieds : vous prendrez des arbres erefiez dans voftre Pepiniere,& les tranf- planterez dans voftre gaftardiere , il n'importe que leietne foitqued vn an, iis feront affez bons à replanter : & pour les planter vous obferuerez ponctuelle- ment ce que i ay mis deuant au plantage des Efpaliers , quieft de mefler du petit fumier de vicille couche auec la bonne Terre, & faifant vne petite butteau mi- lieu du trou, y pofer l’arbe, eftendant les racines de-tous cofés, toufours ti- rant en bas , puis apres remplir le trou iufqu à la Greffe & marcher la Terre pour affeurer l'arbre. Vous noterés qu'il faut que la Greffe foit toùjours à affleurement de terre pour l’ornement de l'arbre, qui feroit defa- greable fi l’on voyoit le nœud où il aura efté greflé & particulierement en quel- ques-vns defquels la Greffe furpañle le Sauuageau en groffeur, & faite vn gros bourrelet à la foudure de la Greffe, ce qui cft fort defagreable. Quant aux arbres des Ffpaliers, & Con- tr'Efpaliers expofés au Midy, l’on peut enterrer la Greffe de quatre doigs plus bas que le Sol, pour auoir plus de fraif- 1108 * FRANÇOIS. 31 cheur, fans craindre qu'elle pouffe aucun Cheuelu à caufe de la fecherefle;& quand mefme elle enauroic ietté, le Iardinier en befchant y peut regarder , les couper & donner vn peu d'air au nœud, afin qu'il n’en poule point de nouueau. Vous obferuerez auffi que durant les grandes Chaleurs , fi vous voulés faire beaucoup de bien à vos arbres, ce fera de mettre autour dupied ( fans pourtant toucher à {arbre ) de la Fougere, ou du grand Fumier ; trois pieds tout autour de vos arbres, & quatre doigts d'efpois feulement , cela feruira à ombrager & entretenir la fraifcheur de la Terre, & auffi empefchera qu'eftant battuë de quelque grande pluye elle ne fe creual. fera, ce quiéuente fouuent l'arbre, & deffeiche les petites Racines, fi imme- diatement auant que de mettre ce Fu- mier, vous faites donner vn Labour à la Terre, ce fera vn double bien que voftre arbre enreceura :d’autant que elle s'en- cretiendra toufours meuble, & ne pouf- _ fera aucune mauuaife Herbe à trauers ce fumier. La baftardiere vous eft neceffaire pour trois raifons principales; la premiere pour auoir des arbres de prouifion, pro- pres à remettreenla place de ceux qui B üij Te LE TARDINIEN meurent, ou qui languifflans ne profitent point: fecondement pour dégager la con- fuñon qui pourroit eftre dans voftre Pe- piniere à caufe de la trop grande quanti- té de icunes arbres : la troifiefme fera pour enavucirà vendre, en recorm penfe dela premiere defpenfe qu'aurés faite à planter voitre Iardin : ils pourront auffi vous rapporter du fruit en ce lieu-là dont Vous tirerés grand contentement, & ou- tre tout cela, vnarbrereplanté pleurs fois eft beaucoup plus franc, que fi di- rectement tiré de la pepiniere, il eftoit placé en lieu à demeurer Ileftauffi de befoin que vous ayez vne Baftardicre pour les Arbres greffés fur Franc, comme Poiriers, Pommiers & autres, que vous voulés faire monter en granës Arbres de fix pieds de Tige, & 1l n'yaautre gouncrnement qu ‘aux prece- dens, finon’ qu'en tes plantant 1] faut couper Î : Piuot qui cft la maïiftreffe Ra- cine, &: dans be accroifflement couper à vn petit doigt pres du Tronc, les Bran- ches quitirent trop de nourriture, & qui feroient vn fourchon à l’Arbre, laiffant les petites, afin que le Tronc fe fortifie, en arreftant la Seueenchemin:Ilyena beaucoup qui fe trompent en ce rencon- tre, lefquels nettoyent vn Arbre de tou- FRANÇOIS. . - tes fes branches, iufques à la hauteut où ils veulent que Le faffe la Tefte, & font contraints d'y mettre vn Pieu , ou Eftan- con pour le drefler , & le garantir des grands vents, qui font plier &tordrele Tronc, à caufe de la charge qui eft à la tefte : cela empefche que le tronc n'en groflit pas fi toft, parce que la Seue ne faifant que pafler pour aller trouuer le nouueau , ne s'arrefte pas en chemin comme elle feroit, sil y auoit des ieu- nes branches 1] y a va temps pour ébourgconner, & arrefter les Arbres durant la Seue : les Bourgcons que l'on peut ofter, font ceux qui dans leur accroiffement donneroient quelque difformité à l’Arbre : car pour à fruit, 1l les faut tous jaifler. Pour diftinguer vn Bourgeon à fruit, d'aucc vnà bois, c'eft que celuy à bois, n'a qu vne feuille, & celuy à fruiten 2 plufieurs. L'on taille aufli les ieunes Iets qui pouffent de trop grande force , & qui par leur vigueur pourroient attirer toute la Seue d'vn Arbre, & feroient languir les Branches qui {ont defia toutes venuës: quand vous remarquerés cela, vous les arrefterés au deux ou troifiéme nœud ; & ce aprés qu'il aura pouflé la Seue. | B y 34 LE TARDINIER On rogne aufli la Seue d’Aouft, tant parce que l'Arbre s’eftendroit trop fans fe garnir, qu à caufe que vien fouuent ellene meurit pasauanti Hyuer, & lail- fe Ia branche affamée par le bout, qu'il faudroit neceffairement rogner à la taille de Fevrier. Si vous voulés faire à part quelquePlan, de grands Arbres, il faut de neceflité qu'ils foient greffez fur Franc. & non pas fur la Coignafle quant aux Poiriers, & fur le Pommier de Paradis quant aux Pommiers : car autrementilsne grandi = roient pas , mais demeureroient to“ à Jours bas de tige. _ Vousplanteres lesPomiers à cinqthoi- fesau moins, & les Poiriers, Pruniers, & autres à quatre : Vous obferuerés fur tout qu'ils foient plantés à laQuinconce, c'eftàdireen Lignes fe coupantes à An- gles droits. | L'on pourra femer dans ce Plan quel- ques Graines, ou Legumes, cela ferui- ra à les entretenir de Labour : car ie vous recommande fur toutes chofes de ne fouffrir aucune Herbe fauuage en tout votre Lieu, reftraignés-vous pluftoftà vnpetit, & le menagez bien, que d'en entreprendre vn grand & le laifferaffrai- chir faute de Labours : les grands lieux FRANÇO 15. 3$ fe font admirer, mais les petits fe cul- tiuent plus facilement ; & vous tirerez plus de profit d’vn petit lieu ménagé, que d'yn qui fera negligé. Des Gréffes, © ce qui e$t 4 objtruer pour les choifir bonnes. ECTION:V. T- y a vne grande fujettion à bien choi- ir les Greffes , car de là dépend que les Arbres portent promptement, ou font quelque-fois jufques à dix ou douze ans fans porter. Les meilleures Greffes font celles qui font au bout des plus fortes & maiftref- fes Branches d'yn Arbre qui a couftume de bien charger à Fruit, & que vous voyez difpofé à porter beaucoup cette année là : car de là dépend que les jeu- nes Arbres que vousen greffez, ont du Fruit dés la feconde où troifiéme année, par fois dés la premiere. Comme au contraire, fi vous prenez vne Greffe fur vn jeune Arbre qui n'ait pas encore porté Fruit, celuy que vous en grefferez ne rapportera de long- temps apres. La Greffe pour l'Efcuflon, doit eftre 36 LE JARDINIER cueillie dans Le mois d’Aouft en decours, & Greffce en mefme temps, pour regle plus certaine , en nes'arreftant pastant à la Lune, c'eft quand vos Sauuageaux & Francs, fonten la force de leur Seue: car l’Efcuflon eft toufiours affez bon; mais [e Sauuageau manque bièn fouuent à eftre difpofé à le recenoir faute de Se- ue, ce quiarriue quad l'Efte eft par trop {ec : qu'ils ne pouffent point ou fort peu en la Seue d’Aouft : C’eft pourquoy fi vous auez quantité d'Arbres à greffer, ne perdez point de temps, & commencez de bonne heure. Vous connoiftrez fi le Sauuageau eft au fort de fa Seue en deux façons : l'vne en incifant l'Efcorce auec le petit Cou- fteau, ou Entoir, & leuant l'Efcorce de FArbre, fi elle quittele Bois , il ya de la Seue : fi elle ne le quitte point, atten- dez qu’elle foit montée, car vous ne le feriez que gafter : l’autre eft quand on voit au bout des Branches des Sauua- geaux les Fueilles de la nouuelle Seue cftre blanches, ce qui témoigne que l’Ar- bre y eft. La Greffe pour l’efcuflon fera choifie du je de l’année , bien meure, & de belle venuë : car il y en a beaucoup qui font maigres par le bout, aufquelles à | Éd à | FRANÇOIS. 27 peine trouue-t'on vn ou deux yeux de bons ; vous la recueillirez proche du jet de l’année precedente, couperez le bout d'enhaut auquel vous ne pourr:z pren- dre d'Efcuflens, & couperez aufli toutes tes Fueilles jufques à la moitié de laqueuë: ce que je vous oblige à couper le bout de la Greffe, & les Fueilles jufques à la moi- tic de la queuë : & que vous les laiffiez, en fe fanant, cela defleicheroit tellement toute la Greffe, que l'on ne pourroit le- uer les Efcuflons d’auec le bois, & auff que tout le fueillage vous cft inutil. Si vous ne greffez que Le lendemain ou plufieurs jours après que vous les au- rez cueillies, vous mettrez tremper le bout d'enbas dans quelque vaifleau ( deux doigts de hauteur d’eau fufhfent ) jufques à ce que vous les vouliez greffer, & fi vous voulez en grefferle mefme jour, il n'eft befoin que de les tenir fraifche- ment dans quelques Fueilles de Choux, ou linges moüillez. Les Greffes pour la Fente fe cucilles dés le decours de la Lune de Ianuier, s’ap- pliquent au croiffant de celle de Fevrier: & continuant de Lune en Lune, jufques à ce que vous voyez que la Seue eftant trop forte dans le. Sauuageau en détache l'Efcorce d’auec le Bois. ”” ; Re es me UT OS | | + ee | ’ « 4 3 LE JARDINIER Pour bien choifir la Greffe pour la Fente, mon opinion eft qu il faut qu'il y ait du Bois des deux Seues de l’année precedente, dont le plus vieil fervira pour mettre dans la Fente, & le der- nier pouflera les Bourgeons ; je ne def- approuue pas que l’on ne greffe auffi le Bois où il n'y aura qu'vne Seue, mais l’Arbren’en portera pas fi toft du Fruit. Vous cueillerez vos Creffes au bout: des plus belles Branches, comme j ay dit cy deuant, & laifferez trois doigts de la premiere Seuc, afin detailler aife- ment voltre Greffe. Pour les conferuer jufques à ce que vous grefhez , il fufht de Îles enterrer à moitiétouten paquet, diftinguant pour- tant les efpeces, de crainte que met- tant deux Greffes de diuerfes fortes fur vn mefme Arbre, vous ne fufliez obli- gé d'en couper vn : d'autant que deux Fruits ne s'accordent jamaisbien fur vn mefme pied, à caufe que l’ynempefche l’autre de venir en [a perfeétion , luy dérobant beaucoup de {a Seue. FRANCOIS. 32 ÉNR ANn, . MNS u ee De la maniere de Greffer. SECTION VI. E n’ay remarque que quatre manieres de greffer qui foient necellaires, & dont on puifle efperer vn fuccez afleu- ré, les autres fortes eftant plus curieu- fes qu'vtiles 3 puifque par ces Quat® on peut greffer toutes fortes d’Arbres & Arbuftes. L’efcuffon tient le premier lieu d'au- tant qu'il s'applique [ur toutes fortes d Arbres & Arbuftes ;, qu'il eft le plus facile à faire, & rapporte pluteft du Fruit. La Fente fuit aprés & fe fait fur gros Arbres, & fur petits, jufques à vn poul- ce de diamettre. La Couronns ne fe place guere que fur des Arbres bien forts. Et l’Approchene fe pratique ordinai- rement que fur les Orengers ; Citroniers & autres plantes qui font dans des quaif- fes , lefquelles fe peuuent approcher ë joindre. Pour commencer donc par l’Efcuffon, voftre Sauuageau eftant dépoüillé detou- tes petites branches jufque à la hauteur LL" hot hihi mener ph dont SET 40 LE TARDINrTER _de demy pied, ou yn peu plus : dés le temps que l'ontailie les Arbres, ou bien à l'heure que voulez orcffer , vous choi- firez la plus belle place fur l’efcorce de Yoftre Arbre, & sil fe peut que ce foit du cofté des grands vents : parce qu'il en vient par fois de fi impetueux, qui décolent , les Efcuffons à caufe de leur tendreur & qu'ils font chargez de Feüil- les & de Bois; ce qui narriue pas fi or- dinairement quand ils font placez. du cofté des grands vents, que qnand ils font de l’autre cofté , quoy que Vous y mettiez des pailleaux pour les foufte- nir. Vous taillerez voftre Efcuflon affez long, comme d’vn poulce ou enuiron, & allez large, afin qu'il prenne tant plus de nourriture : le leuerez propre- ment, & regarderez par dedans fi le germe de l'œil ÿ tient : Car s’il eftoit de- meure au bois, d’où vous l’auez leue, il ne vaudroit rien : vous le mettrez ‘à Voftre bouche, en le tenant par le bout de la queuë de la Fuecille que je vousay fait laiffer exprés en cucillant les Gref- fes, puis vous inciferez voftre Sauua- geau , & leucrez doucement l’Efcorce aucc le manche de l’Entoir , fans frotter contre Îe bois, de crainte d’égratigner FRANÇOIS. 41 la Seuc qui eft deflus, vous placerez voltre Efcuffon entre le bois & l’Efcor- ce, l’enfonçant jufques à ce que le haut de l'Efcuffon fe joigne à L'incifion d'en- haut de voftre Arbre, & quil porte tout à plat contre le bois : cela fait Vous le lierez auec du chanvre, com- mençant à le ferrer bien ferme par le haut pres de l'œil, puis en tournant par bas , laïflerez fort peu de jour à l'œil, où finifant voftre lieure vous fe- rez le nœud. Prenez garde quand vous grefferez que ce ne foit ny pendant la grandear- deur du Soleil, ny durant le temps de | pluye : car l'Efcuffon ne peut fouffrir d'eftre moüillé, & fera mefmement en grand danger de ne pas reprendre, s'il peut les quatre ou cinq premiers jours enfuiuans que vous l’aurez greffé. I] y en a quien leuant l'Efcuflon, Îe- uent aufli du bois, cela fe faifant tout d’vn feul coup de coufteau , je ne def- approue pas cette maniere de greffer, je m'en fuis bien trouué ; car mes Greffes ont fort bien repris, & de plus, on n'eft pas en danger d’éborgner vn Efcuf- … fon , c’eft à dire de laifler l'œil de l’Ef- cuffon au bois de la Greffe ; ceux qui ont quantité d'Arbres à greffer , fe feruiront \ | TR A2 LE TARDINIER de cette maniere, dautant qu'elle eft expeditiue. Trois femaines ou enuiron apres que vousaurez greffe, vous couperez lenœud de voftre chanvre, afin que la Seue ait plus de pañfage. .* L'Hyuer eftant efcoulé, & l'œil dor- mant commençant à poufler, vous cou- perez voftre Sauuageau trois ou quatre doiots au deflus de l’Efcuflon, & cou- perez aufi la filaffe par derriere l'Efcuf- fon iufques à l'Efcorce, cela fe fait d'vn feul coup de coufteau de bas en haut. Vous nofterés point pourtant la fi- lafe d’autour de voftre Efcuflon, elle tombera aflés d'elle. mefme, & puis il y a danger qu’en l'oftant l’on abbatte le Rourgcon qui eft alors extremement tendre. Quand voftre Efcuffon aura pouffé tou- te fa premiere Seue, vous le rengnerez afin qu'il jette des Branches par lés yeux d'embas : autrement il monteroit fans fourcher, & par ainfi voftre Naim n'au- roit pas de grace. Le vray temps pour l'arrefter eft vn Decours , auant que la Seue d'Aouft poufle : fi vous voulés en mefme temps vous couperez le bois du fauuageau qu'aurés laiflé au deflus de l’Efcuffon, FRANÇOIS. 43 & couurirez la playe avec de la Terre franche meflée de Foin bien delié, fai- fant vne perire Poupée : vous la pourrez couurir plus proprement, avec vne Cire mefée, dont je vous donneray la com- poñtion cy-aprés. Si vous voulés attendre L'iflue de l’'Hy- uer enfuiuant pour couper l'Argot de voftre Arbre, vous ne ferez pas obli- gé de l’enuelopper , car Ja Seue mon- tant bien peu de temps aprés ; la recou- urira. - l'ay remarqué qu’vn Efeuffon appli- qué fur vn Sauuageau, ou Franc, qui cit de la groffeur d vn poulce, & au def- fus, ne pouife pas fi bien que fur vn plus jeune, & eft plus facile à décoler. | Il y en a qui efcuifonnent dés la pre- miere Szue, mais il n’auancent pas beau- coup; car l’Efeuflon ne pouffant qu ä la Seue d'Aouft, le jet n'en eft pas fi beau que celuy de l'œil dormant ; d'autant que bien fouuent le Bois du nouueau jet ne meurit pas, & l'Hyuer venant le fait mourir : c’eft pourquoy vous ne greffe- rés à la premiere Scue, fi ce n’eft vne grande neccflité. Pour la Fente ou Poupée, tous Arbres depuis la groffeur du Poulce , jufques aux plus grands y peuuent eftre greffez; 4.4 LE TARDINIER le temps le plus propre, eft depuis fe commencement de la Nouuelle Lune de Fevrier, jufques à ce que la Seue ( eftant trop forte dans les Arbres) fe- pare le Bois d’aucc l'Efcorce, alors vous ceflerés de greffer. Quand vous ercfferésen rente, fi c'eft pour faire vn Naim, 1l faut fcier voire Sauuageau à quatre poulces où enuiron pres de Terre; puis auec la Serpete ofter l'efpoiffeur d’vn Tefton du Bois, où la Scie aura pañfé, à caufe que le trait de Scie ne coupant pas nettement , la Seue ne pourroit recouurir ce Bois gratte, ny la Greffe fe joindre au Tronc, fi fon Efcorce n'’eftoit rafraichie auec la Ser- pete : Cela fait, vous fendrés voftre Ar- bre par la partie où l'Efcorce paroïftra la plus vnie, & moins noüeufe, & ob- ferverés de ne pas mettre voftre Serpette iuftement par le milieu de l’Arbre où eft le cœur du Lois, mais fort peu à co- Îté ; puis vous taillerés voftre Grefke, en aiguiflant tout Île vieil bois jufques au nouucau en forme de Coin, égale- ment de chaque cofté, laïffant les deux Efcerces attachées au Bois, car fi elles ne tenoient au Bois, la Greffe ne vau- droit rien ; vous rognerés voftre Greffe à trois ou quatre poulces plus ou moins AR SD RÉ... ‘ ; FRANÇOIS. AT {elon fa force ; d'autant que fur vn pe- cit Sauuageau , l’on n’en laiffe pas de fi longues que fur vn grand Arbre? Cela fait vous ouurirés voitre Sauuageau auec le Coin, qui fera fair de quelque Bois dur comme Buys, Ebéne, ou autre, frapant doucement deflus , puis vous po- ferés voftre Greffe au bord du Sauua- geau, en l'enfonçant fre au nou- ueau Bois ; & faites en forte , que les endroits par où pañle la Seue, qui font entre le Bois, & l'Efcorce de l’vn & de l'autre , fe joignent. Ayant pofé voftre Greffe, vous en mettrés vne feconde de l’autre cofté de voftre Fente, obferuant de mettre toù- jours deux Greffes à chaque rente, pour- ueu que vous les y puifliés placer fans {e toucher ; car elles recouurent mieux leur Sauuageau, & plus promptement, que s'iln' y en auoitqu'vne, à caufe que ja Seue monte également des deux co- tés, & ne laiffés mourir le derriere de l'Efcorce, comme j'ay dit cy-deuant: En aprés, vous couurirés ce qui refte de la rente entre les deux, Greffes auec vn peu d'Efcorce tendre , l'ajuftant cu- rieufement , afin que l'Eau ne puiffe en- trer dedans, puis vous ferés voftre Pou- pée auec Terre franche, & Foin bien AG LE TJARBINIER delie : a: cuns par deflus la Poupée met- tent de la moufle, & La font tenir auec deux Efcorces de Saule croifées , & les lient d'vn Ozier au pied du Sauuageau, pour conferuer d'autant plus la fraif- cheur, & empefcheri Eau d’ventrer. Quand vous grefferés de grands Ar- bres , vous prendrés les Branches les plus vnies pour y placer vos Greffes : fi elles font groffes, vous y en pourrés placer quatre, en fendant voftre Arbre en fi- oure de Croix, fans pourtant toucher au cœur de | Arbre : les autres Bran- ches que vous ne grefferés point feront fciées à demy poulce prés du Tronc, puis ayant ofté le Bots que la Scie aura ‘gratté, vous les emmailloterés de Terre franche, & ce aufli long -temps que l'Ef- corce fera à recouurir cette playe pour empefcher le hafle en Efté, & la gelée en Hyuer, qui entreroient par le cœur de l’Atbre à fon grand prejudice : il fe- ra bon de lier quelques Eïchaiats aux Franches greffées pour entretenir les jeunes jets & les parer des grand vents, jufques aprés La feconde Année qu'ils feront affermis : & s’il {e rencontre quel - que branche qui pouffle defagreable- ment, vous [a couperés, comme auffi le trop 4. Branches qui s'eftoufent l’vne … FRANCÇeIï1Ss. 47 l’autre, donnant de l’Air au dedans de PArbre. Et quand vous grefferés de petits Sau- uageaux qui n'auront pas [a force de ferrer leurs Greffes , vous aiderés au Sau ageau à le ferrer, en le liant prés de la Greffe auec quelque petit brin d'Ozier. _Quoy que cy-deuant je vous aye obli- gé qu à vos Greffes il n'y ait du Bois de deux Seues, neantmoins vous ne jette- rés celuy où il n’y en aura qu'vne, ny auffi les rogneures de ceux où aurés pris des Greffes de deux Seues, car ils font tres-bons, maisils portent du Fruit plus tard que les a:tres, & ne chargent pas tant, c'eft pourquoy fans neceflité vous ne vous feruirez que de ceux de deux Seues. Le greffer en Couronne, ou entre le Bois & l'Efcorce , ne fe fait point que {ur de vieils Arbres, dont l’Efcorce en- durcie peut fouffrir le Coin fans cftre fenduë; & lefquels ne feroient pas pro- res à faires vne Fente ( à caulé de l’ef- poiffeur de l'Elcorce ) fi ce n'eftoit à grande peine, & encor y auroitil de lincertitude à la reprife. Pour greffer en Couronne ; ayant fcié voftre Arbre à l'endroit où vous le vou- 48 LE lIARDINIER | lés grcffer , & retaiilé le traict de la Scie iufque au vif, particulierement à l’en- droit de ! Efcorce, vous taillerés vos Greffes par un feul cofté en aïguifant, puis frapperez vn petit coin de fer entre le Bois K l’Efcorce, & ayant retiré voftre coin, vous y placerez la Greffe, en l’en- fonçant jufques au haut de l’efguifure. Vous en pourrez mettre autour du Tronc autant que vous voudrez, pour- veu que par la trop grande quantité l'Efcorce ne fe fende. Quant au Greffe en Approche , il eft tres-facile à faire, car il n’y a qu'à pren- dre deux ieunes Branches, vVne de Franc, & vne de Sauuageau, fans les deftacher de leur pied, puis leur ofter à chacune enuiron quatre doigts le long d’'Efcorce, & de Bois, jufques approchant du cœur, les joindre en femble Le plus proprement qu'il Îe pourra, les lier auec du Chan- ure depuis vn bout de la Taille jufques x l’autre. & leur laiffer ainfi pañler les deux Seues : au bout d'vn mois, ou fix femaines, fi vous voyés que le bois grof- file, & que le Chanure l'incommode; & vous Le couperés fur le Sauuageau , en tirant vn feul traict de coufteau, comme j'ay dit à l’Efcuflon. Au commencement de l'Hyuer faudra couper FRANCOIS. couper ou feurer Le Franc de fa Mere, & rogner le tue du Sauuageau à deux poul- _ces prés de fon Greffe , par ainfi ces deux Brins ne faifans qu'vn Corps, le Franc prendra la nourriture du Sauuageau; Vous coturirez les playes de l’vn & de l’autre auec la Cire que je vous enfei- gneray cy-aprés. Vous ne jetterez pas au Feu les Bran- ches que vous aurez oftées des Coignaf- fiersqu’aurez greffezen rente ; car vous en pourrez faire la Bouture, qui dés la premiere année prendra racine, & fera mife en Pcpiniere pour eftré oreffée en fon temps : ce que vous émondrés de vos Coignaffiers durant l'Hyuer, fera aufli planté en Bouture. Les Branches de Pommier de Paradis que l'onappelle Fichet, reprennent aufli de Bouture. Pour planter toute forte de Bouture, vous ferez Vn petit Rayon, comme j'ay dit en la Pepiniere , ( quieft de la hau- teur & largeur du Fer d’vne Befche ) puis l'ayant bien efpluchée de petites Bran- ches ; & taillée par le gros bout en for- me de pied de Biche, c'eftà dire à deux coups de Coufteau en appointant, vous L coucherez au fonds de voftre Rayon, la plaçant fort prés à prés, d'autant qu'il + fo M LE TARDINIEZR en meurt beaucoup, & ferez fortir le petit bout d'enbaut, puis remplirez le Rayon, & le marcherez plulieurs fois en preffant la Bouture & La pliant fort: autrement elle prendroit de l'éuent: & quand vous la labourerez ce ne fera qu'a- uec la Binette, ii fufira que l'on empef- che l’Herbe de l'eftoufer. Vous rognerés votre Bouture toute d'vne hauteur à trois doigts prés de T'er- re, & ce quand vous verrez que la Seue commencera à s’émouuoir, faifant verdir les Bourgeons de voftre Bouture , laquel- le ne pouffe jamais , fi coft que le Plan chraciné. a Des Arbres, & Arbufles en particulier, Ae leur gounertement cÿ remedes 4 leurs maladies. - SECTION Vil. “Ay creu qu'il eftoit neceffaire de faire vn Chapitre feparé, qui comprift en dérail tout ce que nous auons diten gros aux Scétions precedentes : & ce pour : euiter toute forte de confufion : afin que : s il y a quelque chofe qui vous faffe peine . . % fr ii né te. des mes à + li de. dat MS) es ARS Las Rte > | | à | Là RS SL nt ot nn le FRANÇOIS. LL: À comprendre, {| quoy que je me fois cfircé de m'expliquer dans les termes les plas fimples, & les plus communs de noîftre Langue, pour eftre plus fa- cilement entendu de toutes fortes de perfonnes , & que chacun y puifle pro- fiter, que je le vous redife plus clai- rement , en particularifant fur chaque genre derruits, dont l'ont peuple le plus ordinairement les Tardins de noftre France. En premier lieu, je mettray les Poi- riers, comme portans le Fruit; dont il y a le plus d'efpeces que de tousles au- tres enfemble , & defquels le Jardin eft principalement orné par les Efpaliers, . Contr'Efpaliers , & Buiflons, efquels : l'on cueille des Fruits en leur matu- rité au moins pendant fix mois de l’an- née ; & que c'eft Le Fruit dont il yena quantité qui fe garde jufques aux nou- ucaux , fans dechoir de la bonté de fon Gouft, ny fans fe flétrir ; ce qui ne fe rencontre pas en tous les autres Fruits. Tous Poiriers fe peuuent greffer des quatres façons que j'ay dites, ils vien- nent merueilleufement bien fur la Coi- gnaffe & en Eicuffon : rapportent beau- coup plutoft , le Fruit eftant plus beau, C ij s2 LE lARDINIER plus peint, & plus gros que greffez fur le Franc, refcrue le Portail qui manque fouwentà reprendre fur la Coignafle , & veut eftre greffé fur le Franc ? le Grac- cioly, & la Vallée y font tres-propres, & s'ils ont efté auparauant greftez fur la Coignafle, c'eft encore mieux ; car le Fruit en viendra plus beau, & plus gros. Si quelque Greffe en Efcuflon, ou vente fur la Coignafle, manque à pouf- (er faute d’eftre reprife, & que vousju- giez qu'elle foit morte, laiflez repoulier le Sauuageau , il jettera quantité de Bois que vous élaguerez de toutes petites Branches, & l'Hyuer eftant à fa fin, vous les butterez en forme de grofle Taulpi- niere, laiffant fortir le bout des Bran- ches fans les rogner; des l'année mefme elles prendront Racines, pourueu que | vous ayez foin de les arroufer dans les grandes Chaleurs, & que vous ne laif- _fiez abattre la Terre par les Pluyes, la releuans à fa premiere hauteur ; & fi des l’année mefme vous trouuez que quelques - vnes de ces Branches foient affez fortes, vous les efcuflonnerez, fi- non vous attendrez l’année d'apres pour Jes efcuflonner toutes enfemble : & ce feront autant d'Arbres tous venus, que L FRANÇOIS. planterez en voftre Baftardiere l’année d'apres eu il auront pouffé leur premier jet les feparant proprement de leur Me- re, & lestaillant au bout de de la groffe Racine en pied de Biche. Vous obferuerez de les greffer à demy picdde haut pour laiffer de la Tige à vo- fire‘ Arbre, qui prendra Cheuelure par tout où il fera enterré. Si vous auez des Meres Coiïignaffes, & que vous en vouliez tirer des jeunes, vous plongerez les Branches dans Terre, & vne année fufhra pour les enraciner: fi vous en voulez faire des Arbres tout d vn coup, vous le pourrez par la mef- me maniere que je viens de vous mon- ftrer. : Le temps conuenable à plonger & butter ces Branches, eft à la fin de l'Hyuer. Les Pommierr tiendront Île fecond lieu , & fe peuuent auf greffer de quatre facons, ils viennent fort bien fur le ri- chetou Pommier de Paradis, & particu- lierement le Caluil y profite à merucille, & eft plus rouge dedans, que celuy qui eft greffé fur le Franc. Il y à quelques Curieux qui greffent le Caluil fur le Meurier blanc, & tiennent que le Fruit furpafle en rougeur tousles autres qui font greffez, ou fur Franc, ou C ii s4 LE TARDINIER fur Fichet. Les Pruniers le greffent ordinairement en Efcuflon, & en Fente : fi vous auez du Plan prouenant des Novaux , ou des jetsque les Racinés des Pruniers de Da- mas pouffent hors de Terre, vous en fe- rez de bons Arbres ; car ils chargeront beaucoup, à caufe qu’il n’y a aucun Pru- nier tel qu'il foit, qui charge plus que celuy de Damas, La Merizette { qui cft vne efpece de Prunier Sauuage, dont le bout des Bran- ches eft rouge ) n'eft pas bien propre à eftre greffée : car elle refufe beaucoup de Fruits, eftant fort incertaine à la re- prife. Les vieils Pruniers qui font des Bour- fes ou gros pacaners de menuës Bran- ches, feront rajsunis en les éteftancà la fin de l'Hyuer, & ils poufferont du nou- ueau bois qui portera dans l’année fui- uante : vous ferez des Poupées de Terre & Foin aux Branches coupées, & rafraif- chirezle trait dela Scie, ainf que j'ay dit par tout ey-deuant. Les Abricots fe greffent en rente & en Efcuffon , fur le Plan prouenant de leurs Noyaux, & fur le Prunier le Damas blanc, & ceux de Moyeu d’œuf, font venir les Abricots plus beaux & plus gros FRANÇOIS. s; ue fur les autres fortes de Pruniers. Les Pefches , Preffes & Pauies; fe gref- fent ordinairement en Efcuflon dor- mant, {ur le Pefcher, Prunier, ou A- mandier ; mais le Prunier eft à preferer aux deux autres, car elles durent da- uantage, & refiftent mieux aux Gelées & mauuais Vents, qui roüillent les rüeil- les & jeunes jets, les Pruniers blancs, ou Poictrons, n’y font pas bien propres, mais bien le Damas noir, Cypre, & Saint lulien ; ceux qui font greffez fur le Pefcher durent peu de temps : ceux fur l’Amandier durent beaucoup plus que les autres, & font le Fruit meilleur: mais il y a tant de difficulté à gouuer- ner l’Amandier en ce pays-cy, quil vaut mieux s’arrefter aux Pruniers : car l'A- mandier ne eut point eftre tranfplan- té, & eft en d’anger de mourir, fi l'on attend plus d’vn An aprés qu'il aura pouilé fon premier jet, ou deux