/l^ îv- --?..4i«i^' l**'*^ ^ \ -)^- 'A f';^!^ ^^ .\'^, ^/" #*A ■<;'^ ^ .■.^■• r-^' :./<•■■■- • ;^.. '^^ ^^âikHi^^^/^ Î'ÎWI ,i,fc.\è'/^-: Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from Open Knowledge Gommons http://www.archive.org/details/leonssurlaphys04miln LEÇONS SUR LA PHYSIOLOGIE ET L'ANATOMIE COMPARÉE DE L'HOMME ET DES ANIMAUX FAITES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS H. lIIIiMi: EDWARDS 0. L. H., C. L. N. Doyen de la Faculté des sciences de Paris, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle; Membre de l'Institut (Académie des sciences) ; des Sociélés royales de Londres et d'Edimbourg ; des Académies de Stockholm, de Saint-Pétersbourg, de Berlin, de Kônigsberg, de Copenliague, de Bruxelles, de Vienne, de Turin et de Naples ; de la Société Hollandaise des sciences ; de l'Académie Américaine ; De la Société des Naturalistes de Moscou ; des Sociétés Lînnéenne et Zoologique de Londres ; de l'Académie des Sciences naturelles de Philadelphie ; du Lycéum de New-York ; des Sociétés d'Histoire naturelle de Munich, Somerset, Montréal, l'ile Maurice; des Sociétés Entoraologiques de France et de Londres ; des Sociétés Ethnologiques d'Angleterre et d'Amérique , de l'Institut historique du Brésil ; De l'Académie impériale de Médecine de Paris ; des Sociétés médicales d'Edimbourg, de Suède et de Bruges ; de la Société des Pharmaciens de l'Allemagne septentrionale ; Des Sociétés d'Agriculture de Paris, de New -York, d'Albany, etc. TOME QUATRIEME C4FÏ1. PARIS LIBRAIRIE DE VICTOR MASSON PLACE DE L'ÉCOLE-DE-MÉDECINE M DCCC LIX Droit lie Irniliictiiiii risprvé. '^/ LEÇONS SUR LA PHYSIOLOGIE ET L'ÂNAÏOMIE COMPARÉE DE L'HOMME ET DES ANIMAUX. TRENTE ET UNIÈME LEÇON. Suite de l'histoire de la circulation du sang. — Des' mouvements du cœur et du mécanisme de son action. § 1. — Les laits don! j'ai rendu compte dans les précédentes Leçons suffisent pour nous donner une idée i^énérale de la circu- '^''■ lalion du sang et de la route parcourue par ce liquide dans '^'"'^'" l'intérieur du corps de tous les êtres animés ; mais lorsqu'on veut approfondir l'étude de ce phénomène important, il est nécessaire d'examiner de plus près le mécanisme des organes moteurs dont l'action détermine le courant irrigatoire. Pour les Animaux inférieurs, nous pouvons nous passer de la con- naissance de ces détails; mais, pour l'histoire physiologique de l'Homme , ce complément d'instruction me [larait indispen- sable. L'étude des mouvements du conir occupa les gi'ands méde- cins de ranli(juité; llarvey y accorda aussi une attention sérieuse, et llaller la [)oursuivit dans une longue séiic d'expé- IV. 1 Élude lies mouveiiiciils 2 MÉCANISME DE LA CillCLLATION. i'ieiices sur des Anini|i)i'^Xi \V|i)V|ani|5(-. xMais c'est surtout depuis une trentaine d'années qu'elle a pris beaucoup d'importance, à raison des relations que les pathoîogistes ont découvertes entre ces phé- nomènes et certains signes à l'aide desiiuels on peut reconnaître l'existence de diverses maladies de l'appareil circulatoire (1). Malheureusement ces investigations olîrent de grandes diffi- cultés qui dépendent, soit de la complication des mouvements du cœur et de la rapidité avec laquelle ces mouvements se succèdent ; soit du trouble qui se manifeste dans les fonc- tions de cet organe, et d'autres accidents physiologiques qui se déclarent quand on ouvre largement le thorax pour mettre à découvert. les parties dont il est nécessaire d'observer de près (l) Les travaux de Harvey, de Se- veinent. Parmi les publications qui nac, de Haller et de plusieurs physlo- ont fourni des éléments utiles pour la iogisles des xvii" et xviiie siècles, solution des questions complexes sou- avaienî jeté beaucoup de lumière sur levées par cette étude, je citerai d'a- l'Iiistoire des mouvements du cœur, bord celles, de MM. Turner , Hope , lorsque les découvertes de Lacnnec, Marcd'Espiné, Magendie, etdediverses relatives à Tauscul talion {a), vinrent commissions instituées à Dublin et à appeler de nouveau l'attention des Londres par « l'Associalion Britanni- médecins sur ce sujet, et devinrent le que pour les progrès des sciences », point de départ d'une série très nom- et chargées de faire des expériences breuse de recherches variées, qui au- à ce sujet (6). M. Beau publia vers la jourd'hui encore se poursuivent acti- même époque un travail considérable (8) Laènnec, Traité d'auscultation médiate ei des, maladies des poumons el du coeur. Paris, 1819, 2 vol. in-8 . — L'édition que je cile ici est la dernière publiée du vivant de l'auteur en 1 826. (b) Turner, Observations on ihe Cause of Ihe Sounds produced by Ihe Heart (Trans. of the Med. Chirurg. Soc. of Edluburgh, 4 859, t. 111, p. 205). — Hope, Expérimental Researches on Ihe Action of Ihe Heart {Médical Gazette, 1830). — A Treatise on tue Ulseases of the Heart and Great Vessels, d' édit., 1839, p. 9 el suiv. — Marc d'Espine, Recherches expérimentales sur qiielques~unes des bases qui doivent servir au diagnostic des maladies du cxur el de la circulation {Archiv. gén. de méd., i 831 , t. XXVU, p. Li5). — Magendie, Mém. sur l'origine des bruits normaux du cœur (Mém. de l'Acad. des sciences, lome XIV). — Adams, Law, Greene, etc., Report on Ihe Motions and Sounds of the Heart, brj the Dublin Sub-Committee of the Médical Section (5''' Report of the British Association for the Advancement uf Science, l83o, p. 243). — Macariney, Adams, elc, Second Report of the Dublin Sub-Committee (6"" Rep. of the Bnf. issoc. , 1836, p. 275). — Williams , Todd et Clendinning ,, Rep. of thé London Siit-Committee on the Motions and Sounds of the Heart (Brit. Assoc, 1836, p. 261). — Cleudinning', Report on the Motions and Sounds of the-Heart (Brit. Assoc, 1840, p. 163). — Voyez aussi Pennock, Report of Experiments on the Action of the Heart {Am.erican Journal uf Médical Science, 1839, p. 29 et 41 5). MOUVEMEISTS DU COEUK. 3 le jeu normal. Aussi, malgré les recherehes multipliées entre- prises de toutes parts à ce sujet, reste- t-il beaucoup d'incerti- tude sur plusieurs points fondamentaux, el; les auteurs sont-ils très partagés d'opinion quant à Tinterprétation des faits obser- vés. Je n'entreprendrai donc pas l'examen de toutes les ques- tions d'un intérêt purement médical qui se rattachent à l'histoire des mouvements du cœur , et je m'apphquerai seulement à l'étude des phénomènes principaux que le physiologiste ne doit pas ignorer. § 2. — Nous savons que le cours du sang dépend des con- Aitenianœ tractions du cœur, et les expériences de Harvey, dont j'ai déjà j™°'^]'.g™ig"t'^ rendu brièvement compte, nous ont appris que ces contractions ^^^^''^^ ^ 111 ventricules. périodiques se font alternativement dans les ventricules et les oreillettes. Pour s'en convaincre, il suflit de mettre à découvert le coeur d'une Grenouille vivante, ainsi que Haller et ses nombreux successeurs l'ont fait souvent. En effet, on voit alors que la por- tion inférieure de cet organe se gonfle et rougit, pendant (jue sa portion supérieure se resserre, puis qu'elle se contracte à son tour, et qu'en même temps les oreillettes situées au-dessus se dilatent. Plusieurs physiologistes ont pu constater également cette alternance dans les mouvements des deux étages du cœur sui- les mouvemeiils du cœur el sur i^'aivre, dont les résulials sont, remar- ies bruits qui les accompagnent; mais quablement nets (b). la théorie nouvelle qu'il en donna ne Pour l'hislcrique de ces travaux , me paraît pas admissible (o). Enfin, je on peut consulter un article insért; signalerai encore les recherches de dans le journal V Expérisnce , par AIM. Surmay, et surtout les expérien- M. Beaugrand, et l'ouvrage sur l'aus- ces récentes de MM. Chauveau et cultalion par MAI. Barth et r.oger (t). («) beau , liecherclies sur les mouvements du cœur {Archives yénéralcs de médecine, d835 , i' série, t. IX, p. 389). — Traité expérimental et clinique d'auscultation appliquée à l'élude des maladies du poumon et du cœur, 4 856, in-8. {b'j Surinay, Itech. sur les mouvements el les hruils du cœur (Gazette médicale, 1852, 3" série, l. VII, p. «53). — Chauveau et Faivre, Nouv. rech. expérim. sur les mouvements el les hruils iion)i,au:c du cœur (extrait de la Gazette médicale, 1850). (c) Beaugrand, Remarques historiques accompaqnant la Iraduclion d'un mémoire sur tes mou- lemenls el tes bruits du cœur, par Pennock cl Moorc {l'Expérience, 4842, t, X, p. 12',)). — Barlli et P.ogcr, Traité pratiqua d'nicucullaiion, 4' édit., 4854. Il MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dans l'espèce humaine. L'occasion leur en a été fournie par des cas de vice de conformation dans lesquels les parois du thorax étaient restées incomplètes, et le cœur se trouvait presque à nu ou faisait même saillie au dehors. C'est un phénomène constant dans toutes les classes d'Animaux vertébrés; mais il est à noter que le plus ordinairement la systole des oreillettes ne se déclare pas au milieu de l'intervalle compris entre deux contractions des ventricules. Chez l'Homme et chez les Animaux qui s'en rapprochent le plus par leur organisation, elle est suivie presque immédiatement par la systole ventriculaire, et un temps de repos sépare ces deux mouvements d'une nouvelle série de contractions (1). A l'aide de ces observations faites sur l'Homme, et d'une multitude d'expériences faites sur divers Mammifères ainsi que sur des Oiseaux, il a été facile de reconnaître aussi que chacun (l) Une alternance régulière des M. Follin, les deux systoles se sui- deux systoles sans temps de repos, valent presque Immédiatement, mais après l'une ou l'autre, a été observée étaient séparées par un petit inter- par M. Cruveilhier, chez un enfant valle (c). nouveau-né dont le cœur était à dé- Les dissidences d'opinions qui exis- couverl hors de la poitrine (a) ; mais, tent au sujet de la succession plus ou dans un autre cas analogue, décrit par moins rapide des deux systoles ( auri- un médecin américain (M. Uobinson), la culaire et ventriculaire) me paraissent systole ventriculaire succédait si rapi- dépendre d'une certaine variabilité dément à la contraction des oreillettes, dans le rhyllime de ces mouvements et qu'on ne pouvait l'en distinguer, et la des conclusions trop générales que diastole de ces derniers réservoirs pré- chaque auteur a tirées d'un petit nom- cédait à peine celle des ventricules, de bre d'observations particulières, façon que toutes les parties du cœur Ainsi Haller et la plupart des expé- paraissaient se contracter et se dilater rimenlateurs qui ont étudié les mou- en même temps (6). Au contraire, vements du cœur de la Grenouille y dans un cas d'ectopie du cœur sem- ont distingué un certain intervalle blable aux précédents et observé par entre la contraction des oreillettes et (a) Cruveilhier, Note sur les imuvements el les bruUs du cœur (Ga.^eile médicale, t841 , 1. IX, p. 407). (6) Robinson, A Case of Malformation with Heniarks ou the Circulalion of tlie Blovd (American Journal of Médical Science, 1832, vol. XI, p. 340). (c) Follin, Sur une eclopie du caur {Arch. gén. de mdd., 1850, 4' série, l. XXIV, p. \ 01). MOUVEMENTS DU COEUR. 5 de ces mouvements a lieu en même temps, soit dans les deux ventricules, soit dans les deux oreillettes. Du reste, la structure anatomique du cœur nous aurait permis de prévoir qu'il devait en être ainsi, car nous avons déjà vu que les fibres muscu- laires dont se compose la couche superficielle dans chacun des deux étages du cœur s'étendent sur les deux moitiés de cet organe, et embrassent, par conséquent, à la fois, d'une part les deux oreillettes, d'autre part les deux ventricules (1). Lorsque les oreillettes, après leur mouvement de systole Diastole. commun, retombent dans l'état de repos, leurs parois devien- nent flasques, et leur cavité commence aussitôt à se remplir de nouveau. Leur diastole s'accomplit graduellement, et avant qu'elle se soit achevée, le sang commence à s'en écouler celle des venlricules (a). Un temps Faivre ont constaté à cet égard des d'arrêt entre ces deux systoles a été variations assez grandes, suivant les remarqué aussi chez le Chat [b] et conditions dans lesquelles se trouvait chez le Rat (c). l'Animal au moment de l'observa- Chez le Chien, au contraire, la con- tion (/"). traction des ventricules succède si Nous reviendrons sur ce sujet dans rapidement à celle des oreillettes, une autre partie de cette Leçon, qu'elle semble en être la continua- (i) Voyez tome III, p. Zi88. lion, et que l'ensemble de ces mouve- La coïncidence des contractions menls a été comparé à une ondulation dans les deux réservoirs appartenant progressive se dirigeant de haut en au même étage du cœur a été bien bas {d). constatée par Harvey, contrairement Chez l'Ane, la systole ventriculaire à l'opinion de Bauhin et de Riolan, qui succède Immédiatement à celle des avaient cru pouvoir distinguer quatre oreillettes (e). contractions successives, savoir : une En général, il en est de même chez dans chaque oreillette et une dans le Cheval ; mais MM. Chauveau et chaque ventricule (g). (a) Hallpr, Sur les mouvements du cœur (Mém. sur la nahore sensible et irritable des parties du corps humain, t. I, p. 237, 379, etc.). — isariti et Roger, Traité pratique d'auscultation, p. 373. (b)Haller, Op. cit., p. 343. (c)I(lem, ibid., p. 359. [d) Clcndinning, Tteport of the London Committee {Brit. Associât., 1830). — Bartli cl P.o^'er, Op. cit., p. 376. ié) Hope, Treatise on the Diseases of the Heart, p. 15. — Clen(lirinint.f, Op. cit. (Brit. Associai., 1830, p. dSS). (/■) Chauveau et l'aivrc, Op. cit., p. 15 ol suiv. (g) Harvey, Exercit. anat. de motu cordis, cap. iv, p. IC. 6 MÉCANISME DE LA CIRCULATION, pour occuper les ventricules situés au-dessous. En effet, ces réservoirs s'étant relâchés, rien ne s'oppose à l'entrée du sang dans leur intérieur, et les forces qui déterminent le remplissage des oreillettes suffiraient à elles seules pour amener ce résultat; mais il est une autre circonstance qui contribue aussi à faciliter l'entrée du liquide dans l'étage inférieur du cœur, c'est la ten- dance naturelle des parois des cavités ventriculaires à s'écarter après que la conlraction dont elles ont été le siège vient à cesser. Une fibre musculaire qui est en repos ne reste pas raccourcie comme elle l'est pendant sa contraction, et lorsque le mouve- ment de systole qui a rapproché les parois des ventricules de façon à effacer plus ou moins complètement les cavités qu'elles circonscrivent vient à cesser, l'élasticité dont leur tissu est doué les porte à s'écarter de nouveau. Ainsi, quand le cœur est dans son état de repos, il n'est pas affaissé sur lui-même, comme le serait un sac vide, mais les cavités ventriculaires restent plus ou moins béantes. Or la force qui détermine le retour de ces réservoirs à leur grandeur normale doit tendre à attirer dans leur intérieur le sang contenu dans les réservoirs avec lesquels ces cavités sont en communication. La force aspirante déve- loppée de la sorte est très faible ; mais elle doit contribuer à produire ce que j'appellerai la première période de la diastole ventriculaire (1). J'ajouterai encore que chez l'Homme et les autres Mammi- (i) L'imporlance de cette dilatation l'expérience, ont cru pouvoii" expli- passive des veniricules dans le méca- quer de la sorte la progression du nisme de la circulation a été singu- sang vers le cœur (6). Carus, en com- lièrement exagérée par quelques au- battant ces hypothèses, est tombé dans leurs, tels que Zugenbuhler et Schu- un excès contraire (c), et la plupart des barlh («) , qui , sans se fonder sur physiologistes de l'époque actuelle ré- (a) Zugenbuljler, Dissertatio de motu sangiùnis per venris (Journal qéniral de médecine, 1 St 5, t. Lin, p. 121). — Schubartli , Physiologische Erôrtenino der WirKung des Herzens und der Gefâsse, beim Zurûckbringen des Blutes aus den Organen %um lier zen. — Nacliselirift von Gilbert {Annalen der Physili, 1817, t. LVIt, p. 55 et 105). (&) Carus, Ueberden BhUlnufimckoVa DeulscM. Archiv fur Pliysiol., ISIS, t. IV, p. 413). (c) Voyez Mi'iller, t. I, p. 175. MOUVEMENTS DU COEUR. fères l'agrandissement des cavités du cœur, et par conséquent leiu' action aspiratrice, est sollicité par la disposition des parties voquent en doute .l'existence de tout mouvement aspiraloiro de ce genre. Il est évident que la force déployée de la soi te ne saurait être que très fai- ble ; mais il me paraît également indu- bitable que le cœur, après avoir été contracté, tend à reprendre lui certain état de dilatation, et doit exercer ainsi une espèce de succion sur le liquide contenu dans les veines qui y débou- chent. A l'appui de celte opinion, je citerai une expérience de Wedcmcyer et Ciiinther. Un siphon, dont la petite branche était faite avec un tube de caoutchouc et dont la grande branche plongeait verticalement dans un bain, fut fixé par son extrémité opposée dans l'inté- rieur de la veine jugulaire d'un Cheval, A chaque battement du cœur, l'eau s'éleva de quelques centimètres dans cette espèce de manomètre ; pendant la première période de l'ex- périence les mouvements respiratoires et les mouvements du cœur coïnci- dent, et par conséquent l'ascension du liquide au-dessus du niveau du bain pouvait être attribuée à la dilata- lion du thorax ; mais bientôt ce syn- chronisme cessa, et l'on vit alors que l'eau du bain était attirée vers le cœur à chaque diastole de cet organe (a). Comme preuve de l'intervention d'une certaine force aspirante dépen- dant de l'élasticité des parois venlri- culaires, je citerai les résultats obte- nus par divers physiologistes qui . après avoir excisé un cœur palpitant, plongèrent cet organe dans un vase rempli d'eau. Le cœur continue 'i battre pendant quelque temps et le jet qui en sort devient de moins en moins coloré, puis ne consiste qu'en de l'eau à peine sanguinolente. Donc de l'eau s'introduit dans les ventri- cules à chaque diastole, et si les parois de ces cavités ne s'écartaient pas spon- tanément après la cessation de la sys- tole, et en s'écartant ainsi n'appe- laient le liquide circonvoisin dans leur intérieur, cette introduction n'aurait pas lieu. Cette expérience, faite il y a fort longtemps sur le cœur d'une Tortue, par J. Johnson (6), a été pratiquée dernièrement sur d'autres Animaux par M. Chassaignac (c) et modifiée d'une manière heureuse par M. Fink (d). Ce dernier adapte à l'artère aorte un tube vertical en guise de manomèlre, et maintient ouvert l'ori- fice veineux de l'oreillette gauche à l'aide d'un tronçon de tube; il plonge ensuite le cœur, ainsi préparé, dans un bain, de façon à ne laisser dépasser que le tube vertical, et, à l'aide de la main , il comprime le cœur, puis abandonne cet organe à lui-même al- ternativement. A chaque compression l'eau monte dans le tube aorlique et s'y maintient à raison du jeu des val- {a) Wedemeyer, Vnlersuch. ûber.den Kreislaiif, 4828. (6) Voyez Wilson Philip, Some Ohservationii relatinij In the Powei's of Circulation {Trans. of the iledico-Chirurfi. Soc, 1823, t. Xli, p. 397). (c) Voyez Uérard, Des signes sl/Hhoseopiques du rétréciss. de l'orifice mirirulo^entriadnire {Arch.gén.deméd., 1854, t. III, dOl). (rf) lj. Fink, Uemerkungen ulier einifie Versiiche &vr /■:rlnnlerun!i der Meclianik des Uerxens (Miiller's/l)T/i. (ur Anal, vvd l'hysiol, 1840, p 283). 8 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dont cet organe est entouré. Nous avons vu qu'il est placé, entre les deux poumons, et que le tissu de ceux-ci, à raison de son élasticité, tend à se resserrer, et tire, en quelque sorte, sur les parois de la cavité thoracique. Or, cette traction qui fait villes sigmoïdes. Quand la pression exercée sur le cœur vient à cesser, cet organe, en revenant à son élat nor- mal, dilate ses ventricules, et ceux-ci se remplissent, de sorte que l'espèce de pompe ainsi constituée se trouve chargée de nouveau, et en recommen- çant souvent les mêmes manœuvres, on parvient à élever Teau à une cer- taine hauteur dans le tube qui sur- monte l'aorte. M. Fink a fait nne autre expérience qui , au prLMnier abord , peut paraître en opposition avec les conséquences tirées des faits précédents, mais qui, en réalité, n'a aucune portée. 11 adapta à l'entiée de l'oreillette un tube recourbé en U et contenant de l'eau; le cœur battait avec force, mais le niveau du liquide resta le même dans les deux branches de l'iaslrument. Cet auleurparaît dis- posé à en conclure que dans l'état phy- siologique les parois ventriculaires !ic jouissent pas de l'élasticité dont il avait constaté les effets sur le cadavre ; mais le résultat négatif de cette expérience s'explique parfaitement par la flacci- dité des parois de l'oreillette qui, sui- vant toute apparence, suivaient les mouvements déterminés par la dia- stole du ventricule, au lieu de trans- mettre la succion de celui-ci au tube manométrique. l'our juger de l'élas- ticité des parois du ventricule , il aurait fallu mettre le manomètre directement en continuité avec sa cavité. Je ferai remarquer aussi qu'il ne faut pas confondre cette action due seulement à l'élasticité des parois ventriculaires avec la dilatation spon- tanée du cœur, que les anciens phy- siologistes attribuaient à la contraction d'une portion des fibres musculaires de cet organe (a). Galien et beaucoup de ses successeurs supposaient que la diastole venlricuiairc, de même que la systole, était le résultat du raccourcissement de certaines fibres charnues (b). On trouve une opinion analogue dans les écrits de Bichat (c), et cette hypothèse a été même reproduite de nos jours [d), mais cependant elle avait été complè- tement réfutée, vers le milieu du siècle dernier, par les travaux de Haller. En elfet, les expériences de ce grand phy- siologiste, dont je rapporterai ici les paroles, firent voir que « le relàche- » ment du cœur n'est pas l'action na- » turelle d'un plan ou d'une partie de » ses fibres ; car le cœur, en repos ou » privé de vie, demeure dans le même » état où il s'est mis dans sa diastole. » Aucun muscle n'agit dans cet élat (a) Galien, De l'iUiUtà des parties (Œuvres, Irad. de Uarcraberg-, I. I, i>. 402 et suiv.). (6) Par exemple, Peehlin, Perrault et Haniberger (voyez Haller, Ekmenta physiologiœ, t I p. 386). (c) Bichat, Anatomie générale, t. 11, p. 407 (édit. de 1818). (d) Filhos, Inductions pratiques et physiologiques (Thèse, Paris, 1833, p. 8). — Choriol, Considérations sur laslructnre, les mouvements et les bruits du cœur iVw^c Paris, 1841, p. 14). i > MOUVEMENTS DU COEUR. remonter le diaphragme en forme de voûte, et qui contribue puissamment à chasser l'air des poumons au moment de l'expi- ration (1), doit agir aussi sur les deux surfaces de la chambre » de mort, el la disposition du cœur » qui domine dans la diastole n'a » donc pas besoin de muscle pour w naître (o). » Les preuves de l'absence de tout phénomène de contraction musculaire pendant la diastole du cœur sont four- nies par l'observation directe des fi- bres de cet organe chez des Animaux vivants (6). Dans la plupart des ou- vrages élémentaires de physiologie, on cite aussi comme démonstration de l'état passif des ventricules pendant la diastole une expérience faite par Oesterreicher. Elle consiste h exciser le cœur d'une Grenouille vivante et à placer sur cet organe un corps assez lourd pour le déprimer, mais assez petit pour ne pas le cacher. On voit alors que le poids est soulevé pendant la systole, mais ne bouge pas durant la diastole, et l'on en a conclu que ce dernier phénomène n'est accom- pagnéd'aucune contraction musculaire appréciable (c). Il est cependant à remarquer que le même résultat se produirait si la diastole était accom- pagnée dans l'état normal d'une action musculaire, mais que cette action était trop faible pour vaincre la résistance développée par le poids dont le cœur était chargé. Par conséquent, celte expérience ne fournit pas la preuve du fait qu'elle est destinée à établir. Quelques physiologistes supposent que la dilatation des cavités ventricu- laires qui succède à l'état de contrac- tion des fibres charnues de ces organes n'est pas due uniquement à l'élasticité de leur tissu, mais pourrait bien dé- pendre d'une force analogue à celle qui détermine le raccourcissement de ces fibres et qui agirait en sens con- traire, de façon à repousser les parti- cules constitutives de ces mêmes fibres et à les allonger [d]. Dans l'état actuel de la science, il n'y a cependant rien qui nous semble propre à appuyer cette hypothèse. J'ajouterai encore que , suivant M. Beau, les parois du cœur seraient pendant la vie trop flasques pour pou- voir se tenir écartés , lorsque leurs fibres sont dans l'état de repos, et que si la cavité des ventricules ne s'efface pas après la mort, cela dépend seulement du phénomène bien connu sous le nom de rigidité cadavérique (e) ; mais cette rigidité, comme nous le verrons plus tard, est un état transitoire qui ne dure que quelques heures, et la dispo- sition des cavités ventriculaires due à rélastlcité du lissu dont leurs parois sont formées persiste après que ce phénomène a cessé, et d'ailleurs les expériences rapportées ci- dessus me semblent prouver que cette propriété existe durant la vie aussi bien qu'après la mort, (1) Voyez tome U, page 625. (rt) llaller, Mém. sur la nature sensible el irritable des parties du corps humain, t. I, p. 392. (h) Voyez lomc II, page 488. (r) Oiîstorroiclicr, Versuch einer Darstellung der Lehre vom Kreislauf, 1820, p. 33. ((/) Carpenter, l'rinciples (jf Humaii l'IiysioloQjj, 1853, p. 478. If) r.can, Traité expi'.ritiiftitul el clinique d.'avscuUation, 18ri{î, p. 2.''>4. 40 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. cardiaque formée par le médiastin, et par l'intermédiaire de celui- ci, doit tendre à écarter les parois du cœur. Quand ce dernier organe se contracte, aucun vide ne peut se faire entre sa surface externe et les parois de la cavité qui le renferme, ni entre ces parois et la surface adjacente des poumons ; celle-ci doit suivre le mouvement comme elle suit le diaphragme lors delà con- traction de ce muscle ; mais quand la force à laquelle le tissu élastique a cédé vient à cesser son action, ce tissu doit revenir sur lui-même, et entraîner cà son tour les parois des cavités du cœur. Dans l'état de repos, la capacité de ces cavités doit être par conséquent plus considérable qu'au moment de la contraction, et cette augmentation de capacité doit être accompagnée de l'affluxd'une quantité correspondante'de sang dans leur intérieur. La force déployée par le tissu élastique des poumons vient donc s'ajouter à la force élastique propre aux parois des ventricules pour dilater la cavité de ces pompes physiologiques dès que leur contraction a cessé (1). Mais la diastole des ventricules ne dépend pas seulement des causes qui font affluer le sang dans le cœur, en l'attirant, en quelque sorte, dans ces réservoirs inférieurs ; le chargement de ceux-ci est complété par l'intervention active des oreillettes, et on les voit se distendre sous l'influence du liquide que ces (1) Voyez, ù ce sujet, les remarques voirs, et M. Purkinje pense que, par de Purkinje et de M. B(lrard [a). Le suite de la contraction des muscles premier de ces physiologistes pense papillaires du cœur, ils sont lires en que le jeu des valvules auriculo-ven- bas, de façon à agrandir celte espf/ce iriculaires doit contribuer aussi à pro- d'entonnoir lorsque la diastole corn- duire une aspiration dans les oreil- mence (b); mais, ainsi que nous le leltes. En effet , pendant la systole verrons bientôt , les muscles papil- ventriculaire, ces soupapes, réunies en laires ne paraissent pas remplir ce forme d'entonnoir, forment en quel- rôle, que sorte le plancher de ces réser- (ft) Bérard, Cours de physiologie, I. III, p. 6H. (b) Purkinje, Ueber die Snvqkraft des Herzens (Uehersirhl dfr Arheiten der Schlessichen C.esellsrhnft fiir Vaterlâiidisrhe Knltur, 1843, p. 157). MOUVEMENTS DU COEUR. 11 derniers organes, en se contractant, lancent dans leur inté- rieur. La systole des oreillettes, qui se fait d'une manière brusque, systoie -, -, T • 1 ■ fies oreillettes et qui commence dans les appendices auriculaires pour se pro- pager ensuite dans les sinus, n'est pas très énergique; mais dans les circonstances ordinaires, la pression exercée par la contraction des parois de ces réservoirs est assez puissante pour expulser une partie notable du sang qui s'y trouve renfermé. Une portion du liquide mis ainsi en mouvement rentre dans les veines afférentes au cœur, car l'embouchure de ces vaisseaux n'est pas garnie de soupapes capables de s'opposer à ce reflux (1 ), mais la contraction des fibres musculaires dont ces orifices sont entourés (2\ et la pression exercée par la colonne de sang (1) La valvule crEusiachi, que nous avons vue à l'embouchure de la veine cave Inférieure (a) , garnit seulement la moitié ou les deux tiers antérieurs de la circonférence de cet orifice, et ne saurait empêcher le reflux du sang.- La veine cave supérieure est complè- tement dépourvue de valvules. Lower croyait que le passage du sang de ce vaisseau dans la veine cave inférieure était empêché par un tubercule situé entre leurs orifices, et Vieussens attri- buait des usages analogues au bord supérieur et antérieur de la fosse ovale , qui est épaisse et saillante. Mais le tubercule de Lower n'existe réellement pas, et ce qui empêche le sang apporté par la veine cave supé- rieure de pénétrer dans la veine cave inférieure, au lieu d'être versé dans l'oreillette, c'est la direction des em- bouchures de ces deux vaisseaux (6). (2) La contraction des fibres mus- culaires dont les parois des oreillettes sont garnies ne lend pas à diminuer la grandeur des orifices ventriculaires ; mais, ainsi que nous l'avons déjà vu, divers faisceaux de ces fibres sont disposés en manière de sphincter au- tour de l'embouchure des grosses veines (c), et, au moment où ces réser- voirs se contractent, le raccourcisse- ment de ces dernières fibres doit déterminer un certain rétrécissement dans ces ouvertures. M. Parchappe a insisté avec raison sur ce fait (d), et il est à noter que chez divers ani- maux, la Grenouille, par exemple, la contraction des fibres musculaires de la portion terminale des veines caves est très énergique et commence avec la systole des oreillettes. (a) Voyez tome III, page 507. (b) Voyez Sonac, Traité de la structure du cœur, t. I, p. 215. — Piclzius , FÂnige Demerknngen ûher die Scheideiuand des Ilerx^ens beim Mensclifii , mit hesonderer Hiïcksicht auf das Sofieimnnie tubereulum Lotcerl (Miillcr's ArcMv fur Anat., IRS,'!, p. ICI). (c) Voyez tome IH, page 573, W) Parchappe, Du cœur, de sa sirurinre et de ses mouvements, p. 1 24. 12 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. qui arrive aux oreillettes sont des obstacles considérables à rétablissement d'un courant en ce sens ; par conséquent, c'est principalement par l'autre ouverture ménagée dans les parois de chaque oreillette que la sortie s'en effectue. Ces pompes foulantes lancent donc dans les ventricules un jet de sang- chaque fois qu'elles se contractent, et la pression exercée par ce jet sur les parois des ventricules en achève la distension. Quand la circulation est embarrassée, ainsi que cela a sou- vent lieu dans les expériences de vivisection , il arrive parfois que les oreillettes se trouvent distendues au point de ne pouvoir plus se contracter (1) , et cette circonstance a induit quelques auteurs à penser que ces réservoirs ne remplissent aucun rôle actif dans le jeu du cœur (2); mais, dans l'état normal, il en est tout autrement, et, pour mettre en évidence leur influence sur le cours du sang, il me suftlra de citer une expérience faite il y a plus de deux cents ans par Harvey. Ce physiologiste remarqua que chez les Animaux dont le thorax a été ouvert, et dont les mouvements du cœur sont près de s'éteindre, les ventricules (1) Quand par une circonstance on a déterminé la sortie d'une cer- quelconque les oreillettes se trouvent taine quantité de liquide, très distendues, elles ne peuvent plus (2) Cette inertie s'est produite dans se contracter. Cela se voit très bien les expériences de M. Marc d'Espine, chez la Grenouille, quand on insuffle par exemple, et a porté cet auteur à par la veine cave quelques bulles considérer les oreillettes comme étant d'air dans ces organes sans en envoyer des réservoirs passifs seulement [h). dans le ventricule, qui continue à Les observations de M. Bouiilaud ont battre (a). La même chose arrive conduit ce médecin à un résultat ana- quand ces réservoirs sont trop rem- logue (c). La contraction des oreil- plis de sang, et dans ce cas on voit lettes était aussi très peu marquée dans souvent leurs contractions se rétablir les expériences de M. Surmay sur des dès qu'à l'aide d'une petite ponction Cabiais (d). (a) A. Moreau, Note sur les mouvements du cœur {Comptes rendus de la Société de biologie, 1850, p. 207). (6) D'Espine, Recherches expérimentales sur quelques-unes des bases qui doivent servir au diagnostic des maladies du cœur et de la circulation (Arch. gén. de méd., 4831, t. XXVII, p. 156). (f) Bouiilaud, Traité clinique des maladies du cœur, t. 1, p. 88. (d) Surmay, Recherches sur les mouvements et les bruits normaux du cœur {Gazette médicale, 1852, ?>' série, t. VII, p. 055). 310UVEMENTS DU COEUR. 13 cessent de se contracter avant que les oreillettes soient deve- nues inertes, et qu'alors, non-seulement on peut distinguer encore dans les ventricules des battements dus à l'aftlux du sang lancé dans leur intérieur par chaque systole des oreil- lettes, mais on en voit sortir un jet à chacun de ces mouve- ments, si d'un coup de ciseau on enlève le sommet du cœur (i). L'importance de ce phénomène dans le mécanisme de la circulation a cependant été exagérée par les physiologistes qui attribuent exclusivement à la contraction des oreillettes l'afflux du sang dans les ventricules et la diastole de ces derniers réser- voirs. 11 y a entre chaque systole ventriculaire et la systole auriculaire suivante un temps de repos (2) pendant lequel l'étage intérieur du cœur ne reste pas contracté, mais se trouve dans (1) Cette observation de Harvey (a) a été répétée par divers physiolo- gistes. Ainsi, dans une des expériences faites par M. Clendinning et ses colla- borateurs sur des Anes , le cours du sang a continué après que les ventri- cules eurent cessé de se contracter et que les mouvements de systole furent limités aux oreillettes [b). C'est aussi par l'influence de la con- traction de ces derniers réservoirs qu'on peut se rendre compte de la persistance de la circulation dans cer- tains cas pathologiques où les ventri- cules étaient devenus impropres à remplir leurs fonctions ordinaires : par exemple, chez un Homme dont l'autopsie a été faite par Allen Burns, et a montré que les ventricules de- vaient avoir été depuis longtemps tout ù fait rigides , car leur surface était complètement recouverte par un tissu osseux adventif (c). Le rôle actif des oreillettes est égale- ment mis en évidence par diverses ex- périencesdans lesquelles on a introduit l'extrémité effilée d'un tube de verre dans la cavité d'un de ces réservoirs, et l'on a observé les mouvements de la colonne de sang qui s'élevait dans cet instrument lors de chaque systole auriculaire. Plusieurs faits de cet ordre sont décrits par la commission des médecins de Dublin (d). M. llope évalue à un tiers la dimi- nution de volume qui se manifeste dans les oreillettes pendant leur systole chez l'Ane (e\ (2) Quelques anciens auteurs dési- gnaient cette période de repos sous le nom de périsystole (/"). (a) Ilarvey, Exercil. anal, de molu conlis el sanguinis, cap. IV, p. îij (cclil. ilo 1028). {b) Clcndinniii!,', Op. cit. (lirit. Associât., iSiù, p. 185). (c) Voyez Hcid, Ileart (TodJ's Cjjclop. of .inat. and l'hysiol., t. II, p. 003). ((/) liepurt uf Ihe Dublin Sub-Committee (lirit. Associât., 1835, Dublin, p. 244). («) Hopc, Op. cit., p. 18. (f) Riolan, Anthropographie {Œuvres analoniiques, 1. 1, p. 550). Systole les ventricules. 14 MÉCANISME DK LA CIRCULATION. tiii état de relâchement, et se remplit en partie du sang qui s'écoule par les orifices auriculo-ventriculaires devenus libres par l'abaissement de leurs valvules (1). § 3. — Lorsque les parois des ventricules sont stimulées par rentrée de la charge complémentaire du sang dans ces cavités , leurs libres musculaires se contractent à leur tour, et la systole qui s'effectue alors est bien plus énergique que celle (1) La théorie des mouvements du cœur, présentée il y a quelques années par M. Beau, repose principalement sur la supposition que le jet de sanj; lancé par les oreillettes dans les ven- tricules arrive dans ceux-ci non pas d'une manière successive, mais en masse, de façon à les dilater brusque- ment et à produire les mouvements de locomotion dont nous aurons jjien- lôt à nous occuper. Mais pour qu'il en Mt ainsi, il faudrait que les ventri- cules restassent vides pendant la dia- stole des oreillettes; et effectivement M. Beau admet que les choses se pas- sent de la sorte, et il attribue cet état de resserrement des ventricules après la cessation de leur contraclion mus- culaire à un pliénomène de tonicité musculaire (a). Or la plupart des phy- siologistes qui ont fait des expériences sur le jeu du cœur, chez les Animaux vivants, s'accordent à dire que pen- dant le repos de cet organe les ventri- cules ne sont pas resserrés et vides, mais au contraire dans un état de relâchement, et se remplissent peu ù peu de sang, quoique ce liquide ne les distende pas comme au moment de la systole auriculaire (6). L'entrée du sang dans les ventri- cules, pendant la diastole des oreil- lettes, a été mise en évidence par diverses expériences faites sur des Animaux vivants. Ainsi, quand sur un grand Mammifère on fait la résec- tion de la pointe du cœur, on voit le sang s'écouler d'une manière continue des ventricules pendant l'intervalle des systoles auriculaires, et le jet augmen- ter seulement au moment où ces mou- vements de contraction se produi- sent (c). J'ai souvent observé ce phé- nomène. (a) lieati, Traité tl'ausciMation, p. 2i20, etc. (6) voyez : . — Hope, A Treatise ou Ihe Diseases of the Héart, \). ■!(]. — Adanis, Law, Greeiie, etc., Report on the Motions and Sounds of the Heart by tlie iJubtiil l^ab-Commitlee of the Médical Section {British Associât, for the Ad'Vancem. of Sciences, Dublin, 1835, p. 248). — Wachsmuth, Ueher die Function der Vorkamnern des Herzens {Zeitschrift fur ration. Med., 1854, 2° série, t. IV, p. 182). — Pehnock et Moore, Mém. sur les mouvements et les bruits du cmui' (l'Expérience, -1842, t. X, p. 177). — Surmay, Recherches sur les mouvements et les bruits du cœur (Gazette médicale, 1852, p. 055). — Chauvcau et Faivro, Nouvelles recherches e.vpcrimentales sur les mouvements et les bruits du cûiUr, p. 25. (c) Voyez Clendinning, Op. cit. {Report of the Brit. Associât., (Glasgow, 1840, p. 179). Li cœur. MOliVEMENTS t)U COEUR. 15 des oreillettes. Elle s'opère aussi d'une riuinière plus lente, et elle commence vers le sommet du cœur pour se propager ensuite vers la base de cet organe. Enfin elle détermine une diminution notable dans le volume des ventricules , et elle est accompagnée de certains changements dans la forme et dans la position de ces réservoirs, dont l'étude a beaucoup occupé l'attention des physiologistes et a feit naître des opinions très divergentes. Chacun sait que les mouvements du cœur se font sentir au ciioc dehors de la poitrine et produisent vers le niveau du cinquième espace intercostal des battements plus ou moins intenses, c'est- à-dire dans un point correspondant à la partie inférieure de cet organe. Nous avons vu que pendant la diastole des ventri- cules ceux-ci se gonflent, et, en y regardant de près, on voit qu'ils s'allongent en même temps qu'ils s'élargissent. Au premier abord, il était donc naturel de supposer que le choc du cœur contre la paroi antérieure du thorax devait dépendre de la diastole ventriculaire, et quelques physiologistes de nos jours exphquent encore de la sorte ce phénomène. Mais Harvey, en mettant à découvert le cœur chez divers Animaux vivants ,. reconnut que les choses ne se passent pas de la sorte ; que la pointe du cœur s'abaisse et s'éloigne du sternum pendant la réplétion des ventricules , tandis qu'il se redresse et se porte en avant au moment où la systole ventriculaire le rend rigide (1). Un cas pathologique extrêmement rare lui permit même de constater la coïncidence des mouvements de con- traction des ventricules et d'impulsion du cu^ur en avant chez l'Homme adulte * "^ Ee lils d'un des seigneurs de la cour du roi d'Angleterre Charles l", ■ le vicomte de Montgomei'y, recul pendant son (1) La rigidité des (il)res inuscn- est toujours facile à reconnaître au laires de la portion ventriculaire du louclier et fournit le meilleur caractère cœur, au monient de leur contraction, pourla constatation de l'étatdc systole. 16 BIÉCANISME DE LA CIRCULATION. enfance une blessure grave à la poitrine ; les côtes du côté gauche furent brisées et le thorax largement ouvert ; cependant cet accident ne fut pas mortel, et le malade recouvra la santé, mais la plaie se cicatrisa sur les bords seulement et laissa béante une sorte de caverne dans laquelle le coîur se voyait à nu. Plusieurs années après, le roi Charles 1" eut connaissance de ce fait et chargea son médecin Harvey de lui en rendre compte. Le jeune Montgomery, âgé alors d'environ dix- neuf ans, se prêta à une exploration attentive , et, ayant retiré la plaque métallique qu'il portait sur la poitrine en manière de cuirasse, Harvey put voir son cœur battre à découvert, quoique restant dans sa position ordinaire. Or, il reconnut ainsi que pendant la diastole, ou état de relâchement, cet organe restait au fond de sa loge, tandis qu'à chaque contraction de sa portion ventri- culaire, il se relevait brusquement et venait frapper contre la paroi antérieure du thorax (1). Cette observation est parfaitement d'accord avec ce que d'autres physiologistes ont vu chez des enfants mal conformés dont la vie s'est prolongée pendant quelques heures après la naissance , bien qu'ils eussent le cœur à nu hors de la poitrine ou recouvert seulement par la peau. Elle a été confirmée aussi par une multitude d'expériences liiites sur des Animaux vivants, dans lesquelles les erreurs n'étaient pas à craindre. Ainsi, quand le cœur se contracte, ses parois se durcissent, comme le font tous les autres muscles. Or, si l'expérimentateur introduit sa main dans la poitrine d'un grand Animal, et place le doigt entre le cœur et la paroi antérieure de la poitrine , il sent à la fois la pression exercée par cet organe en avant et le durcissement qui est caractéristique de la systole (2). (1) Harvey a consigné ceUc obser- (!2) Dans une des expériences lailcs valion dans son ouvrage sur la génc- par la commission de DuJjlin , une ration (o). portion de la paroi costale du côté (a) Harvey, ExercUationes de (jeneratione Animalium, cxercit. 51 , p. 150. Londini, 1G51. MOUVEMENTS DU COELU. 17 Le choc du cœur accompagne donc la systole ventriculaire (1), et, quand on cherche à se rendre compte du mécanisme de ce mouvement, on voit qu'il résulte de plusieurs causes dont les gauche ayant été enlevée sur un jeune Veau et le péricarde ouvert, on vit qu'à chaque contraction des ventri- cules, la pointe et une portion consi- dérable de la paroi antérieure du cœur venaient presser contre le sternum, et lorsqu'on insinuait le doigt entre cet os et la surface adjacente des ventri- cules, on sentait une forte compres- sion au moment où le cœur, en se contractant, devenait dur, tandis que pendant l'état de relâchement du tissu des ventricules, cet organe se retirait plus ou moins en arrière et cessait de presser ainsi en avant (a). La coïncidence de la systole ventri- culaire et du mouvement du cœur en avant vers le sternum, puis de son retrait vers le dos, au moment où il devient mou et se gonfle de sang, a été très bien constatée chez le Cheval, il y a trente ans, par D. Barry (6). (1) M. Beau, qui attribue, comme nous l'avons déjà vu (c), la diastole des ventricules uniquement à l'entrée brusque d'une ondée de sang dans ces réservoirs , lors de la contraction des oreillettes, rattache aussi le choc du cœur contre la paroi antérieure du thorax à l'impulsion ainsi donnée, et par conséquent , suivant son hypo- thèse, ce choc précéderait la systole ventriculaire au lieu d'en être une des conséquences, opinion qui avait été soutenue aussi par Corrigan (d). L'argument le plus puissant en appa- rence, que M. Beau emploie à l'appui de sa doctrine, lui est fourni par l'expé- rience suivante. Il a vu que si l'on ouvre une des oreillettes, on modifie aussitôt la direction du mouvement exécuté par la pointe du cœur : celle-ci ne se porte plus en avant, mais se dévie du côté opposé à l'oreillette restée in- tacte. Gelas'expliqueparfaitementdans l'hypothèse adoptée par M. Beau (e). En elTet, si le mouvement en avant, exécuté d'ordinaire par la pointe du cœAir, est dû à l'impulsion donnée par les deux ondées de sang lancées simul- tanément par les oreillettes, sa direc- tion devra être la diagonale du parallé- logramme représentant cesdeux forces, et, si l'on vient à supprimer l'une de celles-ci, sa direction devra seconfondre avec celle de la force restée intacte. Mais les phénomènes observés s'expliquent non moins facilement dans l'hypothèse contraire , car, en ouvrant l'un des ventricules, ou en y exerçant une pres- sion qui empêche cet organe d'agir, on doit changer en même temps la direction du plan occupé par la base du cœur et dévier l'axe de figure de cet organe du côté lésé, circonstance dont nous verrons bientôt l'impor- tance. Cette expérience est donc loin d'être décisive. M. Verncuil a été conduit à penser aussi que le choc du cœur devait (a) Report of Ihe Dublin Sub-Committee (Brit. Associât., 1835, p. 244). (b) b. Barry, Dissert, sur lepassaye du santj à travers le cœur. Tljcse, Paris, 4827, p. 9. (c) Vdjez ci-dussus, page 14. (d) Corrigan , On Ihe Motions and Sounds of Ihe Ileart (Dublin Médical Transact., ncvv Séries I, 1830). .'iiii-ii du cœur pour ccuer un peu a son propre poids, et il s aplatit plus ou de la systole, moius coutrc la surface sur laquelle il est couché (1) ; mais, coïncider avec la diastole el non avec qui ii'enipêclie pas la pointe de cet la systole venlricnlaire, parce que sur organe de se relever). Il a constaté le le <',adavre, où la position de cet organe même fait plus nettement chez un est la même que lorsqu'il est en repos, enfant privé de sternum (6). sa pointe ne correspondrait qu'au (1) Ainsi MVI. Chauveau et Faivre quatrième espace intercostal ou à la ont très bien remarqué, dans leurs cinquième côte, et en se contractant expériences sur le Cheval , que le celte pointe se relève , tandis que cœur, en devenant flasque pendant la c'est entre la cinquième et la sixième diastole, s'affaisse sous son propre côte que l'impression se fait sentir (a). poids, et que la direction suivant la- l\1ais celte objection tombe devant quelle cet affaissement s'opère varie les observations de M. Skoda, relati- avec la position du corps. Si l'anima vement au déplacement total du cœur est couché sur le côté, le cœur s'apla- au moment de la systole. Ce patho- til latéralement, tandis que s'il es logiste, en observant des individus placé sur le ventre, la dépression se très maigres, a vu distinctement que fera remarquer sur la face antérieur le cœur descend un peu pendant de l'organe (c). chaque contraction ventriculaire (ce (a) Verneuil, Recherches sur la locomotion diicaur. Thèse, l'aris, 1852, p. 11. (fc) Skoda, Traité de la percussion, trad. par Aran, p. 199 et 206. [c] Chauveau et Faivre, Op. cit., p. 12. MOUVEMENTS DU C0EU15. 19 (juand il se contracte, sa portion ventriculaire devient dure et rigide, comme le fait to.ut autre muscle en action, et il tend à prendre une forme déterminée qui est en rapport avec la dis- position de ses fibres. En effet, il devient presque circulaire à sa base ; la portion voisine de la région ventriculaire se bombe d'une manière assez régulière, et la portion inférieure qui avoi- sine la pointe se rétrécit et se raccourcit (1). Or, pour arriver (1) Galien, en étudiant les mouve- ments du cœur, qu'il mettait à nu en enlevant une portion du sternum, chez un Animal vivant, ou qu'il arra- chait tout palpitant de la poitrine, avait cru apercevoir que la contraction était au contraire accompagnée d'un allongement de cet organe, et il pensa qu'il pouvait expliquer ce phénomène en supposant que les fibres longitudi- nales des ventricules se relâchaient dans la systole pendant que les fibres transversales ou obliques se contrac- tent {a). Vésale partagea cette opinion, mais Harvey reconnut que cet allonge- ment apparent au moment de la con- traction n'existe réellement pas, et que l'illusion est produite par les change- ments de proportions qui s'opèrent alors dans la partie ventriculaire du cœur dont les parois latérales se rap- prochent beaucoup plus que le sommet de l'organe ne se rapproche de sa base (6). Lancisi vit aussi que le cœur, au moment de sa contraction, devient rond et comme sphérique d'allongé qu'il était (c). La doctrine de Galien continua cependant à être adoptée par divers anatomistes {d) , et, vers le milieu du siècle dernier, la question de l'allon- gement ou du raccourcissement du cœur pendant la systole donna lieu à beaucoup de discussions dont Senac a très bien rendu compte (e), mais dont il serait superflu de nous occuper longue- ment ici. Le fait du raccourcissement du cœur pendant la systole, soutenu par Lower, Stenon, Bartholin, Drelin- court , Vieussens, Huard, Bassuel, Senac et plusieurs autres physiologis- tes du XVII'' et du xviii' siècle, ressort nettement de nombreuses expériences de Haller (/"). Ce dernier auteur si- gnale, il est vrai, une exception à la règle générale qui lui a été offerte par l'Anguille ; et l'on comprend que les brides fibreuses, étendues entre la surface du cœur et le péricarde des Poissons, puissent modifier les mouve- ments de ce viscère chez des Animaux (a) Galien, De l'ulilité des parties, liv. VI, chap. viii {Œuvres, trad.' par M, Daremberff, t l p. 402). ■ ' (b) Harvey, Exercit. de motu cordis, p. 23. (c) Lancisi, De motu cordis, lib. I, sect. 2, cap. ii, p. ■124. (d) Piiolan, Manuel anatomique, iG53, p. 319 et 696. — Borclli, De motu Animalium, pars sccunda, p. 6t. — Winslow, Suite des éclaircissements sur la circulation du sany dans le fœtus (Mém. de L'Acad. des sciences, 1725, p. 263). (e) Senac, Traité de la structure du cœur, l. I, p. 286 cl siiiv. (/■) Haller, Sur les mouvements du cœur {Mém. sur la nature sensible et irritable des parties du corps animal, t. I, p. 342 et suiv.). 20 MÉCAISISME DE LA ClP.CULATIUxN. à celte forme, ses diverses parties se déplacent dans un sens ou dajis un autre , suivant la direction dans laquelle elles ont été déviées pendant leur état de relâcliement. Ainsi , quand en pressant sur un point de la surflice des ventricules pendant la dia- stole on y détermine une concavité, celle-ci s'efface dès que la sys- tole se déclare, et la surface redevient convexe ; ou bien encore si, lors de la diastole, on comprime la pointe du cœur de façon à rendre l'axe de cet organe plus court que ne le comporte sa forme typique , on le voit s'allonger au moment de la systole. de celte classe (a). Mais Fontaiia s'est assuré que le cœur de l'Anguille se raccourcit en réalité pendant la sys- tole, de même que cela a lieu pour les autres Verlébrés (6). D'après Queye, un phénomène semblable se présen- terait lors de la systole du cœur de la Tortue (c). Un certain allongement du cœur pendant la systole des ventricules a été signalé aussi chez la Brebis par MM. Pennock et Moore (d) ; mais, dans la grande majorité des cas, la contraction des ventricules est accom- pagnée d'un mouvement de rappro- chement entre la pointe et la base de l'organe. Ainsi , dans les expériences de la Commission des médecins de Dublin, des mesures prises au compas sur le coeur d'un Lapin permirent aussi de constater un raccourcissement au mo- menldelacontraction ventriculaire (e). La Commission des médecins de Londres a obtenu conslamment le même résultat (f). Des mesures prises avec beaucoup de soin par M. Ludwig concourent également à prouver la coïncidence de ce raccourcissement et de la contrac- tion ventriculaire (g). Je citerai encore à ce sujet les expériences faites dernièrement sur le Chien, par MM. Chauveau et Faivre. Ayant excisé le cœur, ces physiolo- gistes le tinrent suspendu par les gros vaisseaux en connexion avec sa base, et mirent ainsi la pointe de cet organe en contact avec un pian horizontal et immobile situé au-dessous. Ils virent alors distinctement que si la pointe du cœur affleurait ce plan au moment de la diastole, elle s'en écartait notable- ment au moment de la systole ventri- culaire [h). (a) Hallcr, Op. cit., t. 1, p. 370. (b) Fonlana, Dissertation épistolaire (Haller, Mém. sur les parties sensibles, t. 111, p. 227). (c) Queye, Dissert, de syncope (voy. Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p. 10). {dj Pennock et Moore, Mém. sur les mouvements et les bruits du cœur [l'Expérience, 1842, 1. X, p. 179). (e) Report on the Motions ofthe Heart [Bi-it. Associât., Dublin. 1835, p. 245). (/■) Report by the London Sub-Committee (Brit. Ass^)ciat., Glasgow, 1841 , p. 204). (g) Ludwig', Uebcr den Bau iind die Bewegungen der Herxventrikel (Zeitschrift fur rationnelle Medizin, 1849, t. VII, p. 20G). (/!,) Chauveau et Faivre , Nouvelles recherches expérimentales sur les raouvemenls et les bruits du cœ-iir, p. 14 (extr. de la Gaz, méd,, 1856). MOUVEMENTS DU COEUR. 21 Il en résulte aussi que lorsque le cœur repose sur une surface plane ou bombée, il s'étale en quelque sorte et s'élargit pendant l'état de flaccidité de ses fibres, et que, tout en diminuant de volume au moment de sa contraction, son épaisseur peut sou- vent augmenter (1). Ces changements sont faciles à constater (1) Celte tendance du cœur à pren- dre une forme déterminée , durant l'état de systole, a été très bien dé- montrée par M. II. Carlisle (a), et res- sort non moins nettement de beaucoup d'expériences dans lesquelles on a vu un des diamètres de cet organe aug- menter pendant que les autres se raccourcissaient. Ainsi, dans les re- cherches de M. Ludwig, faites sur le Chat, le cœur, couché horizontale- ment sur un plan résistant, offrait à sa base, pendant la diastole, 28 milli- mètres de large, mais se rétrécissait dans ce sens de 5 ou 6 millimètres au moment de sa contraction, tandis que son épaisseur ou diamètre antéro- postérieur augmentait d'une manière non moins notable. Effectivement, dans un cas, l'épaisseur de la base des ventricules, réduite à 16'"'", 5 pendant la diastole, s'est élevée tantôt à 19'"'", 5, tantôt à 20, 21 et même 21™"', 5 pen- dant la systole. Dans un autre cas, le même diamètre était de 18 millimètres pendant le repos, et de 23 millimètres pendant la contraction des fibres musculaires. M. Ludwig en conclut que la tendance naturelle du cœur est d'alfccter une forme circulaire à sa base quand il est en contraction, tan- dis que dans l'état de relâchement de son tissu, cette même base représente une ellipse plus ou moins allongée (6). Des faits du même ordre ont été constatés par beaucoup de physiolo- gistes dans des expériences pratiquées sur le cœur intact et dans sa position normale (c). Ainsi quand on saisit dans la main la portion ventriculaire du cœur d'un gros Mammifère, tel qu'un Veau ou un Ane , et qu'on la comprime légèrement pendant qu'elle est flasque, on sent que les doigts sont écartés tout à coup avec force au mo- ment de la systole (d). Pour rendre bien visible ce phéno- mène, les membres de la Commission des médecins de Londres, après avoir ouvert convenablement le thorax d'un Ane dont la sensibilité avait été dé- truite par l'action d'un poison parti- culier (le woorara ou curare) et dont la respiration était entretenue artifi- ciellement, placèrent un petit cylindre de bois (un stéthoscope) debout sur la surface des ventricules, et le main- tinrent dans cette position de façon à lui permettre de suivre les mou- vements de l'organe sur lequel il reposait. Ils virent alors que le cylin- dre, à raison de son poids, détermi- (a) H. Carlisle, Abstract of Ohserv. on tlie Motions and Soumis of Ihe Heart {flrit. Associai., Cambridge, d833, p. 450). ((/) I.iKhvif,', L'ebcr den Ilau und die lieiueriungcii der llcrzventrilcel {/eilsclirift fiir ralifliinclle hkdiziu, 1840, I. VII, p. 2U5 el siiiv.). (c) llamcrnik, Dus Herz und seine Hewegung, tSSS, p. 04. ((/) Kapport de la Commission de Dublin {liejwrt of Ihc lirilish Associai., IMT), p. ^i-i). 22 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. sur un cœur qui continue de battre après avoir été extrait du thorax d'un Animal vivant, et des phénomènes du même ordre se produisent dans l'état normal. En effet, le cœur, couché obliquement sur le diaphragme, s'élargit et s'aplatit notable- ment pendant la diastole , et sa face sternale se bombe au nait une dépression sur les parois du cœur pendant que celui-ci était au repos, mais était soulevé avec force à chaque mouvement de systole ventri- culaire, parce qu'alors la concavité ainsi produite s'effaçait, et la surface du cœur redevenait uniformément bombée comme dans son état ordi- naire de contraction. Dans une de ces expériences le cylindre fut chargé d'un poids d'environ l kilogramme. Ainsi qu'on devait s'y attendre, il enfonça davantage le point de la paroi ventri- culaire sur lequel il reposait ; mais, à chaque contraction de cette paroi, il était soulevé brusquement et la dé- pression s'effaçait. Enfin, dans d'autres expériences, le retour à la forme ar- rondie et normale de la portion ven- triculaire du cœur a été constaté au moyen d'une espèce de compas d'é- paisseur dont les branches, réunies par un lien élastique , comprimaient l'organe sur deux points opposés : pendant la diastole, la pression ainsi produite déterminait une concavité dans la surface du cœur, autour du point d'application de chacune des branches de l'instrument; mais, lors de la systole ventriculaire, celles-ci étaient écartées avec force et la forme bombée du cœur se rétablissait. Cette expérience n'était pas destinée (comme le suppose M. Beau) à établir que les ventricules se dilatent pendant la sys- tole, ce qui serait contraire à tous les faits connus (a), mais à montrer que la contraction des parois charnues de ces cavités tend à en rétablir la forme arrondie, malgré les changements que l'effet de la pesanteur ou de toute autre force mécanique a pu y déterminer pendant que leurs fibres musculaires sont dans l'élat de relâchement (6). MM. Chauveau et Faivre attribuent uniquement à cette cause le choc ou la pression du cœur contre les parois du thorax, et ils formulent nettement leur opinion en disant que ce phéno- mène (c réside dans le changement de » forme et de consistance des ventri- )> cules quand ceux-ci passent de la » diastole à la systole, et dans l'instan- » tanéité de cette transformation (c). » Dernièrement M. Chauveau a publié de nouvelles observations sur la systole ventriculaire ; il trouve que le dia- mètre antéro-postérieur du cœur aug- mente brusquement , et il attribue uniquement à ce changement de forme le choc de cet organe contre la paroi thoracique (d). (a) Beau, Traité d'auscultation, p. 247. (6; Clendinning-, Report on the Motions and Soumis oftlie Henrt, obs. 3, i, etc. {Brit. Associât., Glasgow, 1840, p. 180 et suiv.). (c) Chauveau et Faivre, Op. cit., p. 35. (d) Chauveau, Sur la théorie des pulsa'ion s du cœur {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1857, t. XLV, p. 371). MOUVEMENTS MI COEUR. '23 moment de sa contraction, de façon à se rapprocher de la paroi antérieure du thorax. Lorsque la portion ventriculaire du cœur, en se contractant, acquiert la forme typique que je viens d'indiquer et devient rigide, elle tend aussi à prendre une direction déterminée par rapport à sa base et aux gros vaisseaux auxquels celle-ci est attachée. L'axe de ligure de cet organe tend à former ainsi un angle constant avec le plan fixe ou presque fixe qui passerait par l'origine des artères aorte et pulmonaire. Il en résulte que si la pointe du cœur, pendant la diastole, est retombée ou a été portée plus ou moins loin de la ligne correspondant à cet axe, elle se relèvera au moment de la systole, et que ce redresse- ment sera d'autant plus marqué que la déviation préalable aura été plus grande (i). Or, pendant l'état de flaccidité qui carac- Mouvement de bascule du cœur ea avant. (1) M. Hope explique le choc du cœur à peu près de la même manière que je viens de le faire, et cile divers cas pathologiques dans lesquels ce mouvement est devenu plus marqué que d'ordinaire , parce que des tu- meurs ou des adhérences situées der- rière l'origine de l'aorte fournissaient un point d'appui plus solide sur lequel la base du cœur pivotait {a). Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai aux observations consi- gnées par M. Valentin dans son Manuel de pJujsiologie (6) , et au travail de M. Ludwig que j'ai déjà eu l'occasion de citer. Quant au mécanisme à l'aide duquel ce résultat s'obtient, je partage l'opi- nion de ce dernier auteur, qui conclut de ses expériences que la base du cœur reste immobile, et que le dépla- cement de la pointe de cet organe est d'autant plus grand que le plan pas- sant par l'origine de l'aorte s'éloigne davantage de l'angle droit pendant le repos (c). Un médecin hollandais, M. Levié, a cru pouvoir expliquer le choc du cœur par l'inégalité d'action des deux ventricules, ei il a cité, à l'appui de sa manière de voir, divers cas patholo- giques dans lesquels ce phénomène est tantôt augmenté , lantôt annulé ou amoindri ; mais cette hypothèse n'est l)as admissible et ne rend en aucune façon compte des faits observés (d). (a) Hope, A Trealise on theDeseases of Ihe Heart, |i. 59. (b) Valcnlin, (Jrundriss der J'hysiologie, 1851, p. lUl tt suiv. {r.) Ijidwij,', Op. cit. (Zeilschr. fur rationn. Medizin, t. VII, pi, 2, Çig. 13). — Idem, Lehrb. dcv Phyuioluijie des Menschen, ISSO, t. II, p. Cii, fig. 38. {d) Lcvid, Veraitch einer neneii Erlâuterung des nevxstouMs im (jesiinden inul lirni\ken /usKnide (Archiv fur phy.-iinl. Ileilkvnde, 1K/^0, I. \'III, p. 4.20). 2/|. MÉCANISME DE L.V CIRCULATION. lérise la diastole, la poinle au cœur tend effectivement à aban- donner cette direction et à s'incliner en bas , ce qui l'éloigné d'autant de la paroi antérieure de la poitrine , et , lors de la contraction ventriculaire , elle se redresse pour reprendre sa position typique, mouvement qui fait presser ou même heurter sa face antérieure contre cette paroi (i). 11 est du reste facile de se rendre compte de ces changements dans la direction de l'axe du cœur et du mouvement de la pointe de cet organe en avant lorsque les ventricules se contractent. En effet, les fibres musculaires qui occupent la face antérieure de sa portion ventriculaire sont plus longues que celles situées du côté opposé, et par conséquent, sous l'influence d'une con- traction de même intensité , elles doivent se raccourcir plus que ces dernières. Il en résulte que les deux forces appliquées sous un certain angle à la pointe du cœur ne tirent pas égale- ment celle-ci en haut, et qu'au moment de la systole elle doit se porter un peu en avant en même temps qu'elle se rapproche de la base des ventricules (2). (1) M. Ludwig, se fondant sur des devait influer beaucoup sur les mou- expériences dans lesquelles on a dé- vemenls de cet organe , mais il ne se terminé à l'aide d'aiguilles enfoncées rendit pas bien compte du mécanisme dans le cœur , à travers les parois de ce phénomène (6). L'explication du thorax, la portion de ce viscère anatomique de la projection de la qui correspondait au point où le choc pointe du cœur en avant lors de la se faisait sentir, pense que ce phéno- systole ventriculaire, présentée ci-des- mène dépend tantôt du redressement sus, a été adoptée dans ces derniers de la pointe des ventricules, d'autres temps par plusieurs physiologistes fois des mouvements de la base de (MM. Mope , Parchappe et Bérard , ceux-ci, qui, lors de la systole, par exemple); mais Carlisle fut , je deviennent circulaires au lieu d'èlre crois , le premier à l'établir d'une elliptiques, comme dans la diastole («). manière satisfaisante (c). Plus récem- (2) Borelii a reconnu que la dispo- ment elle a été bien développée par sillon des fibres musculaires du cœur M. Verneuil dans une thèse inaugu- (a) Ludw'ig , Lehrbuch der Physiologie des MenscUen, 1850, t. II, p. 6â. (b) Borelii, De motu Anlmalium. (c) Carlisle, Observations on the Motions and Sounds of thc Ikarl {Report ofthe S'i/ Meeting of the Brit. Associât, lield at Cambridge in 1834, p. 455). MOUVEMEiNTS DU COEUR. 25 Enfin le cœur tout entier peut subir un certain déplacement Locomotion au moment de la systole ventriculaire par l'action du jet lancé dans les artères, principalement dans l'aorte, et ce phénomène est égalementcomplexe,cardeux causes contribuent aie produire. L'une de celles-ci est l'effet de recul déterminé par la sortie du liquide à la partie antérieure des ventricules. Chacun sait que les fluides, en s'échappant d'un vase où- ils sont comprimés, exercent sur la paroi opposée à l'orifice d'écoulement une cer- taine pression qui tend à repousser celle-ci et à déplacer le vase tout entier. C'est l'impulsion ainsi donnée qui détermine l'ascension d'une fusée et le recul des armes à feu , ainsi que le mouvement des machines hydrostatiques appelées roues à réaction ou tourniquets hydrauliques. L'effet produit est le même si la compression du fluide résulte de la dilatation de celui-ci ou de la contraction des parois du vase ; par consé- quent le sang, en s'échappant des ventricules, doit tendre à repousser le cœur en sens contraire , et cet organe n'étant retenu en place que par des vaisseaux à parois extensibles, doit nécessairement céder à la pression exercée de la sorte, si la puissance développée dans cette direction est assez grande pour vaincre les résistances opposées tant par le poids du vis- cère que par l'élasticité des tuniques artérielles qui tendent à le maintenir immobile. Or, l'observation montre que générale- ment il en est ainsi, et que le recul du cœur suffit pour com- rale, où les opinions des anciens auteurs des muscles papiliaires {b) ; mais, sont discutées avec soin et l'action des ainsi que le fait remarquer i\I. Skoda, fibres musculaires des parois des ven- la force d'impulsion de cet organe tricules très bien décrite {a). vers le sternum n'est pas en rapport M. Heine a cru pouvoir se rendre avec le degré de développement des mieux compte du mouvement du cœur colonnes charnues de ses ventricules, vers la paroi antérieure du thorax, et l'hypothèse de M. Heine n'est pas on allrihuant ce phénomène h l'action acceptable (c). (a) A. Verneiiil, Hecherches sur la locomotion (hi cœur. Paris, ISSâ. (b) Heine, Die Mechanilc der Uerzkammerbewegung, des Herzstosscs, e(r., IRiO. (c) SkoJa, Traité de percussion et d'ausruUalinn, p. 212. du cœur. 26 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. penser les effets du raccourcissement de cet organe au moment delà systole, ou même pour déplacer son sommet et le repousser vers le bas (1). Je dois ajouter aussi que le changement de direction du cours du sang déterminé par la courbure de l'aorte ascendante doit tendre à redresser ce vaisseau, et par conséquent à écarter du (1) Cette application des principes de l'hydraulique à la théorie des mouvements de locomotion du cœur a été faite d'abord par O'Brian (a), puis par Gutbrod, et adoptée par M. Skoda (6) ; mais elle a été sur- tout développée récemmentpar M . Hif- felsheim, qui a construit un appareil ingénieux propre à en démontrer l'exactitude (c). D'après ce dernier physiologiste , le choc du cœur ne se produirait plus dès qu'on interrompt complè- tement le passage du sang dans cet organe {d). Plusieurs objections ont été faites à cette théorie : les unes prouvent que l'efTet de recul ne saurait être la seule cause du choc du cœur; mais aucune ne démontre, comme le pensent quel- ques auteurs (e), l'inadmissibilité de cette impulsion au nombre des forces dont le jeu détermine ce phéno- mène. Parmi les premières, je citerai celles faites par MM. Messerschraidt et Valentin. Messerschmidt a combattu l'hypothèse trop exclusive de Gutbrod, en faisant remarquer que des mouve- ments analogues à ceux dont résulte le choc se continuaient lorsque le cœur, ayant été extirpé, ne contient plus de sang (/). M. Valentin se fonde sur des expériences dans lesquelles ayant res- cisé la pointe du cœur, de façon à permettre la sortie du sang par cette voie, il ne remarqua aucun change- ment résultant de la manière dont cet organe se soulevait (g). Au nombre des secondes se range celle tirée de la contractiUlé des parois du cœur. Mais les effets résultant de la pression exercée par le liquide contre les parois du réservoir sont les mêmes, soit que cette force naisse de la dilatation du contenu, soit qu'elle dépende de la contraction du contenan I. Du reste , dans quelques cas , ce mouvement d'abaissement du cœur (a) O'Brian, Case of Partial Ectopia {Trans. of ihe Prov. Med. Associât., vol. VI, ei Amer, Journ. ofMed. Sciences, 1838, t. XXIII, p. 195). (6) SkoJa, Traité de la percussion et de l'auscultation, p. 199 et suiv. (c) Hiflulsheira , Physiologie du cœur, mouvements absolus et relatifs {Mém. de la'Soc. de biologie, 1855, "1' série, t. I, p. 273). — Deuxième mémoire {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1855, t. XLI, p. 255). (d) Hiffolslieim, Troisième mémoire sur les mouvements du cœur ; influence de la ligature des gros vaisseaux du cœur sur le battement ou choc précordial [Comptes rendais de l'Académie des sciences, 1856, t. XLHI, p. 715). (e) Kiwisch, Neue Théorie des Herz-stosses [Prager Yierteljahrschrift filr die prakt. Heilkunde, 1846, t. IX, p. 501). — Giraud-Teulon, Note relative à une nouvelle théorie de la cause des battements du cauir {Comptes rendus de V Académie des sciences. 1855, t. XLI, p. 258). (/■) Messersclimidt, Bemerkungen ûber die Erkldrung des Herzstosses (Froriep's Neue Noliz-en , 1840, t. XIII, p. 291). {g) Valentin, Reperlorium, 1841, p. 331, et Lehrbuch der Physiologie, 1. 1, p. 435. MOUVEMENTS DU COEUR. 27 plan résistant contre lequel s'appuie la portion postérieure de sa crosse, son extrémité antérieure, qui à son tour, par ce mouvement, entraîne le cœur en avant. Quelques physiolo- délerininé par l'allongement des gros vaisseaux au moment de la syslole a été observé directement chez l'Homme. Ainsi, tout dernièrement, M. Bam- berger a eu l'occasion d'examiner un Homme chez qui, par suite d'un coup de couteau donné dans la poitrine, on pouvait aj)pliquer le doigt sur la pointe du cœur : or chaque fois que le cœur se durcissait, phénomène qui caractérise son état de systole, sa pointe descendait sur le doigt de l'ob- servateur, tandis qu'au moment de la diastole elle se relevait {a). Chez des enfants dont les parois thoraciques étaient restées incomplètes, on a con- staté aussi cette locomotion en bas et à gauche lors de la systole (6) . Par exemple, dans un cas observé par M. O'Brian, médecin à Bristol. L'enfant était âgé de quatorze jours, et sa santé paraissait bonne. A chaque contraction du cœur la totalité de la tumeur contenant cet organe était poussée en bas avec force (c). J'ajouterai que M. Commaille a cité à l'appui de l'opinion de MM. Gut- brod et HilTelsheim une observation qu'il a eu l'occasion de faire chez un Chat dont le cœur continuait à se contracter avec force et régula- rité, pendant plusieurs heures après la mort. Dès que tout le sang en fut sorti, les mouvements de systole et de diastole ne persistèrent pas moins ; mais cet' organe ne se soulevait plus : les battements avaient cessé {d). On voit, par les expériences de M. Bryan, que chez le Cheval l'elTet du recul se fait sentir sur la base du cœur, mais est en général com- pensé à la pointe de cet organe par le raccourcissement total des ventri- cules au moment de la systole. Il en résulte que la pointe du cœur reste à peu près immobile, et que le choc est produit essentiellement par la pression de la portion moyenne de la région ventriculaire du cœur contre le côté gauche de la poitrine (e). Des faits qui sont parfaitement en accoi'd avec ces résultats ont été constatés aussi par M. Kornitzer (/") et par MM. Chauveau et Faivre (g). Je dois ajouter cependant que, dans un travail plus récent, l'un de ces derniers auteurs est arrivé à cette conclusion, que l'effet du recul est nul. Ces nouvelles expé- riences de M. Chauveau prouvent bien que le battement du cœur contre la ilhol. , {a) Bamberger, Deilracje %ur Pliysiolo(iie und Palholo(jle des Herz-ens (voy. Arclt. fur Anat. uni PhysioL, 1856, t. IX, p. 328). (6) Skoda, Op. cit., II. 200. — FrickliofTcr, Deschreib. einer Difformitât des Thorax mit Defect dcr Rippen nebsl Bemer- kungen ûber Uerzbewerjunrj {Archiv filrpathol. Anat., t. X, p. 474). (c) O'Brian, Case of Partial Eclopia (Trans. of the Prov. Med. and Surg. Associât., vol. VI, et American Journal of Med. Sciences, 1838, t. XXIII, p. 193). (d) Commaille, Observation d'un fait qiii se rattache à cette proposition : ci Le creur bal parcp qu'il recule. » (Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 185."), t. XLl, p. 1045.) (e) Bryan, On Ihe Précisa Nature of Ihe Movements of the Ileart (Lancet, 1833, I. I, p. 741). (f) Korniizer, Die am Icbendcn Herxen mitjedemllerxsclilay vor sich yehenden Veriïndi'rvnyen {SitAungsberichte der Akad. der Wissensch. su ]Vien, 1857, 1. XMV, p. 121). {y) Cliativeau et Faivro, Op. cit., p. 34. 28 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. gistes ont considéré ce phénomène comme étant la cause unique du choc de ce dernier organe contre les parois du thorax; mais, à raison de la décomposition des forces dont il résulte et du poids considérable du cœur, son effet ne peut être que très faible, et l'on doit le regarder seulement comme un auxiliaire des mouvements intrinsèques du cœur et du recul dont je viens d'expliquer l'influence (1). poitrine n'est pas dû uniquement à une action de cet ordre, puisque ces mouvements persistent lorsque les ventricules ne reçoivent plus de sang dans leur intérieur, et par conséquent ne peuvent en lancer an dehors ; mais elles ne prouvent pas que cette pro- jection de liquide ne concourt pas à la production du phénomène (a). M. Ha- mernik est aussi d'avis qne la systole ventriculaire n'est pas accompagnée d'un mouvement de recul [b). (1) Senac attribua la locomotion du cœur à deux causes : d'abord à la ten- dance de la crosse aortique à se re- dresser sous l'influence de l'impulsion produite par l'arrivée d'une ondée de sang dans son intérieur; en second lieu , au gonflement de l'oreillelte gauche qui se trouve interposée entre la portion ventriculaire de cet organe et la colonne vertébrale (c). W. Hanter avait cherché aussi à expliquer ce phénomène par le redres- sement de la courbure de l'aorte (d), et dernièrement M. J. Béclard a simulé cet effet en injectant de l'eau dans un tube de caoutchouc dont l'extrémité libre était recourbée (e). M. Hiffelsheim, il est vrai, a combattu ces vues en arguant de l'insuffisance de la force appliquée ainsi à la pointe du cœur; mais dans ses expériences sur les effets du recul, il a toujours vu l'injection d'une ondée de liquide dans l'aorte produire un très no- table redressement de celte cour- bure if). Du reste, ce phénomène ne paraît exercer en réalité que fort peu d'in- fluence sur la locomotion du cœur. Ainsi D. Barry ayant introduit la main dans le thorax d'un Cheval, et ayant saisi fortement la partie cardiaque de l'aorte, ne sentit aucun mouvement dans ce vaisseau ; et bien que celui-ci fut tenu de la sorte dans l'immobilité, cet expérimentateur n'aperçut aucun changement dans la manière dont le cœur venait battre contre la paroi du thorax (y). MM. Chauveau et Faivre, dans leurs expériences sur le Cheval, n'ont observé aussi aucun redresse- ment de l'aorte [h). (a) Chauveau, Sur la théorie des pulsations du cœur (Comptes rendus de VAcad. des sciences, 1857, t. XLV, p. 371). (b) Hamernik, Das Her%und seine Beweyung, p. 95 et suiv. (c) Senac, Traité de la structure du cœur, 1777, t. I, p. 356. (d) Voyez J. Hunter, Treatise on Inflammation, etc., 1794, p. iH. (e) Béclard, Traité élém. de physiologie humaine, 1855, p. 178. (f) Hiffelsheim, Op. cit. (Mém. de la Soc. de biologie, 2° série, t. II, p. 279 et 288). (g) D. Barry, Dissertation sur lepassage du sang à travers le cœiir. Thèse, Paris, 1827, p. 7. [h) Chauveau et Faivre, Op. cit., p. 34. MOUVEMENTS DU COEUR. 29 En résumé, nous voyons donc que le phénomène auquel les physiologistes donnent quelquefois le nom de locomotion du cœur est une chose très complexe, et que le choc de cet organe contre la paroi antérieure du thorax est le résultat de plusieurs mouvements simultanés, mais distincts. 11 est aussi à noter que la systole ventriculaire est accompa- gnée d'une sorte de torsion par laquelle le cœur tourne légère- ment sur lui-même, et sa pointe se porte un peu de gauche vers la droite. La direction oblique de la plupart de ses fibres semble être la cause principale de ce mouvement ; mais la tendance de cet organe à reprendre une position normale dont il a été dévié pendant la diastole ventriculaire parait y contribuer (1). L'impulsion qui se fait sentir à la partie inférieure et anté- rieure du cœur pendant la systole ventriculaire n'est pas le seul phénomène de ce genre qui s'observe dans ce viscère. On (1) Un physiologiste de Alarboiirg, M. Kiierscliner, pense que ce mouve- ment de roulis est la cause du choc du cœur contre la paroi de la poitrine, et il l'attribue au retour de cet organe à sa position naturelle, après que le déplacement en arrière et à gauche, détermine par la diastole du ventri- cule droit, a cessé (a). Use fonde sur ce que, dans ses expériences, le cœur ne .s'est pas relevé de la sorte quand il était appliqué contre le rachis, et ne pouvait par conséquent se porter en arrière sous l'influence de la pression développée par l'entrée du sang dans les ventricules. Quand le cœur est libre, cette pression exercerait un li- raill(jment sur les grosses artères, qui, à raison de l'élasticité de leurs parois, ramèneraient le viscère en avant et à droite, dès que les ventricules, en se vidant, cesseraient de faire effort en sens contraire. L'auteur fait intervenir dans son raisonnement diverses consi- dérations qui ne sont pas toujours en accord avec les principes de riiydrau- lique, et il attribue certainement à ce mécanisme trop d'importance. Il est aussi à noter que le mouvement de projection du cœur n'est pas subor- donné à l'aflUix du sang dans les oreillettes, et peut persister après que ce liquide a cessé d'arriver à cet or- gane ; mais je suis porté à croire que l'efiet consécutif du déplacement dia- slolaire contribue à la production du choc du cœur. M. Kornitzcr attribue le mouve- ment de rotation du cœur à la torsion des grosses artères auxquelles cet organe est suspendu (6). (d) Kuuiscliner, Ueber dcn Ikrzstoss (Miillcr's Aixhiv fur Anat. und Vhysiol, -1841, |>. lOif). (b) Koriiilzcr, Up. cU.[HUzun(jiiberkhle derAlcad. der Witmensch. «w Wien), iSbiJ, t. XMV, ji. d 21 . 30 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. remarque aussi un certain déplacement de sa partie auriculaire qui correspond au gonflement de ces réservoirs, et qui précède par conséquent le choc systolaire (1). L'extrémité supérieure du cœur se trouve ainsi portée en avant , vers le sternum , mais ce mouvement n'a que peu d'importance. § 4. — Pendant que les ventricules se contractent de la jeudes valvules sorte, Ics orlficcs auriculo-ventriculaires se trouvent fermés ventricules, par sultc du rapprochemcnt des valvules dont les bords de ces ouvertures sont garnis, et le mécanisme à l'aide duquel cette clôture s'effectue est remarquable par sa simplicité et sa per- fection. Pour l'étudier, il est bon de suspendre dans la position verticale un cœur dont on a enlevé l'une des oreillettes, celle du côté gauche, par exemple, et de faire tomber d'aplomb au centre de l'orifice auriculo-ventriculaire ainsi dénudé un filet d'eau, ou mieux encore de quelque dissolution saline dont la den- sité se rapproche de celle du sang. On voit alors que les languettes de la valvule mi traie flottent dans le liquide dont le cœur se remplit, et se placent spontanément de façon à simuler une sorte d'entonnoir ou de cône renversé, mais elles ne se rapprochent pas complètement par leur bord inférieur qui se recourbe uu peu en dehors. Sous l'influence de la colonne hquide qui tombe avec une certaine force sur l'espace ainsi laissé libre, le ven- tricule gauche se distend jusqu'à un certain point, et dès que l'on vient à interrompre le courant, on voit les parois élasti- ques de ce réservoir revenir un peu sur efles-mêmes. Or, le reflux produit de la sorte agit immédiatement sur la surface externe du cône renversé dans l'intérieur de la cavité ventri- culaire, qui est constitué par les languettes valvulaires ; il rap- proche les lèvres de ces soupapes, et en achève si bien la (1) Ce mouvement alternaiif des pond à la diastole, puis à la systole de ces oreillettes en avant, vers le sternum, réservoirs, a été très bien observé par ou en arrière, vers le dos, qui corres- la Commission médicale de Dublin (a)* (a) Op. cit. {British Associât., 1835, p. 243). MOUVEMENTS UU COEUR. Si fermeture, que si l'expérience est adroitement faite, on peut ensuite renverser le cœur sans qu'une seule goutte du liquide ainsi emprisonné dans le ventricule s'en échappe (1). On voit donc que par le seul fait de la distension des parois des ventricules sous l'influence de la charge complémentaire l)Oussée dans ces réservoirs par la systole auriculaire et de la cessation de ce mouvement, les valvules auriculo-ventriculaires se trouvent rapprochées, et le reflux du sang rendu impossible ou au moins très faible. La disposition des cordes tendineuses qui sont attachées aux bords de ces soupapes et fixées infé- rieurement aux muscles papillaires du cœur contribue à donner à cet appareil la forme conique qui en rend la clôture si facile ; et lorsqu'au moment de la systole ventri cul aire, le sang presse sur la face inférieure des voiles obliques ainsi rapprochées, celles-ci , en se gonflant comme s'enfle une voile latine que le vent remplit, s'appliquent encore davantage les unes contre les autres ; car, à raison des espèces d'amarres formées par leurs cordes tendineuses, elles ne peuvent se renverser dans l'oreillette (2). Ainsi, dès que le sang n'entre plus dans les ventricules et avant même que ceux-ci aient commencé à se contracter d'une manière active, le passage auriculaire se trouve (1) Celle expérience et l'explication conlraclent en même temps que les du mécanisme de la clôlure des val- parois des ventricules, mais seulement \ules auriculo-ventriculaires qui en assez pour maintenir les languettes découlent sont dues à M. Baumgarten. de ces valvules dans la position vou- Ce physiologiste a constaté aussi que lue pour qu'elles ne se renversent pas pendant le repos du cœur ces valvules dans l'oreillette, accident qui permet - ne s'appliquent pas contre les parois trait le reflux du sang dans cette ca- des ventricules, mais conservent une vite, et qui se produit parfois jusqu'à position oblique [a). un certain point quand on simule sur (2) Il est probable que les muscles le cadavre les mouvements du liquide papillaires auxquels sont fixées les en circulation. Mais cette contraction cordes tendineuses ou amarres des n'est pas nécessaire pour déterminer valvules auriculo-ventriculaires se la clôture de l'appareil valvulaire. (a) A. Bauiiiij'uiiuri, Uebev denilechanismus,durcli luelcheu die vcnOsen HevMaïqien neschlussen. werden (Muller's Avcliiv fur Anal, und PhysioL, 1843, p. Wà). 32 -MÉCANISME LE LA CIKCL'LATION. fermé et le liquide, pressé par la systole, ne peut s'éeliapper qu'en pénétrant, d'une part dans l'artère aorte^ d'autre part dans l'artère pulmonaire. Le jeu de la valvule mitrale est plus parfait que celui de la valvule auriculo-ventriculaire du côté droit du cœur, et, lorsque la circulation est gênée dans les vaisseaux du poumon , ce dernier laisse refluer dans l'oreillette une quantité plus ou moins considérable de sang : circonstance qui est très utile pour empêcher l'engorgement de cette portion du système vasculaire (1) ; mais, dans l'état normal, la clôture est suffisamment exacte pour que la totalité ou la presque totalité du liquide contenu dans l'un ou l'autre ventricule soit empêchée de retourner vers les veines et obligée de s'engager dans le sys- tème artériel. Enfin, l'ondée de sang lancée ainsi dans les artères soulève les valvules sigmoïdes que nous avons vues autour de l'entrée de ces vaisseaux (2), et lorsque la diastole des ventricules se prononce, ces soupapes , pressées en sens contraire par la colonne liquide contenue dans ces mêmes vaisseaux, se refer- ment de nouveau et empêchent tout reflux dans le cœur (3). (1) M. King a appelé l'aUention des valvule une soupape de sûreté^^el en physiologistes sur l'insuffisance de la a étudié le jeu avec beaucoup de soin valvule tricuspide pour empêcher le chez divers Mammifères aussi bien reflux du sang du ventricule droit que chez l'Homme (a). dans l'oreillette correspondante toutes (2) Voyez tome III, page Zi96. les fois que le premier de ces réser- (3) Ces valvules, en forme de poches voirs se trouve fortement distendu, ou de bourses, s'appliquent les unes ainsi que cela a lieu dans les cas d'em- contre les autres lorsqu'elles sont barras de la circulation pulmonaire, et renflées , et ferment complètement sur l'utilité de cette disposition pour l'ouverture aortique. Leur jeu a été empêcher la trop grande accumulation étudié d'une manière spéciale par du sang dans les dépendances de l'ar- M. Retzius (6). tère pulmonaire. 