jr+ ;> L E JO DES FOUR L'JNNE'E M. DCC.XXXIL JANVIER, A PARIS, . Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. 'AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE VU ROY. ^#\jpp^ LE JOUR DES JANVIER DCC. XXXII. CONTINUATION DES MEMOIRES DE LITTERATURE & d' Hiftoire.Tome X. Punie II. A Paris, chezSimart, rue S. Jacques, au Dauphin. 1731- vol. in - u. pp. 2I0. fans compter les Tables qui en contiennent 60. NOUS avons parlé de la pre- mière Partie de ce Volume dans le dernier Journal de Décem- bre 1731. il nous refte à rendre compte de la féconde , & c'eft de quoi nous allons tâcher dé nous Janvier. acquiterdans cet article. Les Pièces de cette féconde Partie font : i°. Une DilTertation de M. de Peirefc fur un Trepié antique : z°. Une DilTertation Anonyme fur la Maifon quarrée de Nîmes : Aij 4 JOURNAL D 39. Un Difcours de M. Aubcrt , lu dans une Séance publique de l'Aca- démie de Lyon le S. Mars 1729. au fujet d'un, pallagc de Virgile : 40. Une fuite des Remarques iur le Syftême de M. l'Abbé de Camps , touchant L'origii e de la Maiion de France eV fes prérogatives : 5°. Un Extrait duDifcoursMl.diM.Gariel, Chanoine de Montpellier, fur la Guirrc faite contre ceux de la R. P. R. depuis 161 9. jufqu'à la réduc- tion de Montpellier & à la paix ;• 6a. Une Diflerration fur les Cou- ronnes , leur origine 2c leur forme: 7*. Des Obfervations fur le Dieu Telefphore , par un Antiquaire de Province : 8°. Une Lettre à l'Au- teur Je l'Article 99. des Mémoires de Trévoux du mois de Décembre 1721. fur un paffage de S. Bilile, touchant la Proceffion du S. Elprit : 90. Une Lettre Latine du Pape In- nocent VI. à Louis & à Jeanne , Rot &: Reine de Sicile : 10°. La Copie de deux Lettres de Jean Cal- vin , écrites de Genève à M. du Poiit , Gouverneur de la Ville de Montclimard j la première , le 3. Mai 1545- & la féconde , le 13. Septembre 1 5 6"i : n°. Trois Let- tres de M. de Balzac , l'une à M. de Paillcvols , & les deux autres à M. d'Argenfon : 1 z°. Une Lettre de M. Pierre Corneille à M. d'Argen- fon : 1 30. Une Lettre fur le nouveau Phèdre de M. Burman , écrite par un François réfugié en Hollande. Quant à la première Pièce , il faut remarquer qu'en 1629. il fut trouvé à Fréjus , dans les ruines d'un vieux Temple , un Trepié de ES SÇAVANS; bronze haut d'un pied 5c demi ou environ, qui ht conjecturer à M. de Peircic à qui on l'apporta aufli- tot pendant ion féjout d: Boifgen- cy , que c'étoit un de fes Trcpics votifs dont on ornoit les Temples ; car on prétend qu'il reffembloit en tout à celui de Delphes , fur le- quel la Pythoniffe ou Prérreuc d'A- pollon s'affeyoic pour rendre des Oracles. M. de Peirefc ayant acquis ce Trepié, en envoya aulli-tôtla description aux Sçavans de France cv d'Italie , les priant de lui en donner l'explication : il travailla auffi de fon côté à cette explication; mais aucun , félon le jugement d'Holfténius , rapporté parGaffén- di, n'en donna une plus plaufible que M. de Peirefc. Sa trop vafte érudition l'empêchoit d'être jamais content de ce qu'il écrivoit , ce qui étoit caufe qu'il ne faifoit |aniai; rien imprimer ; mais les Syivans avoient foin démultiplier les copies de fes Ouvrages , & c'eit ce qui cft arrivé à la Differtation que l'on publie ici , dans laquelle il explique le Trepié dont il s'agit. Elle cft imprimée fur une copie qui a été fournie à l'Editeur par le P. Oudin Jefuitc , lequel en a trou- vé pluficurs manuferites dans la feule Ville de Dijon. Sponenavoit eu communication, & ilavoiie à la fin de fon Traité de Tripodibiis , qu'il a tiré prcfqtie tout ce Traité de 1a Diiîertation de M. de Peirefc. Le P. du Moulinet Chanoine Ré- gulier & Bibliothécaire de Sainte Geneviève ,femblt ,. dit l'Ediccur , J A N V I infirmer dans la defcription du Cabi- net de cette Abbaye. . ùi ce Trepié eft confervé} que l'original de cette Dif- fertaiion fe trouve dam un Volume manuscrit des Ouvrages de Al. de Peirefc , qui efi à la Bibliothèque du Roi. Il feroit à fouhaiter qu'avant que de la faire imprimer , on fc fût aiTu- ré de ce fait, & qu'on eût conféré la Pièce fur l'original. L'excufe fuivante qu'on apporte de ce qu'on n'a pas donné cette fatisfa&ion au public , pourra bien ne pas fatisfai- re tout le monde : La maladie , dit- on , & la mort de Al. Boivin Gar- de des Manuscrit s de cette Bibliothè- que , m'ont empêché de pouvoir éclaircir ce fait , & d.e conférer ma copie avec foritrinal dont il s'agit. Chacun voit k cette excaie eft valable. Il feroit encore à fouhaiter pour la commodité des Lecleurs , qu'on eue fait graver ici la figure du Tre- pié en queftion , & qu'on n'eût pas renvoyé au Livre de Y antiquité expliquée , ôcc. du P. de Montfau- con , ou à la Diftertation deSpon de Tripodibus , non plus qu'à la Defcription du Cabinet de Sainte Geneviève , parle P. du Moulinet, ceux qui en lifant la prefente Dif- fertation voudront avoir fur le champ devant les yeux la figure dont il s'agit. La Diftertation de M. de Peirefc eft une defcription détaillée de ce Trepié, accompagnée de diverfes conjeélures fur l'ufage des pièces qui le compofent & fur plufieurs eirconftances particulières qui con- E R ; i 7 3 2. 5 cernent l'Antiquité. Pour donner une idée de cette Defcription, nous en rapporterons le commencement de dans les mêmes termes de l'Au- teur. j> Le Tripos ou Trepié de bron- j» ze antique déterré iur la Côte » Maritime de Provence , en l'an « z6zj. dans les ruines Se masures j> d'un vieux Temple , & tôt après » apporté au Sieur de Peirefe pen- j> dant fon féjour de Boifgency,eft » allez bien confervé pour faire » connoître qu'il eft de manière » Grecque vraifcmblablement , & » l'Ouvrier qui l'a forgé & élabou- » ré femble y avoir arledé en la » ftruélure 5c aux proportions , or- » nemens &c enrichiflemens , ccr- » taines petites particularitez qui err }> rendent la fymétrie fort gentille »& fort convenable à l'ufage auquel » telles pièces étoient communé- « ment employées ou deftinéesJ&: » à la primitive origine & intro* » duction d'icelles dans les Myfte- » res fatidiques , voir beaucoup » plus conforme que l'on ne pea- » feroit , & de plus grand rapport » à ce grand Trepié du Temple » de Delphes , qui y avoir autrefois » fervi à couvrir la gueule , ou » l'orifice Se foupirail de l'Antre » où lesPythonifles alloient humer » le vent ou la vapeur, concevoir » l'efprit & la furie qui leur fai- j> foient rendre ces Oracles fi celé- >3 bres dans l'Antiquité , duquel » grand Trepié tous les autres »> moindres faifoient la reprefenta- » tion par tout où on les mettoit » dans les Temples t comme pour S JOURNAL D » voit faire celui - ci. « Après ce début , M- de Peirefc vient au détail & à l'examen des pièces du Trepié. » Il n'eft compofé , dit-il , que » de cinq pièces tant feulement , » dont l'une fert de fondement , de »baze ou de fous-balTement , fur » quoi fe pofent trois des autres qui ■n fervent de jambages ou pilaftres » pourfoûtenir cV fupporter le cin- »> quiéme , qui eft en forme de baf- » iîn ou d'écuellon , letoutdecui- » vre jaune ou de laton jette en fon- n te ou moulé & affez négligem- » ment reparé. »> Mais néanmoins tout eft h bien n dreflé & ajufté que ces trois jam- >• bages ne fe peuvent tenir de bout » de leur feul équilibre , 6V encore n mieux quand ce baiîin y eft pofé » par defTus qui leur fert de liaifon , » comme en ces reliques de la meil- »> leurc architecture ancienne dont » les pièces étoient li bien dreflées »&équarrées qu'elles fe portent & »'s'cntre-joiguent parfaitement fans «aucun autre ciment ni mortier » que la juftelfc & le fardeau qu'el- »> lesportoient , cvc. Nous renvoyons pour le refte de la difeuffion cv pour les réflexions qui l'accompagnent à la Diiïcrta- tion même. Q.U A NT à la Maifon quarree, qui fait le fujet du fécond Article de ce Recueil , voici en deux mots cequec'eft. Adrien qui devoit fa dignité d'Empereur à Plotine, voulant ho- norer la mémoire de fa bienfaitrice lui fit élever des Edifices fomptueux ES SÇAVANS; dans la Ville de Nîmes , &.* un en- tr'autres de douze toiles de long , de fept & demi de large & de fix de haut , bâti de grolTes pierres aulfi dures & aulTi blanches que le marbre. Cet Edifice fublîfte encore aujourd'hui , & on l'appelle com- munément la Maifon quarree , 1 caufe de fa figure qui eft un quarté long. Cette Maifon quarrée eft élevée fur un Socle de lix pieds de haut èvenrichi en dehors de trente colon- nes canelées , de l'ordre Corinthien avec leurs chapiteaux parfaitement bien traités. L'architrave , une fnfe &c une corniche régnent tout au- tour; & ce qu'il y a de lingulier dans la corniche & qu'on ne voit pas dans les autres Edifices qui nous relient de l'Antiquité, c'eft que les modillons font placés au rebours, ôv font néanmoins un très-bel effet. L'Auteur , après quelques autres remarques fur la ftrucïure de l'Edi- fice -dont il s'agit , obîerye qu'on n'y va.cit ni Autels ni Simulacres de quoi il donne deux raifons : la première , qu'Adrien n'avoir defti- tié cette Badlique que pour y faire chanter des Hymnes en l'honneur de Plotine; & la féconde , que cet Empereur , qui ne croyoit pas que la Divinité put être reprefentée par des mains mortelles , avoit com- mandé que tous les Temples qu'rl faifoit bâtir fuffent fans Statues. Ces Hymnes au refte , à ce que conjecture notre Auteur , étoient chantées par des filles dcilinées à cet emploi. On trouve ici en deux mots l'élo- J A N V I E ge de Plotine : » Cette PrincefTe , » dit l'Auteur , avoic été l'ornement » de l'Empire & la gloire de Tra- »jan; au milieu delà pompe qui » t'environnoit , elleconferva toû- >» jours une extrême modération, & j»fa bonté pour le peuple lui fie » folliciter l'Empereur de (uppri- >»mer les impôts, lui difant que m ceux dont il avoit chargé fes fujets » cerniroient la gloire de Ion règne. La Maifon quarrée dont il s'agit eft appellée Bahlique parSpartien, & quoique le mot de Bafilique ne fignihe ordinairement qu'une Mai- fon Royale ou magnifique ; notre Auteur croit qu'on doit regarder celle-ci comme un véritable Tem- ple confacré à Plotine. Quatre cir- conftances lui paroillent dépofer en faveur de ce fentiment : la première eft une pierre qu'on trouve au pied de cet Edifice, fur laquelle on lit ces mots en caractères extrêmement longs : In Dhx Angnft dans la Théologie Paycnne , d'a- rc voir reçu les derniers honneurs » du tombeau pour pouvoir entrer » dans ces champs bien-heureux . » qui étoient fermés à tousceux qui » n'a voient pas été honorés de la fé- pukurc J A N V I E «pulture avec toutes les folemnitez » ordinaires , & c'étoit encore une » loi certaine que l'on refufoit la fé - » pulture à ceux qui mouroient dans » les eaux. Ces deux chofes ainfi préfuppo- fées , M. Aubert prétend qu'on ne doit pas être furpris que Virgile dépeigne fon Héros iî erlrayé à l'af- ped: des abîmes qui s'offrent à tous momens àfcs yeux. La raifon qu'il en donne,c'eft qu'il faut regarder ce Héros comme fe reprefentant alors f état affreux oit l'on dèpeignoit les âmes errantes fans fé pulture , tour- mentées fans ceffe par des furies & des fpeBres capables d'ébranler le Héros le plus intrépide. Mais d'où vient que le Poète in- troduifant Enée tout glacé de peur, introduit cependant Oronte dans une difpofition toute contraire ? M. Aubert répond à cela , i°. que Virgile toujours judicieux, a voulu nous taire fentir qu'un Héros elt toujours homme & que le courage n'étouffe pas abfolument la nature ; 2°. Qu'il y a des braves par fougue, lefquels font emportés hors d'eux- mêmes par un mouvement aveugle & impétueux qui ne leur permet de réfléchir ni fur ce qu'ils font ni fur les fuites heureufes ou malheureu- fes qu'ils ont à efperer ou à crain- dre. Voilà à quoi fe réduit ici la ju- ilification de Virgile. Nouslaiffons aux Lecteurs à juger & de la caufe & de l'Avocat. Quant à la féconde partie de la fuite des Remarques lut le Syftêmc de M. l'Abbé de Camps touchant l'origine de la Mailon de France , il Janvier, r; 1732; 9 faut fçavoir que les premières Re- marques qui avoient été faites fur ce Syftême , ayant été communi- quées à M. l'Abbé de Camps avant qu'elles paruffent dans le Mercure du mois de Décembre 1720. il en avoit prévenu quelques-unes par deux Ecrits qui parurent dans le Mercure du mois de Novembre de la même année, & qu'il oppofoit i une réponfe du P. Daniel, dont il avoit critiqué l'Hiftoire de France par rapport à divers points. Oeil ce qui donna lieu à la fuite de ces Re- marques , laquelle fut divifée en deux parties pour faire face aux deux Ecrits de M. l'Abbé de Camps. La publication en a été retardée par divers empêchemens ; car quoi- que la Pièce fût en état d'être join- te aux Remarques dans le même Mercure de Décembre , £c qne M. l'Abbé Buchet , Auteur alors du Mercure , 6v qui étoit faih de la Pièce, eût promis de l'inférer dans le Mercure fuivant, cène fut ce- pendant que dans celui de Février 1723. qu'on en vit la première par- tie , où l'Auteur examine fi le titre de "tres-Chrétien a été affecté dès le tems de Clovis I. aux Rois de France , privativement à tous les autres Rois Chrétiens , comme le foûtient M. l'Abbé de Camps, ou s'ils n'ont eu cet honneur que dans latroifîéme Race , comme lecroir, après le P. Daniel , l'Auteur de6 Remarques , qui prétend néan- moins contre ce dernier , que ce titre leur étoit devenu propre long- tems avant Louis XI. B io JOURNAL DES SÇAVANS; C'cft de quoi l'Auteur des Re- a vierc Juge Criminel, & quelques inarques dont il s'agit: , a apporté rlulieurs preuves, aufquclles il joint encore ici l'adrellc d'une Lettre da Cierge , dattee du 8. Septembre 1 41 ç . a Charles V I. en ces termes : Chnfttanijfimo Francomm Kegi Do- mino noftfo Supremo. Elle eu; dans le Spicilege. T. 4. p. 344. Pour ce qui elt de cette féconde Partie-ci , qui n'avoit point encore pu voir le jour , on y répond au fé- cond Ecrit de M. l'Abbé de Camps, où cet Abbé traite de l'origine des Rois de la Race prefente , ou autre- ment de l'origine de Robert-le- Fort , Bifaycul de Hugues - Capct. Nous ne rapporterons point les R e- rlexionsque renferme contre l'Ecrit dont il s'agit, cette féconde Partie , nous ne pourrions le faire fans entrer dans des détails qui nous mene- roient trop loin. Nous y renvoyons les Lecteurs. L'Extrait du Difcours Mf. de Gariel Chanoine de Montpellier, fur la guerre faite contre ceux de la R. P. R. depuis l'an 1619. jufqu'à la réduction de Montpellier & à la paix , cil un Mémoire fuccinét. de ce qui s'eft palfé dans cette guer- re. Le commencement du Mé- moire donnera une idée de tout le relte. » Les Huguenots ayant eu avis «qu'une entreprife fur Navarrins » n'avoit pas réullï , &z que les en- » trepreneurs avoient été pendus , «excitèrent une fédition à Nîmes , »la veille de Noél 1620. & bleffe- » rent quelques Catholiques qui al- »loient à h MelTc de Minuit. Cal- ai M agi ft rats de la prétendue Reli- »gion,à force de prier appaiferent m cette populace; «Le 11. Avril \6il. les portes «delà Ville de Montpellier furent «fermées aux Catholiques, & le » 2c. du même mois Ranchin » Confeiller aux Aydes étant more «les Huguenots ne voulurent pas « permettre que l'on portât fon «-corps aux Obfervantins hors 1» «Ville. Il s'étoit fait Catholique » quelque tems avant fa mort. On «l'enterra dans l'Eglife de N. D. «des Tables. Le Roi ayant pris « fous fa protection , parla Dccta- « ration du 24. Avril , ceux de 11 «Religion Prétendue Reformée, » oui n'adhéroient pas à la rebe'- « lion , les Huguenots voulurent « empêcher le Préhdial de Mont- « pellier d'enregiitrer cette déclara- » tion. «Châcillon ayant ramifie fept » mille hommes, s'avança jufqu'à » Barjac , mais il apprit que le Duc «de Montmorency étoit déjà maî- «tre de Valon. « Les Huguenots avoient acheté » quatre mille Moufquets en Flan- » dres , & le Vailleau qui devoit les «conduire à Aiguefmortes ayant » échoué à deux lieues du Port , les «Confuls d'Arles fe faifïrent de » ces armes , 6c les Huguenots , « pour s'en vanger , ravagèrent la » Campagne. « Ceux de Gignac avec quatre « cens hommes que le Miniftre Su£- « fren leur avoit amenés de Monta- «gnac , fe faifirent de la Ville Le «jour de Pâques. J A N V I •> Les Catholiques s 'étant réfugiés » dansl'EgliIe N. D. qui efc à la » portée du Canon de la Ville , fu- » rent d'abord bloqués. Un Capi- « taine de Sauve , nommé de Pife » s'étant faili de Corcone , les Hu- »> guenots l'en allèrent chafler &: » ruinèrent le lieu , &c. En voilà fufhfammenc pour ju- ger de ce Mémoire. La Diflêrtation fur les Couron- nes, qui fait le lîxiéme Article du Recueil , comprend deux Parties. Dans la première il s'agit de l'origi- ne des Couronnes anciennes; Se dans la féconde , de la forme des Couronnes modernes. L'Auteur , après plufieurs remarques fur les dirTerens ufages des Couronnes dans l'Antiquité , telles qu'étoient les Couronnes d'Olivier , de Lau- rier,de Pin, d'If , de Lierre, de Saule , de Chêne , de Mirthe , de Romarin , &c. vient à ce qui con- cerne le Diadème des Rois. Il obferve que le Diadème ne fut dans les commencemens, qu'un lar- ge ruban, ou une bande d'étoue , de couleur de pourpre , dont les deux bouts fc nolioient avec des Cordons derrière la tête. Que peut-être tout le monde en portoit , 6V que ce n'é- toit qu'une manière commode donc on fc fervoit dans les Pays chauds pour relever les cheveux , ce qui p2roît allez probable ii l'on fait re- flexion que le Diadème eft venu de l'Orient. Ces Diadèmes , fur tout ceux des Souverains, furent rehaufTés de Dia- mans & de riches Pierreries, enfuitc le-î Diadèmes turent des cercles d'or, E R," 1732: ir Les Empereurs qui s'en fervirent depuis Conftantin jufqu'j Maurice & Phocas , mirent fur ce cercle des Diamans , & le bordèrent de perles comme on le peut voir dans les fui. tes de Médailles qu'on a des Empe- reurs. Ces Diamans dont le Diadè- me étoit orné, donnoient à la tête un éclat qui la rendoit toute bril- lante ; fur quoi notre Auteurcite ces vers du 12e Livre de l'Enéide : Cui tempora circùm Aura» bis fex radii fulgentia cingunt Solis avi ipecimcn. Il obferve encore que c'eft cette lumière caufée par l'éclat des pier- reries du Diadème qui a été appel- lée Nimbus ou Çloriette. Que celtt rendoit les tètes qui étaient chargées de cet ornement , refplendijjantes comme celles des Bienheureux , fut' pofé qu'on puijfe les dépeindre corpa- reïkment. Une autre Remarque de notre Auteur, c'eft que les cercles lumi- neux qu'on a commencé à mettre fur la tète des Saints , depuis le quatriè- me ftécle , n'éteient que pour expri- mer les effets d' une lumière naturelle & réfléchie , à laquelle on donna in merveilleux pour mieux exciter à ho- norer les Saints. Il ajoute à cela que les Peintres furent les premiers à fournir cette idée rifîble de la gloî-e cchfîe ; & à cette pccafion il dit que ces Mef- fieurs , auflî-bien que les Poètes , ont toujours eu le privilège de tout entreprendre & de tout ofer : il ci- te en témoignage la mâchoire d'à- Bij 12 JOURNAL DE ne qu'ils ont mife àla main de Cain pour tuer Ton rrere , quoique l'E- criture ne dife pas de quelle manie - re ce meurtre tut fait» Les Peintres firent d'abord ce Nimbe en rond tout uni , comme on le voit en plusieurs images antiques , mais s'appercevant , dit notrcAuteur, que cette grande (im- plicite ne marquoit pas aftez la peti- te portion de gloire celefte que leur imagination avoit accordée aux Saints fur la terre , &C craignant que dans la fuite des tems on ne prit le Nimbus pour unefimple couvertu- re fervant à garantir la tête des ima- ges contre les injures de l'air , ce qui eft arrivé en effet , ainfi qu'il eft rapporté dans les Mé- moires de l'Académie des Inf- criptions , ils s'aviferentde donner au Nimbe un éclat plus rcfTcmblant à une véritable lumière , cv pour cela ils le firent en foleil radié. Ce font ces rayons relevés &c ramaffés en rond , qui ont hit inventer la Couronne radiale , ou à longs rayons qui eft la plus ancienne cfpe- ce de Couronne métallique , & qui a été long-tems en ufage avant les Couronnes à fleurons. Ce cercle lumineux &c plat , continue notre Auteur, étant deve- nu la marque des images des Saints, Se ce qui diftinguoit leurs Statues d'avec celles qu'on érigeoit aux hommes , les Empereurs depuis Juftinien - Rhinotmet , le quittè- rent par refpedt, & fe contentèrent de cercles ornés de pierreries à l'an- tique, ou de Couronnes radiales à longues pointes, comme l'on vient de dire. S SÇAVANS; Mais leur dignité impériale les élevant au-dcilus des Rois qui a voient auili-bien qu'eux l'ufage des Couronnes ouvertes , les Em- pereurs fermèrent les leurs avec des demi cercles ou arcs qui fe croi- foient & imitoient le bonnet ; ces demi cercles étoient furmontés d'un Globe avec une petite croix , ce qui déterminoit la Couronne Impériale. Notre Auteur renvoyé pour la preuve de tout cela , aux Médailles que M. Ducar.gc a mifes dansfon Hiftoire Bizantine. Voilà pour ce qui regarde la pre- mière Partie de la Dillertation. Quant à la féconde , où il s'agit des Couronnes modernes , comme le même M. Ducange , dans fa 24e Dillertation fur l'Hiftoire de Saint Louis , a fait graver des modèles de toutes les fortes de Couronnes qui ont été portées jufqu'à prefent , no- tre Auteur fe trouve difpenfé de s'étendre beaucoup là-deflus. Il taie feulement obferver à fes Lecteurs que les Rois de France de la pre- mière eV de la féconde Race3porte- rent des Diadèmes, des Couronnes radiées , & des Couronnes à fleu- rons : Que dans ces dernières il n'y avoit que quatre grands fleurons qui entouroient la Couronne Se garnilToicnt le deflus du cercle , ainfi qu'on le voit dans la Couron- ne de Charlemagne , qui eft au Treior S. Denis & qu'on porte à Reims pour le Sacre des Rois. Notre même Auteur croit que ces fleurons à trois pointes , qui n'é- toient que des ornemens agréables que le hazard avoit fait imaginer J A N V I pour embellir les Couronnes, pour- roienr bien avoir donné origine aux fleurs de lys qui font les Armoiries, de France» Nous ne fuivrons pas notre Auteur plus loin. Au refte, il ne fe borne pas à ce qui concerne les Couronnes des Empereurs & desRois, il parle aufiî desCouronnes deDuc,dc Comte,de Marquis, de Baron, & il finit par la Couronne à bonnet } qui eft la plus nouvelle de toutes. Il obferve fur cela que plufieurs Mailons Ducales, comme la Tremouille , Luxem- bourg , Montmorency , Cofte-Brif- fac, qui prétendent avoir quelques avantages fur les autres Ducs , par des prétentions de principauté étrangère , ou reprefentations de Maifons Souveraines, mettent leurs Couronnes fur un bonnet rouge fomme d'une houpe de même, ce qui forme une forte de Couronne fermée approchante du bonnet électoral. Les Obfervations fur le Dieu Telefpkore tendent à juftifier M. de Mautour fur l'explication qu'il a donnée d'un morceau d'ancienne peinture à fraifque , détaché de la trife d'une Salle fouterraine décou- verte au Mont Efquilin dans Ro- me , lequel morceau a été apporté à Paris en 1722. L'Auteur des Obfervations dit avoir lu dans le Journal des Sçavans du mois de Novembre 1729. p.645. i'tf-40. l'Extrait de l'explication qu'a donnée de cette peinture M. de Mautour qui a jugé que le morceau en queftion avoit rapport à Efcula- pe , & qu'à l'égard d'une petite fi- E R , 1 73 2: 13 gure qui eft reprefentée en robe longue , ce pouvoit bien être Telef- phore. L'Auteur remarque à ce fujet que dans l'Extrait dont il s'agit, l'on dit que M. de Mautour voudrait bien faire de Cette figure , Thélefpbo- refils d'Efculape , mais que le Capu- chon pièce effemielle du Manteau de Thèlefpbore lui manque. Il dit fur cela i°. que le Journaliften'auroit pas du faire dire à M. de Mautour que Thelelphore étoit fils d'Efcula- pe , puifqu'il n'en étoit que le Com- pagnon ; 20. Que le défaut de Ca- puchon eft fuppléé Se reparé par le delTein d'une petite figure ou ftatue de bronze antique que les Latins appellent fignum , & que lui, Au- teur de ces Obfervations , a vu en original à Paris , » laquelle figure »j reprefente indubitablement Thé- »lelphoreavec un Capuchon , non » fur la tête , comme il eft en effet «•fouvent reprefente , mais rabattu » par derrière. Cette figure , dit-on , a été trouvée dans une Ville de l'Aile- Mineure, Se a fait partie des Cu- riofitez du Cabinet de feu M. le Chevalier de Breteuil , qui l'avoic acquife du Sieur Paul-Lucas. Notre Auteur ajoute plufieurs autres Obfervations pour juftifier M. de Mautour. Nous y ren- voyons. Quant à la Lettre fur un Partage de S Bafile touchant la pro- cefliondu S. Efprit, c'eft une Let- tre écrite au fujet d'une Dirtertation Latine que le Benedidtin qui a con- tinué & achevé la nouvelle Edition 14 JOURNAL D de S. Bafile a approuvée, car il fc rend aux conclurions de la Diuerta- cion. Mais comme il n'en ap- prouve pas également toutes les rai- ions, il avertit de quelques endroits qui lui ont paru toibles , & ce* en- droits étant preique les mêmes que ceux qui ont arrêté les Journaliltes de Trévoux dans leurs Mémoires de Décembre iyir. p. 2508. L'on dit qu'on a cru faire plailîr au Pu- blic de lui communiquer cette Let- tre , où l'Auteur , en répondant aux diffkultez propoféeS , fait de nouvelles reflexions qui ne fervent pas peu à éclaircir &: à confirmer le fentimcnt qu'il défend. Au refte , comme ce lentiment cft futnfam- ment connu du Public par la DilTer- tationdontil s'agit, il cil inutile de Texpofer ici. Quant aux raifons qu'on employé dans la Lettre pour lefoùtenir, nous ne pourrions les produire ici fans nous trop étendre. La Lettre d'Innocent VI. qui fait la neuvième Pièce du Recueil , ellune Lettre Latine , copiée fur le Mf. original , laquelle roule fur un fait bizarre arrivé l'an 1 3X1. dont il n'eu: parlé dans aucun Monument Hiftorique decetems-là, & dont le P. Daniel tait mention dans l'Hi- ftoire du Roi Jean II. la Lettre eft écrite à Louis & à Jeanne , Roi Se Reine de Sicile. Voici le tait com- me il fc trouve dans la Lettre. In capta cujufdam Johannis cg- gnominati Guja Civis Seticn. Temc- raria (jtiaiam Afcendit opinio , ejttfaue mentem aieo novi n'eût jamais fouhaicé. Un mal à »la cuille droite 1 obligea de dif- «• continuer les occupations Acade- » miques , & de fe tenir oifif chez n lui pendant des journées entières, »> comme un SaYcuer boiteux , ve- J A N V I *lut claudum Sutorem. Ne tournez » pas malignement cette comparai- » (on contre M. Burman : ce n'eft « qu'une fçavante allufion à ceSa- » vetier-Medecin dontlaCharlata- »> nerie , au rapport de Phèdre , fuc >> grolîierement déconcertée M Bur- i>man condamné à une folitude n domeftique , cliarmoit fes dou- » leurs par la lecture de Phèdre , de n empechoit aind que fon efprit, >»qui, au milieu de fon mal con- » fervoit la vigueur, ne s'émouifât » Se ne contractât une certaine » rouille. Cloué à fon fauteuil ou à n (on lit de repos } débaucha dans » l'efpace de trois mois le Com- » mentaire dont il a orné fon Phé- » dre. Il le retoucha dès que la » playe qui commençoit à fe refer- » mer , lui permit de fe traîner » dans- (on Cabinet. Heureufe ma- » ladic qui nous a produit un il ex- wcellent Ouvrage ! Ne croyez pas » que ce foit là un conte à plailir , >> je n'ai fait que traduire laconique- »mentceque M. Burman raconte » avec une abondante énergie. n Quoique cet Ecrivain , conti- » nue l'Auteur delà Lettre , rabaif- î> fe les autres Commentateurs , il une s'eft point éloigné de leur goût » & de leurs idées. Toute fon ha- »bileté confifte à inférer dans fes n Notes , à leur exemple , difteren- » tes leçons , & à coudre quelques » partages anciens Grecs ou Latins ; » en forte que lui feul peut apperce- » voir cette fupériorité qu'il s'attri- » bue fur les autres Commenta- >> teurs. Nous joindrons à cet exemple ce E R ; i 7 5 a*1 1 y que notre Auteur dit de M. Bur- man au fujet de la Fable des Ara- balTadeursdes Chiens. n Je ne puis m'em pêcher , dit-il y » de citer un trait qui montre juf- » qu'à quel point M. Burman pof- » fede l'astronomie animale. Vous » fçavez que dans la Fable des Am- i> bafladeurs des Chiens , Jupiter » ordonne que ceux qui ont parfu- » mé fon Palais foient punis par la » faim , afin qu'ils apprennent une » autrefois à retenir leur ventre. M. m Burman applaudit à cette déci- » fion. Voici une partie de fa Note. » Les Chiens affamés & à jeu» re- » tiennent facilement leur ventre } & » certes nous voyons fouvent des m Chiens cjui font de grands efforts n pour fe fonlager. Farnelici & fjuni » facile continent ventrem \ & fane » videmus fapè Canes difficulter ç*r » cum mole ft ià & maximo nifu cacA- n re. Voilà pour le coup une de- » couverte merveilleufc , on en n chercheroit inutilement une fem- » blable clans les Ecrits des Capero- » nicis, desleClercs,dcsDaciers,(Sc » de tant d'autres Commentateurs- n Subalterne; ; il n'appartient qu'au » docle Burman de faire de lî no- » blés remarques. Ces deux exemples fuffifentpour faire juger desdifpolltionsde l'Au- teur de la Lettre à l'égard de Mo Burman. Il nous refte à dire un mot des Tables qu'on a mifes à la fin de ce dixième Tome ■■, la première eft une Lifte alphabétique des Pièces con- tenues dans les Tomes précedens & dans ce dernier ; la féconde , eff i<5 JOURNAL DES SÇAVANS; une Lifte des Titres de ces mêmes avec une grande exactitude , on Pièces , ranges par ordre des Scien- peut les regarder comme l'ame des ces. Ces deux Tables font faites dix Volumes dont il s'agit. HISTOIRE DE LA GUERRE DES HUS SITES ET DV Concile de Bafle. Par Jacques Lenfant : enrichie de portraits. A Utrccht 3 chez Corneille-Guillaume le Febvrc. 1-3 1. m-^°. 2. vol. premier vol. pp. 484. fécond vol. pp. 387. AP R E' S avoir rendu compte dans le Journal de Décembre de l'année 1731- de l'Hiftoirc de la Guerre des Hulïites , nous nous fommes engages à rendre un com- pte particulier de la Diffcrtationdc M. de Beaufobre fur les Adamites de Bohême. Voici ce qui lui a don- né lieu de compofer cette DiiTerta- îion. M. de Beaufobre s'étant propofé d'écrire les Préliminaires de la pré- tendue reformation , a mis au nom- bre des prédeceffeurs des Calvini- ftes les frères unis de Boherne ; mais comme les Catholiques & les Cal- lixtins publièrent fous le règne de George de Podiebrad, que les frè- res de Bohême étoient unis avec la Secte des Picards qu'on aceufoit d'être du nombre des Adamites , il crut devoir difeuter cette queftion dans une DifTertarion qu'il adrclTa à M. Lenfant. M. de Beaufobre y rapporte d'abord ce que les Hifto- riensdifent des Picards ou des Ada- mites de Bohême , il foûtient en- fuite que la nudité Rcligicufe dont on les aceufe ett une fable ; il re- cherche ce qui peut avoir fervi de prétexte à cette aceufation. Puis remontant jufqu'à la fourec , il foû- tient qu'il n'y a jamais eu de Sc&e parmi les Chrétiens où l'on ait fait profellîon de nudité. Enfin il tait quelques obfervations fur une Note du Dictionnaire Critique, où M. Bayle donne aux Payens la préfé- rence au fujet de la pudeur fur plu- sieurs Sectes du Chriftianifme. Enée-Sylvius depuis Pape fous le nom de Pie II. eft le premier des Hiftoriens qui ait parlé des Picards de Bohême. Il dit que leur chef fe difoit le fils de Dieu, & qu'il fc fai- foit appeller Adam èV fes Sectateurs Adamites , qu'il leur commandoic d'aller nuds , que leurs femmes étoient communes , 6v que les hom- mes le faihlfoicnt de la première qui leur plaifoir. Quoique Sylvius ait été en Bohê- me en 145 1. pour les affaires de Nicolas V. & qu'il ait pu s'inftrui- re plus particulièrement des opi- nions des Picards. Notre Auteur croit qu'on ne doit point ajouter beaucoup de foi à cette Relation , parce que Sylvius n'a travaillé à fon Hiftoire de Bohême que fur les Mémoires d'un Chancelier de la Ville de Prague , & qu'il avoiie lui- même qu'il ne fait que raconter ce que d'autres ont dit , & qu'il écrit bien des chofes qu'il ne croit pas. Aliorum d\tta recinfeo, &plurafcrifo au dm J A N V I E tj uam credo.'Noxxz Auteur ajoute que JeanCratonMedecin de l'Empereur Maximilien II. a parlé de l'Ouvra- ge de Sylvius comme d'un amas d'opinions populaires , ôc que le témoignage de Sylvius lui eft très— fufpeèt en matière d'héréfie. Mathias de Mechow dit à peu près les mêmes chofes des Picards qu'Enée-Sylvius , mais Schlecta qui entre dans un grand détail au fujet des erreurs des Picards.ne dit point que leur Chef fe foit vanté d'être \c fils de Dieu , qu'il ait introduit la Communauté des femmes, qu'il ait ordonné à fes Sectateurs d'aller nuds. Dubravius parle de la nudité des Picards ; mais il ne s'accorde point avec Sylvius, furlaraifon pour laquelle il prétend qu'Us alloient nuds. Sylvius dit que c'eft pour marquer leur liberté , 8c Dubra- vius foûtient que c'étoit parce qu'ils prétendaient qu'étant dans un état de perfection ils dévoient vivre comme Adam & Eve ont vécu tint qu'ils ont été dans l'innocence. Théobalde ancien Auteur Luthé- rien qui aceufe les Picards des cri- mes qui font le plus d'horreur , ne dit point qu'ils allaflent nuds, mais feulement qu'ils foûtenoient qu'on pourroit fe pafferde vêtemens , fi le froid le permettoit , & qu'il étoit indiffèrent d'aller nud ou vêtu. Mais le Jefuite Balbinus reprend Théobalde d'avoir confondu les Picards avec les Adamites ; d'où il s'enfuit que fuivant ce Jefuite , les Picards n'étoient point Adamites. Or Balbinus qui paroît par tout fort irrité contre les Picards , ne les Janvier. R » i 7 J2; 17 auroit pas retranché du nombre des Adamites, s'il n'a voit point eu de bonnes preuves de ce qu'il avan- çoit. Mais quels étoient donc ces Adamites que Balbinus paroît fup- pofer avoir été répandus en Bohême dans le quinzième liécle? Il n'y en a voit aucuns, répond notre Auteur, parce que tous ceux qui parlent de ces Adamites, difent qu'ils étoient Picards , Se que Balbinus eft obligé de convenir que les Picards n'é- toient point Adamites. Suivant les Hiftoriens de Bohê- me , les Picards commencèrent à tenir des affemblées à Pragues dès 141 8. cependant ils n'y furent dé- couverts & dillîpés qu'à la fin de l'année 1410. ils nefaifoient donc pas profefllon , dit notre Auteur , de la nudité dont on les aceufe. 1". Laurent de Bizin , Chancelier de la nouvelle Prague fous Wen- ceflas , dit dans un Journal Mf. de la Guerre des Huflltes , que Martin de Moravct , qui étoit un des principaux Prêtres des Picards t étoit du nombre des Prêtres Tabo- rites qui nioient la prefence réelle de J. C. dans l'Euchariftic. Les Picards étoient donc Taborites , s'ils étoient Taborites , ils n'étoient point Adamites. Car les Taborites n'ont point été aceufés d'aller nuds. 30. Martin de Moravet furnommé Etocjuis , parce qu'il prêchoit avec éloquence , fut jette dans un Ton- neau de pojx ardente par ordre de Conrad Archevêque de Prague , parce qu'il foûtenoit que le Corps de J. C. n'eft qu'au Ciel ; on n'au- roit point manqué .d'y ajouter qu'il ,8 JOURNAL DE autorifoit l'incclte & la nudité, dit M. de Bcaufobrc , s'il avoir prêché ces cj es qu'on attribue aux Picards. 40. Les Etats de Bohê- me voulant exclure Sigilmond en 1421. de la fucccllîon à la Couron- ne , l'accufercnt d'avoir diffamé le Royaume de Bohême, en publiant que des percs avoient commerce avec leurs tilles , des mercs avec leurs rîls , cv que les Bohèmes y commetroiententr'eux des abomi- nations de Sodome > fi les Picards qui croient alors dans la Bohême avoient autorilé ces abominations les Bohémiens n'auroient pas nié ces faits abfolument. Ils auroient avoué qu'il s'étoit introduit en Bohême une Secte qui commettoit ces infa- mies , mais qu'ils la pourfuivoient partout à feu & à fang. Nous lailîons aux Lecteurs judi- cieux à examiner fi ces raifons lufri- fent pour juftiiier les Picards au fu- jet de la nudité , nous obferverons cependant qu'il paroît très-difficile de concilier ce que dit l'Auteur que les Picards de Bohême étoient des Taborites , avec la manière dont Zifca Chef des Taborites pourfui- vit les Picards. Sans nous arrêter plus long-tems fur cet article nous palTerons à la féconde partie de la Dillcrration qui regarde les anciens A da mites. On aceufe les Gnoftiques d'avoir tténuds, quand ils faifoient leurs prières. Mais ce taie n'eft appuyé que fur le témoignage de S. Epi— phane , que M. de Bcauiobrc rc- prefente après M. Dupin , comme un Ecrivain fort crédule & fort peu S SÇAVANS, exact. S. C*e"ment d'Alexandrie n'aceufe point les Gnoftiques de prier tout nuds , & Plottn qui avoit eu beaucoup de commerce avec eux à Alexandrie , & qui a écrit contre eux , ne leur reproche point cette nudité cynique. Après ce que notre Auteur a clic de S. Epiphane , on voie bien qu'il n'admettra point une Secte particu- lière d'Adamitcs , dont S. Epipha- ne avoue qu'il ne parle que par oui dire , fans fçavoir même il cet- te Secte a exifté telle qu'on la lui a décrite. Sulpice-Severe dit que Prifcillien fe trouva convaincu de maléfices, qu'il reconnut qu'il avoit enfeigné des Doctrines ob.'ccnes , qu'il avoic tenu des allemblées nocturnes avec des femmes impudiques, 6V: qu'il avoit accoutumé de prier nud avec elles. Ce témoignage d'un Auteur contemporain paroîr bien tort. Ce- pendant il n'embarrade pas M. de Beaufobre , & il répond que Sulpi- cc-Scvere éroit un Auteur fort cré- dule , que fuivant Sulpice-Severe même, les témoins entendus contre lui étoient des perfonnes viles qui avoient été du nombre de fes Dif- ciplcs , que la force des tourmens a pu faire avoiier à Prifcillien & à d'autres Prilcillianites des crimes qu'ils n'avoienr point commis Sul- picc-Severe fait un portrait très- défavantageux des Itacicns & des Evcques des Gaules qui fe joigni- rent à eux contre Prifcillien. 11 ac- eufe Maxime d'avoir refufé d'ac- corder la grâce aux Prifcillianites, parce que ce Prince en vouloit à JANVI leur bien. De ces réflexions & de quelques autres M. de Beaufobre conclut , non que Prifcillien ne foîirint aucune erreur, mais qu'il n'étoit point coupable , non plus que les Prifcillianites des infamies qu'on leur imputoit. De là notre Auteur vient au on- zième & au douzième fiécle, où il trouve les Béguins, les Beguards &c les Turlupins; qu'on aaccuféd'au- torifer les crimes les plus énormes Se la nudité. Mais notre Auteur prétend qu'on ne peut rapporter des preuves fohdes de ces faits , & que ce qu'on en a publié ne vient que de la liberté que fe font donnés cer- tains Ecrivains , d'attribuer toute forte de defordres à ceux qui font ac- eufés d'héréiîe. Pour lui il ne recon- noît dans les Béguins que ceux d'en- tre les Religieux du Tiers-Ordre de S. François qui s élevèrent contre la décifion de Jean XXII. au fujet de l'interprétation de leur Règle fur le vœu de pauvreté , 8c il ne voit dans les Begatds 5c dans les Turlu- pins, que des Vaudois, qui avoient difFerens noms , fuivant les Pays qu'ils habitoient , 8c qui , félon lui, n'ontjamais été convaincus d'avoir autorifé les infamies & la nudité qu'on reproche aux Picards. Une partie de ces Vaudois s'é- toient retirés dans la Bohême fur la fin du douzième fiécle , & on avoit publié en ce tems-là qu'il étoit ve- nu en Bohême deux Démons revê- tus d'une forme humaine , qui prê- choient , difoit-on alors , que ceux qui alloient tous nuds à l'exemple d'Adam & d'Eve faifoient fort E R. , i 7 ? 2: ip bien. M. de Beaufobre eirperfuadc que ces aceufations contre les Vau- dois étoient de pures calomnies &C qu'on les renouvella , lorfque les Vaudois qui s'étoient tenus long- rems cachés dans la Bohême , repa- rurent fous le nom de Picards , en 1421. & 1412. Un des avantages que M. de Beaufobre croit qu'on peut retirer de fa Differtation eit de prouver la fa une té de la remarque de M. Bay- le dans fon Dictionnaire Critique fur le mot Turlupin , où ce Critique prétend que les Chrétiens fe font fouvent plus déréglés fur la nudité que les Payens , & qu'on ne s'en étonnera point Ci on fait reflexion fur un principe inconnu auxPayens, que le fécond Adam eu: venu repa- rer le mal que le premier avoit fait. M. de Beaufobre allure par rapport à la première partie de cette propo- fition , que s'il avoit bien réfléchi fur ce que differens Auteurs ont die des Hérétiques Adamites , il n'au- roit point ajouté foi à leur narra- tion , ou du moins qu'il auroit re- connu qu'il n'y avoit point de fujet fur lequel le Pyrronifmc Hiftorique dont il faifoit profelfion l'obligeât plus de fufpendre fon jugement que îur celui-ci. Notre Auteur renvoyé enfuite au 56e Difcours d'Alexan- dre , ab Alexmd/o, pour faire con- noître que quand il y auroit eu une Secte de véritables Adamites dans lcChriitianifme , elle n'auroit pas poufle l'infamie fi loin que l'ont fait les Payens , qui y étoient autorifés & par leur Religion & par leurs Philofophes.Al'égard de la fteonde Cij ao JOURNAL DE PropofuiondeM.Bayle norrcAuteur la regarde comme un rafincmenc fur l'abus d'un principe de l'Evan- gile qui feroir difficilement tombé dans un autre efprit , une faillie qui lui cft échappée , mais qu'il feroit à fouhaiter qu'il l'eût retenue autant pour fon propre honneur que pour celui de la Religion Chrétienne. 3> La réputation de cet Auteur , dit 3> M. de Beaufobrc , & le plaifir 3) amufant auffi-bien qu'inftrudHf j> qu'on trouve à lire fes Ouvrages , » les rend un peu dangereux pour 3> certains efprits , qui ne chargent 3> gueres leur mémoire que des en- » droits qui favorifent leurs préju- 3) gez , ou leur peu d'amour pour le » Chriftianifme. S SÇAVANS, L'Auteur fait dans cette Differ- tation quelques digreffions ; nous ne nous arrêterons qu'à celle qui re- garde l'origine du nom des Turlu- pins. 11 remarque après un ancien Auteur qu'en Flandres Se en Artois on dit depuis long-tems en prover- be , /'/ eft des enfaris de Turlupin , malheureux de nature , apparem- ment parce qu'un nommé Turlu- pin aura eu des enfans qui feronc peris malheurcufement. Notre Au- teur conclut de-là que les Vaudois ont été appelles Turlupins en Flan- dres , parce qu'ils y étoientles plin miferablcs de tous les hommes , puifqu'on les y brûloit & qu'on les y enterroit tous vi£s. HISTOIRE DE UISLE ESPAGNOLE OU D E S. Tiomingae , écrite particulièrement fur des Mémoires Manufcrits du P. pean-Baptifle le Pers , Jefuite y Âiiffionnaire a S. Domingue , & fur les Pièces originales , qui fe conservent au Dépôt de la Marine. Parle P. Pierre- François-Xavier deCharlevoix , de la Compagnie defjefus» A Paris, chez Hippolite-Lotiis Guerin , Libraire , rue S. Jacques; & Jacques Guerin, Libraire-Imprimeur, Quai des Auguftins. 1730* i»-4°. a. vol. Tom. I. pp. 481. Tom. IL pp. $06. fans les Tables. Planch. & Cart. detach. xvm. DEUX fources principales ont fourni au R. P. de Charle- voix le fonds de cet Ouvrage ; i°. Les Mémoires de fon ami le P. le Pers , Jefuite établi depuis 25 ans à S. Domingue en qualité de Millionnaire , & par-là d'autant plus à portée de s'inftruire exacte- ment fur les affaires de cette impor- tante Colonie : 20. Les Pièces ori- ginales confervées au dépôt de la Marine , &: qui font de deux cfpe- ces , i°. Les Plans & les Mémoires qui y font relatifs ; 20. Toutes les Lettres de nos Rois , des Minlftres, des Gouverneurs , des Intendans Se autres peifonnesen place ; les Re- lations , les Instructions , les Procès Verbaux , &c. qui ont rapport à ce Département. De pareils fecours n'ont pas cependant applani à l'Au- reur toutes les difficultcz fur les deux parties qui compofent cette Hiftoire. Il a fallu fur la premicce J A N V I E vérifier plufieurs faits en confultant les Hilloriens originaux pour y puifer les éclairciflemens necefTai- res. Quant à la féconde partie , fur laquelle on n'a publié jufqu'ici que quelques morceaux détachés, fu- pcrficiels & de peu d'autorité ; comme il s'y trouvoit plufieurs vui- des à remplir , pour lier la plupart des évenemens, & fatisfaire pleine- ment lacuriofité du public , l'Au- teur a eu recours aux lumières que pouvoit fur cela lui communi- quer le dépôt de la Marine. Mais de quelle patience n'a-t-il pas eu be- foin ; quel ennui & quelles fatigues n'a-t-il pas etfuyées pour tirer parti d'un Trétor , où malgré le bel or- dre qui y règne, on eft contraint de parcourir quantité de Pièces in- utiles , avant que de rencontrer celles que l'on cherche ? Il n'y a qu'un grand amour de la vérité , qui puille foûtenir un Ecrivain dans des défaillions ii épineufes. Ce II donc à cette exacle vérité qui fe fait fentir par tout dans cet Ouvrage , jointe aux agrémens d'une narration intereflante , bien fuivie & accom- pagnée de folides réflexions, que le P. de Charlevoix eft principale- ment redevable du furcès de cette Hilloire également curieufe & in- ilnxftive. ■ Des deux Parties qui la compo- fent & qui en forment les deux Volumes, la première partagée en fix Livres , conduit l'Hiftoire de S. Domingue depuis fa découverte par les Efpagnols en 1492. jufqu'à l'entier déperiffemenr de cette Co- lonie pour fes premiers Fondateurs R , r 7 52. 2,1 en 1606. La féconde commence au premier établifîement des François dans les Ifles Antilles en i6z$. Se raconte tout ce qui les a concernés dans celle de S. Domingue , juf- qu'en 1714. LIfRE J. L'Auteur, avant que d'entrer en matière , s'attache à nous décrire fommairement le Pays qui doit fervir de Théâtre aux divers évenemens dont il veut nous informer. Dans cette vue' , il nous parle d'abord des Ifles Antilles en gênerai , limées dans la mer du Nord entre les 8 &2} degrez de la- titude , & entre les 293 & Ji^de longitude ; divifées en grandes Se en petites , & qui toutes enfemblc forment le plus nombreux Archi- pel qui foit connu dans l'Océan. Les grandes réduites au nombre de cinq, font la Trinité, S. Jean de Portoric , l'Efpagnole ou S. Do- mingue , nommée Hayti avant la découverte , Cuba & la Jamaïque. Sans nous arrêter fur les différentes étymologies du mot Amille , allé- guées par divers Auteurs , venons à ce qui regarde en particulier l'Ifle de S. Domingue. Elle eft placée au centre de toutes les autres, com- me pour leur donner la loi, à 20 degrez deux ou trois minutes d'élé- vation du pôle ; ayant environ 60 lieues de l'Eft à l'Oiieil , 30 du Nord au Sud , dans fa largeur moyenne, $00 de circuit, ou 600 , en faifant le tour des anfes. Après quelques obfervations gé- nérales fur les Côtes de cette Ifle , fur les Marées , fur les vents qui y régnent , & dont le plus remarqua.- 22 JOURNAL D ble cfl: la TS'ife ou le vont réglé q>u fount- enrre ks Tropiques & qu'on nomme AUJe ( dit l'Auteur ) du vieux mot François Alis , uni , n'y ayant aucun vent qui fouftlc plus uniment que cclui-la ; après d'au- tres remarques lur les pluves abon- dantes qui rafraîchiffent l'air, fur les diverfes températures de celui- ci, d'où naît la aiverlitc des climats; fur les caufes de la fraîcheur èv de la clarté des nuits , fur celles des ro- fées & des brouillards , fur la varie- té des Saifons : le P. de Charlcvoix parle de la dirlcrcnce des Terroirs , de la manière dont les arbres y jet- tent leurs racines ; du nombre pro- digieux de rivières , de torrens èv de ruiffeaux dont le Pays efl arrofe , &c qui va(dit-on)à plus de trente mille; des lacs , des mines d'or , d'argent , & de cuivre, des Carrières de diffè- res fortes de marbre &c de pierre ; des tempêtes connues fous le nom d'Ouragans qui agitent rarement ces mers alfcz tranquilles , mais qui biffent les plus trilles effets de leur rureur. L'Auteur particularife après cela ce qui regarde les Poif- fons, les Oifeaux , les Infectes Se les Quadrupèdes de cette Ifle. Quanc aux plantes, il en renvoyé le détail à une Hiftoire naturelle de S. Do- mingue , à laquelle on travaille ac- tuellement Se qui doit fuivre de près celle-ci. Le P. de Charlevoix paffe de-là aux lubitans de S. Domingue , &c il nous entretient de leur nombre , de leur figure , de leur complexion & de leur caractère. A l'arrivée des Efpagnols, il y avoic dans Plfle au ES SÇAVANS, moins quinze cens mille ames. Ces Inlulaires croient communément d'une taille médiocre , mais bien proportionnée ; avant la peau rou- gearre , le teint tort bazané , les traits du vifage hideux & grolïîers , les narines tort ouvertes, les che- veux longs, fans nul autre poil lur tout le refte du corps , très-peu de front , les dents fales autres beaucoup d'or que les Efpa- gnols payèrent des plus viles mar- chandées , telles que des pots de terre caflés , des tragmens de verre ou de fayance Se autres bagatelles fcmblables. La perte imprévue que fit alors Colomb de fa Capitanequi fe brifa contre un écueil , le déter- mina à bâtir dans le lieu où il fe trouvoit, une Forterelîe fous le nom de Puerto - Real ; où il lailfa 3 S hommes -, après quoi ayant appris des nouvelles de fon Vaifleau égaré, qui le rejoignit enfin , il découvrir, toute la Côte Septentrionale de l'ifle, Se le 16e de Janvier i4j3.il fit route pour l'Efpagne. Il effuya dans cette traverfée deux tempêtes violentes , dont la première le pouffa aux Ifles Açorres , où il fail- lit à être arrêté ; Se la féconde le jet- ta fur les Côtes de Portugal Se le fit entrer contre fa volonté dans la ri- vière de Lisbonne. Le Roi de Por- tugal, malgré le dépit fecret d'a- voir méprifé les offres de cet illuftre Voyageur, le reçût avec des hon- neurs extraordinaires , & témoigna une extrême horreur pour la propo- rtion qu'on lui fit de permettre qu'on poignardât cet étranger. Ce- lui-ci remit à la voile pour l'Efpa- gne , Se arriva au Port de Palos, d'où il étoit forti fept mois & dou- ze jours auparavant , ayant fait en fi peu de tems le plus grand voyage qui de mémoire d'homme , eue été entrepris en pleine mer. Il reçut à la defeente de fon Vaifleau les mêmes honneurs qu'oa auroit faits au Roi ; les boutiques furent fermées , Se les cloches fon« D a et JOURNAL DE ncrcnf. De Palos il fc rendit à Se- \ille , où il reçut une Lettre de leurs AlteiTcs ( car c'eft ainiî qu'on traitoit alors les Rois Catholiques ) Se de Scvillc il vint à Barcelonr.e , où croit la Cour , Se où il arriva vers le milieu d'Avril. Ce voyage fut pour lui un continuel triomphe. On fortoit au - devant de lui de toutes les Villes par où il devoie pafler[ditl'Hiftorien} 5c on ne fe lalToit point de regarder cet hom- me rare , qui par des routes incon- nues à toute l'Antiquité , avoit fçu trouver un Monde nouveau. Rien ne reprellntoit mieux le triomphe des anciens Romains que fon entrée dans Barcelonne. 11 fut conduit à l'audience des Rois Catholiques , qui l'attendoient au-dehors du Pa- lais, revêtus des Habits Royaux, fous un Dais magnifique , le Prince d'Efpagne à leur côté , le Caci- que vient à S.Domingue où il figue le Trafié qui n'avoit été figné que par fes Députés; il eft déclaré Prin- ce héréditaire du lieu où il s'établi- roit , exemt de Tribut , de obligé au feul hommage envers l'Empe- reur & fes Succeffeurs de Caftille. Nous ne fçaurions entrer dans le détail des autres évenemens , dont les plus remarquables font 1 °. le re- tour de l'Amiral aux Indes ck celui de las Cafas , dont l'expédition eft 5 SÇAVANS; fuivie du plus mauvais fuccès ; :°. La multiplication des Nègres ■.lins l'Ifle Efpagnok s leur révolte, leur débite .S; leur punition: 3°.Les entreprifes de Balboa, qui découvre la Mer du Sud :4e. Lcscruautezdu Gouverneur de la Province du Da- rien , lequel ravage & défoie 500 lieué's d'un Pays très-peuplé, le plus beau &c le plus riche que l'on pût voir : 5". L'affociation entre Pizar- re , Almagre & Fcrnand de Lu- ques pour la conquête du Pérou : 6°. La mort de l'Amiral D. Dicgue- Colomb , &: fa place remplie par fon fils D. Louis : y". L'audience Royale établie au Mexique en 1 5 2.—. Se celle de S. Domingue bornée aux grandes Antilles : $°. La Pro- vince de Venezuela cédée par l'Em - pereur aux- Allemands , qui après l'avoir piiléCjl'abandonaent.: ^°.San- Domingo érigée en Métropole , prife éc pillée par les Anglois ; Id°. Le commerce avec les étran- gers défendu aux habitans de L'Ifle . 6 fon déperiO'cment total , &c. Nous renvoyons à un autre Jour- nal l'Extrait du fécond Volume de cet Ouvrage. DISSERTATIONES MED1CO - CHIRURGIE , JUXTA circulationis leges. Auctore Hugone Gourraigne , Dodtore Medicc , & in Monfpelicnfium Medicorum Academiâ Vice-Proreffore. Monf- pelù , apud Joannem Martel. 173 1. C'eft-à-dire: Differtations Mèdito~ Chïrurgicjues , fiiivant les loix de la circulation. Par M. Gourraigne. A Montpellier. 1731. Brochure /»-8°. pp. 41. CES Differtations font au nombre de deux. L'Auteur commence la première par un pe- tit Préambule fur les tumeurs en gênerai qu'il divife en naturelles , non naturelles , & contre nature. Il J A N V I E appelle Tumeur3toutcéminence du corps.Qiiand cette éminence appar- cient à la compoiuion du corps , comme le nez, c'eft une tumeur naturelle : Quand elle n'eft pas de la conltitution du corps , comme l'éminence du ventre dans les te m- mes grofles , en celle des mammel- les dans les Nourrices, c'eft une tumeur non naturelle , & quand file eft étrangère au corps, de ma- nière qu'elle en dérange conhdera- blementles fondions., c'eft une tu- meur contre nature. C'eft de cette dernière que l'Au- teur parle dans fa Dillertation , & elle eft de trois fortes par rapport à la caufe matérielle , car elle cft fai- te ou d'humeurs,ou de vents, ou de parties. M. Gourraigne ne traite ici que des tumeurs humorales. Dans le premier Chapitre il parle de leur nature &C de leurs différences: Dans le fécond , de leurs caufes , qui font ou prochaines , ou antécéden- tes , ou internes ou externes , & qui fe fubdivifent en beaucoup d'au- tres : Dans le troihéme , de leurs fi- "gnes diagnostics & prognoftics , de leur refolution &c de leur fuppura- tion ; Dans le quatrième , de leur cure : Dans le cinquième , des abf- eès & de leur ouverture. La féconde Diflertation com- prend fix Chapitres : le premier eft, fur les tumeurs chaudes en gênerai *, le fécond , fur le phlegmon ; le troifiéme, fur l'éryiïpele j le qua- trième , fur les tumeurs froides en gênerai -, le 5e , fur l'Oedème , ôilefixiéme , fur le Schirre. L'Au- teur ne dit rien de particulier dans R; 1752. 3; ces deux DilTertations, &C qui ne fe trouve dans la plupart des Livres de Médecine ou de Chirurgie t mais il l'expofe avec beaucoup de méthode Se de clarté -, enforte que nous ne pouvons qu'en confeiller la lecture aux Commençans ; ils y trouveront quantité de reflexions très-utiles Se pour la Théorie & pour la Pratique. L'article de l'E- ryfipcle , celui de l'Oedème Se ce- lui du Schirre , font fur tout, des mieux digérés ; Se l'on y trouvera , touchant i'ufage de la faignée Se des purgatifs pour la cure de ces mala- dies, des avis très-fages ôc très-pru- dens , aufli - bien que fur ce qui concerne I'ufage intérieur de l'acier Se celui des remèdes topiques ou extérieurs. Quant à l'acier , on a coutume d'en faire prendre en poudre à la plupart des malades qui ont des Schirres ; mais notre Auteur re- marque que quelque fouverain que foit ce remède pour ouvrir Se pour ramollir , il demande de grandes précautions pour erre bien adminiftré , parce qu'il agite vio- lemment les humeurs Se qu'il pro- duit des tenfions confiderablesdans les parties folides. Le moyen de l'employer fans rifque .& d'en tirer le profit qu'on en doit attendre , c'eft ï°. de le donner d'abord en petite dofe^&de ne point pafferfept à huit grains les premiers jours, z". D'augmenter cette dofe peu à peu , pour aller jufqu'à 20 grains, 30. D'en faire prendre pendant des mois entiers. 40. De mêler avec l'acier , un peu de fcl ammoniac ou E ij $6 JOURNAL D de borax pour rendre l'acier plus incifif. Pour ce qui eft des remèdes ex- ternes, ils ne demandent pas moins de prudence , Se M. Oburraigno obferve qu'il y a quelquefois plu3 de danger à les employer mal à propos que les remedes mêmes in- rernes. In admovendis remediu ex- ternis , non minus prudenter fe genre oportet: maie adhihta}internis muli o mttgis nocent. Il faut éviter d'appliquer des rc- folutifs trop humides, de peur de trop relâcher la partie fchirreufe , parce qu'en la relâchant à l'excès-, on court rifque de Uirc dégcnerei le fchirre en cancer. D'un autre cô- té il faut aullî fe donner de garde d'appliquer des refolutits d'une quilité trop chaude , de peur de trop remuer les humeurs , de ten- dre outre mefure les vaifleaux , Se de caufer par-là quelque inflamma- tion , ce qui pourroit être luivi de gangrené. Pour éviter ces écut ils il elt bon de mêler les refolutits trot Js ES SÇAVANS; avec les refolutits chauds , cV danr cette vue de mettre en ufage les ra- cines d'hellébore noir , de brione , decigue, dejculquiamc , la graille d'oye , l'huile de vers, celle de lau- rier , la gomme ammoniac , l'em* plâtre de vigo , de diabotanum } de ciguë. A l'égard de l'emplâtre de ciguë , M. Gourraignc alTurï qu'un Bourgeois de Montpellier nommé M. Richard, lequel avoic depuis plufieurs années un fchirre fî prodigieux à la rate que ce fchirre; occupoit toute la capacité du ven- tre , fut gueri par le moyen de ce lcul emplâtre appliqué fur la région de la rate , & porté durant deux mois. Les avis que l'Auteur donne fur la faignée , tur les pugatifs & fur pîufieurs autres remedes ,tant pour la cure de cette maladie, que de toutes les autres dont il parle dans fes deux Diflertations , ne font pas moins dignes que ceux-là, de l'atten- tion des jeunes Médecins. SETHOS, HISTOIRE OU VIE } TIRE'E DES Monument Anecdotes de l'ancienne Egypte : traduite d'un Manufcrit Grec. A Paris , chez Jacques Gucrin , Libraire-Imprimeur , Quai des Auguftins; & Hippolyte-Louis Guerin , Libraire, rue S. Jacques: 173 1. in-\ i. 3. vol. Tom. I. pp. 416'. fans la Préface Se l'Addition : Tom. II. Se III. pp. 842.Carr. détach. z. DANS les cinq premiers Li- vres de cette Hiftoire , nous avous vu Séthos préparé au plus parfait Héroïfme par une éduca- tion finguliere , Se déjà fe fignalant en ce genre par quelques exploits cclatans. Dans les cinq derniers Livres dont il nous refte à rendre compte , nous Talions voir , fous le nom de Chères, devenu Vovageur pour exercer chez ditïerens peuples la vertu bienfaifante , en quoi il fait principalement confifter l'Héroïf- mc ; Se ne rentrant dans fa patrie -, J A N V I que pour y erre le bienfaiteur de ceux qu'il ne devoir regarder que comme fes ennemis 6v fes rivaux. LIVRE VI. Chères s'embar- qua au Porr-blanc fur la mer rouge, dans une florte de 15 VaifTeaux monrés par iocco Phéniciens. Elle éroir commandée par Aftarte , Se deltinée pour porrer du fecours à une Colonie Phénicienne érablie dans Tille de Taprobane ( aujour- d'hui Geylan )• & vivement atta- quée par les Rois de cettel fie. Chè- res , quoique (eul , dénué de tour , même des moindres indices de fa naiffancc,ne defefperoir pas, au mi- lieu de fes grandes vues pour l'uri- liré du genre humain ,. de fe voir bien-tôt le Chef de cette Florre où ii venoit d'entrer efclave. L'Auteur indique les diverfes Nations qu'el- le trouva fur fa route en côtoyant les rivages , jufqu'à la vue de Ta- probane , où elle rencontra la Flot- te ennemie, fort fuperieureen nom- bre de Vaifleaux. Etirayée d'abord ,. elle vouloir retourner fur fes pas ; mais encouragée par Chères , elle bazarda le combat , dont le fuccès fut fi heureux , que les Phéniciens brûlèrent , prirent ou coulèrent à fond une grande partie des Vaif- feaux ennemis. En confequence de cer avanrage, la paix ayant été né- gociée & conclue entre les deux peuples : Phéletés Chef de la Co- lonie Phénicienne , Se dont la per- fidie à l'égard des Infulaires avoic mis cette Colonie à deux doigts de fa perte, fc donna la mort à lui- même pour éviter le châtiment que fa nation lui auroit fait fubir. E R ' , 1 7 }*• 57 Chères en fe promenant dans Galiba Ville de Taprobane , y fit rencontre de plufieurs Prêtres Egy- ptiens déguilés en Marchands Se parmi lcfquels il y en avoit quel- ques-uns de Memphis qui le re- connurenr d'abord. Il leur deman- da le fecret cv leur conta fon hi- iloire-. Il emprunra d'eux , en qua- liré d'Initié , une fomme considéra- ble, tant pour payer fa rançon que" pour fes autres befoins , leur or- donnant de la reprendre (ur fa Caf- ferre de pierreries qu'il avoir laiffée en la garde du Grand-Prêtre, au- quel il en écrivit par leur canal. Ayant ainii recouvré fa liberté, il obtient d'Afhrte nouveau Chef de la Colonie , une Florre de 24 Vaiffeaux , tant Phéniciens que Ta- probanois , pour tenter de faire le tour de l'Afrique , Se il part pour cerre expedirion , accompagné de quelques Prêrres de Memphis. Il perfuade aux Pilotes de gagner rif- le de Menuthias ( aujourd'hui Ma- dagafear) en droite ligne, à la fa- veur d'un vent de Nord , Se non en côtoyant les rivages , comme on avoit fait jjfqu'alors : fur quoi l'Aurcur nous raconte la première, découverte de cette grande Ifle par les Phéniciens. Chères , après y avoir fait un établiflement pour ceux-ci , fit voile vers la Côte d'O- fhir [ aujourd'hui Sofala ] en Afri- que; Côtefameufe par fon or & par fes Anthropophages. Il y fonda auflî des habitations pour Jes peu- ples qu'il conduifoit , dompta Se humanifa les Sauvages du Pays s s'en fervit pour tiier l'or des Mines, 33 JOURNAL D Se fit acheter en Ethiopie iooco chevaux , qui lui turent d'un grand fecours dans fes voyages. LIVRE VU. L'Auteur ouvre ce Livre par un détail hiftorique des Navigations autour de l'Atri- que , entrepriles &: exécutées avant Chères. Celui - ci pourfuivant fa route , trouva les Hotcntots vers l'extrémité méridionale du Conti- nent. Il crut pouvoir les contrain- dre à quelque .forte de travail-, mais il n'y eut ni douceur, ni chàtimens, ni appareil du dernier fupplkc qui pût les réduire à faire aucun emploi de leurs mains pour le fervice de leurs Vainqueurs. Chères conclut de-là qu'il y a des hommes comme des animaux , dont la propriété eft d'être inutiles , cv qui ne font capa- bles ni de focieté , ni d'efclavage. Il découvrit enfin le Gap de Bonnc- Efperance , le doubla 5c y bâtit un Fort. Parcourant enfuite la Cote Occidentale de l'Afrique , il fonda vers l'embouchure de la rivière de Catonbellc une Ville , qu'il nomma nouvelle Tyr, Se le Pays d'alentour nouvelle Phénicie. S'avançant après cela vers ie Nord , il fit la découverte d'un grand Pays appelle Congo , dont la Capitale nommée Sogno cfi à l'em- bouchure du Fleuve Zaïre.On y im- moloit des victimes humaines,&ce Sacrifice qui n'étoit qu'annuel ori- ginairement , fc faifoit alors tous les mois , fous prétexte d'accomplir la volonté des Dieux; mais réellement pour fatisfaire l'avarice d'un pre- mier Miniftrc , qui d'intelligence avec les Sacrificateurs } rançonnai: ES SÇAVANS; les particuliers , qui vouloient fe mettre à couvert de cette barbarie. Le Roi du Pays reçut d'abord favo- rablement les Ambaffadeurs de Chères : mais les ayant chaffespeu de tems après , à l'inftigation du Miniftrc Se des Prêtres, à qui le crédit de ces étrangers auprès du Prince cemmençoit à devenir fut-' pect ; Chères marche contre la Vil- le , il s'en rend aifément le m.iître , fait punir juridiquement le Mini- ftrc 3 abolit les victimes humaines, découvre l'impofture des Prêtres des Idolcs,qui aiment mieux fe brùT 1er eux-mêmes que d'accepter un pardon offert , Se remet le Roi fur. le Throne en le rendant vallal de celui de Phénicie. Non content d'avoir été le vainqueur &: le bien- faiteur des Sauvages du Congo, il voulutencore enêtre le Législateur. De concert avec le Roi & lesPretrcs Egyptiens il donna au Gouverne- ment 6\: à la Religion du Pays une forme beaucoup plus convenable , & telle qu'il i'a voit établie déjà dans fa nouvelle Phénicie. Deux ans s'étant écoulés pendant ces nouveaux établilfemens \ l'Ara- be Azarès ancien efclave de Séthos, c*c qui s'étoit fait connoître fous ce nom à la Cour de Meriaba Roi d'Arabie , jugea qu'il étoit tems de faire courir un bruit fourd que ce Prince y étoit caché. Dans la per- fuafion intime où il étoit de l'avoir vu mort , il ne eraignojt pas de le voir revivre ; mais il apprehendoit que Chères dont la réputation com- mençoit à fe répandre, ne voulut un jour s'en prévaloir en fe radant paf» JANVI fer pour ce Prince Egyptien , & il le hatoit de le prévenir. D'un autre côté , Chères partit de la nouvelle Tyr , fit route de propos délibéré vers le Royaume de Guinée, Pays connu deflors Si dont ji-cara étoit la Capitale. Il fut fur- pris de voir dans, toutes les Villes Maritimes de ce Pays-là toutes les marchandifcSquelesNégrestiroienc des Phéniciens établis fur les Cotes les plus orientales de l'Afrique: & fa furprife étoit d'autant mieux fon- dée , que les marchandifes qu'il voyoit-là dans un fiécle antérieur au Siège de Troye , étoient toutes fortes d'étoffes d'or & de foye , des Damas des Indes , des tafetas d'Ita- lie , des velours brodés d'or & d'ar- gent , &c Chères profitant de ladifpofition favorable où il trouva le Roi du Pays , pour la reforme des mœurs , Se particulièrement du commerce , il lui perfuada en premier lieu d'a- bolir la coutume barbare où étoient les femmes veuves de fe brûler avec les cadavres de leurs maris. Il lui fit publier une Loi qui défendoit la polygamie. Il lui fit fecoiier le joug des Fetiferos ou Prêtres de Guinée , en renonçant à leur ancienne ma- nière d'initier , également fuperfti- ueufe & cruelle , Se y fubfHtuant l'Egyptienne, mais rendue moins myïterieufe , moins héroïque Se plus générale ; Se faifant conftruire un Temple dédié à la DéeiTe des Vertus. Les Fetiferos , qui fouffroient impatiemment une telle reforme , mirent en œuvre leurs preftiges oit E R. ; i 7 3 %\ 55 dinaires pour s'y oppofer. Ils firent paraître la nuit leurs Divinitez pré- tendues appellées Jannanes fous la forme de fantômes affreux, pour in- timider le Roi & le peuple & pour détruire l'ouvrage des Réforma- teurs. Mais Chères ayant dévoilé fans peine l'impofturc des Prêtres qui s'étoient ainlr traveftis pour mieux exécuter leur delfein ; on vi- hta leur habitation , où l'on trouva une Mine de fourre qui pouffant la nuit des exhalaifons enHammées fé- condoit merveilleufcment les fuper- cheries de ces Sacrificateurs. Ils fu- rent condamnés à une retraite per- pétuelle dans leurs maifons ; Se l'on admit leurs enfansà la nouvelle ini- tiation , qui jointe à la reforme du commerce , coûta deux années de travail à Chères. Celui-ci étant enfin parti d'Aca- ra , côtoya légèrement le relie du rivage occidental de l'Afrique , jufqu'au Pays Sacré des Atlantes ou des Hefperides,où il aborda. Nous paffons par - delTus la defeription qu'on trouve ici des principaux lieux qu'il parcourut, Se nous nous ablîenons auffi de particularifer l'Hiftoire de ces Atlantes , celle d'Acmon & de fes defeendans , qu'on croiroit tirée de \' Antiquité des Celtes du P. Pezron ; celle d'Hercule Se d'Antée , celle des pommes Se des brebis des Hefperi- des , &c. Il faut voir tout cela dans le Livre même. LIVRE VIU. Ce Livre n'eft prefque rempli que des récits que divers perfonnages font à Chères d'évenemens qui ont précédé l'arri- 4o JOURNAL DE vée de ce Prince Egyptien chez les Atlantes. Il y apprend en premier lieu les guerres d'Antée Roi de la Mauritanie-Tingitane ( cV petit fils du fameux Antéc vaincu par Her- cule) contre Zoros Roi de Cartha- ge de fes deux fils Saphon & Gif- con : guerres fondées fur le caractè- re ambitieux , & remuant de ce Roi Maure, plus jaloux de faire parler de lui par des conquêtes d'é- clat, que d'affermir fa domination dans les bornes d'un Empire légiti- me. On raconte à Chères de quelle manière Antéc fut affiégé par Gif- con dans Siga Ville Maritime de Mauritanie , l'imprudence avec la- quelle celui - ci , au préjudice des ordres qu'il aveit reçus à Carthagc, accorda au Roi Maure une fufpcn- fion d'armes : la hneffe employée pir ce Roi pour engager le Prince Carthaginois à venir dans Siga fous prétexte d'y conclure le Traité , mais réellement dans la vue de le fèduire parles charmes de Zarite fa fille qu'il lui fait époufer en lui promettant pour dot le Royaume des Mafféfylicns dont la conquête lui devenoit affurée par la mort toute récente de leur Souverain. On joint à ce récit celui de la défaite &C de la mort de Saphon vaincu par Antéc , qu'un tel avantage met en état de faire le Siège de Cartilage même- : on fpecifie les autres éve» nemens qui furent les fuites de la condefccndancc téméraire de Gif- con pour l'ennemi , c'eft-à-dire les circonftances de fon évafion & de fon retour à Carthagc , où il tut condamné à mon par le Sénat , qui S SÇAVANS; voulut bien néanmoins fufpcndre l'exécution de l'arrêt dans l'efperan- cc que ce jeune Piince pourroit ex- pier fon crime par des ferviecs im* portans. Apres ce récit, Chères fc rendit au repas public qui fe faifoit tous les foirs &i où l'avoir invité le Roi des Atlantes. Là un de fes Officiers fit au Voyageur Egyptien un détail exad de la Religion 8£ du Gouver- nement politique de ce peuple , détail que nous omettons pour abréger , mais qui offrit à Chères un exemple de l'innocence où fe confervent quelques hommes éloi- gnés du commerce des peuples per- vertis par le luxe Se par l'ambition; en un mot l'image du iiécle d'or tel que l'amour de la félicité publi- que en faifoit fouhaiter le retour à des hommes fages. Chères eut lieu de fe confirmer dans une idée fi avantageufe , en vilîtant Lixa Ca- pitale des Atlantes , accompagné feulement de deux de fes Phéni- ciens. Se promenant fous les grands pilliets des Halles , ils voulurent y faire quelque emplette ; mais ils furent fort étonnés de voir que les Marchands refufoient leur argent , Cv d'apprendre qu'ils en ufoient ainfi avec tous les étrangers , au(- quels ils fourniffoient même les vi- vres gratuitement. Chères qui avoittorme des pro- jets pour le fecours de Carthagc, fut averti qu'il étoit arrivé chez les Atlantes quelques Carthaginois in- connus, qui avoient choili pour leur retraite une folitude hors de la Ville. Cette arrivée excita U curio- iiré J A N V I fité, Se il obtint du Roi lapermif- ilon de vilitcr feul ces inconnus. Mais quelle tut fa furprife de trou- ver dans cette folitudcZoros Roi de Carthage , la Princelîe Zarite épou- fe de Gifcon , Se fur tout fon Gou- verneur Amédés qu'il avoit perdu de vue depuis li long-tems! Cette rencontre a quelque choie de tort interellant pour le Lecteur. Amé- dés raconte à fon digne élevé fes propres avanturcs, depuis la funeite bataille de Coptos. Enfuite il lui faitl'hiftoire de Gifcon Se de Zari- te , où l'on admire la vertu es; la generofité qui éclattent également dans toute la conduite de cette Princeife & qu'on ne peut lire fans en être véritablement touche. C'elt un de ces incidens qui ne peuvenc être abrégés fans y perdre beaucoup, & qu'il faut voir dans le Livre mê- me. LITRE IX. Chérès ayant pris congé du Roi des Atlantes , re- joignit (a Flotte , dans la vue d'exé- cuter fes projets pour le fecours de Carthage. Mais avant que d'enta- îner cette expédition , il ht fur Tin- gi Capitale du Royaume d'Antée , une entreprife qui lui réullit. On oelebroit depuis quelque tems tous les foirs dans cette Ville des rejouif- fances publiques, dont Tygéehls du Roi , jeune Prince âgé de douze ans, étoit Spectateur, Se pendant lefquellesla garde fe faifoit fort né- gligemment. Chcrès accompagné de 50. hommes traveflisen Paylans Se bien armés fe olifTe adroitemenc dans la Ville; Se foûtenu d'une par- tie de fa Flotte qui étoit entrée fur- Ja»viert E R ; 1 7 j 2; 4.1 tivement dans le Port , il enlève fans obftacle le jeune Prince Se fes deux Gouverneurs, &c les conduit jufque fur fes Vailfeaux. Il eut foin de mettre à profit pour ce petit Prince le tems de fa captivité , en confiant fon éducation à deux Prê- tres Egyptiens, la meilleure école qu'il y eût alors pour les mœurs. Muni d'un gage fi précieux , Chérès parut bien - tôt après fur fa Flotte devant Siga , qu'alliegcoient allez foiblement les Carthaginois. Après avoir fait fommer le Gouver- neur de rendre la place , il employa. aux préparatifs d'un 2flaut qeneral les douze jours accordes à ce Gou- verneur pour faire fa voir au Roi la nouvelle fituation des chofes Se pour prendre fes ordres. Au retour du Courrier , qui encourageoit la Gunifon fur l'efpcrancc d'un pro- chain fecours , Chcrès fit donner l'affaut de tous cotez , & l'aclion fut poultée avec tant de vigueur , que la Garnifon & le Gouverneur blelîé dangereufement , turent con- traints de fe rendre à diferetion. Gagnés enfuite par les bons traite - mens qu'ils reçurent des vain- queurs , Si redoutant les cruautez de leur Prince , ils entrèrent volon- tairement au fervice de Chérès Se des Carthaginois.- Mais dans le par- tage du butin , Chérès Se les liens , par un dédntcrelïement peu com- mun, refuferent d'y prendre part. Après la réduction de Siça les VailTcaux Carthaginois & Phéni- ciens firent voile tous enfemble vers Carthage, où ils n'arrivèrent ce- pendant qu'après un mois de navi- 42 JOURNAL DE cation, à caufe des vents contraires. Dans cet intervalle ,Gifcon à la tête de 30000 Caplcnfes fes alliés mar- eboit au fecours de cette Ville. Ali- tée lui oppofa 30000 hommes des fiens , fans quitter le Siège , croyant cette armée une rois plusnombreufe que celle du Carthaginois. Celui- ci s'étant pofté avantageufement donna bataille aux Tingitans Se les défit. Cette victoire valut à Gif- con de la part du Sénat c\: des Car- thaginois , une abolition générale ; & ce jeune Prince jetra un fecours considérable dansla Ville alîiégée. A peine ia Flotte de Chérès étoit- elle entrée dans le Port d'Utique , qu'un jeune Egyptien inconnu " nommé Pammus vint trouver ce General , Se lui déclara qu'il ctoit ilTu d'une famille conlidcrable d'E- gypte , Si qu'étant fur le point de fc marier , fa Maîtrelle , qui étoit une personne admirable , avoir exigé de lui pour épreuve qu'il vint fc former à l'école ex fur les exemples d'un tel Héros, dans toutes les ver- tus , foit morales , foi: militaires» Elle m'a avoué [ continua - t - il ] qu'elle aimerait paflionnément un homme qui auroit avec vous qurljne rejfemblance ; Se je m'apperçois que f ai déjà l'avantage in cfperé de vous wffembler un peu de vifage. Chères prévenu favorablement pour cet inconnu , dont la phylicnomie no- ble Si douce joir.reà la qualité d'E- gvptien , l'avoit frappé , le nomma des l'inltant même fon Aide-de- Camp. Il le conduifit chez Tygée , te le rendit témoin de l'excellente éducation que l'on donnok par fes s sçavans; ordres à ce jeune Prince. Pammus Étant entré dans Cartha-1 gc avec Chères , eut occahon de iraire fes premières armes dès la nuit même pour repoufTer une attaque des alTiègeans ; Se la valeur qu'il y fit parortre le mit dellors en grande conhderation auprès des Carthacri- nois. L'Auteur } après cela , raconte les proportions de paix faites par le Hérault d'Antéc à Chérès ; les conditions preferites pareclui-ci au Roi Maure , qui feint de les ac- cepter; fa perfidie dans fa retraite , où fes Troupes font battues -, fou combat lingulier contre Chérès Se fa mort. Pammus fut enfuite char- gé des négociations de Chérès 3- vec les Carthaginois, aufuj:tdes prifonnieis , de la reftitution de Si- ga au jeune Roi Tygée , Se de plu- iieurs autres articles; commillion dont il fait s'acquirer avec toute l'habileté qu'on auroit pu attendre d'un Négociateur des plus expéri- mentés. L'établtiTement de Tygée dans fes Etats Se]c retour des Solitaires des Hefperidcs à Carthage, c'eft-à- dire du Roi Zoros j de Zaritc époufe de Gifcon, & du fage Ame- dés , terminent ce Livre , dont la fin annonce les préparants du faux Séthos pour entrer en Egypte , cS- ceux de* Chérès pour y retourner enfin. LITRE JE Chérès en cô- toyant l'Egypte , apprit qu'Afarès ou le faux Séthos à la tête de cent mille hommes embarqués fur la mer rouge avoit furpris &: enlevé la Ville d'Heropolis à l'extrémité J A N V I E de l'Ifthme , & marchoit du côté de Tanis Capitale du Royaume de même nom le plus voiiin de la met Méditerranée , gouverné alors par Spanius. Il apprit encore que ce Roi n'avoit pour héritier qu'une fille de 18 ans appellée Mnévie; qu'elle étoit recherchée par plulicurs Souverains , mais que fon père ne la vouloir marier à aucun Prince qui dût devenir Roi en Egypte ; Se que le taux Séthos l'avoit tait de- mander en mariage. D'autre part Meriaba Roi des Arabes avoir en- voyé d'avance des Amballadeurs à Ofbroth pour lui apprendre que fon fils Séthos étoit en Arabie , & pour lui propofer d'éloigner de fa Cour la Reine Daluca , Se de ren- dre à fon fils aîné l'efperance de la fuccefiîon. Alarès après la priie d'Héropolis , mit le Siège devant Bubaftc. Chères ayant débarqué feS Troupes marcha contre lui. Afarés levé le Siège fecretement & ell pourfuivi dans fa retraite par Chè- res qui lui défait une partie de fon armée. Afarés rentre avec le refte dans Héropolis. Chères le tait (om- merdelui rendre cettePlacc. Afarés la lui abandonne Se fait rembar- quer fon armée pour repaffer en Arabie. Après cette expulfion des Arabes Chérès fe rendit à Tanis. La Prin- ceffeMnevie l'y reçut comme vain- queur , lui mit fur la tête une Cou- ronne de Laurier , Se cette premiè- re entrevue leur fit naître de l'a- mour l'un pour l'autre. Spanius plein de reconnoiffance pour le fer- vice important que venoit de lui r; 1732- «>• rendre Chérès , obtint des autres Rois du Pays pour fon libérateur le titre de Confervateur de l'Egypte, & lui promit fa fille en mariage. Mais Chérès demande du tems pour fe faire connoître à fon père, Se en obtenir le confentement. Il apprit enfuite que le taux Séthos venoit attaquer Mcmphis avec une armée plus nombreufe que la précédente ; ce qui l'obligea de partir pour join- dre la lienne compofée en partie de fes Phéniciens , en partie des Trou- pes Egyptiennes que lui procuroic fa nouvelle Dignité de Conferva- teur. En fe féparant de Mnevic il lui fit ferment de n'en époufer ja- mais d'autre ; Se Spanius de fon côté déclara au Confervateur ., qu'ayant pris la refolution irrévoca- ble de ne donner à fa fille aucun époux qui pût être Roi de fon chef, lui , Chérès , rempliffoit parfaite- ment cette condition. Chères étant arrivé à Memphis , s'aboucha d'abordavecOioroth,fans ' fe taire connoître , pour concerter avec lui , avec la Reine & le Prince Béon , les affaires de la guerre dont il s'agiiloit. Il vit enfuite les Prêtres de Memphis , qui le reconnurent fans peine, Se aufquels il paya fur fa Cadette de pierreries les avances qu'ils avoient faites pour lui pen- dant fes voyages : Se il n'oublia pas de tirer de ce Thréfor la bague de la Reine fa mere. Il.écrivit auiïï à Mnevie une Lettre , par laquelle il s'exaltait de n'avoir pu encore mettre dans uneenticre évidence le fccretdefon extraction , ce qui ne pouvoit s'accomplir qu'à la fin de Fij 44 JOURNAL D la Campagne, dures partit pour l'armée dans le dcffiin de prendre vivant le faux Sétho?. Il joignit fes Troupes à celles que commandoit Pemphos fur les bords de la met rouge , & il reconnut que Pemphos étoit le Pammus qui croit venu le trouver au Siégé de Carthage. Ils convinrent cnfcmble de la neceflïté d'exécuter le projet capital de Ché- ris , & celui-ci pour calmer fur ce point l'inquiétude de Pemphos , lui dit qu'il pouvoit lui répondre que pendant fa vie le faux Séthos n'ufurpcroit jamais la place du \t- ritablc. Peu de rems après, Afarès fit une defeente en Egypte avec une armée de lix-vingt mille hommes. Celle des Egyptiens , en s'éioignant de la Cote , comme pour céder à 1a fupe- riorité de l'ennemi , lui lailla toute la facilité de s'engager dans le Pays, où il fe pofta en lieu défavanta- çeux. Chérès revenant fur fes pas , livre bataille aux Arabes ; il y court rifque de la vie , qu'Afarès alloit lui ôter fi le Prince Béon ne l'eut couvert de fon bouclier > il fait ca- brer fon Cheval contre Afarcs, le renverfe par terre 5: le faitprifon- nier. Pemphos d'autre part brûle la Flotte de l'ennemi , en forte que toutes les Troupes de celui-ci ou furent tuées ou fe rendirent à dif- cretion. Pendant cette guerre , Mnevie , pour calmer fes inquiétudes aufajet de Chérès fon Amant , alla conful- ter fur fa deftinée les Prêtres d'Hé- liopolis , les plus renommés de l'E- gypte pour la divination. Il falloir. ES SÇAVANS; d'abord une préparation de douze jours } qui fe paifoit dans les jeûnes & dans î'ufage" de liqueurs délicieu- fes , où il entroit des afToupitTans \ ce qui amenoit peu à peu les con- fultans à une révélation prefque in- volontaire de leurs feercts. De plus, les Prêtres d'Héliopolis ne manquè- rent pas dans l'occahon prefentede confultcr ceux de Memphis fur ce que ceux - ci favoient des difpoli- tions du vrai Séthos à l'égard de la PrincelTe. On la conduilir par des routes fouterraines dans un Elifée tel à peu près que celui de Mem- phis dont on a parlé plus haut. Là s'offrirent à fes yeux des fpectacles d'.'.mar.s heureux ou infortunés , qu'elle prenoit pour des ombres. On lui fit entendre des voix mélo- dieu fes accompagnées d'inftrununs Se qui chantoient des poëlies où les douceurs de l'amour croient balan- cées avec fes peines. Enfin la Prin- celle étant arrivée à la porte du Temple de la Divination , on lui fit faire les trois queftions au fujet de fon Amant , fur lefquellcs fa confulration rouloit , favoir , Qiii eft-il ? m'aime-t-il i m'épouftra-t-il ; Après quoi la porte s'ouvrir, & l'on répondit aux trois queftions de la Conlultante par l'organe de divers- Acteurs , qui formèrent trois Scè- nes ornées de decorations convena- bles, & qui s'exprimèrent en vers , d'où la PrincelTe ne put rien augu- rer que de iîniftre pour fon maria- ge avec Chérès. Du refte le Tra- ducteur a eu foin de mettre cette Poëfie Gréque en vers François. Le Conferyateur , aufli-côt après J A N V I la défaite des Arabes fit conduire à Memphis le (aux Séthos, qui, en prefence du Roi , de la Reine, des Princes, 6V d'une nombreufe adem- blée de Piêncs Se de Seigneurs , avoiia ion iivyjofturc , déclara que le véritable Séthos n'était autre que Chcrès , lui rendic l'aneau qu'il lui" avoit ôtéàla bataille de Coptos : &c cette dépolition fut confirmée par le témoignags des Prêtres qui avoient autrefois reconnu le jeune Séthos dans Pille de Tabrobane, 6": par la confrontation des trois pièces de l'emeraude } dont on a parié tant de fois. Cet événement inefpcrê détermine Oforoth à def- cendre du Thrône pour y faire monter fon fils Séthos , fi digne de l'occuper. Le nouveau Roi accorde la vie à l'inipolteur Afarès , & le retient à fonferviceen qualité d'ef- clave , ce qui lui paroit une puni- tion aflezrude pour un homme que fon courage cv Ta capacité avoient fut General d'armée. Les deux frè- res dcSéthos lui rendent hommage, & Daluca s'empoifonne, defefperée de perdre malgré elle fon rang par l'abdication volontaire de fon époux. Séthos fait célébrer la cérémonie de fon couronnement. Il y prend la Couronne , la met fur fa tête & fe fait proclamer Roi fous le nom de Séthos-So/ts ou Confervateur. Il re- met enfuitela Couronne fur l'Au- tel , il ôtc fon Diadème pour en ceindre le front de Béon fon frère , & il fe démet de la Royauté en fa- veur de ce Prince. Il le fait monter fur le Thrône , & alors le Grand- E R ,~ 173 5; 47 Piètre lui adrelle un beau difeours , où il lui met devant les yeux les de- voirs d'un Roy preferits ancien- nement par les loix des Egyp- tiens. Séthos, qui pendant les cinq jours de fon règne avoit dépofé tous les Officiers indignes , laine à Béon fon Succcfleur l'agrément de remplir de bons fujets toutes ces places , & lui confeille de rappcllcr Amcdés pour lui confier le Minilte- rc. Il fe tranfporte enluite àTanis. Il déclare à M né vicies julfes motifs qui l'obligent de renoncer à l'Hy- men de cette Princefle , 6V de la céder au Prince Pemphos fon pre- mier Amant , dont la perfeverance 8c le progrès dans le chemin de la vertu méritoient d'être recompen- fes. Il faut lire en entier cette entre- vile de Séthos Se de Mnévie pour en juger fainement ; elle ne fautoit s'abréger. Nous nous contenterons feulement d'en tranferire ici les dernières paroles de la Princefle qui terminent cet éclairciffiement. «Ah! » grand Séthos [ s'écria-t-elle en fc >j levant ] je fuccombe à ce dernier »j trait d'héroïfme. Vous avez deux «frères nés d'une marâtre qui a » voulu vous faire perdre la vie : «vous cédez à l'un votre Couron- » ne , 5c à l'autre votre Maîtreife. » Je fuis trop glorieufe de la part » que vous me faites prendre à l'e- »xercicc de vos vertus &c à l'ac- » compliflement de vos projets. » Vous aimer eft un privilège au- » quel nulle mortelle ne doit pre- » tendre ; tk je me range dans la: » foule de vos admirateurs. 4* JOURNAL DES SÇAVANS, HISTOIRE DV BATANlSME ; OU DE L'HERESIE DE Michel Bàius , avec des Note: Hijhriques , Chronologiques , Critiques t Bec. fuivis d'Eclairciffemens Thèihgiques , & d'un Recueil de Pièces ju- ftifîc.ttives : parle P. Jean-Baptifle Duchefne, de la Compagnie de Jefut. A Doiiay, chez Jacques-François Villerval , Libraire-Imprimeur, rue des Ecoles , au S. Efprit I7J1. un vol. /'«-40. pp. 453. pour le c >rps de l'Hiftoire , pp. 76. pour les EcclaircilTemens , &c pp. 82. pour les Pièces jullirlcativcs, fans h Prérace Se les Tables. •X T O U S avons rendu compre Jl\| dans notre précédent Journal de tout ce qui concerne le corps de cet Ouvrage : il ne nous relïe plus qu'à donner une idée des éclaircif- Icmens qui fe trouvent à la tin. Ils confident en fept Lettres , les trois premières roulent fur la hmeufe Virgule de la Bulle de Pie V. Voici le fait. Dans la Bulle de ce Pape on lifoit immédiatement après les 80. proportions qui y font rapportées : Ouas cjuidem fententias , (juamquam nonnulU aliquo patio fuflineripojfent in rïgore & provrto -cerborum [en fa ah ajfertor'tbtis intento da;/.;:.i- mus , &c. Cette phrafe caufa de grandes difputes. Premièrement pirce que la Bulle dont elle écoit tirée ne fe communiqua pas d'abord , fecon- dsment parce que la copie qu'on donna dans la fuite n'étoit pas ponc- tuée , de telle forte que ceux qui prefentoient la Bulle foûtenoient qu'il falloir placer une virgule après ces mots , fupneri pojfent , & que ceux qui larecevoient foikenoknc au contraire qu'il n'y en falloir point. C'cft-à-dirc que les premiers prétendoient que le Pape avoir dit : nous condamnons ces proportions prifes à la rigueur , & dans le fens que leur donnoient leurs Auteurs quand ils les ont avancées; quoiqu'il y en ait quelques-unes quife pour- rôienteti quelque forte foiîtenir , cv que les féconds prétendoient que le Pape avoir dit; Nous condamnons toutes ces propoficions , quoiqu'il y en ait quelques-unes qui prifes à la rigueur & dans le fens que leur donnoient leurs Auteurs quand ils les ont avancées, fe pourroient en quelque forte foûtenir. On voit par cet expofé combien ces deux fentimensditîeroicnt, lî les premiers avoient raifon , la Bulle condamnoir les quatre-vingt Pro- pofitions prifes à la rigueur, &dans le fens de leurs Auteurs , &: l'on n'en pouvoit foûtenir aucune fans encourir lescenlures, dc'étoitles féconds au contraire qui a voient raifon , il n'y avoir pis une de ces So propoiitions qu'on ne put avan- cer fans danger , en, prétendant qu'elle croit du nombre de celles qu'on pouvoit foûtenir à la rigueur, ÎM dans le fens de leurs Auteurs. C'eft donc à taxer nos idées fur l'cxiftence de cette importante vir- gule que le P. Duchcfne employé ces trois premières Lettres. J A N V I Il partage cette difpu ce en deux Thufes , l'une de droit & l'autre de fait. La première eft qu'indépen- damment de la virgule , on doit faire tomber la cenfure des propor- tions raDportées dans la Bulle •> fur ces propoiitions prifes en rigueur , &. dans le fens propre des paroles qui les compofent : de forte que quand il n'y auroit point en effet de virgule après ces mots fufïtner't foffent , la cenfure ne laiffcroit pas de happer le fens propre & naturel des proportions profaites. La fé- conde eft que la virgule adverfative ou disjondive fe trouve réellement dans la Bulle après ces mots , fufti- nsri pofient. Il foûtient fa première Théfe en établiffanc i". Que toute cenfure dogmatique a toujours pour objet le fens propre e\: naturel des propo- rtions, & que fi la cenfure du Saint Siège proferivoit les 80. articles Se les Livres d'où ils font extraits , feulement à caufe d'un fens étran- ger qu'elles n'ont pas t mais qu'on peut leur donner , elle feroit infor- me , abfurde , infenfée , injufte ; ce . qu'on ne peut dire d'une loi du S. Siège que toute l'Eglifc a reçue : z°. Qu'en fuppofant même que le dé- faut de la virgule rendit la loi obf- cure ou ambiguë , le fens en eft lé- gitimement fixé &c déterminé par le Légiflateur , à qui il appartient de droit d'interpréter & de déclarer le fens de la Loi qu'il a portée. Il prouve que le Légiflateur a déclaré que la cenfure tomboit fur le fens propre & naturel , par le témoigna- ge du Cardinal de Granvclle , pat E R ; 1 7 3 2; 47 l'autorité de Pie V. qui décida que Baïusavoit encouru les cenfures por- tées par la Bulle , pour avoir défen- du les Propoiitions dans le fens des paroles & de l'Auteur , par le faic du Pape Grégoire XIII. qui obli- gea Baïus à confeller y que fes propoiitions étoient condamnées par la Bulle dans le fens qu'il a- voit enfeigné , & l'Univerfité de Louvain à enfeigner la contradic- toire de toutes ces propoiitions pour fe conformer à la Bulle; par Urbain VIII. qui pour apprendre à tout l'Univers, que la Constitution de Pie V. réprouvoit le fens propre èv naturel des propoiitions , rît impri- mer cette Conititution avec la vir- gule ; enfin par l'acceptation pure cV: limple que le S. Siège a exigé dans la fuite des Univerfitez de Louvain 8j de Douai , où il eft dé- claré qu'aucune des propofitions ne peut être foûtenue prife en rigueur &c dans le fens propre des paroles. Notre Auteur paffe enfuite à fa Théfe de Droit , Se la foûtient , i°. Par la vérification authentique qui fe ht des Bulles originales de Pie V. de Grégoire XIIL & d'Ur- bain VIII. en prefenec des Députés de Louvain , par laquelle il fut conftaté que la tameufe virgule fe trouvoit dans les trois autogra- phes. 20. Par une atteftation en for- me du Cardinal de Lugo } &c ce qui fortifie ces preuves , c'eftque la première Théfe femble mettre les adverfaires du P. Duchefne hors d'état de prétendre qu'on a inféré cette virgule dans les trois Bulles originales. 48 JOURNAL DE Dans la quatrième Lettre il s'agit «l'examiner li la Bulle de Pie V. par laquelle les erreurs de Baïus Se de fes complices , font trappes d'a- nathême eft uneLoi dogmatique de l'Eglife Univerfelle , à laquelle tous les Fidèles foient obligés fous peine d'excommunication d'être fournis intérieurement & extérieurement. C'cft le fentimènt de notre Auteur. Il ne s'amule point à prouver que cette Loi eft une Loi Dogmatique , parce qu'il eft confiant quec'cft un Décret émané du S. Siège , Tribu- nal légitime ', qui condamne des proportions doctrinales , Se qui prclcrit ce que nous devons penfer, or ce Décret ne fçauroit être autre chofe. Il fe borne donc ptécifémenC à prouver que l'Eglife Univerfelle a reçu ce Décret , pour cela il em- ployé deux raifonnemens. Le premier confifte à établir que quand une décillon dogmatique émanée du S. Siège eft acceptée de vive voix par l'Eglife où l'erreur a fait du bruit , fans que les autres Eglifes reclament contre le Décret parvenu à leur connoifTance , cette décilion devient dès-là une Loi gé- nérale , à laquelle aucun particulier ne peut rctufer d'obéir. Or c'eft , dit-il , ce qui eft arrivé à la Confti- tution de Pic V. Les Eglifes de France Se des Pays-Bas , où le Baia- nifmc avoir excité des troubles , l'ont acceptée , elle a été juridique- ment promulguée , Se nulle Eglile n'a reclamé contre ce qu'elle conte- noit , il n'eft donc plus permis à perfonnede s'y fouftraire. Le fécond raifonnement qu'em- 5 SÇAVANS, ployé le P. Duchcfne , eft de dire qu'une décilion dogmatique du S. Siège , a force de loi dans L'Eglife , lorlqu'elle y eft acceptée par lecon- fentement exprès des plus grandes Eglifes , 6v par l'adhelion pratique des autres , adhelion marquée en ce qu'elles s'y conforment, oc la pren- nent pour règle de leurs fentimens. Or, continue notre Auteur, la Bulle de Pie V. contre Baïus eft i*. Une décilion dogmatique : Elle eft émanée du S. Siège , Se confirmée par deux Papes : 1°. Elle a été acceptée par le confentement exprès des plus grandes Eglifes. Il appuyé cette dernière propor- tion en citant differer.s actes qui fc trouvent dans le corps de fon Hi- ftoire , c?c qui paroiiTent très -pro- pres à fon dellein , Se termine cette matière par dire que cette Bulle n'a trouvé que deux Prélats oppofans , qui font l'Archevêque de Malines , 6 PEvêque de Gand, que le S. Siège a fufpendus de toutes leurs fonctions , a caufe de leur refiftan- ce , Se qui ie font enfin fournis à cette loi. Dans la cinquième Lettre notre Auteur examine le rond même de la Bulle , il reluire de tout ce qu'il y dir , i°. Que les Baïaniftcs ont tort de fe recrier fur ce que plu- sieurs des proportions condamnées ne fe trouvent pas dans Baïus, puif- que la Bulle ne les lui attribue pas toutes , mais à differens Auteurs , in Jenfu ab Afisrionbus intenta. 2°. Qu'il eft certain , par le té- moignage du Cardinal Granvelle , Se par celui de Baïus même , que le Dodcur J A. N V I E Douleur Jean HefTels , autrement dit Jean de Louvain , ami intime de Baïus , eft Auteur d'une partie des Propofîtions proferiecs par la Bulle. j °. Qu'il n'eft pas pofliblc au- jourd'hui de démêler ce qui appar- tient en propre à chacun de ces deux Docteurs , puifque nous n'a- vons plus ni les cahiers de Jean HefTels, ni ceux de Baïus , ni le Recueil des Propofîtions qu'ils ont avancées dans leurs difputes Aca- démiques. 4°. Que le S. Siège faifant droit fur les remontrances & les apologies de Baïus, a jugé qu'on ne lui a point fait de tort , foit dans l'extrait , foitr dans l'attribution des Propoiuio.is, Se que Baïus s'étant fournis à ce fé- cond jugement , il feroit ridicule de l'attaquer , puifque ce feroit s'iïifccire en faux contre Baïus lui- même. 50. Que plus de foixante des Propofuions notées par la Bulle {ont évidemment de 3jïus les unes quant aux termes Se aufens , les au- tres quant aufens feulement. 6°. Qu'on ne doit donner au- cune créance à Baïus , lorfqu'il fc plaint des extraits ou de la fauiîeté de rétribution , puifque le S. Pape Pie V. apr^s aa mûr examen a dé- claré injuftes les plaintes de Baïus. 7°. Que plullcurs des Propolî- tions condamnées par la Bulle ne font pas tirées des imprimés ; mais des Leçons publiques Se des difpu- tes Académiques de Jean Hef- fels S: de Baïus. Ce dernier en con- vient dans fa féconde Apologie , Se Janvier. k; 1732: 4? la Bulle le marque , tum verbo, tum feriptis. La hxiéme Lettre a pour objet la forme de la Bulle, ex omnibus affila- tionibus. Le P.Duchefne y rapporte ce que dit M. le Cardinal de Noail- lcs à l'Aflcmblce du Clergé de KJ59. lorfqu'on objecta que la con- damnation du Livre intitulé les Maximes des Saints , n'etoit pas revêtue des formalitez ordinaires. Ce Prélat dit qu'il fiilloit mettre une grande différence entre ks jugement dogmatiques & ceux qui regardent lit difcipline ; fue dans ceux-ci il faut s'attacher plus fcritpuleufement k la forme; & dans ceux-là \ à lafub- fance , ainfi notre Auteur ne traite que des qualifications. Il diftingue trois fortes de cenfu- rcs , la première coniilte à dire ana~ thême à des Textes , fans en mar- quer le vice ; la féconde confifte à reprouver Se à qualifier abfolumenc Se distinctement chaque Propolî- tion d'une ou de plufîcurs Notes^ la troifiéme confifte à appliquer plusieurs netrifïures , foit à un Li- vre, relativement à différentes Pro- pofîtions , foit à un tas de Propofi- tions dans un fens rcfpectif. C'eft à juftifier cette dernière forte de cen- fure que s'attache notre Auteur , en érabliffant : i°. Que cette manière de con- damner des Propolîtions étoit en ufage dans l'Eglife long-tems avant PieV. 2°. Qu'elle fixe très-clairement l'objet de la croyance des Fidèles , Si qu'elle eft trés-iurhfante pour les préferver du poiibn de la nouveauté. G jo JOURNAL D 30. Qiic loin de marquer un dé- faut de feience dans l'Eglife ou dans le S. Sicile , elle eft une preuve au contraire de leur fageilc Se de leur prudence à s'en tenir au nécef- fairc. Cette Lettre eft terminée par une application fommaire desNotes ref- pectives contenues dans la Bulle de Pic V. aux Propofitions de Baïus. Notre Auteur en conclut qu'il n'eft aucune des qualifications ref- pedtivcs de la Bulle qui ne tombe fur une ou fur plufieurs des Propo- rtions condamnées , & qu'il n'eft pareillement aucune de fes Propofi- tions , qui ne mérite une ou plu- fieurs des qualifications dont elles ES SÇAVANS, font flétries. La feptiéme Lettre eft entière- ment employée à difeuter cette Propofuion : fans le fecours de la grâce le libre-Arbitre ne peut que pêcher. Comme ce fujet eft infiniment épineux , Se qu'il feroit mieux la matière d'un Traité que d'une Let- tre : nous renvoyons nos Lecteurs à l'Ouvrage du P. Duchefne pour s'en inftruire. Ce Volume eft terminé par qua- rante-deux pièces , toutes écrites en Latin , fous le titre à' Appendix ad Uiftoriam Bai.mifnii. C'cft tout ce que nous en pouvons dire ici. LES FRIVILEGES DES SUISSES , ENSEMBLE ceux accordés aux Villes Impériales & Anfeaticjties & aux habitans de Genève repdens en France , avec un Traité Hijhri^ite & Politique des alliances entre la France & les treize Cantons , depuis Charles VIL jufqu'à prefent. Par M. V. G. J. D. G. S. A Paris , chez la Veuve Saugrain , Se Pierre Prault , Imprimeur des Fermes Si Droits du Roi,. Qiiaide Gêvres, au Paradis. 173 1. /s-40. pp. 542.- LE S Suifles font les plus anciens alliés delaFrance,&ceux quiont perfeveré le plus conftamment dans les alliances qu'ils ont contractées avec nos Rois. Depuis CharlesVII. il n'y a aucun de nos Rois qui n'ait renouvelle les Traitez qui avoient été faits par fes prédecefteurs. S'il y a eu quelque interruption dans les commencemens , caufée par la ja- loulic des Princes voifins , qui n'ont oublié aucun moyen pour rompre les nœuds de cette alliance, elles n'ont point été de longue du- rée , Se la Nation Suiffe a prefqqc toujours été conftamment attachée aux intérêts de la France. C'eft ce que l'Auteur explique dans le Traité Hiftorique Se Politique qui eft à la tête de l'Ouvrage. La principale partie de ce Volu- me eft le Recueil des Pièces dont le titre feul remplit trois feuilles en petits caractères. Ce font des Trairez d'alliance , des Edits , des Déclarations, des Lettres- Patentes, des Reglemens Se des Arrefts du Confeil , concernant les privilèges accordés à la Nation Suille , aux Genevois & aux Marchands des JANVI Villes Anfeatiqucs. Comme nous ne pouvons entrer dans le dérail de îanc de Pièces , nous nous borne- rons au précis de quelques obferva- tions faites par l'Auteur fur un Ar- reft du Confeil du i. Mai 172S. Par cet Arreft , le Roi , fans s'ar- rêter aux Sentences du Bailli de Verfailles , des Requêtes du Pa- lais, ni à un Arreft du Parlement du ao. Février 172S. renvoyé de- vant le Juge de la Jurifdiction Suif- fe toutes les conteftations au fujec du partage de la Communauté &c de la fuccefîîon de Jofeph Courte- noux l'un des Cent- Suiiïes delà Garde. Le Capitaine-Lieutenant- SuifTe & Juge Supérieur de la Compagnie s'étoit joint à la veuve de Courtenoux pour obtenir cet Arreft. Voici les obfervations. Les obfervations que fait l'Auteur dans uneDiflertation particulière à l'occafion de cet Arreft-, confiftent en trois Propositions qu'il regarde comme trois principes de droit pu- blic qui doivent faire conferver aux Suiflcs la Jurifdiction , tant pour le Civil que pour le Criminel , fur les Militaires de leur Nation qui fer- vent en France. Le premier de ces principes , eft, fuivant notre Auteur , que tout Souverain qui par convention don- ne à un autre Souverain des Trou- pes auxiliaires compofées de fes Su- jets,ne fe dépouille point du droit de Souveraineté qu'il a fur les Troupes. Ce qui doit avoir d'autant plus de lieu,quelesSuiffes qui font au fervi- cedu Roi, confervent leur domicile naturel & originaire , dont ils ne pourroient même fe départir. Tant qu'un Ambaffadeur avoué par fon Piince relîde dans une Cour étran- gère , il ne change ni de domicile , ni de Jurifdiction.il en cft de même desTroupes de la Nation Suiffe, qui font au fervice de la France , étant avoués par leur légitime Souverain. L'Auteur prévoit bien qu'on peut lui objecter que les Traites ne s'ex- pliquent point d'une manière qui paroifte allez précife fur la Jurif- diction , tant civile que criminelle des SuilTes. Il répond que la Lettre annexée au Traité d'alliance de 1^53. porte que la Juftice du Régiment fera adminiftréc par les Juges de la Nation £v non par d'au- tres. Il ajoute que quand il y auroit dans les Traitez d'alliance quelque ambiguïté , il faudrait fuivre l'on fécond principe ; que quand les ar- ticles d'un Traité ne font pas allez précis , ils doivent toujours être en- tendus à l'avantage de la partie con- tractante , en faveur de laquelle ils ont été ftipulés jufqu'à ce qu'il y ait une explication réciproque entre les deux PuifTances. L'Auteur donne pour troifiéme principe une maxi- me qui revient aflez à la féconde que les décifipns qu'une des parties contractantes pourroit prononcer fur des faits particuliers relatifs à des articles de Trairez d'alliance, ne peuvent être valables fi elles font au défavantage de l'autre parrie , & qui , fi elles lui font favorables, el- les doivent tenir lieu d'explication des Traités. L'Auteur infifte beau- coup fur ce dernier moyen , & il foûtient que quand on a contefté la. 52 JOURNAL DES SÇAVANS; Jurifdidtion des Suiilcs far leurs de les queftions en leur faveur con- Milicaires qui (ont au lervicede la tre Les Juges ordinaires. France, Louis XIV. a toù(ours déci- LETTR E DE M. DE SAINT ANDRE', GRAND- ficaire de Me<>u\- y à un Abbé de [es amis , au fi-.jn de la nouvelle Hi- ftoirc de Meaux t faite par le P. Di.plellis Bencd.cl.n. A Meaux, chez Alart, Biochure/M-40. de 6. pag. QUoique cette Pièce fait peu tendue, le nom de l'Auteur qui cil d'un grand poids , 6c l'im- portance de ia matière dont il s'y agit , nous engagent à en donner un Extrait en ferme. Nous nous y croyons d'ailleurs d'autant plus obli- ges qu'il nous éd. revenu que des perionnes de diftindtion Se zélées pour la mémoire de feu M.BfJfuct, vouîoient nous reprocher d'avoir adopté dans notre Journal du mois d'Aouft la manière dont le P. Du- pleilîs s'eft expliqué fur le démêlé (î connu d'entre feu M. ï'Evéjue de Meaux de M. de Eenelon Arche- vêque de Cunbray touchant les Principes du Quletifme. Dans cette Lettre M. de S. An- dré fc plaint amèrement du tour que l'Hiltorien de l'Egide de Meaux a donné dans fon cinquiéms Livre , au récit de cette importante affaire. Le P. Duplejfis y eft aceufé non feulement d'avoir avancé des faits faliîhés , mais même d'avoir attribué à M. de Meaux des motifs humains , des intentions m dignes , &c une indigne ploufie contre M. l'Archevêque de Cambray -, en un mot d'avoir cherché à juftiher le dernier de ces deux Prélats , aux dépens du premier , à qui , ajoûte- t-on , l'Eglife efr cependant rede- vable de la condamnation de l'Er- reur. C'eft dans cette vue qu'on' veut que l'Hiftorien air atleele dans; ce qu'il a écrit lur le 0;t:etil?nc , de n'erre que lc.fimple Copiftc d'un- Anonyme inconnu &: partial , Au- teur des Mémoires Chronologiques , au lieu de recourir , pour avoir des eclaircillemens certains , aux Ou- vrages de M. Bo/fuet êc à ceux de fon adverfaire , qu'on lui reprocha de n'avoir feulement pas lus , ou de s'adreder fur cet article à M. de S. André lui-même, comme il avoit fait fur d'autres bien moins- intereflans. » La feule Relation du Ometif- » me } dit là-dellus M. de S. André 3 » faite par M. Bojfuet , auliï-bien » que les Remarques de ce çrand » Prélat , que je lui aurois mis cn- » tre les mains } &c qui renferment » toutes les preuves de ce qu'il » avance , lui auroient fervi de fùrs «guides, puifqu'ellc a donné les » derniers coups au Parti dans Ro- » me , où elle attira à la vérité tous » les furrrages du Pape & des » Cardinaux. Le grand détail même dans le- quel Dom Duplejfis eft entré fui cecte iameufe dilpute , paroît i J A N V I l'Auteur de la Lettre un effet de la prévention outiée de ceci-ciiv-ùn j - il ne la. trouve que trop bien marquée dans ces paroles de iaPrc- face : & fi au lieu d'une Hifcoire de idéaux ; ou il ffûib'.i jtt'.qn ne doit avoir des y cas que pour Ai. Boffuet y il eut fallu travailler k ce]U de AI. as FeneLn , fétoisen état ci écrire avec moins de rejervs. » Quelle relerve , j> s'écrie à ce fujet M. de S. André, j» a-t-il pu faire , après avoir iî peu » garde de mefures , & après avoir »dit des chofes propres d'elies-mc- » mes à donner atteinte à la me- » moire d'un des plus grand. Eve-* »que's qu'il y ait eu dans 1 Eglife » Gallicane & même dans l'Eglife n Univerfelle ? « Peu s'en faut , après cette exclamation, qu'il n'at- tribue à ce Pcre' l'odieux dellein de faire revivre le Q^ietifme. L'article de Madame Guion efl: ici un autre grief contre Dom Du- plefns , & ce grief fait en quelque forte la féconde partie delà Lettre. M. de S André obferve d'abord qu'il auroit dû fuffire à l'Auteur qu'il attaque , que les Livres de Moyen-court , des torrens } & autres de cette nature , enflent été con- damnés par le Souverain Pontife , & par tous les Evêques de France dans des Aflemblécs Provinciales , pour l'empêcher de donner tant de louanges à cette Dame , &: de fe déclarer fon Panégyrifte. A cette remarque il ajoute fuccinètemenc quelques autres raifons tirées de la conduite de Me Çuioti , que nous omettons , mais fur lefquelles il prétend que l'Hiftorien auroit dû E R ; 1752: S3 régler fes expreffions en parlant d'elle , s'il avoit eu , ou plus de, dilcemement , ou moins de pen- chant en faveur de fa -caiife; Tel eit le précis des plaintes Se des aceufations que le zèle de M. de S. André pour l'honneur & la gloire de feu M. B îjfuet , auquel il eroitinrunemeùt attaché, l'a porté à faire éclater dans cette Lettre im- primée. » Il efl vrai, dit-il en finif- » fant , que la réputation de ce » grand Évêque efl: au-deflus de «toute atteinte : mais il m'a paru » neceftaire de faire connoître aufli »au public que dès que j'ai lîi cette » mauvjifeirelanon , j'ai élevé ma » voix contre l'Auteur , que j'en ai » porté mes plaintes à M. le Cardi- nal de B:j[y nofrerEvêque qui n'a- «voit pas encore, rien lu de cette » Hiftoire / & qui fur le champ m'a » marqué fon reflentiment. Son »> trïiinence m'en parla avec m amertume. Je lui propoiai d'écri- »re contre la Préface & la Rela- tion. Il confentit de bon cœur » que je fi de part des connoiflances » que j'avois fur cette matière. » Mon objet étantrempli , pour- » fuit M. de S. André , je m'etf « tiens-là , fans entrer dans la refu- »> tation de tous les endroits de »-l' Hiftoire de Meaux , dont il y » en a quelques-uns rapportés avec » indécence , d'autres par inatten- tion & précipitation, qu'un hom- » me moins occupé que moi pourra » redreiTer. C'efl: ainfi que le Grand-Vicaire de Meaux, après avoir relevé dans l'Hiftoire de Dom Dupleflïs ce qui- 54 JOURNAL DE regarde en particulier M. Bojftiet t s'explique en gênerai fur tout l'Ou- yrage. Après la lecture de cet Extrait , nous nous flattons que le public fendra juftice à la droiture de nos intentions , & il ne nous refte qu'à protefter ici que fur ce que nous avons dit dans noue Extrait du S SÇAVANS; mois d'Aouft , de la manière dont le P. Dupleffis a traité l'affaire du Qujetifmt s nous ferions fâchés qu'on pût penfer que nous euffions manqué en rien au refpect Se aux égards dûs à tant de titres à l'illuftre Prélat dont M. de S. André a pris iî vivement la défenfe. rr NOVVELLES LITTERAIRES. ESPAGNE. De Madrid» DO M Jean de Ferreras . Bi- bliothécaire de fa Majefté Catholique , a publié le feiziéme Volume /'»-4°. de fon Hiftoire dEfpagne écrite en Efpagnol , &c dont le premier Volume tut impri- mé en 1700. fous le titre de Synopfis Hiftorica-Chronologica de F. [pana , pttrte primera 3 que comprebende fus fucceffos des de la Création de el AI un do- y hafla el nacimiento de fje- fu-Chriflo nue fin Senor yRedemptor, formada de los Jlmores feguros y de buena fee. Quelque fuccès qu'ait eu cet Ouvrage il n'a pas évité la criti- que. D. Diego- AIartinez.-Cifneros l'a attaqué dans un Livre in-4.9. in- titulé : Anti-F erreras. D. Francifco deBerganfa a mis au jour in-jf. fon Ferreras convencido san critico defengano en el Tribunal de los Dotlos: c'eft-à-dire , Ferreras aceufé & convaincu d'erreur au Tri- bunal des Sfavans. Enfin D. Diego Mefcolae a écrit en particulier con- tre le 16e Volume de l'Hiftoire d'Efpagne . &: dans un /k-8q. qui a pour titre Ferreras contra Ferreras y y cuna de mifmo palo fobre la parte 1 6. de fa Hiftana de Efpana ; il prétend prouver que cet Hiltorien y eu en contradiction avec lui-même. ITALIE. De Rome. M. Fontanini a publié le Recueil des Conftitutions données par les SouvcrainsPontifes pour les Canoni- fations. C'eft un Volume in-fêlio t intitulé: Codex Confiitutionumquaa Summi Pontifices ediderunt in fo- Umni Canon i-Latione Santlorum k Johanne XV. ad Bencdiblum XIII. five anno Domini 993. ad an. 1J2.9. accurante Juflo Fomanino , Arcbie» pifeopo Ancyrmo , qui Lemmata ¬nlas addidit. C'étoir par ordre du feu Pape Benoît XIII. que M. Fontanini avoit travaillé à ce Re- cueil. De Florence. Les Tables Chronologiques du P. Aïuz.antio , Jefuite , connues fous le titre de Fax Chronologica ad tmnigenam Hifioriam, ont été réim- primées ici chez TartiniSc Franchi. Cet Ouvrage qui eft eftimé , croie devenu extrêmement rare. Il con- filte en 4. planches qui peuvent être colées enfemble. De Paboui. Comino débite une belle Edition ;«-4°. des Oeuvres de Sannazar , avec des additions & la Vie de ce Poé'te par M. J. Ant. Volpi. Jacobé five Aftii Synceri Sannazarii Neopo- %<$ JOURNAL D Utani , f',n Patncu , Pvàaata ex antiqitis Editionibns accuratijfimi defcripta, Acceffit ejiifdem Vit a J. An:. Vulpio AuÛore. Item Gabrie- lis Attilii , & Honorât i Fajciteîli Carmins -jiaeextant. Patavii. 1731. De Venise. André ToL'ti a donné en un vol. z»-4°. une nouvelle Edition de la Traduction Latine du Traité du P. Aiabillon , fur les Etudes Monafli- ejues. Cette Edition eft beaucoup plus ample que celle qui parut chez le même Libraire en 1705. On y a ajouté les remarques du V.Aiabillon fur la réponfe de M. l'Abbé de 7 'râ- pe j traduites en Latin pour la pre- mière fois , & l'Hilloire de cette difpute, écrire p:.r le R. P. Dont Vincent Tbiiillier , a vec diverfes Lettres fur le même fujet , impri- mées parmi les Oeuvres Poithumcs de Dom Mabtllon. Rolleti qui fait travailler à une Traduction Latine de La Bibliothè- que Ecclelîallique du P. Ce illier } Bénédictin, qui doit être en 16. Volumes in- 40. dont deux ont dé- jà paru à Paris , fe propofe d'impri- mer cet Ouvrage par Soufcription } à une condition nouvelle & aflez finguliere. On ne tirera que 3co. exemplaires en grand papiet , & ces exemplaires font delrinés pour ceux qui fc prelferont le plus de fouferire. Ceux qui viendront trop tard , Se qui ne pourront plus être reçus à la Soufcrip- tion n'auront que le petit pa- pier fans diminution de prix ; le- quel fera pour chaque Volume de ES SÇAVANS, onz.e livns de Venife. Le premier Tome paroîrra au mois de Février prochain , & de fix mois en lix mois on en donnera un nouveau. La valeur du premier fe doit paver en foufetivant , & celle du fécond en recevant le premier , Ck ainli de fuite. HOLLANDE. De Le y de. M. Schultens a fait imprimer ici in-fol. le Texte Arabe de la Vie de Sultan Saladin t avec la Traduction Latine qu'il en a faite , aulÏÏ-bien que quelques autres Pièces Hifto- riques qui regardent le même Prin- ce. Le tout tiré des Manufcrits con* fervés dans la Bibliothèque de cet- te Ville. Vita & n-s gejîa Suitani jSlmjlichi - tsilnafiri , Saladini Abi Modifia Jofephi F. Jobi F. Sjadfi. Aublore Boiiadino F. Sjedda- d:. Necnon excerpta ex Hijlorià U.-iiverfali Abulfedt , eafdem res geflis , reiicjumujHe Htfioriam tem- pjris compendiosi exbibjntia. Item- que Sp:cimen ex Htjhria Majore Saladini y grandiore cotburno con- feripta ab Amadoddtno I[pahan$nji. Ex Aljf. Arabicis Academit, Lug- duno-Ba'avs. edidit ac Latine vertu Albertus Schultens. Accedit Index Commentariufque Geograpbicus ex Affî. ejufdem Bibliotbeca comextus. Voici le titre de la nouvelle Edi- tion A'Arst &c. con- tenant un Traité de divers Ordres de Chevalerie , un grand nombre de ■particularités curieufes touchant le tumulte de Thorn , la diète de Grod- 710 , la Vie de l'Empereur de Riijfte Pierre I. Celle de l' Impératrice Ca- therine , du General le Fort , & du Prince Menzicof , avec des Remar- ques Geograpbicjues^Topographiquesy &c. in-fol. 1732. Sans entrer dans l'examen des raifons qui ont porte M. de la Aio- iraye à joindre l'Anglois à côté du François dans ce trohiéme Volume & à le grolïir d'un Traité des Or- Janvier. E R > 1 7 3 2. $7 dres de Chevalerie affez étranger a fes Voyages ; nous nous contente- rons d'obièrver en gênerai que s'il a été mécontent des premiers Li- braires qui ont travaillé pour lui en 1717. par rapport au peu de beauté de l'impreiTion, il doit l'être bien davantage de ceux qui ont impri- mé fon troifiéme Volume , foit pour le papier , foit pour les carac- tères; à moins que l'exemplaire que nous avons fous les yeux ne foit un exemplaire contrefait. Au refte, ce Volume fe vend à la Haye , chez Pierre Aioetjens , & à Paris , chez de Heuqueville; rué' Gift-le-Cœur, chez qui on trouve aufll les deux précédons. Hijloire Métallique des xvn. Provinces des 'Pays-Bas , depuis l'abdication de Charles- Quint , juf- qu'àlapaix de Bade en x-jiè. tra- duite du Hollandois deAd.Gi.KAKB- Van-Loon. 17 J2. Le grand fuccès qu'a eu cette Hi- ftoire dans fa Langue Originale , a engagé P. Gojfe , J. Neaulme &c P. de Hor.dt , Libraires de cette Ville, à la taire traduire en François. Elle mérite tous les éloges qu'on lui don- ne dans le projet de foufeription qui en a été répandu. Cette Edition Françoife fera en cinq Volumes in-fol. & elle confi- nera en 67 5. feuilles de papier fem- blableàceluiduProfpeCluSjlequeleft très-beau , imprimées de caractères neufs, en 2945. Médailles & leurs revers , gravées par les meilleurs Maîtres du Pays , expliquées par l'Auteur, & en divers autres orne- mens necellaires. H 5 8 JOURNAL DE Les Soufcripceurs payeront 90. courants de Hollande pour le petit papier £c 155. florins pour le grand. Ceux qui n'auront pas fouferit payeront 170. florins pour le grand papier & 113. florins 5. fols pour le petit. Ces Souscriptions fe pourront faire chez les principaux Libraires , tant des Provinces-Unies que des Pays étrangers : & ce qui eft bien à remarquer, ils ne payeront la v.- Ieur de l'Ouvrage pour lequel ils auront fouferit que de la manière fuivante : pour le petit papier 40. florins en recevant les deux pre- miers Volumes -, ainfi point d'a- vance pour la Soufcription. 2o. flo- rins en recevant le troifiéme , 1 5. florins en recevant le quatrième, &c 15. autres florins en recevant le dernier. Il en cil de même à pro- portion pour le grand papier, Les deux premiers Volumes , à ce qu'on promet , paroîtront le pre- mier jour d'Avril de cette année 1731. le troifiéme, le premier jour d'Octobre fuivant , & les deux der- niers dans le courant de l'année 1733- FRANCE. De Paris. Plufieurs Libraires débitent ici l'Hiftoire de Charles XII. Roi de Suéde : par M. de Voltaire , avec un titre qui porte pour le lieu de l'im- preffion, le nom de la Ville de Baf- le , chez Ch:jtophle Revis. En deux Volumes in-iz. L'Imprimerie Royale a publié, fur la fin de l'année derrière, le 5 SÇAVANS; "Bombardier François , ou nouvelle Adeibià? de jetter lis Bmbes avec prècifion.. Par M. Belidor , Com- miffaire ordinaire de l'Artillerie, Pro- fiteur Royal de Mathématiques aux Ecoles du même Corps } Membre des Académies Royales des Sciences d'Angleterre & de Truffe , correfpon- dant de celle de Paris. 173 1. /'«-40. Ce Traité a deux Parties : la pre- mière comprend la Table des dif- férentes élévations qu'il faut don- ner aux Mortiers , pour jetter des Bombes à une diltance propofée , 6 un Difcours pour en faciliter l'ufage, fuivi de quelques reflexions fur la caufe des accidens qui fur- viennent dans la pratique , cv h manière de les corriger. M. Belidor - donne dans la féconde Partie un Eflai d'une Théorie lur la poudre à Canon , luivi d'un Traité des Feux dArtirices les plus en ufage à la. guerre , év d'un autre pour la corn- pofitiondeceux qui fe font pour les Réjouiffances. On trouve auffi à la même Im- primerie les Mémoires de l'Acadé- mie Royale des Sciences i pour l'année 1729. Hippolyte- Louis Çuerin , rue S- Jacques , débite : Hiftoire Eccle- fiaflicjne j pourfervir de continuation à celle de M. l'Abbé Fleury , To- MeXXIX^ depuis l'an 1545. juf- qu'àl'an 1 5 50. & Tome xxxe , de- puis l'an 1550- jufqu'en l'an 1555» ;«-4°. Le Tome ix. in-\i. des Sermons eboifis fur les Myfieres de la vérité de la Religion , fur differens fnjets de U Morale Chrétienne , contenant les ; J A N V I Panégyriques , paroîr chez Ph. N. Lot tin , rue S. Jacques , lequel vienr aulfi d'imprimer, Traité de l'Efperancs Chrétienne contre l'efprit de pufillanimitè & de défiance , & contre la crainte excejfive. 1731. in - n. On trouve chez Quittait , rue Galandc , près la Place Maubert > in-âf. Abrégé de la Vie au célèbre Pierre Danés , Ambaffadeur dit Roi François I. au Concile de Trente , Evêjue de Lavanr , Précepteur & Confeffsur de François II. Sic. mort le l$. Avril 1577. avec deux M? moires fur les principales allions de faccjius Danés , parent du premier , Evêque de Toulon , Maure de l'O- ratoire du Foi j Conjeiller d' Etat or- dinaire , décédé a Paris en odeur de fainteté le f Juin ié6$. On a joint à ces trois Pièces un autre Recueil, contenant deux Parties. Dans la première , ou rapporte les Textes de tous les Ecrivains qui ont parlé de l'Evêque de Lavaur , où l'on n'a pas omis l'Oraifon Funèbre de ce Prélat, prononcée par Genebrard à S. Germain des Prez le 27. Avril 1577. ni la DilTertation qui fut faite en 1702. pour prouver que i'Evêque de Lavaur eft le principal Auteur du Livre de Ritibus Ecclcfîa Catholica , imprimé plufîeurs fois fous le nom du Préfident Durant i. La féconde Partie du Recueil con- tient les Opufculesde PierreDanés, qui n'ont pas été imprimés 3 ou qui l'ayant été , font devenu rares. Pierre Gandouin , Quai des Au- guftins , à la belle Image , vient de mettre en vente les Lettres de Saint E R i 1 7 5 2. 59 Jean Chnfojlome , traduites en Fran- çois fur le Grec des PP. Beneditlins de la Congrégation de S. Aiaur oh elles font rangées félon l'ordre des tems; avec des Notes & des Sommai- res , & deux Traitez, écrits du lieu de fon exil à la Veuve Sainte Olim- fiade. 1731. in - 8°. 2. Volumes. Lettres édifiantes & curieufes écri- tes des Alijfuns étrangères par quel- ques Mtjfionnaires de la Compagnie de fefus xxe Recueil , chez Nico- las le Clerc , rue de la Bouderie , Se le Mercier fils , rue S. Jacques , près la Fontaine S. Severin. 1731. in - 11. Guillaume Cavelier & Pierre- François Gijfart, rue S.Jacques, ont achevé l'impreiîïon de l'Ouvrage du R. P. "Buffier de la Compagnie de Jefus, que nous avons annoncé en 1730. dans nos Nouvelles Litté- raires. Il eft intitulé : Cours des Sciences fur des principes nouveaux ' & fîmples , pour former le langage ,- l'efpnt & le cœtr , dans l'ufage or- dinaire de la vie. 1731. in-fol. Hifioire de l'Empire , par M»- HeijJ. Nouvelle Edition, augmen- tée de Notes Hi (toriques & Politi- ques, & continuée jufqu'a prefenr, par M. Vogel , Grand .luge des Gar- des Suides. La Compagnie des Li° braire s. 1731./'»- 12. 10. vol. Etienne Ganeatt , rue S. Jacques , aux Armes de Dombes , a en vente , Hifloire de Gu7man d' Alfarache \ nouvellement traduite & purgée des moralités fuperpiê s , par M. le Sage. 1752. in-11. 2. voL- ornés de figures en taille-douce. Hijloire Negrepontique} contenant- Co JOURNAL D la îrie & les Amours d'Alexandre Caftriot , arriere-neveu de Seander- bergy & d'Olympe la Belle-Grecque, de lit Mai/on des Paleolo^ucs. Tirée des Manufcrits à'Oiïavio-Finelli , de la Duché de Spolette & recueil- lie par lui-même des Mémoires d'un Coloycr Grec en la Côte d'E- ES SÇAVANS, phefe. Le tour mis en ordre & don- né au Public par J. Baudouin. S..- conde Edition , corrigée du • nombre de hautes qui iont dans la première Edition faite en 1^3 1. chez Mufier , Quai des Auguftins, prés du Pont S. Michel, à l'Olivier. 173 1. in-11. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Janv. 1732: Continuation des Mémoires de Littérature & d'Hiftoire. Tome X. Part. II. page 3 Uiftoire de la Çuerre des Hujfites & du Concile de Bajle , 16 Hiftoire de l'IJl; Efpagnole , ou de S. Domingue , ;o Di/fertations Mèdico-Chïrttrgicjucs , fuivant les loix de la circulation , 34 Séthos s Hi/foire ou Vie , tirée des Mémoires Anecdotes de l'ancienne Egypte , 3É Hiftoire du Bàianifme , ou de l'Hércfîe de Michel Baïus , Sic. 4$ Les Privilèges des Suijfes } &cc. jo Lettre de M. de S. André, &c. 5 2 Nouvelles Littéraires , 5 £ Fin de la Table. L E OURNAL DES FOUR L'JNNE'E M. DCC.XXXIL FEVRIER. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. m7 dcc. xxxii. avec approbation et privilege du roy. LE JOURNAL DES SCAVA FEVRIER M. DCC. XXXII. i£5 MONUMENS DE LA MONARCHIE FRANÇOISE , qui comprennent ÏHiftoire de France , avec les figures de chaque Règne que l'injure des tems a épargnées. Terne III. Parle R. P. Dom Bernard de Montfaucon , Religieux Beneditlin de la Congrégation de S. Maur. A Paris , chez Julien-Michel Gandouin , Quai de Conti , aux trois Vertus & Pierre-François Girîart, rue Saint Jacques , à Sainte Therc- fe. 173 1. in-fol. pp. 356. planches 69. CE Volume contient un abrégé de l'Hiftoire de France , en Latin & en François, depuis le re- Fevricr. gne de Charles V. jufqu'à celui de Louis XI. incluhvement , & des Monumens de chaque règne , pour 64 JOURNAL D ^e qui peut regarder les perfonnes des Rois , les Princes 6v les Prîn- ceffes du Sang Royal £v les Grands du Royaume. Ainti l'on voie qu'il clt dans le mémo goût que les deux Volumes précédais dont nous avons rendu compte dans le rems qu'ils ont paru. Nousobferverons feulement que les Monumens qui nous relient depuis le regne de Charles V. font en fi grand nom- bre , fuivant la remarque que fait le P. de Mcntfaucon dans [on Aver- tiflement , &c répandus en tant d'endroits differens , qu'il n'eft pas pollible de les recueillir tous. Il croit en avoir donné alTcz pour que ledeur s'inftruife de la forme des habits , des modes, des manières , des utagesde la Cour, de nos Rois, des Princes , des Officiers ci : la Couronne , cv deschangemens qui y font furvenus dans la fuite des ïïéelcs. Une autre remarque que fait le P. de Monttaucon , dans le même Avertiffement , c'eft que le Roi Charles V. aimoit la peinture , &C qu'il avoit toujours auprès de lui un Peintre appelle Jean de Bruges. Notre Auteur croit que c'eft ce Jean de Bruges qui a fait la plupart des Miniatures , d'après lefquellcs il a donné pluheurs planches qui îeprefenrent des affemblées & des hiftoires particulières. Ce goût pour la peinture s'augmenta fous les rè- gnes fuivans , pendant lefqucls on lit non feulement un grand nombre de Tableaux 5c de portraits , fut tout de Miniatures qu'on infera dans les Mff. des Hiftoires , &c E S SÇAVANS, où l'on repicfenta les Sièges , les Batailles , les Alïemblées fameufes, & les autres choies remarquables que les Hiftoriens décrivent. La Sculpture commença aulfi en ce rcms-li à fournir des Monumens de meilleur goût que dans les fiécles precedens. Nous ne rapporterons rien ici de l'abrégé de l'Hiftoire du règne de Charles V. & de celles des Rois fes Succelleurs, julqu'à Louis XI. nous nous contenterons de rendre comp- te de quelques Monumens , parce que c'eft là le principal objet de l'Ouvrage. Des deux premières planches ^ l'une qui eft alTez groffiere reprefen- tc la cérémonie du Sacre de Char- les V. & celle du Sacre de h Reine Jeanne de Bourbon. Les Pairs alli- ftent à cette fonction cv étendent les mains vers le Roi. Les Pairs Ecclefn ftiques portent la Mitre & la Crolle. Les Pairs feculiers ont la tête nue. Ils portent une courte vefte frangée parle bas. Sur la par- tie de cette planche qui rcprelente Ponction de la Reine Jeanne , il n'y a pour fpedatcurs que des Evêques d'un Côté Se des Dames de l'autre. La planche fuivante qui repre- fente le Couronnement de Char- les V. Se de la Reine Jeanne a été tirée du beau Mf. de Froifard qui eft confervé à la Bibliothèque du Roi. L'Archevêque qui le tient der- rière le Roi lui met la Couronne fur la tète. Parmi les affiftans on re- marque un Prince, qui porte la Couronne , le Sceptre Se le Man- teau Royal. Le ;P. de Montfaucon FEVRI eft perfuadé que c'eft Pierre Roi de Chipre. Dans une autre planche le Roi Charles V. ayant une Couronne ornée de trèfles, &c une fimple vcfte frangée , tient une bannière qu'il donne à un Chevalier qui eft à ge- noux. Un Archevêque qui tient fa croix de la main gauche , bcnit la bannière de la droite. Notre Au- teur croit que cette bannière eft l'o- riflamme , que le Roi donne à un Seigneur pour le faire Porte-Ori- flamme. Il y en a eu deux fous Charles V. Arnoul Sire d'Audcne- han , qui fe démit du Bâton de Maréchal de France pour porter l'Oriflamme l'an i $6 8- & Pierre de Villiers Grand Maître de France en 1 572. » Il y a apparence que dans 3» la cérémonie exprimée fur cette » planche , le Roi donne cette » Charge à l'un de ces deux Sei- u gneurs. Comme Charles V. aimoit les Sciences , on lui prefenta pluficurs Livres. On a communiqué au P. de ÎVlontfaucon une Miniature , où Nicolas Orcfme Grand Maître du Collège de Navarre & Précepteur de ce Roi , lui prefente la traduc- tion qu'il avoir faite des Politiques d'Ariftote. » Le Manteau Royal » de Charles V. eft peint en Outre- j> Mer femé de fleurs de lys d'or. «La Soutane d'Orefme eft en «pourpre , le Surplis blanc , l'Au- » mufe de couleur grife. Les habits y des gens de loi font en outre-mer 31 relevé d'or , à l'exception de ce- » lui qui porte un Chaperon de fa- j» ble , dont la robe cil ceinte en E R ; 1 7 5 2; 65 r> pourpre. Celui qu'on voit debout >>à l'autre côte de Charles V. êft » Robert de Fiennes Connétable de » France. Orefme avoic traduit la » Bible en François. On voit dans une autre planche Jean Corbechon Auguftin & Cha- pelain de Charles V. qui lui prefen- te un Livre fur les proprietez des chofes. Le Roi eft alîîs fur fon Thrône comme dans unlicdejuftice, avant plulieurs perfonnes alllfes à droite & à gauche. Le Connétable qui tient l'épée nue eft alïis fur les degrez du Thrône. Il eft en habit militaire , ayant fon cafque à fes pieds. L'autre perfonnequieft aflîfe lur les degrez du Thrône eft auffi nue tète , mais en habit long. Jean Golem Provincial des Car- mes eft un genoux en terre devant le Roi. Ce carme eft reprefenté écrivant devant le Roi fon Livre intitulé : Rationd des divins Offices. Charles Dauphin , qui eft à côté du Roi , paroît revêtu de fon blafon de France Se de Dauphiné, & Louis Duc d'Orléans avec la brifure du Lambel à trois pendans. Derrière la Reine , dont l'habit eft fémé de fleurs de lys , font fes deux filles Marie & Ifabel , dont les habits fontauflî femésde fleurs de lys. On fçait que dans ce tems-là 5 on ne re- prefentoit les Seigneurs qu'avec leur blafon. La dernière planche du règne de Charles V. eft des plus fingulie- res. C'eft un duel d'un Gentilhom- me contre un Chien. Il eft repre-- fente fur le manteau d'une des Che- minées de la grandeSalle duChâteau 66 JOURNAL D de Montargis ', mais comme on a peine à prefent à reconnoître ce qui y cft reprefenté, le P. de Mont- faucon a fait faire la planche d'a- près une vieille eftampe gravée il y a plus de deux cens ans. Voici l'a- bregé de ce que notre Auteur rap- porte fur ce duel d'après la Coloin- bicre , dans fon Théâtre d'honneur cv de Chevalerie. UnArcher de la garde duRoi étant envieux de la faveur dont le Roi ho- nora un de fesCompagnons nommé Aubry le tua dans la foret de Bon- dy , n'ayant pour témoin de fon •rime qu'un chien qui appartenoic à Aubry. Ce chien , depuis ce tems- là pourfuiyoit Macaire par tout où il le rencontroit. Cela fie naître des ioupçons. Le Roi interrogea Ma- caire qui nia qu'il eût commis le meurtre. Après quoi le Roi voulut, que fuivant l'ufage du duelobfcrvé dans ce tems-là , Macaire fe bâtît en champ clos contre le chien. L'or- dre fut exécuté en prefencede tou- te la Cour , le Gentilhomme n'ayant qu'un bouclier & un gros bâton. Le chien eut allez d'adrefle pour prendre le Gentilhomme, le renverfa & lui fit crier mifericorde. Macaire avoiia enfuite le crime 8c fut envoyé au Gibet, fuivant les M:moires qu'on a envoyés deMon- urgis au P. de Montfaucon. Nous ne rapporterons qu'un exemple de chacun des trois règnes fuivans. Nous prendrons la pre- mière planche du règne de Char- les VI. elle reprefente le Sacre de ce Prince ; ou pour parler plus juite , ce Prince accompagné des dfouze ES SÇAVANS; Pairs. Llle eft tirée d'une TapiiTcrie de la Chapelle Impériale de Bru- xelles. Le Roi y elt allis kir un grand Thrônc , il tient de la droite la main de Juftice cv de la gauche un Sceptre , au fommet duquel il y a un Lion. Sur le taire du Thrône font trois Ecultons de France à rro;s rieurs de lys. Les fix Pairs Laïcs font à la droite du Roi. Cinq d'en» tr'eux font en habit long , les trois Ducs font diftingués pir l'hermine, ils ont tous cinq fur la tète une ef- pece de guirlande. Le Comte de Touloufc a un habit court , avec une Couronne d'une forme dngu- liere. Les fix Pairs Ecclcfiaitiques font à la gauche, crofles Se mitres ; leurs Chapes paroilfent à peu près de même forme que celles dont on fefert aujourd'hui. Chacun d'eux a fon Ecullon. Mais celui qui a tait le defTein de ces Tapifleries n'a point été exact dans ces Armoiries , foit par rapport aux couleurs, foit par rapport au fujet. René le bon Roi de Jerufalcm éroit un excellent Peintre , fuivant Brantôme , Ruh & Bouche. Ce Prince s'eft peint lui-même : ce portrait eft confervé en original dans une Chapelle des Carmes d'Aix en Provence. En 171 1. on en fit une eftampe à Aix en taille-dou- ce , & c'eft fur cette eftampe que le P. de Montfaucon a fait faire la fi- gure, qu'il donne à la planche 47. numéro 8. il y a ectre infeription autour du portrait original : Rtna~ tus Rex pbemfaUm , tttriiifque Sici- lix, Diix AnâegAvle-, T ravine 1 Arum Cernes. Notre Auteur dit que ce FEVRIE Tableau , autant qu'on en peut ju- ger par l'eftampe , paruît être fait de main de Maître. René étoit déjà arifon quand il le fit. Il porte le Collier de l'Ordre de S. Michel, inftitué par Louis XI. fous le règne duquel il mourut l'an 1480. âgé de 72. ans. Son EculTon , qui eft au- deflous , a fur le tout les armes d'Arragon. Il fe difoit Roi d'Arra- gon , à caufe d'Iolande d'Arragon fa mère. On n'y voit pas celles de Lorraine , cependant il prenoic aufîï le titre de Duc de Lorraine. Au-defibus de fes armes cft fa devife à' ardent defir , & plus bas celle de fon Ordre, Los ; le furplus de cette devife , en croijfant } ne paraît pas. C'ttoit le Roi René qui avoit in- ftitué cet Ordre , où l'on ne dévoie ad mettre que des Chevaliers ou des Ecuyers S. Maurice en étoit le Pa- tron. Les Chevaliers qui étoient au nombre de cinquante , dévoient porter fous le bras droit un croi fiant carnaïUè , fur lequel étoif écrit en lettres bleues , Los en Croiffant, Le ferment que faifoientles Chevaliers quand ils étoient admis comprenoic en abrégé leurs Reglemens. Ils ju- roient : la Méfie ouir oh pottr Dieu font donner, dire de Notre-Dame eu manger droit le jour, que pour le Souverain ou Maître ne s'armer y ai- mer les frères , ou garder fon honneur , lête & Dimanche doit k Croiffant R ; 1 7 3 2. 67 porter , obéir fans contredit toujours au Sénateur. Une des Pièces des plus curieu- fesqueleP.cJcMonthucona récueil- lies fous le règne de Louis XI. eft le Parlement tenu par Charles Duc de Bourgogne. Elle eft tirée d'un Tableau original Se fait dans le tems même, qui appartenoit autre- fois à M. de Gagnieres Se qui eft prefentement dans le Cabinet de M. le Maréchal d'Eftrées. Le Duc eft allîs fur un Thrône orné d'un Dais. Il porte une Couronne fer- mée , avec un long manteau ou grand collier d'hermine ; par l'ou- verture du manteau on voit fa Cui- rafle 5c tout fon habit de guerre. A fes pieds eft aftîs un Seigneur la tête nuë, tenant fon épée élevée. Ceux qui tiennent la Sceance font allîs fur un banc qui eft au niveau des pieds du Dais ; d'un côté font le Chevalier Hugonet , trois Préfi- dens , quatre Chevaliers Se huit Confeillers Eeclefiaftiques. De l'au- tre côté font affis deux Seigneurs, fix Maîtres de Requêtes, & douze Confeillers Laïcs. Dans le Parquet font des Procureurs Généraux de* Secrétaires, des Greffiers Se d'autres Officiers inférieurs. On ne peut donner qu'une idée générale de ces planches , ceux qui aiment les Antiquitez Françoifes les verront dans le Livre même. 63 JOURNAL DES SÇAVANS, F. IGNATII HYACINTHI AMAT DE GRAVESON, Sîcix Facultatis Parifienlis Dodons , c'-c Collegii Cafanacenfis Theologi, Ord. Prxdicatorum Epiftolar ad amicum fçriptae Thcologico- Hifto- rico-Polcmicx , in quibus Doi-hun de Gratiâ fe ipfâ elticaci & de Prxdcftinatione gratuit! ad gloriani antè omnem prxvifionem merito- rum , contra Scholx Thomifticx adverfarios, aflerirur ac vindicatur. Opus Sanc~tilTîmo Domino Noftro Bcnedicto XIII. Pontifia Maximo nuncupatum. Roma , ex Thypographià Rochi Bernabx. 1718. 17*9. 1730* C'cft-à-dirc : Lettrts HiÇtoriques , Théologiennes & Polémiques , dans lefquellss on foiuient &on défend La DoClrine de la Grâce efficace par elle-même & de la Prédeflination toute gratuite à la gloire avant prévijïott des mérites , contre les adverfaires de l'Ecole de S. Thomas, dédiées ait Sou - & totalement oppofé auxfentimens de S. AuguftincV'de S. Thomas. On voit par-là que cet Ouvrage cil un Traité complet fur la prémo- tion phyiîque prife-au fensdesTho- miftes ; Traité qui ne diffère des autres que par la forme que fon Février. E R. i 175 2: 6$ Auteur lui a donnée. Comme il feroit prcfqu'impolîï- ble de former la moindre penfée nouvelle fur une matière fur la- quelle toutes les perfonnesraifonna- bles ont réfléchi , & qu'on trouve traitée à fond dans mille & mille Livres de controverfe où les habiles gens n'ont rien oublié de ce qui pouvoit établir leur Syftême, ou dé- truire celui de leurs adverfaires; 0:1 ne doit pas s'étonner lî le P. A mat de Gravefon n'a fait que réunir fous un point de vile particulier ce que les frequentesdifputesdes deux derniers ficelés ont appris à tout le monde. Audi n'entrerons - nous point dans le détail des trente-trois Let- tres qui compofent les trois Volu- mes que nous annonçons , nous nous contenterons de rapporter les raifons qu'employé notre Auteur, pour prouver que le Syftême du Thomifme n'eft ni celui de Calvin, ni celui de Janfcnius. Pour repouffer l'accufarion dw Calvinifme, le P. Amat s'adrelTcaa P. de Meycr qui dans les quatre DilTertations qu'il fit imprimer à Bruxelles en 1715. fous ce titre: De mente ConcdiiTndentini , traite la Dodrine des Thomiftcs de Cal- vinifme , & foûtient que le Conci- le de Trente l'a condamnée comme une fuite des Dogmes de Calvin ' adoptée par le Dodeur Barjncz attribuée à tort à S. Thomas , con- damnée parles L'nivcrfitez, rejettee par tous les Sçavans, oppofée à tous les fentimens des Saints Pères, en- nemie de la liberté, & injurieufeà la Grâce fufHfante & à la Sainteté de Dieu. K 7o JOURNAL DE Pour répondre à cette objection que notre Auteur appelle une noire éc maligne calomnie , il prend deux routes. La première cft d'éta- blir une différence eflcnticllc entre le Syftême de Calvin & celui des Thomiftes. La féconde eft de prou- ver que le Concile de Trente n'a jamais condamné les opinions de ces derniers. La grande différence qui fc trou- ve entre Calvin & les Thomiftes fur ces matières , c'eft que Calvin prétend que la volonté humaine fousi'act.iondeDieu 6c excitée par fa Grâce efficace , n'agit que volon- tairement, parce que telle eft fa nature , mais jamais librement, parce que la liberté eft totalement abiorbce par la détermination ac- tuelle de la Grâce , 6c qu'au con- traire les Thomiftes enfeignent que la volonté humaine actuellement remuée &c déterminée par la Grâce efficace , agit pourtant tréi-librc- ment. Calvin dit que la Grâce efficace eft caufe totale , compktte & uni- que de la converfion du cœur , de telle forte que le Libre-arbitre n'eft point caufe prochaine de cette con- verfion. Les Thomiftes au contrai- re , foûtiennent que la volonté hu- maine excitée par la Grâce cft caufe prochaine , libre , totale, 6c com- plexe de fa converfion ; mais caufe cependant fubordonnée à Dieu , de telle forte , que quoique l'homme foit caufe féconde & prochaine de tous fes actes librcs,Dieu cependant, comme caufe première , univerfcl- 1c & fource de tout être fait par fon 5 SÇAVANS; aclion prédéterminante £c phyfi- que , que la volonté agit ex veut li- brement. C'eft-à-dirc, que Calvin n'admet qu'une caufe totale , fea- voir la Grâce, & quelesThomiftes en admettent deux , fçavoir , la Grâce 6c le Libre-arbitre. Pour ex- pliquer ce fentiment, ilsapportent pour exemple la main 6c le marteau qui tous deux pouftent un clou; la main, à ce qu'ils difent , eft caufe totale , le marteau cft caufe totale de l'impulfion du clou, mais le mar- teau eft fubordonné à la main. Pour prouver que le Concile de Trente n'a point condamné le fenti- ment des Thomiftes, notre Auteur apporte trois argumens. Il tire le premier du Décret de Benoît XIII. donné en 1724. 6c de la Conftitution Pretiofus , publiée par le même Pape en 1727. où Sa . Sainteté approuve &: com- ble de louanges le Syltême des Thomiftes. Il tire le fécond de ce que le Concile de Trente n'a condamné les erreurs de Luther 6c de Calvin que fur les principes des Tho- miftes. Il tire le troifiéme enfin de ce que le fentiment de la Grâce efficace, avant Se depuis le Concile de Tren- te , a toujours été publiquement foûtenu dans les Ecoles Chrétiennes & Catholiques. Notre Auteur fait enfuite , à l'é- gard de Janfenius, ce qu'il a fait d'abord à l'égard de Calvin , c'eft- à-dire qu'il établit dés différences marquées entre le Syftême de cet Evêque 6c celui de S. Thomas : les voici. F E V RI E s°. Les Janfeniftes fe déchaînent -contre la Théologie Scolaftique , Se cette mêmeThéologic eftinhniment rcfpeclée par les Thomiftes. i°. L'état de pure nature que Janfenius foûtientêtreimpoliible& contraire à la juftice de Dieu eft reconnu poffible par les Thomiftes & compatible avec les attributs di- vins. 3e. Janfenius affirme qu'il eft de foi qu'Adam, dans le premier inftant de fa création , reçut de Dieu la Grâce faniftifiante ; au contraire les Difciples de S. Thomas, quoiqu'ils enfeignent qu'on ne peut fans témé- rité , affirmer que l'homme ait été créé dans l'état de pure nature , c'eft-à-dire fans grâces , Se qu'ils foûtiennent qu'il eft de foi que Dieu a accordé la grâce fancïifiante Se la juftice originele à nos premiers parens avant leur chute, ne difent pas cependant que c'eft un dogme à l'égard du premier moment de leur création. 40. Janfenius enfeigne, comme d'après S. Auguftin , que l'igno- iance invincible n'excule pas de pé- ché , opinion que les Thomitîes ont toujours combattue. 50. La neceffité que les Janfeni- ftes admettent dans tous les acles libres depuis la chute d'Adam n'a jamais été reconnue par les Tho- miftes. 6°. Janfenius avance que la Loi Se les Préceptes de Moïfe n'étoient accompagnés d'aucune grâce qui put les faire accomplir , Se les Tho- miftes foûtiennent que Dieu n'a ja- mais retufé aux Juits une grâce fut- R, 17)2- 71 filante qui leur rendoitlcS préceptes poifibles , Se qui les foûmettoit aux punitions Se aux recompenfes. 70. L'impuiffance où les Janfe- niftes fuppofent que les Juftes mê- mes fe trouvent quelquefois d'ac- complir le précepte , malgré tous les efforts qu'iis tont pour l'accomplir, divife encore ces deux Ecoles , puif- que jamais les Thomiftes n'ont re- connu une telle impoffibilité. 8°. Les Janfeniftes rejettent la grâce furfifante qu'admettent les Thomiftes , car c'eft précifemenr, de cette grâce qu'a tant ri Se tant fait rire l'Auteur des Lettres Pro- vinciales. 90. Janfenius croit que la volon- té qu'a Dieu de fauver tous les hommes après le péché d'Adam eft: une volonté ftcrile&: inefficace, qui ne l'engage point à leur donner des fecours luffilans pour leur faire ac- quérir la béatitude éternelle , & les Thomiftes foûtiennent que cette volonté eft en Dieu , vraye Se fin- cere , Si qu'il prépare à tous les hommes , Se à chacun d'eux en particulier des grâces fuflâfantes , dont l'ufage ou l'abus les fait très- juftement mériter ou démériter. io°. Janfenius enfeigne que J. C. n'a répandu fon fang que pour le falut des Elus , & non pour celui des réprouvés , Se l'Ecole de Saint Thomas foûtient que ce Sang pré- cieux a été répandu pour le falut de tous les hommes en général , avec cette feule différence , qu'il a été efficacement répandu pour le falut des Elus & fuffiiamment pour celui des réprouvés. Kij 72 JOURNAL DE 1 1°. Les Janfeniftes prétendent que la Gracu efficace n'eft néceûai- re qu'àcaufe tic la chute ciu premier homme, & qu'avant ion péché la gface verfatile & foûmife au libre- arbitre leur fufhToic; & les Thomi- ftes croyent que dans l'état d'inno- cence , comme dans l'état de péché, la prémotion phyfique eft égale- ment neceffaire, parce que dans l'un & l'autre état la créature eft elTen- tiellement foûmife à Dieu. 1 2°. Janfenius avance que la grâce dans l'état de la natutc tom- bée cft efficace par elle-même, quand elle eft fupericure à la cupi- dité , & qu'elle détermine néceffai- icment la volonté au bien par une délectation celefte indélibcrceSc vie • torieufê ; mais qu'au contraire ,' quand la cupidité eft fuperieure à la délectation celefte , la volonté hu- maine eft néceffairement détermi- née au mal ; principe d'où l'on doit conclure, ditnotre Auteur, que dans l'état de la nature corrompue la volonté humaine n'a qu'une puif- fance paffive , indifférente à la dé- lectation celefte ou charnelle ; mais- qu'elle manque véritablement de la piiffance d'agir &z de ne pas agir/ puifTance dans laquelle tous tes au- tres Théologiens font confifter l'cf- fence delà liberté; or ce principe cft oppofé aux fentimens des Tho- miftes , qui tirent l'efficace de la grâce, non d'une délectation celefte, indéliberée & fuperieure aux de- grez actuels de la cupidité ; mais de la toutc-puifiance de Dieu , qui difpofant de tout avec force Se douceur , détermine la volonté fans S SÇAVANS, blclTcr la puiffance qu'elle a d'agir ou de ne pas agir. i'3°. Les Janfeniftes foûtien- nent encore que la grâce efficace rrc fuppofe pas dans la volonté de l'homme une vraye , plei- ne , complette & prochaine puif- fance d'agir ; mais qu'une telle puiflanec ne lui cft conférée que par la grâce efficace , qui (e trouvant fuperieure à la cupidité , la déter- minent à l'action , d'où fis con- cluen: qu'on ne fçauroic refîfter à la grâce , que les Préceptes de Dieu font quelquefois impoffibles , que pour mériter ou dîmeriterdans l'é- tat de la nature corrompue , la li- berté qui exclut la contrainte eft: requife , mais non celle qui exclud la néccflké ; éc les Thomiftcs foû- tiennent tout le contraire. 140. .Ces deux Ecoles enfin ne différent pas moins à l'égard de la notion ô£ de l'effence de la grâce fuffifante. Cette grâce chez les Jan- feniftes ne paroît qu'une grâce de' nom, puifquc la grâce qu'ils admet- tent n'eft efficace ou inefficace qu'à raifon des degrez de cupiditez qu'elle a à vaincre dans la volonté humaine. Or il s'en faut bien que ce foit là la notion que donnent les Thomiftes de la grâce fi'ffifar.te, puifque dans leur Syftême la grâce fuffifanrccvla grâce efficace differenr de telle forte que jamais l'une ne peut devenir l'aurre. Notre Auteurnc fe consente pas' d'établir ces différences /il pouffelc zélé pour (on Ecole , jufqu'à foute— nir qu'elle eft plus éloignée du Sy- fteme de Janfenius fur la grâce ., HVRI qiiff celle des Moliniftes. Il apporte en effet plufieurs conrormitez entre les opinions de Janfenius & les opinions de Molina , qui non feu- lement réunifient ces deux Théolo- giens , mais encore les diftinguent viiîblement de celle des Thomiftes: nous en rapporterons quelques- unes: i°. Les Moliniftes admettent une feience moyenne en Dieu , qui le dirige dans les décrets qui con- cernent les futurs contingens ,' 6: dans le don de la grâce congrue , accommodée aux tems , aux lieux , & aux circonftanccs dont fon effi- cacité dépend ; or , foûtient notre Auteur, dans le Syftême de Janfe- nius , qui conftitue l'efficacité de la grâce dans une délectation celefte, victorieufe 5c fuperieure aux degrez dé cupidité qu'elle trouve dans la volonté , il faut nécessairement que Dieu avant de donner fa grâce, examine combien la concupifcence qu'il veut vaincre a de degrez , car fans cela il ne pourroit jamais fça- voir quel fera l'effet de fes dons. Molina Se Janfenius font donc d'ac- cord quant au fond fur la feience moyenne. z°. Les Moliniftes difent que la grâce n'eft pas efficace par elle-mê- me, &c de fa nature; mais qu'elle eft rendue" telle par le concours des circonftances ; Janfenius doit dire la même chofe , puifque fa grâce cft rendue efficace ou inefficace, par le moins ou le plus de degrez de cupidité que lui oppofe la volonté à laquelle elle cft accordée. j-°. ■ Les Théologiens Moliniftes E R , 173 s. 73 & Jarrfehift.es enfeignent également que de deux grâces fuffifantes par- faitement égales entr'elles Se accor- dées à deux differens hommes , l'une peut devenir'effïcacc & l'autre inefficace, ce que nient abfolumcnc les Thomiftes. 40. Les Difciples de Molina , croyent que la grâce ne peut deve- nir actuellement efficace qu'à une condition qui dépend totalement de l'homme , c'eft-à-dire à condition que l'homme y confentira ; les Jan- feniftes difent la même chofe en d'autres termes , puifque dans leur Syftême la grâce ne devient efficace qu'à raifon de l'infériorité de la concupifcence , ou d'une moindre refiftance delà volonté humaine. j-°.Le Syftême de Molina & celui ' de Janfenius ont tous deux , félon notre Auteur , une malheureufe conformité , c'eft qu'ils font égale- ment clairs , également faciles à comprendre. Il faut être ftupide, dit-il , pour ne pas faifir d'abord & fans la moindre peine , leur fa- çon d'expliquer l'efficacité de la grâce : QtilS ttt/ti ftupidas qui hanc' doElrinam affuttm ©~ facdlirne "ton ' inteUiaat ? Or ce vice ne peut être reproché , continue-t-d , à l'Ecole de S. Thomas, après toutes les ex- plications'qu'elle donne , toutes les raiions qu'elle apporte , toutes les dittinetn ns qu'elle imagine, pour foîitcnir fon Svitême j on a la pieufe confolarion de fe retrouver vis-à-vis d'un Myltereauîii obfcur, aulli impénétrable , auffi profond qu'n ,)ui(Te l'être. 6". Les Moliniftes &lesjanfc- 74 JOURNAL DE niftes s'accordent parfaitement à dé- crier la grâce futEiantc des Thomi- ftes , & l'on ne fçauroit dire laquel- le de ces deux Ecoles a tait le plus d'effort pour combattre une grâce qui donne à l'homme tout ce qui lui eft neceflaire pour pouvoir agir; mais qui ne lui donne pas tout ce qui lui eft neceflaire pour agir en effet. 7°. L'état d'innocence dans le- quel les Moliniftes & les Janfeniftes foûtiennent que la grâce efficace n'etoit pas neceflaire à l'homme, mais feulement une grâce verfatile3 indifférente & foùmile au libre-ar- bitre , eft encore un point de doc- trine qui réunit ces deux Ecoles , &C S SÇAVANS; les dilringue de celle des Thomi- ftes. 8°. Ces mémos Théologiens s'accordent a nier aux Thomiltes que 1a prémotion , ou la prédeter- mination phylique , foit nécedaire après la chute de l'homme pour tous les actes tant naturels que fur- naturels, & pour chacun d'eux en particulier. 9°. Enfin ces deux Ecoles foû- tiennent également qu'une grâce efficace par elle - même ablorbe le libre-arbitre , cv néceffite la volon- té; Se les Thomiltes font des efforts infinis pour éloigner ces deux conr clufions de leurs principe;. TRAITE' HISTORIQVE ET MORAL DE L'ABSTINENCE de la viande , & des révolutions qu'elle a eue depuis le commencement du monde jufqu'à prefent , tant parmi les Hébreux que parmi les Payens , les Chrétiens & les Religieux anciens & modernes , divifé en quatre Parties. Par le R. P. D. Grégoire Berthelet, Religieux BenediElin de la Congré- gation de S. Vanne & S. Hydulphe. A Roiien , chez la Veuve Hérault. 1731. /tf-40. pp. 511. & fe trouve à Paris, chez Lottin, ruéS. Jac- ques , à la Vérité. CE T Ouvrage , quoique fur une matière qui paroît auto- rifer bien des recherches, n'eft pas auffi étendu que le titre femble le promettre. Le but principal de l'Auteur eft de montrer que l'abfti- nence de la viande eft effenticlle à l'état Monaftique. Ce n'eft que par rapporta ce deffein qu'il parle quel- quefois de l'abftinence des Chré- tiens en generd. Mais comme les ufages & les devoirs des Moines n'intereffent que médiocrement la plupart des gens du monde, il a cru qu'en leur faveur il lui feroit permis de commencer ce Traité par l'Hiftoire des Abftinences , Se des Jeûnes qui ont été obfcrvés de- puis L'ongine du monde julqu'i prelent , tant parmi les Hcbreux &C les Chrétiens que parmi les Payens mêmes. Tout l'Ouvrage eft divifé en 4. Parties , &: chacune de ces Parties en différent Chapitres. Nous allons rendre compte des deux premières, autant que l'abondance & ladiver- ficé des chofes que l'Auteur y fait FEVRI entrer pourra nous le permettre. Nous refervons les deux fuivantes pour le prochain Journal. Dans la première Partie , il en- treprend de faire voir qu'en tous tems & en toutes Religions les hommes ont été perfuadés que la pureté de l'efprit dépendoit en quelque façon de la dilpofition du corps, & que fur ce principe ils ont pratiqué différentes fortes d'abiU- nences ; les premiers hommes ne fe nourriffoient , dit-il , que d'herbes & de fruits. Depuis même que Dieu eut permis à Noé de manger de la chair, la plupart de fes defeen- dans , quoique tombés dans l'idolâ- trie , ne regardèrent cette permif- fion que comme une tolérance dont ils ne voulurent jamais ufer , &c plufieurs Auteurs affurent que ce ne fut feulement que du tems de Pig- malion qui vivoit 900. ans avant J. C. que l'ufage de la viande de- vint commun en Orient. On peut dire à la vérité que dans ces premiers tems les hommes s'ab- ftenoient de la chair plutôt par une horreur naturelle pour l'effufion du fang , que par un principe de Religion ; mais il n'eft pas moins vrai qu'ils ne furent pas iong-tems fans regarder V abftinence & le jeû- ne comme desdifpofitions necellai- res pour arriver à la connoiflance de la vérité , ou pour fe rendre agréables à Dieu. Les Prêtres Egyp- tiens gardoient une abftinence très— rigoureufe dans le tems de leurs purifications ; le vin & la viande croient interdits à ceux qui croient tonfacrésau culte d'J/ts 1 telle étoic E R ; 1 7 5 2. 7j aufli la pratique des Mages parmi les Perfans. Et notre Auteur ne pen- fe pas qu'on doive dire que la croyance où ils étoient de la rranf- migration des ames dans le corps des bêtes fût la feule raifon qui les empêchât de manger de la chair , puifqu'ils réduifoient ceux qui de- mandaient à être initiés dans leurs Myftercs à une abftinence très-du- re. On voit par Tertulien & par S. Léon que cet ulage étoit com- mun parmi les Prêtres des autres Nations ; &: perfonne n'ignore que les Romains jeiinoient pour appai- fer la colère des Dieux , lorfqu'ils s'en croyoient menacés par certains prodiges. Les Philofophcs qui faifoient profeflion d'une morale plus pure que le commun des hommes , s'ab- ftenoient auill de viande. Quoî- qu'en difent plufieurs Auteurs , D. Berthelet foûtient que Pythagore ne mangeoit de rien qui eut été animé ; il ordonnoit la même chofe à fes difciples. Les vers attribués à Orphée condamnent l'ufage delà chair. Ce hit pour en infpirer plus d'horreur qu'il inventa j félon quelques - uns le Syftême de la tranfmigracion des ames. Mais • fuivant notre Auteur , il le tenoit des Egyptiens , comme ceux-ci l'a- voient reçu des Gymnofophiftes. Les Philofophes Indiens re^ar- doient comme une grande impiété de manger de rien qui eut eu vie» Et ce qui montre , félon lui, que, la Mctempfycofe n'étoit pas le feul principe de cette abftinence c'eft qu'ils y joignoient des jeûnes 7€ JOURNAL D extraordinaires. Encore aujour- d'hui la plupart des Brachmanes danslcs Indes , Se des Bonzes dans le Japon ne fe permettent point l'ufagc delà viande cV du vin, ni mê- me celui du pcilîon. Socratc trouve ici fa place parmi les sibftinents. Mais fur tout Zenon étoit fi rigide pour lui-même fur ce point, que fes jeûnes lui avoient rendu le vifage, pale & livide, enforte qu'il avoir vérifié cette parole de l'Oracle, que pour bien vivre , /'/ faut être de la couleur des morts. Epicure lui-mê- me , dont la moraje n'en: fi décriée que parce qu'elle eft mal entendue, .défendit à les Difcipies l'ufage de la chair , comme nuifible à la fanté. Sur la porte de fon Jardin on lifoit ces paroles. Ici efl le fouverai» bien. Celui qui a la garde de ce lieu vous y recevra avec bisn~veillance & poli- t'.ffe ; il vous donnera de la bouillie , & de l'eau en abondance. Te polenta txcipiet , & acjuam large aâmini- flrabir. Enfin comme un homme rempli d'un objet le voit par tout , D. Berthelet trouve dans Horace, tout Epicurien qu'il étoit, un mo- dèle d'abftinence ; i'r ne mangeoit ordinairement .que des herbes Se des légumes ; c'eft toute la chère qu'il promet à un ami qu'il invite à fouper. * De tous ces exemples, l'Auteur en conclut que les Sages du Paganifmeont fenti par les feu- les lumières de la raifon , combien une vie frugale jointe fur tout à l'abltinence de la viande , étoit ne- ccfTaire pour rendre les forces de J Hor. L.l.Fpi,}. ,-. ES SÇAVANS, l'amc fuperieures à celles du corps. Jls avoient pour maxime , dit-il , en s'abandonnant à L'cnthoufiafmc Poétique : Que celui qu'un noble efprit anime A s'élever jufqn'au fublime , Et qui plein de hauts fentimens S'attache aux fujets les plus grands, Doit obferver d'abord à la manière an- tique Avec la pale aufteritc , Comme un Philofoplie Cynique, Les plus ieveres loixde la frugalité. C'eft ainfi qu'il traduit ces trois vers de Pétrone : Artis fever» fi quisamat effectus, Mentemque magnis applicat , prius more Frugaliratis lege paileat exacta. Après avoir ainfi délaffè fon Lec- teur par ce petit morceau de Poé'fie, D Berthelet fe replonge dans l'éru- dition , cv remonte jufqu'aux Pa- triarches , & aux Juftes de l'ancien Tclramrnt , qui ont précédé letems dcMoyfc. Il avoue que l'Ecriture ne nous dit rien de leur abftinencc; mais il ne doute pas que Dieu ne leur ait infpué beaucoup d'amour pour cette vertu. Il eft du moins certain que Moyfe jeûna pendant 43. jours pour fe préparer à rece- voir les Tables de la Loi. Ce fut alors que Dieu renou v.ella la défen- fc qu'il avoit faite à Noé de manger de la chair avec lefang, cV: qu'il permit au peuple Hébreu d'ufer de celle de tous les animaux qui pou- yoient s'offrir en faerifice. Du refte la F E V R I ïi Loi ne prefcrivoit qu'un ieul jour de jeûne folemnel quiétoit ce- lui des expiations ; mais les Juits y en ajoutèrent enfuitc pluficurs au- tres ; Se l'Hiftoire Sainte fait foi que toute la Nation , Se les particu- liers y avoientfouvent recours pour appaifer la colère celefte -, mais il ne paroît pas que dans ces occaiions ils s'abftinffent de l'ufage de la viande. On voit par les Auteurs Erophanes que les Juifs avoient la réputation d'être de grands jeûneurs. Les Juifs modernes comptent en tout 1 9. jours de jeûnes dans leur Calendrier , & font pour lors abfti- nence de vin Se de viande. On n'oublie pas les Nazaréens , les Rechabites , les Pharifiens , les Effeniens , Se les Thérapeutes , Sectes fameufes parmi les Juifs, Se qui toutes avoient certaines ablti- nences qui leur étoient particulières. Comme S. Jean ne vivoit que de fauterelles Se de miel fauvage, il fcmble probable à notre Auteur , que fes Difciples ne mangeoient point de viande , tout lui paroiffant robable lorfqu'il s'agit de groiiîr c nombre des Abftmens. Mais le retabUlfement de l'ab- ftinence perpétuelle de la chair , croit , dit-il , refervé à J. C. qui ve- noit pour reformer ce que la Loi de Moyfe n'avoic que toléré. Il veut bien cependant convenir que le Sauveur n'a pas érigé l'abftinencc de la viande en précepte , pourvu qu'on lui accorde qu'elle eft de confeil pour tous ceux qui auroient aiTez de force Se de fanré pour en (bûtenir la privation. L'exemple de Février. I E R; 175*: 77 J. C. celui des Apôtres Se des pre- miers Chrétiens lui en paroîc une preuve fans réplique. Il tâche enfuite de montrer par une tradition continuée jufqu'au douzième fiécle , qu'il y a toujours eu, même parmi le commun des Chrétiens , quelques perfonnes qui faifoientabftinence de viande. Les Clercs , les Veuves Se les Vierges confacrées à Dieu l'obfcrvoient , Se plus communément & plus régu- lièrement. On voit dans l'Orient Se dans l'Occident grand nombre d'Evêques Se de Prêtres qui fans être engagés dans l'état Monaftique , faiioient abftinence perpétuelle de viande. La tradition fur ce point eft pouffée jufqu'au quatorzième fiécle ; les bornes d'un Extrait ne nous permettent pas de rapporter ici les autoritez dont l'Auteur fc fert pour l'appuyer , non plus que ce qu'il dit fur les diverfes héréiîes qui fe font élevées , les unes pour condamner l'ufage de la viande, Se les autres pour blâmer les jeûnes Se lesabftinences qucl'Eglife ordonne en certains tems. La féconde Partie nous offre une Hirtoire très-détaillée de l'abftinen- ce des Moines Se des différentes ré- volutions qu'elle a éprouvées depuis leur origine jufqu'à ces derniers tems. Tout le monde fçait jufqu'où les Orientaux t Se fur tout les an-. ciens Solitaires Se les Moines d'E- gypte ont porté l'abftinence. Ils ne mangeoient jamais de chair tout au plus quelques fruits , Se quelques légumes •, Se quoique dans la fuite ils le foient relâchés de leur 78 JOURNAL D première aufteriré , ni le Schifme , ni les ravages des Sarazins , ni i'hé- réûe dans Laquelle plu-heurs fe font précipites, ne leur ont jamais tait rompre l'abftincnce de la viande. On ne voie t oint que les Pères Si les Conciles leur ayenr fait aucun re- proche fur cet article. Seulement aujourd'hui quelques Moines Grecs fc croyent permis de manger de la viande, lorlqu'ils font en voyage -, Se s'ils en goùtoient en certaines rencontres-, c'étoit, comme le leur ordonnoit S. Baille , dans la crainte d'être regardés commeManichéens. Du relie, l'abftinence de la viande a toujours été regardée parmi eux comme cfTentielle à la vie Monafti- que. Les premiers Moines d'Occident qui s'etoient formés fur le modèle de ceux d'Orient , furent aulli les imitateurs de leur auiteritéi ils ne fe permettoient pas même le poif- fon. Cependant quoiqu'en remon- tant de fiécle en fiéclc , on trouve de tems en tems parmi eux des exemples d'abftinence & déjeunes qui peuvent entrer en parallèle avec ceux des Orientaux , on ne peut difeonvenir que dès le cinquième fiécle, il n'y eut au moins dans les Gaules une extrême différence en- tre l'abflinence des premiers & celle des féconds. Ce qui chez les Grecs eut été regardé, dit Sulpice-Sévére, comme un excès intolérable , ne pafloit chez les Gaulois que pour un befoin naturel , Edacttas in Gratis, fut* efi , in Galhs n/ttnrs. Audi voyons-nous que S. Benoît, dès le <* fiécle , outre l'ufage du vin > fc ES SÇAVANS, crut obfigé d'accorder a fes Rc'i- gieux deux mets cuits , ce qui n'é- toir pas orainaire en Orient, auf- quels il joignit encore ce que nous appelions dclTert , qui coniilloit ea- quelques fruits cruds. Sa Règle fut trouvée fi fage & fi îiinte qu'elle devinten pende tems la Règle commune de tous les Mo- mfteres dit. ie , de France Se d'Angleterre. Nous nous conten- terons de rapporter en peu de mots les changemens les plus conlidera- blcs qui y (ont arrivas fur i'abltmcn- ce de la viande; à l'égard de ceux qui font furvenus dans lesdirferens Ordres qui fe font ctabiis depuis,, nous renvoyons à l'Ouvrage même. Jufqu'au huitième fiécle , dit l'Auteur , on ne voit aucun Mona- ftere , où l'on fe crut permis de rompre labftine:ce perpétuelle. Mais les ravages des Sarazinsqui fe répandirent comme un torrent dans les Gaules, ayant obligé la plupart des Moines à prendre la fuite , pen- dant ces defordres qui durèrent près de foixanre ans , les Religieux tombèrent dans le relâchement , & commencèrent à manger de la viande. Enfuite Charles Mar- tel ayant donné les Abbayes à des Seigneurs qui s'y établirent avec leurs femmes, leurs enfans ôc leurs chevaux , on conçoit aifémenf que fous de tels Abbés , il étoic bien difficile que les Moines reprif- fent , ou confervafTent l'efprit de leur état. En effet leurs dérègle- mens allèrent toujours en augmen- tant ; &cefuten vain que Charle- oiagnc eflaya d'y remédier en dive» FEVRIE Conciles qu'il fit affembler. Il eft hors de doute, ajoute D. Bcrthelet, que les Moines n'euffent alors rom- pu l'abfHnencede la viande , quoi- qu'il allure qu'on n'en trouve aucu- ne preuve dans les monumens de ce *ems. Il en excepte néanmoins une Charte de Charlemagne qui donne aux Moines de S. Bertin perrnilîîon de faire chalïer dans leurs propres forêts pour leur consolation , c'eft-à- dire , félon fon Commentaire, four fournir des mets extraordinaires aux Aioines. Ce qui peut étonner enco- re davantage, c'elt qu'il ne trouve pas une preuve authentique du relâ- chement de l'abitmence perpétuelle dans une Lettre de Théodcmar Ab- bé du Mont-Callin , qu'il cite lui- même. Cet Abbé confulté par Charlemagne fur la Règle de Saint Benoît, lui répond entr'aurrescho- fes que depuis un tems la coutume ctoit qu'on permît aux Religieux de fon Monafterc démanger de la. volaille aux fêtes de Noël &c de Pâques. Au relie, les travaux de S. Be- noît d'Aniane fous Louis le Débon- naire firent cfperer que l'abltinence feroit bien-tôt entièrement rétablie parmi les Moines. Soutenu de l'au- torité de ce Prince, il porta la refor- me dans tous les Monafleres de France. Mais ce ne fut pas pour long-ocms. Les incurfions des Nor- mands qui pillèrent , & reduifirent en cendre la plupart des Monafte- tes , contraignirent les Moines à les abandonner, & prefquetous après avoir renoncé à la pratique de leur teglc , quittèrent aufli l'habit reli- R »" I 7 3 ?' 79 gicux , de leur propre autorité fç métamorphoferent en Chanoines Se n'en devinrent pas meilleurs. Néanmoins dans le dixième lîécle S.Odon Abbé de Cluny entreprit de faire revivre la règle de S.Benoît dans fon Abbaye. Cette reforme eut un 11 heureux fuccès , qu'en peu de teans elle fe répandit dans toute l'Europe. Plufieurs Monalteres de- mandèrent à l'embraifer fans s'unir à cet Ordre, & fans qu'il confervâc aucune juridiction fur eux. Dans le même tems S. Dunftan Archevê- que de Cantorbery fut le reftaura- tcur de l'état Monallique en Angle- terre , où depuis l'irruption des Da- nois il étoit prefque anéanti. Pendant l'onzième fiécle l'ablti- nence de la viande fut gardée avec allez d'exactitude. S. Romuald, 8c S. Jean Gualbert fondèrent de nou* vellcs Congrégations, où ils firent obferver à la rigueur la Règle de S. Benoît. Les Chartreux parurent aulli pendant ce hécle; & ce font les feuls de tous lesReligieux qui ne fe font jamais relâchés fur l'ablti- nence de la viande. Mais de toutes les branches de l'Ordre de S.Benoît, il n'y en eut point de plus célèbre que celle de l'Ordre de Citeaux qui fleurit à la fin de l'onzième fié- cle. Les premiers Moines qui s'y confacrerent à Dieu , raifoient pro- fellîon d'obferver littéralement la Règle de S. Benoît fans aucune mi- tigation , fur tout par rapport à l'abilinence. De-là vint que l'ufage de la grailTe y fut généralement deftendu.LeursStatutsqui furent re- nouvelles en » 489. portaient peine Lij to JOURNAL DE d'excommunication contre quicon- que mangerait de la viande, même avec difpenie. C'étoitafTezdcpro- pofer le moindre changement dans- la nourriture , pour être condamné à jeûner ce jour-là même au pain Se l'eau Se à recevoir la difeipline en plein Chapitre. Qui croiroit qu'a- vec des Reglemens fi fevercs , il y eut , félon notre Auteur , dès le milieu du douzième fiécle des Moi- nes de cet Ordre qui ne fe faifoient pas fcrupule de manger de la vian- de, Se que le relâchement faifant toujours de nouveaux progrès , on n'y apperçut prefqu'aucune trace de reforme au quatorzième hécle ? Benoît XII. touché de l'état dé- plorable où cet Ordre étoit ré- duit , donna une Bulle dans laquel- le il dérendoir fous les peines les plus rigoureufes aux Moines de S. Benoît de manger delà viande , ou des mets alfaifonnés avec de la graifle dans le Réfectoire. Mais fans doute à la foliieitation des Ab- bés , il permit à ceux d'entre eux qui s'étoient démis, ou qui fe dé- mettraient dans la fuite , de faire gras dans leur chambre , Se d'y ap- peller ceux de leurs Religieux qu'il leur plairoit , pour les y traiter plus délicatement & plus abondamment. Par la même Bulle } les Abbés Se les autres perfonnesdiitinguées par leurs emplois , ou par leur mérite perfonnel obtinrent encore le pri- vilège de fe faire traiter en gras , lorfqu'ils viendroicnrdansles Mo- Bafteres. Cette Bulle n'ayant fait qu'irriter l'avidité des Moines pour la vian- s sçavans; de , Martin V. fe vit obligé de permettre à l'Abbé de Citeaux de dilpenfcrles Religieux de fon Or- dre des jeûnes réguliers 3 & même de l'abltinencc perpétuelle , félon que le demanderaient le temperam- ment des particuliers , la ficuation des Monalteres , Se l'état de leurs biens. Sixte IV. porta la condefeen- dance encore plus loin , & permit au Chapitre gênerai , Se aux Abbés hors de la tenue dudit Chapitre , d'accorder aux Moines Se aux Mo- niales de l'Ordre la permifiion de faire gras dans l'Enclos Se hors de l'Enclos du Monaftere , nonobstant tous Statuts Se Conltitutions con- traires à cette déclaration. Comme pluiieurs Abbés voulurent fe con- former à cette Bulle, & que plu- sieurs au contraire fe tirent fcrupu- le d'y acquiefeer , après de grandes eonteftations , il fut arrêté dans le Chapitre gênerai de l'an 1485. que trois fois la Semaine on ferviroi' gras dans un autre lieu que le Ré- fectoire , Se que tous les Religieux feraient obliges d'en manger. Dans celui de 149 j . il fut ordonné qu'on fe conformerait à l'ufage de la plu- part des Monalferes 3 qui étoit de faire abftincncc les Lundis , les Mercredis , les Vendredis , Se les Samedis ; Se ce Statut fut confirmé par Alexandre VI. Cependant dans quelques Mo-* nafteres, Se fur tout en Angleterre, tandis que le plus grand nombre de la Communauté faifoitgras dans un lieu féparé , on obfarvoit tou- jours qu'il refiât quelques Moines qui mangeaflenc maigre au Refec- FEYRI toire. Car fi nousofons le dire, les Moines parurent pendant long- tems refpecter moins leur confeien- ce que leur Réfectoire. Néanmoins quelques-uns paiTerent bien-tôt par delîus certe formalité. Gregoi- reXIII. en difpenfa même certains Monafteres dépendans du Mont- Caffin ; mais Paul V. révoqua cette permilîion fous de grandes peines. Ainfi au quinzième fiécle les Moines les moins relâchés man- geoient de la viande félon la per- ituffion de la Bulle de Benoît XII. qu'on appelloit communément la Benediftine : il paroît même qu'ils n'y avoient pas plus d'égard qu'à celles des Papes précedens; puifque les Conciles de Sens &: de Paris leur ordonnent de taire du moins mai- gre tous le3 Mercredis de l'année , tout l'Avent,& depuis la Septuage- fime jufqu'à Pâques. Le Concile de Confiance ht encore quelques Re- glemens pour la reforme des Mona- fteres d'Allemagne , mais avec peu de fuccès. Celui de Bafle ne fut pas plus heureux dans la même entre- prife. L'Auteur n'ofe pourtant affu- rer que l'intention de ces deuxCon^ ciles fur de remettre tous les Moi- nes à l'abftinence perpétuelle. Il fe fit cependant quelques reformes dans ce fiécle comme celle de Bur- feld , en Allemagne , de Sainte Ju- flinede Padoiie en Italie, de Valla- dolid en Efpagne , &c de Chezal» Benoît en France. Mais à l'ex- ception de cette dernière ; toutes les autres ne fubfifterent pas long- tems ; &D Berthelct affure qu'il n'y a aujourd'hui que le feul Mona- E R '.; ï 752. Sx ftere de Monferrat en Efpagne , où l'abftinence perpétuelle foit obfer- véc. La Congrégation du Monf- Calîîn qui s'y étoit maintenue juf- qu'au commencement du dix-fep- tiéme fiécle , s'efl; laiffé aller au torrent comme les autres. Aujour- d'hui on n'y fait abftinence perpé- tuelle que dans la feule Abbaye du Mont-Caffin ; mais le Supérieur peut , quand il lui plaît , envoyer fes Moines faire gras à S. Germain, qui eft au bas de la Montagne. La France a donc prefque feuî® l'avantage de voir revivre le vérita- ble cfprit de la Règle de S. Benoît dans plufieurs Congrégations refor- mées qui s'y font établies au com- mencement du fiécle dernier. On conçoit bien que notre Auteui n'oublie pas celle de S. Vanne 8s de S. Hydulphe dont il eft Mem- bre ; il remarque qu'elle eft la me-: re de toutes celles qui fe font for-] mées au-delà des Monts ; elle don- na des Reformateurs à l'Ordre de Cluny , & la Congrégation de faine Maur fi célèbre parmi nous , fait gloire d'être fa fille. Il ne faut pas oublier que malgré la haute opinion que l'Auteur a conçu de l'abftinence , il ne laiffe pas de rendre juftice à la pieté, & à la régularité de plufieurs Congréga- tions de fon Ordre qui fe font relâ- chées fur cet article. Il fe contente feulement d'ajouter à la fin de cet- te féconde Partie que le dérange- ment des Monafteres a toujours commencé par l'infraction de l'ab- ftinence , & leur reforme au con-^ traire par le retabliffement de cetts- iamec pratique. 82 JOURNAL DES SCAVANS, NOWELLE OSTE0L0G1E, OU DESCRIPTION EXACTE des Os du corps humain , accompagnée de Remarques Chirurgicales fur le traitement de leurs maladies , & enrichie de figures en taiie-douce. Par Ai. fjean Palfin , Chirurgien Juré , Anatomfle , & Letltur en Chirurgie àÇand. A Paris, chez Guillaume Caveiier, me S. Jacques , au Lys d'or. 17 51- vol. in- 12. pp. 390* CETTE Ofteologie a été im- primée en Langue Flamande, à Gand en 1702. & enfuice à Leyde en 1714. M. Palfin a cru devoir donner fon Livre en François pour l'ufage des Chirurgiens de France , aufquels il fe dit redevable de plu- fleurs inftrudions. C'cft de cette Edition qu'il s'agit ici , laquelle paroît après la mort de l'Auteur , arrivée il y a environ un an. L'E- diteur , pour recommander l'Ou- vrage , dit qu'il pafie chez les con- noiffeurs pour le meilleur qui foit forti des mains de M. Palfin. Le célèbre lA.Boerhave en cite les figu- res dans fes inftitutions de Médeci- ne. M. Albinus les cite aufli dans fon Ofteologie , Se M. Heifterdxus fon abrégé d'Anatomie. Ce dernier parle encore avec beaucoup d'éloge de l'Ofteologie de M. Palfin , dans fon Difcours Anatomique pronon- cé à Helmftad en 1720. On peut dire en effet , comme le remarque notre Editeur , que l'Ofteologie dont il s'agit contient une deferip- tion exadtedesos du corps humain , &a vec cela des planche s très-fidéles. M. Palfin, entre autres chofes, fuivant le jugement du même M. Heifter, a fort bien décrit les Sinus- Frontaux, Sphénoidaux , &: Maxil- laires. Il a donné auill quelques fi- gures originales , qui , non feule- ment ne fe voyent pas de même ailleurs , mais qui font encore très- utiles pour bien entendre la ftru&u- re des parties. L'Editeur cite là-deffus les figu- res des trois premières planches de cette Edition , dans laquelle il a été obligé , à ce qu'il dit , de changer l'ordre & le nombre des planches de l'Edition Flamande , lefquelles n'étant qu'au nombre de trois , ont été ici partagées en huit , afin àa les proportionner à la forme de l'E- dition. Peur donner plus de relief à l'O- fteologie de M. Palfin , l'Editeur obfervc que celle de M. le Clerc , dont on a fait , dit-il , le plus de cas jufqu'à prefent, a été tirée , il cil wai , d'une excellente lource , fça- voir, des leçons de feu M. Duver-» nay , mais qu'elle eft mal compilée, & que le Copifte y a gliffé des fau- tes ii groilicres qu'il feroit étonnant qu'un Ecolier les eut pu faire. Quel- les font ces fautes ? L'Editeur les cite » &c les voici. M. le Clerc dit , i°. pag. 5 1. Que les Carotides inter- nes^ 0" les veines jugulaires internet pajfent par le grand trou occipital t quoiqu'elles ne paffent nullement par-là , mais par d'autres trous particuliers & féparés : z°. P. 140. FEVRIE QiT/7 fort quatre pttjwts de nerfs par les quatre grandes paires de trous p'ijiérieurs de l'os facrum. Que les quatre trous antérieurs de cet os font fermés , & quV n'y pafie point de nerfs , quoiqu'ils foient beaucoup plus crrands que les poflerieurs. Par où on voit que M. le Clerc dit pré- cisément touc le contraire de ce qui eft. L'Editeur palTefous hienccplu- fieurs autres fautes Conlîderables qui fe trouvent dans l'Olteologie de M. le Clerc , & il dit que ces deux fuffiient pour montrer qu'un tel Livre ne Içauroitêtre propre à des Commençans. Mais pour revenir à M. Palfin, fon Ouvrage comprend quatre par- tics : dans la première , ii ell parlé , i°. de la nature , des différences Se des ufages des os : 2°. De leur for- mation : 30. De la manière dont ils fe nourri ffent, & de leur dureté: 4°. De leur fenfibilitéou infenfibi- lité • 50. De la moelle : 6°. Du pé- riode : j°. DePaffemblagedes os, c'eft - à - dire , du Squelet-. De ces fept articles, nous ne rap- porterons ici que le quatrième , parce qu'il nous paroît à la portée d'un plus grand nombre de Lec- teurs ; on y examine fi les os ont du fentiment. M. Palfin remarque à ce fujet,que quelques-uns regardent les os comme dénués de fentiment, parce qu'ils font dénués de nerfs : Que quelques autres croyenr que le fentiment qu'on attribue à ces par- ties vient du periofte : Que d'autres prétendent que les os ont du fenti- ment, & fe fondent en cela fui les trois expériences fui va me s R ; 1732: 8j 11 fe fait , difent ces derniers, une diltribution confiderable de nerfs dans le corps de l'os , Se par confe- quent l'os a du fentiment, ce qui fe vérifie, félon eux , dans les exfo- liations , lcfquelles (e font toujours avec un peu de douleur, lorfque l'on en arrache les rragmens qui étoient encore un peu adherens. Quand après l'amputation d'une jambe l'on touche la membrane celluleufe qui renferme la moelle ^ le malade fent de la douleur. Si après avoir coupé la cuiffe à vm chien &: laillé pafier les plus grandes douleurs , on enfonce un ftilet dans* la moelle, le chien donne des fignes d'une nouvelle douleur par les mouvemens extraordinaires qu'il fait. On peut objecter qu'un malade à qui on coupe la jambe ,• ne fent, point de douleur à l'os pendant qu'on le lui feie. M. Palfin dit qu'on peut répondre à cela que ce malade fent alors une fi grande douleur, à l'occafion delà folution de continuité qui s'eft faite à 1* chair , aux membranes & au perio- fte, que cette douleur l'empêche de diftinguer celle qu'il peutrelfentir à l'os , Si qui doit être plus légère. Il faut dire la même chofe , félon lui 3 d'un ulcero fiftuleux , où le periofte fe trouve rongé en même-tems que l'os. La grande fenfibilité de la mem- brane médullaire ne peut fe faire que par les nerfs ; ce principe pofé , il faut neceftairement que les nerfs qui fe diftribuent à cette membrane percent les os , 5c c'eft ee que l'ex- «4 JOURNAL D pericnce juftihe ; mais comme h diftribution de nerfs qui fc hic dans les os, n'eft pas il bien iuivic que celle qui fe tait dans les parties molles , il arrive de-là qu'on ne fçauroit fçavoir précifément com- bien il y a de branches de nerfs dans un os, ni en quels endroits de cez os elles fe diftribuent. Ce qui n'em- pèche' pas , félon M. Palfin , qu'on ne puifie dire avec raifon , que les os ont du fentiment dans les en- droits où ils ont des nerfs. Si l'on oppofe que ce ne font pas les os mêmes quifentenc, mais que ce font les nerfs , notre Auteur die qu'on peut tout de même répondre que les parties molles n'ont pas de fentiment , mais les nerfs feuls qui s'y diftribuent, puifque le fentiment qui fe fait dans ces parties ne s'y exécute pas d'une autre manière que dans les os. M. Palfin craint ici qu'on ne s'i- magine qu'il attribue du fentiment aux nerfs , & pour prévenir ce foup- con, il croit necelTaire d'avertir , w Qu'il fçait bien que le fentiment i> n'appartient qu'à l'ame dont il eft j> une émanation, Se que l'efience j> de l'ame conlifte uniquement » dans la penfée dont le corps eil » incapable , l'ciTencede ce dernier i> conliftant feulement dans l'ex- » tendon. « M. Palhn, non content de cette précaution , ajoute qu' » il » établit dans les nerfs , la caufe oc- »cafionnelle de la penlée, parce » que les objets intérieurs ou exte- « rieurs venant à ébranler les nerfs » d'une certaine manière excitent » en l'ame certaines penfées. ES SÇAVANS; Voilà notre Auteur plus que fuffi- famment juftifié fur une erreur qu'il n'avoit nul lieu d'appréhender qu'on inférât defes paroles. Tran- quille à prefent fur ce poinr,il pafte à ce qui concerne le fentiment des os par rapport à la carie. » Il fem- » ble , dit-il, que la carie ne doic » pas toujours être accompagnée de » grandes douleurs , car li elle arri- » ve aux endroits où il n'y a poinc » de nerfs il ne doit pas y avoir de » douleur ; mais fi l'humeur acre « qui caufe la carie , vient à tou- » cher les nerfs , pour lors le mala- » de relient de grandes douleurs, » ainfi qu'on le remarque dans la >-> carie des dents ; &C lorfque les » nerfs font tout-à-tait rongés , la » douleur .peut celler entièrement » pendant que la carie peut taire u» » progrès confiderable» Notre Auteur rapporte à ce fujcC que Nicolas Mafia , célèbre Méde- cin de Venife , dit avoir vu à la cuifie d'un homme, un ulcère où l'os étoit découvert, & fi fenfiblc en cet endroit , que le malade ne pouvoit fouffrir qu'on y touchât quelque légèrement qu'on le fît» Le même Médecin ajoute qu'en perçant l'os jufqu a l'intérieur , le malade fentit de la douleur dans le même endroit , ce qui eft , fuivanc notre Aureur , un avertiftement que Nicolas Mafia a voulu donner aux Anatomiftes , pour les porter à examiner s'il n'y a pas quelques branches de nerts qui fe diftribuent jufques dans la cavité des os. M. Palfin tire de tout ceci une confequenre qui réduit la queftioa du FEVRI du fentiment des os , à une pure queftion de nom. De tout ce que nous venons de remarquer, dit-il , au fujet du fentiment des os , il s'enfuit que fi on [es confidere comme un com- vofé de fitbflance offeufe , de veines 0 d'artères de nerfs & de membranes } ils font fenfibles ; au lieu que la fub- flance de l'os , prife féparément , ejl ixfenfible. Nocre Auteur, dans fa féconde Partie , traire d'abord de la ftruètu- te du crâne en gênerai t puis il ex- plique en particulier ce que c'eft que les futures, l'os frontal ouco- ronal , les os pariétaux , l'os occipi- tal, les os temporaux, l'organe de l'oiiie, l'os fphénoide 6c l'os cri- bleue, les mâchoires, la fonction & la iîtuation de tous les trous de la tête , l'os hyoide , Se enfin les ufa- ges des cavitez de l'os frontal , du fphénoide Se des os maxillaires. Nous ne fçaurions faire l'Extrait de tant d'articles ; nous nous borne- rons àladefcription que notre Au- teur donne d'une partie de l'organe de l'oiiie qui eft nommée le Laby- rinthe. On verra dans cette deferip- tion un exemple de la préciiion Se de la netteté qui caratterifent toutes les explications de notre Auteur. i> La troilîcme partie de l'oreille, si dit-il , Se la plus intérieure , fe î> nomme le labyrinthe. On y re- j» marque trois cavitez : la premie- » re s'appelle la Conque ; nom qui » lui a été donné à caufe de fa ref- » fcmblanceavec les écailles d'hui- « très. Cette cavité eft le centre du s> labyrinthe , 8e elle a fix ouvertu- j> res ; par la première , elle fe Février. E R; 173 2: gs » communique dans le canal ante- » rieur de la coquille , £c par les 3» cinq autres dans les trois canaux j> demi-circulaires. Ces fîx ouver- » tures ne font bouchées par quoi- » que ce foit. On appelle aulîi le » Vestibule , la cavité que je viens » de nommer la Conque. » La féconde cavité du laby- »rinthe qui eft dans la roche w eft la Coquil'e , ainfi appel- » lée à caufe qu'elle refTemble » allez bien par fa face extérieure à » la Coquille d'un Limaçon , &c » qu'elle a les mêmes contours. On » y voit de plus intérieurement un m noyau qui s'étend depuis fa baze » jufqu'à la pointe , autour duquel » fon corps monte en ligne fpirale " Se fait deux tours Se demi. Le "corps de la coquille eft creux ,& » divifé en deux canaux feparis l'un » de l'autre , en partie par une la- » me d'os qui fort du noyau de la «coquille , Se en partie par une » membrane attachée à cette lame » d'os, qui après avoir achevé la «Réparation de ces deux canaux fe a réfléchit de côté Se d'autre , Se ta- « piiTe leurs côtez , de façon que la » partie delà membrane qui, avec }> la lame d'os , fait la féparation en- » tiere de ces deux canaux de la » coquille , eft à fon égard , ce » qu'eft le médiaftin à l'égard de U » poitrine; Se la partie réfléchie de » chaque côté , eft comme la plé- » vrc. «Les coquilles font très-propres » à augmenter le fon , parce que les » rayons fonores vont s'unir à la » pointe. Denis 3 Tyran de Syracufe M $6 JOURNAL D n avoit fait tailler dans le rocher m une prifon en terme de limaçon ; » à la pointe ctoit la chambre du » Geôlier, qui par-là pouvoir en- » rendre tout ce que difoient les » prifonniers. Cette grotte fubfifte » encore, on ne içauroit y étcrn.icr » fans faire un bruit femblablcàce- » lui du tonnerre , &c. Toutes les autres explications ou deferiptions de notre Auteur , font de la même clarté,de la même briè- veté & de la même exactitude , ce qui doit faire préférer fon Ofteolo- gie à un grand nombre d'autres. Nous nous en tiendrons à cet exem- ple , pour éviter la longueur, Se nous nous contenterons d'indiquer les articles des deux autres parties du Livre. L'épine en gênerai fait le fujet du premier article de la troiliéme par- tic ; il s'agit dans le fécond des ver- tèbres du col , de celles du dos , Se de celles des lombes ; dans le troisiè- me , des faulïcs vertèbres ou de l'os facrum & du coccyx ; dans le qua- trième , des côtes ; dans le cinquiè- me , du Sternum ; dans le fixiéme , «les omoplates & des clavicules , Se ES SÇAVANS; danslc dernier , des os innommés 7 c'ell-à-dire des os Mitm, Ifchium , & Pubis , appelles os innominés ou fans nom , parce que pris eniemblc, ils n'ont point de nom qui convien- nent à leur totalité. La quatrième Partie concerne les extremuez , fçavoir i°. les os du bras , de l'avant-bras & delà main proprement dite : zg. Ceux de la cuilfc, de la jambe Se de la rotule ceux du pied proprement dit , les- os fefimoides , Se les ongles. On s'étonnera peut - être que notre Auteur mette ici les ongles au rang des os , mais il femble avoir en cela Hippocrate pour garand , dans le Livre intitule iiepi osrEftN *rsios , où ce grand Médecin dit que l'on compte vingt-fept os à la main ; vingt-quatre au pied, fepe au col jufqu'a la grande vertèbre; cinq aux lombes ; vingt à l'épine y huit à la tête en comptant ceux des yeux ; en tout quatre-vingt Se un os ; Se en y comprenant les ongles, cent Se onze. Au furplus , c'eft ici une queftion de petite confequence. FEVRIER; 1732: 87 HISTOIRE DE L 'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. Année 17 19. avec les Mémoires de Mathématique & de Phyjîjiie pourU mime année , tirés des Regiftres de cette Académie. A Paris , de l'Impri- merie Royale. 173 1. /»-4°. pp. 120. pour l'Hiftoire , pp.42^ pour les Mémoires. Planch. détachées xxni. CE Volume qui eft le 3 2e de- puis 1699. confient 58. Piè- ces , dont les 24 premières compa- rent la partie Hiftorique & les 34 autres font autant de Mémoires im- primés en entier. Mais comme par- mi les articles compris dans l'Hi- itoire, il y en a 17 qui ne font que îes Extraits d'un pareil nombre de Mémoires , il s'enfuit que ce Volu- me n'offre que 41 pièces différentes. Celles de Phyfique générale fe re- duifent à deux , fans compter l'arti- cle des diverfes Gbferuations. L'une fur la lumière Septentrionale , eft de M. Caflini , & paroît tant dans l'Hiftoire que parmi les Mémoires. L'autre eft le Recueil des Obferva- ttons Météorologiques de cette an- née , par M.Miraldi , & eft ren- voyée entièrement aux Mémoires. Nous nous bornerons à l'article hiftorique des diverfes Obfervations. Il n'y en a que deux. Dans la première, communiquée à l'Acadé- mie par celle de Béziers , il s'agit d'un cercle de lumière vu le 7e Juin 1728. depuis dix heures du matin jufqu'à midi autour du Soleil qui en faifoit le centre. Ce cercle imitoic l'Arc-cn-cicl , par la variété des couleurs qu'il failoit paroître en cet ordre , un rouge très-foible , un jaune lavé, un vert auquel fuc- çedoit un cercle blanc qui terminoit la partie concave du phénomène. On |ugea que le rayon de ce cercle devoitêtre de xodegrez 31 minu- tes , puifqu'il paffoit à midi par le zenit , le Soleil couvert de vapeurs étant alors élevé fur l'horizon de 6j degrez 29 minutes. La féconde Obfervatioi» eft duc à M. de Mairan , qui la fit le 3 £ Mars vers les 6 heures -~ du foir an pied de Montmartre, du côté du Roule. Il vit de-là pendant quel- ques minutes le Soleil li blanc , fi. éblouiffant, èc fi parfaitement cir- conferit , qu'on l'auroit pris pour la pleine Lune. Le même phéno- mène futobfervéle premier Juin 172.1. pendant prelque toute la journée. Mais cette fois-ci le Soleil en s'approchant de l'horizon , re- prenoit peu à peu fa couleur jaunâ- tre , Se lorfqu'il commençoit à fe cacher , fon difque parut notable- ment plus elliptique qu'à l'ordinai- re , fon diamètre horizontal étant alors d'un quart plus grand que le vertical, ou comme 524. Sur quoi l'Académicien obferve que le Perc Skeincr , le premier qui aitapperçù & démontré cette ellipticité du dif- que folaire à l'horizon , l'a quel- quefois remarquée fi condderable „ que le diamètre horizontal paroif-: foit être au vertical comme 4 à 3. Cette blancheur du Soleil doic Mij 8S JOURNAL DE être .attribuée [ dit-on] à un brouil- lard tranfparent 5: peu épais : de même que Ycllipriciié extraordinai- re de fon dilque eft l'effet d'une denfité plus grande & d'une moin- dre élévation dans la matière qui caufe les refractions , ou d'une moindre épailleur dans la couche que forme cette même matière. Les articles à'Anatomie font au nombre de quatre , fans y com- prendre celui des diverses Ob- servations. Le premier fur les Sala- mandres , eft de M. du Fay. Le fé- cond eft l'Ecrit de M. Wmflovv , fur la Rotation , la 'Pnnation , la- Supination Se d'autres mouvemens en rond. Le troihéme fur le Dia- phragme s eft de M. Senac. Le qua- trième contient les Obfervations de M. Himaiild fur quelques mufcles des doigts. Ces trois derniers arti- cles font abfolumenc renvoyés aux Mémoires. Le premier fe trouve parmi ceux-ci & dans l'Hiftoire, Nous donnerons une idée de cet article , ainfî que des deux derniers I. L'animal amphibie , connu fous le nom de Salamandre , a fait le fujet d'un Mémoire lu à l'Aca- demieen 1728. par M. de Mauper- tuis , Se dont nous avons donné l'Extrait. La Salamandre s'y trou- voit dépouillée de deux proprietez mcrveilleufes que lui avoient attri- buées mal-à-propos les anciens Na- turaliftes ; l'une de répandre un ve- nin très-dangereux ; l'autre , de vivre dans le feu. Les nouvelles ob- fervations de Mi dit Fay fur cette «ïpece de Lézard ne roulent ni fur l'une ni fur l'autre de ces prétendues S SCAVANS; proprietez. Elles (c renferment toutes ou dans l'établ'nlemcnt des caractères qui didinguentlcs diver- fes clpcccs de ces animaux; ou dans la defertpfion anatomique de leur ftructurc tant extérieure qu'inté- rieure; ou dans l'explication de plu- lleurs fingularitcz concernant l'e- xercice de leurs fonctions. Or tout cet examen regarde prefqu'unique- ment les Salamandres des environs de Paris, fur tout les aquatiques , dont il lui a palTé par les mains plus de :co, prifes dans toutes les faifons de l'année. Parmi celles qu'il a examinées il en a reconnu de trois efpeccs diffé- rences par la grandeur & les varie- rez de conformation extérieure. La première efpece qu'il nomme groffe Salamandre , a de longueur environ cinq pouces ; & les mâles de cette efpece ont en premierlieu fur le dos une peau large de deux lignes, dentelée comme une feie , & qui règne depuis le milieu de la tête jufqu'à l'extrémité delà queue : en fécond lieu une bande argentine large d'environ trois lignes , fituée de chaque côté de la queue, c\T qui' va jufqu'au bout en s'étreciiTant. La féconde efpece appeliée r^Wf Sala- mandre noire , ne diffère de la pre- mière que par le Volume. La troi- fiéme efpece , grolle à peu près comme la féconde, en eft diftinguée par des taches rondes très-noires ,■ dont le corps des mâles eft parfemé, ainfi que la petite crête dentelée dont on vient de parler, & par la/ bande argentine placée , non aiv milieu de la queue , comme dans F E V R I les deux autres efpeces , mais le long de fa partie intérieure. M. du Fay non content d'avoir établi des fignes caractcri (tiques ti- rés de la feule infpectipn pour diffé- rencier les diverfes fortes de Sala- mandres , a pénétré parla difle&ion daas l'intérieur de cetAmphibie, & en expofe les principaux organes à nos yeux. Il nous décrit donc &C nous reprefente à l'aide de plulîeurs fruircs [ qu'il a lui-même très-exac- tement defllnées, c\:qu'a très-pro- prement gravées M. le Chevalier de la Vteuvdïe ] l'épiderme , la peau , les trois mufcles du bas-ventre , le péritoine , le péricarde , le cœur applique immédiatement furl'œfo- pliage , le foye très-grand & parta- gé en deux lobes avec fa véficulc 9 les inteftins & les facs graifleux , la veille faite en forme de cœur, deux longs facs ou veilles pleines d'air , &c. Il a recherché très-curieufe- ment la ftruclure des organes defti- nés à la génération , fur quoi il faut confulterfon Mémoire. Ladefcri- ption qu'il donne auiîi des ouyes de la Salamandre que perfonne n'avoit remarquées jufqu'ici &c qui leur fer- vent à refpirer , mérite d'être lue avec attention. Venons prefentement aux Ob- fervations de l'Académicien concer- nant les fingularitez qui s'orlrent dans l'œconomie animale de cet Amphibie, i9. Les Salamandres peu avide; en gênerai des alimens qui leur conviennent , tels que des mouches à demi-mortes, une forte de fray de grenouille , la plante ziommée linticulœ palvftris 3 vivent. E R ; i 7 5 2. 89 très - long - rems fans manger, &: quelques - unes plus de fix mois, i*. Loin de vivre dans le feu , com- me on l'avoit cru „ elles vivent très- bien dans l'eau glacée où elles ont gelé, s'y maintenant, grâce à lapro- vilîon d'air qu'elles font d'avance , & qu'elles expirent auflî plus abon- damment dans le dégel. Elles ont cela de commun avec les grenouil- les qu'on a trouvées encore vivantes dans des morceaux de glace tirés des glacières, & avec certains cra- • pauds , qui confervent leur vie &c leur agilité dans le tronc bien fain d'un arbre , comme le prouve une Obfervation alléguée ici par l'Hi- ftorien. 30. Les Salamandres Aqua- tiques changent de peau tous les 4 ou j jours au Printems & en Eté, & tous les 1 5 jours en hiver. S'il relie quelque portion de peau arrê- tée à l'extrémité d'une patte & donc elles n'ayent pu fe dépouiller en- tièrement 5 cette portion en fe cor- rompant , leur pourrit & leur fait tomber la patte , fans préjudice de leur vie ; ce qui joint aux obferva- tions précédentes, montre qu'el- les l'ont très-dure. 4°. Quelques - unes jettent par Vanus un corps prefque aulli long qu'elles , & que l'Academicen prendroit volontiers pour un dé- pouillement de quelques parties in- térieures ; ce qui pourrait être ap- puyé [ ajoute l'Hiftorien ] par l'e- xemple des EcreviiTes qui changent d'eftomac , mais fans le rejetter au dehors. 50. Les ouyes des Salaman- dres , après s'être développées dans un certain tems , difparoilTent a* jo JOURNAL DE bout de trois Semaines Se reftent fans fonction : ce qui n'empêche pas que les Salamandres ne vivent également dans l'eau , quoiqu'elles femblcnt alors plus emprellces d'en fortir. 6°. Le fel en poudre eft pour cet animal un poifon mortel , & il fuffit de lui en jetter fur le corps pour le tuer en trois minutes , après lui avoir caufé des agitations vio- lentes , qui expriment de la peau, cette liqueur laiteufe Se gluante , qu'on prenoit mal-à-propos pour fon prefervatif contre le teu. 70. Toutes les efpeces de Salamandres qu'a obfervéés M. du Fay n'étoient ^u'OvipAres. Mais leur manière de s'accoupler s'ell toujours dérobée à la vûë de l'Obfervateur , qui n'a pu non plus parvenir à voir édorre aucun de ces œufs , ni même à ren- contrer de petites Salamandres nou- vellement éclofes. Ces Ampkibies ( demande THiftoricn) ne feroient- ils que frayer comme les poiflons , fans s'accoupler f Les Salamandres obfervéés par M. de Maupertuis, étoient vivipares , & il a trouve dans une feule 54 petits prefque tous vivans \ comme nous l'avons remarqué ailleurs. III. Les découvertes de M. Senac fur la flatUure Se Yitftge du Dia- pbrttgme}(oiment un article interef- fant. Qui croiroit qu'un organe suffi cflentiel à la vie que celui-là , manié par tantd'Anatomiftes clair- voyans , pût fournir encore au Scal- pel Se à la Méchanique de nou- veaux objets dignes de les occuper? C'efl pourtant ce qui rcfulte du Mémoire de l'Académicien , com- S SÇAVANS; me nous Talions faire voir , en nous bornant au feul détail des nouveau- tez concernant la ftruéture &e l'ufa» ge de cette cloifon circulaire qui fépare de V abdomen la poitrine. Elle a deux parties; fa circonfe^ rence mufculeufe ou charnue , Se fon centre nerveux ou tendineux. Les fibres qui forment la circonfé- rence ne font pas diftribuées en rayons qui partent tous d'un même centre; il y en a dont les directions font entièrement oppofées ; par exemple , à la partie antérieure du Diaphragme , on trouve quelque- fois un double plan de fibres , noa obfervé jufqu'ici , dont les fupe-, rieures croifent les inférieures. De la partie pofterieure ou de la profonde échancrure du centre nerveux , naillent tant du fommet que des cotez quantité de fibres mufculeufes 3 dont les divers affem- blages en fe réuni (Tant forment deux piliers , qui après s'être croifés mu- tuellement jufqu'à cinq fois en s'é- loignant de leur origine , vont s'implanter aux vertèbres par di- vers tendons. A côté de ces grands piliers , l'Auteur en a fouvent ob- fervé deux plus petits , dont les fi- bres font un détachement de celles des premiers. De ces petits piliers , ou , à leur défaut , des grands , s'élève à droite Se à gauche une arcade rendineufe , qui s'attache à Tapophyfe rranfver- fe de la première vertèbre des lom- bes ; Se de cette attache naît de part Se d'autre un fécond arc tendi- neux , qui s'unit à la partie moyen- ne de la première taulfe côte. Ceâ FEVRI arcs n'ont été décrits jufqu'à prefcnt par aucun Anatomiftc. A l'égard des ouvertures, qui dans le diaphragme donnent pillage à l'œfophaçe &r à l'aorte, la fuperieu- re , qui eft pour l'œfophage & dans laquelle il peutfe mouvoir, eft foi- mée par les grands piliersji'inrerieu- rc , qui eft pour l'aorre , & dans la- quelle celle-ci eft immobile, n'eft que l'intervalle que laiffent entr'eux ks tendons des grands piliers. De-là M. Senac palle à la des- cription du centre nerveux ou ten- dineux du diaphragme. Ce centre tiffù de fibres tendineufes réunies en petits taiffeaux dont les direc- tions font différentes , reprefente par fa figure irréguliere , non un ter-à-cheval , mais un cœur pro- fondément échancré à fa bafe , & dont le côté gauche eft plus étroit que le côté droit. Ce qu'on y voit de plus remarquable eft le paftage de la veine-cave , fituée au côté droit , près de la pointe de l'échan- crure pofterieure d'où partent les grands piliers, & affujettie dans cet- te fituation par des attaches allée Notantes dans de jeunes fujets. Quant aux ufages du Diaphrag- me , qui font l'infpiration , l'expi- ration , le hoquet , la toux , &c, l'Académicien en développe toute la Méchanique de la manière la plus vraifemblable &c la plus con- forme, finon aux explications qu'en ont données les autres PhyfîcienS su Anatomiftes , du moins à la ftru&ure qu'il vient d'en décrire avec tant d'exactitude & de préci- fîon, M, Senac pofe d'abord pour E R ; 1 7 j 2. 