années tout au plus, & encore lc faudra:il pla cer à demeurer, pour là eftre efcuflon- ne & n'en plus partir : L’Amandiereft auffi plus fujet à la Gelée que les autres, à caufe qu’il fleuric plutoft : tout l'a- uantage que lon en peut efperer, eft qu'il ne produit point de Rejettons au picd. ; C üiij 56 LF TARDINIER Les Cerifes, Bigärreaux, & autres #ruits femblables, fe gr ffent {ur le Me- rizier auec plus d'auantage que fur au- tre Plan : Le vray temps pour les efcuf fonner eft quand le Fruit commence à rougir, & prendre couleur : l’on efcuf- fonne aufli fur les Ceriziers qui tiennent du Sauuage, & dont le Fruit eft amer. Ils fe greffent fort bien en Fente, & pouffent de tres grande force. Mais l'Ef- cuffon vaut beaucoup mieux. Les Figues de toutes fortes, fe pren- nent de Marcottes pour plus grande fa- cilité & prompt raport; ce qui fe faiten paffant une jeune Branche de belle ve- nuë , à trauers yn boïfleau, ou manne- quin, l'empliffant de bonne Terre meflée du petit fumi r de vicille couche , afin qu'elle y prenne racine. Vous prendrez garde de bien accofter, & attacher le mannequin, de crainte que les vents , ou fa charge ne le ren- ucrfent. L'on prend aufli du Plan tout enraci- né , des jets qui fortent de Terre au picd du Figuier ; ou bien de la Bouture, que vous coucherez à la maniere que Jay dite des Coignaffiers, fans toutefois rien couper du haut de [a branche que vous plongerez ; carce boisquia grande FRANÇOIS. moëlle, craint fort l’éuent & l'Eau : vous le planterez à demeurer le plus jeune que vous pourrez, pour la feureté de la re- prife. A l’ifuë de l’'Hyuer , vous ferez ofter de deffus les Figuiers toutes les Figues qui n'auront pas meury, fans les laiflec tomber d’elle mefme : car auant qu'el’ les fuffent tombées, elle auroient attiré beaucoup de la Seue de Arbre, au grand detrimenr des nouuelles, qui faute de ce foin , bien fouuent ne peuuent s'acheuer de meurir. D'autaut que les Figuiers craignent extrémement la Gelée , vous ferez obii- ge de les-planter en quelque bon abry, oules mettre dans des quaiffes, quel'on ferre l'hyuer auec les Orengers. Des Orengers, & Citronniers, je Pen diray que le principal & plus commun gouuernement , qui eft de femer des Pe- pins dans des quaifles, & quand ilsau- ront deux ans Îles replanter dans d'au- tres quaifles chacun à part, lefquelles vous emplirez de bonne Terre, y mef- Jant du petit fumier , & de la Terre, glaize en poudre meurie par vn hyuer: quand ils feront aflez forts, vous les ef- cuffonnerez ou grefferez en approche des la paemiere Seue, vous ferez foi- C v s8 LE TlARDINITER gneux fur tout de les preferuer du froid, les mettant de bonne heure dans la fer- re, & pour Îles garantir entierement de la gelée, ferez faire du feu de charbon dans voftre ferre , durant les plus gran- des rigueurs de l'Hyuer, fi vous recon- noiffez qu'il y gele. Au commencement du Prin-temps, quand vous croirez que les gelées feront entierement paflées, vous leur ferez pren- dre l'air petit à petit, ouurañt premiere- ment la porte de la ferre à la plus gran- de chaleur du jour, & la refermant la nuit : enfuite vous ouurirez les fencftres, que vous refermerez auflila nuit, & les froids eftans entierement paffez, vousies fortirez de la ferre pour les mettre à l'air pendant tout l'Efté. “À mefure qu'ils grofliront, vous Îes changerez en des quaifles plus grandes, les leuant en mote, & razant le petit bout des racines auec quelque confteau, puis les placerez dans les quaiffes, auec de la Terre de la mefme façon que j'ay dit: Aucunsen les changeant de quailie en oftent toute la Terre la tenant pour vfée : mais cela détourne beaucoup de l’accroifflement de l’Arbre, carileft vne année ou deux à fe faire. LE Quant aux Fleurs, vous en pourrez FRANÇOIS. f9 cueillir tous les jours, de crainte quel- les ne noûent à Fruit, ou que par trop épanoüies elles ne fe perdent : vous en laifferez feulement quelques - vnes des plus belles , & des mieux placées pour auoir du Fruit ; autant que vous jugerez l’Arbre en pouuoir nourir. Les araignées ayment fort à v baftir leurstoiles, à canfe que les mouches s’a- donnent fur leurs Fleurs & Feuilles, at- tirées par leur bonne odeur, & fuc : c'eft pourquey l'on aura vne broffe femblable à celle dont on époudre les Tableaux, & l’on les broffera legerement. Les Arbuftes le plus communs font, les Grenadiers, Iaffemins, Roziersemul- cats, & autres, Cheurefucils, Myrthes, Lauriersordinaires, Lauriers-Cerizicrs, Lauriers-Rozes, Althea-frutex, Lilas, Rozes de Gueldres, Phylira ou Alater- ne, & beaucoup d'autres encor qu'il fe- roit fuperflus de mettre icy, nous ferons feulement vn petit difcours fur les prin- cipaux. Les Grenadiers, tant à Fleurs doubles qu'à Frait, fe marcottent en plongeant des branches dans Terre, & les laifant ainfi pañler l’année, ils fe trouueront fuffifamment enracinez auant l'Hyuer, pour eftre tran{plantez: [eur Bouture fera 60 LE TLARDINIER gouuernée comme celle des Coignafliers: ils s’efcuflennent , & fe greffent aufli en rente, en la faifon ordinaire : l’on en met dans des quaiffes, pour pañfer plus feurement l'Hyuer dans la Serre : on en plante aufli en pleine Terre , contre quelque mur où il y aura grand abry, car ils y viennent fort bien : les Grenades que l'onappelle de Raguignan, font les plus rouges, & Îles plus agreables au gouft, quoy que petites. Les [affemins communs blancs, & jau- nes, fe marcottentaufli, & ne font dif- ficiles à gouuernet, venans en toutes Terres fans grande culture : l’onentire des Sauuageaux pour efcuffonner le Jaf- min d'Efpagne, qui veut eftre mis dans des quaïfles ( à caufe qu’il eft fort tendre au froid ) pour eftre ferré l'Hyuer auec les Orengers. Vous le taillerez tous les ans ( à la fin de l’Hyuer) prés de fa Gref- fe, ne laiffant qu’vn œil à chaque brin pour produire les Fleurs, il ne luy fau- dra pas laïfler trop de charge, & l’on for- mera l'Arbre comme vne pétite tefte d'Ozier, luylaiffant vn pied de hauteur de tige. Les Roziers Mufquats s’efcuffonnent far l’Efglantier, & font de facile gou- uernement : Car il n’y a autre fujettion FRANÇOIS. 61 que les décharger du bois mort, & ar- refter les jeunes jets qui pouffent de trop grande force, & qui attireroïent à eux toute la Seue, laiflan: mourir les autres branches : il fe couche aufli dans Terre pour en tirer des marcottes, dont l'on fait des Arbres à part. Les Mirthes, Lauriers-Cerifers, & Lauriers-Rofes, fe plongent aufli pour en tirer de marcottes, 1l fufht que ce {oit vn peu auparauant la Seue d'Aouft, & faut navrer ou fendre le bois que vous mettrezen Terre à l'endroit d’vn nœud, jufques à la moitié de la groffeur de la branche, & enuiron trois ou quatre doigts de longueur felon la force de la branche : en fix femainesils jetteront vn cheuelu fufifant pour les fevrer, & tran{- planter : ils pouffent aufli du pied des pe- tits Rameaux tout enracinez, que vous pourrés feparer de la Mere. Les Lauriers-Ceriliers fe peuuent met- tre en Palliffades, & paffent bien l'Hyuer en pleine Terre. Les Lauriers communs, fe fement de Palaufte , ou graine dedans des quaifles, comme les Orengers : & dés la premiere, ou feconde année , fe replantent : fi l'on les place fous quelque égouft de roiét ( & non de goutiere ) à l’abry du Soleil de 62 LE LJARPINIER midy, ils viendront beaux à merueille: Aucuns les cachent de grand foarre du- rant les gelées; aufquels il font fort fujets. ARE Le Philifea ou Alaterne , {e feme auffi dans des quaiffes auant l’hyuer, & font miles dans la ferre, owies graines ger- ment & pouflent beaucoup mieux, que fi elles n’eftoient femées qu'au Printemps. Quand ils ont feulement demy pied de haut, l’on les peut replanter, & fouffrent d’eftre tondus comme les Buys, fans qu'il foient en d'anger de mourir. Pour lesautres Arbuftes, comme Al- thea-frutex , Arbor-judæ, Litas, & fem- blables , eftant des Plantes faciles à cle- uer & gouuerner, je pafleray par deflus, craignant de groflir par trop noftre Vo- lume , dont la leéture vous feroit peut- eftre ennuyeufe, parlons plutoft des ma- Jadies des Arbres ; & des Animaux qui les incommodent. De toutes les Maladies qui viennent aux Arbres, le chancre eft le plus dan- gereux : car il gerfe & fait mourir Îa partie de l’Efcorce où il s'engendre, & va toufiours en augmentant fi l'on ny remedie promptement , aufli toft que l'on s'en apperçoit ; fi bien que negli- gcant de viliter curieufement les Arbres; - FRANÇOIS. 6; on eh trouue fouuent de tous morts d'vn cofte ; pour remedier à ce mal, il lefaut cerner tout au tour dans l’Efcorce viue, jufques au bois, le chancre tombera de luy-mefme ,-ou bien vous le gratterez afin que l'Efcorce recouure plus facile- ment la place, il faudra l'enueloper peur duhafle, mettant dela bouze de Vache fur le mal. La Mouffe qui vient aux Arbres pro- uient ordinairement de quelque caufe de deflous, qui eft que les Racines trou- uent du Tuf, ou autre melchante Ter- re, cuelles ne peuuent percer pour al- ler chercher la fraifcheur , & par ainfi l'Arbre fe trouue bruflé & dépouillé de feuilles durant ies grandes chaleurs ; il n y a autreremede finon, que fi c’eftvn petit Arbre, il le faut leuerauec le plus de Terre que vous pourrez, & luy faire _vn beau trou de quatre pieds en quarré, mettre du fumier au fonds & le remplir de Terre , & petit fumier meflez enfem- “ble ; aprésquoy vous replacerez l’Arbre obferuant ce que j'ay dit cy-deuant, & il ne paroïftra pas qu'il aitefte leué : car il reprendra Terre facilement, pourueu ue vous ne laifliez deffeicher & éuenter . Racines. Si c'eft vn vieil Arbre, il faudra dé- PT sat Ms ve sf int , Ce EUR hmnlle est : ufr : CS 000% MS nt MGR RE ES 5x sie otlhémett. # 64 LE TARDINIER. chaufler auparauant l'Hyver, & déter- rer fes plus groffes Racines jufques à la moitié de leur groffeur , faifant vn grand cerne autour du pied de l’Arbre , & Île laifler paffer ainfi tout l’Hyuer (ainfique la Terre fe meuriffe } jufques au renou- ueau que remplirés le trou, meflant quel- que fumier bien confomméauec la Ter- re, particulierement le long des ract- nes. | Vousgratterez la moule de vos srands Arbres, auec vne plane, en doflant le- gerement leur Efcorce, & celle des pe- tits Arbres, auec vn coufteau rabbatu: su de bois : le temps le plus propre eft à l'iffuë de quelque pluye, ou à la rozée du matin: car durant la fecherefle, elle eft fi fort attachée, que vous ne la fçau- riez racler fans endommager beaucoup lPefcorce de l’Arbre, fi vous la vouliez gratter entierement. I] ne faut negliger cegrattement, car laiffant le moufle elle augmente toufiours , & eft aux Arbres, re qu'eft la galle aux animaux. La jauniffe on langueur que l'on apper- çoit aux fueilles des Arbres, eft caufeé par quelque bleflures, que les Taulpes & Mulots peuuent auoir faites en leurs racines, ou par le fer de la befche, ou bien qu'elles font fuffoquées par trop PRANCÇOIS. (6 } d’eau qui y croupit. Pour y remedier, 1} faut déchauffer l’Arbre de tous coftés, & le vifiter, fi vous trouuez que les Faulpes, Mulots, ou la befche l'ayent cfcorche , ou fait quelque dommage en fes racines, vous les couperés bien vniment en picd de Biche, au deflus & proche de la pluye, puis mettrés au fonds du trou des fuïes de cheminée, pour étranger ces beftio- les, & le remplirés de bonne Terre mef-- lée de petit fumier: & lice font les eaux qui y croupiflent , ilne faut que faire vne tranchée plus bafle pour les écou- ler. Pour prendre les Taulpes, aucuns enfoüiflent dans la Terre vn pot à beure au chemin par lequel elles ont accou- ftumé de pañler, enfonçant le pot deux doigts au deffous de leur trace, & en pañlant elles {e laiflent tomber dedans ce pot. Autres fe {cruent d'vn canon de bois de la groffeur du bras prés le poi- gnet, & de la longueur de deux pieds, lequel a vne petite languette de fer blanc, à quatre doigts prés de chaque bout, qui eft attachée au canon auec vn fil de fer, vn peu penchante par le bas vers le m1- lieu du canon, afin que la Tauipe en- trarit dedans, & pouflant la languette 66” LE TlARDINITER n'en puifle plus refortir, ny par vn bout, ny par l’autre : l’on le mettra iufte au chemin que l'onauraveu, nouueautra- cé, les deux bouts refpondans le plus proprement que l'on pourra aux deux trous qui feront à la trace : d’autres pour eftranger ces animaux de quelqu endroit où l'on les verroit bien obftinez, font vne petite enceinte de bois de Sureau, qu'ils fichent dans Terre à demy pied de profondeur : le plus feur eft de guet. ter le matin & le foir, quand elles tra- uaillent à faire des buttereaux , ou taul- pinieres, & les enleuer adroitementauec la befche : fi vousen prenez quelqu'vne en vie, vous la mettrez dans le pot à beurre, car l’on tientque par leur petit cry elles appellent les autres, quivenant par la trace déja faite, ne manquent à le laiffer cheoir dans le pot. On les affomme auec van maillet où il y aura des pointes de cloud longues d'vn doigt ( lequel fera emmanché vn peu Jong }en frapant furla taulpiniere, alors qu'elles trauaillent, £ fouillant prompte- ment aucc la befche, l'on ne manquera de les trouuer percées, ou eftourdies, ou mcrtes. À Les Mulots fe prennent en faifant auec du foarre vne petite hutte , comme la FRANCOIS. 67 couuerture d'vne ruche, mettant deffous quelque terrine, on chaudron plein d'eau jufques à quatre doigts prés du bord & jetter par deflus l’eau vn peu de paille d'Auoine pour la cacher, ils y viendront pour fe veaurrer ou y chercher quelque : grain & ils {e noyeront, il eft bonauffi de mettre des clanes de Bled ou d'A uoine : qui pendent au milieu du chau- dront fans y toucher, car ils iront pour manger & fe laïleront tomber dans | l'eau. | … Si vous voulez les empoifonner, l’Ar- fenic broyé mis dans quelque graifle les fera mourir, mais il eft dangereux que ! vos chats lestrouuant morts ne les man- gent, ce qui les feroit auf mourir, fi ce n'eftoient à l'heure mefme, ils langui- | roient quelque temps &erfin n'en écha- peroient pas. Les vers fe mettent auelque-fois en tre le bois & l’efcorce de l’Arbre. fi vous * pouüiez juger où ils font pour les tirer fans faire grande incifon, vous les ofte- rez proprement. Il y a d'vne autre efpece de petits vers que l'on appelle coupe-bourgeons, qui s'engendrent au bout des jeunes jets, &. qui font mourir tout le haut : pour ceux- là ils font aflez aifésà trouuer, en cou- 63 LE JARDINIER pant la jeune branche jufques au vif, Vous ne manquerez de les rencontrer. Les puceons-vers qui mangent les jeu- nes jets à mefure qu'ils pouflent, font fort difhciles à eftrancher, fi ce neft en la barboüillant de chaux viue recente- ment efteinte : vne brofle de Peintre de la groffeur d'vn bon poulce , fera propre à cét cffet. Les fourmis s’eftrangeront de l’Arbre où ils s'attachent, fi vous y faites vne ceinture au Tronc de Ie largeur de qua- tre doigts auec la Laine fraichement ti- rée de deflous le ventre d’vn mouton: où fi vous le graiflez de parcille [largeur auec du tarc, qui eft vne gomme noire de laquelle on frotte la galle des mou- tons : il ya vn autre moyen moins iale & plusfacile, qui ef de faire des petits coffrets de carte percez en pluficurs en- droits auec vn Poincon, & que dedans il y aît de l’appas fait auec Abe broyé bien delié, & miel meflez enfemble : ces coffrets feront pendus à l’Arbre, & les fourmis allant manger cét apas, s'em- poifonneront, & mourront : vous pren- drez garde de ne faire les trous fi grands, que les mouches : miel y puiffent entrer, car elles mourroient aufli. | Vne bouteille de verre dans laquelle il DA FRANÇOIS. 69 y aura eu du micl, ou autre liqueur (u= :# crée , fera attachée à l’Arbre, tous les fourmis entreront dedans vous la bou- cherez, & la porterez à la maïfon, où là auec de l'eau chaude vous la lauerez, & tuërez tous les fourmis, puis vous y remettrez quelque liqueur fucrce, &la reporterez à l’Arbre, ce faifant vous tuë- rez jufques au dernier fourmy. Les limats à coquille feront facilement pris derriere les fueilles les plus proches des Fruits, que vous verrez qu ils auront manchez pendant la nuit : caril fe trouue par fois des Fruits qui font mangez juf- ques à la moitié en vne feule nuit, l’on croit que c'eft la Foüine , & les Rats ve- | rets, ouLers: maiscencfontquedesli- : mats, qui eftansen grand nombre man- | gent autant qu vn de cesanimaux. | { ? FU, RNA ho Sr asértee der Vhdéar 284 don ntm An) Vous ne détacherez de l’Arbre les Fruits que les limats ou autres beflioles aurontentamé, car ilsnetoucherontaux autres qu'apres que ceux-là feront entie- : rement mangez. x ; Il y a d’autres limats-noirs fans co- quille. qui font faciles à ofter : car ils s'attachent au deflus des fucilles & les rongent. | + Pour ce qui eft des cloportes, perce= orcilles , martinets, & autres petits in-. 70 Le TARDINIER feétes qui gaftent les Arbres : On met- tra des ongles de Bœuf, Mouton, & Porc au bout de pieux, ou fur Îles oziers qui lient les Efpaliers , & Contr Efpaliers: dés le grand matin deux hommesiront à cette chafle auec vn chauderont, l’vn leuera doucement, mais promptement ces ongles, & les frapant au dedans du chaudront , cès beftioles tomberont, & l'autre les écrafera auec vn pilon de bois, decrainte qu'elles ne fe fauuent.s Quant aux chenilles, elles font tres- faciles à enleuer durant tout |Hyuer, oftant les pacquets que l’on verra aux branches des Arbres, & les jettant au | feu : ce que vous auriez grande peine à | faire , vous les laifliez éclorre : & en | | # cas que vous en ayez oublié quelques- vns par meégarde, & qu'ils éclofent, ne negligez pas de les ofter en leur jeunef- fe, quaud par la fraifcheur de la nuit, ou par queique humidité, elles feront amaflées toutes eft vn moncceau : car au grand Soleil, & au haut du jour, elles fe difperfent par tout à l’Arbre. Vous quitterez toute forte de befogne pour courir à celle-là, comme la plus ne- autres Mois [uinans iufques aux nouuelles, Ezy. Bon-Chreftien tardif. Gros Chreftien. Calo rozat. Chefne-gallon de plufeurs fortes. Double-fleur. Gaftelier. Gros Kairuille. : Liquet. | Longuc-vie. Longue-vertes. Mufc.. Parmein. Pucelle d'Hyuer.: Rille. Safran d'Hyuer.. Sans P air. - De Thol. Gros T rouué. Petit T rouué. Pommiers hafhifs. Anoueulles. Caluil blanc. Caluil clair. Caluil rouge. FER | Le. Ç n- È * à Le Lee à <= k : L) “4 = _+ 0 £ VS 2 | 7. nn 18: Le SA LE TARDINIER: Comoifes blanches, Carmagnolles. Chaftaignier tendre. Cliquet. Petit Courpendu rouge... Gros Coufinot. Coufinotes longues: Confinotes rondes. L'Enfer, ou Noires. Efcarlatte. Efpice. Fleur de May. Framboisée. Giradottes. Glacées. Gros œil. De Jacob. Lugelles: Mägdelaine. 1 Mignonne. De Neige. Noftre-Dame. Oblongues liflces. Orgeran. | Pafflcpommesde pluñeursefpeces. . Pommaffes : Rambourg Ü à blanc. x Ty Der LA = 74 We À y" << L es NES 5 PP ME CE 0 hu “à PARTS T1 € Rozéc. Groffe rouge de S cptembre. FRANÇOIS. Rouges tendres. si fear de deux fortes. Pommes à troches. De Vignancourt. _Violettes de Mars. Pomme: de Garä:. GE Apis. Fetit Apis.- ÆApicles, Apium., Babichet. Gros blanc. Blanches Glacées. Petit Bon. De Fretagne be Dé Bretagno rouge. De Cardinal. - Camuefas. Chaftaigner d’ yuer. Citron.” Coqueret de ue fortes. . Courpendu dur- _ Courpendu rouge, Courpendu roux. - Dieu. Doursttes.. 86 LE IlArpinrzr. Drap d'Or de Bretagne. Eftrangeres. Fenouillet blanc. : Fenoüillet roux. De Fer. Groffle Femme. Haute bonté. Hurluua. Fayet. De Iudée. De Malingeres: Mattranges. Pafle-Pommes d'Hyuer.. Pigeonnet. Poires-Pommes. Raëflées. Reinette d'Auuergne. KReinette de Mafcons. Reinette grife. Reinette platte. Robillard. Rouzeau d'Hyuer. De Rofes. Pommes fans fleurirs … Santé, De Scigneur, Vermillon. | | . s # ARE va PE, | en | 8 $ : "et | 27 Be , 1e ‘à PA, es s ° CRM UT 10 - PEER. EE, 78 : : ER ANÇOIS. Pruniers hafhifs G sardifs. _ Bricotées. Abricotines.. Ambre. Gros appetit. Beflonne. Blanches de Touflaints.. Bloffes. Bonnes à Noël. Brignolles de Prouence. Brignolles citronnées. Cerizettes blanches. Cerizettes rouges... Citron rondes. Citron pointuës, Cœur de Pigeon... De Cypre. D’Amandes. Gros Damas blanc. Gros Damas double. . Damas gris tardif. , Damas noir haftif. Damas noir mufqué. Damas violet. Dattes blanches. Dattes rouges. ELITE Grofle Datille, “E,41 Darilles. L Éd a! ‘4 bo - : FR ’ É 1% SE pe "NE 5 Î ) + LA on y EM: * TORTUE AZ 88 LE LARDIENI ER: Diaprée blanche & noire. D'Efcarcelle. À fleur double. Haute bonté. Grolffe Imperiale. Imperiale rond. De Ionuille. Iorafes. Ifleuert. Maximilianes.. De Merville. Mirabelles. Mirabolans. Miroir. Moyceu d'œuf. Moyeu de Bourgogne. De Monfeur. Montmiret. Mufquée. Palle veloux de Valencay: Perdrigon blanc. Perdrigon noir. Perdrigon rouge. Perdrigon tardif. Perdrigon vert. Trés-gros Perérigon violet. _Poitron. Raïfnettes ou Prunes à grappes. . ca _ De la Reine Claude. Lt Rognon de Coq. _ an * « _… FR'AN‘ÇO:1S, De Rome. Rondes tardiues. Roy de Brelfle. S. Anthonin. Sainte Catherine. S, Cir. S. Iulien blanc. S. Iulien noir. Grolles Saluces de deux fortes. Sans noyau, Simiennes. Trudennes noires... Trudennes rouges. Des Vaccations. De Vendanget noires, Verdaces, Péfthers & Patiies ee Roffes Alberges. _F Petites Alberges, - Alberges de Prouence. Aubiçons. Pelches- Amandes. Pauies d'Ambre. Angeliques. Aüant-Pefches blanches. Auant-Pefches jaunes. Gros Brignons de Bearn. ‘ Brignons mufquez. 8 9. | 1 | | | | | so Le JARDINTER Pefches Cerifes. Pefches de corbeil. ‘ Dure d'Hyuer. À fleur double. De Gaillon trés-belles. Pauies jaunes. Pauies de Magdelaine. Pefches de Magdelaine: Mircotons blancs. Mircotons jaunes. Mircotons de larnae. Pefches-noix.. Parcouppes.. De Pau. Pefches-prunes. Pauies-raues. Pefches-raues. Perfiques. Perfilles. Roffines. Scandalis blanc. Scandalis noir. Toute jaune. De Troye. De vigne fromentée.. Violettes. FRANÇOIS. ga Cerifes, Bigarreaux &* femblables. JIgarreaux. Cerifes blanches. Cerifer à fleur double. Cœurs. Griottes. Grindoux. Guines blanches. Guines noires. Merizier à fleur double. De Montmorency à courte queuë, Precoces. À trochets. De T ouflaints, F igu es, Lanches. Bourjaffotes. Bourno-Saintes. Fleur. Gourrauau de Languedoc, De Marfeilles. Naines blanches. Naines violettes, Blanches. Violettes. RE ne à CE Lr TARDIN1Ex% Orengers. Igarrades. JDe la Chyné. D Efpagne. De Gennes. De Prouence. Citrons Imonchailli. Limoni Cedri. Eimoni Dorfi. Limoni di Gauita:. Limon doux. Pommes d'Adam. Poncilles. Spada fora à feuiiles de Laurier: Æatres Arbres curieux. . Rboufier. €Y% Azarollier. Carroubier. Cornoüiller. luiubier. Mirabolans d'Afrique: Nefles fans noyau. Piftachier. Vinottier {ans pepin, 193 LE IARDINIER FRANCOIS | 8 SECOND TRAITTE: Des Melons, Comcombres , Citrouilies, autres efpeces femblables. . SECTION PREMIERE. Vi1sQvx les Melons font les plus precieux Fruirs que vous pouuez recueillir de voftre lardin Pota- -gèr: [Left fort à propos de les mettreen cefte de ce Chapitre, & vous donner yne inftruétion trés-ample de quellefaçonils fe doiuecut gouuerner , particulierement au Climat de Paris, qui cft celuy du- quel je me fuis propofé de vousefcrire, Jaiffant les autres qui par leur differen- ce vous pourroient apporter du doute, : 1 SPORE A > À Lr lAnDInNTER fi je confondois la maniere qu'ils s'éle- uent és Païs chauds, auec celle du ne. fire qui eft temperé & plutoit froid à l'é- gard de ces Fruits délicats. Pour paruenir à noftre intention, qui eft de les auoir bons , vous ferez foigneux -de rechercher des Graines de tous coftez ( d'Italie, de Lion, de Tours, d'An- jou, de Champagne, & autres lieux où on fe pique de bonne Melonniere ) & de toutes les efpeces, comme Sucrins, Morins, Melennes, Grenots , ‘blancs, ouuragés, ou brodés, langés & autres, mefme de ferrer celles dont aurés man- gé le Fruit qui vous aura femblé debor- ne Seue : car tel les aime d'vn gout, que l’autre rejectera & tiendra pour def- agreable ; l'un aimera à les manger vn peu verds , & l’autre Îes voudra fort meurs ; c'eft pourauoy vous vous en four- nirés des efpeces où fe portera particu- lisrement voltre appetit , & remarquerés ceux que voftre Terre nourrit le mieux, & meurit le plutoft ; c’eft où vous vife- rez {ur tout, car bien fouuent dés le mois d'Aouft il vient des pluves qui les per- dent entierement, les rendans fans odeur, fans faucur , fans couleur, pleins d'eau, incapables d’eftre mangés, & meuriflans tous d'vn mefmetemps, n'efanspropres | FRANÇOïSs, s; qu’à donner aux Cheuaux qui les aiment extremement ; bref ces pluyes dépouil- lent, & font cefler voftre melonniere, où l’on aura pristantde foin ; &le tra- uail de cinq ou fix mois fe trouuera per- du, fans en auoir eu le contentement que vous en efperiez : C’eft pourquoy, il vous faut effayer d'en auoir de bonne heure pour preuenir ces mefcontentemens. Aux païs où l'on en fait beaucoup auec peu de foin , les mettans en pleine Terre comme l'on feroit vn chou ; fi toft qu'il eft venu des pluyes ils n'en mangent plus ,. & .croyent que ce leur feroit du poizon. Pour commencer donc voftre melon- giere , vous choilirés dans l’enceinte de votre lardin le lieu le plus à l’Abry du mauuais vent, que vous clorrés d'vne haye faite aucc du foarre long, lié par paillafons , & que vous affermirés & ar- refterés bien auec de bons pieux fichez daus Terre, & accoftez, de crainte qu'el- le ne foit renuerfée par les veuts; il y au- ra vnc porte pour l'entrée, qui fermera à clef, empelchant que toutes fortes de perfonnes n'y aillent toucher ; & parti- culicrement pour en interdire l'entrée aux Filles & Femmes, en certain temps que le refpect m cmpefche de declarer. 96 LE TARDINIER | La figure qui eft au commencement de ce Traité, vous fera facilement com- prendre de quelle maniere vous deuez clorre voftre melonniere. Dans ce parc qui fera detelle grandeur que defirerés auoir plusowmoins de Me- lons , vous ferés des couches de fumier de cheual , qu'aurés amaflé durant l'Hyuer, à mefure que l’on le tire de l'Efcurie, &z que vous aurés fait mettre en monceau proche de voftre melonniere. Dés le mois de Feurier, vous commen- cerés par dreffer vne couche pour les Se- mences, prenant du fumier fortant tout chaud de deffous les cheuaux, & de ce- luy qui fera°en monceau les entremef- lant enfemble, afin que le chaud rechauf- fe l’autre. Vous ferés voftre couche toute de la longueur de fa melonniere , de quatre pieds de large feulement, laiffant vn fen- tier tout autour de trois pieds de large pour y remettre du fumier chaud quand vous vous apperceurés qu'elle pourroit auoir palñie toute fa chaleur, & qu'elle fut morfonduë. Cette couche eftant dreffée bien éga- lement, & pilée auec les pieds pour !a faire échauffer ; vous mettrés par dellus enuiron quatre poulces de haut de bon terras FRANÇOIS. 97 terras ou petit fumier de vieille couche meflé auec quelque peu de la meilleure Terre que vous ayés ; vous la drelferez tout à l’entour entenant vn ais fur le co- té au bord de la couche, & foulant vn peu de terras auec la main contre l’ais, | QE l'affermira & le dreffera-on vniment. Voître couche ou forme eftant ache- uée, & de la hauteur de trois pieds ou enuiron, vous la laiflerez échauffer & pafler {a plus grande chaleur, qui durera ‘deux ou trois jours, plus ou moins, felon que !: temps y fera propre : La for- ce de fa chaleur eftant pañlée, ce que vous reconnoiïttrez par la couche qui s'af- feffera, & aufli en fourant voftre doigt dans le terras, vous jugerez fi elle eft propre à femer, car fi vous n'y pouuez durer le doigt, elle eftencore trop chau- de : il faut qu'elle foit feiche, maisnon : pas toute froide, & en cas qu'elle euft pallé toute fa chaleur & fût morfondué, vous larechaufferez , en mettant dansles ‘ fentiers du fumier tiré chaud de deflous . Îescheuaux , comme je viens de dire. La couche eftant en bon eftat, & vo- ftre graine ayant trempé deux fois vingt - quatre heures dans de bon vin ou vinai- gre, ou bien du laiét de vache, met- tant chaque cfpece a part, vous la feme- Y, 98 LE TJARDINIER rez (ur vn bout de voftre couche, refer- uant le refte pour les autres graines que je diray cy-aprés. Vous ferez fur voftre terras de petits traits auec le doigt en trauers de voftre couche, diftans de fix poulces, & les plus droits que vous pourrez ; ou bien vous prendrez vn bafton bien droit, & le pofant fur voftre couche appuyerez deflus,il marquera fufhifammentle trait. Sur chaque trait, vous ferez fix trous dans voftre terras, en enfonçant le bout de vos doigts jointsenfemble en forme de cul de poule ; & dans chaque trou y met- trez trois ou quatre grains de melon, tout d'vne efpece. Sur l’interuale de cét efpace de demy pied que je vous ay fait laifler , vous y femerez de la laidtuë pour manger en fa- lades nouuelles, & du cerfueil en quel- ques vnes: Vous femerez aufli du pour- pier fur le bord de voftre couche tout au- tour ; ces herbes leueront, & fortiront hors de terre en fort peu de temps, & {cront arrachées toutes jeunes, de peur d'étouffer les plantes de melons, cela leur feruira de farciement & labour tout enfemble. ke DU Vous couurirez voftre couche tontes : Is nuits & dansle mauuaistemps, auec FRAX ÇO1s. ge les paillaflons qui porteront fur des tra- uerfe; d: bois, de la groffeur d’vn ef- chalats, lefquelles feront foutenuës auec des fourchettes fichées dans terre, au bord de la couche. On laiffera demy pied ou peu moins _d'efpace entre les paillaffons & la cou- che, & en casqu'il furuint quelque ge- lc, ouneige , vous boucherez toute l’ef- pace qui fera entre voftre couche & les pailladons, auec du grand fumier for- tant de deffous les cheuaux , iufques à ce que le maauais tem ps foit paflé. S1 voftre graine Le brüloit par la trop grande chaleur qui {eroit en la couche, _( ce que vous reconnoiltrez en peu de temps, car elle doit leuer p'omptement.) vous refcmerez tout de nouueau, en la rechauffant par les coftésauec du fumier bien chaud. Le viay temps pour femer [es pre- miers melons, eft en la pleine Lune de Fevrier. Quand ils feront leuez, vous les cou- urirez aucec des verres À boire, laiffant quelque peu d’air entre la terre & le Verre, de peur que le Plant s’eftouffanc ne jaunille. Vous les laifcrez croiftre Jufques à [a quatre on fixiéme feuille auanc que delcs replanter, E i) 10 O0 L E JA 'RBPNrER L’on les replante en trois façons : La premiere {ur des couches, que vous fe- rez à cofté de celle à efleuerle plant, & toutes femblables : Vous ferez des trous dans le milieu de ces couches, de quatre en quatre pieds, & dans chacun y met- trez enuiron demy boilfeau de terras, fans qu'il foit befoin d’en mettre par tou- te la couche, & dans ce terras vous y planterez vos melons, les ayant leuez de deflus voftre forme, auec la plus grof- fe motte que vous pourrez : Le foir à So- leil couchant & apres, fera le vray temps que vous prendrez pour ce faire, & s’il fe peut que ce foit par vn beau jour, vo- ftre plant s’en portera micux ; vous luy ferez vn abry, à ce qu'il ne voye le So- leil de quatre ou cinq jours enfuiuans* vous les arrouferez les premiers jours apres que vous les aurez replantez, afin qu'ils prennent Terre, & s'accroillent. promptement. Vous y mettrez des cloches de verre, qi y feront jufques à ce que le Fruit foit déja gros & autant de temps que la plan- te pourra tenir deflous la cloche laiflant toüjours vn peu d’air entre [a cloche & la couche, de crainte d'étouffer la p'ante. Depuis Les dix heures du matin, juf- FRANÇOIS. 