11 a appelé cette (a) T. King, An Essaij on the Safety-Vahie Fimction in the Right Ventricle of the Human ïleart and on the Gradation of this Function in the Circulation of ]Yarm-Blooded Aniinals [Guy's Hospital Reports, 1837, vol. II, p. 104). (6)r>etzius, Ueber den Mecbanismus des Znschliessens der HalhmondfôrmiQen Klappeu (Miillcr's Archiv, 1843, p. 14, pi. 1, fig. 1 à 9). BRUITS DU COEUn. 33 §5. — Les divers mouvements dont je viens de rendre Bmiis „ „ . , du cœur. compte ne se iont pas tous silencieusement, et lorsqu on écoute avec attention le jeu du cœur , soit en appliquant directement l'oreille sur la partie voisine de la poitrine, soit en employant comme intermédiaire un cylindre creux appelé stéthoscope^ on entend une série de bruits à l'aide desquels le médecin peut juger de la manière dont fonctionnent les diverses parties de cet organe important. Ce fait n'avait pas échappé à l'attention de Harvey (1), mais c'est de nos jours seulement qu'on en a fait l'objet d'études sérieuses, et c'est surtout à Laënnec que la médecine est redevable de la connaissance des signes qu'on en peut tirer dans le diagnostic des maladies du cœur. Dans l'état normal, chacun des petits cycles de mouvements accomplis par cet organe est accompagné de la production de deux sons qui diffèrent par leur timbre et par leur siège. Le premier de ces bruits a son maximum d'intensité entre la qua- trième et la cinquième côte, un peu en dessous et en dehors du mamelon ; il est sourd et prolongé. Le second, plus clair et plus court , semble partir de la partie antérieure de la poitrine , entre le mamelon et le sternum, vers le niveau de la troisième côte (2). (1) Il est probable que l'existence se succèdent avec une grande rapidité, du bruit cardiaque était connue d'Hip- le deuxième bruit devient moins dis- pocrate, car on sait que ce médecin tincl que d'ordinaire ou tend à se avait parfois recours à l'auscultation confondre avec le premier (c). de la poitrine; mais Harvey fut, je II est aussi à noter que l'intensité crois, le premier à en parler (a), et de relative des deux bruits varie suivant son temps le fait était si peu connu, le point des parois du thorax où l'ob- que l'un de ses adversaires tourna en servateur applique l'oreille, et derniè- ridicule l'assertion du grand pliysio- rement ces variations ont été étudiées logiste anglais (/j). d'une manière toute spéciale par (2) Quand les ballemenls du cœur M. Walshc {d). (a) Harvoy, Exercit. anal, de motucordis et sanguinis in Animalibus, 1028, cap. v, p. 30, il)} Emilius l'arisanus, Disceptalinnes de motu cordis , 4 047, p. tOl et iOl. (fi) lleport of Ihe London Sub-Cnmmillee (flrit. Associât., Brislol, -isao, p, 203). ('/) VValsIic, Discases of Ihe Luiias and Ileart, 1851, p. 191. IV. oh MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Le bruit inférieur coïncide avec le choc de la portion ventri- culaire du cœur contre la paroi du thorax. Il est suivi d'un petit silence pendant lequel on sentie battement du pouls au poignet ; puis le bruit supérieur se fait entendre ; il coïncide avec le gon- flement des oreillettes et la systole des troncs artériels qui naissent du cœur. Enfin, à ce phénomène succède un nouveau silence, ou repos, dont la durée occupe environ le tiers du temps écoulé entre le commencement du premier bruit et le retour de celui-ci. Les nombreux auteurs qui, depuis quinze ans, se sont occu- pés de l'étude de ces bruits, sont très divisés d'opinions quant aux phénomènes dont ils dépendent ; mais ce désaccord me paraît tenir en grande partie à ce que l'on regarde assez généra- . lement chacun de ces sons comme étant simple, et dû par con- séquent à une cause unique, tandis qu'ils sont probablement complexes et doivent être considérés comme des résultantes de plusieurs bruits d'origines différentes (1). mit inférieur § 6. — Lc brult inférieur, ou bruit sourd, que les patholo- sjstoîique. gistes appellent généralement aussi le premier bruit du cœur, a évidemment son point de départ dans la portion ventriculaire du cœur. En effet, si l'on détermine avec précision le point où il se fait sentir avec le plus d'intensité, et qu'ensuite, opfTant sur le cadavre, on enfonce dans ce point un stylet ou la lame d'un scalpel, on trouve par l'autopsie que l'instrument a pénétré dans le cœur, non loin de la pointe de cet organe. Tous les (1) Sous ce rapport , je partage premier bruit cardiaque a été consta- tout à fait l'opinion de MM. Barlh et tée par Laënnec , Ilope et la plupart Roger {a). des physiologistes qui se sont livrés à La coïncidence de la contraction des des recherches expérimentales sur ce ventricules et de la production du sujet (6). (a) Bartli et Roger, Traité pratique d'auscultation, p. 195 et suiv. (6) Laënnec, Traité d' atiscultation médiate, t. Il, p. 404. — Hope, A Treatise on tlie Diseases ofthe Heart, p. 16. i— Dublin Sub-Committee, op. dt. (Brit. Associât., 1835, p. 248, etc., etc.). BRUITS DU COEUR, 35 physiologistes admettent ce résultat, mais ils ne sont pas d'accord sur le mouvement des ventricules qui coïncide avec le dévelop- pement de ce son. La plupart des auteurs le considèrent comme étant synchronique avec la systole; M. Beau, au contraire, soutient qu'il se produit en même temps que la diastole des ven- tricules , et qu'il résulte du choc produit par la colonne de sang qui, lancée par la contraction des oreillettes, vient heur- ter contre les parois des cavités ventriculaires (1). Si les deux mouvements de dilatation extrême et de contraction des ventri- cules étaient séparés par un intervalle de temps bien appré- ciable, l'observation trancherait facilement cette question (2) ; mais si la systole ventriculaire survient presque immédiatement après l'arrivée du sang dans Tétage inférieur du cœur, sous l'influence des oreillettes, les deux phénomènes peuvent être facilement confondus, et des erreurs constantes analogues à celles dont les observations astronomiques sont toujours plus ou (1) Cette hypothèse avait été déjà diatement, et ne peut contribuer que soutenue par M. Corrigan (a) et par très peu à le renforcer. M. Pigeaux (h). M. Beau l'a dévelop- (2) Chez le Cheval, où les contrac- pée d'une manière plus plausible (c), tions du cœur se succèdent assez et il est probable que la contraction lentement, MM. Chauveau et Faivre des oreillettes n'est pas tout à fait ont pu s'assurer de la non-coïncidence silencieuse. Ainsi dans une des expé- du premier bruit avec la systole auri- riences de la Commission des méde- culaire caractérisée par le durcisse- cins de Londres , tous les battements ment des parois des oreillettes. Le son de ces réservoirs n'étaient pas suivis se produit après cette contraction et d'une systole ventriculaire, et cepen- coïncide exactement avec la systole dant tous étaient accompagnés d'un ventriculaire (e). léger bruit {d). Mais d'ordinaire le M. Gabriac est arrivé à la même son très faible qui est développé de conclusion en opérant sur des Chiens la sorte se confond avec le bruit sys- plongés dans un état d'aneslhésie par tolique qui y succède presque immé- l'action du chloroforme (/). (a) Corrigan, Op. cit. (Dublin Med. Trans., 1830, now Séries, 1. 1, p. 151). (b) Journal hebdomadaire de médecine, 1830, t. III, p. 238, et t. V, p. 187. (c) Beau, Traité d'auscultation, p. 195 et siiiv. (d) Clendinninç,'', Op. cit. [Brit. Associât., Glasgow, 1840, p 182). (e) Ciiauvcau cl Kaivre, Nouvelles recherches expérim.entales sur les mouvemenis et les bruits du cczur, p. 27 (extrait de la Gazelle médicale, 1850). (/■) Gabriac, Quelques expériences sur le choc du cœur. Thèse. Paris, 1 857. 36 ÎÎÉCÂiSlSME DE LA CIRCULATION, moins entachées peuvent fliire naître de l'incertitude sur la rela- tion vraie du moment précis où naît le son qui frappe l'oreille, et de celui où s'effectue le mouvement que l'œil remarque au même instant. Il faut donc chercher d'autres moyens pour résoudre la question, et on les trouve dans les expériences faites sur des Animaux de grande taille. En effet, si le bruit inférieur du cœur, de même que le choc produit par cet organe contre les parois du thorax, était une conséquence de la contraction des oreillettes et de la diastole ventriculaire déterminée par le jet de sang que les premiers de ces organes y projettent, il est évident que, pour empêcher la production de ce sou, il suffirait d'arrêter le jeu des oreil- lettes. Or, l'expérience prouve que cela n'est pas. Le bruit en question continue à se faire entendre lors même que les oreil- lettes ne peuvent plus se contracter, et se manifeste chaque fois que les ventricules viennent à se resserrer avec force. , , .^ Le bruit inférieur du cœur est donc un phénomène dépen- Cause du bruit 1 X systoiique. ^|gjnjj. essentiellement de la systole ventriculaire. Mais cette systole est accompagnée de plusieurs mouvements qui, indé- pendamment de la contraction même des fibres charnues du cœur, pourraient être invoqués pour expliquer la production des vibrations sonores. Quand on analyse expérimentalement les circonstances dont la production de ce bruit est accompagnée, on trouve que les sources en sont multiples, mais qu'une de ses causes princi- pales paraît résider dans la contraction musculaire dont les parois des ventricules sont le siège. On sait, en effet, par des observations déjà anciennes, que l'action énergique d'un muscle est toujours accompagnée de vibrations sonores plus ou moins distinctes pour notre oreille. On a reconnu une grande analogie entre le bruit de la systole ventriculaire et celui engendré par des contractions brusques et puissantes des muscles larges dont les parois de la cavité abdominale sont garnies, et lorsqu'on BRUITS DU COEUR. 37 écarte toutes les autres causes présumables de ce bruit car- diaque, on ne continue pas moins à l'entendre (1). Il est donc légitime de croire que le premier bruit du cœur résulte, au moins en partie, du phénomène de la contraction (1) Le développement de vibrations sonores par le seul fait de la conlrac- lion de fibres musculaires aété entrevu il y aura bientôt cinquante ans par un physicien célèbre de l'Angleterre , Wollaston (a), et ce phénomène a été étudié vers la même époque par Er- man, de Berlin (b). Laënnec recueillit aussi beaucoup d'observations sur les bruits musculaires engendrés dans di- verses parties du corps humain ; et il en fit l'application à la théorie des bruits anormaux du cœur. Mais il n'y assimila que le bruit de soufflet dont il sera question plus loin (c), et c'est cette hypothèse qui a été combattue par M. Bouillaud [d). En 1835, une des Commissions chargées par l'Association britannique pour l'avancement des sciences, de faire une série de recherches sur les bruits du cœur aussi bien que sur le mécanisme des mouvements de cet organe, entreprit de nouvelles expé- riences sur les vibrations sonores qui peuvent accompagner la contraction musculaire en général, et n(? tarda pas à en conclure que le bruit inférieur du cœur devait tenir en grande partie à un phénomène du même ordre et se lier essentiellement ù l'action des fdjres musculaires de cet organe pendant la systole ventriculairc [e]. Les rappor- teurs de cette Commission appelèrent son intrinsèque la portion du bruit qui dépend de la tension subite des parois du cœur , et ils constatèrent qu'il continue à se manifester lorsque cet organe, en se contractant, ne peut ni battre contre les parois du thorax, ni mettre en jeu les valvules dont il est garni intérieurement. Dans des expériences faites sur des animaux de grande taille (des Anes), ils ont entendu ce même bruit, quoi- que affaibli, lorsque le cœur continuait à se contracter après avoir été séparé de toutes les parties voisines et ex- trait de la poitrine (/"). Des discus- sions se sont élevées entre les patho- logistes au sujet du mécanisme de la production de ces bruits musculaires: les uns les attribuent au fait même de la contraction ; les autres, à la ten- sion des fibres résultant de la résis- tance que les parties voisines opposent (a) Wollaston, On the Diiration of Musciilar Action. Croonian Lecture {Philos. Trans., 1810, p. 2). (6)Erman, Einige Bemerkungen ilbcr Muskularcontraclion { GWhcïV a Annalen der Physik , 1812, i.XL, p. 2i). (c) Laënnec, Traité d'auscultation médiate, t. II, p. -iiO). [dj Ifoiiillaud, Traité des maladies du cœur, l. I, |). 121. (e) ('. Williams, Toild and Clendinuing;, Report of llie London Suh-Committcc on the lilnlimis of Ihelleart {Bnt. Associât., lîrislol, iH'M, t. V, p. 203 et 271). — Voyez, aussi IIopi.-, A Trealise on the Diseases of the Ikavt, p. -12 cl Miiv. — CAi:w\\nn\ni;, Second liapporl (fivit. Associât., (',\ns'j;o\\', iSM, p. 202). — Jégii, De la cause des bruits du co'uv à l'état noriiial. Tlu'so, l'ari':, 1837, r," H 3, p. 13 cl siiiv. (/■) Williams, ToiM el Oendiiiniiip, loc. cit., cxpc'r. \A, Pic 38 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. musculaire dont dépend aussi la systole des ventricules de cet organe. Mais, dans 1 état normal, ce bruit est certainement complexe, et dépend aussi en partie d'autres causes dont il faut également tenir grand compte lorsqu'on veut juger de ce qui se passe dans le jeu du cœur par la nature des sons engendrés dans cet organe. Ainsi le choc de la partie inférieure du cœur contre les parois du thorax est également une des sources de ce bruit complexe. En effet, quand on est couché sur le côté gauche ou que le corps est penché en avant, l'impulsion produite sur les parois de la poitrine par les battements du cœur augmente de force, et l'intensité du son s'accroît en même temps (1). Des expé- riences faites sur des Animaux par Magendie mettent encore mieux en évidence cette source de vibrations sonores, et avaient même porté ce physiologiste à attribuer uniquement au choc du cœur contre les parois thoraciques, non-seulement le bruit infé- rieur dont nous nous occupons exclusivement en ce moment, mais aussi le bruit supérieur (2). au raccourcissement de ces m^mes (1) Voyez à ce sujet les observations fibres , tension qu'ils désignent à tort de la première Commission des mé- sous le nom d'extension muscu- decins de Londres (c). laire [a). M. Bouillaud s'assura du même fait Quelques auteurs pensent que le sur le Coq {d). choc des parois ventriculaires entre (2) Ainsi, quand Magendie main- elles ou contre le faisceau formé par tenait la pointe du cœur éloignée les muscles papillaires contribue beau- des parois* du thorax à l'aide d'une coup à la production du bruit systo- tige métallique introduite dans cette iique; mais les expériences sur les- cavité, il n'entendait plus le bruit in- quelles ils se fondent ne me paraissent férieur, mais celui-ci devenait assez pas concluantes (6). intense pour être perçu par son oreille (a) Hope, A Treatise on Ihe Diseases of the Jleart, p. 42. — Au sujet de la vibration du cœur, voyez aussi une publication récente de M, Haraernik, profes- seur à Prague {Das Herz xmd seine Bewegung, 1858, p. C9 et suiv.). (b) Cboriol, Observ. sur la structure, les mouvements et les bruits du cœur. Thèse, 1841, p. 20 et siiiv. — Bérard, Cours de physiologie, t. III, p. G88. (c) Op. cit. {British Association, t. V, 1830, p. 202). (dj Bouillaud, Traité des maladies du cœur, 1835, 1. 1, p. 129. BRUITS DU COEUR. 39 Il est probable que la tension des valvules auriculo-ventri- culaires qui s'effectue au moment de la systole des ventricules contribue aussi à la production du bruit complexe dont nous nous occupons en ce moment, mais c'est certainement à tort que quelques médecins l'ont attribué exclusivement à ce phé- nomène (1). dès qu'il relevait la tige dont il faisait usage et permettait au cœur de venir heurter comme d'ordinaire contre cet. instrument ou contre les côtes. Il vit aussi que dans les cas où, après avoir enlevé le sternum et mis le cœur à nu, il n'entendait plus le bruit en question^ celui-ci reparaissait avec son intensité ordinaire aussitôt que le sternum était remis en place (a). Dans des expé- riences de la Commission médicale de Dublin, on constata aussi une augmen- tation très notable du son lorsqu'on recouvrait d'une planchette le cœur préalablement mis à nu (6). Mais, d'un autre côté, des expériences non moins décisives montrent que ce choc ne saurait être considéré comme la seule cause du bruit produit par les mouve- ments du cœur. Magendie avait cru remarquer que les bruits du cœur cessaient complè- tement dès que le sternum était en- levé et que cet organe ne trouvait pas d'autre corps résistant contre le- quel il pût frapper (c). Mais d'autres expérimentateurs ne tardèrent pas à reconnaître que cela n'est pas. Ainsi, M. Hope constata la production de ces bruits chez un Ane dont le cœur avait été mis à découvert , et des faits analogues ont été recueillis par i\î. Bouillaud et plusieurs autres phy- siologistes (d). Magendie pensait aussi que l'inter- position d'une couche d'eau ou d'un corps mou entre le cœur et la paroi thoracique empêchait la production du son. Mais les expériences des Com- missions de l'Association britannique prouvent que la cessation des bruits cardiaques ne s'obtient pas de la sorte, et que l'intensité du son est seulement diminuée, soit par l'injec- tion de l'eau dans le péricarde (e) , soit par l'interposition d'une couche d'étoupe entre le cœur et la paroi du thorax {f). (1) M. Rouanet et quelques autres paihologlstes atU'ibuent à cette cause seulement le premier bruit du cœur [(j); mais cette opinion doit tomber devant (a) Magendie, Mém. sur l'origine des bruits normaux du cœur {Mém. de l'Acad. des sciences, 1858, t. XIV, p. 155). (6) Report of Ihe Dublin Sub-Commiltee {loc. cit., 1835, p. 240). (c) MafTfindie, Op. cit. (d) Hopo, Médical Gazette, 1830, cl A Treaiise on Ihe Diseases of Ihe Ileart, p. 13 cl 54. — liouillauil. Traité clinique des maladies du cœur, dH35, 1. 1, p. 128. — lieport of Ihe London Sub-Covimiltee {Op. cit., Brislol, 1830, p. 270). (e) Premier liapport de Dubliniloc. cit., 1835, p. 240). (/■) l'reniier lUippori de la Commission de Londres {firitish Associât., 1830, p. 207). (g) lioiiancl, Aiiatyse des bruits du cœur. Thèse, l-aris, 1832. — Kiwiscli, Ueber die Schallevzeiuiuno in den Kreislaufs Organen (Vcrhaiidl. der Phys. }tcd. Geselsch. au Wûnburrj, 18.">0, I. I). /jO MÉCANISME DE L\ CIRCLLATION L'acliuii exercée par le courant circulatoire sur les diverses parties saillantes et élastiques des voies que le sang parcourt dans l'intérieur du cœur peut contribuer aussi à la production du bruit complexe dont la systole ventriculaire est accom- pagnée, et par conséquent le caractère de ce son peut être modifié par l'altération pathologique detoules ces parties; mais l'étude de ces bruits anormaux est étrangère au sujet de ce cours (1), je ne m'y arrêterai donc pas, et je me bornerai à ajouter que, dans certains états morbides, le bruit systolique les expériences dans lesquelles on a constaté la persistance de ce phéno- mène lorsque le rapprochement des valvules auriculo-ventriculaires avait été rendu impossible par l'introduc- tion du doigt ou d'un instrument à branches élastiques , de l'oreillette jusque dans la cavité des ventri- cules [a). Cependant si cette hypothèse ab- solue n'est pas admissible, il ne s'en- suit pas que le jeu de ces valvules ne puisse concourir dans une cer- taine proportion à produire ce bruit complexe et à en déterminer le ca- ractère. Effectivement cela paraît êire ainsi, car dans quelques expériences où le jeu des valvules auriculo- ventriculaires a été entravé par la dépression d'une portion des parois de l'oreillette jusque dans l'ouver- ture dont elles garnissent les bords, on a remarqué que le début du bruit systolique était moins clair et moins fort que d'ordinaire , ou manquait même tout à fait (6). Des résultats analogues furent obtenus, quand, à l'aide d'un petit instrument à branches mobiles introduit dans le passage auriculo-ventrlculaire, on empêchait les valvules de se rapprocher (c). M. Choriol a cherché à expliquer le bruit systolique par la distension de ces valvules et le choc des parois ven- ' triculaires entre elles , mais il n'a ap- porté aucun fait nouveau à l'appui de cette opinion [d). (1) Les résultats fournis par l'expé- rience suivante et d'autres observa- tions du même ordre ont porté quel- ques physiologistes à attribuer le pre- mier bruit du cœur au passage rapide du sang sur la surface irréguhère des ventricules, lorsque ce liquide se rend aux artères- Le cœur d'un Veau ayant été arraché et suspendu par la base, on remplit les ventriculesavec de l'eau, et l'on exerça avec la main des mou- vements brusques de compression sur ces réservoirs, de façon à en chasser le liquide pendant que l'observateur tenait l'oreille appliquée à un sté- (a) Report of the Londoii Sub-Comjiiittee (Brit. Associât., Brislol, d8oG, p. 2G5). (6) Second Report oftlie London Sub-Committee {Brit. Associât., Glasgow, IS-iO, p. 1 78). (c) Op. cit., p. -186. — Hope, A Treatise on the Diseases of the Heart, p. 38. (d) Choriol, Observ. sur la structure, les mouvements et les bruits du cœur. Thèse, Paris, 341, n' 82, p. 20 et siiiv. BRUITS DU COEUR. M devient assez intense pour être entendu, non-seulement par l'individu lui-même, mais aussi par un observateur dont l'oreille est placée à environ un pied de la poitrine de celui-ci. § 7. — Le bruit supérieur, qui, par sa position, est en rapport avec la base du cœur, et qui, sous le rapport de la coïncidencie second bmt, des phénomènes, correspond tant à la dilatation des ventricules bnùt sujmeur. qu'à la clôture des valvules sigmoïdes dont l'entrée des artères est garnie, paraît dépendre principalement de ce dernier mou- vement (1). En effet, pour le suspendre on pour en changer ihoscope flexible placé contre les ventricules. Un son ayant de la res- semblance avec le premier bruit du cœur se fit entendre ; un son analogue se produisait aussi quand on poussait Tune contre l'autre les parois des ven- tricules vides (a). Les opinions dont j'ai déjà rendu compte ne sont pas les seules qui ont été émises touchant la cause du pre- mier bruit cardiaque. Ainsi M. Wan- ner attribue ce phénomène à la vibration des lames fibro-carlilagi- neuses qui se trouvent dans l'anneau situé à la base du cœur, dans l'origine des artères aorte et pulmonaire, et donnant attache aux diverses fibres musculaires des ventricules. Il suppose que le sang passant sur les cordes tendineuses insérées dans le voisinage de ces plaques est mis en vibration lors de la contraction des ventricules, et il se fonde sur les changements qu'il a remarqués dans les sons rendus par un cœur auquel il faisait exécuter artificiellement des mouvements de resserrement et de relâchement, et auquel il a coupé les points d'inser- tion de ces cordes tendineuses (6). MaJs les expériences dans lesquelles on a empêché le jeu des valvules au- riculo-venlriciilaires sans- faire cesser le bruit inférieur du cœur renversent cette hypothèse. Je dois ajouter que M. Cruveilhier attribue le premier bruit du cœur au redressement brusque des valvules sigmoïdes dans le moment oi!i la con- traction des ventricules lance une ondée de sang dans chaque tronc ar- tériel (c). Mais, dans les expériences faites par . la Commission des méde- cins de Londres, ce bruit a continué après que l'on eut arrêté le jeu des valvules en question à l'aide de cro- chets introduits dans les grosses ar- tères {cl). (1) Lacnnec attribuait le bruit supé- rieur du cœur à la contraction des oreillettes (e). Mais, ainsi que le fit remarquer M. Turner, ce bruit suc- cède à celui produit par la contrac- (rt) Heport of the Dublin Sub -Committee [Bril. Associât., 1835, p. 247). {b) VVanner, Sur les bruits du cœur {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, d8-i9 , 1. XXVIil, p. 201). (c) Cruveilhier, Noie sur les mouvements et les bruits du cœur {Gazette médicale, ISil , t. IN, p. 497). (rf) Williams, Toiid et Clendinning, Op. cit. {Brit. Associai., 183C, p. 207). (e) Laënncc, Traité de l'auscultation médiate, t. Il, p. 399 cl »niv. 42 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. tout à fait le caractère, il suffit d'interrompre ou de gêner le jeu de ces soupapes. Ainsi, quand à l'aide de crochets introduits dans les grosses artères, on retient les valvules sigmoïdes contre les parois des vaisseaux, un bruit de soufflet se substitue au bruit clair et sec qui se produit d'ordinaire dans la région supérieure du cœur, ou bien un silence complet occupe tout l'intervalle de temps compris entre les deux systoles ventriculaires (1). L'artère pulmonaire prend part à la production de ce phénomène, mais le claquement en question dépend principalement de la tension des valvules sigmoïdes de l'aorte. Quelques physiologistes attribuent la pro- tion des ventricules, et précède le long silence ou repos qui termine le cycle de ces phénomènes ; or la systole des oreillettes précède celle des ventricules, et par conséquent ne peut être la cause de vibrations sonores qui ne se font entendre qu'après celles produites par cette dernière contraction (a). Il est aussi à noter que M. Hope a reconnu expérimentalement que la cessation des mouvements de systole des oreil- lettes n'arrête ni n'altère notablement ce bruit (6). M. Turner, en faisant cette recti- fication , tomba à son tour dans l'erreur, car il supposa que le second bruit en question dépendait de la chute du cœur sur le péricarde pen- dant la diastole ventriculaire ; mais les expériences des médecins de Lon- dres prouvent que le phénomène acoustique persiste lorsque le cœur a été séparé de sa tunique mem- braneuse par une couche épaisse d'é- toupe (c). M. Marc d'Espine, à qui l'on doit beaucoup de bonnes observations sur l'auscultation du cœur, a cherché ensuite à expliquer ce même phéno- mène par la dilatation des ventri- cules {cl}. i\lais des expériences nom- breuses prouvent qu'on peut l'empê- cher de se produire sans changer en rien la manière dont se fait la diastole ventriculaire (e). M. Choriol a cru pouvoir expliquer ce deuxième bruit par la séparation brusque des parois ventriculaires ame- nées en contact pendant la systole (f), mais cette hypothèse n'est pas admis- sible. (1) M. Carswell fut, je crois, le pre- mier à chercher l'explication du bruit supérieur du cœur dans les mouve- (. 1S2. (b) Cliarccl.ny, Mém. sur plusieurs cas remarquables de défaut de synchronisme des battements et des bruits des ventricules du comr {Arcli. gin. de mcd., 1S38, t. III, p. 30;!). (c) Cliarcclay, Op. cit. — Pressât, l'roposit. {Observ. sur un cas d'absence du nerf olfactif, Hièse, 1837, [i. Mi). {d) Voyez Bui-dacli, Traité de pliyslotogie, t. VI, [>. ii3. IV. U 50 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. le signe appelé soupir, et l'activité par une note dont la valeur correspondra à la durée de ces phénomènes. Nous aurons alors, pour marquer leurs rhythmes respectifs et leurs coïncidences, les formules suivantes : Bruits f'1 P' Systole auriculaire ^ ^ Systole ventriculaire . f '^ Clôture des valvules sigmoïdes . . . ^ r Clôture des valv. auriculo-ventricul. r ^ 7 r CIioc inférieur Choc auriculaire ^ J- 1/ r Quelquefois le grand silence se prolonge davantage, ce qui semble tenir à un affaiblissement de l'afflux du sang dans les ventricules, et d'autres fois cet intervalle de repos se raccour- cit, le petit silence se prolonge, et le rhythme se rapproche de celui d'une mesure à deux temps (1). (1) Quelques auteurs, ainsi que je l'ai fait ici, tiennent compte du petit silence qui sépare le premier bruit du second (a) ; mais d'autres négligent cet intervalle , et représentent , par conséquent , les trois temps par deux noires et un soupir (6). MM. Uardy et Béhier, tout en re- connaissant le petit silence, ne croient pas devoir y assigner une valeur mu- sicale dans le rliythme à trois temps; mais ils attribuent une valeur un peu plus grande au second silence (c), de façon qu'en notant leur évaluation , on aurait : I P î ^ (a) Pigeaux, Sur les mouvements du cœur {Rapport de M. Piornj, Archiv. yen. de méd., l. XXIV, p. 295). D Espiue, Recherclies sur le cœur (Arch. (jéii. de méd., 1831, t. XXVII). — Barlli et Roger, Traité d'auscultation, p. 282, {b} Beau, Recherches sur les mouvements du cœur {.Arch. gén. de méd., 2° série, l. IX, p. 3'J-i) cl Traité d'auscultation, p. 'USi. ,_ _ (e) Hardy et Béliier, Traité élémentaire de pathologie, t. I, p. 346. BRUITS DU COEUR. 51 H est aussi à remarquer que la durée relative des uiouvc- inents de systole et de diastole est susceptible de varier suivant l'état des forces générales de l'économie (1). Ainsi, lorsque les M. Delucq a cru devoir assigner à ces intervalles des valeurs un peu diffé- rentes (a) qui, ramenées au modede re- présentation précédent, donneraient : Dans le cas où, pour les battements à trois temps, un intervalle apprécia- ble se manifesterait entre la contrac- tion des ventricules et le commence- ment de la systole ventriculaire, on aurait, pour représenter ces phéno- mènes, la formule suivante : S. 0. D. 0. S. V. R. r 5 r mais cela ne changerait en rien le rliythme des bruits normaux ducœur. Enfin i\I. IJalford considère la durée du repos comme étant égale au temps occupé par les deux bruits [b) : Chez le Cheval, le ihythme des mou- vements du cœur n'est pas tout à fait le même ; le repos se prolonge davan- tage, et la succession des systoles se présente de la manière suivante : 0 s. -v. if Repos. ou bien encore : S. 0. s. V. K r r La succession des bruits sera : lors t V ^ ^ r II Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai au travail de MM. Chauveau et Faivre (c). M. Volkmann a trouvé que, chez la Grenouille, la durée de la diastole est à celle de la systole comme 2 : 1, et que, chez les Poissons, la différence entre le temps occupé par ces deux mouvements alternatifs est beaucoup plus inégale. Ainsi, en représentant la durée de la systole par 1, il évalue celle de la diastole à 20, chez le Bro- chet (d). (t) M. Volkmann a cherché à déter- miner, avec plus de précision qu'on ne l'avait fait avant lui, la durée relative des différents mouvements du cœur de THomme ; et pour cela il mesure l'inter- valle qui s'écoule, d'une part entre le premier et le deuxième bruit, d'autre part entre le deuxième et le premier. Pour apprécier le temps , il emploie un pendule dont on fait varier la lon- gueur jusqu'à ce que ses oscillations coïncident avec la durée de l'inler- valle observé , puis on évalue ces oscillations en fractions de seconde par leur comparaison avec les mouve- ments d'un pendule à secondes. En procédant de la sorte, M. Volkmann a été conduit à admettre que le temps (a) Utluc(|, Uechcrchcs vhronolOQiques ou rhythviiqucs sur la durée des bruits ou des silences normaux du cœur. Thèse, Paris, 1845. (b) Halford, Expér. et observ. sur l'action el les bruits du cœur (Revue étrangère, 18.58, \i. !>1, et Médical Times). (c) Cliauvcau et Faivre, Op. cil. {Caxette médicale, 185G}. {d) Volkmann, Hœmodynamik, p. 2G7. 5*2 MÉCAiNISME DE LA ClKCULATlOiS . battements de cet organe se ralentissent par suite de son att'ai- blissement, c'est le temps de repos qui se prolonge (i). On a constaté aussi quelques différences dans le rhythme des mouvements du cœur pendant les premiers temps de la vie (2), mais l'étude de ces variations intéresse les médecins plus que les physiologistes , et il ne me paraît pas nécessaire de nous y arrêter davantage ici. qui s'écoule entre le premier bruit cl le second, et qui doit correspondre à la durée de la systole ventriculaire, est au second intervalle, lequel corres- pond au repos du ventricule, dans le rapport de 96 à 100 (o) ; mais cette méthode me semble offrir une rigueur apparente plutôt que réelle, car la coïncidence entre la durée de chaque intervalle et la longueur des oscilla- tions du pendule ne peut être saisie que de loin eu loin, et pour arriver à des mesures certaines, il faudrait avoir des séries d'observations. Pour lever toute incertitude à cet égard, il faudrait à chaque bruit pointer le phé- nomène sur une bande de papier qui se déroulerait d'un mouvement uni- forme, les distances seraient propor- tionnées aux temps, et leur lon- gueur relative donnerait le rapport cherché. (1) Ainsi, dans les expériences faites par M. Volkmann sur le système du mouvement du cœur chez la Gre- nouille, la durée des systoles n'a varié que fort peu, soit qu'il y eût ralentis- sement ou accélération des pulsa- tions, et les différences dépendaient principalement de la durée inégale des diastoles comparées aux systo- les. Ces dernières ont varié entre 2 et 11 {b). (2) Il résulte des observations de M. Churchill, que, chez le fœtus, le premier et le deuxième bruit se suc- cèdent à peu près comme chez l'a- dulte ; mais c'est ce dernier qui est le plus intense, au lieu d'être le plus faible, ainsi que cela a lieu plus tard. Immédiatement après l'a naissance, le rhythme change, et peut être repré- senté de la manière suivante : Vers l'âge de dix-huit mois, le pre- mier repos s'abrège beaucoup, et le rhythme devient, d'après M. Churchill, le premier bruit, correspondant à la première noire , étant le plus fort (c). (a) Volkmann, Ueber Heratône und Hevzbeiueguiuj {Zeltschi-. fur raiionn. Med., 1845, l. UI, p. 325). (6) Volliinann, Hœmodynamik, p. 267, 383. (c) F. Clmrchill, On Ihe Rhythm of the Hearl of the Fœtus in Utero and of the liilanl ufler Birth {Dublin Quarterly Journ. of Med. Science, 1855, t. XIX, p. 326). TRENTE -DEUXIEME LEÇON. De la fréquence des battements du cœur; circonstances qui influent sur ce phéno- nène. — Du débit de la pompe ventriculaire, — De la force motrice développée par cet organe. § 1 . — La fréquence des coups de piston que donne De la fréquence , f •! des battements l'espèce de pompe irrigaton^e constituée par le cœur est lacile du cœur , . ,, , ,. T , chez l'Homme. Il apprécier, non- seulement par 1 observation directe des mou- vements de cet organe, mouvements que l'on peut sentir au toucher à travers les parois du thorax, ou entendre en appli- quant l'oreille sur la poitrine , mais aussi par l'examen du pouls , c'est-à-dire des battements qui se produisent dans les artères et qui sont une conséquence directe de la contraction du ventricule gauche. Nous reviendrons bientôt sur l'étude du mécanisme de ces battements artériels, mais nous pouvons dès ce moment nous en servir comme signe indicatif de mou- vements correspondants dans le jeu du cœur; et comme l'observation du pouls est plus commode à faire que celle des contractions ventriculaires, c'est en général ce moyen détourné qu'on emploie pour apprécier la fréquence des battements de cet organe. Depuis l'antiquité , l'étude du pouls des malades a beaucoup occupé les médecins (1) ; mais la constatation exacte de la marche de ce phénomène dans l'état normal de l'organisme est d'une date assez récente. Le célèbre astronome Kepler paraît (1) Uippocraie confondait sou.s le phénomène qui nous occupe ici paraît nom de pouls (acpu-^-ai;) les battenients avoir été connue de Rufus d'Éphôsc, dos vaisseaux sanguins et les palpita- qui vivait au coninicncenienl du lions des muscles; mais la nature du ii'^ siècle de l'ère chrétienne. 54 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. avoir été le premier à publier des observations numériques à ce sujet (1), et c'est de nos jours seulement que les méthodes de la statistique ont été appliquées aux recherches de ce genre. Les variations qui s'observent dans le degré de fréquence des battements du cœur dépendent d'une multitude de causes, dont les unes agissent dans le même sens et dont les effets s'ajoutent, tandis que les autres agissent en sens inverse, et par conséquent diminuent d'autant les résultats dus aux premières. Il s'ensuit que les différences observées dans le nombre des pulsations chez une série d'individus ne marchent jamaisproportionnellement aux inégalités de grandeur de l'une quelconque de ces causes per- turbatrices, et que pour saisir les rapports qui peuvent exister entre ces deux ordres défaits, il faut avoir recours aux procédés employés par les statisticiens dans les recherches du même ordre. Pour cela il faut opérer, non sur des séries d'individus, mais sur des séries de groupes d'individus, séries dans lesquelles la condi- tion dont on cherche à apprécier l'influence croît régulièrement, mais où les effets dus aux autres causes de variations se com- pensent dans chac{ue groupe et disparaissent comme ces mêmes effets s'effacent dans la moyenne générale fournie par la réunion de toutes les individualités. Il faut donc réunir dans chacun de ces groupes un nombre considérable d'individus , et lorsqu'on ne pourra pas agir sur des nombres suffisamment grands , il faut faire varier les combinaisons suivant lesquelles les groupe- ments sont effectués, afin de contrôler les résultats fournis par une première série d'observations ; enfin il faut négliger les petites inégalités qui peuvent se manifester dans la direction de (1) Voyez à ce sujet le grand ou- vers le commencement du xvm^ siè- vrage de Haller (o;. L'emploi d'une cle, par Floy^r (6), dont l'ouvrage con- montrc à secondes pour l'évaluation tient plusieurs observations intéres- de la vitesse du pouls paraît avoir été santés mêlées à un grand nombre connu , dans la pratique médicale , d'hypotlièses gratuites. (fl) Huiler, Elcmenta phijsiologiœ covporis humant, t. II, p. 259. (&) Flover, The Fhysic.ian's Puise ivatch. London, 1707. FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. 55 la ligne qui représente la série des faits, comparée à la ligne qui correspond à la marche de la condition dont on étudie l'inlluence, et ne tenir compte cpe de la tendance générale. C'est de la sorte, et de la sorte seulement, que le physiolo- giste peut bien apprécier les relations qui existent entre la fré- quence des mouvements du cœur et chacune des circonstances qui sont de nature à influer, soit directement, soit indirecte- ment, sur l'activité fonctionnelle de cet organe : l'âge, la taille et le sexe des individus, par exemple. Malheureusement., le nombre de faits recueillis est, en général, beaucoup trop faible pour nous permettre d'établir la mesure exacte des effets dus à chacune de ces influences en particulier , mais les tendances générales qu'ils révèlent sont nettement indiquées. ^2. — Lorsciue l'action exercée par une des conditions influence •' ^ , ^ de l'âge variées dont on étudie les efiets est 1res grande comparativement sur la fréquence , . -1 f> T • des baltemenls à celle des autres forces perturbatrices , il suttit d un petit du cœur. nombre d'observations pour en constater l'existence, et c'est ainsi que tous les médecins ont pu facilement reconnaître une coïncidence remarquable entre le degré de fréquence des con- tractions du cœur et l'âge des individus soumis à leur examen. Pour peu que l'on compte les battements du pouls qui se suc- cèdent en une minute chez des enfants nouveau-nés, chez des adolescents et chez des adultes, on voit que ces mouvements se ralentissent avec les progrès de la croissance, et que, dans les premiers temps de la vie surtout, les différences sont très grandes. Mais lorsqu'on veut apprécier d'une manière plus pré- cise le degré d'influence que l'âge exerce directement ou indi- rectement sur la marche de ce phénomène , et qu'on cherche à constater la durée de cette influence , on éprouve plus de difficullés, et il devient nécessaire de beaucoup multiplier les observations. r,;ilien a dil que le pouls est non-seulement le pins rai»idc dans l'enfance, mais le plus lent dans la vieillesse, et jusqu'en 56 MÉCANISME DE L.\ CiRCULATION. ces derniers temps cette opinion a été généralement adoptée (1^ Quelques auteurs ont été plus loin, et ont cru pouvoir fixer la mesure de ce ralentissement continu. Ils admettent que le nombre des contractions du cœur diminue dans la même pro- portion quand l'homme adulte approche des limites extrêmes de la vie que lorsqu'il passe du bas âge à l'époque de la puberté (2). Mais les recherches effectuées depuis quelques années nous apprennent que ces variations ne suivent pas une marche aussi régulière, et qu'après avoir diminué assez rapide- ment pendant les premières périodes de la vie, le nombre des pulsations reste à peu près statiounaire pendant fort longtemps, puis se relève de nouveau dans la vieillesse. Le bruit qui accompagne les contractions du cœur a per- mis aux médecins de constater le nombre des battements de cet organe chez le fœtus qui est encore renfermé dans le sein de sa mère. En général, on compte environ iliO de ces mouvements par minute (3). (1) Galien, De pulsibus, ad tyrones Ce tableau a élé reproduit avec libellus {Oper. o?/?»., tome III, p. /i/i, de légères modifications par divers édit. de 1625). physiologistes, mais sans en citer (2) Ainsi Sœmmering, en se fondant l'origine (6). sur les reclierches de Floyer et sur les (3) L'application de l'auscnllalion à observations qui lui étaient propres, a l'étude des mouvements du cœur du évalué de la manière suivante la fré- fœtus a été faite d'abord en vue seu- quence du pouls aux divers âges («) : lement de la constatation de la gros- Nombre ggggg (g) Q-jaig a condult bientôt à des (les pulsations. \ / ^ A la naissance .... 130 à 140 résultats intéressanis pour la physio- Pendant la 1" année , environ 120 I^endant la 2" année. . 110 — la 3" année. . 90 A 7 ans 85 logie. D'après les observations recueillies par M. P. Dubois, il n'y aurait aucune diflérence notable dans le nombre de .„.,,,., OA ces battements pendant les derniers A lage de la puberle. 80 -^ ^i.jo-e viril 75 '"^'^ ^^^ '^ grossesse, et ce nombre Dans la vieillesse . . . 70 moven serait d'environ IM; en gé- (a) Sœmmerinçr, De corporis humani fabrica, t. V, p. 100. {b) Magendie, Précis élémentaire de physiologie, t. II, p. 396, (c) Kergaràdec, Mém. sur l'miscnUation appliqiiée à la grossesse. In-8, 1822. FREQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. f) / Dans les premiers lemps de la vie extra-utérine, le pouls n'est guère moins rapide, et les variations que l'on observe à cet égard pendant les premiers mois me paraissent tenir à des circonstances indépendantes de l'âge des enfants. Terme moyen , on peut évaluer à environ 130 le nombre des pulsa- tions dans le- premier mois qui suit la naissance; mais quand l'enfant commence à rester plus longtemps éveillé et à faire un plus fréquent usage de ses muscles , son cœur bat un peu plus vite, et, vers la fin du troisième mois, donne le plus ordinaire- ment environ l/iO pulsations par minute. L'excitation produite par le travail de la dentition peut introduire ensuite d'assez grandes perturbations dans la marche de ce phénomène; mais, dans la seconde année de la vie, le pouls se ralentit notable- ment et le nombre des battements continue à diminuer d'une manière assez régulière jusqu'à l'âge adulte ('!). néral, les variations seraient entre IZiO mais, terme moyen, 136 piilsa- et 150 [a). lions (e). M. Jacquemier a vu le nombre de (1) Floyer, qui fut, je crois, le ces pulsations varier entre 108 et premier à compter le pouls des en- 160; il adopte comme moyenne fants nouveau-nés, évalue le nombre l'do [b). ordinaire de ces battements à l'àli ; M. Hohl a compté, en général, en- Bryan-Robinson en trouva 150 chez viron 138 de ces battements (c). un enfant de huit jours , et Haller Dans une série de 600 observations adopta, comme nombre normal, du même genre, faites par M. Nœ- IZiO {f) ; évaluation qui est assez gé- gele, les nombres extrêmes étaient néralement admise par les physiolo- 180 et 90 ; la moyenne, 135 (d). gislcs, mais qui paraît être en réalité Ces nombres concordent aussi par- un peu trop élevée. Pour se former fuitement avec ceux donnés plus ré- des idées justes à cet égard, il est né- cemmcnt par M. Churchill , qui a cessaire d'examiner la question de trouvé pour extrêmes 110 et 160; plus près qu'on ne le fait d'ordinaire, (a) P. Dubois, Rapport sur l'application de l'auscultation à la pratique des accouchements, etc. (.Irt/i. ijén. de méd., 1831 , t. XXVII, p. 405). (b) Jacqueinior, De l'auscullalion appliquée aie système vasculaire des femmes enceintes et du fœtus. Thosc, Paris, 1837, n° 400, p. 19. (c) Ilolil, Die (leburtsInUfliclie Exploration, 1833, l. I. ('/) NtCii'jle, Die yehurtsliûl/linhe Auscultation, 1838, p. 35. le) Cliiirtliill, On tite llliythuiof Ihellearl of the Fœtus in Ulero {Dublin QiiartcrlyJnuru. of Med. Sciences, 1855, I. .\IX, p. 320). if) IIuIUt, Klemenla jihysinloqiœ, I. 1, p. 250, 58 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. De vingt à trente ans, le nombre moyen des battements du cœur descend au-dessous de 72 par mimite, et, de vingt à cinquante, il ne dépasse pas ce chiffre. Mais, aux approches de la vieillesse, le pouls devient un peu plus fréquent ; de soixante à quatre-vingts ans, il est en moyenne d'environ 75, et dans l'extrême vieillesse il s'élève à près de 80. Cette tendance au ralentissement des mouvements du cœiu-, et de chercher à distinguer les effets de l'âge des variations déterminées par d'autres causes. Ainsi., il résulte des observations de M. Lediberder, qu'au moment même de la naissance, et avant que la sec- lion du cordon ombilical ait été faite, le cœur ne bat que de 72 à 100 fois par minute (terme moyen , 83 fois), au heu de 130 ou IZiO fois, comme cela avait lieu avant le commence- ment du travail de l'accouchement. Mais ce ralentissement est pour ainsi dire accidentel ; car, au bout de trois ou quatre minutes, une réaction vive s'opère, et l'on compte le plus souvent environ 160 battements par mi- nute (rt). Les mouvements du cœur se calment ensuite , et pendant les premières vingt -quatre heures la moyenne ne paraît pas atteindre 130. Ainsi M. Gorham (de Londres) a trouvé , chez seize enfants âgés de moins d'an jour accompli, de 100 à 160 pulsations , et a obtenu comme moyenne 123 (b). Des observations recueillies par -M. Mignot ont donné une moyenne de 125 pulsations par minute chez des enfants âgés de quatre à sept jours. Les extrêmes étaient 108 et 13/i (c). Chez quarante -deux enfants d'un jour à une semaine , observés par M. C.orham , les extrêmes étaient à peu près les mêmes (160 et 96) : mais la moyenne s'est élevée à 128. Pendant les deuxième, troisième et quatrième semaines de la vie, cet au- teur a vu le nombre moyen des batte- ments du cœur s'élever à 135. Ainsi la moyenne générale pour les enfants de 0 âge à un mois serait, d'après les recherches de M. Gorham, un peu au-dessus de 130. Ce résultat s'accorde assez bien avec ceux obtenus à Paris par M. Trous- seau, et à Bruxelles par M. Quetelet. Ce dernier auteur ne précise pas l'âge des enfants qu'il a observés , dit-il, immédiatement après la naissance , mais il est à présumer qu'ils avaient d'un à huit jours. Sur o6 observa- tions, 23 ont donné entre 125 et 1^5 pulsations; les extrêmes étaient d'une part lOZi, d'autre part 165, et la moyenne générale était 135 [d], chiffre (a) Lediberder, Recherches sur les changements qui surviennent chez l'enfant au moment de- là naissance (voyez Valleix, Clinique des enfants nouveau-nés, 1838, p. 26). (b) Gorham, Observ. en the Puises of Infants (London Médical Gazette, 1837, t. XXI, p. 324). (c) Mignot, Recherches sur les phénomènes normaux et morbides de la circulation, de la cal o- ricité et de la respiration chez les nouveau-nés. Thèse, Paris, 1851, p. 10. (d) Quetelet, Sur l'Homme et le développement physique de ses facultés, 1835, t. Il, p. 84. FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. 59 depuis la première enfance jusqu'à l'âge adulte, se manifeste dans toutes les séries d'observations recueillies par les auteurs qui ont appliqué les méthodes de la statistique à l'étude de cette question; niais le nombre des faits recueillis jusqu'ici, quoique déjà très considérable, n'est pas suffisant pour nous faire connaître la loi du phénomène (1). La courbe qui représente ces différences n'est pas régulière , et , dans l'état actuel de nos qui ne diffère que peu de celui qu'au- raient fourni les reclierciies de M. Gor- liam, en n'y comprenant pas les en- fants âgés de moins d'un jour. M. Trousseau, en faisant des obser- vations sur des enfants de quinze à trente jours, a compté, terme moyen, 137 pulsations par minule (a). Chez les enfants d'un à cinq mois, M. Gorham a vu les battements du cœur varier entre 10/| et 176 ; ce qui lui donne pour moyenne un peu plus de 1^8. Chez les enfants d'un à deux mois, M. Trousseau trouva , au contraire, une moyenne un peu moins élevée que chez ceux du premier mois; elle n'était que de 132, et entre deux et six mois d'âge il vit celte moyenne tomber à 128. chez les enfants de six mois à un an, M. Trousseau a trouvé en moyenne 120 pulsations par minute, et chez ceux d'un an à vingt et un mois, seule- ment 118. M. Gorham a obtenu une moyenne beaucoup plus élevée pour la même période. Chez les enfants de cinq mois à deux ans, il a trouvé, terme moyen, 130. M. Seux (de Marseille) a fait plus récemment des observations sur le même sujet, et il a trouvé que chez les enfants nouveau-nés qui sont bien portants et dans un état de calme parfait, le nombre des pulsations est le plus souvent de 120 à IZiO. Les va- riations individuelles se sont étendues de 80 à 16^, mais il a compté de l/iO à 160 plus fréquemment que de lOO à 120, et il a trouvé que le pouls dé- passait 160 plus souvent qu'il ne tom- bait au-dessous de 100 (6). (1) Ainsi que je l'ai déjà dit, on croyait jadis que le pouls se ralentis- sait de plus en plus par les progrès de l'âge, et dans beaucoup d'ouvrages qui ne sont pas fort anciens , on avançait que dans l'âge viril on compte 70 battements par minute, tandis que dans la vieillesse il n'y en a que 60 ; mais les recherches de statistique physiologique faites d'abord par MM. Leuret et Mitivié , puis par MM. Ilourmann et Dechambre, par M. Pennock , par M. Guy , par (a) Trousseau, Lettre à Bvetonneau sur le pouls des cnfanls à la mamelle (Journ. des connaiss. médko-chirurg., 1841, p. 28). (6) Roger, Rapport sur un travail de M. Seux sur le pouls riiez les nnuveau-nds {Union médicale, iiit>'>, t. IX, p. ,522). "0 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. connaissances, nous pouvons dire seulement que le ralentisse- ment effectué de la sorte est très considérable. Ainsi, dans les tableaux publiés par M. Quetelet, le nombre moyen des pulsations, qui est de 136 à la naissance, tombe à 88 vers l'âge de cinq ans , à 78 de dix à quinze ans, et à 70 vers vin^t ans. M. Volkmann el par quelques autres observateurs , prouvent qu'il en est tout autrement («). Ainsi MM. Leuretet Mitivié ont com- paré entre eux, d'une part les éjèves de l'école vétérinaire d'Alfort, qui étaient tous des jeunes gens bien portants , dont l'âge variaitentredix-septet vingt- sept ans (moyenne vingt et un ans), et d'autre part les vieillards valides de l'hospice de Bicêtre, dont l'âge moyen était soixante et onze ans. Le nombre moyen des battements du cœur était : pour les jeunes gens, 65 ; pour les vieillards, 7Z| (6). Chez les vieilles femmes, ces au- teurs trouvèrent aussi un nombre de pulsations qui dépassait notablement celui qui s'observe chez les personnes du même sexe, dans la jeunesse ou dans l'âge moyen : ils obtinrent pour moyenne 77. Dans les recherches de M. Pennock la moyenne générale, pour les hom- mes et les femmes d'environ soixante- sept ans, terme moyen était de 75. J'ajouterai que chez deux cents vieillards en bonne santé , observés par M. Charllon, le pouls était en moyenne à 77 ; mais il y avait à cet égard des différences très considé- rables ; ainsi , chez quelques indi- vidus, on ne trouvait qu'environ ZiO battements par minute , tandis que chez d'autres on en comptait 96 ou 100 (c). On n'est pas encore parfaitement fixé sur l'époque où l'augmentation de fréquence commence à se faire sentir. Dans la plupart des tableaux numériques dressés par les auteurs que je viens de citer, elle ne se mani- feste, comme je l'ai indiqué ci-dessus, que dans la vieillesse ; mais les obser- vations recueillies par M. Volkmann tendent à établir qu'elle commence plus tôt ; que le minimum est entre vingt et vingt-quatre ans. La diffé- rence est, il est vrai, très légère entre celte période de la jeunesse et l'âge mûr, et , jusqu'à soixante et quinze ans, les moyennes restent invariable- ment au-dessous de 72; mais de cinquante -cinq à soixante - cinq ans, cette moyenne est de Ik et 65 ans , et au-dessus elle s'élève à 75. {a) Leuret et Mitivié, De la fréquence dwpouls che% les aliénés. In-S, 1832. — Hourmann et Dechambre, Recherches cliniques pour servir à l'histoire des maladies des vieil- lards {Ai'ch. gén. de méd., 1835, 2° série, t. IX, p. 338). — Pennocli, Note on the Frequency ofthe Puise and Respiration of the Aged (American Jovrn. ofMed. Sciences, 18-47). — Guy, art. Pulse (Todcl's Cyclopœdia of Anat. and PhysioL, t. IV, p. 183). — Volliiuann, Hœmodynamik. (6) Leuret et Mitivié, Op. cit., p. 39 et 40. ((?) CliarKon, De la pneumonie chex les vieillards. Thèse, Paris, 4845, n" 71, p. 16, FRÉQUENCE DES BATTEMEiMS DU COELR. 61 On en jugera encore mieux par le tableau suivant, dressé par M. Volkmann, et dans lequel les résultats sont donnés pour chaque année : Ages. Nombre moyen des pulsations. De 0 à 1 an ISli là 2 110,6 2 à 3 108 3 à 4 108 Ù à 5 103 5 à 6 98 6 à 7 93 7 à 8. . 9Z| 8 à 9 89 9 à 10 90,6 10 à H 87 11 à 12 89 12 à 13 88 13 à i/| 82 IZi à 15 83 15 à 16 79,7 16 à 17 76 17 à 18 77 19 à 20 7/i 20 à 21 71 § 3. — Dans les premiers moments de la vie, il ne paraît y avoir aucune différence notable entre la fréquence du pouls chez les enfants des deux sexes (1) ; mais une certaine inégalité ne tarde pas à se manifester, et depuis le bas âge ju.tqu'à la (J) M. Quetelet n'a trouvé aucune par Uii-nième ou pai' ses devanciers, différence notable chez des enfants M.Guy a réuni environ 273 ol)ser- nouveau-nés de l'un et l'autre sexe : valions donnant le nombre de pulsa- pour les deux le maximum de puisa- tions chez de petits enfants des deux lions était de 165; le minimum était sexes, et en a tiré les moyennes sui- de lO/i chez les garçons et de 108 chez vantes : les filles; mais les moyennes étaient ^^.j^^,,,,, j, . ,„3. ""Yir 'l'it de 136 chez les premières et de 135 Uc 2 à 5 loi 103 chez ies secondes (a). 5 ;, 8 85 i)3 En employant les faits constatés 8 à 1^2 vj 'J^2(b) (a) Uuelelut, Sur l'homme cl le développeinenl ijhyauiue de ses fucultds, 1. 11, p. 84. (b) Guy, art. Pulse (Todd's Cyclop. of Anal, and l'hysiol., t. IV, p. 181). Influence des sexes. 62 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. vieillesse extrême, le pouls est plus rapide ehez les lilles et les iemmes que chez les garçons et les hommes. On en peut juger par le tableau suivant, dans lequel un médecin anglais, M. Guy, a groupé les faits de manière à rendre la comparaison facile (1). Ages. Hommes. Femmes. f^erme moyen. Ternie moyen De 2 à 7 ans 97 98 8 à IZi 8Z| 9/1 lù à 21 76 82 21 à 28 73 80 28 à 35 70 78 35 à Zi2 68 78 Zi2 à 69 70 77 /l9 à 56 67 76 56 à 63 68 77 63 à 70 70 78 70 à 77 . 67 81 77 à 8/1 71 82 Ainsi, vers l'âge de la puberté, la différence se prononce fortement; mais elle ne se lie pas aux fonctions reproductrices, car, dans la vieillesse , au lieu de s'effacer, elle devient plus considérable (2). (1) Ces observations ont été re- cueillies de façon à les rendre aussi comparatives que possible. Tous les individus étaient assis , à jeun , el examinés à la même heure (a). (2) Ainsij dans les observations com- paratives recueillies en Amérique par M. Pennock, chez des personnes arri- vées à la vieillesse, le nombre moyen des pulsations était, chez les hommes, de 72, et chez les femmes, de 78 (6). MM. Hounnann et Dechambre ont compté les battements du cœur chez 255 vieilles femmes, et ont trouvé en moyenne 82 pulsations par minute. Il résulte aussi des recherches de ces auteurs, qu'à égalité d'âge, l'accé- lération sénile du pouls est plus fré- quente chez les vieilles femmes qui ont une apparence de décrépitude que chez celles qui paraissent être robustes et bien conservées. Ainsi, en classant de la sorte en deux catégories les sujets de lem's observations, ces auteurs ont trouvé pour le deuxième groupe, terme moyen, 80pulsationspar minute, et pour le premier, 83,7. L'âge moyen était 7Zi ans ^ et 7li ans ^. Enfin, le nombre d'individus qui offraient plus de 100 pulsations était dans la pro- (a) Guy, art. Pulse (Todd's Cyclop. ofAnat. and Physiol., t. IV, p. 184). (6) Pennock, Note on the Frequency ofthe Puise and Respir. of the Aged {Amer. Journ. of Med. scienc, 1847) FRÉQUEÎNCE DES BATTEMENTS DU COEUK. 63 «^ /l. — Lorsfia'on compare entre eux des Animaux qui, par Fréquence ' . *■ des battements leur mode d'organisation, ne s éloignent que peu les uns des du cœur autres, les divers JMammiieres, par exemple, mais qui diffèrent Animaux. beaucoup entre eux par le volume de leur corps , on ne peut être que frappé de l'inégalité considérable qui se remarque dans la fréquence de leur pouls. En général, dans les grandes espèces, le cœur ne bat que lentement ; dans celles qui sont de moyenne taille, ses mouvements s'accélèrent, et dans celles qui offrent le moins de volume , les pulsations se précipitent de manière à devenir parfois difficiles à compter. Par exemple, chez le Cheval et le Bœuf, quand ces Ani- maux sont au repos , le cœur ne bat en général que 36 ou ko fois par minute. Chez l'Ane, on compte environ 50 pulsa- tions ; chez le Mouton , de 60 à 80 ; chez le Chien , de 100 à 120 ; chez le Lapin, environ 150 ; et chez de petits Rongeurs, tels que les Muscardins, environ 175 (1). portion d'un peu moins de 5 pour 100 pas tenu compte de cette circonstance, seulement dans le second groupe, et M. Dubois (d'Amiens) a fait plus de 8 pour 100 dans le groupe où les récemment quelques recherches sur caractères physiques de la vieillesse le même sujet , et a compté chez le étaient le plus prononcés (a). Lion /lO pulsations par minute ; chez {i) On trouve réunis dans l'ouwage la Panthère, 60 (l'Animal étant cou- de Burdach des observations faites ché) ; chez l'Hyène , de 55 à 58 ; et par divers naturalistes sur la fréquence chez le Tapir, M; chez une Louve des battements du cœur chez un grand qui était dans un état d'agitation très nombre d'Animaux (6). Mais ces iadi- grande, il a vu le pouls s'élever à calions n'ont quelque valeur qu'en ce 12/i (c). qui concerne les Mammifères et les D'après une communication ver- Oiseaux ; car, chez les Animaux à sang baie qui m'a été faite par M. Eschricht, froid, les variations déterminées par il paraîtrait que chez les Cétacés le la température extérieure sont si pouls est remarquablement accéléré ; grandes, qu'on ne peut rien conclure ainsi, chez le Marsouin, il y aurait au d'observations dans lesquelles on n'a moins 150 battements par minute. (tt) Ilouriiianii et Decliauiljre , Heclierches cliniqîies pour servir à i histoire des maladies de» vieillards, faites à la Salpèlrière {Arch. gén. de méd., 2° série, t. IX, p. 353). (b) Burdach, Traité de physiologie, t. VI, p. 289. (c) Dubuis (d'Amiens), De la propulsion du sang dans le système vasculaire, considérée dans la série animale {Bulletin de l'Académie de médecine, 1840, t. V, p. 442). (3/i MÉGAMSJiE Dli LA ClilCLLATlON. Influence Oii cst duiic nalurelleiiient conduit à penser (jiie eliez des^.H^ivi'dus. l'Homme l'inégalité de la taille doit être au nombre des circon- stances Cjui influent sur la fréquence relative des mouvements du cœur, et l'on doit se demander si les variations individuelles que nous avons rencontrées sous ce rapport chez les enfants et les adultes, ainsi que chez l'Homme et la Femme, ne dépen- draient pas des différences qui existent dans le volume de leur corps. Les physiologistes du siècle dernier avaient cru remarquer - que le pouls est généralement plus lent chez les hommes de grande stature que chez les personnes de petite taille (1). Les observations publiées de nos jours par M. Rameaux, professeur à la Faculté de médecine de Strasbourg, tendent à prouver (ju'effectivement il en est ainsi, et ce savant a cru pouvoir représenter par une formule algébrique les rapports qui, toutes ■ choses étant égales d'ailleurs, existaient entre la longueur du corps et la fréquence des battements du cœur (2). (1) Ainsi, Seiiac dit que chez des tement complet cliez divers individus hommes de six pieds il n'a compté à l'état normal est proportionnel à la que 60 pulsations, tandis qu'il en trou- longueur de leur corps ; en admeliaot vait 70 chez les individus de cinq que T : ï :: L f : / 4 (T et ^ étaient la pieds ; 90 dans les corps de quatre durée des battements, et L cl l la pieds de haut et 100 dans ceux de longueur du corps ), il calcula quel deux pieds ; mais dans cet exposé, il serait le nombre des pulsations pour ne lient pas compte de l'âge. Il a des individus dont la taille variait de- ajouté que chez les Cent-Suisses (sol- puis dix-huit pouces jusqu'à six pieds dats d'un corps d'élite appartenant à (anglais). Riais il trouva qu'en prenant la maison militaire du roi et composé 65 pour le sommet de la série, les exclusivement d'hommes très grands), nombres obtenus devenaient beau- tés battements des artères étaient très coup plus forls que les nombres don- éloignés (a). nés par l'observation, à mesure que la (2) Bryan Robinson fut, je crois, le taille diminue (6). premier à avancer que le temps em- Dans un premier travail fait par .ployé par le cœur à effectuer un bat- MM. Rameaux et Sarrus (c), ces au- (a) Seiiac, Tmllé du cœur, t. II, p. 21 i. (6) Bryan Robinson, A Tvealise of Animal Econoimj, p. 130, 2= cdit., 1734. (c) Rameaux, Sur le rapport entre la taille et le nombre des pulsations chez l'Hvrninc {IHullcL del'Acad. de Bruxelles, 1839, p. 121). f_ ■'* FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COËUR. ' 65 Les observations de M. Volkmann viennent , dans une cer- taine mesure,- à l'appui des déductions de M. Rameaux, et, d'après l'ensemble des faits constatés par ces auteurs , il me semble évident que la rapidité avec laquelle le cœur est destiné à fonctionner se trouve liée d'une manière intime au volume de l'organisme, non-seulement chez les individus d'une même espèce , mais chez les espèces différentes dans la grande divi- sion des Mammifères , et que là où la proportion de la surface du corps comparée à sa masse augmente, le nombre des coups de piston donnés par la pompe aortique en un temps délerminé tend également à s'élever. Du reste, les recherches de M. Yolkmann prouvent aussi, leurs ont signalé la concordance re- marquable qui existe entre le iionibrfi de pulsations observées chez soixante- quatre soldats d'âge à peu près ogal, mais de taille différente, et les nombres obtenus par le calcul, en admettant que les différences individuelles dans la fréquence de ces battements soient proportionnelles à la racine carrée de leurs tailles respectives. Représentant par n le nombre ob- servé chez un individu, par cZla taille de cet individu, par d' la taille d'un second individu, et par n' le nombre des pulsations chçz ce dernier, il ud- met que ces valeurs seront liées entre elles dans les rapports indiqués par la formule suivante : Dans une publication toute récente, M. Rameaux a développé davantage ces propositions, et a exposé les rela- tions mathématiques qu'il croit exis- ter entre l'activité fonctionnelle de l'ensemble de l'organisme considéré au point de vue de sa masse, et l'ac- tivité soit de la circulation , soit de la respiration (a). J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet quand je traiterai de la statique physiologique, et ici je crois devoir me borner à examiner jusqu'à quel point il y a coïncidence entre le développement du corps en volume et le développe- ment du travail circulatoire représenté par la fréquence des battements du cœur. M. Guy, qui a étudié avec beaucoup d'attention toutes les questions numé- riques dont nous nous occupons ici, n'a pu apercevoir aucune relation entre ces deux ordres de faits, et il repousse avec un peu trop de vivacité l'opinion de M. Rameaux {b). Mais, depuis lors, (a) Rameaux, Des lois suivant lesquelles les dimensions du corps dans certaines classes d'Ani- maux déterminent la capacité et tes mouvements fonctionnels des poumons et rf» cœiir (Mém. couronnés deVAcad. de liruxelles, 1857, t. XXIX). {b) Guy, art. Pulse (Todd's Cyclop., t. IV, ]>. 185). IV. 5 66 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. ce me semble, que ce n'est pas seulement à raison des diffé- rences existantes dans le volume du corps que le pouls est plus fréquent chez l'enfant que chez l'adulte, ou chez la Femme que chez l'Homme. Pour jeter quelque lumière sur celte question , ce physiologiste a distribué en deux séries les personnes for- mant chaque groupe composé d'individus d'une même taille, et, dans une de ces séries, il a réuni les plus jeunes, tandis que dans l'autre série se trouvaient les plus âgés. Or la comparaison des deux colonnes de ce tableau montre que dans presque tous les cas , à taille égale , le pouls était le plus fré- quent chez les plus jeunes sujets. On voit aussi, par les tableaux numériques dus à M. Volk- de nouveaux faits ont été introduits dans la discussion par M. Volkmann,et celui-ci, tout en croyant devoir modi- fier la formule employée par le pro- fesseur de Strasbourg, se trouve con- duit à admettre comme lui, que la taille exerce une influence considé- rable sur la fréquence des mouve- ments du cœur (a). En effet, Ai. Volk- mann a groupé par catégories de tailles les divers individus dont il a pu déter- miner directement le nombre des pul- sations, et en comparant les résultats ainsi obtenus avec ceux que donne le calcul pour ces mêmes tailles, il a trouvé qu'en général il existait entre la théorie et les faits un accord assez intime. Pour effectuer ces calculs, M. Volk- mann croit préférable de substituer aux proportions admises par M. Ra- meaux celles indiquées dans la for- mule suivante, et de considérer, par conséquent, la fréquence du pouls comme élant en raison inverse de la longueur du corps élevée à la puis- sance |. Représentant par p la longueur du corps, et par / la titille, il pose donc la proportion P : p' : : V i ■■ l j, et il arrive ainsi aux résultats suivants î TAILLE MOYENNE. FREQUENCE DU POULS obsetvte. calculée. Moins de 500°'» 151,5 149,2 500 à 600 139,8 138,3 600 à 700 126,6 126,1 700 à 800 H6,5 116,4 800 à 900 110,9 108,6 900 à 1000 106,6 102,1 1000 à 1100 101,5- 96,6 1100 à 1200 93,6 91,8 1200 à 1300 92,2 87,6 1300 à 1400 87,7 84 1400 à 1500 85,1 80,7 1500 à 1600 à 1600 1700 77,8 73,2 77,8 75 1700 à 1800 71,9 72,5 1800 à 1900 72,5 ■ 70,5 1900 à 2000 73,4 68,5 Au-dessus de 200Ô 71,2 60,6 (a) Yolkmann, Die Hàmodynamik nach Yei'suchen, 1850, p. 430. FRÉCJtENCE DES BATTEMENTS DU COEUn. 67 mann, qu'à égalité de taille, les Femmes ont presque toujours le pouls plus fréquent que celui des Hommes (1). J'ajouterai que les recherches de Newport tendent à établir que chez les Insectes il y a également une fréquence plus grande des coups de piston de la pompe cardiaque chez les individus de petite taille que chez ceux dont le corps est d'un volume considé- rable (2); et nous verrons bientôt que ces variations dans l'ac- tivité fonctionnelle du système irrigatoire, de même que les différences dans la puissance respiratoire dont j'ai déjà eu l'oc- casion de parler (3), semblent être en harmonie avec la dépense de chaleur à laquelle l'organisme doit pourvoir. Lorsqu'on étudie attentivement les mouvements du cœur, on remarque aussi que l'aptitude de cet organe à subir l'influence d'une foule de circonstances qui tendent à en modifier le jeu n'est pas la même à toutes les époques de la vie, et que chez les Femmes, de même que chez les enfants, les variations dans la fréquence du pouls, dépendantes de ces causes, sont plus grandes que chez l'Homme adulte. Ainsi c'est dans la première enfance que les différences d'individu à individu sont le plus considé- rables quand l'âge est le même, et chez les Femmes les nom- influence de la constitution indi\iduelle. (1) Newport a compté le nombre des battements du vaisseau dorsal chez une série de larves de Sphinx dont il avait déterminé préalablement le poids , et il a remarqué une ten- dance au ralentissement de ces mou- vements à mesure que le volume du corps devenait plus considérable. Ainsi chez cinq individus dont le poids variait entre 56 et 77 grains , il trouva 50 ou 51 pulsations, tandis que chez d'autres dont le poids va- riait entre 80 et 100 grains, il ne trouva en général qu'environ AO pul- sations, et quelquefois moins de 30, toutes choses étant à peu près égales d'ailleurs (a). (2) Gette prédominance dans la fré- quence des mouvements du cœur ne se manifeste pas ici chez les petites filles comparées aux petits garçons, mais commence à exister chez lesindividus dont la taille dépasse 0'",9'25, et se maintient presqiie sans exception dans tous les groupes caractérisés par une augmentation de 25 millimètres dans la taille (6), (3) Voyez tome II, p. 51/i, (a) Newport, On. Ihe Température of Insects {Philos. Trans., 1837, p. 3d3). (bj Volkinann, Die lldmodynavnk, \>. 430. musculaire. 6(S MÉCANISMK t)E LA CIRCULATION. bres exirêmes s'écarleiil des nombres moyens plus que chez les Hommes. Mais cette impressionnabilité inégale ressortira mieux à mesure que nous étudierons les effets produits par les autres causes qui tendent à accélérer ou à ralentir les battements de cet organe. Influence §5. — Parmi les circonstances dont l'influence, au lieu etcteraTtMié d'être continue, comme celle du sexe ou do l'âge , ne s'exerce que d'une manière passagère, et détermine ainsi des variations dans la fréquence des mouvements du cœur chez le même individu considéré d'un jour à l'autre ou à ditïérents moments dans la même journée, je signalerai d'abord l'état de repos ou d'activité musculaire. Chacun a pu reconnaître par sa propre expérience que tout exercice musculaire un peu violent amène une accélération notable dans les mouvements du cœur (1), et, pour préciser davantage les faits à ce sujet, je rapporterai les résultats donnés par Bryan Robinson. Un homme, dit ce physiologiste, qui, étant couché , n'avait que 64 {mlsations par minute, en offrait 78 après avoir marché d'un pas assez lent, 1 00 après avoir fait près d'une lieue et demie à l'heure, et jusqu'à 1/|0, 150 ou même davantage, après avoir couru de toutes ses forces (2). (1) Cette influence accélératrice se (2) L'accélération du pouls par fait sentir aussi lorsque, sans déplacer l'effet de la marche n'avait pas échappé tout le corps, une portion du système à l'attention de Keil(6). Robinson pré- musculaire est mise enjeu avec force. sente les résultats mentionnés ci-des- Ainsi, en imprimant un mouvement sus sous une forme générale , mais oscillatoire h un poids assez léger tenu sans indiquer le nombre d'observations dans l'une des mains, pendaut que le sur lesquelles il se fonde. Floyer et reste du corps demeure immobile, on Schwenke ont fait aussi des recher- peut déterminer une augmentalion de ches sur ce point (c). 30, de ZiO, et même de 50, dans le Le docteur r>. Knox , dont j'aurai nombre des battements du cœur (a). souvent à citer les observations sur (fl) Bryan Robinson, Treatise of the Animal Economtj, 1734, p. dSO. (6) Keil, Medicina statica Britannica { Tentamina medico-physica, etc., p. 172, édit. de 1730). (c) Voyez Haller, Elementa physiologiœ , t. H, p. 2i)5. FRÉQLliNCE DES BATTiiMIiMS DU (OEIH. 69 Ce n'est pas seulement chez l'Homme et les Animaux les plus semblables à nous par leur mode d'organisation que les phénomènes de cet ordre se remarquent. On en a constaté l'existence jusque dans la classe des Insectes, et l'accélération des battements du cœur sous l'inlluence de l'activité de l'appa- reil locomoteur paraît être une loi physiologique générale (1). Nous reviendrons bientôt sur la cause de cette coïncidence entre l'exercice de nos muscles locomoteurs et la rapidité des mouvements du cœur. Je dois ajouter ici que les effets dont je viens de parler ne se manifestent pas seulement quand on fait des efforts violents, comme dans la course on dans des ma- nœuvres de force (2), mais sont même très appréciables toutes le pouls, a été conduit à regarder l'exercice modéré comme étant le stimulant le plus puissant des batte- ments du cœur. En expérimentant sur lui-même , il a trouvé que la marche à raison d'environ 6 kilo- mètres par heure faisait monter le pouls de 70 à 132 (a). M. Nick a fait des expériences analogues. En mar- chant à raison de 70 pas par minute, la fréquence de son pouls augmentait de 6 à 8 battements, et en doublant la vitesse de sa marche pendant une heure, Taccélération des mouvements de son cœur, d'abord de 10 à 16, s'éle- vait à 25 ou 26 battements. En mon- tant rapidement une petite colline, l'augmentation des pulsations était d'environ 80, et en faisant la même ascension à la course, son pouls deve- nait si précipité, qu'il ne pouvait plus le compter avec précision (6). (1) Ainsi, dans des expériences faites par Newport sur des Sphinx, les pulsations du vaisseau dorsal variaient entre /i2 et 50 lorsque ces Insectes étaient complètement au repos, et s'éle- vaient à 60, 110, 12o, 139 et même 151, sous Tinfluence des mouvements du vol (c). Chez des larves de la Cerura vinula (ou Dicranoura), il compta environ 50 pulsations pendant le re- pos, et souvent 80 ou même près de 100 pendant l'état d'activité (cl). (2) I\ni. Lichtenfels et Frôhlich ont fait plusieurs expériences intéressantes sur l'influence que le travail muscu- laire des bras exerce sur les mouve- ments du cœur. Il résulte de leurs reclierches que les effels produits par {a) Pi. Knox, Ou the Helation subsisting betiveen the Time of Day and Varions Functions of the lluman Body and on the Manner in which the Heurt and Artcries are affected by Musadar Exertlon (Edinburtih Med. and Surg. Journal, 4 815, vol. XI, p. 105). (6) Nick, [ieobachlungen ilber die liedingungen unier denen die Hdufujkiel des Puises im gesunden Zustand verdnderl wird, 182(5. — Conditions qui font changer la fréquence du pouls dans l'état de santé {Arch. gén. de méd., 1831, t. XXVI, p. 412). ic) Ncwport, On the Température ofinsects [Philos. Trans., 1837, p. 292). (d) Op. cit., p. 317. 70 MÉCANISME BE LA CIRCULATION. les fois que notre corps, au lieu iFetre dans un état de repos complet, se trouve placé dans une position telle que la con- traction d'un certain nombre de muscles soit nécessaire au maintien de l'équilibre. Ainsi il est bien établi que, toutes choses égales d'ailleurs , la fréquence des battements du cœur est plus grande quand on est debout que lorsqu'on est assis , et diminue davantage lors- qu'on est couché. Les différences qui s'observent ainsi d'un instant à l'autre chez le même individu, suivant que la position de son corps change, sont fort considérables, et s'élèvent sou- vent à plus d'un sixième du nombre initial. Dans les observa- tions de Bryan Robinson , par exemple , une personne qui , étant couchée, avait 6/t pulsations par minute, en offrait 68 quand elle se mettait sur son séant , et 73 quand elle se tenait debout. Des faits du même ordre ont été constatés en très grand nombre par les physiologistes de nos jours, principalement par M. Guy, et les moyennes auxquelles cet auteur est arrivé s'éloignent fort peu des résultats que je viens de rapporter (1). Au premier abord on pourrait être disposé à attribuer ces changements dans le jeu de la pompe cardiaque à la nécessité d'un emploi de foi^ces plus grandes pour faire circuler le sang la répétition fréquente des contrac- fluence plus grande que ceux du bras lions de muscles antagonistes sont droit (a). beaucoup plus considérables que ceux Dans les expériences de M. Kuox, déterminés par la contraction perma- l'iniluence accélératrice de la marche nente de ces organes, résultat sur le- s'est montrée d'autant plus grande, quel je reviendrai dans une prochaine que l'individu était plus affaibli par la Leçon. Ils ont remarqué aussi que, fatigue (b). toutes choses égales d'ailleurs, les (1) Robinson fut le premier à con- mouvementsdu bras gauche exercent stater l'influence exercée par la posi- sur les battements du cœur une in- tion du corps sur la fréquence du (a) R. Liclitenfels et R. Frôhlich, Beobachtuiigen iiber die Gesetze desGanges der Pulsfrequena {Denkschriflen der Akad. der Wissenschafte^i %u Wien, 4 852, t. III, 2» partie, p. 149 et siiiv.). (/)) Knox, Phys'wlogical Observations on the Pulsations of the Heart {Edinburgh Med. and Siirg. Journ., 1837, t. XLYII, p, 375}. FRÉQUENCE DES BATTEMENTS OU COEUR. 71 dans les vaisseaux, quand ceux-ci, au lieu d'affecter générale* ment une direction à peu près horizontale , deviennent pour la plupart verticaux, comme cela a lieu dans la station: mais, par un examen plus attentif de la question, on trouve que ces variations dans la fréquence des contractions du cœur, suivant la position du corps, se lient à la quantité de force mus- culaire développée par le maintien de l'équilibre dans chacune de ces attitudes (1). Ainsi, quand on est debout, mais appuyé pouls (a). Des observations analogues ont été faites à diverses époques par plusieurs autres médecins (6) ; mais l'étude de ce point de Thisloire des mouvements du cœur a été surtout approfondie par le docteur Guy. Ses recherches portèrent sur 79 Hommes entre vingt et cinquante ans d'âge, en bonne sanlé et dans un état de repos (n'étant excités ni par la di- gestion ni par l'exercice musculaire), et elles donnèrent, terme moyen, en nombres ronds : 78 pour la position verticale. 70 pour la posilion assise, 66 pour la position horizontale. LadifTérence entre le nombre moyen des puisa lions chez ces personnes de- bout ou couchées était donc de 12, ou d'environ un sixième du premier deces nombres. Mais les variations extrêmes s'éloignent beaucoup de ces moyennes. Ainsi M. Guy a vu, d'une part, la difTé- rence se réduire à 3 pulsations, et, d'autre part, s'élever à 26 (c). En écartant les cas exceptionnels, M. Guy obtint les moyennes sui- vantes pour l'Homme adulte et en santé : Debout 81 Assis 7-1 Couché 66 (d). (1) C'est de la sorte que M, Arnott,, par exemple, a cherché à expliquer ce phénomène (e). D'autres physiologis- tes ont attribué l'accélération du pouls dans l'attitude verticale à la direction que le cœur et ses valvules affectent dans cette position (/"). Robiiison, Fal- coner, M. Knox et M. Guy s'en ren- (rt) Bryan Robinson, A Treallse on Vie Animal Econom]), HSi, p. 180. (6) Falconer, Observations respecling the Puise, 1796, p. 34. — Knox, Op. cil. [Edinburfjh. Me.cl. and Sitrg. Journal, t. XI). — Rouliii, Ohserv. sur la vitesse du pouls (Journ. de PhysJ,ol. de Magendie, 1826, I. VI, p. 8). — Nick , Beobachlungen ïiber die Bedingungen, untef denen die Hdufigkeil des Puises im gemnden Zusland verdnderl wird. Tiil)ingen, 1826, p. 41. — Grave.*, On the Effects produced by Posture on the Fréquence and Character of the Puise (Dublin Hospital fteports, t. V, p. 561). — Ilolii, Die gebuvtsliillfticlie Exploration. Halle, 1835. (c) W. (Juy, On the E/fects produced upon Ihe Puise by Change of Posture {Guy' s Hospital Re- ports, 41S38, 1. III, p. î)i>). td) Guy, art. PULSE (l'o'ld's Cyclopœdia, vol. IV, p. 189). (e) Arnotl, Eléments of Physics, t. I, p. 570. (/■) blackley, On the Cause oj' tha Puise being affected by tlie Position oftlie Doily {Dublin Journ. of Med. and Ciiir. Sciences, 1834). 72 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. contre un mur ou tout autre corps résistant , l'accélération du pouls est moins prononcée que lorsqu'on se tient en équilibre sur les jambes seulement ; et quand on est assis, le nombre des battements du cœur diminue dès que l'on s'appuie contre le dossier d'une chaise (1). dent compte par l'influence connue de la contraction des muscles de l'appareil de la locomotion sur les mouvements du cœur (a). (1) M. Guy a constaté des différen- ces très notables dans la fréquence du pouls chez les personnes qui, tout en restant dans la position verticale, s'ap- puyaient ou non contre un mur; ou bien encorechez celles qui étaient as- sises sur un tabouret ou sur une ciiaise dont le dossier leur servait d'appui. Or, dans ces diverses attitudes, l'effort musculaire mis enjeu varie beaucoup, et c'était à mesure que le repos deve- nait plus complet que le nombre des battements du cœur diminuait. Ce physiologiste a déterminé aussi des ditrérences très considérables dans ce nombre chez des personnes dont le corps était placé horizontalement, mais soutenu de façon à exiger, pour le maintien de l'équilibre, des contrac- tions musculaires plus ou moins puis- santes. Ainsi, quand le corps était appuyé seulement sur deux chaises pla- cées, l'une sous les épaules et l'autre sous les pieds, la moyenne des pulsa- tions était 80 ; et lorsqu'on soutenait en même temps les reins à l'aide d'une troisième chaise, cette moyenne des- cendait à 66. Des expériences dans lesquelles on faisait varier la position du corps sans l'intervention d'aucune action musculaire, donnèrent des résultats qui, au premier abord, semblaient défiivorables à l'hypothèse adoptée ici pour expliquer les différences que les attitudes déterminent dans la fré- quence du pouls. Ainsi M. Graves, en faisant mouvoir l'individu à l'aide d'une planche à bascule sur laquelle celui-ci était couché, a vu le pouls s'accélérer ou se ralentir suivant que le corps était placé verticalement ou horizontalement, à peu près comme dans les cas où ces changements sont effectués par le jeu des muscles ; mais M. Guy, en répétant ces expé- riences, a vu que la position verticale déterminait une accélération un peu plus grande dans les battements du cœur, quand elle était produite par l'action liuisculaire, que dans le casoù elle avait lieu sans l'intervention de l'organisme. Et d'ailleurs, c'est sur- tout la contraction permanente des muscles extenseurs, nécessaire pour empêcher le corps de fléchir dans la position verticale, qui détermine l'ac- célération également persistante dans les battements du cœur durant la po- sition verticale ; et lorsqu'on relève un homme à l'aide d'une planche à bas- cule, on ne l'empêche pas d'avoir be- soin de contracter les mêmes muscles pour se maintenir dans la position (a) B. Robinsou, Op. cil., p. 177. — l'alconei-, Op. cit., p. 34. Knox, Op. cit. {Edinb.Med. andSurg. Jouni., t. IX). FîUQUliNCE DES BATTEMENTS DU COEUR.* 73 Il est aussi à noler que les différences produites de la sorte sont, en général, d'autant plus grandes que les battements du cœur sont plus accélérés. Ainsi l'influence accélératrice de la position verticale est plus marquée chez les enfants que chez les adultes ; et lorsque la fréquence du pouls a été beaucoup augmentée par la marche, on voit la position horizontale y déterminer un ralentissement beaucoup plus considérable que dans les circonstances ordinaires. J'ajouterai que dans l'état fébrile, pendant lequel les battements du cœur sont en général très accélérés , les différences produites par des changements dans la position du corps sont encore plus marquées (1). verticale qu'on lui a donnée artificiel- lement, et pour l'empèciier de s'af- faisser sur lui-même. (1) Graves a remarqué que l'iii- fluence de la position du corps sur le nombre des battements du pouls croît avec la fréquence de ces battements (a), et M. Guy a cherché à déterminer la proportion suivant laquelle cette ac- célération s'effectue. Il a trouvé que la comparaison entre l'individu de- bout et assis donnait une différence de 9, quand le pouls est de 60 par minute, et, par conséquent, si l'accrois- sement était proportionnel au nombre des battements, la progression serait de l'2 pour 80 pulsations, de 15 pour 100 pulsations et de 18 pour 120 ; mais les nombres observés ont donné , comme expression de ces différences, 15, '27 et 39. La différence entre le pouls de l'in- dividu couché et celui de l'individu debout a été, pour les mêmes nom- bres, 6, 13, 19, '27. Le maximum de la différence dé- terminée par la position , chez des hommes en santé et en repos, a été (a) flravcs, Op. cit. (Dublin llospiUd lUpavlH, de kh, le pouls donnant 94 dans la posilion verticale; mais lorsque, par suite de l'exercice musculaire, les pul- sations s'étaient élevées à 128 par minute, la diminution amenée par la position horizontale a été même de 56 ; il est également à noler que la différence n'a jamais été égale à la moitié du nombre des battements ob- servés dans la position verticale. Ainsi que je l'ai déjà dit, l'influence de la position du corps sur la fré- quence du pouls est plus considérable dans l'enfance que dans l'âge adulte, et les différences introduites ainsi par l'âge sont plus marquées chez la Femme que chez l'Homme. En effet, M. Guy a trouvé que les différences, suivant que le sujet se tenait debout, assis ou couché, était : pour les Hommes ayant plus de vingt ans, et, terme moyen, vingt-neuf ans, de : 7 et de 3, total 10; tandis qu'elles étaient de 10 et de Ix, total ik, chez les adultes ayant, terme moyen, 1. V, p. 5G2). Influence du sommeil. lli MÉCANISME DE LA CIRCULATION. § 6. — Le sommeil tend, (3omme le repos musculaire , à ralentir l'action du cœur ; mais, dans l'état actuel de nos con- naissances, on ne peut en évaluer numériquement l'influence , quinze ans. Pour les Femmes âgées, en moyenne, de trente-huit ans, et pour les jeunes filles âgées de onze ans, en moyenne, ces mêmes termes étaient : /i, 0; total, à ; 10, i ; total, 11. La différence attribuable à l'âge était donc de h chez les Hommes et de 9 chez les Femmes. Chez les Femmes d'un âge moyen, le pouls était à 92 dans la station verticale, et à 88 dans le décubitus. Chez les jeunes filles, le pouls est descendu de 92 à 81 par ce changement de position. Enfin, chez les unes et les autres, la difl'érence était nulle ou très petite entre la fréquence du pouls, quand l'individu était assis ou couché (a). Les observations recueillies par M. Hohl sur l'influence comparative des attitudes chez les Hommes et les Femmes sont en accord avec la tendance générale des faits que je viens d'exposer. Effectivement, chez la Femme, le pouls est plus fréquent que chez l'Homme, et, d'après ce mé- decin, les variations déterminées par les différences dans la position du corps sont plus considérables chez les Femmesque chez l'Homme (6). M. Guy, il est vrai, n'est pas arrivé aux mêmes résultats, et pense qu'il faut attribuer l'accéléralion du pouls constatée par M. Hohl à la prolongation de la sta- tion verticale chez les Femmes sou- mises à son examen ; mais je suis disposé à croire qu'il est dans l'er- reur à cet égard, et que s'il n'a pas observé des effets aussi considérables chez les Femmes que chez l'Homme, lorsqu'il faisait varier les attitudes , cela pouvait dépendre du genre d'ha- billement dont les premières font usage. Les observations de M. Hohl furent faites dans une maison d'accou- chement, et portaient probablement en majeure partie sur des femmes enceintes ou sur des nourrices, qui d'ordinaire ne se servent pas de cor- sets , tandis que les femmes exami- nées par M. Guy étaient bien certaine- ment revêtues de cette espèce d'étui résistant qui soutient le torse et four- nit au corps des points d'appui lors- qu'on est assis aussi bien que lorsqu'on est debout. J'ajouterai que , chez les enfants nouveau -nés, le moindre mouve- ment suffit pour accélérer assez nota- blement le pouls (c). Ainsi M. Trous- seau a vu qu'il était à 112 pendant le sommeil du jeune enfant, et s'élevait à 180 dès que celui-ci s'agitait et criait (d). Chez un enfant nouveau-né, ob- servé par M. Seux, le pouls était à lOi pendant le sommeil, à 120 pen- dant la veille et l'immobilité, à ISA quand l'enfant s'agitait, et s'est élevé (a) Guy, On the Effects produced iipon the Puise bij Change of Posture (Guy' s Hospital Reports, t. lit, p. 316). (b) Hohl, Die geburtshûljliche Exploration, 1855. (c) Valliîix, Clinique des maladies des enfants nouveau-nés, p. 18. (d) Trousseau, Lettre sur le pouls des enfants à la mamelle [Journal des connaissances médico-chirurgicales, 1841, p. 23). FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. 