A + * ne î ù D se) pd HAUT TNA nbéhe etes +4 nent ER RR NN PLEASE ie DH F5255 pbs up { M is Mar tr theodud. L + pe He LUE pare cr ï QUT ÿ ut Ji tn va te Cissé FOR THE PEOPEE FOR EDVCATION FOR SCIENCE LIBRARY OF THE AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY y \ \f te \ AU 4 . 1110 \ M k UN RIUTUN LENS : L LE OM INLA VAL A L (nr AVI 1 A "INT M nr ï N ITA 7 qu AE Lt 4 te \ Tan à nt NATURALISTE CANADIEN BULLETIN DE RECHERCHES, OBSERVATIONS ET DÉCOUVERTES SE RAPPORTANT À L'HISTOIRE NATURELLE DU CANADA —— 09 — _— TOME TRENTE-NEUVIÈME (DIX-NEUVIÈME DE LA DEUXIÈME SÉRIE) ——— 06 — — L’abbé V.-A. HUARD, directeur-propriétaire sg QUÉBEC ImMP. LAFLAMME #% PROULX 1912-13 RON CUAEE EE" [# CAR to | MREUNOUATIREN VROLELI ANA UT rer L] 25-doaa1 luane (a d | LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Juillet 19/2 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 1 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard 39e ANNÉE C’est bien, en effet, sa #rente-neuvième année d'existence que commence aujourd’hui le Vaturaliste canadien. Kt comme notre joie de le voir toujours vivant s’accroit, à chacun de ces anniversaires, en raison directe du nombre de ses années, on peut imaginer à quel point notre bonheur devient intense. Pour ce qui est de ces «joies du déficit » dont nous parlions voilà deux ou trois ans, nous ne savons pas encore si le bilan de cette année 1911-12 qui vient de finir nous permettra de les goûter encore une fois : mais nous serons bien surpris si nous n'avons pas de nouveau à en savourer les Âpres d lices. Du reste, nous ne voulons pas insister, aujourd’hui, sur une situation qui est bien connue de nos lecteurs—sinon pour leur dire qu’ils ont en mains la « clef » de cette situation, et qu’ils n’ont qu’à s’en servir pour que s'éclaircisse.. . l'horizon financier du Vasu- yaliste. En effet, pour parler sans image, qu’ils veuillent bien payer leur abonnement, et nous n’aurons plus de déficit à combler, nous serons même, par un léger surplus, un peu rémunéré de notre travail! Car la liste de nos abonnés est assez considérable pour nous permettre de solder, et au delà, 1—Juillet 1972. 2 LE NATURALISTÉ CANADIEN toutes nos dépenses de publication. Et c’est bien parce que nos amis, ces messieurs les abonnés «retardataires », gardent en leur porte-monnaie le dollar annuel qu’ils sont pourtant décidés—en principe—de consacrer au soutien du Naturaliste canadien, la seule revue scientifique qui etc., que etc., dont etc., c’est à cause de cela que, pour soutenir cette œuvre-là, il nous faut tirer toujours des flancs amaïigris de notre porte-monnaie, à nous, (à l’intention de ces bar- baies imprimeurs qui ont bien l'étrange désir d’être payés de leur travail!) des douzaines et des douzaines de dollars que nous n’y avons jamais vu entrer... Voilà, en un parfait raccourci, quelle est la vraie situation de notre magazine. — Si elle est bien saisie par les intéressés, et pour peu que ces intéressés soient des gens d’action, on ne saurait imaginer le nombre des lettres chargées qui, dès la distribution de la présente livraison, vont s’élancer à notre adresse dans les bureaux de poste, mettre en désarroi, par cette avalanche imprévue, tout le beau service postal de Sa Majesté, et inonder nos bureaux de leur flot jusqu’ici inconnu. La seule pensée des heures, soit diurnes, soit nocturnes, qu’il nous faudra consacrer à l’ouverture de ces lettres, à l'enregistrement de ces soldes d'abonnement, à l'établissement d'innombrables accusés de réception, tout cela d'avance nous cause des émotions auxquelles nous ne sommes pas habitué et que nous ne savons comment nous supporterons, le cas échéant. Cela, d’ailleurs, est notre affaire, et ne doit pas toucher ces MM. les retardataires au point qu’ils ne veuillent plus, de peur de rous jeter dans une périlleuse crise sanitaire, nous payer leurs arrérages. Car cela serait vraiment le comble, si l’on allait, pour ne pas nous exposer à mourir de joie, nous laisser périr de faim... Tout en préférant, du reste, mourir de joie que de faim, le Vaturaliste canadien aime encore mieux ne pas mourir du tout, et c’est le sort qu’il choisit, prêt à affronter NOTRE 39B VOLUME 3 tous les afflux de dollars qu’appoitera sur nos rives le flot tumultueux du zèle de nos abonnés... Nous n'avons plus le goût de formuler des programmes d'action pour les volumes que nous commençons. Nous vivrons donc au hasard des circonstances, et cela signifie seulement que nous traiterons ici des sujets qui se présen- teront. Ce n’est d’ailleurs pas cette déclaration qui nous empêchera de revenir, en ces mois prochains, à l'exécution des grands travaux que nous avons jadis commencés ou même seulement projetés — pour peu que les circonstances le permettent, ainsi que nous l’espérons. Nous commençons aujourd’hui à publier le mémoire que les directeurs du Premier Congrès de la Langue française— qui vient de se tenir à Québec et avec un si beau succès, — nous avaient fait l'honneur de nous inviter à préparer pour l’une des sections de cette vaste organisation. C’est donc une étude encore inédite, et sur un sujet qui n’a jamais encore été traité avec l’ampleur requise, lequel entre tout à fait dans le cadre des matières qui sont propres à notre revue. Nous ferons un tirage à part de ce travail—soit pour combler la fameuse «lacune», chère aux jeunes auteurs qui cherchent des excuses à la liberté qu’ils prennent de venir ainsi s'offrir aux lecteurs, soit pour permettre aux quelques Canadiens qui ne sont pas encore abonnés au Naturaliste de satisfaire l’envie qu’ils vont avoir de lire ce mémoire, dès la première nouvelle qu’ils auront de son existence. Ce tirage sera, d’ailleurs, restreint : 1°, pour que la brochure mette moins de temps à passer à l’état de rareté bibliographique et à prendre de ce chef une valeur énorme ; 2°, et surtout, parce que, en attendant, nous n’en vendrons pas ... dix exemplaires! | e OO: — 4 LE NATURALISTE CANADIEN LE LAC PROVANCHER Cenx qui suivent de près les développements de la science de la géographie — et encore de très près, puisque le fait est si récent — savent qu’il se trouve un «lac Pro- vancher » dans la région de l'Abbitibi, qui occupe le nord- ouest de la province de Québec. Grâce aux intelligences qu’il nous arrive d’avoir dans la place, nous savons que ce lac, qui n’est pas sans importance comme site et comme étendue, a reçu ce nouveau nom en mémoire de notre illustre prédécesseur au VNaturaliste canadien. Noussavons aussi, et non sans en éprouver une vive gratitude, que cet hommage rendu à notre grand naturaliste est dû au patriotisme si éclairé de notre ami M. Eug. Rouillard, du ministère des Terres et Forêts de Québec, et membre de la commission de Géographie du Canada. :00 : CONTRE LES « MAUVAISES HERBES » Nous avons reçu de la « Ferme expérimentale centrale » d'Ottawa, «service de la Botanique », un joli carton (de 13 pouces sur 91%), destiné à être suspendu le long d’une muraille, et consacrée à l’Epervière orangée, Aieracium aurantiacum L., dite vulgairement « Bouquet rouge». La plante est représentée, de grandeur naturelle, en gravure coloriée. Dans le texte qui accompagne l’image, se trou- vent des renseignements sur la façon de détruire cette plante qui infeste surtout, croyous-nous, les champs de la région ouest de la Province. Ce carton, placé bien en vue dans les écoles et dans les «salles publiques » des paroisses rurales, rendrait certaine- ment de grands services. LE CONSEIL DE BIOLOGIE DU CANADA 5 Nous n’avons qu’à souhaiter que le gouvernement recoure au même moyen pour encourager la lutte générale contre les plantes et même les insectes nuisibles. Rien ne saurait être plus efficace pour porter rapidement, à la connaissance de tous les intéressés, les informations utiles contre les ennemis des cultures. Aussi, nous applaudissons à l’ini- tiative qui vient d’être prise à la section de Botanique de la Station centrale d’agronomie d'Ottawa, et nous comptons que l’on va y continuer l'emploi d’un procédé aussi efficace pour renseigner les cultivateurs sur les plantes nuisibles du pays. : 00! LE CONSEIL DE BIOLOGIE DU CANADA * (Continué de la page 184, vol. XXXVTTII.) M. SINCLAIR : Le ministre ne doit pas perdre de vue le côté pratique de la question, et je dois dire que jusqu’à présent le bureau n’a guère fait de travail pratique pour nos pêcheries. Tout récemment, le professeur Prince a été entendu devant le comité des Pêcheries et il a expliqué que, les meinbres du bureau n'étant pas rétribués, le départe- ment ne pouvait pas leur assigner tel ou tel travail en particulier, et je considère que ce point est très important. Dans cette affaire des pécheries, il se présente souvent des questions pratiques qu’un bureau comme celui-ci devrait pouvoir résoudre ; la partie scientifique du travail ne laisse rien à désirer et je suis très satisfait de ce que font les professeurs des universités, mais la plus grande partie de ce travail, je suppose, se rapporte à leurs fonctions de professeur et le département a parfaitement raison de leur 1. Chambre des Communes, séance du 7 mars 1912. 6 LE NATURALISTE CANADIEN donner toute l’aide possible. Mais il y a plusieurs ques- tions pratiques sur lesquelles les pêcheurs ne s'entendent pas et sur lesquelles un bureau comme celui-ci pourrait faire de la lumière. Il y a quelques semaines, nous avons discuté, ici même, la question de la pêche au moyen de chaluts à vapeur; et le ministre paraissait être d'opinion que ce mode de pêche ne dépeuple pas les pêcheries, tandis que moi et beaucoup d’autres, qui habitons le littoral, sommes d’un avis tout différent. Si nous pouvions soumettre cette question au bureau et lui ordonner de faire une enquête, comme la chose se pratique en Angleterre où le gouvernement emploie des chaluts de l’État pour mieux se renseigner, nos pêcheurs en retireraient de grands avantages. Il y a encore cette question de la propagation du Homard. Le département des Pêcheries dépose tous les ans à la mer plusieurs millions de jeunes Homards, et les opinions sont très partagées sur la question de savoir si ces petits Homards grandissent. Il me semble que des savants pourraient facilement s'assurer des progrès que font ces jeunes Homards après avoir été mis à la mer. L’'honnorable ministre doit comprendre qu’il est très important de nommer à ce poste un homme pratique abso- lument compétent, avec un traitement raisonnable et qui consacrera tout son temps à ce travail. M. HAZEN : Puisqu'on a parlé de la nécessité d’avoir dans ce bureau des fonctionnaires qui se consacrent exclu- sivement à ce travail, je ferai observer que nous avons dans les différentes parties du pays des Stations biologiques où des observations sont faites journellement, durant la saison, sur toutes les questions qui peuvent intéresser le bureau biologique. Daus toutes ces Stations, il y a des observateurs qui enregistrent minutieusement les observations faites, et les résultats sont communiqués aux membres du bureau. LE CONSEIL DE BIOLOGIE DU CANADA I A l’aide de ces observations et de celles qu’ils ont faites eux-mêmes, les membres du bureau obtiennent des rensei- gnements très précieux. Ces observations se font naturel- lement sous la direction du bureau, qui possède plus de pouvoirs administratifs qu’autrefois. Les fonctionnaires nommés par le bureau seront rétribués, mais le bureau lui-même agira comme conseiller et aura la direction des Stations et du travail qui s’y fait. Si l’on constate plus tard que le travail du bureau biolo- gique donne de bons résultats, on l’installera sur des bases permanentes, et 1l faudra alors un crédit plus considérable que les modestes sommes votées jusqu'à présent par le Parlement. Ce service prendra nécessairement beaucoup de développement. Les remarques de mon honorable ami le député de Guysboro (M. Sinclair), qui s'intéresse aux pêcheries avec beaucoup de zèle et d'intelligence, méritent certainement d’être prises en considération, et je me ferai un devoir de les soumettre au bureau biologique en lui recommandant de donner plus de place aux expériences pratiques. Nous avons actuellement dans le département des fonc- tionnaires chargés du côté pratique de ces questions ; il est naturel qu’il y ait des divergences d'opinion, car lorsque le poisson s'éloigne du rivage et gagne la haute mer, ses habitudes deviennent très peu connues. Mon honorable ami a laissé entendre que je ne considère pas les chaluts à vapeur comme des engins destructeurs des pêcheries. Si mes remarques ont pu être interprétées dans ce sens, elle n’exprimaient pas ce que j'ai voulu dire. Je. suis parfaitement convaincu que la pêche avec des chaluts à vapeur a des effets désastreux, parce qu’elle détruit beau- coup plus de poisson que tous les autres modes de pêche connus. Mon honorable ami a parlé des établissements pour la 8 LE NATURALISTE CANADIEN reproduction du Homard, et s’est demandé si les Homards éclos et soignés dans ces établissements deviennent adultes et contribuent à enrichir les pêcheries. Les opinions sont très partagées sur cette question. Les uns croient que le système actuel ne protège pas suffisamment les jeunes Homards. D'autre pensent le contraire. C’est un problème important que nous travaillons à résoudre, avec bon espoir de trouver la solution. J’étudierai la question avec le président du bureau biologique, pour savoir si, sans nuire au côté scientifique du service, il serait possible de donner une plus grande place aux choses pratiques. (À suivre.) :00 : LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE DANS LES SCIENCES NATURELLES (Mémoire présenté par l'abbé V.-A. Huard au Premier Congrès de la Langue française au Canada. ) On a bien osé parfois affirmer qu’il y a sur terre peu de peuples aussi étrangers que nous aux notions même les plus communes de l’histoire naturelle. Il serait long et difficile d’instituer là-dessus une comparaison un peu sé- rieuse entre les gens des autres nations et les habitants de ce pays. Mais comment croire à priori que le Canadien- Français soit tellement inférieur aux autres en ce domaine des sciences naturelles, lorsque pourtant c’est sur les genoux inêmes de sa mère qu’il acquiert sa première initiation scien- tifique, par exemple: en zoologie... Qui de nous, en effet, n’a pas dès cet âge si tendre, —pour ne rien dire deses rela- tions plus ou moins inoffensives avec le #7770ou, je veux dire avec le petit chat du foyer—qui n’a pas dès lors reçu CRT LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 9 des ouvertures sur les classifications animales. « Viens voir la grosse bibite !»… «Prends garde ! la bibite va te man- ger ! ».. nous disait à l’occasion la maman ou la grande sœur. Et c’est ainsi que, de très bonne heure, sinon d’une manière bien précise, bien directe et bien étendue, nous avons pris nos premières leçons d'histoire naturelle. Par exemple, il faut bien l’avouer, la suite n’a guère ré- pondu à un enseignement aussi précoce. Durant toute l’enfance, en effet, nous n’avons plus entendu parler d’his- toire naturelle, pas même à l’école. Tout au plus et par bonheur, dans les abécédaires, dans les livres de lecture et dans les dictées, quelques bouts de pages se sont rencontrés où il y avait quelque description de l’éléphant, du croco- dile, du vautour, etc., et quelques aperçus sur les mœurs de ces animaux si intéressants. Il y a aussi que l'enfant n’a pas le goût, hors la nuit, de se tenir les yeux fermés, et que, au hasard des circonstances, il est entré en relations personnelles avec certaines objets de la nature. C’est ainsi que, voilà une cinquantaine d’années, les petits Irlandais et nous, les écoliers de Québec, nous faisions de la minéra- logie pratique en nous lançant réciproquement, sans d’ail- leurs jamais nous atteindre, des fragments de roche de com- position variée. Ces relations un peu spéciales des deux races ont cessé depuis longtemps, dans nos rues aujourd’hui pavées en asphalte, où il n’y a donc plus une seule petite «roche » pour permettre à l’enfance d'acquérir des connais- sances sur les propriétés et les usages—au moins quant à la balistique— des substances minérales diverses...Et puis l'enfant des villes, pour ne parler ici que de lui et mettre par conséquent les choses au pis, il a pris forcément con- tact, et de bien des façons, avec le règne végétal. Il a vu les riches floraisons du pissenlit se faire jour à travers les fentes du plancher, dans la cour même de la maison! Il a joué sous l’ombrage des frênes étiques qui bordent parfois 10 LE NATURALISTE CANADIEN les rues, où il a vu d’ailleurs s’aligner, une fois par année, le sapin et l’épinette, le jour de la procession du Saint- Sacrement, et l’érable, le jour de la Saïint-Jean-Baptiste ! Et les têtes à crochets de la rapace ( ou bardane ), quels pro- jectiles incomparables ne fournissent-elles pas à l’enfant en veine de taquinerie ! Quant aux chardons et aux herbes Saint-Jean qui, en nos temps pacifiques, règnent partout sur les fortifications et sur les pentes du rocher de Québec, elles jouent aussi leur rôle dans l'initiation botanique de Penfance.—Pour ce qui est du règne animal, les occasions ne manquent pas, pour le citadin en bas âge, d’en prendre de bonne heure quelque aperçu. Des quadrupèdes, domes- tiques ou non, il en voit plein les rues. Lorsqu'il sauve à temps la mouche qui se noyait dans son bol de lait ou lors- qu’il défend contre elle sa tartine, c’est, bien qu’il s’en rende peu compte, c’est de l’entomologie—oh ! très élémentaire ! —qu'il fait. Et pour ne pas énumérer ici toutes les sciences en gze avec lesquelles il prend un contact si précoce, disons au moins que, autour même de la table de famille, il se livre à la pratique de l’ichtyologie, au moins le vendredi de chaque semaine, et les jours de vigile et de quatre-temps, et ceux de l’avent et du carême. Du reste, elle est jolie, cette ichtyologie qui se fait de la sorte au diner ! A preuve, ce petit Québecauois que j'ai bien connu, il y a un peu plus d’un demi-siècle, qui n'avait jamais vu de morue qu’é- talée dans les barils de saumure, chez l'épicier du coin, et qui n’en revenait pas de voir un poisson d'une construction si extraordinaire : ayant une queue et pas de tête, n'ayant de la peau que sur l’une de ses surfaces, et le tout de forme rigoureusement triangulaire. Que les temps sont changés ! Aujourd’hui qu’il y a des chemins de fer pour apporter dans nos villes les morues que les pêcheurs de la Gaspésie viennent à peine de tirer de l’eau, aujourd’hüi la morue, à l'état encore frais, paraît sur nos tables sous la forme clas- LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE ET ‘sique des poissons ; et l’enfant, de nos jours, n’est plus mys- tifié par l’apparence de raquette qu'avait la morue... du temps de nos pères. Eh bien, —il faut le proclamer haute- ment—voilà au moins une affaire où les systèmes d’indus- trie, de commerce et de navigation sont venus au secours de la science en détresse. Or tout cela, c’est pour dire et prouver en une certaine me- sure que, jusqu’à ces dernières années, notre innombrable po- pulation scolaire échappait absolument à tout enseignement scientifique, même élémentaire ; et même n’a-t-on pas vu, jusqu’à ces tout derniers temps, notre cours classique—si sagement et si fortement organisé, et de l’efficacité duquel nous sommes, vous et moi, et pour cause, si bien convain- cus—n'a-t-on pas vu cet admirable cours classique ignorer absolument qu’il y eût dans l’univers un règne animal... Aussi, puisque le parler réflète d’une façon si fidèle l’état des connaissances chez les peuples et chez les individus, il est facile de deviner que le nôtre n’est encore que dans l'enfance, pour autant qu’il s’agit des domaines scientifi- ques. Et c’est, je pense, ce qui va ressortir du coup d'œil discret que je vais me permettre de jeter, si je puis m'’ex- primer ainsi, sur la langue dont nous usons quand il nous arrive de parler de quelque chose qui relève plus ou moins de l’histoire naturelle. I. —DANS LE RÈGNE MINÉRAL C’est ici, dans les rapports entre la philologie canadienne- française et les choses du domaine minéralogique, c’est ici que nous pouvons nous décerner les honneurs du triomphe. Car, nous pouvons le dire avec fierté, ici, c’est-à-dire en ce qui concerne les minéraux divers et les choses qui s’y rap- portent, ici nous pouvons avoir la conscience én paix et nous glorifier de n'avoir à nous reprocher qu’un tout petit 12 LE NATURALISTE CANADIEN nombre de peccadilles, et encore de peu d’importance. Oui! en minéralogie, au moins, nous parlons un français très pur. Il est vrai—il faut Lien l’avouer—, il est vrai, et cela explique beaucoup l'innocence philologique dont nous jouissons en la matière, il est vrai que notre vocabu- laire canadien-français, concernant les choses de la minéra- logie, n’existe pas ou n'existe qu’aussi peu que possible. Quand nous avons nominé le äiamant, le charbon, l’or, l'argent, le fer, le plomb, l’étain, le pétrole, nous avons épuisé, ou peu s’en faut, toutes nos connaissances des espè- ces minérales. Nous trouvons pourtant moyen de sacrifier un peu à l’anglicisme sur ce terrain quand nous disons, par exemple : 2lombeur pour plombier, de l'or solide, de l’ar- gent solide, de l’utle de charbon—laquelle nous inspire même un joli pléonasme lorsque nous la désignons parfois sous le nom d’Æuzle de pêtrole.— Nous faisons de la vulga- risation scientifique, mais poussée à l’extrême, quand nous donnons si souvent au mot crague—qui n’est français que dans le chapitre des cristaux, en minéralogie, —le sens gé- néral de fissure, de fêlure, de fente, de crevasse.—Il n’est pas jusqu’au «féminisme» qui ne s’introduise même dans notre philologie minéralogique, quand nous parlons de /a belle argent, de la bonne argent: mais cette invasion, hâtons-nous de le dire, n’a lieu que lorsqu'il s’agit d'argent monnayé, exception faite pourtant du terrain de l’économie domestique, qui est bien un peu entamé avec la cuiller d'étain fine.—Pour ce qui est de la chimie, dans ses rap- ports avec la minéralogie, nous aurons épuisé la liste de nos trouvailles sur ce champ d’action, lorsque nous aurons mentionné le caustique, qui désigne chez nous le carbonate de potasse ; la perlasse, par quoi nous entendons la potasse elle-même ; la Drerre bleue, matière qui sert à teindre en bleu, et qui, en dehors de notre parler populaire, dépend plutôt du règne végétal, puisqu'on l’extrait de l’indigotier. RADOUX «LE SOURCIER » 13 — Notre Prerre à moulanges, c’est la pierre meulière ; notre Pierre à chaux, c'est le calcaire ; notre pierre à faux, c'est le morceau de roche dons on se sert pour aiguiser les faux. Et à propos de roches, il faut signaler l'emploi assez fré- quent qui se fait ici de ce mot, pour désigner, ainsi que je l’ai déjà donné à entendre, des petits cailloux ou des frag- ments de pierre.—Enfin, ne sortons pas du règne minéral sans nous arrêter un moment sur le mot «plomb.» Malgré l'abondance des expressions que ce vocable a fournies à la langue française, nous avons encore ajouté à cette richesse, au Canada. Nos pères, que leur isolement et leur éloigne- ment des grands centres obligeaient souvent à exercer pour leur compte tous les métiers, avaient le #ou7/e à plomb poui fabriquer les balles de leurs fusils de chasse, et ils ne manquèrent pas de donner malicieusement le sens figuré à cette expression, en l’appliquant aux personnes dont la figure conservait trop de traces de la variole. Et puis, à l’occasion, fidèles à l’origine normande, ils n’ignoraient pas l’art de vendre du plomb, c’est-à-dire, comme on sait, de se tirer des situations embarrassantes par les réponses les plus évasives du monde. Je n’oserais pas affirmer, sans doute, que cet art de décourager les indiscrets se soit complète- ment perdu dans la suite des années. Et voilà bien, je crois, tout ce qu’il y a à dire de notre parler canadien, relativement au règne minéral. (A suivre.) : 00: RADOUX LE « SOURCIER » FEUILLETON DU « NATURALISTE CANADIEN » ( Continué de la page 191, Vol. XX XVIZTI. ) — Et comment expliquez-vous ?... — Je n’explique pas. Mais poussez-le un tant soit peu, 14 LE NATURALISTE CANADIEN le gaillard vous exposera les idées qu’il s’est forgées sur la nature du sol, sur le régime des eaux : il dissertera sur la topographie; notez qu’il ne sait ni À ni B; tout cela, c'est du bluff; et cet ingénieur consigne ses observations en sa cervelle, seul registre dont il dispose, puisqu'il ignore l’art de la lecture et de l’écriture. Non, c’est à crever de rire ! — Mais, objecta très judicieusement la jeune Mme La- rive, c’est de la science et c’est de l’observation, cette étude des terrains à laquelle se livre Radoux ; cet homme est un intuitif ; il est ingénieur par vocation et sans le savoir... Pourquoi y voir du bluff? Les vrais ingénieurs procèdent- ils autrement ? ils étudient surtout dans des livres ; Radoux étudie à même la nature; c’est peut-être la meilleure mé- thode. M. Charvet, qui se plaît à pontifier, goûta fort peu cette contradiction sortie d’une bouche féminine, jeune et un peu railleuse ; il demeura, quelques secondes, interloqué; fort heureusement, la baguette, la ridicule baguette divinatoire, s’offrit à lui comme une perche de sauvetage. — Et la baguette de coudrier, Madame, y voyez-vous un fait scientifique ? et la vieille montre d’argent qui se balance, ou plutôt que ce farceur balance au bout de sa chaîne, est- ce de l’observation? J'admets, pour vous faire plaisir (1l s’inclina avec la grâce d’un ours qui danse) que cette con- naissance approfondie que possède Radoux de chaque pli de terrain, de chaque ruisselet, soit quelque chose de positif et qu’il en sache tirer les déductions pratiques à l'apparition de la montre et de la baguette ; je ne m’insurge pas moins, au nom du bon sens, contre le bluff et l’évident esprit de su- percherie. je le demande: quei rapport existe-t-il entre une eau souterraine et le bois fourchu d’un coudrier? entre cette eau et un pendule métallique? Car cette montre, qui soi-disant oscille d’elle-même, n’est pas autre chose qu’un pendule... truqué. | | PUBLICATIONS REÇUES SI — Les savants pourraient peut-être répondre à votre ques- tion dans un sens ou un autre, hasardai-je, s’ils daignaient contrôler Radoux et ses pareils ; puis, au cas où le fait maté. riel serait établi, s’ils en recherchaïent les causes scientifi- ques... — Croyez-vous, s’indigna M. Charvet, que des physiciens et des ingénieurs voudront se commettre avec Radoux ? — Je ne le crois pas, Monsieur, dis-je avec conviction. — Alors ? — Alors, périsse la science ! plaisanta M Larive. — Pardon, Madame, périssent les imposteurs et la rabdo- mancie ! fit M. Charvet avec une gravité pédantesque. On a beau 1épéter que souvent femme varie ; on a beau se cuirasser contre toutes les surprises, certaines voltes-faces sont tout de même ahurissantes : je restai bouche bée quand, le lendemain matin, à peine éveillée, Louise déclara, pé- remptoire : — Tu sais, chéri, nous retournons dans ce joli petit coin d'ombre, sous le bouquet d’arbres au bord de la prairie ; sûrement, Radoux y sera ; je veux revoir ses manigancesy c'est si amusant ! NOEL FRANCÈS. (A suivre.) rt —— PUBLICATIONS REÇUES —Vol. XI, Bulletin of the Geological Institution of the University of Upsala, edited by Hj. Sjogren. Upsala, 1912. Avec illustrations dans le texte et hors texte. Les mémoires contenus dans ce volume sont écrits soit en anglais soit en suédois. —(Lioyd Library, Cincinnati, Ohio.) PBrbliographical Contributions. Fascicule donnant le catalogue des ouvrages de botanique d'Italie, d’Es- pagne et d’autres pays européens de moindre importance. 16 LE NATURALISTE CANADIEN Synopsis of the Stipitate Polyporoïids, by C. G. Lloyd. Brochure illus- trée à protusion, comme les autres monographies de champignons pu- bliées par la même institution. Elle est dédiée, avec portrait hors texte, à l’abbé G. Bresadola, de Samoa, Océanie, lequel, au jugement de M. Lloyd, est le connaisseur le plus compétent des Polyporoïdes de l'étran- ger. —(Ministère des Mines. Canada.) Æeconnaïissance géologique de la région traversée par le chemin de fer Transcontinental national entre /e lac Nipigon et le lac Clay, Ont., par W. H. Collins. Ottawa, 1911. — Rapport du ministre de l'Agriculture pour 1910-11. Ottawa, 1912. Comme ouvrage disparate, ce volume est un modèle. On y trouve de l’entomologie, de la botanique, de la chimie, de l’hygiène, et jusqu’à un rapport sur les Archives canadiennes, —Pour ce qui est de la botanique et de l’entomologie, on traite des insectes et des plantes nuisibles, pour l'exercice 1910-11. —La Pêche du Homard. Témoignages donnés devant le commandant W. Wakeham, préposé des pêcheries de la division du Golfe, dans la province de Québec et les provinces Maritimes. Vol. I. Ottawa, 1911. Ce volume est le rapport d’une enquête ordonnée par le gouvernement fédéral, en 1909, sur la pêche du Homard. — The Canada Year Book 1909. 2nd Series, Oftawa. 1910. La revue des événements de l’année, qui se trouve en tête du volume, . est d’un grand intérêt historique. — Fermes expérimentales, Rapports. 1911. Ottawa. Illustré de planches hors texte très intéressantes. Les rapports de l’entomologiste et du botaniste du Dominion sont rem- plis de détails importants sur les maladies des plantes et sur les insectes nuisibles. Un fait très intéressant, que nous glanous dans le rapport de l’entomologiste, le Dr C. Gordon Hewitt, c’est l’importation du parasite { Mesoleius aulicus Grav.) qui arrête, en Angleterre, les ravages de la Mouche à scie du Mélèze ( ZLygæonematus erichsonii Hartig). Cette importation se fait au moyen de cocons «parasites » de cette Mouche. C’est celle-ci qui a détruit tant de nos Kpinettes rouges ; et elle sévit en- core, dit M. Hewitt, dans tout l'Est du Canada. Cette importation d’un parasite de l’étranger est la première qui s’est faite en Canada, à notre connaissance. D’autre part, un autre ennemi de l’Epinette, dont il ré- duit les bourgeons en poussière, la 7or/rix fumiferana Clemens, et qui abondaïit ces années dernières depuis le Témiscamingue jusqu’au lac Saint-Jean, aurait aussi trouvé des adversaires en certains Braconides, et aussi dans la ÂVasonia lortricis Brues, parasite trouvé par M. Arthur Gibson, l'assistant du Dr Hewitt. 2-( Commission de la Conservation, Canada. ) Les Forces hydrauliques dn Canada, par L.-G. Denis et A.-V. White. Ottawa, 1911. Avec cartes géographiques. Volume in-80 de 424 pages, abondamment illustré de gravures repré- sentant les principales chutes et cascades des provinces canadiennes, et de plusieurs installations de forces motrices. — Proceedings of the California Academy of Sciences. 4th Series, Vol. I-III (passim.) Cette publication savante contient des études et des rapports d’explo- ration de grand intérêt. —— :00 :-— LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Aout 1912 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 2 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard LES SECTIONS SCIENTIFIQUES DE LA SOCIÉTÉ ROYALE DU CANADA ET LES CANADIENS-FRANÇCAIS Il y aurait beaucoup à dire, à divers point de vue, du discours que l’honorable M. Pascal Poirier, membre du Sénat canadien, a prononcé au cours de l’une des séances générales du Congrès de la Langue française qui s’est tenu à Québec, à la fin du mois de juin. Ce discours, qui ne peut certainement pas être taxé de banalité, était de nature, par la hardiesse de sa manière, à frapper vivement les esprits, comme il n’a d’ailleurs pas manqué de faire. Plus d’un des tableaux tracés par l’orateur, plus d’une de ses assertions, pourraient être relevés; et nous sommes étonné que notre presse ne l’ait pas fait, retenue proba- blement par quelque sentiment—exagéré—de courtoisie à l'égard de l’un de nos sympathiques frères acadiens, en ce moment l’hôte de Québec. Pourtant, l’«hôte» ne s'était pas gêné, lui, d'apprécier à sa manière la situation, particu- lièrement, de l’enseignement dans la Province. En tout cas, ce n’est pas notre affaire, à nous, dans cette revue, de traiter de la plupart des questions soulevées par M. Poirier. 2—Août 1912. 18 LE NATURALISTE CANADIEN Par exemple, nous avons droit d'examiner ici les considé- rations qu’il a exposées sur notre situation, au point de vue scientifique, dans la province de Québec. Nous allons citer, du discours de l’honorable M. Poirier, les passages où il est question de ce que nous sommes et de ce que nous faisons sur le terrain scientifique. Après avoir signalé notre position, «au point de vue de la chose politique» et dans «le domaine public», l’orateur con- tinue (1): « Dans une sphère plus élevée, nous voyons, et cela est dû au défaut d'enseignement supérieur et d’écoles techni- ques, les premières places et les plus influentes, les situa- tions les plus lucratives et les plus honorables, remplies, presque toutes, par nos concurrents. Et voici ce qui est le plus sérieux : le grand effort scientifique qui arrache à la nature ses trésors bienfaisants pour les répandre, ainsi que le bon Dieu l’a préordonné, sur les miséreux aussi bien que sur les puissants et les privilégiés ; qui a changé la face du monde, qui fait le monde plus heureux et meilleur, l’école anglaise et protestante des Etats-Unis et du Canada en réclame l’honneur et les fruits. Le vol des chercheurs et des découvreurs, en biologie, en chimie, et dans les autres sciences naturelles dont jusqu’à la nomenclature nous est à peu près étrangère, passe presque inaperçu, au- dessus de nos têtes. D’autres promènent le flambeau, ouvrent des avenues nouvelles à l’activité humaine, tandis que nous nous attardons aux portes des cimetières, tournés vers le passé qui nous hypnotise, et regardons dormir les grands morts glorieux de notre histoire, nous berçant de l'illusion que c’est tout ce que nous avons à faire pour devenir grands et glorieux comme eux. » Nous ne dirons certainement pas, à l'encontre de M. Poirier, que nous tenons brillamment notre rang dans le 1. Nous tirons nos extraits du texte publié par /a Justice, d'Ottawa, en son numéro du 6 juillet, … mit LA SOCIÉTÉ ROYALE 19 domaine des sciences naturelles, après que tant de fois dans cette revue, l’abbé Provancher et nous, nous avons expri- mé nos regrets de voir l’étude de l’histoire naturelle rece- voir si peu d'attention chez les Canadiens-Français. Toute- fois, nous ne désirons pas revenir aujourd’hui sur ce sujet, et nous résistons même à la pensée de faire l’examen un peu serré de quelques-unes des affirmations de M. Poirier, entre autres de cette proposition fort risquée que « le grand effort scientifique » d'aujourd'hui « fait le monde plus heu- reux et meilleur ». Mais c’est d’un autre passage du discours de M. Poirier que nous voulons nous occuper. Après avoir dit sa crainte « que nous n’ayons reculé de- puis cinquante ans » dans ce qu’il appelle « le domaine dela langue française elle-même », et par quoi il entend la litté- rature et l’histoire, il poursuit en ces termes : « Dans la section géologique et biologique de la Société royale, nous avions un Canadien que nous nommions avec fierté, chaque fois qu’on nous disait que les sciences appli- quées ne sont pas enseignées dans ies institutions fran- çaises de la province de Québec et de l’Acadie, Mgr La- flamme, un géant sorti de l’Université Laval, l'honneur de ses concitoyens et l’une des gloires de l'Eglise du Canada. « Mgr Laflamme est mort, et c’est un Anglais, un pro- testant, qui l’a remplacé. Sur quatre-vingt ou quatre- vingt-dix fauteuils réservés aux deux sections scientifiques de la Société royale, la troisième et la quatrième, soixante et huit sont occupés par des Anglais et trois par des Fran- çais. Encore, sur ces trois Français, l’un, le capitaine Deville, est-il de France, l’autre, le docteur Ami, de Suisse. Un seul, Mgr Hamel, est canadien-français. « Et l’on n’est ni exclusif, ni intolérant dans le monde des sciences. » Il nous paraît, d’après le reste du discours de M. Poirier, que sa pensée est celle-ci: si nous sommes représentés, 20 LE NATURALISTE CANADIEN dans les deux sections scientifiques de la Société royale, le moins possible: soit uniquement par un vieillard qui depuis dix ans ou plus, après une carrière certes très mé- ritante, n’a plus guère quitté le lit où le retiennent sa dé- bilité et ses infirmités, cela est dû à ce qu’il n’y a personne parmi nous qui ait les qualifications requises pour être admis dans cet unique corps scientifique du Canada. Eh bien, nous croyons, nous, que si les Canadiens- Français se trouvent pratiquement exclus des sections scientifiques de la Société royale du Canada, cela est dû à toute autre chose qu’au manque absolu de candidats de leur nationalité qui soient qualifiés pour en faire partie. Et pour disposer tout de suite de ce point — tout en nous tenant nous-même à l’écart, ainsi que la modestie nous en fait le devoir, malgré la vingtaine de volumes qu’il nous est arrivé de publier sur les matières scientifiques —, nous demandons si, parmi les sept douzaines de membres des sections dont il s’agit, il s’en trouve beaucoup qui aient plus de titres que les collaborateurs anciens ou nouveaux du Vaturaliste canadien à faire partie de ce corps savant. Nommons d’abord ici M. C.-E. Dionne, le savant conser- vateur du musée de l’Université Laval, l’auteur des Oz- seaux et des Mammifères de la province de Québec, et de nombreux articles dans les revues scientifiques. Nommons aussi M. Germain Beaulieu, MM. les abbés F.-X. Burque, El. Roy, P.-A. Bégin, M. J.-C. Chapais, M. J. Chagnon, dont nos lecteurs connaissent déjà les mérites au point de vue scientifique. Comment donc aurait-on sujet de dire que, si nos compatriotes ne figurent à peu près pas sur la liste des membres des sections scientifiques de la Société royale, la cause en est que nul d’entre eux n’a les qualifi- cations requises pour y être élu ?. Mais précisément, on ne peut entrer que par la voie élective dans la Société royale. Et voilà le point où nous LA SOCIÉTÉ ROYALE 21 allons apercevoir comment il se fait que si peu des nôtres en font partie À titre scientifique. En effet, étant donné que nos compatriotes de langue anglaise donnent beaucoup d’attention et d'importance dans les programmes de leurs maisons d'enseignement aux sciences naturelles, et que, par suite, ils comptent relativement beaucoup d'amateurs et même de professionnels de cessciences, il n’est pas étonnant qu’ils aient parmi eux, en grand nombre, des candidats aux sièges des sections scientifiques de la Société royale, et donc, qu’ils aient acquis, et pour longtemps, la grande majorité des sièges de ces sections, qui, d’après la constitution même de la Société, sont communes aux deux langues officielles du Canada. Lorsque quelque siège devient vacant dans ces sections, comme les titulaires de langue anglaise trouvent facilement chez leurs compatriotes des hommes qu’ils con- naissent bien et qui incontestablement méritent d’être ap- pelés à faire partie du corps savant: 1is les proposent aux votes de leurs collègues et les font élire sans difficulté. D’au- tre part, nos frères anglophones, dont la plupart ignorent le français, ignorent non moins profondément tout ce que nous pouvons faire, dans la province de Québec, dans le domaine des sciences naturelles. En outre, pour aller au fond de la question, il faut en- core encore en cette affaire tenir grand compte de la diffé- rence de mentalité qui existe entre les deux races.— Sup- posez que, dans les sections scientifiques dont il s’agit, la majorité des membres soit de race française. Eh bien, il arriverait certainement, dans le cas d’une vacance surve- nant parmi les membres anglais, que leurs collègues fran- çais, loin d’avoir l’idée d’y appeler quelqu'un de leurs com- patriotes, se mettraient en quatre pour chercher, dans quel- que coin des provinces-sœurs, s’il n’y aurait pas quelque adep- te des études scientifiques qui pourrait prendre la place laissée vacante par le décès du collègue de langue anglaise. Par 22 LE NATURALISTE CANADIEN contre, dans l’état présent des choses, où les Anglais occu- pent à peu près tous les sièges, ils ne songent seulement pas, dans le cas d’une vacance, à se demander si nous avons notre part dans la partie scientifique de la Société royale. Il y a un siège vacant, et d’autre part ces messieurs con- naissent nombre des leurs qui ont des titres à l’occuper: cela suffit, et l’élection d’un collègue de langue anglaise ne tarde pas. C’est là pure affaire de mentalité, et, nous en sommes convaincu, il n’y a là aucun esprit d’intolérance ou d'esprit d’exclusivisme. Car nous connaissons le carac- tère anglais pour être fait de courtoisie, de loyauté et de générosité : c’est là notre appréciation, telle que nous l’avons formée d’après les relations que nous avons eues depuis longtemps avec les naturalistes de langue anglaise du Ca- nada et des Etats-Unis. Et « voilà pourquoi votre fille est muette », c’est-à-dire, en l'espèce, voilà qui explique comment il a pu arriver que les quelques membres de langue française qui ont fait par- tie, dans le passé, des sections scientifiques de la Société royale, ont été remplacés par des titulaires de langue an- glaise.