91 principe que les parties latérales du Diaphragme font très-concaves du côté du ventre, qu'elles font tou- jours collées aux ailes des poumons qu'elles fuivent dans tous leurs mouvemens, cV que cette concavité n'eft point l'effet de la preffion des vifeetes de 1' 'abdomen , mais que la feule force de l'air en eft la caufe ; ce qu'il prouve par une conforma- tion finguliere de cet organe dans un fujet à qui manquoit prefque totalement l'un des poumons. Les piliers du Diaphragme (con- tinue l'Auteur y moins concaves que les deux poches latérales s'atta- chent auMediaftin dans leur route, ainfi qu'une portion affez large du centre nerveux ; d'où il fuit que la partie moyenne du Diaphragme ne peut s'abbaifler pendant l'infpira- tion. Il y a plus. Les piliers eux- mêmes font tellement gênés pat leur fituation & par leurs attaches 3 que dans leur contraction leurs ex - tremitez ne peuvent fe rapprocher l'une de l'autre. Quel peut donc être leur ufage ? Le voici. La direc- tion de leurs fibres qui fe croifent à leurs exrrémitez, Se qui dans leur milieu embraffent l'cefophage , eft telle que toute l'action de ces fi- bres contractées fe réduit à compri- mer , comme feroit un Sphinfter s le canal qu'elles environnent dans toute fa circonférence : ce qui mec un obftaclc au retour des matières contenues dans l'eftomac, & fert à expliquer le hoquet caufé par la contraction de ces fibres mifes en mouvement par l'agitation iiregu* iiere de l'œfophagç, 92 JOURNAL D Le milieu du Diaphragme étant toujours voûté Si immobile , ne peut être d'aucun ufage dans la res- piration : il n'y a que les deux po- ches latérales , qui s'abbaillent par la contraction de leurs fibres , dans l'infpLration , &c qui remontent par l'adion de l'air , demeurant tou- jours collées aux ailes des poumons, & ceux-ci aux parois du Thorax. Quoique les poches par l'action qui leur clt propre , femblent être les principaux organes de l'infpiration; elle peut cependant à la rigueur s'exécuter fans le fecours du Dia- phragme ; ce que l'Auteur s'efforce de prouver & par la théorie , qui nous apprend que les côtes ne s'é- cartent dansl'infpiration que par la feule action des mufcles interco- ftaax indépendans du Diaphragme, & par l'expérience qui a fait voir des fujets ou (ans diaphragme , ou dans lefquelsce mufcle étoit abfolu- ment fans action , lefquels ne laif- foient pas de refpirer,quoiqu'un peu plus difficilement. M.Senac,malgré ces Obfervations , avoue pourtant que ce mufcle aide les mufcles in- tercoftaux , en ouvrant à l'air exté- rieur une plus ample capacité dans la poitrine , que ce mufcle par fa contraction allonge inferieurement vers 1' 'abdomen. Mais outre cet ufage du Dia- phragme dans l'infpiration , l'Au- teur lui en donne un fécond qui confifte à s'oppofer par fa contrac- tion à l'écartement excelhf des cô- tes procuré par l'action des mufcles întercoltaux. Si la contraction des poches mufculeufcs & mobiles du ES SÇAVANS, Diaphragme fervent beaucoup s l'infpiration , celle des fibres muf- culeufcs antérieures qui ne s'attaif- fent point, a très-grande part à l'ex- piration , en tirant à elles les cotes & par-là refferrant la poitrine : ce qui conduit i'Auteur à nous expli- quer très-probablement la mecha- nique de la toux , à laquelle la con- traction de cette partie antérieure du Diaphragme contribue infini- ment. Pour ce qui regarde l'éter- nuement , le hoquet i le ris , ils n'ont d'autre caufeque la commu- nication des nerts qui le diftribuent dans ce mufcle. M. Senac finit fon Mémoire par quelques réflexions fur l'ufage du centre nerveux du Diaphragme , qu'il conhdere comme une partie purement pallive , foumiflant au roye une attache tellement fixe , qu'il lui elt impoffible de defeendre lorfque le ventre s'affaiffe , comme il arrive à celui des hydropiques après la ponction : d'où il paroît ( dir-il ) que cet affùllement , com- me quelques-uns le prétendent , ne fauroitêtre lacaufedcla défaill?n- ce qui furvient quelquefois au ma- lade après cette opération. Notre Académicien aime beaucoup mieux imputer cet accident au retour pré- cipité du fang dans les artères de l'abdomen , où la comprelîîon cau- fee par l'épanchement des eaux l'empèchoit de couler avec abon- dance, le déterminant à fe porter -vers la tête en plus grande quantité: au lieu qu'après l'évacuation des eaux , ce vuide le rappellant dans les artères inférieures , le détourne en F E V R I en quelque forte des fuperieures, d'où il arrive que le (ne nerveux n'étant plus fourni à toutes les par- ties aulh abondamment qu'a l'ordi- naire , ce défaut peut occalîonner la défaillance. IV. Comme l'infpeclion des figu- res eft abfolument necelfaire à l'in- telligence des obfervations de M. Hunauld fur la ftmBiire & l'aSiion de quelques mufcles des doigts 3 nous ne pouvons en donner ici qu'une idée trcs-generale. Il s'agit d'abord des mufcles qui fervent à la flexion des quatre doigts, l'index , le grand doigt , l'annulaire & l'auriculaire. Ces mufcles font le fublime Si le profond , qui fournirent chacun 4 tendons. Ceux du protond s'atta- chent aux troihémes phalanges des 4 doigts ; Si ceux du fublime , aux fécondes phalanges. Voilà prefque tout ce qu'en favent&tout ce qu'en difent les Anatomiftes. L'Acadé- micien va beaucoup plus loin ; Se fes recherches qui ne roulent au- jourd'hui que fur le mufcle fubli- me, nous font beaucoup efperer de celles qui doivent les fuivre. Il obferve , en premier lieu, que l'on peut ( à l'aide de quelque habi- tude ) remuer féparément la fécon- de phalange de chacun des quatre doigts , d'où il conclud que le fu- blime ne doit pas être confideré comme un fcul mufcle , mais com- me l'affemblage de quatre organes de ce genre , diftinguez l'un de l'autre par l'arrangement de leurs fibres Si parla variété de leurs fonc- tions. Il faut porter le même juge- ment fur le mufcle profond. D'ail- Février. E R, 17.3s. pj leurs , indépendamment de la di- verhté des ufages dans les mufcles ( continue l'Auteur ) il n'eft pas inutile d'en examiner curieufement la ftrudture , ne fut-ce que pour connoître plus particulièrement l'inclinaifon des filets tendineux à l'égard des fibres charnues , la lon- gueur Si la multitude de celles-ci, Les divers plans qu'elles forment , d'où dépendent le plus ou le moins de force dans ces machines , ainfi que le plus ou le moins d'étendue dans leurs mouvemens. Ce que la feule fpéculation a voie fait conclure à M. HunauM s'eft trouvé juftifié par la diileclion » qui lui a découvert pour chaque tendon du fublime un paquet de fi- bres charnues ; ce qui d'un feul mufcle en apparence en fait quatre bien diuinfts. Mous ne parlerons point ici de plufieurs autres décou- vertes qu'il n'avoit nullement pré- vues , Se qui concernent cette mé- chanique. Il faut les voir dans fort Mémoire. Cette conftru&ion mufculeufc bien examinée lui fit connoître d'abord que le mufcle primitif d'où partoient ceux qui étoient deftinés à la flexion de la féconde phalange des trois doigts , index , annulaire & auriculaire , pouvoit être un mufcle auxiliaire , dont la force venoit au fecours des trois autres tirés au-delà de leur portée. Mais il changea bien-tôt d'avis , & com- prit que ce mufcle primitif ne pou- voit rien ajouter à la puiflance des troisautres, quelque refi (lance que ceux - ci enflent à vaincre , lois N 94. JOURNAL DE qu'ils agiffent tous cnfemble, foie qu'ils n'agiffent que (éparément. C'eft ce qu'il s'efforce de démontrer, &c fur quoi il faut recourir au Mé- moire éc aux figures , ainfi que fur l'ufage qu'il attribue à ce même mufclc devenu inutile par rapport à ceux qui fembloient être avec lui en fi grande liaifon. M. Hunauld obferve que la confufion de même que la divilïon des tendons en diverfes parties qui d'un doigt vont irrégulièrement s'unir aux tendons deftinés à d'au- tres doigts , font peut-être des cau- fes du peu d'adrefle de certains fu- jets &du peu de facilité qu'ils ont à jouer des inftrumens ; une phalange d'un doigt ne pouvant ni le fléchir ni s'étendre , fans qu'une autre pha- lange ou la même phalange d'un autre doigt ne fe flechifle ou ne s'étende mal-à-propos en mêrne- tems , fuivant le différent mélange des tendons flechiffeurs ou des ex^ tenfeurs. Nous paffons d'autres ob- fervarions curieufes fur ce fujet , lefquelles terminent le Mémoire de M. Hunauld, Se qu'il faut lire chez lui. Les diverfes Obfervations Arm- tomitjnes font au nombre de fepr. La première contient une Rela- tion envoyée à M. de Mairan par JA- de la Font Ingénieur en chef à Nantes , au fujet d'une Tortue ex- traordinaire, pêchée à l'embouchu- re de la Loire. Elle étoit longue de 7 pieds i pouce , large de j pieds 7 pouces, épaiffede deux pieds. Elle étoit couverte d'un cuir qui lui te- jRQiclieu d'écaillé , Se c'eft pour cc- S SÇAVANS, la que M. de la Font la compare à- h Tcflitdo coriace* de Rondelet , de laquelle cependant elle differoic quant à fa tête Se à (es mâchoires garnies antérieurement de 4 dents affez longues , Se latéralement d'un double rang de petites fituées com- me celles du Requiert. Cette Tortue differoit encore de celle de Ronde-, let par l'inégalité de fes nageoires ,' Se par fa queue entièrement déga- gée de fon corps. Lorfque les Pê- cheurs raflommerent à coups de crocs , elle fit des hurlemens (î hor- ribles, qu'on les eût entendus d'un oinrtde lieue , Se il exhaloit de fa gueule écumante une vapeur fi in-" fe£le,qu'ils penlerent s'en évanouir»- Elle étoit fi corrompue lorfqu'elle fut tranfportée à Nantes qu'il fut impoifible d'en faire la difle&ion ; Se l'on n'en a confervé que le cuit ou l'écaillé. On allure que cette Tortue étoit fort différente de celles- qu'on prend dans les mers de l'A- mérique , & l'on foupçonne qu'elle pourroitêtre venue de la Chine à la fuite de deux VailTcaux qui en étoient nouvellement arrivés. La féconde obfervation commu- niquée à M. Hilvethts par M. Cbauvet Médecin de l'Hôpital de Toulon , roule fur un dérangement énorme de parties trouvé à l'ouver- ture d'un Cadavre, Se qui ne pou- voit être qu'un vice de conforma-- tion. Le ventricule , le colon & la moitié fuperieure de la rate s'é-»- toient placés dans la cavité gauche de la poitrine , en perçant le dia-, phragme en plufieurs endroits , qui' f ormoient comme des anneaux cas-1 F E V R I E tilagineux fortement adhérents aux vifceres qu'ils embrafloicnt. Le co- lon qui pour entrer dans la poitrine avoit percé le diaphragme latérale- ment à gauche , le perçoit une fé- conde fois vers fon milieu pour fentrer dans le ventre & y conti- nuer le canal des inteftins. On peut juger combien , dans une poitrine remplie de tant de vifceres étran- gers , les poumons fe trouvoient à l'étroit., minces , flétri» , repliés en eux-mêmes & incapables de fe di- later fuffifamment 6v de fournir au fang afTez d'air pour obéir facile- ment à l'impulfion du cœur qui s'é- toit considérablement groflî par les efforts continuels qu'il faifoit pour chafler un fang difficile à mouvoir. La troifiéme Obfervation , due à M. Bomllet , Médecin de Beziers , fournit une preuve convaincante d'un fait regardé comme fort dou- teux & prcfqu'univerfellement nié: c'eft hfuperfetation. Une femme, après s'être délivrée d'un Embryon âgé de 40 jours , enveloppé de fes membranes de parfaitement confor. me, accoucha le lendemain d'une fille qui étoit en pleine fanté. Dans la quatrième Obfervation venue du même endroit , il s'agit d'une Gonorrhéc virulente fingu- liere , dont la matière conditionnée comme elle doit l'être en pareil cas , fortoit par les glandes qui gar- riffent la couronne du gland , &c qui fut guérie par les remèdes ordi- naires. Dans l'Obfervation fuivante (j) il eft queftion d'unBézoard extraor- dinaire montré à l'Académie pat R , 1 7 3 *•' 9$ M. Çcofffoy le cadet , Se trouvé dans la vélïcule du hel d'une Tor- tue terreltre de l'Ille de Bourbon. C'elt une pierre irrégulièrement ronde , dont le plus grand diamè- tre eft; de trois pouces trois lignes Se le plus petit de 2 pouces & demi , qui ne péfe pas 5 onces & qui eft d'un jaune verdâtre; ce qui montre que dans le corps des animaux de toute efpcce , il n'y a nulle cavité 3bfolument exempte de concrétions pierreufes. Une tumeur d'un genre fort Sin- gulier trouvée par M. Morand, à l'ouverture du cadavre d'un jeune homme, fait le fujet de la fixiéme Obfervation. Elle occupoit dans le ventre toute la région ombilicale, fe prolongeoit vers le haut , &c fe confondant avec le pancréas , en- troit dans la poitrine conjointe- ment avec l'aorte > elle étoit blan- che , faillante , revêtue de la dou- ble membrane mefenterique , 5c s'attachoit aux vertèbres des lom- bes. Elle étoit remplie d'une ma- tière chyleufe , fluide en quelques endroits , caillée en d'autres , fans odeur ; & elle pefoit 7 livres & de- mie. C'étoit une fuite de l'engorge- ment des glandes du méfentere } Se confequemment de tous les vaif- feauxchyleux : auffî les veines lac- tées y paroifloient-elles très-vifible- ment. On doit encore au même Aca- démicien la 7e & dernière Obfer- vation , qui dans un homme fujet aux palpitations de cœur & mort fubitement , nous découvre des dé- rangemens fort bizarres arrivés à ce Nij 5> les uns en ont fait des Traitez, les autres fe font contentés de recueillir des Décifions , d'autres ont réunis ce qu'Us ont connu d'Ordonnances & d'Arrefts fur cet- te matière. On trouvera dans ces deux Volumes , non feulement ce qu'il y a de plus utile dans les Trai- tez précedens , mais encore beau- coup d'Oblervations importantes & de Pièces juftificatives qui ne font pas dans les Traitez Se dans les Recueils fur cette matière qui avoient paru jufqu'à prefent. Le premier Volume renferme le Trai- té, & le fecondVolume contient les preuves qui font fuffîfimmcnt in- diquées dans le titre du Livre. Ileft divifé en douze Chapitres. L'Auteur qui joignoità beaucoup- d'érudition une grande expérience dans les affaires du Clergé, expli- que dans le premierChapitre ce que c'eft que la Dixme en gênerai , Sî qu'elles font fes différentes efpeces» Il examine dans le fécond Chapitre fi la Dixme eft établie de droit di- vin dans la P\.eligionChréticnne,cxil foûtient la négative. Il avoue que fé- lon le Droit naturel &leDroitDi vin il faut que les peuples fournifTent ce qui eftneceffaire pour l'entretien &c pour la fubfiftance des Pafteurs , qui font occupés àl'adminiftration des Sacremens fie à rmftruction des Peuples. Mais on peut employer des moyens differens pour fournir aux Pafteurs les fonds qui font de- ftinés à leur entretien. Chez les Juifs .. ces fonds étoient tirés des Dixmes. Cependantcommc le pré- cepte de payer la Dixme n'étoit point fondé fur le Droit Naturel , il ne pouvoir former une obligation dans la nouvelle Loi, à moins que ÏEVRI J.C. ne i'cut renouvelle expreflé- ment. C'eft ce qui ne paroîc ni dans l'Evangile , ni dans les Ecrits des Apôrres , quoiqu'il y foie fouvent parlé de l'obligation dans laquelle font les Fidèles de fournir ce qui eft neccffaire pour la fubfiftance de leurs Pafteurs* Aufïï voyons-nous que dans les premiers fiécles , on n'étoit point obligé de payer la Dixme , S. Gyprien le dit expref- fément dans fon Traité de l'Unité de l'Eglife. Dans la fuite il y eut des Fidèles qui payèrent la Dixme à l'Eglife par dévotion , enfuitecet ufage fut changé en une obligation générale dans prefque toutes les Eglifes Latines , quoiqu'en diffe- rens tems. Le 5e Canon du 2e Con- cile de Maçon en contient une dif- poluion exprelte. Jufque ici l'Auteur a foûtenu un fentiment contraire à celui de la foule des Canoniftes qui fe tondant fur quelques endroits desDécretales croyent que l'obligation de payer la Dixme eft de Droit Divin; mais il a pour lui la plupart des Théologiens qui font perfuadés que l'obligation de fournir la fubfiftance aux Mini- lires de l'Eglife eit de Droit Divin , quoique la manière de fournir cette fubfiftance foie de droit pofitif. Mais ce droit poiitif doit-il être regardé comme Ecclcfiaftique ou comme Civil ? C'eft fur quoi le fentiment de l'Auteur eft bien dif- férent de celui des Théologiens. Il avoue que l'Eglife & la Puiffance Temporelle doivent réunir leur au- torité pour obliger les Fidèles à con- tribuer à la fubfiftance des Pafteurs. E R ; 1 7 j 2: pj parce que cette obligation eft fon- dée fur le Droit Divin , mais il foûtient que la manière de fatisfaire à cette obligation par le payement de la Dixme eft plus fondée fur les Loix de l'Etat que fur celles de l'E- glife. La Dixme eft, dit-il, un Temporel qui n'appartient aux Ec- clefiaftiques , ni de Droit Naturel , ni de Droit Divin. La polleftion légitime dans laquelle font les Ec- clefiaftiques de la percevoir ne peut donc être fondée que fur les Loix qui règlent la polîeilion des autres biens de l'Etat , & la manière d'en difpofer. Si les Loix de l'Eglife , ajoute notre Auteur, étoient le fon=< dément de cette polfelïion , un Souverain faifant profeffion de la Religion Chrétienne , feroit privé d'une partie de la puiiTance qu'il avoir fur le Temporel avant d'être Chrétien , & ilfaudroit reconnoî- tre deux Puiftances Temporelles dans les Etats Chrétiens , l'une qui regleroit les Dixmes , l'autre qui regleroit les autres biens. Selon lui les Loix du Souverain , les difpofi- tions des Coutumes & les ufages de' France fuppofent que le droit d'e- xiger les Dixmes eft fondé fur les Loix Civiles. A l'égard des Canons desConciles qui preferivent des Loix fur cette matière qui eft temporelle, on ne les obferve qu'autant qu'ils f© trouvent autorifés expreftément ou tacitement par leSouverain. C'eft ce qu'il établit en particulier pour le fécond Concile de Maçon fur deux faits. Le premier , que ce Concile a été convoqué par le Roi Gontranf le fécond , qu'on n'y a rien détes» $8 JOURNAL D miné que fuivant fa volonté , il le déclare lui-même dans fa Loi fui la célébration du Dimanche. Notre Auteur conclut de ce Sy- ftème que le Souverain peut quand il le juge neceflaire changer quelque chofe dans le payement de la Di\- me. Et c'étoit fur quoi étoir fondé un Edic d'Henri IV. du mois de Janvier 1^07. qui exemptoit de la Dixme pendant dix ans des terres deffechées Se mifesen culture. Ceft auflî le fondement des Ordonnan- ces au fujet des Dixmes infolites, qui font en beaucoup de points contraires aux difpofitions du Droit ■Canonique. Les Dixmes inféodées font le fu- jet du troifiéme Chapitre. Notre Auteur n'eft pas du fentiment de ceux qui croient que ces Dixmes ayent été enlevées à l'Eglife pat Charles Martel pour en recompen- fer fes Officiers & fes Soldats ; il penfc qu'il y en a qui ont été don- nées par des Evêques à des Laïcs pour les recompenfer des fervices qu'ils avoient rendus à l'Eglife, que d'autres ont été ufurpées fur l'Egli- fe par des Seigneurs , &c que la plus grande partie font purement pro- phanes dans leur origine ; l'urage des Seigneurs ayant été endifferens Pays , de fe referver une portion des fruits qu'ils donnent à cultiver à des particuliers. Cependantl'Au- teur avoue que dans notre ufage on regarde les Dixmes inféodées com- me ayant été des Dixmes originaire- ment Ecclefiaftiques , puifqu'on les afTervit fubfidiairemcnt à la portion congrue des Curez. ES SÇAVANS; L'Auteur traite enfuite plufieurs queftions de pratique par rapport aux Dixmes inLod^cs , puis il vient dans le Chapitre quatrième , à la prelcription de la Dixme. Il y foûtient en fuivant les principes qu'il a pofés dans fon fécond Cha- pitre , que fi l'on n'admet point de prefeription en France contre le droit qu'ont les Kccleiiaftiques de lever la Dixme fur tous les fonds , c'eft un privilège que les Souve- rains ont bien voulu accorder aux Ecclefiaftiques &c qu'Us peuvent en ordonner autrement. A l'égard de la manière de payer la Dixme , &C de la quotité à laquelle elle doit être payée , l'Autear fuit les fenti- mens communs , & il rapporte là- deffusplufieurs décidons particuliè- res , dans le détail defquelles nous ne pouvons entrer , non plus que dans les queftions qu'il propofe dans le Chapitre cinquième , fi on doit la dixme des fruits quicroiffent dans les Parcs Se dinsles Jardins, dans les Marais deflechés &£ mis en culture , ou fur les terres aliénées par des Religieux qui font exemts de dixmes, fur les terres qui n'a- voient point été mifes en culture de tems immémorial ou fur des terres qui ayant porté auparavant des fruits fujets à la dixme fuivant la Coutume du lieu , font chargées de quelque cfpece de fruits dont la dixme cft infolite. Ces dixmes infolites font la ma- tière du Chapitre fixiéme ; entre les queftions qu'il y agite , une des plus importantes eft celle qui regar- de la dixme du Colzat qui fait de- F E V RI E puis Iong-tems le fujet d'une conte- ftation entre les Décimatëurs 6c les habitans de la Flandre. L'Auteur eft perfuadé que l'efpritdes Ordon-- nances de Philippe le Bel pour la France , £c de l'Empereur Char- les V. pour la Flandre , a été en dé- fendant, d'exiger les dixmes infoli- îes , d'empêcher que les Ecclefiafti- ques ne levaffent la dixme des fruits qui étoient inconnus dans le tems de ces Ordonnances ; mais il croit que pour qu'on puiflfe fe fervir de ce moyen contre les grosDécimateurs, il faut i°o que les Pafteurs qui ti-' roient leur fubfiftance des dixmes anciennes ne foient pas privés de ce qui leur eft necellaire : z°. Que ce changement ne fe fafle point en fraude des Décimatëurs. Il s'agit dans le huitième Chapi- tre des perfonnes qui doivent la dixme & des Religieux qui en font exemts à titre particulier, & dans le neuvième de la manière de payer h dixme ; ce qui engage l'Auteur dans plufieurs queftions fur les dix- mes de fuite , fur le tems auquel la dixme doit être payée , furies dix- mes abonnées. En traitant des Charges dont font tenus ceux qui pofledent les grofTes dixmes , l'Auteur ne parle point delà portion congrue fur la- quelle d'autres Canoniftes ont don- né des Traitez particuliers , mais ■ des réparations même de la recon- ftru&ion des Choeurs &du cancel des Eglifes Parroitfiales, & des cas dans lefquels les gros Décimatëurs font obligés de fournir les Livres 4'Eglife & les Ornemcns neceflaires R ; ï 7 3 a: 9^ pour le Service Divin. Par rapport aux Juges qui peu» vent connoître des conteftations fur les dixmes , ce qui fait la matière du onzième Chapitre , notre Au- teur obferve d'abord que fi l'obli- gation de payer la dixme eft fondée fur les Loix des Souverains , com- me il l'a foûtenu dans fon deuxiè- me Chapitre , le Souverain a aufll droit de connoître de toutes les conteftations fur la dixme , tant fur le poiTelToire que fur le petitoire s' Se que fi les Juges d'Egiife connoif- fent du petitoire , ce n'eft que par une concelîion du Roi ; mais il re- connoîtque nos Auteurs ne raifon- nent pas de cette manière , & qu'ils enfeignent que le petitoire des dix- mes Ecclefiaftiques doit être traité en Cour d'Egiife ; mais en appli- quant ce principe à la pratique on le réduit à très-peu de chofes , par- ce que les Juges Royaux en pro- nonçant fur le poffefloire règlent prefque toujours le fond , attendu que les conteftations qui naiffent fur les dixmes dépendent prefque toutes de l'ufage &: de la poffeilîon qui font de la compétence du Juge Laïc. Notre Auteur vient enfin aux Charges dont font tenus les Paî- trons, qui ne font point gros Déci- matëurs , & il foûtient qu'ils ne font obliges de contribuer à la por- tion congrue des Curez , après que les dixmes ont été épuifées , que quand il y a des fortes préfomp- tions qu'ils font poiTeiTeurs des an- ciens Domaines des Cures. Après ce Traité viennent trois ioo JOURNAL D Mémoires tirés du Cabinet de M. Prevoft Avocat au Parlement , le premier a été compofé par M. Du- rand Avocat au Parlement de Roiien , dans le temsque M. Pelot y fut reçu premier Président. Le jTecond Mémoire eft de M. Grcard, aufli Avocat au Parlement de Roiien. L'Auteur de ce Mémoire eft beaucoup plus favorable aux Décimateurs que l'Auteur du Trai- té des dixmes dont nous venons de rendre compte , car M. Greard (oûtient qu'elles font de droit divin quant à l'inftitution ; mais que la manière de les percevoir eft de droit pofitif , &c qu'elle dépend de ES SÇAVANS, l'ufage £c de lapofleflîon. Le der- nier de ces Mémoires eft un Recueil d'Arrefts fur les Dixmes par M. Angrant qui eft mort en 1707. Doven des Avocats du Parlement de Paris. On y trouve des Arrefts fur les Dixmes qui n'ont point été imprimés dans d'autres Re- cueils. Nous n'avons rien.de particulier à dire fur le fécond Volume, qui ne contient que les Edits , les Dé- clarations , Se les Arrefts, tant du Confeil que du Parlement , Se quelques autres Pièces qui font citées dans le Traité. OBSERVATIONS DE CHIR URGIE , AVSQUELLES on a joint plufieurs Réflexions en faveur des Etudians. Par Henri-Fran- çois le Dran , de la Société Académique des Arts , Chirurgien Juré a Paris , Ancien Prevoft de fa Communauté & Ancien Chirurgien Major de l'Hôpital de la Charité, Démonftrateur en Anatomie dans le même Hôpital. A Paris , chez Charles Ofmont, Imprimeur-Libraire, rue S. Jacques , à l'Olivier. 173 1. deux vol, in-li. premier vol. pp. 380. fécond vol. pp, 404. CE S Obfervations font au nombre de cent-quinze , plu- fieurs de M. le Dran, & plufieurs de differens Chirurgiens Ces Con- frères. Elles regardent les unes la tête , les autres la poitrine , les autres le ventre & les autres les extremitez. Nous ne fçaurions donner l'txrrait de tant d'Obfervations, nous nous bornerons à la première de chaque Volume pour éviter l'embarras du choix. Voici donc celle qui con- cerne le premier Tome. Il s'y agit dyne Tumeur à la tête d'un enfant nouveau ne. Cet enfant venu au monde avec cette tumeur, fut, deux jours aptes, porté chez M. le Dran , qui lui trouva fur le pariétal droit une grolTeur qui occupoit ptcfque toute l'étendue de cette partie , & qui écoit molle , indolente, élevée d'un pouce de Roi , avec fluctuation. Il hélîta d'abord à porter fon ju- gement iur la qualité de cette tu- meur , parce qu'à la circonrcrcncc il fentoit à l'os un cercle qui lui fai- foit foupçonner que l'ollirication du crâne avoit manqué en cet endroit. Ainii il douta fi la tumeur étoic formée FEVRIE formée par une hernie du cerveau , ou fi c'étoic un faux anevrifme , formé par la rupture de quelque petite artère j car , comme il le re- marque , on fçait que dans cette efpece d'anevrifme, on n'apperçoit pas le battement qu'on lent aux anevnfmes vrais où l'artère n'eft que dilatée. Pour pouvoir s'affurer de la na- ture de la maladie par le progrès qu'elle pouvoit faire , il laifla pen- dant lix jours la tumeur fans y tou- cher, au bout de ce terme il trouva qu'elle n'étoitni augmentée rn diminuée;& comme les anevrif- mes faux augmentent pour l'ordi- naire de jour en jour , il crut que la tumeur n'étoit pas de ce caractère. Il avertit fur cela avoir vu plu- iïeurs faux anevrifmes à la têtecau- fésou par des coups , eu par un ar- rachement de la peau , à des enfans qui s'étoient battus , & à qui on avoit tiré les cheveux & les avoir tous vus augmenter de jour en jour par le volume du fang que l'artère ïburnifloir fans cefle. Perfuadé par là Se par le cercle qu'il fentoit à l'os , que la tumeur en queftion étoit une hernie du cerveau , il fit mettre des compref- fes très-épailTes imbibées d'eau-de- vie, foûtenues feulement avec le bonnet. Il recommanda de les y lailfer 24 heures fans les remouiller, afin qu'acquérant de la dureté en fc deffechant , elles fiflent une légère pompreffion. Au bout d'un mois la tumeur fut entièrement dillipéc , & pen- dant ce tcms-là le temporal s'oilifia^ Ètyritr, R ,' 17^2; roi- ce que l'on reconnut par la dureté qu'il acqueroit tous les jours : enfin le grand cercle qu'on avoir fentiau commencement s'effaça , il n'en refta qu'un petit dans le centre , & ce petit cercle difparut au bout de dix mois , parce que le temporal s'oiliria entièrement. M. le Dran qui a traité cette ma- ladie comme une hernie du cerveau, laifie aux Lecleurs à décider de la nature de cette hernie , cV il fait là-deiïus les reflexions fuiyan-, tes. Il remarque , i°. que G c'étoit un. anevrifme taux , la comprclîîon a pu prévenir un amas de nouveau lang , mais qu'il eft difficile de comprendre ce qu'elf devenu celui qui étoit déjà épanché, puifqu'il y en devoit avoir au moins fix bonnes cuillerées , Se qu'on fçait par ex- périence , qu'une pareille quantité épanchée ne fe refout pas ailémenr. i°. Que fi c'étoit une hernie du cer- veau comme il le jugeadans la fui- te , il eft facile (le voir que le léger point d'appui , a d'abord foûtenu cette partie , & qu'après en la ref- ferrantpar une molle comprelïïon , il a rendu le reflort aux vaifieaiut dilatés j qu'ainfi le tifTu de l'os n'é- tant pas étendu au-delà de ce qu'il devoit , il s'eft endurci Si oififié. M. le Dran fe fait ici uneobjec^ tion , fçavoir qu'une hernie du cer- veau ne faroît pas poffible , pu /y ne la fontanelle étant plu/leurs années il ïofffier , il ne Je fait pas de hernie en cet endroit. Mais il répond que l'obje&ion tombe d'elle-même , fi on confidere qu'à l'endroit de 1» N toi JOURNAL D fontanelle , la duplicature de la du- rc-merc qui fait la taux, eft un frein qui empêchant la voûte du crâne de céder , s'oppofe à la hernie. Voilà pour ce qui regarde la pre- mière Obfervation du premier Tome. Voici la première du fé- cond : il s'y agit d'une hernie cru- rale furvenue à un homme de qua* tre- vingts ans. Cet homme en def- cendant du Coche de Verfailles , tomba , & fut fur le champ attaqué d'une hernie crurale du côté droit, (depuis long-tems il portoit un Brayer , parce qu'il avoit eu autre- fois la même maladie) Il refta en- viron quinze jours dans cet état , & ne crut pas devoir ôter fon brayer , ignorant que la comprelîîon que taifoit ce brayer, rut capable de faire augmenter les accidens. Enfin îa douleur qu'il reflentoit dans l'ai- ne étant continuelle, il fe ht tranf- porter le 9. Janvier 172^. à la Cha- rité. Il avoit vomi depuis fa chute tous les alimens qu'il avoit pris tant liquides que folides , fans en pou- voir garder la moindre portion. Le ventre étoit reflerré & gonflé, mais exempt d'inflammation. Le malade n'y fentoit de douleur que lorfqu'on y touchoit , mais l'endroit de la tumeur , quoiqu'il n'y eût point d'inflammation fous la peau , étoit toujours douloureux ; du refte il y avoit très-peu de fièvre , & le poulx paroilïbit très-lent &r dur. M. le Dran elîaya inutilement de faire la réduction , ce qui avoit déjà été tenté avant que le malade vînt à l'Hôpital. Comme, de quel* E S SÇAVANS, que manière qu'on s'y prît, la gué- rifon paroilïbit fort équivoque , notre Auteur fit mettre lur la tu- meur un cataplâme émollicnt, Se manda pour le lendemain deux de fes Confrères pour délibérer fur ce qu'il y auroit à faire. Ces trois Chi- rurgiens conclurent pour l'opéra- tion , &: le onze Janvier au matin,' feiziéme jour de l'accident , elle fut faite par M. le Dran. La maladie fe trouva être une Entero-Epiplocelle,c'eft-à-direune chute de l'inteftin lk de l'épiploon. Ces parties avoient pafle par def- fous le ligament de fallope du côté de l'os pubis, & pouffant de- vant elles la lame du péritoine , s'en étoient fait un fac où elles étoienc enrermées , qui eft ce qu'on appelle le fac herniaire. M. le Dran commença par dé- couvrir le fac (elon la manière ordi- naire, après quoi il coupa le liga- ment pour ciïayer de réduire les parties fans ouvrir ce fac. Il s'apper- çut aullî-tôt après, que ce n'étoit pas le ligament qui fiufoit l'étran- glement le plus fort i mais que c'é- toit l'entrée du fac , laquelle ayant été long - tems comprimée par la pelotte du brayer , s'étoit retrecic. Alors y portant fon doigt , il fentit que ce fac reflembloit à une bourfe fermée , & que fon entrée feule, à force d'être rctrecie, étoit capable d'empêcher la rédutft ion des parties déplacées. Il ouvrit le fac Se il y trouva une portion d'épiploon qui faifoit auilî une efpece de poche ou de coeffe dans laquelle l'inteftin ctoit enfermé. Il fendu cette coeffe F E V R I fans la détacher du fac herniere au- quel elle étoit adhérante dans tcuce fa circonférence. Il dilata enfuite avec le biftoury caché , l'entrée du fac , de même qu'on dilate l'anneau dans la hernie inginnale ; 6\: il re- duifit l'inteftin. Cet inteftin parut d'une couleur un peu brune, mais n'étoitpas gangrené. La portion de boyau étranglée n'excedoit pas la grolTeur d'une cerife. Notre Ope- rateur laiiîa la petite portion d'épi— ploonqui étoit adhérante au fac, comptant qu'elle tomberoit d'elle- même par la fuppuration. Il ne mit dans la playe qu'une efpe- ce de pelote de charpie , entourrée d'un linge fin, laquelle fçrmoit le partage aux parties, & permettoit ce- pendant l'iiïue des ferofitez en cas qu'il y en eût quelqu'une qui dût fortir. Ilfoûtint le tout avec le ban- dage ordinaire, &z trois heures après il humecta fon appareil avec l'huile rofat pour défendre la playe contre la dureté que cet appareil imbibé de fang pouvoit contracter. Il ne faut pas oublier de remarquer qu'une demi heure après l'opération le malade fut faigné , que fon ven- tre fe dégagea de quantité de vents, & qu'une heure enfuite un lave- ment émollient & carminatif ^ procura une évacuation qui foula- gea beaucoup le malade , & après laquelle il ne vomit plus. Les em- brocations émollientesfurle ventre ne furent pas oubliées , Se le mala- de alla paflablement bien jufqu'au onzième jour de l'opération. Ce- pendant il fentoit toujours quelques douleurs dans l'abdomen , ayant un léger cours de ventre mêlé de fang. Il avoit outre cela un grand dégoût, & fes forces diminuoient tous les jours , enfin s'aftoibliilanc peu à peu il mourut fans agonie. M. le Dran l'ouvrit en prefenec de plufieurs témoins , & il trouva à l'inteftin Ueum à l'endroit qui étoit proche de la playe & qui probable- ment avoit été la portion étranglée, une marque noire Se gangrenée de la largeur d'un liard , fans que l'in- teftin fût percé. Il y avoit dans tou- te la longueur du Jéjunum d'cfpace en efpace , au moins une quinzaine de taches noires toutes pareilles , <$C trois ou quatre de même cà la por- tion de l'Ileum qui remplilîoit la région iliaque droite. Tout le refte du canal étoit fain , à quelques li- gnes d'inflammation près , qui à peine fe difeernoient ; les autres parties étoient faines aullî. M. le Dran réfléchit fur cette Obfervation , & conliderant i°. que le ventre du malade n'étoit prefque pas douloureux , & qu'il étoit peu tendu ; z°. Que dans l'ouverture du cadavre on ne trouva point d'inflammation au canal intcftinal , mais que cependant il y avoit d'ef- pace en efpace des taches noires Se gangrenées; il demande comment cette gangrené a pu fe faire , & il répond ce qui fuit. n Les inflammations dans les Vieil- » lards ne vont jamais fi vite que »• dans les jeunes gens. Cela ne vien- »» droit-il pas de deux caufes Pou de » ce que le fang eft chez eux moins »» fujet à s'enflammer, ou de ce que »le tilTu de leurs vaiiïeaux ayant Oij 1 04 JOURNAL D « moins de relîorts , il combe plas » difficilement dans ccc érctifmc » ou rcnlion tonique qui en rétrécit » le diamètre ; ces mêmes parties » qui ne paroiflent que légèrement 3î enflammées , ne lailTent pas de '•"tomber en gangrenne , & cela n parce que les liqueurs y circulanc »j lentement , s'arrêtent aifément. La Méthode de M. le Dran eft de joindre ainfi des reflexions aux Obfcrvations qu'il rapporte. Il le fait ( comme il l'annonce dans fon titre ) en faveur des afpirans en Chirurgie; & peur montrer com- bien cette Méthode eft utile , il em- ployé à cela une Préface exprès qui paroîr contenir deux Parties. Dans la première , il établie que l'Obier - dation elt la merc des Sciences Se des Arts , & en particulier de la Chirurgie , ce qui n'eft pas bien difficile à prouver; & dans la fécon- de , que li la Chirurgie doit fanaif- fance à l'obfervation , la réflexion a beaucoup enrichi cet art , & qu'il fe faic un concours de l'une &c de l'autre pour le perfectionner. Notre Auteur s'explique fur tout cela d'une manière diftufeSc qui montre qu'il a delfein de faire une Préface dans les formes. Pour orner fa Pré- face il a recours aux phrafes , aux tours , aux figures. Les Garçons Chirurgiens,qui font ceux aufquels elle elt adreffée , y admireront fans doute ces paroles : » L'homme ayant obfervé que » rien n'eft en repos dans l'Univers, y> & que par un changement con- » tinuel , tout tend à fe pcrfedtion- » nei avant d'arriver à fa deftruc- ES SÇAVANS, » tion , l'homme , dis-je , né eu-1 » ricux , avide de connoillances , &C m d'ailleurs obligé de fatistairc ?. n tous fes beloins , a d'abord étudié » les routes que la nature fuit dans m ces changemens. Enfuite refle- »chillant fur la manière dont elle » agit , & combinant fes diftcrcn- »> tes opérations , il a travaillé de » concert avec elle pour l'aider ; » j'ofe dire encore , pour la corriger j» & la redrefler. M. le Dran, quelques pages en- fuite , dit aux mêmes Garçons Chi- rurgiens , qu'à la vérité la réflexion a beaucoup de part à l'avancement des Arts, cV: que fans elle ilsferoien* encore bien peu de choie ; mais fans l'Oblcrvation , demande-t-il , les auroit- elle imaginés? » Non » certainement , répond - il. On »n'enfanteroic que des Syftêmes » incertains ; au lieu que l'obferva- » tion eft la coupelle , ou comme >»l'or, la réflexion s'épure, & fe >» dégage des ruinées d'une imagina*- » tion échauffée qui peut fallu égi- » lement le faux & le vrau A cette comparaifon de la cou- pelle fuccede immédiatement l'ex- hortation fuivante adreflée aux Afpirans en Chirurgie.'Attachons- «nous donc à obfcrvcr fans cède, »Sc à réfléchir fur ce que nous » voyons. C'eft ainfi que les Grands » Hommes fe font formés , c'eft » par là qu'ils ont excellé ; je vous » invite à les imiter. En rapportant l'Obfervation de M. le Dran touchant la hernie cru- rale, nous avonspafféà deflein un endroit qui , à caufe de l'importai^ F E V R I ce dont nous l'avons trouvé , nous a paru devoir être renvoyé à la fin de cet extrait , pour y être expofé plus particulièrement. Dans cette obfervation M. le Dran reprefente comme abfolu- ment inutile, un moyen de réduire les hernies, lequel n'eft cependant pas à méprifer , voici ce que c'eft. M. Reneaume , Médecin , vit le malade qui avoit la hernie dont dont il s'agit. Comme M. le Dran avoit fait mettre fur la tumeur un cataplâme émollient, Se qu'il avoir, mandé pour le lendemain matin deux de fes Confrères , afin de voir enfemble ce qu'il y auroit à faire , M. Reneaulme Médecin lors de quartier à l'Hôpital delà Charité , tut d'avis que l'on continuât les ca- taplâmes émolliens jufqu'à l'après midi ; Se pour effayer d'épargner au malade une opération dangereufe^il recommanda aux Religieux , d'a- voir foin , fur les cinq à fix heu- res du foir , qui eft le terns où le cataplâme pouyoit avoir fait fon erlet , de mettre le malade auprès du feu , de le faire profterner fur fes coudes & fes genoux Se de le tenir dans cette pofture un quart-d'heu- re , pendant lequel tems les parties , à ce qu'efperoit ce Médecin , pour- roient rentrer. C'eft une attitude, dont on avoit vanté le fuccès à M. Reneaulme pour la réduction des hernies. >» J'avois peu de foi à ce remède, » dit M. le Dran. Je ne laiffai pas m de confulter avec mes deux Con- 2» frères, Se nousconcluâmesàl'o- «peration , perfuïdés que toutes E R , 1752: 105 »les proftrations du monde n'é- » toient pas capables de réduire la »> hernie. Nous crûmes cependant »ne devoir pas en interrompre la m cérémonie pour défabufer ceux >» qui y avoient confiance .... Les n Religieux furent exacts ; le ma- 3° lade elfaya le remède Se il n'y ga- »gna que beaucoup de fatigue. M. » Perron qui s'applique fur tout à » cette partie de la Chirurgie , Se » qui y eft très-expert , m'a die » qu'il a elTayé pluiîeurs fois cette m méthode fur le rapport de M. » "Winllow Dodeur en Médecine, » Se qu'il ne l'a jamais vu réullir. Voilà comme M. le Dran s'expli- que fur ce fujct,par où on voit qu'il a cru bonnement que la méthode confeillée par M. Winflov pour la réduction des hernies, confifte fim- plementà profterner un malade fut les coudes Se fur les genoux , en quoi affurément ce Chirurgien fc trompe fort. Il faut , quand le malade eft ain- fi profterné, aider doucement avec la main le boyau à rentrer , fans quoi on n'aura pas plus de fuccès qu'en ont eu M Perron Se ces Religieux. Il eft étonnant que M. le Dran Se M. Perron n'ayent pas été mieux informés de la Méthode de M. WimW , & qu'ils ayent cru que tandis que le malade étoit appuyé fur les coudes Se fur les genoux il falloit demeurer les bras croifés Se attendre que l'inteftin rentrât de lui-même. Nous fçavons l'Hiftoire d'un Payfan qui voyant fon enfant tourmenté d'une hernie que les ioô* JOURNALD Chirurgiens ne pouvoient réduire , le renverfa brufquement la tête en bas Se l'ayant renu un peu de tems par les pieds , fit rentrer aifément le boyau par le moyen d'une com- preflîon douce qu'il fit faire par une autre perfonne à ce boyau ; or lï la réduction ne fc fit pas ici par la féa- le fituation renverfée dans laquelle on mit le malade, à plus forte rai- fon ne pourra-t-clle pas quelquefois fe faire par la feule profternation dont il s'agit. M. Perron, au rap- port de M. le Dran , dit avoir plu - fleurs fois tenté cette méthode, fans l'avoir jamais vu réulfir; mais en cas que ce fait foitvrai,on peut dire que fi l'Operateur s'y étoit pris au- trement Se en la manière que nous venons de marquer , peut-être au- roit-il été plus heureux dans fes ten- tatives. Nous avons cru cette petite réfle- xion convenable par rapport à une méthode dont on peut tirer de grands fecours , Se qu'il n'eft pas jufte de décrier , parce qu'on aura négligé d'y apporter les conditions neceiîaires.Les proftrations que con- feille M. Winflow font excellentes ES SÇAVANS; pour procurer la réduction -, mais il ne prétend pas que ces proftrations fuffifent toujours feules. Ce n'eft point notre ufage de nous déclarer il ouvertement dans nos Journaux. Nous n'y rapportons ordinairement les chofes que comme Hiftoriensfii fans prendre de parti. Mais quand il s'agit de points importans & qui peuvent interelîer le Public , nous ne faifons pas difficulté de nous écarter quelquefois de notre règle. Notre Auteur annonce qu'il pourra par la fuite faire imprimée un troihéme Tome d'Obfervations; mais comme il prévoit que ce qu'il fournira pour cela de fon côté , ne fuffira pas pour remplir ce deflein , il donna avis qu'il y joindra les Ob- fervations utiles ou curieufes dont on voudra bien lui faire part , pour- vu qu'elles foient du rellort de la Chirurgie. Nous avertilTons donc ceux qui auront quelque chofe à publier fut la Chirurgie, qu'ils trouveront en M. le Dran, un Collecteur , qui leur fera là-dclTus tout le plaifir qui dépendu de lui. FEVRIER; 173s. 107 TRAITE' DU Ll BRE-ARB 1TRE ET DE LA Concupifccnce, Ouvrages Poji humes de JMeffire Jacques Bénigne Bolïuet, Evêque de Meaux , Confeiller du Roi en fes Confeils , & ordinaire en fon Confeil d'Etat , Précepteur de Monseigneur le Dauphin , premier Aumônier des deux derniers Dauphins. A Paris , chez Barthelemi Alix , Libraire , rue S. Jacques , près la Fontaine laint Severin , au Griffon. 1731. /«-iz.pp. 218. MBoffuet, Evêque de Troyes l . obferve dans le Mandement qui eft à la tête de ce Volume , que le premier des deux Traitez que nous venons d'annoncer a étécom- pofé pour l'inftruction de M. le Dauphin, AyeulduRoi. Le nom de l'Auteur & cette circonftance particulière ne manqueront pas d'exciter la curiofité du public. Car il n'y a perfonne qui ne fouhaite de voir des matières aufli difficiles que le font celles de la Grâce & du Li- bre-Arbitre traitées d'une manière qui foit à la portée de ceux qui n'ont pas fait d'étude particulière de la Théologie. Notre Auteur fe propofe d'éta- blir d'abord deux propofitions ; la première , que l'homme eft vérita- blement libre ; la féconde , que Dieu gouverne notre Libre-Arbi- tre, qu'il en ordonne tout l'exerci- ce , & qu'il en conduit tous les mouvemens aux fins qu'il s'eft pro- pofées. Nous fommes véritablement li- bres, dit M. Boffuet, s'il y a des chofes qui foient tellement en notre pouvoir, & en la liberté de notre choix , que nous puiffions ou les choiiir ©u ne les choifir pas. Or le Libre- Arbitre coniideré en ce fens eft en nous. C'eft ce qu'il prouve 1°. par l'évidence dufentiment& de l'expérience ; z°. Par l'évidence du raifonnement : 30. Par l'éviden- ce de la révélation , c'eft-à-dire ,' parce que Dieu nous l'a clairement révélé par les Ecritures. Après quel- ques reflexions fur chacun de ces articles. Le Prélat vient à lafecon-: de propofition,fur laquelle il obfer- ve d'abord que nous concevons Dieu comme un être qui fçait tout ; qui prévoit tout , qui pourvoit à tout , qui gouverne tout , qui fait ce qu'il veut de fes créatures , Se à qui fe doivent rapporter tous les evenemens du monde. Les créatu- res libres qui font ce qu'il y a de plus excellent dans l'Univers , font comprifes dans cet ordre de la Pro- vidence Divine. Il faut donc que Dieu ordonne de toutesleurs actions, qu'il les gouverne & qu'il les con- duife aux fins qu'il s'eft propofées. Autrement on établit une forte d'indépendance dans la créature , & on y reconnoît un certain ordre dont Dieu n'eft pas la caufe. Cette dépendance des êtres créés fe doit entendre non feulement des chofes qui font , mais encore des modes & des façons d'être. » Car les fa- çons à 'cue,en ce qu'elles tiennent los JOURNAL D s> de l'être , puifqu'cn effet elles m font à leur manière , doivent nc- » ceffairement venir du premier >> Etre . . . « Si le bon ufage du Li- bre-Arbitre qui eft la plus grande perfection de la créature raifonna- ble, ne venoit point de Dieu. » On »>pourroit dire que nous nous ferions «faits meilleurs Se plus parfaits que » Dieu ne nous a faits, &. que nous »j nous donnerions à nous-mêmes , r> quelque chofe qui vaut mieux 5> que l'être , puifqu'il vaut mieux » pour la créature raifonnable qu'el- » le ne fuit point du tour, que de ne «point ufer de fon Libre-Arbitre, « félon la raifon & la Loi de Dieu.« M. Bolïuet ajoute que fi on ne laifTc pas la liberté de l'homme en la main de Dieu pour l'attirer où il veut , par les moyens qui lui font connus, on ôte à Dieu la prefeien- ce des chofes humaines , parce qu'il ne voit que dans fon ellence ou dans fes décrets éternels , c'eft-à- dire qu'il ne peut connoître que ce qu'il eft , ou ce qu'il opère par quelque moyen que cefoit. Ces deux Proportions étant une fois établies , le Prélat fait voir que nous n'en devrions pas moins croire ces deux véritez, quand nous ne pourrions trouver le moyen de les accorder enfemble , parce qu'une vérité confiante ne peut jamais dé- truire une autre vérité. Ce qui nous arrête n'eft point un doute fur l'une ou fur l'autre de ces véritez , mais î'impoiïibilité apparente de les con- cilier qui ne vient que de la foi- bleffe de notre efprit. Profitons de ia cônnoiflancc-dc ces deux véritez ES SÇAVANS; que Dieu a bien voulu nous don- ner , & que l.i peine que nous avons à les concilier ne nous porte point à les nier ou à en douter. Notre efprit peut juger &c fufpendrc fon juge- ment. Ufons du droit de juger dans les chofes où nous voyons clair , Se fufpendons notre jugement où la lumière nous manque. Le Prélat fuit voir enfuite qu'il y a plulieurs véritez qui paroiffent aux plus fça- vans Philofophes très - difficiles , quelques-uns même difentimpoifi- bles à concilier , cependant cette difficulté ne nous empêche point de croire ces véritez & d'agir con- formément aux connoilïances que nous en avons , pourquoi ne nous conduirons - nous pas de même, quand il s'agit de la toute-puilTance de Dieu, qui apu cacher & dans la nature &c dans fa conduite des fe- crets qu'il n'a point voulu nous communiquer f N'eft-ce pas allez qu'il nous communique ceux qui font nccefTaires pour notre con- duite; Il n'eft pas cependant défendu de chercher les moyens de conci- lier ces véritez , pourvu qu'on ne foit pas refolu de les abandonner , quoiqu'il arrive de ces recherches. C'eftdans cette difpofition que M. BolTuet veut que fes Lecteurs exa- minent avec lui les differens moyens que les Théologiens ont propofes pour concilier la liberté avec les dé- crets de la Providence. Il réduit ces moyens à quatre principaux ; le premier, de mettre dans le volontai- re l'cUence de la liberté; le fécond , d'admettre en Disu une feience moyenne F E V R I E moyenne ou conditionnée ; le croi- fiéme , la fuavité ou la délectation qu'on appelle vieforieufe ; le qua- trième , la prémotion ou la prédé- termination phyfique. L'Auteur rejette le premier de ces moyens, parce que nousfencons en nous-mêmes , quand nous agif- fons, qu'il y a encore en nous-mêmes une faculté de choifîr. Pour com- battre le fécond Syftême, il du que Dieu voit les choies conditionnées dans fon décret ou dans l'objet mê- me ; que s'il les voit dans fon de-*- ctet, il n'y a plus de feience moyen- ne ; s'il les voit dans l'objet même , comme confideré hors de Dieu, »» on fuppofe des chofes futures » fous certaines conditions avant »« que Dieu les ait ordonnées , Se »on fuppofe encore quil les voit «hors de fes confeils •> ce qui eft im- î'.poffible. M. Boffuet ne yrouve pas letroifiéme moyen fuftîlant, par- ce qu'il croit que l'exercice de la li- berté doit avoir Dieu pour caufe première , non feulement par les attraits qui le précèdent , mais en- core dans ce qu'il y a de plus inter- ne. Il ajoute qu'il y a des actions libres où nous ne (entons ni plaifir, ni fuavité ; » Ce qui ôteroit ces ac- » tions à la providence , Se même à >»la prefeience divine ... Si on ne •»reconnoiflbit queDicu atteint pour wainfi parler toute action de nos ** volomez dans fon fond , donnant » immédiatement Se intimement à a chacune tout ce qu'elle a d'être. Dn voit par là que le Syftêmc qu'embraffe M- Bolluet eft celui des Thomiftes de la prémotion ou pre- Fcvrier. R ,~ 1732.. ro que nous fommes libres , Se néanmoins que Dieu gouverne no - ES S ÇA vans; tre liberté , & qu'il ordonne de nos actions. Le fécond Traité , quoique fur une matière fort approchante du précédent , n'eft cependant point dans le même goût. C'eft une in- ftruition morale dont le ftile appro- che fort de celui de la Chaire. M. Boftuet y explique ces paroles de S. Jean : N'aimez, pas le monde , ni ce qui efi dans le monde. Celui qui aime le monde , l'amour du Père n'eft point en lui ; perce que tout ce qui cji dans le monde eft concupifcence de la chair ,& concupiscence des yeux, CJ' orgueil de la vie ; laquelle concupif- cence n'eft pas dnPere,mais elle eft du monde. Or le monde paffe & la con- cupifcence du monde paffe avec lui ; mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement. Ce font ces trois efpeces de concupifcence qui font le principal objet de fon expo- fition. La concupifcence de lâchait eft, fuivant qu'il l'explique, l'a- mour des plaifirs des fens qu'il faut combattre continuellement. La concupifcence des yeux comprend dans un fens métaphorique tout ce qui a rapport à la curiofité Se dans le fens naturel tout ce qui regarde la pompe , l'éclat du monde Se ce qui éblouit les yeux. L'orgueil de la vie vient de l'amour propre mal réglé , dont M. Bofluet fait connoî- tre les fuites funefte?3 en parcourant les dirferens états de la vie. Voici ce qu'il dit à cette occalion fur les Poètes. » Parlons d'une autre cfpece » d'orgueil , c'eft-à-dire d'une autre » cfpece de foibleflc. On en voie FEVRI m qui partent leur vie à tourner un »> vers , à arrondir une période, en »>un mot à rendre agréables des "chofes non feulement inutiles, î> mais encore dangereufes, comme » à chanter leurs amours , & à rem- »plir l'Univers des folies de leur » jeunefTc égarée. Aveugles admira- » teurs de leurs Ouvrages , ils ne :■> peuvent fouffrir ceux des autres. m Ils tâchent parmi les grands dont ts ils flattent les erreurs &c les foi- aiblertcs de gagner des fuffrages » pour leurs vers. S'ils remportent »>ou qu'ils s'imaginent remporter » l'applaudiflement du public , en- «fiés de ce fuccès ou vain ou ima- sjginaire, ils apprennent à mettre j>leur félicité dans des voix confu- » fes , dans un bruit qui fe fait dans » l'air, &c prennent rang parmi ceux » à qui le Prophète fait ce reproche, »vous (fui vêiis rijouijjez, dans le n néant. « M. BolTuet foûtient en- fuite pour abairter les Poètes enor- gueillis des applaudiflemcns du pu- blic , que ce qu'on appelle juge- ment &c goût du public n'efl: que fantailîe & humeur -, puis il décrit la manière dont ils en agiflent , quand quelqu'un eft allez hardi pour critiquer leurs Ouvrages; il fe plaint fur tout de ce que la Reli- gion & la vérité ne font pas ména- gées dans lesOuvragesde ceux d'en- tre les Poètes qui partent pour les plus fages. j> Celui-là s'eft mis dans »> l'efprit de blâmer les femmes, il » ne le met point en peine s'il con- » damne le mariage , & s'il en éloi- a gne ceux à qui il a été donné » comme un remède ; pourvu ER; 1752; 1 î r » qu'avec de beaux vers il facrirîc » la pudeur des femmes à fon hu- » meur fatyrique , & qu'il fafle de » belles peintures d'actions bien » fou vent très-laides, il ert: content. » Un autre croira fort beau de mé- » prifer l'homme dans fes vanitezSc » dans fes airs;il plaidera contre lui » la caufe des bêtes, ëc attaquera en » forme jufqu'àla raifon , fans fon- j> ger qu'il déprife l'image de Dieu, » dont les reftes fontencore (î vive- » ment empreints dans notre chû- » te , & qui font fi heureufement » renouvelles dans notre régénéra- » tion. Ces grandes veritez ne lui » font de rien , au contraire il les » cache de defltin formé à fes Lee - 3) teurs, parce qu'elles romproient » le cours de fes faurtes &c dange- » reufes plaifanteries. Tant on s'é- » Joigne de la vérité quand on » cultive les Arts aufquels la coû- » tume & l'erreur ne donnent dans » la pratique d'autre objet que le » plaifir. « M. BofTuet ne ménage pas plus les Phiiofophes que les Poètes , non plus que ceux qu'on appelle les beaux efprits & les con- querans. Mais comme nous ne pourrions le fuivre dans ce détail fans parter les bornes ordinaires nous renvoyons là-deflus nos Lec- teurs au Livre même. M. l'Evêque de Troyes exhorte fes Diocefains dans fon Mandement à lire ces deux Ouvrages avec at- tention. » Plus vous les méditerez \ n leur dit-il , plus vous y trouverez m de lumière & de folidité , &c plus » vous avancerez dans la connoif- » fance d« la Religion , c'eit-à-dire Pij ii2 JOURNAL DES SÇAVANS; }> dans la connoiffancc de Dieu , de « vons piofuer de toutes ces con- » vous-même, Se principalement «noiflances. ■» de J. C. par lequel fcul nous pou- DE CI SI ON ES CELEBERRIMI SEQUANORUM SENATUS Dolani , in quibus multa tum ad Theoriam Juris , tum praxim &£ confuetudincm ipeclanria dilucide explanantur a Autore Joanne Gri- vello Sequano Juris utriufque Doclore Domino de Perigny , &c. Editio nova ab ipfo Autorc recognira Se pra-cedentibus non tantum emendatior, fed multis etiam deciiîonibus Se difeeptationibus auc~ tior. C'eft-à-dire : Décifions du tres-eelebre Sénat de Djle, dans laquelle on explique avec clarté plufieurs chofes qui regardent la Théorie & la Pra- tique du Druit & la Coutume de la Franche-Comté. Pa' Jean-Gàvel , Douleur en l'un & ? autre Droit , Seigneur de Perigny , autrefois Conseil- ler au Sénat de Dole , & depuis Confetller d'Etat d;s Archiducs Albert & Ifabelle. Nouvelle Edition , revus pa'- l'isfitteur , plus carrelle que les précédentes , C7" augmentée de plufieurs Déci/ions. A Dijon, chez Jean» Baptifte Ogé, Imprimeur de l'Evcché & du Collège. 1731. in-fol„ pp. 61C. JEAN Grivel , Seigneur de Perigny , étoitde Lons-le-Sau- nier. En 1599, il tut fait Confeil- ler au Parlement de Dole, Se quel- ques années après il rut Confeiller d'Etat en Flandre. Il mourut au mois d'Octobre 1624, il a donné au public de fon vivant cent cin- quante Décifions. M. Dunaud , Avocat au Parlement de Bezançon , a dit dans fon Traité des Prefcrip- tions que cet Ouvrage peut être regardé dans fon efpccc comme un modèle pour le ftile , l'ordre, la clarté Se l'érudition , Se que l'on y prend une grande connoiflauce des ufages du Pays : M. Bretonnier , dans fa Préface du Recueil des prin- cipales Qucftions du Droit qui fe jugent diverfement dans les diffé- rends Tribunaux du Royaume , alïuic auffi que les Décifions de Grivel font très-bonnes. L'Auteur les ht imprimer à Anvers en 1618. il s'en ht une féconde Edition à Genève fur celle d'Anvers , celle-ci dont le public eft redevable à M» Grivel de Perigny petit fils de l'Au- teur , eft beaucoup plus exacte Se plus ample que les deux précéden- tes , on a corrigé plufieurs endroits- des cent cinquante premières Dé- cidons fur les Notes de M. Grivel, on l'a augmenté de quarante -deux Décifions Se de trois Réponfes de l'Auteur fur desQueftions qui re- gardent la matière des Subftitu- tions. Les nouvelles Décidons concer- nent , comme celles qui font com- prifes dans les premières Editions , le Droit Romain , des Qiieftions fur la Coutume de Franche-Comté,', ou fur les Coutumes de Flandre, & F E V R I quelques Queftions fur les matières Eccleliaftiques ; nous ne donnerons ici le précis que de la Décifion I/Jï. La Qiieftion qui étoit propofée à l'Auteur étoit de fçavoir il dans un Pays où il eft abfolumcnt défen- du à l'Eglife & aux gens de main- morte d'acquérir des fonds, l'efti- rnation eft due à l'Eglife d'un fonds qui lui a été donné entre-vifs , eu légué par Teftament. L'Auteur , pour décider cette Queftion , diftingue entre la Loi réelle & celle qui eft perfonnelle. Si la Loi eft réelle , comme s'il eft dit que l'Eglife ne pourra acquérir aucun Fief ni aucun bien immeuble, l'eftimation lui fera due , parce qu'une Loi qui eft exorbitante du Droit Commun , doit être renfer- mée dans fa difpofition exprefle , Se que cette Loi n'empêche pas l'E- glife de recevoir l'eftimation du fond , en ne lui défendant quel'ac- quiiuion d'un même tond ; car c'eft une règle générale , dit notre Auteur ., que quand on laifle quel- que chofe à une perfonne à titre de legs ou de fidei-commis , ou à quel- qu'autre titre que ce foit,on doit lui fournir en efpeces ce qui lui a été donné , & que fi on ne peut lui fournir la chofe même il faut lui en payer 1» valeur ; Grivel cite pour confirmer fa décifion la Loi Sedfi i>s de Légat. primo , & la Loi Ftl'ms- fam. deLeg. tertio. Il rapporte enfui- te l'avis de Guillaume Benedicti , de Jean Faber , de Mantica, de "Wamefius & de Menochius,qui re- prend Alciat d'avoir crû que l'Egli- fe en ce cas n'avoir pas droit de dc- E R," 1752, 113 mander l'eftimation du fond qui lui avoit été légué. Si la Loi eft perfonnelle , il faut voir, dit l'Auteur, Cl elle regarde la perfonne qui difpofe ou l'Eglife qui acquiert. Dans le premier cas où la Loi défend de donner des im- meubles à l'Eglife , il y a pluiîeurs Auteurs qui croyent que l'eftima- tion même de la chofe n'eft poinc due à l'Eglife , parce que le dona- . teur n'a point le pouvoir de donner", Se que tout ce qui eft fait contre la prohibition de la Loi eft abfolu- ment nul , d'autant plus que l'efti- mation reprefente la chofe eftimée^ & qu'elle efteenfée en quelque ma- nière n'être qu'une même chofe avec le fond. L'Auteur fuit le fentiment con- traire , év il fe fonde fur ce que la Loi- ne deffendant que de donner un immeuble ne parle point de la valeur de cet immeuble & qu'on ne doit point étendre une pareille difpofition au-delà des termes dans lefquelles elle eft conçue ; il ajoute que fi le Teftateur faifant un legs d'un fonds à l'Eglife dans un Pays où il fçait que l'Eglife eft incapable d'acquérir des fonds, eft préfumé avoir eu intention de laifler à TE-, glife l'eftimation des fonds. D'ail- leurs l'efprit de la Loi n'étant que d'empêcher que les gens de main- morte n'acquièrent un trop grand nombre de Domaines au préjudice du public , on ne doit point l'éten- dre à la valeur du fond , dans la- quelle on ne craint point l'inconvé- nient qui a fervi de motifs à la Loi. La faveur de la caufe pire çft cn-j ii4 JOURNAL D corc un motif qui détermine notre Auteur i embraiTer ce dernier fen- timent , èc il afflue qu'il a été fuivi par le Sénat de Malines entre la Dame ComteflTc de Meghe & les PP. Jefuites. A l'égard du cas dans lequel la Loi défend à l'Eglife même d'ac- quérir des fonds : l'Auteur foûtient qu'il n'y a point de doute que l'cfti- mation ne foit dûë à l'Eglife des fonds qui lui ont été légués , parce ES SÇAVANS, que cette Loi n'a point été faite en haine de l'Eglife , mais feulement pour l'empêcher d'acquérir une trop grande quantité de fonds. Gri- vel cite là-deflus la Loi Fideicom- wifUdeL'gar. 30. La Clémentine exivi de Taradifo. De Verb. Sig. Pe- regrinus & Mantica. Cet exemple feul fuffit pour donner une idée des Décidons dont cette nouvelle Edi- tion a été augmentée. IIJ- NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Rome. M L'Abbé Pafcoli de 'Ptrtufe a . mis au jour fon premier To- me des Pies des Peintres, Sculpteurs & Architectes modernes. Ce Volume, qui cft /tf-40. contient la Vie de 40. habiles Maîtres. Le fécond Vo- lume ne fera pas long-tems à paraî- tre. M.Baldinttceide Florence a voie déjà donné quelques-unes de ces Vies , imprimées depuis peu chez Tartini&c Franchi. Mais comme cet Auteur a parlé de gens qui étoienc encore vivans , fans doute il n'aura pas été auffi bien informé de diver- fès parricularitez touchant leurs perlonnes & leurs Ouvrages , que M. Pafcoli l'a pu être après leur mort. De V e n 1 s"e. tAlbrizù & fes Aflociés ont imprimé /»-8°. Diffènazioni Epi- flolari j Storiche e Ckronologiche.Ces Differtations confiftent en trois Lettres , adreffées à M. "Bernardino Thoaldo, celebrejuiifconfulte. Elles roulent fur plufieurs points d'Anti- quité & de Critique , par exemple, fur le jour précis de l'Inauguration de Trajan pendant la vie de Nerva, fur le tems auquel floriffoit Juve- «al,fur les faites ConfulaireSj fur un paffage de Ciceron dans les Topi- ques , U fur le iiécle où a vécu Clé- ment-Alexandrin. Erancefco Pitteri a entrepris l'E- dition in~%°. des Oeuvres de Cice- ron fur celle que M. Ifaac Verburge publia en 1724. à Amflerdam , chez les 1P 'et/ïeins. Il en a déjà imprimé un Tome , cv il propofe tout l'Ou^ vrage par Soufcription % à raifon de quatre livres de Vemfe pour chaque Volume. On fouferit chez Angiclo - Pafi. nello pour les deux Volumes in~^°. de la Phyiïque Elémentaire , Pifica Elementare, que le P. Crivelli } So- mafque/e propofe de donner au pu- blic. La Soufcription cft de quinze livres de Venife pour les deux Vo- iries. Le P. Crivelli déjà connu par fes Elementi et Aritmetica NumerieA e Littérale „ imprimés en 172 S. doit raffcmbler dans l'Ouvrage que nous annonçons , tout ce qui a été trouvé de plus important en fait de Phyfique , par les anciens & par les modernes. Il y joindra des No- tes contenant l'Hiftoire des diver- fes opinions &C celle de leurs Au= teurs. De L v qjj e s. On trouve chez Marefcandoli une belle Edition en grand ;'k-8°. du Poème de l'Amour Divin t de BeoivUni > avec le Commentaire n6 JOURNAL D du Comte Jean-Pic de la Miran- dole : cet Ouvrage qnieft très-clh- mé , étoit devenu rare. Dell' Amore Celejie & Divino. Canzone du Giw léimo Benivieni Florentins , col co- rnento del Conte Giovanni Ptco Mi- randoUno. In Lucca. Lionardo - Venturini réimprime par Soufcription tous les Ouvrages itt , Xj Et'^ToAm vif! tApii^ùi. Stvt Alexandn Tral- liani Aledici Ltbri daodecim , & Epiftola. de Litmbricis } Grâce & Latine. M. Mùvvard fe propofe d'enrÏJ chir cette Edition de tout ce qui peut en relever le mérite au-deffus des Editions précédentes du même Auteur, foit par rapporta la cor- rection,aux Notes & aux Variantes, foit par rapport aux caractères SC au papier. Ce fera un in-folio d'en- viron 200. feuilles , & le prix de la Soufcription cft de deux guinées, dont on payera l'une en fouferivant, & l'autre en recevant l'exemplaire, dont l'imprcllion fera achevée vers' la fin de cette année. M. Durand, Miniftre de Saint' Martin & de la Société Royale , a publié la vnePart'e defon Hifloin Françoife du feizieme fiécle , conte- nant la Vie de M. de Thon , extrai- te de fes propres Mémoires jufqu'en 1601. & continuée jufqu'à fa mort en 1 6 1 7. ôi les Commencemcns du règne de François II. chez Jean Nourfe. 1732. /«-8°. S. Ballard..]. Senex,G.Innys,Sica débitent un abrégé de la Géogra- phie ancienne de Cellarius , à l'ufa- ge des Ecoles , par M. Samuel Pa- trick^ Sixième Edition. Chrifiophori Cellarii Smalcadenjis Géographie jintiqua , recognita denuo , & ad veterum , novorumque Scriptorum fidem , Hiftoricorum maxme iden- tidem cafligata , & quinta Editions plurimis locis auSla & mmutatx: huic demumfextd E Utioni tôt Char- tas tx mtjori viuïïoris Géographie F E V R I ^/Srttiquâ , quot ad minorem hanc il- îuftrandam requirebantur; duplicem- que lndicem , quorum priori veterœ locoritm nomina novis préLponuntur % fofteriori nova veteribus addidit , totam recenfuit } & Scholarum ufui ficcommodavit Samuel - Patrick. HOLLANDE. D'Amsterdam. D« Saufjt a en vente le Al.iïtre Italien dans fa dernière perfitlion t revu, corrigé & augmenté par l' 'Au- teur , contenant tout ce qui ejlnecef- faire pour apprendre facilement & en peu de tezns la Langue Italienne; avec un abrégé de la prononciation Françoife pour les Etrangers , un Dictionnaire pour les deux Langues, & quelques Lettres a la fin. Par le fieur Veneroni , Secrétaire- Interprè- te du Roi dans la Langue Italienne. 1731./W-80. Ces additions & ces corrections font dues à M. Philibert i } le même qui a eu foin de la dernière réim- preflîon du Dictionnaire de Menère- nt , faite en cette Ville. Une Compagnie de Libraires a aulîi donné une nouvelle Edition du Diclionnaire de la Langue Fran- çoife , ancienne & moderne , de Pierre Richelet, augmenté de plu - fieurs Additions d'Hifioire , de Grammaire , de Critique , de Jurif- prudence , & d'une Lifte alphabéti- que des Auteurs & des Livres cités dans ce Ditlionnaire. L'Edition de ce Dictionnaire qui fi R ; 1732; îi0 n'eft qu'en deux Volumes *»-4°. eft cependant faite fur celle qui parut à Lyoa en 1-718. en 3. Volumes in-folio. Quoique le caractère en foit plus petit , & qu'on y ait faic quelques changemens , elle pourra paraître préférable à l'Edition de Lyon , en ce qu'elle eft d'une forme plus commode & qu'elle doit coû- ter beaucoup moins. De Le yde. M. Ottdendorp 3. donné au public une belle Edition des Stratagèmes de Frontin. Elle eft imprimée in-t°. chez Samuel Luchtmans. S. fjulii Front iniy Libri tv. Stratagematicon, cum Notis integris Francifci Modii , Godefcalchi Stewechii , Pétri Scri- verii & Samuelis Tennulii. His ac- cedunt chm P. Scriverii , tum alio- rum Dottorum inédits. Obfervationes. Curante Francifco Oudendorpio , qui & fuas Annotationes, variafqtie Manufcriptomm LeUiones adjecit. 1731. Peu de rems avant que d'a- voir donné la Vie de Saladin , dont nous avons parlé dans nos Nouvelles du mois dernier , M. Schultens avoir fait paraître à Frane- ker un autre Ouvrage en Arabe ,, fous ce titre : Haririi Eloquentia. Principis , très priores confejjus , è Codice Manufcripto Eibliotheca ' Lugduno - Baravtt , pro fpecimine emijfi, ac Notis illuftrati ab Alber- to Schultens. Franequcra:. E.v Ojfîcinâ Vibii Bleck. 1731. in-40. Cet Hanri , ou 3 comme il s'appel- le proprement , Abi Muhammed 9JÏ i2o JOURNAL D Elkafîm étoit de la Ville de Bâfra en Arabie, &: floriiloit dans le cin- quième fiécle de l'Lgire , c'eft-à- dire vers le douzième fiécle de l'trc Chrétienne. Ii pâlie pour un des Ecrivains Arabes les plus polis & les plus éloquens. C'ell pour ic faire mieux connoîrre encore que M. Scbiiltens a publié ces trois Difcours ou Harangues , comme un Eflai des cinquante qu'on a de cet Auteur dans la Langue ori- ginale. Le premier avoir été tra- duit en Latin par Colins , &c cette • iuction étoit déjà avec le Texte Arabe , dans la grande Grammaire Arabe à'Erpenius. Les deux autres font ici accompagnés de la Traduc- tion de M. Schultens même. Quel que foie le mérite de l'Ecrivain Arabe , on ne fçauroit trop ap- plaudir au zélé qui porte fon nou- veau Traducteur à faire revivre dans fa Patrie , autant qu'il lui elt poiïible , le goût de la Littérature Orientale. Il feroit feulement à fouhaiter qu'un fî bel exemple pût être fuivi dans d'autres Pays , où il fc trouve fans contredit des Biblio- thèques beaucoup plus riches en ce genre que celle de Leyde ; mais en même tems beaucoup plus négli- gées. De t a H a y e. De Ktgiffart Se Sœurs débi- tent une nouvelle Edition corrigée & confîderablement augmentée des Peë/ies de M. l'Abbé de Chaii- lieu , & de M. le Marquis de la Farc. 17 3iw'0?i2» ES SCAVANS, y.'.t« Van-den-Kicboom débite aulli la Traduction Françoife que M . de la Monaerie a faite du Poè- me Latin du célèbre Marcel Paliri' gertiHS , intitulé : Le Zodiaque de la 'vie; ou Préceptes pour diriaerla con- duite & les meturs des hommes. ijîï> in - iî. FRANCE. De Paris, Nous croyons ne pouvoir mieux commencer cet article qu'en an- nonçant à la République des Let- tres la magnifique acquilition que le Roi a faite pour fa Bibliothèque,, vers la fin du mois dernier , de n us les Alanufcrits de lafameiife Biblio- thèque de M. Colbert. Ces Ma- nuferits qui appartenoient à M. le Marquis de Seignelay , petit fils de ce Miniftre , peuvent être divifés en deux clafles. La première confi-- fte en fîx mille Manufcrits anciens , tant Orientaux , Grecs & Latins qu'en Langues vulgaires , fur les Sciences , l'Hiftoire 5c la Littératu- re ; on en compte 3370. Volu- mes in-folio. Les Manufcrits qu'on appelle modernes & qui regar- dent principalement l'Hiftoire & les affaires de France , font ran- gés dans la féconde clafle : ils for- ment un Recueil de plus de 1600. Volumes , fans compter divers Porte-feuilles qui renferment quan- tité de Pièces originales , & 6iz. Diplômes de nos Rois avec leurs Sceaux , depuis Philippe- ji W «jfe jufqu'à François 1. FEVRI Ce rare affemblage de tant de précieux Monumens , réunis aux autres tréfors LitteraireSjaccumulés, pour aiiiidire, dans la Bibliothè- que du Roi , eft au-deflus de tous les Eloges , autîi-bien que les dé- penfes vrayement royales que S A M A J E S T E' ne celTe de faire pour l'augmentation & l'embelif- iementdelamême Bibliothèque. Voici les titres de quelques Li= vres imprimés ici depuis peu. Difîertation fur les différentes Méthodes d'accompagnement pour le Claveffin oh pour l'Orgue , avec le plan d'une nouvelle Méthode établie fur uns Adéchanique des doigts , que fournit la fucceffion fondamentale ds r harmonie 3 & a l'aide de laquelle sn peut devenir ff avant Com^ofiteur & habile accompagnateur , même fans fcavoir lire la Mu fi que. Par M» Rameau , chez Boivin rue S. Ho- noré , à la Règle d'or , Se le Clair3 rue du Roule , à la Croix d'or. 1732. /«-40. de 6$. pag. Les nouveaux Principes de l'Art d'écrire , ou la vraye Méthode d'y exceller , divifée en deux Parties ; la première par demandes & par ré- ponfes , & la féconde en fix Tables y par le fieur Royllet, Expert-Ecri- vain Juré. Chez Alexis Mefnier , rue S, Scverin3 au Soleil d'or. 173 1. petit in-folit. On trouve chez le même Li- braire Dijfe/tations fur les Queflions qui naiffent de la contrariété des Loix & des Coutumes. Par M.Louis Boullentis } ancien Avocat au Parle» nient. 1732. in-jf. AuflH>ien que Lettres Hiriiqw ', E R; 1 7 5 a; i2i Biftoriques & int ère famés fur diffe- rens fujets , du moins c'eft le titre. 1732. in-11. Les Defefpere^ Hiftoirc Héroï- que. Nouvellement traduite de l'I- talien du célèbre Jean - Ambroife Marini 7 fur la dixième Edition de Venife, ornée de figures en taille- douce. Chez P. Prault , Quai de Gèvres. 1732./» n. 2. vol. m La nouvelle Académie de Chi» »rurgie établie à Paris fous la pro- m tection du Roi , délirant contri- » buer aux progrès de cet Art , Si à a l'utilité publique > propofe pour niujet de Prix du l'année 1732. la » queftion fuivante. Pourquoi certaines Tumeurs doi- vent être extirpées , & d'autres fim- plement ouvertes ; dans l'une & l'au- tre de ces opérations ' quels font les cas oit le Cautère eft préférable À L' In- finiment tranchant t & les raifons de préférence. » Ce Prix eft une Médaille d'oe » de la valeur de deux cens livres » qui fera donnée à celui qui au ju- » gement de l'Académie , aura faic » le meilleur Mémoire fur la que^ » ftion propofée. » Les Chirurgiens de tous Pays « feront admis à concourir pour le » Prix ; on n'en excepte que les » Membres de l'Académie. «Ceux qui compoferont, font *> invités d'écrire en François ou en « Latin autant qu'il fe pourra. On nies prie d'avoir attention que » leurs Ecrits foient fort lifîbless » Ils mettront à leur Mémoire » une marque diftinctive , comme » Sentence ? Devife , Paraphe ou i2ï JOURNAL D m Signature : & cette marque fera m couverte d'un papier blanc collé » ou cacheté, qui ne fera levé qu'en » cas que la Pièce ait remporté le »Prix. « Ceux qui travailleront pour le » Prix , adrefTeront leurs Ouvrages « francs de port à M. Morand } Se- » cretaire de l'Académie de Chi- » rurgie à Paris ; ou les lui feront u remettre entre les mains. » Les Mémoires ne feront reçus «que jufqu'au dernier jour de Sep- « tembre 1751. inclulivement. » L'Académie à fon Alfemblée "publique de 1733- qui fe tiendra aile Mardy d'après la Trinité , pro- iï clamera la Pièce qui aura mérité •> le Prix. n La Médaille fera délivrée à » l'Auteur même , qui fe fera con- » noître , ou au porteur d'une Pro- » curation de fa part ; l'un ou l'au- » tre reprefentant la marque diftinc- jstive, avec une copie nette du ES SÇAVANS; » Mémoire. Deux Editions faites en Hollan- de de la Théologie -Phyfique ou Dé* monflrationde /' Exigence & des At- tributs de Dieu , tirée des Oeuvres de la Création • accompagnée d'un grand nombre de Remarques & d'Ob' fervations curieufes. Traduite de l ' Anglois de Guillaume Derham ,' n'ont pu fatisfairc l'emprcfTement de tous ceux qui ont eu connoilTan- ce de cet Ouvrage. Chaubert , Libraire du Journal , le réimprime à Paris , mais en attendant cette Bouvelle Edition qui eft déjà fort avancée ; il a cru devoir faire venir de Hollande le peu d'exemplaires <^ui y reftoient. Le même Libraire débite une petite Brochure donc nous ne man- querons pas de rendre compte : elle a pour titre , Lettre k Madame T. D. L. F. fur M. Houdart de U JMotte de l'AcademieFrançoife,moic à Paris le 16. Décembre dernier. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Fév. 1732." LEs Monumens de la Monarchie Francoife. Tome III. pag. é-} Lettres Wftoriqnes , Théologiques £ 5. 1)omingue , eVr/ï * particulièrement fur des Mémoires Manufcrits dit Père Jean - Baptifle le Pers , le fuite , Miffionnaire a S. Domingue t & fur les Pièces originales , qui Je confervent au Dépôt de la Marine. Par le P. Pierre-François-Xavïer de Charlevob: , de la Compagnie defjefus. A Paris, chez Hippolyte - Louis Guerin , Libraire , rue S. Jacques ; Jacques Guerin ,, Libraire-Imprimeur, îc F. Didoc , Libraire , Quai des Auguftins. 1730. ;'»-4°. 2. vol. Tom. I. pp. 481. Tom. II. pp. 506"» |ar.s les Tables. Planch. 5c .Cart, détach, xvm. ,MArs; *U ia 80 ou cent dans la grande Terre , Scuo à Léogane. Mais on pouvoir envi- fager (dit l'Auteur) cette Colonie Françoife comme un arbrifTcau planté dans un bon terroir où il a pris racine ; & la Colonie Efpagno- le comme un arbre fur le retour , & qui ne prend plus de nourriture. Le P. de Charlevoix faiteonnoî- treenfuite plus particulièrement les Avanturiers qui doivent jouer un fl grand rôlle dans cette HiÛoirc. Il commence par les Boucaniers donc il nous décrit le genre de vie , c'eft- à-dire leurs Boucans ou habitations, leurs Loix, leur Religion , leurs vê- temenSjleursarmes, leurs chartes , leur nourriture, leurs maladies,r_Jv. 11 raconte les divers fuccès de leurs guerres contre les Efpagnols de S. Domingue , les mefures que pri- rent ceux-ci pour les exterminer, ce qui ne s'exécuta point fans plu- lîeurs ma fiacres réciproques , & ce qui aboutit enfin à les ditîîper en- tièrement , après que les Efpagnols, par une chalîe générale dans l'Ifle , l'-eureoc prefquc totalement dé-peu- ES SÇAVANS; plée de bœufs. Cette révolution fir: naître plulicurs établiflemens une partie des Boucaniers qui ne trou- voient plus de quoi fubfîiler s'étanr, faits habitans , & les autres s'étant joints auxFlibulticrs. Ceux-ci occu- pent à leur tour le P.de Charlevoix, qui nous entretient de leurs Bar- ques , de leur manière de faire la guerre S: de partager le butin , du droit qu'ils s'arrogeoient de perfe- cuter fans relâche les Efpagnols 1 fondé fur ce que ceux-ci les empê- choient de chaffer & de pécher fur. leurs Côtes. Il nous parle de leur indépendance , de leur irreligion Se de leurs premières expéditions ren- fermées encore alors dans les bornes de la mer des Antilles , mais qu'ils ne tardèrent guère à franchir. L'Auteur revient au nouveau Gouverneur de S. Domingue , M. d'Ogercn , dont il nous apprend les diverfes avantures & dont il nous peint le caraclere par les traits les plus propres à nous en donner une idée avastageufe. Cet homme [ dit-il ] aimable , fimple , plein de probité, de religion , de fermeté ,' de valeur , trouva le .fectet de fc faire eltimer & de fe faire craindre des Flibuftiers , de former une Co- lonie réglée d'une troupe de Sceler rats, qui n'étoient prefquc plus ni Chrétiens ni Sujets , & paroiifoienc incapables de la moindre fubordina- tion. On lira avec plailir le détail de fes premiers travaux pour faire fleurir la nouvelle Colonie, & on apprendra avec un étonnemenc mêlé d'horreur les expéditions de rOlûnnois, l'un des plus braves & MARS en même le plus cruel de tous les Flibuftiers , lequel après s'être fi- grlalé plus d'une fois en l'un Se en î autre genre , périt enfin d'une manière digne de lui , étant tom- bé entre les mains des Sauvages des Mes de Baron , qui remportè- rent dans un bois , le rôtirent & le mangèrent. Cet événement termine le VIP Livre decetee Hiftoire. LIVRE VIII. Le fuivant conduit cette même Hiftoire pen- dant 19 ans, depuis 16^5. jufques en 1684. On y voit la guerre allu- mée plus vivement que jamais en- tre les François & les Efpagnols de S. Domingue \ malgré la paix des Pyrénées ; les nouvelles entreprifes des Flibuftiers Anglois Se François, conduits par des Chefs de réputa- tion , qui pillent Sant-Yago , s'em- parent pour la féconde fois de Ma- racaïbo, faccagent & ruinent en- tièrement Panama , prennent 5c pillent Porto- Belo. En 1670. la Colonie fc révolta contre fon Gou- verneur M. d'Ogeron Se contre la Compagnie des IndssOccidentales, fur l'interdiction du commerce avec les étrangers. On verra dans le livre même les fuites de cette ré- volte qui dura près de deux ans, que l'arrivée de M. de Cabaret en- voyé au fecours de M. d'Ogeron ne put calmer, Se qui s'afioupit tnfin tout - à - coup , fur le bruit qu'on devoit envoyer inceffam- ment aux Mes une nouvelle Efca- 'dre de Vaiffeaux contre les rebelles, fous la conduite de M. de Ville- pars. La Cour accorda aux révoltés une amaiftic qui fut publiée en ~> 1732. 329 L'entreprife malheureufe faite fur l'Iile de Curaçao par M. de Câas Gouverneur General des Ifles, accompagné de M. d'Ogeron, eut des fuites bien triftes pour la Colo- nie. Cette entreprife futmanquee; 6c au retour, M. d'Ogeron avec l'élite defes Avanturiers ht naufra- ge , Si fe lauva comme il put à rifle de Portoric , dent le Gouver- neur le retint prilonnicr lui £c les lîens. M. d'Ogeron trouva moyen de s'échapper lui quatrième dans un fimplc Canot", Cx de regagne? la Tortue. Sur le refus que le Gou- verneur de Portoric fit de lui ren- dre les prifonniers François , M,- d'Ogeron fe mit en mer pour les aller redemander lui-même les ar- mes à la main. Mais fon expédition échoua par les vents contraires , cV n'aboutit qu'au maflacredes prifon- niers, dofit les Officiers que le Gouverneur avoit épargnés pour les reléguer au Pérou, furent déli- vrés dans la traverfée par un Cor- faire Anglois qui les remit en liber» té. M. d'Ogeron en 1^75. érant paffé en France pour propefer à la Cour fon projet fur la conquête cîe toute l'ifle de S. Domin ■ On nomma en fa place pouï Gouverneur M. de Poiiancey fon neveu , qui n'en jo\iitque pendar/r fix ans , étant mort ;n I6îi. hts évenemens les plus remarquables arrivés fous fon Gouvernement fu- rent le ttanfport de la Colonie de Samana au Cap François ; la prffc zjo JOURNAL D de Tabago par le Comte d'Eftrées , qui manda M. de Poiiancey pour une féconde entreprife furCuraçao, laquelle ne réuffit point , la Flotte Françoife ayant échoue fur les Mes d'Avés ; l'expédition malhcurcufe des Flibuftiers fur Sant-Yago de Cuba; une autre de ces Avanturiers fur Maracaïbo , qu'ils ptirent pour la troifiéme fois ; une révolte de Nègres au Port-de-Paix , fuivie d'une mutinerie des habitans du Cap François , appaifées l'une &C l'autre par la fermeté & la bonne conduite du Gouverneur ; l'entre- prife de Granmont fameux Flibu- ftierfur laCôtedeCumana , dont il recueillit plus de gloire que de butin ; la prife 6V le pillage de la Vera-Cruz par les Flibuftiers Fran- çois , expédition dont l'Auteur donne ici un détail forteirconftan- cié, précédé d'une defeription de cette importante Place fituée au fond du Golphe de Mexique , & le Magafin de tout ce qui fors de la nouvelle Efpagne & de tout ce qui s'y porte d'Europe. M. de CulTy remplaça M. de Poiiancey dans le Gouvernement de S. Domingue, en 1684. Il s'ap- pliqua d'abord à remettre le bon ordre dans la Colonie , & de con- cert avec MM. de S. Laurent & Bégon envoyés par la Cour , il tra- vailla à corriger autant qu'il étoit poftible les abus introduits parmi les Flibuftiers, & à les rappellera S. Domingue. On propofa un éta- blilîement dans la nouvelle Bifcaye. Mais , en attendant , on érigea dans la Colonie unConfeilSouve- ES SÇAVANS tain & plufieurs Sièges Royaux. Les habitans firent au Roi des pre- pofitions pour augmenter le com- merce de leur Ifle , que la Ferme du Tabac ruinoit. Quant à la cultu- re des Cotonniers ils y renoncèrent & y fubftituerent la fabrique de l'Indigo beaucoup plus lucrative» Ils plantèrent auflî les Cacaoyers, on ne fait précifément en quel tems9 &c ces arbres réuflirent au-delà de toute efpcrance. Mais le plus grand profit des Infulaires étoit alors ce- lui qu'ils faifoient fur les prifes des Flibuftiers. En cemêrnetemsl'Iilc de la Tortue" , qui fous M. de Poiiancey, étoit déjà tombée en décadence , fut entièrement aban- donnée; & aujourd'hui elle eft tota- lement deferte, après avoir été pout ainfi dire la Métropole de cette Colonie pendant une aflez longue fuite d'années. LIVRE IX. Ce Livre, qui con- tient l'Hiftoire de fept ans, depuis 1684. jufqu'en 1691. prefente d'a- bord unfpectacle digne de toute la curioiitédes Lecteurs parla fingu» larité des évenemens. Ce font les excurfions des FlibuftiersFrançois &C Anglois dans la mer du Sud, où par- tagés en diverfes Troupes,&prenant des routes différentes , ils fe figna- lerent par des exploits prefque in- croyables. Après avoir manqué la riche Flotte du Pérou , & en avoir été maltraités , ils prirent &c pillè- rent le Port de Realejo , la Ville de Léon , celle de Chiriquita , le gros Bourg de Pueblo-Vicjo Se la nour velle Grenade. Ils battirent lesEf- pagnolsendeux combats auprèsde Panama M A R Panama ; & cette double Victoire ne leur coûta qu'un homme tué Se 21 bleflés. Ils firent enfuite une en- treprit fur Guayaquil , une des plus opulentes Villes du Pérou , qui fournit de Cacao tout le Pays Se la feule où il pleuve. Cette entre- prife leur réufîit , ils fe rendirent maîtres de la Ville , la pillèrent, y firent quantité de prifonniers, 6c un butin fi considérable , qu'ils em- portèrent en or , en perles 6x en pierreries la valeur de 1500000 livres , ayant négligé tout le refle jufqu'à la vaiffelle d'argent Se aux pièces de huit , qui montoient à une quantité prodigieufe. Les Fli- buftiers trouvèrent la maifon du Gouverneur remplie de meubles fi précieux , qu'ils avouèrent qu'en Europe la magnificence n'alloit pas plus loin. Mais rien ne furprenoit davanta- ge les habitans que de voir leurs vainqueurs faits comme les autres hommes Se fi peu mal-faifans. » Un » d'eux raconte dans fa Relation » ( dit notre Auteur ) qu'ayant :>fait prifonniere une des Demoi- »> Telles Suivantes de la Gouver- îj nante , Se la faifant marcher de- » vantlui pour la conduire au lieu «où l'on gardoit tous les prifon- j>niers , cette pauvre fille fe tourna » vers lui , Se les larmes aux yeux , »le conjura de ne la point manger. » Il lui demanda qui lui avoit dit » que les Flibufticrs mangeaffent les « hommes ; Se elle répondit qu'on a le lui avoit affiné , Se qu'on lui » avoit ajouté de plus^ qu'ils étoient K faits comme des Singes. « Toute Mm, S , 1 7 3 2. j 5 ï la Mufique de la Ville écoic dans rifle de la Puna parmi leurs prifon- niers ; les concerts ne difeonti- nuoient point; le fon des Luths, des Thuorbes, des Guitarres, des Harpes Se des autres Inftrumens , que la plupart n'avoient jamais en- tendus taifoient retentir l'air , jour êe nuit. C'étoit pour nos Héros (dit le P. de Charlevoix ) une lue en- chantée , où tout leur courage n'eut pas pu tenir contre les délices qu'ils goûtoient , Se contre les charmes des belles Efpagnohs , fi cela eut duré encore quelques mois : mais il fallut bien-tôt y renoncer. Ils prirent enfuite la grande Vil- le de Tecoantepeque accompagnée de huit Fauxbourgs , après quoi ils fe difpoferent à repafîer dans 11 mer du Nord. Il faut lire dans le Livre même tout ce qu'ils eurent à. fouffrir dans ce paffage , tous les dangers qu'ils efîuyerent , foit pour forcer les retranchemens faits par les Efpagnols fur des montagnes efearpées , en vue de leur barrer le chemin;foit pour naviguer fur la ri- vière qui , au travers d'une infinité de rochers , de précipices Se de plus de cent chûtes d'eau,devoit les porter dans la mer du Nord , fur de petits radeaux appellésP/^w/x , qui ne foûtiennent que deux hommes chacun. Le récit de toutes cescour- fes des Flibuftiers eft terminé par celui des avantures de 55 de ces Corfaires , qui firent aooo lieues dans un fimple Canot , contre le vent > Se de celles du Capitaine le Sage, autre Flibuftier de diltincd tion» I32 JOURNAL D M. de CulTy comprenoit mieux que perfonne à quels inconveniens ces courfes de Flibuftiers étoienc fujettes -, & il eût fort fouhaité , conformément aux intentions de la Cour, de les faire cefler J &c d'em- ployer plus utilement pour le fer vi- ce du Roi ces Corfaires de profef- fion. Il voulut empêcher l'entrepris fe de ceux-ci fur Campèche , mais ce fut en vain qu'il s'y oppofa.. Ils prirent cette Ville fous la conduite de Granmont ( fameux Flibuftier t dont on trouvera ici les avantures ) la reduifirent en cendres & firent fauter laFortercffe; brûlèrent le jeur de S. Louis, dans un feu èc joye qu'ils firent à l'honneur du Roi , pour 20000© écus de bois de Cam- peche , qui étoit le meilleur de tout lebutin,& partirent pourlaCôte de S.Domingue.Parreprelaillcs, lesEf- pagnols fe rendirent maîtres du petit Goave , d'où ils furent chaiîés par les habitans. Malgré les attentions du Gouverneur pour le foulage- ment de la Colonie , une innova- tion dans la traite des Nègres fit murmurer beaucoup d'habitans au Cap François , & les murmures aboutirent à une révolte dans ce Canton-là ; mais elle fut bien-tôt geptiméc. Le Gouverneur fit enfuite ure entreprife fur Sant - Yago , qu'il prit Si. brûla , après une action très- vive où les Efpagnols furent dé- faits, &c que reprefente la vignens gravée à la tête de ce Volume. En ce même tems les Anglois s'empa- ïerent de l'Ifle de S. Chriftophlc , 4'où sis chaiTereat les François , E S SÇAVANS, dont la plupart fe réfugièrent à S. Dominguc , Se turent d'un grand fecours à cette Colonie. En 169 1. lesEfpagnols étant venus attaquer la Colonie Françoife , M. de CufTy marcha contr'eux avec fon Lieute- nant de Roi. Mais s'étant engagé au combat en lieu défavantageux ,' contre fon grc,eV entraîné par l'avis, contraire qui prévalut, fes Troupes furent battues & il fut tué avec Ion Lieutenant. On verra dans le Li- vre même les fuites de cette dé- route. LITRE X. L'Auteur y ra- conte ce qui s'eft pa(ïè à S. Domin- guc depuis itfji. jufqu'en 1697. fous le Gouvernement de M. Du- cafle, Succefleur de M. de CulTy. Il nous informe d'abord des avar- tures de ce nouveau Gouverneur , Si nous en donne le caractère. A. fon arrivée , il trouva la Colonie moins forte de 4000 hommes qu'il ne l'avoit vue quelques années au- paravant ; fans fortifications , fans munitions & fans Vaifleaux , les Flibuftiers étant prefque tous péris , ou entre lesmains des Anglois. Ses premiers foins furent d'examinei quelle avoit été la conduite de fon prédecefleur , dont on dénigroit la mémoire fort injuftement, & de la mettre à couvert des ombres mêmes de tout reproche. Peu de tems après un fameux Plibuftier François nommé Daviot , fit dans la Jamaï- que une expédition qui rut traver- sée par un horrible tremblement de terre. Si d'un côté cet accident dé- concerta fort les defleins du Flibu— ftier , qui y perdit près de zjç*. M A R hommes; de l'autre, il caufa aux Anglois un dommage bien plus confiderable , ayant fait périr Iiooo âmes , renverfé prefqu'entierement le Port-Royal, & brifé prefque tous les Vaifleaux. En 1694. M. DucalTe fit une féconde entreprife fur la Ja- maïque , avec de grandes rorces , y prit la Ville d'Ouatirou, y gagna 3000 Nègres» beaucoup d'Indigo & d'autres marchandifes précieufes; nais il y acquit peu de gloire, cette expédition n'ayant décidé de rien. L'année faivante , les Anglois , pouc fe vanger de cet affront, fe joignirent aux Efpagnols & vinrent attaquer la Colonie Françoife de S. Domingue. Ils s'emparèrent d'a- bord du Cap &£ de fes batteries ., puis marchèrent au port de Paix , qu'ils affiegerent , & qu'ils prirent par la mésintelligence des aîlîégcs. Ceux - ci s'évadèrent pendant la nuit , & firent une belle retraite. M. Ducaflc ne put fécourir cette Place alîîégée , étant obligé de re- lier toujours à Leogane , qui étoit le Quartier le plus important de la Colonie , èc que les ennemis mena- çoient en même tems. La Colonie de Sainte Croix , l'une des petites Antilles tranfportée à S. Domin- gue , !e procès fait aux Sieurs de GraffSc de la Boulaye pour s'être mal comportés dans la défenfe du Cap & du Port de Paix , & quel- ques autres incidens peu confide- lables terminent ce Livre. LIVRE XI. Celui-ci roule fur les évenemens arrivés dans l'ef- pace de 21 ans , c'eft-à-dire de- puis 1^7. jufqu'en 17 18. Le plus S. I7J2. I ? 5 important de tous & par c >nfe- quent le plus digne de la curiolité des Lecteurs, eft certainement la prife de Cirthagéne parle Baron de Pointis accompagné de M. Ducaf- fe, Se c'eit principalement par cette circonftance que cette grande ac- tion intereuel'Hiftoire de S. Do- mingue. Il y avoit plus de trois ans que M. de Pointis preparoit un armement , dont la deûination étoit tenue fort fecrette ; & M. DucaiTe eut ordre de la Cour d'af- fembler les Troupes de la Colonie au nombre de j 200 hommes pour les joindre à celles de M.de Pointis. M. Ducafle ayant foupçonné que Carthagcne pouvoitêtre l'objet de cet armement , ne put dilîîmuler au Miniftre fes fentimens fur cette affaire , &c lui marqua qu'il n'en étoit point d'avis ; de quoi il alle- guoit de fortes raifons. Le P. de Charlevoix , avant que de s'enga- ger dans le détail de cette entrepri- fe , nous en fait connoître plus par- ticulièrement les principaux chefs , en nous peignant les caractères de M. de Pointis, de M. DucalTe & de M. de Galifet , qu'on peut voir dans le Livre même. M, de Pointis étant arrivé à S. Domingue , joignit aux Troupes que portoit fon Efcadre celles que lui fournit la Colonie , ce qui fai- foit environ 3000 hommes de dé- barquement , parmi lefquels fe trouvèrent prefque tous les Flibu- lticrs de S. Domingue. La premiè- re entrevue de MM. de Pointis &c Ducaffe fut le commencement de leur méhncelligencc qui dura pen- Sij p34 JOURNAL D dant tourc l'expédition. Quelque répugnance qu'eue le Gouverneur delà Colonie à fuivte le General en qualité de iimple Capitaine de Yaif- Jeau ; il ne laifla pas de détermi- ner les gens de la Côte à s'embar- quer avec lui malgré leurs premiers refus ; &c il ht avec le General un règlement & des conditions fous lesquelles ils fetviroient, Se donc ils avoient lieu d'être contens. M, de Pointis mit à la voile pour le Cap Tiburon ; Se toute l'armée étant réunie , on délibéra fur le par- ti qu'il y avoit à prendre. Des trois avis qui furent propofês, fçavoir, de chercher les Galions , de pren- dre la Vera - Cruz Se d'attaquer Carthagéne -, ce dernier prévalut. L'Auteur après avoir fait con- noître l'état de l'Armée Françoife Se la difpofitiondes Troupes , don- ne une defeription exa&e de Car- thagéne , & obferve , à ce propos , que M. de Pointis avoit été trompé par les plans qu'on lui en avoic communiqués. La Flotte mouilla devant le Fort de Boucachique , Se ce fut là que fe fit la defeente. Ce Fort capitula bien-tôt ; après quoi on fe rendit maître de Notre-Da- me de la Poupe , Monafterc forti- fié ; puis du Fort de Sainte Croix qui fut abandonné , Se de celui de S. Lazare^ Enfuite on attaqua Hi- himani ou la Ville balle , Se on l'emporta d'alTaut. La Ville haute qu'on bombardoit aulfi par mer Se par terre , Se contre laquelle on drefla des Batteries de demis les Battions de Hihimani , ne put foû- îenir long-tems le grand feu des ES SÇAVANS; Canons , & le Gouverneur fit bat- tre la Chamade. On drefla les arti- cles de la Capitulation , & M. de Pointis prit pofleflion de Carthagé- ne. Le butin y fut immenfe. M. de Pointis , dans fa Relation , ne le fait monter qu'à neuf millions ; mais il ne dit pas que c'étoient neuf millions d'écus. Suivant M. Ducaf- fe , il fut de plus de vingt millions^' fans les marchandifes précieufes , qui furent détournées avec cinq ou fix millions , en or ou en argent. Bien des gens ont même allure que le butin avoit été de 40 millions de livres. Quoiqu'il en foit , il faut voir dans le Livre même quelles furent les fuites de cette expédition , la conduite que tint M. de Pointis dans le partage du butin , ce quife pafla entre lui Se M. DucafTe , an fujet des mauvais trairemens faits aux gens de la Gôtc , le parti que l'on prit de ne garder ni Carthagé- ne ni Boucachique , le départ de M. de Pointis qui trompe les Flibu-; ftiers, le retour de ceux-ci à Car- thagéne qu'ils mettent une féconde fois au pillage , pour fe dédomma- ger , Se 011 ils exercent d'horribles cruautez. Nous paflbns, pour abré- ger , par deflus les faits polterieurs à cette conquête, jufqu'à iavenement de Philippe V. à la Couronne d'Ef- pagne , en 1701. & depuis cette époque jufqu'au départ de M. Du- cafle nommé Chef d'Efcadre en 1703. & auquel fucceda au Gouver- nement de S. Domingue M. Au- ger , qui fut remplacé par le Comte de Choifeulen^iyio, Se celui-ci pa£ M A R M. de Gabaret, en 171 2. Cette an- née mit fin à la fameufe Flibufte de S. Domingue , prefque tous ces Avanturiers s'étant rendus habi- ta ns. LIVRE XII. On trouve dans ce dernier Livre une Hiftoire très-détaillée des troubles qui agi- tèrent S. Domingue en 1722. ôc qui faillirent à renverfer cette Co- lonie. Ils eurent leur fource dans le mécontentement des habitans con- tre la Compagnie des Indes, au fujetdu commerce exclu (îf des Nè- gres , de la diminution des efpeces, & de l'ordre de ne les plus recevoir qu'au poids. Les femmes levèrent les premières l'étendart de la rébel- lion , ayant à leur tête une veuve nommée /Aadaim Sagona y & marchant en bon ordre comme au- tant d'Amazones , tambour bat- tant , le Piftolet à la main & le Sa- bre au côté. Elles allèrent en cet équipage infulter la Maifon de la Compagnie , & en ayant rompu les portes & les fenêtres à coup de pierre , elles jetterent dans la rue tout ce qui s'y trouva , jufqu'aux papiers &c aux Regiftres. Nous ne pouvons fuivre l'Auteur Se particu- larifer avec lui toutes les circon- ftances d'une affaire, qui eut des fuites afTez ferieufes , &c qui ne put être terminée que par l'arrivée du Comte de Champmêlin & du Che- valier de la Rochallard , envoyés par le Roi pour rétablir la tranquil- lité dans cette Ifle ; ce qu'ils exé- cutèrent fans effufion de fang 3 &C en fe confirmant dans l'idée qu'ils avoient déjà de l'attachement in» s; 1732. 135 violable des peuples de S. Domina gue pour leur Souverain. Le P. de Charlevoix termine ce dernier Livre par une defeription très-exacte de la Colonie Efpagnole dans cette Ifle , & de la Colonie Françoifc , en 1714. Par rapport à la première il nous informe de la pauvreté des Efpagnols , de leur mépris pour l'or fur lequel ils mar- chent , deleurpareffe , de leur fo- brieté , de leur ignorance , de leur fierté , de leur Religion , de leurs vertus 6c fur tout de leurhofpitaln té. Ony comptoit en 1717. 18401 âmes , parmi lefquelles il pouvoic y avoir 3705 hommes capables de porter les armes, Quant à la Colo- nie Françoife elle a voit en 172e". 30000 perfonnes libres , parmi lef- quelles on en pouvoir armer loooo êc 100000 Efclaves tant noirs que Mulates, dont on pouvoit enrôler 20000 Nègres fans faire tort aux Manufactures. L'Auteur nous parle de la mifére apparente de ceux-ci & de leur vrai bonheur malgré cette mifére , des qualitez de leur efprit, de leur défaut de mémoire, de leurs vertus &c de leurs vices , de la manière dont on doit les traiter, de leur Religion , de leurs mariages &de plufieurs autres particularitez, fur lefquelles nous renvoyons au Livre même. Nous ne devons pas oublier d'a- vertir que cette Hiftoire, imprimée en beaux caractères & fur de bon papier , eft de plus illuftrée par plufieurs Cartes Géographiques ou Topographiques & par divers plans de Villes , ce qui fert infirment à i35 JOURNAL D l'intelligence parfaicc de la narra- tion. Les principales de ces Cartes ont été dretîées Se dclîinces avec beaucoup de foin 6c d'exactitude , par M. d'Anville., Géographe ordi- naire du Roi. Celle qui paroîtà la tête du premier Volume , mérite fur tout l'attention des connoillems par fa nouveauté , Se par le travail qu'elle a dû coûter à l'Auteur. En effet , il l'a dreffée ( dit-il ) fur un .grand nombre de Cartes particulier ES SCAVANS; res , fur les inftruftions des Naviga- teurs £c des Voyageurs ; fur les ré- cits des Hiftoricns Efpagnols , qui fcurnitlent des détails qu'on n'a. point fait entrer jufqu'ici dans les Cartes ; 6c il a réduit le tout fous la projection la plus favorable , con- formément aux déterminations Aftronomiqucs de longitude faites à la Martinique , à S. Domingue, à la Jamaïque , à Carthagéne , 6c à laLouifiane, ABREGE' DE LA VIE DV CELEBRE PIERRE DANES ; Ambaffadeur du Roi François I. au Concile de Trente , Evêque de La- vaur , Précepteur & Confeffeur de François II. mort le ; 3 . Avril 1577. /ivec deux Mémoires fur les principales aftions de Jacques Doues , parent du premier , Evêque de Toulon , Maître de l'Oratoire du Roi Confeiller d'Etat ordinaire , 6cc. décédé a Paris en tdeur de faintetc le $.JuiK 166$. On a joint un Recueil contenant deux Parties. Dans la première , en rapporte les Textes de tous les Ecrivains qui ont parlé de l' Evêque de Lavaur , ou l'on n'a point omis l'Oraifon Funèbre de ce Prélat , prononcée par Genebrardk S. Germain des Prêt, le 27. Avril 1 577. ni la Diffcrta- tion qui fut faite en 1702. pour prouver que l' Evêque de Lavaur efi auteur du Livre de Ritibus Ecclelîa: Catholicx , imprimé plufîenrs fois fous le nom du Préfident Duranti. La féconde Partie du Recueil contient les Opufcules de P. Danes qui n'ont point été imprimés } ou qui l'ayant été font devenus rares. A Paris , chez Quillau , rue Galandc , près la Place Maubçrt , à l'Annonciation. 17 j 1. in - 40. pp. 1 84. RIEN n'eft plus întereffant dans h Republique des Let- tres que l'Hiftoirc des Grands Hommes qui s'y font diftingués, que les témoignages qu'en ont ren- du les Sçavans qui ont été leurs contemporain; , ou qui ont vécu depuis, & qu'un Recueil d'Opul- culeSjquijû l'on n'avoit le foin de leî réurùr , pourroient fe perdre dans la fuite des tems. C'eft ce qui a été exécuté dans ce Volume à l'égard du célèbre P. Dancs, comme on l'a d'abord reconnu par le titre qu'on vient de tranferire. L'Auteur qui elt parent de l'illuftre Evêque de Lavaur, a trouvé dans les pa- piers de fa famille de quoi éclaircir pluiîeurs faits importans. Voici un précis de l'abrégé de la Vie de Pierre Danes. Il naquit à Paris en 1497. d'une famille an-? cienne , & que les Auteurs contem- porains appellent illuitre. Il fut mi$ M A R très-jeune au Collège de Navarre , où il apprit les Langues Latine , Gréque &c Hébraïque. Il joignit dans la fuite à l'étude des Langues celle de la Philofophie , des Mar thématiques ,,dc la Médecine & de la Théologie. Cette érudition pres- que univerfelle , le fit préférer par les Sçavans qui vivoient de fon tems , même au fameux Budé qui étoit fihabiledans la Langcc Gré- que , mais qui ne fçavoit poi»t d'Hébreu. En 1553. le Roi François I. nomma Pierre Danes pour premier Profcfleut de la Langue Gréque au Collège Royal que ce Prince ve- noit de fonder. L'Auteur remarque que dans ce tems-là les perfonnes de la première diftin&ion fc fai- foient un plaifir d'enfeigner publi- quement , & que Danes avoit eu lui - même pour Maîcre Lafcaris Prince du Sang Impérial des Grecs. Ce fut dans ce tems que Danes en- feignoit au Collège Royal , qu'il donna au public une nouvelle Edi- tion de Pline l'ancien. Il la fit pa- roître fous le nom de Bellocirms , e'eft-à-dire , Belletierc qui étoit fon Domeftique. Il obtint en 1 5 î j. la permiffion de quitter l'exercice de la Chaire du Collège Royal pour aller joindre en Italie George de Selve Erêque de Lavaur, qui étoit alors Ambalïa- deur à Venife. George de Selve étoit intime ami de Danes qui lui avoit appris la Langue Gréque. De manière que de Selve ayant fait imprimer chez Vafcofan fa «aduftion des Oeuvres de Plu- 3, 1732: 137 tarque , dit dans fa Préface que le principal honneur de ce travail doit être rapporté à Pierre Danes. Ce dernier étant en Italie envoya à Vafcofan le dixième Livre de l'Hic ftoirc de France , publié fous J« nom de Paul Emilie; mais que no- tre Auteur croit être l'Ouvrage de Danes3qui affecloit par modeftie de publier fes Ouvrages fous des noms empruntés. Le Recueil d'Ouvrages détachés d'anciens Commentateur* d'Ariftote, dans lequel font com- pris les Queftions d'Alexandre d'A- phradifée fur le Ciel imprimé à Venife en I5J6'. font dédiées à Da- nes,au foin duquel l'Imprimeur dé- clare que le public eft redevable de l'exaelitudede cette Edition. Danés avoit formé la refolution de faire imprimer pendant ce premier fé- jour en Italie les Ecrits de plufieurs autres Commentateurs d'Ariftote , & fes propres Ouvrages fur la Phi- lofophie Péripatéticienne , mais ce deflein ne fut point exécuté. Il pu- blia néanmoins pendant ce tems-là deux Ecrits d'un autre genre. Le premier eft une Apolegie de Fran- çois I. pour répondre aux invec- tives que Charles V. fit contre le Roi de France en plein Confiftoire. Le fécond eft un petitTraité des de- voirs de l'Ambaffadeur qu'il corn- pofa , à ce que croit notre Auteus en faveur de George de Selve fon ami. Etant de retour en France , il fu« choifi pour être un des Juges de Ramus , qui avoit eu la hardieffs de faire peu de cas de la Philofo- phie d'Ariftote & de combattre Içs ijS JOURNAL D principes decePhilofophe. L'avoue Danes &dedeux aucrcs desjuges fut que Ramus avoit été téméraire , ar- rogant eVimpudent d'avoir reprouvé la manière d'enfeigner la Logique reçue par toutes les Nations , d'a- voir critiqué Ariftote & d'avoir avancé pluiîcurs chofes étranges & fauflcs dans fes Anima.iverfions 6: dans fes Inftitutions Dialectiques. Jufqu'ici Danes n'avoit paru que comme Sçavant. En 1545. François premier l'envoya au Concile de Trente en qualité d'Ambafladeur avec Claude d'Urfé & Jean Defli- gneris. Il y fit au nom de la nation une belle Harangue Latine qui lui fit donner de grands éloges par le Préfident du Concile. Henri II. le donna pour Précepteur au Dauphin qui régna depuis fous le nom de François II.il hit auiriCcnfelleur de fon Elevé, & nommé en 1557. à l'EvêchédeLavaur. LesProteftans s'étoient flattés que Danes ne leur feroit pas extrêmement con- traire , mais étant Evêque il foûtint la Religion avec tant de zélé , que quelques-uns d'eux le traitèrent de perfecuteur. Cependant ayant eu le malheur de tomber entre les mains des Huguenots s il leur déclara hardiment qu'il étoit Prê- tre & un de ceux à qui il appar- tient de créer des Prêtres , il refta quelque tems leur priionmer , mais il n'en fut pas maltraité. Sous Charles IX. Pierre Danes alla au Concile de Trente , c'étoit le feul Evêque de France qui y étoit au mois de Juin 1562. il s'y diftingua par fa feience , par fa conduite Se ES SÇAVANS; par la vivacité de fon efprit. On admira fur tout fa réponfc à un Evêque d'Italie qui ayant entendu les plaintes que faifoit Nicolas Pfaume contre les abus de la dat- teric & de la Chancellerie , avoic répondu en colère Galhts cantat. Vtinam , répliqua Danes , ad hnjus Galli eantum excite.retur Petrus & fient *m*rè* • Danes étant revenu dans fon Diocefc s'appliqua uniquement aux devoirs de fon Etat : notre Auteur, le loue fur tout de fon définterefle- ment 5 de fon amour pour les pau- vres & de fon affection pour les Jefuites dont il fut un des plus zélés défenfeurs. Se voyant avancé en âge & infirme , il demanda pour fuccefTeur Gilbert Genebrard fon Difciple 3 le Roi Henri III. lui ac- corda cette grâce , mais aucun Se- crétaire d'Etat ne voulut ûgner le Brevet pour Genebrard. Danes prefenta fa Requête aux Etats de Blois pour les engager à appuyer fa demande auprès du Roi. Le Clergé & la Noblcfle lui furent favorables, mais le Tiers-Etat refufa de fe join- dre aux deux autres , fous le pré- texte qu'une pareille démarche fe- roit contraire au retabliflement des élections qu'on demandoit alors ; mais la véritable raifon , fuivanc notre Auteur , parce que les Gens de Robe favorifoient Pibrac qui eut en effet cet Evêché après Danes. Ce fut la dernière action écla- tante de Pierre Danes ; étant acca- blé de maladies , il fc retira à faint Germain desPrez, où il mourut le 25. Avril 1577.il fut enterré dans l'E-life MARS l'Eglife de cette Abbaye. Gene- brard fit fon Oraifon Funèbre, &C une Epitaphe qu'on rapporte ici &c qui mérite l'attention des Lecteurs. Après l'abrégé de la Vie de Pier- re Danes , on voit dans ce Volume deux Mémoires fur la Vie de Jac- ques Danes qui étoit proche parent du précèdent. Nous rapporterons quelques traits du premier Mémoi- re. Jacques Danes qui eft né a Pa- ris en 1601. étoit fils de Jacques Danes qui avoit été Confeiller au Parlement, Préfidenten la Cham- bre des Comptes, Prévôt des Mar- chands & Confeiller d'État. Notre Jacques Danes fut auffi Préfident de la Chambre des Comptes & In- tendant de Languedoc. La mort de Magdelaine de Thou fa femme & celle d'Henri fon fils qui fe noya à l'âge de 16. ans , lui firent prendre le parti d'entrer dans le Clergé. Il fut d'abord Maître de la Chapelle du Roi, Confeiller d'Etat ordinai- re , puis Evêque de Toulon. ïl fe diftingua dans les aflemblées du Clereé & fur tout dans celle de Mante tenu en 1641. d'où il hit chalTé avec les Archevêques de Sens & de Touloufe & trois autres Prélats , pour n'avoir point voulu consentir à une impofition de de- niers qui leur avoit paru exhorbi- tante. Cependant l'Evêque d'eTou- ion arrivant à Lyon , fut reçu avec de grandes marques d'eftime parle Cardinal Archevêque de Lyon, frère du Cardinal de Richelieu. 11 fut admis aux délibérations de l'af- femblée de 164Ç. quoiqu'il ne fût pas du nombre des Députez , & le Mars. . '75i- HP Cardinal Mazarin lui fit un com- pliment au nom de toute l'alTem- blée. Ce fut un des Evêques des plus zélés pour la condamnation des cinq Propofitions & des Partifans de Janfenius. Quoiqu'il eût été ami intime de M. de Gondrin Archevê- que de Sens ; // ne l'écoutaplus , dit l'Auteur du Mémoire , lorfqu'tl le vit engagé dans tin parti dangereux , dont ilprévoyoit que Us fuites feraient funefies à la tranquillité de l'Eglife. En 165e. il donna fa démifiion de l'Evêché de Toulon , & de la Charge de Maître de l'Oratoire du Roi , pour vivre dans la retraite. Il quitta fon Equipage &c toutes les marques de fes dignitez. Il redou- bla fes auft eritez , jeûnant prefque tous les jouis , ne mangeant que les légumes les plus infipides, prefque fans aucun apprêt , ne buvant que de l'eau , couchant fur la dure , ne prenant que deux ou trois heures par jour pour fon repos , employant le refte du rems à la prière , à la méditation, à des leclures édifian- tes, & au fervicc des pauvres. Il mourut le 5. Juin 1662. âgé de 61. ans , &c il fut inhumé dans le Choeur de l'Eglife de Sainte Gene- viève des Ardens. XJbi non defue- runt ut audio , dit le P. de Sainte Marthe dans le premier Volume du Gallia Christiana, miracn- la (jua ejtts fanUitatis opinionem confirmant. Le fécond Mémoire qui a été en- voyé à l'Auteur par M. l'Evêque de Toulon, contient un détail de plufieurs aciions qui prouvent la pieté de Jacques Danes dans l'Epif- i4o JOURNAL D copatj & des Fondations pieufis 3u'il ht dans fon Diocéfe. Ces Fon- dions jointes à celles qu'il ht de- puis à Paris, font connoître que l'Auteur du Callia Chriftiana n'a point exagéré , en avançant que Jacques Danes avoit employé plus de cent mille écus en œuvres de pieté. Ceux qui voudront voir les Elo- ges qu'ont fait de Pierre Danes les plus fçavans Hommes de fon tems & ceux du ficelé fuivant > comme Erafme , Turnebe , de Tliou , les Poètes Ronfard , du Bellay , Bourbon , Paradin s Paul-Jovc , Hotman , &c. auront recours à la première Partie du Recueil impri- mé apres la Vie de Pierre Danes. Ce n'eft point un chef-d'œuvre dVloquence , mais elle fait connoî- tre l'idée qu'on avoit alors du mé- rite de ce (çavant Prélat , de même que les Epitaphes en Hébreu , en Grec Se en Latin qui fuivent cette Oraifon Funèbre. La DilTertation fur l'Auteur du Livre de Ritibus Ecclefia pour prou- ver que Pierre Danes étoit le prin- cipal Auteur de cet Ouvrage , 8c que le Président Durand qui l'a pu- blié fous fon nom , n'a fait que le mettre en ordre & y ajouter quel- ques endroits , a été publiée en I702. d'autres Ecrivains ont fui vi depuis le fentiment propofé dans cette Diflertation. Ce que l'Auteur de l'abrégé de la Vie de Pierre Da- nes a trouvé de plus fort pour attri- buer cet Ouvrage à l'Evêque de Lavaur fon parent, c'eft que Jean Bertier ancien Evêque de Rieux , ES SÇAVANS; qui étoit contemporain de Pierre Danes , a certifié à Pierre Bertier , Evêque de Montauban fon neveu, que Danes avoit fait le plus fort du Livre qui a paru fous le nom de Durand. Il ajoute qu'il fçait par des titres de familles que les Mff. de Danes furent vendus à Toulouze , Se que le Préfidcnt Duranti en acheta la plus grande partie. Dans la féconde Partie du Re-' cueil qui contient les Opufcules de Danes , on voit d'abord une Epi- gramme Latine de Pierre Danes ,'. qui contient un Eloge d'un Ouvra- ge de Mennuel fur la Grammaire , une Lettre à Nicolas Pafqualigo Vénitien , la Préface de l'Edition de Pline fous le nom de Bellocirius ; une Lettre à Jacques Collin pour obtenir la permillion du Roi afin de voyager en Italie , & qui a été inférée comme une excellente Pie- ce dans le Recueil intitulé EpifloU Seleiïa y imprimé à Paris en 1556". L'Apologie de François I. contre Charles V. » eft fort Latine , bien » tournée , folide & fçavante. Elle » eft une preuve que Danes n'étoit » point fi fort adonne à la connoif- » fance de l'Antiquité, qu'il ignorât » les affaires de fon tems , comme »> cela eft ordinaire aux fçavans An- » tiquaires. François I. avoit été fi content, non feulement de la pureté du lan- gage, mais encore de la foliditc de la Harangue de Pierre Danes au Con- cile de Trente, qu'il voulut qu'elle fût imprimée. L'Auteur y prouve que les Rois de France font ceux de tous les Souverains qui ont été Icî M A R plus attachés à la Foi Carholique, Si qu'il n'y en a point qui ayent rendu de plus grands fervices à l'Eglife Si au S. Siège. L'Ecrit qui a pour titre De Sub- flantiâ & modis ejus ne paroît être qu'un fragment d'un plus grand Ouvrage , l'Auteur y raifonne fui— vant les principes de la Philofophie Péripatéticienne , auflfi celui à qui le Public eft redevable de ce Re- .cueil , a - t - il délibéré s'il le feroit imprimer. Il feplaint aflez amère- ment du malheur de notre fiécle, dont les Philofophes ont abandon- né Ariftote pour embrafler , dit-il, le Syftême d'Epicure renouvelle Si reformé par Defcartes. Il compare à ce fujet le Syftême d'Ariftote , fur le cours des planètes , avec celui de Defcartes ; il foûtient que le Syftê- me d'Ariftote eft beaucoup plus fenfé , plus net Si. plus iïmple que celui de Defcartes ; Se il prétend que cet exemple fuftît pour mon- trer avec combien peu de raifon certains particuliers font fi fort pré- venus contre les Peripatéticiens. Il lui paroît honteux que dans une S , i 7J2. 141 Science aulfi neceflaire à la vie que l'eft la Philofophie on change de Syftême comme on change de mo- de en habit. L'Inftrudlion pour un Ambafla- deur a trois objets principaux. Le premier, ce quel'Ambairadeur doit faire quand il a reçu fes inft'ruc- tions. Le fécond , comment il fe doit conduire à la Cour du Prince vers lequel il eft envoyé. Le troifié- me , comment il doit rendre comp- te à fon Souverain de fes négocia- tions^ Ce difeours contient plu- fieurs reflexions qui pour être deve- nues communes par le grand nom- bre d'Ouvrages qui ont été depuis publiés fur cette matière , n'en font pas mo:ns utiles. Cette Inftruction eft en François , Si ceux qui pren- dront la peine de la lire reconnoî- trontaifémentque fi Pierre Danesa paffé avec raifon pour un des Ecri- vains de fon rems dont la Latinité , étoit la plus pure & la plus exacte „ il étoit aufh un de ceux du même tems qui écrivoit le mieux en Fran- çois. TRAITE DE LA REVOCATION DES DONATIONS PAR la n ai (fan ce on furvenance des en f Ans. Par Al. A***D***L*** R*** , Avocat an 'Parlement de Provence. A Paris, au Palais, chez Nicolas Goflelin , dans la Grand'Salle, à l'Envie. 1738. in-fol. pp. 57, PLUSIEURS Jurifconfultes François avoient déjà donné au public desTraitez de la Revocation des Donations par la furvenance des enfans, ceux deTiraqueau, Si de Papon publiés fous le titre de Com- mentaires fui la Loi Si unqttam, au Code de Revoc. Donationib. ont été eftimés dans le tems qu'ils ont paru. Dumoulin a traité cette matière avec étendue , & Ricard dans fon Traité des Donations a examiné avec exactitude plufieurs queftions aufquelles cette manière de revo- Tij i42 JOURNAL DE ciuer les Donations peut donner lieu. Cependant notre Auteur a cru qu'il pourroit encore traiter la mê- me maricre utilement pour le pu- blic. » J'ai pris foin , dit-il , de fai- » re entrer dans ce Traité , non feu- clément toutes les queftions qui ont « déjà été examinées & décidées » par nos Auteurs François & par » nos Arrcriftes , mais d'autres en- » core qu'ils n'ont point touchées » dans leurs Traitez & Commen- » taires > " il a aufh cru qu'il devoir décider les queftions qui regardent la vie & la légitimité des enfans, parce qu'il n'y a que des enfans vi- vans 6c légitimes qui puillent don- ner lieu à leurs pères de révoquer les donations qui avoient été faites avant leurnailTancc. Tout l'Ouvrage eft divifé en quarante - quatre Chapitres , & chaque Chapitre contient la déci- iîon d'une queftion principale pro- pofée dans le titre , èv fouvenc de quelques queftions incidentes ; nous allons rapporter un précis de deux de ces Chapitres. L'Auteur examine dans le troi- £éme il la légitimation des enfans par le mariage fubfequent peut taire révoquer la donation par le beneh- ec de la Loi Si imcjuam. C'eft une règle cenftante que les enfans illégitimes ne peuvent faire révoquer les donations faites par leur père, foit avant la naiffancedes enfans , foit après qu'ils font venus au monde ; mais quand les enfans font légitimés par le mariage fubfe- quent ils jouillent des mêmes privi- lèges, que ceux qui font nés légiti- S SÇAVANS; mes , c'eft ce qui eft établi d'une manière invincible par Tiraqueau lur la Loi Si unjuam : Se notre Au- teur fait voir que fon fentiment a été fuivi par tous les Parlemens du Royaume dont il cire des Arrells rapportés par le Préhdent Boyer, par P;ipon , par la Roche-Flavin , par Louet & Brodcau iv parRicard dans fon Traité des Donations. On ne peut propofer contre ces enfans qu'ils étoient nés au tems de- là donation , & que le Donateur a pu les avoir en vue lorfqu'il a fait la donation, car h ces cntansétoicnr nés lorfque la donation a été faite , ils n'étoient point alors légitime:, & ce n'eft que leur légitima- tion qui peur fervir de motif à la revocation. Si le Donateur qui avoit des enfans bâtards lorfqu'il a tait la donation avoit prévu qu'il auroit des entans légitimes , fans doute qu'il n'auroit pas fait cette donation , ou s'il l'avoit faite avec la refolution de ne la point révo- quer , on ne devroit avoir aucun égard à fon intention, attendu qu'il n'a voit point encore fenti l'effet de l'arîcction paternelle pour un enfant légitime. L'Auteur examine enfuite s'il faut faire mention dans l'acte de célébration du mariage des enfans naturels qu'on veut légitimer. Dece Se Dumoulin ont crû cette formali- té necellaire , mais Brodeau dont l'avis eft fuivi à prefent n'eftime pas que le défaut de cette formalité puille faire préjudice à l'état de l'enfant , pourvu qu'il foit juftirîé , que l'enfant eft né dans le conçu- M A R binage de ceux qui on: été depuis mariés. 11 y a plusieurs autres queftions qui concernent la légitimation par le mariage fubicqucnt , & qui ne font pas moins importantes que la précédente , dont l'Auteur n'a pas jugé à propos de parler. Le Chapitre onzième nous four- nira un fécond exemple : il s'y agic de fçavoir il la donation faite par le contrat de mariage du Donateur peut être révoquée par la naiiTance des enfans légitimes de ce Dona- teur. Dumoulin a foûtenu l'affir- mative dans fon Traité des Dona- tions faites en contrat de mariage , mais notre Auteur foûtient qu'on ne peucembrafler l'opinion de Du- moulin fans blcller les plus purs principes du Droit Civil. La raifon qu'il en rend eft que le Donateur a fait par fon contrac de mariage une donation uni verfelle , ou de la plus grande partie de fes biens , dans la pensée prochaine d'avoir des enfans, & par confequent que le Donateur ne peut plus fe fervir du privilège que lui accorde la Loi fur le fondement que le Donateur ne croyoit point avoir d'enfans dans le tems qu'il a fait la donation. Le Donateur qui dans fon contrat de mariage fait une donation à un étranger eft cenfé non feulement avoir penfé à fes enfans à naître du même mariage , mais encore leur avoir voulu préférer fon Donataire. Papon , le Préiîdent Boyer & Ri- card fe font déclarés fur cette que- ftion contre Dumoulin , & notre Auteur cite plufieurs Arrefts qu'il S l i 7 5 a. 143 prétend avoir jugé difertement la queltion en faveur des Donataires ' il regarde même comme un aveu- glement de la part de Dumoulin d'à-; voir cru ces fortes de donations ré- vocables par la furvenance d'enfans: cependant quelqu'un que nous croyons être l'examinateur de l'Ou- vrage a mis une Note au bas de ce Chapitre , où il dit que le fentiment de Dumoulin a fes partifans , Se que le Donateur a cru qu'il pour- roit arriver qu'il ne furviendioit point d'enfans du mariage qu'il al- loic contacter, & qu'il a voulu en ce cas feulement difpofer entre-vifs au proiit de fon Donataire, Ilfautobferver, enfiniflant, que cet Ouvrage a été compofe lon^- tems avant l'Ordonnance du mois de Février 1751. faite pour fixer la Jurifprudence fur la nature , la forme , les charges & les condi- tions des donations; c'eft pourquoi il y a quelques articles de ce Traité dont les Lecteurs doivent prendre foin de rectifier les décifions fur les difpofitions de l'Ordonnance : par exemple , au Chapitre 40. l'Auteur décide que la reftitution des fruits en cas de revocation de donation par furvenance d'enrans, n'eft due' par le Donataire que du jour que le Donateur aura formé la demande en Juftice; cependant l'article 41. de l'Ordonnance porte que le Do- nataire fera tenu de reftiruer les fruits du jour que la naiiTance de l'enfant où fa légitimation par ma- riage fubfequent lui aura été notifiée par exploit ou autre acle en bonne forme j & ce quand même la de- 144 JOURNAL DES SÇAVANS, mande , pour rentrer dans les biens même rorme que celui des Dona- donnés , n'auroit été formée que tions de Ricard , pour que ces deux pofterieurement à la notification. Ouvrages piaffent être reliés en- Ce Traité a été imprimé dans la fcmble. TRAITE HISTOR1QVE ET MORAL DE L'ABSTINENCE de la viande , & dis révolutions qu'elle a eue depuis le commencement du monde jufqu'a prefent , tant parmi les Hébreux que parmi les Payens , les Chrétiens & les Religieux anciens & modernes , divifé en quatre Par- tiel. Par le R. P. D. Grégoire Berthelet , Religieux BenediBin de la Congrégation de S. Vanne & S. Hydulphe. A Rouen , chez la Veuve Hérault. 173 1. /«-40. pp. 521. 8c le trouve à Paris, chez Lottin, rue S. Jacques , à la Vérité. NOus avons parlé dans le Jour- nal de Février dernier de la première & féconde Partie de cet Ouvrage , la troifiéme roule fur la manière dont les anciens Moi- nes obfervoient l'abftincnce & fur différentes queftions qui ont rapport à ce fujet. L'Auteur fc fonde à fon ordinaire fur des faits èc fur des au- toritez. Dans un champ fi vafte , nous allons continuer à recueillir ce qui nous a paru de plus propre à donner quelque idée du deffein de l'Auteur. Il commence d'abord par traiter la fameufe queftion , fi S. Benoîc a permis à fes Moines de manger de la viande. Il eft certain qu'il ne la défend pas en termes formels. Voi- ci fes paroles , que tous s'ab/iiennent de manger de la chair des bêtes à qua- tre pieds , excepté les malades & les in firme s. Y? où quelques-uns ont pré- tendu que non feulement les mala- des pouvoient en ufer , ce qui eft le fentiment le plus fuivi ; mais qu'elle étoit même permife aux Moines en paifaite fanté. Et cette opinion vient d'être renouvellée par un Religieux de S. Blaife. D- Berthelet avoue que les Pères Grecs & Latins mettoient une gran- de différence entre les oifeaux is: les animaux à quatre pieds : perfuadés fur l'autorité d'un paffage de l'Ecri- ture mal entendu , que les oifeaux avoient été tirés de l'eau , ils préten- doient qu'ils participoient à la na- ture des poiflons. Il paroît même que dans l'Eglifj Grecque & Lati- ne jufqu'au hxiéme &: feptiéme fic- elé , les Religieux ex les Laïques en mangeaient quelquefois dans les jours d'abftinence , & que ceux qui s'en privoient , le faifoient plutôt par principe de mortification , que dans la per.féc que la volaille fut véritablement chair. Mais après tout , pourfuit notre Auteur , com- me dans le tems où S. Benoît com- pofa fa Règle , les Moines , foit d'Orient , foit d'Occident n'en mangoienr que très-rarement, eft-il polîlble de croire que ce Saint eût permis à fes Moines d'en faire un ufage ordinaire Se d'en manger M A R toutes les fois que l'occafion s'en prefenteroit ? Cependant voyant bien qu'il n'eft. pas aifé de rien dite de précis fur cette queftion , il tranche la difficulté en foutenant qu'il eft inu- tile aujourd'hui de l'agiter. L'Egli- fe a compris la volaille parmi les alimens dont il n'eft pas permis d'u- ferdans les jours d'abftinence ; ainfî les Moines qui fe font engagés par leurs Conftitutions particulières à obferver l'abftinence perpétuelle fur le même pied , que l'tglife y oblige les Séculiers dans le Carême &c les autres jours de jeûnes , ne peuvent plus fe croire en droit de manger de la volaille. Refte à fçavoir ce que l'on doit penfer des Macreufes, Poules d'eau ôc femblables Oifeaux Aquatiques, des Biévres , Loutres , Rats d'eau , &c. fur lefquels l'Eglife ne s'eft point encore expliquée , ôc dont plufieurs Religieux abfiinens ne fe font aucun fcrupulc de manger , parce qu'ils les regardent comme poiilons. D. Berthelet, après avoir obfervé que cette fuppofition donne lieu à une infinité d'abus , s'attache à prouver que pour la plupart ils font mal fondés dans cette opinion, & que du moins pour la perfection de l'abftinence , il convient de s'en priver. De-là notre Auteur palTe rapide- ment à l'examen des aflaifonne- mensdontufoient les anciens Moi- nes Orientaux. Les premiers Soli- taires d'Egypte ne vivoient que de pain 6c d'eau. La plupart cependant y joignoient du fcl , apparemment S ; 1732: 147 pour donner plus de goût à leur pain.Quelques-uns faifoient confire leurs légumes au fel & au vinaigre ; d'autres fe fervoient d'huile , ce qui toutefois étoit regardé comme une délicateffe. Outre le fel & l'huile ; les Moines avoient encore un aiïai- fonnement connu en Grec fous le nom de Ta'fixoç , mot qu'on peut rendre par celui de Saumure. C'é- toit une efpcce de gelée compofée du fuc de certains poifTons , cuits dans du fel & des herbes aromati- ques. La plus ordinaire fe vendoit à vil prix, & les gens de campagne en mangoient fur leur pain. Cepen- dant elle ne fut d'abord permife en Orient qu'aux Moines infirmes ; dans la fuite l'ufage en fut plus commun , & fubfiftoit encore au huitième fiécle. Les Moines Latins n'étoient pas fi fcrupuleux fur l'aiTaifonncment de leurs mets. Dans le tems de S* Benoît on mangeoit de l'huile au Mont-Calfin , & cet ufage dura jufqu'au neuvième fiécle. Ce fut pour lors que pour de bonnes & va- lables raifons qu'on peut voir dans l'Ouvrage même, le Concile d'Aix- la-Chapelle ordonna que les ali- mens des Moines feroient dans îa fuite affaifon nés avec de lagraifle excepté tous les Vendredis de l'an- née , les huit jours qui précedoient la Nativité , & depuis la Quinqua- géfime jufqu'à Pâques. Quoique ce Règlement fut confirmé par le Pa- pe , ôc fuivi par les Communautez Régulières , il s'en trouva cepen-. dantqui ne crurent pas devoir s'y conformer , & qui ne laiffeient pas ttf JOURNAL D de regarder l'ufage de la graiffe comme un abusimolerable. Malgré cela l'ordre de Cluny qui s'etoit propofé de rétablir la Règle de S. Benoîc dans toute fa pureté , alla plus loin que le C nci- le d'Aix , & permit à fes Religieux de fc fervir de graille les Vendredis mêmes , Se pendant l'Avenr. Cet ufage n'y fut aboli que fous Pierre le Vénérable , & il y a beaucoup d'apparence que dans la plupart des autres Congrégations il fublifta juf- qu'au rems des nouvelles reformes qui parurent dans le i je fiécle. Quoique les anciens Religieux ne mangeallent que rarement des otufs , on ne voit pas qu'ils leur fuffent défendus. Il raut dire la mê- me choie du lait & du beurre. Mais ilsfe faiioient quelque fcrupule de manger du fromage , peut-être à Caufe qu'il échauffe. Par cette mê- me raifon ils s'abftenoient d'épice- ries , Si S. Bernard en condamne abfolument l'ufage. A l'égard de la viande on a vu plus haut que les Moines d'Orient pouvoient en manger dans leurs maladies-, mais c'étoit toujours fé- lon eux une grande imperfection que d'ufer de cette condefcendancc. Ils y ont même entièrement renon- cé dans la fuite cv depuis l'onzième fiécle on remarque qu'ils traitent de prévarication criminelle la poffef- iion où les Moines Latins (ont de faire gras dans leuus maladies ; & pour quelque raifon que ce foit, les Religieux Grecs ne rompent j J'abftinence dans leurs Mônafteres; & dans le monde les Séculiers l'ub- ES SÇAVANS; fervent avec la même rigueur aux jours où elle eft prefente par leur Eglifc. Les premiers Moines d'Occident n'étoient pas moins refervés que les Grecs fur l'ufage de la viande dans leurs maladies. D. Bcrthclet montre par une infinité d'exemples que les plus parfaits d'entr'eux fc refufoient ce foulagement. A l'ex- ception de la Règle de S. Benoît, tou es celles deslixiéme , feptiéme & huitième fiécle ne leur permet- tent que la volaille , & ceux qui ufoient de cette permilfion étoient pour ainfi dire regardés comme des excommuniés. L'entrée du Choeur leur étoit défendue ; ils ne pou- voient ni communier ni dire la Meffc qu'ils n'euffent été relevés de cette efpece d'irrégularité , & on leur en donnoit l'abfolution en plein Chapitre. D'où il fuit , félon notre Auteur , que les paiticuliers doivent être très-fcrupuleux à de- mander la per million de manger qras , & les Supérieurs très-circonf- pects à l'accorder ; mais on peut voir fur tout dans la Prétace , que cette manière de penfer n'eft pas fort commune dans les Cloîtres. Non feulement dans les Mona- fteres on n'accordoit point autre- fois l'ufage de la viande fans de très-grandes raifons; mais lesentans mêmes qu'on y élevoit év que leurs parens y offroiehr fouvent avant qu'ils euffent atteint l'âge de 7. ans, les Domeftiqùes eVlcsOuvriers qui y travailloient , les hôtes qu'on y re- cevoir gardôient la même abitinen- ce que les Moines. Mais depuis que les M A R les biens des Monafteres furent par- cages entre les Moines &c les Abbez, ceux-ci prirent le parti de fe loger d?ns le quartier deftiné pour les Hôtes , qui étoithors de l'Enclos , de à la porte du Monaftere. Ils y bâtirent des Palais fuperbes, & c'eft ce qu'on appelle aujourd'hui la Maifon Abbatiale.Commeils y yi- veient dans l'abondance & dans la liberté , ils ne furent pas long-tems fans manger de la viande , ni fans en faire fetvir à leurs Hôtes. Il eft difficile de fixer le tems auquel cet abus commença ; on ne peut dou- ter que dès le dixième ficelé il ne fut déjà établi en Angleterre. No- tre Auteur avoiïe qu'il y a des Commentateurs de la Règle de S. Benoît qui affûtent que , (elon l'intention de ce Saint , on doit fer- vir de la viande aux Hôtes de di- ftinclion. Le fçavant Père Mabillon eft d'un avis contraire , & dit nette- ment qu'on devroit punir comme prévaricateurs ceux d'entre les Su- périeurs qui ont cette complaifance pour les gens du monde. Autrefois on auroit regardé .un Monaftere comme prophané , s'il y fut entré de la viande. Il y en avoit même où l'on prétendoit qu'il ctoit impoflible d'y en porter , fins qu'elle ne fe corrompit à l'inftant. C'eft ce que Pierre-Dauphin , Ge- neral des Camaldules affuroit arri- ver à celle qu'on apportoit dans leur defert. Si l'on en croit un Hi- ftorien du douzième ficelé , c'étoit affez qu'une bête à quatre pieds en- trât dans l'enceinte du Monaftere de Sainte Marie de Laorij, pour de- Mars. s; i7 32-A- 147 venir auffi-tôt enragée. Encore au- jourd'hui l'on raconte qu'on ne peut tranfporter dans le Monaftere du Mont-Vierge au Royaume de Naples ni chair,ni œufs., ni poiffon, non pas même une chandelle de fuif , qu'on ne voye auffi-tôt l'air s'obfcurcir , Se qu'on n'entende en même tems le tonnerre gronder» Ce fait fut attefté par le Cardinal des Urfinsen 170S. Les anciens Moines perfuadés que la qualité de Religieux les fuivoit par tout } ne mangeoient jamais de viande en voyage ni hors de leurs Monafteres. C'eft ce que l'Auteur , fuivant fa méthode or- dinaire , confirme par un grand nombre d'exemples. Il en ufe enco- re de même pour montrer qu'an- ciennement les Moines qui étoienc élevés aux premières dignitez de l'Eglifc, ne fe croyoient pas difpen- fés pour cela de l'abftinence de la. viande. Quelques Evêques qui avoient été tirés de l'Ordre de Ci- teaux l'ayant rompue , le Chapitre les menaça de les priver des fuffra- ges Se des prières de leurs frères. Ce n'étoit point par une dévotion parti- culière , dit le P. Mabillon , qu'ils en ufoient ainfi; ils regardoient ce point de leur Règle comme d'une obligation indifpenfable. Paffons à la dernière Partie de l'Ouvrage, comme cet Extrait n'efi; déjà que trop long , nous n'en di-. rons que très-peu de chofe par rap- port à l'importance de la matière. D. Berthelet fe propofe d'y montrer que les Religieux engagés par leur état à obferver l'abftinence perpé^ Y i48 JOURNAL D tuellc commettent un péché confi- de rablc , pour ne pas dire mortel , toutes les fois qu'ils mangent delà viande fans per million & fans ne- ceffïté.llpofe d'abord pour principe *> que tout Moine cft obligé de ten- »dre à la perfection , cV qu'outre 3>les trois vœux principaux , com- w muns à tous les Religieux ; cha- » que Ordre a , félon S. Bernard , » fes préceptes particuliers aufquels » les Religieux font aftraints , » comme à de véritables Loix , «qu'ils ne peuvent tranfgrefler : a d'où il conclut que l'abftinencc de la viande étant un des préceptes les plus marqués de la Règle de Saint Benoît, on ne doit pas douter que fes enfans n'y foient obligés fous peine de péché, & de péché tris- grief. Il avoue genereufement que S. Thomas , fufvi d'un grand nom- bre de Cafuiftes qu'il cite , eft d'un fentiment contraire , Se que les Conftitutions de la plupart des Or- dres Religieux déclarent positive- ment qu'à l'exception des trois vœux folemncls , l'infraction des autres préceptes de la Règle ne tend point par elle-même coupa- ble de péché. Des autoritez h for- tes &C fi prècifes ne l'ébranlent pas. Il leur en oppofe d'autres , tirées principalement de ce que les grands Perfonnages de l'Ordre de S. Benoît ont penfé des Religieux qui ne gardoient pas l'abftinence. Une des principales raifons qui , félon l'Auteur , ontdéterminéfaint Benoît à défendre la viande à fes Religieux s, c'tlt , dit-il > qu'il étoit ES SÇAVANS; permadé qu'ils ne pouvoient être parfaitement chartes tandis qu'ils uferoicntdecct aliment. Ce princi- pe tire a tant de confequences qu'on nous en pardonneroir la critique, Ci notre ufage n'étoit pas d'expofer fimplement les idées des Auteurs de tout genre , pour en laitier le ju- gement aux fages Lecteurs. Nous fuppofonsque D. Berthelet cft plus heureux dans les autres té- moignages qu'il allègue. On y voie que les Moines qui font gras fans necefîîté , font traités de criminels , de parjures & d'œpoftœts. » Il pré- >j voit qu'on lui objectera que tel 5> étoit à la vérité le fentiment » des anciens , qui n'étant pas au- » trement prouvé , l'on n'en peut 7> conclure rien de certain. Mais » fans nous arrêter , dit - il , à a détruire ce foible fubterfuge , » voici des faits qui juftifieront n qu'ils n'ont rien avancé que de » conforme à la vérité. Ces faits font des punitions mi- raculeufes de differens Moines , dont les uns après avoir ofé manger de la viande fans exeufe légitime , avoient été étouffés fur le champ , le morceau leur étant refté à la gor- ge , Se les autres éroient morts fu- bitement la nuit fuivante. L'Auteur s'imagine bien que les efprits forts diront que ces Hiftoires ont été in- ventées pour infpirer aux Moines de l'horreur pour la viande ; mais fans écouter des foupçons qui mar- queroient, ajoûte-t-il , peu de ref- pect pour des Saints , qui ont cru ou oui dire ces merveilles , il conti« nue d'en rapporter encore de plus M A R étonnantes , & finit ce récit en difant , que fi dans ce monde Dieu ne punit plus aujourd'hui les Moi- nes qui rompent Pabftinence par des châtimens Ci fubits 8c fi extraor- dinaires , ils ne doivent pas douter qu'il ne leur en referve dans l'autre de plus durables &c de plus terribles, ïl vient enfuite aux Conftitutions des Papes, aux Décrets des Conci- les , Se aux Statuts des Chapitres de l'Ordre qui recommandent aux Moines de garder Tabdinence fous des peines très-rigoureufes , telles que font le jeûne au pain & à l'eau , la difeipline en plein Chapitre, la jtrifon , la fufpenfe &c l'excommu- nication. Or comme , félon le Père Alexandre,dont l'Auteur adopte ici le fentiment,touteLoi qui attachede femblables châtimens à l'infraction de ce qu'elle ordonne ou défend , oblige fous peine de péché mortel : Dom Berthclet foûtient qu'on doit penfer ainfi fur le précepte de l'ab- ftinence dans la Règle de Saint Benoît. ' Il ne veut pas non plus que les Moines qui la tranlgreffent en ce point , fe raffinent fur les difpenfes qu'ils prétendent avoir obtenu des Papes. Il avance premieremenr que pour la plupart elles fontfauffes ou obtenues fur de faux expofés. Peut- être , dit-il , que les Bénédictins d'Allemagne, d'Italie & d'Lfpagne qui fe flattent d'avoir des Bulles qui leur permettent de faire gras , fe- iroient bien embarrafTés à les pro- duire. Du moins, pourfuit-il, le P. Martenne n'a pu encore en trou- yei qui leur fuflent favorables fur S, ï73*. I4P- cet article. Il ajoute en fécond lieu que ces permiffions-là , même lorf- qu'elles font véritables , n'ont été données que pour un tems , & pour des raifons qui ne Habilitent plus aujourd'hui. D'où il fuit que lesSuperieurs & les particuliers desOrdres relâchés font obligés de travailler félon leur fagef- fe au retabliffement de l'abftinence, telle qu'elle s'obfervoit dans les pre- miers tems. Il ne craint pas dédire que les puilfances temporelles, à l'exemple de Charlemagne , de Louis le Débonnaire &c de plufieurs grands Princes , font en droit de s'employer pour introduire la re- forme dans les Monafteres qui ffc font écartés de la pratique de leur Règle. Il déclare cependant, après tout ce qu'il a dit dans cet Ouvrage,, il déclare , dis-je , en termes for- mels , n qu'il n'a pas prétendu n damner les Religieux & Reli- » gicufes qui mangent gras par la » permiffion , ou par la tolérance » du S. Siège , encore moins blâmer »la conduite des Papes qui ont au- » torifé la mitigation de certains «Ordres, ni même taxer d'indifFe- » rence ou de lâcheté pour la Règle » les Supérieurs de ces mêmes Or- » dres.t.Ilfçait que la prudence de- mande qu'on ait égard à la foibleffe des fujets , aux circonftances des lieux &c des tems. C'eft affez , dit- il , pour mettre la confeience des Supérieurs Oc des Particuliers en repos , qu'ils confervent un defir, fincere d'embrafTer la reforme , lorfque la Providence leur en offrir u les moyens. y h ijo JOURNAL DES SÇAVANS, C'eft par cette déclaration que dés que c'eft peut- être un des en- Dom Berthelct a cru devoir finir droits du Livre le plus propre à en fon Ouvrage, Se c'eft aulïi par où donner une jufte idée, nous finirons notre extraie , perfua- EXPOSITION DES PREUVES LES PLUS SENSIBLES DE la véritable RcUgion. Par le Père Buffier de la Compagnie de Je fus. A Paris, chez Roilin fils , Quai des Auguftins , à S. Athanafe. 1732'. vol. in-iz. pp. 40S. L'A U T E U R de cette Expofi- tion ayant montré dans fon Traité de la Société Civile, la ne- ceffité de la Religion pour fixer les principes de la morale , a cru de- voir expofer les principes qui éta- bliiîent la Religion Chrétienne comme la feule fur laquelle on ne puifie former aucun doute raifon- nable. Ce n'eft pas, dit-il, un rai- fonnement fupportable que celui de quelques incrédules qui refufent de fe rendre aux preuves de la Re- ligion fous prétexte qu'on peut en douter : il s'agit de voir fi l'on dou- te avec fagefle , fans quoi l'on eft ïnexcufable d'adhérer à un doute mal fondé , &c d'autant plus ïnex- cufable que la chofe fur laquelle on d'erreurs qui s'autoriloient de » mon Evangile ? C'étoit , dites- » vous, une Secle , un Parti dont a les Chefs pairoicnt pour gens de » bien , £c pour gens habiles : mais i> deviez - vous les croire quand jj ils vous donnoient des enfei- » gnemens oppofez à ceux que wdonnoic leMiniftere établi de moi » pour vous tranfmettre mes enfei- » gnemens ? Vous avez donc voulu » puifer votre foi où je ne l'avois » pas mife , au lieu de la puifer au a> Canal où je l'avois renfermée. a Ainfi vous n'avez ni la foi de » mon Evangile , ni ma vraye » Doctrine. Nous palTons plufieurs autres rai- fons , toutes fondées fur des propo- rtions fumes &£ prouvées , qui pa- roifïent avoir la précif.on de l'ana- lyfe fans en avoir la fecherefTe. Viennent enfuite quatre DifTer- tations en forme d'appendices. Dans la première l'on prouve con- tre les Juifs, que le Meffie qu'ils attendent eft venu , puifque toutes les Prophéties qu'ils admettoienc eux-mêmes, par rapport au Meffie, font accomplies. L'Auteur s'attache à toutes les Prophéties prifes en gê- nerai } il accorde que chacune en particulier pourroit être éludée , mais il obfervc que la Providence n'a pu permettre qu'une quantité- innombrable de traits, de figures & ES SÇAVANS, de prédictions différentes convinf- ! ■ au tems de la venue de J. C. fans qu'il hit le vrai Meffie , n'y en ayant aucune qui ne lui convien- ne ou dans un fens littéral ou dans un fens allégorique qui font l'un 5c l'autre admis pour légitimes par les Juifs même. Dans la féconde Dilîertation l'on fait voir qu'il eft inutile de raifon- ner beaucoup contre Spinofa , cv qu'il ne faut que l'arrêter au premier pas en niant fon principe qu'il ne prouve point 6c qui eft abfurde. La troilîémc Dilîertation eft un précis des raifons qui montrent que le Texte de l'Hiftorien Jofeph tou- chant J. C. n'eft point fuppofé. On fait voir dans la quatrième lïllufion de quelques Auteurs au fujet d'Apollonius de Thyane. A la fin du Volume le P. Buffier avertit que cette Expofinon des ■preuves de la véritable 'Religion fe trouve dans le Recueil in-folio qu'il a intitulé : Cours des Sciences , fur' un plan nouveau , Si. dontl'imprcf- fion eft achevée.Comme cetin-folio, que nous avons entre les mains , contient beaucoup de Traitez par- ticuliers qui n'ont point été impri- més jufqu'ici , nous aurons foin d'en rendre compte dans un au- tre Journal. Le cara&ere de l'Ouvrage dont nous venons de donner l'Extrait, paraîtra fans dou- te un préjugé favorable pour les au- tres de l'in-folio. MARS; 1732; 157 DISSERTATIONS SUR DES QVESTIONS OVI naifcnt de la contrariété des Loix & des Coutumes. Par Alc Louis Boul- lenois , ancien Avocat au Parlement. A Paris , chez Mcfnier ■ Librai- re-Imprimeur, rue S. Severin , au Soleil d'or, ou en la Boutique ' Grand'Salledu Palais t mêmeenfeigne. 173Z. /«-40. pp. 546". IL n'y a gueres de queftions plus difficiles dans la Jurifprudence que celles qu'on appelle mixtes , & qui naiffent de la divcrfîté , &C mê- me fouvent de l'oppofition qu'ont entr'elles les difpofiuons des Loix & des Coutumes de différentes Provinces. Ce qui donne lieu à cette difficulté , c'efl: que les Jurifconful- res ne font pas d'accord entr'eux fur la qualité des Loix , pour fça- voir quelles font celles qui doivent être regardées comme réelles , & celles qui font purement perfonnel- les , & qu'ils difputent même s'il y a des Loix qui doivent être réputées mixtes Se qui participent de la réa- lité & de la perfonalité. Ces difficultez ont engage les Avocats du Parlement de Paris à faire depuis quelques années une étude particulière de cette matière. C'eft ce qui a fait le fujet le plus ordinaire des Conférences qu'ils ont faites pendant quelque tems à la Bibliothèque qui leur a été léguée par M. de Riparfond , l'un de leurs Confreres.C'étoit M.Froland, qui après s'être attaché particulière- ment à l'étude de ces queftions , leur en avoit propofé un grand nombre. Cependant M. Froland continua en fon particulier ces re- cherches fur les queftions mixtes , & il eut occafion d'en traiter quel- ques-unes dans fes Mémoires fur l'ufage du Senatus-Confulte Vel- leien en Normandie 3 fur la prohi- bition d'évoquer les Décrets d'im- meubles iitués en Normandie , Se fur les prétendus ufages locaux du Comté d'Eu. Il fe refervoit de trai- ter un plus grand nombre de ces queftions mixtes en deux Volumes particuliers fur cette matière ; mais avant qu'il publiât ces deux Volu- mes , on vit paroître un Volume in-folio fous le titre de fécond Tome des Oeuvres de Ai. Dupleffis , où l'on infera fous le titre de Coufulta- tions le refultat des Conférences fai- tes à la Bibliothèque des Avocats,- aufquelles celui qui prit foin de l'impreffion ajouta des Obferva- tions importantes , & fit quelques changemens pour réduire ces Con- férences à la forme ordinaire des Confultations. M. Boullenois donna auffi au pu- blic fes Queftions fur les Demiffions de bien , & à l'occafion de l'une de ces Queftions il établit les principes qu'il crut qu'on devoitfuivre pour la déciiion des Queftions mixtes qui naiffent de la diveiiité & quelque- fois de l'oppofition des difpofidons des Loix 6c des Coutumes entr'el- les. L'Auteur avoit même fait pa- roître ce morceau avant que de publier l'Ouvrage entier. Xij ,;8 JOURNAL D Depuis M. Frôlant donna aulli les deux Volumes de Mémoires qu'il promcrroit depuis long-rems. Dans l'averti flement qui cit à la tête du fécond Tome , M. Froland par- loit de Conférences que de jeunes Avocats dévoient tenir chez lui fur la même matière , èk: r.ulquelles MM. Maillard &c Boullcnois s'é- toient engagés de fe trouver pour rédiger avec M. Froland les Dif- fertations qui y auroient été faites. Ces Conférences ont été en effet tenues , & on y a agité feize des Queftions mixtes dont il s'agit ici. Les Mémoires qui croient le fruit de ces Conférences furent remis à M. Boullenois. Mais MM. Froland &Maillard n'ayant point travaillé à la rédaction de ces Mémoires , comme ils fe l'étoient d'abord pro- pofé , M. Boullenois fe vit chargé feul de ce travail , &c il apûta (îx nouvelles Queftions à celles qui avoient été agitées dans les Confé- rences. Cet Ouvrage n'eft pas faic dans le même goût que les Mémoi- res de M. Froland fur la nature & fur la- qualité des Statuts , quoiqu'il en foit en quelque manière une continuation. L'Auteur après avoir difeuté les raifons qu'on pourroit rapporter de part de d'autre , fut les différentes opinions, n'a point cru devoir lailTer fes Lecteurs dans une efpece d'incertitude , Se il a dé- claréfur chaque Queftion quel étoit îe parti qu'il croyoit qu'on devoit embralTer. C'eft pourquoi il a pré- féré le titre de Difiertations à celui de Mémoires. Les principes qu'il a iîjivis dans fes dédiions, font ceux ES SÇAVANS; qu'il avoir cru devoir établir dans la fi: iême Queftion de ion Traité des- demiffions de biens» Tout l'Ouvrage eftdivifé en m. Queftions , qui font précédées d'un Difcours Préliminaire , dans lequel l'Auteur propofe les règles qu'il eftime qu'on doit fuivre pour déci- der les Queftions que font naître la. diverfité &i'oppo(îtion desdifpofi- tions des Coutumes cntr'clles. Nous avons deja rendu compte de ces règles en parlant de la Diilcrta- tion fur cette matière que M. Boul- lenois a inféré dans fes Queftions fur les demiilîons de biens qu'il avoit publiées avant le corps de l'Ouvra- ge. Nous obfcrverons cependant que dans la fuite de ce Difcours, l'Auteur fe déclare pour le fenti- ment de ceux d'entre nos Jurifcon- fultes qui ont cru qu'il étoit à fou- haiter que le Roi rcduiilt à une feu- le Loi toutes celles qui règlent l'E- tat & les biens des particuliers , $c- qui ont été perfuadés que l'exécu- tion de ce projet n'étoit point im- poilible , &c qu'il ne contenoit au- cune injuftice. Chaque Province devant facrirîer fes ufages particu- liers pour le bien gênerai 6v pour fon avantage particulier y puifque l'unité de Loi & de Coutume cou- peroit la fourec d'une infinité de procès» Pour ce qui eftdes 2 2. Queftions qui ont été traitées par notre Au- teur , nous ne pouvons en donner ici l'Extrait , ni même en indiquer les titres. 11 furfira de donner le précis de deux de ces Queftions pa- ies à l'ouverture du Livre," par-là M A R on pourra juger de la méthode de l'Auteur Se de la manière dont il raifonne. Il s'agit dansla Queftion douziè- me de fçavoir fi une femme domi- ciliée àNevers mariée fans contrat^ tjui renonce à la communauté, peut avoir fon doiiaire fur les biens de fon mari qui font fitués en Bourgo- gne. Ce qui peut faire la difficulté, c'eft que dans la Coutume de Ne- vers une femme qui n'a point fait de contrat de mariage a un douaire coûtumierfur les biens de fon mari, quoiqu'elle renonce àla communau- té , au lieu que dans la Coutume de Bourgogne la femme qui renonce à la communauté n'a point de doiiai- re. Il femble même que la Coutu- me de Bourgogne n'accorde la communauté 8c le douaire qu'aux femmes mariées , fuivant la Coutu- me générale de Bourgogne ; quand même elle accepteroit la commu- nauté. Cette dernière Qucftion fut agitée au Parlement de Paris entre la Dame Marcel & les héritiers du fieur de Chefly fon mari. On foûtenoit de la part des héri- tiers , qu'en prenant à la lettre la difpofition de la Coutume de Bour- gogne , elle ne devoit avoir aucun douaire fur les biens de fon mari fi- tués en Bourgogne , puifqu'elle n'étoit point mariée fuivant la Cou- tume générale du Duché de Bour- gogne. De la part de laVeuve on ré- pondoit que les Rédacteurs de nos Coutumes ont eu en vue dans leur difpofition les perfonncs foûmifes à leur empire , ou les biens de leur xcflort ; néanmoins que ces YÛé's 5, 1732. ij-$ générales des Rédacteurs n'ont ja- mais empêché qu'une femme ma- riée fuivant une Coutume ne prît fon douaire fur les biens de fon mari, en fe renfermant dans les difpofi- tions réelles de chaque Coutume, C'eft l'avis du Préfuient de Chafe- ncus & de norre Auteur qui ajoute que ces termes -.fuivant la Coutume générale du Duché de Bourgogne , ïbnt entre deux virgules , &c qu'ils doivent être rapportés , non à la femme mariée dont il eft parlé à la fin de l'article , mais à la commu- nauté 8c au douaire dont la Coutu- me fixe la quotité. Le Parlement de Paris rendit un premier Arreft pour que les parties rapportaflenr un acte de notoriété du Parlement de Dijon. MM. les Gens du Roi de ce Parlement répondirent qu'ils n'avoient vu aucun Arreft fur cette Qucftion ; & les anciens Avocats furent partagés, les uns foûtenant l'affirmative & les autres la négati- ve. Onconfultalà-deflusM. Bou- hier de Savigny , Préfident à Mor- tier au Parlement de Dijon,, qui fie une Diftertation pour prouver que la Veuve devoit en ce cas avoir fon douaire fur les biens de fon mari, fitués dansleDuchéde Bourgogne. Ce qui fut ordonné par l'Arreft du Parlement de Paris du 7. Avril 1729. Mais fi cette Veuve avoitrenon- cé à la communauté , elle n'aurolt point eu de douaire furies biens de Bourgogne, fuivant la décifion de notre Auteur, attendu , dit-il , que cette difpofition eft réelle ; par- ce qu'elle donne à la Veuve la itfo JOURNAL D jouiffance d'un bien de fon mari , £c qu'elle dérige par-là le bien & non la condition de la perfonne. D'où il s'enfuit que pour profiter de cette difpofition , il faut exécu- ter la condition portée par la Cou- tume que la femme contribue aux dettes de la communauté. Ce qui diminue la quotité du douaire fixé par la Coutume. Notre Auteur décide enfuite dans la Queftion treizième que la Coutume de Bourgogne qui n'ac- corde le douaire qu'à la Veuve qui accepte la communauté , eft une difpofition négative Si prohibitive, &c que les conjoints même mariés fous une autre Coutume ne pour- raient y déroger en ftipulantque la femme pourroit avoir fon douaire fur les biens de Bourgogne, quoi- qu'elle renonçât à la communauté. Puis dans la Queftion quatorr ziéme M. Boullenois décide, que quoiqu'il n'y ait pas proprement de communauté entre conjoints dans la Coutume de Normandie , la Veuve mariée en Normandie qui prend une partie des biens de la communauté à titre d'héritière de fon mari , peut avoir fon douaire fur les biens fitués dans la Coutume de Bourgogne , parce que l'efprit de cette dernière Coutume eft que la Veuve ., pour prendre fon douai- re , contribue aux dettes de fon ma- ri , ce qui arrive quand elle prend part dans les biens de la commu- nauté à titre d'héritière dans la Coutume de Normandie. ES SÇAVANS, Ce Volume finit par un avis que M. Boullenois donne au public fur une Edition du Digcfte dans un ordre fingulicr. Cet Ouvrage s'eft trouvé dans le Cabinet de M. Du- gonne Docteur Honoraire en la Fa- culté de Droit de l'Univcrlité de Paris. La perfonne qui s'eft donné la peine de rédiger cet Ouvrage , qui nous eft autrefois tombé entre les mains , a coupé en differens exemplaires, par parties, toutes les Loix dont le Digefte eft compofé, & il amisde (uite , en collant ces papiers féparés fur des feuilles blanches , toutes les Loix qui font du même Jurifconfulte. Cujas avoit propofé cet Ouvrage comme un moyen pour faciliter l'intelligence des Loix comprifes dans le Digefte. Jacques Labittc i'avoit en partie exécuté , mais il n'avoit donné qu'une Table avec des chiffres. Antonius-Auguftinus avoit pouffé l'Ouvrage plus loin que le Digefte , mais ce n'étoit en- core qu'une Table, avec des chif- fres , & une cfpece de plan , dont on voit l'exécution pour le Digefte dans les Volumes que confervoie M. Dugone. M. Boullenois a pu- blié cet avis pour fonder le goût du public , &z pour voir fi quelques Libraires fe voudroient charger de l'Edition de ces trois Volumes. Il parle auffi en quelqu'autre endroit d'une traduction du Digefte par M. Dugone, & il en rapporte un mor- ceau. *y§ §f* MARS; 1732. itfr HISTOIRE DE LAC^DEMIE ROYALE DES SCIENCES. Année 1719- avec les Mémoires de Mathématique & de Phyfique p ourla mime année , tires des Regiftres de cette Académie. A Paris, de l'Impri- merie Royale. 17 31. in-^a. pp. 120. pour l'Hiftoire , pp. 426. pour les Mémoires. Planch. détachées xxm. DANS notre dernier Journal, nous avons rendu compte des articles de ce Volume , qui con- cernent la Phyfique générale & YA- natomie. Il nous relie maintenant à parler de ceux qui appartiennent à la Chimie , à la Botanique Se aux Mathématiques. Les articles de Chimie font au nombre de cinq. Le premier, fur le Vinaiqre concentré par la gelée , eft deM. Geoffroy le cadet L e fécond fur laprécipitation du fel marin dans la fabrique du Salpêtre, eft de M. Petit Je Médecin. Le 3e , fur les eaux minérales chaudes de Bourbon /' Ar~ chambault y eft de M. Boulduc. Ces trois premiers articles fe lifent dans l'Hiftoire &c dans les Mémoires. Le quatrième , fur le Borax } par M. Lèmery , Se le cinquième , fur la Porcelaine , par M. de Réaumur , font entièrement renvoyés aux Mé- moires. Nous donnerons l'Extrait du troifiéme & des deux derniers. III. Les eaux minérales chaudes de Bourbon l'Archambault , font tel- lement accréditées en France pour la guérifon de quantité de maladies rebelles , qu'il n'eft pas furprenant que plulleurs Médecins fe foient appliqués à découvrir par l'Analy- fe Chimique en quoi confiftoit la vertu d'un remède fi falutaire. Sans fortir de l'Académie , on peut en compter jufqu'à quatre qui fuc- ceilivement ont analyfé ces Eaux , èc ont fait part de leurs découvertes fur ce point , foit au public, foit à cette Compagnie , comme en font foi fes Mémoires publics en di'.!c- rentes années. M. Duclos ne recon- nut dans ces Eaux qu'un fel nitreux analogue au Natron des anciens, accompagné de cette fulphuréité}quï le rend gras & onclueux au tou- cher. M. "Burlet en tira une matière mûcilagineufe , quelques grains de cryftaux très-déliés , brillans & à pluheurs angles , d'une faveur lixî— vielle & douçâtrejdu fel fixe & lixî-' viel , & quelques particules de fer ,' qui s'attachoient au couteau aiman- té. M. Çeoffroy y trouva quelque peu de fel marin mêlé avec beaucoup plus de fel lixiviel. L'Analyfe Chi- mique offrit à M. Chomelà peu près les mêmes principes que MM. Bur- let & Geoffroy y a voient démêlés. Mais on peut dire que M. Boul- duc a pouffé beaucoup plus loin fes curieufes recherches fur cet article, & qu'elles lui ont développé diver» fes fubftances cachées dans l'inté- rieur de ces Eaux , & qui ne s'é- toient point encore manifeflées aux Artiftcs les plusexa&s. Il n'a cepen- dant mis en œuvre pour cette dé- compofition que des moyens bien fîmples, c'eft-à-dire_, l'évaporation i*2 JOURNAL DE Se la diftillation , qui pour ectre Analyfc reviennent prefque au mê- me. Sans nous arrêter aux épreuves préliminaires de l'Académicien fur ces Eaux par divers mélanges , dont il détaille ici les plus décifives; nous viendrons d'abord au relultat de toutes les opérations qui ont fuivi ces premières épreuves , Se qui fc font réduites à évaporer ou diftillcr, Sek calciner. Les Eaux de Bourbon contien- nent donc naturellement i°. du fel marin , i°. du fel de Glauber , j°. un fel alcali , 40. du bitume , 50. de îa Selenitc } 6°. une terre fort abfor- banteSe-j0. au fer. 1. L'évaporation de l'eau étant pouffee jufqu'à un certain point , il paroît d'abord du fel marin , qui forme alors fuccefiivement au fond Se aux parois du vaiiTeau des cry- ftaux en cubes parfaits , Se qui fe déclare de plus par la faveur Se par d'autres épreuves qui ne permettent pas de le meconnoître. Ce fel pré- domine fur chacune des matières contenues dans la refidence ou le fé- diment. 1*. Prefque en même-tems une Croûte faline allez épaiiTe , raboteu- fc endeiTus, garnie de deux fortes de cryftaux en deffous , couvre la furface du Liquide. Cette croûte faline diffoute de nouveau dans l'eau commune , donne par l'évapo- ration , encore du fel commun ; Se par fon expofkion à l'air, fait naî- tre des cryftaux longs Se parallélo- grammes , taillés à facettes aux ex- tremitez , amers d'abord , puis frais fut la lapgue , ce qui joint à queu S S Ç A V A N S ; ques autres proprietez annonce aufli-tôt le fel de Glauber , pris mal-à-propos pour un fel nitreux par i.Pafcaf dans fon Traité fur les Eaux Minérales dont il s'agit. En effet , l'acide nitreux ne fc trouve nullement dans les entrailles de la terre , Se n'en imprègne que la fu- perficic, d'où il arrive que ce fel ne s'eft rencontré jufqu'id dans aucu- ne des eaux minérales examinées avec l'attention Se l'exaclitude rc- quifesen pareil cas. 30. En continuant l'évaporation, l'eau minérale devient plus roulfe Se plus graffe , d'un goût piquant Se lixiviel, & d'une odeur bitumi- neufe. Ce goût piquant eft l'effet d'un fel alcali fixe , femblable au fel de Tartre à plusieurs égards , mais qui en diffère par ces deux circonftanccs ; l'une , qu'il ne s'hu- niecle que très-lentement à l'air , Se a moins d'acreté ; l'autre , que mêlé avec le vitriol ou fon aci- de , il produit, non un Tartre vi- triolé , comme fait le fel de Tartre, mais un véritable fel de Glauber. M. Boulduc donne ici la manière de réunir ce fel alcali Se de le rendre fec Se palpable. 40. Quant au Bitume confondu avec l'alcali , on l'en fépare en ver- fant fur cette dernière portion d'eau bien concentrée de l'efprit de vin 5 moyennant quoi le Bitume privé ue l'humidité abondante Se réduit eu goutelettes , monte en partie à la furface du liquide, en partie fe col- le aux parois du vaiffeau , Litfant au fond le fel alcali , qu'on en retire aifément pour le deffecher ^l'avoir blanc MARS blanc & pur. C'eft au refte la pre- fence de ce Bitume répandu dans toute la rèjîdence , qui la rend in- flammable , mife fur une pelle rou- gie au feu. 5°. En examinant de près le fé- diment que laiiîe l'évaporation &£ les croûtes pierreufes dépofées par l'eau minérale à fa fource , on y di- ftingue deux fortes de parties, les unes brillantes & tranfparentes , Se les autres blanches , opaques &£ fans éclat. Les premières font les molécules d'un fel qu'on peut qua- lifier de felenite , puifqu'il prend la même configuration en fe cryftali- fant. Ce fel eft mixte , refultantde l'acide vitriolique & de beaucoup de terre , dont l'acide peut fe tranf- porter fur le fel de tartre , ou fe transformer en fouffre minerai par l'union de quelque matière combu- ftible. Au furplus, ce fel n'exifte pas feulement dans quelques acidu- lés ou eaux minérales froides , & dans l'eau minérale chaude de Bourbon , mais encore dans les eaux filées d'où l'on tire le fel com- mun , & même dans quelque plan- te & dans quelque liqueur animale, comme l'Académicien l'a décou- vert. 6°. Quant à la matière blanche ; terne & opaque des fédimens , c'eft une terre capable de fermenter vi- vement avec tous les acides qui la diffolvent plusou moins. Cette ter- re , outre qu'elle eftabforbante , a été calcinée par la nature , dans fon laboratoire iouterrain , dit l'Au- teur. 7°. Par le moyen d'une opera- Mars. ; 175 2- 161 tion qu'il particularife ici , on fepa- re de cette terre une matière plus brune , qui rougie au feu , décèle quelques particules de fer qu'enlève le couteau aimanté , mais dont U petite quantité ne fe fait apperce- voir que difficilement , comme l'on voit , & après bien des opéra- tions. Il paroît par tout ce que nous ve- nons d'expofer , que les matières tirées des nouvelles eaux de Paffy par l'Analyfe Chimique font les mêmes que fournirent ici celles de Bourbon. Mais il faut concevoir en même tems , que plufïeurs caufes peuvent y mettre des différences confiderables; par exemple la va-- rieté dans les dofes de ces matières , leur mélange plus ou moins intime, le degré de coction procuré aux unes plus qu'aux autres par la cha- leur fouterraine, &c. M. Boulduc ne manque pas de revenir au-devant d'une objection qu'il a déjà réfutée en 1716. 6V qui roule fur l'action du feu, capable [ dit-on ] de produire ou tout au moins d'altérer notablement les matières contenues dans les eaux. Mais quelque peu de fcrupule que puiffe laiffer fur ce point une cha- leur auffi douce que celle qui ne produit qu'une fimple évaporation; l'efprit de vin ; bien plus , la forts gelée, fi contraire à l'action du feu, employés l'un ou l'autre à l'Analy- fe des eaux de Bourbon , en ont extrait les mêmes principes. Cela ne doit -il pas lever toutes les dirH- cultez? IV. Le Mémoire de M. Lémcry fuc Y i idée claire de la Phy/ique Celeftc, j> que quelque grandes que foienc »> les diffkultez qu'on a faites con- »» tre eux , & dont on ne fauroit » difeonvenir qu'ils ne foient fuf- » ceptibles , il croit qu'il ne faut » rien négliger de ce qui peut en » confirmer l'exiftence. « Ce ne feroit pas en effet un petit avantage qu'ils auroient fur toute autre hypo- théfe, s'ils foumiffoientfeuls l'ex- plication d'un Phénomène auffi cu- rieux & auffi intereffant que celui de la rotation des Planètes. M. de Mairan fuppofe 1°. Que les couches du Tourbillon Solaire qui entraîne la Terre &z les autres Pla- nètes principales , fe meuvent avec des vîtefles différentes , félon la rè- gle de Kepler , & plus grandes en approchant du point central que vers la circonférence. z°. Que quel- le que foit la caufe de la pefanteur , les corps placés dans un lieu quel- conque de ce Tourbillon , y péfent vers ce point central , vers le Soleil, pat exemple , ou vers fon centre , S,1 1752; I75 en raifon inverfe des quarrez de leurs diftances à ce centre. 3°.Qu'en tout corps dont les parties font de differens poids , s'il eft plongé dans un fluide où il nage & qui l'entraî- ne , fa partie la plus légère fera en- traînée la première, & ira en avant, par rapport au terme où tend le fluide, &c. C'eft d'après ces principes que M. de Mairan démontre que le fluide qui frappe la partie fupericure de la Planète , plus légère par la féconde fuppofîtion, que l'inférieure, la doic pouffer avec plus de force que celui qui frappe cette inférieure , quoique par la règle de Kepler , la viteffe y foit plus grande. D'où il fuit [ troi» fîéme fitppojitioti] que la partie fu- perieure doit avancer dans le même fens que le fluide , Se par confc» quent aller d'Occident en Orient,' ce qui étant réitéré fans ceffe pro- duira la rotation dont on cherchoit la caufe. De la démonftration de 1* Auteur & de la Formule qu'il en tire , naîc une manière très-courte de fa voir quelle doit être la rotation d'une Planète , ou en quel tems elle doic tourner fur elle-même , à raifon de fa groffeur & de fa diftance du point central , qui eft le Soleil. Il l'applique a toutes les Planètes prin- cipales. Mais c'eft un détail Géomé- trique Se Aftronomique dans le- quel nous ne devons point entrer. Il nous fufïira de due , touchant la Planète de Jupiter la plus reffem- blante à la Terre par fes Satellites ; & celle dont la rotation eft le mieux connue , qu'elle tourne en effet fuc Zij 174 a JOURNAL D elle-même., a quelque minute pres, dans le tems que lui prefcritla for- mule de M. de Mairan. L'accord n'eft pas le même dans Venus Se dans Mars ; mais l'Auteur en rap- porte des raifons tirées de l'inclinat- ion de leurs axes , & qui doivenc être lues dans le Mémoire. De la confédération des Planètes principales , l'Auteur paffe à celle des Planètes Secondaires ou Satelli- tes , Se fur tout de la Lune , qui ne tourne pas fur elle-même , comme !cs premieres% » Si l'on fuppofe a> ( dit-il ) les parties d'une Planète » d'une pefanteur fpecifique diffe- » rente , fenfiblement plus grande » dans un hémifphére que dans » l'autre , Se en plus grande raifon » que l'effort relatif du fluide qui la » doit taire tourner fur elle-même, » elle prendra une fituation con- t> liante, & elle ne tournera point » fur elle-même. « Ce qu'il prouve aifément par les mêmes principes qui fourniffent la rotation. Il diffin- gue foigneufement tourner fur foi- même oufurfon centre , d'avec tour- ner autour d'un centre. Ainfi la Lune tourne autour d'un centre , qui eft la Terre , mais non pas fur J on propre «entre , puifqu'elle nous prefente toujours la même face. »Or ( ajoûte-t-il) fi l'hémif- '■» phére de la Lune qui eft toujours si tourné vers nous , fe trouve fpe- »cifiquement & fenfiblement plus » pefant que celui qui nous eft ca- »ché, s.m(i que MM. cAu\out , a //«^«j&quelques autres favans » hommes l'ont cru; il ne faut point » chercher ailleurs la caufe du phé- ES SÇAVANS; » noméne , c\: pourquoi la Lune » nous prefente toujours à peu près ■>■> la même face. Un Géomètre qui » étant placé au centre du Globe » Terrcltrc fuppofé tranfpnrent , » verroit faire le tour de ce Globe » à un vaiffeau t dont il n'apperce- » vroit jamais que le fond ou la » caréné , malgré les vents Se les » impulfions latérales , qui le font » marcher , jugeroit avec raifon » que c'efl parce que la caréné eft » plus chargée , ou plus pefante , » que la partie fuperieure du vaif- » feau qui lui eft toujours cachée. « Mais ces vents & ces impulfions la- térales n'étant pas toujours de la même force , le vaiffeau pancheroit tantôt d'un côté Se tantôt de l'autre, & le Géomètre que nous avons imaginé au centre de la Terre , ap- percevroic tantôt plus Se tantôc moins du flanc de la caréné du vaif- feau. Et c'eft-là encore précifé- mentee qui doit arriver à la Lune par les différentes viteffes du fluide qui l'entraîne. M. de Mairan en tire le principe d'une libration phy- fique en longitude , qu'il ajoute à la libration connue , tant en latitude qu'en longitude } qui n'étoit qu'op- tique. Il prétend que la libration phyfï- que eft neceffaire Se inévitable fup- pofé le différent poids des deux hémifphércs de la Lune , Se les Tourbillons ; Se que fi l'on met le vuideou un Ether non refiftant à la place des Tourbillons , la libration phyfïque fe fera en fens contraire. Ce qui fourniroit un moyen de vé- rifier par expérience , laquelle des M A R deux hypothéfes eft conforme à la nature. Il feroit à fouhaiter que M. de Màiran eût pu fuivre le plan d'Ob- fervations qu'il s'était fait ■pour dé- mêler cette complication de caufes phyfiqucs & optiques, qui concour- rent à la libration lunaire , & qu'il n'a pu mettre en exécution , faute d'un lieu propre à obfer ver lepaffa- ge de la Lune par le méridien , ce qui , félon fes vues , y étoit abfolu- ment neceffaire. Tout au moins pourroit-il nous faire part de ce plan. Quelque Aftronome en pro~ riteroit peut-être, en faveur de la nouvelle idée ôc à l'avantage du pu» blic. La Méchanique renferme quatre articles. Des trois premiers , em- ployés dans l'Hiffoire & parmi les Mémoires , l'un fur les Foutes , eft de M. Couplet; l'autre , fur les Ma- chines à remonter les Bateaux eft le précis de deux Mémoires de M. Pitot , imprimés en entier. Le troi- fiéme, furies Tourbillons Celeftes , eft de M. l'Abbé de M «Itère s. Le quatrième article , entièrement ren- voyé aux Mémoires , eft l'Ecrit de M. le Chevalier de Louville fur les Mouvemens variés & I'eftimation des Forces. i.Le Mémoire de M. Couplet fut la poujfée des Voutes , quoique diffé- rent de l'examen qu'il a publié de lapouffée des terres contre les Revê te- rriens paroît en être une fuite necef- faire. La liaifon de ces deux Problè- mes a été reconnue par ceux qui les ont propofés enfemblc & qui en ont tenté la fblution, Mais comme ces 5 ; 1732; ï7jr tentatives ont toutes paru erronées ou infuffifantes à l'Académicien 1 il a cru devoir fur l'examen des Voutes , remonter d'abord à leue premier principe , fans autre égard pour le travail d'autrui fur cette matière , quoiqu'il n'ait pas làiffé ,' comme il le déclare lui-même, de fe rencontrer quelquefois avec ceux qui l'ont traitée. Suivant ces vues , il divife fon Mémoire en deux parties. Dans la première , il examine la forme 6 la pouflée des Voutes & l'épaif- feur de leurs pieds droits } fans y faire entrer Pengrenement des Vouffoirs , lequel empêche ceux-ci de gliffer les uns contre les autres. Dans la féconde partie , qui rem- plira un autre Mémoire, il déter- minera les plus petites épaiffeurs des Voutes- circulaires uniformes , & leurs pouffées , en y faifant entre* la liaifon des Vouffoirs ; ce qui , de fa connoiftance , n'a été difeuté pac perfonne , & il y donnera de plus l'épaiffeur des pieds droits , telle que l'effort compofé de la pouffée de la voûte & de la pefanteur du pied droit foit toujours dirigé vers un point quelconque de la bafe de celui-ci. 2. Des deux Mémoires de M»' Pitst fur les Machines à remonter les Bateaux , le premier contient ài-i verfes remarques fur les uiubesou Pallettes des Moulins & antres Machines mués far le courant des rivières ; & ces remarques tendent à rechercher le nombre & la difpo» fition la plus favorable de ces Au-< bes, pour porter ces machines à îeus 176 JOURNAL D plus haut point de perfection , en pefant les avantages &c les inconve- niensqui refulteroicnt de quelques difpofltions propofées pour ces Aubes , par rapport au remontage des Bateaux. Le fécond Mémoire eft une eomparaifon entre quelques Machi- nes mûës par les ceurans des fluides où l'on donne une méthode très- fimple de comparer l'effet de celles dont l'arbre qui porte les aîles ou aubes eft perpendiculaire au cou- rant de l'eau, à l'effet de celles dont le même arbre eft parallèle au cou- rant. M. Pitot partage ce Mémoire en quatre principaux articles. Le premier contient les principes des impulfions des fluides contre des furfaces planes, & la décompofî- tion de la force totale de ces im- pulfions en deux forces latérales perpendiculaires & parallèles à la diredion du fluide. Il donne , dans le fécond , la conftru&ion d'une Table des exprcfllons de ces trois forces , laquelle fert également pour l'eau Se pour le vent : & dans le troifléme , la méthode de calcu- ler Se de faire la eomparaifon des forces des différentes Machines. Dans le quatrième il fait voir que la di (lance plus ou moins grande du centre d'impulfion de l'eau à l'axe ou l'arbre de la roue de Moulin ne change point l'effet de la Machine, fa quantité de mouvement reftant toujours le même , tant que la vi- telfe de l'eau ou du vent perfevére dans le même état. 5. M. l'Abbé de Molière! , tou- jours occupé dudeflein de défendre ES SÇAVANS; les Tourbillons de "DefcArtes contre les objections de la Sedle Nevvto- nienne , répond ici à l'une des plus fortes. Il le fait très-probablement &c même très - géométriquement , en adoptant les petits Tourbillons du P. Malebranche fubftitués aux Globules durs des Cartefiens , ÔC par confequent fuppofcs prefque infiniment petits, dont la matière circule autour d'un centre com- mun , avec une force centrifuge de même que les plus grands Tourbil- lons. Il eft vrai que l'on peut faire contre cette hypothéfe une difficul- té confiderabie fondée fur ce que ces petits Tourbillons qui fe meu- vent , comme les grands , en fens contraires & dont les plus forts s'ac- croiftent aux dépens des plus foi- bles, doivent par ces nouvelles ac- quifitions perdre beaucoup de leur propre mouvement , d'où s'enfuit neceiTairement une diminution continuelle & très-fenfible dans le mouvement du grand Tourbillon total.Mais l'Académicien trouve de quoi refoudre cette difficulté dans cette démon ftration donnée par feu M. Varignon , favoir que les pertes de vîtefle faites dans des mouve- mens , félon des Courbes , font in- finiment petites à chaque inftant fini , & qu'il en faudroitpar confe- quent une infinité, qui demande»* roit un tems infini , pour faire une fomme finie, a C'eft ainfi ( obfervc » l'Hiftorien ) que des véritez , » dont peut - être on ne voyoit » guéres d'abord l'ufiçe , vien- » nent , & même d'aflez loin , a» M A R » fccours d'autres veritcz , qui fans » elles , auroient eu un mau- » vais fort. Les Machines ou Inventions ap- prouvées par l'Académie en 1729. font 1°. celle dont M. de la Conda- mne a prefenté la defeription , Se par le moyen de laquelle on exécute fur leTour toutes fortes de contours réguliers Se irréguliers. 20. Un Soufflet de M. Terrai pour les four- neaux à fonderies, les Forges , &C. 30. Un Métal jaune de M. Renty , dont l'alliage concilie affez jufte la ductilité avec la belle couleur d'or. 40. Un Etain allié, mis au jour par S ; ï 7 3 a- . »77 M. Boittet , Si qui eft plus dur Se plus Tonnant , fans perdre la blan- cheur qu'il a au fortir de la Mine. La partie Hiftorique de ce Voln..! me eft terminée par trois Eloges; celui du Père Sebaftien Tmchet ; Carme ; celui de M. Bianchini Se celui de M . Maraldi. On trouve 2 la fin des Mémoires , celui de M. Lamorier , fur une nouvelle manière d'opérer la f finie lacrymale , envoyé à l'Académie par la Société Royale des Sciences de Montpellier, pour entretenir l'union intime qui doit être entr'elles, comme ne faifant qu'un feul Corps. VOYAGES EN ANGL01S ET EN FRANÇAIS; d'A. de la Motraye en diverfes Provinces & Places de la Prujfe Ducale & Royale , de la Ruffie , de la 'Pologne , Sec. imprimé pour l'Auteur , Se fe vend à la Haye, chez Moetjens ; à Londres, chez Round Se Mei- ghan ; à Dublin , chez Grierfon & Bradley. 1731. in-fol. pp. 480. fans les planches. LE Public ayant vu avec plaifir les deux premiers Volumes des Voyages de M. de la Motraye en Europe , en Afie &en Afrique; l'Auteur a cru que la Relation du Voyage qu'il a fait en différentes parties de l'Europe depuis 1716. ne feroit pas moins agréable que celle de fes Voyages précedens. Cette Relation eft divifée en cinq Chapi- tres. Cependant il y a fix Chapitres dans le Volume entier; parce que l'Auteur qui avoit parlé fur la fin de fon fécond Volume du renou-i vcllement de l'ordre du bain en Angleterre par le Roi George I. a jugé à propos de commencer ce 5e, Volume par une Diflertation fur di: vers Ordres de Chevalerie," tant anciens que modernes ; comme plusieurs Auteurs ont donné depuis peu fur cette matière des Traitez particuliers, remplis de recherches curieufes , & dont nous avons ren- du compte dans nos Journaux , nous ne nous arrêterons point fur ce premier Chapitre. Dans le fécond on voit la Rela- tion du Voyage de l'Auteur , de- puis la Haye jufqu'au Lac Ladoga; ayee des Obfervations Topographie ques , Géographiques & Hiftori- ques , fur les endroits les plusconfi- derables par lefquels il a paffé, par- ticulièrement la Pomeranie , la LU vonie , la Piufle a la Gsmland* } i78 JOURNAL DE l'Eftonie , l'Ingrie , &c. En par- lant de la Ville de Thorn , M. de la Motraye parle du tumulte arrivé en cette Ville en 1724. qui a été pour elle l'occafion de la perte de fes privilèges ; il rapporte un précis de ce que lui ont dit là - dellus des Luthériens honêtes gens Se au té- moignage defquels il a cru devoir d'autant plutôt s'en rapporter , que plufieurs circonftances importantes de leur récit lui ont , dit-il , été confirmées par des Catholiques. L'Auteur défavoiie la Relation du tumulte de Thorn qu'il aflure avoir été inférée dans fes premiers Voya- ges fans fa participation. Le pafTage de l'Auteur fur les Côtes de la Mer Baltique lui donne occafion de par - 1er de l'ambre , fur la nature duquel les fentimens font fort partagés. Les uns veulent que ce foit un minerai que les rivières entraînent dans la Mer,d'autres difentque c'eft une et pece de bitume,qui fe forme au fond de la Mer Se que l'agitation des on- des jette fur les bords , quand ileit parvenu à l'Etat de perfection où nous le voyons, d'autres foûtiennent que c'eft une gomme d'arbres Se particulièrement de Pins qui croif- îent fur les bords de la Mer Balti- que , Se fur les bords des rivières qui s'y déchargent , Se que cette gomme eft endurcie par les eaux de la mer Se des rivières. Ce der- nier fentiment paroît à notre Au- teur le plus probable. Ce qui le détermine à l'embraffer , c'eft que l'ambre s'enflamme com- me l'écorce du Pin quand on le pré- fente à la chandelle ., Se qu'on voie S SÇAVANS; dans des morceaux d'ambre de; mouches Se d'autres infectes terre- Ares , qui font connoître que ces infectes ont été embarraffés Se pris dans cette gomme , lorfqu'ellc dé- couloit des arbres. M. de la Mo- traye s'objecte à lui-même, qu'il y a d'autres mers , fur les bords def- quellcs il croît plus de Pin que fut ceux de la mer Baltique , Se que cependant on ne trouve pas d'am- bre fur leurs bords. L'Auteur ré- pond que comme toute forte de terrain n'eft pas propre à produire toutes fortes de chofes , toutes les eaux d'une même mer n'ont point de femblable vertu. Le troifiéme Chapitre contient des remarques importantes fur la Livonie , l'Eftonie Se fur les prin- cipautez de Pleîcow Se de Novogo- rod , fur le Lac Se fur le Canal La- dogua Se en particulier fur la Ville de Petesbourg. Notre Auteur don- ne une defeription détaillée de l'état dans lequel étoit cette Ville dans le tems qu'il y féjourna. On fera fur- pris en lifant cette Defeription que le Czar Pierre I. ait pu en aufii peu d'années fonder une autre fi grande &e aufu belle Ville , dans un defert qu'on regardoitprefquc comme in- habitable. Ce Chapitre eft celui de tout l'Ouvrage que les Lecteurs trouve- ront le plus intcreffànt. On y voit plufieurs faits & plufieurs PicceS importantes , pour l'Hiftoire du. Czar Pierre I. de la Czarine Cathe- rine , Se du Prince qui a luccedé à Catherine. L'Auteur s'arrête parti- culièrement fur deux favoris du Czar M A R Czar Pierre I. tous deux habiles Se braves , mais d'ailleurs de caractè- res bien oppofés , le General le Fort &i le Prince Menzicoff. M. de la Motraye confirme tout ce qu'on a publié fur l'obfciirité delà naiflan- ce , & fur le premier emploi de Menzicoff avant qu'il fût établi à la Cour du Czar. Il marque enfuice comment Menzicoff a été élevé par degrés aux premières places de l'Empire de Ruflie , comment il s'eft conduit pendant le tems de fa faveur, & de quelle manière ce Favori eft tombé dans la difgrace de fon Maître ; lorfqu'il fe voyoit élevé au plus haut degré de fortune auquel un particulier puifle parve- nir fous un Gouvernement Monar- chique. Nous ne pouvons fuivre l'Auteur dans le détail de tous ces faits. Mais comme on parle différem- ment de la naiflance de la Czarine Catherine, & de l'Hiftoire des pre- mières années de fa Vie , nous avons cru devoir dire ici quelque chofe de ce que penfe là-deflus M. de la Motraye. L'Auteur ayant mis cette Prin- ceffe au nombre des Héroïnes ne craint point de diminuer fa répu- tation , en parlant de fa naiflance , il cft au contraire perfuadéque cec- teobfcurité donne encore plus d'é- clat aux grandes qualitez qui l'ont élevé fur le Thrône de Ruflie. Elle éroit née , félon lui, dans le Villa- ge de Rutzen, près du LacWorth- feri. Les uns la font fille d'un Lieu- tenant Colonel de la famille d'A- bendel , les autres du Colonel Ro= Mars. S, 1732; t79 (en ; mais elh étoît fille d'un Vaflal du Colonel Rozen,elle n'avoit que 4 ou 5 ans quand elle perdit fon père, fa merc mourut quelque tems après. Ils ne laiflerent rien à cette orpheli- ne pour fa fubiîftance. Car il ell très-rare que les Vafleaux de la No.- bleffe , tant Livonienne queRuf- fienne lailTent rien à leurs enfans. Le Clerc de la Parroiflc qui tenoic Ecole prit chez lui la jeune Ca- therine. M. Gluck, Miniftrede Ma- rienbourg , lui trouvant de l'efprit,' la mena en fa maifon , & elle y fut élevée par fa femme comme fi ç'a- voitété fa propre fille. Elle y apprit l'Allemand, & dans fes heures de loifir elle s'occupa à la lecture. Quand elle fut en âge nubile un Sergent Livonien qui ctoit au fervi- ce de la Suéde , en devint amou- reux 6v l'époufa du confentement de M.Gluck; le lendemain de ce mariage les Mofcovites fe rendirent maîtres de Marienbourg , fous le commandement du LieutenantGe- neral - Baur. M. de la Motraye avoue de bonne foi qu'on ne fçait pas , même dans le Pays , ce qu'eft. devenu depuis ce tems l'époux de Catherine. Pour elle , elle fut ame- née prifonniere par les Mofcovites, & le Lieutenant General ayant re- marqué dans fa phifionomie quel- que chofe qui le frappoit, en fit prendre un foin particulier. Il la chargea c-nfuite du foin de fon mé- nage. Le Prince Menzicoff qui la vit chez le General-Baur , & à qui on dit l'emploi qu'elle y rempliffoir^, la demanda pour lui donner l'inf- peûton fur tout fon domeftique» A a iSo JOURNAL D C'eft chez le Prince Menzicoi le Czar vit Catherine , qu'il lui parla , & qu'il prit la reiolution de l'amener dans fon Palais. Ce qu'il exécuta fur le champ. M. de la Mo- traye n'a point cru devoir s'arrêter à rapporter de quelle manière Ca- therine eft parvenue à devenir époufe de Pierre I. cv Impératrice de Ruflîe , parce qu'il a reconnu que les Relations qui ont été faites de cette partie de fon Hiftoire font allez fidèles. Dans le quatrième Chapitre l'Auteur décrit fon retour dePeterf- bourg par l'Ingrie , l'Eftonie , le Nord'Oueft de la Livonie , la Se- migalie Si la Pologne ; il rapporte l'état actuel des Provinces & des [Villes par. lcfquelles ilapaffé. Ce ES SÇAVANS, qu'il y a d'hiftorique dans ce Cha- pitre r. .tion des Rois de Pologne, «Se la fameufe Diette de Grodno , dans laquelle on confirma tout ce qui avoit été arrêté par la Cour Allelïoriale fur l'affaire de Thorn , Si la caflation de l'élec- tion du Comte de Saxe au Duché de Courlande. Le cinquième Chapirre eft defti- né pour la Relation du Voyage de l'Auteur en France. Il y parle des cérémonies obfervces au mariage du Roi. De-là il paffe dans le der- nier Chapitre à fon retour en An- gleterre , Se à fon voyage en Irlan- de. Il n'y a guéres dans ces deux derniers Chapitres que desRemax- ques Topographiques. i8i NOWELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Padoue. MFacciotati fonge à donner . un Dictionnaire Latin beau- coup plus exad & plus étendu que tous ceux qui ont paru jufqu'ici à l'ufage des Collèges. Dans cette vue il s'elt attaché à faire un examen critique du Dictionnaire de Danet, comme de celui qui lui a paru avoir le plus de réputation. Les Remar- ?ues qu'il a faites fur la première ettre de ce Didionnaire ont été imprimées ici fous ce titre : Jacobi Facciolati animadverfiones critica in primant Litteram Latini Lexici, cui titulus : Magnum Didionarium Latino-Gallicum , quodadpleriio- rem planioremque Scriptorum Lati- norum intelligentiam collegit, digeflit ac vernaeulo fermons reddidit Pe- trus Danetius , ad ufum Serenif. Delphin't & Serenijftrn. 'Fnncipum. Patavii. Typis Scminarii. 173 1. apud Joan. Manfrè. in- 8°. de 9Z. pages. Ce petit Ouvrage que M. Faccio- lati n'a publié que comme un (im- pie ElTai de fes forces pour l'entre- prife qu'il a formée , eft en méme- tems une preuve de fa fagacité &c de la grande connoifTance qu'il a des Auteurs Latins. Il y difeute 160. articles de la Lettre A du Dic- tionnaire de Danet , & fait voir que cet Auteur s'y eft trompé ? foit pat rapport au fens qu'il donne aux ter- nies , foit par rapport aux citations ou à la manière dont il a lu le Tex- te des Ecrivains qu'il a pris pour guides. On fçait que les citations dans le Didionnaire ne (ont indiquées que par le feul nom des Auteurs, peut- être parce que M. Danet ayant tiré fes phrafes Latines d'autres Lexico- graphes, où ces citations font plus exactement marquées, il a cru qu'il étoit inutile de les repeter. M. Fac- ciolati a pris la peine de confultet de nouveau les Auteurs originaux, non feulement dans les meilleures Editions, mais encore dans les Mlf. qu'il a pu trouver ï il en rapporte les palTages quelquefois en entier , où par parties , quelquefois il ne fait que les indiquer : c'eft fur ces palTages conférés avec le fens qu'ils ont dans le Dictionnaire, qu'il ton- de prefque par tout fa critique ; il ne manque pas non plus de relever les citations faufles ou les articles qui ne (ont appuyés d'aucune auto- rité. Les trois ou quatre premiers exemples de fon Livre que nous tranferirons ici, pourront mieux fai- re juger & de la méthode de l'Au- teur èc du mérite de l'Ouvrage. Quelques Ledcurs remarqueront qu'en bien des endroits la cenfurc du Grammairien devoit moins tomber furie Didionnaire de Da- net que furie Tréfor de la Langue Latine de Robert Ejlienne , & fur A ai; i8a JOURNAL D d'autres Dictionnaires que M. Da- nec n'a fai: que fuivre. I. Danetius in abduco. Non ab-, ducar ut rear. Cic, On ne me fera jamais croire. Facciolatus. Lochs Ciceronis eflin Lib. i. de Divini c. iS.ub.pro- culditbio legendum adducar. Nam adduci ut } pajjim reperitur & apud Ciceronem Ô" apudalios : at abduci ut , durum efl minimeque itjita~ titm. i r. Danet. Abcdo., ist Abedi , Abe- fum. Cic. manger. Facciol. Nufquam reperitur verbum hoc apud Ciceronem dut apud alios idoneos Latinitatis esfticlores. Quidam Tacito tribitunt Annal. i 5. e. 5.exorta Vis Locuftarum abede- rat : Sed Codices fere omnes etiam minus boni, habent} ambsderat. Am- bedo autem Latinum eji prater son- troverjiam. III. Danet. Abjuratio, abjurationis. Plant. ( en Droit) déniement d'une chofe mife en dépôtj ferment qu'on fait de ne l'avoir pas. Facciol. Plautus non habet vo- tent hanc ; imo ne alii qu'idem déte- nons Latinitatis AuUores ante Ifî- dorum Lib. 5. Orig. c. 2.6. IV. Danet. Abominari , pris en fi- gnification paiîîve. S&vitiaqueabo- m'mmtur té omnibus. Val. Flac. ES SÇAVANS; Facciol. Nibil taie habet Vale- rius-FaccHS. Hubet Verrius apud Trifcianiim Lib. S. cap. de ferbis commun. De Milan. M. Saxi a mis au jour une Lettre Latine de 2i. pages, dont nous rendrons compte inceffamment ; elle eit intitulée : Jofeph Antonii Saxii SS. Ambrofi: & 'Caroli Oblati ' , Collegio & Bibliothccx Ambrofian* Pr*ft2i} Epiitola ad Amlcumpro- vindicania formula in Ambrofîano Canone ad Mifft Sacrum prtfcripta; Corpus tuum frangitur Chrilte. Jllediolani. 1 7 3 1 . Ex tAZdibus Pu- latinis. in-8°. ALLEMAGNE. De Fu l d e. M. Uattflein , Confeiller Prive te grand Ecuyer du Prince & Abbé de FuUe , a publié un Volume in-folio contenant 690. Tables Gé- néalogiques d'un grand nombre de Familles Nobles d'Allemagne , dont on n'a tiré que cent exemplai- res. De Leipsik. On doit avoir bien-tôt achevé d'imprimer la féconde Partie du Recueil des Poètes Polonois donné par M. Michel - Abraham Trotz. La première contient la Traduction deV Argents en Polonois par Wa- clavv Poloeck.. Cette féconde Partie inûtnlcç-.BibliothecaPolono-Pettica. M AR renfermera les Fables de M.leWio- vodede Ruflîe. Voici les titres de quelques Ou- vrages imprimes l'année dernière en cette Ville. De origine & progreffu Archi- Pincertiatus Bobemici in Sacro Re- mano Imperio , ac fimmis inàe de- rivatis juribus , Difquifitio Hijlori- ca. Adj cela fnnt in fine Diplomata- Rudolpbina bue pertinentia. Chez Fritfch. 1731. /»-8°. Delicia Epifiolica , five Epiflola- rum non minus raritate quam oratio- nis cnltu atque elegantia illufirium fafciculus, Majora gii , Çravii, Bar- tholini , Schejferi , aliorumque .... Epiftolas vel nunquam ante bac édi- tas t vel oblivione prope modttm ohru- tas } ac ah intérim retrailas , comple- xus. Edidit & de Vità Scriptifque Majoragii prafatus Joban. Petrus Kohlius P. P. accéda Joan. Erhar- di Kappii Prof. Lipf. ad Editorem Epijlola. Apud Hxredes Jo. Frid. Braunii. 175 t. Les mêmes Libraires débitent , M. Gottlob. Frid. Gude de Ecclefîœ Epbefina ftatu , imprimis avo Ape- ftoltco , Commentatio Hiftorico-Exe- getico-Critica ; uni cum pofleriorum Pauli , ejufque Martyrii Vindiciis Cel. WeiTelio., Tbeologo Batavo , oppofttis. Accedit Vita S. Apofioli Pauli , per Çeorgium Majerem olim deferipta } propter raritatem nuncre- c»fa. 1732. z»-8°. De Halle; Joanïfetr. de Ludevig , fCti , Tndtmiant Cancillarii , P"ita Jnjti> S ; 1732; i8j niani Atque TbeodorA Augnflorum ,' necnonTrtboniani : fJurifprudentiA Jujtinianeœ Profcenitm , fide coavo- rum Latii cJ" Gracia Scripterum j Numifimatum, Çonciliorum, Legumt' Litterarum, Codicilloritm, Lapidum, Piffuranm , Mujtvorum aliorumque Monumentonim chm ad legitm & Cerporis Juris intelligendam Hifh- riam , tumadnovifttris Arcbitecla- rum Apologiam ; aïfpulfîs Autorum in varia Scientiarum génère , errori- bus & Calumniis. Hala: Salicx. Imp.Orphanotrophxi. 173 1. ;»«4°0 cumfiguris. SUISSE. De Berne. Gottfcball a imprimé les deux Ouvrages fuivans, l'un en François & l'autre en Italien. Controverfe Philofophique qu'il y a eu entre M. le Baron de Leibnits d'une part 3 & MM. Fouchcr 5 Bayle , Newton & Clarke de l'au- tre t fur l'Harmonie préétablie qui fe trouve entre l'ame & le corps , avec une Préface ou l'en prouve la vérité de cette Harmonie. Par J. J. K. Jntroduzzione alla Filofofia Wolffiana , Colla quale fi difeorre d'alcuni principii di quefio SiftemA di Filofofia , da G. G. K. De Genève. Marc-Michel Boufquet & Com-. pagnie ont achevé l'impreflîon da premier Volume des Elemens de Mathématique univerfelle de M,' 184. JOURNAL D Wolff. Chnjliani iV'olfii , Ctnfilitt- riiAulict Hejfiaci , Mm hem arum & Tbilofophia in Academià Marpur- genfiTrofefforis primarii , Profejforis Pttropolnani Honorarii , Soctetatum Regiarum Britannie atque BoruJfiA fodalis j Elemema Maihefeos imi- verfalis. Tom. 1. qui Commentatio* nem de Méthode Mathematicà , jirithyneticam , Geometriam , Trigo- nometriam , planam &Analyfim tant fnitorum quant infinitorum complec- tititr. 17} 2. /»-4°. Les Frères de Tournes doivent maintenant avoir aullï achevé d'im- primer les Commentaires Latins de Cornélius a Lapide , fur l'Ancien 6c le Nouveau Tcftament. Cette édition qui avoit été commencée par les Huguetans avant qu'ils eufTent quitté la Librairie, eften xi. Volu- mes in-fol. comme les précédentes. On y a mis le portrait de l'Auteur , & elle eft augmentée d'une Table Chronologique pour faciliter l'in- telligence de ces Commen-taires. FRANCE. De Lyon. Les Frères Bruyfet débitent une nouvelle Edition , revue & corri- gée, du Cours de Théologie du P. Paul de Lyon , Capucin , elle eft intitulée : Totius Theologiœ Speci~ men ad ufiim Theologia Candidato- rum, Scholaflica methodo compen- diosè delineatum , ftudio & labore R. P. Pauli à Lugduno , Capucin:, ij}l.in-iz. tf.vol. ES SÇAVANS; De Paris. Guillaume Defprez & Jean De- feffarts , rue S. J acques , à S. Prof- per & aux trois Vertus , ont mis ea vente l'Ouvrage de M. Winflovv que le Public attendoit avec tanc d'impatience. Il a pour titre : Expo- fltion ssfnatomique de la jfruclure du corps humain, iy$z. in - ^", un vol. & cinq vol. in-n. On trouve chez Quillau , rue Galande , à l'Annonciation , l'Ou- vrage polthume de M. de la Loube- re , fur la Refolution des Equations ou l'extraclion de leurs racines. 173 1, ;'»-4°. Aiufier t Quai des Auguftins , près le Pont S. Michel , débite fous le nom d' Amfierdam YHifioire des Flagellans , ou l'on fait voir le bon & le mauvais ufage des flagellations parmi les Chrétiens \ traduite du La- tin de M. l'Abbé Boileau> Docteur de Sorbonne , féconde Edition t re- vue ^r corrigée, 1732. /w-iz. Montalant , aùfll Quai des Augu- ftins , a réimprimé le Roman de Caffandre de M. delà Calprenede , en 10. vol. in- 11. Il fe propofe de réimprimer de même les fameux Romans de Clelie y Cyrus , Phara- mond , Clcopatre , Aftrée &c Aima- hide. Didot , Quai des Auguftins , a en vente le Tome troifiéme & qua- trième du Philofophe Anglois , oa JHifloire de Al. Cleveland fils natu- rel de Cromvvel, écrite par lui-même , & traduite de Vtsfnglvis par l' Au- teur des Mémoires d'un homme de MARS Qualité. 1732. in-11. Le Politique Don Ferdinand le Catholique , traduit de l'Efp.ignol de 'Baltaz.ar Gracien , avec des Notes. Chez Rollin fils , Quai des Augu- ftins , à S. Athanafe. 1732. in-iz. Retraite du P. de Salazar de la Compagnie de pcfiis. Quatorzième Edition. Traduit de l'Efpagnolpar le P. Margat de ta même Compa- gnie 3 Mijfionnaire des JJIes de l'A- mérique. Chez le même Rollin.ij 3 2. in- 11. Le Sujet du prix d'Eloquence que l'Académie Françoife doit donner cette année 1732. cft les Malheurs & les Incenveniens de la Duplicité , conformément à ces pa- roles de l'Ecriture Sainte : Va dti- tlici corde & labiis fceleflts & pec- catori terram ingredienti duabits viis. Les progrès de la Tragédie fous le règne de Louis le Grand , font le fujet du prix de Poëfie que la même Académie donnera auflî cette année. Hifloire Critijue des Pratiques fuperftitieufes qui ont féduit les Peu* ■pies & embarrajfé les Sçavans ; avec la méthode & les principes pourdif- cerner les effets naturels d'avec ceux qui ne 1e font pas. Par le P. le Brun, Prêtre de l'Oratoire. Seconde Edi- tion, considérablement augmentée, in-ii. 3. vol. avec figures, chez la Veuve de Laulne ; on en trouve auffi des exemplaires chez Chau- rert , Libraire du Journal. Fautes à Corriger dans le Journal de Janvier 1732. PAge 16. col. 2. ligne i3. Montfcrrati, lifez Montferrat : Ibid.lig.21J Puerta-Réal , lifez. Puerto-Réal : Page 19. col. 1. lig. 1. l'impruden- ce ///^l'impudence. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Mars 1732; page I22 JOURNAL D homme eft indigne d'un vil em- ploi ; c'eft l'emploi qui eft indigne de lui. Les Oraifons contre Verres fu- rent imprimées à Paris chez Dupuis en 1640. traduites par un Avocat de Touloufe nommé les Fargues. Sur ce qu'on nous dit ici de ce Tra- ducteur , il méritoit aflez la plai- fanterie qu'en fit alors Ménage dans fa Requête des Ditlionnaires , où il le turlupinoit en ces termes : Et les Verrines faifoient nargue A votre Candidat les-Fargue. M. de Villefore le traite de Tra- ducteur aflèz médiocre Se même af- fez ignorant , qui prend pour des noms propres, des noms appellatifs, & qui nclaifTe pas à (on original la plus légère teinture qui le rende re- connoilîable. Il vient enfuite à la verfipn des quatre Catilinaires, des plaidoyers pour Carlius & pour Milon , & de la féconde Phihppique , faite par M. G Met Avocat au Parlement Se imprimée chez Martin, en 1717. Il ne peut s'empêcher de contredire plufieurs maximes avancées par ce Traducteur. Celui-ci fait profelfion de renoncer aux tours de l'original, & foûtient que c'eft la bonne ma- nière de traduire. M. de Villefore trouve toutes les phrafes de M. Gil- let bien cadencées ; mais il y trouve en même-temsCiceronabfolument travefti , au lieu d'y être traduit. L'Avocat Traducteur lui paroit même fi peu fcrupuleux , qu'en certains endroits il ne refpecte pas feulement la vrailcmblance. Par ES SÇAVANS, exemple, dans la première C.;:::i- naire , où Ciceron foûtient en Lee à Catilma qu'il fait toutes fes dé- marches , & qu'entr'autres la nuit précédente fes complices & lui fe font aliénables chez un Sénateur nommé Lecca inter F.ilctnos ; ces mots font traduits par M. Gillet avec une efeorte de gens armés de faux. C'eft ( dit M. de Villefore ) une arme un peu difficile à bien ca- cher fous fa robe : mais c'eft de quoi il ne s'agit nullement ici : /'»- terF-tlcarios étoit un quartier deRo- me appelle la rué des Faucheurs 0» des Fourbiffeurs , comme on difoit à Capouë la rué des Parfumeurs , & comme on dit à Paris la rué des Fau- teurs. Une autre décifion de M. Gillet dans fa Préface, c'eft que la Langue Latine , pour la riche fie des expref- fîons , eji de beaucoup inférieure à la Langue Francoife. C'eft de quoi ne tombe pas d'accord notre Tra- ducteur , qui eft perfuadé que la Langue, qui fert de premier inftru- ment au génie pour produire au dehors fes penfées , eft toujours à cet égard & plus énergique & plus riche que toute autre Langue em- ployée pour les traduire. Voici encore une maxime de M. Gillet , à laquelle notre Traducteur ne peut accorder fon fuffrage. L'A- vocat afTurc que les Métaphores Lati- nes ne fe tradutfent pas bien en Fran- çois : que ces grandes manières ne font plus à la mode , & que l'inclination pour les figures eft une prévention de Collège. M. de Villetorc loûtient, au contraire i°. Que les Métaphores , A V R I pourvu qu'elles foient judicieufes , & qu'elles offrent des rapports bien proportionnés , réuffifTent en Fran- çois comme en Latin : z°. Que les grandes manières de Ciceron ne font hors de mode , que pour ceux à qui la vieille mode ne fied pas; car il faut de l'alTortiment , dans fon genre d'éloquence : 3°. Que l'ufage des figures eft fi peu une prévention de Collège , qu'il n'a été fournis à des règles & réduit en art , que fur l'emploi heureux qu'en ont fait les Orateurs du premier ordre & des premiers tems , en s*a- bandonnant , pour ainfi dire , aux faillies ingénieufes d'un excellent naturel. M. de Villefore fait une obferva- tion générale fur toutes ces vér- ifions: c'eft qu'on y donne à divers termes latins qui reviennent fouvent des fignifications toutes différentes des véritables : par exemple , il faut traduire crimen, aceufation , & non crime ; rem , accise t & non crimi- nel ; Imperator , Général & Armée , & nonEmpereur; Fabula , Comédie, & non Fable ; Religio , fcrupule , & non Religion ; Vmus t valeur , & non Vertu , &c. M. de Villefore nous parle enco- re d'une Traduction alTez nouvelle de douze Oraifons choipes de Cice- re»y imprimée à Paris chez Barbou en 171)- lorfque l'impreffion de cet Ouvrage-ci étoit prefque à la moitié. Ce font les Oraifons s ip. pour la Loi Manilia, ï°. poux le Poète Archias , }°. pour Milon , 4°. pour Marcellus, 50. pour Liga- rius, 6°,pouiDéjotaius , y'.con- L, 1732. 1P3 trePifon , 8°. la féconde Philippi- que cV: les quatre Catilinaires. L'Au- teur Anonyme, qui ( félon M. de Villefore ) traduit allez littérale- ment , déclare d'abord qu'il n'a def fein de travailler que pour de jeunes gens , & pour fe conformer à un tel projet , il fe garde bien de donner à fon ftyle toute la vivacité & toute la pureté qu'il eût été auiîi capable d'y mettre , qu'il l'a été d'y joindre de bonnes Notes ('dit notre Tra- ducteur ). Il rend , au refte , le témoignage le plus avantageux aux verfionsque MM. de Maxcroix cV à' Oliv et ont publiées de quelques-unes de ces Oraifons. Elles lui ont paru fi élé- gamment traduites , que s'ils eul» fent voulu fc charger de tout l'Ou- vrage, ils lui enflent a cet égard fait tomber la plume des mains. H craint même ( ajoûte-t-il avec ans modeftie fi digne d'un homme de fon mérite ) que le peu qu'ils en ont donné ne lui fajje courir Us nfques d'un humiliant parallèle. Après nous avoir entretenus du travail d'autrui , par rapport aux verfionsFrançoifesde ces Oraifons, il nous rend compte de fon travail fur cet article. Il a fait fa Ttaduç^ tion fur la dernière Edition d'Holà lande , publiée ï Amftcrnprn en 1724. chez les Wetfteins, par Ifa.iç. Verburg; & il l'a choifie préférable.-» menr à toute autre, parce qu'elle ralTemble toutes les variantes miles aujourparlcsGrammairiens, & les Glofcs de tous les Commentateurs. Quoique le Traducteur n'en air ne», gligé aucunes, il a cm pourtant de- iP4 JOURNAL D voir s'attacher fut touc à celles d' ' Afconius s de Aîanuce îs: de Gr&vius comme aux plus judicicu- fes. Il a confervé les dénominations ufitées chez les Romains , Se il a pouffé cette fidélité d'interprétation jufqu'à traduire à la lettre certaines cxprcllîons injurieufes , que les honnêtes gens parmi nous n'em- ployent guéres en public , même dans les plus fortes invedives : tel- les font celles de Helluo, de Belluat de Carnifex , que Ciceron met en œuvre contre Verres, contre Pifon, contre Antoine , & que M. de Vil- lefore rend tout Amplement par celles-ci brutal , bête féroce , bour- reau. Il eft inutile de lui objecter que ces expreffions font odieufes & déplacées dans la bouche d'un homme qui fe pique d'être circonfpetl fur les bienféatices - qu'elle ne s'accommode point a nos mœurs ; il répond , que c'eft juftement cette différence de mœurs qu'il faut faire fentir dans une verlion ; que quand on n'en: que l'organe d'un ancien Auteur, il ne faut pas pour adoucir ce qui nous bleffe dans fon langage , lui prêter le notre qu'il n'avoir pas ; qu'il ne fait point de termes plus modérés pour exprimer les trois dont il s'a- git. Il avoue pourtant , que félon toutes les apparences, ces locutions qui nous révoltent , n'ind-.fpofoient pas de même les Romains en leur lan- gue. En ce cas-là , pour les réduire en François à leur juffe valeur , il faudreit donc les rendre par des expreffions plus mefurées , & qui n'excitaffent en nous que le même ES SÇAVANS, degré d'indignation , que celles-là cxcitoicntchcz les Romains. M. de Villeforcexpofe les autres loix qu'il s'eft prefentes dans fa Traduction , par rapporta diverfes circonstances qui s'otiroient affez fréquemment , 5c fur lefquelles les autres Traducteurs ont luivi diffé- rentes méthodes. Il s'eft difpcnic delesimiter dans cellede mettre le terme de Aîrjfîcurs à la tête de cha- que Difcours, contre la coutume de l'Orateur , qui ne l'a pas fait , Se ne l'auroit même pu faire dans la plupart de fes Orailons , où il adref- fe la parole tantôt à l'adveifaire , tantôt au Préfidcnt , tantôt à l'Au- ditoire ou à l'Accufateur. De plus , il n'a ofé tutaver , à leur exemple , certaines perfonnes que l'Orateur traite cependant avec mépris &en rermes injurieux ; & cette pratique lui a paru li baffe & li étrangère aux ufages de notre Barreau , qu'il a cru* devoir s'en abftenir. A l'égard de l'évaluation des fefterecs , il en a toujours réduit les fommes à des comptes ronds y qu'il a exprimés tan- tôt en monnoye de France , tantôt en monnoye Romaine. Jl a confer- vé les termes de Calendes • Jdes &C Nôtres , reduilant à notre ufageles autres quantièmes des mois. Pour les noms de Villes & de Pays , il employé tantôt l'ancienne, tantôt la nouvelle Géographie, fuivant que les lieux font plus ou moins connus : & il renvoyé pour le be- foin , (ur tous ces articles , aux No- tes qui garnirent le bas des pages. Elles (ont brievcs& précifes , & elles roulent (dit-il) fur l'explica- tion A V R I tion des noms d'hommes , de Vil- les ,- de Contrées , des fondions de nous avons contre nous en cette » caufe ce qu'il y a de plus puisant y> dans les Republiques, le crédit 3) & l'éloquence ; c'elt-là le fujet de 33 nos défiances & de nos craintes : 3} car l'éloquence d'Hortcnfiusm'é- » tonne , Se ma Partie redoute le i> crédit de fon adverfaire. Encore 3> fi nous avions quelque part à de j> h grands avantages, nous aurions j> plus de fujet de nous confoler. » Mais j'ai à parler contre un ra- » meux Orateur , n'ayant de mon m côté ni beaucoup d'efprit , ni j> beaucoup d'expérience : & ?> Quintius , avec peu de biens Se » d'amis cft contraint de refifter à » un puilîant ennemi. M. de Villefore. » Un grand » crédit & un grand talent pour la •» parole , deux titres qui dans un 33 Etat donnent infiniment de pou- 3} voir , confpirent tous deux con- jî tre nous , dans la conjoncture & préfente -, l'un m'intimide , ô ES SÇAVANS, » Aqudlir.s t & l'autre m'effraye. » J'ai quelques mouvemens de » crainte que l'éloquence d'Hor- n tenfius ne me déconcerte durant n mon difeours ; & j'appréhende 33 avec excès que le crédit de Ni- 3> vius ne fade à Quintius beaucoup 3> de tort. Il fcmble qu'il ne fau- 33 droit pas tant fe plaindre que ces 33 avantages fulTcnt éminemment 33 en eux , s'ils étoient en nous du 3> moins médiocrement ;" mais 3J tout cft difpofé de manière que 3* moi qui ne puis prefque rien avec 33 mon peu d'cxpcricnce fede génie, 33 je vais mefurer mes forces contre » un défendeur très-habile &: très- 3> difert ; & Quintius fans protec- 33 tion , dans une totale impuilfan- 33 ce, réduit à un petit nombre d'a- 33 mis , vient combattre contre un 33 adverfaire rrès-accrédité. Nous laiflons à juger aux con- noilTeurs , laquelle de ces deux ver- fions reprefente plus fidèlement & plus purement en François le Texte de l'Orateur Latin. On trouve à la tête du Ve Tome un Avertiflemencde 48. pages , où le Traducteur donne un détail hi- ftorique des occafions qui ont fait naître les Difeours compris dans les quatre derniers Volumes. Cela pre- fente une partie conliderable &c très-interc (Tante de la Vie de Cice- ron , qu'on lira certainement avec phifir. *§%«*• AVRIL, 1732. ip? ELEMENTA CHEMIN, QILE ANNIVERSARIO LABORES docuit in publicis privarifque Scholis , Hermannus Boerhaave , Tomi duo , cum ^Eneis Tabulis. Lugduni Baravorum , apud Ifaachum Se- vcrinum. 1731. C'en; - à - dire : Elemens ou inftitutions de Chymie , far M. Boerhaave. A Leide , chez Ifaac Severin. 1732. deux Tomes i«-4°. faifant enfemble 8^tf. pages. E S Elemens de Chymie par _> M. Boerhaave font divifés en trois Parties , dont la dernière n'en: pas encore au jour. On voit dans la première les difierens noms qui ont été donnés à cette Science , l?s divers objets qu'elle le propofe , & quels font les Auteurs , tant an- ciens que modernes qui l'ont culti- vée. C'eft un expolé fuccintdeces trois articles , mais un expofé rem- pli d'érudition , &: chargé de longs paffages Grecs que l'Auteur dans la- bonne union où il eft de la capa~ cité des jeunes Etudians pour qui il écrit , a cru pouvoir fe difpcnfer de leur traduire en Latin. La féconde eft" un dérail des Dogmes les plus certains de la Chymie, qui peu- vent conduire à la découverte des principales véritez phyfiques. Cette Partie commence par la définition delà Chymie. La Chymie , dit M. Boerhaave , eft un art qui enleigne à faire cer- taines opérations phyfiques, par le moyen defquelles les corps fenfibles ou capables d'être rendus tels 3 re- çoivent dans des vafes & par le fe- cours d'inftrumens propres à cela , des changemens qui peuvent, félon l'intention qu'on fe propofe , & pourl'ufage de differens arts , pro- duire des effets lînguliers , & en faire conr.oître les caufes. Comme nous n'oferions nous flatter d'avoir bien pris dans cette traduction , la penfée de l'Auteur , nous croyons devoir rapporter ici fes paroles. Chimia eft ars docens exercere cer- tas pbyjîc.ts operationes 3 qiabits cor~ fora fenfibus patula , vel patefacien- da j va fis capienda } mutentur } ver propria infiniment a , ut defimti & fin gui are s qu'idem effeffus frodu&i innotefeant , horumque caufi, ipfit fer cffcEla pateant , in varios diver- far.'