101 ques à quatre heures apres mydy vous pourrez leuer vos cloches de deffus vos melons, pour les fortifier contre le mau- uais temps, & vous les recouurirez fur le foir. I] arriue par fois des grefles qui caf- _fent toutes les cloches, c’eft pourquoy l'on ena de faites auec du foarre pour cou- urir celles de verre, en cas que l'on voye venir quelque orage, & pendant la nuit pour €uiter tel accident. Quelques-vns font faire des cloche de Terre ; mais je ne trouue aucune raifon en leur procedé : car le Soleil ne penet- tre pas cette Terre; comme il fait à. trauers le verre, ils peuuent dire que c’cft pout la nuit feulement , & contre la grefle, en ces cas là ils ont quelque raifon. Vos melons fe fortifians, vous chof- - rés les principaux jets, ( qui ferontau- tant qu'il aura germé de grains ) lesau- tres rejets vous les châtrerez: & quand vous verrez qu il y aura trois où quatre melons notez fur chaque jet, vonsarre- fterez fa trainaffe, la rognant vn nœud au deffus de celuy où eft le Fruit; vous eftsndrez {ur voftre couche de cofté & d'autre les jets de la plante, pour à leur aife pouuoir nourir le Fruit : quand ; E 1j 162 LE JARDBINIER il fera de la grofleur du poing, vous ne les arrouferez plus, fi ce n’eft dans vne excefliue feichereffe , quand vous ver- rez les fucilles fe brüler, & la plante s'échauder : en ce cas vous donnerez quelque peu d’eau à chaque pied lan- guiffant. Vous mettrés des thuilleaux deffous vos melons, afin qn'ils fe faconnent, & auancent de meurir par la reflexion que le Soleil fait fur la thuile, ce qu'il ne feroit pas fur le fumier, outre ce ils feront plus feichement , & participe- ront moins de la mauuaife qualité du fumier. Vous ne fouffrirez qu aucun petit jet nouueau , tire la Seue de la plante, mais vous le rognerez, fi ce n'eft que voitre Fruic fut trop découuert, & qu'il eût befoin de quelque fucille pour fauori- {er fon accroiflement, de crainte qu'il ne s échaude. La feconde methode de tranfplanter les melons, eft de faire dés la fin de l’E- {té des foffez de deux pieds de haut; fur quatre de large ( les Tourangeaux les appellent des Anjoux) & laiffer vneef- pace de trois piedsentre deux pour Jjet- ter les terres, que vous accommoderez æn dos d’Afne ; puis dans le foflé vous y FRANÇOIS. 103 mettrés de bon fumier, terrier bien pour- ry, & les curures des foflés, tirées de deux ou trois ans, & meuries par les pluyes & gelées. Au mois de Mars, l'Hyuer ayant bien meury le tout, vous ferés befcher, & ‘bien mefler laterre qu'aurés mis en ados, . auec les fumiers de fofé , y adiouftant de nouueaux fumiers bien pourris, & rem- plirez entierement voftre foflé : Vous empefcherés aufli l'herbe d'y venir, iuf- ques à ce qu’en la faifon vous y replan- tiez les Melons, en la maniere que 16 vous viens de dire. 11 y a vnetroifiefme façon bien plus fa: cile , dont ie me trouue aufli bien qué des deux premiers, & 1ay tous les ans eu des Melons en quantité , & de haute feue ( mais i’en attribuë la principale caufau fonds de mon Iardin, qui ef vn fablon amende des long-temps ) On n y fait autre chofe, finon de donnér deux ou trois labours à laterre,deuant&apres l'hyuer; & au temps de replanter, On fait des trous au milieu des planches, dans lefquels on met à chacun vn boif- feau de petit fumier de vieille couche, & dedans on plante comme ie vous ay enfeigné cy-deuant. Si pendant les excefliues chaleurs,vous | E ïiij | 4 104 LE TARDINIER voyez que vos Melons patiflent par trop de foif, & s'efchaudent { comme l'on dit ) il fera bon deleur donner à chacun pied vn arroufoir d'eau, mais quece ne foit qu'à l’extreme neceflité, & rarement. = Pour fçauoir quand voftre Melon fera ‘bonàcueillir, vousreconnoiftrés fa ma turité quand la queuë femble fe vouloir détacher du fruit, quand ils commen- cent à jaunir par deflous : quand le petit Jet qui eft au mefme nœud f defleiche: ê&c quand en les flairant vous y trouuerez de l'Odeur : mais ceux quiont couftume d’eftre dans les melonnieres, le iugent à l'œil , remarquans vn changement de couleur au fruit, qui le tefmoigne eftre en fa maturité par vne iaunifle qui eft entre les coftes. Les melons qui s ouuragent ou bor- dent, font ordinairement douze ou quin- ze iours à fe façonner, auant que d'e- ftre meurs- à Pour la cueïllette, elle fe fera amefure qu'ils fe tournent: fi c'eft pour envoyer au loin, vous les cueillerés dés l'inftant qu'ils commenceront à tournner, car ils s’acheucront de meurir par le chemin : Si ce n'eft pour mamger prompteément, vous les cucillerés bien meurs, les met- tant dans vn feau d’eau fraic{che tirée du FRANÇOIS, 2 4 puys, & les laiflerés rafraichir comme l'on fait le vin, à caufe qu’en fortant de Ja melonniere ils font efchauflez du So- leil, & feroient defagreables à manger, les autres que cueillirez à mefure qu'ils meuriront, feront pofcés fur quelque aix en lieu frais, &feruis felon leur maturité. Vous laifferés à chaque melon lenœud qui tient à la queuë , auec quelques deux ou trois feuilles pour l’ornement, & vous garderés bien d’arracher la queuë: car le melon s'euenteroit ( comme fait” vn muid de vin debondonné) perdant la bonté de fa feue. 71 faut s’afluiettir à viliter la melon- niere au moins quatre fois le iour , au temps que Les Melons meuriflent. autre- ment ils fe pafleroïent de meurir, & ne feroient fi fains , mais mollaffes & pleins d'eau. Pour choifir vn bon melon, il faut qu'il ne foitnetropverdne trop meur; qu'il foit bien nourry, ayant la queuë grof- fe & courte qu’il prouienne d’vne plan- te vigoureufe ; qu'ilne foit hafté par Ja trop grande chaleur : qu'il foit pefent à la main, ferme en le preffant & non mo- laffe ; fec & vermeil par dedans. Souuenez-vous dereferuer les Graines -de c eux que vousaurés trouuez bons, & LT 106 Le TARDIN:ER les plushatifs ; comme ievous ay aducr- ty cy-deuant) & les conferuez bien, elle eft meilleure de deux ou trois ans que d'vn. Les Concombres fe fement & efleuent {urla mefme Couche, & en mefme temps que les melons : ayant auparauant fait tremper la graine, dans de bon lait de Vache ou de Femme; il y ena deblancs -& de verds que l'on nomme Perroquets: C’eft pourquoy dés vos premiers fruits vous vousabftiendrez d'en cueillir quel- ques-vns des plus beaux, des plus blancs, & des plus longs pour en virer la graine, que vous laiflerés meurir fur Îe pied, iuf- ques à la fin de la plante , qui fera aux premieres gelées : Car quant aux Perro- quets, vous les fereés tous manger : d'au- tant que la graine des blancs dégenere affeés en Perroquets. L'on les tranfplante aufli comme les Melons, fur couche & en plaine terre: ils veulent eftre beaucoup arroufés pour leur faire poufler quantité de fruit : On les chaftrera de jets fuperflus , & deceux qui n'ont que de faulces fleurs qui ne noient point à fruit. Les premieres fraicheurs leur font venirle Meufnier, qui eft que les fueil- des fe farinent & blanchiffent, cela tef- FRANÇOIS. 10 7 moignent qu'ils font proches de leur fin. Pour la cueiilette, elle ne fe fera qu'à mefure que vousen aurés affaire, grof- fiffans toüjours , mais aufli s’endurcif- fans, & la graine fe formant dedans les rend plus defagreables au manger, leur vraye bonté eft auparauant qu'ils com- mencent à jaunir. Les Citrouilles s’efleuent auffi fur [a Couche, fe replantent comme les me- lons & Concombres, mais plus commu- nément en plaine terre : vous Les placerés en quelque endroit de voftre Tardin aflez fpacieux, à caufe de leur lets qui fetrai- nent par fois affés loin fans noüer da fruit. Pour les replanter , vous ferés des trous forts efloignés les vns des autres, comme de deux thoiïfes, & mettrez à cha- cun deux boifleaux de petit fumier , à caufe de la foree de la plante, & les ferez bien arroufer. Leur cucillette eft quand elles font en parfaite maturité, que l’on appelle Aou- fées : elles ne fegaftent point fur later- re, mais {e meuriflent de plus en plus. Aux premieres fraifcheurs, l'on les cueillera les matins, les mettant efluyer en monceau à la chaleur du iour : puis on les ferrera en lieu temperé du chaud sE: #1 108 Le TARDINTER & du froid , fur des aix fans fe toucher : & fur tout on lesgardera de la gelée, car elles feroient entierement-perduës. Sivousenauez partrop, ou plus quil n'en cft de befoin pour nourrir voftre fa- mille : vous en mettrez dans le pain du commun, mefmement dans le voftre : Pour ce faire, vous ferés bouillir de la Citrouille tout de la mefme façon que celle que l’onfricafle, pourtant vn peu plus cuitte: puis vous efgouterés l’eau; & detremperés voltre farine auec cette Citroüille, & en ferez le pain à l'ordi- paire : il fera plus jaune, de meilleur gouft , vn peugrascuit, &tres fain pour ceux qui ont befoin de rafraichiflemens. Les Potirons blancs & colors, Bon- nets de Preftres, Trompettes d'Efpagne, Courges, & fruits femblables , ‘nc de- mandent autre gouuernement que Îles Cicroüilles ; finon , qu'aacuns veulent eftre ramés& non rampans defluslaterre. Quant à leurgraine : comme aufli celle des Citroüilles : elle ne fe recucille qu'à - mefure que l'on defpece les fruits pour cftre margés : & il la faut bien efluyerà l'air, puis la bien enfermer de crainte des Souris, qui la mangent comme celle des Meclons & Concombres. | FRANÇOIS. 109 2 Des Artichaux , Cardons € À Ifperges. SECTION'-EE *Artichaud eft vn des excellens fruits de tout le Iardin Potager, & recom- mandable non feulement à caufe de fa bonté, & diuers aprets que l’on luÿ don- ne; mais encore pource que l’on prend long-temps du fruit fur faplante. Il y en a de deux fortes, de Violets & de Verds: les Oeïlletons qui font, à cofté des vieilles Souches feruent de Plant, le- quel veut cftre loge en bonne terre bien cfondrée , fuméc, & labourée de deux ou trois labours. Les gelées eftant entierement pafces: su mois de May l'on plantera ces œille- tons, les ayant feparez de leur mere. auec le plugderacinesque l'on pourra, à caufe de la facilité dela reprile, & s'ils font forts , ils porteront des Pommesdés J'Automne enfuiuant. Vous les planterés à quatre ou cinq pieds l’vn de l’autre, felon la bonté de la terre ; car fielle eft fabloneufe & legere, il les faudÿa planter plus dru fi elle eft forte, d'autant que les fueilles en vien- dront plus grandes, le fruit plus gros, 110 LE TlARDINIER & qu'ils ietteront plus de regrains ; aufli faudra-il qu'ils foient plantez à plus grande diftance. Ils ne veulent autre culture auant l’hy- ver que d'eftre labourez par fois, pour empefcher l'herbe d'y venir. L'Hyver, vous les couurirez pour les preferuer de la gelée : pour ce faire, l'on s'y gouucrne de diueries façons : Les vns apres auoir coupé toutes les plantes à vn . pied pres de terre, & r'aflemblé ce qui refte des fucilles, { comme l’on fait la Chicorée pour la blanchir ( fe conten- tent de les buter en forme de grofe T aul- piniere ; laïffant pañler le haut des fucil- les deux doigts feulement pour ne pas eftouffer la plante, & mettent par deflus du grand fumier, les preferuant ainf de gelée, & que l’eau des pluyes n'entre dedans. Les autres font des rayons entre deux rangées , & iettent la terre en fcrme de dos d'afne fur les Plantes, les couurant à deux doists pres, côme ie viens de dire. Et lesautres n y mettent que de grands fumicers autour de chaque plante, &ils ne laiffent pas de leur faire paffer l'hyuer fans peril : toutes ces trois facons font fort bonnes, chacune ayant fa raïfon pourquoy. | RE FRANÇOIS. II ” Vous lesbutterez le plustard que vous pourrez, de crainte qu'ilsne pourriffent, mais aufli prenez garde que quelques fortes gelées ne vous furprensent, fi vous en auez beaucoup à gouuerner. Si vous voulez auoir du fruit dans l'Au- tomne , il ne faudra que couper la tige des premiers qui auront porté du fruit au printemps, pour l’empefcher qu'elle ne iette desregains : & dans l'Automne, ces forts pieds ne manqueront de ietter de belles Pommes, pourueu que vousles æentreteniez bien de labour , & lesarreu- fiez en leur neceflité : & aufli que vous leur oftiez les œïlletons des coftez, qui tireroient toute la fubftance de la plante. L'hyuer eftant paflé, vous découurirez vos artichaux non pas tout d'yn coup, mais peuè peu, de erainte que les fraif- cheurs ne les gaftent, à caufe de laten- drefle qu'ils ontayantefté eftouffez dans laterre : il faudra s’y mettre à trois re- prifes de quatre en quatre iours : au bout defquels vous les labourerez , & def- chaufferez bien, les defchargeant de plu- fieurs petits œilletons, & n’en laïffant à chaque pied que trois des plus forts, pour porter le fruit. Pour tirer des Cardes d’Artichaux , vous vous feruirez des vicils pieds que UC NON ONF 112 LE TARDINIER voulez ruiner : car il eft bon de cinq en cinqans; de planter vn nouueau quarré d'Artichaux : à caufe que la plante a ef- fritté laterre, & ne produit plus que de petites pommes : Les premiers fruits eftans cueillis, vous rognerez les plantes à demy pied pres deterre, & couperez la Tige Le plus bas que vous pourrez, les œillentons poufferont detres grande force, &eftans à trois pieds de haut ou enuiron, vous les lierez auec du grand foarre, fans les ferrer beaucoup, puis les entourerez de grand fumier, cela les fera blanchir. Vous les pourrez laïiffer iufques aux randes gelées que vous les cueillerez & Est dedans la Caue, ou autre lieu exempt du froid. Vous en cucillerez de jour à autre, qu'en aurezde befoin , commençant par les plus grandes, & laïiffant les autres qui s enforciront en peu de temps, ayant togtela nourriture dela plante. Quant aux Cardons d’Efpagne, ils ne fonc fi delicats à gouuerner que ceux d Artichaux :aufline produifent-ils des Cardes fi douces , ny fi tendres : on les ke de la mefme façon que ecux d’Arti- chaux pour les faire blanchir. | Ils fe fement de graine & fe replan- tent auflf d'œilletons. | FRANÇOIS. r13 Les fleurs des Cardons, qui font de petites barbes violettes feichées à l’air, {eruent à faire prendre le Laié&t, & le caillent comme fait la prefure : Les Ef- pagnols & les Languedochiens en vfent ainf. Les Afperges fe fement de graine fur vne planche à part, dont la terre aura efté preparée par plufieurs labours, & bien fumée : à deuxanson les leue & on les tranfplante. Pour les loger, il faut faire des fof- fez de quatre en quatre picds, & de deux de profondeur, les bien aquarir par le fonds, & ietter la terre efalic- ment des deux coftez, laiccommodant en dos d’Afne, puis donner vn bon labour au fond de vosfoflez, y meflant du petit fumier , & drefler ce labour bien vny par tout : par apres vous placerez vos plantes d’Afparges au cordeau à trois pieds l’vne de l’autre , mettant deux plantes enfembles , vous les placerez tout au bord de éhaque cofté de votre foflé, & ce d'autant que labourant ies fentiers, & par fucceflion les reduifanc à pied & demy de large, la terre fe iet- tera fur Ja planche : alors vous pourrez labourer plus d’vnbon pied de large de chaque cofté de vos Afperges, où la terre 114 LE JADINTIER. eftoit efleuée, & par ainfi vos plantes ietteront quantité de racines du cofté des Sentiers. Vous planterés vne troifiéfme rangée d'Afparges au milieu de ces deux que ie viens de dire : Il fera bon de les mettre en franc de quarreau , afin que les Raci- nes foient tant plus efloïgnées Les vnes des autres, & quelles s'étendent par toute voftre planche, Quelques curieux mettent au fond de leurs tranchées des cornes de Mouton, & tiennent comme pour vne chofe affeu- rée, qu'elles ont vne fympathie auec les Afperges, qui caufe qu'elles en profitent mieux, ie m'en raporte à ce qu ils en ont experimente. Pour les labours, ilnes'en donne que trois par chacun an : Le premier quand les Afperges ceffent de poufler : Le fe- cond, à l’entrée de l'hyuer : Et le troi- ficfme, vn peu auparauant que Îes Af- perges commencent à poufler : À chaque labour vous remplirez, ou rehaufferez voftre planche d’enuiron quatre doists, y icttant la terre de vos Sentiers : & par deffus vous y ferez mettre enuiron deux doigts de haut de fumier de vieille Couche. : Vous ferés trois ans ou plus fans cou- d FRANÇOIS. t15 per aucune Afperge , afin que la plante {e fortifie, & ne s atlouchifle point, au- trement vous n'enauriez que de petites. Si vous eftes iufques à quatre ou cinq ans fans en couper ; vous en cueillerés d'aufli groffes que de gros Poireaux, apres lequel tempspaflé, vous en cou- perés inceflamment , laiffantles plus pe- tites monter à graine, afin que la plante fe fortifie d'autant plus. Pendant les quatre années que vous ne couperés aucune Afperge , ebferuant à chaque labour ce que ie vous ay dit: votre planche fe remplira, & vos Sen- tiers eftans defchargez, vous les pourrés labourer, y mettans deffous le labour, de bon fumier bien gras. Vous fçaurez que la plante d’Afperge montetoüjours, & qu apres que Ja terre de vos Sentiers auraefté iettée deflus les planchers, il fera neceffaire d’yrappor- ter des terres { les dreffant fur la placeen forme de couuercle de Bahut ) autrement elles feroient découuertes, & periroient. Pour cucillir vos Afperges , il faudra ofter vn peu de terre d’autour celles que voudrés cueillir, de crainte d’en couper d’autres qui pouffent : puis vaus les cou- perés le plus bas que vous pourés, & prendrés garde d'offenfer-celles qui font = 116 LE TARDINIER cachés, car ce feroit autant de perte ,& ne feroit qu’aflouchir les plantes. _ A celles que vous verrés qui n’en pro- . duifent que de petites, vous n’y coupe- résrien , afin qu'elles fe fortifient : com- me aufli vous laiffereés monter à graine, celles qui peuuent à chaque planche fur la fin de leur faifon : cela reftaure entie- rement les plantes de toutes les playes que vous leur auez faites, en les def- poüillant de leur fruit. Des Choux @ des La &t:ës de toutes efpeces. SECTION HYII. += y a de tant d’efpeces de Choux, que difficilement vous vous refoudrés à en auoir de toutes en voftre Iardin, ear 1l5 occuperoient vne trop grande partie de voftre terre: c'eft pourquoy vous choifi- rés ceux qui feront les plus agreables à voftre gouft, & qui viendront les plus tendres, & les plus faciles à cuires : à cau- fe que la terre qui les produit, & l’eau qui les cuit, les rendent ou meilleurs, ou moindres en bonté. L'on nous apporte des graines d'Ita- lie, & nous en auons aufli de France: celles d’Italie font Les Choux Fleurs, les | FRANÇOIS. 11/ Romains, de Veronne, de Milan, les Choux, Raues, les Pancaliers, ceux de Gennes , les Frifez & autres. De France, nous auonsles pommez de plafeurs fortes, & ceux qui ne pom- ment point : ceft pourquoy je trouue fort à propos de traitrer icy de chaque forte à part, le plus fuccintement qu'il me fera poflible. Les Choux-flsurs comme les ste pre- cieux de tous ; feront mis icy les pre miers + La graine nous ef apportée d' CS talie, & Ms Italiens la réçoiuent de l’Ifle de Candie & autres endroits du Leuant: ce neft pas que l’on n'en recucille d’af- {ez bonne en Italie & en France auf: maisellene produit pas de fi groffes pom- mes, outeltes, & cft fu jette: à degeneret en Choux, Raues , & Nauets : partant, 11 fera bon de s'en AE la meilleu- re de Leuant, ou par amy, ou paf quel- que affeurée inveiligence ? à Rome : Les Marchands Lingers, & Gantiers se Pa- ris, vous pourront Ti du conten- ‘tement en voftre affaire ; car ils y tra- fiquent de leur Linge, Pañlemens , & Gands. Pour connoiftre la bonne graine / qui eft la plus nouuelle ) il faut qu'elle foie d'yne couleur viue, fort pleine d’huile, a PR d'a hi # 118 Le TJARDINIER bien ronde , & non ridée petite, ou def- feichée, ce qui la témoigneroit eftre vieil- le, qu’elle foit decouleur brune, & non pas d’vn rouge clair, qui feroit paroiftre qu’elle n'auroit pas bien meury fur le pied. . | Eftant pourueu de bonne graine , vous la femerez ou à la maniere d'Italie, ou de France : Pour la gouuerner à l’Ita- lienne , on la feme dans des quaiffes, ou bacquets durant la pleine Lune d’'Aouft; elle leue promptement de Terre, & fe fortifie auant l'Hyuer : La gelée venan- te, vous mettrez vos bacquets dans Îa cade , ou dans la ferre, jufques au re- nouucau, que lesgelées eftant toutes paf- fées, vous lesreplanterez en bonneterre: & par ainfi vous aurez des pommes bel- les, blanches, & bien conditionnées, au- pârauant les grandes chaleurs. Les Italiens n'attendent pas que les pommes foient toutes en leur groffeur, mais peu ‘auparauant ils les arrachent, & les mettentà la caue , enterrant toute laracine, & la tige jufquesà la pomme, les rangeant cofte à cofte vn peu en pen-. chant : là ils s'acheuent de pommer, & fe gardent foft long-temps, au lieu que s'ils les laifloient furterre, la chaleur les feroit monter à graine, us FRA N COLSS !:-. its Les François fe contentent d'en auoir pour la fin d'Automne, qu'ilsconferuent pour manger durant l'Hyuer : ce n'eft pas que quand ils font faits de bonne heu- re, quiln yen ait quelques-vns qui ne faflent leurs pommes vers Le mois de Iuil- let : mais les autres s’endurciffent par les grandes chaleurs & demeurent fans profiter faute d'humidité, ne produi- fansque de petitesteftes , le plus louuent point : C’eft pourquoy vous en femerez peu fur voftre premiere couche dans vo- ftre melonaiere ; en faifant de petits fil- lons à quatre doigts l’vn de l’autre, dans lefquels vous épandrez voltre graine, af- fez claire pour éuiter la confufion, & la recouurirés de fon terras : deuxoutrois fillons feront plus que fuffifans pour vous en fournir amplement. Vers la fin d'Auril, quand vos Me- lons feront hors de deffus la couche, & replantez, vous pourrez y refemer d'au- tres Choux-fleurs, ( de la façon que je viens de dire ) lefquels feront leurs pom- mes dans Automne, & feront ferrezen lieu exempt de la gelée, pour eftre man- gez pendant l'Hyuer. Pour les replanter , vous attendrez qu'ils ayent la fucille large comme la paulme de la main, afin qu'ils loient 110 Le TARDINIER plus forts ; vous leur rognerez le bout du piuot, & les eñterrerez Jufques au co!- let, ceft à dire, que les fueilles de la cime ne refortent que de trois doiges hors de terre; ou bien pour m'expliquer plus clairement, vous les enterrerez jufques au dernier nœud d'enhaut , encor fau- dra-t'il que vousfafliez dans la terre com- me de petits baflins de demy pied de da- mettre, & quatre doigts de profondeur, afin que l’eau aille direétement au pied auand vous les arroufcrez, eftant comme inutile au refte de laterre, oùbiln’y aau- cune racine. | La vraye diftance pour les replanter, eft de trois entrois picds, & deux rangs feulement à chaque planche : On foignc- ra à les farcler & labourer quand ils en auront befoin, jufques à ce que les fueil-- les couurent la terre, & eftouftent l'her- be qui pourroit pouffer. | Si vous voulez faire des trous à l'en- droit où vous les planterez, & mefler de petit fumier comme j'ay ditaux melons, & concombres, vous en aurez plus de contentement, car ils feront la pomme de beaucoup plus srofe. Tous choux, mefmement toute plan- te telle qu'elle foit, veut eftre arroufée : foisgneufement les premiers jours qu'ils lont FRANCOIS. 127% font replantez, pour leur aïder à la re- prile : ce que vous reconnoiltrez cftre, quand les fueilles fe fouftiennent d’elles mefmes, & ne fe laiffent point aller fur terre. Les Choux de toutes les efpeces, fe femeront fur la couche des Meions, pen- dant qu'elle à encor de la chaleur , afin qu'elle germe & leue promptement de | terre : 1l faut faire de petits rayons en trauers de voftre couche, & y femer la - graine affez claire & non confufe. Dans le mois d'Auril, vous enrefeme- rez d'autre fur la mefme couche, à la _ place, d’où vousaurez leué vos melons, | & concombres. Or d'autant que les Oyfeaux font fort afpres à manger la graine lors qu’elle leue de terre à caufe qu’elle porte fon écorce au bout de fa fucille : je vous veux en- , feigner des moyens pour les citranger: *l'vn, en mettant, quelque rets par def- fus la couche, aui foit fouftenuë à demy pied de haut : l’autre, en faifant de pe- tits moulinets de carte, comme ceux dont les enfans fe joüent en courant con- tre le vent : & l’autre, en faifant au lieu de carte auec du bois de Sapin leger, comme de boëttes à confitures : & à AL. bre qui foufticndra les ailes, ny mettre F 7 LE T AR EURE TER auclque grelot, cela empelchera de jour les Oyfeaux, & de nuit les Mulors : car pour peu de vent quil fafle, ilstourne- ront & fatisferont à voftre intention. Dans les couches il s'engendre des or- becs, & des courtillièrés ; qui rongent les femences, & les germes pour les pren: dre, il faut enterrer dans la couche quel- ques petits vailleaux, commedes verres à boire , & autres : 1l les faut enfoncer trois doigts plus bas que le haut de la cou- che : les empliflant d'eau à deux doiots prés du bord ; ces vermines en courant par la couche tomberont dedans, &fe noyéront. | _Lcs choux à large cofte ne feront fe- mez qu'au mois de May, à caufe de leur grande delicatefle , &c s'ils ont aflez de AO pour cftre Pas au commence- rent du mois de luiilet, ts pommeront deuant PHyuér, à mon gouft il n’y a point d cfpece dé choux qui égalent ceux-là, car ils cuifent p: jomprement, & fout delicats, que les plus & oros cottons fon- dent à la bouche : fi vous en mangez à: jeun vn pétages où il y ait peu de pain, 1] vous lafchera doucement le ventre: & de plus qu teile quantité que vousen 2ÿe7z man cé , €l ile ne vous renuoyera € au cussrapyorts à la bouche: brefc eft vie \ FRANÇOIS. 123 efpeec de Choux que je ne vous fçaurois &rop louer , pour vous perfuader à en gar- nir voitre Jardin, pluitoft que de beau- coup d'autres. Des Choux blancs pommez , nous avons ceux de Flandre, qui viennentles plus gros & defquels [1 Pomme élevée er bonne Terre, pefcra quarante livres & au dcflus. Ecux d Aubervilliers, font extreme- ment francs & delicats au manger. Ilyauneautre forte de Choux qui {ont foüettez de quel jues veines rouges, & dont le pied au temps que l’on les replan- te eft tout pourpré ; ceux -ià me fcmhlent les plus francs de tous, car iis pomment tout prés de Terre , jettent peu de Fücils le avant que de pommer ,& fe ferre de telle façon , que ia Pomme eft toute piat- te par deffus. Les Choux ronges auront aufñ quel- que petite place dans voltre Jardin, pour la neceflité en certaines naladies. El y a encore d’une autre cfpece de Choux extremement muiquez qui ne font qu'une petite Pomme, mais ils {ont beaucoup à prifer à caufe de leur bonne odeur. | Les Choux Tendres où Blonds. nef> L fement qu'aux mois d’Acuft > Pour eftre F3} 124 LE TARDINIER replantez un peu ayant l'Hyver, ils s'ac- croiftront & vous fourniront pendant tout l'Hyver, particulierement les jours des fortes Gclées, qui les attendriffent & les rendent tres agreables au manger. L'on replante aufli de toutes les efpe- ces de Choux d'Italie, & les Pancaliers font les plus en eftime, à caufe de leur bon gouft parfumé. Pour replanter toutes fortes de Choux, la Terre cftant profondementlabourte, & bien fumée fous le labour, vous for- . merez des Planches de quatre pieds de large : & à un pied prés dû bord , vous ferez un petit rayon de quatre doigts de profondeur, large de demy pied, reve- nant à rien paren bas, comme uneraÿe de Terre Bled labourée de nouveau : dans ce rayon, vers la fin du jour, en beau temps, vous ferez des trous avec le Plantoir , & planterez vos Chouxjuf- ques au Collet des plustendres Fucilles, en rognant le bout dn Pivot: Vous les cfpaccrez à diftance convenable felon qu'ils grandiffent & eftalent , puis les fe- rez arroufer foigneufement , refpandant l'Eau dans cette Rigole feulement d'au- tnt qu'il n'eft neccflaire d’arroufer toute la plante. L'on pourra auf les replanterez en FRANÇOIS. . 