— Il y aurait lieu de se demander, aussi, si les titu- laires de langue française ont fait quelque chose, lors du décès de quelqu'un des leurs, pour assurer sa succession à un compatriote de même langue. Nous posons cette question, bien que nous sachions que l'élection de l’abbé Provancher, qui avait refusé de faire partie de la Société royale lors de sa fondation, ait été faite sur l’initiative de feu Mgr Laflamme, et bien que nous n’ignorions pas non plus un autre cas où notre ami défunt a fait une autre tenta- tive, celle-là non couronnée de succès, pour faire élire à un siège vacant de la Société royale l’un de nos «scientistes » canadiens-français. En tout cas, nous croyons que nous avons donné dans les pages précédentes les vraies raisons de l’absence quasi LA SOCIÉTÉ ROYALE 23 totale de noms canadiens-français sur la liste des membres des sections scientifiques de la Société royale. Personne de chez nous n’admettra, pensons-nous, que c’est la thèse exposée par l'honorable M. Poirier, au Congrès de la Lan- gue française, qui soit la juste explication de l’éclipse dont nos compatriotes sont victimes au ciel de la Société royale. Après cela, ajouterons-nous, il y a longtemps que cette question de la représentation française, au titre scientifique, dans la Société royale du Canada, s’est imposée à notre attention. Nous prévoyions que l’on pourrait quelque jour tirer argument de notre exclusion — en pratique, c’est bien cela — de la docte société pour conclure de là que nous n'avons personne chez nous qui soit digne d’y être admis. Seulement, nous étions loin de penser que ce serait l’un de nos frères acadiens qui userait le premier du pauvre argu- ment, et cela dans une circonstance aussi solennelle que celle de notre beau Congrès de la Langue française — avec la conséquence que le compte rendu du Congrès, après la presse du pays, va enregistrer et porter partout, jusqu'à la postérité ! en reproduisant le discours de M. Poirier, l’asser- tion très fausse qu’il n’y a pas un Canadien-Français d’éli- gible au titre scientifique à la Société royale ! Eu tout cas, nous sentions bien qu’il était de notre de- voir, en qualité d’unique organe scientifique de la Province, de protester contre |’ «exclusion » des gens de langue fran- çaise des sections scientifiques de la Société royale. Seu- lement, nous avons différé de parler de la question, toujours empêché, nous l’avouons, par la crainte que l’on ne s’écrie en nous entendant: « Tiens ! Voilà l’abbé Huard qui veut se faire recevoir de la Société royale! »— bien que nous n’apercevions pas ce qu’il y a de particulièrement suave dans la perspective dont il s’agit... Mais voilà que, ces temps derniers, nous avons appris que récemment on avait décidé d'augmenter le nombre 24 LE NATURALISTE CANADIEN des membres de la Société royale, et que tous les sièges additionnels des sections scientifiques avaient été donnés exclusivement à des titulaires de langue anglaise. Eh bien, cela nous a paru excessif et mettre le comble à l’in- justice — matérielle, sinon formelle. Cela nous a fait voir que, au train dont sont parties les choses, il est «pratique- ment », quoique, bien sûr, non formellement, réglé que, en ce qui concerne ies sections scientifiques dont nous parlons, «no French need apply!» suivant la formule que l’on en- tend quelquefois. L’injustice pratique de cette situation pour la population française du Canada nous paraît telle, que, faisant abstraction de tout sentiment personnel, nous devons à la fin élever la voix et réclamer justice pour les nôtres, sur ce terrain scientifique. C’est pourquoi le AVa- turalste canadien prend occasion des paroles de M. Poirier pour soulever aujourd’hui la question ; et il continuera de faire entendre ses protestations tant que justice n’aura pas été rendue. Assurément, nous ne pouvons pas prétendre, dans l’état présent des études scientifiques en cette Provin- ce, à voir les nôtres occuper, dans les sections dont nous parlons, tous les sièges, c’est-à-dire peut-être le tiers, aux- quels notre force numérique nous donnerait droit. Mais au moins que tous ceux des nôtres qui ont les qualifica- tions requises reçoivent cette distinction de faire partie de la Société royale — ce qui est à peu près la seule marque honorifique que les hommes de science peuvent attendre en notre pays. Nous tenons à affirmer, encore une fois, et «emphatique- ment » comme disent certains de nos écrivailleurs, que nous n’attribuons nullement la situation que subit, en cette question, l’élément français de la population canadienne, à quelque sentiment de parti pris ou d’exclusivisme de race, de la part des titulaires de langue anglaise de la Société royale. Encore une fois, nous sommes absolument con- LA SOCIÉTÉ ROYALE 25 vaiucu qu’il n’y a là, chez eux, qu’ignorance absolue de ce qui se fait chez nous, en français, dans le champ de la science. Nous croyons, de plus, que, mis au fait de la question, ils admettront parfaitement le bien fondé de notre réclamation. Pour preuve de ce que nous affirmons là, nous dirons qu'avant de traiter de cette affaire dans le Vaturaliste ca- nadien, nous avons eu soin d’en informer deux de nos col- lègues de langue anglaise du Conseil de Biologie du Cana- da et de leur demander leur avis sur la question, tant nous voulions éviter de leur causer au moins de l'ennui: nous n’avons, en effet, comme nous l’avons déjà dit ici, qu’à nous louer de l’aménité et de la délicatesse qui président à nos relations avec les membres de ce Conseil. Eh bien, ces deux messieurs, qui tiennent haut rang parmi les repré- sentants de la science au Canada, et qui appartiennent eux- mêmes à la Société royale, nous ont dit qne nos réclama- tions étaient parfaitement justes, et ont même regretté qu’il fût trop tard cette année pour qu’il en soit dès maintenant tenu compte. Nous avons donc lieu de croire qu’il ne s’écoulera pas beaucoup de temps avant que nos compatriotes de langue française occupent la place qui leur convient dans les sec- tions scientifiques de la Société royale. En tout cas, le Vaturaliste canadien, qui croit remplir un devoir national en soulevant une pareille question devant notre public, ne cessera pas de s’en occuper tant que les nôtres n'auront pas obtenu là-dessus justice com- plète. Mais la tâche lui sera facile, s’il est vrai, comme nous le pensons, qu’il suffit, pour obtenir le suffrage des membres de langue anglaise de la Société royale, de les mettre au fait de la situation qui nous est faite, à nous Canadiens-Français, dans ce corps savant qui, d’après sa constitution, doit être bilingue. Nous le verrons bien, 26 LE NATURALISTE CANADIEN d’ailleurs : car la présente livraison du Naturaliste cana- dien va leur être expédiée à tous, pour que chacun d’eux ait connaissance de la réclamation que nous formulons aujourd’hui dans l'intention, la plus désintéressée qui soit, de faire cesser la sorte d’humiliation qui, par le fait et in- justement, se trouve infligée à nos compatriotes de langue française sur... le théâtre scientifique du Canada. Après ces longues considérations, nous laissons au lec- teur le soin de se prononcer entre la thèse de l'honorable M. Poirier et la nôtre, aussi bien que celui de juger du plus ou moins d’à-propos et de sagesse avec lesquels il a posé la question devant l’opinion publique, au Congrès du mois de juin dernier. — Il y a pourtant encore un mot que nous voulions relever dans le discours du brillant orateur acadien. Parlant de feu Mgr Laflamme, M. Poirier le qualifie « un géant sorti de l'Université Laval.» Ceux qui ont bien connu Mgr Laflamme, et qui savent à quel point il avait le sens du ridicule, peuvent seuls imaginer combien il se serait amusé de se voir ainsi traiter de géant !... Nous n’avons pas l'honneur de connaître personnellement M. Poirier ; mais ce détail nous porte à croire que la mesure n’est pas du nombre des belles qualités qui le distinguent. Certes, nous croyons que le regretté Mgr Laflamme, qui fut en effet, comme a dit M. Poirier, «l’honneur de ses conci- toyens et l’une des gloires de l'Eglise du Canada», possé- dait une science très étendue, et surtout qu’il a été un pro- fesseur absolument remarquable. Mais qualifier de «géant » de la science un homme qui n’a laissé, comme œuvres scientifiques, qu'uu manuel d’histoire naturelle, quelques plaquettes et quelques articles de revue: cela est d’une belle exagération. Quels termes l'honorable M. Poirier trouverait-il donc dans les langues humaines pour appré- cier, par exemple, les illustres Linné, Cuvier, et même notre LA TEHRMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 27 abbé Provancher qui, avec des moyens si restreints, a su le premier, et le seul, traiter de presque toutes les parties de l’histoire naturelle du Canada?... Avouons que, en cette affaire, si l’orateur avait assurément la meilleure in- tention du monde, son verbe l’a trahi «dans les grands prix ». LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE DANS LES SCIENCES NATURELLES (Mémoire présenté par l'abbé V.-A. Huard au Premier Congrès de la Langue française au Canada. ) (Continué de la page 13.) II.—DANS LE RÈGNE VÉGÉTAL Quant au règne végétal, il fournit à notre langue popu- laire une moisson vraiment riche de termes pittoresques et parfois bien jolis, de mots douloureusement estropiés, et à peine quelques emprunts faits au parler anglais: voici donc aussi, chez nous, la botanique qui, plus encore que la minéralogie, a su victorieusement résister à la «tyrannie » du conquérant. Comme on sait, il y a en botanique et en zoologie une terminologie particulière, en langue latine, que l’on peut qualifier d’internationale, puisqu'elle est acceptée, dans son intégralité, chez toutes les nations. Chaque espèce, ani- male ou végétale, reçoit ainsi, du savant qui l’a décrite le premier, un beau nom latin, composé de deux ou trois mots dont l’un au moins—chose admirable !—est généra- lement tiré du grec ; et par là chacune des espèces acquiert 23 LE NATURALISTE CANADIEN comme une sorte de personnalité qui fait que, éteinte ou non, elle sera partout connue sous tel ou tel nom, et cela ‘jusqu’à la fin des siècles, ce qui est déjà joli pour un mou- ron, pour une guêpe, pour une hirondelle, etc. Mais, bien entendu, cette terminologie-là n’a cours que chez les gens qui s'occupent, plus ou moins «technicologi- quement », de l’étude et de la pratique des sciences. Les autres, le gros de l’humanité, ignorent profondément les appellations grecques et latines des planteset des animaux ; et il n’y a rien là qui doive surprendre, pour des raisons faciles à deviner. (C’est même le contraire qui serait éton- nant. Car on n’imagine pas, par exemple, un cultivateur qui dirait à son voisin : «Ah ! quel dommage que le foin de votre champ soit ainsi gâté par ces CArysanthemum leucanthemum ( marguerite blanche) !»—On n’imagine pas la bonne dame disant à sa visiteuse : « Voyez, ma chère, comme il a bien poussé, mon Aesembryanthemum cristal- linum (cristalline, glace) »—On n’imagine pas la ménagè- re se plaignant de voir ses provisions visitées par les ,S/y/o- piga ortentalis (blatte, barbeau de cuisine) —On n’ima- gine pas l’amateur de pêche qui raconterait ses belles cap- tures de Sa/mo salar (saumon) ou de Sa/mo jfontinalrs (truite )! Eh bien, voyons dans un rapide coup d'œil comment chez nous l’on s’en est tiré, d’abord pour les espèces végé- tales, en cette question de terminologie, puisqu'il est bien nécessaire qu’il y ait des mots pour désigner les choses ... On s’en est tiré de la façon la moins compliquée qui soit, puisque l’on s’est contenté — beaucoup comme, ainsi que je l'ai dit, on a fait en minéralogie — de respecter en une mesure même exagérée l’incognito de nos plantes canadi- ennes. La plupart, en effet, de nos végétaux n’ont pas de nom dans notre parler. Il est permis de croire, du reste, que les choses se passent à peu près de la sorte, à cet égard, LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 29 chez tous les peuples, et qu'ailleurs, comme chez nous, l’on n’a donné des noms qu'aux plantes qui, pour une raison quelconque, attirent davantage l'attention. (C’est ainsi que, dans tous les pays, les arbres les plus grands, les plus beaux ou les plus utiles, sont pourvus de noms particuliers et généralement exacts. Je citerai, comme exemples de ce fait, pour ce qui nous concerne, le chêne, le sapin, le marronnier, le tilleul, le lilas, le pommier, etc. A ces arbres correctement désignés, et dont la liste serait courte à dresser, il faut ajouter un petit nombre de plantes très répandues partout, et celles qui sont, pour ainsi dire, « domestiquées »: je veux dire les céréales, les légumes, les plantes d'ornement qui couvrent les plates-bandes du jardin ou qui décorent la fenêtre jusque de l’humble maisonnette. A part ce groupe encore assez restreint de végétaux qui ont de la sorte une espèce d'état civil nettement établi, il y a, à travers la grande masse des anonymes, un certain nombre de plantes qui sont désignées chez nous par des noms parfois jolis, comme je disais voilà un instant, parfois pittoresques, parfois étranges, parfois bien expressifs. Mais, hâtons-nous de le signaler, voici au moins un domaine où l’anglicisme n’a pas même commencé son invasion : toutes nos plantes ont des noms —si l’on peut dire — à « visage » français. Sile mahogany (acajou), la peanut (arachide) et le sago (sagou) figurent dans notre langage, c’est à titre de plantes exotiques, et ce sont, je crois, les seuls mots an- glais qui existent dans notre classification botanique vulgai- re, avec, il est vrai, le barley (orge perlé) de laisoupe fami- liale. Il y a bien les langues indigènes du pays, qui subsistent dans nos listes de plantes par l’a/oca (canneberge), le mascouabina (cormier, sorbier), et le fz»b1na (espèce de viorne). Mais la classification botanique populaire s’est enrichie 30 LE NATURALISTE CANADIEN chez nous de plusieurs dénominations nouvelles; dont je cite- rai les suivantes : la Plaine, pour désigner l’une des espèces de l’érable ; la catherinette, ainsi que parfois nous nommons ici la mûre ou la 1once; la swrette, qui n’est autre que l’o- seille. Chez nous, la ciguë est devenue la carotte à moreau ; le radis, c’est ici la rave; à la bardane, nous avons donné le nom curieux de rapace ; le maïs, quiest en Francele blé de Turquie, est ici le 4/6 d'Inde. Maïs voici où éclate notre esprit de logique d’une façon particulièrement brillante, Là-bas, «au vieux pays », le fruit de l’aubépine se nomme senelle ; eh bien, nous autres, nous nous sommes dit : quand on produit des pommes, on s'appelle pommier, n’est-ce pas ? quand on produit des prunes, on s'appelle prunier, n’est-1l pas vrail Foin donc (puisque nous parlons botanique), foin donc de l’aubépine! Comme cet arbrisseau produit des senelles, qu’il s'appelle donc sezellier ! Et voilà comment il n'y a plus que les poètes qui emploient chez nous, sans trop, j'en ai peur, bien savoir ce que c’est, le joli mot d’au- bépine. Du reste, l’arbrisseau en question est armé d’épines, et nous le désignons tout simplement, en certaines régions, sous le nom d’épines. Sans compter que, comme 1l pro- duit des fruits auxquels, à cause de leur forme, nous avons donné le nom de pommettes, nous n’avons pas manqué, tou- jours par esprit de logique, d’en faire un pommettier. Et, à ce propos, signalons que la pomme de Sibérie est devenue chez nous la pomme d'amour. La poulette grasse dans nos prés verdoyants, ce n’est pas le jeune volatile de la basse- cour, espoir du prochain potage ; maïs, tout simplement, c’est le Chenopodium ciospernum—pardon, je voulais dire l’ansé- rine blanche. Dans notre royaume végétal, la gzenourille ne sert pas à filer la laine, le lin, le chanvre; le wafelas ne sert pas à reposer les membres fatigués du dormeur: ces deux termes désignent seulement, l’un et l’autre, une plante de nos marécages, la massette. Voilà donc un végétal à PUBLICATIONS REÇUES 31 propos de qui l’on ne saurait assez s’affliger de voir qu’il porte à lui seul jusqu’à trois noms français. Où en serions- nous, si les autres plantes faisaient une consommation pa- reille de dénominations? Dans le cas présent, c’est le végé- tal qui a tort; il a tort de donner, par son épi floral, l’idée de trop de choses à la fois : d’une petite massue, de la filas- se enroulée sut la quenouille, de la bourre dont l’on rem- plit des coussins ! (A suivre.) OO PUBLICATIONS REÇUES —( Ministère de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries, Québec.) Matane-Matapédia, province de Québec. Avec cartes. Par Alfred Pel- land, publiciste du Ministère. Québec. 1912. Belle brochure, illustrée à profusion, sur «les ressources, les progrès et l’avenir » de la belle région Matane-Matapédia. Il s’y trouve, outre les renseignements utiles au colon, une quantité de faits qui auront un jour leur importance pour notre histoire nationale. — Rapport annuel du département des Affaires des Sauvages (1910-11 ). Ottawa. 1912. Il faut près de 8oo pages pour contenir ce Rapport, et cela prouve qu’on s'occupe, chez nous, des intérêts des premiers habitants du Canada. —(New York State Museum.) 27/4 Report of the Slate Entomologist on injurious and other Insects of the State of New York, 1911. Albany, 1912. Les rapports de l’institution dont il s’agit jonissent d’une réputation méritée. Dans celui-ci, 27 planches hors texte, représentant un certain nombre d'insectes nuisibles et les ravages qu’ils causent, sont d’un inté- rêt considérable. —(Biological Survey, N. Am. Fauna, 33.) 4 Biological Survey of Colorado, by Merritt Cary. Washington, 1911. Dans la partie de cette publication qui étudie l’effet des caractères physiographiques et climatériques du Colorado sur la distribution de la faune et de la flore, il y a un chapitre sur les mammifères, les oiseaux, les plantes et les reptiles du Canada. 32 LE NATURALISTE CANADIEN —43r74 Annual Report of the Trustees of The American Museum of Natural History. New York, 1912. Ce rapport annuel, illustré de belles gravures, donne une idée de ce qu'est ce grand Musée de New-York. Nous y voyons que cette institu- tion reçoit en dons beaucoup de spécimens, alors qu’il est très rare que notre Musée de l’Instruction publique de Québec se voie l’objet de pa- reilles faveurs. Pourquoi cette différence? Nous étudierons quelque jour ‘ cette question. — Annual Report of the U. S. National Museum, 1911. Washington, 1912. Ici encore, nous voyons uve longue liste dé spécimens offerts au Mu- sée par diverses personres.—La liste des publications du Musée, durant l’année, est d’une abondance étonnante. — Bref och skrifvelser af och till Carl von Linné. Stockholm. 1912. Tout ce que nous pouvons dire, et pour cause, comme on le devine, de cette belle publication de l’Université royale d'Upsala, c’est qu’elle est une édition de la correspondance de Linné. :00 : RD 3 Lu A EP do nd ie DL CR LA di Pot: (9 Le Ads LE An AE AR LL an dE LE LE COURS ABRÉGÉ D'HISTOIRE NAYURELLE A L'USAGE DES MAISONS D'EDUCATION par l’abbé V.-A. Huard Abrégé de Zoologie. Abrégé de Botanique. Abrégé de Minéralogie. Abrégé de Géologie. Ces petits Abrégés, illustrés, qui varient d’une cinquantaine à une cen- taine de pages chacun, sont en vente chez M. l’abbé Huard, à l’archevè- ché de Québec, au prix de : 25 sous, l’unité; #2.40 la douzaine.—Toute- fois l'Abrégé de Géologie ne sera prêt qu’au cours de l’automme. Nous l’annoncerons en temps utile. En préparant ce « Cours abrégé d'histoire naturelle, » l’auteur s’est proposé : 1° de le rédiger tout d’abord au point de vue du Canada, et em même temps d’après le programme des examens du baccalauréat, pour les collèges classiques ; 2° d'éviter l’appareil trop technique, pour ne pas détourner les jeunes gens de ces sciences maturelles qui sont d’elles- mêmes si attachantes — quand on les présente avec assez de vie et non à l’état d’ossature sèche, aride et compliquée. [532522 28 2424 48 24 29 24 20 AD AS 22 25 20 42 219 20 20 20 20 22 4 y, LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Septembre 1912 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 3 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard AU MUSÉE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE LES DERNIÈRES ACQUISITIONS MARSOUIN BLANC, Delphinapterus leucas Pallas. — Le Marsouin blanc dont il s’agit est d’un beau noir bleu- âÂtre, à l'exception d’une partie de l’abdomen. Il ne faut pas crier au merveilleux, puisque, au témoignage de Dionne, les mammifères de cette espèce ne blanchissent qu'en vieillissant — tout comme le chocolat Menier, suivant une anecdote bien connue. Ils ne deviennent donc blancs que lorsqu'ils ont atteint les trois quarts de leurtaille. Or, les spécimens adultes ont de 15 à 20 pieds de longueur. Le nôtre n’a guère plus de trois pieds ; on le dit tout jeune, et il est, comme nous avons dit, de couleur noir-bleuâtre. Il a été pris le 15 septembre, dans une « pêche » de Saint- Laurent,île d'Orléans, où il avait eu la naïveté de s’aven- turer. L/eau s’en est allée, lorsque le reflux se produisit ; et le blanc-bec, si l’on peut, en l’espèce, risquer cette expres- sion, est resté prisonnier. RaAT-MUSQUÉ, Æiber zibethicus \,.—Ici, c'est toute une famille : deux adultes et six jeunes, qu’un cruel chasseur de Saint-Romuald (Lévis) a occise l’été dernier. Et encore, il 3.—Septembre 1912. 34 LE NATURALISTE CANADIEN n’est pas sûr que deux des jeunes, de taille un peu moins forte, ne soient pas des petits d’une hutte voisine qui se- raient venus, une après-midi de congé, jouer avec les autres. Cela leur apprendra à rester chez eux! Le peuple de la province de Québec, qui est devenu de la sorte propriétaire de ce beau groupe de Rats-Musqués, dans son musée de l’Instruction publique, apprendra avec regret que les jeunes de ce groupe sont d’unestature un peu grande pour l'intérêt du spectacle. Le conservateur du Musée, que nous avons adroitement interviewé sur la ques- tion, nous a répondu qu’on ne trouve pas des familles de Rats-Musqués à toutes les portes, qu’il faut saisir au vol les occasions qui se présentent, et que d’ailleurs, avec la « bour- rure » qu'ils ont maintenant dans le corps, il y a toute ga- rantie qu’ils ne grossiront pas davantage.—$Si le peuple de la province de Québec n’a pas le caractère tout à fait revé- che, i: sera satisfait de ces explications, données avec une bonne foi évidente. PAON, Pavo cristatus.—I1 ne s’agit pas ici du Paon vul- gaire — lequel, comme on sait, est d’une incomparable ri- chesse de plumage, cela soit dit pour le mâle. Mais il s’agit d’un couple de Paons d’une blancheur éclatante, avec aigrette de même couleur. La queue du mâle, beau- coup plus grande que celle de la Paonne, est loin pourtant d’avoir les proportions de l’espèce commune aux riches couleurs, dont notre couple n’est du reste qu’une variété.— Qui nous dira où trouver maintenant quelques Paonnaux pour compléter un groupe si intéressant ? — Il paraît qu’en Chine, où l’on fait tout à rebours des autres peuples, le Paon blanc est hautement prisé. Cie LE CONSEIL DE BIOLOGIE DU CANADA 35 LE CONSEIL DE BIOLOGIE DU CANADA (Continué de la page 8.) M. MCLEAN (Halifax): Si nous n’avons pas dans le dé- partement des fonctionnaires consacrant tout leur temps aux travaux biologiques, l'installation de ce bureau aura très peu d'utilité. Ce service a été très négligé par le pas- sé. Au lieu d’instituer un bureau biologique, je conseille- rais au ministre de nommer une commission des Pêcheries composée de fonctionnaires de son département et de cer- taines personnes compétentes, habitant différentes provinces et intéressées dans les pêcheries. Il est à craindre que les fonctionnaires du département qui sont censés consacrer leur temps aux pêcheries ne s'occupent aussi de questions d’une nature générale et qu’il n’y ait pas grands résultats à attendre de leurs travaux. Je crois que ce serait une ex- cellente chose si le département instituait une commission des Pêcheries dont le bureau biologique serait un accessoire ; les deux services pourraient fonctionner de concert. Jesais que cette proposition a déjà été faite dans la Nouvelle- Ecosse, et il est possible que la question ait été portée à l'attention du ministre depuis qu’il est à la tête du dépar- tement des Pêcheries. J'ai souvent entendu moi-même cette proposition et j'y ai toujours été très favorable. Les fonctionnaires du département auraient un concours pré- cieux, si on leur adjoignait des spécialistes nommés par les différentes provinces intéressées, et je demande au ministre d'étudier cette question d’ici à la prochaine session. M. HAZEN : Ce conseil de mon honorable ami mérite certainement d’être pris en considération, bien qu’il ne soit pas nouveau. Une proposition semblable a déjà été faite dans cette Chambre, je crois, lorsque nous avons été appe- lés à voter les crédits affectés au département des Pêche- 36 LE NATURALISTE CANADIEN ries. Si je ne me trompe, ces commissions des Pêcheries existent dans les autres pays. Ils en ont en Angleterre et en Ecosse, et elles font un travail très utile à l’industrie de la pêche. Il y a du vrai dans ce que dit mon honorable ami au sujet des fonctionnaires du département, qui ont à s'occuper de questions d'administration générale et ne peu- vent pas consacrer tout leur temps à l’étude des questions qui concernent exclusivement les pêcheries. Dans le département de la Marine, il y a une commission des Phares qui rend de très grands services concernant les aides à la navigation, les lumières et la protection des côtes. Il serait très difficile de régler ces questions d’une autre ma- nière. Sans avoir approfondi le sujet, je puis dire qu’à mon sens, une commission constituée de la même manière, pour conseiller le ministre sur les questions qui concernent les pêcheries, la protection du poisson, la surveillance des côtes, les saisons interdites, les appareils et les méthodes de pêche, rendrait aussi de grands services au ministre et au pays en général. Je me suis passablement occupé de cette question, mais je n’ai pas encore pris de décision. Je ne possède pas dans le moment tous les renseignements nécessaires, mais je me propose de m'en occuper sérieuse- ment entre cette session et la prochaine. (L'article est adopté.) Sur l’article 8 — traitements des membres. M. SINCLAIR: N'est-ce pas l'intention d'accorder un traitement à deux membres de ce bureau ? M. HAZEN: Non; ils ne seront pas payés comme mem- bres du bureau. Ily aura deux membres qui recevront des appointements comme fonctionnaires du département des Pêcheries, mais ils ne recevront rien en plus, pour leurs services comme membres de ce bureau. (Il est fait rapport du bill qui est lu une troisième fois et adopté.) er — 00% LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 37 LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE DANS LES SCIENCES NATURELLES (Mémoire présenté par l'abbé V.-A. Huard au Premier Congrès de la Langue française au Canada.) (Continué de la page 31.) C’est ainsi que, sans l’aveu des botanistes, la langue popu- laire désigne à sa façon les végétaux qui attirent l’atten- tion par une particularité quelcouque. Voici une plante, l’hélianthe, qui porte haut ses vastes fleurs aplaties et jau- unes, lesquelles encore se tournent tout le jour comme pour ne pas cesser de faire leur cour à l’astre du jour: évidem- ment, il faut lui donner le nom de so/ezZ. Voici l’horten- sia, dont les corymbes gigantesques restent fleuris durant des mois : on le nommera le Quatre-Saisons. Notre cor- nouiller, lui, garde ses fruits rouges, au ras du sol, jusque sous les neiges ; 1l reçoit le nom de Quatre-Temps. Et il west pas jusqu’à la piété la plus tendre qui n’intervienne en la matière. Cette graminée, dont les belles feuilles sont ornées de bandes longitudinales blanches et vertes, on l’ap- pelle ruban de la Vierge. Comme, au mois de mars, le pétunia garnit des fenêtres entières de ses clochettes roses ou violettes, il reçoit chez nous le nom de Sazxt-Joseph, à cause du patronage pieux attribué au mois de mars. D’au- tre part, s’il fallait en croire nos botanistes du parler popu- laire, nos forêts du nord et de l’est, parsemées de cyprès, seraient comme recouvertes d’un voile de tristesse. Mais on peut se rassurer là-dessus : notre cyprès n’est pas du tout funèbre : ce n’est qu’un pin, le pin des rochers, le pin gris. Que si vous entendez parler du cofonntier qui croît sur le bord des routes et des champs, ne vous croyez pas pour cela transporté dans la zone tropicale; il s’agit seulement, en: 38 LE NATURALISTE CANADIEN l'affaire, de l’asclépiade, à qui les aigrettes allongées et soy- euses de ses graines ont valu sa dénomination fantaisiste. Encore moins faut-il croire qu’il va vous falloir grimper au ‘somiuet d’un tronc d'arbre pour déjeuner, si l’on vous parle d’un cocotier pour manger vos œufs à la coque; c’est tout simplement d’un coquetier que l’on voulait parler. Un groupe imposant dans la classification botanique vul- gaire, c’est celui des herbes : l'herbe à ceci, l’herbe à cela, l'herbe à toutes sortes de choses. Et cela en France aussi bien que chez nous. Il ne manque pas de ces dénomina- tions qui sont communes aux deux pays, par exempie: l’'Aerbe à cent goûts, l'herbe à cochon, V'herbe à la coupure, etc. Mais d’autres sont spéciales à l’un ou à l’autre pays. Et si, entre plusieurs autres expressions, c’est la France qui a le monopole de l’4erbe aux femmes battues, nous avons, nous, ceux de l’Zerbe à dinde, de l’Lerbe à la ouate, de l’£erbe à la puce, de l'herbe aux mites, de l'herbe aux ver- rues, etc. C’est bien nous, aussi, qui avons trouvé le joli mot d’érablière, pour désigner la forêt d’érables. Mais tout cela, tous ces termes de la langue populaire dans le domaine de la botanique, c’est encore un peu de la science technique. Or, en dehors de ces expressions di- verses, qui sont encore du français de bonne venue, notre par- ler compte aussi des mots plus ou moins défigurés et altérés. Comme exemple de ces altérations, je citerai le peupelier (peuplier), le zaveau (navet), la preune (prune), la Sétaque (patate, pomme de terre), l’al/ébore ou la Zbore(hellébore), le coudre (coudrier), la /xgère (fougère), le yérémiôme (gé- ranium), le #e/uet (bleuet, bluet, airelle), etc. Faut-il ajouter, avant de s'éloigner du royaume végétal, que, dans notre parler populaire, l'arbre devient l’éôre; l'herbe, de l’Zarbe ; l’aubier, l’aubelle ; l'asperge, l’asparse. Les /ardinages, cela veut dire l'ensemble des légumes cul- tivés dans le potager ; des Douguets, ce sont très souvent LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 39 les plantes à fleurs du jardin ou de la fenêtre; les cocortes, ce sont les cônes du pin, du sapin, du mélèze — lequel, par parenthèse, se nomme éprnette, chez nous. Mais cette revue sommaire et forcément incomplète des prouesses que nous avons accomplies dans le règne végétal doit suffire à notre gloire. Passons donc, maintenant, au règne animal. III.— DANS LE RÈGNE ANIMAL N'est-il pas vrai que nous ne savons pas nous défendre contre une vive émotion lorsqu'on nous présente, au dîner, la petite sardine du bas Saint-Laurent ou la Derdr1ix de nos forêts, — et cela à la seule pensée du bonheur qu'éprouvèrent nos ancêtres de Bretagne en retrouvant dans ce pays et le petit poisson des côtes: de France et le succulent «galli- nacé» des plaines de là-bas! Et, pour ce qui est de cet oi- seau, qui dira si, au fond, ce n’est pas pour nous éviter ces vives émotions, après tout préjudiciables à la santé, que nos paternels gouvernements se font un devoir d’inter- dire, neuf années sur dix, que l’on fasse en cette Province la chasse à la perdrix... Cela n'empêche pas que nos res- pectables ancêtres ont eu—révérence parler —la ber- lue, lorsqu'ils appliquèrent, sur de vagues ressemblances, ces noms apportés de France au poisson et à l'oiseau dont il s’agit. Fi donc! la vraie sardine est une sardine; la nôtre n’est qu’un hareng en bas âge! La vraie perdrix est une perdrix ; la nôtre n’est autre, dans ses trois variétés, que le tétras, et la gélinotte, et le lagopède! On voit la diffé- rence !... C’est donc la faute de nos pères, si notre parler national, aujourd’hui encore, commet des hérésies scienti- fiques aussi douloureuses. Et pour en finir avec cette tâche pénible de faire le procès de nos ancêtres, je leur repro- cherai encore une autre importation patronymique non 40 LE NATURALISTE CANADIEN moins injustifiable. Car c’est bien aussi leur faute, je le crains, si nous décorons à tort du nom de rossignol l’un de nos modestes pinsons. Il est vrai que sans cela nous n’au- rions pas de rossignols au Canada! Eh bien, je crois qu’à part les trois dénominations fausses que je viens d’indiquer, il n’y a pas dans notre zoologie cana- dienne d’autres cas de vol pratiqué dans les faunes étran- gères! Mais c’est toujours trop, n'est-ce pas ? même qu’un unique larcin! Et, encore moins qu’en minéralogie et en botanique, nous avons accueilli en zoologie des noms tirés de l’anglais. Je ne connais, à cet égard, que le #44 qui se soit échappé de la ménagerie anglophone. Maïs hâtons-nous d’ajouter que lorsqu'il est arrivé à l’état de #zd, le chevreau est moins justiciable de la zoologie que de l’industrie et de la mode. Il faut pourtant, en cette matière, ajouter encore le Zaddock, nom que nos pêcheurs donnent à certaine espêce de morue. Par exemple, notre terminologie zoologique populaire a bien fait quelques emprunts aux langues des indigènes qui nous ont précédés sur ce sol. C’est ainsi que, aujourd’hui encore, nous donnons le nom de £akawri à l’un de nos canards ; de /ouladi à l’une de nos grandes truites ; de cart- bou au renne canadien; d’achigan à l’un des proches pa- rents de notre doré (ou sandre) ; de #askinongé à l’une de nos espèces de brochet; de ouananiche, à notre saumon d’eau douce. Quant au couac, qui est le héron de nuit, et au goglu, l'un de nos oiseaux chanteurs, à qui la science et les Anglais se sont entendus pour donner, celle-là, l’appella- tion barbare de Dolichonyx oryzivorus, et, ceux-ci, le nom burlesque de bobolink ; quant au wawarron, le plus. impo- sant de nos batraciens ; quant au carcajou, qui n’est autre que le glouton: je ne sais si la philologie s’est définitive- ment prononcée sur leur cas patronymique. Coupables d'avoir tiré ces quelques dénominations 7 LA TERMINOLOGIE ERANCO-CANADIENNE AI langues sauvages, nous n'avons pas manqué, bien en- tendu, de donner à certains animaux du pays des appella- tions de notre façon. Par exemple, la chauve-souris est devenue chez nous la souris-chaude (du reste, La Fontaine en avait bien fait la souris-chauze). Du pigeon voyageur nous avons fait la tourte (dont il n’y a plus, d’ailleurs, en ce pays, que les vieux à se lécher, rétrospectivement, les doigts; de la moufette, la Dé/e puante (et pour cause, comme on sait); du raton, le chat sauvage; du cochon de lait, le zortureau ; de la marmotte, le sz#/eux ; de l’engou- levent, le #angeux (pour ne pas dire... le contraire, ainsi que l’on fait en certaines parties du pays) de #7aringourns ; du marsouin commun, le pourcrl; de l’orque épaulard, le gtbbar ; de l’ondatra, le rat-musqué !. Mais toutes ces ap- pellations plus ou moins fantaisistes, je les pardonne en considération du joli nom de #/#te que nous avons donné à la grive des bois, proche parente du merle, et dont le chant exquis fait, au soir et au matin, le charme des grands bois. D'ailleurs, nous avons de bien autres forfaits sur la cons- cience... philologique. Où avons-nous pris, par exemple, que l’araignée, l’oie, la dinde, soient du genre masculin! Quelle idée avons-nous de nommer cÆapeau de castor un couvre-chef qui est fait de tissu de soie, et Æuzle de castor un produit dont l’origine est toute végétale ! Comment jus- tifier nos amis'de Montréal d'imposer le nom de canard à la vulgaire bouillotte, qui est d'autant moins de l’ordre des palmipèdes qu’elle n’a pas même de pattes! Et que dire de ces coquins d’écoliers qui, couvrant d’un voile... zoologi- 1. Au Labrador, tout oiseau est dit «gibier». Dans la même région, sinon ailleurs aussi, on nomme #”arèche, le requin ; #armetle ou mer- mette, le guillemot ; foflan, le flétan. 42 LE NATURALISTE CANADIEN que l’école buissonnière que parfois ils pratiquent, se per- mettent alors de faire le renard! En anatomie et en physiologie, nous avons aussi quelques peccadilles à nous reprocher. Par exemple, chez nous, quand nous avons «mal à l’esfomac», cela veut dire que nous souffrons de la poitrine ; le gargoton, c’est la pomme d'Adain ; les reins sont toujours pour nous des rognons, chez l’homme comme chez les animaux — chez les ani- maux «latiori sensu»: car, à la campagne, les animaux, cela signifie : les bestiaux. Le gigter, c'est le gésier; le paumon, c’est le poumon. Encore plus nombreuses sont les déformations que notre parler populaire a fait subir aux vocables qui tiennent plus ou moins du langage zoologique. Par exemple, nous di- sons éturgeon, au lieu d’esturgeon; calimaçon, pour coli- maçon. Des noues de morue, nous faisons des eaux ; es ergots, des argots ; des plumes, des f/eumes. Nous disons marle pour merle; serpent pour serpent ; guernoutlle pour grenouille ; arèche, pour arête, et, encore chez les poissons, ventrèche pour ventre; un Ü@u, un @, un écureu, pour bœuf, œuf, écureuil; pardrix pour perdrix; 7oual pour cheval ; #leuvier, pour pluvier; bonne porreuse, pour bon- ne pondeuse; ô/ette, pour belette; gwevale, pour cavale; moucle, pour moule (mollusque); #ourue, pour morue; üar- nèche, pour bernache (outarde); oiseau de près, pour oiseau de proie. Nous disons : un vo/er (volée) de canards, et une mouvée (banc) de harengs: et ce n’est peut-être pas si cri- minel, après tout. ‘Tout cela, bien entendu, suivant les régions du pays, et seulement dans le parler populaire. I1 me reste à jeter, sur ce parler populaire canadien-fran- çais, un coup d'œil... entomologique, et à lui faire rendre compte de la façon dont il parle dse insectes. —Les insectes, ils forment la classe de beaucoup la plus nombreuse de tout le règne animal : il y en a environ 200,000 espèces différeri- LA TRRMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 43 tes dans tout l’univers. Le gouvernement n’a pas encore organisé le «recensement » de ce que nous avons, au Canada, de représentants de ces races diverses. Pour ce qui est de ia province de Québec, j’estimerais, à vue de nez, que notre population «insectologique » compte bien une vingtaine de mille espèces différentes. Personne n’imaginera que, parmi tout ce «monde», chacun a son nom dans notre langage. Loin de là! Il n’y a pas cinquante de ces espèces qui aient chez nous des noms quelconques, et de ces quarante à cin- quante noms d'insectes, il n’y en a pas vingt dont l’appella- tion soit correcte; et encore ces appellations sont presque toujours générales. Par exemple, on ne distingue pas entre les diverses espèces d’un même groupe: toutes les guêpes n’ont que le nom de guêpes, quelle qu’en soit l’espèce. Notre langue usuelle est donc, au point de vue entomologique, d’une indigence à tirer les larmes des yeux. Je dirai pour- tant à mes compatriotes : vous pouvez sécher vos pleurs, et porter encore la tête haute au milieu des nations. Car il est permis de soupçonner, sans verser dans la calomnie, que Îles autres peuples ne sont pas, à ce point de vue du vocabulaire entomologique, beaucoup mieux partagés que nous. (Cela est désolant, sans doute: mais il vaut mieux avouer fran- chement tous les torts qu’a sut ce chapitre le genre humain tout entier. Il faut cependant ajouter, à voix basse, que, à ce qu’il semble : tandis que la classe instruite, en France, désigne correctement un certain nombre des insectes les plus communs, ici la classe instruite n’en sait guère plus long que le commun des gens en fait de classification ento- mologique. Pour en venir aux particularités, nous donnons donc des noms corrects à quelques catégories d’insectes, plutôt qu’à des espèces elles-mêmes. (C’est ainsi que partout l’on em- ploie les dénominations de guêpes, d’abeilles, de fourmis, de bourdons, de taons, de papillons, de criquets, de puces, de 44 LE NATURALISTE CANADIEN pucerons, de punaises, de maringouins, de mouches... Je crois que la liste de ces noms exacts est déjà terminée! Et encore 1l faut voir comment sont appliquées ces appellations justes ! — L'insecte que l’on nomme correctement bourdon (Bombus) dans la région de Montréal, les Québecquois l’ap- pellent taon. Et cela ne les empêche pas du tout, les Qué.- becquois, par l'institution de je ne sais quelle sorte de cava- lerie, d'appliquer le nom de /aon à cheval à un insecte (7a- banus) qui diffère du bourdon non seulement par les carac- tères « spécifiques », non seulement par les caractères «géné- riques», non seulement par les caractères « familiaux », si l’on peut dire, mais qui appartient même à un «ordre » dif- férent. J'espère qu’il n'existe pas d’autres sujets sur iesquels les Montréalais et les Québecquois souffrent de divergences aussi considérables ! — On connaît ces minuscules coléop- tères, les altises, qui habitent, sur le champ, les navets, les choux, les radis, etc., et qui à l’occasion exécutent des sauts relativement merveilleux. Eh bien, nous osons les appeler pucerons ! Comme si les pucerons, tranquilles et lents tou- jours, étaient susceptibles d'exercices aussi violents! Com- me si les pucerons, mous et flasques, étaient — voyons | — des coléoptères ! D'autre part, en entomologie encore et, sur le chapitre des termes brisés... dans leur contexture, nous n’avons sur la conscience qu’un seul crime, que je sache, à nous reprocher, mais il est d’une force peu commune: à savoir le mot /rémzlle, qui s'emploie chez nos gens pour désigner la fourmi. Or, nous avons fait rendre à la trouvaille tout ce qu’elle pouvait, en tirant de là : et le verbe /rémuzller et les substantifs /rémzllières et frémillement. Et puis nous avons bien aussi, en cette question des in- sectes, plus ou moins «enrichi » la langue de plusieurs dé- nominations particulières. C’est ainsi que nous désignons les grandes libellules par le nom de demorselles galeuses. LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 45 C’est ainsi que nous donnons le nom de coguerelles, lequel désigne une plante de France que nous n'avons pas ici, à l’un des insectes (4/atte germanique) qui font l’ornement des boulangeries et des cuisines. Nous donnons le nom de barbeaux non seulement aux « pâtés » que les enfants se permettent trop facilement d’étaler sur leurs livres et ca- hiers, non seulement aux coléoptères un peu corpulents, mais même aux larves d’œstrides qui font souffrir les ani- maux de ferme, et même aux cafards ou cancrelats qui commencent leurs expéditions nocturnes sur les parquets dès que les lampes sont éteintes, et qui n’appartiennent au- cunement à l’ordre des coléoptères. Ici, tous les papillons diurnes sont simplement des papil- lons, sans plus de distinction. Quant aux papillons noc- turnes ou crépusculaires qui ne sont pas trop volumineux, et qui entrent voltiger dans les pièces éclairées, nous en faisons — surtout s'ils sont d’une couleur claire— des perits- anges : le terme est joli, et même touchant. Les pucerons des plantes tendres et les kermès de l’écorce des arbres, nous les décorons du nom général de «poux», ce qui simplifie beaucoup les soucis de la classification scientifique. Quant aux #ouches à feu (lampyrides), et aux »ouches à patates (chrysomèle), je crois bien que c’est nous qui avons inventé ces dénominations, dont la première surtout est heureuse. Pour ce qui est de ces moustiques à peine visibles (simules), et dont la piqûre donne la sensation soudaine d’une brûlure, nous les avons nommés 4r#lots, et l'appellation ne manque ni de justesse, ni de pittoresque. Et puis il y a les /rappe- d'abord (hanneton), les sautereaux (certains élatérides), les crève-z-yeux (certains longicornes), dont les appellations sont frappées... au coin des mêmes qualités. Il y a les mannes, qui ne sont autres que les éphémères, insectes ailés, mous, colorés qui, l’un de ces quatre matins, au prin- temps, paraissent soudain en extrême abondance, et, fidèles 46 LE NATURALISTE CANADIEN à leur nom, passent si rapidement de vie à trépas. Quant aux chambres empunarsées et aux chiens puceux, les termes en sont transparents et peuvent se passer de commentaire. Enfin, pour être complet dans cet examen de notre ter- minologie populaire «entomologique », j’ajouterai que, chez nous, les papillons mis à part, tous les autres insectes sont compris dans l’appellation générale de « petites bêtes »; que les insectes de consistance plus ou moins dure, et d’un cer- tain volume, se nomment « barbeaux »; et que tous ceux qui ont des ailes plus ou moins diaphanes portent le nom de «mouches». Il est superflu de faire observer que les entomologistes de profession ont établi, pour leur usage, une classification beaucoup plus compliquée, puissamment char- pentée de grec et de latin, et qui serait le suprême refuge de nos langues classiques, si elles devaient encore plus mourir qu’elles n’ont fait jusqu’ici. Après cette étude de notre terminologie en histoire na- turelle, il faut reconnaître que, si notre vocabulaire scienti- fique est loin de répondre à l’abondance des objets qu’il aurait à désigner, il n’est pas cependant très inférieur à ce que l’on peut désirer qu’il soit. Car il serait déraisonnable de s'attendre à ce que la généralité des gens puissent con- naître et employer les noms véritables d’une foule d'objets d'histoire naturelle, dont ils n’ont même jamais vu ou n’ont vu que rarement la plupart. Et, à cet égard, je ne crois pas que la langue usuelle des autres peuples l'emporte beau- coup sur la nôtre. A tout le moins, comme je l’ai déjà fait remarquer, l’an- glicisme n’a pas envahi ce domaine de notre terminologie scientifique. Cette constatation est déjà d’un grand soula- gement, quand on considère l'extension que le fléau a déjà prise, chez nous, sur d’autres terrains. LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE . 47 Si maintenant, pour revenir en gros sur ce que nous avons étudié en détail, nous embrassons d’un coup d'œil le règne minéral, nous voyons que nous nommons, et de façon généralement exacte, les métaux et en général les miné- raux les plus importants. Dans le règne végétal, la plupart des arbres, des arbris- seaux, la plupart des plantes cultivées sont connus sous leurs noms véritables français. Quant aux plantes sauvages, un petit nombre seulement, celles surtout que l’on utilise de quelque façon ou contre lesquelles il y a à lutter pour quelque raison, ont des noms particuliers et plus ou moins caractéristiques. Mais peut- on vraiment exiger davantage du langage populaire ? En zoologie, où le nombre des espèces est immense, l’état des choses, philologiquement parlant, est à peu près le même qu’en botanique. Comme cela est le cas pour les végétaux, plus l’animal est remarquable par sa taille, ou par les ser- vices que l’on en tire, ou par la crainte qu’il inspire, à quel- que titre que ce soit, plus il y a de chances pour qu’il soit connu par une désignation particulière. (C’est ainsi qu’à peu près tous les mammifères de notre faune, tous les grands oiseaux et tous les grands poissons ont leurs appellations françaises, presqué toujours correctes. Par exemple, dans le règne animal, plus l’on est petit, plus l’on est exposé à rester anonyme. Et cela se fait surtout dans la classe innombrable des insectes, où l’on n’est connu qu’à propor- tion de ce que l’on importune, comme les mouches, ou de ce que l’on blesse, comme les moustiques et les guêpes, ou de ce que l’on est utile, comme les abeilles. (A suivre.) 48 LE NATURALISTE CANADIEN RADOUX LE « SOURCIER » FEUILLETON DU «NATURALISTE CANADIEN » (Suite de la page 15.) — Tu n’as donc plus peur ? — Peur? quelle bêtise ! puisque tu es là ! et puis M. Charvet assure qu’il n’y a plus de danger. (Je m'étais, sans succès, évertué à le démontrer la veille ; n'importe.) C’est ainsi que nous contemplâmes à nouveau Radoux dans l'exercice de ses fonctions. Louise «crânait », brave jusqu’à la témérité ; même elle me confia que, pour un sorcier, celui-ci avait fort bon air ; et quand, subitement, il vint vers nous, elle se serra un peu contre moi sans donner d'autre marque de frayeur. Radoux était un malingre, un peu voûté et d’aspect souf- freteux ; de longues moustaches tombantes «à la gauloise» marquaient sa physionomie d’un trait farouche ; maïs des yeux bleus, pensifs et doux, corrigeaient la rudesse du visage, et c’est une âme primitive, naïve et droite, que reflé- tait la limpidité du regard. (La Revue française.) NOFL FRANCÈS. (A suivre.) N. B.