.m amum u/hs. Telle eft la définition que M. Boerhaave donne de la Chymie ; après quoi il parcourt les différentes elalles des corps fur lefquels travail- lent les Chymiftes, fçavoir les Mi- néraux , les végétaux & les ani- maux. 11 définit les Minéraux , des corps naturels nés dans le fein ou fur la fuperneie de la terre , lef- quels font d'une fabrique fi fimple qu'il n'a pas été polfible jufqu'ici , pas même avec le fecoursdes meil- leurs Microfcopes, d'y appercevoir aucune différence entre les vaif- feaux & les chofes contenues dans ces vaiffeaùx , enforte qu'on trouve dans toutes les parties de chacun de ces corps , une parfaite reffemblan- ce au tout dont elles font partie , quoique l'on fçache néanmoins cer- 200 JOURNAL D rainement qu'il y a dans plulicurs de ces corps un concours de parties fluides & de parties folides. Comme parmi les foflîles ou mineiaux on donne le premier rang aux métaux , M. Boerhaave com- mence par l'examen de ceux-ci. Il définit les métaux : des follllcs lourds Se pefans , coulans au feu , fe durcifTans au froid , Se obéilfans au marteau. Il en compte fix com- me on fait ordinairement, fçavoir l'or , l'argent , le cuivre , l'étain , le fer èv le plomb. Les anciens ont mis le vif-argent au nombre des métaux , quoiqu'il n'en ait ni la du- reté , ni la ductilité , ni la fixité. Mais le lieu où il naît , fon poids , fa (implicite , Se la manière facile dont il s'amalgame ou fe joint avec les autres métaux lui ont fait don- ner ce rang. Les Egyptiens ont appelle les fept métaux du nom des fept Pla- nètes ; notre Auteur fait fur cela diverfes remarques que nous croyons pouvoir palier-, elles font fuivies d'un long détail de ce qui fe dit ordinairement touchant la na- ture Se les proprictez du vif-argenc M. Boerhaave parle enfuite des au- tres métaux ; puis il pafTe aux fels , aux fouphres , aux pierres Se autres follîlcs ou minéraux , dont il ne dit rien de particulier. L'autre claile des corps fournis à la Chymie , cft celle des végétaux communément appelles du nom de plantes. L'on définit ici la plante : un corps hydraulique contenant en plulicurs vaillcaux, des humeurs différentes, cv ayant une partie ex- ES SÇAVANS, terne par laquelle il adhère à un att- ire corps, dont il tire par cette par- tie même , la matière de fa nourri- turc Se de fon accroilTemenr. L'on explique en détail tous les articles de cette définition; & l'on prend dc-là occafion de faire fur le mo- dèle de plufieurs Auteurs, une belle defeription de la manière dont les plantes tirent le fuc de la terre , le changent en leur fubltance Se l'em- ployent au développement de leurs branches , de leurs reuilles , de leurs fleurs , de leurs fruits , Ce. Defeription qui fait tout le contenu de cet article des plantes. La clafie des animaux fuccede à celle-là. Qu'elt - ce que l'animal, félon M- Boerhaave îc'cft un corps hygraulique , jouilfant de la vie au moyen d'un mouvement allidu Se réglé d'humeurs qui pallent par des vaifleaux , 8c ayant en foi des con- duits femblables aux racines des plantes, par Iefquels il tire la ma- tière qui les nourrit Se qui les fait croître. M. Boerhaave explique cette dé- finition, après quoi il rapporte en peu de mots,ce qui fe dit communé- ment touchant les efptits , l'eau , les fels , les huiles , 6v la terre, qui entrent dans la compohtion des corps animés. Le règne minerai , le règne végé- tal 2°. L'art de peindre fur le verre, de de faire des vitres avec des figures tranfparentcs : }a. L'art de teindre les étoffes : 40. Celui de fabriquer le verre : 5". Celui de con- trefaire les pierres prétieufes:é°.L'art de la métallique : 70. Celui de la poudre à Canon : 8°. Les effets mer- veilleux de la magie naturelle : 9°. L'art d'aprêter les viandes : io°. Celui de faire les vins : n°. Celui de la tranfmutation des métaux. Il parle de toutes ces cho- ies en Rhétoricien , mais l'article où il s'explique d'un ftyle moins oratoire , ce qui en paroît erîeclive- menc moins fulcepcible , cit celui cù il s'agit de . utilité de la Chymie ES SÇAVANS, dans ce qui concerne l'art d'apprê- ter les viandes. Il remarque à ce fu- jet & fans emprunter le fecours de la Rhétorique, que quelques goûtes de la liqueur acide qui fe tire du fel marin par le moyen de la Chy- mie, étant mifes dans un peu d'eau, ont une vertu admirable , i°. pour- empêcher que la viande, le poillon, &£ autres alimens faciles à fe cor- rompre , ne fe gâtent pendant les chaleurs ; i°. Pour donner à ces alimens une faveur agréable; 30. Pour en faciliter la digeftion ; 40. Pour guérir les maladies qu'ils peu- vent caufer quand on n'a pas eu foin de les preferver de la corrup- tion , & qu'on a été obligé d'en ufer. C'eft de quoi il avertit les gens de mer qui n'ont fouvent que de l'eau corrompue, de la viande in- fecte &: du lard rauce. A l'égard des vins , c'eft à la Chymie, remarque notre Auteur , qu'on doit l'art de les faire bons , de les conferver tels . ou de les cor- riger quand ils ont dégénérés ; c'eft à la Chymie qu'on doit l'art de les fouphrerpour les rendre propres au tranfporr. Un vin eft-il trop acre ? la Chymie apprend qu'il n'y a pour l'adoucir qu'à y jetter un peu de fel de lie de vin brûlée. Eft-il aigri? Elle enfeigne à corriger ce vice pac un peu de poudre d'yeux d'Ecre- viffes jettée dans le tonneau , ou pat un peudecrave. L'invention delà Ricre , du Ci- dre , du Pore ce de plulieurs autres liqueurs vineuks font dues à la Chimie , celle du vinaigre lui ap- partient auili. M. A V R M. Boerhaave l après pluficurs xeflexions générales qu'il fait en- fuitc fut l'art de tranfmuer les métaux & fur les Auteurs , qui ont traité de l'Alchymie , parle des divers agens qu'employent les Chymiftes pour leurs opérations. Comme le feu eft le premier de ces agens, notre Auteur s'attache d'a- bord à en examiner la nature & les proprietez ; il rapporte toutes les ^expériences curieufes qui ont été faites au fujet du feu , tant par rap- port à la raréfaction , à la chaleur , à la flamme , que par rapport aux chofes qui lui fervent d'aliment , l'expofé qu'il donne là-delîus peut être regardé comme une hiftoire na- turelle du feu. C'en: un bon Mé- moire pour ceux qui font au fait de ces matières } de un-s bonne intro- duction pour ceux qui commen- cent à les étudier. Le feu tire toute fa force du fe- cours de l'air ; c'eft ce qui engage M- Boerhaave à examiner auiîî la nature de cet agent. Il confidere d'abord la fluidité de l'air , fon poids , fon reffort , fa condenfation oucompreiïïon, fa raréfaction. Puis il vient aux difterens corps qui font mêlés dans l'air. Il y trouve des particules de feu &c des particules d'eau. Ces dernières lui donnent occafion de parler des rofees , des pluyes, des fontaines, des ruifteaux, des rivières , des fleuves , de la gla- ce, de la neige , de la grêle, de la foudre , & du tonnerre. Il parle enfuite fort au long du commerce .intime qu'il y a entre l'air & la ter- xc } celle-ci recevant tout ce qui Avril, I L ; i 7 j a. 20] tombe de l'air, & celui-là recevant tout ce qui s'élève de la terre. Il n'épargne là-deflus aucun détail. Comme les Chymiftes dans leurs opérations ne fe fervent pas feule-: ment du feu & de l'air, mais de l'eau ; notre Auteur fait un article à part fur le fujet de l'eau , & il en donne l'hiftoire comme il a donné celle du feu &: de l'air. Nous n'en rapporterons que deux articles. On croit ordinairement que l'eau eft: plus pénétrante lorfqu'elle eft chaude; M. Boerhaave prétend le contraire. Il rapporte là-deiîuî l'expérience des Ouvriers quiem- ployent les cimens pour retenir l'eau. Ils alTurent tous que plus l'eau eft froide & plus ils ont de peine à empêcher qu'elle ne perce les murs; ce qui vient, dit M. Boerhaave, de ce que le froid condenfc les par- ties de l'eau , au lieu que la chaleur les dilatant leur procure plus de vo- lume &C les empêche par confe- quent de s'infinuer avec la même facilité qu'elles feroient Ci elles oc- cupoient moins de place. Defcartcs &: plufieurs autres Mé- decins foûtiennent que les particu- les de l'eau font comme autant de petites aiguilles fouplcs 6c pliantes: mais M. Boerhaave foutient au con- traire qu'elles font aufti inflexibles Se auffi dures que le diamant ; ce qui paroi't fort s'accorder avec les effets furprenans qu'elle produit lorfqu'elle dilate les pores du bois, puifqueles Tailleurs de Meules de Moulins n'ont pas de meilleur moyen pour féparer une Meule Dd 204 JOURNAL D d'avec le roc , aprîs l'avoir taillée , que d'enfoncer des chevilles de bois dans des trous horizontaux qu'ils font entre la Meule & le roc, puis de mouiller ces chevilles, car alors l'humidité qui les pénétre les fait enfler de manière qu'en peu de tems la Meule fe trouve féparée. L'exemple de la corde mouillée qui élevé des poids extraordinaires qu'elle ne pouvoit élever étant fe- che , paroît encore fort favorable au fentiment de M. Boerhaave. Quelques dures cependant &£ inflexibles qite loient les particules infeniîblcs de l'eau , elles ne bleflent ni le nez, ni les yeux, ni aucun autre organe quand elles y font appliquées , & l'on ne trouve pas même de plus grand adoùciflantquc l'eau quand elle eft tiède. Notre Auteur fait fur tout cela diverfes reflexions qu'il faut voir dans fon Livre. L'air a du reflort, maisl'eau n'en a point. M. Boerhaave le montre par les expériences que les Physi- ciens ont coutume de rapporter fur ce fujet : on examine enfuite , i°. La (implicite de l'eau ; 1°. La propriété qu'elle a de diflbudre cer- tains corps ; 30. Celle qu'elle a en même -tems, de lier enfemble les particules de quelques autres & d'en faire des corps durs , enforte qu'elle eft: à leur égard une colle & un ciment dont rien ne peut égaler la force. M. Boerhaave cite fur cela le plâtre qui étant délayé avec l'eau, fe durcit prefque tout à coup. lici- te la terre à Potier qui contracte par le mélange de l'eau & par la coc- ES SÇAVANS, tion , une dureté femblable à celle des pierres les plus folides : il cite plusieurs autres exemples fembla- bles , & aulli connus. Puis il obfer- ve que les parties les plus dures des animaux , telles que les ongles , les cornes , les dents , les os, doivent leur fermeté à l'eau ; Se pour le faire voir il renvoyé à ce qui arrive lorfqu'on jette dans l'eau un os cal- ciné à blancheur & encore entier. L'eau fe précipite alors avec bruit & finement dans tous les intervalles de cet os > &c lui rend par la co- hxfion qu'elle procure à toutes les parties qui le compofent, le même poids & la même dureté qu'il avoit auparavant. L'eau nourrit tous les corps , & à examiner cette merveille avec toutes lescirconftances qui l'accom- pagnent, on diroit que ces corps ne peuvent être que de l'eau même, mais M. Boerhaave ne croit point que l'eau foit la matière des mix- tes, il penfe feulement qu'elle en lie les parties. Il eft vrai que fi or place un oignon de fleurs à l'entrée d'une phiole pleine d'eau dont l'embouchure foit aflez large pour embraffer la baze de l'oignon , fie qu'à mefure que l'eau diminue , on la repare en y jettant quelques gou* tes d'eau nouvelle , l'oignon pouf- fera des racines & produira des feuilles & des fleurs, comme s'il ctoiten pleine terre , & cela au plus fort même de l'hyver , pourvu que ce foit dans une chambre clofe , & où il ne gelé pas , ce qui revient à la fameuïe expérience du Saule de Yanhelmont. Mais M. Boerhaave A V R I prétend , avec plufieurs autres Phi- lofophes , que comme il n'y a point d'eau qui ne foit mêlée de particules hétérogènes, c'eft moins l'eau à pro- prement parler , que le mélange qu'elle renferme , qui entre dans la compofition des plantes. Notre Auteur , après ces refle- xions, & un grand nombre d'autres qui les précèdent , &c que nous avons été obligés de pafler , dit que l'eau confïderée en elle-même , eft une efpece de verre qui fe fond lorfqu'il éprouve une chaleur de 33- degrez , &c qui recouvre fa premiè- re dureté , lorfque la chaleur eft au-detïous de ce nombre de de- grez ; dureté qui fait de l'eau , un .orps élaftique, fragile, tranfpa- rent , dont on peut former des len- tilles pour des Microfcopes , ou dont on peut fe fervir en place de verres brûlans. Toutes les proprie- tcz qu'on reconnoîc dans l'eau font L, 1732. so; ici examinées , on recherche entre- autres chofes d'où vient que l'eau gelée eft plus légère , & qu'elle rompt les vaifleaux trop étroits qui la renferment. Nous ne finirions pas fi nous voulions fuivre notre Auteur dans tout ce qu'il dit de l'eau. Com- me la terre eft un des élemens des Chymiftes, M. Boerhaave examine aulîï la nature & les proprietez de cet élément, puis il palTe à ce que ces mêmes Chymiftes appellent rnetiftrues ou diffolvans , il en expo fe toutes les différences Se toutes les vertus. Ce qui eft fuivi d'un Tranc particulier des Inftrumcns Chymi- ques , qui font les vaifleaux , les luts , les fourneaux. La troifiéme Partie deceslnfti- tutions doit bien-tôt paroître , M. Boerhaave promet d'y traiter en particulier, des Operateurs Chymi- ftes. Dd>j 206 JOURNAL DES 5ÇAVANS; LETTRES EDIFIANTES ET CURIEUSES , ECRITES DES Alijfîons étrangères par quelques Mijfionnaires de la Compagnie de Jefus. A Paris, chez Nicolas le Clerc, Libraire Juré de l'Univerfité , rue de la vieille Bouderie , près le Pont S. Michel , à S. Lambert ; Se rue S. Jacques, chez P. G. Mercier fils , près la Fontaine S. Severin, à S. Hilaire. 1731- in-11. pp. 449. pour l'Epîtrc aux Jcfuites de Fran- ce, pp. 48. Tome xx. CE Volume contient dix Let« très , outre l'Epure du P. Du- halde aux Jefuites de France. De ces dix Lettres, quatre font écri- tes par des Millionnaires Jefui- tes établis à la Chine , Se fix autres par des Jefuites d'Amérique. La première écrite de Peking le 15,, Septembre 1728. eft du P. Paren-- nih. L'Auteur y continue la Rela- tion des perfeeutions que fouftrent les Princes du Sang Impérial de la Chine qui ont embraffé le Chriftia- nifme. De deux de ces Princes qui croient enfermés à Peking , l'un a fouffert une mort cruelle avec une confiance admirable, comme on l'a vu dans le Recueil précèdent. Le Prince Jean-Sou fon frère eft mort dans la prifon le 13. Novembre Ï717. tout ce que purent faire les Chrétiens qui vouloient marquer leurs fentimens de vénération pour ce Prince , fut d'obtenir par adreffe Se par argent les chaînes dont ce Prince étoit chargé dans la prifon Se avec lcfquelles on avoit brûlé fon corps. L°inftrudion que ce Prince avoit donnée à fa famille par forme de Teftament , Se les fenti- mens de la Princefte Ccfile , lorf- qu'elle eût appris la mort du Prince Jean-Sou fon mari , que le P. Pa- rennin a inférés dans fa Lettre, font remplis de marques d'une pieté foli- de, & qui feront admirer en Euro- pe cette Branche de la famille Impé- riale de la Chine. On ne fera pas fâché de voir ici un des traits de la Lettre de la Princeffe Cefile au Millionnaire. Après avoir témoigne qu'elle regardoit comme un des plus grands malheurs qui lui fuflenc arrivés de n'avoir pu recueillir les derniers foupirs du Prince fon ma- ri , qui s'étoit donné des peines in- finies pour l'inftruire des Myfteres dé la Religion Chrétienne; Se pour la difpofer au Baptême , elle conti- nue ainfi. » Vous dites dans votre Lettre «qu'une pareille mort eft la fin de » tous les maux Se le commence- » ment de tous les biens , c'eft cela » même qui me l'a fait fouhaiter» n Lorfque je reçus le faint Baptême, » j'a vois fans celle les yeux fur J.C. » attaché à la Croix, les cinq playes » par où fon fang coula jufqu'à la »mort, pour nous délivrer de la » fervitude du péché , 5c nous don- » ner le droit à l'héritage cckftc , » me pénétrèrent de la plus vive ^> reconnoiffance : ce fut avec ces «fentimens que je me vis régénérée »> dans ces eaux falutaires , Se de- a y r i s» puis de tems-là fortifiée par la » grâce de Dieu & par la protection »de fa fainte Mete, j'ai perfeveré jjjufqu'à prefent dans la foi. Une a autre reflexion me foûtient enco- » re , ajoute la Princefle Cefde , » c'eft le fouvenir que j'ai du con- sentement Se de lajoyç que mon » mari faifoit paroître toutes les fois m qu'il furvenoit une nouvelle dif- *> grâce : fur tout les trois dernières » années de fa vie , je fus autant »furprife qu'édifiée de fon atten- tion continuelle à n'agir que par »l'efpritde Dieu. Il n'entreprenoit s> rien , il ne faifoit rien qu'après t* avoir imploré le fecours du Ciel» » Une grande pureté de cœur Se » une profonde humilité animoient » toutes fes a&ions. Il eft heureufe- » ment au bout de fa carrière. Dieu *»l'a appelle de ce monde Se je vis » encore , malheureufe pecherefle *> que je fris. Il y a trois ans que je » n'ai pu me confefler , je crains » tout de ma foiblefle : fî vous y «joignez ce que j'ai à fouffrir de m ceux-là même de qui je devois m attendre quelque fecours , n'ai-je « pas lieu d'appréhender que je s> n'oublie enfin les bienfaits de » Dieu , que je ne déshonore le nom »» Se la mémoire de mon époux, Se «que je ne tombe dans des péchez » griefs qui me conduiront à une *> mort éternelle ? C'eft pourquoi »je vous prie à genoux Se je vous » conjure les larmes aux yeux de j» demander à Dieu par les mérites » de fa Paillon , qu'il me retire au >■> plutôt de ce miferable monde : 3> j'efpere que vous m'accorderez L ; 1752* 207 » cette grâce. Telle eft ma difpofi- » tion prefente, & il fuffit que vous »la connoifhez. La Princefle Cefile eft renfermée au Fourdanne avec les autres Prin- ceffes de la famille Impériale qui ont embralTé la Religion Chrétien- ne , & avec les Princes leurs enfant Deux de ces Dames font mortes dans cette prifon. Le P. Parennin croit qu'il eft difficile que les autres y rehftent encore long-tems. Ces Prifonniers font logés fort à l'étroit, ils couchent fur la terre , ils n'ont pour toute nourriture qu'un peu de ris Se des herbes faites , èc lous un climat très-froid , à peine ont-ils chacun une couverture pour s'é-; chauffer. Dans la Lettre fuivante qui eft dattée de Peking le 16. Juillet I72<7. le P. d'Entrecolles rappor- te plulîeurs traits de la pieté , de IZinnocence , du zelc Se de la fer- veur Aes Chrétiens de la Chine , malgré les perfecutions aufquelle3 ils font expofés depuis quelques an- nées. Une des occupations commu- nes à tous les Néophites eft de bap- tifer les enfans qu'ils trouvent ex- pofés, ou des enfans qu'ils voyenc prêts à mourir. Ils s'introduifent pour cela dans les maifons des parti- culiers , pour donner à ces enfans de petits remèdes qui ont fouvenc rendu la famé à pluficurs enfans des Chinois. Une femme Chrétien- ne a foin d'avoir toujours fur elle du cotton imbibé d'eau , qu'elle n'a qu'à prefTer pourbaptifer les enfans qu'elle voit prêts àmourir, fans qua leurs parens s'apperçoiveitt de cette cérémonie, 208 JOURNALD Un Catechifte dit au P. d'Lntre- colles qu'étant entré dans la maifon d'un Chrétien de fa connoiffance , il trouva toute la famille éploréc de ce qu'un enfant étoit mort fins baptême, & que toute la famille s'étant mife enfuitc en prière avec lui , on apperçut que l'enfant refpi- roit, que le Catechifte l'avoit bap- tifé & que l'enfant fe portoit bien. Le P. d'Entrecolles répondit au Catechifte qu'il fe pou voit faire , Se qu'il étoit même vraifemblableque l'enfant n'étoit pas mort. On m'af- fura , répliqua le Catechifte , qu'il étoit mort , & je le crus aifément , car ayant tàté moi-même fon corps, je le trouvai tout froid. L'humble naïveté du Catechifte , ajoute le P. d'Entrecolles eft toute la preuve que j'aye de la vérité du fait- Ce Père parle plus affirmative- ment d'une vifion qu'un Chrétien très-zélé , mais pauvre lui alîura qu'il avoir eue. Dans une de mes courfes , lui dit-il , je me vis envi- ronné & comme pénétré d'une très- vive lumière , je me crus tranfportc dans le Ciel , tant ce Specïacle me raviffoit en admiration. Un Ange rayonnant de gloire m'appa- rut , me difant qu'il s'appelloit Ra- phaël , &c promit de venir me rece- voir au moment de ma mort , mais il ajouta que cet heureux moment étoit encore éloigné , Se comme il finifloit ces paroles , cet éclat , qui m'éblouifloit , difparut tout à coup. Voilà véritablement, dit le Mil- fionnaire > un de ces pauvres de cœur Se d'affe&icn , dont J. C. a parlé, lorfqu'il a dirqueleRoyau- E S SÇAVANS, me du Cici leur appartient : il leur donne quelquefois dès cette vie mê- me un goût anticipé du bor.heur, qu'il a promis a ceux qui font con- tens de leur indigence , & qui dé- daignent les biens peiiflabies de la terre. Le P. d'Entrecolles nous apprend fur la fin de fi Lettre le iccrec qu'ont les Millionnaires Jefuites établis à Peking pour alfembler les Fidèles dans leur Eglife , depuis qu'il eft défendu aux Chinois de fréquenter les Eglifcs. Le Frère Roullct pafle à Peking pour un tiès-habile Médecin , les Infidèles s'adreffent à lui comme les Chré-. tiens , pour avoir des remèdes Se pour faire penfer leurs playes. Sous ce prétexte les Chrétiens entrent dans la maifon des Jefuites , & en- fuite dans leur Eglife , où l'on fait le Service Divin à voix balte. On les renvoyé un à un après le Service ; de peur qu'un zélé indiferet n'ache- vé de ruiner la Million. A l'égard des Dames qu'on ne peut plus af- fembler dans leur Eglife particuliè- re ; le P. d'Entrecolles qui pafle à Peking pour Médecin , leur admi- niftre les Sacremens , en differens Quartiers où elles s'aflemblent en petit nombre dans des maifons par- ticulières. Il paroît par ce qu'ajoute le P. Millionnaire , qu'il fe fait encore beaucoup de converfions à Peking & aux environs , où les Millionnaires ont plus de liberté que dans le refte de l'Empire de la Chine. Deux autres Lettres du P. d'En- trecolles aufli dattées de Peking du A V R I 7. Juillet 1727. & du premier May de l'année précédente , roulent fur l'adrefle des Chinois à faire des fleurs artificielles, &c fur l'infertion, eu pour parler le langage de l'Au- teur,fur la manière de femer la peti- te vérole pratiquée à la Chine. Ces fleurs artificielles delà Chi- ne qui , fuivant le P. d'Entrecolles, imitent parfaitement les fleurs na- turelles ne font faites ni de foye ni d'aucune efpcce de toile ou de pa- pier. La matière qu'on employé pour former les feuilles qui compo- fent les fleurs eft la moelle d'un ar- brifleau nommé Tottg-tfao qui croît dans les fonds ombragés & fort couverts de la Province de Setchuctt &c de quelques endroits de celle de HoH-cjHang. Cet arbriiîeau que les Chinois employent dans les Méde- cines , monte à la hauteur de plus d'une bralTe.Ses feuilles rcflemblent à celles du Nénuphar , le contour de fa tige eft de plufieurs pouces. Cette tige eft divifée comme celle du Bambou par divers nœuds , elle eft plus grofle au bas de la plante. On coupe l'arbrilTeau tous les ans. Et l'année fuivante il repoufle. On charge des Barques de ces tuyaux pour les tranfporter dans le Kiang- nan , où l'on en tire la moelle pour en faire des fleurs. Cette moelle eft •blanche , très-légère , & cependant alTez unie & agréable à la vue'. On en fait des omemens pour les fem- mes. Mais quand on veut l'em- ployer pour les fleurs , on met un morceau de cette moelle fur une plaque de cuivre entre deux autres plaques fort déliées , & en meme- L , 1 73 2. 209 tems qu'on la fait glifTer doucement dans cet entre-deux des plaques t on en enlevé avec un trancher fem- blable à celui dont fe fervent les Cordonniers , une mince fuperficie qui fe développe. Ce qu'on lève ainfi de la moelle , reiîemble à de larges bandes de papier ou de par- chemin très-fin ; on fait des pa- quets de ces bandes qu'on vend à Peking aux Ouvriers qui les pei- gnent. On n'employé pour ces peintures que des couleurs douces s où il n'entre ni gomme^ni mercure, nicerufe, ni alun , ni vitriol. Le cœur des fleurs , par exemple des rofes, fe fait de filamens de chanvre très-déliés Se colorés. Les petites têtes que portent ces filamens font de la même matière. Pour imiter les plantes dont les feuilles font lu- ftrées & verniflees d'un côté , on applique les pellicules du Tongofac fur de la cire fondue qui ne foit ni trop chaude , ni refroidie , où ils trempent un pinceau dans la cire fondue,&ils le partent délicatement fur la feuille , qu'ils frottent enfuite avec un linge. Les Chinois imitent auffi les fruits avec des pellicules duTongofat qu'ils peignent cVqu'ils verniflenr. Ils donnent même à ces fruits artificiels l'odeur des fruits naturels. L'infertion ou l'inoculation de la petite vérole qui a pafle de Con- ftantinople en Angleterre ., étoi» en ufage à la Chine depuis plus d'un iïécle , fuivant le P. d'Entrecolles qui cite là-deffus un Ouvrage d'un Médecin Chinois qui vivoit à la fin de la Dinaftie de Meng* Les 2io JOURNAL D Chinois ont trois recettes différen- tes pour inférer ou plutôt pour fc- mer la petite vérole. Mais comme ces recettes ne différent guéres entr'elles que par quelques circon- ftanecs particulières , nous nous contenterons de donner ici une idée de la première. Quand on trouve un entant depuis un an jufqu'à fept incluiTvement , dont la petite véro- le eft forcie heureufement fans aucun figne de malignité , on re- cueille les écailles ou pellicules des écailles deflechées. On les en- ferme dans un vafe de Porcelai- ne , dont on ferme bien l'ouver- ture avec de la cire. Lorfqu'on veut procurer la petite vérole à un en- fant, fi les écailles mifes en referve font petites on en prend quatre , h elles font grandes on en prend deux. On y mêle le poids d'un/;' , c'eft-à-dire, un peu plus d'un grain de Mufc , en telle forte que le Mufc fe trouve entre deux écailles quile preffent. On met le tout dans du cotton en forme de tente qu'on infinue dans le nez , & dont on /remplitune des narines de l'enfant. Il faut que cet enfant ait plus d'un an , Cv qu'il ne foit alors attaqué d'aucune maladie , qu'il n'ait pas même le cours de ventre. Lorfque le remède a été infinué dans le nez &£ que la fièvre eft furve- nue , fi les puftules ne paroiffent qu'au troiiiéme jour, on peut s'af- furcr que de dix en fan; on en fau- vera huit ou neuf; fi elles fortent dès le (econd jour, il y en a la moi- tié qui court grand rifque. Mais Ci les puftules pouffent le premier jout ES SÇAVANS, que la riewe fe déclare , on ne peut répondre de la vie d'aucun d'eux. La petite vérole étant aiiili procu- rée , on donne au malade des po- tions Si. des cordiaux qui fortifient. Le P. d'Entrecollcs eft perfuadé que cette méthode des Chinois pour procurer la petite vérole aux enfans eft plus douce 2>c moins dan- gereufe que celle des Anglois qui employent l'incilîon. Parce que le levain de cette maladie lui paroîc devoir produire plutôt de mauvais effets quand il eft inféré dans des chairs vives que quand il eft inféré par la refpiratiojD , étant tempéré, par d'autres cfprits. Quoiqu'il en îcit , cette manière de procurer la petite vérole eft fort en ufage dans toute la Chine , Se comme il y a dans ce vaûe Empire des Pays chauds , d'autres qui font très- froids, &d'autres qui font tempérés, le P. d'Entrecolles croit qu'on pout- roic fe fervir de la méthode dcsChi- nois pour procurer la petite vérole dans tous les autres Pays. Il avoue néanmoins qu'il y a des Médecins Chinois qui n'approuvent point que l'on procure aux enfans la peti- te vérole. On a appris par les Nouvelles Publiques le tremblement de terre arrivé à la Chine le jo. Septembre 1730. qui a boulverfé la Capitale de cet Empire & des environs. Mais le P. Duhddc inftruit plus particulièrement des circonstances de cet accident par les Lettres qu'il a reçues , en .explique les circon- ftances dans un plus grand détail que n'ont fait les Nouvelles Publi- ques A V R I ques. Il fait remarquer le foin que l'Empereur , qui a depuis logé fous des tentes avec fa famille , a eu pour foulager fon peuple dans cette affliction , Se l'attention qu'il a bien voulu avoir pour les Jefuires établis à Peking , les queftions que l'Empereur leur a fai- tes fur les tremblemcns de terre qui arrivent en Europe, 6c fur les caufes de ces tremblemens , avec larépon- fe des Jefuites à ces queftions. Le P. Duhalde fait au(ïï mention de débordemens de rivière qui ont caufé de grands ravages , & de gouffres qui fe font ouverts & d'où, il eft forti une épaifle fumée , & en- fuite des eaux noires en quelques endroits , jaunâtres en d'autres , &C L , i 7 32. 2i 1 en d'autres noires SCfougcàtr. s. Le P. Duhalde avertit fur la fin de fou Epître , qu'il fait graver fous la di- rection de M. Damville toutes les Cartes de la Chine , dreffées fur les lieux par les Millionnaires de la Chine , dont il y en a fept qui font François. Toutes ces Cartes entre- ront dans un Traité auquel le Perc Duhalde travaille depuis quelques années. C'eft une Defcription Géo- graphique, Hiftorique , Politique c\: Phylique de l'Empire delà Ou- ne &c de la T.irtarie Chinoife. Il donnera bien-tôt au public un plan plus détaillé de cet Ouvrage. Nous rendrons compte dans un autre Journal des fîx Letttes des Millionnaires de l'Amérique. BIBLIOTHECA LIBROS ET SCRIPTORES FERME CUNCTOS ab initio mundi ad annum 1535. ordine alphabetico complétons , Auctore £c Collectore F. Alphonfo Ciaconio Ordinis Prxdicatorum Doétore Theologo , nunc primum in lucem prodit ftudio & cuni Obfervationibus Francifci-Dyoniiii Camufati-Vefuntini- Pariais, apud Viduam Georgii Jouvenel. 17 Ji. C'eft-à-dire : Bibliothèque Contenant prefqtte tous les Livres & Us Ecrivains , dreffée par ordre alphabétique , depuis le commencement du monde jufcju'en l'année 1533. Recueillie par F. Alphonfe Ciaconius , Docleur en Théologie , de l'Ordre des FF. Trè- cheurs, imprimée pour la première fois par les foins& avec les Obfervations de François -.Denis Camufat de Befançon, A Paris , chez la Veuve George Jouvenel. 173 1 . in- fol. pp. 976'. fans la Préface. QUOIQ.UE dans l'Epître Dédicatoire qui eft adreiîée à M. le C. de Fleury, M. Camufat paroiffe plus occupé delà crainte de bleiîer la modeftie de ce Miniftre , que du defir de publier fes louan- ges ; il ne peut cependant s'empê- cher de lui rendre ce témoignage. La France , dit-il, a été féconde en Avril. Hommes Illuftresqui par une pru- dence confommée ont étendu les bornes du Royaume , 5c dont le courage invincible a triomphé des Nations Etrangères, mais ce qui eft infiniment plus grand , elle n'en peut montrer aucun , fi on vous en excepte 3 qui toû|ours infenfible à fes propres avantages , comme à Ee aïs JOURNAL D ceux de fes parens,ait gouverne l'E- tat avec défintereffement & avec fagcfle. Dicarn libère quodfcntio qui tegni fines confiimmata prudentia extenderint , Nationefque extemas mira forthudine fuperaverint , mul- tos tulit Gallia Viros Magnes , at jnod longe praftantius eft } qui fui (uorumquc immemor res publias fc.ntle & fapientertratlaverit , prê- ter te babuit neminem. Cette Epître eft fuivie de la Pré- face que Ciaconius a mife à la tête de fa Bibliothèque. On y trouve quelques reflexions fur l'obligation où font les Princes de protéger les Sciences , & de former des Biblio- thèques nombreufes où l'on ait la facilité de recourir aux Manufcrits originaux , & aux anciennes Edi- tions lorfque les nouvelles fc trou- vent altérées par la négligence des Imprimeurs , par la témérité des fauxSçavans, ou quelquefois même par leur mauvaife foi. Mais à l'ex- ception de quelques traits fembla- bles qui font aflez connus , comme cette Préface ne contient rien d'im- portant que l'Editeur ne fe foit trou- vé obligé de tranfporter dans la fienne '3 nous croyons qu'il fuftira de rendre compte de cette dernière. M. Camufat nous alfure que de tous les Ouvrages de Cia- conius il n'y en avoit point qui lui fut plus cher que fa Bibliothèque. Il ne fut cependant point aflez heureux pour obtenir la permilfion de la publier. Une de fes Lettres au Cardinal Sirlet que le P. Mabillon a recouvrée, & qu'on retrouve ici , nous apprend les rai- ES SÇAVANS" fons pour lesquelles lcsCenfeurs qui étoient chargés de la revifer, réfutè- rent d'y donner leur approbation. Ils reprochoient à l'Auteur de n'être fouvent que le Copifte de Gcfner Hérétique de profciîîon , Si qui par cette raifon méritoit peu de croyan- ce, & en fécond lieu d'avoir inféré dans (a Bibliothèque les Ouvrages des Rabins dont la plupart étoient ennemis déclarés de notreReligion. Il répondit au premier reproche qu'il n'avoit fait que revendiquer certains endroits que Gejner avoit pris dans S. Jérôme , Suidas , Tri- théme & femblables Auteurs très- Orthodoxes , 6v qu'on ne pouvoit pas dire que des fources lî pures ruflent devenues empoifonnées de- puis que les Hérétiques y avoient puifé. Saréponfeà la féconde diffi- culté ne parcît pas moins bonne , il allègue que l'Eglife n'ayant point encore proferit les Ecrits des Ra- bins , il ne s'étoit pas cru en droit de prévenir fon jugement. On re- marquera en paffant que les Cen- feurs Romains ont changé de prin- cipes , car Bartoloccius a fait impri- mer depuis à Rome fa Bibliothè- que des Rabins, munie des Ap- probations ordinaires. Enfin il ajoute que pour ce qui regarde les Ecrits compofés parles Hérétiques, il n'en avoit fait entrer aucun dans fa Bibliothèque , dès qu'il les avoit connus pour tels, ou qu'ils avoient été cenfurés. L'Editeur obferve même que Ciaconius ne perd aucu- ne occafion de les attaquer , non feulement lorfqu'il s'agit de Reli- gion , mais qu'il outre le zélé juf- AVRI qu'à les accabler d'invectives & d'injures dans des matières qui ne regardent uniquement que les Belles - Lettres. M. Camuiat déplore le malheur de ces tems , & s'étonne avec raifon que des réponfes fi plaufibies ne fatisfif- fent pas les Cenfeurs Romains. Mais iommes-nous bien affûtés que Ciaconius nous ait rapporté toutes leurs difficultez , & qu'ils ne lui en euffent pas objecté de meilleures ? Quoiqu'il en foit , il mourut fans avoir pu fléchir leur opiniâtreté : il eft néanmoins incertain il fon Ou- vrage étoit entièrement achevé , il dit formellement qu'il l'avoit fini en 1 5 8 3 . mais d'un autre côté tous les Manufcrits qu'on en conferve dans les Bibliothèques Unifient à Epiménidcs. Et tel eft celui dont l'Éditeur s'cft fervi. Il en eft rede- vable à Jean Thyerry de Shoën- berg, Chevalier de Mifnie. Vain- cu par les prières de cet illuftre amij il trouva qu'il y avoit de l'inhuma- nité à laifier dans les ténèbres un Ouvrage qui avoit. coûté tant de foin à fon Auteur. M.Camufat remarque que pour lire avec choix & avec huit, il eft efféntiel de connoître le fiécle où vivoit un Auteur , fa patrie , fon caractère , fa profellion , les diffé- rentes Editions de fes Ouvrages, Se même les Commentateurs qui ont travaillé à les éclaircir. Mais com- ment s'afiurer de toutes ces chofes, fi ce n'eft par le moyen d'une Bi- bliothèque générale des Auteurs? Cependant , ajoure- 1- il , tandis que tout le monde conçoit d'abord L ; i 7 j 2. 2ij l'utilité d'un tel Ouvrage , il n'eft perfonne qui en même-tems n'en fente toute la difficulté. Combien ne feut-d pas de lecture, de tems de connoiffances , & de difeerne- ment pour y réuifir ; & quand mê- me tous ces avantages feroient réu- nis dans une feule perfonne , elle ne devroit jamais fe flatter d'atteindre à la perfection qu'on peut délirer dans, l'exécution d'un fi grand def- fein , & c'eft ce qu'il confirme par l'exemple de tous ceux qui l'ont en- trepris. Il n'eft cependant pas inutile '' continue-t-il , de les connoître pour s'en fervir dans l'occafion. Ra- phaël de Volterre eft le premier , félon l'Editeur, qui nous ait donné quelque idée d'une Bibliothèque Univerfelle. Ses Commentaires parurent à Paris en 1 5 1 5. Tout im- parfaits qu'Us font , il femble que plufieurs Critiques ne leur ayent pas rendu allez de juftice. Ne de- voient-ils pas au moins avoir égard au tems où il écrivoit , &c lui fça- voir gré d'avoir jette le premier des fondemens fur lefquels ilaétéaifé de bâtir dans la fuite ? On doit ju- ger à peu près de même de la Bi- bliothèque de Conrad-Gefner , il eft vrai que l'exécution en eft beau- coup plus heureufe. Quoiqu'il foie tombé dans de fréquentes -méprifes, il lui fera toujours glorieux d'avoir tracé un plan , dont aucun de ceux qui font venus après lui n'a jamais ofé s'écarter. Sa Bibliothèque con- tient l'abrégé de laVie des Auteurs, le fujet de chaque Livre , certains morceaux choihs pour faire con- Èeîj ai4 JOURNAL DE noître leur' ftile , & quelquefois même les jugemens que les Sçavans en ont portés. Plufieurs Ecrivains ont dans la fuite abrégé ou même augmenté cet Ouvrage. Conrad - Lycofthene Hc Robert - Conftantin furent de ce nombre & n'y réuilirent pas. L'a- brégé qu'en fit Jofias-Simler fut beaucoup mieux reçu. Il l'entre- prit du vivant, & même avec l'ap- probation de Gefner. Ce dernier ne laiiTa pas de trouver mauvais qu'il en eut totalement fupprimé les ju- gemens des Sçavans. Il auroit fou- haicé qu'il les eût feulement un peu relTerrés. Les plaintes de Gelner ne firent cependant aucune impreihon fur Jean-Frilius qui marcha fur les pas de Simler , il ajouta à la vérité dans l'Edition abrégée qu'il en don- na , quelques Auteurs dont Gef- ner n'avoit point parlé , mais il fe contenta d'y marquer leurs noms &c leurs Ouvrages , encore a-t-il h fort défiguré les uns 8c tellement tronqué le: titres des autres qu'ils n'y font plus reconnoiflables. On ne peut pas faire ce reproche , con- tinue toujours M. Camufat , à An- toine Verdier. Nous avons de lui un Supplément à l'abrégé de la Bi- bliothèque de Gefner , (i les autres avoient imité fon exactitude , on auroit la fatisfa&ion d'avoir un bon Catalogue de Livres. A l'égard de l'Ouvrage que Jean Hallervord a prétendu nous donner dans le mê- me goût èc fous le titre de Biblio- thèque Curieiffe ; rien n'eft moins exaft ni plus imparfait. L'Editeur parcourt enfuite tous S SÇAVANS, ceux qui ont eu le courage d'entrer dans la même carrière , il en fait la critique, &c n'oublie pas de rappor- ter ce que les autres en ont penfé -, d'où il conclut que les différentes tentatives faites par une infinité d'habiles gens, quoique infructueu- fes pour la plupart , montrent alTez combien une Bibliothèque généra- le des Auteurs feroit utile &c agréa- ble aux gens de Lettres. Mais il ne craint pas d'allurer que perfonne n'y a apporté plus de choix ni plus d'érudition que Gefner. M. Camufat, fans dillimuler que ce grand Homme a eu fes Criti- ques , applaudit à la dotte Apolor gie qu'en a faite Daniel - George Morhoff. Ce dernier taxe d'injufti- ce & d'ingratitude ceux d'entre les étrangers qui acculent Gefner de peu d'exactitude , tv qui le croyenc plus eftimable par la grandeur de fon travail que par la beauté de fon génie. Tel elt , dit-il , le reproche ordinaire que les Etrangers font aux Allemans. Mais fi ces derniers ne le donnoient la peine de leur raf- fembier toutes les richelTes Littérai- res ■ ils fe trouveroient fouvent bien à l'étroit dans leur propre fonds. L'Editeur fouferit à ce juge- ment. On ne fera pas fâché de re- trouver ici fes paroles , elles pour- ront donner quelque idée de fon ftile. Lever» fuper ojfa terram Mo- rbojfîo p^ecor eximii viri C. Gefneri memoriam Vmdicamis à lepidulo- rum illorum hominum injimis y qui prégrandia horrent Volamina, dc- prehenfifauc vel in pulcherrimo Opè- re cjuibnfdam nttvis , illud ad vea~ AVRI dititem tbus & piper migrare jubent. Jlielion fide curn doftijfimis Mis vins qui Litteras pane fepultas , labore improbo , & indifeffa drfigsntia ex~ citarunt , agenditm eji , eorumque fa- ma c.criter tuenda contra, recentiores tjHofdam , qui cum unum & altcrum libellidum patrio fermone confcripfe- ritnt , jamjam fe mort ni s Leonibus barbam impudemer vellere poffe con- fiant , eofqne ab hominum memoria prorfits delendos clamitant : cjua juaïi'a , tiijt radicitus evellatur 3 de faentiis atlum puto. Au reflète qui doit faire fans doute beaucoup d'honneur à la retenue & au difeernement de l'Editeur,jamais perfonne n'a donné moins d'éloges à l'Ouvrage qu'il publie que M. Camufat. Il dit flmplement qu'à l'exception de Gefner , Ciaconius n'eft inférieur à aucun de ceux qui ont travaillé fur la même matière , & qu'eu égard au tems où il vi voit , il le croit préférable à plulieurs d'entr'eux. 11 fouhaiteroit feule- . ment que fon Ouvrage fût venu tout entier jufqu'à nous. Son pre- mier deffein avoit été de l'achever ; mais ayant fait reflexion que la ma- nière de traiter l'Hiftoire Littéraire a dû neceflairement changer par une infinité d'augmentations qui l'ont enrichie depuis le 16e fiécle, il a bien vu que fon travail & celui de Ciaconius feroient fi differens qu'il feroit impofîîble de les aflbr- tir. Il s'eftdonc borné à donner fon Auteur dans l'état où il l'a trouvé , en y ajoutant cependant quelques Obfervations ; fon but dans les uneseftde corriger de tems en tems L, 1732; h y les fautes qui font échappées! Cia- conius ; & les autres contiennent des additions propres à délafler l'ef- prit d'une lecture aufli feche & aufli aride que celle du Texte. Tout homme qui les lira lui fera la juftice de croire , comme il Paf- fure , qu'il ne lui eût pas été difficile d'enfler fes remarques & d'en rem- plir plufieurs Volumes. Mais il pro- tefte qu'il cft bien éloigné d'en vou- loir impofer au public par un étala- ge faftueux d'érudition. Content , dit-il en parlant au fçavant Père le Quien , à qui il adrelfe fa Préface , content de vous plaire , & à quel- ques gens fenfés , je m'embarrafle- rai peu des injuftes Critiques qu'on fera contre moi. Il finit fa Préface en formant les vœux les plus tendres & les plusju- ftes pour la confervation du R. P. le Quien , & en le conjurant de fe rendre aux empreflemens des Sca- vans qui connoiflant fa profondeur dans les matières Ecclefiaftiques, Se fon habileté à les traiter, attendent avec impatience fon Hiftoire de l'Eglife Orientale. On trouve enfuite la Vie de Cia- conius telle qu'on la voit dans la Bibliothèque des Dominicains par Echard. L'Editeur n'a point voulu , dit-il, à l'exemple d'une infinité de gens qui trouvent l'art de paroître fçavans à peu de frais , refondre cette Vie , &c (e l'approprier en y faifant quelques légères additions. L'Hiftoire de Ciaconius n'offre pas de grands évenemens. Il étoit de Baéça, petite Ville d'Andaloufie en Efpagne , Ôc prit l'habit dans 2i6 JOURNAL DE l'Ordre de S. Dominique. Après avoir enfeigné les Lettres humaines & la Théologie avec fuccès dans fa Patrie , il fut appelle à Rome où il gagna les bonnes grâces de Grégoi- re XIII. qui le ht Pénitencier de Sainte Marie Majeure. S'il eft vrai que Clément VIII. le décora du titre de Patriarche d'Alexandrie , il n'en jouit pas long-tems ; est il mourut environ l'an itfoi. âgéde 59. ans. C'étoit l'homme de fon tems qui avoit la réputation de pof- feder mieux la Science de l'Anti- quité. La plupart des Ouvrages que nous avons de lui , &c qui font en grand nombre , roulent fur cette matière. Il ne fera pas inutile d'ob- ferver ici avec M. Camufat que fon Traité del'ame de Trajan tirée des Enfers par les prières de S. Grégoi- re , & fa Dillertation pour prouver que Saint Jérôme avoit été Car- dinal, montrent allez ce qu'on doit penfer de l'érudition J lorfqu'elle n'eft pas jointe à une exacte Criti- que. A quoi nous pouvons ajouter qu'il furrit de jetter les yeux fur fa Bibliothèque pour fe convaincre de cette vérité. Un pareil Ouvrage n'eft pas fuf- ceptible d'un Extrait fuivi. Nous dirons Amplement que Ciaconius y tient ce qu'il promet ; c'eft-à-dire , qu'on y trouve ordinairement en très-peu de mots la profeffion & l'âge des Auteurs dont il parlc,avcc le Ample Catalogue de leurs Ou- vrages. Il s'écarte cependant quel- quefois de cette règle , & ne laine pas en quelques occahons démar- quer ce qu'il penfc lui-même , ou S SÇAVANS, ce que les Critiquas ont penfé de certains Auteurs. Son flile cft pur , fans affectation , & tiès-convena- blc à fon dellein. Il pafoit que M. Camufat a plus recherché les orne- mens du Langage dans les Obfer- vations. Elles font fort étendues , cV vont quelquefois jufqu'à plus de 18. colomncs. Les longues citations d'Auteurs Grecs , Latins, François, Italiens , Efpagnols dont elles font remplies , marquent affez la lectu- re èc l'érudition de l'Editeur. Sans doute que la crainte d'être aceufé de fe parer des dépouilles d'autrui l'a empêché de fondre les penfées des autres dans fes remarques. On y trouve prefque toujours ce que les Sçavans ont écrit fur environ 400. Auteurs dont il juge à propos de parler ; car on ne voit pas fou vent pourquoi il ne dit rien lur les uns, tandis qu'il eft fi diffus furies au- tres. On fe reffouviendra suffi qu'il ne s'eft point engagé à relever tou- tes les erreurs dans lefquelles Ciaco- nius eft tombé ; fans cela peut-être qu'on feroit étonné de fon filencc Air plufieurs traits entièrement faux , ou du moins fort fufpects qui pourroient tromper un Lecteur peu inftruir. Le plus fouvent , il fupplée les omiifions de Ciaconius par rapport aux Ouvrages de cer- tains Auteurs ; quelquefois auffi fe contente-t-il d'indiquer les fources qui en renferment un Catalogue plus exact. C'eft ainfi que fur S. Ambroile il nous renvoyé à Rivet Se à Oudin ; du rdic , il n'oublie pas de parler , ou ce qui lui eft plus ordinaire , de faire beaucoup parler A V R tes autres fur le ftile , & fur le carac- tère particulier à ce Père. Quelques-unes cle ces Obferva- tions ne contiennent que des vers Latins qui nous apprennent que tel Sçavant dont Ciaconins fait men- tion a été loué par un illuftre Poète. En d'autres endroits pour égayer fes Lecteurs , ainfi qu'il l'a promis dans fa Préface , il fait entrer de petites Hiftoires badines , dont il a la fage précaution de ne pas fe ren- dre le garand. Mais auflî pour plai- re aux gens d'un profond fçavoir , à l'article de Beftarion il leur donne deux Lettres de ce Cardinal qui n'a voient point été imprimées , il y joint les deux réponfes de Gémifte- Plethon auquel elles font écrites. Les unes & lesautres traitent^ ce cjut fitbfîfte par foi - même. Nous ignorons la raifon pour laquelle M. Camufat , qui rapporte ordinaire- ment les Veriîons Latines des Tex- tes Grecs qu'il cite , ne s'eft pas donné la peine de traduire ces Let- tres , d'autant plus qu'il n'eft pas aifé de les entendre à moins qu'on ne foit initié dans laPhilofophiePla- tonicienne. La remarque fur Bar- thelmy-Facius a quelque chofe de plus amufant ; c'eft le commence- ment de fon Hiftoire Latine de l'o- rigine de la guerre entre la France & l'Angleterre ; ce commencement a paru fi beau à l'Editeur qu'il en remplit quatre grandes pages. Ciaconius , au fujet d'Erafme , s'eft cru obligé contre fa coutume de faire quelques reflexions fur le caractère généralement répandu dans les Ecrits de cet Auteur , &c I L, 1732. 217 d'en conclure qu'il doit être regardé comme très - fufpeet en matière de Religion. Et fuivant l'ufage de ce tems dans le Catalogue qu'il nous donne de fes Ouvrages fans faire aucune mention de ceux qui avoienc été proferitspar lesPeres du Conci- le de Trente , il ne parle que de ceux qui fe trouvent dans l'Edition de Louvain corrigée fuivant les De« crets de ce même Concile. Du refte, cet article qui eft un des plus longs de fa Bibliothèque en occupe à pei- ne 4. colonnes. Au contraire , M. Camufat, après nous avoir averti que le def- fein qu'il s'eft propofé l'oblige d'ê- tre court , poufle fes Obfervations fur cet article jufqu'à plus de 15. colomnes. Il y rapporte d'abord une partie de ce qui s'eft dît pour& contre les fentimens d'Erafme j &C conclut ainlî.» Si je ne me trompe, » dit- il , chacun jugera de ce Théo- »logien félon les préjugez du parti »> dans lequel il fera entré. Du » moins , petfonne ne pourra-t-il » nier qu'il n'ait fervi de modèle à » tous ceux qui penfoient bien[opti- »mi ] fur les moyens de pacifier les » difputes de Religion, a Et pour s'autorifer dans ce jugement , il ap- porte un long témoignage d'Epif- copius , Arminien zélé &C fameux pour avoir profeflè publiquement la rolérance de toutes les Sectes qui reconnoiflent l'autorité de l'Ecritu- te. Il eft bon d'avertir qu'en même- tems M. Camufat trouve fort étran- ge qu'on foûtienne dans la réfuta- tion de l'Apologie d'Erafme , * que cet Auteur doit être regardé , non * Mémoire de Trévoux ,Juiniyi$. 2i8 JOURNAL D comme un Luthérien, ni comme un Catholique, mais comme un hom- me qui a donné naiflance à la Se<5te des Tolerans. Enfin l'Editeur, avec un ftile très-vif, pour ne rien dire de plus, s'élève dans fa derniereObfervation, contre les Journaliftes de Trévoux, qui à l'occafion d'une nouvelle Edition de l'Anthologie Grecque* avoient jugé peu favorablement de ce Recueil. Pour lui, fansdifeuter les raifons qu'ils allèguent, ni fans fe mettre en peine de chercher de la finefle & de la beauté dans quel- ques Epigrammes qu'ils blâment, & qu'ils apportent en preuve de leur cenfure , il prétend qu'ils ne les condamnent que parce qu'ils ne les ConnoilTent pas afiez , & fe flatte de leur avoir fufrîfamment répondu,en citant les noms de plufîeurs perfon- • Mémoire de Trévoux , Decemb. 1 70*. ES SÇAVANS, nés diitinguécs dans la Littérature , dont les uns admirent l'Antholo- gie , & dont les autres ont fait , ou du moins ont voulu faire des Com- mentaires pour l'expliquer. En voilà aflez pour donner quel- que idée de cet Ouvrage. Malgré la répugnance que M. Camufat té- moigne pour le continuer , qu'il nousfoit permis de croire qu'en pu- bliant la Bibliothèque de Ciaconius dans l'état où elle eft, il n'a eu d'au- tre vue que d'eiïayerfes forces pour, nous donner une Bibliothèque gé- nérale des Auteurs. Nous efperons que le fufTrage du public , l'amour même qu'il a pour les Lettres , joint à la réputation qu'elles lui ont ac- quifes , feront de puiflans motifs pour l'engager dans une entreprife il utile Se fi glorieufe. VARSEN1S avril; 173s. 2 rp L'ARGENIS DE BARCLAY, TRADVCTION NOVVELLE. Pat M. l'Abbé folfe, Chanoine de Chartres, A Chartres , chez Nicolas Befnard , Se fe verni à Paris, chez Gucrin le jeune , Qiiai des Auguftins. 1732. 3. Vol. /'«-12. I. Vol. pp. 3S2. II. Vol.pp.392. III. V0l.pp.4zj. L'Auteur de l'Argénis , au juge- ment de M. l'Abbé Jolfe , doit tenir parmi les Romanciers le rang que Tacite tient parmi les Hi- ftoriens. On trouve , félon lui , dans Barclay, comme dans Tacite, ce tour vif Se fenfé qui fait entendre plus de chofes qu'il ne dit ; on y remarque encore la même fagacité à pénétrer dans le cœur des hom- mes , la même force à peindre leurs vices , Se la même habileté à déve- lopper les intrigues d'un cœur am- bitieux Se corrompu. On ne peut douter que ce Roman ne foit allé- gorique. L'Auteur, témoin des horreurs de la Ligue , Se vivement frappé des maux qu'elle avoit caufés à la Fran- ce, entreprit cet Ouvrage pour dé- tromper la Multitude toujours dif- pofée à fe déclarer en faveur de ceux qui fous le voile de la Religion , ou le prétexte ordinaire du bien public, facrifient le bonheur de leur Patrie à leur haine ou à leur ambition. Il s'en explique ainlî lui-même dans le fécond Livre, où il trace le plan de fon projet. » Je veux , dit-il , dé- «mafquer les auteurs des troubles, m afin que le peuple n'y foit plus » trompé ; je veux faire connoître »>les efperanccs ou les craintes qui î»les faifoient agir ; ce qu'il con- » vient de faire ou pour les rappeller » à leur de voir, ou pour les accabler Avril, » s'ils demeurent obftinés : je tou- » cherai aulîî quelque chofe de la «légèreté du Peuple & de fa folle » crédulité. Mais dans la crainte defe rendre odieux , Se par confequent inutile à ceux-là même qu'il vouloir inftrui- re , il a caché fon véritable def- fein fous l'enveloppe d'une fable ingénieufe , emplie d'évenemens extraordinaires , de guerres interef- fanteSj d'amours héroïques , Se foûcenueparune narration embellie de fréquences deferiptions , Se de difFerens morceaux de Poe'fie. Ce même motif l'a obligé de charger fes portraits de manière qu'il s'y rencontre plufieurs traits qui ne reilemblent point , & qui même ne peuvent convenir à la plupart de ceux d'après qui il les a tirés. Telle eft en gênerai la conduite de Barclay dans l'Argénis. M. l'Abbé Jolie n'a pas cru devoir in- fifter là-deffus , perfuadé que le titre de Traducteur n'exigeoit point qu'il approfondît ce que Barclay lui-même avoit voulu envelopper. Il ne parle pas même de la prétendue Clef qui fe trouve ordinairement à la fin des Editions Latines de ce Roman , moins fans doute parce qu'il la rc- gardoit comme fauffe , que parce qu'il eft difficile de montrer qu'el- le foit vraie ; il eft du moinî certain qu'elle ne nous trompe pas Ff 220 JOURNAL D fur certains noms que Barclay ne déguife que par l'hiver fion de quel- ques Lettres , trcs-.iifées à remettre dans leur ordre naturel. Ainlî tout le monde voit d'abord que Mcrga- nia eft l'Anagramme du mot Latin Cermania ; Dereficus , celle de Frédéricus , Frédéric Comte Pala- tin? Ibburranes, celle de Barberinus^ le Cardinal Barbeiin ; Uiïnulca , celle de Calvinus, &c. Il eft con- fiant encore que par les Hypére- phaniens il entend les Huguenots. Mais fans nous arrêter plus long- ïems fur un point que tout Lecteur éclairé ne doit ni trop approfondir , ni cependant trop négliger, on ne peut nier au moins que la naiflanec de Barclay , fon éducation , £c fes emplois ne l'euffcnt rendu très-capa- ble de bien traiter un fujet fi délicat. Il avoir été nourri dans l'Etude des Belles-Lettres , mais il ne s'y étoit pas borné ; fes Voyages dans les Cours Etrangères l'avoient rendu très-habile dans les affaires , & fur tout dans la politique. Ces qualités lui avoient attiré l'cftime 8c la fa- veur de plufieurs grands Princes , parmi lefquels on doit compter Henri III. auquel il fut toujours fort attaché. On ne doit donc pas le regarder comme un de ces Sçavans, qui nourris dans l'ombre de leur Cabi- net s'épuifent en raifonnemens va- gues fur les matières d'Etat qu'ils n'entendent pas. L'Argénis de Barclay faifoir les délices da Cardinal de Richelieu , & le Traducteur ne craint pas d'à- vancer que ce grand Miniftre a mis ES SÇAVANS, en pratique pour l'avantage de la France, plulieurs des maximes dont ce Livre cil rempli. Les différentes Traductions qu'on en a faites en François, en Italien , en Efpagnol, en Anglois 5c en Allemand , jufti- fîent alTez la refolution que M. l'Abbé Joffe a prife d'en donner une nouvelle Traduction , & l'en- gagent même à regarder l'Argénis comme un chef-d'œuvre. Il avoiie cependant que quelques Critiques ont voulu trouver des défauts dans la conduite de ce Roman ; mais fans examiner fi c'eft avec juftice , il foûrient que la délicateffe des fentimens , la vivacité des peintu- res, la variété des tableaux , ôc fur tout cette politique fenfée qui en fait comme le corps J pourroienc contrebalancer des défauts effen- tiels , fuppofé qu'il s'y en trouvât réellement. Nous ne diffimulerons pas qu'on lui reproche la dureté îk l'affecta- tion du ftile ; mais ce défaut difpa- roît entièrement dans laTraduction de M. l'Abbé Jolie. Sans s'attacher fervilement àfonTexte,il en a ren- du toutes les beautez. » Il a tenu , » dit-il , autant qu'il a pu ce jufte » milieu entre les Traductions qu'u- » ne exactitude trop fcrupuleufc » rend languiffanrcs , cV celles qui >j par des traits hardis & empruntés «défigurent l'original. Pour ce qui » eft de la Poefie , j'ai plutôt confi- » deré , ajoûte-t-il , le but de Bar- » clay que fes paroles. Aufll trouvera-t-on peut-être que c'eft principalement dans les vers dont les trois Volumes de ce A V R I Roman font remplis , que l'Auteur del'Argénis a beaucoup d'obliga- tion à fon Traducteur. On n'eft pas ordinairement fort difficile fur les Pièces de Poé'fîes répandues dans les Ouvrages de ce genre , foit qu'on fe croye obligé de faire grâce à l'ac- ccffoire en laveur du principal ; foit même qu'on fe perfuade aflez com- munément que les qualitez qui for- ment le bon Profatcur font prefque toujours incompatibles avec celles qui forment le bon Poète. M. l'Ab- bé Joffe nous montre aujourd'hui qu'il eft poflîble de les réunir ces qualitcz. Il nous a même paru que fes vers avoient quelque chofe de plus naturel & de plus original que la Profe. Mais on ne doit point en ctre furpris,il en eft d'unTraducleur en profe, quelque habile qu'il foit, comme d'un excellent Peintre qui copie un tableau de fa façon. La neceffité où il eft d'avoir toujours les yeux attachés fur fon original arrête fa main Si refroidit fon ima- gination. Il eft importable qu'il ne lui échappe certains traits moins libres , fouvent même gênés > qui décèlent le Copifte , £c qui le dé- couvrent immanquablement aux yeux des Connoifleurs. Mais outre qu'un Traducteur en vers a droit de prendre plus de liberté , le tour particulier à la Pocfic , l'oblige comme malgré lui de perdre fon original de vue , & de s'approprier pour ainfi dire , tout ce qu'il em- prunte de fon modèle. Après avoir rendu compte de l'Ouvrage & de la manière dont M. l'Abbé joiïe l'a traité , il ne nous i- '. I 7 3 2- 22 1 refte plus que d'en extraire quel- ques morceaux pour donner une idée du ftile & des talcns du Tra- ducteur. On en pourra juger par l'endroit fuivant dans lequel Bar- clay faitainfi parler Argénis , qui teint d'être agitée d'une fureur pro- phétique. «Quelle furprife ! Argénis paroît, » mais avec des yeux égarés , & les » cheveux épars. Elle chancelle à «chaque pas, fon air, fes attitudes m font d'une Prêtreffe agitée qui »femble avoir long-tems combattu » des émotions aufquelles elle n'eit » point accoutumée. Méléandre le » premier eft faili de frayeur, il » ignore quel accident fubit , quel »s Dieu , ou quelle furie caufe ces » violens transports. «Argénis ayant plufieurs fois tour- » né les yeux dans la tête d'une ma- "niere épouvantable fît cette ména- weemon dans les règles de laPoëfie, » le tems ne lui en avoit pas laifTé la » liberté; mais dans un ftile qui pa- »roifïoit plutôt venir desDieux que » des hommes, &queNicopompe,« tel eft le nom que "Barclay fe donne toujours dans fon Roman , » en » changeant peu de chofe rendit en » ces vers. Pallas quitte ces lieux. Quels foudres ! quels éclairs ! Je vois fon Char en feu s'envoler dans les airs: Nous l'avons offenfée , & fà jufte colère Lui fait chercher ailleurs un encens plus fincere. De quel fang déformais feront teints fe* Autels i Pfij 212. JOURNAL D Mais quel trouble m'agite! éloignés-vouy mortels Déefle auprès de vous , du moins pour ma défenfe J'ai mes pleurs, mes foupirs, mes vœux, mon innocence. Toujours prête à vous fuivre , enlevés de ces lieux Celle qui , vous perdant , n'y «onnoit plus de Dieux, /e voi déjà briller la lance redoutable , J'apperçois s'agiter l'Egide formidable ; Déefle, fufpendez un trop jufte courroux, Si vous voulez fraper , qui peut parer vos coups ? Je tremble , je frémis .... pour nous ré- duire en poudre , Jupiter à Pallas a confié la foudre. Je l'entens , elle éclate , ah ! coupables mortels , N'efperez plus d'afile auprès de ces Au- tels; Pour effacer l'affront du dernier de vos crimes , Elle y fçaura fraper fes premières victi- mes. Nous avons choifi cette Pièce précifément parce qu'elle eft courte; il y en a quelques-unes d'allez éten- dues , & pour la plupart elles font amenées fort heureufement. Finif- fons par rapporter un raifonnement politique fur la meilleure forme de gouvernement ; il fervira à faire encore mieux connoître le génie de Barclay & le caractère de fon Tra- ducteur. ES SÇAVANS, » Si vous voulez parler du Gou- » vernement où le peuple a l'auto- » rite ; de quel ufage , dit Nico- » pompe , croyez-vous que foit la » prudence des premieisMagiftrats, "puifque fouvent le peuple par un » aveuglement qui ne lui eft que »trop ordinaire, n'élevé aux pre- » miers Portes que des lâches & des » ignorans? il fe laifle entraîner par » l'en vie, le trouble &: les fadions. » C'eft même quelquefois un hon- » neur & la preuve la plus fîire de » mérite Si de vertu que d'en rece- » voir des mauvais traitemens. A » l'égard de l'autre efpece de gou— « vernement , où les Magiftrats fé- >» parement du peuple ont tout pour »j voir , n'eft-elle pas au-delTous de » la Monarchie ? Pourquoi cher- « cher à augmenter les chaînes hon- j' teufes de la fervitude,en augmen- » tant le nombre de fes Maîtres ? » dans un Prince on n'en a qu'un ; » ici on s'en donne autant qu'il y a »de perfonnes, qui compofent le » Confeil Souverain ..... Je fup- » pofe qu'un Royaume &c une Re- » publique fe trouvent réduits aux »dernieres extrémitez par les dé- nfautsdeceuxquiy commandent,. » auquel croyez-vous qu'il foit plus m aifé d'apporter du remède? Un » Roi meurt avec fes vices , & le » Prince qui lui fuccede peut par «un naturel plus heureux rétablir un » Etat qui étoit près de fa ruine. «Mais un Sénat une fois corrompu m ne laifle aucune efpcrance par la » mort même de ceux qui le com- » pofent. Des mœurs une fois dé— » pravées empirent de jour en jour» wjufqu'à ce m accablé la avril; 1732. qu'enfin elles ayent »fes propres ruines. Republique fous 223 HISTOIRE DES ROIS DE CHYPRE DE LA MAISON DE Lufignan & les différentes guerres qu'ils ont eu contre les Sarrafins & les Génois : traduit de l'Italien du Chevalier Henri Giblct-Cypriot. A Paris chez André Cailleau , Place du Pont S. Michel , & Guillaume Sau- grain, fur le Quai de Gêvres. 1732. 2. vol. /'»-i 2. premier vol.pp. 45 9. fécond vol. pp. 433. L'Editeur de cette Traduction Françoife n'a point vu fans doute l'original Italien de l'Hiftoi- re qu'il donne au public ; le titre feul lui auroit appris que le Cava- lier Giblet n'a d'autre part à cetOu- vrage que celle de l'avoir publié. Il le dit en termes formels , & fe plaint même de ce que la modeftie de l'Auteur ne lui permet pas de le faire connoître , très-convaincu , dit-il , que fon nom feul eut été ca- pable de donner un grand prix à à cette Hiftoire. Il ne craint pas d'aflurer qu'elle ne le cède à aucune autre , foit parla grandeur des faits, foit par la nouveauté ou par la di- versité des évenemens dont elle eft remplie. Il convient qu'on y trou- vera certains récits qui paroî- tront avoir quelque chofe de fabu- leux, mais il foûtient néanmoins qui tout y eft fi exactement vrai que c'eft-là une des principales raifons que doivent rendre cette Hiftoire recommandable. L'Auteur a tra- vaillé fur les Commentaires du Bu- ftron & fur la Chronique de Frère de Lufignan ; il s'eft encore fervi des Relations des deux frères Po- docataro , & des Journaux des Flat- c dans l'équipage d'un finir pie Gentilhomme fe rendre à Ro- me au jour marqué pour ce fameux duel. Tant de faits fi brillans & (i extraordinaires l'avoient comblé de oloire , fuivant le témoignage de l'Hiftotien , ( 1^67. ) lorfque les nouvelles qu'il apprit des defordres de la Reine fa femme le frappèrent tellement , qu'il abandonna tous fes projets pour ne plus écouter que ES SÇAVANS; fa vengeance & fon defcfpoir. Tranquille cependant en apparence, il porta cette humiliante affaire de- vant la haute Cour de Chypre. La Reine y fut déclarée innocente , ôc fon aceufateur condamné à mort. Le Roi fut h irrité de ce jugement dont l'injuflice n'étoit que trop éclatante, qu'il tomba dans une cf- pece de démence. » Il auroit voulu, »> dit l'Hiftorien , d'après fon Tra- is dudeur , comme Caligula à l'é-, » gard des Romains que toute la «Noblelfe Cypriote n'eut eu «qu'une tête qu'il auroit coupée » tout d'un coup pour les extermi- » ner tous à la fois. Refolu de fe « vanger de la même manière » qu'ils l'avoient offenfé , fans plus » penfer aux glorieufes entreprifes » où fon grand cœur le portoit fans » ceffe , il fe livra entièrement au » defir qu'il avoit de débaucher les » nobles Dames de la Cour , & il » fit tant par amour , par argent ou » par force , qu'il vint à bout des » femmes , des filles , ou des fœurs » de tous ceux qui s'étoient fi fort » oppofés à la condamnation de la « Reine. Au milieu de tant de fureur il li laiffa vivre , auffi-bien que fon fa- vori le Comte de Rochas. Enfin les Grands du Royaume laffés Se hon- teux de fupporter fi long-tems un Tyran qui immoloit leurs parens , à fes craintes , & leurs filles à fa brutalité , conjurèrent fa perte i Ces deux frères fe mirent à leur tête , &C le firent poignarder dans fon pro- pre Palais. (1368.) Nous remar- querons , quoique l'Editeur Fran- çois A VR I çois n'en avertifle point , que le Traducteur fupprime une légère circonftance qui jettoic un faux merveilleux fur ce tragique événe- ment. Les Grands Se le peuple ne ga- gnèrent rien à cette mort, & furent même peut-être encore plus mal- heureux fous le règne de Pierre II. D'un côté la Reine Eleonor moins touchée de la perte d'un mari,qu'elle avoit offenfé il cruellement qu'indi- gnée de n'avoir aucune parc au Gou- vernement du Royaume pendant la minorité de fon fils , vengea fes propres querelles fous prétexte de venger la mort de fon Epoux. Il en coûta la vie à plufieurs Seigneurs & entr'autres au Prince de Galilée fre- ce du feu Roi. D'un autre côté la guerre s'étant allumée entre les Cy- priotes & les Génois, ces derniers s'emparèrent deFamagouitefi 374.) firent le Roi prifonnier , & com- mirent tous les defordres que la li- cence Se la rureur infpirent à des vainqueurs irrités. La paix qui fui- vit ce ravage fut encore pour le Royaume une fource de malheurs. Car ayant été conclue à condition que lesGénois garderoientFamagou- fte jufqu'à ce qu'ils eiuTent été payés de la fomme de 100. mille ducats, cette place devint l'afile ordinaire de tous les mécontens , & fous les prétextes les plus légers la Garnifon en fortoit pour piller & défoler le Pays d'alentour. Pierre II. étant mort à l'âge de 26. ans fans autre réputation que celle d'avoir été un Prince foible & incapable de gouverner 3 le Corv Avril. L; 1732. 227 netable fon oncle après diverles avantures, pafla tout d'un coup des Prifons de Gènes au Thrône de Chypre. Il prit le nom de Jacques, fe fie enfuite couronner Roi de Je- rufalem , & bien-tôt après il 101- gnit à ce titre celui de Roi d'Ar- ménie qui lui fut dévolu par la mort de Lyonnet fon coufin. On n'oubliera pas <]ue de ces trois Royaumes Jacques n'en polfedoit réellement qu'un feul , encore le partageoit-il avec les Génois. Il s'appliqua avec un foin infatigable à remettre l'ordre & l'abondance dans fes Etats» mais il mourut dans le tems que fes Sujets commen- çoient à reiTentir les effets de fa modération & de fa valeur. La malheureufe étoile de Janus fon fils aîné influa jufques fur fes peuples. Pendant fon règne ils fu- rent défolcs par la pefle & par la famine. Lui-même tomba dans les mains de Tangrivardi Général du Soudan d'Egypte. [ 1414 ] Cet Infidèle irrité de ce que les Catalans & tous les Corfaires qui pilloienc les Côtes de Syrie trouvoient une retraite aflurée dans les Ports de Chypre , y envoya une formidable armée qui força les principales Villes duRoyaume , mit tout à feu & à fang , & s'en revint après avoic fait un butin immenfe. Janus lan- guit long - tems dans les prifons d'Egypte. L'Hiftorien même ac- coutumé à chercher dans la mali- gnité des hommes les raifons fe- crettes de leur conduite , infinuc que le Cardinal Hugues, Archevê- que de Nicofic qui gouvernoit peu- ai8 JOURNAL D dant la Captivité du Roi fou f cre , n'étoit pas fâché d'avoir quelques prétextes pour la prolonger. M ais ce Prince trouva dans lagénérolîté d'un de fes Sujets, ce qu'il avoit jufqu'alors attendu inutilement de celle de tous les autres. Jean Po do- cataro vendit tout fen bien pour faire les 2 do. mille ducats aufquels la rançon de fon Maître étoit fixée. Le Roi revint donc en Chypre Se fut reçu avec une joye inexprima- ble. On peut dire cependant qu'il en tut plus redevable à la compaf- fîon qu'avoientinfpiré fes malheurs, qu'à l'idée des avanti ges que les peuples fc promettoien t de fon re- tour. Il mourut cinq ans après avoir recouvré fa liberté j fansqueles mi- féres de l'Etat & les Tiennes propres hii euffent permis de goûter le plai- fir de fe revoir fur le Thrône. L'extrême habileté de Charlot- te fille du Duc de Bourbon , &c mère de Jean II. remit un peu l'E- tat pendant deux ans que dura fa Régence. ( 1434. ) A fon arrivée en Chypre, dit l'Hiftorien , elle fut Moins eftimée qu'une femme , & lorf- quellefe mit au timon des affaires , elle furpaffa ce qu'on pouvoit atten- dre de t' homme le plus habile. Tandis que le Roi auifi ennemi des affaires qu'incapable de les conduire } fe li- vroit tout entier au plaifir & à la débauche , Héléne-Paléologue fa femme, fille du Defpote de Morée, difpofoit de tout par le confeil de fa Nourrice. Les Grands, àdeffein de fecouer un joug fi honteux , en- gagèrent le Roi à marier Charlotte fa fille à Jean de Portugal , & bien- ES SÇAVANS; tôt après le Roi le déclara Gouver- neur du Royaume. Mais à peine étoit -il revêtu de ce titre que la Reine fa belle -mère le fit empoi- fonner. Jacques fils naturel du Roi qui l'aimoit infiniment , c\: qui par cette raifon étoit très-hai de cette Princeffe, tua de fa main le Cham- bellan qu'on aceufoit d'être l'au- teur de la mort de Jean de Portugal: A l'âge de 1 8. ans Jacques avoit été fait malgré lui èv malgré le Pape même , Archevêque de Nicofie , quoiqu'il jouit des revenus de l'Ar- chevêché , il menoit cependant la vie d'un Cavalier , & en faifoit tous les exercices. La tendreffe que le Roi fon père avoit pour lui,le fauva des mains de la Reine qui vouloit le perdre. Mais après fa mort, Jac- ques devint bien-tôt l'Arbitre du Royaume, Se le Maître du Roi même. On prétend qu'il vouloit le nommer fon Succeileur , mais il mourut fans avoir pu exécuter ce deffein. Ce Prince, quoique beau & très-bien fait , fut toujours peu eftimé à caufe de la médiocrité de fon génie. Elevé parmi les femmes , /'/ en avoit pris routes les inclinations , fi on en excepte la paflion de do- miner. L'anneau Royal fut remis à la Princeffe Charlotte , veuve de Jean dePortugal,& qui deflors étoit pra- mife à Louis de Savoye , fiis du Comte de ce nom. La Reine qui vivoit en parfaite intelligence avec fon hère naturel ne fe conduific d'abord que par fes confeils. Les Seigneurs en conçurent une violen- te jaloufie , & fçurent bien-tôt ini"-' A V R I Firer le même fentiment à cette rincefTe. Pat leur confeil elle don na tant de dégoûts à Jacques,que ne fe croyant pas en fureté dans le Royaume , il prit le parti d'en for- tir. H fe retira auprès du Soudan d'Egypte , qui le renvoya avec une puifTante armée [ 1460.]; ce fecours & l'amour que les peuples lui por- toient , joint au mépris & à l'aver- flon qu'ils avoient pour Louis de Savoye,mari de la Reine y lui ou- vrirent l'entrée de toutes les places du Royaume , à l'exception d'une feule } dans laquelle la Reine fe ren- ferma avec ce qu'elle avoit de plus précieux. Louis de Savoye , Prince fans expérience & fans refolution , réduit à ta dernière extrémité s'en- fuiten Italie fous prétexte de cher- cher du fecours -, mais ayant vu l'impoilîbilité d'en trouver , il ou- blia entièrement fa femme 8c fon Royaume. Charlotte de fon côté fut obligée de fe réfugier à Rhodes auprès du Grand Maître de la Reli- gion. Par fa retraite Jacques fe vit maître de tout le Royaume & eut encore la gloire de châtier les Gé- nois de Famagoufte dont ils étoient en poiTeifion depuis 9 o. ans. Rien n'égala la fagefle , l'applica- tion & la bonté avec lefquelles le nouveau Roi gouverna fes Etats ; on ne pouvoit lui reprocher que fes galanteries qui penfêrent même lui coûter la vie > mais fon mariage mit fin à ces defordres. Il époufa Catherine Cornaro, nicce d'André Cornaro Auditeur de la Republi- que de Venife en Chypre. Le Sénat l'adopta pour fa fille , contracta à L; T732. 229 cette occâfion une Ligue perpétuel- le âVCC Jacques & fes Succefieurs. Ce Prince n'en refleurit pas long- tenis les avantages ; une fièvre ma- ligne , ou li on ne fe laile pas d'en- tendre toujours repeter des conjec- tures fi odieufes , le poifon , félon quelques-uns , arrêta le cours de (es profperitez , à l'âge de trmte ans j après un règne de douze ans. » Ce fut , dit l'Hiftorien pir la » bouche de fon Traducteur , un i> Prince doiié d'une prudence 8c » d'une valeur finguliere ; il fut j> également généreux dans les «combats comme dans la victoire; » il gagna fon Royaume à la pointe » de l'épée , & il fit voir que c'eft la » valeur qui donne les Couronnes » tout autant que ia fortune; il étoit » né pour les grandes chofes , les » périls & les obftacles qu'il ren- » controit en fon chemin le ren- » doient vaillant &r obftiné à les » furmonter. Il ne fe donna aucun » repos qu'il n'eût chaffé enticre- » ment les ennemis du Royaume > » il fut plutôt prodigue que libéral t » s'étant appauvri lui-même pour » enrichir les autres. Il fçavoit le » fecret de fe faire aimer & crain- » dre , de forte que pendant tout » fon règne on ne vit qu'une feule » conjuration. Pour ia bonté il » étoit (ans pareil ; il aimoit & en- » richifibit tous ceux qui l'avoient » en averfion. Il eft vrai qu'il con- » fentit à la mort des conjurés , » mais ce fut plutôt par raifon d'E- m tatque par le defir de fe venger. » Il ordonna avant de mourir » qu'on ouvrît les prifons pour laif- Ggij 230 JOURNAL D » fer un éternel fouvenirde fa bon- v té & de fa clémence. « Ce mor- ceau fuffira pour faire connoître le ftile du Traducteur. Après fa mort les Gouverneurs faluerent Catherine en qualité de Reine de Chypre. Elle étoit pour lors enceinte , & mit au monde peu de tems après un Prince qui tut nommé Jacques. Sa Régence qui ne dura que deux ans fut continuel- lement agitée de troubles &c de fac- tions. Elle eut la douleur de voit maffacrer fes deux oncles que les Nobles du parti de fon fils accu- foient d'avoir empoifonné le feu Roi , tandis que les autres égale- ment irrités de n'avoir point de part au Gouvernement , qu'elle aban- donnoit entièrement aux Cornaro , fe déclarèrent pour la PrincclTe Charlotte , femme de Louis de Sa- voye. L'arrivée du Général Mocé- nigo que les Vénitiens envoyèrent avec de bonnes troupes au fecours de leur fille adoptive lui faifoit ef- perer un fort plus heureux ; mais la mort du jeune Roi ( 1475.) que fuivant l'ordinaire perfonnene crut naturelle, la contraignit d'aban- donner le Royaume de Chypre. 'Par la mort de Pierre l'Enfant , dit l'Hiftorien , la Maifon de Lufignan finit fon règne t & moi , ajoûte-t-il , ES S ÇA VANS; je finis mon Hijloire. Après en avoir rendu compte à l'égard de l'Hiftorien , nous dirons Amplement que naturel- lement fécond en réflexions & en conjectures , il aime à raifon- ner fur tous les faits qu'il rapporte ; jamais il ne perd la moindre occa- fion de mettre de longs difeours dans la bouche de fes A&eurs. Loin qu'il paroiffe ferré & concis comme le prétend l'Editeur , nous crai- gnons qu'on ne l'aceufe d'être va- gue & diffus , principalement dans £ès délibérations politiques fur lef- quelles il revient fouvent. Peut-êtrs même qu'on dira de lui ce qu'on die ordinairement des Hiftoriens de fon Pays , que la lecture de leur Macchiavel les a gâtés. Rien dans cette Hiftoire ne fe fait par hazard, ni par caprice. Tout eft prévu, tout eft l'effet de la politique la plus pro- fonde & fouvent la plus odieufe ; mais en même tems on n'oublie rien pour en infpirer toute l'horreur qu'elle mérite. C'eft par cette raifon que nous croyons que fi cette Hi- ftoire n'eft pas toujours également agréable à ceux qui ne lifent que pour s'amufer , elle paroîtra du moins toujours utile & curieufe à ceux qui lifent pour s'inftiuixe, AVRIL; 1732. 231 LA BIBLIOTHEQUE CHOISIE DE M, Cotomiés. Nouvelle Edition , augmentée des Notes de MM. Bourdelot 1 de la Monnaye & autres : avec quelques Opufcules du même Colomiés y qui n'avoient point été recueillis. A Paris , chez Gabriel Martin , rue Saint Jacques , à l'Etoile. 1731. tn-iz. pp. 376. fans la Préface &c les Tables. CE Livre eft îuffifamment con- nu par trois Editions , la pre- mière faite à la Rochelle , en 1682. in-S°. la féconde, à Amfterdam, en 1700. de la même forme-, la troifiéme , à Hambourg , conjoin- tement avec les autres Ouvrages de l'Auteur, en 1709. in-40. Il ne doit donc point ici nous occuper pour le fonds. Nous rendrons compte feulement de l'état où il pa- roît dans cette nouvelle Edition, 6c des accompagnemens qu'on y a joints. On y voit d'abord l'ancien Avei- tiflement mis à la tête de la fécon- de Edition 5 lequel eft fuivi d'une Préface du nouvel Editeur. Celui- ci nous y entretient des additions dont il a eu foin d'enrichir ce petit tréforde Littérature, qui originai- rement ne contenoit que l'Hiftoirc Littéraire de cent Volumes choifis, pleine d'Anecdotes inrereffantes. Il n'y en a pas davantage aujourd'hui. Mais on y trouve plufîeurs articles corrigés & augmentés fur l'Edition d'Amfterdam & quelques autres imprimés conformément à celle de l£8i. où ils renfermoient quelque chofe de plus que dans l'Edition de 1700. A l'égard des Notes deftinées à éclaircir plufieurs endroits du Texte , & imprimées à deux colon- ies au bas des pages , elles font de différentes mains. Celles qui font marquées d'un B viennent de Pier- re Bonnet-Bourdelot, Médecin de la Faculté de Paris. Celles qui font défignées par une M font dues à feu M. Bernard de la Monnoye de l'Académie Françoife, Celles qui ne portent aucune marque font de quelques Savans qui n'ont point voulu être nommés. A la fin du Volume paroiffent «Jeux Opufcules de Colomiés , non imprimés dans la Collection de M. Fabricius ; fçavoir , la Vie du Père Sirmond fe fuite , mife au jour à la Rochelle, en 1671. in-%". Se une verfion Françoife de l'Exhortation de Tertullien aux Martyrs , publiée au même endroit & de la même forme en 1^7$. Cela eft fuivi des Notes, des corrections & des addi- tions de M. la Monnoye , pour les Ouvrages de Colomiés tels qu'on les voit dant l'Edition de Ham- bourg , /«~4°. recueillis par M. Fa- bricius. Il y en a i°. pour la G allia Orientalis ; i°. Pour les Mélanges Miftoritjues ; 30. Vont le Recueil de PaniculariteTJSx. autres Opufcules. Nous nous arrêterons fur quel- ques-unes de ces Pièces , qui pour être nouvellement publiées , fem- blent mériter un détail plus parti- culier. De ce nombre font i°. l'E- loge de Colomiés ; z", Celui de 332 JOURNAL D Bonnet- Bourdelot , l'un &c l'autre produits dans la Préface de l'Edi- teur ; 3°. La Vie du P. Sirmond ; 4°. Les Notes. I. L'Eloge de Colomiés fait un article confiderable dans le Diction- naire de Bayle ; ce qui n'empêche pas qu'on ne trouve dans celui qu'on lit ici quelques partieuhritez omifes par le Lexicographe ; &c ré- ciproquement, celui-ci en fournie quelques-unes , qui ont été négli- gée? par notre Editeur. Paul Colomiés étoit ifTu d'une famille Proteftante originaire de Béarn , & qui s'étoit établie à la Rochtlle. Il y naquit en 1638. Son père Jean Colomiés étoit Mtdecin, fils d'un Miniftre, & poffedoit une belle Bibliothèque [ félon Bayle]. Le jeune Colomiés ayant fini fes premières études fous les yeux de ion père , qui étoic fort lettré ; il fut envoyé à Saumur âgé de 1 6 ans, pour y faire fa Philofophie &c fa Théologie : & Louis Oppelyfut fon Maître en Hébreu. Il fe rendit. à Paris en 1664. & y fit avec Ifaac Voffius une liaifon qui a duré toute fa vie. Il fuivit cet ami enHollande; d'où étant revenu en France au bout d'un an , il en repartit en 1681. pour l'Angleterre , Se alla logera Londres chez Voffius. Il y demeura deux ans, Se pen- dant ce féjour , il témoigna trop ouvertement fon dégoût pour le parti Presbytérien , & fon penchant pour celui des Epifcopaux. Il s'en déclara même par un Ouvrage in- titulé : TheologorumPrefbyterianorum leon : ce qui lui fufeita beaucoup ES SÇAVANS, d'ennemis. Il devint cependant Lecteur d'une Eglife Françoife éri- gée félon le RitEpifcopal. Il palTa depuis à Lamberh , pour y être Bi- bliothécaire de Guillaume Sancroft Archevêque deCantorbéry.Maisen 1691. il perdit cet emploi par la dilgrace du Prélat , qui fut dépouil- lé de fon temporel , pour avoir opi- niâtrement refuféde prêter ferment de fidélité au Roi Guillaume & à la Reine Marie. Colomiés en conçut tant de chagrin qu'il en tomba ma- lade , & ne fit que languirjufqu'au 13e Janvier 16^92. qu'il mourut à Londres , âgé de 54. ans , indigne- ment digne ( obferve Bayle ) de groffir \ Appendix du Livre de Pie- rius-Valerianus de Infelicitate L'itte- ratornm. On parloit alors de lui procurer la direction de la belle Bi- bliothèque de Gottorp , placée dans le Palais du Duc de Holftein. Après la mort de Colomiés, on apprit qu'à Lambeth , il avoit con- tracté un mariage de confciencc avec une fille de baffe condition , à laquelle il fit un legs de 30 livres fterlin : ce qui ( félon Bayle ) la fit revenir de l'affliction qu'elle a voit fait éclater avec des cris extraordi- naires, le jour de l'enterrement, Bayle ajoute que beaucoup de gens ont foupçoimé que Colomiés mou- rut Socinien. Ses Livres &C fes MfT. pafferent entre les mains de M. Ha- naelot , fon coufin germain Se fon héritier. Colomiés étoit devenu Théolo- gien par bienféance , à caufe de la Religion qu'il prorcfToit : homme de Lettres &:Cncique, par incli- A V R I nation. L'Hiftoire Littéraire prife dans toute fon étendue étoit fon fort. C'eft dans les meilleures four- ces de ce genre qu'il a puifé , pour en recueillir tant d'Anecdotes cu- rieufes concernant laVie & les Ou- vrages des Savans , tant de traits & depaffages fingulicrs , qui remplif- fent la plupart de fes Traitez &y font régner une érudition fine Se choifie , jointe à une probité , à un défintereffement fur lefquels ne pouvoit rien la différence des Reli- gions. Cela ne put cependant le ga- rantir des infultesdu violent Jurieu, qui dans fon Efprit de M. Arnaud ', traita Colomiés de parafite & d'homme aux gages de Voflîus. Mais la iïtuation de fes affaires , fa manière philofophique de penfer & la douceur naturelle de fes mœurs le mirent au - deffus de pareils re- proches & l'empêchèrent de répon- dre aux invectives du Miniitre , fur la réfutation defquelles l'Editeur renvoyé au Dictionnaire de Bayle, à l'article de Colomiés. On y trouve une Notice des Ou- vrages de ce favant homme, tant imprimés que Mil. favoir, \°.GaU lia Orient alis , où il traite des Fran- çois qui ont entendu la Langue Hébraïque, imprimée à la Haye, en 166$. in - 40. 2°. Opufcula , & non pas , comme Bayle en allègue peu exactement le titre , KsimeUa Litteraria , ce qui ne fait qu'un des Opufcules , les autres étant un Re- cueil de particularitez, tait en 1665. des clefs pour les Lettres Latines & Françoifes de Jofeph Scaliger & pour celles de Cafaubon & de Sau- L ; 1752. 235 maife -, des Notes Latines fur les Inftitutions Oratoires de Quinti- lien : 30. Epigrammes & Madri- gaux , publiés à la Rochelle en 166%. in-11. Poefies d'un fi mau- vais goût , dit notre Editeur , qu'on s'eft bien gardé de les remettre au jour , dans cette nouvelle Edition delà Bibliothèque choifie : ^.Re- marques fur les féconds Scaligera- na , imprimées à Groningue, en 1669. in-11. 50. La Vie du Perc Jacques Sirmond : 6°. L'Exhorta- tion de Tertullicn aux Martyrs , traduite en François : 70. Rome Proteftante , publiée à Londres , ou plutôt à Roiien, en 167 5. z'»-i2. 8°. Mélanges Hiftoriques, à Oran- ge , en 1675. in-z^. 90. Obferva- tionesfacrœ , avec une Lettre écrite à M. Claude fur la Verfion Fran- çoife des Bibles de Genève , à Ro- terdam, 1679. in-n. io°. Theolo- gorum Prefbytenanorum Icon , &cc, 16$ 2. in-11. ii°. La Bibliothèque choifie : 12°. Ad Guilielmi Cave Chartophylacem Ecclefiafiicum Pa- ralipomena , à Londres , \6%6. ;'»-8°. ij°. Lettre a M. /^/tou- chant la Critique du P. Simon : imprimée à Londres en i6$é. in-40. avec un Livre d'Ifaac Vof- fius: 140. Des Notes Latines fur les Epîtres de S. Clément , à Londres , 1687. /k-8°. 150. Italia & Hifpa- nia Orientalis , publiées depuis peu [ félon notre Editeur ] à Ham-l bourg , par M. IVolfiits. Les Ou- vrages MIL de Colomiés fe redui- fent i°. à des additions Se des cor- rections fur quelques-uns de fes Livres imprimés , tels que la Gallia 2J4 JOURNAL Orientait! ,Sela Vie du P. Sirmond: 2°. à une Clef de quelques endroits de Balzac , indiquée par l'Auteur, & qu'on ne trouve plus. Le Recueil des Ouvrages de Colomiés donné par M. Fabricius n'étant pas com- plet , demanderoit qu'on y joignît un Supplément. II. Pierre Bonnet-Bourdelot , Auteur des premières Notes fur la Bibliothèque choifie , étoit Doc- teur-Régent en la Faculté de Méde- cine de Paris , où il fut reçu en 1676^. Il fut depuis Médecin ordi- naire du Roi Louis XIV. Se pre- mier Médecin de Madame la Du- chefle de Bourgogne. Il étoit ne- veu , par fa mère , de Pierre Mi- chon , connu fous le nom de l'Ab- bé Bourdelot, Médecin delà Facul- té de Paris , Se attaché en cette qua- lité aux trois derniers Princes de Condé. Ce Pierre Michon étoit, auiîî par fa mère , neveu de Jean Bourdelot , dont nous avons des Notes fur Lucien , fur Héliodore & fur Pétrone. Jean Bourdelot dé- clara Pierre Michon héritier de tous fes biens [ parmi lefquels fe trouvoit une belle Bibliothèque ~] à condition que celui-ci prendroit le nom de Bourdelot ; Se celui-ci bif- fa fous la même claufe fa fucceflîon à Pierre Bonnet fils de fa feeur. Ce dernier Bourdelot avoit un frère appelle Jacques Bonnet , qui a publié fous fon nom une Hiftoire de la Muhque Se une de la Danfe. Mais notre Editeur foupçonne que ce qu'il y a de meilleur dans ces deux Ouvrages, pourroit bien ap- partenir à Bonnet-Bourdelot le Me- DES SÇAVANS; decin ; Se d ajoute que cette con- jecture n'eft pas tout-à-fait hazar- dée. Elle l'eft fi peu que Jacques Bonnet dit en propres termes, à la tête de fa Préface fur l'Hiftoire de la Mufique, Qu'il ne fe feroit jamais avtfé de l'entreprendre t fins des Mémoires ajfez. curieux qu'il a trou- vés parmi les Mff. de l'Abbé Bourde- lot fon oncle & de Bonnet-Bourdelot fon frère. La Bibliothèque de Jean Bour- delot s'étant notablement accrue en- tre les mains de l'Abbé , devint en- core beaucoup plus nombreufe pat les nouvelles acquittions du der- nier propriétaire, qui l'enrichit non feulement de Livres de Médecine , mais encore de Livres de Belles- Lettres Se d'Hiftoire ; enfortc qu'elle Vemportoit pour le nombre Se pour le choix fur toutes celles de fes Confrères. Il avoit travaillé pendant vingt ans à un Catalogue de tous les Livres de Médecine im- primés , qu'il accompagnoit d'Ob- fervations critiques , 8e de quelque détail fur la Vie de chaque Auteur. Ce Catalogue Mf. fe conlerve dans la Bibliothèque du Roi. Bonnet- Bourdelot mourut en 1709. âgé de 54 ans. A l'égard de M. de la Monnoye,' Auteur des fécondes Notes fur la Bibliothèque choifie , communi- quées généreufement par M. Galyot fon ami , notre Editeur renvoyé l'Eloge de cet excellent Critique aux Continuateurs de l'Hiftoire de l'Académie Françoife , Se il fait en même tems des vœux pour la pu- blication des Ouvrages pofthumes de A V R i de cet Académicien ; publication , qui ne lui feroit pas moins glorieufe [ ajoûte-t-il ] qu'utile à la Republi- que des Lettres. III. Jacques Sirmond naquit à Riomen Auvergne, Tani558.de Îiarens distingués. Il fit paroître dès on enfance tant de vivacité d'ef- prit , & de paflfion pour les Lettres, qu'on eut grand foin de mettre à profit de fi heureufes difpofitions , en lui choififfant d'excellens Maî- tres en ce genre. Il y fit des progrès fi rapides , qu'à Tâge de 14. ans , il fe trouvoit en état d'en donner lui- même des leçons aux autres. Ayant fait une revûë des différentes Com- munautez , nulle ne lui parut plus conforme à fon génie &c à fon in- clination dominante pour l'étude, que la Compagnie de Jefus. Il y en- tra donc âgé de 1 5 ans& s'y perfec- tionna merveilleufement dans la connoifTance des Langues Gréque & Latine, qu'il profeffa publiquement pendant quelques années, par l'ordre de fes Supérieurs. Il eut alors pour Difciples Charles de Valois , Duc d'Angoulême,fils naturel deCharles IX. ScFrançois de Sales, depuisEvê- que de Genève. Son exactitude à s'acquitter des devoirs de Régent ne l'empêcha pas de s'appliquer à l'Antiquité Ecclefiaftique , &c defe lier d'amitié avec Pierre Pithou & Nicolas le Févre , Précepteur de Louis XIII. dont le premier, pour marque de fon eftime , lui dédia une Diflertation Latine fur la pro- ceffion du S. Efprit. En 1590. le P. Sirmond , âgé de 3 2. ans , étant allé à Rome , y Avril. L; 1732- 23; devint aullî-tôt Secrétaire de Clau- de AquavivaGénéral de fon Ordre, Se remplit ce porte fort au gré de celui-ci. Il fut auflî d'un grand fe- cours au Cardinal Baronius , qui compofoit alors fes Annales , Se qui pour marque de fa reconnoiffance , lui légua en mourant un Crucifix de cuivre très -délicatement travaillé. La grande liaifon du P. Sirmond avec ce Cardinal _, avoit procuré à celui-là une entrée dans la Biblio- thèque du Vatican , & la facilité d'y confulter une infinité de Mfl. qui lui fournirent de grandes lu- mières. De retour en France , il y vifita les plus fameufes Bibliothè- ques , d'où il tira grand nombre de M (T. précieux , abandonnés aux vers, enfevélis fous la pouffiere, ou deftinés à des ufages indignes de Pièces qui pouvoient être II utiles au public. Le P. Sirmond ayant terminé fes Voyages Littéraires, vint enfin fe fixer à Paris , âgé de 52 ans , pour y répandre à pleines mains les ri- chefles qu'il avoit acquifes. Le pre- mier Auteur qu'il mit au jour avec fes Notes fut Geoffroy Abbé de Vendôme publié l'an 1610. Depuis cette époque jufqu'en 1^5 1. il fe paffa peu d'années qui ne fufTent marquées par quelque Ouvrage du P. Sirmond , ainfi que l'on peut s'en convaincre en lifant la Notice qu'en donne ici Colomiés, qui en indique environ 54, fur lefquels nous croyons devoir renvoyer au Livre même. Il étoit prefque impoffîble que tant d'Ecrits fur différentes matie- Hh 2^6 JOURNAL D res ne fiflcnt mûre de rems en tems quelques conteftations. Aulli lePere Sirmond tut-il obligé d'entrer en difpute avec Saumaife , avec l'Ab- bé de S. Cyran, avec Jean Triitan- de S. Amant, fameux Antiquaire, & quelques autres. Quoiqu'il ait compofé plufieurs de ces Ouvrages dans une extrême vieillelTe , ils font fentir le même feu &c la même for- ce que ceux qu'il avoit publiés dans toute la vigueur de fon âge ; d'où vint à Balzac la penfée de lui don- ner pour devife un lingot d'or avec ces mots Splendefcit ab avo. Il a re- çu les plus grands éloges de tous les Savans fes contemporains ; de Gro- tius , de Saumaife , de Selden , de Gaulmin , du grand Jérôme Pignon , de Manque , de Gouthiére , de Naudé , de Sarajin , &c. Sa grande réputation engagea le Pape Urbain VIII. fi favorable aux gens de Lettres , &c fi lettré lui- même, à le faire folliciter vivement de venir à Rome. Mais le Roi Louis XIII. à la prière de quelques perfonnes, lui défendit de quitter le Royaume ; & le P. Sirmond, de fon côté, en avoit Ci peu d'envie, qu'ayant appris dans la fuite que Sa Sainteté n'avoit eu d'autre vue" en l'attirant à Rome , que de l'honorer de la Pourpre,il répondit que fi à fon arrivée dans cette même Ville on lui eût annoncé le deffein du Pape, il feroit à l'inftant retourné en France par le même chemin qui l'avoit conduit à Rome. Enié}8. il fut choiiï pour être Confcfieur de Louis XIII. Mais malgré fa prudence & fa modera- ES SÇAVANS, tien qui fitisfaifoient également les Catholiques Se les Protcftans , il ne jouit de cet honneur que très- peu d'années , & l'on mit en fa place le P. Dinet. Colomiés attri- bue ici cette difgrace à une propofi- tion que quelques Miniftres obligè- rent le P. Sirmond de faire au Roi grièvement malade, & cette pro- position étoit d'accorder à Mon- fieur la Corrégence avec la Reine. Le laborieux Jefuite fut ravi que cet incident l'eût rendu à fes chères études. Il les continua , fain de corps & d'efprit , jufqu'au mois d'Odobre de l'année 1651, qu'il mourut âgé de quatre-vingt-treize ans. IV. Il ne nous refle plus qu'à produire ici quelques échantillons des Notes qui accompagnent cette Bibliothèque choifie. 1. Pag. r. Franc. Vavajforit Li- ber de Ludicra DiHione. ] » Les Je- » fuites appelloient ce Livre la Chat- yte du P. Vavaffeur. Il a été dix » ans à le lécher & à le polir. Il l'en- » treprit à la follicitation du P. Pe- » tau , dont il étoit Secrétaire & «Ledeur. Ménage n'eftimoit pas » tout ce que ce Père dit contre le »ftyle burlefque. Les jugemens « qu'il fait des Auteurs Grecs & La- » tins au nombre de 50 font très- » judicieux. rB. z. Pag. 40. Titus - Livius , cum Notis Variomm, accurame Grotto- vio. ] » L'an 1682. je vis à S Ger- » main,des Grecs de l'Ifle de Chio, » qui venoient pour traiter avec » M.Colbert d'un Tite-Live entier, «qu'ils difoient avoir dans leur A V R I » Ifle , & qui avoir écé fauve de »» l'incendie de la Bibliothèque de »> Conftantinople. On dit que le n marché en avoit été conclu à » £0000 livres , & qu'on avoit en- w voyé dans l'Ifle pour le copier , m de peur que le Vaifteau qui l'ap- » porterait venant par malheur à » périr , la perte ne tut irréparable. » On ne parloit dans ce tems - là a que du plaifir qu'auraient les gens » de Lettres de voir un Tite - Live » entier : car le Roi , difoit-on , le » faifoit imprimer à fes frais , & le » donnerait au public à bon mar- » ché. Mais depuis ce tems-là , on » n'a point oui parler ni des Grecs »> de Chio , ni du Tite-Live. 2?. 3 . Pag. 5 j . Oeuvres de Plut arque traduites par Jacques Jlmyot. ] » Voici comme Colomiés parle de » cette Traduction d'Amyot dans » un autre endroit. Y ai oui dire À » M. Patin , qu'il avoit appris du » bon-homme Laurent B oc bel (quia » fait imprimer les Décrets de l'E- » glife Ç-allicane ) qu'Amyot avoit 3» traduit les Vies de Plut arque fur » une vieille verfion Italienne de la » Bibliothèque du Roi , & qu'elle » itoit caujfe des fautes qu'il avoit » faites. Je ne fais fi cette verfion i> riefi point celte que fit fur le La- » tin l'an î^Zz.Bapti fie- Alexandre n Jaconel de Rieti y qui ejl dans la » même Bibliothèque. Il eft vrai que » cette verfion Italienne imprimée » l'an 1482. in-fol. chez Adam de » Rot^ril à Aquila Ville de l'A- » bonze ultérieure exifte , & qu'il »> y en a un exemplaire dans la Bi- »> bliotheque Royale. Il eft encore » vrai qu'elle a été réimprimée en » Italie pludeursfois in-^9.&c /»-8°. » Mais comme elle n'a été faite » que fur de très - mauvaifes ver- » lions Latines, que ce Traducteur » a rendues encore pires ; il ne faut » pas s'imaginer qu'Amyot , qui n nonobftant les fautes qu'on lui » reproche , ne laifloit pas d'être » un fort habile homme , fût capa- » ble de s'attacher à une fi mifera- » ble copie. M. 4. Pag. 67. M. Gradenig , Bi- bliothécaire de S. Marc à Venife , & autrefois Précepteur de Made- moifelle Hélène Corneille , la mer- veille de f on fièck.~\ » Delà manie- » re dont le nom de cette Demoi- » felle eft ici deguifé , difficilement » la reconnoîtra-t-on. C'eft la Si- » gnora Hélena-P ifcopia - Cornara. » Les Auteurs qui ont écrit en beau » Latin , ont ufé du mot Cornélius » pour exprimer l'Italien Cornarg. * Mais quand on trouve dans leurs » Ecrits les noms de plufieurs Car- » dinaux , Marcus-Ctrnelius, Fran- n ci feus - Cornélius , André as- Cor- n nelius&c. il faut toujours les ren- » dre en François par Cornaro , ja~ » mais par Corneille. Ainfi l'Auteur «des Difcorfi délia vita fobria 5 le n fameux Luigi-Cornaro , bâtard de n cette maifon , nommé Ludovicus n Cornélius dans la Vie du Cardinal » Commcndon écrite en Latin pat » Antoine-Marie Gratiani , devoit »en François être nommé Louis- » Cornaro , & non pas , comme udans la Traduction Françoife , » LouiS'Corneille. M. 5. Pag. 99. Bibliothèque de Pr*n~ Hhij 238 JOURNAL D fois Çrudé Sirur de la Croix -dtt- Mains. ] » Il eft vr.ii ( comme «l'obferve ici Colomiés ) que du » Verdier ne nous apprend tien de » particulier des Auteurs dont il s> fait mention , fi l'on en excepte » les vieux Romanciers François Se 3» Poètes Provençaux. Mais en rc- »compenfe , il rapporte des Ex- » traits de beaucoup de Livres , & » comme une cfpece d'échantillon, «qui peut faire juger de tout l'Ou- » vrage. Il y en a , à la vérité , de «bien ennuyeux , & fur tout il ço- » pie une infinité de mauvais vers, «dont on fe paderoit fort bien. Il » manque à cette Bibliothèque une » Table des noms, qui ne laille pas » d'être fort utile dans la Croix-du- » Maine. Il feroitaifé de faire une » bonne Bibliothèque Françoife de wees deux, 8c de la continuer juf- jjqu'en 1600. La Bibliothèque de »»du Verdier eft imprimée à Lyon , y»in-fol. 1 585.5. «C'eft (remarqnc l'Editeur ) ce qu'a exécuté feu M. delà Monnoye , avec des additions & des corrections fur chacune. Son Ouvrage eft en état d'être imprimé. 6. Pag. \%6. M. de Saumaife , dans [es Exercitations fur Soit» , pag. 1306. nomme Gratins virum «xcellentilfimx do&rina: , in omni génère Litterarum. 3 » Saumaife « cependant ne trouvoit pas bon » que l'on crût Grotius égal à lui. » Une marque de fa délicatefle là- » deflus, c'eft quefon intime ami » Claude Sarrau lui ayant écrit ces » mots dans une Lettre après la » mort de Grotius : Soins Me ( Gro- » tins ) de principatn Litterarum E S SÇAVANS, >j tecuin conrendere poffe vi débat ur , M foins ergo j.vn régnas : peu s'en •> filutquc Saumaife ne rompît en- n tierement avec lui. C'eft ce que » j'ai reconnu par deux Lettres » qu'il lui écrivit , l'une du 30 Oc- » tobre , l'autre du 20e Novembre >♦ 1645. que j'ai lues manuferites , » mais que j'apprens avoir depuis » été publiées par Crénius , dans la » dernière defquelles , après avoir » déclaré par une faufle modeftie , » &au plus loin de fa penfée, qu'il » confent qu'on luipréfereGrotius, » il témoigne enfuitele peu d'efti- » me qu'il en fait , foit pour la » Théologie , foit pour la Philo- M fophie, foit pour la Jurifpruden- »> ce ; ne faifant nulle difficulté de " le mettre fort au-deflous de Vof- " (nis le pere , èv demeurant feu- " lement d'accord que c'eft un * grand Poète , qualité, à fon avi3, * de nulle conlideration pour don- " ner le premier rang dans l'Empi- ** re des Lettres , & commune w d'ailleurs à Grotius avec Heinfius M & Barlarus , plus grands Poètes "encore, dit-il, au fentimentdî " bien des gens. M* 7. Pag. 189. tApnleii Metamor- phofis , cum Notis Joh. Pricai. 1 »> Ce Pricius arrivant en France , »avoit des recommandations de » gens de Lettres pour mon grand- » oncle Jean Bourdelot , qui l'afîl- » fta de fes amis , de fon argent Se » de fes Livres , & qui fit imprimer » à fes frais fon Apologie d'Apulée, » dont j'ai encore les planches de n cuivre , fur lefquelles ont été ti- trées les figures d'Antiquicez qui A V R I «font dans ce Livre. B. 8. Tag. 360. Thomas Clochette. ] » Il eft ridicule de donner à Cam- » panellale nom de Clochette > com- »me fi ce Religieux Calabrois » avoir été un François nommé Clo- » chette. M. S. Pag. 364.p*g.)t$.Hg. 18.] » Voflîus Sx. tous ceux qui croyent x> Pallavicin Auteur du Divorce ce- » le/le , fe trompent bien fort. Sa » Vie qu'on voit au-devant de fes » Oeuvres , fait connoître que c'eft » une erreur. Rien n'efl plus oppofé «que le génie & le ftyle de cet Ou- » vrage au génie & au (tyle de Pal- » lavicin ; & il eft certain que ce »> ne fut point cette compofition qui »fut la caufe de fa mort. M. 10. Pag. m.pag.lij.lig. 7.] »» La remarque touchant François nde Enzinas eft inutile, de quand wl'Efpagnol Enzina figniheroit du L ; 1 7 j a. 2 ^ nliohx ; il feroit aufli ridicule d'ap- » peller en François cet Auteur » François du Houx , que Thomas » Hua ado , Thomas Dérobe , parce » qu'en Eipagnol Hurtado fignific » dérobé. On trouve d'ailleurs jQ«*r- » c«i traduit par Enzma dans la » plupart des Di&ionnaircs Efpa- «gnols; & Enzinas lui-même s'é- » tant du Grec Af u's compofé le nom «de Dryander , fous lequel il eft sa aufîî connu , que fous celui d'En- » zinas ; il s'enfuit que 1 on ne le » doit citer que par l'un de ces deux » noms , lans jamais dire ni dit » Chejne,nïdu Houx : comme nous «devons toujours dire Jean Reuch- » lin ou Jean Capnion , & jamais » Jean de la Fumée. Ai. En voilà fumfamment pour don- ner un avant-goût des Notes , qui fervent à éclaircir ou à corriger le Texte de Colomiés, » proprement &: uniquement OSTE'OLOGJE , PREMIER TRAITE', DANS LE QV EL ON confidere chaque os par rapport aux parties qui les compofent , aux cavi- té*, qui s'y trouvent , & a fes jontlions avec les autres os. Par Jean Ba^et Maure Chirurgien Juré de Paris t Démonflrateitr en Anatomie & Chirur- gie. A Paris , chez Louis d'Hôtelfort , rue' Saint Jacques , près S. Be- noît, àla Refurrection. 1731. vol. in-iz. pp. 407» /^E n'eft ici qu'une partie du qui y font joints ; le tout , afîure-t- Traité Ofteologique de M. Baget : dans cette partie qui doic être fuivie d'une féconde & d'une troifiéme , il donne la defeription des os , fans rapport aux parties molles ; dans la féconde , il fera eonnoître , à ce qu'il dit , l'attache desmufcles, & dans la troifiéme, il reprefentera , à ce qu'il dit aufli , les ligamens des os & les cartilages il , vérifié tant fur le cadavre frais que fur le f ce , & réduit fous cette nouvelle méthode par le Sieur faffe } Examinateur de cet Ouvrage , ave s tente t'exattitude poffible* Quatre articles compofent cette première Partie. Dans la première , on traite des parties de l'os , fça- voir * \ de la Diaphyfe qui eft le propre corps de l'os : z°. De l'Apo- â4o JOURNAL DE fhyfe qui eft une portion continue de l'os élevée & Taillante fur le corps de l'os : 30. De VEpiphyJe qui eft un os adhérant à un autre par une (impie contiguïté , 8c affujetti par le moyen d'un cartilage. Dans le fécond , on parle des ca- vitez des os , qui font le trou , la fente , le canal , le conduit , la fof- f e , l'échancrure, le finus,la cavi- té aveugle , la cavité cellulaire. Dans le troifiéme , il s'agit des jonctions des os , fçavoir de la Diaithrofe , de la Synarthrofe , & de leurs différentes fortes. Dans le quatrième , on traite des os en particulier , on commence par ceux de la tête & du col. On vient enfuite à ceux du dos , on continue parles os de la poitrine 8c des hanches , & on finit par ceux des extrémitez tant inférieures que fupérieures. Ce que l'Auteur dit fur tout cela n'eft nouveau ni pour le fond ni pour la méthode. C'eft une répétition abrégée de ce qui fe trouve dans la plupart des autres Livres d'Ofteologie , 8c une répétition d'autant plus courte qu'elle n'eft accompagnée d'aucune remarque particulière de l'Auteur. L'exemple fuivant fervira là-deflus d'échantil- lon pour tout le refte. » Des cavitez des os. La cavité » eft un défaut de continuité en l'os, m de laquelle la figure, la grandeur, 3> 8c les ufages differens produifenc » les différentes efpeces. Les diffe- » rentes cavitez font le trou , la fen- » te , le canal , le conduit , la folTe, »> l'échancrure , la fciiTure , la fi- » nuofité , la rainure , le linus , la S SÇAVANS, » cavité aveugle ou fans iffue ', la » cavité cedulairc, &c. >» Le trou eft une cavité qui per- »ce l'os de part en part, dont l'en- » trée répond à la fortie , n'ayant » pas plus de quatre à cinq lignes «d'étendue. La Fente eft une cavité longue , étendue fur les deux furfaces de l'os qu'elle perce de part en part. Le Canal eft une cavité longue , en forme de gros tuyau dont l'en- trée eft éloignée de la fortie pour le paiTage desvaiffeaux. Le conduit n'eft différent du ca- nal qu'en ce qu'il eft plus court. La foffe eft une cavité qui a une entrée large , 8c point de fortie. Si cette cavité fert à la jonction & eft grande 8c ronde, elle s'ap- pelle cotyle; fi elle eft ronde & moyenne , elle s'appelle glene , & fi elle eft petite 8c fuperficielle, elle s'appelle glene effacé. Si elle eft longue, demi-circulaire , ou femi- lunaire 8c qu'elle facilite le jeu d'un autre os comme d'une corde , elle s'appelle poulie. L'échancrure eft une cavité qui reprefente l'intérieur d'un croiffant ou autre figure approchante , qui avec pareille cavité oppofée diamé- tralement par les angles , fait un trou. Mais fi cette échancrure eft longue , 8c reffemblc à une goutie- re, elle s'appelle i°. Scilîurc lî elle loge des mufcles , ou leurs tendons ; 20. Sinuolité û elle loge des vaif- feaux ', 30. -Rainure iî elle reçoit des os. Ainïî ce n'eft que la fonction &c non pas la figure , qui impofe le nom à ces trois fortes d'échancrures. A V R I Le Sinus eft une cavité dontl'en- trée eft étroite , le fond large , &C point de fortie. La cavité aveugle eft celle qui fe trouve dans les os longs à moelle. La cavité cellulaire eft ce nom- bre de loges de différentes gran- deurs & figures qui fe trouvent dans tous les os , quelque grands ou petits qu'ils foient , mois ou durs t denfes ou fpongieux , mais plus fcnfibles & en plus grand nombre dans les uns que dans les autres , & en certaines parties des uns, que dans les autres parties de ces mêmes os , par où pafient les vaiiïeaux de- ftinés à leur nourriture .... toutes les cavitez fe divifent encore en ilmples & en compofées , en pro- pres & en communes , en uniques & en doubles ou multiples, en par- faites & en imparfaites ou partiales: les cavitez fimples font celles , &c. L; 1732. 141 Nous ne fuivrons pas plus loin notre Auteur. Cet exemple, com- me nous avons dit, fufnra pour le refte du Livre. La leclure d'un Ouvrage tel que celui-ci , ne fçauroit fervir de rien à ceux qui veulent fe perfectionner dans l'Anatomie , mais pour ceux qui ne veulent ou qui ne peuvent cultiver à fond cette Science , & qui font cependant bien aifes d'en avoir quelque teinture , ils trou- veront ici des instructions fuflî-' fantes. L'Auteur fe rend juftice là- deflus , ne voulant point donner fonOuvrage pour plus qu'il ne vaut,' Se avouant ingénument dans fa Préface i°. Que ce petit Traité des os eft fait pour ceux qui ne peuvent beaucoup étudier. 1". Qu'on y fup- pofe parler À un homme à qui tout eft nouveau en Anatom'ie. NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Milan. UN nouveau Programme La- tin de M. Argelati nous ap- prend que la Société Talatine a mis au jour le xxie Volume de fon Re- cueil des Hijîoriens d'Italie. Cette Partie doit paioître , félon M. A r- gelati , d'autant plus interelTante , qu'elle comprend l'Hiftoirede dif- ferens Etats de l'Italie depuis la fin du 14e fiécle jufque vers le milieu du 15e. On affure dans le Program- me que dans ce fiécle la barbarie & la cruauté qui n'avoient que trop régné jufqu'alors parmi les Princes & les Généraux d'Armées , faifant place à des fentimens plus humains & à des mœurs plus douces , on vit reparoître en quelque forte la véri- table grandeur d'ame des anciens Romains , & que la Science de la Guerre y fut portée à un fi haut point , que l'Italie fut en ce genre comme l'école des autres Nations. Mais , ajoûte-t-on , telle eft la vi- ciffitude des chofes humaines ! Ce peuple qui pour le courage Se l'ha- bileté dans l'Art Militaire fervoit dans ce tems-là de modèle & don» a42 JOURNAL D noie des leçons aux aucres peuples , livré depuis à la corruption , fuite ordinaire des difeordes , s'avillic &: languit aujourd'hui dans la plus indigne mollcffe. Sans entrer dans ce qui peut avoir porté M. Argelati à faire à fa Na- tion un fi fanglant reproche , nous allons donner , fuivant notre cou- tume , les titres des Pièces que con- tient ce xxie Volume. Hijioriit Fratris André* Billii 3 patriâ Mediolanenfis , Ordinis Ere- mitarum S. Auguflini } in novem Li- bros digefla , ab anno mccccii. uf- que ad annum mccccxxxi. nunc primitm prodit e MSto Codice perga- meno Bibliothece Ambroftant, cum duobus aliis MSStisCodd. N ovarien - fi uno , & altero ornât iffimi Viri Co- ntins CaroliPertufati collata. Matthai Palmerii Florentini de Captivitate Pifarum , five de bello contra Pifanos gejio à Florentinis anno mccccvi. Commentarius, nunc primUm prodit ex MSto Codice Flo- rent ino. Vita Caroli Zeni Patriùi Veneti Clarijftmi ad Pium II. Pont. Max. AuQore Jactbo Zeno ejus nepote , Feltrenfi& Bellttnenfi Epifcopo , ab Anna circiter mcccxxxiv. ufcjue ad annum mccccxviii. nunc primitm in lucem prodit ex MSto Codice Se- 7/iinarii Patavini. &4nnales Senenfes ab anno mccclxxxv. ufque ad annum mccccxxii. per Anonymum Scripto- rem dedutli , & nunc primUm publi- ca luce donati e MSStis Libris Se- nenfibus. Brachii Perufini Vita , & gefla ES SÇAVANS; ab anno mccclxviu. ufque ad an- num mccccxxiv. AuElore Johannc- Antonto Campano Epifcopo Inte- ramnenÇi , feu Aprutino , antea édi- ta , nunc in omnium commodum re- ciifa. Leodrifii Cribelli de Vita , rebuf- que gejlit S fort i s bellicofiffimi Ducis, ac inittis Francifci S forint Vicecomi- tis ejus filii Mediolanenfium Ducis Illiiflrijfimi Comment arius nunc pri- mitm prodn è MStoCodiceBibliothe- ca Chr.ftianiffimi "Hjgis. Chronicon Tarvtpnum ab anno mccclxviu. ufque ad annum mccccxxviii. AuElore Andréa de Reduftis de Que/o , nunc primitm in lucem erumpit ex MSto Codice Colla- tino. Chronicon Forolivienfe ab anno mcccxcvii. ufque ad annum mccccxxxiii. AuElore Fratre Hie- ronymo Forolivienfi Ord. Prtdic. nunc primitm in lucem eduilum ex MSto Codice Comitis Brandolini de Brandolinis. Leonardi Atetini rerum fuo tem- pore geftarum Commentanus , ab anno mccclxxviii. ufque ad an- num Mccccxt. antea editus; nunc •J16 Journal des S f avant , autem emendatiits ad fidem MSti Codicis Beraomatis. Hiftoria Florentina italice conf- cripta y Auftore Anonymo } ab anno Chrifli mccccvi. ufque ad annum mccccxxviii. nunc primkm luce donata è MSto Codice Bibliotheca Eftenfis. Chronicon Piflorienfe a condita 1)rbe ufque ad annum mccccxlvi. AuElore fannotio-Manetto Florent i- no L E JOURNAL SCAVANS 5 POUR L'ANNEE M. DCC. XXX II MAY. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY. LE JOURNAL DES SC A VANS. MAY M. DCC. XXXII. HISTOIRE DE L'EMPIRE , CONTENANT SON ORIGINE, fon progrès , fes Révolutions 3 la forme de [on Gouvernement , fa politi- que , fes Négociations , & les nouveaux Reglemens qui ont été faits par Us Traitez, de U^eflphalie & autres , par Aï. Heifs. Nouvelle édition , augmentée de Notes Hiftoriques & Politiques , continuée jufqu' à prefent. Par M. V. G.J.D.G. S. A Paris, par la Compagnie des Libraires. 1731.W-12. 10. vol.&/«-4°. 3. vol. POUR bien fçavoir l'Hiftoire Public d'Allemagne , & pour être de l'Empire, il faut avoir fait inftruit de cette partie du Droit une étude particulière du Droit Germanique , qui eft necelfairc May. K k ij 25o JOURNAL D non feulement aux Allemans, mais encore aux Nations voifincs , il faut être inftruit de l'Hiftoire des Empereurs & des principales révo- lutions arrivées dans l'Empire, de- puis fonétabliflement, c'eft-à-dire depuis Charlemagne jufqu'à pre- fent. C'eft ce qui a fait eftimer l'Ouvrage de M. Hcifs , dont il s'agit ici. L'Auteur y donna un abrégé de l'Hiftoire Se du Droit Public de l'Empire ; & il y joignit plu fieurs Pièces , qui font le fon- dement du Droit Public d'Allema- gne , comme la Bulle d'or , les tranfactions delà paix publique , les Concordats Germaniques, les Ca- pitulations Impériales & les Traitez «le Weftphalie. M. Heifs avoit fini fon Hiftoire de l'Empire au Traité de Weftpha- lie fait en 1648. M. Bourgeois du Chatenet Plénipotentiaire Subdélc- gué de Monfieur &c de Madame d'Orléans aux Conférences de Francfort pour les affaires Palatines, ayant pris le foin d'une nouvelle Edition de l'Ouvrage de M. Heifs quiparuten 1711. continua l'abrégé de l'Hiftoire de l'Empire depuis le Traité deWeftphalie jufqu'en 171 1. ce qui comprend les dernières an- nées de Ferdinand III. & les règnes des Empereurs Leopold & Jofeph. Il continua de même jufqu'en 1711. la fuite des Electeurs & des Princes Ecclefiaftiques , & les Généalogies des Electeurs 5c des autres Princes Séculiers de l'Empire , tant Catho- liques que Proteftans. M. Bourgeois du Chatenet, crut devoir encore joindre à ces augmentations des ES SÇAVANS, Notes non feulement fur la partie hiftorique de l'Ouvrage de M. Heifs, mais encore fur les pièces qui fervent de preuves à l'abrégé du Droit Public d'Allemagne : le Traité de Weftphalie étant regardé aujourd'hui comme la pièce fonda- mentale de la liberté Germanique , M. Bourgeois s'eft attaché à en éclaircir plufieurs articles en rappor- tant ce qui y a donné lieu. Il a joint au Recueil des Pièces la Capitula- tion de l'Empereur Jofeph , lorf- qu'il fut élu Roi des Romains. Cette troifiéme Edition eft enco- re augmentée de plufieurs Notes Hiftoriques 8c Politiques , entre lefquelles il y en a quelques-unes où l'Auteur a cru que M. Heifs fai- foit paraître trop de partialité pour les intérêts de la Maifon d'Autri- che. Les augmentations les plus confiderables font l'Hiftoire du rè- gne de Charles VI. depuis fon avè- nement à l'Empire jufqu'à la fin de l'année 1714. ce qui forme deux petits Volumes & un petit Volume de preuves qui contient les Traitez de Raftad , de Bade &dc Vienne. L'Ouvrage de M. Heifs eft fi connu qu'il ferait inutile que nous nous arrêtaffions à en donner unEx- trair. Ii fuffira de rapporter ici un précis de quelques-unes des Notes qu'on a mifes au bas des pages de l'Hiftoire & de l'Etat de l'Empire, de M. Heifs. Cet Auteur rapporte dans l'Hi- ftoire de Ferdinand III.qu'Amurat Empereur des Turcs fe trouvant en grand danger dans la Bataille qui fe donna près de Warne en 1444. en- M A rre ce Prince & Uladiflas Roi de Hongrie , tira de fon feinune Ho- irie que le Roi de Hongrie lui avoit donnée en gage pour fureté d'une trêve ; Si qu'Àmurat montrant pu- bliquement cette Hoftie & levant les yeux au Ciel s'étoit écrié: Chrifi, fi tu es Dieu , comme tes Chrétiens le difent , venge leur perfidie , ils t'ont donné à moi pour gage de la paix qu'ils ont fi rel'tgieufement jurée ~ & ils n'ont point laiffé de la violer. Cet- te circonstance qui regarde l'Hoftie confacrée eft révoquée en doute , remarque l'Auteur des Notes , par des Hiftoriens dignes de fou Ces Hiftoriens difent qu'Uladiflas avoit conclu une trêve pour dix ans avec les Turcs , avec ferment de part Si d'autre de l'obferver in- violablement , mais qu'Uladiflas pouffé par le Pape , à la follicitation du Cardinal Julien Légat du Saint Siège , qui le difpenfa du ferment , rompit la trêve au préjudice duTrai- té, que dans la bataille l'armée d'A- murat plia dans le commencement. Si que ce Prince fongeant à fe fau- ver , il fut retenu par fes principaux Chefs qui lui montrèrent les Eten- darts des Chrétiens. Cette vue le ranima , ajoute l'Auteur de la No- te , Si lui fit proférer les paroles que l'Hiftoire rapporte en cet en- droit. Mais on pourroit faire une difficulté à l'Auteur de la Note en obfervant que les termes dans lef- quelson fait parler A murât fem- blent fuppofer que c'étoitune Ho- ftie confacrée qu'Uladiflas lui avoit remife pour affurance de l'exécution du Traité. Quoiqu'il en foit 3 M. de Y ; 1732. 2.51 Heifs ne dit point que ce fut à la perfuafion du Légat qu'Uladiflas rompit la trêve ; Si qu'il fuivit en cela les maximes de gens imbus d'u- ne fauffe Théologie , qui croyent que ce n'eft point violer la foi que de ne point tenir les paroles qu'on donne aux Infidèles. L'Empereur Maximilien fils de Frédéric III. eft le premier des Princes de la Maifon d'Hafpourg qui ait porté la qualité d'Archiduc d'Autriche , qui s'eft depuis perpé- tué dans la Maifon de ce Nom. M. Heifs n'a fait aucune mention de cette circonftance dans l'Hiftoire de Maximilien. L'Auteur des No- tes ajoute à cette Obfervation que Brunon Archevêque de Cologne prit le titre d'Archiduc , lorfquc l'Empereur Othon le Grand fon frère, l'établit Régent dans le Royaume d'Auftrafie. En 10Ç8. l'Empereur Henri IV. voulant re- compenfer Erneft II. Marquis d'Autriche des fervices qu'il avoit rendus à l'Empire , en s'oppofant aux incurfions des Hongrois , lui donna la même qualité d'Archiduc. Et en iij£. Frédéric Barberouffc honora du même titre d'Archiduc t Henri frère Si fucceffeur de Leo- pold d'Autriche. Ce fut pour rele- ver Maximilien par un titre qui le diftinguât d'avec les autres Princes d'Allemagne , que Frédéric II. fie revivre cette qualité d'Archiduc en faveur de fon fils , en attendant qu'il pût le faire Roi des Romains. Maximilien voulant enfuite que ce titre demeurât dans fa famille , éri- gea l'Autriche en Aichiduché , Si 2js JOURNAL D lui attribua par fon Edit de fi gran- des prérogatives qu'elles mettent en plusieurs choies les Archiducs d'Autriche au-deffus des Electeurs. M. Hcifsdit dans le Chapitre ie de fon Etat de l'Empire qu'il refte peu de chofes de l'ancien Empire Romain entre les mains des Empe- reurs modernes ; fur quoi l'Auteur des Notes obferve que les plus ha- biles Jurifconlultes Allemans qui ne donnent point dans la viiîon fc moquent de cette dénomination d'Empire Romain , Se que plu-: lîeurs même parmi les modernes ne lui donnent point ce titre Si. fe con- tentent de l'appeller l'Empire d'Al- lemagne. Il ajoute qu'il n'eft point à fouhaiter pour l'Allemagne Se pour les Princes de l'Empire que les Empereurs fe rendent maîtres de Rome Se de toute l'Italie, Si que l'étendue des Royaumes ne contri- bue pas toujours à leur folidité ni à la félicité des peuples. C'eft une grande queftion entre ceux qui ont traité de la Conftitu- •tion de l'Empire d'Allemagne, de fçayoir fi l'Empire eft une Monar- chie ou une Ariftocratie., depuis que l'Empire eft forti delà Maifon de Charlemagnc. M. Heifs ayant rap- porté plufieurs raifons de part Se d'autre , fe détermine pour le fen- timent de ceux qui font de l'Empe- reur le Monarque de l'Allemagne. L'Auteur des Notes en tait plu- fieurs fur ce morceau ; Se ce qui re- faite de ces différentes obfervations, c'eft que l'Empire eft compofé de plufieurs Souverains qui fe font unis fous un chef qu'ils onc élu pour ES SÇAVANS; leur confervation commune , & qu'Us prétendent avoir le droit de dépofer , s'il donnoit atteinte à leurs libertez. C'eft pourquoi il adopte la définition de Puffendorf, que l'Em- pire eft un Corps compofé de plu- sieurs Souverains affociés fous diffé- rentes conditions , qui font tous obligés d'avoir pour leur Chef un grand refpeft. Les Notes fur les Traitez de Munfter Se d*Ofnabrug pourront être utiles à ceux qui n'ont point vu le Recueil des Négociations, ou l'Hiftoire particulière de ce Traité. Nous n'en rapporterons ici qu'un feul exemple. L'article 4. du Traité de Munfter porte que le Cercle de Bourgogne fera Se demeurera Cer- cle de l'Empire , après que les dif- férends d'entre la France & l'Efpa- gne feront affoupis. L'Auteur des Notes remarque fur cet article que ce qui avoit fait la difficulté étoit de fçavoir fi le Roi d'Efpagne, comme Chef du Cercle de Bour- gogne j auroit droit d'envoyer un Député aux Diettes de l'Empire , parce que ce Député ne manque- roit pas d'appuyer les intérêts de la M ai ion d'Autriche. L'Empereur qui vouloir faire valoir les droits d'un Prince de fa Maifon, fe fon- doit fur la Bulle de Charles V. de l'an I54S. qui l'ordonnoit ainiî. Mais on répondoit que cette Bulle n'avoit jamais été acceptée par l'Empire ni exécutée , Se qu'on avoit refufe d'admettre à la Diettc l'Ambaffadeur d'Efpagne , quand il s'y étoit prefenté. Les Hiftoires des Empereur* M A Leopoid & Jofeph qui forment les augmentations les plus confidera- bles de l'Edition de 17-11. ne font que des abrégez, parce que l'Au- teur s'eft voulu conformer au goût & à la méthode de M. Heifs. Ainfi on n'y trouve que les principaux évenemens qui ne font ignorés d'aucunes des perfonnes qui fe font un peu appliquées à l'Hiftoire de leur fiécle. L'Auteur qui donne au public cette nouvelle Edition , s'eft étendu davantage fur le règne de Charles VI. Mais un particulier qui écrit l'Hiftoire d'Evenemens fi proches quand il n'a point eu de part aux affaires de l'Etat } ne peut guéres rapporter que ce qu'il a ap- pris dans les Nouvelles Publiques , dans les differens Traitez entre les Souverains , ou de quelques Re- Y î 1 7 3 2. n;j cueils de Pièces qu'on publie de tems en tems. L'Auteur s'eft parti- culièrement attaché à développer les évenemens des premières années du règne de Charles VI. qui ont le plus de rapport au droit public de l'Empire. Ce qui fc trouve fouvent négligé par les autres Hiftoriens. Les Lecteurs remarqueront encore une différence ienhble entre les deux Auteurs des additions au fujet de la manière dont ils parlent des trois derniers Empereurs. On s'ap- perçoit d'abord que le premier étoit un François qui écrivoit dans le tems que la guerre étoit allumée en- tre la France & la Maifon d'Autri- che j & que le fécond eft un étran- ger qui a compofé fon Hiftoire de Charles VI. pendant la paix. LE "BOMBARDIER F R A N Cfl 1 S , OU NOVVELLE Méthode de jetter les Bombes avec prècifïon. Par M. Belidor, Çommiffaire ordinaire de l'Artillerie , Projeteur Royal des Mathématiques aux Ecoles du même Corps , Membre des Académies Royales d'Angleterre & de Prujfe , Correfpondam de celle de Paris. A Paris , de l'Imprimerie Roya- le. 17Î 1. /'«-40. pp. 3 66. fans les planches , & fans le Difcours Préli- minaire. M Belidor ayant donné dans . fon premier Ouvrage les principes généraux des Mathéma- tiques & en particulier de la Géo- métrie qu'il a cru les plus neceffai- tes à ceux qui font employés dans l'Artillerie , traite dans ce Volume des matières qui ont un rapport plus immédiat à cette partie de l'art mi- litaire , qui fait auffi partie des Ma- thématiques. L'Auteur y donne d'abord des Tables où l'on trouve les différentes élévations qu'il faut donner aux Mortiers pour jetter des bombes à toutes les diftances qu'on peut propofer depuis \6. toifesjuf- qu'à deux mille-, enfuite on trou- ve un Eflai d'une Théorie fur la poudre à canon , fuivie d'un Traité des Feux d'Artifices les plus en ufa- ge à la Guerre, & un autre pour la composition de ceux qui fe font pour les RéjoiiiiTances. Les Tables pour les différentes 2;4 JOURNAL D élévations que l'Auteur fait donner aux Mortiers pour jetter des Bom- bes à certaines diftances , eft préce- déd'un Difcours Préliminaire, le- quel contient des Obfervations fur le jet des Bombes Se fur l'ufage des Tables. Il fuffira de donner ici un précis du Difcours Préliminaire pour faire connoître ces Tables qui font l'objet principal de ce Volu- me. On prétend que les premières Bombes furent jettées en 1588. dans la Ville de Wachtendonch en Gueldre , affiégée par le Comte de Mansfeld. Ce n'eft qu'au premier Siège de la Motthe en 1^34. que les François s'en font fervis. L'ufa- ge en a été très-commun fous le rè- gne de Louis XIV. ce fut fous ce Prince que M.Blondel voulant con- tribuer à perfectionner l'art de jet- ter les Bombes , compofa un Ou- vrage fur ce fuje», où il joint fes propres découvertes aux Obferva- tions que les plus grands Géomètres avoient ajoutées à celles de Galilée 5c de Toricelli. Mais on n'a point profité de ces principes dans la pra- tique du jet des Bombes. En effet, les anciens Bombardiers fe font fervi depuis plus de 60. ans de Tables inférées dans les Mémoi- res d'Artillerie de S. Remy , dont M. Blondel n'avoir fait mention , félon la remarque de notre Auteur, que pour les blâmer , fans marquer en quoi elles font défetteufes. M. Belidor foûtient qu'elles font con- traires à l'expérience & aux princi- pes. Par rapport à l'expérience , il rapporte plusieurs épreuves qu'il a ES SÇAVANS, fait faire , & par lefquelles il aflure qu'on a reconnu le peu de fond qu'il y a à faire fur ces Tables. Pour les principes il dit que celui qui les a rédigées, a pris pour règle que les portées étoient en progreffion arit- métique de même que les angles de l'élévation. Ils auroienteu raifon de raifonner de cette manière fi les fi- nus des angles de degré en degré étoient entr'eux en progreffion arit- métique , car les amplitudes des pa- raboles font dans la raifon des finus des angles doubles de ceux où le Mortier a été pointé ; mais il ne faut qu'avoir appris les premiers élemens des Mathématiques pour fçavoir que les finus des angles ne font point entr'eux dans une pareil- le progreffion. Ce qui a trompé l'Auteur de ces anciennes Tables , fuivant que le conjecture M. Beli- dor , c'eft qu'en pointant le Mor- tier fous l'angle de 10. n. 12. 13. 14. & 15. degrez les portées fur lefquelles ils ont fait leurs épreuves différent entr'elles d'environ 8. toi- les. Ce qui fembloit former une progreffion qui n'eft point fort éloi- gnée de l'aritmétique , mais s'ils avoient continué de tirer de degré en degré depuis dix jufqu'à 45. ils auraient vu qu'à mefure qu'ils ap- prochoient de la plus grande ampli- tude , la différence des portées de- venoit toujours plus petite, &c ils auraient vu qu'une Bombe chaffée à 120. toifes avec deux livres de poudre, fous l'angle de ly. degrez n'eft pas chaffée à plus de 240. toi- fes avec la même charge 345. de- grez , quoique les anciennes Tables fuppofaflent M A fuppofaffent que cette Bombe dé- voie aller à }6o. toifes. M. Belidor fuppofe pour princi- pe de fes Tables , ce qu'il a établi dans Ton Cours de Mathématiques. Quand on cire plufieurs Bombes fur differens degrez d'élévation , en fe fervant toujours de la même char- ge , les amplitudes des paraboles font dans la raiion des finus des an- gles doubles de ceux où le Mortier a été pointé. Erjfuite il fait obfer ver que le finus total étant le plus grand de tous les finus, il eft celui du plus grand angle double , fous lequel une Bombe puiffe être jettée. Ainfi la plus grande portée fera fous 45. mais le» finus de 30. degrez étant la moitié de celui de 90. les portées fous 15. & 45. degrez , feronteom- me les finus de 50000. tk de iooooo. d'où il s'enfuit que la por- té: de 45 . degrez eft double de cel- le de 15. Si que li une Bombe a été jettée à 100. toifes de diftance, le Mortier étant pointé 215. degrez , fi on jette une Bombe pareille, avec la même charge & le même Mor- tier pointé à 45. degrez , cette Bombe ira tombera 200. toifes. L'Auteur marque enfuite com- menton doit faire ufage des Tables dreffées fur ces principes. Nous ne rapporterons qu'une des applica- tions qu'il en fait. » Si l'on vouloir tirer un Mortier à deux livres de poudre, pour chafler une Bombe à 250. toifes il faudroit commencer par en tirer une à 1 j. degrez (car l'Auteur a fuppofé dans fes Tables le coup d'épreuve à 1 5. degrez ) & chercher par tel moyen qu'on vou- May. dta à quelle diftance elle aura été, & fuppolé qu'on fçache que c'eft à 160. toifes pour connoître à quel degré il taut pointer pour aller à 250. toiles , on cherchera dans la Table au fommet d'une des pages le coup d'épreuve qui va à 160. &c dans la colonne de cette épreuve au rang des toifes le nombre 250. on voit qu'elle répond à 25. degrez 41. minutes , qui eft l'élévation qu'il faut donner au Mortier. M. Belidor fait remarquer d'au- tres avantages qu'on peut retirer de fes nouvelles Tables , qui font de déterminer par leur moyen U charge qu'on doit employer pour chafler les Bombes à une diftance fort éloignée, d'y trouver toutes les portées qui peuvent fe rencontrer dans la pratique, de trouver fans mefurer à quelle diftance aura été tomber uneBombe qu'on aura jettée fous une élévation quelconque. Sur la fin du Difcours Prélimi- naire, notre Auteur fait des Obfer- vations fur la forme différente des Chambres des Mortiers, fur leur plus grande portée, fur les Bom- bes , fur la manière de charger fur la manière de pointer , fur le coup d'épreuve , fur le choix de l'élévation du Mortier , fur lesplat- tes-formes , fur la différence que les changemens de poudre & de l'air peuvent caufer dans les por- tées ; enfin fur la manière de tirer les Bombes à Ricochet , dont on a fait les premières épreuves pour l'attaque des Places à l'Ecole de l'Artillerie de Srrasbourg en 1725. Au fujet des différences qui fur- Ll z;5 JOURNAL D viennent aux ponces par les chan- gemens de i'air , notre Auteur a éprouvé pluheurs fois que toutes les autres chofes étant d'ailleurs égales , les portées font beaucoup plus courtes pendant la grande ar- deur du Soleil que pendant la fraî- cheur du matin Se du foir , 5c qu'un orage qui change tout d'un coup l'air du chaud au froid , pro- duit du changement dans la portée. Il ajoute que la poudre châtiera la Bombe plus loin , lorfque le Mor- tier fera dans un fond , que quand il fera fur un lieu fort élevé, parce que l'air étant, dit-il, plus con- denfé dans le premier que dans le fécond, le reffort de la poudre par- ticipe de ces différences. Nous remarquerons en finiffant ee qui regarde les nouvelles Tables de M. Bclidor , qu'on en a fait plu- fieurs épreuves en prefence des Ca- pitaines du Régiment Royal Artil- lerie , du Bataillon de la Perrelle Se des Commandans d'Artillerie de l'Ecole de la Fére, qui ont certifié que par le fecours de ces Tables on peut tirer les Bombes beaucoup plus jufte que l'on n'a fait jufqu'à prefent. Le jugement de ces Offi- ciers ne peut être que d'un grand poids, & fait beaucoup d'honneur à M. Belidor , qui par le moyen d'un principe fimple des Mathémati- ques a trouvé le moyen de tirer les Bombes avec plus de précidon. L'EfTai de l'Auteur fur h pou- dre mérite l'attention des Pbyfi- ciens. Il entreprend d'y prouver que les effets de la poudre doivent acceffairement dépendre , 1 °. Des ES SÇAVANS; propiierez de l'air, car la poudre n'eff: qu'un feu qui a la vertu de met- tre l'air en action , après quoi c'eft l'air feul qui produit tout le refix ; z°. Desqualitez des matières dont la poudre elt compofee ; 30. De la manière dont elle s'enflamme Se de la loi , félon laquelle fe lait cette in- flammation. Par rapport à la première de ces proportions l'Auteur fait pluiîeurs remarques fur le reflort de l'air , Se fur les grands efforts dont l'air elt capable, quand, étant renfermé , il le trouve raréfié jufqu'à un certain point. L'Auteur vient enfuite aux trois matières qui compofent la. poudre, le Salpêtre, le Souffre & le Charbon. Le Salpêtre , félon lui,n'eft pas une matière inflamma- ble , comme on le croit communé- ment , mais un fel mêlé de beau- coup d'air fubtil. Si ce fel paroîc s'enflammer quand on le jette fur des charbons ardens , c'eft que le falpêtre met en action les parties fultureufes du charbon,qui ne pour- roient s'exhaler faute d'être affez agitées. L'Auteur confidere le fouf- fre comme une huile unie à beau- coup de fel fixe. Comme il ne faut qu'échauffer l'air pour le raréfier au point que fait la poudre , le fouffre mêlé avec le falpêtre fuffiroit feul pour en produire l'effet ; mais com- me le falpêtre n'étant mêlé qu'avec le fouffre , produit dès qu'il eft en- flammé un vent h fubit Se h violent qu'il éteint en même tems la flam- me du fouffre , il a fallu mêler du charbon , qui a la facilité de s'allu- mer aifémem , Se qui au lieu de s'e- M A Y » 1 7 3 *• 2 SI teindre par la trop grande agitation Le Traité des Feux d'Artifice les du falpêtrenefaitque s'en allumer davantage. Sur la troifiéme propofirion l'Auteur fait voir que la poudre s'allume fucceiïivement , & il tire de là des règles pour lui donner plus d'action & de force , en faifant enforte qu'il s'enflamme en même tenu une plus grande quantité de poudre. L'Auteur foûtient ici con- tre le fentiment commun, que plus une Picce de Canon eft échauffée par un grand nombre de coups qu'on tire de fuite , & plus les Bou- lets dpivent aller loin. Il aiïure au contraire qu'il a éprouvé que le pre- mier coup va plus loin que tous ceux que l'on tire enfuite. Il ajoute pour expliquer la raifon phyfiquc de cette expérience , qu'au pre- mier coup l'air eft beaucoup plus condenfé dans la chambre où il eft mêlé avec la poudre , & qu'il doit par confequent produire plus d'effet que quand il eft raréfié parplufieurs coups qui ont été tirés de fuite. Après cet Effai Phyiîque fur la poudre , vient la compoiîtion des Feux d'Artifices les plus en ufage à la Guerre. Cette partie de l'Ouvra- ge eft purement méchanique ; l'Au- teur y apprend la manière de char- ger les Bombes & les Grenades , la compofition des Fufées pour les Bombes &c pour les Grenades , des Tourtaux &c des Fafcines godron- nées , des balles à feu qu'on jette avec le Mortier ou avec la main , plus ufités dans les Réjoiiiffances n'eft point de M. Belidor , mais de M. Waren Lieutenant d'Artillerie de M. le Duc de Lorraine ; M. Waren , ditnetre Auteur , eft con- nu pour l'homme du monde qui eft le plus au fait de cette feience, ayant fait exécuter un grand nombre de magnifiques Feux d'Artifice pour le plaiiîr de fon Prince. M. Waren explique dans le premier Chapitre de fon Traité les matières qui fer- vent à former les Feux d'Artifices & la manière de les préparer, il diftin- gue enfuite les Pièces des Feux d'Artifice en groffes & en petites. Il traite de ces dernières dans le fé- cond Chapitre. Dans les fuivansil enfeigne la manière de conftruirc les Fontaines à feu & les Fufées de Soleil , les différentes efpeces de Fufées volantes , les Bombes d'Ar- tifice , les Globes , les Pots à fleurs , les Pots à feux, les Trompes. Il ap- prend dans le feptiéme Chapitre comment on peut faire paroître dans un Feu d'Artifice des armes , des perfonnages & des lettres en- flammées. Enfin il fait voir com- ment , pour compofer un tout de ces différentes parties, on ordonne un Feu d'Artifice. Ces deux derniers Traitez dans lefquelsles Auteurs n'ont eu en vue que la pratique , pourroient don- ner lieu aux Philofophes & aux Mathématiciens de faire beaucoup de reflexions. Llij 2j8 JOURNAL DES SÇAVANS, JNTRODVCTION GENERALE A L'ETUDE DES Sciences (jr des Belles-Lettres , en faveur des verfonnes qm ne ffavent que le François. A la Haye , chez Ifaac Beauregard , dans le Pooten. 173 1. vol. in-iz. pp. zyC. fans compter la Préface qui eft de 24. pages. LE S perfonnesque l'Aurcur a en vue danscerte Introdu&ion générale aux Sciences & aux Belles- Lettres, font i°. de jeunes gens qui ayant très-négligemment employé, ou entièrement perdu le tems dans les Collèges , s'apperçoivent enfin du tort qu'ils ont eu , & voudroient reparer cette perte : i". Des Offi- ciers Se des Gentilhommesqui dé- terminés par leur temperamment ou par la htuation de leurs affaires, prennent de bonne heure le parti de la retraite , & cherchent dans cette retraite à fe défennuyer par la lecture. Les uns & les autres fauffe- ment perfuadés que la feience eft inacceffible à quiconque n'en a pas dès fi première jeuneffe cultivé avec foin les principes , fe bornent à des Livres de pur amufement , &c fe condamnent d'eux-mêmes à une ignorance dont ils s'imaginent qu'il n'eft plus tems de fe délivrer. No- tre Auteur a tâché de s'accommo- der ici aux befoins de tous ceux qui font dans ce préjugé. » Il marque en peu de mots la ■» neceffité des études , & le choix » que l'on en doit faire félon le de- » gré d'utilité de chaque feience , » & le plus ou le moins de rapport m qu'elle a dans l'état que l'on a ém- it bradé. Il indique les fources où » l'on en peut puifer les élemens , » & nomme les Livres à peu près » dans l'ordre où il juge qu'd eft à » propos de les lire. 11 avertit que fon but n'eft pas de propofer tous les bons Livres fans exception. La tâche feroit effrayan- te pour quiconque commence d'é- tudier. Mais ileroit pouvoir affurer que fi on fuit fidèlement le cours d'étude qu'il trace , on trouvera dans les Livres qu'il défigne , affez de lumière pour connoître les au- tres Ouvrages dont on aura befoin dans la fuite. 11 y a des Voyages, dit-il, où il fuffit d'abord d'être mis dans le bon chemin-, on ne man- que point en avançant , de rencon- trer fur fa route, des guides qui mé- nentauiïi loin qu'il raut aller. lien eft de même des feiences -, le tout dépend fouvent d'en avoir entamé l'étude d'une manière qui en favo- ri fe le fuccès. L'Ouvrage eft divifé en quatre Parties : dans la première , on trai- te des Icienccs , &c dans la féconde , des Belles-Lettres; les deux autres ne font pas encore au jour ; l'Au- teur annonce qu'il y parlera de l'Hiftoire 6V de la Religion. On a coutume dans les Collèges de commencer par les Belles-Let- tres ; notre Auteur fuir une autre route : il commence par les Scien- ees; ce qu'il fait fans doute parce que ceux pour qui il écrit étant for- as delà première jeuneffe, font plus M A Y , 1752. 2jp capables des Sciences que ne le font du rapport avec les emplois dans les enfans qu'on mec au Collège. D'ailleurs les Sciences, à confiderer le but que l'Auteur fe propofe dans la première Partie , regardent les devoirs , & font une préparation utile aux emplois -, or il eft certain qu'en ce fens , elles méritent les premiers foins : mais après y avoir donné le tems & l'application ne- ccffaires , rien n'empêche qu'on ne donne aulli quelques heures à d'autres fortes d'études qui fervent à orner Se à divertir l'efprit, cVqui ont été appellées pour cette raifon les Belles- Lettres , Se par nos ayeux tes Giyes-Sciences. C'eft fur ces étu- des que roule la féconde Partie. No- tre Auteur demande d'abord fi elles font convenables à un Chrétien } Se il répond i°. Que fi on fait refle- xion que l'efprit a befoin d'un dé- laflement honnête , on neluirefu- feri point celui que lui offrent les Belles-Lettres: 20. Que générale- ment parlant , elles fervent à polir ce même efprit que l'on tâche d'en- richir par les études graves Scférieu- fes : }°. Qu'on peut s'appuyer ici de l'exemple des Pères de l'Eglife , dont quelques-uns ont fait un ex- cellent ufage des Belles - Lettres : 40. Que dans ces derniers tems on a publié quantité de Livres de pieté, dont la le&ure fait fentir que ceux qui les ont compofés n'ont pas cru les Belles - Lettres indignes d'un Chrétien : 50. Qu'il s'agit feule- ment de ne s'y pas livrer d'une ma- nière qui dérobe le tems& l'appli- cation que l'on doit à fon état , Se par confequent aux Sciences qui obc lcfquels on eft engagé. C'eft par ces conliderations que l'Auteur a cru devoir faire entrer ici les Belles-Lettres dans fon plan. La première Partie de ce plan, comme nous l'avons remarqué , concerne les Sciences. L'Auteur la commence par tracer à ceux pour qui il écrit, une idée des études en gênerai. Il leur fait remarquer , i°.Qu'il en eft desLi vres comme de la lumière , Se que comme la trop grande quantité de lumière n'éclai- re pas , mais éblouit , la trop gran- de quantité de Livres , quand on les veut tous lire à la fois , nuit plus qu'elle ne fert : 2°. Que les Grecs n'étudioient qu'en leur langue 3 qu'ils n'avoient à apprendre que les chofes ; qu'on pourroit les imiter > &C que les François le peuvent au- tant Se peut-être plus qu'aucun au- tre peuple , puifqu'ils ont en leur Langue prefque tous les bons Li- vres de l'Antiquité , Se outre cela quantité d'Ouvrages modernes pleins de découvertes utiles qui ont échappé aux ancien? i la Phyiï- que par exemple Se les Mathéma- tiques ayant acquis de grandes ri- cheffes dans ces derniers tems; d'où notre Auteur conclut que l'igno- rance des Langues fçavantes eft un mauvais prétexte à un François pour fe difpenfer d'étudier les Sciences , puifqu'on peut devenir très-fçavant fans fçavoir ni Grec ni Latin. Il avoiie que ceux qui tra- vaillent aux recherches hiftoriques^ Si autres femblables,qui demandent un certain genre d'érudition , ont à *6o JOURNAL D la vérité,befoin de fçavoir la Langue Larine Se d'autres Langues, pour en- tendre les actes qui fervent à dé- brouiller ou à conftater les circon- stances d'un fait ; mais il prétendque lorfqu'on n'éfudie que pour le ror- mer le cœur par les préceptes de la morale , par les exemples de l'Hi- Itoire Se par les maximes d'une foli- de fagefTe , ou pour enrichir fon efprit de ce que les Sciences ont de plus utile foit par rapport aux de- voirs , foit par rapport aux befoins , ou qu'enfin on étudie pour orner fon efprit des grâces que les Belles- Lettres ajoutent aux dons natu- rels , en perfectionnant la manière de penfer Se de s'exprimer , ou en- fin pour fe faire une occupation honnête Se agréable , il prétend que dans tous ces cas on peut , avec la feule langue Françoife , acquérir une connoiflance folide des Scien- ces , Se même ce que quelques-unes ont de plus fin ou déplus fublime. Mais il obferve que les études doivent être conduites avec choix : Que comme l'efprit humain a fes bornes en gênerai , chaque efprit a les fiennes en particulier ; qu'ainfi étudier tout , c'elt le moyen de ne rien fçavoir ; parce qu'alors la mé- moire fefurcharge , l'efprit demeu- re accablé, Se confond les idéesou les faits. Notre Auteur compare ceux qui étudient de cette for- te , à ceux qui d'une fenêtre élevée regardent dans une place publique, cv qui à force de voir beaucoup de monde ne vovent perfonne. Puifqu'ilell impolïible de fçavoir tout , il veut qu'on fe détermine de ES SÇAVANS, bonne grâce à ne fçavoir que ce qu'il eft polïble de bien appren- dre ; il veut outre cela qu'on prenne fi bien fes mefures qu'on ne s'attache qu'aux Sciences qui font les plus propres à l'état qu'on a ern- brafle. Il cite fur cela , comme des exemples ridicules, i°. le Prêtre Folengo Religieux Bénédictin , qui au lieu d'étudier l'Ecriture Sainte Se les Percs, s'amufoit à compofer des Livres entiers de vers burlef- ques qu'il nommoit Macaroniques, Se à former en Latin un nouveau jargon rempli de plates bouffonne- ries- i°. Arnaud de Villeneuve Mé- decin de profelfion qui fe mêloit de dogmatifer Se d'écrire de la Théo- logie. }°. Un certain Jurifconfulte qui a compofe des Traitez de Mufl- que. Ces maximes générales fur les études , font fuivies d'un grand nombre de reflexions fur le travail neceflaire pour acquérir les Scien- ces , fur les motifs qu'on doit fe propofer en les étudiant , fur les de- grez d'utilité des Sciences , fur cel- les qu'il ne faut que parcourir t fur l'ordre des études , fur les Sciences qui appartiennent à la Philofophie, à 1a Logique , à la Métaphyfique , à la Phy hque , à la Morale , à la Ju- rifprudence , à la Politique , à l'E- conomie ; ce qui fe termine par des reflexions générales fur les Sciences. Nous ne fçaurions donner le détail de tant d'articles ; nous nous bornerons à quelques avis de l'Auteur fur l'étude de la Logique Se de la Phyfîquc : il voudroit qu'on Lût jufqu'à troii fois de fuite MAY la Logique de Port-Royal Se que pour cette première fois on préférât les premières Editions. On entreprit cette Logique pour taire voir qu'un Jeune Ecolier pouvait apprendre la Logique en moins de huit jours , Se cependant on a tellement grolïi le Livre qu'il peut à peine être lu utilement en deux mois. L'Ouvrage fut critiqué, on en voulut juftifier la méthode , Se cela engagea dans des éclairciffemens dont les Ecoliers qui commencent n'ont pas befùin. C'cft pourquoi notre Auteur con- fcille l'Edition la plus fimple Se la moins chargée de ces additions. Régis a auffi donné une Logique dans fon Cours de Philofophie; il eft danslesnouveaux principes;ois le confeille fort ici. On recommande après cela la Recherche de la vérité , far le P. Malebrmche. Il eft vrai que ce Livre eft rempli de bien des ehofes qui appartiennent à la Phyfi- que , Se qu'il eft difficile qu'un jeu- ne homme les comprenne à la pre- mière lecture; mais, félon notre Auteur, cela ne doit pas empêcher de le lire d'abord ; la raifon qu'il en donne,c'eft que ce Livre remplie l'efprit , d'un grand nombre de principes qui influent fur les autres études , Se comme ce n'eft pas un Ouvrage qu'il ne faille lire qu'une fois , on prétend que lorfque un jeune homme, après les études qu'il aura faites enfuite, reviendra à une féconde lecture du Livre , il com- prendra tout Se y trouvera une déli- cieufe fatisfaction. Ce n'eft qu'après cette féconde lecture qu'on lui con- fsille de lire les Critiques qui ont , I 7?5- 2fîl été faites du Syftème du P. Male- branche fur l'origine de nos idées. Quant à la Phyhque générale , voici un échantillon de ce qu'on en dit ici: » Les Phyfîciens tombent » d'ordinaire dans deux deflauts : » ils bâtiftent un Syftême Se y ap- is pliquent enfuite les expériences. » Delcartes a fait cette faute ; il »> Falloir: au contraire raflembler les » expériences , recueillir les véritez «qu'elles démontrent Se attendre » qu'il y eût allez de véritez pour » former un Syftême. Mais , dira- » t-on , il ne feroit complet que » dans un fiécle ou deux. Cela fc » peut , mais ces véritez dévelop- » pées Se démontrées par les expe- rt rienecs feroient certaines , au lien i> que mêlées avec ce qu'il y a de » douteux dans le Syftême entier , » elles perdent le degré de certitude » qu'elles avoient. C'eft ainlî qu'un » homme qui doit recevoir trente » piftoles prifes d'un fac, où il fçaic » qu'entre cinq cens bonnes il y en » a cinquante de faufles , a peur » avec raifon , d'être payé en mau- » vaife monnoyc Cependant com- » me il faut prendre une teinture' "de la Phyfiquc avant que de lire » la plupart des bons Livres écrits » fur cette Science , &: qu'à moins » de quelques principes on ne pour- » roit pas bien les entendre , parce » que ceux qui les ont écrits fuppo- » fent toujours qu'ils parlent à des » gens qui ont au moins les notions j> communes , on peut fe difpofcr » à cette lecture par celle de la Phy- » fique de Rohau.lt } Se par celle » de Régis» 262 JOURNAL DE Aptes ces avis , notre Auteur re- commande la Phyfique deNew ton, puis la Théologie Phyfique de M. Derham qui eft toute dans les prin- cipes de NeWton , &C qui peut ier- vir adonner une grande idée de la fageffe de Dieu dans les opérations naturelles. Il ne veut pas qu'on né- glige les Oeuvres de M. Harfoekery quoique dans fes conjectures phyli- ques il y ait des Hypothéfes qui ont befoin qu'on fe fouvicnne du titre fous lequel elles font publiées. Le défaut des Phyficiens , remarque- t - on ici , eft d'avoir recours à lear efprit dans des chofes où il ne faudroit que des yeux &c de la raifon. Nous pafTons les autres articles de la première Partie pour donner des exemples de la féconde. L'Auteur parle d'abord de ce qui concerne les Belles-Lettres en général , puis de ce qui concerne le bel Efprit, l'Elo- quence, le Style, la Poche, les Ro- mans, le Poëme Dramatique , l'E- légie, les Cantates , la Satyre , les Epîtres, 1a Fable , la Peinture, la Mufique ,1e Génie , le Goût. Pour éviter l'embarras du choix dans ces dirl'erens fujets , nous nous bornerons à l'article de l'éloquence que le hazard nous met fous la main. L'Auteur fait d'abord obfer- v-erà fon élevé , i°. Que l'éloquen- ce ne confifte point, comme plu- ficurs fe l'imaginent , à parler long- terris &c avec facilite fur le premier fujet qui fe prefente , mais à ne par- ler que de ce que l'on fçait , & à énoncer fes penfées d'un manière convenable. S SÇAVANS, i°. Que la bienieanec renferme quatre rapports aufquels il faut avoir égara : rapport au tems , rap- port à la perfonne qui parle , rap- port à ceux à qui l'on parle , rap- port à la matière que l'on traite. 3°. Que l'omillion d'un feul de ces rapports , eft une faute eilen- ticlle contre l'éloquence. 4°. Que quelque habile que foie un homme il ne parlera jamais élo- quemment lur un point qu'il ne pofledera pas à fond ; qu'Horace pour cette raifon , veut que l'on choifiiïe fa matière , qu'on l'exami- ne de tous cotez , &c qu'on l'arran- ge dans fon efprit , parce qu'alors l'éloquence ne manquera jamais au befoin. On remarque à ce ïujet,que l'obicurité dans le difeours ne (çau- roit être qu'une fuite de l'obfcurité qui eft dans la penfée de celui qui parle. Sur quoi on cite ces vers de Boileau qu'on ne fçauroit jamais avoir trop prefens à la penfée. II cil certains efprits dont les fombre» penfées Sont d'un nuage épais toujours embar- rallées , Le jour de la raifon ne fçauroit les per- Arant donc que d'écrire apprenez à pen- fer. Selon que notre idée efc plus au inoins obfcure , L'expreflîon A V R I no nunc primitm prodit ex AiSco Cedice Florentins. SUISSE. D b Zurich. M. Jean-Jacques Scbeucbzer , toujours applique à l'étude de la Phyfique,vient de publier en Latin & en forme de Théfe, fous le titre de Cttlum trijki, ad Julias Calendas anni mdccxxxi. /'«-4e. Une Des- cription très - circonftanciée d'un Orage extraordinaire , arrivé la nuit du 30. Juin au premier Juillet 173 1. &qui fit beaucoup de dégâts dans une grande partie de la Suific , fur tout dans le Canton de Zurich. Cette defeription eft accompagnée de plufieurs Obfervations Phyfi- ques fur la différence des vents , fur la conftitution de l'air , fur les variations du Baromètre , &c. pen- dant toute l'année dernière. ANGLETERRE. De Londres. Bovvyer diftribue aux Soufcrip- teurs l'Edition in-folio du Livre in- titulé M armera O-xonienfia, don- née par M. MaittaWe. W. Innys f J. Ojborn , T. Long- man & autres Libraires diftri- buent de même l'Ouvrage de M. yînderfon , lequel a pour titre : The Royal Généalogies , ou Tables Généalogiques des Empereurs , Rois & Princes depuis Adam jufqu'à prefent. C'en: un Volume in-folio de 81 1. pages fans compter l'Epître Dédicatoire au Prince de Galles , la Pîéface & les Tables. Ce Livre cft divifé en deux Parties. La première , commence par une Hiftoire Chronologique du Monde , depuis la Création jufqu'à l'Ere Chrétienne , Se comprend ks Avril. L; 1732; 243 Généalogies des premières & plus grandes Familles, ainfi que des plus anciens Souverains de Y A fie , de V Europe , de 1" Afrique & del'^;»*- rique jufqu'à Charlemaqtie , plu- fieurs même de ces Généalogies defeendenc jufqu'à prefent- La fé- conde Partie contient des Généalo- gies des Princes & des Rois de l'Europe depuis Cb.irlemagne jufqu'à ce tems-ci i 5c finit par celles des Rois de la Grande Bretagne. M. Anderfon , qui d'abord r.'a- voit penfé qu'a traduire de l'Alle- mand en Ai.'rlois les Tables Généa- logiques fi connues du céidbic M. Hubneràe Hambourg, s'elt trouvé engagé, après avoir lu les Hiftorens & lesGéné.dogiftes anciens 6V: mo- dernes , à donner beaucoup plus d'étendue à fon Ouvrage ; mais il reconnoît qu'il a fuivi pour drefier fes Tables la méthode de M. Hub- ner qui lui a paru préférable à toutes les autres , quoiqu'il fe foit avanta- geufement lervi de ce qu'à écrit M.Imhof, quand il s'en: agi de re- foudre ou de débrouiller grand nombre de difficultez Chronologi- ques & Généalogiques. M. Alexandre Gordon qui don- na en Anglois en 1727. in-folio l'A tinerarium Septentrionale^ ou Voyage au Nord de la Cjrande Bretagne } vient de publier dans la même Langue, chez Vandenboechjz Com- pagnie , un Supplément à cet Ou- vrage , fous le titre à' Additions & de ÇorreBions , avec quatre nouvel- les planches gravées. Ce Supplément , qui contient plufieurs DilTcrtations & des Dcf- criptions d'Antiquitez Romaines&C d'autres Monumens découverts de- Ii 244 JOURNAL D puis peu en EcofTe & au Nord de l'Angleterre > cft imprime de la même forme que 1' 'Itinerarium Sep- tentrionale y afin qu'on pui (Te com- modément les faire relier cnfemble. LaTraduction Latine de ce Livre avec celle du Supplément , s'impri- me actuellement en Hollande. T. IVoodvvard- a en vente le fé- cond Volume de la Traduction Angloife à'Euclide, faite par M. Edmond Stone de la Société Royale i fur l'Edition de M. le Docteur Gregory. Le Traducteur a ajouté dans ce Volume une DifTer- tation fur la Vie &: les Ouvrages d'Euclide t avec une réponfe aux Objections que quelques Critiques modernes ont faites contre les Ele- mens de cet ancien Géomètre. Meilleurs d'Oyty &cCdlfon} qui ent traduit en Anglois le DiSlion- naire de la Bible du Pcre Calmet y ont propofé de faire imprimer cet Ouvrage parSoufcription. Ilferaen trois Volumes in-folio de 6X0. feuil- les fans compter un nombre confi- table de planches gravées. La Sous- cription cft de (ix guinées , dont deux feront payées en fouferivant , & les quatre autres en recevant l'exemplaire. M. Peck_, qui publia , il y a huit ans , les Annales de Stamford t va donner une Edition de la Vie de Mylord Cecil Burghleigh y premier Miniftre de la Reine Elizjtbeth Si Grand Tréforier d'Angleterre , écrite par un Auteur contemporain. L'Editeur y joindra des Notes tirées du Journal Original de ceSeigneur, avec un Recueil de Lettres, tant de Mylord Burghleigh que de quelques autres Miniftresdcla Reine Elisa- beth* ES SÇAVANS; Il doit inceffamment paraître une nouvelle Edition de l'Hiftoirc de l'Eglifc de Durham , écrite par Simeon de Durham , Au- teur célèbre du douzième fiécle. M. Selden avoit déjà publié cet Ouvra- ge en i£j2. avec d'autres anciens Hiftoriens. L'Edition que nous annonçons & dont le public eft re- devable à M. Fudd doit être beau- coup plus correcte , puifqu'il la donne fur un Manufcrit de l'Eglife même de Durham , lequel , s'il n'eft pas de la main de l'Auteur , paiTe du moins pour être de fon tems» Il a été de plus collarionné fur deux autres MIT. l'un de Cambridge , &C l'autre de la Bibliothèque Cottonien- ne. L'Editeur a fait imprimer en même tems quelques autres Pièces qui ont rapport à la même Hiftoirer entr'autres celle-ci : De injujia perft- cutione Guillelmi Epifcopi Dunel- menfîs, dont il recherche quel eft le véritable Auteur dans une Diflerta- tion particulière. On nous mande que le même M. Rudd , homme fort verfé dans la connoiffance des Antiquitez An~ gloifes , fe prépare aullï à donner un Catalogue raifonné de toutes les Chartes de l'Eglife de Durham , lefquelles font en grand nombre & dont la plupart font très-anciennes, auili-bien que de tous les Mfl. con- fervés dans la Bibliothèque de cette Eglife. Ce Catalogue fera , dit-on , à peu près dans le goût de celui que Lambecius a fait des Mit. de la Btr bliotheque de l'Empereur. FRANCE. De Paris. Quelques Libraires débitent ici en cinq Volumes /»-8°. les Oeuvres A V R I de M. le Baron de Valeff , impri- mées à Liège , chez Everard Kints. 173 1. L'Auteur a jugé à propos de fe deiîgner suffi par le nom à' Auteur des Titans ou Géans , Poème imprimé z'w-iî.à Paris en 1725. Le premier de ces cinq Volumes, dédié au Prince Eu- gène, contient un Recueil d'Odes à qui on donne le titre d'Héroïques & Galantes, avec une Description delà Hollande en vers, & quelques autres Poëfies. Le Tome 1 1. & III. renferme des reflexions en profe fur l'Iliade d'Homère , lefquelles fontadreffées à l'Empereur par une longue Epître Dédrcatoirc. L'Au- teur a fait précéder les reflexions qui font dans chacun de ces deux Volumes par deuxOdes de fa façon, dont l'une eft intitulée les Préjugez., & l'autte , la Vérité , contre Homère dans ïefpnt de [es Parttfans. On trouve dans le quatrième Volume deux Pièces de Poè'lie beaucoup plus étendues que toutes les autres. L'une eft un Poëme écrit en Stan- ces &c en huit chants intitulé : le Siècle de Louis le Grand. L'autre qui a pour titre Thémire ou Vss4e- trice nouvelle fur le Théâtre d'Aihé- ne y eft un Poëme allégorique en 1 2. chants Se en vers de dix fyllabes, dans lequel M. de Valef ', fous des noms ou renverfés ou fuppofés , a fait à fa manière la critique ou l'élo- ge des Poètes François &c des Ac- teurs du Théâtre de la Comédie Françoife. Les rues de Madrid en 6. chants, tes défauts des femmes , l'Hifioire de la Porcelaine en profe &: en vers , &i le combat des Echajfes , avec des Dialogues en vers , des Satires & quelques autres Pièces compofenc le cinquième Volume. La Veuve de Lanlne , rue S . Jac- ques , à l'Empereur , a imprimé Hiftoire Critique des Pratiques fu- perfiitieufes qui ont féduit les peuples & embarralfé les Sçavans , avec la méthode & les principes pour dif- cerner les effets naturels d'avec ceux qui ne le font pas. Par le R . P. Pier- re le Brun , Prêtre de l'Oratoire. Seconde Edition augmentée. 1732. in-ii. 3. vol. On en trouve auflî des exemplaires chez Chaubert , Lii braire du Journal. Ce Livre eft dé- dié à M. le Cardinal de Fleury. L'E« diteur y a joint une Préface où l'on explique en quoi confident les aug- mentations, avec un Eloge Hifto- rique du P. le Brun : on a eu foin de conferver dans cette Edition tout ce qui étoit dans la première , com- me le Difcours adrefféaux Evêques de France , la Préface de l'Auteur, & les approbations, &c. Babuty , rue S. Jacques , à Saine Chryfoftome , a mis en vente l'Ex- plication du Livre de la Genefe , ou félon la méthode des Percs , on s'attache à découvrir les Myfteres de Jésus-Christ , & les Règles des mœurs renfermées dans la Let- tre même de l'Ecriture. 173 i.in-12.. €. vol. Explication du Livre de Job , félon ia même méthode , auffi chez "Babuty 1732. in-iz. 4. vol. Voici de quelle manière le Li- braire s'exprime dans fon Avertiffe- ment au fujet de ces deux Ouvra- »ges: L'explication des Livres delà » Genefe & de Job , qui commen- » ce à paroître , eft attribuée à deux m célèbres Auteurs dont le mérite » &c le nom font affez connus. Le » goût du public s'étoit déjà déclaré » par l'approbation qu'il avoitdon- » née aux Conférences, où l'on fai- ±±6 JOURNAL D »> foit levure de ces Ecrits , fit où » ilsétoienr expliqués de vive voix. >» Les copies manufentes qui (ont »» répandues en a fiez grand nombre, m tout imparfaites qu'elles étoient , •> faifoicnt fouhaiter depuis plu- »> fieurs années qu'on pût en tacili- » ter la lecture par le fecours de ul'impreilîon. La providence m'a »mis en état de fatistaire ce jufte »defir , en me faifant tomber en- m tre les mains une copie tort exac- »» te de ces explications. On fentira » avec plaifir , ajoute le même Li- ji braire, qu'outre une fçavanteSc » modefte érudition qui fe fait » remarquer par tout , elles font «très - propres à nourrir la pieté, » qu'elles font dignes de la parole » de Dieu, & qu'elles portent le » flambeau dansles endroits les plus » obfcurs &c les plus profonds des » Livres Sacrés. Difcours fur la Peinture pronon- cés dans les Conférences de l'Aca- démie Royale de Peinture & de Sculpture. Par M. Charles Coypel , premier Peintre de Monfeigneur le Duc d'Orléans. Chez Mariette t aux Colonnes d'Hercule, rue S. Jac- ques. 173 2. Brochure /«-4°.de 34. pp. Ces Difcours font au nombre de ES SÇAVANS, deux : le premier edfurta necejfitc de recevoir des avis , prononcé dans une Conférence de l'Académie le 4e Novembre 1730. Le fécond eit un Dialogue/*»*/* connoijjance de la Peinture , prononcé dans la même Académie au mois d' Aouft 172^. L'Invention de la Poudre. Poème divifé en trois Chants. Dédié à S. A. S. Monfcigneur le Duc du Mai- ne. Par M. D. R. Chez ?ojfe , rue S. Jacques , à la Fleur de Lys d'or. 1732. in-%°. Théâtre de M. le Grand Comédien du Roi. Chez la Veuve de Pierre Ribou , vis-à-vis la Comédie Fian-. çoife. 1 7 j 1 . in- 1 2. 4. vol. Suite de ï'Hiftoi^e S.cretie des Femmes Galantes de V Antiquiiè. Tom. IV. V. & VI. Chez Etienne Ganeau , rue S. Jacques. 1731» in - 1 2. Perkjn faux Duc d'Tork^t fous Henri VII. Roi d'Angleterre. Nou- velle Hiflorique. Par le iîeur la Paix de Lizancour. Chez Nyon , Place de Conty. 1732. inii. Lettre à Madame T. D. L. F. fur Monfieur Houàart de lu Motte de l'Académie Françoife. Par M. l'Ab- bé Tmblet. Chez Chaubert , Librai- re du Journal. P Faute a corriger dans le Journal de Mars 1732. Age 129. colonne 1. ligne 1. en même , ///« en même tems. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Avril 1752. LEs Orai/ons de Ciceron , traduites par M. de Villefore , Page l%9 Elet/.ens ou lnflttution de Chymte f 199 Lettres édifiantes & curietijes , écrites des Miffions étrangères , 206 Bibliothèque de F . Alphonse Ciaconius , &c. 211 U Argents de Barclay , Traduction nouvelle } îkc. 219 Hijiotre des Rois de Chypre , e\:c. 223 L - mais il compte qu'un homme qui aura lu attentivement les Livres qu'on vient d'indiquer d'abord pour les principes, fera en étatdedifcerner ce qui eft digne d'admiration ou d'indulgence dans ces differens Re- cueils. Notre même Auteur voudroit que fon élevé , pour fe former à l'é- loquence , lût aufiî des Sermons choifis , mais de quelle utilité , s'objecte-t-il , cela peut-il être à un homme que vous fuppofez n'être pas un Ecclefiaifiquc , Si qui par confequent n'aura jamais ni Pocca- fionni le droit de prêcher. Cela lui ES SÇAVANS; apprendra du moins , répond - il j. à difeerner 1rs bons Prédicateurs, Se aies prétererà certains Difcoureurs qui ont quelquefois la vogue ; quoique leurs Sermons n'ayent fou- vent d'autres appas qu'une élégance de phrafes foûtenue par un certain gefte & un certain ton. D'ailleurs , ajoûte-t-il quelques lignes après,' on peut dire qu'indépendamment, de la pieté, les traits frappans Si fu- blimes des beaux Sermons , ne font pas tellement attachés aux Ouvra-- ges compofés pour la Chaire, qu'ils ne puiflentêtre tranfportés ailleurs, Si beaucoup fervir à perfectionner un Orateur dans un genre différent. Cet éclaircilfement pofé , l'on confeille ici aux jeunes gens qui veulent cultiver l'art Oratoire , de lire les Sermons ou Homélies de S. Chryfoftome , comme du feul Père qui fe foit élevé à la véritable éloquence. Tous les autres Pères , dit-on, méritent un grand rcfpecE pour les excellentes chofes qu'ils enfeignent , mais ce Saint mérite outre cela d'être admiré pour la ma- nière dont il annonce les véritez de la Religion. Après S. Chryfoftome l'on con- feille les Oraifons Funèbres recueil-» lies en fix petits Volumes ; les Ser- mons du P. Bourdaloiie , du P. de la Rue, du P. Cheminais, du P. Terraflon , du P. Mailîllon , Si de quelques autres Prédicateurs , dit- on , du premier Ordre. M. Arnaud &: M.deSillcrionteu unedifpute fur l'Eloquence de la Chaire. Cela a valu au Public di- vers Traitez donc on confeille ici la M A lecture. Ces Traitez font contenus en un Recueil intitulé : Réflexions fur l'éloquence des Prédicateurs. On recommande encore l'Ouvrage in- titulé : l'Eloquence Chrétienne dans l'idée & dans la pratique , par le P. Gisbert Jefuite. Notre Auteur a mis à fon Livre une Préface où il loue fort le Traité de M. Rollin fur la manière d'enfei- gner & d'étudier les Belles-Lettres. Mais une chofe dont il déclare avoir été charmé dans cet Ouvrage , de de laquelle il feroit difficile de fe dou- ter s'il n'en avertiffoit , c'eft que M. Rollin , dit-il , n'a pas fait ferupu- le de piller par tout. Voici comme il s'explique fur ce fujet. » Une des chofes qui m'ont le «plus charmé dans le Livre de M. *> Rollin , c'eft le foin qu'il a pris »> de mejuftiner fans le fçavoir. Il » avoue de bonne foi qu'il ne fe fait » point un fcrupule ni une honte de »» piller par tout , fouvent même » fansciter les Auteurs qu'il copie , » parce que quelquefois il fe donne »la liberté d'y faire quelques chan- »» gemens , je penfe comme lui & » je ne crois pas que l'ambition qui » fait afpirer au titre d'Auteur doi- »ve l'emporter fur l'utilité de 3* ceux dont on fepropofe l'inftruc- sjfion. Ainfi fans fçavoir que M. » Rollin m'eût donné cet exemple, s>j'ai fuivi la même conduite que » lui. Je n'ai fouvent fait que repe- n ter les penfées des plus grands n Maîtres , & mon Livre n'eft à » proprement parler qu'un tifTu de » de ce qu'ils ont dit avant moi. U« autre article que nous remar- Y ; T7J2. 25y querons dans cette Préface, eft ce qu'on y dit de quelques Auteurs , qui fans avoir aucune connoiiTance des Langues fçavantes , n'ont pas laiffé d'acquérir un rang illuftre dans la Republique des Lettres. On cite fur cela Clément Marot , qui fans Grec ni Latin a pourtant laiffé dans fes Ouvrages , un modèle de ftyle net & naïf, dont les grâces durent encore après deux fiécles ; on cite Valentin-Conrart , qui fans avoir lu Ciceron dans la Langue originale qu'il n'entendoit pas étoit cependant capable de remar- quer les endroits où le Traducteur François avoitma' ^is la penféede cet Orateur , & même de la lui marquer avec afTez de juftefTe. On' cite Racan qui avoi: fi peu de dif- pofition pour le Latin qu'il ne pût , dit-on , jamais apprendre le Confi~ teor , & qui malgré ce défavantage s'eft immortalifé par [es Bergeries Se par d'autres Ouvrages marqués au bon coin. On cite Quinault dont l'érudition étoit fi mince qu'il a confondu les Cataractes du Nil avec les bouches de ce Fleuve, & qui toutefois eft le premier , & en quel- que façon l'unique qui ait excellé dans la compofition des Tragédies en Mufique. Pour ne pas groffir inutilement cette Lifte , notre Auteur remarque que l'on a vu Perrault & tout récemment M. de la Motte , fans Grec & avec fort peu de Latin , compofer des Ouvrages fort eftimables. Il aceufe feulement ces deux derniers d'œveir ofé fort ir de leur fphére , en hasar- dant leur jugement fur des Auteurs M m ij 266 JOURNAL D qu'ils n'entendoient pas. Il dit qu'on a trouvé ridicule que le premier osât dégrader des génies tels qu'Home- tc Si Virgile pour trouver une place honorable à Chapelain (on ami, Se qu'on n'a point applaudi au fécond d'avoir rifqué une Traduction d'Homère , ni d'avoir voulu faire paffer pour des corrections le re- tranchement de tout ce qu'il n'avoit pu rendre avec la force &: la beauté du Grec. D'où on conclut que ce ES SÇAVANS, n'ult pas d'avoir ignoré la Langue Grecque 6v de ne [çaveirque très- peu delà Latine , qu'eft venue la difgrace où on prétend que font tombés ces deux Académiciens , mais d'avoir voulu fe mêler d'un» forte de Critique qui demande qu'on lesfçache. Nous partons plufieurs autres re- flexions de notre Auteur fur cette matière. Il eft tems de finir. CONTINUATION DES MEMOIRES DE L1TTERATVRE & d'Hijloire.Tome XI. Partie I. A Paris, chez Simart , Libraire-Im- primeur de Monfeigneur le Dauphin, rue S. Jacques, au Dauphin. 173 1. vol. in-11, pp. 258. NOUS avons parlé dans neft précedens Journaux , des dix premiers Tomes de cette Continua- tion des Mémoires de Littérature èc d'Hiftoire. Il s'agit prefentement du onzième , dont il n'y a encore que la première Partie d'imprimée. Cette première Partie contient fix Pièces différentes , (ça voir une Dif- fertation fur le Goût , un Difcours fur la Poéfie des Hébreux , un au- tre fur l'Ecriture Sainte , un autre fur le droit des Archevêques de Reims pour facrer les Rois de Fran- ce , une Réplique à la dernière ré- ponfe du P. Bouillard , pour la dé- fenfe de la grande Antiquité du Portail del'Eglifede S. Germain des Prez , Se une Diflèrtation fur un Monument antique trouvé à Narbonne. La Differtation fur le Goût a pour objet,non le Goût en gênerai, maisle Goût Spirituel & Métaphy- fique qui ne varie point & qui eft indépendant des lieux , des tems , des Pays & des âges , parce qu'il n'a pour fondement que la vérité. Le Goût confîderé en ce fens eft ici défini : TJnt idée du vrai bien , re- connu & bien fenti fur chaque chofe dont on juge : l'Auteur conclut de- là qu'avoir le goût bon , c'efl eftimer ou critiquer , far fentiment , & par un jugement implicite de l'efprit , ce que la raifon eftime ou critique après l'avoir examiné. Mais il prétend que cett idée fenfible ne doit être ni trop ni trop peu chargée , tv que dès qu'elle s'écarte de la précifion , le goût devient défectueux, de forte que tous ceux qui faidffenr parfai- tement le vrai, doivent l'apperce- voir de la même manière , parce que la perfection eft une , & que confideréc dans un tout , elle n'a point différentes faces. Il y a une vérité fouveraine, & M A cela pofé, il faut neceflairement, félon notre Auteur , que lorfque cette vérité eft confultée elle éclaire également la raifon dont l'elTence eft la même dans tous les hommes. Il remarque à cette occafion : que l'ame d'un Européan n'eft point différente de celle d'un Chinois : Que lésâmes des premiers hommes n'étoient point non plus d'une au- tre efpece que celles des hommes d'aujourd'hui , & que fi les juge- mens que les âmes portent fur un même fujet font differens , il ne s'enfuit nullement qu'elles foient différentes entr'elles , qu'ainfi on allègue en vain les mœurs antiques ou modernes , pour autorifer cer- tains goûts : Qu'il n'y a autre chofe à conclure dans les contrarietez où font les hommes fur la qualification des objets , fi non que les uns en jugent bien &c les autres mal. La maxime fondamentale de cette Differtation , eft qu'en cha- que objet qui s'offre à l'efprit, il y a un vrai qui le conftitue bon ou mauvais , parfait ou imparfait , agréable ou défagréable ; Que plus il y a de vérité dans cet objet , plus les gens de bon goût en font con- tins ; Que voir précifément ce vrai, en fentir conféquemment l'impref- fion , c'eft avoir du goât ; mais que d'en juger par fes difpofitions per- fonnelles , par les fentimens d'au- trui, par les préventions populaires, c'eft n'en avoir point ou l'avoir mauvais. De forte que ni les mœurs particulières des Nations , ni les paillons diverfement agitées, ni les opinions anciennes , ni les agré- Y , i 73 2. 26*7 mens de la nouveauté , ni les Ulu- lions de la mode , ni les préjugez du peuple , n'ont droit de détermi- ner le jugement quand il eft que- ftion de former fon goût : Que fi les hommes d'un autre tems ou d'une autre Nation que nous , ont le goût différent du notre, cela ne juftifie ou ne condamne ni le notre, ni le leur ; Que tout fe doit décider en faveur de la vérité. Mais comment connoître cette vérité , ne faut-il pas pour cela une grande application ? Non , dit no- tre Auteur , cette étude n'exige point de difeuffions & de médita- tions profondes : Tout fe fait au premier inftant dans une perfonne éclairée , non feulement lorfqu'il faut juger d'un être fimple , mais des êtres les plus compofés. Pour faire comprendre la chofe, on fe fert ici d'un exemple fcnfible : la Philofophie démontre combien de combinaifons d'idées il faut raA- fembler en un moment pour juger feulement de la diftance &c de la Ci- tuation d'un arbre planté au milieu d'une campagne; l'efpritfait pour- tant tout cela fans s'en appercevoir, & il ne le fait pas avec moins de jufteffe. Il en eft de même , félon notre Auteur , de k manière dont un objet excite le fentiment du goût. Si plufieurs ne peuvent parve- nir à en juger fainement , après avoir effayé de le faire , ce n'eft pas la faute de la règle , mais de leur peu de pénétration , & il n'en fauc tirer d'autre confequence , Ci non que ce font gens fans aptitude pour avoir du goût. 8>CS JOURNAL D Toute la DilTertation ne roule que fur cette maxime générale , tournée & maniée de différentes façons } c'efl par tout le même ta- bleau , mais prefenté fous divers points de vue , & avec dirlerentes bordures. Notre Auteur a dit , comme nous venons de le remarquer , que le goût ne doit dépendre ni des lieux , ni des âges , ni des pallions, ni des tems. Il fait , à l'égard de ce dernier point , une reflexion dont les partifans d'Homère ne feront fans doute pas contens. Leur ré- ponfe ordinaire pour difculper ce Poète du reproche d'avoir repre- fenté les Dieux d'une manière peu conforme à l'idée qu'on doit avoir de la Divinité , c'eft qu'il faut fe tranfporter )ufqu'au tems où il vi- voit. L'Auteur de la Differtation dit là - deffus , Qu'il a beau faire faire à fon imagination ce grand Voyage ; Qu'il n'en revient pas plus content : Qu'à.la vérité on pré- tend qu'Homère ne pouvoit repre- fenter les Dieux que tels qu'on les croyoit alors , mais que la réplique à cela effc que comme alors on avoit fur la Divinité des idées extrava- gantes , le bon goût ne peut approu- ver des extravagances ni en elles- mêmes , ni dans le Poète qui les a écrites. Les partifans d' Homère ajoutent qu'il faut du moins rendre juftice à fon art, admirer la beauté de fes peintures , la cadence nom- breufe de fes expreffions : » J'ad- >> mirerai fi l'on veut, dit Ik^dcjfus -, notre Auteur, tous ces traits en * eux-mêmes , niais non dans leur ES SÇAVANS, m application, ni par rapport à ce >> qu'ils expriment. Je fçai que dans u pluiïeurs Grotefques biendcllmés » on peut goûter l'adreffe de l'art ; '•■ mais fi le Peintre nous les donnoit » pour des figures régulières , je » n'eftimerois ni l'Ouvrage ni l'Ou- >s vrier. On peut infpirer du goàt » pour la reprefentation d'un porti- » que, mais il ne faut pas dire qu'on »a voulu faire un Clocher, car » deflors on n'y voit plus l'idée du « vrai. Le faux , tel qu'il eft expri- »,mé dans les Poèmes d'Homère , »> ne contribue ni à la véritable uti- » lité , ni au véritable plaifir de «l'homme ; Quand je voudrai de >i la faine morale , & des allégories » inftructives , je ne les irai pas n chercher dans fes Ouvrages -, je » fçai où en trouver de beaucoup î> meilleures & de plus belles. Ad- >» mire donc qui voudra fon élo- u quence poétique > des qu'il ne » l'employé que fur le faux , je n'en » puis admirer l'ufage ; ou fi elle a » quelque chofe de bon en elle-mê-. » me , & en le détachant du fujet , » ce n'eft plus qu'un vain ornement »,en l'air. Notre Auteur ne s'en tient pas à ces traits : comme les partifans d'Homère veulent qu'on admire dans fes Ouvrages la beauté dudef- fein , la fageffe de lacompofition , la hardiefle &c la juieffe des compa- raifons , l'ordonnance de la narra- tion &: des récits , en un mot qu'on regarde fes Poëlies comme des mo- dèles du Poème Epique ; il répond que peu importe qu'il y ait des modèles pour ces fortes de Poèmes* M A & il demande fi les efprits tombe - roientdans l'indigence fans une pa- reille Poëfie , fi l'on profiterait moins dans les Lettres, &c fi l'ima- gination auroit moins deqfcioi fe re- jouir; Il reconnoît de quelle utilité font les modèles pour i'Hiftoire, pour les Traitez de Politique & de Morale , pour les divers genres d'é- loquence ; mais il foûtient qu'un Poëme Epique n'eft qu'un timide fictions' indifférentes £c puériles , qui ne méritent pas qu'on en élevé l'Auteur fi haut 5c qu'on les compa- re à la Majeftueufc Sublimité des Livres Saints. Car , dit-il, on eft allé jufju'h cet excès , & les amis eC Homère font fur cela des comparai* fons Jérieufes qui font tout-h-fait nfibles. Un Poëte eft encore plus obligé qu'un Hiftorien à foûtenir dans fes peintures les caractères des perfon- nes , &z c'eft en quoi l'Auteur de la Differtation trouve qu'Homère a principalement manqué : il cite fur cela la conduite d'Achilles que le Poëte introduit comme un Héros , Si qui plein de rage contre un Prin- ce illuftre que lui-même a tué , fe venge fur le cadavre de ce Prince , avec toute la baffelfe & toute la lâ- cheté du plus vil efclave. Il dit que le Poëte dans cette image s'écarte de l'idée du vrai , que par confequent cette image ne peut plaire ; & il déclare qu'il en appelle là-deffus à la fincerité de tous ceux qui veulent juftifier Homère, Il ne difconvient pas que ce Poëte n'ait peint les mœurs de fon tems , ôV ne l'ait fait a-vec-toiues les grâces imaginables 3 Y, 1732: 260 mais il prétend que la peinture de ces fortes de mœurs ne fçauroit plaire à des gens non prévenus. Il ne critique pas Homère fur fa verfi- fication , ni fur fon ftyle , il avancé même qu'il y auroit de l'injuftice à le faire , il le critique feulement comme ne renfermant pas dans fes Poëmes les beautez que fes admira- teurs lui attribuent , & comme donnant de faux traits aux caractè- res. Cet article d'Achilles eft un des plus longs de la Differtation , 5C c'eft par où elle finit. Notre Auteur , au refte , qui vient dédire qu'il y auroit de l'in- juftice à critiquer Homère fur fon ftyle & fur fa verfification , n'ap- préhende pas cependant après ce jugement , de fe mettre au nombre de ceux qui n'entendent pas lé Grec , & qui par confequent font auffi peu à portée de juger d'Homé- re par rapport au ftyle & à la verfi- fication , qu'ils prétendent être à portée d'en juger par rapport aux chofes. Vcici fes propres termes : » Mais nous raifonnons en vain , » les Partifans d'Homère regardé- )> ront toujours avec compaffion » ceux qui , fans fçavoir fa Langu?,. » ont l'audace de le critiquer .... i> Je prendrai néanmoins la liberté » d'avancer une propofition qui » leur paroîtra fans doute un para- is doxe bien nouveau ; c'eft que »j ceux qui ne fçavent pas le Grec »> font plus en état que les autres de » prononcer fainement fur le mérité » elfentiel des Ecrits d'Homère. On »> feait combien l'Elégance du ftyle n eft- capable d'impofer aux Lee- a7o JOURNAL D m tcurs, & de fouftrairc à leurs yeux » les difformitez d'un Ouvrage. Il faut donc , félon notre Au- teur , pour être bien en état de ju- ger d'Horaérc par rapport aux cho- fes , ignorer abiblument la Langue Grecque,de peur de fe lailTer fédui- re par les beautez du ftyle ; mais ce- la étant, comment juger du ftyle , Ç\ l'ignorance de la LangueGrecque ne permet pas de le fentic ? Notre Auteur cependant qui fait gloire d'ignorer cette Langue, prononce qu'on ne peut fans injuftice critiquer Homère fur fa vérification & fur fon ftyle. Sera-ce fur les Traduc- tions qu'il taudra ferepoferici pour connoître les beautez de ce ftyle ? mais outre que fi dans les Traduc- tions ces Beautez étoient confervées, ce feroit , félon le principe de notre .Auteur , un empêchement pour bien juger des chofes, il déclare lui-même qu'une bonne traduction de l'Iliade telle qu'on l'a aujourd'hui, bien fidelle, bien exafte (jr fèparée du preftige harmonieux des locutions Grecques & Poétiques , fuffit pour donner lieu de juger fi un Dieu fabu- leux agit en Dieu , fi un Héros parle en HéroS , fi un homme fe conduit en homme. Si cette bonne Traduction , cette Traduction fidelle Se exacte dont il parle eft exempte du pnjtige harmo- nieux des locutions Grecques & Poé- tiques , elle ne peut donc être d'au- cun fecours pour juger du ftyle Se de la yerfification d'Homère. Sur quoi donc fe jecter pour pouvoir dire avec connoiftànce de caufe ou'il y auro.it de l'injuftice de criti- ES SÇAVANS; quer le Style & la verfification d'Homère? Sera-ce fur le fentimenc commun des Sçavans ? Mais notre Auteur veut en tout , une autre rè- gle que le fentimenc commun des Sçavans , il veut qu'on examine par foi-même la vérité Se qu'après cet examen particulier l'on forme un jugement. Les amis d' Homère , dit- il , en appellent au fentiment de tous les Grands Hommes, aune fucceffion no» interrompue de célèbres approba- teur s^comme fi le goût devait cpnfulter f autorité ou la tradition. Ce n'eji point par ces règles qu'on doit juger. Il faut examiner dans l'Ouvrage mê- me les endroits oit l'idée du vrai n'ejl point exprimée , & malgré 'l'approba- tion univerfelle 3 dire hardiment que ces endroits font défeilueux & révol- tent le bon goût de la vérité qui doit dijfiper la prévention. Par le mot de vrai Se par celui de/tf«.v l'Auteur de la Diilertatiori entend un vrai Se un faux qui fe trouvent aulTï - bien dans le ftyle, dans rélocution Se dans ce qu'on ap- pelle les manieres,que dans les cho- fes. Ainfi quand il s'agit de juger du ftyle de quelque Auteur, ce n'eft nullement au fentiment commun qu'il veut qu'on s'en rapporte : Il y a du faux par tout , dit-il , »> il y en » a dans les fentimens, dans les ma-, » ximes , dans les caractères des » perfonnes , dans les productions m de leur cfpric , dans le choijt m des divertilîemens, dans la con- » ftruiftion d'un édifice , dans l'af- » fortiment d'un meuble ou d'un "habillement, dans lapoliteiTe Se » la galanterie , comme dans mille autres M  «autres chofes dont ledénombre- » ment ennuyerait. Cela étant, il faut, pour bien juger du ftyle & de la verfiiication d'Homère , examiner , par rapport au goût ce qu'il peur y avoir de vrai ou de faux dans. ce ftyle &: dans cet- te verfification , Se l'examiner foi- même indépendamment du fenti- ment des autres. Or cet examen , demanderont les Lecteurs, eft-il praticable fi l'on n'entend pas laLan- gue dans laquelle Homère a parlé ? Mais c'eft trop nous étendre fur la première Pièce de ce Recueil , il eft tems de paiTer aux autres. Le Difcours fur la Poëfie des Hébreux eft de feu M. l'Abbé Fleu- ry Prêtre , Prieur d'Argenteuil Se Confeïïèur du Roi. Le fond de ce Difcours confifte en diverfes refle- xions fur la beauté des Pfeaumes Se de quelques autres Ouvrages Poéti- ques de l'Ecriture Sainte. Pour fe former une idée de la Poë- fie des Hébreux , M. l'Abbé Fleu- ry veut qu'on y confidere d'abord deux chofes. i°. Les paroles, qui eft ce qu'on appelle proprementPoëfie: z°. L'air ou le chant , qui eft ce qu'on appelle Mufique , & dans les paroles il veut que l'on examine le fens Se l'expreffion , c'eft-à-dire le deflein,& les penfées , les figures , l'éloctffion & l'harmonie. Le deflein des Poëmes Hébreux eft de louer Dieu , de lui rendre des a&ions de grâces a & de le prier ; il comprend auffi les louanges des Grands Hommes, quoique ces der- nières foient plus rares , Se feule- ment mêlées avec les louanges de May. Y : Ï73 *« 471 Dieu. Un autre but de ces Poëmes eft d'exhorter à la vertu & de donner divers préceptes de morale , com- me dans le premier Pfeaume Se dans un grand nombre d'autres. M. l'Abbé Fleury obferve fur cela que les Grecs dans leur plus grande antiquité avoient de ces Poëmes de morale , comme les Elégies de So- Ion , les vers dorés de Pythagore , ceux de Théognis , de Phocilidc , &c. Il croit auffi que les Hébreux avoient quelques Chaufons pro- phanes. Quoi qu'il en foit, chaque Canti- que de l'Ecriture, chaque Pfeaume Se chaque Ouvrage de Poëfie , a fon deftein particulier où tout fe rapporte , Se qu'il faut bien connoî- tre, dit M. l'Abbé Fleury , fi l'on veut entendre l'Ouvrage. Il rappor- te ici en détail ce que l'on a de Poëlie dans l'Ecriture Sainte ; après quoi il remarque que lorfque on lie les Pfeaumes fans une grande atten- tion , on croit n'y voir que des pa- roles qui difent toujours la même chofe ; mais que plus on s'y appli- queras on y trouve de penfées dit- rerentes,& toutes penfées exprimées par des figures nobles Se fublimes qui changent prefque à tous les ver- fets i tantôt ce font des interroga- tions , tantôt des apoftrophes , tan- tôt des exclamations , tantôt c'eft le Prophète lui-même qui parle, tan- tôt c'eft Dieu , tantôt c'eft le pé- cheur. On voit David adrefler quelquefois la parole aux chofes infenfibles Se leur donner de l'ac- tion. Les compaiaifons font futtoiic Nn 27? JOURNAL DE très - fréquentes , Se li parmi ces comparaifons il y en a quelques- unes qui parodient baifes,c'eft parce que le Prophète veut fe proportion- ner à ceux pour qui il écrit , enforte que cette prétendue balTclTe ne vient que de la différence de nos mœurs. M. l'Abbé Fleury cite lur cefujetla comparaifon fuivante ti- rée des Cantiques : vos dents font comme des brebis fraîchement ton- dues qui fortent du lavoir : chacune a deux agneaux , & il n'y en a pas une de jierile. Au refte ,■ comme cette comparaifon ne paroît pas convenir en tout , notre Auteur avertit qu'il ne faut pas prétendre non plus que les comparaifons de "l'Ecriture foient entières, & il dit qu'il fuffit qu'elles fe vérifient fur un point; enforte que celle dont il s*agit ne fignifie autre choie finon vos dents font blanches , égales & bien ferrées. Nous palTons plusieurs expofi- tions que notre Auteur fait de di- vers paflages de l'Ecriture , par lef- quelles il effaye de montrer la fubli- mité des expreflions poétiques con- tenues dans ce Livre Divin. Nous difons,il effave, car il faudrait pour y réuftîr , connoître à fond l'harmo- nie des paroles , la mefure des vers, & l'air du chant , Se c'en: comme l'avoue notre Auteur, ce que nul homme fur terre ne peut fçavoir. La raifon en eft que l'on ignore en- tièrement la prononciation de l'Hé- breu , comme du Grec , du Latin , & de toutes les Langues mortes , & que l'on ne fçait point quelle étoit la mefure des vers chez les Hébreux S SÇAVANS; Se la quantité des fvllabes , CJr les Hébreux avoient l'un Se l'autre l M. l'Abbé Fleury fait diverfes re- marques à cette occalion dont voici les principales. On apprend de S. Jérôme que les vers des Hébreux étoient com- pofés de certain nombre de pieds d'une efpece particulière : Scaligec n'en demeure pas d'accord , Cv il ne fait pas difficulté de traiter là-def- fus ce Père, de ridicule ; mais, fé- lon M. l'Abbé Fleury , c'eft Scali- ger lui-même qui eft ici ridieule,de contefter à S. Jérôme un tait d'an- tiquité que ce faint Docteur pou- voir tenir de la Tradition des Juifs,, &de le contefter fans autre fonde- ment, lïnon que les Sçavans d'au- jourd'hui l'ignorent, même parmi les Juifs. Not#: Auteur prétend contre Scaliger , qu'il refte dans les Pfeaumes plulieurs marques de (u- jettion à certaines mefures de mots ou de fyllabes , témoin des lettres fouvent ajoutées ou retranchées à la fin des mots , témoin des mots en- tiers qui parodient n'avoir point de lignification. On ignore les airs des Pfeaumes Se des Cantiques , comme on igno- re ceux des Odes Gicques Se des Odes Latines. Cependant ces Pfeaumes & ces Cantiques étoienc compofés exprès pour être chantés , commejon le voir,p<«* l'Hiftoire, & parles inferiptions des 'Pfeaumes. M. l'Abbé Fleury s'appuye ici du témoignage de Platon qui tient que les airs Se les paroles dévoient être inféparables , Se que c'étoit un très-grand abus de compofer des MAY vers pour n'être point chantés , ou de compofet des airs qui n'euffent point de paroles , comme ceux des înftrumens. Que les airs des Cantiques Hé- breux fuflent beaux Se nobles , no- tre Auteur en apporte trois preuves: La première eft la beauté des paro- les , Se la dignité qui paroît dans leur Poè'fie ; y ayant tout lieu de croire que le refte y répondoit. La féconde , eit la diverfiré des ïnftru- mens qui font nommés dans les ti- tres des Pfeaumes , Se en divers en- droits de l'Ecriture. La troifiéme , cft la multitude des Muficicns , fruifqu'il y avoit trois grandes fa- milles de Lévites deftinées à cette feule fonction par l'ordre de David & des principaux Officiers de forv Etat , lefquelles faifoient deux cens quatre-vingt-huit Maîtres de Mu- fique pour chanter dans le temple , Se inftruireles autres. M. l'Abbé Fleury remarque ou- tre cela que David fut toute fa vie grand Muficien , ce qui ne pouvoir que contribuer beaucoup à faire ai- mer la Mufique à fes peuples. Outre le chant , la Poéfie étoit accompagnée de danfes , Se c'eft dans cet affemblage de chant Se de danfes , que M. l'Abbé Fleury fait confifter les Chœurs de Mufique dont parle l'Ecriture. Il cite fur cela les Chœurs qui chantoient dans les réjouiffances publiques , pour célébrer quelques victoires, Se ceux qui chantoient dans des céré- monies de Religion , comme lorf- que David amena l'Arche en Jeru- falem. » 17 5 2. 275 On voyoit des Chœurs non feu- lement dans les Procédions , mais dans le Temple même ; témoin ces deux Chœurs dont il eft parlé dans Efdras , lefquels après avoir chanté fur les murailles de la Ville , vin- rent finir dans le Temple ; mais de quelles perfonnes étoient compofés ces Chœurs ? Notre Auteur dit que c'étoient des troupes d'hommes onde femmes , de filles on de garçons :-t ajfortis enfemble , vêtus & ornés de même manière } chantant le même airy en danfam les mêmes pas , qui de~ voient être comme- des branles. Il en juge par les Chœurs des Grecs dont on connoît le détail , Se qui étoient une imitation de ceux des Orientaux. Il prétend que les Intermèdes des Comédies Efpagno- les ont beaucoup de rapport à ces Chœurs des Hébreux. Au refte , comme les Tragédies antiques font fort défigurées fur le papier , parce qu'on n'y voit ni l'appareil de la Scène , ni les grandes troupes d'Afteurs, ni les concerts Se les danfes ; ou, comme les récits des plus belles pallions Se les paroles des airs ne font rien hors delà reprefen- tauon , de même , dit M. l'Abbé Fleury , il ne faut pas douter queles Cantiques des Hébreux ne foient très-differens dans les Livres où on les voit j de ce qu'ils étoient dans la bouche des Muficiens, Se étant accompagnés de toute la magnifi- cence des fêtes. Pour en concevoir la beauté , il veut qu'on fe trans- porte en efprit dans le Temple de Saîomon , au milieu de cette mul- titude innombrable dépeuples qui ç» Nni; 274 JOURNAL D remplifloient les Cours & les Gal- lerics , que l'on y conhdcre l'Autcî charge de victimes , &c tout envi- ronné de Prêtres revêtus de leurs- habits blancs, qu'on jette les yeux fur les Lévites diftribués en plu- fîeurs troupes i les uns joiians des Inftrumens , les autres chantans Se danfans avec modeftie & gravité» Peut-être , dit-il , pourroit-on par cette voye deviner quelque chofe , au lieu qu'il ne refte de touc cela que les paroles qui pour ceux qui n'entendent que le latin ne font qu'une traduction , Se encore à l'é- gard des Pfeaumes , une traduction de traduction Se fort littérale , ce qui ne peut donner qu'une idée fort imparfaite des chofes. Pour faire comprendre jufqu'où peut aller cette imperfection , notre Auteur traduit mot à mot deux en- droits d'Horace , pris au hazard , Se enfuite il compare l'idée que peut donner une telle traduction , avec celle que peut donner la tra- duction littérale des Pfeaumes. Voici le premier exemple: L'argent n'a point de couleur , Crifpe-Sallujie ennemi de la lame cachée dansles terres avares , s'il n'eft éclairci par un ufa- ge modéré. Voici le fécond : Mécène defeendu d'ayev.x Rois , o mon appui tfrmon doux omememMly en a quife plaifent d' avoir amajjé en courant, la poufliere Olympique 3 & que la bor- ne évitée par les roues brûlantes f & la palme illuftre , élevé aux Dieux maîtres des terres. Comme il y a plus de rapport entre le François & le Latin qu'il n'y en a entre le Grec &C l'Hcbreux , ou entre le Latin Se ES SÇAVANS; l'Hébreu, M. l'Abbé Fleury pour bien exprimer ce que c'eft que la traduction des Pfeaumes, traduit en ces termes une Strophe de Pin- darefur la Traduction Latine. j> Hymne régnante fur le Luth : »» Quel Dieu, quel Héros, quel » homme envoyerons-nous. Cer- »>tainement Pife eft à Jupiter, Se » Hercule a inftitué le combat » Olympique , les prémices du bu- »» tin de la guerre , mais c'eft Thé- » ron qu'il faut chanter de la voix y »à caufede fa courfe dans un Char, » à quatre Chevaux , vainqueur , ce «jufte hôte 3 appui d'Agrigente, » fleur dans ce très-illuftre Gouver- » nement de Villes, Notre Auteur obferve qu'il y a dans Pyndarc pluficurs endroits qui traduits ainfi mot à mot fur la- traduction Latine n'ont aucun fens,. & de-là il veut qu'on juge de ce que perdent les Pfeaumes par une traduction littérale & verbale , fur tout quand cette traduction eft la traduction d'une traduction. Mais de peur que ce qu'il dit de la beauté originale ne diminue le refpecti qu'on doit avoir pour la verfion vul- gate , il avertit que cette verfion ne prefente aucun lens qui ne (oit bon. & catholique , ce qui fuffit. En voilà fuffïfamment pour don- ner une idée de ce difeours fur la Poé'fie des Hébreux. Celui qui fuir Se qui eft intitulé t Dsfcours fur l'Ecriture Sainte , eft du même Auteur : ce qu'on s'y propofe,eft de montrer , I*. Que la Bible eft le Livre le pins ancien qui foit aujourd'hui fui la terre, du M A moins par rapport aux Livres de Moyfe& aux fui vans jufqu'au troi- fiéme Livre des Rois : i°. Que les Livres Sacrés loin d'être mal écrits, Se d'un ftyle bas Se grollier, comme le prétendent quelques Critiques , ne cèdent en rien pour la beauté même extérieure, à ceux d'Homère Se de plufieurs autres anciens que l'on eftime tant. M. l'Àbbé Fleury en apporte di- vers exemples qui pour n'avoir rien de nouveau dans le choix, n'en font pas moins convaincans , & il con- clut de tous ces exemples , que fi l'autorité de l'Eglife Se les miracles ne permettent pas de douter que l'Ecriture Sainte ne foit la parole de Dieu , la raifon ne permet pas non plus de douter qu'elle ne foit très-bien écrite. Pour ce qui eft de la quatrième Pièce de ce Recueil , dans laquelle on traite du droit des Archev. de Reims pour facrer les Rois de France , on ne s'y propofe pas de prouver que les Archev. de Reims font feuls en poffefllonde ce droit ; on convient que depuis le Règle- ment de Louis le Jeune , perfonne ne leur aricndifputé fur cela, mais il y eft queftion de répondre à ceux qui foûtiennent qu'avant ce tems il n'y avoit rien de fixe & d'arrêté , & que ce privilège fut accordé par grâce à cette Métropole : c'eft ce que l'on difeute dans cette Differta- tion par des faits fuffifamment con- nus. Nous y renvoyons les Lec- teurs. La réplique à la dernière réponfe du P. Bouillard pour ia défenfe de Y; 1752. a7J la grande Antiquité du Portail de l'Eglife de S. Germain des Près, ne nous arrêtera pas beaucoup. Il s'agit de fçavoir h la grande Tour de l'E- glife de cette Abbaye Se les huit fi- gures qui ornent le Portail font du milieu du fixiéme fiécle ou feule- ment du commencement du onziè- me ; Se par une fuite de la conte- ftation, fi l'ancien Tombeau d'une Reine , lequel fe voit dans le Choeur de la même Eglife , eft in- dubitablement celui de la fameufe Fredegonde: Si cette Eglife fut dé- diée du vivant du Roi Childebert fon Fondateur, ou fi ce ne fut que fous Clotaire Succeileiu de Childe- bert ; Se enfin fi la Chartre de fon- dation , Se le privilège d'exemption de l'Abbaye , font des titres authen- tiques , ou des Pièces fuppofées , comme l'ont cru plufieurs Criti- ques. L'Auteur de la Réplique prétend qu'on n'établit que fur des conjec- tures la grande Antiquité de c« Portail , Se que ces conjectures fup- pofent ce qui eft en queftion ; mais ce n'eft pas fur quoi ilinfifte, il fe propofe feulement de montrer les endroits foibles de la dernière ré- ponfe du P. Bouillard , il s'en tient là j cette réplique eft la Pièce la plus longue du Recueil. Il faudroit pour en donner un jufte expofé, en- trer dans des détails qu'un extrait ne comporte pas. La Differtation fur un Monu- ment antique trouvé à Narbonne, laquelle fait le dernier article du Recueil, contient l'explication d'un Bas-Relief où eft reprefenté, ï°. Un 2-}6 J O U II N A L D enfant tenant de la main droite, comme s'il fe joiioit, un voile min- ce Se léger qui s'élève en forme de voûte fur fa tête Se va aboutir der- rière l'épaule gauche de l'enfant qu'on voit debout Se fort tranquil- le derrière une touffe qui paroîtetre une toufte de gazon dont les brins longs Se minces , mais ferrés lui ca- chent les pieds Se tout le bas du corps , ne biffant voir que la poitri- ne , la tête , le bras droit Se une partie du bras gauche. z". Deux enfans à peu près de même âge que celui -là, lefqucls font debout auprès de cette touffe , l'un d'un côté Se l'autre de l'autre , Se qui tiennent chacun des deux mains un gros vafe en forme d'ar- rofoir , d'où ils verfcntde l'eau fur cette touffe de gazon. }°. Une efpece de loge ou de maifon au veftibule , de laquelle paroît une figure d'homme ou de femme , ( car on ne diftingue pas bien lequel c'eft ) tenant un enfant entre fes bras. 4°. Un enfant debout en pofture d'Ecolier ' ayant devant foi un pu- pitre avec un Livre ouvert , Se pa- roilTant recevoir les leçons d'un Maître qui eft reprefenté affis j avec une robe longue. Cette touffe de gazon au refte , dont nous venons de parler eft figu- rée de manière qu'on la peut pren- dre auffi pour une touffe de flam- mes, 5c c'eft le parti qu'embraffe notre Auteur,qui,cela fuppofé,trou- ve le Monument en queftion très- facile à expliquer. Il faut avoir un génie particulier ES SÇAVANS, pour l'explication des vieux Monu- mens,& ceux qui ont du talent poux deviner les énigmes , font ordinai- rement très-propres à démêler cer- tainesAntiquitez.Ils ne rencontrent pas toujours julte , mais dans le bc- foin, à force de donner de l'exercice à leur imagination , ils trouvent le moyen de forger des vraifemblan- ces qui les contentent , & qui con- tentent quelquefois les autres. Le fujet des Enigmes ordinaires eft fimple par lui-même , Se fi -tôt qu'on l'a développé on voit un rap- port fi réel , entre l'Enigme Se ce qu'on appelle le mot de l'énigme , qu'il n'eft pas pollible de douter qu'on n'ait découvert ce qu'on cher- choit. Mais dans ce qui concerne l'explication d'une Antiquité, il en va tout autrement : On hazarde plufieurs conjectures fans pouvoir s'affurcr quelle eft la véritable , Se à la faveur de cette obfcutité on fe fauve toujours par un endroit , qui eft,que fi l'on a mal rencontré , on ne peut du moins être abfolument convaincu qu'on fe foit trompé i c'eft la commodité qu'il y a dans ces fortes d'explications, on eft au large , & on peut fans rifque fe donner carrière. On verra fi l'Au- teur de la Differtation dont il s'agit a profité de cette commodité. Il a cherché d'abofd dans l'Hi- ftoireRomnine,à quelle forte de fi jet il pourroit appliquer le Monu ment en queftion : Mais elle lui paru ftérile fur ce point , & il pen fe avoir été plus heureux en fou i l - lantdans PHiftoire Grecque où il t trouvé, ic. Que Jupiter amoureux M A Y; «fe la jeune Thétis eut envie del'é- poufer ; mais qu'ayant appris des deftinées , que le fils de Thétis fe- roit plus puilTant que fon père , il fit céder fon amour à fon ambition, & maria Thétis à Pelée. 20. Que Thétis indignée de fe voir l'époufe d'un mortel , refolut de jetter dans le feu tous les enfans qui naîtroienc de ce mariage , s'imaginant que ce qu'il y auroit en eux de mortel fe- roiteonfumé par les flammes , Se que ce qu'il y auroit d'immortel fe conferveroit : Que par une épreuve ii étrange elle avoir déjà fait périr iîx de fes enfans , &c qu'elle en étoic au feptiéme quiétoit Achille , lorf- que Pelée l'ayant prife fur le fait, arracha fon fils des flammes &c le porta à Chiron pour en avoir foin , ce qui irrita fi fort Thétis qu'elle fe fépara de fon époux , & fe retira auprès des Néréides- j°. Que de- puis ce tems-là Achille fut nommé Pyrifoits pour marquer qu'il avoit été garanti du feu : 40. Que dans la fuite on le nomma Achille , parce qu'il lui manquoitune lèvre , cette lèvre ayant été con fumée par les flammes. Cehfuppofé, notre Auteur pré- tend que rien n'eft iî clair que le Monument dont il s'agit. Il n'y a pas à douter, félon lui, i°. Que cet enfant qui eft au milieu de cette touffe qu'il prend pour un amas de flammes ne foit Achille : 20. Que ces deux enfans ou ces deux hom- mes qui verfent de l'eau fur cette prétendue flamme, ne le faflent par ordre de Pelée :3e. Que cette figu- re croquée ( foit d'homme ou de 1752; 277 femme ) qui tient un enfant entre fes bras5ne reprefentePelce qui tient fon fils : 40. Que l'enfant qui pa- role debout devant ce pupitre, ne foit Achille , & que le Maître dont il femble recevoir les leçons ne foit Chiron. Voilà le Monument expli- qué. Quelques Lefteurs demanderont peut-être , i°. Ce que c'eft que ce voile qui s'élève au-delfiis de la tête de l'enfant 5c dont l'entant femble fe jouer : z°. D'où vient que Chi- ron qui étoit moitié homme 2c moitié cheval, n'eft cependant point reprefenté fous cette figure ? Quant au premier point , notre Auteur n'en parle pas. Pour ce qui eft du fécond, il trouve à propos de dire i°.Que UsNarbonnois qui s'étoient, pour ainll parler, roman ij es , vou- lant tranfmettre à la pofterité la mémoire de l'éducation d'Achille par Chiron, ont rejette la Fable des Centaures, & ont jugé plus conve- nable de reprefenter Chiron fous la forme ordinaire d'un homme , i°. Que pour faire entendre qu'il étoit le Maître ou le Précepteur d'Achille^ ils lui ont donné un habit long , une ceinture , un manteau , &: l'ont dépeint aflîs , ayant les pieds ap- puyés fur une efpece d'eftrade , Se tenant la main droite étendue,ce qui eft l'attitude d'un homme qui ex- plique quelque chofe;3°. Qu'ils ont au contraire reprefenté Achille dans l'attitude qui convient à un Difci- ple-, Qu'il eft vêtu de long , mais fans manteau ; Qu'il eft debout par refpect au-devant de la table ou du pupitre , & qu'il tient la main a78 JOURNAL D droite étendue comme répondant aux interrogations de fon Maître , ou difputant avec lui. Ainû* , félon notre Auteur , fi l'enfant tient ici la main droite éten- due , c'eft qu'il répond aux interro- gations de ion Maître , ou difpute avec lui ; & d Chiron tient la fien- ne dans la même fituatiGn, c'eft ES SÇAVANS; qu'il tait des interrogations à fon Difciple ou qu'il lui explique quel- que chofe. Il y auroit bien des reflexions à faire fur toutes les autres circonftan- ces de l'explication que nous ve- nons de rapporter , mais nous laif- fons ce foin aux Critiques. LETTRES HEROÏQUES y H I S T 0 R I QJJ E S ET imerejfantes fur diferens Sujets. A Paris , chez Mefnicr , rue S. Severin. ijîi.ix-li. pp. 220. LE titre de ce Livre promet beaucoup , l'Avertilïemenc enchérit encore fur le titre. On affû- te » que tout dans ces Lettres eft » folidement prouvé , rien de gê- m né , tout y eft bien conçu -, grands » fentimens , conceptions nobles , uévenemens étonnans - varietez m furprenantes , vicifîitude étrange » des chofes humaines , leçons ad- » mirables. « Voyons en gênerai à quoi aboutiront des promefles iî magnifiques. Un Seigneur qu'on ne nomme point , diftingué par fes emplois & par fes grandoq'ualitez, qui commandoit même les armées , époufa une Dame que fes appas rendoïtnt admirable & que fes venus faifoient révérer. Ces deux époux s'aimoient beaucoup , quoique chrétiennement ; mais leur amour eft traverfé , la femme eft obligée départir pour les Pays étrangers, dans la fuite même le mari eft arrê- té prifonnier. Cette féparation don- ne lieu aux Lettres dont il eft ici queftion. La première Lettre où le mari fait éclater toute fa tendrefle pour f» femme eft remplie , comme toutes les autres , de fentimens héroïques , fi par ce mot héroïque , on peut entendre tout ce qui eftoppoléau naturel. » Je vous aime , lui dit-il, » tout le veut , les charmes de votre » efprit , les grâces de votre perfon- »ne, votre phifionomie,où l'on re- » marque un certain mélange de vi- »vacité Se de grandeur, lafagefle » de vos difeours , cette feience de » parler & de fe taire avec dignité j » cette étendue' de cœur que vous » avez reçue du Ciel , les traits •> d'une jeuneife floriflante , votre » application à des ledtures férieufes » ou à desexerciecs pieux. « Mais il fe plaic-r qu'un amour fi vif & fi pur foit troublé •, on voit en effet.par la féconde Lettre que fa femme eft obligée, comme on l'a dit , de par- tir pour les Pays étrangers. On ne nous en apprend pas davantage. Il ne faut pas que le Lecteur fe rende trop difficile fur la partie hiftorique de ces Lettres ; à l'égard des leçons, il n'en manquera pas , le mari & la femme M A femme font d'one fécondité iné- puifable fur la morale ; mais L'arti- cle d.e la fidélité conjugale efl: celui qui revient le plus dans ces premiè- res Lettres. La grande idée qu'ils ont l'un & l'autre de leur vertu ne les raiïure pas fur ce point. Puis-je , dit le mari à fa remine , & dois-je merepoferfur la foi de vos fermens ? l'idée d'une infidélité armeroit mon courroux ; Dieu puniroit votre lâche perfidie. La Dameaifez bonne pour jic pas s'irriter d'un foupçon Ci odieux , lui répond en ces termes : Votre rang , ni votre naiffance ne ntont jamais caufé d'envie; je ne fuis point par confequent une adultè- re de eoncupifeence ; quant au corps , ht feule penfée me fut frémir. Après quoi elle raifonne non feulementen Philofophe j mais même en Théo- logien , fur la dignité ëi fur les de- voirs du mariage. Dans la troifiéme Lettre le m3ri , pour montrer que fa jàlbufie n'eft pas fi mal fondée , fait en ftile ora- toire une longue description de l'a- mour & de fes effets. Voici comme il en parle. «Les opérations de l'amour , » Madame, font étonnantes. Il im- Mportune par fa complaifance , il m captive les oreilles , il fafeine les n yeux , fubjugne la volonté , il » repaît l'imagination. » Ses attaques font fiéqucntes , » îk fes combats victorieux. 