75 car, dans les observations publiées à ce sujet , on n'a pas tenu compte des effets qui chez les personnes endormies dépendent seulement de la position horizontale du corps (î). J'ajouterai cependant que chez l'Homme adulte le fait seul du sommeil ou de l'état de veille ne paraît pas changer bien notablement le nombre des pulsations, tandis que chez les Femmes, et surtout chez les jeunes enf\\nts, les différences déterminées de la sorte semblent être assez considérables (2). à 174 sous l'influence d'efforls mus- culaires prolongés (a). Comme exemple de l'influence de la position du corps sur la fréquence du pouls dans l'état morbide, je cite- rai les résultats constatés par M. Smith. D'après plus de 1500 observations recueillies chez des phthisiques, ce médecin a trouvé que, terme moyen, le nombre des battements était de 87 quand les malades étaient couchés , de 95,5 quand ils étaient assis, et de 10^,1 quand ils étaient debout. La différence pour les deux premières positions était donc de 8^, et celle entre le pouls, cliez les individus cou- chés ou debout, dans la position verti- cale, de 17. L'augmentation détermi- née par le seul fait de la différence de position s'est élevée à 29 chez le même individu couché ou assis, et dans un cas elle a été de hU quand le malade était debout au lieu d'être couché (6). (1) Cet effet du sommeil a été re- marqué par Galien (o), et Ilaller rap- porte que, suivant Hamberger, le ra- lentissement serait, chez l'Homme en bonne santé , de 10 pulsations {d). Mais si la position du corps est la même, cette estimation s'éloigne beau- coup de la vérité (e). (2) M. Quetelet a fait un assez grand nombre d'observations numé- riques sur un petit garçon de quatre à cinq ans, et il a trouvé que pendant l'état de veille le nombre de pulsations était, terme moyen, de 93, û, tandis que pendant le sommeil cette moyenne n'était que de 77,3. Chez une petite fille de 'trois à quatre ans, les nombres observés étaient , terme moyen : 102,3; 92. Enfin, chez une femme de vingt- six ans, la différence était aussi d'en- viron 10 dans les états de veille et de sommeil; mais M. Quetelet ne dit pas si, pendant la veille, la position ho- rizontale avait été conservée (/"). INick a fait des observations analo- gues sur dix jeunes gens. La diffé- rence était d'environ, en moyenne, 3 pulsations (g). Enfin M. Hohl a observé que le som- meil amenait une diminution de 10 ou (a) Ropfcr, Rapport sur le travail de M. Seux (Union médicale, 1855, t. IX, p. 522). (6) Smilh, On the Rate of Pulsation and Respiration in Phlhisis {Rritish and Foreign Med. and Chirg. Revlew, 1850, 1. XVII, p. 475). (c) Galion, De causis pulsuum, lil). III, c:ip. ix. (d) H:illcr, FAnmenlapliysiologiic corporis hnmani, t. II, p. 2(53. (e) Knox, Op. cil. (Edinbuvgh Med. and Surg. Journ., 18;î7, vol. XLVH, p. 375). if) Quctolol, Sur l'Homme et le développement de ses facultés, I. II, p. 87. (g) Nick, Op. cil. 76 MÉCANISME D:: la CIllCULATlON. Chez les Mammifères hibernants , h fréquence des batte- ments du cœur diminue beaucoup toutes les fois que la léthargie se déclare; mais ce ralentissement n'est pas une conséquence du sommeil seulement , et dépend surtout de l'affaiblissement général des forces vitales qu'entraîne l'abaissement de la tem- pérature intérieure du corps (1). de 11 battements dans le pouls, chez les Femmes, vers la fin de la période de gestation, et que, chez les enfants nouveau-nés , celte ditTérence s'éle- vait en général de 20 à LiO batte- meiîls. Ce médecin attribue aussi à l'état de sommeil ou de veille une influence très grande sur le nombre de contractions du cœur chez le fœtus (a). M. Gorham, dans tiois observations faites sur des enfants âgés de moins d'un mois, a trouvé pendant le som- meil, terme moyen, 108 pulsations; tandis que, pendant la veille, la moyenne générale était d'environ 128. Mais les faits qu'il rapporte ne sont ni suffisamment nombreux, ni assez comparatifs pour qu'on en puisse rien conclure (6). M. Trousseau a trouvé que, chez des enfants de quinze à trente jours, le nombre moyen des pulsations était de 121 pendant le sommeil et de M\i) pendant la veille. Chez les enfants de six à vingt et un mois, ces moyennes étaient 112 et 128 (c), (1) Nous verrons ailleurs que chez les Animaux hibernants la faculté de produire de la chaleur n'est pas assez grande pour que l'organisme conserve une température constante sous l'in- fluence d'un froid un peu vif ; de sorte que sous ce rapport ils se rapprochent des Animaux dits à sang froid. Or, l'abaissement de la température inté- rieure de ces Animaux est accompa- gné d'un ralentissement dans l'action du cœur, lors même que ce refroidis- sement n'est pas assez considérable pour amener la léthargie. Ainsi, dans quelques expériences faites par Saissy, un Hérisson dont le cœur battait 75 fois en août, lorsque la tempéra- ture extérieure était de 19 degrés, ne donna que 25 pulsations en novembre, par une température de 6 degrés ; chez un Lérot , les pulsations sont tombées de 105 à 60 sans que l'en- gourdissement se soit manifesté. Le même observateur a vu que chez la Marmotte dans l'état d'activité le cœur bat environ 90 fois par minule, mais que dans l'état de léthargie il ne se contracte que très faiblement, 10 ou 12 fois par minute (d). Prunelle a vu les battements du cœ-ur tomber à 8 ou 10 chez le même Animal , quand l'engourdissement était profond (e) , et Marshall- Hall a trouvé que chez la (a) Holil, Die geburtshûlfliche Exploration. (b) Gorliam, Observ. on the Puises of Infants (Lond. Med^ Gazette, 1837, t. XXI, p. 325). (f) Trousseau, Op. cit. {Juurn. des connaiss. médico-chirurg., 1841, p. 28). {d) Saissy, Recherches expérimentales sur la physique des Animaux hibernants, 1808, p. 42 et suiv. (e) Prunelle, Recherches sur les phénomènes et les causes da sommeil hibernal de quelques Mammifères (Ann. du Muséum, 1811, t. XVIII, p. 28). FRÉQCÉNCE DES BATtEMENTS DU COEUR. 77 § 7. — Les variations dans la température extérieure influent aussi smiedegréd'activitéducœurde l'Homme. Ainsi Delaroche, i» en restant pendant quelques minutes soumis à l'action d'une atmosphère chanffée à environ 65% vit son pouls s'éleveràl60, ce qui devait être beaucoup plus du double du nombre ordinaire (1). Il paraîtrait aussi que, dans les régions tropicales, les batte- ments du cœur sont en général plus fréquents que dans nos Influoncc de lempéralure exlérieuie. Chauve-Souris en aclivilc^ les pulsa- tions s'élèvent parfois à 200, tandis que dans le sommeil hivernal elles se réduisent à 28 (a). Des phénomènes analogues se re- marquent chez les Insectes à méta- morphoses complèles pendant que ces Animaux sont à l'étatde nymplics, pé- riode de leur existence durant laquelle ils restent dans une sorle d'engourdis- sement très profond. Ainsi Newport a vu que chez le Sphinx ligustri les pulsations du vaisseau dorsal, après avoir été d'environ 90 chez la jeune Chenille , descendent à 30 vers l'é- poque de la dernière mue, et tombent à environ î2 chez la nymphe, ou se ralentissent même davantage (6). (1) Il est à regretter que cet auteur n'ait pas indiqué le nombre des batte- ments de .'^on pouls avant son entrée dans l'étuve (c). Dans les recherches de MM. Leuret et Milivié sur la fréquence du pouls chez les aliénés, les variations journa- lières de température n'ont paru exer- cer aucune influence directe sur ce phé- nomène ; mais le nombre moyen des pulsations s'est trouvé plus élevé en été qu'en hiver (comme 82 : 78). Du reste, il est à noter que cet etfet n'a pas été constant (d). Chez les enfants nouveau -nés, lorsque la température du corps s'a- baisse beaucoup, comme dans les cas de sclérème, ou endurcissement du tissu cellulaire, on observe un ralen- tissement très considérable dans les battements du cœur. Au lieu de compter environ 130 pulsations par minute, il arrive souvent qu'on n'en trouve qu'environ 80, et quelquefois il y en a moins de 50 {e). On doit aussi à M. Lisie quelques observations relatives à l'influence des variations de la température atmos- phérique sur la fréquence du pouls chez les enfants (f) ; et j'ajouterai que M. Smith a constaté une augmenta- lion très notable dans le nombre des battements du cœur chez les phtbi- siques, à mesure que la température extérieure s'élevait (g). M. Calliburcèsa fait récemment une (a) Marshall-Hall, art. Hibernation (Todd's Cyclop. of Anal, arid PhysioL, 1. 11, p. 772). . (b) Newport, Op. cit. {Trans. Philos., 1837, p. 315 et 316). (c) Delaroclie, Expériences sur les effets qu'une forte chaleur produit sur l'économie animale. Thèse, Paris, 1800, p. 33. {(/) Leuret et iMilivié, De la fràiiience du pouls, p. 73. (e) Mignot, Recherches sur les phénomènes normaux et morbides de la circulation, etc., chc% les nouveau-nés, 1851, p. 22. (() Lisle, Note sur la fréquence du pouls che% les enfants {Gazelle médicale, 1837, t. V, p. C89). (g) Smilh, Op. c'a. (Urit. and For. Med. Chir. lieview, 1856, t. XVII, p. 475), Influence de la pression atmosphérique 78 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. climats tempérés , et l'on assure que cliez les habitants des régions polaires le nombre des pulsations est inférieur de beau- coup à ce qui s'observe ici (1); mais on ne possède à ce sujet que peu de données positives. § 8. — On admet généralement que les variations dans la pression atmosphérique influent aussi beaucoup sur le degré de fréquence du pouls, et que le nombre des battements devient d'autant plus considérable que l'on s'élève davantage au-dessus du niveau de la mer ; mais les observations sur lesquelles on se fonde ne sont ni assez multipliées, ni assez comparatives, pour qu'on en puisse tirer des résultats dignes de confiance, et, d'après divers faits qu'il serait trop long d'exposer ici, je suis porté à croire que les effets attribués à la raréfaction de l'air série d'expériences intéressantes rela- tives à l'influence de la chaleur sur l'ac- tivité du cœur chez la Grenouille. Il a vu que des applications chaudes faites, soit sur une partie éloignée du corps, telle que la patte postérieure, ou di- rectement sur le cœur mis à nu, dé- terminent dans les pulsations de cet organe une grande accélération (par exemple, les portent de ZiO ou de 50 à 80, ou même davantage), et que cette accélération se produit indépendam- ment de l'action du système nerveux cérébro-spinal ; car il a obtenu les mêmes efléts en opérant sur des Ani- maux intacts et sur d'autres dont il avait détruit préalablement l'encé- phale et la moelle épinière, ou dont il avait paralysé les nerfs moteurs par l'administration du curare. Enfin il a étudié les effets produits par l'action directe de l'eau à /|0° sur le cœur, après son extirpation, et il a obtenu les mêmes résultats : ainsi, dans une de ses ex- périences, les battements étant de 18 avant l'immersion de cet organe dans le bain à /lO ", se sont élevés à 9/i quel- ques minutes après [a). (1) Blumenbach assure que chez les Groënlandais on ne compte que 30 ou UQ battements du cœur par minute (6) ; mais cela me paraît peu probable, et je regrette de n'avoir pu trouver aucun renseignement sur ce sujet dans les divers voyages dans les régions polaires publiés récemment. Les douches froides déterminent une diminution très considérable dans la fréquence du pouls, mais cet effet est de peu de durée (c). (a) Calliburcès, De Vinfluence de la chaleur sûr l'activité du cœur (Gaxette hebdomadaire de médecine, 4 857, t. IV, p. 468). (b) Blumenbach, rnstiVutlons physiologiques, 1797, p. 57. le) Bence Jones et Dickinson, Hech. sur l'effet produit sur la circulation par V application in'O' longée de l'eau froide à la surface du, corps de l'homme (Journ. de physiologie, 1858, t, I, p. 72). FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. 79 sont souvent dus en grande partie à la fatigue musculaire ou à d'autres causes (1). § 9. — Le travail de la digestion tend à accélérer les batte- influence ments du cœur, et la nature des aliments ingérés dans l'estomac exerce aussi une influence considérable sur le degré de fré- quence de ces mouvements. Ces faits sont connus depuis fort de la diffeslion. (1) Les voyageurs qui se sont élevés à des altitudes considérables ont sou- vent remarqué une grande accéléra- lion dans les battements de leur pouls, et ont attribué ce phénomène à la di- minution de la pression barométrique. Ainsi de Saussure, dans sa célèbre as- cension au Mont-Blanc, remarqua que même après un reposde quatre heures au niveau du col du Géant, son pouls donnait 110 battements par minute, tandis qu'à Chamounix il n'en comptait que 72. Un de ses guides avait le pouls à 112 dans la première de ces stations et cl 60 dans la seconde , et chez un autre la difi'érence était dans le rap- port de 98 à /|9 (a). Gay-Lussac, dans son voyage aérostatique, constata aussi une certaine accélération dans son pouls lorsqu'il s'était élevé à une grande hauteur dans l'atmosphère (6). Enfin M. Parrot, d'après quelques ob- servations faites sur lui-même clans diverses stations, pendant une excur- sion dans les Pyrénées, a cru pouvoir poser en refile que le pouls étant à 70 au niveau de la mer, bal 75 à 1000 mè- tres d'aitilude, 82 à 1500 mètres, 90 à 2000 mètres, 100 à 3000 mètres, et 110 à 6000 n)èlrcs au-dessus de ce niveau (c). Mais je suis porté à croire que l'influence des variations de la pres- sion atmosphérique est loin de pro- duire ordinairement des effets aussi considérables sur la fréquence des battements du cœur, et que, dans les cas précédents, les fatigues du voyage avaient surtout contribué à amener l'accélération du pouls signalée ci- dessus. Effectivement je vois , par les observations de M. i^ioulin , qu'à Santa- Fé de Bogota le pouls n'est pas notablement plus fréquent qu'à Paris ; or, Santa-Fé est à une hauteur de 26Zi3 mètres au-dessus du niveau de la mer. Je vois aussi que ce physiolo- giste , après un voyage fatigant de Santa-Fé à Servidad, dont l'altitude n'est que de 1000 mètres , avait 102 pulsations au lieu de 69, comme dans la première de ses stations. J'ajou- terai que l'ensemble de ses observa- tions ne permet de saisir aucune rela- tion constante entre le degré de fréquence de ces battements et la pres- sion atmosphérique {d). Il est cependant indubitable que souvent les mouvements du cœur sont ralentis par une grande augmen- tation de la pression barométrique. Cela a été remarqué d'abord chez les (a) Horace de S;iussure, Voyane dans les Alpes, t. IV, p. 207. (6) Gay-Lus?ac, ftelalion d'un voyage aérostatique (Ann. dechini., I. LU, p. 89, an xiii). (c) Parrui, Ueber die Beschleuniguny des menschlichen Puises, nach Maassgabe der Erhôhung des Slandpunktes iitjcr der Meeresfldclte (Froriep's Notizen, 1826, t. X, p. 216). {d) Pioulin, Observations sur la vitesse du pouls à différents degrés de pression atmosphé- rique et de température {Journal de physiologie de Magendie, 4820, t. VI, p. i). 80 MÉCANISME DE LA CllîCULAtlOlN. longtemps (1), mais ils ont été mis en évidence de la manière la plus nette par une série de recherches dues à deux jeunes physiologistes de l'école de Vienne : MM. Lichtenfels et Fro- lich. Ces observateurs ont noté d'heure en heure le nombre des battements de leur pouls, et ont enregistré comparativement le ouvriers mineurs , mais les résultais étaient très variables. Ainsi M. Uut- cliinson a fait quelques observations sur le pouls de six Hommes que Ton descendit au fond d'une mine à une profondeur de ù55 mètres. La di- minution dans la pression ainsi pro- duite était d'environ 1/20* d'atmos- phère, mais la température de la mine était de plus de 5" supérieure à celle de l'air extérieur. Cette chaleur devait tendre à augmenter la fréquence du pouls, et cependant chez trois de ces individus les batlements étaient moins nombreux au fond de la mine qu'à la surface du sol, et dans deux cas on ne trouva aucune dilférence. Dans un cas il y avait au contraire une augmen- tation très considérable. Le nombre des inspirations était toujours aug- menté [a). Depuis quelques années plusieurs médecins ont fait usage de bains d'air comprimé , et ils s'accordent à dire que, sous l'influence d'une pression additionnelle d'environ une demi- atmosphère, il y a le plus ordinaire- ment un certain ralentissement dans la marche du pouls ; mais ils n'ont pas donné des renseignements numéri- ques assez précis pour satisfaire les physiologistes. Jl paraîtrait que les variations brusques dans la densité de l'air ambiant déterminent souvent, au premier abord, une accélération dans le jeu du cœur, et que chez les indi- vidus bien portants le séjour prolongé dans un bain d'air comprimé n'influe que peu sur la rapidité de la circula- tion ; mais que chez les individus dont les mouvements du cœur sont très accélérés il en résulte souvent un ralentissement fort considérable [b). Ainsi M. Privaz a vu quelquefois une réduction des deux cinquièmes se pro- duire de la sorte ; et M. Berlin assure qu'à la suite d'un seul bain d'air com- primé, il y a ordinairement une dimi- nution de 12 ou 15 dans le nombre des pulsations, quelquefois même de 30 ou de û6. Il cite un cas dans lequel le pouls était habituellement à 106 ou 108, et descendit à 72 après une séance dans lu chambre à air comprimé; dans une circonslance, le pouls tomba même à Zi5, et resta pendant fort long- temps au-dessous de 56 (c). (1) L'accélération du pouls à la suite des repas, que les médecins ont appe- lée febris à prandio {d), a été notée par Keil (e) , et llobinson a fait à ce sujet des observations plus précises. 11 trouva que le malin, avant déjeu- ner, le nombre des batlements descend {a) Hutchinson, On the Capacily of ihe Lungs (Med. Chirnrg. Trans., 1846, t. XXIX, p, 228). (6) Privaz, Essai sur l'emploi médicinal de l'air comprimé, 1810, p. 37. (c) Berlin, Élude clinique de l'emploi et des effets du bain d'air comprimé, 1855, p. 34, {d} Van Swieten, Comment., t. I, p. 680. (e) Keil, Tentamma medico-physica et medicina statica Britannica, p. 178. FRÉQUENCE l)ES rtATTEMENTS Dt COEUR. 81. moment de chaque repas et les aliments dont ils faisaient usage. Or, les tableaux ainsi dressés nous montrent que, peu de temps après chaque repas ordinaire, le pouls s'élève notablement, puis se ralentit peu à peu jusqu'au moment où le travail digestif s'exerce de nouveau (1). Par l'effet de l'abstinence prolongée pendant plus de vingt heures, le nombre des battements du cœur a diminué de 12 et même de 1 6. Mais il s'est manifesté dans cette expérience un phénomène remarquable qui montre combien l'influence de l'ha- bitude sur le mode d'action de nos organes est considérable, même là où ces actions se produisent sans le concours de notre au minimum et se relève vers l'heuie de ce premier repas , puis redes- cend jusqu'au dîner, et s'accélère de nouveau immédiatement après : cette augmentation persiste pendant trois ou quatre heures (o). Des faits du même ordre ont été enregistrés par Floyer, Schwenke et Haller (6) ; mais les recherches les mieux conduites me paraissent être celles publiées récem- ment par MM. Lichtenfels et Frôlich. (1 ) Ces auteurs , dont les observa- tions s'accordent très bien avec celles de Bryan l^obinson, ont fait leurs recherches sur eux-mêmes, et en se plaçant dans les conditions voulues, pour rendre les. résultats aussi com- paratifs que possible, ils se levaient un peu avant sept heures du matin et déjeunaient entre sept et huit heures, en prenant du café au lait ; un second repas avait. lieu à deux heures, puis ils prenaient encore du café à sept heures du soir et de la bière à dix heures. Voici les nombres de pulsations observées chez l'individu A dans une première expérience. .les puls;itûjii,s. 7 69,36 Avant le déjeuner. 8 78,62 Après le déjeuner. 8 ' 82,43 9 80,52 10 74,15 H 73,81 12 71,78 1 68,50 Avant le dîner. 2 77,26 Après le dîner. 3 74,31 i 69,30 5 66,87 6 67,65 Avant le goûter. 7 72,60 Après le goûter. 8 70,11 9 67,92 10 . 65,85 Avant le souper. a 70,88 Après le souper. Il résulte de l'ensemble de ces recherches qu'au moment du lever, le pouls est très lent, et que, dans l'heure {a) Brjan Holjinson, Op. cit., p. 151. (b) llaller, Klemciita ■jihysMoijiœ, t. II, \>. 204. IV. Influence de la nature des aliments. 82 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. volopté. Effectivement, aux heures où d'ordinaire les contrac- tions du cœur étaient accélérées par Tingestion des aliments dans l'estomac, le ralentissement progressif de ces mouvements a été suspendu et une légère réaction s'est opérée (1). La nature des aliments ingérés dans l'estomac n'est pas sans influence sur les effets produits par le travail digestif sur la con- tractilité du cœur. Ainsi, les deux jeunes physiologistes dont je viens de citer les recherches ont remarqué que l'accélération du pouls se manifeste plus promptement quand on fait usage d'aliments azotés que lorsqu'on n'emploie que des aliments amylacés ; mais, d'un autre côté, ces derniers produisent sous ce rapport des effets plus considérables et plus prolongés. qui suit le déjeuner, le nombre des battements augmente d'environ 8. Pendant les six heures suivantes le pouls se ralentit graduellement, et arrive à peu près au même point qu'avant le déjeuner. Le dîner, repas fort léger, était bientôt suivi d'une accélération dans le pouls, qui était moins prononcée que celle du matin. L'augmentation était d'environ six ou sept battements. Puis survenait un nouvel abaissement qui s'efl'ectuait plus rapidement que celui qui avait eu lieu avant le dîner, et qui, interrompu à la suite du goûter, a continué bieniôl après, et a atteint le point le plus bas vers onze heures du soir. L'usage d'une certaine quantité de bière à la fin de la soirée paraît avoir contribué d'abord à augmenter ce ra- lentissement, mais a déterminé ensuite une petite réaction (a). (1) Dans une de ces expériences où le jeûne avait été observé depuis la veille, le pouls était à 77 le matin à sept heures, et à 76 à dix heures; en- suite on a compté : A 11 heures, 71 battements. 12 — 62 1 — 58 2 — 58,5 3 — 58,5 i — 59 5 61 Chez un autre individu, placé dans les mêmes circonstances, le pouls est descendu de 87 à 75 vers une heure, tandis que d'ordinaire le minimum atteint à cette époque de la journée était de 82 seulement ; pendant l'après- midi , sous l'influence de la faim , le nombre des battements a ensuite os- cillé entre 76 et 79, pour retomber à 75 vers six heures , au lieu de se maintenir entre 88 et 92, comme cela se voyait quand cette personne suivait son régime accoutumé (6). ia) Lichtenfels et Frôhlich, Op. cit. (Mém. de l'Acad. de Vienne, t. III, 2' piirtie, p. 121 et (6) Liclilenfels et Frôhlicli, loc. cit., p. 122, FRÉQUENCE DES BATTEMENTS DU COEUR. 83 J'moiUerai que les boissons lermentées déferuiinenl d'abord 1111 ralentissement plus ou moins grand dans les mouve- ments du cœur, puis en précipitent les mouvements; mais que le café possède à un plus haut degré cette puissance stimulante (1). 11 est d'ailleurs à noter que, dans les études de ce genre, il ne faut pas confondre les effets transitoires produits par la diges- tion de tel ou tel aliment avec les conséquences secondaires qui peuvent résulter de régimes variés. Ainsi, quoique l'accélération du pouls soit plus marquée à la suite d'un repas composé de substances végétales que lorsque les facultés digestives s'exer- cent sur des matières animales, l'usage habituel et presque exclusif d'aliments pauvres en azote paraît tendre à ralentir l'action du cœur (2). Mais, en ce moment, je n'insisterai pas (1) MM. Lichtenfels et Frolich ont vn que l'ingestion d'une certaine quan- tité d'eau tiède dans l'estomac déter- mine presque immédiatement dans les battements du cœur un ralentissement considérable, mais très passager ; la diminution dans le nombre des pul- sations est en général de 8 à Jl, mais au bout d'un quart d'heure l'eflél dis- paraît complètement. L'eau chargée d'acide carbonique détermine pendant environ vingt mi- nutes un ralentissement qui peut être porté à 16 pulsations par minute. La bière produit un ellel analogue, mais beaucoup plus faible. Le vhi et l'alcool agissent d'abord de la même manière, et le ralentissement produit par celte dernière boisson a été par- fois de lii pulsations par minute ; mais la réaction qui se maniieste bientôt peut amener une accéléiation d'environ 17 battements au-dessus du nombre initial. Ces auteurs ont expérimenté de la même manière sur divers médica- ments, tels que la belladone, l'atro- pine 5 l'opium , le chloroforme et l'élher. (2) M. Volkmann a eu l'occasion de recueillir «n nombre considérable d'observations numériques sur le pouls chez des détenus dans une des prisons de l'Allemagne où le régime est presque entièrement végétal, et il a trouvé que la moyenne ainsi obtenue était notablement inférieure à celle fournie par l'examen du pouls de personnes de même taille dont le ré- gime n'olïiail rien d'exceptionnel. La moyenne pour les prisonniers en question était d'environ 6'6 pulsations, tandis que la moyenne normale cor- respondante était d'environ Tô (a). (a) Volkiiiiinn, Die llâmodynamik, p. 43 5, Variations diurnes. Sll MÉCANISME DE LA CiRCULATlON. davantage sur ce sujet, qui trouvera mieux sa place quand nous étudierons d'une manière spéciale l'alimentation. § 10. — Les diverses circonstances dont nous venons d'étu- dier l'influence concourent à produire les changements qui s'observent dans le pouls aux diverses heures du jour. Keil et la plupart des anciens physiologistes qui ont fait des recherches à ce sujet ont trouvé les battements du cœur plus fréquents le soir que le matin, et les médecins admettent généralement que cette accéléralion vers la tin du jour est un phénomène normal. Mais lorsqu'on se met autant que possible à l'abri des perturba- tions déterminées par les repas, l'exercice musculaire sous ses diverses formes, et les autres causes d'excitation, on arrive à un résultat contraire (1), et l'on voit que la fatigue de la journée tend (1) Pulsus nocturnus matutino multù celer ior est, a dit Keil (a), et Ton voit, par le dépouillement de ses observations numériques, qu'en eifet la moyenne des battements enregis- trés dans ses tableaux est, pour le matin, 80,5, et pour le soir, 89,7 (6). Robin- son, dont les recherches datent égale- ment du commencement du xviii" siè- cle, trouva aussi, terme moyen, chez un individu, 70 pulsations dans la ma- tinée (de huit heures A. M. à deux heures P. M.), et 76 dans l'après-midi (de trois heures du soir à onze) ; un autre individu lui donna en moyenne, poiu" les mêmes périodes, 68,5 et78 (c). Falconer a obtenu des résultats ana- logues, savoir : pouls du matin, 69,6 ; poulsdu soir, 76 (t/). Enfin, M. INick a trouvé aussi une fréquence plus grande le soir dans trois séries d'observations faites dans les conditions ordinaires de la vie ; mais, dans d'autres séries fai- tes de façon à écarter l'influence exci- tante des repas, des contractions mus- culaires et de l'activité mentale, il obtint un résultat inverse : à huit heures du matin, il y avait en moyenne 63 pulsations, et à sept heures dusoir, 58 seulement (e). Ce dernier résultat s'accordait avec les conclusions que le docteur Knox (d'Edimbourg) avait tirées précédem- ment de l'ensemble de ses observations sur la fréquence relative du pouls à neuf heures du matin (avant le déjeuner), et vers minuit, après un souper trèsléger. Son pouls était, terme moyen, à 68 le matin et à 6/i le soir (/"). En 1837, le même auteur publia de nouveaux faits (a) Keil , Tentamina medico-physica quibxis accedet medicina statica Britannica, p. 178 (édit. de1730). (b) Guy, art. PULSE (Todd's Cyclopœdia of Anat. and Physiol.,\o\. IV, p. 190). (c) Bryan Robinson, Op. cit., p. 150. {d) Falconer, Observations respecting the Puise, 1796. (e) Nicli, Beobachlungen iiber der Bedingungen unter denen die Hdvfigkeit des Puises, etc., \ 826, (/■) R. Knox, On the Relation subsisting beiiveen Time of the Day and Varions Functions ofthe Human Body, etc. {Edinbnrgh Med. and Surg. Jonrn., 4 81.5, t. XI, p. 54). FiiEUUiiîNCi': oi!:s liA'ni^MiùNxs DU cojau 85 non-seulement à rendre le cœin^ moins actif sous le ra[)port du nombre des coniractions effectuées en un teuips donué, mais aussi moins irritable, de sorte que les effets produits par une même puissance stimulante sont moins grands le soir que le matin (1). Chez les malades, il en est autrement, car la fatigue à l'appui de l'opinion qu'il avait été le premier à professer, relativement à la diminution du nombre des pulsations vers la fin du jour (a), et les recherches plusnombreusesde M.Guy sont venues montrer que, dans l'état normal de l'organisation, cette tendance est assez générale. Il est vrai que la différence consta- tée par cet auteur entre le matin et le soir était tantôt en plus, tantôt en moins ; mais, dans la grande majorité des cas, le pouls s'est trouvé moins fréquent le soir que dans la mati- née (6). Une certaine infériorité numé- rique dans le pouls du soir a été con- statée aussi chez des femmes enceintes par M. nohl (c). Enfin, M. Herden a porté également son atlentiou sur celte question, et il a trouvé en moyenne 2 pulsations de moins le soir que le matin (d). Des observations analogues ont été faites par M. Tournesco (e). (1) La diminution dans l'irritabilité du cœur vers la fin du jour est mise en évidence par divers faits recueillis d'abord pur M. Knox, pui.-. par d'au- Ires physiologistes {f). Ainsi, M. Guy a trouvé que l'accélération du pouls déterminée par des repas identiques était plus considérable le matin que le soir ; des aliments qui ne produisaient aucun effet appréciable le soir aug- mentaient dans la matinée le nombre des battements de 5 à 12, et prolon- geaient leur influence pendant une ou deux heures {g). On sait aussi que les boissons alcooliques déterminent une accélération du pouls, qui est plus marquée quand ou en fait usage de bonne heure dans la journée que dans l'après-midi. iVl. Knox a remarqué que les diffé- rences produites par les changements de position du corps sont plus grandes le matin qu'au milieu du jour, et sont le moins marquées vers le soir (h). M. Nick a fait la même observation [i), et les recherches de M. Guy ont con- duit à un résultat analogue en ce qui concerne la comparaison entrele matin et le milieu du jour, mais accusent au contraire une augmenlation dans ces inégalités vers le soir. La différence entre le nombre des pulsations chez l'Homme debout ou couché a été de 8 vers midi, de 9 pendant la soirée, et de 10 le matin (j). (a) Ivnox, PhysiûloyicaL Observations on Ihe f'tUsatiotis uftlie Hearl (Ediiiburgh med. and Surg. Journ., 1837, l. XLVII, p. 358). (6) Guy, art. l'ULSU (Todd's Cyclop. of Anal, and PhijswL, l. IV, [i. lUl). (c) Holil, Ule oeburtshûtIUche Exploration, 1833. ((i) Hanlun, Observ. on thr, l'ulse and Respiraiion [Ainenran Jonru. of Mcd. Science, tSiS, vol. V). le) Tournesco, Du pouls. Tliù.su, 1853, y. 20. (/■) Kno.'c, Op. cit. (Edinb. Med. and Surij. Journ., i^lb, vol. XI). ((/) Guy, Op. cil. (TodJ's Cyclop., l. IV, p. l'Jt). (Il) Knox, Op. cil. (Edinb. Med. andSurij. Journ., 183i), vnl. XLVII, p. '.',t>'J}. (j) Nick, Op. cit. ij) '^">'> (¥• "^i'- (^'«iy'' llospitnl llepurls, l. III, p. 3il). 86 JIÉCANÎSME DK LA CIRCULATSON. (h', la journée détermine mi élat fiéwreiix qui est accompagné d'une accéléralion du pouls (1). § 11 . — Je dois aussi faire remarquer les rapports intimes qui existent entre la fréquence des mouvements du cœur et de l'ap- pareil respiratoire. En général, le nombre des pulsations est à les mouvements peu près quatrc foïs plus considérable que celui des inspira- respiratoires. n^^j,, ^^^jg ^^ obscrvc à cet égard de grandes variations, et le rapport entre ces deux fonctions change notablement avec la position du corps, la fréquence du pouls et plusieurs autres circonstances (9). Rapports entre la fréquence des battements du cœur (1) Ainsi, chez les phthisiques, M. Smith a trouvé, terme moyen, 91 le malin et 98 le soir ; le minimum était 65 le matin et 70 le soir ; le maxi- mum 1^3 le matin et 152 le soir. Il a remarqué que la différence était d'au- tant plus grande que la lésion locale était plus étendue et le pouls moyen plus fréquent (a). (2) M. Guy a recueilli sur ce sujet une série d'observations nombreuses et intéressantes (6). Il a remarqué d'abord qu'en plaçant les personnes dans la même position et en empê- chant, autant que possible, toute préoc- cupation intellectuelle de nature à in- fluer sur les résultats, on trouve des variations individuelles assez considé- rables : ainsi il a vu le rapport entre les inspirations et les pulsations être, d'une part, comme 1 : 2,7, et, d'autre part, comme 1 : û,3 ; mais, dans la très grande majorité des cas , elles étaient dans la proportion d'une inspi- ration pour 3,5 pulsations. Le nombre de pulsations correspon- dant à une inspiration s'est élevé de la sorte à mesure que les battements du cœur s'accéléraient. Ces observations tendent à établir aussi qu'à nombre égal de pulsations, les mouvements respiratoires sont plus fréquents le soir que le matin. Ainsi, le pouls étant à 65, M. Guy a trouvé, en moyenne, 17 inspirations le malin et 18 dans la soirée. Des faits analogues ont été enregistrés par M. Ilarden (c). Les effets de la position du corps sont encore plus marqués. Ainsi, pour 64 pulsations par minute, dans les trois positions suivantes, M. Guy a trouvé que chaque inspiration corres- pondait à 2,9 pulsations chez l'individu debout. 3,3 — — assis. 4,9 — — couché. La moyenne de 1/| observations faites sur les personnes couchées ou («) Smith, The Rate of Pulsation and Respiration in Phthisis {Brit. and Foreign Review, 1856, t. XVII, p. 475). (b) Guy, art. PULSE (Todd's Cnclopœdia ofAnat. and Physiol., vol. IV, p. 19ci). (c) Hardeii, Obseni. on the Palse and Respiration (American Jouni. of Med. Science, 1843, l. V, p. 340). FRÉQUENCK DES BATTEMENTS UU COEUR 87 Nous verrons bientôl que la dilatation de la cavité thora- influence , de la pression cique ou sa contraction influent notablement sur la facilite thoradque. avec laquelle le sang arrive au cœur ou s'en échappe pour aller dans les artères périphériques ; mais je dois noter ici que les variations de pression produites de la sorte peuvent modi- fier aussi le jeu de cet organe. Ainsi, dans les mouvements expiratoires ordinaires , le pouls est un peu plus fréquent que pendant l'inspiration, et la pression exercée sur le cœur par l'air emprisonné dans les poumons , quand on contracte à la fois la glotte et les parois du thorax, rend les battements plus rares (1); en agissant de la sorte, on peut même les sus- assises a donné les propor tions sui- vantes : Position assise . . . 1 : : 3,30 Position couchée . . l : : i,d9 Dans les recherches faites par M. Harden les différences étaient moins grandes, mais dans le même sens, et ces résultats s'accordent avec ceux obtenus par M. Pennock (a). Il résul- terait aussi de quelques observations faites par M. Osieteiet que, pendant le sommeil , la fréquence des batle- ments du cœur, comparée à celle des mouvements respiratoires , serait un peu moins grande que pendant la veillée (6). Les recherches de ce statisticien tendent aussi à établir que chez la Femme la dilîérence entre le nombre des pulsations et des mouvements inspiratoires est un peu plus considé- rable que chez l'Homme. Une légère inégalité dans le même sens a été constatée par M. Pennock chez les vieillards , comparés aux vieilles femmes. Dans une série d'observations faites plus récemment sur ce sujet, par M. Marré, les nombres moyens ont été, pour les Hommes, 69 pulsations et 19 inspirations; pour les Femmes, 77 pulsations et 23 inspirations. Ce jeune médecin a vu aussi que le nombre relatif des mouvements inspi- ratoires augmente quand le pouls est moins fréquent que d'ordinaire, et di- minue quand les battements du cœur s'accélèrent d'une manière anormale. Ainsi le nombre des pulsalions cor- respondantes à une inspiration était de •2,7 quand le pouls était entre 50 et GO ; de 3,7 pour un pouls de 80 à 90, et d'environ A pour un pouls d'environ 1^0 (c). (1) D'après les observations de M. Vierordt, la différence entre la durée d'un battement complet du {a) Pennock, On the Frequency of the Puise and Respiration of the Ayed {Amer. Journ. ofMed. Science, iSil). {&) Qiiclelet, .S«r l'Homme et le développement de ses facultés, t. II, p. 86 et suiv. (c) y.avrè. Recherches sur les rapports )i,iimériques qui existent, chea l'adulte à l'état normal et à L'état pathologique, entre le pouls et la respiration (Archives qénérales de médecine, 1855, 5* série, t. H, p. 72). 88 MÉCAMSME DE LA OIKCULATION. pendre momentanément. Ainsi, le professeur E. F. Weber (de Leipzig) a fait voir que cet arrêt des mouvements du cœur peut être produit à volonté, et détermine parfois un état de syncope (1). v cœur pendant l'inspiration et l'expi- ration, chez l'Homme, serait comme 1000 : 987 {a). Chez le Chien le pouls devient quelquefois remarquablement rare pendant l'inspiration (6). (1) C'est sur lui-même que M. E. F. Weber a fait ces expériences curieu- ses. En suspendant sa respiration, et en contractant en même temps très fortement sa poitrine, il a vu les bat- tements de son cœur s'affaiblir beau- coup, et après 3 à 5 pulsations, qui n'étaient accompagnées ni de choc cardiaque, ni des bruits ordinaires, s'arrêter tout à coup. Dans une de ces expériences , ayant retenu ainsi sa respiration plus longtemps que d'ordi- naire, il tomba en syncope. Enfin, il constata que cette cessation tempo- raire de l'action du cœur ne tient pas au fait de la suspension de la respira- tion, soit que cette suspension ait lieu pendant l'inspiration ou pendant l'ex- piration, mais dépend de la pression déterminée par la contraction violente du thorax (c). Ces faits nous permettent de com- prendre la possibilité de suicides dé- terminés par des efforts analogues dont la violence serait extrême. Galieu et quelques autres écrivains de l'antiquité ont fait mention de cas de mort occasionnés par la suppres- sion volontaire de la respiration [d). En général, on traite ces récits de fables; mais, d'après l'accident sur- venu dans l'une des expériences de M. Weber, et d'après une observation recueillie, il y a environ un siècle, par Cheyne, je serais disposé à croire que chez certaines personnes les suites de cet arrêt du cœur pourraient être mor- telles. Cheyne raconte avec beaucoup de détail l'histoire d'un de ses malades qui, en retenant sa respiration d'une manière particulière, faisait cesser les battements de son pouls et tombait sans connaissance. Il fut témoin de ce fait, et l'homme qui offrait ce singu- lier phénomène resta dans un état de syncope pendant près d'une demi- heure , puis revint graduellement à son état ordinaire (e). M. Donders a fait aussi quelques observations sur l'influence que les divers modes de respiration exercent (a) Vierordl, Dis Lehrevom Arterienpuls, 1S55, )i. id'S. (b) Liidwig, Beitrâge %ur Kenntniss des Einflusses der Respirations-Bewegungen auf den Blutlaufim Aortensysteme (Miiller's Archiv fur Anatomie uiid Phys., 1847, p. 253). — Vierordt, loc. cit. (c) E. F. Weber, Ueber ein Verfahren den Kreislauf des Blutes und die Function des Hev%eiis willkûhrlich zu unterbrechen (Berichte ilber die Verhandtungen der Sâchsischen Gesellschaft der Wissenschaften zu Leipzig. 4850, p. 29, et Archiv. gén. de méd., 1853, 5" série, t. I, p. 399). (d) Galicn, Mouvements des muscles, liv. Il, cliap. yi{Œuvres, trad. de Daremberg, 1. 1, p. 366). — Valcriiis Maximus, Meinorahllia, lib. IX, chap. xir (hist. de la mort de Coma). (e) G. Cheyne, The English Malady or a Treatise of Nervous Diseases, 1733, p, 307 (cas du colonel Townshead). Fl!Éi)Ul!:iNCfc; DES BATTEMENTS DL' COELU 89 ^12. — îl exisie aussi dans la IVéquence des battements du variations ^ , . individwelles. cœur des différences individuelles très considérables dont le physiologiste ne peut se rendre compte. Ainsi, parmi les hommes dont l'âge , la taille et le tempérament sont les mêmes et dont toutes les fonctions paraissent être parfois dans leur état normal , on trouve que le pouls est habituellement très lent chez les un« et accéléré chez d'autres ; on cite des exemples de personnes dont la santé était bonne et dont le cœur ne battait que trente ou quarante fois par minute; on a même vu ce nombre descendre à 23 (1). Les cas d'une grande accélération normale du pouls, indépendante de tout état patho- logique, sont plus rares (2). § lo. — Nous n'avons pas à nous occuper ici des modifi- cations que les maladies peuvent déterminer dans la fréquence des contractions du cœur (3) ; je ferai remarquer cependant que sur les battements du cœur. Il a vu tés par divers auteurs ; et , parmi les que les expirations laborieuses trou- hommes dont le cœur ne donnait blaient les mouvements de cet organe, qu'environ ZiO contractions par mi- mais les rendaient tantôt plus fré- nute, se trouve Napoléon I" (c). quents, d'autres fois plus rares. Des (2) Wliest a rapporté l'exemple inspirations très profondes tendaient d'une femme dont le pouls, à l'état de à rendre les mouvements de ce vis- santé, battait 120 fois par minute (d). cère plus faibles et moins fréquents (3) Voyez, à ce sujet, les recherches que dans les circonstances ordi- de M. Donné (e). naires (a). J'ajouterai seulement ici que les (1) Haller rapporte cet exemple pertes sanguines considérables, tout d'extrême lenteur du pouls, observé en affaiblissant beaucoup les contrac- par Henkel ib); et, de nos jours, des tions du cœur, y déterminent une cas assez semblables ont été décrits grande accélération. Ainsi flales a par plusieurs médecins. M. Tournesco coiîslaté que le pouls du Cheval bat et M. Bérard ont réuni un assez grand ordinairement environ 36 fols par nombre de cas de ce genre, rappor- minute, mais s'élève à 100 et même (n) Dondcrs, Weitere lieUiUye zur Physiol. dev Respir. und Circulation (Zeilsclirifl fur rationn. Med., 1854, 2" sorie, I. IV, p. 241). (b) H:illci-, Elemenla physioloyicc, t. II, p. 25U. (c) Tournesco, Du pouls. Thèse, Paris, 1853, n» 99, p. 31. — Ufjrard, Cours de physiologie, t. IV, p. H 3. (d^ Voyez Cliomel, Pathologie (jénérale, p. 2G4. (e) Donné, Recherches sur L'étal du pouls, etc., dans les maladies {Arch. yen. de viéd,, 1835, 2* série, l. IX, p. 129). 90 MECANISME DE LA CmCULATlON. ces pliériooiènes pathologiques viennent souvent confirmer ce que les expériences physiologiques rendent très probable au sujet (le l'influence du système nerveux sur l'activité fonction- nelle de cet organe. Mais l'étude de cette influence fera le sujet de la prochaine Leçon , et pour le moment je négligerai égale- ment l'étude des modifications que l'action des substances mé- dicamenteuses ou toxiques peut exercer sur la contractihté du cœur; car aujourd'hui je ne veux appeler l'attenhon que sur le jeu normal de cette espèce de pompe foulante dont le rôle est si important dans le travail irrigatoire. Hhythme § ili. — Lorsqu'on veut déterminer seulement la fréquence du cœur, dcs mouvemcuts du cœur, il suffit d'en compter le nombre par minute en se réglant sur une montre à secondes ; mais quand on veut évaluer avec quelque précision leur durée relative , il devient nécessaire d'avoir recours à d'autres instruments, tels qu'un sphygmographe ou sphygmomètre enregistreur, à l'aide duquel on trace la courbure des oscillations du pouls (I). Dans davantage, quand l'Animal est près de périr par hémorrliagie (a). Une petite saignée produit au contraire un ralentissement du pouls. (1) Le sphygmographe employé par M. Vierordt consiste en un levier sus- pendu comme le fléau d'une romaine, dont le long bras est garni en dessous, à peu de distance de son point d'ap- pui, d'une petite tige terminée par un disque et destinée à être appuyée sur l'artère; de petites coupes placées sur chacun des bras du levier reçoivent des tares et permettent à l'expérimenta- teur de régler le degré de pression ainsi exercé sur le vaisseau ; enfin l'ex- trémité du long bras est terminée par un pinceau très fin, qui s'élève ou des- cend à mesure que les battements de l'artère soulèvent ou laissent retomber le petit disque déjà mentionné, et qui trace sur un rouleau de papier en mouvement une ligne courbe corres- pondante à ces pulsations. Pour que cet instrument donne des indications exactes , il tant que le frottement pro- duit par le déplacement du pinceau sur le papier soit très faible, et, pour remplir cette condition , M. Vierordt fait usage d'un cheveu qui , en se promenant sur du papier enduit de noir de fumée , enlève cette poudre et trace une ligne blanchâtre. Enfin, il est également nécessaire de graduer (a) Haies, Hémastatique, p 15. HHYTHME DES BATTEMENTS DU COEUK. 91 ces derniers temps , le professeur Vierordt (de Tubingiie) a fait beaucoup de recherches de ce genre, et a trouvé que dans l'état normal ces mouvements sont moins isochrones qu'on ne serait porté à le croire au premier abord. Ainsi le temps qui s'écoule entre un battement artériel et le battement suivant varie sou- vent dans le rapport de iOO à 133, ou même davantage (1). Ce physiologiste s'est appliqué aussi à mesurer les variations qui s'observent dans la grandeur des pulsations et dans les autres particularités dépendantes de la manière dont le travail de la circulation s'accomplit; mais la plupart de ces phénomènes sont complexes et dépendent de la réaction des parois vascu- laires non moins que du jeu du cœur , et par conséquent ce n'est pas ici le moment de nous en occuper (2). convenablement la pression exevcée sur l'artèie; car, pour peu qu'elle de- vienne trop faible, les mouvements du levier sont insuffisants, et, quand elle est trop forte, la courbe ne repré- sente pas fidèlement les oscillations du pouls et oflFre des inégalités dues seulement à cette cause. Il est aussi à noter que, dans cet appareil, le levier qui trace la courbe est très long, com- paré au bras du levier de la puis- sance, de façon à grandir beaucoup le mouvement produit , et que son extrémité libre est maintenue dans un même plan vertical par des pièces articulées qui en régularisent le jeu. M. Vierordt en a donné une descrip- tion très détaillée, accompagnée de figures {a). (1) Chez des personnes en bonne santé etdont la respiration était calme. M. Vierordt a trouvé, sous ce rapport, des variations très grandes. Dans une série d'expériences de ce genre, la diirérence a été, dans le rapport de 100 : 161 ; chez les malades, elle a été parfois comme 100 : 222 (6). M. Prudente a remarqué que chez la Grenouille on peut rendre les battements du cœur intermittents , non-seulement en soumettant cet or- gane à l'action directe de diverses substances , telles que de l'ammo- niaque, une solution aqueuse d'opium et de la jusquiame , mais aussi en introduisant ces matières dans la bouche de l'animal. L'irrégularité des pulsations dépend tantôt du prolon- gement de la systole, tantôt de la durée plus considérable de la dia- stole (c). (2) Voyez la trente-quatrième Leçon. (a) Vierordt, Die Lehrevom Arlerienpnls in (jesunden und kranken Zustdnden, 1855, p. 21 o t siiiv., fi^'. 0. (b) Mcm, ibid., p. 82. (c) Prudente, Zuv ErklâruiKj des tiilevnUlirens der IlenscIM'je ([''roi'iup's Nene Nolheii, 1841,1. XX, p. 352j. Débit fie la pompe cardiaque. 92 MÉCAlNlSiME Di: LA C'IIICLLATION. § 15. — Pour évaluer le débit d'une pompe dont on connaît la contenance et dont le piston joue d'une manière complète et régulière, il suffit de compter le nombre de coups donnés en un temps déterminé, et de multiplier par ce nombre le vohniie de liquide correspondant au jaugeage de l'instrument. Au pre- mier abord, on peut donc croire qu'il serait facile de calculer, avec les données que nous possédons déjà , la quantité de sang que le ventricule gauche du cœur envoie par minute dans le sys- tème aortique. En effet, nous avons vu que le nombre de coups de piston réalisés par cette espèce de pompe foulante, c'est-à- dire le nombre de ses contractions, est, terme moyen, chez l'Homme adulte, d'environ l'I par minute. Si nous estimons la capacité du ventricule gauche à environ 80 centimètres cubes (1 ), (1) Au premier abord , il semble très facile de déterminer avec une grande précision la capacité de cha- cune des cavités du cœur, et que, pour obtenir ce résultat, il doit suffire de peser cet organe à vide , puis de le peser de nouveau après avoir rempli une ou plusieurs de ses cavités avec un liquide dont la densité est connue, du mercure, par exemple. Mais ce procédé ne donne en réalité que des résultats fort incertains, à cause de l'état de resserrement plus ou moins grand du ventricule gauche qui per- siste chez le cadavre. Pour s'en con- vaincre, il suffit de jeter les yeux sur les tableaux publiés par Legallois. En elïet, dans quelques-unes des expé- riences de ce pliysiologisie, faites sur le même cœur, le ventricule gauche ofl'rait successivement une capacité de cinq, puis de vingt mesures, suivant que ce viscère était encore dans son état de rigidité cadavérique, ou avait été rendu flasque par la malaxation : et dans ce dernier cas il ne paraissait pas encore avoir regagné, à beaucoup près, sa grandeur physiologique ; car on sait que les deux ventricules sont à peu près de même capacité, et le ventricule droit pouvait contenir qua- rante-six des mêmes mesures {a). J'iijouterai que dans des expériences encore inédites de M. Colin sur la capacité des ventricules du cœur du Cheval, les effets de la contrac ion cadavérique ont été encore plus con- sidérables. En effet, ce jeune physiolo- giste a constaté que le ventricule gauche peut contenir, terme moyen , 1 litre de liquide quand ses parois sont dans l'état de relâchement qui accompagne la diastole, mais qu'une heure ou deux après la mort, cette même cavité ne peut recevoir que 1 ou 2 décilitres, et qu'après que la rigidité cadavérique paraît avoir cessé, le cœur ne reprend jamais sa flaccidité primitive ; de façon ifl) Leg'allois, Anatomie et physiologie dit cœur (Œuvres, t. I, p. 333). DÉBIT Dt; VENTUICL'LE Cauche, 9S et si nous adnieltons aussi qu'en général à chaque mouveiment de systole il se vide presque complétenient, il en résultera que cet organe, fonctionnant dans ces conditions, serait capable de que la capacité du ventricule gauche reste inférieure à ce qu'elle était du- rant la vie. Pour le ventricule droit, ce changement est beaucoup moins marqué. Ainsi, en expérimentant sur un Porc, M. Colin a trouvé qu'immédia- tement après la mort, la capacité du ventricule gauche était représentée par U^ grammes d'eau, et celle du ventricule droit par 56 grammes; tandis qu'une demi-heure après, lors- que la rigidité cadavérique avait com- mencé à se manifester dans cet or- gane, la seconde de ces cavités pou- vait encore recevoir 3/4 grammes d'eau, mais la première 5 grammes seulement. Les variations qui se remarquent dans la capacité des ventricules chez les divers individus de la même es- pèce sont d'ailleurs très considé- rables. Par exemple, chez le Cheval, M. Colin a vu la capacité du ventricule gauche s'élever à 1500 centimètres cubes, et dans un autre cas n'être que de 770 centimètres cubes. En général, elle est plus considérable chez les in- dividus de grande taille que chez les petits; mais il n'existe à cet égard aucun rapport constant. Ainsi c'est chez un Cheval du poids de /i50 kilo- grammes que le ventricule gauche contenait 1 litre et demi d'eau, et chez un autre individu du poids de /i(JO ki- logrammes, ce réservoir ne pouvait loger que 980 cenlimètres cubes de liquide. Chez le Mouton, la capacilé du ven- tricule gauche s'est trouvée être de Zj2 centimètres cubes dans une expé- rience, et de ô/i dans une autre. Chez le Chien, elle était rie 7 centimètres cubes chez un individu pesant 5 kilo- grammes; de 16 centimètres cubes chez un individu du poids de 10 kilo- grammes, et de 35 centimètres cubes chez un autre dont le corps pesait 17 kilogrammes. C'était probablement en pesant le sangcontenu dans le ventricule gauche que Harvey est arrivé à estimer la con- t-nance de ce réservoir comme étant égale, chez l'Homme, au moins à 2 on- ces de ce hquide, c'est-à-dire à environ 65centimètrescubes(a). Maiscetteéva- luation est évidemment trop faible ; et, dans une expérience analogue faite par Legallois, la capacité du ventricule droit s'est trouvée être de 86 centimètres cubes. Le ventricule gauche ne jaugea que 78 centimètres cubes. Du reste, il està'présumer que sises parois avaient été dans un état de relâchement com- plet, sa cavité aurait été h peu près de même grandeur que celle du ven- tricule droit (6). Abegg a cherché la solution de cette question par un autre procédé. Il mit à découvert le cœur chez des Lapins, et au moment de la diastole il lia les vaisseaux qui partent de cet (a) llarvcy, ExercU. de viola cordis, caji. ix, p. 43, {b) Legallois, Of,. cit., p. 334. 94 MÉCANISME DE LA CiRCULATION. fournir au système irrigatoire environ 6 litres | de sang arté- riel par minute, ou 108 centimètres cubes par seconde (1). Mais lorsqu'on examine ce phénomène de plus près , on voit que la question est loin d'être aussi simple, et que la quantité de sang mise en mouvement par les contractions du ventricule gauche du cœur ne dépend pas seulement de la fréquence plus ou moins grande des battements de cet organe. Quand le jeu de cette espèce de pompe s'accélère beaucoup, sa cavité ne se dilate pas autant que lorsque ses mouvements sont lents , et en se contractant il se vide moins complètement (2). Les évalua- tions que je viens de présenter ne peuvent donc être considé- organe ; puis il ouvrit les cavités car- diaques, et pesa, d'une part le sang qui s'en écoula, d'autre part le cœur vide. D'après ces données, il estima que le poids du sang reçu dans le cœur de ces Animaux est égal aux neuf dixièmes du poids du viscère lui même. Enfin, appliquant ce résultat à l'évaluation de la capacité du cœur de l'Homme déduite du poids de cet organe, il calcule que, suivant les individus, la quantité de sang reçue dans ses cavilés peut varier entre 6 et 12 onces (a). (1) Klein a fait usage d'un raison- nement de ce genre pour évaluer la quantité de sang qui, dans un temps donné, est lancée dans l'aorte par les contractions du ventricule gauche chez l'Homme ; mais il estime arbi- trairement la capacité de ce réser- voir pulsatile à une once de sang ou /ipo. c.^(35. ce qui correspond à envi- ron 32 centimètres cubes, quantité qui est beaucoup trop faible. Il prend 80 comme expression du nombre de pulsations par minute, et calcule aussi qu'il sort pendant cet espace de temps environ 133 pouces cubes de sang , c'est-à-dire 2638 centimètres cubes, ou un peu. plus de 2 litres et demi (6). Haies, en se fondant sur l'opinion de Harvey et de Lower, base ses cal- culs sur une capacité ventriculaire égale au volume de 2 onces de sang, ou 3p''-<^-,318; ce qui supposerait un débit double , c'est-à-dire d'environ 5 litres par minute (c). (2) Je reviendrai bientôt sur les moyens à l'aide desquels on a pu con- stater expérimentalement la diminu- tion de la valeur fonctionnelle de la systole, lorsque la fréquence des bat- tements du cœur augmente, et je me bornerai à citer ici quelques résultats. Dans les expériences de M. Hering, faites sur un Cheval, le nombre des pulsations du cœur s'est élevé de 36 à 100 par minute, par l'effet d'une course au trot, et la valeur de chacun (a) Abegg, De capacitate arteriarum et venarum pulmoiium, p. 3. Bi-eslau, 4848. (b) Klein, Tentaviina medico-physica, tent. 2, De velocUate sanguinis, p. 30 el suiv. (c) Haies, Hémasiatique, p. 34. DÉBIT DU VENTRICULE GAUCHE. 95 rées que comme s'appliquant au maximum d'effet que le cœur produira ; mais elles ne sont pas sans importance , ne fût-ce que comme moyen de contrôle , pour juger de la valeur des conclusions déduites d'autres recherches entreprises dans le même but. § 16. — - Quelques physiologistes ont espéré résoudre d'une manière plus rigoureuse les questions dont nous nous occupons ici, en empruntant à l'hydrodynamique un autre procédé. Pour évaluer la quantité de liquide qu'un réservoir débite en un temps donné, il suffit de connaître l'aire de l'orifice d'écoule- ment et la vitesse du courant qui s'en échappe , puis de multi- plier ces quantités l'une par l'autre , c'est-à-dire de se repré- senter la quantité de liquide qui sort pendant un temps donné, une seconde, par exemple, sous la forme d'un cylindre solide dont la base serait l'aire de l'orifice, et la hauteur la distance parcourue par une molécule du liquide durant ce même espace de temps. Pour calculer cette base, on peut se borner à mesurer le diamètre de l'orifice ; car, ainsi que chacun le sait, le rapport du diamètre à la circonférence du cercle est bien connu, et, pour évaluer la surface cherchée, on n'a qu'à multipher la cir- de ces coups de pompe a diminué en M. Hering, que, pour pousser dans le même temps dans le rapport de 29 système circulatoire une même quan- à 13 (a). tilé de sang, le cœur du Cheval em- M. Vierordt a. constaté aussi que ploie généralement environ 25 secon- chez un Chien la valeur de chaque des, quand il bat 35 ou /lO fois par coup de pompe donné par le venlri- minute ; mais que dans les affections cule gauche a diminué dans le rapport fébriles ou inflammatoires, où cet or- de 17 à 10, en même temps que la fré- gane donne 80 ou lo 0 pulsations dans quence des battements du cœur s'éle- le même espace de teriips, il lui faut vait de 62 à 109 (6). souvent 35 ou même /lO secondes pour On voit, par d'autres expériences de produire le même résultat (c). (a) llcring , Versiiche ûber einiye Momente, die auf die Schnelligkîel des Blutlaufs Ein/luss haben{Arch. fur physioL. Heilkunde, 1853, t.XU, p. 133). {b) Vierordt, Ijie Erscliemu7igen und Geselxe der Slromgeschwindigkeiten des Blules, 4858. p. 158. (c) Hering, Op. cil. {Anh. fûrphys. Ueilk., t. XII, p. ISS, etc.). 96 MÉCAISISME DE LA ClKCL'LATÏON, conférence de l'orifice par le quart de son diamètre. La déter- mination de la vitesse du courant est plus difficile à effectuer dans la pratique , mais en théorie elle est non moins simple, et peut se faire à l'aide du théorème de Torricelli. En effet, la physique nous apprend que la vitesse d'un liquide qui s'échappe librement d'un réservoir est théoriquement égale à la vitesse acquise par un corps grave en tombant dans le vide d'une hauteur égale à la longueur de la verticale comprise entre le plan du niveau de la surface du liquide dans le réservoir et le centre de l'orifice d'écoulement. On a constaté aussi que la hauteur à laquelle le liquide s'élève dans un tube manométrique adapté à l'orifice d'écoulement est égale à la hauteur du même liquide dans le réservoir; et par conséquent, lorsque le jet est déterminé non par la pression due à une colonne liquide, comme dans le cas du réservoir dont je viens de parler, mais à la charge dépendant d'une pression exercée par les parois du iVase, ainsi que cela a lieu dans une pompe foulante, on peut encore évaluer la vitesse théorique du courant efférent en substituant dans le théorème de Torricelli la hauteur de la colonne manométrique à la longueur de la verticale comprise entre le centre de l'orifice d'écoulement et la surface libre du liquide contenu dans le réservoir ouvert en dessus. Ainsi l'eau qui, lancée par une pompe foulante, s'élèverait à une hauteur d'un mètre dans le tube manométrique adapté à l'orifice d'écou- lement, est animée d'une vitesse théorique égale à celle qu'un corps grave acquiert en tombant dans le vide de la hauteur d'un, mètre. Or, nous avons vu que, d'après les recherches de Haies et des autres physiologistes qui ont étudié expérimentalement la pres- sion sous laquelle le sang s'échappe du ventricule gauche du cœur, on est conduit à penser que chez l'Homme, de mêm,e que chez les Mammifères les plus voisins de nous par leur mode d'organisation, la charge développée par la contraction de ce DÉBIT DU VENTRICULE GAUCHE. 97 réservoir est capable de faire équilibre à une colonne de sang d'environ 2 mètres de haut. Si la sortie de ce liquide se faisait librement, on pourrait donc penser que sa vitesse théorique serait d'environ 6"\3 ; car telle est à peu près la vitesse ac- quise par un corps en tombant dans le vide d'une hauteur de 2 mètres (1). D'autre part, la mesure de l'entrée de l'aorte nous apprendque le plus ordinairement la circonférence de cet orifice est d'envi- ron 65 millimètres, ce qui donne, pour la valeur de son aire, à peu près 3/i0 millimètres carrés. Si l'effet de la systole ventriculaire était continu, l'application des principes de l'hydraulique à l'évaluation des résultats obte- nus par le jeu de l'appareil circulatoire nous conduirait donc à supposer que le volume du sang poussé dans le système arté- riel dans l'espace d'une seconde serait égal à la sohdité d'un cylindre ayant plus de 6 mètres de haut et o/iO millimètres carrés de base. Mais nous savons que la systole est un phénomène intermittent dont la durée n'occupe qu'environ le tiers du temps employé par les battements du cœur, et, par conséquent, en poursuivant L'hypothèse que j'expose ici, il faudrait réduire des deux tiers la somme obtenue par le calcul précédent comme expression du volume de sang expulsé du ventricule gauche du cœur par seconde. Ce calcul donnerait 680 centimètres cubes, quantité qu'il faudrait réduire encore proportionnellement aux résistances qui s'opposent au libre écoulement du liquide. On sait, en effet, que dans nos appareils hydrauliques l'écoule- ment s'opère rarement avec la vitesse que la théorie y assigne, par suite des résistances qui se développent près des bords de l'orifice ou dans l'intérieur des tuyaux de sortie. Nous verrons bientôt que dans le système artériel les obstacles opposés à (1) Voyez les IraitOs de mécanique : par exemple, Dclaimay, Couru élémen- taire de mécanique, p. 10^. IV. 7 98 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. l'entrée du jet lancé par le cœur sont fort considérables, et que, pendant la diastole de ce dernier organe, la colonne de liquide occupant l'intérieur du tube aortique supporte une pression très grande. Or, la pression exercée sur ce liquide doit se transmettre également dans tous les sens , sur la colonne sanguine arrivant du cœur tout comme sur les autres points de sa surface ; et, par conséquent, elle doit diminuer d'autant les effets produits par la pression en sens opposé due à l'action des parois ventriculaires. Les résultats du calcul exposé ci-dessus doivent donc subir une nouvelle correction et être diminués d'une quantité correspondante à la charge que le sang renfermé dans l'aorte supporte au moment où le mouve- ment de systole du cœur commence et où une portion de la force vive développée par cet organe est employée à y faire équilibre. Or, cette pression qui s'oppose au libre écoulement du sang de l'intérieur du cœur dans l'aorte nous est donnée approximative- ment par la hauteur à laquelle la colonne manométrique se maintient pendant la diastole dans les expériences dont j'ai déjà parlé. Enfin, nous verrons bientôt que la force avec laquelle le sang coule dans les gros vaisseaux voisins du cœur est modifiée tantôt en plus, tantôt en moins par les variations de pressions dépendantes des mouvements respiratoires. 11 se produit ainsi dans la colonne manométrique des oscillations très étendues ; et si l'on compare la pression constante qui peut être considérée comme s'opposant à l'écoulement du liquide dans l'aorte, à la pression additionnelle qui se manifeste chaque fois que la courbe s'élève, on verra que dans les expériences de M. Poiseuille elle est dans la proportion de li ou de 5 à 1. Le volume de sang qui, d'après ces calculs, sortirait du cœur en une seconde se trouverait donc réduit à 136 centimètres cubes, ou même à 11 o centimètres cubes, quantités qui se rapprochent extrême- ment de celle fournie par le premier mode d'évaluation. Mais les données numériques employées dans ce long calcul DÉBIT DU VENTRICULE GAUCHE, 99 manquent de précision, et l'on comprend que le résultat obtenu de la sorte puisse être facilement affecté d'erreurs très consi^ dérables. On ne peut donc l'accepter avec confiance, et, dans ces derniers temps, M. Volkmann et M. Yierordt se sont appli- qués à mesurer directement la vitesse du sang dans le voisi- nage du cœur, vitesse qui est un des éléments de la question dont nous cherchons ici la solution. J'exposerai ailleurs les méthodes expérimentales qu'ils ont mises en usage, et je me bornerai à dire ici que M. Yierordt a été conduit à considérer le courant comme sortant, terme moyen, avec une vitesse de 261 mdlimètres par seconde , et qu'en faisant la somme des quantités qui arrivent dans les artères carotides et sous-cla- vières, ou qui passent dans l'aorte descendante, il obtint comme évaluation du volume chassé par le ventricule gauche du cœur en une seconde , 207 centimètres cubes , ce qui donnerait 465 centimètres cubes pour chaque systole, si l'on compte 75 de ces mouvements par minute (1). L'estimation de M. Volkmann, quoique basée sur des données fournies par des expériences très différentes, est à peu près la même que celle adoptée par M. Yierordt ; mais si on les com- pare l'une et l'autre aux résultats obtenus par la détermination directe de la capacité delà pompe aortique, on est conduit à les considérer comme étant au-dessus de la vérité. En effet, si le ventricule gauche du cœur débitait par seconde 180 grammes de sang, comme l'admet M. Yierordt, ou 188 grammes, comme le pense M. Yolkmann, la capacité de ce ventricule serait au moins de 165, ou même de 172 centimètres cubes, si l'on (1) Je reviendrai sur ce siijel tlans citer les ouvrages où les rcsullats les trenlc-cinquiènie et (renle-scp- indiqués ci- dessus se trouvent consi- tième Leçons, et ici je me bornerai à gnés (a). (a) Voyez Volkmann, Die Jfdmodynamlk, p. 251 et suiv. — Mbi-ovùi, Uie Erscheinunrjen und (ieselfte der StromgeschnnnJiykeilcn des lilules, 1858, p. iOS et suiv. Travail mécanique du cœur. JOO MÉCANISME DE LA CIRCULATION. prend avec M. Vierordt 72 battements du cœur par minute pour le nombre moyen des coups de pompe donnés par cet organe. Or cette capacité ne s'observe presque jamais et ne me semble pas pouvoir être adoptée comme un terme moyen. § 47. — C'est à l'aide de raisonnements analogues, fondés sur les principes de l'hydrodynamique, que quelques auteurs ont cherché à évaluer le travail mécanique du cœur, c'est-à- dire le poids que la force développée par les contractions de cet organe pourrait élever à une certaine hauteur dans un temps déterminé (1). Mais, d'après ce que je viens de dire sur ce mode (1) C'est par une série de raison- nements assez semblables à ceux em- ployés ci-dessus et en s'appuyant sur des résultats numériques encore plus hypothétiques que Keil, dont les tra- vaux sont cités dans tous les Traités de physiologie , a cherché à évaluer ce qu'il appelle la force du cœur. Il fut conduit de la sorte à admettre que cette force est égale à celle qui en 1/5° de seconde élèverait à une hauteur de 8 pouces 6 lignes un poids de 5 onces (a). Dans CCS derniers temps, M. Vie- rordt a publié des recherches ana- logues. Pour évaluer le travail mécanique du cœur, ce physiologiste admet d'a- bord : 1° Que la quantité de sang expulsée du ventricule gauche, à chaque con- traction de ce réservoir , est de 120 grammes; 2° Que la pression exercée sur le sang en ce moment fait équilibre à une colonne de ce liquide haute de 2 mètres, ce qui indiquerait, en sup- posant son écoulement libre, une vi- tesse théorique de 6"", 3 par seconde ; 3" Que le nombre de contractions est de 75 par minute. D'après ces bases, il calcule que la force \ive du sang qui sort du ventri- cule gauche est de 0'^'' à, c'est-à-dire est capable de faire équilibre à une force qui élèverait à la hauteur de 1 mètre un poids de 0'^'',3 par se- conde. La pression exercée par le ventri- cule droit, et indiquée par la hauteur de la colonne manomélrique, est beau- coup moindre, et M. Vierordt en dé- duit que la vitesse théorique du sang lancé par ce réservoir doit être de Zi"',8 ; d'où il conclut que la force vive communiquée à ce liquide par la systole venlricuiaire droite est de 0'''',17 par seconde. Mais les pressions indiquées ci- dessus sont les sommes de la pression sous laquelle le sang arrive dans le cœur pendant la diastole et de la pression additionnelle développée par la systole ; et, d'après les calculs de (a) Keil, De vl cordis sançjuinem per tolmn corfus impellendo {Teiitamina medico-physica, 730, P. 40). l'UlU;ii MUTHICE UÉl'LOVÉ!': l'AK LE COElll. 1 0 1 d'investigation, on a pn voir combien il règne d'incertitude dans les données numériques que le physiologiste peut intro- duire dans les formules dont il fait usage, et par conséquent aussi combien les résultats qu'il en tire sont peu dignes de confiance. § 18. — Quelques auteurs ont cherché à mesurer la puis- Puissance ^ _ motrice sance motrice développée par les contractions du cœur. Le du cœur. premier qui se soit livré à des recherches de ce genre est Borelli , mathématicien célèbre du xvn' siècle ; mais ses calculs à ce sujet, basés sur des hypothèses qu'on ne saurait admettre aujourd'hui, ne conduisirent à aucun résultat utile pour la science (1). Haies, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les travaux, attaqua la question d'une autre manière; il ne chercha pas à deviner M, Hering, la première est égale à environ 1/15' de la pression tolaie. Pour évaluer le travail musculaire du cœur, M. Vlerordl réduit donc pro- portionnellement à cette fraction les résultats indiqués ci-dessus, et arrive de la sorte à considérer le travail ef- fectif du ventricule gauche comme étant égal à O'^'',02 par seconde, et celui du ventricule droit comme étant de 0'''',0 i 5. D'après cela, le travail muscu- laire de ces deux pompes foulantes serait de 0'^'',035, c'est-à-dire capable d'élever à la hauteur de 1 mètre un poids de 0'''',035 par seconde. D'après les mêmes bases, le travail quotidien serait donc égal à celui d'une pompe qui, en vingt -quatre heures, élèverait 302ù kilogrammes d'eau à la hauteur de 1 mètre {a). (1) l'.orelli a évalué à 180 OOU livres la force développée par l'organisme dans les contractions du cœur ; et pour comprendre comment il a pu arriver à un pareil résultat, il faut suivre la série de raisonnements et d'observa- tions sur lesquels il s'appuie. 11 dé- termina d'abord expérimentalement le poids que la main d'un Homme peut soutenir à bras tendu, et il cal- cula, d'après les principes connus de la mécanique, quelle devait être la force développée par les muscles de l'épaule et du bras dans cette circon- stance, vu les longueurs inégales des bras du levier de la puissance et de la lésistance. Il trouva ainsi qu'en fai- sant équilibre à un poids de 26 livres, les muscles biceps et brachial anté- rieur développaient une force égale à un poids de 560 livres appliqué di- rectement à leur extrémité inférieure (fl) Vicifii'.K, iiher ilic llcr:l;r(ifl (Arcliiv fiir plnisiuto;iisrhe lldlkuiuk, 1 sr.ii, i. IN, p. :i70J. 102 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. quelle pouvait être la sonime de force dépensée par l'organisme pour effectuer la contraction du cœur, malgré la résistance que le sang oppose à ce mouvement, mais à évaluer la pression que et agissant dans la direction de leurs fibres (a). D'après des expériences analogues et des calculs du même ordre, il considéra la force des mus- cles masséters et temporaux comme équivalant à un poids de 300 livres [b). Mais Borelli supposait que la contrac- tion de toute fibre musculaire est le résultat de l'élargissement d'une série de petites vésicules rhoniboïdales ou machînules dont ces fibres seraient composées (c) ; machinules qui agi- raient de la même manière que les losanges articulées dont se compose un joujou d'enfant à l'aide duquel on fait avancer ou reculer l'un des bouts en écartant ou rapprochant les bran- ches mobiles de cette petite machine. Pour évaluer la force développée dans la contraction musculaire, il se crut donc obligé de calculer quelle serait la puissance motrice nécessaire pour agrandir de la sorte la diagonale de chaque machinule constitutive d'une fibre musculaire, lorsque le résultat de cette dilatation s'effectuant dans l'ensemble du muscle, est égal à la résistance vaincue dans l'expérience précédente [cl) ; or il trouva qu'en supposant chaque fibre composée d'un certain nombre de ces rhombes, il faudrait que la force totale développée par les muscles massé lers et tempo- raux, pour faire équilibre au poids de 300 livres, fût égale à 375 420 livres. Puis admettant que deux muscles de même masse doivent avoir la même force, et trouvant que le volume du cœur est à peu près égal à celui des muscles masséters et temporaux réu- nis, il suppose que la force employée par la Nature pour enfler les machi- nules constitutives des fibres du cœur doit être égale aussi à 3000 livres (e). Enfin, trouvant que la résistance que le sang présente dans le système arté^ riel est 60 fois plus grande que la résistance vaincue dans l'expérience précédente, il en conclut que, puisque le cœur surmonte cette résistance , la force déployée par la Nature pour produire le phénomène de la systole doit être égale à 3000 x 60, c'est- à-dire à 180 000 livres (/"). On voit donc que celte estimation de la dé- pense de force effectuée à chaque contraction du cœur ne repose que sur une série d'hypothèses sans fonde- ment, et doit être considérée comme un exercice de calcul plutôt que comme un travail physiologique. Le natura- liste ne saurait y trouver aucun se- cours, et si j'en ai parlé ici, c'est seule- ment pour en montrer l'inutilité. i\î. Poiseuille en a très bien exposé la marche {g), et je m'étonne de voir {a) J.-A. Borelli, De, motu Animalium, pars prima, cap. viii, prop. 22, clc. (b) Idem, ibid., cap. xv, prop. 8 '. (c) Idem, ibid., cap. xvii, prop. H3 etsuiv. {d} Idem, ibid., cap. xvi, prop. 91 et suiv. {ej Idem, ibid., pars secunda. cap. v, prop. 66 cl 67. (/■) Idem, ibid., cap. v, prop. 73. (g) Poiseuille, Recherches sur la force du- cœur aorlique. Thèse, Paris, 1828. FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 103 la SLirtace interne de cette espèce de pompe foulante exerce sur le liquide qu'elle déplace pour le lancer dans l'artère aorte. L'hydraulique nous apprend que la pression exercée par un ^^p^J,^^'^' liquide sur chaque point de la surface des parois du vase qui le contient est égale au poids d'un prisme de ce même liquide qui aurait pour hauteur la verticale abaissée de la surface libre de celui-ci sur ce même point, et pour base cette surface. Pour éva- luer la pression totale à laquelle les parois du vase font équilibre, il faut donc connaître : d'une part, l'étendue de la surface par laquelle celles-ci sont en contact avec le liquide; d'autre part, la hauteur du prisme liquide au-dessus du centre de gravité de la surface pressée, et, en troisième lieu, la densité du liquide employé. Afin de résoudre le problème qu'il s'était posé, Haies avait donc à mesurer l'étendue de la surface interne du ventri- cule et à constater la hauteur à laquelle le sang, liquide dont la pesanteur spécifique est connue, peut être élevé par les con- tractions du cœur dans un tube vertical mis en commiuiication avec l'embouchure de l'aorte. Il pratiqua cette dernière expé- rience tantôt sur des Chevaux, tantôt sur des Chiens ou sur d'autres Animaux vivants, et il chercha ensuite à évaluer direc- tement la superficie des parois ventriculaires (î). Le mode que de nos jours quelques médecins précédent, évalue la force produite instruits en parlent comme d'une par cet organe à 6 livres par pouce chose digne d'admiration (a). carré ; puis, calculant que le ventricule M. Arnolt, se fondant sur la suppo- gauche offre à l'inlérieur une surface sition que le cœur de l'Homme peut d'environ 10 pouces carrés, il se faire équilibre à une colonne de sang trouve conduit à attribuer à l'action haute de 8 pieds anglais ( environ de ce réservoir une puissance égale à 2°',/|Zi), et que cet organe, pour vain- 60 livres (b). cre l'inertie de la masse du sang (1) Pour évaluer l'étendue de la existant dans le système circulatoire, surface interne du ventricule gauche a besoin d'exercer une pression de chez le Cheval, Haies y a])piiqua de moitié plus grande que dans le cas petites pièces de papier ajustées de (o) Bérard, Cours de pliysiolrjfjie, ^851, t. III, p. G54. (6) Neil Arnolt, Eléments of l'kysics or Nalural Pliilosophy. Pression exercée par le cœur sur le liquide en circulation. 10/l MÉCANISME DE LA CiaCULATION. d'estimation dont il fit usage n'était pas susceptible d'une grande précision, mais donna des résultats assez comparatifs, et en appliquant ensuite à l'Homme, par voie d'analogie, les données fournies par les expériences sur ces quadrupèdes, il crut pou- voir conclure que l'effort exercé par le cœur sur le sang artériel, au commencement de chaque systole, est égal à un poids d'en- viron 51 livres ou '25 kilogrammes. § 19. — Mais ce qu'il importe surtout au physiologiste de con- naître, c'est la pression sous laquelle le sang, poussé par la systole ventriculaire, entre dans le système artériel. En effet, c'est la charge sous laquelle ce liquide est lancé de la sorte qui inllue le plus sur la manière dont la circulation s'en effectue, et c'est en étudiant les variations dont cette pression est susceptible que l'on peut obtenir avec le plus de sûreté et de facihté quelques façon à se joindre et à en suivre toutes les inégalités, puis il reporta chacune de ces pièces sur une planche divisée en lignes carrées, pour en mesurer la grandeur. La somme de ces mesures partielles lui donna 26 pouces carrés pour la surface interne des parois de ce réservoir, abstraction faite de la coupe de l'orifice aorlique [a). Afin de déterminer le poids auquel le sang, en s'échappant du ventricule, peut faire équilibre, ce physiologiste introduisit dans l'une des artères voi- sines du cœur l'extrémité de la bran- che horizontale d'un tube recourbé, dont l'orifice était dirigé vers cet or- gane, et l'assujettit à l'aide d'une li- gature. Le sang s'éleva à une certaine hauteur dans la branche verticale de ce tube, et, d'après cette hauteur et la densité connue du sang, il calcula la pression exercée. En opérant ainsi, Haies trouva que la hauteur de la colonne sanguine élevée par les con- tractions du cœur était de 8 pieds 3 pouces à 9 pieds 8 pouces chez les Chevaux ; de 6 pieds 5 pouces chez un Mouton, et de /i pieds 2 pouces chez un Daim. Chez les Chiens, le ré- sultat obtenu varia beaucoup, suivant le poids de l'animal et d'autres cir- constances individuelles ; chez les sujets de grande taille, le sang s'élevait en général à environ 6 pieds et demi, et atteignit une fois 7 pieds 11 pouces ; mais chez les Chiens de petite taille et en bon état, il ne montait que de 3 à /l pieds environ (6). Au moment de mettre cette feuille sous presse, je reçois communication d'un travail inédit de M. Colin sur la question traitée par Haies, et je pro- (a) llalcs, HémastcUique, (rad. par Sauvages, p. 20. (b) Haies, Op. cit., p, 1 el 35. FOUCK MOTRICE DÉPLOYÉE PAU LE COKUll. 105 lumières sur les conditions qui en règlent le développement. Or, pour mesurer cet effet, iious n'avons besoin de connaître que le poids de la colonne d'un liquide à laquelle la puissance d'impulsion développée par le cœur fait équilibre. Depuis une vingtaine d'années, beaucoup de travaux ont été Expénences faits dans cette direction, et ils ont conduit à des résultats dont m. Poiseuiiie. nous aurons souvent à profiter dans cette étude des phénomènes mécaniques de la circulation. M. Poiseuille a été le premier à s'en occuper d'une manière suivie et à introduire dans les pro- cédés d'expérimentation le degré de précision nécessaire. Il a employé à cet usage une espèce de manomètre à air libre, qu'il nomme hémodynamomètre. C'est un tube en U, dont la petite branche est recourbée et disposée de façon à pouvoir être assu- fite de cette circonstance pour en dire quelques mots (a). M. Colin pose le problème à résou- dre comme l'avait fait son ingénieux prédécesseur, mais cherche à évaluer avec plus d'exactitude les éléments du calcul. Ainsi , pour mesurer la surface interne du ventricule gauche du cœur du Cheval, animal sur lequel portent ses recherches , il remplit cette cavité avec du plâtre gâché, en ayant soin de pratiquer ce moulage avant que la rigidité cadavérique ait commencé à se déclarer. Le plaire, étant solidifié, lui donne un modèle en relief du ventricule, et en traçant sur ce modèle des figures géométri- ques (la plupart carrées ou triangu- laires), il arrive facilement à en évaluer la surface avec un degré siiflisanl d'approximation. Eu procédant ainsi , M. Colin a trouvé que, chez un Cheval de taille moyenne , l'étendue de la surface interne des parois du ventri- cule gauche était de 565 centimètres carrés, quantité qui est plus que le double de celle obtenue par Haies, et cette différence s'explique facilement par l'état de resserrement où se trou- vait probablement le cœur étudié par ce dernier expérimentateur. Pour évaluer le poids de la colonne sanguine à laquelle les contractions de la pompe cardiaque font équilibre, AI. Colin adapte à l'artère carotide d'un Cheval un tube vertical, et il détermine la hauteur à laquelle le sang s'y élève. En procédant de la sortCj il trouve, comme l'avait fait Ilales, que cette hauteur est d'enyiron 2 mètres, et, à l'aide de ces don- nées, il évalue à 118 kilogrammes 050 grammes la pression exercée sur le sang par la surface du ventricule gauche du cœur du Cheval, lorsque cet organe se contracte. (a) Coliti, De lu, dfUermlnalion exijùrimenlale de la force du cxur, iiiéiuoinj jn'ûscnlé à l'Aca- ddiiiic le 20 juill(;t I S5S (voyez domplea rendus, t. XLVII, p. 1 55). 