126 confufion dans des quarrez entiers, par- ticulierement les Blons pour geler ; mais celan'eft fi commode que par planches pour l’arroufement : joint aufli que cha- que planche diftinguera plus facilement les efpeces que vous mettrez chacune à part. Vous foignerez à oftertoutes Les fueil- les mortes des Choux pour plus de pro- preté , évitant la mauvaife odeur qui provient de la corruption des Choux ; & auffi que cette pourriture accueille beau- coup de Vermine, comme Limats, Gre- nouille, Crapaux, &autres, qui ne font qu'endommager les Choux. Quand vos pommes feront faites, fi vous en remarquez quelqu’vne qui vou- luft monter à Graine : vous arracherezla plante à demy , ou bien marcherez fur le Tronc, faiiant pancher le Chou furle cofte; cela empefchera qu’il ne graine fi toft. & vous donnera le temps d’eftre mangé en le prenant des premiers. Pour la Graine , vous pourrez referver de vos plusbeaux Choux, enles replan- tanten quelques Abry des vents d'Hyver pendant les grandes Gelees, les couvrant avec des pots de Terre, & du grand Fu< mier par deflus : vous le découvrirez par fois dans le temps doux , & quand il fera Fi 126 Le TARDINTER Solcil , pour les revigorer , eftant foi- gncux de les revcir la nuiét , peur d’eftre fürpris de quelque gelée. Vousen metterez d'autres dans la Ser- fe, les pendant par la Racine en haut quelques quinze jours : afin que toute l'Eau qui peuteftre entre les rucilles s’é- goute,car elles pourriroient: lequeltems eflant paflé , vous les enterrerez jufques à la moitié du Tronc, les mettant fi prés Tune de l'autre qu'ils fe priffent toucher. Pour les autres quine pomiment point, iln’y a qu'à les replanter ou les laiffer en leur place , äls fouffriront l'Hyver , & ‘graineront de bonne heurer La Graine eftant meure, ce que vous connoiftrez quand les.-premieres Goufles feront feiches, & s’éuvriront d’elles-mé- mes:alors vous l’arracherez.doucement, la tirant par Tige, & l’accofteréz à voftre Contre-Efpalier, pour la s'achever de meurir, & feicher:: J1 eft bon de l'yat- tacher avec quelque brin d'Ozier, de chainte que le Vent la jettant par terre nen faile efcouller beaucoup. Dans le mois d’Aouft vous femerez des Choux à Pomme fur quelque Planche à part, pour la leur laiffer pafler l'Hyver en forme de Pepiniere, jufques au Re- _ nouveau que vousles replanterez en la FRANÇOIS. 12 7 maniere que j ay dice cy deuant : & c'elt le moven d'auoir des Pommes de trés- bonne heure , fi l’on eft foigneux de les bien gouucrner. | Il y a plufñeurs petits animaux qui rongent & endommagent les choux, tant en leur jeuncffe, qu’en leur accroifle- ment, comme les ticquets, qui font vne petite efpece de mouche verte qui faute, les limats, fourmis, puceons, & autres: le feul remede que j'y trouue, eft lefre- quent arroufement quiles étrange,ou fait mourir : car durant la grande fecherelle, onveit perir journellement les choux, par l’importunité de ces animaux. À _ Il fair bon femer des Choux à toutes ‘les pleines Lunes des Mois, pendant tout le beau temps, afin de remedier aux de- fordres que ces petites beftiolesvous font; veusdie pourez faire facilement fans def- pente, en vous feruant du labour que l'on aura donné à vos Efhaliers, où ià cfleuant vos: jeunes Choux , Îles fre quents arroufement profiteront auf à vos Àrbres. H ya des Choux curieux qui portent pluñeurs Pommes {ur vne mefme tige, mais ils ne font fi delicats que les autres. Quand vous aurez coupé les ceftes d: vos Choux, fi vousne voulez en arracher F ati] ee * = 128 LE TARDENIEX. le tronc, 1l vous repouflera de petits re- jets, que les Italiens appellent Brocoli, & les François des Broques, elles fe man- gent ordinairement en Carefme à la pu- rée, & en entremets, {ur les meiileu- res tables. Des Laictuës, il s'en trouue prefque auffi grande quantité que de Choux ; c’eft pourquoy j'ay mis ces deux plantes en mefme Chapitre. Nous auons pour celles qui pomment, les cabuiles, celles à plufeurs teftes fur van mefme pied, celle à coquille, celles de Gennes, la Romaine, & la Frifée, qui pomme en forme de Chicorée. Les autresquine pomment point com- me les Frifées fans pommer, & beaucoup d’autres de plufieurs fortes. Et d'autres encore qu'il faut lier pour les faire blanchir : qui {ont la Laiuë à feuille de Chefne, ou Royale, & les Chicons. | Elies fe fement pendant toute l’année, excepté l'Hyuer : car depuis que vous commencerez à en mettre fur voftre pre- miere couche (ainf que j’ay dit en l’arti- cle des Melons ) iufques à la fin du mois d'Otobre vous en pourrez efleuer. Pour les faire pommer il ne oift qu'à les replanter à demy pied, ou vn peu PO CAPNO PER O0 PTS 2e | FRANÇOIS, _ 129 plus l’vne de l’autre les planches des Ef- paliers, & Contr Efpaliers, ÿ feront bien propres, fans occuper aucune autre par- tie de voftre lardin : durant les grandes chaleurs elle auront peine à pommer, fi ce n’elt à force d'arroufemens, la faifon les faifant monter à graine. | _ Celles de Gennes font à preferer à tou- tes les autres, à caufe de leur groffeur, & qu'elles paflent l'Hyuer fur Terre eftant replantées, où vous en ponrez prendre pour les Pottages, & aufli qu'el- les vous donnent les Pommes, dés la fin d'Auril. Pour celles qui ne pomment point il n'ya qu'à les femer, & à mefure qu'el- les croïftront les efclaircir ( e’eft à dire ofter Le trop ) afin de donner lieu à celles qui refteront de s’élargir & augmenter: aucuns les replantent, maïs c’eft fe don- ner trop de peine, pour vne plante fi fa- cile à efleuer. Les Royales, & Chicons fe veulent replanter à vn pied ou plus éloïignéee les _vnes des autres: & quand vous verrez que leurs plantes couuriront toute leur T er- re, alors par vn beau temps, non plu- uieux, & la rozée du matin eftant ef- fuyce, vous les lierez de deux ou trois liens par étages , auec du foarre long ; & F + #7 1: Y30 Le TARPoeNTrER ce à plulieurs reprifes { c’elt à dire) enne lss liant pas toutes comme elles fe ren- contrent {ous la main, maïs choififfant Îes plus fortes les premieres, pour don- ner de l’air aux foibles, cela fera auffi qu'elles vous dureront plus long-temps, les premieres eftans blanches, aupara- want que les dernieres féient liées. Si vous defirez les faire blanchir bien promptement, vous mettrez par dellus chaque plante vn pot deterre, fembla- ble aux creuzets des Orfevres, & les cou- urirez defumier bien chaud, cela Les fera blanchir en fort peu de temps. Pour la graine de Laiétuë de toute les fortes, elle eft fort facile à recueiilir, à taufe que les grandes chaleurs en font monter beaucoup plus que l’on ne vou- droit de celles qui auroient efté femées Îes premieres : vous lesatiaëherez quan vousverrés, quil y aura plus de la moi- tié des fleurs pañlée, & les accoufterez tout debout contre les lattes de vos Contr'El- paliers, leslaïffant meurir, & deffeichez dix ou douze jours: puis eftant bien fei- che vous la froifflerez entre vos mains, nettoyerez de fa baffle , & la ferrerez met- -tant chaque efpece à part. Fx ANÇO:1S. 131 EEE Les Racines. SECTION IV. Y .EsBerte raues , commeles plusgrof- fes feront mifes en tefte de ce Chapi- tre : clles veulenteftre placées en bonne Terre, bien fumée, & bien effondrée, pour produire leurs racines bien longues, .groffes, & non fourchuës; carfielles ne trouuent le fonds de la Terre à leur gouft, elles s’élargiront aflez, & crofi- ront par la tefte, maïs dansle milieu il s’y fait.vn trou qui profonde bien auanr, les rendant dures & pleines de filets, perdant beaucoup de leur couleur rou- ge, qui fait.que l’on les méprife : C'eft pourquoy fi vous ne voulez faire effon- drer voftrelardin, craignant la dépenfe, vous ferez au moins befcher deux labours l’vnfur l’autre, en la maniere que ie vous vais enfeigner, qui n’eft qu'vndiminurif de l'effondrement. H faudra befcher vne Orne-toute de la longueur du carré, d’vn bon pied de pro- fondeur , & de deux pieds de large , en dectant la Terre tout d'vn coûté: puis bef- cher va fecond labour dans ce mefme fof- X€, le plus profond que l'on pourra fans 132 LE TARDINIER en fortir la Terre : par aprés y mettre enuiron quatre doigts de haut de bon fu- mier bien gras, comme celuy qu'on tire de deffous les Vaches & Moutons, pen- dant que l'on ne les affourre point ; puis befcher vne feconde Orne, jettant la pre- miere litiere fur ce fumier : parapres bef- cher la feconde litiere, & fur ce labour. mettre du fumier, comme j’ay dit cy- defus, & en continuant dela mefme fa- con, jufques au bout de voftre carré: La derniere Orne demeurera baffe d’vne litiere, à quoy vous auiferez de trois moyens. lequel vous agréra le plus, & qui vous fera à moindre dépenfe pour la remplir, ou d'y faire porter les Terres, qu'aureztirées de la premiere litiere, de la premiere Orne : ou de les faire ratti- rer pour mettre voftre carré de Niueau; ou de laiffer ce foife vuide , pour y jetter toutes les farelures du fardin, afin que B elles fe confomment en fumier, refer- ant à rendre voftre haire égale, à mefure que les labours fe denneront. Cette façon de ménagement, eft-ce que je vous ay voulu dire cy-deuant, à la premiere Seétion du premier Traité quand j’ay parlé de l'effondrement de la Terre, ou j ay promis vne maniere pour fleuer toutes fortes d'herbes potageres legumes. FrRANGers. 133 L'Hyuer eftant entierement paflé, vous femerez vos Bettes-raues fur quelque bande de vos Efpaliers : puis eftant aflez fortes, vous les replanterez par plan- ches, les mettant à vn pied prés l’vne de l’autre, pour la facilité de leur ac- croiflement, rejettant celles que vous trouuerez fourchuës, comme de nulle valeur : vous ne negligerez de les biner, & farcler curieufement de toute herbe, ce faifant vous en recueillirez de trés bel- les, pourueu que vous ne les laifiez patir de foif pendant la grande chaleur. uelques-vns ne les replantent point, mais aufli elles ne viennent pas fi belles, & font fujettes à eftre fourchuës, pour lesvreplanter, vous obferuerez la mefme chofe que j’ay dite aux Choux, referuë qu'ilne faut pas leur rogner le piuot. Vn peu auparauant les gelées, vous les tirerez de Terre, & les mettrez dans la ferre, enterrant toute la racine dans du fablon jufques au coller, les jon- chant cofte à cofte, vn peu en penchant, & jettant vn lit de fablon par deffus ; puis remettrez vn autre lit de Bette- raues, puis twn lit de fablon, & en continuant. jufques à la derniere, elless'y conferue- ront trés-bien, les prenant |à à voftre befoin toutes de rang, fans en tirer du N] "id D 14 LP? à ”. n SL Le 1 À 134 Le JARDINIER miiteu ou des deux coftez par élection. Pour la graine, vous referuerez des plus belles racines, & des plus longues, que vous enterrerez comme Jes autres, pour au Printemps.les planter en quel- que endroit vuide de voire Contr’tfpa- lier; d'autant que vousy pourrez.arre- frer fon montant, queles.ventsrenuer{e- roient à caufe de fa trop grande hauteur, &- charge, .s il n'eftoit fouftenu : fi vous n'aymez.mieux les mettant en quelque planche les appuyer auec des pieux bien forts. La grainceftant meure, vous arra- cherezles plante & les lierez à vos Contre Efpaliers, afin qu'elles s'acheucuent de _meurir, & feichent plusfacilement. Les Carrotes, & Paners fe gouucrnent :comme la Bette-raue , 4ls ne {ont f ten- dres au froid paffans ailément l’Hyuer dans la Terre fans fe gafter jufques au tenouucau qu'Hs montent en graine, & ne valent plusrien à manger, vous en ER rerez de Terre pour Voftre prouilion pen- dant l'Hyuer,lefquels vous ferrerez com- _me les Bettes-raues. ._ Ily a des-Carrotes de deux couleurs, -de jaunes, & de rouges: les jaun font les plus delicates à mectreau pot: ou au- -trement : fi vous voulez en manger de tendres au mois de May, comme les ? ” L + ‘difix d'Efpagne , que l'on nomme Scor- Ps ds 2 7 FRANCOIS. Ty Picards à Amiens qui les mettent au pot en guife d'herbes ( il faudra famer la Terre, & la preparer par bons labours durant l'Efté : au mois d'Aouft vous les femerez la Lune eftant en fon decours, elles leucront auant l'Hyuer, & en far- ctant les mauuailes herbes, vousles ef- claircirés où vous y verrés de la confufion, ‘d'autant qu'il n'eft befoin de les tranf- planter cemme les Bettes-raues. Pour la graine, vous choifirez des plas belles, & des blus longues, que ferre- rez eu la caue pendant l'Hyuer, & les re- “mettrez en ‘Terre au renouueau comme les Pettes-raues, pour les laifler monter à graine; fi vous en laiflez quelque-vnes dans Terre , elles ÿ pafferont aifément FHvuer fans fe pourrir, & monteront : | Se 1 13 à 11 n£ia graine en (à faïfon : maisil eft mieux de lestirer hors de Terre, ainf que j'ay dit: d'autant que vous choifirez les plus bel. les , les plus groffes, & les plu: longues pour engeancé: ce que- vous obferuerez auffien toutes fortes de plantes, fi vous voulez eftre toùjours fourny du meilleur. Les Salfifix qui fe cultiuent dans les Tardins {ont de deux efpeces : ilyenaqui fleuriffent violers, ce font les communs, & d’autres jaunes, ceux-cy font les Sale # "4 à +8 EL. - | Se : Fe 4 136 LE TARDINIER fonere, ils font differens de fücillage, auffi bien que de fleur : car les violetsont la fücille femblable au petit Plantin à cinq nerfs, & les jaunes l'ont beaucoup plus large. Il y a fort peu detemps que nousavons cette Scorfonere en France, & jecroisen avoir eu des premieres: c'eft une racine beaucoup plus delicateau manger que le Salffix commun & elle a cét avantage ar deflus toutes les autres Racines , qu'elle n:fe pace point dans Terre com- me les autres qui fe cordent, & ne durent que uneannée, laiflez l’y tant que vous voudrés, elle groflira toüjours, & fera en tout temps prefte à manger , quoyv qu'elle monte à Graine tousles ans: Il eft bon de ratiflerfon Efcorce brune ( dont elle prend fon nom de Scorfonere ) & la faire un peu tremper dans l'Eau claire, avant que de la mettre bouillir , à caufe qu'elle jette une petiteamertume qu'el- le retiendroït fans cela, ce que ne font pas les Salfifix communs, qui eftand fim- plementlavés , fe mettent boüillir , puis onleve Îa peau. £ Ilsfe fement en deux temps, au Re- nouveau , & quand ils deffleuriffent., laiffans envoler leur Graine : pour plus grande propreté, & commodité à les Aid EE +2 Ra pa ic: FRANÇOIS. 137 Sarcler , on les feme en Rayon fur des Planches , quatre Rayons à chaque Plan- che : Quand ils monteront en Fleur , il faudra entourer la Planche avec despi- eux, & une Latte ou deux en forme de Contr'Efpalier , de craînte que les Vents ne les renverfent par Terre, au prejudi- ce de la Graine:Les Communs fleuriflent pluftoft que ceux d'Efpagne. Pour recuillir la Graine , il faut qua- tre ou cinq fois le jour vifiter vos Salffix,. car élle s’épanoüit comme un Piffenli&, & s'envole : C’eft pourquoy l’on prandra garde aufli-toft qu'elle fera efpanoïüie , de rarmalfler toutes Les barbes, & leste- nant du bout des doigts en arracher la Graine , que vous mettrés à mefure dans quelque pot de Terre , qui fera toüjours proche de la planche, pour efviter à la porter ferrer dans le logis à chaque vifite que vous y ferés , & le couvrirés de quel- que Tuile, de crainte qu'il ne pleuve de- dans, &cque voltre graine ne foit moüillés. DesRaAvEs ,1lS’en trouve de trois æefpeces, La Rnez,ou R ABBE ou 2ros Rairorr,.la RAvE-Noire& le PE&TIT-RAIFORT, qui eft celle que l’on mange communément à Paris. LARABSEouRHEE, eft une viande grofliere fort commune en Limoges par- 13.8 Le JARDINTER myles pauvre Gens quien font plufeurs fortes ée Mets , bouillis . fricailés & à Fhuile : les ayant premierement fait tremper dans l'eau tranchées parroelles, efin d'en ofterla plus grande force : elle fefeme tout du longdu mois de Iuillet juiques à croisfois, afin quefi les vnesne sencontrent.le temps propre, les autres puiffent fuppleer; la Terre Sablonneufe bien amendée, & labouree de trois La- bours, eft ce qu'elle defire pour de- venir bien grofle, il y en à qui parleur - groffeur, galent un Pain de deux fols; on les tirc de terre avant la Gelèes , & font confervées.en lieu exempt dufroid comme fes Navets Pour recuellir la Graine , il ne faut y'en Îsiffer des plus grofles dans terre, elles y pafleront l'Hyver«& graineront æn la faifon : le plus cert incit d'en re- planter des plusgroffes à l’ifuë des forces Gclées. | Les Raves Noiresne font pas beaucoup à.priler selles fe veulent gouverner com- me les petits Raiforts. Les petites Raves ou-petits Reforts,., _fefement à tous les Decours des Lun-s, depuis que vous commencerés votuz premiere Couche, jufques au moisd'Oc- tobre:on les accommode diverfement; Lu FRANCOIS 139 carf vous les voulés auoir belles, clai- res, nettes, & bien longues, il faudra dans le temps que vous lemés vos Me Jons en quelque endroit de voftre Cou- che ‘alors qu'elle aura encor de la cha- leur } faire des trous de la hauteur de voftre doigt diftans de trois poulces, l’vn de l’autre; X dans chaquestrou y laïffer choir deux graines de Kaues, mettant vn peu de fablon par deflus , en laiffant'le trou tout ouuert, elles s’accroiftront de Ja hauteur de voftre doigt , par deffus ce quelles euffent fait, ne pouffans leurs premieres Fueilles ;qu’apres qu’elles fe- ront montées au Niueau de Ja Couche. Quand vos Melons feront replantés, vousen pourrés femer fur la couche, & auffi en plaine Terre, Je mettant par rayons. Pour la Graine, vous laifferés monter dès premieres femées, & la cuillerés quand vous verrés les Goulles d’en bas s ouurir ; & laifler allier leur Graine: Vous la mettrez (comme les autres que ï'ay dit ) le long de vos Contr'Efpaliers, pour la faire feicher &s'acheuer de meurir: La meilleure graine que nous ayons vient de ces HortiHons d'Amiens, quien efle- uent de trés-bien conditionnée dans leurs 11 -marais.: à la leuce il femble qu'elles ne en 140 LE TARDINITEX foient pas bien franches : mais à [a qua- tre ou fixiéme fucille , elles fe fortifient merueilleufement, moyennant que l'on ne neglige de lesarroufer. Des Nauets, il y ena de plufeurs ef- peces que je ne particulariferay point, je diray feulement queles petits font les meilleurs, & les plusagreables au gouft, lesautres cftant molaffes, & ayans moins de faueur. On les femes en deux temps, au re- nouueau, & au commencement d'Aouft: toute la difficulté qu’il ya, c'eft de bien prendre fon temps; car s’il eft trop plu- uieux, Ja graine créue, & ne germe point; s'ileft trop fec, elle ne lee point : C’eft pourquoy voyant qu’vne femaille aura manqué , l’on rebinera le gueret, & on le. refemeratout denouueau : Quand ils font leuez, mefmes quand ils ont déux, ou quatre füeilles ; file tempselt trop fec, les ticques, & pucecons les mangent, & e’eft à recommencer : C’eft pourquoy voyant qu'vne femaille aura manqué, faudra recommencer, comige je viens de dire. Pour eftre bons, il ne faut pac qu'ils foient plus de fix femaines dans Terre, autrement ils deuiennenñt verreux {e def- feichent, & font defagreables à màn- ét, | FRANÇOIS. 141 ser, eftans pleins de filets. L'on lesferre pour L Hyuer dansa ca- ucouautre lieu exempt de la gelée, fans autre foin que de les mettre en monceau, ou par bottes. Pour la graine , il faut choifir des plus beaux , plus longs, & plus clairs, lef- quels on remettra en Terre au renou- ueau, & l'on arrachera la Plante quand on verra les premieres goufles s’ouurir; Ja mettant feicher, & l’on labrifera en- tre les mains fur vn drap, luy laiffant pañler le refte du jour au grand Soleil, pour en deffeicher toute l'humidité, puis l'on la nettoyera & ferrera en lieu temperé. Le Perfil fera mis aufli entre lesraci- nes, quoy que fa fücille foit eftimable, vous feruant en plufieursmets, & tenant place de Poiure, & d Efpice. Les gelées eftant paflées, vous feme- rez le gros & petit Perfil , le pennaché, & frise, & en Terre labourée profonde- ment & bien amendée, afin qu’il pro- duife de longues & groffes racines : Il fe feme par rayons fur des planches, qua- tre rayons à chaque planche : puis la ter- re eftant rabbatuë dans lesrayons , & Îe gueret bien redreflé : on femera de l’Oi- gnon par deflus, que l’on enterrera auec 142 LE lARDLNTER les dents du rafteau, en frappant douce- ment fur la planche : & tout bien redre{- fé derechef,& les fentiers nettoyez, vous mettrez {ur chaque planche, enuiron la hauteur de deux doigts de petit fumier de vieille couche, tânt pour amender [a Terre, que pour empefcher que la pluye ou les arroufemens nelabatt:nt, & ne la faffent creuafler. Or d'autant que la graine de Per], eft vn mois dans Terre ians leuer, l'Ot- gnon aura loifir de s’accroiftre & pren- dre affez de force, pour eftre replantéz Quand vous l’arracherez pour le replan- ter, cela feruira de labour, & de farcle- ment au Perfil; & par mefine mo: en com- meil fera déja fort, vous pourrez l'éclai- cir où vous verrez que les plantes feront crop druës, afin qu'il en profite mieux. Vous couperez de la füeille quand vous en aurczde befoin, fans que la plante en puiffe fouffrir aucun detriment. Les racines fe laiflent dans Terre, & l'on n’en prend qu'au befoin, à caufe qu'elles groffiffenttoüjours, mefme du- rant l'Hyucr ; vousen leuerez pourtant ce que vous croirez en auoir affaire, de crainte que la Terre fe trouuant fcellée de la ge lée, vous n'en puifficz auoir dans lan: cfliré. FRANÇOIS, 143 Pour la graine, vous en laiflerez monter quelque bout de planche, & ne l’arra- cherez quetoutne foit meur, la laiffant feicher comme les autres. Les Cheruis viennent de graine, & de plante , mais plus gros, & meilleurs de plante, que de graine : l'on {e fournit ordinairement de celles de Troyes cn Champagne comme les ne illeures. Pour leeplanter ,ilfauten Terrebien befchée, & bien fumée , faire des petits rayons, trois à chaque planche, de qua- tre doigts de profondeur , & coucher de- dans "ras racines de la Cheruis. à plus d'vn demy pied l'vne de l’autre , pour leur donner plus de commodité à sac- croître, & deuenir plus belles. L'on en tire de Terre à mefure que on aaffire, laiflant le furplus qui cæo CA tofjours, & montera à graine en {a failon. Lis Réponces, quoy que ce foic vne pia nic bien agreable au gouft, & qui s’anprefte pour leftre mangéc en plufeurs go > Deantmois je ne m arrefteray oint à dire la maniere de la gouuer- 2, d'autant que l'on fe contente des fauuages, fans {e donner la peine d'en culciuer. L:s Tampinanbours font des racines 144 Lr lARDiNnritEe rondes, qui vicnnenttoutes par nœuds, & cue l'on mange dans le Carefme en for- me de fonds d'Artichaux2 ils ne veulent pas grande culture, & pourucu qu'ils {oient plantez en bonne Terre, ils pro- fiteront abondamment. On les feme de graine, & onles plan- te aufli de racine : ils portent des fleurs comme de petits Soleils, dans lefquelles fe recueille quantité de graines, qué les Medecins difent en leur vfage eftre pre- judiciable à la fanté, c’eft pourquoy ils feront bannis des bonnestables. | | Detou'es les fortes d Herbes Potsgeres. SECTION V. Ous commencerons par la Bette- blanche, ou Poirée comme par la plus grande de toutes les herbes potage- res, & de laquelle ontire plusabondam- ment que de pas vne autre. | La Bette-carde ; ( ainfila nommeron- nous à l’imitation des Picards, qui me- ritent ’veritablement l'honneur d’eftre appcllez les meiïlleurs, & les plus cu- rieux Jardiniers pour les potages, que tous les autres de toutes les Prouinces de France; car foit que la Terre, ou le . climat FRANÇOIS. 14$ climat y apporte beaucoup , ou que ce foit par leurinduftrie, & trauail ; leurs herbages font tout d’yvne autre grandeur & largeur, qu'aux autres endroits : car pour la Carde de Berre j’en ay veu chez eux de huit poulces de large , ou peu moins, & de longueur, & époifleur con- uenable à fa largeur ) fe feme au renou- ucau, les gelées eftant entierement paf fécs : vous pourrez vous feruir des plan- ches de vos Efpaliers pour ce fujet, puis quand elles auront fix fücilles : vous les replanterez en Terre qui aura efté pro- fondement labourée dés l'Automne , & meurie par les gelées durant l'Hyuer: Auant que de les replanter, on portera force fumier fur la Terre & la relaboure - ra-ton mettant le fumier au fonds de [a jaulge, puis les ayant tirées de [eurs pe- piniere, on leur roionera le piuot, & on les replantera par planches, deux rangs feulement à chaque planche & à trois pieds l'vne de l’autre, faifant com- vn petit rayon, ain que j'ay monftré cy-deuant , à la maniere de replan- ter toutes fortes de Choux, ce que je ne repeteray point icy, pour éuiter prolixité. Si vous voulez qu’elles abondent en belles Cardes, vous (oignerez à les bien C | 144 LE TARDANITER biner, farcler & arroufer ; quand veusre- connoiftrez qu'elles en aurontneceflité. Pour les cueillir, vous ne les coupe- rez pas, mais les arracherez de leur plan- te, en les tirant vn peu de coté ; cela n’offenfera en aucune façon la fouche, au contraire elle groflira les reftantes, & re- parera fa ruine en fort peu detemps. Vous ne replanterez pour Cardes cel- les que trouuerez vertes : car elles de- generent. L'on en femera pendant tout lEfté pour en auoir de tendres à mettre au po- tage, ou pour la farce. Ah Vousen femerez auffi à la fn d'Aouft, aufquelies vous laifferez pailer l'Hyuer en forme de pepiniere, & au renouucau vous les replanterez pour auoir des Car- des toutes des premieres. … Ily a des Bettes Cardes qui font rou- ges mais fi vous en voulez auoir que ce foir plucoft par curiofité , que pour voftre vfige, car elles ne font les Cardes que pe- tites, & eftant cuites perdent beaucoup de leur couleur rouge, deuenant pañles, ce qui fait qu’elles ne font fi agreables au manger, ny à la veuë, quelesblanches. Pour lagraine, vous en laifierez mon- ter des plusblanches, & plus larges fans leur arracher aucune fuecilles vous arrc+ FRANÇOIS. 