11 atta- »que tantôt par les ris, tantôt par »les pleurs, foit par la modeftie , » foit par l'audace , ou par la fim- nplicitc , ou par la iule. Y , 1752. 279 wC'eft un furet qui pénétre les ■•folitudes , qui fe mitonne aux >j grilles , &c qui maîtrife dans les n cercles. Souvent donne-t-il la loi »& les dignitez dans les Etats. La femme dans fa réponfe ne manque pas d'alîurcr qu'elle lui fe- ra fidelle j Se pour ne pas demeurer en relie , elle lui envoyé un portrait: très-étendude la Dame Chrétienne. On ne fera pas fâché d'en voir quel- ques traits. » Comme le Soleil fe levant » dans le Ciel , qui cil le Thrône » du Très-Haut , orne le monde , » de même le vifage d'une femme «Chrétienne doit être l'ornemenc » de fa maifon. » Point de parure qui ne con- » vienne à (on état , nul entête - » ment , ni humeur , ni paillon , ni » légèreté dans fa conduite , gran- » de circonfpe&ion. Elle efl: exac- » te , fans critique , indulgente fans » flatterie-, louant par connoilfance u exeufant par inclination , & ne » blâmant que par necefÏÏcé , pru- » dente fans timidité , preilante »fans indilcretion. Le Lecteur reconnoîtra fans peine dans le ftile de la femme le ftile du mari. Il eft vrai qu'il ne fe- roit pas aifé de trouver deux per- fonnes capables de penfer ni de s'exprimer comme l'Auteur de ces Lettres. Ce qui le diftingue prin- cipalement , c'eft pour me lervir de fes termes, une adrefle merveil- leufe a parer fes Ecrits de tout ce qu'il trouve dans l'Ecriture qui 4 quelque rapport à fou fujet. Le mari, comme la femme, font Or» 2$o JOURNAL D un ufjge commun de» tours & des cxprelhons les plus rires dans 1rs Livres Saints. Il faut cependant beaucoup de fagelle Se de goût pour s'en fervir à propos ; fans ces talens le fublime de l'Ecriture enfle plutôt le flile qu'il ne le nourrir. Si l'on en croit nos deux Epoux, cet avis ne les regarde en aucune façon , le mari dit à fa femme qu'on eonnoît bien que les Oracles Sacrés donnent à [es Lettres une vi- vacité , & une folidité au-deffus des idées profanes , il l'allure qu'/7 en eji édifié, réjoui & consolé. Seroit- ce pour montrer aux gens mariés qu'ils ne fçmroient trop s'eftimer l'un ix l'autre , quand même les louanges qu'ils fe donneraient fe- roient exagérées , ou iimplement par la haute opinion que l'Auteur avoit de fes Lettres , qu'elles débu- tent prefque toujours pu des éloges pompeux que les deux Epoux le prodiguent tour à tour ? Le mari dit à fa temme : les ma- ximes répandues dans votre Lettre font pures , & les fentimens remplis de noble ffe & de dignité ; le tour en ijî vif , il efl ingénieux. Votre Lettre efl très- belle , lui ré- pond la Dame , chaque période efi uni fentence , tout y parle. J'y recon- nais les traits de cette éloquence qui compte fes combats par fes vitloires , & qui nt trouve de la refiflance que dans la Cupidité & dans le defef- poir. La quatrième Lettre roule fur k mort d'un Prince , à laquelle le mari perd beaucoup; on ne voit joint eç qu'il ypwrd , ni quel étoit ES S ÇA VANS, ce Prince , m:ken recompenfe or trouve tomes les triftes fc pieufes réflexions qu'un pareil fujet amené naturellement , le mari lait même part à fa femme des plus beaux traits qu'il a remarques dansl'Orai- fon Funèbre du Prince. On en ju- gera par celui que nous croyons devoir rapporter. » On a beau faire, la Majefté pat » fon éclat n'éblouit point la mort ; » l'éloquence ne la charme point ; » les richeiîes ne peuvent la cor- » rompre, nt les plaifirs l'émouvoir, »ni les larmes l'attendrir t ni la » fanté l'éloigner , ni les armées la » taire reculer; noinmonrerons tous;, c'eft ainfi qu'il écrit toujours ce mot. Dîns la 5e Lettre , il envoyé à f.; femme une copie de ce qu'il écrit fur les devoirs des Evêques à fon frère qui étoit nommé à l'Ar- chevêché dc***,il lui ditentr'autres chofes : » N'appeliez à votre fe- *> cours ni le feu du Ciel comme » Elie , ni le tonnerre fur la Mon- •n tagne comme Moyfe ; employez » dans la conduite de vos Ouailles » le doux zéphir qui fervoit pour » ainfi dire de véhicule à l'efprit de »> Dieu. " Il y a de bonnes chofes dans cet efpece de Sermon , par la raifon qu'il y a toujours du bon dans tout difeours de pieté. La femme charmée d'avoir un mari fi habile , lui en marque fa jove & fa furpiife dnns les termes les plus forts & les plus élevés. Que votre grandeur dame , lui mande*r- elle , fut le prix de la naiffance & du courage , je le fçavtis ; que vous MAY ■*yit. fcù aiijfi wiftter un Camp , camper une année pdre(fer une batte- rie , relever une tranchée , commander une attaque , fortifier un logement , Sec. Car l'énumeration remplit une page entière , la renommée m avait appris tous c-es faits héroïques , mais en vérité j'ignorois que vous fujfiez. au nombre de nos Sçavans dans nos Ecri- tures Saintes ; elle lui communique enfuite fes propres reflexions fur la promotion de fon frère , & fur la more du Prince, mais elle les inter- rompt enfin pour dire k fon mari qu'elle tt lu mainte fois ce qu'il lui a écrit de l'amour charnel. Vous n'êtes plus y continue-t-ellc , affligé , je peux vous en parler, & continuer à vous égayer ; elle eflaye de le faire , Se finit en difant ,je voudrais feule- ment infpirer à mon fexe , car il efl adorable , & mille fois plus digne que le votre , que les Amans qui font capables de renoncer à leur honneur ne méritent pas d'être aimés. Leçon inutile ; la vue du péril n'empêche pas qu'on ne s'y expofe ; & on ne fe défend point d'aimer quand on veut. Il n'eft pas facile d'accorder cette maxime avec cette rigide Se fiere morale dont elle tait profelîion dans la plupart de fes Lettres. Dans la fixiéme , le mari loue le goût que fa femme a toujours eu pour l'Ecriture Sainte ; vous vous en êtes fait , dit-il , une étude , nous un amufement. Cependant oubliant dans le moment ce qu'il venoit de dire, il fuppofe qu'elle eflcttrieufe de feavoirce quec'eji que l' Ecrit u/e, & les endroits les pins dijficultueux de cei Livres. Saince Se louable , I 7 3 2- t 281 curiolïté ! s'écrie-t-il , car l'excla- mation eft une de fes figures favori- tes ; pour la contenter cette curiolî- te il s'étend fur la necelfité Se l'uti- lité de l'Ecriture Sainte , 5c fur les principaux caractères de l'Eglifc Catholique qui doit en être l'inter- prète. Il lui explique la différence du fens littéral & du fens miftique, il lui apprend les diverfes fubdivi- fions de ces fens & tache de rendre touc cela fenfible par quelques exemples. Quoique cette Lettre foit toute Théologique > elle finit par des louanges fur les grâces Se fur le mérite de fa femme. Celle qui fuit eft d'un genre tout oppofé. Il étoit refervé à notre Au- teur d'allier enfemble des matières qui avant lui avoient toujours été féparées ; la jaloulie qui a voit agité pendant quelque rems l'efprit du mari pafte tout à coup dans le cœur de la femme, mais à plusjufte titre; elle lui écrit , tenant en main le Billet que fa chère Confidente , com- plice de fa. brutalité , lui a envoyé. Tel eft ce Billet. Atouthazard, charmante Da- me , peut-on vous demander , avec tout le refpecT: qui vous eft dû , fi vous avez fait prefent de votre no- ble cœur à quelqu'un ? Parlez ea honneur. On vous aime, déclaration fin- eere. Les dons de la nature , ceux de la grâce vous rendent aimable ; voulez-vous aimer ? Secret > bonne foi , probité, tendrelTe diferetion , déUcatefte , prefens , biens , richeflés , cœur ; on vous promet tout. Parole exer Oo ij 282 JOURNAL DE cutéf. Qu'en dites-vous / Une entrevue pour nous expli- quer conviendroie à merveille. Vinccnnes , S. Cloud , Bois de Boulogne , votre Maifon de Cam- pagne ou la mienne , ce font des lieux propres. Point de Domclti- ques , finon nos Favoris. C'eft à vous à parler ; preferivez le jour , l'heure , le moment & le lieu. Dé- guifè ou autrement , je m'y ren- drai. De ma part ne craignez ni repen- tir ni chagrin. Je vous jure qu'au- cune fatisfaétion n'égalera la vôtre. Contentement en tout. Ce n'eft point ici un piège , pu- re inclination ; vous méritez infini- ment; on vous mérite. Confultez- vous , décidez. Votre réponfc je l'attcns, donnez-la moi. Grande impatience : bon jour , précieux ob- jet de ma flamme. Qu'on ne s'attende pas à voir la femme foûtenir dans cette occaiîon le caractère d'une Dame éclairée & Chrétienne , loin d'eiïayer à rame- ner fon mari par des (entimens de Religion , elle l'accable d'injures & d'imprécations. Cet emportement lui attire une forte morale, quoique vague & gé- nérale , fur la retenue avec laquelle on doit écouter les foupçons désa- vantageux à la réputation de fon prochain. Après quoi le mari finit par où il auroit du commencer , c'eft-à-dire qu'il nie abfolument le fait, 6c quoique le ftile du Billet foit une forte préfomption contre lui , il foûtient qu'il ne l'a ni écrit , ni fait écrire. Reprenez, votre tran- S SÇAVANS, qitiltité , lui dît-il , je continue à vous parler de l'Ecriture S. lin te. J 'en fuis à fon obfcurité. On ne peut nier que cette Lettre ne foit rem- plie de véritez folides & édifiantes ; nous craindrions cependant , après ce qu'on vient de lire , qu'on ne nous accusât de mêler le Sacré avec le Profane fi nous en inférions ici quelques endroits. Entrelafler les Dogmes les plus fublimes cv les Véritez les plus ref- pcclables de la foi dans des petits, détails de jaloufic & de tendreffe conjugale } chamarrer tout cela de penfées & d'exprcfîions finguliercs, quelquefois même peu décentes, quoique figes dans le tonds , n'eft - ce pas cnclulfcr les diamans les plus précieux dans le plus vil métail t diminuer leur éclat & quelquefois même les expofer à être méconnus par les ignorans qui ne jugent ordi- nairement des chofes que par ce qui les accompagne ? Il fuflîra de dire que cette Lettre qui eft rrès-longue , tend à juftifier la foi dcl'Eglife, fur la Trinité, fur la Divinité de J. C. cv fur le pé- ché Originel , contre la plupart des Hérétiques qui combattoient ces Dogmes- Au refte, on croira, fi l'on veut, que l'Auteur affeéte de n'être ni fort profond, ni fort méthodique dans ces matières. Cela fent mieux fon homme de Condition, & peut- être que c'eft par cette râifon qu'il 1 a i (Te échapper des fautes très-con- fîderables contre la Langue. Dans la Lettre fuivante , la fem- me convaincue de la fidélité de fon mari , fans répondre à fes fçavantes M A leçons , condamne la précipitation avec laquelle elle l'a voit accufé, mais elle le fait dans des termes peu convenables à une moderne Euflo- chium. Nous femmes cependant obligés de dire que l'Auteur paroît avoir eu par tout des intentions très -pures. L'honneur Se la Reli- gion éclatent dans tous fes fenti- mens : un peu plusd'ufage du mon- de lui auroic appris à mefurer fes paroles , £c à éviter de reveiller certaines idées que la corruption du iîéclc ne manque guéres d'enveni- mer. La huitième Lettre commence ainiï : Vn fujet efi [auvent traverfé par un autre fujet ; ce n'efi pas ma faute , mais necejfité caujee par la diverfité des objets qui nous font of- ferts. Il prouve contre les Prote- ftans que c'efl de l'Eglife. qu'on doit recevoir le Canon , la Verflou & l'interprétation de l'Ecriture Sainte. La neuvième Lettre traite des trois états de l'homme. S'il i brillé par la Théologie dans les Lettres précédentes, il va fe diflinguer par l'érudition dans la dixième : c'eft-là que commence ce qu'il appelle fa Digreffion fur la Genefe; elle eftde ioo. pages. Il avoiie cependant qu'il doit une par- tic de ce qu'il va dire à différons Auteurs, il nous avertit encore qu'il n'écrit que pour fa femme. L'amour pour vous , lui dit-il , nul- lement la vanité , conduit ma plume. Le Lecteur pourra cependant trou- ver que s'il n'écrit que pour fa fem- me , il en dit trop , & pas anez , s'il Y; '7? 2. 283 avoit en vue d'inftruire les autres. Du refte , fon caractère dans fes Lettres fur la Genefe efl plutôt de montter les diffîcultez qui fe pre- fentent dans ce Livre que de les re- foudre. Il nous nffure qu'il n'aime point les difcufîions. Sa Lettre , dit-il , n'efi point un traité de com- bats & de dijputts. Il commence par exemple un long calcul fur les dimenfions de l'Arche, &c fans achever ce calcul, entr'autres raifons qu'il apporte pour montrer que ce bâtiment pou- voit contenir tous les Animaux que l'Ecriture y fait entrer , il obferve que ceux qui naiffent de corruption ne s'y trouvaient point. Tels font les principes de fa Phyfique. Donnons encore un échantillon de la maniè- re dont il explique l'Ecriture. n Le fils deSébéon, dit-il, fu- is rent Ada & Ana , félon l'expref- » fîon du verfet 24. de la Genefe , »& dans le 14e du même Chapi- »» tTc , il efl: dit qu'Ana étoit fille » du même Scbéon. n Nulle contradiction, Mada- »me, le nom d'Ana pouvoitêtre » commun aux hommes & aux » femmes. Sébéon a pu avoir une n fille appellée Ana & un fils auflî «nommé Ana. Nous voyons enco- »re aujourd'hui un homme qui «•s'appelle Anne , & une fille qui »fe nomme auflî Anne. Ce nom » convient aux deux fexes. «Grave dépofition ! Jofeph ac- " eufa fes frères d'un crime énorme, m quel étoit ce crime ? C'étoit celui »que l'Apôtre ne veut pas norn- » mer t tant il étoit noir & horri- 284 JOURNAL D » ble. L'Ecriture n'en parle point. » Le S. Efpric l'a voulu cacher i n foûmettons notre curiolité. Pour le remercier de ces inftruc- tions , la remme envoyé à fon mari un excellent morceau fur les devoirs de la Royauté -, on l'a dit-elle , af- furé que ce porcrait a été prefenté à Monfeigneur le Dauphin , fils de Louis le Grand. Cette Pièce mécite d'être lue. Enfin, nous voilà arrivés à un de ces grands évenemens que leLecteur a attendus jufqu'ici. Le voici avec toutes les circonftancesqueces Leu- rres nous en apprennent. La femme fait un rêve moins extraordinaire en lui - même que par la manière dont il eft décrit; elle fonge que fur de faufies aceufations on arrête fon mari , l'arrivée d'un Courier juftifie la vérité de fon rêve. Son mari lui- même lui apprend la nouvelle de fa prifon. Il paroît d'abord foûtenir ce malheur avec courage , mais bien-tôt il eft accablé fous le poids de fa difgrace , & tellement acci- blé qu'il n'a plus feulement la force de moralifer. Les fept Lettres qu'il écritdans ù prifon font très-courtes, mais on n'y perd rien , celles de la Dame deviennent très-longues. C'eft Job & fa femme. Ce font même toutes leurs exprefîïons , avec la différence qu'il s'en raut bien que le mari imite l'héroïque patience de Job, comme la femme copie parfaitement l'aigreur 6c la dureté de la femme du laine hom- me. ES SÇAVANS, Quoi qu'il y ait dans ces demie rcs Lettres de très-belles chofes fur l'adverfité & fur la fourmilion due aux ordres de- la Providence , ce- pendant les fentimens en paraî- tront peut-être plus nobles que Chrétiens, plus ingénieux que con- folans , Se tenir plus de la fierté Stoïque que de la patience Evan- geliquc. Il femble que le mari lui- même en jugea aiufi , du moins n'a- douciftbient-elles guéres l'ennui de fa prifon. Il en fort cependant;mais comment ; c'eft ce qu'on ignore. Si femme qui étoit pour lors revenue des Pays étrangers fans qu'on fçachc aulTî depuis quel tems , ni à quelle occafion , lui mande qu'elle a été aftez fieureufe pour obtenir fa liber- té , & qu'elle l'attend ce foir-Ià même. Netts fouperons en femble , lui écrit-elle , belle & bonne Com- pagnie \ ilumination par tout y bal & fiftin , aedamatiens , allegreffe re'jouifî.tnce. C'eft ainfi que finiftent ces Let- tres. On remarquera que l'Auteur , pour y foikr mieux le Grand Sei- gneur , n'y amis aucunes citations, quoi qu'il emprunte de tous côteï il femble même qu'il n'ait compofé cet Ouvrage que pour ralTembler dans un fcul Corps les penlées &les maximes qu'il ayoit recueillies dans les Livres de morale &de pie- té. Sa Prcrace nous promettoit une variété [ttrprenante ; à l'égard de cet article , le Lecteur trouvera fana doute qu'il furpafle prefque tous Ici Auteurs quiavoient paru ayant lui. M A Y ; 1732. 28J DISSERTATIO MEDICA IN A U GUR AL ÏS, SISTENS Obfervationcs Mcdicas-Mifcelhneas , Theoreticas & pra&icas quam gratiofi Collegii Medici in Academiâ Juiiâconfenfu , prsfide Lauren- tio Heiltero , Doctore-Medico. Theoria: Chirurgie & Bocanices Pro- feflbre ordinario , Academix Cxfar : naturi curioforum , ncc non Regiï Berolineniîs, &c. pro gradu DocToris publiée defendetdie 19. Decemb. 1731. Joannes-Fridericus Moebius Glauchavia-Schoenbur- gicus. Helmftadii. Litteris Pauli Di&erici - Schnorrii , Académie Typographi. C'eft-à-dire : Obfervations diverfes de Médecine , Théori- que & Pratique. Propofées par fjean - Frédéric Moebius , pour obtenir le degré de Dotlenr , fous la Préfidenee de Laurent Heifter , Dotleur en Médecine & Profeffeur de Chirurgie & de Botanique , &e. A Helm- ftad. Broch. in - 40. pp. 48. CE S Obfer varions font au nombre de vingt & une. La première eft d'uneHydropifie afeite parfaitement guérie fans ponction , êc par le feul ufage de l'abfynthe Se des bayes de genièvre infufées dans de la bierre : exemple , dit-on ici , qui tait voir que les eaux des Hy- dropiques épanchées dans la capaci- té du ventre , peuvent quelquefois être reprifes par les vaiffeaux & s'é- chaper par les urines, par les fueurs, par la tranfpiration & autres voyes, & que par confequent on ne doit pas toujours defefperer de guérir l'hydropifie afeire ; quoi qu'elle pafTe pour incurable Se qu'on ne puiiTe expliquer comment des eaux ainfi extravafées peuvent trouver wne autre iiïuë que celle de la ponc- tion. La féconde eft d'une femme de «ente ans > groffe de neuf mois , laquelle paroi/Tant d'ailleurs fe bien porter, mourut fubitement, Se dans le cadavre dé laquelle on ne trouva 4'aurre caufe ds cette mort, qu'un- polype graifteux qui remplifloit & dilatoit l'oreille droite du cœur., quoique cette femme ne fe fût ja- mais plaint pendant fa vie d'aucune difficulté confiderable derefpirer. La troifiéme Obfervation con- cerne un jeune homme de 27. ans , d'une maigreur extraordinaire , le- quel ne pouvoit matcher que le corps courbé , Se dont les intcltins après fa mort furent trouvés tous percés de vers ; d'où l'Obfervateut conclut que les maladies vermineu- fes ne doivent pas être négligées, puifque les vers par leur féjour peuvent enfin percer les inteftins , Se mettre par-là les malades hors d'état de guérifon. On voit dans la quatrième Obfer- vation un jeune Payfan qui après avoir bù au Cabaret de la Bierre , où fes camarades avoient jette à fon infeû de la cendre Se des feuilles de tabac avec de l'efpsit de froment, tomba tout d'un coup à terre de det- fus un banc où il étoit , s'endormic d'un profond fomtneil, en vomit- 286 JOURNAL D fant un peu. Alors fcs Compagnons croyant que ce n'étoit qu'une lim-- ple ivrelTe,le laillerent fans f. cours. Se beurenc à leur ordinaire , mais s'appercevant endure qu'il ne refpi- roit plus , Us voulurent le réveiller, Se ils le trouvèrent fans vie. Le Magiltrat ordonna l'ouverture du cadavre : elle tut taite par M. Hei- fter, lequel trouva ce qui fuit : le foye étoit joint au péritoine ; l'efto- niac qui contenoit encore de la cendre de tabac & quelques petites portions de feuilles de cette plante , paroilToit très-fain , nulle inflam- mation, nulle érofion. Onvifitala poitrine , le poumon y étoit adhé- rent à la plèvre , le péricarde fans eau , mais il tort attaché au coeur qu'il faifoit une cfpcce de concré- tion , avec ce vifeere , & qu'on ne l'en pouvoir féparcr fans déchire- ment -, du refte le cœur &: les vaif- feaux du cœur dans l'ctat natu- rel , point de polype ni autre chofe d'infolite. On ouvrit la tête pour voir fi cette partie ne contiendroit point quelque caufe manitclte de mortjComme il arrive allez louvent dans les apoplexies , mais rien de dérangé n'y parut , (oit en dehors , foit en dedans. Au fimple récit de l'acculent dont il s'agit , il n'elt perfonne qui ne regardât les cendres Se les raid- ies de tabac comme la caufe de cette mort. Mais M. Heillcr en juge autrement : Il prétend que fi elle étoit venue de là , le tabac au- roit produit auparavant dans ce jeu- ne homme ce qu'il a coutume de produire dans tous ceux qui en ava- ES SÇAVANS, lent , fçavoir des vomiflemens énormes , des tremblemens de lè- vres , des vertiges , &c. Or ces fymptomes n'étant point furvenus , il conclut que la mort en queilion ne doit être nullement attribuée au tabac , d'autant moins qu'il n'y avoit dans l'eflomac ni érofion ni inflammation. Il ne penfe pas nou plus qu'on puille l'imputer à l'ad- héfion des poumons avec la plèvre, ni à celle du foye avec le péritoine , y ayant quantité d'exemples de femblables adhélions fans que la mort s'en foit fuivic. A quoi donc l'imputer? C'cft, félon M. Heifter, à la concrétion du péricarde avec le cœur : Concrétion fi intime, que le péricarde étoit fans eau. Or le cœur ■ remarque-t-on ici, a encore plus befoin qu'aucun autre mufcle d'être humecté , enforre qu'étant à fo€ , comme il i'étoit, & n'ayant pu par confequent , faute d'humidité , exercer fes mouvemens , il a fallu necelfiirement que toutes les fonc- tions du corpsayenteeffé. Ilferoit à iouhaiter que M. Heilter eût ex- pliqué comment cette mort a pu être fubite , n'y ayant pas d'appa- rence que la concrétion dont il s'a- git d &; l'entier dclîcchemcnt du péricarde , ayent pu'être l'ouvrage d'un moment. Le fujet de la cinquième Obfer- vation eft un Enfant épileptique c\: tondant fans cède , mort à trois ans c\ demi , dans i'cllomac & les in- tertins duquel on trouva une gran- de quantité de vers , 3c dont le poumon étoit prcfque tout fchir- rcux , le canal veineux du foye en- core M A Y » *7 3*« 2S7 core ouvert, auffi-bienque le trou n'étoic pas ici la feule partie atta- ovale , où l'on dillinguoit parfaite- jment la valvule. M. Heifter fait là -demis trois ïemarques : La première, quel'épi- lepfie des enfans de cet âge , vient prefque toujours de vers., Se que les Médecins n'ont pas allez d'é- gard à cette caufe : la féconde , que les poumons de cet enfant, quoi- qu'ils fuiîent fchirreux , ne laif- foient pas étant jettes dans l'eau d'y nager : la troifiéme , que la toux continuelle de l'entant venoit du fchirre des poumons : la quatrième, que le canal veineux Se le trou ova- le ne fe ferment pas toujours dès la naiflance comme on le croit : la cinquième , que la valvule du trou ovale de cet enfant étoit fituée de manière que pendant la vie de l'en- fant elle permettoit au fang d'entrer de l'oreillette droite du cœur dans la gauche , Se nullement de la gau- che dans la droite. Ce qui montre , dit M. Heifter, que M. Méry de l'Académie des Sciences s'eft abfo- lument trompé dans l'ufage qu'il a voulu attribuer à l'ouverture dont il s'agit. La fixiérne Obfervation concer- ne le cadavre d'un homme mort d'écrouelles , dans lequel on trouva entr'autreschofes tout le mefenterc rempli de grottes glandes durcies, Se de la même nature que les ccrouelles dont le malade avoit été attaqué. L'Obfervateur conclut de- là que pour la guérifon des écrouel- les on ne fçauroit avoir trop d'égard à l'état du mefentere Se des autres parties internes ; car le mefenterc May. quée , on trouva dans la poitrine des glandes auili grofles que des œufs de poule , Se toutes d'une du- retc extraordinaire. La feptiéme Se la huitième Ob- fervation contiennent diverfes Re- marques Amtomiques : mais la huitième fur tout mérite d'être lûë , on y voit que fouvent des Chirur- giens coupent des bras qu'ils pour- roient conferver ; les inftrudions que le fçavant Médecin leur donne là-defllis font importantes, nous les traduirions volontiers ici en leur fa- veur , il nous le pouvions faire fans nous trop étendre. La neuvième Se la dixième Ob- fervation contiennent une Des- cription exacle des mufcles inter- ofleux de la main ; cette Defcri- ption eft aidée de deux figures en taille-douce très-diftincT:ement def- finées , Se accompagnées de leurs explications. La onzième Obfervation eït fur les mufcles interofleux des pieds. La douzième fur divers autres mufcles. L'ouverture d'une chienne plei- ne & à terme , fait le fujet de la treizième Obfervation. Il s'agit dans la quatorziéme,d'ua enfant monftrueux venu au monde (ans cerveau. Dans la quinzième, d'un jeune homme de 15. ans mort au milieu de fymptomes extraordinaires , dans le corps duquel on trouva le diaphragme, les poumons ,1e foyes Se î'eftomac, tout gangrenés Se me-, me fphacelcî. Pp 288 JOURNAL D Les Obfcrvations qui fuivenc celle-là concernent des opérations de Chirurgie. Telles font i °. l'ex- tirpation d'une groffe tumeur ve- nue à une fille de vingt ans, entre l'œil droit cv le nez , Se s'avançant profondement dans l'orbite. 2°. Une glande maxillaire fchirreufe retranchée à une autre fille. 3". Une portion d'inteftin corrompue, qui fut coupée Oc recoufue fi adroite- ment que les deux extrémitez fc rejoignirent Se fe cicatriferent > ne faifant plus qu'un même canal. 40. De greffes pierres contenues dans la vcflie d'un homme de foi- xante ans , d'un tempérament ex- trêmement robufte , brifées 6c chaflécs par le moyen d'une certai- ne bierre dont on lui perfuada de boire. 50. Deux excroifTances ve- lues , coupées avec des cizeaux aux ES SÇAVANS, oreilles d'un enfant de trois ans, £c attribuées à une peur que la mère de l'entant , étant greffe , eut d'une fouris qu'elle tua lk qu'elle prit en- fuite par les oreilles avec des pincet- tes pour la jetter par la fenêtre. 6°. Enfin un hydropique qui fouf- froit trois fois la ponction , & à qui on tira la première fois trente- fept livres d'eau , quelques mois enfuite quarante livres , &c au bout de deux autres mois la même quan- tité ; le tout fans que le malade en fût affoibli, ni en fouffrît aucune incommodité. Ces vingt-une Obfervations font détaillées au long , nous les avons abrégées le plus qu'il nous a été pof- fible , nous laiflons à ceux qui en feront curieux à les examiner dans le Livre même. M A Y, 1754; 289 GRAMMAIRE TURQUE, OU METHODE COURTE ET facile , four apprendre la Langue Turque : avec un Recueil des noms t des verbes & des manières de parler les plus neccjfaires afçavoir, avec plie- /îeurs Dialogues familiers. A Conihncinople. 17J0. ;'«-4°. pp. 194. UNE Grammaire Turque , compofée en Langue Françoi- fe pour la commodité de cette Na- tion , fembleroit avoir dé/a tout le mérite de la fingularité , car on n'a point vu jufqu'ici de pareil Livre. Mais une Grammaire Turque en François imprimée à Confkntino- ple , peut pafferpour un phénomè- ne tout nouveau , dans la Repu- blique des Lettres. C'eft en effet •un des premiers Livres qui foient fortis de l'Imprimerie établie de- puis peu d'années par les Mahome- tans dans cette Capitale de l'Empire Othoman. La connoiffance de la LangueTurque n'avoit pas laifféde fe répandre dans les divers Etats de l'Europe.Mais comme prcfque tou- tes les Grammaires qu'on en avoir publiées étoient Latines, elles ne pouvoient être de quelque fecours que pour ceux qui entendoient le Latin. La plus ancienne de ces Gram- maires Turques eft félon toutes les apparences celle de Jérôme Megi- fer Hiloriographe de l'Eleèteur de Saxe , & qui la mit au jour en 1612. in-%°. fans nom de Ville ni d'Im- primeur , fous ce titre Inflitutionum LingiiA Turcicd Libri quatuor. Il la dédia au Roi de Hongrie Matthias, depuis Empereur ; &c dans fon E pi- tre Dédicatoire , il fe donne pour le premier qui ait entrepris de re* duire cette Langue barbare à des règles Grammaticales , & d'en con- struire un Vocabulaire par ordre al- phabétique, ainiî qu'on le trouve imprimé à la fin de cette Gram- maire. Après ce premier effai , il en pa- rut un autre en 1 631. imprimé ert beaux caractères, à Paris chez An- toine Vitray , /«-40. fous le titre de "Rjtdimenta Çrammatices LingitA Turcica, C'étoit l'Ouvrage d'An- dré du Ryer , Sieur de Malczair , qui avoit été Conful de la Nation Françoife en Egypte ; qui publia à Paris en i<>34. /«-8°. une verfion Françoife du Gui i flan ou de l'Em- pire des Rofes , de Sa.tdi Prince des Poètes Turcs & Perfans ; & en 1647. dans cette même Ville jn-40. une tradu&ion de l'Alcoran en la même Langue. Ses Rudimens Turcs furent réimprimés en 163 3. & il ne paroît avoir eu nulle con- noiffance de la Grammaire de Me- gifer. Environ dix ans après , c'eft-à- dire en 1641. furent publiés à Ro- me /'«-8°. de nouveaux Rudimens de la Langue Turque , compofés en Italien par Jean Molino , qui pen- dant plufieurs années avoit fervi à Conltantinople en qualité d'Inter- prète pour la France & pour la Re- publique de Venife. Ces Rudiment très-abregés fe trouvent à la fin d'un, Ppij 290 JOURNAL D Dictionnaire Italien & Turc dreffé par le-même Auteur. En 1643. François-Marie Afag- fio , Clerc Régulier de Païenne , fat imprimer à Rome en Latin des Jnftitutions de la Langue T'arque , in-folio } qui rempliflent en partie le fécond Livre d'un Ouvrage compofé fur les Langues Orientales qu'on parle en Géorgie , Se dont le premier Livre roule fur la Gram- maire de la Langue Géorgienne* Maggio , dans ce fécond Livre , traite conjointement de la Langue Turque Se de la Langue Arabe. L'Anglois Guillaume Seaman donna quelque chofe de plus com- plet en ce genre , à Oxford , en < 670. in-i,0. fous ce titre ,Gramma- tica LingHA Turcki. , in quinquc Partes diflnbitta ; Se il dédia cet Ouvrage au fameux Robert Boyle , qui fit en partie les frais de l'im- prcfllon. Cette Grammaire n'étoic pas le coup d'eflai de Scaman^n fait de Langue Turque. Il avoitdéja mis en lumière un Catechifme en cette même Langue , imprimé en 1 660. puis une Verfion Turque de fa fa- çon du Nouveau Teftament , pu- bliée en 1 6 66. in-40. Se Boyle a voit procuré par fes liberalitez &: par celles de fes amis , l'Edition de l'un & de l'autre. Enfin la Grammaire Turque de François de Mefgnien MeninskJ , Chevalier du Saint Sépulcre de Je- rufalem , & premier Interprète de l'Empereur dans les Langues Orientales , a effacé toutes les au- tres Grammaires de cette efpece. Elie fut. imprimée à Vienne en A117 ES SÇAVANS; ftrichc , en 1 S80. à la têre du Grand Tréfor des Langues Turque , Ara- be & Perfane , qui remplit cinq Volumes in-folio ; Se qu'on peut re- garder comme l'Ouvrage le plus ample 6v le plus approfondi qui ait été encore exécuté fur ces trois Lan- gues de l'Orient : car le Vocabu- laire Italien & Turc (compilé d'a- bord en François par le P. "Bernard de Paris , Miflîonnaire Capucin y puis traduit de François en Italien par fon Confrère le P. Pierre d'Ab- beville ) eft peu de chofe en compa- raifon , quoiqu'imprimé à Rome en trois gros Volumes in - 4*. en 166^. L'Auteur de cette nouvelle Grammaire Turque [qui eft le R. P. Helderman , Jefuite, Million- naire au Levant] connoît tout le mérite de celle de Meninski, Se la regarde comme la feule qui ait eu, jufqu'ici quelque fuccès. Mais comme l'étendue de l'objet qu'em- bralTe Meninski en voulant enfei- gner à la fois les trois Langues, le jette indifpenfablement dans une multitude de règles capables de furcharger la mémoire de ceux qui commencentjSi de les rebuter : no-- tre Auteur , de concert avec les plus grands Maîtres du Pays en ce genre, Se guidé fur tout par les avis du favant Ibrahim Effendi , s'#ft effor- cé d'applanir les ditficultez en rc- duifant au pur neceflaire les Règles Grammaticales. Cette Grammaire offre d'ail- leurs une très-grande commodité à ceux qui voudront apprendre à lire correctement cette Langue , & à M A ceux qui fans aucun deflein de la favoir lire, fouhakeront feulement de la patler. Cette commodité con- fifte à mettre fous les yeux du Lec- teur tous les mots Turcs '-, non feu- lement en caracteresOrientaux,mais auflî en caracleres François , qui re- prefentent , autant qu'il a été poffi- ble , la véritable prononciation de ces termes étrangers. Il eft vrai que notre Alphabet ne nous fournit pas tous les caractères , ou pour parler plus jufte , tous les fons que fait en- tendre la Langue Turque. Mais on a tâché de fuppléer à ce défaut en ccrivantle Turc en caractères Fran- çois les plus approchans de cette Langue , quant à la prononciation. L'Auteur fait ici des exeufes fur les tautes d'impreiïion qui fe font gli liées dans cet Ouvrage , & qui étoient d'autant plus inévitables dans un eiTai comme celui-ci , qu'on a été obligé pour la fabrique des matrices & la fonte des caractè- res , d'employer des Ouvriers qui ignoroient totalement la Langue Françoifc ; d'où il eft arrivé que nonobftant les plus grandes atten- tions pour veiller à tout , on n'a pu prévenir tous les inconveniens , &C conduire pour une première fois cet Ouvrage à toute la perfection qu'on auroit fouhaitée. Comme les Turcs font originai- res du Turqueftan , il ne faut pas s'étonner fi leur Langue a beaucoup de reiTemblance avec celle que par- lent encore aujourd'hui les Tartares qui habitent ce Pays-là, c'eft-à-dize au-delà du Fleuve ©xus. Il y a néanmoins cette différence entre la Y ; 173 a.' 2$i Langue Turque & celle de ces Tar- tares en gênerai , que la première a reçu beaucoup d'adouciflemenc dans fa prononciation , & s'eft con- sidérablement enrichie aux dépens des Langues de fesvoifins, fur tout des Arabes , des Perfans,dcs Grecs, &c. Notre nouveau Grammairien nous la fait connoître ici affez mé- thodiquement , & en cofifequenec aflez clairement. Pour cela , après une Introduction fommaire, il di- vife le corps de cet Ouvrage en fept Parties , dont la première trai- te de l'orthographe; la féconde, des Noms & des Pronoms ; la troifié- me , du Verbe ; la quatrième „ des autres parties du difeours ; la cin- quième , de la Syntaxe ou conftruc- tion ; la fixiéme , prefente un Re- cueil des Noms , des Verbes , & des manières de parler les plus necef- faires ; la feptiéme contient vingt Dialogues qui roulent fur les fujets les plus ordinaires des converfàtions. Nous indiquerons feulement dans chacun de ces articles , ce que 1* Langue Turque nous a paru avoir de plus Singulier^ On fait d'abord qu'elle s'écrit de droite à gauche , c'eft-à-dire tout au contraire de nos Langues Euro- péennes , & que toutes fes lettres paflent pour autant de confonnes , ainfi que dans la plupart des Lan- gues Orientales. Elle a trente-trois caractères , favoir les vingt-huit qui compofent l'Alphabet Arabe , & cinq qu'elle emprunte du Perfan, Elle employé fept fortes d'écritu- res. La première nommée Nefghi eft refervée pour l'Alcoran i la fe- 2 fevvichemek. , s'entr'aimer ; bakniak^ , regarder ; bs.kjchernak^ , s'entreregarder. Le verbe réciproque fe forme du verbe fimple par l'addition de la fyllabe in mife avant la terminaifon »2<^ou mahj ex.fevvmek^., aimer; fewitt- m4, s'aimer foi-même ; bakmal^, regarder ; bakinmak^ , fe regarder foi -même. Il faut obferver que toutes ces fortes de verbes ont chacune leurs dérivez: par exemple, du verbe tranfitif fevvdurmek^, faire aimer , fe forme le négatif [evvdurmémel^ , ne pas faire aimer ; l'impoffible fewdurèmémck^ , ne pouvoir pas fai- re aimer ; le paflîf fevvdurilmek^t faire qu'on foit aimé , avec fon dé- rivé impoifible fevvàmllimimek^, ne pouvoir pas faire que quelqu'un foit aimé. C'eft ainfi que du verbe coo- pératif dérivent un négatif, un im- poifible, un paffif avec fon négatif & fon impoifible , un tranfitif avec fon négatif auflî & fon impoifible : que du verbe paflîf fe forment un négatif , un impoflïblc , un tranfi- tif, & ainfi des autres : ce qui mul- tiplie les verbes prodigieufement & ; 1732; 25)3 abrège fort les expreflïons. Le verbe fubftantif eft auxiliaire pour lui - même & pour les autres verbes, par rapporî à certains tems Se à certains modes. Les uns & le£ autres font les mêmes que dans la plupart des Langues ; & dans cha- cun des tems qui fe forment indé- pendamment du verbe auxiliaire ,' ces trois perfonnes varient leurs ter- minaifons tant au fingulier qu'au pluriel. Ces tems font pour l'indi- catif, le prefent ou futur ( car ces deux tems fi* confondent ) & le parfait : pourloptatit^encore le pre- fent ou futur : pour le fubjon&if le prefent ou imparfait ; ce qui ne faic en tout que quatre tems. Il faut joindre un impératif, un infinitif & des participes. Dans la conjugal- fon du verbe fubftantif , les tems indépendans de ce verbe auxiliaire pour lui - même font en plus grand nombre. La conjugaifon du verbe imperfonnel vvar(i\ y a) & celle du négatif "to'edur ( il n'y a point ) ont leurs irrégularitez. En gênerai rou- tes les autres conjugaifons font aflez régulières , & fe reduifent à deux , félon que leur infinitif fe termine en mekjiu en mak. L'Auteur pafle très-legerement fur la féconde con- jugaifon , qui retombe prefquc par tout dans la première. A l'égard des particules indécli- nables , il eft à remarquer que cel- les qui dans la plupart des autres Langues s'appellent Prépojitions 3 parce qu'elles précèdent ordinaire- ment les noms qu'elles régiflent , font ici nommées Po/Ipofitions t parce qu'elles fui vent toujours leur régime. 2j>4 JOURNAL D L'article de la Syntaxe partagé en 6 Chapitres , ne remplit que fepe pages de ce Volume. Il eft traité dans ces 6 Chapitres, i°. de la ma- nière dont on parle à quelqu'un ; 2°. de l'ordre de la conftruction ; 3°. de la concordance d'un nom avec un autre ; 40. de celle d'un fubftantif avec un autre ; j°. des Verbes ; 6°. des queilions de lieu Se de tems. L'Auteur obferve que malgré la coutume établie originai- rement chez les Tues ainfi que chez la plupart des Nations Orientales , de tutoyer indifféremment leurs Supérieurs , leurs égaux & leurs in- férieurs ; la politeffe Européenne qui s'introduit peu à peu dans leur Langue , permet aujourd'hui qu'on employé le pluriel ou la troifiéme perfonne du fingulier , lorfqu'on parle à fon Supérieur , ouà des gens conftitués en dignité. On leur donne même àprefent de la Maje- fté, del'Altefle, de la Grandeur , comme parmi nous. L'Auteur ob- ferve encore , par rapport à l'ordre de la conftruction , que les Turcs ont un ftyle très-périodique ; enfor- te qu'il faut fouvent aller chercher le verbe perfonnel ou le gérondif , d'où dépendent le fens &c la con- ftruction 3 à la fin des périodes , c'eft-à-dirc , dix , quinze ou vingt lignes plus bas. Le Vocabulaire compofé d'envi- ron 1400 mots tant noms que ver- bes , rangés , non par ordre al- phabétique , mais fous differens chers , fournit aux befoins les plus preffans de la converfation. Oeil à quoi concourt très -utilement un ES SÇ/AVANS, Recueil des exprefiions ou phrafrs. les plus triviales ; & avec cette pio- viiîon, l'on peut s'engager dans la lect-ure des Dialogues , pour dc-là paffer à celle de quelque Livre Turc , du Catéchifme de Séaman par exemple , ou de faVeriîonTur- que du Nouveau Teftamcnt. Oa trouve à la fin de ce Vocabulaire un Catalogue des noms de Pays , de Royaumes, d'Iiles, de Villes, de Fleuves , &c. fuivi de celui des di- vers peuples connus ; le tout en François & en Turc. On eft furpris de voir dans cette dernière Langue la plupart de ces noms fi étrange- ment défigurés , qu'à peine y font- ils reconnoiflablej , fans compter ceux qui n'ont pas la plus légère ref- femblance Se qui font totalement differens. Qui devineroit en effet que Nemtché eft l'Allemagne , qu' Adganiftan eft la Pcrfe , que Leh eft la Pologne, que Madgiar eft la Hongrie , que Maghryb eft la Mauritanie , queBetcheeft Vienne en Autriche, que Tchéh eft la Bohè- me , &c? Quelque foin qu'ait eu l'Auteur d'éclaircirde fon mieux lesdifficul- rez qui regardent la prononciation des Lettres Turques , il ne les a pas cependant toutes applanies. Il eft vrai que ne trouvant point en Fran- çois d'équivalans pour les lettres gutturales des Turcs, il nepouvoit nous en reprefenter parfaitement le fon. Mais à l'égard du caractère Perfan appelle dans l'Alphabet Turc Sttghir-Noun , qu'il allure fc prononcer comme notre » final , il en eût fait connoître plus précifé- menç MAY ment la valeur en le comparant à notre gn tel qu'il fe prononce dans le mot dignité. Ainfi le nom Turc de la Mer Noire doit fe prononcer Kara Dégniz. , & non pas Kara Déniz., comme l'écrit notre Au- teur. De plus, il devoir employer notre diphthongue ou dans toutes les fyllabcs où l'« doit prendre ce fon^ exprimant par notre u François la voyele Turque qui en a le fon ; fuppofé qu'elle y foit en ufage : cat s'il en faut croire d'habiles Inter- ,1732; 2£5 prêtes en cette Langue , le fon u y eft à peine connu. Néanmoins, s'il faut s'en fier à l'orthographe de cette Grammaire , Se prononcer à la Françofe tous les « , on l'y trou- vera preiqu'aufli communément que la diphthongue Françoife ou : ce qui paroît peu conforme à la vé- ritable prononciation Turque. Ce font de petites négligences qui peu- vent aifément fe réparer dans une féconde Edition. COURS DE SCIENCES SUR DES PRINCIPES NOUVEAVX & /impies four former le Langage , l'efprit & le cœur dans l' ufage ordi- naire de la vie. Par le Père Buffier , de la Compagnie de fsjus. A Paris ; chez Guillaume Cavelier , rue S.Jacques, au Lys d'or; & Pierre- François GifFart , rue S. Jacques , à Sainte Thérefe. 1732. vol. in-fol. à deux colonnes , pp. 1 3 60. fans les Préfaces Se les Tables. LE but du P. Buffier dans cet Ouvrage , eft de montrer la Haifon que les Sciences ont entr'el- les , & comment elles conduifent l'une à l'autre. Il met ici la Gram- maire comme la première & la ba- ze de toutes les Sciences , non feu- lement en tant qu'elle lert aies en- feigner Se à les apprendre , mais aulfi entant qu'elle démêle en cha- que Science la nature Se la valeur des termes , Se écarte par ce moyen la confufion qui pafle ordinaire- ment du langage dans l'efprit. Comme la Grammaire enfeigne à parler pour fe faire bien entendre aux autres ; l'Eloquence & la Poë- fieenfeignent à faire une impreifion fenfible fur l'efprit de ceux à qui nous parlons ; c'eft ce qui a donné lieu aux Traitez d'Eloquence Se de Mas. Poè'fie que le P. Buffier a inférés dans ce Cours de Sciences , parce qu'en effet l'Eloquence Se la Poëfie font le plus noble ufage à quoi l'on puiffe employer la Grammaire. Le beau Langage ferviroit de peu fi l'on nefçavoitbien penfer. Pour bien penfer il faut recourir aux Sciences qui enfeignent à trouver des principes fûrs de nos connoif- fances, &: à tirer de juftes confe- quences de ces principes. Or c'eft ce qu'enfeignent la Métaphyfi- que , que le P. Buffier donne ici fous le titre de premières véritez , Se la Logique qu'il donne fous celui de Véritez dexonfecjitence ou Prin- cipes du raifonnement. La Règle univerfelleà quoi il rapporte toutes les premières véritez elt ce qu'il ap- pelle lefens commun , qu'il regarde nf6 JOURNAL DE comme le fentiment qui réunit plus d'efprirs dans un même point de vue. Le principe qui ferc de baze à la Logique dans ce Cours de Sciences , eftque pour tirer infailliblement une confequence jitfk , // ne faut qu'avoir indiftinclement prefent à l'efprit le principe d'où cette connoijiance eft tirée. Par exemple , fi Ton a claire- ment prefent à l'efprit l'idée & la connoiftance d'une Horloge , il eft impoffible d'en conclure que ce fbit un Moulin à vent ; il en eft ain- lî , félon le P. Buffier , de toute autre idée ; Se c'eft fur quoi il éta- blit, i". Que l'on raifonne tou- jours jufte fuivant l'idée qu'on a prelente actuellement à l'efprit ; 2°. Qu'il ne fe fait point de fophif- me mentalement ; 30. Que tout ce qu'on appelle communément So- phifme ne confifte que dans une équivoque , enforte qu'au liea d'employer les règles ordinaires & difficiles de la Logique pour démê- ler un Sophifme, il ne faut que débrouiller l'équivoque des ter- mes. L'Auteur confirme tout cela par des exemptas. La Métaphyfique & la Logi- que contenant ce qui forme la Science de l'entendement humain, leP.Buffier en a voulu rendre l'accès facile par deux autres Ouvrages où fe trouvent des exercices à la portée de tout le monde ; l'un a pour titre : Elément de Métaphy(ique , &c l'au- tre , Examen des préjugez vulgaires. On voit dans le premier , comment le peuple même , dans les chofes qui lui font familières , eft capable 5 S ÇA VANS; de Métaph;, (lobe , puifque celle-ci ne confifte , iclon notre Auteur ,.. qu'à connoître un objet ou un fujec par toutes les faces & tous les tours par où il peut être confideré , & que c'eft en quoi les hommes les plus grolhers ne manquent gué- res de rtullir quand il s'agit de leurs intérêts. Le P. Buffier en rapporte des exemples fenlibles. Quelque importantes que foienc les Sciences dont on vient de parler, elles le font encore moins que cel- les de la Morale & de la Religion ; c'eft pourquoi l'Auteur deftinc à celles-ci deux Traitez particuliers , l'un intitulé : De la Société Civile 6 dit moyen de procurer fon propre bonheur avec celui des personnes avec qui l'on a à vivre; Yzutie-.Expo/ition des preuves les plus fenfibles de la véritable Religion. Ce dernier a été imprimé à part /«-12. & nous en avons donné l'Extrait le mois d'A- vril dernier. Les autres Traitez ayant été im- primés ailleurs font déjà connus par les Extraits qui en ont paru en di- vers Journaux , mais nous ne nous fouvenons pas qu'on y ait remarqué que ces Traitez font accompagnés d'Obfervations Critiques fur les Ouvrages des Auteurs les plus re- nommés qui ayent écrit fur les mê- mes matières. C'eft pourquoi nous croyons devoir donner ici une no- tice des Obfervations dont il s'agit. Le P. Buffier, dans les Remarques- Critiques qu'il fait , commence d'abord par indiquer ce qu'il trouve de meilleur dans un Ouvrage, puis il vient à ce qui lui paroît de moins parfait. M A A l'égard de la Grammaire rai- fonnée , il donne à cet Ouvrage beaucoup d'éloges , mais il l'aban- donne en plufieurs points. La Grammaire du P. Chifflet Jefuite ne trouve pas plus de grâce auprès de notre Auteur. Cette Grammaire a eu pendant plus de 50. ans, un très-grand cours , & les Editions s'en font multipliées en divers Pays de l'Europe ; le P. Buffier obferve que le P. Chifflet a eu le talent de taire des règles exactes , & de les énoncer avec précifion , mais il dit que le François que fçavoit le Pcrc Chifflet ne vaut rien aujourd'hui , ôc même n'étoit pas trop bon de fon tems , du moins dans la Franche- Comté ; Patrie de l'Auteur. On ne fçaehe pas , remarque le P. Buffier , que ce fût alors parler bon François que de dire : Quoique je ferois , ou quoique j'aimerois , pour quoique je fiffe t quoique faimajfe , ni qu'on ait prononcé témongne pour témoigne. Quant à une Grammaire Françoi- fe imprimée à Amfterdam fous le nom de M. de la Touche » le Perc Buffier reconnoît qu'elle vaut peut- être mieux qu'aucune de celles qui ont paru auparavant -, mais il y trouve fur la prononciation beau- coup de règles défectueufes, témoin entr'autres, celles où M. de la Tou- che ditquelorfque ti eftfuivi d'une voyelle , on prononce comme s'il y avoit fi , ce qui eft très-faux dans les mots qui commencent par ti , puifque tien , tiendra ne fe pronon- cent pas comme s'il y avoit fien } fienàra. La Grammaire de M. l'Abbé Y , 1752. 297 Régnier paffe auffi en revue : le P. Buffier n'ofe faire fur celle-là aucunes remarques décifives ; il renvoyé tout, comme il le doit, à la décifion de Meilleurs de l'Acadé- mie Françoife. Pour ce qui eft du Traité d'Elo- quence , les Obfervations du Père Buffier tombent i°. fur la Rhétori- que d'Anftote traduite en François; 2°. fur les Ouvrages de Ciceron touchant l'Eloquence; 30. fur l'in- ftitution de l'Orateur par Quinal- lien. Quant au premier de ces Ouvra- ges , Ariftote ne veut pas que l'on s'attache à enfeigner comment il faut taire un exorde , une narra-? tion , &c. tout cela , félon lui , f_s'il s'en faut fier à la Traduction] ne tendant qu'à s'altérer ïefprit dit Juge , & ne montrant point en quoi confiée l'artifice de la preuve , qui ejl de fortifier le ratfonnement & de rendre un homme pitijfant en Emhy- memes. Le Grec d'Ariftote, dit le Perc Buffier, donne peut-être des idées plus nettes que cette Traduction Françoife ; comment un hom- me qui paffoitpour parler auffi-bien que le Traducteur , a-t-il cru fe fai- te entendre en difant que l'artifice de la preuve confijle a rendre un hom- me pui fiant en Enthymêmes ? Il au- roit fallu au moins pour rendre ces paroles intelligibles , les accompa- gner d'un Commentaire; car, con- tinue le Père Buffier, que veut-on dire par artifice de la preuve & pat ces autres mots , Y artifice de la preu- ve ejl de fortifier la raijon. Qjqij ap8 JOURNAL E> Dans les Obfcrvations fur Cice- cen , l'on exalte la nobleffe de fes fentimens Se la beauté de fes cx- preffions; mais onfoûtient que fes Ouvrages , quoique pleins de grâ- ces , ne fçauroient fournir aucun fecours véritable pour acquérir l'é- loquence. On les trouve ornes de digreffions heureufes,de rraits d'hi- ftoire choifis , de reflexions ingé- nieufes; mais on prétend qu'ils font ftériles par rapport aux exercices- pratiques de l'Eloquence. On penfe à peu près de même de l'inftitution de l'Orateur par Qyin- tilien : ce Rhéteur , félon le Père Buffier , parle très-fenfément des acccffoircs de l'Eloquence, comme de l'éducation des enfans , de la Grammaire , de l'Orthographe, des matières de la compofition fur lef- quelles l'on peut exercer la jeuneffe, de l'origine &£ des parties de la Rhétorique. On eft feulement fur- pris que Quintilien mette la digref- fion pour une partie du Difcours , d'autant plus qu'ailleurs il la regar- de comme un deffaut en pluficurs Orateurs qui ne l'employent que pour délaffer de la fechereffe des preuves & de la narration. Dans le cinquième Livre Quintilien parle encore de divers fujets affez étran- gers à l'Eloquence , &i qui fervent de peu pour la pratique , comme quand il examine s'il vaut mieux placer les preuves ou au commence- ment, ou à la fin , ou au milieu , après quoi il conclut que cela dépend du befoin & de la nature de la chofe. L'on en pourroit dire autant de tou- tes les règles de l'Eloquence fans en ES SÇAVANS; erre pour cela plus inftruit. Ain fi des douze Livres qui compofent ce fameux Ouvrage de Quintilien , il n'y en a guéresque deux ou trois qui regardent directement l'Elo- quence Se le moyen de l'acquérir. Le dixième paroît le plus important par rapport à ce but : on y parle du befoin ellèntiel de lire & d'imiter les Ouvrages éloquens, de s'exercer à compofer & à corriger avec atten- tion fes propres Ouvrages. C'eft à" quoi le P. Buffier réduit l'art d'ac- quérir l'Eloquence , s'il en eft quel- qu'un; mais cela même eft comme extérieur à l'Eloquence, & fe trou- ve commun avec toutes lesfacultez où l'on veut réuffir. Les Obfervations fur les Ouvra- ges célèbres de Poëfie , regardenc particulièrement la Poétique d'A- riftote , celle d'Horace , de Vida & de M. Defpreaux : on remarque ici une penfée particulière à Ariftote , fçavoir que laPoéfie eft plus utile que l'Hiftoire : le Paradoxe ne fera pas admis univerfellement, non plus que la raifon qu'en apporte Arifto- te , qui eft que la Po'éfie convient a un plus grand nombre de perfonnes. L'Art Poétique d'Horace eft loué ici avec raifon comme un Chef- d'œuvre de bon fens , non feule- ment pour la Poé'fie , mais encore pour tout genre de Littérature. On ne pourroit ce femble , dit le Père Buffier , y defirer que l'ordre des chofes ; encore s'y trouve-t-il plus qu'on ne s'imagine d'ordinaire.LcP. Buffier en indique là-defîus une fuite générale qui femble fort naturelle. La Poétique de Vida contient des MAY règles affez communes , mais tou- jours fenfées , & expofées en des vers très-latins & très-purs. L'Art Poétique de M. Defpreaux eft con- nu pour un Ouvrage des plus ac- complis , quoiqu'il ne renferme que des préceptes qu'on trouve ail- leurs , excepté quelques-uns qui regardent la Poëfie Frar.çoife , & dont on ne conviendroit pas avec lui : fur quoi le P. Buffier cite celui- ci , fçavoir que le caractère du petit Poème nommé Madrigal eft de ref- pirer la douceur , la tendreffe & l'a- mour ; car bien d'autres fujets con- viennent au Madrigal. Du refte les préceptes que donne M. Defpreaux, fuuent-ils auffi complets & auffi exads qu'ils peuvent l'être , ils ne fervent , félon le P. Buffier , qu'à faire eftimer l'Ouvrage du Poète, fans faciliter la pratique de la Poë- fie. Les Remarques ou Obfervations fur les Traitez de Métaphyfique & de Logique qui fe trouvent à la fin du Traité des premières véritez , & de celui des njèriteT^ de confe- quence , méritent encore plus d'at- tention : elles tombent fur quel- ques Ouvrages de Philofophcs des plus renommés , tels que M. Def- cartes, M. Loke , le P. Malebran- che , M. le Clerc , M. Crouzas , M. Régis , l'Auteur de la Logique de Port-Royal , M. Gaflendy , & les Profefleurs de la Logique enfei- gnée ordinairement dans les Ecoles. Le P. Buffier montre combien tous ces Ouvrages font eftimables ; mais avec le même art de iîneerité il y marque ce qu'il croit le moins di- ; 1752. 299 gne d'approbation ; nous en rappor- terons quelques traits , d'où l'on pourra juger des autres. On dit fur Defcartes,que le foin qu'il prit d'être en garde contre tous les préjugez t a fait que depuis lui on a philofophé avec plus de circonfpedtion. Sa Méthode a été utile par l'analyfe qu'elle nous a accoutumé de taire plus exacte- ment , des mots & des idées ; mais quand il preferit de doutée s'il exifte aucune chofe fenfible on imaginable & même des démonftra~ tions de Mathématique , il a voulu dire une chofe raifonnable , & ce qu'il dit ne l'eft point ; car peut-on douter un feul moment fi un trian- gle n'eft pas un cercle ; ce que Def- cartes enfeigne en cet endroit & qui ht alors tant de bruit , fe réduit à une maxime fenfée, mais commu- ne , fçavoir qu'il ne faut porter au- cun jugement qu'on ne foit bien afluré de l'évidence de la chofe. M. Loke eft loiié d'avoir été le premier de ce tems-ci qui ait vou- lu démêler les opérations de l'cfprit humain fans fe conduire par des Sy- ftêmes , mais il ne penfe pas tou- jours fi jufte & fi clairement té- moin ce qu'il dit pag. 278. de la Traduction /'«-40. à Amfterdam 1 700. fçavoir que lalibe rtè n'appar- tient pas à la volition ni a la volonté, mais feulement à la puiffance de pen- fer ou de ne pas peu fer ; ce qui ref- fentle verbiage ou l'opinion de ceux qui ne reconnoifloient point de li- berté dans l'homme. M. Loke ajou- te pag. $96. qu'un homme qui aurait perdu entièrement U mémoire ne fe- soo JOURNAL DE roit plus la même personne , mats que néanmoins ce [croit le même hom- me, A voir un grand Philofophe faire un raifonnement fi étrange , on pourrait, dit le P. Buffier, lui appliquer avec vérité ce qui a été fauffement dit de S. Paul: Votre grand fçavoir vous fait perdre la raifon. On exalte ici le P. Malebranchc d'avoir donné un jour très-brillant à la Doctrine de Defcartes , enforte que cette Docirine a été plus ré- pandue par le Difciple que par le Maître. D'ailleurs fon grand talent eft de faire fi bien fentir les difficul- tez de l'opinion qu'il réfute , qu'à l'aide du jour plaufible dans lequel il montre la Science il lui donne de l'attrait. Puis fans d'autre façon il la fuppofe comme incontestable fans faire femblantde voir ce qu'on y peutoppofer. Le P. Malebranche, fur ce ton-là avance Tom. i. Liv. j. Chap. 2. que les idées font des êtres fins réels que tout ce que nous voyons dans Wnivers , parce que les idées étant intelligibles , elles ne [ont pas un néant , mais des êtres réels. On répond qu'il s'enfuivrpit que ia ron- deur & toute autre (impie modifi- cation feroient des êtres réels, puis- qu'elles font intelligibles. Cepen- dant fi on veut contrarier lcP.Ma- lebranche,il faut l'arrêter au premier pas,fans quoi on feroit à fi fuite plus de chemin qu'on n'auroit voulu. En même-rems qu'on approuve la vûë que fe propofe M.Crouzas dans fa Logique , on en trouve le deffein trop vafte , les reflexions trop peu développées } & des ter- S SÇAVANS, mesembarrallés que l'Auteur don- ne pour clairs. Par exemple quand M. Crouzas dit qu';7 y a des percep- tions qui fe connoiffent elles-mêmes t le Critique dit là-dcflus que ^per- ception n'efi que l'atlion de l'efprit qui perçoit , qui connott , & que c'efl la eonnotffanee même de l'efprit. Or la connoiffanceneconnoît pas , comme l'afrion n'agit pas , c'eft la faculté de l'efprit qui connoît ôc qui agit. 11 n'y a donc point de per- ceptions dont on puille dire qu'el- les fe connoiffent elles-mêmes. Parmi les Ecrivains qui ont fait des Traitez de Logique on trouve M. le Clerc dont le foin a été de rapporter ou d'abréger ce que d'au- tres avoient penfé; ainfiçe qui eft dans fa Logique de bon ou de def- feclueux ne doit guéres lui être at- tribué , excepté dans un endroit, pag. 104. de l'Edition de 1700. chez Galet à Amfterdam , où M. le Clerc dit qu'il zpeine a croire que Dieu ait fait tant de miracles pour des fn]ets qui n'en valent pas la pei- ne. On obfervc ici que M. le Clerc n'eft pas Juge compétent de ce qui vaut la peine que Dieu faffe des miracles 3 que fi un événement mi- raculeux eft prouvé par des témoi- gnages non fufpecls , on doit croire qu'<7 valait la peine que Dieu l'opé- rât. La raifon humaine n'auroit pas jugé que ce fut la peine que Dieu opérât le Myftcre de l'Incarnation , il n'en eft pas moins vrai 5c n'en doit pas moins être cru. Le P. But- fier paroît faire plus d'attention à la Logique intitulée l' An de pen- fer y il marque divers endroits par MAY icfquels il femble que ce foit la meilleure qui eût été jufqu'alors compofée en François ; mais il ne convient pas de la clarté que la Pré- face attribue à cet Ouvrage en infi- rmant qu'un jeune Seigneur l'apprit en quatre jours , fans nul fecours étranger. Le Critique, par un aveu des bornes de fon intelligence , dit que même à la troifiéme lecture de cette Logique il y a trouvé des cho- ies qu'il n'y entendoit pas , à caufe des fréquens exemples tirés de la Géométrie qui ne font pas familiers à tous. D'ailleurs on attribue dans cet Ouvrage tous nos faux juge- mens à un deffaut de Logique , au lieu que , félon le P. Buffier , les faux jugemens viennent bien plus d'un défaut de vérité dans le princi- pe , ce qui ne regarde point la Lo- gique , que d'un manque de vérité dans les confequences , ce qui re- garde eflenticllement la Logique. Il fe trouve ici beaucoup de refle- xions particulières fur ce qui eft dit dans l'Art de penfer , touchant , i°. La nature de l'idée claire 8c de l'idée obfcure : 2°. Le caractère des propofitions incidentes : J°. Les embarras de Logique qu'on peut éviter par l'ufage de la Grammai- re , ôc d'une jufte intelligence des termes , &c. Sur ce qui eft dit page 1 54. Qu'on parle jufte en appellanc Ariftote le Prince des Philofophes, ■parce qu'en cela on fuit une opinion commune, quoique fauffe,\e P.Bufner répond , qu'une opinion commu- ne ne juftihe point des exprelîîons faufTes. Qu'elles ne font juftes que par rapport à l'emploi qu'on en fait > 17 3 2; 301 ielon l'ufage établi en une Langue. Ainfî cette expreffion -.Ariftote eft le Prince des Philofophes , eft jufte parce que l'ufage a établi que l'on entende par-là , Ariftote eft réputé communément le Prince des Philo- fophes. Sans cet ufage les propofi- tions pourroient être faufles , même en fuivant une opinion commune. Du refte quand on ne feroit pas du fen- timent du Critique , fes Obferva- tions fervent toujours à faire regar- der les propolîtions fous divers jours qui éclairciflent les chofes ÔC qui les font démêler avec plus de précilion. Les Obfervations fur des Traitez de morale , tombent i°. fur les Li- vres de Ciceron intitulés de Officiis: 20. Sur l'Ouvrage de Pierre Char- ron de la Sage/Je : 3 °. Sur le Traité de Morale de M. Régis : 40. Sur les devoirs de l'homme & du Ci- toyen par M. Puffendorf : 50. Sur la Morale de Gaflendy : 6°. Sur la Morale qu'on enfeigne dans les Ecoles. L'Ouvrage de Ciceron de Officiis qui eft un Chef-d'œuvre par bien des endroits, ne femble pas à l'Ob- fervateur avoir toute la juftefle pof- fibledans ladivifion & l'aeconomie du deflein gênerai s dans certaines expreflîons vagues , non plus qu'en des maximes qui femblent outrées. Pierre Charron , dans fon Livre de la Sagefte a renfermé beaucoup de reflexions particulières, metfanc dans un jour nouveau celles qui font communes, & donnant à pen- fer plus qu'il ne dit , mais il rappor- te beaucoup de chofes qui regar- 302 JOUR.NAL D dent plutôt une fpéculation douteu- fe qu'une pratique fûrc. Par rapport à celles - ci , il indique certains moyens qui ne la facilitent guercs t comme quand pour empêcher la colère , il preferit d'arrêter &C tenir fon corps en paix fans agi- tation. Quand on fera en état d'employer le remède , dit là-dcf- fus le P. Bufficr , on fera guéri du mal. La Morale de M. Régis fait con- fiderer les devoirs de l'homme par rapport , 1°. à fa raifon particulière: 2°. à l'ordre civil : J°. à l'état du Chriftianifme ; mais on trouve qu'il auroit pu d'abord donner à en- tendre plus nettement ce que c'eft que la Morale pour en marquer toutes les parties & faire fentir leur liaifon Se leur dépendance. La défi- nition qu'il apporte en difant que la Morale eft Vj4rt de bien vivre ou de vivre honnêtement , paroît trop vague. Celle qu'il apporte de l'amour paroît embarralTee ; c'eft , dit M. Régis , un mouvement de l'ame qui nous unit à ce qui nous convient. Il femble , dit le Père Buffier , que la définition feroit plus jufte fi l'on difoit feulement que c'eft un mouvement de-Vame vers nn objet ; car , ajoute le Critique , fi l'on aime un Cheval , eft-on pour cela uni à ce Cheval ? D'ailleurs que fert de dire : Vn mouvement vers un objet qui nous convient ? Dès que l'ame fe porte vers un objet , cet objet lui convient. Le Traité de l'Homme Se du Citoyen par M. Puffenùorf a été imprimé allez de fois , Se traduit en ES SÇAVANS, allez de Langues pour juftiher le cas que le P. Buffier paroît en faire , il y voudroit feulement moins de fechereife Se plus d'exemples ou de traits d'Hiftoires pour rendre les préceptes plus fenfibles avec quel- ques preuves pour convaincre les efprits qui ne le rendroient pas d'a- bord aux maximes qu'on leur pro- pofe. La critique la plus utile que pa- roifle faire le P.Buftnr tombe fur la Morale de l'Ecole : il allure qu'on n'y enfeigne prefque rien qui ferve à la conduite de la vie , à la règle des mœurs Se aux motifs qui en pourroient infpirer le goût. Auftî eft-ce la partie de la Philofophie , qui eft demeurée la plus défeftueu- fe dans les Collèges , où l'on donne pour morale , desfujctsalambiquez Se Méthaphyfiques : les Scholafti- ques difent que c'eft pour fournir aux jeunes gens de quoi difputer & s'exercer l'efprit, à quoi l'on répli- que i°. que l'exercice de difputer n'eft pas préférable aux inftrucîions necellaires pour fçavoir fe conduire 6c fe rendre heureux : 2°. Que les vrais fujets de morale fourniroienc de juftes matières de difcuflîon , Se par confequent de difputer. Par exemple fi l'habitude de contenter nos pallions contribue à notre bon- heur ; quel bonheur nous pou- vons-nous procurer à nous-mêmes; s'il eft des vices dans les particuliers qui ne foien* point contraires à la Société, ii l'on doit fe taire un foin de plaire aux autres, Se quelle en eft la règle. La dernière partie de cet in-foli» n'a voit M A n'avoir pas encore été imprimée , elle contient des réponfes aux dit- ficultez propofées fur divers Traitez de ce Volume , ce qui donne occa- fion à beaucoup de refiexions utiles, foie pour le fond des chofes , foit pour la manière de les expofer ; on trouve fur le Traité des premières véritez. , des objections fubtiles Se ingénieufes qui avoient été impri- mées dans le Mercure de France. L'Auteur y répond avec beaucoup de clarté. Dans l'éclairciffementdes difficultez propofées fur le Traité des principes du raifonnement , l'on montre une équité allez peu commune , en louant fort quelques Objections faites par le P. Rougé , de l'Ordre de S. François. On re- connoît qu'elles font bien fondées , mais on infinue que ce qui y a don- né lieu font certaines expreffions moins.exactes qu'elles n'auroient dû l'être. Le Père Buffier parle d'un ton bien différent au fujet d'une Criti- que imprimée de fon Traité de la Société Civile. On ne peut guéres lire les Objections & les réponfes } &eftimer beaucoup la cenfure dont il fait le précis ; il dit qu'il y a trouvé quelque lueur d'efprit ou de malignité au milieu d'une grande difette defens commun & de vérité : C'eft au Lecteur à en juger. A la fuite des éclairciffemens vient un Difcours fur l'étude & la Méthode des Sciences. L'Auteur infinue que les Méthodes données dans les Livres fe trouvent inutiles pour l'ufage , parce que chaque ef- j>rit & chaque Sçavant a une Mé-' May. Y; 1752. 50Î thode particulière qui lui convient, & qui ne convient point à une infi- nité d'autres. D'ailleurs il faut di- verfifier les Méthodes félon les befoins , les états & les deffeins de chacun des particuliers qui étu- dient. La Science de l'Hilloire par exemple , doit être tout autrement étudiée par un Ecclefiaftique que par un Négociateur Se un Politique. Il eft néanmoins quelque chofe de commun à toutes les Sciences où tous doivent s'appliquer , parce qu'elles influent dans toutes les au- tres : Telles font les Sciences ra- maffées dans ce Volume ; parce qu'elles conduifent à tout, entrent dans tout , Se peuvent ordinaire- ment fuppléer à tout. A ce fujet on indique les préceptes les plus géné- raux qui contribuent à la vraye ac- quit! tion des Sciences. Les autres Differtations, qu'on trouve ici, roulent fur differens fu- jets dont quelques-uns ne femblent pas avoir de liaifon particulière avec les Sciences. L Auteur a choifi ces différentes fortes de fujets pouc montrer quel fecours , dans toutes les occafions s on peut tirer de l'u- fage de la Grammaire , de la Mé- thaphyfique , de la Logique Si. des autres Sciences bien apprifes. Dans la Differtation fur la natu- re du Goût , on eft furpris d'abord que l'Auteur femble vouloir établir que les goûts divers font également bons, félon le proverbe , qu'a» ne difpute pas des goûts ; mais on fe raproche volontiers de fa penfée quand il avertit qu'il parle des goûts divers , en tant que l'un ne Rr 304 JOURNAL D tient pas plus à la raifon que l'au- tre , !k en tant qu'ils for.t de purs goûts , indépendans de la raifon même ; car ce qui eft raifon , dit-il, n'eft point un pur goût, c'eft vérité ou devoir. Une autre DiiTertation eft pour examiner fi les beautez. de la Mujique font réelles ou arbitraires. L'Auteur prend cette occafion pour faire un petit Traité de Mufiquc , fuivi & intelligible à ceux même qui n'en auraient jamaisoui parler , comme pourroient être des hom- ines nés fourds. C'eft ce qu'il ap- pelle un efTai de la manière dont on fetit s'y prendre pour enfeigner métha- ES SÇAVANS, dignement une Science à ceux qui n'en auroicnt jamais eu nulle idée ; manière appliquée ici à la Science de la Muftque. Le Volume finit par trois Difler- tations qu'on ne s'attendroit guéres de trouver ici , l'une fur une que- ftion de Jurifprudcnce-, fçavoir , quelle eft en di verfes branches d'une même maifon fortic de trois frères qui ont fubftitué leur Domaine, la fille aînée du fils aîné. L'autre , fur la nature de ce qui s'appelle le Change en Europe , Se la dernière fur l'origine & la nature" du droit & de l'équité» NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Rome. IL paroît ici , chez Roch Berna- bt, , Imprimeur, une petite Bro- chure Latine de 1 1 . pag. in-40. inti- tulée : Veteris Gemma ad Chrifiia- 9ium ufum exfcalpta brevis expiant - tio , ad Academicos Etrufcos Corto- Ttenfes. La pierre dont il eft queftion dans cette Diftertation eft une S'ar- doine de deux couleurs, d'un poul- ce & demi de haut& d'un poulce de large, confervée dans le Cabinet de Mrs Vittori. D'un côté eft taillée en relief & de face l'effigie de la Sainte Vierge a mi-corps , les deux bras levés de- puis les coudes, Se les deux mains étendues , comme une perfonne «lui prie, fuivant l'Auteur de l'Ex- plication. On y lit ces quatre let- tres, deux de chaque côté de la tête: MHPwr : Mater Dei. De l'autre côté de la pierre eft taillée de même en relier une Croix dans les quatre angles de laquelle font ces mots : keb a£o tiae kiiot. qu'on explique par ceux-ci • KJpie- jSohVtéi Af'ovn kimlr*. Domine ad- jura Leonem Domimtm. L'Aureur, apres avoir expliqué ce qui regarde l'attitude delà Sainte Vierge & les caractères qui fe trouvent fur cette pierre , auffi-bien que l'ufage pieux auquel elle pouvoir être deftinée , prétend qu'elle a été faite pour l'Empereur Léon fils de Bafile le Macédonien & d'Eudoxic , déclaré Empereur par fon perc en 870. Si qui fut honoré du furnom de Sage. .] M À De Venise. Le Sgr Lodovico Ughia. entrepris de faire graver en jo. planches les peintures & les autres ornemens du Palais Ducal de cette Ville , avec des explications convenables , im- primées en beaux caractères , &C qui accompagneront chaque plan- che. Comme cet Ouvrage , qui fera fans doute plaifir aux Curieux, demande de la dépenfe , M. TJghi le propofe par Soufcription , à l'exemple de quelques autres per- fonncs qui ont fait ci - devant des entreprifes à peu près femblables. On délivrera chaque année aux Soufcripteurs dix planches avec leurs explications, lefquelles leur coûteront deux livres &c demie pièce , ce qui fera en touc z$. liv. monnoye de Venife , qu'on fera obligé de payer d'avance tous les ans jufqu'à la fin de tout l'Ou- yrage. On ne recevra les Soufcriptions pour l'Italie que jufqu'au mois d'OcT:obre prochain , & pour les Pays étrangers que jufqu'au mois de Décembre. On pourra foufcrire à Paris chez plufieurs Libraires , entr'autres chez "Sriaffon , rue S. Jacques , à la Science , où l'on trouvera auflî le projet imprimé de cette Souf- cription. SUISSE. De Genève. On a toujours ici une égale at- tention à faire fleurir la Librairie , Se rien n'eft plus digne des éloges Y ; i 7 5 2: 305: des Gens de Lettres que le zélé avec lequel les Libraires de cette Ville continuent de s'empreiTer à donner de bonnes Editions des meilleurs Livres , quelque grande qu'en puifle être la dépenfe , fans cependant s'embarrafler beaucoup du fecours des Soufcriptions. Mate-Michel Boujqiiet Si Com- pagnie viennent d'imprimer le ProfpeSlus d'un Ouvrage qu'ils ont prefentementfous Prefle , &dont l'Auteur eft déjà célèbre par plu- fieurs autres qu'il a publiés à Paris dans le même genre. Il eft intitulé : Expofttio Juris Canonici per régulas nattirali ordine digeftas, ufuqite tem- peratas, ex Corpore Juris ac aliunde defnmptas ; in duos Tomos divifat quorum prior continet quidqmd fpec- t.tt Jus illttd in fe & in génère tnf- peUum\ pofterior, cjuidcjuid pertinet ad idem Jus in fpecie conftderattmè A Joanne-Petro Gibert, DoBore , Theologo & Canonisa. 173 2. in- fil. Comme le ProfpeUus imprimé de ce Livre contient près de 10. pages in-fol. Se qu'il eft par confe- quent d'une étendue trop confide- rable pour en rendre compte dans cet article ; nous remettons à en donner un Extrait en forme dans notre Journal de Juillet. Nous nous contenterons de remarquer que les Libraires promettent de donner tout à la fois dans le cou- rant de cette année 17 3 2. les deux Volumes, qui feront imprimés en caractères neufs &c fur de beau pa- pier. Les mêmes Boufquet 8c Com- pagnie auront aufti achevé cette Rrij .}o5 JOURNAL D année la nouvelle Edition en cinq Volumes in-fol. des Traitez deju- fUtia & Jure , du R. P. Louis Mo» lin*, Jefuite. Cet Ouvrage très- eftimé & recherché par les Théolo- giens Se les Jurifconfultes , croit devenu rare , quoiqu'on en eût fait plufieurs Editions en Efpagne , en Flandres & en Italie , foit du vi- vant de l'Aureur , foit après fa mort. L'Editeur de Genève qui a eu foin, à ce qu'on allure , de confé- rer enfemble ces différentes Edi- tions , doit mettre à la tête du pre- mier Volume une Préface Hiftori- que Se Critique qui contiendra la Vie de l'Auteur Se un Catalogue raifonnéde fes Ouvrages. On trou- vera à la fin du cinquième Tome une Table générale du Livre. Les frères de Tournes impriment en deux Volumes in-folio l'abrégé que le R. P. Noël de la Compagnie de Jefus a fait de toutes les Oeu- vres du fameux Père Suarez. , con- tenues en 18. Volumes m-folio im- primés en dirTerens tems : R. P. Francifci Suarez è Societate Jefu , Tbeologia Summa feu Compendium. Cet abrégé n'avoit pas encore paru. Le P. Suarez. , parmi tous ces Ou- vrages Théologiques, ayant omis de traiter deux matières importan- tes , fçavoir de puflitiâ & Jure Se de Aïatrtmonio , fon Abreviateur y a fuppléé en ajoutant un Appendix en deux Parties : la première, de fjftitiâ&Jure , extraite de Lejfius: la-fcconde, du Traité fi connu de Sanchez. , de Matritnonio, ES SÇAVANS; ANGLETERRE. De Londres. M. le Docteur Bentley a publié une nouvelle Edition du Paradis- Perdu de Mdton , avec une Préface Se des Notes. 1732. in-£. W. lnnys a imprimé Recherches fur l'évidence de la Religion Chré- tienne. Traité écrit en Angloispar une Dame. 17 J 2. ;>-8°. Le même Libraire débite Dijfer- tationes Phyfico-Mathematict, par* tim antea édita in AUis Philofophi- cis Londinenfibus , jam auSiiores & emendatiores , partir» nunc prirnum imprefft. Auilore Johanne Surin , M. D. Colleg. Medic. Londin. & Reg. Societ. Socio , Sec. i73i./»-8°. Alciphron : Or the minute Philo*- fopher. Alciphron, ouïe petit Phi- lofophe ; Apologie de la Religion Chrétienne en fept Dialogues , contre ceux qu'on appelle cfprics forts. Chez Jacques Tonfon, 1732. /'«-8°. deux Volumes. M. Eleazar Albin , qui a don- né il y a quelque tems une Hiftoirc naturelle des Infectes , vient de mettre au jour une Hiftoire Natu- relle des Oyfeaux, en loi. planches gravées , où les figures font defil- nées Se enluminées d'après des Oy- feaux vivans ; les planches font ac- compagnées- de remarques fur cha- que Oyieau dont le nom eft marqué en Anglois Se en Latin. Cet Ou- vrage fe vend chez V. lnnys , J. ÇUrke Se J. Brindley, 17} 1, /w-40, . MAY HOLLANDE. D'Amsterdam. Lexicon Medicum : in fito totius Artis MedicA termini in Theoria & praxi Medick , Anatome , Chirur- gie. t Pharmacia , Chemiâ t Botani- ck , ôYc. definiuntur, acjuxta Phy- fices & Jfdechaniees demonflrata principia exponuntur 5 ex optimorum omnium gentium , inter Antiquos & Récent iores'Praclicomm, Anatorr, ico- rum , Chirurgorum , Chemtcorum , Aiechanicorum , Pharmaceutices t Rei Herbaria ac naturalis , &c. Scriptomm obfervatis & operibus j ubique fidtjftme citatis. Quibus inter- feritur dijpciliorum in Philofophia naturali rerum expofuio , cjuatenns tarum intelligentia bons. Artis Mé- dias. Theoria. in fervit , &c. cum f- guris aneis & accuratit Indicibus , &c. 1731. in-èf". Le ritre de cet Ouvrage dont Meilleurs Tronchin &c de Neuville , Do&eurs en Médecine font les Au- teurs , & qui s'imprime chez les Wetfleins & Smith, parut l'année dernière dans le VIL Tome , Part. I. de la Bibliothèque rai- fonnêe. Ces Libraires ont appris de- puis que M. Philippe Burggrave , Médecin de Francfort , fe preparoit à donner un Ouvrage à peu près pareil dont il a déjà diftribué le Programme 3foit qu'il ait ignoré leur entreprife , foit qu'il ait crû qu'ils LéulTent abandonnée.C'eft ce qui les a engagé à publier de nouveau ce titre auquel ils ont joint une feuille imprimée comme doit l'être le refte du Livre, & qui contient differens > * 7 î 2. 307 articles de leur Didionnaire. Sans méprifer le travail de M. Burggra- ve & fans s'arrêter à l'injultice que leur pourroient faire les Libraires d'Allemagne , ils font perfuadés qu'en mettant par cette efpece d'é- chantillon le Public à portée de connoître la méthode qu'ont fuivia Meilleurs Tronchin g£ de Neuville , Se la beauté de leur impreffion , la différence que fera ce même Public des deux Dictionnaires, ne pourra être qu'en faveur de celui qu'ils ont' entrepris & qu'ils continuent d'im- primer. De Le y db.' Jean- Arnold Langerai^ va don- ner par Soufcription une Edition in-folio de ce qu'on appelle les pe- tits Traitez de Jurifprudence du célèbre Jacques-Godefroy de Ge- nève. Jacobi Gothqfredi, y. CV & Profejforis f/uris Celeberrimi \ pri- mum in Academiâ Genev. De in ejufdem Vrbis S-.natoris, Cenfulis f. & Patris. nomine variis Légat ion i- bus in Galliam , Germaniam , Pede- montium atcjue Helvetiam praclari funili } Opéra Juridica Minora , ad Antiquitates pr&fertim furisfub lm- ptratoribus Gentilibns & Chriftianis fpetlantia , five Libelli , Traclatus, Orationes & Opufcitla rariora & prafîantiora y cjutbus continenturfe- UB& t non modo in Jure , fed omnï Ahtiejuitate Romana & Gr&ca pus Antiquum illuftrante materia. Om- nia ab innumem mendia purgata cum Vita & Icône Auilùris, & Indice Cêpioftjftmo. 17 3 2. Ces differens Traitez avec les Y, 1732. 309 précautions requifes , n'a pas cepen- dant concouru pour le prix propofé par l'Académie en i729.C'eft que le paquet étoit refté à la Porte \ &z qu'il n'en a été retiré que par M. Meynier lui-même en 173 1. lorf- que le prix eût été adjugé par l'Aca- démie au Mémoire de ÎA.Bouguier. Etudes Militaires.Vremïcte Par- tie , qui comprend le plan gênerai de tout ÏOuvrage y & l'exercice -de l'In- fanterie , avec des figures. Dédié au Roi , par M. Bottée , Capitaine au Régiment de la Fere. Chez Claude Jombert s rue S. Jacques ; Tabarie, Quai de'Cohty ; Jofeph Bullot , rue de la Parcheminerie i à S, Jofeph. iyil.in-iz. Inftrkclions Chrétiennes fur tes Souffrances. Par M. l'Abbé' * * *. Chez Barthélémy Alix , rue Saint Jacques au Griffon. 1732. in-12. Confédérations Chrétiennes d'un homme qui veut férieufement travail- ler à fon falut , ou fes devoirs comme Chrétien } Se comme homme en- vers Dieu , envers lui-même & en- vers les autres. Ouvrage , eft - il marqué dans le titre , utile à toutes fortes de perfonnes, particulière- ment aux gens riches , aux Négo- cians Se même aux Directeurs des ames. Chez Babuty , rue S. Jac- ques 3 à S. Chryfoit-©me. 1 7 3 1. in- îi. Sermons choifis fur les Myfteres , la vérité de la Religion , différent Sujets de la Morale Chrétienne Sec. Tome X. contenant les Panégyri- ques. ChezLottin, rue S. Jacques, près S.Yves, à la Vérité. 1731* in riz. 3io JOURNAL D Scanderberg , ou Avantures du Prince d'Albanie. Chez de Lefpine fils , rue S. Jacques , à la Victoire , & Dupuis , au Palais , au S. Efprit. iy$z.in-ii. i. vol. Recueil de Pièces , d'Hifioire & de Littérature, Tome 11. Ce Volume fera incellamment mis en vente chez CHAUBERT , Libraire du ES SÇAVANS; Journal. Le premier Volume en fut publié au commencement de l'an- née dernière , !k nous en avons ren- du compte dans nos Journaux. Après les Pièces qui compofent celui - ci on trouvera une Table alphabétique des matières conte-: riuës dans les deux Volumes, TABLE Des Articles contenus dans le Journal de May 1732.' HIfloire de l'Empire , contenant fon origine ,fon progrès , &c.page 14J Le Bombardier François , ou Nouvelle Méthode de jetter les Bombes t &c. Introdutiion générale h ? étude des Sciences , &rc. Continuation des Mémoires de Littérature & d'Hifioire ; Lettres Héroïques , Hiftoriques & wterejfantes fur differens Sujets '} Obfervations diverfes de Médecine , Théorique & Pratique , Grammaire Turque t &o Cours de Sciences , par le T. Buffier _, &c. Nouvelles Littéraires } Ml M* zég 278 185 »5>5 304 Fin de La Table. L E JOURNAL CAVA'NS 5 r ou'* VANNEE M. DCC. XXX I l JUIN. A PARIS," Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE VU KOY. LE JOURNAL DES SÇAVANS. JUIN M. DCC. XXXII. LETTRE A MADAME T. D. L. F. SUR MONSIEVR Houdart de la Motte 3 de l'Académie Françoife. A Paris , chez Chau- bert , Quai des Auguftins, du côté du Pont S.Michel, à la Renommée & à la Prudence. Broch. in- 1 !.. pp. 29. CETTE Lettre eft un Eloge de feu M. delà Motte de l'Aca- démie Françoife , né à Paris le 17. Janvier 1672. & décédé dans la même Ville le z6. Décembre de l'année dernière. On commence Juin. d'abord par reprefenterla perte que la Republique des Lettres a faite par la mort de M. de la Motte , & après avoir jette diverfes fleurs fur fon tombeau , on remarque que fi jamais homme eut droit au titre Sfij 5i4 JOURNAL D à'Efprit mivèrfel , c'eft ce célèbre Académicien , & que fi du feul M. Lcibnitz on auroit pu taire plu- fieurs Sçavan$ , comme s'en expli- que M. de Fontenelle, on auroit pu de même du feul M. delà Morte faire plufieurs hommes d'efprit j car on ne le donne point ici pour un homme fçavant i mais on prétend que l'univerfalité des qualirez de l'efprit vaut bien l'univerfalité des connoiflances ; fur cela l'on deman- de d'un ftyle d'Orateur,fi ces quali: tez étoient médiocres en M. de la Motte ? Se l'on répond à cette de- jnande, par une autre de même fty- le , fçavoir : fi le brillant & lafoli- dité , la vivacité dr lajttftejfe, H en- jouement & le badi nage fin & léger ,' la force & la profondeur dit rai fon- dement , fi tout cela n'êtoit pas réuni en fa perfonne dans le degré le vins iminent ? Comme M. de la Motte ne pa- roiflbit pas moins pourvu de ces excellentes qualitez dans la conver- fation que dans fes Livres , on prend encore le tour de l'interroga- tion pour le reprefenter de ce côté- là tel qu'il étoit : falloit-il , dit-on , en chercher la preuve dans fes Ou- vrages ? Etoit-il de ceux qu'on ad- mire dans leurs Livres y & qu'on trouve prefque inférieurs au commun des hommes dans la converfation ? On répond à cette demande, que la converfation de M. de la Motte étoit en un fens , encore fuperieure à fes Livres; il n'a pas écrit fur tout, mais , demande-t-on , de quoi ne farloit-tl point , & avec quelle lu- mière ? ES SÇAVANS; Apas ces interrogations on prend un ftyle plus uni, év évitant tou- jours de peindre M. de la Motte comme Sçavant , on a loin d'obier- ver que c'eft le détail des Sciences qui f lit les Sçavans; Que M. delà Motte ignoroit ce détail, & qu'ainfi il n'étoit pas fçavant, à prendre ce terme félon l'acception commune •, mais qu'il étoit .quelque chofe de mieux , qu'il avoit des admirateurs dans toutes les Académies , 8c fur tout dans celle des Sciences , main- ' tenant auffi polie que feavante ,' Qu'un de nos plus grands Géomè- tres & pourtant un très-bel efpr'u ' car c'eft ainfi qu'on s'explique , t dit plufieurs fois qu'il y avoit dans cet Académicien de quoi faire un Newton , un Leibnitz, Après ces réflexions , on parte au talent qu'avoit M. de la Motte d'é- crire en profe & en vers : onrecon- noît que fa profe eft generalemeuc admiréc,quc fes Odes, au moins les premières , font auliï beaucoup efti- mées , mais qu'il n'en eft pas de mê- me de fes autres Ouvrages en vers de fes Tragédies, par exemple, auf- quelles malgré leur fuccès bien des gens conteftentle mérite delà ver- fification. L'Auteur de la Lettre ne peut iouffrir cette di verfitc de juge- mens : les Tragédies de M. de la Motte plaifent fur le Théâtre, di- fent quelques Critiques , & en-- nuyent fur le papier. Notre Auteur doute que ce fait foit bien gênerai > il dit ente pour lui , il les a vîi lire avec plaifir , Qu'Inès a arraché des larmes aux Lecteurs auffi - bien qu'aux Spectateurs , tant à Paris J u I que dans les Provinces ; qu'au fur- plus , c'eft l'cflentiel de plaire fur le Théâtre , que le fimple Verlîfica- teur y cchoiie 3 &c que le feul Poëtc y réuffit. L'Auteur prévient ici une objec- tion qu'on pourrait lui faire, qui eft qu'on a vu des pièces peu eftimées ne pas laifTer d'avoir beaucoup de. fuccèsdans la reprefentation : il dit fur cela i°. Que dès qu'une Pièce touche les Spectateurs, & qu'elle les interelTe , elle renferme de l'inven- tion, de la conduite, du fentiment , &c fuppofe par confequent dans celui qui l'a faite plus de génie & de talent Poétique que n'en fup- pofent les Scènes le plus heureufe- ment verfifiées : z°. Que la vraye Tragédie eft celle qui plaît aux Spectateurs; parce qu'étant deftinée pour le Théâtre , on n'en fçauroit bien juger que par l'imprefîÎQn qu'elle fait fur ceux qui la voycnt reprefenter : 3°.Que Corneille tout fuperieur qu'il eft à Racine par l'é- tendue & la force du génie, fe fait moins lire que Racine. Comme M. de la Motte a fait des Ouvrages de profe & des Ouvrages de vers , & que fa profe a emporté tous les fufîrages, on recherche d'où vient que fes vers n'ont pas eu le même fuccès , & que fes premières Odes qui parurent il y a quelques années avant fes Ouvrages de profe ont été préférées à fes autres poëfies. Voici comment on démêle cette queftion. On remarque d'abord que la perfection impoflîble en tout gén- ie , l'eft fur tout dans les vers ; & N, 1752. 5iX qu'il eft beaucoup moins difficile en foi , d'approcher de cette perfection dans l'a profe ; on dit en foi , parce qu'un' Auteur peut avoir plus de talent pour le moins facile , c'eft- à-dire pour les vers , &: qu'alors ce qui eft plus difficile en foi devient cependant le plus facile à l'égard de cet Auteur , à caufe de la difpoiî- tion particulière qui eft en lui pour ce plus difficile. Or la profe de les vers faifantdeux genres à part,dont chacun demande un tour d'efprit particulier & très-différent de celui qui fait réuffirdatjS l'autre , on né trouve perfonne parmi les plus grands hommes , qui ait été tout enfemble , Poète & Profateur , ex- cepté le feul M. de la Motte que l'Auteur de la Lettre reprefente comme unefprit univerfel. La mé- diocrité des vers de ceux des plus fameux Ecrivains en profe qui ont voulu fe mêler de verfifler , & la médiocrité de la profe des meilleurS- verfificateurs , font ici appelles en témoignage. L'exemple de Racine fembleroit dépofer le contraire ; mais un Difcours Académique s quoique fort beau , quelques Pré- faces de trois ou quatre pages , quoique très-bien écrites, ne valent pas la peine , dit-on , d'être ici ob- jectées -, ilfaudroit des Ouvrages en plus grand nombre ou plus étendus. Cette propofition établie., qu'on ne peut réuflir tout enfemble Se dans la profe & dans les vers } èc que ce talent étoit refervé à M. de là Mot- te , on vient en la manière fuivante à l'examen de la queftion qu'on s'eft propofé d'éclaircir au fujet des ju= 5i5 JOURNAL DE gcmens diffcrens qui ont été portés de M. de la Motte. » Cet Auteur , » dit-on , qui s'étoit annoncé d'a- » bord comme Poète dans la Re- v publique des Lettres , & qui dés » 1697. a voit débuté par un des » chef-d'eeuvres du Théâtre de » l'Opéra t l'Europe Galante , fui- » vie d'Omphale , du Triomphe » des Arts , &c. donna fes Odes en »> 1707. à la tête defquellcs paroîc j) un Difcours admirable , un chef- x> d'oeuvre de profe. Ses autres Oeu- }) vres vinrent enfuite , toujours » également mêlies de vers & de » profe. Celle-ci portée à toute la » perfection connue , 8c d'autant » plus inattendue dans un Poète , » s'attira une attention fingulierc , » même une forte de refpeft. Enfin » elle effaça prefque ces vers , à u l'occafîon defquels elle avoit été « faite. L'occafîon fut faifie par » ceux qui n'aimoient pas M. de » la Motte : Sa profe étoit hors y, d'atteinte , fes vers prêtoient da- » vantage à la critique ; ils furent )> attaqués, & le furent avec fuccès, t> mais ce fera toujours le fort des » meilleurs vers. On en conclut î> aujourd'hui qu'ils font inférieurs » à fa profe. On a raifon en un fens, 3> ils font moins parfaits & ne font » pas moins eftimables ; ils ne font «bons que comme de bons vers, » ils font bien éloignés d'être bons i> comme de bonne profe , év fur- » tout de la profe comme celle de » M. de la Motte. On a dit,que ne »> fe bornoit-il à écrire en profe? & » moi je dirois : que ne fe bornoit- » il à écrire en vers ? ne fcavoit-il S SÇAVANS; » pas que l'effet ordinaire de la » comparaifon entre deux cho- » fes inégalement bonnes , fur » tout en matière d'Ouvrages d'ef- » prit , & quand il s'agit des Ou- » vrages d'un même homme , eft m de faire trouver nuuvaife celle 3> qui n'eft qu'inférieure. La plus » grande louange qu'on pût donner » à des vers , ce feroit peut-être de >» dire qu'ils valent de la profe , » mais je n'en connois point de » tels. Les excellens vers touchent, w charment, enlèvent, il n'appar- » tient qu'à la profe de fatisfaire. Ce font là les propres paroles de l'Auteur de la Lettre , fur lefquelles il y auroit bien à réfléchir : cette dernière proportion entr'autres , que les vers touchent , charment , enlèvent , Se qu'/7 n'appartient qu'à la profe de fatisfaire , paroîtra fans doute finguliere , puifqu'il eft dif- ficile de comprendre qu'on puiffe être touché , charmé , enlevé fans être fatisfair. Mais voici le précis d'un raifon- nement plus fimple &c plus décifif dont on fe fert pour conferver à M. de la Motte le rang que quel- ques perfonnes veulent lui ôter , de Poète év de grand Poète : cet Aca- démicien a travaillé dans plufieurs genres de poche ; fes plus févéres Cenfeurs conviennent qu'il a fait de très-belles Odes ; donc il étoit Poète, & outre cela affez Poète pour les autres genres de Poche. Ses ennemis l'a voient cru Poète fur fes Odes , & ils ont celle de le croi- re tel fur fes Fables & fesTragédiesj mais quand même celles-ci feroient J u I auiïi mauvaifes qu'ils le prétendent, tout ce qu'il en faudrait conclure , feroit que M. de h Motte n'étoit pas propre à la Fable , à la Tragé- die. La belle Ode eft l'Ouvrage du Poète par excellence , l'Ouvrage de tous les genres de verfification , qui demande le plus d'harmonie, celui de tous les genres de poëfie où il faut le plus de feu , d'élévation , de génie ; danc fi M. de la Motte a fait de très - belles Odes , il étoic Poète & excellent Poëte. Ce raifonnement qui eft plus étendu dans la Lettre , & que nous avons cru pouvoir abréger fans en diminuer la force , eft confirmé par l'exemple fuivant qui fait voir qu'il y a bien du préjugé dans plusieurs efprits , au fujet des vers de M. de la Motte. On ignora quelque tems qu'il étoit l'Auteur de la Tragédie des Machabées , & pendant toutee rems on ne ceiïa d'en louer la verfi- fication; cela eft bien Racinien , dit un excellent Critique, à la première reprefentadon de la Pièce , cV fur cette prétendue conformité de ftyle, voilà aufli-tôt l'opinion répandue que la Tragédie en queftion étoit de Racine même. On ne l'attribua à aucun autre Poëte , pas mê- me à M. de Voltaire , fi générale- ment 6c fi juftement eftimé pour la verfification. Enfin M. de la Motte fe découvre , & alors l'admiration tombe t ou du moins s'affoiblit beaucoup : fes ennemis honteux de leur méprife fe vengent par la cri- tique. A ce mot d'ennemis on deman- dera peut-être comment M. de la N ; 1732. 317 Motte fi digne d'être aimé pouvoit exciter contre lui la haine de quel- qu'un. L'Auteur de la Lettrerépond que cet Ecrivain 3 tout aimable qu'il étoit en fa perfonne , avoit plus de titres qu'ils ne falloit pour être liai ; &c quels titres entr'autres , c'eft qu'il excitoit la jaloufie d'une foule d'Auteurs , & qu'il attaquoic les préjugez de plufieurs Sçavans t qui voyoient la gloire de leurs tra- vaux évanouie par la chute de ces préjugez. On cite en preuve de cela fon Difcours fur l'Iliade d'Homère, qui fouleva contre lui les Partifans de l'Antiquité déjà un peu bleftés de fes jugemens fur Pyndare , Ana- créon , Horace , 6c de fon Ode de rémulation,malheureufement pour lui une de fes plus belles Odes ; de comme il donna en même tems une nouvelle Iliade , moins traduite , dit-on , qu'imitée de l'ancienne y moins imitée que refondue , les ennemis de l'Académicien cherchè- rent à fe venger fur le Poëme François , de ce que le nouveau Poëte avoit écrie contre le Poëmc Grec. On dit ici un mot en partant de la difpute élevée entre M. de la Motte & Madame Dacier, on re- proche à Madame Dacier fes invec- tives répandues dans le Livre inti- tulé des caufes de la corruption du goût, Se on lotie M. de la Motte fur la modération qu'il a gardée en oppofant à cette Sçavante les refle- xions fur la Critique , qu'on regarde ici comme un des plus beaux Ou- vrages de ce genre parlesagrémens du ftyle 6c la juftefle du raifonne- ment. 5iS JOURNAL D Une féconde caufe qu'on rap- porte des critiques malignes qui ont parues contre M. de la Motte, c'eit d'avoir travaillé dans prefquc tous les genres de poéiîe , ou, com- me on parle dans la Lettre , d'y avoir réuflî ; on dit à ce fujet que comme l'Europe entière fe ligua contre Louis XIV. le foupçonnanc d'afpirer à la Monarchie univer- fclle , de même une foule d'Ecri- ▼ains fe font unis contre M. de la Motte , qui , félon eux , vouloit envahir tout l'Empire des Lettres Se régner feul fur le Parnaffe, enle- ver à la Fontaine le feeptre de la Fable , à Corneille &c à Racine ce- lui de la Tragédie &c être tout en- femble Législateur & Modèle. D'autres ont condamné M. delà Motte furie préjugé gênerai, qu'on ne peut réuilir à la lois en tant de choies différentes. On avoue ici que le préjugé eft raifonnable & que c'elt une règle prefque toujours vraye ; mais il refte, dit-on , à exa- miner d M. de la Motte n'en feroit point l'exception. M. de la Motte , à ce qu'on fait voir ici , n'en ufoit pas à l'égard des autres comme les autres en ufoient à fon égard : il fe plaifoit à loiier le mérite , & pour peu qu'un Auteur en eût il avoit foin de le relever. Il démeloit les beautez, dans la toule des défauts , & motitroit du bon côté les Ouvrages £v les Auteurs ; s'il eût été capable de hair quel- qu'un , il eût liai ces Cenfeurs de profeffion , qui moitié fottife , dit l'Auteur de la Lettre , moitié or- gueil & mauvaife foi , trouvent pi- ES SÇAVANS; toyable ce daeihblctout Ouvrage nouveau , & ne fçayent rendre rai- fon de leur dégoût que par des phrak-s générales & des lieux com- muns dont ils ont farci leur mé- moire Se qu'ils n'entendent pas. Comme ML de la Morte loûoit félon le mérite, on remarque que fes grandes louanges n'étoient que pour les Auteurs excellens, &: l'on fait de lui à cette occafion un por- trait qui le caracterife trop bien pour ne devoir pas être expofé ici. » Les louanges qu'il donnoit » n'étoient pas de ces louanges va- *> gués qu'on ne peut refufer fans fe » rendre fufpect d'envie t c'étoic » des louanges détaillées Se raifon- » nées , des louanges qui mettoient » dans tout leur jour les beautez de » ce qu'il loûoit. Il a donné des avis » utiles fur des Ouvrages dont un » autre que lui auroit craint le fuc- » ces , Se il a applaudi enfuitc au » fuccès fans faire fentir en aucune » manière la part qu'il y avoit. » C'eft ainfi qu'il faifoit briller en » même tems fes lumières , fon » équité Se fon délîntereffement i » aulîi feu M. de la Faye difoit de » lui , jufticc Se juftxiTe , voilà fa » devife. Ce caractère concerne la perfon- ne de M. delà Motte ; voici celui que l'on donne de fes Ouvrages , on dit : Qu'il ne feroit pas raifonna- ble d'y vouloir tout julliher : Que parmi un très-grand nombre des plus beaux vers , il y en a de durs & de profaïques: Que par une ïorte d'impatience il étoit moins propre à corriger que capable de produire Se par ? u l parla peut-être moins Verfificatcur que Poète , la versification ne fe perfectionnant que par les lenteurs de la correction : Qu'il faudrait paffer condamnation fur quelques endroits ou négligés , ou gâtés au contraire par une affectation vicieu- fe , & un air de pointe : Que cet Ecrivain qui montrait tant de goût dans l'examen des Ouvrages des autres , paroît dans fes propres Ou- vrages en avoir moins que d'efprit & de génie. L'Auteur de la Lettre va plus loin, il trouve que M. de la Motte donne quelquefois à fes pen- fées un certain tour qui , quoique fpirituel, déplaît fans qu'on puiffe bien dire pourquoi. Je l'ai vu , ajoûte-t-on , foùtenir d'une manière fiplaufible ces endroits attaqués , que je ne fçavois plus qu'en juger , ou plutôt que lui répondre ; mes difficul- té*, me panifiaient bien refolues , & mon irnprejfion cependant étoit tou- jours la même ; mais dans ces occa- fions j'ai fouvent ofé me défier de [on efprit , & m'en tenir à mon goût. Cette critique paroît bien peu avantageufe pour M. de la Motte , mais elle eft fuivie d'un correctif qui en efface bien-tôt l'impreffion: on avertit que la bonne manière de défendre les Ouvrages en vers de M. de la Motte, car on reconnoît que les autres n'ont pas befoin d'a- pologie, ferait, i°. De faire obfer- ver que les tantes y font fuffifam- ment rachetées par les beautez : 2°. De s'attacher à faire fentir le prix de ces beautez : 30. De mon- trer que les fautes dont il s'agit font de peu d'importance &c n'attaquent Juin. N , 175*. ?iP jamais le fond de l'Ouvrage : 40. De reprefenter que M. de la Mgrte n'eft pas de ces Poètes qui doués d'une brillante imagination mais dépourvus de juftefte & d'é- tendue d'efprit, n'offrent aux Lec- teurs que des beautez de détail, tan- dis que le tout eft défectueux ; qu'il poffedoit au fouverain degré l'art de faire un plan Se d'en arranger toutes les parties ; Que ce talent brille dans fes moindres Ouvrages en vers ; qu'on y remarque toujours de l'invention Se un deffein bien fuivi. On conclut de-là que M. de la Motte eft un des plus grands Poètes François. On finit par remarquer qu'il eft encore un des plus grands Orateurs & un des meilleurs Criti- ques qui ayent paru; puisonraf- femblefous un feul point de vûë les principaux traits qui caracterifent cet Auteur. Qaant à la qualité d'Orateur qui ne lui a jamais été conteftée , on fe contente de citer là-deffus le remerciment qu'il fit à l'Académie Françoife , lorfqu'il y fut reçu en 17 10. & on exhorte les Lecteurs , pour l'honneur de l'Aça- demicien , à comparer ce Difcours avec ceux qui ont été laits en pareil- les occafions depuis près de cent ans parles meilleurs Ecrivains. Pour ce qui regarde la qualité de Cririque , on remarque i°. Que perfonne n'avoit plus approfondi que lui la nature des Ouvrages d'ef- prit; que perfonne ne connoiffbit mieux les règles & les raifons des règles , & n'a expofé les unes &: les autres avec plus de lumière & d'a- Tt iao JOURNAL DI grémcnt : i°. Que fur les traces de M. de Fontcncllc , il a appliqué aux Belles -Lettres & à la Poé'%, cet efprit Philofophique que Def- cartes avoit porté dans les différen- tes parties de la Philofophie ; pré- cienfe nouveauté, dit là-deifus l'Au- teur de la Lettre , mais dont le goût & la fruits font peut-are referzés a vas defeendans ; car combien de gens difent encore qu'il ne faut point rat- ionner fur les agrémens, que la recher- che de leurs caufes n'eft d'aucune utilité ? Ce(i preffue toute la criti- que qui a été faite de fes difeours fur îa Tragédie & principalement de fes réflexions furies vers. Pluiïeurs perfonnes ont regardé comme un Paradoxe fon fentiment, Que tous les genres d'écrire traitez, jufqu'à prefent en vers pouvaient l'ê- tre heitreitfement en profe. Ce fenti- ment a été vivement combattu par divers Auteurs , & entt'autres par M. de Voltaire -, mais l'Auteur de la Lettre remarque qu'on n'a tou- ché à fes raifons, qu'en difant que c'étoient des raifens pbilofophi- ques. Q elques-uns ont mal pris la penfée de M. de la Motte,& à cette occafion on fe croit obligé de don- ner dans la Lettre un abrégé de ce qu'il a écrit fur cette matière, & de l'état de la queftion : voici cet abré- gé que nous abrégerons encore. Les vers ne conviennent pas à tous les fujets , il n'y a que la profe qui y convienne , & il en eft de tous les genres de poefie comme de la Comédie & du Poème Epique , qui peuvent être faits indifférem- ment en profe ou en vers» On en ■S sçavans; demeure d'accord à l'égard de ces derniers, parce qu'on'en a des exem- ples i mais le Philofophe n'a pas befoin d'exemples pour croire. M. de la Motte ttoit perfuadé que des Tragédies en profe réullîroient fi elles étoient d'ailleurs de bonnes Tragédies. On ne lui a point répon- du fur cela directement , on n'a point refuté les raifons parlefquelles il a prétendu montrer que bien loin que les vers fuffent effenriels à la Tragédie, la profe y convenoitplus naturellement, & que l'habitude feule nous avoit familiarifé à enten- dre des Rois , des Héros , des Prin- celTes , délibérer & s'entretenir en vers ; on ne lui a donc répondu qu'indirectement , en exaltant les beautez des vers , 6v le plaifir qu'ils caufent. M. delà Motte a fuivi fes adverfaires où ils l'ont voulu me- ner , &il leur a répondu à (on tour en examinant en Philofophe la ver- fification , &: en expofant les incoa- veniens des vers en gênerai & fut tout des vers François. Mais il n'a pas manqué d'ajouter que les vers nonobllant tous leurs défauts , avoient des agrémens infinis , &r pour l'efprit & pour l'oreille ; qu'ainfi ils ne dévoient pas être abolis quelle que fût la caufedeces agrémens ; qu'il falloir non fubfti- toer , mais ajouter un ufage à un au- tre, non diminuer le plaifir, mais en procurer de plus d'une efpecc. Voilà en abrégé quelle ctoit la- penféc de M. de la Motte furies vers & fur la profe. Il ne nous refte plus qu'à rapporter ce qu'on dit ici du cara&erc de fes Ouvrages & de. JUIN fa perfonne : l'abondance , la nou- veauté , la juftefle des penlées , &£ selle des raifonnemens , la force, la délicatefte , la netteté &c la préci- fîon du flyle ; voilà , dit-on , ce qui cara&erife les Ouvrages de M. de la Motte. Il étoit au relie d'une douce So- ciété , affable , poli fans affe&ation dans le langage &c dans les maniè- res; on prétend dans la Lettre, qu'il auroit pu écrire comme il parloit , Se bien écrire ; que cependant peu favorable à la maxime, qu'il faut écrire comme on parle , il refufoit cette louange , difant qu'il ne fal- loit pas prendre cette maxime à la Lettre, qu'elle lignifie feulement qu'il faut paroître écrire comme on parle , que prife même en ce fens , elle n'eft vraye que pour les Dialo- gues & les Lettres : notre Auteur, qui a connu particulièrement M. de la Motte, Se avec lequel il té- moigne avoir été fort familier, dit qu'il parloit d'un ftyle fimple &c aïfé; mais il remarque enfuite que cet Académicien ne s'expliquoit pas de même dans fes Ecrits ; il nous a donné dans fes Ecrits , dit- on , un des plus parfaits modèles du ftyle foigné & travaillé. La peinture naïve qu'on fait de M. de la Motte par rapport à ce qu'il étoit dans la converfation & à la douceur qu'on a toujours remar- quée en lui jufqu'à la fin de fes jours , terminera cet Extrait com- me elle termine la Lettre. m II excelloit dans la converfa- » tion , il l'aimok , 2>c y plaifoit ,17 5 2. 32 1 » également à tout le monde ; mais » elle ne lui étoit jamais plus apréa- » ble que lorfqu'on y difeutoit «quelque matière ; c'eft alors » qu'il y brilloit davantage. Il dif- u putoit avec vivacité , maû fans » emportement , fans aigreur , fans » opiniâtreté , en homme du mon- » de , plutôt qu'en homme de Let- tres; il railloit & n'offenfoit ja- » mais , badinoit avec grâce , plai- » fantoitavec fi ne (Te. Ce qu'il avoit »> été, il l'étoit encore quand la mort » l'a enlevé ; les infirmitez les plus m douloureufes n'avoient point alte- » ré fa douceur & fa gayeté naturel- le. Son efprit avoit confervé tou- » te fa vigueur Se acqueroittous les «jours de nouvelle* lumières. M. » de la Motte aimoit le travail , Se n dans l'état où il étoit réduit , c'é- » toit fa plus douce confolation Se » prefquefon unique plaifir. L'Auteur de la Lettre déclare ici qu'il n'a pas loué M. de la Mot- te d'une manière digne d'un fi ex- cellent Homme , que peut-être ne l'a-t-il pas allez loiié, & qu'en crai- gnant trop de lui faire grâce il ne lui a pas fait juftice. Puis il finit par ce trait fingulier. » Je fçaurai bien-tôt à quoi m'en » tenir là-deffus. M. de Fontenelle, » comme Directeur de l'Académie m Françoife, répondra au Succeffeur » de M.de la Motte; j'aurai foin de » vous envoyer les deux Difcours " aufii-tôt qu'ils feront imprimés» a je n'ai pas la vanité de craindre qu'ils m'humilient. Ttij 32z JOURNAL DES SÇAVANS, LA CATANOJSE, OU HISTOIRE SECRETTE des Mouvement arrivés au Royaume de Naples , fous la Reine Jeanne 1. A Paris, chez Pierre Gandoiiin , Quai des Auguftins. 1731. vol. in-11. pp. 344. PHILIPPE furnommée la Caunoife , qui a joiié des Rol- ies lî furprenans dans le Royaume de Naples , fous les règnes de plu- lieurs Souverains , Si entr'autres fous celui de la Reine Jeanne I. fait le fujet de l'Hiftoire dont nous allons rendre compte. Comme cet- te Hiftoire eit fans cclîe interrom- pue par des incidens étrangers qu'on y mêle pour groffir le Livre &C qui ne fentent que la fiction 6: la fable: nous tâcherons d'éloigner tout ce qui pourrait faire perdre de vue l'objet principal du récit, & nous nous reftraindrons autant qu'il nous fera poiïible aux faits effentiels fans prétendre toutefois en garantir tou- tes les circonstances. La Catanoife étoit une Blanchif- feufe , mariée à un homme qui fai- foit le métier de Pécheur ; elle fe nommoit Philippe , & on lui don- na le nom de Catanoife, parce qu'elle étoit née dans la Ville de Catane en Sicile. Elleavoit de l'ef- prit , & fçut pr Titcr des occafions que la fortune lui offrit de parvenir aux plus grands honneurs. Char- les II. Roi de Naples, fils de Charles I. frere de S. Louis Roi de France, Chef de la Maifon d'An- jou , donna lieu par fes infortunes à l'élévation de cette femme , & voi- ci comme on raconte un événement il extraordinaire. Robert Duc de Calabre fils aîné de Charles , avoit époufé Violante , Princeffe d'Arragon, fœur de Jac- ques Roi d'Arragon & de Frédéric. Frédéric , nonobftant cette alliance, s'cnnuyoitde vivre en Sujet, cvfs rendit maître de la Sicile qui ap- partenoit au Roi de Naples, pere de fon beau-frere. Le Roi de Na- ples envoya Robert Duc de Calabre pour s'oppofer aux conquêtes de Frédéric. Violante , Ducheffe de Calabre, la plus vertueufe Princef- fe de fon tems , voulut accompa- gner fon époux dans les périls où il alloit s'expofer. Robert fut vaincu par Frédéric , & le trouva dans une li rrifte fituation que ceux qui du- rant fa profperité, paroilloient être fes meilleurs amis furent les pre- miers à l'abandonner. Au milieu de cette difgrace la Ducheffe de Calabre , auparavant accouchée d'un fils qui fut nommé Charles, accoucha d'un fécond fils qui fut nommé Louis. Elle fut alors li délaiffée qu'elle eut de la peine à trouver une femme pour nourrir le petit Prince. Après beau- coup d'inquiétude fur ce fujet , elle s'eftima fort heurçufe de pouvoir le confier à une femme qui faifoic le métier de BlanchilTeufc pour ga- gner fa vie ; c'était la Catanoife dont il s'agir. Cette femme étoit jeune cV fort bien faite , elle avoic JUIN, 1732. 523 les cheveux nous , les yeux de mê- route fa prudence pour ménager un me couleur, grands , pleins de feu, les traits allez réguliers , le vifage très-agréable, Se avec cela beau- coup d'efprit > mais plus qu'il n'é - toit neceffaire pour l'ufage qu'elle en fit dans la fuite ; car ce ne fut en elle, dit notre Auteur, qu'artifice, orgueil , ambition , intérêt Se ava- rice ; elle fe fervoit de toutes fortes de moyens pour parvenir à fcs fins, Se les crimes lui étoicnt plus fami- liers que les bonnes actions. Son mari , comme nous l'avons remar- qué , faifoit le métier de Pécheur ; fon humeur , dit l'Hiftorien , con- venoità celle de fa femme , ilétoit entièrement fournis à la Catanoife. Ces deux perfonnages fe propofe- rent de profiter des moyens que la fortune leur procuroit pour rendre leur condition meilleure. Dès que Philippe , autrement dite la Catanoife , fe vit auprès de la Dircheffc de Calabre, elle s'ap- pliqua à connoîrre l'humeur de fa maîtreffe , pour tâcher de gagner fa confiance, ce qui né lui fut pas difficile. La Ducheffe qui étoitnaturelle- ment franche , Se qui jugeoit des perfonnes par leurs manières , crut trouver dans celles de la Catanoife des fignes certains du plus rare mé- rite. Violante l'aima tendrement & fe vit bien-tôt en état de lui en don- ner des marques. C'eft ici le nœud de l'Hiftoire ', Se nous ne fçaurions extraire avec trop de fuite ce que notre Auteur remarque fur ce fujet. La Ducheffe de Calabre employa accommodement entre le Roi Charles fon beau-pere Se le Prin- ce Frédéric fon frère. Elle en vint à bout, Se il fut arrêté par le Traire que le Prince Frédéric auroit pen- dant fa vie la joiiifTance de la Sicile, avec le titre de Roi de Trinacrie , à condition qu'il épouferoit la Prin- ceffe Eleonore fille du Roi Char- les. La fin de ces brouflleries rendit la tranquillité aux deux Royaumes, Se fournira la Ducheffe de Calabre, à qui on devoir un fi grand bien- fait , les cœurs de tous les peuples. La Catanoife qu'une ambition démefurée animoit , profita de cette conjoncture pour demander des grâces , Se les ayant obtenues de la Ducheffe dont elle avoit fçû gagner le cœur par mille arrifices , elle fe flattoit de ne pas refier en Ci beau chemin lorfque la Ducheffe tomba malade d'une maladie mor- telle; accident qui fournit en effet à la Catanoife le moyen de pouffer plus loin fon bonheur : elle fervic avec tant de foin la Princeffe mala- de , que cette Princeffe recomioif- fante étant fur le point de mourir, pria Robert d'accorder fa protec- tion à une perfonne dont elle avoit reçu tant de marques d'artache- ment , ce que Robert exécuta peu de tems après d'une manière bien efficace ; car s'étant remarié avec la Princeffe Sanche fille du Roi de Majorque , il donna la Catanoife à fa nouvelle époufe , en difant à cette Princeffe qu'il lui faifoit un prefent confiderable , puifque le S24 JOURNAL D mérite delà Catanoife école prouvé par l'amitié que Violancc avoit eu pour elle & par le foin qu'elle avoic eu de la lui recommnader en mou- rant. La nouvelle Duchcffc , à ce que remarque l'Hiftorien, reçut d'a- bord cette femme par déférence à la volonté du Duc fon Epoux , mais enfuite elle la garda avec plai- fir. Car cette artificieufe femme ayant reconnu que la Princeffe fai- foit profeflîon d'une extrême pieté, n'oublia rien pour contrefaire la dévote , & devint une des plus ru- fées hypocrites qui fe foient peut- être jamais vues. Son airimpofteur lui réulîît fi bien que Sanchc la ju- gea digne de toute fon amitié : la Princeffe l'accabloitdc bienfaits, Si la prevenoit même fouvent pour lui épargner le foin de lui marquer fes defirs. Le mari de la Catanoife ne pro- fita guéres de toutes ces faveurs de la fortune ; il mourut peu de tems après d'une mort allez prompte, & qui , félon l'Hiftorien , auroit fait foupçonner qu'elle n'étoit pas natu- relle , fi dans ces commencemens l'on s'étoit apperçu de la noirceur d'ame de la Catanoife , comme on s'enapperçut dans la fuite. Notre Auteur dit que cette fem- me marqua autant de douleur de la perte de fon mari , que li elle en avoit été effectivement affligée. Il prétend que ce maci croit devenu à charge à fa femme depuis qu'elle s'étoic vue à portée de s'élever , & il ne fait pas difficulté d'infinuer que le but de la Catanoife ctoic ES SÇAVANS; d'époufer quelque perfonne de confideration. Ce qu il y a de cer- tain,félon notre Hiitorien^c'eft que dès que fon niaii tut mort elle n'ou- blia rien pour s'attirer nombre de prétendans , afin dechoifir dans ce grand nombre celui qui lui paroî- troit plus propre à favorifer fon élé- vation. Notre Auteur , après diverfes circonftances qu'il rapporte au long & que nous fournies obligez de paf- fer pour nous renfermer dans de juftes bornes , vient enfin au ma- riage de la Catanoife avec un jeune homme nommé Raimond, aupa- ravant Mahomctan, lequel étoit à la Cour du Roi Charles , &C qui de fimpleCuifinier étoit parvenu à la dignité de Chevalier par le crédit de la Catanoife auprès de la Prin- eefTe S anche qui obtint du Roi cet- te grâce pour le jeune homme , quoiqu'il n'eût jamais manié d'autre fer que celui de la Cuifinc ; mais Raimond plaifoit à la Catanoife , qui en étant devenue éperdument amoureufe , & voulant cacher fa pafiion à la Princeffe , lui fit enten- dre que comme ce jeune homme avoit été Mahometan & qu'il étoit nouvellement converti à la foi , el- le ne fouhaitoit l'cpoufer que pour lui faire fetttir combien l'abjuration de fes erreurs lui étoit avant ageufe & que les biens fpvnuels lui en atti- reraient de temporels ; qu'elle étoit prête à fe facnfier en cette occafion , pour encourager ceux des Infidèles qui apprendraient Us profpcritez. de Rai- mond^ imiter fon exemple: que l'in- térêt poitrroit les y amener & la JUIN, grâce les y foutenir. Les bornez, dont vous m'avez, honorée , ajoûta-t-elle , me font rechercher par des partis fort au-deffus de Raimond ; mais je crois ne pouvoir faire un meilleur ufage des biens dont vous m'avez, comblée , qu'en les partageant avec un homme qui n'en a point d'autres que fa foi & fes bennes mœurs. La Catanoife joignit à cela , dit l'Hiftorien , plusieurs autres dif- cours hypocrites qui charmèrent la Ducheffe , & qui l'engagèrent à favorifer ce mariage; la cérémonie s'en fit avec une pompe extraordi- naire & la Ducheffe de Calabre fe chargea des frais de la noce. L'Auteur fait ici un- long expofé de l'état où étoit alors la Cour de Naplcs , & il entre là-deilus dans un détail auquel nous croyons de- voir renvoyer les Lecteurs. Nous remarquerons feulement qu'il y a dans ce détail quelques articles qui ne paroiffent pas bien clairs. Tel eft entr'autres le fuivant. » L'an 1309. les Napolitains ; =» dit notre Auteur } perdirent leur » bon Roi Charles II Il laiffa »» neuf fils & quatre filles, dont «voici les noms : Charles- Martel » Roi de Hongrie, Louis qui fut » fait Religieux de S. François , » Robert Duc de Calabre , Philip- j> pe Prince de Tarente « ( Sur quoi il eft à remarquer qu'à la page 4e notre Hiftorien dit,parmé- prife fans doute , que Robert Duc de Calabre étoit fils aîné de Charles. ) Voici comme il con- tinue. »Robcit Duc de Calabre fucce- 1732: 32J" m da au Roi Charles fon père , à » l'exclufion des enfans de Charles » Martel Roi de Hongrie fon frère » aîné Le Roi Robert s'appli- » qua à procurer le bien de fes peu- » pies & aux foins de fa famille...... »Eni3îj. Robert fe maria avec «■Catherine d'Autriche fille de » l'Empereur Albert. Cette Prin- » ceffe étant morte très-peu detems « après 3 le Roi penfa à faire une » nouvelle alliance. Pour cet effet , •»il envoya le Comte Eleazar en m France pour demander Marie fil- »le de Charles Comte de Valois s » qui lui fut accordée. Il eft difficile de comprendre ce Difcours de notre Hiftorien , puif- que Catherine d'Autriche ne fuC pas mariée à Robert , mais à Char- les Duc de Calabre fils de Robert, & que Marie de Valois ne fut point non plus mariée à Robert , mais aa même Charles Duc de Calabre , alors Veuf de Catherine d'Autri- che. C'eft toute la reflexion que nous ferons fur ce fujet. Si-tôt que Marie de Valois eut époufé Charles Duc de Calabre , le Roi Robert , beau-pere de la Prin- ceffe , lui donna la Catanoife 3 comme une perfonne attachée à fa Maifon depuis long- tems , ayanr fervi la Ducheffe Violante , la. Reine Sanche & la Ducheffe Ca- therine avec un foin qui lui avoir fait mériter leur bienveillance. Marie de Valois étoit fort jeune» cependant la Catanoife , quoique fur le retour , fçût fi bien s'infinuec dans les bonnes grâces de la Prin- cefile , qu'elle en obtint plus de g%6 JOURNAL D marques d'amitié qu'elle n'avoit encore fait de toutes les autres. L'Hiftorien dit que cette femme itoit un véritable Caméléon qui fe conformait à tout ce quelle appro- choit. Elle avoit paru dévote devant la Reine Dona Sanche ; fitot quelle tut remarqué que la paffion dominan- te de la nouvelle Duché fe était la parure , elle mit toute fon étude à in- venter des ajuflemens d'un goût nou- veau. Elle loiioit avec excès , la beauté (fr les grâces de la Princeffe , de même que tout ce qui fervoit à l'orner. Ses adulations réujftrent de manière que devenue maître fje de la confiance de la Ducheffe , le cré- dit de cette artificieufe favorite par- vint à un point oh il n'avoit pas en- core été auparavant. La Duchefle de Calabrc accou- cha la première année de fon ma- riage d'une fille qui fut nommée Jeanne. La Catanoife obtint la Charge de Gouvernante de la peti- te PrinceiTe ; celle de Surintendanc de fa Maifon tut donnée à Rai- mond. Dans ce tems-là les Florentins demandèrent à Robert Roi de Na- ples , le Prince Charles fon fils Duc de Calabre , pour les gouverner pendant dix ans. Le Roi y confen- tit & envoya Gautier Duc d'Athè- nes Se Comte de Brefne fon parent pour prendre pofleflîon de ce Gou- vernement au nom du Duc de Ca- labrc , qui s'y rendit peu après avec la Duchefle fon Epoufe. Au pre- mier bruit de ce changement la Ca- tanoife entra dans de grandes in- quiétudes : elle craignit que II elle ES SÇAVANS; ne fuivoit la Duchefle , d'autres ne. profitallent à fon préjudice , de cet éloignement , Se ne s'emparadent de l'efprit de la Princefle. Pour fe mettre à couvert de tout danger fur ce point , elle perfuada à la Duchefle de mener avec elle la Princefle fa fille à Florence. Cette ambitieufe femme fçûc trouver à Florence de nouveaux moyens d'agrandir fa fortune. Elle connut que le; cfprits y étoient plus polis qu'à Naples , Si le langage plus épuré. Là-deflus elle crut , dit l'Hiftorien , devoir renoncer à cet amour propre qui nous perfuade fouvent que nous valons mieux que les autres , Si elle s'étudia à fe former fur ce qui lui parut de meil- leur dans cette nation, & cela pour fe rendre toujours plus capable de plaire aux perfonnes qui pouvoient contribuer à l'augmentation de fa fortune , quoique celle dont elle jouifloit alors fût capable de rem- plir les defirs les plus avides. Elle ne fçavoit ce que c'étoit que de faire plailir fans intérêt. Elle vendoit autant qu'il lui étoit poflible les grâces qui dépendoient de la Du- chefle , &: elle lesfaifoit tomber fur ceux qui les payoient davantage. La Duchefle de Calabre accou- cha à Florence d'un fils qui fut nommé Charles & qui ne vécut que neuf jours. Elle eut enfuite une fille qui fut nommée Marie , donc il eft parlé dans la fuite de cette Hiftoire. Après trois ans de féjour à Flo- rence le Duc de Calabre ayant ap- pris que l'Empereur Louis de Ba- vière JUIN viere cntroiten Italie , 8c craignant qu'il n'eut deiïein d'inquiéter le Roi de Naples , ce Duc partit de Florence pour fe rendre à Naples auprès du Roi fon père , afin d'être à portée de le fécourir en cas de befoin. Cette même année , c'eft-à-dire en 1328. le Duc de Calabre mou- rut & ne laifla que les deux filles dont il a été parlé plus haut, fçavoir Jeanne &c Marie. Le Roi Robert inconfolable de la perte qu'il avoir faite du Duc de Calabre fon fils , s'attacha à ce qui lui reftoit de ce cher fils , &c fongea à procurer aux jeunes Princefles, filles du Duc de Calabre , une éducation qui pût les rendre dignes de leur père. Robert ayant vu quatre Prin- ceffes accorder fucceflîvement leur confiance à la Catanoife , fe per- fuada , remarque notre Hiftorien , qu'il n'y avoit qu'un mérite fupé- rieur à tout autie,qui eût pu fe con- ferver ainfi une égale faveur auprès de plusieurs perfonnes d'humeurs fi différentes. Dans cette penfée il engagea la Catanoife à prendre foin de la Princeffe Jeanne. Ce comble d'honneur ne fut pas fuftîfant pour contenter la Catanoife; elle eut la hardiefle de demander pour fon mari la Charge de Grand Sénéchal de Naples. Le Roi la lui accorda , Si s'attira par-là du fameux Bocace des railleries que l'on voit encore dansfes Ecrits. Notre Hiftorien reprefente par tout la Catanoife comme un efprit des plus noirs ; mais pour ce qui re- Juin. > 17 32. Î27 gardeRaimond fon mariai en fait un portrait des plus avantageux , & ce qu'il en dit mérite d'être rapporté. » La perfonne de Raimond , dit* »/'/, n'étoit pas indigne du bon- » heur dont il jouiiîoit ; les Con- » feils , ni les exemples de fa femme » n'avoient pu déranger l'inébran- » lable probité qui regnoit dans fon »» ame. Il auroit eu l'eftime du pu- » blic s'il n'avoit été lié à une per- » fonne qui en méritoit le mépris » & l'averlion. Mais le Ciel rompic »j cette union peu de tems après par nia mort de Raimond. » Il faifoit un bon ufage de fon «crédit, &ncperdoit aucune oc- » cafion de rendre fervice à tous » ceux qui le mettoient à l'épreuve; »on peut dire qu'il n'a jamais caufé » la moindre peine à qui que ce » foit ; le Roi le regretta véritable- » ment, & lui fit faire une pompe » funèbre très-honorable. Quand la Catanoife perdit fon premier mari , notre Auteur pré- tend que les regrets qu'elle témoi- gna n'étoient qu'extérieurs ; mais il affure qu'elle pleura véritablement; celui-ci , & que le Roi ne put s'em- pêcher de lui témoigner la part qu'il prenoit à la jufte douleur où il la voyoit. Il l'affina en même tems de la continuation de fa protection, en lui recommandant de redoubler fes foins pour la confervation de la PrincelTe Jeanne. La Ducheffe de Calabre mourut peu de tems après, & c'eft ici t à proprement parler , le véritable point où il faut prendre l'Hiftoire de la Catanoife. Cette femme s'empara entière- Vv 328 JOURNAL D ment de l'cfprit de la jeune Prin- cefie qui n'avoir plus de merc , &C elle en vint à bout en fc conformant à toutes fes inclinations^ qui étoient l'indépendance ik la galanterie. Une Gouvcrnanrc qui auroic eu affez de vertu pour préférer fon devoir à fon inteiêt , auroit tâché , dit notre Hiftorien , de reprimer de bonne heure ce qui paroilloit de mauvais dans le cœur d; cette Prin- cefie , & qui a eu des fuites fi fune- fies à fa réputation ; mais la Cata- noife , remarque-t-il , qui ne fon- geoit qu'à plaire à ceux qui pou- voient diftribuer des grâces, voyant le Roi Robert affez vieux , ne pen- fa , tandis qu'il éclairoit fes actions, qu'a inftruire la Princefle en l'art de dilfimuler , jufqu'à ce qu'elle fut maîtrefle de fes volontez par la mort du Roi. La Princeue mit en ufage les mauvaifes inflructions de fa Gou- vernante; mais malgré fes foins à fc deguifer , elle ne put empêcher Robert (on père , de s'appercevoir de l'inclination qu'elle avoir pour le Prince de Duras , quoiqu'elle fût déjà mariée au Prince André de Hongrie neveu de Robert; incli- nation que la Catanoife fomentoit de tout fon pouvoir ; ce qui , avec d'autres chagrins domeftiques, fie mourir Robert d'affliction , le 13. Janvier 1 342. âgé de foixante qua- tre ans. Il fut d'autant plus regretté que la PrinceiTe Jeanne qui lui fuc- cedoit , laiffoit entrevoir , dit l'Hi- ftorien , un malheureux avenir. Cette Princefie fut peu fenfiblc à la perte qu'elle venoit de faire 1 la ES SÇAVANS, Catanoilc lui ayant toujours fait cn- vifager comme la fin de la contrain- te la mort future du Roi. Charles Roi de Hongrie avoir laific à fon fils André , alors âgé de 18. ans , un Gouverneur Cordelier. nommé Robert, qui jouoit auprès de ce Prince le même Rolle que la Catanoife jouoit auprès de la Prin- cefie. Enforte que bien loin d'ef- fayer de le corriger de fes défauts , dont un des moindres étoit l'ivro- gnerie , il applaudiflbit à tout ce qui pouvoit plaire à ce Prince, & le faifoit dans des vues femblablcs à celles de cette femme. Comme le Cordelier connoiffoit les fentimens du Prince , 8c que la Catanoife con- noiffoit de même ceux de la Prin- cefie , il arrivoit que ce Gouver- neur & cette Gouvernante étoienc très-oppofés l'un à l'autre & fe tra- versaient dans toutes les occafions. Le Roi André accoutumé au vin , recevoit d'un vifage égal tous les évenemens, év s'embirrafloit peu des fujets de chagrins que Jeanne qui aimoit aillcuts;pouvo]tlui don- ner. Mais fon Gouverneur le Cor- delier n'etoit pas fi tranquille , il examinoit avec foin les démarches de tout le monde , 6v principale- ment celles de Jeanne Cv de fa Gouvernante. La Catanoife qui n'ignoroit pas combien le crédit de ce Moine étoit nuihbleaux deffeins qu'elle avoit , commença par infpi- rcr à la Reine d'éloigner le Corde- lier ; cet éloignement n'étoit pas facile , mais elle en vint à bout après un certain tems. On voit ici par pluficuis faits ex- JU I traordinaires que rapporte l'Hilto- ticn , &: que nous pallons , l'empi- re étrange que cette femme avoir uiurpc fur l'efprit de la Reine. Comme Jeanne aimoit le Prince de Duras ainfi que nous l'avons remar- qué , la Catanoife qui tavorifoit cette inclination illégitime , em- ploya toutes fortes de moyens pour éloigner ceux qui lui parurent fuf- peds. Elle leur fit ôter les Charges qu'ils pofTedoient , les fit donner aux perfonnes de fa famille Se aux autres qui étoient dans fes intérêts. L'Auteur entre là-deffus dans un détail curieux auquel nous ren- voyons ; détail qui fait voir que les bienfaits ne le diftribuoient que par cette femme & qu'elle n'étoit con- duite que par l'orgueil , l'avarice &C la fureur. Cette fureur fut fi grande^que la Catancife fe voyant contrariée dans fes deffeins par le Roi André qui étoit inftruit des mauvais confeils qu'elle donnoit à la Reine , refolut de le faire mourir pour conferver le crédit qu'elle avoir auprès de la Reine. Refolution qui fut exécutée le ï8. Septembre 1 345. dans le Pa- lais même du Roi. Notre Auteur raconte au long comment elle s'y prit pour parvenir à un crime fi horrible ; nous paffons ce détail. Nous remarquerons feu- lement que de la manière dont il reprefente les chofes , la Reine en- tra dans le deffein de la Catanoife. Plufieurs Auteurs cependant la dif- culpentde ce crime. Quoi qu'il en foit , le Roi de Hongrie, frère d'André, demanda N, i752- 529 la punition des aiTafllns de fon frère. La Reine fut obligée de permettre la recherche des coupables. Elleau- roit bien voulu en excepter la Cata- noife , mais elle ne le put ; cette femme étant regardée de tout le monde généralement comme la principale Aclrice de cette aftreufe Tragédie. Les Etats du Royaume commi- rent à la recherche des coupables , Hugues de Baux Prince d'Orange & Comte d'Avellino. Il fit arrêter plufieurs perfonnes , èc entr'autres la Catanoife, fon fils j fon gendre & fa fille. » Cette femme fi hautaine , dit » l'Hiftorien , devant laquelle tout » le monde trembloit . cette femme n qui de petite Blanchiffeufe , avoir » porté fi loin fon pouvoir , qu'elle » gouvernoit avec plus d'empire »> que la Reine même , parut char- » gée de chaînes , vêtue de haillons » 6c expofée aux railleries de tout » le peuple , qui étoit charmé de la a> voir rentrer dans fon néant. La Reine qui l'avoit tant aimée l'abandonna dans cette occafion, & la Catanoife fe voyant ainfi délsif- fée , fe déchaîna contre la Reine , difant que le feul regret qui lui re- ftoit étoit de n'avoir pas abrégé les jours de celle qui l'abandonnoit. Elle fut conduite hors de la Vil- le avec fon fils , fon gendre & fa fille , où on leur donna la queflion au milieu d'une plaine , afin qu'il y eût plus de Spectateurs. Ayant été convaincus , on les ramena en pri- fon : Puis ils furent traînés fur une Claie dans toutes les rues s Se eu- yvii 33o JOURNAL DE fuite attaches à des Mats de Navire pour être tenaillés cn.' déchirés. La Catanoife qui croit arToiblic parles années , ne pouvant fupporter tant de tourmens mourut dans les dou- leurs. Sa tête fut expofée fur une des portes de Naples ; le fils , le gendie ex la fille de la Catanoife , après avoir effuyé les fupplices qu'on vient de marquer 3 furent brûlés vifs. Notre Auteur termine là fon Hiftoire. Cependant comme il ne s'eft pas contenté de lui donner pour titre : La Catanoife , mais qu'il lui donne encore celui à' Hiftoire Secmte des Mouvement arrivés au Royaume de Naples , fous la Reine Jeanne I. Il femble que pour fe conformer au titre, il auroit dû prefentement rap- porter de quelle manière la Reine Jeanne démêla fes intérêts avec le Roi de Hongrie au fujet de la mort d'André. Mais il dit qu'il nepaffera pas plus avant , à moins que les Lec- teurs ne foyent affez. contens de fon récit pour l'engager à donner la Vie de cette Princejfe. Le titre de Secrette que porte cette Hiftoire , annonce des chofes qui ne font pas encore venues à la connoiflanec du public. C'eft fans 5 SÇAVANS; doute par rapport à cela que l'Au- teur dit dans fa Préface que fon Hiftoire contient plufionrs faits in- terelTans dont il doit la découverte à certains Mémoires particuliers qui n'avoient pas encore été mis au jour. Seroit-ce à ces Mémoires par- ticuliers qu'il devroit la connoiffan- ce des entretiens les plus cachés de la Reine Jeanne avec la Catanoife , 6 jufqu'à la connoidance la plus détaillée de ce qu'en certaines occa- fions, la Catanoiie difoit en elle- même Se fur quoi il étoittropde fon intérêt de ne pas s'ouvrir pour qu'on puifle la foupçonner de l'a- voir jamais fait. Il détaille cependant ces particu- laritez comme fi elles avoient été révélées , &c c'eft ce qui fait un des principaux caractères de fon Hiftoire , ii l'on en excepte les con- tinuelles & ennuyeufes digreftions y fur des avantures amoureufes & Romanefqucs qui font plus de la moitié du Volume , & du milieu defquelles nous n'avons pas eu peu de peine à dégager le fonds de cette Hiftoire pour en donner, comme nous venons de faire , un Extrait fuiyi. JUIN, i 73 2. 53* GALLIA CHRISTIANA IN PROVINCIAS ECCLESIASTICAS diftributaquâ feries Se Hiftoria Archiepifcoporum , Epifcoporum t S< A'obatum Francis vicinarumque ditionum ab origine Eccleharum ad noftra tempora deducitur , & probatur ex authenticis inftrumentis ad calcem appofitis. Tomus tertius. C'eft-à-dire : La Gaule Chrétienne, divifét en Provinces Ecclefiafliques , qui contient la fuite & l'Hiftoire des Archevêques , des Evéyues & des Ahbès de France & des Etats voi- jins , depuis l'origine des Eglifesjufqu'à notre tems , avec des preuves tirées d'Atles autenticjues. Par Dom Denis de Sainte-Marthe \ Religieux Be- nediilin de U Congrégation de S. Maur , par lesquelles ce Monarque lui » faifoit des propohtions de paix ; »il fut arrêté qu'Aladil épouferoit «la fœur du Roi. Aladil m'envoya » donc avec le Cadi ou Juge Boha- 7) din fils de Sjeddad & plulicurs » Officiers des plus confiderables ES SÇAVANS, » vers le Sultan , pour lui rendre »> compte de cette négociation. « Dans les deux paiTj^es il s'agit , comme l'on voit , de la même af- faire , de la même députatioml'Hi- ftorien en eft le chef, de fon pro- pre aveu , & il étoit revêtu de la dignité de Cadi ou Juge, comme il l'allure lui - même , [ page 10 ] Amadin témoigne que le chef de cette dépuration étoit un Cadi , 8c que ce Cadi s'appelloit Bobadm fils de Sjeddad. D'où M. Schuhens conclut qu'il n'ell pas douteux que ce nom ne foie celui de notre Hifto- rien Arabe. A l'appui de cette preuve en vient une autre cirée de la confor- mité qui le trouve entre les Extraits d'Abulfcda & ceux de Navvetnus , (Auteur d'une grande Bibliothèque de Littérature Arabe manuferice ) d'une part , «Se divers pallages de notre Hiitorien de l'autre. En voici quelques exemples. Abulfeda rap- porte que l'Eglifc de Sainte Anne i Jerufalem ayant été convertie en un Gytnnafe ou une Académie par Sa- ladin , ce Prince en donna la direc- tion au Juge Bohadin fils de Sjed- dad. Notre Hiitorien , parlant de lui-même 3 dit [ page 267. ] que Saladin le lailîa à Jerufalem pour achever la conftruction de l'Hôpi- tal & du Gymnafe. Abulfeda , en parlant de la mort de Saladin , allu- re que le Juge Elphadil arriva lorf- que ce Prince refpiroit e core ; mais que le Juge Bohadin fils de Sjeddad à fon arrivée le trouva mort. Notre Hiitorien dit la même chofe, [f"ge i~6- ] I» femble que JUIN, toutes ces preuves & plufïeurs au- tres de même nature que nous omettons pour abréger , donnent à la découverte de M. Schultcns tou- te l'évidence que l'on peut fouhai- ter en pareil cas. Il s'applique enfuite à montrer en quelle conlideration & en quelle familiarité Bohadin étoit auprès du Sultan , combien il lui lut attaché , ne le perdant prefque jamais de vue, &c devenant par-là témoin oculaire des grandes actions de ce Prince. Notre Editeur ne peut donc par- donner à Bohadin la négligence avec laquelle il s'elt contenté d'ef- fleurer tous les autres exploits de Saladin , pour fe renfermer prefque uniquement dans ceux qui ont rem- pli les quatre ou cinq dernières an- nées de ce Sultan , c'eft-à-dire dans l'Hiltoire de la Guerre Sainte ou de la prife de Jerufalem & de fes fuites. Comment cet Hiftorien fi familier avec fon Héros , fi inftruit du détail de tant d'actions glorieufes , ne s'eft-il point plus étendu fur la con- quête de l'Egypte , fur celle des Royaumes de Damas & d'Alep , de la Méfopotamie , de l'AfTyrie & de tant d'autres Souverainetez > Qui étoit plus à portée que lui de nous découvrir les motifs les plus fecrets de ces grandes entreprifes & les refibrts les plus cachés qui les ont fait réufiir ? En un mot qui pouvoit mieux nous conduire de victoire en victoire avec Saladin , pendant les 25 ou 30 années que ce Prince a rempli tout l'Orient du bruit de fa renommée ? M. Schultens croit entrevoir 1» 175 2 m vraye caule qui a fait parcourir fi rapidement ou G brièvement à Bo- hadin tous les autres hits d'armes de fon Prince. Il cil perfuadé que ce n'eit que par un excès de zèle pour le Mahométifme, que l' Hi- ftorien s'eft fixé pour ainfi dire à l'événement le plus avantageux pour cette Religion. C'eft celui qui a fait le plus d'honneur à Saladin . non feulement parmi tous les peu- ples infidèles , mais encore parmi les Chrétiens. Ceux-ci n'ont pu re- rufer à ce grand Homme les ék>ge$ qui lui étoient dûs pour routes fes vertus tant civiles que militaires , qui ne brillèrent nulle part avec plus d'éclat. Il s'en faut bien f_ continue notre Editeur] que fes autres expé- ditions ayent été regardées aufii fa- vorablement par les Mufulmans mêmes. Il étoit impoiTïble de parlée de la conquête qu'il fit de l'Egypte, fans faire mention en même tems de fon ingratitude & de fa perfidie envers le Sultan Noradin , fon Sei- gneur légitime , fon bienfaiteur Se l'artifan de toute fa fortune , au- quel il eut l'adrefle de foultraire ce beau Royaume. On ne pouvoit le faire voir paifible poflefleur de ceux de Damas & d'Alep, fans reprefen- ter d'un autre côté les enfans du même Noradin dépouillés de leurs Souverainetez ce réduits à la trille condition de fimples ValTaux du nouveau Conquérant. Il cil vrai que Bohadin a loin de glilTer dou- cement fur ces injuftices, & qu'il tâche de les colorer par quelques prétextes fpécieux. Mais comme il ne s'attend pas d'en impofer là» Xxij 33S JOUHN AL DE dcffus à perfomie , il ■■ nient le parti ït le moins qu'il lui cft pollîblc fut des faits h déshonorans pour Saladia , 5c il tire promptement le rideau fur ce qui pourroit ternir la gloire du Sultan. Quoi qu'il en foit,on doit favoir bon gré à M. Schultcns d'avoir pu- blié fur ce grand événement de b- Conquêtc de Jerufalem par Sala- din, un Hiftorien Mahométan tel que celui-ci. Car jufqu'à prefenc nous n'avions été informés du détail de cette guerre que par des Hilto- liens Chrétiens. Ils font affez d'ac- cord avec lui , quant aux faits principaux : mais Bohadin ouvre à les Lecteurs une entrée dans l'inté- rieur de fon Héros , dont il con- noilloit tous les deffeins & tous les expediens , puifqu'il en étoit fou- vent le Miniftre. C'eft ce que cha- cun fentira de refte en lifant cette Hiftoire , 6c fur tout cette partie concernant le Siège d'Acre ou de Ptolémaïde , qui dura prés de trois ans , 5c pendant lequel les Sara fins ailiégésdans la Ville par les Chré- tiens , & ceux-ci affiégés au dehors par l'armée de Saladin , mirent en ceuvre toute la valeur Se toutes les rufes pratiquées en pareil cas, dont le refultat fut que la place demeura aux Chrétiens , qui pour airiïi dire , l'arrachèrent aux Infidèles. Un au- tre mérite -de notre Hiftorien Ara- be , c'eft qu'il rend juftice aux deux partis ; élevant quelquefois juf- qu'au Ciel la bravoure & les autres grandes qualitcz de nos guerriers Chrétiens ; 5c nediflîmulant point d'autre part les difgraccs de fes 5 SÇAVANS, . C'eft ainlî qu'il nous dépeint la confternation de Sahdin après la journée d'Arfof où ce Sul- tan fut défait par Richard Cœur- de-Lion Roi d'Angleterre ; enforte que le Prince Saralin fc vit réduit au point de trembler même pour Jerufalem. A l'égard du ftyle de Bohadin , l'Editeur y trouve en gênerai de la lïmplicité 5c de l'ingénuité. Mais cet Hiftorien n'eft pourtant pas touL-à -fait exempt du vice de fa. Nation , 5c il laifie échapper ça 5c là quelques traits de cette diction figurée, brillante 5c atnpoullée fi familière aux Orientaux. De ce gen- re font les expreffions fui vantes ,. déployer les ailes de fa juftice ; ré- pandre lu pluye de fes bienfaits ; la fucur on la foi fini encbevcftra la bou- che ; prefemer a tout le monde le front riant de fon hofpitalitê; vendre fon fouffl: pour la refpiration future ;. c'eft-à-dire , facrifier fa vie pn-feme pour l'autre vie ; les épées burent le. fanq^ jufju'à l'ivrejfe ; les yeux de fes- fneffes furent éblouis & obfcurcis y pour dire fes rufes furent déconcer- tées : En voici quelques autres en- core plus outrées : L'épéc du Sei- gneur faifoit une moiffon des âmes ; les Lions des combats p*r les dents de la v.Eloire 5 fe raffafterent d'ennemis éten lus fur la place -, le Cielverfoit la pluye du combat fur les têtes de ceux qui étaient eux-mêmes les Têtes 6 les Chefs des Combattans , &Cc. L'Hiltoricn n'oublie pas , fur toutj [ dit l'Editeur J d'inférer dans fa narration, comme bon Mufulman, plufieurspaflages de l'Alcoran qu'il JUIN jfiit'placer à propos. Mais quoique fon ftyle par fa force & par fa vivacité femble tenir du caractère qui fe fait remarquer dans le ftyle des Arabes naturels; notre Editeur cependant croit y apperccvoir quelque chofe d'étran- ger qui lui feroit foupçonner que .Bohadin n'étoit point Arabe. Il le croiroit volontiers natif de Moful , fur la foi de quelques endroits de cette Hiftoire. Peut - être étoit - il Carde ou ^(fyrien : du moins s'at- tacha-t-il d'abord au Sultan de Mo- ful , qui l'envoya en ambaflade vers le Ghalife de Bagdad -, Se il étoit encore au fervice de ce Sultan, lorfqu'à l'occafion du voyage de la Mecque, il ht connoi (Tance avec Saladin , dont il étoit l'admirateur , Cv trouva auprès de ce Prince Cur- de l'accès le plus favorable. Il devint , comme on l'a vu plus haut , Ion Cadi ou fon Juge de confiance. Mais l'Editeur croit en- core devoir l'élever à un plus haut grade , Se il en fait un Mufti ou un Pontife. Il appuyé cette conjecture par diverfes conhderations qui femblent y donner quelque vrai- femblance. Le Langage de Boha- din , dans la première partie de cette Hiftoire, eft beaucoup moins îe Langage d'un homme d'Etat que celui d'un Ecclefiaftique. Il y fait é- clater partout le zélé le plus ardent pour fa Religion: il infifte fort fur les faits de ce genre, & en pafle fous fi- îence quantité d'autres qui interefle- roient davantage. Il ne fait point une peinture aflez vive des grandes vertus de Saladin ; Se il en parle un ,1732. 3M peu trop modeftement. D'ailleurs, (continue M. Schultens) rien ne lent plus fon homme d'Églife que cette affectation continuelle à com- * bler de bénédictions le Sultan 8c fes Sujets, Se à répandre au contrai- re les imprécations furlesFr3ncs fes ennemis. En effet il ne nomme pas une feule fois Saladin , qu'il n'y joigne aullî-tôt cette formule ( Dieu lui fajfc mif encorde. ) Parle-t-il de quelque Villeoude quelque Forte- refleMahométane ? Dieu laconfer- ve , ajoûte-t-il d'abord. Fait - il mention de Damas ; ( & il parle de cette Ville en cent endroits) ? c'eft toujours Damas frotegee de Dieu. D'un autre côté , eft-il queftion des Francs ou des Chrétiens : Dieu les maudijfe , ajoute Bohadin ; ce qui revient à chaque période ou tout au moins à chaque page. On s'imagine bien que le Traducteur , dans fa verlion , a eu loin d'épargner à fon Lecteur l'ennui de ces lortesde re- pentions. Deux autres preuves du Sacerdoce de notre Hiftorien [ fé- lon l'Editeur ] fe pourroient tirer de la fouveraine direction du Sacré Gywnafe de Jerufalem qui lui fut confiée par le Sultan , Se de fon empreffemçnt hors de fai(on à exhorter au pèlerinage de la Mec- que ce Prince à qui fes guerres con- tinuelles permertoient encore à peine de rcfpirer. M. Schultens ren- voyé pour une nouv .le confirma- tion (ur ce point au dernier Chapi- tre , où l'on ne peut [ dit-il ] mé- connaître les propres caractères d'un véritable Mufti. De Bohadin il pafle au fécond 54-0 JOURNAL D Hiftoricn de la Guerre Sainte , c*eft-à-dire à Amadoddm ou Av..i- dm d'Ifpahan , dont il ne donne u i qu'un morceau du premier Chapi- tre accompagné de (a verlion & cfc fes Notes. D'Herbelot en a parlé dans fa Bibliothèque Orientale t où il l'appelle Emad ou Emadeddin ni Kttteb, Amadm le Scribe. Il le met au nombre des Ecrivains les plus il- luftres. Il cite de lui quelques Ou- vrages de réputation , tels que celui qui a pour titre la Palme du ficrfc , & un autre annoncé fous celui de Bark^ Alsjami , le foudre de Syrie , qui contient L'Hiftoire de Saladin en fept Volumes. Ce dernier Ou- vrage eft fouvent allégué par Nu- vveirius dîns fa Bibliothèque ; mais il n'eft point encore tombé entre les mains de l'Editeur 5 de même que celui dont cet Editeur publie au- jourd'hui un échantillon , femblc n'être pas venu à la connoifTancc de d'Herbelot. 11 eft intitulé le Livre de /' 'Eloquence de Kous , touchant la conquête de Kods. Pourfendre ce titre intelligible , il faut apprendre au Ledeur que Kom croit un Orateur célèbre chez les Arabes , & dont l'éloquence avoit paiTé en proverbe ; de manière que poux louer à l'excès un Orateur en cette Langue on le difoit plus éloquent que Kous. En fécond lieu les Maho- métans appellent Kods la Ville de Jerufalem , c'eft-à-dire la Sainte Cité. On peut juger prefentement de la haute opinion qu'Amadin avoit de fon Ouvrage par le titre faftueux qu'il lui a donné. Il n'y déroge point dans tout le ES SÇAVANS, cours de Ion Hiftoirc.EUc eft écrite du ftyle le plus ampoullé.»L'Hiito- »ricn ( dit l'Editeur ) s'élève bien » au-deflus de Pindare ; il vole per- » pétuellemcnt dans les airs , il fe » perd dans les nues , il fe guindé » jufq'i'aux étoiles , & entraîne >» avec lui fon Lecteur. Tout ce que »>j'ai jamais lu de plus fublime » ( continue M. Schultens ) ou pour »mieux dire, de plus erflé, dc- »> meure fort au-deflous d'Amadin. » Le pompeux Hariri comparé » avec un tel Cavalier , n'eft pref- » que plus qu'un Piéton qui va tec- »> re à terre. L'éloquent fils d'A- »rabsjœ dans fon Hiftoire deTa- » merlan , ne fait que fuivrede fort »Ioin les traces d'Amadin , & eft » trop heureux de lui dérober quel- » ques fleurs. On peut dire ( pour» » luit l'Editeur ) que la narration » d'Amadin pctille des figures les » plus outrées & dont le faux éclat, » après vous avoir d'abord ébloui , m s'éteint prefqu'auflîtôt. Il avoue cependant que parmi tout ce clinquant l'on découvre quelques traits qui brillent d'une lumière plus pureèv plus naturelle, Se qui frappent tres-agréablement les Lecteurs. Au travers de toute fa profe figurée , Amadin n'a pas laif- fé d'être d'un grand fecours à M. Schultens , foit pour le mettre en état de pénétrer plus à fond toute l'énergie de la Langue Arabe, foit pour lui fournir divers édaircifTo mens furies noms propres des hom- mes & des lieux, fur pluheurs parti- cularitez de la Guerre Sainte , dont cctHiftorien a été auifi témoin oçu- JUIN lairc, & fut le vrai Cens de Bohadin difficile quelquefois à démêler. Si le ftyle guindé d' Amadin le rendoit quelquefois prefqu'inintelligible au Traducteur , en recompenfe la netteté des caractères dont il eft écrit dans le Manufcrit de Leyde a où font marqués tous les points- voyelles , lui applaniffoit bien d'au- tres difficultez qu'il rencontroit à chaque pas dans celui de Bohadin , affez mal écrit , fans aucuns points- voyelles & fou vent dénué même de ceux qui distinguent les confon- ds. Il comptoir faire grand ufage d'Amadin pour le Commentaire Hiilorique , Géographique & Cri- tique qu'il avoit deiTein de joindre à Bohadin , 6c dans lequel il auroit raffemblé tout ce qui pou voit jetter de nouvelles lumières fur l'Hiitoire de Saladin conduite depuis fa naif- fance jufqu'à fa mort. Mais ces re- cherches lui fourniroient la matière d'un fécond Volume égal à celui- ci ; & c'eft de quoi il ne veut char- ger ni le Libraire ni le Public , avant que d'avoir preiTenti les gens de Lettres fur ce qu'il doit augurer dufuccès d'une pareille entreprife. En attendant il publie toujours des Extraits d' ' Abulfeda , qui pour- ront tenir lieu d'une forte de Com- mentaire , & il s'applique à nous faire connoître plus particulière- ment cet Auteur d'une li grande confideration parmi les Mahomé- tans. Ce favant homme étoit de l'illuftre Maifon des Jubides , & defeendoit d'Aladil frère de Sala» din. Il naquit l'an de, l'Hégire 6yi. '7 3-*' 34* fut revêtude la dignité de Roi & de celle de Sultan , & mourut âgé de 6o ans après 22 ans de règne, l'an de l'Hégire 733. C'eft (dit M. Schultens) ce que M. Jean Ga~ gnier, cet ornement de l'érudition Orientale , a mis hors de doute f en redrelTant fur ce point Gravius t A'Herbelot, &c quelques autres, dans fa Préface fur la Vie de Mahomet , qu'il a publiée d'après Y Abrégé de i Hi flaire Univerfelle d'Abulfeda ' avec fa verfion Latine & fes Notes. Il elt dit , dans cette Préface , qu'A- bulreda a continué Ton Hiftoirc jufqu'à l'an 71 1. de l'Hégire : d'où il paroît qu'il exifle deux fortes d'e- xemplaires MIT. de cet Ouvrage? l'une plus complette & qui va juf- qu'à l'année 7 J v où mourut Abul- feda ; l'autre moins étendue & qui fc termine à l'année 712. la troifié- me du règne de ce Prince dans //<*- tna Ville de Syrie , où il fut rétabli (olemnellemcnt par l'autorité du Soudan d'Egypte } Mahomet fils de Kelaiine. Le Mf. d'Abulredade la Bibliothèque de Leyde va jufqu'à l'année 730. & M. Schultens allure que ce Mf. a été poufle jufques là par cet Auteur même , & non par des Continuateurs. Il a cru faire plaihr aux Ledeurs de leur décrire ici la manière dont ce favant hom- me , qui palfe avec juftice pour le plus grand Géographe & le plus grand Hiftorien de l'Osent, fut in- stallé dans la dignité de Sultan ou de Roi ; &c il emprunte cette des- cription d'Abulfeda lui - même y dont il copie le Texte & le traduit en Latin. Nous y renvoyons. 342 JOURNAL D Des deux Ouvrages d'Abulfeda , fur l'Hiftoirc& iur la Géographie , on n'a imprime jufqil'à prêtent que quelques morceaux. Il y en a deux tires de fon Hiftoire Univerfellè , fa voir la Vie Af.ibomet publiée par M. Gagnier , & les Extraits tou- chant Saladin que nous donne ici M. Schultens. Des l8. Tables qui compofenttoutle Canon Géographi- que d'Abulfvda , la première qui roule fur l'Arabie, a vu le jour con- jointement avec les petits Géogra- phes Grecs de l'Edition de M. tind- fon : la 25e & la 16e où font décrits le Chovvareme & le Mavvafralna- har ou la Région Tranfo.uane , ont paru avec une verlîon Lr.tine de Jean Gravitts célèbre Mathémati- cien Anglois. Notre Editeur obfer- ve qu'Abulfeda ne compte point les longitudes des lieux , en com- mençant avec Ptolomée & les au- tres Géographes , aux Iflcs fortu- nées , mais en faifant paffer fon premier méridien par lcCap le plus tvancé de la Côte Occidentale de l'Afrique ; ce qui fait une différen- ce de dix degrez. Il remarque de plus par rapport à la mefure des di- ftances des lieux , que le Géogra- phe de Nubie fait fes journées de 30 milles, & qu'Abulfeda les ré- duit à 24. milles. Il attend avec grande impatience l'Edition com- plette de cette Géographie d'Abul- feda, fouhaitée depuis h long-rems, & promife enfin par M. Gagnier dans fa Préface fur la Vie de Ma- homet. C'eft un des plus beaux pre- fens dont il puifle enrichir la Litté- rature Orientale. E S SÇAVANS, A l'égard de la Table G!ogra- phique imprimée à la fin de ce Vo- lume , l'Editeur nous indique les fourecs où il a puifé tous les éclair- ciffemens qu'elle nous offre en ce genre , & fans lefquels la Vie de Sa- ladin feroit beauco ip moins inte- reflante , par l'ignorance où l'Hî- ftoirc nous laifferoit fouvent fur les noms & fur la fïmation des PaysoC des Villes qui ont été le Théâtre de> grandes acïions de ce Prince. M. Schuhcns a tiré pour cela les plus grandes lumières d'un Dictionnaire Géographique Arabe Mf. confervé dans la Bibliothèque de Lcyde fous le N° 1700. & que d'Herbelot af- fure être l'Ouvrage de S.ifiediin Abdalmoumen ben Abielha^. M. Schultens eft fort tenté de croire que ce Mf.de Lcyde eft l'exemplai- re original écrit de la main de l'Au- teur même. Il feroit volontiers un femblable jugement du Mf. qui remplit la principale partie de ce Volume. Prefque uniquement occupés juf- qu'ici de l'Hiftoire Littéraire de cec Ouvrage , nous n'avons dit que très» peu de chofe de ce qu'il nous pre- fente concernant l'Hiftoire politi- que. C'eft-à-dire que nous avons beaucoup parlé de Bohadin, d'A- madin ÔV: d'Abulteda; &C qu'à peine avons-nous fait quelque mention de Saladin, le Hùos de cette Hi- ftoire. Mais cet Extrait eft d ja li long , qu'il ne pourroit s'étendre davantage fans devenir ennuveux. Ainli nous fommes obligés de ren- voyer à un autre Journal un récit «bregé des évenemens déduits dans les J U I N, i7î*. 345 les trois morceaux hiftoriques que miere fois. l'on voit ici paroître pour la prc- .LA THEORIE DE LA M ANOEUVRE DES Vaijfeaux réduits en pratique , ou les Principes & les règles pour naviguer le plus avantageufement qu'il efi poJfible.Tar M. Pitot,^ l'Académie Royale des Sciences. A Paris, chez Claude Jombert, rue S.Jacques au coin delà rue des Mathurins, à l'Image Notre-Dame. 173 1. /'»-4°. pp. \\y RIEN n'eft plus utile dans la navigation qu'une bonne ma- nœuvre: »par fon moyen on donne •» aux Voiles Se aux Gouvernails » les fituations les plus avantageu- •» fes , foit pour faire le plus de che- »> min qu'il eft poiïîble , foit pour -»vifer promptement. " On con- noît parfaitement la dérive & par confequent la vraie route qu'on a tenue. On eûime la grandeur du iîllage ou le chemin fait par le Na- vire ; on profite heureufement des vents pour s'élever d'une Côte , pour doubler un Cap , pour éviter un écueil , poutfuivreun Vaifleau, lui donner la chaiïe ou le verfer pour prendre le deflus ou l'avanta- ge du vent, ou fe le conferver prin- cipalement dans un combat naval. Ce n'eft que par une expérience de plufieurs années , & par une fuite de voyages , de courfes & d'obfer- vations réitérées que les plus fameux Marins fe font rendus habiles dans cette partie de la navigation. En ex- pliquant les principes fur lefquels ces pratiques font fondées , on s'y rendroit habiles en peu de tems , comme l'obferve notre Auteur dans fa Préface , & on les perfectionne- rait aifément en joignant la théorie lui». à l'ufage. M. Pitot remarque que le P. Par- dieseft le premier qui ait entrepris de donner des règles de Théorie pour perfectionner la manœuvre des Vaifleaux. Mais il ajoû e que toutes les propofi rions fondamenta- les que ce PereelTaya de donner far cette matière furent autant de para- logifme. Cette Théorie du Perc Pardies fe trouve à la fuite de fon Traité du mouvement local 5c de» forces mouvantes imprimé en 1671; En 1689. M. le Chevalier Renaucî publia un Traité plus étendu de la Théorie delà manœuvre des Vaif-i féaux ; mais comme il bâtit fur Ut mêmes fondemens que le P. Pardies il donna dans les mêmes Paralogif- mes. Notre Auteur porte le même jugement du Traité du P. Hotte , où il trouve les mêmes principes , & par confequent les mêmes para- logifmes que dans les deux Ouvrar' ges précedens. Ce fut M. Huguens qui obferva le premier que le principe furie- quel M. le Chevalier Renaud dé- terminoit les différentes vitefîes du Vaiffeau étoit faux j ce qui faifoic tomber la plus grande partie de fa Théorie, M. Renaud ne fe rendit i44 JOURNAL D poinr aux raifonsde M. Huguens, Se cette difputc donna lieu à plu- fieurs Ouvrages. M. Bcrnoully qui s'étoit d'abord déclaré pour M. Re- naud, prit enfuite le parti de M. Huguens. Enfuite il prétendit que M. Renaud ctoit tombé dans une autre méprife au fujet de la déter- mination de la dérive , ou de la connoiflance de la vraie route du VaiSTeau. Ce qui donna lieu à une nouvelle drfpute entre M. Renaud & M. Bcrnoully. Ce dernier donna en 17 14. une nouvelle Théorie de !a manœuvre qui paroîc à notre Auteur fondée fur des principes incontestables. Ce font ces princi- pes que M. Pitot s'eft propofé de mettre à la portée des Marins. Il s'attache à donner des démonstra- tions plus fimples & plus courtes que ne le font celles de M. Ber- noully j & à en appliquer les prin- cipes à des formes de vaifTeaux plus approchantes de celle des Vaifleaux ordinaires. Il y joint des Tables qu'il aflure avoir été dreflées de manière que les Oflîciers de Mari- ne Se les Pilotes pourront y trouver d'un coup d'œil les déterminations des vitefles , & que par leur fecours on fera en état de donner des folu- tions fimples des plus importans problêmes qui puilTcnt regarder la manœuvre. Tout l'Ouvrage eft divifé en neuf Sections. Les deux premières ne fer- vent en quelque manière que d'in- troduction aux fuivantes. Il s'y agit desloix des impulfions des fluides, & de l'explication de quelques ter- mes qu'il eft important de bien en- ES SÇAVANS; tendre pour la manœuvre des VaïT- feaut. L'Auteur détermine dans la troi- fiéme Section les Situations les plus avantageufes des voiles Se de la quille du VaiSTeau , par rapport à la ligne du vent, tant pour gagner que pour perdre au vent. Il fuppofc feulement pour établir fa Théorie fur ce point important que la déri- ve eft nulle , ou que la refiftance que le VaiSTeau trouve à fendre l'eau par fa pointe ou fa proue, eft infiniment petite par rapport à la refiftance qu'il trouveroit en fen- dant l'eau par le côtL L'équation ou la formule qu'il employé dans cette Section , revient à celle qui avoit été propofée par M. Huguens fans aucune démonstration , Se dont M. Bernoully a le premier donné l'Analyfe dans fa Théorie de la ma- nœuvre. La fituation des voiles Se les dé- rives font le fujet de la quatrième Section. Il y fuppofeque les coupes horifontales du Vaifleau font des polygones rectilignes de tant de co- tez égaux qu'on voudra , faifant entr'eux des angles inégaux. Plus le nombre des cotez du Polygone fera grand,plus lescoupes feront appro- chantes de celles des vraies formes du VaiSTeau , Se plus on approchera des juftes déterminations; aini par la méthode de cette Section, on connoîtra les quantitezde la dérive fi près que l'on voudra. Dans la Section fuivanteoù il s'agit des im- pulsions des fluides fur les furfaces courbes , l'Auteur confidere , après M . Bernoully , les coupes horizon- JUIN Cales delà carenne , comme com- pofées de deux fegmens de cercles égaux joints par une corde commu- ne qui reprefentela direction de la quille. Les rapports des vitelles des Vaifleaux , relativement à la quan- tité de la dérive , à la position des voiles , aux angles des voiles & de la quille , aux angles d'incidence du vent fur les voiles , aux vitefles refpe&ives des vents , &c aux quan- -titez des voiles^font la matière de la iîxiéme Section. Des Obfervations fur le Gouver- nail & fur la rame fourniiTent la matière de la feptiérae & de là hui- tième Section. La neuvième eft proprement cel- le où l'Auteur applique fa Théorie à la pratique. Il y apprend aux Pi- lotes à fe fervir de fes Tables , & par leur moyen il y donne la folu- tion de plusieurs problêmes qu'il déduit de principes établis dans fa Théorie, fans néanmoins employer aucun calcul algébrique. Après la folution de treize de ces problêmes, l'Auteur propofe quelques règles pour connoître l'effort abfelu de la refiftance de l'eau fur la proue &c fur le corps du Vaiffeau , celui du vent fur la furface des voiles & la .vite/Te abfolue du vent. Ce plan gênerai de l'Ouyragc n'eft qu'un précis d'un plan plus étendu que M. Pitot donne dans fa Pré faccjfcv dans une Table raifonnée » *7 3*- 345 des articles de fon Livre. Pour fui- vre notre méthode ordinaire il fau* droit rapporter quelques exemples , & les tirer particulièrement desSec- tions troiiiéme , quatrième & cin- quième , qui contiennent les dé- monstrations des principes de fa Théorie ; mais comme nous ne pourrions rendre fenfible * ce que nous en rapporterions , fans entrer dans un grand détail de cal- culs algébriques & fans le fecours des figures qui font gravées en plu- sieurs planches à la fin du Livre ; nous fommes obligés d'y renvoyer les Lecteurs curieux de ces matières* Nous obferverons en faveur de ceux qui ne font point aflez au fait de ces matières pour juger de l'Our vrage par eux-mêmes , que l'Aca- démie des Sciences , fur le rapport qui lui en a été fait par M M . Nico- le & Bragelone , a jugé » qu'au » moyen des Tables conftruites par »> M. Pitot , dont on peut faire r> ufage avec une légère teinture de » Mathématiques, cet Ouvrage ne *> pouvoit être que très-utile, non » feulement pour diriger les Vaif- » féaux dans leur route > mais auflî » pour donner fur le champ la re» » folution des plus importantes » queftions de la manœuvre , rela- » tivement à des fuppofitions qui » ne peuvent cauier que de petitee » erreurs, Yyii 34* JOURNAL DES SÇAVANS; A VINDICATION OF THE MIRACLES OF OUR BLESSED Saviour, inwichM. "VColfton's Dilcourfes on them are particularly examin'd , his prctended Authoritics of the Fathers againlï the truth of thcir Littéral fenfe are fer in a juftlight, and his objections in point of reafon arc Aofvcr'd. C'cft-à-dire : Réponje aux prétendues slitthori- teT^ des Pères , & aux yjrgurncns tirés de la raifort que M. IVolfton aile* gue dans Jes Difcoitrs contre la vérité du fens Littéral des Miracles de y. C. Par T^ichard Lerd , Evê^ue de S. David. Seconde Edition. A Londres, chez Jacques & Jean Knapton. 1731. 2. vol. ;»-S°. premier vol. pp. 43 8. fécond vol. pp. f9i* ON verra d'un côté par l'Ou- vrage dont nous allons don- ner l'Extrait, qu'il n'en; point d é- garcmens iî monftrueux dont l'ef- prit humain ne foit capable , lors- qu'il n'eft point retenu parle irein d'une autorité infaillible i & de l'autre que tout homme qui va con- tre les principes de la Religion fe trouve toujours forcé d'aller contre les principes les plus évidens delà raifon. Cette dernière vérité eft clairement démontrée dans la réfu- tation dès Difcours du fieur Wol- fton fur les Miracles de J. C. & à' l'égard de la première, l'Angleterre n'en fournit tous les jours que trop de preuves , & l'exemple du fieur Wolfton furfiroit feul pour nous en convaincre. Nourri dans les Lettres & dans la lecture des Pères dont on ne peut lui contefter une grande con- noiffance , il prit les Ordres dans l'Eglife Anglicane, &■ fe fit d'abord connoître par une Apologie de la Religion contre les Payens &con-- tre les Juifs. Cet Ouvrage fut efti- mé i cependant l'Evêque de Saint David nous apprend qu'on y re- marque un peu trop d'affectation 2 expliquer l'Ecriture dans un fens al- légorique ; mais dans la fuite entraî- né par la hardiefle ds fou génie , il publia d'autres Ecrits dans lefquels il témoignait un mépris ouvert pour la Lettre de l'Ecriture, & où' il fe propo/oit, difoit-il -, de délivrer les Evangelifos (fr les Pères des- Prédicateurs de la Lettre. Enfin de- puis 17*7. jufqu'en 17 19, parurent les Cix Difcours que le Prélat Angli- can combat dans cette réfutation. Le fieurWolfton y foûtienten ter- mes formels , » Que les quatre - » Evangeliftes ne font nulle parc » une Hiftoire Littérale , mais urt » Syftcme de Pliilofophie & de » Théologie Miftique , & quc~ » l'Hiftoire de la Vie de Jésus, » telle qu'elle eft racontée dans l'E- » vangile , n'eft qu'une reprefenta- » cion e n.blématiyue de la Vicfpiri- » tuelle dans l'ame de l'homme, & )> fes Miracles les figures de fesorc— » rations miflerieufes fur l'Eglife & j> fur les Elus. « Il prétend prou- ver ce Paradoxe impie par l'autori- té des Pères , & par des argumens tirés de la raifon. JUIN, 1732. Mais s'il montre autant d'em- fans horreur portement que Celfe , Porphyre & Julien l'Apoftat, il patoît enchérir fur eux par l'aveugle malignité avec laquelle il eflaye de jetter du ridicule & du burlefijuefur les Mi- racles de J.C.& fur fa perfonne fa- crée. L'Evêque de S. David ne fe propofe point de relever des traits qui doivent être enfevelis dans un éternel filence , il obferve feule- ment que comme il n'y a point de fujet qu'on ne puifle tourner en ri- dicule , auffi n'y en a-t-il aucun, dont par le moyen du ridicule on puifle réellement diminuer la jufte valeur. On a pu , dit-il , donner un tour burlefque à rOdiiTée&àl'Enei- de , mais on n'a jamais pu diminuer le refpect dû à ces Chef-d 'œuvres de l'efprit humain. Ainfî comme par le moyen de l'allégorie on peut fe fervir de tout, pour prouver tout ; de même le burlefque montre feu- lement qu'on peut le louer de tout ; mais il lui eft- impolhble de rendre prophane ce- qui eft- facré , ni faux ce qui eft cflentiellemcnt vrai. Le fieur Wolfton protefte en vain qu'il n'a fait ufage de eeftile contre le fens littéral des Miracles de J. C. que pour faire place au fens miftique qu'il renferme. Son crimi- nel deftein perce à travers un voile fi léger ; ce qui fait que le Prélat lui applique ces paroles de J. C. à Ju- das : Vous trahiffeTjc Fils de l'hom- me par un baifer. Car on ne voit que trop que non feulement le fens litreral , mais même le fens mifti- que de l'Evangile ne font plus rien 347 & comme le fleur Wolfton le déclare , les Miracles de J.C. &C fur tout fa Refurre&ion, ne font , pris à k lettre , qu'impo- ftureôc qu'illufion. Avant que d'en venir en particu- lier au Difcours de fon adverfairc. L'Evêque de S. David examine en gênerai ce que c'eft que Miracle, fon ufage, fon autorité j il prouve que les premiers Apologiftesde la Religion Chrétienne ont foûtenu clairement les Miracles de J. C. dans le fens littéral , il fait enfuite de favantes recherches fur l'origine de la méthode d'expliquer l'Ecritu- re dans un fens miftique, fur l'au- torité que doit avoir ce fens , 8c ré- pond aux objections du fieur Wol- fton fur tous ces points ; telle eft la matière des trois premiers Chapi- tres. Nous tâcherons de faire entrer dans la fuite de cet Extrait ce qu'ils renferment de plus important. Dans le quatrième , le Prélat' Anglican vient à l'examen du pre- mier Difcours. Il roule fur les Ven- deurs chalTés du Temple , fur les deux Pofledez délivrés dans le Pays; des Gérafcnicns , & fur la Transfi- guration de J. G. Le fleur Wolfton ne craint pas^ de foûtenir que ces trois Miracles , pris à la lettre , & tels qu'ils font rapportés par les Evangeliftes, font, comme tous les autres Miracles du Sauveur , remplis de traits abfurdes & improbables , par confequent qu'ils n'ont jamais été opérés en tout ni en partie , mais que ce font uniquement des récits prophétiques de réel , û ce qu'on ne peut repeter & paraboliques de ce que j. C, de* - $4t8 JOURNAL DE voit un jour opérer d'une manière miftcrieufe & encore plus furpre- nante. Ainfi par rapport au Miracle de J.C. chalTantles Vendeurs, cetAu- tcur dit qu'il eft incroyable qu'un homme fans crédit , fans autorité , ait pu, armé feulement d'une efpece de rouet, exercer un empire auifi abfolu fur une multitude qui n'a- voit aucune vénération pourfaper- fonne ; mais l'Evêque de S. Davidj foûtenu des Textes formels de l'E- vangile , nie précifément que les Juifs n'euffent aucune vénération pour J. C. on voit au contraire par le Chapitre même duquel ce récit eft tiré , que les Chefs de la Syna- gogue vouloient fe faifir de J. C. mais qu'ils n'oferent le faire , à cau- fe qu'il étoit regardé par la Multitu- de comme un grand Prophète ; or l'action de J. C. n'a rien de furpre- iiant dès qu'il étoit regardé comme tel. Sans parler de l'impreflîon in- térieure qu'il faifoit fur les ceeurs , on fçait par l'Ancien Teftament jufqu'à quel point les Juifs refpec- toient les Prophètes. Nous ne rapporterons point ici les autoritez des Pères dont le fieur Wolfton abufe pour montrer que ce Miracle n!eft point vrai , pris à la lettre ; on convient avec lui qu'iLs y trouvent un fens miftique , & per- fonne n'en doute ; mais il eft mani- festement faux j comme il le pré- tend , que par ces explications ils ayent exclu la vérité du fens litté- ral i au contraire ils fuppofcnt tou- jours ce fens comme le fondement fur lequel ils étabiiifem le m s alltgp- S SÇAVANS; ries. Cecte vérité eft fi claire \ Se d'un autre côté l'abus que fait le ficur Wolfton des paroles des Pères eft fi groilîer , & fa mauvaife foi il vilible , qu'on ne peut s'em- pêcher d'être furpris de voir qu'oa fe donne la peine d'employer tant de citations & d'érudition , pour effayer d'ouvrir les yeux à un hom- me qui a refolu de ne point voir^ Se qui ne s'enveloppe delà préten- due autorité des Pères , que pour en impofer au Vulgaire , pour rendre fa perfonne & fon fyftême moins odieux , ou plutôt pour fe dérober à la vengeance des loix dans le tems même qu'il fappe les fondemens de la Religion. Ainfi quelques folides que foient les réponfes de notre Auteur aux objections que le fieur Wolfton tire des Pères , pour lefquels il n'affecte d'avoir tant de refpecT: , que parce qu'il leurrait dire tout ce qu'il veut, nous les paierons fous filencc , & nous ne nous arrêterons qu'aux ob- jections qu'il emprunte de la rai- fon. Voici à quoi fe reduifent celles qu'il allègue contre le Miracle de J. C. qui chaffa les Démons du corps de deux hommes qui en étoient poffedés, & qui permit à ces Démons d'entrer dans un trou- peau de pourceaux. Il dit i". que le pouvoir de chaffer les Démons ne prouve point que J. C. fût vérita- blement le MefCe , puifqu'il n'y avoit rien en cela que félon l'Evan- gile même , les faux Prophètes , les Ouvriers d'iniquité , &mêmecer- tans jimjict parmi les Juifs ne I u l puflent faire. Mais a l'égard des faux Chri/is & des faux "Prophètes qui, félon la parole de N.S. feront de grands prodiges , jitfju'a féduire m'e- mêlés Elus , s'il et on poffible ; qui ne voit que ces derniers mots , s'il étoit poffible , montrent à la vérité la grandeur de ces faux Miracles , mais qu'ils prouvent en même tems qu'il eft impofllble que les Elus y foient jamais trompés } & par con- fequent qu'on ne manquera jamais de moyens neceflaires pour diftin- guer les Miracles de J. C. d'avec les preftigesdes Impofteurs. Quant à l'ufage où l'on prétend qu'étoient certains Juifs d'exorcifer les pofledez au tems de J.C.l'Evê- que de S. David foûtient que le fait eft fort douteux, s'il eft queftion de ceux d'entre les Juifs , qui n'agif- foient pas au nom du Sauveur. Car lorfqu'il dit aux Juifs ; fi je chaffe ies Démons , par qui vos enfans les ehajfent-ils ? S. Auguftin prétend avec plufieurs autres Pères que par ce mot enfans on doit entendre les Difciples de J. C & fur tout les 72. En effet lorfque J. C. chafloit les Démons des corps des pofledez, d'où feroit venue la furprife des Juifs tant de fois répétée dans l'E- vangile , s'il avoit été ordinaire à quelques-uns d'entr'eux d'opérer le même prodige indépendamment de l'autorité de J. C. Les 72. Dif- ciples eux-mêmes feroient-ils reve- nus avec tant de joye lui dire: Sei- gneur , les Démons même nous font affujettis parla vertu de votre Nom ? Àufli les Pharifiens ne purent élu- der la force de l'argument que ti- N ; 1 75 2. J4p roit J. C. en faveur de fa Million du pouvoir qu'il avoit furies Dé- mons qu'en difant qu'il les chafloit au nom de Béelzébut. Mais en fuppofant qu'avant J. C. quelques-uns parmi les Juifs euflent eu le pouvoir dechaflerles Démons , ils ne l'exerçoient du moins qu'au nom du Dieu d'Abra- ham & de Jacob , comme nous l'apprenons de S. Irenée & de faint Juftin ; car ce que Jofeph nous ra- conte de certains exorcifmes dont on attribuoit l'invention à Salomon eft trop plein de cérémonies bizar- res 6i puériles pour qu'on s'y arrê- te. Or bien loin qu'on puiffe inférer de cette fuppofition que l'exercice de cette puifiance ne prouvoit pas la Miflîon de J. C. c'en eft au con- traire une preuve fans réplique. Car fi les Juifs , dont il eft ici queftion s n'ont pu chafler les Démons qu'au nom du Dieu de Jacob , à plus forte raifon J. C. qui chafloit les Démons au nom de fon Père , & qui les chafloit en preuve de fa Divinité , dans la perfonne de qui non feule- ment cette puiflance n'étoit pas renfermée, mais qui lacommuni- quoit à fes Difciples , à plus forte raifon , dis-je, un pouvoir fi étendu prouve-t-il que J.C. étoit le Meflle & qu'il tenoit fon autorité de Dieu. La féconde Objection du fieur Wolfton contre le Miracle des deux Pofledez que J. C. délivra , c'eft qu'il n'eft pas croyable qu'il y eut danslePays des Gérazéniens des troupeaux de pourceaux ; on fçait 3 dit-il , qu'il étoit défendu aux Juifs $So JOURNAL D d'en manger , Se même d'en élever. Mais cette difficulté tombe d'elle- même , continue le Prélat , lorf- qu'on fe rappelle que Gadare aux environs de laquelle ce Miracle ar- riva , étoit une Ville Grecque êc non une Ville Juive. Gadare raifoit partie de la Décapole ou des dix Villes , où les Juifs fe trouvoient mêlés avec les Gentils ; il n'eft .donc pas furprenant que la campa- gne qui lesenvironnoit abondât en .ces fortes d'animaux. Nous remarquerons ici qu'Ori- gêne, cité par le fieur Wolfton, entre les Pères qui nient , félon lui, la vérité littérale de ce Miracle , la foûtient fi positivement qu'il alfure » qu'on montroit encore de fon n tems à Gergefa ou Gadare , Ville » ancienne fituée fur le Lac de Ti- »beriade, le rocher d'où les pour- «jceaux furent précipités avec vio- » lence p3r les Démons qui les pof- n fedoient. Enfin Le fieur Wolfton , pour enchérir fur ce qu'on vient de voir, joint l'extravagance à l'impiété , 6c dit d'un air de confiance que la rai- fon principale qui l'empêche de croire que le récit des Vendeurs chaflesdu Temple , aulîî-bien que celui des deux Pofledez délivrés par J. C. contiennent des raits qui foient réellement arrivés , c'eft qu'ils renferment deux crimes ; le premier confifte , félon lui , dans je tort qu'il fit aux Changeurs , aux Marchands de Colombes, en ren- verfant les tables des uns & les Ca- ^es des autres ; le fécond dans la j?erte qu'il caufaà cewxà quiappat- ES SÇAVANS, tenojent les pourceaux , qui furent noyés. Or3 dit-il , ces deux crimes ne furent point objectés à J. C. de - vant Pilate. Cependant fi ces faits étoient littéralement vrais , eut-il éténecelTaire , ajoûte-t-il , de cher- cher des témoins contre Jefus ; II ne rougit point d'infifter fur ce pré- tendu raisonnement. Nous ne di- rons rien des réponfes qu'y donne le Prclat , rapporter un tel blafphê- me , c'eft allez le réfuter- Malheu- reux un Auteur qui fe croit obligé de répondre en forme à de telles abfurditez ; mais plus malheureux encore ceux qui le mettent dansia neceffité de le faire. L'obligation où nous fommes d'abréger ne nous permet point de fuivre l'Apologifte dans la défenfe du Miracle de la Transfiguration de J. C. pris à la lettre. Les objec- tion du fieur Wolfton ne confident qu'en quelques traits burlefques qu'il appelle de folides raifons , ôt qui lui donnentJa hardiefle en fi- niftantfon premierDifcours d'inful» ter aux Théologiens de fa Nation , £n leur difant , que s'ils peuvent détendre les Miracles de J. C. con- tre les Pères & contre fes objec- tions , il s'avouera pour un impie , un blafphemateur & pour un homme qui mérite les plus févéres châtimens. Mais paflons à. l'examen du fé- cond Diicours. Les Miracles qui y font attaqués font celui de l'Hc- morroifle , de la femme tourmen- tée depuis 18. ans d'«» efprit de foi- hleffe\ & l'entretien de N. S. avec la Sajnancaine. £vant de ics.com A battre J U î battre en particulier, le fieur "Wol- fton avance en gênerai que les Evangeiiftes n'établiffent point foli- dement que les guerifons faites par J. C. ayentété miraculeufes. Pour réfuter cette calomnie , l'Evêquc de S. David donne d'a- bord la définition du Miracle ; un Miracle , dit-il , eft propiement une opération furnatureile contraire au cours ordinaire des chofes & aux loix communes de la nature , foit par rapport au fujet fur lequel il eft opéré , foit par rapport à la maniè- re même dont il a été opéré. Les guerifons des maladies naturelle- ment incurables, telle que la gué- ri fon d'une main deilechée, celle de l'Aveugle né, &c. font miraculeu- fes par rapport au fujet : les guéri- fon des maladies qui auroient pu à la vérité céder à des remèdes natu- rels , mais qui font fubites , parfai- tes , exercées par une feule parole , fouvent même fur une perfonne abfente,ou par un fimple attouche- ment font encore miraculeufes par la manière. Or cette divifion com- prend toutes les guerifons faites par le Seigneur, par confequent toutes font également miraculeufes. Après cet éclairciflement le Pré- lat vient aux Objections du fieur Wolfton contre le Miracle de l'Hé- morroïde. Les voici féparées des traits bouffons dont l'Auteur les af- faifonne à fon ordinaire ; il avoue d'abord que quelques Pères, & en particulier S. Auguftin , qu'il ref- pefte trop , dit-il , pour ofer le con* tredire , croyent que le fait eft arri- vé comme l'Evangelifte le raconte. Juin. N , 1732. 3/r Cependant cette guerifon ne lui en paroît pas plus furnatureile ; il ne s'agiffoit , félon lui , que d'une lé- gère indtfpofition que la force feule de l'imagination aura pu guérir. L'Evêque de S. David accable ici [on adverfairc par le Texte formel des trois Evangeliftes qui rappor- tent que cette femme étoit malade depuis douze ans, & qu'elle avoit inutilement & à grands frais cher- ché dans la Médecine quelque fou- lagement. Il fait voir enfuitc par le témoignage de plufieurs Médecins, tels que Bartholin dans fon Traité de Morbis Biblicis , Se Adtr dans celui de Morbis Evangelicis , que la maladie en quefiion étoit abfolu- ment incurable par le fecours de l'art > il ne croit pas même que dans une occafion où il s'agit d'un fi grand intérêt pour la vérité , ce foie blefTer la gravité du cara&ere Epif- copal que d'entrer avec les Mede-j cins dans certains détails que la na- ture d'une femblablc maladie en-1 traîne ordinairement. Le fieur Wolfton in lifte fur la* force de l'imagination , &c pour montrer qu'elle étoit le principe de la guérilbn de l'Hémorroiiie , il ajoute que les Evangeliftes recon- noifTent que J. C. ne pouvoit faire de Miracles contre l'incrédulité. IL fuffit de recourir au Texte Sacré pour fc «onvaincre qu'ils ne parlent que d'une impoflîbilité morale , & non d'une impoflîbilité naturelle , ainfï quand S. Mathieu nous dit que N. S. ne fit pas beaucoup de Mi- racles dans fon propre Pays a caufe de l'incrédulité des habit ans , il nous Zz 3J2 JOURNAL D apprend du moins qu'il y en fie quelques-uns •, S.Marc même nous en donne le détail , il eft donc con- fiant que le pouvoir de J. C n'é- toit pas lié par l'incrédulité des peuples ; Se s'il ne l'excrçoit pas fur eux , c'cl\ qu'une difpofition (I criminelle les rendoit indignes d'a- voir parc aux merveilles de la bon- té. Une autre guérifon miraculeufe dont M. Wolfton contefte la réali- té dans ce même Difcours , eft cel- le de la femme pojfedé: d'un efprit qui la rendoit malade depuis 1 8. ans, & qui était fi courbée qu'elle ne pon- voit regarder en haut. Ce font les paroles mêmes de S. Luc , qui en qualité de Médecin , félon la re- marque du Docteur Frcind dans fon Hiftoire de la Médecine, s'ex- prime en termes plus exacts S< plus précis fur les maladies guéries par J. C. que les autres Evangeliftes. Si on croit le fieur Wolfton , un Texte fi formel ne lignifie autre chofe finon que cette femme étoit mélancolique & abbatue, & que les avis charitables de J. C.en qui elle avoit confiance , lui ayant ren- du la gayeté , lui avoient en même tems rendu les forces. Une preuve, félon lui , que cette infirmité n'étoit pas considérable, c'eft l'indignation que le Chef de la Synagogue fit éclater contre J. C. pour avoir gué- ri cette femme un jour de Sabar» Habile à exeufer les hommes pour aceufer la vérité même.leSr'Wolfton prétend que les Juifs n'auroient pas eu le cœur aiïez dur & aflez mauvais pour être capables d'un tel fenti- E S SÇAVANS, ment, fi l'incommodité dont il s'a- git avoit été auifi ràchcufc qu'on le fuppofe. Comme h l'Hiftoire de la Pailion & de la Mott de N. S. ne prouvoient pas clairement que la malignité & l'envie précipitoient ces peuples dans les plus grands ex- cès. Ignore-t-il d'ailleurs jufqu'où la fuperftition leur faifoit portée l'exactitude à obferver le Sabar? La crainte de le violer ne les empêcha- t-elle pas dans ce fiécle-là même de prendre les armes contre les Ro- jnains , qui donnèrent exprès ce jour-là un alfaut gênerai à leur Vil- le » & qui y entrèrent en effet fans refiilance ? Nous n'infiftons point furies au- tres raifons qu'apporte l'Evêque de S. David pour montrer la vérité de ce Miracle , & en particulier pour prouver que quoique les Evangeli- ftes ne nous dilent point quelle étoit précifément la maladie de cette femme, c'eft également infilt- rer à l'Evangile &c à la bonne foi que de rejetter l'état dans lequel ils la dépeignent fur des vapeurs mé- lancoliques cv d'attribuer fa guéri- fon à l'impretfion naturelle que la prefence & les paroles de J.C. fi- rent fur fon efprit. Parmi les profanes railleries & les foupçons odieux dont le heur Wolfton fait ufage pour |ettei un air de faux & de ridicule fui l'entretien de J.C avec la Samari- taine , la fuie chofe qui mérite quelque attention, c'eft qu'il pré- tend que J. C. ijui ne fc déclaroit qu'avec peine aux .luits pour le Meflîe , fe donne ouvertement pou* J u I tel parmi les Samaritains , gens groifiers Se peu inftruits. Qui croiroir que le palTage de S. Jean , Chap. X.v. 24. auquel il renvoyé , contient une tetutation complette d'une insinuation ii artificieule , en voici les paroles. Jefusfe promenant dans U Çallerie de Salomon , les Juifs s' a Semblèrent autour de lui , & lui dirent : jufcjua cjuandnous Uen- drez-vous en fufpens ? fi vous êtes le Chrifl , dites-le nous clairement s Je~ fus leur répondit : je vous l'ai dit , gj* vous ne me croyez pas. Peut-on rien de plus précis que ces mots, je vous l'ai dit ? Dans le même Chapitre ne ie donne-t-il pas le nom de Fils de Dieu qui eft équivalent à celui de Meflîe, là& en plufieurs autres en- droits? n'en appelle-t-il pas à fes Oeuvres en preuve de fa Million? Et ce qui renverfe entièrement le Syftême du fieur Wolfton , c'eft qu'il y parle des Oeuvres qu'il fai- foit actuellement , Sz non de fes Oeuvres Spirituelles qu'il devoit, félon cet Auteur , accomplir un jour. Le fieur "Wolfton commence fon troifiéme Difcours avec plus de chaleur , quoique toujours avec la même indécence. C'eft au fujet du Figuier maudit par J. C. parce qu'il n'y trouva point de fruit. Cet: te a&ion eft fi infenfée, félon le prophane Difcoureur , qu'il deJ mande qu'il lui foit permis de pren- dre un ftile plus badin & plus bouf- fon que celui dont il s'étoit fervi dans ces autres Difcours. Quoi de plus abfurde , dit-il , que de cher- cher des figues, lorfqu'il n'en eft N , 1732; 35/j pas encore la faifon ? Mais quel- qu'un , ditl'Evêquede S. David . foit parmi les anciens , foit parmi les modernes , peut-il réellement croire que S. Marc parle ici du fi- guier ordinaire, qui dans la Judée ne porte du fruit qu'environ cinq mois après le rems qu'il fuppofe que J. C. y en chercha? L'Evangile n'a- t-il pasfurnlamment prévenu cette erreur , en nous marquant que le fi- guier dont J. C. s'approcha , avoit des feuilles ? Il eft donc ici que- ftion de cet antre efpece de figuier connu dans la Judée qui portoi: en touttems des figues bonnes à man- ger, Si que par ceteeraifon Julien l'Apoftat compare dans une de fes Lettres aux arbres du Jardin d'Aï-, cinous. Quoique ce témoignage j dit l'Evêque de S. David, ne doive pas être fufpecl au fieur Wolfton , il y joint encore ceux de Pline & de Théophrafte parmi les anciens , de Baumgarten , Se du célèbre M. de Tournetort parmi les modernes t qui ont tous connu cet efpece de figuier. Ces paroles de S. Marc , ce n'e- toit pas encore le tems des figues 1 lont donc uniquement pour nous avertir que ce n'étoit pas le tems des figues ordinaires. Ainfi dès qu'en ce Pays il y avoit des figuiers qui por- toient du fruit en toutes faifons ,' l'efperance d'en trouver fur un de ces arbres que J. C voyoit couvert de feuilles, n'a rien que de txès-iai- fonnable. Il eft vrai que S. Aug. quoique; de l'aveu du ftetir Wolfton même très-perfuadé de la vérité littéral» Zzij 1S1 JOURNAL D de ce Miracle , en parle en termes peu mefurcs. Il croyoit que Saint Marc parle dans cette rencontre du figuier ordinaire &fur cette fuppofi- tion, il prétend qu'il faut entendre allégoriquemcnt cette Hiftoire ,car prife à la lettre on la rrouveroit , dit-il , mfenfée ; hoc faiïum mfifi- guratum accipiatnr , ftultum inveni- tur. Le Prélac Anglican ne peut s'empêcher de dire que S. Auguftin fait bien voir qu'il n'étoit pas fore habile dans l'Hiftoire Naturelle , Se que cet endroit auroit bien mérité d'avoir place dans ces nombreufes tetra&ations. Il ajoute même que ce Père, dont il loiie d'ailleurs l'cf- prit,la feience & la pieté, a Couvent fecours aux interprétations mitti- ques , non par neceflîté, ni parce que le Texte le demande ; mais parce qu'il n'étoit point affez verfé dans la critique pour bien entendre la lettre de l'Ecriture. Au refte , il eft bon d'avertir ici que l'Evêquc de Sk David ne blâme pas l'ufage de l'allégorie, il n'en condamne que l'excès ; il reconnoît en plufieurs endroits de cet Ouvrage que l'Ecri- ture & la Vie de Notre-Seigneirr font remplies d'expreffions figura- tives ; & de faits fimboliques ; & il «emarque en particulier que celui du figuier maudit eft de ce nom- ire» Mais, ditl'advcrfaire, maudire cet arbre & le faire fecher à l'infrant 5 n'étoit-ce pas une mar- que de vengeance & de colère , d'autant plus déraifonnable , qu'il s'agiflbit d'un Etre infenfible qui ce pouveie eue coupable de rien :•• ES 5ÇAVANS, c'eft par cette même raifon , dit l'Evêque , qu'il n'y avoit ni ven- geance ni colère dans l'adlion de J. C. C'étoit même une marque de fa bonté , il vouloit par un exemple lî frappant avertir les Juifs du fort qui les menaçoit , s'ils perfiftoient dans leur opiniâtreté à ne pas le re- connoître. Le ficur Wolfton ajoute enfuite que Les Juifs & les incrédules pou- voient bien s'imaginer qu'il y eut de la fraude dans ce fait, &foupçon- ner même que la h*chc du Charpcrr- tier n'eût travaillé à la racine de l'arbre. Nous ne nous permettons de rapporter un trait fi odieux Se fi bas , quoique le Prélat Anglican qui fe trouvoit forcé de répondre à tout, en cite de beaucoup plus inju- rieux , & contre lefquels toute oreille moins fimiliarifèc avec le blafphême , ne peut 3'empêcher de fe révolter , nous ne nous permet- tons , dis- je , de rapporter ce trait que pour avoir occafion de placer ici une réponfe qui fur faite à un des pareils du fieur Wolfton , Se que le Prélat lui applique. Julien l'Apoftatdcmandoit un jou^cn par- lant de J. C. ce quefaifoit le Fils du Charpentier à telle occafion , il pre- paroit, lui répondit-on , des cer- cueils pour les Apoftats. Prédiction qui fut vérifiée peu de tems après par la mort de Julien. Mais pour revenir au prérendu foupçon que les Juifs & les incrédules pour- roient former contre ce Miracle s. le Prélat montre invinciblement par le témoignage des Evan- geliftes , que tous les Apôtres JUIN étoient prefens lorfque J. C. mau- dit le figuier , & que tous en reve- nant de Jerufalem témoignèrent leur étonnement de le voir feché jufqu'à la racine , d'où il s'en fuit qu'il ne peut y avoir de fraude dans un fait attefté par tant de témoins. Enfin le fieur Wolfton vient à ce qu'il appelle une démonstration contre la vérité littérale del'Hiftoi- re du figuier. Il la tire, à ce qu'il prétend , des propres paroles de Jc- fus , qui dit à fes Difciples cjttc s'ils avaient de la foi , non feulement ils feraient ce qu'ils venoient de voir en ce figuier , mais qu'ils tranfporte- roiertt même des montagnes. Or, con tinue-t-il , les Apôtres n'ont jamais opéré ce dernier prodige à la lettre, donc le premier pris en ce fens n'eft point vrai. Autrement il fuivroit de -là ou que les Apôtres n'auroient jamais eu de foi , ou que J. C. eut manqué à fa parole. On demande d'abord au fieur Wolfton d'où il fçait que les Apôtres n'ont jamais tranfporré de montagnes. Le filence des Hiftoriens lui. fuffiroit-il , pour être en droit de nier ce fait ? Car, félon la remar- que de S. Chrifoftome & de S. Je- xôme, tous les Miracles des Apôtres aufli- bien que ceux de J. C. n'ont pas été écrits. L'adverfaire ne doit pas ignorer du moins que S. Jérô- me attribue un Miracle de cette nature àS.Hilarion ,&quc S. Chri- foftome qu'on n'aceufera pas, dit-il, d'être trop crédule , foûtient que plufieurs perfonnes très-inférieures en fainteté aux Apôtres avoiens dans des cas de neceflité uanfpoité , 1752. irî des montagnes. C'eft ce que S. Gré- goire de Nice nous apprend en par- ticulier de S Grégoire furnommé le Taumaturge. Que ces auforitez. foient reçues ou non par d'autres, le SrWolfton qui témoigne en toutes occalîons une fi grande vénération pour les Pères eft obligé de les ad- mettre. Mais comme pour refoudre cette objection , le Prélat eft perfuadé qu'il n'eft point neceftaire de prou-» ver que les Apôtres ayent tranfpor- té réellement des montagnes , il n'infifte point fur ces autoritez. Il fuffit , dit-il , qu'ils ayent fait des Miracles auftî grands dans le fonds, & qui marquent un pouvoir auflî furnaturel. La refurre&ion d'un mort n'a-t-elle pas en un fens quel- que chofe de plus extraordinaire que le déplacement d'une monta* gne , qui peut être quelquefois l'ef- fet d'un tremblement de terre ou de quelqu'autre caufe naturelle ? Ainfi fuppofé que les Apôtres n'ayent jamais opéré ce Miracle, ce n'eft pas qu'ils ayent manqué du pouvoir neceflaire pour l'exécuter. G'eft: uniquement parce que l'occafion de le mettre en œuvre ne s'eft jamais prefentée. Ne peut-on pas dire encore qus la promeiTe de J. C. aux Apôtres ifignifioit feulement que la foi les rendroit capables défaire les prodi- ges les plus extraordinaires , tels qu'étoient dans leur efpecc ceux de faire fecher un figuier & de tranf- porter dej montagnes 3 II femblc même que cette manière de parler n'étoit qu'une expteffion pr overbia* ES SÇAVANS; oblige malgré nous de le finir. En gênerai on ne craint point d'af- furer que l'Ouvrage de l'Evcque de S.David eft écrit avec autant de for- ce que d'érudition. Il fcmbleroit ce- pendant qu'il auroit pu fe difpen- fer , comme nous l'avons déjà re- marqué , de répondre à certaines difficultés qui n'ont rien de ferieux & qui ne méritent que le mépris & l'indignation ; mais peut-être que le caradere & la difpofition des ef- pritsdeceux à qui cet Ouvrage s'a- dreffe particulièrement , deman- doient qu'il ne laiilât rien fans ré- plique. Nous donnerons l'Extrait du fé- cond Volume dans les Journaux fuivans. 356* JOURNAL D le pour figniher les choies les plus difficiles. Ce qui le prouve, outre plulîeurs autres railons qu'apporte encore l'Evéquc de S. David , c'eft que dans un autre endroie en parlant de l'efficacité de la toi , fubllitue un exemple différent à celui de tranfportcr les montagnes. Il dit à fes Apôtres , que s'ils ont de la foi ils commanderont à un Svcomore de fe déraciner &C d'aller fe planter dans la mer , &C qu'ils feront obéis. Telles font les répon- fes que le Prélat Anglican donne aux Objections du fieur "Wolfton contre leMiracle du figuier maudit. Ce qu'il dit contre le même Auteur au fujet du Paralitique guéri au Lae de Bethfeda n'eft pas moins folide : mais la longueur de cet Extrait nous THESES MISCELLANE^ CONSENSU SUPERIORUM publicat difquifitioni propofitx à Johanne-Adolpho Jacobaco Olig. Fil. refpondente Severino Hee , Philofoph. Bacc. Se Collegii Medicei Aliîmno , in Domo Confiftoriali die %6. Julii. Ann. 1730. Hauniar , ex Typographco Régi & Univerliratis- C'cft-à-dire : Théfes mêlées ■propofèrs à la difpute publique par Jean- Adolphe Jacobauis, & fouten- u'és parSeverin Hee i Bachelier en Philofophie } &c. le 16. Juillet 1730. Brochure /«-4e. pp. 14. CES Théfes ou Proportions font au nombre de onze. La première concerne l'incertitude des temedes de la Médecine : la fécon- de , l'ufage de l'eau froide dans les maladies : la tioiliéme, le Quinqui- na : la quatrième > l'inoculation de la petite vérole : la cinquième, les ongles: làfixiéme, l'Epiploon : la feptiéme , les glandes fontaines de l'inteflin ReBum : la 3e, la graille : fci neuvième , le devoir des Sa- ges - Femmes dans les accouche- mens difficiles : la dixième , l'ai- nian : Se la dernière, l'art de faire le papier. Quant a l'incertitude des remè- des , l'Auteur obferve qu'il n'v en a point fur lequel on puiflc toujours compter. Il en apporte plulîeurs raifons,dont les principales lont les divers remperamens } les différentes manières de vivre , lefexe , l'âge, le climat j la Saifon ; les pallions , &c. J u I Toutes circonftances qui varient l'effet des remèdes , ckqui deman- dent par confequent de la part de ceux qui les ordonnent , une atten» tion & une prudence fingulierej enforte qu'il eft iinpoffible d'établir jamais pour la guéiifon des mala- dies , une pratique uniforme , à moins que de vouloir faire de la Médecine une profeiîîon aveugle & ▼ifiblcment meurtrière. Pour ce qui eft del'ufagedel'eau froide , l'on foûtient ici qu'il ne convient point intérieurement dans le Rachitis , dans la Manie & dans quelques autres maladies; mais qu'à l'extérieur il eft fort recomman- dé : le bon effet qu'on prétend que l'eau froide produit alors ne vient point j dit-on , de ce que l'eau froi- de étant appliquée au dehors empê- che , comme fe l'imaginent quel- ques-uns , que les efprits animaux ne fe diffipent trop par l'infenifble tranfpiration , mais de ce que cette eau par fa froideur chaffe dehors les fucs qui embarraffent les vaiiTeaux capillaires, eVpar cette fortie rend la circulation plus libre. Car, pour- fuit notre Auteur, les particules qui caufent le froid de l'eau , étant ni- treufes , n'agiffent jamais en s'ap- prochant , mais en secartant au contraire les unes des autres , & ce- la à caufe de leur vertu élaftique. Pour prouver fon fenriment il apporre l'exemple de l'eau glacée qui occupe beaucoup plus de place que celle qui ne l'eft pas, comme il fe voit par ce qui arrive à une bou- teille d'eau , lorfque cette eau vient à gder , puifque ii la bouteille n'eil N , t 7 3 2. 5 j7 pas bouchée,l'eau gelée s'élève alors au-deffus de l'orifice , & fi. le vaif- feau eft bouché , elle le cafte faute d'y trouver une place fuffifante pour s'étendre. On prétend que cette vertu expanfive de l'eau gla- cée fe manifefte même dans la vé- gétation des plantes ; à quoi l'on ajoute que fi au fort de l'hiver les doigts viennent à perdre leur mou- vement par le froid ., il n'y a pas de meilleur moyen pour le leur rendre,, que de les laver dans de l'eau bien froide ; les Anaromiftes qui travail- lent à des Différions font fouvent expofés à ces engourdiffemens de doigts , & l'on cite ici M. Winflow qui affurc que pour fe conferver alors le mouvement des mains , il n'y a pas d'expédient plus fur que de les tremper dans de l'eau extré- ment froide. M. Boerhaave, comme on le peut voir dans fes Ekmens de Chymie s dont nous avons donné l'Extrait le mois d'Avril dernier 5 foûtient que l'eau liquide n'occupe jamais moins de volume que lorqu'elleeft bien rroide , ce qu'il appuyé du témoignage des Cimentiers qui af- furent tous qu'ils n'ont jamais plus de peine à empêcher l'eau de percer les murs que dans les tems où elle eft plus fioide ; car M. Boerhaave prétend que cette facilité extrême de l'eau à pénétrer alors les obftacles qu'elle rencontre , vient unique- ment de ce que le froid la condenfe,, ce qui la rend , dit-il 3 plus capable de s'inlmuer dans les intervalle; des parties,que fi elle occupoit plus de place 3 comme il lui arrive- X 3;8 JOURNAL DES SÇAVANS; quand elle clt moins froide. Ici au phthiiiqucs ou hydropiques contraire on prétend que pius l'eau eft froide & plus elle acquiert de dimenfion. Voilà deux fentimens bien oppofés. Il eft vrai que l'eau gelée occupe plus d'efpace que l'eau fluide ; mais s'eniuit-il que cette dernière doive augmenter en volume à proportion de lafroideus? C'eft de quoi bien des Phydciens ne conviendront pas. Quant au Quinquina, on prétend ici que ce remède eft li incertain contre les fièvres intermittentes , qu'à peine mérite-t-il le nom de Spécifique , & pour le prouver on allègue le fait fuivant , dont on die avoir été témoin. En 1727. fur la fin de l'Automne & pendant tout l'hiver régna dans la Ville de Lon- dres une fièvre intermittente du nombre de celles qu'on appelle ir- ïégulieres , parce qu'elles n'ont au- cun retour réglé. Les Médecins An- glois n'oublièrent rien pour guérir parle Quinquina cette forte de fiè- vre. Ils le firent prendre aux uns en fubftance , aux autres infufé dans du vin rouge de Portugal ; ils en donnèrent à d'autres la refinc. Cet- te méthode ne fit que fufpendrc la fièvre pour quelques Semaines ; après quoi elle revint plus forte que jamais , emportant tous les jours un Î;rand nombre de malades (ans que c Quinquina dont on s'obfrina à continuer l'ufage , &: qu'on fit mê- me prendre en plus grande dofe qu'auparavant, pût être d'aucun fe- cours contre cette mortalité. Les malades qui ne mouroient pas avoient le malheur de devenir ou Notre Auteur qui étoit depuis peu à Londres, voyant, dans cette occafion, l'inutilité du Quinquina , crut devoir prendre à l'égard d'un homme & d'une femme qui im- plorèrent alors fon fecours , une au- tre méthode que celle des Médecin* du Pays. Il ordonna à l'un une in- fufion cfabfinthe, de petite centau- rée, d'herbe nommée mille-feuilles & de racine de galanga , dans de l'eau de fontaine mêlée avec du via blanc de Portugal. Ce remède con- tinué plufieurs jours chalTa la fièvre fans retour. Les fymptomes de cette fièvre commencèrent par une dou- leur dans les lombes , accompagnée d'un froid que la chaleur fuivit de près. Il ordonna à l'autre qui étoit la femme du malade , tv qu'il trou- va attaquée d'un vomiftement énorme avec une forte fièvre qui av-oit été précédée de friiTon , 17 grains d'yeux d'Ecreviires,un demi- gros de racine de Ccntrajerva , trois grains de Saphran , douze grains de Nître dépuré , le tout à prendre de trois en trois heures -, il lui ordonna de plus un julep alcxi- rcre fait avec l'eau de pivoine , le Svrop de pivoine & le Syrop de Méconium. L'ufige de ces remèdes &.' celui" qu'on y joignitdes conferves arrié- res 5c du fyrop d'eeillet,guerircnten 4. jours la malade. Au r^lle , notre Auteur remarque qu'entre les di- verfes caufes qui privent le Quin- quina de fon effet , une des princi- pales eft la mauvaile toi des Mar- chands qui fophiftiquent fouvent ce remède. Pour JU IN, Pour ce qui regarde l'inoculation de la petite vérole, on commence d'abord par expofer de quelle ma- nière fe pratique cette opération, puis on tâche de prouver par des exemples , que la petite vérole ainfî communiquée, a de grands avanta- ges. Sçavoir i°. de n'être point mortelle. 2°. De ne produire fur la peau du vifage aucun trou Si au- cune couture; ce qui eft bien favo- rable aux Dames. ?°. De preferver de la rechute & d'en preferver fi ef- ficacement que lorfqu'on eft une fois guéri on peut fréquenter im- punément tous les malades attaqués de petite vérole. L'article des ongles roule fur la queftion fui vante : fçavoir fi les on- gles tirent leur origine des houpes nerveufes de la peau , ou fi elles ne font pas plutôt une partie de la cu- ticule. M. Heifter , dans la féconde Edition de fon abrégé Anatomi- que, eft du premier fentiment. Mais notre Auteur fe déclare ici pour le fécond : la raifon qu'il en donne, c'eft qu'en féparantla cuticule d'a- vec la peau, on voit i ongles ad- hérentes à cette cuticule , & les hou- pes de la peau dans leur entier. Le fujet du fixiéme article eft l'épiploon : comme cette membra- ne , dit-on ici , ne s'étend pas ordi- nairement jufques aux grosinteftins, il s'agit de fçavoir comment la na- ture fupplée à cejdcfaut: & là-dellus on répond que dans les endroits où l'épiploon manque , il y a des pelo- tons de graiffe qui tiennent lieu de cette membrane & empêchent que les diverfes portions d'inteftins ne Juin. 17? 