—Nous craignons fort d’avoir perdu la suite de cet émouvant récit; du moins, après de soigneuses recherches, et à l'imprimerie et dans le «bureau de rédaction» du journal, nous n’en pouvons trouver trace. Si jamais nous la retrouvons, nous en poursuivrons sûrement la publication. En attendant, il n’y a qu'à gémir sur l’infortune qui nous arrive, la première fois que nous publions ici un feuilleton ! En tout cas, au lecteur impatient, nous pouvons dire que ce roman scientifique se ter- mine de façon très paisible, et sans aucun mariage — tout le monde, là- dedans étant déjà marié. LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Octobre 1912 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 4 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard LA PONTE DES LIBELLULES ! Le retour de l'automne me rappelle une observation faite sur les Libellules. (C'était par une belle journée de septembre, une de ces journées lumineuses et tièdes, où le soleil semble donner ses dernières caresses à la nature avant le long engourdissement de l’hiver. Une journée de soleil et de chaleur, c’est une grande fête pour tous les êtres vivants, mais peut-être plus encore pour le monde des insectes. On dirait que ces animalcules ne trouvent pas, dans un sang trop pauvre, l’énergie suffisante à leurs mouvements, et que, seuls, les rayons pénétrants et vivi- fiants de l’astre du jour ont le pouvoir de mettre en branle ces organismes débiles. Lorsque les nuages s’amoncellent et que le vent fraîchit, brillants papillons et Bourdons velus, gracieux diptères et lourds coléoptères, disparaissent et vont se biottir en quelque retraite profonde, d’où ils sortiront pour se baigner avec volupté dans la lumière éblouissante du soleil. Ne voit-on pas, aux premiers beaux jours du printemps, les Mouches quitter leurs quartiers 1. Il s’agit de libellulides appartenant probablement au genre Diplax. 4—Octobre 1912. 50 LE NATURALISTE CANADIEN d'hiver et revenir à la vie après une léthargie de plusieurs mois ? Il y avait donc en ce jour de septembre une grande ani- mation chez la menue gent ailée. Parmi les survivants de la saison chaude, nombreux étaient les Grillons à la noire livrée, nombreuses aussi étaient les Libellules, avec leurs gros yeux aux milliers de facettes, leurs ailes légères et transparentes comme une gaze, leur abdomen à forme de long tube. Ces Libellules prenaient leurs ébats au-dessus d’un étang creusé dans une sablière ; mais parfois elles mettaient pied à terre, sans doute pour se reposer de leurs longues évolutions. Il n’y a rien d’étrange à rencontrer ces insectes dans le voisinage d’un étang, puisque leurs larves sont aquatiques. Mais voici le nouveau, l’imprévu. Les Libellules, qui planaient ou tournoyaient dans les airs, n'étaient pas toujours isolées: les couples étaient nombreux et formés de la manière la plus étrange. L'un des deux insectes se tenait fortement cramponné à l’abdo- men de l’autre, en l’embrassant de ses six pattes et en s’'aidant des nombreuses épines qui garnissent ses membres. De plus, l’insecte qui formait l’avant-train avait son abdo- men fixé entre la tête et le corselet de celui qui venait en second lieu. Des deux insectes, l’un traînait donc l’autre. Les couples se balançaient gracieusement à quelques pouces de la nappe liquide, tout en allant de côté et d'autre. Dans ce mouvement oscillatoire, l'extrémité du seul abdomen libre venait périodiquement toucher la sur- face de l’eau, pour se relever immédiatement. Si un couple s’éloignait un peu de l’étang, ce même abdomen se repliait vers la base de l'abdomen de l’insecte moteur. Pourquoi tout ce manège ? S’agissait-il, pour ces insectes, d’une simple promenade sentimentale près: des lieux où ils avaient passé la première phase de leur existence ? Etait-ce l’accouplement sexuel? Il y avait cela, peut-être, LA PONTE DES LIBELLULES SI et encore autre chose, comme me l’apprit l’observation de plusieurs couples capturés et observés de près. Des deux insectes qui composaient chaque couple, celui qui se faisait porter par l’autre était une femelle pleine d'œufs, dont l’unique soin était d'effectuer sa ponte dans les meilleures conditions possibles pour assurer la reproduction de l’es- pèce. C’est là mon opinion. Mais pourquoi la femelle se fait-elle ainsi véhiculer par le mâle? Ne pourrait-elle pas se promener seule au-dessus de l’eau, en répandant ses œufs çà et 1à? Je ne le crois pas, et voici pourquoi. La ponte, en elle-même, est assez labo- rieuse et pénible, comme le prouvent les palpitations et contractions de l’abdomen qui l’accompagnent. De plus, cette fonction doit s’accomplir, non pas au repos comme chez la plupart des insectes, maïs pendant le vol. Tout cela exige un effort musculaire et une dépense d'énergie dont la femelle est probablement incapable dans l’état cri- tique où elle se trouve. | Il y a encore une autre raison. On sait que, grâce à la capillarité, certains corps assez denses peuvent flotter sur uu liquide qui ne les mouille pas. Ainsi, par exemple, une aiguille à coudre, placée délicatement à la surface de l’eau, y reste aussi longtemps qu’elle n’est pas mouillée. Si donc les œufs des Libellules étaient posés à la surface de l'étang, ils y demeureraient, allant çà et là, au gré des vents, ou seraient entraînés vers le ruisseau par où s’échap- - pe le trop-plein de l’étang ; et alors, adieu la progéniture. Il faut donc que les œufs soient immergés au moment de la ponte. De la sorte, ils gagnent la vase du fond, y reposent sur un lit moelleux et chaud, et sont dans les conditions les plus favorables pour l’éclosion. N'est-ce pas pour produire cette immersion des œufs que le mâle pro-. mène la femelle, la balance et la secoue au-dessus de l’eau, de manière que son abdomen frappe la surface de l'étang ? 52 LE NATURALISTE CANADIEN À chaque secousse, quelques œufs se détachent de l’extré- mité de l’oviducte et plongent immédiatement. Supprimez ces secousses, et les œufs restent collés à l’ab- doimen de la femelle à cause de leur viscosité. (C’est ce que j'ai pu constater sur un individu capturé au moment de la ponte : en quelques instants une centaine d'œufs au moins étaient sortis de l’organisme maternel et s'étaient agglomé- rés en une masse arrondie. Pour les détacher, la femelle dut se servir de ses pattes. La même chose se produirait sans doute à l’état de liberté, et alors les œufs pondus ainsi, par paquets considérables, seraient dans des conditions trop défavorables pour l’avenir de la race. Cette explication des mouvements des Libellules, je la donne à tout risque. Peut-être d’autres naturalistes ont- ils sur ce point des observations à la fois plus nombreuses et plus précises : à eux de confirmer ou d’iufirmer les con- clusions que j'ai tirées des faits énoncés plus haut. ELIAS Roy, ptre. :00 : LES SANICLES UNE MISE AU POINT Les Sanicles (de sanare, guérir, ou peut-être de San Ni- colas) forment un genre d'Ombellifères dont les individus sont très abondants dans les bois riches de la province de Québec, excepté peut-être dans certaines régions monta- gneuses. Leurs fruits, qui s’attachent à la laine des mou- tons, sont bien connus des cultivateurs ; mais je ne sache pas qu’ils leur aient encore infligé un de ces vocables énergi- LES SANICLES 53 ques par quoi ils traduisent leurs opinions à l'égard de cer” taines plantes désagréables. Quoique ces Ombellifères soient bien connues, il règne, dans nos Flores canadiennes, au sujet de leur nomenclature et de leur distribution géographique, une regrettable con- fusion. Voici l’état de la question. 1° D’après l'abbé Provancher, nous n’aurions qu’une es” pèce de Sanicle: Sanicula Canadensis 1, qu’il fait syno. nyme de Saricula Marylandica D. C. 2° D'après l’abbé Moyen, nous aurions deux espèces : Sanicula Marilandica 1,. et Sanicula Canadensis L. 3° D’après Britton et Brown (//{/ustrated Flora) et Gray’s Manual, 7th edition, la province de Québec n'aurait que la Sanicula Marilandica 1. les espèces suivantes se rencon trant plus au sud : S. Canadensis L., S. gregaria Bicknell, S. trifoliata Bicknell. 4° Enfin, M. John Macoun, dans son Catalogue of Ca- nadian Plants, admet deux espèces à l’est des Montagnes Rocheuses : S. Marylandica 1, et S. Canadensis I. Ilne veut considérer cette dernière espèce que comme une va- riété de la précédente ; et des localités qu’il indique pour elle, aucune ne se trouve dans notre Province. Disposons tout d’abord de Provancher. La description qu’il donne de Sanzicula Canadensis \., se rapporte sans aucun doute à Sawicula Marylandica 1. (non D. C.) Il faut donc faire la substitution et écarter la prétendue syno- nymie. X Quant à Moyen, qui sépare les deux espèces, la description qu’il donne de S. Canadensis L., bien que fort brève, pa- raît s’y rapporter. Il l’indique comme se trouvant dans l’île de Montréal et les environs. Il serait sans doute inté- ressant et probant d'examiner les spécimens sur lesquels ce botaniste a basé sa détermination. Pour en venir à nos observations personnelles, nous 54 LE NATURALISTE CANADIEN avons pas eu l’occasion de remarquer la S. Canadensis L. Si, comme il est probable, l'affirmation de l’abbé Moyen est exacte, nous devons confondre continuellement les deux plantes dans leur station. Mais ce que nous sommes à même d'affirmer avec certi- tude, c’est que nous avons une troisième espèce de Sanicle, très distincte, très caractérisée, assez récemment étudiée, et qui n’a pas encore été signalée dans la Province. Il s’agit de Sanicula trifoliata Bicknell. Nous l’avons rencontrée dans plusiéurs localités des environs de Montréal, tant au nord qu’au sud, et notamment à Oka et à Saint-Bruno. Dans ces deux endroits, assez éloignés l’un de l’autre, la plante est relativement abondante. Son habitat semble être assez exclusivement les bois montueux, et nos observations per- sonnelles confirment absolument sur ce [point l'affirmation des auteurs de ?’Z//ustratea Flora. Voici la description de la plante. Sanicula trifoliata Bicknell. Bull. Torr. Club. 1805. Tige grêle de 1-21 pieds, généralement simple. Feuilles d’un vert brillant, minces, tripartites, les seoments latéraux quelquefois lobés, doublement dentés. Fleurs staminées peu nombreuses, sur de longs pédicelles grêles. Fruit muni d'aiguillons, ovoide, tendant à devenir fusiforme à matu- rité, surmonté du calice en bec. Style inclus. Ainsi donc, en l’état présent de nos connaissances, la flore de la province de Québec comprend les Sanicles suivantes : Sanicula Marylandica L., Sanicula Canadensis 1. Sani- cula trifoliata Bicknell. CLEF ANALYTIQUE DES ESPÈCES Plante bisannuelle, feuilles tripartites...,, S. érz/oliata. Plante vivace, feuilles 3-7 divisées. Fruit de moins de 2 lignes; styles plus courts que les aiguillons....,,,... S. Canadensts. A PROPOS DE PANTHÈRE ET DE... COLIBRI, ETC. 55 Fruit de 3 lignes; styles plus longs que les aiguillons, recourbés sur le Vi AVS ts ASPPON PEROU RE S. Marylandica. Nous reviendrons dans de futures notes sur certains autres genres qui ont besoin de revision. C’est en accumulant les observations et les travaux partiels que l’on rendra pos- sible la rédaction d’une bonne Flore illustrée de la province de Québec. FR. MARIE-VICTORIN, des Ecoles chrétiennes. 23 septembre 1912. HBhllèse.de Lonseueuil, 10: + OO A PROPOS DE PANTHÈRE ET DE... COLIBRI, ETC. Il nous est arrivé de «rencontrer » le Précis de Géogra- Plhie récemment publié par M. l'abbé Adolphe Garneau, du séminaire de Québec. L'ouvrage est monumental, eu égard à la masse de renseignements, et bien à jour, ras- semblés dans ces pages, dont le nombre dépasse les 700. Il faut être un peu du métier.. de faiseur de livres, pour se rendre compte du travail que représente une œuvre scientifique de cette étendue. Dans le court tête-à-tête que nous avons eu avec l’ou- vrage de M. Garneau, nous sommes tombé sur quelques détails que nous devons relever et même taxer d’inexacts. Ce ne sont là, assurément, que des vétilles, au point de vue de l’universalité des choses; mais au point de vue de l’histoire naturelle du Canada, cela n’est en rien négli- geable. Il y a donc, à la page 219 du Précis de Géographie, un paragraphe intitulé FAUNE, et où se trouve la liste des qua- 56 LE NATURALISTE CANADIEN drupèdes et des oiseaux de la province de Québec. Au nombre des premiers, nous voyons indiqué «le cougouar (panthère)». Et nous dirons, d’abord, qu’il faut écrire couguar, d'après les autorités. Puis, qu'est-ce que cette « Panthère » dans la province de Québec? Qui a jamais oui parler de « Panthère » dans nos bois ou dans nos pe/és ? Bien entendu, quand on parle de Panthère, on entend, dans tout l’univers, de grands félidés des Indes et de - l'Afrique, dont l’aménité de caractère laisse beaucoup à désirer... Et comme, ainsi qu’on le sait, les pays à Pan- thères sont aussi les pays où se trouvent les Lions, les Tigres, les Hléphants, nous voilà en belle posture, dans la province de Québec. Si nous avons toutes ces bêtes-là dans nos forêts, c’en est fini des courses aux fruitages, pour l'enfance canadienne. Quelles sont les familles qui lais- seront «aller aux framboises » leurs petits garçons et leurs petites filles, pour les voir enlevés soudainement par la trompe d’un Eléphant, ou croqués à l’improviste par un Tigre ou une...Panthère ? Mais, sans doute, il ne s’agit pas ici du grand fauve des vieux continents. Il s’agit seulement de la Panthère d'Amérique, qui est bien en effet le surnom du Couguar. Et nous croyons volontiers que, par distraction de l’auteur ou du typographe, ce qualificatif « d'Amérique » a été omis de l’appellation de la sorte de Panthère dont ils’agissait ici. Quant au Couguar lui-même, dit Panthère d'Amérique, M. Dionne rapporte (Mammifères de la province de Quëé- bec, 1902, p. 275), d’après l'ouvrage Animals of N. A. qu’il en a été tué un individu le 3 octobre 1863, pour la dernière fois dans la province de Québec, et il consacre un chapitre de son ouvrage à l’histoire naturelle de cet animal. Nous avons peine à admettre la réalité de l’occur- rence du Couguar, dans la Province, même en 1863, et même jamais dans les temps historiques. (Car, si nous A PROPOS DE PANTHÈRE ET DE,,. COLIBRI, ETC. 57 ne faisons erreur, en aucun endroit des annales, des chro- niques, des relations, etc., du passé, il n’a jamais été fait mention de l’animal féroce dont il s’agit comme se trou- vant dans notre Province. En 1869, au cours d’une revue de notre règne animal dans le Vaturaliste canadien, Vabbé Provancher ne fait pas même une allusion à la présence, à une époque quel- conque, du Couguar dans notre faune de l’Est, et nous pensons qu’il a eu raison. En tout cas, même d’après ce que rapporte M. Dionne, le Couguar n’aurait plus été vu ici depuis 1863. Il nous paraît donc, à tout le moins, qu’on ne doit plus le donner comme appartenant à notre faune, et, par conséquent, que notre ami et collaborateur lui-même eût mieux fait de ne pas l’inscrire dans ses Aammuÿfères de la province de Québec. KEt pour ce qui est de le mettre encore aujour- d’hui, après cinquante ans que le dernier spécimen à (sup- poser que le fait soit authentique) aurait été vu dans la Province, dans la liste de nos «grands et petits fauves », cela nous paraît injustifiable. Que M. Garneau nous dé- barrasse enfin de cet animal-là, dans sa deuxième édition. —Quoi! Le Couguar n'existe plus même dans le centre des Etats-Unis et du Canada, il est maintenant propre aux régions de l’ouest de l'Amérique ; et on le donnerait en- core comme appartenant à notre faune de l’extrême-Est ? N'est-ce pas révoltant ? Encore, pour terminer, une petite chicane au Précis de Géographie, où nous voyons mentionnés, à la fin de la même liste des espèces de notre faune de Québec, le cobrt et le moineau, parmi nos « oiseaux chanteurs ou utiles ». Passe pour le Colibri ou Oiseau-Mouche : s’il n’est pas chanteur du tout, il a au moins sa petite utilité, sinon en 58 LE NATURALISTE CANADIEN suçant — comme dessert — le nectar des fleurs, au moins en faisant, de tout petits insectes, le fond de ses menus quotidiens. Mais son estomac doit être si exigu, et encore plus celui de ses deux petits, que le ravage qu’il fait parmi les insectes nuisibles ne doit pas avoir une importance beaucoup colossale. Et d’ailleurs, diront les personnes inexpérimentées en histoire naturelle, ne frémit-on pas en pensant aux occasions où l'Oiseau-Mouche pourrait s’atta- quer à l’un de ces gros insectes, à l’une de ces grosses che- uilles, et où l’on ne sait pas si ce n’est pas lui qui serait avalé tout rond, ou même — pour comble d'horreur — s'ils ne se dévoreraient pas simultanément l’un l’autre... Mais le Moineau ! D'abord, personne ne l’a jamais en- tendu chanter. Puis, quant à son utilité, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle est très contestée ; et nous croyons même que sa tête a déjà été mise à prix, en certains endroits. Il contribue sans doute, pour sa part, à mener la campagne contre les insectes nuisibles — en les avalant, ce qui est la bonne manière ; mais il est accusé, et non sans juste motif, paraît-il, de se payer lui.même si chère- rement de ses services, aux dépens des grains qu’il vole daus les granges ou dans les champs, que c’est une question de savoir s’il n’est pas, en somme, plus nuisible qu’utile. A la place de M. l’abbé Garneau, nous chasserions donc aussi, dans une autre édition, le Moineau, sinon le Colibri, de la catégorie où ils se trouvent dans son tableau de la faune de la province de Québec. Dehors aussi, n'est-ce pas? «la fourmis » (szc) qui, seule de son monde (entomologique), et avec une effronterie dont l’histoire offre heureusement peu d'exemples, a bien osé se glisser dans la liste des principaux mammifères du Canada, que M. Garneau a donnée à la page 193 de son ouvrage... Il y a là, évidemment, un lapsus extrêmement amusant. Qu'est-ce que l’auteur avait mis là sur son manuscrit? La souris, probablement. LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE 59 Encore un mot, pour dire que, à notre avis, le /apin n'aurait pas dû être mentionné dans cette liste, non plus que, dans la liste des oiseaux qui fait suite, le /azsan et la pintade. Ces espèces n'existent pas, en effet, à l’état sau- vage dans notre pays; elles sont introduites d’ailleurs, et ne sont ici qu’à titre de domesticité, ou d'élevage, comme le chat, le cheval, la poule, le serin, les poissons rouges, etc.— Hormis, que, pour le lapin, il s'agisse des descendants de ceux qui furent introduits, vers 1800, dans l’île de Sable, à cent milles de la Nouvelle-Ecosse, et dont le Vaturaliste canadien disait, en janvier 1872 (V. C., IV, p. 32), qu’ils étaient revenus à l’état sauvage. Voilà ce que, dans un examen rapide et au point de vue de l’histoire naturelle, nous avons trouvé de discutable dans le Précis de Géographie. On doit admettre que cela est loin de suffire pour diminuer sensiblement la haute va- leur scientifique de cet ouvrage. «00 LA TERMINOLOGIE FRANCO-CANADIENNE DANS LES SCIENCES NATURELLES (Mémoire présenté par l'abbé V.-A. Huard au Premier Congrès de la Langue française au Canada. ) (Continué de la page 31.) Observons aussi que, dans toutes ces appellations popu- laires d'objets d’histoire naturelle, principalement en miné- ra logie et en botanique, les noins usités sont rarement spé cifiques, presque toujours génériques. En d’autres termes, 60 LE NATURALISTE CANADIEN ce sont surtout les groupes qui ont des noms particuliers, et non les espèces. La science populaire, toujours assez confuse, ne saurait là-dessus donner davantage. Toutes les considérations précédentes visent uniquement le parler strictement populaire, envers lequel il ne serait pas juste d’être beaucoup exigeant, si l’on considère que, jusqu’à ces tout dernières années, la plus grande partie de notre population scolaire n’entendait jamais parler des sciences naturelles. Toute la terminologie scientifique de notre langue populaire franco-canadienue n’était donc fou- dée, jusqu’à hier même, que sur la tradition orale! C’est merveille, 11 faut le reconnaître, qu’elle ne soit pas encore et plus impropre, et plus inexacte, et plus insuffisante. Quant au parler de notre classe instruite, on peut lui faire le reproche — qu’il commence d’ailleurs à ne plus autant mériter — de trop ressembler, au point de vue de la correc- tion, à la langue strictement populaire, dans le domaine de l’histoire naturelle comme dans les autres. Il mérite d’ail- leurs, lui aussi, quelque indulgence sur ce chapitre de la philologie scientifique, quand on songe que, jusqu’à ces dernières années, notre enseignement secondaire ignorait qu’il existe, sur notre « globe terrestre », quelque chose qui s'appelle le règne animal. Il n’est donc pas étonnant que le parler de nos gens instruits ne vaille pas beaucoup mieux que celui des classes populaires dans les domaïnes scienti- fiques. Mais enfin, depuis ces derniers temps, les conditions se sont modifiées et améliorées. Actuellement, les programmes de toutes les institutions d'enseignement, des primaires comme des secondaires, comprennent l’étude de l’histoire naturelle en ses trois grandes divisions. Il y a donc lieu maintenant d'espérer que les groupes d'élèves ne sortiront plus des écoles sans être pourvus d’un vocabulaire scienti- fique un peu plus développé que celui de leurs devanciers. LA TERMINOLOGIE ERANCO-CANADIENNE GI Ce résultat s’obtiendra, comme il est naturel, à proportion de ce que le personnel enseignant sera ou deviendra lui- même à la hauteur de la situation, c’est-à-dire à mesure que croîtra sa compétence à donner l’enseignement scienti- fique élémentaire. — Et que l’on ne croie pas que l’influence que pourrait exercer à cet égard le personnel enseignant sur les enfants soit de peu d'importance. S'il m'est permis d'apporter ici mon expérience personnelle, je dirai que, voilà bien des années, lorsque j'avais l'honneur d’être atta- ché au corps enseignant de l’une de nos grandes maisons d'éducation, je mettais volontiers à contribution, au cours de mes chasses entomologiques, le zèle et la complaisance des élèves. En très peu de temps, les noms exacts des groupes d'insectes les plus communs se vulgarisèrent dans mon entourage, et la connaissance s’en est maintenue jusque plusieurs années après. Même, je serais le plus surpris du monde s’il ne se trouvait pas, de-ci, de-là, dans le vaste royaume du Saguenay, de vénérables curés, de respectables avocats et médecins, qui savent encore reconnaître et dési- gner par leur nom le carabe, le hanneton, le nécrophore, etc. Lorsque, de la sorte, grâce à l'étude plus complète que l’on fait aujourd’hui des sciences naturelles dans le cours classique, notre classe instruite aura reçu une connaissance un peu sérieuse, quoique très élémentaire encore, des trois règnes de la nature, lorsque son vocabulaire des sciences naturelles, qui est aujourd’hui d’une maïigreur désolante, se sera enrichi de tant de termes précis et de si bonne langue, notre parler littéraire lui-même y gagnera des beautés toutes nouvelles. Nos poètes habiles, nos beaux prosateurs ne témoigneront plus alors de l’indigence de leur vocabulaire, quand ils voudront parler des choses de la nature; ils en parleront sans risquer de commettre les bourdes monumen- tales qui, dans le passé, ont parfois égayé à leurs dépens les connaisseurs. Ne trouveront-ils pas, à l’occasion, que 62 LE NATURALISTE CANADIEN cela fait bien «dans le paysage », je veux dire dans les ta- bleaux qu’ils brosseront si joliment du bout... de leur plume : les cicindèles, les coccinelles, les libellules, les gril- lons, et autres insectes à noms agréables, qui voltigent sur les terres et les eaux ; les anémones, les ansérines, les barda- nes, les bourraches, les cornouïillers, les épilobes, les iris, les nénuphars, et autres plantes à dénominations pas plus ré- barbatives ?... Pour que le parler des classes populaires et des classes instruites se guérisse de l’extrême insuffisance qui, dans le domaine des sciences naturelles, le caractérise aujourd’hui, il y faudra mettre du temps et des soins. En cette matière comme en bien d’autres, c’est sur l’école qu’il faut surtout compter, l’école où tous les individus passent un nombre plus ou moins grand d'années. Or, à ce point de vue comme à tous lesautres : tant vaut le maître tant vaut l’école. C’est dire que, en tout ce qui concerne les objets de la nature, soit pour assurer à notre langue franco-canadienne une plus grande correction, soit pour la doter d’un vocabulaire suff- samment étendu, il n’y a à compter que sur l’école à tous ses degrés, et par conséquent, en définitive, sur le professeur, l’instituteur et l’institutrice. Aussi j'ai l'honneur de proposer l’adoption des vœux sui- vants : 1° Que, dans les écoles de préparation à l’enseignement, les futurs professeurs, instituteurs et institutrices, puissent acquérir, en histoire naturelle, une connaissance assez éten- due des espèces minérales, végétales et animales de notre pays, soit les plus communes, soit les plus importantes au point de vue industriel, agricole et commercial, 2° Que, dans leur enseignement des sciences naturelles, les professeurs, instituteurs et institutrices, s'appliquent à faire connaître et à faire apprendre aux élèves les noms français exacts des espèces minérales, végétales etanimales dont il est question dans la proposition précédente. UN JUGEMENT SUR LA BAGUETTE DES SOURCIERS 63 3° Que, soit par l'initiative du gouvernement de la Pro- vince, soit par celle de l’une de nos grandes maisons d’édi- tion, l’on publie une série de tableaux d’histoire naturelle destinés à être constamment exposés dans les écoles, et où soient représentés en couleurs les principaux minéraux, végétaux et animaux du Canada, dont les noms français seraient imprimés en assez gros caractères pour être lus de toutes les parties d’une classe ordinaire. D UN JUGEMENT SUR LA BAGUETTE DES SOURCIERS Le Geological Survey des Etats-Unis publie une série de notes très appréciées relatives à l’hydrologie. Dans une de ces notes (n° 225, intitulée: Underground waters for farm use), M. L. Fuller exprime en passant le jugement qu’il s’est fait sur la baguette des sourciers à la suite de ses propres essais. Il parle de la baguette fourchue en coudrier dont on tient les deux branches en mains. Voici, d’après Ærowledge (avril), comment il s'exprime à ce sujet : « Dans ses essais avec une baguette de ce type, l’auteur a trouvé qu’à certains endroits l’appareil semblait s’abais- ser indépendamment de sa volonté ; mais des expériences plus complètes ont montré que cette rotation résultait d’une action musculaire légère et, du moins avant un attentif examen, inconsciente, dont l’effet se transmettait, par les bras et les poignets, jusqu’à la baguette. On n’a pu découvrir aucun mouvement de la baguette qui serait attri- buable à des causes étrangères au corps... « L'inutilité de la baguette des sourciers ressort des faits suivants : elle peut être mue à la volonté de l'opérateur ; elle est en défaut quand il s’agit de découvrir les forts 64 LE NATURALISTE CANADIEN courants d’eau des tunnels et autres conduites artificielles qui ne trahissent l’eau par aucune indication superficielle ; dans les régions calcaires, où l’eau coule en veines bien définies, les succès de la baguette ne dépassent pas ceux de la simple conjecture. En fait, les «sourciers» ne réus- sissent avec leur baguette que dans les régions où l’eau git en nappe définie dans une couche poreuse ou dans des dépôts plus ou moins argileux... On n’a encore trouvé aucun système mécanique ou électrique pour découvrir l’eau en des endroits où le simple sens commun n’en aurait pas indiqué tout aussi bien la présence. Le seul avantage qu’on a à recourir à la baguette des sourciers... tient à ce qu'on se procure parfois de la sorte un service habile, puis- que les spécialistes auxquels on s'adresse, pour peu qu'ils aient une perspicacité native, arrivent forcément par leur expérience même à découvrir la présence et la direction des eaux souterraines mieux que les gens non préparés. » (Cosmos, 1 août 1912.) D PUBLICATIONS REÇUES — Poulailler pratique dans la région nord-est de la province de Québec par J.-B. Plante, aviculteur, 2e édition entièrement revisée du Poulailler modèle. Québec, 1912. Prix, 25 cts. En vente chez l’auteur, à Stada- cona, Québec. Les opuscules si soignés de M. Plante sur l’aviculture forment déjà toute nne petite bibliothèque, que les intéressés feraient bien de posséder et surtout de consulter à l’occasion. — Traité de Constructions rurales, par A.-L,. Gareau et Emile Plante, Québec, 1912. In-8°, 82 pages. Cet ouvrage, abondamment illustré, simplement et clairement rédigé, est rempli de sages directions pour la construction et l'aménagement des divers édifices de la ferme rurale. — Archivos do Museu Nacional de Rio de Janeiro. Vol. XIV et XV. Grands volumes in-4°, illustrés. Mémoires sur les poissons du Brésil, sur certains diptères, sur la flore brésilienne, etc. LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Novembre 1912 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 5 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard UNE LETTRE DE L'HONORABLE M. POIRIER Au cours du mois d'octobre, quelqu'un nous dit : — Vous avez lu la lettre de M. Poirier ?... Qu'en dites- vous ? — Quelle lettre ? — Une lettre où 1l répond ‘à votre article du mois d'août... — Et où se trouve cette lettre ? — Dans ie Pays, de Montréal, du 12 octobre. Et nous avons réussi, après de laborieuses recherches, à lire cette communication de M. Poirier. Nos lecteurs se rappellent probablement que, dans notre livraison du mois d’août, nous avons, à l’encontre d’une assertion faite par l'honorable M. Poirier, membre du Sénat canadien, dans le discours qu’il a prononcé à l’une des séances du Congrès de la Langue française qui s’est tenu à Québec à la fin du mois de juin, — nous avons expliqué comment il se fait, à notre sens, qu’il n’y ait qu’un seul Canadien-Français parmi les membres des deux sections scientifiques de la Société royale. Disons, en résumé, que 5—Novembre 1912. 66 LE NATURALISTE CANADIEN M. Poirier paraît croire que cela est dû au manque de can- didats qui aient, chez nous, les qualifications scientifiques requises. Notre thèse, à nous, c’est que nous avons bien au moins quelques candidats qui ont des titres à faire par- tie de la docte compagnie; mais que, l'admission dans la Société royale se faisant par voie élective, et les membres des sections scientifiques étant à peu près tous de race anglaise, il n’est guère étonnant qu’ils n’appellent que de leurs compatriotes à venir siéger parmi eux: et cela, soit parce qu’ils ignorent les travaux que nous pouvons faire ici en langue française, soit parce qu’ils ont toujours chez eux une abondance de candidats méritants, soit à cause de la « mentalité nationale » de ces messieurs, et qui les fait se servir d’abord, avant de songer à des candidats d’autre tACe. Il nous aurait été agréable d'entendre M. Poirier défen- dre sa propre thèse par les arguments dont il aurait cru pouvoir l’étayer, puis discuter la nôtre et démontrer pour- quoi il la trouverait peu solide. Il n’en a rien fait, et nous croyons beaucoup qu’il s'en est abstenu comme d’une tâche difficile et même impossible à accomplir. De ce que nous disons là, nos lecteurs vont être à même de juger par eux-mêmes; car nous allons mettre sous leurs yeux, inté- gralement, la lettre même de M. Poirier. Nous leur lais- sons aussi le soin d'apprécier le choix qu’a fait M. Poirier du Pays, parmi toute notre presse de la Province, pour répondre au Vaturaliste canadien, et par suite le fait qu’il a cru devoir présenter sa défense à un public, celui du jour- nal montréalais, qui ne connaissait rien de l’affaire dont il s’agit, et cela de préférence au public, celui de notre revue, qui était au fait de la question. Quoi que puisse penser M. Poirier, en ce qui le concerne, de ce dernier point, nous regardons, nous, comme un devoir de simple loyauté de fournir à nos lecteurs l’occasion de UNE LETTRE DE L’'HON. M. POIRIER 67 prendre connaissance de ce que l’honorable sénateur a cru devoir répondre à notre article du mois d’août. Ils s’éton- neront sûrement de constater que, ainsi que nous venons de le signaler, il ne tente seulement pas de réfuter notre thèse, et aussi de ce qu’il s’en prend à certaines de nos assertions sans les citer textuellement. S'il avait discuté de cette façon avec feu M. Tardivel, il aurait eu sans doute à s’en repentir! Il serait peut-être suffisant, pour qui viendrait de lire notre article du mois d’août, de lire à la suite la lettre de M. Poirier; et nous ne redouterions aucunement le juge- ment que l’on pourrait ensuite porter sur l'affaire. Toute- fois, on ne trouvera pas mauvais que nous relèvions, en des notes brèves, certaines des assertions de M. Poirier. Et ce sera là toute notre réplique. Voici donc la correspondance de M. Poirier avec tous ses titres et sous-titres — lesquels, espérons-nous, sont de la rédaction même du Pays. UNE LETTRE DE L'HON. M. POIRIER EN MARGE D'UN ARTICLE DE L'ABBÉ HUARD ET DE SON ! DISCOURS AU CONGRÈS DU PARLER FRANÇAIS De la vérité là où il y a trop de mensonges — De la lumière là où il y a trop d'ombre — Des écoliers à qui on corrige leurs thèmes —L'éminent sénateur acadien donne de ses nouvelles à la bonne presse A. M. G. Langlois, directeur du Pays. Cher monsieur, De passage à Montréal, dimanche dernier, n’ayant rien à lire durant les longues heures de pluie et de neige qui: 1. Il est superflu, sans doute, de faire observer que nous n'avons fai aucun discours au Congrès de la Langue française. 68 LE NATURALISTE CANADIEN faisait, j'achetai tous les journaux français que je trouvai à l’étalage de mon hôtel: /e Devorr, le Nationaliste, le Bulletin, l'Action, le Pays, le Canada, La Patrie, la Presse, La Croix, le Canard et quelques autres feuilles bien pen- santes. : Cette débauche de lecture dominicale me revient à trois dollars, deux que vous trouverez ci-contre, pour abonne- ment au /4ys, et un que j’adresse au Vaturaliste de M. l'abbé Huard ?. M. l'abbé Huard me consacre dix pages de son Vaéura- liste canadien, plus qu’il n’en faudrait pour décrire un saurien de l’époque tertiaire *, et il fait, durant tout ce temps-là, des efforts d'esprit pour me faire «endêver » #, comme nous disons chez nous. ; Ce n’est pas précisément à cause de cela que je m'abonne à l'excellente revue scientifique qu'est le Va/urahste ; c’est pour être logique; c'est parce que, si, d'un côté, les sciences ne sont pas enseignées comme elles devraient l'être dans nos maisons d'éducation secondaire, elles ne reçoivent pas non plus l’encouragement, soit moral soit pécuniaire, qu’elies auraient droit d'attendre de tout le monde et plus particulièrement de nous qui avons fait un cours complet 2. En effet, l'honorable M. Poirier, un abonné d’autrefois au Va/ura- liste canadien, nous a fait le plaisir de se réinscrire sur nos listes. L’ex- emple est excellent, et serait à suivre par bien d’autres intellectuels, plus prompts à crier à l'insuffisance de nos compatriotes sur le terrain scientifique qu'à faire quoi que ce soit pour aider à la diminuer. Comme on le verra un peu plus loin, M. Poirier pense comme nous sur ce sujet. 3. M. Poirier veut sans doute parler ici des gigantesques sauriens des premières époques géologiques, Dinosaures, Ichthyosaures, etc. ; mais alors, il aurait fallu dire « l’époque secondaire». A l’époque tertiaire, les reptiles ne diffèrent plus tellement de ceux de l’époque actuelle, 4. Rassurons ici M. Poirier. Ce que nous avons écrit de son discours ne nous a pas si fatigué qu'il le croit. Et qu'il soit «endêvé » ou non, cela nous est de la plus parfaite indifférence. UNE LETTRE DE L'HON. M. POIRIER 69 de mnémonique ° et qui, à cause de cela, posons à la classe éclairée, voire au monde savant. Combien d'avocats, eombien de notaires, combien de médecins et apothicaires, combien de curés, combien de professeurs dans nos collèges classiques, reçoivent et lisent le Vaturaliste canadien de M. l'abbé Huard, l'unique or- gane scientifique de la province ? Les mots soulignés sont de M. l’abbé lui-même. Ecrits par moi, ils constitueraient, paraît-il, un délit grave, un outrage aux Canadiens-Français. C’est, en effet, parce que j'ai dit, au Congrès du Parler français de Québec, que la Société royale ne compte qu’un wzique Canadien-Français sur soixante-et-onze dont se composent les deux Sections scientifiques, fait authen- tique et que personne n’a nié, que je suis pris plus particu- lièrement à partie (6) par M. l'abbé Huard, qui, lisant, dit-l, au fond de ma pensée (7) —il se trouve toujours des âmes charitables pour lire le fond de nos pensées— me fait 5. Nous craignons fort que M. Poirier n’ait pas une idée juste de ce que l’on entend par un cours de mnémonique complet ou non. 6. C'est d'autant moins pour ce fait que nous avons «pris plus parti- culièrement à partie» M. Poirier, que nous avons nous-même cité ce fait dans notre article. Ce que nous lui avons reproché, c'est d'avoir paru tirer de ce fait la conclusion que si nous ne sommes pas représentés davantage dans les sections scientifiques de la Société royale, cela est dû à ce que nous manquons de candidats à cet honneur—puisque, a ajouté M. Poirier dans son discours, «l’on n’est ni exclusif, ni intolérant dans le monde des sciences. » 7. Non, nous n'avons jamais dit que nous «lisions au fond de la pen- sée» de M. Poirier. Nous avons dit simplement ceci: « Il nous paraît, d'après le reste du discours de M. Poirier, que sa pensée est celle-ci ». .…. Par exemple, nous devons l'avouer, nous avons l'habitude, quand nous lisons des écrits ou que nous écoutons les gens, de chercher à connaître leur pensée. Autrement, nous ne saurions plus pourquoi lire et pourquoi écouter. | 70 LE NATURALISTE CANADIEN dire intérieurement qu’il n’y a absolument personne parmi les Canadiens « qui soit qualifié pour en faire partie. » Parce que vous nous déclarez, monsieur l’abbé, que vous êtes «l’unique organe scientifique de la province » (Vatura- liste canadien, août 1912, p. 23, ligne 24), je n’en conclus nullement que vous ayez voulu par là rien insinuer de désobligeant pour vos confrères en sciences naturelles ($). Alors, pourquoi me faire penser ce que je n’ai pas dit ? Est-ce vrai ou non ce que j'ai dit, sans commentaires aucuns, de la composition des membres de la Société royale ? Vous ne voudriez pourtant pas, vous un saint prêtre, que j’eusse, même pour vous être agréable, ditautre chose que la vérité? * Le Canada français fourmille de savants, selon vous 1. Tout est parfait. Je n’y trouve rien à redire; je m'en réjouis plutôt, et j'y ajouterai même—cela vous fera autant plaisir que d’entendre dire que Mgr La- flamme était un géant intellectuel — le nom de M. l’abbé Henri Simard, digne successeur de Mgr Laflamme à sa chaire de professeur de physique, à l’Université Laval (1). 8. Il nous fait peine d’avoir à faire observer à notre honorable contra- dicteur que nous n’avons pas commis la faute ridicule de nous désigner personnellement comme un «organe scientifique.» Tout le monde a compris que c’est notre journal que nous avons désigné de la sorte. 9. Ah non! Nous ne voulons pas vous faire manquer à la vérité! Et ce que vous avez dit «de la composition des membres de la Société royale », nous l’avons dit nous-même — en d’autres termes, il est vrai... et Dieu merci! 10. Où M. Poirier a-t-il pris que nous ayons jamais rien dit de ce genre! Nous nous sommes contenté de nommer six ou sept de nos col- laborateurs, qui pourraient très bien faire partie de la Société royale. 11. Nous n'avons pas attendu de lire M. Poirier pour penser que M. l’abbé Simard, notre collaborateur dans une autre œuvre scientifique que celle-ci, devrait déjà être membre de la Société royale. Seulement, nous prions M. Poirier de vouloir bien relire la page de notre article dont il s’agit ici: il y constatera que nous n’avons parlé là que des colla- borateurs «anciens ou nouveaux» du Va/uraliste canadien, parmi les- UNE LETTRE DE L'HON. M. POIRIER 7 Mais tout cela prouve-t-il rien à l'encontre de ma thèse ? J'ai eu la témérité d’ajouter, avec autant de correction dans les termes que j'en ai pu mettre, que cette constata- tion — j'en ai fait d’autres également pénibles —, pour être humiliante, ne laissera pas que d’être salutaire pour nous, si nous faisons enfin sur nous-mêmes, et non pas, comme trop souvent il arrive, sur les autres, un sérieux examen de conscience ; si nous cessons de croire que nous sommes les plus excellents parmi les hommes, les f/us savants, les plus saints, les plus parfaits, tout naturellement, sans presque rien faire pour cela, parce qu’on nous le dit dans les discours de la Saint-Jean-Baptiste, et j’ajouterai main- tenant, dans le Vaturaliste canadien ; si nous nous secouons, nous autres laïques, et nous mettons à l’œuvre; si dans nos collèges et nos universités l’on porte plus d’attention à l’enseignement pratique des sciences appliquées, voire du français. Bref! j'ai demandé de la vérité là où 1! y a trop de vanité, d'adresses et de mensonges, de la lumière là où il y a trop d'ombre À. M. l'abbé Huard se scandalise de mes paroles, crie haro ! sur moi, et s'étonne que la bonne presse (vous n’en êtes pas, mon cher M. Langlois) ne m’ait pas depuis longtemps pulvérisé de ses anathèmes. Je ne dirai pas avec Victor Hugo, s'adressant à ceux pour qui le progrès scientifique semble ce qu’il y a de plus détestable au monde : quels nous avons le regret de ne pouvoir compter encore, malgré nos invitations, le savant successeur de feu Mgr Laflamme, dans l’enseigne- ment de la Physique et de l'Astronomie à l’Université Laval. 12. Il suffit de lire cette tirade, et les suivantes, pour en apercevoir le vide et l'inopportunité. Par exemple, quand, en particulier, le Va/ura- Liste canadien nous a-t-il représentés comme «les plus excellents. (sic) parmi les hommes, les f/us savants », etc? 13. Voilà qui nous est appliqué aÿeg à-propos, nous qui donnons, sans compter, notre temps et notre argent pour tenir debout, en notre Province française, au moins une revue scientifique. 72 LE NATURALISTE CANADIEN Si nous les laissons faire on aura dans vingt ans, Sous les cieux que Dieu dore, Une France aux yeux ronds, aux regards clignotants, Qui haiïra l'aurore. Mais je trouve tout de même que l'organe est ici plutôt fossile que 20e siècle. Et cet «organe scientifique » de M. l'abbé Huard, mis en travers du chemin du progrès, représente éminemment les hautes études dans la province de Québec!... Posant en «wagister elegantiarumy», M. l'abbé me baïlle, en passant, une leçon de tenue. Cela m’en fait deux. J'en avais déjà reçu une, en plein visage, à la séance du Con- grès que je présidais. Il estime qu’étant «l'hôte» de l’Université Laval, je n'aurais jamais dû y parler science et enseignement !