106 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. jettie dans l'intérieur de l'artère sur laquelle on expérimente, et dont la grande branche s'élève verticalement; une certaine quantité de mercure occupe la partie inférieure de l'instrument, et une dissolution de carbonate de soude, destinée à empêcher la coagulation du sang dans la petite branche, transmet la pres- sion de celui-ci à la surface correspondante de la colonne mer- curielle. Enfin celle-ci s'élève proportionnellement à cette pression dans la branche opposée du tube, et la différence entre son niveau dans les deux branches donne la mesure de la pression exercée sur le sang lui-même, sauf les corrections qui sont rendues nécessaires par l'interposition de la dissolution de carbonate de soude, et qui sont très faciles à effectuer (i). (l) L'hémodynamomètre étant ainsi disposé, la petite brandie de l'instru- ment se trouve entièrement remplie, près de son extrémité, par la dissolu- tion de carbonate de soude, plus bas par le mercure qui s'élève dans l'autre branche,, de façon à faire équilibre au poids de la colonne formée par les deux liquides dans la première bran- che. Dès que l'extrémité de la petite branche aura été introduite dans l'ar- tère et les parois de celle-ci assujet- ties autour du tube à l'aide d'une ligature, le sang viendra se mêler à la solution alcaline et refoulera le mer- cure, qui s'élèvera d'autant plus dans la branche opposée du manomètre. Mais, en déterminant ce déplacement, le mélange de sang et de dissolution alcaline forme dans la petite branche de l'instrument une colonne de liquide de plus en plus considérable, dont le poids vient s'ajouter à l'effort exercé par le courant sanguin; la colonne mercurielle qui dans la grande bran- che de l'instrument s'élève au-dessus du niveau du métal dans la petite branche est donc tenue en équilibre par ces deux forces, et pour dégager l'effet dû à la pression circulatoire, il faut déduire du résultat total l'effet attribuable au poids de la colonne de liquide aqueux en question, poids qui est égal à celui d'une colonne de mer- cure, divisée par la différence qui existe entre la densité de ce mélange et la densité du métal, c'est-à-dire environ l/10^ Ainsi, dans le cas où le mélange sanguin occuperait dans la petite branche du manomètre une hauteur de 10 millimètres, son poids élèverait de 1 millimètre le mercure dans la branche opposée de l'instru- ment, et, pour opérer les corrections voulues, il faudrait déduire 1 milli- mètre de la hauteur observée dans le niveau de. cette colonne au-dessus de la surface du mercure dans la petite branche (a). Cet instrument présente quelques (a) Poiseuille, Recherches sur la force du cœur aortique, thèse, Paris, 1828, p. 23 etsuiv., c par extrait dans le Jomnal de physiologie de Magendie, l. VIII, p. 272. FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 107 Pour obtenir ainsi d'une manière exacte la mesure de la force d'impulsion que déploie le cœur, il faudrait adapter le mano' mètre à l'orifice même par lequel le sang s'échappe de cet organe ; car, à raison de l'extensibilité des artères, la pression exercée sur le liquide en mouvement s'affaiblit à mesure que' celui-ci s'avance dans le système vasculaire. Or, il serait très difficile d'opérer ainsi sans introduire une grande perturbation dans les mouvements du cœur, et l'on est en général obligé de se borner à prendre la pression du sang dans une des grosses artères voisines de cet organe, la carotide à la base du cou, par exemple, et par conséquent les résultats auxquels on arrive sont un peu au-dessous des valeurs cherchées. Des considé- rations dont j'aurai l'occasion de parler dans une prochaine Leçon avaient conduit M. Poiseuille à penser que cette diffé- rence n'existait pas; mais elle a été constatée par d'autres inconvénients auxquels les physiolo- gistes ont cherché à remédier de di- verses manières, et lorsque nous étu- dierons d'une manière spéciale les pliénomènes de la circulation dans les artères, j'aurai l'occasion d'y revenir ; mais je crois devoir ajouter ici que, pour éviter les oscillations de la co- lonne mercurielle dues à l'action de la pesanteur, quand la pression dé- veloppée par la contraction ventricu- laire cesse brusquement, Magendie a eu recours à ce petit appareil uiano- métrique fondé sur les mêmes prin- cipes, et dans lequel la branche ascen- dante , constituée par un tube très étroit, est séparée de la petite branche par un réservoir dont la largeur est assez grande pour que le niveau du mercure ne varie pas sensiblement quand la colonne manométrique s'é- lève ou descend (a). Cet hémomètre de Magendie, un peu perfectionné, est connu aujourd'hui sous le nom de cardiomètre. Il consiste en un flacon à deux tubulures, auquel est adapté, d'une part, un tube vertical d'une longueur considérable , et , d'autre part, un tube coudé dont la branche horizontale est garnie d'un ajutage propre à être introduit dans le vais- seau sanguin sur lequel on veut opérer et à y être fixé. Le fond du flacon est occupé par du mercure, et le tube vertical plonge dans ce bain par son extrémité inférieure. Enfin, le reste du flacon et le tube coudé qui s'élève de sa partie supérieure sont remplis d'une solution alcaline destinée , comme dans l'hémodynamomètre de (a) Ouetlcl, Mémoire sur les liémomètres {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1850, t. XXX, p. 64). Similitude Jcs résultats fournis 1 ar différents Animaux. 108 MÉCANISME DK LA ClllCULATION. expérimentateurs, et !a théorie montre qu'elle doit exister. Les évaluations données par ce physiologiste sont par conséquent un peu trop faibles, mais elles n'en sont pas moins comparatives entre elles, et l'erreur constante dont elles sont affectées est de peu d'importance. Les expériences de M. Poiseuille nous apprennent qu'il existe chez les divers individus d'une même espèce des variations très grandes dans le degré de pression exercé sur le sang artériel par les contractions du ventricule gauche; mais que, sous ce rapport, il n'y a que peu de différence entre les divers Mammi- fères dont il a pu faire usage dans ses recherches, et que la hauteur de la colonne manométrique à laquelle la force du cœur fait équilibre n'est point réglée par le volume de cet organe d'impulsion. Ainsi, ce physiologiste a vu le liquide lancé par les systoles M. Poiseuille, à empêcher la coagula- tion du sang. Quand l'instrument est mis en communication avec le sys- tème circulatoire, le sang, poussé dans la brandie horizontale du tube coudé, et de là dans le flacon faisant office de cuvette, presse sur le bain de mercure et fait monter ce liquide dans le tube vertical. Par conséquent, raclion exer- cée de la sorte se mesure directement par la hauteur de la colonne mercu- rielle, dans ce dernier tube, au-dessus du niveau du métal dans la cuvette. Afin de rendre ce petit manomètre d'un emploi comuiode, on donne à la cuvette certaines dispositions qu'il serait trop long de décrire ici, mais que M. Cl. Bernard a fait connaître avec tous les détails désirables (a). tiales faisait usage d'un tube de gros calibre long d'environ 3 mètres, qui était maintenu verticalement et mis en communication avec le système circulatoire par son extrémité infé- rieure , à l'aide d'un ajutage re- courbé (6). Le sani,' lancé par le cœur s'élève dans ce tube jusqu'à ce que la colonne ainsi formée fasse équilibre avec la force d'impulsion développée par le cœur ; et tout der- nièrement ce mode d'expérimentation a été préconisé par !VI. Colin (c). Dans certains cas, on peut elTectivement y avoir recours; mais la prompte coa- gulation du sang dans l'ajutage, et même dans tout l'appareil, en rend l'emploi impossible dans la plupart des recherches de ce genre. (a) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et la palholu'jie du sijstèine nerveux, 1858, l. 1, p. 279, fig. 41. (6) Haies, Héniastatique, p. i. (c) Colin, Pc la détermination expérimentale de la force du cœur. FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 109 veritriculaires s'élever à peu près à la même hauteur dans son hémodynamomètre, lorsqu'il soumettait à ses expériences des Chiens de taille très différente et dont le cœur pesait, chez l'un de ces Animaux, 83 grammes seulement, tandis que chez un second individu le poids de cet organe était de 120 grammes, et que chez un troisième il s'élevait à 200 grammes. Mais ce qui au premier abord pouvait surprendre davantage, c'est de trouver que la pression exercée par le cœur d'un Cheval, pesant 2 1 ou même 3 kilogrammes, ne tenait pas en équilibre une colonne liquide notablement plus haute que ne le fait parfois la force statique développée par les contractions du cœur d'un petit Chien. Des expériences du même genre, faites plus récemment par d'autres physiologistes, tendent à établir aussi que, sous ce rapport, il n'y a que peu de différence entre les divers Mammi- fères. Ainsi M. Volkmann a trouvé même que le cœur d'une Poule est susceptible d'élever la colonne manométrique à peu près aussi haut que le fait d'ordinaire le cœur d'un Cheval, dont le volume est cependant mille fois plus grand (1). (l)Dans les expériences de M. Poi- dans un second 122 millimètres, et seuille, les pressions observées ont dans nn troisième 110 millimètres varié entre 1Z|6 et 18'2 millimètres de seulement {h). mercm'e chez les Chevaux, et entre Enfin , dans une expérience de IZil et 179 millimètres chez les chiens. M. Spengler , elle s'est élevée à La différence, comme on le voit, est 318 (c). insignifiante (a). Pour le Chien, M. Volkmann a Dans les expériences de M. Volk- trouvé tantôt 172, 157 ou là'ô milli- mann, les variations individuelles ont mètres ; d'autres lois 10^ millimètres été plus considérables. seulement. Chez le Cheval, la pression obtenue Chez des Moutons, il a trouvé lan- a été, dans uu cas, de 21Z| millimètres; tôt 206 millimètres, tantôt 177 milli- (a) Poiseuillc, Henherches sur la force du cœur aortUiuc, p. H. (6) Volkmann, Die Hdmodynamik, p, 177. (c) Spengler, Ueber die SUirlie des arteriellen lilulstrnms (Miilici'.s Archiv fltv Anal, viid l'hjisiol., 184^, [1. 40). 1^0 MÉCANISME DE LA CIRCULATION, Chez les Vertébrés à sang froid, tels que les Grenouilles et nos Poissons d'eau douce, la force statique du cœur est moins considérable : ainsi, dans les expériences de M. Volkmann, les pressions observées chez ces Animaux ont varié entre 18 et 84 millimètres, tandis que chez les Mammifères et les Oiseaux elles se sont maintenues entre 88 et 21 li. Variations Du rcstc , ccttc gTando similitude dans la pression sous de la ^ force statique laqucllc le saug s'échappe du ventricule gauche du cœur chez du cœur. . ,, ^ les divers Mammiieres n imphque pas une egahte dans la puis- sance d'impulsion développée par cet organe chez ces Animaux si différents par la taille et le poids du corps. En effet, la quantité du Hquide à mettre en mouvement est très variable, et le volume du cœur est toujours dans un rapport assez direct avec la masse du sang contenu dans son intérieur et poussé avec une même vitesse dans les conduits irrigatoires. La force déployée par la pompe cardiaque, pour élever chaque molécule de sang à une même hauteur, sera proportionnée au nombre de ces molécules qui traversent à la fois l'ouverture d'écoule- ment, et par conséquent elle se représente par la hauteur de la mètres, et d'autres fois 98 millimètres On voit que les variations indivi- seulement. duelles sont trop grandes pour que, Les pressions observées par le même dans l'état actuel de la science, on expérimentateur ont été, cliez des puisse ritn établir relativement à la Veaux , de 177, 153 et 133 milli- pression moyenne chez les diverses mètres. espèces. Chez un Coq, 171 millimètres, et Mais , ainsi que nous le verrons chez un Porc 88 millimètres ; chez bientôt, les résultats obtenus dans les une Cigogne, 161 millimètres. expériences dont il vient d'être ques- Chez un Pigeon, de 157 millimètres. tion n'étaient pas dus à l'action du Chez un Lapin, il n'a observé cœur seulement , et la pression exer- qu'une pression de 90 millimètres; cée par le thorax au moment des mais M. Blake a trouvé 108 milli- mouvements d'expiration y contri- mètres (a). huait souvent beaucoup. (a) Voyez VoUtmann, Die Mmodynamik, p. 178. FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 111 colonne manométrique multipliée par l'aire de la base du cy- lindre liquide qui sort du ventricule gauche, c'est-à-dire l'aire de l'orifice aortique. Or la grandeur de cette ouverture est en rapport avec le volume du cœur, et M. Poiseuille, en calculant d'après ces données, évalue à un peu plus de 5 kilogrammes la force statique du cœur aortique de l'un des Chevaux soumis à ses expériences, tandis qu'en supposant la pression indiquée par le manomètre non moins considérable chez l'Homme, il trouve que la même force n'équivaudrait qu'à environ 2 kilogrammes (1). § 20. — Si, au heu de considérer les résultats absolus produits par le jeu de la pompe circulatoire, on examine d'une manière comparative la force développée par cet organe et les résistances qu'il est appelé à vaincre pour maintenir le cours du sang dans le système vasculaire, on voit qu'il existe entre les divers Mammifères des différences considérables. Ainsi, chez le Lapin, l'effet utile des contractions du ventricule gauche ne dépasse que de très peu les résistances qui s'opposent au mouvement circulatoire, tandis que chez le Cheval l'excédant de force développée par cet organe d'impulsion est très consi- dérable. 11 me paraît probable que des recherches ultérieures (1) M. Poiseuille évalue le diamètre le cœur se contracte, l/i5 325 milli- de l'aorte au niveau des valvules sig- mètres cubes de mercure, ou, en moïdes , chez un Homme adulte, à d'autres mots, un poids de l\ livres ùk millimètres, ce qui suppose que 3 gros /j3 grains, c'est-à-dire l''"', 981. l'aire de lorifice est d'environ 908mil- Le même calcul, appliqué à un autre limètres carrés. En admettant que la individu dont le diamètre de l'orifice pression manométrique serait égale à aortique était de 35 millimètres, donne la moyenne fournie par les extrêmes 1'^'', 858, en supposante pression indi- observées dans les expériences sur les quée parle manomètre égale à l/iO mil- deux espèces de Mammifères men- limètres, c'est-à-dire au minimum lionnées ci-dessus, on aurait coninie moyen observé dans les expériences évaluation de la force statique totale précédentes (a). du sang dans l'aorte, au moment où (a) Poiseuille, Heckerchen sur la force du cœur aortique, p. 44. 112 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dévoileront quelques relations intéressantes à connaître entre la puissance cardiaque et la grandeur des forces locomotrices ; mais, dans l'état actuel de la science, on ne peut rien affirmer à cet égard, et, par conséquent, je ne m'y arrêterai pas (1). (1) Je citerai, à ce sujet, quelques expériences intéressantes de M. Claude Bernard, mais je ne saurais admettre la distinction fondamentale que ce physiologiste habile a cru devoir éta- blir entre ce qu'il nomme la pression artérielle et la pression cardiaque. M. Bernard fait remarquer avec rai- son que lorsqu'on introduit le mano- mètre directement dans le ventricule du cœur, on obtient la mesure de l'impulsion déterminée par la con- traction de ce réservoir, et du moment que cette contraction cesse, la colonne manométrique retombe à son niveau primitif; tandis qu'en plaçant l'instru- ment dans une artère plus ou moins éloignée du cœur, les effets sont plus complexes, et pendant la diastole du cœur, comme on le sait, la colonne manométrique se maintient à une cer- taine hauteur, au-dessus de laquelle elle s'élève momentanément à chaque coup de piston de la pompe car- diaque. Or, c'est la pression dont dépend celte élévation constante que M. Bernard appelle la pression arté- rielle, et il considère la pression car- diaque comme venant seulement s'y ajouter pour produire l'oscillation dont je viens de parler (o). Mais, ainsi que nous le verrons dans une pro- chaine Leçon, celte pression constante, de même que la pression intermit- tente, est une conséquence de la con- traction du ventricule gauche du cœur ; elle est produite par la trans- (a) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et p. 277. formation d'une portion de celte force qui, au lieu de déplacer direc- tement la totalité de la colonne liquide contenue dans le système vasculaire, dilate les parois artérielles, et s'uti- lise ensuite pendant la durée du repos du ventricule. C'est donc en réalité le résultat de la relation qui existe entre la puissance cardiaque, la résistance que le système capillaire et les autres parties du cercle vasculaire opposent au déplacement du sang, et le degré d'extensibilité des parois artérielles. La hauteur à laquelle la colonne ma- nométrique se maintient pendant la diastole du cœur, quand l'instrument est introduit dans une artère, corres- pond donc à celle portion de la force cardiaque qui n'est pas employée directement à pousser le sang dans les capillaires, et qui, à raison des obstacles qui s'opposent à ce mou- vement, se reporte sur les parois ar- térielles pour les distendre et remon- ter l'espèce de ressort constitué par leurs tuniques élastiques. Or, on voit, par les expériences de M. Bernard, que la quantité de force employée de la sorte est à peu près la même chez les divers Mammifères , mais que l'autre portion de la force cardiaque, c'est-à-dire celle qui déplace directe- ment la colonne sanguine et déter- mine dans les artères voisines du cœur un jet intermittent, est au con- traire très variable suivant les espèces. Ainsi, dans une de ses expériences, la pathologie du système nervetiœ, 4858, t, I, FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 113 ^ 21 . — Il existe , comme je l'ai déjà dit , des variations influence '' de la taille considérables dans la force du creur chez le même individu ou eidci-â-e ^ , , sur la puissance chez les divers individus d'une même espèce, et l'étude des cardiaque. circonstances qui déterminent ces différences est d'un grand intérêt; mais ici encore nos connaissances sont très incom- plètes. Nous avons vu qu'on n'observe aucun rapport constant entre le volume du corps et le degré de développement de la force du cœur ; cependant je suis porté à croire que les variations de la taille sont au nombre des circonstances qui influent sur ce [)héno- mène, et que, toutes choses étant égales d'ailleurs, pour une même espèce, la colonne manométrique doit s'élever davan- tage chez les grands individus que chez les petits (1). Les recherches de M. Volkmann ont conduit cet auteur à penser qu'en général la pression de la pompe cardiaque est plus la portion de la force ventriculaive employée à produire la pression con- stante correspondait, chez le Lapin, à 95 degrés du cardiomètre, et la por- tion complémenlaire de cette môme force qni opérait directement le dé- placement de la colonne sanguine au moment de la systole n'était reprc- senlée que par 5, tandis que cliez le Cheval, où la pression constante était aussi d'environ 95, la pression com- plémentaire intefmitlente était égale à environ 80 (a). M. Bernard a été même conduit à penser que cet excé- dant de la force ventriculaire (excédant auquel il réserve le nom de force car- diaque) est d'autant plus considérable que l'Animal est plus grand (h). (1; Ainsi, dans les six expériences faites sur des Chiens par M. Poiseuille, je vois que chez les trois individus les plus petits la pression était, terme moyen, de 155 millimètres, tandis que chiz les trois individus les pins gros elle s'est élevée , en moyenne , à 165 millimètres. Chez les deux indi- vidus dont le poids était au-dessous de 15 kilogrammes, la moyenne élait de 153 ; chez les trois individus dont le poids variait entre 15 et 'il kilo- grammes, cette moyenne s'est élevée à 157, et chez l'individu dont le poids dépassait AO kilogrammes, elle était de 179. Enfin, il est aussi à remarquer que la pression la plus faible (1/|1 millimè- tres) était donnée par l'individu le plus peli t, et la pression la pi us forte 1 179 mil. limètrcs) par l'individu le plus grand (c). (a) Bernard, Op. cit., p. 286. (b) Idem, ibid., t. 1, p. 280. (c) Poiseuille, fiecherclies nir la forcf du cmir nortiqne, p. M. lY. 114 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. grande chez les individus de moyen Age que chez les individus jeunes ou très vieux ; mais il n'a pas donné tous les renseigne- ments nécessaires pour nous permettre d'apprécier la valeur de cette opinion qui, du reste, est probablement fondée (1). Influence § 22. — La prcssïon exercée sur le sang du système de la quanlilé , ' • i i , • i -i i n fie sang artericI par les contractions du ca^ur est susceptible de varier "cardiaque."''^ aussi SOUS l'influencc de diverses causes dont l'action est transitoire. Ainsi une de ces conditions de puissance musculaire dans le cœur comme dans les autres parties de l'organisme, est évi- demment l'abondance du sang en circulation dans l'économie. Pour s'en convaincre, il suffit de comparer la pression exercée sur la colonne manométrique par le liquide qui s'échappe du ventricule gauche chez un Animal auquel on praticjue une série de saignées jusqu'à le faire périr d'hémorrhagie. Haies a réalisé cette expérience sur un Cheval, et il a vu la pression produite par les contractions du cœur diminuer rapidement à mesure que l'Animal perdait son sang, mais rester encore assez grande jusqu'au moment où la mort est survenue (2). (i) M. Voîkmann présente ce résul- (2) Pour constater les eflets des tat sous la forme de proposilion (a) ; émissions sanguines, Haies ajusta, mais je n'ai trouvé dans son ouvrage comme d'ordinaire , dans l'artère qu'une seule expérience où l'influence carotide d'un Cheval, son tube mano- dc l'àgc ail pu être appréciée : c'est métrique, et interrompit de temps en celle qui porte sur un jeune Chien, temps l'expérience pour laisser sortir et qui donna pour la pression caroti- du vaisseau une certaine quantité de dienne seulement lOZi millimètres, sang. Audébut,Ie liquides'éievaitdans tandis que dans les autres expériences le tube à 9 pieds 6 pouces ; mais après faites par ce physiologiste sur des la soustraction d'environ 60 pouces Animaux de la même espèce, et pro- cubes de sang, le liquide ne monta bablemenl adultes, la colonne mano- que de 7 pieds 10 pouces; puis, après métrique s'est élevée au moins à 123 chacune des saignées suivantes, le et a atteint même 157 (h). manomètre accusa des pressions de (a) Volkniann, Die Hdmodynamik, p. 178. (fc) Idom, Md., p. 417 et i78. FORCE MOTRICE DÉPLOYÉE PAR LE COEUR. 115 Lorsqu'au lieu de diminuer considérablement la quantité de sang en circulation dans l'organisme, on appauvrit ce liquide en injeciant de Teau dans les veines, on produit sur le cœur un effet analogue : la colonne manométrique faisant équilibre à la force développée par la contraction du ventricule gauche baisse beaucoup ; mais si l'on substitue à ce liquide certaines Influence de la richesse du sang. 7,6, de 7,3, de 6,5, de Zi,9, de 3,9, et ainsi de suite, avec quelques petites irrégularités, jusqu'à ce que la pres- sion développée par la contraction du cœur ne déterminât plus qu'une ascension de 2 pieds, et alors l'Ani- mal ne tarda pas à mourir (a). M. Colin vient de soumettre au jugement de l'Académie des recher- clies analogues. Le tableau suivant contient les résultats d'une des expé- riences de ce jeune physiologiste, et montre avec quelle réguliulté la pres- sion développée dans les artères par la contraction du cœur s'aiï'aiblit à me- sure que la masse du sang dimi- nue. Le sujet était un Cheval très vigoureux. NUMÉROS QUANTITÉS HAUTEUR DU SANG TOTALES DANS LE DES SAIGNÉES. DU SANG PERDU. TUBE MANOMÉTRIQUE. Grammes. Meties. 1 0 2,270 2 2 2,140 3 4 2,095 i 6 2,020 5 8 1,850 6 10 1,845 T 12 1,420 8 14 0,970 9 10 0,770 10 n 0,700 dl 18 0,800 12 19 0,725 13 20 0,660 U 21 0,540 15 22 0,525 16 23 0,515 17 24 0,430 18 25 0,420 Enfin M. Colin a trouvé que la mort arrive dès que la pression déve- loppée de la sorte est réduite à peu près au cinquième de normale (b\ a pression (a) Halos, llémaslatique, p. 18. — Les expériences n°" 1 et 2 Jonnùrcnt dos i(,'sullals analogues (Op. cit., p. 5, 13,1. (b) Colin, De la détermination expérimentale de la force du cœur (M>ini. mannscril). 116 MÉCANISME DE LA CIRCULATION substances excitantes, une décoction de café, par exemple, on obtient un résultat contraire, et l'on voit la pression cardiaque s'élever d'une manière remarquable (1). Rapport Enfin il paraît y avoir des rapports intimes entre l'état des entre l'état p ''iid' -.i i i des torces générales de 1 économie et la grandeur des pressions eurputsTancr dévcloppécs daus le système circulatoire par les battements du cardiaque, ^^^^j^, Effectivemcnt, M. Colin, chef des travaux anatomiques à l'école vétérinaire d'Alfort, vient de faire une série d'expériences comparatives sur des Chevaux, dont les uns étaient jeunes et vigoureux, les autres plus ou moins affaibhs par l'âge, les fatigues ou les privations ; et il a vu que le sang s'élevait tou- jours d'autant plus haut dans l'hémodynamomètre, que l'Animal était plus fort (2). Défaut II est aussi à noter que les battements du cœur qui se succè- "* ''dansTer""" ^^leut n'out pas tous la même intensité, et que les variations dans la force développée de la sorte sans qu'il se soit produit aucun changement notable dans l'économie peuvent être même assez considérables ; mais les oscillations de ce genre n'ont que peu d'importance, car d'ordinaire elles n'influent pas notable- (1) Dans une expérience faite sur monter le mercure à 90 et même à un Chien par Magendie, la colonne 105 millimètres (6). mcrcurielle de l'hémodynamomètre en (2) Voici les résultats consignés communication avec Tarière carotide dans le Mémoire de M. Colin : battements du cœur. fort 2,27 de moyenne énergie. . 2,02 vieux 1 ,01 très maigre 1,85 oscilla entre 80 et 105 millimètres ; mais après qu'une quantité un peu con- Un Cheval irè? vigoureux .... 2,70 sidérable d'eau tiède eut été injectée dans les veines de l'Animal, elle ne se tint qu'entre cOet 60 millimètres (a). On injecta ensuite dans la veine jugu- _ presque usé 1,78 laire une petite quantité de café, et _ 1,70 presque aussitôt après on vit, non- _ — i,62 seulement le pouls devenir plus fré- — extrêmement faible. . l,oo(c). quent, mais la pression cardiaque faire (n) Magendie, Leçons sur les phénomènes pliysiqiies de la vie, 1837, t. III, p. 51. (b) Idem, ibid., p. 53. (c) Colin, De la détermination expérimentale de la force du cœur. FORCt: JIOTRICE DKl'LOVÉE PAU Lli COFJjn. il/ ineiit sur la pression iiioyenne résultante d'une dizaine de pulsations (1). Dans la prochaine Leçon, lorsque nous étudierons l'influence que le système nerveux exerce sur les mouvements du cœur, nous verrons que la grandeur de la force motrice développée par les contractions de cet organe est soumise à d'autres causes de variations. En ce moment, je ne m'arrêterai pas davantage sur ce sujet , et je me bornerai à ajouter quelques mots relatifs à l'action de la pompe veineuse , car, dans tout ce qui précède, il n'a été question que du ventricule aortique. § 5:3. — On ne possède encore que peu de données sur cette Puissance partie de l'histoire du mécanisme de la circulation, mais je suis parïSric'ui porté à croire que la force développée par la contraction du ven- '^""'' tricule droit du cœur, et employée pour faire circuler le sang dans les vaisseaux pulmonaires, est moins considérable que celle produite par le ventricule gauche. Effectivement M. Hering a constaté cette inégalité en plaçant des tubes verticaux dans ces (1) Ces variations successives dans taieiil pas toujours la coloiiuc à la la force des contractions du cœur même liautcur, et les résultats obte- contribuent à rendre le ponts inégal ; nus lurent : mais, ainsi que nous le verrons bien- y,^,,^ ,,, i-pulsaiion, une p.-essiun de 60 lot, elles ne sont pas la seule cause de pour la 2» — — su l'irrégularité des battements artériels. Pour la 3' — — 40 Quoi qu'il en soit, le fait dont il est ici Pom- la 4* — — 05 question a éié mis très bien en évi- dence par fine des expériences de M. Cl. Bernard. Ce physiologiste, ayant introduit l'ajutage de son cardiomètre par la veine jugulaire jusque dans le ventricule droit du cœur, vit la colonne peu, h n _ ~ 65 mercurieile s'élever à chaque systole, Pom- la 12» — _ es et redescendre à zéro pendant la du- p^^, i^ 13. _ _ 70 rée de chaque diastole venlriculaire ; p^ur la ti Pour lit 5° — — 60 Pour la 6" — — 40 Pour la 7° — — 60 Pour la 8" — — 45 Pour la 9' — — 55 Pour la 10' — - 60 60 mais les battements successifs ne por- pour la t5« — — (iO{a}. (a) Cl. rSrr.ianJ, Leron» sur la p!i.iisiolo(jie et la pallioloijie du sysièiiie nerveux, 1858, I. I, p. 278. 118 MÉCANISME DE L4 CIKCULÂTION , deux réservoirs, chez un Veau monstrueux dont le cœur était hors de la poitrine : le sang lancé par le ventricule droit ne s'éleva qu'à environ les deux tiers de la hauteur qu'atteignait celui fourni par le ventricule gauche (1). Quelques expériences ^ (1) Le maximum de l'élévalion du sang observé dans le tube adapté au ventricule droit était de 21 ponces de Wurtemberg, et dans le tube en con- nexion avec le ventricule gauche il était de 3'> pouces. Les minima correspon- dants étaient 18 et 27. Il en résulte que la pression exercée par le ventricule droit étant représentée par 1, celle développée par le ventricule gauche était de 1,7. Du reste, il est à noter que chez cet Animal la force déployée de la sorte était très faible , ce qui dé- pendait probablement du vice de con- formation dont il était affecté [a). rour évaluer la force relative des deux ventricules , M. Valentin admet que ces forces sont proportionnelles au poids du tissu musculaire dont se compose chacun de ces réservoirs cou- tracliles ; et, pour déterminer ce poids, il pi''se séparément la portion libre des parois de chaque cavité ; quant à la cloison interventriculaire , il sup- pose qu'elle appartient également aux deux ventricules, et il attribue la moitié de son poids à chacun de ceux-ci. En procédant de la sorte, il trouve que le ventricule gauche pèse presque deux fois autant que le ventricule droit, et par conséquent il admet qu'il doit posséder deux fois autant de tissu musculaire que celui-ci. Or, la capa- cité des deux ventricules étant sup- posée égale, et la urandeur des orifices efférents la même, il en résulterait que la colonne manométrique tenue en équilibre par le ventricule droit n'aurait que la moitié de la hauteur de celle élevée par l'action du ventri- cule g.niche (6). Ce raisonnement a été l'objet de critiques très fondées de la part de M. Ludwig. D'abord, pour évaluer la force des muscles d'après leur poids, faut-il les considérer à l'état sec ou à l'état humide , et ensuite le poids du ventricule gauche est-il bien le double seulement de celui du ventricule droit ? M. Ludwig a fait à ce sujet plusieurs expériencesdont les résultats indiquent des variations assez grandes , et il fait remarquer avec raison que l'ac» tion de la cloison interventriculaire ne saurait être considérée comme étant également utile au travail méca- nique des deux réservoirs. J'ajouterai même que, d'après la forme des ven- tricules, il me paraît évident que son influence doit être presque nulle dans la systole du ventricule droit, ou doit même tendre à diminuer l'eflet utile de la contraction de la portion libre des parois de celui-ci, car elle fait sail- lie dans son intérieur, et, en se con- tractant, elle ne doit diminuer que la capacité de la cavité située du côté de sa surface concave, c'est-à-dire le ventricule gauche. 11 en résulte donc qu'en adoptant même l'hypothèse fon- (a) Hering', Versuche die Di'uckkrcift des Herzetis sM bestimmen (Viernrdl's Archiv fiir phijsio- lofj'sche Heilkiinde, 1850, t. IX, p. 13 etsiiiv.). (6) Valenlin, Lehrbiwh der Physiologie des Menschen, t. I, p. Hi, édit. de 1847. FORCE MOTiUCE DÉl'LUYÉE PAR LE UOEUR. 119 faites récemment par mon savant collègue M. Claude Bernard sont, il est vrai, défavorables à l'opinion que je viens d'émettre, mais elles ne me paraissent pas avoir la même signification qu'au premier abord on serait disposé à leur attribuer (1). En résumé , nous voyons donc que la puissance motrice engendrée par les contractions des deux ventricules du cœur est en réalité très considérable, et que les jets de sang lancés dans le système irrigatoire par ces pompes foulantes sont grands aussi bien que fréquents. damentale du raisonnement de M. Va- lentin, on serait conduit à évaluer la force relative du ventricule droit beau- coup moins haut que ne le fait ce physiologiste. Mais l«s données sur lesquelles reposent des calculs de ce genre sont trop incertaines pour qu'on puisse tirer de ceux-ci aucun résultat digne de confiance (a) . (1) M. Cl. Bernard, en introduisant son cardiomèlre p;ii- la veine jugulaire jusque dans le ventricule droit du cœur d'un Chien, a vu la colonne manométrique s'élever plus haut que dans les expériences où il faisait com- muniquer cet instrument avec l'une des grosses artères qui proviennent du ventricule gauche. Mais, ainsi que ce physiologiste le fait remarquer avec raison, on ne saurait en conclure que la pression déployée par le ventricule droit est supérieure à celle exercée par le ventricule gauche ; car, dans les expériences faites sur les artères, la totalité de celle-ci n'agit pas sur le cardioraètre, et ainsi que nous le ver- rons bientôt, une portion est trans- mise aux parois des artères (6). (a) Ludwig , Einige Bemerkuncjen zu ValeiUin's Lehren voiii Alhmeii, und vom Dhitkrelslauf (Zeitschrift fur rationnelle Medizin, 1845, t. III, p. 153 et suiv.). (b) Cl. Bernard, Op. cit., t. I, p. 378. TRENTE -TROISIEME LEÇON. Des causes de la contraction du cœur, et de l'influence du système nerveux sur les mouvements de cet organe. Notions § ^' — ^^^ recherches nombreuses dont j'ai rendu compte préiiminairos. ^|gj-jg jgg ^^.^^ dcmières Leçons nous ont fait connaître le jeu de la pompe irrigatoire constituée par le cœur; mais les physiolo- gistes n'ont pu se contenter de ce premier résultat, et ils ont été naturellement conduits à se demander quelle peut être la cause des mouvements de cet organe. Pour aborder cette question, il est nécessaire d'anticiper un peu sur les matières qui feront le sujet d'une autre partie de ce cours. Lorsque nous étudierons d'une manière spéciale le mode de production des mouvements dans l'économie animale, nous verrons que toute fibre musculaire jouit de la faculté de se raccourcir brusquement lorsqu'elle y est sollicitée par l'action de certains agents que l'on appelle des stimulants. On donne le nom de contractilité à cette puissance motrice, et celui d'^V^^- tabililé iih propriété en vertu de laquelle la contractilité s'exerce sous l'influence des impressions que produisent les stimulants. Afin de procéder méthodiquement dans nos investigahons, il sera donc bon d'examiner quelles sont les causes détermi- nantes des mouvements du cœur, et quelle est la source de l'irritabilité dont cet organe est doué. Les Chacun sait que les muscles de nos membres sont mis en jeu ""Tu cœuT V^^^ l'influence de notre volonté, et que cette influence s'exerce invoioTiLies. P^i' l'intermédiaire du cerveau et des nerfs qui se rendent à ces organes. Mais nous suivons aussi que notre volonlé ne peut rien sur les mouvements du cœur; elle ne saurait ni les arrêter, ni CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUH, l'il les pi'ovoquer, ni même en accélérer ou en retarder le retour. Les batteuients du cœur sont donc des mouve- ments involontaires , et ils doivent dépendre de quelque autre force. Les expériences des physiologistes nous apprennent aussi que Action l'irritabilité musculaire n'est pas mise en jeu uniquement par excitateurs. la puissance nerveuse , et qu'elle obéit à d'autres mobiles. Ainsi la contraction des muscles de nos membres peut être déterminée par l'action de l'électricité ou de la chaleur, par le contact d'un grand nombre de substances dites stimulantes, ou même par une excitation mécanique. Or, si l'on ouvre la poitrine d'un Animal vivant, et si l'on agit de la même manière sur le cœur, on y produit les mêmes effets : vient-on à exciter méca- niquement le tissu charnu de cet organe avec la pointe d'un scalpel, on le voit se contracter comme tout autre muscle se contracterait en pareille circonstance (l), et le même phéno- mène se produit lorsque, au lieu de l'irriter mécaniquement, on en provoque l'action au moyen de l'électricité (2) ou à l'aide de quelque stimulant chimique : par exemple , en y (1) Sténon, célèbre anatomisle da- sujet par les devanciers de ce physio- nois du milieu du xvii° siècle, fut, je logiste (c). crois, le premier à faire des expé- ('2) Galvani, le célèbre auteur de la riences sur le rétablissement des mou- découverte des effets physiologiques vements du cœur par l'action des ex- du courant électrique, n'a pas vu le citations mécaniques (a). Mais ce sont cœur se contracter sous l'influence de surtout les travaux de Haller et de cet agent, et plusieurs autres physi- Zimmermann auxquels je renverrai clens étant arrivés également à des pour des exemples de faits de cet résultats négatifs dans des expériences ordre ;6). On trouve dans le grand du même genre, on pensa d'abord ouvrage de Haller l'indication des que cet organe , de même que les principales observations faites à ce autres muscles dont l'action n'est pas (a) Slônoii, Ex variovum Animalium sectionibus hinc inde factis super motuni cordis miri- culorum et venœ cavœ (Mém. de Copenhague, I. Il, obs. 40). (t) Haller, Mé'm. sur les parties sensibles et irritables du corps animal, I. I, p. 344 et suiv. — Zimmurrnann, Expériences (Haller, Op- cit., t. II, |i. 35 et suiv.J. (c) Haller, Elementa pliysialogiœ, l. I, \>. 407. 122 MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. appliquant de l'eau chaude (1) ou en l'exposant à l'action de l'air (2). On reconnaît aussi, à l'aide de ces expériences, que l'irrita- bilité est beaucoup plus développée à la face interne des cavités soumise à la volonté, différait, sous a publié à ce sujet des observations ce rapport, des muscles de l'appa- intéressantes faites sur le cœur de reil locomoteur, et était insensiiîle à l'embryon du Poulet (e), et je citerai ce stimulant (a) ; mais le fait de l'ex- également les expériences de M. We- citabilité des mouvements du cœur ber, relatives à l'influence de la tem- par le galvanisme fut bientôt constaté pérature sur la fréquence des batte- par une commission de l'Académie de ments du cœur de la Grenouille, après Turin, composée de Vassali, Giulio et l'extirpation de cet organe {f). Tout Rossi (6). Des expériences plus nom- récemment M. Galliburcès a publié des breuses faites peu de temps après par faits du même ordre (g). Schmuck , Fowler , M. de Humboldt, (2) L'action excitante de l'air sur le Nysten et quelques autres physiciens, cœur a été constituée par les expé- donnèrent le même résultat (c). riences de Wepfer {h) et de plusieurs (1) Les expériences de Woodward, autres physiologistes des xvii° et de Senac et de plusieurs autres phy- xviii'^ siècles (i), mais a été mise siologistes (rf), montrent que le con- encore mieux en lumière par les tact de corps chauds excite énergique- recherches de Haller (j) et de Zim- ment les contractions du cœur. Ilaller mermann (/<;). (a) Voyez Sue, Histoire du galvanisme, t. III, p. 22:2. • — Valli, Lettre {Journal depliysique, t. XLI, p. 185). — Aldini, Essai théorique et expérimental sur le galvanisme, 1804, p. 63, 77, 9i, etc. — Bichat, Recherches sur la vie et la mort, p. 489 (édit. de Mag'endie, 1822). (b) Vassali-Eandi, Giulio et Rossi, Rapport sur des expériences galvaniques (Gommentarii biographici, 1792, et Bibliothèque britannique, sciences et arts, 1802, t. XXI, p. 92). — De excilabilitate contractionum in partibus musculosis involuiitariis ope animalis electricitatis (Mém. de l'Acad. de Turin, 1792 à 1800, t. VI, p. 40 et suiv.). (c) Fowler, Experiments and Observations relative to the Influence lately discovered by M. Gal- vani, 1793. — Humboldt , Expériences sur le galvanisme, Irad. par Jadelot, 1799, p. 342. — Nysten, De l'état des propriétés vitales après la mort {Recherches de physiologie et de chimie pathologiques, 1811, p. 300 et suiv.). (d) Woodward, Géographie physique, trad. par Noguiez, p. 193 et suiv. — Senac, Traité de la structure du cœur, t. I, p. 322, 328, etc. — Haller, Mém. sur la nature sensible et irritable des parties du corps animal, t. I, p. 73. — Caldani, Lettre à Haller {loc. cit., t. III, p. 127). (e) Haller, Stir la formation du cœur du Poulet, ^' mém., p. 113. if) Weber, Muskelbewegung (Wag-ner's Handvjôrterbuch der Physiologie, tome III, 2' partie, p. 35). {g) Voyez ci-dessus, p. 78. {h) Wepfer, Cicutce aquaticœ historia, p. 29, etc. (i) Voyez Haller, Elem. physiol., t. I, p. 468. (;■) Haller, Mém. sur les parties sensibles et irritables du corps animal, t. 1, p. 174, 348, 352, etc. (k) Zimmermann, De irritabilitate (Haller, Mém. sur les parties sensibles, etc., t. II, p. 37 et suiv.). CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUK. 123 du cœur qu'à la surface de cet organe (1). Ainsi, dans diverses expériences , quelques bulles d'air ou quelques gouttes d'un liquide irritant introduites dans ces cavités ont rétabli les mou- venfients, lorsque ceux-ci paraissaient avoir complètement cessé et que la surface externe du cœur était devenue indifférente à l'action des stimulants (2). § 2. — Les recherches de Haller tendent à prouver que l'agent dont l'influence détermine dans l'état normal de l'économie les Action ilu sang. ( I ) Cette observation a été faite par Haller et plusieurs autres physio- logistes (a). >\!. Vircliow a trouvé ce- pendant que chez le Chien l'endo- carde est peu sensible au contact des corps étrangers, tels qu'une sonde (6). (2) L'action stiiiuilaiite de l'air sur le cœur se manifeste parfois d'une manière très remarquable. Ainsi il arrive souvent que chez des Animaux morts en apparence, et dont le cœur a cessé de se contracter depuis très longtemps, on voit cet organe recom- mencer à battre lorsqu'on ouvrant le thorax et le péricarde, on l'expose au contact de ce fluide. M. Valentin a souvent observé ce phénomène chez les Grenouilles. On cite plusieurs casd'autopsies dans lesquels l'ouverture du thorax et l'in- troduction de l'air dans le péricarde ou même dans l'intérieur du cœur déter- minèrent des battements de cet organe chez l'Homme fort longtemps après la cessationdetoutsignede vie. Senaca vu ainsi les mouvements du cœur rétablis dans un cadavre par l'effet de l'insuf- flalion de l'air par le canal thoracique, chez un Homme mort depuis douze heures (c), et Hunaud, l'un des an- ciens professeurs au Jardin des plantes à Paris , fut témoin d'un fait ana- logue {d). L'action stimulante de l'air sur le cœur a été également mise en évi- dence par des expériences de M. Tie- demann, dans lesquelles ce physiolo- giste a étudié ce qui se passe lorsqu'on place dans le vide le cœur d'une Gre- nouille excisé et encore palpitant. Aus- sitôt que la raréfaction de l'air atteint un certain degré, les mouvements du cœur s'affaiblissent, et dans l'espace d'environ une demi-minute , ils s'ar- rêtent tout à fait quand le vide est presque complet; mais ils se déclarent de nouveau lorsqu'on fait rentrer l'air dans le récipient. Dans une des expé- riences de M. Tiedemann , ces alter- natives d'activité et de repos, suivant que le cœur a été exposé au contact de l'air ou soustrait à l'action de ce fluide, ont été constatées dix fois de suite. Un résultat analogue avait été ob- tenu précédemment par Fontana ; et si: Caldani,dansdes expériences du même genre, n'a vu les battements cesser (a) Haller, Elementa physiol., 1. 1, p. 400. (6) Viicliow, Gesammelte Abhandlujifjen, [i. 723. (c) Senac, Traité du cœur, t. I, p. 420. id) Haller, Méni. sur la nature sensible et irrltaOte des jiarlies, i. I, p. 74. î^-4 .MÉCANISME DK L\ CIRCL'LATluN. coniractions du cœur, est un stimubint local du même ordre, et consiste dans le sang qui, à chaque mouvement de diastole, afflue dans les cavités dont cet organe est creusé (1). En effet, lorsque le cœur est vide et ne reçoit plus de sang dans son intérieur, il cesse de battre, à moins qu'il ne soit excité par quelque autre stimulant; et si l'on dispose l'expérience de telle sorte que l'un des réservoirs cardiaques reste privé de sang, tandis que l'autre en contiendra, ce dernier continuera à battre, tandis que le premier restera en repos. Ainsi , dans une des expériences de Haller, la veine cave et l'artère branchiale furent liées chez une Anguille ; l'oreillette, en se contractant, se vida dans le ventricule, mais, ne recevant plus de sang, cessa de battre; tandis que le ventricule, au contraire, ne pou- vant chasser dans l'artère branchiale tout le sang qu'il conte- nait, continua à se contracter et à se relâcher alternativement, et l'on vit le liquide, ballotté par ces mouvements, monter et qu'au bout d'un quart d'heure, cela de- pourvu qu'il y ait encore du sang vaitteniràrimperfeclion de la machine dans ses vaisseaux; mais qu'il ne pneumatique dont il faisait usage (a). reprend pas ses mouvements s'il est M. Tiedemann a constaté aussi que devenu exsangue (c). l'action stimulante de l'air augmente (1) Le rôle du sang comme excitant lorsque la densité de ce fluide se des mouvements du cœur avait été trouve accrue. Il a obtenu les mêmes entrevu par plusieurs physiologistes résultats en répétant ces expériences du xvii' siècle , et notamment par sur le cœur du Triton (6). Bartholin , Lancisi et Fantoni {d) ; M. Schiff a trouvé que le cœur de mais c'est à Haller que l'on doit la la Grenouille , après avoir cessé de connaissance de la plupart des faits battre dans le vide, recommence à se les plus propres à établir la proposi- contracter quand on l'expose à l'air, tion énoncée ci-dessus (e). (a) Caldani, Leltre à Haller [Mémoires sur les parties sensibles et irritables du corps animal, par Haller, 1. 111, p. 135). • — Fontana, Dissertation épistolaire (Haller, Op. cit., t. III, p. 217). (b) Tiedemann, Versuche uber die Bervegung des Herzens unter dem Recipimten der Luftpumpe (Mùller's Archiv fiïr Anal, und PhysioL, 1847, p. 490). (c) Schiff, Der Modus der Herzbewegtmy [Arch. fur physiol. Heilk., t. IX). (d) Voyez Senac, Traité de la structure du cœur, t. 11, p. 015 (2" cdit., 1777). (e) Haller, Mém. sur la nature sensible et irritable des diverses parties du corps animal, t, I, p. 370. CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUR. 135 descendre dans son intérieur. La ligalure placée à l'entrée de l'oreillette fut alors enlevée de façon à permettre au sang d'affluer de nouveau dans ce réservoir, et aussitôt celui-ci recommença à battre. Je citerai également une autre expérience du même physio- logiste. Lorsque l'action du cœur s'affaiblit et tend à s'éteindre, le mouvement ne s'arrête pas en même temps dans toutes les parties de cet organe, et la cessation des battements se produit toujours dans le même ordre. C'est l'oreillette droite qui con- serve son activité le plus longtemps, et le ventricule gauche s'arrête avant son congénère. L'observation nous apprend aussi que, dans les cas où la circulation devient languissante, le sang cesse d'arriver dans le ventricule gauche avant que son afflux dans le ventricule droit se soit arrêté. 11 y a donc là une coïn- cidence remarquable entre l'ordre suivant lequel ces deux ca- vités cessent de battre et cessent de recevoir du sang dans leur intérieur; mais une simple coïncidence n'entraîne aucune relation nécessaire de cause et d'effets, et pour tirer de celte circonstance des lumières utiles, il faudrait pouvoir, en chan- geant l'un des termes, changer aussi l'autre. Or, c'est précisé- ment ce que Haller a fait. A l'aide de Mgalures convenablement disposées, il a empêché l'entrée du sang dans le ventricule droit, et il a retenu une certaine quantité de ce liquide dans le ventricule gauche. L'ordre suivant lequel le mouvement s'ar- rête d'ordinaire dans ces deux réservoirs a été alors renversé, et c'est dans le ventricule gauche que les battements ont persisté le plus longtemps (1). (1) Ilaller pratiqua cette expérience vrit l'artère pulmonaire ot vida le sur un Chat, il coupa la veine cave ventricule droit. Le sang fut au con- supéricure, et lia la veine cave infé- traire retenu dans le ventricule gauche rieure de façon à cmpOcher le sang pnr la ligature de raoïle. Les balte- d'arriver dans roreillelte; puis il ou- ments s'arrêtèrent d'abord dans l'o- 126 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Lorsqu'un Animal, tel qu'un Chien au tout autre Mammifère, est près de mourir d'hémorrhagie, son cœur se meut plus long- temps que toute autre partie, mais il arrive un moment où (^es battements s'arrêtent, et si l'on introduit alors dans cet organe, au moyen de la transfusion, une petite quantité de sang, on voit ses contractions se rétablir. Pour que ce phénomène se mani- feste, il n'est pas nécessaire cjuc le sang parvienne ni au cer- veau, ni à la moelle épinière, ni dans aucune autre partie de l'économie ; il suffit de son contact avec la face interne des parois du cœur. Ainsi, lorsque le cœur d'une Grenouille, séparé du corps de l'animal et vidé de tout le sang qu'il contenait, a cessé de battre , on peut le remettre en mouvement en introduisant quelques gouttes de sang dans son ventricule (1). On peut même ranimer ainsi les contractions dans des fragments de cet organe (2). reilleUe droite. Pendant quelque temps le ventricule droit continua à se con- tracter en même temps que son con- génère , mais bientôt il cessa de se mouvoir , tandis que le ventricule gauche chargé de sang continua à battre pendant quatre heures [a). Des expériences analogues ont été faites par Caldani, et les résultats en ont été les mêmes (5). Dernièrement M. Schiff les a répétées aussi avec un plein succès (c). (1) M. Schifl a pratiqué cette expé- rience sur des Crapauds et des Lézards aussi bien que sur des Grenouilles. Pour la faire , il place le cœur palpi- tant sur du papier buvard qui absorbe promptement le sang chassé par les mouvements de systole , et lorsque le ventricule s'est complètement vidé , les battements cessent presque aussi- tôt. Alors, au moyen d'un tube efDlé, il introduit quelques gouttes de sang dans l'oreillette, et tout de suite les battements recommencent. Ce physio- logiste a constaté aussi que les batte- ments du cœur cessent quand cet organe est devenu exsangue par suite de contractions longues et violentes déterminées par le galvanisme ; mais que ses mouvements ne tardent pas à se rétablir, si l'on introduit un peu de sang dans le ventricule {d). (2) M. Budge a trouvé que des (a) H aller, Mém. sur les parties sensibles et irritables, 1. 1, p. 363. (&) M. A. Caldani, Lettre à Haller (voyez Mém. sur les parties sensibles et irritables, t, III, p. 423 et suiv.). (c) Schiff, Der Modus der Herzbeîvegung (Vierordt's Arcli. fiir physiol. Eeilkunde, 4850, t. IX, p. 34). [à) Idem, ibid. {Arch. fiir physiol. Heilkunde, t. IX, p. 3f>), CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUR. 127 Il est donc bien démontré que le contact du sang sur la paroi interne des cavités du cœur est capable de déterminer les con- tractions de cet organe, lors même que l'irritabilité de celui-ci se trouve affaiblie par les approches de la mort, et par consé- quent il me paraît légitime de conclure qu'à plus forte raison, dans les circonstances ordinaires, la même action doit être suivie dés mêmes effets. La principale cause déterminante des battements du cœur me paraît donc être l'excitation produite par le contact de ce liquide sur les parois des cavités dont cet organe est creusé (1). Mais, pendant la diastole ventriculaire, ce n'est pas seule- ment à la surface interne des cavités du cœur que l'influence fragments du cœur, détachés de cet organe pendant que son action est vigoureuse , cessent de se contracter spontanément dès qu'on enlève tout le sang dont ils sont baignés, mais recommencent à palpiter avec force quand on les met en contact avec du liquide. L'excitation ainsi produite est plus efficace que celle déterminée mécaniquement {a), (1) Diverses objections ont été faites contre cette théorie de l'excitation de la contraclilité du cœur par l'abord du sang dans ses cavités. Ainsi Mark pense que raction de ce liquide ne peut pas être la cause déterminante de la systole , parce que l'afflux du sang dans les ventricules a lieu lente- ment, et que la contraction se produit tout à coup , après que la surface interne des ventricules est en con- tact avec cet agent depuis quelque temps (6). Mais, ainsi que Burdach le fait remarquer avec raison, une irritation quelconque n'appelle une réaction qu'à la condition d'être por- tée elle-même jusqu'à un certain de- gré d'intensité , et {)ar conséquent on comprend facilement que l'influence stimulante du sang puisse n'être sui- vie de la contraction du cœur que lorsque cet organe est suffisamment rempli (c). On a dit aussi que le cœur de l'em- bryon du Poulet se contracte avant de contenir du sang ; mais, ainsi que nous le verrons dans une autre partie de ce cours, la formation du sang précède de quelques heures l'appari- tion des premiers mouvements pulsa- tiles dans le cœur (rf). Dans un Mémoire manuscrit que l'Académie des sciences a renvoyé der- nièrement à mon examen, M. J. Paget (a) Budge, Die AbhSngigkeit der Herzbewegung vom Rûckenmarke iind Gehirne {Archiv fur physiol. Heilkunde, 4 840, t. V, p. 501). (6) Marlt, Ucber die thierische Dewegung, p. U2 (d'après Burdacli). (c) Hurdacti, Traité de physiologie, t. VI, p. 300. (d) Voyez Prévost et Leberl, Mémoire sur la formation des organes de la circulation et du sang dann l'emhryon du Poulrl (Ann. des sciences nat., 1844, 3" série, t. I, p. 283). 428 MÉCANISME DE LA CIUCULATION. stimulante du sang s'accroît. Au moment de la contraction de cet organe, les petits vaisseaux qui en parcourent la substance se trouvent pressés par l'élargissement des fibres charnues dont ils sont entourés, et par conséquent se vident plus ou moins complètement, tandis que pendant la diastole ils reprennent leur calibre ordinaire, et la circulation s'active dans leur inté- rieur. La disposition anatomique des valvules sigmoïdes qui garnissent l'entrée de l'aorte doit contribuer aussi à rendre l'abord du sang dans les artères coronaires moins facile pen- dant la contraction que pendant le repos des ventricules, et par conséquent il y a là un concours de circonstances qui contri- buent à faire varier périodiquement la somme des influences stimulantes dont la réunion provoque la systole (1). a cru pouvoir expliquer la cause du retour périodique des contractions du cœur en attribuant ce phénomène à un mode rhythmiquc de la nutrition de :.2t organe ; mais il ne donne aucune preuve de l'existence d'une intermit- tence dans ce travail nutritif, et par conséquent je crois inutile de discuter ici cette hypothèse [a). (1) Les physiologistes ont été très partagés d'opinions relativement au rôle de la circulation du sang dans les vaisseaux coronaires et à la manière dont celte circulation s'effectue ; mais ici, comme dans beaucoup d'autres questions scientifiques, il y a eu de chaque côté des conclusions trop ab- solues, et la vérité me semble être entre les deux extrêmes. Déjà, du temps de Haller et de Se- nac, les uns avaient soutenu que chez l'Homme les orilices des artères coro- naires sont recouverts par les valvules sigmoïdes de l'aorte, lorsque ces sou- papes se relèvent pour laisser passer le sang chassé du ventricule pendant la systole de cet organe ; mais d'autres anatomistes avaient remarqué que souvent ces orifices sont placés trop loin du cœur pour être obstrués de la sorte (6). Dernièrement cette question a été traitée de nouveau par M. Briicke, et a donné lieu à une discussion très approfondie enire ce physiologiste et M. Hyril. Le premier de ces auteurs s'est appliqué à élablir, mieux que ne l'avaient fait les anciens anatomistes, que chez l'Homme, ainsi que chez les autres Mammifères etchez les Oiseaux, les orifices des arlères coronaires, situés immédiatement au-dessus de l'entrée de l'aorte, sont recouveris par les valvules sigmoïdes , lorsque (a) i. Paget, Recherches sur la cause des mouvements rhythnuqiies du cœur {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1857, t. XLV, \k 409). (6) Voyez Senac, Traité de la structure du- cœur, t.. I, p, 89 et eiiiv. CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUR. 129 Ces résultats nous aideront à comprendre le retour pério- dique des contractions du cœur. En effet, cet organe, stimulé par la présence du sang dans son intérieur , se contracte , et par cela même fait cesser celte excitation, car il chasse ainsi la totalité ou la plus grande partie du liquide dont l'action avait déterminé ce mouvement, et dès lors il rentre dans l'état de repos; mais ce repos permet l'entrée d'une nouvelle quantité de sang dans son intérieur, et de là une nouvelle excitation à la contraction. L'action appelle le repos, et le repos devient une cause d'action. La nature nous oftre donc là un nouvel exemple de ces enchaînements de phénomènes qui sont à la fois des effets et des causes, qui se renouvellent par cela même qu'ils cessent, et qui persistent avec le même caractère, tant que les ces soupapes se relèvent poiu' laisser entrer le sang dans le système arté- riel ; de façon que, pendant la systole ventriculaire , les vaisseaux propres du cœur ne recevraient pas de sang, et se videraient même en partie par suite de la compression exercée sur les capillaires lors de la contraction des fibres musculaires entre lesquelles ces vaisseaux sont logés. Il est vrai que sur le cadavre on trouve souvent l'orifice des artères coronaires un peu au delà de l'espace recouvert de la sorte par les valvules sigmoïdes ; mais ^]. Briicke pense qu'en général ce dé- placement est un résultat de la rigi- dité cadavérique. Il fait remarquer aussi que chez les Reptiles, où l'ar- tère coronaire naît beaucoup plus haut, ce vaisseau traverse très obli- quement les parois de l'aorte, de façon qu'il doit être oblitéré lorsque ce der- nier tronc vasculaii e est distendu par le jet de sang lancé du cœur dans son intérieur (a). M. Hyrtl soutient une opinion con- traire, n pense que le sang arrive dans les vaisseaux coronaires pendant la systole ventriculaire aussi bien qu'après la clôture des valvules sig- moïdes, et il s'appuie sur ce lait que, si l'on injecte l'aorte par la veine pul- monaire, on remplit les artères coro- naires, bien que, dans ce cas, les val- vules en question aient dû être rele- vées pendant le passage de l'injection. Il a rappelé aussi que le jet de sang qui s'échappe de la piqûre faite à une artère coronaire esl plus fort pendant la systole ventriculaire que pendant la diastole (b). M. Brûcke explique ce phénomène (o) Brùcke, PhysirAogisclie Bemerkumjen ûber die Arluritc coronariœ curdis {SUx>unfjsberifMe der wissensch. Mcad. tu Wien, ISSô, l. \1V, p. U45). (b) llyi'il, Vortvay. Lcwcis dass die Urspyiinye der Coronar-Artene7i,ivàlirend der Systole der Kamrner, von deu Sennlunarklappen n'ichl bedeckl werden und das der Enlrilt des Blutes iii dieselben nicht wdlirend der Diastole slaltllndet (Sit^unysber., i. XIV, p. 37^). IV. y 130 MECANISME DE LA CIRCULATION. instruments qui les produisent sont aptes à remplir leurs fonc- tions accoutumées. Ajoutons encore, pour compléter ce ta- bleau, que l'expulsion du sang, au moment de la systole, est aussi la cause principale de l'afflux de ce liquide stimulant au par la compression des capillaires lors de la contraction des fibres charnues du cœur (a). Mais M. Hyrtl a répliqué par une expérience faite sur le cœur d'un Silure. L'artère coronaire étant coupée transversalement et isolée, il a vu que le sang s'échappait du tron- çon supérieur, et non du tronçon in- férieur (6). M. Endemann a fait aussi des expé- riences sur ce sujet, en simulant sur un cœur rempli de liquide les mou- vements de contraction et de dilata- tion des ventricules, et en observant les oscillations de la colonne mercu- rielle dans un manomètre mis en communication avec l'une des artères coronaires. A chaque systole du cœur une poussée du liquide se manifestait dans ces vaisseaux, et, par consé- quent, il conclut que les valvules sig- moïdes n'en ferment pas l'entrée lorsque ces soupapes se relèvent contre les parois de l'aorte (c). J'ajouterai aussi que M. Ponders a trouvé que les pulsations des artères coronaires sont synchroniques avec la systole ventriculaire (d). D'après cet ensemble de faits, il me paraît évident que dans la plupart des cas l'entrée des artères coronaires doit être abordable pour le sang pendant la systole aussi bien que pendant la diastole ventriculaire ; mais je pense, comme M. Briicke, que, pendant l'état de contraction des parois charnues du cœur, les petits vaisseaux logés dans la substance de ces parois doivent être comprimés au point de se vider en partie, et qu'au moment de la diastole, le sang, pressé par les parois élasti- ques des grosses artères, doit affluer en abondance dans ces petits capil- laires. Il me paraît probable qu'il y a même ainsi un mouvement de va-et- vient des grosses veines dans les ca- pillaires, car on sait qu'excepté à leur terminaison dans le sinus commun, ces vaisseaux n'ont pas de valvules. Il est d'ailleurs bien établi que la présence du sang dans les vaisseaux propres du cœur est une des condi- tions du développement de la puis- sance contractile dans le tissu muscu- laire de cet organe. Ainsi, dans des expériences faites sur ce sujet par M. Erichsen, on a vu que chez les Mammifères la ligature des artères coronaires est suivie assez prompte- ment de la cessation des contractions du cœur, et que la durée de ces mou- vements est encore abrégée si l'on ouvre les veines coronaires de façon à faciliter la sortie du sang, tandis (a) Briicke, Dcr Verschluss der Kranzschlagadem durch die Aorten Klappen. Wien, 1855 (2° article). (b) HjtU, Ueber die Selbststeuerung des Herzens, ein Beitrâg %ur Mekanik der Aorten Klappen. Wien, 4 855. (c) Endemann, Beitràge zîir Mekanik der Kreislaufs im Hcrzen (Dissert. inaug.). Marburg, 1356 (voy. Henle et Meissner, Bericht ûber die Fortschritie der Anat. und Physiol. im Jahre iShG, p. 432). (d) Honders, Physiologie des Menschen, 1. 1, p. 41 . CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUR. 131 moment de la diastole- car la colonne sanguine renfermée dans le système circulatoire est poussée, pour ainsi dire, tout d'une pièce, et l'entrée d'une ondée dans l'extrémité artérielle du système est suivie de la sortie d'une quantité correspon- dante par l'autre bout de cet appareil hydraulique, et, par que l'effet contraire a lieu quand on place les ligatures de façon à empri- sonner une certaine quanti té de ce liquide dans les vaisseaux propres du cœur (a). M. Schiff a obtenu des résultats analogues ; et en pratiquant cette ex- périence sur l'artère qui porte le sang dans l'épaisseur des parois du ventri- cule droit sans oblitérer celles qui se distribuent au ventricule gauche, il a vu les mouvements de celui-ci conti- nuer comme d'ordinaire, tandis que l'autre est demeuré prompteraent en repos, bien que dans les circonstances ordinaires ce soit le ventricule gauche qui s'arrête le premier (6), J'ajouterai que M. Brovvn-Séquarda cru pouvoir aller plus loin dans l'ex- plication du rôle du sang .dans la pro- duction des mouvements du cœur. Il pense que c'est le sang veineux con- tenu dans les vaisseaux propres du cœur qui provoque la systole, et cela à raison de l'acide carbonique que ce Jiquide renferme. Suivant ce physio- logiste, le développement de la puis- sance musculaire serait entretenu par le sang artériel, mais ce serait le sang veineux qui agirait comme stimulant pour déterminer la contraction des fibl-es musculaires du cœur (c). M. Radcliffe a cherché aussi à ex- pliquer les mouvements rhythmiques du cœur, en supposant que l'état de relâchement des fibres musculaires est déterminé par l'afflux du sang ar- tériel dans les vaisseaux coronaires, et l'état de contraction par l'action de ce même sang devenu veineux par le fait de son séjour dans les capil- laires (rf). Mais cela me paraît peu probable. Kn effet, nous voyons par les expériences de .M. Castell, que le cœur d'une Grenouille , séparé du corps et plongé dans du gaz acide carbonique, ne bat pas plus fortement que dans l'air, et que ses mouvements s'arrêtent beaucoup plus tôt. Dans les nombreuses expériences de cet auteur, les pulsations ont cessé au bout de huit ou même de six minutes dans le gaz acide carbonique, tandis qu'elles continuaient pendant environ une heure dans de l'azote ou dans de l'hydrogène, et se prolongeaient pen- dant plus de douze heures dans l'oxy- gène (e). (o) Eridiscn, On the Influence ofthe Coronary Circulation on Ihe Action of the flenrt {Londôn Médical Gazette, 18-i2, 2' série, t. H, p. 5G1). (6) Schiff, Der Modus der HerzbewegimQ {Arcli. [tir physiol. Heitliunde, t. IX). {c) Brown-Sôquiird , On tlie Cause of llie Ileativrjs of tlie Ileart {Expérimental Hesearclies apptied ta l'Iiysiology and Palhcloyy, 1853, p. Wh). (d) P.adcliflu, Ttie Fliysical Tlieory of Mvscnlar Contraction {Médical Times, 4 855, t. X, ]>. e4i). (e) Casic)), IJeher dus Vertialten des ller%ens in Vcrschidenen Canarien {^VnWcv'a Archiv fur Anat. nnd PliysioL, 18r.4, p. 226). 132 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. conséquent, pour sortir de l'extrémité veineuse du cercle vas- culaire, il ne peut que pénétrer dans le cœur. Influence S g. — Ainsi , daus les circonstances ordinaires, le retour de l'épuisement sur le retour rhythmiquc des contractions du cœur semble être déterminé par périodique . . des contractions l'arrivée intermittente du sang dans les cavités ventriculaires. du cœur. Mais cette cause n'est pas la seule dont dépende la périodicité des battements de cet organe. En effet, lorsque l'excitation pro- duite par le contact du sang, ou de tout autre fluide stimulant, devient permanente, la contraction ne persiste guère plus long- temps que d'ordinaire et continue à être interrompue par des repos réguliers. Le caractère rhythmique de ces mouvements doit donc dépendre en partie au moins de quelque autre cause, et, pour s'en rendre compte, on est obligé d'invoquer des faits d'un ordre différent. Lorsque nous étudierons d'une manière spéciale la production du mouvement par les muscles en général, nous verrons que la force en vertu de laquelle ces organes se contractent s'épuise toujours plus ou moins promptement par le fait même de son emploi ; les fibres, dont la contraction a duré pendant un cer- tain temps, cessent d'êire irritables et se relâchent; mais le repos les rend aptes à fonctionner de nouveau, comme si la puissance motrice s'y engendrait d'une manière continue, et ne se dépensant que pendant la durée de la contraction, pouvait s'y accumuler pendant le repos, et arriver ainsi au degré d'intensité voulu pour déterminer une nouvelle contraction. La décharge de cette force, dont dépendrait la contraction, serait donc sou- mise à deux conditions, son accumulation en quantité suffisante et l'intervention d'une puissance stimulante. Si l'action de cette dernière force était continue, son effet se manifesterait dès que la puissance contractile serait arrivée à un certain degré, et cesserait du moment que la décharge déterminée par son in- fluence se serait effectuée; l'action du muscle serait donc suivie d'un repos qui rendrait cet organe apte à agir de nouveau sous CAUSE DES MOUVEMENTS DU COEUR. 133 l'empire de la même cause d'activité, et, par cette succession d'états différents de la fibre musculaire, on comprend la possi- bilité de ses contractions rhythmiques, lors même que son action serait sollicitée d'une manière continue par une stimulation permanente. Sous ce rapport, le cœur ne diffère pas des autres muscles : „ sa contraction amène l'épuisement de sa force contractile ; cet épuisement amène le repos, et le repos permet le rétablissement de la puissance contractile. Ainsi, à raison de la. nature de ce phénomène, l'action du cœur serait périodique, lors même que la cause déterminante de la contraction ne se ferait pas sentir d'une manière intermittente, comme c'est le cas de l'excitation produite par l'afflux du sang. Mais l'énergie de la contraction parait être en rapport avec la quantité de force contractile accumulée dans l'organe qui se contracte, et, par conséquent, sous l'influence d'une stimulation constante qui en provoquerait l'emploi dès que cette accumu- lation atteindrait la limite inférieure indispensable à la produc- tion du mouvement, celui-ci devra être très faible, et, toutes choses étant égales d'ailleurs, très fréquent. Or c'est ce qui a lieu effectivement quand le sang se trouve retenu dans les cavités du cœur; les battements de cet organe deviennent petits et précipi- tés, tandis que dans les circonstances ordinaires, à la suite d'un repos prolongé, amené par l'absence de ce stimulant, les contrac- tions déterminées par celui-ci ont une intensité très grande. L'intermittence dans l'action stimulante du sang sur le cœur Résumé. n'est donc pas la seule cause de la périodicité rhythmique des mouvements de cet organe, mais favorise beaucoup le dévelop- pement de la force nécessaire pour donner à ces mouvements la puissance voulue pour l'exercice du travail circulatoire , et elle peut être considérée même comme étant, dans les circon- stances ordinaires, le mobile dont dépend le retour régulier de ces battements. lâ/l- MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Rôle § /i. -_ L'observation journalière nous apprend que la pro- nerveux ductiou do Certaines sensations est suivie de la contraction dans • 1 • la production involontaïrc de divers muscles qui obéissent cependant à la des contractions , du cœnr. voloute , ct quc , par exemple , la douleur résultante de la piqûre ou du tiraillement d'une partie sensible détermine, soit dans la partie même, soit ailleurs, une réaction de ce genre. Au premier abord, on pourrait donc supposer que le cœur est influencé de la même manière par le contact du sang, et qu'il se contracte par suite de la sensation ainsi produite ; mais cette hypothèse ne résiste pas à un examen sérieux, car il a été bien démontré que le cœur est en réalité insensible : le contact des corps étrangers n'y fait naître aucune sensation, c'est-à-dire n'y produit aucune impression dont nous ayons la conscience. Cette insensibilité du cœur se déduit non-seulement de di- verses expériences dans lesquelles la lésion de cet organe n.'a été suivie d'aucun signe indicatif de souffrance, mais aussi de témoignages directs. Harvey s'en est assuré en examinant le jeune Montgomery dont j'ai déjà eu l'occasion de parler (1). Il a pu palper, à plusieurs reprises, le cœur de cet homme sans que ces mouvements donnassent lieu à aucune sensation. . Montgomery n'avait conscience de l'application du doigt de l'observateur sur son cœur que lorsqu'on touchait en même temps les parties voisines des parois thoraciques (2). Influence § 5' — L'irritabihté du cœur ne saurait donc être attribuée et ïe Ta" moelle ^'^ ^^ Sensibilité de cet organe; mais la faculté que possède le suiTeTœur. systèmc nerveux d'exciter des mouvements dans l'organisme Insensibilité du cœur. (1) Voyez ci-dessus, page 15. ('2) Dans un cas d'ectopie parlielle du cœur cliez un enfant qui vécut trois mois, M. O'Brian a vu aussi que les attouchements pratiqués sur cet organe ne déterminaient la ma- nifestation d'aucun signe de sensi- bilité (o). {a) O'Brian, Case of Partial Ectopla (Trans. oflhe Prov. Assoc.,ei.. Amer. Journ. of Med. Scierie, 1838, t. XXIII, p. 194.). INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUK LE COEUR. 135 est indépendante de la iacolté de sentir. On sait aussi que les muscles des membres, lors même qu'ils sont devenus insen- sibles, peuvent être mis en action par l'influence du cerveau ou de la moelle épinière, inlluence qui leur est transmise par les nerfs moteurs; et, par conséquent , on doit se demander si les contractions du cœur ne seraient pas, comme les contractions de tous ces muscles, dans la dépendance des grands foyers d'inner- vation, etnese trouveraient pas placées sous l'empire, soitde l'axe cérébro-spinal, soit des ganglions du système sympathique. Au premier abord, cela pouvait paraître probable, et diverses expériences mal interprétées ont fait penser qu'il en était ainsi : que les mouvements du cœur étaient dépendants de l'influence de l'encéphale transmise à cet organe par les nerfs pneumo- gastriques (1), ou bien encore que le principe de ces mouve- ments avait son siège dans la moelle épinière. (1) Une expérience qui date de mais d'autres expérimentaleurs virent l'antiquité, et qui, après avoir été pra- que la section des nerfs en question tiquée par Rufus d'Éphèse (a) et par ne produit rien d'analogue {d) , et Galien (6), a été souvent répétée par Haller fut conduit à considérer ces les physiologistes de nos jours, aussi nerfs comnje n'ayant pas d'action sur bien que par ceux du xvn* et du le cœur (e). Enfin les reciierches de xviii^ siècle, avait conduit quelques Legallois nous ont donné la clef de auteurs à penser que les mouvements toutes les variations qui se remar- du cœur étaient sous l'empire des quent dans les résultais de cette vivi- nerfs pneumogastriques. En effet, la section ; car elles ont établi que la section de ces nerfs est quelquefois mort prompte qui s'observe parfois suivie d'une mort très prompte, et dans les expériences de ce genre Piccolomini, Willis et Lower, altri- résulte non pas de la cessation des huèrent ce résultat à une paralysie du battements du cœiu-, mais de la para- cœur, déterminée par l'opération (c) ; lysie des muscles dilatateurs de la {a) Voyez Morgagni, De sedibus et causis morborum, epist. xix, art. 23. (6) Galien, De Hippocr. et Platon, decretis, lib. II, cap. vi, el De locis ajfectis, lilj. I, cap. vi. (c) Piccolomini, Anatomicœ prœlectiones, 1586, p. 272. — Willis, Nervorum descrlpiio (Opéra omnia, 1682, 1. 1, p. 86). — Lower, Tractalus de corde, 1708, p. 90. — Bolin, Circulus anat. etphysiol., 1097, p. lOi. ((i)Riolan, Opéra analomica, 1049, p. ^tM. — Plernpius, Fundamenta medicinœ, IGii, p. 112. — Cliirac (voyez Senac, Traite du cœur, 1777, t. I, p. /p2i). («) Haller, Ëlementa physiologice corporis Inimaui, t. 1, p. 403. 130 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Opinion Ainsi Legallois, après avoir reconnu que l'ablation du cer- âc Legallois. , a i i i i ■ i veau n arrête pas les battements du cœur, pourvu que la vie de l'Animal soit entretenue à l'aide de la respiration artificielle, trouva que cet organe est subitement paralysé lorsqu'on intro- duisant un stylet dans le canal vertébral, on écrase la moelle épinière; et il en conclut que la force en vertu de laquelle le cœur se contracte provient de cette portion centrale du système nerveux (l). Mais ce physiologiste aurait été plus réservé dans ses déductions , s'il avait connu les résultats obtenus par les expériences de quelques-uns de ses devanciers. La coniiaciiiité ^^ cffct , Zimmemianu et Spallanzani avaient constaté du cœur ncdépendpas que l'ablatiou complète de la moelle épinière pouvait être de la moelle ^ ^ ^ * _ '^ '- épinière. pratiquée sans déterminer la paralysie du cœur ('2). Wilson Philip, en répétant les expériences de Legallois , a repro- duit les faits observés par ce physiologiste, mais a trouvé glotte ; paralysie qui , à son tour , culation ; mais la destruction de la détermine l'asphyxie , si les carli- moelle épinière par écrasement dé- laces du larynx ne sont pas assez termina presque immédiatement la résistants pour maintenir par eux- cessation des mouvements du cœur, mêmes la communication libre entre et cela lors même que cette opération l'arrière-bouche et les voies pulmo- n'avait été étendue qu'à la région naires (a). Quant à l'influence que la cervicale seulement ou bornée à la section des pneumogastriques exerce région dorsale (6). réellement sur les mouvements du (2) Zimmermann, ayant détruit le cœur, nous y reviendrons bientôt. cerveau et la moelle épinière d'un (l) Dans les expériences de Légal- Chien, ouvrit la poitrine de cet Ani- lois, présentées à l'Académie des mal, et vit que le mouvement du cœur sciences en 1811, et faites sur de très se soutenait ; au bout d'une heure, jeunes Lapins , la respiration artifi- tout indice d'activité avait dis- cielle fut pratiquée lorsque les mouve- paru (c). ments naturels du thorax devenaient Spallanzani fit une expérience ana- insuffisants. Dans ces conditions, la logue sur un Triton (rf). décapitation n'interrompit pas la cir- (a) Legallois, Expériences sur le principe de la vie {Œuvres, t. I, p. 152 et sulv.). (6) Idem, ibid., t. l, p. 96 et suiv. (c) Zimmermann, Dissert, de irritabilitate. Gôttingue, 1751. Voyez Haller, Mém. sur les parties sensibles et irritables du corps animal, t. II, p. 37. [d) Spallaiizaiii, Expériences sur la circulation, p. 342. INFLLEXCE DU SYSTÈMK NEUVELX SUR LE COEUR. 137 aussi (jLie, même chez les Mammifères, les battements du cœur peuvent, dans certains cas, persister après la destruction com- plète de l'axe cérébro-spinal (i). Enfin M. Flourens a fait voir plus récemment que, même chez les Oiseaux, la circulation, soutenue par la respiration artificielle, peut continuer pendant plus d'une hernie après rpie l'on a enlevé ou détruit le système cérébro-spinal tout entier (2). Pour prouver que le principe d'activité du cœur ne provient pas de la moelle épinière, ainsi que le supposait Legallois, on peut arguer aussi des cas tératologiques dans lesquels la circulation du sang s'est effectuée de la manière ordinaire, bien que tout l'axe cérébro-spinal, frappé d'un arrêt de développe- ment, eût depuis longtemps disparu de l'organisme (3). (1) Wilson Philip reconnut qu'en ment la circulation, et les battements opérant soit sur des Grenouilles, soit du cœur, sans être anéantis , furent sur des Lapins rendus insensibles par beaucoup affaiblis par l'écrasement un coup porté sur la tète, et main- rapide de la moelle épinière effectué tenus en vie au moyen de la respira- à Paide d'un gros stylet plongé dans tion artificielle, on pouvait enlever la le canal vertébral. Dans tous les cas, totalité de l'axe cérébro-spinal sans cependant, Wilson Philip vit les mou- arrèterles battements du cœur, et, vements du cœur se rétablir sponta- dans ces conditions, la destruction de nément après un certain temps de la moelle épinière à l'aide d'un stylet repos (a). mince introduit dans le canal rachi- j,es résultats obtenus par ce phy- dien n'affecta pas davantage les mou- siologiste ont été confirmés par plu- vemcnts de cet organe. Mais ce sieurs autres expérimentateurs (6). physiologiste observa des phénomènes (9) M. Flourens a trouvé qu'en analogues à ceux décrits par Legallois pratiquant la respiration artificielle, on lorsqu'il écrasait brusquement , soit pouvait soutenir la circulation chez l'encéphale, soit la moelle épinière, les Oiseaux pendant plus d'une heure par un coup de marteau, par exem- après la destruction de tout le système pie. Chez les Lapins, cette destruction cérébro-spinal (c). subite du cerveau arrêta temporaire- (3) Lallemand a constaté l'absence (a) W. l'hilip, An Expérimental Inquinj inlo Ihe Laïus of the Vital Functions, p. 56 et siiiv. (6) Weinholdt, Vevsuch ilber das Leben und seine Grundkrdfte aufdem Wege der Expéri- mental-Physiologie, 1817. — Na.sse, Untersuchungen zur Lebensnaturlehre und nuv Heilkunde, 1818. — Wfiilcnieyer, Untersuchungen ûber den Kreislaufdes Bluts, 18'2S. — Halliday, Dissert, sur la cause des mouvements du cœur. Tlièso, Paris, 1824, n° 90. (e) I''loiirens, Hecherches expérimentales sur les propriétés et les fondions du système nerveux, 1824, p. 1!)1. 138 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. La contractiiité Dcs expérieiices analogues à celles dont je viens de parler, du cœur ... <) i i ne dépend pas maJs taitcs siir les autres centres nerveux avec lesquels le des ganglions extra cardiaques cœur 86 trouvc cu rclatlon , par l'intermédiaire des nerfs qui s'y rendent, montrent également que la faculté contractile de cet organe ne dépend de l'action d'aucun de ces foyers d'in- nervation situés au loin, et ne peut tenir qu'à une force engen- drée sur place, c'est-à-dire dans l'intérieur du cœur lui-mêm^|.. Effectivement, on a pu détruire tour à tour chacun des ganglions nerveux qui se trouvent dans son voisinage , ou dans d'autres régions plus éloignées , sans arrêter ses battements (1). complète de la moelle épinière et de quels ils faisaient allusion sont les l'encéphale chez un fœtus humain qui ganglions cervicaux ou les autres or- était arrivé presque à terme, et qui ganes du même ordre, qui sont situés n'aurait pu vivre de la sorte dans le plus ou moins loin du cœur, et la sein de sa mère, si son cœur ne s'était persistance des mouvements de ce pas contracté de manière à effectuer viscère après sa résection suffirait la circulation du sang. pour prouver que le principe de ces Cet auteur cite aussi un certain mouvements ne saurait être localisé nombre de faits analogues recueillis de la sorte en dehors de sa substance, par Morgagni, Paiysch et plusieurs Ainsi, dans un premier travail sur autres pathologistes (a). cette question , M. Brachet (de Lyon) (1) Prochaska fut, je crois, le pre- a cru pouvoir établir expérimentale- mier à attribuer aux ganglions du ment que la section des nerfs qui grand sympathique la production de émanent des ganglions cervicaux la force nerveuse qui entretiendrait moyens et inférieurs détermine im- la contractiiité du cœur (6), et celte médiaîement la cessation des con- hypolhèse a été soutenue de nos tractions du cœur {cl). D'autres expé- jours par plusieurs physiologistes (c); rimentateurs ont constaté que cela mais les foyers d'innervation aux- n'est pas (e) ; puis, dans une nou- («) Lalleraand, Observations pathologiques propres à éclairer diverspoints de 2ihysiologie. Thèse, Paris, 1818, et 2° édit., 1825, p. 40 et suiv. (&) Prochaska, Commentatio de functionibus systematis nervosi ( Openm minonm pars 2, p. 166). (c) Lallemand , Observations pathologiques propres à éclairer plusieurs points de physiologie, 2' édit., 1825, p. 70 ei suiv. (d) Brachet, Mém. sur les fonctions du système nervetix ganglionnaire, 1821, p. 47. (e) Milne Edwards et Vavasseur, De l'influence que les ganglions cervicaux moyens et inférieurs du grand sympathique exercent sur les mouvements du cœur (Ann. des sciences nat., 1826, t. LX, p. 329). Voyez aussi à ce sujet : — Dupuis, Observ. et expér. sur l'enlèvement des ganglions cervicaux des nerfs trisplanchni ques des Chevaux {Journ. de méd., 1816, t. XXXVII, p. 340). — ioherl, Études sur le système nerveux, 1838, f. 'i9i. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 139 On sait d'ailleurs que le cœur d'un Animal vivant continue de se contracter avec force et régularité, pendant un temps assez long, après qu'on l'a arraché de la poitrine (1). Quelques physiologistes ont pensé qu'on pouvait expliquer velle publication , le même auteur attribua ce rôle aux ganglions car- disques qui sont placés près de la base du cœur (a) ; mais M . Longet a fait voir que ceux-ci pouvaient aussi être détruits sans que les battements de cet organe lussent interrompus par l'opération. Ainsi M. Longet, après avoir arraché le cœur d'un Animal vivant et en avoir retranché les oreil- lettes ainsi que les gros vaisseaux, en racla la base de façon à détruire complètement le plexus ganglionnaire situé dans cette partie, et il vit ce- pendant les battements persister avec énergie (6). Si les ganglions intrinsèques du cœur se trouvaient seulement dans la partie ainsi nettoyée, il faudrait con- clure de cette expérience que Tirrita- bilité du cœur est complètement indé- pendante du système nerveux; mais l'anatomie nous ai)prend que certains petits centres médullaires du même ordre sont logés plus profondément dans l'épaisseur des parois venîricu- laires (c) , et par conséquent on peut supposer, par analogie, que si une puissance nerveuse est nécessaire à l'entretien de cettç irritabilité, cette force serait développée dans ces der- niers ganglions. (1) Haller, avec son érudition ac- coutumée, a réuni un grand nombre d'observations éparses dans les au- teurs, relativement à la durée des battements du cœur de divers Ani- maux après la résection de cet or- gane. Leeuwenhoeck a vu le cœur d'une Anguille se mouvoir ainsi pen- dant six heures ; Redi a vu ce phé- nomène se maintenir pendant neuf heures dans le cœur d'une Torpille, et Montanus dit que chez le Saumon les battements ont persisté pendant vingt-quatre heures. Haller rapporte aussi des exemples d'une durée en- core plus grande de l'irritabilité chez des Reptiles , surtout chez des Ser- pents (f/). Chez les Mammifères et les Oiseaux adultes , les contractions du cœur ne se continuent en général que pendant quelques minutes après son extirpation ; mais chez les Mammi- fères hibernants l'irritabilité se con- serve quelquefois pendant fort long- temps. Ainsi Templer rapporte que, ayant ouvert deux Hérissons vivants, et ayant détaché le cœur, il vit cet or- gane, placé sur un plat, exécuter des mouvements alternatifs de systole et de diastole pendant deux heures ; pendant la dernière demi-heure , les contractions s'étaient beaucoup atïai- blies , mais se ranimaient quand on piquait l'organe avec la pointe d'une aiguille. Enfin un quart d'heure après que les cœurs en question eurent (o) Brachet, Recherches expérimentales sur les fondions du système nerveux ganglionnaire, 1830, |>. 120 et suiv.). (6) Longet, Anatomie et physiologie du système nerveux, t. II, p. 005. (c) Voyez.'iome III, }iaj;e SOS. (d) Haller, ELemenla physiologiœ, t. I, p. 471. l/lO MÉCANISME DE LA CIRCULATION, cette persistance de l'irritabilité du cœur, ainsi séparé du reste du corps, par l'hypothèse de l'accumulation préalable d'une certaine quantité de force nerveuse qui aurait été engendrée dans la moelle épinière ou dans quelque autre foyer d'inner- vation plus ou moins éloigné de cet organe, et transmise à celui-ci par l'intermédiaire des nerfs (1). La puissance Au prcmicr abord, cette interprétation des faits peut paraître ^Z cœu/ plausible, mais elle ne me semble pas être l'expression de la '^"eTorgane!"' vérité. Effectivement, il est d'autres expériences qui prouvent, à mes yeux, que la production de la force dont dépend la con- tractilité du cœur, tout en pouvant être influencée par l'action des grands centres médullaires avec lesquels cet organe est en relation , a lieu sur place, et résulte de l'action , soit des fibres musculaires , soit des petits foyers d'innervation qui se trouvent en assez grand nombre dans l'épaisseur des parois ventricul aires. Si le cœur tirait d'une source étrangère la puissance en vertu de laquelle ses fibres se contractent sous l'influence des stimu- lants locaux, cette force irait toujours en diminuant à mesure que l'on s'éloigne davantage du moment où cet organe ne pour- rait plus en recevoir du dehors, soit parce que le foyer d'inner- vation aurait été détruit, soit parce que la communication avec celui-ci aurait été interrompue. Or les choses ne se passent pas de la sorte. Wilson Philip, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les travaux, a reconnu que la paralysie du cœur déterminée par l'écrase- ment brusque de la moelle épinière ou du cerveau n'est pas ' permanente. Si l'on entretient la vie de l'Animal au moyen de la cessé de baUre de la sorte, il vit les (1) Voyez Longet, Anat. et phys. pulsations reparaître sous l'influence du système nerveux, t. II, p. 601. d'une douce chaleur (a). (a) Templer, Upon the Motion of the Hearts of two Urchiiis after their being Cut eut (Philos rmn«., 1673, t. VIII, p. 6016). . INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. Mii I respiration artificielle, le cœur retrouve peu à peu son irrita- bilité, et recommence à battre, bien qu'il ne puisse plus tirer du dehors aucune nouvelle provision de force nerveuse (1). § 6. — Mais, comme nous l'avons vu précédemment (2), infiuenco , 1 • 1 J ''^^ ganglions il existe dans l'épaisseur des parois du cœur une multitude de cardiaques. nerfs, ainsi qu'un certain nombre de ganglions qui, par ana- logie, doivent être considérés comme autant de foyers d'inner- vation, et, par conséquent, tout en circonscrivant aux limites du cœur lui-même le siège du travail vital dont résulte sa force contractile, il nous reste encore à déterminer si cette force est engendrée par ses éléments nerveux ou par ses fibres muscu- laires, ou, en d'autres termes, si la contraclilité musculaire est une propriété inhérente aux fibres constitutives des muscles ou une puissance qui leur est communiquée par les nerfs. Depuis le temps de Haller les physiologistes sont partagés sourco d'opinions à ce sujet, et aujourd'hui encore deux hypothèses musculaire. sont en présence. Haller supposait que l'irritabilité est une propriété inhérente à la fibre musculaire et ne dépend pas de l'activité fonctionnelle du système nerveux. La plupart des physiologistes de l'époque actuelle considèrent au contraire cette propriété comme étant communiquée aux muscles par les nerfs, et se sont appliqués à découvrir le siège de la production de la force nerveuse dont cette faculté dépen- drait (3). Nous examinerons d'une manière complète cette (1) On doit à M. Schilï' beaucoup (2) Voyez tome III, page 510. d'expériences qui tendent aussi à (3) La position de ces ganglions établir que les mouvements liiythmi- diffus est telle, qu'il serait difficile ques du cœur ne dépendent pas d'une d'obtenir par des viviseclions des action nerveuse réllexc et n'ont pas preuves directes de leur influence sur leur principe au deliors de cet organe les mouvements du cœur. En effet, lui-même (a). nous avons vu que, cbez les Manimi- {u) ScliilT, l'eber lier Modws der Iternbewcniing {Arch. fur phys. Ileilk., l. IX). 