2- 3!p fe collent les unes aux autres , fans quoi l'expuliion des matières fuper- flues contenues dans le bas-ventre ne fc pourroient faire. On remarque dans le feptiéme article que les glandes de l'inteftin Refttim nommées Solitaires par les Anatomiftes , ne font autre chofe que de petits refervoirs, qui verfenc au dedans de cet inteftin une hu- meur propre à faciliter la fortie des fuperfiuitez qu'il renferme. A l'égatd du huitième article ; on y prétend que ce qui fert à la nourriture de ceux qui font tombés dans un deffechement total , n'eft point ce qui peut refter de graille dans leur corps , cette graiffe ne pouvant être reprife par les artères pour être portée enfuite par les vei- nes dans la maffe du fang, mais que c'eft uniquement à la faveur des gelées , des émulfions & autres chofes iemblables , que ces malades font nourris. On remarque dans le neuvième article , i°. Que lesenfans ont un plus grand nombre d'os que les adultes ; ce qui vient de ce que quelques uns de leurs os qui n'en doivent faire qu'un dans la fuite, ne font pas encore réunis : z°. Que cette multiplicité produit une fou- pleffe qui fert à faciliter la naiffance des enfans. On donne, à cette occa- sion , plufieurs avis utiles pour l'art des accouchemens. Le dixième article contient quelques Obfervations qui ont déjà été faites fur l'aiman , l'une entr'au ■ très que quand cette pierre eft ron- de elle tire davantage & que quand Aaa }6o JOURNAL D cllc.eft de figure cubique, elle tire moins. On demande enfuite f I l'ai— man a la même vertu aftringente que le fer , & on répond qu'on n'a rien à dire là-demis , parce que l'ai- man cft exclus du rang des chofes qui fervent à la Médecine. Notre Auteur ne fçatt pas apparemment que cette pierre cft un excellent to- ES SÇAVANS, pique pour arrêter le fang. Dans le onzième &c dernier arti- cle on propofe l'invention nouvelle ufitée en Angleterre de taire du papier non avec des lambeaux de linge, mais avec le chamvre même, l'ortie & autres plantes , cV on ex- horte de travailler à la perfection de cette découverte. TRAITE' DE LA VERITE DE LA RELIGIOM Chrétienne , tiré du Latin de Ai. Jean-Alphonfe Turretin , Profiteur et» Théologie & en Hifloire Ecclefîafiicjue à Genève. Setlion ///. de la vérité delà Religion Judaijue. A Genève , chez Marc - Michel Boufquet ô£ Compagnie ; Se à Paris , chez Chaubert , 17 31. pp. 153. COMME nous avons rendu compte du deffein Se de la méthode de notre Auteur, en par- iant des deux premières Differta- tions, il nous luffira de faire fou- venir le Lecteur qu'on prouve dans la première de ces DiHertations le befoin qu'ont les hommes même les plus éclairés d'une révélation fur- naturelle , & qu'on explique dans la féconde quels font les caractères de la révélation. Après la difcullïon de ces deux points il eft naturel de chercher où l'on découvrira cette révélation, n Mais autant que cette vt recherche eft neceffaire , autant » demande-t-elle de circonfpection. *> Gar comme il importe de ne pas » re,erter la vérité quand Dieu nous »> la prefente , il importe 3uffi de ne » fe pas biffer éblouir par de tauffes *> lueurs. « L'Auteur ne croit point qu'il foit necefTaire pour faire cet examen de paffer en revue tous les fîécles , ni tous les peuples de la terre. On découvre dans la plupart tant de groffiereté cV d'extravagan- ce , qu'ils ne méritent point qu'on s'y arrête. Il fixe donc fes regaids fur un coin du monde, qui parcît avoir été long - tems le refuge de la lumiere,pendant que le relte de l'U- nivers étoit couvert d'epaiffes ténè- bres. Ce coin du monde eit la Ju- dée. Il obferve d'après l'alcal qu'au milieu de l'Univers Idolâtre les Hébreux feuls ont confervé le culte du vrai Dieu , qu'ils produifent un corps d'Ecritures , qui eft le plus ancien Livre qu'il y ait au monde , & qu'ils affurent que ce Livre con- tient l'Hiftoire & les Leçons de plulieurs Prophètes que Dieu a fufeirés parmi eux. L'Auteur , fuivant cette premiè- re idée , examine quels font les Dogmes des Hébreux cV leurs Loix Morales , Ccrémoniellesou Politi- ques. Il entre dans le détail des Li- vres Hiftoriques de l'ancien Tefta- rnent, enfuite il parle des Propher tics. JUIN La connoiffance du premier Etre eft la borne de coûte Religion. A cet égard il n'y a point de Nation ni même de Secle de Philofophes qui puilTentêtre comparées aux Hé- breux. Ils ont toujours tait profef- fion de reconnoître un premier principe , fpirituel , inviiîble , exiftant avant tous les hccles , c'eft ce que l'Auteur prouve en rappor- tant plufieurs palTages des Livres de Moyfe , & de ceux des Prophètes , où il eft parlé de la grandeur de Dieu , de fa puiffance Si de fes au- tres attributs, & il conclut de ces partages qu'ils donnent une idée Ci jufte & fi noble de la Divinité , qu'on peut dire hardiment qu'au- cun des Sages Payens n'en a appro- ché. Il eft vrai qu'on trouve dans ces mêmes Livres des exprefîîons qui ne paroiffent pas d'abord répondre à cette fublimité , telles que font celles-ci , que l'Eternel s'eft prome- né dans le Jardin d'Edcn , qu'il defeendit pour vifiter la Tour de Babel , qu'il étend fon bras , qu'il fe repent , Sec. Mais il cil vifible que l'Ecriture en ces endroits , fe fert de façons de parler figurées & populaires , pour s'accommoder au goût d'une Nation qui avoit befoin d'être frappée de tems en tems par des images fenfibles. C'eft pour- quoi l'Ecriture attribue fouvent à Dieu , ce qui ne convient qu'aux fymboles extérieurs par lefquels il fe maniftfte. Si quelque impie pouffe l'objec- tion jufqu'à dire , qu'on pourroit ainfi pallier julqu'aux exprellîons , 17 32; 36-1 les plus groffieres des Payens tou- chant leurs Divinitez , l'Auteur ré- pond que les vrais caractères de la Divinité font marqués en tant d'en- droits de l'Ecriture Sainte , que quand les Auteurs Sacres viennent à employer les figures , on les recon- noît d'abord pour ce qu'elles font ; au lieu que chez les Payens les expreiîions qui prefentent les idées les plus abfurdes font prifes dans leur fens naturel , & elles formenc le fond de leur Religion. Ce n'ift pas par quelques phrafes répandues en dirferens endroits qu'il faut ex- pliquer le fond d'un Syftême , c'eft au contraire au fond du Syftême connu d'ailleurs, qu'on doit ajufter ces phrafes. De ces Obfervations notre Au- teur paffe à l'examen de quelques autres Dogmes de la Religion Ju- daïque, & il fait voir que ces Dog- mes confirment les Notions natu- relles , &c qu'ils éclairciiïent fur la Création , fur l'origine du mal , §C fur plufieurs autres queftions des difficultez que la fimpie raifon ne pouvoit refoudte. L'Auteur con- vient que l'immortalité &c les re- compenfes éternelles des Juftes ne font pas expliquées aufli clairement dans l'ancien Teftament que dans le Nouveau. Mais il répond que les Hébreux étant groffiers, il falloir les retenir par quelque choie de plus vifible &c de plus marqué que ne le font les biens purement fpirituels d'une autre vie. Il ajoute qu'il y a d'ailleurs dans l'ancien Teftament beaucoup de chofes qui font pro- pres à ouvrir les yeux fur ces véritez A aaij 3<Ï2 JOURNAL D îux pcrfonuei intelligences. Notre Auteur taie voir enfuite que les Préceptes Moraux delà Loi Mofaïque font un excellent abrégé du Droit naturel, très-propres à faire fleurir chez un peuple la pieté 6v la juitice ; attendu qu'ils com- prennent nos devoirs envers Dieu , envers les hommes & envers nous- mêmes. L'enlèvement des meubles dcsEgyptiens & l'ordre de les exter- miner ne font pas contraires à ia Loi Naturelle , félon la remarque dePAuteur, parce que Dieu eft le maître des biens & de la vie des hommes & que les Ifraélites n'é- toient par rapport à ces deux arti- cles que les exécuteurs des ordres que Dieu leur avoir donnés. A l'égard des Loix qui regardent le culte Judaïque , il y en a de deux cfpeces , les unes qui font eflentiel- les , comme l'adoration , les priè- res , la leéture de la Loi ; d'autres qui font purement cérémoniellcs. Ces demie es étoient des figures qui cachoient fous leur écotee quel- que inllruction importante , îs: qui fervoientàdiftinguer lcsjuifs d'avec les autres peuples. Cette idéegene- rale juflirîée par l'explication d'un grand nombre de points de la Loi cérémonielle des Juifs, fuffît pour répondre aux objections que font quelques perfonnes fur cette Loi ; quand même il y aurait quelques- unes de ces cérémonies dont on ne pourrait aujourd'hui découvrir le motif à caulc de l'éloigncmcnt des îems. Cette preuve de la vérité de la icvclation Judaïque tirée de l'es- ES SÇAVANS, cellcnce de fa doctrine & de fes Loix, cil foûtenue de deux autres preuves encore plus frappantes. Ce font les Miracles & les Prophéties qui font rapportées dans les Livres de l'ancien Teftamenr. L'Auteur obferve d'abord que l'Hiftoire de la Gencfe cft refpeéta- ble par (on antiquité , que Moïfc qui l'a écrite précède de cinq cens ans les Auteurs Payais les plus an- ciens , qu'il touchoit au temsdes Patriarches , que Lévi bilaycul de Moïfe avoir vécu quelque rems avec Ifaac , qu'Ifaac avoit pu voir Sem fils de Noé , que Scm avoir vu Mathufalem,& quece dernicravoie vu le premier homme. Si Moïfc avoir voulu en impofer auxHraëlite» dans les Récits , il aurait fait le monde beaucoup plus ancien , c\ il fe leroit bien garde de rapprocher les rems , de loire que , knvanr fon calcul , la mémoire en dût encore être récente lorfqu'il écrivok. » Le " tour des penfées de Moïfe, fon » fhle , la peinture qu'il fait des « mœurs de fon rems, un certain air «original qu'on ne peut bien défi— = nir , tout y relient le goût antique n Se porre avec foi , comme re- » marque l'Auteur, le caractère de m fidélité. « Il ajoute à ces moyens que plus on remonte dans l'Anti- quité prophane plus on tiouve de veftiges cv de monumens qui qua- drent avec les faits rapportés par Moïle dans le Livre de la Gcnefe. Il faut avouer, félon norre Au- teur , qu'il y a des traits dans la Gc- nefe fufccptibles de grandes diffi- cultezi mais il obfctve là-deflus JUIN que le fond de cette Hiftoire repre- fente de grandes véritez , & il veut qu'on fe Souvienne , quand on ren- contre de ces endroits obfcurs , qu'il nous manque pour les bien enten- dre quelque clé tirée ou de certai- nes circonstances qui ne font pas ve- nues jufqu'à nous , ou du goût des Orientaux qui étoient extraordinai- rement portés aux Apologues&aux allégories. L'Auteur va même juf- qu'à permettre d'appliquer cette dernière partie de fa proposition au Serpent qui tenta la première fem- me; car il dit qu'elle fut pouffee pat un efpiic malin qui eft défigné fous le nom de Serpent, foie qu'il eut réellement emprunté l'organe de cet animal , foit qu'il y ait de la fi- gure dans ce dilcours. Car on ne doit pas faire un point de foi t ajoû- te-t-il , de celle ou telle interpréta- tion fur des chofes qui font diffici- les ou peu eflcntielles. Après laGenefc l'Auteur vient à l'Exode & au Pentateuque. Il prou- ve que les Miracles dont il eft fait mention dansces deux Livres font des preuves confiantes de la vérité de la Religion Judaïque. Pour douter de ces Miracles } il faudroit fuppofer ou que MoïSe eft un per- fonnage feint , ou que c'étoit un impofteur, & que les Ifraclires fe font eux-mêmes pietés à l'impoftu- re , ou que cette Hiftoire a été fup- pofee ou du moins altérée long- tems après la mort de Moife. La première hy pothéfe n'a pas la moin- dre apparence , car s'il étoir permis de s'élever ainfi contre la voix de sous les fiécles 3 il n'y auroit aucun >. " 7 3 2; 3^3 fait au monde qui fût à l'abri du Pyrronilme. La fainteté de la doc- trine & des vues de Moife, fa pa- tience , fon deiintereflement , fa franchife& fon zélé ne permettent point de le Soupçonner d'impoftu- re. Il n'auroitpu tromperies Iiraë- lites , en leur rapportant des Mira- cles éclatans , continués pendant plufieurs années qui s'étoient faits fous leurs yeux 6c dont ils étoient tous les |ouis les témoins. D'ailleurs il n'y a pas la moindre apparence que les Ifiaélitesayent été d'intelligen- ce avec Moife pour tromper la po- fteriré , car on ne pourra perfuader à aucun homme fenfé que des mil- liers de perfonnes (e loient accordés pour (oûtenir un pareil complot. Ces Livres contiennent plufieurs traits qui ne font point honneur aux Ifraëlircs , & il n'y a point d'appa- rence qu'ils eufîent confenti à en étcmiler la mémoire, s'ils n'avoient point été convaincus de leur vérité. Certe Nation fi difficile à gouver- ner n'auroit point obéi à Moife pendant fa vie , & elle n'auroit pas fuivi après fa mort des Loix qui étoient fi contraires à fon penchant naturel , fi elle n'avoir point été perfuadée entièrement de la vérité des faits Surnaturels rapportés dans les Livres de Moïfe. Sur la troificme Hypothéfe l'Au- teur fait voir qu'il eft impoflible que les Livres de Moïfe euftent été fuppofés ou altérés : entre un grand- nombre de moyens fur lefquels il établit cette propofition , il infifts particulièrement fur ce qu'il n'y au- roit pas de tems dans lequel on pût 364 JOURNAL DE dire que cette altération ou cette fuppohtion eût été faite. Peu de tems après la mort de Moïfe la fup- pofition ou l'altération auroit été démentie par la notoriété publi- que, ils n'ont été fuppofcsni altérés du tems de Samuel, de David & des Prophètes , puifque ces Auteurs Sacrés ont eux-mêmes cité les Li- vres de Moïfe. Ils n'onc point été faits ou altérés depuis la divifïon des dix Tribus , autrement les Samari- tains ne l'auroient point reçu. L'Au- teur infifte aulTi beaucoup fur le moyen tiré de ce que toutes les céré- monies , les Fêtes & les prières delà Religion Judaïque fuppofentla vé- rité des Livres de Moïfe. La vérité du Pentateuque étant une fois établie , celle des autres Livres Historiques ne peut guéres être conteftéc. C'efi pourquoi notre Auteur ne s'y arrête point autant qu'il a fait fur les autres Livres de Moïfe. Il finit par les Prophètes , & pour faire voir que Dieu même les infpiroit , il s'arrête fur quelques- unes des Prophéties des plus claires & des plus fenhbles j comme celle d'Ifaïe pour Cyrus , celle de Daniel touchant les quatre grandes Monar- chies, S SÇAVANS; On voit p.u le précis de cette Didertation , que fi M. Turretin , dont on explique les principes dans cet Ouvrage n'a point le mérite de propofer des preuves qui frappent par leur nouveauté , il a du moins celui d'avoir réuni en un corps , & donné occafion de mettre dans un ordre fenhble & naturel , ce qu'il y a de plus folide dans tantd'ex- cellens Ouvrages anciens & moder- nes qui ont été faits pour prouver la vérité de la Religion. Au refte , notre Auteur avertit que s'il y i des Lecteurs dans l'efprit def- quels il reftât quelque difficulté fur la vérité de la Religion Judaïque , il faut qu'il fuf pende fon jugement, jufqu'à ce qu'il ait lu les DiiTerta- tions que l'Auteur fe propofe de donner au public fut la vérité de l'Evangile , parce que les preuves de la Religion Chrétienne étant en- core plus fortes éx'plus à l'abrisdes difficulrez que celle de la Religion des Juifs , ferviront à fortifier ce qu'il a dit dans cette DifTertation* Car la révélation Judaïque ne fai- fant pour ainfi dire qu'un corps avec le Chriftianifme , l'éclat de l'une rejaillit fur l'autre & lui prête une nouvelle force. JUIN; 1732: 36ï LE ZODIAQUE DE LA VIE , OU PRECEPTES POVR diriger la conduite & les mœurs d:s hommes 3 traduit du Poème Latin de Marcel Palingene , célèbre Poète de la Stellada. Par M. de la Monne~ rye. A la Haye, chez Jean Swart. 173 1. /»-ir. 2. vol. premier vol. pp. 240. fécond vol. pp. 280. PALINGENE paflepourun des plus fameux Poètes du quinzième fîécle. Il étoit de Stella- da , petite Ville du Ferratois fur la Rive Méridionale du Pô. L'Auteur de la Préface qui eft à la tête de cet Ouvrage , & qui eft différent du Traducteur , reprend Scaliger , d'avoir avancé que Palingene a voie pris le nom de Stellatus à caufe du titre de Zodiaque qu'il avoit donné à (on Pocme , comme s'il avoic voulu figniner par-là qu'il étoit Foete Etoile. L'Aurcur de la Préface prùend aufti que Scevole deSainte- Marrhe avance fans aucune preuve que Palingene fut Médecin d'Her- Cules-d'Eft II. Duc de Ferrare. Il paroîc par l'Epître Dédicatoire de ce Pov me , que le Poète ne con- noiffoir point le Duc de Ferrare , Se qu'il n'en étoit point connu , Se qu'il avoit paffé la plus grande par- tie de fa vie dans fa Patrie 3 occupé à la compolition de fon Poème , & peu favorifé des biens de la for- tune. Il parle même en plufieurs endroits fort mal des Médecins , quoiqu'il eftime beaucoup la Mé- decine. Quelques Auteurs ont dit que Palingene étoit Prêtre Se Pierre plein de Religion , mais Critique févére, qui n'épargnoit ni les Ecde- liaftiques , ni les Moines de fon tems. L'Auteur de la Préface ne trouve pas cette qualité mieux jufti- fiée par rapport àPalingene que cel- le de Médecin. Il ne fait pas non plus beaucoup de fond fur ce que difent Melchior-Adam & Guy-Pa- tin , que le corps de Palingene fut exhumé quelque tems après fa moct , qu'il fut brûlé par ordre de l'Inquifition Se que fes cendres fu- rent jettées au vent , foit à caule de ee qu'il avoit dit dans fon Poème, contre les defordres des Prêtres & desMoinesdefon tems, dont il fait quelquefois des peintures affreufes, fans épargner le Pape Se les Cardi- naux , foit à caufe qu'il avoit été acculé de magie. Au refte, l'Au- teur de la Préface eft perfuadé qu'il eft peu important d'examiner ce point de fait par rapport à la mé- moire Se à l'Ouvrage qui nous refte de Palingene ; parce que tout ce qui refulteroit de cette condamna- tion feroit que ce Poète n'auroit pas écrit conformément aux fenti- mens ou aux vues des Inquisiteurs. A l'égard du Poème on en a par- lé fort diverfemenr. Scaliger n'en avoit point une idée fort avanta- geufe. Mais M. de la Monnerye , Baile Se Guy - Patin l'eftimoienc beaucoup. On a loué dans ce Poème la pureté de la diction & la folidité des préceptes de morale ; ceux mê- 366 JOURNAL D nies qui ont paru les plus prévenus contre Palingcne s'accordent alfez fur ces deux points. Mais ils com- mencent par critiquer le titre ; celui de Zodiaque de U vie humaine leur paroît d'autant plus extraordinaire , que les préceptes de morale qu'il donne dans chacun des Livres de fon Poème , n'ont aucune relation aux lignes du Zodiaque , dont il y en a un marqué à la tête de chaque Livre. A quoi fes Apolo- giftes répondent qu'il leur paroît aullî ridicule de lui reprocher ce ti- tre, que de taire un reproche à Hé- rodote d'avoir donné le nom d'une des Mufes à chacun des Livres de fon Hiftoire. Le mélange de laFable & du Chri- ftianifme qu'on trouve non feule- ment dans la même page , mais encore dans le même vers , ce qui fait de la peine à plusieurs peifon- nes ne peut s'exeufer que fur l'u- fage de fon fiécle , pendant lequel on n'étoit point choqué de ce mé- lange du facré & du prophane ; ni des attributs de Dieu, avec ceux des monftrueufes Divinitez du Paga- nifme. Ce n'elt pas fuiiplement dans les exprellions qu'on peut re- procher ce mélangea l'Auteur, il y a des opinions qu'il femble foûte- nir avec beaucoup de zélé , 5c qui peuvent favorifer le Paganifme. Ce font des efpeces de Divinitez d'un fécond rang , dont il fait des habi- tans du Ciel. Mais le Traducteur prétend dans fon Epître Dédicatoi- re , que ce que l'Auteur appelle des Divinitez du fécond ordre ne font que des intelligences très-pures qui ES SÇAVANS, font fans ceffe prolternées au pied duThrônc de Dieu. D'aillcuis lia grand foin dans tout le corps de fon. Poème de placer Dieu dans une ca- thegorie particulière infiniment au- deflus de ces intelligences. Il ajoute qu'il lui paroît que le Poète n'a eu d'autre defiein que de c:.cher une Philofophie fecrette fous ce mélan- ge , & de gigner la perfuafïon de fes Lecteurs, par ces ornernens Se ces deferiptions , fans lefquelles il auroit cru aue fon Poé'me auroiï langui. Le tameux Mdton , ajou- te l'Auteur , s'eft donné du moins autant de licence dans une matière qui a des bornes plus refletr tées. L'Auteur de la Préface eft encore obligé de convenir qu'il y a des morceaux dans lefquels le Poète s'attache à pouffer avec vivacité les objections de ceux qui n'ont point de Religion , & qu'il fait des def- eriptions trop flatteufes de la vie des Epicuriens ; mais il prétend qu'on ne doit pas conclure dt-là que Palingcne ait eu de mauvais fentimens au fujet de la Religion , parce qu'il parle en dirïerens en- droits de Dieu & de fes attributs d'une manière qui répond à l'idée qu'en doivent avoir les Chrétiens les plus éclairés, ôc qu'il s'applique à prouver combien la félicité que procure la vertu cft au - delïus de celle que les Epicuriens attachent au plaifir des fens. Nous laiflcuis aux Lecteurs à dé- cider, s'il ne refulteroit pas de ces Apologies de Palingcne que fon Poem; ne formeroit qu'un mélange monftrueux J u I ittonftrueux de Chriftianifme &c de Paganifme , qui étant joints à des raifonnemens tirés de l'ancienne Philofophie ne prefentent à l'efprit des Lecîeurs que des objets confus, & que ce n'a pu être que la vérifica- tion , & des préceptes de morale qui ont attiré au Poëme de Palinge- neles éloges qu'en ont fait plufieurs Sçavans. Scevole de Sainte-Marthe avoit imité en vers François dix ou douze morceaux de ce Pocme, qu'il avoit fait imprimer dans le Recueil de fes premières Oeuvres imprimées en 1569. il n'avoir donné ces mor- ceaux que comme des elTais d'une imitation pareille du Poëme entier qu'il avoit reaolu d'entreprendre fi ces efiais étoient goûtés. Apparem- ment que Scevole de Sainte-Mar- the reconnut que cet Ouvrage ne feroit point du goût du Public , puifqu'il ne paroît pas qu'il ait con- tinué d'y travailler. Quoiqu'il en foit , depuis Scevole de Sainte-Mar- the on ne connoît perfonne qui ait entrepris d'imiter en vers le Pocme de Palingene ou de le traduire en profe Françoife. Ainfi ceux qui n'entendent point le Latin auront l'obligation à M. de la Monnoye de pouvoir juger par eux-mêmes , finon du ftile & de la verfification, du moins du fond de l'Ouvrage. Voici un échantillon de la traduc- tion , pour qu'on puifie juger du ftile duTradudteur. C'eft le com- N ; t 7 3 a; $£7 mencement du 5e Livre. « Ce ne font pas les richefles de » l'Arabie qui excitent mes defirs. » Les Pierres p-récieufes que pro- » duit la Mer-Rouge me font in- » différentes. Les fables d'or que » i'hebre Se le tage roulent dans » leurs lits bnllans ne me font nulle » envie. Jamais je n'afpirerai au » Gouvernement des grandes Mo- » narchies. Je regarde avec indiffe- » rence le Diadème des grands » Rois , les deftins ne m'ont pas j> refervé pour de fi grandes choies, » & l'on ne m'entendra pas , pour » cela les taxer d'injuftice. Je fens » les dangers qu'on court quand » on pollede de grandes richelfes , i> foit qu'on en ïalTe un bon ou un » mauvais ufage , le péril eft à peu u près égal. L'on a fouvent vu » ceindre du Diadème des Têtes » fans efprit. Qu'il y a peu de ceux » qui font revêtus de la Pourpre » Tyrienne qui méritent cette dé- » coration! Pour moi je borne mes wfouhaits, & prie l'Auteur de 1* » Nature de m'accorder tout ce que » les méchans Se les gens fans efpris » ne peuvent pofleder. Je veux di- » re la Science & la Vertu. Ce font » ces qualitez qui approchent » l'homme du caractère des Dieux. y> C'eft de vous , Jupiter tout-puif- » fant, que ces dons émanent, nous »> ne pouvons les tenir que de vo< » bienfaits. mJUj Mk Juin. Bbb 36S JOURNAL DES SÇAVANS, NOVVELLES LITTERAIRES. ALLEMAGNE. D' I E* N S. JFred. Ritter a imprimé une Dif- . fertation de M. Harlet fur le tcms où S. Paul eft arrivé à Rome. De Pauli in Vrbem Romam mgref- ftt, AÏionim xxviii, \6. defcripto , Exereitatio Hifiorico - Theologica t varii generis Obfervationibits illu- Jirata. Autore Job. Cafp. Harletio. 1732. in - 4*. Le fentiment que l'Auteur fuit dans cet Ouvrage, eft que S. Paul n'elt allé à Rome , que l'an 53. de l'Ere Chrétienne fous l'Empire de Claude, £c non fous celui de Néron , comme le préten- dent quelques Chronologiftes. M. J. Frêd. Wucherer , Do&eur en Théologie , a publié chez la Veuve Adeyer t une Réfutation du Syftême de ïVhifion , fous ce titre : qui y a mis une Préface de fa façon, dans laquelle il donne une idée du caractère & des Ecrits de ce Prélat , dont le portrait eft à la tète du Li- vre , gravé par M. Venue. Le même Wdford débite le pre- mier Volume du Recueil que M. .Morgan Auteur d'une Hiftoire d'Alger , a publié par brochures , fous le titre de Picœnix Britannicus. On afTure que ce Volume qui eft de 550. pages in-^9. contient un grand nombre de Pièces ou cu- tieufes ou très-rares fur différentes matières. Le fécond Volume qui s'imprime de même , ne fera pas moins épais que le premier. C. Rivington a imprimé en deux .Volumes in-%*. la Traduction An- gloife que M. J» Martin , de la So- ciété Royale, a faite de Y Hiftoire des Plantes qui croiffent aux envi- rons de Paris, par M. de Toumefort. Le Traducteur a , dit - on , fait quelques additions Se quelques changemens au Texte Original 3 pour l'accommoder aux Plantes qui naiffent dans la grande Bretagne. On propofe p3r Soufcription î'Hiftoire de Neivcaftle l\nia Tyne: intitulée : Novum Caftellum fiiper T.ynam Ami^mm & Hodiçruim; S SÇAVANS, ou Vêtat ancien & prefent de la Ville de Keiucafile; en Anglois. Cet Ou- vrage fera en un Volume in-folio de 70. feuilles : le prix de la Souf- cription eft de 10. Shelings 6. de- niers, dont cinq feront payés en fouferivant , Se le refte en recevant l'exemplaire. On imprime auiiî en un Volume in-folio tous les Ouvrages de feu M. Freind , célèbre Docteur en Médecine Se de la Société Royale. On doit traduire en Latin ceux que- l'Auteur a écrits en Anglois. R. Hett a en vente The Hiftory ofthe Puritains , &c C'eft-à-dire : Hiftoire dés Puritains ou des Pro- teftans non-Conformiftes depuis la Reformation jufqu'à la mort de la Reine Elifabeth : on y expofe les principes Se les fentimens de cette Secte , on y parle des efforts que les Puritains ont fait pour parvenir à une plus grande reformarion dans l'Eglife , & de ce qu'ils ont eu z fouffrir; on y donne aulli la Vie & le caractère de leurs principaux Théor logiens. iw-£°. La nouvelle Edition que M. le Docteur Bentley a donnée du Para- dis Perdu de Mdton 'y ou plutôt les corrections hardies & les change- mens confiderables qu'il a faits à cet Ouvrage , ont attiré à ce Sçavant un grand nombre de Cenfeurs. Il a déjà paru diverfes Brochures contre lui. On alîure que celle qui mérite le plus d'attention , cftcelle qui eit intitulée: A Reviens ofthe text of Mdton's Paradife lof}, cVc. in-2°; L'Auteur après y avoir examiné les principales conedions de M* Betttz- JUIN îey , en propofe plufieuts autres qui' lui paroillent plus judicieufes. HOLLANDE. D'Amsterdam. Les IVetfleins & Smith distri- buent leur magnifique Edition des Métamorphofes d'Ovide en Latin , êc traduites en François avec des Remarques & des Explications Hi- ftoriques , par M. l'Abbé Banier de l'Académie Royale des Infcriptions 6i Belles-Lettres, en deux Volumes in-folio , ornés de i Ji. figures en taille-douce , gravées par B. Picart èc par d'autres habiles Maîtres. Cet Ouvrage paroîten même tems La- tin &c Anglais, Se, Latin & Hollan- dais. Les mêmes Libraires ont fait une Edition en trois Volumes in-iz. de la Traduction des Méra- morphofes , avec l'explication des Fables par M. l'Abbé Banier } Se avec figures. On trouve chez Jean-Fiederic Bernard , Mémoires Miftonqiies & Critiques fur divers points de l'fii- floire de France , & plu/ieurs Sujets curieux , par François-Eudes Aie- zeray. En deux Volumes in-î°. Les matières de ces Mémoires fontdif- pofées par ordre alphabétique. L'E- diteur y a mis à la tête un Difcours qui contient diverles reflexions fur l'Hiftoire de France de Mezeray , & fur le caractère de cet Hiitorien , de la V ie duquel il donne un abrégé. L'article le plus curieux de cette Pièce eft peut-être celui où l'on fe propofe de prouver que Aiez-eray n 'eft point l'Auteur de YHiftoire de la Mère & du fils , qui a étéimpri:- » *73*^ 371 mée depuis quelque tems dans ces Provinces. D'Utrecht. M. de Paww t déjà connu par l'Edition de quelques Auteurs Grecs , vient de donner chez Guil. Croon celle des Odes d'Anacreon» jinacreontis Teti Odœ & fragmenta, Gracè & Latine j cum Notis Johan^ vis Cornelii de Pauw. 1732. in-/f. Nous rendrons compte dans un au- tre endroit de ce que cette Edition peut avoir de remarquable , & nous parlerons alors plus amplement dit lentiment de l'Editeur qui femble être perfuadé que toutes les Odej d' Anacrion ont été fuppofées pat les Grammairiens. FRANCE. De Strasbourg. Tanegyricus Ludovico XV. Gal- liarum Régi in folemni Natals Re- gii celebratione anno mdccxxxiî. ' Argentorati jujfu publico dittus A Johanne-Daniele Schoeprlino- Lit- teris Georg. Adami Piefckeri , Vni- verf. Typogr. M.Schoepfiw, qui eft ordinairement chargé de faire ces fortes de Difcours publics le jour de la NaifTancedu Roi, a faifi dans celui-ci , comme on pouvoir s'y at- tendre , l'heureufe circonitance du paiTage de Don Carlos en Italie. Oeil: fur cet événement que roule pour la plus grande partie , le Pané- gyrique que nous annonçons , Se l'habile Orateur a traité cette ma*- tiere avec encore plus de feu & d'é- loquence qu'on n'en remarque-dans fes Harangues précédentes,- D t T o u L. Conduite de U Providence Àam 312 JOURNAL D Fétablijfement de la Congrégation de Notre-Dame , cjui a four [on Infli- tuteur le "Bienheureux Père Pierre Fourier , dit vulgairement de Ma- taincourt , Supérieur General & Ré- formateur des Chanoines Réguliers de la Congrégation de Nôtre-Sauveur. Prefentée à Nojfeigneurs les Illujlrif- fimes & Reverendiffimes Evècjues , comme premiers Supérieurs de cette Congrégation. Avec une Préface en forme de Difcours aux Filles de cet Infhtut. Chez Claude Vincent. 1732. 2. vol. grand in-î°. Le P. Pierre Fourier , né à Mire- court en Lorraine le 30. Novembre 15^5. 8c mortàGrayen Franche- Comté le 9. Décembre 1^40. a été béatifié par le Pape Benoît XIII. le 10. Janvier 1730. De Montpellier. Jean Martel a imprimé une Brochure /'«-40. contenant les Ex- traits des Mémoires qui ont été lus dans l'affemblée publique delà So- ciété Royale des Sciences de cette Ville, tenue le 27. Février 1732. dans la grande Sale de l'Hôtel de Ville , en prefence des Etats de la Province. i°. Extrait du Mémoi- re de M. Danyz.y , fur la poufTéc des Voûtes. 20. Extrait du Mémoi- re de M. Chicoyneau le fils , fur le mouvement des Plantes appellées Scnfitives. 30. Extrait du Mémoire de M. Plantade fur quelques nou- velles expériences du Baromètre. 40. Extrait du Mémoire de M. La- morier , ou fes Obfervations fur l'u- fage de l'eau commune dans la Chirurgie. On obferve à la fin de cet Impri- ES SÇAVANS, mé que M. de Bernage de S. Mau- rice Intendant de Languedoc , èc Prélidcnt de la Société pour cette année, recapitula tous ces Mémoires avec autant d'intelligence que de prccifion & de netteté. De Paris. Programma Gloffairi Enneaflici : c'eft le titre gênerai d'un Program- me Latin & François imprime i»-4°. Brochure de jî. pages, inti- tulé : Çlofaire en neuf Langues \ »ou Diètionnaifc nouveau pour » l'intelligence de neuf Langues ; wfçavoir, le Latin , le François, » l'Italien , l' Anglois , l'Efpagnol , "l'Allemand, l'Hébreu , le Grcc- » Littéral , Se le Grec-Vulgaire t y> difpofé iuivant une méthode *»qui forme pour ces neuf Langues » foixante - douze Dictionnaires » complets Se très-utiles non feule- ra ment aux Gens de Lettres , mais »j auffi à ceux qui n'ont aucune tein- » ture du Latin, comme les fem- » mes Se toutes les autres perfonnes n qui par leur éducation Se par leur «état fe trouvent bornées à leur » Langue Maternelle. Ouvrage Pofthume du R. P. Cajfien , Capucin. De l'Imprimerie de Langlois , rue S. Etienne des Grecs , au bon Pafteur. 1731. De quelque utilité que puiiTcétre cet immenfc Recueil de Diction- naires , le Profpeïius dont nous n'a- vons fait que donner le titre , ren- ferme tant de détails fur la métho- de que l'Auteur a fuivie , auflï-bien que celui qui a continué l'Ouvrage après fa mort , qu'il ne nous eft pas polïible d'en donner ici une jufte Jtf r idée , & nous fornmes- obligés d'y renvoyer nos Lecteurs. Réflexions inftruftives & morales fur l'Apocalypfe. Par M. l'Abbé Genreau , Curé de Nôtre-Dame de Dijon. Chez d'Houry 1732. in-iu M. Genreau adrelTe ces Reflexions à fes Paroifîlens , & fon Epître Dé- dicatoire eft vraimentcdihante. Difcours fur Us Vies des Saints de l'ancien Teflament. Chez Ofmont & Henry , rue S. Jacques. 1752. in-iz. 6. vol. Codex Medicamentarius , feu Pharmacopaa Parifienps , ex man- data Facnltatis MedtcinaTarifien- fis in lucem édita, M. Hyacinthe Theodoro Baron Decano. Apud Guilielmum Cavelier , via Jacobea. 1732. /»-4a. Cet Ouvrage dont on attendoit l'Edition depuis long- tems eft accompagné d'un Arrêt du Parlement du %6. Mars 1731. qui ordonne» que tous les Apothicaires »de cette Ville & Fauxbourgs de «Paris feront tenus de fe confor- »mcr au nouveau Difpenfaire dans » dans la corn pofuion des remèdes » y mentionnés fait inhibi- ai tions & défenfes aux Apothicaires » de donner les comportions men- tionnées audit Difpenfaire , ni au- » très par eux faites aux malades , »» fur autres ordonnances que celles »des Docteurs de la Faculté, Li- «centiés d'icelle, ou autres ayant » pouvoir d'exercer la Medeciue » dans la Ville & Fauxbourgs de «Paris, Si fans ordonnances dat- » tées & (ignées defdits Docteurs , "Licentiés, ou auties ayant pou- « voir , . defquelles Ordonnances N , ï73 2-\ 375 » lefdits| Apothicaires feront tenus » de tenir bon & hdéle Regiftre , le » tout fous les peines portées pat »> les Ordonnances. M. Ludovic i-Johannis le Thieui- lier in Vniverfttate Panfienft Facui- tatis Saluberrirna Dotions Régent is 3 &c. Obfervationes Medico pratlic*, Apud Carolum Olmont , Huart 3 Cloufier, via Jacobea. 1732. in-ii* Traité complet de Chirurgie , co»- tenant des Observations & des Refle- xions fur toutes les maladies Chirur- gicales , & fur la manière de les trai- ter. Par M. Guillaume Manque fi de la Motte , Chirurgien Juré à Va- lognes , & Chirurgien de l'Hôpital des Troupes du Roi , en baffe Nor- mandie, établi audit lieu. Seconde Edition , revûi , corigèe & augmen- tée. Chez Guillaume Cavelier. 1732. in-n. 4. vol. Hifloire de la dernière pefle de Marfeille , Aix , Arles & Toulon ,, avec plufteurs Avantures arrivées pendant la Contagion. Divifée en deux parties, par M. Martin. Chez Paulus-du-Mefnil , au Palais. 1732. in-\%. La première partie de cette Hiftoire n'offre au l.edteur que des objets triftes & touchans ; mais il en eft dédommagé par la féconde qui renferme des Avantures parti- culières & intereflanus. Nous em- pruntons pour faire connoîrre cee Ouvrage , les paroles de M. Mo-, reau de Mmtour , qui en eft l'Ap-; probateur» Apologie des Bêtes , ou leur con- itoijfance & raiftnnement prouvés contre le Syftéme des PhiUfophes Car- tcfiim s qui prétendent que Us Brstiss j74 JOURNALD ne font que des Machines Automa- tes. Ouvrage en vers par M. Mor- fouace de Beaumont. Chez Pierre Prault , Quai de Gêvrcs. i 7 3 1. in-l°. Cette Apologie eft adreflee à M. le Comte d' ' Argenfon , Chancelier de Mgr le Duc d'Orléans , & l'E- pître Dédicatoire eft en vers. La préface qui fuit eft une efpece de Paraphrafc Françoife auflî en vers de quelques endroits du prcmierLi- vre de Lucrèce , où cet Auteur parle des difïîcultez qu'il y a à traiter un Sujet tel que celui qu'il entreprend d'orner des grâces de la Poé'fie , foit par rapport à la fechereile de la ma- ES SÇAVANS; tiere , (oit par rapport au défaut des expreiiionsneceiîaires. M. de B an- mont fe croit dans le même cas que Lucrèce à ces deux égards. Le refte de l'Ouvrage qui compofe propre- ment l'Apologie des Bêtes confifte dans le recit en vers de plufieurs traits d'hiftoire vrais ou fuppofés , d'où il femble qu'on pourroit con- clure que les Bêtes ne font pas de purs Automates, mais qu'elles con- noiffent & raifonnent jufqu'à un certain point- Sien cela le Syftême de l'Auteur n'eft pas nouveau, on peut dire du moins que la manière dont il l'expofcj eft tout-à-fait nou- velle. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Juin 1732; LEttre à Madame T. D. L. F. fur M. Hondart de la Motte ; page 31J La Catanoife } Sic. 3 Z2 La Gaule Chrétienne , Sic. Tom. 111. 331 La Vie de Saladin , 6Vc. 335 La Théorie de la Manœuvre des Vaiffeaux réduite en pratique , &c. 343 Réponfe à M. Wolfton , &ic. 34^ Thefes de Médecine , &c. 3 ç£ Traité de la Vérité de la Religion Chrétienne , par M. Turrctin } $60 £,e Zodiaque de la Vie t Sic. 3^5 Nouvelles Littéraires , }£t Fin de k Table L E JOURNAL SÇAVÂ'NS, POUR VANNEE M. D CC. X X X I L JUILLET. A PARIS; Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. "mT^CC. XX XÏL AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY, LE JOURNAL DES SÇAVANS; JUILLET M. DCC. XXXII. DISSERTATION CRITIQUE ET THEOLOGIQVE SVR LE Concile de Rimini. A Paris _, chez Deluffeux , Chevalier Romain rue Saint Etienne d'Egrés. 1732. vol. in-\i. pp. 372. CEUX qui prétendent que l'autorité de l'Eglife enfei- gnante ne confifte point dans l'u- nion du plus grand nombre des premiers Pafteurs avec leur chef , allèguent là - deiTus , le Concile de Rimini. M. Corgne , Auteur de U Juillet. DiiTertation Critique & Théologi- que , dont nous allons rendre compte , croit devoir répondre ici à cette objection , quoiqu'elle ait déjà été fi fouvent refolue. » Plus » ceux , dit - il , qui combattent » l'autorité de l'Eglife ont de con- Cccij 37? JOURNAL D i> fiance dans l'objection dont il » s'agit , plus il faut travailler à » l'éclaircir , afin de forcer une » bonne fois les ennemis de l'Egli- » fe dans leur plus fort retranche- »ment, & de leur faire tomber u des mains les armes dont ils fe » fervent depuis li long-tems , 8c «qu'ils ont regardées jufqu'ici com- » me invincibles, j'ai donc cru » qu'il falloit traiter ce point à a> fond , & ne rien négliger pour a> développer tout ce qui regarde s> cette matière, puifqu'en leur fai- » fant perdre l'avantage qu'ils pré- »> tendent tirer du Concile de Ri- a» mini , ils demeureront fans force, » n'ayant plus rien qu'ils puiffent a» raifonnablement faire valoir „ a» peut affoiblir l'autorité de l'Egli- *> le Catholique à laquelle ils onc » tant de peine de fe foûmettre. Après ce Préliminaire , qui eft la fuite de plufieurs reflexions que nous paiïbns , l'on entre en matière & l'on examine fix points effentiels, fçavoir i°. Quel étoit l'état del'E- glife immédiatement avant le Con- cile de Rimini. 2*. Si les Conciles de Rimini & de Seleucie ont été lé- gitimement convoqués. 3°.S'ilsonc erré dans la foi. 40. Quel étoit le nombre des Evêques qui les com- pofoient. 5'. Si ce nombre étoit îuperieur à celui des Evêques qui lefidoient dans leurs Sièges. 6°. Si la foi de Nicée a été abandonnée du plus grand nombre des Evêques en 360. & jufques vers le milieu de l'année 361. où moutut l'Empereur Conftance,& où fe termina la per- sécution que ce Prince aveu com- ES SÇAVANS; mencée l'année d'auparavant. Quant au premier point , l'Au- teur réfute d'abord ces paroles du Miniftre Banage : Je dois dire Au- jourd'hui que le nombre prefque total des Evêques , qui ont à leur tête le Chefviftble de l'Eglife , eft la Chai- re de Satan ; &c pour détruire la prétention de ce Miniftre & de ceux qui le fuivent , on remarque d'a- bord qu'il eft certain parl'Hiftoire, que la chute du Pape Libère , ( fup- pofé qu'elle foit vraye ) eft arrivée en 3 57. deux ans avant le Concile de Rimini , qui fut tenu à la fin de 459. & trois ans avant la grande perfecution de Conftance, déclarée en 360. l'année d'après le Concile de Rimini ; puis on montre par un grand nombre de faits, que lorfquc le Pape Libère foufenvit , prefque tous les Evêques du monde foûte- noient la Foi Carholique , & qu'au contraire lorfque les Evêques de Rimini tombèrent , le Pape foûte- noit la foi avec le plus grand nom- bre des Evêques difpeifés dans leurs Sièges ou exilés pour la faine Doc- trine > enfin que pendant que Con- fiance perf'cutoitles Evêques d'O- rient qui étoient dans fon Empire 3 le Pape avec les Occidentaux , & un très-grand nombre d'Evêques d'Orient, tant de l*Empire Romain que des Pays Barbares , étoient for- tement attachés à la foi Nicée, d'où il refaite que du tems des Ariens , la foi Catholique a toujours préva- lu dans le Corps Epifcopal , bien loin que le Pape avec le plus grand nombre des Evêques ait jamais été dans l'erreur. JU I LL Au regard du fécond point, fça- voir fi les Conciles de Rimini & de Scleucie ont été légitiment convo- qués , M. Corgne fe propofe de montrer qu'il n'y eut peut-être ja- mais de Conciles plus irréguliers dans leur Convocation que ceux-là; 8c il dit qu'il traitera, ce point d'au- tant plus volontiers qu'il voit qu'on tte l'a pas fait encore jufqu' ici. Il pofe d'abord quatre règles pour la tenue' légitime des Conci- les : la première , qu'ils foient con- voqués par le Pape, ou de fon con- fentement, & qu'en confequcncc il y préfide par lui ou par fes Lé- gats : la féconde , qu'ils ne foient point affemblés malgré les Evêques Catholiques : la troifiéme , qu'on n'en exclue aucun Evêque Ortho- doxe & non excommunié : la qua- trième , qu'on y convoque les Evê- ques des Parties les plus confidera- bles de l'Eglife , & qu'il s'y en trouve en effet. Ces conditions établies , notre Auteur , qui foûtient qu'elles font fondées fur l'ufage confiant de l'E- glife , déclare qu'on n'en oblerva aucune pour convoquer les Conci- les de Rimini & de Seleucie , i°. Le Pape n'y fut pas même ap- pelle , ce qui fe voit par une Lettre du Pape Libère même aux Orien- taux , dans laquelle il reprefente le Concile de Rimini comme une Ca- bale formée par la faction des Ariens. » Quoique les Ariens, dit- *> /'/ , ces hommes impies & fcéle- » rats, foient venus à bout d'enga- »ger les Evêques d'Occident à «^"affemblei à Rimini pour les en^ » gager par des difeours féduifans , » ou plutôt pour les forcer par l'au- torité de l'Empereur,à retrancher » un terme qui avoit été mis avec «beaucoup de fage fie danslapro- » feffion de foi , ou à le condamner uabfolument, cet artifice n'a de » rien fervi. M. Corgne ajoute à ce témoi- gnage, celui de S. Damafc Succef» feur de Libère, lequel s'explique ainfi : » Le nombre de ceux qui fe «font trouvés à Rimini ne peut » porter aucun préjudice à la bonne » doctrine , parce qu'ils s'y font af- «femblez fans la participation de » l'Evêque de Rome , qu'il falloit » plutôt confulter qu'aucun autre» m fans la participation de Vincent » ( de Capoue ) qui a joui de la di- » gnité Epifcopale durant tant d'an- » nées , & fans celle de plufieurs » autres qui étoient de même fenti- » ment que ceux-ci. Theod. Liv. 2» n-Hifi. Cap. i/i. ancienne Edit. A ces preuves pofitives.en fucce* de une autre , qui , quoique négati- ve, ne paroît pas avoir moins de force , c'eft le filencc des Hiftoriens fur ce point ; ear ils n'en difent pas un mot , quoique d'ailleurs ils ayent grand foin de marquer la part que les Papes ont eue aux Conciles gé- néraux , comme à celui de Nicée ,' d'Ephefe 3 de Calcédoine & autres. Poyr ce qui eft de la féconde con» dition : Qu'un Concile ne doit point être convoqué malgré les Evêques Catholiques fur rout des grands Sièges , M. Corgne fait vok que cette condition n'a point été obfeivée dans leConcile de Rimini, 3«o JOURNAt D & là-dclTus il cite 1°. Le Pape Li- bère, qui dans la Lettre rapportée ci-deflus , fe plaint que ce Concile a été procuré par les intrigues des Ariens ; z°. S. Arhanafequi fait la même plainte dans pluficurs de fes Ouvrages , Se entr'autres dans (a Lettre aux Africains , où il parle en cette forte : » La parole de Dieu »quia été expliquée dans le Con- » cile de Nicée , demeurera à ja- »mais; car fi on veur comparer le » nombre des Evêques qui compo- sèrent ce Concile , à celui des » Evêques qui compoferent ces Sy- »»nodes particuliers, on verra que le «nombre des Evêques du Concile » de Nicée, l'emporte fur eux com- »> me le tout fur fa partie Le m Concile de Nicée a été convoqué » pour de juftes raifons , & les au- »>tres n'ont eu d'autres caufes que »> la haine , la contention 6c la vio- lence. Qui pourroitdonc fouffrir »iceux qui nous vantent le Concile » de Rimini ? Qui ne feroit indigné » contre ceux qui rejettent les De- «crets de Nicée pour s'attacher à » des Décrets que la violence & la "contention onc extorqués aux » Evêques de Rimini. Ne fouffrons m pas qu'on nous en parle davanta- » ge , mais attachons-nous unique- » ment aux Décrets de Nicée. Voilà une peinture de la con- vocation du Concile de Rimini , bien différente de celle qu'en ont faite depuis peu certains Auteurs , & entr'autres celui du témoignage delà vérité;mais afin qu'on ne croye pas que ces paroles de S. Athanafe foienc échappées à ce Saint Docteur ES SÇAVANS; comme en paflant, M. Corgnecice du même Saint, un autre partage qui ne paroît pas moins précis ; il eft tiré du Livre des Synodes: » Quelle raifon , dit ce Père y ont- » ils eue d'affembler tous cesSyno- »des, & quel ufage en peut-on m faire ? Celui de Nicée fuffir. Il a «été convoque pour condamner »> l'Héréiie Arienne Se d'autres Hé- »re(îes : il les a toutes proferires par » fa Doctrine faine &: orthodoxe. » En vain donc veulent-ils perfua- n der qu'ils demandent ces Synodes » pour conferver la foi -, car en » premier lieu l'Ecriture fuflît , Se »s'il eft befoin de Concile pour » expliquer la foi , nous avons les » Actes des Pères de Nicée ; car »> ceux qui s'y font aftemblés n'ont »> pas manqué d'y pourvoir... .C'eft m donc une preuve manifefte , que m leurdefTeinen artemblant mainte- » nant d'autres Conciles, n'eft pas » d'établir la vérité , mais d'abolir » les Décrets de Nicée. Nous panons plufieurs autres re- flexioDS pour venir à la troifiéme regle,qui eft qu'un Concile gênerai n'eft point légitimement aflemblé dès qu'on en exclut les Evêques les plus orthodoxes. Or c'eft , félon la remarque de M. Corgne , ce qui s'eft pratiqué à l'égard des Conciles de Rimini Si de Seleucie ; on en peut voir les preuves dans la Dirter- Utionpag. jz. La quatrième & dernière condi- tion pour rendre valide la convoca- tion d'un Concile, eft que les Evê- ques des parties les plus confidera- bles de l'Eglife y Coient appelles , Se J U ï L L qu'il s'y en trouve en effet \ or c'eft, félon M. Corgne, ce qui n'eft point arrivé dans les Conciles dont il s'a- git , puifque à Rimini il n'y aveit que des Evêques d'Occident, ou que s'il y en avoit quelques - uns d'Oiient , ils étoient fans titre ; & qu'a Seleucie il ne fe trouva que des Evêques d'Orient,excepté S. Hilai- te qui y vint par hazard & fans avoir rien concerté avec les Evê- ques d'Occident. Notre Auteur conclut de -là qu'aucun de ces Conciles n'eft Oe- cuménique. Il obferve de plus qu'en les joignant même enfemble, on ne peut les confiderer comme faifant un Concile Oecuménique , l°.parce que la diftance qu'il y a en- tre Rimini & Seleucie , ne permet pas de fuppofer que deux affcmblées tenues en des Villes fi éloignées puiffentfaire une même affemblée ; 2*. Parce que la diverfité de for- mule ne permet pas non plus de le penfer. M. Corgne s'étend ici au long fur cette diverfité de formule , & fait à cette occafion, plufieurs re- marques importantes que nous fommes obligés de paffer pour mé- nager de la place aux autres articles dont nous avons à parler. Notre Auteur , après avoir mon- tré que les Conciles de Rimini & de Seleucie ne furent pas Oecumé- niques , vient au troifiéme point qu'il s'eft propofé de difeuter , & foûtient après du Peron , le Père Alexandre , M. Nicole , M. Bof- fuet & plufieurs autres Auteurs qu'il feroit trop long de citer ici , ET; 1752; 3$r que ces Conciles n'ont jamais erré dans la foi. Il appuyé fon fentiment fur les trois raifons fui van tes : la première^, que le fens propre & naturel de la formule de Rimini eft Catholique; la féconde , que les Pères du Conci- le, avant que de la figner , voulant faire connoître à tout le monde qu'ils l'entendoient dans le fens Catholique , obligerentdes Evêques Ariens d'anachématifer Arius & fa Doctrine ; la troifiéme , que ces Pères croient fi perfuadés qu'on ne devoit donner qu'un fens Catholi- que à leur formule , qu'auffi-tôt qu'ils fçurent qu'on luiendonnoit un mauvais , ils réclamèrent contre ce procédé. Si je prouve ces trois points , dit notre Auteur, je croirai avoir fufffamment démontré que non feulement les Pères du Concile n'ont pas erré , mais mime que les Fidèles pouvoient facilement connoître que Is Corps Epifcopal était attaché à U faine Dotlrine. Après ces paroles M. Corgne rapporte la formule & fait voir qua dans fon fens littéral & naturel,elle ne contient rien que de Catholique;. Jefus-Chrift y eft appelle Fils uni- que de Dieu , terme qui exclut la filiation adoptive laquelle convient à tous les faints. Il y eft dit engendré de Dieu avant tous les fiécles & avant tout commencement , paroles qui n'expriment pas moins l'éterni- té du Fils de Dieu, que l'expriment ces paroles de l'Evangile de S.Jean-» In principio erat Verbum. Il y efb dit Créateur de toutes chofes ; Dieu de Dieu, ôc ajfis à la droite du Tere, $82 JOURNAL D Il y eft appelle Seigneur & Dieu fimplcment. Or tous ces termes expriment la Divinité de J. C. & ne peuvent avoir d'autre fens naturel. De plu; dans cette formule il n'y a pas un mot qui détruife le Dogme de la Divinité de J. C. M. Corgne confirme tout cela , 1°. Par le fentiment des Evêques d'Italie , qui dans une Lettre aux Evêques d'Illyrie n'apportent d'au- tre raifon pour rejetter le Concile de Rimini , finon que la tergi- verfation de certaines gens en avoit corrompu les Décrets. 20. Par le témoignage du Pape Libère qui mande aux Evêques d'Italie qu'on doit condamner les Auteurs de la prévarication des Pères de Rimini, farce que ces Auteurs ufant d'une tblique & maligne fubtiliti ., ont trompé la bonne foi de ces Evêques qui ont agi innocemment ; ce qui montre que ces profeffions de foi dont on fe fer vit à Rimini pour fé- duire les Catholiques , n'avoient lien de mauvais dans leur propre fens , quoique les Ariens y donnaf- fent un fens hérétique au moyen d'une interprétation oblique & for- cée. 3°- Par les paroles de S. Jérô- me , qui dans fon Dialogue contre les Luciferiens,dit que le fens natu- rel de ces profeffions de foi n'a- voient rien de facrilege. Quitmfu- perficies expojitionis nihil jamfacri- legum preferret j Que les paroles dont elles étoienteompofées paroif- foient être le langage de la. pieté; Que le venin qu'elles cachoient n'é- toit apperçû de perfonne ; Que le ES SÇAVANS; fens Catholique étoit à couvert & que ce fut pour cela que les Evê- ques ne fe foucierent pas de retenir le mot de fubftance ; enfin que par cette profeffion Deum de Deo oa exprimoit parfaitement la foi. La quatrième autorité qu'allègue M. Corgne , eft celle de Sulpice- Sevcre qui en parlant de la formule qu'on fit ligner aux Légats du Con- cile de Rimini Se qui eft la même qui fut après fouferite dans ce Con- cile, la traite de formule qui expri- moit un fens Catholique , mais qui renfermoit une perfidie cachée. A ces témoignages M. Corgne fait fucceder celui des Evêques mê- mes de Rimini,qui , félon S. Jérô- me dans fon Dialogue contre les Luciferiens, fe plaignent que les Evêques Ariens les avoient trom- pés : nous penfions , difoient-ils, que leur langage étoit l'expreffion de leur cœur , & nous ne foupçon- nions pas que dans l'Eglife de Dieu où doit régner la fimplicité Se la bonne foi , il fe pût trouver des gens capables de parler d'une ma- nière & de penfer de l'autre. Notre Auteur conclut de tous ces témoignages , que la formule de Rimini, prife en elle-même , paf- foit pour Catholique , & qu'elle ne fut regardée comme mauvaife que par rapport au mauvais fens que les Ariens y donnoient malignement & contre la véritable lignification des paroles. Il eft vrai que cette formule re- jette le mot de confubftantiel , ainfî qu'on le voit dans ces paroles : Quant au nom de fubftance dont les Fera JUILL Feres fe font fervis par /implicite , & qui n'ayant point été entendu par le peuple a été un Jujet de chute a plu- sieurs , nous avons jugé à propos de le rejetter , parce qu'il ne fe trouve point dans la Sainte Ecriture , & que ja- mais elle n'a parlé de la fubftance du Père t ni du Fils ; nous difons que le F ils efl femblable au Père, comme la Sainte Ecriture le dit & l'enfeiane. Là-deffijs notre Auteur remarque que la formule rejettant le mot de confubftantiel , on pourra objecler qu'elle eft hérétique , parce qu'on prétendra que l'omiffion de ce mot étoit alors une marque diftindive pour connoître l'héréfie des Ariens, comme l'ufage du .même mot étoit la marque de la Catholicité ', mais il répond à cette difficulté,en mon- trant i°. que le mot de confubftan- tiel n'eft pas abfolumenr une mar- que de Catholicité : 2°. Que chez les Ariens mêmes, on pafloir pour Catholique fans fe fervir de ce mot : i°. Que quand le mot de confubftantiel feroit devenu alors necefiaire pour exprimer la foi , cependant eu égard aux précautions que les Percs de Rimini prirent pour empêcher que l'omiffion de ce mot tirât à confequence , on ne peut les aceufer d'être tombés dans l'erreur , ou d'avoir fouferit à une formule hérétique. Mais comment prouver que le mot de confubftantiel n'étoit pas ne- ceflaire pour exprimer le Dogme Catholique ? Notre Auteur ne pa- roît pas embarrafle là-detTus : Il re- marque qu'avant le Concile de Nicce on ne fe fervoit point de ce Juillet. E T , i 7 j 2. 38;. mot , & que même , aînfi que le rapporte S. Athanafe & S. Hilaire, il tut rejette dans un Concile d'An- tioche tenu contre Paul de Samofa- te. La difficulté fe réduit donc à fçavoir fi au teins du Concile de Rimini , le mot de confubftantiel étoit necelTaire pour exprimer le Dogme Catholique, enforte qu'on ne pût pafïer pourorthodoxe,qu*en l'admettant , & s'il n'a pour l'acquifition de ces lumières , d'autre fecours , que ce- lui de fa propre expérience , il lui en coûtera bien des meprifes , & fouvent la vie à fes malades, avant Dddij 3$6 JOURNAL D qu'il fc foi: mis en ctat de prati- quer plus furement fa profeilion. Le moyen le plus coûte pour y par- venir efl certainement l'étude des Traitez particuliers touchant l'Hi- ftoire Naturelle de chaque Provin- ce , Se même de chaque Ville. Mais ces Traitez font en fi petit nombre qu'ils ne peuvent encore foulager que très - foiblement les befoins delà Medecineence genre. Si l'on n'a pas travaillé jufqu'ici plus efficacement Si plus affidu- ment à y remédier , ce n'eft point faute d'exhortations de la part des plus grands Médecins , tant anciens que modernes , qui ont tous recon- nu la neceffité preffante de fournir fur cette matière les éclairciffemens & les détails les pluscirconftanciez. Hippocrate,dans fonLivre deA'èri- bits, Aqun &Locis} en a donné un excellent modèle qu'on ne fauroit trop confulter. C'eft conformément à des vues fi utiles , que quelques Médecins des derniers fiécles fe font appli- qués à faire de curieufes recherches fur l'Hiftoirc Naturelle Si fur 11 Médecine de certains Pays , Si nous ont fait part de leurs découvertes fur ces deux articles. L'Auteur de cet Ouvrage , dans fa préface a en fait palier plufieurs en revue , qui fe font fignalés dans cette forte d'ér rudition Phylïque & Médicinale. De ce nombre font Profper Alpin } dans fa Médecine des Egyptiens ; Jacques Bontius } dans celle des In- diens; Guillaume Pif on , dans cel- le du Brefil ; André Ùeyertc Guil- laume T»barie, ou des Italiens , chez qui à «peine en trouvera-t on un lur cent n qui fâche le Grec ou le Latin Se » qui ait du goût pour les Lettres j » ou des Allemands Se des Polo- «nois, dont la plupart pofledent «parfaitement l'une Se l'autre Lan- » gue,5ccherilTent tellement la Lit- m terature Se les beaux Arts , qu'ils )>y donnent la meilleure partie de » leur tems i Peut-être [ ajoûte-t-il] 30 ont -ils été barbares autrefois j » mais je crains fort que cette bar- » barie n'ait paiTé d'eux à nous , 5i »j que réciproquement la politelïe , »la magnificence , l'érudition Se » l'humanité n'ayent fait choix de » leur Pays pour s'y retirer. « Eraf- me en avoit porté prefque le même jugement. L'Auteur convaincu de cette vérité par lui-même , a donc choiii la Ville de Warfovie pour l'objet principal de fes Obfervations Phyfiques & Médicinales , & il la regarde comme un féjourqui méri- te d'autant mieux l'attention des Médecins , que cette Capitale ne le cède pour la falubricé ni pour tou- tes les commoditez de la vie à nul- le autre Ville de Pologne. Il cft per- fuadé que (i les Portugais font bien fondés à dire vulgairement que (i Dieu aime quelqu'un parmi eux il lui procure une habitation dans Lisbonne ; on peut aflurer de mê- me que h Dieu aime un Polonois, S SÇAVANS; il lui accorde un domicile dans Warfovie. M. Erndtcl cfpere que fon Ouvrage en fournilTant des lu- mières fur diticrens chefs aux Mé- decins qui voudront fe fixer dans cette Capitale, leur fervira de guide dans l'exercice de leur prof-llion Se les empêchera de prendre le change cV de s'égarer. Il partage fon Traité en fix Cha- pitres- Il expofe dans le premier ce qui concerne la fituation de Warfo- vie & fes principaux Edifices : il parle de l'air dans le fécond , Se y traite conjointement de ce qui re- garde le Terroir, dont les vapeurs & les exhalaifcJns remplifTant l'air, influent beaucoup dans les effets bons ou mauvaisqu'il peut produi- re •, enforte que ces deux points doi- vent être difeutés conjointement ,' Se ne pourraient l'être féparément fans jetter l'Auteur dans des répéti- tions ennuyeufes : il eft queftion des Eaux dans le troifiéme Chapi- tre : le quatrième roule furleshabi- tans , dont on examine le genre de vie , la complection Se les mœurs : leurs maladies font le fujet du cin- quième, Se l'on informe le Mede- decin dans le fixiémede la métho- de de traiter les malades. Tout cela efl: fuivi d'un Catalogue des Plan- tes qui croilfcnt aux environs de la. Ville ; Se qu'on appelle ici , en ter- mes de Botanifie , le Perger ou Le Jardin de Warfovie. L'Auteur n'eft point aflTcz vain pour fe flatter de remplir parfaite- ment l'attente du public , fur tous ces articles. Il compte tort fur l'in- dulgence de fes Lecteurs , qui vou- J U î L L dront bien confiderer qu'il n'a compofé cet Ouvrage pour ainfi dire qu'à fes heures perdues , fans le fecours d'aucune Bibliotheque,8c fur fes propres Obfervations^qu'il a rangées dans le meilleur ordre qu'il lui a été pofîîble ; en un mot , qu'il eft le premier qui ait rompu la gla- ce fur cette matière & qu'il n'a été guidé par perfonne. On trouvera , parmi les iingularitez de ce Traité, une nouvelle Théorie de fa façon touchant la maladie nommée Plica) &c il eftime que cette Théorie qui lui paroît plus vraifembhble que toutes celles qu'on a mifes au jour fur ce point , ne fera pas indigne de l'approbation des Juges équitables , & pourra même être perfectionnée dans la fuite par de nouvelles re- cherches & de nouvelles expérien- ces. Après cet extrait de la Préface venons au corps de l'Ouvrage , &c donnons une idée plus étendue des fix Chapitres qui le compofent. Chap. I. L'origine de Warfo- viene va point fe perdre dans l'an- tiquité la plus reculée. Tous les Hi- storiens conviennent qu'elle fut fondée vers l'an de J. C. î i6j. par Conrad Duc de Mafovie , à vingt milles de diftance de Czerzk , lieu de l'ancienne refidence de cesDucs, lequel eft aujourd'hui prefque rui- né. Warfovie fe trouve dans une fituation fi avantageufe , que l'Au- teur ne fait nulle difficulté de lui appliquer ce que Tite-Live dit de celle de Rome , placée dans une campagne trh-falubre, à portée d'une Rivière également favorable an commerce de terre & de mer , an ■mï- E T , 1732. 589 lieu de plufieurs Contrées & dans un endroit fait expris pour l'accroifîe- rnent d'une Ville. Mais quand M. Erndrel nous allure que Warfovie occupe comme le milieu de la Po- logne 5c de la Lithuanie prifes en- femb'e ( car c'eft apparemment ce que figninent ces mots , in média Polonid, pariter ac Lithuanix/ita,) il n'a pas fans doute bien confulté la Carte. Ce fut l'avantage d'une telle fituation qui détermina le Roi Sigiimond-Augufte achoifir cette Ville pour la tenue des Diètes gé- nérales de la Nation Oc pour y éta- blir fa Cour, ce que fes Succeffeurs ont conftamment fuivi depuis près de 160 ans. "Warfovie eft entre le 51e & le 53e degré d'élévation du Pôle , Si parconfequent à la même latitude que Breflaw , Francfort fur l'Oder, Minden en Weftphalie, & Anvers» Sa longitude eft entre le 44e &le 45e degré, Se fon méridien eft le même que celui de Konigsberg en Pruffe , de Cafchau , d'Eperies, de Bude , de Varadin , de Belgrade & de Ragufe. A l'égard de la déclinai- fon de l'aiguille aimantée horizon- tale , après quelques raifonnemens furies variations de cette déclinai- fon , l'Auteur conclut qu'il eft fort douteux que de-là on puiffe tirer quelque fecours pour déterminer furement les longitudes. Warfovie eft conftruite dans une plaine qui s'étend de tous cotez à perte de vue., Se qui n'eft traverfée d'aucun ma- rais, d'aucun Etang , d'aucun Lac, d'aucune Caverne , d'où puifTenç. s'élever des exhalaifons malignes. 3S>o JOURNALD Ses environs n'oftrcnt aux yeux que des campagnes fertiles en bleds & en pâturages de toute cfpccc , d'agréables Jardins , de claires fon- taines , 6v la Villule qui borne la •Ville du côte de l'Orient. Au midi, où le terrain s'élève un peu c\: forme quelques éminenecs , elle a une for- te Citadelle &c une promenade pu- blique très-fréquentée dans la belle Saifon , pour ne rien dire des Bains magnifiques i'Vjaz.do'W bâtis par le grand Maréchal Staniflas-Lubo- mirski & confiderablement aug- mentés & décorés parle Roi Augu- fte. Vers le Nord eft une Solitude ou un Couvent de Camaldules , que le voifinage de la rivière & 5 JOURNAL DES SÇAVANS. Nous voudrions des avis donnés On ne les examine que pour y trour par l'amitié , & on ne nous en don- ne que par vanité , pour s'approprier une part aux f accès de nos Ouvrages; Nous voudrions qu'on nous gardât le fecret ; mais en y manquant ; que font ces indifercts , ils publient leurfoibleffe Se notre docilité , leur orgueil , Se notre modsftie ? Ils ap- prennent au public que nous fça- vonségalement Se convenir de nos fautes & les réparer. Ils n'ont parlé à nous Se aux autres que pour leur gloire, Si c'eftla nôtre qu'ils pro- curent de toutes façons. Mais la docilité a fes bornes, jugeons nos propres Juges, dit M. Coypel , ne nous rendons qu'à des raifons claires Se folides. Il eft ce- pendant , félon lui , telle autorité qui vaut des raifons , il eft tel avis auquel il faut fe foûmettrc avant même que d'en être éclairé. La lu- mière fera la fuite Se le fruit de la foûmiffion. On veut des raifons dans ceux qui critiquent , que n'en veut-on de même dans ceux qui louent ? que ne leur demande-t-on le pourquoi de leur approbation ? On craint qu'ils n'ayent rien de bon à nous dire. On craint de les faire entrer eux-mêmes en doute fur la vérité de leurs louanges. Il eft plus fur de ne point trop approfondir. Quelle foibleffe ! C'eft prendre en quelque forte des avis que de confulter les Ou- vrages des habiles gens qui nous ont précédés , Se de ceux avec qui nous vivons. Mais ceux-ci d'ordi- naire n'excitent que notre jaloufie. ver des défauts. On cherche a en rabaifferlesbcautez. Nous difons à la vue de ces Ouvrages , voilà des défauts que j*aurois évité ; nous di- fons encore quelquefois , ce Pein- tre réullit dans telle partie ; mais nous ne manquons pas en même tems de donner la prééminence aux parties que nous croyons poffeder mieux que lui , Se la conclufion de tous ces jugemens que nous n'avons pas la prudence de tenir feercts , eft qu'à tout prendre nous avons quel- que fuperiorité fur lui. De-là ces critiques malignes dégrafées fous l'apparence d'éloges. Détrompons' nous , le mal que nous difons les uni des autres ne peut produire qu'un fâ- cheux effet dans le monde Le 'Public attentif h tous ces ai f cours les retient ; éh ! que pouvons-nous efpe- rer t s'il conclut que de part & d'au- tre on a raifon ? M. Coypel cite enfuite dans Meffieurs deTroy , Rigaut &: de Largilierc un bel exemple de cette union fi defirable & fi rare qui de- vroit fe trouver entre les rivaux dans les Sciences Se dans les beaux Arts. Non feulement l'idée de ne point fonffrir d'égal eft la fourec de beau- coup cTinjufticcs ; mais elle eft pref- que toujours la borne de nos pro- grès ; on eft rongé de chagrins , dé- voré d'inquiétudes , fituation peu favorable à un travail heureux. M. Coypel ne prétend pas ce- pendant qu'on doive fe contenter d'une obfcure médiocrité. Il eft i dk-il3 une première cl.iffe "a laquelle il faut mériter d'être admis en renon- JUILL ter à tout , mais plu/ieurs peuvent y trouver place . Il revient enfuite à l'étude des Ouvrages des autres , en marque les utilitez Se répond à quelques ob- jections. Un point très-important fur les avis , c'eft de n'atrendre pas à en demander que notre Ouvrage foit trop avancé. Dans ce cas on n'aura pas la force de nous parler fincere- ment. Ce feroit quelquefois nous obliger à rout recommencer. D'ail- leurs des chofes mal penfées , & que nos amis ne nous auroient pas laiffé introduire dans une grande compop- tion , brillent far une heureuje exé- cution qui les fèduit eux-mêmes , & nt leur permet pas de nous demander le faerifice d'une partie qui quoique belle y rend fouvent la totalité rïdi- tule. M. Coypel finit par le danger où nous expolent les loiianges exagé- rées de nos amis ; il fe cite lui-mê- me pour exemple. Il y a dans tout ce morceau un air de vertu & de parfaite modeftie qui fait du moins autant de plaifir que les plus beaux traits d'efprit. Venons maintenant au fécond Difcours ou plutôt au Dialogue fur la connoiflance de la Peinture. L'Auteur nous apprend qu'il le eompofa pour M. le Duc d'Orléans qui lui avoit ordonné de l'entretenir quelquefois fur la connoiflance de la Peinture. Il lui a donné la forme de Dialogue , afin : dir-il , d'y jet- îer plus de vivacité. »Il y fuppofe un véritable Con- ?> noifleur, en converfation avec un E T ; î 7 5 2; 5$7 » homme d'efprit qui n'ayant ja- « mais eu de principes fur la Pein- » ture n'ofe s'en rapporter à fes » yeux j ou pour dire plus , n'ofe » céder au plaifir qu'il reflent en » voyant des Tableaux dans la » crainte de n'être pas fatisfait fer » Ion les règles. M. Coypel prouve donc que pour voir desTableaux avec plaifir, il n'eft pas abfolument necefïaire d'avoir étudié les principes de la Peinture , comme pour lire des vers , pour entendre un concert avec plaifir , il n'eft pas neceflaire de fçavoir faire des vers , de fça- voir la Mufique. Quantité de pré- tendus Connoifieurs n'ont étudié que les manières des Peintres, fans s'appliquer à connoître leurs beau- tez. Ils ne vont pas même chercher les preuves de l'originalité d'un Ta- bleau dans les grandes parties ; c'eft fouvent un petit coin de ce Tableau , la touche d'une plante, d'un nuage ou te derrière de la toile qui les détermine. Dailleurs , ces gens-là n'ignorent aucun terme de l'art. C'eft par là fur tout qu'ils impofent , moins on les entend plus on les admire. Ces difeurs de grands mots font desEléves. Le premier préjugé fur lequel ils erabliflent les autres, c'eft que les Peintres font ceux qui fe connoi fient le moins en Tableaux. L'Elève eft bien-tôt perfuadé qu';/ peut en toute fureté méprifer tous les Tableaux peints fur des toiles neuves & admirer ceux qui menacent mine. » Combien de gens 3 s'écrie l'Au- » teur , fi j'ofe , dit-il , hazarder w cette exprelllon , combien d# 3j>8 JOURNAL D » gens qui ne connoilTenc que le » caractère d'écriture des grands » Peintres , & qui n'ont jamais lai » réfléchir fur la beauté de leur » ftile ! M. Coypel fuppofe enfuite un vrai ôv un prétendu Connoilîcur devant un ancien Tableau , & les fait parler l'un Se l'autre chacun dans leur caractère. Mais ce mor- ceau qui eft écrit avec beaucoup de vivacité n'eft pas fufceptiblc d'Ex- trait. On explique enfuite jufqu'à quel point un homme d'efprit peut rai— fonner fur la compodtion d'un Tableau , fur les groupes , fur les contraftes , fur le deffein , &c. On pofe pour principe que l'action ne peut être parfaitement rendue qu'autant que ces parties s'y trou- vent. Or un homme d'efprit peut juger fi le fujet qu'on lui annonce cft rendu avec vérité. En un mot la Peinture cft l'imitation du vrai. Voilà la règle à laquelle il faut tout rapporter , 6c elle cft infaillible. A l 'égard de la connoifi.ince des maniè- res cefl par ■où l'en doit finir ; la grande affaire eji de fe connaître en beautez. 11 ne nous refte plus qu'à offrir aux Lecteurs quelque endroit par lequel ils puiffenr juger du ftile de M. Coypel. C'eft ainfi que dans le Dialogue , fao^e Zj. il parle de ces gens qui veulent fe donner un air de capacité en blâmant les Ouvra- ges des modernes. h i r ' ' wLoiiqu une nouveauté paroit , ES SÇAVANS, «nous aimons mieux en entendre » dire du nul que du bien. Je » ne fçai pourquoi ; mais il tauten- » core L'avouer à notre honte, nous » fentons une fecrette iv déteftablc » joye à déprimer un homme qui a » fait fes efforts pour nous plaire ; »&vùccrte malheureûfe inclina- wtion , il devient bien plus difficile » d'approuver un Ouvrage que de » le blâmer. Dites qu'il ne vaut «rien , l'on vous croit, fans qu'il » foit befoin de vous expliquer da- »vantagej mais fi vous en parlez » avec éloge [ au cas qu'on veuille »bien ne pas vous traiter d'imbéci- »le ] on vous demande au moins m raifondc votre approbation. C'eft » alors qu'il faut véritablement s'y » connoître pour prouver fa capa- « cité. Et peut-être même faut-il n plus de goût & d'efprit pour bien » fentir les grandes beautez , que » pour découvrir les défauts. D'ail- j> leurs, que rifquons-nous en Ma- li niant î Si l'Ouvrage eft bon 5c » reconnu pour tel dans la fuite, «nous donnons à penfer en le re- » gardant avec froideur que nous » avons une idée du beau bien fupé- ■>■> rieure à celle qu'en a le vulgaire. » Mais qu.ind par malheur fa criri- »quc l'emporte fur nos applaudif- » femens , nous courons rifque de » paffer pour un efprit borné. Al'é- » s^ard des productions des anciens, n on ne peut que le taire honneur » en les louant, parce qu'enfin la » Poitcrité les aconfacrez. *P§§5* LETTRES J U I L L E T , r 73 2. 399 LETTRES EDIFIANTES ET CURIEUSES, ECRITES DES Mijfions étrangères par quelques Actionnaires de la Compagnie de Je fus. Vingtième Recueil. A Paris, chez Nicolas le Clerc , Libraire Juré de l'Univerfité , rue de la vieille Bouderie, près le Ponc S. Michel , à S. Lambert; Se chez P.G. le Mercier fils, rué' S. Jacques, près la Fon- taine S. Severin, à S. Hilaire. 173 1. in-11. pp. 449. fans l'Epître aux Jefuites de France du P. Duhalde. NOUS avons rendu compte dans le Journal du- mois d'Avril dernier de quatre Let- tres écrites de la Chine au P. Du- halde par des Millionnaires Jefuites. Nous allons donner un précis dans cet article de fix Lettres écrites par des Jefuites Millionnaires de l'A- mérique. La première eft dattée de la nou- velle Orléans , le 12. Juillet 1730. le P. le Petit y parle des mœurs y des coutumes Se de la Religion des Sauvages de la Louifiane nommés Natchez , & de la manière dont ces Sauvages égorgèrent les Fran- çois de la Colonie établie dans leur Contrée. Cette Nation de Sauvages habite, fuivantle P. le Petit, un des plus beaux climats de l'Univers. Ce font les feuls de ce Continent qui paroif- fent avoir un culte réglé. Ils ont un Temple qui reffemble à un Four de pierre qui auroic cent pieds de cir- conférence. La porte en eft fort baffe Se peu large i la voûte de l'E- difice eft couverte de nattes. Par deffus font trois figures d'Aigles de bois peintes en rouge , en jaune Se en blanc. Autour du Temple règne une enceinte de paliffades , fur la- quelle ils expofent les crânes des Juillet. têtes que leurs Guerriers ont rap- portées des combats. Dans l'inté- rieur du Temple il y a des Tabler»' tes, où l'on a placé des pjnieisde canne qui contiennent les ollcinens de leurs anciens Chefs , Se à côté ceux des Victimes qui fe font fait étrangler pour fuivre leurs Maîtres à l'autre monde. Sur d'autres Ta- blettes font des corbeilles peintes , où fe confervent leurs Idoles. Ce font des figures d'hommes Se de femmes faites de pierre Se de terre cuite , des têtes Se des queues de Serpens extraordinaires , des Hi- boux empaillés , des morceaux de criftaux , & des mâchoires de grands poiffons. Les Gardiens du Temple y entretiennent un feu per- pétuel , Se ils doivent empêchée que ce feu ne flamme. L'entrée du Temple eft défendu aux hommes du menu peuple, même lorfqu'ils portent à manger aux mannes de leurs parens; de toutes les femmes il n'y a que les fœurs du Chef qui ayent la liberté d'y entrer. Le Soleil eft le principal objet du culte de ce peuple. Leur Grand Chef prend le titre de frère du So- leil. Tous les matins il honore de fa prefence le lever de fon frère aîné, il le falue par des hurlemens , il lut Fff 400 JOURNAL D fait une offrande des trois premie- «es gorgées qu'il tire de fon Calu- met , & il lui enfeigne la route qu'il doit tenir dans fa courfe. Ces Nat- chez croient l'immortalité de l'a- me. Ils font perluadés que ceux qui auront fuivi leurs Loi x feront dans un lieu de délices , où ils vi- vront au milieu des feftins , des danfes Se des femmes , Se que ceux qui n'auront pas obfervé leurs Loix feront jettes fur des terres couvertes d'eau , où ils feront expofés tous nuds aux morfuresdes Maringoins, où ils ne fe nourriront que de chair de Crocodiles fie de mauvais poif- fons , Se où ils auront des guerres continuelles. Le Grand Chef a un empire ab^ folu , non feulement fur les biens , mais encore fur la vie de tous fes Sujets. Aucun d'eux n'oferoit lui refufer fa tête lorfqu'il la demande. Ils font obligés de travailler à tout ce qu'il leur ordonne fans en exiger aucun falaire. Ils n'entrent dans fa Cabanne , qui eft de même con- ftru» prefque aullî long Se aulli fin que » la laine. Sa queue eft très-courte , » Se fon mufcaureiîemblc parfaitc- » ment au vifage d'un homme qui » auroit la têteenveloppéed'unca- » puche bien étroit. Celui que nous » vîmes , dit le P. Fauques , n'étoic » guéres plus gros qu'un chat. Si n nos Indiens ne l'euffent pas » trouvé trop maigre , ils s'en fe- » roient régalés. « Le nom qu'on a donné à cet animal convient bien à fon indolence Se à fon inaction ; car le P. Fauques ne croit pas que cet animal pue faire cent pas en un jour dans le plus beau chemin. La Lettre fuivante du P. Labit , nouveau Millionnaire , roule , comme une partie de celles du P, JUILL Lombard & du P. Fauques , fur la difficulté de convertir les Sauvages dont on découvre tous les jours des habitations. Le P.Labit croitque le meilleur moyen qu'on puiffe em- ployer eft de les engager à s'établir dans des habitations d'Indiens Sau- vages convertis , comme eft la nouvelle peuplade du Kourou , dont les habitans ont, fuivant ce que le P. Labit rapporte, beaucoup de Religion 5c de ferveur. Venons à la cinquième Lettre qui eft du P. Margat , écrite de Notre- Dame de la Petite-Anfe à S. Do- mingue. Ce qui y a donné lieu eft Fcxtrait que le P. Margat a vu dans les Mémoires de Trévoux du mois de Juin 1729. d'une Diftertation de M. Fontanini fur la Pentade.Ce fçavant Prélat diftingue la Pentade de laMéléagride dontVarron a parlé comme d'un excellent manger. Ce Jefuite qui demeure en un Pays où il y a beaucoup de Pentades, foû- tient au contraire que la Pentade eft la même chofe que la Méléagride , & que tout ce que les anciens difent de la Méléagride convient à la Pen- tade. Cette dernière eft comme la Méléagride une efpece de Poule plus grofle que les Poules commu- nes : fon plumage eft tout mouche- té. Les unesont des taches noires &£ blanches difpofées en forme de rombade , d'autres font d'un gris plus cendré. Les unes & les autres font blanches fous le ventre 5c au boutdes aîles» Leurdosens'élevant fait une efpece de boffe qui n'eu formé que par le replis des aîles , leur queue eft courte & recourbée E T , 175s. 4oj en bas. Tout ceci convient à la Mé- léagride décrite par les anciens : mais pour faire connoître plus par- faitement la Pentade , l'Auteur de la Lettre remarque plufieurs autres chofes qui méritent que les Natura- liftes fe donnent la peine de lire cette Lettre entière. La dernière Lettre de ce Volu- me eft une Lettre du même P. Mar- gat, où il dit que le nom de Negres- Marons qu'on donne aux Efclaves fugitifs vient de YEÇpzgnolSimann^ qui veut dire Singe. Il ajoute qu'on leur a donné ce nom parce que ces Nègres fc retirent dans les bois comme les Singes ,, & qu'ils n'en fortent que pour faire leurs provi- sions dans les habitations voifincï. La proposition faite par unEcclefïa- ftique de donner des Millionnaires aux Négres-Marons lui paroi: auffî extraordinaire que feroit celle de donner en France des Curez aux Voleurs de grands chemins. Dans la fuite de cette Lettre l'Auteur répond à la queftion , pourquoi il n'y a plus d'anciens habitans de Saint Domingue. Pour la re- foudre , il reprend l'Hiftoire de S. Domingue , depuis que. ce Pays a été découvert par les Efpa- gnols , & il fait voir que c'eft la cruauté des Efpagnols qui a fait^pc- rir les anciens habitans de ce Pays- là , les uns dans le* guerres , les au- tres de defefpoir de fe voir réduits dans la plus rude des férvitudes. Le Père Margat rapporte enfuice les Difcours que le fameux las Cœ~ fas< fit dans ls Confdl d'Efpa- gne en faveur des Indiens de Saine: 4o4 JOURNAt DES SÇAVANS; Dominguc , pour qu'on les trairâc ont réunis en un grand nombre de avecdouccur, &lesrcponfcs à ces peuplades dans le Paraguay.Par cette Difcours par l'Evêque de Darien , attention , dit-il , leurs Majeftcz qui avoiiant les faits avancés par Us Catholiques fe font procuré une Cafas , foûtenoit qu'on devoit en multitude prefque infinie de nou- agir avec les anciens habitans de veaux Sujets dont les Tributs aug- S. Domingue 3 comme on avoit fait mentent lcsT réfors de la Couronne, iufqu'alors. Se dont l'innocence , le délînteref- Le P. Duhalde conclut de cette fement & la pieté retracent de nos partie de la Lettre du P. Margat, jours une vive image de la ferveur que ce qui s'eft paffé par rapport du Chriftiamfme en fa naillance. aux anciens habitans de S. Domin- Le P. Duhalde ne développe point gue fait fentir la fageffe des précau- davantage la reflexion. Nous fui- tions que les Rois d'Efpagne ont vrons fon exemple , & nous laiffe- prife depuis plus d'un lîécle , de n'a- rons aux Le&eurs qui font au taiti voir aucun commerce avec les In- en tirer les confequenecs. diens3que les Millionnaires Jefuites VITA ET RES G ESTiE SU LT ANI , ALMALICHI Alnafiri , Saladini , Abi Modaffiri Jofephi F. Jobi , F. Sjadfi. Audore Bohadino F. Sjeddadi. Necnon excerpta ex Hiftoria univerfali Abulfe- da: , eafdem res geftas , reliquamque Hiftoriam temporis , compen- diofe exhibentia. Itemque fpecimen ex Hiltoria majore Saladini gran- diorecothurnoconferipta abAmadoddino Ifpahanenfi. Arab. & Latin. ex Manufcriptis Arabicis Academix Lugduno-Batavœ edidit ac Latine vertic Albertus Schultens. Accedit Index Commentariufque Geogra- phicus ex Mff. ejufdem Bibliothecae contextus. Lugduni- Batavotum. Apud Samuëlem Luchtmans , AcademixTypographum. i732.C'eft- à-dire : La Vie de Saladin , écrite par Bohadin fils de Scheddad ; avec des Extraits concernant la même matière , tirés de l'Hijieire Univerfellt d' Abulfeda ; & un échantillon d'une Hifioire de Saladin plus étendue t écrite par Amaâoddin d'Ifpahan : le tout tra'duit en Latin fur les Affi. Arabes de la Bibliothèque ae Leyde , par Albert Schultens. On y a joint une Ttible & un Commentaire Géographique , tirés des Affî. de la même Bibliothèque. A Leyde, chez Samuel Luchtmans. 1732. in-fol. pp.278. pour la Vie : pp. 64. pour les Extraits : pp. 16. pour l'Echantillon. Sans compter la Table de 22. feuilles , & la Préface de 14. pag. NOUS avons fait connoltre , me , & dont le plus confiderableeil dans notre premier Extrait , celui de Bohadin. Il ne nous refte les Auteurs des trois Morceaux Hi- plus qu'à indiquer fommairement {toriques , qui compofent ce Volu- aux Lecteurs les principaux évenc- J U I L L mens racontés dans cette Hiffoire , & qui font ceux de la Vie du Sultan Saladin. L'Auteur , après un début des plus devons, tels que le font pref- que toujours ceux des Ecrivains Mahométans , déclare d'abord que les grandes actions de Saladin, dont il a été le témoin oculaire , lui ont fendu croyables les faits les plus fur- rrenansdesHéros de l'antiquité^que on regarde pour l'ordinaire com- me fabuleux. Il ne donne cette Hi- ftoire que comme un abrégé ; &c il a raifon à certains égards , puifque , félon que nous l'avons déjà obfervé, il parte très-legérement fur les au- tres exploits du Sultan , êc n'expofe avec étendue que ceux qui ont (1- gnalé les dernières années de ce Prince. Il divife en deux parties fa narration. Dans la première il parle delà naiffance, de l'éducation , des qualitez naturelles Se des mœurs de Saladin. Dans la féconde , il nous le fait voir courant prefque perpé- tuellement de victoire en vi&oire ', malgré les viciffitudes delà fortune, & il le fuit avec toute l'exactitude d'un Hiftorien qui s'affujetit à l'or- dre destems. I. Saladin naquit l'an de l'Hégi- re 531. (ou de J.C. u 37.) àTé- crit Fortereffe de Méfopotamie , & dont fon père Job fils de Schadfi, originaire de Dawin,Ville d'Armé- nie , voifine de Téflis , avoit le gouvernement. Job fon père ayant abandonné Técrit , vint avec fon frère Afedoddin-Schirkouhé s'éta- blir à Moful , où ils remplirent îous deux les premières Dignitez > E T , 173*. 40; fous la prote&ion de l'Atabek ou Sultan Zenchi , que nos Hiitoriens Occidentaux appellent Sanguin. Job quelque tems après tranfporta fa famille à Balbec Ville Syrie,dont on le fit Gouverneur \ &i fon fils Saladin y reçut l'éducation la plus noble , & y fit paroîcre les plus fa- vorables difpofitions aux grandes vertus politiques & militaires. Le Sultan Noradin fils & Succeffeur de Zenchi en conçut une idée fi avan? tageufe , qu'il le mit bien-tôt au nombre de fes amis les plus intimes, & qui méritoient toute la confiance du Prince. L'Auteur interrompt ici fa narra- tion , pour faire une revue détaillée des excellentes qualitez de fon Hé- ros. Il nous peint donc la pieté de Saladin , fajuftice, fa libéralité , fa valeur , fon zélé pour la Guerre Sainte , fa patience , fa confiance en Dieu , fa clémence , fon huma- nité & fa politeffe : alléguant plu- fieurs exemples éclatans de chacune de ces vertus. Saladin étoit rigide obfervateur des cinq articles de la Religion Mahométane , qui font la créance d'un feul Dieu , la pratique de la prière aux heures marquées , l'aumône , le jeûne du Ramadan & le pèlerinage de la Méque. Il étoit fi régulier à la prière qu'il ne l'bmet- toit pas , quoique malade , & qu'en voyageant , lorfque l'heure de cet exercice arrivoit , il defeendoit de cheval pour s'en acquiter , faifant même des prières de furrerogatiou la nuit , lorfqu'il s eveilloit. Quoi- qu'il fût d'une complexion à foûte-- nir difficilement le jeûne , il ne 4oS JOURNAL D manqua que deux fois en fa vie à celui du Ramadan ; Se ce fut à l'occafion de quelques maladies : ce qui ne l'empêcha pas de réparer ces omiiîîons l'année même qu'il mou- rut, Se cela contre l'avis des Méde- cins. La mort le prévint avant qu'il vût exécuter fon pèlerinage de la vfe8««e , pour lequel il avoit don- né tous les ordres neccflaires. La leclurcdel'Alcoran faifoit fes plus chères délices ; il en étoit touché au point de répandre des larmes. Il le lifoit fouvent lui-même ou fe le faifoit lire Se expliquer par des Docteurs Mufulmans , dont il écoutoit les traditions avec plaifir , & il fe montrait inexorable à tous ceux qui manquoienc de refpect pour la Religion. Ses aumônes Se fes autres libera- litez furent fi excelfives qu'à peine les richeffes immenfes qui lui paiTe- ■rent par les mains purent-elles y fuftire ; enforte qu'il ne lai (Ta en mourant à fes héritiers ni maifon , ni fonds de terre , ni Jardin , ni Métairie, ni champ, ni aucune autre efpecc de bien , & qu'on ne lui trouva dans fon trefor pour tou- te monnoye que 47 pièces d'argent Se une feule pièce d'or. Il donnoit des Villes, des Contrées, des Pro- vinces entières ; Se s'étant rendu maître de la Ville d'Amida , il en fit prefent à Kara fils dArflan , qui la lui avoit demandée. Après la pri- fe de Jcrufalcm , fe voyant envi- ronné d'AmbafTadeurs qui lui ve- ndent de rous cotez , & fon trefor ■étant épuifé par fes largcfles précé- dentes , il fit vendre tous fes ES SÇAVANS, joyaux Si en diftribuale prix à tous ces MiniuTcs étrangers. Son Hifto- rien allure lui avoir oui dire que lui[Saladin] connoiffoit un hom- me qui regardoit du même œil le» richefles & la boue ; Se cet homme étoit lui - même. Lorfqu'il étoit campé dans la Plaine d'Acre , on ftipputa le nombre des Chevaux de fon Ecurie , dont il avoit gratifié fes Officiers & fes Soldats ; Se ce nombre fe montoit à dix mille. En un mot , Saladin ne pouvoit fe re- foudre à refufer -, Se l'imper tunité des demandes n'étoit pas capable de fufpendre chez lui la facilité Se l'agrément avec lefquels il favoit répandre fes bienfaits. Ce caractère généreux qui alloit jufqu'à la pro- digalité , engageoit fes Tréforiers ( dit Bohadin ) à mettre des fom- mes en referve pour les befoins preflans & imprévus; fans quoi l'ar- gent auroit fouvent manqué au Sultan. Il enrichit tellement tous les fiens, qu'il les preferva du rit" que d'avoir jamais rien à demandée à perfonne. J'étois quelquefois honteux ( avoue Bohadin ) de l'impudence avec laquelle ceux que le Prince avoit accablés de fet dons venoient encore en folliciter de nouveaux , Se les obtenoient fans peine Si fans chagrin de ù. part. Sa valeur & fon intrépidité ne lui laiffoient craindre aucun péril pour fa perfonne. On l'a vu à la fin d'une Campagne , après avoir con- gédié la meilleure partie de fes Troupes, faire tête avec une poignée de gens à des armées de cinq à fix cens J U I L L E cens mille hommes , les harceler perpétuellement , en tuer jufqu'à cent mille , en noyer un plus grand nombre, &: réduire le refte preiqu'à rien , par la difette & les maladies furvenues en confequence. On l'a vu dans les guerres les plus allu- mées , fe promener leul à cheval entre les deux armées , ranger fes Troupes en bataille , en faire la re- vue en paffant de l'aîle droite à la gauche, taire avancer un bataillon , en arrêter un autre fui vant le befoin, le tout avec le même fang froid qu'il eût fait paroîtreen pleine paix; & fe faifant lire quelquefois à la tête de l'armée des Livres de dévotion concernant lesTraditions Mahomé- tanes: ce qui eft fans exemple , dit l'Hiftorien. Mais rien n'éft au-def- fus de la bravoure avec laquelle, à la journée d'Acre , où la meilleure partie de fon armée avoit été mife en déroute , il vint à bout de rame- ner les fuyards au combat , de re- commencer l'action , &C d'arracher pour ainfi dire la victoire aux Chré- tiens qui furent entièrement dé- faits. Son zélé pour la Guerre Sainte fut toujours fi ardent, que depuis le moment qu'il l'eut entreprile juf- qu'à fa mort , il ne fit nulle dépenfe avec lui , & les in]uftices fe font » multipliées après lui. Le monde » a fait la plus grande perre qu'il » pouvoir faire , puifqu'il a été » privé par la mort de ce Monar- »que, de fon plus bel ornement! » laReligion Mufulmanne s'eft ob- » feurcie, depuis que cette grande » lumière a été éclipfée , & enfin » l'Etat ne fait plus que chanceler , t» depuis qu'il manque de cet appui, 414 JOURNAL DES SÇAVANS. H l STO I RE C RITIQJUE DES PRATIQUES fuperjlitieufes qui ont féduit les Peuples & embarraft les Sçavans , avec la Méthode ejr les principes pour difcerner les effets naturel > d'avec ceux qui ne le font pas. Tar le R. P. "Turre le Brun, Prêt -s de l'Oratoire. Seconde Edition , augmentée. A Paris , chez la Veuve de Laulne , rue S. Jacques, cv chez Chaubert , Quai des Auguftins. 1731. 3. vol. /«-il. premier vol. pp. 433. fans y comprendre 98. pages pour les Epîtres Dédicatoires , les Préfaces , la Vie de l'Auteur ôc les Approbations. Second vol. pp. 568. troifiéme vol. pp. 505. QUOI que M. Belon , neveu de l'Auteur , dans l'Epître Dcdicacoire qui eu adrelfée à M. le Cardinal de Fleury , farte c">mme les honneurs de cette Edition > 011 en eft cependant redevable aux foins de M. l'Abbé * * * , déjà fort connu dans la Republique des Lettres par plufieurs Ouvrages de ce genre. Sa Préface nous apprend que ce Livre parut à Rouen pour la première fois en 1702. dans un Volume ;«-iz. & que malgré l'ap- probation avec laquelle il rut reçu du Public. Le P. le Brun empêcha qu'il ne fût réimprimé , dans le delfcin de donner un nouveau jour à fes principes , & de les développer avec plus d'étendue. On nous allu- re que dans cette nouvelle Edition le fuccès a répondu aux Travaux de l'Auteur. On avoue cependanc que fa mort l'a empêché d'y donner toute la perfection qu'il s'éroit pro- pofée. Il avoit refolu d'y faire en- trer un Traité complet du Sortilè- ge , &r d'y joindre une réfutation fuiviedu monde enchanté de Bek- ker ; mais ce qu'il a lailTc là-deftus n'étant qu'une légère ébauche, on n'a pas cru devoir le publier. Le P. le Brun fe promettoic d'approfon- dir davantage ce qui regarde les différentes épreuves pour connoître la vérité. L'Editeur auroit pu continuer les recherches de fort Auteur fur cette matière, mais// n'a ojé , dit-il , mêler [on travail avec celui d'un homme fi difiingue, il nous fait cependant efperer qu'il pourra fe vaincre là-deffus dans une nouvelle Edition. Des trois Volumes qui compo- fent celle qu'il nous prefente au- jourd'hui , les deux premiers ren- ferment l'Hiftoire Critique des pratiques fupcrftitieufes. On trouve- ra cette Edition non feulement fort différente de la première par les augmentations confiderables qui l'enrichiflenr , mais encore par le nouveau plan que le P. le Brun s'y eft formé. Il commence par établir des principes généraux pour ap- prendre à difcerner ce qui eft natu- rel d'avec ce qui ne l'eft pas t &c paffe enfuitc à l'examen des faits. A l'égard du troiiiéme Volume on fc flatte qu'il fera bien reçu des per- fonnescurieufes qui aiment les Re- cueils de Phyfique. On y a réim- primé l'illufion des Philosophes fur JUILLE la baguette , & on y trouvera plu- sieurs autres Pièces qui ont rapport à ce fujet. Nous ne dirons rien de l'Eloge Hiftorique du P. le Brun qui fuit cette Préface , parce que la plus grande partie en eft tirée de celui qui a paru dans notre Journal du mois de Mars 1719. & que les ad- ditions qu'on y a faites ne regardent que les difputes littéraires du P. le Brun , dans lefquellcs l'Editeur , fuivant l'ufage , met toujours la force Si l'équité du côté de fon Hé- ros , & la foibleffe & l'injuitice du côtéde celui de fes Adverfaires. On nous donne enfuite le Dif- cours en forme d'Epître Dédicatoi- reaux Evêques de France , la Pré- face & les Approbations qu'on trouve dans la première Edition. » De ces Pièces , dit l'Editeur , « les unes font aulÏÏ utiles que » lorfqu'on les publia pour la pre- » micre fois , & les autres font tant m d'honneur au Livre & à l'Auteur, a qu'on m'auroit certainement blà- »> mé fi javoisofé les fupprimer. Comme dans le Journal du mois de Février 170;. on a rendu un compte exact de la première Edi- tion de ce Livre , nous ne nous ar- rêterons que fur les Additions &c les changemens qui font particuliers à cette nouvelle Edition. Tout l'Ou- vrage y eft divifé en huit Livres. Dans le premier, dont le fond eft prefque entièrement neuf, le P. le Brun traite du moyen'de difeerner la vérité ou la raufleté des effets na- turels Après avoir fait fentir com- bien il eft difficile d'y réuffir ,' il Juillet. T, 17)3. 4T5" s'attache à montrer qu'on ne peuc tirer là-ddïus aucunes lumières des Sages de l'Antiquité. Accoutumés , dit-il , à confon- dre l'Hiftoire Naturelle avec la Religion & avec la fupcrftirion , ils fe font égarés honteufement fur la nature des faits extraordinaires qu'ils rapportent. LesChaldéens , les Perfes & les Affyriens , ces Maî- tres fameux qui ont înftruit les Crées & les Romains font les Au- teurs des Fables les plus abfirdes & les plus extravagantes , en forte qu'on trouve l'origine de la folie des hommes ■parmi ceux qui ont été connus pour être les Dépositaires de la Science du genre humain. On ne peut pas dou- ter , ajoûte-t-il , qu'ils n'ayent re- tenu trois articles fondamentaux de la doctrine des Patriarches , l'exi- ftence de la Divinité , de la Provi- dence & des efprits intelligens qui font fes Miniftres ; ils fçavoient que de ces efprits , les uns font fa- vorables aux hommes , & que les autres leur font contraires. De-là ce culte fuperftitieux j pour mériter la bienveillance des bons Anges & pour fe garantir de la haine des Démons-, de-là la Di- vination , la Magie & les autres Su- perftirions qui des Egyptiens ont paffé chez les Grecs , les Romains & les autres peuples de la terre. Ou plaça des génies dans les forêts , dans les arbres , dans les eaux, dans toute la Nature : il n'étoit donc pas étonnant que des efprits ainfi difpo- fés vident du myftere par tout, & que mille évenemens qui font une fuite ordinaire des loix dumoure- Hhh 4i6* JOURNAL D ment Biffent regardes comme des prodiges ou des préfages. L'Auteur vient enfuite aux grands Philofophcsquela Grèce Se l'Italie ont produit , & tait voir par la nature même des principes fur lefquels ctoit fondée leur Philofo- phie, qu'il ctoit impodîble qu'ils nous donnalTent des règles (ures pour difeerner les effets naturels d'avec ceux qui ne le (ont pas. Les uns comme Thaïes &: fes Difciples n'admettoient point de Subftances Spirituelles; les autres, comme les Pythagoriciens & les Platoniciens, n'en n'avoient qu'une idée confufej les Epicuriens ne fentoient pas la différence qu'il y a entre l'efprit & la matière ; &c les Académiciens étant perfuadés qu'il n'y a rien de certain , ne pouvoient ni fixer leur efptit ni celui des autres fur les faits difficiles à expliquer. Le P. le Brun en apporte pour preuves ce que les uns &c les autres ont écrit fur la Science desAugures, des Harufpices , 6c fur la plupart des autres moyens que les peuples employoient pour découvrir les chofesles plus cachées , Se pour de- viner l'avenir. On ne trouveroit peut-être pas étrange , continue-t- ii , que les Philofophes euffent abandonné ces pratiques ridicules à la crédulité des Peuples. Ne fom- mes-nous pas accoutumés à voir courir parmi nous les prédictions des Almanachs fans que nos Sça- vans daignent s'appliquer à en montrer la fauffeté. Mais ce qu'on ne peut voir fans étonnement , c'eff. que les plus grands hommes de ES S Ç A V A N S , l'Antiquiré parmi les Grecs & les Romains avent entrepris de prou- ver krieufement qu'on pouvoit dé- couvrir les évenemens futurs pat l'infpeclion du fiel d'un Cocq , du Foye d'un Taureau , du Cœur ou du Poumon de quelque autre Animal. L'Auteur conclut de tous ces exemples que les premiers Sçavans du monde & les anciens Philofo- phes ne peuvent point nous condui- re dans les recherches necelTaires pour difeerner les effets naturels d'avec ceux qui ne le font pas. Il faut donc avoir recours à la raifon» Elle nous apprendra fur tout à ne pas tomber dans le ridicule de chei- cher la caufe de ce qui n'eft pas , & à commencer par nous affurer avec foin des faits dont nous voulons ex- pliquer la nature. Le P. le Brun donne ici quelques règles pour par» venir à cet examen. La parefleufe crédulité du grand nombre toujours amateur du merveilleux , cv i'opi- niatreté fuperbe de certains cfprits indociles font les deux principaux écueils qu'il faut éviter dans ce dif- cernement. On ne peut nier , ajoûte-t-il , qu'on ne foit obligé de fe défier des Compilateurs & des Hiftoriens mêmes qui ont eu le plus de réputa- tion dans le monde , leurs fréquen- tes méprifes, les fables qu'ils ont débitées par foibleiîe , par ignoran- ce , par vanité , ou même par in- térêt , ne le prouvent que trop. » Quelques-uns , dit-il , d'après » Sénéque , font crédules, d'autres » font négligens j quelques - uns- JUILL » lailTetit gtiffer le menrbnge dans j> leurs Ecrits , d'autres l'aiment ; « ceux-là ne l'évitent pas , d'autres »» le recherchent. C'eft ce qu'on » peut dire de tout ce qu'il y a » d'Hiftoriens ; cette Nation s'i- » magine que fes Ouvrages ne peu- » vent acquérir l'approbation pu- » blique , & fe répandre à moins » qu'ils ne (oient affaifonnés de »> menfonges. Us fe font trompés les premiers , êc ont non feulement trompé le Vulgaire, mais les Phyficicns mê- mes, qui ont fotivent recherché la caufe de difïerens effets qui n'exi- ftoient que dans l'imagination de ceux qui les racontoient. C'eft ce qu'il prouve par ce qu'une infinité de Naturaliftes & d'Hiftoriens ont écrit fur la Rémore , fur la produc- tion des Macreufes , fur les Poulains & les Perdrix qu'on foûtenoit être engendrés par le vent, fur une pier- re prétendue lumineufe & brûlante, dont la fable a été adoptée par M. de Thou Se inférée dans fon Hiftoi- re , fur le Phoenix dont les Pères ont tiré de fi belles moralitcz, fur l'aiman , &c. Quoique dans cet endroit , com- me en plufieurs autres , l'Auteur entre quelquefois dans des détails qui femblent l'éloigner un peu de fon but. Cependant la plupart des faits qu'il rapporte font fi intereffans & fi curieux qu'on lui pardonnera fans doute d'avoir facrifiéla jufteffe de fon Ouvrage à l'inftru&ion , & à l'amufement de fes Lecteurs. D'ailleurs il étoit fi perfuadé qu'on ne pevivoit avoir devant les yeux ET, 1752. 417 trop d'exemples desfauffetez répan- dues dans le monde, afin de fe tenir toujours fur fes gardes pour ne pas confondre le vrai avec le faux , que quoiqu'il craigne lui-même de rap- porter peut-être trop de fables , il ne peur s'empêcher d'employer encore le Chapitre 6e du premier Livre à montrer par differens exemples tirés des anciens & des modernes , juf- qu'où va la pente des hommes à dé- biter & à croire des récits fabuleux. Tous ces exemples, continue-t- il , montrent évidemment la ne- ceffité de s'affurer des faits dont on veut rechercher la caufe. La crédu- lité produit ordinairement plus de mal qu'on ne croit , parce qu'il n'eji rien qui donne plus de lieu à la four- berie des méchans , à la fuperflnioit des fimples & à l'obftination de ceux qui veulent être incrédules fur toutes ebofes. Il avoiie cependant que la crédu- lité a quelque chofe de plus exeufa- ble que l'excès contraire ; elle fup- pofe ordinairement une certaine candeur qui fait qu'un homme in- capable de tromper , ne s'imagine pas aifément qu'on veuille le trom- per lui-même, au lieu que l'incré- dulité prend fa fource dans un mé- pris infini des autres & dans une eftime injufte de foi-même qui fup- pofe même quelquefois un grand fonds de corruption. Il obferve que fi c'eft foibleffe d'efprit que de croire tout légère- ment , ce n'en eft pas une moins grande que de rejetter hautement certains récits furprenans , par la feule raifon , qu'on n'a pu s'affurer Hhhij 4i8 JOURNAL D de leur vérité par fesyeux. Comme Il dit-il , il n'y avoir pas une infi- nité de chofes qu'il nous eft impoflî- ble de révoquer en doute, quoique nous ne puifllons nous en convain- cre par le témoignage de nos fens. L'Auteur propoic enfuite quatre tegles fur lesquelles tout homme fa- ce & prudent doit former fon ju- gement à l'égard de l'exiftence de quelque fait qu'on puiffe lui allé- guer. » i°. Comme on ne doit point d agir fans raifon , il ne faut pas re 3) jetter comme faux tout ce qui eft 3> rapporté par des Auteurs graves » lorfqu'on n'a rien qui en prouve « la fauffeté. » 2°. La multitude & l'unifor- » mité des témoignages de perfon* » nés fenfées & définterefftes qui » difent avoir vu un fait , font des » marques certaines de fa vérité. » 3°. 11 faut rejetter un fait qui » n'eft avancé que fur des conjectu- »> res , quand on a d'ailleurs d'au- » très faits certains , ou des expe- » riences confiantes qui le contre- ?> difent. » 4°. Il ne faut pas décider qu'u- » ne chofe eft impoiTible à caufe » que l'on croit communément » qu'elle ne fe peut pas faire j car j) l'opinion des hommes ne peut » pas donner des bornes aux effets » de la Nature c\: de la toute-puif- » fancede Dieu. Le P. le Brun fait enfuite l'appli- cation de ces principes à differens points de Phyfique &: d'Hiftoire dent les uns, après avoir palfe pen- dant une longue fuite de fiécles ES SÇAVANS; pour conftans , font aujourd'hui re- connus pour entièrement fuppofés ; & dont les autres au contraire qui avoient été regardés comme faux ne trouvent plus maintenant de con- tradicteurs. Y a-t-il quelqu'un qui contefte aujourd'hui l'exiftence des Antipodes , ou qui ofe foûtenix avec les anciens que la Zone torride fbit inhabitable ? L'Auteur toujours inépuifablc en exemples , en rap- porte encore plufieurs autres qu'on verra avec plaifir dans l'Ouvrage même. Nous y renvoyons encore fur les principes qu'il y établit pour juger û un effet eft naturel , s'il tient du miracle ou de la fuperftition. Ce font précifément les mêmes que ceux qu'il avoir pofés dans la fécon- de Partie de la première Edition de fon Livre. Nous ne pouvons cependant nous empêcher de dire que tous les rai- fonnemens de l'Auteur paroiffent être fondés fur des notions claires , & communément admifes par tous les Philofophcs. Il s'étend beau- coup fur les principes qu'il juge nc- ceffaires pour connoître l'action des corps , furlcsloix de la communi- cation du mouvement , fur les changemens qui peuvent leur arri- ver par le changement de la confi- guration de leurs parties , fur la. caufe de la légèreté &c de la pefan- tcur s fur Ydliifton de ceux qui ad- mettent des fympathies 6V des at- tractions t &c. On trouvera peut- être qu'il fe laiife un peu trop aller au plaifir de parler lur des matières dont quelques-unes appartiennent. J U I L L plutôt à l'Hiftoire Naturelle qu'à l'Hiftoire des Supcrftitions , mais il eft fi rare de trouver un Théolo- gien profond qui foit en même rems bon Philofophe , & fur tout bon Phyficien , qu'on lui fçaura gré d'avoir voulu montrer qu'il eft pofîïble d'allier des qualitez qui pa- roiffent fi oppofées. Le fécond Livre roule fut la vé- rité & fur la fauffeté des effets natu- rels. L'Editeur nous apprend que le P. le Brun y a réuni tout ce qui fe trouve épars dans la première Edi- tion de fon Ouvrage. On y remar- que cependant des additions tort intereffantes. Telle eft par exemple l'Hiftoire d'une fille qui après avoir feint pendant plufieurs années d'être muette , fe prétendit guérie mira- culeufement au Tombeau de Jac- ques II. Roi d'Angleterre. Le Père le Brun lui-même qui demeuroit pour lors à S. Magloire , reçut la dépofition de cette fille en prefen- ce de plufieurs de fes Confrères. Voici le fait en peu de mots ; elle racontoit qu'un homme lui ayant donné un bouquet , au même in- ftant fa langue s'étoit retrecie en forte qu'elle ne pouvoir la porter jufqu'aux dents , qu'elle avoit per- du la parole , &c qu'il lui étoit venu fur le creux de fa poitrine une tu- meur plus grofle que les deux poings. Mais que pludeurs années après , la femme du Blanchiffeur des Pères de l'Oratoire , fes filles &c fes Servantes , du nombre def- quelles elle fe trouvoit pour lors , touchées du trifte état ou elle étoit réduite , lui avoient confeillé d'al- E T ; 1752. 4ip 1er au Tombeau du Roi Jacques, demander à Dieu fa guerifon s qu'elle y étoit allée en effet , Se que fur le champ, après avoir été près de douze ans muette, fa langue s'é- toit allongée , qu'elle avoit retrou- vé l'ufage de la parole , & que la tumeur dont il a été parlé,s'étoit to- talement diffipée. Quoique cette fille fut regardée comme une Sainte , le P. le Brun , qui n'ignoroit pasjufqu'à quel point le fexe peut foûtenir la diliimula.- tion & la contrainte , voulut s'aflu- rer par lui-même de la vérité de tous ces faits ; 6v fes perquifitions , dit-il , aboutirent à découvrir que cette fille étoit une friponne , & que depuis l'âge de 16. ans elle avoit joué le même rôle en differens en- droits , & fi bien que M. l'Evêque de la Rochelle , fur lesatteftations des Chirurgiens , avoit donné un Certificat , portant qu'en l'année 1^97. elle avoit recouvré miracu- leufément l'ouye & la parole dans l'Eglife de Notre-Dame des Ar- dilliersà Saumur. Cette malheureu- fe difparut dès qu'elle apprit que fa guerifon étoit fufpede. Il femble cependant , malgré l'exactitude de l'Auteur , qu'il manque quelque chofe d'effentiel à cette relation r car on ne nous apprend point com- ment elle en avoit pu impofer à tant de perfonnes, fur la contrac- tion de fa langue, fur la tumeur de fa poitrine , & fur la ceffation de cesaccidens.. Une autre addition non moii curieufe regarde l'Hiftoire d'une fille Cataleptique qui en ijio. 420 JOURNAL DE donna en fpcctacle à Paris , ôc qui attira la curiolîté de l'Auteur. Il nous en rend compte dans deux Lettres adrelfécs à M. le Duc de Noaillcs. Dans la première il expo- fe le hit. Cette tille , à certaines heures réglées , eut pendant 16. jours qu'il tut libre de la voir trois maladies compliquées fans aucunes marques de fentiment, la Catalep- sie , le Tétanos } fi: des affections hypocondriaques, ou plutôt , dit-il, des "jipons auffi-bun exprimées par ge lie s fans paroles que peuvent faire les meilleurs Pantomimes. Quoique ni la malade , ni aucune perfonne de fa famille n'eulfent jamais pré- tendu faire pafTer ces fimptomes & ces efpeces de vidons pour des mi- racles, fur quelques fdupçons qu'on eut de la fincerité de cette fille , elle fut enlevée par l'autorité de M. le •Lieutenant de Police, & l'on répan- dit de fa part qu'elle avoit avoiié fa fourberie de vive voix & par écrit. Le Médecin qui la voyoit foûtint hautement que ce déiaveu étoit faux , & on ne fe mit pas en peine de lui impofer iilence. Dans la féconde Lettre , après un examen allez détaillé des raifons pour & contre la vérité de cette ma- ladie , le P. le Brun fe détermine à croire qu'elle étoit feinte, il regar- de comme une preuve décifive de l'impofture de cette fille, la facilité furprenante avec laquelle dans fes attaques de Gataleplîe fon corps s'abaifloit , s'élevoit & fe foûtenoit. » Une caufe phyfique 5c matérielle » doit , dit-il , toujours agir de la 1* même manière dans les mêmes 5 SÇAVANS, j> circonlhnces phylïques. Or on » convient , ajoûte-t-il , que le » corps de la malade étoit pefant » pendant la Cataleplic comme il j> l'etoit auparavant, donc il ne » pouvoir être remue que par une » torce proportionnée à Ion poids. « Mais dès qu'il paroît par le témoi- gnage des Médecins anciens & mo- dernes dont l'Auteur rapporte les paroles , qu'un des caractères de cette maladie elt de donner au corps une difpofition particulière qui l'oblige à refter en quelque fi-, tuation qu'on le mette , peut-on fuppofcr que le corps foit alors dans les mêmes circonilances phylïques 6 que du moins fa pefanteur relati- ve foit précifément la même. Quoiqu'il en foit , le P. le Brun nous apprend que la Cataleptique fut rendue à fes parens, après avoir palfé quelque tems dans un lieu où elle avoit fait une rude pénitence , » d'où il conclut qu'il faut qu'on » ait connu fa faute pour l'avoir » punie, fie qu'on n'ait pas cru cette » faute allez grande pour faire du- » rcr plus long-tems la pénitence. Nous laiflons aux Lecteurs à ju- ger de la (olidité d'un tel raisonne- ment , & fi pour fuivre exactement les règles qu'on a développées avec tant d'exactitude dans cet Ouvrage, il n'eut pas été neceffairc avant de porter un jugement décifif fur un tait de cette nature , de revoir la malade lorfqu'clle tut mife en li- berté , de l'interroger elle ou fes pa- rens fur la manière dont elle s'étoit trouve guérie dans la Maifon de Correction où elle avoit été enfer- JUILL mée ; cet exemple joint à quelques autres de la même nature pourroit même faire croire à bien des gens que notre Auteur eft plus heureux dans le choix des principes qu'il donne pour difcerner les effets na- turels d'avec ceux qui ne le font pas que dans l'application qu'il fait de ees mêmes principes à plufieuis faits extraordinaires. L'Editeur lui-même avoue qu'il ne peut lui pardonner d'avoir adopté l'Hi- ftoire de î'enforcelement du fils de M. de la Richardiere dont on trouve la relation à la page 28 1. de ce premier Volume : il l'excufe ce- E T; 1752; 42 r pendant fur la probité de ceux qui la lut ont rapportée ; mais il auroit dû confiderer , dit-il , que la probité n'eft point à l'abri des prcftiges de l'imagination & des illufions de la crédulité. L'Auteur examine dans le troi- fîéme Livre ce qui regarde les Ta- lifmans, nous n'y avons remarque aucunes additions conlïderables, 8c nous remettons au Journal pro-- chain l'Extrait de ce que les autres Livres & les différentes Pièces qu'on a inférées dans cette nouvelle Edition contiennent de nouveau &i de particulier. 422 JOURNAL DES SÇAVANS, GALLIA CHRISTIANA IN PROVINCIAS ECCLESIASTICA5 diftributa qui feriesSc Hiftoria Archicpifcoporum , Epifcoporum , &c Abbatum Francis vicinarumque ditionum ab origine Eccleharum ad noftra tempora deducitur , &c prubatux ex authcnticis inftrumentis ad calcem appofitis. Tomus IV. C'eft -à-dire : La Gaule Chrétienne , dtvi- fét par Provinces Ecclefiafliques , dans laquelle on voit la fuite & l'Hi- floire des Archevêques , des Evécjues & des Abbez. de France & des Pays iioifins , depuis l'origine des Eglifes jiifju'a notre tems , avec des preuves tirées d' Ailes autentiques renvoyées à la fin du Volume. Par les Coins des Religieux BenediElms de la Congrégation deS. Maur. Tome IV. A Paris , de l'Imprimerie Royale , 17*5. LE P. Denis de Sainte - Marthe auquel le public eft redevable des trois premiers Volumes de cet- te nouvelle Edition de la Gaule Chrétienne , mourut immédiate- ment après l'imprelhon du troifié- me Volume : c'eft pourquoi ceux de fes Confrères qui avoient tra- vaillé avec lui à ce grand Ouvrage, & qui ont entrepris de le continuer, ont cru devoir mettre à la tête de ce Volume un abrégé de fa Vie. En voici le précis. Denis de Sainte-Marthe croit né à Paris le 24. Mai 1650. d'une fa- mille noble , & qui s'eft diftinguée depuis long-tems par l'érudition Si par la vertu. Il étoit le dernier des enfans de François de Sainte-Mar- the, Seigneur de Chandoifeau, 6V: de Marie le Camus. Son pere prit foin de fon éducation. Ce ne fut que quand il eut atteint l'âge de 1 y ans qu'on l'envoya au Collège de Pontlcvois qui eft gouverné par des Benedidtins de la Congrégation de S. Maur , il y prit du goût pour cette Congrégation. Il y fut admis en \66-j. Se il y fit profeflîon le 1 1. Aouft ié'fîS, Comme il avoit édifie les autres Novices par fon exemple pendant l'année de fon Noviciat, fes Supérieurs jugèrent à propos de le retenir pendant deux années con- tre leur coutume dans l'Abbaye de S.Melaine où il avoit fait fes vœux, enfuite on lui fit étudier laRhetori- que , la Philofophie & la Théolo- gie. Il fit de fi grands progrès dans ces études , qu'on le choifit en 1679. pour enfeigner la Philofo- phie 6c la Théologie- Il évita de rraicer dans l'une Si dans l'autre de ces Sciences toutes celles des que- ftions Scolaftiques qui font plus épineufes qu'utiles. Dans fon cours de Philofophie , il foûtint les opi- nions des nouveaux Philofophes. Mais en Théologie il évita , difent fes Confrères , toutes les nouveau- tez , ne puifant fes principes que dans les plus pures fources de l'An- tiquité. Il s'y étoit rendu Ci habile , que dans le même tems qu'd enfei- gnoit la Théologie aux jeunes Reli- gieux de fa Congrégation , il don- noit au Public des Ouvrages fur la Controverfe. Ce fut en ce tems-li que J U I L L tjue parurent fon Traité de la Con- feffton contre les erreurs des Calvini- fies ; fa réponfe aux plaintes des Pro- îeflans t touchant la prétendue perfe- Chtion ; /es entretiens touchant l'en- treprife du Prince d'Orange fur l' Angleterre. En 1690. il fut fait Prieur de .S. Julien de Tours. Pendant qu'il eemplifloit cette Place , il pronon- ça l'Oraifon Funèbre de Madame de Bcthune AbbelTe de Beaumont- tes-Tours. Ayant été rappelle de Tours à l'Abbaye de S. Germain ■des Prez , pour y faire les fonctions de Bibliothécaire , il donna au pu- blic la Vie de Calîîodore qui parut en 1^94. fes Supérieurs î'envoye- «ent la même année à Rouen , cù il fut jufqu'en 170J. d'abord Prieur de Bonne - Nouvelle & enluitc Prieur de S. Oiien. Il publia pen- dant ces dix années U Vie de S. Gré- goire le Grand , fes reflexions fur la Lettre d'un Abbé d'Allemagne aux RR. PP. Bénédictins de la Congré- gation de S. Maur , fur leur der- nier Tome de l'Edition de Saint- Auguftin. Une Lettre à un Docteur de Sorbonne touchant le Mémoire d'un Docteur en Théologie adrefle à MM. les Prélats de France contre iesBenedi&ins, & la nouvelle Edi- tion des Ouvres de S. Grégoire le Grand avec des Notes & des Dilîer- tations. On lui a auflî attribué cinq Lettres Latines contre l'Abbé delà Trappe. Ces Lettres font vtves , fneme mordantes , difent nos Au- teurs , mais écrites avec élégance. Le Père de Sainte - Marthe les dc- favoiioit. Juillet, E T, 1732. 425 Depuis 1705. jufqu'à fa mort H occupa toujours des Places très-ho- norables dans fa Congrégation. Il fut fucceflîvement Prieur de la Maifon des Blanc-Manteaux , des Abbayes de S. Germain des Prez & de S. Denis , Allîftant du General , Préhdent de deux Chapitres Géné- raux , & enfin General de fa Con- grégation en 1720. Ilyavoitcinq ans qu'il remplifloit cette Place avec honneur , lorfqu'il mourut le 30. Mars 1725. âgé de 75. ans il avoir publié en 171 5. le premier Volume de la Gaule Chrétienne, les fuivans ont été imprimez en 1720. & 1715. la vigilance, l'at- tention , la douceur ik la prudence avec laquelle il gouverna , foie comme Prieur de grandesAbbayes, foit comme Supérieur General de fa Congrégation lui ont mérité l'e- ftime de fes Confrères. Ils ont été fur tout édifiés de fon exactitude à- tous les exercices réguliers , de fa vie pénitente , & des autres mar- ques de pieté qu'il a donné jufqu'à la mort. On rapporte comme une preuve de fa grande charité qu'il vendit un Médaillon d'or dont le Pape Clément XI. lui avoit fait pre- fent & qu'il en diftribua le prix aux pauvres. On eft furpris que tant d'exerci- ces de pieté &c les grandes occupa- tions que donnoient au Père de Sainte-Marthe les emplois dont il étoi: chargé lui ayentlaifle encore alTez de tems pour travailler à un fi grand nombre de Livres qu'il a donnés au public. Mais cet étonne- tnent cette quand on voit que pen- I ii 424 JOURNAL DE dant trente cinq ans il n'a point ac- cordé chaque jour plus de quatre heures & demi au fommcil. Ses Confrères qui ont entrepris de continuer la nouvelle Edition de la Gaule Chrétienne , fuivront en tout la méthode du P. de Sainte- Marthe. Ils ont feulement obtenu des Evêques , pour rendre ce Re- cueil plus parfait , qu'avant de faire imprimer ce qui regardera chaque Diocéfe , qu'ils prendront la peine d'en lire l'Hiftoire ou de la faire lire par des perfonnes qui feront inftrui- tes de ce qui concerne leurs Eglifes. Ce quatrième Volume ne con- tient l'Hiftoire que d'une feule Mé- tropole ., qui eft celle de Lyon , quoique cette Métropole n'ait que quatre Evêques Suffragans, Autun, Châlon , Langres & Maçon, il y a un fi grand nombre d'Abbayes dans le Diocefe de Lyon tk dans les quatre Diocéfes qui en dépen- dent , qu'on n'a pu joindre une au- tre Eglife Métropolitaine à celle de Lyon , comme on l'avoit pratiqué dans les Volumes précédons qui contiennent chacun l'Hiftoire de plufieurs Métropoles. Nous nous contenterons de rap- porter ici quelques traits de ce Vo- lume qui regardent la critique. Nos Auteurs font perfuadés queS.Irenée Evêque de Lyon doit être mis au nombre des Martyrs , nonobftant tous les argumens négatifs propofés fur ce point par Dodvel , qui a été refuté par Dom Ruinard & par Dom Mafluct. Mais les Actes du Martyr de ce Saint Evêque n'ont point été confervés. Ils étoient per- S SÇAVANS; dus dès le rems de S. Grégoire le Grand. Baronius fc vantoit d'en avoir trouvé une copie , mais il ne l'a point fait imprimer. Le P. Rui- nard a voit vu des Actes du Martyre de S. Irenée dans la Bibliothèque de Citeaux , mais ils lui avoient paru écrits dans un tems fi éloigné de celui auquel a vécu ce faint Martyr» qu'il n'a point ofé les faire entrer dans fon Recueil. On en conferve auflidans l' Eglife de Lyon, mais nos Auteurs ont mieux aimé palier fous filence ce que portent ces Actes que de raconter des fables. On n'eft point d'accord fur le tems auquel S. Irenée fouffrit le Martyre, quelques-uns difent que ce fut en l'année 197. tems auquel l'Empe- reur Severe ayant vaincu Albinus entra victorieux dans la Ville de Lyon. Mais bien loin que Severe perfecutât les Chrétiens en ce tems- là,illes favorifoit. Théophile Rai- naud prétend que S. Irenée fourlric le Martyre en 208. quand Severe paffa par Lyon pour fon expédition d'Angleterre. Mais aucun ancien Hiftorien ne ditque dans ce voyage l'Empereur Severe ait pafle par Lyon , & quand il y auroit paiîé , il n'y a point d'apparence qu'il s'y fut arrêté. D'ailleurs il n'eft point parlé de S. Irenée dans l'Hiftoire Ecclelîaftique , depuis la difpute entre les Afiatiques & le Pape Vic- tor au fujet de la Pâques fur la fin du deuxième fiécle. D'où nos Au- teurs concluent que Saint Irenée a fouffert leMartvrc des le commen- cement du troifiéme fiécle en loi. parce que la perfecucion de l'Empc. JUILL rcur Scverc commença, félon Eufe- be la dixième année de l'Empe- reur Severe. Il eft vrai que l'Ecri- vain qui a donné le dernier au pu- blic une Vie de S. Irenée, ne croit pas qu'on doive compter la pre-< miere année de l'Empire de Severe en l'an 15 J. parce que c'étoitjulien qui étoit alors reconnu à Rome pour Empereur. Mais nos Auteurs répondent que cet Hiftorien devoit fe fouvenir de ce qu'il avoir remar- qué qjje Severe avoir été revêtu de laPourpre par fon armée dès le mois d'Avril, & que Julien ayant été tué au commencement du mois de Juin , Severe avoit été auffi-tôt re- connu pour Empereur par les Ro- mains. L'Hiftoire ne nous apprend rien autre chofe de Fauftin cinquième Evêque de Lyon , finon qu'il écri- vit au Pape S. Etienne & à S. Cy- prien au fujet de Marcien d'Arles, quis'étoit féparé de l'unité de l'E- glife pour fe joindre à Novar. M. de Launoy a au que la Lettre fur ce fujet qui a été inférée dans les Oeuvres de S. Cyprien n'étoit point de ce faint Evêque -, mais cette Let- tre a paru à nos Auteurs fi conforme au ftile & aux fentimens de S. Cy- prien , qu'Us ne peuvent même fonpconner qu'elle ne foit point l'Ouvrage de l'Evêque de Canna- ge , & ils renvoyent à M. de Tille- mont &c à Pearfon ceux qui vou- dront voir les réponfes aux objec- tions de M. de Launoy. Nos Auteurs n'ajoutent point de foi à ce que Severe & de Lamure difent de jufte 13e Evêque deLyon, ET, 1732. 42 y que fa mère ayant été aceufée d'a- dultere , il déclara à haute & intel- ligible voix auflî-tôt après fa naif- fance que le Seigneur d'Anton qu'il montroit du doigt étoit fon père , non plus qu'à ce que rapportent ces deux Auteurs , que quand Jufte fut baptifé une Colombe blanche fe re- pofa fur fa tête. C'eft pourquoi nos Auteurs £e bornent à rapporter ca qu'on trouve de S. Jufte dans les Conciles de Valence & d'Aquiléc & dans Adon , qui aflure que faine Jufte ayant quitté fon Eglife de Lyon fe retira en Egypte , où il paffa le reftede fes jours dans la So- litude avec des Anachorètes. Quelques Auteurs donnent à Elpide pour Succeffeur faint Sicai- re , mais il n'eft pas dit un mot de faint Sicaire dans les anciens Ca- talogues des Evêques de Lyon , ni dans les anciens Bréviaires de ce Diocéfe, c'eft pourquoi nos Au- teurs croyent qu'il eft très-difficile qu'on puiffe mettre faint Sicaire au nombre des Evêques de Lyon , quoiqu'on dife qu'on ait trouvé pendant le douzième fiécle , dans une Chapelle dédiée fous l'invoca- tion de faint Sicaire , une tombe fur laquelle étoit marqué le nom de ce Saint , avec une tête ornée d'une Mitre. A l'égard des Saints Séna- teur & Didier que quelques-uns mettent au nombre des Evêques de Lyon , nos Auteurs ont cru les pouvoir exclure entièrement de leur Catalogue, attendu que ceux qui y donnent une place à ces deuxSaints, ne fe fondent que fur desautoritez trop modernes , pour qu'on foie liiij 4t6 JOURNAL DES SÇAVANS, obligé de les fuivre. Il eft vrai Vie peut bien marquer la fîmplict qu'Ùfuard , dans ion Martyrologe fait mention le II. Février pour Lyon , Mpud LugditnHm de faine Didier Evêque Se Confcffeur, mais comme Ufuard ne parle point ail- leurs de faint Didier de Vienne, nos Auteurs croient que c'eft à l'E- rêque de Vienne qu'il faut appli- quer ce qu'Ufuard dit en cet en- droit de S. Didier , ils ajoutent, que ce Saint a été particulièrement ho- noré à Lyon , parce que c'eft dans le Dioccfe de Lyon qu'il a été tué. A l'égard de la queftion fi déba- tue entre les Critiques , s'il y a eu deux Saints Eucher Evêque de Lyon , nos Auteurs rapportent les eaifons de part Se d'autre. Ils difent d'un côté après M. de Tillemont èc quelques-autres Ecrivains , qu'il y a tant de rapport à ce qu'on ra- conte de ces deux Evoques qu'il n'y a point d'apparence d'en faire deux perfonnes , que les anciens Catalo- gues des Evêques de Lyon , entre lefquels il y en a un qui précède le tems d'Agobard ne font aucune mention des deux Euchcrs , non plus que les anciens Martyrologes. D'un autre côté Baronius, Sponde, les Bollandiftes , Théophile Rai- naud , le P. Mabillon , diftinguent deux Eucher. M. de Tillemont lui- même cft obligé de convenir qu'il faut en admettre deux , fi la Vie de fainte Conforte e(l de quelque autorité. Or plufieurs habiles Cri- tiques penfent qu'on ne peut rejet- îcr la Vie de fainte Conforte com- me un Ouvrage fufpeclr } Secc que Al.de Tillemont a rapporté de cette té ou l'ignorance de cette Sainte, fans rendre le fond d>t cette Hi- ftoircfufpecte. La Lettre d'un Eu- cher écrite à Philon au fujet du Mo- naftere de l'Ifle - Barbe , pendant que Maxime en étoit Abbé fournit un fécond argument à ceux qui prennent ce paiti , car ils font per- fuadés que cette Lettre eft d'un Eu- cher Evêque de Lyon , Se qu'on ne peut l'attribuer au Grand Saint Eu- cher, non feulement parce que le ftile- qui en eft barbare , né*peut convenir au premier Eucher donc le ftile eft très-élegant , mais enco- re parce que fon tems ne s'accorde point avec celui dans lequel a vécu Maxime Abbé de rifle- Barbe. La Vie de faint Cefaire d'Arles écrite par faint Cyprien Diiciple de faint Cefaire , qui parle d'Eucher , Se qui eft appelle Evêque de Lyon dans quelques Manufcrits , fournit en- core un moyen à ceux qui ambraf- fentee parti. Ils répondent à M. de Tillemont que quoiqu'il y ait dans l'Hiftoire de l'un Se de l'autre Eu- cher quelques traits qui paroiffent d'abord femblable: , on ne laide point d'y remarquer de la différen- ce. Pour ce qui eft des Catalogues des Evêques de Lyon , quelque refpect qu'ils méritent par leur anti- quité , rien n'empêche qu'on y ajoute un Evêque en les corrigeant fur d'anciens Monumens. Nos Au- teurs laiffent à ceux qui liront cet Ouvrage à prendre leur parti fur ce point de critique , Se s'ils fc déter- minent à parler des deux Eucher, ils déclarent qu'ils ne prétendant J U I L L point par-là condamner le fenti- ment de ceux qui n'en admettent qu'un. Nous aurions fouhaitc pouvoir rendre compte de plufieurs autres articles des Archevêques de Lyon où nos Auteurs traitent d'autres points pareils, dont la le&ure fera plaifir à ceux qui aiment la criti- que , mais les bornes que nous nous fommes preferites ne nous permet- tent point de rapporter un plus grand nombre d'exemples. C'eft la raifon pour laquelle nous ne dirons aïen ici des Abbayes du Diocéfe de E T, i75 2r. 417 Lyon , non plus que des Evêchez Suftragans de cette Métropole ; ce que nous pouvons dire en gênerai [ c'eft que ce Volume n'a pas fait moins de plaifir aux perfonnes qui veulent s'inftruire de l'Hiftoire de l'Eglife de France , que ne leur en ont fait les Volumes qui ont paru pendant la Vie du Père de Saintes Marth* L'antiquité & la reputa-; tion de l'Eglife de Lyon contribue même à rendre la leclure de ce Vos lume plus intereflante. Nous parlerons du cinquiérn.8- Tome dans le Journal fuivast, 428 JOURNAL DES SÇAVANS; CORPS VN1VERSLL D IPLOMAT1QVE DV Droit des Gens \ contenant un Recueil des Traitez. d'Alliance , de Paixt de Trêve , de Neutralité , de Commerce , d'Echange , de Protetlion & de Garantie , de toutes les Conventions , Tranfatlions , Pâlies , Concordats (fr autres Contrats qui ont été faits en Europe depuis le règne de l'Empe- reur Charlemagne jufcju'a prejent , avec les Capitulations Impériales & Royales t les Sentences A bitrales & Souveraines dans les caufes impor- tantes , cvC. Par M. y. du Mjnt , Baron de Carels - Croon ) Ecuyer , Confeiller & Hiftonographe de Sa Majeflè Impériale & Catholique. A Amfterdam , chez Pierre Brunel , R. & J. Weftein , &c G. Smith , Henri \vraesberge &Z. Châtelain-, & à la Haye, cher Pierre Huffon & Charles Levier, in-folio , 17 } 1. Tome VIII. LE S huit Tomes de ce grand Recueil ont été donnés au Pu- blic en differens tems. Il auroit été naturel que nous rendiflîons compte du plan de l'Ouvrage , lorfque le premier Volume parut en 171^. mais ce Livre ne nous étant point alors tombé entre les mains j nous avons cru devoir attendre pour en parler que les huit Volumes euffent été publiés. Ce que nous en allons dire fera tiré de la Préface de M. du Mont &c de l'AvercifTement des Libraires qui accompagnent cette Préface. On ne peut douter qu'une com- pilation de la nature de celle-ci ne Foit infiniment utile aux Miniftres d'Etat & à tous ceux qui ont quel- que part au Gouvernement ; il faut que ces perfonnes foient inftruites des Droits de leurs Maîtres , cv des Droits & des prétentions des Na- tions voifincs , & elles ne peuvent mieux s'en inftruire qu'en faifant une étude des Traitez de Paix , d'Alliance & de Commerce, des Contrats de Mariage des Souve-: rains, des Difpofîrions qu'ils ont faites de leurs Etats ; foit par des donations entre-vifs , foit par des Teftamcns , & de tous les autres ti- tres qui peuvent fervir à fonder , à établir ou à jullifier les droits & les intérêts des Princes & des Etats de l'Europe. Ces Rccueilsfont encore neceflaires aux Jurifconlultcs , non feulement dans les Etats où le Droit Public fait une partie effen- tielle des conteftations qui font portées à des Tribunaux conten- tieux , mais encore dans les autres Etats, où ces titres importans in- fluent fouvent fur ladécifion des affaires de< particuliers. Ces titres fervent auffi très-fouvent à ceux qui veulent écrire l'Hiftoire ou s'en in- ftruire à fond. Le Généalogiftc & le Géographe y trouvent auffi de grands iecolirs. M. du Mont eft furpris qu'on ait négligé jufqu'au dix-feptiéme fiécle à travailler à de pareils Re- cui ils qui forment des Codes du Droit des différentes Nations de l'Europe entr'elles, pendant qu'on J U I L L a fait tant de compilations qui ne regardoient que les Droits des Par- ticuliers, où le Droit Public d'un Etat, même des Loix Barbares & qui ne font prefque plus d'aucun ufage, comme celles desRipuaires, des Francs , des Bavarois , des Vi- figots , &c. Goidaft eft le premier qui ait entrepris de donner des Compila- tions de cette matière , fes riches Collections font remplies d'un grand nombre de Titres & d'Actes très-importans , fur tout par rap- port à l'Allemagne , il étoit bien difficile qu'il ne le glifsât un grand nombre de Pièces de mauvais alot , entre tant de Pièces excellentes dont il étoit le premier Editeur ; ce qui a donné lieu à des Critiques , mais qui n'empêchent point que ces Recueils ne foient encore très- lecherchés. Les Collections de Freherus , Limnxus , Londorpius , Millerus , quoique faites dans un goût différent de celles de Goldaft, contiennent plulieurs Pièces qui tendent au même but. Mais les grandes Collections de M. Lunig , dont il y en a une qui forme treize Volumes /'«-/ô/.contiennent un bien plus grand nombre de Pièces cu- cieufes & interelTantes pour l'Alle- magne que toutes les Compilations précédentes. Il n'a point cité les fources d'où il avoit tiré ces Pièces politiques ; cependant on a été per- fuadé jnfqu'à prefent que fon Re- cueil étoit exact 6i fidel. Le Recueil imprimé en deux Volumes i»-4°. à Nuremberg, ne contient que des Traitez de Paix , E T ; 1752: 42$ de Trêve & d'Alliance , depuis 1647. jufqu'au Traité d'Oliva en 1660. Les Pièces y font toutes tra- duites en Allemand. Ce Recueil fut fuivi en Allemagne de celui de M. de Leibnitz intitulé Codex fnris Gentium , auquel il ajouta quelques années après un Volume fous le ti- tre de Afantijîa. Ces deux Volumes contiennent des Pièces curieufes & utiles; mais M. de Leibnitz y en a inféré plufieurs qui avoient été pu- bliés avant lui , il y en a même quelques-unes qui avoient été im- primées fur de meilleures copies que celles dont il s'eft fervi. Quoique Rimer fe foit borné dans fa grande Compilation aux affaires de la grande Bretagne , elle contient un très-grand nombre de Pièces qui entrent dans le plan d'un Recueil des Titres Politiques de l'Europe. A l'égard du Recueil /«-4e. im- primé à Paris chez Frédéric Léo- nard , c'en: un Ouvrage du Librai» re qui ne contient que des Traitez , des Déclarations de Guerre , des Manifeftes & d'autres Pièces qui regardent h France. Le hazard feui y a donné lieu. Il avoit imprimé le Traité de Nimegue avec quelques actes qui concernoienr ce Traité fous le Privilège qui lui avoit été cédé par les Commis de M. de Pompone. On lui fournit enfuite d'autres Pièces qu'il fit imprimer s, mefure qu'elles lui tomboient entre les mains. Remontant enfuite jufqu'à la Paix de Vervins, il trouva. alTez de Pièces pour compofer qua- tre Volumes, Son deffein ayant plu 430 JOURNAL D aux Miniftres, ils lui firent com- muniquer environ trois cens Pièces, il en compila les deux premiers Volumes qui commencent au Trai- té d'Arras en 1435. Si qui finillent en 1600. M. du Mont croit que M. Hamelot de la HoulTaye a eu part à cette Compilation ; parce que M. Hamelot joignit à ce Re- cueil fes Obfervations qui roulenc principalement fur les Traitez faits pendant ce tems-là, & qu'il pafTe très-légèrement fur les Traitez du dix-feptiéme liécle. Avant cette Compilation de Léonard on avoit imprimé en 1É90. un petit Recueil de Traitez , d'Aètes Si de Mémoi- res qui avoit été réimprimé à Am- fterdamen 1671. Le grand Recueil des Traitez de Paix , de Trêves , de Neutralité , de Sufpenhon d'armes , de Confédé- ration , d'Alliance , de Commerce, de Garantie Si d'autres A&es Pu- blics imprimé à Amfterdam & à la Haye en quatre Volumes in-folio fut auffi l'Ouvrage d'un Libraire. Il forma le deflein de réunir dans fa Compilation , les Traitez Si les Actes , répandus dans les differens Volumes dont on vient de parler, Si ce qu'il trouveroit ou ce qu'on lui indiqueroit dans differens Mé- moires , comme ceux de Viètorio- Siry , dans le Mercure. François , dans le Théâtre de l'Europe, CTe. Se il les rangea fuivant l'ordre Chronologique. Mais ce qui rendit fon Recueil plus confiderable Si ce qui le fit le plus rechercher, ce fut un grand nombre de Pièces que lui communiqua M. Chriitin Vicomte ES SÇAVANS; Se Viceren , Confeillcr du Roî d'Efpagne en fon Confeil de Bra- bant , de la famille des Chriftins, qui a produit de grands Jurifcon- fultcs & de grands Hommes d'Etar, Se les Pièces qui lui furent fournies par M. Van-dcr Dulîen Pétition- naire de la Ville de Goude, c\: ne- veu de M. Bcverning , employé dans plulîeurs Amballades . qui avoit recueilli un grand nombre de Traitez Manufcrits ou en feuilles volantes. Uneperfonnc intelligente fe chargea de l'arrangement des Pièces , de la compofition des Ti- tres Si de la Préface , Si de quel- ques Notes , aufquelles le Libraire joignit celles qu'il trouva dans Gui- dait, dans M. de Leibnitz Si dans quelques endroits du Recueil de Léonard. Des Libraires d'Hollande ayant refolu de donner une nouvelle Edi- tion de ce grand Recueil publié en 1700. s'adreiferent à M. du Mont , qui a eu part en plusieurs grandes Négociations , Si que fes emplois ont engage à faire une étude parti- culière des Traitez de Paix Si des anciens Titres pour le Droit des Souverains. M. du Mont ne penfoit d'abord qu'à purger le Livre des fautes qu'on y avoit lailTces en co- piant celles de Léonard , de Leib- nitz , d'Aitzema , de Perard Si des autres Auteurs dont Moetjens s'é- toit fervi. Mais le grand nombre de Pièces qu'il trouva dans les Li- vres , Si les Pièces Manufcrites qu'il avoit entre les mains tiréesde la Bibliothèque Royale de Berlin , de la Chambre des Comptes de Lille, J U I L L Lille, du Greffe des Etats Généraux des Provinces unies, des Archives de l'AmbafTade de France à la Haye , lui fie naître le deffein de former un Corps Diplomatique qui pût être pour le Droit des Gens, ce que le Corps des Loix de Juftinien cft pour le DroitCivil.M.le Comte de Sinzendorf , que notre Auteur appelle le Mécène de l'Empereur , approuva fon deffein & lui com- muniqua plus de mille Pièces im- portantes , qu'il fit tirer des Archi- ves de la Maifon d'Autriches, de fon propre Cabinet , & des Proto- coles defes Ambaffades. Pour rendre la Compilation plus complette , M. du Mont s'adreffa à toutes les Cours de l'Europe , Se il leur communiqua fon plan. Il re- connoîtque fes tentatives ne furent point abfolumcnt inutiles ; mais il ejoûte qu'elles lui ont produit beaucoup moins qu'il n'avoit lieu d'efperer. La Collection entière de M. du Mont qui commence au tems de Charlemagne & qui finit en 173 1. eft compofée d'environ dix mille Actes. Mais il avertit que pour examiner ceux qu'il de voit faire entrer dans fon Recueil , il lui en a fallu lire plus de cinquante mille, & qu'il lui a fallu chercher ceux qui étoient déjà imprimés , dans plus de deux mille gros Volumes. Il fe flatte que (i l'on confère fa Collection avec toutes celles qui l'avoient précédées , on y remar- quera une différence d'exactitude qui lui fera honneur , tant à l'égard du choix des Pièces & des Copies , Juillet. ET; 1752. 45 r qu'à l'égard du foin qu'il a pris des citations , & de l'éclairciffement des dattes. Ce dernier point fait le fujec de la plus grande partie de ces- Notes qui méritent l'attention des Lecteurs curieux de Chronologie. Il y en a quelques autres qui n'ont pour but que de faire connoître la difeordance des copies du même Acte , ou la faufleté de quelques Diplômes confiderables. M. du Mont reconnoît que pour rendre ce Recueil plus parfait il feroit à fouhaicer qu'on y fît un bon Gloffaire des termes des an- ciens Actes, tant pour le Latin & le François que pour les Actes écrits en d'autres Langues , mais fes oc- cupations ne lui ont pas permis de fe charger de ce travail ; la même raifon & l'impartialité dont il dé- clare qu'il fait profelïion , l'ont em- pêché de joindre auxPieces,desNo- tes Critiques , Historiques & Poli- tiques, qui n'auroient pas manqué de picquer la curiofité des Lec- teurs. A l'égard des Pièces qui font écrites en des Langues moins con- nues que la Latine &la Françoife , M. du Mont n'avoit point le def- fein d'en donner de traduction ; deux raifons le déterminoient à prendre ce parti ; la première , que ces traductions occuperaient une place qui feroit mieux remplie par des Pièces écrites dans la Langue originale; le fécond, qu'il auroit été très-difficile de trouver des per- fonnes capables de bien traduire ces Pièces , fur tout celles qui font écrites en Allemand , il dit que îmt Kkk 432 JOURNAL D efl cnigmt , dans les Pièces Alle- mandes qui ont quelque antiquité. Il s'eft pourtant appliqué à en don- ner une idée dans le titre qui eft en François à la tête de la Pièce , il y a même plufieurs de ces titres qui contiennent le Sommaire de ce qui eft contenu dans la Pièce. Pour ce qui eft des Pièces Lati- nes, Efpagnoles Se Italieanes, M. du Mont fuppolant que ceux qui confulteroient fa Compilation en- tendroient ces trois Langues , il n'avoit point jugé à propos de met- tre en François le titre des Pièces , comme on l'a fait dans le Recueil de 1700 il avoit auifi retranché quelques Pièces de cette Edition de 1700 qui ne lui paroiiîoicnt point devoir entrer dans Ton Plan i & quelques Notes tirées de differens Auteurs fur différentes Pièces. Mais les Libraires ont cru que s'ils fui voien« en tout le plan de M. du Mont, la compilation neferoit point regardée comme une nouvelle Edition de celle de 1700 qu'ils avoient promife au Public. C'eft pourquoi en fe fervantdu titre que M. du Mont avoit donné à l'Ou- vrage , & en profitant d'un nombre prodigieux de Pièces qu'il leur avoit fournies, & de fes Notes, ils ont fait entrer dans cetteEdition tout ce qui avoit eu place dans celle de 1700. foit par rapport aux traductions des Pièces Flamandes , Angloifcs , ou Allemandes, foit par rapport à des Manifeftes & à d'autres Pièces de cette nature , foit par rapport aux titres des Pièces , foit pour les No- t"S J on diftingue néanmoins hs ES SÇAVANS, Notes de M. du Mont des an- ciennes par la lcttreDdont elles font marquées. Il eft aulïï facile de di- ftinguer les Pièces fournies par le nouvel Editeur , de celles qui fe trouvoient dans le Recueil de 1700. parce que les noms des E.tats que les Pièces concernent font marqués en marge des Pièces en petit carac- tère capital , pour les Actes qui avoient été inférés dans l'Edition de 1700. au lieu que cette Note à la marge ne fe trouve point aux Pie- ces ajoutées dans cette nouvelle Edition : les Pièces nouvellement fournies par M. du Mont en Alle- mand, en Flamand ou en Anglois ne font point traduites dans ce Re- cueil a comme le font celles qui étoient dans l'Edition de 1700. Les Tables Chronologiques des Pièces qui font rangées , fuivant la date , font à la tête de chaque partie dont il y en a deux dans chaque Volume. Ces Tables contiennent un Extrait de la compilation , dont on voit bien que nous ne pouvons rendre un compte plus détaillé. Il faut feulement annoncer ici ce que promettent les Libraires de Hollande pour fervir à la féconde Partie du Recueil. Il y aura d'abord un Supplément au Corps Diplo- matique. Enfuite un Corps Céré- monial-Diplomatique. Ce fécond Recueil que les Héritiers de M. du Mont ont remis aux Libraires contiendra une infinité de Diplô- mes , de Traitez , de Privilèges , concernant les Titres 6V les Préémi- nences des Rois & des Princes , les Traitemens accordés dans les Cours J U I L L aux Ambaffadeurs, aux envoyés & aux autres Miniftres Publics, les dif- ferensqui ionr fur venus en tr'eux,lcs Ordres de Chevaleries , les Conte- ftarions d'entre les Souverains tou- chant le Salut de la Mer , & ce qui regarde les honneurs , les dignitez & les cérémonies. On joindra à ce Recueil de M. du Mont, un Trai- té du Cérémonial de France de M. de Sainctot , Introducteur des AmbalTadeurs. Pierre précieufe , difent les Libraires , qui n'a jamais étéimprimée. La Compilation en- tière fera terminée par un Ouvrage de M. de Barbeyrac qui a pour titre: IntroduElion & Supplément an Corps Diplomatique du Droit des Cens. On annonce que l'Ouvrage fera divifé en trois Parties ; dans la première, l'Auteur parlera de l'an- tiquité des Traitez Publics , de leurs différentes fortes , de la ma- nière dont on les faifoit , de leur ufage , de leur interprétation : la féconde , contiendra un Recueil des Traitez jufqu'au rems de Charlemagne , que M. de Barbey- tac a pu recueillir dans les anciens ET, 17 3 2. 4]j Auteurs Grecs ou Latins, ou dans les Auteurs modernes qui ont pu- blié des Infcriptions tirées des mar- bres antiques. La troiiîéme Partie roulera fur le Corps Diplomatique. M. Barbeyrac y rapportera à certai- nes claffes toutes les Pièces qui en- trent dans ce grand Recueil 3 il marquera l'ufage qu'on en peut faire , il indiquera les moyens qu'il faut prendre pour les bien entendre. Enfin on affure qu'il n'oubliera rien de ce qui pourra contribuer à faire entendre les Pièces, &: à les faire lire avec fruit. Tous ces Ouvrages que les Libraires annoncent fcrorj,t fix Volumes in-foUo , à la fin def- quels il y aura une Table alphabéti- que très-ample, tant pour le Corps Diplomatique que pour le Supplé- ment. Les Libraires affurentque ces Supplémens feront imprimés avec beaucoup plus de promptitude que le Corps Diplomatique. C'eft M. Rouffet , connu par fon Recueil Hiftorique des Traitez , Mémoires & Ades depuis la Paix d'Utrecht, qui s'eft chargé du foia de cette Édition* Kkkij 4H JOURNAL DES SÇAVANS; NOVVELLES LITTERAIRES. ANGLETERRE. De Londres. M Smith , Chirurgien & Apo- .thicaire de Kendal , a pu- blié en Anglois;'»-8°. chez Henri Lititot ton Traité des Principes de Chirurgie , avec un Difpenfaire Chirurgical , qui enfeigne la maniè- re de préparer les remèdes les plus approuvés & les plus enufage. Il paroî: chez A. M 'illard un Ouvrage nouveau auffi en Anglois & /«-8°. du célèbre M. Jacques Douglas , de la Société Royale,c£v. intitulé : Defcription du Péritoine Se de cette partie de la Membrane Cel- lulaire , qui y eft attachée. M. Douglas explique de plus la vérita- ble lïtuation de tous les vifeeres ds l'abdomen , par rapport à ces deux membranes. • J. Tonjfon " les Knaptons & plu- fieurs autres Libraires, ont en vente une nouvelle Edition in -folio des Mémoires de Whitlockf , fur les affaires d'Angleterre. Ces Mémoi- res furent imprimés pour la pre- mière fois à Londres en i 6 % i. in-folio , chez Nathaniel Tonder , fous le titre de Memorials of the English affairs , &C. C'eft-à-dire : Mémoires pour (ervir à l'Hiftoire de ce qui s'eft paffé en Angleterre depuis le commencement du règne de Charles I. en \6%y jufqu'à l'heureux retabliiTement de Char- les II. en 1660. L'Ouvrage dont nousallons par- ler &c qu'on propofe d'imprimer par Soufcription n'eft pas moins confiderable que le précèdent ; c'eft une traduction Angloife de V Hi- fioire des Troubles de la Grande Bre- tagne , depuis l'année 16} 3. juf- qu'en 1^50. par Robert Aienteth de Salmonct* Cet Auteur étoit Ecoffois , d'une Famille diftinguée : il quitta fi Patrie dans le tems des troubles , & vint à Paris , où il s'acquit beau- coup de réputation parmi les gens de Lettres. Il y fut honoré de la protection du Coadjuteur , depuis Cardinal de Retz , qui lui donna un Canonicat de l'Églife Cathé- drale. Il écrivit en François l'Hi- ftoire dont il eft ici queftïon , & il en publia la première Partie qu'il dédiai fon Protedcur , en 164.9» Chez Antoine Vitré m-if. Cette Partie qui ne va que juf- qu'en \6^é fut, après la mort de l'Auteur , réimprimée en 1661. chez Auguftin Courbé , in-folio , Se elle eft (uivie dans cette Edition de la féconde Partie qui finit à l'année 1649. inclufivement. On trouve à la fin de ce Livre une Relation des véritables caufes & des conjonctu- res favorables qui ont contribué au rétabli ffement du Roi de la grande Bretagne , dédiée à M. Foucquet 3, J U I L L par D. Riordan de Mufery. Cette Pièce fera auilî traduite en Anglois, &c le tout fera un Volume in-folio de 150 feuilles. Le prix de la Souf- cription eft d'une guinée pour le petit papier & de deux guinées pour le grand. On en paye la moitié en fouferivant. M. François Clifton , Médecin du Prince de Galles , & Membre du Collège des Médecins & de la Société Royale , va donner auflî par Soufcription une Edition de toutes les Oeuvres d'Hippocrates en Grec & en Latin en trois Volumes /K-40. dont le prix fera de deux gui- nées pour les Soufcripteurs. On foufent chez W- lnnys. Le même Libraire reçoit des Soufcriptions pour l'Edition des Harangues & autres Fragmens de Ljfias , en Grec & en Latin , la- quelle doit paroître par les foins de M. J. Taylor } du Collège de faint Jean à Cambridge. Elle fera en un Volume /a-40. pour lequel on don- nera douze Shellings , dont fix Shellings en fouferivant &C le refte en recevant l'exemplaire. C. Rivington imprime /'«-40. par Brochures ou par Nos la Traduc- tion Angloife des Mémoires, pour fervir à l'Hiftoire Ecclefiaftique des fix premiers fiécles. Par M. de T-il- kmont. HOLLANDE, D' Amsterdam. Les Wetfleins & Smith débitent ia belle Edition in-folis de Thucy- ET, 1732; 4ÎJ. Aide en Grec & en Latin , donnée par M. Duker. Nous en rendrons compte incefiamment.Cette édition fc trouve à Paris chez CavelierSc chez quelques autres Libraires. FRANCE De R o v e n. P. Boucher , Euft. Hérault & Jore pere & fils , ont imprimé &c débitent R. P. D.Johan. Mabillo- nii Prafationes Attis Santlorum Or- dinis S. Benediïït } m fitculorum claffes diflnbutis , prafix* ; cjuibus accedit ejufdem difquifitio de Curfu Gallicane 1732. in-^°. De Paris. Voici les titres de quelques Li- vres nouveaux que nous n'avons pas encore annoncés* La Genefe en Latin & en Fran- çois 3 avec une explication du fen9 littéral & du fens fpirituel, tirée de l'Ecriture & de la Tradition» Chez Emery fils , Quai des Augu- ftins, à S. Benoît. 1732. in-n. Sermons choifis fur les My frères , la vérité de la Religion y & differens^ fujets de la Morale Chrétienne ■ &c. Tom. XI. contenant les Panégyri- ques. Chez N. Lottin , rue Saine Jacques, à la Vérité, ijyt. in-n,. Le Banquet de Platon-, traduit un tiers par feu M. Racine de l'Acadé- mie Françoife, & le refte par Ma- dame de * * *. Chez Pierre Gan- doum , Quai des Auguftins , à h.\ Belle-Image. 1732./»-! 2. 43<î JOURNAL D Pierre Frank a en vente : Traité fur la Magic , le Sortilège , les Pof- feffions , obfe fiions & maléfices", oit l'on en démontre la vérité' & la réali- té : avec une méthode (lire Û" fiicile pour les dtfcerner , & les règlement contre les Devins , Sorciers , Magi- ciens, &cc. Ouvrage très-utile aux Ecclefiaftiques , 3ux Médecins & aux Juges. Par M. D*** 17J2. *'*- 12. Mélifthénes , oaVllluflre Perfan: Nouvelle, par M. de /»***. Chez le même , Quai de Gcvre , au Pa- radis- 1732. in-\i. Effai fur le bon goût en Mufique. Par M. Grandval. Chez le même P. Prault. On trouve encore chez le même Les Sultanes de Guzarate , ou les Songes des Hommes éveillés. Contes Mogols. Par M. Geullette. 1732. in- 1 2. trois vol. Recueil de Pièces , d'Hifloire & de Littérature : Tome fécond , à Paris, chez Chaubert j Libraire du Journal. Ce Volume , que nous avons déjà annoncé comme devant paroître incedamment, contient les Pièces fuivantes. La Vie de Plutarque , traduite de V Anglais de Dryden. Discours fur l'état des Nations à la Naiffance de Jefus-Chhfi. Dijfertation fur les Donations de Pépin & de Charlemagne à l'Eglife de Rome , dans laquelle on montre quelles font le commencement de U Souveraineté des Papes. Dtfcours fur les faux Prophètes & fur les moyens de les difeetner d'avec les Proplktes véritables. ES SÇAVANS, Diprtation fur la Codeïlion d'ifi- dore & fur les Décretales attribuées aux premiers Papes. Sentiment d'un homme d^ef prit fur la Nouvelle intitulée Dom Carlos. Riponfe de M. B* * * Confeiller, au Parlement de Bourdeaux , à une Lettre que Monfieur Durand lui 4 écrite au fujet des Dtfcours de M. de la Motte fur la Poe fie 'Dramati- que. Le même Chaubert & Com- pagnie doivent inceffamment ouvrir la vente des Livres provenans de la Bibliothèque de feu M. le Préfident Frizon de Blamont. Le Catalogue qu'ils en impriment actuellement ,fe diftribuera chez Ottrdel} David le jeune Se Chaubert , fur le Quai des Auguftins ; dans la rué' S. Jacques , chez Ofmont 3Huart ,Cloufier; &chez Giffey , rue de la vieille Bouderie. Avis aux Soufcripteurs des Eftam- pes gravées & a graver d'après les Tableaux du Cabinet du Roi , de Monfeignettr le Duc d'Orléans & des particuliers. M.CroZAt a bien voulu donner fes foins pour faire graver les cent quarante Eftampes d'après les Ta- bleaux ou les Defleins de l'Ecole Romaine , & qui compofent , avec l'abrégé de la Vie des Peintres , le Volume qui eft en cwt d'être déli- vré. On délivrera même avec ce Volume vingt-neuf Eftampes gra- vées d'après des Tableaux & des DelTeins de l'Ecole Vénitienne ; Se ces vingt-neuf Eftampes acquitte- ront les quarante livres qui lui ont été payées d'avance au-delà des cent vingt livres du prix fixé d'abord J U I L L E pour le premier Volume : laquelle fomme lui a été payée ou doit l'être, par les perfonnes qui ont pris les quatre cens cinquante Soufcrip- tions qu'il a délivrées. Il n'en a pas diftribué davantage fur les huit cens qu'il avoit propofé de délivrer au Public. Cet Ouvrage fi utile & fi hono- rable à notre Nation , feroit de- meuré imparfait, fi M. Robert, Peintre de M. le Cardinal de Rohan , & qui demeure à l'Hôtel de Soubifc , n'avoit bien voulu fe charger de le continuer. En faveur de la continuation de cette entreprife , les Soufcripteurs auront agréable de faire payer d'a- vance vingt-quatre livres pour cha- que Soufcription en grand papier , & vingt livres pour les Souscrip- tions en papier ordinaire ; & ce en retirant de chez M. Crez.at les vingt-neuf Eftampes d'après les Ta- bleaux de l'Ecole Vénitienne , & qui feront inceftamment en état d'être délivrées.Il y en a déjà vingt- fept de prêtes. Il fera donné un reçu de cette avance au dos de la Souf- cription ; & en faveur de cette avance, M. Robert s'engage de con- tinuer à faire graver feize Eftampes •qu'il aura foin de faire délivrer dès T, 1752. 437 qu'elles feront achevées : il conti- nuera de fuivre cet ordre jufqu'à ce que les cent dix Eftampes qui com - poferont le fécond Volume , & qui feront gravées d'après l'Ecole Véni- tienne, foient achevées. Il y en au- ra cent d'après des Tableaux qu'on choifit parmi ceux qui n'ont pas en- core été gravés , &: dix d'après des Defleins de Peintres , dont on n'a pas de Tableaux en France. A ces Eftampes fera joint l'abrégé de la Vie des Peintres de cette Ecole. Principes généraux & raifonnês de la Grammaire Françoife par M. Reftaut , Nouvelle Edition de moi- tié plus ample que la première & à laquelle l'Auteur a ajouté un abrégé des Règles de la verfificatiox Fran- çoise, Le prompt débit de la pre- mière Edition de cet Ouvrage dont nous avons donné l'Extrait dans no- tre Journal de Janvier 17 3 1 . fournie un préjugé favorable du fuccès que doit avoir cette féconde ; elle fera mife en vente dans le courant de ce mois , nous ne manquerons pas de rendre compte des additions que l'Auteur y a faites : il doit en même tems publier un abrégé féparé des principes de la Grammaire François fc à l'ufagc desenfans. 438 JOURNAL DES SÇAVANS; Fautes à corriger dans le Journal d'Avril 173 1. PAgc 193. col. prem. ligne 7. la vieille mode , lifé^h vieille Mode : pag. 199. col. prem. lig. 20. la bonne union , lif. la bonne opinion : pag. 200. col. 2. lig. 16. qui les nourrit Se qui les fait croître, ///". qui le nourrit Si qui le raie croître: pag. 201. col.2.1ig. 2 5»brayez , lifez.bioyès: pag. 202. col. 2. lig. 22. lardrauce, UJ. lardrance: pag. 205. col. 2. ligne dernière, des OperateursChyrmftes , ///. des Opérations Chymiques. Vans le Journal de May. Pag. 292. col. 2. lig. 7,6. terminaife, lif. terminaifon. Dans le Journal de Juin. Pag. 542. col. première , lig 6. le Choiuareme Si le Manvafralnahar , lifez le Cho'warefme Si le Maivaralnahar. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Juillet 1732; DIJfertation Critique & Théologique fur le Concile de Rimini , page 377 Hijloire Naturelle de Warjovie , &'c. 385 Difcours fur la Peinture , Sic. par Charles Coy pel , 3 9 j Lettres édifiantes & curieufes des Mi (fions étrangères, &c. vingtième Recueil, 199 La Vie de SaUdin , tirée de l'Hiftoire Vniverfelie (tAitulfeda , Sic. 404 Ui foire Critique des Pratiques Supcrftiticwfes qui ont féduit les Peuples (y embarra fêles Sçavans , Sec. par le Perele Brun „ 414 La Gaule Chrétienne , divifée par Provinces Ecclefiajliques , Sic.Tome If. 422 Corps Vniverfel Diplomatique du Droit des Cens , Sec. Tome VI II. 428 Nouvelles Littéraires , 434 Fin de L Table. L E JOURNAL SCAVANS, v o U R L'ANNEE M. DCC. XXX II A O U S T.. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY, LE JOURNAL DES SC A VANS; AOUST M. DCC. XXXII. WARSAVIA PHYSICE ILLUSTRATA, SIVE DE AERE, Aquis, Locis , & incolis "Warfavix , eorumdemque moribus Se mor- bis Tra&atus : cui annexum cft Viridariuni, velCatalogus Planrarum circa Warfaviam nafeentium. Autorc Chriftiano-Henrico Erndrelio Philof. & Mcd. Doftore, Sacr. Regix Majeft. Polon. & Ele&or! Saxon. Archiatro , Se Nat. Curiof. Germania: Collega. Drefdse , apud Joli. Chriftoph. Zimmermanni Hxred. & Johan. Nicol. Gerlachium. 1730. C'eft-à-dire : Hiftoire Naturelle de IVarfovie y où il efl traité de l'air de cette Fille , de [es eaux , de fort terroir , des mœurs & des mala- dies de [es Habit ans. On y a joint un Catalogue des Plantes qui n*iff$*f Aouft. Lllij 14* ^aNAL DES SÇAVANS; aux environs de cette même Ville. Par Clmftien-Hcnri Erndtel , Doileur in Philofophie & en Médecine , premier Médecin du Ro: de Pologne , & Membre de l'Académie des Curieux de la Nature. A Drefde , chez les Héritiers de Jean - Chriftophle Zimmermann &: Jean-Nicolas Gcrlach. 1730. ;»-4°. pp. 247. pour l'Hiftoire : pp. 132. pour le Catalogue „ planch. détacli. 3. DE S fîx Chapitres qui compo- fent cet Ouvrage , les deux premiers où il eir parlé de la fnua- tion de Warfovic Se de l'air qu'on y refpire , ont fait la matière d'un premier Extrait. Il nous refte à ren- dre compte dans celui-ci des Cha- pitres fuivans. Chap. III. L'Auteur fait plu- sieurs obfervations fur les eaux en gênerai 3 avant que de s'engager dans un examen particulier de cel- les que l'on boit à Warfovie. Il n'eft point du fentiment de ceux qui croyent que la mer fournit l'eau des fources , en fe filtrant à travers les pores de la terre , où elle dépote fes parties falines : & il trouve dans cette hvpothéfe de trop grandes diffîcultez. Il aime beaucoup mieux s'en tenir à la fimple' évaporation de l'eau marine , qui raffemblée en l'air produit les rofées , les pluyes & les neiges , d'où naiffent toutes les fources. Sur quoi il n'eft. point ébranlé par l'expérience de M. de la Hire , qui s'eft efforcé de prou- ver que la pluye ne pénétroit point la terre au-delà de feize pouces de profondeur. Ce qui ne peut faire «ne règle générale , ( dit notre Au- teur ) puifque , d'un autre côté , le Géographe Bern. Varenins allure que cette pénétratioa peut aller juf- qu'à dix pieds , & puifque la poro- fité de la terre doit être fufceptiblc du plus Se du moins, fuivant la diverfirc des terroirs. D'où il eft naturel de conclure l'exiftence de quantité de refervoirs fouterrains , entretenus par les pluyes , qui félon le calcul de Perrault ex de Manot- te , tombent en allez grande abon- dance chaque année , pour perpé- tuer le cours de tous les FleuVéV L'Auteur examine enfu e les qualitez des principales cJpeces d'eau potable , qui iont celles de pluve, de fontaine^, de puit -■ pitoyablement. Et quoique les Tar° 44 Il obferve que l'hydropifie , la jauniffe & la phthific , font àWarr fovie prefque toujours mortelles , parce qu'elles font ordinairement les fuites de la crapule & de la dé- bauche. L'Ophthalmie ou l'inflamma- tion des yeux , plus ordinaire aux étrangers qu'aux gens du Pays, fc guérit par la faignée , 8c fur tout par les purgatifs réitérés ; ce qui s'accorde avec l'obfervation de Spigelius au fujet d'un aveugle gué- ri par un cours de ventre venu fu- bitemenr. A l'égard d'une autre efpece d'Ophthalmie , qui eft la vé- nérienne , & qui furvient fouvent à une gonorrhée virulente fuppri- mée mal à propos ; elle eft ordinai- rement fuivie de la perte totale de l'œil } à moins que l'on n'ait eu foin dès le commencement du mal } d'extirper adroitement une excref- cence maligne qui fe forme autour delà cornée , & qui perçant bien- tôt cette tunique , procure la fortie de toutes les humeurs de l'œil. L'Auteur attribue à S. Tves célèbre Oculiftede Paris la première épreu- ve de cette opération. Dans les pleurefies &c les péri- pneumonies , le remède capital t félon lui , eu: la faignée faite dès les premiers jours Se répétée jufqu'à 4 fois [ Se c'eft beaucoup pour les gens de fon Pays.] Il y joint l'ufage du blanc-de-baleine & des dia- phoniques abforbans. XI compte encore beaucoup fur la faignée , pour la cure de l'apo- plexie , auquel cas il préfère celle des veines jugulaires à toute autre, M mmij 45-0 JOURNAL D 11 a beaucoup moins de confiance aux vomitifs en pareille occafion ; mais il fait grand cas des volatils les plus puiffans , propofant même jufqu'à l'efTcnce de cantharulcs. Il n'oublie pas de conleillcr aulïi le fer rouge appliqué fur la fontaine de la tête Si à la plante des pieds. A l'égard des fièvres malignes épidemiques, M. Erndtel n'exclut point de cette cure la faignée , pourvu qu'on y ait recours dès le commencement, Se qu'on fe ren- ferme pour la fuite dans l'ufage des cordiaux Se des diaphoniques : car il paroît que les purgatifs lui font fulpects en pareil cas. Il traite fur le même pied les petites-véro- les » à l'exception qu'il y prodigue beaucoup moins les cordiaux , Se qu'il purge fouvent à la fin de la maladie. Il a tiré ( dit-il ) peu de fecours de Plpecacuahna pour la gttérifon des dysenteries ; encore moins des autres purgatifs , fans en excepter la rhubarbe fi vantée pour cette maladie par certains Médecins. Il s'eft réduit pour cette cure à un lé- ger émétique , emprunté pourtant de l'Ipecacuahna , aux anodyns tant en lavemens qu'en fomenta- tions , aux balfamiques aftringens mêlés avec les diaphonique Se les narcotiques. Quant au traitement de la Plica, elle n'admet que la cure palliative , Se il eft dangereux ( comme nous l'avons obfervé plus haut ) de vou- loir la guérir radicalement. Il n'eft queftion que de favorifer par toutes fortes de moyens l'cxpalfion dule- ES SÇAVANS; vain qui caufe cette étrange mala- die , &qui ne trouve fonilTue faci- le que par la racine des cheveux qu'il fait croître exceffivement en tout fens. Nulle autre évacuation n'eft capable ( dit l'Auteur ) de remplir cette indication capitale : ni faignée , ni purgation , foit pac haut, foit par bas. Il faut s'en tenir pour l'extérieur aux topiques ap- propriés, c'eft-à-dire aux fomentan tions réitérées faites avec une dé- coction du Lycopadium ; [ forte de mouffe , appelléc autrement pat Gafp. Bauhin Mufcus terrefiris cla-> vatus : ] Se pour l'intérieur à l'ufa- ge des cordiaux diaphoretiques , tels qu'un mélange de poudre de cloportes & de vers de terre , de cinabre , de bezoard minerai Se de fel volatil de vipères, en y joignant, fuivant l'occafion , les abforban* antimoniaux , Se les ptifannes de Guayac Si de Sarfepareille. A la fuite de cette méthode gé- nérale de guérir , eft imprimée une Relation particulière des maladies qui ont régné à Warfovie pendant l'aînée 1720. avec la manière donc eltes ont été traitées j le tout extraie des Journaux de Breflav écrits en Allemand , où l'Auteur l'avoit fait d'abord inférer, Se traduit en Latin par lui-même. Cette Relation où l'on fuit exactement les différente» maladies félon l'ordre des Saifons où elles ont paru , contient plu- fîeurs obfervations fingulieres &C qui méritent d'être liies. Le Catalogue des Plantes qui croiflent aux environs deWarfovie- rempli les I|*« dernières page*. A O U S T; 1732; I 45*1 ■ èc ce Volume. Ces Plantes y font riflent., l'endroit où elles naiffent: rangées fuivant l'ordre alphabeti- & l'on y trouve quelques difputes que, au nombre de 91 6. On y ap- de Botanique décidées ou par l'inf- prend leurs noms Latins & Polo- pection même des Plantes , ou con- nois , leurs caractères génériques & foimérnent à la Méthode de Rivin. fpécifiques , le tems où elles fleu- EUTROPII BREVIARIUM HISTORIEE ROMAND , CUM metaphrafi Graeca Pxanii , & Notis integris Elis Vineti , Henrici Glareani , Tanaquilli &c Anna: Fabri , Thoma: Hearnii ; item felcctis Frid. Sylburgii & Chrift. Cellarii. Accedunt Sexti Rufi Breviarium cum Notis integris Chriftoph. Cellarii ; & Meiïila Corvinus de Pro- genie Augufti ; ut & Anonymi Oratio funebrisin Conftantinum ju- niorem. Ex M(T. Bibl. Lugd. Bar. Recenfuit Sigebertus Havercampus qui & fuas &c Chriftoph. Augufti Heumanni Notas adjeert. Cum Indi- eibus copiofiiîimis. Lugduni Batavorum. Apud Johannem Arnoldum Langerak. 1729. C'eft-à-dire : Abrégé de l'Hiftoire Romaine , par Eutrope , avee la verfion Grenue de Paanius, les Notes entières de Vmet t de Glarean t de Tanegui le Fevre , de [a fille , âe Htarne ; & les Notes shoifies de Sylburge , & de Cellarius. Ony a joint l'Abrégé de cette même Hiftoire , par Sextus Rufus , avec les Notes entières de Cellarius ; Méfia- la Corvinus , de la famille d' A ugufte ; & l' Oraifon funèbre de Conftantitt le jeune , par un Anonyme. Le tout conféré fur les M fi de la Bibliothèque de Leyde , par Sigcbert Havercamp , & accompagné de fes Notes & de celles de Chriflophle Augufle Heumann : avec des Tables très-amples. A Leyde, chez Jean Arnold Langerak. 1729. in- 8°. pag. 774. fans la Préface , les Prolégomènes 6c les Tables. PARMI les Abbréviateurs de l'Hiftoire Romaine , Eutrope mérite certainement un rangdiftin- gué. C'eft en effet celui que l'on doit mettre d'abord entre les mains de la jeunefTe » à qui l'on veut don- ner une première teinture de cette Hiftoire. Il Ta écrite d'un ftylefim- ple , net & facile , dérogeant quel- quefois , il eft vrai , à cette extrême pureté qui caracterife les Auteurs Latins du bon fiecle ; mais en ré- compenfe il eft très-exaft à mar- quer les dates des événemens , ce qui" facilite infiniment cette forte d'étude , & fait une imprefllon plus vive & plus durable dans la mémoi- re des Lecteurs. Il partage fa nar- ration en dix Livres , &la conduit depuis la fondation de Rome juf- qua la mort de l'Empereur Julien; c'eft à-dire pendant le cours de 1 \\$ . ans. Nous ne connoiflbns cet Hifto- rien , que par les témoignages de quelques anciens Auteurs , tels que Suidas, Prifcien, Jean Malala,Geor- gc Codin 3 Nicéphoie Grégoras ■* 412 JOURNAL D &c. Nous apprenons d'eux qu'Eu- trope écoit Italien , Sophifte de pro- feffion ; qu'il fut Secrétaire de Con- ftantin pour les I et ks -, qu'il ac- compagna Julien dans l'expédition de ce Prince contre les Perles , &le vit mourir dans le Camp des Ro- mains; qu'il écrivit cet Abrégé par l'ordre de l'Empereur Valcns au- quel il le dédia , & qui en avoit d'autant plus de beloin , qu'étant très- peu lettré par lui-même , il ne pouvoir acquérir trop promptement une connoiflance hiftorique de l'Empire qu'il gouvernoit. On voit pat l'établiffement de ces époques le peu d'apparence qu'il y a que nôtre Hiftorien ait été Dif- ciple de S. Auguftin , comme l'ont avancé divers modernes trompez fur ce point par une Lettre de Gen- nadius , où celui-ci fait mention d'un Prêtre nommé Eutrope , qu'il range à la fuite de S. Auguftin , d'Orofe & de quelques autres, au- quel cas nôtre Hiftorien eût vécu non .feulement fous Conftantin , de fous toute la pofterité de cet Empe- reur ; fous Valentinien & Valens, mais de plus fousGratien,fousThéo- dofe, éc fe fut encore trouvé affez jeune fous l'Empire d'Arcadius Se d'Honorius , pour devenir le Dif- ciplede S. Auguftin : ce qui paroît à Gérard Jean Voffius hors de toute vrai-femblance. D'ailleurs, ajoûte- t'il , il s'enfuivroit de là qu'Eutrope auroit été Chrétien : ce qui eft fort douteux , puifqu'il ne dit pas un mot des dix perfecutions. A la ve- nte , il témoigne que Julien pcife- cuta la Religion Chrétienne , fans ES SÇAVANS, etfulïon de fang : mais cela prouve- t'il le Chnftianifme d'Eutrope comme l'ont pretendu quelques Ecrivains -, Si un Paycn ne pouvoit- il pas tenir ce même langage î Rien ne marque mieux ( conti- nué" Voulus ) l'eftimc où étoit no- tre Auteur, fjr-tout parmi les Grecs, 3ue le foin qu'ils ont pris de le tra- uire en leur langue. Un Hiftorien originaire de Lycie, & nommé Ca- piton , en fit une verfion Gréqu« (au rapport deSuidas ) laquelle ne fc trouve plus. Nous en avons une fé- conde attribuée à Ptanius , impri- mée plufieurs fois , & qui n'a pas été oubliée dans cette édition. Cel- larius croit cette verfion prefque auffi ancienne que l'original;ce qu'il s'efforce de prouver par un partage d'Eftienncde Byzance. Quant au ftyle Latin d'Eutrope,' on peut dire que Paul Diacre y a fait grand tort par les additions de fa façon qu'il y a fourrées , comme on peut aifément s'en convaincre en examinant les onze premiers Livres de l' Hiftoire meflée, réimprimée nou- vellement dans la riche Colle&ion des Hiftoriens d'Italie due au Sça- vant M. Muratori. Jean-Baptifte Egnatius eft le premier qui ait ef- faye de dégager Eutrope des fré- quentes interpolations où Paul Dia- cre l'avoir comme noyé , te de le tirer au clair , j^our aind dire. Il le fit imp imer à Venife en ijzo. & cette J:rion fur rcnouvcllée plu- fieurs fois- M ' '• Antoine Schcnbo' rce Chanoine de Bruges, yr.availla beaucoup plus efficacement dans la fuite , à l'aide d'un M S. trouve à A O U S Çand , cV-'quioftroitlepur texrede l'Htftorien excmc de toute addi- tion. C'eft donc cette édition de Schonhove publiée à Bafle,en 1546. puis en 1552. /»-8°. qui nous a fait voir pour la première rois Eutrope dans tout Ton naturel. Elie Vinet y fit de nouvelles corrections, guidé par un M S. confervé à Bourdeaux , & le fit imprimer avec fes Notes à Poitiers, à Balle & à Paris, en 1553. J9.& 60. in-ïi. Il réparut à Lyon en 1 594. in 8°. parles (oins de Paul Merula , avec les Notes d'Henri Glarcan, celles de Vinet , & les huit Livres des Supplémens de Paul Dia- cre. Frideric Sylburge le fit réimpri- mer revu fur un M S. de h Biblio- thèque de Fulde , co ijointement avec les autres Ecrivains de l'Hiftôi- re Romaine, & avec la verfion Gré- que de Pttmjus tirée de la Biblio- thèque de François Pitbou. Chrifto- phle Cellarius en donna deux édi- tions > uneàZeitsen 1^78. l'autre à Jene,en 1697. toutes deux /«-8*. avec des Notes , des Variantes & la verfion Gréque. Tanegui le Vivre avoit publié Eutrope à Saumur , en 1667. <»-8°. avec Aurelius Vi&or , Se les avoit accompagnez de cources Notes l'un & l'autre. Cette édi- tion de le Févre fut renouveUéc à Londres en 1705. Feu Madame Dacier mit au jour la fienne à l'ufa- ge de Monfeigneur le Dauphin , à Paris, en 168$. in-40, elle fut réim- primée à Oxford, en i6<)6» in-%". Norre nouvel Editeur s'étonne avec taifon que cette fçavante femme ait avancé dans fa Préface , qu'elle n'a- Toit trouvé nul fecoms par rapport f ' * 7 3 a; 45"? à Eutrope , & que perfonne n'avoit écrit fur cet Hiftoricn , du moins qu'elle n'en avoit aucune connoif- fance : pendant que fon édition eft pofterieure à celles de Cellarius, de Vinet Se de Glarean } aufquelles il lui eût été racile de recourir. Cette obfervation critique de M. Haver- camp ne laide pas d'être aftaifonnée de tous les éloges qui font fi légiti- mement dûs à Madame Dacier. En- fin la dernière édition d'Eutrope Se la plus parfaite qui ait paru jufqu'à prefent , eft celle de M. Thomas Hettrne , revue fur fept M S S. & fur toutes les précédentes éditions, & par conféquent chargée d'une in- finité de Variantes , imprimée à Ox- ford , en 1703. i«-8°. C'eft donc cette édition de Mp Hearne , que M. Havercamp s'eft principalement propofée pour mo- dèle. Il en a fcrupuleufement raf- femblé les diverfes leçons , auf- quelles il a joint celles que lui ont fournies de nouveau les M S S. de la Bibliothèque de Leyde. Il a faic réimprimer toutes les Notes indi- quées dans le titre de ce volume , parmi lefquidles il en a inféré quel- ques-unes de fa façon -, mais il a cru devoir être d'autant moins prodi- gue en ce genre , que le texte d'un Auteur aulfi laconique que l'eft Eutrope , ne lui a parudeja que trop furchargé de Commentaires. Pour- quoi donc ,(dira-t'on , ) n'en avoir pas retranché une grande partie ,. dont on auroit pu fe palier fort aifé~ ment ? Il ne s'agit pas ici ( répond notre Editeur ) des befoins des Sça- vans , qui fe réduifent à peu de 4*4 JOURNAL D sholes. Il eft queftion de foulager les étudians pour qui les diffkultez naiffent à chique pas , &c ne peu- vent trop s'applanir. Il nous aver- tit que n'ayant pu recouvrer la féconde édition de Cellarius que lorsqu'on achevoit celle-ci , il n'a pu faire d'autre ufage des nouvelles notes que lui offroit cette féconde édition , que celui de les renvoyer à la fin de la (îenne , conjointement avec la nouvelle Préface de ce mê- me Editeur. M. Havercamp s'eft trouvé dans le même cas , par rap- port à un M S- de la Bibliothèque de Leyde , qu'il n'a pu confulter qu'après coup5 & dont il nous com- munique fidèlement quelques Va- riantes dans fa Prérace , pour n'a- voir rien à fe reprocher fur l'article des orr.iffions. Il a -fuivi pour le partage de chaque Livre en Cha- pitres , la divihon de l'édition Dau- phine , où ils font plus multipliez , Ce par- là d'une plus grande com- modité pour les renvois delà Table de tous les mots au Texte. A l'égard des dates qui font les années depuis la fondation de Rome , elles font fujettes à quelques variations , foit entre les Commentateurs , qui ne s'aflujettiflent pas toujours aux mê- mes fartes , foit de la part d'Eutro- pe lui-même , qui s'eft conformé aux differens calculs chronologiques des Hiftoriens qu'il abregeoit , dont les uns s'en tenoient à celui de Yarron ,& les autres s'en écartoient. A la fuite d'Eutrope , paroît dans ce volume l'Auteur d'un Abrégé concernant les Victoires & les Pro- vinces du Peuple Romain, & fur le ES SÇAVANS,- véritable nom duquel les Sçavanc font peu d'accord. La plupart , tels que Jofeph Scaligcr , Cafaubon 8C Ezechicl Spanheim , le nomment Sextits /?;//wr,d'autres l'appellent Ru- fus Feftus , Ik. de ce nombre eft Hen-; ri de Valois , qui le prend pour le Feftus dontZozime , Suidas & Eu- napius ont parlé comme d'un hom- me cruel. Il y a là-defTus un troifié- me fentiment , & c'eft celui de Thomas Reinelius & de Jacques Godefroi , qui des deux noms n'en font qu'un , Sextus Rufus Feftus , par lequel ils defignent cet Abre- viateur. Quoi qu'il en foit , on doit le regarder comme plein d'érudi- tion , très-verfé dans l'Hiftoire , Se d'autant plus convenable aux jeunes étudians , qu'il indique fommaire- ment les guecres & les conquêtes des Romains , fuivant l'ordre des Provinces qui en ont été fucceffîve- ment le fujet. Il entreprit cet ouvrage par l'or- dre de l'Empereur Valens , Se le lui dédia. Par conféquent , il étoit con- temporain d'Eutrope ; mais il n'é- crivitpourtant qu'après lui.La preu- ve en eft qu'il a fouvent puifé dans l'Abrégé d'Eutrope , ainfi que l'ont, obfervé Scaliger , Valois Se Lindcn- broge. D'un autre côté fes Extraits ent fourni matière à ceux de S. Jé- rôme & de Paul Orofe. On prétend qu'il a écrit cet Abrégé l'an de J. C. $6<). fous le Confulat de Valenti- nien & d'Aurelius Vi&or qui tom- be à la cinquième année de cet Em- pereur : ce que Jacques Godefroy prouve par la fin de ce petit ouvra- ge comparée avec l'Hiftoire d'A- mien A O U S mien Marcellin. A cet Abrégé de Rufus eft joint un ancien catalogue des Provinces Romaines , connu des Sçavans fous le nom de bchonhove , fon premier Editeur , & qui donne une notice plus coniplette de ces Provinces. Durefte M. Havercamp publie ici cet Abrégé tel que Cellarius le mit au jour à Hall en Saxe , en 1698. itt-29. Mais le nouvel Editeur l'a conféré fur un M S. de la Biblio- thèque de Leyde , & rend compte des Pariantes dans quelques notes inférées parmi celles de Cellarius. C'en1 de la Préface de celui ci que nous avons emprunté le petit détail qu'on vient de lire au fujet de Sex- tus Rufus. A cet Abbreviateur fuccéde la verfion Gréque d'Eutrope , par V&a- nius j publiée pour la première fois par Sylburge , en 1 j 89. d'après un feul M S. mutilé malheureufement de quelques pages. CeTraducteur ne fe picque pas d'être par tout littéral; il ajoure en certains endroits ; il re- tranche en quelques autres. Ses ad- ditions donnent quelquefois du jour à des pacages obfcurs , quelquefois elles pervertirent le fens. 11 omet allez fouvent quelques noms pro- pres ; il prend le change fur la pen- fee de fon Auteur , & par là décelé fon ignorance , foit en fait de Lan- gue Latine , foit en fait d'Hiftoire. C'eft dequoi Sylburge ne manque pas de produire bon nombre d'exem- ples dans les notes critiques dont il accompagne cette verfion Gréque, & qui font imprimées dans ce volu- me au bas des pages. Au furplus , Âoujl, T, 1732. 45-5 cet Editeur eftime que Pa?aniusn'é- toit guéres moins ancien qu'Eutro- pe , ce qu'il infère d'un partage du IX. Livre , où le Traducteur Grec parlantdeNarlesRoi de Perfe.Con- temporain de Dioclétien , dit que ce Roi étoic ayeul deSapor &: d'Hor- midas , dont le règne ( ajoûte-t'il ) s* eft étendu jufait'a notre temps. Ce qui ne paroillant ni dans le texte La- tin d'Eutrope , ni dans les additions de Paul Diacre , fait aflez connoître que le Traducteur l'a avancé de fon chef, & que par conféquent il vi- voit alors. La quatrième Pièce inférée dans ce volume telle qu'on l'a déjà vue dans l'édition d'Eutrope de M. Hearne , cft l'Oraifon funèbre de Conrtantin le jeune , fils du grand Conftantin , écrite en Grec par un Auteur Anonyme , & traduite en Latin par Morel. Celui-ci juge par le ftyle de cette Pièce d'éloquence , qu'elle eft l'ouvrage d'un Sophifte Athénien , qui n'etoit pas un Ora- teur médiocre, & dont les maximes & les fentimens déclarent artez le Chriftianifme. Morel en avoit eu la communication par le moyen de Thomas Godetroy fils de Denys fa- meux Jurifconfulte , qui en avoit tiré une copie d'après un M S. delà Bibliothèque Palatine. Dans cette Oraifon , ou plutôt cette Plainte fu- nèbre , l'Orateur déplore la mort du jeune Empereur Conftantin. Cette mort eft racontée diverfement par les Hiftoriens ; les uns , comme So- crate& Sozomcne , l'aceufent d'a- voir voulu envahir les Etats de fon frère Conftans \ Cv certainement l'en; Nnn tfC JOURNAL D droit où il fut r téjC'eft à-dire le voi- fmage d'Av]uiuc, montre clairement qu'il avoir franchi les limites de fa donvnarum bornée par les Alpes. Les autres, comme Zozime5af!urcr.t qu'à l'occaiion de quelque difpiite furvenuë entre les deux frères , au fujet de l'Afrique parthagïnoifc & de l'Italie , mais fans aucune décla- ration de guerre •> Conftans mit des Troupes en Campagne, fous pré- texte d'aller au fecours de fon frère Conftnntius engagé dans la guerre de Perfe , mais avec un ordre iecret de fe rabattre fur Conftantin , qui n'étoir point fur fes gardes , & de le tuer. Le dernier morceau compris dans ce volume eft l'écrit publié fous le nom de Meiïala Corvinns touchant la famille ou les ancêtres d'Augufte, & dans lequel on expofe l'origine de Rome & fes premiers progrès. C'eft un nommé Jacques Bedrot, qui, comme on le voit par l'Edition de Mayence publiée en 1540. a mis le premier cet Ouvrage en lu- mière. M.Hearne l'aconreré fur un M S. de la Bibliothèque de Lincoln à Oxford; Se c'eft d'après l'Edition de cet Anglois , Se avec fes Notes , qu'd paroîr dans celle-ci. Dureftc, rous les Sçavans conviennent que c'eft une pièce entièrement fuppo- fée ; & Voilîus le père eft fort de l'a- vis de Barthius , qui la regarde com- me une production du moyen âge. On peut confulter ce qu'il a recueil- li touchant la vie &c les écrits du véritable Meiïala , dans fon Traité des Hiftoriens Latins , liv. 1. cb. ES SÇAVANS , Le foin de nous faire connoître combien cette nouvelle Edition d'Eutrope l'emporte fur toutes les précédentes , n'eft pas le feul qui occupe M. Havcrcampdansfa Pré- face. Il en employé les cinq der- nières page s à repoufîer les mjuftes aceufations d'un Proreffeur fonCol- legue, &: ci-devant fon ami,qui s'eft déchaîné contre lui fans fujet & l'a chargé d'injures. Ce Collègue, qu'il ne nomme pas , mais qu'il déligne aftez , n'eft autre que M. Barman , dont le fiel fe répand avec profuhon fur tous ceux qui ont le malheur de lui déplaire. Son grief contre M. Havercamp roule fur ce que celui-ci a paru favonfer par quelques avis Se par la communication de quel- ques Livres,la nouvelle Edition des anciens Poèmes Latins fur la Chaf- fe Se fur la vie Paftorale ; Se cela dans un temps où M. Burman tra- vailloit fur ces Poèmes à deftein de les publier ; ce qu'il vient d'exécu- ter, comme l'on fçait. M. Haver- camp qui n'avoit garde de fe pré- cautionner par rapport à un projet dont il n'étoit nullement informé , a tenu fa conduite ordinaire qui le rend très-fecourable Se très-com- municatif aux gens de Lettres & aux Libraires qui s'adreffent à lui ; & il ne s'eft jamais perfuadé que cette qualité bienfaifante dût indif- pofer contre lui ceux qu'une même profellion devroit mettre dans de pareilles difpofitions. Bien loin de vouloir ttaverfer M. Burman dans fes entreprifes, il ne lui a jamais re- fufé dans l'occafion les feryiees littéraires dont il n'eft avare peur À O U S T , 1752. 4yy petfonne ; & il attend avec impa- ger l'enlèvement des Sabines. On. tienec les Ouvrages que promet cet habile Profeffeur, tels que fes Poè- mes fur laChafle, Ton Claudicn & ,plufieursautres,tout prêta leur pro- diguer tous les applaudillemens qu'ils mériteront. Mais il ne pourra jamais fe réfoudre ( dit-il) à changer de ftyle & de ton pour répondre but* à-but à des libelles pleins d'injures groffieres , & qui ne peuvent que déshonorer ceux qui les publient. Il prie donc avec beaucoup d'inftan- ce M. Burman de vouloir bien s'ab- ftenir à l'avenir de ces termes orTen- fans empruntez de valets , ou de harangeres , Se qui conviennent fi peu à un homme de fon âge &£ de fa dignité-, en un mot, il le conjure de vivre poliment déformais avec fes Confrères. Voilà en gros dequoi il s'agit dans cet éclairciiTement , dont nous ne nous amuferons point à particularifer le détail , qui feroit peu intereiïant pour le public. Il nous refteroit à donner ici quel- qu'idéc , non de toutes les Notes raffemblécs dans cette Edition d'Eu- trope , & qui font depuis long tems entre les mains de tout le monde ; mais feulement de celles qui vien- nent de M- Havercamp & de M. Heuman fon ami - & qui paroif- fent pour la première fois. Nous en expoferons donc quelques-unes par lesquelles on pourra juger de leur caractère. Elles concernent la plupart le choix de quelques di- verfes leçons. Liv. 1. ch. 1. fut g. ë. Commotis iellis propter raptorum injuriam. ] Il s'agit de la guerre excitée pour ven- demande s'il hut lire à l'ordinaire propter rapt arum injuriam. Pour venger l'hijure faite aux femmes en- levées , où bien , comme porte le M S. de Leyde propter raptorum injuriam , pour venger l'injure faite par les raviffeurs. M. Havercamp préfère cette dernière Leçon -, &c juftifie cette préférence par deux paffages d'Ovide, où injuria Tbe- fei} l'injure de Tbéfée , fe prend pour l'injure faite par Théfée à fon fils Hippolyte , & injuria Vortnns. , fi- gnirîe l'injure faite par la Fortune : Se le Commentateur fait venir à l'ap- pui de ces deux paffages quelques autres qui ont le même fens. Liv. 1. ch. 3. pag. 9. & annum defcripfit in decem menfes | prius fine aliqua compiuatione confufum. ] Il cft queftion de l'année divifée en dix mois par Numa , au lieu que les Hiftoriens attribuent cette divifion à Romulus : Surquoi nos deux nou- veauxCommentateursne fontpoino d'accord. M. Heuman , pour çon- ferver l'honneur de ce partage à Romulus , veut qu'on raye absolu- ment ce palfage , alléguant pour raifon, qu'aulli-bien le Traducteur Grec l'a omis , & que cette fuppref- fion rend le difeours plus coulant. M. Havercamp s'y oppofe , & en appelle à l'autorité des M S S. qui n'ont tous qu'une voix fur ce point, ajoutant qu'une année confule & fans divifion convient fort aux Ro- mains encore demi-Barbares , tek qu'ils étoient fous Numa , lorfqu'il entreprit de les policer. Liv. 2. ch. 24. pag. 97. Canha* N nnij *;8 JOURNAL DE ginienfts Regulum pctierunt* ut Romam proficifceretur. ] M. Heu- man trouve cette cxprcllion peu conforme à la pure Latinité , petic- runt Regulum , ils prièrent R< mlus. Mais ( ajoûte-t'il ) tel étoit l'ufage de ce fiécle-là , & c'eft ainfi que parloit S. Auguftin , furquoi il cite le troifiéme & le quatrième Livre de la Cité de Dieu. chap. 17. cV 23. Liv. J. ch. 7. pag. 1 1 1. Quia la- trotinati navesRomanorum ftterant. ] M. Havercamp fur la toi de tous les M S S. de Leyde , Ut latrocinati navibus , ce qui forme une constru- ction plus régulière , cv fait enten- dre > que les Hiftriens ayant enle- vé aux Romains plufieurs vaiiïeaux chargez de Bleds , s'en fervirent dans la fuite pour exercer fur eux leur piraterie. Liv. 3. ch. 10. pag. no- Anni- halem callidiim é" impatientent du- cem. ] M. Heuman , au lieu de cal- iidtim ( Annibal rufe & impatient ) veut avec Langius ( dam J'en Notes furies Offices de Ciceron ) qu'on li(e caliditm ( Annibal ardent } chaud , & impatient. ) M. Havercamp y donne fon fuffrage , appuyé de l'autorité de trois Manufcrits de Leyde ; & il cit perfuadéque l'idée çeneralement répandue kir les rufes d'Annibal a fait prendre le change aux Copilles fur ce paflàge. Liv. i.ch. 15. pag. 134. Omnes ferè Hifpani. ] M. Havercamp, fur la garantie de quatre de fes M S S. de Leyde , lit omnes fsre Hifpania , f refaite toutes les E [pagnes ; ce qu'il autorife par une cxpreffionfembla- b\t qu'Eucrope employé lui-même s sçavans; (//y. 6. ch. i. ) Atfjuc omnes prope Hifpaniét in ditionem PopuliRtmani redaclx funt. Liv. 5. ch. 6. pag. :ij. SylU Archelaum , apttd Pir&eum , non lon- ge ab Athcms , obfedtt. ] M. Heu- man , fur la prépofition apud mife en œuvre ici pour /'«, allègue divers exemples d'un fcmblable ufage, par- mi lcfquels il y en a un tiré des Let- tres de Ciceron ad Familiaresxvi. 3 . Nos apud Alyfîam , ex qtio loca ad te Hueras ante dederamus , utium diem comrnorati fumus. Cette ex— prcllion eft commune dans les Au- teurs du moyen âge , tels que Gm- nadius, S. Auguftin , cvc. Liv. 5. ch. S. pag. 220. ut fecun- dus à Sylla haberetitr. ] C'eft de Pompée que parle Eutrope. M. Heuman liroit volontiers fecunditt Sylla , un autre Sylla , fondé fur l'autoricé de l'Interprète Grec, qui a traduit ainfi ie Latin. M. Haver- camp trouve j ie cette conjecture n'eft pas à mcpnfer ; quoiqu'on puiffe néanmoins ielon lui confer- ver l'autre leçon , & l'expliquer de cette manière : Sylla fe fitDidtateur, ôc comme ce fouveram Magiftrac avoit immédiatement fous lui un Général de la Cavalerie qu'il nom- moit ; on pouvoir regarder Pompée comme rempliifant cette place fous le Dictateur , & par confequent > dire de ce jeune Officier , qu'il ètoit le fécond après Sylla. En voilà fufïïfamraenr pour fça- voir à quoi s'en tenir fur le mérite des nouvelles Notes ajoutées aux anciennes. L'Editeur a eu foin de faire imprimer à la tète du Volu- A O U S me , toutes les Dédicaces Se toutes les Préfaces qui fe lifent dans les Editions précédentes; &: qui fe trou- vent ici au nombre de feize ; fui vies des Jugemens portez fur Eutrope , par les anciens Se les modernes. Il n'a pas oublié non plus de multi- plier les Tables qui font d'une fi grande commodité. Il en donne T ; 1732: 4;* quatre, la première pour les matiè- res principales , la féconde pour les locutions les plus fingulieres,latroi- fiéme pour les mots Grecs les plus remarquables dans la verfion de Paeanius, & la quatrième pour tous les mots qui compofent le texte d'Eutrope, HISTOIRE C RIT I QJJ E DES P R A T I QU E S fuperjlitieitfes qui ent féduit les Peuples & embarrafé les Scavans , avec la Méthode & Us principes pour difeerner les effets naturels d'avec ceux qui ne le font pas. Tar le R.P. 'Pierre le Brun, Prêtre de l'Oratoi- re. Seconde Edition , augmentée. A Paris , chez la Veuve de Laulnc , rue S. Jacques } Se claez Cbaitbert , Quai des Auguftins. 1731. 3- vol. in-11. premier vol. pp. 433. fans y comprendre 9$. pages pour ks Epîtres Dédicatoires , les Préfaces , la Vie de l'Auteur Se les Appro- bations. Second vol. pp. 558. troifiéme vol. pp. 505. NOUS avons déjà rendu compte du premier Volume de l'Hifcoire Critique des Pratiques lupeiititietifes , nous allons ache- ver d'en faire connoître les deux derniers. Le quatrième Livre pai lequel commence le fécond Volu- me nous a paru entièrement neuf. Il contient l'Hiftoire Critique des Pratiques obfervées en l'honneur de S. Hubert pour fe préferver de la rage. L'Auteur , après nous avoir allure qu'il fait grâce à plu- sieurs traits de la Vie de ce Saint qui donneroient beau champ à U Critique s. fe borne à difeuter ici ce qui regarde le pouvoir qu'on lui attribue fur la rage , Se les moyens par lelquels on implore fon inte&- ceilion , foit pour fe guérir , foie pour fe préferver de cette funefte .maladie. Ces moyens confident première- ment à fourrrir une légère incifion qui fe fait au front , fous la peau duquel on infère un petit brin de l'Ecole de S. Hubert qu'on prétend lui avoir été apportée du Ciel par un Ange. Ce qui prouve , félon les Religieux du Monaltere de S. Hu- bert , la vérité de cette Relique ,' c'eft que depuis l'an 8x5. elle £c conferve toujours dans toute fa beauté , quoique l'humidité del'E- glife où elle eft renfermée , foit fi grande qu'en peu de tems les autras Ornemens y font gâtés ; à quoi ils ajoutent que cette Etole fubfiftc toujours t quoique pour l'opération que nous venons de décrire 3 on en ait coupé une infinité de morceaux qui tous réunis enfemble , feroient fuffifans pour faire plufieurs Etoles de pareille grandeur. 46o JOURNAL D Outre l'incitïon dont nous avons parlé , on prefcrit encore une Ncu- vaine dans laquelle on a eu, dit-on, en vue de joindre les moyens natu- rels aux furnsturels. Et onibûrient qu'une expérience continuelle Si de plufieurs fiécles montre que ceux qui s'y foûmettcnt avec pieté Se avec exactitude , font non feule- ment guéris ou préfervés de la rage, mais qu'ils ont encore le pouvoir d'accorder des repis , c'eft-à-dire de fufpendre pendant 40. jours l'effet de la rage , afin de donner le tems à ceux quiauroient été mordus de quelque bête enragée de fc ren- dre à S. Hubert , ils peuvent même renouveller ces repis de 40. en 40. jours tant que dureroient les raifons qui ne pennettroient pas d'entre- prendre ce pèlerinage. Malheureufement 1 dit le P. le Brun, les Auteurs contemporains ne parlent point du voyage de faint Hubert à Rome , quoique la récep- tion miraculeufe de la Sainte Etole foit fondée fur ce voyage ; d'ail- leurs on ne peuc l'accorder avec l'ordre des tems , comme il foûtierït que le Père le Cointe l'a fait voir. D'où il conclut que l'Auteur de cette p\ca(c fupercherie étoit mau- vais Chronologifte , il avoiie ce- pendant que la manière de tailler , c'eft-à-dire d'inférer un petit brin de l'Etole de S. Hubert dans le front de ceux qui ont été mordus des bêtes enragées eft très-ancienne, ce qui donne lieu de croire qu'on autoit employé à cette cérémonie une Etole qui a voit fervi à Hubert, Se que pour la rendre plus rcfpe&a- ES SÇAVANS, ble , on avoit cnfuite fuppofé que c'etoit un prefent du Ciel. A l'égard de la Neuvaine qu'on pratique aujourd'hui après l'inci- iion , on peut dire qu'elle paroît déhgnée, quoique obfcurémcnt par un Auteur Anonyme qui vivoit dans l'onzième fiécle , mais cela n'a pas empêché que Gerfon , Se quelques Do&eurs de Paris ne l'ayent condamnée comme fuper- ftitieufe , après avoir vu l'avis des Médecins de la même Ville qui en avoient porté un jugement fembla- blefur les articles qui appartiennent à leur Profeffion. On rapporte leur décifion qui eft tirée des Ouvrages de M. de Sainte Beuve. Sur de relies autoritez le Père le Brun foûtient qu'il faut défabufer les Peuples de ces ufages , & empê- cher certains particuliers de courir les Villes & les Villages, fur- tout dans la Picardie , foit pour toucher ceux qui ont été mordas par des animaux enragés, foit pour donner des répis. Il ne trouve cependant pas mauvais qu'on recoure dévote- ment aux reliques de S. Hubert, qu'on fe faffe même tailler dans l'efperance d'être guéri , ou préfer- véde la rage. Il n'ignore pas , ajoû- re-t-il, Si il le prouve par differens endroits de l'Ecriture , que Dieu relevé la gloire des Saints par les Miracles qu'il produit à l'occafion de certaines chofes qui ont touché à. leurs corps. Mais il voudroit qu'on ne fe fervît plus de fer rouge pour marquer les animaux,^ qu'on abo- lît toutes les pratiques de la Neu- vaine. Elles font renfermées en dix A O V S articles qu'on pourra voir dans l'Ouvrage même. Il ne diffimule pas cependant que quelques perfonnes les ayant condamnés comme fuperftitieux , les Religieux de S. Hubert les fi- rent imprimer en 1690. avec des explications qui furent approuvées parl'Evêque de Liège, par fes Vi- caires Généraux & par de célèbres Docteurs en Théologie & en Mé- decine de l'Univerfité de Louvain. Des dix articles contenus dans la Neuvaine , trois regardent les Théologiens , les fept autres font du rcïlbrt des Médecins ; & ces derniers déclarent que loin qu'ils y ayent rien remarqué de fuperfti- tieux , ils s'offrent de faire voir qu'ils font conformes aux règles & aux principes de la Médecine. Cette dccifion donna lieu à M. Gilot Chanoine de Rheims d'écrire une grande Lettre Latine à M. Hennebel fameux Docteur de Lou- vain; on la trouve ici toute entière. Elle eft très-vive Si très— détaillée , il y traite les pratiques de la Neu- vaine de ridicules , de vaines & de fuperftitieufes , le P. le Brun fouf- crir à cet avis , & ajoute qu'il lui farott qu'elle doit être tour-k-fait in- terdite f & quoiqu'il penfe que les vues & les dilpofnions qui les ac- compagnent peuvent rendre ces fortes de pratiques excufables , il trouve néanmoins qu'il eft encore mieux de les fupprimer , pour ne taiffer attribuer l'effet qu'on attend yu'd la feule proteÙton de Dieu im- florie far la prière. L'Auteur fem- i)lc oublier ici ce qu'il a établi ail- T; 1752: 4*1 leurs , Se ce qui l'efl: certainement par l'autorité de toute l'Eglife } fur les grâces que Dieu attache aux Reliques des Saints, & à la prati- que de certains devoirs particuliers qu'on leur rend. La Lettre du Chanoine de Rheims ne demeura pas fans répli- que. Un Religieux de S. Hubert entreprit de la détruire. Le Père le Brun nous a confervé cette Répon- k , l'Auteur y foûtientque l'expli- cation qu'on a voit donnée à la Neu- vaine n'étoit pas nouvelle , quoique publiée depuis peu de rems ; qu'on nel'avoit jamais entendue dans un autre fens, & qu'il étoitauffi inju- fte qu'impoffible de lui en donner un différent. Il prétend même que toute perfonneéquitable & judrcicu- fe préférera toujours le jugement des Docteurs en Théologie 5c en Médecine de la Faculté de Louvain à celui de quelques Docteurs & Médecins de Paris qui étant moins à portée , &c moins curieux de s'in- former de la manière dont la Neu- vaine de S. Hubert fe pratique, ne l'ont condamnée que parce qu'ils n'en pénérroient ni l'efprit ni le vrai fens. Du refte il ne prend point la défenfe de la réception miracu- leufe de la Sainte Etole. Cette Lettre auroit peut-être mé- rité une réfutation fuivie , d'autant plus qu'il s'agit de condamner unç dévotion qui pendant plus de 900. ans a toujours été autorifée par les Evêques Diocéfains & foûtenuè" pas le fuffrage d'une Univerfité qui croit devoir s'eftimer autant que toute autre qu'on pourioit lui oppo: 4*2 JOURNAL DE fer , le P. le Brun n'en a pas jugé ainfï , il convient feulement que l'Auteur n'a rien oublié pour pur- ger de fuperftition h Neuvaine de S. Hubert. Malgré cela il perfide , dit-il , à la condamner, cv voudrait que fur ce point la dévotion des Fi- dèles fut réduite à ce qu'il a propo- fé ci-deflus. Il examine enfuite ce qu'on doit penfer des perfonnes qui fe préten- dent defeenducs de la famille de ce Saint, & qui en cette qualité affu- rent qu'en touchant fimplement au front ceux qui ont été mordus des bêtes enragées , ils ont le pouvoir de les guérir de la rage. Il rap- porte à cette occafion l'Hiftoire d'un foit disant Chevalier de Saint Hubert qui en 1649. obtint des Lettres-Patentes du Roi qui lui permettoient d'exercer tranquille- ment cette merveilleufe vertu ; & qui l'exerça en effet à Paris , & dans plus de 30. Diocefes du Royaume avec l'approbation des plus grands Evêques de ce rems-là. Comme il ne paraît ni par lesLettres-Patentes, ni par les Certificats de Meilleurs de Gondy Archevêque de Paris 8c de Gondrin Archevêque de Sens qu'on ait fait examiner par des Mé- decins (î les perfonnes qu'on fuppo- foit guéries, avoient été mordues par des animaux qui fulTer.t vérita- blement enragés , l'Auteur dit net- tement qu'on peut rejetter ces pré- tendues merveilles , & croire que ces premiers Prélats trompés ont enfuite trompé les autres. Quoi qu'il en foit » il ne nous ap- prend point ce que devint ce celé- S SÇAVANS, bre Chevalier. 11 ajoute qu'il igno- re s'il y a encore en Flandre des perfonnes qui s'attribuent le même pouvoir ( nous favons du moins qu'on en trouve encore en Pi- cardie. En gênerai le P. le Brun s'atta- che à montrer que rien n'eft plus chimérique que cette prétendue defeendancede S. Hubert. A peine fçait-on l'origine de ce Saint.Peut- on outre cela faire une généalogie fuivie depuis un fi long-tems ? Avant l'an mille les Fiefs n'étoienc point héréditaires, & les noms n'é- toient point fixés. Mais , dira-t-on , la pofTeffion où font les Rois de France de guérir les écrouelles a été généralement approuvée & refpcdxe dans tous les tems, il n'eft donc pas improbable que la vertu de guérir certains maux foit attachée à certaines familles. L'Auteur répond à cette objection que depuis un tems immémorial les Rois de France guériffent les écrouelles , ce qu'on ne peut pas dire des Chevaliers de S. Hubert par rapport à la rage. Il ne fait pas cependant remonter cet ufage juf- qu'au rems de Clovis , comme plu- sieurs Auteurs, mais il croit vrai- femblable que Dieu conféra cette grâce au Saint Roi Robert , qui pendant fa vie fit beaucoup de mi- racles. On voit par un paiTage de Guibert de Nogent qui vivoit il y a plus de 600 ans , que Philippe I. touchoit & guerilToit les perfonnes affligées des écrouelles , & qu'il perdit même pour un tems ce pou- voir , apparemment , dit le P. le Brun AOU Brun , pendant qu'il fut excommu- nié. Ce même Guibcrt nous ap- prend encore qu'il avoit été fou- vent témoin des guerifons miracu- leufes que faifoit Louis le Gros en touchant ceux qui avoient les écrouelles , & en îaiiant fur eux le figne de la Croix ; ce qui montre , {elon la remarque de notre Auteur , que Guillaume de Nangis s'eft trompé , lorqu'il avance que S. Louis fut le premier qui fe iervit du ligne de la Croix en touchant ces fortes de malades. Il paroît certain par Guibert de Nogent que vers l'an noo les Rois d'Angleterre ne fe flattoient pas en- core d'avoir ce même privilège. Cependant plufieurs Auteurs ont écrit qu'en 1041. il fut accordé à Edouard le Confefteur , & qu'il le tranfmit à fes SuccelTeurs. M. Bec- kert Chirurgien & Membre de la Société d'Angleterre, qui a publié en Anglois des Recherches libres & défintereffées fur la guérifon des écrouelles par les Rois d'Angleter- re , rapporte cet ufage non à Edouard le ConfcfTeur , mais à Edouard III. qui monta fur le Thrône en 1527. On ne peut nier du moins que lur la fin du 1 2e iléele perfonne ne conteftoit aux Rois d'Angleterre la puiffance de guérir les écrouelles , & que ce fut Edouard III. qui régla les cérémo- nies qui fe pratiquaient à cette oc- cafion. Le P. le Brun ne doute point que les prétentions qu'il avoit lur le Royaume de France n'ayent excité le zélé qu'il montra pour ufer de cette puiflance ; elle le rendit fi fa- Aoujt. S T, 1732. 46*5 meux que Bradwardin dans fou Li- vre de Caitfa Dei , en paile avec une efpece d'enthouhafme ; il ap- pelle toute l'Europe en témoignage du pouvoir que ce Roi avoit (ur les écrouelles , 6c il foûtient qu'un mi- racle fi confiant croit fufhfant pour convertir les incrédules. Mais dans le même endroit il marque claire- ment que ce don étoit commun aux Rois de France , & aux Rois d'An- gleterre ; ce qui montre que ces derniers ne fe l'attribuoient pas du moins uniquement à caufe des droits qu'ils prctendoicnt avoir fur le Royaume de France. A l'excep- tion de Guillaume III- de Geor- ges I. & de Georges II. aujourd hui régnant, tous les Rois d'Angleter- re , même depuis la prétendue Re- formation , ont continué de tou- cher ceux qui avoientles écrouelles, & on allure que le Chevalier de S. Georges en a guéri un grand nombre en Italie , oit il eft reconnu pour Roi d' Angleterre. Le P. le Brun parle encore de l'ufage où étoient ces mêmes Rois de bénir des Anneaux pour guérir de la crampe & du mal caduc. Il en eft fait mention fous Edouard II. il a fubfifté conftamment pendant le I4efiécle; mais il eft difficile d'en marquer la fin. L'Editeur nous promet dans 1* 5e Livre une agréable & inftmEiivc variété. On y trouve l'Hiftoire des diverfes pratiques pour connoître l'avenir , pour difeerner les inno» cens d'avec les coupables , avec l'origine &. le progrès des épreuves de l'eau bouillante , du fer chaud Ooo 4 Brun auroit dû naturellement for- m tir tout grillé de ce feu , Se mou- =>rir prcfque fur le champ, Peut- aêtre, continue- t'il , Dieu ne le «permît-il pas à caufe de fa iimpli- aiicité & de fa bonne foi ; mais il » ne fut pas tout-à-fait préferve , »de peur que le. Miracle complet » n'eût tait paffer pour une Relique »la Lance qui peut-être ne l'étoit wpas. «> Il en étonnant queledou- xe où ces fortes d'épreuves laiffe- Kenc prcfque. toujours ceux qui 7 ES SÇAVÂNS; avoient recours , n'en ait pas dé- fubufé le monde pendant plufieurs fiéclïs où elles ont regr.é. . Le fixiéme Livre traite de l'o- rigine & du progrès de l'épreuve par l'eau froide renouvcllée , en no$ jours pour découvrir les Sorciers* Nous n'y avons remarque aucunes additions , non plus que dans le feptiéme Livre , où l'on retrouve l'hiltoire de la Baguette , & de fes differens ufages , tant parmi les Na- tions anciennes que modernes. Hn- fîn dans le dernier Livre l'Auteur rappelle tout ce qu'il avoit dit dans fa première Edition fur les moyens dont on peut fe fervir pour arrêter les pratiques fuperftitieufcs, & fur les Maximes que l'Eglife a toujours fùivie pour condamner , oit pour punir ceux qui s'y abandonncroient. Le troifiéme Volume eft, comme on l'a déjà annoncé, un Recueil de différentes Lettres compofées par le Perc le Brun lui-même , ou par dif- ferens Auteurs à l'occafion de la Baguette. La première efc de M. Chauvin Docteur en Médecine, & la féconde de M. Garnier suffi Do- cteur dans la même Faculté , on prétend dans ces deux Lettres ex- pliquer par des raifons phyfiques les principaux phénomènes de la Ba- guette , èc prouver fur tout qu'il n'y a rien que de naturel dans l'u- • fage qu'en fit le fameux Jacques . Aymar pour découvrir les auteurs & les complices d'un affalîïnat com- mis à Lyon , en 1692. Ce fut en partie pour répondre à ces deux Lettres que le Perc le Brun publia celles qui fui vent , fous le ci— A O U ère de Lettres qui découvrent l'illufion des Thilofophes fur la Baguette y & qui détruifent leur fyjlême. Elles fu- rent imprimées à Paris en i é? 3 . in- 12. on nous les donne ici , parce qu'elles font devenues très-rares. M. Confiés, furnommé l'aveugle d'Embrun , qui étoit un de ces Phi- îofophes qui avoient pris la deffenfe de la Baguette écrivit pour les ven- ger. Mais félon l'Editeur les inju- res lui tinrent lieu de raifons. Sa lettre fut fuivie d'une réplique où Je P. le Brun témoigna autant de modération que fon adversaire avoit témoigné d'aigreur ; M. Comiés y fépondit par une autre lettre 5 mais ons'elt abitenu de la taire réimpri- mer dans cette nouvelle Edition , parce , dit l'Editeur, qu'il n'y a pas ombre de raifonnement , & que l'Auteur n'y dit que des grolîîere- tés. Les deux Lettres qui fui vent font Anonymes; on foutient dans la pre- mière qn'on ne doit point attribuer les effets de laBaguette à l'opération du démon , mais à des caufes Phy- siques & naturelles; la féconde mé- rite plus d'attention , auffi-bien que la troifiémequi eft de M. Robert Procureur du Roy au Châtelet de Paris , l'une & l'autre découvrent évidemment l'impofture & la four- berie de Jacques Aymar. On y voit qu'après un examen très-exa6fc fait à Paris en prefence de Moniteur le Prince, & de plufieursperfonnes très-éclairées , cet avanturier fut convaincu de ne pouvoir découvrir par le moyen de fa Baguette ni les îburces ni les métaux cachés , en- S T, 17 52. ^y core moins les vols & les meurtres. Il faut avouer que ces deux pièces jettent un grand ridicule furies au- teurs qui fuppofant les faits de la. Baguette comme véritables, s'épui- fent en raifonnemens , foit Phyfi- ques , foit Thcologiques , les uns pour en juftifier l'ufage , & les au- tres pour le condamner. On trouve encore ici une Lettre deM.Malbofquet,contre le traité de la Phyfique occulte. Enfin ce Re- cueil finit par une Lettre écrite non? ont été transmis qu'en fa- i* veur du Mvftere qu'ils renfei- » ment , il ne craint point d'ii:- n firmer , qu'il n'y en a aucun a pris à la lettre , qui puiiïe fe » foûtenir centre la difcufTîon d'une » critique exacte. » Par rapport à la réfurreétion de la fille de Jarry , il demande d'abord , pourquoi J. C. dit , que cette fille n'étoic pas morte , & qu'elle n'étoit qu'en- dormie. Etoit-ce le moven de con- vaincre les Peuples de la venu de fa réfurrection , de ne traiter fa mort que de fommeil ? Mais eft-il fur- pren.int , répond l'Evèque de Li- chefield , que J. C. ait qualifié de fommeil une mort qui n'étoit point pour durer j en effet perfonne n'y fut trompé ; ôi loin que cette ex- preffion rendit la mort de cette fil- le douteufe j en en étoit Ci perfua- ES SÇAVANS, dé , que ceux qui étoient préfent fe moquèrent de Notre Seigneur , parce qu'il paroiffoit en douter. Pourquoi , dit encore le SieurWol- fton , J. C fit-il fortir tout le mon- de, & ne permit-il qu'au Père & à la merc de la fille , & à trois de les Apôtres , d'être témoins du prodi- ge qu'il alloit opérer ; Plus il y eût eu de témoins, & plus le miracle eût été confiant. On répond que le mépris que les Peuples avoient té- moigné pour J. C. méritoit que Jefus les chaflàt de fa préfence : que d'ailleurs ce mépris prouve in- vinciblement qu'ils étoient bien af- faires de la mort de cette fille , & ils eurent une entière convic- tion de la puifTancc du Sauveur , lorfqu'ils la virent paroître pleine de vie. Mais repliquc-t'il , fi J. C. vouloit que ce miracle fervît à prou- ver fa Million , par quelle raifort défendit-il aux parens de la fille d'en parler ? Comme fon heure n'é- toit pas encore venue , répond le Prélat Anglican , il en ufoit ainfi pour ne pas irriter l'envie & la fu- reur de fes ennemis. Cependant malgré cette précaution , le bruit dt fes miracles fe répandit dans tout le Pays. Le Sieur "Wolfton objecte feule- ment centre la réfurrection du Fils de la veuve de Naïm, qu'il n'y a- voit pas allez long-tcms qu'il étoit mort , pour qu'on en fût vérita- blement allure ; il s'étonne en mê- me tems de la préférence que Je- fus lui donna fur plulîeurs autres perfonnes qui fembloient mériter à plus jufte titre que lui de reve- AOU< nîr au monde. Mais d'où fçait-on, qu'il n'y avoit pas au moins trois jours que ce jeune homme tut mort. Car il y avoit desLoix pohtives dans ces Pays, qui défendoient d'enterrer les morts avant ce terris , lorfque la nature de leur maladie pouvoit faire foupçonner qu'ils ne fuflTent tom- bés qu'en léthargie ? D'ailleurs la tendreffè ,. & l'affliction de cette mère permettent-elles de douter, qu'elle n'eût pris toutes les pré- cautions poffîbles, pour s'affurer de la vérité de la mort de Ton fils. Quant à ce que le Sieur Wolfton prétend que ia puiffauce & la fa- gellc de Dieu auroient plus éclaté dans la réfurrection de quelques- autres perfonnes, quoique TEvêque de Liciierîeld apporte quelques rai- fons du choix que Dieu fit de ce jeune homme préferablement à tant d'autres , il avoue que la meilleure raifon qu'on en puiiTe donner , eft. la volonté de Dieu } toujours maî- tre de fes grâces. Le Difcourcur vient enfuite à la réfurrection du Lazare i & trouve en premier lieu , qu'il y avoit de îa foibleffe en J. C. de pleurer la mort d'un homme qu'il alloit ref- fufeiter. Il n'oublie pas que Saint Epiphane rapporte , que quelques Chrétiens par la même raifon a- vsient effacé du Texte de S. Jean l'endroit où il eft dit que Jefus a- voit pleuré. Comme fî , répond le Prélat , J. C. qui avoit bien voulu f rendre toutes nos foibleffes , à exception de celles qui font cri- minelles , n'en avoit pas ufé ainfi pour juftifiex les larmes que nous ; T ; r 7 5 2; 46$ répandons à la mort de nos parens ,- pour les renfermer dans de juftes bornes , & en même tems par ce ftntiment de compaffion qui le faifoit pleurer avec ceux qui pleu- rent. Si Lazare ctoit mort , qu'étoit- il befoin , dit le Sieur de Wolfton, de l'appeller à haute voix ? C ctoit, répond1 l'Evêque de Licheffeld s pour attirer mieux l'attention de tous ceux qui étoient préfens ; peut- être même pour les empêcher de foupçonner qu'il n'y eût de la ma- gie dans la réfurrection du Lazare, d'autant plus qu'on croit que les Magiciens operent leurs enchante- mens , en murmurant fecretemenî certaines paroles,. Mais reprend l'Adverfaire , Je» fus n'auroit il pas dû faire ôcer le fuaire qui cachoit le vifage du La- zare , afin que le Peuple l'eût vu - paffer par dégrés de la mort à la vie. On répond que le caractère de la puiffance divine eft d'opérer dans un inftant, Se que bien loin que le Peu- ple eut été plus convaincu de la vérité de la mort du Lazare ; & par conféquent de fa réfurrection 3 il J. C. eut commencé par lui fai- re découvrir la face , rien ne prou* voit mieux l'un & l'autre que de voir un homme dans le même étac oùilavoitétéenfeveli,envclopédans un fuaire, qui Tempcchoit même de refpirer , ayant outre cela les pieds Se les mains liées , fe ranimer à l'inftant, & montrer tout d'un coup dans cet état qu'il étoit rempli de vie. On voit en effet que la multi- tude en fut fi frappée j que les Prin- ces des Prêtres voulurent faire m©u-- 47 & à l'obfcrvarion de la Na- ture pour des chofcs de cette im- portance , qu'il n'efl pas étonnant, que leur ayant fourni des preuves fufrifantes de la Réfurreclion de J. C. il ne fe (oit pas cru obligé de îeur en donner la démonftration la plus complettc qu'il fut pofliblc d'en fouhaiter. En troifiéme lieu il dit , qu'après toutes les infidélités des Juifs , il ne convenoit pas plus à J. C de les forcer par des preu- ves irréfiftiblesi reconnoître fa Ré- furreclion , que de defeendre de la Croix , lorfqu'ils le fommerent dé- ^aigneufement delcfairCjavcc pro- mefle de croire à cette condition. Il foûttent enfuite , que quand T; T732. 