#, Le compliment n’est guère flatteur pour ia première université française du Canada. En tous cas, je n’ai pas cru, et ne crois pas encore, qu’en abordant ces questions en thèse générale devant un Congrès plénier de la famille française dans le monde réunie à Québec pour délibérer sur ses intérêts essentiels, j'ai fait, comme il le prétend, à cette occasion, l’impair de celui qui parle corde dans la maison d’un pendu. Les délégués au Congrès du Parler français étaient, sans doute, à un certain point de vue, les « hôtes » de la cité de Québec et de l'Université Laval, et l'hospitalité qu’ils en ont reçue a été princière, cordiale, parfaite; mais nous croyions, nous autres de l'Ontario, des Etats-Unis et de = ‘14. D'abord, nous n'avons rien dit de tel. Kt puis..., il yala manière de « parler science et enseignement. » Et nous ne croyons pas que l’on puisse assimiler, comme fait plus loin M. Poirier, la qualité des repré- sentants de l’ Acadie au Congrès de la Langue française et vis-à-vis la province de Québec, à celle des membres du Parlement fédéral vis-à-vis la ville d'Ottawa. FABRICATION DU POISSON ROUGE 73 l’Acadie, moi, au moins, je me figurais que cette abon- dante hospitalité était de la nature de celle que reçoivent, de la cité d'Ottawa et du ministère, les députés au Par- lement fédéral: qu’elle ne leur enlevait pas la liberté de penser et de parler convenablement. Si nous étions là tous comme des écoliers à qui on cor- rige leurs thèmes; comme des petites filles de couvent présentant à leurs maîtresses de gentilles petites adresses, revues, corrigées et parfumées, il est bon qu’on le sache . Pour ma part, malgré la haute considération que je professe pour le révérend directeur du Vaturaliste canadien, je n’en crois rien. Ce serait « à d’autres grands malheurs un mal- heur ajouté. » Mais il est temps que je termine ; ce que je fais, en sou- haïtant au vaillant «organe», qu’est /e Pays, les grâces d'état les plus abondantes 16, PASCAL POIRIER. A0 )E LA FABRICATION DU POISSON ROUGE Le Journal officiel de la Société des Chasseurs de France donne de bien curieux détails sur cette industrie qui, sans doute, offre toute satisfaction aux amateurs, mais qui est peut-être moins appréciée du pauvre poisson soumis à cette culture intensive. «Il n’y a pas bien longtemps, dit notre confrère, on ne connaissait guère qu’une seule variété de poisson rouge. C'était un modeste cyprin, d’une couleur uniformément écarlate, que l’on plaçait dans un bocal de verre d’une forme spéciale, où le malheureux, laissé ordinairement 15-16. ! ! ! — On s'étonnera, d’ailleurs, en maints quartiers, des bon- ues dispositions qu’affiche ici M. Poirier pour le Pays. 74 LE NATURALISTE CANADIEN sans nourriture, passait son existence à tourner mélanco- liquement. « Plus tard, sont venues les variétés, marquées de taches noires ou blanches et à écailles dorées. «Aujourd’hui, le cyprin ordinaire est un peu négligé pour des espèces de formes plus singulières, des monstruo- sités créées de toutes pièces par l’ingéniosité des Chinois ou des Japonais, telles que le télescope, etc., et son élevage est à peu près abandonné, sauf en Italie, où cette industrie — car c’est là une véritable industrie —est très pratiquée. « Le plus important des établissements s’occupant de cet élevage est en Sicile. Il comprend cent vingt viviers ou étangs d’une contenance d'environ cent mètres carrés cha- cun, séparés par des digues et échelonnés sur trois hectares de terrain tourbeux. Ces viviers, communiquant ensemble pour la plupart, sont alimentés par l’eau tiède sortant d’une filature voisine et par l’eau de plusieurs sources cap- tées à cet effet. L'eau de source est saturée d’air par son agitation dans les tuyaux avant d'arriver aux viviers, qui sont divisés en quatre catégories: 1° pour le frai; 2° pour l'élevage ; 3° pour le durcissement de la peau du poisson ; 4° pour les diverses colorations à obtenir. Les viviers pour la coloration n’ont qu’une très faible profon- deur, et la température de l’eau y est quelquefois portée, en été, jusqu’à 50° C. au moyen d’un générateur à vapeur. Les bassins destinés au frai sont un peu plus profonds: 30 à 40 centimètres environ. L'eau, très oxygénée, y est fré- quemment renouvelée afin de provoquer la ponte. Des dépressions sont ménagées à certaines parties du fond et les bassins de frai sont garnis de plantes aquatiques, telles que l’Æodea canadensis, \ Hippuris vulgarts, etc., sur Îles- quelles les poissons vont, le moment venu, déposer leur frai. Ÿ «Le système en usage permet d'obtenir des poissons FABRICATION DU POISSON ROUGE 75 colorés à la fin de la première année, qui, à l'automne sui- vant, ont atteint la taille marchande et peuvent frayer deux ou trois fois par an. «On obtient donc chaque année deux ou trois séries d’éclosions, fournissant deux tiers environ de femelles et un tiers de mâles. Quand les circonstances sont favorables, la première s'effectue en mars ou avril, la deuxième en juillet, la troisième à la fin d'août. Le grand nombre des éclosions est dû à l’aération artificielle de l’eau, à une ali- mentation intensive, et aux mutations périodiques des mâles permettant d'obtenir de forts rendements avec un nombre relativement restreint de femelles. « Avec ce système intensif, les poissons deviennent assez rapidement stériles ; ils sont alors livrés à la vente. « Quant à l'alimentation, l’injecteur refoulant l’eau de la filature dans les viviers d'élevage aspire en même temps un mélange d’infusvires et d’insectes que la température de cette eau, voisine de 38°, tue avant qu’ils aient atteint les réservoirs, et on leur donne, en outre, une nourriture abondante composée d’insectes, de sang caillé, de débris de viande et de germes d’orge provenant des malteries ; ils se trouvent très bien de ce régime, car les alevins de l’année atteignent à l’automne une longueur de 4 à 7 cen- timètres. C’est surtout l'abondance de la nourriture qui provoque la fécondité des poissons, et il est d'autant plus essentiel de fournir à ces poissons une copieuse alimenta- tion que, placés dans une eau atteignant une température élevée, leur respiration est beaucoup plus active et qu’ils ont par conséquent besoin d’être plus copieusement nourris. « La «mise en couleur» des poissons est obtenue au moyen de procédés spéciaux à chaque éleveur. Les trois principaux éléments employés pour obtenir cette coloration sont le fer, la noix de galle et le tan, qui donnent, en les combinant dans certaines proportions, diverses colorations. 76 LE NATURALISTE CANADIEN Les poissons les plus recherchés en Italie sont ceux qui portent les couleurs de la Prusse ou de l'empire allémand dans l’ordre où elles figurent au drapeau. Ils atteignent un prix très élevé. «S1 quelques sujets ne se colorent qu’imparfaitement, on les place dans un bassin peu profond où ils sont en pleine lumière. Le soleil exerce sur la coloration une action très énergique, mais beaucoup ne peuvent résister à ce traitement et périssent. « Pour préparer les poissons à ces manipulations, on les place pendant quelque temps dans des bassins où leur peau se durcit sous l’influence de la tourbe, du fer et de la craie en dissolution dans l’eau. « L'eau de rivière est recommandée pour les aquariums. La nourriture doit être animale. Mais, en tout temps et surtont en hiver, la nourriture doit être donnée avec par- cimonie. Il vaut mieux que le poisson reste un mois sans manger que d'avoir une nourriture abondante. Il faut éviter de donner du pain ou des matières féculentes qui s’aigrissent et rendent l’eau dangereuse. » :00 : « SYNONVMV OF THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA » Bv'E. P. VANSDUZEE, BUFFALO, "NW? L'important travail dont on vient de lire le titre a paru dans le Canadian Entomologist du mois de novembre. Il est d’un tel intérêt pour l’entomologie de la province de Québec, que nous devons le reproduire ici en entier. ‘Tou- tefois, nous n’en traduirons que l’introduction ; le reste, qui est la liste des espèces, peut sans inconvénient paraître ici 1HE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 77 en anglais — la majeure partie en étant d’ailleurs du latin. Il nous a été agréable soit de faire la connaissance de M. Van Duzee, couservateur de la Bibliothèque publique de Buffalo, soit de lui faciliter l'étude qu’il a faite des collec- tions Provancher, au Musée de l’Instruction publique. Ci suit l’article de M. Van Duzee. (Traduction.) Grâce à l’obligeance du Rév. A. Huard, de Québec, j'ai pu dernièrement faire l'examen de la collection Hémiptérologi- que de Provancher, qui se trouve maintenant dans le Musée de l’Instruction publique, au Palais législatif de Québec. Cette collection, dont on a pris bon soin, est dans un excel- lent état de conservation. I1 semble qu'elle soit, en grande partie, la matière même dont l'Abbé s’est servi pour la pré- paration du volume consacré aux Hémiptères, dans sa ?e- tite Faune entomologique du Canada: en effet, on peut dire que toutes les espèces dont il est traité dans ce volume sont rangées, en cette collection, dans le même ordre que dans le volume lui-même: les quelques espèces qui s’y trouvent en sus sont généralement placées entre les rangées régulières des spécimens !. Il n’y a d'ordinaire qu’un seul spécimen, au plus deux, de chaque espèce, et les étiquettes paraissent être de l’écriture de Provancher lui-même. Il n’y a pas de «types » désignés comme tels. Je n’ai pu trou- ver trace des types des espèces qu’il a publiées, en 1872 1. Le témoignage que rend ici M. Van Duzee nous fait grand plaisir. Car, ainsi que nous l’avons écrit ailleurs, nous nous sommes efforcé de conserver la collection de l'abbé Provancher, celle au moins qu'il a tra- vaillée jusqu’à sa mort — en effet, le Musée en contient aussi une autre achetée de lui plusieurs années auparavant —, telle qu'il l'a disposée lui- même ; et cela justement pour que cet;e collection reste comme le com- mentaire de ses ouvrages entomologiques. Etant donné les modifica- tions continuelles qui se font dans la nomenclature des insectes, cette ligne.de conduite nous a paru la plus sage, pour assurer et conserver la valeur des ouvrages entomologiques de notre grand naturaliste, H. 78 LE NATURALISTE CANADIEN dans le volume IV du Vaturaliste canadien. Je suis con- vaincu que, à l’époque où il publia sa Petite Faune, il a fait entrer dans sa collection générale ce « matériel » ou du moins ce qu’il en possédait encore, et par conséquent qu’il sera à jamais impossible de «localiser » (to locate) toutes les espèces qu’il a anciennement décrites !. Toutefois la collection de la Petite Faune contient la détermination, faite par Provancher, de la plupart de ses espèces de 1872; et pour autant que ces spécimens s'accordent avec ses pre- mières descriptions, ils doivent être regardés comme se rap- prochant le plus possible des types existant aujourd’hui ? des espèces anciennement décrites par Provancher. 1. Ces types se trouvent, du moins en partie, dans une collection plus ancienne de l'abbé Provancher, que nous possédons aussi au Musée de l’Instruction publique. H. 2. L'abbé Provancher n'avait pas l'habitude de munir d'aucune indi- cation particulière les /ypes, soit les spécimens qui lui avaient servi pour la détermination ou la description de ses espèces nouvelles. Nousn'avons jamais vu dans ses collections d'indications de ce genre. — Quand il dé- terminait et décrivait des espèces nouvelles, d’après un spécimen unique se trouvant en des lots d'insectes qu’on lui confiait pour les identifier, il gardait ordinairement, croyons-nous, ces «uniques». Nous le savons d’ expérience personnelle : car il ne nous a jamais remis les « uniques » qu’il avait reçus de nous et qui étaient des espèces nouvelles. I1 a même gardé de la sorte les deux espèces de Zyda que nous avons décrites sur son témoignage qu’elles étaient nouvelles. Nous acceptions volontiers cette manière de faire, trouvant que «c'était bien le moins » qu'il enrichît de la sorte et en de telles circonstances sa propre collection. — Maintenant, nous pouvons affirmer que l’abbé Provancher a fait trois collections d'insectes: l'une qu'il vendit en 1877, au département de l’Agricul- ture, Québec, et qui fait actuellement partie de notre Musée de l'Ins- truction publique; une autre qu'il vendit, peu d'années avant sa mort (1892), au collège de Lévis, près Québec, et enfin celle qu’il laissa à sa mort, et qui fut achetée, en 1893, par le gonvernement et se trouve aussi dans notre Musée. Il semblerait donc que les «types» de toutes les espèces décrites par l'abbé Provancher doivent se trouver dans l’une ou l’autre de ces trois collections. M. Van Duzee n’a examiné qu’une seule de ces collections, celle que M. Provancher a laissée à sa mort. Faute de bien nous rendre compte du genre de travail qu’il avait l'intention de faire en visitant le Musée, ou par suite de nous ne savons plus quelle au- tre circonstance, nous avons oublié de lui faire voir aussi la plusancienne de nos collections Provancher, celle de 1877. Or, nous avons le plaisir de pouvoir dire à M. Duzee que, par un simple coup d’œil jeté dans un seul des tiroirs de cette collection, nous avons constaté la présence de «spécimens d’une dizaine des espèces d’Hémiptères décrites en 1872 par THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 79: En partant pour Québec, j’emportai, pour faire la com- paraïson, un bon nombre de spécimens de ma collection, représentant toutes les espèces au sujet desquelles j'avais des doutes, et je fus de la sorte en état de me fixer sur presque toutes les espèces de la Petite Faune et sur la plu- part de celles de 1872. Dans les notes qui vont suivre, j'ai pensé qu’il était pré- férable de donner ma propre identification (to give my de- termination of) de chacune des espèces de la Petite Faune, en signalant toutes les formes douteuses, pour la comparai- son rigoureuse desquelles je n’avais à ma disposition aucun «matériel » et où par conséquent je n’avais que mes souve- uirs pour me fixer. — Pour chacune des espèces, j'ai indi- qué d’abord la page de la Petite Faune, et ensuite le nom telle qu’elle le donne. — Quand la détermination est «cor- recte », ce mot «correct » vient à la suite du nom, et, après, je donne le nom qui désigne aujourd’hui l’espèce, pour les cas où il diffère de celui dont Provancher s’est servi. 20. Thyreocoris unicolor P. B., correct. 21. 7hyreocoris pulicarius Germ., correct. 21. Æomæmus ænetfrons Say, correct. 22. ÆEurygaster alternatus Say, correct. 27. Canthophorus cinctus P. B., correct. Sekirus cinc- ius,P..B. 28. Pangæus bilineatus Say, correct. 29. Podisus cynicus Say, correct. Apateticus cynicus Say. 30. Podisus modestus Dall. Under this name is one Podisus sereiventris Uhl. pinned to the label and one #0- destus at the side. l'abbé Provancher, par exemple: Æurygaster Nicoletanensis, Miris vici- mus, M. viridis, Salda major, S. obscura, S. variegata, etc. Si M. Van Duzee le croit utile, nous publierons ici volontiers la liste complète de- ces espèces. H. 80 LE NATURALISTE CANADIEN 31. Podisus spinosus Dall., correct. Pôodisus maculi- ventris Say. | 32. Perillus circumcinctus Stal, correct. Perclloides circumcinctus Stal. 33. Perillus exaptus Say, correct. Perilloides exaptus Say. 34. Rhacognatus americanus Stal, not in the collection. © 35. Brochymena annulata Fabr. is y-pustulata Fabr. (Under the name y-pustulata Fabr. is one example of myops Stal.) 36. ÆEuschistus fissilis Uhler, correct. 36. ÆEuschistus tristigmus Say, correct. 38. Aéelia americana Dall., is Veottiglossa undata Say ; a dark specimen, but not as dark as the western #72/71eata Kirby. 39. ÂVeottis lossa undata Say, correct; a pale example. (In the collection is a western specimen of 7%yanta anti- guensis Westw., labelled Veoftiglossa sulciyrons.) 40. Ælymenarcys nervosa Say, correct. 40. Cœnus delius Say, correct. 41. Lioderma ligata Say is Pentatoma persimilis Horvath. 42. Thyana custator Fabr., correct. 43. Mormidea lugens Fabr., correct. 44. Cosmopepla carnifex Fabr., correct. 46. Banasa calva Say ; under this name is a pale example of dimidiata Say. 46. Banasa dimidiata Say, correct. 46. Banasa euchlora Stal, not in the collection. 48. Acanthosoma cruciata Say. On this label is an example of ÆZasmostethus atricornis Van D., and byit one of Æ. cruciata Say. (A suivre.) LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Décembre 1912 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 6 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard LES AMMOPHILES ! «COMME AU PAYS DE J.-H. FABRE » La faune entomologique diffère considérablement d’un pays à l’autre, surtout suivant les latitudes. Que sont les obstacles des conditions atmosphériques ou climatolo- giques pour la puissance du Créateur ? Sa Sagesse a trouvé les moyens de produire partout la vie sous des formes très nombreuses et variées, adaptées aux différents milieux. Rien d'étonnant donc si les insectes de notre pays ne sont pas exactement les mêmes que ceux de France ou d’ail- leurs, quant aux espèces, à leur manière de vivre et à leurs instincts. Cependant, malgré cela, 1l y a lieu de se demander par quel argument ou quel tour de force génial l’on voudrait en certain milieu nous obliger à croire qu’il n’est pas pos- sible de tirer, ici comme en France, les mêmes conclusions, 1. Dans cet article il s’agit de l’Ammophile commune, Ammophila communis Cress. (A.)—Nous signalons à nos lecteurs cet article, qu'ils trouveront, comme nous, du plus vif intérêt. Ils y remarqueront aussi la note apologétique, qui a son importance. 4. C, 6,—Décembre 1912. 82 \ LE NATURALISTE CANADIEN contre le transformisme, des mœurs et des instincts de nos insectes. Ils ne sont pas les mêmes, dit-on, que ceux dont parle le maître de Carpentras ? Mais du moment qu’un hyménoptère, par exemple, quelle que soit son es- pèce, vivant en Chine ou au Canada, manifeste en lui la présence d’un instinct impérieux et invariable, poussant toujours aux mêmes actes, malgré les obstacles quelque- 4 Fig. 7.—L'escalade du talus. Fig. 1.—Ammophila communis Cress. fois insurmontables, suivant toujours avec rigueur la même méthode difficile, quand une autre plus simple et plus facile est offerte fortuitement ou proposée à satiété par l’expérimentateur, il faut conclure : cette manière d’agir m'est pas acquise ; elle n’est pas due aux actions lentes et séculaires du transformisme, mais elle a été imposée à l’insecte dès le commencement ; il y est astreint par l’acte d'une Volonté supérieure. Du moment qu’un hyménop- 2. M. J.-H. Fabre, entomologiste français. | | Quest st Te LES AMMOPHILES 83 tère, du Canada ou de France, manifeste par ses actes une connaissance profonde de l'anatomie de sa victime, con- naissance non acquise par éducation, puisque la mère sera morte avant la naissance de son fils, connaissance non acquise par tâtonnements ou expériences répétées puisque, dès la première opération, il est expert dans son art, il faut conclure : cette connaissance n’est pas le résultat de l'expérience acquise dans les luttes pour la vie. Science non acquise, donc science infuse; science infuse, donc science de Dieu. Le besoin, l’influence des milieux, etc., etc., ces arguments aussi drôles que pauvres, invoqués à tout moment, n’y sont pour rien; ce sont des mots en l’air que le vent seul devrait emporter au pays des Hot- tentots ! Depuis longtemps nous examinons le petit monde des insectes ; et, il faut l’avouer, dans ce domaine la puissance et la sagesse divine nous plongent dans l’admiration, au- tant qu’elles le font par les merveilles du monde sidéral. Revenez en notre mémoire, heures joyeuses, passées loin des bruits du monde, pour nous laisser contempler encore les ouvrières du Bon Dieu, les Ammophiles, accomplissant fidèlement, malgré les difficultés, l’ordre reçu de perpétuer la race. Les beaux jours n'étaient pas disparus à jamais de notre horizon, malgré les averses quotidiennes et le ciel assom- bri de septembre dernier. Le jeudi, 3 octobre, la nature reprenait son air de gaieté, sous les rayons d’un clair soleil. Et comme cela, nous partions, élèves et professeur, oubliant les lois de la gravitation et le tube de Torricelli, à la recherche des Ammophiles. Cet hyménoptère, au corps svelte et allongé, ceinturé d’une écharpe rouge à l’abdomen, porté au bout d’un pédoncule fin et délié, creuse son terrier à même les talus à pic de terre argileuse mêlée de sable. 84 LE NATURALISTE CANADIEN A une dizaine d’arpents de notre collège, un terrain de ce genre est exploité par la compagnie du chemin de fer « Canadien Pacifique » et les Ammophiles. Mais en trou- verons-nous à l’œuvre ? Nous les avons vues tant de fois fâner au soleii, prenant leur bain de chaleur et de lumière, nous faisant regretter les heures perdues et nous exposant aux quolibets des passants, qui ne comprennent pas qu’un Fig. 2.—Le coteau exploité par le « Canadien Pacifique » et les Ammophiles. homme sérieux puisse s'arrêter à la porte d’une demeure aussi banale que celle d’un insecte. Comme nous avons été récompensés de notre persévérance ! Nous avons pres- que tout vu ce que nous désirions voir depuis longtemps. À peine installés près de la paroi coupée à pic par la pelle du cantonnier, nos élèves poussent le cri de satisfaction : « En voici une, et une autre, qui creusent ! » Nous nous partageons en deux équipes, pour bien suivre les opérations et ne perdre aucun détail. C’est bien cela, LES AMMOPHILES 85 « cants tnstar », disaient Buffon et Fabre, elles jouent des mandibules et des pattes antérieures; les postérieures brossent et déblaient la place avec une rapidité étonnante. A certain moment le terrain durci résiste: alors du fond du terrier nous arrive un bruit strident et plaintif, un grincement peut-être d’impatience que l’insecte fait enten- dre en s’attaquant avec plus d’ardeur à l’obstacle. Et voilà Fig. 3.—4« En voici une et une autre qui creusent ! » l’'Ammophile qui sort tenant dans ses mandibules un bloc d'argile de grosseur surprenante, qu’elle jette au bas du talus. Après quelques instants de repos, la besogne est reprise avec le même entrain. Puis l’ouvrière vient faire sa toilette et se chauffer au soleil. L'autre équipe nous tient au courant des mêmes gestes en termes pittoresques et remplis d'enthousiasme. Mais... voilà nos ouvrières qui s’envolent ! Désappointement. général des spectateurs. 86 LE NATURALISTE CANADIEN Quand reviendront-elles ? Il faudra retourner bientôt à l'étude ! Au milieu de ces perplexités, la bonne Providence nous préparait d’autres joies. En effet, après quelques minutes d’attente, nos ouvrières reparaissent sur la paroi presque verticale du talus, chargées d’un riche butin. Chacune, se frappant le corps de coups d’ailes encoura- geants, traîne entre les pattes sa proie, une chenille glabre, de la grosseur d’un tuvau de plume d’oie et d’un pouce de longueur, qu’elle tient solidement avec ses man- dibules. La victime est sur le dos, la tête en avant. Ce sera la nourriture toute fraîche pour la jeune larve dont l'œuf sera pondu dans quelques minutes sur le segment du milieu.— « Mais, c’est trop lourd ; elle ne réussira pas à grimper. Nous t’aiderons, petite!» Inutiles sympathies ; l’'Ammophile connaît sa force, et nous connaissons main- tenant son courage. Malgré les dégringolades acciden- telles et d’autres dues à notre malice, elle réussit à traîner jusqu’à la porte de son terrier le précieux fardeau. Ah! Favier !, fidèle domestique du grand maître, que n’étiez- vous là pour nous trouver uue chenille vivante à substi- tuer? Nous aurions vu avec quel art le savant opérateur paralyse sa victime. Ce spectacle nous était réservé pour une autre occasion. Avant d’enfouir le déjeûner de sa future larve, l'Ammo- phile fait une courte visite au terrier. Quelque intrus à déloger ou un dernier coup de balai à donner, tel doit être le motif de cette descente. Profitons de ce temps pour éloigner la chenille de quelques pouces. L’Ammophile reparaît déjà ; elle vient chercher sa proie pour l’enfouir. Tout va bien à l’intérieur; c'est le temps de pondre. « Mais, qu'est ceci ? » semble-t-elle dire, à la vue du grand dérangement que nous venons de faire. Elle s'arrête tout 1. Domestique de M. Fabre. LES AMMOPHILES 87 court, se brosse les antennes, et se frotte les yeux avec de la salive. Ce n’est pourtant pas un rêve !... Le dérange- ment reste un mystère ; et le premier moment de surprise passé, elle approche de nouveau la chenille et s’introduit encore une fois sous terre. L’observateur patient pourra faire recommencer vingt fois, et peut-être plus, la descente de l’insecte dans son terrier. Cette visite au terrier doit donc être d’une importance capitale pour la sécurité de sa progéniture, puisque l’'Ammophile la recommence chaque fois que nous éloignons la chenille. Elle craint, en effet, l'entrée d’un parasite au terrier pendant la manœuvre. Mais il y aurait pourtant un moyen bien simple de mettre fin à ce manège ennuyeux tout en ne négligeant rien pour la sécurité : une course rapide de la porte à la proie et retour précipité avec la chenille ne laïsseraient pas le temps au pa- rasite d’entrer.—Mais l’insecte ne raisonne pas de la sorte ; l'instinct commande d’agir de telle manière, c’est impérieux. Rien ne se changera, dût la mère abandonner tristement l’œuvre de ses jours. Enfin, nous cédons à ses désirs, et la voilà qui s’attèle en saisissant la chenille à la nuque et la tire à reculons dans la retraite obscure. En quelques ins- tants, la besogne .de la maternité sera terminée. L’œuf pondu et collé sur le segment du milieu, où 1l semble qu’elle a fait une légère entaille dans la peau, la mère sort en grattant et en projetant la terre en arrière de manière à obstruer le passage. Avec quelle hâte et quel entrain elle travaille ! Il faut dissimuler le précieux dépôt aux yeux ide tout passant suspect de vandalisme. Il faut de plus murer bien solidement l'entrée du souterrain avec un bloc qui la masque en même temps. Vite un coup de mandibules à droite, à gauche, aux aspérités voisines, avec grincement qui manifeste l’impatience. Si rien ne se dé- tache, une visite au bas du talus est décidée. Au milieu des débris, une pièce bien mesurée est choisie, hissée pres- 88 LE NATURALISTE CANADIEN tement et jetée avec toute la pesanteur du corps dans l’em- brasure du corridor obstrué; et c’est fini. Advienne que pourra. Les soucis maternels ne réclament pas d’autres labeurs pour le nouveau germe de vie. Il commencera à manifester sa vitalité dans une douzaine de jours, et tout seul fera l’apprentissage du rude métier de la vie. La mère s'envole au loin et se prépare à la nuit. «Et jam Fig. 4.—Elle est couchée en forme de cercle... cadunt altis de montibus umbræ». C’est le temps pour nous de rentrer au collège. Il va sans dire que nous pra- tiquons un peu le vandalisme ; avant de partir, nous détrui- sons la demeure préparée avec tant de soin, pour nous em- parer de la chenille. Elle est couchée en forme de cercle dans une alvéole, à trois pouces sous terre, le futur vampire attaché à son flanc droit sur le segment du milieu. Le tout est mis délicate- ment dans un tube de verre: ce qui nous permettra, si nous sommes bon éleveur, de suivre sur notre bureau de LES AMMOPHILES 89 travail la marche des événements. Chacun revient enchan- té, répétant comme un refrain: Quelles belles heures nous avons passées aujourd’hui ! Il ne tient qu’à nous de goûter souvent de telles joies. Nous passons dans le monde en étourdis, sans considérer les œuvres de Dieu, et voilà ce qui fait la banalité de nos promenades. Restait à voir le drame qui se déroule, lorsque l’Ammo- phile, partie en chasse, rencontre enfin sur une tige de gra- men le gibier recherché. Chasseur habile, l’'Ammophile doit l'être ; car elle réussit toujours à trouver la pièce de choix. Nos recherches persévérantes ne sont pas aussi fructueuses ; c’est en vain que nous avons examiné avec beaucoup de soin le gazon et les touffes d'herbes et retour- né les feuilles de luzerne du voisinage. Les chenilles di- verses, vertes ou rouges, que chasse l’'Ammophile, ne se pré- sentent pas à nos regards attentifs ; et qu’en ferait-elle, d’ail- leurs, si nous les lui présentions dans un moment où elle est en mal de flâner? Tout de même, quelle belle occa- sion, favorable et complète, nous eûmesle lendemain! En marchant sur la voie ferrée, qui conduit au talus déjà visité, nous apercevons une de ces chenillles rouges, galonnée de blanc des deux côtés dans toute sa longueur. Elle arpen- tait en sécurité, se dirigeant vers quelque coin de la « ma- chine ronde », où se chrysalider pour l’hiver et préparer ses ailes poudreuses aux caresses de mai prochain. Cette ren- contre était le commencement de notre bonne chance. En cinq minutes, la pauvrette est avec nous au talus. Une surprise nous y attendait. Manchote de la patte gauche postérieure, une Ammophile qui a reçu des ruades, bien certain ! est en frais de creuser. Mais... c’est une voleuse, une pillarde, un brigand! La voilà qui sort du terrier en traînant une chenille paralysée, sur laquelle nous aperce- vons l’œuf d’une autre Ammophile. Le mystère de la boi- teuse est dévoilé : elle a déjà eu maille à partir, cette rapace, 90 LE NATURALISTE CANADIEN avec la maîtresse de céans, et pendant le duel un coup adroit de l’adversaire a éclopé la boiteuse que nous voyons. Vraiment la Providence nous favorise : nos yeux ne perdent rien de cette belle séance en perspective. Le premier regard de la voleuse se porte sur l’œuf mis à jour. C’est l'ennemi de celui qu’elle va bientôt pondre ; il faut qu’il disparaisse. Un coup de mandibules, et c’est fait! L'opération qui suit est vraiment étonnante. La che- nille exhumée est peut-être paralysée depuis quelques jours ; alors, elle ne vivrait pas assez longtemps pour servir de nourriture fraîche à la nouvelle larve. Il faut le savoir. Notre voleuse se fait ausculteur ‘pour saisir les moindres mouvements de la circulation et les spasmes du système nerveux. Avec sa trompe elle palpe partout, et semble écouter en s’arrêtant à chaque segment. Les médecins cé- lèbrent leur grand maître, Laënnec; mais quelles leçons de précision et de délicatesse leur donnerait l'Ammophile dans cet art de l’auscultation, si elle pouvait parler! Chut ! voici le temps de provoquer le drame superbe que nous attendons. Klle descend, suivant son habitude, faire sa visite au terrier. Remplaçons vite la vieille chenille paralysée par celle que nous avons capturée. Allons! tout doux, la belle! comme cela, en rond de chien, à la porte du terrier. Sûre de son coup d'état, l'Ammophile sort la tête et vient s’atteler à la proie. Grands dieux ! elle est vivante! Pas possible! L’Ammophile s'arrête tout court, se frotte les antennes et les yeux. Klle ne rêve pas: la chenille est bien vivante. Aussitôt l'instinct du chasseur se réveille. Avec la rapidité de l’éclair qui fend la nue, il se précipite sur le monstre qu’il enfourche et saisit à la nuque de ses mandibules puissantes. Non habituée à semblable cava- lier, la chenille commence à se cabrer : va-t-elle le désar- çonner? Elle courbe en arc élastique son échine rondelette dont les extrémités se rejoignent. IL/arc se détend avec LES AMMOPHILES OI violence, et voilà la monture qui dévale au bas du talus. A quelle savante école, fier cavalier, avez-vous pris ces leçons d'équitation ?... Malgré les culbutes et la dé- gringolade, il est encore cramponné à sa monture au milieu des débris qui sont projetés au loin. La pous- sière soulevée dans l’arène par les gladiateurs fut-èlle jamais aussi glorieuse? Mais voici le moment décisif. Fig. 5.—Le coup d'artiste. Fig. 6 — Tout va bien à l'intérieur ; c’est le temps d’enfouir la proie. Nous nous couchons presque pour saisir tous les mou- vements des combattants. Un répit permet à l’Ammo- phile de prendre la position favorable à son coup d'artiste. Le pédoncule s'incline sur le flanc droit de la victime et vient placer son abdomen, armé du dard empoisonné, sous le ventre, en plein milieu de la longueur du monstre qui se repose un instant. Le coup est déjà porté, c’est fini; l'arc se détend. Bravo! c’est bien 1à qu’il fallait frapper. Les deux extrémités seules maintenant, comme deux tron- çons disloqués, sont en mouvement. Quel coup de préci- FA . 92 LE NATURALISTE CANADIEN sion ! Quelle connaissance de l'anatomie, et quelle violence dans le poison! Ii serait intéressant de savoir par quelle excitation nerveuse, ou quelle chaleur des cellules ébran- lées pendant la lutte, ou en vertu de quelle énergie latente physiologique, physique ou chimique, la première Ammo- phile, en besoin pressant de venin violent et rapide, aurait distillé ce liquide mortel. Pauvre science aux abois! Voyez donc les choses ridicules que vous nous proposez pour vous débarrasser de notre Dieu! Et le coup de dard magistral, au segment du milieu, pour atteindre le gan- glion nerveux et briser l’arc élastique, seule arme défen- sive de la chenille, dites-nous qui vous l’a appris, première Ammophile des lointaines époques géologiques? Nous sa- vons bien que l’on ressasse : « La lutte pour la vie est votre grande école; les échecs répétés ont aiguisé vos sens et réveillé des instincts latents, qui ne demandaient que l’ex- ercice pour atteindre le degré de perfection tant admiré aujourd’hui.» Mais enfin, votre réserve de venin est très petite, et il n’y a qu’un point à frapper pour maîtriser votre proie ; il y a mille autres points invulnérables, mille mau- vaises chances contre une bonne d’épuiser votre précieuse réserve. La bonne chance vous est donc arrivée, au moins deux fois, et du premier coup: une fois chez un Ammophile mâle et une autre chez une femelle, puisque vous avez laissé des descendants. Chanceuse, va! Et puis ces enfants, qui n’ont pas connu leur mère, ont dû recommencer l’ap- prentissage et avoir eux aussi la bonne chance du premier coup de dard !—« Recommencer l'apprentissage ? Vous n’y êtes pas, reprend la théorie ; c’est plus simple que cela : les connaissances de la mère se sont transmises par atavisme ». Oh ! la belle explication! Septembre arrivé, le besoin de pondre se faisant sentir, l'instinct de la chasse se réveille ; et, la proie attrapée, voilà les cellules sanguines et chiti- neuses de l’Ammophile qui se consultent et se rappellent LES AMMOPHILES 93 enfin que leur mère a trouvé l’an dernier, /ertio Zdus Octo- bris, lun& primé, le point exact et unique du corps de la chenille où il faut planter le bistouri pour la paralyser. Comme c’est beau l’atavisme! « Ponr l’amour de l’ata- visme, permettez que je vous embrasse ». (Molière.) Mais nous sommes loin de notre histoire. L'opération de la chenille se continue ; car ses deux tronçons ont encore des mouvements désordonnés qui pourraient mettre en péril le futur nourrisson. L’Ammophile, toujours à cheval, se glisse le long de sa victime et joue du dard à chaque segment pour atteindre tous les ganglions nerveux. Après cela, quelques moments de repos, un bain de soleil, une courte promenade à travers les aspérités du talus, proba- blement pour explorer le terrain et trouver la meilleure route pour l’escalade prochaine. Enfin, dernière visite à l’opérée et dernière opération. La chenille immobile sera couchée en rond dans la loge souterraine ; la tête sera ainsi tout près du segment mitoyen qui portera l’œuf de l’Ammo- phile. Condition bien périlleuse pour la progéniture: les mandibules puissantes de la chenille ont conservé toute leur vigueur ; on les voit encore s'ouvrir et se fermer avec violence. Malheur à l’œuf attrapé par ces formidables tenailles! L’Ammophile connaît tout cela par instinct ; comment conjurer ce grave péril? Voyons notre artiste à l’œuvre. Un coup de dard au ganglion de la tête serait-il à propos? N’allons pas! le péril serait aggravé. Le nœud vital est là, et toute lésion en ce point amènerait la mort instantanée et la corruption du cadavre. Alors, adieu beaux rêves de vie pour la jeune larve qui réclame une nourriture fraîche. Non, la chenille doit rester vivante. Changeons donc le mode d’opération. L’Ammophile se met alors à comprimer délicatement et méthodiquement entre ses man- dibules l’appareil cervical. A plusieurs reprises elle mâ- chonne, à la nuque, en faisant des pauses et en auscultant 94 LE NATURALISTE CANADIEN avec sa trompe pour constater les progrès de l’immobilisa- tion. Enfin, l’opération est complète. Ensevelir la para- lysée, pondre et cacher le trésor, ce sera l'affaire de quel- ques minutes. Voilà l’histoire intéressante de l’Ammophile commune. Cela ressemble, à ne pas s’y tromper, au récit du maître de Carpentras! Monsieur Fabre a raconté scrupuleusement ce qu'il a vu; nous avons fait de même. Tant pis pour ie transformisme, si l'Ammophile de France ressemble à celle de Sainte-Thérèse! Séparées.depuis les temps les plus recu- lés, elles n’ont pas, comme les audacieux fils de Japhet, jeté des radeaux «oceano dissociabili » pour venir se conter, sur la vieille terre d'Amérique, les meilleurs modes d’action qu’aurait pu leur apprendre la lutte pour la vie à travers les siècles. À 4.000 milles de distance, elles agissent encore l’une et l’autre de la même manière, sans perfectionnement dans leurs vieilles méthodes ; c’est qu’elles ont toujours agi de même depuis le commencement et qu’elles n’ont jamais entendu parler de transformisme. Il nous reste à suivre le développement de l’œuf et de la larve contenus dans des tubes de verre sur notre bureau de travail. A l’œuvre donc, intéressants germes de vie! Nous vous rendrons la liberté quand vous aurez des ailes, au doux soleil de mai 1913, pour vous permettre de nous donner encore les belles jouissances de la contemplation de l’œuvre de Dieu. Sainte-Thérèse, octobre 1912. Jos.-B. MIGNAULT, ptre. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 95 « SYNONYMY OF THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA » By E. P. VAN DUZEE, BUFFALO, N. Y. (Continué de là page 15.) In this collection are the following erroneous determi- nations: 7%yanta custator, labelled 77ichopepla atricor- ms Stal.; Æuschistus servus Say, labelled Æ, 2mpictiventris Stal.; Æ. fissilis Uhler, labelled Æ. variolartus P.B.; Apa- teticus bracteatus Kh., labelled Podisus grandis Dallas ; and Pertlloïdes exaptus Say, labelled Perzllus splendens Uhler. 53. Anasa tristis De G., correct. 54. Chelinidea vittigera Uhler. Under this name is one example of zvzttigera Uhler and one of /abulata Burm. Judging from the description, the former must have been the one stated to have been taken in Quebec. 55. Alydus eurinus Say, correct. 56. Alydus 5-spinosus Say, correct. | 56: Alydus pluto Uhler. Under this name are two females of eurinus Say. 57. Zetrarhinus quebecensis Prov. is Protenor belfragei Hagl. In the collection it stands under the correct name, showing that Provancher must have corrected his own determination later. 58. Capys muticus Say, correct. MNeides muticus Say. 58. Jalysus spinosus Say, correct. 60. Corizus punctiventris Dall, correct. Séctopleurus crassicornis Linn. 60. Corizus lateralis Say is nigristernum Sign., as usually determined. 61. ÆHarmostes fraterculus Say. On this label is an example of Ortholomus longiceps Stal. 96 LE NATURALISTE CANADIEN The following are incorrectly determined: Ceraleptus sp. determined as Orsillus scolopax Say; Metapodius ter- minalis Dall. as Anisoscelis corculus Say; Metapodius femorata Fabr. as Anisoscelis declivis Say ; and Æarmostes reflexulus, pink form, as 77. serratus Fabr. 69. Lygœus bistriangularis Say, correct. 70. Lygœus turcicus Fabr. is Z. kalmit Stal. 70. Nystus groenlandicus Zett is N. thymit Zett. 71. Æelonotus abbreviatus Uhl., correct. 7Alegyas abbre- viatus Uhl. 72. Cymus tabidus Stal. is Cymus discors Horv. 73. Œdancala crassimana Fabr. is ©. dorsalis Say. 74. Zschnorhynchus didymus Zett., correct. Z. resedeæ Panz. 75. Oxycarenus disconotus Say, correct. Crophius dis- conotus Say. 75. Ischnodemus falicus Say is Peritrechus fraternus Uhler. 76. Blissus leucopterus Say, correct. 77. Emblethis arenarius XAnn. is Æ. vicarius Horv. 77. Plociomerus nodosus Say is Scolopostethus Sp., proba- bly ifidens Horv. 78. Carpilis ferruginea Stal, correct. 70. Ligyrocoris constrictus Say, correct. Perigenes constrictus Say. 80. Æerœus insignis Uhl1. is not in the collection. 81. Æremocorts ferus Say, correct. 82. Trapezonotus nebulosus Fall., correct. 82. Pamera bilobata Say is Ligyrocoris contractus Say. (A suivre.) 00 LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Janvier 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 7 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard: UN ENTOMOLOGISTE PROVINCIAL Dans les premiers jours de ce mois, le gouvernement provincial a décidé d’attacher un entomologiste au minis- tère de l'Agriculture, et le directeur du Vaturaliste cana- dien a été appelé à être le premier titulaire de cette fonc- tion nouvelle. Nous désirons remercier ici nos confrères de la presse et toutes les personnes qui nous ont, en cette occasion, offert des félicitations auxquelles nous avons été très sensible. :00 : DEUXIÈME LETTRE DE L'HONORABLE M. POIRIER Vous voulez bien, monsieur l'abbé, vous occuper une seconde fois de moi. C’est aimable à vous. Mais j'ai baissé dans votre considération, évidemment, puisque, de dix pages que je remplissais dans /e Naturaliste du mois d’août, votre organe, dans sa dernière livraison (1), ne m'en consacre 1. Il s’agit de la livraison de novembre de notre revue. 7.—Janvier 1913. 98 LE NATURALISTE CANADIEN plus que trois, avec quelques notes au rez-de-chaussée. .., de mauvaises notes. Vous me reprochez, dans un langage courtois auquel certains de vos confrères avec qui j'ai eu maille à partir ne m’avaient guère habitué, d’avoir publié ma réponse dans le Pays, de Montréal, au lieu de m'adresser «au public de votre revue». Voulez-vous savoir pourquoi ? C’est qu’il est probable, à peu près certain même, qu’au- cun journal bzen pensant de la province de Québec n'aurait condescendu à me donner asile, et que, parmi les grands quotidiens, nul n’aurait osé le faire (2). Oh! Je parle avec connaissance de cause, allez! Elle n’est pas brillante la liberté de penser et d'écrire, dans votre Province, lorsqu'il est question de sciences, d’éduca- tion et d'enseignement (3). Le moyen âge, que l’on a beau- coup calomnié à ce sujet, était large, en comparaison, à Rome tout au inoins. Et puis ce choix qui vous scandalise est dû à une circons- tance toute fortuite. J'ignorais, aussi profondément que d’autres semblent ignorer la faune de l’époque tertiaire, que vous m’aviez pris à parti dans le Naturaliste, à cause de mon discours au Con- grès de Québec, lorsque, par le plus pur des hasards, étant de passage à Montréal, un numéro du Pays dans lequel vos attaques contre moi étaient relevées et vos moqueries (4) de 2. Nous trouvons, nous, que le certificat donné ici, indirectement, par M. Poirier lui-même à son article, est loin d’être de première classe. Car il n’est pas exact de dire que nos journaux «bien pensants», et même nos «grands quotidiens», puisque M. Poirier ies sépare de ceux-là, refusent de publier des communications, lorsqu'elles sont convenables de fond et de forme. Si donc notre correspondant jugeait d'avance que sa lettre ne serait pas accueillie dans nos journaux, cela —à notre sens—pronve etc. RC hi 4. Nous avions déjà remarqué que M. Poirier ne paraît pas « fort» sur la propriété des termes. Mais l’exemple qu’il en donne ici passe les DEUXIÈME LETTRE DE L'HON. M. POIRIER 99 Mgr Laflamme commentées favorablement, me tomba sous les yeux (5). Je ne recevais pas alors, et ne lisais guère Ze Pays, pas plus d’ailleurs —je le confesse à ma courte honte —que le Naturaliste canadien, deux excellentes publications, autant que j'en ai pn juger depuis, mais dont l’une a son habitat au pôle nord et l’autre son gîte au pôle sud, ce qui fait qu’elles sont en froid, excepté lorsqn’il s'agit de /omber Mgr Laflamme (6). Comme je tiens M. Langlois pour un honnête homine, et que, d’ailleurs, il semblait partager mes opinions en matière d'instruction supérieure, je n’ai pas vu le mal que vous y voyez à lui confier ma réponse. Il ne fallait pas songer à Québec. Vous commencez votre deruière lettre, monsieur l'abbé, en disant à vos le:teurs que ce n’est qu'après «de laborieuses recherches » que vous êtes parvenu à prendre connaissance bornes et nous justifierait de rompre absolument notre conversation. Qualifier de « moqueries » à l'adresse de feu Mgr Laflamme les deux pa- ges que nous avous écrites à son sujet dans notre livraison du mois d’août est une véritable injustice. La moquerie n'est ni d’un chrétien ni d’un homme bien élevé, .et ce n’est pas nous attribaer à nous-même un bien grand mérite, que de dire que nous n’avons jamais usé de cette manière. Dans le passage signalé, et que nos lecteurs peuvent aisément revoir, nous avons dit quel était le mérite réel de Mgr Laflamme et qui suffit à illus- trer sa mémoire. Au surplus, et s’il y avait là, après tout, des «moque- ries», comment notre honorable correspondant ne voit-il pas que lui-mê me en serait l’objet plutôt que Mgr Laflamme ! 5. Nous ignorions que /e Pays avait fait écho à nos observations rela- tives au discours prononcé au Congrès par M. Poirier. Nous comprenons maintenant que notre correspondant ait pu adresser à ce journal, plutôt qu’au nôtre, la réponse qu'il voulait nous faire; et nous sommes heureux de pouvoir retirer la qualification de déloyauté que nous avions appli- quée indirectement, à ce sujet, à la manière d'agir de M. Poirier, et qui consistait à présenter sa défense devant un tribunal, c’est.à-dire un pu- blic, autre que celui devant lequel l’attaque avait été produite. 6. !!!— Quant au Vafwraliste, que M. Poirier place sur le même pied que /e Pays, au point de vue de l’« excellence », il est peu flatté du rap- prochement, et pour cause, comme on le devine bien ! 100 LE NATURALISTE CANADIEN de ma correspondance au Pays. Cela veut dire, si je vous entends bien, que j'ai manqué vis-à-vis de vous aux lois de la courtoisie, vous faites usage du mot «loyauté» (7) en ne vous communiquant pas ma réponse, et me met en mau- vaise posture devant vos lecteurs et tout le clergé de Québec (8). Et si c'était le contraire qui fût la vérité vraie; si les rôles étaient intervertis, avec exagération pour vous, votre geste, monsieur l'abbé, manquerait, n'est-ce pas? d’élé- gance. Je vous déclare sur l’honneur qu’aussitôt ma réponse parue, j'ai mis à la poste, à votre adresse au Vaturaliste canadien, Québec, un numéro du Pays qui la publiait (9); et j'ajoute, sur l'honneur encore, que je n’ai connu votre attaque contre moi qu'après en avoir pris connaïssance dans Ze Pays. Je me suis, ensuite, procuré le Naturahste en dehors de voire bureau. Vous n'avez, j'en conviens, adressé, le fascicule du mois d'août, après que je me fusse abonné à votre revue et assez longtemps après, deux ou trois semaines, au moins. Mais autant vaudrait, pour satisfaire à la «loyauté», me l’adres- ser aujourd’hui. , 7. Nous avons employé le mot /oyauté, parce que c'était celui qui con- venait à la circonstance (4. C., nov. 1912, p. 66). On peut se plaindre à haute voix d’un manquement à la loyauté, mais non, croyons-nous, d’un manque de courtoisie. 