1/|2 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. question délicate, lorsque nous étudierons particulièrement les fonctions du système nerveux, et, pour le moment, je me bor- nerai à dire que des expériences récentes tendent à faire pré- valoir la théorie hallérienne. Effectivement, mon savant col- lègue, M. Cl. Bernard, et M. Kôlliker, professeur à l'université de Wurtzbourg, ont établi qu'à l'aide de certaines substances toxiques on peut annihiler l'action des nerfs moteurs chez un Animal vivant, sans détruire l'irritabilité des muscles (1), et que, d'autre part, on peut faire perdre à ces derniers organes fères, il en existe sur le trajet de plu- sieurs branches des nerfs du cœur. Mais les expériences dans lesquelles on a divisé en fragments plus ou moins minimes le cœur de la Grenouille, sans faire cesseï- les phénomènes de contraction dans les portions ainsi isolées, sont défavorables à l'hypothèse de l'origine nerveuse de la puissance contractile. Un des arguments qu'on a employés contre la théorie hallérienne est fondé sur l'analogie qui se remarque dans les effets de l'opium appliqué sur un nerf ou introduit directement dans la cavité du cœur. Haller croyait que le cœ,ur n'était pas soumis à l'influence sédative des narcotiques, parce que dans les cas où la sensibilité et les autres fonctions cérébrales sont interrompues par l'action générale de ces substances, on voit le cœur continuer à battre ; mais cela prouve seulement que le système cérébro-spinal est plus facile à engourdir ainsi que ne le sont les nerfs cardiaques et leurs ganglions, et un des contemporains de Haller, VVliylt, a constaté que le cœur n'est pas soustrait à l'influence de l'opium (a). L'action sédative de cette substance sur ce viscère a été mieux démontrée par les expériences de M. W. Henry. Ce physiologiste a vu que l'injection d'une certaine quantité de solution aqueuse d'opium dans les cavités du cœiir, chez le Lapin, est suivie non- seulement de la cessation de tout mouvement spontané dans cet organe, mais de la perte complète de l'irrita- bilité. L'action sédative de cette sub- stance est beaucoup moins marquée quand on l'applique extérieure - ment (6). (1) On sait depuis longtemps que le curare ou woorara, substance dont les indigènes de l'Amérique méridio- nale se servent pour empoisonner leurs flèches (c), paralyse les mouve- ments volontaires, mais n'arrête pas les (a) Whylt, Physiological Essays. (h) W. C. Henry, A Crilical and Expérimentai Inquinj into the Relations hetween ^erve and Muscle (Edinbiirgh Med. and Surg. Journal, 1832, t. XXXVII, p. H). (c) Voyez Brodie , Experimenis and Observations on the Différent Modes in ivhich Death is produced by certain Vegetable Poisons (Philos. Titans., 1812; réimprimé àsiiis ses Physiolog. Research., p. 57 et suiv.). INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. IftS leur irritabilité, sans altérer d'une manière appréciable les pro- priétés du système nerveux (1). Cette analyse physiologique battements du cœur (a) . Or M. Cl. Ber- nard a fait voir que cette paralysie dépend de l'annihilation de l'excitabi- Jité des nerfs moteurs, mais laisse subsister l'irritabilité des muscles auxquels ces nerfs se rendent. En effet , quand l'organisme est sous l'influence de ce poison, ie galvanisme appliqué à l'un de ces nerfs ne produit aucune contraction dans les muscles correspondants ; mais, en faisant agir ce stimulant directement sur les fibres musculaires, on provoque dans celles- ci les mouvements ordinaires (b). Une autre expérience, due à M. Kôl- liker, vient compléter les résultats ainsi obtenus , car elle montre que cette espèce de paralysie dépend de l'action locale du curare sur les nerfs situés dans l'épaisseur même des muscles affectés. Ce poison agit par l'intermédiaire du sang, qui le trans- porte dans les diverses parties de l'organisme, et M. KôUiker a constaté que si l'on empêche le fluide en circu- 'ation d'arriver dans un muscle en particulier, on préserve celui-ci de la paralysie générale dont le reste du système locomoteur est frappé (c). M. Bernard a fait plus récemment des expériences analogues (d). Il paraîtrait donc que, sous l'influence toxique du curare , les mouvements généraux sont anéantis , parce que les nerfs moteurs deviennent inaptes à mettre en jeu l'irritabilité des muscles, mais que cette irritabilité persiste dans toutes les parties de l'organisme , et continue à produire des contractions là où des stimulants d'un autre ordre interviennent : dans le cœur, par exemple, où le contact du sang pro- voque les mouvements systolaires. Dans l'empoisonnement par le chlorure de baryum, M, Brodie a remarqué aussi que lesbatlements du cœur persistaient et pouvaient être même plus fréquents que d'ordinaire, bien que l'Animal fût dans un état d'insensibilité générale avec paralysie et dilatation de la pupille (e). (1) Cette annihilation de i'irrita- (a) Voyez Humboldt, Voyage aux régions équatoriales , t. II, p. 547 et suiv. — Roiilin et Boussingault, Examen chimique du curare, poison des Indiens de l'Orénoque {Ann. de chim., dSSS, t. XXXIX, p. 24). — Pelletier et Persoz, Examen chimiq\ie du curare {Ann. de chim., 1 S29, t. XL, p. 213). — Pi. Schorabiirg, On the Urari, the Arrow Poison of the Indians {Ann. ofNat. Hist., 1841, t. VII, p. 407). — Pieynoso, Recherches sur le curare. Paris, 1835. — R. Scliomburg-, On the Urari {Phai'maceuticalJournal, A^^vW, i851). (b) Cl. Bernard et Pelouze, Recherches sur le curare {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1850, t. XXXI, p. 533). — Cl. Bernard, Action du curare et de la nicotine sur le système nerveux et sur le système musculaire (Comptes rendus de la Société de biologie, 1850, t. II, p. 495). (c) Kiilliker, Physioloyische Untersuchunyen ûber die Wirkung einiger Gifle (Viiclmvv's Archiv fur pathologische Anal, und Physiol., 1850, (. IX). {d) Cl. Bernard, Leçons sur les effets des substances toxiques et médicamenteuses, 1857, p. 207 et .suiv., p. 4C3 et .suiv. (c) Brodie, Further Observations and E.tperimenls in ttie Action of Poisons on the Animal Sys- tem (Philos. TranK., 1812, ot Physiolog. Research., p. 01 et suiv.). lkl\ MÉCANISME DE LA CIKCULATION. (les fonctions conduit donc à faire penser que l'irritabilité n'est pas sous la dépendance des nerfs, et appartient à la fibre musculaire elle-même (1 j. Action § 7. — Il est aussi à noter que la puissance contractile du de divers poisons CŒur pcut être Considérablement affaiblie, ou même détruite par la contraciiiité l'actiou dc certaius poisons, sans que des effets du même ordre du cœur. .„ ^ i i ^ ' m se mamlestent en même temps dans le système nerveux cérébro- spinal ou dans les muscles qui en dépendent. Ainsi, dans les cas d'empoisonnement déterminés chez des Chiens par l'upas antiar, on a vu les mouvements respiratoires continuer après que le cœur avait cessé de battre (2), et, dans d'autres expé- riences faites sur des Grenouilles pour constater le mode d'action du sulfate de cuivre, on a vu également le cœur s'ar- rêter lorsque l'Animal exécutait encore des mouvements \ olon- bilité dans tout le système musculaire est déterminée par l'action du sulfo- cyanure de potassium. Dans les cas d'empoisonnement par celtesubstance, le cœur cesse de battre et les autres muscles ne se contractent plus sous l'influence du galvanisme, mais les nerfs de la sensibilité conservent leur excitabilité (ai. (1) Les expériences dont je viens de parler ne me semblent pas suffire pour trancher complètement la ques- tion en litige, car les influences exer- cées par le système nerveux sont très variées, et nous savons que certaines substances toxiques annihilent une ou plusieurs des propriétés de ce système sans détruire les autres facultés ner- veuses. Il serait par conséquent pos- sible que l'innervation ne fût pas com- plètement suspendue dans le tissu musculaire dont les nerfs sont devenus indiff'érents aux excitants qui d'ordi- naire provoquent leur action sur des parties irritables. Du reste, nous exa- minerons à fond cette question dans une autre partie de ce cours. (2) L'upas antiar est un poison préparé par les Javanais avec le suc d'un arbre de la famille des artocar- pées nommé Antiaris toxicaria. Sir B. Brodie a trouvé que l'intro- duction d'une très petite quantité de celte substance dans une plaie est promptement suivie d'un grand ralen- tissement des battements du cœur ; les contractions de cet organe devien- nent irrégulières et s'interrompent fréquemment , tandis que les mouve- ments respiratoires continuent avec leur amplitude et leur fréquence ordi- naire. La mort arrive subitement, et quand l'Animal tombe, son cœur ne bat plus, bien qu'il puisse encore faire (a) Cl. Bernard, Leçons sur les effets des substances toxiques, p. 354 et suiv. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. illb taires, ou que ses membres étaient agités de contractions con- vulsives très violentes (l). J'ajouterai que le cœur, séparé du reste de l'organisme, éprouve des effets analogues par le contact de diverses sub- des mouvements respiratoires et qu'il y ait quelquefois des mouvements convulsifs des membres (o). Récemment M. Kôlliker a fait des expériences analogues sur des Gre- nouilles, et il a trouvé aussi que la paralysie du cœur par l'upas antiar précède la cessation des mouvements volontaires (6). J'ajouterai que le poison des Madô- casses , provenant d'un arbre appelé Tanghitiiaveneni fera, àétevmineégn- lement la cessation des mouvements du cœur et ne produit qu'assez long- temps après la paralysie des muscles volontaires et automatiques. Le ven- tricule reste dans un état de contrac- tion permanente (c). (1) On doit à M. J. Blake beau- coup d'expériences intéressantes sur l'action que diverses substances miné- rales exercent sur le cœur, lorsqu'on les introduit directement dans le tor- rent de la circulation. Quelques centi- grammes de sulfate de zinc, adminis- trés de la sorte, délerrainent, au bout de peu de secondes, chez le Chien, une grande diminution dans la force des contractions veniriculaires, ainsi que ce physiologiste s'en est assuré en mesurant par l'hémodynamomètre de M. Poiseuille la pression du sang dans les artères. L'injection d'une quantité un peu plus considérable de ce sel arrête presque subitement les batte- ments du cœur et détruit l'irritabilité de cet organe. Le sulfate de magnésie produit des effets analogues, mais moins intenses. Le sulfate de cuivre, au contraire, est plus actif. Dans une expérience faite sur un Chien, l'injection de 30 centigrammes fut suivie immédia- tement de quelques palpitations irré- gulières du cœur, puis d'une grande diminution dans la pression exercée par cet organe sur le sang artériel, et l'emploi d'une dose un peu plus con- sidérable du même sel détermina en douze secondes la cessation de tout mouvement dans les oreillettes aussi bien que dans les ventricules {d). Pour mettre mieux en évidence les ellets produits par le sulfate de cuivre sur le jeu du cœur, M. Moreau a fait sur des Grenouilles diverses expé- (rt) Broilic, Op. cit. (Physiolûgical Hescarches, p. GO et siiiv.), (b) KiJIliker, Einirja Deinerkuiigeii ûber die Wirkunj des Upas antiar {Verhandlungen dei' WùrzburQev phys.-med. Gcsellschaft, tSD", Bil. VllI). (c) Kôlliker et l'olikan, Some Remarks on Ihe Physiological Action of Ihe Tangliinia venenifura {l'roceed. oflhe Royal Soc, 1858, t. IX, p. 173). (d) M. Blake a public plusieurs Mémoires relatifs à riiillucncc exercée par diverses substances toxiques sur la conlraclililé du cœur ; ce sont : 1° Observ. on Ihe Physiological E/j'ects of varions Agents introduced iitlo ihe Circulalian, as indicaled by Ihe Uœmodynamomeler (Edinb. Med. and Surg. Journ., 1839, 1. \A, p. 331). — 2° On Ihe Action of Poisons {Op. cit., t. LUI, p. 33t, et t. LVI, p. 412). — 3° On Ihe Action of tlie Saline Substances when introduced mto the Vascular System {Op. rit., 1840, t. LIV, p. 331)). — A" .Mcni. sur les effets de diverses siibslances injec- tées dans le système. circulatoire [Archives générales de médecine, iii'à'J, 3" série, I. VI, p. "284), IV. 10 illQ MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Stances toxiques. Ainsi le cœur d'une Grenouille, isolé de la sorte et placé dans des conditions favorables, peut continuer à battre pendant plusieurs heures, tandis que son irritabilité se riences clans lesquelles , au moyen d'une ouverture pratiquée à la paroi antérieure du thorax, cet organe fut poussé au dehors, opération qui ne pa- raît causer aucune perturbation grave dans ses fonctions, car les Animaux préparés de la sorte peuvent être faci- lement conservés pendant une hui- taine de jours. Le cœur, ainsi mis à nu, bat avec la régularité ordinaire ; mais si l'on introduit un peu de sul- fate de cuivre dans l'abdomen, en moins d'une heure les pulsations ces- sent complètement. Après que le cœur est devenu ainsi tout à fait inac- tif, M. Moreau a vu cependant l'ani- mal exécuter quelques mouvements volontaires, et pendant cinq minutes il y eut encore quelques mouvements réflexes assez énergiques. Le galva- nisme appliqué aux nerfs lombaires déterminait des mouvements violents dans les muscles des membres infé- rieurs, mais le cœur ne se contractait plus sous l'influence des stimulants. Ce physiologiste a vu aussi l'excita- bilité des nerfs périphériques persis- ter plusieurs heures chez des Gre- nouilles, après la cessation des mou- vements du cœur dans l'empoisonne- ment par le sulfate de mercure, et il a obtenu des effets analogues en em- ployant d'autres préparations du même métal (a). Les sels de baryte et de strontiane, injectés dans les veines, détruisent aussi très rapidement l'irritabilité du cœur, sans faire cesser les contractions des muscles des membres (6), On connaît un grand nombre d'au- tres substances qui, introduites dans le torrent de la circulation en quan- tités même assez faibles, diminuent beaucoup la puissance contractile du cœur, ou même en arrêtent plus ou moins complètement l'action. Tels sont : L'acide oxalique (c); L'acide cyanhydrique, et le cyanure d'ammoniaque {cl) ; Le nitrate de potasse (e). Le bichlorure de mercure {f). Dans l'empoisonnement par l'arse- nic , l'irritabilité du cœur est con- sidérablement diminuée ou même éteinte (g). Appliquée directement (a) Moreau, Becherehes sur l'action des poisons sur le cœur {Mém. de la Soc. de biologie, 1855, 2" série, t. II, p. 171). (b) Blake, Op. cit. {Edinb. Med. andSurg. Journ., 1841, t. LVI, p. 113 et suiv.). (c) Christison et Coindet, An Experim. Inquiry on Poisoning by Oxalic Acid (Edinbwgh Med. and Surg. Journ., 1823, t. XIX, p. 184, 324 et suiv.). (tZ) Mayer, Die Vergiftung durch Blausâure {Arch. fur physiol. Heillmnde, 1843, t. II, p. 249). — ■ Schiff, Modus der Herxbeiuegung {Arch. fur phys. Heilkunde, t. IX). (e) Blalce, Op. cit. {Arch. gén. de mêd., 1839, 3" série, t. VI). (/■) Brodie, Further Obs. andExp. on the Action of Poisons {Philos. Trans., 1812, et Physiol. Researches, p. 98). — Schiff, Experinientelle Untersiichungen iïber die Nerven des Herzens {Arch. fur physiol. Heilk., 1849, t. VIII, p. 186). ■ — Modus der Herxbetvegung {Archiv fiir physiol. Heiïkunde, 1850, t. IX, p. 55). {g) Jager, Dissertalio de effectihus arsenici in varies organismes. Tiibiiigen, 1808. — Brodie, Op. cil., p. 82 et suiv. — Scliiff, Op. cit., p. 55. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. Hil perd en cinq ou six minutes dans le gaz acide carbonique, et en deux minutes quand il est exposé à l'action du chlore (1). § 8. — Mais si le principe de l'irritabilité musculaire ne innuence réside pas dans le système nerveux , il n'en est pas moins '^'ner'veur évident que les divers foyers d'innervation exercent une très déYdoppement grande influence sur le développement de cette force. Effec- la conlracuiité tivement, nous avons déjà vu, par les expériences de Légal- ^"^ ''*^"'^" lois , que la destruction brusque de la moelle épinière arrête les mouvements du cœur, et Wilson Philip a trouvé que le ■ même effet se produit lorsqu'on écrase tout à coup le cerveau (2). Mais, lorsque préalablement, on a interrompu les communica- tions nerveuses entre le système cérébro-spinal et le cœur, en coupant les deux nerfs pneumogastriques qui s'étendent de la moelle allongée jusque dans l'abdomen et qui fournissent des branches à cet organe, la destruction de la moelle épinière ou de l'encéphale n'est plus suivie des mêmes effets : le cœur continue à battre. Les effets sédatifs de certains médicaments sur la circula- siii" un nerf, cette substance en clé- l'hydrogène ou dans l'azote le cœur truit aussi l'excitabilité ; mais, intro- cessa de se contracter au bout d'en- duite dans la circulation , elle ne viron une heure , mais sans avoir produit pas le même effet. perdu son irritabilité. Dans le gaz L'opium exerce une action sédative acide sulfhydrique la paralysie s'est sur le cœur, même chez des Animaux déclarée, terme moyen, au bout de dont tout l'axe cérébro-spinal a été douze minutes , et dans l'acide car- délruit préalablement (a). bonique au bout d'environ six miautes. (1) M. Castell a publié une série Le protoxyde d'azote détermine des intéressante d'expériences sur la durée effets non moius prompts, et l'action de l'activité du cœur séparé de l'orga- sédative du gaz acide sulfureux est nisme et placé dans divers gaz. Elles encore plus rapide. Enfin, le gaz acide ont été faites sur des Grenouilles, et hydrochlorique , de même que le ce pliysiologiste a vu que dans l'oxy- chlore, détruit toute irritabilité en gène les battements persistaient pen- deux minutes (6). dant douze heures, tandis que dans (2) Voyez ci-dessus, page 136. (a) Castell, Veber das Verhalten des Herzens in verschiedcnen Gasnrteii (Miiller's Archiv fur Anal, urul PhysioL, 1854, p. 248). (b) Wliytt, An Account ol Experiments made with Opium on living or duhig Animais {\Vorl<;s, 17G8, p. 3H), 148 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. tion , la digitale, par exemple , sont la conséquence de Tac- tion de ces substances sur le cerveau , et cessent de se pro- duire quand la communication entre le cœur et l'encéphale par l'intermédiaire des nerfs pneumogastriques vient à être inter- rompue. On peut donc les citer aussi comme preuves de l'influence de l'axe cérébro-spinal sur les mouvements du cœur (1). Mais l'action des grands centres nerveux sur les mouve- ments de cet organe est plus facile à mettre en évidence à l'aide (1) Vers la fin du siècle dernier, Cuilcn, médecin célèbre d'Edimbourg, constata la propriété dont jouit la di- gitale pourprée de ralentir les batte- ments du cœur, et depuis lors on a fait souvent nsage de ce médicament pour combattre les palpitations, les hé- morrhagies, etc. Administrée à doses modérées, elle détermine en général une diminution de 15 à 20 pulsations par minute et même davantage. Fer- riar a vu le nombre des battements du cœur êlre réduit ainsi de moitié, et l'on cite un cas dans lequel le pouls est tombé à 17 sous l'influence de celte substance [a). A hautes doses, la digitale produit souvent des eflels contraires. Ilécemment, M. Traube (de Berlin) a fait des expériences inté- ressantes sur l'action de cette sub- stance. En injectant une certaine quantité de digitale dans les veines d'un Chien, il a fait descendre le pouls de 128 à 32 dans l'espace d'une heure ; mais quand la dose dépassait certaines limites, les battements du cœur se sont accélérés et sont montés à plus de 200. Lorsque les nerfs pneumogas- triques élaient coupés préalablement, l'injection de la digitale dans les veines ne déterminait aucun effet appréciable sur les mouvements du cœur (b). Il est aussi à noter que dans cer- tains états pathologiques du système nerveux, dans les cas de commotions violentes du cerveau, par exemple, le pouls devient souvent très rare. Chomel cite un cas de ce genre dans lequel, pendant plusieurs heures, le cœur ne donnait que IZt battements par minute (c). On a vu aussi les battements du cœur devenir intermittents sous l'in- fluence de la pression exercée par une tumeur sur les filets des nerfs pneu- mogastriques qui se rendent au plexus cardiaque [cl). (a) Ferriar, An Edsay on the Médical Properlies o/'Digitalie purpurea, 1799. HamiUon, Observ. on Digitalis purpurea oî' Foxçjlove, 1807, p. 87. Biilaull de Viiliers, Essai sur les propriétés médicinales de la digitale ponrprée, 1812. Hoinollc et (îuevenne, Mém. sur la digitaline et Im digitale pourprée {Archives de physiO' logie de Bouchardat, 1854, p. 170). (fc) Traube, Ueber die Wirkuncjcn der DujiiaUs (CaiislaU's Jahresbericht, 1853, t. V, p. 121). (c) Chomel, Pathologie générale, p. £08. {d} Heine, Ueber die organische Ursache der Herz^bewegung (Miiller's Arcliiv fiir A1}al. und physioL, 18 il, p. 23 4). . IKFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SLR LE COEUR. 1 /l9 des expériences dans lesquelles on fait passer à travers la sub- stance de ces foyers d'innervation un courant galvanique dis- continu. En agissant de la sorte sur la moelle épinière, on détermine dans tous les muscles de l'appareil locomoteur des contractions tétaniques d'une grande violence , sans affecter notablement l'action du cœur ; mais M. Weber et M. Budge ont trouvé que si l'on dirige le même courant sur la moelle allongée, on arrête aussitôt les mouvements de ce dernier organe, et ce n'est pas une contraction permanente qu'on y détermine de la sorte, c'est un état de repos, une sorte de paralysie (1). La (1) La plupart des auteurs attri- buent tout le mérite de cette décou- verte iinporlante à M. Ed. Weber (de Leipzig) ; mais elle me paraît avoir été faite en même temps par ce phy- siologiste et par M, Budge. Le point de départ de toutes ces expériences est un travail publié en 1837 par M. Masson. Ce physicien trouva que le passage d'une série ra- pide de commotions galvaniques de la tète à Tabdomen détermine non- seulement des contractions tétaniques générales d'une grande intensité , mais la mort très promptemcnt (a). En 18/45, M. Er. H. Weber commu- niqua à la réunion des naturalistes italiens à Naples les résultats des re- cherches qu'il avait faites en com- mun avec son frère sur la contrac- tion musculaire, et d'après l'influence que l'excitation électro-magnétique de la moelle allongée ou des nerfs pneu- mogastriques exerce sur les mouve- ments du cœur, il arriva à cette con- clusion : que l'énergie de ces mouve- ments dépend csscntiellementde l'axe cérébro-spinal ; que le centre d'action de cette force est dans la moelle allon- gée ; que les nerfs pneumogastriques la transmettent de là au cœur; enfin que le rhythme des mouvements du cœur est réglé par le grand sympa- thique (6). Au commencement de I8Z16 , M. Budge publia des expériences éta- blissant que, chez la Grenouille, le passage d'un courant électro-magné- tique discontinu dans la moelle allongée détermine le repos du cœur, tandis que les muscles de la vie ani- male sont mis dans un état de con- traction spasmodique, et que les mou- vements du cœur sont égalemcntsus- pendus par la galvanisation discontinue des nerfs pneumogastriques (c). Peu de temps après, MM. Weber firent paraître pour la première fois, (a) Masson, De Vinduction d'un courant sur lui-mâine {Ann. de chimie et de physique, 1837, t. LXVI, p. 29). (6) Wcljcr, Circa l'in/luenza deli' asse ccrebro-spinnle et del gvan simpatico su i movimenli del cHore [Atti délia setlima adunanza degli scienziali ilaliani tenuta in Napoti, in octobre 1845, p. 712, N^jpoli, 18i0). (c) Bii'Igc, liriefliche Milthcilini'j iiber die llcnbewcfiunfj (Miillcr's Archiv fur Anat. viid l'hynoL, 1840, p. 2'Ji). 150 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. section ou la ligature des nerfs pneumogastriques empêche ces effets de se produire ; mais si l'on galvanise de la même en Allemagne, le travail dont des ex- traits avaient été communiqués pré- cédemment à la réunion des natura- listes italiens, et en ce qui concerne le point dont nous nous occupons ici, ils y formulèrent des conclusions identiques avec celles présentées par M. Budge (a). Une discussion s'est alors élevée sur la question de priorité entre M. Budge et MM. Weber, et c'est à raison de la communication faite l'an- née précédente, à la réunion de Naples, que l'on donna gain de cause à ces derniers. Mais rien dans les actes de cette réunion n'autorise à croire qu'antérieurement à la publication de M. Budge, M^]. Weber eussent re- connu l'elfet sédatif produit sur le cœur par la galvanisation discontinue de la moelle allongée ou des pneumo- gastriques ; et s'ils avaient vu que dans ces expériences les battements du cœur étaient arrêtés, il y a tout lieu de croire qu'ils attribuaient cet arrêt à une contraction permanente de l'organe et non au relâchement de ses fibres, puisqu'ils concluent de ces mêmes expériences que le priucipe d'activité du cœur réside dans la moelle épinière. Si la question de priorité ne devait se décider que sur ces pièces, M. Budge me paraîtrait donc avoir été incontestablement le premier à faire connaître au public le phénomène si curieux du repos du cœur sous l'influence de l'excita- tion de la moelle allongée ; mais on trouve dans les Annales d'Omodei , publiées à Milan , un autre docu- ment qui porte la date de 18/|5, et qui établit d'une manière plus nette les droits de MM. Weber, C'est un article des frères Weber, relatif aux expériences dont ils avaient commu- niqué précédemment quelques résul- tats au congrès de Naples, car le fait de l'arrêt des mouvements du cœur y est formellement annoncé (6). On sait cependant que les journaux de méde- cine italiens paraissent souvent fort longtemps après le moment qui est indiqué sur leur litre, et dans le mé- moire publié par ces auteurs en 1846, il n'est pas fait mention de l'article dont je viens de parler. Il me semble donc probable que la découverte de MM. Weber a été faite à peu près en même temps que le travail de M. Budge, et que c'est indépendamment l'un de l'autre que ces deux auteurs sont arrivés au même résultat. Quoi qu'il en soit , les faits ainsi introduits dans la science ont été bientôt après vérifiés et complétés par les expériences de MM. SchifT (c). [a) E. FL Weber, Ueher E. Weher's Entdeckungen in der Lehre von der Muskel Contraction (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 184G, p. 497). (&) Expérimenta physiologica in Iheatro anatomico Lipsiensi facta a professorïbus Ed. et Ern. H. Weber fratribus et ab hoc c^im viris doctis seplimi congressus Italici communicata. Napoli {Ann. univers, di medlcina del Doit. Omodei, t. GXVI, p. 227, nov. 1845). (c) Schiff, Experim. Untersuch. iiber die Nerveii des Herzens {Arch. fur physiol. Heilkunde, 1849, t. VIII, p. 1G6 et 442). — Der modus der Ber%beiuegung [Arch. fiir physiol. Heilkunde, t. IX, p. 60). INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 151 manière le tronçon cardiaque du nerf coupé, on suspend les contractions du cœur, tout comme en galvanisant dans les Bôffa et Ludwig (a) , Claude Ber- nard (6), Brown-Séquard (c) et plu- sieurs autres physiologistes {d). On avait d'abord pensé que, pour produire cet arrêt des mouveuienis du cœur par la galvanisation des pneumogastriques, il fallait agir à la fois sur ces deux nerfs ; mais M. Schiff a constaté que ce résultat peut être obtenu par la galvanisation d'un seul de ces nerfs, pourvu que le courant d'induction soit assez puissant (e), et que, si l'Animal soumis à l'expérience est très vigoureux, l'effet sédatif est moins marqué et ne détermine sou- vent qu'un ralentissement du pouls. Il paraîtrait aussi, d'après les expé- riences de M, Cl. Bernard, que l'in- fluence exercée sur le cœur par la galvanisation des nerfs pneumogas- triques, est moins grande chez les Oiseaux que chez les Mammifères et les Batraciens (/"). Si l'on continue l'expérience au delà d'un certain temps, l'influence paralysante s'émousse , et les batte- ments du cœur peuvent se rétablir spontanément (g); mais on peut alors produire un nouvel arrêt en faisant passer le courant d'induction dans une portion du nerf située au-dessous du premier point d'application (h). M. Eckhard a constaté qu'en sou- mettant les pneumogastriques à l'ac- tion du sel commun, on produit sur le cœur les mêmes effets qu'en surex- citant ces nerfs à l'aide d'un courant galvanique discontinu (i). Enfin, il résulte des expériences de M. Waller, que l'exercice de cette in- fo) Hoffaet Ludwig', E'inige neue Yersuche ûber Herzbeweguncj {Zeitsclirlfl fur ralioim. Medicin, d850, t. IX, p. 127). (b) En 1848, M. Lefebvre mentionna brièvement le fait de l'arrêt du cœur observé par M. Cl. Ber- nard quand ce physiologislo galvanisait l'extrémilc périphérique des nerfs vagues {Observ. d'anat., de physiol. et depathoL, thèse, Paris, 1818, n° 58), et plus récemment M. Cl. Berjiard a publié une nouvelle série d'expériences sur ce sujet {voyez Leçons sur la jjhysiologie et la pathologie du sys- tème nerveux, 1858, t. II, p. 381 et suiv.). (c) Brown-Séquard, De l'arrêt passif des battements du cœur par l'excitation galvanique de la moelle allongée et par la destrucli07i subite du centre cérébro-rachidien {Comptes rendus de la Soc. de biologie, 1850, t. II, p. 20). (d) Maycr, Ueber die Eimoirkung der Magnetelektricitàt auf das Bluther& und die Lymphher- zen (Froriep's Neue Notizen, 184G, l. XXXVIII, p. 312). — Jacobson, Questiones de vi nervorum vagorum in cordis motu. Halis, 1847 (voyez Canslalt's Juhresber., 1848, t. I, p. 105). — Bidder, Ueber funclionell verschiedene und rdumlich getrennte Nervencentra m Frosch- herxen (Miiller's ,4)c//. fiir Anat. und Physiol., 1852, p. 163). — Voyez aussi Budge, Einftuss der Reiz-ung und Zerslôrung von Theilen des Gehirns und liûclcenmarks auf Beiuegung der vom N. .^ympalhicus versorglen Organen (Wagner's llundivurter- buch der Physiologie, 1846, t. 111, p. 412). {e} ScIiilT, Exper. Untersuch. ûber die Nerven des Herzens {Arch. fur physiol. Ileilk., l. VIII, p. 179). if) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et la pathologie du système nerveux, 1858, l. Il, p. 394. (g) Weber, Op. cit. — Valentin, Grundriss der Physiologie, p. 551. {h) Scliiff, Op. cit. {Arch. fur physiol. Ileilkunde, 1840, l. Vlll, p. I"9). (i) Kckliard , /nr Théorie der Vagns-Wirkung (Miillor's Arch. fiir Anal, und Physiol., 185), p. 205]. 15*2 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. circonstances ordinaires le cenfre nerveux dont ce cordon émane (1). fluence sédalive est subordonni^e à rintégrité des filets nerveux que les pneumogastriques reçoivent de l'ac- cessoire de Willis; car si l'on détruit celui-ci d'un côté du cou, la galvani- sation du pneumogastrique corres- pondant devient sans effet sur le creur, tandis qu'en agissant de la même manière du côté opposé, on arrête, comme d'ordinaire, les batte- ments de cet organe {a). \\. Brown-Séquard a constaté que la piqûre ou l'ablation de la portion de la moelle épinière appelée le point vital, peut produire sur le cœur des effets analogues à ceux déterminés par la galvanisation de celte portion du système nerveux; le pouls dimi- nue subitement de force et de vitesse ou s'arrête même complètement (6). Enfin, ce physiologiste pense que le ralentissement ou l'arrêt du pouls qui avait été observé par M. Weber et quelques autres physiologistes, lors des mouvements respiratoires labo- rieux (c), ne dépend pas seulement des effets mécaniques de ces mou- vements sur le cœur , mais lient plutôt à l'action nerveuse qui est dé- veloppée pour les produire, et qui s'étendrait au cœur aussi bien qu'aux muscles thoraciqucs. Effectivement, quand le pouls est devenu lent, M. Brown-Séquard a vu un ralentis- sement marqué dans les contractions du cœur à la suite de chaque effort inspiratoire, chez de jeunes Animaux dont le thorax avait été largement ouvert (d). (1) La suspension de la fonction conductrice des nerfs en général, par l'effet des ligatures, est bien connue depuis longtemps, et M. Stannius a constaté que par ce moyen on empêche la manifestation des phénomènes qui, dans les circonstances ordinaires, ré- sultent de l'action de la moelle épi- nière sur le cœur. Ainsi le passage d'un courant galvanique discontinu dans cette portion du système ner- veux n'arrête plus les mouvements du cœur quand les pneumogastriques sont liés (e). Je rappellerai aussi que, par l'ac- tion toxique de certaines substances, du curare par exemple, on peut rendre les nerfs pneumogastriques inaptes èi remplir leurs fonctions ordinaires ; et lorsqu'ils sont sous l'influence de cet agent, l'excitation intense de la moelle allongée par le courant d'in- duction reste sans effet sur les mouve- ments du cœur(/"). Quand les nerfs ont été excités de la sorte, l'écrasement (a) Wallcr, Expériences sur les nerfs pneumogastrique el accessoire de Willis {Gaz. méd., 1856, p. 420). (b) Bi-n\vn-Séquard, Recherches sur les causes de la mort après l'ablation de la partie de la. moelle allongée qui a été nommée point vital (Journal de physiologie, 1858, I. I, p. 22i2). (c) Voyez ci-dessus, pa^çc 87. {d) Brown-Séquard, Note sur l'association des efforts 'mspiratoires avec une diminution ou l'arrêt des mouvements du cœur (Journal de physiologie, 4 858, t. I, p. 512). (e) Siannius, Ziuei Reihen physiologischer Versuche (Miiller's Archiv (ûr Anat. und PhysioL, 1852, p. 85). (/■) Cl. Bernard, Leçons sur les effets des substances toxiques, 1857, p. 348, 367, etc. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 153 § 9. — Il est donc bien démontré qu'il existe des relations in- times entre le mode d'action dn cœur et de la moelle allongée, et que ces relations s'établissent principalement, sinon exclusi- vement, par l'intermédiaire des nerfs pneumogastriques (1). D'après les faits que je viens de rapporter, on serait tenté de croire aussi que l'influence exercée par ce foyer d'innervation est essentiellement sédative et tend à arrêter les mouvements du cœur. Une autre expérience dont les résultats sont moins nets, mais n'en sont pas moins très intéressants, semble au premier abord mettre ce point hors de toute contestation. Quand on coupe les nerfs pneumogastriques et que l'on soustrait, par conséquent, le cœ^ur à l'action directe de la moelle allongée, on voit les battements de cet organe s'accélérer ('2). On en a conclu brusque de la moelle épinière est éga- comme cela s'est vu plusieurs fois (6), lement sans influence sur les batte- c'est encore à l'arrêt des battements ments du cœur. du cœur qu'il faut attribuer ce singu- (1) M. Brown-Scquard a constaté lier phénomène (c). que l'écrasement rapide de l'un des (2) Cette accélération des mouve- ganglions semi - lunaires détermine mcnls du cœur, à la suite de la section aussi l'arrêt des mouvements du des nerfs pneumogastriques , a été cœur , mais que cet effet se produit constatée par beaucoup d'cxpérimen- probabiement par suite de la réaction tateurs ; mais ce phénomène n'est exercée sur la moelle allongée, car le pas constant, et quelquefois l'effet même résultat ne s'obtient pas quand contraire s'observe. Ainsi, dans deux li'S nerfs pneumogastriques ont été expériences de ce genre faites sur des coupés préalablement (a). Ce physio- Chiens par MM. Hoffa et Ludvvig , logiste explique ainsi les cas de mort on mesura, à l'aide d'un instrument subite produits par l'application d'un particulier qui représente graphique- coup violent siu- le ventre, et il pense ment la marche des pulsations du que lorsque l'ingestion d'une certaine cœur, la durée des mouvements de quantité d'eau très froide dans l'eslo- systole et de diastole des ventricules mac a été immédiatement mortelle, avant et après la section de ces nerfs. (a) Browii-Séquaril, Recherches expérimentales sur la physiologie el la palholoijie des capsules surrénales, \<. ^0 (exlr. des Archives générales de médecine, 1856). (b) Voyez Guérard, Considérations générales sur l'hygiène et sur les accidents gui peuvent succéder à l'ingestion des boissons froides lorsgue le corps est échauffé [Annales d'hygiène pu- blUiue, 1842, t. XXVII, p. />3). (c) Brown-Séqiiard, Rechercltes sur les causes de lu mort après l'ablation de la partie de la moelle allongée nommée point vital [Joxirn. de physiologie, 1858, p. 230). 15/|. MÉCANISME DE LA CIRCULATION. que dans l'état normal le système cérébro-spinal tient, pom^ ainsi dire, en bride la force contractile du cœur, et que l'exal- tation de cette puissance sédative déterminée par le passage d'un courant galvanique discontinu dans la moelle allongée est la cause du repos qui se manifeste dans cette circonstance (1). Mais cette hypotbèse n'est pas en accord avec l'ensemble des faits connus ; car, dans d'autres cas , on voit l'excitation de l'axe cérébro-spinal produire une augmentation dans l'action du cœur. Ainsi , plusieurs physiologistes ont vu le pouls s'accélérer lorsqu'ils excitaient directement le cerveau ou la moelle épinière Dans la première expérience, la durée moyenne d'une série complète de ces mouvements était de 0,22 secondes avant la section , et de 0,15 après l'opération ; mais dans la deuxième expérience le résultat fut inverse ; la tlarée moyenne des baltements était de 0,18 avant et de 0,20 après la sec- tion des pneumogastriques (a). Dans les expériences faites sur des Chiens, le nombre des battements du cœur a souvent doublé à la suite de la section des nerfs pneumogastri- ques (b) ; mais il paraîtrait, d'après quelques expériences de M. A. Mo- reau, que chez les Grenouilles cette opération est sans influence sur le nombre des pulsations (c). M. Eckhard a trouvé que si l'on fait passer un courant galvanique con- tinu et puissant par une partie du pneumogastrique, on produit le même elTet que si l'on coupait ce nerf, et que les mouvements du cœur s'accé- lèrent (d). (1) Quelques physiologistes pensent qu'il existe une sorte d''antagonisme entre l'action de la moelle allongée qui s'exerce sur le cœur par l'inter- médiaire des pneumogastriques et celle de la portion cardiaque du grand sympathique ; que cette dernière se- rait excito-motrice et la précédente sédative (ou bridante, pour employer ici l'expression adoptée par les auteurs allemands) , de sorte que les mouve- ments de cet organe seraient réglés par la résultantede ces deux forces(e;; mais cette hypothèse ne paraît pas être fondée et ne compte aujourd'hui que peu de partisans. (a) Ludwig und Hoffa, Einige neue Versiiche ûber Herzhexuegung (Zeitschr. fur ratioiin. Med., 1850, t. IX, p. 140). (b) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et la pathologie du système nerveux, t. II, p. 394. (c) Voyez Cl. Bernard, Op. cit., p. 395. {d) Eckhard, Physiologie des nerfs et traitement du tétanos (Gazette hebdomadaire de méde- cine, iS5i, i.l, \\ 601). (e) E. H. Weber, Ueber Ed. Weber's Entdeckungen in der Lehre von der Muskelcontraciion (MLiller's Arch. fur Anat. und Physiol., 1846, p. 503. — Valentin, Grundriss der Physiologie, p. 563. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 155 en appliquant de l'alcool sur la surface de ces organes préala- blement dénudés (1). On connaît aussi des substances qui, introduites dans le tor- rent de la circulation, agissent sur le système cérébro-spinal et déterminent également d'une manière consécutive une grande accélération dans les mouvements du cœur. La nicotine produit cet effet; et, pour s'assurer que l'excitation du cœur est bien le résultat, non de l'action directe du poison sur cet organe, mais de l'influence de cette substance sur le système nerveux. (1) Wilson Philip a fait cette expé- rience de la manière suivante sur des Lapins. L'Animal étant rendu insen- sible par un coup assené sur la tête, il ouvrit le thorax et pratiqua la respi- ration artificielle de façon à maintenir la vie. 11 découvrit ensuite le cerveau et la moelle épinière, et appliqua sur ce dernier organe un peu d'alcool. Une grande accélération dans les bat- tements du cœur se manifesta aussitôt. Le même effet fut produit par l'appli- cation de l'alcool sur le cerveau (a). Ces expériences ont été répétées par plusieurs physiologistes, et les mêmes résultats ont été obtenus (6). Pour bien apprécier l'influence que des excitations faibles de diverses parties du système nerveux peuvent exercer sur les mouvements du cœur, M. Scliiff a déterminé d'abord la ma- nière dont cet organe bat chez divers Animaux, après l'enlèvement du cer- veau. Il a vu ainsi que chez la Gre- nouille, le Bombiuator et le Lézard, les pulsations diminuent d'abord de fréquence assez graduellement , puis restent à peu près stationnaires pen- dant un temps assez long, après lequel elles se ralentissent de nouveau et deviennent irrégulières. Dans une se- conde série d'expériences, il a soumis les Animaux mutilés de la sorte à de faibles excitations galvaniques ou à l'action de divers stimulants chimi- ques appliqués sur la moelle épinière ou sur quelque autre partie du système cérébro-spinal, et il a constaté que, dans la plupart des cas, il en résultait une légère accélération dans les batte- ments du cœur (c). Chez un jeune Lapin, dont il avait lié les nerfs pneumogastriques pour empêcher la transmission de tout eO'et réflexe, il a vu les battements du cœur s'élever de 9Zi à 1 12 par minute, quand il excitait d'une manière très modérée la portion inférieure de ces nerfs par le galvanisme [d). (a) W. Ptiilip, An Expérimental Inquiry into the Laivs ofihe Vital Functions (1820, 3° cJit., p. 68). (6) Halliàay, Dissert, sur la cause des mouvements du cœur. Tiièsc, Paris, 1824, n" 90, p. 18. — Lontcel, Anai. et physiol. du système nerveux de l'Homme (t. I, p. 293). (c) Scliiff, Experimentelle Untersuchunyen iiber die Nerven des Herxens {Archiv fur physiolo- gische Heilkunde, 1849, t. VIII, p. 100 ol siiiv.). (d) Schiff, loc. cit., p. 233. 156 MÉCANISME Dli: LA CIRCULATION. il suffit d'interrompre la communication directe entre ces parties au moyen de la section des nerfs pneumogastriques , car alors la nicotine , tout en produisant les symptômes ner- veux observés précédemment , ne modifie pas la fréquence du pouls (1). Dans diverses expériences, on a vu aussi l'excitation des nerfs pneumogastriques être suivie d'une augmentation dans la Iré- quence du pouls (2). Enfin l'excitation de quelques parties du système ganglion- naire a été également suivie d'une certaine accélération dans les battements du cœur (3). (1) Ainsi, dans des expériences faites sur un Cliien, M. Cl. Bernard a vu que rintrodiiclion de quelques goutles de nicotine dans une plaie faite à la cuisse, détermina divers symptômes nerveux et fit monter le pouls de 115 à 332. Quelques jours après, l'Animal, étant parfaitement rétabli, fut soumis de nouveau à la même expérience , mais on coupa les nerfs pneumogas- triques avant d'administrer la nico- tine ; avant l'introduction de cette substance dans la plaie, le pouls était à '206, et après il ne devint pas plus rapide; au bout de quelques minutes, il descendit même à 195 , mais les symptômes nerveux généraux se ma- nifestèrent comme précédemment (a), (2) Je ne cite ces résultats qu'avec beaucoup de réserve ; car, dans la plu- part des expériences où l'accélération des mouvements du cœur a été obser- vée sous l'influence de l'action d'un faible courant galvanique continu sur les pneumogastriques (6), il est pos- sible que l'action de cet agent n'ait pas été limitée aux nerfs et se soit étendue jusque sur le tissu musculaire du cœur, où son passage détermine pres- que toujours des contractions. (J) Ce fait a été constaté par Bur- dach, en stimulant la portion cervi- cale du grand sympathique à l'aide d'applications alcalines (c). M. Longet a fait des observations analogues [cl), et M. Valentin a vu que chez les Ani- maux dont le cœur vient de cesser ses mouvements, on peut les réveiller en stimulant soit le nerf accessoire, soit le système sympathique cervi- cal (e). Enfin M. Vierordt assure que l'excitation de la portion cervicale du (a) Cl. Bernard, Leçons sur les effets des substances toxiques et médicamenteuses, p. 401 et liv. {b) Fowler, Experiments on Animal Electricity, 1794. — HuinbolJt, Expériences sur le galvanisme, p. 343. — Longet, Anatomie et physiologie du, système nerveux, t. II, p. 314. (c) Buniacli, Traité de physiologie, t. VIL, p. 74. (d) Longet, Anatomie et physiologie du système nerveux, t. II, p. 605 (e) Valentin, Grundriss der Physiologie, p. 507. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 157 Au premier abord, ces faits paraissent contradictoires, ou du moins fort difticiles à mettre en accord avec une tliéorie quel- conque de l'action nerveuse sur le cœur. Mais en les exami- nant de plus près, il me semble possible d'en saisir la clef. D'autres considérations, que je ne pourrai exposer qu'en faisant l'histoire des fonctions du système nerveux, me conduisent à penser qu'il existe une certaine solidarité entre la puissance vi- talequi se développe dans divers organes et qui revêt tantôt le caractère de la sensibilité ou de la force excito-motrice, d'autres fois celui de la puissance mécanique ou môme d'un agent chi- mique, et qu'il y a une sorte d'équilibre instable entre ces diverses forces; de telle sorte que tout accroissement dans la production ou dans la dépense de l'une d'elles dans un point déterminé de l'organisme tend à déterminer un certain effet, une augmentation ou une diminution dans la quantité de force emmagasinée , pour ainsi dire, dans les autres parties de l'organisme. Ainsi, il me semble qu'on peut s'expliquerl'affaiblissement ou l'arrêtdesmou- vemenls du cœur, soit dans le cas ou l'on écrase le cerveau, soit dans celui où l'on fait passer un courant galvanique discontinu dans les parties du système nerveux qui sont le plus directe- ment en relation avec le premier de ces organes, en supposant qu'on détermine ainsi une dépense excessive de la puissance ner- veuse, et qu'alors la force engendrée dans le cœur, et employée d'ordinaire à faire battre cet organe, s'en écoule pour se porter vers l'axe cérébro-spinal ; tandis que dans le cas où l'on stimule gi'and sympaihiqiic par un courant vulecœur de la Grenouille battre avec galvanique continu détermine aussi plus de force et de rapidité quand il une accélération dans les mouvements galvanisait le bulbe aortique , où se du cœur («). trouvent beaucoup de branches du Il esl aussi à nolcr que M. Weber a plexus cardiaque (6). (a) VieronJt, Jjie l.ehrc vom Arlerienpuls, p. 08 (1855). {b) E. II. Wclier, Ueber Ed. Weber's litildeckungen m dev Lehre voit der Muskekonivocliun (Miiller's Archiv fur Anal, nnd l'ysiol., iHW, p. 50-2). 158 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. le cerveau ou la moelle épinière de façon à en exalter l'action et non à l'épuiser, on détermine par l'intermédiaire des pneumo- gastriques un courant en sens inverse, et l'on augmente la charge nerveuse du cœur. Si cette hypothèse est vraie, toute dépense excesssive de force vitale doit tendre à arrêter ou à affaiblir les mouvements du cœur. La douleur, quel qu'en soitlesiége, semble devoir être considérée comme un phénomène de cet ordre ; et, par conséquent, une douleur intense aurait pour effet de ralen- tir ou de suspendre l'action de cet organe. Or, l'expérience nous apprend que, dans un grand nombre de cas, le pouls devient rare ou cesse même complètement de se faire sentir pendant quelque temps, lorsque des accidents nerveux de ce genre se manifestent (1). (1) Les mouvements du cœur sont également suspendus , ou tout au moins beaucoup ralentis par une com- motion violente. Ainsi, quand on jette fortement à terre une Grenouille, on voit les battements de cet organe s'arrêter subitement, et cette espèce de paralysie persiste pendant quelque temps après que l'Animal a recouvré la faculté d'exécuter des mouvements généraux. Une douleur intense, celle produite par l'écrasement de la patte, peut déterminer aussi un arrêt plus ou moins long dans les fonctions du cœur chez ces Batraciens, et la lésion qui occasionne cette douleur est en- core suivie des mêmes effets, lors même que l'Animal est devenu insen- sible à la souffrance par la destruction préalable de son système cérébro- spinal (a). On doit à M. Cl. Bernard une série d'expériences intéressantes sur l'in- fluence que l'excitation des racines des nerfs rachidiens exerce sur les mouvements du cœur; nous aurons à y revenir bientôt, et je me bornerai à ajouter ici que les sensations doulou- reuses même très légères que l'on produit de la sorte sont toujours sui- vies d'un arrêt brusque, mais de peu de durée , dans les battements de cet organe (6). Chacun sait qu'une émotion vive est susceptible de produire la syncope, état dans lequel les battements du cœur sont suspendus ou extrêmement affaiblis et ralentis. M. Wagner a observé quelque chose d'analogue chez le Lapin. lia vu qu'en effrayant l'Animal on peut produire un arrêt momentané du cœur ; le pouls normal est très fréquent et l'ar- (fl) Biidge, Die Abhdngigkeil der Herzbevjcgîing vom Riickenmarke vnd Gehirne {Archiv fur physiol. Heilkunde, 1846, t. V, p. 584). — Scliiff, Experimentelle Untersuclmng ûber die Nerven des Herxens {Archiv fur physiol. Heilkunde, 1849, t. VIII, p. 170 et suiv.). (&) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et la pathologie du système nerveux, t. II, p. 2G8. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. l5Ô Mais comment se fait-il alors que les battements du cœur soient accélérés par la section des nerfs pneumogastriques? L'explication de ce résultat nous sera fournie quand nous étu- dierons Faction des nerfs sur les vaisseaux capillaires. Nous verrons alors que si l'on soustrait les petites artères à l'influence du système nerveux , on en détermine une sorte de paralysie qui en amène l'élargissement. II est donc à présumer qu'à la suite de la section des pneumogastriques, les vaisseaux de la substance du cœur se dilatent, et recevant plus de sang dans leur intérieur, les fibres musculaires circonvoisines sont plus sollicitées à se contracter, et entrent en action plus fréquemment que d'ordinaire, bien que leur puissance contractile soit di- minuée (1). § 10. — Dans une autre partie de mon cours, je reviendrai rêt déterminé de la sorte dure environ galvanisation de la moelle allongée ou une seconde, puis les battements du des pneumogastriques, le système ir- cœur s'accélèrent (a). rigatoire du cœur se resserre au point (1) M. Brown-Séquard pense qu'il d'empêcher le sang d'arriver aux faut attribuer à un phénomène in- fibres musculaires de ce viscère, cir- verse, c'est-à-dire à un état de con- constance qui les priverait tout à coup traction spasmodique des vaisseaux du stimulant dont le contact est né- capillaires du cœur, la paralysie de cet cessaireàleur action, etqni, parconsé- organe qui résulte de la galvanisation quent, ferait cesser leurs contractions de la moelle allongée ou des nerfs rhythmiques (6). Gette explication pa- pneumogastriques. Nous savons que raît au premier abord très plausible ; les nerfs du cœur se distribuent en mais si la paralysie temporaire du grande partie aux vaisseaux sanguins cœur, qui résulte de la galvanisation de ce viscère, et nous verrons dans de la moelle allongée, dépendait d'une ime prochaine Leçon que la galvani- cause de ce genre, le tissu charnu des sation des nerfs' qui se rendent aux ventricules devrait être exsangue pen- parois des artères peut déterminer la dant qu'il est ainsi maintenu en repos, contraction de celles-ci. M. Brovvn- et, à en juger par sa couleur, il ne se .Séquard suppose donc que lors de la trouve pas dans cet état (c). (a) Wagner, Neurolorjische Untersuchungen, d854. {b) IJrown-Séquard, Cause of the Stopping of the Hearts Movements Produced by an Excilallon o{ ihe Medulla oblongala or the Par vaguin {f:.j:perimcntal Researches applied to Physiology and Palhology, 1853, p. 77). (c) Vulpiaii, flech. expérim. sur la conlructUltc des vaisseaux, p. 5 (oxlr. <.tos Méin. de la Soc de biologie, 1858). ilVxeilabililé. 460 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. sur cette manière d'envisager les relations qui existent entre le cœur et les divers foyers d'innervation ou de leurs annexes (1); et en ce moment je me bornerai à ajouter que pour se rendre compte de la cause des modifications qui s'observent souvent dans le mode d'action du cœur, il est nécessaire de porter encore plus loin l'analyse des phénomènes physiologiques, et de dis- tinguer, par exemple, ce qui tient d'une part à la production, et d'autre part à l'emploi de la puissance contractile de cet organe. La ruissance EtTectivcment, les circonstances qui sont favorables à l'un TcsTpàs'' de ces résultats ne le sont pas toujours à l'autre, et en général arc'îe^degré ïl scmblc mêmc y avoir à cet égard une espèce d'antago- nisme; de sorte qu'une grande irritabilité du cœur, ou, en d'autres mots, une grande fréquence dans ses contrac- tions, toutes choses étant égales d'ailleurs, est plutôt un indice de faiblesse que d'activité dans le développement de sa puis- sance contractile. Ainsi, dans la dernière Leçon, nous avons vu que chez les Animaux grands et vigoureux les battements du cœur sont rares, tandis qu'ils sont fréquents chez ceux qui sont petils et faibles. Nous avons vu également que la fatigue accé- (d) Lorsque nous éludierons les taires, en faisant agir du sel marin fonctions de la vie animale, nous ver- sur le nerf qui s'y distribue, et que rons que les phénomènes dont il vient cet état tétanique cesse dès que l'on d'èlre question ne s'observent pas fait passer un courant galvanique dans seulement dans le cœur, et se produi- ce même nerf (o). On a formulé d'une sent dans les muscles de l'appareil de manière générale ces faits, en disant la locomotion , quand ces organes que la galvanisation du nerf change viennent à se contracter d'une ma- l'état du muscle correspondant, le fait nière indépendante de la volonté. contracter quand il est en repos , et Ainsi M. Eckhard a trouvé que l'on le met en repos quand il est en con- peut déterminer des contractions traction (6). spasmodiqucs dans les muscles volon- (a) Eckhard, Physiologie des nerfs el traitement du tétanos [Gazette hebdomadaire de méde- cine, 1854, t. I, p. G06). (b) Cl. Bernai d, leçons sur la l'hysiologie et la pathologie du système nerveux, 1858, 1. 1, r. 207. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 161 1ère le pouls, et l'on remarque encore que d'ordinaire les mou- vements du cœur se précipitent beaucoup aux approches de la mort (1). On a constaté aussi que dans les pulsations de ce genre, malgré la vitesse des battements, la pression exercée sur le sang par les contractions du ventricule gauche diminue beau- coup, ce qui indique un affaiblissement dans le travail de cet organe. L'indépendance du degré d'irritabilité du cœur (c'est-à-dire de l'aptitude plus ou moins grande de cet organe à se contracter sous l'intluence d'un stimulant d'une intensité donnée) et de la quantité de force motrice engendrée par sa contraction, semble ressortir aussi de quelques expériences dans lesquelles on est parvenu h le rendre presque indifférent à l'action excitante du sang sans affaiblir notablement la puissance des systoles qui s'y effectuent de loin en loin. Ainsi lorsque, après avoir coupé les pneumogastriques, on galvanise le bout inférieur de ces nerfs, on arrête, comme nous l'avons vu, les battements du cœur; (1) Des phénomènes analogues s'ob- des Chiens da'ns un état de maigreur servent quand les forces générales de très grande, la pression du sang dans l'organisme sont très alFaiblies par les carotides ne faisait équilibre qu'à une hémorrhagie ou par quelque autre 90 ou 108 millimètres de mercure (a), cause ; le cœur est alors agité de pal- M. Cl. Bernard a vu qu"à la suite de pitations faibles et précipitées qui ont la section des nerfs pneumogastriques, beaucoup de ressemblance avec le le cœur, tout en battant avec beau- tremblement convulsif qui se manifeste coup plus de fréquence que d'ordi- souvcnt dans les muscles de l'appareil naire, a perdu une grande partie de locomoteur quand, sous l'influence du sa force; au lieu d'élever la colonne froid ou de toute autre circonstance, mercurielle du cardiomèlre à 15 ou la volonté devient impuissante à régler 18 millimètres, comme dans les cir- Paction de ces parlies. constances ordinaires, il ne la fait M. Lîudge a trouvé aussi que chez monter que fort peu (6). fa) Builtre, nericlil ûbcv die Arbeilenimphysioloyisclien InsliliU in Bonn [BcvVm, Med. Zeilschr., lK5i, 11° 50, p. 2i1). {Il) Cl. Hcrn.'ir.l, Injlnencc de la section des nerfs pneumoiiaslriques sur les conirticlions du (frnr (Cniiifles rendus de la Sdcirli de liiotoyie, 184(t, I. 1, |i. Vi). IV. 11 162 - MÉCANISME DE LA CIRCULATION. mais, au bout d'un certain temps, cet organe exécute quelques mouvements, et les contractions qui s'y déclarent alors, au lieu d'être très faibles, ainsi que l'on s'y serait attendu, parais- sent être souvent plus puissantes que dans les circonstances ordinaires (1). Je ferai remarquer également que l'irritabilité du cœur peut être accrue par l'action des stimulants qui déterminent cepen- dant la dépense de la force contractile engendrée dans son tissu. Par exemple, quand cet organe est affaibli et près de cesser ses battements, on le voit reprendre de l'excitabilité par cela seul qu'on l'a excité (2). § 11. — 11 est d'ailleurs à remarquer que ces relations entre le développement de la puissance contractile du cœur et l'action (1) MM. Liulwig et Hôffa ont étudié avec beaucoup d'auenlion les modifi- cations qui se manifestent dans le rhythme des mouvements du cœur, lorsque, après la section des nerfs pneumogastriques, on excite le tron- çon cardiaque de ceux-ci à l'aide d'un courant d'induction ; et ils ont trouvé que si ce courant n'est pas très intense, les lemps de repos du cœur sont prolongés, mais les systoles qui se déclarent de loin en loin ont souvent une grande puissance (a). M. Ludwig a vu aussi qu'après la cessation du courant d'induction à l'aide duquel on a arrêté les mouve- ments du cœur, cet organe bat sou- vent avec une rapidité extraordinaire ; il a compté jusqu'à 600 pulsations par minute (6). (2) Cette exaltation de l'irritabilité, par le fait même de l'emploi de celte propriété se voit très bien dans quel- ques-unes des expériences faites vers la fin du siècle dernier par l'illustre physicien de Berlin, M. de Humboldt. Ce savant a trouvé que si l'on excite de la sorte le cœur' détaché du corps d'un Animal vivant, non-seulement on y détermine directement des con- tractions, mais qu'on le rend plus apte à continuer de battre après que la cause de ces mouvements a cessé. Ainsi, dans une expérience faite sur le cœur d'une Carpe, lorsque cet or- gane ne donnait plus qu'un mouve- ment en quatre minutes et était devenu insensible aux irritations mé- caniques, M. de Humboldt y a fait passer pendant quelques instants un courant galvanique, et l'a vu alors se contracter avec rapidité non-seule- ment pendant l'application de ce sti- mulant, mais assez longtemps après. {a) Htiffa et Ludwig', Einige neue Versuche ûber Ilerziewegung (Zeilschrift fur rationnelle ■ Medizin, 4850, t. IX, p. 101). (&) Ludwig, Lehrb2ich der Physiologie des Menschens, 1856, t. II, p. 69. INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 163 des grands centres nerveux paraissent devenir d'autant plus intimes et plus nécessaires que l'organisme se perfectionne davantage. Ainsi il existe de grandes différences dans la durée de temps pendant lequel le cœur est susceptible de continuer à agir après avoir été séparé du reste de l'économie, et son indé- pendance est en général d'autant plus grande chez les Animaux appartenant à un même type zooolgique, que ceux-ci sont moins élevés en organisation. Le cœur d'un Poisson ou d'un Reptile, séparé du corps et abandonné, par conséquent, à ses propres forces seulement, continue à battre beaucoup plus longtemps qiie celui d'un Mammifère , et parmi ces derniers Animaux on a constaté, sous ce rapport, des différences qui coïncident aussi avec des inégalités dans le perfectionnement physiolo- gique (1). On a remarqué aussi que dans la classe des Mammi- fères ce phénomène est plus persistant chez le nouveau-né que chez l'adulte, et qu'il dure encore plus longtemps chez les Ani- maux hibernants, quand ils sont dans l'état de léthargie (2). Le cœur, réveillé pour ainsi dire par de MM. J. Czermak et Piotrowsky, le galvanisme, donna o5 pulsations que le temps pendant lequel le cœur par minute ; le nombre de ses batte- continue à battre, après son extirpa- ments descendit ensuite à 31, puis à tien du corps, varie suivant l'état dans 23, à 12 et à 3 par minute ; mais une lequel se trouve le système nerveux seconde application du galvanisme les au moment de l'opération : quand les porta de nouveau à 25 , et l'activité nerfs pneumogastriques ont été cou- de cet organe fut entretenue de la pés préalablement, les pulsations sont sorte pendant . près d'un quart en général moins persistantes que d'heure (a). Ces faits, auxquels les lorsque ces mêmes nerfs ont été sti- physiologistes n'ont pas accordé assez mulés (&). d'attention , me paraissent impor- (1) Voyez ci-dessus, page 139. tants, car ils jettent d'utiles lumières (2) Dans des expériences compara- sur beaucoup de phénomènes patho- livcs sur la durée de l'irritabilité mus- logiqaes. culaire pendant l'état de veille et l'état Il paraîtrait, d'après les expériences de léthargie, faites par Mangili, les bat- (o) Humliolilt, Expériences sur le galvanisme , Irad. par Jadelot, 1799, p. 345 et suiv. (b) .1. Czermak et l'ioirowski, Ueber die Dauer und Anaahl dcr Ventriliel-Conlractionen des ausgeschnitten Kaninclicnlierxens (SUximgsher, dcr Akud. xu Wien, 1857, t. XXV, p. 431). 16/l MÉCANISME DE LA CinCULATlON. L'élude attentive des mouvemenls du cœur nous rend égale- ment témoins de plusieurs autres phénomènes inléressanls, mais dont l'explication serait difficile et incertaine dans l'état actuel de nos connaissances ; et comme ces faits particuliers ne jetteraient aucune lumière nouvelle sur l'histoire générale des fonctions de cet organe, je ne crois pas devoir m'y arrêter. inAueiice § ^2. — 11 mc rcstcrait cependant une question importante nerleur '^ cxamincr : c'est la cause de la coordination des mouvements ^"ri.jMiimiq'ile''' ^li-'i sc rcmarqucnt dans les diverses parties constitutives de la '^"^duïœTr!"" pompe cardiaque, et qui se succèdent toujours dans un ordre régulier ; mais ici encore les faits significatifs nous font presque entièrement défaut. Cette coordination paraît être dévolue aux ganglions nerveux qui sont logés dans la substance des parois du cauu^ (1) ; mais leiïienls du cœur onl persisté pendant plus de trois iicures, après la décapi- lalion, chez dos Marmottes qui clalont plongées dans le sommeil liibei nal au moment de ropéialion; tandis que tliez un autre Animal de la même espèce, qui était éveillé depuis deux mois, tout mouvement de cet organe cessa en moins de cinquante minutes après la décapitation (a). Marshall- Hall a obtenu des résultats encore plus remarquables, dans des expériences analogues pratiquées sur des Héris- sons. La sccUon de la moelle allongée détermina, chez un individu en état d'activité, la cessation des battements du ventricule gauche et des oreillettes en quelques minutes, et les contrac- tions du ventricule droit s'arrêtèrent au bout d'environ deux heures ; mais chez un individu en léthargie, ce phy- siologiste, après avoir divisé la moelle allongée, enleva la totalité du cerveau et do la moelle épinière, et vit ensuite les battements du cœur continuer, d'une manière régulière et énergique, pendant plus de dix heures. Onze heures après l'opération, les contrac- tions spontanées de cet organe ces- sèrent, mais se rétablissaient encore sous rinfluence des stimulants méca- niques {b). (1) M. Volkmann a cherché à déter- miner le siège do la puissance coor- dinatrice des mouvements du cœur, en divisant de diverses manières cet organe et en observant les phéno- mènes qui se manifestent dans les h-agments ainsi obtenus. En opérant sur la Grenouille , où les pulsations persistent pendant assez longtemps malgré ces mutilations, il a trouvé ' (a) Mnngili, Mém. sur la léthargie périodique de quelques Mammifères {Annales du Muséum, t. X, p. 454 el siiiv.). [ly) Marsliall-H;ill, On Uibernation [Philos. Trans., 1832, f. 340). INFLUENCE DU SYSTEM!:; NERVEUX SUR LE COEUR. 165 les expériences tentées en vue de la détermination du rôle particulier de ces divers centres d'innervation n'ont pas conduit à des résultats nets, et les consé(|uences que l'on en que si l'on sépare le veulricule de la portion auriculaire du cœur, cette dernière continue à battre réguliè- rement, tandis que le ventricule reste en repos, ou, s'il se contracte , ses mouvements ne sont plus en har- monie avec ceux des oreillettes , mais son irritabilité persiste. En fai- sant une section longitudinale, il a vu que si la division est portée au delà d'un certain point, l'une des moitiés reste en l'epos, tandis que l'autre con- tinue de battre, mais que l'excitation du lambeau immobile est suivie d'un mouvement général. Si l'on achève la section, l'un des fragments continue à baîlre, et l'autre ne se contracte que sous l'influence d'un stimulant, et chaque irritation n'est suivie que d'une seule cou traction (a). M. Bidder a repris ce sujet de recherches, et a été conduit à ad- mettre une distinction entre les mou- vements rhythmiques du cœur, qui commencent toujours dans les oreil- lettes pour se propager ensuite dans le ventricule, et les mouvements sym- pathiques ou réflexes qui sont provo- qués par l'irritation locale d'un point de la surface de ce viscère. Les pre- miers continuent dans les oreillettes après que ceux-ci ont été séparés du ventricule, et M. Bidder les attribue à l'action des ganglions situés sur le trajet des branches du nerf pneumo- gastrique dans l'épaisseur de la cloison interauriculaire (6). Dans le ventricule isolé , les mouvements rhythmiques cessent immédiatement, mais l'irri- tabilité persiste , et chaque attouche- ment y détermine une contraction. Enfin, quand on enlève la portion de la base des ventricules qui loge les ganglions dont l'existence a été con- statée dans le voisinage des valvules auriculo-ventriculaires , l'irritation d'un point des parois du ventricule est encore suivie d'une contraction partielle, mais ne détermine plus de mouvementsgénéraux dans l'ensemble du viscère. Cependant la destruction de ces ganglions veniriculaires n'em- pêche pas les battements rhythmiques de continuer (c). M. Ludwig a vu aussi qu'en cou- pant en deux le cœur d'une Grenouille, de façon à avoir d'une part les oreil- lettes et la porlion voisine du ventri- cule, d'autre part la portion moyenne et inférieure du ventricule, on fait en général cesser les mouvements dans ce dernier fragment, tandis qu'on n'arrête pas les pulsations dans l'autre partie où se trouvent les principaux centres médullaires. Des faits du même ordre ont été (a) Volkniann , Nachiveisima der Nervencentra , von wekhen die Daveonnc der Lymph-und BhUrjefdss llerxen aus(jehl (Miillor's Archiv fur Anat. und PhysioL, 18'i4, p. /i23 cl suiv.). (b) Voyoz ci-dessiis lomo III, pajc 370, ut Ludwii?, Ueber die Herznerven des l'rosches (Miiller's Arch. fiir Anat. und PhysioL, i84S, p. d39, pi. 5). (c) ItiiJ.liT, Ueber funclionnell vcrscliiedene und rdumUch gelrennte Nervencentra im Frosch- hcnen (iMûller's Arch. filr Anat. und PhysioL, 1852, p. lO.'t, pi. 0). — Voyez aussi Roscnbcrgev, De cenlris motivwm curdis. Dorpal, ) 850. Résumé. 1G6 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. pourrait déduire sont trop hypothétiques pour prendre place dans un enseignement classique (1). § 13. — En résumé , nous voyons donc que le cœur ne tire son principe d'activité ni du cerveau, ni de la moelle allongée, ni de la moelle épinière, ni d'aucun des autres foyers nerveux qui sont situés plus ou moins loin de cet organe; qu'il puise en lui-même la force en vertu de laquelle il exécute ses mou- vements rhythmiques ; et que la volonté ne saurait exercer aucune influence directe sur la manière dont il bat, mais que son mode de contraction peut être considérablement modifié par l'action de divers centres nerveux , et plus particulière- ment de la moelle allongée ; que certains états de ces parties constatés par M. Ileidenheim. Ce phy- siologiste a vu que si l'on excise le cœur d'une Grenouille, et qu'on le place verticalement en laissant un peu de sang; dans son intérieur, on peut enlever les oreillettes sans influer nota- blement sur les battements du ventri- cule; mais que si l'on continue à en- lever par tranches le bord supérieur de ce dernier organe, on détermine d'abord un affaiblissement progressif, et l'on produit l'arrêt complet de ses mouvements lorsqu'on a rescisé une zone d'une certaine largeur, tout en laissant intacte la portion inférieure du cœur (a). (1) Ainsi je ne vois aucune expli- cation plausible à donner de quelques faits constatés expérimentalement par M. Stannius. Ce physiologiste a re- connu que si on lie successivement les trois veines caves qui, chez la Grenouille, s'ouvrent dans le cœur, on n'arrête pas les battements de cet organe, mais que cet effet se produit quand la ligature est placée sur le point même où ces vaisseaux débou- chent dans l'oreillette, bien que les pulsations ne soient pas interrompues dans le sinus de ces veines situé en amont de ce point. Ainsi une forte pression exercée sur une partie déter- minée de l'oreillette produit un effet analogue à celui qui résulte de la galvanisation des nerfs pneumogastri- ques ou de la moelle allongée. Si la ligature, au lieu d'être placée à l'en- trée même de l'oreillette, est appli- quée sur le sillon transversal qui sépare le ventricule des oreillettes, les battements continuent dans les deux portions du cœur ainsi isolées, mais cessent d'y alterner suivant un rhylhme régulier. Enfin, ce qui est bien plus singulier, c'est l'effet pro- duit par l'application d'une ligature sur ce sillon transversal, après que les battements du cœur ont été arrêtés (a) Heidenheim , Disquisitiones de nervis organisque centrallbus cordis. Berlin , 1854 (voyez Canstatt's Jahresbericht, 1855, 1. 1, p. 130). INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX SUR LE COEUR. 167 peuvent même arrêter tout à coup ses mouvements, et que c'est principalement par l'intermédiaire des nerfs pneumo- gastriques que toutes ces relations s'établissent. Il reste encore beaucoup à découvrir touchant la source de la puissance dont cette pompe irrigatoire est animée ; mais les résultats qui sont déjà obtenus jettent, comme nous l'avons vu, beaucoup de lumière sur ce point important, et suffisent pour nous donner l'explication de plusieurs des phénomènes du travail circulatoire dont nous avons eu à nous occuper dans les Leçons précé- dentes. Je ne pousserai pas plus loin cette étude, un peu longue, par l'action d'une ligature placée sur l'entrée de l'oreilletle ; car cette se- conde ligature détermine le rétablis- sement des pulsations, bien qu'on n'ait rien changé dans l'état de l'autre lien dont la présence avait déterminé la suppression de ces mouvements. Il est aussi à noter que lorsque le cœur a cessé de battre par suite de la ligature de l'entrée de l'oreillette, il n'a pas perdu son irritabilité, mais a cessé seulement d'être excitable par les stimulants physiologiques qui , d'or- dinaire , en provoquent l'action; en effet, si alors on l'excite mécanique- ment, on peut le déterminer à se con- tracter (a). D'après celte série de faits remar- quables, on peut soupçonner que la pression produite parla ligature sur le point de jonction du sinus veineux cl de l'oreillette exerce son action sur quelqu'un des ganglionsnervcux situés dans l'épaisseur des parois de l'oreil - letle ; que cette excitation détermine un effet sédatif analogue à celui précédem- ment observé dans les cas d'excitation violente de la moelle allongée ou des nerfs pneumogastriques, et que le rétablissement des mouvements du ventricule par l'application d'une seconde ligature sur le sillon auriculo- ventriculaire résulte de l'interruption ainsi effectuée entre les ganglions auriculaires et les ganglions venlricu- laires, de la même manière qve la ligature des pneumogastriques em- pêche les effets de la galvanisation de la moelle allongée de se fan-e sentir sur le cœur. Il serait intéressant de voir si un courant d'induction dirigé sur le point même où l'application d'une ligature paralyse temporairement le cœur, déterminerait des effets ana- logues, tandis que, dirigé sur le ven- tricule, il excite, comme on le sait, des contractions convulsives dans tout cet organe. la) Slannius, Ztvei lleilicn physiolofjischer Vcrsuchc (Miiilcr's Archiv fil)' Anal, wnl PInisiol , 1852, p. 85). 168 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. des fonctions du cœur, et dans la prochaine Leçon nous exami- nerons ce qui se passe dans le système artériel lorsque, sous l'intluence des contractions du ventricule gauche , le sang est lancé dans cette portion de l'appareil vasculaire. TRENTE -QUATRIÈME LEÇON. Du cours du sang dans les artères , et de rinduence de ces vaisseaux sur ce mouvement. — Élasticité et contractilité des artères ; influence du système nerveux sur leur calibre ; action des stimulants , etc. ^1. — Chacfue fois que le cœur se contracte, il lance une , ^''"•'^ . 'j i i 'lie progression ondée de sans- dans les artères (1); si ces vaisseaux avaient , <-^y^»s " \ / ' dans le systmiio des parois inextensibles, la colonne liquide contenue dans leur ^''"^™'- intérieur serait alors refoulée, pour ainsi dire, tout d'une pièce, et le déplacement, qui serait en rapport avec la longueur de l'ondée injectée de la sorte, cesserait dès que le coup de pislon donné par la pompe cardiaque serait achevé. La circulation se ferait par conséquent d'une manière intermittente, et le courant irrigatoire s'arrêterait pendant chaque temps de repos des ventricules. Mais les choses ne se passent pas de la sorte. Si l'on ouvre, sur un Animal vivant, une grosse artère située à quelque distance du cœur, on voit le sang s'en échapper d'une manière continue; le jet devient plus fort à chaque mouvement de systole, mais il ne s'arrête pas quand la contraction du cœur est terminée ; et si l'on ouvre une artère de très petit cahbre, on voit que l'écoulement du liquide s'effectue d'une manière presque uniforme. Plus on s'éloignera de l'organe d'impulsion, moins l'accélération du courant correspondant aux coups de piston donnés par celui-ci sera marquée, et si l'on observe au (1) L'hypothèse d'un mouvement dernier et même tout récemment, circulatoire indépendant de l'action par divers auteurs (a) ; mais il me mécanique du cœur et des vais- paraît inutile de discuter ici leurs opi- scaux a été soutenue , dans le siècle nions. (a) Par exemple : A. Wilson, An Inquiry into the Moving Powers eniploued in Ihe Civculation oflhe Blond, 1774. — Grabeaii, DU vitale Théorie des niutkreislaufes. Altona, 1841. — Wanncr, Nouvelle théorie de la circulation du sang. Paris, 185G. 170 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. microscope le mouvement du &ang dans les ramuscules termi naux du système artériel, on verra le sang y couler d'un mou- vement uniforme. Transformation ^^^^^ transfomiation graduelle d'un mouvement saccadé, mouvement intermittent, en un mouvement continu et uniforme, est due à intermittent ]'j^ction dcs parols dcs vaisseaux dans lesquels le courant "" contimr"' s'établit. En effet, l'hydraulique nous apprend que tout mou- vement intermittent peut être converti en mouvement continu, si l'on emploie la force primitive à comprimer un réservoir ou un ressort qui exerce une action constante : or les parois des artères sont extensibles et élastiques (1) ; elles sont donc sus- ceptibles déjouer le rôle d'un ressort de ce genre, et la pression exercée par l'ondée de sang lancée par la systole ventriculaire se faisant sentir sur leur surface interne aussi bien que sur la colonne de liquide contenue dans ces tubes, les met en jeu. Ainsi, pendant la durée de la systole, une portion seulement de la force engendrée par l'injection de l'ondée sanguine est em- ployée à faire avancer cette colonne liquide, et l'autre portion produit la dilatation du vaisseau (2) ; mais dès que l'action (i) Les physiologistes confondent élastiques et dont rintérieuf est souvent, mais bien à tort, ces deux rempli d'un fluide incompressible, il propriétés. L'élasticité n'est pas la me paraît utile de s'appuyer sur le faculté de céder à la pression en principe bien connu de l'égalité des s'allongeant ou en éprouvant tout pressions. autre changement de forme, mais la La physique nous apprend que les propriété que les corps possèdent de liquides ont la propriété de trans- reprendre plus ou moins complète- mettre dans tous les sens et égale- ment leur état primitif quand la cause ment les pressions qui agissent sur qui change leur volume ou leur forme une de leurs surfaces ; par conséquent cesse d'agir. la tranche A du liquide occupant la (2) Pour expliquer aux personnes portion du vaisseau voisine du cœur, qui n'ont accordé que peu d'atten- et pressée par le flot arrivant de ce tion à l'étude de la mécanique les dernier organe, transmettra dans tous effets produits par l'injection d'une ]es sens cette même pression, et agira certaine quantité de sang dans une à la fois sur la branche liquide sui- artère , tube dont les parois sont vante B, et sur les parois élastiques a COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. 171 du cœur vient à cesser, les parois des artères tendent à revenir sur elles-mêmes et compriment le liquide qui les dis- qui circonscrivent latéralement l'es- pace qu'elle occupe. Le déplacement produit ainsi de part et d'autre sera proportionné aux résistances que le liquide A trouvera en B .et en a. Si l'écoulement en aval était impossible, et B immobile, l'effort total s'exerce- rait sur a et déterminerait un agran- dissement correspondant dans le dia- mètre du cylindre liquide A, car la totalité duliquideinjecté parla contrac- tion du cœur serait obligée de se loger conjointement avec le liquide A dans cette portion circonscrite du vaisseau quej'appellea; mais,en réalité, B cède à la pression, et, par conséquent, la poussée latérale se trouve diminuée de toute la différence qui existe en ce point entre les deux forces contraires tendantes l'une à arrêter le mouvement de A, l'autre à déplacer B. Il se pro- duira donc dans le cylindre fluide un renflement circulaire en a. Mais la tranche liquide B devra transmettre aussi dans tous les sens la pression exercée sur sa surface par A, et, par conséquent elle produira une poussée sur la tranche suivante du même cy- lindre, que j'appellerai G, ainsi que sur les parois qui l'entourent latéralement et que je désignerai par 6. Il se formera donc en B un renflement analogue à celui dont nous venons de constater la production en A ; mais la pression exercée par A sur B est moindre que la charge à laquelle A était sou- mis, puisqu'une portion de la force communiquée à celui-ci a été em- ployée au déplacement des parois élastiques a : la poussée latérale sera par conséquent aussi moins grande en h qu'en a, et ce que je viens de dire au sujet de B sera applicable à C, puis à D, et ainsi de suite, dans toute la longueur du prisme liquide renfermé dans le tube élastique. 11 se produira donc dans l'intérieur de ce tube une sorte de vague circulaire qui se propagera instantanément dans toute cette longueur, mais dont la hauteur diminuera à mesure qu'elle s'éloignera de son origine ; car une portion de plus en plus considérable de la force motrice aura été trans- mise aux parois élastiques du vaisseau et employée à tendre le ressort con- stitué par ces mêmes parois. La forme de cette vague pourra être modifiée par la manière dont les pa- rois extensibles des artères reviennent sur elles-mêmes en vertu, soit de leur élasticité , soit de leur contractilité. M. Frey a cherché à préciser le mode de transmission des dilatations dont elles sont le siège, en y appliquant les formules qui représentent la propa- gation des ondes dans des cordes élastiques et en assimilant les parois artérielles à un faisceau circulaire de ces cordes («). Mais, dans l'état actuel de la science , les calculs que l'on pourrait eflectuer sur ces bases ne me paraissent pas susceptibles d'être d'une grande utilité en physiologie, car nous ne connaissons pas assez bien la part due à lacontracliUté mus- (a) Frey, Vf.rsMh einer Théorie der Wellenbewegiing des Blutes in den Arterien (Miillci's Archiv fur Anal, und Physiol., 1845, p. 132). 172 MÉCANISME DE LK CIRCULATION. tend. Or le sang ainsi pressé ne saurait rentrer dans le cœur, parce que les valvules sigmoïdes , dont l'entrée de l'aorte est garnie, se rabattent et se rapprochent de façon à fermer le passage dès que le liquide en rapport avec leur surface concave les pousse vers cet organe. Il faut donc que le sang déplacé par le rapprochement des parois artérielles suive le courant déterminé directement par la syslole ventriculaire, et se dirige vers la périphérie de l'appareil irrigatoire. C'est effectivement ce qui a lieu, et c'est de la sorte que le mouvement circulatoire, intermittent à la sortie du cœur se continue pendant la diastole de cet organe, et, ainsi que je l'ai déjà dit, se transforme peu culaire des tuniques arlériellcs pour ouvrages récents de physiologie. Les pouvoir admettre que dans les vais- personnes qui voudraient approfondir seaux vivants les choses se passent de ces applications de la mécanique à la la même manière que dans les tubes théorie du phénomène de la circula- inertes. tion pourront consulter avec fruit les C'est pour cette raison que j'ai cru écrits de MM. Weber, Frey, Volk- devoir ne pas entrer ici dans un exa- manu, Ludwig, Donders et plusieurs men spécial des principes d'hydrody- autres expérimentateurs qui , dans namique que Ton trouve exposés avec ces dernières années , ont traité ce beaucoup de délails dans quelques sujet délicat {a). (a) T. Young-, On the Functions nfthe Heart and Artevies {Philos. Trans., 1809, p. 4). — E. H. Weber und W. Weber, Wellenlehre auf Expérimente gegrûndet, oder iiber die ^Ycllen tropjbarer Flussigkeiten mit Anwendung auf die Schall-und Lichtwellen, 1825. • — E. H. Weber, Annotationes anatomicœ et physioiogicœ. Lipsiœ, 1827 (réimprime en 1834 sous le titre : Depulsu, resorpiione, auditu et tactu annotationes). ■ — Maissiat, Des lois des mouvements des liquides dans les canaux, et de leurs applications à la circulation des êtres organisés en général. Thèse de concours, Paris, 1839. — Frey, Versuch einer Théorie der Wellenbewegung des Blutes in den Arterien (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1845, p. 132). — E. H. Weber, Ueber die Anwendung der Wellenlehre auf die Lehre vom Kreislaufe des Blutes und insbesondere auf die Piilslehre (Miiller's Archiv fur Anal, und Physiol., 1851, p. 497). — E. H. Weber, Widerlegung der von Volkmaiin gegen meine Abhandlung ilber die Anwen- dung der Wellenlehre auf die Lehre vom Kreislaufe des Blutes und insbesondere auf die Puls- lehre gemachten Einwendungen (Miiller's Archiv fur Anat., 1853, p. 156). — Volkmann, Die Hamodynamik, nach Versuchen. In-8, Leipz., 1850. — Donders, Kritische en experimentele Bijdragen op het Gebied der Hœmodynamica (Neder- landsch Lancet, 1855, t. IV, p. 601, et t. V, p. 129). — Une partie du racnio travail a été traduite en allemand dans Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1856, p 433. — P. Black, On the Forces ofthe Circulation {Médical Times, 1855, t. X, p. 305, etc.). — Volkmann, Erôrterungen zur Hydrodynamik (Miiller's Archiv, 1856, p. 523). — Ludwig , Lehrbuch der Physiologie des Menschen {Physikalische Einleitung) , 1856, t. II, p. 28. — Donders, Berechnung des Widerstandes , bei hydraidischen Versuchen {Archi/v fiir die Hollandischen Beitrage ^iir Natur-und Heilkunde, 1857, t, 1, p. 60). COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. j 75 û peu en un mouvement uniforme ; car les parois arlérielles jouent ici le rôle d'un ressort qui serait monté à chaque systole, et qui presserait sur la colonne liquide dès que le mouvement dont sa tension dépend vient à s'affaiblir (1). § 2. — Pour donner une idée nette de ce qui se passe dans cette portion du travail irrigatoire, il me semble utile de repré- senter le phénomène physiologique par le jeu d'un appareil hydraulique inerte et assez semblable à un instrument dont un jeune expérimentateur de l'école de Paris, M. Marey, vient de faire usage pour étudier les lois de l'écoulement des liquides dans les tuyaux élastiques (2). Cette machine consiste en une petite pompe foulante, à laquelle est adapté un (ube de caout- chouc très long et terminé par un robinet qui permet d'en régulariser le débit. Le tout est rempli d'eau; la pompe est en communication avec un réservoir destiné à l'alimenter : on imprime au piston des mouvements de va-et-vient parfaitement réguliers, et l'on dispose le robinet terminal de façon à obtenir un jet continu et uniforme, ce qui est facile, pourvu que le tube élastique ait une longueur suffisante et que l'oritice d'écou- lement soit assez petit. On compte le nombre de coups de (I) Ce mode de transformation du incendie, où l'eau, en sortant du corps mouvement circulatoire dans les ar- de pompe, traverse un réservoir con- tères a été très bien expliqué par tenant de l'air comprimé, lequel fait Haies (a), et Uunter a comparé fort office de ressort, et, après avoir été judicieusement ce mécanisme à celui refoulé pendantla descente du piston, du réservoir à air d'un double souf- réagit lorsque la pression ainsi pro- Het, dans lequel le courant est con- duite vient à cesser (c). tinu, bii'u que le mouvement soit (2) Voyez ses Recherches liydrau- altcrnalif (6). Comme divers auteurs ligues sur la circulation du sang l'ont fait remarquer, c'est aussi {Annalesdessciencesnaturelles, lSb7, d'après le même principe que le jet t. VHf, p. 329). conlinu s'oblienl dans une pompe h (o) Hal(;s, llinuoslutiiiue, p. 23. (b) Hiintei-, Sur le saiifi, etc. {(Eiivres, t. 111, p. lOO). (rySleinlnicli, Ariioll, de. (voyez hiinJach, Traite de physiriUi(iie, (. VI, p. H.Sfl). il II MÉCANISME DE LA CIRCULATION. piston qui ont été donnés pendant un temps déterminé, et l'on constate qu'à la fin de l'expérience le tube de caoutchouc est plein d'eau comme il l'était au début. Il est dès lors évident que la quantité d'eau qui pendant ce temps s'est échappée par l'ex- trémité libre du tube est égale à la quantité que la pompe y a poussée. Mais l'écoulement, comme nous l'avons vu, était con- tinu, tandis que l'injection ne s'opérait que pendant la descente du piston, c'est-à-dire pendant la moitié du temps qu'a duré l'ex- périence. Il faut donc que, pendant la durée de chaque coup de piston, la quantité injectée dans le tube ait été double de celle débitée par l'extrémité opposée de ce conduit, et qu'à la fin de chacun de ces coups la moitié de la charge de la pompe ait trouvé à se loger dans le tuyau, conjointement avec la quantité initiale dont celui-ci était lui-même chargé. Ce volume d'eau correspondant à l'excédant de la recette sur la dépense constitue ainsi une charge complémentaire qui vient s'ajouter à la charge initiale du tuyau et qui augmente d'autant le volume total du liquide contenu dans ce tube. Il faut par conséquent que, pendant la durée de chaque coup de piston de la pompe fou- lante, la capacité du conduit d'écoulement ait été augmentée d'une quantité égale à cette charge additionnelle, c'est-à-dire égale à la quantité lancée par. la pompe, moins la quantité émise par l'extrémité libre de l'appareil pendant le même laps de temps (1)= Cette dilatation du tube est le résultat de la pres- sion exercée contre ses parois par la charge additionnelle, et (1) M. Volkmann a cherché à cal- sorte dans les artères (voyez ci-dessus, ciller l'augmentation de capacité de page 99) , comparée à celle qui pen- l'ensenible du système artériel de dant le même laps de temps arrive l'Homme sous l'influence de chaque dans les capillaires, et il en conclut ondée de sang lancée par le ventricule que la charge additionnelle du sys- gauche ; il se hase sur l'évaluation de tème artériel est d'environ 94 centi- la quantité de sang poussée de la mètres cubes (a). (a) Volkmann, Lfie M7nodynamik, p, 418. COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. 