47$ J. C. fe feroit manifefté clairement au Peuple Juif : on peut douter avec raifon qu'ils fe ruftent conver- tis. Les Principaux d'entr'eux é^ toient divifés en deux Sectes ; les Saducéens nioient la réfurreclion des morts ; comment auroient - ils cru celle de J. C. & les Pharifiens avoient trop d'intérêt à foûtenir ce qu'ils avoient fait contre lui pour reconnoître fa divinité. Ainfi, com- me pendant fa vie ils attribuoienc fes miracles à Beelzebut,ils auroient foutenu que fa préfenec parmi eux après fa mort , n'étoit qu'une illu- fion de Satan. L'Evêque de Li- chefield , après avoir ainfi montré , que J. C. ayant donné des preuves furrîfantes de fa Réfurrectionjla'é- toit point neceffaire qu'il fe fit voie à la plus grande partie du Peuple , t'attache à prouver que le témoi- gnage que les Apôtres ont rendu à cette vérité forme une démonftra- tion complettc. Leurs Ecrits por- tent avec eux un caraèlere de fin- cérité & de fimplicité , qui ne per- met pas de les foupçonner d'artifi- ce, on y remarque même quelques variations à la vérité peu impor- tantes , fur les circonftanccs de cer- tains faits , qui marquent qu'ils n'ont point écrit de concert. Ils y découvrent avec ingénuité leurs er- reurs & leurs foiblcflcs. Or fi dee gens qui ont fcellé de leur fang la vérité des faits qu'ils foûçenoient » ont eu toutes les occafions qu'on peut fouhaiter , pour s'aflurer de la réalité de ces faits , on ne peut avec raifon les révoquer en doute. Mais il ne faut pas regarder Pppijj 474 JOURNAL D feulement les Apôttes comme des témoins très-croyables par les mê- mes raifons communes à tous les autres témoins non fufpccts , il faut, continue t'il , les confiderer dans un ordre plus élevé , comme établis de Dieu-même, pour être les témoins de la Vie , de la mort , Se de la R e- furrection de fon fils. Ainfi J. C. ayant voulu pour des raifons dignes de fa fagelTe , ne fe montrer après fa Rélurre&ion qu'à fes Difciples \ dont les plus éminens étoient les Apôtres , on doit les regarder non feulementcommedes témoins fuffi- fans par eux-mêmes , mais encore comme des témoins d'autant plus irréprochables , qu'ils avoient été nommés 8c choifis pour rendre té- moignage à la vérité de fa R.éfm> rection. Témoignage d'autant plus cer- tain , que pouToir leur fut don- né d'en confirmer la vérité par des miracles , Se ces miracles ont une liaifon fi naturelle avec laRéfurrec- tion de J. C. que la certitude des uns , qui eft confirmée par les Li- vres Saints , Se qui a même été re- connue par les plus grands enne- mis du Chriftunifme , démontre évidemment la certitude de l'autre, les bornes dans lefquelles nous fommes obligés de nous renfermer, ne nous, permettent point de rien dire des mauvaifes chicannes que le Rabin continué de former fur les différentes apparitions du Sei- gneur après fa Réfurrection. Nous ne nous ferions pas même fi fort étendus fur unLivre de cette nature, iî nous n'ivions cru qu'il était im- ES SÇAVANS; portant de bien convaincre certai- nes gens , que quelque efprit , quel- que lecture , quelque hardiefle mê- me que l'on ait , quelque liberté qu'on donne à fes penfees & à fes expreilîons , u tlt impolliblc de rien dire de raifonnable contre des faits auffî refpectablcs par eux-mêmes , &: auffi folidement établis que ceux de l'Evangile. Que ces prétendus cfprits forts affez équitables pour avouer qu'il n'y a rien de fi meprifablc , que tout ce que l'on a écrit jufqu'a pre- fent contre la Religion , ceffent donc d'en attribuer la caufe , nen à la force des preuves fur lefquel- les elle eft établie , mais à la foi- bleffe des argumens , par lefquels elle a été atttaquée , il s'eft trouvé un homme qui a ofé le faire farrs aucun ménagement , qui né dans un Pays où la liberté dégénère fi fou- vent en licence , avoit affez de lec- ture pour recueillir tout ce que les Payens & les Juifs ont avancé de plus fort contre l'Evangile , affez de fécondité pour enchérir fur leurs découvertes impies , affez d'adreffe pour fe couvrir même de l'autorité des défenfeurs les plus zélés des vé- rités qu'il combattoic , & cependant tous les efforts d'un tel homme , n'ont abouti qu'à femer fesEcrits de quelques traits burlefqueSjCapables, à la vérité, de faire rire les libertins, mais ii foibles , qu'on ne peut s'ima- giner qu'il fe foit flatté , qu'ils puf- fent aller jufqu'aux perfonnes de bon fens , ni faire la moindre im- preflîon fur tout efprit capable dt réfléchir. A OU Aptes tout ce qu'on vient de voir, il feroic afTez inutile de fuivre l'E- vêque de Lichefield dans ce qu'il répond au Sieur Wollton, qui pré- tend montrer » que lorfque J. C. n en appelloit à (es miracles pour » prouver ladivinitéde fa Miliîon,il » parloir non des miracles bits dans »la Chair , mais de ces miracles » mylliques qu'il devoit faire dans » l'efprit , dont ceux qu'on fuppo- »> fe avoir été faits dans la chair, » n'étoient que l'ombre &c la figu- a* re. Le Sieur Wolfton ne dit rien d'intelligible fur ce point , il paroît S T; 1753; 47X même qu'il n'a pas cherché à fc faire entendre , il s'en exeufe fut ce que la matière eft trop féche , 8c renvoyé là-deffus aux Pères de l'E- glife. Ainfi , quoique quelques-uns au rapport du Prélat Anglican ayent regardé cet Auteur impie comme un Enthoufiafte,que le goût pour l'allé- gorie avoir jette dans la chimère, on ne peut s'empêcher de dire , qu'il ne ïefpecle pas plus le fens myftiquc que le fens littéral de l'Evangile , 3c que fon unique but dans fes dif- cours prophanes n'ait été de détrui- re l'un par l'autre. EXPOSITION ANATOMIgUE DE LA STRVCTVRE DV corps humain , par Jacques Bénigne Wmjloiv , de l'Académie "Royale des Sciences , Dotleur Régent de la Faculté de Médesine en l"Univerfitè de Paris , ancien Profejfeur en Anatomie & en Chirurgie dans la même Faculté , Interprète du Roy en Langue Teutonique , & de la Société Royale de Berlin. A Paris , chez Guillaume Defprez , Imprimeur Se Libraire ordinaire du Roy , Se Jean Defelïartz , Libraire , rue Saint Jacques à Saint Profper Si aux trois Vertus. 173 2. vol. in-sf. pp. 739. PRESQUE tous les Livres d'A- natomie ont ce deffaut , qu'au lieu de renfermer une Defcription fimple & précife des différentes par- ties du corps humain , ils font en- tremêlez de recherches vagues & inutiles fur l'ufage de ces parties , & fur les différentes fins que peut s'être propofées le Créateur en les formant , ce qui ne fert qu'à groffir un Ouvrage, & à exercer la pa- tience des Lecteurs. M. Winflov perfuadé qu'un Livre d'Anatomie ne doit être qu'un détail des di- verfes Pièces qui entrent dans la ftruclurc du corps humain , & une hiftoiie fidèle de cette Itiuèture , s'eft renfermé ici dans les bornes d'Anatomifte , & a évité tout ce qui pouvoit l'écarter du véritable but qu'il a eu en vue ; c'eft ce qui lui a fait choiiîr le titre d'Expojî- tion iAnatomique de la jiruiîure du corps humain , parce qu'il expofe Amplement cette ftrudture , com- me il l'a trouvée par les fréquences & diverfes différions qu'il a faites, s'en tenant uniquement à ce qui re- garde la méchanique du corps hu- main & s'occupant très-peu des caufes finales. Un autre deffaut de la plupart des Livres d'Anatomie , ou plutôt de tous ceux qui ont pa- ïu jufques ici^eft de fuppofei qaand 47* JOURNAL DES SÇAVANS; il s'agit d'une partie que les com- mençans ne connoiffent pas qu'el- le leur cft déjà connue , ce qui leur rend abfolument inutile , l'ex- plication qu'on leur donne. M. ,W inflcw a fuivi une méthode plus claire , & quand il parle d'une par- tie qu'il veut faire connoître , il fe donne bien de garde de la defigner par des parties inconnues. L>»ns le Traité des Mufcles , par •M*«jple , il fe borne d'abord à l'ex- pofition de ceux qui font attacher aux Offcments , parce que dans un traité précédent il a fait l'expofition de ces mêmes OfTemcnts , Se il évi- te de parler des Mufcles attachez à d'autres parties ; par exemple , de ceux qui font attachez à l'œil , par- te qu'il n'a pas encore donné con- noiffance de ces Organes , Se que les commençons ne pourraient pas deviner de quoi il leur parle , fur tout quand il leur nomme quelques portions particulières de ces mêmes Organes 3 à laquelle tel ou tel Muf- elc eft attaché. On trouvera dans tous les arti- cles de cette Expotition Anatomi- que , la même méthode dont nous parlons,qui eft de pafferdes parties connues aux parties inconnues , & de ne traiter des particularitez qu'a- près avoir traité des généralité?. Auffi l'Auteur a-t'il mis immédia- tement après le traité des Os fecs, celui des Os frais, avec toutes leurs appartenances, fur tout par rapport aux mufcles qui font uniquement attachez aux Os , Se dont plusieurs ne le font pas immédiatement, mais par le moyen d'un ligament, d'une aponeurole , Sec M. Winflov a compofé dent tables particulières qui facilitent ex- trêmement la connoiflanec des muf- cles , l'une où l'on voit d'un fimple coup d'œil, à combien d'os chaque mufcle cft attaché , foit que ce muf- clefervcà mouvoir l'os, où qu'il n'y ferve pas ; l'autre où l'on découvre de même fur le champ t à combien de mufcles chaque os particulier donne attache. La première de ces tables eft difpofée de manière que chaque mufcle y eft mis en titre avec le numéro du Traité des Muf- cles , Se que fous chaque mufcle fe trouve le dénombrement de touc les os qui ont rapport à ce Traité. Dans la féconde , chaque os eft mit en titre , & fous ce titre eft ran- gée la Lifte de tous les mufcles , attachés à cet os. Par exemple , dans la première où il eft parlé d'abord des mufcles du bas vemre.Qn voit i°. fous le titre d'Oblique externe ( N°. 71. ) i°. que ce mufcle oblique eft attaché à la cinquième , fixicme Se feptiéme des vrayes côtes , rare- ment à la quatrième. i°. Qu'il l'eft à toutes les fauffes côtes , 30. à l'oi des Ifles, 40. à l'os pubis. Puis fous le titre à Oblique interne , N°. 87. On voit de même , que les os auf- quels eft attaché ce mufcle oblique interne, font i°. la fixiéme & la feptiéme des vrayes côtes avec leurs cartilages , 20. toutes les fauffes cô- tes Se leurs cartilages , 30. la der- nière vertèbre des lombes , 40. l'os des Ifles , 5 °. l'os Pubis. Le mufcle tranverfe vient enfui- .re &: fous ce titre , le Trantverfe t (N°. 107.) on voit que ce mufcle A O U S tient, î*. aux cartilages de la fi- xiéme Se de la feptiéme des vertè- bres des côtes , 20. aux cartilages de toutes les fauffes côtes, 30. aux trois premières vertèbres des lom- bes. Le mufcle droit & les mufcles pyramidaux tiennent , comme on le remarque après , en fuivant la même méthode , fçavoir t le droit, s', à l'extrémité xiphoïde du fter- num , 1°. aux cartilages de la cin- quième, fixiéme & feptiéme des ▼rayes côtes , 30. au cartilage de la première des fauffes côtes, 4*. à l'os pubis , & les pyramidaux au même os pubis. La féconde Table con- tient le dénombrement général des os mentionnés dans le Traité des mufcles , avec une lifte particu- lière des mufcles attachés à chacun de ces os : ce qui eft exécuté ea «ctte forte: L'Os coronul eu frontal* Le Crotaphite. L'Os farinai lç Crotaphite, L'Os des Tempes. Le Crotaphite, le maffeter, le digaftrique , le ftylo-hyoidicn , le fterno-maftoidien , le Splenius , le petit com plexus. L'Os fphcnosdt. Le Crotaphite , le grand Plcry- goidien , le petit Plerygoidien. L'Auteur pourfuit ainfi fa Table depuis les os de la tête jufqu'aux •s des orteils. Css deux Tables font d'usé gran- T; 1752: 477 de utilité pour la pratique de la Mé- decine & de la Chirurgie , parce qu'elles mettent fous les yeux dans le moment , toutes les liaifoni qu'un mufcle bleffé , ou autrement malade , peut avoir avec plufieur» os , & toutes celles qu'un os lu~ xé , fra&uré , ou autrement atta- qué, peuc avoir avec plufieurs muf- cles. On trouve dans un Traité fommaire un pareil dénombrement abrégé de toutes les parties exter- nes & internes du corps humain ■ l'Auteur y a mis auffi-tôt après cha- cune de ces Parties , une lifte des principales ramifications d'artères , de veines & de nerfs qui y ont quel- que rapport par leur route , par leur connexion , & leur commu- nication» Comme certains petits Auteurs s pour fe faire de la réputation à peu de frais , ont publié comme d'eux., plufieurs chofes qu'ils avoient ap- prifes de M. Winflov dans fes Cours publics & dans fes Cours particuliers , nous croyons à pro- pos d'avertir que ces Plagiaires ver- ront ici leurs larcins découverts j non que M. Winflov s'explique en aucune façon fur cette matière , mais parce qu'en divers endroits de fon Ouvrage on trouve les dattes de certaines obfervations qu'il a : faitcs,& qu'en confrontant ces datâ- tes on démêle fans peine les plu- mes étrangères dont fc font parcs quelques Geais. Du refte il ne fera pas mal à propos de rapporter à ce fujet le té- moignage de M. "Winflov- fur la manière équitable , donc les Etfaa- 47-8 JOURNAL DE gers en ont agi à ion égard. » Par- ia mi le grand nombre de ceux , m dit-il , qui ont afliité à mes cours, »> je n'en ai apperçu que très-peu »> qui ayent fait paroître comme » d'eux, ce qu'ils tenoient de moi. » Je vois avec beaucoup de recon- »> noillance la conduite ditferentc » qu'ont gardée à mon égard les *> Etrangers , en rapportant dans » leurs DifTertarions ce qu'ils ont » vu ou entendu chez moi , aux » Ecoles de Médecine , & au Jar- » din du Roy , où )'ai profedé pen- » dant douze ans., à la place de » feu l'illuitre M. du Vcrnay, qui, » à caufe de fon peu de fanté , m'y » avoit engagé. Je ne puis à cette » occaiîon m'empêcher de louer ici » la fincerité de l'Auteur de la Tra- » duction latine de la Myographie v de M. Douglas, de m'a voir dans « fes Notes déclaré l'Auteur de plu- n fieurs chofes que j'avois feule- » ment dites de vive voix , & dont sj je n'avois encore fait aucune » mention imprimée ; cela me » donne aufïl lieu de parler de la » fincerité de celui , qui , après » avoir amaffé par écrit tout ce » qu'il avoit pu entendre dans mes »i Cours , nie le mit entre les mains a avant fou départ de Paris , en » me difant : bac tua funt. C'étoit * M. l'Archevêque, Docteur en j) Medecine,5t Aggregé de Rouen. M. Winflow n'avoit nul deiTein de donner des figures pour le pre- fent , parce qu'ainfi qu'il le décla- re dans fon Avcrtiflemcnt , il n'en vouloic que d'originales tirées fous fes yeux &: d'après nature , ce qui s sçavans; ne fe peut taire qu'en un long ef- pace de temps ; d'autant plus que ces figures qu'il a déjà commencé de faire dciïiner , doivent compo- fer un Ouvrage à part , contenant au moins quatre-vingt planches , in- folio , avec une explication en La- tin 8c en François , à côté de cha- que planche : Ouvrage qui deman- de une dépenfe Royale. Mais plu- fieurs particuliers ayant fortement follicité M. Winflov de ne pas donner un Livre d'Anatomie abfo- lument dénué de figures , il s'eft déterminé,à la follicitation des mê- mes perfonnes , à donner quelques- unes desfameufes5i excellentes Ta- bles d'Euftachius avec explication. Ces Tables font ici au nombre de quatre,M.Winflow les a fait copier furies Originaux de Rome, avec les explications de Lancifi, aufquel- les il en a aulîi ajouté lui-même quelques-unes. Il nous refte à dire un mot de la divifion & de l'Economie de l'Ou- vrage. Il n'eft diilribué ni en Li- vres ni en Chapitres , mais en di- vers Traitez , dont les titres indi- quent la matière qui y eft renfer- mée. Le premier Traité contient l'Hiftoire des Os du Squelete , ou des Os fecs. Le fécond , celle du Cadavre récemment décharné , ou des Os frais. A ces deux Traitez fuccede celui des Mufcles , puis ce- lui des Artères , & celui des Vei- nes. Le Traité des Nerfs vient en- fuite ; après quoi on trouve un trai- té fommaire des parties du corps humain , contenant le dénombre- ment des Artères , des Veines , des A OU des Nerfs de chacune de ces par- ties , l'Hiftoire générale des tégu- mens , &: une explication des ter- mes d'Anatomie les plus généri- ques. Le bas ventre fait le fujet du huitième Traité , la poitrine , celui du neuvième , &c la tête , celui du dixième , qui eft le dernier. M. Winflow a inféré dans ce Traité , le difeoursde feu fon grand Oncle j le célèbre M- Steuon , fur ï'Anatomie du Cerveau , difeours que le neveu déclare avoir fuivi comme le modèle gênerai de toute /a conduite dans fes travaux Anato- miques : On ne peut fçavoir trop de gré à M. Winfiow d'avoir donné au public une nouvelle Edition de cette Pièce qui étoit devenue très-rare , ôc qui renferme de fi excellens avis , foit pour éviter le faux & l'imagi- naire, foit pour découvrir le vray & le réel non-feulement par rap- port à la ftrudure &: à l'ufage des parties ; mais encore par rapport à la manière de faire les dilîections & les figures An.itomiques. Peut êne ne fera-t'on pas fâché de trouver ici quelques endroits de ce difeours , il eft adreflé à Mef- fieurs de l'AiTemblée de chez M. Thévenot , en i66i. M. Stenon déclare d'abord qu'il |ne connoît rien dans Ï'Anatomie (du Cerveau , & qu'il fouhaiteroit jfort être le feul qui fût oblige de (faire une telle confelfion. Il re- marque que ce feroit un grand bon- peur pour le genre humain , que f.ette partie la plus délicate de tou- tes , &c qui fe trouve fujette à des Aettjl. S T , i 7 î 2. 47j> maladies fi fréquentes &: fi danae- reufes , fût aufîî-bien connue que fe l'imaginent beaucoup de Philo- fophes &c d'Anatomiftes. Il y eni peu, obfervet'onenfuite, qui imi- tent le grand Sylvius, lequel ne parle du cerveau qu'en doutant , quoi- qu'il ait travaillé tant d'années à le connoître ; le nombre de ceux, con- tinué'-t'on , à qui rien ne donne de la peine, eft infailliblement le plus grand , & ces gens qui ont l'affir- mative fi prompte , vous donnent l'Hiftoire du Cerveau & vous defi- gnent la difpofidon de fes parties ' avec la même alluranceque s'ils a- voient été prefens à la compoiîtion de cette merveilleufe Machine , Se qu'ils eullent pénétré dans tous les defltins de fon grand Architecte. Quoique le nombre de ces Affir— mareurs , foit grand , M. Stenon ne laiiïe pas d'avancer que»ceux qui cherchent la venté ne trouveront dans tout ce que l'on a écrit du Cerveau , aucune chofe qui les puifle fatisfaire. Après ces reflexions générales , notre Auteur obferve que lorfqu'on voit diflequer un Cerveau , tout ce qu'on en peut di- re , c'eft qu'il renferme deux fub- ftances différentes , l'une grifatre &£ l'autre blanche ; que la blanche eft continue aux Nerfs qui fe diftri- buent par tout le corps : Que la "ri- fatre ferten quelques endroits com- me d'écorce pour la fubftance blan- che , & qu'en d'autres elle fepare les filamens blancs les uns des au- tres. Si on demande ce que c'eft que ces fubftances , de quelle manière 4S0 JOURNAL D ces Nerfs fc joignent dans la fub- ftance blanche , & jufqu'où les cx- rrèmitésde ces Nerts yavanccnr,M". Stenon répond que c'eft-là que les Anatomiftes doivent confeflér leur ignorance ; car de dire , remarque- t'il , que la fubftance blanche , par exemple , eft un corps uniforme comme feroit de la cire , où il n'y a point d'artifice caché , c'eft ce qu'on ne peut avancer, non-feule- ment parce que ce feroit avoir un fentiment indigne du plus beau chef-d'œuvre de la nature ; mais, parce que la fubftance dont il s'a- git étant par tout fibreufe comme elle le paroît en plufieurs endroits , il faut que ces fibres foienc difpo- fées avec un grand art , puiique toute la diverfué de nos fentimens Se de nos mouvemens en dépend. On admire l'artifice des fibres dans chaque mufcle : combien , deman- de ici M. Stenon , ne les doit-on pas admirer davantage dans le Cer- veau , où ces fibres renfermées dans un fi petit efpace, font chacune leur opération fans confufion 2c fans de- fordre. On ne connoît pas mieux, félon notre Auteur , les ventricules du cerveau qu'on en connoît la fub- ftance , ceux qui y logent l'efpric animal , croyent avoir autant de raifon que ceux qui les deftinent à recevoir les fuperfluitez exercmen- teufes , mais les uns Se les autres le trouvent aflez empêchez quand il faut déterminer la fource de ces cfprits ou de ces fuperfluitez ; puif- qu'on peut auifi-bien les taire ve- nir, des yailleaux que l'on voit dans ES SCAVANS, ces cavitez , que de la fubftance même du cerveau. Il n'eft pas au refte plus aile de déterminer le lieu de leur fortie. M. Stenon fait voir d'une manière très-fenfible toutes cesdifticulrez. Si la fubftance Se les ventricules du cerveau font quelque chofe de fi inconnu , notre Auteur prétend que la vraye manière de le difîcquer n'eft. pas plus connue. Il ne parle pas de celle qui coupe le cerveau en lamel- les , il y a déjà long rems qu'on eft: convaincu qu'elle n'apporte pas un grand éclaircilTement dans l'Anato- mie. L'autre dift~edtion qui confifte à développer les replis paroît un peu plus naturelle , mais elle ne montre que les dehors de ce qu'on cherche , Se encore ne les montre- t'clle que bien imparfaitement : la. troifiéme qui ajoute au développe—- mentdes replis , une féparation de la fubftance grife d'avec la blan- che, pafle un peu plus avant, m lis elle ne pénétre point cependant au de-là de la furface de la moelle. On fait divers mélanges de ces méthodes de diftequer , aufquelles l'on pourroit auffi ajouter diverfes manières de profil , de long Se de travers. M. Stenon nonobftant ce- la, prétend que la vraye difleclion du cerveau feroit de fuivre les filets des nerfs au travers de la fubftance du cerveau pour voir par où ces filets partent , Se où ils aboutirtent » mais il avoué que ce travail eft lî plein de difficulté qu'on n'oferoic efperer d'en venir à bout fans des préparations toutes particulières. En' effet la fubftance du cerveau eft fi' A O U S molle , les fibres en font fi délica- tes , qu'on ne fçauroit prcfque les toucher fans les rompre. Ainfi l'A- natomie n'étant pas encore par- venue à ce degré de peitection , de pouvoir faire la vraye détection du cerveau j M. Scenon conclud que lesAnatomiftes doivent plutôt pren- dre le parti d'avouer ici leur igno- rance , que de chercher à fe tromper eux-mêmes, &c à tromper les au- tres , comme ils le font tant de fois. Car les uns , dit il , vous font pa- roitre dans le cerveau , des parties féparées qui ne font cependant qu'u- ne même fubitance continuée , les autres veulent perfuader par l'ad- miniftration Anatomique , que cer- taines parties ne font que contigues, tandis qu'elles font réellement join- tes enfemble par des filets ou par des vaiffeaux. Il y en a qui donnent aux parties la fituation qu'ils croyent necelTaire au fyitême qu'ils fe font imaginez , s'embarraflant peu d'examiner fi la nature ne les a point difpoiées d'une manière contraire. Vous en trouve- rez, continue M. Stenon ; qui vous démontreront la Pie Mère où elle ne fe trouve pas ; & qui ne connoî- tront point la du Mère en quelques endroits où elle fe voit très-évidem- ment. Ils vous feront même pafier en un befoin , la fubftance du cer- veau pour une membrane , & tout cela très-fouvent fans defiein de tromper , mais trompez eux-mê- mes parles principes qu'ils fe font faits , & par la manière de diiîe- quer à laquelle ils fe font alTujettis. M. Stenon palfe ici au fyftême T , i 7 5 2. 48 r des anciens lur le fujet des ventri- cules du cerveau par rapport aux fonctions de l'ame. Il remarque que les anciens ont pris les ventricules antérieurs pour le fiege du fens commun & les poftérieurs pour le fiege de la mémoire , 6i que dans un autre ventricule qu'ils appellent ventricule du milieu, ou cavité voû- tée , ils ont pofé le fiege du juge- ment ; lurquoi il fait les reflexions qu'on doit attendre d'un auiîi ha- bile homme. Il vient enfuite aux fyflêmes mo- dernes , & refufe d'abord celui de M. Willis qui loge le fens com- mun dans le Corpus S triât uni ou corps raye , l'imagination dans ce qu'on appelle Corpus Ccdlofum où corps calleux , la mémoire dans la fubitance corticale ou grifatre qui enveloppe la blanche , M. Defcar- tes paroît enfuite fur les rangs , on combat à plein fon fentimenc fur la glande pineale , & on faic voir que tout ce que ce Philofophe en a dit ne s'accorde nullement avec la véritable Anaromie. On montre entre autres chofes , que la conne- xion de cette glande avec le cer- veau par le moyen des Artères , eft une pure fiction. Nous avons dit que le difeours de M. Stenon ren- fermoit d'excellens avis fur ce qui concerne les figures Anatomiques, en voici quelques exemples. Les directions où les prépara- tions étant fujettes à beaucoup d'er- reurs , &c les Anatomiftes étant. fu- jets à fe faire des fyltêmes , & à y accommoder la mollelfe des par- ties , il ne faut pas s'étonner n les 482 JOURNAL D figuresqu'on taie d'après ne font pas exactes. Mais les fautes de la dire- ction ne four pas les feules caufes de l'imperfection dont il s'agir. Le Deffinareur v contribue beaucoup par l'ignorance de Ion arr. La diffi- culté qu'il y a de donner dans le deffem , le relief & l'enfoncement néceilaire, & celle de faire bien en- tendre à ce DcilînatCLir ce qu'on veut qu'il exécute , lui fervent fou- vent d'exeufe. Les meilleures figures du cerveau que l'on ait eues |ufqu'à prefent , font celles de M. Willis , il s'y eft pourtant glille quelques fautes qu'il importe de remarquer. Dans la troifiéme figure il re- prefente la glande pineale comme ronde Se fans pointe , ce qui n'elf pas. On n'y voit rien non plus de la fubftance du cerveau qui eft de- vant la bafe de la glande, &c qui pallc par de-là d'un côté du cer- veau à l'autre. Selon la figure de M. Willis , il y a derrière la glande un efpace entre les corps du troi- fiéme Pair des Tubercules , lequel efpace eft litué dans la baie du Cer- veau , 6v cependant cec efpace pa- roît tout autrement quand on le voit dans l'état naturel. L'expen- fion mince de la fubftance blan- che du Cerveau, laquelle va fe con- tinuer avec le milieu du petit Cer- veau , & qui en cet endroit eft fort épailTe ne le trouve point dans cette figure , non plus que la vraye ori- gine des Nerfs pathétiques , qui fortenc de cette même expanfion. ES S Ç A V A N S , M. Willis fait paroîrre féparés , îes corps du deuxième Pair des Tu- bercules i quoiqu'ils tiennent d'or- dinaire cnfemble. Le defTous de la voure y paroît toute d'une même fubftance , ce- pendant il a des inégalirez , & une ftructure très admirable. Nous paf- fons plulieurs autres deffauts coniï» dcrables qu'on reprend ici dans les figures particulières de M. Willis nous y renvoyons les Lecteur?. Voici quelques autres obfcrva- tions fur les figures Anatomiques en gênerai. Il fe rencontre une difficulté par- ticulière pour bien delliner le Cer- veau.11 fuffit de préparer une fois les autres parties pour en exprimer la figure, parce que ces parties demeu- rent long-temps dans le même étati le Cerveau au contraire étant pré- paré s'affaillc avant qu'on en ait ti- ré le deilein , enlorte qu'il faut delliner d'après plulieurs cerveaux pour achever une (eule figure ; ce qui n'ayant pas été coniideré, pour- roit bien être caufe qu'il n'y a point de figures d'Anatomie plus impar- faites que celles du Cerveau. M. Srenon après ces remarques donne plulieurs avisimportanspour bien dmequer le Cerveau , & ne fe point expofer au rifque d'en alté- rer les parties en les examinant ; ri faudroic copier tout le difeours pour en rapporter ce qu'il renferme d'u- tile. L'cftime que M. Winflowfaic de cette Pièce, fuffit pour en recom- mander la lecture. A O U S T , 1732; 485 HISTOIRE SECRETTE DES FEMMES GALANTES DE l'Antiquité. A Rouen ; Se fe vend à Paris ■ chez Etienne Ganeau, rue Sainr Jacques , aux Armes de Dombes ; 6c à Roiien , chez Jorc perc & fils ; Imprimeuis-Libraires de M.l'Archevêque lk du Clergé. 1732. in-11. 3. vol.Tom. IV. pp. 407. Tom. V. pp. 471. Tom. VI. pp. 547, fansTAvertilTemenc. DANS l'Extrait que nous donnâmes des trois premiers Volumes de cet Ouvrage au mois de Juin 17Z& nous travaillâmes à détruire le préjugé que doit na- turellement faire naître le titre qu'il porte. C*eiï-à-dire , que nous apprîmes au Public , que ce Livre n'eit. point uniquement une nou- velle combinaison de fympathies merveilleufes , de penchants invin- cibles, de déclarations touchantes , d'entrevues hazardeufes , d'allar- mes, dejaloufies, d'enlevemens , d'abfences , de naufrages , de rc- connoiflances , &c de tous ces lieux communs qui compofent les Ro- mans , & qui ne parlent qu'à l'ima- gination des Lecteurs. L'inconnu qui l'a compofé , s'y propofe un but plus raisonnable & pins utile. Il a delîein , comme nous le dîmes alors , de donner une Hiftoire abré- gée des Empires les plus floriflans , de leurs Princes , de leurs Loix &c de leurs Révolutions. Qui pouvoit mieux le conduire à ce but , que les Avantures des Femmes Illuftres de chaque fiécle , puifque ce font elles qui ont fouvent donné le branle aux grands évenemens ? Pour remplir ce deflein , il falloit ife défier du témoignage des Poètes fe recourir à celui des Hiftoriens^ C'cft ce que notre Auteur a fait i mais fans indiquer les fources dans lefquelles il avoit puife. Cette mé- thode l'avoit fait Soupçonner d'a- voir fubftitué fes propres ficiions à celles des Poètes; & fictions pour fictions , quelques perfonnes ont dit qu'il eût mieux valu s'en tenir à celles qui font connues de tout le monde , que d'en inventer de nou- velles. C'eft pour fe difcuîper decetre aceufation , qu'il a mis à la tête des trois Volumes que nous annonçons, un avertilfement , dans lequel il juftifie quelques endroits de fon Li- vre , qui ont paru choquer les no- tions communes. Iô , par exemple c(t connue fur le témoignage des Poètes , pour une Nymphe aimée de Jupiter , pourfuivic par Junon a changée en Vache , &c quelque tems après décorée de l'apothéofe fous le fameux nom d'Ifis. Il s'en faut bien que notre Auteur nous la prefente fous ce point de vue. il nous la peint comme une PrêtrefTc de Junon, qui portant les marques certaines d'un commerce galant a profite de la crédulité de fon fiécle en déclarant que Jupiter l'a rendue mère 5 & qui cependant , pour éviter le mépris des indevots , & les reproches de fa famille,, parTc 484 JOURNAL D en Egypte , y vie errance quelque tems , y bit fes couches , & s'y ma- rie enfin à Télègone. Qui ne croi- roit que la feule envie de fubftitucr le vraiiemblable au merveilleux a fuggeré ces faits à notre Auteur ; Et cependant deux longs pallagcs , l'un de Paléphare &c l'autre d'Hé- rodote , prouvent incontcftjble- ment qu'il n'a rien mis du lien dans ce narré. Narcilîe eft connu de tout le monde pour un garçon charmant , épris de l'amour de fa propre beauté Se qui périt en fe mirant dans un ruilîeau , fur les rives duquel il ad- miroit follement fon image. Notre Auteur nous le donne au contraire pour un jeune homme enchanté de la beauté d'une de fes fœurs , que la nature s'etoit plue à lui rendre tota- lement femblablc , que la mort lui enlevé , & dont il ne peut retrou- ver l'image , qu'en fe mirant lui- même dans le cryftal d'un ruifleau, qui la lui reprefentefi naïvement, qu'il ne fçsuroit fe refoudre à quit- ter cette rive , & qu'il y meurt. Pourquoi cette Hiftoire paroît-ellc nouvellement imaginée ? C'eft que prefque perfonne ne fe fouvient de l'avoir lue dans Paufanias , d'où notre Auteur l'a tirée. Hercule , dont nous avons une fi haute idée , n'eft connu dans cet Ouvrage que comme un petit hom- me d'une figure aiTezdcfagréable; qui joint l'art à la nature pour ef- frayer ceux qu'il aborde ; dont le courage approche plus delà féroci- té que delà véritable valeur, à qui l'emportement , la fureur & le ES SÇAVANS, meurtre font familiers; qui fe fait un mérite d'être le plus gourmand Cv le plus y vrogne de fon fiécle , Se qui , père d'un nombre prodigieux d'entans, en mallacre une partie, &c ne connoît pas l'autre. Qui croi- roit que les Poètes eullent pu par- venir à faire palier un tel monftrc pour un Héios , malgré les témoi- gnages d'Apollodore, d'Athénée , tk de Clément d'Alexandrie ; Ecri- vains qu'a fuivis notre Auteur , &C dont il rapporte les paroles? Médée n'eft point une marâtre dans cet Ouvrage. Ce font les Co- rinthiens, qui font coupables du meurtre de fesentans. Quelle preu- ve en a-t-on ? Elien le dit préci- fément. Voici fon Texte. » Plu- i> lîeurs rejettent le bruit qui coure » contre Medée : car ce ne fut » point elle qui maflacra fes enfans, « ce furent les Corinthiens. Ce qui » a donne matière à la Fable qui la t> deshonore , c'eft que les Corin- n thiens conjurèrent Euripide de » mettre ce forfait fur le compte » de Medée , & que ce Poète le » fit avec tant d'art Se tant de fuc- h ces, que fon menfonge a fait ou- » blier la vérité. C'eft ainfi que notre Auteur ju- ftifie les fîngularitez qu'on trouve dans les trois premiers Volumes de fon Ouvrage. A l'égard de celles qui fe liront dans les fui vans, en connoîcra d'abord ce que l'on en doit penfer , puifiju'il indique pat des Notes les Auteurs qui lui ont fourni les efpeces d'anecdotes, dont il a fait ufage. Il ne faut pourtant pas s'imagi- A O U S mer , que tout ce qu'il rapporte foie rire de l'Hiftoire. Le titre même de fon Ouvrage eft une preuve du con- traire , puifque la galanterie qui en fait le fonds , étoit vraifemblable- ment ignorée de tous ceux qu'il met fur la Scène. Car quoique les anciens connurent parfaitement l'amour, on a tout lieu de croire qu'ils fuivirent la nature de trop près, pour favoircequec'étoitque la galanterie. Aufli n'ont - ils pas même de termes pour exprimer ce que nous entendons parce mot. Les trois nouveaux Volumes que nous annonçons au Public , renfer- ment chacun quatre Hiftoires prin- cipales, comme ceux qui les ont précédés. Le IVe contient i°. l'Hi- ftoire de Dorique fameufe Courti- fanne^danslaquelle notre Auteur fait entrer tout ce qui s'eft paffé de mé- morable fousPfammèsRoi d'Egyp- te: z°.L'Hiltoire de Sapho, contem- poraine d'Alcée & de Stéfichore ; où l'on trouve plufieurs faits con— cernant l'Hiftoire de la Grèce , qu'on y démêlera avec plaifîr des ornemens dont notre Anonyme l'a enrichie : 3*. L'Hiftoire de Géga- nie , que quelques Hiftoriensonc cru n'avoir jamais exifté , mais que d'autres au contraire affurent avoir été l'Epoufe du vieux Tarquin cin- quième Roi de Rome , &c mère de Tarquin le Superbe : fur quoi notre Auteur prenant le milieu entre ces deux fyftêmes , fe Contente de faire Géganie MaîtreiTe du vieux Tarquin, & la reprefente comme T, i7ja: 48y l'amede tout ce qui s'eft paffé à la Cour de ce Prince, fuivant Denys d'Halicarnaffe : 40. A l'occafion de Phya , on rappelle les principaux évenemens arrivés lous le règne de Pififtrate Tyran d'Athènes. Le Ve Volume renferme i°, l'Hi- ftoire de Rhodope , Efclave Tra- cienne , connue pour une Courti- fanne , mais dont l'Auteur fait une Héroïne, & un exemple de vertu. Ce qu'il y a de vrai dans cette Hi- ftoire , eft tiré de ce qui s'eft parte en Lydie , fous le règne de Créfus : 20. Sous le nom de l'Hiftoire de Phédime , on lit la fameufe conf- piration , qui délivra l'ancienne Perfe de la tyrannie des Mages : l'amour de la liberté, celui delà Patrie, la haine de l'ufurpation , l'attachement à la Maifon Royale du Grand Cyrus , la nobleffe de ce projet,fa hardieffe dans la conduite, fon bonheur dans l'exécution , & l'amour qu'on rend ici le principal motif de cette grande révolution , fournirent des iituations fi interef- fantes , qu'on lira furement ce mor- ceau avec plaifir : 30. L'Hiftoire de- Nitétis fille d'Apriès ancien Roi d'Egypte , & de Sylofonte frère de Polycrate Tyran de Samos , eft une .fuite de l'Hiftoire du même fiécle ; 40. L'Hiftoire de Learna fameufe Courtifanne amené tout ce qui a précédé la chute des Pififtratides à Athènes. Cette femme qui fe pi-- quoit d'une confiance inviolable ,. en exigeoit une pareille de feî Amans. Il fuffifoic de nelaplusaW- 4S5 JOURNAL D nier pour la trouver fiere , coura- geule , diilimulée , Se capable des plus haures entreprifes pour punir Ion infidèle. L'inconftance d'Hip- parque , l'un des derniers Pififtra- tides , allume fa fureur , Se caufe ici tous les évenemens qu'on y lir. Le VIe Volume eft compofé i°. de l'Hiftoire de Tullie , fille de Servius-Tullius fixiéme Roi de Ro- me : cette Hiftoire eft la fuite de ce qu'on a lu dans le Ve Volume , fous le titre de Gèganie , & conduit le Ledtcur jufqu'à l'expullion des Tar- quins: i°. De l'Hiftoire de Percale, qui à travers une infinité d'avantu- tes galantes,, apprend les évenemens fameux du règne de Clcomene Se de Démarate,Roisde Lacédemone, à ceux qui fauront les difeerner : 3°. De celle d'Anytis fille de Da- rius - Hyftafpide troifiéme Roi de Perfc ; dans laquelle on continue l'Hiftoire de ce Pays-là jufqu'à la levée du Siège de Paros , par Mil- tiade : 40. De celle enfin d'Artémi- fe première , fille de Lygdamis , Se veuve d'un Roi d'Halicarnafïe ; laquelle il faut bien diftinguer delà veuve de Maufole , fi fameufe par la douleur que lui caufa la perte de Ion mari. L'Auteur donne à la pre- mière tant de part dans la guerre que Xcrxès porta en Grèce , qu'il ne tient pas à lui que le nom d'Arté- mife ne fok aullî célèbre dans l'Hi- ftoire des Porfes , que celui de Thé- miftocle l'eft dans celle des Grecs. Pour peu qu'on ait lu Hérodote, on fait qu'une ArtémifeReine d'Ha- ES SÇAVANS, licarnafle , équipa cinq Vaiffeaui pour accompagner Xerxcs dans fon expédition contre la Grèce , fans y être contrainte par aucune neceflîté, mais feulement pour exercer fon courage Se faire éclater fa vertu : Que cette Reine fe rendit compa- rable aux plus grands Héros par fa valeur & fa prudence : Que Xerxcs l'honora toujours comme la plus brave de fon armée Se la plus fage de fon Confeil ; Se qu'elle fit dire à ce Prince, qu'à la journée de Sala- mine , les femmes de fa flotte a voient combattu comme des hom- mes, & les hommes comme des femmes. Voilà ce que l'Hiftoire nous apprend de cette Artémife ; Se voici ce que la ficlion y ajoute chez notre Auteur. Il la fait pafler à Athènes préci- fement dans le tems où l'on eft pro- pre à prendre Se à donner de l'a- mour. Elle y voit Thémiftocle Se ne peut lui refufer fon cœur. Mais ce Héros occupé par des projets de politique , ou amufé par de fimples galanteries , ne daigna pas même s'appercevoir qu'une Artémife vou- loitlui plaire. Elle fortit d'Athènes pénétrée d'amour , Se agitée du plus violent dépit. Arrivée à Hali- carnaffe , fon Souverain l'époufa , & la fit merc d'un fils , dont elle étoit Régente , lorfque Xerxès re- folut d'alfervir la Grèce. Il ne crut pas [ dit l'Auteur ] que ce fut affez d'aflembler des Troupes innombrables pour exécu- ter ce projet. Il jugea neceiTairc d'apprendre A O U S d'apprendre l'état du Pays ; Se pour s'en inftruire , ce fut fur Artémife que fon Miniftre lui fit jetter les yeux. On lui ordonna donc [ car on la fait ici tributaire de Perfe ] de paffer déguifée à Athènes , & d'e- xaminer avec foin les forces e\: les difpolïtions des Athéniens & de leurs alliez. Un tel commandement fit frémir Artémife. Elle prévit qu'elle reverroit Thémiftocle , Se qu'elle ne le reverroit pas avec in- différence. Mais enfin il fallutobéir. Elle partit d'Halicamaffe fous un habit de Cavalier, Se arriva bien-tôt à Athènes , comme un Perfan dif- gracié de la Cour de Xerxès, & qui venoit chercher un afyle. Elle s'y fit nommer Arafpe , & fous ce nom elle gagna la confiance de Thémiftocle. Mais quelle fut fa douleur, lorfqu'elle apprit que cet illuftre Athénien étoit engagé dans le commerce le plus tendre avec Stéfilée! Elle perdit tout efpoir de l'emporterjamaisfur une telle riva- le , Se forma le projet de fe venger à la fois Se des charmes de Stéfilée Se de l'indifférence de Thémiftocle. Après avoir fait tout préparer pour fon départ , elle attendit que Stéfi- lée allât à fa maifon de Campagne fur le bord de la mer. Elle fit forcer fa retraite , l'enleva , Se revint à Halicarnaffc avec fa proye. Thé- miftocle croyant que fa Maîrreffe avoit fuivi volontairement Arafpe, qu'il apprit être l'auteur de cet en- lèvement , eut bien-tôt oublié Sté- filée , il fe maria même Se ne s'occu- pa plus que de la gloire. Cependant Artémife jouiffoit de T, T732. 4S7 toute fa vi&oirc , Se fit fa voir à Xerxès , non feulement ce qu'elle avoit remarqué dans Athènes , mais encore qu'elle avoit en fa. puiflance la Maîtrelfe de Thémi- ftocle, le plus formidable des Grecs. Xerxès apprit cette dernière nou- velle avec plaiiir. Il regarda Stéfi- lée comme un gage qui pouvoit lui être utile , fi la fortune le contrai- gnoit un jour de traiter avec Thé- miftocle. Pour s'aflurer cette ref- fource , il voulut que fon illuftre Prifonniere fut conduite à fa Cour, Se chargea Dardanus , jeune Se charmant Abydcnien , d'aller la retirer des mams d' Artémife. A peine parut-il devant la Reine d'Halicarnaiîe , qu'il lui fit oublier jufqu'au dépit qu'elle avoit confer- vé contre Thémiftocle. Elle ne fut occupée que de l'amour fubit Se violent , que fit naître dans Ion cœur l'Envoyé de Xerxès. Elle pré- vit , en frémilTar.t, qu'il alloitvoir Stéiilée , Se qu'il la trouveroit char- mante. Mais c'étoit un malheur qu'elle ne pouvoit éviter. Elle fe contenta donc de traiter Dardanus de façon à lui faire entendre tout ce qu'elle fentoitpour lui. L'Abyde- nien fut fourd à toutes fes avances. IJUen fallut enfin venir à une décla- ration plus intelligible. Dardanus la reçutLavec un refpecl: affez équivo- que pour faire croire à la Reine qu'il étoit très-fenfible à fes bontez; de telle forte qu'Artémife le vit partir avec Stéfilée dans l'efperancc de le voir bien-tôt revenir feul par- tager fon lit Se fon Trône. Mais quel fut fon dcfefpoir , quand elle Rrr 483 JOURNAL D apprit que fon cher D.irdanus s'é— étoit fouftrait à fon amour , &c avoit dérobé Stéfilée aux vues po- litiques de Xerxés , en s'enfiiyant avec elle dans un Pays inconnu ! La raç^e &c la tureur s'emparèrent de fon ame. Elle mit tout en ufage pour découvrir l'afyle que fon in- grat avoit choifi à ù rivale. Elle le découvrit enfin. Mais elle ne rejoi- gnit ces deux Amans , que pour être témoin de leur amour mutuel , £c de leur heureux mariage. Le ref- fentiment qu'elle en eut lui fit rou- ler pendant long-tenis des projets de vengeance qu'elle ne put exécuter. Elle prit donc le parti de retourner' dans fes Etats, mais elle n'y put re- lier.L'image de la félicité de Stéfilée la tourmentoit fans celle. Elle en fortit enfin, & elle prit le chemin du Cap de Leucade , qui pour lors avoit la réputation d'être un remè- de allure contre les defefpoirs amoureux. On y montoit fur le faî- te d'un rocher , on fe précipitoit dans la mer , & l'on fortoit des flots mort ou guéri. La Reine d'HalicarnafTe Tenta ce remède pé- rilleux & y perdit la vie. Telles font les avantures que l'Auteur prête à (on Héroïne , pour avoir occafion d'inftruire fon Lec- teur , de ce qui a immédiatement précédé ou fuivi la fameufe journée de Salaminc. Il ne nous refte plus qu'à donner quelques échantillons du ftyle de l'Auteur, £<. c'eft ce que nous allons faire , en tranferivant quelques-uns des portraits qu'il fait entrer dans ïe morceau donc nous venons de ES SÇAVANS, rendre compte. Tel eu celui d'At- témife. » Elle eut non feulement une » vaillance, qui la releva infini- » ment au-delïus de toutes celles » de fon fexe ; mais ce qu'elle eue "d'admirable, & ce qu'on trouve » même rarement dans les plus » grands Capitaines, c'eit que dans m le feu de l'action &c dans le perd » le plus redoutable , elle confer- y> voit un jugement & une prefence » d'efprit que rien n'ébranloit , 8c » qui 1a mettoient alors en état de » prendre fi à propos fon parti , » qu'elle favoit toujours fe dérober }> au danger , & quelquefois en » profiter au delavantage de fes en- >> nemis. Sage Se prudente dans les » délibérations , elle alloit au vrai j> fans jamais s'en écarter. La valeur » n'étoit donc point en elle une » vertu téméraire , qui lui fît bra- » ver le danger fans le prévoir. Elle » envifageoit toutes les fuites, & » elle n'oublioit rien alors pour » empêcher qu'on ne s'y expofât. » Cependant cette femme recom- » mandable par tant de vertus » guerrières , fi fage dans le Con- j> feil & fi ferme dans le péril , ne. » put faire ufage de ces dons ex- » traordinaires dans le tranfport » que lui caufa le tumulte des paf- 3> fions. Elle n'eut ni allez de cou- » rage , ni allez de prudence , pour » alîurer fon repos , qu'elle fit per- » pétuellement dépendre des capri- » ces de l'amour. Faite de manière » à recevoir aifément la loi , elle » eut le malheur de ne pouvoir la a> donner. Aulfi renommée par fet A O U S » actions militaires, que Sapho par » fes Ouvrages Poétiques , elle fut *> comme elle le rebut d'un Amant »> qu'elle idolâtroit ; 6c elle périt » comme elle , en tentant de fe » guérir par la voye, qui avoit fi » mal réullî à Sapho. Tel eft encore le portrait de Xerxès. a Ce Prince n'avoit de Roi que » l'extérieur ; 5c on n'a pu lui en - » vier l'éloge d'être l'homme de » Perfe le mieux fait & de la meil- «leuremine. Mais il n'eut aucune » autre qualité rccommandable. m Elevé dans le fein de la molefle , a & enivré de la vaine idée de fa » grandeur , il crut follement qu'il nn'y avoit que fes Dieux au-delfus m de lui : & s'il permit qu'on les » adorât dans les Cicux , il s'imagi- •> na qu'on ne devoit fervir que lui n fur la terre. Accoutumé à recc- » voir de fes Sujets une obéiftance wbafle & fervile , il s'offenfa qu'il *» y eût des hommes , qui retu- « foientdelereconnoître pour Roi: » de fans confulter s'il avoit aflez T, 1732. 480 n de courage ou- d'habileté pour les » vaincre , il fe perfuada qu'il n'a- nvoit qu'à le vouloir pour réunir , »> & qu'une vaine montre de fes » forces fuffiroit pour le rendre n Monarque abfolu de l'Univers. Tel eft auiîi celui de Dardanus. » Il n'avoit que vingt-deux ans, » & la nature en le formant n'avoit »» oublié aucune des grâces qui peu- » vent embrafer les cœurs : non » feulement il étoit d'une beauté "parfaite, mais il avoit toute la » dignité qui peut la rendre admi- » rable ; une taille avantageufe , un » air de noblefte répandu dans toute » f a perfonne, & ce je ne foi quoi » qui plaît, lors même que l'on ne » fonge pas à plaire. Qu'on ajoute à ce que nous ve- nons de dire , ce que nous avons expofé dans notre Journal du mois de Juin 1726. & ceux qui défirent s'inftruire en s'amufant , auront certainement du Livre que nous annonçons une idée allez avanta- geufe , pour fouhaiter de le lire. Rrrij 4po JOURNAL DES SÇAVANS; GUALLIA CHRISTIANA IN PROVINCIAS. Ecclefiafticas diftributa in quà feries ac Hiftoria Archicpifcoporum , Epifcoporum & Abbatum Rcgionum omnium , quas vêtus Gallia. compiectcbatur , ab origine Eccledarum ad notera :empora deducitur & probatur ex auchenticis inftrumentis ad calcem appolîtis. Opéra & fhidio Monachorum Congregationis S. Mauri Ordinis S. Bcnedi&L Tomus V. C'eft-à-dire: La Gaule Chrétienne , divifée en Provinces Ecclrfîa/liques > dans laquelle on voit la fuite & l'Hifloire des Archevêques , des Evêques CT des AbbeT^de tous les l'.iys compris dans l'ancienne Gaule , depuis l'o- rigine des EgUfes jitfqu'à notre tems } avec des preuves tirées des Adonu- mens authentiques. Par des Religieux BencdiElins de la Congrégation de S. Maur , Tome V. A Paris, de l'Imprimerie Royale. 173 1. in -foL col. 1 1 1 5. pour le corps de l'Ouvrage. CE Volume comprend deux Archevêchez, celui de Ma- lines & celui de Mayence. Quoique la Ville de Malines fade une Seigneurie particulière, elle eft enfermée dans le Brabant, dont elle eft en quelque manière le centre. Elle n'eft cependant point des plus anciennes de ce Pays-là. Charles le Simple en donna la Sei- gneurie aux Evêqucs de Liège qui en étoient les Evêques Diocefains. Ceux - ci eurent pour avoués des Seigneurs delà Maifon de Berthold qui s'emparèrent fouvent de la puiflance temporelle , quoiqu'ils ne fuflent établis que pour foûtenir les droits de l'Evêque. Malines fut engagée en 1300. à Jean II. Duc de Brabant, enfuite à Guillau- me Comte de Haynaut & d'Hol- lande ; enfuite Adolphe Marcan, Evêque de Liège , vendit Malines à Louis de Nevers Comte de Flan- dres. Cette Seigneurie paiTa à la Maifon de Bourgogne par le ma- riage de Marguerite avec Philippes le Hardi , c\: enfuite à la Maifon d'Autriche , à laquelle elle eft re- tournée par le Traité d'Utrecht. Malines fut du Diocefede Liège jufqu'au onzième tiécle que la Ville de Malines tut attachée , pour le Spirituel, à l'EvêchédeCambray. Elle refta en cet état jufqu'à l'érec- tion des nouveaux Evêchez du Pays-Bas. En 1559.1e Pape Paul IV. érigea Malines en Archevêché à la prière de Philippe II. Roid'Efpa- gne; & on lui donna pour Suffra- gans les Evêques d'Anvers , de Bois-le-Duc , dans le Brabant , de Gand , de Bruges & d'Ipres dans la Flandres , Se de Ruremonde dans la Gueldre. Saint Lambert fut le premier Apôtre du Pays où eft (îtuéela Vil- le d'Anvers. On dit que S. Wille- brod y prêcha auflî la Foi , il fut ai- dé dans cette fonction par S. Rit- bold que la Ville de Malines revê- te comme fbn Apôtre particulier» ÀOUS Nos Auteurs croyent, après le Père du Sollier, qu'il n'y a pas beaucoup de fond à faire fur la tradition du Pays , que S. Rubold étoit de Sang Royal, & qu'il a voit été Archevê- que de Dublin. Ce qui leur paroît le plus probable , c'elt que S. Ru- bold étoit un Moine d'Hibernie, qui ayant appris les progrès que S. "Willibrod faifoit dans la Belgi- que en prêchant la Foi, paffa d'An- gleterre dans la Belgique, qu'il fit enluitc un voyage à Rome , Se qu'ayant été fait Evêque, il conti- nua la Million que S. Willibrod avoir commencé à Malines & aux environs. Il ajoute que ce Saint, qui s'étoic distingué par fon zélé Se par un grand nombre de Miracles , fut tué en 775. par des aiTalîîns qui a voient été long tems très-liés avec lui. Le premier Archevêque de Ma- lines fut le Cardinal Perrenot de Granvelle , qui s'étant démis de fon Archevêché en 1582. eut pour Succeffeur Jean Hauchin. Ayant pris le degré de Licence dans la nouvelle Univerfité de Douay , il fut d'abord Chapelain de Guillau- me de NalTau Prince d'Orange , an- fuite Chanoine de Sainte Gudule de Bruxelles Doyen de cette Eglife ôc Officiai de Bruxelles. Pendant qu'il remplifloit ce porte il eut une grande difpute avec les Hérétiques au fujet de la prefence réelle de J.C. dans l'Euchariftie. Les Héré- tiques l'arrêtèrent , &C le tinrent pendant trois mois en prifon.C'étoit un homme d'une humeur très-douce & qui s'étoit fait aimer de tout le T , 1732; 4pi monde par fon caractère. Son Dio- céle fut expofé en 1 584. à la fureur des Hérétiques , l'Archevêque fut lui-même obligé de s'enfuir à Lou- vain , d'où il retourna à Malines quand les troubles furent finis. 11 mourut âgé de 6i. ans en 1589. après avoir rempli le Siège de Ma- lines pendant fix ans. Il n'y a eu encore que 12 Eve- ques d'Anveis ; nous ne parlerons ici que de François Sonnius qui fur le fécond Evêque de cette Ville. Son nom , fuivant la Langue du Pays , étoit Vanden - Velde. Il n'étoic point d'une famille diftinguée r mais il fe fit une grande réputation ,, par fon érudition & par (on mérite perfonnel. Il pafia du Siège de Bol- duc à celui d'Anvers. Il étoit de petite taille , mais il avoit l'efpric vif, de grands fentimens , beau- coup de feience & beaucoup de conduire. Il alfifta à deux Conciles de Malines , & il donna au Public en 157^. un Livre de démonftra- tions tirées de la parole de Dieu fur les fept Sacremens de PEglife 5c des Statuts Synodaux , il mourut en 1 •jrjé. âgé de 70. ans. Il prenoit pour devile ces mots Latins : fine. snere ntbil } c'eft-à-dire s rien fans peine. Sonnius étoit fort ami de Cor- neille Janfen , qui fut premier Evêque de Gand; diftingué par un grand nombre d'Ouvrages , 5c fus tout par la Concorde Evangeliquo dont tous les Théologiens ont fait l'éloge. Nous nous bornerons à ces exemples pour l'Archevêché de 45>2 JOURNAL DES SÇAVANS; Malincs , venons à celui de Maycn- cc. Cetre Ville eft trop connue pour que nous nous arrêtions ici à donner un précis de ce qu'en dilent nos Auteurs, par rapport au tem- porel , (oit pour l'état ancien , foit pour le tems prefent. Nous remar- querons feulement que nos Auteurs aliurent, après Scrarius & tous les Hilloricns de Mayence , que Saint Crefcent , Difciple de S. Paul , en fut le premier Evêque. Il eu: du moins certain que S. Crefcent fut envoyé dans les Gaules ou dans la Germanie vers l'an 80. de J. C. fé- lon Eufebe , il fouffrit le martyre à Mayence , où il fut inhumé , com- me le marque Tritheme dans laVie de S. Maxime , &c S. Jérôme dans le Catalogue des Hommes Illuftres. Le 40e Se le dernier Evêque de Mayence fut Gewilieb qui fut dé- pofé dans un Concile, parce qu'il étoit coupable d'un homicide. C'é- toit S. Boniface qui l'avoit fait condamner dans le Concile , ce Saint Jut mis par Carloman & par Pépin à la place de Gewilieb. Ces Princes voulurent en même tems pour relever ce Siège que l'Eglife de Mayence , qui étoit auparavant fujette à une autre Eglife , fut éri- gée en Eglife Métropolitaine, de toutes les Eglifes de la Germanie. Sur quoi ils envoyèrent au Pape qui érigea Mayence en Archevêché , fuivant le Diplôme que nos Au- teurs rapportent dans les preuves d'après Aubert le Mire. Le Pape Zacharie fournit à cette nouvelle Métropole Tongres , Cologne , Woimcs, Spire , Utrccht 5c tou- tes les autres Parties de la Germante dont S. Boniface avoit été l'Apô- tre. Le premier des Archevêques de Mayence , honoré du titre d'Elec- teur , fut , fclon notre Auteur , Vil- legife. C'était le fils d'un Char- pentier, mais que (a feience & fon génie fuperieur avoient élevé pac degrés jufqu'à l'Archevêché de Mayence. Il prit pour armonics une roiic en mémoire de la Profef- fion de (on père , &: ces armoiries ont été depuis confervées par les Archevêques de Mayence. Ce trait de Villegile eft en lui une preuve de modeftic. Tritheme le loiie de fa douceur , de fon amour pour les pauvres & de fa bienveillance pour tous ceux qui avoient recours à lut. Tangmar dans la Vie de S. Bernard Evêque d'Hildeshein nous depeinc au contraire Villegife comme un homme fuperbe , entêté, vindica- tif , & qui vouloit fe rendre maître des droits qui appartenoient aux autres Prélats. Néanmoinsl'Auceur de la Vie de S. Godard dit que Willegile rendit enfuite à S. Ber- nard la juftice qu'il lui devoir. L'Eglife de Confiance nous four- nit un fécond exemple pour la Mé- tropole de Mayence. La Ville de Confiance a pris fon nom de Con- fiant père du grand Conflantin , elle ell iitucc dans la Souabe fur uu Lac qui prend fon nom de cette Ville. L'Evêque en fut long-tems le Seigneur , l'Empereur Frédé- ric III. en fit une Ville Libre ; mais (es habitans ayant refufé de recevoir Ylmcrim de Charles V. A O U S elle paffa fous la domination de la Maifon d'Autriche. La Ville eft divilée en deux Etats 3 ce- lui des Nobles & celui des Rotu- riers ; le gouvernement de la Ville efl partagé entre ces deux Ordres , /ans qu'on fâche que cette tonne de gouvernement y ait jamais caufé ni trouble ni jaloufie. Cette Ville a depuis plufieurs fiéclesun Evêque qui efl Suffragant de Mayence , l'Evêché a été tranf- icréen cette Ville de celle de Win- difeh , en Latin Vindomjfa , après que cette Ville eut été détruite par les Allemans , ou après l'incurnon des Huns. Tant que Windicla for. une Ville Epifcopale , elle fut dé- pendante de l'Archevêché de Be- zançon. C'efl à prefent un Bourg du Canton de Berne qui n'eft pas fort éloigné de la Ville de Bade. Le Diocefc de Confiance étoit autrefois le Diocefe le plus étendu de toute l'Allemagne ; & quoique la prétendue reformation en ait retranché beaucoup de ParoifTes, il y en a encore un très - grand nombre. L'Evêque de Con- fiance qui poflede plufieurs Sei- gneuries confiderables dans l'Em- pire efl Dire&curdu cercle de Sua- foe avec le Duc de Wirtemberg. T, 175 2; 4p5 Les Barons de Zcwcyer font fc$ Echauffons héréditaires. Nos Auteurs mettent à la tête de leur Catalogue des Evêquesdc Windich S. Beat, qui , félon eux , n'a vécu que fur la fin du troifiéme fiécle ; car ils ne peuvent croire que l'Eglife de Windich ait été établie, avant celle de Bezançonqui en étoit la Métropole , & qui , félon eux , n'a été fondée que dans ce tems-là» Maxime que nos Auteurs difent avoir été le cinquième Evêque de Windich , fut le premier Evêque de Confiance , fon Siège ayant été transféré en cette Ville en 570. fé- lon quelques Auteurs, en 595. fui.» vant l'ancienne Gaule Chrétienne 3, ou en 597. à ce qu'affurent d'autres Ecrivains. Il paroît que cette tranf- lation fut faite fous le règne deClo- taire,mais lesSçavans ne s'accordent pas entr'eux fur la queftion , fi c'é- toit Clotaire I. ouClotaire II. Nos Auteurs ont pris le parti, après le P. le Cointe , de dire que s'étoit fous Clotaire I. M. Schenek de Staufenbcrg efî le 29e Evêque de Confiance donc nos Auteurs font mention , en- comptant cinq Evêques de Win- dich. 49* JOURNAL DES SÇAVANS, NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Florence. OR bis Sacer & Prof anus illu- Jiratus. Pars fecunda Euro- pam complectens. Volumen prï- nwra , in quo de Jtalia ejufque Provinciis , T'edemontio , Liguna, Infubria , Venetia , & ditione Pon- tificià. Opus Ecclefiaftica: & Pro- fana" Hiftorix nec non Geographix ftudiofis apprime utile. AucTrorc P. Francifco Orlandio , Ordinis Prx- dieatorum Magiftro, & inUniver- fîtate Pifanâ Theologorum Dog- matum Profeffore. Florentin. 175 1. in - folio. Cet Ouvrage contiendra huit Volumes in-folio. Le troifiémedoit paroître inceffammcnt. Il s'impri- me par Soufcription chez Paperini. ANGLETERRE. De Londres. On imprime ici par Soufcription laTraduérion Angloife de l'Ouvra- ge de M. WinfloW publié cet an- née à Paris chez De/prez. Se Defef- farts , fous le titre à'Expofition tsinatomique de lu (IruUure duCorps humain. Cette Tradu&ion qui eft de M . G. Douglas fera accompa- gnée de quelques additions & de planches gravées par un des plus habiles Maîtres. Le Livre fera de I jo. feuilles /«-40. qui feront deux Volumes , èv le prix de la Soufcrip- tion eft d'une guinée. On promet de délivrer l'exemplaire à la Saine Michel prochaine. On propofe suffi d'imprimer pat Soufcription le Catalogue des Ma~ nuferits de U Bibliothèque du Roi a' Angleterre , en un Volume ;»-4°. de 60, feuilles, enrichi de planches gravées. Britannia Romsna : or , the Ro- man sAntiquies o/"Britair. : c'eft-à- dire , tsfntiquitez. Romaines de l* grande Bretagne : en trois Livres, dont le premier traite de ce qui s'eft paffé fous le gouvernement des Romains. Le fécond eft un Re- cueil des Infcriptions & des Anti- quitez Romaines qui fe trouvent en Angleterre , & le rroifiéme contient des Diffettations fur la Géographie de fur difterens Itiné- raires , &c. par M. Horflcy , de la Société Royale. ChezJ. Ofborn Se Th. Longman. 17 J 2. in-folio. A General Hiflory of the World. Ou Hiftoirc générale du monde de- puis la Création jufqu'à la deftruc- tion de Jerufalem par Nabuchodo- nofor. Par M. Th. Brett. Chez Cy- Us. 1732. /»-8°. J. Thonjfon a imprimé les vérita- bles Oeuvres en vers & en profe du Chevalier George Granville Lord L.wfdcnjune. 1731. /ff-40. Simconis A O U S Simeofiis Monachi Danhelmenfis Libellas de exordio at-jue procurfu Danhelmenfis EccUfi*. ; cui pr&mit- titar Reverendi Viri Thomx Rud , eradita difqaijîtio , in qua probant? non Turgotnm , fed Simeonem fmfie verum bttjits Libelli Auïlorem- E Co- dice M. S. perantiquo in Bibliothe- ca public À Epifcoporum Dunhelmen- jium defcripfit ediditque Thomas Bedford. Accédant , prtter alia , ex eodcm Codice Hifior'u Dunhel- menfiam Epifcopomm continuatio ; & Libellas de injuflâ vexations JViUdmi 1. Epifcepi , nunc primant éditas. Londini , Typis facobi Bet- tenham. 1732. in-S". FRANCE. De Paris. Les Monumens de lit Monarchie Franfoife , qui comprennent l'Hi- ftoire de France , avec les figures de chaque règne que l'injure des îems a épargnées , Tome quatrième. La fuite des Rois depuis Charles VIII. jufqu'à François I. inclufi- yement. Par le R. P. Don Bernard de Monfaacon. Chez Julien-Mi- chel Gandouin , Quai de Conty, aux trois Vertus , & Pierre-Fran- çois Giffart , rue Saint Jacques , à Sainte Therefe. 1731. in-folio. Coûtâmes générales & locales du Pays & du Duché de Bourbonnois , avec le Commentaire dans lequel ces Coutumes font expliquées fui- vant les Obfcrvations Manufcrites & les fentimens des plus fçavans Magiftrats , & des plus habiles AouJÎ. T, 17 *° r Avocats de la Province qui ont vé- cu depuis la rédaction de ces Cou- tumes jufqua prefent , Gtc. par Meffire Matthieu Aaroax des Pom- miers , Prêtre-Do&eur en Théolo- gie , Confeillcr-Clerc en la Séné- chauffée de Bourbonnois , & Siège Préfidial de Moulins. Chez le Bre- ton fils , Quai des Auguftins , près la rue Gift-le-cœur, à la fortune. 1731. in-folio , 2 . vol . Dibltonnaire Oeconomique , con- tenant divers moyens d'augmenter fon bien & de conferver fa famé , avec plulîeurs remèdes allures Se éprouvés pour un très-grand nom- bre de maladies & de beaux fecrets pour parvenir à une longue & heu- reufe vieillcfie. Quantité de moyens pour élever , nourrir , guérir &£ faire profiter toutes fortes d'ani- maux domeftiques, comme brebis, moutons, bœufs , chevaux, mulets, abeilles, &: vers à foyc. Difîvrens filets pour la pêche de toutes fortes de poiiTons & pour la chalîe de tou- tes fortes d'animaux & oifeaux , &c. une infinité de fecrets décou- verts dans le Jardinage , la Bota- nique, l'agriculture, &c. par M. Noël Chomel , Prêtre , Curé de la Paroille de S. Vincent de Lyon. Troifiéme Edition , revue , corri- gée Se augmentée d'un très-grand nombre de nouvelles découvertes & fecrets utiles à tout le monde , par M. P. Danjou , Prêtre : enrichi d'un grand nombre de figures, à Lyon , & fe vend à Paris , chez Etienne Ganeaa , rue S. Jacques , aux Armes de Dombes. 1 7 } 2. in -folio } deux Volumes. sic &6 JOURNAL D Hifioire générale des Auteurs Su- iris & Ecclefafliques , qui contienc leur Vie, le Catalogue , la Criti- que , le jugement , la Chronologie, l'Analyfc cC le dénombrement des différentes Editions de leurs Ou- vrages ; ce qu'ils renferment de plus interefïant fur le Dogme , fur la Morale Se fur la difeipline de l'E- glife ; l'Hiftoire des Conciles tant généraux que particuliers , Se les Aétes choifis des Martyrs. Par le R . P. Dom Rémi Ceillier , Bénédic- tin de la Congrégation de S. Van- ne Se de S. Hydulphc , Coadjuteur de Flavigny. Tome III. Chez Pau- lus du Mefnil 3 au Palais. 1732. in - 4°. L' Anatomie générale du Cheval, contenant une ample Se exacte def- cription de la forme , fituation & ufage de toutes fes parties. Leurs différences Se leurs correfpondances avec celles de l'Homme. La géné- ration du Poulet (Se celle du Lapin. Un Difcours du mouvement du chile Se delà circulation du fang. La manière de diffequer certaines parties du Cheval difficiles à anato- mifer , & quelques Obfervations Phyfiques , Anatomiques Se cu- rieufes fur différentes parties du corps Se fur quelques maladies. Le tout enrichi de figures. Traduit de l'Anglois , par F. A. Garfanlt , Ca- pitaine du Haras du Roi en furvi- vance. Chez Barthelemi Lefxel , tue S. Jacques Se autres Libraires. J73Z./'«-4°. Lts Entretiens Phyfiques d'Ari- fie& d'Eudoxe : ou Phvfiquc nou- velle en Dialogues , qui renferme ES SÇAVANS, précifément ce qui s'eft découvert, de plus curieux Se de plus utile dans la nature ; enrichis de beau- coup de figures. Nouvelle Edition , revue Se augmentée d'un Volume. Par le P. Regnault de la Compa- gnie de Jefus. Chez Jacques Clou- z.ier , rue S. Jacques , à l'tcu de France. 1732. /»-i2. quatre Volu- mes. Relation Hijlorique de l'Ethiopie Occidentale : contenant la deferip- tion des Royaumes de Congo , An- golle Se Ainamba , traduite de l'Ita- lien du P. Cavazzi , Se augmentée de plufieurs Relations Portugaifes des meilleurs Auteurs , avec des Notes,des CarresGeographiques,3c un grand nombre de figures en tail- le-douce. Par le R. P. J. B. Labat * de l'Ordre des Frères Prêcheurs. Chez Delefpine le fils , rue Saint Jacques, à la Victoire. 1732. in-n. cinq Volumes. Inftrttcliw Chrétienne fur les huis béatitudes , par demandes & par réponfes. Tirées des Saints Pères de l'Eglife , & en particulier de Saint Auguftin , avec des prières Si afpi- rationsfur chaque initru&ion. Ou- vrage orné de figures en taille-dou- ce. Chez Whte Se Henri , rué' faint Jacques. ij$i.in-iz. Oeuvres mêlées de M * * * / con- tenant un Difcours fur la fin qu'a eu Virgile en compofant fes Buco- liques; une traduction de fes hglo- gues en vers François ; un autre Diicours fur les Règles de l'Eclo- gue. Des Paraphrafcscn vers fur des Pfcaumes de David , & fur quel- ques Chapitres des Proverbes de A O U S Salomon. Des Lettres , des Epîtres en vers , des Reflexions Morales , quelques Odes , quelques autres Pièces de Poefic , Se pour fin un Traité fur la manière de juger des Ouvrages d'efprit. Chez Barrais, Quai des Auguftins. 175 1. in-n. Principes généraux & raifonnès de la Grammaire Françnife , avec des Obfervations fur l'Orthographe , les accens , la ponctuation Se la prononciation Se un abrégé des rè- gles de la verfification Françoife , dédiés à Monfeigneur le Duc de T ; î 7 ? *? 4i>7 Chartres , par M. Renault. "Nouvel- le Edition , corrigée & augmentée. Chez Chanbert , Libraire du Jour- nal , à l'entrée du Quai des Augu- ftin , du côté du Pont S. Michel t à la Renommée & à la Prudence. 1732. /«-I2. Hifloire d'Emilie , ou les Amours de Mademoifelle de * * *• Par Ma- dame Mehenfl. Chez T)elefpme fils , rue S. Jacques , à la Victoire, &; Dupuis le fils , au Palais. 1732» in -12. Fautes a corriger dans le journal de fuillet 1732. PAge 378. col. 1. ligne 20. peut, KfiZ pour : Ibid. col. 2. ligne 36V foi Nicée , lifez. foi de Nicée : pag. 388. col. 2.1ig. 28. compledtion, lif. complexion: pag. 405. col. 2. lig. 5. Ville Syrie , ///. Ville de Syrie; pag. 258. col. 1. lig. I5.rctrecie , lif. racourcie. TABLE Des Articles contenus dans le Journal d'Âouft 1732." Hlfioire Naturelle de Warfovie , Sec. page 441 Abrégé de P Hifloire Romaine , par Eutrope. 451 Hifloire Critique des Pratiques Supcrflitieufes qui ont féduit Us Peuples & embarraffé les Sçavans , &c. 459 Réponfe a Wolfton , Sec. 466 'Expofition Anatomique de la flrufture du corps humain 3 Sic. 47 5 Uiftoire Secrette des Femmes Galantes de l'Antiquité , 48 5 La Gaule Chrétienne y divifée en provinces EcclefiafUques , &c. Tome V. 490 NtHvelks Littcmrts ; 4 j 4 Fin de la Table, L E JOURNAL SCAVANS, FOUR VANNEE M. DCC. XXX II SEPTEMBRE. A PARIS," Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins , du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC XXXII. AVEC AFPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY, i^& ^Mjj naaato * LE JOURNAL DES SC A VAN S SEPTEMBRE M. DCC. XXXII. Z£ TRIOMPHE DE LA CATHOLICITE' , OU RE' PONS E d'un Protejlant noHvtllsment converti } aux difficulte^ue lui propofe fit faeurfurla Religion prétendue Réformée , avec une differtation fur la dif-. pute que Saint Paul eut avec Céphas. Tar Ai. l'Abbé D * * * A Paris , rue de la Harpe , au bon Pafteur , vis-à-vis la rue des deux Portes. 1732. vol. in-ii. pp. 2jo. CETTE Réponfe confiée en ris à une fœur Proteftantc qu'il a quatre lettres qu'un Proteftant en Hollande , où elle s'en; réfugiée, nouvellement converti, écrit de Pa3 II lui rend compte des motifs pas Septembre, T 1 1 i) joi JOURNAL D 1 fquels il s'cft d rcrmiré à embraf- fer la Religion Catholique. Cette feeur l'avoir défie de lui alléguer au- cune bonne raifon d'un tel change- ment , & lui avoir mandé qu'il hl- loir apparemmenr qu'il eût confulté quelque nouvel Evangile. Le nou- veau Converri lui dir là-deflus dans fa première lerrre, qu'il n'a confulré que la pure parole de Dieu ; qu'il y a appris , i°. Que fefus-ChrijieJi tt fage Architecte de l'Evangile , lequel a bâti fa Maifon furie Roc , À l'épreuve de tous accidens. 2°. Que Jefus-Chnft a éiifié fort Eglife fur Pierre , & que les portes de l'Enfer ne prévaudront point contre Elle t parce qu'il fera tous les jours aves Elle jufqu'à la confommation des pi- tiés , fuivam fa promeffe qui efi in- faillible ; 30. Que David a prédit l'éternelle durée de cette Eglife , la- quelle prédiction Clément Maroc a traduite par ces deux vers que les Proteftans chantent dans leur* Temples. Rien ébranler ne la pourra > Car Dieu prompt feccurs lui donra. On remarque ici que Calvin dans fa Réponfe au premier Livre de Pighius enfeigne la même chofe t lorsqu'il dit que Jefus-Chrjjl a fidel- lemtnt affifté [on Eglife , & que toù- jçurs il l'affifi. ra , comme il l'a pro- mis ; furquoi on fait voir à la Pro- teftante que ces partages ne peuvent convenir qu'à l'Eglife d'ici-bas , & non à celle du Ciel. On lui repre- fente enfuite l'abfurdité qu'il y a de. dire nonobftant toutes ces j>ro« ES SÇAVANS; mefTes de J. C. comme font les Proteltans , Q^'U a fallu que Dieu ait fitfciié des gens d'une façon ex- traordinaire j pour drefier l'Eglife de nouveau y qui était tombée en ruine & défolation. On demande là-def- fus à la Proteftante , fi ces chofes bien pefées , on avoir d'autre parti à prendre que celui d'abandonner une Religion, qui , par une contra- diction fi manifefte , abolit toutes les promelTes que Jefus-Chrift a faites à fon Egliie , & les abolit au point de définir , comme il fe voie par l'article 3 1. de faConfelîîon de Fûy : Que l'Eglife étoit perte par tou- te la Terre , & qu'il n'étoit pas mi" me reftè 7000 hommes , qui n'eujfent fléchi les genoux devant Baal, Mais ce qu'il y a d'important à remarquer fur ce fujet , ik que le nouveau Converti n'oublie pas de remettre devant les yeux à fa fœuï Proteftance , c'eftee qu'on lit dans la vie de Calvin écrite £c compofée. par Théodore de Beze > de l'Edi- tion in- a. de Genève , fçavoir. i°. Que Calvin >» à l'âge de 34. ••ans, fans aucune' million ni or- » dination y comme il l'aveue lui- » même dans fes opufcules, fe mit à » compofer fon Inftitution dans la » Ville de Balle pour inftruire , di- »foit-il, tous les Fidèles ; qu'en- » fuite il fe retira en la Ville de Gc- » neve , où il fe fit Pafreur de cette » Eglife , dont il vouloit faire une «nouvelle Rome , n'y ayant alors n fur la Terre aucune perfonne qui » enfeignât une Doctrine femblablc 19 à la. fienne, ainfi qu'il en con-- » vient lui-même dans fon Epure S E P T E M o-adrefTée à François I. & qu'il a m mife à la tête de fes Inftitutions. i°. Que Calvin fe voyant réduit à former une Eglife toute nouvelle, il en établit tous les Rits , &c toutes les cérémonies qu'il vouloir v être obfervées. » Il en drelïa la Confef- » iion de Foy , fit un premier & fe- s» cond Catechifme , tel que les Ré- «formez l'ont à prefent, établit la » forme des Prières Eccleliaftiques , s» la manière d'adminiftrer les Sa- » cremens , celle de célébrer le Ma- »» riage , celle du Chant de l'Egli- se fe , la vifite des malades Se la dif- s-cipiine que les Proteftans appel- aient Ecclehaftique, après quoi il s> fit aflembler le Peuple de Genève » par dixaine , pour lui faire ligner » la nouvelle Prorelllon de Foy , ce » qui caufa , dit Beze , des fédi- »> tions. Voilà , dit le Frère à fa fœur , l'établiflcment & l'époque de la prétendue Réforme. Après avoir examiné toutes ceschofes , la grâce de Dieu me fit faire les réflexions Suivantes. Quoi donc me dis-je à moi-même , eft-ce que Jefus-Chrift: a voulu attendre 15 3 6 ans pour don- ner à fon Eglife , les InftrucT:ions dont elle avoitbefoin,& la réforme qu'il vouloir qu'elle embraflat,S: que fans obferver ce qu'il avoir preferit lui même touchantl'ordination&la mifllon de fes Miniftres , il a voulu fe fervir d'un jeune homme de 24. ans fans aucun caractère » pour fai- re accomplir ce qu'il vouloir que les Fidèles obfervaiîent & donner de nouveaux Miniftres , & une nou- velle forme à fon Eglife ? B R E, 1732: yoj Après ces réflexions le nouveau Converti fait voir à fa fœur , que ceux qui ont établi félon la préten- due Reforme, les premières & prin- cipales Eglifes de France , n'ont pas eu plus de million. 11 rapporre là- deflus ce que dit Beze du nommé Jean le Clerc , Cardeur de Laine lequel s'étant fauve de Meaux après avoir vomi mille injures contre le Pape, renverfé les Images des Saints^ & commis pluheurs autres impietez contre l'Eglife , fut faire ie Prédi- cateur dans la Ville de Mets, fans autre feience , dit Beze , que d'avoir lit la Bible tournée tellement quelle- ment en François , & quelques pe- tits Livrets. A cette hiftoire fuccede celle de Jean le Ma (Ton , jeune homme de 22. ans, natif d'Angers , furnommé la Rivière , lequel fortant des étu- des de Droit, vint à Paris fe réfu- gier au Pré aux Clercs ,. près le lieu où font à prefent les Invalides r Si. y fut fait Miniftre en cette maniè- re dans une Chaumière, où il s'é- toitretiré, & où demeuroit le Sieur de la Ferriere , Gentilhomme du Maine. La femme du Sieur de la Ferrie* re étant accouchée, & ne voulant point que fon Enfant fût baptifé en l'Eglife Romaine, ceux qui fe trou» verent aiîemblez là, firent Miniftre ce Jean Manon la Rivière , pour baptifer l'Enfant , Se le firent Mi- niftre à la tant infiante prière du Sieur de la Ferriere. Ce font les ter- mes de Beze , qui raconte cette- hiftoirc , ce qui fut , continue-t'ii ' occafion des premiers commensemms- 504 JOURNAL D de rEglifc de Paris , aiant été le- dit la Rivière élit par l'affen.blée , éipre s les jeûnes & les prières , en tel cas reçus , & lors d'autant plus dili- gemment & ferieufement pratiqué , que la chofe «toit nouvelle en ce lieu- là. Le nouveau Converti n'oublie pis de faire encore obferver à fa Sœur , qu'à Mcaux ce fut un Pierre le Clerc , aufiï Cardeur de Laine , qui y établit la prétendue Reforme fans avoir reçu fa million , & fon ordination que d'autres Cardeurs comme lui , ni avoir plus de feien- «c que Jean le Clerc , dont il a été parlé. Il paiîe fous filence plufieurs au* fres hits femblables que Beze a rapportez dans fon Hiftoire. Il exhorte fa fœur à les lire avec attention , & il lui dit que la Divi- ne Providence a permis que Beze ait écrit ce Livre , pour fervir à détromper ceux que ces premiers Sectateurs ayoient jettez dans l'er- reur. On reprefente ici à la fœur après diverles réflexions que la crainte de nous trop étendre nous oblige de palTcr, que puifqu'on étoit dans une Eglife qui n'avoit aucun Pafteur lé- gitime , d'autant que ceux qui en font les Minières à prefent, n'ont f eçû leur million , & leur ordina- tion que de ces premiers qui n'en avoient aucune. On a dû par con- séquent en fottir au plutôt ; une Eglife qui n'a point de Pafteurs légitimes ne pouvant être la vraye ' Eglife -, furquoi on cite à fa fœur Farticlc vinçt - çinauiémc de h ES SÇAVANS, Conrcffion de Foy , dans lequel les Proteftans difent : >» Que l'Eglife h ne peut confifter, iinon qu'il y » ait des Pafteurs qui ayent la charge » d'enfeigner , !k qui foient dùe- » ment appeliez. D'où le Proteftant converti infère que la prétendue Reforme ne peut être la vraye Egli- fe j ex qu'ainfi quand il n'y auroit que cette feule conlîdcration , on n'auroir pas pu eu fureté de con- feience demeurer plus long- temps dans une telle Eglife. Un fécond motif a porté l'Au- teur de ces lettres à changer de Re- ligion , c'eft , dit-il , qu'on lui a fait voir que les nouveaux Réfor- mateurs fe vantent de fuivre la pure parole de Dieu , fans y rien ajouter , ni diminuer , ni changer y & que cependant ils y ont ajouté , dimi- nué & changé. Nous renvoyons là- dcilus à la lettre même. L'Auteur s'étend au long fur cet article , auflî- bien que fur celui dcl'Euchariftie, où il remarque. i°. Que les Refor- més ont reconnu Jean Hus & Jé- rôme de Prague , pour de faints Martyrs de leur Reforme , quoi- que cependant de l'aveu des Refor- més , Jein Hus & Jérôme de Pra- gue cru fient fur la doctrine de i'Eucharifiie , tout ce qu'enfeigne l'Eglife Romaine -, 20. Que M. Daillé dans fa fameufe lettre au Sieur Monglat , parle en ces ter- mes. » Bien que nous ne croyions » pas cerre réelle prefence , nous » n'eftimons pas la créance (1 ctimi- » nclle qu'elle nous oblige de rom- » pre avec tous ceux qui la tien- »» nent , comme il paroîc de ce que S E P T E M » nous la fupportons es Luthériens; «de façon que !i L'Eglifc Romaine m n'eût eu autre erreur que celle- » là , nous accordons volontiers » qu'elle ne nous eût donné fujet de 30 nous feparer d'avec elle. 3°. Que tout le corps des Egli- fes Proteftantes eft revenu à cet avis dans le Synode national , tenu à Charenton en itfji ; l'on cire ici îe Décret , nous y renvoyons. Nous avons refervé pour finit l'extrait de cette première lettre , laquelle renferme 45. pages^ ce que l'Auteur y dit par manière de di- jfe(Tîon,à la page 16. fur les plain- tes que fondes Proteftans, touchant la conduire que l'Eglife Romaine a tenue à leur égard. Ils traitent de perfecution cette conduite : L'Au- teur de la lettre renvoyé d'abord îi-dciïus au Traité intitulé : Con- formité de la conduite de l' Eglife de France , pour ramener les Proteftans y avec celle de l' Eqlifc d'Afrique , du temps de S. Auguflin , pour ramener les Donati/îes. Puis il fait obfcrver àfafœur, que les plaintes des Pro- teftans fur ce fujet , font mal fon- dées, Se que tous les reproches qu'ils font là-delfus à l'Eglife Romaine , conviennent à plus jufte titre à l'E- glife Proteftante. Calvin , remarque-t'il , n'a ja- mais eu en fa puiflance , que l'he-. tetique Servet ; il le fit condamner au feu dans la ville de Genève. Meilleurs les Etats Généraux ont fât couper la tête à Barneveld leui '.Avocat General , pour avoir entre autres chofes , félon ce que porte fon aneft de mon , troublé l'Etat B RE, 1732. j-o£ de la Religion & contriflé au poffi- ble , F Eglife de Dieu , parce qu'il ne vouloir pas fe foumettreà la dé- cifion du Synode de Dordrech. Dans plusieurs Eglifes Protcftan- tes , on a fait des Loix pour priver les Enfans Catholiques , de la fuc- ceflion de leurs pères & mères , & la donner à des héritiers Proteftans quoique plus éloignez. Les Catho- liques y font exclus de toutes les charges , & de tous les emplois de l'Etat. Ceux d'entre eux qui veu- lent défendre leurs droits , font traîi. nez avec outrage dans les Tribu* naux , Se leurs biens confiîques T ceux qui fouftrent avec patienct font furchargez de Taille , & trai- tez avec moins de pitié que des Ef- claves. Cent venté efl inconteftable dit là-deftus à fa faeur le Proteftant converti , vous entendez, bien de qui je veux parler. Mettez donc la main à la conscience , & faites la cempA- raifon de ces traitemens avec ce qui s'efi pratiqué en France. La Réponfe que vous ferez, fera la mienne , fjr nous verrons qui des deux Eolifes fera la plus fanguinaire , & qui de nous pourra chanter , comme vouj- faites : 0 ! la belle viQoire , & If beau triomphel La féconde lettre eft une répli- que à la réponfe que la Proteftante a faire à la première , dont nous ve- nons de parler. Le nouveau Con- verti y reproche à fa Soeur , ou plu- tôt à celui dont elle a emprunté le fecours ; car il ne croit point qu'el- le en foit l'Auteur , il lui reproche, 1'. De n'avoir point épargné contre l'Eglife Catholique } les injures ,, So6 JOURNAL D les fuppofitions, les calomnies, &c d'en avoir compofé plus d'un quart de fareponfe; i°. D'avoir entairé fans choix & fans ordre, des parta- ges de l'Ecriture, qui ne viennent point au fait , &C qui rempliirent plus d'un autre quart de la lettre ; j°. D'avoir employé une partie du tefle à des queftions étrangères , comme de fçavoir fi l'Empereur Conftantin a été Arien ou non ; 4°. De s'être attachée à taire une grande &C inutile defeription de l'E- tat de l'Eglife , tant ancienne que nouvelle, depuis Abraham jufqu'au temps de Calvin. » Vous avez tort, »>dit-il, ici à la Protejlante , de *> n'avoir pas fauté au de-là du Dé- »> luge,&de n'être pas allé chercher m notre Pece Adam au Paradis Ter- » relire , où il fut créé d'abord Ci m heureux , & d'où il fut enfui- » te charte en punition de fon pe- s» ché. Il y avoit-là bien de la ma- »» tierc à amplifier votre difeours m pour le moins aulfi utilement que »> dans tout le refle. Quel endroit n de ma lettre avez-vous voulu ré- >» futer par ce long récit ? vous m'au- " riez fait plaifir , vous ou votre s' Auteur , de me le marquer ; car »»je n'y comprends rien , finon »» qu'on a voulu montrer quelque «érudition. Après ces reproches , le nouveau Converti expofe le plan de fa ré- plique. L'Auteur qui m'a répondu, dit il, " nc doit pas s'attendre que je » le fuive dans toutes les parties du » monde , & de l'hiftoire qu'il » parcoure en pofte , & où il s'égare wtiès-fouvenc , en voulant aller SÇAVANS, vite ES » trop vite. Je m'attacherai uni- wqucnient, autant que la brièveté » d'une lettre me le permettra, Se »que l'exigera la matière que nous » traitons , à vous marquer d'abord » les endroits ertentiels de ma pié- » cédente , aufquels vous n'avez » pas répondu ; je répondrai en- » fuite à vosdifficultez furlesquc- » (lions de controverfe que voul n me propofez , & je réfuterai les i> fuppofitions mal fondées qui font m dans votre lettre. 11 y en a beau- » coup que je lailTerai fansréponfe, >» parce qu'elles font inutiles , ou m qu'elles fe détruifent d'elles-mê- » mes! A l'égard des injures & des » calomnies , comme elles ne font » point effentielles aux points de » foy qui nous feparent, je n'y fe- » rai aucune attention,quelque cho- » fe que vous en puiffiez penfer , Se » en cela je fuivrai ma Religion. Tel eft le plan de la réplique dont il s'agit. Nous nous contenterons de remarquer qu'on examine cinq queftions , la première ; fi cette pro- portion , que lafoy ne fe commandt pas , mais qu'elle fe perfitade , eft tellement vraye qu'on ne puiffe ja- mais contraindre là-deffus perfon- ne , & qu'il faille abfolument con- damner S. Auguftin, qui en parlant aux Donatiftes , leur dit : » vous » croyez donc qu'on ne doit con- » traindre perfonne à bien fairejmais » n'avez- vous pas vu que le Pcredc » famille commanda à fes gens de »» forcer d'entrer au feftin tons ceux » qu'ils rencontreroient ? N'avcz- » vous pas vu avec qirelle violence » Saul qui depuis a été le erand Taul S E P T E M m Paul , fur forcé de reconnaître m & d'embrafler ia vérité ! Car vous » ne direz pas fans doute , que l'ar- » gent ou les autres bicns,par la pri- as vation dcfquels les Loix forcent » les hérétiques à rentrer dans l'E- » glife , ioient plus chers aux hom- >» mes que la lumière que Jelus- »» Chrift ôta à S. Paul , lorfque par » cette voix menaçante qu'il lui rît » entendre du Ciel , il le renverfa » par terre , laquelle lumière ne lui m fut rendue qu'après qu'il fut in- » corporé à l'Eglife: direz-vous en- »> core après un telexemple^qu'il ne m fauc faire aucune forte de violen- »jceaux hommes pour les tirer de m l'erreur / S. A'-tg. Lett. 48. de » l'ancienne Edit. à Pincent, n. 5. La féconde queftion eft fi l'on a eu raifon d'affurer comme on a fait dans la première lettre , que les Protcftans par une liberté qu'ils qua- lifient de Sainte liberté , ont ajou- té, changé , & diminué quelques mots dans l'Ecriture Sainte ? Ce que l'on confirme par de nouvelles preuves. Le troifiéme point que l'on trai- te , eft fi S. Pierre a été à Rome , & s'il y eft mort , furquoi l'on cite pour l'affirmative , les plus habiles Miniftres Protcftans , & Calvin même. Le quatrième , concerne l'éta- bliftement de l'Eglife fur S. Pierre , établilTement qu'on autorife du té- moignage d'un des plus habiles Pro» teftans , qui eft Cameron. Le cinquième regarde le culte des Images & des Reliques , fur- quoi l'on expofe le véritable fenti.- Sepcmbre. B R E, r 7 ? 2. j-07 meut de l'Eglife Catholique , fea- voir que ce culte eft relatif; culte au refte qu'on montre avoir été admis cV: approuvé par Jean Hus même , dont on cite ca parole» : "Toutainfi que les anciens Pères » ont adoré Jefus-Chrift en fon fi- >>gnc, ainfi nous adorons le même » Jefus-Chrift au figne & non le » figne ; Se fi l'Eglife prononce de-; »> vant un Crucifix , Ave Rex nt- nfter , ou bien tuant Cntccm ado- xt ramus , qui veulent dire en Fran- »çois , je te fa/tte' notre Rçy } ou » bien nous tadyons Crotx , elle » n'adore pas l'Image , mais Jefus- »Cluift crucifié en Croix. JeJfiHus w de l'Adorât, fart. 4. vers la fin. On cite fur le même fujet Lu- ther , qui s'explique là-delius com- me Jean Hus. Le iixiéme article, eft l'invoca- tion dts Saints exprimée en ces ter- mes par le Concile de Trente : Je tiens pareillement que les Saints efui régnent avec Jefus-Chrift font à ho- norer & à invoquer, & qu'ils of- frent à Dieu leurs prières pour nous. Invocation fur laquelle le fameux Miniftrc Bochart s'explique d'une manière à ramener , dit-on ici, le Protcftant le plus prévenu. Voici fes paroles. » Encore que l'Eglife du temps at du deuxième , du troifiéme , & » du quatrième Concile General , » ait invoqué les Saints , & que » nous condamnions abfolumcnt » cette invocation , néanmoins nous » avons raifon de tenir cette Eglife- »> là , & non feulement elle , mais m encore , celle de quelques fieelef V vv 5-o3 JOURNAL D » après , pour la vraye Eglife , qui » a porte le flambeau de la vérité » en la Terre , & en laquelle tout » Fidèle étoit obligé de demeurer «pour donner gloire à Dieu , Se » être uni au Corps de Jefus-Chrift, Paroles qui font voir que félon ce Minière l'Invocation des Saints n'eft donc point Idolâtrique , puif- qu'il n'auroit pu approttver,comme il le faitjcetce ancienneEgUfcqui in- voquoit les Saints , & encore moins foutenir qu'on étoit obligé d'y de- meurer pour être unis au Corps de Jefus-Chrift , & donner gloire à Dieu ; n'étant pas pollible de s'i- maginer qu'il eût cru permis de de- meurer dans une Eglife idolâtre , & que fes Confrères cutîent fouf- fert qu'il avançât une telle propor- tion dans un Livre qui fe vendoie publiquement à Paris , au Palais , chez Vandofmc Libraire Ptote- ftant. On cire encore ici le témoi- gnage de Luther , qui , dans fon Commentaire fur l'Epure aux Ga- lates , rapporte que Dieu fit un mi- racle en faveur des parens d'une pauvre fille , » laquelle par l'arti- » fice du Démon , dit Luther t ils » ne voyoienc que fous la figure » d'une Vache. Ils invoquèrent , »j continue-t'il , S. Macaire, qu'il » priât pour la fille , afin que Dieu y> chaffât cette illufion du Diable , » ce que Dieu , ajoute Luther } ac- s» corda : Après que S. Macaire eut «prié , leurs yeux furent ouverts. Je ne tiens pas , dit le même Luther dans un autre endroit, » que »ceux qui révèrent encore les s-" Saints , pourvu qu'ils n'y mettent ES SÇAVANS, » pas leur confiance , foient à rejet- » ter & à méprifer •, car ce qu'ils » rendent aux Saints , ils le ren- »dent à Chrift , &c il ne fe peut » faire que l'honneur rendu aux » Saints , n'ait rapport à Jefus- » Chrift. On peut donc les invo- wquer fans crime. Le fepticme article, eft le Sacri- fice de la Me (Te , furquoi le nou- veau Converti reprefente à fa Sœur que la répugnance qu'elle marque avoir à ce fujet eft mal fondée , les Luthériens , lui dit-il , croyent la frefence réelle , Jean Hus & Jérô- me de Prague , croyoientlaTrani- fubftantiation. Vos Minières ont défini en plein Synode qu'il faut recevoir à leur Communion les Lu- thériens , fans les obliger de taire abjuration , quoiqu'ils croyent la piefence réelle. Daillié nous dit que cette Do-ftrine n'eft point un fujet de fepatation , & qu'elle n'a point de venin ; voilà ma chère Sœur le plus efientiel de la MelTe ; car fi l'on croit que Jefus-Chrift eft réel- lement prefent fur l'Autel , il n'y 3 point d'inconvénient à croire qu'il s'y offre pour nous à Dieu fon Pè- re , &z voilà le Sacrifice de la Meflc. Nous pafions plufieurs autres réfle- xions de notre Auteur. Le huitième article , concerne le Purgatoire. Le Proteftant converti^ dit là-defius à fa Sœur qui par déri- fion , lui avoit raconté une table au fujet des peines que fouffrent ccur qui font en ce lieu , il lui dit que l'Eglife Catholique qu'elle fîtppofe c toit pas pour crime d'hcreiîc, mais » pour trahifon , que Setvet fut brû- »lé à Genève. 2°. Que Calvin avoit j>fait tout fon polliblc pour le fau- » ver de ce fupplice 3 &c avoit tâ- »ché de faire au moins changer fa » condamnation en un bannilTe- « ment. Voici le titre de ce Traité m de Calvin : Déclaration pour main- tenir la vraye Foy que tiennent tous Chrétiens, de la Trinité des Personnes en unfeulDieu,contreles erreurs déte- flables de Michel Servet Efpagnol^oH il eji montré qu'ileft licite de punir les Hérétiques , & qu'a bon droit ce méchant a été exécuté en la ville de Genève. Calvin en plusieurs endroits de ce Traité convient que ce fut à fa folliciration qu'on arrêta Servet pri- fonnier. » Je ne veux pas nier , » dit-il , colon, ijo?. & 1 5 J 1 . » que ce n'ait été à ma follicitation » ci pourfuite , qu'il ( Servet ) fut Mconititué prifonnicr ; car d'au- » tant que par les Loix de la ville » de Genève , pour entrer en con- » noiflanec de caufe , il hlloit que *> quelqu'un fe rît partie , je con- »feflc que l'homme qui demanda «juftice contre lui, le fit à mon » aveu .-. c'a été à mon aveu qu'il «a été appréhendé en cette Ville, » pour rendre compte de (es maléfi- »> ces. Je ne nie point que l'aclion » qui a été intentée contre toi , n'ait »étédre(Tée par mon conkil. Dans la colonne 151?. du mê- me Traité , Calvin ajoute : L'OfS- » ce d'un bon Magiftrat , e(t de ré- » primer avec la puiffance du glai- S 5ÇAVANS, » vc , & par juftes & légitimes pu- » nitions , ceux qui étant Apoftats »dcla Foy , induifent & follici- » tent les autres à fe révolter en » blafphêmant contre l'honneur de «Dieu-, & dans la colonne 1533. » il dit que iî S. Paul lorfqu'il li- >i vra à Satan Himcnéc S>c Alexan- »dre , eut eu alors quelques Mi- » giftrats* fidèles de bons Zélateurs »de la gloire de Jcfus-Chriit ,y a- Mt'il doute qu'il ne leur eut baillé » telles gens à châtier , vu qu'il dé- » ployé la puidance qui lui étoit » donnée de Dieu à ce faire. Le nouveau Converti pour pré- venir une objection qu'on lui pour- roit faire ici : fçavoir que le Traite dont il s'agit , ne doit être regarde que comme un Ouvrage particulier de Calvin , avertit que cet Ouvrage eji approuvé & fouferit par quatorze autres Minières avec Calvin } dont l'Egitfede Genève étoit alors compo- fée. Il veut qu'on écoute encore fur cela le témoignage de Beze , Au- teur , remarque-t'il , d'autant plus- croyable en cette occafioM , qu'il parle comme témoin oculaire. Beze dans la vie de Calvin , Edition de Genève , imprimée chez Pierre Chouet , 1663. dit pag. 62. & 6j. » En ce temps- là } 155?, Michel «Servet dont il a été parlé ci-def- » fus , Efpagnol de maudite me- » moire , lurvint , non pas un hom- » me , mais plutôt un monfire hor- » rible compoié de toutes les hc- » refies anciennes & nouvelles , » combattant le Baptême des petits » Enfans , &Z fur tout exécrable » blafolicmateur contre la Sainte S E P T E M «Trinité , Se nommément contre » l'Eternité du Fils de Dieu. Ce- »> lui-ci c'tant arrivé en cette ville » ( de Genève ) ÔC reconnu par au- » cuns qui l'a voient vu ailleurs, fut »faifi par le Magiftrat le 13. jour » d'Aouft , à caufe de fes blafphê- » mes , &Z là-deffus tut tellement & » vivement combattu par Calvin,en » la vertu de Dieu & de fa parole , » que pour toute défenfe il ne lui » refta qu'une opiniâtreté indompta- » ble,à raifon de laquelle par jufte ju- » gemenr. de Dieu &c des Hommes , » il fut condamné au fuplice du feu. n Ainfi finit fa malheureufe vie ôC « fes blalphêmes qu'il avoit dégor- »gez cueillement. Selon la Proteftante,Jefus-Chrift ordonne indifféremment à toutes foi s de pcrfonnes,dç lire l'Ecritu- re . aïi teâ & pour le prouver elle cite ces paroles qu'elle dit être dans S. Jean. chap. 5. v. 39. Enque- rez-vous diligemment des Ecritures ; car par teilles vous avez, vie éternel' le. La Vulgate porte : Scrutamini fcripmras , quia vos putatis in ip/is vitam aternam habere. Le mot Scru- tammiy dans cet endroit , ne fignifie pas plus enquerez-vous diligemment , que , vous vous enquerez diligem- ment , ainfi c'eft une faute de le fi- xer au premier fens , fans avertir qu'il cft également fufceptible du fécond. Quant à ces mots : Car par icelles vous avez la vie éternel- le , ils font mal rendus , puifque le texte porte , quia vos putatis in ip- fis vitam aternam habere , parce que vous croyez y trouver la vie éternelle. Meilleurs de Port-Royal tradui- fent ainli ce palîage : Vous Ufez avec foin les Ecritures , parce que vous croyez y trouver la vie éternelle ; &c en même-tems ilsavertiffent par une note, qu'on peut traduire aulfi : Examine^ les Ecritures , puifque vous croyez y trouver la vie éternelle. Le nouveau Converti qui n'i- gnore point ce que porte le texte , Sœur, non-leulemcnt que ces pa- roles enquere\-vous , donnent un fens détermine à Scrutamini , qui figeitie également vous vous enquê- tez , mais que celles-ci : Par icellet vous avez la vie éternelle font des paroles tronquées , puilquc le texte porte , par icelles vous croyez avoir la vie éternelle , ce qui eft bien dif- férent. Il fait (ur tout cela diverfes réflexions que la longueur de cet extrait nous oblige de paffer. Nous palTons , pour la même railon tout ce qu'il dit à fa Sœur pour la con- vaincre qu'elle a tort de s'imaginer que l'Ecriture foit claire par elle- même , & pour lui montrer que l'Eglife Romaine cft la vraye Egli- fe ; c'eft par ces deux articles que finit la lettre. La quatrième & dernière eft une réponfe aux difficuitez que la Pro- teftante a alléguées à fon Frere,com- me des obftacles invincibles qui la doivent empêcher d'embralTer \x Religion Catholique. La première difficulté , eft la Communion, fous une feule efpecc : La féconde , le Service public en Langue incon- nue au Peuple : La troifiéme , 1» multiplicité des Sacremens : La qua- trième , la Supériorité qu'exercenc fur les Peuples differens ordres de Pafteurs : La cinquième , les céré- monies dont on ufe dans les Egli- fes : La fixiéme, l'obligation decon- feffer fes péchez à un autre Pécheur: La feptiéme, les Indulgences. Tous articles aufquels le nouveau Con- verti répond en détail, &c d'une ma- nière claire & précife. SEPTEMBRE; 1732: jt5 Quant à h differtation fur la ré- qui dit que c'étoit feulement un deffaut de conduite. Il cite Saint primande faite par S. Paul à Cé- phas , elle n'eft point de l'A*uteur de ces Lettres , il n'en eft que l'E- diteur : il l'envoyé à fa feeur com- me une pièce qui peut beaucoup contribuer à la convertir : on y dé- montre , lui dit-il , que le Céphas repris par S. Paul n'étoit qu'un des 71. Difciples , & non pas l'Apôtre S. Pierre, & qu'ainfi c'eft mal à propos que les premiers Reforma- teurs , fuivant l'exemple des autres Hérétiques qui les ont précédés , fe font fer vis de ce paflage pour s'op- pofer au Ckefvifible de l'Eglife , Succcfleur de S. Pierre , & Vicaire de Jefus-Chiift. Mais pour ne pas finir fans rap- porter quelque endroit de cette Dilïertation , nous remarquerons que l'Auteur, après avoir employé diverfes preuves pour montrer que ce fut à Céphas le Difciple cV non à Saint Pierre , que Saint Paul refi(ta , obferve i°. Que quand même ce feroit avec Saint Pierre que Saint Paul auroit eu cette contesta- tion , il ne s'enfuivroit nullement que S. Pierre eût manqu-é dans la foi , puifque S. Paul avertit lui mê- me que le crime de celui qu'il a repris , ( foit Pierre ou Céphas ) n'étoit que pour s'être abftenu de manger avec les Gentils, de peur de déplaire aux Juifs. L'Auteur de la Difîertation demande fur cela , fi l'on peut trouver de l'ignorance ou de l'héréfie dans cette conduite / Il cite à ce flijet Tertulien , Paul même , qui a pouffé plus loin fa complaifancc pour les Juifs , & qui auroit par conjecjuent , mérité une plus forte réprimande ; il rapporte là-delîus ce qui fe lit dans les A&es des Apôtres : fçavoir, que pour faire plaihr aux Juifs, S. Paul fit circoncire fon Difciple Timo- thée, & fe fit lui-même couper les cheveux à Kenchrée , comme les Nazaréens , pour accomplir fon vœu , félon la Loi de Moyfe ; iï rapporte comme une autre fois , fuivant le confeil de S. Jacques^ peu de tems avant que S. Paul fût pris par les Romains , cet Apôtre fe joignit à quatrejuifsqui a voient fait vœu , alla avec eux dans le Tem- ple offrir le Sacrifice , paya pour eux & pour lui , & fe purifia avec ces Juifs. Il remarque comme Saint Paul vivoit avec les Juifs , de la même manière que s'il e lit été Juif 3 & comme avec ceux qui vivoient fous la Loi , il agi (Toit de la même manière que s'il eût été fous la Loi. Il remarque enfin que tous ces faits font rapportés dans l'Ecriture , & que cependant perfonne ne les a relevés , ni ne s'eft avife d'en con- clure , que S. Paul ayant pleine- ment judaïfé , il eût erré dans la Foi. Notre Extrait eft plus étendu que nous n'avions d'abotd compté de le faire, mais l'importance & la diverfité des matières nous ont inr ipnfiblement entraînés. yr* JOURNAL DE S SÇAVANS, LEXICON MEDICUM , IN QUO TOTIUS ARTIS MEDlCiE termini in Thconà Se praxi Mcd.ta , Anarome , Chirurgià , Pharma- cia , Chcmiâ , Botanicâ definiuntur , ac jùxca Phyfices &. Mcchaniccs demonftrata principia exponuntur Autoribus Theod. Tronchin , cVLud. de Neufville. M. D. D. Amftclo-. dami, apud R. Se J. Wecftenios & G. S. Smith. 1732. C'eft-à-dire : Ditlionnairc de Médecine , dans lequel i°. on définit tjr on ex* pofe , félon les 'Principes Phyfiques & Méchaniques , tous les ternies de cet Art , tant pour ce qui regarde la Théorie & la Pratique , que pour ce qui regarde l Anatomie , la Chirurgie y la Pharmacie , la Chymie , la Bo- tanique y &c. 2.0. L'on cite les Ouvrages & les Obfervations des Prati- ciens des Anatomifles , des Chirurgiens } des Chymifies , des Méchani- eiens , des Pharmaciens , des Botanijles & des Naturaliftes de toutes let Nations , les plus renommés , tant anciens que modernes : $°.L'on éclaire it les points les plus difficiles de la Philofophie naturelle , qui ont rapport i la Théorie de la Médecine : 4*. L'on donne la fignification de tous les ter- mes Ç/ecs t Latins , Anglais , Flamans , François , Allemans , Italiens ■ & autres appartenans à la Médecine : 50. L'on marque les propriétés , les ufages & les doz.es de tous les Médicamens tant /impies que compofés : 6°. Von met fous les yeux les plus belles & les plus exaÛes figures qui fe trouvent du corps humain dans les meilleures Tables Anatomiques : 70. Von explique les principaux caractères Chymiques qui fe prefentent dans les Livres des Médecins & des Chymifies : S°. L'on indique dans des Tables fdelles toutes les matières de l'Ouvrage. Par Théodore Tronchik & Louis de Neufville, Dotleurs en Médecine. A Amfterdam , chez R. & J. Wetftcins, 3c G. S. Smith. 1732. Brochure in.- 40. CE n'eft ici qu'un Eflai qu'on empêché un Docteur en Médecine donne pour fçavoir le juge- de la Ville de Francfort fur le Mcin. ment du Public , &c prendre là- de travailler fur le même projet , deflus les mefures convenables , & d'en publier un Programme , foit pour conrinucr comme on a quoique l'entreprife de Meilleurs commencé , (oit pour changer de Tronchin & de Neufville , (Se l'an- méthode. Cet Eiîai a été d'abord nonce de leur entreprife foient an- annoncé dans la Bibliothèque rai- terieures, ce qui vient peut-être de fonnie , & cette annonce n'a pas ce que le Médecin de Francfort n'aura- S E P T E M n'aura pas eu connoiffance du tra- vail des deux Médecins d'Amfter- dam : quoiqu'il en foit, nous ve- nons de rapporter le titre ou Pro- gramme du Di&ionnairc de ces deux Meilleurs , voici celui du Dictionnaire du Médecin de Franc- fort : comme ce titre eft tort éten- du , nous n'en rapporterons qu'une partie en Latin pour le traduire en- fuite tout entier en François , ainfi que nous avons faic à l'égard du premier. Jo. Philippi Burggr.ivii Junioris , Dottoris Medici Francofurti ad Adocnitm , Ltxicon Medicum Vni- verfale , omnium verborum , précipite veto reru-m ad Medicinam & difei- plinas illi familiares fpeclAntinm ex- plicaiionem Syfttmaticam exibens.... francofurti , ad Mxnum , funtpti- bus FredericiDanielis Knocbii. C'eft-à-dire : Dictionnaire Uni- vcrfcl de Médecine , contenant une Explication Syftématique de tous les mots , & particulièrement de tous les points qui appartiennent, foit à la Médecine, foit aux autres Arts ou Sciences, enforte qu'on y expofe par ordre alphabétique tous les termes , & principalement tou- tes les matières qui regardent, tant en gênerai qu'en particulier , la PhvfiqueJ'AnatomiclaBotanique, la Chymie, la Médecine, la Phyfio- logie, la Pathologie, la Semiotique, l'Hiftoirc des maladies , la diette qui convient aux perfonnes faines , éc celle qui convient aux perfonnes malades, la méthode générale de re medier aux differens maux du corps humain , la vertu des Médicamens, Septembre. ERE, i 7 j i. yi;- & fur tout de ceux qui fc vendent dans les Boutiques, leur matiere,leur préparation , la pratique , foit com- mune , foit fpecialedc la Médecine &c de la Chirurgie ; l'Hiftoire de la Médecine, celle de fes dogmes & de fes principaux Auteurs. Le tout appuyé du témoignage des meil- leurs Ecrivains tant anciens que modernes , lefquels font cités avec tant de fidélité &C d'exaditude que ce Dictionnaire pourra véritable- ment fenir lieu d'une Bibliothèque Médicale : Ouvrage accompagne de figures en taille-douce , & fuivi d'une Table très-ample. Par Jean-Philippe Burggraie le jeune , Docteur en Médecine à Francfort fur le Mein. Aux dépens de Frederic-Daniel Knochius. Bro- chure in-folio. M. Burggrave , après ce titre , avertit i°. Que le Dictionnaire qu'il projette , fera de fîx Volumes in-folio , dont chacun ne palfera pas le nombre de \6o. pages , en- forte que les Relieurs pourront ré- duire , s'ils veulent , les lîx Volu- mes à trois. 2°. Que vers Pâques de l'année prochaine 173). le premier Volu- me paroîtra & les cinq autres dans le cours des cinq autres années fui- vantes. 30. Que chaque Volume ne fc vendra que deux florins. 4°. Qu'on payera d'avance le premier Volume. 50. Que quand on le recevra on payera tout de même d'avance le fécond» & ainfi des autres. 6°. Que le premier contiendra Xxx jiiî JOURNAL DE feulement l'explication des mors qui commencent par les lettres A 8c B , parce que ces mots font en très-grand nombre : Que le fécond contiendra uniquement celle des mots commençant par la lettre C. parce que le nombre de ceux-là furpalfe celui de toutes les autres : Que le troifiéme renfermera les lettres D , E , F , G. Le quatrième les lettres H, 7, K , L, M, l'Au- teur ne dit rien des autres. 7°. Que le dernier Volume ren- fermera une Table d'autant plus utile qu'elle réunira plufieurs arti- cles de même genre , qui n'étant rapportés que par occafion en di- vers endroits du Dictionnaire, s'y trouveront difperfes & n'y pour- roient être devinés. 8°. Que le papier de chaque Vo- lume , fera très-beau & très-blanc , femblable à celui où eft imprimé l'Eifai que l'on donne. Sur quoi nous remarquerons que le papier de cet Elfai ne répond point à la pro- meuve. Il y aura outre le Libraire plu- fieurs perfonnes chargées de rece- voir l'argent des Soufcripteurs : on trouve au commencement de cet Elfai leurs noms & leur adrelTe. Le terme fixé pour les Soufcriptions cil depuis le 28 . Janvier de la pre- fente année 1732. jufqu'au pre- mier de Septembre de la même an» née. Il ne nous refte plus qu'à rappor- ter quelques exemples de ces deux Elfais : le premier , qui eft celui d'Amfterdam par Meilleurs Tron- chin & de Neufville contient 8. S SÇAVANS, pages /»-4°. à deux colomnes. Les mots expliqués dans les deux pre- mières pages font compris fous ACC ACH. ACM. ADI. /EGO. Ceux des troifiéme t quatrième , cinquième 5 fixiéme , feptiéme &C huitième pages font compris fous HOR & HYD. Voici , à l'excep- tion de certains faits anatomiques &C myfterieux aufquels nous ren- voyons les Médecins Se les Chirur- giens , le premier article du Dic- tionnaire : Accélérateurs de l'Urine , ce font des mufcles qui nailTent de la partie fupericure de l'urethre-, fous l'os pubis Ils n'agiftent que dans l'expulfion des dernière» goûtes de l'urine : hors ce tcms-là ils ne contribuent en rien à la fai- re fortir ; quoiqu'il femble cepen- dant , à en juger par le nom qu'on leur donne , qu'ils foient les inftru- mens prochains de l'évacuation toute entière Achatci. Grec , A**'™; fait le fu- jet du fécond article , voici ce qu'il contient. L'Agate eft une pierre prétieufe , laquelle a emprunte fon nom d'un Fleuve de Sicile , auprès duquel elle a été découverte. Elle eft plu*, dure , plus légère , plus brillante que le Jafpe , à demi tranfparente., diverfement colorée 3 reprefentant plufieurs fortes d'images , tantôt un Pigeon , Se alors on l'appelle 3 Phajjachates , tantôt une corne &C alors on la nomme Kerachates , tantôt un ou plufieurs arbres Se alors on la dé/îgne par le nom de "Dendrachatts , tantôt des cfpcces S E P T E M deChariots, deRi vieres> d'Oifeaux, de Bœufs , de Chevaux , d'Hom- mes. Pline , Hiftoire Naturelle , Livre J7. Chap. premier; Solin , Chap. 5. de Marmodeus , Livre des Pierres prétieufes, chap. 2. rap- portent que Pyrrhus a voit une aga- te où les neuf Mufes avec Apollon étoient naturellement reprefentées. Dans les derniers héclcs pluiieurs autres Auteurs auffi crédules que ces premiers } rapportent des cho- fes femblables. Tels font Lambe- cius , Liv. premier de la Bibliothè- que de l'Emp. Aldrovandus , Liv. 4. des Métaux , Chap. 73. Pancirolus, Liv. deschofes mémo- «ables ; Kircher liv. 8. du Monde Souterrain , Seèt. 1. &c. Les plus belles agates viennent des Indes, & les moindres , de Bohême. La couleur des agates reiïemble quel- quefois à celle du corail , quelque- fois à celle du poil de l'Hyène , du Lion , du Panthère. Quand les couleurs de l'agate font mêlées de veines blanches on l'appelle Lenca- ehate ; quand ces veines font de couleur de fan g , on la nomme tAZmachate , & quand elles tirent fur le rou^e de ia Cornaline, on l'appelle Sardachate. On prépare avec l'agate , fur tout avec celle qui tire en couleur fur la peau de Lion , un emplâtre nommé Diachate , dont y£tius donne la defeription dans fon cin- quième Livre. Cet emplâtre paffoit autrefois pour très-efficace contre les tumeurs dures , les écrouelles & les morfures des bêtes venimeufes# Quant à l'agate elle-même , de B R E, 17 3 2. 5r7 quelque efpece qu'elle foit , les an- ciens lui ont attribué plufieurs ver- tus admirables; les curieux peuvent conlulrer li-deffus Pline dans fou Hiftoire Naturelle, Liv. 37. Chap. 10. On la mettoit au nombre des Cardiaques & des Antidotes les plus fpecinques. Quelques moder- nes la placent encore aujourd'hui au même rang ; mais les perfonnes vraiment éclairées fe rient de ces vertus imaginaires , & ne recon- noilTent d'autre qualité dans cette pierre , que d'être bonne à faire des cachets & autres ouvrages fembla- bles , ou s'ils la croyent propre à quelque chofe dans la Médecine, c'eft uniquement à être employée comme un bon abforbanr. Après cet article , Meilleurs Tronchin &: de Neufville viennent au mot Acme y en Grec'Ax^»', jls expliquent ce que les Médecins en- tendent parce mot ; ils palTentdc- là aux termes Ad.ipofa-V.ifa t les vaiffeaux adipeux de Malpighi ,.& rendent compte de ce que c'eft que ces vaifteaux chez les Anatomiftes. La Tunique de l'œil appellée en Latin AdnataTunica, fait le fujet de l'article qui fuccede à celui-là. La plante , connue chez les Bo- taniftes , fous le nom de /£crole- thron , vient après ; puis on palle aux mors Hora , Heure ; Horizon- tale Aurttm , qui chez quelque Adeptes eft le Mercure; Horminum plante dont les feuilles reffemblent à celles de la Sauge; Hydrargjmm vif argent; Hydroybobia , Hydro phobie ou rage. C'eft par l'explica- tion de ce mot , que finit l'Effai ; Xx xij ji8 JOURNAL DE l'article eft fore long & fans être conduit à fa fin , il tient lept co- lomncs entières /«-4e. de petit ca- ractère. Nous rapporterons l'arti- cle du mot Ho'* , S: r.ous ferons l'analyfc «le celui où il cil: parlé de 1' Hydrophabie. Le mot Hora fc prend en deux fens, dans les Livres de Médecine. i°. Pour toute forte de tems de l'année , ainli qu'on le voit dans le fécond Aphorifme d'Hippocrate , Section premierc;dans les premiers, troifiéme ôv quatrième , Section troilîéme. Les Auteurs Grecs, Si entr'autres Hippocrate , donnent par excellence,au tems de la canicule le nom de Hora , "ty* ; on retrou- vera dans aucun de ces Auteurs, le mot Hora pour lignifier , comme parmi nous , une partie du jour. Le mot d'Heure n'a été employé en ce fens que long-rems après, comme le prouvent Scaliger de Lmend. Temp. Liv. 1. Cafaubon , ad Libr. vl. Athenxi. Cap. 10. Pollux par- lant des termes en ufage pour délî- gner les parties du jour ne hit nulle mention d'Hors. Ainli dans l'A- phorilmc 30. d'Hippocrate , Sec- tion 4. & dansl'Aphonfme 5. Sec- tion 5. le mot Horaqaï s'y trouve ne doit être traduit que par celui de tems. Il en cil de même de tous les autres endroits de cet Auteur, DÛ ce mot fe peut rencontrer. L'article de Y Hydrophobie com- mence par l'Ervmologic de ce mot. Meilleurs Tronchin &: deNeurvil- 1c décrivent enluite ce que c'eft que cette affreufe maladie , c'eft-à-dirc la. rage , &z comment elle fe corn- S SÇAVANS, mimique d'un animal à l'autre , par la morfure, par le toucher , tjrc. Ils marquent en quels Pavs & en quelles Saifonscllc c(t plus ordinai- re , quelle manière de vivre y peut donner occalion , cv quels font les lignes de cernai dans les chiens, quelle en eft la nature , par quels degrezil commence £\: augmente , quels en font les fymptômes, les remèdes & les prefervatifs , qu'eft- ce qu'on découvre dans les cada- vres de ceux qui meurent de cette maladie , &c. Nous ne fçaurions donner l'extrait de tous ces articles, nous nous bornerons à une partie de celui qui concerne les remèdes. On avertit ici de traiter cer'e ma- ladie comme la plus inflammatoire qui fc puiile imaginer , & pour ce- la de commencer d'abord îs dès les premiers lïgri es , pài la faignéc , laquelle, dit-on, fe doit faire le plus près qu'il fe p-.ur de la morfu- rei on recommande de réitérer !a faignée au-delà de ce que la pru- dence pourroit permettre en toute autre maladie , èv de la pouller au point qu'elle faffe tomber le malade en foiblelïe. Après ces fréquentes cv abondantes faignées , on con- feille de donner au malade des lavemens d'eau où il y ait du nitre , un peu de fel commun & quelques goûtes de vinaigre , puis delejctter tout d'un coup dans un bain d'eau froide , ou de lui en verfer une grande quantité fur le corps , & de recommence: l'un ou l'autre jufqu'à ce qu'il ne craigoc pins l'eau . de le co i fui- te à en boire largen pro- S E P T E M curer autant qu'il fera pollible , le fommeil de la nuit , & de lui don- ner toujours une nourriture légère & humectante. Ettmuller , Heifter 8c quelques autres Auteurs, veulent qu'on don- ne aux Hydrophobes , des Alexi- pharmaques ScdesCordiaux échauf tans; on condamne ieveette prati- que comme très-funefte , & on en donne les raifons. Meilleurs Tronchin & de Neuf- ville avertident qu'il ne faut pas fe fier ici à l'eau de la mer, ils en rap- portent diverfes expériences & exa- minent ce qu'on doit crte^lre de pluheurs autres remèdes vantés par . certains Auteurs, ce qu'ils (ont avec beaucoup de foin 5: de recherches. Pour mettre autant qu il nous eft pollible , les Lefteurs en état de juger de ces deux Dictionnaires, il ne nous refte plus qu'à rapporter des exemple* de celui de Francfort. Il ferait à fouhaiter qu'on put com- parer enlemble dans l'un &. dans l'autre t (lai , quelques explications d'un même mot ; mais ces deux EtTais font conçus de manière que les tfrmes qui font le fujetdcl'un , font differens de ceux qui font le fu- jetde l'autre. Ou plutôt nous remar- querons quel' Ertai dui'Didtionnai- t c ne roule que fur un fcul mot qui tfiAmrhoniacum, Ammoniac, terme qui ne fe trouve point dans l'f.flai du D;£ti ->nnaire de Meffieurs Tron- chin & de Neufville. L'explication de ce feul mot , fans être achevée , remplit douze colomnes de l'Eflai de M. Burggrave , lequel Eflai eft arenà , car «'/*/«»{ lignifie Sable cV Afj./jiutia.\h dgnifie fablonneux. Ce n eft pas toute forte de fable , ou toute forte de chofe fablonneufc qui a donné lieu d'inventer ce mot, c'eft le terroir lablonneux de la Ly- bie Cyrenaïque , qui en eft la véri- table occafion. Parce qu'il y avoit là un Temple confacré à Jupiter , qu'on y honoroit fous le titre de Jupiter Ammon , à caufe de la qua- lité fablonneufe du Pays. Pour fça- voir combien cette Région eft fa- bîonneufe , il faut lire ce qu'en dit Quinte-Curfe , lorfqu'il décrit le voyagé qu'y fit Alexandre le Grand. >■ On vit , dit-il , de vsftcs » Campagnes toutes cachées fous " le fable , & y étant entré comme » dans une protonde mer , on cher- » choit des yeux où étoit la terre , » nul arbre , nul veftige de culture. Au refte il pourrait bien fe faire , dit ici M Burggrave , que le nom d'Ammon eût moins été donné à Jupiter à caufe du fable dont il s'a- git, qu'a caufe qu'un Berger nom- mé Ammon lui avoit élevé le Temple dont nous avons parlé ; car ce Berger , félon ce que raconte Paufanias , s'appelioit véritable- ment Ammon. L'Aureur du Dic- tionnaire ajoute plufieurs reflexions qui aboutillcnt à conclure que le premier fentiment eft le plus vrai- lable, Il définit enfuite ce que c'eft que la Gomme Ammoniac ou jao JOURNAL D plutôt ce qu'on appelle decc nom , car il obfervc que ce n'eft pas une fimple Gomme, mais une larme gommeufe, refineufe,ce qu'il prou- ve au long, Se ce qui eft luivi de pluficurs recherches curieules fur la même matière 5 toutes accompa- gnées de citations fçavantes & pro- pres aux fujet. Les proprictez de cette larme font ici expofées dans un grand détail : l'Auteur montre d'abord les vertus qu'elle a étant appliquée extérieurement , puis celles qu'elle a étant prife en dedans, ou plutôt , il rapporte ce qu'un grand nombre d'Auteurs ont écrit ià-deiîus , & il y |oint pluheurs ré- flexions de fon cru. En voici quelques exemples : » Cette larme appliquée furies tu- j» meurs , eft un excellent remède j> pour les refoudre : la chaleur » naturelle du corps la liquéfie , & » par cette liquéfaction en agite les «plus fines particules , ces particu- » les ainfi agitées , lefquelles font }> falines £c vifqucufes , s'infinuent » jufques dans le fang , après avoir » tourné un certain tems entre la 53 fuperheie de la tumeur & la fub- 33 ftance de cette larme attachée Se « collée fur la partie. Or tandis 33 qu'elles entrent dans le fang, la 33 fubftance gralTe Se vifqucufe du 13 médicament , alTouplir, ramolic si & relâche les fibres Se les vaif- 33 féaux de la partie où eft la tu- 3j meur , Se par le moyen des par- is ticules falines de la même drogue i>lequel!es entrent dans le corps , » ces fibres & ces vaiiïeaux font ^.ébranlés d'un doux mouvement ES SÇAVANS, » d'ofcillation qui rend la tumeur «plusdifpoféeà obéir à l'action de >»ccs mêmes particules , lorfqu'em- «portées du dedans au dehors par 1* » tranfpiration elles reviennent à la » partie,car trouvant alors cette par- »tie plus molle Se les vaifleaux dont »» elle eft parfemée, plus mobiles,il >» faut necellairement qu'elles cm- «•portent les obftrudtions qui fond» »» tumeur. M. Burggrave poufle plus loin fon explication , & la continue toujours fuivant la même méthode qui eft de s'attacher fcrupuleufe- ment à la Méchaniquc , ce qu'il obfervc non feulement ici , mais dans toutes les autres occafions où, il s'agit d'expliquer quelque opéra* don de l'Art ou de la Nature. Après plufieurs autres reflexions que nous fommes obligés de palier pour éviter la longueur , on vient, à l'ufage intérieur du même médi- cament qui fe prend , dit-on , ou en bol, ou en pilule, ouenémul- fion , ou en électuaire. Notre Auteur entre , à cette oc- cafion , dans un grand détail de ce que produit ce remède lorfquft les particules fe font mêlées avec le fang. Il explique méchaniquemenc Se anatomiquement comment ces fortes de particules ainii emportées cv chariées par le fleuve du fang qui circule , peuvent guérir la pé- ripneumonic cv autres affections de de la poitrine , les maladies qui ont leur liège ou dans la tête ou dans le bas ventre ou dans les extremitez ; puis il parle des emplâtres , des ce- nts , des onguensSc auties prépara* S E P T E M tions qui fe font avec ceprc larme, pour la guérifon de diverfes mala- dies , Se il cite fur tout cela les Au- teurs les plus renommés dans la Médecine Se dans la Pharmacie. Il paffe de-là au fcl ammoniac 8c obferve là-deiTus jufqu'à la fin de fon Eflai , où il lailîe cet article im- B R E, 1732; jat parfait , la même méthode qu'il a obfervée en parlant de la Gomme ou larme ammoniac. Il y a lieu de juger par ces deux Eflais , que les Dictionnaires qu'on projette , feront peut-être quelque chofe de plus que des Dictionnai- res. LA VERITE FABULISTE, COMEDIE, AVEC VN T^ecueil de Fables. Par M. de Launay. A Paris, chez Jean- François Joffe, rue S. Jacques, à la Colombe. 173 1. ;»-i2. NOUS ne dirons rien de la Comédie qui fe trouve à la tête de ce Recueil , le fuccès qu'el- le a eu l'a fait aflez connoître. Com- me fa principale beauté confifte dans les Fables dont elle eft rem- plie } l'aplaudiflement avec lequel elles ont été reçues doit être un pré- jugé favorable pour celles que M. de Launay nous donne aujourd'hui. Il n'a point cru devoir imiter les Auteurs qui ne craignent pas d'éri- ger leurs caprices en règles de l'art , & qui dans de longues Préfaces fai- tes après coup, inventent de nou- velles règles uniquement pour ju- ftifier les écarts dans lefqueh ils font tombés. Ce Recueil de Fables n'a d'autre Préface que la Comédie dont nous venons de parler. L'Auteur, par la bouche de la Vérité , nous y apprend en peu de mots le but qu'il a cru devoir fe propofer dans la compofition de fes Fables. Perfuadé avec tous les grands Maîtres qui l'ont précédé, que ces fortes d'Ouvrages doivent toujours tendre à la correction des amccHis i il ne perd jamais de vûë le point de morale qu'il entreprend de traiter : mais il le prelente avec une noble (Implicite , également éloi- gnée de l'affectation & de la fechc- reffe. Cependant lorfque le fujet lut en a paru fufceptible , il n'a pas laiiTé d'y répandre beaucoup de Poé'fie ; on en jugera par la Fable fuivante, c'eftla 18e. Le Poisson et les Arbres. Près d'un Fleuve qui lentement Laiffoit couler fon onde parefleufe , Des Chênes élevoient leur cime ambi- tieuie , Ets'aprochoient du Firmament; L'onde qui leur fervoit de gîacCj En répetoit par tout les troncs & les rameaux , Et «es nouveaux Titans fembloient rem- plir l'efpace Des Cieux , de la terre & des eaux. Un Poiflbn attiré par le tendre ramage Des habitans ailés , Chantres de ce» beaux lieux, Venoit fouvent près du àmg9 5it JOURNAL D Ecouter de leurs voix les fons mélodieux, Et jouir d'un fi doux ombrage ; Mais de leurs toits voifins des Cieux , Ainfi que de leurs chants , il détint en- vieux , Le voilà donc qui fe de foie , Qui de Ton élément dételle le féjour; Il fe plaint du dcltin qui lui donna le jour , En le privant de la parole. Mais voit-on le deitin révoquer fef décrets ? Le Poiffon nage , & TOifcan vole ; Ce font d'immuables artêts. Ce Poiifon cependant voulut faire un miracle , Jufqu'au-deffus des flots il cherche à s'é- lancer , Mais que lui fert de s'efforcer , Victime à tout moment d'un invincible obftacle ? Un beau jour il fit tant qu'il fauta fur Iç bord ; Mais il fc repentit d'un effort téméraire ; Car ne pouvant plus haut élever fon effort , Ni regagner fa demeure ordinaire, Il relia fur le fable , attendant que la mort Vint mettre fin à fa mifere. Où ne trouve-t-on pas cette efpece de fous , Qui de l'état d'autrui dcfîreux & jaloux , Pour s'élever , perdent leur héritage ? Pourquoi nous déplacer ? qu'en retire- rons-nous i ES SÇAVANS, II cil & plus fur , & plus doux D'être content de fon partage. Pour mieux taire connoîcrc no- tre Auteur, donnons ici une Fable dans un genre différent , on verra par la manière dont elle cft traitée qu'un Fabulifte , fans foirir du ftilc familier qui fait fon caractère , peut quelquefois s'élever jufqu'au, fubli- mc. Le Pan et le petit Oiseav. Fable $5. Dans une riante vallée Toute la troupe des OifHu» Tenoit un jour fon affemblée , C'eft comme parmi nous les Etats Géné- raux. Il éroit queftion d'élire Un d'entre eux pour chef de l'Empire , En un mot de choifîr un Roi, Les Eleâeurs prirent fcéance, Et fî-tôt qu'on eut fait filence, Le Paon fe levé , & dit : je croi que c'eft à moi, Meflïeurs , que vous devez donner la préférence. La beauté de mes tra:ts vous en preferit la loi. A ces mots déployant fon radieux plu- mage , Il en fait à leurs yeux un fupctbe étalage. : , voyez, Meilleurs, & ma & mon air, C'eft à ce brillant avantage Voyez , voyez , Meflieurs, & ma taille & mon air, Que S E P T E M Que l'époufc de Jupiter A donné Ton fuffrage. Charmé d'un difeours fpeeieux , Chacun étoit prêt de le croire , Mais un petit Oifeau prudent, judicieux, Qui mieux que le Hibou tnériteroit la gloire D'être auprès de Minerve élevé dans le» Cieux, Lui dit, vous nous contez une plaifantc hiftoire ; Qu'eft-oe qu'un Roi , Meflieurs , qui n'a que la beauté ? {1 en faut un qui veille à notre fureté, Un favori de la viétoire. L'Aigle, ce fier fupport du Souverain des Dieux , Qui porte fa foudre en tous lieux; Mérite feul qu'on le choififle ; Joute autre élection irritant fon couroux, Si pour punir notre injuftice, Il venoit à fondre fur nous , Le Paon nous pourroit-il garantir de fëï coups î Il n'en fallut pas davantage ; La troupe élut l'Oiieau de grand renom , Et renvoya le Paon avec fon beau plu- mage A la toilette de Junon. La morale de la Fable par laquel- le nous finirons cet Extrait , n'eft pas moins forte ni moins instructi- ve que celle de la précédente , mais elleeft enveloppée dans un ftile en- joué & badin qui la fait d'autant Septembre. BRI; 1752. 5=25 mieux lentir que le Poète femble avoir pris plus de précautions pouc la cacher. Le Barbet et les Roquits.' Fable 47. Un Barbet, fous un maître habile, Avoir apprif des tours charmans ," Et des habitans de la Ville Il s'attiroit par tout les applaudilfcmcns ; Docile au moindre figne , il fembloû tout comprendre ; C'étoit un merveilleux Aftcur, Sachant d'ailleurs fe faire entend dre Mieux que n'eût fait un Orateur* Un beau jour ayant la manie De vouloir fe faire admirer De ce que nous nommons la bonne compagnie , Dans un riche Palais il ofà pénétrer. Le nouveau Rofcius entre donc fur H Scène , Fait un falut à la Romaine , Et jappe un compliment pour annoncet fes tours ; Mais voilà les Roquets auffi-tôt en émeu* te, La Dame du logis en avoit une mente i Et l'Orateur perdit le fil de fon difeoure. Ne pouvant avoir-amiience , Aux gambades il eut recours ; Mais Roquets d'aboyer toujours ; Même avec plus de violence ; Loin de leur impofer filence , Chacun vanta la voix des M ce ors , dâl Marquis, Yyjr S24 JOURNAL DES SÇAVANS, On leur trouva le goût exquis, Ce ^on pen(-e des chiens, n'iroit-il Ils furent Teu'.s fêtés, & dans tout l'audi- point au M-i;trc ? toire II paffc pour confiant qu'il n'eft point de Mais non ; le Grand Seigneur eft tout €C la gloire qu'il veut être. Des Chiens de qualité d'avoir le moindre acquis. •îpi» «<»* OBSERVATIONS MATHEMATIQUES, ASTRONOMIQUES , Géographiques & Phyfîtjues , tirées des anciens Livres Chinois , & eu faites nouvellement aux Indes ailleurs , par les Pères de la Compagnie de Jefus. Rédigées & publiées par le P. Etienne Souciet de la même Com- pagnie. Tome II. Contenant une Hiftoire de /' Agronomie Chinoife , avec des Dijfertations , par le P. Gaubil de la même Compagnie , Tome III. contenant un Traité de l' Aflronomie Chinoife, par le même P. Gaubil. A Paris , chez Rollin père , fur le Quai des Auguftins , près le Pont S. Michel, au Lion d'or. 1732. /»-4*. Tome II. pp. 178. Tome III. pp. 373 fans la Préface du fécond Tome qui eft de 25. pages , & fans les planches. »TLya long-tems , comme le i> JL remarque le P. Souciet dans » fa Préface , que l'on parle en Eu- » rope de l'eftime & de l'applica- s> tion que les Chinois ont eu de » tour tems pour l'Aftronomie^es » Obfervarions Celeftes qu'ils ont » faites, de leurs découvertes eu çç t> genre & des fecours qu'on en j» peut tirer pour l'Hiftoire &: la a Chronologie. « Mais il n'y a perfonne jufqu'i prefentqui ait en- trepris avant le P. Gaubil , de don- ner aux Européans une idée jufte &T complétée de l'Aftronomie des Chinois , avantqu'ilseuffcnr adop- té celle de l'Europe. La difficulté de réunir dans l'éxe- cution d'un pareil Ouvrage, paroît avoir détourné jufqu'à prefent les .Millionnaires de la Chine de l'en- treprendre. En effet il faur,pour une pareille entreprife , une perfonne qui poITede toutes les parties de l'Aftronomie Europeanne dans la. perfection dans laquelle on les a portées dans les derniers ficelés , Se qui fâche parfaitement la Langue Chinoife & la Tartare. On a beau- coup de peine à trouver les Livres Chinois qui traitent de cette an- cienne Agronomie. Les Million- naires fur tout ne peuvent guéres faire ces recherches fous le nouvel Empereur fans s'expofer beaucoup. Ces Livres ne font la plupart que des Traitez informes , fans ordre , fans méthode, remplisd'un grand nombre de citations Se de répéti- tions , de queftions étrangères 3 de traits de Morale , d'Hiftoire, de Phyfique, d'Aftiologie Judiciaire» S E P T E M Il n'eft point aifé de fuivre dans un grand nombre de Livres de cette clpece , le progrès & la décadence de l'Aftronomie, de démêler les méthodes différentes des Aftrono- mes , de les examiner , d'en faire la critique , &c de pénétrer au tra- vers des obfcuritez, dans des fe- crets que les Chinois eux-mêmes ne conçoivent pas , parce que les plus habiles d'emr'eux étant bornes à des pratiques d'Aftronomie Euro- peanne , ne connoilfenr point la pratique , & à plus torte railon la Théorie de l'ancienne Aitronomie Chinoife. Le P. SoHciet n'eft entré dans ce détail que pour mieux faire fentir l'obligation qu'on a au P. Gaubil d'avoir furmonté ces difficultez. Etant arrivé à la Chine dans des circonftances dans lefquelles il ne pouvoir exercer fon zélé comme il l'auroit pu faire fous l'tmpcreur Cham-hi , il a trouvé du tems pour s'inftruire lui-même de l'ancienne Aftronomie Chinoife & pour en inftruire les Savans d'Europe qui font curieux de ces matières. Il a lu & extrait ces tameux Livres Claffi- ques les Kmgi qu'on regarde à la Chine comme des Livres Sacrés. La grandeHiftoire de laChine,dont les différentes parties font compo- sées par des Auteurs contempo- rains , qui commence à l'Empire des Hans , deux fiécles avant J. C. & qui finit au commencement du 15e fiécle de l'Ere Chrétienne , contient fous chaque Dynaftie l'Hiftoire de l'Aftronomie Chinoi- se & des anciens Aftronomes, le BR.E, 1732, jîy P. Gaubil a tiré de ces Livres tout ce qui avoit rapport à fon ob;et. Il a lu tout ce qui regardoit l'Aftro- nomie dans les Commentaires fur les Livres Claffiqucs faits fous les Dynafties des Tang , do Song -, des Ming; il a cherché dans les Ou- vrages des 'Aftronomes Chinois , ( il y en a qui ont compofé plus de cinquante Volumes in -folio fur l'Aftronomie ) leurSyftême cv leur méthode. C'cft après ce travail im- menfe que le P. Gaubil s'eft trouvé en état de donner fon Hiftoire , Se fon Traité de l'ancienne. Aftrono- mie Chinoife. C'eft une tradition à la Chine que Fon-bi qui eft regardé comme le Fondateur de l'Empire , a le pre- mier enfeigné l'Aftronomie. Mais le P. Gaubil affure que quelques efforts qu'ayent fait juîqu'à prefent les Chinois, ils n'ont pu découvrir la méthode de ce Prince, ni fçavoir jufqu'où s'étendoit fa feience aftro~ nomique. Un fragment confidera- ble qui a été confervé d'un Livre Claffique appelle Choit-kjng , fait connoître que dès l'an 115 5. avant J. Cil y avoit des perfonnesprépo- fées pour la fupputarion & pour l'obfcrvation des Eclipfes , & qu'il y avoit des règles pour cette fuppu- tation , puifque lcsLoixpunifloient févérement les Aftionomcs qui avoient manqué à annoncer jufte le tems d'une éclipfe. Celie de l'an 2155. avant J. C. fert à fixer une époque famenfe dans l'Hiftoire de la Chine. On voit encore par ce fragment que dans ce tems - la les Chinois obfervoient les mouve? Yyyij S26 JOURNAL DE mens du Soleil, de la Lune Se des Allres, pour déterminer le tems des Equinoxes Se desSolftices , que l'année étoit alors chez les Chinois de lt6. jours ce 6. heures, cv qu'au bout de 4. ans l'année avoit 367. jours ; l'année Lunaire étoit aulîi en ufage , ix pour rendre le calcul jufte on fe fervoitd'intercallation. Il re- fte encore quelques autres fragmens d'anciens livres compofés dans les frécles fuivans qui parlent d'Aftro- nomie. Mais les Altror.omes Chi- nois conviennent, lclon le P. Giu- bil , qu'après le tems du Tchim- Tfie ment le nombre Se l'arrangement de la plupart des étoiles , ils en ont fait des Catalogues ailez amples, un Recueil d'éclipfes de Soleil , Se quelques Obfervations fur les Co- mètes , mais ils n'ont marqué pour' les Aftres ni longitude ni latitudc ni déclinaifons. On chercheroir fort inutilement quel étoit leurSy- ftème d'Aftronomie , car ils n'a- voient aucune connoiffanec de la Trigonométrie Sphérique , & on ne trouve dans la description de leur Empire faite fous cette Dyna- ftie , aucun veftige de pofition des lieux en confequence des Obferva- tions Aftronomiques. Le P. Gaubil obferve encore dans le même endroit que la plû- S E P T E M part des Auteurs Européens qui ont parlé de la Chine , ont cru que lés Chinois donnoient au monde une antiquité de plusieurs millions d'années , & qu'ils pretendoienc fonder cette opinion fur des Obfer- varions Aftronomiques. Mais il ajoute que cette opinion n'a été ambralfée à la Chine que par quel- ques particuliers , Se qu'elle n'y eit pas fort ancienne, du moins qu'on ne fçauroitla démontrer telle. L'an 164. de J. C. des étrangers que leP.Gaubil croit avoir été fujets de l'Empire Romain arrivèrent à la Chine; c'eft aullî cette année-là qu'un Aftronome appelle Thang- Heng fit des Armilles , une Sphère, un Globe Celefte , un Tube pour fpéculer les Aftres & un Livre qui expliquoit l'uiage de ces Inftru- mens. Ce Livre eft perdu , mais on voit encore dans l'Hiftoire des H'in la defeription de cette Sphère qui étoit de Leton. Malgré cck- cours , l'Aftronomiene fut pas fort perfectionnée, même fous les der- niers Princes de la Dynaftie des Han\ la raifon qu'en rend le Peré Gaubil , c'eft que dans ce tems-là toute leur Aftronomie confiftoit en des combinaifons arbitraires pour trouver des époques à des jours &à des années du Cicle de 60. dont on fuppofoit que les caractères avoient des rapports au Ciel , à la terre & à l'homme, z". La plupart des A ftro- nomes des Han ont cru que le cal- cul des mouvemens des Aftres n'é- toit pas fondé fur des règles im- muables. Ils croyoient que les ac- ïions bonnes ou mauvaifes des Prin- B R E , 1752: ys7 ces changeoient fouvent les mouve- mens des Aftres , fur tout par rap- port aux éclipfes du Soleil.Quoiquc les Aftronomes des Dynafties fui- vantes ayent bien réfuté ce faux principe des Aftronomes des Han> ils n'ont pas laifté d'y avoir recours eux-mêmes, quand une éclipfe mal calculée les a mis en danger de perdre leurs biens, leurs Charges ou leur honneur. Ils ont aiiiTî fou-' vent voulu hire la cour à leur Prin- ce aux dépens delà vérité. Il y eut par exemple en 1715. une approxi- mation de 4. Pianettes , à cette oc- calîon les Chinois marquèrent dans leurs Rcgiftres une conjonction des- fept Pianettes , parce qu'ils croient- que cette conjonction fous un Prin- ce eft une faveur particulière du Ciel , cependant cette faulfe con- jonction j fera faire bien de faux Syftêmes aux Auteurs des fiécles à venir. Sous les Dynafties qui fuivirent celles des Han , il y eut des Aftro- nomes dont les Ouvrages fe font confervés, & par lefquels on voit qu'on a fait de tems en tems à la, Chine des découvertes utiles pour perfectionner l'Aftronomie , ou du moins pour diminuer les défauts de. celle qui étoit fuivie du tems des £fo».f.Nous ne fuivrons pas l'Auteur dans ce détail , & nous nous con- tenterons d'en rapporter quelques traits. Ju-hi Aftronomede la Dyn^ftic des Tfins eft le premier Chinois que l'on fâche avoir parlé du mouve- ment propre des fixes, Jufqu'au milieu du cinquième yaS JOURNAL D fiécledc l'Ere Chrétienne les Aftro- nomes Chinois fuppofoicnt une étoile fixe au Pôle du monde , Se qu'ils appelloient l'étoile du Pôle : Tjou-tcbong t Aftronome Chinois , qui vivoit dans ce tems-là , décou- vrit que cette étoile tournoit com- me les autres d'Orient enOccident, . Se qu'elle devoit fe diftinguer du point rue appelle Pôle Boréal. Av.mtl'an j 50. on voit bien que les Agronomes Chinois, connoif- foientla latitude auitrale &: boréale de la Lune; mais jufqu'alors ils n'avoient point de règles pour con- noître le changement caufé à cette latitude ,parce qu'on appelle paral- laxe de latitude , ils n'avoient point non plus dérègles fort claires pour connoître le moment du commen- cement , du milieu & de la fin d'u- ne éclipfe. Les préceptes pour la quantité de l'éclipfe étoient fautifs , 'Tcbang-tfe-Jtn donna des règles fur ces differens points. Notre Auteur rapporte ces règles avec allez d'é- tendue dans l'article du troifiéme Tome , où il traite de ces règles , Se laide à ceux qui liront ce Chapitre à juger de la bonté de la méthode. En 72i.une éclipfe calculée,fui vant la méthode ordinaire , s'étant trou- vée faufle , l'Empereur Hivent- fottg appella à d Cour un rameux Bonze Chinois de la Secie de Fo , nommé T-Hang. Ce Bonze tâcha de fc former la meilleure méthode d'Altronomie qu'il lui fut polïible. Enfuite il appliqua la méthode aux figure, Se aux nombres qui font dans les Livres Claffiques , fur tout au nombre Tt-ycn , c'eit-à-dire , E S SÇAVANS, grande abon lance , propofé pat Confunus t 8c il prit ce nombre pour titre de foa Ouvrage lur i'A- itronomic. Ce Bonze Altronome eut un grand chagrin dans le tems qu'il s'y attendoit le moins. Il avoit donné comme fur le calcul de deux éclipfes de Soleil , qu'il avoit or- donne d'obferver dans tout i'Eni pi- re , le tems fut ferain prefque par toute la Chine un jour indiqué, 2c nulle part on ne vit de veftigesd'é- cliples. Le Bonze dillimula fort chagrin, Se pendant, dit le Perc Gaubil , qu'il travailloit à corriger les principes qui lui avoient tait faire un faux calcul, il fit publier un Livre où il pretendoit prouver que le Ciel a voit changé les règles ordi- naires du mouvement qui doit pro- duire l'éclipfe. T-Hang travailloit avec beaucoup de zélé à un Cours complet d'Altronomie lorfquc la mort l'enleva âgé de 45. ans. Les Mathématiciens nommés par l'Em- pereur mirent en ordre fes Ecrits Se fon Ouvrage tut public &c approuve dans l'Empire. Notre Auteur parle fous l'année $06. de l'Ere Chrétienne d'une note de l'Hiitoire Chinoife, où l'on allure qu'en ce tems-là qui étoit le règne A'Hien-tfong , on donna à la Bouflole la forme qu'elle a aujour- d'hui. Mais l'ufage de l'aiguille ai- mantée étoit plus ancien à la Chine que l'Empire de ce Prince , fuivant le P. Gaubil , puifqu'il allure qu'il a trouvé l'ufage de la Bouffole pour connoître le Nord Se le Sud , dans un Livre fait fur la fin de la Dyna- flie des Hans. Il ajoute que dans ce S E P T E M B Livre on parle exprefféinent de l'aiguille aimantée. Un Herbier Chinois cité par notre Auteur ferc à prouver que des le commence- ment du douzième fiécle on con- noiffoit à la Chine la déclinaifon de l'aiman , & avant l'entrée des Jefuites à la Chine Tching , Prince de la famille Impériale des Ming avoit donné des règles pour con- noître la quotité de la déclinaifon par l'application de l'aiguille fur une ligne méridienne. Dans le 13e fiécle Co-cheon-kjng qui étoit de la Province de Petcheli fit de grands changemens dans la méthode de l'Aftronomie Chinoi- fe. L'Aftronomie faite en Chinois , fuivant la méthode de l'Europe, fous le feu Empereur Cham-hi } dit nettement que c'eft Co-cheou-kjng le premier qui ait fçû laTrigonométrie Sphérique. Quand le P.Gaubil aura recouvré le Traité en entier, il verra s'il y a quelque choie qui mérite d'être traduit. Notre Auteur dit qu'il ne fçait pas lî cet Aftronome le fit à lui-même fa méthode fur la Trigonométrie, ou s'il L'apprit des Mathématiciens étrangers qui é- toient alors à la Cour delà Chine. Après la mort de cet Aftronome , les Chinois négligèrent très - fort l'Aftronomie. Elle étoit prefque entièrement tombée lorfque Hong- Voh Fondateur des Ming qui gou- vernèrent l'Empire jufqu'en 1644. travailla à la rétablir. Ce Prince re- nouvella la méthode de Co-cheoH- kfKg > & il introduifit des Maho- niétans dans le Tribunal des Mathé- matiques. Malgré les foins de R E, 1752; JT2$ Hang-VoH Si de fes Succeffeurs tout alloit de mal en pis „ & vers l'an 1573. les Mahométans ne cal- culoient pas mieux que les Chinois. C'eft en xe tems-là que le Prince Tcbïn t Si l'Aftronome Hing-y-lou entreprirent de rétablir l'AlUono- mie ; le P. Gaubil alïure qu'on ne fçauroit allez loiier leur entreprife Se leur travail , Si il aflure que le& Ouvrages de ces deux Auteurs fonc ce que les Chinois ont de mieux. Mais dans le tems qu'ils travail- loicnt avec plus d'ardeur , on con- nut à la Chine l'Aftronomie Euro- peanne , dont les Jefuites donnè- rent une idée aux Grands de ce Pays-là , on en parla aux Princes avec éloge , Si la Cour refolut da donner aux Jefuites le foin du Tri- bunal des Mathématiques , c'eft par-là que la Religion Chrétienne s'eft introduite à la Cour de Pékin, Si l'Empereur régnant a déclaré qu'il ne confervoit les Europeans à fa Cour qu'à caufe delà connoiffan- ce qu'ils ont des Mathématiques Se du Calendrier qu'ils fçavent régler. C'eft ainff que le P. Gaubil ter- mine fon Hiftoirc abrégée de l'A- ftronomie Chinoife -, le Volume fuivant ne contient, à proprement parler , que des preuves de ce qu'il a avance dans la partie hiftorique^ Il y explique avec plus d'étendue qu'il n'avoit fait dans la première* partie les Syftêmes de quelques Aftronomes , avec leurs calculs Se leursTables, réduits à notre manière décompter. Ce que l'on peut conclure de cet Ouvrage , après le P. Souciet , c'eft jjo JOURNAL DES SÇAVANS; qu'il ne faut pas s'attendre à tirer avec raifon que cet Ouvrage ne* de l'Aftronomic Chinoiie des fe- laillera point d'être utile, pour fe cours pour perfectionner la nôrre , mettre au fait de cette matière donc puifque les Chinois eux-mêmes on a tant parlé , & pour juger plus l'ont abandonneepour prendre celle- fainementdc l'Hiftoirede la Chro- ci & qu'ils rendent en ce point à nologie & des Obfcrvations Qti* l'Europe un hommage qu'Us lui noiies. cefufcnc en tout le tefte. XI ajoute EXPOSITIO S E PTEMBRE, 175 2. n* EXPOSITIO JURIS CANONICI PER REGULAS NATURALI ordine digeftas ufuque tcmpcratas ex Corpore Juris ac aliunde de- fumptas induosTomos. C'elt-à-dire : Expofition du Droit Canonique far des règles mifes dans un ordre naturel , tirées du Corps du Droit Canonique & d'autres endroits , divifés en deux Tomes. Par M, Jean- Pierre Gibert, Dotteur en Théologie & Canonise. A Genève , aux dépens de Marc - Michel Boufquet & fes Affociés. 1731. Brochure in -fol. pp. 10. NOUS avons annoncé ce grand Ouvrage dans nos Nouvelles Littéraires du mois de Mai ; mais comme le ProfpcBus qu'on vient de publier mérite une attention particulière, nous en al- lons rendre compte. Dans ce Traité , dont le pre- mier Volume cft déjà fous la Preffe , M. Gibert fe propofe de faciliter l'étude du Droit Canoni- que. Dans cette vue il entreprend trois chofes. La première de remé- dier à la confufion qui fe trouve dans le Corps du Droit Canonique, en rangeant fes difpofitions dans un ordre naturel : la féconde d'ajouter les décidons neceflaires qui y font omifes : la troihéme d'en retran- cher les morceaux inutiles. Le preniicr défaut par rapport à l'ordre conliite,felon M. Gibert, en ce que les mêmes matières fe trou- vent traitées dans chacune des compilations qui compofcntlecorps du Droit Canonique ; de forte que quand on veut réunifies décifions qui regardent quelque matière , il faut chercher ce qui y a rapport dans fix Collections différentes. Il n'y a point d'ordre dans cha- cune de ces Collections , on trouve Septembre, par exemple des chofes qui regar- dent les Sacremens , dans le pre- mier , le rroilïéme , le quatrième & le cinquième Livre des Dccretales. Ce qui a rapport aux Sacremens cft aulli traité en trois Parties différen- tes du Décret de Graticn. M. Gi-^ bert fait voir qu'il en elt de même de ce qui regarde les irrégularitez , les jugemens , les bénéfices , les de- voirs des Clercs , les Moines 5c les Chanoines Réguliers , dans les Dé- crétais de Grégoire IX. dans le Sexte, dans les Clémentines , &c. La méthode qu'on a fuivie dans chacun des titres de laCompilation, d'en ranger les différentes décifions fuivant l'ordre Chronologique , ne peut caufer que de la confufion. Car par-là fouvent la décifion qui contient la définition ou la divifion de la matière que le titre prefente , fe trouve dans le milieu ou fur la fin du titre , & les décifions les plus générales font fouvent précédées de décifions particulières. On a aulli fouvent réuni fous le même titre des matières dont cha- cune devoit avoir fon titre féparé ; il y a quelquefois des titres qui font exprimés d'une manière G appro- chante d'autres titres , qu'il femblç Z z z H2 JOURNAL D qu'on ait voulu traiter de la même matière , quoique les chofes qui en font le fujet foienc entièrement différentes. Souvent les matières qui ont cnfemble du rapport , Se qui auroient par cette raifon été jointes , fe trouvent traitees fous des titres qui font fort éloignes les uns des autres. Le titre de l'éledion & de la puiffance de l'élu auroit dû être di vifé en plufieurs titres , dont l'un auroit traité de l'Election, l'au- tre de la Confirmation , un autre de la Conflcration des Evêques ou de la benedi&ion des Abbez. Les titres de Verbomm fignificatione &c de Régula Juris , dont le premier contient des explications des ter- mes, & l'autre des Règles de Droit auroient dû être à la tète du Corp* de Droit. Pour éviter ces embarras l'Au- teur a réuni fur chaque matière tout ce qu'il a trouvé dans le Corps du Droit Canonique fur cette ma- tière , il donnera d'abord les défi- nitions & les divifions necelfaires , il parlera de ces caufes & de ces ef- fets , il expliquera les changemens qui font furvenus dans la difcipli- ne,il répondra aux objections qu'on peut faire contre les décillons,c\:il ju- ftifiera chacun de ces points par des Textes du Droit Canonique ou par des Canons tirés d'autres Compila- tions , en distinguant les Pièces fuppofées d'avec les véritables , & en avertiffant celles fur lefquelles des Critiques ont eu des foupçons. Par rapport aux omiulons M. Gibert obferve qu'il y a des titres importons qui manquent dans le ES SÇAVANS, Corps du D:oit Canonique, d'au- tres titres qui ne donnent qu'une idée fort imparfaite des matières qui y font traitees , d'autres qu'il faut divifer en plulieurs articles. Il faut avertir les Lecteurs des déci- llons qui ont été tronquées, des Pièces fauffes qui ont été données pour véritables, des Canons îk des Décrétâtes qui font abrogées , de ceux qui ne regardent que quelque* Eglifes particulières , des change- mens qui ont été faits dans le Texte des Décretales par S. Raymond de Pegnafort , pour corriger des déd- iions erronnées ou pour adoucit celles qui étoient trop ieveres. De- puis la Compilation des Clémenti- nes jufqu'au tems de Sixte IV. qui eft le dernier Pape dont les déci- dons ayent été inférées dans le Corps du Droit Canonique , il y a. eu des Conciles mêmes généraux , comme ceux de Confiance &c de Balle, qui ont fait d'utiles Regle- mens pour la difeipline & pour la reformarion des mœurs qui n'ont point été mis dans le Corps du Droit Canonique, & que M. Gi- bert aura foin de placer fous les ti- tres aufquels ils ont rapport. Il ob» fervera la même chofe tant par rap- port au Concile de Trente que par rapport aux Conciles Provinciaux tenus avant ou depuis le Concile de Trente. 11 y ajoutera les Confti- tutions des Papes fur les matières qui font partie du Droit Canonique depuis le Pape Sixte IV. Pour ce qui eft des inutilitez que M. Gibert fc propofe de retran- cher , ta principale regarde la nai- S E P T E ration des faits , à l'occafîou def- quels une décifion a écé faite. Quand la décifion eft claire par elle- même, ces narrations font abfolu- ment inutiles. S'il y a quelque ob- fcurité dans la décifion , l'Auteur fe fervira pour la lever des circon- stances des faits qu'il expliquera dans les Notes. Il ne répétera point tous les Canons qui contiennent la même décifion , il fe contentera de rapporter ceux qui lui paroîtront le plus formels. Il ne croit point de- voir retrancher les déci fions abro- gées, ou celles qui font extraites de Pièces fuppofées, parce qu'on tire fouvent de grands avantages des raifonnemens qu'on peut faire fur les décidions de la première ef- pece , & parce que plufieurs Ca- nons , quoique fuppofés , ont été long-tems en vigueur , &c qu'il y •en a qui fervent de rondement à la difeipline prefente. Notre Auteur afTure qu'en fe fervantde fa Collec- tion , on apprendra plus de Droit Canonique en un mois qu'on n'en apprendroit en un an , en l'étudiant dans le Décret de Gratien & dans les Décrerales. Il vient enfuite à l'ordre qu'il fuivra dans cette Compilation. Dans la première qui comprendra plus de trente Traitez , l'Auteur parlera des Loix en gênerai, de leurs différentes efpeces , des Canons & des différentes Com- pilations qui en ont été faites , des Conciles tant généraux que particuliers, des Synodes Dioce- îains , du Concile de Trente & des .décidons de la Congrégation éta- M B R E , i 7 j 2. /j j blie pour l'interprétation de ce Concile. L'Auteur traitera enfuite du Droit Canonique , de la diffé- rence qu'il y a entre ce Droit & le Droit Civil, des Règles générales du Droit Ecclefiaftique , des Rè- gles qui concernent les matières particulières, comme les Bénéfices ou l'Ordre Judiciaire & les Règles de Morale. De-là il paffera aux fources du Droit Canonique , 3c il y appliquera les Règles que Chali- ne a données dans fa Méthode pour l'interprétation des Coutume:. M. Gibert ne regarde en quelque ma- nière cette première Partie que comme les Prolégomènes de fon Ouvrage. L'Auteur fe propofe dans la fé- conde Partie de donner des Traitez fur les matières particulières du Droit Canonique. Pour y mettre de l'ordre , il prétend tout rapporter à l'Eglife , qu'il confîderera d'abord en elle-même , enfuite par rapport à lajuriidiction qu'exercent fes Mi- niftres, tant volontaire que conten- tieufe; les perfonms & les chifts que M. Gibert regarde comme les deux objets de la Jurifdiclion fourniront, la madère d^sTraiter fuivans. Il di- vifera les chofes en purement fpi ri- tuelles , en purement temporelles , & en mixtes qui patticipentdu Spi- rituel Se du temporel, puis il vien- dra à l'initruclion Judiciaire 3c aux jugemens , tant en Matière Civile qu'en Matière Ecclefiaftique. On voit par-là que M. Gibert fuivra dans cette féconde Partie le même ordre qu'a fuivi Lancelot , & qu'il avoit emprunté des Infticutions de Z zz ij 5H JOURNAL D Juftinien. C'en: aufli l'ordre auquel fc font attaché la plupart des Au- teurs qui ont entrepris de donner des Traitez complets du Droit C a- nontquc. C'eft: pourquoi nous avons cru qu'il n'etoit point necef- faire de fuivre notre Auteur dans ce détail des matières qu'il fc pro- pofe d'expliquer. Nous avertirons ES SÇAVANS, feulement , d'après M. Gibett , que tous les Traitez particuliers qui compoferont Ton expofuion du Droit Canonique , feront rédigés fuivnnt la méthode de fon Traite des Cenfures , avec cette différen- ce néanmoins que fon Exnofition fera en Latin, Si. que fon Traité des Cenfures eft en François. REFLEXIONS INSTRUCTIVES ET MORALES SVR l'Apocalypfe. Par M. l'Abbé Genreau, Curé de No: re- Dame de D:jon. A Paris, rue S. Severin , chez d'Houry , feul Imprimeur-Li- braire de Monfeigncur le Duc d'Orléans. 1732. vol. in-11. pp. 6}6. LE Curé de Notre-Dame de Dijon dédie fon Ouvrage à fes Paroilîiens. » Il elt bien juile , leur » dn-il dans fon Epure Didicatoire, » que je vous confacre le fruit de 33 mon travail. Je fuis votre Patteur, *> vousêtes mon Troupeau. Le foin » de votre falut eft ma Miffion. Je » puis vous dire comme l'Apôtre 33 ledifoit à fon Difciple: letems 33 de la refolution de mon corps 33 approche , éx par la necellité où x font tous les hommes de mourir, 33 je dois bien -tôt vous quitter ; 33 mais par le defir que j'ai de vivre » toujours dans vos cœurs , j'ai for- ai mé le deffein de vouslailTcr des 3* Reflexions infhucïives Si mora- a les que j'ai tirées de tous les j» Pfeaumesdu Roi Prophète , des jj Epîtres de S. Paul , des Epîtres 33 Catholiques , & de l'Apocalypfe. » Je travaille même encore à ex- 33 traire de tous les Livres de l'an- 33 cien & du Nouveau Teftament , » les endroits les plus propres à » vous confoler & à yous fan&iiïer 33 dans les afflictions Se dans les » épreuves de cette vie. 33 Ce font tous ces differens Ou- 33 vrages que ]c vous adrefferai à 3» mefure du goût que vous aurez 33 en les lifait, pour la fandtirication 33 de vos âmes. Je commence par 3#vousoftrir l'Apocalypfe de Saine 33 Jean l'Evangelilte, dans la pen- 3> fée où je fuis que ce Livre eft peu 3> entre les mains des Fidèles , parce 33 qu'on croit communément qu'il 3» n'eft rempli que de myiteres ca- 33 chés , !k qi'il clt donné à peu de 33 perfonnes de les approfondir. J'ai 33 tâché de mettre ce Livre dans un 33 jour où les Mvfteres qu'il renfer- 33 me .quoique toujours profonds Se 3) prefque impénétrables, l'oient un 33 peu dévoilés , où le Fidèle dé- 33 couvrira les véritezles plus fubli- 33 mes de la Religion , les moyens 33 les plus furs pour fe fortifier dans 33 la pieté &i pour parvenir à la per- 33 fec\ion que Dieu lui demande 13 dans fon état. Tel eft le début de l'Epicatoirc S E P T E M de notre Auteur à fes Paroiiliens. Nous avons cru le devoir rapporter en fon entier pour faire voir quel eft le deflein qu'on fe propofe dans l'Ouvrage , &c les vues que l'on a d'en donner d'autres. Il ne nous refte plus qu'à citer quelque exemple de ces Réflexions inftrudtives Se morales , pour met- tre les Lecteurs en état d'en juger par eux-mêmes. Nous choilirons quelques-unes de celles qui concer- nent la Viiion de S. Jean , de la- quelle cet Apôtre parle dans le Chapitre premier de l'Apocalypfe, & qui commence ainfî , verf. 10. Je fus ravi en efprit un jour- de Dimanche , & j'entendis derrière mot une voix fine comme d'un ton- nerre. Notre Auteur fait là-deffus les teflexiois fuivantes. Ce fut au jour du Seigneur que l'efprit de Dieu parla à notre Apô- tre , & qu'il fe fit entendre à lui avec tant de force que la Trompet- te la plus fonore n'auroit pu fe taire entendre plus diftinctement. C'eft encore dans ces grands jours qui fonc les plus fpecialcment confacrés au Seigneur, que l'E'prit de Dieu fe fait entendre au refte des Fidèles, c'eft dans les aflemblées du faint jour de Dimanche, que les Chré- tiens réunis en un même lieu , at- tirent toujours le Seigneur au mi- lieu d'eux ; c'eft-là que fa voix fe fait entendre, c'eft-là que Dieu parle au cœur , que fa parole s'infinue avec tant d'efficace que nous voyons au fortir de nos Temples , des hommes tout changes , qui ne fou- B R E , 1755. S3S pirent plus que pour le Ciel , Si qui banniiïent de leur cœur toute attache à la créature Toutes vos Ecritures , Seigneur , portent ces mêmes caractères, & devroient gagner le cœur de tous les hommes; mais comme ils aiment la terre , & qu'elles leur défendent de s'y atta- cher , leurs pallions combattent ces véritez quelesEcritures renferment, & malgré le caractère de Divinité qu'elles portent , ils fe laiffent en- chanter par les vaines elperances qui les flattent , & par les douceurs que la terre leur prefente. C'eft à vous , ô mon Dieu , à détruire de telles préventions Apres ces paroles qui fontfuivies de quelques autres reflexions que nous paffons pour abréger, l'Auteur vient au i ie verfet : tsilors je me tournai pour voir celui de qui j'entendais la voix , & regardant derrière moi , je vis fept Chandeliers d'or. Voilà le Texte , voci la Refle- xion. L'Apôtre S. Jean fut attentif à la voix qui lui parloit, &furprisdes chofes prodigieufes qu'on lui di- foit, il regarda derrière lui , & vit fept Chandeliers d'or. C'étoit fans doute la figure des fept Evêques qui gouvernoient les feptEglifesd'Aiie. Car qui dit un Evêque , dit l'or le plus fin de l'Eglife par fa pureté ôc fon amour pour Dieu. Il eft le Chandelier qui porte la lumière , & le feu qui embrafe. Il doit à fon Troupeau les inftructions qui éclai- rent leur efprit , Se doit encore plus peifuader pax fes œuvres que 5î<5 JOURNAL D par fes paroles ; la fc. in te ce Je fa vie doit être comme un or épuré qui brille par tout , & les ardeurs de fon zéle doivent embraferles cœurs les moins attachés à leur Dieu. Voilà , Seigneur , les dignes Evê- ques que votre Eglife attend de votre bonté pour la gouverner. Ils doivent être cet or pur qui brille par tout , cette lampe ardente qui éclai- re & qui enflamme ..... Nous en voyons de tels, ô mon Dieu , dans votre Eglife , c'eft une précieufe femenec que nous vous / ES S Ç A V A N S , prions de taire germer ..... Nous laiflonsplufieurs autres ré- flexions de notre Auteur fur le mê- me verfet , & nous nous en tien- drons à celles que nous venons de rapporter Le peu d'exemples que nous avons cités fur l'un & fur l'au- tre nous paroilfcnt furfifans pour le delTein que nous nous fommes pro- pofés , qui eft de faire connoître le Livre que nous annonçons. Ceux qui ont du goût pour la véritable pieté, y trouveront de quoi fc nour- rir. LETTRES PASTORALES DE MONSEIGNEVR l'Evêjue de Londres aux Fidèles de fon Diocêfe , contre les Libertins & les Incrédules , traduites de l'Anglais , far Abraham le Moine, Prêtre de l' Eglife Anglicane & Chapelain du Duc de Portland. A la Haye, chez Gofle & Neaulme. 1732. in-iî. première Lettre, pp. 8z. féconde Lettre, pp. 106. troilîéme Lettre, avec un Appendice aux Lettres Paftorales , pp. 158. ON ne peut jetter les yeux fur l'Ouvrage que nous annon- çons au Public fans déplorer le malheur de ces prétendus Pafteurs qui ne confervant qu'une ombre d'Epifcopat, ne confervent en effet qu'une ombre d'autorité. De - là vient que ces mêmes armes toujours victorieufes de l'erreur dans les mains des Catholiques deviennent foiblcs &: impuiflantes entre les mains des Proteftans. Comme par- mi eux chaque particulier fe croit en état & en droit d'en faire l'é- preuve, ils les brifent dès qu'ils s*apperçoivent qu'elles percent l'er- reur qu'ils foûriennent ; & toujours à couvert fous le bouclier de l'indo- cilité , ils éludent tous les traits qu'on eiTaye de leur porter. Telle eft la fource des mon- ftrueux excès qui inondent l'Angle- terre , & qui ont donné lieu aux Lettres Paftorales dont nous allons donner l'extrait. Quelque aftreufe quefoit la peinture que l'Evêque de Londres fait de ces excès, nous la rapporterons , afin de convaincre de plus en plus les Fidèles du bon- heur qu'il y a de vivre dans le fein d'une Eglife qui peut feule fixer le Dogme & la Morale qu'elle pref- crità fes enfans. Après s'être plaint de ce qu'un vice abominable & prefque incon- nu dans ces Pays Septentrionaux , commençoit à fe répandre en An- gleterre i a le Prélat ajoute que S E P T E M »danî quelques Ouvrages impri- » mes depuis peu , on n'a point » rougi de faire l'apologie des mai- 3» fans de débauche, & de recom- » mander à la protection même des » Magiftrats les vices des particu- j> liers , comme avantageux au Pu- » blic. Que dans d'autres on a fap- » pé les tondemens de toute Reii- »gion, & favorifé l'Achéifrne & » l'incrédulité. Et' ce qui rend , » dit-il , ces Ouvrages encore plus » pernicieux , c'eft que les Auteurs » y cachent leurs véritables deiïeins » fous divers prétextes fpecieux. a» L'un par exemple faifant fem- » blant de combattre ce qu'il appel- » le les ufurpations du Papifme , «pour s'iniinucr par-là dansl'efprit » des Proteftans , a tâché d'abolir a» toute difcipline Ecclefiaftique, &c 2» d'anéantir même jufqu'à l'exiften- » ce d'un Miniftere Chrétien & » d'une Eglife Chrétienne. Un ï* autre affectant un grand zélé pour j>I'œconomie Judaïque , & pour » le fens littéral de l'Ecriture , a «mis tout en œuvre pour fapper » les fondemens du Chriitianifme. a» Untroifiémc fous ombre dedon- » ner aux a&ions & aux Miracles i> de Notre Sauveur un fens plus 3) fublime Se plus fpirituel , n3a rien * n<%''§^ Pour cn anéantir la réa- » lité .... D'autres ont fait paroî-, =»treun grand attachement pour la » Religion Naturelle au préjudice a» de la Religion révélée & *> tous ou prefque tous ces Auteurs, «• fous prétexte de défendre les » droits naturels des hommes , ont s» fait un jeu de la Religion, ont B R E, 1732. SS7 » tourné en ridicule les plus impor- » tantes véritez qu'elle enfeigne 8c » fe font ainfi abandonnés à une li- » cence fi effrénée qu'on n'en avoic "jamais vu de pareille. L'Evêque de Londres nous ap- prend enfuite que ces impietez ont été réfutées par un grand nombre d'Ouvrages également pieux & folides , mais il remarque en même tems que pour la plupart ils font fi étendus & C\ élevés que les gens du monde n'ont pas aûez de knllr ni de lumières pour en proflrer. Ce- pendant comme ce font ces fortes de perfonnes qui ont le plus befoin d'être prémunis contre la fédu&ion il a cru leur devoir donner quel- ques règles courtes & ailées à rete- nir , dans la confiance qu'elles pourroient leur fervir de préfervatif contre le venin de la contagion. Et telles font ces règles. Première Règle: il faut avant tou- tes chojes que vous ayez, un defirfin- cere de Connaître la volonté de Dieu , & une forte refoluiion de vous foû~ mettre à tout ce qui vous paraîtra tel. Mais ces téméraires qui attaquent les dogmes les plus évidens de la Religion , répondront au Prélat Anglican qu'ils ne le font que parce qu'ils ne les regardent pas comme tels. Ainfi la dernière partie de cet- te règle eft auffi fauffe que la pre- mière eft folidement établie fur ces paroles de J. C. Si quelqu'un veut faire la volonté de mon Père , il con- naîtra fi la doïlnne que /'enfeigne vient de Dieu , ou fi je parle de mon chef. Tant que vous ne délirerez- pas de connoître , ajoûtc-t-il , & r,2 JOURNAL D que vous ne ferez pas prêts à mettre en pratique ce que la Religion vous enfeigne, vous ferez toujours dif- pofés à vous taire îlluhon &c à vous tromper vous-même pour marcher au gré de vos padîons criminelles. Seconde Règle : ne négligez, au- cun des moyens que Dieu vous prefen- te pour vous inflruire pleinement de fa volonté. Ces moyens, au juge- ment de l'Auteur , font la leclrure de l'Ecriture Sainte , la prière, la docilité aux inftruiftions des perfon- nes de pieté & de lumières , &C l'é- loignement de tout efptk de curio- sité &c de prefomption. Troifiéme Règle : après vous être étinft affuré de la ftneerué de vos in- tentions , examinez, la conduite & les mœurs de ceux qui tâchent de vous féduire ou de féduire les autres. Comment les efclaves du vice fe- roient-ils tranquilles dans la jouif- fance des objets de leur cupidité , s'ils ne taif -ienc tous leurs efforts pour fe perfuader par de vains rai- fonnemer.s que l'Evangile n'eft pas véritable ? Ne foyez pas furpris non plus , continue-t-il , de les voit empreffés à taire des Profelytes , ils voudroient augmenter leur parti pour fe fauver oc l'infamie dans le grand nombre des vicieux. Tsnel^ pour certain que dr telles gens ne font ennemis de la Religion , que parce que la Religion je déclare ennemie de leurs paffions & de leurs de/ordres. Quatrième Re.'ie : S t- b: entre les mains quelqueLivre furla Religion qui ne foit pas écrit avec ton- te la gravité & le refpeft que deman- de unfujet fi férieux , ne douiez, pat ES 5ÇAVANS, qu'il ne vt:nne d'un efprit gà:é , & qu'il n'ait été compojé dans d:s vîtes prophanes. Il établit cecte règle fut ce principe qu'il n'y a point de fu- jet quelque grave & quelque fubli— me qu'on le (uppofe,qu'un impie ne puille tourner en ridicule; il mon- tre enfuite combien il eft dangereux de lue ces Livres profanes qui font un jeu de la Religion , & qui ofenc prefenter le poilon fous un apas fi criminel , mais en même tems fi propre à féduire. Cinquième Règle : ne vous laif- fez. jamais perfuadsr de renoncer à la révélation fous prétexte de fuivre lu raifon pour guide. Il le prouve pat l'incertitude des lumières qu'on ri- te des plus grands Philofophes fut les règles tondamentales de la mo- tale. Et pat l'incapacité où font la plupart des hommes de comparer les fentimens de ces Philofophes pour choifir entre tous leurs Syftê— mes celui qui eft vrai Si lediftin- guer d'avec celui qui eft faux. Mais quand même cet examen feroit poffiblc , il eft certain qu'il y a plu» fieurs véritez de morale dont la connoi (Tance eft abfolumcnt necef- faire à l'homme pour la pratique de fes devoirs , que la révélation feule nous a découvertes, & que lcsSages duPaganifme ont ignorées ou n'ont connues qu'imparfaitement ; telles font, par exemple , ce qui regarde la nature du culte qu'il faut rendre à la Divinité pour lui être agréable, notre reconciliation avec Dieu , un fecours furnaturel pour nous met-< treen état de faire fa volonté , Cvla certitude d'une autre vie dars la- quelle S E P T E M quelle les bons feront recompenfés Se les méchans punis. Il s'attache outre cela à faire voir que la Religion naturelle que les incrédules oppofent aujourd'hui à la Religion révélée eft bien diffé- rente de celle que les Sages de l'An- tiquité ont découverte parles ieules lumières de la raifom ils foûtenoient que pour acquérir la vertu Se pour fe rendre agréable à Dieu , il falloit dompter Se reprimer les pallions , au lieu que les incrédules de notre tems femblent avoir pour principal but de les fatisfaire, cv que le repro- che ordinaire qu'ils font à l'Evan- gile , c'eft qu'il exige le renonce- ment à foi-même Se met un frein aux cupiditez des hommes. Sixième Règle : ne regardez, pas une vérité comme douteitfe , à caufe qu'il y a des gens qui affeSent d'en douter. Il y a , dit-il, des monftres par rapport à l'efprit , aulli-bien que par rapport au corps, Se ce n'eft pas d'aujourd'hui qu'on a remarqué qu'il n'y a point d'opinion h abfur- de qui n'ait été avancée par quel- que Philofophe. Septième Règle : Quand vous avez, des preuves fuffifœntes qu'une dotTrine vient du Ciel , ne laiffez. pas d'avoir pour elle une foi inébranlable , quoique vous ne puijftez. pas apperce- voir clairement la convenance d? Futilité de chacune de fes parties. Dieu nous a donné la raifon pour nous conduire à la révélation , mais il ne nous a pas donné cette même raifon pour nous ériger en Juge de fa conduite , de fes my frères Se de Vœconomie de la Religion. Entre- Stptmbn. B RE, 1752. 5?£ prendre de le faire , c'eft oublier que nous fouîmes hommes Se nous mettre à la place de Dieu même. Huitième Règle : Ne foujfrez. point qu'on détourne votre attention des preuves les plus claires & les plut dtrstles de la vé'ité du Chnftianifme pour l'arrêter fur d'autres preuves qui quoique bonnes , font moins à la, portée du commun des Chrétiens. L'artifice des Libertins Se des in- crédules eft de glilîer adroitement fur les preuves les plus claires de la Religion, Se de fe jetter fur celles qui le font moins par rapport au commun des hommes , Se parcon- fequent plus fufceptibles de difpu- te. Nous avons , dit-il , pluheurs fortes de preuves qui concourent à démontrer la Religion Chrétien- ne. i°. Les Types : i°. Les Prophé- ties : 30. L'attente générale où l'on étoit du Meffie dans le tems que J. C. vint au monde : 40. Les Mi- racles qu'il a opérés : 50. Les pré- dictions qu'il a faites de fa mort, de fa Refurreclion : Se 6°. La prompte & miraculeufe propagation de l'E- vangile. Mais quoique toutes ces preuves prifes en elles-mêmes foient également fortes , elles ne font pas cependant également à la portée de tout le monde. L'Evêquc de Londres les examine chacune en particulier. Mais il infifte principa- lement fur celles dont le fimple peuple eft capable , & qui ne fup- pofent ni la connoiftance des Lan- gues , ni de la Chronologie , ni des coutumes des Juifs , comme les au- tres preuves qui fe tirent de^ figures Se des Prophéties de l'ancien Tefta- A a a a J40 JOURNAL D mcnr , fur lcfquellcs il eft aifé d'em- barraffer des gens peu inftruits. Il mec enfuire dans un très-beau jour tous les argument qOe le Nouveau Teftamenr, dont il prouve l'infpi- ration , nous prefente fur la vérité delà Religion Chrétienne. Mais comme la morale a une grande influence fur la foi , il pro- pofe pour neuvième Règle d'entre- tenir avec foin dans fan cœur de grands femimens de refpeil & de vé- nération pour les chofes f aimes. C'eft-à-dire , tout ce quia rapport à la Religion , comme la parole de Dieu , fon laine Nom, le jour qu'on d^iic lui confacrer , fa Maifon , fon Culte Se fes Miniftres. Il donne pour dixième & der- nière Règle , de prendre garde fur toutes chofes de tomber dans une efpe- ce d'indifférence par rapport à la Re- ligion. Il finit par des vœux pour le troupeau que le Roi a confié à fes foins. Vœux inutiles , tandis que parmi cesrcgles dont la plupart font très-foiides , Se développées avec force Se avec netteté , il ne fera pas entrer celle de fe foûmettre aveu- glément à une autorité infaillible , qui peut feule fixer le libertinage de l'efprit, èv l'empêcher de fe bif- fer emporter à tout vent de doc- trine. Le titre de la féconde Lettre Pa- ftorale de l'Evêque ck-Londresnous apprend qu'elle a été faite à l'occa- fion de quelques Ouvrages impri- més depuis peu où l'on foûtient que la raifon , fans le fecours de la révé- lation eft un guide fumfant en ma- tière de Religion, Si cette Lettre E S SÇAVANS, eft traduite fur une cinquième Edi- tion. L'Evêque de Londre examine d'abord quel ejl le vrai & le légitime ufage de la raifon par rapport à la révélation. Il foûtient qu'il eft fi faux , comme le Soutiennent les ennemis de la Religion , que pour embraffer la révélation , on foie obligé de renoncer à la raifon , que tous les Chrétiens conviennent au contraire que c'eft à la raifon à examiner la divinité de la révéla- tion ; mais dès qu'elle s'eft une fois affuré de la folidité des preuves fur lefquelles elle eft appuyée , la raifon. s'arrête , non. parce que la révéla- tion nous y fait renoncer , mais, parce que dès ce moment elle prend la révélation pour guide , Se qu'elle ne fe croit pas permis de révoquer en doute la fageffe , Se la conve- nance d'aucunes de fes parties ,. après qu'elte eft perfuadée que le tout émane de Dieu. Il montre enfuite que la raifon eft un guide infuffifant en matière de Religion , il en apporte pour preu- ve les différentes erreurs de la plu- part des anciens Philofophes fur la nature de la Divinité ,-fur l'immor- talité de l'ame, & fur les points de morale les plus effentiels à la prati- que de la vertu. Il infifte avec force fur l'impoiîibilité où étoienteeux d'entr'eux qui s'étoient le moins éloignés de la vérité d'obliger les hommes à fuivre leurs fentimens. Les monftrueufes opinions qu'on a découvertes dans les derniers tems parmi les peuples qui étoient in- connus aux anciens , lui fournif- fent encore des preuves non moins. S E P T E M folides que curieufes fur la foibleffe de la raiion en matière de Religion, d'où l' Auteur conclut que la rêve- lation n'était pas feulement utile , mats qu'elle était même tris-necefiai- re pour nous fervir de guide affuré en matière de Religion. Si les Sages de la terre n'ont pu délivrer le monde de la corruption & de l'ignorance dans laquelle il ctoit plongé , il s'enfuit clairement qu'il falloit une autorité fuperieure à celle de la raifon pour établir la vraye Religion dans le monde , &C cet avantage ne fe trouve que dans la Religion Chrétienne , qui feule a propofé à l'homme des motifs aflez torts pour l'engager à la pra- tique de fes devoirs , & qui lui a découvert en même tems les moyens par lefquels il devoit les pratiquer, fçavoir , une grâce fuma- turelle , qui étant parfaitement libre dans fon principe , il étoit impojfible que les hommes en euffent d'eux-mê- mêmes aucune idée ni aucune ajfu- rance. Les hommes font donc obligés de rechercher , s'il y a une révélât ioti divine , & quelles font les preuves qui démontrent qu'elle vient de Dieu. Il fait voir par pluhcurs raifons , & entr'aimes par la liaifon naturelle qu'il y a entre la vertu & le bon- heur , entre le vice & la mifere , qu'une révélation divine e(t une chofe non feulement très-poffible , mais encore très-probable : d'où il conclut qu'/7 ejidu devoir de tous les hommes de recevoir pour leur guide en matière de Religion toute révéla- tion qui a Dieu pour auteur y & de BRE, 1732. 5-41 la recevoir dans toutes fes parties. L'Auteur palle légèrement fur ce point, parce qu'il l'avoitlolidement établie dans fa premiereLettre.Mais il s'arrête à juftiher les fentimens de plufieurs célèbres Théologiens An- glois du dernier hécle que les incré- dules acufent d'avoir fait peu de cas des dogmes particuliers duChri- ftianifme , & de la neceffité de fe foûmettre à une révélation divine. Voici , félon lui , ce qui a donné quelque fondement à cetre calom- nie; comme pendant l'es troubles caufés par la tadtion des Presbyte- riens fous Cromwel , les Prédica- teurs affedoient non feulement de ne point reprefenter au peuple les grands devoirs de la morale , mais qu'ils avoient même en quelque manière pris à tâche de les dépri- mer , pour perfuader au monde que la foi étoit tout , & que les oeuvres n'étaient rien. Après le retabliffe- mentde Charles II. Se de la famille Royale , les Miniftres de l'Eglife Anglicane fe crurent obligés de montrer la neccfîué des œuvres pour être fauve , & de prêcher Se d'écrire fur l'importance des devoirs moraux ; mais ceux d'entr'eux qui le firent , dit-il , avec le plus de zèle n'eurent pas moins d'attention à expliquer au peuple le grand ouvra- ge de notre Rédemption par J. C. de les autres dogmes de la Religion révélée. Il conjure , en unifiant , ceux qui feroient tentés de quelques pen- lées d'irréligion de s'affurer au moins de la fincerité de leurs ferti- mens fur ces trois points , i°. » S'ils A a a a i; 74* JOURNAL D » (ont pleinement dilpofés à em- «bralTer toutes doctrines cv à lui- » vre toute règle de conduite qui » leur paroît clairement venir de »>Dieu. 2°. S'ils louhaitentde tout » leur cœur qu'une Religion qui ») remédie à la corruption de notre » nature , Se qui promet aux gens n de bien un état de bonheur Se » d'immortalité après cette vie foit »> bien fondée. 30. Et s'ils ne trou- » vent en eux aucune p^lîon ni au- »»cim vice qui les porte à defirer j3 tout le contraire. Si les hommes , r> ajoute - 1- il , avant que d'entrer »dans l'examen de la Religion, » s'interrogeaient eux-mêmes fur s> ces trois articles , il n'y auroit cer- » tainement point à craindre que n l'incrédulité s'emparât de leur » efprit. Mais quelque grand que foit le crime de l'incrédulité , il ne craint pas de dire que la chaleur avec la- quelle certains incrédules travaillent à répandre leurs erreurs eft encore beaucoup plus criminelle , parce que rien n'eft plus contraire au bonheur des hommes dans cette vie même , Se à tous les intérêts de la focietéque l'efprit d'irréligion. Cet endroit mérite d'être lu ; Se en gê- nerai on peut ailurer que cette Let- tre eft très-propre à faire ouvrir les yeux à ceux qui feroient alTez mal- heureux pour avoir des doutes fur la Religion. La troifiéme Lettre de l'Evêque de Londres eft adreffée , comme la précédente , aux Fidèles de fon Diocefc , & particulièrement aux habitans de Londres & de Weft-, ES SCAVANS; minfter. Elle répond aux difficul- tcz des incrédules contre les Ecrits contenus dans le Nouveau Tefta- ment , confinerez, comme une règle que Dieu nous a donnée pour la foi & pour les mœurs. Nous fouhaiterions qu'il nous fût permis de nous étendre davanta- ge fur cette Lettre. Le Prélat An- glican entreprend d'établir i°. »Que » les quatre Evangiles contiennent » une Hiftoire véritable & fidèle de «la Naiffance, de la Vie , de la «Mort, delà Refurre&ion &de »l'AfcenfiondeJ.C. » i°. Que le Svftême entier du nChriftianifme , ou l'œconomie » de 1 Evangile ne fut pas pleine- » ment manireftée au monde par » Jefus - Chrift lui - même pen- »dant le cours de fon Miniftere , »mais qu'il a laiflé plulieurs choies à "annoncer ou à expliquer à fes » Apôtres qu'il inftruiloit , & qu'il «commit d'une façon particulière- » pour s'aquitter de cet emploi. n 30. Comme les Apôtres de- » voient , en vertu de leur Com- » million , non feulement atteftex » Se annoncer au monde les chofes » qu'ils avoient reçues & apprifes » de leur Maître , mais encore dé- » velopper & expliquer toute i'es- n conomic de l'Evangile , ils furent » conftamment dirigés Se alliftés » par le S. Efprit qu'ils reçurent » félon la promeffe de J. C. avant » que de commencer leur Mini- » ftere. » 4°. C'eft de leurs enfeigne- j> mens Se de leurs Ecrits tels qu'ils » nous ont été tranlrrus dans leurs SiPTEMB » Actes & dans leurs E pures , aullî- ♦> bien que des Evangiles , qu'il » faut apprendre quels lont les arti- n cles de loeconomie Evangelique , » qu'ils dévoient manifefter & ex- » pliquer conformément aux in- » ftructions qu'ils avoient reçues de »> J. C. Se fous la direction & l'affi- » (tance du S. Efprit. » 50. Les Livres du Nouveau "Tellament qui contiennent la » doctrine annoncée par J.C. & par »> fes Apôtres ont été fidèlement « tranfmis aux Chrétiens des iiécles m fuivans. » 6°. Lesenfeignemensdes Apô- » très contenus dans leurs Epures , » &z dans les Actes , joints à ceux de a Notre-Seigneur rapportés dansles » Evangiles , ont été deftinés à être »pour les Chrétiens de tous les » tems une règle invariable de foi » £v de conduite , &c turent des les » commencemens regardés & reçus » comme tels par les tglifes. Le Prélat Anglican entre dans un grand détail fur tous ces points , & y fait paroître un grand tonds d'érudition & de crinque. Mais les bornes de cet extrait ne nous per- mettant pas de le fuivre 3 nous nous contenterons de remarquer que par rapport à l'autenticité des Epîrres des Apôtres ; la raifon , félon lui , pour laquelle il y en eut quelques- unes qui ne furent pas d'ibord re- çues aullî-tôt que les autres par tou- tes les Eglifes , c'eft qu'elles étoient écrites ou à des particuliers comme la féconde & la troifïéme de Saint Jean , ou aux Chrétiens difperfés en divers Pays , comme la féconde R E , i 7 5 2. J45 de S. Pierre & celle de S. Jacques , ou aux Chrétiens en gênerai , com- me celle de S. Jude. Et comme la certitude que les Egliles particuliè- res pouvoient avoir de l'autenticité de ces Epîrres dépendoit de la vue des Originaux , du témoignage de ceux qui en avoient été les Porteurs ou à qui elles étoient écrites , on voit tout d'un coup que cet examen étoit beaucoup plus facile lorfqu'on fçivoit à quelles Eglifes ces Epîtres étoient adtellées , qu'il devenoit au contraire plus difficile , ôc qu'il demandoit plus de tems lorfqu'on ne pouvoit le taire fans confulter en gênerai toutes les Egliles qui fe trou voient répandues dans l'Empire Romain. Ainlî bien loin, dit-il, que la difficulté que firent d'abord certaines Eglifes de compter les Epures dont nous venons de parler parmi les Livres Canoniques, puif-» fe artoiblir l'autorité des autres, rien au contraire ne montre mieux avec quelles précautions ils ont été admis dans le Canon des divines Ecritu- res,cx.'l'univerlalité avec laquelle ces Epîtres furent reçues dans la fuite , eft une preuve qu'elles avoienc aquis à cet égard toute l'autorité poffible. C'eft ce qu'il fait voir de l'Apocalypfe5 &C en particulier de chaque Epître de l'Ecriture , donc l'autenticité a d'abord été conteftée» On voit par-là , dit-il, avec quelle injuftice des perfonnes qui n'étoient pas d'ailleurs mal intentionnées pour le Chriftianifme , ont préten- du que tous les Livres du Nouveau Teftament font devenus autenti- ques tout à la fois par un acte fo- 5-44 JOURNAL DE lemnel de l'Eglifc qui en auroic fait une Règle ou un Canon pour tous les Chrétiens. Cela eft fi peu yrai , ajoûte-t-il , que chaque Livre en particulier fut d'abord reçu par certaines Eglifes particulières , plu- tôt ou plus tard i félon les tems où il avoit été écrit , & les différentes occaiions que ces Eglifes avoient de leconnoître, vu la différente di- fhnee des Villes Se des Pays , ôc le plus ouïe moins de corrcfpondance qu'il y avoit entr'eux. La Règle qu'elles fuivoient pour recevoir ces Livres particuliers , n'étoit autre que la certitude qu'elles avoient qu'ils étoient écrits par des perfon- nes divinement infpirées , & c'elt fur ce fondement qu'elles établif- foient l'autorité de chaque Livre , après une recherche exadte qui ne laifloit plus lieu aux doutes. Et lorfque par degrés chaque Eglife particulière fut alTurée que tous les Livres du Nouveau Teftament avoient été écrits par des perfonnes divinement infpirées , elles en firent toutes leurs déclarations publiques dans des Conciles afTemblés par oc- cafion pour régler les affaires géné- rales de l'Eglife. » Ces Livres ne furent donc pas » jugés autenriques en vertu de ces » déclarations ; mais ces déclara- » tions furent faites parce que ces j> Livres étoient autemiques , l'E- » glife n'etant confiderce que coiti- » me un témoin qui dépofoit que » ces Livres avoient été écrits par » les perfonnes dont ils portoient les » noms , à qui ils font attribués , & n de i'mfpiration defquels ils tirent S SÇAVANS, » leur autorité. On nous donne enfuite deux Lettres Paltorales de l'Evêque de Londres. La première eft adreffec aux Chefs de famille dans les Colo- nies Angloifesde l'Amérique , & Il féconde aux Millionnaires qui tra- vaillent dans ces mêmes lieux. Ces Lettres roulent fur la neceffité d'in- ftruire les Nègres dans la foi. Elles font précédées d'une exhortation à tous les véritables Chrétiens d'An- gleterre , pour les engager à aider de leurs liberalitez & de leurs au- mônes la Société établie pour la propagation de l'Evangile dans les Plantations Angloifes. On y voit que jufqu'à prefent on a pris peu de foin d'inftruire les Nè- gres des Véritez de la Religion , faute de fonds neceffaires pour en- tretenir des Catéchiftes , ou même parce que les Chefs de famille fe perfuadent qu'il n'eft pas de leur intérêt de travailler à la converfion de leurs Nègres. L'Evêque de Lon- dres n'oublie rien pour les engager à lever un fi arand opprobre de dejfus le nom Prote fiant , &C rend cette ju- fticeaux Catholiques Romains que non feulement les habitans de leurs Plantations en Amérique , mais encore ceux des divers Etats de l'Europe de qui ces Plantations re- lèvent , fe font tous fignalés dans l'attention qu'exige cette œuvre de pieté. Quelques folides que foient la plupart des raifonnemens qui fonc renfermés dans les difterens Ecrits dont nous venons de rendre comp- te , on ne s'étonnera pas qu'ils SEPTEMBRE, 1752: S4Ï ayent fi peu de fuccès ; mais il eft perçans , lorfqu'il n'eft pas que- éronnant que ce peu de fuccès ne ftion de connoître cette Eglife qui faffe pas enfin ouvrit les yeux à eft feule la Colonne de la Foi & de des gens qui les ont d'ailleurs fi la Vérité. LES METAMORPHOSES D'OriDE , TRADUITES EN François , avec des Remarques & des Explications Hifloriques : par M+ l Abbé B A n 1 e r , de l'Académie Royale des Infcriptions & Belles-Let- tres. Ouvrage enrichi de figures en tailie-douce. A Amfterdam, chez R.» Se J. Wctftein , 6c G. Smith. 1732. in -folio , 2. vol. Tom. I. & II. pag. in-iz. 3. vol. To. I. pag. 384. To. II. pag. 318. To. III. pag. 276'. fans la Prérace Se les Tables. Fig. détachées 16. QUEL QU E intereffans que foient en gênerai tous les Ou- vrages d'Ovide , on peut dire que fon Poème des Métamorphofes eft celui de tous qui a piqué le plus vi- vement la curiolité du Public. Cha- que Nation a voulu s'en rendre la lecture aulfi familière qu'il étoit poflible, Se ce motif l'a fait tradui- re , foit en vers, foit en profe^dans prefque toutes les Langues de l'Eu- rope. Les François fe font fignalés fur tous les autres en es genre ; Se les verfions des Métamorphofes fe font multipliées chez eux à l'excès» Clément Marot eft un des plus an- ciens qui ait tenté de les traduire en vers, mais il ne fit qu'entamer l'Ouvrage & fe borna aux deux pre- miers Livres, aufquels dans la fuite un Poète contemporain nommé Barthelemi Aneau joignit le troi- fiéme. Long-tems après lui , c'eft- à-dire en \66%. Charles Coypeatt plus connu fous le nom de D'ajfou- ey , en mit une très-petite partie en vers burlefques , fous le titre d'Ovi- de en belle-humeur , Se fix ans aupa- ravant L. Rieher en avoit travefti dans le même genre de vers les cinq premiers Livres fous le titre d'Ovi- de Bouffon. Benfferade de l'Acadé- mie Françoife traduiht en Ron- deaux le Poëme entier en \6-j6-. En. 1700. Thomas Corneille, auifi dç l'Académie, Se qui 20 ans aupara- vant , avoit publié en vers François les fix premiers Livres des Méta- morphofes, en donna une traduc- tion complette, enrichie de figures, en trois Volumes in-n. Les ver- fions en profe ont été pour le moins aulfi nombreufes. Nous avons celles de Renoùard Se de du Ryer , toutes deux in- folio , avec des figures ; celles de Mamgnac Se de l'Abbé de Bellegarde , in-i 2. Malgré ce grand nombre de traductions , on ne connoît encore qu'affez imparfaitement en Fran- çois les Métamorphofes d'Ovide,, foit pour le fens , foie pour l'cx- preffion. Souvent les Traducteurs faute d'attention ou d'un Texte La- tin allez correct , ont mal pris la penfée du Poè'te, Se par confequent l'ont mal rendue en notre langue , ou ne l'ont rendue* qu'à demi. Sou- S±6 JOURNAL DE vent ils lui ont prêté leurs propres idées , ou bien quelque intérieures qu'elles ruflent aux tiennes pour l'agrément & le beau naturel , ils les leur ont fubftituées fans ferupu- le. A l'égard du ityle de ces ver- fions i il rie donne pas moins de prife à la (aine critique. Combien n'offre-t-il point de Paraphrafcs languiflantes , d'exprclîlons furan- nées , de tours vicieux , d'images peu décentes en François ? Quelles inégalitez ne fait-il point fentir , s'élevant quelquefois tout d'un coup jufqu'à l'empoullé, pour tomber un moment après dans le médiocre &: même dans le bas f Les Méta- morphofes avoient donc grand be- foin d'un nouveau Traducteur François, qui fût également en gar- de contre tous ces éçueils, Si qui eût les talens neceflaires pour s'en garantir. M- l'Abbé Banier, connu dans la Republique des Lettres par di- vers Ouvrages , qui lui ont tait honneur , sVft donc chargé du foin de faire parler Ovide en François aulfi purement Se auilî intelligible- ment, que le méritoit ce Poète iï digne d'y être bien entendu. Il lui falloit pour cela , non feulement une verhon contormeà fon Texte, mais des Remarques propres à mettre dans un plein jour ce que fa narration pouvoir avoir d'obfcur , foit par rapport à la Fable, qui en fait le capital , foit par rapport aux mœurs e«faux coutumes anciennes. Petfonne n'étoit plus capable de lui fournir l'un Se l'autre fecours , que M. l'Abbé Banier. Sur tout S SÇAVANS, pour ce qui concerne le fécond où l'explication de la Fable, il y a ong- tems qu'il a fait fes preuves. Quant au premier, il avoue modeft cment* que ne s'étant jamais occupé à tra- duire , il s'ctoir déterminé avec ré- pugnance à débuter en ce genre par un Ouvrage auilî épineux cv d'une aulfi longue d.fcullion que celui-ci: Se que pour l'encouriger à une en- treprife qu'il jugeoit au-deflus de fes forces , les avis fages & judi- cieux d'un ami auffi diltingué par fon goût Se fa politetfe que par la jufteire de fon efprit , fa fagacité Se fon érudition, a voient été d'un grand poids. Il eut même [ ajoûte-t-il ] la vanité de croire qu'il réuiTîroit par la raifon que cetami le crut propre à réutfir. ( C'eft de M. de Boz.e , Se- crétaire perpétuel de l'Académie des Belles-Lettres,qu'il veut parler.) Le fuects a juflific le pronolric. M. l'Abbé Banier pouvoir marcher fans crainte , fur la parole d'un tel garant ; Se il peut fe flatter qu'un coup d'eiîai comme celui-ci vaul un coup de maître. Cette carrière qu'il a fi digne- ment fournie n'étoit pas exempte de ditficultez , fur tout par rapport àlaverdon. Il nous les expofeen détail dans «ne élégante Prérace, Se nous informe en même tems des règles qu'il s'eft preferites pour les furmonter. Les ditficultez de la tradu&ion naitfoient en partie des beautez de l'original , Se en partie de fes défauts. Il étoit mal aifé de bien rendre les unes, Se prefque impoffible de faire paffer les autres. Les premières coniiirent dans l'arc merveilleux S E P T E M merveilleux avec lequel Ovide a raffemblé dans un Poème fuivi tous les fujers de Mccamorphofes imagi- nés par les Grecs & par les Latins , évenemens fabuleux dont tout l'U- nivers devenoit la Scène , & dont la durée égaloit tous les iiécles écoulés depuis la nailTancc du mon- de. » Que de traits ( dit le Traduc- » teur ) que de couleurs différentes »»ne falloit-il pas avoir ramaffées » pour tant de tableaux ! Ccpen- » dant il les a tous finis , ces ra- vi bleaux , & à la fin de l'Ouvrage » fon pinceau n'eft point affaibli. Il » a plus fait encore ; dans des Fa- » blés qui fe reffemblent il a fil omettre les nuances délicates, qui » les diftinguentles unes des autres. «Aglaure niétamorphofée en ro- » cher , eft différente d'Anaxarette » qui éprouve le même change- ra ment. Les Héliadcs qui devien- i» nent des Peupliers , ne reffem- >>blent ni àDaphné , ni à Driope, » qui font auffi changées en arbres. u Aréthufe & Cyané métamor- y» phofées l'une 5c l'autre en fontai- » nés , n'ont rien de commun , mê- »> me dans le détail de leur change- ra ment. Ce font toujours de nou- » velles images , des beautez fingu- » lieres. Uni dans les narrations s> [ continue M. l'Abbé Banier ] pa- ra thétique , tendre & touchant i> dans les monologues, élevé dans «les harangues , Ovide fait faire m paffer imperceptiblement le Lec- »> teur d'une Fable à une autre , par » desliaifons fouvent fort ingénieu- » fes. Il a fu même dans une ma- i» tiere obfcure , garder une efpece Septembre. B R E, 1752. 74.7 » d'ordre chronologique, &c. A l'expoiition de ces beautez fi difficiles à taire bien fentir dans une veriion , fuccede le dénombrement des défauts du Poète Latin j & le Traducteur efpere que la franchife avec laquelle il va les découvrir rendra moins fufpectes les louanges qu'il vient de lui donner. Ecoutons encore M. Banier lui-même fur cec article. » Ovide avoit (dit-il ) un » génie extrêmement fécond , Se » les expierions les plus heureufes wfembloient venir d'eites-mêmes fc »> placer dans les endroits les plus » difficiles à exprimer. Mais cecte » fécondité même eft devenue un » défaut chez lui ; il n'a pas fu la «ménager, &c s'eft trop livré aux » faillies de fon imagination. Ai- » mant à épuifer fes fujets, il ne » croyoit jamais en avoir allez dit. » Eloigné de cette fage retenue qui nlaiffe toujours quelque chemina » faire aux Lccîeurs, Ovide, pour » vouloir avoir trop d'efprit , leur »> ôte le plai/ir d'en avoir eux-mê- » mes ; trop diffus , il feroit fâché »• d'oublier la moindre circonftance. » On peut ajouter encore qu'il » joue trop fouvent fur les mots , » qu'il court après les pointes , « Se c'eft de quoi le Traducteur produit plufieurs exemples : qu'il n'évite point afTez les répétitions des mê- mes termes , dont apparemment on étoit moins choqué dans fa langue qu'on ne l'eft dans la nôtre : qu'en décrivant le changement d'une perfonne foit en arbre , foit en fon- taine, il defeend dans des détails apatomiques , qui ne peuvent Bbbb S\% JOURNAL D manquer de devenir ennuyeux en François : que les amours des Dieux Se des hommes , qui four le princi- pal fujet d.s Métamorphofes , y (ont peinrs par des traies trop vifs , Se trop licentieux , & que c'eft feu- lement dans ces endroits - là que le Po'éte ( dit M. Banier ) ne donne que tfop à penfer. Enfin une dernière difficulté , 6v qui lui paroilïbitpref- que infurmontable , croit celle de rendre en profe un Ouvrage en vers , fans qu'il y perdît trop , non feulement du côté de la. cadence Se de l'harmonie, mais encore du côté des autres ornemens Poétiques, tels que les images , les métaphores» les comparaifons. Il favoit que ces fi- gures devenoient fouvent languif- fantes dans notre profe, &: que la mefure'harmonieufe Se cadencée de la poëfie n'étoit compenfée que foi- blernent par l'élégance du llyle Se par la richefle de l'expreifion, Au milieu de tant de dirficultez, le Traducteur a cru que pour s'en débarralTer la règle la meilleure Se la plus fure étoit de s'attacher à l'efprit de l'Auteur que l'on traduit, plutôt qu'à fes paroles , de rendre exactement fes penfées , fans négli- ger de faire fentir fa délicateffe Se fon élégance. » Moins occupé [ dit » M. l'Abbé Banier ] à rendre le « nombre que la valeur des mots^ » l'Interprète doit favoir à propos » s'éloigner également d'une cen- a>trainte fervile , Se d'une liberté «> excelTîve ; tenir le jufte milieu 35 entre une timidité judicieufe Se '» une heureufe hardielTe,fe fouftrai» 35 re à la tyrannie de la lettre 3 fe ES SÇAVANS, " rendre maître des fins , Si fe foû- » mettre aux tours de fa Langue..... » Il faut connoître à fond le génie »dc l'Auteur que Ion traduit, fe » transformer en lui le plus qu'il » eft polîïble , Se fi notre Langue ne )5 peut fournir toutes les beautez de » l'original , il faut prendre un ef- » for généreux , Sz payer en cqui- » valens ; fur tout , lorfqu'on tra- » duit un Poé'tc. « En un mot, tout fe reduiroit ( dit le Traducteur ) à faire parler en notre Langue l'Au- teur qu'on traduit ., comme il y au- roit parlé lui-même. Mais avec quelle finefie d'exprefîlon , quel, tour vif Se ingénieux ne s'en fe- roient point acquias des Ecrivains tels que Virgile , Horace, Ovide f Se propofer un tel point de vue en les traduifanr , c'eit ( conclud M. l'Abbe Banier ) de quoi faire trem- bler le plus hardi Traducteur. Il a eu pourtant le courage de fe le pro- pofer, ce point de vue : & fi l'exé- cution n'a pas répondu par tout fé- lon fes fouhaits , à. l'idée de perfec- tion qu'il avoit fans celle devant les yeux , le Public doit lui tenir grand compte du travail pénible par lequel , en confervant prefque tous les agrémens à fon original , il a fu faire difparoître certains dé- fauts qui ne taifoient pas honneur au Poète. Au furplus , de meilleure foi que les Traducteurs precedens , qui pour ne pas rifquer un parallèle trop humiliant pour eux , ont eu foin d'écarter de leurs vcrlions le Texte de l'Auteur , M. l'Abbé Ba- nier s'eil fait un devoir de le faire S E P T E M imprimer à côté de la iîenne( dans l'Edition in-folio ) pour mettre fes Lecteurs plus à portée de décider , s'il a rendu fidèlement Ovide. Il a fuivi pour l'impreflîoiî de ce Texte Latin l'Edition de M. Barman , comme la plus parfaite : év il avoue fur fon expérience , que les correc- tions de cetEditeur en développant le plus fouvent d'une manière claire & précife le vrai fens d'Ovide , font d'un grand fecours pour un Tradudeur.il a cru pourtant devoir en certains endroits , préférer l'an- cienne leçon à la nouvelle ; cV il en avertit dans fes Remarques. Pour donner comme un avant - goût du mérite de cette Traduction nous ne pouvons nous difpenfer d'en tranferire ici quelques morceaux des plus interelTans. Nous commencerons par la Fa- ble de Niobé changée en rocher , ( Liv. 6. Fable 5. ) & nous pren- drons cette PriuceiTe dans le mo- ment qu'on lui annonce la trille nouvelle de la mort de fes fept fils tués par Apollon, c\' de celle d'Am- phion fon époux. Voici comme Ovide peint alors cette orgueilleufe Princeiïe. » O ! que Niobé , dans » ce trifte état étoit différente de »» cette hère Niobé , qui traînée fur »un fuperbe Char , alloit arracher » le Peuple des Autels & des Tern- it pies de L atone ! Son fort étoit » alors envié de tout le monde ; » maintenant elle fait compaiTion »» à fes ennemis même. Elle s'ap- » proche de fes enrans , elle les «> embraffe ; levant enfuite les bras » & les yeux Yeis le Ciel : tepaîs-toi B R E, T732; 5-43 »de ma douleur, cruelle Latonc » diloit-elle ; goûte le barbare plai- » fit de me voir accablée de dou-< »leur &c de defefpoir : ton lâche ncœur doit enfin être raflafié. Je » fuccombe fous le poids de mon » affliction , &c tu peux te glorifier »d'un triomphe complet. Mais je » me trompe, ilnel'elt point en- »core : dans le malheur le plus af- » freux qui puilîe arriver à une me- ure, il me relie encore plus d'en- » fans qu'à toi , qui te vantes tant » d'être heureufe. Après en avoir » perdu fept , je remporte er.core » fur toi par le nombre de ceux qui »me relient. A peine avoir- elle » achevé de parier , que l'on enten- » dit le bruit que hit un arc , lorf- » qu'il lance une flèche. Toute l'af- n femblée en fut troublée ; la feule m Niobé que fes defaftres avoienû » rendue encore plus audacieufe , >» n'en fut point émue. Pendant que >» fes filles en habits de deuil Se les » cheveux épars, pleuroient auprès » des lits funèbres, où étoient les "jeunes Princes , l'une d'elles fc »• fentit blefler au fein d'un coup de » flèche , & tomba morte fur le » corps d'un de fes frères. Une au» » tre confoloit fa mère , lorfqu'elle » perdit tout d'un coup l'ufage de » la parole & la vie , fans qu'on » eût vu le trait qui l'a» oit frappée; » cv ne ferma la bouche que dans wl'inflant qu'elle expira : l'une y tombe en fuyant s l'autre meurt » fur le corps de fa fœur ; celle-ci » cherche vainement à fe cacher : »» celle-là paroît interdite & trem- »» blantc. Il v en avoir éja fix de B b b b ij Sso JOURNAL D » mortes , toutes d'une manière « différente ; & il n'en rcltoit i)Uis m qu'une que fa mère convroit de *> fon corps & avec fes habits. Laif- « fe-m'en une du moins , dit-elle à « Latone ; de tant de filles je ne »> t'en demande qu'une , ex c'eft la » plus jeune de toutes que je te de- •> mande. Mais tandis qu'elle hifoit ucette prière, elle la vit expirer «entre fes bras, &c. La plainte de Philoméle » après l'outrage qu'elle reçut de Teréefon beau-frere, eft remplie de tout le pathétique le plus convenable en pareille occafîon. Voici comme la fait parler , d'après Ovide , M. l'Abbé Banier , ( Liv. 6. Fable j. ) « Barbare , s'écria-t-elle, en levant «les mains au Ciel , que viens- tu » de faire ? Quel exécrable crime » as-tu commis , cruel ? Quoi ni les » larmes de mon père, ni les prie- » res , ni l'intérêt de ma feeur , ni m les refpe&ables droits du maria- »>ge , ni l'innocence d'une fille qui « c'étoit confiée , rien n'a pu te tou- «cher, t'émouvoir? Tu as violé , «inhumain, tout ce qu'il y a de » plus facré dans le monde. Mal- aa heureufe que je fuis , me voilà » donc la rivale de l'infortunée Pro- » gné , & toi , tu te trouves le ma- »> ridesdcuxfceurs. Hélas ! je n'a- »vois pas mérité un traitement û « cruel. Pourquoi lai!fes-tu ton cri- ât me imparfait , perfide ? Que ne » m'ôtes-tu cette vie , que tu viens «de me rendre infuportablc ; ou » plutôt que ne me l'as-tu arrachée, « avant que de commettre ce crime » detcitable 2 Du moins , j'aurais ES SÇAVANS, » eu la confolation de defeendre in- «nocente dans les Enfers. Ah 1 fi » lcsDrcux ont vu une action li noi- » re ; s'il cil: encore des Dieux ; fi « tout n'efl pas anéanti avec mon » honneur , ne crois pas échaperà «leur vengeance ni à la mienne. «J'irai moi-même publier ton cri- «me, fi je me vois jamais en li- « berté , la pudeur ne m'empêchera » pas de le divulguer \ toute la ter- » re l'apprendra par ma bouche ; &C » iî je demeure enfermée au milieu » de ce bois , je ferai retentir les » arbres & les rochers de mes cris « & de mes plaintes» Du moins le »Ciel Se les Dieux, s'il en eft quel- » qu'un qui l'habite, m'entendront » & me vengeront. Nous rapporterons encore le Monologue touchant , par lequel Myrrhacombat l'amour inceftueux qu'elle a conçu pour fon propre pè- re. Voici comme elle s'en explique ici , par l'organe de notre Traduc- teur ( Liv. io. Fable io. ) Le Poète nous expofe d'abord en ces termes la fituation de cette fille. » Malheureufe Myrrha , dit - il , »s une brillante jeunefle cherchoit à «te plaire; tout l'Orient difputoit » la conquête de ton cœur. Il falloir « choifir un époux parmi tant d'a- » mans > & excepter de tous les » hommes celui qu'il n'étoit pas w permis d'aimer. Hélas îl'infortu- « née fille de Cinyras ne connoît » que trop combien fes fentimens *»font criminels, & elle n'oublie » rien pour les combattre. Quelle « fureur me rranfporte , dit-elle s m que prétens-je faire i O Dieu ! O S E P T E M » refped facré , qui êces dû à un « père , oppofez-vous à un fi grand » crime. Ne permettez pas qu'il » s'accompliffe : fi toutefois c'eft un «crime que d'aimer ion père. La » nature ne femble-t-elle pas auto- » rifer cette tendrefle pour ceux qui »» nous ont donné le jour ? Les ani- » mauxjesoifeaux ne reconnoiflenc m point les loix qui défendent ces »fentimens3 & jamais les liens du » fang ne furent un obftacle à leurs » amours. Heureux de n'être point n aiîujettis à ces devoirs rigoureux , j> qui gênent les hommes ! Faut-il » qu'une barbare loi s'oppofe aux « penchans qu'infpire la nature î j' On dit cependant qu'il eft des "Peuples , chez qui la mère époufe » le fils , & le père fa propre fille , u pour augmenter par ces nouveaux » liens ceux que le fang a formés. j> Que ne fuis-je nd-e pumi ces Na- » tions ! Le lieu de ma naiflance 3° fait feul mon crime & mon mal- wheur. Infortunée, pourquoi rou- » 1er ainfi dans ton efprit des exem- » pies fi odieux ? Efperances crimi- » nelles , ceiTez enfin de me flatter. m Cinyras eft digne d'être aimé ; =• mais je ne dois l'aimer quecom- » me un père. S'il ne l'étoit pas , il » me feroît permis d'avoir pour lui » d'autres fentimens. Hélas ! le » fang m'unit trop étroitement à » lui. Ce lien eft le feul obftacle qui » s'oppofe à mon bonheur. Etrange- » re , je pourrois efpercr d'être 3> heureufe. Pour ne pas tomber m dans un abîme affreux , je de- » vrois éviter fa prefence , &mc » bannir pour jamais de ma Patrie. B R E , î 732. 