147 fterezle montant à quelque bon pieu, de crainte que fa trop grande charge ne le faffe abatre, au prejudice de la graine, qui pourriroit au lieu de meurir. Deux plantes au plus fuhiront pour vousen fournir amplement : vous l’arra- cherez par vn beau temps, (quand vous jugerez qu'elle fera meure par la cou- leur jaune qu'elle prendra, ) & la laifle- +ez bien fecher, puis la froiflerez auec Jes mains fur quelque nappe, la nettoye- rez de toute ordure, & [a ferez encor bien feicher, de crainte qu'ellene moi- file , car comme celle eft fpongieufe, auffi bien que celle desBettes-rancs, ellegar- dera long temps fon humidire. Il y a vne perite efpece de Bettes que l'on nomme ÂAïrroche, ou Bonne-Dame, qui eft fort agreable au manger, rendant le potage trés-beau , & qui porte fon beu- ze d'elle-mefme. Elle veut pareille culture que la Berre Carde, referué qu'elle fe plante plus prés : elle vient bien auffi fans eftre re- plantée, fufhc qu elle foit farclée, &bi- née dans le beloin. H y a plufeurs efpeces de Chicorées fraiches , qui font diflerentesen ficil- Jages , & en grandeur, mais pourtant femblables au gquit, & qui {ce gou- G: 148 Le TlARDINIER ucrnent tout d'yne mefme facon. Elles fe femeront au renouueau, fur les planches des Efpaliers: & quandelles auront fix füeilles, on les replanteraen Terre bien amendée , à la diftance de dix- huit poulces l’vne de l’autre , en léur ro- gnant le piuot : lors que par leur accroif- fement elles couuriront toute la Terre, il Les faudra lier à la maniere que j'ay dit cy-deuant : quand j'ay traité des Chi- cons ; qui eft de les lier non pas toutes à main, c'eftà dire fortes & foibles, mais prendre les plus auancées les premieres, & laifler fortifier les autres ; je vous y renvoye, afin d’éuiter les redites; c'eft en la Section troifiéme de ce fecond T rai- té, en l’article des Laituës, où vous verrez aufli la maniere de les blanchir promptementauec des pots de cerre. La Chicorce fe blanchit encor d'vne autre forte : durant les grandes Cha- leurs, quand vous verrez qu'au lieu de fe pommer, elle voudra monter à grai. ne, vous creuferez la Terre cofté de la plante , & fans l’arracher vous la cou- cherez dans terre, ne laiffant fortir que le bout des fucilles, elle fe blanchiraen fort peu de temps, & cela l’empefchera de monter à graine. Aer 2 Pour plus grande propricté, il eft bon FRANGOIS. , 149 de les lierauparauant , afin que la Terre ne tombe pas entre les füeilles: ce qui donneroit tant plus de peine à les bien Jauer auant que de s’en feruir. Vous obferuerez de les coucher tou- tes d'vn cofté, les vnes fur les autres, comme elles ont-efté plantées ; commen- çant par celles du bout de la planche, & en continuant, couchant les fecondes fur les premieres, & les troifiefmes fur les rangs iufques au bout. le trouue encor deux autres manieres de les bien blanchir pour l'Hyuer. La premiere, eft qu’à l’entrée des gelées vous les licrez à l'ordinaire, pour au bout de huit ou dix jours, les ayant arrachées, vous les enterrerez dans la couche, qui’ vous aura feruy à éleuer vos femences, faifant vn petit rayon de trauers la cou- che, de Ja hauteur de voftre piante, qui fera de huit poulces ou enuiron ; com- mençant par vn bout ; vous coucherez dedans vos plantes cofte à cofte , fe tou- chant l’vne l'autre fans fe preffer pour- tant, & vn peuen penchant ; cela fait, vous les couurirez du petit fumier de la mefme couche, en faifant vnautrerayon pour vne leconde rangée, dans lequel vous coucherez des plantes, comme au premier, & ainfi en continuant, autant G iÿ Tÿo LE TR PTNTIER que vous aurez de plantes : par aprés vous couurirez le tout enuiron la hauteur de quatre doigts , de bon fumier chaud tout recentement tiré de l’Efcurie & en peu de temps elles blanchiront : fi vous voulés les couurir de quelque paillaffons en forme detoict, pour les preferuer des grandes pluyes, ellcsdureront fort long- temps fans {e pourrir: Quand vous en voudrez prendre pour voltre vfage, vous commencerez par les derniers qu'aurez enterrées, & prenant tout à main fans diftinion , vousles tirerez de rang, & {ur le lieu mefme les éplucherez du pour- ry, ou de e: qui fera roircy par Le fumier, auant que de Îles mettre dans la corbeille, pour Les porter à la cuifine. La feconde maniere de les conferuer plus long-temps, fera de les enterrer comme deflus par rayons, dans le fablon à la caue : leur mettant la raciñe en haut, de craînte que le fablon ne grille entre Jes fueilles, & qu'il ne s'en trouue dans les plats, quand on vous la feruñra : Il n'eft pas neceffaire d'y mettre du fumier par deffus, pourueu que le fablon cou- ure la plante de quatre doigts de haut, il fuffira : & quand vous les tirerez pour voftre vfage, auant que de les dreffer, vous les fecouërezbien,la racine enhaut, FRANCOIS. IST pour faire tomber tout le fablon, qui pourroit eftre aux fueilles ; vous les pren- drezaufli toutes main, comme elles fe prefenteront dans leur rangées. | Il y a dela Chicorée quife ferme d’elle- mefme fans eftre liée, qui eft d’vne fort petite efpece, mais beaucoup eftimable pour fa bonté. Quant àlagraine, vous laifferez mon- ter des plus belles plantes, & particu- hierement de celles que vous verrez qui veulent blanchir d’elles-mefmes, & {e pommer fans eftre liées : vous la laiffe- rez bien meurir, mefmement pañler de meurir; car elle ne tombe pas aïnfi que beaucoup d’autres : au contraire, quand apres l’auoir laiffée bien fecher, vous la porterez fur l'aire de la grange, encore aurez vous affez de peine à latirer dedans les nœuds à grands coups de fleau. L’endiue ou Chicoree fauuage, fegou- uerne comme la franche, & auec moins de peine , la femant feulement dans vn petit rayon, & la farclant, binant, & éclaircifant en faifon. | Pour la blanchir, on la couure fim- plèment de fumier moyennement chaud, elle fe tire de Terre au commencement. des gelées, & fe ferre dans le fablon à. Ja caue comme les autres racines ; mais G iiij 1$2 LE TARDINtTER auant que de l'y mettre, il faut qu'elle : foit prefque blanche; fa racine eft beau- coup cftiméc, & j'ay douté fi je la de- uois mettre au rang des racines, mais Jay jugé plus à propos dela placer aucc Ja franche,ä caufe de la conformité qu’el- les ont, tant à l’accroiffement, qu à la façon de grainer. De l'Ozcille, nous en auons de plu- fieurs efpeces, quifont, la grande, ou l'Ozeille à la mequenne, ou à la parefle: d'autant qu'vne feule fueille peut fuffire pour vn potage ; attendu qu’elle eft d’y- ne fi prodigieufe grandeur , qu’elle a des fucilles qui ont jufques à fept poul- ces de large, & quinze ou dix-huit poul- ce de long, c'eft vne efpece que l’on a apporté des Païs Bas, j’en ay eu des premiers. La feconde efpece, eft vneautre grande Ozeiïlle femblable à la patience. La troifiefme, eft celle qui ne porte point de graine , mais de qui la plante s'élargit dans terre, en produifant de petits jettons à cofte defquels on fe fert pour plant. 3 La quatriefme, eft la petite Ozeille que nous auons dés fi long-temps en vfage. LT La cinquicfme, eft l’Ozeille ronde, | & | FRANÇOIS. 153% grande & petite, qui ne graine point auffi , mais on en tire du plant de cer- taines trainafles qu'elle fait, qui cou- urent toute la Terre : & par des rejet- tons qui font autour de la plante, que l'on partit en petites touffes, pour en faire des planches. La fixiefme eft la Surellé, ou fauua- ge qui fe trouue dans leshaut prez, que l'on prendra la peine de cultiuer dans les Jardins. Il y ena vne feptiefme qui a la fueille en trefle, que l'on nomme Alleluya: elle eft fort delicate & agreable à caufe de fon acidité, toute femblable à l'O- zeille , quant au gouft ; fort excellente dansles potages, farces, & falades,d'au- tant qu’elle a toutes les mefme qualitez & gouftque [es autres Ozeilles. Elles fe peuuent toutes femer à l’ifuë des gelées, par petits rayons, quatre à chaque planche : vous foignerés qu’elle foit bien farélée de toute les herbes qui l’eftouffent : quand elle fera vn peu for- te, vous l'éclaircirez afin qu'ellcen pro- fite micux : & fi vous voulez, de ce qu'ar- racherez vous en ferez d'autres planches: mais le meilleureft, fivousen defrerre- : planter, de prendre du plus fort plant, & au commencement de l’Automne, ou G y If 4 Le TARDIN:1ER Printemps; en faire des planches à part: elle vient bien d'vne façon & d'autre, dure fort long temps en {a bonté , mef- mes jufques à dix, où douze ans, apres lefquels il fera bon d'en replanter ail- leurs, d'autant que la terre s’ennuye d’e- ftre toùjours chargée d'vne mefme plan- te, & fe plaift en la diuerfité : joint aufli que les racines , s’entrepreffans les vns les autres, ne trouuent pas de fubftance fufifante pour leur entretien. Elles fe veulent labourer au moins trois fois l'An: & à la derniere qui fera au com- mencement des fortes gelées, vous re- pandrez par deflus du petit fumier: Les - crottes du poulailler luy font auffi trés- bonnes, & la font profiter à merueille. À ce dernier labour ; l’on arrachetou< tes celles qui par quelques graines tom bées font hors de leur rang, & aufli on chaftre la ronde, & coupe-t'on à toutes fueilles & tiges tout prés de terre, auant que de les couurir de cesfumiers. Pour la graine, elle eft facile à recueil- Hir en celles qui en portent, car le plein Eft£ venu elles montent, & quand vous verrez qu clle fera meure, vous coupe- rez les tiges prés de terre, puis eftant bien feichée , elle quittera facilement Les” bourfes, vous la nettoyerez bien, & læ CIrerez,. FRANÇOIS. 1$$ La Patience fera gouuernée comme: l'Ozeille ; c'eft vne plante qui n'ef fi delicate au manger, neant-moins vous ne laiflerez d'en auoir quelque planche, afin que voftre [ardin ne manque d'au- eunce chofe. La Bourrache, à caufe de fa vertu trot ucra aufli lieu dans voftre Jardin , quoy qu'elle gafte la coujeur des potages, en Les noirciffant : {es fleurs font fort agrea- bles à feruir furtable, & fe peuuent met- tre fur [a viande , fur les potages, falades & autres aprets : d'autant qu à caufe de eur grande douceur, les mange qui veut, fans qu'elles donnent aucun degouft. Elles fe fement au renouveau , eomme les autres herbes, & fe peuuent laiffer dans terre, leurs racines fupportans.les gelées s & repouffans au PrintempséEes Marailchers de Paris arrachent toute la plante, & en fement plufers fois durant l'Année, à caufe qu'elle en eft plus tendre. ; Pour fon gouuernement , il fufira de la biner legerement, & labien farcler. Pour la Graine vous laifferez monter des plus belles plantes , & eftant bien meurice fur le pied : vous la cueillirez, & ferrerez ainfi que les autres. La Buglofe , fera gouuernée tout de La G y} CRE "A 186 LE TARDINIER mefme façon que la Bouroche , c'eft pourquoy jene m'y arrefteray point. Le Cerfueil , outre celuy que je vous ay dit cy- deuant qu'il falloit femer fur les Couches, pour compofer les petites Sa- lades , à la fortie de l'Hyuer il fera bon de mois en mois , d'en referuer de nouueau { quoy que peu ) à caufe qu'il en fera plus delicat que quand ileft vieil femc: Les Bandes de vos Efpaliers, & Contr’Efpa- liers pourront feruir à cét effet, dautant qu il ne peut nuire à vos Arbres par fa pe- titefle , & pour le peu de fubftance qu'il luy faut à fon accroïflement, &encor pour le peu de temps qu'il fejourne en un lieu. Vousen en laïflerez monter à Graine quelque bout de planche, qui fufhra pour vous en fournir amplement, la laif- ferez bien meurir fur le pied, puis vous l’arracherez, où couperez, &la feiche- rez parfaitement , avant que de la ferrer. I] yaune autre efpece de Cerfueil d'Ef- pagne , qui fe nomme Mirrhis-Odorate : fa feuille refflemble toute à la Ciguë , eft fort agreable au gouft , ayant fon parfum femblable à l’Anis-Vert , & encore plus agreable en le mafchant peu. Au Renouveau, quand de fa vieille Ti- geil pouffe fon jet, on le couvrira de fu - mier menu, puis de chaud par deffus FRANÇOIS. 157 pour l’eftouffer , afin d’eftre mangé en Sa- lades : il eft de beaucoup plus agreable que le Perfil de Macedoine, ny que le Sceleri d'Italie. On le femera au Renouveau en quel- que endroit à part, & on nele labourera enaucune façon tant qu'ilfoitlevé, mais on le faclera feulement à mefure que {herbe y pouflera , dautant qu’il eft par fois une Année fans fans fortir de Terre. Pour la Graine vous la recuillirez en fa faifon,& la gouvernerez côme lesautres. Le Perfil de Macedoine fera mefnagé tout de la mefme façon que je viens d en- feigner au Cerfueil d'Efpagne , excepté que fa graine n'eft pas fi long-temps à le- ver & qu'il ne fe mange qu'étouffé fous le Fumier ou fous des pots de Grets, com- me la Chicorce. Le Cclerid Italie feratraitté de la mé- me maniere, fon montanteftce qui eftde - plusexceilenten fa plante , à caufe de fa delicateile & tendreur. Ces trois dernieres Plantes ne {e veu- lent femer tous les Ans, mais fe confer- ver dans terre fans crainte que les Ge- lécs les faffent perir. | Du Pourpier , t'en trouve de quatre fortes : Le Vert, le Blanc , le Doré, ñ’a- oueres apporté des Ifles de S. Chriftophe, / 1$FÈ LE JARDINIER quieft le plus delicat, &la 4. eft la Pour celine,ou petit Pourprerfauvage,le moins à prifer, taterre fe produifant naturcHe- ment d’elle-mefme, fansaucuntravail. I] fe feme au Renouueau fur la Couche, & tout Icleng de l'Efé , pour en auoit toufiours de tendre. Pour Le femer, il faudra labourer later- re, puis la bien dreffer par tout, & efpan- dre deffus voftre Graine fa plus claire que vous pourez, d'autant qu'à caufe defa pe- titefle l'on y met toüjours plus qu'ilnen faut, & eftant femée, vousne l’enterrerez d’autre facon, finon en battant fur la plan- che auec le dos d'vne paefle de bois, ou d’vn battoir à lexiue:Onl’arouferale plus proprement que lon pourra,pour nefaire des trous à laterre, fl leve en fort peu de temps, c'eft pourquoy l'onne le laiffer a manquer d’eau dans fon commencement. Il fe replante pour en tirer de la Graine bien conditionée, & pour avoir de plus gros cottons à confire au Sel, defquelson fe fert en Hyver dansles Salades, & dans les Potages. Pour la Graine, vous jugerés que elle fera mzure quand vous la verres bien noi- re, alors vous arracherés la plante & la mettrés fur quelque drap fe fannir, & feicher au Soleil : le foir venu, vous la HR ANCOÔIS. 1f9 ferrerés à couvert dans le mefme drap, la remettant le lendemain au Soleil ; & tôus les jours en continuant de mefme , cela acheuera de meurir celle qui ne l'eftoit pas : puis apres vous}a broyerés dans les mains, & la mettres fur quelque autre linge à part pour bien feicher , auant que de la ferrer : vous remettrés derechef fe1- cher les plantes quelques jours durant, car elles vous rendront encore beaucoup de graine,qu'elles n'auroient pas quittée. Vous remarquerez que la graine nou- uelle n’eft pas fi bonne à femer que celle de deux, trois ou quatre ans. Les Epinarsfe trouuent de trois efpe- ces : des grands qui n’ont pas la fueille f poinétuë que les petit, & desblonds, qui font la troifième efpece : ils fe venlent fe- mer au commencement de l’Automne, afin d'efre fortifiez auant l’'Hyuer;fi vous voyez qu'ils pouflent par trop, vousen pourrez couper pour les potages, & pour Ja patiflerie, ils feront de beaucoup plus tendres que dans le Carefme où l’on en mange ordinairement : La maniere de les femer eft par planchesen petitrayon,qua- re à chaque planche: On les farclera pro- prementquand ils feront leuez, & oftera- on ceux qui par hazard de quelque graine tombée, feront leuer entre deux rayons, Lé 60e Lr lARDINIER Vous en referuerez quelque bout de planche pour la graine, coupantaux au- tres endroits ce qu'en aurez de befoin, & dant le Carefme, vous arracherez la plante entiere pour tout employer à la cuifine, n'y rognant que la racine. La graine fe trouuce de deux fortes, de picquante,& d'autre fans picquans,toute ronde : celle-cy fait les Efpinards blonds, & plus delicats que les autres. Des Feues, Poix, € autres legumes, SECTION VI. I: ya trois fortes de groffes Feues , cel- les que l'on nomme à Paris Feues de Marais, lefquelles viennent larges , plat: tes, & de couleur fort blonde : D’autres plus petites beaucoup, femblables aux premieres, fauf qu'elles font plus ron- des : Ft d’autres encor plus petites & tou- tes differentes des premieres, d'autant qu'elles font prefque rondes, & de cou- leur grife, ou rougeaftre : ce font de ces Feues que l’on donne aux Cheuaux, & que l'on fait mouldre pour employer en plufieurs befoins. lene veuxtraitter icy que de la maniere de gouuerner les plus groffes, laifant les f / FRANÇOIS. 161 petites comme de peu de valeur, & je diray , que les opinions font bien diuerfes pour letemps, & la façon de les femer. Aucuns les fement dés les Aduents de Noël, & tiennent qu’ils en ont des pre- , mieres bonnes à manger: Autres atten- dent jufques à la Chandeleur : Et les au tres veulent que les gelées foient entie- rement paflées, auant que de fe mettre à celabour. Chacuna fes raifons parti- culieres, & difent que c’eft à caufe des puceons qui en mangent la cime quand elles font en fleur : pour moy qui ay toù- jours en vilée le plus certain, j'atends que l'es gelées foient paflées, & je fon- de ma raifon fur ce que la faifon amene tout. Ce neft pas que je vous veüille diffuader d’en femeraux Aduents, & au mois de Feurier; mais je vous confeille d'en faire peu , referuant la plus grande quantité quand les gelées feront paflées: d'autant que comme il eft neceflaire de les mettre en [a meilleure Terre, & la plus baffe que vous ayez : elle fera mal en labour aux deux premiers temps, à caufe qu'elle retient & garde plus fon eau, que les terres legeres. Auant que de les femer vous choifirez celles quifontles mieux conditionnées, & les plus faines : vousles mettreztrem- 26% Le ÎADINIER ne per vn jour ou deux, dans le jus du fu mier elles s'enfleront extremement , & s'auanceront de germer plus qu'elles ne feroienten dix, ou douze jours : Outre que, ne fejournans paslong temps dans Terre fansleuer , la vermine our: moins detemps de lesendommager , & d’abon- dant, ayanttrempe dansce jus,elless'im- bibent de la bonne qualité du fumier, qut les fait vegeter plus abondamment. Pour [es femer , 1l faut que ia Terre ait efté libourée auant l'Hyuer , nettoyée: de toute herbe, puis auec la fourche l’on fera vne jaulge, fur l’ados de laquelle ( & non pas au fonds ) vous placerez vos Feues, à demy-pied, ou vn peu plus l’vne de Fautre : puis aprés vous ferez vne feconde jaulge, & dela Terre qu'en leuerez vous couurirez vos Feues : puis vne troifiéme, & fur cette troifiéme vous placerez des Feues comme à la premiere: ainf en continuant de deux en deuxjaul- gcs, vous y mettrez des Feues-: 1l faut cftre curieux de mener la jaulge la plus droite que l’on pourra:ofin que l'on puifle les biner, farcler, & rogner : fans rom- pre les tiges en paflant dedans. Ilyena d’autres, quiaprés auoir bien Jabouré , & dreffé leur Terre la diuifent par planches, & les fement au plantoir* FRANCOIS. EC mais l’autre maniere me femble meil- leure, d'autant qu'elle rend la Terre plus efmiée , où mauble, ou pefle, com- me vous la voudreznommer, m'accom- modant au langaze de plufieurs Pays, pour la facilité de me faireentendre. Dans leur accroiflement, quand vous verrez que l’Herbe les voudra fuffoquer, vous les binerez, & farclerez propre- ment, fans les endommager ; & desja grandes, vous remarquerez que les pu- ceons, ou moucherons, paroiftront au coupeau de leur tige, s'attachans à la partie la plus'tendre: alors vous les rogne- rez, emportant les puceons, auec le plus tendre du jet, oùils font attachez. Vous mettrez ess roignures dans quel- que boiffeau, pour eftre jettées au feu: ou bien vous les enterrerez dans la fof- fe au fumier, ou en quelque autre lieu fort éloigné de vos Feucs, car ils y re- tourneroient. Vous deftinerez quelques planches par- ticulieres pour en manger en vert, fans cueillir des gouffes dans toutes les plan- ches; & quand vous aurez entierement dépoüillé quelque plante, vous la cou- perez prés de Terre, afin qu'elle jette de nouueaux Jettons, qui porteront leur fruit dans l’arriere faifon. SP LE lJARDINIER Pour la Semence , vous les laifferez bien fecher fur pied, jufques à ce que les gouiles & la tige foient routes noires; & les arracherez à la grande chaleur du jour , les ferez battre au fleau à petits coups, & les ferez vanner à voftre com- modité. Le foarre, ou chaulme, que vous en tirerez, ne fera brülé , quoy que la cen- dre en foit trés-bonne, mais fera mis pourrir auec les fumiers pour les ame- liorer : mefmement fi vous voulez bien amander de la Terre, femez y des Feucs; & quand elles commenceront à defleu- rir, labourez le tout enfemble terre, & Feues , fans fonger à la perte qu’il y peut auoir ; car cette maniere de fumier eft vn merueilleux amendement. 11 fe trouue des groffes Feues qui font d'vnrouge brun, mais elles ne font fide- licates que les blondes. Les petites Feues d'haricot , ou calli- cot, ou bien Feues rottes font de deux efpeces, de blanches, & de colorées, parmy lefquelles il y en a aufi de blan- ches, mais plus petites, & rondes que ne font pas les grandes blanches. Pour commencer par les grandes vous les femerez en quelques planches à part, quatre rangées à chaque planche, afin | FRANÇOIS, 16$ d’auoir plus de commodité de lesramer, que fi elles eftoient femées en confufon: Vous en deftinerez quelques-vnes pour en mangeren vert, en laiffant les autres pour les mancherfeiches, & pour la Se- mence : Quand vous les cueillirez, vous prendrez garde de n'offenfer ny corrom- pre la tige, afin qu'elle vousen produife jufques à ce qu’elles feichent fur le pied. Les colorées qui font pius petires, fe fement ordinairement en plain gueret frais labouré : que l’on herfera fans y ap- porter autre foin qu'aux grains qui font en plain champ: finon quehuit, ou dix jours apres qu'elles feront leuées, il efk bon de les biner, & n'y plus toucher, jufques à ce qu’elles jettent des traina- ftes, qui eft au commencement de Iuil- Jet ( lefquelles il faudra rogner , ou cha- ftrer, pour faire mieux profiter les gou- fes qui font au bas de la tige ; & pour éui- cer que en lians les vnes aux autres, par trop de ramage, elles ne verfailent, & ne pourriflent celles de deflus , au lieu de meurir. Ces fortes de Feues, ne defirent la Terre fi forte que les Feues de Marais, mais plutoft la Sablonneufe. Elles veulent eftre femées an commen- cement du mois de May, & arrachées à 156. LE IlARDIENIER méfure que les plantes feichent, les fai- fant battre au fleau, comme j’ay dit cy- deuant aux Feues de marais : car fi veus les cueillez plus vertes, vousaurezgran- de peine à trouuer les lieux propres pour les metre feicher, qui feroit vn grand em- baras, fi vous en auiez beaucoup. uant aux branches qui font ramées, d'autant qu'elles montent au haut de leurs rames, & fonc long-temps à toù- jours porter , il fera bon de cueillir les goufles que vous verrez eftre feiches, à caufe qu'elles ne meuriflent pas toutes en mefme temps, & qu'il en peut arri- uer deux inconueniens : Le premier, qu eftant paflées de meurir, la goufle s’ouuriroit à la grande chaleur du jour, & laïferoit tomber Îles Feues qui font dedans : & le fecond , que s’il venoït de grande pluyes , le parchemin de la gouffe cflant mouillé, il s attacheroit aux Fe- ues, par vne certaine glus qui s'yfaic, & ne s’en détacheroit plus , exmdommageant les Feues par vn moyli qui les tacheroit, & lesrendroit defagreabies à la veuë, & encor plus au manger : outre que l'on feroit obligé de les écoffer à la main, ce . qui feroit perdre beauçoup detemps. Vous tircreztoutes.lesnoires, & tou- tes ceiies qui feront meflces de noir, & FRANÇOIS, 147 Hlanc;dautant qu'elles deuiennent:noire quen cuifant elles teignent le boüillenr. Vous ferez état des rouges par deflus toutes lesautres, à caufe de leur delica- telle? furpaffanc de beaucoup les blan- ches, quoy qu'à Pariselles foient le plus *. ! desagache, & reftaure s’1ls font décheus x Cxtenueze Des Oignons, Aïls, Ciboules, Poirreauxs Herbes Odoriferantes ; € autres commoditez du l'ardin , qui ne font comprifes aux Cha pitres precedens. SECTION VII "Oignon fe trouue de trois couleursz le blanc, le pafle, & le pourpre rouge : Je dis de trois couleurs, car je n'eftimé pas que ee foient trois efpeces differentes, veu qu'ils font prefque fene- blables en gouft , laiffant à juger deleurs qualitez aux Simpliftes. Outre ce que je vous ay fait cy-deuant femer des Oignons auec le Perfil, vous en femerez encore d’autres fur quelque planche à part : Et quand il fera gros comme le tuyau des plumes de Poules, vous les pourrez replanter en rayon au plantoir , afin d'enauoir de trés gros. Sivous en laiffez fur la planche où l’au- rez femé , il deuiendra plus petit, & fe H üiij 12 176 Ls TJARDINTER monftrera plutoft hors deterreen failon, que celuy qui aura efté replanté. Durant ies grandes chaleurs d'Efté, il voudra monter à graine ce qu'il faut pre- uenir en pilant aux pieds lemontant, cela Parreftera , & fera groflir l'Oignon. Quand vous verrez qu'il fera hors de terre, quilaura la fueille bien feiche, & qu’il fera comme l'on dit, bien Aoufté, alors vous l’enleuerez entierement, re- cherchant jufques aux plus petits dans la planche auec la binette, & le laifferez quelques jours feicher par monceau ‘ur fon gueret, pour par aprés eftre férre en lieu temperé des qualitez de l'air, tirant plutoft au fec, qu'à l'humide. Pour la Semence, vous choifirez des plus gros qu’aurez referuées, & lesgelces cftans paflées , vous les planterezen bon- ne terre bicn fumée, & déchargée de pierres, qui cft la vraye terre que defirent les Oignons ; Vous vous feruirez de vo- ftre Hyuer pour cét effst, en fillonnant Ja planche où vous le voulez mettre, non en long, .mais en traners, & aflés pro- fondement , puisaprés vous poferez vos Oignons au fond de la raye, à vn bonde- my pied l'vn de l’autre, & le recouuri- rez en faifant vn fecond rayon, ainfi vn troifiéme, & vn quatrième , continuant | FRANÇOIS. : 1772 de mefme jufques au bout de voire planche. Quand ileft en graine il eft fort fujet à eftre renwerfé des vents, à caufe de fa charge, & la foibleie de fon tuyau, qui fe rompt ou courbe facilement, laiffant " choirfatefte à terre, qui pourritlagrai- ne au licu de la meurir : c'eft pourquoy l'on y/remediera, en faifant comme vne petite barriere tout autour-de la plan- che, (que j'ay dit aux Salffix } ou bien mettant des petits pieux d'efpace ,;°en efpace , à chacun defquels vous lierez quatre ou cinq tuyaux, les approchans & penchans doucement fans les corrom- pre s’il fe peut. | La tige eflant feiche:,'& la cefte faifant paroiftre la graine à découuert , donne vn témoignage de {a maturité: c’eft pour- quoy vous l'arracherez ; & aprés auoir coupé tous lestuyaux , vous mettrez feiz Cher les teftes fur quelque nappe, met- tant à part la graine qui tombera d'elles mefme fur lanappe, conime la meilleu- re, & la mieux conditionnée ; puis quand le tout fera bien fec; vous les broyerez dans vos mains, en en retirant auec pa- tience & à force de feicher , Le plus que vous pourrez. * Si vous ne la voulez brover à l'heure L H v 176 LE JARDINIER mefme, vous lierez les teftes par-bou=« quets, & les prendrez dans voftre ferres, elle fe conferuerâ, & augmentera en bonté, n'en prenant qu’à voftre befoin. 1} y à tant de tromperie à acheter de cette graine, que je vous confeille de n'en prendre pour femer que de la voltre.. fi ce n’eft que quelque amy vous en en- voye pour vous renouueler; car aucuns: Marchands vous la vendent trop vieille, & paf confequent incapable de germer, oubienils l’échaudent, pour connoïiftre la bonne , il en faut mettre vse pincée dans quelque Efcuelle, y mettre de l'eau, & la faitéinfufer {ur de l1 cendre chau- de ; en pêtu de temps elle pouflera. fon, germe, fi elle eft bonne, finon il la fau- dra rejetter. Les Ciboules de toutes fortes, depuis. la plus groffe juiquesä la Ciuete d'An- eleterre, fe plantent de cuilfe, en met- tant quatre, ou cing.enfemble, pour en, faire vne touffer :,& [elon la! groffeur de la Ciboule, vous les éloignerez, n’yayant. autre foin pour le:scouuerner, que de les. bien farcler, biner, & fi vous voulez, fumer auant l'Hyuer:. ro On. les pourra, laifler en Jeur plan- che tant d'années que l’on voudra, la plante grofliflanc toufours, par les. FRANÇOIS: 179 Cayeux qu'elle jette en abondance. I! fera bon pourtant de trois, ou de quatre ans l’vn, de la releuer, & de la planter en vn autre endroit ; d'autant que la terre s’ennuye d’eftre chargée d'v- ne mefme forte, & s'effrite de la qualité le plus augré de la plante, ne la rendant que langoureufe, & debile, fielle y fe journe plus long-temps. L'ail fera gouuerné comme l'Oignon, le vraytemps de Je planter eft à la finde Fevrier : le temps de le piler, ou noüer fes tuyaux , eftà la faint Pierre de Iuin:. & le tempsde le leuer de terre, à la faint. Pierre d'Aouft ; fuiuant le Prouerbe des vicils Jardiniers: À la faint Pierre feme tes Aïls , à la faint Pierre piletes Ails, à la faint Pierre recueilletes Ails. uand vous les aurez amallez ,. vous les laifferez bien feicher par monceaux fur le gueret : puis à la fraifcheur du ma- tin,. vous les lierez auec leurs fucilles mefmes, par douzaines : & leur laiffe- rez paller la journée au beau Soleil, amant que deles porter augrenier,eu enlaferre, les pendansaux foliues du plancher, pour Jes conferuer plus feichement. Les Efchalotes ( ou Appetits ) feront m énagées comme les Ciboules, replan- ta nt les-petits Cayeux pour lesfaire grof- k H vi 180 LE TARDINtER fir: & au mois d’Aouft vous retirerez de terre ce que vous en voudrez ferrer , Les mettant en mefme lieu que les Ails. Le Porreau féra auffi ménagé de la mef- me façon que l'Oignon, & replanté en rayon au plantoir le plus auant que l'on pourra afin qu'il ayt le blanc plus long: mefme ilne faudra remplir le rayon que quelque temps aprés, jufques à ce qu'il foit grandy, cela alongera encor le blanc, l'on y fait vne autre façon de plus, qui eft, que quand ils font au bout de leur _ aceroïllement, on les couche dans ieur rayon , les vnsfur lesautres, ne leur laif- - fant fortir que bien peu de la fucille, ce qui eft dans terre blanehy ; & par ainfi vn Porreau eft alongé de beaucoup, & fait autant de profit que deux autres. Pour la graine, vous referuerez des plus beaux & des plus longs , que Vous replanterez au renouueau : & quand ils feront montez, vous les entourerez de Pieux, & Palliffades comme les Oignons, de crainte que les teftes ne tombent à Serre. | - Quand elie fera meure, vousla cou- perez, feicherez, ou ferrerez. par bou- quets, ou autrement, tout ainfi que l'Oignon. | FE Les Herbes Odoriferantes, & autres * FRANÇOIS: 181 que vous deuez principalement auoir dans voftre Jardin, font celles qui fe mettent en falades, & dans les apprefts de cuifine ; laiffant les autres À voftre vo- lonté, comme Souchet, Bafilic, Lauan- de , Garderobe, Yfoppe , Steca, Meliffe, ‘Camomile & autres : nous traitterons icy feulement de celles dont vous ne de- uezeftre dépourueu. Pour les Salades : Le Baulme, l’Eftra- gon, la Perce-Pierre, le Creflon Ale- nois, la Corne de Cerf, la Pimpinelle & la Trippe Madame, font celle que l’on y employe d'ordinaire conjoinctement auec celles que j’ay décrites aux Sections precedentes , la Salade eftant tant plus agreable, qu'il y a de diuerfitez d'Her- bes qui la compofent, Aucunes de ces Herbes fe fement & autres fe plante de racine , quey qu’elles portent prefque toutes delagraine, mais non fi valeureufe que le plant enraciné. Celles qui fefcment, font la Corne de Cerf, la Pimpinelle, & le Creflon: les. autres fe plantent auec racine, & toutes fe gardent fort bien dans terre, y paflant l'Hyuer. Vous pourrez les laiffer tant d’Années que vous voudrez au lieu où vous les au- rez femées & plantées , n'y ayant autre 18% Le IARDBINIER foin que de les biner, & en labourer les fentiers, de crainte que les mefchantes herbes ne les eftouffent. Les autres qui fe portent à lacuiline:. fonte Thym, fa Sarriette, la Marjolaine des deux efpeces, la Saulge auflides deux cfpeces, & le Rofmarin touteslefquelles plantes font affez faciles à faire venir, & vous en fournir plusque fuffamment. La Regalile ne fera oubliée, pour la neceflité de ceux quiont befoin de boire. de Îa Pcifane : mais fivousenmetrez dans voftre Iardin, placez-la en iicu où elle ne vous puifle nuire ; car fi elle trouue la terreà gouft. elle fe trainera & profon- dera beauconp plus que ne fait le chien dent, vous donnant grande peine à la chercher, en cas que vous la voulufliez. entierement arracher. Elle vient aufli bonne par toute la. France, que celle que l'on apporte. d’Efpagne. | Pour vous en fournir, vous-prendrez da plant enraciné, que eoucherez dans, terre à quatre bons doigts de profondeur, & vous ne la labourerez point : mais la. bincrez, & farclerez feulement pour la. faire mieux profiter. Le T him fe feme & fe replante de plant. enraciné d'ynetouffe en faifant plufieurs. ERANÇOIS. 