8. Nous resrettons que notre honorable correspondant ne s’aperçoive pas que c’est lui-même, et encore par certains passages de sa communi- cation d'aujourd'hui, qui se «met en mauvaise posture devant nos lecteurs et tout le clergé de Québec». S'il suivait de plus près la « bonne presse » de la Province, il saurait à quoi s'en tenir là-dessus. Pour nous, il ne nous convient pas, ici du moins, de laisser dévier la conversation de ce côté. 9. Cela, c’est de la courtoisie, et nous en remercions M. Poirier. (Car il n’est pas obligatoire d’informer un journaliste qu’on l'attaque dans tel journal : c’est à lui à suivre les événements de la presse. DEUXIÈME LETTRE DE L'HON. M. POIRIER IOI Ceci est une question d'honneur entre vous et moi. Tirons-la au clair, si vous le voulez bien, monsieur l’abbé, et daignez répondre, s’il vous plaît, sur votre parole d’hom- me de Dieu— vous m'avez donné le droit de vous le de- mander— aux deux questions suivantes. M'avez-vous envoyé le Va/wraliste canadien du mois d'août 1912, avant d’avoir reçu le prix de mon abonne- ment (10)? Avez-vous reçu par la malle, quelque temps après qu’il eût paru, le numéro du ?ays qui reproduisait ma lettre (11)? 10. Nous ne croyons pas du tout qu’il soit admis, dans le journalisme, qu'il faille donner communication, à un homme public qu’on blâme pour une cause quelconque, du numéro de journal contenant les choses désagréables qu’on a cru devoir dire de lui. Le faire serait sans doute courtois, mais l’omettre n’est pas déloyal. C'est aux hommes publics à s'occuper eux-mêmes de connaître ce que l’on dit à leur sujet dans la presse. Nous n'avons pas à apprendre à M. Poirier qu'il existe des agen- ces spéciales qui se chargent de ce soin pour ceux qui recourent à leurs services encette matière. D'ailleurs, en l'espèce, M. Poirier ayant jadis «renvoyé » /e Naturaliste, nous aurions trouvé peu délicat de lui en en- voyer ainsi un numéro sans qu’il le demandât. 11. Voilà qui est à tout le moins singulier, pour ne pas dire plus, et même beaucoup plus. Nous disons à nos lecteurs, en novembre dernier, et M. Poirier vient de le reconnaître, qu’il nous a fallu de « laborieuses recherches » (exécutées, ajouterons-nous, dans les dépôts de journaux, et couronnées de succès dans une salle de lecture) pour lire sa lettre au Pays ; et M. Poirier, deux mois après, nous requiert solennellement de lui dire si nous avons reçu le numéro du journal qui la contenait et qu’il nous a envoyé par la poste. Ils emble donc qu'il interrompe, en cette affai- re, ses usages de courtoisie, puisqu'il nous accuse ici, implicitement, de mensonge (lorsque nous donnons à entendre que nous avons dû cher- cher ailleurs un numéro de journal qu’il nous a envoyé), ou de sottise (lorsque nous donnons à entendre que nous avons fait tant d'efforts pour trouver, au dehors, nn numéro de journal que nous aurions eu entre les mains). Le dilemne n’est guère confortable. Après cela, nous dirons à M. Poirier que nous ajoutons une foi entière à sa parole, lorsqu'il affirme qu'il nous a expédié ledit numéro de journal, En outre, nous n’accusons aucunement le service des postes d’avoir manqué de nous re- mettre le colis en question. Et même, mis en veine de confidence, nous 102 LE NATURALISTE CANADIEN Vous avez ma parole d'honneur. Je n’accepterai pour réponse satisfaisante qu’un oz ou un on catégorique (12). D'après votre glose, les dix pages que vous m'avez con- sacrées se réduiraient à cette «thèse » que vous brûlez de soutenir, savoir qu’il existe, dans la province de Québec, un grand nombre de savants (13) tout à fait gwahfés pour entrer dans les sections scientifiques de la Société royale; et vous me citez à l’appui six ou sept uoms tous choisis parmi vous et vos collaborateurs. Mais j'y ai souscrit, les deux yeux fermés, à votre #.èse sans même vous demander si tous vos candidats intimes avaient écrit et publié ce que le règlement et les statuts de la Société royale exigent de ses membres pour s'assurer de leur compétence; j'y ai, de plus, ajouté le nom de M. l’abbé Simard, que, par mégarde sans doute — on ne pense pas à tout — vous aviez oublié (14) et omis. Que puis-je faire davantage pour vous concéder votre thèse, puisque j'en accepte les conclusions sans l’examiner. ajouterons qu’il y a tout lieu de croire que nous avons bien reçu l’envoi. Mais, d’autre part, et eu égard à de nombreuses occupations, nous som- mes absolument débordé par le volumineux courrier qui nous vient chaque jour et ne pouvons plus suffire à le dépouiller complètement. Nous avons de la sorte, dans notre cabinet de travail, cinq ou six mon- tagnes de documents, livres, journaux, revues, qui remontent à toutes les époques. Celle de plus récente formation, où s'est déposé sans doute l’envoi de M. Poirier, s’est malheureusement écroulée deux fois, ce quia eu pour effet d’intervertir l’ordre des sédiments et de mettre au fond des lits qui devraient être au-dessus, Bref, ce n'est peut-être pas avant une couple d'années que nous arriverons au journal — passé à l’état de fossile — de M. Poirier. 12. Nous regrettons vivement de n'avoir pu donner là-dessus complète satisfaction à notre correspondant. 13-14-15. Pour la deuxième fois, il nous faut nier ces avancés sur les quels, du reste, nous nous sommes déjà expliqué dans notre livraison du mois de novembre, Nous formulons ici le vœu que M. Poirier se borne à traiter ainsi deux fois les mêmes points, pour que cette polémique puisse se terminer avant la fin du monde. DEUXIÈME LETTRE DE L'HON, M. POIRIER 103 Dans votre premier article (page 17, et aussi note 14 de votre réponse), vous m'avez baïllé une leçon d'usage, mon- sieur l'abbé, en me signalant discrètement certains sujets, les sciences, l'étude de la langue française, entre autres, dont 1l est de mauvais goût de parler, quand on est l’hôte de l'Université Laval et qu’on vient de l’Acadie (15). Dans celui-ci, vous m’en octroyez deux: la leçon de «loyauté» que nous venons de voir, et une de paléontologie, que nous allons, si vous le voulez bien, examiner. J'ai écrit ceci textuellement : « M. la’bbé Huard me con- sacre dix pages de son Vaturaliste canadien, plus qu’il n’en faudrait pour décrire un saurien de l’époque tertiaire.» Vous me reprenez doctrinalement en ces termes: «M. Poirier veut sans doute parler icr (c'est moi qui souligne partout) des gigantesques sauriens des premières époques géologiques, Dinosaures, Ichthyosaures, etc.: mais alors, il aurait fallu dire «l’époque secondaire». A l’époque ter- tiaire, les reptiles ne diffèrent plus tellement de ceux de l’époque actuelle.» Vous ne me faites évidemment « parler ici» de ce dont je n'ai pas eu l'intention de parler, qu’afin de me prendre en faute, de vous fournir l’occasion d’exposer en spectacle, aux yeux de la bonne et pudique presse et devant vos lec- teurs, la nudité de mon ignorance, et de me donner une bonne leçon (16). Quant on en use ainsi vis-à-vis d’un adversaire, on a mauvaise grâce, serait-on de la maison d’Aaron, de «remer- cié Dieu», comme vous le faites bruyamment ( note 9) de de ce que vous écrivez «en d’autres termes » que je ne le fais. D’autres, avant vous, ont remercié Dieu en «termes » à peu près pareils, à qui cela n’a pas réussi. 16. Entermé tantôt dans un dilemne, nous pouvions du moins nous remuer ur peu. Ici, M. Poirier nous ligotte dans la mauvaise foi... 104 LE NATURALISTE CANADIEN Mais revenons à nos sauriens. Vous avez l'air de beau- coup tenir à ce que j'aie l'honneur de soutenir une «thèse » contre vous. Vous allez, monsieur l’abbé, dût cela vous faire sourire de pitié, être servi à souhaïit. rère thèse. Je maïintiens dans son intégralité l'énoncé, ou, si vous préférez, ia proposition que j'ai faite, et dont vous contestez l’exactitude scientifique. Je soutiens, en même temps, que j'ai dit précisément ce que j'avais l'intention de dire, et que je n’ai pas voulu «parler ici», comme vous le prétendez, des “gigantesques sauriens des premières époques géologiques» (17), cela pour deux raisons—la première, parce qu’il répugnait à ma modestie de faire un rapprochement entre moi et ce qu’il y a, en fait de bêtes, de plus «gigantesque » dans la nature; la seconde, parce qu’il n’existait pas d’«Ichthyosaures » aux «premières époques géologiques ». Quant aux «Dinosaures», je confesse que je n’en sais rien. Si c’est des dinosauriens que vous avez voulu parler (18), il n’en existait pas, non plus, aux «premières périodes géologiques ». 17. Très bien ! Et cela nous est parfaitement égal! Mais ce qui nous douneit à penser que M. Poirier voulait «faire un rapprochement » entre lui et les grands sauriens, c’est que, après avoir mentionné que nous lui avons consacré dix pages dans notre livraison du mois d'août, il ajontait (WV. C., novembre, p. 68): « plus qu’il n'en faudrait pour décrire un saurien de l’époque tertiaire.» Â1x pages, ce serait trop, suivant M. Poirier, pour décrire son saurien. Mettons, alors, sep{ pages, si l’on veut. Eh bien, nous n'aurions pas pensé qu'il ne se fût agi là que du modeste crocodilien qu'il appelle, plus loin, à son secours contre nous. 18. M. Poirier connaît les dinosauriens, mais il ne connaît pas les «Dinosaures». Eh bien, nous avons la joie et l’honnéeur de lui en pré- senter un, de «dimensions énormes», à la page 216 des Æ/éments de Minéralogie etc., de Mgr Laflamme (édition de 1912). Par exemple, si nous ne craignions de faire dire encore à M. Poirier que nous voulons «tomber» Mgr Laflamme, nous ajouterions que nous ne savons pas où notre défunt ami a trouvé ce genre de reptiles : car, malgré nos recher- DEUXIÈME LETTRE DE L'HON. M. POIRIER 105 Je n’ai jamais contesté l'existence de «gigantesques » sauriens à l’époque secondaire: iln’en a pas été question dans ma réponse, ni entre nous, auparavant, mais je vous ferai observer que l’époque fertraire, la seule dont j'aie parlé, marque le développement des crocodiliens, ce qui suffirait seul à me douner raison contre vous. Vous ne contesterez pas que les crocodiles appartiennent à l’ordre des sauriens ? | 5 21ème thèse. Je me fais fort de vous démontrer, con- trairement à ce que vous professez comme de doctrine, qu’il n'existait pas de “gigantesques sauriens aux premières époques géologiques ». De fait, il n’en existait ni de gigantesques, ni de petits, ni de minuscules, il n’en existait absolument aucun, excep- té en puissance, par évolution, si vous voulez faire une concession à Spencer et à Darwin (19) Tout le monde sait ça. Qui jamais a entendu parler de l'existence de sauriens aux âges azootiques, dans les fremzières formations terrestres, durant l’époque archéenne, le huronien, le lau- rentien, le Keewatin ? Si par «premières époques géologiques» — il n'y en a qu'une— vous entendez l’époque primaire dans le sens précis accepté aujourd’hui en géologie, c’est-à-dire la série paléozoïque, comprenant les systèmes cambrien, silurien- dévonien, carbonifère et permien, jusqu’à l'étage de tran- sition avec l'ère secondaire: eh bien! je maintiens encore, ms ches dans tous les ouvrages scientifiques qui scnt à notre portée, nous n’avons vu mentionner nulle part le Dinosaure ; aussi l’avons-nous sans pitié laissé en dehors du traité de Géologie que nous venons de mettre sous presse, 19. En fait d’ «évolution», nous ne faisons de concession à personne: nous sommes absolument anti-évolutionniste. On trouvera quelques-uns des motifs de cette attitude dans le petit ouvrage de Géologie dont nous parlions au No 18, et qui sera en librairie dès le mois prochain. 106 _ LE NATURALISTE CANADIEN contrairement à ce que comporte votre leçon, si 2précise qu’en soit la terminologie, qu’il n'existait pas, alors, de sautiens, «gigantesques» ou autres. J'ajoute que l’époque secondaire n'appartient pas aux «premières époques géo- logiques » (20). Je relève dans votre crédo paléontologique deux autres hérésies scientifiques qui pourraient, chacune à son tour, faire le sujet d’une ##èse particulière. Je les mettrai sous Vos yeux, si vous avez quelque curiosité de les connaître (21). Si Mgr. Laflamme vivait, il se chargerait sans doute de ce soin. Maintenant, monsieur le professeur d’histoire naturelle, ou, pour vous donner le titre que vous affectionnez, titre qui vous revient de droit, que vous détenez — terme spor- tif — de fait, monsieur le directeur de «l'unique organe scientifique de la province de Québec», la plume ou la pa- role, à votre choix, est à vous. Je me tiens à vos ordres, depuis barbara jusqu’à baralipton. Pour finir en condition de grâce. 20. Si M. Poirier ne veut pas faire entrer l’époque secondaire parmi les « premières époques géologiques», sa 2ème Thèse est tout ce qu’il y a de plus solide. Et voilà justement où il faut renoncer à tout espoir d’accord entre nous: car nous estimons, nous, que la secondaire aussi appartient aux «premières époques géologiques », et non pas seulement l’archéenne et la primaire. Ilest vrai qu'il n’y a en tout que cinq épo- ques géologiques reconnues par la science, et que la secondaire vient en troisième rang; mais rien ne nous prouve que l’époque actuelle soit la dernière, et nous croyons donc avoir droït, jusqu’à nouvel ordre, de compter la secondaire parmi les « premières ». 21. Comment donc! Mais oui! Que M. Poirier nous amène ses deux autres thèses scientifiques, destinées à renverser nos «deux autres hérésies scientifiques». S’il y a une chose à laquelle nous tenions ici, c’est l'exactitude parfaite, et M. Poirier nous fera plaisir, s’il nous aide à réparer les erreurs que nous avons pu commettre daus cette revue. —Quant au reste de la lettre de M. Poirier, nous laissons au lecteur le soin d'en apprécier le ton et le bon goût. MÉTÉOROLOGIE, BOTANIQUE ET ZOOLOGIE * 107 Vous me reprochez, monsieur l’abbé, d’avoir «présenté ma défense(?) à un public qui n’est pas celui de votre revue » (p. 66). Vos reproches me sont plus sensibles que vos leçons. Pour vous prouver que je tiens à ne pas vous désobliger, et, en même temps, pour vous épargner, si je m’adressais ailleurs, les trois points d'exclamation «!!!» dont vous faites précéder la mention du journal de M. Langlois (Note 16), deux exclamations de plus que vous n’en mettriez vraisemblablement s’il s'agissait de Belzé- buth, je vous prierai, et vous prie, de vouloir bien publier la présente « défense» dans votre Vaturaliste canadien, et d’avoir pour agréable l’assurance de ma considération la plus respectueuse. PASCAL POIRIER. Shédiac, N.-B., le 9 janvier 1913. mm C|0): EN LAPONIE MÉTÉOROLOGIE, BOTANIQUE ET ZOOLOGIE .. Voulez-vous, avant de quitter cette inhospitalière Lapo- nie, jeter un regard sur l’école de Hammerfest? Une re- ligieuse de Sainte-Elisabeth en a la direction. Il y a un quart de siècle que Sœur Abiata y est l’ange gardien de nos enfants, en même temps qu’à l’église elle est la sainte Cécile qui dirige le chant et la musique. Nous n’y trou- vons, pour le moment, que la moitié des élèves, ceux dont les parents habitent Hammerfest même. Les enfants des catholiques dispersés sur un territoire plus vaste que trois départements français, ne viennent à Hammerfest que pen- dant trois mois de l’année pour fréquenter l’école et recevoir 108 + LE NATURALISTE CANADIEN lPéducation catholique. Pendant ce temps ils sont reçus dans le petit institut attenant à l'hôpital des Sœurs. Nous sommes en été, et les figures des enfants sont roses et gaies. Maïs, en hiver, leur vue fait pitié, tellement le manque de lumière et la fumée de la lampe, qui ne s’éteint pas même à midi, les rendent pâles et maigres. Pauvres petits! Pendant de iongs mois les tempêtes de neige les retiennent prisonniers, et souvent les parents doivent les conduire à l’école, pour qu’ils ne se perdent pas dans la neige ou qu’ils ne soient pas soulevés par le vent et jetés dans la mer à côté du chemin. Malgré cela ils aiment l'hiver, parce que tous leurs amu- sements, tous leurs jeux supposent la neige. Souvent, vers la fin du mois d'août, lorsqu'elle a disparu à peine depuis deux mois, les enfants demandent aux religieuses : —Ma Sœur, est-ce que la neige ne reviendra plus jamais ? Dès que quelques flocons tombent, les traîneaux, les skis et les patins sont retirés et mis en service. Si vous assistiez à une classe, vous observeriez qu’on doit expliquer aux enfants une infinité de choses qui par- tout ailleurs sont supposées connues. —Savez-vous ce que c’est qu'un arbre? Qui en a vu un? Une fillette lève le doigt : —Moi, j'en ai vu un, l'arbre de Noël, qui portait les lu- mières étincelantes et les délicieux bonbons. Est-ce que les arbres sont tous comme cela ? On arrive à la zoologie. Les animaux qu'ils ont vus, ils n’ont pas besoin pour les compter de tous les doigts des deux mains: deux ou trois poissons, quelques oiseaux ma- rins, la chèvre, et puis le chien et le chat. Les enfants de l’intérieur de la | aponie n’ont jamais vu de vache ni de porc. Bien des enfants de la ville même MÉTÉOROLOGIE, BOTANIQUE ET ZOOLOGIE 109 d'Hammerïfest ignorent ce que c’est qu’une poule. Les autres leur apprennent qu’il y en a une à l’hôpital catholi- que. Et voilà toute l’école en marche pour aller prier les Sœurs de leur faire voir ce rare animal. Hammerfest possède deux ou trois petits chevaux. Quand les pêcheurs des fjords arrivent en ville et voient un deces quadrupèdes, ils s'arrêtent stupéfaits d’admira- tion, de même qu’en France on s’arrêterait pour contempler un chameau. Un jour, un Norvégien, établi à l’intérieur d’un des fjords septentrionaux, eut la bonne fortune d’hériter d’un cheval. Toute la contrée accourut pour le voir. —Bon! se dit le gros /andhandler du pays; j'aurai au moins la possibilité de louer un cheval, lorsqu'il m’arrive- ra de faire un voyage par terre. Quelques jours plus tard, il alla trouver le propriétaire du quadrupède : —Eh bien, Rasmus, lui dit-il, comment va votre cheval ? — A la perfection ! — Pourriez-vous me le louer pour un petit voyage ? —Avec plaisir; mais, pour le moment, c’est impossible. — Pourquoi donc ? — Parce que maintenant il dort ; ce serait cruel de l’éveiller. Il n’y avait rien à répondre à un argument si péremp- toire ; le gros marchand s’en alla en riant. MGR FALLIZE, Vicaire apostolique de la Norvège. I11O LE NATURALISTE CANADIEN «SYNONYVMY OF THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA » By E. P. VAN DUZEE, BUFFALO, N. Y. (Continué de la page 96.) 84. Plerometus canadensis n. sp. This is the species lately described as Pseudocnemodus brunnert by Mr. Barber and must be known as Pseudocnemodus canadensis Prov. ‘The following are incorrectly determined: Owco- peltus fascratus Dallas, determined as Zyoœus gutta H.S., and Dysdercus mimus Say, as Lygæœus pulchellus H. $S. Geocoris limbatus Stal is correctly named. Under the name Cremodus mavortius is an example of the larger dark form which I now consider to be distinct. 85. Geocoris bullatus Say, correct. 89. Anthocoris musculus Say. This is À. borealis Dallas, which is probably a synonym of #usculus Say. 90. Zetraphlebs canadensis n. sp., correct. Zyclocoris canadensis Prov. 01. Zrrphleps insidiosus Say, correct. 102. Collaria merlleurt Prov., correct. 103. Collaria oculata Reut., correct. 103. Miris anstabilhis Unler, correct. Senodema instabi- Zis Uhler. 104. Zrigonotylus rufcornis Fall., correct. 104. 7rygonotylus pulcher Reut., correct. 104. Zeptopterna dolobrata Länn., correct. Mir1s dolo- rata LAnn. 106. Resthenia insignis Say. Under this name is the black form with the pronotal collar only fulvous. It pertains to Reuter’s genus //a{ty{ylellus. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA III NoTE—Under the name Xesfhenia nigricollis is à large black Zopidea, and under the name Xes/henia macu- hcollis stands Zopidea confluens Say. There is also an Orthotylus congrex Uhler under the name Zomatopleura cæsar Reut., but this placing must have been an accident. 106. ZLopidea confluens Say, correct. 108. Phytocorts scrupeus Say is P. lasiomerus Reut. 108. Phytocoris pallicornis Reut. is P. tibralis Reut. 109. Phytlocoris eximius Reut., correct. 110. Phytocoris 1nops Uhler, correct. 111. Veurocolpus nubilus Say, correct. - 112. Compsocerocoris annulicornis Reut. This is not Reuter’s species, but a large dark coloured PAytocorrs of the eximius group, perhaps still undescribed. I have taken the same form about Buffalo, and Mr. Moore has sent me specimens taken by him at St. Hilaire, Que. 113. Calocortis rapidus Say, correct. Adelphocoris rapr- dus Say. 114. Calocoris bipunctatus Fabr., correct. 114. Pycnopterna amæna n. sp. This is the CZostero- coris ornata Uhler and must hereafter be known as CZoste- rocoris amæna Prov. Its occurience at Ottawa, if really taken there, was probably accidental. Its range seems to be restricted to the Pacific region. 116. Camptobrochis grandis Uhler, correct. 116. Camptobrochis nebulosus Uhler, correct. 118. Coccobaphes sanguinarius Uhler, correct. 119. Lygus pratensis Ann. is Z. convexicollis Reut. 120. Lygus flavonotatus Prov. is Z. pratensis Linn. var. lineolarts P. B. 120. Lygus belfrager Reut. is the red variety of Z. pratensis Linn. 121. Lygus invitus Say. Pinned on this label is à Lygus tenellus Van D., and next toit is a ZL. znvitus Say. 112 LE NATURALISTE CANADIEN 121. Zygus contaminatus Fall. is Z. pabulinus LAnn. 122. Pœcilocapsus lineatus Fabr., correct. 123. Pœcrlocapsus afinis Reut., correct. /Zorcias dislo- catus afinis Reut. 123. Pæcilocapsus marginalis Reut. I did not find this in the collection, but the determination is undoubtedly correct. 123. læcilocapsus goniphorus Say, correct. Æorcias dislocatus goniphorus Say. With this specimen is pinned an example of var. #2grita Reut. of the same species. 124. Orthops scutellatus Uhler is 7Zroprdosteptes amæ- nus Reut., var. palmert Reut. 125. Systratiolus venaticus Uhler, correct. Pæciloscytus venaticus Uhler. 127. Pamerocoris brunneus Prov. On this label is pinned an example of P/agiognathus politus Uhler, but as it does not agree at all well with Provancher’s description of 1872, I am inclined to think that the type specimen was lost and the present one substituted by error. 127. Pœctiloscytus sericeus Uhler. On this label is an Orthotylus flavosparsus Fall. _127. Pœciloscytus basalis Reut. On this label is a S/ke- narops malinus. Neither this nor the preceding speci- mens agree with the descriptions in the Petite Faune and may have been placed there by mistake. 129. Capsus ater Fieb., correct. Authority should have been Zrnnœus. 130. Monolocoris filicis Linn., correct. 131. Pilophorus bifasciatus Fabr. is P. clavatus Linn. 132. S/phrosoma stygica Say, correct. (A suivre.) (O0 > D EE NATURALISTE CANADIEN Québec, Février 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 8. Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL XIIe SESSION, CANADA, 1913 A M. le rédacteur en chef. Cher monsieur, Le Comité exécutif du douzième Congrès géologique international m’a chargé de vous prier d’attirer l’attention de vos lecteurs sur les séances du Congrès qui doivent se tenir pour la première fois en Canada, l’année prochaine. Les dispositions préliminaires sont annoncées dans la pre- mière circulaire, dont je vous envoie ci-joint un exem- plaire. Depuis la première réunion du Congrès à Paris, en 1878, d’autres réunions ont été tenues en Italie, Allemagne, Angleterre, Etats-Unis d'Amérique, Suisse, Russie, Aus- tralie, Mexique et Suède. Au dernier Congrès tenu à Stockholm en 1910, 850 délégués étaient présents, et l’on espère dépasser ce nombre l’année prochaine au Canada. Vous remarquerez qu’une ample série d’excursions a été préparée pour faire connaître la géologie-type et les riches- ses minérales du Canada. Ces excursions auront lieu 8—Février 1913. 114 LE NATURALISTE CANADIEN durant les mois d’août et de septembre, au Cap-Breton et de Halifax, sur l'Atlantique, à Prince Rupert et à Victoria sur le Pacifique, et des chutes du Niagara, sur la frontière méridionale, à Dawson City, près du cercle Arctique. Des géologues de toutes les parties du monde assisteront à ce Congrès; et pour un grand nombre ce sera la première visite au Canada. Parmi eux, on comptera des professeurs des principales universités, et des écoles de Mines; des fonctionnaires du service géologique et du service des Mines des différents gouvernements; ainsi que des géolo- gues et des ingénieurs des mines exerçant la profession pour leur propre compte. La valeur du rendement minier anuuel du Canada s’est constamment accrue d'année en année, au cours des trente dernières années, et dépasse maintenant cent millions de dollars. Mais si l’on tient compte des richesses déjà con- nues et des territoires énormes dont les richesses sont in- connues, ce rendement est faible, et le Canada a besoin de plus d'hommes et de plus d’argent pour la prospection, le développement ‘et l’exploitation. Le meilleur moyen de se procurer cet argent est d’attirer, non pas le gros du public, mais les hommes qui s’adonnent à ces industries et qui savent comment les diriger. Les géologues et les ingénieurs des mines sont évidem- ment les homines les plus capables d’influencer chez eux l'opinion dans ces questions, au sujet desquelles leur auto- rité est reconnue; par suite, 1l ne faut pas négliger l’occa- sion que présente l’assemblage au Canada de tant de spé- cialistes éminents. On devrait faire tous les efforts pos- sibles pour montrer au monde entier que si nos richesses minérales sont grandes, nous avons aussi un immense ter- ritoire, non développé, qui attend la venue du prospecteur expérimenté. Il y a déjà eu au Canada des réunions de sociétés géolo- CONGRÈS GÉOLOGIQUE -:INTERNATIONAIL. 115 giques et d’autres sociétés scientifiques ; mais c’est la pre- mière fois que se tient ici un Congrès géologique interna- tional, et il n’est guère probable que l’occasion se présente encore d’ici à un grand nombre d'années: car les réunions ont lieu tous les trois ans et chaque fois dans un pays différent. Les géologues canadiens se rendent parfaitement compte du grand honneur qui leur a été fait à eux, et à leur pays, en choisissant le Canada pour le lieu de réunion du Con- grès et ils reçoivent, pour sa préparation, la généreuse assistance des gouvernements Fédéral et Provincial, des chemins de fer et des sociétés minières, ainsi que des particuliers, hommes d’affaires et homines de profession, qui tous contribuent largement de leur argent et de leur temps. Son Altesse Royale le Duc de Connaught, feld-maréchal et gouverneur général du Canada, a gracieusement accepté d’être président d'honneur du 12e Congrès. Je me ferai un plaisir d'envoyer un exemplaire de la circulaire à tous ceux de vos iecteurs qui en feront la demande, ainsi que de leur fournir, s’ils le désirent, d’au- tres renseignements sur le Congrès. J'espère, M. le Rédacteur, que vous aurez l’amabilité d’user de votre influence et des moyens à votre disposition pour faire connaître au public le but, l’objet et l’œuvre du Congrès. Veuillez agréer, monsieur, l’expression de mes saluta- tions. W. S. LECKY, : secrétaire du Comité exécutif du douzième Congrès géologique international. 116 LE NATURALISTE CANADIEN Le Congrès Géologique International, sur l'invitation qui lui a été faite d’un comimun accord par le gouverne- ment fédéral, les gouvernements provinciaux du Canada, le ministère des Mines et l’Institut des Mines du Canada, tiendra sa douzième réunion, au Canada, durant l’été 1913. En vue de procéder à l’organisation, une assemblée de re- présentants des divers corps scientifiques du Canada a été tenue à Toronto, Ontario, le 2 décembre 1910. PROGRAMME (Æxérarts.) Il est projeté de tenir la réunion du Congrès à Toronto à partir du 21 août ou à peu près. Le Congrès siégera huit jours. SUJETS A DISCUTER Les sujets suivants ont été choisis pour fournir les thèmes principaux de discussion :— 1. Les richesses houillères mondiales. 2. Différenciation dans lès magmas ignés. 3. L'influence de la profondeur sur la nature des gise- ments métallifères. 4. L'origine et l'importance des sédiments pré-Cambriens. 5. Les sous-divisions, la corrélation et la terminologie du pré-Cambrien. 6. Dans quelle mesure l’époque glaciaire a-t-elle été in- terrompue par des périodes interglaciaires ? 7. Les caractéristiques physiques des mers paléozoïques et les particularités de leur faune considérées au point de vue de la portée du retour des mers, dans l’établissement des systèmes géologiques. LES RICHESSES HOUILLÈRES MONDIALES Le Comité exécutif du onzième Congrès tenu en Suède a compilé et publié un rapport très clair et complet sur les « CYPÉRACÉES » NOUVELLES 117 Richesses mondiales en Minerais de fer. L’exécutif actuel a entrepris de préparer une monographie analogue des ri- chesses Houillères mondiales. Pour rendre ce travail aussi complet que possible, il a fait appel au concours de tous les principaux pays du monde. Cette invitation a été accueillie de la façon la plus cordiale ; et il y a lieu d'espérer que les volumes seront prêts à être distribués avant la réunion, de façon à pouvoir servir de base à une discussion lors du Congrès. EXCURSIONS Des dispositions ont été prises pour organiser une série d’excursions, qui permettront aux membres du Congrès d'acquérir une notion de la géologie et de la physiographie, aussi bien que des richesses minérales et autres richesses naturelles, de toutes les parties les plus accessibles du Canada. Ces excursions auront lieu avant, durant et après le Congrès. Les membres auront l’occasion de prendre part à une ou plusieurs des excursions les plus longues, et à quelques-unes des plus courtes. N.B.—Adresser toute correspondance relative au Congrès’ M. le Se- crétaire, Congrès géologique international, Musée commémoratif Vic- toria, Ottawa, Canada. :00 : PLUSIEURS « CYPERACÉES » NOUVELLES POUR LA FLORE DE QUÉBEC La distribution géographique de nos Cypéracées est fort peu connue. Les plantes qui composent cette famille sont 118 LE NATURALISTE CANADIEN des herbes ordinairement sans importance économique, que les botanistes même négligent souvent. Elles ont cependant un rôle : c’est surtout au moyen de ce type particulier que la vie végétale prend possession des marais, des bas-fonds et des rivages. Quoique la raison providentielle de la pullulation des individus soit obvie, l'extrême multiplicité des espèces est déconcertante, et reste un problème insoluble. L'étude des quelque 1000 espèces du seul genre Carex constitue une science à part qui occupe de nombreux spécialistes. Nous voulons aujourd’hui signaler deux Cypéracées absolument nouvelles pour la Province. Nous ajouterons ensuite des notes sur quelques espèces ou variétés récem- ment séparées et qui n’ont encore été incluses dans aucune Flore canadienne. Il s’agit d’abord du Cyperus Schweïnitzit Torr. (Fig. 1), récolté par nous et notre collaborateur, Frère Rolland- Germain, à Oka, P. Q., sur les alluvions qui bordent le lac des Deux-Montagnes. On ne le connaissait jusqu’à présent au Canada que dans la région riveraine des grands lacs, dans l'Ontario méridional, et dans l'Ouest. La: zonede dispersion de ce Souchet se trouve ainsi singulièrement élargie. Il est probablement abondant dans la vallée de l'Outaouais, où l’on doit le confondre avec Cyperus esculentus L,., espèce vulgaire des champs humides, rangée parmi les mauvaises herbes. Voici la description du €. Schweïnitzir Torr. Plante vivace, se propageant par une espèce de petit bulbe solide. Chaume très grêle, rugueux aux angles supérieurement, de 1-2% pieds de hauteur ; ombelle de 3-10 rayons très inégaux, dressés ; épillets lâches (Fig. 1, A), portant de 6à 16 fleurs. Feuilles involucrales 3-7, dressées. Glumes convexes, d'un brun verdâtre, à nervures nombreuses, se détachant à maturité. Fruit à angles aigus, aussi long que la glume, acuminé aux deux extrémités. (Fig. 1, B). « CYPÉRACÉES » NOUVELLES 119 *k *X %*% _ Les rives de l'Outaouais, à Saint-Eustache,£P. Q., tout près de la sortie du lac des Deux-Montagnes, nous ont fourni, en 1912, une nouvelle espèce que sa haute taille A.—Epillet. B.—Fruit, style et}stig- mates. Fig. 1. Cyperus Schweinitzii Torr. 120 LE NATURALISTE CANADIEN rend intéressante : Sczrpus Torreyi Olney. (Fig. 2). Elle se classe dans la catégorie des grands Scirpes à tige trian- A.—Epillets et feuille involu- crale. B.—Fruit et aigrette C.—Glume. D.—Section triangulaire du chaume. EÉ.—Nodules des feuilles. Fig. 2. Scirpus Torreyi Olney gulaire du type S. Americanus Pers. si répandu dans toute l'Amérique du Nord. de 2 « CYPÉRACÉES » NOUVELLES I2I Description : Vivace, rhizomes grêles, rougeâtres, stolo- nifères (au moins chez les spécimens de Saint-Eustache : les ‘auteurs ne parlent pas de cette particularité). Chaume ni triangulaire (Fig. 2 D), à côtés concaves, grêle, de 2-4 pieds, noduleux, feuillé À la base. Feuilles 2-3, linéaires, noduleuses (Fig. 2 E), au moins plus de la moitié de la longueur du chaume, quelquefois plus longues, grêles, canaliculées ; feuille involucrale de 2-6 pouces, dressée, simulant la continuation du chaume, obtuse-arrondie à l'extrémité (Fig, 2.A); épillets 1-4, paraissant groupés latéralement, oblongs-fusiformes, aigus, distincts, de 34-17 pouce de longueur ; glume ovale, lisse, à peine mucronée, brunâtre (Fig. 2 C); style trifide, étamines 3; aigrette formée d'environ 6 soies barbelées, plus longues que le fruit, à dents réfléchies ; fruit, un akène irrégulièrement triangulaire, très lisse, muni d’une pointe allongée (Fig. DR): On admettait jusqu’à présent que la limite nord du Scirpus Torreyt Olney n’atteignait pas la frontière cana- dienne. La présente découverte semble indiquer que ia plante existe dans le bassin du Saint-Laurent supérieur et de l'Outaouais. Ce Scirpe fructifie plus tard que les autres espèces du groupe. Des spécimens récoltés en août dernier étaient encore très jeunes, à peine assez formés pour permettre la détermination. *k *X *% Le genre Sczrpus a été l’objet d’une étude très spéciale de la part de M. Merritt L. Fernald, de l’Université Harvard. Les résultats de cette étude ont trouvé place dans la septième édition du fameux Gray’s Manual of Botany. Le groupe d'espèces à épillets nombreux et à feuilles involucrales multiples a reçu des additions consi- 122 LE NATURALISTE CANADIEN dérables. M. Fernald a herborisé lui-même dans l’est de la province de Québec, et il y a récolté les types de plu- sieurs de ses espèces nouvelles. Nous lui avons soumis récemment quatre spécimens de Scirpes de ce groupe, et nous croyons utile de joindre ses remarques à nos propres observations. 1. Scirpus pedicellatus Fernald. Saint-Bruno, P. Q., T'er- rains tourbeux ravagés par le feu. Août 1912. 2. Scrrpus atrocinctus Fernald. Terrains d’alluvion au bord du lac Nominingue, P. Q. Espèce de création récente qui paraît être très répandue dans la Province. Il est probable que nombre d’herbiers la contiennent sous l'étiquette de S. cyperinus (L ) Kunth. 3. Scirpus atrocinctus Fernald, var. brachypodus Fer- nald. Châteauguay, P. Q., juillet 1912. Prairie maréca- geuse. Les épillets sont brièvement pedicellés et rassem- blés en têtes denses et irrégulières. C’est Ja forme boréale de l’espèce. 4. Scirpus cyperinus (L.) Kunth., var. pelius Fernald. Terrains d’alluvion au bord du lac Nominingue, P. Q. Août 1912. Les très longues feuilles involucrales carac- térisent l’espèce, et la couleur sombre des involucelles, la variété. C’est aussi la forme boréale de l’espèce. Elle commence à fructifier à la fin d'août, lorsque S. afrocinctus, avec qui elle voisine, est déjà à maturité. 5. Scirpus subterminalis Torr. Nous avons déjà signalé cette espèce dans le comté de Mégantic, P. Q. (Var. Can., Vol. XXXVI, No 5, mai 1909.) Nous l'avons retrouvée dans un petit lac tourbeux des environs de Saint-Jérôme, comté de Terrebonne, P. Q. Il est hors de doute que plusieurs autres espèces de Scirpes pourront encore venir enrichir notre flore provin- ciale. Il suffit pour cela d'apporter plus de rigueur aux déterminations. (Cette rigueur engendre des doutes, pro- THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 123 voque des discussions d’où sortent des conclusions intéres- santes. Nous offrons nos remerciements à M. Louis Préfontaine, pour les dessins dont il a bien voulu illustrer ces quelques notes. Frère MARIE-VICTORIN, F. E. C. Collège de Longueuil, P. Q. 26 janvier 1913. :00 : « SYNONYMY OF THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA » By E. P. VAN DUZEE, BUFFALO, N. Y. (Continué de la page 112.) 133. Zrichia punctulata Reut. This specimen is in poor condition, but is undoubtedly a 7Yropidosteptes, perhaps pettiti or palmerr. With it stands a pale example of Zygus pratensis Linn. 134. Stenarops chloris Uhler is 7ropidosteptes commits- suralis Reut. 134. Slenarops malinus Uhler is a large pale Zygus pratensis Linn. 135. Labops hesperius Uhler, correct. 136. Orthocephalus saltator Hahn. A Capsid new to me, but certainly not the European sa/{ator Hahn. 137. Chlamydatus luctuosus n. sp. On this label is a broken specimen of Dricyphus agilis, but it does not agree with the description entirely and may be an error. 124 LE NATURALISTE CANADIEN 138. Orthotylus dorsalis Prov. is ©. congrex Uhler: This specimen agrees in all respects with Provanchers description of 1872 and the name must take precedence over Uhler’s published in 1887. 140. Dicyphus californicus Stal, correct. 141. /dolocoris famelicus Uhler is Macrolophus she tus Uhler. 141. /dolocort agilis Uhler is correct. 143. Æyaliodes vitripennis Say, correct. 144. Malacocoris Provancheri Burque is a good species of Diaphnidia near pellucida Uhler. 146. Parthenicus psalliodes Reut. On this label is a very poor specimen of //racora stalir Reut. 147. Globiceps flavomaculatus Fabr. is Mimoceps gracilis Uhler. 148. Oncotylus decolor Fall., correct. Zopus decolor Fall. 148. Oncotylus pulchellus Reut. is Orthotylus flavospar- sus Fall. 149. Oncotylus punctipes Reut. Probably correctly determined. Our American species differs from Reuter’s description only in wanting the black pubescence on the autennæ and venter and in having the areoles scarcely darker than the rest of the membrane. 150. Macrocoleus coagulatus Uhler, probably correct, 150. Amblytylus 6-guttatus, n. sp. A distinct and beau- tiful species belonging to genus A/acrotylus. I took it at Ottawa. 152. Psallus delicatus Uhler is a form of ?/agrognathus obscurus Uhler. 153. Plagiognathus fuscosus Prov. Under this name is placed the ordinary form of ?. obscurus Uhler, but it is not the /usosus nor the dorsalis of the NAT. CAN., 1872, as quoted by Provancher. The former is very close to if not identical with ?. politus Uhler. 1HE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 125 - 154. Plagiognathus rubricans, n. sp. À good species pertaining to genus ÆÆznocapsus Ulher. It differs from l’anduzeei Uhler in being larger and in having the second antennal joint entirely black. Mrs. Slosson has recently taken this species at Lake Toxaway, N. C. 155. ÆAgalliastes associatus Uhler, correct. NOTE.— Among the Capsids in this collection is a Garganus fust- Jformis Say named /egocælum signatum Dist., and a Cera- tocapsus pumilus determined as Ceralocapsus lutescens Reut. 155. Agalliastes verbascr H.S., correct. CAlamydatus is now used for this genus. 158. Corythuca ciliata Say is a variety of arcuata Say. 158. Corythuca juglandis Fitch is a typical arcuata Say. 159. ZLeptostyla oblonga Say. This seems to be a Ze tobyrsa, probably explanata, but unfortunately I had no specimen for comparison. 159. Gargaphia til1æ Walsh, correct. 160. Pysatochila plexa Say, correct. 160. Leptophya mutica Say, correct. 162. Phymata wolfir Stal is Erosa pennsylvanica Handl. 165. Aradus robustus Uhler is 7-/ineatus Say. 165. Aradus aequalis Say is robustus Uhler. 166. Aradus acutus Say. On this label was a species still undetermined in my collection, but quite distinct from acutus Say. | 166. Aradus 7-lineatus Say. The species under this name was new to me and was quite distinct from either 4-lineatus or robustus. 167. Aradus similis Say. This seemed to be /uberculi- fer Kirby as nearly as I can tell without comparing speci- mens directly. 167. Aradus rectus Say, correct. À. lugubris Fallen. 167. Brachyrhynchus granulatus Say. New to me, but not granulatus as determined in my collection. 126 LE NATURALISTE CANADIEN 168. Brachyrhynchus lobates Say is the granulatus of my collection. 169. Aneurus politus Say is septentrionahis Walker. 160. Aneurus inconstans Uhler, correct. 170. Cimex lectulartus LAnn., correct. 175. Coriscus subcoleoptratus Kirby, correct. 175. Coriscus propinquus Reut. is the young of the preceding species. 175. Coriscus vicarius Reut. is the larval from of Alydus eurinus Say. 176. Coriscus rnscriptus Kirby is C. rufusculus Reut. The name Reduviolus is now used for this genus. NOTE. —I]n the collection is an Acholla mutispinosa De G. label- led Szzea coronata Stal, and a Diplocodus exsanguis Stal. labelled Acholla tabida Stal. | 176. Coriscus ferus Linn., correct. 180. Srinea diadema Fabr., correct. 181. Diplodus luridus Stal. is Diplocodus luridus Stal., female. 181. Darbanus georgiæ Prov. is a worn female specimen of Diplocodus luridus Stal. 182. Darbanus palliatus, n. sp., is the male of Dzploco- dus luridus Stal. 182. Evagoras marginata, n.sp.,is Zelus cervicalis Stal. 183. Melanolestes picipes, H. $S., correct. 183. Melanolestes abdominalhis, H. $S., correct. Leconte is authority for this species. 184. Opsicætus personatus Linn., correct. An immature specimen ishis Xeduvius albosignatus as suggested by him. The name Xeduvius is now used for Opsicætus. 186. Emesa longipes De Geer. Under this names a Ploiariola, probably errabunda Say. 186. Cerascopus errabundus Say. The insect on this label seems to be a Parce; but I could not locate the species without material for comparison. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 127 189. Salda ligata Say, probably correct. 190. Salda obscura Prov. is Zttoralis Linn. 190. Salda major Prov. is deplanata Uhler, which name it must supercede as it has priority by one year. 191. Sal/da littoralis LAnn. is 2nterstitialis Say. 191. Salda Zlugubris Say. Apparently 7epleta Uhler, but I could not be certain without specimens for compari- son. 192. Sctodopterus bouchervillet Prov. is coriacea Uhler, which name it must supercede having priority. 193. Zrmnobates lineata Say, correct. 195. Gerris rufoscutellatus Latr., correct. 195. Gerris remigis Say, correct. 195. Gerris marginatus Say, correct. 196. Gerris canaliculatus Say. This may be #venoi Kirk. It is smaller than warginatus and stouter than canaliculatus usually is; but I could not be certain of the determination without specimens for direct comparison. 197. Belostoma grisea Say, correct. PBenacus grisea Say. 198. Zattha fluminea Say, correct. Belostoma fluminea Say. 199. Aanatra fusca P. B. is X. americana Montd. 200. Votonecta 1rrorata Uhler, correct. 201. Votonecta undulata Say, correct. 202. Corisa, sp. My own material in this genus is still unworked and I did not attempt to locate the Provancher species. 204. Prionosoma villosum, n. sp., does not differ in any respect from pfodopoides Uhler. 204. Euschistus jugalris, n. sp. I could not find this in the collection, but from the description I am now strongly inclined to consider it the form of servus with acute humert, although it might be conspersus Uhler. 128 LE NATURALISTE CANADIEN 205. Platygaster pacificus, n. Sp., correct. 211. Crcada pruinosa Say, correct. 212. Cicada septendecim Linn., correct. 7zbicina sep- tLendecim Linn. (A suivre.) +: OO: PUBLICATIONS REÇUES — L'Almanach Rolland, Agricole, Commercial et des Familles, pour 1913, renferme, outre ses nombreux et utiles renseignements religieux et civiques, d’agréables légendes et d’intéressantes histoires inédites, par nos auteurs cauadiens. Publié par la Compagnie J.-B. Rolland & Fils, 6 à 14, ruc Saint-Vincent, Montréal. Prix : 1o cts; franco par la malle, ro icts: — (Exper. Farms.— Div. of Entomology.) Zegislation in Canada Lo prevent the introduction and spread of insects, pests and diseases des- tructive of vegetation. With regulations regarding the importation of vegetation inlo Canada. By €. Gorden Hewitt, D. Sc., Dominion Ento- mologist. Bull. No 12.—2nd Series, — Entomological Bull. No. 6. Ot- taWa. 1912. Ce titre est long, mais aussi il fait ressortir l'importance considérable de cette plaquette publiée par le ministère de l’Agriculture du Cenada. — Fermes expérimentales. Rapports. 