5-5 * » Mais un penchant funefte m'ar- » rête. Puifqu'il ne m'eft pas per- » mis de pofteder Cinyras , j'aime » du moins à le voir , à lui parler » à le careffer. Malheureufe , ofe- >» rois-tu poulTcr tes defirs au-delà »de ces innocentes carelles î Tu » veux donc violer les droits les » plus facrés de la nature , devenir » la rivale de tamerc , la concubi- » ne de ton père , la fœur d'un fils » inceftueux , &c la mère de ton » frère? Tu ne redoutes donc poinC «les implacables Furies , qui la » torche à la main & les cheveux «heriflés de ferpens, épouvantent » fans ceife les criminels ? Ah ! » puifque tu n'es point encore cou- » pable d'un crime fi deteftable , »que ton cœur n'en fou point fouil- »ic3 6c ne fais point rougir la natu- » re qui s'oppofe à un ii grand for- «fait. Enfin , quand même ton » peret'écouteroit , ta paffion trou- » veroit toujours en elle-même fa » propre condamnation. D'ailleurs, » Cinyras a trop de vertu , & il » refpecfte trop les loix de la natu- »re. Ah ! que n'eft-il brûlé des «mêmes feux que moi ! Ces trois morceaux fuffiront pour faire juger combien cette verfion approche de l'original , & à quelle euftance M. l'Abbé Banier laide derrière lui tous les Traducteurs François des Métamorphofes. On s'imagine bien que le Tra- ducteur , qui a confacré fes princi- pales études à l'explication des Fa- bles, ne laiffe point dénuées d'un fecours (1 utile celles qu'Ovide nous étale dans fon Poème. Ces explica- j;* JOURNAL D tions peuvent être de plulieurs ef- peces , fuivant les divers fens que prefenrent ces mêmes Fables, Se lui- vanc le tour du génie de ceux qui travaillent à les développer. D'où il eft arrivé qu'à la faveur de l'obf- curité répandue par les Poètes fur ces fictions plus ou moins ingénieu- fes , on y a découvert tout ce qu'on afouhaité; Se les allégories phyfi- ques , morales , même jufqu'aux chimiques Cv aux médicinales, ont ouvert un vaux champ aux imagi- nations des Interprètes. Ce n'eft point de ces fortes d'explications que fe charge ici M. l'Abbé Banier, Si. il cède volontiers à fes Lecteurs ( dit-il ) le plaifir d'en faire tous les frais par des reflexions qui s'offrent allez naturellement- Pour lui , accoutumé depuis long-tems à ne chercher dans les Fables que les évenemens hiftori- ques du monde naiflant, il n'y voit autre chofe que les actions des an- ciens Héros , fur lefquellcs les Poè- tes ont jette tout le merveilleux que leur a fourni un art fi fertile en fic- tions & en ornemens. Il ne prétend point extraire du fonds de la My- thologie, tous les fecrets des Scien- ces & des arts , comme ont voulu faire les Allégoriftes. Il fe borne uniquement à ramener cette My- thologie aux faits purement hiftori- ques , d'où elle tire fa première origine ; Cv il s'eft refervé fur ce point la fatigue des difeuffions labo- rieufes , qu'il eft bien aife [ dit-il ] d'épargner au public , lequel , félon toute apparence , n'en lera point jaloux. Le plus grand travail de ES SÇAVANS, l'Auteur pour ce regard , a été d'à-* breger ou de perfectionner par de nouvelles recherches , Se par plu- heurs découvertes que lui ont com- muniquées [ dit-il ] fes illuftres Con- frères , ce qu'il avoit déjà public fur cette matière , foit dans fon Explication des Fables , foit dant plulieurs Dillertations Académi- ques. Comme un Ouvrage tel que celui-ci deftiné à toutes fortes de Lecteurs , n'eft point fufceptiblc d'une érudition trop épineufe Se trop approfondie , M- l'Abbé Ba- nier renvoyé par des citations, pour un plus grand détail , aux Auteurs qui en ont traité avec plus d'étendue. Quant à l'origine des Fables , il en donne, au commencement de fa Préface , une idée générale , qui doit fervir de Préliminaire ou d'In- troduction aux explications particu» lieres qui fontdiftnbuées dans tout l'Ouvrage. Il reconnoît donc diffé- rentes fources d'où dérive toute la Mythologie tamGreque queLatine. La première , félon lui, eft la com- munication que Dieu voulut bien avoir avec les Patriarches , d'où naquit ce mélange continuel de* Dieux Se des hommes dans les Fa- bles du Paganifme ; 20. Le culte rendu aux Aftres , aux Elemens ,' aux Fleuves , aux Montagnes , en un mot , à toute la nature; 30. Les Grands Hommes Se fur tout les Conquerans déifiés; 40. L'infidélité de la Mémoire à conferver la vérité des faits-, au défaut de l'Ecriture ; 5*. Les louanges hyperboliques données aux merts par des Orateurs trop perf uaflfs ; 6". La crédulité des SEPTEMBRE, 1752; j;3 Voyageurs , dont les faufles Rela- 3 Jo. ans avant J. C. Anticlide > Si- tions en impofoiént à leurs Com- patriotes : 7°. Les fantaifits des Peintres prifcs pour des féalitez : 8°. Une Philofophie grofïîere qui fondée fur le (eul rapport des fcns , animoittous les êtres : 90. Des ter- mes étrangers que leur lignification équivoque faifoit prendre dans le fens qui offroit du merveilleux : io°. Le defîr de mettre des Dieux dans fa généalogie : 1 1°. Des Prê- tres interelTés à rendre leurs cérémo- nies plus lucratives & plus refpecla- bles par le mélange des Fables r 12°. Des Poètes, furtoutlcs Dra- matiques & les Epiques , juftifiés dans leurs fictions & regardés com- me des modèles dont on ne devoit point s'écarter 3 pour réulîîr , &c* De tant de fources fécondes for- tirent une infinité de fables qui per- pétuées par tradition ou con(ervées dans des Ouvrages fugitifs tels que des Eloges funèbres , ou des Epi - thalames , s'introduifirent dans les Archives des Temples , clans les Annales du monde , dansleSyftê- me de la Morale comme dans celui de la Religion, formèrent des corps d'Hiftoire & de Théologie ; tels qu'on les voit fur tout dans Héfio- de , dans Homère , & dans les Poè- tes Tragiques , qui les adoptèrent. G'eft-là ( dit l'Auteur) qu'ont pui- fé dans la fuite tous les Compilateurs de Fables appellées Mythologues 3 tels que Nicandre de Colophon dans fes Changement ou Mètamor- phofes publiées vers lai fio.Olympia- de ; Héraclide de Pont , dans fes 'Allégories <% Homère , mifes au joui lene de Chio , Phylarque, dans fdn Abrégé Afythologiquè, compofé 1 50. ans avant l'Ere Chrétienne ; Théodore & Antoninus - Liberalis dans leurs Métamorphofes 3 Apollo- dore dans fa Bibliothèque , &c. C'eft de la plupart dé ces Re- cueils qu'Ovide a tiré les fujets de fes Métamorphofès , partagés en XV. Livres , &où font raiîemblées 7.06. Fables. M. l'Abbé Banier n'en lailfe aucune fans y joindre une ex-- plication , & cette explication eft prefque toujours hiftorique , à moins qus la Fable dont il s'agit ne foit manifeitement de l'invention du Poète [ ce qui eft affez rare 1 au- quel cas l'Auteur fournit des règles générales fuivant lefqucrlles ces for- tes de Fables doivent s'expliquer, & ces règles font comme la clef de ce qu'on appelle la Mythologie des Dieux , de leurs amours & de leurs enfans. Nous fouhaiterions faire connoî- tre ici plus particulièrement toutes ces explications hiftoriques des Fa- bles, lefquelles font très-dignes de la curiofité du Lecteur. Mais il faut neceffairement nous borner à la fimple indication des principales s qui font , celle du cahos & de la formation du monde ; ( Liv, i„ Fable 1. ) celle des Géans ( Liv. 1. Fable 5. ) celle du Déluge ; ( L. 1, P. 8.) celle de l'enlèvement d'Eu- rope ; ( L. 1. F. 14. ) celle de Cad- mus & de fa pofterité , [ L. 3. F. 1. & 2. ] celle d'Acleonj[ L. 3. F. 3.] celle de Penthée -, ( L. 4. F. 8. 9. & 10, ) celle de Perfée ; [ L.4. F, 16 , 554 JOURNAL DE 17. 18. 1?. L. 5. F. 1. ] celle de l'enlcvemenc rie Profcrpine ; [ £.5. F. 6. & 7. J celle de Cérès cher- chant fi fille; ( L. 5.F.8.er 9.) celle des entans de Niobé ; [ L. 6. F. 5. ] celle des Argonautes (L. 7.) celle de Minos 8c de fa guerre con- tre les Athéniens; ( L. 8. F. 1. & t.) celle de la chafle de Caly- don ; [L. 8. F. 4. ] celle d'Her- cule & de Tes travaux ( L. 9. ) celle de Protce; ( L. 1 1. F. 7. 8. <£" 9.) toutes celles qui concernent la guer- re de Troye & les Héros qui s'y trouvèrent; (L.11. i^.&\^.)&c. On les lira toutes chez l'Auteur S SÇAVANS; avec d'autant plus de plaifir , qu'el- les donnent de la réalité à des eve- nemens que l'on s'étoit tait une ha- bitude de regarder comme pure-, ment fabuleux. Du refte , on n'a rien oublié dans cette Edition de ce qui peut contri- buer au plaifir des yeux : la beauté du papier, la netteté desdifferens caractères Se par deflus tout , plus de 200. planches gravées par le fa- meux Picart , (ont bien capables de Tarifaire en ce genre les plus délicats en faifant honneur à ceux qui onC conduit cet Ouvrage. JOSEPHI SEPTEMBRE, 1732. sss JOSEPHI-ANTONII SAXII SS. AMBROSII ET CAROLI oblati Collegio &c Bibliothecz Ambrolianx Praere&i ; Epiftola ad Amicuni pro Vindicanda formula in Ambrofiano Canonc ad Miffa: Sacrum praefcripra Corpus tuum frangitnr Chriflc. Mediolani , ex i£dibus Palatinis. C'eft-à-dire : Lettre écrite à un Ami par Jofeph - Antoine Saffi , Préfet de la B:bliothéjug Ambroiftenne , pour défendre cette fomiuL p'efcripte par le Rit Ambroifien dans le Canon de la Aieffe , Corpus tuum rrangitur Chrifte. A Milan. 1731. /»-8°. pp. 22. MSASST ne diffimule point à . fon ami que plutieurs Théologiens n'ayent été bleflcs de cette Formule qui fe lit dans le Ca- non de la Méfie prefcrit par le Rit Ambroifien : votre Corps cft rom- pu j 0 Chrifl , votre Calice efi béni ; Corpus tuum frangitur Chrifte,Calix tuum benedicitur; il femble en effet, dit-il, qu'elle fort contraire à ce Dogme Catholique , qui enfeigne que le Corps de Jelus - Chrifr fe trouve tout entier fous chaque par- tie de l'Hoirie même après qu'elle a été rompue. Quelques-uns n'ont pas craint de l'appeller l'Hérélie des Ambroifiens , Ambrofianorum Hereftm , & il nous apprend que des perfonnes remplies des pieté fi- rent tous leurs efforts pour faire fupprimer la Formule dont il eft ici queftion, lorfqu'on ht une nouvelle Edition du Miffel Ambroifien. Quelques raifons qu'on ait al- léguées contre cet ufage, car il nous afhire qu'elles ne font point venues à fa connoiftance. Il ne doute pas que l'autorité de l'Eglife de Milan qui conferve ce Rit depuis plufieurs fiecles , & fur tout celle de l'Eglife Romaine qui l'a toujours approuvé, Stftembn. ne foient feules fuffifintes pour mettre la Liturgie Ambroifienne à couvert de tout foupçon. M,iis dans la crainte qu'on ne l'ac- eufe d'éluder plutôt la difficulté que de la refoudre. Il ne refufe point de prouver la folidité de cet- te Formule par des raifons tirées des Théologiens les plus célèbres ôi des fources les plus pures de l'Hiftoire Ecclefuftique. Il avertit d'abord que ce mot de frangitur , être rompu , n'eft point nouveau lorfqu'il eft queftion du Corps de J.C. confacré. S. Paul, 1. Cor. Chap. io. verf. lé. s'en eft fervi : le pain que nous rompons n'eft- il pas , dit-il , la participation du Corps de J.C. Panis quem fran- gimus nonne participatio Corporis Domini eft. Dans le Chapitre fui- vant , verf. 24. où ce même Apôtre rapporte la Formule dont j. C. même fefervitpourlaConfecracion du Pain , au lieu de ces paroles qu'on lit dans la Vulgate , ceci efi mon Corps , qui fera livré pour vous, le Texte Grec porte, t» Cmtf v/uùi x.\âptw : c'eft-à-dire , qui eft ron.pn pour vous. La même expreffion fe trouve dans les Verfions Syriaques C c c c y5S JOURNALD 6c Arabes. Et Saint Chrifoftome , Cornélius à Lapide , avec plufîeurs autres , nous apprennent que ces paroles ne doivent pas s'entendre leulemcnt de la mort de J. C. dans fa Pallion , mais du Sacrement de l'Euchariftie. Ajoutez à cela que dans un Con- cile de nj. Evoques où préfidoit le Pape Nicolas II. la Formule par laquelle Berenger abjura fes erreurs fur la prefence réelle , portoit en termes formels que le Corps de J. C. étoit réellement totiehè & rom- pu par les mains des Prêtres & broyé parles dents des Fidèles. Confentio... Corpus Domini noftri Jef» Chrifli non folum Sacramento , fed in veri- tate manibus Sacerdotttm traftari , & frangi & dentibus Fidelium at- îeri. Comme le fcandale que Beren- ger avoit caufé étoit rrès - grand , le Pape Nicolas conçut tant de joye de fon abjuration qu'il en envoya des Copies dans toutes les Eglifes de l'Europe. Et celle de Mi- lan en ayant reçu une comme les autres, M. Safli croit très-vrai- femblable que ce fut à cette occa- fion que la Formule Corpus tuum frangitur Chrifte fut ajoutée dans fa Liturgie. Ce qui le confirme dans cette opinion , c'eft qu'elle ne fe trouve point dans les Manufcrits qui ont plus de 700. ans d'antiqui- té, au lieu qu'on la voit dans tous ceux des fiécles fuivans. On ne doit point > dit-il , être furpris que l'E- glilè de Milan t pour montrer fon ES SÇAVANS; oppofition aux erreurs de Berenger, ait introduit ce nouveau Rit 3 puifqu'il paroît que c'eft dans le même elprit que les autres Eglifes établirent la Coutume de l'Eléva- tion de l'Hoftie & du Calice auilï- tô: après les paroles de la Confecra- tion : il eft vrai que le Cardinal Bona avoue qu'il ignore la première origine de cet ufage ; mais d'un au- tre côté, continue M. Salïï , le P. le Brun nous apprend dans fon excellent Ouvrage de l'Explication de la MelTe que cette Cérémonie fut établie du tems de Berenger , & qu'il eft très-probable que ce fut uniquement pour rendre un hom- mage plus éclatant à la vérité du Corps de J. C. dans l'Euchariftie. Il montre enfuite par les témoi' gnages de Bellarmin , de Bona , du P. Juenin même , que les expref- fions de cette formule s'accordent parfaitement avec le Dogme de la Foi fur 1' 'intégrité du Corps de J. C. dans l'Euchariftie , &c que cette ex- prciîïon , loin d'être particulière à l'Eglife de Milan , fe trouve dans le Pontifical Romain , dans l'an- cienne Liturgie de l'Eglife Gallica- ne aulîî-bien que dans celle de l'E- glife Grecque,& entr'aurres dans la MelTe de S. Chrifoftome. D'où il conclut qu'attaquer l'Eglife de Mi- lan fur C£t article , c'eft en même tems attaquer l'Eglife Univerfclle, qui a toujours dit que le Corps de J. C. étoit rompu dans le Sacre- ment de la Sainte Euchariftic ^He«î§* SEPTEMBRE, 1732; *J7 ESSAY SVR LE BON GOUST EN MVSIQUE , PAR M. Grandval. A Paris , chez Pierre Prault , Quai de Gêvres , au Paradis, 1731. Brochure in-iz. pp. -j6. SELON l'Auteur de cet ElTai, le bon Goût en Mufique , comme en toutes fortes d'Arts , eft le fentiment naturel purifié par les règles ; il confifteàfçavoir eftimer les chofes ce qu'elles valent , Si à s'y attacher à proportion qu'elles font eftimables ; mais que faut-il pour avoircedifeernement.'' Deux chofes , répond l'Auteur : de l'o- reille Si une feience raifonnable de la Mufique ; fans l'oreille on ne fçauroit être bon juge en Mufique ; l'Auteur le fait voir par l'exemple qu'il rapporte d'une jeune perfonne qui fçavoit paflablement la Mufi- que , mais qui manquoit abfolu- ment d'oreille , Si qui fe mit à chanter une Scène entière , d'un ton ii haut , fans s'en appercevoir , qu'il ne manquoit plus à fon chant, que d'y joindre une Trompette Marine. M. Grandval remarque ici qu'il y a de deux forres d'oreilles , l'une pour le fon , l'autre pour la mefure ou le mouvement. L'oreille, pour le fon , eft celle qui eft bleffée d'un faux ton , Si qui fait connoître quand on chante ou qu'on touche faux. Celle-là eft impofliblc à don- ner. L'oreille, pour le mouvement, fait chanter de mefure , fait con- noître quand on en eft fotti , Si elle enfeigne l'exacte précifionde la va- leur des tems. 11 y a des gens qui ont l'une au fuprême degré , Si à qui l'autre manque entièrement. On cite fur cela certains Mufieiens qu'on die avoir connus , lefquels avoient l'oreille du fon fi partaite , qu'ils auroient dilcerné jufqu'à un demi Coma , quoiqu'ils ne pulîent danler un Menuet en cadence ; 8C des Maîtres à danfer qui ne s'apper- cevoient pas quand on chantoit faux. L'Auteur , après plufieurs refle- xions que nous partons , dit que lorfqu'on a confultéfurla Muiique la voix du fentiment intérieur , il faut confulter les règles , Si épurer ce fentiment par leur décihon. En- tre ces règles il y en a de grandes Se de petites. Les petites , félon notre Auteur, regardent U compofition^ Les grandes font : Qu'une Muiiquc doit être naturelle , expreflîve , Si harmonieufe. Premièrement, naturelle ou plutôt fimple , car la fimplicité eft la marque du naturel; en fécond lieu , expreflîve ; en troifiéme lieu , harmonieufe. Ce font ces trois grandes règles donc on doit faire l'application aux airs que le fentiment intérieur a ap- prouvés , Se elles doivent décider en dernier reflort. L'on explique ici au long ce qu'il faut entendre parles termes de na- turel , de fimple , d'expreftîf" , d'harmonieux ; puis ou remarque que de toutes les qualitez d'un Mu- ficien , la vivacité eft la plus triv»- C c c c ij y;8 JOURNALD îe &c la plus commode ; l'érudition la plus cherc & la plus dangereufe, la droiture de jugement, h plus fo- lide Se la plus utile ; & le bon goût , la plus rare & la plus exquife. Les Muficiens d'Italie ont ici leur place , on dit que parmi eux il s'en trouve d'infiniment aimables , 6c qui,à la feience qu'en gênerai ils poffedent à un plus haut degré que les François, fçavent joindre le beau chant Si le naturel. Il y en a d'au- tres , continue l'Auteur , qui ont des Symphonies charmantes ; je fuis toujours au guet , dit - il , pour Attraper de leur Mufique ; je la cher- ahe avec emprefïement , je la dévore avec avidité. Je fais de leurs beaux airs mesplusche- res délices , Mais je laifle au vulgaire adorer leurs caprices. Je cours après le beau de quelque part qu'il me vienne, & ne /fais rien de plus efiimable que les bonsCompofi~ teurs d'Italie ; mais par malheur il eji de ceux-ci encore grande cherté, pour me fervir de l'exprejfion de Monta- ge- Notre Auteur venant enfuite aux Muficiens François , fait l'éloge de Lulli : «admirez, dit -il , l'ef- »piit qui brille dans fes Ouvrages ! »»cet efprit fe montre pu tout. m Quels tours fins, vifs, délicats & » expreffifs ! c'eft ce qui s'appelle » retoucher la peinture de laPoé'fie, «c'eft en renforcer les couleurs. La «pratique , l'application & l'étude » font les Ouvriers ; mais il n'y a a> que l'efpnt qui fafle lesexcellens » Ouvriers ; on coanoît toute l'é- E S SÇAVANS, » tendue d'cfprit d'un Auteur , à » bien peindre ce qu'il entreprend »de peindre. Car laMufiqne doit, airui que la Pein- ture , Retracer à nos fens le vrai de la Nature. » Et c'eft en quoi excelle cet hom- » me admirable , &c. Notre Auteur finit fa Dilîcrtation en avertillant que dans la Mufique, comme dans tous les autres Arts , il faut fe propofer un point de per- fection , au - delà de celui auquel on peut aller. La raifon qu'il en donne eft que l'on ne fe mettroit jamais en chemin , lî l'on croyoit n'arriver qu'au point où l'on arrive- ra.Toutes les feiences ont leurs chi- mères après quoi elles courent, fans la pouvoir attraper. Mais elles at- trapent en chemin, des connoiiLn- ces fort folides. La Chymie a fa pierre philofophale ; la Géométrie, fa quadrature du ceicle ; l'Aftro- nomic fe: longitudes , la Mécha» nique , le mouvement perpétuel. Il eft impoffible , dit-on ici , de trou- ver tout cela ; mais il eft fort utile de le chercher. Notre Auteur termine fon EtTai en remarquant qu'en fait de Mufi- que^on doit s'accoutumer à juger en écoutant lefentiment naturel,qu'cn doit affermir ce fentiment par les petites &: par les grandes règles, qu'après avoir jugé il faut prendre garde à la réputation des Compfi- teurs, & ne fixer tout-à-fait fes juge- mens,qu'à la troifiéme ou quatrième fois qu'on aura entendu leschofes ; qu'enfin il fane joindre le jugeaient SEPTEMBRE; 17^; 559 de comparaifon à celui du raifon- pouvoir dire de cet Eflai que les nement , 6v laitier confirmer fes Lecleurs équitables n'examineront jugemens Se ceux du Public, par les pas fans doute à la rigueur , puifque arrêts du tems. c'eft un Eflai. Voilà tout ce que nous croyons NOVVELLES LITTERAIRES. L ITALIE. De Milan. A Société Palatine vient de mettre au jour le XX IF Tome de [onKecuc'ù desHiftoriens d'Italie, lequel contient les Pièces fui vantes. ELENCHUS TOMI XXII. Historia Senensis , ad anno mccccii. ufque ad annum mcccc- xxii. Auiïore Johanne Bandino de Bartholomaris , contimtata a Fran- eifeo Thomafio ejus pronepote , & à Petro Rullîo ufque ad annum MCCccLxvin. tiunc primkm in lu- cem prodit è Aîanufcripto Codice Huberti Benvoglienti Patricit Se- nenfis. Commentaria Comitis Jacobi Picinini, fiveDiarium rerum ah ipfo gefiarum anno mcccclii. fervente belle inter Venetos , & Francifcum Sfortiam Mediolanenpum Ducem , AuBare Porcellio Poëta & Scriba Alphonfi 1. utriufque Sicilia %e- gis , nunc primitm prodeunt ex Ma- nuferipto Codice Bergomenfi. Poggii , Hiftoria Florentina , à Johanne-Baptifta Recanato Patri- cia Veneto jampridem in lucem édita , Motifqut & À liftons Vit» illuftrata^ nunc vero ab codent autla & recog- nita. Excerpta ex Annalibus Princi- pum Eftenfium ab anno mccccix. ufque ad annum mccccliv Auûore Johanne Ferrarienfi Ordinis Atina- rum , nunc primitm prodeunt ex Ma- nuferipto Codice Bibliothecae E- ftenfis. Vit A ClariJfîmiFiri Neni Cap- ponii à Bartholomxo Platinenll feripta , nunc primkm prodit ex Ma- nuferipto Codice Bibliothecx Strozzianx Florentina. Vita Jannotii Manettï Viri Clarijftmi Florent ini ab anno mccc* xcvi. ufque ad annum mcccclix. Aitttore Naldo Naldio Florentino , ex Manufcripto Codice Nobilis Vi- ri Bonagiuntae Manetti expreffa. Historia Urbis Mantux , ab ejus origine ufque ad annum mcccc- lxiv. feripta a Bartholomxo Sac- cho Cremomnjt , è Vico Platina > vu! go appellato Platino , primkm édita in lucem à PetroLambecio^/r» Clarif. nunc autem in commodum Emditorum reeufa. Annales Placentini ab anno mcccci. ufque ad annum mcccc- lxiii. ab Antonio de Ripalta Pa- tricio Placent ino conferipti , ac dein- de continuât! ab Alberto ejus fili® jô*o JOURNAL D Hfcjiie ad annum mcccclxxxxiv. nunc primùm in lucem proferuntur è Manukripto Codice Placcntino. Vita Philippi Mariae Viceco- miris Mcdiolanenfium Ducistertii , Auïlore PcrroCandido Dcccmbtio jam édita ; nunc veto cum Codice Bi- bliotheca Monachorum Sancri Am- brolii Mediolani coi Lu a & autla. Vita Francifci Sfortix quarti Adediolanenfiitm Ducis perEpitomen fcripta ab eodern Pecro Candido Vi- glevanenfi ab anno mcccci. ufquead annum mcccclxii. mine primùm Lia reddita è Aîanufcripta Codice Bibliotheca: Chriltianillîmi Régis. Oratio Pctri Candidi Decem- brii i«/î~ 562 JOURNAL DE génieur , demeurant à Paris , Fau- bourg s. Germain , rue de Seine , chez le Sieur Home: , Marchand Carrier & Papetier , près l'Hôtel d'E (pagne. Ce Livre fe vend chez Gabriel Valleyrc, rue de la vieille Bouderie, & Pierre Martin , Quai des Augu- ftins. I731. /'»-8°. Traité des Tumeurs contre-nature, par M. Deidier, Confeiller , Mé- decin du Roi , Chevalier de fon Ordre de S. Michel , ProfelTeur Royal de Chimie en l'Univcrfité de Montpellier , &:c. Cinquième Edition , augmentée d'une Difler- tation Préliminaire fur la Chirur- gie-Pratique & de plufieurs Con- sultations 5c Obfervations Chirur- gicales du même Auteur , avec un Difcours Académique fur la conta- gion delà pefte de Marfeille. Chez D'Houry-, rué' S. Severin. 1731. in- 11. Efyacinte , ou le Marquis de Cel- tafdiror^o : nouvelle Efpaqnole. S SÇAVANS. Ouvrage rempli d'evenemens fin- guliers, curieux &. remarquables. Chez Bienvenu} cv Charles (juiliau- me , Quai des Augultins. 1731. 2. vol. Remarques Hijioriques & Criti- ques lur l'Hiftoire de Charles XII. Roi de Suéde , par M. de Voltatre , pour (ervir de Supplément à cet Ouvrage, par M. de la Motraye. Nouvelle Edition faire fur celle de Londres. Chez Michel - Etienne David , Se Antoine de Heuquevillc père , Quai des Augultins. in-i*. Recueil des principales dècifiansfur les Matières Bénéficiâtes , extraites des Canons, des Conciles & des plus célèbres Auteurs , conformes aux Edits & aux Déclarations du Roi, & à la Jurifprudence des Par- lemens du Royaume Si du Grand Confeil. Par M. R. Drapier , Avo- cat en Parlement : féconde Edition. A Paris , chez Nicolas-Pierre tsifr- mand , rué S. Jacques à S. Bencît. in-\ t. 1. vol. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Sept. 1752. LE Triomphe de la Catholicité , &c. pag. 501 Dictionnaire de Médecine , 8fC. JI4 La Vèrhé Fabulifie , Comédie , &c. < h Obfervations Mathématiques , Agronomiques , Géographiques & Phyfiques) ècc.Tomef/I. 514 Expofîtion du Droit Canonique , &c. 5 ji Réflexions inflruilives & morales fur l'Apocalypfe , 6V c. 534 Lettres Pajiorales de Monfcigncur l'Evêque de Londres aux Fidèles de [on. Diocéfe , cvc. 53^ Les Mètamorphofes d'Ovide , par MX Abbé Banier, çrc. 54 j Lettre de M. Salli fur cette Formule du Rit Ambroifien , Corpus tuum frangitur Chrilte , f ç 5 Ejfai fur h bonGoût cnMufique , ècc. 5 57 Nouvelles Littéraires , 5 5 j L E JOURNAL SCAVANS, POUR VANNEE Al. DCC. XXXII. OCTOBRE. A PARIS, Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROY. LE JOURNAL DES SCAVANS o OCTOBRE M. DCC. XXX IL S.JULIIFRONTINI LIBRI QUATUOR STRATEGEMATICON, cum Notis integris Francifci Modii , Godefcalci Stewechii , Pcrri Scriverii , & SamuelisTennulii. His accedunt, cum P. Scriverii , tum aliorum Dodorum inedirxObfervationes. Curante Francifco Ouden- dorpio , qui ô: fuas Adnotationcs , variafquc Manufcriptorum leclio- nes adjccit. Lugduni-Baravorum , apud Samuelem Luchtmans. 173 t. C'eft-à-dirc : Les quatre Livres des Stratagèmes de Frontin : avec les Notes entières de Modius , de Steivech y de Scriverius & de Tennulius. On y * joint des Obfervations non encore imprimées de Scriverius (fr d'au- tres Scavans : le tout recneMipar Us [tins de François Oudendorp t avet OQobre. Ddddij $66 JOURNAL DES SÇAVANS; fes Remarques & plu/îeurs Variantes que lui ont fournies les Mamtfcrits. A Lcyde , chez Samuel Luchtmans. 17JI. in-i°. pp. 512. fans la Pic- face Se les Tables. MOudendorp s'eft déjà fait . connoîcre par la belle Edi- tion Latine de la Pharfale de Lu- cain , qu'il donna en 1728. à Leyde chez Luchtmans, en deux Volumes »»-4°. Se dont nous rendîmes com- pte alors. Celle qu'il procure au- jourd'hui des Stratagèmes de Fron- tin , marque de fon côté la même attention au befoin d'éclairciffe- mens où fe trouvent encore la plu- part des Auteurs Claffiques , & le même difeernement dans le choix des fecours qu'il leur offre , tant de la part des M (T. que de celle des Critiques ou Commentateurs. L'Ouvrage deFrontin dont il s'agit, écrit d'un ftyle pur , fimple Se con- cis, paroilToit encore tronqué , dé- figuré Se corrompu en plufieurs en- droits , maigre douze ou treize Editions qui en ont été publiées en divers tems , Se dont la première vit le jour à Rome en 1494. /»-4°. Cependant quelque peine qu'ait prife le nouvel Editeur pour le ré- tabli iTement d'un Texte fi maltrai- té par l'ignorance ou le mauvais goût des Copiftes : il n'ofe fe flatter d'avoir remédié à tout, Se il laiiïe encore de quoi exercer la fagacité de ceux qui viendront après lui , Se qui feront aidés dans leur travail par de meilleurs Mff. Ceux qu'a confultezM. Ouden- dorp , foit par lui-même , foit par fesamis, ne font pourtant pas en petit nombre , & il en allègue jus- qu'à treize. Il y en a trois delà Bi- bliothèque de Leyde , autant de celle de Cambridge , deux de celle de Médicis , un de celle du Vati- can , &c. parmi lefquels il S'en ren- contre quelques-uns marqués au bon coin Se recommandables par leur ancienneté. Au défaut de quel- ques autres dont on devoit lui en- voyer les Variantes qu'il n'a pu*c- cevoir par divers contretems ; il a eu recours aux plus anciennes Edi- tions , qui, comme l'on (ait, tien- nent fouvent lieu de Mlf. D-' ce genre font celle de Rome , que nous venons d'indiquer ; celles de Boulogne de 1496. Se de 1504. in-folio: celle de Paris, de 151 j. w-40. que quelques-uns ont regar- dée comme la plus ancienne de tou- tes : celle de Cologne, de 1524. /«-8e. celle de Wcchel , faite à Paris, en 1535. in-folio , & quel- ques autres. Tels font les guides que notre Editeur a fuivis pour la cor- rection du Texte de fon Auteur. A l'égard des Notes dont il a cru devoir l'accompagner , Si qui rem- pli ffent le bas des pages , il a puifé pour cela dans les meilleures four- ces , Se en a tiré tout ce qui pou» voit donner quelque jour aux en- droits obfcurs de cet Ouvrage. On trouve donc ici les Notes de Fran- çois Aiodius de Bruges , imprimées à Cologne en ïjSo./w-S0. celles de O C T O Stcwech , publiées d'abord à An- vers, en 1 585. /'»-4°. puis ^impri- mées plufieurs fois avec les anciens Auteurs de l'art militaire. Les No- tes de ces deux Commentateurs, entrepnfts fans l'aide d'aucun Mf. comme Us en conviennent eux- mêmes , ne peuvent être d'une grande relîource pour l'intelligence de Frontin. Celles de Pierre Scrive- rius y qui ont paru dans les Editions de Leyde de I607. in - 40. & de i£2j.i»-i2. y ferviront beaucoup plus utilement, fur tout dans l'état où on les voit ici , c'eft-à-dire con- sidérablement augmentées d'après l'exemplaire original de Scriverius lui-même. Mais les Remarques de Samuel Tennulius imprimées à Ley- de en 1 6j 5. in -12. l'emportent de beaucoup fur toutes les précé- dentes , tant pour l'érudition que pour le foin qu'il a pris de revoir le Texte fur quatre MlT. differens ôc de le corriger en confequcnce,mct- tant d'ailleurs à profit pour cette correction , les Notes de Guiet , de J. Frideric Gronovius , & de quel- ques autres. C'eft de quoi notre Editeur a fçû tirer bon parti , com- me il le déclare lui-même. Pour ce qui eft des Commentai- res de KobcttKeuehen publiés dans l'Edition qu'il donna de tous les Ouvrages de Frontin , à Amfter- dam, en \66i. /'»-§•. M. Ouden- dorp s'eft difpenfé de les inférer en entier dans la Tienne , pour deux taifons ; la première , parce que cette Edition de Keucben eft aftez commune ; la féconde , parce que fes Notes font ou de peu d'import B R E ; 1732. f6j tance, ou pillées dans celles de Scri- verim, àcCafaui>on1 àeSaumaifc & d'autres Critiques célèbres. M. Burman , dans fes Prolégomènes fur les Poètes Latins qui ont traité de la ChalTe, parle dcKeuchen comme d'unPlagiaireavéré,&en produit des preuves. D'un autre côté Périzonius & Tennulius l'ont convaincu d'i- gnorance fur plufieurs articles.Non- obftantdc telspréjugez,fi peu favo- rables à la réputation de ce Com- mentateur de Frontin , notre Edi- teur n'a pas laiiTé d'emprunter de lui les Variantes tirées du Mf.d'y^- cerius , de même que quelques No- tes qui ont leur mérite , & qu'il a rangées parmi les fiennes , fans ou- blier d'en faire honneur à celui de qui elles lui venoient. Il a de plus tranfporté dans fon Edition la Let- tre de J. F. Gronovius imprimée dans celle du même Keucben , à qui Cette Lettre concernant Frontin & digne de la curiofité du Lecteur , eft adreflee. Les Notes du même Gronovius fur Frontin, non encore publiées , font dues à fon petit hls M. Abraham Gronovius qui les a communiquées à M. Oudendorp. Celui-ci a raiTemblé à la tête de ce Volume toutes les Dédicaces & les Préfaces des autres Editions , & ter- mine la fienne par une Table très- ample & très-exacTe de tous les mots & de toutes les exprelîîons qui compofent le Texte de fon Auteui; travail fatigant , mais très- utile , dont M. Michel Benoift , Membre de l'Univerfité de Leyde , a bien voulu fe charger. Apiès la Notice détaillée que 568 JOURNAL D nous venons de donner de cette nouvelle Edition ; nous ne pouvons nous difpenfer de faire connoître plus particulièrement l'Auteur de l'Ouvrage qu'elle nous prefente. Le fameux Critique Barthitts s'eroit fi- guré que cette Collection de Strata- gèmes qui nous refte aujourd'hui fous le nom de Frontin , n 'étoit que l'extrait ou l'abrégé d'un Ou- vrage plus étendu qu'avoir écrit cet Auteur fur la même matière : & cette imagination pouvoir erre fondée fur le mauvais état où étoic réduite cette Collection, interpolée, eftropiéc & mutilée en divers en- droits > telle qu'on la voyoit fur tout dans les premières Editions. Mais ( dit notre Editeur ) ce qui doit mettre cette conjecture de Bar- thtus , au rang de quelques autres idées chimériques dont il fe préocu- poit un peu trop légèrement , Si qui ne faifoient pas fortune ; c'eft que la brièveté qui règne dans ce Livre de Frontin ne s'y trouve que con- formément au dellein de l'Auteur , qui l'annonce lui-même dans fon Prologue ; Se que d'ailleurs la ma- tière qu'il traite ne comporte guéres un ftyle plus diffus : fans compter que les 8 Livres des Stratagèmes recueillis en Grec par Polycn, èVqui ne partent point pour l'abrégé d'un plus grand Ouvrage , font écrits tout auliî laconiquement. Quant à ce que nous avons à dire au Lecteur touchant la perfonne & les autres Ecrits de Frontin , nous ne fçau- rions mieux taire que de l'emprun- ter des Prolégomènes , que M.Jean Ptleni favar.t Profertcur de Mathé- ES SÇAVANS, matique à Padoiie ~ a mis au-de- vant de la belle Edition qu'il a pu- bliée en 17:1. du Traité des A^h:- ducsàu même Auteur, év que no- tre Editeur a fait imprimer à la fui- te de fa Préface- Ces Prolégomènes font partagés en deux Ciupitrcs , dont le premier nous informe de la Vie de Fronrin en fuivant l'ordre des Confuls fous lefqueis il a vécu , Se le fécond nous inftruic de fts Ou- vrages. I. Frontin , dont le nom de fa- mille étoit Jule , ne venoit point de ces anciens Patriciens qui ont il- luftré ce beau nom. Il n'etoit iffu probablement que de ceux , qui , fous les Empereurs Claude & Vef- pafîen , furent artociés aux Patri* ciens , foit à caufe de l'ancienneté de leur famille , foit à caufe de fa diftinciion. M. Poleni ne doute prefque pas que notre Auteur n'ait éré Patricien ; & ce qui le confirme dans cette idée , c'eft que Frontin lui-même allure que Y Intendance dis Aqu:ducs a tdîtjonrs été adminiftrée par Us premiers de la Ville de Rome; Se que lui, avoir alors cette admini- ftration. L'on ignore le lieu & l'an- née de fa nairtance : on fait feule- ment qu'il a été contemporain de Vefpafien Se de fesfils, de Nerva &deTrajan. Les évenemensde fa vie jufqu'au rems de fa Préture font aurtî peu connus. C'eft Tacirc qui fait la première mention de Fron- tin , & il en parle pour nous ap- prendre que ce Préteur de la Vdlt avoir convoqué le Sénat le premier Janvier l'an de Rome 81$. [de J. C. 70.] qu'on y avoir décerné de* O C T O B louanges 5c des avions de grâce , tant pour les Rois que pour les Lieurenans Généraux &c pour les Armées: Se qu'enfuite Frontin s'é- toitdémisde fa Charge pour en re- vêtir Domitîen. M. Poleni conjecture que notre Auteur fut Conful Subrogé l'an de Rome 8 27. ( de J. C. 74. ) & trois raifons femblent appuyer cette con- jecture ; la première, qu'Elien dans la Préface de fon Traité de la Tatti- que , appelle Frontin Homme Cm- fulaire ; la féconde , qu'ayant été envoyé l'année fuivante pour com- mander en Angleterre , il y fut en qualité de Proconful , ainfi qu'y al- loient prefque tous ceux à qui l'on confioit le Gouvernement de cette Province , & qu'il partit pour y al- ler immédiatement après fon Con- fulat , comme le fit Agricola fon Succeffeur ; la troisième , que cette année de Rome ne fourniHantdans les fades d'autre Conful Subroge queDomitien : il y a grande appa- rence que Frontin fut le fécond. Ce fut donc l'an de Rome 8*8. félon M. Poleni , que Frontin pa(îa en Angleterre. Nous apprenons de Tacite qu'il y prit la place d'un au- tre qui avoit fuccedé à Cérial, dont les grandes actions avoient fait tort à la réputation de ce premier Suc- celTeur lequel y avoit acquis peu de gloire ; mais que Frontin , entr'au- tresexploits , y fubjuga les Silures, Nation belliqucufe , qui fait au- jourd'hui partie de la Principauté de Galles , & dont la valeur jointe à la difficulté des lieux offrit à ce General deux puuîarii oblUcles à RE, 1732. j<5> furmonter. En fuppofanr avec plu- ileurs Savans (dit notre 'Biographe') que Cerial prit le Gouvernement de l'Angleterre en 8 24. & qu'Agrt- cola y vint vers l'an 8 3 1 . il le trou- ve fept années d'intervalle entre l'un ôc l'autre. M. Poleni. laide les trois premières à Cérial , n'en don- ne qu'une à fon premier Succeffeur qui n'en mérite pas davantage , & accorde les trois dernières à Frontin qui fçut les fignaler par fes conquê- tes. Il refulte de cet arrangement que le Proconfulat de Frontin en Angleterre commença l'an 828. I! revint à Rome l'an 831. & ce fut alors ( félon M. Poleni ) qu'il fe mit à écrire fes Livres des Stratagè- mes ; ce qui femble d'autant plus probable , qu'avouant ailleurs, qu'à la referve de fon Traité des Aque- ducs , il n'a écrit aucun Ouvrage qu'après s'erre pleinement infirme de fa matière par l'ufage Se l'expé- rience ; fes expéditions d'Angleter- re l'a voient mis fuffifamment au fait fur la conduite &c fur les ru fes neceffures à un General d'Armée. Il publia vraifemblablcment ces Livres l'an de Rome 837. après la guerre de Germanie & le retour de Domitien qui en eut le furnom de Germanique. En effet Frontin dans ces Livres nomme plufieurs fois Domitien, fouvent en y joignant ce titre ; il y parle beaucoup de cet- te guerre , & ne dit rien de celle des Daces qui vint enfuitc ; or ce fut en 837. que Domitien fur fur- nommé GermaniejHe. Cela découvre l'erreur de Raphaël Volaterran Se de ceux qui l'ont iuivi dans le fenri- J70 JOURNAL D ment où il étoit que Frontin avoit dédié fes Stratagèmes à l'Empereur Trajan, des exploits &C des conquê- tes duquel il ne dit pas un feul mot, pendant qu'il s'y répand en éloges pour Domitien. Avant que de publier cet Ou- vrage il avoit mis au jour ( comme il le témoigne lui-même 6V: comme Végéce en fait foi ) fon Traité de Y Art Militaire , que nous n'avons plus , & que quelques-uns ont con- fondu mal-à-propos avec le qua- trième Livre des Stratagèmes. Fron- tin , non content de s'être inftruit à fond de la difeiplinc militaire des Romains , avoit fait aullî une étude particulière de celle des Grecs, au rapport d'Elien dans fa TaBique , lequel lui attribue un Traité tou- chant celle qui étoit en ufage du tems d'Homère , Se duquel il ne nous refte aujourd'hui que le titre. Notre 'Biographe préfume que Fron- tin compofa ces divers Ouvrages fous l'Empire de Domitien , pen- dant lequel il joiiilToit probable- ment d'un grand loifir. Car il eft à croire que depuis l'an '837. jufqu'à la mort de cet Empereur , il vécut éloigné de Rome dans fes terres , pour être à couvert de l'indigna- tion & de la haine de ce Prince , que la prefence des gens de mérite blelToit infiniment. Ce fut dans cet- te retraite que Frontin lia quelque commerce de Littérature avec Mar- tial, comme il paroît par. quelques Epigrammes de ce Poète. Il ne s'é- toit pas néanmoins interdit h abfo- lumcnt le ieiourcLe Rome, qu'il ne s'y montrât quelquefois, même du ES SÇAVANS, vivanc de Domitien 5 Se il y vint ( comme l'allure Pline dans une de les Lettres) pour une affaire qui rc- gardoit un fils déshérite par fa pro- pre mère : d'où l'on peut conclure, ainfi que de fon Traité des Aque- ducs , qu'il étoit verfé aulli dans la. Jurifprudence. Il fut Conful pour la féconde fois l'an deRome 8 50. La preuve de ce fécond Confulat fe tire ia. du témoignage de Martial ; i°. De celui de Pline le jeune , qui dans fon Panégyrique de Trajan , attelle que ceux qui furent Confiais pour la troifiéme fois avec cet Empereur dans fon troifiéme Confulat , l'a- voient été pour la féconde fois avec Nerva. Or Frontin , comme nous l'allons voir , fut Collègue de Tra- jan dans le troifiéme Confulat de celui-ci. Ce fut vers la fin de cette même année S 50. que l'Intendance des Aqueducs fut donnée par Ner- va à notre Auteur qui le certifie lui- même , &c qui fe mit deflors à compofer Ion Traité fur cette ma- tière. En 8 5 3. Trajan fut Conful pour la troifiéme fois & eut Frontin pour Collègue. Ce troifiéme Confulat de notre Auteur n'eft pas avoué de tous les Antiquaires. Le Cardinal Noris s'eft efforcé de le prouver avec toute l'érudition la plus capable de perfuader. Le P. Pagi a foûtenu, d'un autre côxi. , que le Collègue de Trajan, dans ce troifiéme Con- fulat, étoit non pas Frontin, mais Fronton ; ajoutant que le Cardinal Noris avoit renoncé fur ce poinc à fon premier fentiment. M. Poleni, que O C T O B que l'autorité de ces deux Savans d'avis contraires, rendoit incertain fur le parti qu'il avoit à prendre , a confulré là-delfus un de fes amis , dont la grande littérature pouvoir décider folidement cette queftion : ôc cet ami efl M. Jean - Baptifte Morgagni très - célèbre Profefleur d'Anatornie à Padoùe ; qui a fçu joindre à la connoi (Tance la plus profonde de l'Anatomie Se des au- tres Sciences naturelles toutes les amenitez des Belles-Lettres. On en peut juger par la réponfe de ce fa- vant Homme à M.Poleni, que ce- lui-ci a fait imprimer en entier dans fesProlégoméneSjdont nousrendons compte ; Se dans laquelle M. Mor- gagniy après une difcufïlon exacte des preuves qui établirent les deux opinions, difeuffion qui remplit ici treize pages , femble fe déterminer en faveur du Cardinal Noris , bif- fant toutefois le droit de la décifion à M. Poleni , dont il prévoit avec raifon que le fentiment fera confor- me au fien. Notre Biographe fixe à cette an- née 855. la publication du Traité des Aqueducs de Frontin , dédié à Trajan , Si non pas à Nerva , com- me l'a avancé Fabretti dans fa Dif- fertation de Aquis &Aqn*dnflibus. Il y a donc eu entre l'Edition de ce dernier Ouvrage & celle des Stratagèmes publiée en 837. feize années d'intervalle > Si. c'en efl: allez pour mettre quelque différence dans leftyle de ces deux Ouvrages. M. Poleni place à l'année fui- vante [ 854. ] le Proconfulat de Frontin en Alic , indiqué par une Oftobre. RE, 1732. £71 Médaille Gréque , qui a d'un côté une tête barbue avec cette légende : *ponteinos AN©r. c'eft-à-dire , Frontin Proconful > au revers la fi- gure d'un fleuve , Se à l'exergue : zmtp. eiti. MrPTOr. c'eft-à-dire : frapé par ceux de Smyrne , fous la PréfeÙure de Myrius. Cette Médail- le efl: rapportée dans les Mélanges d'Antiquitez. de Spon ; d'où M. Po- leni l'a tirée , de même que notre Editeur qui l'a fait graver au fron- tifpice de cette nouvelle Edition. On a pris d'abord la tête qu'on voit fur cette Médaille , pour celle de Frontin lui-même. Mais on s'eft defabufé de cette idée par cette re- flexion , Qu'avant Adrien les Em- pereurs ne portoient point de barbe, Se que celui-ci fut le premier qui introduiiît l'ufage contraire; qu'ain- fi la tête barbue dont il s'agit ne fauroit être celle de Frontin, qui fut Proconful fous Trajan ; Se doit pafTer pour celle de Jupiter ou peuc- êtrc'd'Hercule. On peut donc fup- pofer que Frontin fut nommé Pro- conful d'Alie , l'année qui fuivit fon troifiéme Confulat. Il mourut vers l'an de Rome 859. félon M. Poleni , qui prétend que cette mort ne fauroit guéres être mife plutôt. Voici fes raifons. Pline le jeune nous apprend dans une de fes Lettres , Qu'il fucceda à Frontin dans la dignité d'Augure. Frontin étoit donc mort alors; car cetre dignité étoit à vie. Il efl pro- bable que Pline parvint à l'Augurât après la 43* année de fon âge. Or il avoit 44 ans en 8 $9. Il n'adonc été créé Augure qu'en cette même an- E e ce $1* JOURNAL DE née au plutôt ; d'où il fuit que la mort de Frontin n'eft point arrivée antérieurement à cette datte. Peut- être lui a-t-clle été poltcrieure, mais de peu d'années. Il défendit qu'on lui érigeât aucun monument après fa mort } & il le ht en ces termes : Jwpenfa Mmamemi fupervacua e/i; mernoria nefiri durab.t , fi vitam merniriits. C'eft-à-dire : la dèpenfe d'un Monument eft fuperflue ; notre mémoire durera , finous avons mérité de vivre. M. Poleni , dans cette Vie de Frontin , a eu pour guides les Com- mentaires de Cafpinien fur les Con- fits Romains , copies par Catanée à ins fes Notes fur Pline le jeune ; Scriverihs , au commencement de fon Frontin ; Gerard-Jean Voffuis , dans fon Traité des Hiftoriens La- t.»s ; Pupi-Blount , dans fa Cenfure des *4ntews les plus célèbres. C'eft de - là que notre Biographe a tiré une partie de fes matériaux , auf- quelï il a joint tout ce que fes pro- pres recherches ont pu lui fournir de nouveau fur ce même fujet , & après avoir fournis tous ces faits hiftoriques au plus ferieux examen } il les a rangés fuivant l'ordre des Confuls , à l'exemple de Fabricius, dans la Vie de Ciceron & de M. JMaJfon , dans celle de Pline 6v de quelques autres. II. M. Poleni , dans le fécond Chapitre de fes Prolégomènes , dif- cute quels font les Ouvrages publiés fous ie nom de Frontin , qui ap- partiennent véritablement à celui dont nous venons de parler. Le premier eft celui qui a pour titre 3 S SÇAVANS; Sev.Julii Froïi'.im V.C. de rt Agra- ria Liber, où il eft traité des quali- tez des terroirs. L'Auteur de cec ElTai qui l'écrivoit dans letems que Domitien faifoit la guerre aux Da- ces, déclare qu'il n'ttoit alors qu'un novice dans l'art d'écrire ; ce qui ne peut convenir à notre Frontin , qui avoir été Préteur fous Vefpafien , puis Conful & Proconful. D'un au- tre côté , ce Livre dans quelques MIT. eft attribué à un M. Junius- Nypfus , ts: dans quclqu'autre à Dom Gerbert, Pape & Philofophc; Donno Gerberto Papa & Pbilofopho. 2°. Le fragment lur les Limites pu- blié fous le nom A'Hygin ou de Jule Frontin de Sicile , n'appartient pas davantage au Confulaire t lk pour- roit être l'Ecrit de l'Auteur de re Agraria. j°. On en doit dire autant d'un autre petit fragment imprimé parmi les Ecrivains de Limitibus , comme extrait du fécond Livre de Frontin. 40. A plus forte raifon les deux fragmens des Livres concernant les Colonies ( de Coto- niis) ne peuvent - ils^être cenfes l'Ouvrage de notre Frontin, puif- qu'il y eft parlé de l'Empereur Adrien , & qu'alors Frontin n'étoit plus. A l'égard des 4 Livres de Strata- gèmes , quelques Critiques ont dou- té qu'ils fuilent du même Frontin qui a écrit fur les Aqueducs ; & leur fcrupule fur ce point naît de ia dif- férence du ftyle qu'ils croyent ap- percevoir entre ces deux Ouvrages. Mais M. Poleni peu frappé de cette différence a confulté là-dcflus fon ami & fon Collègue M. Gmiani , OCTOB Profeffeur de Philofophie , hom- me de goût & d'un difcernemenc exquis en ce genre de Littérature , qui lui expofe dans une Lettre infé- rée ici , ce qu'il penfe fur la que- stion prefente. Il veut bien fuppofer d'abord que le Traité des Aqueducs eft écrit d'un ftyle plus pur & plus châtié que les Stratagèmes. Mais il ne croit pas que cette raifon foit fumfante pour les atrribuer à deux Ecrivains, fur tout fi l'on conhdere, que le dernierOuvrage eft un affem- blage d'extraits de divers Auteurs tant Grecs que Latins que Frontin a voit recueillis dans fa jeunelfe pour fon utilité particulière, auquel cas il n'eft pas merveilleux qu'on fe per- mette quelque négligence d'élocu- tion : au lieu que dans l'autre Ou- vrage où il s'agiffoit de remplir l'attente de Nervaqui Tavoit char- gé du foin de veiller aux Aqueducs HISTOIRE ECCLESIASTIQUE, POUR SERTIR DE continuation à celle de M. l'Abbé Fleury. Tome XXV. depuis ijo8. jufqu'en 15 20. A Paris , chez Emery , Quai des Auguftins , à S Benoît; Saugrain père , à la Fleur de Lys; Pierre Martin , à l'Ecu de France. 1725. i»-4°. pp. il fe fit Chrétien , cv il perfuada à Hochflrat Dominicain Inquiliteur en Allemagne Se à Arnaud de Ton- gres , Proteffeur de Théologie à Cologne , qu'il falloit faire brûler tous les Livres des Juifs comme remplis d'impietez. L'Empereur Maximilien rendit fur ce fujet un Edit conforme aux voeux d'Hoch- ftrat Se d'Arnaud de Tongres , cependant Reuchlin empêcha l'e- xécution de cet Edit à Stutgard , Se plufieurs perfonnes qui avoient du O C T O crédit à la Cour de l'Empereur en follicirerent la révocation. Ce Prin- ce confulta là-deflus plufieurs Uni- veriïcez, Se même les deux Anta- gonistes Reuchlin Se Hochitrat. Reuchliu fut d'avis qu'on fuppri- mât les Livres des Juits qui font directement contre la Religion , & qu'on leur lailTât les autres. Pfefferkorn entreprit de réfuter cet avis par un Livre Allemand , qu'il intitula le Miroir Manuel , Reuchlin y répondit par un Livre qui avoit pour titre le Miroir Ocu- laire. Les Théologiens de Cologne tirèrent de ce Livre quarante-quatre propofitions qu'ils aceuferent d'he- lefic. Reuchlin y répondit par une Apologie Latine qu'il adrefia à l'Empereur. Cependant il fut cité devant l'Inquihteur Hochftrat qui rendit une fentence contre lui , quoique fon Procureur eût reeufé ce Juge Se qu'il eût interjette appel à Rome du refus qu'on avoit tait d'avoir égard à fa reeufation. Les Commiffaires nommes par le Pape pour juger cet appel s'alîemblerent à Spire Se condamnèrent Hochftrac qui ne voulut point reconnoître ce Tribunal. Cependant les Théologiens de Cologne s'adrelTerent à la Faculté de Théologie de Paris, dont il y eut quatre-vingt DocTreurs qui fu- rent d'avis que le Livre de Reuch- lin devoit être condamné au feu. Ce qui fut exécuté à Cologne. Pfef- ferkorn fe croyant victorieux 3 fit un nouvel Ouvrage intitulé Cloche élu Tocfin , ce qui obligea Reuchlin de porter encore fon affaire à Ro- B R E, 1732; J7; me , Se de demander au Pape un jugement définitif. Mais les Com- millaircs nommés par le Pape , du nombre defquels étoient les Cardi- naux Cajetan iv Silveftre-Priero , quoique Dominicains , ayant paru favorables à Reuchlin , tout ce qu'Hochflrat put obtenir fut une furceance , pendant laquelle ks parties fe réconcilièrent. Les Do- minicains convinrent de payer les frais du proecs , Se de faire rendre ■ne fentence en faveur deReuchlin. Avant que la promefle des Domini- cains fut exécutée 3il fe rerira àTu- binge , où on le pria d'enfeigner le Grec, peu de tems après il fut atta- qué d'une jaunifle , ce qui l'engagea à fe faire tranfporter à Stutgard où il mourut. Notre Auteur dit que Reuchlin fut un des plus fçavans hommes de fon iîécle , qu'il écrivoit avec beau- coup d'éloquence , que l'Allema- gne n'avoit alors que lui feul qu'elle pût oppofer aux Sçavans d'Italie , qu'il ne cedoit en rien à ces derniers pour la beauté du difeours , & qu'il ne leur cedoit point en feience. Ce- pendant notre Auteur n'eft point de l'avis de ceux qui ont dit que Reuchlin étoit le premier des Chrétiens qui fe fut appliqué à l'é- tude des Livres des Juits, & il par- le à ce fujet d'un Dominicain du 13e fiécle nommé RaymandMortini qui avoit fait une étude particulière du Talmud Se des autres Livres de ce genre , Se qui avoit compofé en Hébreu. Les Ouvrages de Reuch- lin ont été imprimés en ditferens tems à Tubinge , à Francfort & ail» Sj6 JOURNAL D leurs. Notre Auteur ne décide point la queftion , lï l'Ouvrage publié fous le titre de Lettres des hommes obfcitrs eft de Reuchlin ou d'Herri- Hattcn. Rien, dit notre Hiftorien, n'eft plus divertilTant que cet Ou- vrage , qui irrita fi fort les Moines qu'ils le firent mettre à l'Index. Erafme ne l'a point approuvé. Reuchlin mourut en i j zi . lous le Pontificat de Léon X. C'eft l'Hiftoire du Pontificat de ce Pape qui fait le fujet des derniers Livres du 25e Volume dont nous rendons compte. On y verra une partie de l'Hiftoire de François I. & de celle de l'Empereur Char- les V. que l'Auteur n'a point cru devoir divifer d'avec l'Hiftoire Ecclefiaftique de ce tems-là dont les principaux fujets , par rapporta l'Eglife , font la continuation du Concile de Latran convoqué par Jules IL l'abrogation de la Prag- matique-Sanction , l'établiffement du Concordat , le commencement de l'Hiftoire de Luther & de celle du Lutheranifme. Comme ces fu- jets font fort connus , nous nous bornerons ici à un des traits de l'Hiftoire du Concile de Latran, que notre Auteur paroît avoir mieux développé que ceux qui ont écrit avant lui l'Hiftoire de ce tems- là. C'eft ce qui regarde l'annexe que donnoit le Parlement de Pro- vence pour l'exécution des Bulles de Cour de Rome dans l'étendue de fon reffort. Notre Auteur remarque d'abord que c'étoit un ufàge obfervé de tems immémorial dans la Province, ES SÇAVANS, de ne mettre aucune Bulle à exécu- tion fans une permilTîon du Parle- ment qu'on appelloit Annexe , cet ufage avoit été confirmé dans une aflemblée d'Ltat de la Province de 1481. Se par le Confcil du Paysen 14S2. avant l'établilTemenr du Par- lement , ce qui avoit été approuvé depuis la réunion de la Provence à la Couronne par les Rois Louis XI. èc Louis XII. Le Parlement de Provence ayant refufé une annexe à Tarins de Santloriis , Camerier de Jules IL qui avoit été nommé pat ce Pape à la Prévôté d'Arles , Jules en fut fi irrité qu'il commanda à Louis de Rochechouard Vice-Lé- gat d'Avignon de s'employer pour abolir ce droit d'annexé. Ce diffé- rend fut accordé avec le Vice-Légat à l'avantage du Parlement de Pro- vence , qui confervoit fon droit d'annexé avec quelques Modifica- teurs. François Deftampes qui fut Vice-Légat d'Avignon après , de Rochechouard ne voulut point exé- cuter l'accord avec le Parlement de Provence, & Louis XII. qui s'e- toit déclaré hautement contre Ju- les II. empêcha en 1510. que le Vice-Légat n'usât de fon pouvoir en Provence. Léon X. s'étant reconcilié avec la France donna la Légation d'A- vignon au Cardinal de Clermont , neveu du Cardinal d'Amboife , & écrivit au Parlement de Provence pour lui demander l'annexe de fes pouvoirs ; le Parlement qui n'avoit pas reçu d'ordre qui révoquât celui de 1 5 1 o. refuferent l'annexe. Léon X. irrité de ce refus , ordonna O C T O B au Promoteur du Concile de La- tran de fe plaindre des oppofitions que le Parlement mettoit à l'exécu- tion des Mandats Apoftoliques. Marius de Penufelius donna en ef- fet fa Requête qui contenoit un grand nombre de Chefs d'aceufa- tion contre les Officiers du Parle- ment de Provence , aufquels il im- putoit d'élever leur tête contre le faim Siège , en imitant l'orgueil de Satan. Le Pape ayant admis cette Requête , décerna un Monitoire contre ceux des Officiers du Parle- ment de Provence , qu'il croyoit lui être les plus oppofés , pour les obliger à comparoître en perfonne dans trois mois , fous peine d'en- courir toutes les Cenfures Ecclefia- ftiques. Après la bataille de Marignan , François I. prit des mefures pour terminer cette affaire qui pouvoit caufer de grands embarras. On RE, 1752; 577 convint que le Parlement donne- roit une fatisfaction au Pape , £c qu'il demanderoit l'abfolution des Cenfures ; mais à condition que le Pape accorderoit certains articles par lefquels ileonfirmeroit le droit d'annexé , Se confentiroit que le Parlement continueroit d'en joiiir. En exécution de ce Traité Louis de Solurs , Ambafladcur de France prefenta au Concile de Latran la fourmilion du Parlement de Pro- vence au Monitoire décerné dans la huitième Scffion , & reçut l'abfo- lution au nom des Officiers du Par- lement de Provence. Notre Auteur fe déclare bien clairement pour les Officiers du Parlement de Provence contre les Papes Jules II. & Léon X. & il aiïii- re que ces Officiers n'avoient point d'autre vue que de maintenir les libertés de l'Eglife Gallicane. HISTOIRE ANCIENNE DES EGYPTIENS, DES Carthaginois , des Affyriens , des Babyloniens , des Médes & des Perfes des Aiacèioniens , des Grecs. Par M. Rollin , ancien Relieur de l'Uni- verfité de Paris , Trofeffenr d'Eloquence au Collège Royal , & Affocté à V Académie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres. Tome IF. A Paris, chez la Veuve Etienne , Libraire , rue' Saint Jacques , vis-à-vis la rue du Plâtre, à la Vertu. 1732. in-iz. pp. 598. planch. 1. ON trouve à la tête de ce qua- trième Volume un Avertiffe- ment de l'Auteur, fur quelques fautes à corriger dans fon Ouvrage & fur la critique faite au fujet des reflexions dont il accompagne fes récits hiftoriques , & que quelques perfonnes croyent trop longues & trop fréquentes. Il avoue que fur ce point , il s'eft un peu écarté de la règle fuivie par les Hiftoriens , Se qui confifte à fe repofer ordinaire- ment du foin de ces reflexions fut le Lecteur même. Mais il a jugé que , pour l'inftruction des jeunes gens aufquels cet Ouvrage eft prin- cipalement deftiné , & dont il veut travailler fur toutes chofes à former 578 JOURNAL DE l'eipiit &r le cœur, il lui fcroir per- mis de factifier en partie à ce motif fi légitime une règle , à laquelle ce- pendant il ne rehifera point ( dit-il) de fe foûmettre, fi , dans la fuite, la décifion du public l'y détermine d'une manière plus formelle. Lorfque dans notre Journal d'Octobre de l'année dernicre,nous rendîmes compte du Volume pré- cèdent , nous n'en conduisîmes l'extrait que jufqu'au Chapitre 5e du fixiéme Livre ; & c'eft où com- mence la guerre du Péloponnefe. C'eft de cette époque Ci fameufe que nous allons partir , pour en parcou- rir d'avance tous les principaux éve- nemens racontés dans le refte du troifiéme Tome , puis dans les 97 premières pages de celui-ci : ce qui comprend les 27. années que dura la guerre dont il s'agir, fous les Rois de Perfe Artaxerxe-Longue- main , Xerxès II. Sogdien&Da- rius-Nothus ou le bâtard. Cette guerre fuivit d'afTez près celle que les Grecs avoient foûte- nuë avec tant de gloire contre une fi puilîante Monarchie. La Grèce & la Sicile en devinrent le Théâtre , &l'on y vit les Grecs vainqueurs des barbares, tourner leurs armes les uns contre les autres. La guerre de Perfe beaucoup plus féconde en ex- ploits éclatans&quelquefois prcfque incroyables , a prefenté un fpectacle plus capable de piquer vivement la curiofité , en faifant admirer tant de grands Capitaines Grecs qui ont. iîgnalé leur courage dans les occa- fions les plus périlleufes , un Miltia- dc , un Léonide , un Thémiftocle , S SÇAVANS, un Arilbde , un Cimon , un Paufa- nias. La guerre du Péloponnefe en- tre Athènes , Lacédémone & les peuples alliés de ces deux Republi- ques, n'offre rien, à beaucoup près, de fi intereffant.Ce ne font que dé- mêlez ou négociations, Se ravages mutuels entre des Villes ou de très- petits Etats ; Sièges de Places d'or- dinaire peu conliderables ; com- bats donnés entre des armées peu nombreufes, & danslcfquclsily a peu de fang répandu. On ne laiffe pas d'y voir des Acteurs jouer d'afTez grands Rolles -, un Peri- clès , un Nicias , un Alcibiade , du côté des Athéniens ; un Bra- fidas , un Gylippe , un Lyfan^ dre , du côté des Lacedemo- niens , méritent toute l'attention des Lecteurs. Le premier acte d'hoftilité , dans cette guerre , fut l'entreprife fur Platées Ville de la Béocie , faite 8c manquée par les Thébains, alliés des Lacédémoniens. Aux dégâts que firent ceux-ci dans l'Attiquc fuccederent ( la féconde année ) ceux qu'y caufa l'horrible pefte , la- quelle, après avoir ravagé l'Ethiopie où elle avoit commencé, l'Egypte, la Libye & une grande partie de la Perfe, vint fondre tout-à-coup dans Athènes, Cette difgrace des Athé- niens fut bien-tôt fuivie d'une au- tre, par l'imprudence avec laquelle, au préjudice de leurs véritables in- térêts , ils ôterent à Périclès le com- mandement. Ils ne tardèrent pas à le lui rendre, mais il n'en jouit pas long-tems , & mourut la 3e année de la guerre. Il regardoit comme un O C T O B ur titre des plus glorieux pour lui cette circonftance , que pendant tout le tems qu'il avoit gouverné la Republique , il n'y avoit Pas itnfeul Citoyen k qui il eut fait Prendre le deuil. Apres fa mort, on eftfurpris &C feandalifé en même tems de lahon- teufe reffourcedes Lacédémoniens , qui ont recours aux Perfes , mais dont les Athéniens déconcertèrent les mefures. Ils fe rendirent maî- tres de Potidée qu'ils alliégeoienc depuis trois ans : après quoi ils pri- rent encore Mityléne. D'un autre côté , les Lacédémoniens firent le Siège de Platées, l'un des plus fa- meux de l'antiquité s & après une longue & vigeureufe rehftance dé- crite par notre Hiftorien avec beau- coup d'exaétitude , la place man- quant de vivres, fut contrainte de fe rendre &c rutrafée. La (îxiéme & la feptiéme année delà guerre,n'eu- rent d'évenemens fignalés que la prife de Pyle , petite Ville de la Meffénie, par les Athéniens fous la conduite de Démoithéne , lefquels peu de tems après y furent affîégés eux-mêmes par les Lacédémoniens que commandoit Brahdas. Il ne put empêcher que ceux-ci ne fuf- fent enfermés dans la petite Iflede SphacLeric , dont Cleon l'un des Généraux Athéniens s'empara : &c en ce même tems mourut Artaxer- xe-Longuemain Roi dePerfe. La huitième année de la guerre , les Athéniens , commandés par Ni- cias , conquirent l'Iflc de Cythére fur la Côte de Lacédémone , 6i les Spartiates conduits par Brafidas fi- Ofobre. R. E, 1732. 5-79 rent une expédition dans iaThrace, où ils prirent Amphipolis ; ce qui fut caufe de l'exil de Thucydide l'Hiitorien , à la négligence duquel les Athéniens imputèrent la perte de cette place -, qui leur étoic d'une grande importance. D'autre part , ceux-ci conduits par Dcmo- fthéne & Hippocrate , s'étant enga- gés dans la Beotie , fur l'efperance de débaucher aux ennemis plulîeurs Villes , furent rencontrés près de Délie par les Thébains , qui après un combat allez opiniâtre , les défi- rent & les mirent en fuite. Socrate fe trouva dans cette a&ion , & y fie merveilles. Après un an de trêve , la guerre recommença la dixième année. Cléon , à la tête des Athé- niens vint affiéger Amphipolis où s'étoit jette Braiidas. Celui-ci ayant tait une fortie à l'improvifte , mit les Athéniens en déroute , Se Cleon fut tué dans la fuite. Pour Brafidas , qui avoit été bleffé dangereufement pendant l'aétion , fes gens le rem- portèrent fecretement dans la Ville, où il mourut peu de tems après. La mort de ces deux Chefs donna de grandes facilitez pour la paix , qui par les foins du Roi de Lacedemo- ne Pliltonax & de Nicias General des Athéniens, fut conclue pour 50. ans. Alcibiade qui commençoit à fe mettre fur les rangs de à prendre connoiffance des affaires publiques, ne permit pas que cette paix fût de longue durée. L'Auteur peint ici le cara&ere de ce fameux Athénien , tel que l'ont reprefenté Platon dans fes Dialogues, Thucydide, Xeno- Ffff y8o JOURNAL D phon, Plutarque Se les aurres Hi- ftoriens. » Alcibiade , die M. Rol- , avoir un caradtere fouple & »» flexible , propre à prendre toutes »lcs imDreflîons que demandoit la » différente conjoncture des tems ; » fe portant avec la même facilitée »la même ardeur au bien ov au mal; u-paflanc d'un excès à un autre » prefque tout contraire , fans inter- » valle ; de forte qu'on lui appli- »>quoit ce que dit Homère du ter- » roir d'Egypte y qu'il por:oit beau- v> coup de drogua mèdecinales très- » excellentes y & attffi beaucoup de » poifons. On pourroit dire de lui » que ce n'étoit point un homme j> feul , mais h l'on ofoit s'exprimer ajainfi, un compofé de plufieurs m hommes; ferieux , enjoué , aufte- » re , attable ; maître impérieux & » plein de hauteur, efclave rampant » Se plein de baffeffe ; ami de la » vertu Se des vertueux , livré aux » vices Se aux méchans ; capable » des plus pénibles tangues Se de la n vie la plus dure , infatiable de dé- » lices 5c de voluptez. " La plus vi- ve 5c la plus marquée de toutes les pallions ( continue l'Hiftorien ) étoit en lui un efprit de domina- tion , qui vouloir tout emporter , 8c qui ne pouvoit fouffrirni fuperieur ni c gai : Se comme il poffedeit tou- te la force de l'éloquence Si toutes les grâces del'élocution , il auroit fouhaité ne devoir qu'à de pa- reils talens tout fon crédit Se toute fon autorité. Alcibiade, tel qu'on vient de le dépeindre , fe mit donc en tête de îiaveifer de tout fon pouvoir lo ES SÇAVANS, Tr-.ité qui venoit d'être conclu en- tre les deux Nations. Mais n'ayant pu en procurer La rupture , il fe re- duilïtà en retarder l'exécution, pat les obflaclcs qu'il y forma. On peuc voir par quelles intrigues Si par quelles rufes il vint à boutdedéfu- nir Se d'ébranler prefque tout le Péloponnefe , Se de fùfcitcr en un feul jour des ennemis nombreux aux Lacédémoniens. En un mot, il fut manier lesefpritsde les com- patriotes avec tant de dextérité & tantd'afcendaiit , qu'il leur perfua- da d'entreprendre la conquête de Sicile à laquelle les Athéniens avoient penfé dès le tems de Péri- clés , mais dont ce fage conducteur avoit eu grand foin d'écarter les projets. L'occafion qui les fit renaître hic l'ambalïade des Egcfhins, peuple de cette lfle qui imploroient le fe- cours d'Athènes contre Syracufe. La guerre debicile fut donc refolue, à l'inltigationd' Alcibiade, Se mal- gré les oppoluions de Nicias, qui en prévoyoit les fuites funeftes. L'un Se l'autre furent pourtant nommés Généraux , Se on leur joi- gnit Lamachus. L'armée étant fur le point de s'embarquer , il arriva un incident à Athènes capable de jetter du trouble Se de l'inquiétude dans les efprits. Toutes les ftatuës de Mercure qu'on voyoit de forme quartée à l'entrée des maifons Se des Temp'es fe trouvèrent mutilées en une nuit , particulièrement au vi- fage, fans q'ie l'on pût découvrir l'auteur d'un coup fi hardi. On ne manqua pas d'en aceufes OCTOB Alcibiade , & les foupçons contre lui n'étoient pas fans quelque ron- dement:. Mais il eut beau demander avec inftance qu'on lui fît fon pro- cès s'il étoit coupable , (ans atten- dre qu'il tût abfent pour le perdre ; fes ennemis eurent le crédit de tai- re furfeoir le jugement , fous pré- texte que le départ de la Flotte ne pouvoir fe différer ; on mit donc à la voile , & l'on aborda en Sicile , où Alcibiade fe rendit maître de Catane par furprife. Après ce premier exploit , il fut rappelle par les Athéniens , pour être jugé fur l'accufation intentée contre lui, puis il fut condamné à mort par contumace. Mais il fe retira chez les Lacédémoniens, dont par la foupleffe de fon caractère il fut faire fes meilleurs amis ; gagnant fi bien au furplus les bonnes grâces de la Reine Timée , qu'il en eut un fils , nommé Leotychide , en public, mais que fa mère en parti- culier parmi fes femmes & fes amies ne rougiffoit point d'appeller Alcibiade. Notre Hifiorien n'ou- blie pas de faire connoître plus particulièrement au Lecteur le nou- veau Théâtre où fetrouvoit trans- férée la guerre du Péloponnéfe ; c'eft-à-dirc , la Sicile , dont il in- dique les diflercns peuples, &c décrit fur tout avec exactitude la Ville de Syracufe , dontle Siège formé pour lors par Nicias , que la mort de La- machus rendit bien-tôt feul Géné- ral des Athéniens , doit être regar- dé comme un des plus fameux dont ilfoit parlé dans l'Hiftoire Gréque. C'ctoit la dix-huitiéme année de la guerre. RE; 1732. j8r Nous ne fuivrons point M. Roi- lin dans le détail des circonftances de ce Siège. Nous dirons feulement que la Ville étoit prelque réduite à l'extrémité, &: furie point de capi- tuler, loifque l'arrivée de Gylippe , qui venoit de Lacedemone au fe» cours des Syracufains,ht bien chan- ger la face des affaires. Après divers avantages remportés par Gylippe , Nicias qui a voit informé les Athé- niens de la fituation ràcheufe où il fe trouvoit , en reçut un rentorc d'hommes & de Vaiffeaux conduits par Démofthéne & Eurymédon , qu'on lui envoyoit pour nouveaux Collègues. Ceux que les Athéniens lui avoient marqué de prendre, en attendant , parmi fes Officiers pour cette fonction , l'engagèrent mal- gré toute fa répugnance , à donner un combat Naval , où il fut vaincu. Peu de tems après , le fecours étant arrivé avec Démofthéne , les Athé- niens furent battus par terre , & perdirent en cette occafion deux mille hommes ; ce qui les jetta dans une extrême conftemation. Ils ha- sardent un fécond combat naval, où ils font encore défaits ; ce qui leur fait prendre la refolution defe retirer par terre. Enfin vivement pourfuivis par l'ennemi , ils font obligés de fe rendre à diferetion ; les deux Généraux Nicias & Démo- fthéne font condamnés à mort & font exécutés , malgré l'oppohtion de tout ce qu'il y avoit de gens fa- ges &c modérés à Syracufe : ce qui arriva la dix-neuviéme année de la guerre. Telle fut la fin de la mal- heureufe entreprife de Sicile , Se Ffffij 582 J OURNAL D » Ciccron [ remarque M. Rollin ] » a eu raifon dédire , en parlant du » dernier combat naval donne dans » le Port de Syracufe , que c'clt - là « que les forces d'Athènes, auflï- jt bien que fes Galères turent rui- » nées Se coulées à fond ; £c que » c'elt dans ce Port que la gloire Se i> la puiffance des Athéniens firent » un funefte naufrage. Nous veici arrivés au quatrième Volume de cette Hiftoire, lequel renferme celle de zS années, dont les 8 premières appartiennent enco- re à la guerre du Péloponnéfe , Se dont le relie embralïe les plus nota- bles évenemens arrivés jufqu'à la dix-feptiéme année du règne d'Ar- taxerxe-Mnemon , deux ans après la paix d'Antalcide , ou depuis l'an du Monde 3591. jufqu'à 3619. L'Auteur divife ce Volume en cinq Parties : la première conduit l'Hi- ftoire Gréque depuis la défaite des Athéniens en Sicile, jufqu'aux pre- mières années d'Agefilas Roi de Sparte : la féconde roule fur l'entre- prife du jeune Cyrus contre fou frère Artaxerxe , &i fur la fameufe retraite des 10000 Grecs : la troiiié- me contient ce qui s'eft palfé depuis le retour des Grecs jufqu'à la mort du Catien Datame : la quatrième renferme un abrégé de la Vie de Socrate,fa condamnation & fa mort: la cinquième expofe ce qui concer- ne les mœurs & les coutumes des Grecs, principalement des Athé- niens 8c des Lacedemoniens. La déroute des Athéniens en Si- cile entraîna la révolte de prefque jous leurs alliez, qui les abandonne; ES SÇAVANS, rent pour le joindre aux Spartiates. D'un autre côté , Alcibiade s'étant mis en crédit par fes fouplclfes au- près de Tillaphemc, Satrape du Roi de Perfe à Sardes, & ne voyant plus de fureté pour lui parmi les Lace- demoniens, engagea ce Vice-Roi à favorifer fous main par nulle voies détournées le parti des Athé- niens. Ces bons offices rendus par cet exile à fes Concitoyens, mit les amis en état de ménager fon retour dans fa patrie , à condition qu'on y fubllitueroit l'Ariftocratie au gou- vernement populaire. On y établit donc celui des 400. que leur tyran- nie ht bien-tôt dépofer , ce qui ac- céléra le rappel d'Alcibiade. Après pluheurs exploits il rentra triom- phant dans Athènes , fut déclaré Généralillime , ex y fit ce:ebrer les grands M y Itères; puis il partit avec la Flotte. On lira chez l'Hiltoriea avec beaucoup de plaifir les circon- ftances de ce retour d'Alcibiade. D'autre part , les Lacedemoniens allarmés d'un tel événement , &C redoutant les heureux fuccèsde cec Athénien , lui oppoferent en la per- fonne de Lyfandre un Amiral très- experimenté. Celui-ci battit près d'Ephéfe la Flotte des Athéniens en l'abfcnce de leur General : & quoi qu'on ne pût légitimement rendre Alcibiade refponfable de cet échec, puifquc fes Lieutenans avoient en- gagé l'action contre la détenfe ex- prelle, les Athéniens, (uivant leur légèreté ordinaire, ne lailkrcnt pas de lui ôter le commandement , 6c le confièrent à dix Généraux. Les Lacedemoniens en firent au- OCTOB tant par rapport à Lyfandre , & lui firent fuccedet Callicratidas , qui après plulieurs victoires remportées fur les Athéniens, perdit contt'eux la bataille navale des Afginufes , l'une des plus mémorables qui le foient données entre les Grecs , Se dans laquelle il y eut du coté des vaincus plus de 70 Galères , ou prifes ou coulées à fond. Les Athé- niens ne jouirent pas long-tems de leur triomphe, Se Lyfandre ayant été rétabli Général de la Flotte La- cedemonienne , remporta , près d'Aigos-Potame , une célèbre vic- toire fur celle d'Athènes , com- mandée par Conon , qui fefauva; prit tous les autres Généraux , fit jooo prifonniers qui turent tous égorgés ; ce qu'il eut le bonheur d'exécuter avec très -peu de perte 8c en très-peu de tems , ayant ter- miné dans l'cfpace d'une heure, par cet exploit l'un d^s plus fignalés dont l'Hiftoire fade mention , une guerre qui avoit duré 27 ans. Car après cette expédition , il vint met- tre le Siège devant Athènes , la contraignit de capituler Se de fe (S "tendre , en fit démolir les murail- les au fon des Huttes Se des trom- pettes , y changea la forme du gou- vernement, Se y établit 30 Archon- tes ou plutôt 30 tyrans. Ainli finit la guerre du Péloponnefe , Se ce fut vers ce tems -là que mourut Darius-Norhus Roi de Perfe, après un règne de 19 ans. Cela eft fuivi du récit des trou- bles domeftiques arrivés à la Cour de Perfe au commencement du rè- gne d'Aitaxerxe-Mnénion ; de la RE, 1752. 5-8^ mort d'Alcibiade , dont l'Hifto- rien étale dans un magnifique éloge les vertus Se les vices ; des arTreu'fes cruautez exercées à Athènes par les 30 Tyrans , qui font mourir Thera- méne un de leurs Collègues , parce qu'il étoit ennemi des violences » du retour de Thrafybule à la tête des Athéniens fugitifs, lequel fe rend maître de la Ville , en chalfe les Tyrans , Se y rétablit la liberté î des fecrets deffeins de Lyfandre pour fe faire Roi de Lacedemone &c„ Nous nous fommes arrêtez fur ls guerre du Péloponnefe , Se nous avons cru devoir en tracer ici une idée fuivie, parce que cette partie de l'Hiftoire Gréque eft moins uni- verfellement connue. Il n'en fera pas de même de l'expédition du jeune Cyrus contre fon frère Arta- xerxe Roi de Perfe , & de la fameu- fe retraite des 10000 Grecs qui l'a- vaient fuivi. Comme le détail de ces deux évenemens eft beaucoup moins ignoré , nous n'en dirons au- tre chofe , finon que M. Rollin donne un précis très-exact de la Re- lation que Xenophon nous en a laiflee , Se qu'il joint à cet abrégé , félon fa coutume , les reflexions utiles Se intereffantes , d'où refulte le principal fruit qu'on doit recueil- lir d'une étude férieufe de l'Hiftoi- re. Il a fait graver une Carte des Pays parcourus dans cette expédi- tion & dans cette retraite. M. Rollin continue à raconter l'Hiftoire des Grecs jufqu'à la paix d'Antalcide Se celle des Perfes juf- qu'à la guerre conue Datame inclfc y84 JOURNALD iivemcnt. Les perfonnages qui y paroiffent avec le plus d'éclat font Lyfandte Se Agefilas, du coté des Lacedemoniens, Conon du côté des Athéniens , & Datame du côté des Barbares. Agefilas appuyé de fon mérite Se du grand crédit deLyfan- dre , tut élu Roi de Lacedemone après la mort de fon rrere Agis , au préjudice de fon neveu Leotychide, à qui la Couronne appartenoit, & que le foupçondebâtardife en ex- clut. L'Hiftorien donne d'abord le caractère de ce grand homme , qui ne peut s'abréger , Se qu'il faut lire en entier. Ce fut en Ane qu' Agefi- las fit fes premiers exploits. Lyfan- dre l'y avoit accompagné, mais il fe brouilla bien-tôt avec lui , Se re- vint à Sparte. Le motirdes Lacede- moniens dans cette guerre d'Alîe étoit d'affranchir les Villes Gré- ques de l'Ionie de l'oppreffion du Roi de Perfe. Agefilas , à qui Lacedemone avoit confié le commandement général des ar- mées de terre Se de mer , avoit fait pendant deux ans des progrès fi rapides , qu'ils étoient capables d'allarmerle grand Roi. Heureufe- ment pour lui une Ligue de plu- fieurs Nations de la Grèce contre les Lacedemoniens i rappella brufque - ment Agefilas au fecours de fa Pa- trie. En attendant l'on retour, les Lacedcmoniens battirent les Con- fédérés près de Nemée , Ville dans le voiiinage de Corinthe. Mais peu de tems après la Flotte de Sparte fut défaite à la vue de Cnidc, p;r celle des Perfes que commandoit Conon Athénien. ES SÇAVANS, Les Lacedcmoniens eurent bien- tôt leur revanche à la bataille de Coronéc , qu'Agefilas gagna contre les Thébains , Se apris laquelle il retourna victorieux à Sparte, où il ne relâcha rien de la limplicité de fes mœurs anciennes. Conon ,' d'autre part , fécondé par le zélé des Thébains , releva en peu de tems les murs d'Athènes , rétablie cette Ville dans fa première fplen- deur , & la rendit plus formidable que jamais à fes ennemis. La dou- leur que les Lacedemoniens en conçurent leur fit prendre lâche- ment la refolution de fe venger en même tems Se d'Athènes Se de Co- non fon Refhurateur, en faifant la paix avec le Roi de Perfe. Ils char- gèrent de cette négociation leur Amiral Antalcide, qu'ils envoyè- rent au Satrape Teribaze , Se qui , malgré les oppofitions de la plupart des Villes intereffées , conclut un Traité de paix à ces conditions hon« teufes pour la Grèce , Que toutes les Villes Gréques de'i'Afiedemeu- reroient foûmifes au Roi , Se que toutes les autres , tant petites que grandes, conferveroientleur liber- © té, le Roi ouue cela retenant la poffeflîon des Ifles de Cvpre Se de Clazomene , 6c lapant celles de Scyros , de Lem os , Se d'Imbros aux Athéniens , a qui elles app.irte- noient depuis long -tems ; promet- tant au furplus de fe joindre aux peuples qui recepteroient le ire la guerre par terre . ceux qui refufe- roient d'j entrer, CVtoit Lacede- mone même qui avoit propofé de O C T O B telles conditions. On verra , d'un autre côté, la guerre d'Artaxerxe contre Evagore Roi de Salamine en Cypre; qu'il fait attaquer par une armée de 300000 hommes , fous la conduite d'Oronte fon gendre , Se par une Flotte de 300 Galères, qui a voit pour Amiral Teribaze , Perfan d'une grande Nobleffe Se d'une frandc réputation : (es Perfes battus 'abord par mer Se par terre , puis vainqueurs dans une bataille navale Se affiégeant Salamine , qu'ils con- traignent de capituler , à condition qu'elle reliera féale de toute l'Ifle au pouvoir H'E vagore avec le titre de Roi Tiibut3Ke d'Artaxerxe : l'é- loge & le caractère d'Evagore , tracé d'après l'Orateur Ifocrate : l'affaire de Teribaze aceufé par Oronte d'avoir confpiré contre le Roi de Perfe , puis déclaré inno- cent : l'expédition d'Artaxerxe con- tre les Caduhens 3 où ce Roi efluya RE, 173 2. jSf la difette la plus affreufe , & qui fc termina enfin félon fes fouhaits par le ftratagême dont s'avifa Teribaze: les exploits de Datame Gouverneur de la Leuco-Syrie , fa révolte con- tre le Roi de Perfe, que les ennemis de Datame avoient indifpofé contre lui iSc fa mort. Nous ne dirons rien ici de i'Hi- ftoi-re abrégée de Socrate , qui n'eft pas le morceau le moins tra- vaillé de ce Volume , foit pour le fonds hiftorique, foit pour les refle- xions pleines de folidité^ de julref- fe , en un mot , dignes de M. Roi- lin. Il faut lire cette hifloiredans toute fon étendue' ; elle perdroit trop à être réduite en extraits. Nous renvoyons à un autre Jour- nal le dixième Livre, qui termine ce Volume , Se qui roule fur les mœurs Se les coutumes des Grecs particulièrement des Athéniens Se des Lacedemoniens. CONTINUATION DES MEMOIRES DE LITTERATVRE & d'Hiftoire. To>ne XI. Partie II. A Paris, chez Simart , Libraire- Imprimeur de Monfeigneur le Dauphin, tuë S. Jacques , au Dauphin. 1732. vol. in-\i. pp. 478. DA NS le Journal du mois de Mai dernier , nous avons donné l'extrait delà première Par- tie de ce onzième Volume : il nous tefte à donner celui de la féconde. Elle contient huit articles ; le pre- mier , eft la Vie d'Auger de Guifc- lin , Seigneur de Bufbec ; le fécond, les Lettres du même Augcr ; le troifiéme , un Projet de Diflerta- jâQn fui l'Ode ; le quatrième, un Eflai de Syftême fur ladéclinaifoei del'aiman; le cinquième, une Let- tre A. M. B. C. de l'Eglife de Saint Flour ; le fixiéme, une autre Lettre à Dom Lamy Prieur de Beaulieu , fur quelques fingularitez du Rituel de l'Abbaye de Beaulieu ; lefeptiéme, une DifTertation fur les Vulpinales ; Se le dernier, une Queftion Hiftorique fur le fujse d'un, ancien Obéliique, S%6 JOURNAL DES SÇAVANS, Nous allons parler de ces huit Empereur Turc , ainfi qu'on le peut Pièces dans le même ordre que nous venons de les rapporter. i". Auger de Guifciin naquic à Comine , Bourg de Flandres 3 dont Philippe de Comine il connu par l'Hiitoirc qu'il a donnée, portoic le furnom. Son pereGillcsGuifelin, Seigneur de Bufbec furie Lis,étoit des plus anciennes & des plus no- bles Maiibns de Flandres. Il fit d'abord élever fon fils fous fes yeux pendant quelques années , après quoi il l'envoya fous la conduite de Jean-Baptifte Egnatius , faire fes études à Louvain , puis à Paris , enfuire à Vcnife , & enfin à Bolo- gne &à Pavie. Gilles de Guifelin étant mort , Dom Pierre Lafto Am- bafladeur de l'Empereur Ferdinand en Angleterre , informé des bonnes qualitez d'Auger , l'appella auprès de lui i ce qui fournit à Augcr plu- fieurs occafions de faire connoître fon mérite. On voit ici i°. comme Jean Vender de Aa , un des Confeillers Auliques , infpira. à l'Empereur , de faire venir Auger à Vienne , où il fe diftirigua fi fort par fa capacité , par fa prudence & par fa vertu, que l'Empereur & Maximilien fon fils, préféraient le confeil d'Auger à ce- lui de leurs autres Miniftres. 2°. Comme ils le choifirent pour Gouverneur des Archiducs Ma- thias , Maximilien , Albert & Ven- cellas. 30. Comme il fe diftingua par plulîcurs ambaiTades , dont la première & la féconde qui tut au- près de Soliman , lui attirèrent l'e- flime de la bienveillance de cet voir par les relations de l'une & de l'aucre , imprimées à Anvers , l'an CIO. DC. XX. On voit en quatrième lieu com- me le public efi: redevable a Auger de pluûeurs inferiprions anciennes de Grèce Se d'Alie , dont il fit part aux Sçavans : En cinquième lieu , comme après Ion retour de Conltantinople, il fut choifi pour conduire en France lfabelle d'Au- triche , mariée à Charles IX. En iixiéme lieu , comme l'Empereur Rodolphe II. le fit fon Ambalfa- deuren France auprès de Henri III. La Pièce fe termine par la mort d'Auger. Ce Seigneur à l'âge de 70. ans , ayant obtenu de l'Empe- reur fon maître,quelques mois pour revoir fa patrie , prit fa route par la Normandie, où peu de jours enfuite fentant fes forces diminuer , il fe fit tranfporter à S. Germain ( gros lieu de cette Province ) il y fut reçu dans la maifon d'une femme de qualité , Dame dcMailloce , où il mourut onze jours après , l'an 1 592. le 5. des Kalendes de Novembre. Son corps fut enterré dans l'Eglifc de S. Germain avec beaucoup de pompe-, fon cœur embaumé dans une caille deplomb,tut porté à Buf- bec , & dépofé dans le magnifique Tombeau de fes pères. L'Auteur remarque ici qu'aux quatre Lettres de l'AmbafTade d'Auger en Turquie, lefquellcsont été miles au jour par Platine fous le titre des voyages de ce Seigneur à Conftantinople & à Amafie, on a joint fes Mémoires aux Princes Chrétiens OCTOB Chrétiens pour les porrer a faire la guerre aux Infidèles. On avertit encore qu'il avoit écrit un Livre de la véritable Noblclîe , mais que ce Livre ne fe trouve point. Les Lettres d Auger de Guifelin qui font le fécond article de ce Re- cueil ont été écrites dans le cours de fon Ambaflade auprès d'Hen- ri III. tv font adrelTées à l'Empe- reur Rodolphe II. dont il étoit Ambaffadeur. On les donne tra- duites de l'original Latin au nom- bre de cinquante - deux. C'efl: à M. l'Abbé Bécbet Chanoine d'U- fès , natif de Clermont en Auver- gne , qu'on doit cette Traduc- tion. M. l'Abbé Bechet cft mort en 173 z. âgé de foixantecv treize ans. Nous nefçaurions entrer dans le détail d'un fi grand nombre de Let- tres ; nous nous contenterons d'en citer quatre, &: encore fera-ce par fragmens pour éviter la longueur; ces Lettres feront la huitième, la neuvième , la dix-huitiéme Se la quarante - deuxième. Elles nous ont paru plus fufcepubles d'abrégé que les autres. Lettre y m. du i.Oftob. 1582. » On ne s'efr point trompé 3* quand on a jugé que le Maréchal a de Biron iroit joindre à propos le ,» Duc d'Alençon. Le Roi a donné » à ce General le Gouvernement de a Picardie. Il a ordonné de mettre » à couvert cette Province de toute » infulte. Les Commandans &. les » Gouverneurs doivent lui obéir. Octobre. R E , 1 75 2; J87 ■» On a de grandes efperances lur la » capacité de ce General. C'eft le » plus grand homme de guerre que » la France ait aujourd'hui. Il a ac- »quis une grande expérience dans » les armes. Il a été élevé pendant j) fes longs fervices à tous les de- » grez d'honneur de la Milice » Le Duc de Monrpenfier , père » du Prince Dauphin , eft mort » fort âgé. La mort de ion pere ue » l'a pas empêché de continuer fon » chemin en Flandres. »Salcede, dont j'ai parlé dans v> mes Lettres précédentes, vient de » fouffrir un cruel fuplice , je ne » fçai pour quel crime , mais il » étoit , fans doute , bien énorme , » pour avoir été condamné à un i> châtiment Ci extraoïdinaire. Je » n'en trouve qu'un feul exemple » dans toute l'Hiftoire Romaine, » qu'Hoftilius ht fourlrir à SufFef- » fius. Si ce malheureux a attenté à >» la vie du Duc d'Alançon ou à » celle du Roi ou à toutes les deux, w c'efl: ce que j'ignore. Il a été con- » damné à être tiré à quatre che- » vaux. Au premier effort des che-J n vaux , il a crié qu'il avoit encore u quelque choie à déclarer. Sa dé- » pofition ayant été reçue par le » Greffier , il a prié qu'on lui déta- » chat la main droite pour écrire » quelque chofe ou pour ligner fa » dépolition. Enfuite fa main ayant » été ratachée , les chevaux chacun » de leur côté , firent deux grands «efforts , mais qui ne purent l'é- » carteler. Dans ce tourment ayant » apperçu le Roi à une fenêtre , le- » quel regardoit fon fupphcc, avec Gggg SSS JOURNAL D » les Reines fa mère & fa femme , m il implora la clémence de Sa Ma- » jefté. On lui coupa la gorge , en- » fuite la tête , 8c on lui arracha le » cœur. Les chevaux enfin démem- »♦ brerent le refte de fon corps. Sa » tête a été envoyée à Anvers pour » être expofée au lieu le plus émi- »> nent. Voilà la fin d'un homme har- »di & méchant au dernier point. » Il avoit fabriqué delà faulTe mon- »noye, dont il avoit acheté une MMétairie:le Vendeur ayant reconnu »la friponnerie , en porta fa plainte »>au Roi qui le rétablit dans fon 3> Domaine. Salcede prit la fuite , » crainre d'être jette dans l'huile »j bouillante , fuplice décerné con- «tre les Faux-Monnoyeurs. M»is » auparavant il prit fes mefures » pour brûler cette Métairie, & peu » s'en fallut que le maître ne fût » confumé avec fa maifon. Le Roi » qui l'alla voir quelquefois dans fa w prifon , lui reprochant le crime «d'avoir voulu brûler un homme » qu'il avoit déjà trompé par fes » faux écus , Salcede répondit à Sa » Majefté: j'ai voulu rôtir un hom- » me qui m'avoit voulu faire bouil- » lir. Quel caractère d'efprit , de » plaifanter fur le point d'une mort » cruelle ! Je crains que ce malheu- » reux n'ait donné de mauvais » foupçons contre le frère du Corn- ât te d'Egmont. ES SÇAVANS, »ra pour obferver les defleins cklcs » mouvemens du Prince de Parme, » dont on dit que l'armée diminue » tous les jours par la faim & » par la pefte. Ce Courier de Flan- » dres, que j'ai dit avoir été retenu, *» ayant donné bonne caution qu'il »» n'étoit chargé que de Lettres de h Marchands , a eu la liberté d'al- » 1er en Efpagne. L 'A mba (fadeur »de cette Nation, oftenfé que la » tête de Salcede , par ordre du » Roi , fût envoyée à Anvers pour n y être expolée au lieu le plus émi- »> nent , en a porté [es plaintes à Sa a Majefté : Anvers n'eft point de fa «domination. Le Roi qui nes'at- » tendoit pas à cette plainte , ne >j put répondre finon qu'il avoit » envoyé cette tête au Duc d'Alen- » çon fon frère , pour en faire ce » que bon lui fembleroit , tk qu'il » en feroic des petits pàtez , s'il » vouloit Le Roi recom- «mence fes pèlerinages : il va à » Notre-Dame de LieiTe , fur les »> confins de la Champagne , du co- nté de la Picardie. On conjecture » que c'eft pour être redevable à la » Sainte Vierge, de la joye qu'il au- » ra d'avoir un héritier. On dit que »le Roi a donné fes ordres en Bre- »»tagne pour y conftruire 50. Gale- » res. On a d'autres afluranecs » qu'on mettra une grande Flotte » en mer. Lettreix. ^«15. Novemlr. \ $% 1; Lettre xv ni. du 20. Maix^l^. » Le Maréchal de Biron s'eft »> Le Roi a inftituéune • campé fur les bords de la Rivière » nouvelle Confraine, fous le nom » de Somme j on croit qu'il y refte- » de Flagellans , ou Pénitens : on O C T O B » ne parle d'autre chofe dans route «la Ville ; fur tout depuis qu'un »» Prédicateur très-celebre , quoi- wque bon Catholique , s'eft avifé » de lâcher quelques mots contre 19 cette Inftittition nouvelle. Le »> Roi, par l'infpiration de quelques «Confrères , a banni ce Prédica- «teur. Mais ce qui eft ridble, eft » que les Laquais qui font en grand » nombre au fer vice de la Noble (Te, » ayant dans le Louvre , contrefait, n pour fe divertir , les Proceffions » de cette Confrairie, le Roi en fit «prendre environ quatre-vingts, «qu'il fit fuftiger d'importance » dans la cour des cuifines. Ils em- »> portèrent avec eux les marques » effe&ives des flagellés , qu'ils n'a- » voient prétendu reprefenter » qu'en fiction. Lettre xlii. du 4. OBobre 1584. » J'ai peu de matière pour une » Lettre , cependant je dois remplir » mon devoir , 5c profiter du tems. » Le Roi eft de retour de Lyon , » fans y avoir rien fait de remar- quable. Il a refté quelque tems au » Bois de Vincennes , qui eft une » de fes Maifons de Campagne : il « y fait bâtir une Eglife qui fera » deiTervie par des Religieux de » l'Ordre de S. Jérôme, & où lui » & les Pénitens qu'il a inftitués , «feront leurs exercices. Cependant « il eft toujours appliqué à reformer » les mœurs &c à punir les délits , «fur tout de ceux qui pour leurs «propres intérêts, ont diverti les »> Finances du Fiic 6c de fon Tre- R E, 1752. y8p « for , dont le nombre eft fort » grand dans toutes les Provinces. » Il ne pardonne pas même aux «premiers Miniftrcs. La crainte » fait prendre la fuite à plufieurs. » Apres cette reforme, il en vien- » dra à celle de ces Cours , qu'on » appelle Parlemens , pour leur "faire rendre compte de quelle » manière ils ont adminiftié la Ju- »ftice, & rendu leurs jugemens ; » car on prétend que ces Compa- »gnies font dans une corruption , » à laquelle il eft absolument ne- nceffaire de remédier. Le Roi n'a » pas plus d'autorité dans le Royau- «me, que celle que ces Chambres » s'attribuent. Ayant droit de punie » ou de faire grâce. *> Le Cardinal de Bourbon ^ » quoique dans un âge décrépit, ne » paroit pas difpofé à remettre au »> Roi de Navarre, fon neveu, la » fuccellion à la Couronne. Il pan- >»che pour le p.irci des Guifes ; leur «autorité eft fort grande, & une par- » tie du Royaume fe déclare en leur » faveur. On a même publié que ce » Cardinal devoir renvoyer fon » Chapeau & la Pourpre , &épou- n fer la veuve du Duc de Montpen- » fier , fœur des Guifes. On peut, par ces quatre exem- ples , juger du caractère & du ftyle des autres Lettres. Le Projet de Diflertation fur l'Ode , qui eft le troifiéme article dont nous avons à rendre compte fut compofé dès le tems que M. de la Motte, de l'Académie Françoi- fe , publia fon Ode fur l'Enroufiaf- me.On a différé jufqu'ici à le mec-. s9o JOURNAL DE tre au jour , pour ne taire , dit-on , aucune peine à petfonne. Mais comme il ne contient rien de per- fonnel , l'Editeur avertit qu'il a cru enfin pouvoir le donner au public , foie afin que le public profite de ce que ce petit Ouvrage peut avoir de bon , (oit pour le foûmettrc à la critique de ceux qui pourront four- nir de plus grandes lumières fur le même fujet. Il s'agit ici des proprie- tcz de l'Ode, mais particulièrement du defordre que l'on prétend con- venir à ce Poème , &c de l'enthou- iiafme qu'on en regarde comme la principale beauté. M. de la Motte , à ce qu'on foûtient dans le Projet , tombe fur cette matière , en quel- ques erreurs de fait , & en d'autres , qu'auffi-bien que celles-là , l'Au- teur qualifie d'erreurs furprenantes. Selon M. de la Motte ( Se on ren- voyé là - deflus à l'Ode dont nous venons de parler ) l'enthoufiafme ejl un égarement fondé fur la har.iicffe du Poète ; les règles de l'Ode font ti- mides, & ne s'accordent pas avec l'enthoufiafme ; en fuivant l'exem- ple des Auteurs qui ont donné dans l'enthoufiafme , on fe Uûfferoit con- duire a un tranfport indiferet. Enfin, l'enthoufiafme & la raifon ne s'ac- cordent pas ; & demander de Cen- thoufiafme à l'Auteur , c'eft lui de- mander qu'il s'égare. Notre Auteur ne trouve rien de folide dans tout ce difeours : il pré- tend i°. Que les tranfports qu'on demande dans l'Ode font très-rai- fonnables ; 20. Que les règles les approuvent, & même 1 .s exigent en certains cas j 30. Que ces règles S SÇAVANS, n'ont rien de timide , & que com^ me elles ont été formées fur les heureufes productions des plus grands génies , les exemples qu'on en prclentc dans les Auteurs ne conduifent qu'à la raifon. Il veut que pour fc faire une jufte idée de l'enthoufiafme , on le re- garde comme un eff-.t , ou comme l'image d'une noble & aimable yvref- fe ; ou félon les termes d'Horace , comme une noble & aimable folie > fur ce principe il prétend qu'on rendra raifon de tout ce qui regarde l'enthouiiafme. On dit ici queM.de la Motte fuit l'enthouiiafme à caufe des louan- ges que le Poctc s'y donne -, on ré- pond à cela que l'enthouiiafme peut fubfilter fans louanges, cvd'ail- leurson demande s'il ne ffauroit y avoir des vins modeftes , comme il y a des vins dévots ? On remarque à ce fujet , qu'Horace ne fe compare qu'à une Abeille lorlqu'il compare Pindare à un Cigne. Ce qui elt un trait de modeftie. Mais en quoi proprement l'en- thoufiafme paroît-il.'' Il paroît , félon notre Auteur , non par des chofes jettées fans raifon dans un Ouvrage , mais par les termes nou- veaux &: hardis , parles comparai- sons deftitueesde leurs applications, finon dans la penfée, du moins dans l'expreffion > il paroîr parlesmétha- phores , les hyperboles ou tranfpo- fitions, & autres figuresqui mar- quent la faillie : il paroît par une certaine négligence dans la Syntaxe iv dans la conftruclion; par la fubli- miri de la difpofition & de l'oidont O C T O nance ; par la licence des nombres & des mefures dans les vers ; par les penfces imprévues fk nouvelles; par les faillies qui portent fubite- ment d'une confulération à une au- tre ; & dans des digtcmons ; il pa- roît par le changement des perlon- nes , lorfqu'on pa(Te par exemple , de la première à la féconde , ou à latroihéme, ou de la troifiéme à la féconde. L'Auteur du projet de- mande s'il y a rien en tout cela , qui ne convienne avec un beau feu d'imagination , à une aimable folie t ou à une noble yvreffe ? Il veut ce- pendant qu'une raifon exacte gou- verne cette folie ou cette yvrefle 11 cenvoye fur cela aux Oracles de la Sybille dans le fixiéme Livre de l'Enéide , & aux Pfeaumes de Da- vid. Il foûtient qu'on y voit tout ce qu'il vient de remarquer, & qu'on l'y voit accompagné d'un caractère de raifon auquel on ne pourra ja- mais appliquer ce que M. de la Motte die de l'enthoufiaf me. LaMufe de ce Poète ne veut point donner dans les faillies , pour n'être ni une Bâchante , ni une Pythie. Ces paroles engagent notre Au- teur a demander 11 on croit qu'une Mufe pnilTe défavoiïer les vers de la Sybille dans Virgile , ou l'Ode par laquelle Horace feint de voir les Menades, ou enfin les vers de l'A- thalie de M. Racine , dans lefquels ce Poète fait prophetifer par Joïada la grandeur future de l'Eglife. Il allure que ni Virgile, ni Horace , ni M. Racine , ni Pindare n'ont quitté la raifon dans leurs enthou- fiifmes, comme la Mufe de M. de B R E , 1732; j-j>i la Motte fait entendre qu'on la quitte dans les faillies dont il s'agit. La Mufe de ce Poète , lui dit : ne fongez. qu'à charmer Us fages.Cct avis paroit abfolument hors de pro- pos à l'Auteur du Projet , qui re- marque que c'en: pour les fages mêmes que font les iaillies dont il s'agit. Nous panons plufîeurs autres traits de critique pour obferver avec notre Auteur , que le vrai en- thoufiafme a été dans les Prophètes} qu'on le trouve dans les Cantiques de Moyfe & de Zacharie £c dans la plupart des Prophéties, comme dans la plupart des Pfeaumes Dieu parlant de la vanité des Oracles des Nations , dit que c'efl lui qui met les Devins en fureur. On examine ici ce paffage Si on remarque 1 °. Qu'il ne peut s'entendre que de la per- miflion que Dieu donnoit aux Dé- mons, d'imiter fur les Devins fon opération fur l'efprit des Prophè- tes : 20. Qu'il n'eft pas furprenant que les Démons puiflent faire imi- ter l'enthoufiafine aux hommes } puifque les hommes font capables de l'imiter naturellement comme les faux Prophètes l'imitoient , comme Virgile l'a imité dans les Oracles de la Sybille, & M. Raci- ne dans fon Athalie : 30. Qie les Odes enthoufiafmées ne pa'oiiïent qu'une imitation des vrais enthou- fiafmes: 40. Que cette reflemblan- ce & l'excellence de la chofe ont été un légitime fondement pour donner ce nom aux faillies de l'O- de, & même à celles qu'on voit quelquefois dans les dilcouis en S92 JOURNAL D profe : 50. Qu'il J a quelque chofe de très-grand dans ces mouvemens de l'ame ; outre que Dieu cil l'Au- teur de cette grandeur & de cette beauté de génie : 6°. Qu'il ne faut pas s'étonner qu'une difpofition d'efprit qu'on regarde comme une efpece d'yvrefle , foit regardée comme une infpiration , quand on voit que l'infpiration des Apôtres fut regardée comme une y vrefle. Nous laiflons aux Lecteurs à ju- ger de cette dernière reflexion. Notre Auteur ayant toujours en vue de juftifier le nom d'yvrefle , qu'il donne à l'enthouiîafme , dit que les digreflîons de Pindare & d'Horace, toutes utiles au fu|et, ou utiles en elles-mêmes , imitent Vyvrejfe qui fait qu'un homme , à l'occafion d'une penfée ou d'un mot accefloire , perd de vue Ion premier fujet , & s'attache à cette penfée ou à ce fujet accefloire , &C revient enfuite à (on premier objet, que quelquefois il n'y revient plus, content de nous avoir mené dans un Pays plus beau que celui qu'il promettoit : Que telle eft cette Ode où Horace parle contre les premiers Auteurs del'artdenaviger , laquel- le commence par ces mots , illt ro- bur & as triplex , &c. & cette autre où il fe jette fur l'avanture d'Euro- pe , laquelle commence par impios parthe , &c. On prétend que M. de la Motte n'a pas du defordre de l'Ode une idée plus juûe que celle de l'en- thoufiafme ; il fait confifter ce de- fordre dans le retranchement des liaifons grammaticales , & il pré- ES SÇAVANS, tend en cela , ne fuivre que les lu- mières de la raifon. Maisonfoû- tient qu'il y a d'excellens difeours dépouillés de liaifons, & néanmoins fans defordre, & des difeours pleins de defordre , & néanmoins char- gés de liaifons. On cite pour le pre- mier cas, les Satyres & lesEpitrel d'Horace , lefquelles en cent en- droits , font dépouillées de leurs liaifons grammaticales , fans que perfonne fe foit encore avifé de dire qu'on y trouvât ce defordre qui convient à l'Ode. On cite pour le fecond,cetteStance de l'Ode de NU Defpreaux fur Namur. Dans fes chantons immortelles, Comme un Aigle audacieux, Pindare étendant fes ailes, Fuit loin des vulgaires yeux , Mais , ô ma fidelle lyre ! Si dans l'ardeur qui m'infpire , Tu peux fuivre mes tranfports, Les chaînes des monts de Thrase N'ont rien oui que n'eftace La douceur de tes accords. On remarque que cette Srance a toutes fes liaifons, 6c que cependant il y a du defordre ; le defordre que notre Auteur y trouve confifte en ce que le Poète par les premiers vers , faifant d'abord croire qu'il va dire , je ferai mieux que Pindare dit cependant autre chofe dans la fuite , fçavoir : je ferai mieux qu'Or- phée , puifque c'eft Orphée qui eft le Poè'te de Trace , comme Pindare OCTOB croit le Poète de Beotie. On prend ici occafion de parler du defordre qui fe remarque dans un grand nombre des Pfeaumes de David ; dans le fécond , par exem- ple , qui commence en ces termes : D'où vient Ce bruit & ce fouleve- ment parmi les Nations ? Pourquoi les Peuples forment-ils de vains com- plots } &c. On voit là , dir notre Auteur , le feu divin du Prophète } & il fe montre dans toute la fuite. Ce même feu ,àce qu'il obferve , fe remarque dans la plupart des Prophéties ; il en cite un exemple , où il prétend que fe trouve tout ce qu'il attribue à l'Ode; c'eft la Pro- phétie que Dieu fit prononcer par Balaam , en ces termes : »> Voici ce que dit Balaam fils de »Beoor Voici ce que dit ce- » lui qui entend les paroles de » Dieu , qui a vu les vifions du « Tout-puiffant , qui tombe en ex- « tafe \ 8c qui , en tombant , a les » yeux ouverts ! Que vos pavillons » font beaux , ô Jacob ! Que vos » Tentes font belles, ô Ifraè'l ! Elles jj font comme des vallées couvertes a» de grands arbres , comme des » Jardins fur le long des fleuves , »> Se toujours arrofés d'eau ; comme j» des Tentes que le Seigneur même » a affermies , comme des Cèdres m plantés fur le bord des eaux ! Sa » pofterité fe multipliera comme •» l'eau des fleuves. Son Roi fera «•dans une grande élévation ; Dieu » l'a fait fortir de l'Egypte & fa » force cft lemblable à celle du "Rhinocéros. Ils dévoreront les r> peuples qui feront leurs ennemis 3 RE, 1732: s?} » ils briferont leurs os , & les per- » ceront de leurs flèches. Quand il » fe couche , il dort comme un » Lion , ou comme une Lionne que » perfonne n'ofe éveiller. Celui » qui te bénira , fera bent lui-mè- » me , & celui qui te maudira , fera » regardé comme maudit. Notre Auteur admire dans ces paroles , 1 °. la confiance d'un homme infpiré & en extafe fans perdre la raifon ; 20. Ces deux apo- ftrophes fubites qui excitent l'atten- tion &c le raviffement : j°. Ces ima- ges gracieufes de vallées, dejardtnsy de cèdres toujours arrofés , images interrompues par l'idée de la pro- tection de Dieu3ce qui joint la for- ce à l'agrément : 40. Le cours de cette poflerité t cette élévation de fes Rois , cette fortie d'Egypte , & enfin cette comparaifon du Rhino- céros : 50. Ce partage inopiné de la deuxième perfonne qui eft dans les apoftrophes , à la troiiîéme , & en- fuite du nombre iîngulier au plu- rier : 6°. Le retour fubit du plurier au fingulicr : dans ces mots:Quand il fe couche : j°. Ces images nouvel- les : auffi terrible dans la paix.qu'un Lion qui doit , ou qu'une Lionne : 8°. Le contraire de ces images avec les précédentes qui n'ont rien que de gracieux : 90. Cette apoftrophe nouvelle: Qui te bénira, Sec. la- quelle eft fi propre pour marquer une protection éclatante du Ciel. Tout cela renferme , félon notre Auteur, une parfaite idée de l'Ode, de fon enthoufiafme , & defon de- fordre. Au refte, fi dans tout ce qu'il 594 JOURNAL DE vient de dire on trouve quelque chofe à reprendre , il piic qu'on le roture , ou qu'on lui montre quel- que choie qui foie plus digne & plus capable de plaire aux fages. L'Essay du Syftêmc fur la décli- naifon de l'Aiman cil une Picce tore courre, à la prendre comme nous allons faire , a l'endroit précis de la queftion , après toutefois , qu'avec notre Autour, nous aurons dit un mor de ce que c'eft que cette décli- naifon. Quelque pente qu'ait l'Aiman à fc tenir dans la ligne méridionale, enforte qu'il y aie un coté qui re- garde le Septentrion , Se un autre le Midi i ( ce qu'on appelle ordinaire- ment le paralelifme de l'Aiman) il ne laille pas quelquefois d'aller pour ainfi dire contre fan penchant, de manière qu'on l'a vu tendre tantôt du côté de l'Occident , Se tantôt du côté de l'Orient. C'eft ce qui s'eft remarque fur tout dans l'ai- guille aimantée qui en différons tems a été fujette à ces variations. Par exemple , fous Charles IX. el- le déclinoit du côté de l'Orient , d'environ 4 degrez ; peu de tems après fous Henri III. elle paroilloit entièrement parallèle à l'axe 6V aux pôles du monde; dans la fuite fous Henri IV. elle commença à décli- ner dii côté de l'Occident, Selon les Mémoires de Meilleurs de l'Acadé- mie des Sciences , cette déclinaifon a toujours été en augmentant ; les Obfervations de Meilleurs de la Hire perc Se fils Se de M. de Lille en font foi. Cette variété de décli- naifons dans l'Aiman étant donc S SÇAVANS, furc , à n'en point douter , il n'é- toit pas naturel de laillcr un fait de cette confequenec fans en chercher lacaufe. ht c'oll à quoi s'eft appli- qué l'Auteur de cet Elfai. Il com- mence d'abord par écarter ce qui n'eft pas de la qucltion , après quoi il vient au fujet qu'il s'eft propofé , Se voici en abrégé (on Syftcme» qu'il donne , dit-il , à tout hazard. La terre en tournant autour du Soleil , prefente toujours les mêmes faces aux étoiles pohires ; ce mou- vement qui s'appelle le paralelifme de la terre , étant une lois fuppofé , il ne s'agit plus que de voir fi on peut vraisemblablement , en don- ner un pareil à la terre ; car en cas qu'on le puiffe , on aura trouvé une caufe fixe & permanente d'un effet qui a les mêmes qualitez , ce qui eft le but qu'on fe propofe dans cet Effai. La terre coniiderée par rap- port au mouvement dont nous ve- nons de parler eft un aiman gênerai, Se ce principe établi, l'aiman de fon côté pourra être regardé comme une efpcce de terre , qui a fes pôles, fon équateur , fon cercle méridien , fon tourbillon , Se fon athmofphe- re , comme la terre. En gênerai tous les Philofophes , félon notre Auteur j conviennent que la meil- leure manière d'expliquer la vertu directrice de l'aiman par laquelle il fe tourne toujours du côté du Sep- tentrion , eft de l'attribuer à une grande abondance de matière élé- mentaire , un peu craffe Se épaiffe , qui fortant des pôles du monde , entre avec impéruofité par un de ceux de la terre , Si, en reflort pat l'autre. On O C T O B On s'appuye ici de l'expérience qui tait voir que l'aiman cire toute fa force & route fa vertu de la terre, ce qui fe ceconnoit par l'inclinai- fon de l'aiguille aimantée , qui du côté qu'elle regarde le pôle le plus proche , baille davantage vers la terre; raifon pourquoi plus on s'é- loigne de l'équateur , Se plus on doit charger de cire le côté de l'ai- guille le plus éloigné du pôle , Se en même tems raifon pourquoi quand on fe trouve directement fous l'Equateur, on ôte entièrement la cire. De cette liaifon ou union intime entre l'aiman Se la terre, doit ne- ceffairement naître, félon notre Au- teur , un commerce fingulier entre les deux , de forte cependant que ce commerce fe falTe avec une entière fubordination de l'aiman à la terre. C'cft-à-dire j que fi l'aiman dépend abfolument de la terre il doit en emprunrer tous les mouvemenSjinê- me fe mouler fur fes différentes fi- tuationSj&que s'il en emprunte tous fes mouvemens , la même caufe qui produit les Phénomènes du mou- vement de la terre , Se fur tout la variation dans fon paralelifme, doit produire ceux de l'aiman , & fon changement de paralelifme, d'où s'enfuit que fi le paralelifme de l'ai- R E, 1732. . S9t man ne fe trouve pas toujours dans la même fituation , c'eft parce que celui de la terre éprouve le même fort , n'y ayant pas d'apparence que l'aiman doive à la terre une partie de fes mouvemens , & qu'il ne lui doive pas l'autre. Comme on remarque du chan- gement dans le paralelifme de la terre, il feroit à fouhaiter que notre Auteur en développât la caufe pour en faire l'application à celui de l'ai- man , Se pour voir (1 la même caufe peut produire ces deux effets ; mais s'il ne le fait pas ici , il promet qu'il tâchera de le faire dans la fui- te , Se il y a lieu de croire qu'au cas qu'il ne donne pas d'abord là-de(Tus des certitudes , du moins on doic attendre de lui des conjectures très- raifonnables. En commençant l'extrait de cet- te féconde Partie du onzième Vo- lume de la Continuation des Mé- moires de Littérature Se d'Hiftoire, notre deffein n'étoit pas de le laifler imparfait ; mais ce que nous avons rapporté jufqu'ici nous ayant con- duit plus loin que nous ne penfions, nous croyons plus à propos de ren- voyer les autres Pièces à un autre Journal , d'autant plus qu'elles nous paroi (Tent de nature à mériter un Extrait à part. O&obre. Hhhh jo6 JOURNAL DES SÇAVANS, M. LUDOVICI-JOANNIS LE THIEULLIER IN Univcrfitate Pariiienlî , Facultatis Salubcrriniae Doctoris Regentis , Régis Coniiliarii , &. in Majore Coniilio Medici ordinani , Obferva- tioncs Medico-Praifticar. Parifiis , apud Carolum Ofmont , ad Infigne Olivx ; Petrum-Michaclem Huart , ftib Sigro Juftitiae , & Jacobum Clou/ter , fub Signo-Gallico , viâjacob.xâ. C'cft-a-dire : Obfervations de Médecine- Pnttiq ue , par Louis- Jean le Thieulher , Dotltur-Rîgent de l* Faculté de Médecine en IVniverfué , Confeilltr du Roi , & fait Médecin ordinaire dans le grand Confeil. 1732. A Pans , chez Charles Ofmont , à l'Olivier ; Pierre-Michel Huart t à la Juftice , & Jacques Cloufier , aux Armes de France, rué" S.Jacques, vol. /»-iz. pp. 395. L'Auteur dit dans fa Préface que c'elf ici fon premier Ouvrage ; ainh il a la modeltie de dilîimuler qu'il en a déjà donné un il y a quel- ques années ; lequel eft intitulé : Lettre a l'auteur des Obfervations & Réflexions fur la petite vérole , avec une Dijjertation fur cette xnala~ die & la manière la plus heureufe de la traiter. Par M.J. Louis le Thieul- lier Douleur- Régent de la Faculté de Médecine en i'Umverfiié de Pa- ris. %A Paris , chez, jac.jues Quil- lau j rué Gaiande. \~J"i.^. Quoi qu'il en foit , voici en quoi coniiftent les obfervations dont il s'agit : elles font diyiféesen vingt- une Sections, dont la première con- cerne l'Avortement ; la féconde , l'Efquinancic ; latroiliéme , l'Apo- plexie ; la quatrième , la Goûte; la cinquième , la Colique^ la fixiéme , les Convulfions -, la {eptiéme , la DylTenterie;la huitième, l'hryfipe- lc ; la neuvième & la dixième , les Fièvres; la onzième , l'Hydropifie;, la douzième , la Jaumile ; la trei- zième , le cours vicié des Règles ; J[a quatorzième, la Rougeole ; la quinzième , la Douleur Néphréti- que ; lafeiziéme, laParalyiie; la dix-leptiémc , la Péripacumonie ; la dix-huitiéme , la Phthide ; la dix - neuvième , la Pleurefie ; la vingtième , la petite Vérole & le Pourpre ; la vingt-unième, le Vo- rmdement. Nous ne fçanrions parler de tant d'articles : nous nous bornerons à celui de là Rougeole : il renrerme fix Obfervations : elles font datées , la première de 1724- là féconde ,U troifiéme , cv la quatrième de 171 5. la cinquième Si la hxiémede 17-7. ce que nous remarquons pour faire voir que l'Auteur rapporte fes Ob- fervations avec choix & dikerne- mert ; n'y avant pis d'apparence qu'en toute l'année Ï724. laquelle fut allez abondante en rougeoles ., il n'ait traité qu'une feule de ces ma- ladies ; qu'en 1725» il n'en ait trai- té que trois; qu'en 1726. il n'en ait traité aucune , & qu'en 1717. il n'en ait traité que deux. Car il faut . noter que ces Obfevations , non plus que toutes les autres du Livre, ne renferment aucun cas hngulier , OCTOB &C que l'Auteur les publie unique- mène, parce que la méthode qu'il y expole paroît lui avoir réulïî , & qu'il croie qu'elle pourra réullir de même aux autres. Ainfi les cas expofés ici par l'Au- teur , n'ayan: rien d'extraordinaire ni par rapport aux accidens de la maladie, ni par rapport à la cure , il eft à prefumer qu'il en aurait cité- un plus grand nombre , s'il n'avoir Voulu ufer de difeernement Se choifir ceux qui lui ont paru les plus favorables à 1a méthode qu'il a fuivie ; car dans ces obfcrvations non plus que dans toutes les autres du Livre , on n'en verra aucune où notre Auteur ne paroille avoir réuflï félon fes louhaits. Sur quoi nous remarquerons en pallant , qu'un Médecin expérimenté qui donne- roit des obfetvations où il expofe- roit également fes bons & fes mau- vais fuccès, pourrait taire en cela un Livre allez utile; mais pour ne pas nous écarter , voici les iix ob- fcrvations de notre Auteur fur la rougeole, elles fervironr d'exemples pour toutes lesiiitresdu Recueil. Nous les traduirons mot à mot pour ne les altérer en rien. Première Obfervation. Un garçon de 14. ans fut attaqué de la rougeo- le le 22. Décembre 1724. c'étoit le troifiéine jour de la maladie. Il paroiifoit fur la peau de petites éle- vures lenticulaires fous Informe de taches rouges, fub maculanimrubi- citndamm forma. Un écoulement de pituite fercule par le nez , un érer- nuëment fréquent &C une toux feche avoient précédés , après quoi étoit R E, 1732. ^97 furvemi enfin une enflure, des pau- pières. La fièvre étoit allumée , le ventre reilerré. On fît une ptifarjnc avec la farine de gramen & de fcor- fonaire ; on délaya dans chaque verre de cette ptifanne une cuil- ler de vin médicamenteux pré- paré avec le fucre , la canelle & la noix mufeade. Le 25e jour les cho- fes allant bien , je fus fpe&ateur & non acteur. Tout le pafîa de la mê- me manière jufqu'au 28. que la purgatiou fuivante fut preferite : Prenez miel aérien deux onces Se demi , huile d'amandes douces deux onces , dans un verre d'eau. Cela dégagea abondamment les inteftins , & abbailTa le ventre. Le dernier de Décembre, je fis avaler au malade une potion laxativc : Prenez deux onces & demi de miel aérien , & une once & demie de Syrop de pomme compofé. Faires de cela une potion à prendre en une fois. Voilà mot à mot la premiers obfervation de noue Auteur fur la rougeole. Voici la féconde. Le 13. de Juin 1715. je fus mandé par une Demoifelle de qualité , âgée de 24. ans, maigre , d'un efpritde feu, gaye , d'un temperamment fan- guin & bilieux ; du relt e fort petite mangeufe : cœ'.ero^mn ipfa minima cat efea. La fièvre l'avoit prife pour la première fois , le onze du même mois de Juin ; &c cette fièvre fut enfuite accompagnée , i°. de douleurs de tête d'abord alfez légè- res , mais qui après cela devinrent picquantes. 20. D'une pefante laiïl- Hhhhij yo8 JOURNAL D tude de membres. 3°. D'ardeur de reins Se d'éblouifïement d'yeux. 4°. D'une petite toux qui alloit Se venoit. Ces Symptômes me firent juger qu'il y avoir de ta malignité*, c'eft pourquoi je fis préparer une ptifan- ne avec la racine de gramen Se de feorfonaire , laquelle ptifanne , mê- lée d'un peu de vin, le bûvoit à pê- nes coups, mais fréquens. Il faut re- marquer que le tems des règles ap- prochoit. Or pour exciter une dou- ce Tueur la potion fuivante tut pré- parée : prenez eaux de chardon bé- nit, de feorfonaire Se de melifTe, de chacune une once} confection d'hyacinthe , un gros -, fang de bouc un gros \ fyrop d'oeillet une once : foit faite une potion pour trois doles, adonner à heures alter- natives. Il furvint une fueur loua- ble ; mais cependant la malade ne changea point de linge. Le quatotziéme jour je ne fus pas trompe dans mon attente : car fa peau de la poitrine parut couver- te d'un grand nombre de taches rouges : la toux étoir augmentée , mais la fièvre diminuée. La malade fc mit alors à buvotter par cuillerée de la potion fuivante. Prenez fper- me de baleine , un gros Se demi ; diffolvez-le dans 4 onces d'huile d'amandes douces. Soit faite une potion. La nuit fut tranquille, Se à la faveur du fommeil la toux s'ap- paifa. Le quinzième jour au matin toit: le corps , depuis la têce jufqu'aux pieds , fut couvert de rougeoles boutonnées. Je fis- préparer alors un E S SÇ AVANS, vin vigoureux qi'on rendit tel par un prudent mélange de fucre , de mufeade & decanclle. La malade , toutes les deux heures, buvottoic de cette mixtion , c'e outre cela on en mettoit une cuiller dans chaque quatrième coup de fa ptifanne. Les chofes réullîrcnt félon mes vœux. Sur le déclin du jour , l'évacuation périodique furviut ■, & tout fe pafTa dans l'ordre. Je continuai m 1 mê- me méthode tant à l'égard du vin Se de la ptifanne , qu'à l'égard de la nourriture qui ne tut point trop épargnée , mais au contraire : car le matin la malade mangea du pain trempé dans le bouillon du pot ; puis vers le milieu du jour , elle hu- ma un œuf frais , & le foi relie prie une grolle rôtie au vin 5c au fucre, fans oublier les bouillons. Lel£.la potion fuivante tut preferite : Pre- nez eau de Scorfonaire , 3 onces ; Svrop de guimauve une once Se de- mi. Soit faire une potion , pour prendre à cuillerée. Le 17. la petite vérole Se tous les fymptomes qui l'accompa- gnoient , commencèrent à difparoî- tre. Le 18. un lavement fait avec une décoction émolliente , Se avec trois onces de miel mercuriel , rendit le ventre libre. Le ii. l'évacuation périodique étant abfolument ceffee , le purga- tif fuivant fut ordonné pour le len- demain : Prenez Silique d'Egypte écrafée , 3 onces j Tamarinos , une once ; faites bouillir cela un tems fuffifant dans une livre Se demi d'eau, ajoutez -y deux onces & OCTOBRE, 1752. J95? demi de miel aérien, puis faites une Baleine, un gros Se demi ; diffol- colauue pour trois doles , entre lel- quelles on prendra un bouillon. Le ventre rut lâché comme il le falloir, & la fièvre chafîée. Le 25. la convalefcente fut pur- gée po'ir la dernière fois , avec ce qui fuit: Prenez Rhubarbe & Aga- rie , de chacun un gros ; Manne de Calabre , deux onces &demi ; Sel d'Epfon,deux gros; foit faite félon l'arc , avec demi livre d'eau, une potion laxative , pour boire en une fois. Troifième Observation, Le 27. Juin 1725. la noble fille d'un Tre- forier des Domaines du Roi , âgée de 19. ans , fut attaquée d'une rou- geole boutonnée. La fièvre étoit ar- dente , les yeux érincellans , &le corps abattu comme s'il avoïc effrayé un grand travail. Une roux fré- quente tourmentoit la malade j les règles avoient leur cours. Enfin tou- te la peau devenue rouge étoir cou- verte de bourgeons. Une ptifanne fut préparée avec la racine de gra- men , Se de Scorfonaire , dans cha- que deuxième verre de laquelle on mettoit un peu de vin de Bourgo- gne. La potion fuivante fut auffi compofee: Prenezeauxdechardon bénir, de Meliffe Se de Scorfonai- re , de chacune une once , Confec- tion d'Hyacinthe, un gros; Sang de bouc , un demi gros; Syrop de Tuf- filage , une once : foit faite une potion pour deux dofes. Le loir la fièvre fe calma , la toux s'adoucit, & la peau devint d'une moiteur convenable ; la po- tion fuivante fut faite : Speime de vez-le dans cinq gros d'huile d'a- mandes douces. Soit faite une po- tion pour être bûvottée par cuille- rée. Le 28. les chofes étant dans le même état , la même potion hui- leufe tut réitérée Or fur le foir la malade dit que fes règles l'avoienc quittée , règles au refte qui avoient, été comme il faut tant pour la quantité que pour la durée. Le 29. au matin on donna un lavement fait d'une décoction émol- lienre Se de trois onces de Miel Mercuriel ; la nuit luivante fut tranquille. Le 30. le ventre fe lâcha par le cathartique que voici : Prenez deux onces Se demi de Manne, dilîolvez- Ies dans une demi livre d'eau ; Se dans la colature délayez deux onces d'huile d'amandes douces. Soit fait un breuvage à prendre en un coup. Le 2. de Juillet, la rougeole étant dé|a bien loin , la potion la- xative fuivante fut préparée pour le lendemain : Silique Egypciaque écrafée, trois onces-, Manne, deux onces ; Sel de Glaubcr , un gros. Soit faite félon l'arr, avec une de- mi livre d'eau , une potion pour un feul coup. Le régime , dans tout le cours de la maladie , fut le même que celui de la féconde Obferva- tion. Quatrième Obfervatïon. Le huit de Juillet 1725- je traitai la fille cadette du même Tréforier des Do- maines du Roi , âgée de 12. ans 3 ëc malade d'une rougeole fimple, Une ptifanne fut préparée avec La. 6oo JOURNAL D racine de Gramen &c Scorfonaire , dans chaque troifiémc verte de la- quelle on délayoit une cuiller de vin médicamenteux , compofé comme celui de la fecomle Obser- vation. Au refte, pour remédier à une toux, la potion fuivante fut en même tems compofée: Prenez Sper- me de B deine , un gros •, dillolvez- lc dans 4 onces d'huile d'amandes douces. Ajoutez une oncedeSyrop de Coquelicot : foit faite une po- tion à donner par cuillerée. Les 9. 10. 11. & 12. les chofes allèrent heureufement leur cours , &C la rougeole étant abfolumcnt diffipée , cette potion lavative fut préparée: prenez Miel Aérien, une once & demi ; moelle de CalTe- mondée , demi once : délayez dans une fuffifante quantité d'eau , pour une dofe. Le ventre fe lâcha fort bien , & cela fans qu'aucun fymptome tour- mentât l'enfant. Le 14. 6V: 1 5. la liberté du ventre fut entretenue par deslavcmens. Puis le \6. la malade prit une dernière médecine. Ainfi en peu de jours cette petite fille qui étoit fort alerte , retourna à fesjeux & à fes éclats de rire ordinaires , Sic intra paucos dus , ad cachinnas fejliv-* re- dut paella, 11 nous refte encore à rapporter fur la rougeole deux Obfcrvations de notre Auteur , pour remplir le nombre que nous avons promis; el- les ne font pas longues , & nous croyons que les Lecteurs voudront bien que nous acquitions notre pa- role , d'autant plus que cet expofé ES SÇAVANS, fervira a les mettre encore plus en état de juger da Livre , car c'eft tout ce que nous devons avoir en vue ici. Voici donc ces deux Obfer- vations ; nous les traduirons mot 2 mot , comme nous avons fait les quatre précedcrrtxs. Obfervation cinquième. Le 8. de Juin 1727. je traitai la fille du no- ble Monheur * * * Chevalier , âgée de 12. ans , & malade de la rougeole. Elle ufa pourboiilon or- dinaire , d'une décoction de racine de Gramen Se de Scorfonaire , dans chaque coup de laquelle on délayoit une cuiller de vin de Bour- gogne. Elle bûvoit outre cela de trois heures en trois heures , la va- leur d'une cuiller de vin préparé avec la canelle , le girofle , la noix mufeade & le fuerc : les bouillons furent préparés avec une fois plus de bœuf que de veau , & avec la moitié d'un chapon. ( l'Auteur ne fpecific point la dofe du veau ni le nombre des bouillons qu'on faifoic de ce qu'on metroitau pot). Quoi qu'il en foit, voici comme il pour- fuit. Nous donnâmes ainfi des médi- camens dans les alimens , &c des alimens dans les médicamens. Il ne lut rien tenté au-delà , jufqu'au 14. que tous les fymptomes étant diiïî- pés , la purgation fuivante fut ad- miniftréc. Prenez miel aérien , deux onces & demi ; huile d'amandes douces , une once & demi : le ventre fut purgé abondamment &: les chofes fe palferent ii bien,que le 1 1. le der- nier purgatif fut donné. O C T O Prenez miel aérien , deux onces; Syrop de pomme compofé , une once : (oit taice dans fix onces d'eau, une potion pour une prife. L'Obfcrvation fuivante eft un peu plus étendue que les autres , mais c'ell la plus considérable des fîx , & elle mérite d'autant plus d'être rapportée que l'Auteur y parle de la faignée i remède donc il n'a point encore parlé dans les cinq Obfervations précédentes. OlfftrvatioH firiéme. Le 17. Jtiil- ltt 1717. Monheur *** m'envoya appeiler pour traiter de la rougeole, fille qu'il avoit, âgée de fept ans : elle tomba malade le 1 3. du même mois, Si tue faignée deux fois. Un tel traitement avoit détourné de fon ouvrage la nature , Si l'enfant , vic- time de ce traitement , fut agitée de chaleur Si de rîcvre , eut des convuliions de tems à autre , on la crut à l'agonie, fon corps étoit tantôt «ouge Si tantôt pâle. Une toux fré- quente lui irritoit les poumons , à caufe de l'humeur roitgeolique re- tenuëau dedans. Le ventre tendre, étoit gonflé , & couloit. Un lave- ment compofé d'une décoction de racine de guimauve Si de graine de lin, tut introduit. Ow prépara des bouillons avec le veau Sclebceuf, parties égales, de chacun, & avec la rapure de corne de cerf & le ris. La potion fuivante fut aulTî ordon- née. Prenez fleurs de tilleul , fperme de Baleine , un gros Si demi ; huile d'amandes douces , quatre onces i fyrop d'althea , Si de diacode , de chacun fix onces : ibic faite une po- B R E, 17 32. r5oi tion pour prendre à la cuiller. Le i§. il y eut peu d'efperance de guerifon. Je fus fpeelateur Se non acteur, fpes exigua falutis re- linjiieb.iinr^fpedator fui , non aftor. La nuit cependant fut tranquille. Le i 9. la toux s'adoucit , Si pa- reillement la fièvre ; un clyftere tempérant fut introduit ; on réitéra la potion ci-deflus. Le ventre s'ap- platit , Si la diarhée cefTa. Rien de nouveau ne fut tenté le lendemain. Le 21. l'enfant fut purgée. Prenez miel aérien , deux onces ; huile d'amandes douces , une once: foit faite avec lïx onces d'eau , une potion pour une prife. A peine eut-elle avallé cette mix- tion cathartique , qu'elle la vomit ; le ventre néanmoins , à caufe de la comprcliion que firent les mufcles excités par les efforts du vomilTe- ment, fe lâcha d'une manière loua- ble , un lavement fut introduit le foir. Le 22. on donna à la malade une potion préparée avec l'huile d'amandes douces , Si le fperme de Baleine. Le 2?. le ventre parut élevé , il n'y eut point d'appétit; Si la bou- che devint amere. Or comme la malade avoit de la répugnance pour les purgatifs liquides, on la purgea à fon infçu avec un bouil- lon, en la manière fuivante : Prenez poudre de Tribus , vingt grains , mêlez-les dans un bouillon. Elle fut purgée fuffifamment haut & bas , par le moyen de ce bouil- lon y Si l'appétit lui revint ; je permis qu'on la nourrît un peu lar- gement. il mar- que avec attention le tempérament dont il jugea qu'elle étoit ; mais en parlant d'une femme de même âge, qu'il dit avoir guérie de la petite vérole , il garde un profond iîlen- O C T O ce fur cet article ; ferait -ce, de- manderont quelques Lecteurs, que pour traiter la rougeole , la con- noiffance du tempérament, feroic abfolument necelîaire , mais que pour traiter la petite vérole , cette connoiflance feroir fuperflue î Quant au fécond point , on en trouve, comme du préctdent,nom- bre d'exemples dans le Livre ; en voici un entr'autres : l'Auteur dit dans fa féconde Obfervadon ci- defïus rapportée , que cette fille de 24. ans attaquée de la rougeole , etoit maigre , qu'elle avoir l'efprit gai, mais bouillant ', fervidâfifti- vâque mente y avec un tempérament fanguin - bilieux ; mais il ne dit point à quoi cette circonftance le P RINCIP ES GENERAUX ET RAISONNEZ DE LA Grammaire Francoife , avec des Obfervations fur l'Orthographe , les Ac~ cens ; la Ponfluation , & la Prononciation : & un Abrégé des Règles de la Verfifcation Franfoife : dédiés a Monfeigneur le Duc de Chartres. Par M. R e s T A u T. Nouvelle Edition t corrigée & augmentée. A Paris , chez le Gras , Grand'Salle du Palais ; Lottin , rue faint Jacques , près S. Yves; Defaint , rue S. Jean de Beauvais } Chaubert , Libraire du Journal, à l'entrée du Quai des Auguftins, du côté du Pont S. Michel. 1732. in-n. pp. 5j2. B R E , 1732. 60 y détermina pour la marîere de trai- ter la maladie. A la vérit: il décla- re qu'il fit prendre de ttms en tems, à la malade , du vin affaifonné de canelle, de mufeade & de fucre 3 mais il n'explique point fi c'eft la maigreur, l'efprit bouillant cv le tempérament fanguin-bilieux de la perlonne , qui le déterminèrent à preferire ce vin échauffant. Il faut efperer , s'il donne une nouvelle Edition de fon Livre, qu'il y repa- rera ces fortes d'omiilîons , & peut- être un grand nombre d'autres de divers genres , que le louable defir qu'il a de conftruire de bonnes Ob- fervations , lui pourra taire apper- cevoir. LA première Edition de cet Ouvrage parut en 1730. & dans le compte que nous en rendî- mes l'année fuivante ; ( Journal de Janvier) nous donnâmes une idée générale de la Méthode que l'Au- teur s'y propofoit , & qu'il dédui- rait plus au long dans fa Préface. Après quoi , nous en rapportâmes un exemple , tel que nous le pre- fentoit le premier Chapitre du Li- vre. Le fuccès de cette première Edition a été marqué fuffifamment par le prompt débit, & par l'ufage qu'en ont fait 3 non feulement les jeunes gens de l'un & de l'autre fe- xe , mais encore des perfonnes d'un âge plus avancé , curieufes de s'in- ftruire plus à fond de la Langue Francoife ; & par deffus tout M. le Duc de Chartres lui-même. Un ac- cueil fi favorable , & fortau-delTus des efperances de l'Auteur, qui ne regarïoit ( dit-il ) cette Grammaire I i i i ij 606 JOURNAL DE que comme un Effai c:;ccutc avec aflez de précipitation, l'a détermi- né à redoubler fes foins } pour méri- ter de plus en plus les fuffrages du Public : Se c'eft de quoi l'on trouve- ra des preuves convainquantes dans cette féconde Edition. Elles font comprifes dans quantité de change- mens §C d'augmentations qui ten- dent également à la rendre plus uti- le & plus intereffante. Ces changemens confident dans plufieurs définitions rectifiées .Se par là devenues plus claires & plus exactes : dans un arrangement plus naturel de certaines matières ; dans des raifonnemens plus étendus Se plus développés: dans un détail plus particulier de ce qui concerne la pratique du langage. Pour ce qui eft des augmentations , elles rou- lent fur un affemblage affez com- plet de tous les principes & de tou- tes les règles neceffaires à quicon- que veut parler &c écrire correcte- ment : règles que l'Auteur a re- cueillies fans s'écarter néanmoins du phn & delà méthode qu'il a voit d'abord en vue ; Se qu'il a d'ail- leurs affaifonnées de tout ce qui pouvoit contribuer à éclairer l'ef- prit & à former le cœur. Telles font d'une part , les définitions ôc les r flexions qui en font une fuite , puifqu'ayant toutes pour objet les opérations de l'efprit , elles font puifées dans les pures fources de la Logique : tels font , d'un autre côté les exemples mis en œuvre pour ju- ftifier les préceptes de la Grammai- re > exemples choifis avec tant de ciiconfpe&ion } qu'il n'y en a pref- S SÇAVANS; que aucun qui n'offre quelque point de Religion ou de morale , quelque trait d'hiftoirc ou de feience. Une autre addition qui grolTit ce Volu- me , eft un Traité de la Verfifica- tion Françoife , compofé avec l'at- tention la plus fcrupuleufe, cV avec les mêmes égards pour le choix des exemples les plus capables d'inftrui- re & d'édifier. L'abrégé de cette Grammaire s promis dès la première Edition en faveur des jeunes enfans } devient à prefent d'une necelïité plus indif- penfable , à caufe des accroiffemens & des changemens qui dans la nou- velle Edition ne font plus à la por- tée d'un âge fi tendre. Nous croïons donc devoir avertir que l'impref- fion de cet Abrégé eft finie. Quanc à cette féconde Edition , l'Auteur paroît perfuadé qu'elle ne peutgue- res convenir en l'état où elle eft , qu'aux jeunes gens qui font en Se- conde ou en Rhétorique. C'eft alors qu'un jugement plus formé les rend capables de faifir les matiè- res un peu abftraites & fpéculatives. » Un bon Rhétoricien ( dit M. » Reftaut ) ne doit ignorer ni les » principes de fa langue , ni les re- » gles de la Poé'fie Françoife : & ce » feroit pour lui un nouvel avanta- ge , fi l'étude de ces mêmes » principes pouvoit lui fervir de » préparation &c comme d'intro- ït dnîtion à celle de la Logique , à » laquelle il doit pafler en fortant » de Rhétorique. « Telles font en gênerai les différences qui diftin— guent cette féconde Edition de la première , fuivant que nous en in- OCTOB forme l'Auteur dans un Avertiffe- ment particulier mis au commen- cement de ce Volume immédiate- ment après la Préface qui étoit à la tête de la première Edition , & qu'on trouve ici réimprimée. Pour venir maintenant au corps del'Ouvrage,ileft partagé enXVIL Chapitres , fubdivifés la plupart en plulieurs articles. Danslel. Chapi- tre , après quelques reflexions pré- liminaires , on traite des Mots , des Syllabes, des Voyelles, des Diph- thongues , des Confonnes , Se des parties du Difcours en gênerai. Dans le II. il s'agit aufïï en gênerai du Genre , du Nombre Se du Cas. Dans le III. des Noms Subftantifs, Adjectifs, Numéraux , de leurs Genres, de leurs Nombres , de leurs Cas , Se des degrez de Com- paraifon. Dans le IV. des Articles denni , indéfini , partitif ou indé- terminé , Se de l'Article Vn , Une. Dans le V. des Pronoms perfon- ncls , conjonctifs , pofleffifs i dé- monftratifs , relatifs , abfolus , in-, définis ou indéterminés. Il eft que- ftion des Verbes dans le VI. Cha- pitre j c'eft-à-dire de leurs 4 Con- jugaifons , fans compter celles des deux auxiliaires , de leurs différen- tes propriétés, ou des nombres, des perfonnes, des Tems Se des Modes, des différentes fortes de Verbes,qui font le Subftantif, l'Adjectif, l'Ac- tif, le Paflif , le Neutre , le Réci- proque , l'Imperfonnel Se les Au- xiliaires ; du Gérondif, des Verbes îrreguliers Se défectueux des quatre Conjugaifons. Dans le VII. des Par- ticipes a&ifs & paffifs. Dans k VUh RE, 1732: 607 de l'Adverbe. Dans le IX. de la Prépofîtion. Dans le X. de la Con- jonction. Dans le XI.de l'Interjec- tion. Le Chapitre XII. contient une explication plus particulière des Cas; Se le XIII. une explica- tion plus détaillée des Articles. Le XIV. roule fur l'Orthographe. Le XV. fur les Accens. Le XVI. fur la Ponctuation , Se fur quelques fi- gures dont on fe fert en écrivant ; le XVII. & dernier fur la Pronon- ciation. Pour tracer prefentemenc une idée plus complette de cette Grammaire , nous allons extraire çà Se là quelques-unes des Obferva- tions de l'Auteur , lefquelles nous paroîtront mériter une attention plus particulière. M. Reftaut définit la Voyelle une lettre employée peur exprimer un fon fimpîe, qui fe forme par la feule ouverture de la bouche , Se qui a cela de propre, qu'il eft per- manent , c'eft-à-dire qu'on peut le continuer, fans faire aucun mouve- ment nouveau de la bouche , pen- dant tout le tems que l'on peut pouffer le foufflc qui fort des pou- mons. Cette définition convient parfaitement à toutes fortes de Voyelles , foit (Impies , foit com- pofées, foit nafales ; à l'exception d'une feule , qui eft 1'^ muet ou fé- minin , dont le fon ne peut deve- nir permanent , fans détruire abfo- lument la nature de cet t Se fans le transformer en la voyelle compofée eu , qui diffère certainement de IV muet , foit en profe , foiten vers. En parlant des voyelles longues ou brèves, & desfyllabes où elles 6oS JOURNAL D entrent , l'Auteur allure que les voyelles longues ne fe trouvent or- dinairement que dans les dernières fyllabes des mots , ou dans les pé- nultièmes ; qu'elles fe rencontrent plus rarement dans les antépénul- tièmes , auquel cas on coule lî légè- rement fur les deux dernières , qu'on ne met pas plus de tems à les prononcer , que s'il n'y en avoit qu'une , comme au mot entêtement. L'Auteur n'a point penfé à quantité de mots qui dérogent à cette règle , comme tefiament , conjlamment , tempérament , Sec. où l'on ne glif- fe pas h légèrement qu'il ledit , fur les deux dernières (yllabes. A l'é- gard de ce qu'il ajoute , Que les voyelles des fyllabes qui précèdent l'antépénultième font toujours brèves ; il paroît que cette règle eft fu jette à de grandes exceptions, comme on le voit par ces mots ;'»- duftrieufement , impertinemment , honteufemtnt , confternation , Con- jiantinople , Sec. ou les deux pre- mières fyllabes font longues , im- perceptiblement y ou les trois pre- mières le font encore, & par une in- finité d'autres. M.Reftautn'a pen- fé ici qu'aux voyelles longues par nature, Se nullement à celles qui le deviennent par pofition , ou par la rencontre des confonnes qui les fui- vent. L'Auteur met entre le fon des confonnes & celui des voyelles cet- te difference,que le fon de celles-ci eft permanent, au lieu que le fon de celles-là ne fe fait entendre que pour un inftant , & par un feul coup de langue ou de lèvres : com- ES SÇAVANS, me on le voit , fi l'on effaye de prolonger le fon de la fyllabe ba fans la repeter , auquel cas le fon du b difparott tout d'abord , & il ne refte plus dans la bouche que celui de Va : ce qui eft très - vrai. Après quoi il ajoute Qu'il faut en excepter les fons de 1'; confonne , de Vf, Se du ch , que l'on peut con- tinuer ; mais qu'on s'appercevra fi l'on y prend garde , que c'eft né- ceffairement avec le fon de Ve muet. L'Auteur devoir comprendre dans fon exception les confonnes/, r} v & z, y qui font dans le même cas que les trois qu'il excepte. M. Reftautdit (page 46.) que les adjectifs en teur font leur fémi- nin en triée : Acleur , Atlrice , Pro- teiïeur} Protetlrice , &c. mais il a. omis les exceptions de cette règle , lefquelles font en grand nombre , comme xAuteur 3 Sauteur , Men- teur, Chanteur , Enchanteur , Sec. Nous remarquerons, au fujet des Nombres , que l'Auteur écrit par tout plurier Se non pluriel , malgré la décifion de l'Académie Françoi- fe , Se l'ufage obfervé par les autres Grammairiens , tels que l'Abbé Régnier , le P. Bujfier , &c. Dans le Chapitre concernant les Pronoms , leur nature , leurs diffé- rentes efpeces Se leurs ufages , cette matière eft difeutée avec beaucoup d'exacYitude , Se l'on y trouve des obfervations importantes : l'Auteur y examine , entt'autres, fi une fem- me doit dire j'ai été malade , & je la fuis encore , oujelefuis encore. Il convient que beaucoup de femmes difent je la fuis encore; mais il rc-: OCTOB connoît en même tems , que celles qui fe piquent de bien parler , ainfi que tous les gens de Lettres &c la plupart des Dons Auteurs difcnt & écrivent/* le fuis encore. Quoique ces deux ufages lui paroiflent pres- que également autorifés ; fans con- damnera premier , il fe détermine pour le fécond , qui lui femble plus conforme aux principes de la lan- gue. Sur quoi il propofe deux rè- gles qu'il croit générales & qu'il appuyé de quelques exemples em- pruntés des Auteurs les plus moder- nes. Il prétend donc , en premier lieu , que le Pronom conjon&if le eft indéclinable, ou invariable pour le mafculin Se le féminin , pour le fingulier &c le plurier , lorfqu'il fe rapporte à un ou à plufïeurs noms adjectifs , de quelque genre èc en quelque nombre qu'ils foient ; par exemple , mon fiknce a pu vous donner lieu de penfer que je n'étois pas auffi fenfible que je Icfuis aufuc- cès de vos travaux } Sec. [ dit une Dame rcfpe&able , dans une de fes Lettres : ] Catherine de Médicis itoit jaloufe defon autorite' , & elle le devait être [ dit le P. Daniel , dans fon Hiftoire de France : ] Fut -il jamais une fille plus malheur eu fe & plus ridiculement trahie que je le fuis : [ lit-on dans une Comédie très-connue : ] Vous m'avez, trouvé aimable , je ceffe de vous le paraître: nais exempte de caprices 3 \e ne le fuis pas de foupçons [ dit une Mar- quife dans fes Lettres : ] De même (ajoute l'Auteur ) plufïeurs femmes diront inconteftablement avons- RE; 1752. rjop nous jamais été aujfi tranquilles que nous \efommes y & non pas que nous les fommes ? Il établit pour féconde règle , Que le pronom conjonctif le eft dé- clinable , c'eit-à-dire qu'il fait/* au féminin , & les au plurier , toutes les fois qu'il fe rapporte à un nom fubftantif. Ainfi lorfqu'on dit à quelqu'un étoit-ce là votre penfée ; il répondra fort bien , pouvez-vous douter que ce ne h fut ? parce que la fe rapporte au fubftantif penfée. De même , fi l'on demande à une fem- me , êtes-vous Madame une telle ? ou à une A&rice , êtes-vous Andro- maque dans cette Tragédie ? elles peuvent répondre l'une & l'autre , oui Je la fuis , parce que/* fe rap- porte aux fubftantits Madame une telle & jindromaqite. Par la même raifon, [continue l'Auteur ] fi on me demande, font-ce là vos gens î je répondrai oui , ce les font , parce que lesk rapporte zgens qui eft au plurier. Il allègue pour raifon de cette différence , que le pronom conjonctif ayant rapport à un fub- ftantif, en doit prendre le genre & le nombre; au lieu que ne fe rap- portant qu'à un adjecîifqui n'a par lui-même ni l'un ni l'autre , il doit refter indéclinable ou invariable. Au fujet des pronoms relatifs , l'Auteur obferve que bien que l'emploi du relatif que foitd'expri- merunaceufatif, il y a cependant quelques façons de parler autorifées parl'ufage, où ce relatif tient lieu tantôt d'un datif , & tantôt d'un génitif ou d'un ablatif, comme quand on dit, c'eft à vous que js 610 JOURNAL D ■parie , au lieu de dire à qui je parle: c'eft à vous que j'en veux, au lieu de dire à qui j'en veux ; c'e/l du Roi que vous devez, attendre cette grâce , au lieu de dire , de qui ou dont vous devez, attendre cette grâce. On pêche fouvent contre cette règle, non feule- ment dans le langage familier, mais aullï en écrivant pour le public. Les Pronoms qui , que , quoi , lequel t laquelle } pouvant êtie tan- tôt relatifs , & tantôt abfolusj voi- ci les règles pour les diftinguer que preicrit l'Auteur. Qjti , que 6c quoi font toujours relatifs lorfqu'on peut y fubftituer lequel , laquelle : exem- ples : le jeune homme qui cultive l* vertu, c'eft-à dire lequel cultive la venu : le Prince que je fers , c'eft- à-dire lequel je fers : les dangers à quoi on s'expofe , c'eft-à-dire auf- quels on s'expofe. Qui eft toujours pronom abfolu , lorfqu'on y peut fubftituer quelle perfonne. Exemple: Je ne fais qui vous êtes , c'eft-à-dire quelle perfonne vous êtes : A qui dois- je demander confeil ? c'eft-à-di- re , à quelle perfonne dois-je deman- der confeil} Jj)jte & quoi font aulîî pronoms abfolus , quand on peut les rendre par quelque ehofe : Ex. ^Je ne fais que vous offrir , c'eft-à-di-i re quelle chofe vous offrir. Je fais de quoi il eft capable , c'eft-à-dire de quelle chofe il eft capable. Le mot que ne pouvant être rendu ni par lequel ou laquelle, m par quelque cho- fe , n'eft alors ni pronom relatif, ni pronom abfolu , mais ce n'eft qu'u- ne conjondion: Exem. Je crois que vous étudiez,. Lequel 6c laquelle ïiveç leurs cas font pronoms abfor ES SÇAVANS, lus, quand on peut y fubilituer quel &c quelle : Exemple : laquelle ave^~ vous achetée ? c'eft - à - dire quelle mai f on avez-vous achetée ? Je voit auquel vous donnez, la préférence , c'eft-à-dire a quel Livre vous don- nez lu préférence. Dans le Chapitre du Verbe divi- fé en lix grands articles, l'Auteux s'applique à bien en développer la nature , il en parcourt les diverfes proptietez , 6c les met dans tout leur jour , il paffe en revue les diffé- rentes fortes de verbes & les carac- terifetfès-diftindemcnt ; il preferit des règles fur la formation des tems, lefquels font infiniment plus (im- pies & plus naturelles que les règles ordinaires^ s'étendant à tous les ver- bes des 4 conjugaifons tant réguliers qu'irréguliers , n'étant chargées que d'un petit nombre d'exceptions , Se fe trouvant plus faciles à retenir par l'enchaînement qu'elles ont les unes avec les autres ; enforte (con- tinue l'Auteur ) que parce fecours, il n'y a point de verbe (i difficile qu'il puiïre être qu'on ne foit en état de conjuguer exactement dans toutes fes parties. Il fait auffi plu- fieurs obfervations très - juftes Se très-utiles fur le régime des verbes. Il remarque , au fujet des partir cipes a&ifs , qu'ils différent des au- tres adje&ifs, i°. en ce qu'ils ont les mêmes régimes que leurs verbes : 2°. En ce qu'ils font la plupart in- déclinables , ce qui fourfre néan-3 moins quelques exceptions , com- me approchant , dépendant , ten- dant , ufant , joïtiffant , répugnant, Sec. 6c quant à l'objeclion qu'on pourroic O C T O B pourroit lui faire , Qu'il oublie d'y en joindre pluiieurs autres qui fem- bleroient devoir s'y rapporter, com- me dominant , dominante , furpre- nant , furprenante , chômant, char, mante; il répond que ces mors qui femblent être participes ne font que de purs adjectifs verbaux : & il fournit un moyen par lequel on peut diftinguer ii un mot terminé en ant eft un participe ou un adjec- tif verbal. Cela fe réduit à ces trois circonstances : i°. l'adjectif verbal n'a pas, comme le participe actif, le régime abfolu ou relatif du verbe dont il eft formé : ainli on dira bien tau femme fuppliante , mais on ne dira pas une femme fuppliante f es Ju- ges, il faudri dire une femme fup- pliant fes Juges: 2°.Le participe actif ne peut jamais fublifter féal dans le difeours „ fans être fuivi d'un régi- me exprimé ou fous-entendu : ain» fi on ne peut pas dire Pierre aimant } fans dire ce qu'il aime : au lieu que l'adjectif verbal s'employe abfolu- ment & fans fuite ni fans régime ; un effet furprenant , un Jardin char- mant , &rc. 3°. L'adjectif verbal peut toujours être mis immédiate- ment après le verbe fubftantif être , ce qui ne convient pas au participe actif ; ainfi on dira bien ce Jardin ejl brillant j cet effet eft furprenant ; mais on ne dira pas fans bleilerl'ii- fage , je fuis lifant , Pierre eft dor- mant celte femme eft aimant fon ma- ri ■ cette femme eft craignant Dieu ; quoiqu'on puifle dire cette femme eft J.tçre , attachée à fes devoirs , crai- gnant Dieu & aimant fon mari ; par- ce qu'alors craignant & aimant ne Ottobre. R E , i 73 2. 6rr font pas immédiatement après le verbe eft. M Keftaut , au fujet des partici- pes pallits , tantôt déclinables , tan- tôt indéclinables, donne quatre rè- gles générales (ur lelqutdles ( dit-il) preique tous les Grammairiens font d'accord. Mais comme ils font par- tagés entr'eux fur les exceptions , il s'eft conformé au fentiment de l'Abbé Régnier d;s Marais } comme à celui qui doit être d'un plus grand poids pour ce qui regarde les difri- cultez de notre langue. Les 4 Chapitres deftinés aux par- ticules indéclinables , c'eft-à-dire à l'Adverbe, à la Piépofition , à la Conjonction èc à l'Interjection , & qui font le 8,1e 9,1e io, & le i Ie , font pleins d'obfervations très-uti- les pour l'exactitude & la correc- tion du langage. L'habitude où l'on eft de prendre ces parties du dif- eours pour autant de particules ou de petits mots deftinés à moniher différemment l'action des verbes, à marquer les rapports que les idées ont les unes aux autres, à lier les divers membres du difeours & à exprimer quelques mouvemens de l'ame; fait que l'on eft furpris de trouver parmi ces particules , fur tout parmi les conjonctions , des phrafes entières : par exemple : fi ce n'eft que , bien entendu que , à la charge que , c'eft à [avoir , à la bonne heure que , c'eft-à-dire , d'où vient que j c'eft pourquoi , quoiqu'il en foit , Sec. Toutes ces expreftîons ne peuvent être comprifes qu'abuiivc- ment fous le nom de conjonctions } regardées pour l'ordinaire comme Kkkk 6iz JOURNAL D des particules indéclinables. Dans le Chapitre de l'Orthogra- phe Françoife , l'Auteur en attribue les difficultcz à 4 caufes principales, favoir , 1°. aux iettres qui entrent dans la compofîtton de la plupart des mots , & qui ne fe prononcent point : ainlî moments , efpnts)faints3 ils donnent , ils donnaient , le pro- noncent ( dit l'Auteur ) à peu près comme s'il n'y avoit que mon, an y efpri , fin , il donne , il donnêt , Sic. ( où la modification d'à peu-près cft d'autant plus necelTaire que dans 4 de ces mors la dernière f\llabe, en vertu de l'orthographe ordinai- re , s'allonge conhdérablemcnt : ) ia. aux difierens fons donnes à une même lettre, ouàunmêmeaffem- blage de lettres ; par exemple , oi ( dit l'Auteur ) fe prononce diffé- remment dans loi , f$i , emploi ; dans connaître , paroître , Si dans/; lifois , jelirois ; ( on n'apperçoit ce- pendant aucune différence de pro- nonciation pour oi entre connohre & je lifois :#) 30. aux diflerens ca- ractères employés pour déligner le même ion ; ainh on prononce le même fon an dans diamant , Nor- mand t ferment , fang J banc , fe ns t fans: 40. au foin deconferver dans les mots empruntés du Grec ou du latin plulîeurs lettres inutiles , comme des traces de leur origine ', ainlî on écrit Philofephie , Si non Filo/ofie ; phrafe Si non frafe ; fylla- be , Si non filabe; intention} Si. non intanfion s &c. M. Reftautdivife l'Orthographe Françoife en orthographe de prin- cipe & en orthographe d'uia^e. Il ES SÇAVANS, appelle orthographe de principe celle qui cft établie furies principes mêmes de la langue > & qui peut Te réduire à deux règles générales : telle eft celle des différentes termi- naifons des noms , par rapport aux genres ex aux nombres , £c celle des verbes , par rapport aux tems 5c aux perfonnes. 11 appelle orthogra- phe d'ufage celle dont on ne peuc guéres donner de règles générales , & qui fait écrire les fyllabes des mots d'une manière plutôt que d'une autre, parla feule raifon de l'ufage ou de Fctymologie : ainlî c'eft en vertu de l'ufage qu'on écrit honneur avec deux nn } Si. honorer avec une feule ; Se c'eft en vertu de l'étymologie qu'on écrit f.ls avec une/, parce qu'il vient du Latin filins, Sic. Nous ne pouvons luivre l'Auteur dans le détail où il entre fur ces différentes elpeces d'ortho- graphes , dont il nous paroît déci- der les diflkultez avec beaucoup de difeernement Si de jufteffe. Nous en donnerons pour exemple ce qu'il dit touchant l'y Grec & le z. Il retranche le premier de la fin de tous les mots où il tient la place de 17, & où on l'a mis fans aucun fondement : ainlî il écrit toujours fourmi , lui , celui , effai , Rot y loi , fai3 f 'aimai 3 Sic. fans y Grec. Il croit que ce né feroit pas abfolu- ment pécher contre l'orthographe que d'employer 17 limple dans les mots dérivés du Grec , fans avoir égard à leur origine , & il prétend que l'ufage en eft aurorifé par un grand nombre de bons Ecrivains- Mais il veut qu'on fe feive de l'y OCTOB Grec , lorfqu'il s'agit d'exprimer le fon de deux ii voyelles , <3c c'eft à quoi ce caractère femble être parti- culièrement deftiné. Quant à l'ori- gine de cet ufage , l'Auteur croit qu'autrefois on écrivoitles deux ii dans ces mots , 8c que le dernier ayant été allongé de cette fjçon ij , afin qu'on les diftinguât de Vît avec deux points, on les a transformez cny Grec. Il veut donc qu'on écrive payeur } joyeux , voyons, Pays} Pay- fan j &c. parce qu'en prononçant ces motson y fait entendre deux ii. Mais il veut qu'on écrive fans y Grec , Païen }faïance , caier 3 aïeul, &c. parce qu'on n'entend dans ces mots que le fon d'un i. Sur quoi il obferve que dans prefque tous les verbes où l'on met l'y Grec pour deux ii en certaines perfonnes, il doit fe changer en / fimple en d'autres , où il ne tient plus la place de deiîx ii : ainfi quoiqu'on écrive [oyons ,foye\,i voyons , voyez. , &c. on doit écrire qu'ils foient , qu'il voie , qu'ils voient. A l'égard de quelques mots qui font entendre le fon de trois «/, ou du inoins dans lefquels on les imagine , quoiqu'on ne les y entende pas distinctement , il faut y mettre un i fimple à la fuite de l'y Grec. Ces mots font les pre- mières & les fécondes perfonnes du plurier de l'imparfait de l'indicatif, & du prefent du fubjonclif des verbes qui ont un y Grec avant la terminaifon ant du participe actif; &c par confequent il faut écrire à l'imparfait nous payions jvous payiez; au prefent du fubjonclif , que nous payions , que vous payiez, t Sic. R E , i 73 2. 6ij Pour ce qui eft du £, l'Auteur ne l'employé à la fin des mues que pour les fécondes perfonnes du plu- rier des verbes, dont les terminai- fons ont le fon de l'e fermé , com- me vous aimez. , vous donniez , vous finirie"^ , Sec. & il termine par une s au lieu d'un z , les pluriers des noms tant fubftantifs qu'adjectifs , dont le imgulier a pour dernière voyelle un c fermé , écrivant les bontés , les amitiés , les hommes fen- fés, Sec. Au fujet des accens l'Auteur croit qu'à l'exception de quelques mots , Use ouverts n'ont pas befoin d'êfTe marqués de l'accent grave , parce que la prononciation en cil prefque toujours furfifamment déterminée par les confonnesqui les fuivent : & que pour favoir fi l'e eft fermé ou muet , & confequemment s'il lui faut ou non l'accent aigu, on doit avoir recours aux bons Dictionnai- les & à l'ufage. En donnant des règles pour la ponctuation , M. Reftaut regarde comme une pratique vicieufe ou du moins inutile , de mettre deux points fur une voyelle qui ne fait qu'une fyllabe avec la précédente , ou qui ne peut s'y joindre, ni par confequent occafionner une pro- nonciation ambiguë : ainfi c'eft [fé- lon lui ] un abus d'écrire avec deux points fur Vu , avouer , jouir , proue , avenue , rue t vue , cVc. 11 eft enco- re inutile de mettre deux points fur une voyelle pour la féparer de l'e qui la précède , lorfque cet e eft marqué de l'accent aigu , qui furfit pour le féparer de la voyelle qui le K k k k ij tfr4 JOURNAL D fuit : ainfi l'on doit écrire obètffant , réitérer, rènffir , éVc. fans mettre deux points lurl'; 5c furl'w. Iln'ift pas moins abuiîr [ félon notre Au- teur ] de mettre deux points fur Yi pour lui donner le Ion de deux ij , & par-là fuppléer à l'y Grec : com- me dans Pats, moien , envoie? : ce qui pourrait induire en erreur les étrangers cjui voyant aïeul , càiert finance écrits avec deux points fur Yi , comme Pais , moien , pronon- ceraient aiieul , caiiçr , finance , &C croiroient être bien fondés. Il ferait inutile de répondre qu'alors il fuffi- roit d'écrire tout fimplement3rt/«<(, eaier , faiance , fans mettre deux points fur IV ; car l'étranger en ce cas pourrait tomber dans un autre vice de prononciation en lifant , ai-eul j cai-er , fat-ance. Les Obfervations de l'Auteur fur la prononciation , lefquels remplif- fent le dernier Chapitre de cette Grammaire , méritent d'autant mieux d'être lues , qu'elles corri- gent certaines prononciations vi- . cieufes, contre lesquelles ne font pas toujours affez en garde les per- sonnes du premier rang & qui fe piquent de bien parler. Tels font les mots où fe rencontre 17 mouil- lée , comme fille , faille , oreille , feuille , prononcés fye , paye , oreye , feuye ; tels font les mots nourir , neuriture , Nottriffe , aujourd'hui , prononcés norir , nonture , Noriffe , aujord'hui i agneau , prononcé an- Veau i je trouverai, prononcé je trou- ES SÇAVANS, verrai ; je mourrai , je courrai , j'ac- querrai , prononces je mourrerai , je coiirrerai , yacjuerrerai ; vous ferez., vous dormirez , vous chante- rez. , prononcés vous ferais , vous domirais , vous chanterais , &c. Ce que nous venons d'extraire de cet Ouvrage fuffira pour exciter la curiohté du Lecteur éc pour l'en- gager à prendre une connoiffanec plus particulière de cette Grammai- re Françoife , écrite avec beaucoup d'ordre , d'exactitude , de netteté , de précifion , & pleine d'obferva- tionsjuftes , fenfées & approfon- dies , qui dépofent en faveur de l'érudition grammaticale de M. Reftaut & de l'étude férieufe qu'il a faite de notre langue. Il nous réitérait a parler de Y A- bregè des règles de la verfificatioit Françoife ; mais comme ce détail nous mènerait trop loin , nous nous contenterons d'avertir que cec Abrégé contient trois articles fub- divifés en plufieurs Seclions , tk. dans lefquels on verra régner le même ordre méthodique & la même clarté que dans la Gram- maire. Au furplus , l'Auteur fouhaite ( dit-il dans l'Avertillement ) que le public foit auffi content du fond de l'Ouvrage , que fans doute il le fera de la manière dont on l'a exé- cuté par rapport à la beauté du pa- pier , à la netteté du caractère, &C à h correction des fautes. OCTOBRE, 1732. 615 RERUM ITALTCARUM SCRIPTORES AB ANNO 500. ufquead annum 1500. &c. C'cft-à-dire : Suite du Recueil des Ecrivains de l'Hiftoire d'Italie. Par Al. M u r a t o r i. Tome V. A Milan , de l'Imprimerie de la Société Palatine. 17 Z4. pp. £45. NOUS nous promettions de donner de fuite l'Extrait de ce fçavant Ouvrage , mais differens connetems nous ayant obligez de l'interrompre , nous y revenons aujourd'hui avec d'auunt plus de pLifir que les Sçavans continuent d'applaudir aux travaux de l'illuftre M. Aluratori. Ce cinquième Tome qui eft dédié au Cardinal Odefcal- chi , Archevêque de Milan, com- mence par quatre Chroniques qui contiennent les principales expédi- tions desdiveries Nations contre le Royaume de Naples. Elles avoient déjà été imprimées par les foins d'Antoine CarraccioU , Prêtre de l'Ordre des Clercs Réguliers ; mais dans cette nouvelle Edition on y a ajouté les Remarques de M. Pere- grini avec quelques autres additions qu'on a tirées d'un Manufcrit du Mont-Caffin. Comme dans ces Chroniques 5c fur tout dans l'abrégé d'Hérempert il elt fouvent parlé des Princes & des Ducs de Benevent , de Salerne, & de Capoiie , on voit ici avec plaifir la fuite de ces Princes tirées de Paul Diacre , d'Hérempert & d'autres Auteurs. Carraccioli nous apprend qu'Hé- rempert étoit un Moine du Mont- Calîin, Lombard de nation , d'une famille illuftre , & qu'il eft mort au commencement du dixième fié- cle ; il avertit qu'il ne faut pas le confondre avec un autre Iîcrem- pert , homme célèbre qui vivoit dans le même tems , & duquel on trouve une Infcription dans Gru- tcr. L'Abrégé Chronologique de l'Hiftoire d'Hérempert renferme les actions remarquables des Ducs de Benevent» elle commence à la mort de Luitprand , Roi des Lom- bards vers l'an 745. & finit vers l'an 888. on conferve encore l'Hi- ftoire entière d'Hérempert , mais les Manufcrits qui en refirent font il peu corrects , Se le fond en eft d'ail- leurs fi mauvais par les tables Se les préjugez dont elle eft remplie, que M. Mitratori auroit cru abufer de la patience des Lecteurs s'il l'avort publiée. Cet abrégé contient ce qu'elle a d'utile &: d'exact, & on l'attribue à Hérempert même. L'Auteur de la féconde Chroni- que eft Lupus-Protofpata ; on le croit fur différentes conjectures af- fez probables Grec d'origine, Se Citoyen de Bari ; mais on n'en fçait rien de certain. Il vivoit envi- ron versl'an 1088. cette Chronique commence en l'an 86b. & va juf- qu'en l'année 1102. on y a joint un Auteur Anonyme qui l'a continuée jufqu'en 1519. On ne fçait autre chofe de celui qui acompofé la troifiéme Chioni- 6i(5 JOURNAL D que h-non qu'il étoit Moine du Mont-Callin , elle commence à l'an mille de J. C. & s'étend jufqu'l l'an 1 21 2. clic cft fort fcche , &c ne renferme prcfque que des dattes qui ne font pas toujours exactes comme M. Peregrini le fait voit par des Notes qui font beaucoup plus étendues que le Texte. La quatrième a pour Auteur Fal- con , qui de Notaire du Palais de Benevent devint un des Juges de cette Ville depuis qu'elle fut fous l'obéifTance des Papes. Elle com- mence environ l'an 1102. & va juf- qu'àl'an 1 140. il s'attache fur tout à rapporter ce qui étoit arrivé de plus remarquable à la Ville de Be- nevent. Le ftyle de ces Ecrivains eft groflîer Se barbare , mais ils ne laiffent pas d'être précieux , à caufe des fairs qu'ils nous appren- nent , fur tout lorfqu'ils racontent l'Hiftoire de leurs tems. Cependant les différentes corrections que Car- raccioliSc Pérégriniont été obligés d'y faire , & qu'on retrouve dans cette nouvelle Edition , montrent allez avec quelle précaution on doit les lire. Ce n'eft pas fans raifon qu'on a aceufé les Goths & les Lombards d'avoir voulu natter leur Nation par les fables qu'ils ont mê- lées dans leurs Ecrits , & par une affectation continuelle à relever les actions de leurs Compatriotes , Se à blâmer celles de leurs ennemis. Le fécond Livre de l'Hiftoire des Princes Lombards offre i°. des Diflertations fur l'origine , les bor- nes Se la iituation de l'ancien Du- ES SÇAVANS, ché de Benevent , avec plufieuts autres picces, on en cft redevable au travail de M. Peregrini , il a mis à la tête une Carte qui nous reprefente l'ancien Duché de Bene- vent; Etatconfiderable, puifqu'il avoit environ un mille d'étendue dans fa plus grande longueur. L'Auteur avoue cependant que les différentes révolutions qui y fonc arrivées , non feulement fous le règne des Lombards, mais encore fous celui des Grecs & des Nor- mans qui s'en emparèrent fucceili- vement, Se qui changèrent lésant ciennes divifions des Principautez , répandent beaucoup d'obfcurité fut cette matière. 20. La fuite des Abbez du Mont- Caffin tirée de divers Auteurs de- puis l'an 710. jufqu'à l'année 1137. j°. Une Differtation Italienne fur l'Illuftre Famille Calment a y avec deux autres Diflertations , dans lefquelles on traite de la ligni- fication de ce mot Porta , parmi les Auteurs du moyen âge , Se de la ii- tuation ancienne de Capoiïe. M. Peregrini y foûtient que quoique par le mot de Porte on doive entendre ordinairement les Entrées des Villes , qu'ancienne- ment cependant il fignifioitles dif- férentes Tribus ou Quartiers , dans lefquels le Peuple d'une Ville étoit partagé ; Se à 1 égard de Capoiie , quoi qu'il foir confiant qu'elle a plufieurs fois changé de fituation , il prouve qu'elle a toujours été éloi- gnée de la Mer au moins de douze nulle. 40. Un Poé'me Héroïque conte- OCTOB nanties Expéditions des Normands dans la Sicile, dans la Poiiille & dans la Calabre juiqu'à la mort du Duc Robert Guifcard avec les No- tes de Tiremacus & de Godefroy- Guillaunie Leibnitz. On fçait qu'en 1016. un homme considérable de la Pouille nommé Mélo , pour fc venger des Grecs , quienétoienr pour lors les maîtres, engagea quelques Seigneurs Nor- mands qu'un pèlerinage au Mont- Gargan y avoit amenés , à faire la conquête de ce beau Pays ; leur prudence & leur valeur les lervirent fî heureufemenc que fous Robert- Gui feard & Roger fon frère , ils s'emparèrent non feulement de la Pouille qui comprend aujourd'hui le Royaume de Naple , mais enco- re de toute la Sicile au-delà du Phare. Entre les Hiftoriens qui ont tranfmis un événement G célèbre. Guillaume de Pouille tient le pre- mier rang. Vofllus l'a compris par- mi les Hiftoriens Latins. On ignore cependant qui il étoit j il eft cer- tain qu'il écrit comme témoin ocu- laire. Jean Tiremacus Avocat Fifcalde Normandie , fut le premier qui en 1582. fit imprimer ce Poè'me, il falloit qu'ilTût devenu bien rare , car Duchefne n'en fait point men- tion. M. de Leibnitz l'inféra depuis dans fa Collection des Ecrivains qui traitent de la Maifon de Brunf- vik. Enfin M. Maratori revendi- que à jufte titre cet Auteur. Son exactitude l'égale aux Hiftoriens les plus judicieux ; mais le tour êc la facilité de fes vers le distinguent R E, 1732. 6\ 7 de tous les Poètes qui parurent dans ces fiécles d'ignorance & de barba- rie. j°. Un Ecrit intitulé, Courte Chronique Normande , depuis l'an mil quarante -un , jufqu'en mil quatre-vingt-cinq , par un Anony- me , tiré de l'Eglife de Nardo. Il n'avoit point encore été imprimé. 6°. L'expédition du Prince Tan- crede à Jerulalem par Radulphe de Caen , un de fes Domeftiques B avec lcsNotesdesPeresMartennecv: Durand. M. Murât ori avoue qu'il a eu quelque peine à faire entrer cet Ecrit dans fon Recueil , d'au- tant plus qu'il n'a aucun rapport avec les affaires d'Italie. Il a cru cependant qu'il pouvoir, y trouver place , parce que les trou- pes qui accompagnèrent Boémond cVc Tancrede étoient pour la plupart Iraliennes , & qu'outre cela il lui paroîc vraifemblable que ce dernier étoit né en Italie; il appuyé cette opinion de quelques conjectures affez plaufiblcs. Le ftyle de cet Hiftorien eft ex- traordinairement recherché & fore ingénieux, quoiqu'il retombe fou- vent dans le mauvais goût de fon iiécle, on ne peut cependant s'em- pêcher de le lire avec beaucoup de plaifir. 7°. La Vie de laComtefle Mal- thilde écrite en vers par Donizon 3 Prêtre & Moine de Canofle , Or- dre de S. Benoît , avec des Notes de Meflieurs de Leibnitz &c Mura- tori ; on y trouve auflî la Charte de la donation que cette Comtefle fie de fes biens à l'Eglife Romaine, 6iS JOURNAL DE 8°. Une aucre Vie en profe de la même Comtefle Mathildc par un Auteur Anonyme & publiée pour la première fois par M. de Leibnitz. 9°. Un Poème d'un Anonyme fur la guerre que la Ville de Milan fît dans l'onzième ficelé à celle de Corne , ex qui finit par la ruine de cette dernière. Il paroît ici imprimé pour la première fois par les foins & avec les Notes de M. Stampa de la Congrégation, des Sommafques. Il eft écrit en vers Léonins 6c d'un ftyle fi peu la- tin & ii embarralîé qu'il eft fouvent inintelligible , ôc qu'il a fallu toute la patience & toute la pénétration du fçavant Editeur pour en éclaircir certains endroits. Io°. Une Hiftoire de Milan de- puis l'an mil 95. jufqu'cn l'an mil 132- écrite par Landulphe lejeune , qu'on appelle de S. Paul , pour le diftinguer de Landulphe l'ancien , qui a donné aufll une Hiftoire de Milan qu'on a vue dans le quatriè- me Tome de ce Recueil. Cette Pièce n'avoit point encore vu le jour. M.Saflî Préfet de la Biblio- thèque Ambroifienr.e , jaloux com- me plufieurs autres Sçavans d'Italie, de féconder le zéie de M. Murarori, à tiré Landulphe des ténèbres , & a joint des Remarques afTez étei dues- LePerePagiavoit eu communica- tion du Manufcrit , fur lequel on l'a i nprimé, & il allure qu'on en peut, tirer dts connoilTanccs très-uriles pour l'Hiftoirc Ecclciinftique. Un des morceaux le plus curieux en se genre eft ce que l'Auteur rappor- S SÇAVANS, te du Prêtre Liprand fon oncle. Cet homme d'un zèle extrêmement ardent, aceufa l'Archevêque Grof- fulan de Simonie , Se s'offrit de prouver la vérité de cette aceufa- tion par le jugement du feu ; après s'être prépare par plufieurs jours de jeûne &: de prières , il palla en effet en prelence d'un grand peuple en- tredeux bûchers fans que les habits Sacerdotaux , dbnt il étoit revêtu , fuflent feulement endommagés pat la flamme. Cependant comme en jettant de l'eau bénite & de l'en- cent dans le feu fa main avoit été légèrement brûlée, cVqu'au fortir du bûcher il avoit eu le pied blclTé par un cheval. Ces accidens rendirent fon témoignage fuipect , l'affaire fut portée au Pape qui obligea l'Arche- vêque à jurer qu'il n'avoit point obligé Liprand à fubir cette épreu- ve. Surquoi ce Prélat fur confirmé dans fon Siège ; mais les Partifans de Liprand ne voulurent pas fe foûmettre à ce jugement, & cette affaire caufa beaucoup de tumulte &: de féditions , &: finit enfin par la dépofition de Groflulan. il0. Un Poème à la louange de Bergane p.r M.itre Moyfe de la même Ville. Cet Ouvrage avoit dé- jà ac imprimé plufifurs fois ; mais on le trouve ici corrigé fur dihcrcr.s Manufcrits. Ce titre de re étoit donné ordinairement aux Notaires , aux Grammairiens, & aux .lurifeon fuites. Du refte on ne fcait rien de particulier (ur cet Auteur. M. Muratori prouve qu'il n'eft pas h ancien qu'on le croit communément, e\: qi'il vivoit au commencement O C T O B commencement du onzième fiécle. Il eft écrie en vers Léonins , où l'Auteur porte la jufteflede la rime auffi loin que nos Poètes François. 11°. L'Hiftoire de Sicile par Gaufred - Maletefle Moine Béné- dictin. Elle parut pour la première fois à Saragofle en 1578. On y voit les conquêtes des Princes Nor- mands en Sicile pendant l'onzième fiécle i Maleterrc étoit contempo- rain de Guillaume de Pouille , ôc a traité les mêmes matières ; mais il paroîr qu'il a écrit plus rard que lui. M- Muratori croit qu'il étoit de Normandie. Son Hiftoire commen- ce à la première année que les Nor- mands arrivèrent dans la Pouille , & elle finit en 1099. Elle avoitdéja été imprimée plufieurs fois ; & M. Muratori nous la donne à fonordi- R E , 1732: 615 naire avec les Préfaces &C même les Epîtrcs Dédicatoires des anciens Editeurs. Il en eft de même de la dernière Pièce par laquelle ce Volume finit. C'eft une Hiftoire compofée par Alexandre Abbé de Telefa Ville de la terre de Labour. Il l'a commencé à la mort de Guillaume Duc de Pouille en n 27. & il l'a conduit jufqu'en 113 5. année en laquelle Roger Roi de Sicile donna la Cam- panie à titre de Principauté à fon fils Amfus. Elle avoit déjà été im- primée plufieurs fois. M. Muratori juftifie cet Abbé du peu d'exaclitu- de à marquer l'ordre des tems donc Voffius Se quelques autres l'avoient aceufé. Nous donnerons fans interrup- tion l'Extrait des Volumes fuivans. LES ENTRETIENS PHYSI QVES UARISTE ET d'Eudoxe , ou Phyjtque nouvelle en Dialogues , qui renferme précifémtnt ce qui s'eft découvert d; plus curieux & de plus mile dans la Nature. Enrichis de beaucoup de figures. Nouvelle Edition , revite & augmentés d'un Volume. Par le Père Regnault , de la Compagnie de Je fus. A Paris, chez Jacques Clouter , rue' Saint Jacques , au coin de la rue de la Par- cheminerie , à l'Ecu de France. 1731. 4. vol. in-iz. premier vol. pp. 385. fécond vol. pp. 41^. troifiéme vol. pp. 376". quatrième vol. pp. 411. Le tout fans compter les Tables de chaque vol. lefquelles montent cnfembleà 122. pages. NOUS avons parlé de la pre- mière Edition de ce Livre dans le Journal de Mars 1730. nous allons rendre compte ici de la fé- conde. Elle eft augmentée d'un .Volume, & ce qui fait cette aug- mentation font des Tables , des Planches , des Eclairciflemens, des Notes , des Observations , des Ex- Qttobre. periences & des Reflexions, que l'Auteur a ajoutées. De ces addi- tions, les unes font répandues dans les Entretiens que l'on a déjà vus,' les autres font la matière de deux nouveaux Entretiens -, l'un eft fur l'eau en gênerai , & fe trouve dans le Tome fécond , l'autre eft fur l'a- me des bêtes, 6c fc trouve dans le lui 6io JOURNAL D quatrième Tome. Nous nous bor- nerons à ces deux Entretiens. Celui de l'eau commence parla définition de l'eau. Parlerons -nous de l'eau en gênerai , du d'abord Arifte à Eudoxe ? Eudoxe répond auflï-:ôr qu'il eft ai fé de comprendre que l'eau eft , i. Vn fluide dont les parties font z. flexibles , 3 . percées en tout fens , 4. pins rondes , plus polies, ou moins rameufes que celles de l'huile; 5. moins polies , plus ra- meufes , on plus longues cjite celles de I'efprit de vin ; 6. plus folides que (elles de l'air. Eudoxe s'explique en détail fur chacun de ces articles. Il dit 1°. Que l'eau eft un liquide , parce que fes parties font continuellement agitées en tout fens , puifqu'elte dilfout les fels : 2°. Que les parties de l'eau font flexibles, parce qu'elle prend la figure des interfaces les plus étroits & les pénétre : 30. Qu'elles font percées en tout fens , puifqu'el- les tranfmettent la lumière de tous cotez , ôc qu'elles font 14 fois plus légères que celles du Mercure : 40. Que les parties de l'eau font plus sondes , plus polies ou moins ra- meufes que celles de l'huile , parce que l'eau eft plus coulante &C fe dé- tache bien plutôt du linge : 5*. Que les parties de l'eau font moins po- lies , plus rameufes , ou plus lon- gues que celles de i'efprit de vin , parce que l'eau fegele & fe durcit, tandis que I'efprit de vin ne gelc point : 6°. Que les parties de l'eau font plus folides que celles de l'air } parce que l'eau pénétre où l'air ne pénétre pas. ES SÇAVANS; Eudoxe interrompant Arifte ," en lui difant que , félon les Obfer- vations de M. Halley , l'eau eft huit cens fois plus pefante que l'air. Arifte à ce propos , lui fait re- marquer que c'eft la raifon pour- quoi on peut à peine enfoncer dans l'eau un balon plein d'air. Eudoxe prend auffr-rôt la parole ëc obferve que cet excès de pefan-: teur & de légèreté donne un niveau fort utile pour niveller la terre &C connoître l'horifon. A ce mot de niveau la curiofité d'Arifte eft tout d'un coup excitée: j'apprendrai volontiers , dit-il , /* conflmclion & "ufage du niveau. Eudoxe qui ne demande pas mieux que de fatisfaire fon ami juf- que fur les moindres chofes , lui explique en détail ce que c'eft que le niveau dont il s'agit, Se de quelle manière on le conftruit ; puis pour orner fon difcours,il lui dit que c'eji en quelque forte au niveau que l'on doit & les eaux qui viennent dans les Jardins de Vcrfaille ravir les fens , par mille fpetlacles divers , & le fameux Canal de Languedoc.il ne manque pas, à cette occafion, d'in- former fon ami , i°. Que le Canal dont il s'agit fut commencé pat l'ordre de Louis le Grand en 1 6 66. fous la conduite de M. Riquet : 20. Qu'il fut achevé en 1 6 8 1 : 30. Qu'il a douze Eclufes où l'eau monte & baifle félon qu'on ouvre Se qu'on ferme les Eclufes , pour faire monter ou defeendre les bâtH mens impunément , malgré les chûtes d'eau ; 40. Que le Canal va OCTOBRE, I7J2. 6zt du Port de Cete fe rendre dans la Tentent &c qu'elles ont de la con- Garonne à Touloufe : 50. Qu'avec la Garonne, il joint deux mers fé- parées par la France & l'Efpagne , fçavoirla Méditerranée & 1 Océan. ■ Arifte charmé de ce qu'il entend demande à Eudoxe Ci les Egyptiens &c les Romains ont jamais entrepris dans le tems de leur plus grande magnificence & de leur plus gran- de profperité , des ouvrages plus utiles au public , plus hardis & plus dignes de l'Egypte ancienne & de l'ancienne Rome. Après quoi il fe récrie : Et un des principaux inflrti- tnens pour de tels ouvrages , c'ejl un petit tuyau de verre plein d'air & d'eau. Puis il remarque tout de fui- te , que l'eau étant beaucoup plus pe- ftnte que l'air , elle a beaucoup moins d'interflices. Ce qui donne lieu à Eu- doxe de dire qu'auffi l'eau fe com- prime-t-elle beaucoup plus difficile- ment, mais qu'enfin elle fe compri- me ; compreffion qu'il prouve par l'expérience de la boule d'argent creufe , laquelle étant fermée exac- tement avec de l'argent fondu, ôc étant enfuite batue à coups de mar- reau, diminue de volume, & laiiTe fortir l'eau par les pores de l'argent comme une efpece de fueur. Voilà ce qu' Arifte Se Eudoxe difent fur l'eau en gênerai. Voici à prefent leur entretien fur l'ame des bêtes. Comme il eft fort étendu , nous n'en rapporterons que l'effen- tiel. Le deffein de l'Auteur , dans ces Entretiens , eft de prouver contre Defcartes que les bêtes ne font pas de pures machines ; mais qu'elles noiffance. Eudoxe ouvre l'entretien, & commence par demander fi en faifant reflexion fur les fens & fur les opérations des animaux on peut foûtenir ferieufement qu'ils n'ayent ni connoiffance , ni fentiment ni paffion ? Arifte à fon tour fait cette autre demande : mais pargentillef- fe feulement : fi les bêtes , dit-il , avoient delà connoiffance, un peu de fentiment , une ame acceffible à la paffion , à la colère , les plus éclairées , les plus fieres 8c les plus furieufes fe feroient-elles montrées fi peu fenfibles à l'injuftice £c à l'af- frontque leur auroitfait M. Defcar- tes , de les dégrader , de les foû- mettre, comme une montre, com- me l'ouvrage d'un fimple Artifan , aux loix d'un pur méchanifme ? Eudoxe rapporte fur cela ce qu'on raconte d'un cheval artificiel , ca- pable de faire dans une pleine cam- pagne fept à huit lieues en un jour, & ce qui fe lit de cette ftatue de fer imaginée par un prifonnier , la- quelle alla par plufieurs détours prefenter à genoux une Requête au Roi de Maroc dans fon Palais , 8i revint enfuite trouver le prifonnier. La tête artificielle & parlante cbn- ftruite par albert le Grand, & la ftatue de Memnon qui proferoit des paroles dès qu'un rayon du Soleil venoit à lui coucher les lèvres , ne font pas oubliées ici non plus que plufieurs autres Machines fembla- bles dont nous croyons pouvoir palfer le détail. Eudoxe continuant de parler , avoue qu'on ne fçauroit borner U mil, en JOURNAL DE Sageffe de Dieu , & que lî les hom- mes ont pu faire des Machines fi furprenantes, à plus forte raifon le Souverain Ouvrier en peut taire qui fans le fecours d'aucune ame exé- cutent les mêmes chofes qu'on voit exécuter aux animaux; mais il dit que l'Auteur de la Nature égale- ment fage & bon nous a fait naître avec un penchant qui nous porte prcfque invinciblement à attribuer aux animaux de la connoifîancc. Et il prétend que ce penchant eft une forte preuve contre le fenti- ment de Defcartes. La docilité de plulkurs animaux à apprendre prefque tout ce que l'on veut , eft une autre preuve que l'on fait beau- coup valoir ici. Nous n'entrerons point dans tous les détails où l'on entre à ce fujet. Nous nous conten- terons de remarquer que tout ce que les animaux font de furprenant tant par leur inftincT: naturel que par le moyen de l'inftruction, eft ici expofé au long , & quede-là Arifte Si Eudoxe concluent que les ani- maux ne font point de pures Ma- chines. Mais fi les bêtes ont une ame , que fera-ce que cette ame , demande Arifte ? Eudoxe répond que c'eft une fubftance qui n'eft réellement ni efprit ni corps , que c'eft une troi- sième efpece de fubftance unique- ment fufceptiblc de pallions & de S SÇAVANS; connoillances fenfibles, une fub-' ft.ince fans reflexions fur fes con- noifTances , fans délibération , fans choix, fans liberté, fans mérite, & parconfequent deltinéeà périr avec le corps. C'eft par cette conclufîon fuivie néanmoins de quelques réflexions fur le méchanifme des animaux ,' que fe termine l'Entretien. Au refte , comme il y a dans ce Livre quelques planches anatomi- ques , nous ne fçaurions guéres nous difpenfer d'avertir que par une in- advertance qu'on ne peut attribuer fans doute qu'au Graveur } les deux figures qui repreientent l'une l'aorte & l'autre la veine-cave avec leurs principales diltributions, font faites de manière que ce qui doit f être à droite y eft mis à gauche , & ce qui doit y être à gauche y eft mis adroite. C'eft pages 2>8. Se 300. Nous croyons cet avertiflement neceftaire pour les jeunes Ledeurs. La même faute fe trouve dans la première Edition. Nous ne par- lons point de la planche 6b. repre- fentant le Canal Thorachique , dans laquelle ce Canal paroît aller à la veine foudaviere droite , quoi- que l'Auteur dife , pag. 302. qu'il va fe rendre à la varie joitclaviere gauche. Comme en effet il doit s'jr rendre. Ô C T O B R E, 1732: €2% NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Milan. LA Société Palatine fait déli- vrer aux Souscripteurs le To- me premier des Oeuvres de Sigo- nius, dont M. Argelati 3, entrepris l'Edition , fous ce titre : Caroli SigOnii Àdiitinenfts Opéra omnia y édita & médita , cum Notis Vario- rum Ulnftrium Virorum , & ejufdem Vita a Cl. V. Lud. Antonio Mura- torio Sertn'ijfimi Duels Mutin a Bi~ bliothecario conferipta , Philippus Argelatus Bononienfis mine primum collegit , fuafjue animadverfiones in ali(jnot ipfius Sigonii Opufcula ad- jecit } nec non indicibuslocupletiffi- mis exornavit. Tomusprimus. In- •viclijfmo & clément ijfimo Carolo .VI. Rem. Imper, femper Augufto. 1732. in- fol. FRANCE, De Bor.be awx»' L'Académie Royale des Belles- Lettres , Sciences & Arts de cette Ville , ayant été obligée de referver un des deux Prix de cette année , elle en propofe encore deux aux Sçavans de l'Europe , qui feront diftribués le vingt - cinq d'Aouft 1*733- £lle deftiae un de ces Prix à ce- lui qui expliquera avec le plus de probabilité le Syftême delà Circu- lation de la Sève dans les Plantes , on qui établira lé mieux ? opinion con- traire. L'autre eft deftiné à -celui qui donnera l'explication la plus proba- ble de la Nature de l' 'Air & de [es Troprietez.. Il fera libre d'envoyerles DifTerta- tions en François ou en Latin : on demande qu'elles foyent écrites en caractères lillbles; elles ne feront reçues pour le concours que juf- qu'au premier Mai prochain inclur nvement. Au bas des DiflTertations il y aura une Sentence 3 & l'Auteur mettra dans un Billet léparé & cacheté , la même Sentence , avec fon nom Se fon adrefle. Les Paquets feront affranchis & adrefsés k Aionficur Sarrau Secrétai- re de l'Académie , rué de Gourgues 3 tu au Sieur Brun Imprimeur de l'A- cadémie } rué S, $ 'âmes. M. l'Abbé de la Quintine efk l'Auteur de la DilTertation fur le Magnetifme des Corps t qui a rem-, porté un des deux Prix propoIeS pour l'année 17}!. De P a r î s; Il y a déjà du tems que Jes Frères Barbou, rué S. Jacques , aux Cï^ gognes } ont imprimé U 62$ JOURNAL D VHiftoire de Dannemarc , avant & depuis l'établi ffemtnt de la Monar- chie. Par M. J. B. De/roches }Ecuyer, Confeillcr & Avocat Général du Roi Très-Chrétien au Bureau des Finances Se Chambre du Domaine de la Généralité de la Rochelle. Nouvelle Edition f revue & corri- gée fur l'Edition d'Hollande ; à la- quelle on a joint la fuite de la même Hiftoire , jufqu'àl'an 1732. in-iz. 5. vol. Montalant , qui a propofé pat Soufcription l'Ouvrage des RR. PP. Martenne & Durand , Reli- gieux Bénédictins de la Congréga- tion de S. Maur , intitulé : Veterum Scriptorum & Monumentorum , Hifioricorum , Dogmaticorum , Afo- ralium , ampli ffima Colletlio , donc il a déjà donné les fix premiers Volumes aux Soufcripteurs , fera en état de leur diftribuer au com- mencement du mois de Novembre prochain les 7e 8e & 9e Volumes de cette Collection , ceux qui n'ont pas fouferit payeront les 9. Volumes 200. liv. au lieu de 1 50. liv. que les Soufcripteurs les ont payés. L'on trouve auiîi chez le même Libraire , Se des mêmes Auteurs l'Ouvrage qui a pour titre : The fait- rus novits Anecdotorum CompleSlens Jiegum ac Principum aliorumque fi- rorttm Illuflrium Epiftolas & Diplo- mata , in-fol. 5. vol. pour 90. liv. aufli de France. Il débite encore ['Hiftoire de l'E- glifr. Gallicane du P. Longneval } de la Compagnie de Jefus , ;»-4°. fix vol. dont on vend féparément le 5e & le 6\ ES SÇAVANS, On trouve chez G. Martin t rue S. Jacques; Se J. Guerin , fur le Quai des Auguftins, la Rofalinde imitée de l'Italien , 2. vol. in - iz. 17.31. U Imitation de Jefus-Chrift y tra- duite & revue par M. L. du Fref- noy , D. de S. fur l'ancien original François , d'où l'on a tiré un Chapi- tre qui manque dans les autres Edi- tions. Avec l'ordinaire de la Sainte Meffe. in -8°. 173 1. Chez Pierre Gandouin , Quai des Auguftins, à la Belle-Image. La Compagnie des Libraires a en vente Oeuvres de Maître Fran- çois Rabelais , publiées fous le titre de Faits & Dits du Géant Gargan- tua & de fon fils Pantagruel , avec la Pronojlication Pantaqrueline, l'E- pître du Limoftn , la Crème 'Philofo' phale j deux Epures à deux Vieilles de mœurs & d'humeurs différentes , & des Remarques Htjioriques & Critiques de Monfieur le Duchat y fur tout l'Ouvrage. Nouvelle Edi- tion , augmentée de quelques Remar- ques nouvelles. 1732. in-%°. 6. vol. Lettres du Cardinal d'Offat , avec des Notes Hiftoriques Se Politiques de M. Amelot de la Houffaye. Nou- velle Edition , corrigée fur le Ma- mifcrit original y confîderablement augmentée & enrichies de nouvelles Notes de M. Amelot de la Houf- faye , qui ne fe trouvent point dans la dernière Edition de Paris de 1^97. in-iz. j. vol. C. J. B. Herijfant , rué' Neuve Nôtre-Dame , Se Ph. Nie. Lottin t sue S. Jacques , ont imprimé Ser~ mons choifis fur les Myjleres , la Vê° O C T O B rite de la Religion différent Sujets de U Morale Chrétienne. Tome xn. contenant l'Ott^ve dit S. Sacrement, dr autres Sermons & Difcours. 1731. in-ix. Voyage de Confiantinople pour le Rachapt des Captifs. Par le R. P. zjehannot , Dolleur en Théologie de la Faculté de Paris , Mtmflre & Supérieur de la Maifon de Beauvoir RE; 1732. 6*2 x fur Mer , de l'Ordre de la Sainte Trinité. Chez de Lormel , rué du Foin Se Kené Joffe,m coin du Mar> ché-Neuf. 1752. in-11. Les Bains des Thermopyks à la Trincejfe de Mïlet. Vu feue Made- moifelle de Scuderi. Chez la Veuve Ribou , vis-à-vis la Comédie Fran-; çoife. 1732. /»-8°. Fautes a corriger dans le Journal d' ' Aouft 1732. PAge 447. col. 1. lig. 7. concortions , lifez, contorfions : Ibid. lig. 8, de membres , lif. de Membres:. Dans le Journal de Septembre* Page 504. col. i. lig. 4. reçus, lifez. requis : Ibid. col. 1. lig. 37. aucu> ne. On , lif. aucune , on : Ibid. col. t. lig. pénultième à fa fœur , lif. à la fœur: Pag. $06. col. t. lig. pénul. parcoure, lifez parcourt : Ibid. col. 2. lig. 26. qu'on examine , lifez, qu'on y examine : Pag. 505. col. 2. lig. 33, que compofe Calvin, lifez. qu'a compofe Calvin : Pag. 5 1 j. col. 2. lig. 13. occafion. Parce qu'il, lifez. occafion, parce qu'il : Pag. 520. col. 2. lig. 2 8. les maladies , lifez ôc les maladies : Pag. 534. col. Z. lig. dern. tel cft le débuc de l'Epicatoire , lif. tel eft le début de î'Epître Dédicatoire : Pag. 5 3 6 . col. 2 . lig. 1 2 . fc nourir , lif. le nourir : Pag. ; 50, col. 1. 1, 27* c'étoit , lif. t'étoic 626 TABLE Des Articles contenus dans le Journal d'O&obre 1732; LE S quatre Livres des Stratagèmes de Frontin. Par François Ouden- dorp, pag. 5 ponctués ont d'abord été très-ra- >» res. 4. L'Auteur vient maintenant aux nouveaux Défenfeurs des points-voyelles, qui plus raifonna- bles que les premiers , renoncent aux hypothtfcs combattues jufqu'i- ci. Ils avouent que les Malloretcs font Auteurs de la ponctuation hébraïque, mais ils prétendent que ces Grammairiens n'ont ponctué le Texte Hébreu que fur des Tradi- tions orales deicenduës d'Efdras jjufqu'à eux. Mais ( remarque le P. Houbigant ) comment conduire fans altération ces Traditions orales depuis Efdras jufqu'aux MalToretcs; Comment fixer pendant 15. fiécles la prononciation du Texte Hébreu de manière qu'elle ne fûtfufcepti- ble d'aucune vacation , Se cela fans Dictionnaires & fans Maîtres/ Cet- te uniformité chimérique n'eft que trop démentie par les anciens Tra- ducteurs qui ont lu ce Texte fi di- verfement, foit entr'eux , foitpar rapport à la ponctuation Maffore- tique , comme nous l'avons obfer- vé plus haut. L'Auteur , au fujetdc ces prétendues Traditions orales , renvoyé pour plus ample éclairciffe- ment au Difcours imprimé à la fin du fécond Tome de la Grammaire de M. Mafclef , fous ce titre Nova Grammatice Argumenta & vin- ÀlCttt. Novembre. NOVEMBRE, 175s. 67/ 5. Enfin notre Auteur , pour for- cer fes adverfaires dans leur der- nier retranchement , qui elt It feience profonde èv la critique mer- 1""" f.">.'Suv..t „„«, Mafforetes , entreprend de faire voir , après divers Savans , que ces Mafforetes n'étoient que des Gram- mairiens très-médiocres. Il en don- ne d'abord une Critique générale qui roule fur differens chefs , Se qu'il îuftihe par pludeurs exemple?. Il pallede-li à des Critiques parti- culières qu'il multiplie jufqu'au nombre de huit , & (ur lefquelles , ainii que fur les générales , nous ne pouvons le fuivre en détail. Nous nous contenterons d'indiquer en gros les diverfes réflexions de l'Au- teur , aufquelles donnent lieu fes Critiques tant générales que parti- culières. Voici à quoi fe reduifent ces réflexions. i°. Les Mafforetes ont laiiré des fautes confiderables dans leurs Manufcrits, ils les ont mal corrigés en quelques endroits Se d'une manière peu uniforme. 20. Ils employent une méthode bi- zarre pour corriger leur Texte; ils Jaiffent dans la fuite du difcours des mots altérés qui le corrompent , & ils attribuent à ces mots des points qui leur font étrangers. 30. Ils s'é- cartent confïderablement des 70 Se deS. Jérôme, en ponctuant les noms propres de l'Ecriture. 40. En déter- minant les fens du Texte Hébreu par leur ponctuation , ils n'ont pas toujours fait affez d'attention à la fuite du difcours ; ils ont prêté aux Auteurs Sacrés des métaphores peu convenables ; ils n'ont point com- Nnnn èq6 JOURNAL D parécnfemble les paffages parallè- les; ils ont donné à plulieurs mots des lignifications abfurdes. 5*. Ils ont quelquefois mal rencontré dans Interprètes avoient heureufement rendu le Texte Hébreu. 6°. Dé- pourvus d'anciennes Traditions fur la Langue Sainte, d'anciennesVer- ilons de l'Ecriture, & d'une critique fuffifante pour la correction parfai- te de leurs Manufcrits, ils euffent fait fagement de nous épargner leurs points-voyelles , & de ne pas limiter la lecture de leur Texte par là , car voici les inconveniens qui en font arrivés. j°. Ils ont donné fans s'en ap- percevoir , une infinité de démen- tis aux anciens Traducteurs. i°. En ponctuant le Texte Hébreu ils ont ïouvent limité à une feule idée le difeouts des Auteurs Sacrés, lequel étoit fukeptible de divers fens. 30. En nous affujettiffant à leurs points-voyelles , ils ontôté à la cri- tique toute l'étendue qu'elle doit avoir. 40. Par leur ponctuation, ils ont retranché autant qu'ils ont pu , à deux fortes de Lecteurs la tacilité de bien entendre l'Hébreu fans points ; favoir , i°. à ceux qui ayant appris l'Hébreu félon leur méthode veulent enfuice lire le Texte non ponctué : 20. aux Ma/clef fies qui lifentle Texte Hébreu fans prendre carde aux points-voyelles des Maf- ïbretes; ceux-ci par leur ponctua- tion ayant fait éclipfer de ce Texte plufieurs de ces 4 voyelles Aleyh , Hé ', Ou.ih &C toi , qui en facifo- toient la lecture , & rendoient le ES SÇAVANS, difeours moins vague & moins irré- gulier : 30. Ils nous ont ôté les in- troductions que l'Hébreu nous donne pour les Lansucs Q:;cr.taies qui en dérivent : 40. Ils nous ont fait perdre la trace de beaucoup d'anciennes étymologies : 5". Ils ont dégoûté de la Langue Sainte quantité de gens , qui ne manquant ni de capacité pour la bien entendre, ni de zélé pour approfondir les Ecritures , ont été bien-tôt rebutes, les uns parla pcritelTe des points- vovelles , dangereufe aux yeux dé- licats , & inacceflibles à certaines vues ; les autres par la multitude odieufe des préceptes qui les con- cernent. Tels font ( ajoute le Père Houbigant ) les préjugez légitimes contre les points-voyelles des Maf- foretes. Nous nefailons qu'effleurer ici ces articles , qu'il faut voir dans toute leur étendue chez l'Auteur. Mais comme la méthode des AJafcUfijhs a contre elle d'autres préjugez qu'il elt important de dé- truire : c'eib à quoi l'Auteur em- ployé le feptiéme article de fa Pré- face , dans lequel il répond aux ob- jections. On oppofe donc en premierlicu, Que le Texte Hébreu fans points- Yovelles devient h vague ev il confus, qu'il n'eft plus pollible de l'enten- dre. L'Auteur répond à cela , que ce Texte non-ponctuén'eif pas plus intelligible aujourd'hui qu'il l'étoic pour les Mallotetes inventeurs des points , que le font pour nous ks Livres des Rabins , écrits fans points , Se d'un ityle bien moins facile que les Livres Sacrés ; que le N O V E M Pentateuque Samaritain & la Ver- lion Samaritaine , écrits l'un & l'au- tre fans points- voyelles. Or tous ces Livres fe lifent &C s'entendent, fans Traditions émanées d'Efdras ou des premiers Samaritains. Pour- quoi les Livres Saints non- ponctués feroient-ils moins intelligibles? On objecte , en fécond lieu , que bien qu'abfolument parlant , on pût fe palier des points - voyelles , ils offrent cependant une forte de Commentaire , dont il cft utile de ne fe pas priver , en les proferivanr. A cela le P. Houbigant fait deux réponfes ; l'une, Que li le Com- mentaire fourni par les points- voyelles eft bon , le Lecteur eft en état de le découvrir de lui-même , puifque l'Hébreu fans points en- ferme toute interprétation feniéc des Livres Saints : l'autre , Que fi ce Commentaire n'eft point fenfé, le Lecteur ne pouvant en pareil cas le deviner, aura recours, s'il veut, pour l'apprendre aux Verfions La- tines faites fur les ponctuations Mafforétiqucs. Sur cette règle établie par les Aiafclejifits , que pour entendre parfaitement le Texte Hébreu, il faut recourir fouvent aux ancien- nes Verfions de l'Ecriture , on tait cette dernière objection , Que le Texte original, ne doit point être jugé fur des Traductions. L'Auteur convient du principe ; mais fans prétendre que les Verfions aufqucl- les on a recours déterminent en dernier reffort les fens du Texte Hébreu , les Mafclefijies ne conful- tent les anciennes verfions que pour B R E , i 73 2. £77 y découvrir lequel des anciens In- terprètes a mieux rendu fon Texte, lequel s'eft fervi d'un Manufcrit plus correct , lequel eft le mieux entré dans le génie des Auteurs Sa- crés , lequel s'eft rendu plus atten- tif à la fuite & à l'enchaînement de tout le difeours : en un mot , ils ne confultent ces Traductions que comme autant de Gloffaires , Se comme ils confulteroient les con- cordances Hébraïques dé Buxtorf , où l'on trouve un mot Hébreu ex- pliqué par un autre. Tous ces articles n'ont été difeu- tés par l'Auteur, que pour juftifier devant le Public le choix qu'il a fait de l'Hébreu fans points , en compofant cet Ouvrage. Il ren- voyé les Lecteurs aux dernières ju- ftihcations qui ont été faites des fentimens de M. Mafclef. » Ce » Grammairien judicieux ( conti- » nue-t-il ) a rencontré , fans le » fçavoir , un Difciple dont il fe » feroit honneur s'il vivoit encore , w & ce Difciple a répondu folide- » ment aux objections pofthumes >» qui nous font venues d'une Eco- » le de fçavans Religieux, que nous » refpcctons , mais que nous fça- 1» vons bien n'être point tous du » fentiment de leur Maître. L'Auteur, dans le dernier arti- cle de fa Préface , rend compte de la méthode qu'il s'eft preferite pour la conftruction de ce Vocabulaire où font raffemblées toutes les raci- nes de la Langue Hébraïque. Nous avertillons d'abord que dans cet Ouvrage on s'eft propofé pour mo- dèle les racines Gréqucs de Port* N n n n ij 6-jS JOUHNAL D Royal > avec cette feule différence , qu'au lieu que dans ces dernières on fait deux claffes, l'une des mots les plus communs expliques en vers, l'autre de ceux qui font les plus ra- res expliquas en profe, le P.Houbi- gant n'en a bit qu'une feule , & a mis en vers toutes les racines Hé- braïques, ce quia fon avantage. II déclare d'abord , qu'il a compofé cet Ouvrage pour deux fortes de Lecteurs , pour les Mafclefifies Se pour ceux qui ne fe font pas enco- re affranchis des points-voyelles ; Se il donne aux uns Se aux autres d'u- tiles avertiffemens. Une veut point par exemple qu'en apprenant les Stances par cœur, on charge fa mémoire des mots Hébreux : il fufrlra , félon lui, qu'en lifant ces mots Hébreux, & couvrant d'un pa- pier les lignifications Françoifes qui font à côté , l'infpcction feule de ceux-là reveille aulîï-tôtdans la mémoire les idées de celles-ci. Il ne confeiile à perfonne d'ufer de ces racines comme d'un Diction- naire , fans fe donner la peine de les apprendre : autrement ils per- draient bien du tems , Se s'expo- feroient à bien des méprifes , que l'Auteur fpecifie. Il juge à propos de ne point apprendre les Stances fans y joindre la lecture du Texte Hébreu. Pour prononcer les mots Hébreux qui commencent toujours chaque vers, on fuivra les deux rè- gles de M. Malclef, pour Us voyel- les Se pour les confonnes. A la fuite de chaque mot Hé- breu paraît d'abord fa lignification primitive ou plus étendue , qui dc- ES SÇAVANS, vient comme une pierre d'attenre pour une féconde lignification , & celle-ci pour une troifieme , &c. ce qui aide beaucoup la mémoire du Lecteur. Au-de(Tous des Stan- ces font imprimées les Notes defti- nées i°. à indiquer toutes lesfignifi- eations des Racines ou mots/impies^. 2*. à relTembler tous les mots com- pofes Se tous les fens dont ils font fufceptibles dans les Livres Saints. Ces Notes contiennent grand nom- bre de lignifications nouvelles des mots Hébreux répandus dansplu- fîeurs Critiques ou Commenta- teurs. Les citations Gréques qui cn- richiffent ces Notes , font pour la. plupart tirées desHéxaplcs d'Origé- ne Se des concordances Gréques de TrommUis , Se traduites en Fran- çois ou en Latin. Toutes ces cita- tions rempliflent deux vues princi- pales : l'une d'apprendre aux Lec- teurs comment les anciens ont tra- duit certains endroits difficiles du Texte Hébreu; l'autre, dejuftiher fou vent la conformité des ancien- nes Verfions de l'Ecriture Sainte avec ce même Texte Hébreu non- pon Syriaques , Arabes, Samaritaines „ drr.infcrces dans ces mêmes Notes, Se des citations empruntées du fa- meux Bocbart. Aux Stances Se aux Notes qui forment la première partie de cet Ouvrage, fuccedent les particules Hébraïques , qui remplirent la fé- conde. Cette partie eff beaucoup- plus ample qu'on ne la trouve dans. les Birxtorfs , étant ici enrichie aux. NOVEM dépens des Héxaples d'Origéne Se de l' Heptaglotton de Caftel ; fans compter la Diflerration de Cappel fur les Ken & Kethtb de La & de hou ; inférée en cet endroit pour exciter les Hébraïians à consulter la Critique Sacrés de ce favant homme , à mefure qu'ils avance- ront dans la lecture du Texte Hé- breu. Les origines ou les étymologies Gréques , Latines , Françoifes , Italiennes, Efpagnoles, &c. c'eft- à-dire , les mots de ces diverfes Langues dérivés de l'Hébreu, corn- pofent la troiiïéme partie de ce Vo- lume, Si. font rangés félon l'ordre de l'alphabet Hébraïque. On voit d'abord la Racine de cette Langue imprimée en cj ratières hébreux, puis en caractères Romains conformes à la prononciation des Aiafclefifies : À la fuite dclquels viennent les mots qu'on fuppofe en tirer leur origine. On peut rapporter toutes ces étymologies à trois différentes clartés. Les unes font vrayesôc peu- vent palier pour indubitables ; les autres n'ont que delà vraifemblan- ce i les dernières font vifiblemenc fauffes. Du nombre des premières ou des véritables font , par exemple 3 Ie. Ambuba'i'jE , Joueufes deFlîite , dérivé d'ABOuBA en Chaldaïque & en Syriaque, Chalumeau: 2°.Ab- ba ou Abbas , Père , Abbé , d'AB , Père : j°. £&» , Hélas : de Aboui, Hélas. 4°. Adam , le premier Hom- me, d'ADAME' , terre rouge : 50. A- donis , Dieu des Phéniciens , d'A- dan , Seigneur; 6°. Srtww*, Hys- B R E, 1732; CÎ75 sopus , Hyfepe ,d'AzAB, la même chofe. Nous rapporterons pour exem- ples des étymologies du fécond or- dre ou feulement vrailemblables les fuivantes : 1°. £e'« , être allumé ; aÇ» , fuye decheminée , du Chaldéen Aza , brûler : z°. Arar, la Saones Rivière dont le cours eft très-lent 3 Si Ara en bas- Breton lent , d'A~ her, tarder: 30. Maori , les Mau- res , Afriquains Occidentaux , de Mouherin , les derniers , les Occi- dentaux : 40. Turo, ObtuRO, fermer t c'I'Ater , la même chofe : 50. à^ii , cruel , d'AiM , terrible : 6°. kvJ( , fourrage , d'AcAL , nour- riture. Les exemples qui fuivenr offrenr des étymologies de la troifiéme clarté , ou qui font absolument chi- mériques : 1°. Axilla , aijfelle , d'ATizL, la même chofe : 2°. Bi- got , hypocrite , de Beguid , perfi- de : 30. Bellum , guerre, de Bê- lai. , mêler, brouiller: 40. E°/u£pvov Embryon t d'AM-BERA, mère cjui crée: s9. i'iKi\rt, femblable, deGuiL refemblance : 6°. Hidalgo , en Ef- pagnol , noble , de Daguil , infi- gne. C'cil fur les étymologies de cet- te dernière clarté , que l'Auteur a cru devoir demander grâce aux Lecteurs. Comme elles peuvent en- trer pour quelque chofe dans fort dertan général , qui eft de rendre les Racines Hébraïques plus faciles à retenir , en montrant le rapport , foit véritable , foit apparent ou feu- lement imaginaire , qu'elles ont ivec les termes connus dans les au» 68o JOURNAL D trcs Langues , il s'eft riaece de quel- que indulgence des Savans pour ce Mgard. Il exhotte donc les Hébraï- fans fes Difciplcsà lire une Lctcre des origines , à mefure qu'ils ap- prendront par cœur la même lettre dans les racines. L'Auteur finit la Préface en priant les Mafclefifles qui en favent autant que lui , de lui donner leurs avis fur les tances ou fur les omi liions qui pourroient fe rencontrer dans cet Ouvrage , & il promet de mettre ces avis à pro fit. Au furplus , comme il fcroit à fouhaiter pour ceux qui lifent l'Hé- breu fans points , qu'il s'imprimât des Bibles Hébraïques de cette ef- pece qui rulTent à lcurufage , le R. RECUEIL T>E PIECES , D'HISTOIRE ET DE Littérature. Tome Second. A Paris , chez ChaubeRt, à l'entrée du Quai des Auguftins , du coté du Pont S. Michel , à la Renommer & à la Prudence. 17 Jl. pp. 234. ES SÇAVANS, P. Houbigant tjit cfperer qu'il pu- bliera bien-tôt une Bible Hébraïque fans points, d'un beau caractère, de beau papier , Se moins chere que les Bibles ponctuées. L'Editeur des quatre Grammaires de M. Mafclef nous a priés d'aver- tir ici , cjh'iI ne laijfe pas ignorer è fes Letleurs les caractères San;*ri~ tains & Syriaques ( ainlî qu'on i'a avancé dans les Mémoires de Tré- voux ) Se qu'il a fait imprimer dans le fécond Tome de ces Gram- maires , un Alphabet Samaritain ex un Alphabet Syriaque , avec toutes les lettres initiales , médiantes & finales. CE Recueil renferme fept Pie- ces , fçavoir : la Vie de Plu- tarque traduite de l'Anglois de Dryden ; un Difcours fur i'etat des Nations , à la Naillance de Jefus- Chrilt ; un petit Traité des Dona- tions de PepmiSi.de Charlcmagnc à l'Eglifc de Rome; une DilTerra- tion fur les taux Prophètes ; une autre fur la Collection d'Ifidore, & fur les Décretales attribuées aux premiers Papes; une expohrion des fentimens d'un homme d'efprit lur la Nouvelle intitulée : Dom Car- tos ; enha-la Réponfe d'un Con- feiller du Parlement de * * à une Lettre de M. Durant, au fujet du Difcours de M, de la Motte , fur la. Poëfie Dramatique. La Vie qu'on donne ici de Plutar- que elt la plus longue Pièce du Re- cueil ; nous l'abrégerons le plus qu'il nous fera poiiîblc. Cet Hifto- nen né à Chéronée petite Ville de la Boérie , d'un père dont on ne fçaic point le nom , Zc fous le règne de l'empereur Claude , comme notre Auteur le conjecture , vécut dans un hecle qui fçût eltimer fon méri- te. Plutarque trouva un Trajan , comme Ariliorc avoit trouvé un Alexandre. Mais les Hiftoriens qui lui fucccilerentlui portèrent envie, ou négligèrent de le taire connoître: A-ucun d'eux , pas même parmi fes Compatriotes , n'a daigné écrire NOVEM une Relation circonftanciée de fa Vie. Ou h quelqu'un l'a fait dans la fuite , fon Ouvrage ne s'efl: point confervé. Ainfi , à l'exception de quelques traits qui fe trouvent ré- pandus au fujet dePlutarque , dans Suidas Se dans un petit nombre d'Ecrivains, il faut glaner dans les Oeuvres, de cet Hiltorien pour compoferuneHiftoirede fa Vie. Il eut pour maître Ammonius d'Egypte, qui après avoir enfeigné la Philofophie à Alexandrie, voya- gea dans la Grèce , & s'établit enfin à Athènes , où il s'acquit une gran- de réputation. Plutarque élevé par «in Ci grand Maître , fit des progrès ctonnans dans les Sciences , Se fe fit admirer fans avoir voyagé dans les Pays lointains, Se fans avoir même appris aucune Langue étrangère. Notre Auteur obferve fur cela , que Plutarque négligea d'abord d'ap- prendre la Langue Latine, Se ne commença que fort tard à lire les Eci'itsdes Romains. S'il eut le bon- heur d'être formé par un excellent Maître, on remarque que fa vertu naturelle fut la principale caufe du progrès qu'il fit dans les Sciences. On palTc ici aux liaifons étroites qu'il voulut avoir avec les Sçavans , Se aux voyages qu'il entreprit dans ce deffein. On raconte comme à l'exemple de Pythagorc Se de quel- ques autres Philofophes, il s'entre- tint avec les Prêtres d'Egypte pour apprendre les Myfteres de la Reli- gion des Egyptiens j comme à fon retour d'Egypte dans la Grèce , il vifita toutes les Académies , & en rapporta plufieurs Obfervitions B R E , 173 2. 681 dont il a enrichi la pofteritc. On n'oublie pas le foin qu'il fe donna de recueillir les Livres les plus efti- més , Se de confulter les Régi (très publics de toutes les Villes où il pafToit. On remarque qu'il fit un voyage exprès à Lacédémone pour voir les Archives de cette République, Se prendre des idées jultes de fon an- cien gouvernement , de fes Légilla- teurs, de les Ephores , de fes Rois ;. ce qui le mit en état de faire entrer dans fes Ouvrages les faits les plus mémorables , Se les traits les plus fententicux des Lacédémonicns leurs proverbes , leurs coutumes , leurs loix , leurs cérémonies , leur manière de vivre, foit en public, foit en particulier , dans la paix Se dans la guerre. L'étude qu'il fit des mœurs des autres Republiques , ainfi qu'il paroît par fes Vies 6\: par fes Questions Gréques Se Romai- nes , n'eft pas non plus oubliée ici. On obferve comme il joignit à ces connoiffances celles des Statues, des Infcriptions , & des Tableaux. Les différentes Seelres des Philofophes exciterentla curiofïtéde Plutarque ; l'on entre à ce fujet dans des détails aufquels nous nous croyons obligés de renvoyer pour éviter lalongueur, Plutarque s'appliqua particulière- ment à la Philofophie Morale, dont les principes lui parurent moins douteux , Se plus utiles pour le rè- glement de la vie des hommes. Il reconnut après Socrate , que les Spéculations de la Philofophie Na- turelle , étoient plus agréables qu'utiles , 6v qu'elles étoient abftru- 682 JOURNAL D fes, épineufcs Se pleines de Sophif- mes. Il fçavoit, dit l'Auteur , que les Mathématiques pouvoienc par leurs démonftrations le dédomma- ger de l'application qu'elles deman- dent v mais en même tems ils'ap- perçût qu'en le rendant plus habile, elles ne le rendoient pas plus ver- tueux , & que pour cecte railon , elles ne le conduifoic>r point au vrai bonheur ; ce qui l'engagea à faire de cette Science, non fon oc- cupa:! i i, mais fon amufement.C'é- toit j'i ncipalement à Table qu'il s'e ... it à refoudre quelque pro- blênu ; il a voit foin en même tems d'affa donner de traits plaifans Se enjoués ce qu'il dif >it. Car plutar- que n'étoit pas un Philofophe trifte & mélancolique -, il vivoit agréa- blement fans s'écarter des bornes de la fageffe ; fa converfation étoit gaye , fon érudition aimable. Il ne fut pas alTez auftere pour meprifer lesricheffes; maître d'un patrimoi- ne confiderable il jouilToit fans fa- ite des douceurs de l'abondance, Se faifoit part d'une partie de fes biens à fes amis. Notre Auteur prétend que Plu- tarque faifoit profelîion de la Reli- gion Payenne fans en croire les fu- perftitions. Il eft vrai qu'il fut Prê- tre d'Apollon; ill'avoiie lui-même, mais il ne s'enfuit pas de-là , dit-on, qu'il ait été Polytheiftc. M.Dryden prétend même que ce grand Hom- me croyoit un Dieu tel que nous le croyons; ôc comme plufieurs Au- teurs lui ont attribué la même créance fans citer de lui aucun Texte qui appuyât leur fentiment , E S SÇAVANS, notre Auteur prétend fupp'.