183 brins.auec racines , éclattant feulement le pied: & ille faut planter auec le plan- toir large , ainfi que l’on fait toutes for- tes de bouttures. La Sarriette fe feme touslesans, c’eft: pourquoy il faudra eftre foigneux d’en. -recucilir la graine , & l'Herbe eftant feichée ,. fera conferuée pour Les affai- _ fonnemens. | De la Marjolaine, il y en a de fran- | che, &d'Hyuer, lafranche,, ou petite, __ eft fort tendre la gelée : partant, l’on {era foigneux d'en ferrer la graine, pour en refemer tous les ans : celle d'Hyuer ou la grande , fe pourra perpetuer en quelque lieu que vous voudrez. Les Saulges franches , & baftardes,re… prennent parfaicement bien de boutures, & de branches éclattées. de leur fouche auec racines. Le Rofmarin fe plante auffi de bout- ture, & de plant enraciné éclaté de fa fouche. Le Fenoüil doux, & l’Anis, qui font plantes qui fe fement & gouuernent fans beaucoup de foin, ne feront oubliez en vofre 1srdin. Contentez-vous du peu d’inftruétion que je,vous donne de ces plantes Odo- riferantes ; la crainte que j’ay de groflir - 184 Le TlARDIN:iERr par trop noftre Volume, a fait que j’ay paffe allez legerement par deffus ; il refte maintenant pour conclurre ce Traité, d'y adjoufter quelques plantes & Ar- buftes portans fruit, neccflaires à voltre Jardin. Les fraifcs font de quatre fortes, des blanches, des groflcs rouges, des Capprons, & des petites rouges ou fau- uages. | | Pour ces dernicres qui font les petites, Vous ne vous çn mettrez beaucoup en peine fi vous cfles proche des boiïsoù elles abondent : car les Enfans des Villagcois en apporteront afflez, pourueu que vous leur en donniez quelque peu de chofe: & fi vous efticz cfloignez de ces petites douceurs, vous en pourrez faire de pe- tits Tapis fort eftroits dans le milieu de quelques vnes de vos allées, fans aucun foïn ny autre peinc que de les planter, en voyant feulementquerir du plaähten mo- te, où vous fçaurez qu'il y en aura, ou bien de les femer, qui eft de jetter déf- fus ce tapis l’eau dans laquellé vous aurez laué vos Fraifcs auant que de les manger. , sd Pour les groffes Fraifes blanches ; rou- ges, & Capprons , vous les planterezpar planche, quatre rangées à la planche, & FRANCO TS. 185 chaque planche à vn pied & demy l’une de l’autre ‘ le meilleur planteft de pren- dre des traïnafles qu’elles font durant J'Efté, & en mettre trois plantes dans chaque trou que vous ferez auec le plan- toir. Le vray temps de le planter eft dans ‘le mois d'Aouft, lors que cxs trainañles font fortes, & ont pris Racines par les nœuds, formans à chacun vne pe- tite planche. - Pour leur gouuernement , on les la- bourera , farclera, & binera fort foi- gncufement. Pour auoir du plus beau fruit, & du plus net, l’on mettrra à chaque plante yn petit paifleau, y liant doucement les montans de chacune plante auec du foar- re : cela fera qu'outre que le Fruicen fera plus gros, les Limate, Crapaux, Gre- noüilles, & autres animaux nuifblesne s’y logeront pas : ce qu'ilsferoient, fila plante rempoit par terre : & en mange- roient vne bonne partie, attaquans toù- Jours les plus belles. . Au temps qu'elles jettent feur trai- naffes , 1l les faudra chaîftrer curieufe- ment, n'y en laiflant aucunes, que cel- les que vous deftinez pour en auoir du plant. | Vous en ferez tous les Ans quelques 186 LE lARBINTER nouuclles planches, ruinant celles qui auront plus de quatre ou cinq ans, com- me commençans à déchoir de leur bonté & groffeur. El fera bon-de les fumer de petit fu- mier vn peu auparauant les grandes gelées, afin de les ameliorer , coupant toutes les fueilles, comme j'ay dit à l'Ozeille. Pour’ la terre qu'elles defirent, le {a- blon leur eft plus à gouft que la terre for- te: C’eft pourquoy vous chofirez la par- tie de votre lardin-la plus. fablonneufe pour les y loger. ape Si vous voulez auoir des Fraifes dans l’Aptomne, vous n'auez qu'à couper toutes les premieres fleurs qu'elles pouf- feront, & les empefcher de fruétifier: elles repoufferont d’autres fleurs par apres, qui porteront leur fruit en ar- riere-faifon. Des Framboilfes, il s’entrouue de deux couleurs, de blanches, & de rouges; elles fe plantent de plant enraciné écla- tant vne fouche en plufieurs brins, & les. plantant à quatre doicts l’vn de l'au- tre en rayon ouuert, qui eft la hauteur du fer d'vne befche , comme j'ay dit cy- deuant, quand j'ay traitté de la maniere de dréfler la Pepiniere, où je vous ren- FRANÇOIS. 137 uoye pour plus abreger. * Il n’y a autre foin outre les labours, que de tailler le bois mort, & ofter les jets qui poufleront dans les fentiers , & entre deux rangs. Si vous voyez pour- tant qu'à force de pouffer ils s'eftouffaf- fens , vous les foulagerez en coupant les nouueaux jets, & laiflerez les vieils, comme les plus francs & capables à por- ter fruit. Les Grofeilles font de deux efpeces, des grofles & petites blanches qui ont des piquerons. | Ft d’autres rouges, blanches, & per- lées fans picquerons, que l’on nomme en Normandie des Gadelles. Elles fe veulent toutes planter & gou- uerner comme les Framboifes , c’eft pourquoy je ne m'y arrefteray pas d'a- uantage. Les Champignons, & toute autre ef- pece femblable, que les Italiens appel- Jent d'ynrom commun À tous Fri, nows les diftinguerons en noftre Langue, en _Jesnommant Champignons de bois, qui. font ceux qui viennent à la riue des fo- refts qui font trés-larges: Champignons de Prez ou paftures, qui font ceux qui croilfent où le beftial paift ordinairement, & ne pouffent guere qu'aprez les pres 158$ Lr TARDINIER niiers broüillards d'Automne : ce font ceux que Jj'eftime les meilleurs, tant à caufe de la beauté de leur blanc par def- fus, que de leur couleur vermeille par deflous : outre ce, ils font encor de fort bonne odeur, ce que n'ont pas les autres. Les Champignons de Jardin qui poutlent ordinaireraent fur les couches : & les mouflerons qui nè viennent qu'au com mencement du mois de May, dans les bois cachez fous la moufle , d’où ilsem- pruntent leur nom de mouflerons. De toutes ces efpeces il n ya que celle fur couche que vous puifliez faire venir dans votre lardin : Et pour ce faire on dreffera vne couche auec du fumier de “Mulet, ou d'Âine , en mettant deflus quatre doigts de menu fumier dit terras: & aprés que la grande chaleuff de la cou- che fera paflée l’on jettera deffus toutes les épluchures, & l'eau où l'on aura la- ué ceux que l'on appreftera à la cuifine: mefmementtrons lesvieils ; & mangez de verts, ou limats: cette couche vous en produira de trés:bons, & en fort peu de temps : Cette mefme couche vous pour- ra feruir deux ou trcis ans, & fera bon- ne à en faire d'autres. | | Si vous jettez de cette eau dés laueu- res furles couches à Melons, elles vous PR | FRANÇOIS. 159 €n pourront produire auffi: je me fuis laiflé dire qu'il y a des pierre qui eftans miles dans le fumier ont la vertu qued'en produire en fort peu de temps, & qu'il y a des curieux qui ont deces pierres , je m'enrapporte à l'experience qu'ilsen ont faite. Pourles moriiles, &trufes , il n'y na qu en certains lieux oùelles viennent #aturcllement. £ croy vous auoir enfcigné tout ce qui fe. peut cultiuer dans les lardins , au moins ce qui {e mange le plus commu nement.en noftre France Parilienne : les autres Prouinces ayant d’autres plantes dont ils nous donnent les defpoüilles à fi bon marché, qu celles ne valence pas la peine de lescultiuer: comme par cxem- ple, les Capres, ce n’eft pas qu'elles ne visnaent foit bien en ces qüartiers-cy: mais elles font embarraflantes > OCCUpans va grand lieu pour peu de rapport : & venans mieux entre les picrres de quel- que vieille mazure,qu’entout outre lieu: c'eit vne trop grande pcine de s'aflujectir à en cucillir les fleurs pour les confire au {cl, & clles vous reuiendroient à beau- coup plus d'argent, que vousnelesache- terez chez les Efpiciers. Finiflons ce Traité, & mon‘trons à prefens ia maniere de conieruer en 180 LE lAaRDINtTER {on naturel, & confire tout ce que vous recueillirez de voftre Iardin , felon l'or- dre des Sections, & des dc. com- me vos Fruits, Herbages, & Legumes fent en leur rang dans ces deux premiers Traittez, YIIIIT at EU ÿ, VS AN UE Hey Drasve Cutrr ateRtnesteneenns LE IARDINIER FRANCOIS. IT. ET DERNIER TRAITTE. | SECTION PREMIERE. | De la maniere de conferuer Les Fruits en leur narusel. Lnya rien qui touche plus viue- Ï ment les Sens, que d2: voir dans le profond de l’Hyuer des Fruits auffi beaux & bons, voire mefme meilleurs que quand on les à cueillis. Eralers qu'il femble que les Arbres foient morts pour ne plus reuerdir, & que par la rigueur du froid votre lardin eft tellement dé- poüillé de tout ce qui l’embelliffoir, qu'il paroift plutoft vn defert qu'vnlieu de de- lices : c'eft alors que vous gouftez vos | 4 - 192 LE JARDINIER Fruics auec beaucoup plus de contente: ment que dans l’Efté, ou par latrop gran- de quantité & diuerfité, ils vous {ont plucof à dégouft qu'agreable. C’eft donc pourquoy il nous faut eflayer de vous montrer Les moyens les pluscertains, ë£ les plus faciles pour les bien conferuer tout le long de l’Hyuer : & mefmes juf- ques à ce que les nouueaux vous incitent à quitter les vicils, car il eft des fruité comme des Vins : ceux que l'on boit les premiers; font les plus delicats, & les plus feuez; & ceux que l’on garde pour l’arriere - failon font les plus fermes ou rudes, neant-moins dans leur temps trés- aercable : mais fi toit que Les nouucaux {ent frais, & en boitte, l'on quitte les vicils, qui auparauant eftoient eftimez crés-excellents : De mefme auf , fitoft que les nouueaux ; Fruits approchent de leur maturité, l’on abandonne ceux de l'Année precedente ; & vn plat de Frai- fes, de Cerifes, ( quoy que toutes ver- ces ( ou de Poires de Haftiueau , fera pre- feré à la meilleure Poire de Bon-Chreftien que vous ayez. Pour paruenir à noître intention il fera bon de choifir quelque lieu dans voftre legis qui foit commode pour en faire sn Fruiétier, oureleruoir, quiaitles fene fire FRANCOIS. CE ftrés&ouuertures petites à caufe de la ge Ice, & du gräd chaud;lefquellesyours tien drez toùjours bien fermées , n'y laiffanc entrer aucun air, & ne vous en feruant que pour la clairté,refermant tous les vol- lets quand vous en fortirez : mefmement quand il n'yen auroit aucune, & que la porte fut petite & baffe : ce feroit encore le meilleur , la tenant fermée fi toft que vous ferez entré dedans. Le lieu eftant deftiné pour voftre frui- tier, vous le ferez garnir d’aix en tablet- té tout autour : en cas que le lieu foit grand, & que l’on puiflgfaire dans le mi- lieu des monceaux, ou mijols des Fruits les plus communs, que! on deftine pour les Valers : & en cas qu'il foit petit, vous VOUS contenterez d'en mettre de trois co- ftez , referuant le quatriéme, pour y pla- cer vos mijols. | Ces aix feront pofez {ur des Confoles de Bois, ou de fer, bien fortes à caufe de la charge ; deux cofte à cofte , pour faire la largeur de deux pieds : vous ÿ cloüerez vne petite latte par deuant, de crainte qu'en maniant les fruits il ne rou- lent & tombent : Vous lailere trois picds de vuide par bas, Pour mettre | lès petits monceaux des fruits les moins précieux , en les diftinguanc & feparant . # 194 LE FARDINIER felon leurs efpeces ; & continuerez des rangs de tablettes, jufques au Plancher . d'enhaut, les pofant les vnes fur lesautres à la diftance de neufà dix poulces. Pour voftre plus grande commodité, vousaurez vn degré de boisfacile à por- ter,qui {eruira à vous éleuer, jufques à la plus haute tablette; quand vous vifiterez vos fruits, vne échelle n’eftant fi cômode, . & laiffant beaucoup plus de pieds, outre le danger quilya, qu'en vousaduançant &allongeant par trop pour atteindre par fois en quelque lisu éloigné, Fefchelle pourroit glifler ou tourner. Le temps venu de cueillir vos fruits de garde que vous reconnoiftrez en plu- fieurs façons : Ou quand ils commencent à tomber d'eux mefmes, ce qui arriue ordinairementaprés les premieres pluyes d'Automne, quand l’Arbre raffraichy & & humeëté, renfle fon bois, & deftache les fruits ; ouquand les premieres gelées vous aduertiffent de les ferrex ; ou pour vntemps plus prefix, dans le decours de la Lune d'Oétobre { cecy foit dit pour les Poiriers, & Pommiers feulement ) com. mençaft à cueillir les plustendresles pre- mers, & finiffant par les plus fermes pour leur donner plus de loifir qu'aux autres à sacheucr de meurir. FRANÇO:S, Tiya quelques fruits quine fe veufene manger que mols, comme les boires de Grofmenil, les Cormes, Alifes, Aze- rolles , & autres : lefquels vous laifferez à l'Arbre tant que vous voyés que cheañts en quantité d'eux-mefmes, ils vous obli- ent à les ferrer. | Pour les Neffles, Le vray temps de les cueillir eft à la faint Luc, afin d'obeyr au Prouerbe. Quand vous cucillirez vos fruits, if faudra auoir des corbeilles d’ozier bien fortes, pour eftre portées pleines par deux _ Hommes, & vous mettrez vn peu de foarre au fonds, pour empefcher que je fardeau de celles de deflus, ne froiffe cel- les de deffous contre la corbeille. À mefure que vous détacherez vos fruits, vous en ferez élection mettant les gros, les moyens, ceux qui fonttombez d'eux mefmes, ou que vous aurez abba- tus en cueillant les autres, chaque forte en {a corbeille à part. Ie ne parle point icy des petits, ou trognonnez, car ie fup- pofe que vous en aurez déchargé vos Ar- bres, beaucoup de temps auparauant & dés lors que Vous auez reconnu qu'ils ne pouuoient profiter, afin de donner plus de nourriture aux beaux. | li) 19 6 LE JARDINIER _ Les Pommes percées de vers, feront. aufli mifes auec celles qui tombent pour pour eftre mangées des premieres. A mefme que vouscueillirez vosfruits, vous les porterez dans voftre fruictier, & rangerez les plus precieux; {ur vos ta- blettes, fans qu'ils fe touchent, mettant vn peu de foarre Jong deffous, diftinguant les beaux d’auecizs moindres, partablet- tes particulieres , & mettant les tombez, & verreux en monceau, ainfique je viens de dire. : PE Quant aux Poires de Bon-Chreftien, elles fe veulent cucillir plus curicufe- ment que les autres : car à celles qui font belles & bien colorées, rouges d’vn co- fé, & jaunes de l’autre, il leur faudra {celler le bout de la queuë , auec, de la cire d'Efpagne pour arrefter la eve qu’elle ne s'éuapore : puis aprés on les enueloppera de papier bien fec, & !:s mettrat’on dans des boillcaux couucrts, afin qu'elles prennent vnes belle cou- leur blonde cftans cftouffées dans ces boiffeaux. Vous pratiquerez le mefme aux Poi- res de Double - Fleur, de Cadillac, de Toul, & autres qui greffées fur le Coi- onaffier prennent couleur de l’Arbre: Car quant à celles qui font greffies fur FRANCOIS, 197 ranc , elles demeurent ordinairement vertes : C’eft pourquoy fans y apporter tant de peine, il n'y aura qu'à les ran- ger fur la tablette, comme j'ay dit cy- deffus, Les plus curieux ont vne armoire qui ferme extrémement bien, dans laquelle ils mettent leurs Poires de Bon-Chreftien, elle eft garnie de tablettes, & fur cha- que tablettes il ya de petites tringles de bois, qui fe croilent en forme de treil- His, dont les quarrez font à peu prés dela grandeur qu'vne belle Poire peut eftre groffe : fur chaque quarré ils ÿ mettent vde Poire à part, de crainte qu'elles ne fe touchent, & s’il yen a quelqu vne de pourrie, qu'elle ne gafte {a voifine: ils . tiennent cette armoire toùjours bien fer- mée, mefmes ils collent des bandes de papier autour des guichets, pour em- pefcher entierement l'air d’y entrer, n’y regardans que quand ils en veulent pren- dre , cela les eftouffe, & leur fait pren- dre vne trés-belle couleur : maisaupara- uant que de les enfermer ils laiflent les Poires cinq ou fixjours dans les corbeilles telles que l’on les a apportées du Jardin afin qu'elles fe refuënt. Pour les fruits qui fe mangent mols, 1l les faut mettre en mijol, & s'ils ne Li 198 Le TADINTER meyriflent allez promptement à voftre volontéi, vous Îles mettrez dans vn facà bled, & les ferez blurtter par deux erfonnes ; le heurtement qu'ils fe feront L vns contre les autres; les auancera beaucoup de meurir. Les Raïfins mufcats ou autres com muns fe conferuent en plufeurs façons, ou en les rangeant fimplement fur du foarre, ou en les pendant à des cerceaux au plancher, & les couurant par deflus auec du papier ; pour les garentir de la poudre, ou en Îles mettant auec de la paille d'Auoyne, ou de la cendre dans des tonneaux. Le laiffe icy plufieurs manieres curieufes d’en conferuer, comme, lors que la grap- pe eft en fleur, la faire entrer dans vn boccal de verre : puis eftant meure Îa couper, fceller la queuë, & l’attacher en forte qu’elle pende dans le boccal fans y toucher, & aufli bien boucher l'entrée du boceal auec de la cire molle, en forte qu'iln'yentreaucunair, cela conferue la grappe jufques aux nouuelles. Ily à encor beaucoup d’autres moyens que je méprife à caufe du peu de pro’t que l’on tire, & de l’embarras & dépen-. £e quil y faut faire. _ Quoy que je n’aye pas cy-deuant en-. Je FRANCOIS. . 1° $ feigné, comme il fe faut fournir dé mu(- cats de toutes les couleurs, ce n'eft pas que je l'ignore ; car j'en fuis amplement pourueu, mais comme c'eft vne plante qui fe veut gouuerner ainfi que les autres vignes, j'en faiffe le foin à mes vignerons; qui dés leur jeunefle font nourris au tra- uail de la vigne, l'experience leur fai- fant connoiftre les fujettions neceflaires, que les lardiniers n'obferueroient pas auec tant de precautions qu'eux : parti- culierement au planter & äla taille, qui font les feules façons que je leur fais faire? & dont je me trouue fort bien. Ie vous diray feulement fur ce fujet que les Mouches de toutes fortes, com- me Abeilles, Guefpes & autres, les Fouy- nes, Lers, & Rats-Verets, font extré… mement friands de ce raifin quand il eft bien meur : pour y remedier il faut met- tre des Aïls, à demy échachez en plu- fieurs endroits de voftre Treille, & aflez proche des grappes, leur forte odeurles en chaffera. Le plus grand afpe du Soleil de mi- dy, & l'Abry de quelque muraïlleeft le vray lieu que defirent les mufcats. Pour conclurre cette Section, je vous aduertiray de viliter fouuent voftre frui- &ier , afinque s'il y à quelques fruits qui I ii 200 LE TJARDBINIER fe pourriffent que vous lesoftiez, car par leur attouchement ils gafteroient les plus fains : sil s’en trouue quelqu'vn qui foit ronge de Souris, vous ne l’afterez pas de fa place ; car tandis qu'il y aura dequoy manger à celuy-là, elles ne toncheront point aux autres : mais tendez des fourri- ciers proche de là, afin de les prendre: Car d'y laiffer hanter les Chats, ils d6- rangeroient tous vos fruits, & feroient leur ordures dedansles mijols, & fur des tablettes: : :; Des fruits [eichez. SECTION Il. - L y a quantité de fruits que nous fei- chons au four, que l’on feicheroit au Soleil en Pays chaud , comme en Prouen- ce les Brignolles, en Languedoc les Pa. feriles ouRaifins: mais puis que lafroi- deur du climat nous oblige à nous feruir du four ; je particulariferay icy de quelle facon chacun veut eftre feiché. Commencçant parles Cerifes, Guines, _& Griottes , comme par les premiers que que la faifon nous prefente;vous les choi- firez bien meures, grofles, & qui ne foient point tournées: Vous les poferez n'as FRANCOIS. zOt fur des clayes, lesrangeant cofte à cofte, le plus proprement qu’il fe pourra, fans qu’elles foient les ynes fur les autres, y laiffant les queuës & les noyaux, puis vousiJes meitrez dans le four ; qui fera temperé de chaleur, comme quand on atiré le Pain d'yvne fournée &c les yayant laiflécs, tant qu’il aura de la chaleur, vous les retirerez, & remuerez toutes, -enles changeant de place, afin qu'elles fcichent parfaitement ; puis vous re- chaufferez le four , les y remettant tant de fois, que vous reconnoifliez qu'elles foient fufffamment feches, pour eftre gardées : Vous les laiflerez refroidir en monceau vn jour entier,par aprés vous les lierez par bouquets & les ferrerez dans des quaiffes ou boiffeaux bien fermez. Les Prunes feront fechces comme les Cerifes, & ne feront cueillies que trés- meures : Les meïlleures à feicher {ont cel- les qui tombent d’elles-mefmes , carel- les auront plus de chair, & feront plus. agreables à manger que celles que vous décacherez de l’Arbre, qui gardent toù- jours quelque verdeur. à Pour les plus excellentes à faire Pru- neaux, on choifit les Imperiales, Dat- tes, fainte Catherine , Diaprées, Per- drigon, Cypre, Brignolles, Damas de 1 y 262, L£i'lArRHENEER ; toutes les fortes, & faint Iulien pour le commun du Logis. Si vous voulez accommoder des Pru= nes à la façon de Brignollés, il vous faut choifir de quelque belle efpece de vos prunes, comme de Perdricon, d’Abri- cot : Moyeu- dœuf, Brignolles, ou autrés quiauront la peau blanche ; les peler fans coufteau en tirant la peau qui quitera ai- {ement la prune fielle cftbien meure:puis ofter les Noyaux , fans rompre le fruit, æ&omme ienfeigneray cy-apres, en par- Jant des Abricots; faire bien bouillir ces peaux auec peu d'eau, paller Le tout par va gros linge; & dans ce ius qui fera en confiftance de Syrop, y tremper vos rrunesà chaques fois que vous les met- trez au four, en les applatifflant autant de fois: fi voftre ius n'eft afflezen Syrop, vous prendrez du ius de Gadelles blan- ches, bien meures, cela rendra voftre Syrop fort efpois, & bien lié. Les Prouenceaux au lieu du Four, Îles mettent à desbranches d’Efpine, à cha- que piqueron vne, & les laiffe ainfi fei- cher au Soleil. Les Pefches s’accommodent de la mef- me façon que les Prunes, mais il les faut cueillir à l'arbre ; car celles qui tom- bent, outre ce quelles font trop meures, E FRANÇOIS: 283 elles fe font des meurtrifleures qui ne fe- cheroient qu'àcrande peine, & feroient defagreables au manger : auant que d’o- ftcr les noyaux , vous les mettrez vne fois aufour, pour lesamortir, puis vous les fendrez proprement auec le coufteau, ti- rerez le noyau, &lesouurirez, & applat- tirez fur quelque Table, afin que les- mettant au four elles fe fechent aufli bien par dedans que par dehors, à cau- fe de leur grande efpoiffeur; & au der- nier coup qu'elles fortiront du foureftans encore toutes chaudes; vous les refer- merez , & applatirez pour leur redon- ner leur premiere forme. - Les Abricots ferontaufli cueillis à l’ar= bre bien meurs : ilne fera beloin de les ouurir pour leur ofter les noyaux : mais feulement les poufler proprement par l'endroit de la queuë & ils fortiront par le bout : En les fechant l'ont ne les ouure pas comme les Pefches , maison leslaif- fent entiers , fe contentant de les apla- tir, afin qu'ils fechent efgalement, & qu’ils s'arrangent mieux dans les bcëtes. Les Poires fe fechent pelées & fans pe- ler , tout de mefme maniere que i’ay en- feigné cy-deuant :eftans pelce, elles en font beaucoup plus delicates, & l'on fe Art de peaux pour les tremper dans le À 1 v) 52. Me 104 LE lAR Dre en ius, ainfi que i’ay dit aux Prunes pelées: on leur laïfle la queu & la tefte en les pelant : il negift qu’à faire eflcétion des bons fruits les plus deliœts & les plus mufquez, comme L'Orenge , & le bon- Chreftien d'efte, la Mufcadille, le gros Mufcat, le Rouffeller, le Bezy d’Airy; ¢ autres qui fe trouueront excellens. La Poire ne veut pas eftre cueillie trop meure, car cela la rend moilañfle. En vendanges , vous pourrez mettre parmy vos pefures du vinblanc douxau lieu d'eau : & auffi quand fe fera la faifon des Cydres, y mettre du Poiré doux, fait fans eau. Les Pommes fe fechent ordinairement fans peler : & fe coupent par moitié, oftans. le trognon : Vous pourrez en faire boüillir quelqnes-vnes pour en tirer le us . afin d'y tremper celles que vous vou- drez fecher. Les Raïfins de toutes fortes, Mufcats & autres, feront aufli fechez au four {ur la claye : n'ayant autre fuicétion que de ne leur donner trop chaud & lesretour- ner louuent :afin qu'ils feichent éfgale- ment:Les Languedociens les paffent dan. la lexive , auant de les feichier au Soleil. le mettray aufli au rang des fruits fecs les Feves vertes , lefquelles bien appre- LA | FRANÇOIS, 105$ ftées, auec quelque peu de Sarriete fei- che, qui eft le vray affaifonnement des Feves, pafleront pour nouu-lles. Pour les feicher, vous prendrez des Tendresquiont encore la peau ou rob- be verte, & non pasblanches : vousleut ofterés cette .robbe { ce que l’on appelle à Paris fraizer) puis les mettrés feicher au Soleil fur des papiers, en lesremuant plufeurs fois le iour : vous les retirerez le foir dans le logis, & les remettrez tous les iours au Soleil, iufquesà ce que vous reconnoifliez qu'elles feront bien feiches, qui fera en peu detemps, fi le Soleil n’eft vouuert de nuées : Eftansfei- ches , on les {errera dans des Boiffcaux couuerts, les gardant de toute humidité. Il les faudra laiffer tremper, ou infu- fer dans l’eau tiede, enuiron demy iour auparauant que de les mettre cuire. Pour les Pois Verts, on choilira des plus cendres: & tirés de leur cofles feront mis ficher comme les Feves : auant que de les cuire, vous les metirés tremper en eau tiede, adiouftanc à leur cuiflon vne poignée de fucilles de pois nouueaux, fi vous enauésen vert : la liant auec du fil, de crainte qu'elle ne fe mefle auec les Pois. Les Morilles & Mouflerons feronten< v 206 Le TARDIN TER filés, & pendusen quelque lieu à [a cha- fur, comme le defflus d’un four , où la ils feicheront facilement : & fi vous n’auez aucun lieu commode, il fufhra de les prendre deuant le feu, où mettre dans le four moyennement chaud, Des Confitures an Sel, € V'inaigre. SECFTON - III. Es Concombres , font les plus gros fruits du Jardin potager qui fe conf {ent au Sel: ou les prend ou fort petits (que l’on appelle Cornichons, à caufe que l'on choifit d'ordinaire ceux qui font crochus; dautant qu'ils ne profitent point en grofliflant : } ou déja gros, mais tendres , n'ayans encore les pepinsdurs, car ils feroient defagreables au manger : Ceux-cy fe confient pelésou fans peler ; mais il vaut mieux les peler auparauant que de les confire, qu'apres qu'ils font confits, à caufe de la perte du Sel & du vinaigre qui aura confit cette peau, qui pour fa dureté n'eft pas facile à manger : 1ls font auff plus propres & plus blancs, . eftans pelezà l’inftant que l'on les veut feruir, que ceux que l'on pele auant que de les confire, fi bien que vous en vfe- FRANÇOIS. 207 rez comme vous voudrez. Les autres, qui font les Cornichons, fe confifenr fans peler, à caufe-de 12 de- licatefle de eux pra. = 7 ; Vus les cueillirez dés lé matin par vn beau temps, leur laiffant paffer la iour- née au Soleil, pour les amortir vn peu, afin qu’ils prennent mieux leur {el. Vous mettrez les pelez, ceux {ans pe- ler, & les Cornichons chacun à part dans des pots de grcts ; (car ceux de Terre fe pourtiffent par la force du Sel qui les pe- netre, perdant leur faumure, ) & vous les arrangerez proprement , les preant le plus que vous pourrez, fans les froiffer: vous tetterez par dcflus du fel en bonne quantité, puis du vinaigre, infques à ce que ceux d'enhaut trempent autrement ils’ y feroit vne moififleure , qui gafte- roitceux qui ne tremperoient pas : Cela fait, vous les ferrererez en lieu tempe- té de chaud & de froid, n’y touchant dé fix femaines au moins, afin qu'ils fe con- fifent parfaitement : voftre fruitier fera cres-propre pour les bien conferuer. 4 Le pourpier que vous confirez, fera pris de celuy que vous aurez replanté, pour c{re plus beau & plusgros : Le vray temps pour le cucililr, c’eft quand il commence à fleurir, fi vous voulez l’auoir 208 LE LARDUNIER bien tendre : car [1 vous atrendiez quil fut défleury pourauoirlagraine, (com- me l'on le vend ordinairement, ) 1l {e- roit trop dur à manger : vous {le ferez amortirou defléicher deuxon trois fBurs au Soleil , puis apres vous le rangerez dans les potsde grets; le fallant & cou- urant de vinaigre commeles Concombres Les Capres, les Eleurs de Genet , la Perce-Pierre, lPEftragon , & autres Her- bes femblables, feront aufli confites de la mefme maniere que les Concombres & le Pourpier. Tor Les fandsd’Artichaux le confifent 2u fel , mais d’yne autre methode que les precedens, car ils veulent eftre.cuïsplus qu'à demy : & eftans refroidis & bien ef- goutez de toute Îeur eau, mefmement efluyez auec des linges pour n'y auoir plus d'humidité : l'on Îles rangera dans les pots , & l’on refpandera deffus de l'eau fallée autant qu’elle le peut-eftre, c’eft à dire, que pour les rendre iufques àcepoint, il y faudra. mettre du felau- tant qu’elle ne pourra {e fondre, & ce iufques à ce que vous reconnoiffez qu'en y en mettant dauantage,elle n'en puifle plus fondre, & que le fel aille au fonds en fon entier; cette eau fe nomme eaux Marinée. Lt ÉOE d'ofén he FRANÇOIS. 