1912. Ottawa. Ce sont les rapports du Botaniste et de l’Entomologiste du Dominion qui, dans ce volume, attirent toujours l’attention des naturalistes. Les maladies des plantes et les insectes nuisibles en forment le fond, et se trouvent ainsi traités, chaque année, d'une façon très utile. — On sait que notre collaborateur, M. Germain Beaulieu, est maintenant attaché à la division d’Entomologie, comme agent extérieur. «Ses connaissan- ces approfondies des insectes de la Province, écrit de lui M. Hewitt, eu- tomologiste du Dominion, le rendent précieux pour ce service ». — Missouri Botanical Garden. 23rd Annual Report. 1912. Parmi les mémoires que renferme ce beau volume, nous signalons celui qui a pour titre: À consideration of the physiology and life his- tory of a parasitic Botrytis on pepper and lettuce». C’est une thèse présentée à l'Université de Washington, par un M. George-I,. Peltier (probablement un de nos compatriotes), pour le degré de maître ès arts. A mentionner aussi une monographie des Usnéacées de l'Amérique du Nord, par M. R. Heber Howe, jr. —(Commission de la Conservation.) Conditions forestières de La Nouvelle-Écosse, par B.-E. Fernow. Ottawa. 1912. Cette étude sur l’état des forêts de la Nouvelle-Ecosse, sur leur distri- bution relative anx sols et sur leur maintien, est de grande importance. Treize planches d'illustrations ajoutent encore à l’intérêt de ce travail. :00 : LE . NATURALISTE CANADIEN Québec, Mars 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 9 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard LES «c SOURCIERS » Nous avons publié, l’an dernier, de nombreux documents sur la question de la Baguette divinatoire. Nous en pu- blierons peut-être d’autres dans quelque numéro prochain. Mais voici que la question vient d’entrer, on peut le dire, dans une nouvelle phase. Nous lisons, en effet, dans un récent journal de Paris que, à la demande de nombreux géologues et physiciens, l’Académie des sciences a décidé d'ouvrir une grande enquête sur la question des «sourciers » et de la « baguette divinatoire ». Une Commission, com- posée de MM. Dastres, biologiste, Douvillier, chimiste, et Armand Gautier, chimiste, étudiera la question. M. Dastres interrogé a répondu : « Je n’ai pas d’idée pré- conçue à ce sujet. De grands esprits, et notamment Che- vreul, qui lui a consacré un opuscule, n’ont pas dédaigné de s’occuper de cette question. Je demanderai à mes col- lècues de s’adjoindre des personnes dignes de foi qui ont fait des expériences ou contrôlé des résultats obtenus avec la baguette de coudrier. On saura bientôt s’il convient de 9—Mars 1913. 130 LE NATURALISTE CANADIEN modifier la définition du dictionnaire de l’Académie : «sourcier,—Celui qui découvre les sources par un moyen que la science ne veut pas reconnaître. » D'autre part, on se rappelle qu'après une enquête tenue dernièrement par les autorités de Washington on a conclu contre la réalité du phénomène de la Baguette divinatoire. On attendra donc avec intérêt les résultats de l'étude qu’entreprend l’Académie des Sciences de Paris. :00 : CHEZ LES PUCERONS CAUSERIE ENTOMOLOGIQUE (1) Le sujet de cet article n’est point une étude générale des Aphidiens ou pucerons; moins encore l’énumération des particularités qui distinguent entre eux les nombreux gen- res et espèces de cette famille. C’est un simple recueil de quelques faits qui sont plus intéressants et plus suggestifs, glanés dans l’histoire de ces animaux. Rappelons tout d’abord que leur vie est généralement de courte durée : cinq semaines environ; qu’ils sont aptes à se reproduire au bout de vingt et quelques jours ; et que, par suite, le nom- bre des générations qui se succèdent chez eux dans le cours d’une année est assez considérable. I. LEUR HÉRÉDITÉ Les pucerons ne partagent pas nos idées sur l’hérédité. Nous croyons, nous, communément, que non seulement le 1. Cet article sur les Pucerons a paru dans les Æ#udes, livraison du 5 mars 1912. [Le manque d’espace nous a seul empêché de le reproduire plus tôt. Mais ces études de mœurs entomologiques ne sont pas moins ou plus d’actualité un an plus tôt, ou un an plus tard. On lira ce travail avec un vif intérêt, croyons-nous. 4. C. | CHEZ LES PUCERONS 131 fils doit recevoir de ses parents toutes les propriétés qui les font, lui et eux, de la même espèce, mais encore que, par ses caractères individuels, il doit ressembler à ses père et mère plus que tout autre individu issu de parents diffé- rents. Le puceron, lui, ne se croit obligé qu’à transmettre à ses descendants immédiats les caractères spécifiques es- sentiels : pour le reste, il y va largement. Aïnsi, les individus de la première génération de l’année sont tous sortis d’un œuf; eux, au contraire, ne pondent pas, ils mettent au jour leurs petits tout vivants. Une gé- nération vivipare et agame qui descend immédiatement d’une génération sexuée et ovipare, quelle atteinte à l’idée commune de la transmission héréditaire ! Le pius souvent, la seconde génération de l’année est assez semblable à la première. Parfois, cependant, celle-ci ne compte que des noirs et celle-là que des verts. Une peuplade nègre qui n’engendrerait que des blancs n'aurait rien de plus mer- veilleux. Mais chez les pucerons ce changement de teint présente un avantage sérieux : les noirs, éclos avant les premières pousses du printemps, auront à vivre sur une écorce datant de l’année précédente et noirâtre elle-même ; les verts, nés plus tard, grimperont aux scions nouveaux à écorce encore tendre, et verte comme eux. Les uns et les autres échapperont ainsi plus facilement aux yeux des ma- raudeurs: stratagème intelligent. Mais l’hérédité ? Pres- que toujours les premières générations de l’année ne con- . tiennent que des individus dépourvus d'ailes, apières ; mais bientôt on rencontre parmi les membres d’une même géné- ration des aptères et des individus ailés. Les uns et les autres sont également agames et vivipares; mais les ailés iront fonder des colonies sur quelques plantes ou quelques arbres encore inoccupés. Ils laisseront ainsi à leurs frères aptères toutes les ressources que peut fournir la plante na- tale, et celle-ci sera moins exposée à périr d’épuisement., 132 LE NATURALISTE CANADIEN Double avantage obtenu par ce moyen simple et ingénieux, mais peu conforme à l’hérédité. Il y a plus Une même génération contient parfois jusqu’à quatre formes distinc- tes. Outre les individus aïlés ou aptères de taille ordinai- re à l’espèce, on rencontre des 7a2ns, avec ou sans ailes, si différents des autres, non seulement par leur taille environ deux fois moindre, mais aussi par l’élégance de leurs for- mes et par leur genre de vie, qu’un observateur peu averti les rapporterait infailliblement à une espèce distincte et même éloignée. Tandis que les parents et les frères géants vivent en famille sur l'écorce, les zazns s’isolent sur les feuilles voisines s'ils sont aptères, ou plus loin s'ils sont pourvus d’ailes. De plus, c’est à eux seuls qu’il est donné de mettre au jour une génération qui, par une exception rare, vivra trois ou quatre mois au lieu de quelque trente jours, et dont les individus en naissant ne ressemblent ni à leurs parents ni aux petits des générations précédentes. C'est seulement aux premiers froids de l’automne, après un premier changement de peau, qu’ils montreront les carac- tères de leur espèce. Ce ne sont pas encore là les derniers accrocs aux lois de l’hérédité ; ils ne se produisent qu’à la dernière génération de l’année. Celie-ci, en effet, chez tous les Aphidiens, ne contient plus que des individus sexués. Les femelles, au lieu d’être vivipares comme leurs mères, pondront les œufs destinés à braver la froidure du . prochain hiver, et à fournir la première génération de l’an- née suivante. Alors, toutes les transformations que nous venons d'indiquer se reproduiront fidèlement dans le même ordre. Il y a donc, si l’on veut, une certaine hérédité chez les Aphidiens, mais combien peu conforme à nos idées ; ou un certain atavisme, mais atavisme réglé où rien n’est lais- sé au hasard, où toute ressemblance avec quelques-uns des ancêtres vient à heure fixe et ne manque jamais. Quelqu’une des théories proposées pour expliquer l’héré- CHEZ LES PUCERONS 133 dité ordinaire est-elle également satisfaisante pour celle-ci ? J'en doute. Sauf celle qu’on nous apprit au catéchisme: l’auteur de la nature l’a ainsi ordonné. Explication sim- ple, vraie, scientifique autant que pas une, maïs, il faut l'avouer, un peu trop générale. Les causes secondes im- médiates dont dépend la solution du problème suivant sont plus faciles à discerner. II. LEUR MULTIPLICATION RAPIDE, VAINE MENACE DE DOMMAGES IMMENSES La fécondité du puceron n’a rien de remarquable. Chez nombre d'animaux, poissons, crustacés, etc, chaque femelle produit des milliers, parfois des centaines de milliers d'œufs; ceux de l’Aphidien ou ses petits n’at- teignent pas la centaine. Et cependant on peut se demander comment il n’a jamais encore détruit toute végétation et par conséquent toute vie sur la terre. (C’est qu’en effet la multiplicité de ses générations, dans une même année, exagère de façon étonnante le nombre de ses descendants à la fin de cette année. Supposez cinq repro- ductions par an (il y en a souvent plus), et trente petits pour chaque individu (ou trente œufs, s’il est ovipare), la suite des générations pour un seul puceron contiendra : I 30 900 27 000 810000 individus. Ces derniers étant sexués compteront donc en chiffres ronds 400000 femelles qui pondront 12 millions d'œufs, Donc, 12 millions de pucerons pour la première génération de la seconde année; 144 millions de millions pour commencer la troisième, etc. Et à la fin de la dix- ième ? Des millions de fois plus qu’il n’en faudrait pour détruire toute végétation et ainsi réduire à la famine et à la mort presque tous les animaux qui peuplent la terre et 134 LE NATURALISTE CANADIEN l’air. Les eaux seules ou leur voisinage immédiat reste- raient peuplées. L'expérience prouve qu’une telle catas- trophe n’est point à redouter. C’est que la Providence a pris ses mesures pour la rendre impossible. Presque tous ces ravageurs sont condamnés à mort: ils seront dévorés. Des familles nombreuses d’autres insectes ont été désignées pour ce travail nécessaire : Syrphes, Coccinelles, Hémé- robes, Conioptéryx, divers Chalcidites...et toute la tribu des Flexiliventres ont reçu l’ordre de s’y appliquer. Et ils s’y appliquent. | | Qui n’a rencontré parfois certaine mouche assez sembla- ble aux guêpes par sa couleur et sa taille, immobile dans quelque rayon de lumière où elle se tient suspendue par un battement d’ailes précipité, puis s’'élançant tout à coup, rapide comme un trait, à la rencontre de quelque voisin ou voisine de même espèce et, après échange des politesses usi- tées, revenant aussi rapide à son poste ensoleillé? C’est un Syrphe. Il ne faudrait pas croire que tout son temps se passe à ces jeux innocents. Au contraire, la femelle est presque constamment en quête de quelque plante portant colonie de pucerons; colonie nombreuse ou seulement com- mencée: un puceron ayant près de lui un ou deux petits suffit à ses desseins. Elle dépose tout à côté un‘ou plu- sieurs de ses œufs, selon le cas. Elle sait d’instinct que sa larve, sitôt éclose, tronvera là victuailles convenables et suffisantes. Les manœuvres de cette larve ne sont pas moins curieuses que celles de ses parents. Aveugle, elle s’avance en portant sa longue tête effilée, tantôt à droite tantôt à gauche, et palpant tout autour d’elle jusqu’à ce qu'elle ait touché un puceron. Celui-ci, saisi à l'instant, est soulevé tout d’une pièce entre les mandibules puissan- tes de la larve; et, ainsi maintenu, il est sucé jusqu’à la peau. Alors la larve jette de côté la dépouille et passe à une autre victime; ou, si la faim est assouvie, se couche CHEZ LES PUCERONS 135 au milieu du troupeau pour faire là même une tranquille digestion. Fait curieux, les pucerons menacés par sa pré- sence ne fuient pas (1), elle pourra dévorer jusqu’au der- nier d’entre eux sans qu'aucun ait fait un mouvement pour se soustraire à la mort. Les Coccinelles (qu'avant les laïcisations modernes tout le monde connaissait sous le nom de bé/es à bon Dieu) ne ne sont pas moins grands destructeurs de la gent aphidien- ne ; ni les Hémérobes dont la larve s'appelle vulgairement le lion des pucerons, ni les Conioptéryx, ni les Scymnes.….. tous, comme les Syrphes, massacreurs brutaux et sans forme. Les Flexiliventres s’y prennent d’autre façon. On a donné ce nom à une tribu nombreuse d'Hyménoptères plus élégants et plus sveltes encore que nos guêpes, dont ils ont à peu près la forme, mais beaucoup plus petits (2 ou 3 mil- limètres de longueur), de couleur plus sombre, munis d’an- tennes souvent aussi longues que le corps et d'ailes peu riches en nervures. Ils ont la curieuse propriété de recour- ber leur abdomen (de là leur nom) vers la poitrine, jusqu’à mettre ces deux parties du corps en contact. Tous sont des hypocrites raffinés, aux gestes moelleux ; sans précipi- tation, aux attitudes plutôt bienveillantes, tandis que leur cœur nourrit de noirs desseins. Si vous rencontrez par- fois une troupe un peu nombreuse de pucerons, vous avez chance de trouver aussi parmi eux quelqu'un de ces me- nus tartufes. Vous le verrez se promener tranquillement au milieu de la foule, flattant de ses antennes tantôt l’un tantôt l’autre à mesure qu’il s’avance, puis s'arrêter près de l’un d’eux qu’il a reconnu plus apte à ses vues. Pour celui-là, les caresses redoublent ; on serait même tenté de 1. Certaines espèces fuient, et on voit la larve assassine se coucher, en l'entourant de son corps, sur le pédoncule de la feuille où elle a fait des victimes, pour qu'aucune de celles qui restent ne puisse plus échapper. 136 LE NATURALISTE CANADIEN croire qu’il lui adresse dans leur langue quelque compli- ment flatteur, que le puceron, bonne bête qui n’a jamais fait du mal à autrui et ne soupçonne pas qu’on lui en veuille, écoute avec une complaisance mal déguisée. Pen- dant ce temps-là, le cajoleur s’arc-boute peu à peu sur ses pattes postérieures, infléchit doucement vers le puceron son abdomen caché sous la poitrine, prend ses mesures, et tout à coup le frappe de sa tarière à quelque point plus faible de la peau. Il y a déposé un de ses œufs. L'animal bles- sé a un sursaut d’étonnement, mais n’y comprend rien et se remet à boire. Le Flexiliventre l’a déjà quitté sans au- tre politesse et va répéter ailleurs ses manœuvres perfides. L'œuf déposé éclora bientôt et la larve qui en sortira pé- nétrant dans le corps du puceron, si elle n’y est déjà, en absorbera d’abord les parties les plus fluides, puis les autres jusqu’à la peau. A ce moment, la larve aura justement achevé sa croissance, et c’est la peau du puceron 2246 qui lui servira de demeure pendant la nymphose. Elle en orne d’abord toutes les parois d’un riche tapis de soie (1), et met de côté, avec grand soin, en un seul tas, les résidus de sa digestion. Est-ce coquetterie, notion innée de l’hygiène et précaution contre la rupture possible des frêles murail- les de la maison, ou tout cela ensemble? Puis elle s’en- dort du sommeil du juste. Et c’est son droit, puisqu'elle a joué le rôle que lui avait assigné la Providence. C’est d’ailleurs pendant ce sommeil que celle-ci lui prodigue ses soins les plus minutieux. A ce ver, jusque-là tout à fait informe, elle fait pousser six pattes, quatre ailes, deux an- tennes, etc... et lui moule un corps des plus élégants. Il s'éveille alors seulement ; et, se taillant une ouverture dans les murs de sa prison, il en sort tout habillé de neuf, tout 1. C’est aussi avec quelques fils de soie gluants que le parasite colle la paroi abdominale de sa victime contre la feuille ou la tige où celle-ci, à bout de forces, s’est arrêtée pour mourir. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 137 prêt ponr la célébration de ses noces, tout disposé à cajoler à son tour le peuple des Aphidiens comme le firent ses ancêtres. L. DESHAYES. (A suivre.) OUEE——— «SYNONYMY OF THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA » — By E. P. VAN DUZEE, BUFFALO, N. Y. (Continué de la page 128.) 213. Cicada canadensis, n. sp. This is rz»05a Say more strongly marked with orange on the base of the elytra and wings than usual. I have an exactly similar specimen which I cannot distinguish from 7##0sa. It belongs to genus Okanagana Dist. and not to 7zbicen, and is not noveboracensis Emmons as I had conjectured. 214. Cicada rimosa Say. The ordinary dark form of this species. 217. Amphiscepa coqueberti Kirby is Ofiocerus degeert Kirby. 218. /ysteropterum semivitreum, n. sp. This species was a surprise to me and I had taken nothing at all allied to it for comparison. It seems to belong to the Californian group of /ssids and is very close to Drc{yobia permutata Uhler. It may be an accidental introduction from the West. 219. Scolops sulcipes Say, correct. 138 LE NATURALISTE CANADIEN 220. Ælelicoptera septentrionalhs, n. sp. This is the ZY- diptera 1 have been determining as sepéentrionalis Prov. 221. Æelicoptera vestita, n. sp., is Zlidiptera opaca Say. 222. Crxtus stigmatus Say. This is the C. séigmatus of my table published in CAN. ENT., XX XVIII, p. 408, Dec. 1906. 223. Olarus quinquelineatus Say, correct. 223. Oliarus cinnamomeus, n. sp., correct. 224. Delfhax unipunctata Prov. is Stenocranus dorsalis Fitch. 225. Delphax furcata Prov. This seems to be a good species of Zzournta. 229. Enchenopa binotata Say, correct. 229. Enchenopa latipes Say, correct. Campylenchia latipes Say. 230. Archasia canadensis, n. sp., À. belfrager Stal. 231. Jantheexpansa Germ., correct. Antianthe expansa Germ. 232. Æntylsa sinuata Germ.is male of Æ. bactriana Germ. 232. ÆEntylia carinata Germ. is female of Æ. bactriana Germ. : 233. Æntylia concava Germ. is Æ. concisa Walk. 234. Ceresa diceros Say, correct. 235. Ceresa bubalus Fabr. On the label is C. {aurina Fh. and by it a male of C. bubalus Fabr. 235. Ceresa brevicornis Fitch. On this label is a female C. basalis Walk., and next it is a female bwbalus Fabr. 235. Ceresa semicrema Say. Under this name is a dark male and female of Ceresa basalis Walk. 237. Stictocephala inérmis Fabr., correct. 237. Stictocephala festina Say is lutea Walk. 238. Cyrtosia vau Say is probably correct. This speci- men has no cloud at apex of the elytra and is larger and darker than usual. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 139 239. Cyrtosia trilineata Say, correct. 239. Cyrtosia fenestrata Fitch. Under this name is a dark male of vau Say. 240. Cyrtosia ornata, n. sp., isthe male of C. cnereus Emmons. 241. Zhelia univittata Harr. is godingt Van D. 242. Thelia bimaculata Fabr., correct. 243. Telamona scalaris Faïirm., correct. /Zeliria scala- ris Fairm. 243. Zelamona tristis Fitch, correct. 244. Telamona unicolor Fitch, correct. 244. Telamona fasciata Fitch, correct. Male of w»2c0- or Fh. 244. Telamona reclivata Fitch, correct. 245. Publilia concava Say, correct. 246. Carynota mera Say, correct. 246. Carynota picta, n. sp., is C. porphyrea Fairm. 247. Ophiderma marmorata Say is Carynota stupida Walk. (uskokensis Godg.) 248. Obphiderma tinornata Say is {ava Godg., a little clouded with reddish. 248. Tragopa brunnea Prov. is Acutalis semicrema Say. 250. Platycotis 4-vittata Say, correct. 251. Platycotis nigromaculata, n. sp., is ?. sagittata Germ. [Under the name 7e/amona querct Fh. is a species I cannot distinguish from oëso/eta Ball (from memory only), but it is certainly not gerc1.] 253. Bruchomorpha oculata Newm., correct. 254. Embolonia tricarinata , n. gen. et sp., is the #a- cropterous form of Bruchomorpha oculata Newm. 255. Aphrophora parallela Say, correct. 256. Aphrophora 4-notata Say, correct. 256. Aphrophora quadrangularis Say, correct. Zepy- ronta 14. 140 LE NATURALISTE CANADIEN 257. Philænus shumarius Linn., correct. 258. Philænus lineatus LAnn., correct. 258. Philænus albiceps Prov., is spumarius var. leucoce- phala TLinn. | 259. Clastoptlera obtusa Say, correct. 260. Clastoptera proteus Fitch is oblusa var. éristis Van D. 260. Clastoptera saint-cyrt Prov. isthe variety of fro/eus later named subspecies f/ava by Ball. 263. Tettigonia viridis Kabr. This is the European viridis Linn. As there seems to be no reason to question Provancher’s statement. that this specimen was taken in Quebec, we must add tire species to our list of North Ame- rican //emiplera. 263. Tettigonia tripunctata Sign is Æolla tripunctata Fitch. 265. Proconta undata Fabr., correct. 265. Proconia costalis Fabr., correct. 266. Diedrocephala mollipes Say is Draæculacephala noveboracensis Fitch. 267. Diedrocephala coccinea Korst., correct. 267. Driedrocephala hieroglyphica Say is Tettigontella gothica Sign. 268. Ælelochara communis Fitch., correct. 268. Acopsis viridis Linn. is Dræculacephala mollipes Say. 269. Gypona quebecensis Prov. Under this name is straight cana Burm. It is not the species formerly sent to me by Provancher as gwebecensis, which was smaller and of a deeper green color. 269. Gypona hullensis, n. sp., is pectoralis Spangb. 270. ÆEucanthus orbitalis Fitch. Dr. Ball now places this as a synonym of Æ. acuminatus Fabr. 270. Penthimia picta Prov. The specimen is missing — — THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA I4I from this label, but there can be no question that is the male of americana Fitch. 275. Platymetopius acutus Say, correct. 275. Platymetopius magdalensis, n. sp. This is the species later described by Prof. Osborn as obscurus. 276. Scaphoideus immistus Say, correct. 277. Scaphotdeus auronitens, n. Sp., correct. 278. Deltocephalus curtisit Kh., correct. Afhysanus curéisit Fh. 278. Deltocephalus inimicus Say, correct. 279. Deltocephalus citronellus Prov. The insect on this label is a 7amnotettix probably still undescribed. It is not the form described in the NAT. CAN., p. 378. 279. Dellocephalus minkii Fieb., correct. 280. Dellocephalus sayt Fitch, correct. 280. Selenocephalus placidus, n. sp. This is an Acuce. phalus new to me. It has a dark shade under the sharp lunately rounded anterior margin of the vertex and the apex of the elytra are coarsely alternated with fuscous points which are not properly iudicated in Provancaer’s descrip- tion. It may be one of the European species already reco- gnized from this country. 281. Athysanus obsoletus Kixsch. is now known as 7e/a- hivus Gill. & Baker. 282. Athysanus plutonius Uhler. This has more recen- tly been separated out as a distinct species under the name uhlert Ball. 282. Acocephalus circumflexus n. sp. is the male of albifrons LAnn. 283. Thamnotettix citronellus Prov. Under this name is a very pale specimen of eburata Van D., but it does not answer to the description in the NAT. CAN., p. 378, and cannot be that insect. 284. Thamnotettix clitellarius Say, correct. 142 LE NATURALISTE CANADIEN 284. Thamnotettix subcupræus Prov., correct. 284. Thamnotettix melanogaster Prov., correct. 285. Thamnotettix decipiens, n. sp. The only specimen on this label is much paler than this species is generally found in the east. 285. Thamnotettix seminudus Say, correct. Æuteltix seminuda Say. 286. Jassus unicolor Kh., correct. CAlorotettix unico- lor Fh. | 286. Allygus irroratus Say, correct. Plepsius irrora. lus Say. 287. Cicadula 6-notata Fall., correct. 288. Bythoscobus chtellarius Fitch is Zdrocerus provan- chert Van D. 289. Bythoscopus fenestratus Fh. is a pale form of Oz- copsis nigrinast Fh. 289. Bythoscopus variegatus Fh. correct. Oncopsis va- riegatus Fh. 290. Bylhoscopus prunt n. Sp. correct. Oncopsis pru- nt Prov. 291. /diocerus pallidus Fitch, correct. 202. {diocerus verticis Say. I was not able to locate this nearer than to place it in the a//ernmatus group. It is not the western versicrs, 292. Zdiocerus duzeei n. sp., correct. 202. diocerus subbifasciatus Say is lachrymalis Fitch. 293. Zdiocerus alternatus Fitch, correct. 293. Zdiocerus novellus Say, correct. Agallia novella Say. 204. Pediopsis viridis Fitch, correct. 205. Pediopsis basahs Van D., correct. 295. Pediopsis insignis Van D., correct Now known as érimaculata Fitch. This genus must be known as //a- Cropsts. THE PROVANCHER COLLECTION OF HEMIPTERA 143 295. Pedtopsis flavescens Prov. A small female of Ow- copsis nigrinast Fh. 296. Agallia sanguinolenta Prov., correct. 206. Agallia 4-punctata Prov., correct. 298. Erythroneura mali, n. sp., is Dicraneura communis and must be known as Dricraneura malr Prov. 208. Erythroneura vitis Harris, correct. 209. ÆErythroneura vitifex Fitch, correct. 290. Ærythroneura vulnerata Fitch, correct. 209. Ærythroneura rosæ Linn., correct. ‘These are now placed in 7yf4/ocyba. 300. 7 yfhlocyba jocosa Prov. À reddish form of Ba/clu- tha punctata Thunb. 301. 7 yphlocyba punctata Thunb. is the common green form of that species. 335. Cyrus augustatus Stal., correct. 336. Aradus abbas Bergr., correct. 336. Coriscus flavo-marginatus Scholz., correct. 337. Delphax bifasciatus, n. sp., is S/obaera tricarinata . Say, a little faded. 338. Ceresa subulata Say is constans Walk. 338. Æelochara bifada Say, correct. Æolla bifida Say. 339. Dellocephalus chlamydatus, n. sp.,isan A{hkysanus later described as zfuscata by Giiiette and Baker. 339. Dellocephalus superbus, n. sp., is a Xestocephalus later described by me as /#/vocaprtatus. 340. Erythroneura obliqua Say, correct. 7y2kloyba obliqua Say. 340. Zyphlocyba unica, n.sp., is an ÆEmpoasca later des- cribed as sp/endida by Gillette. (The Canadian Entomologist.) ——. 00. — 144 LE NATURALISTE CANADIEN UN PARASITE DE LA MOUCHE DOMESTIQUE On ne sait que trop combien il seaait intéressant de se débarrasser de la mouche domestique, qui, comme bien d’autres espèces portant le même titre, est une des plaies de l'humanité, et cela à différents titres. Or, cette mouche des maisons (Musca domestica) a un ennemi qui en mo- dère l’excessive multiplication; c’est un champignon, l'Empusa muscæ, connu depuis longtemps, que l’on retrou- ve continuellement dans le corps des mouches mortes. Malheureusement, il ne suffit pas à la besogne et il fau- drait arriver à le multiplier par une culture rationnelle. Le problème à résoudre est d'autant plus intéressant que ce parasite ne s'attaque pas à la seule mouche domes- tique, mais aussi à celles de plus petite espèce, nos com- mensales aussi (Fannia canicularis), et à celles des éta- bles quitourmentent si cruellement les animaux (.S/o/oxys calcitrans). M. Edgar Hesse est parvenu à cultiver le parasite, leur ennemi, et avec les produits de cette culture il a pu détrui- re les mouches en grand nombre. Si les promesses de M. Hesse se vérifient, on pourra le ranger parmi les bienfai- teurs de l'humanité. La destruction complète des mouches serait, au double point de vue de l’hygiène et de la tran- quillité, une véritable victoire contre les ennemis de l’hu- manité et de ses meilleurs auxiliaires. (Cosmos.) ——— 00: LES COQUILLES D'HUITRES DANS LES CONSTRUCTIONS On vient d'élever à Galveston une maison de cinq étages, en béton, dans laquelle les coquilles d’huîtres ont remplacé le gravier; on estime le résultat excellent, tant au point de vue économique qu’à celui de la solidité. On dit qu'un mur construit ainsi en 1882 a supérieurement résisté depuis à l'épreuve des inondations et même à l’incendie. (Cosmos.) ÉE NATURALISTE CANADIEN Québec, Avril 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 10 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard UNE ADDITION A LA FAUNE ORNITHOLOGIQUE DE LA PROVINCE DE QUEBEC — M. Dionne, le conservateur du musée de l’Université Laval, nous annonce la capture, dans la province de Qué bec, du Syxéhliboranshhus antiquus (Mergule à gorge noire, Ancient Murrelet). Ce petit palmipède, nous dit-il, habite les côtes de l’océan Pacifique, depuis le Japon et le sud de l’Alaska (Sitka) et jusque vers les régions arctiques. L'oiseau a été capturé, le 13 avril, par M. A. Chase-Cas- grain, avocat de Montréal, qui en a fait don au musée de l'Université Laval, Qnébec. Au témoignage de M. Dionne, cet oiseau n’a jamais en- core été signalé comme s'étant rencontré dans la Pro- vince. La mention que nous en faisons ici est donc une primeur scientifique de haute valeur, et nous en offrons nos remerciements à notre savant ami. —\ 00; — 10—Avril 1913. 146 LE NATURALISTE CANADIEN COURS ABRÉGÉ D'HISTOIRE NATURELLE Par la publication, faite le mois dernier, d’un Abrégé de Géologie, nous avons complété le Cours abrégé d’histoire naturelle que nous avons préparé pour les étudiants de nos collèges et petits séminaires. Nous nous sommes efforcé d'éviter, dans ces manuels, destinés aux jeunes gens, un appareil trop technique et propre à les détourner d’études qui sont, par elles-mêmes, si attrayantes. Si nous en croyons les témoignages qui nous en ont été donnés, ces petits livres seront en effet propres à intéresser les étudiants, en leur donnant les no- tions essentielles sur les sciences de la nature. Le dernier publié, l’Abrégé de Géologie, nous a valu particulièrement des appréciations de ce genre, venant de publications sérieuses et de plusieurs professeurs d'histoire naturelle. Il nous a valu aussi, de la part de collaborateurs du Pays, de Montréal, des critiques assez vives du chapitre que nous avons cru devoir consacrer au Transformisme dans ce manuel. Nous nous proposons, assurément, d’exa- miner ici, en présence de nos lecteurs, les assertions et les jugements de ces ‘ennemis, ” et d’en démontrer, espérons- nous, l’inauité. Cela, par exemple, n’est d'aucune urgence, et nous nous en occuperons quand nous aurons du loisir et de l’espace à notre disposition, c’est-à-dire dans un numéro plus ou moins prochain. :00 : LABORATOIRE D'ENTOMOLOGIE Depuis que nous avons été appelé aux fonctions d’ento- mologiste du ministère de l’Agricultute, à Québec, nous LE CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL 147 nous sommes occupé d'organiser un laboratoire d’entomo- logie. Les riches collections d'insectes et la bibliothèque scientifique qui se trouvent au musée de l’Instruction publi- que, et dont le soin nous était déjà confié, ont singulière- ment facilité notre tâche. An cours d’un récent séjour à New-Vork, et avec la bien- veillante autorisation de l’honorable M. Caron, ministre de l'Agriculture, nous avons fait l’acquisition d’une collec- tion complète—autant du moins que cela se peut—des insectes nuisibles des Etats-Unis et du Canada. Cette acquisition est d’une haute importance, et le public pren- dra grand intérêt à voir cette collection, quand nous pour- rons la disposer et l’exposer dans le musée provincial. Nous reparlerons plus tard de cette collection. 00 LE CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL XII* SESSION, CANADA, I9OI3 Nous avors reproduit dernièrement la Circulaire annon- çant, pour cette année et en Canada, la prochaine tenue du Congrès international de Géologie. Une deuxième Circulaire, datée du rer février, a fixé la session du Congrès du 7 au 14 août, à Toronto. Il nous est agréable de trouver le nom de M. Th.-C. Denis, surintendant des Mines de la Province, dans la liste des membres du comité Exécutif ; et dans celle des membres du comité d’Organisation, celui de M. l’abbé C.-R. Gui- mont, professeur de Géologie à l'Université Laval, Québec. Avant, pendant et après le Congrès, il y aura une série d’excursions géologiques dans les diverses régions du Ca- nada. L'une de ces excursions, qui durera du 13 juillet au 148 LE NATURALISTE CANADIEN 1er août, sera consacrée à la partie orientale de la province de Québec et aux provinces maritimes. Pour ce qui est de notre Province, on examinera le Groupe Québec, près de Québec et à la Rivière-du-Loup, l'Ordovicien de la chute Montmorency ; le Dévonien et la structure appalachienne de la région de Gaspé; les conglomérats du Bic et leurs galets de Cambrien. Les membres de cette excursion passeront la journée du 14 juillet à Québec et dans les environs. Eu vue de pour- voir aux détails de leur réception à Québec, M. l’abbé Gui- mont a provoqué la formation d’un comité Exécutif local, composé des membres suivants: Sir Geo. Garneau, ancien maire de Québec, président ; M. Th.-C. Denis, surintendant des Mines de la province de Québec, secrétaire ; M. Baillairgé, ingénieur de la ville de Québec; M. l'abbé V.-A. Huard, directeur du Vaturahste cana- dien ; M. l’abbé C.-R. Guimond, professeur de Géologie à l'Université Laval, Québec, secrétaire adiotnt ; M. Parmelee, du département de l’Instruction publique, Québec; M. l’abbé Ph. Fillion, professeur de chimie à l'Université Laval, Québec; M. Hamilton, gérant de la Banque Montréal, Québec; M. J.-G. Scott, agent commercial, à Québec. Ce Comité s’est réuni pour la première fois le 18 avril au séminaire de Québec, et a déterminé les grandes lignes de son travail d'organisation. Bien que les circonstances ne nous permettent pas de prendre part, personnellement, aux études et aux excur- sions du Congrès—sinon lors du séjour des Congressistes à Québec, le 14 juillet, nous ne manquerons pas de revenir UN ANCIEN ENNEMI DE LA POMME DE TERRE 149 dans nos livraisons suivantes, sur ce grand événement de la tenue en Canada du Congrès géologique international. Rappelons que, pour tout ce qui concerne la tenue de ces assises scientifiques, on peut s'adresser au Secrétaire du Congrès géologique international, Victoria Memorial Museum, Ottawa. :00 : UN ANCIEN ENNEMI DE LA POMME DE TERRE SOMMAIRE. — Les Méloides. — Classihcation. — Genre de Méloides nuisibles à la pomme de terre.—LEpricaute gris-cendrée.—L Epicaute noire.—La Macrobase unt- colore. — Particularités relatives aux Méloïides. — Moyens de combattre les Méloïdes.—Raïsons qui m'ont engagé à préparer ce travail. LES MÉLOIDES.—Ceux d’entre mes lecteurs qui sont jeunes vont probablement penser, en lisant le titre de ce travail, que je vais parler de la Chrysomèle de la pomme de terre qu’ils doivent considérer comme un ancien ennemi de ce tebercule, attendu qu’il est dans notre Province depuis l’année 1876, après avoir commencé à envahir Ontario en 1870. Ce n’est pas cependant celui-là dont je vais parler; car l'ennemi contre lequel je veux mener la guerre aujourd’hui est plus ancien que cela et s’est attaqué à la pomme de terre bien avant la Chrysomèle. Je viens présentement dénoncer les ravages que causent de temps à autre les Méloïdes, famille d'insectes coléoptères dont il existe plusieurs espèces, comme on le verra plus loin, mais dont trois surtout manifestent leur présence nuisible dans notre Province. 150 LE NATURALISTE CANADIEN CLASSIFICATION.—TJe vais d’abord commencer par bien décrire les insectes dont je veux entretenir pendant quel- ques instants mes lecteurs, en indiquant ce qu’ils sont au point de vue de la science entomologique. Les diverses espèces de ces insectes appartiennent à la famille des Méloïides, à l’ordre des coléoptères hétéromères, à la classe des insectes et à l’embranchement des arthropodes. De cette famille, les genres Méloé, Macrobase, Epicaute et Pomphopoie comptent, dans l'Amérique du Nord, d’après Gibson, 16 espèces. GENRES DE MÉLOIDES NUISIBLES À LA POMME DE TERRE.—De ces 16 espèces d'insectes de la famille des Méloïdes, il n’y en a que trois qui sont connues comme causant des dommages à la pomme de terre, dans la pro- vince de Québec. Avant de les décrire particulièrement, je vais d’abord donner les caractères communs à tous les insectes de la famille des Méloïdes : MÉLOIDES.—'TÀTE fortement penchée, brusquement rétrécie en un cou se dégageant du prothorax; ANTENNES de 11 articles, insérées sur les côtés du front au devant des yeux; PROTHORAX plus étroit que les élytres, sans sutures latérales, ses cavités cotyloïdes grandes, confluentes, ouvertes; ELYTRES, en général flexibles, sans épipleures bien distinctes; ABDOMEN, à six segments libres; PATTES longues, les 4 hanches antérieures grandes, coniques, contiguës, les postérieures transversales, proéminentes, pres- que contiguës; TARSES antérieurs de 5 articles, les posté- rieurs de 4, les crochets fendus ou dentés à la base. (Prov.) Insectes de taille moyenne ou davantage qu’on trouve sur les plantes, et remarquables d'ordinaire par la consis- tance molle de leurs téguments. La plupart possèdent aussi une propriété épispastique ou vésicante que la méde- cine met à profit depuis longtemps. Les cantharides des UN ANCIEN ENNEMI DE LA POMME DE TERRE I5I pharmacies sont tirées des pays tropicaux, et particu- lièrement de l'Espagne. Nos Lyttes possèdent aussi la même propriété, quoique à un degré moins intense. De là vient à ces insectes leur nom anglais de BLISTER-BEETLE (coléoptère vésicant). Procédons maintenant à la description des trois espèces qui nous intéressent. Ce sont les suivantes: NOMS SCIENTIFIQUES. NOMS FRANÇAIS. NOMS ANGLAIS. Epicauta cinerea. Epicaute gris- Ash-gray coloured cendrée. Blister-Beetle. Epicauta Pennsylvanica. Epicaute noire. Black Blister- Beetle. Macrobasis unicolor. Macrobase Gray Blister- unicolore. Beetle. L’'EPICAUTE GRIS-CENDRÉE est de couleur noire et uniformément revêtue d'une pubescence grise, avec le corps de trois à cinq huitièmes de pouce de long. Elle apparaît dans les chaudes journées de juillet. L'EPICAUTE NOIRE est, comme son nom populaire l’indique, d'une couleur noire terne, avec un corps variant d’un tiers de pouce à un demi-pouce. Elle nous visite généralement en août. La MACROBASE UNICOLORE est de couleur gris-cendrée uniforme, et est un peu plus grande que l'espèce précé- dente; son corps ayant une longueur variant de un demi- pouce à cinq huitièmes de pouce. Elle nous arrive dans les jours chauds de juillet. PARTICULARITÉS RELATIVES AUX MÉLOIDES.—Les insec- tes dont nous sommes à nous occuper déposent leurs œufs, en été, superficiellement dans le sol, où ils éclosent et où leurs larves subissent des métamorphoses très intéressantes. 152 LE NATURALISTE CANADIEN Elles passent d’abord par la phase du triongulin, puis par la forme carabidoïde, suivie de la forme scarabéoïde, pour se changer ensuite en nymphe et finalement en insecte parfait. A leur état de larves, elles pénètrent dans les oothèques des orthoptères et en dévorent les œuîs, détrui- sant ainsi ceux du criquet ou sauterelle à cuisses rouges (Caloptenus femur-rubrum) qui dévaste quelquefois nos moissons. Malheureusement, après avoir accompli cette bonne œuvre, elles en entreprennent une mauvaise en venant, ensuite, à l’état d'insectes parfaits s'attaquer à nos pommes de terre, à nos tomates, etc., qu’ils dépouillent en deux ou trois jours de leurs feuilles, avant même que ceux qui ne les connaissent pas se doutent de leur présence. Ils arri- vent par essaims nombreux et séjournent peu de temps, étant fort vifs à la besogne. MOYEN DE COMBATTRE LES MÉLOIDES.—D’après ce qui a été dit plus haut, au sujet des larves des Méloïdes, on a pu conclure qu’il n’y a pas lieu de les craindre tant qu’elles ne sont pas parvenues à l’état d’insecte parfait. (Cela limite, fort heureusement, le temps pendant lequel il faut s'occuper de les détruire. Là où l’on a l'habitude de pratiquer la pulvérisation au moyen de la bouillie bordelaise empoisonnée, pour combat- tre le Doryphore et les diverses maladies ou pourritures de la pomme de terre, l’on n’a pas à chercher d’autre remède contre les attaques des Méloïdes que celui-là, dont je rap- pelle ici la formule pour mémoire : Sulfate de cuivre (coupeiose bleue) 4 Ibs. Chaux fraîche A: 1x0 Vert de Paris 4 OZ. Eau (x baril) 40 gallons. Comme l'attaque des Méloïdes est très subite et que ces UN ANCIEN ENNEMI DE LA POMME DE TERRE 153 insectes sont fort voraces, il faut être prompt à faire l’appli- cation de ce remède dès leur arrivée. Les Méloïdes étant facilement épeurées, on emploies ou- vent avec succès un moyen qui cousiste à se servir de deux ou trois garçons, ou plus, si c’est nécessaire, qu’on fait marcher à travers le champ infesté pendant qu’ils agitent de-ci de-là des branches d’épinette ou d’autres arbres. Un pareil procédé leur permet de chasser en avant d’eux les insectes vers l’extrémité du champ où ils se dispersent et d’où il est rare qu’ils reviennent, surtout si l’on a eu soin de placer au bout du champ ainsi traité une ligne ou rangée de paille qui reçoit les insectes dont on détruit des milliers en y mettant le feu. Dans les jardins, on peut se défaire de ces insectes en les brossant de sur les plantes dans des casseroles contenant de l’eau à la surface de laquelle on a mis un peu d’huile de charbon. RAISONS QUI M'ONT ENGAGÉ A PRÉPARER CE TRAVAIL. —En terminant ce travail, je désire qu’on me permette de dire que deux raisons m'ont engagé à l'écrire. La pre- mière, c’est que j'ai senti le besoin de compiler de plusieurs études, rapports et bulletins publiés au Canada et aux Etats-Unis sur ce sujet, un sommaire des renseignements qu’il fallait chercher en fouillant à plusieurs sources, tou- chant la famille des Méloïdes, lorsqu'on désirait apprendre quelque chose les concernant. La seconde raison est que presque toute la littérature que nous avons sur ce sujet est écrite seulement en anglais, chose qui empêche nos culti- vateurs français, qui, plusieurs d’entre eux, n’ont pas plus de connaissance de l’anglais que n’en ont du français nos amis les cultivateurs anglais, de lire ce qu’ils devraient ap- prendre touchant ces ennemis de leurs pommes de terre. En publiant ce travail dans le VMaruraliste canadien, je leur donne une chance d’être renseignés sur ce sujet. J.-C. CHAPAIS. I54 LE NATURALISTE CANADIEN CHEZ LES PUCERONS (Continué de la page 137.) III. VENGÉS DE LEURS ASSASSINS Je me suis quelquefois demandé pourquoi Celui qui créa les destructeurs du puceron et les munit largement des ar- mes et des instincts nécessaires pour cette extermination, avait aussi dressé d’autres assassins à faire périr à leur tour une partie de ces destructeurs. Quelle qu’en soit la raison, que je ne connais pas, le fait est certain: Syrphes, Cocci- nelles, etc., sont souvent eux-mêmes la proie d’autres chas- seurs, insectes comme eux et presque toujours plus petits qu'eux. Souvent, par exemple, une nymphe, d’où norma- lement devait sortir un Syrphe adulte en faisant dans la peau de cette nymphe une ouverture parfaitement arrondie, laisse échapper de cette peau, trouée irrégulièrement par une effraction brutale, une douzaine de Chalcidites qui ont vécu de sa substance. Le même sort atteint nombre de nymphes Coccinelles dont les entrailles ont nourri des Chalcidites, des Braconides, et même parfois un diptère, un moucheron. Un jour, pendant que j’examinais un ce- risier quelque temps auparavant tout couvert de pucerons, et que je constatais leur disparition presque complète, j’a- perçus une petite mouche fauve qui luttait avec acharne- ment contre une Coccinelle déjà en nymphose. (Celle-ci multipliait les secousses saccadées de son buste, seul mou- vement dont elle dispose en cet état, l’autre la mordillait de toutes ses forces, sans lâcher prise. Je m’approchaï alors pour étudier de plus près la tactique de chaque com- battant et. la mouche effrayée s'enfuit. J'en découvris alors plusieurs autres qui avait fini par maîtriser leur vic- time et probablement pondaient. Je cueillis donc une. CHEZ LES PUCERONS FES douzaine de ces nymphes (elles étaient là en très grand nombre) et les mis en observation. La plupart donnèrent les Coccinelles adultes qui en sortent normalement, mais de plusieurs s’échappèrent des mouches fauves identiques à la mouche assassine que j'avais observée; trois ou quatre chacune de ces nymphes. Cette mouche est une ?Hora, et probablement la ?