175 comme ces parois sont élastiques aussi bien qu'extensibles, elles doivent réagir sur le liquide qui les distend ; par conséquent, dès que celui-ci ne sera plus poussé par le piston, il cédera à la pression exercée par ces parois, et s'échappera au dehors jusqu'à ce que l'équilibre se soit de nouveau étabh entre le contenant et le contenu , état qui sera réalisé lorsque le vo- lume de celui-ci sera redevenu égal à celui de la charge initiale du tube. ■ A l'aide d'expériences 4e ce genre, on peut facilement vérifier la plupart des principes d'hydraulique sur lesquels repose l'ex- plication de beaucoup de phénomènes dont le physiologiste est témoin lorsqu'il étudie le cours du sang dans le système arté- riel. Ainsi, en activant le jeu de la pompe foulante, ou en faisant varier la grandeur de Tobstacle que le robinet terminal oppose à l'écoulement, on voit que la force élastique des parois du tube croît à mesure que leur élasticité a été sollicitée davantage; que, sous l'influence d'un effort donné, cette élasticité est solli- citée en raison de l'intensité de l'obstacle à l'écoulement, et que la transformation du mouvement intermittent développé par les coups de piston en un mouvement de progression uniforme est d'autant plus complète que le tube se dilate plus facilement, et par conséquent que l'élasticité de ses parois a été moins mise en jeu. Enfin, si l'on fait varier le calibre ou la longueur du tube élastique employé dans la construction de cet appareil hydrau- lique, on démontre également bien que, toutes choses étant égales d'ailleurs, la transformation du mouvement intermittent en mouvement uniforme est d'autant plus complète que la sur- face pariétale du tube dont l'élasticité est mise en jeu offre plus d'étendue. § 3. — L'élasticité des artères n'a pas seulement pour effct iniiucnce de régulariser ainsi le cours du sang dans la portion périphérique 'IJaTièZ'' du système irrigatoire; elle influe aussi sur la quantité de liquide '"' y' que ces tuyaux de conduite sont susceptibles de débiter sous un CCS liiyatix. 176 MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. effort cardiaque donné. On sait depuis longtemps, par les expé- riences des physiciens, que la rigidité ou la dilalabilité et l'élasti- cité des parois d'un tuyau de conduite n'influent cpie peu sur les quantités du liquide qui s'écoule de celui-ci quand le courant qui le traverse est déterminé par une pression const-ante ; car le maximum de dilatation du tuyau est promptement atteint, et la force élastique ainsi développée demeure en équilibre avec la pression exercée par le liquide en mouvement. Mais lorsque l'impulsion, au lieu d'être continue, est intermittente, les choses ne se passent plus de la même manière , et l'on trouve que l'élasticité des parois du tube contribue à augmenter le débit de l'orifice d'écoulement. Ce résultat obtenu par l'expérience (1) est fecile à expliquer par les lois de l'hydraulique. L'obstacle qui s'oppose au libre écoulement du liquide mis en mouvement par la pompe cardiaque résulte principalement des frottements de ce liquide contre les parois des vaisseaux qui le contiennent, et la physique nous apprend que ces frottements croissent comme le carré de la vitesse du courant. Or l'élasti- cité du tube a pour effet de ralentir le mouvement imprimé au sang pendant la systole ventriculaire et de continuer ce mouve- ment pendant la durée du repos; le déplacement d'un volume (1) Jusque dans ces divers temps, ni élastique que par un tube à parois les physiciens, ni les pliysiolcgisles, rigides de même diamètre, n'avaient étudié suffisamment Tin- Pour le démontrer, M. Marcy fait ihîence de i'élasticilé des parois des usage d'un petit appareil très simple tuyaux de conduite sur la marche et très facile à employer dans l'cnsei- des courants qui sont déterminés par gnemenl public, li adapte à un flacon des impulsions intermittentes. M. Ma- contenant de l'eau deux tubes dont rey vient de publier à ce sujet une l'extrémité inférieure plonge dans ce série de recherches intéressantes, et liquide ; l'un de ces tubes se recourbe il a très bien mis en évidence le ré- de façon à constituer un siphon dont sullat indiqué ci-dessus. Il a vu qu'à l'cxlrémilé inférieure est en coiiimu- égalité de pression, l'écoulement est nication avec un ajutage à deux beaucoup plus abondant par un tube branches qui sont munies de lobinels transversale. COURS DU SAjNG DANS LES AHTÈRES. 177 donné de liquide s'effeciue donc dans un temps à peu près double de celui qu'il emploierait si les artères étaient des tubes rigides, et la vitesse du courant étant réduite dans la même proportion, les résislances doivent être diminuées comme les carrés des nombres représentant ces vitesses différentes. Ainsi l'extensibilité et l'élasticité des parois artérielles jouent un rôle très important dans le travail de la circulation. Examinons donc de plus près le jeu de ces parties, et cher- chons d'abord comment l'augmentation de la capacité des artères s'effectue sous l'influence de la charge additionnelle de sang poussée dans un vaisseau par chaque systole ventriculaire. § Zt. — Ce phénomène est complexe et résulte de l'ai- Manière , , • 1 • ! 1? 'I • 1 . dont les artères longement aussi bien que de 1 élargissement de ces vais- .uigmemcnt de capacité. seaux. Harvey, à qui il faut toujours remonter lorsqu'on veut Dilatation chercher la solution de quelque question touchant la circulation du sang, avait reconnu l'existence de cette augmentation dans le calibre des artères à l'arrivée de chaque ondée de sang lancée dans leur intérieur par la contraction du cœur ; mais l'expérience très simple sur laquelle il fonda son opinion ne pouvait donner des résultats assez nets pour rendre le phéno- et se coniinuent l'une avec un luyau ainsi dans le flacon sont faciles à rigide, l'autre avec un tuyau à parois compter, et leur nombre correspond élastiques de même calibre que le à la quantité d'eau écoulée. Or, en précédent. L'autre tube, dont Texlré- faisant passer alternativement le cou- miié inférieure, comme je l'ai dit, rant par l'une et l'autre des brandies plonge dans l'eau du flacon, dépasse terminales du siphon bifurqué, on le bouclion qui ferme hermétiquement voit que le passage des bulles est beau- le vase , et son extrémité supérieure coup plus rapide quand c'est le tube est ouverte, de façon à laihser entrer élastique qui débile le liquide que lors- dc l'air à mesure que Teau s'écoule que l'écoulement se fait par le tube par le siphon, dès que celui-ci est rigide (a). amorcé. Les bulles d'air qui ciilicnt (tf) Marcy, Itecherdies hydi'auliques snv la circulation du sann {Ann. iks sciences nat., 1857, i' sC-rif, t. VllI, p. n\, [.I. 7, li(f. i}. IV. 12 178 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. mène sensible à tous les yeux. Elle consisie à dénuder un de ces vaisseaux, à le couper transversalement et à en saisir avec les doigts l'extrémité tronquée : à chaque battement du cœur, dit ce grand physiologiste , on voit l'artère se dilater (1). D'autres observateurs ont révoqué en doute l'existence de cette dilatation, et, en effet, elle est trop faible pour pouvoir être bien constatée de la sorte (2). Cependant elle est bien réelle, et, pour en démontrer l'existence, il suffit de répéter l'expérience faite, il y a une vingtaine d'années, par M. Flourens. On intro- duit l'artère dans un petit anneau brisé d'acier bien trempé, très mince et de dimension convenable pour embrasser le vais- seau sans le comprimer. Dans le point ainsi emprisonné l'artère ne peut se dilater qu'à la condition d'ouvrir l'anneau élastique dont il est entouré ; et si les bords de la fente pratiquée dans (1) IJarvey rend compte de cette ainsi que dans l'artère pulmonaire, où expérience dans sa deuxième disserta- elle lui a paru plus considérable que tion sur la circulation du sang, adres- dans le premier de ces vaisseaux (c). sée à J. Riolan (a). Enfin M. Poiseuille a mis en évi- (2) Les mouvements de locomotion dence la dilatation de l'artère carotide qui accompagnent la dilatation des du Cheval , à l'aide d'un instrument artères rendent celle-ci très difficile à disposé de façon à emprisonner une constater par l'observation directe, et portion de ce vaisseau dans un vase d'ailleurs elle est presque toujours à rempli d'eau et surmonté d'un tube peine appréciable à l'œil; aussi plu- capillaire, dans lequel le liquide s'é- sieurs physiologistes, tels que Lamure, levait ou s'abaissait suivant que l'ar- Arthaud et Parry, ont-ils été con- tère, en se gonflant ou en se rétré- duits à en nier l'existence (6). Mais cissant , chassait du réservoir une Spallanzani l'a très bien observée certaine quantité d'eau ou la laissait dans l'aorte du Triton et du Lézard, entrer (cl). {a) Harvcy, Exercitatio altéra ad J. Riolanum, in qua midtm contra ciretdtum sangvinis ob- jectiones refeUuntur (Opéra omnia, p. IH). (6) Lamure, Recherches sur la pulsation des artères, 1769. — Arthaud, Dissertation sur la dilatation des artères, ITH, — Parry, Expérimental Inquiry on the Arterial Puise, p. 50. — E. H. Parry, Addilional Experiments onArteries, 1819, p. H. — Davies, General principles of Physiology. { London Médical Reposilory, 1828, t.- XXIX, p. 389). (c) Spallanzani, Expériences sur la circulation, p. 359, 360, 362, etc. (d) Poiseuille, Recherches sur l'action des artères dans la circulation artérielle (Jourtial de physiologie de Magendie , 1829, t. IX, p, 46, pi. 1, fig, l). COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. 179 celui-ci s'écartent, il sera évident que la dilatation a lieu. Or, M. Flourens ayant placé autour de l'aorte de divers Mammifères un de ces anneaux à branches mobiles, a toujours vu les deux bouts de celles-ci s'écarter au moment de la systole, et se rap- procher quand le cœur était en repos (1). § 5. — L'allongement des artères sous l'influence de l'im- pulsion imprimée au sang par la contraction du cœm^ est plus facile à constater. Pour la rendre évidente, il suffît de marquer d'un trait coloré un point donné de la carotide primitive préala- blement mis à nu chez un Mouton ou quelque autre grand Mam- mifère, puis de placer à côté de ce trait, comme point de repère, une aiguille fixée d'une manière immobile. En effet, on voit alors le trait coloré avancer et reculer alternativement d'une manière synchronique avec les mouvements de systole et de diastole des ventricules du cœur (2). Cette éîongation déter- (1) Les anneaux brisés dont M. Fion- rcns se servait é (aient faits avec des ressorts de montre, et ses expériences ont été pratiquées sur des Lapins et des Chiens («). ('2) Le fait de l'allongement des artères lors de Taffliix dn sang dans leur intérieur a été constaté depuis longtemps par plusieurs autres phy- siologistes, tels que Halier, Parry, Bell, Schultz et Wedemeyer (b) ; mais l'expérience citée, ci- dessus est due à M. Flourens. Toutes choses égales d'ailleurs , ce changement dans l'état du vaisseau est d'aulant plus marqué, que celui-ci offre au courant sanguin un obstacle plus brusque. Ainsi il est plus marqué (a) Flourens, expériences sur le méca)iismc du mouvement ou batlemenl des artères (Ann. des sciences naî., iS'ôl, 2° série, t. VII, p. 100). {b) r':irry, An Experim. Inquiry inlo the Nature of the Arlerial Puise, J8Ui, p, -102 et siiiv, — Cil. lîoll. An Essay ou ihe Forces which circulale the lilood, 1819, p. uO, — Sclmllz, Das System der Circulation, p. 330. — VVedurnoycr, Untersuchunycn ûber den lireislauf des Blutes, 1828. (c) Halltr, Mémoires sur le mouvement du sang, p. 41 . AUongemeni des artères. au niveau d'une bifurcation que dans un tronc droit et indivis, parce que l'éperon, faisant obstacle à l'ondée san- guine, est poussé en avant avec force à chaque systole ventriculaire, et re- vient en arrière dès que cette impul- sion s'arrête. J'ajouterai que rallon- gement de l'artère sous l'influence de i'afllux du sang poussé dans son inté- rieur par les contractions du cœur est beaucoup augmenté par le fait de la ligature du vaisseau, car alors tout le mouvement de progression im- primé directement ù la colonne de liquide ainsi emprisonnée tend à pousser en avant l'extrémité fermée du vaisseau. Halier a noté ce phéno- mène (c), qui est surtout remarquable .80 MECANISME DE LA CHICULATION, Lucomoiioii mine souvent un déplacement de tout le vaisseau qui se courbe arières. CH afc ct 86 rclèvc. Ou donuc à ce phénomène le nom de loco- motion des artères (1). à TexUémitc du moignond'an membre ampulé : on voil rextrémité de l'aiière liée s'avancer à chaque pulsation et faire saillie à la surface de la plaie. M. VolJcmann a cherché à décou- vrir les rapports qui existent entre rallongement et Félargissement des artères, lorsque ces vaisseaux sont distendus par un afflux de liquide dans leur intérieur. L'observation di- recte ne permet pas de résoudre cette question ; mais, à l'aide d'une série d'expériences délicates faites sur le cadavre , ce physiologiste est arrivé h des résultats intéressants. En déter- minant le poids de la quantité d'eau contenue dans un tronçon artériel d'une longueur connue et non dis- tendu , il a pu calculer par les don = nées de la géométrie l'aire du cy- lindre représenté par ce liquide, et par conséquent aussi le diamètre inté- rieur du vaisseau à l'état de repos; puis il injecta dans ce même tronçon d'artère une quantité additionnelle d'eau de façon à le distendre forte- ment; il pesa de nouveau pour con- naître la quantité du liquide introduit de la sorte, et*l mesura la longueur du vaisseau pour déterminer l'allon- gement que celui-ci avait subi ; enfin à l'aide des éléments de calculs ainsi obtenus , il a estimé le diamètre de ce second cylindre liquide, et il a pu comparer l'augmentation du vaisseau en largeur à l'allongement que ce tube avait éprouvé. Il a fait cette expérience sur des portions de l'artère brachiale et de l'artère ilia- que de l'Homme et sur diverses ar- tères du Chien , du Lapin , de la Chèvre et du Bœuf, et toujours il a trouvé que l'extension latérale était de beaucoup supérieure à l'allonge- ment. En prenant pour unité de me- sure la dilatation transversale , il a trouvé que l'allongement pour une même étendue n'était souvent que d'environ 0,^5, et ne s'est jamais élevé au-dessus de 0,83. Au premier abord , ce résultat peut paraître en opposition avec ce qui s'observe pen- dant la vie; car en général, quand une artère bat, il est facile de voir qu'elle s'allonge, tandis que son élargissement n'est que rarement visible à l'œil. Mais , ainsi que le fait remarquer M. Volkmann , cela dépend de ce qu'on ne peut observer qu'une très petite longueur transversale pendant que la vue embrasse le vaisseau dans une étendue longitudinale considé- rable («). (1) Si le vaisseau est recliligne et si ses deux extrémités sont fixées de façon à ne pouvoir s'écarter pour obéir à l'impulsion ainsi produite, il s'y produira un mouvement de loco- motion par inflexion latérale, et il s'y formera une ou plusieurs courbures suivant la disposition des points de plus grande extensibilité (6). Si l'artère est un peu courbée, sa courbure sera alors augmentée; mais (a) Volkmann, Die Hàmochjnnmik, p. 420 et suiv. [b) Voyez Frey, Op. cit. (Miiller's Archiv fur Anat. und Pliysiol., 18-i5, f . 147), COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. 181 ^ 6. — Le pouls, ou battement des artères, dépend aussi de Théonc l'impulsion imprimée au sang par les contractions du cœur, et consiste en partie dans les divers mouvements que je viens de décrire (1). Ainsi, quand ces pulsations sont visibles à l'œil, elles si elle est coudée ou si elle présente une coui'bure .brusque, elle tendra à se redresser et à augmenter en dia- mètre dans le point correspondant à la rencontre de l'axe de sa première portion rectiligne avec la grande cour- bure décrite par ses parois dans la partie courbée. Quand la portion du vaisseau située au delà de la courbure est libre, elle se redresse plus ou moins sous l'in- fluence de la pression exercée ainsi sur ses parois ; mais lorsqu'elle ne peut être déplacée de la sorte, l'allon- gement de la première partie du tube détermine au contraire une augmen- tation dans la flexuosilé de la seconde, phénomène dont on est souvent té- moin quand on observe au microscope la circulation dans les petites ar- tères {a). (1) Ainsi que je l'ai déjà dit [b], Galien et ses disciples attribuaient les pulsations des artères à une force qui résiderait dans les parois mêmes de ces vaisseaux et qui leur serait trans- mise par le cœur; mais Harvey fit voir que l'expérience sur laquelle Galien fondait son opinion ne donnait pas les résultats que celui-ci avait cru obtenir (c), et il prouva que le batte- ment dos artères est produit par le choc du sang contre les parois de ces vaisseaux. En effet, il reconnut que 1.1 ligature d'une artère , opération qui empêche le passage du sang dans son intérieur, fait cesser les bat- tements au-dessous du point oblitéré ; mais que les battements continuent à s'y produire si , à l'aide d'un tube rigide introduit préalablement dans sa cavité, là où la ligature doit être placée , on maintient la comnmnica- tion libre entre les portions du vais- seau qui sont situées en amont et en aval de celte ligature. Ilarvey cite aussi un cas pathologique dans lequel les parois de l'aorte étant devenues osseuses dans une longueur considé- rable, le pouls n'aurait pas dû se faire sentir dans les membres abdominaux, si la théorie de (lalicn avait été l'ex- pression de la vérité ; or, les batte- ments artériels s'y manifestaient à peu près comme dans les circonstances or- dinaires (rf). A l'époque où vivait Harvey, on admettait généralement avec Galien que la dilatation des artères coïncidait avec celle du cœur. Harvey établit expérimentalement que c'est le con- traire qui a lieu, et que la systole des (a) VVI]:i; Ion Joncs, On iheSlate of Ihe Btooil and Dlood-Vessels in Inllammalion (Cny's HospUal Ueporls, 1851, t. VU, p. lOS). — Vojez aussi, au sujcl .lu la locoinolion tics arlùros, les expériences de M. l'Iourcns {Op. cil., Ann. des sciences nal., 2" série, l. Vil, p. lOy). (b) Voyez ci-dessus, I. III, p. 20. (c) Harvey, Kxercilalio altéra ad J. lUolanuin, in qua mulla' contra vircuUiim sauguiiris objcc- liones rcfcllunlur {Opéra omuia, p. 111). (il) Op. cil., p. lia. 182 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. résultent principalement de la locomotion du vaisseau; mais, dans la plupart des cas, ce déplacement et la dilatation produite par la charge additionnelle que détermine la systole ventriculaire sont trop faibles pour être aperçus de la sorte, ou pour être sensi- bles au toucher, et l'impulsion cardiaque ne devient manifeste que si l'on oppose un obstacle au cours du sang dans ce conduit flexible en déprimant un peu les parois de celui-ci. C'est pour cette raison que l'observateur ne sent aucune pulsation quand il applique le doigt sur une artère qui se trouve entourée de parties molles et qui fuit sous la pression plutôt que de se laisser déprimer ; mais si le vaisseau dont il fait choix est à la fois assez rapproché de la peau pour être focile à comprimer et repose ventricules se manifeste en même temps que la diastole des artères. Il paraît, du reste, qu'avant l'époque où vivait Galien, la vérité avait été décou- verte, mais avait passé presque ina- perçue des physiologistes. Effective- ment, dans un écrit que l'on attribue à Rufus d'Éphèse, et que M. Darem- berg a mis en lumière dernière- ment (a), il est dit positivement que les battenients synchroniques des ar- tères et du cœur ne sont pas de même nature ; que les artères battent quand elles se remplissent, et le cœur quand il se vide. Voici la traduction du passage en question : « Le pouls se produit de la » manière suivante. Le cœur, après » avoir attiré le pneuma du poumon, » le reçoit d'abord dans sa cavité » gauche, puis, retombant sur lui- » même, il le distribue aux artères » remplies par l'affaissement du cœur, » les artères de tout le corps produi- » sant le pouls ; quand elles se vident, » il y a systole. Ainsi le pouls a lieu » dans les artères quand elles se rem- )) plissent et qu'elles reçoivent le » pneuma, et dans le cœur lorsqu'il » se vide, comme nous l'établissons » plus bas. Nous avons donc donné » une définition convenable du pouls » en disant : le pouls est la diastole et » la systole du cœur et des artères ; il » est composé de diastole et de sys- » tôle. Les artères et le cœur battent » en même temps; aussi presque tous » les médecins pensent-ils que le pouls » se produit par la réplétion simulta- » née du cœur et des artères ; cela est » évident, mais les battements ont lieu » pour les artères quand elles se rem- » plissent, et pour le cœur quand il » se vide (6). » (fl) Ivvo^iq Ttip) ctpuyp.tov : Traité sur le pouls, attribiié àRufi(S d'Ëphèse, publié pour la pre- mière fois en grec et en français avec une introduction et des notes par M. Gh. Daremberg. Paris, 1846. (&) Op. cit., p, 21. COURS DU SANG DANS LES ARTÈRES. 183 sur un plan résistant, un os, par exemple, il éprouve un petit choc chaque fois que le cœur lance une ondée de sang dans le système circulatoire, et c'est ce choc que les médecins dési- gnent plus spécialement sous le nom de pouls. Le mécanisme de ce phénomène est facile à expliquer. La pression exercée par la colonne sanguine en mouvement sur les parois de l'artère croît proportionnellement aux obstacles qui s'opposent à son écoulement, jusqu'à ce qu'elle soit devenue égale à la pression motrice développée par le cœur, et alors le courant s'arrête. Ainsi que je l'ai déjà dit, le principal obstacle qui s'oppose au libre écoulement du sang contenu dans les artères est dû au frottement de ce liquide contre les parois du système vasculaire, et ce frottement croît proportionnellement au carré de la vitesse du courant.. Or la quantité de ce liquide qui, dans un temps donné, passe dans les diverses sections d'un tube qui en est rempli, est partout la même, et par conséquent la vitesse du courant devient d'autant plus grande dans une de ces sections, que l'aire de celle-ci est plus petite. Par conséquent aussi, lorsqu'en déprimant sur un point les parois de l'artère on rétrécit brusquement le calibre de ce vais- seau, on développe dans ce même point une résistance à l'écou- lement du sang; cette résistance a pour conséquence une poussée correspondante du liquide contre l'obstacle, et cette pression, accrue à chaque systole par l'arrivée subite d'une nouvelle ondée de sang dans le vaisseau, produit sur le doigt qui constitue l'obstacle un choc plus ou moins fort. En effet, le courant étranglé dans ce point fait effort pour pousser l'obstacle en avant et en dehors. Pour produire un phénomène analogue dans un tube flexible quelconque, il suffit de faire passer dans ce conduit un courant d'eau mis en mouvement par une force intermittente, et de déprimer sur un point de sa longueur, avec 184 MÉCANISME DE L.i CIRCULATION. le doigt ou avec un petit levier, les parois du tube ainsi rempli. A chaque coup de piston donné par l'organe moteur, on sentira sous le doigt une pulsation, ou Ton verra le levier soulevé par le choc du courant (1). intiuenco § 7. — Ccttc cxpérience, qui a été pratiquée récemment par do la loiig-Lienr des vaisseaux M. Marcy, Hous permet aussi de comprendre facilement com- sur la , force du pouls, mcnt Ic caracterc de ces pulsations peut varier sous l'inQuence d'efforts cardiaques identiques, lorsque les propriétés du tube traversé parle courant viennent à se modifier. Ainsi, lorsqu'on fait usage d'un tuyau dont les parois sont dépressibles sans être sensiblement élastiques, la pulsation a le même caractère que l'impulsion initiale dont elle est la conséquence : elle est brève si le coup de piston est brusque et court'; elle est forte si ce coup est puissant, et elle se fait sentir au même moment (1) Pendant longtemps il a régné duit par la dépression de l'artère parmi les physiologistes et les méde- sous le doigt de l'observateur {b}. cins de grandes divergences d'opinions Enfin Parry n'y voyait qu'un etlet de au sujet de la cause du pouls, et là, l'allongement de celui-ci (c). M. Flou- comme dans beaucoup d'autres cir- rens a fort bien établi que ce phé- constances analogues, le désaccord est nomène se complique de tous les venu en grande partie de ce que élémenls qui peuvent concourir à la chacun soutenait d'une manière exclu- production des battements de l'ar- sive une portion de la vérité. Ainsi tère {d); opinion qui était aussi celle Galien et Harvey altribueiit ce phé- de llaller (e) et de Sœmmering (f). nomène uniquement à la dilatation Enfin, M. Marey a démontré expérl- des artères. Weilbrecht et Bichat mentalement la part qui est due à la soutenaient qu'il dépendait essenlielle- dépression du vaisseau par le doigt de ment du déplacement du vaisseau (a) ; l'observateur, et a expliqué d'une tandis que Arthaud l'expliquait par manière très claire le mécanisme de l'effort du sang contre l'obstacle pro- ce mouvement (g). {a) Weitbrocht, De eireulatione sanguinis cogitationes phusiologicœ {Comment. Acad. Petropol., 1724 et 4735, t. VII, p. 316). — Bicliat, Anatomie générale, t. I, p. 315 (édit. de 1818). (6) Arthaud, Dissertation sur la dilatation des artères. Paris, 1771. (c) Parry, Inquiry into the Nature of the Arterial Puise. 1816, p. 100 et fuiv. (d) Flourens, Op. cil. (Ann. des sciences nat., 1837, 2° série, t. VII, p. 112). (c) Haller. £/em.p?ii/«ioio(/iœ, t. 11, p. 238. (f) Sœmmering', De corporis humanifabrica, t. V, p. 8-4. (g) Marey, Recherches hydrauliques sur la circulation du sang (Ann. des sciences nat-, 1857, 4" série, t. VII, p. 341). (JOURS DU SANG KAÎNS LES ARTÈRES. - 185 dans toute la longueur du conduit. Mais lorsqu'on emploie un tuyau à parois élastiques , tel qu'un tube de caoutchouc ou une artère, les choses ne se passent plus de la même manière ; le choc pulsatile se modilie à mesure que la distance déjà parcourue par le courant est plus grande, et ne devient sensible que plus tardivement, quand cette distance est consi- dérable. Du reste, nous aurions pu prévoir qu'il devait en être ainsi, d'après ce que j'ai eu déjà l'occasion de dire relativement à la transformation graduelle du mouvement intermittent imprimé au sang par les contratitions du cœur, en un mouvement uni- forme par l'effet du jeu des parois artérielles. Ainsi le pouls s'affaiblit à mesure que l'on s'éloigne du cœur, et, en général, cesse d'être perceptible dans les très petits vaisseaux (1). Effectivement il doit en être ainsi, puisque le battement du pouls est dû au mouvement de progression im- primé directement à la colonne sanguine par la portion de l'ondée qui est lancée dans le système artériel par chaque sys- tole du ventricule gauche et qui ne trouve pas à se loger tem- porairement dans le tronçon de ce système de tubes compris entre le cœur et le point où la pulsation se produit; portion qui est d'autant moins grande que ce tronçon du système vasculaire offre moins de longueur ('2). (1) rialler a trouve qu'en général il sera peut-êtreljon de prendre comme le ponls disparaît complètement là où exemple un cas particulier, et de cal- Ic diamètre de l'artère est descendu à culor les efTets produits , sans tenir environ 1/3 de millimètre (a) ; mais il compte des effets de l'écoulement qui existe à cet égard des différences con- s'opère en même temps, sidérabics suivant les circonstances Supposons qu'à chaque systole le piiysiologiques. cœur lance dans l'artère 50 centi- (2) Pour faire bien comprendre cette mètres cubes de liquide, que la capa- partie du mécanisme de la circulation, cité initiale de ce tube soit de 10 cen- (a) Hallcr, Mimoire sur le mouvement du saii'j, \>. 35. 186 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Nous voyons là l'utilité de certaines dispositions anatomiques qui se remarquent dans diverses parties du système artériel, soit chez l'Homme, soit chez les Animaux. Parfois le vaisseau nourricier d'un organe, au lieu de se rendre à sa destination en suivant une hgne à peu près droite, présente de nombreuses flexuosités. Or ces courbures augmentent l'étendue de la surface élastique sur laquelle le sang vient presser avant que d'arriver dans le système capillaire, et puisque la transformation du mouvement saccadé imprimé à ce liquide par les contractions du cœur, en un mouvement uniforme, est une conséquence de l'action de l'espèce de ressort ainsi constitué et devient d'autant plus complète que les surfaces en question sont plus étendues, il s'ensuit que ces méandres artériels doivent avoir pour effet timètres cubes par centimètre de lon- gueur, et que le degré d'élasticité des parois dudit vaisseau soit telle que, sous l'influence de la pression déve- loppée par la contraction ventricu- laire, sa capacité puisse être augmen- tée de 1/10". Il est évident qu'à une dislance de 1 décimètre du cœur, la charge additionnelle déterminée par la systole n'aura été que de 10 centi- mètres cubes, et que l'ondée lancée par cette systole aura dû faire avancer ko centimètres cubes du liquide préexistant dans celte même portion de l'artère. Mais, à une dislance de 2 décimètres , la dilatation du tube aura permis le placement d'une charge additionnelle de 20 centimètres cubes, et par conséquent la portion de la charge initiale déplacée par le jet parti du cœur ne sera que de 30 cen- timètres cubes. A une distance de 3 décimètres, ce déplacement pourra se trouver réduit à 20 centimètres cubes ; enfin, à 5 décimètres, elle pourra être nulle, car la totalité des 30 centimètres cubes de liquide pro- jeté durant la systole, et des 500 cen- timètres cubes qui occupaient déjà le vaisseau avant le commencement de ce coup de piston, aura trouvé dans celte longueur de 5 décimètres , di- latée par l'effort systolique, la place nécessaire pour se loger, et ce sera seulement lorsque la pression déve- loppée par le cœur aura cessé que la charge additionnelle commencera à s'avancer vers les capillaires. On voit donc que, dans cette hypothèse, la vitesse du courant, déterminée direc- tement par la systole venlriculaire décroît rapidement à mesure que la longueur du tube d'écoulement aug- mente, et que par conséquent aussi la transformation du mouvement in - terminent ou saccadé en un mouve- ment uniforme tend à devenir de plus en plus complète à mesure que la sur- face des parois extensibles dont l'élas- ticité est mise en jeu s'est accrue. On peut résumer ces résultats , comme je l'ai déjà fait , en disant COURS DU SANG DANS LES ARTERES. 187 de régulariser davantage le cours du liquide dans la portion correspondante du système capillaire, et de mettre les parties molles dont celui-ci est entouré plus complètement à l'abri des secousses résultant des pulsations artérielles. § 8. — Le synchronisme de la systole ventriculaire et du influence 1 , -\ i^ 1 1 1 • • -ri de la longueur battement des artères est complet dans le voisinage mimediat du de rartère , , • /i • ' 1 \ sur le retard cœur ; mais , dans les parties éloignées du système circula- du pouis. toire, un certain intervalle se manifeste entre le moment où le premier de ces mouvements s'accomplit et celui où le second devient appréciable. On remarque aussi que ce retard du pouls augmente à mesure que le [point exploré est situé plus loin de l'organe d'impulsion (i). Cela dépend de la manière dont les que les effets de l'élaslicité des parois artérielles croissent comme la surface de ces parois. Or , le battement du pouls est produit par le surcroît de pression déterminé par la charge addilionnelle, et par conséquent , à mesure que la dilatalion de l'artère se trouve solli- citée par une quantité de liquide en mouvement moins considéraijle, l'in- tensité des pulsations diminuera. La présence d'une ampoule à parois élastiques sur le trajet du vaisseau tend aussi à diminuer, et peut même éteindre complètement les pulsations dans toute la portion du tuJDe qui est située en aval de celte dilatation. Effectivement elle augmente l'étendue de la surface exlensiijje située en amont de l'obstacle qui, en relardant le passage du sang, développe la pul- sation, et cette augmentation de sur- face permet à une plus grande portion de la charge additionnelle lancée par la systole de se loger dans la partie du vaisseau comprise entre cet obstacle et le cœur. La charge additionnelle qui arrive dans le point oiî l'observa- teur cherche à sentir les battements artériels en est diminuée d'autant , et par conséquent le pouls se trouve affaibh proportionnellement. C'est pour cette raison que, dans les cas d'anévrysmes , le pouls est considérablement diminué ou même supprimé dans la portion du vaisseau qui se trouve en aval de la dilatation, et l'effet est d'autant plus marqué, que la poche anévrysmale est plus grande , qu'elle communique plus largement avec l'artère et que ses parois sont plus élastiques. On a ob- servé des cas d'anévrysmes de l'ori- gine de l'aorte qui supprimaient le pouls dans toutes les artères du corps (rt). (1) L'existence d'un certain retard dans le pouls des artères éloignées du cœur avait été remarquée, vers le milieu du siècle dernier, par Weit- (a) Sauwers, Anévrysme de l'aorte ascendante {Moniteur des hôpitaux, 1857, p. 5f 188 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. parois artérielles réagissent sur l'ondée de sang lancée par la systole ventricLilaire et de la durée de cette contraction. La portion du liquide qui arrive dans Tartère au commencement de la systole, trouvant à se loger dans la partie de ce tube qui avoisine le cœur, y détermine aussitôt le degré de tension additionnelle dont dépend le pouls, et n'agit que faiblement sur les parties éloignées de la colonne sanguine artérielle ; mais la portion suivante du même jet, trouvant cette portion cardiaque de l'artère déjà dans un état de tension, fait sentir son action sur la partie suivante du vaisseau, et ainsi de proche en proche, de façon qu'à mesure que la longueur du conduit augmente, la pression exercée sur les parois vasculaires, et par suite la pulsa- tion, ne devient sensible qu'à un moment correspondant à une brecht et Senac (a), mais avait été dont les systoles sont prolongées {cl). révoquée en doute par Haller (6), et Dans quekfues états pathologiques n'a été bien établie que par les obser- il devient beaucoup plus grand que valions récentes de Rochoux, de dans l'état normal: par exemple, lors - Carlisle , de M. E. II. Weber , de qu'une poche anévrysmale se trouve M. Hamernik, et de quelques autres en amont de l'artère où les pulsations pliysiologisles de la période actuelle (c). s'observent (e). M. Marey a remarqué M. Weber a trouvé que la différence que dans ce cas le défaut de synchro- enlre le moment de la manifestation nismeestd'autant plusgrandquele sac de la systole ventriculaire et de la anévrysmal est plus volumineux, et il pulsation de l'artère pédieusc est e\pliqae très bien ce phénomène par d'environ 1/7' de seconde. Ce retard l'influence de l'étendue des parois est surtout sensible chez les per- élastiques interposées entre le cœur sonnes dont la circulation est lente et et la partie explorée (/"). (a) Weitbredit, De circulatione sanguinis eogitationes physiologicœ {Comment. Acad. Petropol., 1734-35, t. VII, p. 317etsuiv.). — Senac, Traité de la structure du cmir, 1777, t. II, p. 204. (b) Haller, Elem.phys., IV, § 42. — Rochoux, art. Pouls, Dictionnaire de médecine par Ailelon, Andral, etc., 1827, t. XVII, p. 42(5. — Carlisle, Observ. on the Motions and Sounds of the Heart (Brlt. Associât., 1S33, p. 455). (c) Weber, De pulsu in omnib. arter. plane non synchronico' (Annot. Acad., Leipzig, 1834). — Hamernik, Die Verhàltnisse des Puises %ur Diagnostic innerer Krankheiten ( Medicitiischer Jahresbericht des Oesterreichen Staates, 1843, t. XXXIII, p. 129). (d)E. H. Weber, Ueber die Anwendung der Wellenlehre (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1851, p. 536). («) Hamernik, Op. cit. — Valleix, Guide du médecin praticien , t. II, p, 52. {f) Marey, Op. cit. {Ann. des scienees nat., 4" série, t. VII, p. 349). COURS DU SANG DANS LKS AhTÈUliS. 189 période de plus en plus avancée de la conlraclion ventriculaire.. L'impulsion commence, il est vrai, au même instant dans toute l'étendue de ce système hydraulique, mais ne devient appré- ciable au doigt que lorsqu'elle a atteint un certain degré d'inten- sité, et cette intensité n'est obtenue que successivement dans les divers points du parcours artériel; aussi tous les observateurs sont-ils aujourd'hui d'accord pour reconnaître le défaut de syn- chronisme dans les battements des artères delà portion centrale et de la portion périphérique du système circulatoire; mais quelques auteurs croient voir dans cette différence un retard apparent et non un retard réel (1). (1) Dans la prochaine Leçon j'aurai à revenir sur ces faits, et je rendrai compte alors des expériences hydro- dynamiques à l'aide desquelles M. Ma- rey a cherclié dernièrement à mettre en évidence la forme de l'ondée san- guine lancée par la systole ventricu- laire, et à donner une théorie simple du retard des pulsations dans les parties lointaines du système artériel, M. E. II. Weber, comme je l'ai déjà dit, assimile à une vague san- guine la charge additionnelle lancée dans les artères par chaque contrac- tion du ventricule gauche, et explique le phénomène du pouls par la pro- gression de cette onde ; puis, se ba- sant sur le retard observé dans le battement des artères à mesure que la dislance du cœur augmente, il cherche à calculer la vitesse de pro- gression de cette même onde, et il l'évalue à 9'",2ZtO par seconde ; marche qui ne dillère qne peu de celle obser- vée par ce physiologiste dans ses ex- périences sur la propagation des ondes dans un cylindre d'eau renfermé dans un tube de caoutchouc. M. Weber fait remarquer aussi qu'à raison de cette grande vitesse et du temps pendant lequel dure chaque contraction systo- lique, l'espèce de vague sanguine ainsi produite doit avoir une longueur con- sidérable, et que sa partie antérieure doit être déjà anéantie dans le système capillaire avant que sa partie posté- rieure ait achevé de sortir du cœur (a). Hflectivement, dans cette théorie, la longueur du renflement de la colonne sanguine ou vague positive serait d'environ 2'",b, car le temps qui s'é- coule entre le commencement et la fin de chaque systole peut être évalué à environ ijk de seconde, et par con- séquent l'extrémité antérieure de la vague sanguine, marchant à raison de 9'", '2 par seconde, serait à environ 2"', 8 du cœur, lorsque la dernière portion de cette même ondée sortirait du ventricule gauche. Mais les élé- (a) E. H. ^Vcl)e^, lleber die Anwendumj der Wellenlehre auf die Lehre vom Kreislaufe des fllules {WiWkr^ Arcliiv fur Anat. und Hiysiol., iSSl, p. 530). 190 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Influence § 9. — Puisque le pouls est dû à la pression additioDiielle du dGffrG » d'extensibilité qui se développe dans les divers points du système artériel sous %e l'artère'' l'influence de l'ondée de sang lancée par le cœur, et que la epous. ^pgj^gfgpj^^cjtJQj^ ^l^ mouvement intermittent ainsi produit en un mouvement uniforme s'effectue peu à peu au moyen de la dila- tation des artères et de la réaction mécanique de ces vaisseaux, il est évident que toute variation dans l'extensibilité et l'élasticité des parois de ces tubes doit influer sur la distance à laquelle cette transformation devient complète et sur la longueur du vaisseau où les pulsations se manifestent. Aussi, sans cpi'il y ait aucun changement dans la force d'impulsion déployée par le cœur, l'intensité du pouls dans les parties périphériques du système circulatoire peut être augmentée par un état de rigidité anormale des artères qui avoisinent le cœur; car celles-ci, en perdant de leur extensibilité et de leur ressort, perdront d'une manière proportionnelle le pouvoir transformateur qui tendait à régulariser le cours du sang, et le caractère saccadé de celui-ci se conservera plus loin. On comprendra également que, si une artère devient rigide^ les battements du pouls ne s'y feront plus sentir; car le vaisseau, pour battre de la sorte, doit être dilatable (i). menls de ces calculs sont trop incer- laisser distendre par l'afflux du sang tains pour que les physiologistes puis- ou déprimer sous le doigt, et c'est de sent attacher beaucoup de valeur aux la sorte qu'on peut rendre compte résultats obtenus de la sorte. d'une observation de Haller. En expé- (1) Ainsi lorsqu'un tronçon d'artère rimentant 'sur des Grenouilles, ce vient à s'ossifier, comme cela a lieu physiologiste remarqua que le pouls quelquefois, le pools disparaît dans la n'était pas sensible dans l'aorte des- porlion du vaisseau qui a subi cette cendanle, tandis que l'aorte ascen- aitcration. Le même phénomène peut dante, les artères pulmonaires, les s'observer dans quelques portions du artères brachiales, etc., qui sont plus système artériel qui, sans être ossi- extensibles, offraient les battements fiées , sont trop résistantes pour se ordinaires (a). (a) Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p. 46. PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 191 § 10. — Le ressort des parois artérielles dépend en grande partie de l'élasticité, propriété purement physique dont elles sont douées à un haut degré; mais il tient aussi à une action vitale dont beaucoup de physiologistes ont méconnu l'exis- tence (1). Pour constater la première de ces propriétés, il suffît de prendre sur le cadavre de l'Homme, ou de tout autre Mam- mifère, un tronçon d'artère, et de le comprimer ou de le tendre. Si on le comprime, il s'aplatit; mais dès que la pres- sion cesse, il reprend sa forme cylindrique, et sa lumière rede- vient aussi large qu'avant son aplatissement : si on le tiraille doucement, on le voit s'allonger, et il revient sur lui dès que l'effort auquel il a cédé vient à cesser (2). Nature Ju ressort des artères. Elasticité. (1) Quelques auteurs ont soutenu que chez THomme et les autres Mammifères les artères n'olFrent au- cune trace d'irritabilité et ne sont que des tuyaux élastiques ; Magendie , dont l'autorité était à bon droit très grande aux yeux des élèves de l'École de Paris, traitait d'hérésie physiolo- gique toute opinion contraire à la sienne sur ce point, et déclarait que « du moment que l'on admet que les parois des artères , grosses ou petites , se contractent à la manière du tissu musculaire , il n'y a plus de théorie de la circulation possible (a). » On comprendra donc pourquoi il m'a paru nécessaire de multiplier beaucoup, dans mes Leçons à la Fa- culté des sciences de l'aris, les preuves de cette contractilité des parois arté- rielles, qui aujourd'hui est indubitable. (2) Si par l'injection ou l'insuHla- lion on remplit avec excès une artère, on la voit s'élargir un peu et s'allon- ger; mais, au moment où l'efibrt cesse , elle revient sur elle-même et se vide en partie. Si l'on replie un de ces vaisseaux, il tend à se redres- ser, et si on le distend alternativement dans le sens de sa longueur et en tra- vers, on voit qu'il est susceptible de s'allonger plus qu'il ne peut s'élar- gir [b]. Un physiologiste du siècle dernier, Wintringham a fait des expé- riences sur la résistance des artères à la rupture , mais il n'a obtenu que peu de résultats intéressants (c). La résistance latérale est due principa- lement à la tunique moyenne , qui du reste ne contribue que fort peu à la résistance longitudinale , laquelle réside presque entièrement dans la tunique externe. (a) .Magen(Jie,_ /.e^jons sur les phénomènes physiques de la vie, t. II, p. 78. {h) Bédard, l'ilémenls d'analomie générale, 1823, p. 374. (c) Wintritigliatii, An Expérimental Inquiry on, Some Parts ofthe Animal Structure, 1740, 192 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Le rôle de cette élasticité des tissus artériels, dans la pro- duction des phénomènes du pouls, est également facile à con- stater à l'aide d'une expérience pratiquée par Bichat. Ayant amputé le bras d'un cadavre et l'ayant assoupli par l'immersion dans un bain tiède, ce physiologiste adapta à l'extrémité de l'artère brachiale de ce membre un petit tube, et introduisit l'autre extrémité de cet ajutage dans l'artère carotide d'un gros Chien. Le cœur de l'Animal poussa aussitôt du sang dans le bras du cadavre, et à chaque systole il se manifesta dans celui- ci un battement analogue à celui du pouls, quoique plus faible (1). Cnniraciiiité § ^^- — Mais pcudaut la vie le ressort des artères et la tonique, pi^ession que les parois de ces vaisseaux exercent sur le sang qui les distend sont beaucoup plus considérables que dans l'or- ganisme inanimé et dépendent en partie d'une autre cause. En effet, chez l'Animal vivant, les artères tendent constamment à se resserrer, et si elles conservent un calibre à peu près égal à celui qu'elles offrent dans l'état de vacuité sur le cadavre, c'est parce qu'elles sont distendues par le sang contenu dans leur intérieur (2). (1) Bichat obtint un résultat ana- vaisseau paraissait arrivée à son lôgue en adaptant à Textrémité d'une maximum ; et 3° un jour après la artère un sac de peau ou de toute mort, lorsque les propriétés vitales ne autre substance élastique, et en com- pouvaient plus agir et que le calibre primant périodiquement le liquide du vaisseau était déterminé seulement dont ce sac était rempli , de façon à par l'élasticité de ses parois. L'u- le lancer par saccades dans le vais- nité de mesure employée était IjUàO seau (a). de pouce, et, dans une de ces expé- (2) Dans diverses expériences faites riences , la première circonférence sur des Béliers, Parry a mesuré com- était égale à 379, la seconde à 270, et parativement la circonférence de l'ar- la troisième à 320. La diminution to- lère carotide : 1° pendant la vie; taie avait donc élc de 105, dont 59 2° quelques minutes après la mort, devait être dû à la contractilité vitale lorsque la contraction tonique du et 50 à l'élasticité physique. Dans une (a) Bichat, Anatomie yénérale, t. T, p. 304, * PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 193 En voici la preuve. Si l'on met à nu l'artère carotide sur un Chien vivant, et si l'on applique sur ce vaisseau deux ligatures, l'une vers la base du cou, l'autre à quelque distance de la tête, on interrompra toute communication entre le tronçon ainsi délimité et le reste du système circulatoire, car nous savons que dans cette région la carotide ne fournit aucune branche. Le sang, ainsi emprisonné, se trouvera donc soustrait à l'in- fluence des mouvements du cœur et ne pourra être pressé que par les parois mêmes du vaisseau. Cependant, dès que l'on pra- tiquera à ces parois une petite ouverture, on verra ce liquide s'en échapper rapidement ; il sera lancé au dehors avec force et le tube se videra presque complètement (1). La différence qui existe dans la force de réaction d'une artère vivante et d'une artère morte est également mise en évidence par une expérience très curieuse due à M. Poiseuille. A l'aide d'un petit appareil qui lui permettait de déterminer la charge nécessaire pour distendre avec de l'eau une portion d'artère et de mesurer comparativement la pression exercée par les parois autre expérience faite sur une Brebis vaisseau située en aval du point obli- par le même physiologiste, la mort téré se vide dans les veines (6) , et fut produite par hémorrhagie, et la Schwenke avait vu qu'une portion carotide, qui, dans l'état normal, me- d'artère comprise entre deux liga- surail 320, s'est réduite ù 160; mais lures chasse dans les vaisseaux voi- après la mort elle a repris peu à peu sins le sang compris entre ces deux une circonférence égale à 232 : le rétré- liens (c). cissement avait donc été de 160, dont L'expérience, lelleque je l'ai décrite 6S dépendant de la tonicité vitale et ci-dessus, a été faite par plusieurs phy- 92 de l'élasticité (a). siologistes, et notamment par Sœm- (1) Drélincurt a constaté que lors- mering (cl) , par Ueinarz (e) et par qu'une artère est liée, la portion du Magendie (/). (a) Parry, An Expérimental Inquirii inlo the Nature of llie Arterial Piihe, ■181G , p. 00 et ^suivantes. (6) Caroli Drelincurlii Expérimenta anatomica ex vivorum sectionihus petita, i>. 3(1084). (c) Pc.hwenke, llœmalologia, \>. 80. ((Z) Soîinnicring, De corporis liumanl fabrica, t. V, p. 80 (1800). (e) Pic-iiiarz, Uiss. de ivrilabil. arteriarum (voy. liiin.lach, Traité de pinjsiolotjie, t. VI. p. 3.'')2). (/■) Mageniliu , Ulcm . sur l'action des artères dans la circulation {Journal de physiolotjie, d 82d , t, I, p. dO'J). IV. 13 19/i MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. de ce vaisseau , lorsqu'après avoir été distendu de la sorte, celui-ci revient sur lui-même, ce physiologiste a trouvé que la réaction est à peu près égale à l'action quand on opère sur une artère provenant du cadavre d'un Animal mort depuis plu- sieurs jours, mais la dépasse très notablement dans les artères prises au moment même sur un Animal vivant ou récemment mort (1). îl est aussi à noter que les effets de la contractilité vitale des artères se révèlent souvent aux anatomistes qui, pour étudier le mode de distribution des petits vaisseaux, cherchent à les remplir pardesinjections. On saitqu'en général ces opérations réussissent (1) Pour pratiquer cette expérience, M. Poiseiiillc adapte à chaque extré- mité d'un tronçon d'artère un tube recourbé en forme de V, contenant du mercure, muni d'un robinet et dis- posé de façon à pouvoir servir de manomètre. L'artère et Finlervalle entre les deux lubes étant remplis d'eau , on ferme le robinet qui ter- mine le second tube , et l'on verse dans la branche libre du premier la quantité de mercure nécessaire pour repousser l'eau de façon à dilater for- tement l'artère. On note la hauteur de la colonne de mercure dans la grande branche de ce tube, au-des- sus du niveau du métal dans l'autre branche, ce qui donne la mesure de la pression employée pom- distendre l'artère ; puis on ferme le robinet placé entre la terminaison de ce ma- nomètre et l'artère, et l'on ouvre le robinet placé au bout du second tube raanométrique : l'artère revient alors sur elle-même, et en chassant l'eau qui la distendait, élève le mercure dans la branche ascendante de ce dernier manomètre. Celte élévation donne la mesure de la pression exer- cée par les parois de l'artère au mo- ment où elles reviennent sur elles- mêmes. Or, M. Poiseuille a trouvé que cette pression est supérieure à la première d'une quantité insignifiante dans une artère provenant d'un Animal mort depuis longtemps, et où l'élasli- cilé seule peut être en jeu ; mais qu'elle la dépasse d'une quantité très notable dans les artères prises sur des animaux vivants, et que l'on peut supposer être encore doués d'une certaine puissance vitale. Ainsi, dans une expérience, l'excès de la force de contraction sur la force de dilatation a été égale à 19, et même à '2A millimètres de mercure, lorsqu'il employait une artère vivante, et n'était égale qu'à environ U milli- mètres quand il se servait d'une artère extraite du cadavre d'un Cheval mort depuis plusieurs jours (a). (fl) Poiseuille , Recherches sUr l'action des artères dans la circulation artérielle {Journal de physiolo(jie de Magendie, 1829, t. IX, p. 44-). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 195 bien mieux sur le cadavre déjà refroidi que chez les Animaux vivants, ou chez ceux qui viennent de mourir (1). § 12. — Les physiologistes ont été très partagés d'opinions au sujet de la nature de cette faculté contractile des artères. Bichat et ses disciples ont pensé qu'elle différait essentiellement de la contractilité musculaire, et l'ont désignée sous le nom de tonicité. En effet, elle ne donne pas lieu à des mouvements brusques, comme ceux des muscles qui obéissent à la volonté, ou même des fibres musculaires du cœur. La constriction d'une artère ne se manifeste pas immédiatement a})rès l'action des stimulants qui déterminent ce phénomène (2) ; elle s'effectue Kalure de la faculté contractile fies artères. (1) Ainsi Ch. Bell cite l'exemple d'une TorUie dont il lui fut impossible d'in- jecter les altères immédiatement après la mort, quelque force qu'il em- ployât, mais chez laquelle cette opé- ration se fit avec facilité le lende- main (a). Du reste , la tonicité des artères peut quelquefois se conserver fort longtemps après que le vaisseau a été séparé du reste de l'organisme, et soustrait par conséquent à l'influence de la vie générale de l'individu. Hun- ier cite un exemple remarquable de la persistance du ressort vital dans les artères logées dans le cordon ombi- lical. Au moment de raccouchement, le bout placentaire de ce cordon ayant été lié, le placenta fut expulsé plein de sang. Le lendemain une seconde ligature fut placée à environ un pouce au-dessous de la première, et le bout de cordon situé entre les deux liga- tures ayant été rescisé , le sang en sortit immédiatement sous forme de jet. Ilunter observa alors avec soin le diamètre des orifices béants des artères qui s'étaient vidées de la sorte, et en les examinant de nouveau vingt-quatre heures après, il trouva qu'ils s'étaient contractés au point de se fermer com- plètement. Il renouvela alors la sec- tion, et le lendemain il constata en- core une fois la constriction de l'extré- mité des artères coupées; mais le jour suivant, ayant répété pour la troisième fois l'opération, il vit les orifices de ces vaisseaux rester béants : d'oi!i il con- clut que les artères avaient cessé de vivre, tandis que pendant les trois premiers jours elles avaient conservé leur contraclilité vitale (6). (2) Hastings rapporte des expé- riences dans lesquelles la contraction des artères ne s'est déclarée qu'une heure après l'application du stimu- lant (c). (o) cil. Ik-ll, An Essay of Ihe Forces luhich circulale Ihe Dlood, hehio an Eœalnlnatlon of the J)ii]'erence of Ihe Notions of Fhnds in Liviny and Dead Vessels, iv 35 (181!)). [b] UiiiiitT, Sur le sang, l'inflammation, etc. {Œîivres, t. MI, p. 180). (c) Hastings, Treatise on the Inllammotion oflhc Mucovs Membrane of the Lunys, p. 3i, Développement inégal de la coniractilité clans les diverses artères. 196 MÉCANISME DE L\ CIRCULATION. lentement et dure pendant un temps considérable ; mais ce mode de contraction ne diffère pas de celui qui s'observe dans d'autres organes dont la structure musculaire n'a soulevé aucun doute parmi les anatomistes, et aujourd'hui on est assez géné- ralement d'accord pour le considérer comme étant de même nature (1) . En étudiant la structure des artères, nous avons vu que des éléments musculaires s'y trouvent associés en plus ou moins grande proportion aux libres élastiques (2), et les expé- riences faites sur les Animaux vivants , depuis l'époque où Bichat écrivait, prouvent clairement que ces vaisseaux sont doués de l'irritabilité musculaire. Les divergences d'opinions que je viens de mentionner tiennent en partie aux différences qui existent dans le degré d'irritabilité des artères de divers calibres. Dans les gros troncs la contractilité est très obscure ; dans les vaisseaux de moyenne grosseur elle devient plus grande, et varie en intensité suivant les espèces ou même les individus ; mais dans les petites branches elle est beaucoup plus développée, et c'est dans les rainuscules qu'elle se manifeste avec le plus de puissance (3). (1) Lorsque les contraclions arté- rielles sont peu persistantes, on peut en déterminer le renouvellement à plusieurs reprises. Dans une des expé- riences faites par Tliomson sur les vaisseaux sous-cutanés de la Gre- nouille, l'application de l'ammoniaque excita quatre fois de suite des contrac- tions à des intervalles de quelques minutes, et dans im autre cas ce pliy- siologiste a pu provoquer des mouve- ments analogues neuf fois dans l'es- pace d'une heure (a). (2) Voyez tome III, p. 51Z|. (3) Ilaller, qui était resté indécis quant à l'existence de l'irritabilité dans les grosses artères, regardait les artérioles comme étant certainement privées de la faculté de se contrac- ter (b). Mais les expériences de Thom- son ont été favorables à l'opinion des physiologistes qui attribuaient aux petites artères une puissance de con- tractilité plus grande qu'aux gros~ troncs (c), et les faits dont la science s'est enrichie plus récemment, et dont je vais rendre compte, donnent tout à fait gain de cause à ces derniers auteurs. nerveux 16 Calibre dc ces vaisseaux sous 1 intiuence du système nerveux. sur la , -. ,,, . . . f , , contraction des Eu ctudiant 1 histoirc anatomique de ces tubes, nous avons vu - ''""^^°" que des filets nerveux viennent se répandre dans leurs pa- rois (1). Or, on a constaté que la section de ces nerfs détermine dans les vaisseaux des effets analogues à ceux que la division du nerf moteur d'un membre produit sur les muscles de cette partie : il en résulte une véritable paralysie des parois vascu- laires, et ceux-ci, ne pouvant plus résister, comme d'ordinaire, à la poussée du sang, se laissent distendre, effet qui détermine dans le tube ainsi modifié une augmentation de capacité. Cette dilatation des vaisseaux est facile à constater dans cer- taines parties du corps. Ainsi, quand on coupe le nerf sympa- thique du cou chez un Lapin, on voit aussitôt les vaisseaux de l'oreille s'élargir, et bientôt après la rougeur qui se manifeste dans la conjonctive indique que les artérioles de cette mem- brane ont subi une modification analogue. Des faits du même ordre ont été constatés dans diverses parties de l'organisme à la suite de la section des nerfs qui se rendent aux vaisseaux correspondants , ou de la destruction des centres médullaires dont ces nerfs dépendent ; et l'augmentation dans la capacité de la portion du système circulatoire ainsi paralysée détermine à son tour divers phénomènes dont l'étude nous occupera ailleurs, l'augmentation de la chaleur animale, par exemple. Mais les artères qui ont été de la sorte soustraites à l'action du système nerveux, et qui, pour cette raison, ne se contractent plus, n'ont pas perdu leur irritabilité, et en substituant au stimulant normal l'excitation galvanique, on peut en réveiller la tonicité et y déterminer des contractions comme d'ordinaire (2). (1) Voyez ci -dessus, tome III, les travaux lorsque je traiterai du p. 515. système nerveux, avaient soupçonné, (2) Depuis assez longtemps plu- plutôt que constaté, l'action exercée sieurs auteurs, dont je ferai connaître par cet appareil sur la tonicité des PROPRIETES DES AUTERES. 501 Des effets analogues s'observent quand on galvanise les filets nerveux du grand sympathique qui se rendent à la glande sous-maxillaire : les artères se resserrent et cessent bientôt d'être perméables au sang ; mais si l'on excite de la même manière les nerfs qui dépendent du système cérébro-spinal et qui se distri- vaisseaux sanguins: ainsi M. W^harton Jonesa remarqué que la secliondu nerf scialique déterminait une légère dila- lalion dans les artères de la palmure interdigitale de la patte de la Gre- nouille. Mais c'est dans ces dernières années seulement que la question a été décidée par des expériences nettes et concluantes, A la suite des obser- vations faites par M. Cl. Bernard sur l'augmentation locale de chaleur que la division du nerf sympathique au cou détermine dans l'oreille du même côté chez le Lapin , MM. Waller , Brown - Séquard , Schiff et quelques autres physiologistes ont porté leur attention sur les modifications que cette section et d'autres opérations analogues déterminent dans l'état des vaisseaux sanguins de la partie dépen- dante du nerf coupé, et ces expéri- mentateurs sont arrivés ainsi à des résultais très importants pour la phy- siologie de la circulation. La dilatation des artères, et même des autres vaisseaux de l'oreille externe, se déclare presque aussitôt après la section de la portion cervicale du grand sympathique chez le Lapin ; et M, Waller a vu qu'en pratiquant une incision dans l'oreille ainsi injectée, on détermine une hémorrhagic beaucoup l)lus abondante qu'en blessant de la môme manière l'oreille du côté op- posé dont les nerfs sont restés intacts. Il a reconnu, aussi qu'en excitant par le galvanisme le même nerf, on peut déterminer dans ces artères une con- traction si énergique, que souvent elles se vident complètement; mais dès qu'il suspendait l'action du courant galva- nique, il voyait ces vaisseaux admettre de nouveau le sang dans leur inté- rieur. M. Waller a constaté aussi que la dilatation des petites artères de l'oreille du Lapin, déterminée par le contact de l'eau chaude, de la mou- tarde et d'autres rubéfiants, disparaît presque complètement par la gal- vanisation de la partie cervicale du sympathique, et que cette excitation diminue beaucoup l'écoulement du sang quand on fait une incision de la peau de l'oreille ainsi injectée. Enfin, de même que iM. Budge (a), il a trouvé qu'en excitant de la même manière la moelle épinière entre la deuxième et la troisième vertèbre du cou , on détermine dans les vaisseaux du pavillon de l'oreille une contrac- tion encore plus grande qu'en agis- sant sur le nerf sympathique cervi- cal (h). Ces résultats ont été, non-seulement confirmés par les expériences de ftlM. Brown-Séquard, SchilF, Kuss- (a) Budgc, De l'influence de la moelle épinière siir la chaleur de la tôle [Comptes rendus de V Académie des sciences, dSôS, t. XXXVI, \>. 377). (b) Waller, Neuvième Mémoire sur le système nerveux {Complcs rendus de l'Académie des sciences, 1«53, l. XXXVI, p. 378 et siiiv.). 202 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. buent à la même glande, on détermine aussitôt des phénomènes dont on ne peut se rendre compte qu'en supposant que sous maul et Tenner, Snellen , etc. (a) , mais généralisés ; et Ton peut affirmer aujourd'hui que, chez les Mammi- fères, toutes les artères du corps sont soumises à Tinfluence du système ner- veux ; qu'elles sont frappées d'une sorte de paralysie par la destruction de certaines parties de ce système, et que l'excitation galvanique des filets ner- veux qui s'y rendent ou des centres nerveux dont ces filets dépendent les détermine à se resserrer d'une ma- nière plus ou moins énergique. Ainsi M. Brown-Séquard a con- staté que parla galvanisation des nerfs sympathiques qui des ganglions ab- dominaux vont aux artères et aux veines des membres postérieurs on détermine dans ces vaisseaux les mê- mes effets qui s'observent dans ceux de la tète quand on galvanise le grand sympathique du cou (6). Après la section du nerf sympa- thique au milieu du cou, on peut aussi produire la contraction des vaisseaux de la pie-mère en galvani- sant le ganglion cervical supérieur (c). Du reste, les nerfs sympathiques ne sont pas les seuls qui agissen t de la sorte sur les parois des vaisseaux sanguins. Ainsi M. Brown-Séquard a trouvé que la section du nerf auriculaire détermine dans l'état des artères du pavillon de l'oreille des effets ana- logues, Magendie, M. Valenlin et plusieurs autres physiologistes ont vuquelasec- tion du nerf trijumeau est suivie de la dilatation des vaisseaux sanguins de la conjonctive, et les expériences de M. Schiff tendent également à démon- trer l'influence paralysante de cette opération sur les vaisseaux, non-seule- ment de l'œil, mais aussi de la mem- brane pituitaire (d). Je citerai également à ce sujet les expériences de M. Schiff sur l'influence que la section des nerfs de la langue exerce sur la coloration de la mem- brane muqueuse de la faceinférieure de cet organe. Dans l'état normal, les petits vaisseaux de cette partie ne laissent (a) Brown-Séquard, Sur les résultats de la section et de la galvanisation du nerf grand sym- pathique au cou {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1854, t. XXXVHI, p. 73). — Schiff, De l'influence du grand sympathique sur la production de la chaleur animale et sur la contractilité vasculaire (Journal hebdomadaire de médecine, 1854, t. 1, p. 423). ^ ICussmaul et Tenner, Uéber den EinfLuss der Blutstroinung in den grossen Gefdssen des Halses auf die Wârme des Ohrs beim Kaninchen und ihr Yerhâltniss zu den Wdrmeverande- rungen luelche durch Ldhmung xind Reix-ung des Sympathicus hedingt luerden (MoleschotTs Unters. zur Naturlehre, 1857, t. I, p. 90). — Snellen, Experimentelle Untersuchung ilber den E'uifLuss der Nerven auf den Entzundungs- process [Archiv fïir die Holldndischen Beiirage zur Natur und Heilkunde \on Donders und W. Berlin, 1857, t. I, p. 206). — Callenfels, Onderzoekingen over den invloed der Vaatzenmoen of den Bloedetmloop en den Warnstegraad (Nederlandsch Lancet, 1855, 3° série, t. IV, p. 689), et Ueber den Elnfluss der vaso-motorischen Nerven auf den Krelslauf und die Temperatur ( Zeitschrift fur rationnelle Médecin, 1855, 2= série, t. VII). (6) Brown-Séquard , Op. cit. [Comptes rendus de l'.\cadém':e des sciences , 1854, t, XXKVIIt, p. 90). (c) Callenfels, Op. cit. {Nederlandsch Lancet, 1855, 3° séri»;, t. IV, p. 753). {d) Schiff, Untersuchungen zur Physiologie des Nervensy stems, 1855, 1. 1", p. 2 etsuiv. PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 203 cette influence les petits vaisseaux répandus dans sa substance ont éprouvé une grande dilatation (1). J'ajouterai que l'excitation des nerfs de la sensibilité dans une portion circonscrite du corps peut même provoquer dans des parties fort éloignées une action réflexe sur les vaisseaux passer que peu de sang, de sorte que la membrane est blanchâtre ; mais après la section de l'un des nerfs hypoglosses, ceux du côté correspon- dant se dilatent beaucoup et donnent à la muqueuse une couleur rouge qui contraste avec la teinte pâle du côté opposé. L'effet est encore plus marqué lorsqu'on coupe d'un côté de la tète les nerfs lingual et hypoglosse à la fois (a). Ce physiologiste a vu aussi que chez les Chiens et les Lapins, l'excitation galvanique de la portion cervicale de la moelle épinière détermine la contrac- tion des vaisseaux de l'oreille, comme M. Waller l'avait constaté ; mais que cet effet ne se produit plus lorsqu'on coupe préalablement les racines des nerfs qui mettent cette portion du système cérébro-spinal en communi- cation avec les nerfs sympathiques du cou (6). On lui doit aussi plusieurs expériences qui tendent à établir que les artères des membres et des autres parties de ' l'organisme sont placées également sous la dépendance de certains nerfs. Enfin l'ensemble de ses recherches l'a conduit à penser que l'influence excito-motrice exercée sur les vaisseaux a sa source dans le cerveau et la moelle épinière, et que les ganglions sympathiques la trans- mettent seulement (c). (1) Dans des expériences récentes et pleines d'intérêt, relatives à l'influence du système nerveux sur l'état du sang qui traverse les glandes , M. Cl. Ber- nard a trouvé que lorsqu'on a lié le filet sympathique qui se rend à la glande sous-maxillaire , le sang coule en plus grande abondance des veines de cet organe et otïïe une teinte ver- meille ; mais que si l'on galvanise ensuite ce nerf, le sang devient noir, s'écoule plus lentement, et bientôt s'arrête même tout à fait ; ce qui pa- raît dépendre du resserrement des petits vaisseaux. Enfin, si on he le filet du nerf lingual qui se rend à la même glande , et qu'on le galvanise, non-seulement le sang recommence à couler à flots et otïre une teinte ver- meille, mais s'échappe même de la veine en formant un jet saccadé, dont les moments d'accélération sont syn- chroniques avec les battements du pouls : phénomènes qui indiquent l'é- largissement des voies de communi- cation entre les artères et les veines de la glande (d). {a) Scliiff, Ueber den Einjluss dev Nevvcn auf die GeÇâsse der Zunrje (Arclûv fiir Physlol. Ileilk., 1853, t. Xll, p. 377). (6) Schiff, De l'influence du grand sympathique {Gazelle hebdomadaire de viédecine, d 854, l. F, p. 423). (t) Schiff, Untersnchungen zur Pliysiolorjie des Narvensy stems, 1855, p. 131. {d} Cl. licrnard, Sur les variations de couleur dans le sang veineux des organes glandulaires, suivant leur étal de fonction ou de repos {Journal de physiologie, 1858, t. I, p. 241). 204 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. sanguins, et déterminer ceux-ci à se dilater ou à se contracter. C'est de la sorte que les applications froides sur la nuque arrêtent souvent le saignement du nez, et que dans divers cas d'hémor- rhagies internes on peut espérer de bons effets de l'emploi de la glace à l'extérieur (1). § 1/i. — Ainsi, il est aujourd'hui bien démontré que ce n'est pas seulement à raison de l'élasticité de leur tissu que les artères pressent sur le sang qui, lancé dans leur intérieur par le jeu de la pompe ventriculaire, est venu les distendre, mais qu'elles (1) Stock, médecin du commence- ment du siècle actuel, qui a beaucoup insisté sur les effets du froid sur l'or- ganisme, cite plusieurs observations intéressantes au sujet de l'utilité des applications froides sur la peau, dans des cas d'hémorrhagies graves, soit de la membrane pituitaire, soit des reins, de rutcrus, etc. On connaît aussi des exemples de la suppression brusque des menstrues, à la suite de l'inges- tion d'une quantité considérable d'eau froide dans l'estomac (a). Dans ces derniers temps, M. Brown- Séquard a constaté expérimentale- ment que l'immersion de l'une des mains dans l'eau froide peut déter- miner la contraction des vaisseaux sanguins dans la main du côté op- posé (6), et M. Callenfels a vu qu'en pinçant l'oreille d'un Lapin, on peut déterminer la dilatation des vaisseaux dans l'oreille du côté opposé (c). Ce dernier physiologiste a constaté aussi d'autres faits qui mettent en évi- dence l'action nerveuse réflexe sur la contraclilité vasculaire. Si l'on coupe le nerf spinal chez un Lapin, opéra- tion qui détermine une légère dilata- tion des vaisseaux sanguins de l'oreille du côté correspondant, on peut pro- duire ensuite la contraction de ces vaisseaux non-seulement en galvani- sant le bout périphérique du nerf coupé, mais aussi en excitant de la même manière son tronçon supé- rieur qui est resté en communi- cation avec la molle allongée, et qui n'a plus de relations directes avec la partie où l'effet s'observe. Il faut donc que l'excitation ait été transmise d'abord à l'axe cérébro-spinal et y ait déterminé une action nerveuse réflexe sur les vaisseaux de l'oreille [d) . M. Snellen vient de répéter et de va- rier ces expériences de façon à mettre encore mieux en évidence l'action réflexe du système sur les vaisseaux. (a) Stock, Médical Collections on the Effects ofCold as a Remedy in certain Diseases, 1805, p. H 3 et sLiiv. (6) Brown-Séquard, Remarques sur l'influence du froid appliqué à une petite partie du corps hiomain {Journ. de physiologie, 1858, 1. 1, p. 502). (c) Callenfels, Ueber den Einfluss der vaso-motorischen Nerven, auf den Kreislauf und die Temperatur (Zeitschrift fiir rationnelle Medicin, 1855, 2' série, t. VU, p. 191). (d) Callenfels, Op. cit. {Zeitschr,, t. VII, p. 192), PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 205 tendent à se resserrer en vertu de la contractilité lenle ou to- nique dont leurs parois sont douées, et que cette contractilité, de même que celle des muscles ordinaires, est soumise à l'in- fluence du système nerveux. Ces faits nous fournissent une explication satisfaisante de phéno- mènes dont on est journellement témoin : par exemple, de la rou- geur de la face et même du cou, qui se manifeste si souvent sous l'influence d'émotions légères (1), et de la pâleur subite qui, dans Ainsi il a fait voir que la dilatation des vaisseaux de l'œil que Magendie avait remarquée comme une des con- séquences de la section du nerf tri- jumeau (a) ne dépend pas de cette opération elle-même , mais bien de l'irritation de la conjonctive par suite de la paralysie des paupières ; car on empêche la congestion du sang de s'y établir, en maintenant les paupières de l'Animal fermées et en préservant l'œil du contact des corps étran- gers (6). (1) Plusieurs auteurs ont alTirmé que les nègres ne sont pas suscep- tibles de présenter des phénomènes de ce genre : en eifet, dans les cir- constances où les blancs rougissent, leurs joues ne prennent qu'une teinte plus noire ; mais cela ne lient pas à une différence dans les propriétés du réseau capillaire sous-cutané de leur visage, et dépend seulement de l'épaisseur de la couche de pigment qui recouvre le derme et qui masque la rougeur due à l'injection de ces petits vaisseaux. Pour s'en convain- cre, il suffit d'observer ce qui se passe chez les individus de cette race qui portent à la joue une cicatrice un peu étendue. On sait qu'à la suite d'une brûlure ou d'une blessure, le réseau muqueux de la peau ne se reproduit pas ou ne se reproduit que très imparfaitement, et que les cica- trices restent blanches chez les nègres comme chez les Hommes de la race caucasique. Or, on a remarqué que sous l'influence des émotions, ces cicatrices rougissent chez les nègres, comme le ferailla joued'unindividu derace blan- che (c). Chez les albinos, ce phéno- mène prend une grande intensité. La rougeur des pommettes chez les ma- lades affectés de pneumonie paraît dépendre aussi d'une action nerveuse réffexe exercée par l'intermédiaire soit des pneumogastriques, soit du grand sympathique sur les vaisseaux de cette partie de la face ; mais on ne sait pas si elle est due à une dilatation simple des petits vaisseaux sous- cutanés , à une sorte d'hypérémie active, ou à un arrêt du sang déter- miné par la contraction des vei- nules (d). (a) Magendie, De Vinjluence de la cinquième paire de nerfs sur la nutrition et les fonctions de l'œil {Journal de physiologie, •1824, I. IV, p. 170). (6) Snellen, Experimentelle Untersuctmng iïber den Ein/luss der Nerven aufden Entzimdunys- process (Arch. fiir die liolldndischeii BeitrcCge zur Natur-und IJeillcunde, 1858, t. I, p. 210). (c) Burgess, On Ihe l'hysiotogy and Mechatiism of Blushing. In-8, 1839. (d) Gublcr, Sur la rougeur des pommettes dans la pneumonie, analysé par M. Drown-Stquanl {Journal de physiologie , 1858, t. F, p. 411). 206 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. d'autres cas où le choc moral est plus intense, peut frapper notre visage. Si l'influence nerveuse cesse momentanément d'arriver avec l'abondance ordinaire dans les nerfs qui animent les petits vaisseaux sous-cutanés de la face, le sang y pénètre en plus grande quantité que dans l'état normal; et si l'excitation du système nerveux s'étend à ces mêmes nerfs, la contraction des vaisseaux s'opère et la couleur des joues disparaît. J'ajouterai que l'affaiblissement général de l'organisme paraît tendre à diminuer la force contraclile des artères (}); mais le degré d'irritabilité de ces vaisseaux varie beaucoup suivant les individus, sans que l'on puisse toujours se rendre compte des causes de ces variations (2). (1) M. Wliarton Jones a remarqué que chez des Grenouilles affaiblies par une longue réclusion, les petites ar- tères étaient souvent dilatées au point d'avoir jusqu'à quatre fois leur calibre ordinaire {a). Il est aussi à noter que les diffé- rences sexuelles paraissent avoir quel- que influence sur le développement de l'irritabilité des parois artérielles. Ainsi, dans les expériences de Parry, la contraction des artères déterminée par le contact de l'air était beaucoup plus grande chez les Brebis que chez les Béliers (5). (2) La divergence des résultats ob- tenus par les divers physiologistes dépend en partie de ce que 1res sou- vent l'observation des effets des stimu- lants a été abandonnée trop tôt ; mais d'autres fois on ne peut attribuer la non-réussite des expériences qu'à un défaut d'irritabilité. Ainsi Verschuir a vu souvent les artères rester com- plètement immobiles à la suite de l'application de divers stimulants, tan- dis que d'autres fois l'emploi des mêmes moyens y déterminait des con- tractions très fortes ; quelquefois ces différences se sont produites entre les deux côtés du corps d'un même Ani- mal, ou bien encore entre les divers rameaux d'une même branche vascu- laire (c). il paraîtrait y avoir aussi , à cet égard , des différences spécifiques : ainsi M. Vulpian a trouvé que la con- tractilité vasculaire est plus dévelop- pée chez le Surmulot que chez le Chien et le Lapin (rf). (a) Wliarton Jones, On the State of Blood and Blood-vessels in Inflammalion (Guy's Ilospital Beports, 2= série, t. VIT, p. 7). (6) Parry, Experim. Jnqumj, on Arterial Puise, p. 76. (c) Verschuir, Disserlatio mcdica inavguralis.de arteriarum et venanm viirritahili, 17C6, p. 84 à 88. (d) Vulpian , Recherches expérimentales siir la contraclilité des vaisseaucr, p. 4 {Société de biologie, 1858). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 207 § 15. — Le resserrement des artères peut être provoqué par des agents mécaniques aussi bien que par l'influence ner- siimTiInts veuse. Ainsi on a vu souvent des contractions lentes , mais """''''""''"'^ énergiques, se manifester dans les carotides et d'autres troncs d'un calibre considérable dont on irritait les parois en les ra- clant avec un scalpel ou en les piquant avec une aiguille (1) ; Action des sur les artères. (1) Verschuir, qui fut un des pre- miers à bien constater l'exislence d'une faculté contractile dans les ar- tères, vit dans une de ses expériences faite sur un Chien, la fémorale se res- serrer d'espace en espace après qu'il eut stimulé les parois de ce vaisseau en les raclant avec un scalpel. En excitant de la même manière la caro- tide, il y détermina aussi des contrac- tions locales (a). Thomson, en irritant avec la pointe d'une aiguille les pelites artères de la patte d'une Grenouille , est par- venu plusieurs fois à provoquer une contraction complète de ces vais- seaux (b). Hastings a obtenu tantôt une con- striction linéaire, tantôt un resserre- ment assez étendu, en irritant méca- niquement diverses artères, telles que la fémorale et les mésentériques, ou même l'aorte abdominale, chez le Chat, le Chien et le Lapin (c). En gé- néral, ce phénomène ne se manifestait qu'au bout de cinq minutes ; quel- quefois seulement au bout de quinze à vingt minutes. Reinarz et Burdach ont vu des tron- çons d'artères de Bœuf et de Cheval, détachés du corps, se resserrer sur des cylindres de cire d'un diamètre égal à leur calibre qu'on avait in- troduits sans effort dans ces vais- seaux {d). M. Wharton Jones a vu que, sous Pinfluence d'une légère pression exer- cée avec un instrument mousse, les arlérioles de la palmure des pattes, chez la Grenouille , se contractent promptement, mais ne tardent que peu à reprendre leur calibre ordi- naire. Des effets semblables sont pro- duits par l'application d'une goutte d'eau froide ou d'un courant galva- nique très faible (e). Enfin, tout dernièrement M. Marey a appelé de nouveau l'attention des physiologistes siu- les phénomènes de contraction déterminés dans les petits vaisseaux de la peau par une irrita- tion mécanique {f). (a) Verscliuir, De arlei'iarum et venarum vl irritabili, p. 89 et siiiv. (b) i. Thomson, Traité médico-clnricr(]ical de l'inflammation, p. 57. (c) Hastings, Dispiiialio phys. inaug. de vi conlrarlUi vasorvm. Edinb., 1818. — A Treatise on Inflammation of the Mucous Membrane ofthe Lungs, ta which is prefl.red an Expérimental Inquiry respecling the Conlraclile poiueroflhe ftlood-vcsscls, etc., -1820, p. 24 et suiv. {d) Burdadi, Traité de physiologie, t. VI, 353. {e) Wliarloti .lones, Op. cil., p. 9. (f) Marey, Mémoire sitr la conlraclililé vasculaire (Ann. des sciences nat., 1858, 4" série, t. I\, p. 08). Action du froid, etc. 208 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. et ces effets sont plus faciles à produire dans les petites branches artérielles que dans les gros troncs que je viens de nommer (1). L'action locale du froid détermine aussi le resserrement des petites artères (2), et une chaleur très forte produit des effets (1) M. Viilpian a trouvé que la con- Uaclion des vaisseaux est plus facile à exciter à l'aide de stimulants méca- niques qu'au moyen de l'électricité , et que chez le Chien celte propriété est peu développée dans les grosses branches de l'artère mésentérique, mais le devient beaucoup dans les petites divisions du même vaisseau, et augmente à mesure qu'on se rap- proche de la terminaison de celles-ci dans les parois de l'intestin (a). (2) L'utilité des applications froides sur les blessures pour y arrêter l'écoulc; ment du sang n'a pas échappé à l'ob- servation du vulgaire, et paraît avoir été connue depuis longtemps même des sauvages de l'Amérique septentrio- nale(6). Cullen, dont l'auloriléélaittrès grande parmi les médecins du siècle dernier, préconisait le froid comme le plus puissant des astringents auxquels on peut avoir recours dans les cas d'hé- niorrhagic(G) ; et c'est principalement à raison de la contraction des vais- seaux sanguins produite par cet agent, que l'on peut se rendre compte des succès obtenus par plusieurs chi- rurgiens de nos jours, qui, à la suite d'opérations ou de blessures, ont re- cours aux topiques réfrigérants pour empêcher l'inflammation de se décla- rer dans la partie lésée (d). C'est aussi par suite de la con- striction déterminée dans les petites artères par Je contact de l'air froid que souvent , dans des opérations chirurgicales telles que l'ablation du sein et les amputations , il arrive que des petits vaisseaux échappent à l'attentioiî du chirurgien et ne donnent pas de sang lorsque celui-Ci commence le pansement de la plaie, mais ne tardent pas à devenir la source d'une hémorrhagie inquié- tante dès que, le pansement étant achevé et le malade replacé dans son lit, la chaleur générale du corps fait (a) Vulpian, Recherches eœpérimenlales sîir la contraciilité des vaisseaux, de, p. 4 (oxlr. des Mém. de la Soc. de biologie, 1858). (b) Stock, Médical Collections on Effects of Cold, 1805, p. 109. (f) Cullen, First Lines of tlie Praclice ofPhysic, 1784, t. II, p. 31 G. [dj A. Bel .wd, DIém. sur l'emploi de l'eau froide comme antiphlogisl'ique dans le traitement des maladies chirurgicales (Archives générales de médecine, 1835, 2° série, t. VII, p. 5). — Baudens, Des règles à suivre dans V emploi de la glace après l'opération de la cataracte [Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1845, t. XLl, p. 264). — Souvenirs d'une mission médicale à l'armée d'Orient, p. 40 et suiv. (extr. de la Reviie des Deux-Mondes, août 1857). , — Chassaignac, Mém. sur les hémorrhagies des cavités muqueuses ; nouveau mode d'applica- lion de la glace dans ces hémorrhagies (Archives générales de médecine, 1851, 4= série, t. XXVI, p. 129). — Magne , Sur les heureux effets de la glace appliquée sur l'œil Immédiatement après l'opé- ration de la cataracte par abaissement (Gaxette médicale, 1855, p. 595). PROPRIÉTÉS DES ARTERKS. 