1288 Par deflus cette eau qui furnagera vos | _ Artichaux, vous eoulerez de bon beure fondu la hauteur de deux doigts, afin que l'air n'y puiffe entrer, puis le beure eftant bien refroidy, vous les ferrerez auee les Concombres, ou en lieu fem- blables, & couurirez de telle façon,que les chars & fouris n'aillent manger le beure. le prefupofe que vous les ayez prepa-. ré auant que deles mettre dans les pots; de la mefme façon que quand on Îles veut feruir fur table, qui eft d’ofter tout “fe vert de leurs fueilleg, & le foin de dedans. Le vray temps pour ce mefnage eft en Automne, quand, en pratiquant ce que j'ay dit cy- deuënt dans le fecond traité, au chapitre des Artichaux | vos plantes - vous en produifent de tendres : ee font ceux-là que deuez prendre pour faller, & vous n'attendrez pas qu'ils s'ouurent pour fleurir, mais vous les prendrez. quand ils font encore en pommes bien formées, Quand l'on en voudra manger, on les deffallera entierement , les changeant d'eau, & Îles remettra-on bouillir enco- re vne fuisauant que de les preparer pour la table, x 2To LE TJARDINTER | Les Alperges, rois fans Coffe, morilles. Champignons & Mouflerons , feront auffi confits au fel, [ les ayant fait cuire à de- my, & apprefter chaeun felon fa facon] dela mefme maniere qué les Artichaux. … Vous vifterez au moins tous les mois Vos pots, afin que s’il y auoit quelque chofe de chancy,ou que quelqu'vn perdit fa faumure , vous y apportafliéz remede. - Ie me fuis aduifé., ,il ya déja quelques années , de confire des Cornoüilles, & les ay fait pafler pour des Oliues de Vé- : rone, à beaucoup de perfonres qui s'y font tromnées, "la couleur eftant toute femblable, & le gouft peu different :' Ie fais cueillir les plus groffes, & mieux nourries, autemps qu elles veulent com- mencer à rougir : lesayant laiflé vn petit fannir,ie les mets dans des potsou barils, & les emplis d'eau fallée tout femblable à celle que ï'ay dite pour les Artichaux : & our leur donner bonne odeur, i’y ad- toufte du fenoûüil vert en branche, & du laurier, puis ie bouche biénle vailleau, & n’y touche detrois moisapres. Sielles ont pris trop de fel, on lesdeffallera au- parauant que de es feruir fur la table, FRANÇOIS. z11 Des (onfitures au M ouf on an Vin doux an | Cidre, er an Miel, SECTION -EV: ki à Outes fortes de fruits qui fe confi- fent au fucre , fe peuuent aufli con- fire au Mouft, au Cidre , & au miel; & il n’yaautre fujeétion à choifir ceux qui fe. + veulent parboüillir auparauant que de les . | confire, d'auec ceux qui ne s'euerdu- ment point, que celle que l’on feroit fi Jon Îles confifoit au fuere : C’eft pour- uoy i aime mieux me retenir dans cette Détion de vous fes diftinguer, attendant à vous en donner vne intelligence tres- ample, en la feétion fuiuante, où ie m’é- tendray tout au long, vous enfeignant les diucrfes manieres de faire des Confi- tures liquides ; en enfuiuant l'ordre & le rang des fruits que i’ay tenu dans tous les Chapitres de ce Liure, pour ne rien laif- fer paller fans vous fatisfaire, & vous rendre capables de confire tout ce qui fe recuciliera de voftre ITardin propres à Confitures. Pour defcrire icy feulement les princi- pales fuicétions que l’on doit obferuer ne- ecflairement à confire le fruit au mouft ou 212 LE TARDINIER vindoux, vous prendrez trois feaux,où trois pots, outrois parties du moult, {e- lon le peuoule plus que voulez Confire de fruit : vous les mettrez dans vn Chau- dron ou Poëflon fur le feu, & prendrez garde fi vous faites vôftre feu auec du bois, que la flambe , pour eftre par trop gran- e, ne brufle voftre Chaudronnée par quelque cofté. Vous-ferez boüillir ce Moulft iufque à la reduction detrois à vn, afin qu'il ne s’efpoifffe & puiffe confire fuffifamment voltre fruit, pour eftse de garde fans fe chancir ny gafter. Vosfruitseltans pelez, ou fans peler, felon leurs efpeces, ou Îa delieatefie que vous y. voulez apporter : Ceux qui doi- uent eftre parboüillis l'eftans ; & bien efgouttez & fecichezde toute leur eau , fe- . ront iettez dans ce Mouf, & confits, les efcumant foigneufement,& faifant boüil- [ lir iufques à c: que vous voyezque le fi+, rop foit en bonne confiftance , ce qui fe cônoift en en mettät quelques gouttes fur vne Aflicette elles demeurent enrubis, & ne coulent point en penchant l’Affiette- Le mouft ne {çauroit eftre pris trop doux, c'eft pourquoy , fi toft quel'on ap- portera des grappes bien meures,de la vigne, vous les ferez promptement fou- ler, & prendrez de ce moult ce qu'en au- FRANÇOIS. 215 tez de befoin, blanc, ou rouge, felon ce que vous voudrez confire : aucuns fruits, comme lesCoins, lesroires, les Raifins rouges, & femblables, veulent que ce mouft foit de grappes rouges : au- tres le veulent de grappes blanches,com- me les Noix, les Raifins mulcats, & au- tres à qui on defire conferuer lablancheur Aux fruits que vous confirez, où il faudra du vin rouge, mettez y pour re“ ÎIcuer le gouft, la Canelle, & le Cloud de Giroffle , les enfermant dans vn pe- tit noüet de linge, afin qu'ilsne fe mé- lentauec lesConfitures & fe perdent ou confomment dans le Sirop: Et à ceux qui voudront le vin blanc, vous n'y met- trez que le fenoüil vert, l'enfermanit auffi dans vn linge. Le Raïfiné fe fait en prenant de belles grappes rouges des plus meures, & ne. les cueillans Que l’aprefdifnée au Soleil, afin quetoute l’humidité en foitbannie. Vous-les mettrez en quelque grenier de voftre logis ; où l'air & la chaleur don- nent aifement , les eftandans fur desta- blesou clayes, pour là les laiffer quinze fours au moins {e refluyer & amortir ; à faute qu'il ne faffe beaucoup Soleil, ou, fque le temps foit froid, vousles mettrez Ava peu au four b'en temperé de chaleur : - 214 LE TARDBENTrErR. Apres quoy vous les preflerez dans ls mains en leur oftant toutes Les Raffles, ou Rafteaux , & mettrez peaux & ius bouil- ir dans le chaudron en l’efcumant foi- oneufement ; & oftant le plus de pepins que vous pourrez : vous ferez reduire le tout à la troifñiéme partie. diminuant Île feu à mefure que voftre Raïfiné s’époiffit, & le monuant fouuent auec vne gafche ou cucillier de bois, de crainte qu'il ne s'attache au Chaudron, & pour le faire cuire également : eftant reduit. vous les pafferez au trauers d’vne eftamine ougros Linge, froiffant les peaux auec la cueil- lier de bois pour en exprimer toute la fub- ftance : & de plus vous Les preiferez en tournant l'eftamine ou auec des prefles; Cela fait vous les remettrez encore fur le feu, &lesrecuirez, tournant inceffam- ment tant que vousiugiez voftre Raifiné eftre aflez cuit ; puis vous de tirerez du ! feu, le verfant dans desterrines, de crain- te qu'il ne contraéte quelque mauuais gouft du chaudron : eftant demy froid, M vous le mettrez dans des pots de greis , fl ou Fayence pour le cenferuer. cs Vous laiflerez vos pots defcouuerts cinq ou fix tours : puis vous y mettrez vn papier, tout de la rondeur du dedansde voltre pot , lequel touchera par. tout à ' FRANÇOIS. 21$ voftre Raifiné : & quand vous vifiterez vospots, f vous voyez que voftre papier foit chancy , vousleleuerez, y enremet- tantynautre; & ce tant de fois que vous y verrez du moïl : qui fera iufques à ce | que toute l'humidité fuperflué foit éua- | porée :alors ilne chancira plus, ficen’eft | que voitre Raïfiné ne foit pas affez cuit: | auquel casille faudra recuire, puis vous | le couurirez à demeurer. Pour faire de la mouftarde à la mode de Dijon, il ne faudra que prendre de ce Raïfiné, & y mettre dela graine de Sencvé mouluë ou broyée dans yn mor- Itier, puis paflée au Tamis bien delié: lÆftant bien meflez enfemble, il faudra y tefteindre des charbonsardents pour ofter amertume du Senevé : puis [a mettre dans des barillets ou pots de grcts que [vous boucherez bien, & les ferrcrez pour svoftre vfage. - L'on confit auffi toutes fortes 4e fruits sau Cidre de Poire fait fans eau en le fai- , tant reduire au tiers par l’ebulition, de 112 mefme façon que ï'ay ditau mouft. Pour confire au miel, vous prendrez “lu plus efpois plus dur refflemblant ifu Sucre, & le ferez boüillir dans vne kboefle à confitures , l’efcumant bien eu- ifieufement, &remuant de crainte qu'il 7 à | 516 LE ÎIARDINIER ne brufle : pour voir quand il fera cuit, faut prendre vn œufde poule, & Île met- tre fur voftre miel, s’il enfonce il n'eft pas aflez cuit, & s'il flotte deflus, il fe- raen bonne confiftence pour confire vos fruits : Vous fçauez que le miel eft fort. aifé à brufier : c'eft peurquoy vous ache- ucrez voftre cuiffon à petit feu, remuant fouuent le fond de voftre chaudron auec voftre gafche ou cuillier, de crainte qu'ilnc brufle. Des confitures Hquides au S she SE CETTE "ON V , Voy que ie deurois icy commencer par les AmandesGrozeilles, Abri- cots verts, & fruits rouges, comme les premiers qui {e prefentent pour eftre con- fits, neantmoins i ay eftimé qu'il valoit mieux fuiure l’ordre que nous auons déja tenu , que d'entre-mefler lesarticles, où par auanture j'en pourrois oublier quel- qu'vn, ce qui vous donneroit du mefcon- tentement- | Nous commenceront donc par les # Poires, comme celles à qui i’ay donné le premier rang , & diray que chezles Con- fifcurs de Paris, il ne s'en trouue que de quatre! FRANCOIS, s1Ÿ quatre ou cinq fortes qu'ils gardent, ou liquide pour faire fecher à mefure qu'ils enont befoin pour lé‘ debit : Ces poires font la mufcadille, le gros muf- cat, le Blanquet, le petit Roffelet, & l’Orenge, neantmoins toutes fortes de poires {epeuuent mettre au Sucre : vous prefererez pourtant les fruits delicats à ceux qui font fermes. Pour paruenir donc à noftre intention vous pelerez proprement vos fruits, fai- fant la peau la plus deliée que vous pour= rez, & leur ofterez la tefte, laiflant la queué enticre & ratifflce aux plus petites : & vous couperez les plus gros par moi- tié, leur oftant le trognon , & ne leur laiffant qu'vn bout de aueuë : A mefure que vous les pelerez vous les ietterez dans l’eau fraiche de crainte qu’elles ne noirciffent : en apres vous les ferez par- boüillir ou éuerdumer pour aider à la cuiflon, & rendre plus preparées à rece- uoir le Sucre, puis uous le tirerez de l’eau & les efgowtterez fur quelqueClaye: cel: fait vous les peferez, & mettrez au moins autant de livres de bon Sucre qu’il yaura de livres de fruits : vous caflerez voftre Sucre , en forte que le plus gros morceau n’excede en groffeur vne Cha- ftaigne : vous mettrez votre fruit dass r 213 L£ ARDINIER Ja poëfle & poudrerez Voftre Sucre par- deilus, y iettant vn peu d’eau pour ai- der à le fondre feulement : apres vous mettrez voftre poëfle fur Le feu, & con- firez votre fruit Le plus promprement que vous pourrez, afin que le bouillon fur- nageant continuellement le fruit, il le cuife égzlement. | Vous aurez toùjours l’Efcumoire à la main pour changer voftre fruit de place, & efcumer continuellement : vous ne. Jeuerez voftre poëfle de deffus le feu, que vous ne iugiez voftre fruit eftre confit : ce que vous pourrez remarquer par Île bouillon , qui s'abbaiffant ne fera tant de moufle ou de boutteilles qu'au com- mencement , & par les gouttes de Syrop { que vous mettrez fur vne afliette, ) fi clles ne coulent point : alors vous tirerez voftre poëfle de deflus le feu , & verferez vos confitures dans quelque terrine, de . crainte que feiournans dans la Poëfle, el- les ne contraétent quelque mauuaissgouft, prouenant du cuiure : vous les laifferés trois ou quatre iours repofer dans cette terrine en lieu exempt de la poudre fans les couurir, afin que toute l'humidité dufruits'éuapore, & que le fruit prenne Sucre : au bout defquels , vous panche- rez voRreterrine, & s’il y a quelque eau = — | rl FRANGo:I s& 214 qui furnabe le Syrop, vous l'efgoutterez, puis renuerferez vos confitures dans vo= ftre Poëîle , afin de les faire recuire fi el lesen ont de befoin, & les laifferez vn peu refroidir, auant que de les mettre dansles pots pour les ferrer : vous les laïflerez quatre ou cing iours fans les cou- urir: au bout defquels, s’il y a quelque humidité deffus vous l’efgouterez : puis vous les couurirezcommei’ay dit cy de- uant, y mettant yn papier de la rondeur du pot qui touche le Syrop : Et fivous les trouiezaffez cuittes du premier coup apres les auoir efgouttées ; vous vous- contenterez de les faire chaufler fans les vuider de la terrine, enles meflant auec la gafche ou l’écumoire, & eftans vn peu refroïdies , vous les mettrés dans les pots, comme ie viens de dire. L'on confit aufli des Poires & autres fruits pour eftre mangez chauds, ce que Jon appelle Compoftes : comme par exemple le petit Certeau, & autres fe- ken la couftume du paysou vous ferez. Pour lesconfire, vousles pelerez,com- me j'ay ditcy- deflus!, & les mettrez dans va pot de terre neuf: à vne liure de poi- res, 1l fufhit d’yn bon qQuarteron de Su- crc, auec la moitié d'vn demy-fe ice. de bon vin vermeil, & de l’eau ; Pur Ki 220 LE LARDINITER ‘ à ce que celles d’en-hauttrempent : vous les couurirez du couuercle , & les ferez bouillir à feu mediocre , les remuant de tempsentemps, pourne les laifler atta- cher au pot : & quandelles feront à demy euittes, vous y mettrezde la Canelle & du Clou de Girofile, les: acheuant de euire à petit feu, iufquesà ce que le Sy- rop foïit aflez fait à voftre volonté. Pour les feruir fur table, vous les ran- gerez le plus proprement que vous pour- rez fur vne Afliette en Rofe, les mon- tant les vnes fur les autres en pointe de Clocher, puisle Syropeftant vn peu re- froidy , vous lé verferezpar-deflus , afin qu il arroufe voltre fruit de tous coftez. Quant aux Pommes, il s’en confit fort peu au Sucre, fi cen’eften Compofite, { c’eft à dire pour eftre mangéeschaudes ) mais pour garder, l'on n'en faitguere, à caufe quelles font mallaffes , & n’ont pas grand gouft. Pour les Compoftes, celles de Calvil feront confites fans peler & entieres, leur oftant feulement leJtrognon le plus pro- prement que l’on pourra, en le creufant par l'endroit de la queuë auee vn coù- eau fort eftroit comme ceuxd Angleter- re; puis feront parbouïllies, & bien ef- gouttées auant que d'eftrermiles dans le FRANÇOIS. ZT -pocflon : À vne liure de fruit, 1l faut au moins fix onces de Suere , pour faire vn beau Syrop en gelée ; & au lieu d'eau, vous ferez bouillir des pelures de Pom- mes de Renette ou Cappendu : & Îes ayant pañlées & preilécs à trauers vne Eftamine ou gros Linge : vous prendrez de ce jus, & en mettrez vne fufhfante quantité pour confire voftre fruit, le moins que vous pourrez pourtant, de crainte qu'il ne fe defpece : vous le Fe- rez cuire à grand feu de Charbon ( celuy de bois eftant du tout incommode au Sucre ) afin que le boüillon furnageant Le fruit il le confife également : vous re- muërez {ouuent voftre fruit , l’'éeumant & tournant auec vne petite gafche de bois , qu'aurez faite de quelque rendde boëtte à Confitures: c'eft vne petite vftan- cile fort propre à manier le Sucre, tant en Confitures, au liquide qu'au fec, Paftes , Conferues, & Mafepains, d’au- tant que l’on efcume , tourne & mefle tout ce qui eft dans le poeflon jufques au fonds : le graueur ena fait la figure tout au bas de la planche, qui eft au com- mencement de ce Traitté. Voftre fruit eftant confit, voustirerez le Poeflon du feu, & le laifferez prefque refroidir auant que d'en ofter vos Pom K iij 222 Le TARDINIER mes, les roulant doucement dans leur fyrop auec la gafche, puis vous lestire- rez & poferez fur leurtrou, afin qu'elles s’égouttent : en aprés vous Les drefferez en pyramyde fur vneafliette, vne au mi- lieu, fix autour, trois deflus, & vne fur les trois quifcera la poinéte : vous verfe- rez vos égouttures dansie pocflon, & fe- rez cuire voftre Syrop fur vn petit feu, jufquesà ce qu'il foit en gelée, le re- muant fouuent, de crainte qu'il ne brü- le : puis quand vous voudrez feruir vo- fre fruit, vous le répandrez auec vne cueillir d'argent fur vos Pommes, les ar- roufant de tous coftez, cela fera vn cotti- gnac ou gelée qui ornera de beaucoup voftre fruit ; rempliffant aufli le fonds de l'afliette. | Les Pommes de Capendu, & Renette fe pelent, & fe confifent entieres, ou par moitiées, leur oftant aufh les tro- gnons, & leur faifant vne gelée auec leurs peaux, comme j'ay dit cy-deflus. Aux vnes & aux autres, fi vous y vou- lez adjoufter Le Vin, vousmettrez le rou- ge au Caluil, auec la Canelle & le Giro- fle, & le blanc aux autres auec le Fe- moûil , cela augmentera de beaucoup icur gouft. | Auec de la Pomme, l’on contrefait des Prunes qui eft en les couppant par quar - FRANÇOIS. 23 tiers, & de chaque quartier entailler vn petit plotton, l’arrondiffant en pointe par les deux bouts, de la mefme forme d’vne Prune ; puis les faire parboüillir, & de leurs peleures en tirer Le jus pour époiflir la gelée, en les confifant comme cy-deuant : eftans cuittes on les dreffera fur l’Affiette, en forme de pointe de clo- cher ou Pyramide: c’eft vn plat fortagrea- ble à voir, & qui furprend à l’abord ceux qui n'en ont point encores EU, Ne pou uant dire ce que ce peut eftre. Vous pourrez faire de la gelée de Pom- mesà part, en tirant du jus des peaux &c trognons, dont vous aurez oftc les pe- pins auant que de les mettre cuire « le tout eftant bien cuit en l’eau, pañlé à l'E. famine , & bien preflé, vous mettrez dans ce jus du Sucre en fufhfante quanti- té: ce que l’experience vous apprendra, en y mettant plutoft plus que moins, fai- fant cuire cette gelée en bonne confiften- ce, laremuant inceflamment, puis vous la pafferez à trauers quelque morceau de linge de quintin, la coulant dans des boettes { pour garder en forme de Cot- tignac ) ou fur des APR ua feruir fur la table : defquelles afliettes fi vous voulez vousen prendrez quelques-vnes, & couperez ce Cottignacen petites ban: K üii) 354 LE IARBINI:ER des, pour orner les bords de vos plats de Compoftes , ou pour ( tirant à l'épargne & ménage) en feruir peu, les entrela- çant en treillis ou figure de ferpenteaux fur des aflicttes. Pour ce qui eft des Pafles, jen en par- cray qu'à la Seétion fuiuante quand je traitteray des Confitures feiches , d'au- tant qu'elles fe font toutes prefque de la mefme façon. ” Les Prunes fe confifent pelées & [ans peler en leur laiffant les noyaux, & l'on gatiffera feulement les queuës pour les rendre plus vertes : on les jetrera dans. Peau à mefure que l’on les pelera : elles fe veulent cucillir pour confire, & non pas ramafler celles qui tombent le vray temps pour les cueillir, eft quand celles qui prennent couleur commencent à rou- gir : les plus excellentes que l'on choi- fit, font le Perdrigon, l'Imperiale, læ Diaprée, l’Abricot, la Brignolle, l'Ifle- Vert, Sainte-Catherine, de Roy, & au- tres qui fe trouuent trés-bonnes: celles que l’on peleordinairement,ce font celles de qui la peau deuient rorge en meurif- fant, laiffant les autres fans peler , fi ce n'eft pour plus grande delicatefle ; car pour ce qui eft du gouft, la peau de tou- tes fortes de Fruit eft la partie la plus f2- … FRANÇOIS. 225$ uoureufe de tout le fruit : l’on les fera parboüillir ou éuerdumer dans peu d’eau; & égouter comme nous auons dit cy- deuant : puis ayant mis à chaque liure de Fruit cinq quartrons de bon Sucre caffé auec vn-peu d’eau de celle dans la- quelle elles auront efte parboüillies, l'on jettera le tout dansla poefle, & la met- tra-t'on fur le fourneau , où le Charbon ne fera qu'à demy allumé; afin qu’en s'acheuant dembrazer , le Sucre ait loifir de fondre, & que la poefle ne brüle point. Vous remarquerez cecy, qu à toutes Confitures au Sucre ; le Charbon ne doit eftre qu'à demy allumé, quand l’on com- mence à confire, pour les caufes que je viens dedire, & s’ilfe peut , il faut taf- cher à lesfaire toutes d’yne cuitte ; c’eft à dire, fans les tirer de deflus le feu, que vous ne croyez qu elles foient faites; car de les tant remettre de fois fur le feu, cela diminuë beaucoup de leur couleur, & fait brûler le Sirop , qui s'attache au haut de voftre poefle ou baffine : Il fuffie - uc vous vous yteniezattentif, écumant pe ee ent, & retournant ou faifant rouler le fruic dans fon Syrop, auec le dos de l’écumoire ou la gafche , le fai- {ant toujours boüillir par deflus Îe fruit. K. y 226 Le TARDPhINTER & lors que vous verrez que le boüillo® -s'allentira, c’eft vn figne qu'il appro- ‘che de fa cuiffon : cé que vous recon- noiftrez encore par les gouttes que met- srez fur vne afliette, & qui ne coule- ront point. Vos Confitures eftans faites, vousles tirerez dufeu, & les gouuernerez de la ‘mefme façon que j’ay dit aux Poires. Si vous voulez en dreffer dans des tafles, quand elles feront fufifamment euittes , & prefque refroïdies, vous Îes égoutterez de leur Syrop, & les range- ‘xez proprement dans les tafles, fans Îcs preller par trop : puis au bout de deux où trois Jours, vous les égoutrerez e1v- core s'il y a quelque humidité, & ferez. rechauffer le Syrop , ( s’il et crop clair vous le recuirez ) puis le couicrez à tra- uers le quintin fur vos Prancs, fans Les. “détacher de Ja tafle, & le Syrop {urna- geant par deflus, les garantira de chan- cir : vous les laifferez découuertes trois jours, & aprés vous leur mettrez vn rond de Papier de la grandeur de latafle, qui touchera au Syrop, afin que s’il chan- cifloit, l’on en-changealt : cela fait que les Confitures paroiflent beaucoup, & fans comparaifon plus belles quand © 2 leué ce Papier : qui auec foy entraifu: FRANÇOIS. 127 toute la chanciileure ou candiffleure , qui d'ordinaire fe fait en forme de peau fur toutes les Confitures, aufquelles on ne met point ce-Papier. à Pour les Compoftes de Prunes que l'en veut manger chaudes, vous ne mettrez que demie liure de Sucre à la liure de - fruit: & pour la proprieté l’on leur cou- pc la moitié de la queuë, quirefte pous les prendre auec les doigts , fi l’on ne fe veut feruir de fourchettes. Les Amandes & Abricots vert, font Jes premiers fruits qui fe confifent : on es prend tendres, auparauant que le bois du noyau commence à {e durcir: Pour le confire , ils s’éuerdument dans l'eau claire, y mettant vn peu de bon tarcre pour détacher la bourre qui eff deffus : puis apres on les efluie chacun à part, pour ofter, cette bourre, & on les confit comme j ay monftre cy-deuant, mectant feulement liure à liure de Sucre & de fruit : fi c'eft pour manger en Com- poite, il fuffira de demie liure de Sucre à la liure de fruit, Les Abricots eftans en Îeur parfaite groeur, fe confffent pelez & fans pe- ler : on leur poufle Le noyau eomme-j'ay ditcy-denant aux Abricots fechez : aux plus verts , on leur donne vn petit boiuls | K vi dde. 221$ Lu JARDINIER fon pour les éuerdumer, puis fans ler fecher font pris auec l'écumoire, & mis dans le Sucre caflé, auec vn peu d'eau; en apres font confits & gouuernez jufques. à la fin de la mefme facon que les Pru- nes : Il faut cinq quarterons de Sucré à la liure de fruit. Quant à ceux qui font trop meurs, pelez & non pelez, il les faut mettré parmy Le Sucre caffé, auec fort peu d'eau, fans les faire parboüllir auparauant ; & äl ne faut craindre qu'ils fe defpecenr, gar la force du Suere les faifit, & on les. getire de la pocfle plus entiers ( s’il faut ainfi dire )} que l’on ne les y a mis. Aucuns y mettent les Amandes de leurs noyaux, en plaçant vne à chaque vuide d’entre les Abricots qui font dans les tafles : fi vous y en voulez mettre, ÿe vous confeille de les faire confire à part, dans vn peu de Sucre; car fi vous. les mettiez fans cuire, ils feroient décuire. voftre Confiture , & elle chanciroit. Quelques- vns aufli confifent les Abri- œots d’vne autre maniere, qui eft de les. pcler, & au lieu deles mettre dansl'eau, ont du Sucreen poudre qu'ils jettent par deflus : les laiffant infufer vn jour ou deux, tant que le Sucre foit fondu; puis. Es les mettent fur le feu, & les ayant FRANÇOIS ‘ 223. retirez apres le premier bouillon, 1-s Jaiffent repoler encore deux autres jours dans leur Syrop ; au bout defquels ilsles acheuent de cuire , & mettent les Abri- cots dans Les Pots: puis ils font recuire le Syrop , & le verfent par deflus : cette fa- çon de confire eft embarraflante ; & ne faic pas fi bien que celles que ie vous ay dit cy-deuant. L'on fait aufli de tres-bonne Marmela- de d Abricots , Pefches & autres Fruits. propres à ce fujet , en les prenant bien meurs, & les faifant cuire auec le Sucre, y mettant la moitie de demy- feptier d'Eau à deux liures de Sucre, & trois liuresde Frui& : vous la cuirez en confftence pour | garder, puis la mectrez dans les Pots& Talles en les couurant & gouuernant comme lesautres Confitures. Il faut que ic faffe icy vne petite digref- ” fion touchant le Sucre & que ic aife,qu'il ya vn vicilerreur qui s'eft toufiours pra- tiqué , parmy beaucoup de ceux qui fe meflent de faire des Confitures : C'’eft: qu'ils cuifent leur Sucre à part, jufques en confiftence de parfait Syrop , l'efcu- mant foigneufement , puis ils mettent leur Fruit dedans & le confifent : quant à moy , l’experience m'a fait connoiftre qu ils fe trompent tres-lourdement, pour / { 239 Le TARDINTEX Îles raifons que ie vous vais déclarer, qui font , que le Sucre eftant en Syrop, exhale (auec l'Eau qu'ils y ont mis) la meilleure, & plus fubtile qualité du Sucre,qui pene- tre & faifit plus viuement le Fruiét : ce qu'au contraire , celuy qui eft defia en Sy- rop, ne peut confire que le deflus , à caufe qu'il eft engraiffé, & efpoiffy par la cuif- {on : outre cette raifon, iamais le Syrop ne prend que bien peu le gouft du Fruit, ce qui Le rend moins agreable. Les Alberges & Pefches, comme elles font aflez femblablesaux Abricots, aufli veulent-elles eftre confites de la mefme facon, en tout & par tout. C'eft pourquoy ien'en diray rien dauantage; de crainte que par vne fuperfluicé de difcours ie ne groffiffe par trop noftre Liure. Les Coingseftans des Fruits tres-durs, veulent eftre confits d'autre façon que les tendres : Pour y paruenir,ils feront pelez promptement, coupez par quartiers , & les Trognons eftans oftez , feront iettez dans l'Eau chaire : Par apres ils feront mis boüillir, iufques à ce qu'ils appro- chent d’eftre cuits : puis on vuidera l'Eau dans laquelle ils auront bouilly, & l'on y mettra de bon vin blane, continuant à les faire cuire , tant que vous voyez qu ils fe eulcnt defpecer,alors vous iestirerez dis 4 3 + 4 FRANÇOIS. 