éer à cela par les deux Textes fuivans : le premier eft tiré du Livre de la cclfationdes Oracles, oùPlutarque pour répondre aux Stoïciens qui pretendoient que s'il y avoit plu- fleurs mondes , il fallait plufieurs Dieux pour les gouverner , leur dit: >» Où eft la neccflité d'admettre » plufieurs Dieux pour la pluralité » des mondes ; Puifqu'un Etre cx- » cellent , doiié d'intelligence Si de » raifon , que nous reconnoiffons » pour perc Se pour maître de tou- n tes chofes , luftk pour régler ces » differens mondes , au Heu que fi » l'on admet plufieurs agens Suprc- » mes, leurs décrets fe contredironc » perpétuellement. « M. Dryden avoue qu'il n'a pas traduit littérale- ment ce palïage , mais il foûtient qu'd en a confervé le fens , quoi- qu'il ait dérangé l'ordre de la pen- fée. Le fécond Texte eft tiré du Commentaire fur le mot E'1 , qui étoit gravé au-deffus des portes du Temple d'Apollon à Delphes. Plu- tarque dans ce Commentaire rap- porte différentes explications du mot dont il s'agit , Se dit entre au- tres chofes , 1°. qu'£7 fignifiey», parce que toutes les queftions qu'on faifoit à la Divinité commençoient par Si : par exemple , Si les Grecs [croient vainqueurs des Perfes , Sec. 2°. Qu'.EY pourrait fignifîer Tu es, pour exprimer l'Etre par effence , ou la perpétuité de l'Etre apparte- nant à Apollon. Plutarque adopte cette dernière interprétation , Se s'explique ainfi. E'1 veut dire : » Toi qui es un , car il n'y apas plu- » fieurs N O V E M « fieurs Divinitez , mais une feule. » Je n'entends pas ce mot a» , dans » un fens compofé , comme lorf- » qu'on dit une armée , mais je le » prends pour ce qui exifte feul , & » doit neceffairement exifler feul , » renfermant l'unité d'eflence : Un n eft ce qui n'eft qu'un , ce qui eft » lîmple fans compofition ni mé- i> lange. Aind être un en ce fens, » n'eft précifément qu'une nature n pure par elle-même , incapable ») de changement & d'altération. L'opinion de Plutarque fur la Métempfycofe eft ici examinée , on prétend qu'il femble établir ce dog- me dans les Traitez où il recherche les caufes de la ceffation des Ora- cles , & pourquoi la pythie ne les rendoit plus en vers ; on cite là-def- fus quelques paroles de ce Philofo- phe ; ceux qui en feront curieux les pourront voir pag. 28. Scfuiv. le mariage de Plutarque , fa femme , fesenians, fa manière d'agir dar* fon domeftique font ici un article étendu. M. Dryden, après plusieurs re- marques que nous pallons , dit que Plutarque à l'âge de 60. ans quitta l'Italie pour revoir fa Patrie , qu'à fon retour il fut élu Arconte , ou premier Magiftrat de Cheronce j que peu de tems après il fut mis au nombre des Prêtres d'Apollon, que félon toutes les apparences il eft mort revêtu de l'une cV de l'autre dignité *, qu'au refte on ignore le tems &c les circonftances de fa mort, mais qu'il eft confiant qu'il vécut jufques dans une vieillcffe très- avancée , fans difeontinuer fes étu- Nevembre. BRE, 1731. cT8j des. C'eft par là que M. Dryden termine fon Kiftoire de Plutarque. Il déclare au refte qu'il a, travaillé fur tant de Mémoires défectueux qu'il n'a pu fatisfaire nî fa curiofité, ni celle des autres. Ce [l ici , dit-il, la Vie d'un Philofophe ou l'on ne trouve point cette variété d'événe- ment qui eft fi propre a amufer le Lec- teur , Vie plus agréable pour le Philo- fophe qui la mené , que pour l'Hi- ftorien qui l'écrit. Quelques traits d'érudition , ut» éloge del'Hiftoire, des Reflexions fur la manière de la bien écrire dans tous les genres , & une juftiti- cation de Plutarque contre lacen- fure de quelques Auteurs, font la clôture de cette première Pièce , dont le dernier article eft une tra- duction de l'Epigramme d'Aga- thias , confervée dans l'Antologie, &c qu'on fuppofe avoir été mife au bas de la Statue de Plutarque, la voici. Plutarque de Cheronée , c'eft a ta louange immortelle , que Rome mar- tiale élevé par reconnoiftance ce Mo- nument. Elle apanage avec la Gré- ce la gloire qui t'eft due pour les parallèles des Héros des deux nations. Tu n'as jamais pu écrire ta Vie , er toi qui as trouvé des Héros qui fe reffemblent , tu n'es comparable k perfonne. La seconde Pièce , qui eft fur l'état des Nations à la naiffance de l'Eglife , expofe la fituation où étoient alors les Gentils par rapport au civil 8c par rapport à laReligion. A l'égard du civil on effayede faire voir en eux une difpofitionfenfiblc Oooo idées jufqu'au Cabinet Cv au lit >» des plus grands Princes : vous » n'auriez jamais cette hardielfe , i> Madame , & ridelle dépolitaire » des Trefors de l'Hittoire , vous » auriez taie fcrupule de nous re- 3> preftnterle fils naturel de Char- » les Quint, fous la figure d'un » mal-hcnnêtc homme. Vous fça- » vez que les Auteurs qui ont parlé i> de lui , le nomment l'amour de » ion ::.v.c , .S; l'émulation de ceux »qui leluivront ; vous nous repe- ji tenez ces éloges i c\: lins fonger » que pour plaire il faut dire des x> chofes nouvelles » vous ne vous i> feriez point avilée de donner à » Dom Juan , des delirs criminels » pour la femme de fon Roi , non i> plus que des fentimens de ven- 31 geance cv d'envie pour un Piincc a> dont il devoit un jour être fujet. » Vous auriez par les fuites du » mcmeefpritobfervé les règles de n la vrailemblance , iv vous fouve- 3> nant qu'Homère Se Virgile mar- x> quent avec foin l'âge de leurs i> Héros ; qu'ils ne leur font rien 3> faire que de conforme à cette ob- » fervation , & que chez eux la fai- B R E, 1732. 6*87 » fon de la prudence & celle des » entreprîtes téméraires font vifi- 3) blement dilf inguées ; vous auriez » perdu ce grand incident de l'en- 33 trevûe de la Reine Se du Prince » Dom Carlos. » Il naquit au moisde Xovem- » brede l'année 1^44. Se Madame * Elifabeth de France Héroïne de 3> cette Hiftoire , fut mariée au » Roi Philippe II. le mois de Juin » 1559. Ce Prince n'avoit donc » que quinze ans , quand , pour » me fervir des termes de l'Auteur, 33 il ImalUà i.t rencontre. Qu'm- 33 riez-vous fait d'un Héros de ce: « âge 5 vous auriez cru pécher con- » trele jugement li vous l'aviez dé- » terminé à ce qu'il devoit faire. Il » n'eût reçu les imprelîïons de l'a- » mour que comme un mouve- » ment inconnu , & furpris d'un » trouble qu'il n'auroitpu définir, » il vous eût obligée à trancher en >3 fix lignes de récit, trois ou quatre » années de fa vie. » Son nouvel Hiftorien en eft- » bien meilleur ménager : à cet âge «•où vous n'auriez ofé lui donner » aucun emploi , il conçoit unvio- » lent amour pour la temme de fon » père , les périls & la lîngularité de » fon entreprife ne lui donnent au- » cune terreur , & maître abfolu 30 d'un efprit qui à peine de- » voit être formé , le defordre & » l'ardeur de fon ame ne produifenc » qu'une converfarion enjeu.;. »Vous me direz fans doute, >» comme vous êtes malicieufe , que » ce caractère fc dément , que la » dillimulacion du Prince l'abara- <Î88 JOURNAL DE «donne dans les occafions où elle m lui feroic le plus necellaire. Il laif- »fe deviner au Prince fon oncle les »> fentimens de fon cœur, & partant » de cette imprudence à une autre , »il die des injures à un homme »> qu'il avoit aflez eftimé , pour ne » fe déguifer qu'imparfaitement en n fa prefence. Il choifit mal (on heu » Se fes témoins quand il fait cette » raillerie fur les voyages du Roi i» fon père; &la Princeffe d'Eboly » lui étoit affez fufpecle , pour le » contraindre à fe modérer devant «elle-, n'a voit-il , direz-vous, que j>la chambre de la Reine , où il m pût écrire une ironie de cette for- »te, & après l'avoir écrite, n'avoit- » il point d'autre endroit où la ca- >»cher , qu'un cabinet , qui par le » nombre des Officiers d'une Reine «doit être confïderé comme un » lieu public 2 Mais , Madame , » il faut que toutes chofes fuivent » l'ordre de la nature : Dom Carlos » avoit fait à 15. ans le perfonnage »d'un homme de quarante, il fal- >iloit bien que dans le refle de fa m vie il fît celui d'un homme de » quinze , &c. Nous nous en tiendrons à cet exemple pour faire juger du refte de la Critique. La septi'eme 5c dernière Pièce du Recueil eft la plus courte, com- me la première eft la plus longue. C'eft une Lettre , comme nous en avons averti , qu'un Conieillcr du Parlement de B. * * * écrit en ré- ponfc a M. Durand , au fujet du Difcours de M. de la Motte fur la Poé'fie Dramatique ; l'Editeur du s sçavans; Recueil donne d'abord avis dans une Note , qu'il n'auroit ja- mais publié cette Pièce h M. de la Motte étoit vivaDt , mais que depuis qu'il eft mort il ne trouve aucun inconvénient à la rendre pu- blique, & là-defTus il cite ces paro- les de M. de la Motte même : Tous les égards font dûs a ceux- avec qui nous vivons nous ne devons aux autres que la vérité . . . . & nous ne faifons d'anatomie que des morts. Re- fiex. fur la Cri t. p. 1 ;. fecondeEdit. L'Auteur de cette Lettre, après s'être juftifié fur quelques reproches que lui a fait M. de la Motte, fe rab- bat à dire, i°.qu'on ne trouve point dans l'Ouvrage de M. de la Motte le fecret du Poëme Dramatique , que c'étoit cependant ce qu'il avoit annoncé ; 20. Que fi l'on retranche de fon Ouvrage ce qui n'en eft point , fçavoir un Difcours Prélimi- naire , où il dit longuement , qu'il a eu de la vanité , qu'il en a , qu'il en doit avoir , &: que même le pu- blic doit fouhaiter qu'il en ait,vingt pages de morale rancunière contre les Parodies , autant fur les Criti- ques , une moitié du Livre defti- née à des juftifications perfonnelles, on n'a , après cette réduction, quoi- que ce foit fur la Poefie Dramati- que-, enlorte qu'enlever. de l'Ouvra- ge de M .de la Motte ce qu'on vient de dire , c'eft enlever tout fon Ou- vrage , ce qui refte ne conlïftant qu'en chofes communes , quoi- qu'elles foient le fruit de trente an- nées d'ajfiduité & d'experience au Théâtre & d'autant d'années de dif- cuffions au Caffè. NOVEMBRE, 1752; Le Confeiller Auteur de cette Ouvrage de Critique ; c'eft aux Lettre écrite contre un Ecrivain qui n'eft plus en état de fe détendre, la termine en avettifiant qu'il eft refolu de ne plus travailler à aucun Le&eurs à voir ce qu'ils doivent penfer du parti que prend enfin cet Auteur, APOLOGIE DES BESTES , OU LEVRS CONNOISSANCES, & raifonnemens , prouvés contre le Syftéme des Philo fophes Cartefiens t qui prétendent que les Brutes ne font que des Machines automates. Ou- vrage en vers. Par M. Morfouace be Beaumont. A Paris, chez Pierre Prault , Quai de Gêvres, au Paradis. 1732. vol. in-%°. pp. 196. CE T Ouvrage eft tout en vers, jufqu'à l'Epure Dédicatoire même & à la Préface ; l'Auteur , dans cette Préface , introduit fa Mufe qui lui reprefente d'abord en ces termes , la difficulté de l'entre- prife qu'il médite. Sous le joug que la rime impoiê aux vers François , Et dont l'entoufiafme eft fans ceflc l'ef- clave ; Pourras-ru te ployer & foûtenir le poids D'un fty'e exaft & clair , noble , agréa- ble & grave ? Toutefois je veux bien fans te découra- ger Te montrer les écueils où tu peux t'cnga- ger. Des grâces & des fleurs de notre Poëfic Adoucir & parer l'âpre Philofophie , Eft un rare talent : c'eft un fuprême don Qu'au Parnafle on rcferve aux enfans d'Apollon. C'eft peu d'avoir règle le plan de ton Ou- vrage , D'en peindre à ton idée une flatcufe ima- ge ; Il faut que l'exécution Marche d'un pas égal avec l'invention. Penfes-tu que des vers gênés par la ma- tière Conferverontleur grâce entière? Dans un fujet fcabreux , aride , fec , in- grat. Toute la force de la verve , Sous des termes bornés languit , tombe 3 s'énerve. Et le feu le plus vif jette un mourant éclat. S'agit-il de décrire un combat , un nauf- rage , Ou de guerre civile un Empire agité, Dans de fi vaftes champs , l'cfprit qui fe dégage, Frappe des vers au coin de l'immortalité. Il n'en eft pas ainfi quand il faut fe re- ftramdre Au fterile récit de la conftruétion Des loges du Caftor : ou quand il faut dépeindre Cet art qui pour le miel compofe le rayon , 6$o JOURNAL DES SÇAVANS, La profe peut à peine exprimer la mer- veille De l' Alvéole & de l'Abeille, Faut-il reprerenter les (impies actions De la bete qui vit fuivant fes notions , Pour les bien exprimer quelle trille di- fette Souffre le plus riche Poète ! Apres quelques autres reflexions, la Mufe exhorte notre Auteur à fuir la Méthaphyfique , & lui recom- mande de s'en tenir à ce qui eft du Phylîcien. Il fuffit qu'en Phyficien Tu prouves au Cartelîen Par démonftration , & par expérience, Que l'ame de la brute agit par connoif- fance. Laide aux préfomptueux fbûtenir leur moyen D'affigner à fon être un être mitoyen Entre l'ame matérielle Et ton ame fpirituelle ; Evite l'équivoque , & mets de ton côté La doék & fage Antiquité. Fai , comme elle , fentir l'éminente di- ftance De l'ame de la bête & dufoiblc rayon De fon imparfaite raifon Jufqu'à l'humaine intelligence Qui par fa noble qualité Sur l'autre être animal foûtient la di- gnité. Nous paflons quelques autres vers pour venir à l'Ouvrage même. Dans la Préface c'clt une Mufe qui parle, & dans l'Ouvrage on intro- duit une bête qui fur le fait du fenti- ment & de la raifon prend la défen- fe de fes fcmblables , fuivant cet au- tre avis de la Mufe dans la Préface. Il faudra fur la Scène introduire une bête, Qui de Ton genre brute , en réclamant les droite. Viendra de la nature interpréter la voix , Et de fes actions tirant la confequence Démontrer que fon ame a quelque con- noiffance , Voici donc comment notre Au- teur fait parler d'abord la bête qu'il introdait : Que tu fais peu d'honneur à là fage rai- fon, Homme orgueilleux ! Tu fuis la brillante lumière, Que t'offre fon flambeau : ton erreur lui préfère D'une fauffe lueur la fombre exhalaifon. Plein d'une folle idée , en vain tu t'ima- gines Que les bêtes ne font que de pures Ma- chines , Sans ame , fans penfée, & qu'un aveugle inftinft. Mais pour rougir de ta chimère Et fentir tes Ululions, Compare un peu tes actions A leur conduite régulière , Cette NOVEMBRE, 1732. 691 Cette comparaifon révolte ta fierté, Mais fans te prévaloir de ta fubtilît* Ofe à ton amour propre iirpafcr le fïlence , Et tu reconnoîtras où panchcla balance. M. de Mot fouace interrompt ici îe Difcours de la bête pour recom- mander aux Lecteurs de prêter une oreille attentive à ce qu'elle va leur dire : Par un aveu public nous confentons, dit- elle, De vous abandonner la fiere opinion D'être animés vous feuls ; à notre exclu- fion , Par une ame fpirituelle ; Et pour veus mieux flatter fur cette di- gnité , Nous ne contenions point fon immorta- lité. Nous ne Tentons que trop avec quelle diftaoce La nature a voulu vous élever fur nous , Et vous donner la préféance ; Nous y fommes fournis fans en être ja- loux. Quelque dur que foit votre Empire, Nous le fouffrons (ans murmurer , Mais nous fommes las d'endurer Tous les traits dont on nous déchire. On prétend dégrader par un noir atten- tat, Notre nature & notre état , Cet outrage nous force à rompre le fîlen- ce. Novembre. Nos fenfcs animaux fe plaignent par ma voix , Et m'ont chargé de leur défenfc , La nature m'infpire & réclame nos droits. Depuis des fiédes innombrables Nous étions en pofleffion D'agir en bêtes raifonnables Pour notre confervation : Mais il eft furvenu depuis plus de vingt luftres , Un Philofophe audacieux , Qui croyant fe rendre fameux Par des découvertes illuflres , A rifqué contre nous un romanefque écrit Qui n'a pas fait honneur à fon fa- blime efprit : Cette fable philofophiquc A néanmoins fcû plaire au cerveau luna- tique De quelques faux Scavans & bizarres Docteurs , Que la nouveauté feule engage en fês er- reurs. Ce jeu qui devoit être une plaifanterie A contre nous, enfin, paflé la raillerie, A ces vers M. de Morfouace trouve le moyen de faire fucceder une peinture des mœurs de la bête par oppolltion à celles de l'homme; mais une telle peinture ne fervant de rien pour prouver que les bêtes fentent & ont de la raifon , elle ne peut guéres être confédérée ici que comme une digreflion , & c'ell de Pppp 692 JOURNAL D quoi il fera facile de juger parce dé- but de la bc;e que notre Auteur fait parler. Je vais donc commencer par un détail fincere A développer fans myftere , Toutes les oppositions De nos moeurs à vos parlions > Nous voyez-vous brûler de la foif des ri- chefles , Et de l'ambition careflér les foibleffes, &e. Après le relîe de la digreflîon que nous croyons pouvoir palier , l'Au- teur revient à ion fujet , en faifant taire à fa bête les raifonnemens fui- Si votre idée étoit une réalité Qui nous pût revêtir d'impaflibilité, Nous entendriez-vous errer , gémir & plaindre , Quand à force de coups vous voulez nous contraindre; Mais nos gémiflemens , notre vive eia- meur , Stlon vous , ne font point des lignes de douleur , Vous ne faites de nous que des montres fonantes , Dont hsrfque le timbre eft frappé , Les machines ictentilTantes Rendent le même fon qui nous eft échap- pé. Grâce à vos rêves ridicules, Hé bien nous voilà donc transformés en pendules. ES SÇAVANS; N'cft-cï point trop nous ennoblir ? Oui , ditef-vous j il faut encor vous zvuic. Vous n'êtes tout au plus qui des marion- netes , Qui , fans fçavoir agir , faites des pi- rouettes; Mais nous vous répondons , levez votre bandeau , Notre métamorphofç eft dans votre cer- veau. Quoi ! le Renard, le Singe & les bêtes Canines Ne font que de pures Machines, Qui , fans perception , & fans nul fentï- ment N'ont dans leurs fonctions qu'un jeu de mouvement ? L'adroit imitateur de la malice humaine, Le Singe, loin d'agir & penfer finement N'eft donc qu'un tuyau d'orgue, ou quel- que autre inftrument, Qui fuit par fes reflbrts une route incer- taine, &c. Vous ofez dire que le Chien Ne voit, nefent, ne connoît rien 3 Pénétré de douleur s'il a perdu Ion maî- tre, S'il court pour le chercher avec empref- fement. Et d'abord qu'il le voit paroitre , S'il lui marque fa joye & fon attache- ment , S'il le flatte, le fuit, le baife & Ieca- rede , Si fes fauts , fes tranfports expriment fa tcndxeflè ; NOVEMBRE, i73 a. 6j?3 Tout cela, dites-vous, fe fait fans paf- Qu'il apportoit entiers jufques dans la /ion , &c. maïfon. _ r . . . » it i Ainfî, chez l'Officier fumoit graffe cui- Cette fuppoluion paroit abiurde fme t à la bête qui plaide ici pour fes ca- . . j c, c j« «."„;,_ ~;„..„ Qui caJmoit Ion humeur chaenne ; maradeSj & ahn d en taire mieux ^ » » voir l'abfurdité , elle raconte l'Hi- Mais enfi.i il paya fon tribut à la mort. Itoire fuivante ; qui eft fuivie de vingt -cinq autres. Celle-ci a pour fujet le Barbet de l'Officier • & s'eft pafTée à Tours , il n'y a pas long-tems. Alors dans fa douleur amére , Le Barbet défolc , kurle , fe defefpere , Et d'un maître fi cher veut partager le fort , Dès qu'on levé le corps pour le porter en terre , Certain vieil Officier réduit à la mifere, { Le cas eft aflez ordinaire ) N'avoit pour Domeftique , & prefque pour tout bien, Qu'un Barbet qui fut fon foûtien , Ce compagnon tendre & fidelle Four fon maître indigent fut touché de pitié , Peut-être d'intérêt; non c'étoit d'amitié, Et pour le bien nourrir employoit tout Succède une langueur plus cruelle & plus {ovl zélé. I! prend donc le parti d'être fon pour- voyeur. Il faifit le cercueil, il le gratte, il le fer- re, En vain on le repoufle, il veut à chaque mirant Se jetter dans la foflé , & s'enterrer vi- vant. A cette douleur violente lente. Tantôt au Chaircuitier , tantôt au Ro- nfleur Il efeamotte quelque proye , Qu'à fon maître à l'inftant il apporte aveejoye; Le Boulanger voifin n'étoît pas plus exemt De lui fournir en pain fon petit contin- gent. Au furplus , adroit à la chaffè , Souvent il attrapoit le canard & l'oifon. Le Lièvre, leFaifan, le Lapin , h Bé- calle, Sur la foffe il fe couche , il refufe le pain , Et foudre la foif & la faim; Les yeux noyés de pleurs , il gémit, il foupire , Et percé de douleurs , fur la foffe il expi- Les Hiftoires qui viennent à la fuite de celle-là , font : Le Chien de Sabinus , l'Oifeau de Proye ôc le Poulet , le Singe échappé , le Singe de Charles- Quint, le Singe & l'Ecolier, le Chien &c le Chat , la Cigogne & le Pélican , la Poule & le Canneton , le Caitor , le Canard , la Linotte ., PPPP»J 6^4 JOURNAL D le Cheval, les Serins, la Chienne qui joue au piquet , le Chien qui connoît les caractères d'Imprime- rie , les Oifeaux de proyc fur les coquillages, les Crabes, les Rats des Alpes, l'Eléphant de Porus, le Chien , le Moineau , le Chat & la Souris , l'Eléphant Se le Mar- chand , l'Aigle Se (i MaîtrelTe , le Lion & l'Efclave , l'Abeille. Nous ne rapporterons de ces Hi- ftoiies que celle qui a pour titre , le Chien , le Moineau , le Chat & la Souris- Laquelle fe trouve en profe dans les Mémoires de Vigneul- Marviile. Une Dame de nom , & Connue à Paris , Avoit fcû , par Ton induftrie , Apprendre à vivre enfemble en fa mé- nagerie , Le Chien & le Moineau , le Chat & la Souris. Tous ces quatre animaux , maigre leur différence , Et d'efpece & d'humeur , vivoient d'iiv- telligcnce , Couchoient dans le même grabat , Et mangeoient tous à même plat : Il eft vrai que le Chien , par droit de pré- féance , Scpartageoit d'abord la meilleure pitan- ce ; Enfuite il regaloit le Clut D'un morceau fin & délicat; le Chat de fon côté , doux , bien appris, honnête , Au goût de la Souris poliment faifoit fête De bon fromage gras, & de tranches de lard, ES SCAVANS, Le Moineau moins friand fe Contentoît des miettes De bifeuit ou de pain dont ils lui faifoient part, ït qu'il alloit piquer au bord de leurs 3tC- ficttes. Ainfï chacun avoit fon lot , Et tous bûvoient à même pot. Mais comme on dit qu'après la panfe Vient le jeu , la joye & la danfe , Le Chien léchoit le Chat , le Chat pei- gnoit le Chien , La gaillarde Souris qui ne rifquoit plttS rien Etoit auffi de la partie , Et fans craindre l'antipathie, Joiioit avec le Chat, qui, par cent jolis tours, Lui faifoit doucement pâte de velours. Du pétillant Moineau le gentil badinage Entroit auffi dans tous leurs jeux. Il alloit , flatcur & volage , Béqueter l'un & l'autre en voltigeant fur eux. Leur jeu de l'innocence étok la douce image, Ils n'y perdoient jamais aucur. poil ni plm- mage. Cette rare communauté , Plus fage qu'une Confrafrie , Vivoitdans une privauté. Exempte de fupercherie. Un fpectacle fi curieux Charmoit les efprits ferieu*, NOVEMBRE, 1752. 6j>5 Us publioient par tout qu'aux Cloîtres des Chanoines , Ni dans les cellules des Moines , On ne voyoit régner l'harmonique unif- fon D'un fi charmant concert de paix & de raifon. Or d'un Ci bon ménage , 5c pourtant fi contraire , En nature , en cfpece > en inclination , Il refulte une preuve auflî forte que clai- re, Que la Bcte machine a dans Tes adions Certain principe de lumière Que vous qualifiez de plus ou moins grolfiere , Mais qui feule fufEt pour bien concilier Quatre bêtes fi difeordantes, Cette foible raifon les rend aflèz pruden- tes Pour nous faire fentir qu'il fautfacrifier Sa naturelle antipathie A la neccfïité du repos de la vie. La dernière de ces Hiftoircs qui eft celle de l'Abeille , finit par une confequence générale qui fait la conclufion de tout l'Ouvrage. Comme on a coutume d'allé- guer l'exemple de l'Abeille & de plufieurs autres animaux pour exci- ter au travailles perfonnes pareffeu- fes , notre Auteur fe fert de cet ar- gument pour prouver que les ani- maux ne font donc pas dépourvus de raifon , & voici là-deffusle dif- cours qu'il prête à la bête qu'il fait parler» Arbitres orgueilleux de ce fierTribunal Qui par fcsvifions extrêmes, Au vil rang d'automate abaifîe l'animal , Accordez- vous avec vous-mêmes, Car fi ces bonnes qualitez Vous font des leçons aflèz amples Que vous propofez pour exemples Des plus fages moralitcz , Il taut qu'il ne foit pas une pure ma- chine , Puifque fes bonnes mœurs font des in- ftructions Dont vous vous fervez mieux que de vo- tre dodrinc Pour corriger vos paflîons. Ou bien, vous faites tort à l'humaine nature , D'approuver le reproche & la jufte cea- fure Que vous fait l'animal privé de fenti- ment . S'il eft vrai qu'il n'agit que machinale- ment. Pour renverfer votre Syflême , Et trancher tous les nœuds de la diffi- culté , Le fens naturel m'a didé Cet indifloluble diîême , C'cft un invincible argument , Dont la fimplicité , la force & la juftice Prouvent l'illufîon , l'orgueil & le caprice De votre aveugle entêtement. Vos hrpothéfes , vos défaites Ne fçauroient vous fauver d'un érernej affront , Et l'injure que vous nous faites Ctf JOURNAL DES SÇÂVANS, Doît rejaillir fur votre front. Un plus ample détail deviendroit inutile , Pourmajuftification. Ce que j'ai dit fuffit à moncfprit flerile ; Et j'ai droit de conclure avec précifion , Qub h bête n'eft point une pure ma- chine , Un automate , un infiniment. Mais qu'elle penlc, agit, avec difceme- ment , Par un principe infus qui feul la détermi- ne , Et lui donne une attention Qui fait fa confervation. Sitf Ces faits fi certains j'établis fa défe*> fe, Et m'en rapporte à la Science De tout impartial & raifonnable.fpril. J'ai dit. On ne trouvera peut-être pas dans la manière dont quelques-unes «le ces Hiftoires font contées , la finefle & la délicatefle qu'elles fembleroient demander ; mais l'Auteur , en plufieurs endroits de fa Préface, a foin de prévenir là- deflus les Lecteurs par leîVcrs qui fuivent, Entre les modernes Auteurs Prens la Fontaine pour modelle; Ioftruire & badiner en répandant det flenrs Eft le fruit immortel de fa grâce nou- velle. Ses fujets , il eft vr»i , plus rians q«e lei tiens, N'ont point des argumens les importun* lien; ; La fable lui laitToit tout l'effort de f« veine , Mais de la vérité la majefté t'enchaîne , Aiufi ne prétends pas pouvoir en liberté r D'une douce armonic, égayer ton Traité. Nous croyons à propos de ren- voyer ici nos Lecteurs au Journal de Juin 1730. où nous avons donné l'Extraie de deux Lettres écrites en vers par M. Racine le fils , dans la première defquelles ce Poète eflaye de prouver que le fentiment de M. Defctnes fur l'infenfibilité des bê- tes eft conforme à la raifon \ & dans la féconde , que ce fentiment eft conforme à la foi. On pourra com- parer enfemble la Poé'fie de ces deux Auteurs , & voir lequel des deux a mieux réuifi en ce genre. NOVEMBRE, 1732; 6$>7 LE BRIGAND AGE VELA MEDECINE , DANS LA manière de traiteY les petites viroles & les plus grandes maladies , par l'é- met icjue , lafaignie du pied , & le Kermès minerai. Avec un Traité de la meilleure manière de guérir les petites véroles par des remèdes & des obfer- vations tirées de l'afage. A Utrccht , chez Corneille-Guillaume le ïcb- vre. 1732. vol. in-it. pp. 220. LE deffein de l'Auteur dans ce Livre, eft , à ce qu'il déclare, de faire ouvrir les yeux au public fur le boulverfttnent des Loix , des ufages & des remèdes de la Médeci- ne , dans la pratique qia s'établit aujourd'hui aux dépens de la famé. Lcdefordre doit il fe plaint, eft , félon lui , évidemment prouvé par la licence avec laquelle on voit en ce rems , fe former des praticiens dans l'art du monde qui demande le plus d'étude Se de préparation. Il foûtienc que cet art ejt [auvent au- jourd'hui en proye à la témérité , à la préfomption , & k l'imperitie d'un jeune homme , fraîchement/om des Ecoles , crud encore dans les études : ( jludiis erudus ) les faits parlent, dit-il , & bien-tôt les pierres crie- ront contre un tel abus ; il ne faut , à ce qu'il allure , que fuivre les nouveaux praticiens chez les mala- des , pour être convaincu que tous s'écartent de la droite voye. Autant que la faignée du pied étoit rare dans l'ancienne Médecine, où l'on ne la plaçoit qu'en très-peu de cas , autant, félon lui, eft-elle fréquen- te parmi les nouveaux Médecins. Il leur reproche de la regarder comme un rcmedeconvenabledans tous les cas , dans tous les tems , à îousles fexes,&à toutes les maladies. La purgation, dit-il , qui faifoit au- trefois la clôture du traitement des plus grands maux , eft aujourd'hui le prélude de ce traitement:par pur- gation, l'on entendoit des purga- tions douces ou au moins , non violentes , au lieu qu'en ces nou- veaux jours, les purgatifs font chan- gés en émetiques ; ce n'eft plus , pourfuit-il , que le tartre ftybic èc le Kermès qui dominent. L'on cou- vre du beau nom de grands coups de Maître, l'abus qu'on fait de ces remèdes, & cks faignées du pied ; maisqu'eft-ce, demande-t-il , que ces prétendus grands coups de Maî- tre , qu'on vante il fort au public , dont on tâche de fafeiner les yeux , qu'un véritable brigandage/ Notre Auteur avertit que ce mot de Bri- gandage n'eft point un terme d'in- jure , ni même une exprcfllon défo bligeante dont il veuille fe fervir à l'égard de perfonne. Il déclare qu'il n'employé l'expreiîlon , que parce qu'elle lui paroît exprimer au natu- rel , le renverfement affreux que la nouvelle pratique introduit dans la Médecine; renverfement qui cul- bute , félon lui , toute la bonne Médecine , & qui en même tems porte la défolation chez tous les malades : deux points de confe- quenec qu'il fe propofe de montres 3 Latins , parce qu'Hippocrate , » Galien , Celfe , Se tant d'excel- » lens Auteurs que ceux-là ont for- us mes , deviendront inutiles, ce »> feront dorefnavant toutes pedan- » teries d'école , que ces recherches » fcrupuleufes du tems pafTé , èc » dont il faudra laiffer repaître l'an- »cicr.nc Médecine, parce que ces » bonnes gens n'en içavoient pas S SÇAVANS, otage. L'A'itcur affurc qu'il feroit es é:at d.- nommer des Médecins vi- vans qui ont tenu de femblibles difecurs, &: qui même ont avancé que peu guérir les petites véroles , on a enfin découvert qu'il n'y a qu'à purger depuis le commencement de la maladie jufqu'àla fin. Il ra- conte à ce fujet,qu'un de ces Méde- cins peu chargés de fcicncc , a bif- fé après fa mort un témoignage bien authentique de ce qu'il avoit penfc pendant fa vie , fur la prétendue inutilité de l'étude en Médecine, ne s'e tant trouvé de Livres dans fon Cabinet que pour deux piftoles. Tel eft , s'écrie notre Auteur , le déca- brementde la Médecine, 5c l'étac honteux où elle fe voit réduite dan* Paris entre les mains de ces préten- dus GuérilTeurs de la nouvelle fa- brique. Il demande fur cela, fila Médecine fe coniervera plus de gloire &c de dignité dans les Pro- vinces ? La raifon fur laquelle il tonde fon doute , eft que rien ne paroît plus capable de léduire les jeunes Médecins qui font répandus dans les Provinces, que d'y appren- dre, comme ils font tous les jours , que de jeunes Médecins dcP.uis , qui ont été leurs compagnons d'E- cole , & dont ilsconnoillent le peu de talens 6V le peu de génie , fc mêlent dans la foule des Praticiens} d'apprendre en un mot , que fans autre mérite que de s'être livrés à une méthode qui ne demande au- cune capacité , ils jouent le rôle de Médecins. » Rien , dit-il , n'efl: «plus capable d'expofer de jeunes » Médecins tvfOVEM » Médecins de Province à la renta- »» tion de croire qu'il eft inutile de » pâlir fur les Livres, d'étudier la «nature , & d'apprendre à démêler » les maladies , puiiqu'a Paris fans »cet attirail de connoiffances, cer- » raines perfonnes font admifes à » faire la Medecine,« en n'y donnant que du Kermès & de l'émetique , & en y prodiguant au hazard les f ai- gnées du pied. Ainfi donc } pourfuit notre Auteur, tout ira en defordre , fie pourainfi dire , à la débandade , pour le deshonneur de la Profejfion 3 farce que l'on prendra modèle fur ces nouveaux Médecins de Paris, Médecins qui n'ont ni le dedans ni le dehors de Médecins : ils n'en ont point le dedans , puifque la feience leur manque : ils n'en ont point non plus le dehors , puifqu'à exami- ner ce que demande Hippocrate pour l'extérieur du Médecin , on ne trouve rien en eux qui y reflem - ble : premièrement , félon notre Auteur , on n'y voit point cette contenance grave qui fied fi bien dans une profeilion comme la Mé- decine : Secondement , on n'y voit point non plus, cette modeftie de vêtemens , laquelle doit annoncer tout d'un coup dans un Médecin , qu'il fçait les bienféances de fa con- dition , fie qu'il n'a pas la pecirefle de vouloir fortir de fon état. Le ve- lours au contraire , dit-il, l'or & l'hermine, font aujourd'hui l'ha- billement ordinaire de ces nou- veaux Médecins , ce qui eft , félon lui , un traveftillement qui tourne au grand deshonneur de la Méde- cine. Troilîémcmcnt, un Médecin, Novembre. B R £, 1732. €.$9 félon Hippocrate , doit parler fen- tence ; mais peut-on , demande no- tre Auteur , attendre rien de tel de Médecins qui n'ont pas encore eu le tems de former leur jugement; car c'eft , à fon avis , ce qu'on a lieu de penferen voyant la manière bizarre dont font vêtus ces jeunes Praticiens. Quatrièmement, on ne découvre en eux , aucune manière detintcrelfée , on les voit aller avec un empreffement fordide , de por- te en porte , comme a une efpecc de quête , & rien de ce qui relieur le falaire , ne leur fait honte. Nihil turpe quod quaftuofitm efi, Paterc : Comme par ces traits de criti- que l'Auteur ne prétend , à ce qu'il déclare , choquer qui que ce puifte être , il a foin de prévenir li-deflus, par le partage fuivant , ceux qui voudraient s'offenfer de ce qui vient d'être dit : Qui vitas hominum ita taxât ut neminem omnino perflrtngat nominatim \ qutfo utrum is mordere videtur , an docere potins ac monere ? Ergo fi quis extittrit qui fe fe lafum clamabit , is «ut confcientiam prodit fuam} aut certè metum. Erafm. Ma- riât Encom. Prxr. Voilà pour ce qui regarde le pre- mier point de notre Auteur-, fçavoir, l'honneur & la dignité de la Méde- cine abfolument violés par quel- ques-uns des nouveaux Médecins. Nous dirons un mot de ce qui con- cerne le fécond ; fçavoir, les mal- heurs que , félon notre même Au- teur , la nouvelle pratique caufe chez les malades. Quels affreux enlevemens , \ 'é- cric-t-il , que ceux que fait ton. les Q.qqq 7oo JOURNAL D jours la nouvelle pratique parla fai- gnée du pied , l'émetique & le Ker- mès ! Ce font des chefs de famille ; une femme à fon mari , un mari à fa femme; des enfans à l'un Se à l'autre , qui font enlevés en peu de jours •, que de morts fans teftament & fans Sacremens , &c. Il faudroit , pour reparer de tels malheurs , que ceux qui les caufent pufTent opérer des rcfurre&ions ; mais les Médecins en font-ils , de- mande l'Auteur , numquid Aiedi- ci [nfeitabunt , Pfalm. 87. v» 1 1. Nous palTons plusieurs autres traits de cette nature, pour venir à des inftruétions importantes qui fe trouvent dans le Livre , Se par lef- quellcs l'Auteur prétend juftifier ce qu'il penfe de la nouvelle pratique. Nous en rapporterons des exemples détachés, fans nousaffujettir à aucu- ne tranfition , nous contentant d'annoncer par un titre court le fu- jet de chaque exemple que nous rapporterons , ce qui mettra tout d'un coup les Lecteurs au fait.Nous commencerons par les Leçons que notre Auteur fe croit obligé de donner aux nouveaux Médecins , fur la préférence de la faignée du bras dans la petite vérole. Voici en abrégé ce qu'il dit fur ce fujet. C'cft pag, 61. & fttiv. Que la faigné: du bras e(i préférable dans la petite vérole. Le but qu'on doitfe propofer en fait de faignées, au commencement d'une petite vérole , eft d'empêcher que dans les amas inflammatoires ES SÇAVANS, qui fe préparent , il n'aille trop de fang aux cmhoits où il en va natu- rellement davantage, Se que par cette trop grande quantité, il ne s*y forme autant d'abfcès que de pu- llules. Or c'eft principalement dans le cerveau Se dans fes dépen- dances , que ces fortes d'amas font plus abondans ; auflî eft-ce par ces endroits que périflent la plupart de ceux d'entre les malades de petite vérole , qui font inopinément enle- vés vers le feptiéme , le huitième > ou le onzième jour. L'habileté du Médecin confifte donc à s'y pren- dre de manière, qu'avant ce terme il vienne à bout de détourner du cœur , par la voye la plus libre , la plus dégagée , la plus courte , le plus de fang qu'il efl: poflîble. Oc fur ce principe , fi l'on mefure les diftances du bout du pied au cœur , Se celles du pli du coude vers le même endroit; on verra , ditno- treAuteur , que le fang a moins de chemin à faire pour defeendre du cœur au bras par les artères foucla- vieres Se axillaires , Se pour remon- ter du bras au cœur , qu'il n'en a à faire pour defeendre du cœur au pied Se pour remonter du pied au cœur. Ouvrant donc la veine du bras; l'on defemplit plutôt Se de plus près, les ventricules du cœur Se. les vaifTeaux parlefquelseft por- té le fang qui doit groflîr le volu- me des amas dont il s'agit, & par confequent il doit arriver que la matière des puftules de la petite vé- role fera très-promptement dimi- nuée dans le cerveau Se dans les parties voifines , par la faignée du N O V E M bras. Cela pofé , notre Auteur ob- ferve qu'on ne peut fe promettre de la faignée du pied , un dégagement auffi prompt , puifqu'il eft împoffi- ble que par cette faignic , le fang foit dérobé d'auffi près , & auffi immédiatement du cœur, qu'il l'eft par celle du bras. De plus l'artère qui porte en bas le fang du cœur pour être repris par les extremitez de la veine qu'on ouvre au pied t eft l'aorte defeendante , au moyen de laquelle le fang fe diflribue & fe perd dans tous les vifeeres, depuis î'eftomac jufqu'au baffin hypoga- ftrique , avant que d'arriver aux artères crurales pour être repris par les extremitez de la veine du pied. Le fang donc qu'on évacue par l'extrémité de cette veine , eft celui qui s'eft perdu dans les vifeeres fu- périeurs & dans les chairs fupé- ricures ; mais ce fang n'eft pas celui qui fait actuellement ou qui doit faire les amas phlegmoneux dans le le cerveau , ni celui non plus qui fait ou qui va faire les puftules fur la peau : au lieu que le fang qu'on tire du bras, vient immédiatement du cœur , & que c'eft celui-là mê- me que le cœur doit inceffamment pouffer vers le cerveau. Ce n'eft donc point du pied , conclut notre Auteur , mais du bras qu'il faut fai- gner pour prévenir les engagemens de la matière qui fait la petite véro- le,puifque la faignée du pied n'éva- cue en aucune façon cette matière. Pour rendre la chofe plus fenfî- ble , on fait remarquer qu'il y a au moins trois longueurs depuis le cœur jufqu'au pied , contre une B R E, 1732. 701 qu'il y a depuis le plis du bras juf- qu'au cœur , &qu'ainfi pour pou- voir employer avec raifon la fai- gnée du pied , dans le cas dont il s'agit , il faudrait qu'elle vuïdât auilî abondamment &c auiîî prom- ptement le fang contenu dans ces trois longueurs , que la faignée du bras vuide celui qui eft contenu dans une feule : or il n'eft pas pofîî- ble de concevoir qu'une faignée qui ne peut évacuer le fang du cœur, qu'en évacuant celui qui cft s par exemple , à trois pieds de diflancc du cœur , foit cependant auffi capa- ble d'évacuer le fang de ce vifeere , que le fera une faignée qui n'aura qu'à évacuer le fang contenu dans l'efpace d'un pied. C'eft pourtant ce qu'il faudrait qui fût pour pou- voir évacuer ou pouvoir détourner par la faignée du pied , le fang qui doit faire les embarras de la petite vérole: notre Auteur infère de tout cela, que la nouvelle pratique qui veut fubftituer la faignée du pied à celle du bras, dans les petites véro- les, eft une pratique meurtrière, parce que tandis qu'on s'amufe in- utilement à répandre le fang des parties inférieures , celui des vifee- res qui avoifinent le cœur , a le tems de fe porter au ventricule droit de ce mufcle , &c d'aller ainfi grofîîr le volume de fang qui doit former la petite vérole. Notre Auteur , cent pages après, reprend le même fujet : c'eft page 160. & fuiv. La faignée du pied , à ce qu'il prétend , ne peut produire que de funeftes effets dans les cas où les Q.qqq'j . 7oa JOURNAL D nouveaux Médecins l'employent aujourd'hui. Comme la plupart n'ont aucune teinture dcMedccine, fc qu'ils n'étudient point 3 ils s'ima- ginent que la fâigucc du pied dans les petites véroles , rabat vers les parties inférieures le fang du cer- veau. Mais un liquide qui a pris af- fez d'épailTeufj pour être gluant , pefant , & comme collé contre les vaiiîcaux qui doivent le tranfmct- tre 3 ( car tel eft le fang dans les pe- tites véroles ) un liquide de cette forte, ne fçauroit, dit l'Auteur, être bien difpolc à devenir fouple Se fluide au point de fc lailfer précipi- ter ainfi de haut en bas. Ce ne fera donc , pourfuit-il , que le fang des jambes &c des cuifles que cette fai- gnéedu pied évacuera : or ce fang a'eft pas celui qui fait dans les par- tics fuperieures la petite vérole , Se c'eft cependant de ces parties que viennent dans la maladie don: il s'agit , les orages qu'on a à craindre. Ainfi, conclut-cn , vouloir faigner du pied pour détourner ces orages, c'eft vouloir porter le remède capi- tal à l'endroit où il y a moins de mal. Car il eft confiant., comme i'obferve Sydcnham . & que l'expé- rience le coufirme , qu'en tait de Î>etite vérole , tout le danger doit e prendre de la part des puftules de la face Se des parties fuperieures : en effet , autant que les puftules du vifage , lorfqu'elies font feches , noires &C écailleufes , dénotent de la malignité dans la petite vérole s autant les puftules des jambes Se des bras , ont-elles alors une apparence favorable de fuppuration , puif- ES SÇAVANS, qu'on les voit ^ is ce même (eraS , fe terminer par la fletrifïure , après s'être vuidees du pus qu'elles ren- fermoient. Cependant deux à trois livres de far.g que ces Meilleurs n'appréhen- dent pas d'ôter en un fcul jour, à un malade j par quatre faignées du pied , car ce nombre ne leur fait pas peur , donnent beaucoup à crain- dre par l'étrange éclipfe que peur foudainement produire dans la cir- culation du fang , une évacuation auffi prompte 5c aufïi énorme. No- tre Auteur ne le dilïimulc pas , il prétend que c'eft - là qu'il faut chercher la caufe de fes aftaifTemens fubits qui arrivent aux vaifleaux, ce qu'on voit li fouventfuivis d'une brufque mort. Il croit de plus qu'il, ne faut point chercher ailleurs , la raifon de ces dépôts intérieurs, de ces caries Se de ces abfcès , qui ac- compagnent ou qui fui vent tant de petites véroles ; le fang , dit-il , n'ayant pas été dégage dans les par- ties fuperieures , a eu le tems de crever les vaiffeaux , de s'extrava- fer dans les parties molles , &: de creufer jufques dans la fubftancc des os , ce qui fait les dépots inté- rieurs , les abfcès iv les caries. Notre Auteur ajoute , fag. iSS. & 189. d'autres : fur le même fujet , lcfquelles ne paroif- fent pas moins dignes d'attention : en voici le précis : l'on fait , dit-il , la faignee du pied dans la péri r rôle , pour dégager ou preierver le cerveau ; l'intention eft excellente. Mais il faudroit pour venir à bout de ce qu'or, fc propolc , que le fang NOTE M fût auffi liquide & auffi coulant que l'eau ; de manière qu'en vuidant celui qui féroit au-deflous, on obli- geât celui de deiTus à tomber. Or ce n'eft point là l'idée qu'on doit le former du fang , puilque c'eft un fluide gluant , fibreux , nageant dans une lymphe qui fe met aifé- ment en colle ou en geiée. Si l'on joint à cela que les vailTeaux qui le renferment , font mille angles , mille cercles , mille courbures , on verra que le dégagement qu'on fe propofe de faire dans le cerveau par la faignée du pied "3 n'eft pas cliofe à efperer. Une autre reflexion de notre Au- teur , c'eft que fi l'on conudere, s°. le nombre prodigieux de vaif- feaux de tranfport pour le fang qui doit defeendre de la tête aux pieds, & l'innombrable quantité de ceux qui doivent le reporter des pieds à la tete ; z°. l'incomprehenlible pe- titeffe des capillaires , tant des vaif- feaux de tranfport du cerveau aux pieds , que des vailTeaux de tranf- port des pieds au cerveau , on ne pourra s'empêcher de reconnoître que le fang, & pour defeendre &c pour remonter, doit paffer par des endroits il étrangement ferrés , tant par leur nombre que par leurs dia- mètres , & fi entrecoupés par leurs courbures &C leurs replis , qu'il n'eft pas poffible qu'à la feule occafion d'une faignée du pied, ce fang fe déplace prefque fur le champ,d'unc extrémité à l'autre , comme fe le iàgurent les Partifans de cette fai- gnée. Peut-être , dit notre Auteur : BH, 1732: 705 une h prompte & fi facile defeente du fang ieroit-elle concevable, fi le fang étant pouffé comme de l'eau par un coup de pompe , il avoit à tomber par des canaux perpendicu- laires cilindriques qui defeendiffent à plomb vers les parties baffes ; mais encore faudroit-il alors , une autre pompe qui repouffât cette eau par des canaux qui allalîént auffi uniment & auffi directement vers le cerveau. Au furplus , la force in- concevable de la puiffance du coeur démonttre fenhblement , félon no- tre Auteur, ics affreufesrefiibmces que le fang , au fortirdu ventricule gauche du cœur , trouve à furmon- ter , pour arriver vers les parties fu- perieures ; il demande fi celles que ce fang doit iuimonter pour aller aux parties inférieures , font moins conliderables ? En quel terni de la petite virole il faut [cligner*, pag. 1S4. ôc fuiv. L'Auteur n'entçnd parler ici que de la faignée du bras. L'impor- tance , félon lui , cft de faigner fuffifamment dans les premiers tems de h petite vérole , pour ap- paifer le trouble du fang , ou de fa. circulation ; car comme c'eft dans. le calme de la fanté que les fecre- tions naturelles fe font le mieux j. auffi, dit-il, eft-ce dans le calme des humeurs , que fe fait mieux l'éruption de la petite vérole ; la faignée lui paroît mériter d'autant plus de confiance dans cette occa- fion 5 qu'il la regarde comme un re- mède fouverain pour guérir les va- 704 JOURNAL DE millemcns & les cours de ventre , qui fatiguent tant alors les malades; de forte que ce même remède , en appaifant le trouble des humeurs, rétablit l'ordre ex le calme dans le cours du fang & des efprits ; notre Auteur foûtient , à cette occafion , que l'abus de l'émetique eft tout vifible ici , puifqik la fa ignée feule fufrit pour remédier 5c aux envies de vomir év à la violence de la fiè- vre. Il reconnoîr cependant deux cas où l'émetique peut convenir dans la petite vérole : le premier, lorfque l'eftomac eft récemment chargé d'un chyle croupiflanr, pro- duit par des excès contre la tempé- rance ; le fécond , lorfque nonob- ftant les faignées , il arrive des af- foupiflemens léthargiques. Dans le premier cas, il vent qu'on donne l'émetique tout d'abord , &" avant que l'inflammation ait gagné l'efto- mac. Mais il veut en même tems que la faignée ait précédé , & qu'on n'employé que le vin émetique •, encore faut-il , félon lui , que ce vin foit mêlé avec quelque adoucif- fantftomachique. Prenez, par exem- ple , dit-il , demi once de vin éme- tique , une once & demie d'huile d'amandes douces, fi x gros de fy- rop violât , deux onces d'eau de chardon benit , deux gros d'eau de canelle orgée , mêlez le tout exacte- ment. Quant au fécond cas , il con- feille de donner fans trop de délai , un émetique qui puillccaufer quel- que peu d'ébranlement aux nerfs , comme le tartre émetique avec la manne dans un bouillon. Mais ce qu'il recommande de bien retenir, S SÇAVANS; c'eft que les faignées précipitamment faites , épargnent ces accidens , ou du moins les adouciffent Se en pré- viennent les fuites dangereufes. Une autre obfcrvation importante qu'il n'oublie pas , c'eft qu'il ne faut point fc biffer tromper ici par l'apparence d'un beau fang , le fang paroiffant très - fouvent tel dans les premières faignées ; la rai- fon en eft, fuivantfa penfée , que le fang des malades de la petite vé- role , étant coeneux , il fe ralentie toujours dans quelque vifeere j ce qui fait qu'il ne peut guéres fe mon- trer mauvais dans les palettes, qu'a- près que le fang qui fe trouve plus libre dans les grands vaiffeaux a été évacué par plufieurs faignées ; en forte que le (ang corrompu com- mence à lortir alors , au grand fou- lagement des malades;les premières faignées n'ayant fervi que de prélir minaires à ce dégagement. Vfage des Emettants & des purga- tifs , pag. 69. Se fuiv. Les Médecins de la nouvelle fabrique , ces Médecins que notre Auteur appelle des Médecins dé- nués de feience , mettent , félon lui , l'émetique à tous les jours , Se le donnent à toute main : fur cela il leur oppofe la conduite d'Hippo- crare. Ce grand Médecin avoit des remèdes équivalons à l'antimoine , comme les ellébores , ( car il em- ployoitle blanc & le noir ) les éla- rercs , le peplium & autres fcmbla- bles , appelles dans les anciens Au- teurs , Agitateria s mais dans la fa- N O V E M cheufe necdïîté oà étoit l'ancienne Médecine, d'employer défi violen- tes drogues faute d'en avoir de plus douces , Hippocrate ne s'en îervoit qu'avec de grandes referves, il épargnoit ces fortes de remèdes dans les maladies provenantes de trifteiTe , de chagrins , de veilles , d'yvrognerie , de débauches qui épuifent , &c. Il s'abftenoit même , félon la remarque d'Heurnius '3 de les don- ner dans les maladies aiguës , & ne fe les permettoit que rarement dans les Chroniques j ce que plulîeurs fçavans Médecins modernes qui ont écrit fur les purgatifs , regardent comme une conduite digne d'être imitée de tous les Médecins dans l'ufage des émetiques Se des purga- tifs d'aujourd'hui, principalement à l'égard de la petite vérole. Cette maladie, dit notre Auteur , eft de fa nature une maladie inflammatoi- re , à laquelle par confequent la purgation ne convient pas. Le fa- meux Riviere,ce Praticien fi avoiié., défend abfolument la purgation dans la petite vérole » Se décide que c'eft un remède funefte dans le commencement de cette maladie. Sydeham ne la permet que dans la convalefcence. Nous pafîons plu- fieurs autres reflexions fur ce fujet , on les peut voir aux pages 6f. 70. &71. Kermès , f*g. 9 i.jufqu'k la p. 104. Les Partifans du Kermès difent qu'ils font avec ce remède des cures nieourquoiles Praticiens verfés dans a cure de cette maladie , donnent, dir notre Auteur, tant de crainte des bouillons à la viande : bouil- lons qu'ils regardent comme faifant un fang trop fibreux & trop fub- ftantiel. Dans cette vûë , le fage Sy- denham préfère les bouillons d'or- ge , de ris, ou de gruau , & ne per- met ceux de viande , que lorfque la petite vérole eft parfaitement gué- rie. Comme le public & bien des Médecins qui fe gouvernent par les 7o6 JOURNAL DE préjugez des Gardes-malades , font peu capables de goûter cette prati- que ; notre Auteur , pour ne point heurter de front,une erreur aççcédi- tée , fe r abbat fur les bouillons raits avec le poulet Si le ns. Un petit poulet cv un quarteron de ris fuifi- îent , félon lui , pour cinq ou lix bouillons. Il confeille en même tems,une ptifanne légère de feorfo- naire , de regliûe&: de chien-dent. Cette ptifanne , à ce qu'il prétend , eft propre à baigner le fang , Si à le délayer au point d'en faire paffer librement tous les fucs au travers des capillaires les plus fins -, enforte que le fang , par fa circulation ren- due plus libre , entraîne Si diflïpe les amas inflammatoires. L'Auteur n'en demeure pas à ces réflexions, il avertit que ce bon effet de la boif- fon eft d'autant plus à efperer , que les faignées qu'il faut avoir foin de faire , mettant le fang plus au large, font caufe qu'il fe biffe plus aifé- ment pénétrer par la même boiffon, Si qu'il circule par confequent avec moins de roideur , parce que les fi- bres des artères étant ainlî humec- tées, perdent de la dureté de leur fyftole ; d'où il (uit que le pouls s'adoucit Si que la fièvre, cet im- portant (ymptomè qui mérite toute l'attention des Médecins , dans la petite vérole , commence à dimi- nuer. Si notre Auteur appelle ici la fièvre un fymptome digne de toute l'attention des Médecins -, c'eft , dit-il , qu'elle crt le lignai par le- quel or. connoîr a quoi la. nature en ell de fon travail pour la gucrilon de la maladie dont il s'agit. Il entre S SÇAVANS, la - deilui dans un détail que la crainte de nous trop etendre nous oblige de palier. Différences à obfcrver dans les peti- tes véroles par rapport aux fai- fons , pag. 14^. cv fuiv. Un Praticien , par la feule atten- tion à h faifon où fe montre la pe- tite vérole , doit fçavoir d'avance de quelle nature elle fera. Si c'elt le mois de Janvier , par exemple, il fçait que c'elt le tems où la petite vérole eft confluente , Se li-deffus il fe prépare à la traiter fuivant les obfervations certaines qu'a faites à cefujet la bonne Médecine. Si au contraire cette maladie paroît vers l'Equinoxe du Printems , il fçait 2ue c'eft le tems des petites véroles ifliniïes , & pour lors il prend d'au- tres allures, fuivant des obfervations non moins certaines que celles qui regardent les petites véroles con- flnemes. Par cette méthode il fe trouve prévenu de bonne heure fur ce qu'il aura à faire en l'une & eu l'autre de ces deux efpeces capitales de petites véroles. Ainfi il marche ferme en confequence ; car il fçait, par exemple, que le huitième jour dans les petites véroles diftinSles , & le 11e dans les confluentes , font des époques à obferver , parce que que ce font des jours dangereux où péri ffent les malades qui ont à périr, Si là-deffus il règle fa conduite , fes prognoftics , fes efpcrances ou fes craintes. Toutes ces attentions , félon notre Auteur , font incon- nues dans la nouvelle pratique, Si voilà N O V E M voila pourquoi les Médecins qui s'y enrôlent , font fi fouvent fur- pris & trompés, aulîî peu capables de prévoir les évenemens de la ma- ladie, que de connoîtrv: les remèdes qu'elle demande. Un des plus con- sidérables de ces évenemens eft pré- vu par les bons Médecins : c'clt la falivation ; ils l'attendent dès ks premiers jours dans les petites véro- les confluentes , Se ils fçavent , fé- lon le befoin , la ménager , l'entre- tenir ou la rétablir jufqu'à l'onziè- me. La pratique nouvelle n'eft , fé- lon notre Auteur , au fait de rien fur tout cela ; ce qui eft caufe que tant de malades font les victimes de cette pratique. La règle que fuit la même méthode avertit un Prati- cien , que les pieds & les mains doivent enfler dès que la falivation vient à ceffer , Se en confequence , il entretient dans leur ordre tous ces mouvetnens fucceffifs , Se écar- te tout ce qui pourroit furvenir de funefte. Si la petite vérole eft une trife , Pag- I55- Les nouveaux Praticiens , dit notre Auteur , fe figurent avec le peuple , que la petite vérole eft une crife , & dans cette penfée , voulant procurer au fang ; fa dépuration par les cordiaux amers dtaph are tiques ils ctablifrentl'ufagc du Lilium dans des potions cordiales Se des apoze- mes animés par le Kermès dans cha- que doze , qu'il eft de leur routine de multiplier le long du jour. Mais ces remèdes, dit-il, font autant de Novembre. B R E, 1732. 707 brûlots, Se fi on les compare avec la véritable caufe delà maladie, on verra qu'en les employant on tra- vaille à augmenter cette caufe, bien loin de la détruire , puifque de tels «remèdes ne peuvent que dévelop- per l'ardent fpiritueux qui domine alors dans le fang. Quelle étrange bévûë , s'écrie-t-il , de prendre pour crife ce qui ne peut paroître tel qu'à des yeux dénués de toute lumière en Médecine. Il eft vrai que les pu- llules de la petite vérole font des abfccs qui , en un fens , peuvent palier pour critiques , mais on ren- voyé là - deffus à Hippocrate qui avertit que tout ce qui eft critique n'eft pas crife , & qui traitant en particulier des tubercules ou bou- tons qui font critiques fans opérer la crife , dit que ces tubercules eux- mêmes , tout critiques qu'on les peut nommer fi l'on veut , font un obftacle à une crife parfaite : c'eft dans le Livre 2. des Epidémies. On citeDuret,quiexpliquant cet endroit d'Hippocrate , foûtient la même chofe : on cite Severinus qui dans fon Livre intitulé: deAbfcejjfuum rc- conditânaturâ, p.ifi". avance que ces fortes d'éruptions tiennent moins de l'arrangement Se de l'ordonnance de la nature , que de l'irritation ; en forte que le calme qui les fuit quel- quefois eft moins la marque d'une nature vi&orieufe qui fe délivre , que d'une nature fatiguée qui laiffc agir fon ennemi , in hoc mnfolutio fed exfolutio. Mais fi la petite vérole eft une crife , comme le croyent bonnement ces nouveaux Prati- ciens, notre Auteur foûtient qu'ils Rtri 7o3 JOURNALD fe conduifcnt pnrconfcquent d'une manière contraire à leurs propres principes , puifque dans les crifes il ne faut émouvoir la nature ni par les purgatifs , ni par aucun autre rernede irritant, & que cependant il n'eft point d'agitations que ces Meilleurs netâchenc ici de lui don- ner tant par les faignées du pied , l'unctiquc cV: le Kermès, que par les apozemes , 6c autres remèdes fembiables , foie que la petite véro- le forte ou qu'elle foie fortie ; fur quoi il leur applique ce mot d'un grand Praticien ( Valedus ) pericii- lofîus cenfeo incidere in Aîedicum qui nefeiat quiefeere } quàm qui nef- eiat contrant adhibere . C'eft-à-dire, j'eftime qu'il eft moins dangereux de tomber entre les mains d'un Mé- decin qui nefçait ce quec'cftquede lailïer fes malades en repos , que de tomber entre les mains de celui qui demeure court & ne fait rien, Qu'il ne faut pas même purger à la fin des petites véroles , pag. 217. On termine ordinairement par la purgation , le traitement des petites véroles. Mais notre Auteur la trou- ve plus de ftyle en cette occafion , que de neceflité -, il dit qu'il eft peu de maladies où l'on doive moins purger , même après la guerifon , que dans la petite vérole. C'eft une obfervation confiante que cette ma- ladie laifte après elle, bien des reftes qui caufent quelquefois de longues infirmitez;le vulgaire fonde fur ce- la le prétendu befoin de la purga- tion à la fin de la petite vérole. Mais ES SÇAVANS» notre Auteur prétend que l'obfcr- vation dont il s'agit eft très- mal en- tendue' &quc ces reftes dont on s'au- torile pour purger, (ont des m.ir:ercs inflammatoires demeurées non dans l'eftomac ni dans les inteftins, mais dans le fang ; en forte quec'eft plu- tôt par la fai^née, que par la : tion , qu'il faut efpcrcr de pouvoir les évacuer. Sydcnham eftdec.tte opinion, cvonncmanquepasdclc citer. Si Itt rougeole & la petite vérole font de même nature t pag. 218. L'Auteur eft pour l'affirma- tive : on fçait , dir-il , traiter la rougeole quand on fçait bien trai- ter la petite vérole. Les indications y font par tour les mêmes : & il s'y agi: principalement de rabattre la fougue du fang , laquelle elt fi grande dans la rougeoie, qu'il s'é- chappe quelquefois par le nez, mais fe porte toujours aux extrémitez des artères lymphatiques ; ce qui forme dans la rougeole, i". ces petites bubes inflammatoires & érylîpéla- teufes qui fortent prefque de cha- que point de la fuperlîcie de la peau : 20. Ces larmes qui baignent les yeux , & cet éclat vif qu'on y apperçoit. Ce même fang, dit notre Auteur , circulant avec tumulte dans le poumon Se dans toute la poitrine, excite une toux fréquente qui fouvent palfe en crachement de fang. Il veut que pour adoucir tous ces accidens, on fafle d'abord rrois ou quatre faignées du bras ; il pré- tend qu'avec ce fecours , la maladie N O V E M doit guérir en deux ou trois jours , mais il pofe pour condition qu'on ne donne au malade aucuns cor- diaux ni aucuns purgatifs. Un re- mède qu'il juge être auffi necelfaire dans la rougeole que dans la petite vérole , c'eft le prompt ufage des Caïmans, après un nombre furnfant de faignées ; car à l'aide du fyrop de Diacode , ou de quelques grains de pilules de cynogloffe , fi fpecifi- ques contre la toux , il prétend qu'un Médecin a la confolation de voir la rougeole difparoître dans l'efpace de deux fois vingt-quatre heures , &le malade heureufement tiré d'affaire. Nous finirons notre Extrait par quelques avis de l'Auteur fur les le&ures que doit faire un Médecin qui commence. LeElures propres à un jeune Médecin. Il faut , félon notre Auteur , B R E , 1732. 70^ qu'un Médecin qui commence , life Hippocrate, puis Galien, Arétée , Celle , Rhahs : enfuite les grands Maîtres qui ont perfectionné la pratique , tels que Fernel , Duret , Hollier s Baillou , Docteurs célè- bres de l'Ecole de Médecine de Paris, il y doit joindre Platerus , Foreftus, Zacutus, Valéfius , Ri- vière , Heurnius. Et pour ne man- quer d'aucun fecours , il lira encore avec attention les grands Auteurs qu'ont produits les nouvelles décou- vertes , comme font les Sylvius d'Hollande , les Willis, les Syde- nham , les Morton , les Pitcarne , les Baglivi, les Etmuller , les Stalh, les Offman. Nourri dans ces riches pâturages, il prendra , dit notre Auteur , le bon goût de la Médeci- ne , & alors la raifon , l'ordre &c le bon fens occupant chez lui la place de la préfomption&dela témérité, il pourra devenir un excellent Maî- tre. CONTINUATION DES MEMOIRES DE LITTERATURE & d'Hiftoire. Tome XI. Partie II. A Paris , chez Simart , Libraire- Imprimeur de Monfeigneur le Dauphin , rue S. Jacques, au Dauphin. 173 1. vol. itt-ii, pp. 478. DANS le Journal d'Octobre dernier neus avons parlé des quatre premières Pièces de cette fé- conde Partie , laquelle en contient huit , il nousrefte à parler des qua- tre autres , fçavoir i°. d'une Lettre à M. B. C. de l'Eglife dcS. Flour. 20. D'une autre à Dom Lamy , Prieur de Beaulieu,fur quelques lîn- gularitez duBituel de l'Abbaye de Beaulieu-, 50. D'une Dilîertation fur les Vulpinales ; 40. D'une Qiic- ftion Hiflorique fur un ancien Obe- lifque. Quant à la Lettre écrite à M. B. C. de S. Flour , l'Auteur avertit d'abord qu'il faut retrancher de la fixiéme Leçon du Propre de Saint Flour, cette phrafe : Non nulle Ba- jîlicarum Dedicationes ah Hugone celebmtA memorantur ; qui. inter admtmeratur Bafdica Sanflorana , R r r t ij 7io JOURNAL D quo tcmpore , Concilium Claro- tnontenfe fub nrbano habitum efl. On n'entre point ici dans la que- ftiondc droit , li les Abbez peuvent lacrcrur.c E ment . . .; '.BtuDoOhaflaincK, Récolcr., qui •>■ , dic-on , prodigué À pleines mains m:x Prélats Réguliers tous les privilèges qu'il pouvoit GT qu'il ne pouvoit pas leur accorder , ne s'clt jamais avilë de leur attri- buer celui-ci , mais s'eft contenté de leur donner le pouvoir de bénir ou de réconcilier une Eglife ou un Cimetière avec de l'eau qui ait été. bénite par l'Evoque. ie. Que Dom Mabillon qui ne doit pas être lufpe.it aux Réguliers, allure que la Confecration des E- giifes cil Un des principaux droits qui appartiennent aux Evèques. 3°. Qu'à la vérité on lit dans la Vie de S. Gai , un fait qui femble écendre ce droit aux Abbez , fça- voir que S. Colomban bénit de l'eau , en afpcrfa l'Eglife , fit pro- ceflionnellcment avec fesReligieux, le tour de l'Eglife & enfuite la dé- dia : Dedicavit Ecclefîam, qu'il fie des onctions fur l'Autel : Vnxit Altare , qu'il y mit des Reliques de Sainte Aurelie , qu'il revêtit l'Autel des ornemens convenables, Ht y cé- lébra la Meffc : mais que ce fait n'é- tant rapporté que fur le témoignage de Walefride-Strabon , qui a écrit la Vie de Saint Gai deux cens ans après la mort de S. Colomban, & Jonas qui a écrit la vie de Colom- ban, dont il étoit ptefque contem- pornn, n'en faifant nulle mention, .SA ne doit pas compter beaucoup ES SÇAVANS, fur un tel exemple, Quoiqu'il en ioit , notre Auteur, fans Touloir , comme nous avons dit ,. démêler ici la queftion de droit, fe borne a la l'impie difcullion du fait ; voici en abrégé fes refle- xions fur ce point : i°. Dans le Propre du Diocéfc de S. Flour il eft dit que l'Eglife de S. Flour fut facrée lorfqu'on cele- broit le Concile de Clcrmont. Ce- pendant la Dédicace de cette Eglife rut faite le feptiéme Décembre de l'année 1095. &: alors le Concile étoit déjà fini. i°. Elle fut faite par le Pape Ur- bain II. & S. Hugues n'en tut que le fpechteur. 30. On célèbre encore aujour- d'hui à S. Flour le 7e de Décembre l'Anniveifaire de cette Dédicace ; &: cependant la Cathédrale a depuis été rebâtie par Pierre 3c Antoine de Lautoin , quiétoient rreres, eV: qui furent facceiîîvement Evéques de S. Flour. En forte qu'on fit fans doute une Dédicace de cette nou- velle Eglife. Ce qui étant fuppofé , il relte à fçavoir fi cette féconde Dédicace fut faite le 7e de Décem- bre : car fi clic le fut un autre jour, notre Auteur prétend qu'il en fauï célébrer l'Anniveriairc un autre jour que le 7e de Décembre , puif- que la Dédicace du Pape nefubfiite plus. De cette difculîion l'Auteur palîe à une autre qui peut-être ne paroîtra pas d'abord fort importante , mais qui en fon genre ne laifle pas de mériter quelque attention. LesBol- jLandiiles , AhfyHtli rienn'ichappe , ( N O V E M «lk-on ici , & qui découvrent juf- çju'aux moin ira fautei d'orthogra- phe , font dans leur troifiéme Volu- me du mois d'Avril, l'obfervation fuivante : Sanfti Sulpicii , non Su- pliai ( uti perperani evexfum') plu- res fuut totâ G allia Ecclefut. C'eft- à-dire : il y a dans toute la Franct plufieurs Eglifes de S. Sulpice , & non" de S. Suplice , ( comme on l'a mal k propos imprimé. ) Notre Au- teur foûtient que les Bollandiftes ont tort de regarder comme une faute , qu'on ait écrit : Sanïli Su- plicii , de S. Suplice , au lieu de Santlt Sulpicii , de S. Sulpice. Il remarque là-deflus, i°. qu'à Bour- ges où l'accent , dit-il, eft très-bon, on prononce communément, l'Ab- baye de S. Suplice. ia. Qu'en Quer- cy l'illuftre Maifon de S. Sulpice , s'appelle plus communément de S. Suplice. 30. Que planeurs Pari- liens prononcent , la Paroifle de S. Suplice. 40. Qu'on lit dans quel- ques Manufcrits Latins Suplicius , au lieu de Sulpicius. De ces quatre obfervations notre Auteur conclut, que dans le partage cité , on peut rayer fans fcrupule le perperam & même la Note entière des Bollandiftes, en cela , dit-il, trop icrupuleux. Il ne leur fait pas plus de grâce fur ces autres paroles : Vicus Ifidorus , vulgo Ifioir , nunc inter Abbatias de fut numerari. Il les avertit que l'Abbaye de S. Auftrc- moine d'Iiîoirc , & non pas lfjoir , laquelle cil unie à la Congrégation de S. Maur , fubfiile encore dans la Limagnc d'Auvergne , il les ren- voyé là-deflus a» fécond Tome de ERE; r752. 711 la France Chrétienne , de l'Edition des Bénédictins. , Autre erreur, qu'on reprend dans cet autre partage des Bollandiftes : Necjue hocSanftiJoannis Cœnobium, amplius pitlavis fuperefi : On les avertit tout de même que ce Mon.i- ftere fubfiile dans l'enceinte de Poitiers , & porte le nom de Mou- tier neuf. On leur donne fur cela 8c fur d'autres points que nous partons, divers avis femblables que quelques Lecteurs traiteront peut-être de minuties, mais qui confédérés par rapport à la confequence qu'on en peut tirer pour ce qui regarde la Re- publique Littéraire , ne font pas à mépriîcr ; & fi l'on s'en tient à ceux qui viennent d'être rapportés , ne peut-on pas dire, demande notre Auteur , que puifque des Ecrivains aulli exacts Se aufti habiles que les Continuateurs de Bollandus , onc fait de pareilles fautes , à plus forte raifon doit-on fe tenir fur fes gardes quand on lit des Hiftoriens moins éclairés & moins foigneux î L'Au- teur de la Lettre prend de-là occa- fion de remarquer qu'il eft d'une grande confequence pour ceux qui écrivent quelque Hiftoire , de ne s'en point rapporter aux Auteurs qui les ont précédés } mais de puifer eux-mêmes dans les fources & de lire les originaux. La plupart des Hiftoriens , dit-il , font de race Moutonnière, ils fe fui vent les uns les autres ,.& ne font que fe copier, de-là vient que l'on a fi peu d'Hi~ ftoires exactes. Il avoue que les Bol- landiftes avant entrepris un Ouvrai ge immenfe , il eft prefque impofïir 7i2 JOURNAL DE blc qu'il ne s'y glilfe beaucoup de fautes -, mais il voudroit que com- me la moillbn eft grande, cv que le nombre des Ouvriers eft petit , il y eût pour un Ouvrage qui eft com- mun à toutes les Nations , un Ou- vrier de chacune ', un Romain , un François , un Efpagnol , &c. & que chacun de ces Ouvriers connût à fondfon Pays; Que le Romain , par exemple , eût parcouru l'Italie; Que le François eût fait fontour de France , Que l'Efpagnol eût voyagé dans tous les Royaumes du Roi Catholique , & ainfi des autres. Sans cela, remarque-t-il , il eft dif- ficile de ne point faire de fautes dans les Obfervations Géographi- ques , témoin entr'autres les Hifto- tiens François qui lors même qu'ils traitent de la France, tombent dans des fautes groffîeres , s'ils n'ont pas été fur les lieux dont ils parlent. Le Cardinal Baronius, félon la remarque du Père Jean Croifet , » dit fagement , que la moindre » faufTeté qu'un Ledeur trouve » dans une Hiftoire , le fait douter » de toutlerefte , &c qu'il ne peut » plus s'alfurer de rien dès qu'il s'eft » vu une fois trompe. « Cette cita- tion que fait ici de Baronius le Père Croifet , engage notre Auteur à di- re que le témoignage de ce Père eft un témoignage domeftique , qui ne fçauroitêtre reculé par les RR. PP. Bollandiftes, & là-deflus il avance que fi l'on vouloit tabler en toute rigueur , fur le principe que le Perc Croifet allure être fagement établi par Baronius, &z qui l'cll effecti- vement , on leroit en droit de ne S SÇAVANS, plus s'alRircr de l'exactitude du Père Croifet même , & voici comme il s'y prend pour le prouver. Le Perc Croifet , dans la belle Préface fur les Vies des Saints , qui eft celle où il cite avec éloge l'obfervation de Baronius • » promet de ne rappor- i> ter aucun fait qui ne fuit antorifc » pour trouver créance , ce font fes » propres termes. Mais oublieux » de la promette dès l'entrée de fon «Livre, à la page 15. du Tome » premier de l'Edition de Lyon, » année 1723. dans la Vie de Saine «Pierre-Thomas, Carme, alTez » mal placée au 4. de Janv. il dit » que le Pape Clément VI. ayant » ordonné epte [on corps fut tranf- » prrtê à la Chaife-Dieu dans le » Vélay , dont il avoit été jibbi » avant fon Pontificat , la Commif- » fion en fut donnée a Saint Pierre- » Thotr.ar. Double erreur d'Hiftoi- » re ôc de Géographie , en moins « de deux lignes. Clément VI. n'a » point cré Abbé de la Chaize- » Dieu. La Chaize-Dieu n'eft point » dans le Vclay , elle eft certainc- » ment en Auvergne dès le tems de » fa fondation. Le P. Croifet le rc- }> connoît lui-même dans la Vie de » S. Hugues Evoque de Grenoble , j> Moine de la Chaize-Dieu. On ne termine pas ici la critique du P. Croifet , on dit que ce Rêve- rai Père f (fuite , dans la Vie de S. Pafcal , met cinq Prieurcz de Cluni , quoique , félon le compte ordinaire , il n'y en ait que quatre ; fçavoir , la Charité , S. Martin des Champs , Sauvigni , & Souxillancs; puis on ajoute qu'on pourtoit rele- N O V E M ver quelques autres endroits du P. Croifet > mais que ceux-là fuftî- fent pour prouver ce qu'on a avan- ce. On s'abftient auiïi-de reprendre plufieurs fautes de la même cfpcce dans le Dictionnaire de Moréry , & on dit pour raifon, que c'eft que cela meneroit trop loin. On fe rab- bat enfuite fur les leçons de S. Eu- trope premier Evêque de Saintes , & on avance qu'elles contiennent rant de labiés qu'il feroit beaucoup mieux de fubftituer à ces Leçons celles du Commun d'un Martyr Pontife. Mais ce qui choque le plus notre Auteur , eft de voir que l'on rafle S. Eurrope defeendant des Rois de Perfe , Courtifan du Roi Hcrodcs, Difciple de S. Simon & de S. Jude , Compagnon de Saint Denis Aréopagite , & qu'on lui donne plufieurs autres qualitez de ce calibre. Voilà ce qui nous a paru de plus eflèfiticl dans cette Lettre. Celle qui fuit &c qui eft adrelléeà Dom Lami , Prieur de Beaulieu , ne nous arrêtera pas beaucoup. Non qu'elle n'ait fon mérite, mais c'eft qu'elle roule fur un fujet affez fec par lui- même , & qui ne peut guéres inte- refTer que les Ritualiftes &les Li- turgiftes 5 dont la Confrairie , ce- pendant, comme le remarque notre Auteur à la fin de fa Lettre , eft beaucoup plus nombreufe que celle des Aigcbriftes & des Af.it hémati- tiens , en faveur de fquels le public ne trouve pas mauvais qu'on infère dans les Journaux des Sçavans , des Ex- traits d'algèbre , que peu de gens en- tendent. B R E; 1732; 713 Il s'agit ici de quelques fîngulari- tez. du Rituel de l'Abbaye de Beau- lieu : Dom Lami , Prieur de Beau- lieu , n'ayant pu trouver dans cette Maifon aucune perfonnequi en pût lire les Manufcths, & étant curieux de fçavoir ce qu'ils renferment s l'Auteur de la Lettre lui mande qu'il a vu autrefois ces Manufcrits s &c qu'il en a fait alors des extraits qui le mettent en état de donner fur ce fujet la fatisfaction qu'on peut délirer. Il commence parle Rituel , & s'en tient là pour le pre- fent. Ce Rituel eft un petit Manuf- crit /K-40. long de fept pouces & large de îîx, qui paroît avoir été écrit vers le XV; lîécle.- On y voie en plulieurs en par la queue , & lia des torches » au milieu. ' Ce qui eft bien différent , dit notre Auteur , d'avec les Renards du Cirque , an f quels véritablement on attachait des torches à la queue mais qui n"étoient pas liés deux k deux. Pour ce qui eft de la féconde raifon ; fçavoir, que fi les Vulpina- les euffent eu du rapport à l'événe- ment de Carfeole , on les auroit cé- lébrées vers le tems de la moiffon de ce territoire , on ne trouve pas cette raifon plus convaincante que Sfff 7i6* JOURNAL D l'autre : les Vulfinulet , dit-o;i , étoiciit regardees comme un Sacri- fice a Cérès , & fi cette Fcrc t la feule inilitr.ee en l'honneur de Cérès , peut-être ( comme elle fe célébroit en mémoire de la moiflon de Carfeole ) auroit-on choilî le tems de la récolte des bleds pour la célébrer. Mais y avant déjà une au- tre Fête confacrée à cette DéefTe , & qu'on appelloit exprefTement les Céréales , laquelle tomboit dans le mois d'Avril , on ne pouvoitguéres choifir pour les Vnlpinales un eems plus convenable que celui-là. L'Auteur de la DilTertation ob- ferve de plus, que c'étoit au même mois d'Avril , que fe célebroient toutes ces Fêtes dans lefquelles on demandoit la fertilité de la terre/3 comme l*s Fordicides , où on im- moloit à la terre une Vache pleine , pour obtenir la fécondité dans les animaux ; les Robigales , où on prioit la DéefTe Rabigo , de prefer- ver de la rouille , les bleds , Se les autres grains ; les Florales , où on demandoit à la Déelle Fhre , de faire fleurir heureufement tous les fruits. On n'oublie pas de remar- quer qu'Ovide parle encore de quelques autres Fêtes de ce genre , lefquelles tomboient dans le même mois d'Avril , qui étoit le mois que les Romains avoient choifi pour demander aux Dieux la conferva- tïon & l'abondance des biens de la terre ; & on conclut de tout cela } qu'il n'eft donc pas étonnant que les Vitlpinales fuflent célébrées dans ce mois. On joint une autre raifon à celle-là , fçavoii que quand os ES SÇAVANS; veut faire des vœux pour une recot- te , on" n'attend pas le tems de la moiflon , mais qu'on s'y prend de* le tems même que les bleds com- mencent à entrer dans un état de maturité. L'on termine? la DilTerta- tion par dire , » i°. Que Bocharc »> qui a fi bien mérité des lettres , a »» eu fur les Vulpinaks , une idée ji bien extraordinaire & très-éloi- n gnée de la vérité , une idée qui » n'eft foûtenuc d'aucunes bonnes » raifons : 2°. Qu'Ovide a donné la » véritable origine des Vitlpinales. Dans la dernière Pièce il s'agit de fçavoir fi avant Manlius le Ma- thématicien , qui fit pofer une bou- le dorée au-dellus d'un Obelifque élevé par Augufte dans le champ de Mars , quelqu'un s'étoit avifé de mettre un pareil ornement au bout d'un Obelifque. La queftion eft facile à décider > aufîi n'y em- ployé - t - on pas un long diicours» Pline le Naturalifte, en parlant des Carrières de marbre qui étoient aux environs de la Ville de Siene dans la haute Egvpte > rapporte que les anciens Rois d'Egypte fi- rent tirer de ces Carrières, de gran- des pierres , qu'ils dédièrent au So- leil , & aufquelles , pour cette rai- fon , ils donnèrent la figure d'un Rayon Solaire , Se le nom d'Obelif- ques, ce mot en Langue Egyptienne lignifiant Rayon.Cch fuppofé, il eft naturel de juger que les Obelifques étant taillés en forme de rayons fo- laires, fe terminoient Amplement en pointe , fans avoir à l'extrémité aucun globe ou autre ornement; mais pourquoi Manlius ajoûtc-ç-il N O V E M une boule à l'Obelifque dont on vient de parler; On en trouve la raifon dans Pline, c'étoit pour fer- •virde Gnomom ou de Cadran Solaire^ par où on voit que ce Mathémati- cien n'en agit de la forte que par rapport à fon art, fans aucun def- fein de faire de cette boule un or- nement à l'Obelifque. Mais ce qui montre bien , félon notre Auteur , que Manlius a été le premier inven- teur du Globe pofé au-deffus de l'Obelifque , c'eft que Pline rappor- B R E', 1732. 717 te que ce Mathématicien en conçut l'idée fur l'ombre que forme la tête de l'homme ; car Ci cet Hift orien , pourfuit-il , eût fçu que quelqu'un, avant Manlius , eût imaginé la même chofe , il n'eût pas manqué d'en avertir. Au refte , on remarque que les fragmens de l'Obelifque en queftion fe voyent à Rome fous des ruines au pied du Mont Gitorio , proche le Tybre , & voilà tout ce qui nous a paru de plus confidera- ble dans ces quatre Pièces. WALTERI HEMINGFORD , CANONICI DE GISSEBURNE Hiftoria de rébus geftis Edwardi I. Edwardi II. & Edwardi III. Acce-, dunt inter alia Edwardi III. Hiftoria per Anonymum , &c. C'eft-à- dire : Hiftoire des Rois Edouard I. Edouard II. Edouard III. Par Gau- thier <^Hemingford , Chanoine de Giffeburne , avec une Hiftoire d'E- douard 11 L Par un Anonyme. La narration du procès fait à Regnault Pecoke , des Morceaux Hiftoriques tirés du Diffionnarre Théologique de Thomas Gafcoine, un Ouvrage de la retraite de Charles I. de la fille d'Oxford y & une Notice des Maifons Religieufes du Diocéfe de Bath & de Wiel. Tirées des Manufcrits , & publiées par M. Thomas H e a r N. A Oxford. 1732. /k-8°. 2. vol. premier vol. pp. 263. fans la Préface , fécond vol. pp. 473. VOICI le quarantième Ou- vrage donné au Public par M. Hearn depuis l'année 1702. il con- tient , comme le plus grand nom- bre des Volumes précedens , des morceaux de l'Hiftoire d'Angleter- re 5 tirés d'Auteurs contemporains. Gauthier Hemingford , qui eft l'Auteur des trois premiers Ecrits contenus dans ces deux Volumes , étoit Chanoine Régulier du Mona- ftere de Giiïeburne dans l'Archevê- ché d'Iork. Il mourut dans fon Monaftereen 1347. Après avoir fini les études qu'on faifoit faire aux Chanoines de GilTeburne ; il prit le parti de s'appliquer à l'Hiftoire de fa Patrie , & il cornpofa une Hi- ftoire d'Angleterre , depuis le rè- gne de Guillaume le Conquérant, jufqu'à fon tems. Le fçavant Tho- mas Gai fit imprimer en 1677. une partie de cette Hiftoire qui va juf- qu'à la mort d'Henri III. & il avoit promis de publier la fuite dans d'autres Volumes de la Colle&ion des anciens Hiftoriens d'Angleter- re. Mais il n'a point exécuté ce def- fein. M. Hearn a cru que le mor- ceau de l'Hiftoire de Gauthier, Sfffij 7iS JOURNAL D d'Hemingford , qui commence au règne d'Edouard I. meritoi: d'au- tant plus d'être publié qu'une partie des fraies qu'il rapporte font arrivés de fon tems , 6c qu'il avoit pu s'in- ftruirc aifuaier.t de ce qui s'étoit pafTéfotisle règne d'Edouard T. M. Hearn n'a pu recouvrer en entier l'Hiftoire d'Edouard II. par He- mingford, de forte qu'il fe trouve une lacune depuis l'année 13 12. qui étoit la fixiéme année du règne d'Edouard III. celle-ci ne va que jufqu'au mois d'Aouft 1346'. mais on trouve le refte de l'Hiftoire d'Edouard III. jufqu'au tems de fa mort dans l'Hiitoire de ce Prince par un Anonyme, dont M. Hearn a joint l'Ouvrage à celui d'He- mingford. Il a paru en François tant de différentes Hiftoires d'An- gleterre , dans lefquelles on a parlé des trois premiers Edouards , que nous avons cru que ce feroit fatiguer les Lecteurs de leur donner un pré- cis de ces Hiftoires. Il nous îuffîra de remarquer en général qu'elles font écrites dans le goût de cetems- là, Si. qu'on doit fe contenter , en les lifant , de s'affurer de certains faits , fans y chercher l'agrément du ftyle , des caractères ou des re- flexions qui puiffent flatter les Lec- teurs. Il y a dans l'Hiftoire d'He- mingford Se dans celle de l'Anony- me quelques Pièces originales , foit en Latin, foit en vieux Normand t qui feront plaifir à ceux qui aiment ces fortes d'antiquitez. Ce fut en 1457- que Renaud Pe- eoke, Evêque de Chichefter, ayant comparu devant l'Archevêque de ES SÇAVANS, Cantorbéry & devant le Roi Hen- ri VI. fut obligé de rétracter plu- fieurs erreurs qu'il avoit enfeignées. Les principales qui font comprifes dans fa rétractation , font d'avoir foûtenu , qu'il n'étoit point necef- faire , pour être fauve , de croire que J. C. fût defeendu aux enfers après fa mort , non plus que dé croire au S. Efprit , à l'Eglife Ca- tholique, ou à la Communion des Saints ; d'avoir avancé que l'Eglife Univerfelle peut fc tromper dans les chofes qui regardent la foi , que tous les Fidèles ne font point obligés de fe foûmettre aux décidons des Conciles Généraux ou de l'Eglife Univerfelle pour ce qui regarde la foi Se le falut des âmes. L'Archevê- que de Cantorbéry l'exhortant à retracter ces hérélîes , lui déclara que s'il refufoit de fe foûmettre il feroit livré au brasfeculier , Se en- iuite condamné au feu , comme Hérétique notoire. Il fit en public, dans une place de la Ville de Lon- dres, l'abjuration qu'il avoit faite en particulier , Se les Livres dans lefquels il avoit foûtenu ces héréfies furent brûlés publiquement. Feco- ke fut dépofé Se envoyé en exil où il mourut. Thomas Gafcoine qui a rapporte plufieurs traits d'hiftoirc dans fon Dictionnaire Hiftorique que M. Hearn a eu foin de recueillir , parle fouvent de Pecoke Se de fa con- damnation , lui attribue encore d'autres erreurs que celles dont il avoit fait une abjuration folemncl- le. Une de ces erreurs étoit , fui- vant Thomas Gafcoine , d'avoir. N O V E M foûtenu que les Evoques n'étoient point obligés de prêcher. L'Auteur de ce Dictionnaire Thcologique étoit né en 1403.il avoit enfeigné la Théologie dans P Université d'Oxford , dont il avoit été plusieurs fois Rectreur. Il mourut en 1457. il relie de lui qua- tre Ouvrages que l'on conferve en Manufcrit , la Vie de S. Jérôme , un Dictionnaire Théologique en deux Volumes, un Volume de Le- çons & de Sermons fur les Evangi- les. On voit par les extraits de fon Dictionnaire Théologique , qu'il avoit un grand zélé pour la prédica- tion. Il demande pardon à Dieu de ne s'y être point allez appliqué. Il condamne avec beaucoup de force la pluralité des bénéfices, &c ceux qui ayant des bénéfices chargés de la conduite des âmes , les font dé- fervir par des Prêtres Mercenaires. B R E ; 1732. 7ip Il s'élève en quelques endroits con- tre la Cour de Rome , & il fe plaint de la manière dont elle difpofoit alors des bénéfices. Il n'en avoit pas voulu avoir , & il avoit toujours vécu de fon patrimoine. Un jour le Roi Henri VI. lui demanda pour- quoi il n'étoit point Evêque. Sei- gneur, lui répondit Gafcoine , fi j'avois voulu devenir riche , j'aur fois mieux aimé être bon Gordon- nier que le plus fçavant Docteur d'Angleterre. La Relation de la manière dont le Roi Charles I. forcit d'Oxford en 164^. eft du Docteur Michel Hu- dron. Elle eft en Anglois de même que la Notice des Maifons Reli- gieufes du Diocéf: de Bach , où l'Auteur marque la datte -le la fon- dation de ces Monafteres , & donne un état de leurs revenus. MEMOIRE SVR LE SUJET DV PRIX PROPOSE' PAR V Académie "Royale des Sciences 3 en l'année I729. touchant la meilleure méthode d'obferver fur mer la déclinaifon de l'aiguille aimantée ou la variation de la Boujfole. Par M. M e y n i e r , Ingénieur du Roi tour la Marine , ci-devant Profejfeur Royal d'Hydrographie au Havre. A Paris , de l'Imprimerie de Jacques Guerin t Libraire-Imprimeur , Quai des Auguftins. 1732. /«-40. pp. $6. fans les planches. CE Mémoire avoit été envoyé à l'Académie des Sciences,après qu'elle eût annoncé qu'elle diftri- bueroit un Prix conformément à la fondation de M. Rouillé de Mef- îay , à celui qui auroit le mieux ïéuffi dans un Ouvrage touchant la meilleure manière d'obferver la déclinaifon ou la variation de îa Boufible fur mer. Mais comme il refta à la pofte jufqu'après la diftri- bution du Prix , M. Meynier crut devoir le communiquer à l'Acadé- mie des Sciences & enfuite au pu- blic. L'Auteur commence par prou- ver dans fa Préface que le défaut d'obfervations exactes fur la varia- tion de la Bouffole , caufe fouvent des erreurs dans la navigation. Eî 72o JOURNAL DE qu'il a occalionné beaucoup de naufrages. C'eft , comme il l'ob- ferve d'après la Société Royale de Londres, le défaut de connoilTunce de la variation de la Bouffole fur les Côtes Méridionales d'Angleter- re & à l'entrée de la Marche , qui a caufé la perte de l'Efcadre Angloife commandée par l'Amiral Chawel. M. Meynier remarque qu'en fui- vant la méthode ordinaire on ne peut faire les obfervations fur la dé- clinaifon de l'aiguille aimantée auffî fouvent & avec autant d'exactitude qu'il feroit à fouhaiter qu'on pût les faire pour la navigation. i°. Par- ce que l'on n'obfcrve cette variation que quand le Soleil ou des étoiles font à l'horifon , Se qu'il arrive fou- vent que le Soleil n'eft pas vifible à l'horifon , Se qu'il eft ordinaire- ment très-difficile de diffinguer les étoiles à l'horifon , à caufe des exhalaifons qui s'élèvent de la mer. a*. Parce qu'un feul homme ne peut faire l'obfervation , Se qu'il faut que l'un des Obfervateurs foit attentif à diriger les deux fils à l'A- ftre lorfqu'il eft à l'horifon , Se que l'autre obferve en même tems fur la rofe de la Bouffole le degré qui répond au fil horifontal , ce qui caufe de l'embarras. 30. Quand le VaifTeau eft incliné d'une certaine quantité du côté oppofé au Soleil , on ne peut plus taire les obferva- tions fuivant la méthode ordinaire. 40. Laboëte de la BoulTole fuivant les mouvemens du Vailleau t le moindre roullis dérange l'obferva- tion d'une manière qu'il eft d'au- tant plus difficile de reparer qu'un S SÇAVANS; Aftrc n'eft que très-peu de tems à l'horifon. La plupart des Pilotes mettent des hardes fous la boète de la Bouffole , Se tenant la boete en- tre leurs mains , tâchent de remé- dier à une partie des différentes în- clinaifons que le Vailleau lui pro- cure. Cette précaution , quoique groffiere , eft quelquefois utile , mais elle ne peut fuftire pour des ob- fervations qui demandent la plus grande exactitude. Ce font ces défauts de la métho- de ordinaire qui ont donné lieu à M. Meynier d'inventer un infini- ment , par le moyen duquel une feule perfonne puiffe obferver la déclinaifon de l'aiguille aimantée au Soleil lorfqu'il eft à l'horifon, Se qui puiffe fervir pour obferver la même déclinaifon aux étoiles depuis l'horifon jufqu'à environ 60. degrez d'élévation & même plus , de manière qu'on puiffe faire des obfervations pendant toute la nuit avec cetinftrument. Il eft compofé d'une Bouffole de mer ordinaire, placé dans un cer- cle de cuivre , de manière que le plan du cercle foit perpendiculaire a la fuperficie de larrofe de la bouf- fole où font marqués les degrez de même que les fils ou pinules. On pofe le cercle où eft placée la Bouf- fole fur un quarré formé de deux pièces de bois égales Se rectangles affemblées par des chevilles de cuivre qui traverfent les deux pie- ces Si qui font tarrodées par le bout. Le plan du cercle doit être perpendiculaire fur la fuperficie du quarré. On prend enfuite un cercle N O V E M ] de cuivre qu'on enchafle entre les deux pièces de bois du quané , de manière que le plan du cercle foit perpendiculaire à la rofe horifontale de la Bouflole où font marqués les devrez, qu'il la partage en deux par- ties égales , & que l'un de fes fils horifontaux fe trouve entièrement dans la fuperficie du cercle. Au haut de ce cercle il y a un trou pat le moyen duquel on fufpend l'in- ftrument dans un cadre , de forte que le cercle ait la liberté de fe pla- cer verticalement dans le tems de l'obfervation , on pofe le cadre fur un fupport de bois armé d'une poin- te de fer à l'extrémité. L'Obferva- teur appuyé cette pointe fur le fond du vaifleau entre fes deux pieds , 5l tenant avec fes mains le fupport ou le carré de bois , il l'entretient dins l'cquiliBre. où eft fon corps , & étant tourne vers l'aftre, il fait fe obfervations fans beaucoup de peine. Un des avantages que l'Auteur tire de cette pratique eft que les Marins ayant acquis l'habitude de fe tenir en équilibre fur les vaif- feaux , de manière que les roullis & les autres mouvemens du vaif- feau ne les incommodent point ou très-peu, le Pilote entretenant fon corps en équilibre y entretient en même tems l'inftrument qui fert à faire fes obfervations , quoique dans ce tems-là le vaiffeau incline confi- derablement , tantôt d'un côté tan- tôt de l'autre à caufe du roullis & du tangage. Un fécond avantage ; c'eft que par le moyen de cet inftru- ment , un homme fcul peut faire R E; 1732. 72r les obiervations à l'horifon du So- leil. Mais le plus grand avantage de cet inftrument, fuivant M. Mey- nier , c'eft qu'on peut par fon moyen obferver la déclinaifon de l'aiguille aimantée aux étoiles pen- dant la nuit , pour cela on dirige les deux cotez du cercle à l'étoile en faifant tourner horifontalement l'inftrument fur la pointe. Il faut voir en même tems de quel côté le fil horifonral qui eft dans le cercle de cuivre fous le verre de laBoudole eft écarté de lapointe-dela fleur de lys &c de combien de degrés , car fî l'étoile eft en fon méridien dans le tems de l'obfervation , & que h pointe de la fleur de lys fe trouve ibus ce fil , la Bouflole n'aura point de déclinaifon j mais fi la fleur de lys eft écartée de ce fil horifontal , la Bouflole déclinera du nombre des degrez qui feront depuis la fleur de lys jufqu'au degré de la Bouflole qui répondra à ce même fil. La dé- monstration que l'Auteur donne de cette propofition dépend d'une fi- gure pour laquelle il faut renvoyer les Lecteurs au Livre même, lien eft de même de ce que l'Auteur dit fur les obfervations que deux hom- mes peuvent faire à tous les Aftres pour avoir la déclinaifon de la Bouf- fole depuis l'horifon jufqu'à foixan- te degrez d'élévation. L'Auteur vient enfuite à quelques problêmes dont la folution ne peut être que très-utile aux Marins. L'Académie ayant fait examiner ce Mémoire par Meilleurs Caflîni J Saurain, de Mayran , Nicole 8c Pi=- tôt a jugé le 1 3, Juin 173 1* » Que 722 JOURNAL D » l'inftrumcnt inventé par M. Mey- m nier eft très-propre pour fa u ver » une partie des défauts prefque j> inévitables des méthodes ordinai- »> res ; que la promptitude avec la- *> quelle l'Obfervateur peut voir » l'A lire tk le degré de cet inftru- « menr, eft une des chofesdes plus a> impoitantes pour obferver fur r> mer avec quelque exactitude. Que » la fufpcnfion ingénieufe &c (impie i> qu'il donne à ï'inftrument n'eft *> pas moins importante. Qu'on »> oourra de cette façon obferver la « déclinaifon de la Bouffole , beau- » coup plus commodément , que » par toutes les méthodes qui font » ordinairement en ufage , tant par * le Soleil que par les étoiles fixes , » qu'enfin M. Meynier a fait paroî- a» tre dans cet Ouvrage fa grande » fagacité naturelle pour les inven- » tions méchaniquesdont il a don- » né de bonnes preuves dans plu- » fieurs occafions , Se particulierc- i> ment en relevant un vailTeau » fubmergé depuis plufieurs années » à l'embouchure de la Charente.cc Un Chef d'Efcadre & plufieurs Pi- lotes affinent aufiï que cet inftru» mentdont ils ont fait l'épreuve fera très-utile pour la navigation. L'addition à ce Mémoire qui en ES SÇAVANS, fait la féconde partie , contient l'ex- plication d'un planifphere , que M. Meynier a inventé pour trouver fa- cilement fur mer à toutes les heures de la nuit la hauteur du pôle , en connoiffant la hauteur de l'étoile polaire , pour trouver la déclinai- Ion méridionale de cette étoile , l'heure de fon paffage & celle des autres étoiles fixes par fon méri- dien au-deffus& au-defibus du pô- le pour apprendre à connoîrre dans le Ciel les étoiles qui font fur ce planifphere , & pour trouver l'heu- re pendant la nuit à ces mêmes étoiles. Ce planifphere eft en feuille dans le Livre , mais pour en faire ufage il faut le coller fur du carton & le découper de la manière dont l'enfeigne M- Meynier. Ceux qui ne veulent point fe donner la peine d'ajufter ce planifphere en carton , en trouveront de tous prêts chez le Libraire qui vend le Livre. Notre Auteur allure que jufqu'à prefenc on n'a point connu de cadran pour tiou.ver l'heure aux étoiles qui foit aulfi exacT: que ce planifphere. Et M.Caffini qui a approuvé l'addi- tion au Mémoire qui contient l'ex- plication de ce planifphere , a jugé qu'il feroit utile pour la navigation. NOVPELLES NOVEMBRE, 1752. 1H NOVVELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Milan. L'Edition des Oeuvres de Sigo- nius , que nous avons annon- cée dans nos Nouvelles Littéraires du mois dernier , fera en cinq Vo- lumes in-folio. Suivant le Program- me publié par M. tArgelati les Soufcripteurs doivent payer d'a- bord en recevant le premier Volu- me déjà imprimé , vingt - cinq li- vres y appellées impériales , pour le petit papier , &C douze livres & de- mie d'avance pour le Volume fui- vant. Il en coûtera pour le grand papier trente-deux livres , Se fei^e livres auflî d'avance. Mais pour ne pas rebuter ceux à qui ces prix pourroient paroître un peu exorbitans , M. Argelati pre- met que dans la fuite ils ne feront pas toujours les mêmes , & qu'il au- t a foin de les réduire à proportion de la quantité de feuilles d'impref- fion que contiendra chaque Volu- me. On peut fouferire ou trouver des exemplaires de cette Edition à Va- ris , chez de Bure , Libraire , Quajr des Auguftins. ANGLETERRE. De Londres. Les' Knaf tons ont entrepris de Novembre. donner par foufeription en deux Volumes in-folio une féconde Edi- tion de la Traduction Angloifeque M. Tyadal a ci-devant publiée de l' Hiftoire d'Angleterre écrite en François par M. Rapin de Thoyras. Ces deux Volumes feront de 400. feuilles du plus beau papier, impri- més en caractères neufs , avec des planches gravées , des cartes & des Tables Généalogiques. Le prix de la Soufcription eft de deux guinées , dont la moitié fera payée en fouferivant , & l'autre moitié en recevant le fécond Volu- me. Les mêmes Libraires ont en ven-, te le fécond Tome in-40. de Y Iliade d? Homère en Grec & en Latin, dont le public eft redevable à M. Samuel Klarke , de la Société Royale , &C fils de feu M. Samuel Klarke , qui en 1729. donna le premier Volume de cette Edition del'Iliade , à l'ufa- ge du Duc de Cumberland. M. Lediard a fait imprimer chez J. IValthoe en deux Volumes ;»-8*. Sa Traduction Angloife de la Vie de Sethos , écrite en François par M. l'Abbé Terrain. A. fohnfton , Graveur , & A. Millard t Libraire , ontpropofé par Soufcription un Ouvrage confide- rable fous le titre de Diplomata (jr Numifmata Scotit. Ce Recueil for- mé par feu M. Anderfon , aura ueux Parties. Ttcc 724 JOURNAL D La première contiendra les Di- plômes ou Chartres des Rois A'E- cofie , depuis Ditncan fils de Mal- colon en l'an 1094. jufqu'à Jac- ques I. en 1424. les copies de ces Chartres feront figurées &: gravées, avec toute l'exactitude & toute la précillon polTible. Elles feront aufTi rendues en caractères modernes, 6v cette Partie fera accompagnée de 48. Tables Alphabétiques , foie pour la forme des letres , foit pour les abréviations en ufage dans les anciens Manufcrits. La féconde Partie de ce Recueil comprendra les monnoyes Se les Médailles d'or & d'argent des Rois d'Eco/fe. Tout l'Ouvrage doit conftltcr en 1 50. grandes planches in-folio t gravées par le célèbre M. J. Start , Se doit coûter aux SoufcripteursyT.v guinées , dont on payera la moitié d'avance , Se le refte en recevant l'exemplaire en feuilles. FRANCE. De Paris. Une Compagnie de Libraires dé- bite la Vie de Ai. Bayle , par M. des Mitizeaux. Nouvelle Edition. 1731. in-\z. 2. vol. Elemens de Géométrie , avec un abrégé d' Arithmétique & d'Algèbre. ES SÇAVANS; Par M. Rivard. Chez Henri } rue Saint Jacques, vis-à-vis Saint Yves. 1732. /»-4°. Le Triomphe de la Pauvreté ffr dis Humiliations , ou la Vie de Ma- dcmoifelle de Belleredu Tronchay y appellée communément Soeur Loui- fe : avec fes Lettres. Chez Gabriel Martin , rue Saint Jacques , à l'E- toile. 1732. ;'k-8°. Mademoiselle du Tronchay étoit une fille de Condition de la Province d'Anjou , dont les vertus Se la grande pieté ont édifié , non feulement fa Patrie Se les Provin- ces voifines, mais encore la Ville de Paris , où les caractères fingu— liers de fon amour pour la Pauvre- té , Se de fon dévouement au fer- vice des Pauvres , ont éclaté dans- les Hôpitaux. Les Avantures de Monfieur Ro- bert Chevalier , dit de Beauchêne , . Capitaine de Flibnftiers dans la nou- velle France. Rédigées par M. le Sage. Chez Etienne Ganeau , rue' Saint Jacques, aux Armes de Dom- bes. 1732. in- 12. 2. vol. Saillies d'Efprit , ou choix cu- rieux de traits utiles Se agréables pour la converfation , &c . par M. Gayot de Pitaval. Nouvelle Edi- tion , augmentée , revue Se corri- gée. Chez Briajfon , rue Saint Jac- ques , à la Science. 1732. quatre Parties en deux Volumes /'s- 1 2. NOVEMBRE; 1732: 7*5 Fautes à corriger dans le Journal d'Ollobre 1732. PAge 59e. dans le titre 3 lïg. %.l"Vniverfitêt lif. HVniverfttè de Paris i ibid. col. 2. lig. ?. Peripacomonie , ///. Peripneumonie : pag. J97. col. 2. lig. 4. farine de gramen , lif. racine de gramen : ibid. lig. 21. Se demi > lif. &c demie: pag. 598. col. première, lig. 19. fang de bouc lif. fang de bouc-eltain : ibid. lig. 16. par cuilleiée, lif. par cuillerées: ibid. col. 2. lig. 25. une once & demi , ///. une once &c demie : ibid. 1. iya. la petire vérole , lif. la rougeole : ibid. lig. 3 9. tamarinos., lif. tamarinds: ibid. lig. pénultième , une livre & demi , lif. une livre Si demie : p. 059. . col. 1. lig. i.demi, ///. demie : ibid. 1. 10. demi ,lif. demie : ibid. 1. 36". fang de bouc , ///. fang de bouc-eftain : ibid. col. 2. lig. 5. par cuillerée ,, lif. par cuillerées: ibid.l. 20. & demi , lif. &c demie : p. tfoo. col. 1. 1. 13. par cuillerée , lif par cuillerées : ibid. lig. 1 9. une once & demi , lif. une once & demie : ibid. col. 2. 1. 39. & demi , ///. & demie: p. 601. col. I.'- lig. 16. fille 3 lif. une fille : ibid. 1. 22. eut , ///. elle eut. TABLE Des Articles contenus dans le Journal de Novembre 1732. RA cines Hébraïques , fans points-voyelles 3 ou Ditlionnaire Hébraïque p âr racines 3 &cc. page 6C9 Recueil de Pièces , d'Hiftoire & de Littérature t Tome fécond, £80 Apologie des Bêtes , &c. g 89 Le Brigandage de la Médecine , Sec. 69 7 - Mémoires de Littérature & ÂHiftoire.Tome XL Part. 11. 709 Hifloire des Rois Edouard 1. Edouard 11. Edouard 111. &c. 717 Mémoire fur le fujet du Prix propofé par l'Académie Royale des Sciences t touchant la déclinaifon de l'Aiguille aimantée ou la variai ion de U Bouffo- fe,&c. 719 Nouvelles Littéraires ; 72 3 Fin de U Table. L E JOURNAL CAVANS, POUR L'ANNE'E M. DCC. XXX II DECEMBRE. A PARIS; Chez CHAUBERT, à l'entrée du Quay des Auguftins, du côté du Pont Saint Michel, à la Renommée & à la Prudence. M. DCC. XXXII. 'AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE VU ROY. LE JOURNAL DES SCAVANS DECEMBRE M. D C C. XXXII. BOTKTAIAOT IIEPI TOT riEAOIIONNHSIAKOY nOAEMOT BIBAIA OKTÛ. Thucydidis de Bello PeLponneliaco Libri odto , cum adnotanonibus integrisHenriciSrephani & Joannis Hudfoni. Recenfuic, & notas fuas addidit Jofephus Waiïe. Editionem curavit , fuafcjue animadveriîoneî adjecit Carolus- Andréas Dukerus. Cum variis DifTertationibus , colla- tionibus , & Indicibusnovis locuplcriffimis. Aniftelaedami , apud R. Se J. tWetflenios &c Gui. Smith. 1731. C'eit-à-dire : Les huit Livres de Thucydide touchant la Guerre du Péloponnéfe , avec les notes entières de Henri Etienne & de Jean Hudfon , celles de Jofeph W ajfe , & celles de Charles- André Duker. On y a joint des Difîertations , des Variantes Décembre. V v v v ij 73o JOURNAL DES SÇAVANS, tirées de divers Manufcrit: , & des Tables nouvelles & très-arnptes. A Amfterdam , chez R. Se J. Wstfietn , Se Guillaume Smith. 173I. in- fol. pp. 722. fans y comprendre la Préface , les Prolégomènes & les Variantes de 34. pag. une partie des Tables de 48. pag. les Annales de Thucydide de 123. pag. & deux Cartes Géographiques. VOICI donc enfin la nouvel- le Edition de Thucydide, pro- mife depuis fi long-tems, S: atten- due avec tant d'impatience. Le pre- mier coup d'oeil prévient d'abord en faveur de ce Volume: la beauté du papier t la netteté' des caractères tant Grecs que Latins , la belle or- donnance des divers morceaux d'imprelfion qui compofent chaque page , c'eft à-dire le Texte Se fa Verfion qui forment deux colonnes fuperieures , les anciennes Scholics Se les Notes qui en remphllen: deux autres inférieuremént 3 les Variantes placées entre deux Se qui occupent fans interruption toute la largeur de cet intervalle ; tout cela preiente au Lecteur un fpectacle agréable qui l'invite à prendre une connoiffance plus particulière de cet Ouvrage. C'eft fur quoi M. Duker l'Editeur a foin de lui four- nir toutes les lumières neceffiires dans une Préface de plus de 1 8. grandes pages , mais dont près du tiers roule fur toute autre chofe que fur Thucydide. Nous rendrons compte en premier lieu d'après cet- te Préface , de ce qui concerne cette nouvelle Edition. M. Duker s'en explique d'abord dans les termes les plus modeftes , qui font toujours honneur à un Sa- yanc diftingué. Il n'a voit jamais eu ( dit-il ) une a fiez haute idée de fa littérature pours'ingerer de procurer une nouvelle Edition d'un Auteur ancien tel queThucydide.Quoiqu'il ne fût pas tout-à-fait étranger dans la lecture de cet Hiftorien ; l'entrer prife lui paroifloittrop au-deiïus de les forces. Mais les follicitarions réi- térées des Sieurs Wetftein Se Smith Libraires, déterminés à réimprimer cet Auteur par la rareté Se le prix exceflîf où ils voyoient la dernière Edition qui en a voit été faite à Ox- tord , vainquirent la répugnance de M. Dnker ; ces Libraires lui fourniffant déjà de leur chefquel- ques provilions capables de l'encou- rager. C'étoient de favante*. Notes de M. WalTe , non encore pu- bliées ; c'étoient les Variantes de deux mar-'uferits , l'un de la Biblio- thèque du Roi de France, l'autre de celle de Copenhague ; c'ctoitde plus l'efperancc d'avoir bien-tôt en communication les manufents de la Bibliothèque de Hcflè-Caffel, SC la facilité de confulter quand on voudroit celui de la Bibliothèque d'Amfterdam. Il paroît , par la Notice que M. Duker nous donne de ces 4. ma- nuferits , i°. que celui de Paris a quelques (îngularitez pour la pro- nonciation des accens , pour la jonction Se pour la réparation de D E C E M certains mots : 2°. que celui de Danemarca joo. ans d'ancienneté, mais que depuis le milieu du cin- quième Livre jufqu'à la fin , le ca- ractère décelé une main plus récen- te, & qu'il fut acheté à Venifeen 1699. par feu M. Rojigaeri: 3°.que le manuferit de Hellc-Caffel, d'une grande terme & prefque quarrée , écrit élégamment fur. du papier de coton (comme le croit notre Edi- teur ) èv très-épais , eft de l'année 1252. 40. que le manufciit d'Am- fterdam de forme moyenne , eft à peine ancien de 300 ans , ma's qu'ayant été copié d'après un autre marqué au bon coin , il ne lailTe pas d'avoù Ion utilité pour confir mer en beaucoup d'endroits la véri- ra'ole leçon. Au (ecours emprunté île. ces 4 manuferits M. Duker a Jo'.'U la confrontation du Texte de Thuodide [édition de Balle ] faite par M. Weijîan Miniltre fur un mar.ufcrit, du xme ou xivc llécle , confervé dans,la Bibliothèque de cette même Ville , jnais qui n'étant arrivée en Hollande que lorfqu'on y imprimoit le dernier Livre de cette Hiftoire a été renvoyée à la fin des témoignages & des juçemens recueillis au fujet de l'Hiftorien Grec. Quant aux anciennes éditions, -notre Editeur n'a eu recours qu'à celle de Vafcofen qui n'offre que les trois premiers Livres, Se à celle èi Hervagius faite à Bafle , entre deux exemplaires de laquelle datez l'un & l'autre de 1540 il a remarqué quelques différences, llnes'eftpas mis en peine de confulcer un plus B R E, 1752. 751 grand nombre d'imprimez , &cela pour deux raifons -, la première parce qu'au fonds il ne s'éroit propo- fé que de renouvellcr l'édition de M. Hudfon ; la féconde , parce qu'il fe perfuadoit que cet Editeur avoit eu grand foin de conférer toutes les éditions fur celle de Tor~ tus. C'eft pourtant , dit - il , de quoi il a commencé à douter lorf- qu'il s'eft apperçu îles méprifes dans lefquelles eft tombé M. Hudfon en copiant les Fanantes de l'édition à' Hcrv-igius. Il iemble que ce com-« mencement de défiance fur l'exac- titude de M. Hudfon devoit enga- ger M. Duker à redoubler la (ienne, & à ne s'en tenir pas aux deux feules éditions qu'il vient d'alléguer. Les autres font , i°. celle d'Aide, à Venile en 1 502. in-foi. 2°. celle de Junte à Florence en 1 $16. in - fol. 30. les deux d'Henri Etienne^Gré- qucs-Latines , in-fol. l'une de 1 5^4. l'autre de 1 588. 40. celle d'^Emi- lius-Portus à Francfort chez. We- chel , en 1599. in-fol. fans compter quelques éditions /«-40. & in-n, qui ne contiennent que quelques Livres de Thucydide. A l'égard de cette nouvelle édi- tion , voici l'ordre que s'y eft pref- crit M. Duker. Pour l'inipreffion du Texte Grec & de la Verlion La- tine , il a fuivi fcrupuleufement l'édition d'Oxford , conformément à l'intention de M. Wap notifiée aux Libraires ( que celui-ci a pour ainfi dire , mis en befogne ) à l'ex- ception de quelques changemens indiqués parle même. M. Duker a poulie i\ loin le fcrupule fur cet ar= 732 JOURNAL D ticle, qu'il ne s'cil pas permis la inoindre liberté , li ce n'eft qu'il s'accufc pourtant d'avoir eu l'auda- ce de changer une fois ou deux fur l'autorité d'un rnanufcrit la prépo- fition iiç en k , Si d'avoir peut-être tait cnco;e quclqu 'autre change- ment de mêmf force , ma;s tou- jours fans oublier d'en avertir le Lecteur. Voilà, comme l'on voit, un Editeur circoDipect a l'excès. Il eft vrai qu'il s cil dédommagé dans (es Notes , & qu'il s'eft mis au lar- ge fur ce point. De plus , il a infé- lé les nouvelles Variantes chacune en leur lieu , parmi celles qu'avoit déjà raflemblées M. Hudfon , en y joignant celles que celui-ci avoic renvoyées à l' Appendix de fon édi- tion d'Oxford. On avoue de bonne foi que parmi ces Variantes il y en a pluheurs qui ne font viliblement que des fautes des Copiftes , Si d'autres qui ne peuvent être de nul ufage ni peur la correction du Tex- te , ni pour l'éclaircilTement du fens de l'Auteur , en forte qu'on au- roit pu fans confequence ., fc débar- raffer de tout ce fatras. Mais com- me on s'étoit propofé M. Hudfon pour modèle , il falloit le fuivre aveuglément. D'ailleurs , loin de regarder toutes ces minuties avec autant d'indifférence que le font certains Critiques , M. Duker re- tenu par l'autorité de M. Burman , qui en fait fes plus chères délices , n'avoit garde d'en proferire les in- utilitez même les plus avérées : Si il renvoyé là-dcuus à la Préface que ce Profelfeur a mife au-devant de fa nouvelle édition de Juftin. A ES SÇAVANS, propos ae quoi il Lit unefortie fui le nouvel Editeur de Seneqtie le Tragique , lequel a marqué peu de conûderation pour ces Compila- teurs de fanantes , Si en particu- lier pour lui [ M Duke. ] enfoncé pour lors dans ces forte- dedifeuf- lîons par rapport à Thucydide. Il décoche en palfant contre cet Edi- teur (qmelWi-Scbroeder) quel- ques traits allez vifs , promettant de revenir fur lui à la fin de cette Préface; & il lui tient parole, com- me nous le verrons. Il reprend a près cela le fil de fon difeours , Si nous parle desScholies Gréques qui accompagnent le Tex- te de fon Auteur , telles qu'elles ont paru dans l'édition d'Oxford , avec les corrections de HenriErien- ne , de M. Hudfon &: celles de M. Çrammms qui ont été communi- quées par M. Fabricius. Celui-ci , d'accord en cela avec H. Etienne , eft perfuadé que ces Scholies font de differens Auteurs , dont trois y font nommés , fçavoir , Amyllus , Af- clepiHS , Si Phœbatnrnon ; un qua- trième, Sabinus , l'eft pat Suidas , qui le donne pour un des Com- mentateurs de Thucydide , Si qui allègue de plus un Evagoras , dont il cite un Livre plein de recherches fur la diction du même Hiftoricn. Pour ce qui eft du liécle de ces Grammairiens, il feroit difficile de le recueillir de leurs Scholies avec quelque certitude. Sabinus ( félon Suidas ) floridoit fous Hadrien. Marcellin , Auteur de la Vie de Thucydide , Si qui [ félon Vojfius ] vivoit fous Valentinien , Valens Se D E C E M Grarien , fait mennon d'Antyiius & d'Afclcpius, qui par confequcnt étoient plus anciens. M. Fabricius ibupçonne que Phôebamraon éroic contemporain de Synedus , & en conftqucnced'ArC3Liius. On peut conjecturer encore le tems où ont vécu quelques autres de ces Scho- liaiKs;& croire que quelquesGram- mairiens Grecs plus modernes ont réuni en un corps toutes ces ancien- nes Scholies. Suidas paroît en avoir tranferit plufîeurs mot pour mot ainlï qu'il fembie l'avoir fait par rapport à celles qui accompagnent les Textes d'Ariftophane, de So- phocle,& de quelques autres. Mais, dira-t-on , ne feroit-ce point plu- tôt ces Scholiaft.es qui auroient em- prunté de Suidas leurs obfervations fur ces differens Auteurs ? Feu Ku~ fier, dans fa Préface fur Suidas, a fort bien prouvé que celui-ci a pui- fé dans ces Grammairiens de quoi enrichir fon Lexique : fur quoi M- Duker indique un pafTage du Scho- liafte d'Ariftophane cité par Suidas, pafige qui a échappé au défunt , & qui démontre que Suidas , & non pas le Scholiafte , éroit le Copifte. Ce qui n'empêche pas que dans la fuite ont n'ait pu coudre à ces an- ciennes Scholies quelques palTages extraits du Lexique de Suidas. Au-dciToas des Scholies Grcques font imprimées, i*. les Notes en- tières de Henri Etienne, dont quel- ques-unes avoient été négligées dans l'édition d'Oxford, i°. celles de M. Hudlon , 30. celles de M. Wafle , 40. celles de l'Editeur , di- stinguées des autres pat cette cir- BRE, 1752. 753 confiance que l'Auteur n'y a pas mis fon nom , mais qu'elles reveil- leront allez par elles-mêmes l'atten- tion du Lecteur. On ne trouve point avec routes ces Notes celles de Portns , d'où il arrive que cette édi- tion ne rend point la lîen'hé inutile. On a renvoyé aux additions quel- ques-unes des Notes de Henri E- tienne, que leur prolixité ne per- mettoit pas d'inférer commodé- ment parmi les autres. En général , ces Notes d'Etienne qui ne vont point au-delà du fécond Livre, n'ont d'autre défaut que celui-là même que ce Commentateur cen- furoit dans le Scholiafte Grec , c'eft-à-dire un verbiage fouvent in- utile. A l'égard des Notes de M. Duker l'Editeur , il ne les a faites la plupart [dit -il] qu'à la hâte & pendant qu'il corrigeoit les épreu- ves ; en tirant quelques-unes de la marge de fon exemplaire où il les avoit écrites d'avance; fa mémoire lui en fourniffant quelques autres, compofant le refte prefque fur le champ , & s'abftenant fur tout de toucher aux difficultés du Texte qui eufTent exigé de lui une longue èVlaborieufe méditation à laquelle il ne s'étoit point engagé, &c que les conjonctures prefentes d'une im- preffion actuelle jointeàfes autres oc- cupations lui rendoientabfolument impratiquable. Cet aveu fîneere de M. Duker touchant ce qui le con- cerne dans cette édition eft une preuve de fa bonne foi , & répond parfaitement au ton modefte qu'il a pris dès le commencement de fa Préface. Il ne veut pas nous induise 754 JOURNAL DE en erreur en mettant lui-même à un trop haut prix les travaux fur Thucydide : il ne les conf..cie prin- cipalement ( dit-il ) qu'à ceux qui font encore novices dans la lecture de cet Hiftorien , cv non aux Sa- var.s , pour lelquels ces mêmes tra- vaux n'auront d'autre utilité [ félon lui ] que celle de leur faire naître l'occAlion d'exercer leur génie lur cet Auteur , & d'en perfectionner le Texte de plus en plu1;. Il a même l'ingénuité de reconnoîtreque par- mi les Notes deltinées uniquement à l'inftruction des premiers il eut fait fagement d'en fupprimei quel- ques-unes , qu'il a foin d'indiquer , &C fur lefqvielles il veut bien palfet condamnation , &: pir-là mériter l'indulgence du public. A la fuite de toutes ces Notes , viennent fept Tables, dont les trois premières qui avoient déjà paru dans l'édition d'Cbtord , font ici réimprimées en meilleur ordre. Les trois fuivantes, drelTées par l'Edi- teur lui-même, renferment les mots & les phrafes [ tant pour le Grec que pour Latin ] dont il eft queftion dans les Notes , & les noms des Auteurs de l'une Se de l'autre Langue , qui y (ont corrigés ou expliqués. La feptieme Table, qui eft celle de tous les mors év de routes les phrafes du Texte Grec de Thucydide, avoitété d'abord com- par M. Walle : mais comme elle n troit point allez débrouillée pour devenir utile au public , un jeune Trlandois nommé M. Jac- ques VPàll'is a bien voulu fe char- ger de la refondre d'un bout à l'au- S SÇAVANS; tre. A toutes c-s Tables fuccedela meilleure partie des Ann«lti Tbx- cydidei du lavant Doùiuel , où lont rangés par ordre chronologique tous les évenemens de la guerre du Péloponnefe écrite par cet Hifto- rien. M. Duker fe repent fort de n'avoir fait imprimer ici qu'une partie de cet excellent Ouvrage , &C de n'avoir pas confcillé aux Librai- res de le redonner dans toute fon étendue. Il s'en efl a vile trop tard. Sur ce qui concerne la perfonnede Thucydide , fa diction , & divers autres chefs qui pourroienr être difeutés par rapport à lui , M. Du- ker renvoyé a ceux dont il a taie imprimeries témoignages & les ju- gemens à la tête de ce Volume , Se qui ne laiiîent rien à fouhaiter fur cette matière : tels font principale- ment Gérard Voffius & M. Fabri- citis dans fa Bibliothèque Gréque. Notre Editeur fait iciuneobferva- tion fur le partage de l'Hiftoire de Thucydide divifée ordinairement en 8 Livres , & quelquefois en 9 ou en 1 }. 11 en fait une autre plus im- portante fur les pallagesou les mots de cet Hiftorien allégués par d'an- ciens Auteurs j Se qu'à prelent on ne trouve plus chez lui. Il en rap- porte plu fieurs exemples , & n'en découvre point de caufes plus vrai- fcmblables , que les méprifes de ceux qui l'ont cité de mémoire &C fans recourir à fon Texte , la di ver- fitéqui regnoir entre les exemplai- res de ce teais-là & les fautes qui fe font gliflees dans les nôtres. C'elt à quoi fe devoir naturelle- ment terminer la Préface de M. Duke- D E C E M Duker. Mais il l'allonge de près de fix pages pour inftruire le Public touchant un procès ou une querelle que lui a fufcitée fore injustement [ dit-il ] M. Schroeder Principal du Collège de Delft &: nouvel Editeur de Séneque le Tragique. Ils s'accu- fent l'un l'autre de s'être attaqués réciproquement en matière grave & qui interefle notablement leur réputation. C'eft un détail dans le- quel nous ne pouvons entrer ici Se qu'on peut voir en partie danscette Préface. Nous nous contenterons d'obferver que les injures ne font point épargnées de part ni d'autre ; que M. Duker fi modefte fur ce qui touche fon Ouvrage , n'eftrien moins que modéré quand il s'agit de défendre fon honneur Se de re- poulfer de faillies aceufations ; que les termes les plus outrageans ne lui coûtent rien en beau Latin , Se qu'il a ramafle contre fon adverfaire les plus expreffîfs en ce genre : tels font les noms qu'il lui donne de Tens- brio , d'infulfum caput i de Aiagi- (iellorum alpha , de Balatro , de ma- ledicentijftmus P&dagogus , d'tmpor- tunifftmum animal , de Sycopbanta impudent iffimus , de gloriofus Thra- fo , de nttfutijftmus ardelto , demi- fellus ludimagijier , d'ignavus fan- guis , d'importunijfima bellua i d'im- fius & bipedum nequijftmus , &c. M. Duker dira, fans doute , qu'en fait d'injures il n'en a pas elTuyé de moins violentes de la part de fon Antagonifte ; mais la caufe de ce- lui-ci en devenoit infiniment plus mauvaife , fi notre Editeur ne l'eut point trop imité dans un ftylç qui Décembre. B R E, 1732- 7^ eft h deshonorant pour les gens de Lettres &' h indigne d'une telle proteilion. On peut dire qu'en cet- te occafîon , M. Duker a mal en- tendu fes intérêts , & il faut l'en plaindre. Nous finirons notre extrair pat un détail des principaux faits con- cernant la Vie de Thucydide. Il étoit Athénien , du Bourg d'Ali- mufe,fiisd'Olorus ou d'Orolus(cac le nom de fon père fe trouve écrit de ces deux manières) ikd'Hegch- pyle. Ildefcendoit du fameux Mil- tiade , s'il faut en croire Marcellin, mais cet Ecrivain Grec de la Vie de Thucydide , eft refuté fur ce point par Jean Rutgers dans fes diverfet Leçons. Quoiqu'il en foit, Thucy- dide étoit îftu d'une illuftre famille. Il naquit la feconde année de la 77e Olympiade qui eft la 46 gavant Jefus - Chrift , comme on peut le recueillir du témoignage de Pam- phila dans Aulu-Gelle. Il étoit donc âgé d'environ \6 ans, lorfque dans l'affemblée des Jeux Olympi- ques \ il entendit Hérodote lire publiquement fon Hiftoire ; Se en conçut une (1 vive émulation qu'il en verfa des larmes. Hérodote qui s'en étoit apperçu , en tira l'augure le plus favorable pour l'érudition future du jeune homme , Se en fie compliment à Olorus. Ilrcfulte de ces dates, qu'Hérodote n'avoit que 13 ans de plus que Thucydide. Ce- lui-ci eut pour Maîtres le Philofo- phe Anaxagore Se le Rhéteur Anti- phon ; & la doctrine qu'il puifa chez ce Philofophe taxé d'Athéif- me l'en fie aulfi foupçonner lui-mç-» Xx xx 7? falut avec crainte & avec trem- » blement , redouter la profanation » des Sacremcns & l'abus des gra- » ces , le nombre des Elus eft tret- » petit. Pexfonne ne fçak s'il eft di- ES SÇAVANS, u gne d'amour ou de haine. « Ce font autant de véiitez ; mais le dé- mon fe fert de ces véritcz-là même pour nous perdre , en les détachant des autres véritez, qui doivent les tempérer , 2c tandis que l'efprit de Dieu ne nous reprclente la grandeur de nos péchez qu'en nous taifant en même tems envifager la mifericor- de de Dieu, le Séducteur nous tait une peinture effrayante de nos pé- chez ,. Si. nous cache les richeffes de la bonté de Dieu , pour ne nous lai (Ter voir en lui qu'un Juge infini- ment jufte , infiniment terrible. Mais honore-t-on le Tout-puiflanc par le trouble & par la crainte. Rien qui lui foit plus injurieux que cet efprit; c'eft même le moyen d'at- tirer fur foi les maux que l'on craint. Saint Pierre ne commencc.à s'enfoncer dans les eaux que lorf- qu'il commence à trembler Se à manquer de confiance. Le fécond Chapitre tend à prou- ver que l'efperance eft d'une necef- fité aulli indifpenfable que la foi. L'Auteur obferve qu'une infinité de Chrétiens qui auroient horreur de s'arrêter à des penfées contre la foi . ne craignent pas fouvent de s'arrêter à des penfées qui attaquent ouverte- ment l'efperance. Ils ne penfent pas , dit-il , d'après un Auteur fort célèbre qu'il ne cite point , & dont il employé fouvent les propres pa- roles , ils ne penfent pas que » s'il » nous eft commandé d'aimer Dieh » de tout notre coeur , fans nous bor- » ner volontairement à aucun de- w gré d'amour, il ne l'eft pas moins » d'avoir confiance en Dieu de tout 0ECEM » notre cœur s fans nous borner vo- » lontairement à aucun degré de » confiance. « Nous devons croire par une vive & forte confiance que Dieu nous a aimé d'un amour éter- nel j qu'il nous aime de ce même amour don: il a aimé fon Fils uni- que , Se comme devant être les co- héritiers de fa gloire» Croire fans efperer , c'eft la foi des démons. Ils croyent que J. C. eft venu au monde pour les tour- menter > Se les Chrétiens croyent qu'il y eft venu pour les fauver. Ceux qui ne voyent en Dieu qu'un Juge terrible, & qu'un vangeut inexorable , fubftituent au Dieu véritable une Idole que leur crain- te s'eft forgée. Semblables aux Dif- ciples encore groffiers, la prefence de J. C. qui vient à eux pour les fecourir , les effraye , parce qu'ils le prennent pour un phantôme tout différent de ce qu'il eft. Dans le troifiéme Chapitre on traite des motifs Se des fondemens de l'cfperance chrétienne ; ces mo- tifs font réduits à quatre principaux, la toute-puiffancede Dieu , fa mi- fericorde , Se la vertu infinie de J. C. à quoi on ajoute la connoif- fance même que l'homme a de fes propres miferes. Comme ce dernier motif de confiance ne fe prefente pas naturellement à l'efprit , l'Au- teur remarque que la mifericorde de Dieu fuppofe necefTairement la mifere de l'homme , d'où il con- clut qu'on ne peut bien fentir toute la grandeur de la première , fans connoître en même tems jufqu'où *ya la féconde, C'eft dans cette vue B R E, T752: 7j9 qu'il prétend expofer dans le Cha- pitre quatrième tout ce que la roi apprend à l'homme pour l'humi- lier. Il y fait une peinture très-vive Se très - étendue de la foiblcfTe de l'entendement & de la volonté de l'homme , de la force de (es enne- mis, de la malice des démons , & fur tout de notre indignité a l'égard de la grâce. Enfin pour faire voir la grandeur de nos maux par la. grandeur du remède qui leur étoic neceffaire , il explique les raifons qui ont déterminé Dieu à fe faire homme. » Quelle extrémité de » mifere dans l'homme , s'écrie-t- » il ! quel excès de mifericorde en » Dieu ! que des hommes n'ayenc » pu être délivrés de la malédiction » de Dieu , fans que Dieu fe foit » expofe à la malédiction de tous » les hommes. « Il but avouer que iî on tomboit par hazard fur ce Chapitre fans avoir lu le titre de l'Ouvrage , il ne feroit pas aifé d'en concevoir le deftein. Les Chapitres 6. Se 7. ont quel- que chofe de plus confolant. Si la foi , dit-il , humilie l'homme afin de l'empêcher de tomber dans la préfomption ; d'un autre côté elle le relevé pour l'empêcher de tomber dans le defefpoir. Les motifs de confiance qu'elle lui fournit , com- me il a été dit ci-deffus , font fondés fur la toute-puiffance Se la miferi- corde de Dieu, & fur les mérites de J. C. le Médiateur delà nouvel- le alliance. » Il nous a été donné , » dit-il , pour être le fupplément >» univerfel de tous nos befoins» » J. C. tous fes Mifteres , fa Vie 740 JOURNAL D »> & fa Mort , ne vous ion: pas j> moins propresque s'il n'avoir été » donné qu'à vous feul en particu- » lier. Et l'amour par lequel Dieu » vous le donne , eftaulîî infini que » l'amour par lequel il le donne à » rous. Quelle plus grande affuran- » ce pou voit-il vous donner de vous » pardonner vos péchez , & de » vous donner toutes les grâces ne- » cellaires pour vaincre vos foiblef- » fes , que de vous mettre entre n les mains de la victime qu'il s'eft » choilie lui-même pour vous taire » mifericorde ? La vue de leurs péchez paffés , pourfuit l'Auteur , pourroit - elle troubler la confiance que des motifs fî puilTans doivent infpirer à tous les hommes ? Mais enonr-ils com- mis de plus grands que tant de Saints fur lefquels l'Ecriture &C l'Hiftoire Ecctefiaftique nous ap- prennent que Dieu s'eit plu de fi- gnaler f« mifericorde ? L'efperance des Juftesles plus parfaits n'a-t-elle pas les mêmes fondemens que la nôtre ? d'un côté l'aveu de leur foi- blefTe , de l'autre la confiance en la bonté de Dieu, ont fait toute leur refTource. Plus même le fentiment de nos miferes fera vif, plus nous aurons lieu d'efperer. Aimons donc , non pas nos foiblefîes , mais la con- rtoijfjnce Ô" la conviction de ces foiblejfes. C'eft être déjà bien riche que de connoître fa pauvreté. Pre- nons carde de confondre l'efpric d'humilité avec l'efpric de pufillani- mité cv de défiance ; le premier porte à Dieu 6v à chercher rous les moyens de lui plaire ; le fécond ES SÇAVANS; nous attache à nous-mêmes, nous jette dans l'inaction, & nous dé- goûte de la pieté. Le feptipme Chapitre roule fur les avantages de l'efperance. L'Au- teur y montre qu'elle eft par elle- même agréable à Dieu , qu'elle obtient tout de lui , 8c ne trompe perfonne. Au refte , il n'y fait pref- que qu'étendre &C prouver davan- tage plufieurs principes qu'il avoit déjà rapporrés dans dirlerens endroits de ceTraité.ll s'objecte que plufieurs ne perfevereront point dans Iajufti- ce Chrétienne; ceux-là fans doute, dira-t-on , feront trompés & con- fondus. Mais il répond que ce font eux-mêmes qui fe font trompés , Se non pas le Seigneur qui les a trom- pés ; ils ne fe trouvent confondus, que parce qu'ils ont celle d'efperer ; s'ils avoient continué de mettre leur confiance en Dieu , il les auroit rendu victorieux de leurs foibleffes, ex de la force de leurs ennemis. Mais notre Auteur appréhendant toujours qu'on ne s'occupe tclle- ment.des vérirez confolantcs qu'on ne détourne fon efprit de la confi- deration des vérirez terribles , nous offre dans le huitième Chapitre les moyens de nous en fervir pour ra- nimer notre confiance. Comme Dieu nous oblige , dit-il , de croi- re les unes & les autres ', elles doi- vent donc être la règle de notre conduite, & quand nous ne trou- verions point le moyen de les ac- corder , nous ne devons pas douter qu'elles ne s'allient parfaitement enrr'elles. En vain en ferions- nous inftruits , fi nous ne trouvions le D E C E M moyen de les réunir. C'eft ce que l'Auteur efiaye de faire dans le Chapitre huitième. » Il faut, dit- » il j regarder la crainte comme un » hommage que nous rendons à t> Dieu , &£ comme une partie de i» notre pénitence. Vivre fans au- » cune crainte des juj^emens de » Dieu , c'eft non feulement le de - a> shonorer, mais c'eft infulterà fa » juftice , à fa puiffance , & à fa » fainteté , &c irriter fa colère. » Craindre fans efpcref , c'eft en- as core le deshonorer , parce que )> c'eft le craindre ^ comme on » craint un Tyran , & neconfide- » rer en lui qu'une juftice fans bon- 3> té Si fans mifericorde , &c violei n un de fes plus grands préceptes -â » par lequel il nous commande *> formellement d'efpcrer en lui. a> Craindre & efperer , c'eft vrai- » ment l'honorer ; parce que c'eft i> le regarder comme l'être fouve- » rainementjufte &mifericordieux» » le Dieu de fainteté & le Père des » mifericordes. La crainte doit n donc faire une partie de notre » fureté. Il convient ncanmoiry qu'il eft des occafions où l'on doit moins s'occuper de la crainte ; tels font les tems d'oblcurité , de foibleffe , d'é- preuves; à la fin de la vie, & fur tout aux approches de la mort. » C'eft alors qu'on doit s'entretenir a> principalement ou même unique- an ment de tout ce qui peut (oûtenir » la confiance & l'amour, &c éloi- s> gner de fon efprit tous les objets «de crainte. Il faut alors , conti- aonue-t-il } imiter ceux qui étant B RE, 1752. 741 »> obligés de marcher fur les bords » d'un précipice affreux , en dérour- » nent les yeux de panchent du côté » oppofé , de peur que la feule vue » du péril qu'ils courent ne leur » caufe quelque éblouiifement &C » ne les y entraîne. « La crainte n'eft commandée qu'autant qu'elle peut fervir à l'amour , & à la con- fiance. Il apprend enfuite aux Chrétiens imparfaits non feulement à ne point craindre la mort , mais même à la defirer. Dans le neuvième Chapitre on fait voir qu'il n'en cft pas des re> chûtes fréquentes dans les péchez véniels, comme des rechutes dans les péchez mortels. Un vrai Chié- tien doit à la vérité avoir une gran- de horreur des pi us légères fautes , prendre toutes les précautions poifi- bles pour les éviter , les expier par une pénitence continuelle, puif.jue tous les péchez véniels ont, dit-il, été mortels à J. C. & que tous ont contribué à fa mort.M.ns après tour, ces fortes de rechûtes ne doivent point affoiblir la confiance qu'on doit avoir en Dieu,» un horrme qui » eft bien perfuadé de fa foibleffe >» n'eft point furpris de fes chûtes. » Il y a plutôt lieu de s'étonner » qu'étant aufli foibles que nous » fommes , nous ne tombions à » chaque pas , & que nous ne faf- » fions des chûtes plus confidera- » blés. « Une ame véritablement humble hait les péchez où elle tombe , parce qu'ils font contraires à la vérité & à la juftice de Dieu. Mais elle aime l'humiliation qui lui en revient, parce que la véiicé Se 742 JOURNAL D la juftice divine demandent qu'elle profite de cette humiliation pour les expier , &c pour obtenir la grâce de s'en iclever. Comme il efl: de foi que les Juftes ne peuvent pas avec les fecours ordinaires de la grâce éviter tous les péchez véniels, la refolution de n'en pas commet- tre doit être plutôt un delTein (meere de travailler à les éviter , qu'une cf- perance de les éviter abfolument. On prouve dans le neuvième Chapitre que l'efperance doit être ferme S: inébranlable au milieu des plus grands périls. Cette vérité eit appuyée par un grand nombre de partages de l'Ecriture Sainte que l'Auteur joint enfemble , & dont il forme un texte îuivi ; c'eft dans ces fortes d'endroits, qu'il touche, qu'il eft rempli d'onèfion , & qu'on le trouvera véritablement confolant. Puis revenant aux divers caractères de l'efperance Chrétienne , il aver- tit qu'elle ne doit point aller jufqu'à la certitude totale 6c abfolument infaillible qu'on eft juftifié, 5c du nombre des Prédeftinez , ce qui fe- roit l'erreur des Calviniftes ; mai» il ajoute que cette efperance ne doit pas cependant nous laifler dans le doute , c'eft-à-dire dans une égale incertitude fur notre béatitude , ou fur notre damnation. Seroit-il poffi- ble alors , dit-il, que l'efperance , comme on l'a vu en tant d'endroits, fut une fource de paix , de confola- tion &Z de force ? Le doute fi on re- cevra les moyens neceffaires au [al ut ' oh fi on ne les recevra point , iî on fera fauve ou damné , feroit une fource continuelle d'inquiétudes. ES SÇAVANS, Cependant il feroit réellement im- polfiblede les calmer , fi l'cfpet an- ce étoit compatible avec le doute volontaire de fon falut éternel. Il apporte enfuitcplufieurs exem- ples cv quelques comparaifons tirées de l'Ecriture pour montrer quelle doit être la force & l'immobilité de l'efperance; mais il indfte princi- palement fur les promeffes que Dieu a faites aux Elus , de les ren- dre victorieux de tout ce qui pour- roit s'oppofer à leur falut , & de leur donner la vie éternelle , & veut qu'à l'imitation des Apôtres qui ap« pliquoient à tous les Fidèles les pro- meffes faites aux Elus , tous les Chrétiens s'en fafTent auffi l'appli- cation à eux - mêmes , & qu'ils ayent une ferme confiance qu'ils font du nombre de ceux à qui la vie éternelle & la fuite des grâces neceffaires pour y arriver eft promi- (e. Il faut donc , dit - il ailleurs ' s'appliquer toutes les promeffes de Dieu , & concevoir que ce n'eft pas aux hommes en général, mais que c'eft à nous en particulier que ces promeffes ont été faites. Parmi ces promeffec'iue l'Auteur fuppofe n'ê- tre faites qu'aux Elus, & que l'A- pôtre S. Paul applique cependant à tous les Fidèles , » il rapporte cette » promelfe de Dieu à ion ancien m peuple , je ne vous laifferai point » & je ne vous abandonnerai point ; » & cette autre du Prophète , le » Seigneur efl mon fecours , je ne » craindrai point ce que Us hommes n pourront me faire. L'Apôtre Saint » Jean applique de même , ajoûte- » t-il , à tous les Fidèles la promef- » fc D E C E M •» fe de la vie érernelle , & veur que ••chacun s'en fade l'application , Se » que cette vue les rempltlTe de » joye. « D'où il conclut qu'il eft non feulement permis , mais même commandé à tous d'efperer qu'ils font du nombre des Elus. Il reconnoît qu'il n'eft pas ne- eeflaire d'avoir des difpofitions bien parfaites pour s'appliquer les promelfes qui regardent les Elus. » Ce ne font pas , dit-il, ces bori- » nés difpofitions qui précèdent Se » qui forment l'efperance d'avoir w part aux promefTes des Elus. C'eft j> au contraire cette efperance qui y> précède & qui produit ces bonnes » difpofitions , depuis les degrez les " plus imparfaits jufqu'aux plus * parfaits. Le but de l'Auteur dans le der- nier Chapitre eft: de faire voir que l'efperance remplit l'ame de joye. Se que cette joye s'allie parfaite- ment avec l'efpric de componction Se de gémiflement Ci recommandé aux Chrétiens , leurs larmes, Se leurs gémilTemens font même pour eux une fource de confolation. Puifque c'eft la marque la plus affii- rée qu'ils font animés du S. Efprit qui produit en eux ces gémilTemens Se cette fainte douleur. Toute joye qui n'a point pour fondement l'ef- B Tk E, T732." 745 perance Chrétienne eft: fauiïe , Se ne peut rendre l'ame tranquille ; la vraye joye vient du vrai bien de l'ame raifonnable , ou de l'efperan- ce de pofleder ce vrai bien. Or Dieu feul cil le vrai bien de l'ame railon- nable , il eft donc le feul par con- fequent qui foit capable de lui don- ner une véritable joye. D'où il eft aifé de voir que l'ef- perance rend l'ame Chrétienne heurcife par avance , puisqu'elle ne defire rien , qu'elle ne commen- ce de pofleder d:ns le moment mê- me qu'elle commence à le délirer. La pauvreté , la douleur , en urt mot tout ce qui affligé les autres hommes contribue à augmenter la joye du vrai Chrétien , parce que toutes ces épreuves lui acquièrent un droit nouveau & plus affiné i l'héritage eclefte. D'où l'Auteur ti- re cette confequence que comme les Chrétiens fans l'efperance d'une autre vie feroient les plus malheu- reux de tous les hommes, auifi avec elle font-ils véritablement heureux, puifque les chofes mêmes qui pa- roiflent les plus dures Se les plus dé- fagréables, contribuent , félon les paroles de J. C. à augmenter leur recompenfe , Se par cette rai!on de- viennent pourcux un fujet de joye Se de confolation, Décembre,, Tf7Z 74* JOURNAL DES SÇAVANS, QU/ESTIONES MEDICjE DUODECIM AB 1LLUSTRISSIMIS Viris R. D. Fiancifco Chicoincau, Canccllario amplilfimo, Joanne Bczac Decano venerando , PetroRideux, Antonio M agnol , Hcnrico Haguenbs, Jacobo Lazerme, & Gerardo Fitz-Gerald , Régis Confi- lianis , Medicis , Se Profelforibus meritilTimis , propofitxin Aula Epifr copali Monfpclicnfi , coram illufttiiiîmo ac Reverendiffimo D. D» Carolo Joachimo Colbcrr de Croifly , Monfpelienfium Epifcopo. Pro Regia Cathedra vacante per abdicationem R. D. Joannis Aftrac , in. Collegio Regio Parifienfi Profciïbris digniffimi , quas , Deo duce 5c aufpice Deiparâ , propugnabit in Auguftiilimo Monfpelienfi Apollinis Fano , triduo integro , manè&ferè, diebus 9. 10. & 11. menlis Ja- nuarii annil.732. Hugo GourraigneD. M. Monfpelienfis. Monfpelii, apud Joanncm Martel, Univerfitacis Medicina: Typograr phum. 1731. C'cft-à-dire : Douze Quefiions de Médecine que Meffleurs Chicoinean Ee- zac , Hideux , Magnos , Huguenot , Lazerme } & Fitz Gerald , ont propofées dam la Salle Epifcopale de Montpellier, Pour la Chaire Royale de Médecine vacante par /' 'abdication de M. Ajlmcy êcc. le [quelles Propo fit ions ont été [obtenues k Montpellier pendant trois jours yfçavoir , le 9. le io. & le 1 1. de Juin de cette année. 1752. P*r Hugues Gourraigne , DoBeur en Médecine de Montpelier, A Montpelier, chez Jean Martel, Imprimeur de l'Univerlké de Méde- cine. 1732. Brochure i»-4°. pages 24. LE S douze Queftions dont il s'agit , lefquelles ont été pro- pofées par pluhcurs illiiftres Méde- cins de Montpellier, roulent fur differens fujets. Ces Meilleurs de- mandera dans la première , fi la Muliquc eft l'unique remède à la morfure de la Tarentule , & on conclut pour l'affirmative : ils demandent dans la féconde , fi l'i- magination bleffée d'une femme enceinte peut être la caufe d'un monfire , Si on conclut pour la négative : dans la rroineme, fi l'o- pium cft bon pour les Rhumatif- mes , & on conclut affirmative- ment : le point de la quatriém^ef^ fi les apéritifs conviennent dans les fchirres de la ratte ; & la condu- fion , qu'ils y conviennent. Il s'agit dans la cinquième de fçavoir , iî pour guérir l'apoplexie , les nar- cotiques font quelquefois à préfères à tous les autres remèdes , & on foû- tient que non : dans la fixiéme , il la fièvre fcarlatine eft différente de la petite vérole , 5t fi eilc demande un autre traitement & on foû- tient qu'elles font femblables, 3£ qu'il taur les traiter l'une & l'autre de la même manière : dans la fep» tiéme , fi on peut employer les fu- dorifiques & les diaphoreriques pour gueru l'œdème , & on le dé<* D E C E M clare pour l'affirmative : dans la huitième , fi le carboucle & la gan- grené exigent le même traitement , ôc on conclud que la cure de l'un & de l'autre doit être la même : dans la neuvième , fi les fomenta- tions d'eau marine conviennent auxmorfures des animaux attaqués de rage , & on tient pour l'affir- mative : dans la dixième, fi pour îa guerifon des maladies de la peau on peut fe fervir de remèdes exter- nes qui repouffent l'humeur au dedans , ce qu'on prouve ne pas convenir, ou s'il faut en venir aux remèdes internes , ce qu'on fait voir être très à propos , pourvu que les Médecins examinent fi ces mala- dies de la peau font éritiques ou fympromatiques , car dans le pre- mier cas on veut qu'ils ayent feule- ment foin de ne point détourner la nature , Se dans le fécond , qu'ils employent les remèdes internes qui pcuventrendreles humeurs fluides, & rétablir la rranfpiration arrêtée , tels que font la chair de vipère , les écreviffes, le lait , les diaphoni- ques fur tout , & les fudorifiques : la onzième Queftion eft fi l'appétit déréglé pour certaines chofes abfur- des , comme pour du plâtre & au- tres chofes femblables , fe guérit plus facilement par la variété des objets qui peuvent corriger l'imagi- nation des perfonnes atteintes de ce mal , que par les médicamens , & on conclud pour le premier : la douzième enfin , eft fi dans les ma- ladies foporeufes lorfqu'il y fur- vient quelque fièvre maligne , les veficatoires font préférables aux B R E , 1732. 74; émetiques , & on conclud affirma- tivement. Nous ne fçaurions donner l'ex- trait de tous ces articles, nous nous bornerons à celui où l'on foûtienc que l'imagination des mères ne fçauroit être la caufe des monftres. On pofe d'abord pour principe , dans la queftion dont il s'agit, que c'eft une loi généralement établie par l'Auteur de la nature , que cha- que animal produifefon femblable; en forte que fi un fœtus vient au monde avec une difformité qui pa- roifTe contraire à cette loi , on doit le regarder comme un monftre. De cette propofition on vient à la di- ftin&ion des monftres. On remarque que , félon le vul- gaire , il y en a de deux fortes : fça- voir, i°. des enfans qui ont la fi- gure de Lions , d'Elephans , de chiens, de poifTons , de grenouilles, de ferpens , &c. i°. D'autres qui fans avoir une autre figure que celle de leur efpece, naiffent les uns avec plus ou moins de deux pieds, de deux mains, &c. les autres avec deux têtes, les autres avec deux corps joints enfemble , &c. On admet ici comme indubita- ble, cette féconde forte de monftre, & on traite l'autre de fidion , la raifon qu'on allègue pour rejetter celle-là , eft que chaque animal a en foi de quoi reproduire d'autres animaux de fon efpece , que ce qu'il renferme pour cela eft un ger- me dont la forme fpécifique que Dieu y a mife eft invariable & ne dépend pour le fond , ni du niou- Y y y y ij 74* JOURNAL D nt , ni de l'imagination , mais peut feulement être altérée en cho- ies accidentelles , (ans jamais que l'cfpccc contenue dans le germe puiffe être changée en une autre, ce qui ne fe pourroit taire , que le «-^rme même ne devînt un autre germe : chofe abfolument impollî- ble , quelque force qu'on fuppofe dans l'imagination d'une femme gtoffe. On joint une autre raifon à celle- là , qui eft que li l'imagination des mères avoir le pouvoir que quel- ques perfonnes lui attribuent ici fur la foi de quelques Hiftoires, on ne verroit pas tant de mères après avoir ardemment fouhaité des en- fans mâles , n'avoir néanmoins quoiqu'il n'ait jamais été imprimé , plufieurs Auteurs en ont fait mention fous le nom d'An- nales de Caffaro , parce qu'il fut le premier qui les commença. Il nous apprend lui-même qu'il avoit été Conful de fa R. P. & qu'il en com- mandoit les troupes à la fameufe prife de Jerufalem. Après fa mort ," lesdifferens Auteurs qui ont conti- nué ces Annales , paroiffent l'avoir fait par ordre de la R. P. Du moins les 7 , 8 & 9e Livres portent-ils le nom de quatre differens Nobles, deux Jurifconfultes , Se deux Laï- ques , qui le difent nommés par un Décret public pour recueillir les évenemens remarquables arrivés de leur tems. Jacques Doria commen- D E C E M ce feul le 10e Livre fans marquer par quelle raifon on ne lui avoit alTocié perfonne dans ce travail, mais pour ïuppléer, dit-il , à la Chronique de CarTaro qui ne commence l'Hi- ftoire de Gênes qu'au tems où il vi- voit , Doria remonte jufqu'ct l'ori- gine de cette Ville , & débite beau- coup de fables, tant fur l'étymolo- gie de fon nom que fur fes pre- miers Fondateurs , il reprend en- fuice ces Annales , où ceux qui l'a voient précédé , les avoit laiiïces , & il les conduit jufqu'en i294.il n'eut point de Succeffeur. On y trouve une fuite exacte desConfuls & des Podeftats de Gènes , & un détail quelquefois afTez étendu de ce qui s'eft pallé fous leur admini- ftration* Mais on fent bien que des Auteurs qui écrivoient fousles yeux de la R. P. ont évité avec grand foin tout ce qui auroit pu les blelfer, on y verra cependant plufieurs faits importans , &c qui jufqu'alors avoient été enfevelis dans un pro- fond filcncc. 6°. La Relation de la Conquête de MefTîne en 1 1 6b. fur lesSarazins par le Comte Roger Normand. La ptife de cette Ville le rendit bien- tôt maître de toute l'Iflej & il en fut le premier Roi. Cette relation qui a été écrire pa; un Auteur Ano- nyme , mais contemporain , avoit déjà été donnée par M. Baluze dans le fîxîéme Tome de fes Mifcella- ïiées ; on y a joint deux Diplômes en faveur de la Ville de Meffine , l'un de Roger & l'autre de Guil- laume , tous deux Rois de Sicile , le premier, fixe ce que la Ville de Mef: B R E , 1752; 74P fine &; fon territoire dévoient payer au Roi } ex il ajoute qu'ils demeure- ront affranchis de toutes impofitions à perpétuité, quand même le Roi pour quelque raifon qu'on pût allé- guer , voulût demander ou même contraindre de payer davantage, etiamfi Rex peteret aut cateros coge~ ret pro re quant acunque necejfaria. 70. Les actions de l'Empereur Frideric I. furnommé Barbcroufle par Otton Evêque de FrifingueôC par Radevie fon Continuateur. Ces deux Auteurs font regardés avec juftice comme les meilleurs & les plus judicieux Hiftoriens de leur tems. Le premier étoit neveu de l'Empereur même dont il écrie l'Hiftoire , & il nous apprend qu'il l'avoit entreprife à fa prière. Nous ne fçavons fi ^£neas-Sylvius qui nous affure avant qu'il fût Pape que les liaifons du fang ni de l'inté- rêt n'a voient altéré en rien la fince- rité d'Otton , eut penfé de même depuis qu'il fut élevé fur le S. Siège» Il faut avouer qu'il cft affez difficile de fe faire une véritable idée de Fri- deric ; les Allemands le donnent comme un des plus grands Princes qui ait porté la Couronne Impéria- le , & les Italiens le reprefentenc comme un Tyran fans foi &c fans Religion. M. Muratori croit qu'il y auroit peut-être plus d'équité à le regarder comme un Prince com- pofé de grandes vertus , & de grands vices , mélange qui entre afTez fouvent dans la compofition des plus célèbres Héros. Otton de Frifingue n'a donné que les deux premiers Livres de fon Hiftoke» 7yo JOURNAL D Ce Prélat croit très-fçavant , fur tou: dans la Logique ik dans la Dialectique ; mais les fréquen- tes digreffions qu'il fait fur ces matières interrompent fouvent le fil de fi narration. Radcvic fon Chapelain £c Chanoine deFrihn- guequi l'a continuée a évité ce dé- faut ; maisils'eft contenté d'y ajou- ter deux autres Livres, & n'a fuivi fon Hiftoire que jufqu'en n£o. parce qu'il ne vouloir pas , dit-il , que le nombre des Livres palTa ce- lui des Evangiles. Jean Cufpinien fut le premier qui en 1 51 5. les mit en lumière. M. Muratori les a cor- rigés avec beaucoup d'exactitude fur les Manufcrits de la Biliothéquc de l'Empereur, auffi bien que la Chronique fuivante qui avoitdéja paru par les foins de Chrétien Ur- ftiiuis. C'eft la neuvième Pièce de ce Recueil , elle eft d'Orton Abbé ou Moine de S. Blaife , elle fert com- me d'Appendice à l'Hiftoire précé- dente Cv va jufqu'à l'an 1209. 8°. Une Lettre de Burchard No- taire de l'Empereur à Nicolas Ab- bé de Sigeberg , contenant la ruine de la Ville de Milan. Cette trifte fceneàlaquelleBurchard furprefent arriva en 11 £2. & rendit Frideric extrêmement odieux dans toute l'Italie. Quoique cette Pièce ait dé- jà été imprimée deux fois , M. Mu- ratori a cru devoir lui donner enco- re ici place , afin que les Lecteurs trouvaient ici de fuite tout ce qui regarde les expéditions de Frideric en Italie. 3°. La Relation de la levée du ES SÇAVANS,' Sage d'Ancone en 1 171. écrite pa» Maître Bor, compagnon Florentin^ cV Profelleur ci'Humanitez , cv de Grammaire a Bologne. li fe déchaî- ne contre l'Archevêque de Mayen- ce qui commandoit les Troupes que Frideric I. dont îlétoit Chancelier, avoit envoyées à cette expédition» On eft redevable de cette Relation aux recherches de M. Argelati , le ftyle en eft très-dur , 6c donne bien mauvaife opinion d'un fiéclc où un tel Auteur étoit regardé comme un Ecrivain poli. 10. Une Hiftoire de Lodi par Othon - Morena , continuée pat Acerbus-Morena fon fils. Le der- nier fut établi Podeftat de Lcdi mê- me par Frideric I. On y trouve ce que cet Empereur fit de plus confi- derable en Italie depuis x 1 5 3 . juf» qu'en 116 S. comme ces deux Hifto- riens étoient attachés à Frideric, 8c qu'ils avoient l'un &: l'autre exercé fous lui des emplois confiderabics , M. Sallï qui eft l'Editeur de cette Hiftoire , avertit qu'il faut les lire avec précaution. Fcelix Olnis fut le premier qui la publia euié^?. mais il avoiie lui-même qu'il tut oblige de fe fervir d'un Manufcrit plein de fautes & de lacunes. M. de Lei- bnitz l'a inférée depuis dans fon Hiftoire de la Maifon de Brunfrik fans y rien changer faute de Ma- nufcrits plus correcls. M. Saflîa été affez heureux pour en trouver deux dans la Bibliothèque Ambroifienne, Se fi differens de celui dont Olîus avoit eu corn munication , qu'il eut été impouible de corriger l'un par les autres fans jetter les Lecteurs dan$ D E C E M dans un labyrinthe d'où ils n'euf- fent pu fortir. D'un autre côté M. Saiîi craignant qu'on ne l'accullt de vouloir donner trop d'autorité à fes Manufcrirs a jugé à propos de faire imprimer à côté de l'ancienne édi^ tion d'Ofius , celle qu'il prefente aujourd'hui. Il a éclairci pluficurs endroits de cette Hiftoire par fes propres Notes & par celles d'un IçavantBenedi&in de la Congréga- tion du Mont-Ca(Tîn qui par mo- deftie n'a point voulu être nommé. ii. Un Commentaire de Sire Raul fur les expéditions de Fride- ric I. en Italie , imprimé pour la première fois fur un Manufcrit de la Bibliothèque des Jefuites de Milan. Il eft inconteftable que l'Auteur étoit Citoyen de Milan , le qu'il écrit comme témoin ocu- laire. Cependant on ne peut fçavoir s'il étoit véritablement de cette Ville ; ce nom de Raul eft un nom François qu'on rend ordinairement par celui de Radulphe , mais on ne lailTe pas de trouver quelques Ita- liens qui l'ont porté. Le mot de Sire embarraffe davantage > il eft purement François, & on ne voit point qu'aucun Italien ait jamais pris ce titre à moins d'y joindre le nom d'un Marquifat ou de quelque HE, 173 s. 7;r terre confiderable , comme il Sire di VaronçA } di1\{arbonna •> ainfi , difons-nous en François le Stre de Coucy. Quoiqu'il en foit , M. Muratori fe contentant de confer- ver ce nom de Sire Raul à la tête de l'Ouvrage , nous prefente toujours cet Aureur fous le nom de Radul- phe de Milan. Après avoir jufqif ici donné tant d'Hiftoriens que leur Patrie ou leurs intérêts perfonnels attachoient à Frideric , il s'applau- dit avec raifon d'en avoir du moins trouvé un qui foûtienne la caufe des Italiens ; car , dit-il , fi dans les affaires qui regardent les particu- liers j on ne peut porter un juge» ment fur , lorfqu'on n'a entendu qu'une des deux Parties , à plus forte raifon, eft-on encore moins en état de le faire dans les démêlez qui arrivent entre les Princes & les Etats qui leur font oppofés. Du re- fte il nous affure que la narration de Radulphe paroît exacte Se fincere» elle commence à l'an 115 4. & va au moins jufqu'à l'an 1177. otl trouve enfuite dans le Manufcrit le récit de la dernière expédition de Frideric-Barberouffe en Orient. On laiffe aux Sçavans à juger fi ce morceau doit être attribué au même Auteur, Dctcmbrt. Zzzz 75; JOURNAL DES SÇAVANS, ORDONNANCES DES ROIS DE FRANCE DE LA troifiime Race , recueillie', par ordre Chronologique. Troi finie Volume f contenant les Ordonnances du, Roi Jean depuis le commencement de l'an— nie 1355. Ju/qu'À fa Vttri , arrivée le S. Avril 1^4. avec un Sup- plin.em pour tomes les ar.nies de fon règne. Par M. Secousse, an- $ten Avocat au Parlement , &Affocié a l'Académie Royale des Infcrip- tious & Belles-Lettres. A Paris , de l'Imprimerie Royale. I732. in-foL pp. 6 94. fans la Préface cV les Tables qui font très-amples. EN rendant compte du fécond Volume de cette grande Com- pilation , nous avons vu que M. Seconde qui avoic été chargé par ordre du Roi de continuer cet Ou- vrage après la mort de M. de Lau- rieie , s'étoit engagé de donner un nouveau Volume au Public avec le plus de diligence qu'il lui feroit poffible. L'exactitude avec laquelle il a exécuté fa promefle , & la ma- nière dont il a d'ailleurs fatisfait à fes engagemens , fait efperer au Pu- blic qu'il verra avancer prompte- ment une Compilation il neceiïaire pour la Jurifprudence & pour l'Hi- (toire. Comme M. Secoulîe a fuivi dans ce Volume , qu'il appelle les prémices de fon travail fur les Or- donnances , le plan que M. de Lau- riere s'étoit preferit , & que nous l'avons expliqué en parlant du pre- mier Volume , il n'eft pas necefTai- re que nous entrions de nouveau dans ce détail. Nous obferverons feulement qu'outre les Notes qui font au bas des pages comme dans les deux Volumes publiés par M. de Lauriere , M. SecoufTe a chargé les marges de ce Volume d'un grand nombre de petites Notes. Les unes ae jfoac que des xenvois à d'autres Ordonnances , d'autres fer- vent à l'intelligence du Texte , il y en a qui contiennent l'explication des vieux mots François & plu-' ficurs où M. SecoufTe a mis les mots qu'il a cru manquer dans le Texte , & la refUtution de ceux qui lui ont paru avoir été corrompus par 1a né- gligence ou par l'ignorance des Copiftcs. Par là M. SecouiTe repre- fente fidèlement dans l'impreliion les manuferits qu'il a fait copier, & il fait connoître en même tems les corrections qu'il croie qu'on pourrait y faire. M.Secouffe donne dans laPréface des obfervations fur quelques ma- tières importantes qui font l'objet du plus grand nombre des Ordon- nances comprifes dans ce troifieme Volume. Elles font divifées en cinq articles qui regardent, la datte des Ordonnances , les guerres privées „ l'arriére -ban , les alTemblées des Etats tk les Mariages. Par rapport à la datre des Ordon- nances , notre Auteur obferve d'a- bord qu'il y en a plufieurs à la tête defquelles fe trouve le nom du Roi Jean , & qui font dattées de Paris , dans le tems dans lequel il efl cer- tain d'ailLeuis que ce Roi étoit ab- D E C E M fent, il y en a d'autres au nom du Roi Jean & qui font aulïî dattées de Paris dans le tems que ce Prince étoit ptifonnieràBourdeaux ou en Angleterre. Faut-il par cette rai— fon re|etter ces Ordonnances comme fuppofées î C'eft un parti que notre Auteur ne craint point qu'on puiffe prendre , parce qu'il n'efl pas poffible de prefumer , fur tout par rapport aux loix faites pour tout le Royaume , que quelqu'un Ait eu intérêt de fuppofer une Loi qui ne foit point émanée du Prince, affezde témérité pour ofer l'entre- prendre , Si les facilitez neceffaires pour la faire inicrire dans les Regi- ftres publics. Dans cet état , il ne paroît point qu'il y ait d'autre parti à prendre que celui d'avoir recours à des con- jectures pour lever ces contradic- tions apparentes par rapport à la datte entre différentes pièces au- thentiques & des Monumens Hi- {toriques dont l'authenticité ne peut «tre conteftee. M. Secouffeen pro- pofe de três-ingénieufes , aufquelles il joint des Textes d'ordonnances ■oui leur donnenr une nouvelle for- me. Voici là-deffus fon Syftême. Il y avoit fous le règne du Roi Jean quatre Cours ou Jurifdictions principales. LeConfeil chargé d'ex- pédier les affaires du gouvernement , où les Ordonnances étoient exami- nées avant que d'être fcellées , les Requêtes de l'Hôtel , où l'on ex- pedioitdes Lettres furies Requêtes des particuliers qui étoient enfuitc portées au Confeil , le Parlement , »ù étoient jugées les affaires de la B R E, 17 $ 2. i$î Juftice&la Chambre des Co::::irci qui connoiifoit des affaires de Fi- nance. Quelquefois le Confeil du Roi fe tenoit au Parlement , com- me on le voit à la fin d'une Ordon- nance du 19. Novembre 13 £3. &c quelquefois à la Chambre des Comptes. Quand les Lettres avoient paffé au Confeil affcmblc fcul , ou avec le Parlement & avec la Chambre des Comptes , on les envoyoit au Chancelier qui de- voit les examiner & les corriger avant que de les fceller , 5c qui les faifoit refaire quand on avoit manqué à certaines formalitez. Ces Lettres étoient dattées du jour qu'elles étoient fcellées & comme le fceau n'y étoit point toujours mis le jour qu'elles avoient été paffées au Confeil, elles pou- voient fe trouver dattées d'un jour où le Roi &z fon Confeil ne fe trou- voient plus dans le lieu où il étoit lorfque l'Ordonnance avoit été ar- rêtée au Confeil. Quelquefois le Roi Jean laiffoit à Paris une partie de fon Confeil , 8c notre Auteur conjecture qu'en ce cas le Roi laiffoit à cette partie de fon Confeil le droit de pafTer des OrdonnanceSjde mettre fon nom à la tête & de les faire fceller du fceau du Châtelet , & en ce cas l'ordon- nance pouvoit être dattée de Paris, quoique le Roi ne fut point en cet- te Ville. Lorfqu'rl y avoit un changement de règne dans le tems que les Let- tres étoient dattées , il faloit les re- faire pour mettre le nom du Roi à la rête. Il en étoit de même pal Z z z z ij 7j4 JOURNAL D rapport aux Régens il N:^r on mec- toit le nom à la tête des Ordonnan- ces, mais notre Aureur per.fe que dans le grand nombre des L crtres qui ont été fccllées du teins de la Régence de Charles pendant La ptiïon du Roi Jean , & qui avoienc été arrêtées au Confeil avant la pri- fon du Roi , il s'en fera gliiTées quelques-unes aux fceaux que les Secrétaires auront négligé de refai- re. Sur les Lettres expédiées au nom du Régent , M. SecoulTe ohferve qu'on mit à la tête des Lettres le nom de Charles fils aîné du Roi Jean , foir lorfque ce Prince eut la qualité de Lieutenant du Roi , foit lorfqu'il eut celle de Régent. Il re- levé par cette obfervation une faute de François Duchefne ; dans Ion Hiftoire des Chanceliers de France, où il dit que les Lettres furent ex- pédiées au nom du Roi Jean juf- qu'à ce que Charles ion fils eut pris le titre de Régent. Duchefne cite pour prouver ce tait des Lettres du rj. Juin 1357. M. Sccouffe a trouvé ces Lettres dans le Mémorial C. de la Chambre des Comptes de Paris , où elles font intitulées , Charles Lieutenant } Sec. Depuis la captivité du Roi Jean jufqu'au commencement de la Régence de fon fils les Lettres Royaux furent fcellées du fceau du Châtelet dont la garde fut commife à Foulques de Bardouil, qui avoit déjà eu cette commiiTion fous le règne de Philippe de Val- lois pendant un voyage du Chance- lier , & à l'abfence du grand, fcel* ES S ÇA VANS, Ce que notre Auteur juftifie par une Pièce qu'il a tirée du fécond Volume de la copie des Regilhes du Parlement de M. Ogier Préli- dent aux Requêtes du Palais. C'cft une CommiiTion de Philippe de Valois adrclîée à Pierre Hangeft , & à Foulques- Bardouil , pour fceller en l'abfence du Chancelier du (cel du Châtelet, & contre- fceller du fignet du Parlement les Lettres qui leur feront envoyées. Cette Commiilîon eft du 4. Janvier 1348. Guillaume Marpandi dépo- fitaire du fignet du Parlement le remit à Pierre d'Hangeftc & à Foulques - Bardouil , par ordre de Meilleurs du Parlement le Vendre- di d'après l'Epiphanie 154S. Le quatrième article qui contient des recherches fur les Etats Géné- raux & en particulier fur ceux qui ont été tenus fous le règne du Roi Jean mérite une attention par- ticulière de la part des perfonnes qui font curieufes du détail de no- tre Hiftoire èv de l'ancienne forme du gouvernement du Royaume. Notre Auteur y reprend année par' année l'Hifïoire de chacune de ces affemblées d'Etat foit générales foit particulières dont il a eu connoif- fance , foit par les Ordonnances , foit par les Hiftoriens contempo- rains, foit par d'autres Monumens qui ne font confervés qu'en manuf- crit dans les Bibliothèques de Paris. Il y explique comment ces af- femblées étoient convoquées , il fait connoître les Commifîaires qui y affiftoient au nom du Roi , la ma- nière dont les Députez donnoiens DEC E'M îeur avis , comme on y regloit les fjbiïdes qui dévoient erre donnés au Roi , & la manière dont ils le- roient levés, &c de quelle manière dévoient être rédigés les cahiers que ies Etats prefentoientau Roi , & les Ordonnances que ie Roi faifoit ex- pédier fur les reprefentations des Etats. Ce morceau de la Préface fera bien connoître aux Lecteurs- combien l'Hiftoire eft necciraire pour l'intelligence des Ordonnan- ces , &c avec combien de foin M.Se- coufle a étudié l'Hiftoire duRoi Jean pour échneir par fes Notes les Or- donnances de ce Prince. Le fruit de ces recherches fera une Hiftoire du règne du Roi Jean , qu'il s'engage de donner au public dans quelques années. On voie déjà par ces Notes BRE, 1732; 75" >* qu'il y aura à relever un grand nom- bre de fautes échappées à nos Hifto- rtens modernes. Notre Auteur a trouvé , à ce qu'il allure y tant de fautes dans ce que dit M. de Bou- lainvilliers fur ies Etats de 1 3 5 5 . &c 13 56. tant d'inexactitudes dans les faits, &tant de conjectures hazar- dées , fans parler des reflexions que le Comte a faites fur cette matière r qu'il a abandonné le deffein qu'il avoir d'abord formé de l'examinée en détail dans la Préface. Il faudrait donner ici des exem- ples des Notes fur les Ordonnan- ces , mais comme ce détail nous obligerait de palier nos bornes or- dinaires , nous le renvoyons au premier Journal de l'année 173 3* . HUMFREDI LLWYD ARMIGERI BRITANNICA Defcriptionis Commentariolum , nec non de Mona Infula &c Britanni- ca Arce fîve Armamentario Romano , accedunt v£rx CambroBritan- nicas. C'eft-à-dire : Defcription de la grande Bretagne , par Humfrej Lliuyd , avec uns Lettre en forme de Differtation fur Cljl» de Àdona qui fervoit de Fort & d'Arfenal aux Romains , & une ancienne Chronique. Par M. Willame de la Société Royale de Londres. A Londres, de l'Imprimerie de Guillaume Bowyer, i7ji.;'w-4°. pp. 171. HUMFREY LLWYD; Auteur des deux premiers Ouvrages compris dans ccVolume, fleuriiToit vers le milieu du feizié- mc fiécle. Il étoit Médecin du Comte d'Arundel , chez lequel il dit lui-même qu'il avoit pafle quin« ze années. Ses Ecrits font connoî- tre qu'il avoit beaucoup d'érudi- tion , fur tout par rapport aux anti- «juitez Britanniques dont il avoit fait uns étude particulière. C'eit ce que reconnoît Camden qui eft un Juge non fufpect en cette matière. L'Editeur ajoute que Llvyd a fer- vi de guide au fçavant Camden. Ce fut le 30. du mois d'Aouft 1568. que Llwyd envoya la defeription de la grande Bretagne au fçavant Ortelius d'Anvers. L'Auteur étoit alors attaqué d'une violente maladie dont il croyoit qu'il ne releveroit point , & il prioit Ortelius de l'ac^ cepter comme une dacniere marque 7y6* JOURNAL DE de fon fouvenir &C de ion amitié. . Cet Ouvrage tut imprimé à Co- logne , mais rempli de fautes; ce qui vient , ielon M. Willame , de ce que celui qui a pris foin de cette édition, n'entendoit point ce qui en fait le fujet , fur tout par rapport aux termes Anglois , ou du Pays de Galles. Le nouvel Editeur a corrigé ces fautes autant qu'il l'a pu n'ayant point de manuferit exacï: entre les mains. Il a revu dans les Auteurs Originaux tous les partages , foit Grecs , foit Latins qu'il y a trouvés citez. Le but de Llwyd dans cette Dif- fertation en; de donner une Defcrip* tion exadle de l'ancien état de la Bretagne , & de faire connoître la Situation des lieux de l'habita- tion des difFerens peuples des Ifles de la grande Bretagne dont il eft parlé dans les anciens Monumens. Pour y parvenir^' Auteur s'attache à découvrir l'origine des noms des differens Pays & des différentes Vil- les , par le moyen de laquelle il fe flattoit de découvrir ce qu'il cher- choit. Un feul exemple furfira pour faire connoître de quelle manière l'Auteur exécute ce projet. Céfar a le premier donné le nom de Bretagne à l'Ille qui porte au- jourd'hui le nom d'Angleterre. Tous les Hiftoriens Latins ont luivi en ce point l'exemple de Céfar. Ce- pendant ce n'étoit point là , fuivant notre Auteur , le nom que pre- noient les habitans de ce Pays-là. Les anciens Bardes l'appclloient Prydaitt , terme de l'ancienne Lan- gue Bretonne , qui eft compofé de 5 SÇAVANS, deux mut,'Pyd&; Cmn , le pre^ micr de ces mots /îguifie beauté ou force , & le fécond veut dire blanc , 6 par ce nom les habitans défi- gnoient un Pays beau & fertile. L'Auteur prétend que les anciens Bretons ayant joint ces deux mots en avoient retranché la leterc C. pour en rendre le fon plus doux. Si les Latins fe font fervi du mot BW- tannia au lieu de celui de Prydain y e'eft qu'ils accommodoient les noms propres étrangers au génie de leur Langue, de manière qu'il étoic difficile à ceux du Pays de fe recon- noître , quand ils lifoient ce qui les concernoit dans les Auteurs Latins. Llwyd fait voir qu'on a depuis fouvent changé en B. o\xcn Pb. ou en Mf. le P. des anciens Bretons. Cependant l'Auteur ne croit point que le nom que portoient les habitans de l'Ille Brittivn vint de Trydain , ni que les anciens Bre- tons eu (Tent toujours habité ce Pays, comme le difoient Céfar & Diodo- re de Sicile, il eft peifuadéau con- traire que les Bretons tiroient leur origine des Troyens , &C qu'ils ont été nommés Britfwn , à caufe de Brutus qui les avoit conduits de la Ville de Troye dans le Pays qui s'appelle aujourd'hui Angleterre , ou grande Bretagne. Ceux qui font curieux de ces fortes de recherches auront recours au Livre même. La Dilhrtation furl'Ifle de Mo- na que Leiwyd avoit aufiî adrelfée à Ortchus , hit imprimée à Anvers en 1570. par les foins du même Orrelius, 6c réimprimée à Londres en 157$. l'Editeur n'a pas eu lamé- D I C E M me peine que fur la defcription de l'ancienne Bretagne , parce que cet- te Differtation avoit été imprimée beaucoup plus correctement que le premier Ouvrage. L'Auteur y foû- tient que l'Iile Mona dans laquelle les Romains avoientun Arcenaleit celle que Polydor-Virgile appelle jtnçiifeam. La Chronique qui termine ce Volume &c qui eft imprimée pour la première fois , eft d'un Auteur in- connu , qui vivoit il y a environ B R E , 1732; 757 400. ans. Elle eft écrite en ancien- ne Langue Bretonne. Elle a été tra- duite en Latin par Robert Vau- ghan , que l'Editeur araire avoir été très-verfé dans les Antiquitez de (on Pays. Cette Chronique com- mence en l'an 520. de l'Ere vulgai- re èv finit en l'an 1264. l'Editeur donne cette Chronique en ancien Breton } avec la traduction Latine , & quelques Notes du Traducteur , aufquelles il a jugé à propos d'en ajouter quelques-unes. HISTOIRE ECC L ES I ASTI QUE; POUR SERVIR DE continuation a celle de M. l'Abbé Fieury, Tome XXVI. depuis l'an 1 5 2,1 . jttffjit'en 1518. A Paris , Quai des Auguftins , chez Emery , S augrain , & Pierre Martin; Se dans la rue S. Jacques , chez Jean Manette , S: Hippolyte Guerin. 1729. /«-40. pp. 594, CE S huit années de l'Hiftoire Ecclefiaftique comprennent les derniers tems du Pontificat de Léon X. celui d'Adrien VI. & les premières années de Clé- ment VIF. On y voit, par rapport aux affaires Ecclcfiaftiques , la con- tinuation de l'Hiftoire du Luthe- ranifme, celle du commencement de l'Anabatifme , l'établiilement de la prétendue Reformation dans la Suilîe, les décidons du Concile de la Province de Sens , contre les nouvelles héréfies , les grandes con- teftations aufujet de l'exécution du Concordat entre le Pape Léon X. te le Roi François I. l'établiffement de l'Ordre des Capucins } un grand nombre de Cenfures prononcées par la Faculté de Théologie de Paris contre des Propofitions avancées par diflerens Auteurs^en particulier contre des Propofitions d'Erafme. Les principales matières Civiles fur lefquellcs notre Auteur s'étend dans ce Volume j font les guerres entre le Roi François I. l'Empereur Char- les V. &c le Roi d'Angleterre Hen= ri VIII. le fac de la Ville de Rome par l'armée que conduifoit le Duc de Bourbon , Se la prifon du Pape Clément VIL Nous ne rapporte- rons ici que quelques traits de ce Volume. Notre Auteur ayant parlé de l'é- lection du Pape Adrien VI. donne un abrégé de l'Hiftoire de ce Pape avant qu'il fut élevé fur la Chaire de S. Pierre. Adrien Florent étoit Hollandois ; né à Utrecht en 1459. fils d'un Braf- feur de Bierre 3 &c félon d'autres „ d'un Tapiiîier. Ses parens n'étant point en état de l'entretenir dam 7,-8 JOURNAL D les écudes , obtinrent pour lui une bourfe dans un des Collège de Lou- vain. Il s'y difeingua cri Philolo- phie & en Théologie. Quand il prie le bonnet de Doétcur , ce tut Margueritte d'Angleterre, Gouver- nante des Pays-Bas , qui en fit la dépenfe. Par le crédit de cette Prin- celle , il fut fuccedîvement Cha- noine de l'Eglife de S. Pierre de Louvain , puis Doyen de la même Eglife , Profeiîeur en Théologie , Vice-Chancelier de l'Univerfité ôc ProtefTeur de l'Archiduc Charles , qui fut depuis l'Empereur Char- les V. il tut enfuite Ambaffadeut auprès du Roi d'Efpagne , Ferdi- nand qui le fit Evêque de Tortofe. Après la mort de Ferdinand il par- tagea la Régence d'Efpagne avec le Cardinal Ximencs , il fut depuis feul Vice-Roi de ce Royaume pour l'Empereur Charles V. le Pape Léon X. l'avoit fait Cardinal le premier de Juillet 15 17. Après la mort de Léon , Adrien Florent fut élu Pape par le crédit qu'eut dans le Conclave l'Empereur Charles V. nonobftant les intrigues des Cardi- naux de Médicis & de Volfey. Ce nouveau Pape reçut la nouvel- le de fon élection à ViAoria Ville de Bifcaye. Il prit auffi-tôt les habits Pontificaux , &c fe fit nommer A- drjen VI. Ce qui parut d'autant plus extraordinaire que les préde- cefTeurs avoient changé leurs noms depuis plus de cinq cens an'. Cette élection ne plut pas aux Romains qui vouloient un Pape Italien. Ce- pendant dès qu'il fut arrivé à Rome OU lui fit tous les honneurs qu'on F. S SÇAVANS, fait aux nouveaux Papes ; néan- moins il ne voulut pas foutbir qu'on érigeât des Arcs de triomphe, & il en fit interrompre un qui étoit déjà fort avancé , & qui coûtoit plus de 500. ducats d'or , parce qu'il regir- doit ces décorations comme des rc- ftes du Paganifme Auffi-tôt après qu'il fe vit en pof- feflion de la Chaire de S. Pierre , il prit des mefures pour reformer les mœurs du Clergé & pour rétablir la Difcipline Ecclefiaftique. 11 fui- voit les confeils que lui donnoienc fur ces points deux hommes d'une probité connue , Jean-Pierre Ca- ratfe Archevêque de Theate , & Marcel Gaétan deThienne. Senlible aux maux que l'abus & la multipli- cation des indulgences avoit caufés dans l'Eglife , il ôta aux Frères Mi- neurs le pouvoir de prêcher celles qui avoient été accordées en faveur de ceux qui contribueroient à la confhuétion de l'Eglife de Saint Pierre. Il deffendit de vendre les Charges &£ les Offices de la Cour de Rome , il modéra les Taxes de la Datterie , abolit les Coad- jutories & les regrès , Se il s'at- tacha à ne conférer les Bénéfices qu'à des perfonnes capibles & de bonnes mœurs. » Quelques perfon- » nés d:diftinction lui en ayantde- » mande un allez confiderable pour » fon propre neveu , à qui il ea » avoi: r'onné un de foixante év dix >» écus d'or , ce qui n'éroit point un » revenu confiderable pour le ne- » yen d'an Pape , il le rrfufi &.' dît " qu'il louhaitoit ardemment qu'on » donnât les hommes 3ux Bcncfii- » cas D E C E M 0 ces , & non pas les Bénéfices aux »> hommes. Cette attention ne l'empêchoit pas de veiller aux intérêts tem porels de l'Eglife Romaine, il obligea par la force des armes les Malarefta à lui rendre Rimini dont ils s'étoient emparés. Mais il traita avec dou- ceur les Ducs d'Urbain & de Ferra- re qui avoient été dépouillés de leurs Etats fous le Pontificat de LeonX.L'affecîion & la reconnoif- fance qu'il avoit confervé pour l'Empereur Charles V.l'engagercnt à accorder à ce Prince de grands privilèges , & enfuite à fe déclarer en fa faveur contre la France. Mais il ne furvêcut pas long-tems à cette déclaration de guerre contre la France. Il mourut le 14. Septembre 1 j 2 3 . âgé de 64. ans 6. mois , après un an huit mois &: fix jours de Pon- tificat. Les Romains furent rejoiiis de fa mort , ils ne l'avoient jamais aimé, dit notre Auteur, tant parce qu'il étoit étranger t que parce qu'il avoit paru ennemi de la grandeur èc de la magnificence que fes pré- decefleurs avoient tant recherchées. Une autre caufe pour laquelle notre Auteur allure qu'on ne l'aimoit point , c'eft qu'il étoit zélé pour la reforme du Clergé, qu'il avoit re- tranché beaucoup d'abus dans les Offices de la Cour Romaine , dans les collations des Bénéfices , dans la difpenfation des Indulgences y qu'il mangeoit en fon particulier comme un Religieux , & qu'en re- tranchant les dépenfes fupeiflué's , il obfervoit beaucoup de frugalité & d'épargne. Ce qui faifoit dire Décembre, B R E ; r 7 ? z. 7^ aux Italiens que c'étoit un honnête homme & un bon Chrétien , mais un médiocre Pontife. Adrien n'étant encore que Profef- feur de Louvain , avoit donné au public un Commentaire fur le qua- trième Livre des Sentences. Etant Pape , il le fit réimprimer fans y rien changer , non pas même cette maxime , que le Pape n'eft point infaillible, dans ladécifion des que- ftions qui appartiennent à la foi. II y a aufîï de lui douze QueiHonS fous le titre de Qutftiones quodlibe- ticœ , le compte de l'homme mou- rant , &un Sermon fur l'orgueil. On n'a de lui que quelques Lettres depuis fon Pontificat. Il lut inhume dans l'Eglife de S. Pierre (ous une tombe allez (impie avec cette inf- cription : Adrianus VI. hic fitus ejly qui nihil fibi infelicius in vicâ quam quod imper aret duxit ; c'ell-à-dire , Ici repofe Adrien VI. qui rfeflim* rien de plus malheureux pour lui dans toute fa vie que de commander. Le Cardinal Enckenwoé'r , la feule perfonne qu'Adrien VI. ait honoré de la pourpre , lui fit ériger un tombeau de marbre enrichi de fcul- ptures & d'ouvrages en relief avec une longue infeription. Ce tom- beau fut placé dans l'Eglife de fain- te Marie des Allemands. L'envie d'arrêter le progrès que les nouvelles hérciies commen- çoient à faire en France , donna lieu à la Faculté de Théologie de Paris de cenfurer tout ce qui paroifloic avoir quelque air de nouveauté , en matière de Religion-, mais il faut avouer que ce zélé a été quelquefois A a aa a 76o JOURNAL DE poufle trop loin , comme on le voit par une de ces cenfures rapporrécs par notre Auteur dans le cent vingt- feptiéme Livre. Il y eut une difpute entre Jacques d'Etaples & Jean Fifchcr Evèque de Rochcfter , au fujet de Marie - Magdelainc , de Marie fœur de Lazare , 6c delà Pe- cherefle de l'Evangile , dont le Fe- vre failoir trois perfonnes differen- tes , & que l'Evêque de Rochefter foûtenoit n'être qu'une feule per- fonne. La Faculté décida qu'on ne devoir point fouffrir l'opinion de le Fevre , & elle détendit à tous fes Membres de l'enfeigner 8c de la prêcher. La raifon qu'en rendoit la Faculté , c'eft qu'il n'y auroit rien de certain , s'il étoit permis à des particuliers de rejetter une tradition des Saints Pères reçue par toutes les Eglifes. Notre Auteur remarque que ce grand principe , de la vérité duquel tout Catholique doit con- venir, ne devoit point être appliqué à une queftion de la nature de celle- ci. En effet la Faculté n'eft plus de ce fentiment, & on y foûtient tous les jours , depuis que cette matière a été éclaircie , que les deux Maries te la PecherefTe font trois femmes différentes , que l'une étoit de Naïm , l'autre de Bethanie & l'au- tre de Galilée , &; que les anciens Pères , avant S. Grégoire Pape, ont diftingué ces trois femmes. Dans les Cenfures contre Eraf- me, il y a quelques propositions condamnées , fur lefquelles on pourroit faire à peu près les mêmes teflexions que fur celles qui regar- dent les deux Maries & la Péche- S SÇAVANS, refïe ; mais il y en a d'autres fur lefquelles il paroîc à plusieurs Ecrivains beaucoup plus diffici- le de juftifier Erafme. Cependant notre Auteur le regarde , après M. Marfoliier , comme l'un des plus fçavans & l'un des plus grands hommes que Dieu ait donné à fon Eglife. Il oppofe à la cenfure de la Faculté de Théologie de Paris , les éloges que les Papes , les Cardi- naux , les Evêques , les Rois , les Princes & tous les grands Hommes les plus attachés à l'Eglife Catholi- que ont faitd'Erafme. Il ne prétend pas néanmoins qu'Erafme foit ab- solument irréprehenfible , cet Au- teur ne l'a pas prétendu lui-même , mais il foûtient qn'on ne doit pas le regarder comme hérétique , &C qu'il ne devoit point être traité aulfi feverement qu'il l'a été par la Fa- culté de Théologie de Paris , pre- mièrement parce que de fon temsil étoit permis de difputer de beau- coup de chofes dont il n'eft plus permis de douter , depuis que le Concile de Trente a fixé fur ces fu- jetsnos fentimens &c notre créance, En fécond lieu , parce que quel- ques-unes de ces cenfures ont été plus loin que le Concile de Trente. En troifiéme lieu , parce qu'Erafme a déclaré plufieurs fois que dans l'interprétation de l'Ecriture il s'en tenoit à l'explication de l'Eglife , & qu'il fe foûmettoit à tous fes juge- mens ; enfin qu'Erafme avoit dit lui-même dans la Lettre qu'il avoit écrite au Parlement de Paris , que ceux qui vouloient faire cenfurer fes Ecrits , prefentoient des propofi- D E C E M tîons tronquées , qui n'avoienc un mauvais fens que parce qu'on les fé- paroit de ce qui les précedoit Se de ce qui les fuivoit. A l'égard des Hérétiques Luthériens Se Zuin- gliens , avec lcfquels on l'accufe d'avoir eu trop de liaifon , notre Auteur obferve qu'on ne peut faire un crimeàErafme de l'eftime qu'il a fait paroître pour leur érudition, du commerce qu'il avoit eu avec eux fur des matières de feience Se des BRE," 1732; 76*1 voyes de douceur qu'il croyoicêtrc les feules qu'on dût employer pour les ramener à la communion de l'Eglife. Au refte , Eralme a affez fait connoître combien (es fenti- mens étoient oppofés à ceux de Lu- ther Se de Zuingle , & combien il défaprouvoit leur conduite. Nous rendrons compte dans un autre Journal du 27e Volume de cette Hiltoire. MUS^ RHETORICES , SEU CARMINUM LIBRI SEX , A Selectis Rhethorices Alumnis in Regio Ludovici Magni Collegîo , elaborati Se palam recitati in argumenta ipfîs propoiïta A. P. JE. An. Xaverio de la Santé , Socictatis Jefu Sacerdote. Lutetix Parifiorum , Typis Fratrum Barbou , via San-Jacobxâ , fub Ciconiis. 1732. C'eft- à-dire : Recueil de Pièces de Poëfîes compofées par des Rhetonciens du Collège de Louis le Cjrand fur plusieurs fujets propofés par le P. d e t a S a n t e de la Compagnie de Jefus. A Paris , de l'Imprimerie des Frères Barbon , rue S. Jacques , aux Cicognes. 17JI. vol. in-iz. pp. z88. CE Recueil eft divifé en fix Parties , la première com- prend diverfes notions Poétique* fur l'origine de plufîeuts Arts Se de plusieurs Jeux>; par exemple , fur l'origine des Orgues , fur celle des TapiiTeries, des Miroirs , des Per- ruques-, fur celle du, Volant , delà Paulme , du Billard , des Echecs , &c. La féconde roule fur differens Sujets de pieté, tels que font, par exemple , la comparaifon de la gloire des Saints avec celle des Hé- ros, les fouffrances des Ames déte- nues dans le Purgatoire }i la Vie de S. Jean Népomucene Martyr , la pu- nition de Coré , Dathan Se Abiron, la mort d'Abfalon , la défaite de l'armée de Sènnacherib, Sifara tué par Jahel, Llyfée vengé du Ciel par des Ours qui fe jetterent fur des cn- fans qui fc mocquoient de ce Pro» phete. La troifiéme partie contient les Eloges de quelques Princes : on y, voitentr'autres celui de Louis XVi au fujet de fon couronnement , au fujet de fa Majorité Se au fujet de laguérifon de fa petite vérole ; on y voit en divers endroits celui de la Reine. Plufieurs, fujets tirés de l'Hi- ftoire Se principalement de l'H'i- ftoire Romaine fort l'a matière de la quatrième partie , tels que font par exemple , la confiance 'du Sol- datCynegire, Annibal vainqueur, A a 1 a a ij •j6z JOURNAL D des Alpes, Sylla animant fes Sol- dats. La cinquième partie confilte tou- te en fictions : c'e(i , par exemple , I Iercule vainqueur de Cerbère , le travail & h pareile en difpnte de- vant Apollon } l'invention £c l'ufa- ge du ter. La fixKme renferme diverfes Pièces mêlées. On y voie d'abord la defeription d'un petit Maître- précieux , puis des Epigrammes les unes Latines , les autres Françoifes, quelques Fables , une en vers Si. les autres en proie , avec des énigmes. Nous ne fçaurions entrer dans le détail de tant d'articles; nous nous bornerons au portrait du petit Maî- tre, & à la mort d'Abfalon. Puis nous viendrons à un Difcours préli- minaire que les Libraires du Re- cueil adreflent aux Lecteurs. Dif- cours qui par l'élégance avec laquel- le il eft écrit mérite qu'on en tarte mention. Le portrait du petit Maître a pour titre, le petit Aiaitre Précieux. II renferme des traits qui en appre- nant aux jeunes gens à s'exprimer heureufement en Latin fur certains fujets auiïi étrangers en Latin que familiers en François/ont en même tems capables de leur faire fentirle ridicule de la conduite qu'on y re- prefente , & de leur infpirer parce moyen, tout le mépris qu'ils en doi- vent avoir. La parefle & la nonchalance du petit Maître en queftion , font d'a- bord dépeintes ; voici comme on lui fair commencer fa journée j on le prend dès fon rc veiL ES SÇAVANS, Hic in utramque anrem bis fex ttbi- dorniik horas , Profiavitque graves alte de pe&ore rhonchof , Ofcitat ; & rurfus tepefàda? niembr» redinat Culcitula; ; invitât blando (ubftraminc pluma, Nec fiait è ftratis inalc pigrum evolvere corpus , Ni ludus vel menfa vocet. Tum denique molli Languidulum è leftocaputexetit , hainr ruora , cliaruin Bellus homo volât ad fpeculum. Nen pronus adorât Namen; at erectâ cerrice, oculoqueiu- perbo Ad fpeculi lumen, vulcura feu miraen adorât : Narciflum fpeclare putes , quamquam inter utrumque Hoc diferîmen ineft, mulris quod bel- lulus olim NarcifTus placuit , placet at fibi troflulut Et fua n-.iratur, nulli mirabilis , ora. Voilà le petit Maître reprefenté fe levant avec beaucoup de peine , & courant enfuitc à fon miroir ^ devant lequel il admire fon vifage, dont il n'y a que lui de charmé : le. voici à prefent à fa toillette où il s'applique des mouches, du fard,où on lut parte au fer fes cheveux mis du foir en papillottes , où on le pei- gne avec an , où on le poudre , où on reflen.ee > &c. D E C E M Menfula fub fpeculo, ûat mappâ inftr iti decenti , Fœmineoque nitet circum undique mun- dj paratu , Fucus adeft , minium , certifia rccondita vaft Candidulo. Cyprius pulchella in pixidc pulvis Hîne latet , inde nigro fadi de vellere fo- rum Orbiculi , & vultûs quaevis inedicamina'. Crifpum Mafcula fœmineis gypfare coloribus ora Non pudet f afcitâquc gênas obducere larvâ ; Nature qnafi fuppudèat , formarque cu- pide, Deformare aveat nativos ftontis honores. Ambo aftant famuli , caputambos oo cupat unum : Peâine Caefariem componens alteï ebur- no , Perque gradus torts ftricM compage pa- pyri> Leâa capillorum inrolvens discrimina , ferro Vibrât , & implicites varia in glomera- mina crines Ordine multifîdo cirratum torquet in or bem , Alter odoratoconfpergitpulvere cirros , Expaflbque fricans mantili abftergit heri- ks Attaftu leviore gênas. Herus, alter A- donis Mundat. amygdalinâ leviquc filigine palmas ; Quin anima; fordcs cura idem compare raundat 2 ERE; T7 3»; 7 ejHit fiudii paritm , tabor/s mhil redo- leat ; innat*. nobilitatis fpiret plitri- mum. Il fembleroità ce langage , que les Mufes, qui font fi imparticllcs, ne fe plairaient qu'avec la Noblefie, &c regarderaient d'un œil de mé- pris toutes les autres conditions : nos Libraires répondent à cette ob- jection. Après quoi ils avertirent que pour faciliter de plus en plus l'étude d'une Langue auïfi précieufe que la Latine , 6c montrer fur ce point le zélé qui les anime, ils ont rcfolu de réimprimer les plus belles Ha- rangues qui ont été prononcées en divers tems par les Profeffeurs de Rhétorique du Collège de Louis le Grand, & de publier auffi les Pièces BRE, 1792. 7(

n en B b b b b 11 77o JOURNAL D fat commencée : >us !e n cm. Dé- canat du Sieur Nicolas Ardry , in- terrompue enfuira fous ce même Décanat , & fous celui du Sieur Etienne - François Geoffroy , puis reprife dans les derniers mois du Décanat du lieur Geoffroy , & en- fin terminée lous celui de M. Hva- cinthc-Théodore Baron , actuelle* ment en place. La Faculté de Médecine ce Pâ- tis en 1745. fous le Décanat de M. Philippe Hardouin de Saint Jac- ques, donna au public une Phar- macopée pour fervir de règle aux Apoticaires , qui auparavant ne fui- voitnt chacun que leur caprice dans la composition 3c la préparation des médicamens , ce qui mettoit les Médecins hors d'etat de Içavoir ce qu'ils ordonnoienr , 6v portoic un notable préjudice aux malades. Cette précaution eut Ton effet pen- dant plulieurs années, mais dans la fuite des tems la Pharmacopée, qu'on avoit dreffée étant devenue très-rare , cv fc trouvant outre cela manquer de piulieurs remèdes dont la Pharmacie s'eft enrichie depuis, il étoit important de l'imprimer de nouveau , & de l'amplifier : c'ell à quoi la Faculté vient de Satis- faire par le Codex qu'elle donne. Voici de quelle manière elle s'en eft acquitée. Comme aujourd'hui la Médeci- ne ne fe borne pas aux fecours que fournit la Pharmacie Galenique , mais qu'elle en emprunte un grand nombre de la Chymie , la Faculté a rallemblc les uns & les autres dans ce Codcx,en distinguant feulemeat ES SÇAVANS, par d . erens les re- mèdes chymique: iter la contuhon. Quant aux Galeniques 3 quoi qu'ils foient en ufage de- puis long-tems, & que l'expérience n'y ait jamais rien découvert de dangereux , la Faculté n'a pas l.ude d'en faire un Scrupuleux examen ; elle a ajouté aux uns , retranché aux autres, cv en a changé la plu- part en mieux. A l'égard des Chy- miques , comme ils font plus vio- lens j il n'y a fotte de foin qu'elle n'ait employé , Soit pour adoucit les uns , Soit pour s'allurer de l'in- nocence des autres. Elle a mis dès l'entrée du Livre , les différentes manipulations qui conviennent pour rendie certains. médicamens plus propres aux ufa— ges qu'eu fait la Médecine. On y voit par exemple, quelle eft la meil- leure manière de purifier le Sel am- moniac , le nirre , le Sel marin , l'a- lu:n , le mercure , la gomme am- moniac , le ftorax ; comment il. faut préparer les cantharides , les cloportes, les vers de terre, com- mc:.t fe fait le plomb brûlé , l'alum brûlé , &c. Le corps de la Pharmacopée vient enfuitc : on y a mis dans leur rang ordinaire les remèdes galeni- ques ; mais on a renvoyé à une au- tre clafle les eaux diûilé.s , comme chofes appartenantes à la Chymie. La Faculté, en 1715. Sous le Décanat de M. Nicolas Andry ,. délibéra long-tems Sur le choix des caractères do.it elle devoir fc fervir pour marquer certains médicamens & les dofes de tous les remèdes :. D E C E M elle tut d'abord d'avis , à la perfua- fion de quelques Docteurs , d'em- ployer pour les médicamenSj les ca- ractères chy iniques : &c pour les do- fes, les caractères Arabes ; fçavoir , par exemple , pour déhgner le fer, cette marque $ , &c pour déligner l'antimoine celle-ci J. Mais ayant depuis fait réflexion qu'entre ces caractères , il y en avoic que des garçons Apoticaires peu attentifs on tr^s-ignorans , comme il ne s'en trouve que trop , pouvoient aifé- ment prendre l'un pour l'autre , elle changea de fentimenf, , & ftatua qu'on ne fè ferviroit dansl'impref- hon , que des caractères ordinaires, c'elt-à-dire , qu'au lieu , par exem- ple , d'employer cette marque J pour fignirïcr le fer , & celle-ci $ pour lignifier i'antimoine,on écriroit tout au long , fer , antimoine : Que tout de même , au lieu de déligner l'eau par cette marque V , & le feu parcelle-ci A , on écriroit à la ma- nière commune , e.v: , feu , qu'à l'égard des dofes 5 au lieu de mar- quer par ce ligne 3 le fcrupule ou la dofe de 24. grains , te par celui- ci }. celle de la dragme ou du gros, c'elt-à-dire , de foixante &c douze grains, on mettroit tout au long gros ou dragme , ce qui fut conclu le 18. Juin 172c. & ce qui a été fuivi ; fur quoi nous remarquerons que dans l'ancien Codex dont nous venons de parler, la même chofe a été obfervée. Au refte , comme la Faculté en corps n'a pas pu rédiger l'Ouvrage dont il s'agit . on juge bien qu'elle sn a commis le foin à quelques uns B R E , 1 732. 771 de les Docteurs ; mais elle a revu enfuite kurOuvrage qui a été expofe fur le Bureau pendant un mois à la cenfure de tous les Docteurs , qui y ont fait chacun leurs remarques, dont elle a profité. Il ne reftoit plus qu'une cheie à faire , c'étoit de con- fulter parmi les Apoticaires , les plus hibiles Artiltes ; c'eft ce qui a été pratiqué; ils ont donné leur avis & on en a fait ufage. En vain la Faculté auroit-elle pris tant de foins pour régler la Pharmacie, fi les Pharmaciens ife fe foûmettoient aux règles que la Faculté a faites : c'eft à quoi il a été pourvu par un Arrêr du Parlement qui leur détend de fufvré dans les préparations de leurs remèdes d'au- tres méthodes que celle qui leur eft preferite dans ce difpenfaire par la Faculté de Médecine de Paris : les termes de l'Arrêt font : Notredite Cour ordonne que les Ordonnances , ' Edits & Déclarations regiftrées en notredite Cour , ensemble les Ar- rêts & Reglemens de notredite Cour, rendus aufujetdcs Médecins & Apoticaires , feront exécutés fé- lon leur forme & teneur: ce faifant, que tous les Apoticaires de cette Ville Se Fauxbourgs de Paris , fe* ront tenus de fe conformer au nou- veau difpenlaire fait par les Sup- pliass dans la compofition des re^ medes y mentionnés , & ce dans fix mois, à compter du jour du prefenc Arrêt , & de l'Acte de dépôr qui fera fait au Greffe de notredite Cour , dudit difpenfairc , après avoir été figné du Doyen de la Fa- culté de Médecine de cette Vilje 772 JOURNAL D de Paris. Fait inhibitions & déten- fes aux Apoticaircs de donner des compositions mentionnées audit difpcnfiirc , ni autres par eux faites, aux malades , fur autres ordonnan- ces que celles des Do&curs de ladite Faculté, Licentiez d'iccllc , ou au- tres ayant pouvoir d'exercer la Mé- decine dans cette Ville & Faux- bourgs de Paris, & fans ordonnan- ES SÇAVANS, ces tUtrées & lignées dcfdits Doc- teurs, Licentiez, ou autres ayant pouvoir , dcfcjuelles ordonnances lcfdirs Apoticaires feront tenus de tenir bon & fidèle Regiftre , le tout fous les peines portées pat les Or- donnances , Edits & Déclamions du Roi cv Arrêts de la Cour. Fait en Parlement le 16. Mars 1731. NOWELLES LITTERAIRES. ITALIE. De Veroni. IL paroît ici une Lettre Latine de M. le Marquis Maffei , adreffée à M. le Baron de Bimard , fous ce titre : Scipionis Maffeii Marchionis Epiftola , in quà très exirnid, ac nuriquàm antea zulgatx Jnfcriptiones exibentur atqiie illu- firanmr, Veroni. Per^acobttm Vd- larfium. 1731- i«-49- Brochure de 14. paçes. Des trois Infcriptions dont il s'agit dans cette Lettre, la première eft Latine. M. M*ffi, dans le Cabinet duquel elle fe trou- ve, n'avoit fait que l'indiquer dans fon Hifloire Diplomatique. Elle contient un congé honorable donné par les Empereurs Philippes à quel- ques Soldats des Cohortes Préto- riennes , avec le Droit de Bour- geoifie Romaine pour les enrans que ces Soldats pourroient avoir de leurs mariages avec des femmes Romaines ou avec des tcnimcs La féconde Infcription qui eft du Cabinet de M. le Bret premier Président du Parlement de Proven- ce , eft Grecque , auifi-bien que la troiliéme. Ce font les Ordonnan- ces de deux Villes, l'une des Côtes d'Afrique , félon M. Maffù , l'au- tre de Sicile , qui décernent des honneurs publics a quelques partir ailiers. M. Maffei , après l'explication de ces Infcriptions , envove à M.^# Bimard le deifein de deux Médail- les fingulieres , qu'on voit en forme de vignette au titre de cette Lettre, & il lui parle à la fin du grand pro- jet qu'il a formé de donner une Collection complette de toutes les Infcriptions anciennes Grecques cv Romaines qui ont paru juiqu'ici dans difïerens Recueils , ou qui n'ont pas encore été publiées. Le pian de cette entreprife eft déiairopriméen Italien &en Latin, & nous referions au mois prochain à en rendre un compte plus exact SC plus decaiilc. DECEM FRANCE. De Paris. La Veuve Manière &i J. B. Gar- nier , rue Saint Jacques, à la Pro- vidence , débitent le fécond & le troUiéme Tome de l'Abrégé des Traitez de Théologie de feu M. Tournely : Pr&kUiones Théologien de Myfterio Saniliffim» Trinitatis } & de Angelis , ad ujum Seminario- mm, & examims ad gradin Theo- logicos pravii contratlœ, Sec. Tomus secundus. PrdiUtones Théologie a de Opère fex dierum , Sec. Accejftt ,ippendtx inflar Supplément i adloca Theologi- ea. Tomus tertius. 1731c tn-iz. On trouve chez Prault , Quai de Gêvres , au Paradis , ['Analyfe de VHifloirc Militaire du Règne de Louis le Grand. Par P. F. Bmnet , en S, feuilles in-folio , imprimées pour être collées enlemble. Méthode pour apprendre l'Hifioire des Faux Dieux de l' 'Ant.quitè ; ou le Panthéon Myftique. Compofé en Latin par le Père Pomey t Si traduit en François par M. Tenand. Nou- velle édition, revue & très-exacte- ment corrigée. Chez le même Prault. 1732. in-11. Suite du Traité du Sublime a M. Defpreaux. Où l'on fait voir ce que c'eft que le Sublime & fes différen- tes efpeces , quel en doit être le fty- le ; s'il y a un art du Sublime , & les raifons pourquoi il eft fi rare. Par M . Silvam > Avocat en Parle- ment-Chez le même Libraire.1732. in- 12. Application de l'Algèbre à la Géo- métrie . ou Méthode de démontrer B R E, 1 75 a; 775 par l' 'Algèbre les Théorèmes de- Géo- métrie , & d'en refondre CT conjiruire tous les problêmes. L'on y a joint une Introduction qu'\ contient les Règles du calcul algébrique. Par feu M. Çtimée de l'Académie Royale des Sciences, Protelleur Royal de Ma- thématique, & ancien Ingénieur ordinaire du Roi. Seconde édition, revue , corrigée & confîderable- ment augmentée par l'Auteur» Chez Qufillean ' rue Galande , près la Place Maubert , à l'Annoncia- tion. 173:. On trouve chez Chauben , Li- braire du Journal , des Exemplai- res de la nouvelle Edition de la Vie de M. Bayle par M. 'Defmai- faux, in-iz. 2. vol. que nous avons déjà annoncée dans les Nouvelles Littéraires du mois de Noyea.bre dernier.- On trouve auiîîchez Giffcyy rue de la Vieille Bouderie , à l'Arbre de J ifé , Véritable Calendrier Chrono- logique & Mifonque , contenant la connoiffance des tems } pour l'année 173 3- Avec une nouvelle fuite des plus curieux Traits d'Hiftoire. Un Journal des Evenemens de l'année dernière 1732. Les Naifïances Se Morts des Rois , Reines , Princes & Princef- fes de l'Europe, où l'on a joint tou- tes les Epoques qui les concernent. Et un mélange curieux de plu- fieurs autres nouvelles Matières amufantes & utiles. Neuvième édition , dédiée à Monfieur le Duc d'Orléans, pre- mier Prince du Sang» 774 fautes à corriger dans le Journal à'Oftobre 173 t. X Age 571. col. féconde , lig. 7. frapé , lifez. frapéc. Dans le Journal de Novembre. Pag. (>-j6 . col. i lig. }£• plus , lifez moins : pag. 679. col. première, lig. dernière , £'«-t».»os , lif. £W»«os : Ibid. col. 2. lig. z$.Atizl, lif. Atzïi.: lig. 26. i'p£fv*i t lif. T?p8(và : pag. 692.. col. première, lig. 17. errer, lif. crier : pag. £98. col. 2. lig. 19. décabrement , lif. délabrement. : pag. 701. col. 2. lig. 17. Tes , lif. ces : pag. 708. col. I. lig. 19. moins , lif. plus : pag. 714. lig. dern. niaifon , lif. moiflon : pag. 717. col. fecondej lig. Il, & voila ,efface\^Sc BIBLIOGRAPHIE; T7S BIBLIOGRAPHIE, 0 U CATALOGUE DES LIVRES DONT IL EST PARLE' DANS LES Journaux de l'Année 1732. Les Titres des Livres qui ne font qu'annoncés dans les Nouvelles Littéraires jeront indiqués far une Etoile. BIBLIASACRA^INTERPRETESjCONCILIA. * T ES Commentaires Latins % j de Cornelius-à-Lapide , fur l'ancien & le nouveau Tefta- ment , page 184 ? Explication du Livre de la Gene- fe & de celui de Job , 145 * Tradu&ion Ançloife du nouveau Teftament , faite fur le Latin de la Vulgate, par Jean Wiclef , * La Gcnefe en Latin & en François, &c. 4 1 5 * La Phyilque Sacrée , oh Phyfi- que naturelle de la Bible 3 56® PA TRES, THE OLOGI,ASCETlCl,LITURGlCI, ScRIPTORES EcCLESIASTICI , &C. HetERODOXI. £ Nouvelle édition de la traduction Latine du Traité des Etudes Monaftiques du P. D. Mabillon3 ,6 p Sermons choifis fur les Myfteres, la Vérité de la Religion & diffe- rens Sujets de la Morale Chré- tienne , $8-435-624 î Les Lettres de S. Jean Chryfo- ftome , traduites en François fur le Grec des PP. Bénédictins, j? Peembrt,, Lettres Hiftoriques , Théologiqueî Se Polémiques , dans lefquelles on foûtient & on défend la doc- trine de la Grâce efficace par el- le-même & de la prédeftinatioa toute gratuite de la gloire av^ne la prévifion des mérites, &c. Par le P. J. H. jimat de Grave/en , de l'Ordre des Frerts Prêcheurs, Traite Hiftorique & Moral de l'ab; Çcccc • 776 BIBLIOG ftinence de la viande , &c. pat le P. D. Grégoire Berthelet , 74 & fuir. Se pa.".m& fi'iv. «Traité du Libre-Arbitre Se de la Concupifcence , Ouvrages Po- fthumes de Meliïre Jacques-Bé- nigne BoJJuetfivèquc de Mcaux, 107 * Le Pocmc de l'amour divin de Bcnivieni avec le Commentaire du Comte Jean Pic de la Mi- randole , 1 1 5 ? R- P. F. Petri-Maria Paflerini , Opéra omnia Theologia & Ca- nonica , il£ "* Traduction Latine du Supplé- ment au Dictionnaire de la Bible ikDomCd/wt., Ibid. ? Notice des Auteurs qui ont parlé de la propagation de l'Evangile dans ks différentes parties du monde : par M. Jean Albert-Fa- bncius , il 7 Expofuion des preuves les plus fen- ïibles de la véritable Religion : par le P. Bitfjier , Jefuite , r 50 *Le Cours de Théologie du Père Paul de Lyon , Capucin , 1 84, * Retraite du P . àc Salazar , Je- fuite , 185 * Traduction Angloife du Dic- tionnaire de la Bible du P. Cal- net , 244 * R. T. Fmncifci Suarez Theologit furmnafeuCompendium, ^06 * Recherches fur l'évidence de la Religion Chrétienne , Ibid. * Aicifhron : or the minute Pbi- iofopher y Ibid. ? Inflru&ions Chrétiennes fur les fouffrances , 309 :* Confidcrations Chrétiennes d'un R A P H I E. homme qui veut ferieufement travailler à fon falur, 309 Réponfe aux prétendues autotitez des Pères & aux argumens tirés de la raifon que M. Wolflen allè- gue dans fes Difcours contre la vérité du fens littéral des Mira- cles de J. C. par Richard Lerd ^ Evêquede S. David , 34É & fuiv. 8c 466 & fuiv. Traité de la vérité de la Religion Chrétienne , tiré du Latin de M. Jean-Alphonfe Tiirretin , 360 * De Paitli in Vrbem Romam in- greffit , AElomm XX Tj 71. 16; deferipto exercitatio Hiftorico- Theologicu , 368 * Job. Fr. Wucherer Tbeol. Doit. V indiciel, AtemA Divinitatisfefu Chrifli , Ibid. * De Arii vert, Divinitatis Chrifli hoflis , morte miferœ, Sec. prolu- fto , Ibid. * Conduite de la providence dans l'établiflement de la Congréga- tion de Nôtre-Dame, qui a pour fon Inftituteur le Bien-heureux P. Pierre Fourier , $yr * Difcours fur les Vies^des Saints de L'ancien Teftament , 37^ Differtation Critique Se Théologi- que fur le Concile de Rimini , . f77 * Traité fur la Magie , le Sortilège» les PoflelTions', Obfe(îîons'&: Maléfices, où l'on en démontre la vérité Se la réalité , 436 * Inftruiftions Chrétiennes fur les huit Béatitudes , 496 Le Triomphe de la Catholicité, B IB L I O G R A Réflexions inftructives Se morales fur l'Apocalypfe : par M. l'Abbé Gcnreau , j 3 4 Lettres Paftorales de Monfcigneur l'Evêquede Londres aux Fidèles de fon Diocefe , contre les Li- bertins & les Incrédules , tradui- tes de l'Anglois par Abraham le Moine t 5 3 £ Jo/ephi - Antonii Saxii Epiftola ad uitnicitm pro vindicanda formula in Ambrofiano Canone ad Aïifîa Sacrum prœfcripta, Corpus tuum HISTORICI SACRI P H 1 E. 777 rrangitur Chrifte,' J55 * Réfutation des Critiques de M. Bayle fur S. Aùgùftin , 56a * L'Imitation de J. C. traduire & revue par M. l'Abbé Dufrefnoy , D. de S. fur l'ancien Original François , 61^. Traité de l'Efperance Chrétienne ' contre l'efprit de pufillanimité Se de défiance, 737 * Abrégé des Traitez de Théologie de feu M.Tournely , 775 (Continuation des Mémoires de Littérature & d'Hiftoire , To- me X. Partie II. j — Tome XL Partiel. 1C6 : — Tome XI. Partie II. 585 & fuiv. & 709 & fniv. Hiftoire de la Guerre des Huflîtes & du Concile de Balle : par Jac- ques l' Enfant , 1 6 Hiftoire de l'Iile Efpagnole ou de S. Dominguc , écrite particuliè- rement fur des Mémoires nu- nuferits du P. Jean-Baptifte le *Pers , Jefuite , & fur les pièces •riginales qui fe confervent au dépôt de la Marine : par le Père de Cbarlevoix , de la Compagnie dejefus, 20 &fuiv.£ * Le feiziéme Volume de l'Hiftoire d'tfpagne , écrite en Efpagnol par Dom Jean de Ferrerai y fous le titre de Synopfis Hifiorico- Chronologica de 'Efpana, &c. 55 * La Critique de cette Hiftoire: pat Dom Diego Ai aninez.~Cifne>vs, ' Ibid. * Autre Critique du même Ouvra- ge : par Dom Francifco de Ber- g"»fa, . 5 5 * Critique particulière du feiziéme Volume delà mêmeHiftoire3Ibid. *Les Tables Chronologiques du P. Aluzantio , Jefuite , Ibid. * Traduction Latine de la Biblio- teque Ecclefiaftique du Père D. Ceillier } Benedi&in, j£ * Hiftoire Métallique des XVII. Provinces des Pays-Bas. Depuis l'abdication de Charles - Quinc jufqu'à la Paix de Bade en 171e". traduite du Hollandois de M» C c c c c ij 778 BIBLIOGRAPHIE. Gerst-d-Van-Loon } 57 * L'Hiftoire de Charles XII. Roi de Suéde : pat M. de Voltaire, .5* ' Remarques Hiftoriques & Criti- qua fur ectre Hiftoire , 562, * Hiftoircde Gufman d'Alfarache. Nouvellement traduite & pur- gée des moralitez fuperflucs, 59 * Hiftoire Négrepo^tiquc, fécon- de édition, Ibid. Les Monumcns de la Monarchie Françoifc , qui comprennent l'Hiftoire de France , avec les fi- gures de chaque règne que l'in- jure des rems a épargnées. Tome troifiéme : par le R. P. Dom Ber- nard de Mont faite on , Religieux Benedi&in de la Congrégation de S. Maur , f 3 — * Tome IV. 495 Hàfteire de l'Académie Royale des Sciences, année 1719. &c. 07 &f niv.êi 161 & fuiv. '' Le premier Tome des Vies des Peintres, Sculpreurs Zc Archi- tectes modernes : par M. l'Abbé Pafcali de Peroufe , 1 1 J * Diflertazioni Epiftolari , Storicbe e Chronologiche , Ibid. * Mifcellanea Juridico - Hifioriea , * Hiftoire Françoifc du feiziéme iîccle, 118 » Cbrijîophori Çellarii Smalcadenfis Geogravhia antiqua reetgnita de- kho , (y ad vetemm, novontmejnc Scriptorum fidem JHiftoriçernm maxime identidem taftigata , &c. Ibid. * Les Defefperez , Hiftoire Héroï- que i iii Abrégé de la Vie du célèbre Pîert e Dames, i$6 Voyages en AngloisSc en François èC Aubry de la Aîottraye , en di- verfes Provinces &. Places de la Prufte Ducale & Royallc , &c. Tome III. * 57 & 177 * Tables Généalogiques d'un grand nombre de Familles No- bles d'Allemagne , 18* * M. Gêttlob. Fnd. Gude de Eccle- ftA Ephefîna jfatu imprimis £V$ j4pofloltco , Commentatio Hijio- ric» Exegetico-Çritica , &c. 183 * Jeannis-Petri de Ludewiç , Joli Vita Jufliniani atcjue Thcodorét Auguflorum , neenon Trtbtnian't } &c. Ibid. * Hiftoire des Flagcllans , traduite du Latin de M. l'Abbé Botleau , 184 * Les Romans de Caffandre , Cle- lie , Cyrus , Pharamond , Clco- patre , Aftrée & Almahide, &c. Ibid. * Hiftoire de Cleveland, fils natu- rel de Cromwel , Ibid. * Le Politique Dom Ferdinand le Catholique , traduit de l'Efpa- gnol de Baltazar Gracien , 185 Lettres édifiantes & curieufes , écri- tes des Midions étrangères , par quelques Miffionnaires de la Compagnie de Jefus, Tom.XX. 2 3 04 2 Les Peintures & les autres orne- mens du Palais Ducal de la Ville de Venife , gravés en 50 plan- ches , avec des explications con- venables , 305 *Scanderberg ou Avantures du Prince d'Albanie , 310 Lettre à Me T. D. L. F. fur Mon- sieur Houdart de la Motte de l'Académie Françoife, 313 La Catanoife , ou Hiftoire Secrette des Mouvemens arrivés au Royaume de Naples , fous la Reine Jeanne première , 3x2 Çallia Chrifiiana in Provinces di- finbuta , &c. Tomus 111. 331 Tomus IV. 421 Tomus V. 490 La Vie de Saladin, 3 ■; J & fuiv. & 4.04 à1 fuiv* R A P H I E. 779 * Cxremonialia ElelTionis & Coro- nationis Romani Pontificis & Cxremonialia Epifcopomm ,368 * Duo 7{erum Anglican arum Scrip- tores vcteris , Vil. Thomas Otter- bourne , &Joannes Whetham- ftede , ab origine Gémis Britan- nica , ufqus ni Edvardum IV. 3*9 * Etat ancien & prefent de la Ville de Nevcaftle , 370 * Hiftoire des Puritains on des Proteftans non Conformiftcs , Ibid. * Mémoires Hiftoriques & Criti- que fur divers points de l'Hi= ftoire de France & pluficurs fu-~ jets curieux : par François-Eudes de Mez.eray , 371 * Hiftoire de la dernière pefte de Marfeille , Aix, Arles & Tou- lon , 373 Hiftoire Critique des Pratiques fa- perftitieufes qui ont féduit les peuples Se embarraffé les Sça- vans : par le R.P. Pierre le Bruns 414 &fuiv. Se 459 & fuiv. * Mémoires de Whitlocke fur les affaires d'Angleterre > 434 * Hiftoire des troubles de la grande Bretagne, depuis l'année i£î3. G. S. 50 * Codex Conflit ut ionum quas Summi Pontiûces ediderunt in fohn,ni Canonizatione SanElorum à Jo- hanne XV. ad BenediElum XIII. Mccurante Jufto Fontanino , &e. Decemb. 5 5 Traité des Dixmesen général , fui- vant la Jurifprudcnce ancienne & moderne , &c. 56 Décidons du très-célèbre Sénat de Dole, dans laquelle on explique avec clarté plufieurs chofes qui regardent la Théorie cV: la. Prati- que du Droit & la Coutume de 'îa Franche - Comté : par Jean Grivel , 112 Traité de la Revocation des Dona- tions par la naiflance ou la fur~ Ddddd 744 BLIO G inçc des er! 141 des Que ftions qui Contrarier c i : par .\ ! • 1 S7 * De pmgrejfit . F '.;■- ci in Sacra R d. Isrivatis Juribus , '■■ • ..fino hifl in fine Di- plomatà Rudolphina hue fer tia , 1 S 3 * Ludoviei M linae Tracl.it us de fufiititi & Jure , 30e * èjicobi Gothofredi Opi ri Juri !■- ca minora } 307 * Delineatio Jur'n Publici E: ftici Proteftantium , 3^8 Corps Univerfel Diplomatique du Diuic des Gens , &c. par M. J. R A P H I E. Damant t 428 Générales & I du Pays & du ! ois : ; .t M. - 4 ' S C naturali t • s Jitris ac aliunde defumptas , 531 * Traité désMatiercs Crimin fuivant l'Ordonnance du mois d' A ou le 1670^ çcTi * Recueil des principale"; Déci fions fut 1rs Matières lienehciales: par M. R. Drapier t $6z Ordonnances des Rois de France < ace , rccuei. lies p r ordre Chronologique par M. Sccoup , 751- M E D I C I. £)i/fertationes Medico - Ch':r:i,ygicd , juxta circulations leges } u4nturt H.tgone Gourraigne , 34 * Aret.ri Cappadocis de C au fis & Signis acmorum & diuturnoruin morborum Libri quatuor , &C. tditionem curavit Hermannui Bocrhawe, 5 Traité de ï Efperance Chrétienne , !kc. Don \e Que lh Fin Je la Table; 75 7 744 74^ 75* 755 757 76-1 7*1 77* 775. Ê-X' *i.