209 analogues, tandis que sous l'influence d'une chaleur modérée on voit ces vaisseaux augmenter de calibre (1). Hunter a reconnu que l'excitation produite par le contact de l'air sur la surface externe d'une artère suffit pour déterminer dans ce vaisseau un resserrement lent, mais très persislant (2), Influence ilu contact lie l'air. cesser la constriction de ces vaisseaux. Pour arrêter les hémorrhagies de ce genre, on est quelquefois obligé de remettre la plaie à nu, afin de lier les artères dont l'ouverture est res- tée béante ; mais alors l'action de l'air froid produit de nouveau la con- traction de ces vaisseaux et en rend la recherche très difficile, de façon que parfois quelques-uns d'entre eux se soustraient encore à l'œil de l'o- pérateur , et que les mêmes acci- dents se renouvellent plusieurs fois de suite. Mais les chirurgiens savent aussi que pour arrêter cet écoulement du sang, il suffit souvent de faire des applications froides sur la partie divisée. Schwann a fait quelques recherches sur la contraction des artères par l'action du froid. Dans une de ses expériences, il étala sous le micros- cope le mésentère d'un Crapaud , et y versa ensuite quelques gouttes d'eau fraîche : une des branches artérielles, qui avait 0''?-,072û de diamètre avant l'application du froid, se resserra de façon à n'avoir au bout de quinze minutes que 0''f-,0'276 ; puis se dilata peu à peu, et en répétant l'instilla- tion de l'eau froide, on vit repa- raître la contraction plusieurs fois de suite (a). Des phénomènes du même ordre se manifestent avec plus d'intensité dans les vaisseaux capillaires, ainsi que nous le verrons dans une des prochaines Leçons. (1) Marshall-Hall a constaté qu'un phénomène analogue h la contraction tétanique dont les muscles de la Gre- nouille sont saisis quand on plonge un de ces Animaux dans un bain à la température de Zi9 degrés, se mani- feste sous la même influence dans les parois des artères, et il a rapporté cette expérience comme un argument en faveur de l'opinion de ceux qui attribuent un pouvoir musculaire à ces vaisseaux (6). (2) « Si l'on divise une artère trans- versalement, ou si l'on se borne h la dénuder, dit Ilunter, on observe qu'elle se contracte par degrés jusqu'à ce que sa cavité soit entièrement obli- térée ; mais si on la laisse dans cet état de contraction jusqu'après la mort de l'Animal, et qu'alors on la dilate de manière à dépasser ce qui constitue l'état de repos du tissu élas- tique, elle ne se resserre ensuite qu'autant qu'il faut pour revenir à cet état, et ce retrait s'opère immé- diatement, mais n'est pas égal à celui dont l'artère est capable pendant qu'elle est vivante. L'arlère libiale (a) Schwann, arl. Cef.ksse (Encyclopœdische Wurtevbuch, p. 229). (()) Marshall-Hall, A Critical and Experimenlal fCssay on tl\e VArcuUilimi of Iht ninod, -IS.TI, p. 80. IV. 1/4 210 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. et beaucoup d'autres physiologistes ont été témoins du même phénomène. innuence Lcs stiuiulauts chimiques sont plus puissants pour exciter la des agents . \ / 1 - j -t • i chimiques, contractiou des artères (1), et c est en grande partie de cette postérieiiie d'un Chien ayant élé mise à découvert, son volume fut déter- miné, et l'on observa qu'elle se con- tracta tellement en un court espace de temps, qu'elle offrit un obstacle presque complet au passage du sang, et que lorsqu'on l'ont divisée, le sang ne fit que suinter par le bout du vaisseau. On dénuda de même l'artère carotide et l'artère crurale, et l'on suivit attentivement les changements qui s'opérèrent dans ces vaisseaux, tandis qu'on laissait couler le sang de l'Animal jusqu'à la mort; or, on remarqua que ces artères devinrent évidemment de plus en plus pe- tites (a). » La contraction des artères au con- tact de l'air a été observée aussi par Fowler, Jones, Hastings et beaucoup d'autres physiologistes (6). (1) Ilailer et ses disciples ont vu la constriction des artères se produire quand on applique sur ces vaisseaux des acides énergiques, notamment l'acide sulfurique ; mais on pouvait penser que ces changements étaient dus seulement à quelque altération chimique dans la substance des pa- rois vasculaires (c). Une des expé- riences faites par Hastings tend à prouver le contraire : en effet , ce physiologiste , en touchant l'artère fémorale d'un Chat avec de l'acide nitrique, a vu ce vaisseau se resserrer immédiatement ; mais , bien que la marque jaune produite par le contact de cet agent persistât sur la tunique artérielle externe, la contraction cessa dans l'espace de quelques heures ; on ne pouvait donc attribuer celle-ci à "une modification chimique de la sub- stance des parois vasculaires, car l'état produit de la sorte aurait élé perma- nent [d). Du reste, Verschuir avait déjà remarqué que l'acide nitrique ne détermine pas le même resserre- ment de ces vaisseaux sur le cadavre que chez les Animaux vivants (e). Thomson a constaté par plus de cent expériences que l'ammoniaque faible appliquée sur la peau inter- digitale des Grenouilles détermine presque toujours très promptement la contraction des artères sous-ja- centes (/"). Mais Hastings, qui paraît avoir fait usage d'ammoniaque con- centrée, a vu ce réactif provoquer par- fois la dilatation de ces vaisseaux, tandis que d'autres fois il a observé des contractions [g). Hastings a déterminé une contrac- (n) Hunier, Traité du sang, de l'inflammation, etc. {Œuvres, t. III, p. 185). (h) Fowler, Disput. inaiig. de inflammatione. — Jones, De arterxœ sectœ consecutionibus , p, 29. — Hastings, Treat. on the Inflam. of the Mucoiis Membrane of the Lungs, p. 28, (c) Hallcr, Dissert, sur l'ii'ritabilité (Mém. sîtr les parties sensibles et irrit.,\. 1, p. (d) Hastings, Op. cit., p. 28. («) Verschuir, Dissert, de arteriarwn et venarum vi irvitabili, p. 90. (f) Thomson, Traité mcd.-chir. de l'inflammation, p. 56. {g) Hastings, Op. cit., p. 28 et 30. 56). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 211 •propriété que dépend raclion utile des astringents et d'autres topiques dont les chirurgiens font parfois usage pour arrêter les hémorrhagies (i). Dans l'état physiologique, ces vaisseaux tendent toujours à se lion presque complète dans les petites artères interdigilales de la Grenouille, cil y appliquant de l'essence de téré- benthine (a). Le contact d'une dissolution de chlorhydrate d'ammoniaque provoque en général une contraction considé- rable des petits vaisseaux, mais quel- quefois une dilatation. M, Wharton Jones a trouvé qu'une faible solution de sulfate d'atropine dans l'eau, appliquée sur la peau de la Grenouille,, détermine dans les arlé- rioles sous-cutanées une contraction lente > à la suite de laquelle ces vais- seaux ne reviennent à leur calibre ordinaire que très graduellement (6). Prévost a trouvé que la teinture d'aconit étendue d'eau produit un rétrécissement très remarquable des petits vaisseaux, mais il n'a fait ses expériences que sur des parties affec- tées d'inflammation (c). Le seigle ergoté et l'ergotine que l'on en extrait paraissent exercer une action très puissante sur la contrac- tilité des vaisseaux sanguins. Dans une expérience faite par M. Chaval- lay, de Ghambéry, l'artère crurale d'un Lapin ayant été ouverte , donna un jet de sang de la grosseur d'une plume d'oie ; mais un tampon de charpie imbibé d'une dissolution d'er- gotine ayant été appliqué sur la plaie, le vaisseau s'est oblitéré au bout de cinq minutes , et l'hémorrhagie a cessé. Des effets analogues ont été obtenus en expérimentant sur l'artère crurale et sur la carotide d'un Mou- ton {d). (l) Les topiques employés pour ar- rêter l'écoulement du sang, et appelés hémostatiques , agissent pour la plu- part en déterminant tout à la fois la constriclion des orifices béants des petits vaisseaux et la formation d'un caillot à l'extrémité de ceux-ci. L'eau de Rabel (qui est un mélange d'acide sulfurique et d'fflcool ) remplit ces indications, et l'alun est un des ingré- dients les plus puissants de la plupart de ces eaux hémostatiques. L'acétate de plomb exerce une influence ana- logue sur les petits vaisseaux san- guins. Dans ces derniers temps on a beaucoup vanté l'emploi du matico , substance qui provient d'un arbre de la famille des Pipéritées, qui croît en Bolivie, et qui a reçu les noms d'ylr- tanthe elongata ou de Stephensia elongata (e). (a) Haslings, On the In/lamm. ofthe Mucoua Membrane of the Lugs, p. 5G. (b) Wharton Jones, On tke State of tlie Blood and lilood-vessels m Inftarmnai'wn {Guy's hosp. Heporls, t. VU, p. 8). (c) Prévost, Note sur V inflammation (Mém. de la Soc, de plujsique et d'Iiist. nnt, de Genève, 48:{3, t. VI, p. 146). (rf) iionjean, Note sur l'application de l'ergotine dans les liémorrliarjles externes {Comptes rendus de l'Académie des sciences, 184D, I. XXI, p. 53). — Nouvelles expériences sur l'action de l'ergotine dans les hémorrhagies externes {Comptes rendus, l. XXI, p. 400). [ej Cazcnln;, De la valeur du malicu comme kémostalique {IJulictin de thérapeutique, 1851, t. .NU, p. 32). 512 MÊC.iNISME DE LA CIHCULAlION. luduencc resseiTcr ct à presser sur le sarii^: coiifciui dans leur intérieur, du volume i o ■) iiu san-. f]g gQpjg qyg ]g,^,p capacité est subordonnée à la quantité de liquide ainsi renfermé, et qu'ils se vident quand le cœur cesse de leur en envoyer. Ce resserrement de tout le système artériel est manifeste dans les cas d'hémorrhagie abondante (1). Le même phénomène se produit d'une manière locale, lors- qu'à l'aide d'une ligature on interrompt la communication entre le cœur et une portion du système artériel. En aval du point oblitéré, le vaisseau se rétrécit et se vide complètement. Influence § 16. — 11 cst aussi à noter que le développement d'une aigue. ^Qj^ij^gpjJQj^ énergique dans les parois artérielles, de même que dans les autres parties irritables de l'organisme, est presque toujours suivi d'un affaiblissement temporaire de la puissance vitale de l'organe, lequel se décèle ici, non-seulement par une diminution de l'excitabilité (^), mais aussi par une dilatation (1) Dans une expérience faite sur par Parry, la carotide d'une Bre- une Brebis par Parry, la circonfé- bis fut dénudée, et sa circonférence, rencc de l'artère carotide qui, pri- mesurée avec soin, était égale h raitivemenl, était de ^ de pouce, se ~ de pouce. Après une heure d'expo- réduisil dans les proportions suivantes sition à l'air, elle s'était retirée au après chaque saignée de 250 grammes point de n'avoir plus, vers le milieu de sang : de la porlion dénudée que — (6). (2) L'épuisement de l'irriiabilité par 288, 250, 235, 233, 222, 201, , l . -, l, . , . , , f ,„, ,^, ,„^ le fait de lexercice de cette facultés est 191 , 161 , IGO. manifesté dans une des expériences A ce moment l'Animal mourut d'hé- de Thomson. A l'aide de l'applicaiion morrhagie, et la tonicité du vaisseau localed'unpeud'ammoniaqueaffaiblie, venant à se perdre graduellement, les il détermina dans l'espace de moins mêmes mesures donnèrent : d'un quart d'heure quatre contractions dans certaines artères sous-cutanées 5 minnies après la mort 212 ^^^ jg p^j^g ^p^,„g Grenouille; la cin- 4 heures ''- après la mort 234 ., i- •• i .• i » '_ ^ quieme application du stimulant ne 11 heures -- après la mort 232 , , , ',,,,. . , , provoqua plus de mouvements dans 28 heures après , la même dimension (a). ces vaisseaux, mais les artères voi- Dans une des expériences faites sines qui n'avaient pas élé excitées (a) Parry, Experim. Inquirij into the Natvre of Arlerinl Puise, p.. 38 et sniv, [b) Idem, ibid., p. 37. l'UOPRIETES i)î£S AUTElïKS. ^il3 anormale du vaisseau. Ce relâchement des parois est surtout manifeste dans les très petites artères, et, sous l'intluence de certains agents, il peut se déclarer directement sans avoir été oifré.ence précède de contractions (1); il se produit d autant plus vite, des stimulants ,, . . ', ' 1 • 1 • • faibles ut que 1 excitation a ete plus puissante, et sur les vaisseaux qui puissants, etc. sont très irritables, tels que les petites branches sous-cutanées, la contraction n'est bien distincte que sous l'influence des stimu- lants faibles, tandis que la dilatation est un elTet presque immé- diat d'une excitation vive (2). de la sorle conservaient leur irrita- bilité {a). Versclitiir et VVedemeycr avaient reconnti aussi que lorsqu'une artère s'est contractée sous l'influence de quelque stimulant, l'emploi renou- velé du même moyen ne produit que peu ou point d'effet [b], (1) Hastings a observé ces phéno- mènes d'une manière très distincte en appliquant de l'ammoniaque sur la membrane interdigitale de la Gre- nouille ; mais la dilatation consécu- tive ou même primilive des petits vaisseaux estplns considérable, quand on emploie une solution de chlor- hydrate d'ammoniaque, et, lorsqu'ils sont agrandis de la sorte, ils se res- serrent de nouveau sous l'influence des applications froides, de l'al- cool, etc. Le contact d'une solution de sel conunun détermine aussi une dilata- lion considérable dans les petils vais- seaux (c). Dans les expériences de M. VVharlon Jones ce phénomène a été souvent précédé d'ime contrac- tion momentanée des artérioles. L'action locale d'un mélange de teinlure d'opium et d'une solution de sulfalc de cuivre détermine celte dila- tation sans contraction préalable (cl). (2) Les recherches récentes de M. Marey sur la conîraclililé vascu- laire ont conduit ce jeune physiolo- giste à penser que les variations dans les effets dus à l'excitation des arté- rioles dépendent, d'une part, du degré d'intensité du stimulant , et , d'autre part, du degré d'excitabilité du vais- seau ; Qu'une excitation modérée tend toujours à faire contracter les vais- seaux ; Qu'une excitation forte tend à les dilater par suite d'une sorte d'épui- sement d'innervation comparable à la fatigue qui suit l'exercice muscu- laire ; Enfin, que la répétition fréquente (a) ïlioinson, Traité méd.-chir. de rinflammalion, p. 50. (h) Vcrschuir, Dissert. de arUriarum et venarum vi irritahUi, p. 84. - - W'i-'iliMiicycr, Uiitersucliung eu ûber dcr Krelslauf des fllulcs, p. iîi2. in) Haflings, On tlie Iii/lnmm. oftlie Mucnus Membrane, p. 54 cl sniv. {d) Wliarion Jono.«, Op. cil. {Cuy's llosinlal lieporls, vol. VU, p. 9). Relâchement des artères. 211 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. A la suite d'une contraction très intense ou très prolongée, telle qu'on en voit se manifester par l'action stimulante d'un fort courant d'induction, le relâchement des parois artérielles peut même devenir si considérable, que, sous l'influence de la pression exercée par le sang, la portion du vaisseau ainsi affai- bli se dilate au point d'offrir le double de son diamètre ordi- naire et quelquefois prend l'apparence d'une petite poche ané- vrysmale (1). de l'excitation tend à émousser l'irri- tabilité de ces organes et les rend plus difficiles à exciter. Ainsi , quand en appuyant légère- ment sur là peau avec un corps mousse , on y trace uue ligne , on chasse mécaniquement le sang des vaisseaux que l'on comprime , et la ligne devient pâle pendant une se- coride ; mais le sang ne tarde pas à revenir, et la peau reprend sa teinte normale. Cependant, vingt ou trente secondes après , la ligne blanche re- paraît comme la première fois et per- siste davantage. Quelquefois elle dure plus d'une minute, et elle dépend évi- demment d'une contraction des petits vaisseaux correspondants qui, excités par la pression, ont réagi contre cette excitation et se sont contractés lente- ment. Si , en traçant cette ligne, on appuie davantage ou si Ton fait usage d'un instrument un peu aigu, de façon à produire une légère douleur, on détermine Tapparilion d'une traînée rouge sur chaque côté de laquelle se montre un liséré blanc; phénomène qui s'explique par la dilatation des petits vaisseaux là où ils ont été for- tement excités, et leur contraction dans les parties adjacentes où leur excitation a été moins vive. M. Marey a remarqué aussi que le premier effet de l'électricité appliquée à dose modérée sur la peau au moyen de houppes métalliques est une con- traction des vaisseaux du derme, tandis que l'effet d'un courant plus fort ou plus prolongé est une dilata- tion des mêmes vaisseaux. (1) Ce fait de la dilatation anormale d'une portion d'artère à la suite d'une contraction excessive a été constaté sur les vaisseaux mésentériques de la Grenouille par les frères Weber (a), et me semble de nature à jeter beau- coup de jour sur la formation de quelques-uns de ces élargissements permanents, connus sous le nom d'ec- casies, qui se remarquent parfois sur certains points des petites branches du système artériel chez l'Homme, et qui ont été l'objet d'une étude très approfondie de la part de M. Vir- chow (6). (a) Ed. und R. H. Weber, Ueber die Wh'kitngen, welche die magneto-elektrische Rei&ung der BliiUjefâsse bei lebenden Thieren hervorbringt (BùWer's Archiv. fur Anat. und Pliysiol., 1847, p. 235). (b) Virchow, Ueber die Erweiterung kleinerer Gefâsse {Archiv fur pathologische Anat. und P/iî/*ioJ., 1851, t. III, p. 427). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 215 Je dois ajouter que par l'effet de l'habitude l'irritabilité des vaisseaux sanguins s'émousse. Ainsi l'action du froid, qui pro- duirait une contraction marquée dans les artérioles de la peau d'une région du corps qui est d'ordinaire bien abritée contre les variations de température , restera sans influence appréciable sur les vaisseaux d'une partie qui est accoutumée à subir l'im- pression de l'air extérieur (1). § 17. — Les variations qui peuvent survenir dans le calibre influence , -,, .,,. •,11) • 1 des contractions des artères d une portion très circonscrite de 1 organisme, et partielles qui sont déterminées soit par les nerfs, soit par toute autre relâchement cause, sont de nature à influer beaucoup sur la manière dont le *"' surT"' sang y circule. En effet, si la branche artérielle qui se rend à "locâîe?" un réseau capillaire vient à se contracter de façon à n'avoir temporairement que la moitié ou le quart de son diamètre ordinaire, elle débitera beaucoup moins de liquide dans un temps donné , et si les canalicules dans lesquels elle va se terminer conservent leurs dimensions primitives, le sang ne coulera plus dans ceux-ci avec la vitesse accoutumée et pourra tendre à y devenir stagnant. Enfin si le resserrement partiel des artérioles est accompagné d'un relâchement ou défaut de contractilité dans la partie suivante du même système de petits vaisseaux, le trouble ainsi produit s'aggravera, et la stase du sang dans les (l) Jl. Marey a appelé dernièrement sous-jacents détermine sur la peau de raltention des physiologistes sur cet l'épigastre une ligne ronge lisérée de ordre de faits, et a cité un assez grand blanc, co;nme dans le cas où sur la nombre d'exemples d'amoindrisse- main on froisse fortement les tégu- ment de l'irritabilité des parois vascu- ments. M. Marey explique de la même laires , par suite de ce qu'il nomme manière les dilférences qui s'observent V accoutumance aux excilations. dans les effets produits sur les petits Ainsi le degré d'excilaliun niéca- vaisseaux sous-cutanés par une appli- niquc qui ne produirait sur le dos de cation froide portée sur la peau du la main qu'une ligne blanche due à corps ou sur la peau des mains ou de la contraction des petits vaisseaux la face (a). {a) M.-irftv, Mi'm. sur la coiilra'UUllé vatculah-e [Ann. de.i sciences nal., 1858, 4" série, 1, IX, p. 69 et stiiv.). 216 MÉOA^•|SMK DE LA ClKClJLATlOiN. capillaires deviendra plus complète. Or ce sont là précisément les phénomènes qui s'observent au début de l'état morbide que les pathologistes désignent sous le nom d'inflammation (1). L'harmonie normale cesse alors d'exister entre le degré de toni- cité des diverses portions du système vasculaire de la partie malade. Le rétrécissement spasmodique de l'artériole dans une certaine étendue de ce vaisseau détermine un ralentissement de la circulation dans les capillaires qui en dépendent, et si d'autres influences, dont j'aurai bientôt à parler, viennent concourir à entraver la marche du sang en aval du détroit ainsi formé, les globules que ce liquide charrie ne tardent pas à s'y agglomérer et à boucher le passage; puis la partie du vaisseau qui s'était contractée tombe dans l'état d'atonie qui suit toujours une action désordonnée, et se dilate de façon à verser une quantité extraordinaire de sang dans les capiflaires ainsi engorgés. Quelquefois cet afflux de liquide suffit pour vaincre l'obstacle, pour désagréger les amas de globules et rétablir le mouvement circulatoire dans les vaisseaux obstrués ('2) -, mais d'autres fois il ne produit pas ce résultat et ne fait qu'accumuler de nouveaux globules contre les agglomérations déjà formées, et dilater davantage les capiflaires en amont de l'obstacle, de façon à étendre les limites du mal. Ces phénomènes sont loin de con- stituer à eux seuls l'état de phlogose, et l'excitation locale qui (1) La dilataliou des capillaires dans caraclèies de l'état inflammatoire; l'inflammation a été révoquée en mais celte coloration est due aussi en doute, ou même niée par quelques grande partie à l'accumulation des glo- pathologistes, mais est bien réelle. Les bules hémaiiques dans les capillaires observations de Emmert, de M. Lebert malades, ainsi que nous le verrons plus etde M. Briicke ne laissent aucune in- en détail dans la trente-sixième Leçon, certitude à cet égard (a). Ce phéno- (2) C'est ce qui a lieu lorsque l'in- mène contribue beaucoup à la produc- flammation se dissipe ou se résout, lion de la rougeur, qui est un des pour employer ici le terme technique. {a)Ewmcii, Beitr. Aur palhol. {\oy Manie, Bei'icht. Zeilschr . fiir ratlonn. ilM.,1846, t. II, p. 3"). — Lebert, Physiologie palhologique, 1845, t. I, p. T. — Briicke, llemerkungen ûbcr die Mechanick des EntrAinduiKjsprocesscs {SiliWi'jsberichle der Akad. der Wissenscltaflen zu Wien, 1849, t. III, p. 131). arlores. PROPRIÉTÉS DES AIITÈRKS. 217 les détermine est la soiiree d'autres désordres physiologiques dont nous n'avons pas à nous oceuper en ce monnent, mais ils sont au nombre des caractères les plus importants du travail intlammatoire, et ils amènent souvent de grandes modifications dans la forme et dans le mode d'action des vaisseaux affec- tés (1). Ainsi il n'est pas rare de voir les artérioles perdre de la sorte leur disposition cylindrique, et devenir moniliformes par suite des rétrécissements et des dilatations qui alternent entre eux, ou bien encore simuler des espèces de poches anévrys- males microscopiques (i2). ^ 18. — Dans l'immense majorité des cas, la contraction contiactions ^ ^ rhjlliniii|iies et la dilatation des artères ne se font que très lentement et de quelques n'offrent rien de rhythmique; mais il n'en est pas toujours ainsi, et chez certains Mammifères quelques-uns de ces vais- seaux s'agrandissent et se resserrent alternativement d'une manière assez régulière. Le professeur Schiff (de Berne) a dé- couvert ce curieux phénomène dans les vaisseaux sous-cutanés de l'oreille chez le Lapin, et il le considère comme venant en (1) Cette coiistriclion initiale des en forme d'ampoules paraissent ne artérioles qui conduisent à un point pas avoir écliappé à l'attention de où l'état inflammatoire se déclare, et Lcuvvenhoeck (6), et conslituaient pro- ie ralentissement du cours du sang bablement une partie des petites tu- qui en résulte dans les capillaires si- meurs vasculaircs dont Haller a parlé lues au delà, ont été constatés d'abord sous le nom d'anévrysnies vrais (c) ; par M. Briicke, professeur de pliysio- mais celles-ci n'ont pas toujours ce logie à Vienne, piiis par MM. Pagetet mode d'origine, et la nature n'en est Wbarton Jones à Londres, et par bien connue que depuis la publication M. Lebert à Paris (a). des observations de MM. Kolliker et (2) Ces dilatations circonscrites et liasse, Virchow, etc. [d). [a] Briicke, Op. cit. — Pagel, Lectures on Ihe Surgical l'atholofjij, 1853, t.I, p. 302, elc. — Whaiton Jones, Op. cit. {(Jtty's llospital Reports, i' série, t. VII). — Lebert, Mdm. sur les changements vasculaircs que provoque la localisation injlamma- loire (Mém. de la Société de biologie, 1852, l. IV, p. 84). {b; Leinvcnhoeck, Expérimenta et conlemplationes [.\rcana Naturce, t. Il, p. 17'J). (e) Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p. 9. (d) Rolliker et Masse, Ueber blultiiirperchenhaltiqe Zellen {Zeitschr. filr Wisscnsch, ZooL, 18i8, I. I, p. 200). — Virchow, Op. cil. (Archivfiir patholoy. Anal, und l'itysiol., 1851, 1. III, p. 427). Fonctions de la tunique moyenne des artères. 218 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. aide aux mouvements du cœur; mais les changements de calibre dans les artères de cette partie me semblent, au contraire, devoir retarder plutôt qu'accélérer le cours du sang (1). § 19. — L'élasticité et la contractilité des artères sont dues à la tunique moyenne de ces vaisseaux, tunique que nous avons déjà vue se composer de fdjres de tissu jaune et d'éléments musculaires (2). La force de résistance des parois artérielles dépend aussi principalement de cette couche moyenne, et cette circonstance nous fait comprendre comment ces tubes cylin- (1) M. Schiff a trouvé que ces dila- tations périodiques commencent dans les branches artérielles situées à la base du pavillon de l'oreille, et s'éten- dent ensuite aux ramuscules et aux veines. Les contractions suivent la même direction, et ces états alterna- tifs se succèdent plus ou moins rapi- ■ dément, suivant la température exté- rieure et diverses autres circonstances. La contraction de ces artères peut être provoquée par des stimulants mécaniques aussi bien que par le galvanisme ; et, chose importante à noter, quand on pince une des oreil- les, l'effet produit n'est pas seule- ment local, mais se manifeste aussi dans l'oreille du côté opposé. M. Schiff a observé le même phénomène quand il pinçait fortement une des pattes de l'Animal ou quand il l'effrayait (a). M. Van der Beke Gallenfels a ré- pété les expériences de M. Schiff, et a constaté également ces changements périodiques dans le calibre des vais- seaux de l'oreille externe du Lapin ; mais il n'a observé ni la régularité ni la fréquence de ces mouvements annoncés par le professeur de Berne. Dans ses expériences, chaque état de contraction ou de dilatation du- rait une minute ou davantage, tan- dis que M. Schiff a vu les change- ments se répéter plusieurs fois dans le même espace de temps. Quand l'air est froid, les vaisseaux restent quel- quefois contractés pendant plusieurs heures ; mais quand la température atmosphérique est élevée, l'état de di- latation est prédominant (6). MVÎ. Donders, Iloppe et Gallenfels ont fait remarquer avec raison que ces mouvements rhythmiques ne doi- vent pas contribuer à accélérer la circulation du sang dans les vaisseaux de l'oreille, car ils se propagent beau- coup plus lentement que ne marche le courant déterminé par l'action du cœur. La contractilité de ces vaisseaux a été étudiée aussi par M. Vulpian (c). (2) Voyez ci-dessus, tome III, p. 51Zi. (a) Schifï, Fin accessorisches Arterienherz bel Kaninchen {Arc'h. fur ■physiol. Heilkunde, 1854, t. Xm, p. 521). (6) J. Van der Beke Gallenfels, Ueber den Einfluss der vaso-molorischen Nerven aufden Kreis- lauf und die Temperatur {Zeitschr. filr rationnelle Medicln, 1855, 2" série, t. VII, p. 172 et suiv.). (c) Vulpian, Sur la contractilité des vaisseaux de l'oreille du Lapin {Compte rendu de la Société de biologie, 1856, 2' série, t. III, p. 183). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES. 219 driques se laissent distendre par le sang, et se transforment parfois en une vaste poche, lorsque, dans un point de leur éten- due, ils se trouvent réduits à leurs tuniques interne et externe, soit par suite d'une blessure et de la non-cicatrisation de la plaie faite à leur tunique moyenne , soit par l'effet d'une sorte d'ul- cération de celle-ci. On donne à ces dilatations artérielles le nom d'anévrysmes, et il arrive souvent que les chocs répétés du sang contre leurs parois, après en avoir déterminé l'amincisse- ment, en effectuent la rupture, accident qui amène d'ordinaire une hémorrhagie mortelle. . C'est aussi à raison des propriétés physiologiques de cette tunique moyenne que dans certains cas une artère divisée se ferme spontanément et cesse de livrer passage au sang, qui d'abord s'en échappait comme un torrent ; mais le retrait de cette gaine ne suffit que rarement à produire à lui seul rocclu- sion du vaisseau, et dans la plupart des cas la coagulation du sang entre les lèvres de la plaie contribue aussi pour beaucoup à la suppression de l' hémorrhagie (1). § 20. — ïl est facile de comprendre que de légères variations influence sur le pouls. dans la puissance contractile des artères doivent influer sur le caractère des pulsations dont ces vaisseaux sont le siège. Si les (I) Dans les plaies d'armes à feu, extrémité resle ijéanle, el c'est par par exemple dans les cas où nii suite de la formation d'un caillot membre a été emporté par un boulet qu'elle s'oblitère. Le mécanisme de ce de canon, il arrive parfois que l'artère travail cuiatif a été étudié, pour la déchirée se contracte si fortement à première fois, par un des chiriirp;iens son extrémité, que le sang ne peut les plus célèbres du siècle dernier, plus y passer et n'y constitue qu'un J.-L. Petit (6). Vers la même époque, caillot filiforme (a) ; mais dans la Morand, tout en méconnaissant l'im- plupart des cas où une grosse artère portance des résultats constatés par a été divisée transversalement, son son devancier, enrichit la science de (a) Gulliric, On the Diseases and Injuries ofArleries, 1830, p. 22'k (6) J.-L. Petit, Dissertation sur la manière d'arrêter le sang dans les hémorrhagies {Mém. de l'Acad. des sciences , 1731, p. 85). — Secorid Mémoire sur la manière d'arrêter des hémorrha- gies, contenant deux observations qui prouvent que le sang s'arrête par un caillot (Mém. de l'Acad. des sciences, 1732, p. 388). 220 MÉCANISME DE L\ CIRCULATION. parois vasculaires sont à la fois très irritables, mais incapables de résister fortement à l'impulsion produite par le choc du sang- contre leur surface interne, elles céderont beaucoup sous l'in- fluence de chacune des ondées lancées par le cœur, et revien- dront promptement sur elles-mêmes dès ciu'elles auront été nouveaux faits relalifs à la coutracli- lité de ces vaisseaux (a) ; Kirklancl et quelques autres physiologistes fii-ent également des travaux sur ce point important ; mais ce sont principale- ment les expériences de J. Jones, de P. Béclardetd'Amussat, qui ont com- plété les recherches commencées si heureusement par J.-L. Petit. Lorsqu'une artère d'un calibre con- sidérable a été complètement divisée en travers, elle se raccourcit et se contracte tout en restant béante ; m?iis sa tunique externe se retire beaucoup moins que sa tunique moyenne et sa membrane interne, et le sang ne larde pas à y adhérer en se coagulant. Une sorte de bourrelet se constitue ainsi et se rétrécit de plus en plus par l'addition de nouveaux dépôts de sang coagulé, jusqu'à ce qu'enfin il forme une espèce de bonnet ou de capuchon qui recouvre l'extrémité du vaisseau et adhère à ses parois. Ce couvercle arrête l'hémorrhagie et détermine la formation d'un autre caillot intérieur, ou bouchon, qui est conique et s'étend dans l'intérieur du vaisseau jusqu'au niveau de la première branche la- térale de celui-ci, mais n'adhère que faiblement à ses parois» et ne tarderait pas à être expulsé par le sang, si le caillot extérieur ou capu- chon n'existait pas. L'inflammation adhésive peut ensuite s'établir dans la plaie, et la portion de l'artère qui est occupée par le caillot se contracte alors graduellement, et finit par s'obli- térer complètement et se transformer en un cordon ligamentiforme. Mais il arrive d'ordinaire que le caillot cède au torrent circulatoire avant que le travail de consolidation se soit com- plété, et qu'une nouvelle hémorrhagie se déclare. Aussi, dans les cas de la section d'une artère d'un calibre un peu considérable, faut-il toujours avoir recours à la ligature, la com- pression , ou quelque autre moyen analogue, pour prévenir des accidents funestes. Lorsqu'une artère n'a été coupée qu'à moitié, la rétraction des bords de la plaie, au lieu de contribuer à eu (a) Morand, Sur les changements qui arrivent aux artères coupées (Mém. de l'Acad. des sciences, 1730, p. 321). — Poulcau, Mélanges de chirurgie, i 7G0, p. 299 et suiv. — Kirkland, Essaij on the Method ofSuppressing Hemorrhage from Divided Arteries, 1763. — J. F. Jones, A Treatiseon the Process employed by Nature in Siippressing the Hemorrhage from Divided and Punctured Arteries, 1810. — - Béclai'il, Recherches et expériences sur les blessures des artères {Mém. de la Soc. médicale d'émulation, 1817, t. Il, 2» parlio). — Amussat, Nouvelles recherches expérimentales sur les hémorrhagies Iraumatiques {Mém. de IWcad. de médecine, 1836, 1. V, p. 08). — Recherches expérimentales sur les blessures des artères et des veines (cxlr. du Journal de chirurgie de Malg-aig-ne, 1843). PROPRIÉTÉS DES ARTÈRES, 221 excitées par ce slimulant mécanique. Les baltemeiils du pouls seront alors plus grands que dans l'état normal, et pourront même devenir visibles à l'œil là où ils étaient d'ordinaire à peine appréciables au toucher (1). Si, par suite du relâchement de amener roblitéralion, ne peut que la rendre plus béante ; par conséquent, une blessure de ce genre est souvent plus dangereuse que la section com- plèle du vaisseau, et c'est pour ceUe raison que parfois le chirurgien trouve avantage à diviser complètement une artère qui a été ouverte de la sorte. 11 est aussi à noter que les tuniques interne et moyenne des artères sont plus fragiles que la tunique externe, et lorsqu'on applique une ligature sur \m de ces vaisseaux, on les rompt circulairement. L'extrémité divisée se contracte, et le sang, retenu par la constriction artificielle de la tunique externe, s'y coagule ; puis le cul-de- sac ainsi produit se resserre peu à peu et sa cavité s'oblitère. On peut déter- miner les mêmes effets en tordant seulement l'artère de manière à briser complètement ses deux tuniques in- ternes sans déchirer sa gaîne externe. Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai aux recherches de J. Jones, de Béclard et d'Amiissat, citées ci- dessus. (1) Cette augmentation dans la grandeur des oscillations pulsatiles des artères peut être déterminée à volonté par l'action locale de certains agents sur ces vaisseaux. Ainsi, dans les expériences de Ilastings, l'applica- lion de l'ammoniaque sur l'aorte ven- trale d'un Lapin a été suivie immé- diatement de battements très étendus dans ce vaisseau. Ce physiologiste a constaté aussi que les mouvements du pouls devenaient visibles à l'œil dans l'ailèrc carotide du Cheval, lors- qu'il y appliquait le même réactif. Des pulsations beaucoup plus fortes que d'ordinaire se sont manifestées aussi dans l'aorte d'un Chien après que les parois de ce vaisseau eurent été excitées mécaniquement (a). Peut-être faudrait-il rapporter à un excès dans l'irritabilité des parois artérielles le phénomène du pouls double qui a été observé par plusieurs pathologistes, et qui est connu sous le nom de pouls dicrote. Ainsi Parry rap- porte l'exemple d'un jeune homme dont chaque systole du cœur correspondait à deux battements du pouls dans l'ar- tère radiale du côté droit, toutes les fois que la circulation était accélérée. L'un de ces battements était évidem- ment produit par la contraction du ventricule gauche du cœur, et celui qui coïncidait avec la diastole ventri- culaire dépendait peut-être de l'im- pulsion imprimée au sang par la réac- tion des parois artérielles qui, au lieu d'être lente et graduelle comme d'ordinaire, était brusque. Parry cher- che à expliquer ce double battement par la locomotion du vaisseau, mais le raisonnement qu'il fait à ce sujet me paraît peu satisfaisant (6). (fl) Hasiings, Inflamrn. of Ihe Mucous Membrane of Ihe Limrjs, p. 28, [b] l'aiTy, Kxperim. inquiry on the Nature of Ar ter ial Puise, p. 134. Au sujet lin pouls dirroti', voyez ausfi Virciiow, Die Lehre vom Arterienpuh, p. 184 ol siiiv. 2^2 MÉCANIIsiVIE DE LA CIRCULATION. leurs parois, les arlères deviennent moins capables de réagir . contre le courant qui tend à les dilater, il est évident aussi que la transformation du mouvement intermittent développé par les contractions du cœur, en un mouvement continu, ne s'effectuera pas aussitôt que de coutume, et que les saccades du sang en circulation se feront sentir au delà du point où le pouls cesse généralement d'exister (1). Or toutes ces variations dans la manière d'agir des parois vasculaires se lient à certains états physiologiques, et c'est pour cette raison que le médecin, en étudiant les mouvements des artères, peut s'éclairer utilement sur la disposition générale de l'organisme aussi bien que sur le mode d'action du cœur. Il est également à remarquer que la différence dans la toni- cité normale des artères paraît être beaucoup plus grande qu'on n'aurait été porté à le supposer. Dans ces derniers temps, M. Yierordt et un de ses disciples ont cherché à mesurer directement le diamètre de quelques-uns de ces vaisseaux chez l'Homme vivant , et ils ont vu que du matin au soir leur capa- cité pouvait changer notablement , phénomène qui semble devoir dépendre de quelques variations dans la contractilité de ces vaisseaux plutôt que d'une différence dans le volume des liquides en circulation (2). « § 21. — On considère généralement l'élasticité et la con- (i) D'après quelques expériences licielle qui repose sur un plan résis- hydrauliques faites par Alisou, il pa- tant, par exemple l'artère radiale au raîtrait que la force élastique des av- poignet; et, à l'aide d'une petite pla- tères est moins grande dans les parties que, on la déprime de façon à l'apla- atteintes d'inflammation que dans les tir, et l'on mesure sa largeur dans parties saines (a). cet état. MM. Vierordt et Aberle ont (2) Pour faire des observations de trouvé ainsi que, le soir, le diamètre ce genre, on choisit une artère super- de ce vaisseau est plus grand que le (a) Alison, Notice of some Expenments on the Vital Properties of Arteries leadiny to Inflamed Parts, etc. (Edinb. Med. and Sîirg. Journ., 1836, t, XLV, p. 100). PROPRIETES DES ARTERES, tractilité des artères comme n'ajoutant rien à la force motrice influence des artères développée par les mouvements du cœur et comme servant '"'■i'»p"'«*''"'=^ ^ . . circulatoire, seulement à en régulariser l'emploi ; mais, d'après quelques expériences dues à M. Poiseuille, je suis porté à croire qu'il en est autrement. x4insi que je l'ai déjà dit, ce physiologiste a trouvé que la réaction vitale des parois de ces vaisseaux détermine une pression supérieure à celle du sang, sous l'influence de laquelle leur dilatation s'était produite, et par conséquent il faut admettre que la contractilité des artères, mise enjeu par le fait de chaque distension, contribue d'une manière active à pousser le sang vers le système capillaire, et tend à contre-balancer la déper- dition de forces qui peut avoir lieu dans ce trajet (1). § 22. — Je dois ajouter que l'intluence des mouvements respiratoires peut devenir très grande sur la marche du sang artériel dans le voisinage immédiat du cœur (2) , mais que Influence des mouvements du thorax. matin. Voici quelques-unes des me- sures comparatives prises cliez quatre individus : A. Matin, 2,92. Soir, 3,44 B. — 2,43 — 3,32 C. _ 2,29 — 2,67 D. — 1,74 — 2,45 (a) (1) J'ai déjà eu l'occasion de parler de ces expériences au commencement de celte Leçon (6). Un des physiologistes les plus cé- lèbres du siècle actuel, Charles Bell, a cherché à établir par une suite de raisonnements plus spécieux que so- lides, que les artères sont douées d'une puissance impulsive très con- sidérable, et contribuent plus que le cœur à mettre le sang en mouve- ment (c) ; mais les faits sur lesquels il s'appuie peuvent être expliqués sans avoir recours à une pareille hypo- thèse. ('2) Dans les recherches faites par M. Spengler sous la direction de M. Ludwig, on a comparé sur le même Animal les variations de pres- sion coïncidentes avec les mouvements d'expiration et d'inspiration, d'une part dans l'artère carotide, d'autre part dans une branche périphérique du système artériel chez le Cheval. Dans une première expérience, on a comparé de la sorte les pressions à l'extrémité inférieure de la carotide et a l'extrémité céphalique du même (a) Aberle, Die Messung der Arteriendurchmesser am khenden Menschen. TuJjingne, ISr.G (voyez Vicrordt's Archiv fûrphyml. Ileïlkunde, d850, t. XV, p. 574). (b) Voy. ci-dofsus, pajje 193. (c) Cil. liell. An Kssay on the Forces luhich Cireulale Ihe filood, 1819. 22/|. MÉCANISME DE LA CIRCULATION. l'accélération intermittenle imprimée ainsi au liquide en cir- culation diminue promptement dans les parties périphériques du système vasculaire, et que dans les petites artères elle cesse d'être appréciable. Mais c'est là un sujet que nous étudierons plus attentivement dans la prochaine Leçon. * vaisseau, et l'on a trouvé que dans le premier point la difl'érence entre le moment de l'inspiration et celui de l'expiration était, terme moyen, d'en- viron IZiO millimètres de mercure , tandis que dans le second point elle n'était que d'environ Zi9 millimètres. Chez un autre Cheval, les varia- tions correspondantes étaient, terme moyen, d'environ 75 millimètres dans la carotide, de 27 millimètres dans l'artère maxillaire interne, et d'envi- ron 7 millimètres dans l'artère méta- tarsienne postérieure (a). la) Spengler, Ueber die Stdrke des Arleriellen Blutstronis (Miilier's Archiv fur Anat. und Physiol., 1844, p. 55 et suiv.). TRENTE - CINQUIEME LEÇON. Suite de l'histoire du cours du sang dans les artères. — Mesure de la pression à laquelle ce liquide se trouve soumis dans ces vaisseaux ; circonstances qui font varier cette pression. — De la vitesse du courant sanguin dans les artères. — Bruits artériels. — Circonstances qui influent sur le mode de distribution du sang dans les diverses parties du système artériel. — Rôle des anasto- moses. du sang dans les arlères. § 1. — Nous avons vu dans une Leçon précédente (1) que Poussée latérale la charge sous laquelle le sang , poussé par la contraction du cœur, entre dans le système artériel, est considérable, et peut être généralement estimée comme équivalant à la pression qu'exercerait une colonne d'eau de près de 2 mètres de haut. Cela posé, les physiologistes devaient être naturellement con- duits à chercher ce que devient cette pression à mesure que le sang avance dans ra[)pareil circulatoire, et quelle poussée ce liquide détermine sur les parois des vaisseaux qu'il traverse (2). (1) Voyez ci-clcssus , page lOZi et suivantes. (2) i'our mettre en évidence et pour estimer h» force avec laquelle le sang presse contre les parois des ar- tères et dilate ces vaisseaux, les an- ciens physiologistes ont eu recours à une expL'ricnce curieuse que chacun peut répéter sur sa propre personne, mais qui n'a pas toute la portée que l'on y atlribuait. Lorsque, étant assis, on pose un genou sur l'autre en croisant les jambes, on voit le pied qui est de la .-orle suspendu en l'air osciller d'une manière régulière, et il est facile de se (■on\aincre que ces mouvements cor- respondent aux Ijatlenienls de l'artère IV. poplitée, qui se trouve pressée entre les deux genoux et qui se rend au membre ainsi placé. Chaque fois que le sang, lancé pailecœur, vient frapper contre les parois de ce vaisseau, le pied se soulève, et par conséquent il était na- turel de penserque le mouvement ainsi produit était dû à l'impulsion du sang. Or, en fixant un poids de 25 kilogram- mes, ou mémedavanluge, àTextrémité du membre qui oscille de la sorte, on peut voir les mouvements continuer, et, en mesurant la longueur du bras de levier représenté par la jambe, on a calculé que la force nécessaire pour soulever de la .sorte 25 kilogrammes était au moins égale à 200 kilogram- mes. On a donc conclu de cette expc- 15 226 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. On sait, en physique, que toute pression exercée sur un liquide renfermé dans un vase se transmet dans tous les sens et égale- ment, de sorte que si le système artériel était un réservoir clos , la charge produite par la contraction du ventricule gauche se ferait sentir avec la même puissance dans toute la longueur de ce système, et déterminerait partout une éléva- tion égale dans la colonne manométrique employée pour la mesurer. Les premières expériences dans lesquelles Haies (1) chercha à mesurer la pression du sang dans les diverses artères ne donnèrent à ce sujet aucun résultat net, et celles faites, il y a rience que l'effort exercé par le sang sous l'influence des contractions du cœur devait être assez considérable pour faire équilibre à plus de deux quintaux métriques (a). Mais ce raisonnement péchait par sa base, et a été renversé par une autre expérience non moins simple. CharlesBell fitremarquerque, dans les opérationschirurgicales, il suffit d'une pression légère exercée avec le doigt pour arrêter complètement le cours du sang dans une artère, et qu'un poids comparativement très faible, placé sur le trajet de l'artère crurale au pli de l'aine, aplatit ce vaisseau et fait cesser les battements dans les parties situées au delà. Il en conclut que l'action mécanique du sang lancé dans la portion suivante du même vais- seau ne pouvaitètre la cause directe du mouvement de projection qui suit son afflux dans les artères de la jambe (6). Il ne fut pas heureux dans l'explica- tion nouvelle qu'il donna du phéno- mène; mais, d'après les faits qu'il rapporta, on doit penser que les con- tractions des muscles extenseurs de la jambe contribuent pour beaucoup à la production du phénomène. JNous dis- cuterons ce point en traitant de la contraction musculaire. (i) Haies, dont j'ai déjà eu l'occa- sion de citer les recherches sur la force du cœur, trouva que le sang lancé par l'artère carotide et par l'ar- tère crurale d'un Chien s'élève à peu près à la même hauteur dans un tube vertical adapté à l'un et à l'autre de ces vaisseaux (c) ; mais en discutant les résultats numériques fournis par d'autres expériences de ce physiolo- giste, Senac arriva ci celte conclusion que le sang a plus de force dans les artères voisines du cœur que dans les autres {d). (a) Voyez Senac, Traité de la siructiire du cœur, t. Il, p. 153. (6) Cil." Bell, An Essay on the Forces which Circulate the Dlood, 1819, p. 69 et suîv. (c) Haies, Hémostatique, p. 31. (d) Senac, Traité de la structure du cmtr, t. I!, p. 154. ■ l'RESSlON 1)0 SANG t)ANS LRS ARTÈRES. 2:27 vingt-cinq ans, par M. Poiseuillc (1), semblaient prouver qn'ef- lecfivement les choses se passent ainsi dans l'appareil circnla- toire de l'Homme et des autres Mammifères. En effet, ce phy- siologiste distingué n'observa aucune différence dans la hauteur de la colonne liquide tenue en équilibre par le sang contenu ;G DANS LliS ARTÈUKS. 2*29 siu'face et les parois du tuyau tend à la Ibis à enlraîner les molécules de celui-ei et à arrêter les molécules du fluide en mouvement ; la matière dont se compose la paroi rigide du tube ne saurait se déplacer, et par conséquent l'effet se traduit tout entier par un refard déterminé dans la marche des molé- cules du liquide. Celui-ci se trouve donc ralenti de plus en plus dans son cours vers l'extrémité libre du tuyau , et toutes les résistances partielles ainsi engendrées s'ajoutant d'aval en amont, créeut dans chaque section de la veine fluide une force de plus en plus considérable qui, en s'opposant à la marche de celui-ci, développera une pression correspondante au retard produit. Ainsi, quand à l'aide du piézomètre ou de tout autre instru- ment analogue, on mesure la pression exercée par le liquide en mouvement dans un point déterminé du tuyau que celui-ci tra- verse , on ne mesure pas seulement les effets dus à la force motrice qui a donné à ce liquide l'impulsion dont il est animé; on voit le résultat complexe produit par deux forces contraires : d'un côté, la charge initiale pesant sur le liquide au moment de son entrée dans le tube , et, d'autre part, la résistance que le courant ainsi provoqué rencontre dans la portion de ce tube où il doit passer. On comprend donc que la poussée latérale observée puisse varier suivant que les ra[)porls entre ces deux forces contraires changeront , et qu'elle doive augmenter avec la résistance à l'écoulement libre quand, la force d'impulsion reste la même; ou bien encore que cette pression du liquide contre les parois du tube augmente de la même manière quand les obstacles à l'écoulement ne changent pas, mais que la rapi- dité initiale du couiant s'accroît. Ainsi imaginons de l'eau qui, sous l'influence d'une charge constante, coulerait dans un tuyau dont rextrémiléserait garnied'un robinctet dontl'intérieurserait en coniniunicalion avec luie série de piézomètres placés de dis- tance en distance. Si le rohitiet est cojnplétement ouvert et 230 MÉCAiNISME DE LA CIRCULATION. d'un calibre égal à celui du tube, le liquide s'élèvera dans les piézomètres à des hauteurs de moins en moins grandes à mesure qu'on s'éloigne du réservoir faisant fonction de moteur : mais si l'on tourne graduellement le robinet, on verra les différences de niveau diminuer de plus en plus dans les divers piézomètres par suite de l'élévation croissante des colonnes manométriques près de l'orifice, et quand l'obstacle opposé ainsi à l'écoulement sera devenu égal à la force employée pour déterminer le cou- rant, la hauteur de cette colonne deviendra égale aussi dans tous les manomètres , car ceux-ci rentreront dans la condition des vases communicants ordinaires. Signification § 2. — Par conscqucnt, lorsqu'on applique sur une artère l'hé- hénwdynamo- niodynamomètrc dc M. Poiseuille ou tout autre manomètre (1), métriques, ^j. ^^^ ^^ évaluc la prcsslon du sang contre les parois de ce vais - seau par l'élévation de la colonne liquide dans l'intérieur de cet instrument, on a sous les yeux les effets produits par la résul- tante de deux forces opposées : l'une qui tend à pousser le sang en avant, et qui est due essentiellement aux contractions du ventricule gauche du cœur; l'autre qui tend à empêcher ce liquide d'obéir à cette influence, et qui résulte du frottement du liquide contre les parois des vaisseaux et de quelques autres causes de perte de force vive (2). (1) Voyez la description de ces in- de mettre la petite branche du tube struments, page 106. manométriqiie en communication la- (2) Afin d'éviter les causes d'er- térale avec Tartère, sans entraver no- veur qui peuvent s'introduire dans les tablement la circulation dans celle-ci. expériences d'hémodynamique par Pour cela, riiémodynamomètre est suite des obstacles accidentels que l'a- pourvu d'un ajutage terminé par une daptation de l'appareil à l'artère doit petite plaque circulaire qui s'avance en opposer au passage du sang quand on manière de rebord tout autour de l'o- ajuste cet instrument dans l'extrémité rifice de cette pièce ; une autre plaque tronquée du vaisseau, ainsi que le fai- annulaire et mobile engaîne le tube, sait M. Poiseuille, quelques physiolo- et, à l'aide d'un écrou, vient s'appli- gistes préfèrent employer une disposi- quer contre la précédente. Une petite lion à l'aide de laquelle il devient facile fente pratiquée dans la paroi de Par- PRESSION DU SANG DANS LES ARTÈRES. 231 Or, les expériences hémodynamiques montrent que les résis- tances qui tendent à ralentir le cours du sang et à développer la poussée latérale exercée par ce iluide en mouvement se trouvent principalement vers l'extrémité du système artériel, et que, dans l'intérieur des gros vaisseaux, la pression n'est modifiée que très peu parla longueur du trajet parcouru. Effec- tivement, ainsi que je l'ai déjà dit, les différences n'étaient pas appréciables dans les expériences de M. Poiseuille, et, pour les constater pour la première fois, il a fallu avoir recours à un pro- cédé d'observation très ingénieux, employé par M. Volkmann. La poussée latérale du sang dans les artères qui avoisinent le cœur varie à chaque instant. La vitesse avec laquelle ce liquide coule dans les petits vaisseaux est presque uniforme, tandis que l'arrivée du flot lancé dans l'aorte par la systole ventriculaire est intermittent. Chaque fois que la pompe car- Variations dans la pression du santj déterminée par l'action du cœur. tère permet à l'opét-ateur d'introduire le disque terminal dans l'intérieur du vaisseau, et en serrant ensuite les lèvres de la plaie entre ce disque fixe et l'anneau mobile dont il vient d'être question, on intercepte toute commu- nication entre l'intérieur du vaisseau et l'extérieur, par l'espace compris entre les bords de la boutonnière et le tube ; celui-ci se trouve comme soudé latéralement à l'artère, et sa cavité communique librement avec l'intérieur du vaisseau sanguin. L'in- strument disposé de la sorte repré- sente donc exactement les piézoraè- 1res dont les liydrauliciens se servent pour mesurer la poussée des liquides dans les tuyaux de conduite des eaux, et donne la mesure de la pression latérale. On trouve dans les Mémoires de deux des disciples de M, Ludwig,et dans quelques ouvrages généraux [a], des descriptions complètes et des fi- gures de ce petit instrument diverse- ment modifié. M. Volkmann a fait usage d'un autre ajutage, consistant en un tube métallique du calibre de l'artère, qui s'adapte par ses deux extrémités à des pièces annulaires autour (lesquelles on lie les deux bouts de l'artère divisée transversalement , et qui porte une branche latérale s'en détachant à angle droit (6). (a) Spengler, Ueber die Sldrke des arleriellen Blutsiroms (Miiller's Avchiv fur Anal, und PhysioL, 1844, p. 50, pi. 2, ùg. 6). — Mo!,'k, Ueber die Sli'omkrafl des venosen Ulules {Zeilschrift fur raliotmellc Ncdivln, 1845, l. m, p. 47, fig-. \, 2, ^). — Volkmann, Die Hdmodynamik, p. 141. — .1. lîtd.-ir.l, Traiic élémentaire de physiologie, 1855, p. 194. {h] Vulkmann, Op. cit., y. 14C. 2o'2 MÉCANISME Dli L\ CIRCULATION. diaque donne un de ces eoups de pislon Ibultuit, l'excédant de la vitesse initiale du courant sanguin sur le courant effectir, dans la portion périphéri(jue du système, se trouve beaucoup augmentée , et l'augmentalioii de pression qui en résulte dans les gros vaisseaux se traduit au dehors par un mouvement d'ascension brusque de la colonne de liquide suspendue dans rhémodynamomètre adapté à l'un de ces troncs artériels. Mais quand cette injection de liquide vient à être interrompue par la diastole ventriculaire, le sang continue toujours à s'écouler vers les veines ; par conséquent, la poussée latérale diminue, et la colonne manométrique descend proportionnellement à la dimi- nution effectuée. On voit donc le liquide osciller dans le tube de cet instrument, s'élever pendant la systole ventriculaire, et descendre pendant la diastole, mais se maintenir toujours pour le moins à une certaine hauteur qui correspond à la moindre de ces deux pressions développées, l'une par l'effet direct de l'ac- tion du cœur, l'autre par la réaction des parois élastiques des artères contre l'effort ainsi exercé. Évaluation Pour évalucr la pression totale à laquelle le sang se trouve ^m'oyènne."" soumis d'uuc manière permanente dans un point déterminé du système artériel, il faut donc prendre la moyenne entre les deux longueurs ainsi constatées ; et au premier abord on croi- rait pouvoir obtenir cette moyenne avec un degré de précision suftisant en additionnant ces mesures et en divisant ensuite par 2 la somme obtenue. Mais la durée du temps pendant lequel le niveau de la colonne manométrique reste au-dessus du niveau moyen ou descend au-dessous n'est pas la même , et pour bien juger de la valeur totale des pressions, il est souvent néces- saire d'avoir recours à une autre méthode d'évaluation. Pour résoudre la question, M. Volkmann a fait parfois usage d'une espèce particulière d'hémodynamomètre enregistreur inventée par M. Ludwig, et disposée de façon à tracer sur une bande de papier (jui se déroule d'un mouvement unitbrme toutes l'RIiSSlON DU SA>'G DAAS LliS .4.UTÈKES. iOÛ les variations produites dans le niveau de la colonne mano- mélrique (1). I.a courbe dessinée par cet instrument, auquel on a donné le nom de kymographe , représente donc fidèlement toutes les inégalités ; et pour obtenir avec une grande précision la moyenne des hauteurs observées pendant toute la durée de l'expérience, il suffit de découper la bande de papier en suivant les ondulations de la courbe qui y est tracée et de peser com- parativement les deux fragments ainsi obtenus. Si les bords parallèles de la bande correspondent aux maxima et minima des oscillations, et si le papier est d'une épaisseur uniforme, conditions qui sont faciles à réaliser, la différence entre le poids de l'un de ces fragments et la moitié du poids de toute la bande donnera la proportion de la valeur moyenne cherchée (2). (1) Le manomètre enregislreiir, in- venté par M. Liidwig, et désigné par M. Volkmann sous le nom de kymo- graphion, consiste en un hémody- nnmomètre ordinaire dont la grande branche contient un petit flotteur qui suit les mouvements du mercure et qui porte une tige verticale; celle-ci dépasse l'extrémité du tube raano- métrique , et porte à son tour un pinceau dont la position varie suivant le niveau de la colonne mercurielle et s'élève ou descend avec celle-ci; une bande de papier mise en mou- vementd'une manière uniforme par un système d'horlogerie passe latérale- ment devant la pointe du pinceau, et reçoit la marque laissée par son con- tact. Une ligne onduleuse se trouve ainsi tracée, et correspond exacte- ment, par la hauteur et la forme de ses courbes, à l'étendue et à la durée des oscillations du liquide dans l'hé- modynamomètre {a). M. Ludwig a appliqué cet instrument à divers usages, et en a observé ainsi plusieurs résultats très intéressants, comme nous le verrons dans la suite de nos études. (2) 1\I. Marey a proposé récemment l'emploi d'un moyen beaucoup plus simple. Pour évaluer la tension moyenne, il place entre le vaisseau sanguin et la colonne manométrique un tube capillaire d'une certaine lon- gueur, de façon à développer dans celte partie de son instrument des frottements suffisants pour annuler les oscillations et maintenir le mer- cure à une hauteur correspondante à la moyenne entre le maximum et le minimum des hauteurs que ce liquide atteindraitalternalivement dans un hé- modynamomèlre ordinaire. Il a donné (o) LuiJwig, Deilràge suc Kmntniss des Einfliisses (1er lîespii'aHoiis-Deweyunqeii aiifden Blullaufim Aorlen-System (Miiller's Arcliiv fiir Anal, und l'hys., (847, p. 243, pi. x). — Volkmann, Die llâmndynamik , pi. t. 23/| MECANISME DE LA CIRCULATION. Diminution de cette pression dans les artères périphériques. C'est en procédant tantôt de la sorte , tantôt à l'aide de l'iié- inodynamomètre ordinaire, que M. Volkmann a comparé la pression moyenne du sang dans des artères situées à des dis- tances différentes du cœur chez un même animal , et a constaté que cette pression diminue un peu du centre vers la périphérie du système artériel. Ainsi en opérant sur un Chien, ce physiologiste a trouvé que dans l'artère métatarsienne la pression moyenne correspondante à la demi-somme des deux hauteurs de la colonne mano- métrique n'était que de 165 millimètres de mercure, tandis que dans la carolide elle était de 172 millimètres (1). Dans une autre expérience faite sur un Veau , la pression moyenne était de H6 millimètres dans la carotide, et de 89 millimètres seulement dans l'artère métatarsienne. Entin M. Volkmann a comparé aussi la pression moyenne du sang à l'extrémité thoracique de l'artère carotide et à l'extrémité périphérique du même vaisseau chez divers Mam- mifères , et il y a observé des différences très notables (2). à cet instrument le notn d'hémomètre Gompensateur (a). (1) Ces nombres coire.spondent aux moyennes fournies par huit détermi- nations (6). (2) Voici les résultats obtenus dans une de ces séries d'expériences : Extrémité Portion thoracique périphérique ,,-«.• , , '^ , , Dmerences. Dans quelques-unes des expériences faites précédemment par M. Spengler, les résultats paraissent être au pre- mier abord en opposition complète avec la conclusion générale déduite des reclierclies de M. Volkmann, car la pression moyenne obtenue dans la carotide était plus faible que dans les artères éloignées du cœur. Mais l'inspection des données numériques obtenues pendant les moments de systole et de diastole du cœur me semble donner la clef de celte ano- malie, car, dans tous les cas, la colonne manométrique s'élevait beau- coup plus haut pendant la systole. [a) Marey, Recherches hydrauliques sur la circulation du sang {Ann. des sciences nat.,. 1857, i' série, t. VIII, p. 349). (6) Vollimann, Hdmodynamik, p. 167. (c) Idem, iiid., p. 169. de la de la uiiiBieiice carotide. carotide. MiUi.n. Millirn. Millin,. Veau. . 134 80,5 53,5 Id. . . 135,5 94,5 41 Id. . . 177 151 26 Id. . . 145 108 37 Cheval. 122 97 25 Id. . . 214 151 60 Chèvre. 135 126 9 Cabri. . 118 85 33 W. PRESSION DU SANG DANS LES ARTÈRES. 235 En effet, le kymographe lui donna comme expression de la poussée moyenne : Dans la partie Dans la partie centrale. périphérique. Chez un Chien 113,8 88,8 Chez un Mouton lZi2,/i 116,7 Chez un autre Mouton. ...... 88, /i 61,3 Chez nn Lapin, il trouva 91 millimètres pour la pression dans la carotide, et 86 millimètres dans l'artère crurale (1). Il résulte aussi des recherches de ce physiologiste que ces dans la carotide que dans les artères périphériques. Dans les quelques ex- périences où la pression moyenne était plus faible dans le voisinage du thorax que dans les parties éloignées, l'abaissement durant le repos du cœur était énorme dans la carotide, ce qui me semble avoir dû dépendre d'nn trouble dans les mouvements respiratoires ; en effet, nous verrons bientôt que les mouvements violents et laborieux d'inspiration produisent sur la circulation du sang artériel, dans le voisinage du cœur, des effets contraires à ceux déterminés par les contractions de cet organe (a). Cette anomalie s'est produite aussi dans quelques-unes des expériences de M. Voikmann, et ce physiologiste l'a constatée également au moyen d'un autre procédé : en appliquant à l'extré- mité tronquée de chacune de ces ar- tères un ajutage dont Pouverture offrait une aire de la même dimension, et en déterminant la quantité de sang qui s'en écoule en un temps donné. 11 trouva ainsi que, par des orifices égaux, l'artère carotide, chez le Veau, perdit en quarante secondes, dans un cas, 201 grammes de sang, tandis que l'artère crurale en débitait 223 'gram- mes. Dans une autre expérience, le jet fournit en vingt secondes, par l'artère carotide, 110 grammes, et par l'artère crurale, 157 grammes de sang (6). (1) Ces moyennes furent établies à l'aide de la courbe découpée de la manière mentionnée ci-dessus (c). 11 serait bon d'appliquer à l'élude de ce point de l'histoire de la circula- tion un instrument qui a été employé récemment par M. Cl. Bernard pour comparer la poussée du sang dans la carotide et dans la veine jugulaire, et qui paraît devoir donner des résultats plus comparatifs : c'est Vhémomètre différentiel. Il consiste en un tube en U qui e.st appliqué contre une plan- chette graduée, et qui est à moitié rempli de mercure. Chaque extrémité de ce tube est garnie d'un robinet et communique avec un tuyau flexible dont le bout opposé est pourvu d'un ajutage propre à être introduit dans le (ai Spciigler, Op. cit. (Mullur's Arcidv fur Anal, und PhijsioL, 1S44,, p. j2 el suiv., — VollimHnn, Die Udmodynaniik, p. 160. (6) Idem, ibid., p. 175. (c) Wem, ibid., p. nO cl suiv. 236 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. inégalités de pression dans les troncs sitnés près du cœur et dans les artères plus ou moins éloignées de ce centre d'impul- sion ne sont pas proportionnelles aux distances, ni les mêmes dans les diverses régions du corps ; et que dans l'artère crurale, par exemple , la poussée latérale du sang est plus grande que dans les branches du système carotidien , particularité dont nous obtiendrons l'explication lorsque nous étudierons l'in- tluence du diamètre des vaisseaux sur la rapidité du courant qui les traverse, et lorsque nous connaîtrons la manière dont la circulation s'effectue dans les diverses parlies du système veineux. Du reste, les différences qui se remarquent dans la poussée latérale du sang dans les diverses parties du système artériel sont toujours, comme je l'ai déjà dit, très petites, et ce fait prouve que les résistances qui s'opposent au libre écoulement du sang, et qui, en réagissant contre l'impulsion imprimée à ce liquide par les contractions du cœur, déterminent la pression latérale, ne résident pas dans ces conduits, mais sont situées au delà. En effet, le frottement du sang en circulation contre les parois des artères n'occasionne que peu de retard dans la marche de ce liquide, et, ainsi que nous le verrons dans la prochaine Leçon , c'est dans le système capillaire situé entre ces vaisseaux et le système veineux que ces résistances se développent. vaisseau sanguin; enfin toute la por- quels on veut expérimenter, et on les tiou de rappareil qui est inoccupée y fixe; puis on ouvre les robinets, et, par le mercure est remplie d'une dis- suivant que la pous'-ée du sang est plus solution de carbonate de soude pour forte dans Tun ou dans l'autre, la empêcher le sang de s'y coaguler. On colonne mcrcurielle se trouve refoulée introduit les deux ajutages termi- du côté opposé dans le tube à deux naux dans les deux vaisseaux sur les- branches (a). (a) Cl. Bernard, Leçons sur la phijsiologie et la patliolofjie du syslèine nerveux, 1858, l. I, p. 28-2, tl-. 42. PllIiSSION DU SANG DANS LKS AUTÈKES. 2o7 § 3. — Les expériences dont je viens de rendre comple Application , do ces résullali nous éclairent aussi sur la grandeur de la loree déployée par les à h mesure . ' de la pression artères pour pousser le sang dans les veines. Nous avons vu anérieiie ,,, ., .„ constante précédemment que ce liquide coule d une manière uniforme et dans les dernières divisions du système capillaire ; la rapidité ' caidiaque. du courant qui arrive dans les veines est donc aussi grande pendant le repos du cœur que pendant l'action de celte pompe foulante, et par conséquent la force nécessaire pour la produire est précisément celle qui est développée par les artères quand le cœur est inactif. Or, la pression exercée de la sorte est aussi celle qui, dans les expériences en question, maintient la colonne manométrique au-dessus de son niveau initial, et qui correspond à la limite inférieure des oscillations dont le sommet donne la mesure de la puissance déployée par la systole ventriculaire. La différence qui se manifeste entre les minima et les maxima de ces oscillations indique l'excédant de la force cardiaque sur la force artérielle, c'est-à-dire la pression sous laquelle les parois vasculaires cèdent au moment où l'ondée du sang est lancée dans leur intérieur par la contraction du cœur. D'après ce que nous savons déjà sur la transformation gra- duelle du mouvement saccadé du courant artériel en un mou- vement uniforme, nous pouvons prévoir (|ue la différence entre ces deux forces doit décroître à mesure qu'on s'éloigne du cœur pour se rapprocher des capillaires , et que la pression artérielle doit être partout à peu près la même, tandis que l'excédant de la pression cardiaque sur cette dernière sera d'autant plus grand, que l'on se rapprochera davantage de l'organe central d'impulsion, c'est-à-dire du cœur. Les résultats fournis par l'expérience sont en parfait accord avec la tliéorie (1) ; et nous comprenons ainsi pourquoi les (1) Ainsi, en examinant les lal)leaiu on voit que dans les expériences com- niiinéiiqiies i)iil)li(''%|)ai''\l. Voikmann, paiatives laites par ce pliysiologisle 238 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. parois arlérielles offrent plus d'épaisseur et de résistance dans les gros troncs que dans les petites branches (1). Influence § /[ . — Alnsl cjuc je l'ai déjà dit en terminant la dernière des mouvements Lcçon , cliez l'Hommc et les autres Mammifères, l'impulsion respiratoires . . , , sur la pression imprimec au sang artériel par les contractions du cœur est artérielle. i-o ' • • i • • i • modifiée par les variations de pression qui se produisent dans la chambre thoracique lors des mouvements de dilatation et de contraction de cette cavité. Lorsque dans l'expiration, la poitrine se resserre pour chasser l'air des poumons, la pression ainsi développée s'exerce sur le sang contenu dans le cœur et les gros vaisseaux inclus dans cette espèce de pompe foulante, aussi bien que sur les gaz contenus dans les voies respiratoires,^ et tend à chasser ce liquide au dehors. La dilatation inspiratoire produit un effet contraire ; elle tend à agrandir ces réservoirs sanguins comme elle agrandit les poumons, et par conséquent aussi elle tend à y faire séjourner une plus grande quantité de sang. Les résultats du travail effectué par le cœur se trouvent sur l'arlèrc carolide et Tarière du tarsienne (a). Des résultats analogues pied d'un Chien de grande taille, la ont été obtenus par M. Cl. Bernard (fej. limite inférieure des oscillations de la (1) Ainsi que je l'ai déjà dit, Win- colonne manomé trique était entre 17Zi tringhani fit, il y a plus d'un siècle, et lZi6 dans la carotide et entre 179 et beaucoup de recherches sur les pro- 169 dans l'artère du pied, tandis que priétés physiques des vaisseaux sau- les maxima étaient de 19Zi à 20G guins, et dans une de ses expériences pour le premier de ces vaisseaux , et il mesura la force nécessaire pour dé- seulement de 168 à 178 pour le se- terminer la rupture des parois artériel- cond. Terme moyen, l'excédant de les chez le Mouton: pour l'aorte, près la pression cardiaque sur la pression du cœur, elle était de Zi-''"»*;''' ,36, et artérielle était de 37 dans la carotide pour l'artère iliaque , de /i,0/i (c). et de 2 seulement dans l'artère niéta- M, J. Davy a traité le même sujet [d], [a) Voikmann, Die Hâmodunamik, p. 167. (6) Cl. Bernard, Leçons sur La physiologie et la pathologie dit, système nerveux, 1858, t. I, p. 281. (c) Wintringham, An Expérimental Jnqniry on some Parts of Ihe Animal Structure, 1740, . p. 49. {d) J. Davy, Notice of a Fatal Case of Piuptiire of Ihe Jleart and Aorta ; with an Account of some Experiments on Ihe Power of Résistance of the Heart and Great Yessels {Research., Anut. and PhysioL, t. I, p. 441 et ,suiv.). PRESSION DU SANG DANS LES ARTÈRES. 539 donc aUernativement diniinués ou augmentés par l'action de l'appareil respiratoire. Les mouvements d'expiration activent le courant déterminé dans les artères circonvoisines parles con- tractions du ventricule gauche, et les mouvements d'inspira- tion le ralentissent. Or, le jeu de la pompe respiratoire et celui de la pompe cardiaque ne sont pas synchroniques : les mouve- ments d'inspiration et d'expiration sont moins fréquents que les mouvements de systole et de diastole du cœur; et tantôt la force accélératrice produite par la contraction du thorax coïncide avec l'impulsion donnée par le ventricule gauche, de façon à en augmenter les effets, d'autres fois elle se développe dans le moment où ce dernier organe est en repos, et contribue à faire avancer le sang dans le système artériel pendant que le cœur n'agit .pas. Pour constater les effets des mouvements respiratoires sur le cours du sang veineux , il suffit d'ouvrir une des artères des membres sur un Animal vivant, et d'observer les rapports qui existent entre la grandeur du jet qui s'échappe de ce vaisseau et l'énergie des contractions du thorax. Chaque expiration accélère l'écoulement du liquide , et si l'Animal vient à pousser des cris violents ou à faire quelque effort analogue , on voit en même temps le jet grandir (1). (1) IMagendie, en faisant ceUe expé- action de ce genre, les muscles con- rience, a produit des effets analogues stricteurs de la gloite se contractent lorsque avec les mains il comprimait en même temps que les muscles expi- les côtés du thorax de l'Animal («). râleurs, et par conséquent la pression C'est en partie par suite de la même à laquelle l'air se trouve soumis dans influence que, dans les cas où les parois le thorax devient très considérable; d'une artère sont amincies par une or cette pression se transmet au sang dilatation anévrysmale, la rupture s'en contenu dans l'aorte, et, par consé- fait plus facilement quand le malade se quent, accélère le mouvement ini- livre à quelque cffoit musculaire que primé à ce liquide par les systoles du s'il restait en repos; car, dans toute cœur. On cite beaucoup d'exemples (a) .Mafjcndic, De l'influence des mouvemenln de la yoUrine cl des efforts sur la circvlalion du san(j [Journal dephysioL, 1821, t. I, p. d-Sfi). 240 MÉCANISME DE LA CiUCULATlON. Ces influences diverses des mouvements respiratoires sur la force avec laquelle le sang tend à couler dans les grosses artères qui partent de la cavité thoracique ont été étudiées d'une manière habile par M. Ludwig. A l'aide d'instruments disposés de façon à tracer la courbe des mouvements imprimés à la colonne manométrique, ce physiologiste a comparé les pres- sions développées, d'une part dans la cavité thoracique, sous l'influence des mouvements respiratoires, et d'autre part dans l'intérieur de l'artère carotide, par l'action combinée de lapompe thoracique et de la pompe cardiaque; et les résultats obtenus de la sorte rendent sensible à l'œil la part de chacune de ces forces dans le phénomène de la circulation artérielle (1). Ainsi, dans ses expériences sur des Chevaux , on voit que la courbe représentant la pression du sang dans les artères s'élève et d'accidenls de ce genre qui se sont produits pendant que le mahide était saisi d'une quinte de toux, ou faisait des elTorts soit pour vomii', soit pour toule autre cause (o). M. Donders a publié un travail assez étendu relatif aux effets des mouvements respiratoires sur la cir- culation dans Tctat pathologique (6). (1) J'ai déjà fait connaître l'instru- ment dont M. Ludwig fait usage dans ces expériences (c), et je me bornerai à ajouter ici que pour comparer la pres- sion exercée sur le sang dans les artères et celle développée dans la cavité !ho- racique par les mouvements respira- toires, ce physiologiste met un de ces manomètres en communication avec la carotide, et adapte un second de ces appareils à un petit sac flexible rem- pli d'eau et insinué sous les parois de la poitrine, dans l'intérieur de la chambre thoracique, de façon à être soumis à la pression développée dans cette cavité, et à ne nuire en rien au jeu de la pompe respiratoire. Les oscil- lations de la colonne manométrique, déterminées par la sortie ou la rentrée d'une portion du liquide contenu dans ce sac tracent la courbe de la pression thoracique dépendante du jeu de l'ap- pareil respiratoire, en même temps que les oscillations du mercure dans l'autre manomètre enregistrent elles- mêmes les variations de pression qui se manifestent dans l'artère. Les mo- ments correspondants aux battements du cœur sont indiqués par les som- mets de cette dernière courbe ; et en comparant celle-ci à la courbe des (a) BourJon, Kichevcties sur le mécanisme de la respiration et sur la circulation du sang, 1820, p. 70 et suiv. (&) Donders, Dijdrage tôt het Mechanisme van Ademhaling en Bloedsomloop {Nederlandsch Lancet, 1849, 2° série, t. V, p. 354). (c) Voyez ci-dessus, page '■23-2. VRESSION DU SANG DANS LES AHîfclUilS, ^/jl s'abaisse d'une manière régulière à mesure que le cœur se contracte ou tombe en repos, lant que les mouvements respira- toires se font avec lenteur et facilité ; mais lorsque ces mouve- ments s'accélèrent et que la respiration devient laborieuse, on voit correspondre à chaque élévation de la courbe représentant la pression thoracique une augmentation dans la bautein^ de la colonne manométrique tenue en équilibre par la pression à laquelle le sang artériel se trouve soumis. L'effet de la systole venlriculaire est accru s'il coïncide avec l'expiration, et pendant la durée de ce dernier acte la diminution de pression qui accom- pagne la diastole s'affaiblit ; enfin, lorsque le thorax vient à se dilater, la ligne onduleuse tracée par la colonne manométrique descend bien plus bas au moment du repos du cœur, et s'élève moins haut sous l'influence de l'état de contraction de cet organe. A l'aide de cette représentation graphique du })hénomène. on peut hre en quelque sorte toutes les combinaisons variées résul- tant de l'action simultanée de ces deux sortes de mouvements dont le rhythme n'est pas le même, et l'inspection des lignes nous apprend plus en quelques instants que ne le feraient une description minutieuse ou de longs tableaux numé- riques (1). pressions thoraciques, on pont dis- de ces courbes s'élève et s'aiiaîsse en tinguer immédiatement les iclalions même temps que la courbe l\ Ioniques cherchées. Ainsi, quand la marche ondulations représentant les mouve- des oscillations de la courbe du pouls ments thoraciques, on en peut inférer ne cliange pas dans les moments cor- que ce changement est dû à cette respondantsà une expiration ou à une dernière cause, et apprécier même la inspiration, on en peut conclure que grandeur de l'influence de celle-ci par la dilatation et la contraction du tho- la grandeur des perturbations, rax sont sans effet appiéciable sur le (1) Pour plus de détails à ce sujet je cours du sang arlériel; tandis que si renverrai donc aux rif,Mires qui accom- la moyenne l'ournie par la première pagnent le Mémoire de M. I,ud\vig(rt). {a) Ludvvij,', V.eiiruije îîic Kennlniss des Einlliis/ies iler liespiraiions-neiuefiunden (inf Oen flhilhnif'nn Aorlen-Systeme (Miillcr's Archiv fur Anal, vnd l'hysiol., iHM, p. 242). IV. 16 2/|.2 " MÉCANISME DR LA. CIKCULATlO^ . ■ Influence S 5, — Lii ciuantité de saii"' conteouc dans le svslème vas- du volume _ ■ "■ "^ du sang cLilaire influe aussi sur le degré de pression auquel ce liquide sur !a pression artérielle, est souiiiis , et par conséquent sur la poussée qu'il exerce, soit sur les parois de l'appareil irrigatoire, soit sur la colonne nuanométrique disposée pour en mesurer l'action (1). Il est tacile de comprendre aussi comment le degré de réplé- tion des artères peut influer sur la distance à laquelle les batte- ments pulsatiles se font sentir dans ces vaisseaux. En eiTet, les parois élastiques de ces tuyaux cèdent d'autant plus facilement qu'elles sont moins distendues, et plus les artères se dilatent aisément, moins sera grande la longueur du système vascu- laire que la charge complémentaire lancée par le cœur à cha(jue systole devra occuper. Or, c'est la pression déterminée par • cette charge additionnelle qui produit le phénomène du pouls, et par conséquent, toutes choses étant égales d'ailleurs, celui- ci se manifestera dans une longueur d'autant plus grande du (1) L'inQupnce de la distension plus qiiéc paria colonne manométrique, ou moins grande du syslème vascu- (Uant de 10 millinièu-es de mercure, laire sur la pression sous laquelle le s'est élevée à 19 millimètres après la sang circule a été mesurée d'une ma- transfusion de '280 grammes de sang nière plus précise par M. Brunncr; dans les veines de l'Animal, puis est car, dans ses expériences, il a annulé descendue à 8"'", 5 à la suite d'une les efl'ets qui d'ordinaire sont dus, saignée de 356 grammes (a). soit à l'action du cœur, soit à la con- J'ajouterai que M. Budge a trouvé traction des muscles locomoteurs, et la pression du sang dans les artères qui viennent compliquer les résultats beaucoup plus faible que d'ordinaire observés. Pour cela, il a paralysé mo- chez des Animaux qui étaient réduits mentanément les muscles locomoteurs ;; un état de maigreur extrême. Chez par l'aclion du chloroforme ou de deux Chiens, dans cet élat, la colonne l'opium, et il a arrêté les battements meicuriclh! de l'hémodynamomètre du cœur en galvanisant les nerfs ne s'élevait qu'à 108 millimètres, à pneumogastriques. Chez un petit 90millimètres,ou mêmeà unehauteur Chien préparé de la sorte, la pression encore moindre (6). des parois vasculaires sur le sang indi- (fl) Brunnei-, UeberdieSpannuiiçi des ruhenden Blntesim lehenden Thiere (Zeitschr. fur raiionn. Med., 1851, 2« série, t. V, p. 336). (b} Bwlge, Bericht ûber die Arbeiten im physiologischen Inslitnl in Bonn, 1854 (Canstalt's Jahresbericht, 1855, I. I, p. 89). VITESSE DU SAÎSG !!ANS LES ARTÈRES. 2^^ tiihe artériel fiiic la qiinnlilc de liquide conlenue dans celui-ci sera plus considérable comparalivement à sa capaeilé. § 6. — Bien que le sang dislribuc dans toutes les parlies de Évaluation l'organisme par le système aortique soit mis en mouvement ''" '•'^,'|"''"' par un moteur unique , ce liquide ne coule pas avec la même «""'■^'^^^^^^■^"S"'" vitesse dans les divers vaisseaux et se trouve réparti très inéga- ''* """"'' lement dans les dilTérenles régions du corps. La théorie et l'expérience conduisent également à la connaissance de ce résul- tat importanî. La mesure de la vitesse normale du courant sanguin dans l'intérieur des vaisseaux d'un Animal vivant présente de grandes diftlcuités. Yers le milieu du siècle dernier, Haies et plusieurs autres physiologistes firent à ce sujet quelques recherches (1) , mais elles furent peu fructueuses , et c'est dans ces derniers temps seulement que les efforts des expérimentateurs ont été couronnés de succès. Pour déterminer directement cette vitesse dans les petits vaisseaux des parties transparentes , on peut avoir recours aux observations microscopiques , et nous ver- rons bientôt que, dans l'étude des mouvements du sang dans les capillaires, ce mode d'investigation a été employé utilement ; mais dans les grosses artères , dont les parois sont opaques , on ne saurait l'utiliser, et il faut avoii' recours à d'autres moyens. M. Yolkmann, qui le premier introduisit dans ce genre de recherches la précision nécessaire, fit usage d'un instrument auquel il donna le nom iVhémodromomèlre. Cc&i un |)elit tube métallique qui s'adapte dans les deux bouts d'une artère coupée transversalement, et qui communicpie latéralement avec les deux extrémités d'un tube de verre recourbé en forme d'U. Deux robinets qui tournent en même temps sont logés dans le tube métallique et disposés de façon à laisser libre le passage direct entre les deux bouts de l'artère , ou à le fermer et à (1) Voyez ci-dessus, page 92 et siiivanlos. 2/|/l MÉCANISME DE LA CiilCULATION. diriger le courant par la branche lalérale qui a été préalable- ment remplie d'eau salée. Les dimensions de toutes les parties de l'instrument sont calculées de manière à ne point gêner le pas- sage du sang ; et quand l'instrument est en place, l'expérimen- tateur, après avoir laissé d'abord le sang couler par le tube méiallique, tourne tout à coup les robinets, marque l'instant où ce liquide, reconnaissable à sa couleur, entre dans la branche latérale, et compte les fractions de seconde que le courant ainsi dévié de sa route primitive emploie pour arriver à l'extrémité opposée du tube transparent et à parcourir un espace dont la longueur est connue (l). Les résultats obtenus de la sorte ont beaucoup plus de préci- sion que de prime abord on ne serait porté à leur en attribuer, et s'accordent très bien avec ceux auxquels un autre expéri- mentateur non moins habile, M. Yierordt, de Tubingen, vient d'arriver à l'aide d'un procédé différent. Ce physiologiste a mesuré la vitesse du courant sanguin à l'aide de son hémotacho- mètre, instrument qui est fondé sur le principe du pendule hydroméirique, et qui a été disposé de façon à enregistrer sous la forme d'une courbe les variations existant dans la rapiflité du courant sous l'influence duquel le pendule est plus ou moins dévié de sa position verticale (2). (1) L'hémodromomèU-e, tel qu'il étroite à parois transparentes, qui porte fut employé dans le principe par à ses deux bouts des orifices destinés MM. Volkmann et lîiiltenheim (a), à être adaptés aux deux extrémités présentait diverses imperfections aux- d'une artère coupée transversalement ; quelles le premier de ces pliysiolo- elle peut donc être traversée par le gistes a porté remède. On en trouve courant sanguin qui coule dans ce une description détaillée dans l'ou- vaisseau, et elle renferme un petit vrage de M. Volkmann (6). pendule dont l'extrémité libre, frappée (2) L'bémolachomctre de M. Vie- par le courant, se relève plus ou rordt consiste en une petite caisse moins suivant la vitesse dont celui-ci (a) Hiiltciilieim, Observaliones de saiiguinis cïrculalione hœmodromomctri ope in/tlitniœ. Halle, 4R46. (6) Vollimann, Die Hâmodynamik, p, 103, pi. 3, fig'. ■) à 4, VlTESSli DL' SANG DANS LES Al'.TÈPJiS. 2^5 § 7. — La vitesse inégale du torrent cireulatoire qui se causes remarque daUvS les diverses parties du sysleme artériel dépend iio cène vitesse principalement des différences qui existent dans le calibre de diverses parties /Il -, ni i- 1 ,1 du sysièmo ces vaisseaux. (Jiacun sait par 1 observation du mouvement de artériel. l'eau dans une rivière que, toutes choses étant égales d'ail- leurs , le courant se ralentit là où son lit s'élargit, et devient au contraire d'autant plus rapide que ses bords se resserrent davantage. La quantité de liquide qui traverse, en un temps donné, chaque section transversale du canal, est partout la même ; mais la vitesse avec laquelle cette quantité passe est en raison inverse défaire de la section qu'elle occupe. 