23 feu, & les mettrez efgoutrer & feicher : Cela fait vous les confirezcomme lesau- tres fruits precedens, trois quarterons de fucreeftans fufhfans pour chaque liure de fruit. y adiouftans la Canelle & le Cloudde Giroffle & les mettrez dansles poisau fortir de la Poëfle, fans autre ob- feruation que de les poferen lieu fec. Le Cotignac à la mode d'Orleans, fe f2it en mettant bouïllir en eau claire les peaux des Coings, & les Trognons, y mellan aufli la gomme que tirerez des pepins, qu'aurez faie tremper, laquel- le pallercz ätrauers vn linge, pour leser feparer, auant que de la mettre parmy: les peaux : letoutayant bien bouilly, il Îe faudra pafler par l'Eflamine, puis faire cuire le ius tant qu'il efpoifliffe, y ad- iouftant du vin blanc François ; ou Bour- guignon, d'autant qu'il yades vins qui noirciflent en cuifant, comme font tous les vins d'Orleans, de Blois, & quel- ques autres : vous y mettrez du fucre à proportion du ius que vous aurez , ne vousen pauuant dire la doze, parce que ce fera plus ou moins, felon que voître: jus fera fort ou foible , l'experience vous Le ferz connoifire dés le premier eoup : cela fair , vous. le mettrez cuire à feu. mediocre, en l’efcumantbien, & le es 232. Le TARPBINIER muant fouuent auec la gafche, pour l’em- pefcher de s'attacher à la Poëfle:& quand vous reconnoiftrez qu il fera cuit en con- fiftence de Gelée forte, vousle tirerez du feu, le verfant à trauers quelque linge dlié , fur les moufles de plomb figurez, ou tout d'vn coup dans les Boëttes où vous Île voudrez confcruer. Eftant bien froid, pour retirer celuy des. Moufles , & le mettre dans des boëttes, faudra faire chauffer de l’eau dans quel- que chaudron, tremper le moufle de-. dans iufques au bord, puis. le coëffant auec le fonds de la boette, retourner les deux enfemble s’en deflus deffous : le Co. tignac quittera le plomb, & tombera dans la boîte, laquelle vous efgoutterez de l’eau qui pourroit yeftre auec le Cot- tignac, qui fera fondu par l’eau chaude, “en fe deftachant du Moufle : » ous les. laifferez deux iours fans couurir, au bout defquels vous les fermerez, & ferrerez En lieu fee.” Si pendant l'anné ce Cottignac chan cifloit, ou candifloit, ou bien qu'il y. tombaft quelque ordure, ilfaudroit faire : chauffer de l’eau claire, & en verfer par deffus ; ce la emportera toute l'ordure, & il fera aufli beau que s'il venoit d'eftre fait. | ; — pe te. DR To EEE FRANÇOIS, 233 Les noix font les confitures les plus lon- gues à faire de toutes, on les choifira tendres, auparauant que le bois fe faffe à la coquille, & les pelera-on proprement, leur baillant trois ou quatre coup de cou- fteau à chacune , en long & non en tra- uers, afin qu'en bouillant elles foient mieux penctrées : à melure que l’on les pelera, l’onles iettera dans l’eau tiede, & les fera on infufer en grande Eau fur la cendre chaude, iufques au lendemain, que l’on les mettra bouillir en nouuelle eau, & eftant tirées du feu & efsouttées, feront mifes de rechef infufer dans d’au- treeau, & cela vous le reïtererez tant de. fois, que reconnoifliez qu'ellesn'ayent plus d'amertume, apres quoy vous les acheuerez de cuire en bon vin blanc Fran- çoit, à vn cent de Noix, vne pinte de vin, & autant d'eau, y mettant gros comme vne Noix feiche de bon Salpeftre pour les. mieux penetrer, & defarmertumer : au deffaut du falpetre, vous y mettrez gros comme la moitié d'vne Noix de Sel ; puis quand vous verrez qu'elles feront cuittes. : & qu'elles fe voudront defpecer, vous les tirerez hots de l’eau, & les mcttrezbien efgoutter & féicher dans quelque linge : ce qu'eftant fait vous les larderez de bon- ne cfcorce de Citron, & les mettrez 234 L#IADINITIER confire comme les autres que i’ay dites cy-deuant,y adiouftant vn peu d'eau pour faire fondre le fucre, & les affaifonnant de Canelle, & de Cloud de Giroffles : il fuffira de trois bons quarterons de fucre pour liure de Noix, que pelerez à l’heu- re que les voudrez mettre dans le fucre : cftans confites & Le Syrop reduit en bon- ne confiftance, vous fes verferez dans les pots, les laiffant defcouuerts quel- ques jours comme les autres. Les Cerifes que l’on voudra confire, feront choifes les plus grofles, mieux nourries, & nontournez : onne les pren- dra trop meures, mais quand elles au- ront vne couleur viue & vermeille par tout ; celles de la Vallée de Montmorency font fort en eftime pour leur bonté : c’eft pourquoy l’on prendra fon temps, quand on commence à les apporter à Paris, & on n’attendra pas la fin de la faifon, où j'on n’en peut auoir que de lisu ombragé : car vous.fçaurez,qu'entoutes fortes defruis, Les premiers qui fe mangent en chaque faifon / pourueu que l’on leur donne le temps de meurir) font toùjours les plus excellens au gouft, & les mieux condi- tionnez : les autresn'efans que comme des regains, qui par debilité n'ont peu accompagner les premiers en maturité. $ Œ FRANÇO:1S. 2:$ Pour confire vos Cerifes fans noyau, il faut les pefer auant que d'en tirer les noyaux : puis auec le plus de proprieté que vous pourrez, tirer le noyau en pref- fant doucement la Cerife du bout des doigts, & tirant la queuëde l’autre main il fortira aifément fans la defchirer: Vous les ietterez à mefure dans votre Poëfle où il yaura du fucre en poudre, que vous aurez aufli pefé auant que de l'y mettre : vous verrez par le poids, ce qu'il y aura à defduire pour les queuës & noyaux, afin de garder la doze neceflat- re du fucre qu’il conuient mettre àcha- que liure ; qui eft, cinq quarterons de fucre pour chacune liure de Cerifes, fi vous les voulez faire belles à prefenter , & qu'il yait beancoup de Syrop : le fcay bien qu'il feroit plus expeditif, apres leur auoir ofté les noyaux, de les pefer dans quelque papier. mais cela les ga- fteroit & patrouilleroit, ce que la Cerife ne peut fouffrir à caufe de fa delicatefle, fe tournant facilement ; & auffi qu'elle perdroit beaucoup de fon ius : Pour fon= dre le fucre vous y mettrez quelque peu de ius de Cerifes, qu'aurez preflées dans vnlinge, { Les tournées feront affezbon- nes pour cela } Vous mettrez la Puëïñle, fur le feu, le charbon n'eftant qu'à demy 2:6 Lsr TlARDINTER embrafé, pour les caufes que i'ay dites cy-deuant : vous cuirez vos Ceriles tout d’yn bouillon; puis vous les tirerez du feu, les laiflant prefque refroidir, & les drefferez dans vos pots & tafes. Si vous voulez en drefler dans des tafles comme les Prunes, n'en mettant qu vn lit, & les laiffant deux ou troisiours fans y mettre le Syrop, & le rond de papier qui toucheau Syrop , elles feront belles à merucilles. | Quelques: vns y adiouftent fe ius de Gadelles, maiselles changent le gouft de la Cerife par leur acidité, & rendent le fyrop trop liéen Gelée : Si pourtant vous voulez tirer au mefnage en yen mettant, il ne faudra qu'vnelivre de fucre, à vne livre de fruit. Pour framboifer vos Cerifes, à la pla- ce du noyau de chaque Cerife, vous y met- trez vne Framboife rouge, les ayant pe- fées auparauant, pour éuiter confufon: LA : à la dofe du fücre qu'il faudra mettre. Les Cerifes où l’on n'oftera point le noyau, feront piquées chacune en deux en‘roitsauec la pointe du coufteau, cela empefche qu'elles ne creuent, & quittent leur peau:vous les confirez comme deflus,. vne liure de fucre eftant fufhfante à vne: Bure de fruit. FRANÇOIS. 537 Les Griottes eftans vne efpece de Ceri- fes, feront confites dela mefme façon que les Ceriles : fi vous y voulez mettre le ius de cadelles , cela reucillera leur gouft qui eft aflez plat : elles fe veulent conüre bien _meures à caufe de leur fermeté. Le firop de Cerifes fe fait auec du ius de Cerifes bien meures, que pafñlerez à trauersvne Eftamine, ou linge fort ; & y adiouftantle fucre, ( vne livre à cha que pinte deius ) vous le cuirez en con- fiftence de firop. Pour le clarifier il faudra le couler à trauers vne fueille de papier brouïllars, ou dans la Chauffe d'Hipocras. Pour faire la gelée de Cerifes, il faut paffer des Ceriles à trauers l’eftamine, & y adioufter vn tiers de ius de cadelles, puis à chaque pinte, mettre vne liure & demie de fucre , & la cuire à petit feu , en tournant toüjours de peur qu'el- le ne fe brufle : & pour connoiïftre quand elle fera faite, vousen mettrez quelque gouttes fur vne afiette : fieftans refroi- dies, vous les pouuez leucr auec la poin- te du couftean, la gelée fera faite, finon il faudra continuer à la cuire : Vous la mettrez dans des boëtes comme le Cot- tignac. Ilyena qui font des confitures de Ce- »38 LE IARDINIER rifes fans fucre, en paffant force ius de Cerifles & de cadelles enfemble, le faifant cuire & le reduifant iufquesautiers, puis éis en confifent leurs Cerifes : c'eft vne commodité pour ceux qui n'ont point de fucre , mais cen'eft pas Vn grand ragouft pour les bouches delicates. Aux Compoftes de Cerifes , l’on y laiffe la moitié de la queuë & le noyau par confequent : ce n'eft d'ordinaire qu'à la nouueauté quel'on en fert fur table il fufra de demie liure de fucre à la hiure de Cerifes, d'autant que ceft pour man- ger à l’iftant qu'elles font faites. Pour les feruir fur l’Affiette ,; l’on. drefle toutes les queuë en en-haut, puis l'on verfele firop tout chaud par deffus à l’inftant que l'on les veut feruir fur table. le vous veux enfeigner la maniere de faire l'Eau Clairette, qui eft:vne com- pofition tres-excellente pour rechauffer l'eftomach des Vicillards, qui par man- que de chaleur naturelle, ont fouuent des crudirez & indigeftions ; elle eft aufli tres bonne pour les perfonnes de toutes aagesquiont des debilitez de cœur, & des efpeces de coliques, caufées par les brouïllards ou froidures , cette eau les confortant extremement, & les remet- A pr! FRANÇOI:S. 2:9 tant en parfaite fanté : Les Femmes en tra- uail d'enfant en peuuent aufli vfer , pour leur augmente: les forces & le courage. Pour la faire , vous prendrez deux pin- tes de bonne eau de vie, fi elle eft reétifiée elle en fera encore plus excellente : vne liure des plusbelles & plusgroffes Ceri- fes, aufquelles vous ofterez feulement la queué : vne liure de fucre , demie on- ce de Canelle, & demie once de Cloude Girofile : Vous mettrez le tout dans vne bouteille de verre, infufer au Soleil iuf- quesà a fin des iours Caniculaires, re- muant parfois cette compoñtion auecvn bafton , ou bien renuerfant la bouteille, tout le Marc qui eft au fonds fe meflera par tout, la tenant toüjours bien bou- chée crainte de l’éuent. Plein vne cuillier d'argent fufñra pour vneprile; & vne Cerife que vous tirerez de la bouteille auec vn fil d'Archail, faic en petit dard , afin quil apporte la Ce- rife qu'aurez piquéec. ; à En temps de pelte, c'eft vntres-bon & agreable preferuatif: vousen prendrez, & en donnerez à vos domeftiques vne pri- fe à chacunà ieun, & ne faudra manger de demie heure apres , afin que les efprits qui font dans cette compofition fe ref- pandent par tout le corps. s46 Ls IARDENTIER Les Grozeilles blanches ne fe eonfifent guere au liquide, fi ce n'eft à la grande nouueauté que l'onenfait des Compoftes pour feruir chaudes fur la table : elles fe confifent ordinairement au fec, nous en parlerons au chapitre fuinant. Pour Les Compoftes , l'on coupe la tefte & la queué des crozeilles , & on les fait ! parboüillir ; puis eftans efsouttées on | 2 les pefe, & on les confit tout d’vn boüil- | lon ; demie liure de fucre à la liure de fruit fera plus que fufhfante pour lésren- | dre agreables. Les crozeilles rouges & rerlés que | nousappellons Gadelles, fe confifent au liquide, eft vn petit fruit extremement. agreable. Pour les confire vous Les peferez, & les feparerez de leurs queuës, les meitanct dans la poëfle où fera Le fucre en poudre: par apres vous y adioufterez du tus d'au- tres cadelles qu'aurez preflées douce- ment dans l'eftamine, puis les mettrez fur le feu, & les confirez tout d'vn boùil- Jon:apres quoy vous lestirerez du feu, les laifferez vn peu refroidir, & les dreflerez dans vos pots & tafles :1l fufira d'vne li- ure de fucre à vne liurede fruit pour les rendretres belles: vous y mettrez moins de fucre fi vous voulez, & feront bonnes a j À ES : FRANÇoïs. 241 à manger : mais non fi belles, ny auec tant de firop. La Gelée fe fait en preffant les cadel- les, & tirant par force iufques à la der. niere goutte de jus, dautant que le plus efpois ne fort que le dernier, puis vous y adioufterez le fucre, trois quarterons à la liure de ius (qui eft vne pinte ] cfans fufhfans pour faire de telle celte : vous la cuirezen confiftence ( comme ay dif cy-deuant aux Cerifes ) puis la dreffe- rez dans des boëtes , Ja laiffant refroidir deux ou trois jours auant de les couurir. L'on framboife aufli des Gadelles en y mettant du ius de Framboifes pour fon- dre le fucre, en lieu de celuy de Ga- delles; cela leur donne vn parfum tres- agreable au gouft. Quelques-vns confifent des Gadelles fans Sucre, entirant & exprimant quan- tité de ius, le faifant reduire au tiers : puis y mettant confre les Gadelles, ils les cuifent iufques à ce qu'ils croient qu’elles le foient fufhfamment pour eftre gardées: s'il yadiouftoient feulement vn quarte- ron de Sucre à [a liure du fruit, elles au- roient quelque petit agréement qui les fcroit manger , mais {ans fucre, c’eft vne - . LA jufques au jus, & l’ayant bien lauée & | délimonnée en plufieurs eaux chaudes, & fechée; comme j'y dir celle d'Oren- | ge, vous la mettrez dans le Sucre, & y. adjoûterez le jus de Citron pour la ren- dre plus hautes en faueur. Pour faire le Bifcuit de Citron épois. 278 LE TARDINTER de trois doigts & plus, vous cuirez vo-- fire Sucre en confiftence de Conferue vn peu forte, puis jetterez la poudre de Citron preparée comme j'ay dit, & me- lerez vn peu de jus de Citron & du blanc d'œuf fouctté auec des verges pour le fai-- re leuer, ce qu'ayant fait, vous verferez voftre Sucre fur du papier, tenant le | | | poeflon deflus, afin que fa chaleur fafle | Jeuer d'auantage voñre Conferue, puis! eftant encore chaude, vous la couperez: ES Por par gros Blicuits qui feront tous pleins # d'veux par dedans, & fort legers. On fait aufli de la Conferue de jus | de Citron fans y mettre de la Chair rà- ns pée, mais elle n'a que l'acidité , &! n'eft pas fi agreable.que cclle où vous en aurez mis. 1 Îl ÿ Les Piftaches feront pelées à l'eau chau- de, puis pilées dans le mortier de pierre, les ie auec l'eau de fleurs d'Oren- ges, de crainte qu'elles ne rendent l'huile apres quoy vous les mettrez dans voftre Su. re cuit en Conferue, & deftremperez cette Pafte À vn cofteé de voftre poeflon, mellerez bien le tout, & y adjoufterez quelque peu de Mufc, & d'Ambregi: broyez auec du Suere bien delié & paf: fé au Tamis, puis la drefferez commk les autres: CENT AS FRANÇOIS. 279 Il fe fait de la Conferue detoutes fortes de Fruits desja confits au fec, comme Abricots, Pefches, Cerifes, Orenges, Citrons, Efcorce de Citron vertes, & au- tres, en lestaillant en lardons ou petites billes femblables à des}dez à joïer, &les jettaut{dans le Sucre alors qu'il eft cuit jufquesà Conferue vn peu lafche,. puis _meflant le tout pour en rendre la diuerfité plus agreable, il les faudra dreffer & tail- Jerainfi qué j'ay dit aux autres. | Vous pouuez en Conferue contre-faire plufieurs chofes qui furprennent à l'a- bord,comme parexemple des tranches de Jambon, cela ef vn peu embarrafflant à vne perfonne qui n’a pas accouftumé de |trauailleren conferues, à caufe qu'il faut bien prendre fon temps pour entendre à Atout, mais pourtant trés facile à qui y à |yn peu de pratique. | Poury paruenir, vous aurez des plats pret tous prefts, & quand voftre Su- scre fera cuit en Conferue vn peu foible, jou lafche, vous en verferez vne partie dans vn de vos plats, & le poudrerez ade chair de Citron, on de jus de Fram- iboifes blanches , ou de fleurs d renges, Mbref de tout ce qui fera blanc, pour re- aprefentet la graiffe & le lard, & ferez. pien tourner cette Corfe;ue par quel- | 4 4 180 Le laArRDiIN:1ER qu'vn pour incorporer le Sucre auec le décuit : puis vous verférez vne autre par- tie dé voftre Sucre dans yn autre de vos- plats, &y mettrez de [a poudre de Ro- fes, jus de Framboifes, Grofeilles rou« es, ou autre qui pourra reprefenter la: chair dé Jambon, ne meflant pas voftre: décuit par-tout le plat, afin que reftans quelques endroits blancs quand vous ti-. rerez voftre Conferue du plat, cela imite mieux ies graifles qui entre-lardenc le! Jambon, & pour dernier, vous mettrez. auec le refte du Sucre quiferadans voitre poeflon, dé la fueiHe-de Fenoüil vert, que ferez piler dans le mortier de pierre, fi c'eft en-la faifon, ou en autre temps des Piftaches, pour reprefenter le Perlil ha- ché, & herbes.fines, que l’on met fur le iard da Iambon: Vous prendrez ces Conferues qui feront encore chaudes &! 1 poferez la rouge, & vn peu de blanchel| fur vne tablé, les meflerez enfemble},, pour imiter les mufcles & graifles, quil}. entre-lardent le Tambon : puis apres; mettrez de la blnche: par deffus pouls, contrefaire le lard, &'du vert peur le der-}f nier qui reprefentera le Perfl, vous ap45, puierez &; battrez de la main à chaqut},, Ji que mettrez afin de les incorporer à}, joindre enfemble.Vos Conferues eftank,, FRANCOrS.. 281 encore chaudes vous les couperézen for- me de tranches de Iambon , & les dreffe- rez {ur desafliettes, mettant yneou deux ” fucilles de Eaurier par deflus pour ayder à la tromperie. Si vous en vouliez fair: vne quantité, vous pourriez vous {eruir de trois poef- : Jons, au lieu d’écuelles d'argent. _ Pour contrefaire des Ceruelats, pre- | nez le refte du rouge qui fera dans Vos | écuclles, & y mettrez deux ou trois gout- | tes d’eau claire, où de fleurs d'Orenges, | meflez y de la poudre de Canelle battuë, | & pañlée bien fine pour embrunir vofire. 4 couleur : & ramaflez les teftes de voftre Jambon, (oftant le vert); mettrez le tout | dans le poeflon , aucc vn pcu d’eau que | vous Verferezn'en prenant que dans vne il cucilliere d'ärgent. peur d’en trop met- tre, mais feulement pour décuire yn peu *| Le Sucre : Vous mettrez le pocflon fur vn # petit feu pour échauffer ces Conferues & dles incorporer enfemble en Îles meflant #auec [a gafche, & qu'en les tirant du fpoeflon elles foicnt faciles à manier & Hformer auec lesmains en rond comme des Sauciffons ; pendant que Je Sucre fera en- core chaud vousles trancherez par roëles, “bou en long, & les drefferés fur des afficttes inf que les Sauciffons naturels. 282 LE LArDInNrER Vous pourrez encore imiter mille gen- tillefles auec le fucre & toutes ces cou- leurs, en faifant des paftes que vou mouflerez & façonnerez à l’oifir d’autan qu'elles n'entrent point fur lefeu. Parexemple, pour contrefaire des Ru- bans d'Angleterre de plufeurs couleurs : Vous qrendrez du fucre paflé bien delié . au tamis de foye, & pour le rendre en-k core plus fin que celuy qui eft pilé at Mortier, ceft qu'il le faut broyer à fes fur le Marbreainfique les peinftres fon leurs couleurs :eftant pailé vous en met trez {ur vne table bien nette, y mélere: yn peu de gomme agragant détrempé aucc l’eau de fleurs d’'Orengesou de Ro fes, & ferez vne pafte qui fe puiffe eften dre fous le Roufleau : Vous diuiferez cetfà te pafteen autant de morceaux que vou voudrez qu'il yait de couleurs, lefquel les vous meflerez auec voftre fucre cha cune à part, les cftendrez auec le Rouif! Jeau les. plus minces & tanues que vor pourrez : Vous trancherez ces paltes pe petites Lanieres bicn delieés que ioir drez proprement& promptement les vnaf: aux autres, afin que l'humidité qui e dans le corps de la pafte foude ces Lanif: res, que diuerffierezpourimiter lesRa bans : en fuitte de quoy, vous pailerez li ue... mie | 24 FRANCOIS. 2.83 | gerement le Roufleau par deffus pour les mieux joindre , puis vous les fermerez en | nœuds ou galans , mettant des Cartes | phées en rond pour fouftenir les replis iufques à ce qu'ils foient fecs, ce qui fe lfcra en moins de deux heures. 4 , Vous contreferez aufliles Chiffres, & j Armes blafonnées de qui vous voudrez , Jraillant cette paîte auec le coufteau, ou jauec des Moufles de fer blanc qu’aurez “# faire exprés, & imiter toutes fortes | de marqueterie que voftre efprit vous Hooerera, ii Si Vous voulez rendre ces figures en- ore plus recreatiues:eftans parfaitement . 2 ; , » [im « heches, vous les glacercez de fucre délié (sftrempéauec eau de fleurs d'Orenges, Sales mettrez dans le four ; puis les re- girercz & glacerez de lautre cofté; les. JJemettant derechef au four pour en fe- her la glace : par aïinfi on ne verra point. ja figure qui fera enfermée entre ces deux lacis, à caufe de [a blancheur, fice n’eft a T'expofant au jour & regardant à tra- ers ; alors on reconnoiftra ce quec'eft,& nadmirera voftre induftrie. Auec cette mefme pafte vous ferez des 1blettes & mulcadins tels que vous vou rez y meflantle Mufc, l'Ambre , la pou- ce d'Iris, la Canelle, le Girofe > & -fteau Le furplus de Ja figure de Ia tour: 284 LE TARDINIER toute autre chofe qui peût feruir à {4 rez. creation du gouft, où à forcifiér l'efto- mach; mefme aufli des purgatifs, & pre- feruatifs de toutes les fortes que la Mcde-: cine enfcigne | | 3 F Pour feruir des Mufcadins für table, l'on les met d’or inaire dans de petites tourtieres ou abbaiffes de fa mefme peft:s ( maïs fans Mufe pour éuiter à la def- pence ) cès petites Abbaïlfes fe font auec des Moufle de fer blanc qui feront de telles fgures qué vous Youdrés, où-ron- des, ou en Triangle, ou à Panñs, ou en Eftoille, bref felon voitre fantaïifie : dans lefquelles vous mettrés de voitre palte qui aura efte eftenduë auéc le Roufleau, & auantque de la mettre vous poudrerés voftre Tourtiere de fucre crainte qu’elle ñe s'attache: vous rogneres-auec le cou: ticre, & laillerés fécher ces Abbaitfes} dans leurs moutlés environ deux heures puis les retirés, & poferés en quelqu lieu oùelles puitfent s’asheuer de bier fecher. AS Dans ces mefmz=s petites tourtierce quand elles feront bien feches , l'on: drellera des Confitures liquides pour ei mettre de plufieurs fortes [ur.vne mefmk, Alertes. “SARNIA PT CR À Fr AN GO IS. 285 De éette mefme pate vous ferés auffi des Bif£uits , & pains de ‘ itron, y ad- |‘iouftant de R'rafpüre qu'aurés fait par- | “bouillir pour fre ‘plis oréable ,1& | Faÿant meflé anes vftre (ocre & Gém- |'me : vous tirérés & applatirés la pañte | ous le Roufleau , mettanr d:Hous & def. | fus du fucre en poudre {de crainte qu'el- {Henes’attache à la Table ouau Roufleau) fans la replier poureant , 4fin qu'elle garde vne humidité: dans 1: milieu qui AT leuer, quand vous Ja mettrés au four , qui fera yn quart d'heure apres que vous l’aurés coupée en Bilcuits ou petits Pains, à’eaufe qu'elle fecheroit crop & ne leueroit-pas. SELF | 5 Si vous ne voulés vous feruir de Gom- ne Agrägañt , vn peu de blanc-d’œuf fœtté y pourra fupplier. . Vous en ferés de tous Goufts & de tow- es couleurs ,<[e Tourne fol ( quoy que fort peu agreable! s’emplovera au deffaut Mes Violettes; Bourraches, & autres coù- L: cites > puis on lesroufle dedans du fu- re bien fiñ en leur laiffant prendre ce u'elles peuuent , les mettant feicher 286 Le IADINTER deuant le feu pour afferimir le fucre : Sifi vous meflez auecvoscouleursyn peud eau || deblanc d'œufou degomme,cela les ren- |: dra fermes pardeffus comme les dragées. |. . Le Féuoüil vert grainé-en branche & autres fleurs, feront plongez dans le fu- |: cre cuit en Conferue , puis poudrés de }h fucre fin on les mettra fecher deuant le {| feu. J Au Fenoüil vert, on y larde des Cure: }r dens comme l’on feroit des Gluaux à vne fe pippée , cela fert de dragée, & pour fe|; nettoyer la bouche. | -|p _ Les Maffepans fe font d’Amandes dou-|; ces, d'Auelines , de Piftaches, de Pi-{l nons, d Amandes ameres, de noyaux/r d’'Abricots & Pefches ; mefmement dep Semences froides mondées fi vous y vou-}e lez faire la defpence : & ils fe trauaillenti| _ tous de la mefme façon. f: Pour le faire excellent, il faut pren-|s dre vne liure d'Amandes, que vous perte lerez les mettant dans l’eau chaude, puish dans la fraiche à mefure que vousles déld. poüillerez de leur peau, car cela ledtr blanchir de beaucoup: vous les retirerei de l’eau, les effuyerez ou feicherez dandfh du linge , & les mettrez dans le Mortiell or de Marbre ou Pierre, & les pilerez tan f: que l’on ne puifle plus remarquèr aucu/y. | FRANÇoO:S. 287 (ne partie de l’Amande pour petite qu’el- le foit : en Les pilanc vous les arrouferez |auec de Bonne eau de fleurs d'Orenges , ou de Rofes bien rectifiée , & purgée de fon Phlegme par diftiilations; ou fimple- ment repolée de long-temps, car il s’y fait |vne vaze au fonds de Ja bouteille qui eft le plus Vifqueux & Craife de toute l’eau Role, & faudra paller ce quie vous en au: rez à faire à traucrs vn linge d: crainte {que ce Phlegmene fe mefle :ce que l'on. y met des eaux de fenteur n’eft pas tant pour l’odeur que pour empefcher que Les Amandesen les pilant ne rendent |’ Hui- {le, car le maflepan feroit defagreable : fvous y meflerez vne liure de beau fucre | palé delié comme celuy desMufcadins & {en ferez vn corps en confifterce de boïil. lie bien efpoifle : vous pafferez voftre pa fte à trauers le fas ou l’Eftamine, afin que {s'il y auoit quelques morceaux d aman- A des qui ne fuflent pas ailez pilezon les re- broyaft , & que l’on ne trouue rien de -defagreable dans le Maflepan : Vous met- trez cette palte dans le poeflon, & la cuirez à petit feu comme les paftes de nf fruits fecs, ( c'eft à dire) iufques à ce que la pañte quitte le Poeflon, en retour- “nant toûjours de peur qu'elle ne brufle: afvous en gouflerez fi elles tient de la enif= 288 Le JARDIN&HER fon auant que de la tirer du feu: puis eftant cuite la verferez dans quelque vaif- felle dé Fayence qu'aurez poudrez de fucre afin que le Maflepain ne s'y attache point, & eftant prefque refroidie, vous . la mettrez fur voftre table, la manierez & tirerez fous le Roufleau comme de la palte, & la façonnerez en grandes Tar< des rondes ou bien en petites que vous. arrondirez$ lescoupant auec le haut du : Caliced'vn Verreaboire, en l'appuyant fur la pate, qui fera de l'efpoifleur que voudrez que foient vos tartes : Vous en ferez de quarrées, en l'Ozange, en Cœur, ; en Triangle , & de toure autre figure que vous voudrez, lespinçgant par les hords pour y faire le petit dentclage qui s'y pra- tique ordinairement : eftans façconnées vous les mettrez cuire dans le four moyé- nement chaud , pour leur donner vne petite couleur rouffe par les bords, & extremitez, puis lesretirerez, les laifle- rez refroidir, & les glacerez auec fucre fin & eau de rofeou de fleurs d'Orenges : 1 faut que cette glace foit efpoifle com- me du Miel blanc & que lon l’eftende auec lc coufteau, apres quoy vous re- mettrez vos tartes au four pour cuire cette glace : & quand celle aura bouffy: vous les resirerez , les laifferez refroi- er | We: À | ll FrANcoIrs. 289 dir, & fsrrerez en lieu fec. Aux grandes tartes apres que vous leut aurés donné couleur , vous les glacerés, & piquerés deilus des Piflaches, des <[- corces de Citron de l'Orengeat, du Ci- tronnat, ou du Canelasen dragées : puig vous les remettrés au four pour fecher la glace, & les retirerés quand elle aura bouffy. Sivousvoulés les embellir & enrichir dans le milieu de quelque petit Rocher de Confitures diuerfes , vous y en met- trés de telle forte que voudrés, puifque vous aués la methode de les mettre en _conferue. Vous ferés auffi auee voftre maffepan de longs triangles pour detrois en dref- fer vne Piramide fur vn plat que vous ac- compagnerés de petites tartes tout autour on de Mafepan filé { dontie vous vais en- feigner cy-apresla maniere dele faire, } & adiufterés fe tout felon que vous in- uenterés par voftre caprice. Le Maffepan de Piftaches ( qui fe fera comme celuy d'amandes douces ) vous lepourrés déguifer en fonds d Artichaux, en Afperges , mettant vn peu de blancau gros bout pour mieux tromper , en pois fanscofles, & autres chofes femblables, ayant des moufles de bois ou de plom N PAR mu sd . deftremperez vofire glace, & voftre pañte 1289 Le TARDINIER qui en faffent la figure, bref vous vous: diuertirés dans cès gentillefles autant que votre curiofité vous y portera, & la defpence que vous voudrés faire y pourra: fournir. Auec du maflepan d'Auelines, vous pourrés faire des petits boutons que cui- résau four, leur faifant prendre vn peu de couleur pour contrefaire les Auelines, & les feruirés dans vn plat comme en Ca: refme on fert les naturelles. Si vous ne voulez mettre tout voftre: Maffepanen tartes, vos le prendrez a- uec la gafche dans fe poëflon tout fortant du feu, & auec le coufteau en drefferez des Maccarons comme ceux de conferue, que mettrez au four pour prendre cou- leur. Les. Paticiers dans leur mañepan & Maccarons y meflent vn peu de fleur de farine de pur froment bien fine, & de l'eau de blanc-d'Ocuf dans laglace e’eft: ce qui les rend pañles : pour prendre de cette eau il faut foetter des blancs d'œufs, & les laiffer repofer: fous là mouffe, il fe trouuera de l'eau auec laquelle vous our les Maccarons. Me 12 . Pour faire le maflepan fillé, il faut ajoir vne petite pallette de bois, où vns | ERA NÇOI se, 291 Isond de boëtte , qui aura des cordons pour l'attacher à la main, & roufler def- ! fous de la pafte de maflepan , en poudrant | fouuent voftre table , de crainte qu'il ne s'yattache : il fe tirera long & efgal en igroffeur , duquel vous ferez des Lacs d'amour, des Tortis, des Chapeaux, | des baftons rompus, des Chiffres, & au- ttres figures telles que voudrez : vous les | mettrez au four pour prendre couleur , 1 &c les ferrerezpourenioliuer & adiufter | vos autres Mañepans. | De voftre mefme pañte de Maflepans, | vous en pourrez faire des Tourtieres ou { Abbailles grandes & petites qu'emplirez | de: confitures , au lieu de celles de pur | fucre que iay dit cy-deuaut. | L'on tireaufli des Maffepans en bande, | c’eft à dire que l'on fait des Comparti- mens, & Armoires, lefquelieson rem- plit de Confitures liquides de la couleur des Blazons , comme pour reprefenter l'Or on méttra des Abricots , ou de la | marmelade d’'Abricots, & Pommes : le | Sinople, du Verius, des Amandes, & {des Abmcots Verts; Gueufle, des Ceri- fes, Framboifes, & Grofcilles Rouves : ainfi des autres, approchant le plus Ique l'on pourra de ce que l’on veut imi- Len N ii. …ehe# vous, l'on en fait de Cuiure roù ge dont vous pourrez vous feruir auét vos maffepans & glacis, & mettant, d f:x de charbon déflus, & deflous , cela | fetisfora À vbs intentions : il fera de be foin d’y.regarder founent , afin de ne ARE 24 LE FI Le FARDEVIER * Bsvonsnguez van four de Maffonneri g E] ï plus de commodité que des ordinaires} cn pofant doucement fur des papieres! ; * °C or #: $ _d'nner plus de cuïffon à vos maffepans, vousvoudrezqu'ilsen prennent. | RS : - Pains de Citron , & Glacis, que ce que +R TA 2, 7 mr INT NE P ge k 6 S _- Le ; P. ET UPS, 3 ge nf NAS Y Re Ent É 4 ne 3 # 2 “ka “oh Ps | NL 20 + SLT: & Gel dE : A] 4 AT TEREe * : “A ir À ve EAe Le, 2 à : £ + € Ë - 4 LR ” “ - 3 _— L7 7 PV: ok mA 10 ele ou VE È ja A 14 Eté) jm Fr LIAX rt # 1 2 7 ; n 3 ) VU 0 Duc. P7 2. | 4 F7 04 41 JU 1 / In} 7 DRE L &: 2) bi AJ VIN Fe EVER bre re NP .49: TI à "À + L' 1 7 L. 120 de pur AL 5 À 17 À Lt > MUSES us PR CT SRE 7, gente ANNE 7 UT 0 20 4e LOTONEE PR 2 rit ÉD #8 Si Pal WA È 103 EN 20 y | she æ : CL 2e + CA Ne ne d Mr: rs i 5 . * d à » LE