#%ora ava (Macq.) Il semble bien que, pendant la lutte, la Phora dégorge sur la nymphe un poi- son qui lui enlève peu à peu toute sensibilité, et c’est seu- lement alors qu’elle pond ses œufs sur ou dans sa victime immobilisée. À Les Flexiliventres eux-mêmes, si protégés qu'ils soient par la peau du puceron devenue leur demeure, ne sont point à l’abri de toute attaque. Quand on met en obser- vation un grand nombre de pucerons piqués et fixés, cueil- lis à la même date et de même espèce, on remarque ordi- nairement, quelle que soit cette espèce, deux époques dis- tinctes pour la sortie des parasites. La Première sortie ne donne que des Flexiliventres; la seconde, quelques jours après, divers hyménoptères non Flexiliventres. L’hypo- thèse la plus vraisemblable pour expliquer ce retard cons- tant, c’est que les derniers venus sont assassins de Klexili- ventres établis avant eux dans les pucerons : ce n’est qu’a- près la croissance à peu près complète des premiers occu- pants que les seconds peuvent tirer de ceux-ci des vivres suffisants pour atteindre eux-mêmes leur taille définitive. Cette explication est même certaine pour quelques-uns des parasites de la seconde sortie, par exemple, pour les Zygo- cerus (Fürst.) qui s’y rencontrent souvent en plus grand nombre que les autres. En effet (que le lecteur excuse ici certains détails nécessaires), le résidu de la digestion chez les Flexiliventres est formé de six à huit boulettes ovales, noires, de grosseur égale, qu’on retrouve toujours dans un coin du puceron dé. Au contraire, chez les Zygocerus, 156 LE NATURALISTE CANADIEN ce résidu consiste en une boulette unique, beaucoup plus grosse, expulsée tont entière par un seul effort (1). Or, les dépouilles des pucerons de la seconde sortie contiennent à la fois et les six-huit boulettes plus petites, et la boulette unique plus grosse. Elles ont donc renfermé et le Flexi- liventre et le Zygocerus; et c’est ce dernier, seul survi- vant, qui a dévoré l’autre, disparu. Autre preuve du mé- me fait, d'application plus facile et plus étendue. Parmi les Flexiliventres, les espèces du genre Praon (Haliday), assez nombreuses, ont l'habitude exceptionnelle de ne point faire leur nymphose dans le puceron dévoré, mais dans uñïé chambrette qu’elles construisent au-dessous de sa dé- pouille et à laquelle elles donnent la forme d’une lentille, lentille bien arrondie, bien polie, de faible épaisseur. Le puceron vide, collé au-dessus de cette substruction, ressem- ble à un canard minuscule nageant sur une goutte d’eau. Si l’on recueille un assez grand nombre de ces édicules (2), et qu’on les mette en observation, on récoltera encore deux sortes de parasites: des Praons nombreux et quelques Ly- gocerus, Encyrtus, Allotria, etc. déjà rencontrés en secou- de sortie avec les autres genres de Flexiliventres. Impos- sible de ne pas reconnaître les assassins des Praons dans les Zygocerus, ete. sortis de ces demeures si spéciales, que les Praons seuls savent construire. 1. Pour s’en assurer : des pucerons, encore habités après la première sortie, extraire, à l’approche de la seconde, les parasites qu’ils contien- nent, sans toutefois les endommager au cours de cette opération délicate. Quand le parasite est un Zygocerus et n’a pas commencé sa nymphose, on aperçoit la boulette unique à travers les parois demi-transparentes de l’abdomen. Plus tard, la même boulette se retrouve auprès de la nym- phe. Un hasard heureux (!) peut vous faire assister à l'expulsion. 2. Le Praon a besoin de toute sa soie pour /sser les parois de sa maï- son, aussi n’en trouve-t-on pas dans l’intérieur du puceron collé au-des- sus. Les boulettes résiduelles se trouvent aussi dans la substruction, elles ne seraient donc expulsées qu'après la croissance complète de l’ani- mal et pendant qu’il construit la retraite où il va faire sa nymiphose. CHEZ LES PUCERONS 154 IV. INDESTRUCTIBLES Le secours que ces vengeurs apportent au peuple des Aphidiens en restreignant la multiplication de ses exter- minateurs n’est pas négligeable. Néanmoins, ceux-ci res- tent toujours assez nombreux pour qu’on s'étonne parfois de voir les pucerons reparaître en grand nombre là même où on les croyait tous détruits ; là où d’abord on les avait vus réunis par millions, et où, ensuite, cherchant avec soin, on n’en retrouvait plus que les dépouilles. Mais comme l’auteur de la nature a pourvu à ce que leur race n’enva- hisse pas la terre, il veille aussi à ce qu’elle n’en disparais- se pas complètement, il veut même qu’elle y demeure tou- jours florissante. Et d’abord divers causes : une cachette plus favorable, la croissance du ravageur terminée avant l’extermination complète du troupeau, un trop grand empressement vers une proie volumineuse et appétissante faisant négliger quelque jeune qui ne promet rien de substantiel, etc., etc., peuvent et doivent naturellement sauver quelques vies. Qu'il y en ait, par exemple, une ou deux d’épargnées sur un arbre où les pucerons étaient multitude innombrable ; pendant que les assassins, dont la croissance n’est pas en- core achevée, vont chercher pâture ailleurs, et que les au- tres commencent là même une nymphose qui durera pour eux jusqu’au printemps prochain, les réchappés, désormais hors de danger, grandissent et établissent des familles, puis celles-ci une peuplade, enfin la ponte hivernale se fait : il y aura donc de nouveau, l’an prochain, des pucerons sur le même arbre. Et en grand nombre; car, par une mesure providentielle en leur faveur, leurs œufs n’ayant besoin que d’une très faible chaleur pour arriver à l’éclosion, les pucerons apparaissent assez longtemps avant leurs enne- mis: ceux-ci retenus par l’engourdissement hivernal ou 158 LE NATURALISTE CANADIEN une nymphose inachevée. Ils peuvent ainsi se multiplier à l’excès avant que les tueries recommencent. Il y a d’ailleurs des espèces dont toute la population jeu- ne échappe au carnage. Pour obtenir ce résultat, l’auteur commun des dévoreurs et des dévorés a pris des disposi- tions efficaces. (Citons-en un exemple curieux, et facile à constater, puisque le bénéficiaire est un vulgaire Cladobius très commun sur nos Sycomores et autres Érables. A la troisième ou quatrième génération de l’année, au lieu de donner aux petits les formes et l’apparence ordinaires dans leur espèce, le Créateur les a doués de formes, d'apparence et d’instincts presque inconnus dans la famille des Aphi- diens, mais plus propres à les soustraire aux recherches des ennemis, que ceux-ci emploient leurs yeux ou leurs palpes pour les découvrir. A peine mis au jour, le jeune quitte sa mère, et va chercher sur la feuille natale un enfonce- ment propre à recevoir son corps, à dessein très aplati. Il s'y accommode. La surface de son dos se trouve alors de niveau avec celle de la feuille autour de lui. Sa couleur est aussi celle de la feuille. Pour remplir plus exactement la petite cavité qu’il a choisie, 1l peut placer, et il place ses pattes et ses antennes autour du corps et non dessous. Détail plus extraordinaire, unique peut-être dans la tribu des Aphidiens, ses poils, au lieu d’avoir la forme ordinaire, sont élargis en écailles et n'existent que sur les bords de l'abdomen, à la face extérieure des pattes et des antennes et au-devant de la tête, formant ainsi tout autour de l’ani- mal une couronne dont le plan se confond avec celui de la feuille et le sien. Ainsi, les moindres interstices se trou- vent remplis, la surface de la feuille et celles des diverses parties de l'animal forment un tout continu. Celui-ci, ainsi blotti dans son enfoncement, échappe facilement à toutes les recherches. Ce n’est pas tout; le danger renaî- trait, si l’insecte, n'ayant comme ses parents que quelques PR 7 LES SOURCIERS 159 semaines de vie, venait à grossir presque aussitôt ; mais lui peut vivre sans se développer jusqu’à ce que, trois ou quatre mois s'étant écoulés, la saison des massacres soit terminée. Quand ses ennemis ont pris leurs quartiers d'hiver ou com- mencé une nymphose dont le sommeil durera jusqu’au prin- temps suivant, alors seulement, il croît, et aux premiers grands froids, il a déjà une postérité nombreuse. Avouons que si le puceron a inventé tout seul et tout seul réalisé ces stratagèmes, il a du génie. Ainsi, il existe un admirable équilibre entre les condi- tions qui tendent à l’accroissement indéfini du peuple aphi- dien et celles qui aboutiraient à sa destruction complète. Les premières n’amèneront jamais la catastrophe qu’on de- vrait en redouter, si elles étaient seules; les secondes ne produiront pas de si tôt la famine et la ruine chez les nom- breuses espèces d’insectes à qui Dieu a donné le puceron pour nourriture. Le puceron si faible, si désarmé, si pour- chassé, vivra probablement plus longtemps sur notre pla- nète, que ne l’ont su faire les redoutables colosses d’antan, Mégalosauriens, Mammouths, etce., dont 1l ne reste plus que quelques squelettes, et une mention dans les ouvrages des géologues. L. DESHAYES. (A suivre.) 00 LES « SOURCIERS » ! Un homme admirable, écrit M. Louis Forest dans le Matin, a, au milieu du dix-huitième siècle, écrit sur le pro- 1. La Baguette divinatoire a ce printemps un regain d'actualité. Aussi, nous voulons enregistrer ici beaucoup de ce qui se publie sur le sujet. Ce que nous donnons aujourd’hui n’est donc, qu'une entrée en A: PS (W. C.) 160 LE NATURALISTE CANADIEN blème une étude parfaite. Par malheur, il n’était pas un savant patenté. Il est oublié. Il devrait être une de nos gloires. Cet homme fut l’abbé Paramelle. Peu enclin aux moyens empiriques, il accumula des mil- liers et des milliers d'observations sérieuses. . Avec cette patience qui fit se pencher notre génial Fabre sur la vie des insectes, l’abbé Paramelle étudia la vie des sources. Bientôt le géologue passionné put lire sur le terrain, écrit en lettres de pierre et de terre, le secret des eaux sou- terraines, et il a laissé un livre, /’Ar£ de découvrir les sources, qui est un petit chef-d'œuvre. Eh bien, labbé Paramelle qui, par des procédés pure- ment scientiñiques, découvrit, lui, authentiquement, plus de 10,000 sources, ne croyait pas aux sourciers magiques. Son incrédulyté était fondée sur des centaines d’expériences loyales, faites en compagnie de ceux qu’il nommait, non sans ironie, des joueurs de baguette. (l/rzvers.) pm OU PUBLICATIONS REÇUES — Fermes expérimentales (année 1912). Ottawa. 1912. Parmi les Rapports composant ce volume, ceux de l’exfomologiste et du botaniste attirent surtout notre attention. De Dr Hewitt, entomologiste du Dominion, traile au long des divers insectes nuibles du Canada. M. Gussow, le botaniste du Dominion, s'occupe des principales mala- dies qui attaquent les plantes utiles, Inutile de dire que ces deux rapports sont d’une haute valeur scienti- fique. — Boletin del Instituto Geologico de Mexico. Num. 29. Faunes juras- iques et crétaciques de $S. Pedro del Gallo, par le Dr C. Burckhardt. Atlas, planches 1-46. Mexico, 1912. Beau volume composé de 46 planches in-40. — (Departément of Mines. Bull. No. 8.) Znvestigation of the Peat Bogs and Peat industry of Canada, 1910-11, by A. Anrep, Ottawa, 1912. Un certain nombre de gravures de ce rapport représentent des plantes qui contribuent à la formation de la Tourbe. h LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Mai 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 11 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard L'APPETIT DES OISEAUX — Contrairement au dicton courant « Manger comme un oiseau », il paraît que, de tous les animaux, les oiseaux sont parmi les plus gros mangeurs de la création, ainsi qu’en témoignent certains chiffres relevés par des observa- teurs et dont voici quelques-uns : Le mignon roitelet consomme deux fois et demie son propre poids en vingt-quatre heures. La mésange bleue donne 475 fois par jour la Bed à ses petits. L’émouchet absorbe 1,000 souris par mois, sans compter vers, hannetons, etc. Le hibou se régale de 7 souris l’une après l’autre, et peut recommencer pareil repas moins de trois heures après. Les pigeons des bois sont parmi les plus gloutons, et chacun d'eux ingurgite facilement 1,000 grains de blé en un jour. | | A quoi tient pareil besoin incessant de consommation, 11—Mai 1913. 162 LE NATURALISTE CANADIEN extraordinaire, comparativement à la grosseur de ceux qui en sont affligés ? Plusieurs raisons semblent naturellement concourir à l'entretien d’une telle nécessité gastronomique chez la gent ailée. En premier lieu, on peut considérer que ies oiseaux, de par leur habitat même, sont soumis à un travail musculaire relativement important. Le vol, en effet, mal- gré l'apparence d’extraordinaire légèreté gracieuse qu’il donne à la plupart des oiseaux, ne nécessite pas moins d'eux un effort qu’on peut taxer de considérable, aussi bien dans le vol plané que dans le vol ramé. Avec ce der- nier, l'effort saute aux yeux des moins prévenus, qui con- çoivent immédiatement quelle force doit dépenser l’oiseau pour produire le coup d’aile en rame, à l’image du mouve- ment imprimé aux avirons d’un canot. Mais lorsqu’admirant dans le ciel le déplacement rapide de l’oiseau planeur reposant sur ses ailes déployées, immo- biles par rapport au corps, devant ce spectacle stupéfant on est frappé d’admiration: il faut à l’esprit lui-même un effort de réflexion pour comprendre que l'oiseau ne se maintient, et ne peut se maintenir longtemps dans cette position nou habituelle, sans un effort musculaire important, d'autant plus fatigant qu’il est moins varié, et dont l’expé- rience, qui consiste à rester quelques minutes les bras immobiles étendus en croix, nous permet d’apprécier sur nous-même toute l’intensité. L'opinion admise actuellement par certains que l'oiseau dans le vol plané utilise pour progresser la force des cou- rants aériens n’infirme d’ailleurs nullement la nécessité de l'effort continu, pour le maintien immobile des ailes éten- dues. Ainsi, par lui-même, le vol incessant de l’oiseau pour la recherche de la nourriture ou celle de sa progéniture est un véritable travail qui implique une usure constante des L'APPÉTIT DES OISEAUX 163 tissus : donc, déjà, la nécessité d’une nourriture abondante en vue de leur réparation. Mais un autre facteur vient l’augmenter beaucoup; c’est la ventilation violente à laquelle est soumis le corps entier de l’oiseau par son déplacement rapide dans l’air. L'effet immédiat de cette ventilation énergique est d’en- lever une grande quantité de chaleur au corps de l'oiseau et ce, malgré la couche protectrice de duvet qui le recouvre. Cette chaleur, perdue pour l'animal, l’est en quantité d'autant plus forte que la température normale de l'oiseau est très élevée (comparativement à celle des autres êtres vivants) et qu’il se meut dans des couches d’air plus froides en raison de leur altitude. Chacun peut d’ailleurs vérifier facilement l’action inten- sive de la ventilation sur le besoin de nutrition : il suffit par une journée de grand vent de faire dans la campagne une simple promenade d’une heure environ, donc non fati- gante par elle-même. Au retour, immanquablement, on constatera en se mettant à table qu’on est doué d’un ap- petit supérieur à l’ordinaire. (C’est la nécessité impérieuse de récupération des calories jetées aux quatre vents du ciel qui se fait ainsi vivement sentir par l'intermédiaire de l’estomac. Mais s’il vous est possible en entrant de vous installer devant un substantiel repas auquel vous ferez le plus grand honneur, et qui comblera en wxe fois votre fringale passagère, l'oiseau n’a pas la même ressource, la na- ture ne l’ayant point pourvu d’une prévoyante et active cuisinière, et 1l doit « servir le banquet » avant de s’y as- seoir. Et comme sa table n’est ouverte qu’au gré très va- riable du hasard de la chasse, ce n’est le plus souvent que par petits acomptes plus ou moins espacés qu’il prend sa nourriture, d’où peut-être l'expression «manger comme un oiseau », c’est-à-dire peu à la fois. 164 LE NATURALISTE CANADIEN C'est à ce régime, anquel il est soumis malgré lui, des «petits morceaux » digérés presque aussitôt qu’avalés, joint au travail musculaire qu’il fournit sans cesse et à la néces- sité de maintenir son corps à une température élevée, malgré une forte déperdition incessante, que l’oiseau doit d’être en réalité un habituel affamé, donc un mangeur sans égal. L. AUBOUER. : OO: CHEZ LES PUCERONS (Continué de la page 150.) V.—SACRIFIÉS, MAIS CONTENTS Il viendra peut-être ici à la pensée du lecteur que, si la Providence a favorisé le peuple des Aphidiens en prenant tous ces moyens de le rendre indestructible, elle n’en a pas moins départi aux individus qui composent ce peuple un sort absolument déplorable: vie toujours très courte, sou- vent abrégée et abrégée par une fin tragique ; évidemment, le puceron est une créature sacrifiée. (C’est vrai; 1l est sacrifié comme l'herbe des prairies et le feuillage de tous nos arbres sont sacrifiés pour être la nourriture de la plupart des animaux; comme ceux-ci le sont presque tous pour entretenir la vie chez les autres. Cependant, on peut soutenir qu'entre toutes les bêtes, le puceron est une des plus heureuses; non, assurément, de la béatitude idéale, mais de celle que comporte sa nature: la satisfaction des instincts, des besoins, des aspirations bestiales. Il n’a, lui, qu’un instinct, qu’un besoin, qu’une aspiration: se gorger des sucs savoureux de la plante sur laquelle son Créateur CHEZ LES PUCERONS 165 l'appelle à vivre. Et ce désir est satisfait sans interruption durant sa vie entière. Dès sa naissance, il trouve la table servie. Qu'il plonge seulement son rostre puissant dans les premières couches d’une écorce encore tendre, ou dans le tissu sans résistance de la feuille sur laquelle il a vu le jour, et il rencontre aussitôt une source abondante,.inépui- sable, des sèves qui font ses délices. Il boit à longs traits son ambroisie: c’est une jouissance ininterrompue, un ban- quet perpétuel, un festin de toute la vie. Qui donc, parmi nos pochards, n'a pas rêvé un pareil sort, quand il est deve- nu tout à fait... bête? Et pas de soucis. Nulle préoccupa- tion d'acquérir: il ne lui manque rien; et ses enfants seront tous aussi riches que lui-même. Nulle préoccupation pour l'éducation des siens: ils savent en naissant tout ce qu’il leur faut savoir. Nulle crainte n’a sur lui aucune prise: même lorsqu'un de ses assassins est tout près de lui et s'apprête à le saisir, ii continue tranquillement ses lippées : il ignore le danger (!) et la mort. Il ignore aussi l’au-delà ; et n’a d’ailleurs aucun compte à rendre à son Créateur. Ainsi, rien qui l’effraye, rien qui l’attriste. Et même, d’après quelques philosophes, s’il prévoyait que sa substance servira quelque jour à augmenter celles d’autres bestioles plus nobles que lui, il serait heureux de passer ainsi à un degré plus élevé dans l’échelle des êtres. Maïs j’ai toujours eu quelque doute sur le pouvoir réjouissant de cette consi- dération. Quoi qu’il en soit, tout incapable qu’il est de 1. I1 montre cependant quelque ennui à la vue de certains visiteurs. Qu'un naturaliste, par exemple, s'approche de lui pour l’examiner à loisir, on le voit alors, sans retirer sa trompe de la feuille nourricière, donner à son abdomen un mouvement de va-et-vient qui semble destiné à éloigner l’inportun, mais si gauche et si pénible qu’il est bien plus propre à exciter chez celui-ci le rire et la curiosité. Si les pucerons sont en famille, toute la troupe effectue ce mouvement avec une simultanéité presque parfaite. Qui donne le signal? 166 LE NATURALISTE CANADIEN ce réconfort transcendant, le puceron se montre toujours heureux de son lot, jusqu’au moment où quelqu'un de ses assassins l’arrache à sa beuverie en lui enfonçant ses mandi- bules dans les chairs. Alors, pour la première fois, il se débat ; il y a là pour lui, de toute évidence, une minute(!) douloureuse. Mais ce n’est qu’une minute dans une vie jusque-là toute de paix et de jouissance. Le Psalmiste a dû, en toute justice, lui appliquer comme à tous les autres animaux les paroles qu’il adressait à leur commun Créateur : Aperts lu manum tuam, et imples omne animal benedictione. L. DESHAYES. DÉCOUVERTE DU LYCOPODE PETIT-CYPRES DANS LES LAURENTIDES Grâce à la dispersion faciles des spores qui les reprodui- sent, les cryptogames sont beaucoup plus uniformément réparties à la surface du globe que les plantes supérieures. En effet, tandis que, chez celles-ci, les espèces ubiquistes 1. Faut-il faire quelques réserves à ce sujet pour les pucerons dévorés lentement par un parasite intérieur? 11 semble qu'il y a dans ce cas une agonie prolongée et des douleurs atroces. Il se peut. Pourtant, il y a des raisons de croire que, même alors, les souffrances durent assez peu, abrégées qu’elles sont par quelque poison capable, comme le curare, d'enlever la sensibilité sans détruire aussitôt la vie. En effet, l'animal blessé devient rapidement immobile sans avoir donné presque aucun signe de douieur. En outre, sa peau en se décolorant prend une teinte souvent très différente de celle que lui laisse la mort spontanée. Ces deux faits ne s'expliquent guère que par l'influence d’un principe spécial élaboré par le parasite ou déposé avec l'œuf par son parent flexiliventre, et capable d’agir à la fois sur les cellules nerveuses de la victime et sur la chiline de sa peau. | LYCOPODE PETIT-CYPRÈS DES LAURENTIDES 167 peuvent se compter sur les doigts, beaucoup de cryptoga- mes avaient déjà fait la conquête des cinq parties du monde avant les temps historiques. En ce qui concerne la famille des Lycopodiacées, humble reste de la gigantesque flore de l’époque houillère, les espèces de la vallée du Saint-Laurent ne diffèrent guère de celles de l’Eurasie, surtout si l’on tient compte des lati- tudes. On en jugera par le tableau suivant : TABLEAU COMPARATIF DES LYCOPODES DE LA FLORE LAURENTIENNE ET DE LA FLORE FRANÇAISE FLORE LAURENTIENNE FLORE FRANÇAISE . Selago L. lucidulum Mchx. . inundatum L. obscurum L., dendroideum Mchx. annotinum L. sabinæfolium Willd. L. Selago L. L L clavatum L. L. clavatum en L À inundatum L. complanatum L. . complanatum L. chamæcyparissus A. Br. (1) . chamæcyparissus A. Br. SUCRES RUPES., COR PL . alpinum L. (?) L. alpinum £. PAROREHEREE Il est à remarquer que toutes les espèces françaises se retrouvent ici (2), etique Z. Zucidulum, £L. obscurum, L. sabinæfolium et L. sitchense manquent là-bas. En Europe aussi bien qu’en Amérique, Z. complanatum et Z. chameæcyparissus ont été longtemps confondus. Tout au plus considérait-on ce dernier comme une variété du premier. Francis-E. Lloyd, alors professeur à l'Université Colum- 1. Espèce dont la découverte récente dans le Québec fait l’objet de ces notes. 2. Sauf peut-être Z. a/pinum. 168 LE NATURALISTE CANADIEN bia, jeta enfin de la lumière sur cette question, dans un article publié par le Æulletin of the Torrey Botanical Club (26: 559-567, 15 nov. 1899). Dans cette communication, M. Lloyd, se basant sur l'examen de spécimens provenant de diverses localités des Etats-Unis, fit bonne justice de la prétendue identité spéci- fique des deux Lycopodes cités plus haut. Au cours d’une herborisation à Saint-Colomban, comté de ‘l'errebonne, P. Q., sur les étendues gneissiques qui forment les premiers contreforts des Laurentides, nous avions récolté, en août 1912, ce qui nous parut alors une forme curieuse du Z. complanatum, se rapprochant du Z. chamaæcyparissus d'Europe. Ayant eu la bonne fortune d’entrer en relation avec M. Lloyd, devenu professeur à l’Université McGill de Montréal, et de lui soumettre nos spécimens, le distingué professeur les rapporta sans hésiter au Z. chameæcyparissus À. Br. C’est, croyons-nous, la première fois que la plante est signalée au Canada. La station de Saint-Colomban ne peut être unique, et il y a lieu de croire que l’on pourra retrouver cette espèce en beaucoup d’endroits du piateau laurentien. Le Lycopode Petit-Cyprès (Z. chamaæcyparissus A. Br.) se distingue tout d’abord de son congénère le Lycopode étalé (Z. complanatum X,.) par la position de son rhizome. Chez celui-ci, en effet, le rhizome court à la surface du sol, développe de la chlorophylle parce qu’exposé à la lumière ; il est aplati et porte de petites feuilles étroites. Le rhizo- me du Z. chamaæcyparissus est, au contraire, strictement souterrain, courant généralement à une profondeur de 5-12 centimètres, et est, par conséquent, privé de chlorophylle ; il porte des feuilles ovales ou lancéolées rétrécies à la base. Non moins frappante est la production chez le Z. chameæ- cyparissus d'innovations annuelles à l'extrémité des ra- LYCOPODE PETIT-CYPRÈS DES LAURENTIDES 169 meaux. Ces innovations sont plus ou moins orthotropes suivant leur exposition à la lumière et font angle avec les pousses anciennes. On sait que les rameaux du Z. compfla- natum sont, le nom l'indique d’ailleurs, plagiotropes et ne produisent pas, ou très rarement, d'innovations annuelles. De ce que le Z. chamæcyparissus a un port plus dressé que celui de son congénère, il s'ensuit que le caractère dorsiventral de ses rameaux est fort atténué, et que les feuilles du côté ventral ne se distinguent guère morphologi- quement de celles du côté dorsal. Chez le Z. complanatum, au contraire, les feuilles ventrales sont excessivement ré- duites et rappellent les amphigastres de certaines Hépa- tiques. Un autre caractère remarquable du Z. chamaæcyparissus est sa glaucescence, qui est assez accentuée pour lui donner un aspect poudreux. M. Francis-E. Lloyd a remarqué que, dans les mêmes stations, il y a une différence de trois à quatre semaines entre les époques où les deux espèces müûrissent leurs spores. M. Lloyd n’en recherche pas la cause. Peut-être pourrait-on l’attribuer à l’enfouissement du rhizome, cir- constance qui, en restreignant le développement foliaire, hâte la maturité de l'appareil reproducteur. Tout obser- vateur de la nature a remarqué que les individus d’une espèce qui sont placés dans des conditions défavorables à l'expansion de leur système végétatif se hâtent de donner leur fruit et disparaissent. (1) 1. Les Lampourdes des rivages du Saint-Laurent (Xan{hium commune Britton) nous en offrent un exemple frappant. Les fruits épineux de cette plante sont roulés en grandes quantités sur les battures de Lon- gueuil, où ils ne peuvent germer qu'après le retrait des eaux, Commen- çant leur cycle végétatif lorsque la saison est déjà avancée et, d’autre part, se trouvant serrés les uns contre les autres, ils ont à peine développé les deux feuilles embryonnaires, qu'ils produisent hâtivement 1-2 fruits qui sont mûrs en même temps que ceux provenant des plantes normales. Ces individus d’arrière-saison ne mesurent souvent que 8-rocentimètres, quand la taille moyenne de l'espèce est d'environ 50 centimètres. 170 LE NATURALISTE CANADIEN Comme question de fait et pour en revenir à la question, notre magnifique Lycopode arborescent (Z. obscurum L.), dont le rhizome est souterrain, arrive aussi à maturité un bon mois avant Z. complanatum, L. clavatum, L. inunda- tum, dont le rhizome est superficiel. Les différences plus haut énumérées sont plus que suff- santes pour faire disparaître tout doute relatif à la distinc- tion spécifique des deux Lycopodes en question. Nous avons reçu, il y a quelques années, de notre confrère de France, Fr. Héribaud-Joseph, des spécimens venant du département du Puy-de-Dôme, sur le plateau central de la France, et que le savant botaniste étiquetait: Z. chamæcy- parissus À. Br. La comparaison de ces spécimens avec ceux des Lauren- tides, l'opinion autorisée de M. Francis-E. Lloyd et du Fr. Héribaud (1), nous permettent donc d’affirmer avec certi- tude l’existence du Lycopode petit-cyprès dans la province de Québec. Frère Marie-Victorin, des Écoles Chrétiennes. 15 avril 1913. Collège de Longueuil, P. Q. : OO: LES « SOURCIERS » ET LEUR BAGUETIE Du Patriote des Pyrénées : M. l'abbé Th. Moreux, direc- teur de l'Observatoire de Bourges. 1. Le Fr. Héribaud-Joseph est bien connu en Europe pour ses im- menses travaux sur la Flore d'Auvergne, tant actuelle que fossile: La Flore d'Auvergne, Les Muscinées d'Auvergne, Les Lichens d' Auver- gne, Les Diatomées yossiles de l'Auvergne. etc. Plusieurs de ces ouvrages ont été couronnés par l'Académie des Sciences. LES « SOURCIERS » ET LEUR BAGUETTE V7 Le mécanisme de la découverte des sources, quoique inexplicable, se résume en un fait très simple : L'opérateur, «celui qui a le don », tout au moins, place dans ses mains une baguette fourchue de coudrier, la tige de la fourche dressée en l’air ; vient-il à passer au-dessus d’une conduite d’eau souterraine, aussitôt, d'un mouvement irrésistible, la tige de la fourche s’abaisse vers la poitrine du sujet. Sui- vant la rapidité ou la violence de l’abaissement, celui-ci diagnostique la profondeur du cours d’eau, son importance, etc, etc. Certains sourciers ont acquis des réputations fameuses, quasi-légendaires. Presque tous sont devenus des profes- sionnels dans cette science bizarre, et cela sans le savoir. Un jour par exemple, que le Frère Arcouse, supérieur de l’école de Thurins (Rhône), visitait une carrière avec un de ses amis, il aperçoit sur le sol une baguette de coudrier, il la ramasse et, tout en plaisantant, il la tient entre ses mains « pour voir si elle tournerait ». Les deux amis continuent leur promenade, lorsque tout à coup la baguette s’agite et se tourne du côté de l’opé- rateur. Surpris, le Frère Arcouse veut en avoir le cœur net ; on creuse à l’endroit désigné par la baguette, et l’on découvre à quelque profondeur une veine d’eau dont personne, pas même le découvreur, ne connaissait l’exis- tence. Le Frère Arcouse était sacré «sourcier». Depuis, on l’appela de toutes parts et on lui doit la découverte de 1,300 sources! rien que cela ! Mais pourquoi une baguette de coudrier, et non une: autre? Le Frère Arcouse se le demanda et fit de nombreux essais pour résoudre la question. «En fait, conclut-il, la baguette de coudrier n’est pas nécessaire, tous les bois peuvent être employés, pourvu qu'ils aient beaucoup de nœuds.» Bien mieux, à la fin, 172 LE NATURALISTE CANADIEN l'opérateur n’employait plus qu’une tige de fer de 6 milli- mètres de diamètre environ, et qu’il recourbait en forme de boucle. | La force avec laquelle se faisait le mouvement de rotation dans ce dernier cas était considérable, ainsi qu’en témoigne l'expérience suivante: L'opérateur, après avoir laissé dé- passer les extrémités de la baguette en dehors de ses mains, priait deux personnes de tenir ces extrémités libres et de s'opposer au mouvement de la tige. En dépit de tous leurs efforts, si la baguette devait tourner, elle le faisait et souvent la rotation l’amenait à décrire un angle de 90 degrés. Le Frère Arcouse ne s’est, paraît-il, trompé que sept fois au cours de ses nombreuses expériences, et encore parce qu’il s'agissait d'explorer sur des terrains argileux qui gardent facilement des couches d’eau stagnantes. AC DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L'INSECTE ! (Second article.) LA RESPIRATION CHEZ L'INSECTE Où la circulation dn sang rentre en Scène, pour un moment. — La respiration chez l’homme et chez les vertébrés.—?as d'admission dans la tyachée-artère, si l'on n'est pas... de l'air. — Un coup de dent à l'évolution, en passant. — Ce que l'air va faire dans les poumons. — Le système du libre-échange, dans les vaisseaux capillaires. — La respiration chez l’in- secte. — Que de ‘nez’?! Que de ‘‘ nez’? ! — Par où l'on flaire, chez les insectes. — Où l'on dit, à Aristote, son fañt. — Un ‘‘ bocage’’ abdominal et thoracique. — Portes et contre- portes. — Comment l’on se noie, et comment l'on ne Se note 1. Comme nous avons reproduit, en son temps, le premier de ces arti- cles écrits pour la Vouvelle-France, il nous taut bien aussi, par esprit de suite, reproduire le second, que voici. DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L’'INSECTE 173 pas. — Plus il y à de poison, moins l'on s'empoisonne. — Pour empêcher l'air ‘‘ inspiré’ de revirer en chemin — Le vrai moyen d'éviter la phtisie pulmonaire. — La fraternité universelle. — Ceux quise font une provision d'air. — Un mode nouveau de propulsion, pour aller sur l’eau. — Des larves bien attrapées. — A la godille! — Ce ne sont pas les ‘‘ Américains’ qui ont inventé les sacs aériens. — Le cher- d'œuvre qu'est le puceron. — Respect qu’il faut avoir pour la vie des insectes, au nom de l'art et de la mécanique. Nous disions donc—oh ! par exemple, ce n’était pas hier! Voilà trois ans et huit mois, que de la sorte il nous était donné de causer, de cette tribune de la Vouvelle-France, avec les lecteurs bénévoles, et sans doute, après un si long temps, plusieurs de ses interlocuteurs ne sont plus ici pour continuer la conversation, soit qu’ils aient commis l’erreur déplorable d'informer l’abbé Lindsay qu’à aucun prix ils ne voulaient voir ce magasin continuer de venir à leur foyer; soit que depuis lors se soit terminée leur période d’épreuve sur la planète que voici. Quoi qu’il en soit, ce que nous disions donc, en 1909, c’est que nous allions ‘comparer à la fonction circulatoire et à la fonction respiratoire de l’homme celles du vil insecte. ” Comme de toute évidence, il m'est personne de mes lec- teurs qui ne se souvienne, et de manière si précise, qu’au mois de janvier 1900, j'ai traité effectivement dela circula. tion chez l’insecte, et qui ne se rappelle que par cette circula- tion-là il faille entendre le mouvement régulier et ininter- rompu du liquide sanguin à travers les tissus de l’homme et de l’animal, voilà que pour autant l’on doit reconnaître que j'ai déjà disposé de la moitié de mon sujet—tel que, du moins, je le délimitais alors. Car s’il était loisible, en suivant le cours d’un pareil sujet, de s'arrêter en route à tout ce qui s’y rattache ou même à tout ce qui très naturel. lement en fait partie, l’on ne sait quand on en pourrait sortir —surtout si l’on ne s’en occupait que tous les trois aus. C’est ainsi, par exemple, qu’il y aurait lieu d’exami- 174 LE NATURALISTE CANADIEN ner quelle est la composition de ce liquide sanguin, qui joue un rôle si considérable dans le maintien de la vie; comment il peut bien s’incorporer les produits utiles de la digestion, et de quelle manière il les porte et les distribue à tous les éléments de l’organisme... Cela soit dit simple- ment pour que l’on supçonne au moins l’ampleur du sujet dans lequel je me suis plus ou moins sagement engagé, et que d’avance l’on suppute le nombre des articles “tri- annuels” qu’il faudrait pour l’épuiser en une certaine manière. À plus tard, donc, à bien plus tard, des coups d'œil sur l’alimentation, sur la digestion, sur l’absorption, sur l'assimilation chez les Mouches, les Pucerons, les J'aons, les ‘“ Vers” à choux ou à soie, les Sauterelles, les Guêpes, les Maringouins, et les autres 200,000 espèces d’in- sectes qui ne contribuent pas peu à mettre de la vie tout autour du globe terrestre qui nous promène à travers les espaces !… Et puisque c’est cela qui fut, au moins implici- tement, annoncé ici, il y a trois ans, et qui touche de bien près à la fonction de la circulation dont nous traitâmes alors, bornons-nous pour aujourd’hui à parler... un peu de la respiration. LA RESPIRATION CHEZ L'HOMME ET LES VERTÉBRÉS Etant donné qu’il n’est rien, pour aller sûrement, comme de bien entendre les choses, il importe de dire tout d’abord comment il faut comprendre cette fonction de la respi- ration—chez les vertébrés seulement, bien entendu, et par conséquent, chez l’homme, avec qui—suivant notre pro- gramme d'il y a trois ans—nous voulions, relativement à cette fonction respiratoire, comparer l’insecte. Sans doute, ainsi que j'ai bien osé l’écrire ailleurs... pour l'instruction de la jeunesse, la respiration ‘‘est une fonction qui a pour but la transformation du sang veineux en sang ar- tériel, au moyen de l’oxygène de l'air.” Assurément ! Et voi- là pourquoi ‘‘ votre fille est muette” ! Et on le serait à moins DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L’INSECTE 175 Mais, puisqu'il ne s’agit pas ici, précisément, d’instruire la jeunesse, disons un peu, en langage qui ne puisse com- munément entendre, ce que c’est que la respiration.—La respiration, cela consiste à respirer !—En effet, cela est frappant d’exactitude. Mais qu'est-ce que respirer —Res- pirer, c’est avaler de l’air!—C’est encore exact, au moins en une certaine mesure. Mais il faut savoir qu’on n’avale pas de l’air comme on avale du veau, ou du potage, ou de la confiture! Apprenez donc, mon ami, que lorsqu'on veut «avaler de l’air,» il n’y a qu’à le laisser entrer tout seul par ie nez ou par la bouche, et que, de l'arrière bouche, il trouve libre passage, par la trachée-artère, jusque dans l’in- térieur des poumons, où il pourra remplir le rôle qui lui appartient. Tandis que, si c’est du veau ou quelque autre aliment, soit solide, soit liquide, que l’on avale, cela doit prendre un chemin voisin, l’œsophage, et se rendre droit à l'estomac. Oui! droit à l’estomac! et il en sera ainsi, à condition que vous ne mettiez pas obstacle au fonctionne- ment normal des choses. Il y a lieu, en effet, de remarquer que ces aliments peuvent très bien, si l’on n’y prend garde, se tromper de route et tenter de s'engager dans la trachée- artère, pour tomber en pleins poumons! Vous imaginez la catastrophe que cela serait, si un morceau de pomme de terre ou une cuillerée de soupe au pois allait, comme cela, parcourir les bronches et les bronchioles, et aboutir aux alvéoles, puis aux vésicules pulmonaires... On ne sait même peut-être pas, au juste, ce qui résulterait de tout cela. C’est qu’un accident de cette sorte ne se produit jamais du moins en principe (ce qui est bien déjà quelque chose), parce qu’il n’est pas loisible à quoi que ce soit d’aller se promener à volonté et sans cérémonie dans la trachée- artère et se loger dans les poumons. En effet, dans l’ori- fice de la trachée-artère, l’on ne passe pas si l’on ne montre patte blanche, c’est-à-dire si l’on n’est pas seulement «de l'air.» Sitôt que, par exemple, une miette de pain, ou une 176 LE NATURALISTE CANADIEN goutte d’eause présente, par erreur, à cette ouverture de l’arrière-bouche, une trappe (voile du palais) s’abat à l’ins. tant et ferme la voie à l’indiscret voyageur. Ce mécanisme opportun d’occlusion automatique fonctionne chaque fois que cela est utile, et sans que nous nous en apercevions seu- lement ; c’est au point que, sans aucun doute, la plupart des hommes vivent et meurent dans l'ignorance totale de ce prodigieux appareil, sentinelle toujours vigilante à l’entrée de la route qui mène au poumon. Que si, toutefois, un grain de quoi que ce soit parvient à forcer la consigne, tout n’est pas dit, il s’en faut bien! Car alors tout l’appareil se révolte et se livre à des spasmes d’une teile violence que l’intrus se voit brusquement expulsé. Chacun a fait l'expérience de ces toux si fatigantes qui se produisent lorsque l’on a “avalé de travers», ainsi que l’on dit. Voilà donc com- ment l’appareil respiratoire est merveilleusement organisé pour repousser l’invasion de tout corps étranger. —Ce n’est sans doute pas calomnier les évoiutionnistes que de les voir prétendre que cette machine de protection n'existait pas tout d’abord chez nos «ancêtres » simiens, ni même peut- être. chez le pithécanthrope ou l’anthropopithèque ; mais que ces vénérables et prétendus grands-pères de l’hnmanité actuelle éprouvaient si souvent les plus terribles accès de toux, qu’ils ne purent manquer de désirer ardemment que leur trachée-artère se vit protéger contre des accidents si désagréables; et qu’à la fin, «la fonction ayant créé l’or- gane», par suite des efforts incessants de la «nature», il se trouva un beau matin que l’orifice de ce conduit était muni de la trappe défensive, qui nous donne, généralement au moins, la paix en cette matière... Admirons la robuste imagination de ces messieurs les évolutionnistes, et passons | | (A suivre.) LE NATURALISTE CANADIEN Québec, Juin 1913 VOL. XXXIX (VOL. XIX DE LA DEUXIÈME SÉRIE) No 12 Directeur-Propriétaire : L'abbé V.-A. Huard NOTES SUR DEUX CAS D’'HYBRIDISME NATUREL MENDELISME ET DARWINISME Les phénomènes d’hybridation intéressent à la fois la taxonomie et la biologie. A la première de ces sciences ils fournissent des renseignements utiles sur les affinités des espèces et la subordination des caractères. La biolo- gie, elle, puise dans ces faits pour édifier ses théories sur le mécanisme et les lois de l’hérédité, comme pour étudier les limites de variation des espèces. La grande bataille qui s’est livrée durant cinquante ans autour de la doctrine de l’évolution devait naturellement attirer l’attention des naturalistes sur les hybrides. Au- jourd’hui, bien que le darwinisme soit en pleine décadence et que l’échafaudage haeckeliste se soit écroulé avec la probité scientifique de son créateur, tous les faits se rap- portant à cet ordre de choses doivent être notés avec soin. En effet, bien qu’eile soit suffisamment prouvée, la Zoz des hybrides de Mendel, dont la découverte a porté un coup si fatal à l’évolutionnisme, a besoin d’être précisée en 12 — Juin 1913. 178 LE NATURALISTE CANADIEN certains de ses détails. Ce résultat ne sera atteint que par l'étude raisonnée d’un plus grand nombre de faits. Les hybrides naturels dans notre flore sont mal connus et relativement rares, sauf dans les genres Sax, Carex et Viola, qui en offrent d'assez fréquents exemples. Dans cet article, nous en étudierons deux, dont l’un est, croyons- nous, entièrement nou- veau; et l’autre consti- tue depuis une dizaine d'années un sujet de discussion pour les bo- tanistes américains. # *X *X Disposons d’abord de ce. -dermier (the 7 C’est le Nénuphar à dis- que rouge, Vymphæea rubrodisca ( Morong ) Greene, que l’on croit être le produit d’un croisement entre Vy#- phæa Amertcana (Prov.) Miller & Stand- Fig, 1.— Nympheæa rubrodisca. ley,{et Mymphea mi- crophylla Pers. (1) Fig. 1.—a, Ovaire et stigmate. b, Etamine. 1. La nomenclature des Nymphéacées a été sonvent remaniée et est, conséquemment, assez embrouillée. AV. Americana est le grand Nénu- phar jaune, commun partout dans la Province, que la plupart des au- teurs désignaient sous le nom de V. advena Ait. AN. microphylla=N. Kalmiana Sims. NOTES SUR DEUX CAS D'HYBRIDISME NATUREL : 179 Voici la description de cette plante. —Ferutilles flottantes de 75 — 200 mm. de longueur, de 55 — 145 mm. de largeur, ovales, arrondies au sommet ; échancrure de près de la moitié de la longueur de la nervure principale ou quelque peu plus longue, fermée et très étroite; limbes minces, glabres, à lobes oblongs-triangulaires, obtus; feuilles submergées bien développées, très minces, crispées, largement oblon- gues ou ovales, largement arrondies et rétuses au sommet, d'à peu près les mêmes dimensions que les feuilles flottan- tes, échancrures plus larges et plus ouvertes; rhizomes relativement grêles, quelque peu comprimés, d'à peu près 25 mm. suivant le plus grand diamètre; cicatrices (points d'attache ) des feuilles elliptiques ou ovales, de 8 — 10 mm. de longueur; fleurs d'environ 25 — 35 mm. de diamètre, hautes de 20 mm.; sépales, généralement 5, glabres, tous semblables, oblongs ou ovales, ou presque orbiculaires, obtus ou tronqués, très peu rétrécis à la base; pétales spa- tulés, tronqués, de 8 — 9 mm. de longueur; étamines sur quatre ou cinq rangs, portant des anthères de la moitié de la longueur des filets; sépales jaune serin, teintés ou non de rouge intérieurement, la teinte toujours plus pâle que dans V. Americana ; pétales, jaune pâle, quelquefois tein- tés de vert; étamines jaunes et anthères couleur chamois ; ovaire d’un jaune verdâtre, plus pâle que celui des étami- nes et des anthères, faiblement coloré de carmin sous le disque; disque carmin; fruit ovoide, étranglé supérieure- ment, d'environ 22 min. de hauteur et 10 mm. de diamè- tre, orbiculaire, à contours ondulés ; rayons stigmatiques 8 — 13, généralement 10 — 12, linéaires, de 3 mm. de lon- gueur, atteignant presque les bords du disque ; disque sans ligne médiane, à centre fortement déprimé, lisse; fruit d’un brun purpurin à maturité; graines ovoïdes de 21 —3 mm. de longueur, de 17% — 2 mm. de diamètre, d’un brun léger, brillantes. 180 LE NATURALISTE CANADIEN Bien que nos anciens auteurs ne parlent point de cette jolie plante d'eau, nous pouvons affirmer avec certitude qu’elle existe dans la Province et indiquer des localités. Nous en trouvons plusieurs dans la belle monographie du genre VNymphæa récemment publiée par la Smithsonian Institution (1): Danville, 1894 (Berg); Rivière Saint- François (Æggleston 3010); Ottawa, 1910 ( Fletcher). Nous avons examiné personnellement les VMymphæu de l’herbier de l'Université McGill. Sous l’étiquette de Vz- Phar luteum Smith (Brome Lake, Eastern Townships), nous trouvons un spécimen qui est certainement 7#ôro- disca. Enfin, nous avons récolté nous-même l’espèce en question à Saint-Eustache, sur la rivière Jésus, au mois d'août 1912. Ce que nous savons de sa distribution géographique dans la Province se résume donc à cinq localités: Ottawa, Saint- Eustache, Brome Lake, Rivière Saint-François, Danville. Nous avons dit plus haut que les botanistes américains ne sont pas d'accord au sujet de cette Nymphéacée. Beau- coup la considèrent comme un produit hybride: M. Ame- ricana x N. microphylla ; quelques-uns lui accordent rang spécifique. Parmi les premiers se range M. John Macoun, de la commission Géologique du Canada, qui nous écri- vait à la date du 20 janvier 1913: «As regards 4. rubro- disca, no matter what any one else may say about this so- called species, I am quite couvinced that it is a hybrid ». Le regretté Dr Fletcher avait soumis, il y a une dizaine d'années, des spécimens de ce Vymphæea à M. KR. Casparry, directeur du Jardin botanique de Kænigsberg, ia plus haute autorité pour le genre. Ce dernier lui répondit 1. The North American Species of Nympaæa, by Gerritt S. Miller, jr, and Paul C. Standley. (Contributions from the U. S. National Herbarium, Vol. 16, Part 3.) Smithsonian Institution, 1912. NOTES SUR DEUX CAS L'HYBRIDISME NATUREL I8I comme suit: «I have not the slightest doubt but that your Muphar is N. advenr x N. Kalmiana (1); it is inter- mediate between the two, and what is decisive is this: the pollen is very bad; no less than 957 of the grains had no fovilla. 4. advena and N. mirophylla have both very good pollen ». Parmi les tenants de la valeur spécifique du M. rubro- disca, se trouveut MM. Miller & Standley, dans la monogra- phie citée plus haut. Ils en donnent les raisons suivantes : 1°. Les caractères du V. rubrodisca sont aussi constants que ceux d’aucune autre espèce américaine. 2°. Aucun cas de mendélisme ou de réversion vers l’une ou l’autre des espèces-mères n’a été constaté. 3°. La plante n’est pas toujours nécessairement associée à NV. Americana et à N. microphylla. Dans certaines loca- lités, l’une ou l’autre de ces deux espèces, ou les deux en- semble font défaut. (2) 4°. La zone de dispersion de V. rubrodisca s'étend beau- coup plus à l’ouest que celle de M. wzcrophyllu. En effet, tandis que la première atteint la pointe extrême du lac Supérieur, la seconde ne dépasse pas Niagara, aux Etats- Unis. 5°. La stérilité relative de la plante n’indique pas néces- sairement une origine hybride. Certaines espèces d’un genre fructifient moins abondamment en raison des moyens de reproduction asexuelle dont elles sont pourvues. (3) De la comparaison de ces différentes opinions, il ressort 1. D’après la nomenclature actuelle: }V. Americana x N. micro- Phylla. 2. N. microphylla paraissait faire défaut dans la station de Saint-Eus- tache. 3. Le Lis tigré de nos jardins ( Zilium tigrinum L.) en est un exem- ple typique. Il produit abondamment, à l’aisselle des feuilles, des bul- billes noires qui reproduisent la plante. Après la floraison, le pistil se flétrit et disparaît avec le reste des organes floraux. 182 LE NATURALISTE CANADIEN Fig. 2.—Un hybride nouveau : Lysimachia terrestris x L.thyrsiflora. que, seules, des expériences méthodiques ayant pour ob- jet l'application de la loi de Mendel au M. rubrodisca pourront trancher la ques- tion. Le dessin de M. L. Pré- fontaine, que nous reprodui- sons ici, a été fait d’après les spécimens de Saint-Eusta- che, 1912. Le contour de la feuille diffère quelque peu de celui qu'indiquent MM. Miller & Standley, et se rapproche davantage de la Fig. 1528: de’ 7//Ys/raral {lora de Britton & Brown. Fait curieux, les deux types de feuilles voisinaient dans les spécimens de Saint-Eus- tache. *k * _*X L’hybride que nous allons maintenant décrire (Fig 2) est, croyons-nous, nouveau pour la science. Il s’agit d’une forme de Lysimaque trouvée par nous dans un marais de Châteauguay, en face de l’île des Sœurs, au mois d’août 1912. Fig. 2.—A, Ovaire et style x 5.—B, Un pétale x 3.—C, Un sépale x 5.—D, Ovaire et style de Z. ferrestris x 5.—EÆE, Ovaire et style de L. thyrsiflora x 5. NOTES SUR DEUX CAS D'HYBRIDISME NATUREL 183 Dans l’impossibilité de faire rentrer cette forme dans le cadre d'aucune espèce décrite, nous avons pensé à un croi- sement possible et fait une analyse comparative minutieu- se de cette plante et des Lysimaques de notre région. Le résultat fut que nous étions en présence d’un cas d’hybri- dation entre la Lysimaque terrestre et la Lysimaque thyr- siflore. (Zysimachia terrestris (L) B. S$S. P. x Lysimachia thyrsiflora JL.) Des spécimens furent soumis au Dr N.-L. Britton, direc- teur du Jardin botanique de New-Vork, à M. John Macoun, de la commission Géologique, et au Dr M.-0. Malte, de la Ferme expérimentale d'Ottawa. Ces trois spécialistes confirmèrent notre opinion. Le Dr Britton, le célèbre botaniste américain, nous écrit: «I have studied your Fig. 3.—Pollen de Z. {errestris x thyrsiflora (très grossi). Lysimachia spécimen, and think it may be, as you say, a hybrid. I do not remember having read of such a hybrid and certainly have never seen a specimen before. » Le Dr Malte base son opinion sur l'examen microsco- pique du pollen. Celui-ci présente, en effet, deux sortes de grains: Un petit nombre (Fig. 3, A) sont remplis de protoplasma et sont par conséquent opaques; le reste se Fig. 3.—A, Grains fertiles. —B & C, Grains stériles, 184 LE NATURALISTE CANADIEN Fig. 4.—A. Lysimachia lerrestris (L) B.S. P. B. Lysimachia thyrsiflora 1. NOTES SUR DEUX CAS D'HYBRIDISME NATUREL 185 compose de grains plus petits ( Fig. 3, B & C ), de forme ir- régulière, vides ou renfermant un protoplasma aqueux ou translucide. Le Dr Malte a calculé qu'environ 75 à 85% des grains de pollen sont parfaitement stériles. (Cette sté- rilité marquée est la meilleure preuve que la plante sous examen est un produit hybride et non une espèce nou- velle. Les espèces-mères de cet intéressant hybride sont deux Lysimaques parfaitement distinctes, comme l’on peut s’en convaincre par l'examen des figures (Fig. 4). Aussi, y a-t-il lieu de s'étonner de voir hybrider deux espèces si dissemblables. Beaucoup d'auteurs persistent à placer la Lysimaque thyrsiflore dans un genre à part et monotypi- que: VMaumburgis. Le fait d'hybridation est, ce nous semble, décisif en la matière, et prouve que les différences ne nous paraissent si profondes que parce que nous n’avons pas une notion adéquate de la subordination des ceractères. Il y a donc lieu, croyons-nous, de replacer la soi-disant Naumburgia thyrsiflora dans le grand genre linnéen Lysimachia. La Lysimaque terrestre ( Z. séyicta Aït.) est excessive- ment commune partout dans le Québec; la Lysimaque thyrsiflore est beaucoup plus rare. Dans les marais de Châteauguay, seule Z. {errestris accompagnait la plante hybride. Le tableau ci-dessous suggère deux remarques : 1°. L'influence de la Lysimaque thyrsiflore semble pré- pondérante dans le composé hybride. 2°. La plante hybride est de taille plus forte que les plantes-mères. La même particularité peut s’observer pour la longueur du style. 186 LE NATURALISTE CANADIEN TABLEAU COMPARATIF DES CARACTÈRES L. terrestris (L) B. S, P. L. terrestris — L, thyrsiflora Hauteur maximum de la p'ante: 80 | cm. | Tige grêle, unie. Tige feuillée jusqu’à la base. Feuilles \ancéolées, étroites. Hauteur maximum de la plante : 105 cm. Tige forte, striée. Feuilles de la moitié infé- rieure réduites à des écailles caduques. Feuilles lancéolées, étroi- tes, Feuilles ponctuées- glanduleuses. Tnflorescence : Grap- pe terminale al- longée. Sépales verts. Feuilles ponctuées-glan- duleuses. {nflorescence : Grappes ter- minales ou axillaires, ovoides ou légèrement allongées. L. thyrsiflora Hauteur maxi- mum de Ja plante : 8o cm. Tige forte, striée. Feuilles de la moitié inférieu- re réduites à des écailles caduques. Feuilles lancéo- lées, plus larges. Feuilles ponc- tuées-glandu- leuses, Inflorescence : Grappes axillai- res, ovoides, Sépales ponctués-tachetés. Pétales marqués de lignes colorées. Anneau pourpre. Style de 1 mm. de longueur. Fruit marqué de li- gnes longitudina- les colorées. Pétales ponctués-tachetés. Pas d’anneau. Style de 2%-3 mm. de longueur. Fruit ponctué. Sépales ponc- tués-tachetés. Pétales ponctués. Pas d’anneau. Style de 2 mm. de longueur. Fruit ponctué. NOTES SUR DEUX CAS D'HYBRIDISME NATUREL 187 k' Au profit des lecteurs peu familiarisés avec les acquisi- tions récentes de la science biologique, il pourra paraître intéressant d'ajouter, au compte rendu qui précède, quelques uotes au sujet de la Zor des Æybrides de Mendel. Gregor Johann Mendel (1822-1884) était un moine autrichien, abbé de Brünn, qui poursuivit durant de lon- gues années, dans le jardin de son monastère, des expérien- ces d’hybridation sur les pois. Il publia le résultat de ses travaux dans un petit journal peu répandu, ce qui lui va- lut l'oubli et le silence du monde savant. Il ya une douzaine d'années, le Hollandais Hugo de Vries répéta en les développant les expériences de Mendel, et conclut à la confirmation de la Zoz des hybrides déjà formulée par le moine autrichien. Cette loi peut s'énoncer ainsi: «Si deux individus ap- partenant à des espèces ou races différentes, soit B et R, forment un produit hybride, leur descendance sera donnée par la formule : 3? + 2BR+ R? ; —P” représentant les pro- duits identiques à Z, LÀ? ceux identiques à À, et leterme 27A les produits hybrides présentant le mélange des caractères de Z et de ZX.» Cette relation remarquablement simple signifie, dans le cas de Z. terrestris—L. thyrsiflora, que si l’on sème les grai- nes de la plante hybride, on obtiendra vraisemblablement : poule L::ferres{ris ul, . . . :. EAN 507 de Z.4{errestris x L. thyrsiflora (2BR) 25/ude Z. thyr$tHora te. . 25. (2) Si l’on sème de nouveau toutes les graines obtenues du semis précédent, il est évident que les formes pures de Z. terrestris et de ZL. thyrsiflora, étant entièrement libérées, se comporteront comme si elles n'avaient jamais fait partie d'un composé hybride. Les graines des formes hybrides 188 LE NATURALISTE CANADIEN (2BR) donneront naissance à une descendance figurée encore par la formule 2?+2BR + R°, et ainsi de suite. De Ja Loi de Mendel et des travaux de Hugo de Vries, il ressort clairement : 1°. Que les graines müûries sur une plante hybride ne donnent pas toutes des hybrides ; 2°. Qu'un hybride est un produit éminemment instable, dont la tendance naturelle est la réversion vers les formes- mères ; en d’autres termes : que l’état d’hybridité est un état de compression contre lequel s’insurgent les forces spécifiques propres des parties composantes. 3°. Qu'il ne peut plus être question d’une transforma- tion continue des formes organiques par la sélection ou le croisement des races ou variétés; c’est par brusques sauts (mutations ) que les nouvelles variétés paraissent se for- mer. (Travaux de Vries.) Le darwinisme se trouve donc ainsi sapé dans sa base même. D'ailleurs, cette doctrine scientifique dont on avait fait durant cinquante ans—peut-être contre le gré de son auteur—une machine de guerre contre le vieux Dieu gêneur et sa morale encombrante, s'est écroulée autant sous les coups de ses plus ardents coryphées, Haeckel et son école, que sous les expériences du moine autrichien. Le monde savant ne considère plus sérieusement l’hypo- thèse évolutionniste. Je dis: le monde savant, et j'entends par là les hommes qui, dans tous les domaines, font avan- cer la science. Il est certain que toute une école de vul- garisateurs, dénnée de scrupules scientifiques, ou marchant sous l'impulsion reçue, continuera à colporter encore long- temps la pacotille transformiste. «De la théorie de Darwin, dit le célèbre physiologiste Elie de Cyon (1), ne survivront que les nombreuses et ad- 1. Dieu et science, Paris, Aican, 1910. DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L’'INSECTE 189 mirables observations sur la vie des plantes et des animaux qu’il avait si laborieusement accumulées. Son idée géné- rale, l’évolution par la sélection naturelle, fut une grave erreur....Des siècles d'innombrables expériences et d’ob- servations sur les conditions de la vie des cellules et sur leur croissance, ainsi que sur les transmissions héréditaires et sur la nature des variations possibles à produire, passe- ront avant qu’une histoire du développement des espèces puisse être entreprise dans une direction strictement scien- ÉHQUE. .. » Fr. MARIE-VICTORIN. Collège de Longueuil, P. Q. 20 mai 1913. : OO: DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L'INSECTE LA RESPIRATION CHEZ L'HOMME ET LES VERTÉBRÉS (Continué de la page 176.) Mais l'introduction de l’air atmosphérique dans les pou- mons, ce n’est que l'entrée en matière de la fonction de respiration. Il n’y restera pas longtemps avant de se voir, lui aussi, expulsé de la place; mais quel rôle, en quelques instants, il y aura joué! Ni plus ni moins, en pas plus d’une demi-minute, il y aura purifié tout le sang qui rem- plit nos veines, et l’aura complètement revivifié; voilà quel est le grand objet de la respiration, et cela vaut qu’on l’expose avec quelque détail. Pour cet objet, suivons donc le courant sanguin dans la tournée rapide qu’il fait à tra- vers l'organisme. 190 LE NATURALISTE CANADIEN Quand il part des poumons, le sang est chargé du gaz vivifiant qu'est l’oxygène, et sa couleur est d’un beau rouge. Presque aussitôt, il reçoit de l’estomac et des intes- tins les produits utiles de la digestion. Ceux-ci, il les distribue par le système artériel dans tout l’organisme, et c'est en quoi consiste la nutrition, par laquelle les tissus divers s’accroissent ou du moins maintiennent leur activité vitale. Quant à l'oxygène du sang, il se combine avec les principes carbonés des éléments organiques, et cette sorte de combustion développe la chaleur nécessaire au fonction- nement de l’organisme, Par suite de son rôle de distri- bution, le sang perd sa richesse; 1l se charge par contre d’acide carbonique et de déchets divers: il est devenu noirâtre. Il lui faut alors se débarrasser de ces matières inutiles ou nuisibles, et renouveler ses provisions nutritives. Aussi la pompe aspirante que constitue le côté droit du cœur le rappeïle, pour le pousser ensuite vers les poumons. Et c’est ici qu’intervient la respiration, pour débarrasser le sang de l’acide carbonique dont il s’est chargé durant sa course à travers les tissus, et lui rendre l'oxygène qu'il devra utiliser dans le trajet qu’il va de nouveau entre- prendre dans l’organisme. Tout cela se fera au contact de l'air atmosphérique introduit dans les poumons, à chaque instant, par l'inspiration. Et voici, en deux mots, comment s’opèrent cette purification et cette ‘ réoxygénation ” du liquide sanguin. Les artères, qui amènent le sang dans les poumons, se divisent et se subdivisent à l'infini, jusqu’à n'être plus que des tubes très fins (vaisseaux capillaires) D'autre part, la trachée-artère, par laquelle arrive l’air inspiré, se divise, dans la masse pulmonaire, en rameaux bronchiques qui se subdivisent, eux aussi, à l'infini, pour se terminer en petits sacs, nommés «alvéoles pulmonaires», dont la paroi est creusée de dix à vingt cavités. si bien que, à la DEUX GRANDES FONCTIONS CHEZ L’INSECTE IOI fin, on porte à une couple de cent mètres carrés la surfa- ce totale qui dans les poumons est baignée par l'air; si bien, en outre, que par suite de ces ramifications multi- pliées des rameaux artériels et bronchiques, il n’y a plus, entre le sang des uns et l’air des autres, qu’une membrane d’une minceur... à tirer les larmes des yeux.—Mais, qu'est ceci? une membrane mince? et par quoi seulement sont séparés un excès d’acide carbonique (dans le sang) et un excès d'oxygène ( dans l'air)? Eh bien, il n’en faut pas plus pour qu'entre en scène un nouvel agent, je veux dire une nouvelle loi: l’oswmose; et, dans ce pays-là, on peut le croire, les lois s’observent ! Aussitôt, en vertu de cette loi physique très rigoureuse, il s'établit, à travers la mince cloison, un double courant de ces gaz, qui fait qu’à la fin l'oxygène est allé se fixer sur les globules rouges du sang, qui vont l'emporter et le distribuer à tous les éléments de l'organisme ; et que l’acide carbonique, lui, qui ne pouvait que jouer un rôle dangereux dans le liquide sanguin, passe dans les vésicules pulmonaires, puis dans les alvéoles pul- monaires, puis dans les bronchioles—où il n’a pas d’ail- leurs le temps de s’ennuyer; car voici qu’aussitôt la masse pulmonaire se contracte, et le force à sortir par le plus court chemin! Ce plus court chemin, qui est d’ailleurs le seul, ce sont les bronches, la trachée-artère, puis les fosses nasales où la cavité buccale—par où se dégage, dans l’océan atmosphérique, ce méchant acide carbonique, dont les éléments, par des influences diverses, se dissocieront, redeviendront de part et d’autre oxygène et carbone, entre- ront dans je ne sais quelles autres combinaisons, en ce vaste univers, jusqu’à la fin des temps. J'espère que mon lecteur, qui s’est rappelé, au cours de ce bref exposé, les notions qui lui ont été familières un jour ou l’autre, se rend bien compte en ce moment de ce qu'est cette fonction de la respiration chez les vertébrés et 192 LE NATURALISTE CANADIEN chez l’homine.—Eh bien, c’est à ce système respiratoire, qui fonctionne chez les êtres des degrés supérieurs de l’é- chelle zoologique, que nous avons maintenant à comparer le système respiratoire du brillant Papillon, de la Cigale bruyante, de la Mouche importune, du Moustique sangui- naire. (A suivre.) + O: PUBLICATIONS REÇUES — Bulletin of the American Museum of Natural History. Vol. XXXI, 1912. Nous signalons dans ce beau volume l'étude de M. J.-A. Allen : « Historical and Nomenclatorial Notes on North American Sheep.» Il s’agit de notre Mouflon (Ovis montana) de l'Ouest, et des 9 autres es- pèces ou variétés de ce mammifère.—A noter aussi un travail sur le nouveau dinosaurien (Sawrolobhus osborni B. Brown) trouvé derniè- rement dans l’Alberta. — (Ministère des Mines, Canada.) Æapoort sur la partie N.-E. du district de Saskatchewan (J.-B. Tyrrell}; Æapports sur la rivière Stewart, Vukon (J. Keele) et la rivière Peel, Vukon et Mackenzie (C. Camsell). Le rapport de M. Keele contient une liste de lépidop- tères et autres insectes capturés dans le Vukon en 1904-05 ; celui de M. Camsell mentionne des mammifères, des poissons, et des fossiles. Les dépôts d'argile et de schistes de la Nouvelle-Ecosse et d’une partie du Nouveau-Brunswick, par H. Ries et J. Keeiïc. — Rapport de l’Astronome en chef (1909-1910). Vol. I, Ottawa, 1572. — Rapport annuel du Service topographique, 1909-10. Ottawa, 1911. —Cours élémentaire de Cosmographie, à l'usage des élèves de la faculté des Arts de l’Université Laval, par l’abbé Henri Simard, $S. T. D., A. M. Québec, 1913. Vol. in-12, cart. toile, 198 pages, 64 gravures. Il manquait à notre enseignement classique un «manuel d’'Astronomiey», et il fallait se servir, dans nos maisons d'éducation, d'ouvrages préparés pour les maisons de France suivant les programmes d'examens de là- bas, mais plus ou moins appropriés à nos systèmes d’études. M. l’abbé Simard, le distingué professeur d'Astronomie à l’Université Laval de Québec, a su heureusement combler cette lacune, par la publication de ce cours de « Cosmographie (qui n’est que le nom modeste de l’astro- nomie,) »—Comme les autres publications de M. l'abbé Simard, celle-ci se distingue par la simplicité, la précision et la clarté. Notre jeunesse étudiante va se réjouir d’avoir ce joli manuel pour étudier les choses de l’univers, dont notre Terre n’est pas quantité négligeable. Mais tous les gens instruits devraient avoir ce livre dans leur bibliothèque, pour se renseigner rapidement sur tant de questions d'ordre astronomique qui se présentent d’elles-mêmes si souvent. TABLE DES MATIÈRES DU VOLUME XXXIX Page ÉPIQUE 2.2.2 0: saluer ONCE. CT I BeltaciBfovanchers. =: 6: 002.02... 5 0 CE 4 Cuatre les «mauvaises herbes » 2222... .. 0 2. 2. se Le conseil de Biologie du Canada .. .. ..... 7 0... 525 La Terminologie franco-canadienne dans les sciences natu- relles (Huard)..... tee RE Ce 8,27; 37 59 Radonmie SONrCICr(.S722/E). 2 SR... . CP 13, 48 EURRICATIONS RECURS RES - - - - 15,31, 64, 128, 160, 192 Les sections scientifiques de la Société royale du Canada, et les CanaIEnS ETANCAIS. - RE. : . ON PT 17 Cours abrégé d'Histoire naturelle (Huard) ............. .. 92, 146 Au musée de l’Instruction publique.—Les dernières acquisitions .. 33 larponte des Libellules (I/abbé ELRe) ........ 74000: 49 Les Samicles (Fr. Marie-Victorin) 2 ..........2727... 52 Apropos de panthère'et de... \colibraeic. .. …..: 1° 55 Un jugement sur la baguette des sourciers............ ........... 63 Une lettre de l'honorable M. Poirier... ....... . Re Core cee 65 La fabrication du Poisson rouge 422. ... ...... 0... 73 Synonymy of the Provancher collection of Hemiptera (E. P, Van EM AN Se. ane He OR 76, 95, IIO, 123, 137 Les Ammophiles (L'abbé J.-B. Mignault)...............,.......... 81 194 LE NATURALISTE CANADIEN Un entomologiste provincial............... RM ss Gÿ7 Deuxième lettre de l'honorable M. Poirier. "2." "CPEPPEEEEEE Fe En Laponie (Météorologie, Botanique et Zoologie)................ 107 Congrès géologique international, Canada, 1913.............. 113, 147 Plusieurs Cypéracées nouvelles pour la flore de Québec (Fr. Marie- Vaictorin) PP NSP Me» à done CRE ET TRE ER EEE 117 Les uSoutciers A RE. OS ee CCE RES 129, 159, 170 Chez les Pucerons (L'Deslhagies) AMOR EE RP TERRES 130, 154, 164 Un parasite de la Mouche domestique. 0004 SORTE EEE 144 Les coquilles d’huîtres dans les constructions................ ... se Une addition à la faune ornithologique de la province de Québec.. 145 Loboratoire d'entomologie n.. rc RPC EOMECRC ES EPP PP PRES 146 Un ancien ennemi de la pomme de terre (J.-C. Chapaïis) .......... 149 L’appétit des oiseaux (L./Anbonuer).:.4.4040%. PERRET RER I61 Découverte du Lycopode petit-cyprès dans les Laurentides (Fr. M.-Victorin).::,.24:: 1002000... c:cmseecle ct Me ETC 166 La respiration chez l’insecte (L'abbé V.-A. Huard)............. 172, 189 Notes sur deux cas d’hybridisme naturel (Fr. M.-Victorin)........ 177 TABLE ALPHABÉTIQUE TABLE ALPHABÉTIQUE DE PRINCIPAUX NOMS DE GENRES Er D'ESPÈCES ? MENTIONNÉS DANS CE VOLUME Ammophila communis Cress.. 81 Caloptenus femur-rubrum.... 152 Carex:- : 118, 178 Chenopodium ciospermuim. . 2120 Chrysanthemum leucanthe- LT Le ARR RE PMPESERRRE 28 Cyperus esculentus L ........ 118 % Schweinitzii Torr.... ‘ Delphinapterus leucas Pallas.. 33 ID'OIENERS Se AU SN PRE 49 Dolichonyx oryzivorus....... 40 Elodea Canadensis........... 74 Hpicantaiicinerea....:....... 151 & Pennsylvanica.. .... FE Fannia canicularis....... -. 144 FiberizibethiensiL;":. .2 2... 33 Hieracium aurantiacum L.... 4 Éthpparis vulgaris... ...... 74 OR OETIRUUN Le... .. ISI Lycopodium chamæcyparis- sus A Br.... 167 : clavatum L..... 170 . complanatum L. 167, sc Ne inundatum L.... ‘ ss obscaromil,.." 0" Lygæonematus erichsonii IS ÉTAT EEE MAR PER ORRRRRE 16 VROCETSE eue die sn sc 155 Lysimachia stricta Ait........ 185 ds terrestris B. S. P.. 153 ch thyrsifora L:....- L Macrobasis unicolor.......... 151 Mesanbryanthemum cristalli- IEEE LAC CEE MOST OP 28 195 Mesoleius aulicus Grav...... 16 MéSca domestica…"""..2.".". 144 Nasonia tortricis Brues....... 16 Naumburgia thyrsiflora...... 185 Nuphar luteum Smith........ 150 Nymphæa AVENANT 178 Americana M.&St. ‘‘ Ÿ microphylla Pers.. pe rubrodisca Greene.. *‘ < Kalmiana Sims.... EME cristafüs. "#40. 34 Péera flava:: 227 155 SRE. . CT ee 178 Sälimo fontinalis- 28 ‘. SAlAFE Le ss Sanicula Canadensis L...... 53, 54 ee gregaria Bicknell.... 53 Ée Marylandica L.... 53, 54 10 trifoliata Bicknell.... ‘* Scirpus Americanus Pers..... 120 ‘“ atrocinctus Fernald.. 122 ge var. bra- chypodus Fernald.. ‘* ‘_ cyperinus (L.) Kunth. ‘‘ + var. pelius Ferhald ee: ‘ pedicellatus Fernald.. “ ‘_ subterminalis Torr... É TorreyiOlIney.- +. 120 Stomoxys calcitrans.......... 144 Stylopiga orientalis.......... 28 Synthliboransphus antiquus. . 145 anus. .... 2 44 Tortrix fumiferana Clemens.. 16 DR... .... PE 178 ERRATA Page r5, lire : Page 15 (au lieu de 51). Page 30, ligne 6e du bas, lisez : ciospermum. — M Ofébeé, -Nillek 1942 +. re Bu” ol. XXXIX (x1x de la 2e série) No. CANADIEN BULLETIN DE RECHERCHES, OBSERVATIONS ET DECOUVERTES SE RAPPORTANT A L’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA fondé en 1868 par l’abbé Provancher RUE PORT-DAUPHIN Mie j VAE eut à LF SQUUUUET y Qu as PAS (are nn MA 77777 sd 10 Ex Imprimerie LAFLAMME & PROULX, 34, rue Garneau, Québec. © SOMMAIRE DE CÉÊTE LIVRAISON dr Re OA M «£e lac Provancher . . . 8 1) PENSER SÉRRLe les « mauvaises best SES M 2 5 TT > Ta terminologie franco-canadienne dans les sciences Nr paturelles 4, 0, . NEURONES QE Radeux 1x sourcier» fi .1.:,0)50 EE. AR nee recrues. LA. Re IE ENS “ENS 0 : El rs Le N'ATURALISME CANADIEN paraît à la fin de chaque tnois, par #4: ‘fivraison de 16 ou 20 pages in-8°. a E Le prix de l’abonnement pour le Canada et les Etats- nt est “d UNE PIASTRE par année.—Pour la France et les autres : pays de P'Union prstale, SIX FRANCS. Les reçus d'abonnement seront renfermés dans la vase sui- .vant la date où l’on aura payé. On ne peut s'abonner pour moins d’un an. Les personnes qui . -Souscrivent au journal durant l’année reçoivent les nnméros parus depuis le commencement du volume. La direction entend laisser aux correspondants du journal l’en- tière responsabilité de leurs écrits. Toutes les communications, relatives à la rédaction ou à l’admi- 1 nistration du NATURALISTE, doivent être adressées au directeur- * «propriétaire, M. l’abbé V.-A. Huard, à l’Archevêché, Québec.— Téléphone 1519. à AGENCE DU ‘“NATURALISTE’”’ Paris.—MM. R. Roger & F. Chernoviz, Editeurs, 99, Boulevard Raspail, Paris. En vente au bureau du Waturaliste : .: —ZLabrador et Anticosti, par l'abbé Huard, 520 p. in 80, $#1.25 ; franso +: 45 S pQNE tous pays. a Le Naturaliste canadien, Volumes ou numéros détachés. —Les Li Les Mollusques, de Provancher. AMERICAN ENTOMOLOGICAL CO. 55 Stuyvesant Ave., Brooklyn, N. Y. are Didie No 6 d'insectes d'Anaee et autres continents et Ca- dié] # 10 cts, à retenir sur le premier achat. $ Monré — Prix modérés.— Articles soignés, - , À. RE 2 * Geo. Franck, Manager L L'Apôtre du Saguenay, par l'abbé Huard, 3e édition, 55 cts franco. : ‘taloque illustré de fournitures entomologiques, in 80, 104 p. x expé- - istructeurs de meubles et de tiroirs pour collection d'insectes, a. 1. XXXIX (x1x de la 2e série) No. 2 Québec, Août 1912 GANADIEN BULLETIN DE RECHERCHES, OBSERVATIONS ET DECOUVERTES SE RAPPORTANT A L’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA fondé en 1868 par l'abbé Provancher A SHARE (Q> PA AA ‘> : a 210 C7 À 7 DR. ZA mme es — 48 # A / PUY 4 LA hd LOU TURN : . 4 à e 9 . LE [] £ le Ta = 4 » Imprimerie LAFLAMME & PROULX, 34, rue Garneau, Québec. K 1 ñ 6 CRE " spà Le E PU 224 cs? SOMMAIRE DE CETTE LIVRAISON Les sections scientiques de la Société royale du Canada et les Canadiens-Français. : "7,00 CCR La terminologie franco-canadienne dans les sciences Haturelles :.55 42680... SUN ENSERR Publications reçues 9, 4121 AOC NS Le NATURALISTE CANADIEN paraît à la fin de chaque mois, par livraison de 16 ou 20 pages in-8°. Le prix de l’abonnement pour le Canada et les Etats-Unis, est d'UNE PIASTRE par année.—Pour la France et les autres pays de l’Union postale, SIX FRANCS. Les reçus d'abonnement seront-renfermés dans la livraison sui- vant la date où l’on aura payé. On ne peut s’abonner pour moins d’un an. Les personnes qui souscrivent au journal durant l’année reçoivent les nnméros parus dépuis le commencement du volume. La direction entend laisser aux correspondants du journal l’en- tière responsabilité de leurs écrits, Toutes les communications, relatives à la rédaction ou à l’admi- nistration du NATURALISTE, doivent être adressées au directeur- propriétaire, M. l'abbé V.-A. Huard, à l’Archevêché, Québec.— Téléphone 1519. AGENCE DU ‘“NATURALISTE’”’ Paris.—MM. R. Roger & F. Chernoviz, Editeurs. $ 99, Boulevard Raspail, Paris. En vente au bureau du Waturaliste: : — Labrador et Anticosti, par l'abbé Huard, 520 p. in 80, $#1.25 ; franco : $1.45 pour tous pays. . —L'Apôtre du Saguenay, par l'abbé Huard, 3e édition, 55 cts franco. ; —Le Naturaliste canadien, Volumes ou numéros détachés. © —Les Coléoptères, Les Mollusques, de Provancher. AMERICAN ENTOMOLOGICAL CO. 55 Stuyvesant Ave., Brooklyn, N. Y. * Prix-Liste No 6 d'insectes d’ Amérique et autres continents et Ca- … talogue illustré de fournitures entomologiques, in 80, 104 p. : expé- dié pour 10 cts, à retenir sur lé premier achat. { : Constructeurs de meubles et de tiroirs pour collection d'insectes, Ronnie. — Prix modérés. — Articles soignés. Geo. Franck, Manager CA | : | ÿ D 'XXXIX (x1x de la 2e série) No. "4 Québec, Septembre 1912 GANADIEN BULLETIN DE RECHERCHES, OBSERVATIONS ET DECOUVERTES SE RAPPORTANT A L’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA fondé en 1868 par l’abbé Provancher QUELS AQ = gliusuitt er’ £ : . Ç - > Dr QUÉBEC 2, RUÉ PORT-DAUPHIN LAÆRL HU QITE a mm QT 7 777 AA nr. 7 ee - SOMMAIRE DE CETTE LIVRAISON Au Musée de l’Instruction publique. Les dernières acquisitions . . ie ANR RS Le Conseil de Biologie 14 Cats ET SE La terminologie franco-canadienne dans les sciences ù naturelles .° 488". 1 TS ORNE Radoux le « sourcienne . 2/27 SITE Le N'ATURALISTE CANADIEN paraît à la fin de chaque mois, par livraison de 16 ou 20 pages in-8°, Le prix de l’abonnement pour le Canada et les Etats- Unis, est d'UNE PIASTRE par année.—Pour la France et les autres pays de l’Union postale, IX FRANCS. Les reçus d'abonnement seront renfermés dans la livraison sui- vant la date où l’on aura payé. On ne peut s'abonner pour moins d’un an. Les personnes qui souscrivent au journal durant l’année reçoivent les nnméros parus depuis le commencement du volume. La direction entend laisser aux correspondants du journal len- tière responsabilité de leurs écrits, Toutes les communications, relatives à la rédaction ou à l’admi- nistration du NATURALISTE, doivent être adressées au directeur- propriétaire, M. l’abbé V.-A. Huard, à l’Archevêché, Québec.— Téléphone 1519. AGENCE DU “NATURALISTE?’’ Paris.—MM. R. Roger & F. Chernoviz, Editeurs. 99, Boulevard Raspail, Paris. En vente au bureau du Waturaliste : — Labrador et Anticosti, par l'abbé Huard, 520 p. in 80, f1.25; franco $1.45 pour tous pays. —L'Apétre du Saguenay, par l'abbé Huard, 3e édition, 55 cts franco. —Le Naturaliste canadien, Volumes ou numéros détachés. —Les Coléoptères, Les Mollusques, de Provancher. AMERICAN ENTOMOLOGICAL CO. 55 Stuyvesant Ave., Brooklyn, N. Y. Prix-Liste No 6 d'insectes d’ Amérique et autres continents et Ca- talogue illustré de fournitures entomologiques, in 80, 104 p. : expé- : dié pour 10 cts, à retenir sur le premier achat. Coustructeurs de meubles et de tiroirs pour collection d'insectes, Nouveœutés.— Prix modérés. — Articles soignés. Geo. Franck, Manager LE LA 4 + AE Es F = 60 YEARS’ EXPERIENCE PAIE TRADE MaAR&S DESIGNS CoPyrIGHTS &C. EE may quickly ascertain Our opinion free w _— an LA tionsstrictly confidential. HANDBOOK on Patents gent free. Oldest agenoy for, for securing patents. Deer oi taken through Munn & Co. receive ecial notice, without = ie + in the "Scientific fimerican, A handsomely illustrated weekly. culation of any scientific journal. Les a Canada, $3.75 a year, postage prepaid. Sold by all newsdealers. MUNN & CO,8618raévar. New York Branch Office, 6235 F St. Washington, D, C. LA REVUE CANADIENNE La plus belle publication du Canada, et la plus ancienne revue littéraire française de !’ Amérique—43° année de de 700 pages, magnifiquement illus- trés. L'abonnement n’est que de $3.00. S’adresser à la REVUE CANADIENNE, l’année deux beaux volumes de près Université Laval, Montréal. publication. — Elle forme à la fin de ABRÉGÉ DE ZOOLOGIE. — Par l'abbé HUARD. Vol in-12 de 130 pages, illustré de 122 vignettes : — Prix 25 sous, franco 28 sous, chez l’auteur, à l’Archevêché de Québec. MANUEL DES SCIENCES USUELLES. Par les abbés V.-A. HUARD et H. SIMARD. 2ÈME ÉDITION Vol. in-12 de 380 pages, illustré de 234 vignettes :—Prix, fo.75 cts l’exemplaire, joli cartonnage papier, En vente seulement chez M, l’abbé Huard, à l’Archevêché de Québec.—Prix spécial à la douzaine. LES ÉTAPES D'UNE CLASSE AU PEMT SÉMINAIRE DE QUÉBEC, 1859-1868, par l'abbé D. Gosselin, curé de Charlesbourg, P. Q.—In-12 de 292 pages, illustré.—Prix: 75 sous, chez l’auteur et chez les libraires. | AVIS AUX ZOOLOGISTES Monsieur PETIT Ainé, naturaliste, 21, rue du Caire, Paris (France); membre Fondateur de la Société Zoologique de France, ancien voyageur au Congo français, serait désireux d’entrer en relation avec des per- sonnes pouvant lui procurer en grand nombre des Grands Ducs, P#60 maximus, en peaux bourrées, des Chouettes (S/rix) de toutes espèces, des ailes de grands Goélands des coléoptères brillants ; puis un type ou deux de Canards Eider (Somateria spertabilis), plumage parfait d'hiver, et Macreuse à lunettes (Oidemia perspicillata), le tout payable en espèces, en échange ou en marchandise, D 7 de + Die se DER E nm | € _ aèrne EDITION du TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE DE ZOOLOGIE ET D'HYGIÈNE par l’abbé V.-A. Huard. Volume in-12 de VIII-265 pages, 1llustré de 202 vignettes dans le texte. — Prix : 60 cts l’ex., en vente chez l’auteur, à Québec et chez les libraires de Québec et de Montréal. GUERISSEZ VOTRE RHUMATISM . Le Rhumatisme, le Lumbago, la Sciatique, les douleurs de reins ont été guéris de la façon la plus complète au monde par l'emploi de la Stillingia, de l’Iodure de Potassium, de Racine de Vigne, de Résine de Gaiac, et de Salsepareillc {1 a été prouvé que leur combinaison consti- tue le meilleur remède en existence pour le rhumatisme ; il a guéri des cas opiniâtres durant depuis 30 et 40 années et au-dessus, même chez des vieillards. ‘Les cinq ingrédients mentionnés ci-dessus préparés avec soin et habi- leté non seulement comme proportions, mais encore comme choix de ma- tières ont été compressés en forme de tablettes et sont appelés TONIQUE GLORIA et 50,000 boîtes sont offertes gratuitement pour le faire connaître. Après expérience personnelle le directeur du Vafuraliste recommande ce remède. C’est le seul médicament qui purifiera votre système rapi- dement. Envoyez simplement votre nom et votre adresse en y joignant cette annonce, JOHN A. SMITH, 13 Laing Bldg., Windsor, Ont., et par le retour de la malle vous recevrez une boîte d’essai absolument gratis. RDETTE 2 RONDS PETER SPEED EP SENTE, CEE EN EE RNEE IMPRESSIONS D'UN PASSANT (Amérique—Europe—Afrique) par l’abbé V.-A. Huard. Volume in-8°, de vir1-366 pages.—Prix : #1.00. EN VENTE : Chez l’auteur. à Québec, et aux Librairies J.-P. Gar- neau et A.-O. Pruneau, Québec. A MonTREAL : Librairies Beauchemin, Granger, Cadieux & Derome. CIE J.-A. LANGLAIS & FILS LIBRAIRES, Rue Saint-Joseph, PAPETIERS. SAINT-ROCH, - QUEBEC. VENTE A GRANDE RÉDUCTION de livres d'église, de piété, de classe, et de bibliothèque. Assortiment complet de PAPETERIE, ETC., ETC. Unique Agence pour les célèbres cloches de la maison Havard. Les Fa- briques sauvent 30% en nous confiant leur commande. CÉLÉRITÉ ET SATISFACTION GARANTIES. - 60 YEARS’ EXPERIENCE littéraire française de 1’ Amérique—43° année de _ TRADE MARKS DESsIcns CoPyrIGHTS &c. Anyone sending a sketch and RES we ns etner VUE CANADIENNE, E A 4 res taken through np À Co. receive ecial notice, Without charge, in "Scientific Ainerican. A handsomely illustrated weekly. Largest, cir- lation of any scientific journal. Terms for Canada, 83.75 a year, postage prepaid. Sold by all newsdealers. MURN & CO,2518rca, New VOrk Branch Office, 625 F St. Washington, D. C. Es REVUE CANADIENNE La plus belle publication du Canada, de 700 pages, magnifiquement illus- trés. L'abonnement n’est que de $3.00. l’année deux beaux volumes de près S'adresser à la R et la plus ancienne revue publication. — Elle forme à la fin de Université Laval, Montréal. ABRÉGÉ DE ZOOLOGIE,. — Par l'abbé HUARD. Vol in-12 de 130 pages, illustré de 122..vignettes : — Prix 25 sous, franco 38 sous, chez l’auteur, à l’Archevêché de Québec. MANUEL DES SCIENCES USUELLES. Par les abbés V.-A. HUARD et H, SIMARD. 2ÈME ÉDITION Vol. in-12 de 380 pages, illustré de 234 vignettes :—Prix, fo.75 cts l’exemplaire, joli cartonnage papier. En vente seulement chez M. l’abbé _ Huard, à l’Archevêché de Québec.—Prix spécial à la douzaine. LES ÉTAPES D’UNE CLASSE AU PEMT SÉMINAIRE DE QUÉBEC, 1859-1868, par l'abbé D. Gosselin, curé de Charlesbourg, P. Q.—In-12 de 292 pages, illustré.—Prix: 75 sous, chez l’auteur et chez les libraires. AVIS AUX ZOOLOGISTES Monsieur PETIT Ainé, naturaliste, 21, rue du Câire, Paris (France), membre Fondateur de la Société Zoologique de France, ancien voyageur au Congo français, serait désireux d’entrer en relation ayec des per- sonnes pouvant lui procurer en grand nombre des Grands Ducs, 24b0 maximus, en peaux bourrées, des Chouettes (S/rix) de toutes espèces, des ailes de grands Goélands des coléoptères brillants ; puis un type ou deux de Canards Eider (Somalteria spertabilis), plumage parfait d'hiver, Es et Macreuse à lunettes (Oidemia perspicillata), le tout payable. en espèces, en échange ou en marchandise. sème EDITION du TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE DE ZOOLOGIE ET D'HYGIÈNE par l'abbé V.-A. Huard. Volume in-12 de VIII-265 pages, 1llustré de 202 vignettes ’ dans le texte. — Prix : 6o cts l’ex., en vente chez l’auteur, à Québec et chez les libraires de Québec et de Montréal. GUERISSEZ-VOTRE RHUMATISME Le Rhurtiatisme, le Lumbago, la Sciatique, les douleurs de reins ont été guéris de la façon la plus complète au monde par l'emploi de la Stillingia, de l’Iodure de Potassium, de Racine de Vigne, de Résine de Gaiac, et de Salsepareillc 11 a été prouvé que leur combinaison consti- | tue le meilleur remède en existence pour le rhumatisme ; il a guéri des cas opiniâtres durant depuis 30 et 40 années et au-dessus, même chez des vieillards. Les cinq ingrédients mentionnés ci-dessus préparés avec soin et habi- leté non seulement comme proportions, mais encore comme choix de ma- tières ont été compressés en forme de tablettes et sont appelés TONIQUE. GLORIA et 50,000 boîtes sont offertes gratuitement pour le faire connaître. Après expérience personnelle le directeur du Vaéuraliste recommande ce rémède. C’est le seul médicament qui purifiera votre système rapi- dement. Envoyez simplement votre nom et votre adresse en y joignant cette annonce, JOHN A. SMITH, 13 Laivg Bldg., Windsor, Ont., et par le retour de la malle vous recevrez une boîte d’essai absolument gratis. IMPRESSIONS D'UN PASSANT (Amérique—Europe— Afrique) par l’abbé V.-A. Huard. Volume in-8°, de virr-366 pages.—Prix : #1.00. EN VENTE: Chez l’auteur. à Québec, et aux Librairies J.-P. Gar- neau et A.-O. Pruneau, Québec. . A MonTREAL : Librairies Beauchemin, Granger, Cadieux & Derome. CIE J.-A. LANGLAIS & FILS : LIBRAIRES, Rue Saint-Joseph, PAPETIERS. SAINT-ROCH, - QUEBEC. | VENTE A GRANDE RÉDUCTION de livres d’église, de piété, “ de classe, et de bibliothèque. Assortiment complet de PAPETERIE, ETC:, Erc. . Unique Agence pour les célèbres cloches de la maison Havard. Les Fa- Fire sauvent 307 en nous confiant leur commande. CÉLÉRITÉ ET SATISFACTION GARANTIES. AE tn d 60 YEARS’ EXPERIENCE de littéraire ée guiasion of any scientific journal. Terms for Tr A .15 a a postage prepaid, Sold by MUNIE Cos 2618rvadves, NEW VOTK 65 F &t.. Washington, D. C, el [D] n ' . _. SÉSTÉÉSE = a 45 DZ É à ; es 9 & v Les a - f e| +—+ : i n © a 14 a L [e) a JT LITE A Le | A ne “Ÿ" Le cars n © < . REDR ENTER Teaoe Marks < © À 0 EC 2 g DEsiens “16 2 © de 0H MS D'ou d'a 0 CoPyRIGHTS &C. À = SE d'à Anyone 4.4 à 2 RSR and description may le) = © vo s à = eo quickly ascertain our opinion free whether an 4j © © = & # © A invention is probably atenteble ommunica- Ars A = Ÿ A tions stri ul on Patents D O R S DER sent fre Idest TER for SCurE atents æ, Ÿ à = LV — > Pat rou 0. recelve Œ — | w D E œ BA ie rs Ps De itLouS AL M ds . bo Go 5] n S © © RARON “RCE 2 TR 9 & guation of 22 illustrated weekly. Largest cir- = = fx 5 < A "A CA S © 816 ÿ SSSSE gd RE COR EC m Un TER française de !’A ABRÉGÉ DE ZOOLOGIE. — Par l'abbé HUARD. Vol in-12 de 130 pages, illustré de 122 vignettes : — Prix 25 sous, franco 28 sous, chez l’auteur, à l’Archevêché de Québec. MANUEL DES SCIENCES USUELLES. Par les abbés V.-A. HUARD et H. SIMARD. 2ÈME ÉDITION Vol. in-12 de 380 pages, illustré de 234 vignettes :—Prix, fo.75 cts l’exemplaire, joli cartonnage papier. En vente seulement chez M. l'abbé Huard, à l’Archevêché de Québec.—Prix spécial à la douzaine. EN D SE RE UE LT ES 2m LES ÉTAPES D’UNE CLASSE AU PETIT SÉMINAIRE DE : QUÉBEC, 1859-1868, par l’abbé D. Gosselin, curé de Charlesbourg, : P. Q.—In-r2 de 292 pages, illustré.—Prix: 75 sous, chez l’auteur et chez ! les libraires. AVIS AUX ZOOLOGISTES Monsieur PETIT Ainé, naturaliste, 21, æue du Caire, Paris (France), membre Fondateur de la Société Zoologique de France, ancien voyageur au Congo français, serait désireux d’entrer en relation avec des per- sonnes pouvant lui procurer en grand nombre des Grands Ducs, Bubo \ maximus, en peaux bourrées, des Chouettes (.S/rix) de toutes espèces, des aïles de grands Goélands des coléoptères brillants ; puis un type ou deux de Canards Eider (Somaferia spertabilis), plumage parfait d'hiver, et Macreuse à lunettes (Oidemia perspicillata), le tout payable en : espèces, en échange ou en marchandise. SOMMAIRE DE CETTE LIVRAISON Notes sur deux cas d’hybridisme naturel. Mendelisme et Darwinisme. (Fr. M.-Victorin.) "mener Deux grandes fonctions chez l’insecte, (Suwife.) . 189 Publications reçues! 44, -4 22 0 RENNES LE NATURALISTE CANADIEN paraît à la fin de chaque Ho par : livraison de 16 ou 20 pages in-8°, Le prix de l’abonnement pour le Canada et les Etats-Unis, est d'UNE PIASTRE par année.—Pour la France et les autres pays de l’Union pwstale, SIX FRANCS. Les reçus d'abonnement seront renfermés dans la livraison sui- vant la date où l’on aura payé. b On ne peut s'abonner pour moins d’un an. Les personnes qui souscrivent au journal durant l’année reçoivent les nnméros parus depuis le. commencement du volume. La direction entend laisser aux correspondants du journal l’en- tière responsabilité de leurs écrits. Toutes les communications, relatives à la rédaction ou à l’admi- nistration du NATURALISTE, doivent être adressées au directeur- propriétaire, M. l'abbé V.-A. Huard, à l’Archevêché, Québec.— Téléphone 1519. AGENCE DU “NATURALISTE?’’ Paris.—MM. R. Roger & F. Chernoviz, Editeurs. 99, Boulevard Raspail, Paris. En vente au bureau du Waturaliste : — Labrador et Anticosti, par l'abbé Huard, 520 p. in 80, $1.25; franco. $1.45 pour tous pays. —L" Apôtre du Saguenay, par l'abbé Huard, 3e édition: 55 cts franco. — Le Naturaliste canadien, Volumes ou numéros détachés. —Les Coléoptères, Les Mollusques, de Provancher. AMERICAN ENTOMOLOGICAL CO. 55 Stuyvesant Ave., Brooklyn, N. Y. Prix-Liste No 6 d'insectes d’ Amérique et autres continents et Ca- taloque illustré de fournitures entomologiques, in 80, 104 p. : expé- dié pour 10 cts, à retenir sur le premier achat. Constructeurs de meubles et de tiroirs pour collection d'insectes, Nouveœutés.— Prix modérés. —Articles soignés. Geo, Franck, Manager AA, 2 V7 © dd 60 YEARS’ v € ei EXPERIENCE =. dü Z «QU 2 D = Le — [e| Lou 1 A ên 2 Ÿ < Ô Teave MarK«s re DEsIens 5 CoPpYyRIGHTS &C. > , AS 7 imérique Anyone sending a sketch and description may quickly ascertain our opinion free w ren an invention is probably patentable. Communica- tions Se reunsdential HANDBOOK on Patents sent free. Oldest agenay for for securing patents. Patents taken through re AA Co. receive epecial notice, without charge, in "Scientific Ainerican, A handsomely illustrated weekly. Largest cir- œulation of any scientific journal. ‘Terms for Canada, $3.79 a year, postage prepaid, Sold.by all newsdealers. MUNN & Co.serruw New York Branch Office, 625 F St. Washington, D. C. LA REVUE CANADIENNE L'abonnement n'est que de:$3.00. la RE La plus belle publication du Canada, et la plus ancienne revue de 700 pages, magnifiquement illus- publication. — Elle forme à la fin de l’année deux beaux volumes de près Université Laval, Montréal. française de !’ A S’adresser à trés. ABRÉGÉ DE ZOOLOGIE. — Par l'abbé HUARD. Vol in-12 de 130 pages, illustré de 122 vignettes : — Prix 25 sous, franco 28 sous, chez l’auteur, à l’'Archevêché de Québec. MANUEL DES SCIENCES USUELLES. Par les abbés V.-A. HUARD et H. SIMARD. 2ËME ÉDITION Vol. in-12 de 380 pages, illustré de 234 vignettes :—Prix, fo.75 cts l’exemplaire, joli cartonnage papier. En vente seulement chez M. l’abbé Huard, à l’Archevêché de Québec.—Prix spécial à la douzaine. RAR DU TT TOME EE ARMES UNE ER PTT EL TER ENT à LE mm qe _ LES ÉTAPES D'UNE CLASSE AU PETT SÉMINAIRE DE QUEBEC, 1859-1868, par l'abbé D. Gosselin, curé de Charlesbourg, P. 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Volume in-12 de VIII-265 pages, 1llustré de 202 vignettes . dans le texte. — Prix : 60 cts l’ex., en vente chez l’auteur, à Québec et chez les libraires de Québec et de Montréal. 4 bond GUERISSEZ VOTRE RHUMATISME Le Rhumatisme, le Lumbago, la Sciatique, les douleurs de reins ont été guéris de la façon la plus complète au monde par l'emploi de la Stillingia, de l’Iodure de Potassium, de Racine de Vigne, de Résine de Gaiac, et de Salsepareillc {1 a été prouvé que leur combinaison consti- tue le meilleur remède en existence pour le rhumatisme ; il a guéri des cas opiniâtres durant depuis 30 et 40 années et au-dessus, même chez des vieillards. Les cinq ingrédients mentionnés ci-dessus préparés avec soin et habi- leté non seulement comme proportions, mais encore comme choix de ma- tières ont été compressés en forme de tablettes et sont appelés TONIQUE GLORIA et 50,000 boîtes sont offertes gratuitement pour le faire connaître. 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