11 en est de même dans tout système de tuyaux , et par conséquent la vitesse du sang qui coule dans les artères est soumise aux mêmes lois. Or il arrive d'ordinaire que lorsqu'une artère se bifurque ou donne naissance à une branche , les calibres réunis des deux vaisseaux situés en aval du point de partage sont plus considé- rables que le calibre du tronc dont ils proviennent. Il en résulte, par conséquent, qu'en général la vitesse du sang diminue à mesure que le vaisseau où ce liquide coule se ramifie davantage. Cet agrandissement de l'aire totale du système artériel , depuis l'origine de l'aorte jusqu'à la terminaison de cet appareil irri- gatoire dans la profondeur des divers organes, a été remarqué vers le miheu du xvn' siècle (1) ; et son importance a été beaucoup exagérée par la plupart des auteurs. C'est dans ces est animé. L'extrcmilé opposée de la ireiir de M. Ludwig. Cet inslrunient lige du pendule met en nioiivenieiit est très sensible, et, après avoir été une aiguille qui, à l'aide de divers convenablement gradué, indique avec organes intermédiaires, fait mouvoir beaucoup de précision la vitesse du d'une manière correspondante un pin- coiuanl qui traverse la caisse (a). ceau devant lequel tourne d'tm mou- (1) Ilaller nous apprend que vement uniforme un cylindre portant G. Colles fut le premier à constater une bande de papier, à jjcu près ce fait, conmie dans le kymograplie enrcgis- (a) Viernr,:t, Die ICrsclieiiiundcn ^uid (Jeselxc dcr Slvuinyeschii'indiijkeiUn des Dliilcs , p. 10, lig. 1 i 5, ri pi. \. Kr.Mikfnrt, 18:^8. 2/l6 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dernières années seulement qu'on a cherché à déterminer avec précision les différences de capacité qui existent entre les troncs vasculaires et leurs branches, ou à en calculer les effets (1); mais les résultats obtenus jusqu'ici n'ontpas beaucoup d'importance. (1) Dans les écoles on avait l'habi- liide de comparer la capacilé totale du système ailériel à celle d'im cône creux dont le sommet serait au cœur et la base représenterait le réseau capillaire ; mais les recherches de M. Ferneley et de M. Paget ont lait voir que la somme des aires n'augmente pas toujours, et que les diirérencos sont peu considérables à cet égard entre les gros troncs et les branches qui en naissent (a). Ainsi M. l'aget a trouve que chez riJomme les rapports entre l'aire de l'aorte à sa sortie du cœur, et la somme des aires du même vaisseau au delà de l'origine de la sous-clavière gauche et des trois grosses branches qui en parlent entre ces deux poinis, sont, terme moyen, comme 1 ; 1,05. L'aire du tronc brachio-céphalique étant re- présenlée par 1, la somme dus aires de la carotide droite et de la sous clavièrc, qui résultait de sa bifurcation est égale à l,lû. Un certain élargissement s'observe aussi dans le couiant irriga- toire en passant, de la carotide com- mune dans les divisions de ce vaisseau, et M. Paget a vu que la somme des aires des branches de l'artère faciale est à l'aire de cette artère elle-même comme 1,19 est à 1. 11 a observé un élargissement analogue dans l'arbre artériel des membres thoraciqnes, et. d'après les mesures prises sur l'aorte descendante et sur les branches qui en naissent au-dessus de sa bifurca- tion pour constitiier les iliaques pri- mitives, cet anatomiste évalue la somme des aires de ces branches à 1,18, l'aire du tronc aortique étant prise pour unité. Mais, dans la plupart des cas, il a remarqué des différences inverses entre le calibre de l'aorte et le calibre réuni des deux artères iliaques primitives; terme moyen, l'aire de la terminaison de l'aorte étant représentée par 1,1a somme des aires de SCS deux branches était 0,89, et, en général, une diminution de calibre se manifestait aussi dans les deux branches de l'iliaque primitive com- parée à ce tronc lui-même. En- fin, dans les membres inférieurs , M. Paget a vu le lit du courant s'a- grandir un peu par suite de la division de l'iliaque externe en branches de distribution. Ainsi le courant sanguin doit être moins rapide dans le tronc brachio- céphalique que dans l'aorte, et se ralentir un peu eu passant ensuite dans la carotide externe, puis dans l'artère faciale; un ralcnlissementplus considérable doit se manifester dans le courant qui passe de l'aorte ven- trale dans les branches viscérales de ce U'onc ; mais la vitesse de ce même (a) Ferneley, On the Obtlnance of certain Laws in the Animal Œconomtj {Londoii Médical jQaz., 1840, t. XXV, p. 389). — Paget, On the relative Sizes of the Trunks and Branches of Arteries {London Med. Gaz., 1842, 2» série, t. 11, p. 55). BRUITS ARTÉr.lliLS. ni § 8. — l/auscultalion nous apprend que le passage du sang Bmts produits dans les grosses artères qui avoisinent le oœur délermine la passaS'dusan- production de vibrations sonores [ilus ou moins intenses et dont lo le caractère peut varier bcaucou]) (1). Lorsqu'on aj)[)lique le dans is artères. coiiranl doitaiigmenlcr quand il passe de l'aorle dans les artères iliaqiirs. Des leclierclics analogues ont élé failes par M. Ilazard. Gel aiialoniislc a trouvé aus-i qu'en général Taire des branches artérielles est, en somme, plus grande que Taire du tronc dont ces vaisseaux naissent; mais qu'il en est autrement pour les artères iliaques comparées à la partie terminale de l'aorte ; Taire de ce tronc dans le point oîi il se bifurque pour coiislitiier les iliaques, étant d'environ :j-^ plus grande que la somme des aires de ces derniers vaisseaux [a). Enfin, des ob- servations plus récentes , ducs à M. l'olmer, s'accordent assez bien avec les résultats précédents, niais montrent qu'il peut y avoir parfois des difïérences individuelles assez considérables dans la capacité relative de Taorte et de ses premières bran- ches (6). M. Bfown-Séquarda constaté des faits du même ordre chez les Chiens le). (l) L'étude des bruits artériels a été commencée il y a environ trente- cinq ans par Laënnec, et poursuivie depuis lors avec beaucoup d'attention par plusieurs patliologistes ; mais les opinions sont encore très partagées au sujet du mode de production de ces vibrations sonores. Je ne pourrais, sans ra'éloigner de l'objet de ces Leçons, discuter ici toutes les ques- tions qui ont été soulevées de la sorte, et je me bornerai à indiquer les prin- cipaux ouvrages qui en ont traité {d). (a) Voyez Horner, Spécial Anatomy and Histologu, t. Il, p. 184 (Philadelpliia, 1843). (6) Folmer, Dïssevialio di nexu inter arteriarum truncos et ramos exorientes. Groninguc, 1855 (voyez C.instaU's .laliresber., 1857, t. 1, p. 77) (c) Brown-Séquard, F'iils qui semblent montrer que plusieurs kilofjr. de fibrine se forment et se transforment chaque jour dans le corps de l' Homme (Journ. depliysioL, 1858, 1. 1, p. 3j3). (d) Voyez Laënnec, Traité de l'ausculi.ation, 18t'J, l. If. — Corrigan, On the permanent Patency ofthe Aorlic Valves (Edinb. Med. and Surg. Journ., 4 832, t. XXXVII, p. -230). — Piorry, Surlesbruits du cœur et des artères [Archiv. de inéd., 1834, 2= série, t. V, p. 245). — Bouillaud, Traité clinique des maladies du cœur, 1. 1, p. "H 0 et suis'. — Mai^cnàie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, t. I, p. 298. — Vernois, Eludes physiologiques et cliniques des bruits des artères. Tlièse, Paris, 1837. — Cil. Williams cl Todd, Second Report of the London Sub-committee of the British Associa- lion on Ihe Motions and Sounds of the Ileart {Sevenlh Meeting of the British Association for the .idvancement of Sciences, 1837, p. 15(j). — Beau, Recherches sur les causes des bruits normaux des artères {.irchiv. gén. de méd., 1838, l. I, et 1845, t. VllI), et Traité d'auscullalion, 1856, p. 375 et suiv. — Lal;arpe, Nouvelles recherches sur le bruit de soufflet des artères {Arch. gén. de méd., 1838, 3" série, t. III, p. 33). • — Andrn], Essai d'hématologie, p. 57 et sniv., 18i3. — Aran, iléw. sur le murmui'e vasculairc {Arch. gén. de méd., 1843, 4" série, t. II, p. 405). — Hardy et Beliier, Traité élémentaire de pathologie interne, 184G, t. I, p. 445 et suiv. — Ilamornik , Unters. iïber die Erscheinungcu an den Artcrien und Vencn, 1847. — .Moiineret, Etudes sur les bruits vascutaires et cardiaques {Union médicale, 184!), p. i'JU). — Kiwiscli von lîollerau, Neue l'orschungen ûber die Schaller&eugxmg in den lireislauforga- nen {Verhandl. der phys.-med. (icselLich. In Wurzburg, 1850). — Il^ynsius, llijdraqe tôt cène l'hyii.srhe verlUaring van de abnormalc geruischen in hel 2/l8 MÉCAMS>1E DE LA CIRCLLATIUN. Stéthoscope sur le trajet de l'aorte, des carotides ou des sous- clavières, on entend ordinairement deux bruits qui coïncident avec ceux du cœur : l'un, très faible et sourd, se produit en mênfie temps que la diastole du vaisseau (1) ; l'autre, plus clair, accompagne la systole artérielle. Ce dernier diminue et cesse même complètement à très peu de distance du cœur, et ne paraît être autre chose que le second bruit cardiaque qui est transmis par les parois vasculaires de l'orifice aorlique vers l'oreille de l'observateur. Mais le bruit sourd, tout en s'aflaiblissant dans les vaisseaux plus éloignés du cœur, se fait entendre jusque dans les artères du bras et de la cuisse, et paraît être occasionné par le frottement du liquide en mouvement contre les parois des vaisseaux ou par l'espèce de remous qui s'établit dans les points où ces conduits présentent quelque changement brusque dans leur calibre (2). Effectivement on peut produire un phénomène (1) Ce hruil coïncide avec le balte- diminution dans sa niasse (6); mais ment du pouls, el, par conséquent, de pareils plis n'ont jamais été aper- se produit, ainsi que ce battement, eus dans k-s cas de ce genre et ne en même temps que la systole ventii- paraissent pas pouvoir se produire, culairc dans le voisinage du cœur, D'ailleurs , en appliquant sur une mais un peu plus tard, dans les artères région du corps la grande ventouse plus éloignées de cet organe. Ce retard Junod , on peut diminuer beaucoup est très sensible chez les individus la quanlité de sang en circulation dans dont le pouls est rare (a). les autres parties du système vascu- (2) M. Vernois, qui fut un des pre- laire, et M. Beau a fait voir que, miers à chercher l'explication phy- dans ce cas, loin d'augmenter l'inten- siquc de ce phénomène, pensait que silé des bruits anormaux dans les ces bruiis résultaient du froltement artères qui sont ainsi vidées parlielle- du liquide en mouvement contre des ment , on fait cesser peu à peu ces plis qui se formeraient aux parois mêmes bruits (c). des artères quand le sang a subi une Un des élèves de l'école physiolo- vaatstelsel {Onder^oekinyoi (jedaan in het physioloijisch laboratorivm der Utrechtsche Hooge- school, -1854, p. d, et Nederlandsch Lancet, iSb-'t, 3« série, t. IV, p. 20). — Barlli et Roger, Traité pratique d'auscultation, 1S54, p. 471 et suiv. — Tli. Webei% Physikalische und physiologische Expérimente ïiber die Entsiehung der Ge- rausclie in deii DliUgefâssen (Archiv fur physiol. Heilkunde, 4 855, t. XIV, p. 40). (a) Bouilliiud, Traité clinique des maladies du cœur, 1835, t. I, p. 204. (&) Vcinois, Études physiologiques et cliniques pour servir à l'histoire des bruits des artères- Thèse, Paris, 1837. (t) Beai.i, Traité expérimental el clinique d'auscultation, \k 308. BRUITS ARTÉfilELS. 269 analogue en iTijectant de l'eau dans les arlères d'un cadavre ou dans des tubes élastiques quelconques, pourvu qu'en pressant légèrement sur les parois de ces vaisseaux on y détermine un giqiic d'Utrecht, M. Heynsiiis, a fait plus roicemment des expériences inlé- ressantes sur le mécanisme de la pro- duction des vibrations sonores dans les tubes où un liquide coule avec rapi- dité. Il a vu d'abord que ce phéno- mène acoustique se manifeste dans tous les points où le tube présente une dilatation ; que la poussée plus ou moins forte du liquide en mouvement ne modilie en rien le son produit ; que le caractère de celui-ci dépend essentiellement du degré de vitesse du courant, et que le résultat est le même, que le mouvement soit déter- miné par une pression en amont ou par une aspiration en aval. Enfin, il a constaté que le bruit vasculaire se produit de la même manière, lors- qu'on substitue à la portion renflée ou rélrécie du tube élastique un tube de verie de même dimension, et il a profité de cette circonstance pour étudier le mouvement du courant dans ce i)oint, en rendant ce mouve- ment visible à l'aide de particules colorées tenues en suspension dans le liquide. Il a reconnu ainsi qu'il se formait toujours, dans ces points de dilatation ou dans le voisinage des points de rétrécissement, un tourbil- lon plus ou moins fort, et que l'in- tensité du bruit est proportionnée à la production du remous. La pré- sence d'inégalités à la face interne du tuyau détermine les mêmes effets, et M. Heynsius conclutdeses expériences que c'est le choc des molécules du li- quide qui engendre les vibrations so- nores, lesquelles se transmettent en- suite aux parois du vaisseau {a). Vers la même époque, M. Th. W^eber a étudié également avec beaucoup de soin les circonstances qui influent sur la production des sons dans les tubes élastiques inertes (des tubes de caout- chouc) qui sont parcourus par un courant suflisamment rapide pour mettre leurs parois en vibration, et les résultats auxquels il est arrivé sont en parfait accord avec les faits observés par les palhologistes. Ainsi il a trouvé que les sons se produisent plus facilement dans les tubes à parois minces que dans des tubes à parois épaisses, et dans les gros vaisseaux que dans les petits; que le rétrécisse- ment brusque d'un tube ou le passage du liquide d'un tube étroit dans un tube plus large favorise également le développement de ces vibrations sono- res, pourvu que le courant y conserve une vitesse suffisante; enfin, que les liquides d'une faibiedensité produisent ces sons plus facilement que ceux d'une densité considérable : ainsi les vibra- tions étaient plus intenses quand il employait de l'eau que lorsqu'il se servait de lait, et s'établissaient plus dillicilement quand, au lieu de lait, il faisait usaye de sang {b). (a) Ilcjiibius, Op. cil. {OndcrzoekuKjen yedaun in hel phijsiuloijisch Inhvraturium der Ulrechtschc lluoiieschoid. Jaar vu, 1854, p. 53 ctsuiv.). ((/) Th. Wcber, Op. cil. i,\rch. fiir phyaiol. Ikilkunde, 1855, l. \tV, p. 40). 250 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. rétrécissement (1). Il est aussi à noter que ce bruit artériel normal augmente à mesure que le cours du sang devient plus puissant et plus rapide. Quand la circulation est activée par l'exercice musculaire , on l'entend plus loin dans le système artériel que lorsque le cœur se contracte d'une manière calme et lente. Enfin il varie aussi quant au timbre, suivant que les artères sont plus ou moins distendues par le sang , que leurs parois sont plus ou moins épaissies , plus ou moins irri- tables , etc. ; le degré de densité du liquide en mouvement influe également sur la facilité avec laquelle ces tubes sont mis en vibration par le courant qui les traverse, de sorte qu'il existe à cet égard des différences suivant l'âge, le sexe et la constitution des individus aussi bien que suivant les parties du système artériel soumises à l'observation (2). Tout rétrécissement brusque du conduit vasculaire, ou tout aulre obstacle local qui entrave le cours du sang dans une artère, détermine aussi la production de vibrations sonores qui renfor- cent ce bruit normal ou qui en changent le caractère (3). Ainsi (1) Ce fait a élé constaté par Corii- les femmes, et surtout chez les en- gan («), et plus récemment par plu- fants, il est plus mou. Enfin il varie sieurs autres expérimentateurs (6). aussi suivant le degré de tension des (2) Ainsi les artères crurales don- muscles de la région explorée. nent un son plus doux et moins sec (3) Comme exemple des bruils ar- que les carotides (c). Le bruit est tcriels produits par la diminution de d'autant plus intense que le calibre calibre d'une artère dans un point du vaisseau est plus considérable, il assez circonscrit, je citerai le mur- est plus sourd quand celui-ci est très mure dit placentaire, qui est souvent rempli de sang ou que ses parois sont très marqué chez les femmes en- très épaisses. Il est plus mat et plus ceintes, et qui dépend de la pression sec chez les vieillards que chez les exercée par l'utérus, tantôt sur les adultes, tandis qu'au contraire, chez iliaques externes, tantôt sur les hypo- (a) Corrig-an, Op. cit. {Edinb. Med. and Surg. Journ., 1832, t. XXXVII, p. 230). (6) Piorry, Op. cit. (Arcli. gén. de méd., 1834, l. V). — Laharpe, Op. cit. {Arch. gén. de méd., 1838, i' série, t. II). — Williams ctTodd, Op. cit. (Brit. Associât., 1837, p. 156). — Aran, Op. cit. [Arch. gén. de méd., 1843, i' série, t. 11, p. 4-24). (c) Vernois, Études physiologiques et cliniques pour servir à l'histoire des bruils des artères (thèse, 1837, p. 39). BRUITS ARTÉRIELS. 251 en appuyant sur le vaisseau avecle doigt ou avec le stéthoscope, on y fait naître un bruit de souffle plus ou moins prononcé, et, dans certains états pathologiques , des phénomènes acoustiques du même ordre se manifestent à chaque battement du pouls (I). Par exemple, toutes les fois que l'un de ces vaisseaux se trouve comprimé par une tumeur voisine , ou que ses parois sont le siège de quelque altération morbide qui diminue sa dilatabilité ou le i>oli de sa surface. Des effets analogues se produisent quand le courant circulatoire pénètre dans une portion élargie du conduit ou vient frapper contre les bords d'un orifice, comme dans les cas où l'artère communique avec une poche anévrysmale. Enfin ces bruits artériels anormaux s'observent aussi dans des affections où le degré de contractilité des parois artérielles parait avoir été modifié par l'état général de l'orga- nisme, et se manifestent toutes les fois que la densité du sang descend au-dessous d'un certain niveau. Ainsi, chez les personnes atteintes de chlorose, le bruit de gaslriqiies, et d'autres fois sur l'aorte produit par une forte expiration (6). abdominale. lùi effet, M. Th. Weber (1) Les patliologistes distinguent a reconnu que, pour faire cesser ce sous des noms spéciaux (tels que bruit bruit, il suffisait déplacer le corps de soufflet , bruit sibilant ou musical , dans une position telle que le vaisseau bruit de diable, etc.) les divers sons en question ne se trouvât plus cora- qui se produisent ainsi dans le sys- primé par l'utérus («). tème vasculaire, et ils en tirent parti M. W. Jenner a remarqué aussi pour le diagnostic des maladies ; mais qu'une légère pression exercée sur le nous n'avons pas à nous occuper ici deuxième cartilage costal, du côté de ces applications, et je me bornerai gaucho, suffît pour provoquer chez à renvoyer aux principales sources où les jeunes enfants un murmure très l'on peut puiser pour avoir plus de I)rononcé qui paraît avoir son siège renseignements sur l'histoire physio- dans l'artère pulmonaire, et que logique de ce phénomène (c). souvent le même eiïet peut être (a) Tli. Wclior, Op. cit. (Archiv filr physiol. tieilkunde, 4855, I. XIV, p. 40). (hj \V. .lonnoi-. On the Influence of l'ressure in llie Production and Modi/ication of palpable Vibrations and Murmurs perceptible ovcr the lleart and great Vessels {Médical Times, 1850, i.[, p.SOfi). (c) Voyez ci-dessu.s, page 247, iiolo d. 252 MECANISME DE LA CHICIJLATION. souffle est 1res développé, et M. Andral a constaté que ce sym- ptôme se manifeste toutes les ibis que le sang se trouve ap- pauvri au delà d'un certain degré, et que les globules ne s'y trou- vent plus dans la proportion de8 pour 100 en poids. Les physio- logistes ont donné diverses théories de ce phénomène singulier, mais il me paraît devoir dépendre en grande parhe des inégalités de calibre que la contrachon irrégulière des parois artérielles peut déterminer dans des portions voisines d'un même vaisseau, contractions locales dont nous avons déjà vu des exemples en étudiant les propriétés physiologiques de ces tubes (1). (1) M. Beau , s'appnyant sur les résultats obtenus dans les expériences sur la production des sons par le pas- sage d'un liquide dans les tubes iner- tes, croit pouvoir expliquer les bruits en question par un défaut de propor- tion entre Fondée de sang lancée dans le système artériel par la systole ven- triculaire et la capacité du vaisseau. Us dépendraient donc de l'augmenlaUon de frottement déterminée, soit par l'introduction d'nn volume excessif de sang à chaque contraction du cœur, soit d'une diminulion générale dans le calibre des artères, le débit de la pompe cardiaque restant le même. C'est de la sorte qu'il rend compte de l'augmentation de tes bruits chez les chloroliques, quand la circulation se trouve activée par l'exercice mus- culaire ou par toute aulre cause (a) : et, en eliet, la surabondance de l'on- dée sanguine peut être une cause de vibrations sonores dans les parois artérielles ; mais il me semble que les phénomènes en question s'expli- quent d'une manière bien plus facile à l'aide des changements locaux dans le calibre des vaisseaux que nous sa- vons pouvoir se produire sous l'in- fluence du système nerveux et des modifications introduites dans la com- position chimique du sang. Kn eflet, tout rétrécissement partiel d'une ou de plusieurs artères doit être accom- pagné d'un bruit de soufllle plus ou moins intense, et c'est dans les all'ec- tions nerveuses que l'on voit souvent ces symptômes se manifester d'une manière passagère. Ainsi Laënnec a remarqué que, chez les hypochon- driaques, on voit souvent la circula- tion se faire d'une manière parfaite- ment normale tant que le malade est calme; mais le bruit de souffle se manifeste dans les carotides dès qu'une émotion morale vient à troubler l'exer- cice de cette fonction. Il a remarqué que le même bruit se fait souvent entendre chez les moribonds ; enfin il ne croit pouvoir l'attribuer qu'à ce qu'il nomme une sorte de spasme de l'artère (6). Cette hypothèse a été très vivement critiquée par quelques pliy- (a) Beau, Traité expérimental et ctinique d'auscultation, p. 400 et suiv. (b) Lai-niicc, Traité de l'auscultation, t. II, p. 122 et suiv. (cdit. do 1826). INFLUENCE DES ANASTOMOSES ARTÉRIELLES. 253 § 9. — L'étude anatomiqiie de l'appareil circulatoire nous a appris que des branches particulières du système artériel anastomoses portent le sang dans chacune des parties du corps , mais que la circulation les ramuscules terminaux de ces vaisseaux s'anastomosent sou- vent, et, par l'intermédiaire des capillaires, communiquent tous entre eux (1). Dans certaines parties de l'organisme où le cours Influence des artérielle. siologisles (a) ; mais si l'on substilue à l'expression spasme, employée par l'il- lustre Laënnec, les mots contraction spasmodjque locale, on signalera, je crois, la véritable cause physique du phénomène, cause qui est à son tour subordonnée à l'action du système nerveux. Ce serait donc par suite du désordre occasionné dans l'exercice des fonc- tions du système nerveux par l'appau- vrissement du sang, et non à raison du mode d'action d'un liquide peu dense sur les parois artérielles, que l'insuffisance des globules entraînerait la production du bruit de souffle dans les carotides constaté par M. An- dral (6). Effectivement, nous savons par les expériences de M. Tii. Weber que la diminution dans la densité du liquide en mouvement dans les tubes élastiques, loin de faciliter le dévelop- pement des vibrations sonores, est une condition défavorable à la manifesta- tion de ce phénomène (c) ; et l'on com- prend aisément qu'il doit en être ainsi, puisque ces vibrations sont dé- terminées par le frottement du liquide contre les parois du vaisseau, et que ce frottement augmente à mesure que l'adhérence du liquide avec la surface sur laquelle il glisse devient plus grande (cZ). (1) L'existence de certaines anasto- moses artérielles n'avait pas échappé à l'attention des anatomistes de l'anti- quité, et Galien parle de quelques- unes de ces communications entre les portions périphériques d'artères dif- férentes (e). Après que l'on eut adopté généralement l'usage des injections pour les études angiologiques, les dé- couvertes de cet ordre se multipliè- rent beaucoup, et fournirent d'utiles lumières à la chirurgie; mais jusque vers la fin du siècle dernier, beaucoup d'auteurs considéraient les anasto- moses comme des dispositions excep- tionnelles, et ce sont principalement aux recherches de Scarpa, chirurgien célèbre de l'école de l'avie, que l'on doit la connaissance de la solidarité établie par ce moyen entre toutes les parties du système artériel {[). (a) BouillauiJ, Traite des maladies du cœur, t. I, p. 230. ((/) Andral, Essai d'hématolo/jie. {€) Th. Wetjor, 0]). cit. {Avch. fur jjhysiol. fleilkunde, 1855, t. XIV), (rf) Il est cependant à noter qu'en employant une dissolution de gélatine, M. Aran n'a pu produire de vibrations sonores, tandis qu'avec de l'eau le bruit était très fort. {Op. cit., Arch. gén. de méd., 1841!, t. II, p. 425.) {e) Galifn, De l'tiHlité des parties du corps, livre XVI, cliap. x {Œuvres, trad. de Darembcrg, l. Il, p. -101). (/■) Scarpa, SuU aneurisma rillessioni ed osservazioni anatomico-cUruraiche, i%Oi, cap. i àiv. 254 MÉCANISME DE LA CIRCULATION , (lu sang dans le tronc principal est exposé à rencontrer des obstacles, des voies latérales assez larges se Iroiivent ménagées ainsi pour le maintien de la communication entre les portions du vaisseau situées en amont et en aval de l'obstruction ; et lorsque, par suite d'une circonstance anormale, une artère vient à êlre oblitérée , on voit presque toujours la circulation reprendre assez promptement son activité ordinaire dans les dépendances du conduit interrompu : car les ramiiscules anastomotiques qui relient entre elles les branches dont le point d'origine se trouve des deux côtés de Fobslacle se dilatent, et le sang rentre ainsi dans la portion périphérique du système par un chemin détourné (1). Les transformations qui s'opèrent de la sorte d'une manière accidentelle sont analogues à celles que nous avons vues (1) J'ai déjà eu l'occasion de parler de quelques-unes de ces anastomoses, par exemple de celles qui existent entre les divers troncs artériels de la tête (a) ; et pour montrer combien ces voies, que l'on peut comparer à des che- mins de traverse tracés entre des gran- des routes collatérales, sont faciles, je citerai des expériences dans lesquelles le passage du sang a été interrompu brusquement dans les principaux vais- seaux de la tête sans qu'il en soit ré- sulté aucun trouble grave dans la cir- culaiion. Vers la fin du xvii" siècle, Valsalva, l'élève favori de Malpighi, lia à la fois les deux artères carotides pri- mitives chez un Chien : l'animal en soutîrit peu, et plus de trois semaines après l'opéraiion , on le tua, afin d'employer son cadavre pour des tra- vaux anatomiques (6). Aslley Cooper a obtenu des résultats analogues, en opérant sur des Animaux de la même espèce ; mais il a reconnu que les communications anastomotiques au moyen desquelles la circulation se maintient dans les parties périphé- riques du système carotidien ne sont pas toujours aussi faciles. Ainsi, pour que la ligature des deux carotides ne détermine pas la mort, chez le Lapin, il faut mettre un certain intervalle de temps entre l'application de la pre- mière et de la seconde ligature, afin d'amener peu à peu le degré néces- saire de dilatation dans les canaux anastomotiques qui relient les bran- ches de ces vaisseaux aux artères vertébrales (c). Chez l'Homme, la circulation indi- recte du sang dans les vaisseaux de la tête paraît être moins facile. Cepen- dant la ligature de l'une des carotides primitives a été souvent pratiquée avec succès. Cette opération hardie a été faite plus de 150 fois, et (a) Voyez ci-dessus, tome III, p. 532 et suiv. (6) Valsalva, Opéra, cumaddit. Morgagni, epist.xiii, p. 507 (1740). (c) Aslley Cooper, Exixrim. and Observ. on the tying of the Carotid and Vertébral Arteries {Guy's Hospital Reports, t. I, p. 457, fig;.) INFLUENCE DES ANASTOMOSES ARTÉRIELLES. 255 se manifester pendant la vie embryonnaire, lorsque le courant circulatoire devait changer de route sur quelques points de son parcours ; et c'est par suite de l'établissement de ces voies de communication latérales que l'oblitération d'un gros tronc artériel peut avoir lieu sans entraîner la mort des par- lies de l'organisme dont les vaisseaux naissent au-dessous du point où le passage direct des liquides nourriciers est devenu impossible (1). Ainsi, dans les opérations chirurgicales, on lie dans 80 cas au moins les malades ont suite de l'applicaliond'mie ligature (c), survécu {a). mais il me paraît bien démontré au- (1) Dans la plupart des cas, c'est par jourd'hui que dans quelques circon- la dilatation de vaisseaux anastomo- stances il y a réellement production tiques préexistants que la conimuni- de vaisseaux nouveaux (J). Du reste, cation redevient libre entre les deux lors même qu'il en est ainsi, ce sont portions d'une artère séparées par des capillaires seulement qui se for- une ligature ou tout autre obstacle, et, ment d'abord, et c'est peu à peu qu'ils en général, la route suivie par le sang se dilatent et acquièrent des parois pour arriver dans le tronçon inférieur plus épaisses, tout comme cela se du conduit est fort détournée (6). voit pour les ramuscules préexistants Beaucoup de physiologistes pensent dont l'élargissement suffît d'ordinaire que c'est même de la sorte seulement pour rendre la communication anasto- que la circulation se rétablit dans motique assez large pour permettre le cette dernière partie du vaisseau à la passage de la quantité de sang néces- (a) Voyez Velpeau, Nouveaux éléments de médecine opératoire, 1839, t. Il, p. 23t. (6) Voyez à ce sujet : — Wliite, Cases in Surgery, p. 139, pi. 7. — Descliamps , Observations anatomiques faites sur ^m sujet opéré suivant le procédé de Hunier, d'un anévrysme de l'artère poplitée [Mém. de l'Acad. des sciences , Savants étrangers, t. I, p. 25). — Asiley Cooper, Case of fémoral Aneurism for îuhich ihe external iliac Artery was lied, wiih an Accouru of the Préparation of the Limb dissected at the expiration ofeighteen Years {Guy's Hospital Reports, 1830, t. 1, p. 4.3, pi. 1 et 2). — Account of the first Successful Opération performed on the common Carotid Artery for Aneurism in 1808 ; ivith the post-mortem Exami- nationin 1821. (Guy's Hosp. hep., t. I, p. 53, pi. 3). — Pclleiaii, Clinique chirurgicale, t. I, p. 127. (c) Bicliat, Anatomie générale, t. I, p. 345 (éilit. de 1818). • — Maunoir, Mém. sur V anévrysme et la ligature des artères, 1802, p. lOG cl suiv., pi. 1 et 2. — Opponlieiin , Experim-, nonnulla circa vitam arteriarum et circulationem sanguinis pcr vasa collateralia. Manheim, 1822. (rf) Voyez à co sujet : — C. II. Pai'ry, Additional Experimenis on the Arteries, p. 32 et suiv. — C. Meyer, Disquisilio de arteriarum regeneratione. \n-i, Bonn, 1823. — EIjc'i Dénatura medicatrice sicuhi arteruv. vulneralœ et ligatœ fuerint, 182(i. — Scli^nsbcrg, nétablissement de la circulation après la ligature et la section des troncs artériels iJourn. des progrès, 1828, t. XII, p. 70 et suiv.). — Zubcr, Expér. sur la régénération des artères, cxtr, par Clnisliani {.lourn. de Prague, 1828, t. Xll, p. 80). i>56 MÉCANISME DE LA ClRCULATIOiV. souvent une artère, qui devient alors imperméable dans une cer- taine longueur, mais ce vaisseau reçoit de nouveau du sang à quel- que distance au-dessus de la ligature; et l'on connaît un grand nombre de cas où une oblitération analogue s'est produite spon- tanément dans une des maîtresses branches du système artériel sans entraîner aucun trouble grave dans la circulation. L'aorte descendante, par exemple, a pu se rétrécir non loin du cœur, de façon à ne laisser passer que fort peu de sang ou à devenir complètement imperméable dans une certaine étendue, sans que la circulation en ait été interrompue dans les diverses parties du corps dont les vaisseaux dépendent de l'aorte abdominale ; car la communication entre les portions du tronc artériel situées en amont et en aval de l'obstruction s'est établie par des bran- ches anastomotiques latérales dont le calibre a grandi propor- tionnellement à la quantité de liquide qui avait à y passer (1). Quand l'oblitération s'opère graduellement et avec lenteur, de saire à l'cnU'clicn du service irrigatoirc dans leurs autopsies un assez grand dans les conduits alimentésde la sorte. nombre d'exemples d'oblitération plus Dans quelques cas d'oblitérations ou moins complète du tronc de l'aorte artérielles, la circulation se réiablit en dont on n'avait pas même soupçonné aval de l'obstacle par des voies très l'existence pendant la vie de l'in- délonrnées. Ainsi, d'après les obser- dividu, et dont la date devait être vations de M. Ilamernik (de Prague), cependant fort ancienne. Toujours il paraîtrait que lors de la ligature de les communications entre les deux l'artère sous-clavièrc gauclic, le sang portions du vaisseau ainsi fermé arrive dans le membre correspondant s'étaient rétablies par les canali- par l'intermédiaire des vaisseaux de cules anastomoliqucs qui reliaient la tète, et en passant successivement les rameaux dépendants des artères dans le tronc brachio-céphalique, sous-clavières aux branches de l'aorie l'artère sous-clavière droite, la verte- descendanle, et qui s'étaient beau- brale du même côté, le cercle de coup dilatés. Des cas de ce genre Willis et l'artère vertébrale gauche ; ont été mentionnés par Marc-Aurcle de façon que dans ce dernier vaisseau, Severinus, Fantoni , Stork, Slentzel, le cours du liquide est rétrograde (a). Meckel (l'ancien), Sandifort et quel- (1) Les pathologistes ont rencontré ques autres anatomistes du siècle der- (a) Hamernik, Ueher die VerhaUnisse des Umfanges und der Pulsationen periphcrischer Arte~ rienbei Oblitération des Anfangsstiickes der absteigenden Aorta {Prager Vierteljahrschr. fiir die praft?. i)/e. -19. (6) Van Trigl, Die Oogspiegel [Nerderl. Lancet, 1858, 3° série, t. II, p. 450). — Coccius, Veber die Anwendung des Augenspiegels, 1853, p. 3 et suiv. — Dondfei's, Die Zigtbare Verschijnselen van Bloedsomloop in het Oog. (Nederlandsch Lancet, 1855, 3' série, t. IV, p. 253). (c) Poiseuille, Recherches sur les causes du mouvement du sang dans les vaisseaux capillaires, p. 18. COURS DL SANG DANS LES CAMLLâIRES. 269 nouille le liquide se mouvoir d'une manière intermittente dans tout le cercle vasculaire, s'avançant pour ainsi dire tout d'une pièce, chaque fois que le cœur se contractait, et s'arrêtant par- tout dès que cet organe se reposait. Or, à cette époque, les tuniques vasculaires ne sont encore qu'imparfaitement déve- loppées, et par conséquent il est facile de comprendre que les artères puissent être inactives (1). § 3. — Lorsqu'on observe au microscope le mouvement du sang dans les petites artères, on voit que le courant est plus ra- pide dans l'axe du vaisseau que dans le voisinage des parois de celui-ci , phénomène qui est en accord avec les lois générales de l'hydraulique (2). Effectivement chacun sait que dans une rivière le mouvement de l'eau est plus rapide au milieu que près des bords, et les expériences des physiciens nous apprennent que lorsqu'un liquide coule dans un tuyau , en le remplissant complètement, une certaine adhérence s'établit entre sa surface et les parois adjacentes ; une partie de la force motrice dont Effets de l'adhérence entre le sang et les parois vasculaires. (1) Spallanzani cite aussi d'autres faits qui sont de nature fi mettre en évidence l'action directe du cœur sur le cours du sang dans les capillaires chez l'embryon du Poulet. 11 a vu, par exemple, que chez des embryons âgés de quarante heures, le sang s'ar- rête brusquement dans toutes les parties du système vasculaire dès que le cœur cesse de battre; que pendant ce repos les vaisseaux restent tous remplis de sang, et que le courant se rétablit aussi tout à coup dans les capillaires aussi bien que dans les troncs artériels, dès que le cœur re- commence à se contracter. Dans une autre expérience faite sur un embryon de trois jours, le cœur avait cessé de battre spontanément, et Spallanzani y excitait de temps en temps des con- tractions au moyen de stimulants : or le sang était d'abord en repos, mais la circulation générale recommençait immédiatement partout à chaque systole, et s'arrêtait de même brusque- ment chaque fois que la contraction des ventricules cessait (a). (2) Cette inégalité dans la vitesse du sang au centre du courant et vers la périphérie du filet liquide n'avait pas échappé à l'attention de Malpighi et de Ilaller (6). (a) Spallanzani, Expériences sur la circulation, p. 202, 207, etc. [b) Voyez Ilaller, lilem. physiol., t. 11, [>. ICO, cl Mém. sur le mouvement du sang, p. &2. 270 MÉCANISME BE LA CIRCULATION. sont animées les molécules qui composent la couche extérieure du courant est donc employée à vaincre cette résistance , et il en résulte une diminution correspondante dans la vitesse de cette couche. Un frottement analogue s'établit en même temps entre la couche fluide ainsi retardée dans sa marche et la couche suivante , et ainsi de suite de la périphérie vers le centre ; mais l'adhérence des molécules fluides entre elles étant très faible comparativement à celle développée entre la première couche et les parois solides du tuyau , les retards dus à ces frottements cessent bientôt d'être sensibles, et le centre du cou- rant conserve presque toute sa vitesse initiale, tandis que l'espèce de gaine fluide qui l'entoure se trouve plus ou moins ralentie. Dans les artères cet effet est très marqué. Le torrent sanguin qui coule dans ces vaisseaux n'en occupe pas toute la largeur, et se trouve entouré d'une couche mince de liquide qui est Couche presque immobile. Cette couche stagnante est composée essen- ''Tê'sdn.nr tiellement de plasma; les globules charriés par le courant central ne s'y engagent que rarement , et lorsqu'ils s'en appro- chent, on les voit souvent tournoyer sur eux-mêmes par suite de l'inégalité de vitesse des diverses tranches de liquide avec lesquelles ils se trouvent en contact (1). (1) Le fait de l'existence de cette de chaque côté du fiiet sanguin ronge couche de sérum immobile ou près- était extérieure au vaisseau, etappar- que immobile entre la surface interne tenait à la liqueur contenue dans des ca- des vaisseaux et le courant sanguin, nauxlymphatiquesqui, chezlesBalra- déjà signalé par Perrot et par quel- ciens, entourent les grosses artères (c). ques autres physiologistes (a), a été Mais M. Poiseui lie a constaté le même très bien établi par les observations phénomène chez les Mammifères où de M. Poiseuille (6). M. Weber apensé cette disposition anaîomique n'existe que la bande translucide qui se voit pas, et d'ailleurs il a vu souvent quel- (a) Perrot, Dissert, de molli sanguinis in corpore liumano. Dorpat, ISii. (b) Poiseuille, Recherches sur les causes du mouvement du sang dans les capillaires, p. 45 et suiv. (extr. des Mem. des Sav. ét7'ang.,t. Vil). (c) E. H. Weber, Microscopische Beohachtungen ûber die sichthare Fortbewègung der Lyrâph- Mrnchen in den Lympligefdssen der Frosclilarven (Miiller's ArcUv fur Anat. und PhysioL, 1837, p. 267). COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 271 Le sang en circulation dans le système irrigaloire se meut donc dans l'intérieur d'un tube de liquide en repos Cjui le sépare des parois solides du vaisseau où il se trouve renfermé. Dans les tuyaux d'un calibre considérable, le frottement développé par cette adhérence entre la surface interne du vaisseau et la couche adjacente du hquide n'influe que peu sur les produits de l'écoulement, car la portion de la section du cylindre liquide retardée de la sorte ne constitue qu'une petite fraction de l'aire du cercle ainsi déUmitée; mais l'épaisseur de la couche sur laquelle l'influence des parois vasculaires se fait sentir reste à peu près la même , quel que soit le diamètre de ce cylindre, et par conséquent il est facile de prévoir que si le calibre du tuyau diminue de plus en plus , il arrivera un moment où l'at- ques globules hématiques , heurtés des globales blancs et non des globules par leurs voisins, sortir du courant rouges qui se voient d'ordinaire dans central, et se trouver lancés plus ou cette couche périphérique de sérum, moins profondément dans l'épaisseur nous la trouvons dans les propriétés de la couche stagnante, et ne s'y mou- physiques de ces corpuscules. En voir que très lentement ou même y effet, on sait, par les observations mi- resler en repos (a). croscopiques laites sur du sang placé Les recherches d'Acherson, de entre deux lames de verre, que les M. Gluge,deM. Lebert et de M. Whar- globules rouges glissent avec la plus ton Jones sont conGrmatives de celles grande facilité sur les surfaces avec deM.Poiseuille. Ces physiologistes ont lesquelles ils sont en contact, tandis vu souvent des globules blancs, qui que les globules blancs, ou globules s'étaient accolés à la surface interne lymphatiques , y adhèrent beau- du vaisseau, s'en détacher, et passer coup (c) ; quand ces derniers vien- de la couche périphérique transparente nent à toucher les parois du vaisseau, dans le grand courant central du vais- ils doivent donc être plus difficiles à seau (6). déplacer. Quanta laraison pour laquelle ce sont (a) Poiseuillc, Op. cit , p. M. {b) Acherson, Ueber die relative Betvegung dev Blut-und LymphMvnchen in den BhUgefasseû der Frusche (Miillcr's Arehiv fur Anat., 1837, p. 452). — Gliige, Quelquen obscrvalions sur la couche inerte des vaisseaux capillaires (Ann. des sciencesnat., -1839, 2" sôrie, t. XI, p. 58). — VVliarton Jones, On the State of llie Blood and Blnod-vessels in Inflammation {Guy's Hospi- taineports, 1851, vol. VII, p. 14). — Lelierl, l'iiysiolofiie patholo'jiqxie, 1845, t. I, p. 8. (c) Voyez toiiic I, page 73. 272 MÉCAINISME DE LA CIRCULATION. traction exercée parles parois de celui-ci deviendra la principale résistance à vaincre par la force qui tend à produire le courant. Des expériences d'hydraulique dues à M. Poiseuille font voir que cette limite est atteinte dans les tubes capillaires dont le diamètre est à peu près le même que celui des ramuscules ter- minaux du système vasculaire de l'organisme; de sorte que dans des tuyaux de ce genre les produits de l'écoulement sont, toutes choses égales d'ailleurs , en proportion inverse de la longueur du conduit (l). inn.icnce Alusl la quautlté de sang qui , en un temps donné, arrivera \L^ais™ dans un point déterminé du système circulatoire, pourra varier sur'ic'ia^'débit. du siuiplc au double, suivant que la longueur de la portion du vaisseau capillaire conduisant à ce point sera équivalente à 1 ou à 2, toutes choses restant égales d'ailleurs. La nature trouve donc là un moyen pour faire varier la rapidité de la circulation dans les diverses parties de l'organisme, bien que le mouvement imprimé au liquide nourricier dépende partout d'une môme force. Les principes d'hydraulique que je viens de rappeler nous per- mettent aussi de prévoir que les variations dans le diamètre des vaisseaux capillaires doivent exercer une grande influence sur le débit de ces tubes, sans que rien soit changé dans l'intensité de la force qui met en mouvement le liquide renfermé dans leur (1) Il est évident que cette loi n'est telles que Ton puisse négliger ces der- applicable qu'aux tubes dont le dia- nières fonctions. Du reste, les résultats mètre est assez pelit pour que la ré- fournis par les expériences de M. Poi- sistance due au frottement du liquide seuille se sont toujours très bien ac- coutre les parois du vaisseau dépasse cordés avec les résultats calculés la résistance dépendante de l'adhésion d'après cette loi (c), et l'exactitude de des molécules liquides entre elles ou ses observations a été confirmée par de leurs poids, dans des proportions M. Regnault (h). (a) Poiseuille , Uecherches expérimentales sur le mouvement des liquides dans les tubes de très petits diamètres {Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. élrang., 1. IX, p. 490 el suiv.). (6) l'icgnaull, Rapport fait à l'Académie {Ann. de chimie, 1843, 3" série, t, VU, p. 50). COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 27S intérieur, et ici encore les expériencesde M . Poiseuille sont venues donner la mesure des effets obtenus. Ce physiologiste a constaté que le produit de l'écoulement des liquides dans les tubes de très petit calibre, toutes choses restant égales d'ailleurs , croît pro- portionnément au diamètre de ces tuyaux élevé à la quatrième puissance. Ainsi la force qui ne déterminera le passage que d'un volume de sang par seconde dans un tube capillaire de ^ de millimètre en diamètre fera couler dans le même espace de temps 16 volumes de sang par un vaisseau du même ordre dont le diamètre sera de 7^ de miUimètre (1). Les observations microscopiques faites sur la circulation capillaire montrent que sous ce rapport les choses se passent de la même manière dans les vaisseaux de l'organisme vivant et dans les tubes inertes. Aussi, M. Wharton-Jones, en étu- diant l'action de divers agents sur l'état des capillaires sous- cutanés chez la Grenouille et sur le mouvement du sang dans leur intérieur, a-t-il vu que la dilatation de ces petits canaux était d'ordinaire accompagnée d'une accélération du courant circulatoire dans leur intérieur, et que leur rétrécissement ten- dait à déterminer la stagnation du sang avant même qu'il y eût oblitération de leur cavité (2) (1) Lajoi que M. Poiseuille formule appaitient à la première de ces deux en ces termes ; « Les produits sont catégories (a). entre eux comme les quatrièmes puis- (2) Ce fait a été révoqué en doute sances des diamètres » s'applique seu- par plusieurs auteurs récents, parce lement aux liquides qui sont suscep- qu'ils le considéraient comme étant liljles de mouiller les parois des tubes, contraire aux lois de l'hydraulique tels que l'eau, l'alcool, l'éther, elc, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler, et ne régit pas le mouvement de Mais il faut bien se rappeler que, dans liquides qui ne jouissent piis de celte un réseau de vaisseaux capillaires, les propriété, tels que le mercure; mais choses ne se passent pas de même que le s,ang, dont nous nous occupons ici, dans un tube ou un conduit unique. (fl) Poiïciiille, Hcclicrches expérimenlales svr le moiivcment des liquides ditns les Itihes de très fjctils diamètres {Slcm. de l'Acad. des sciences, Sav. èlrany., t. JX, p. 513 et siiiv.). — ricgnaull, ltaj>porl sur le travail préctilenl [Ami. de chimie, 1843, 3* série, t. VII, y. 7,'ij. IV. 18 274 MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. coniraciiiiié § /j.. — Eli falsaiit l'histoire anatomique de l'appareil circii- des capillaires. ,..,.,. latoire, j ai dit que les capillaires ont une structure plus simple i que les artères, et tendent à perdre plus ou moins complètement les éléments musculaires et fibreux qui , en nombre considé- rable, entrent dans la composition des tuniques de celles-ci (1); nous pouvons donc prévoir que les vaisseaux les plus ténus doivent être moins sujets à changer de calibre que ne le sont les artérioles. Ils sont, en effet, moins irritables, et les varia- tions qui s'observentdansleur diamètre paraissentdépendre prin- cipalement du degré relatif de pression exercée sur leurs deux surfaces par le sang d'une part et par les tissus circonvoisins d'autre part. Aussi sous l'influence des stimulants mécaniques ou chimiques que nous avons vus produire des effets si considé- rables sur le volume des artérioles (2), n'observe-t-on que peu d'indices de contraction dans les capillaires proprement dits, et la plupart des phénomènes de ce genre qui ont été décrits Là où le liquide ne coule que dans un dans un vaisseau contractile ne s'ap- seul lit, le courant s'accélère dans les plique qu'aux capillaires, et que l'in- parties étranglées et se ralentit dans fliience accélératrice dont il est ici les parties élargies; mais lorsque les question, quand un de ces tubes se variations qui se produisent dans Ja dilate, ne se manifeste que dans le cas grandeur de la section d'une ou de où la dilatation s'opère dans toute la plusieurs branches d'un réseau vascu- longueur de la portion du vaisseau laire n'ont pas nécessairement les comprise entre deux anastomoses ; car mêmes effets locaux, elles n'influent un élargissement partiel ne pourrait que proportionnément aux différences être suivi que d'un ralentissement du qu'elles déterminent dansla somme des courant dans la portion dilatée, ou sections de tout le système de canaux vice versa. C'est peut-être faute d'a- collatéraux ; et si le rétrécissement voir suffisamment analysé ces pliéno- d'une de ces voies y fait naître des ob- mènes, que les pathologistes ont été si stades au mouvement du courant, ainsi divisés d'opinions touchant l'influence quejel'aiexpliquéci dessus, c'est prin- que la constriction ou l'agrandisse- cipalement dans les autres branches ment des petits vaisseaux exercent sur du système quele mouvement s'accélé- la vitesse du courant sanguin, rera. Il est, du reste, bien entendu que (1) Voyez tome III, page 568. tout ce que j'ai dit ci-dessus touchant (2) Voyez ci-dessus, page 210 et le ralentissement du cours du sang suiv. COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. S75 par les pathologistes, comme se manifestant dans les vaisseaux de cet ordre, appartiennent en réalité aux artérioles. Il n'existe, il est vrai, aucune ligne de démarcation nettement tracée entre les artérioles, qui sont très contractiles, et les capillaires, qui ne le sont que peu ou point ; mais la différence physiologique s'établit graduellement et devient très prononcée quand on compare entre elles une artériole bien caractérisée et une des branches les plus grêles du réseau capillaire (1). Or, cette iné- galité dans l'irritabilité et dans la puissance contractile de ces deux portions contiguës du système circulatoire est une des causes de l'accumulation anormale du sang dans les capillaires, quand les artérioles qui aboutissent à ces vaisseaux viennent à diminuer de calibre sous l'influence d'un stimulant local. Effec- tivement, ainsi que je l'ai déjà expliqué dans une des précédentes Leçons (2), ce rétrécissement du conduit alimentateur du réseau rompt rharjïionie existant préalablement entre ces deux parties du système vasculaire ; une portion du sang qui, dans l'état normal, était lancée dans le lacis capillaire, se détourne de sa route ordinaire, et la ciuantité de liquide qui arrive dans ces canalicules étant réduite, le courant dont ils sont le siège se ralentit. Le sang, retardé ainsi dans sa course, oscille et s'arrête même dans les branches du réseau où son passage est le moins facile, etles globules rouges qui, dans un courant rapide, restaient dans l'axe du cylindre liquide, se répandent dans les couches périphériques où il n'y avait d'abord que du sérum. Quand le mouvement est lent, ces corpuscules rouges se déplacent aussi moins facilement que les parties fluides du sang, et tendent à s'accumuler, comme le feraient des cailloux charriés par un (1) c'est faute d'avoir distingué divergentes au sujet des elTels des nettement ce qui se passe dans les cliangemenls que ces vaisseaux étroits très petites artères et dans les capil- présentent dans les parties irritées ou laircs proprement dits, que beaucoup enflammées, d'auteurs ont émis des opinions si (2) Voyez ci-dessus, page 215. 276 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. torrent, là où le lit de celui-ci, venant à s'élargir, déterminerait un retard dans le cours de l'eau (1). Il en résulte que l'un des premiers effets du trouble amené ainsi dans le travail circula- toire est un élargissement de la traînée rouge qui occupe l'in- térieur des capillaires engorgés, et de là une augmentation apparente dans le diamètre de ces vaisseaux, et une coloration plus intense de la partie qui les renferme. Mais lorsque cet état de choses persiste pendant quelque temps, l'hypérémie, c'est-à-dire l'accumulation insolite du sang dans le lacis capil- laire, n'est pas seulement apparente, elle devient réelle, car ces vaisseaux augmentent de calibre (2). Les physiologistes ne sont pas d'accord sur la cause de cette dilatation des capillaires qui s'observe dans l'état dit inflamma- toire. Suivant les uns, elle serait due seulement à une augmen- tation dans la poussée latérale du sang, qui, à son tour, résulte- rait des obstacles que les amas de globules agglutinés dans les capillaires opposent au progrès du courant circulatoire (3) ; tandis que suivant d'autres, elle devrait être attribuée à un état d'atonie des parois de ces petits vaisseaux (4). Les faits dont on argue (1) Cette accumulalion des globules dère les capillaires proprement dits sanguins s'étend de plus en plus en comme n'étant pas doués de contrac- amont de l'obstacle, et détermine dans tilité, et pense que la diminution de les capillaires collatéraux un ralentis- calibre qui s'y remarque parfois est sèment dans le mouvement circula- due à la turgescence ou à la con- loirc qui, à son tour, prédispose à striction des tissus circonvoisins. Il l'agglomération des globules. Cela attribue aussi uniquement à la pres- nous explique comment , dans beau- sion exercée par le sang contre leur coup de cas, un foyer inflammatoire surface interne la dilatation qui dans s'étend progressivement. certains cas s'y effectue (a). (2) Voyez ci-dessus, page 216. (Zi) Ainsi M. Andral, dont les juge- (3) M. Wharton Jones , dont j'ai ments portent toujours l'empreinte déjà cité fort souvent les recherches d'un grand bon sens, admettrois modes sur tout ce qui touche à l'état des de formation de ces accumulations de vaisseaux dans l'inflammation, consi- sang dans les capillaires, savoir : (o) Wharton Jones, On the State of the Blood and ihe Blood-Vessels in Inflammation {Guy's Hospital Heporls, 2" série, t. VII, p. 40). COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 277 de part et d'autre me paraissent insuffisanls pour trancher la question; mais, d'après quelques expériences que j'ai eu l'occa- sion de faire à ce sujet, tout en attribuant à la cause mécanique dont je viens de parler un rôle très important, je suis porté à croire que la résistance des parois est souvent diminuée. En effet, ce n'est pas seulement en amont des obstacles créés par les accumulations de globules sanguins que les capillaires m'ont paru se dilater sous l'influence des rubéfiants; j'ai vu parfois ce phénomène se produire là où le sang était seulement ralenti dans sa course, par suite du rétrécissement ou de l'engorge- ment du conduit ahmentateur du courant, et un ralentissement de ce genre ne peut donner lieu à aucune augmentation dans la pression exercée par le fluide que ces vaisseaux renferment. Il me semble donc probable que les capillaires proprement dits, de même que les artérioles, sont susceptibles d'éprouver des variations dans le degré de tonicité ou d'élasticité dont ils sont doués, et que leur état d'atonie, de même que le relâchement des parois des artérioles subcapillaires, est une des causes de l'hypérémie locale (1). l'hypéréraie sthénique, ou par excès se laissent distendre par le sang en d'irritabilité ; l'iiypéréniie atonique, repos dans leur intérieur (6). ou par diminution dans la tonicité des (1) Il me semble probable que Ttip- capillaires, et l'hypérémie mécanique, parence d'une terminaison en cul- par obstacle à la circulation vei- de-sac, que M. Virchow et d'autres neuse (a). pathologistes ont observée dans quel- M. Lebert, tout en trouvant avec ques capillaires sanguins des mem- raison que les médecins ont beaucoup branes muqueuses , dépendait de abusé de l'hypothèse d'une hypé- la production de dilatations atoniques rémie atonique et d'une paralysie sur certains points obstrués et de vasculaire, admet qu'il y a diminu- la constriclion ou même de l'atro- tion dans l'élasticité des parois des plue du vaisseau au delà du point vaisseaux capillaires, quand ceux-ci élargi (c). (a) Andral, Anatomie patholofjique, I. I, p. H. (b) Lcbcrl, Mémoire sur les chancjements vasnUaires que provoque la localisalion iii/lammcitoire (hlém. de la Soc. de biologie, 1852, t. IV, p. 84). (c) Voyez Kollikcr, Élémenls d'histologie, p. 027. 278 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Quant à la nature de l'influence qui déterminerait l'atonie des tissus constitutifs des parois de ces petits vaisseaux, je ne pourrais présenter que des conjectures; mais il ne serait peut- être pas inutile de signaler l'analogie qui existe entre les divers modes d'action des différents stimulants et les effets opposés résultant d'une part de la section des nerfs vaso-moteurs, d'autre part de l'excitation de ces nerfs par le galvanisme (1). Les changements dans le calibre des petits vaisseaux sanguins ne se manifestent pas seulement dans les cas pathologiques dont je viens de parler; dans l'état normal, on les aperçoit aussi, mais alors ils coïncident ordinairement avec des modifications du même ordre dans les branches artérielles qui alimentent le réseau vasculaire où ces phénomènes ont leur siège, et il en résulte non pas la stase du sang, comme dans l'inflammation, mais des variations dans l'activité du travail irrigatoire dans ces parties. Ainsi, quand l'estomac et l'intestin sont en repos, les vaisseaux qui parcourent leurs parois sont resserrés ; ils ne reçoi- vent donc que peu de sang, et ce liquide, ù raison même de l'é- troitesse des canaux où il circule , ne s'y meut que lentement ; (1) Effectivement, nous avons vu, tien d'un courant galvanique discon- par les faits rapportés précédemment, tinu sur ces nerfs, c'est-à-dire un état que le sel commun et quelques autres de repos [a], et qu'en excitant la moelle substances déterminent dans les petits épinière ou le cerveau par le contact vaisseaux un état de relâchement qui de l'alcool, on occasionne une accélé- n'est pas la conséquence d'une con- ration dans le pouls (6). Il y aurait traction préalable, tandis que d'autres donc de l'intérêt à chercher si ce n'est substances, telles que l'alcool, provo- pas à raison de l'action spéciale et quent de prime abord la contraction locale de ces agents sur les nerfs des et ne produisent la dilatation que parois vasculaires que leur contact d'une manière consécutive. Oi", nous détermine tantôt une augmentation, avons vu aussi que le sel, appliqué sur tantôt une diminution dans l'état de les nerfs pneumogastriques, déter- contraction obscure et persistante mine sur les mouvements du cœur le qu'on nomme tonicité. même effet que celui produit par l'ac- (a) Voyez ci-dessus, page 151. {b} Voyez ci-dessus, page 155. COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 279 mais lorsque ces organes sont stimulés par la présence des ali- ments et que la digestion commence, il n'en est plus de même : la vascularité apparente des parois de ces cavités augmente consi- dérablement, le réseau capillaire se montre dans un état de turgescence, les courants artériels y arrivent avec impétuosité, le sang y circule rapidement, et une foule de petits vaisseaux qui auparavant échappaient à l'observation se dessinent nette- ment (1). § 5. — La circulation capillaire n'est pas subordonnée seu- lement à l'état de dilatation ou de contraction des vaisseaux qui établissent le passage entre les systèmes artériel et veineux , à la force avec laquelle le sang arrive dans ces canalicules, et à la facilité plus ou moins grande qu'il trouve à s'en écouler par les veines; les parois vasculaires exercent aussi de l'influence sur le courant qui les baigne , et pour peu que l'adhérence entre leur surface et le liquide en mouvement vienne à augmen- ter, le passage du sang des artères dans les veines se trouve ralenti. La température exerce une certaine influence sur l'adhérence qui s'établit entre les parois des tuyaux inertes et les liquides en mouvement dans les conduits : ainsi le froid tend à ralentir l'écoulement, et cela indépendamment des variations que cette cause peut déterminer dans la densité de ces liquides (2) . Dans Influence de rdlat des parois vasculaires sur la vitesse du courant. Action du froid. (1) Les physiologistes savaient de- puis longtemps que les vaisseaux san- guins de l'estomac sont dans un état de turgescence normale pendant la durée du travail digestif, et que les tuniques de ce viscère pâlissent beau- coup lorsque la digestion n'a plus lieu; mais c'est dans ces derniers temps seulement qu'on a fait des oij- servations microscopiques sur la circu- lation capillaire dans les parois du tube digestif en activité et en repos. Ce sujet a été étudié avec soin par un des jeunes médecins de l'École de Paris, M. Boul- land (a). (2) M. Poiseuille a constaté que ce ralentissement ne dépend pas de la condensation du liquide déterminée [a) Boulland , liecherches microscopiques sitr la circulation du sang et le système vasculaire tmguin dans le canal digestif, le foie et les reins. Thèse, l'aris, 1840, p. 24. 280 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. l'organisme cette action est beaucoup plus considérable : ainsi l'application de la glace sur les vaisseaux du mésentère d'un Mam- mifère suffit pour diminuer considérablement la vitesse du sang dans les gros vaisseaux, soit artériels, soit veineux, et pour arrê- ter complètement la circulation dans les capillaires. L'effet se produit en quelques secondes, et persiste pendant fort longtemps si l'action du froid a été un peu prolongée. Or, cette stagnation du sang ne dépend pas d'un resserrement dans les capillaires : M. Poiseuille, à qui l'on doit la connaissance de ces faits cu- rieux , n'a pu apercevoir aucun changement dans le diamètre de ces petits vaisseaux ; mais il a remarqué que l'épaisseur de la couche immobile de sérum qui est interposée entre les parois et le courant où les globules sont charriés s'accroît beaucoup quand le mouvement circulatoire est ralenti de la sorte , et par conséquent il attribue ce phénomène à une augmentation dans l'adhérence du liquide aux parois vascu- laires. Le froid produit des effets analogues sur la circulation capil- laire chez les Batraciens, et la chaleur amène le résultat inverse. Ainsi quand on soumet le mésentère d'un de ces Animaux à l'in- tluence d'une température élevée (par exemple en le plongeant dans un bain à /lO degrés), on voit la vitesse du torrent circula- toire devenir si grande jusque dans les plus petits vaisseaux, qu'on a peine à y distinguer la forme des globules hématiques (1). par rabaissement de température, car sur la rapidité plus ou moins grande la marche du phénomène ne change avec laquelle les liquides traversent pas lorsqu'en opérant sur l'eau, on les vaisseaux capillaires de l'orga- dépasse le point où la densité de ce nismc a été démontrée, vers le milieu liquide cesse d'augmenter par l'etTet du siècle dernier, par Haies, à l'aide du reh-oidissement , savoir entre k de- d'injections pratiquées sur le cadavre grés et zéro (a). d'un Chien qui venait de mourir d'hé- (1) L'influence de la température morrhagie. Ce physiologiste intro- (a) Poiseuille, Recherches expérimentales sur le mouvement des liquides dans les tubes de très petits diamètres {Mém. de VAcad. des sciences. Sav. étrang., t. IX, p. 254 et suiv.). COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 281 H me paraît probable que divers phénomènes dont on est témoin quand on observe la circulation dans les vaisseaux capil- laires des tissus qui sont le siège d'un travail inflammatoire dépendent d'un état particulier des parois de ces conduils; état dont nous ne connaissons pas la nature, mais dont l'effet serait d'augmenter l'adhérence de leur surface avec les matières qui baignent celle-ci. Ainsi que je l'ai déjà dit, on remarque alors que les globules hématiques charriés par le sang ne restent pas, comme d'ordinaire, dans l'axe du courant, et vont s'accoler, Influence de l'élat physiologique des -parois vasculaires. duisit successivement dans l'aorle, sous une même pression, de l'eau chaude et de l'eau froide, et il compara le temps nécessaire pour effectuer ainsi le passage d'un même volume de liquide. Dans une de ses expériences, une mesure d'eau froide mit pour passer de la sorte des artères dans les veines 80 secondes de plusque ne l'avait fait une égale quanUté d'eau cliaude ; et en substituant ensuite à l'eau froide de l'eau chaude, il vit la même quan- tité employer, pour passer de la sorte, 77 secondes de moins que dans l'é- preuve- précédente , et couler par conséquent à peu près avec la même vitesse que dans la première injec- tion (a). M. Poiseuille a fait ses expériences tantôt sur les vaisseaux du mésentère ou de la palmure interdigitale de la Grenouille, tantôt sur ceux du més- entère ou de la vessie urinaire de jeunes llats. Chez ces derniers l'action locale de la glace déterminait, en 10 ou 15 secondes, le repos du sang dans un grand nombre de capillaires, tan- dis que chez les Grenouilles le même effet n'était obtenu qu'au bout de 6 à 8 minutes. Le rétablissement de la circulation après la cessation de l'ap- plication de la glace se faisait attendre plus longtemps chez les Mammifères que chez les Batraciens. Ce physiolo- giste remarqua aussi que, sous l'in- fluence d'une température inférieure à 10 degrés, la circulation s'arrête dans un grand nombre de capillaires dès que le mésentère d'un Mammifère est ex- posé à l'air, tandis qu'à une tempé- rature de 25 ou 30 degrés cette stagna- tion du sang ne s'observe pas. Chez les Mammifères, l'action locale du froid sur une petite portion de l'organisme ne produit aucun retard dans la cir- culation générale ; mais, chez les Batraciens, le cours du sang peut être ralenti de la sorte dans tout le corps, bien que les battements du cœur n'aient pas diminué de fréquence. Cela dépend probablement de l'abais- sement de la température de la tota- lité du sang sous l'influence du froid extérieur {b}. (a) Haies, Hémostatique, frad. par Sauvages, IW, p. d02. (6) Poiseuille, Recherches expérimentales sur les causes du mouvement du sanij dans les vais- icaux capillaires, p. 58 et suiv. 282 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. pour ainsi dire, contre les parois du vaisseau qui les contient ; or on peut produire à volonté ce phénomène, non pas en modifiant la constitution du sang, mais en agissant sur le tissu des parois vasculaires, soit au moyen d'une excitation mécanique, soit à l'aide de divers agents chimiques (1). Les changements qui se manifestent en même temps dans le calibre de ces petits vaisseaux (1) L'influence de l'état des parois des vaisseaux capillaires sur la ma- nière dont le sang coule dans ces pe- tits tubes me semble ressortir évidem- ment des expériences de M. W. Jones sur la production des phénomènes inflammatoires dans la membrane in- terdigitale de la Grenouille {a). En ap- pliquant sur la peau quelques gouttes d'une solution concentrée de sel com- mun, on y détermine promptement une dilatation plus ou moins considé- rable des artères et une accélération du cours du sang dans les capillaires correspondants ; mais bientôt les glo- bules rouges, au lieu de se tenir dans le centre du courant, commencent à adhérer aux parois vasculaires, en face de l'embouchure de quelque branche vasculaire, et s'y accumulent de façon à y former une masse stagnante. Si l'intensité du phénomène augmente, cette agglomération de globules déter- mine bientôt l'obstruction du vaisseau, et la circulation s'arrête de proche en proche dans les capillaires voisins, et la stase locale du sang peut s'étendre jusque dans quelques branches vei- neuses voisines, tandis que le mouve- ment du liquide continue à être accé- léré dans d'autres parties du même réseau vasculaire. Il me paraît difficile de croire que dans cette expérience la dissolution saline ait agi directement sur les glo- bules hématiques, et il me semble probable que c'est en modifiant l'état des parois vasculaires avec lesquelles elle est en contact, que cette substance a produit ces effets. Du reste, il est aussi d'autres faits qui semblent indi- quer que dans les points affectés, des phénomènes d'exosmose se dévelop- pent avec une certaine intensité. En effet, M. H. Weber, en étudiant l'action des rubéfiants sur des parties de l'organisme qui se trouvaient sous- traites à l'influence du cœur au moyen de ligatures, a vu que le sang, parfai- tement en repos dans les capillaires, affluait des artères et des veines voi- sines dans les petits vaisseaux slir les- quels il appliquait un stimulant chi- mique de ce genre ; et ce mouvement des liquides ne pouvait s'expliquer par une diminution de la pression exercée par les parois vasculaires dans ce point, car il se manifestait dans les cas où il faisait usage de substances qui déterminent le resserrement de ces conduits, aussi bien que lorsqu'il appliquait sur ceux-ci des matières dont le contact détermine leur dilata- tion (6). (a) Wliarton Jones, On the State ofthe Blood and the Blood-Yessels in Inflammation (Guy's Hospital Reports, 2° série, l. VII, p. 34 et suiv.). (6) H. "Weber, Expérimente ûber die Stase an der Froschschivimmhaut (Miiller's Archiv fiir Anal, und Physiol., 1852, p. 361). COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 283 et dans la vitesse du courant qui les traverse ne suffisent pas à expliquer ce qui se passe dans les parties où une inflammation se développe, et je suis persuadé que la cause de cet état mor- bide est une modification du travail nutritif ou sécrétoire dont le tissu malade est le siège; modification qui se lie probable- ment ta la manière dont l'influence nerveuse s'exerce dans cette portion de l'organisme. Mais ce sujet n'est pas de mon domaine, et il est encore trop obscur pour qu'en nous y arrêtant ici, nous puissions faciliter nos études physiologiques sur la cir- culation. Je me bornerai donc à l'indiquer, mais j'engagerai les pathologistes à examiner avec plus d'attention qu'on ne l'a fait jusqu'ici ce côté de la question qui, envisagée au point de vue mécanique, les a occupés si souvent (1). (1) Pour plus de détails sur l'état aux travaux que j'ai déjà cités fort des petits vaisseaux dans l'inflam- souvent dans cette Leçon et dans celle mation et sur les modifications qui sur les propriétés des artères, ainsi s'opèrent dans le sang en repos dans qu'à quelques autres publications ré- ces conduits engorgés, je renverrai cenles (a). (a) Hastings, A Treatise on the Inflammation of the Miicous Membrane of the Lungs. In-8, 1820. ■ — Kaltenbrunner, Expérimenta circa statum sanguinis et vasorum in inflammaiione. Munich,. 1826. • — ■ Recherches expérimentales sur l'inflammation {Répertoire général d'anatomie, 1827, t. IV, p. 3G6 et suiv.). — Tliomson, Traité médico-chirurgieal de l'inflammation, Irad. de l'ang-Iais. — Kocli, Ueier die Entzûndung nach mikroscopisehen Versuch. (Meckel's Arch. fur Anat. und PhysioL, 1832, p. 121). — Prévost, Note sur l'inflammation [Mém. de la Soc. de physique et d'histoire naturelle de Genève, 1833, t. V). — Henle, Bericht (Zeitschr. fur ralionn. Med., t. II, p. 37 et suiv.). — Hasse et Kolliker, Einirje Beohachlungen ûber die Capillar-Gefâsse in entzûndeten Theilen {Zeitschr. filr ralionn. Medicin, 1846, t. IV, p. 1 , pi. 1. — Lehevl, Physiologie pathologique, 1845, t. I, p. 1 et suiv. — C. Brucli, Erweiterte Blutgefdsse in der Entzûndung {Zeitschr. fur rationn. Med., 1846, t. V, p. 69). — Vogel, Traité d'anatomie pathologique générale, Irad. par Jourdan. In-8, 1847, p. 75 et suiv. — Harling, Over varikeuse Haarvaten {Nederlandsch Lancet, 1848, 2° série, t. IV, p. 65). — Brijcke, Bemerkungen ûber die Mechanik des EntxAindungs-Processes {Sitzungsberichte der mener Wissensch. Akad., 1849, t. III, p. 130). — Paget, Lectures on Inflammation (London Med. Gazette , 1850, 2° série, t. X, p. 966 et suiv.). — Vircliow, Ueber die Erweiterung kleinerer Gefâsse {Arch. fiir pathol. Anal., 1851, t. III, p. 427). — H. Wcber, Exper. ûber die Stase an der Froschschwimmhaut (Miiller's Archiv filr Anat. und PhysioL, iH?,^, p. 301). — Wliarton Jones , On the State of llie Blood and the Blood-Vesscls in Inflammation asccr- 28/1 MÉCANISME DE LA CIRCULATION, Influence § 6. — Lgs vaiialions qui peuvent survenir dans la composi- sur son cours tion chimiquedu sang doivent partois intluer aussi sur la vitesse les capillaires, avec laquelle ce liquide coule dans les vaisseaux capillaires, lors même qu'elles ne déterminent aucun changement dans le dia- mètre de ces tubes (1). En effet, M. Poiseuille a constaté expé- rimentalement que la présence de certaines matières salines en dissolution dans l'eau peut activer ou retarder le mouve- ment de ce liquide dans des tubes inertes; que l'influence exer- cée de la sorte est plus ou moins grande suivant les proportions du mélange ; et que sous ce rapport l'écoulement des liquides (1) Haies a cherché à déternimcr diiectement rinfluence que diverses substances introduites dans le système vasculaire peuvent exercer sur la rapi- dité avec laquelle les liquides traver- sent les capillaires. Pour cela, il a comparé le temps nécessaire pour eflecluer l'écoulement de diverses so- lutions qu'il introduisait dans l'aorte chez des Chiens. Dans une de ses ex- périences, il vit que le passage d'un volume d'eau chaude avait lieu eu 62 secondes, tandis qu'après avoir fait circuler pendant quelque temps une décoction de quinquina dans les mêmes vaisseaux, le passage d'un égal volume de ce liquide nécessita 22i secondes. Dans une autre expé- rience, une première mesure de dé- coction de camomille passa en 96 se- condes , mais la onzième mesure mit 138 secondes à s'écouler. La même quantité de petit-lait tiède passa en 15 secondes (a). ^Vedeweyer rapporte quelques ex- périences faites par Gunlher sur le même sujet. Ce physiologiste a vu que de l'eau injectée dans les artères d'une partie vivante passait facilement dans les veines, tandis que de l'alcool ou du vinaigre passaient à peine ou pas du tout, suivant leur degré de concen- tration (6). Mais les résultats obtenus dans toutes ces recherches doivent être attribués à l'état de contraction ou de relâchement des petits vaisseaux provoqué par le contact des agents employés, plutôt qu'à des différences dans le degré d'adhérence entre ces liquides et la surface interne des vais- seaux. tained by Experimenls, Injections and Observations by the Microscope {Guy's Hospital Reports, 1852, 2° série, t. VII, p. 1 à 9, avec fig.). — Lebert, Mémoire sur les changements vasculaires que provoque la localisation inflamma- toire {Mém. de la Soc. de biologie, 1852, t. IV, p. 67 et suiv.). Schultze, Beitr. zur Lehre von der Stase in der SchtuimmJiaut der Frosche {Verhandlungen der Phys. Med. Gesellscltaftin Wiiraburg, 1854, t. IV, p. 248). — Donders, Physiologie des Menschen, 1856, t. I, p. 135. — ■ Gunning, Onderz-oekingen over Bloeds Bewegimg en Stasis. In-8, Ulrecht, 1857 (thèse). la) Haies, Hémostatique ou statique des Animaiix, p. 105 et suiv. Ib) Wedemeyer, Untersuch. ûber de Kreislauf des Blutes. COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 285 est soumis aux mêmes lois dans les vaisseaux à parois vivantes de l'organisme animal et dans les conduits inertes. Ainsi, toutes choses étant égales d'ailleurs, de l'eau chargée d'acide carbonique passe plus lentement dans tous ces conduits étroits que de l'eau pure. Le phosphate de soude, le carbonate de la même base , et plusieurs autres sels , déterminent aussi un retard plus ou moins considérable dans le courant; tandis que, au contraire , le débit des mêmes tubes devient plus grand quand l'eau qui les traverse tient en dissolution de l'azotate de potasse et de l'iodure de potassium (1). (1) Les substances salines que M. Poiseuille cite comme accélérant l'écoulement de l'eau clans les tubes capillaires sont : l'iodure et le bro- mure de potassium, les azotates de potasse et d'ammoniaque, le cyanure de potassium et l'acétate d'ammo- niaque. L'acide cyanhydrique et l'acide sulfhydrique augmentent aussi le débit de ces tubes. Les sels qui retardent le mouvement de l'eau, dans les tubes de petits dia- mètres, sontbeaucoup plus nombreux. M. Poiseuille range dans cette caté- gorie : les azotates de soude, de plomb, de stronliane, de chaux et de magné- sie; les chlorures de sodium, de cal- cium et de magnésium; les sulfates dépotasse, d'ammoniaque, de soude, de magnésie, de zinc, de fer, etc.; les phosphates de potasse, de soude et d'ammoniaque ; les carbonates, les bi- carbonates et les oxalates à base alca- line ; l'acétate de plomb, le citrate de fer, l'éméiique, les sels de morphine et de strychnine, etc. La soude produit im retard plus considérable que la potasse. D'autres substances, telles que les iodures de sodium et de fer, l'azotate d'argent et le deutochlorure de mer- cure, ne paraissent exercer aucune influence sur la vitesse du cou- rant (a). M. Poiseuille a obtenu des résultats analogues en opérant sur le sérum du sang au lieu d'eau, et il a vérifié les applications qu'il avait faites de ces lois physiques aux phénomènes dont l'organisme vivant est le siège, en introduisant diverses matières salines dans le torrent circulatoire, chez le Cheval, et en déterminant les varia- tions que la présence de ces substan- ces produisait dans la rapidité de la circulation. Ainsi, quand la vitesse normale du sang était de 25 à 30 se- condes, elle est devenue de 18 à 2Zi secondes sous l'influence de l'acé- tate d'ammoniaque, et elle est descen- due à 35 ou ho secondes quand il fai- sait usage de chlorure de sodium (a). {a) Poiseuille, Piecherches expérimentales sur le mouvement des liquides de nature différente dans les tubes de très petits diamètres (Ann. de chimie, ■1847, 3* série, t. XXI, p. 70). — Hecherches expérimentales sur l'écoulement des liquides considéré dans les capillaires vivants (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t, XVI, p. 00). 286 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Vitesse du sang § 7. — Alnsl ({UQ nous l'avoiis VU Qu Commencement de les capoiaires. ccttc Lcçon, lorsqu'oD obscrvc 311 microscopc la circulation du sang dans les capillaires d'une partie transparente de l'orga- nisme , telle que la palmure de la patte d'une Grenouille ou la nageoire caudale d'un petit Poisson, on croirait avoir sous les yeux un torrent des plus rapides ; mais le mouvement appa- rent est agrandi proportionnément au pouvoir amplifiant de l'instrument, et le courant est en réalité beaucoup plus lent qu'on n'aurait été porté à le supposer d'après la vitesse avec laquelle le liquide se meut dans les artères (1). Du reste , cela s'explique facilement par les différences de capacité qui existent dans ces deux portions du système vasculaire. Il suffit d'avoir vu une fois la disposition de cet appareil pour reconnaître que la somme des sections de tous les capillaires de l'organisme doit dépasser de beaucoup la grandeur de la section du tronc de Taorte ou la somme des sections des diverses branches de cette artère, et ce n'est pas sans raison que les anciens physio- logistes comparaient la moitié centrifuge du système circula- toire à un canal conique dont le sommet serait au cœur et la base dans les organes -, mais l'élargissement de cet ensemble de conduits ne se fait pas graduellement comme dans un cône et ne se prononce nettement que vers la partie périphérique, c'est-à- dire dans la zone des artérioles et des capillaires. Plusieurs physiologistes ont cherché à mesurer la vitesse du sang dans les capillaires des Batraciens et des Poissons (2), et (1) Voyez «i-dessus, page 263. parcourt la distance d'un pouce en (2) Haies fut, je crois, le premier une minute et demie ; ce qui corres- à chercher à déterminer par i'obser- pond à environ 0'"'"528 par se- valion la vitesse moyenne du courant conde {a). circulatoire dans les capillaires, et il Cette évaluation est beaucoup trop estima que, dans les petits vaisseaux faible, M. Weber, en faisant des re- des muscles de la Grenouille, le sang cherches sur la circulation dans les (a) Haies, Hémostatique, p. 58, COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 287 dans ces derniers temps M . Yierordt a cra pouvoir résoudre cette question pour l'Homme, en étudiant certains phénomènes de la vision dont nous aurons à nous occuper ailleurs (1). Les résultats auxquels on est arrivé de la sorte ne peuvent être considérés que comme des approximations peu certaines, mais ils ne sont pas dénués d'intérêt. D'après les évaluations de ce dernier auteur, la vitesse moyenne du courant sanguin dans les capillaires de la queue du Têtard, a Irouvé que l'espace parcouru en une seconde est, terme moyen, d'environ 0'"",57 (a). M. Valentin, par des observations analogues faites sur la membrane interdigiiale de la Grenouille, estime cette vitesse à 0'"'",507 (6). M. Volkmann évalue cette vitesse dans les capillaires des branchies du Têtard à 0""°,'îà ; dans la queue du même Animal, à 0""°,Zi; dans la na- geoire caudale d'un petit Poisson , à 0'°'",12 ; et dans les capillaires du mésentère d'un Chien, à 0""",8 par seconde (c). (1) Il arrive souvent que lorsque la vue a été fatiguée par l'éclat uni- forme d'une lumière blanche, et que l'on comprime l'œil d'une certaine manière , on voit pendant quelque temps l'image d'un courant en forme de réseau. La même sensation se pro- duit souvent dans l'obscurité, lorsque le système nerveux est dans un état d'excitation maladive, et elle paraît être produite par le passage des glo- bules sanguins dans les capillaires de la rétine. C'est en étudiant ce phéno- mène et en calculant l'espace par- couru par l'image en un temps donné, à l'aide de moyens qu'il serait trop long d'exposer et de discuter ici, que M. Vierordt est arrivé aux éva- luations qu'il a données de la rapidité du courant circulatoire dans les capil- laires chez l'Homme. Ce moyen est très ingénieux, mais je ne crois pas que, dans l'état actuel de nos connais- sances, on puisse obtenir de son em- ploi des données bien sûres touchant la vitesse réelle du sang dans notre organisme. Dans ses premières recher- ches sur ce sujet, ce physiologiste évalua à 0'""',5 la vitesse du sang dans les très petits capillaires, et trouva cette vitesse de 2 à 5 fois plus considérable dans les vaisseaux qui laissent passer à la fois plusieurs globules {d) ; mais ses dernières ob- servations ont donné une vitesse plus grande , savoir : de 0'""',6 à 0°"",9 dans les très petits capil- laires (e). (a) E. H. Weber, Ueber die in den Adern lebender Frosche und Froschlarven siclitbare Bewe- gung von Kornchen, welche die Gestalt der Lymphkornchen haben und ûber die Geschwindigkeit mit welcher sie suwohl, als dei Dlutkurperchen in den Haargefassen sicli beivegen (Miiller's Archiv, 1838, p. 407). (6) Vîilonlin, Lehrbuch der Physiologie des Menschen, t. I, p. 482. (c) Volkiii.jnn, IJie llamodynamik, p. 185. (rf) Vi(;r(ir(lt, l'hysiologische Mitlheilungen (Archiv fur physiol. Heilk., 1850, p. 255). (e) Vierordt, Die Eracheinungen und Geset%e der Stromgeschwindigkeiten des Blutes, p. 112. Évi'lualion de la capacité relative du système capillaire. 288 MÉCANISME DE LA CIRCULATION, capillaires du système aortique serait de 0"'"',36 par seconde chez la Grenouille, mais s'élèverait entre 0™"\6 et 0"™,9 chez l'Homme (1). § 8. — D'après ce que je viens de dire touchant la cause du ralentissement du courant circulatoire dans les capillaires, il est facile de comprendre que la comparaison des vitesses du sang à son entrée dans le tronc aortique et dans ces canalicules peut nous éclairer sur le calibre relatif de ces deux portions du système vasculaire. En effet, la totalité du sang qui pendant la durée de chaque seconde est poussé par les contractions du cœur dans le système aortique doit passer pendant le même espace de temps par chacune des sections du système capillaire et se rendre dans les veines ; mais la vitesse du courant dans chacun de ces points sera en raison inverse de la grandeur de l'aire (1) Le procédé généralement em- ployé pour évaluer la vitesse du courant circulatoire dans les capil- laires consiste à observer ce phéno- mène au microscope,, et à estimer le temps qu'an globule du sang met à parcourir un certain espace, le champ de rinstnunent ou l'intervalle com- pris entre deux lignes d'un micro- mètre, par exemple. Mais afin d'arri- ver à des résultats plus précis, M. Vierordt a eu recours à un moyen très ingénieux eraprunlé à la pliy- sique. On sait qu'un corps en mou- vement paraît immobile , s'il n'est éclairé que pendant un instant suffi- samment court pour que le déplace- ment de l'image produit sur notre rétine ne soit pas appréciable pendant la durée de l'éclair. Il en résulte que plus le mouvement est rapide, plus aussi devra être courte la durée de l'éclair, sous l'influence de laquelle ce mouvement sera inaperçu, et qu'en variant la longueur du temps pendant lequel la lumière arrive sur le cou- rant sanguin jusqu'à ce que les globules charriés par celui-ci pa- raissent immobiles, on pourra calcu- ler la vitesse de leur mouvement. C'est ce que JM. Vierordt a fait en pla- çant entre le miroir réflecteur et le porte-objet de son microscope un disque tournant uniformément et percé de trous convenablement es- pacés; la lumière n'arrive alors sur le courant sanguin, et de là à l'œil de l'observateur, que pendant que l'un de ces trous se trouve correspondre à l'axe de l'instrument, et en variant la vitesse avec laquelle le disque tourne sur lui-même, on peut varier à volonté la durée de cet éclairage intermit- tent {a). (a) VieronU, Die Erscheimtngen unil Gesel^e der Stronujesclnvindigkeiten des Blutes, p. 35 et suiv. COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 289 de CCS sections , et, connaissant d'une part l'aire de l'entrée de l'aorte et la rapidité du courant qui s'y engage , d'autre part la vitesse du même courant dans les capillaires, on en pourrait déduire la grandeur de la somme des aires de tous ces petits vaisseaux. M. Vierordt a employé les données que je viens de rapporter pour effectuer ce calcul, et il a été conduit de la sorte à penser que la section du système capillaire aortique est à l'aire du tronc d'origine de ce même système comme 800 ou 850 est à 1. Ainsi on peut se représenter l'arbre artériel comme une série de tubes dont la capacité pour une longueur donnée, 1 centimètre, par exemple, serait de 1 centilitre près du cœur et de 8 à 9 litres à l'extrémité de sa portion branchue (1). § 9. — En étudiant la structure de l'appareil vasculaire, influence nous avons vu que non-seulement il existe de grandes diffe- la disposition , , -Il • • '1 anatomiqne renées dans le nombre des capillan^es qui se trouvent répandus des capillaires 11,/' . . . Il- V sur la fréiiiience dans les divers tissus de 1 économie, mais aussi que le diamètre des obstructions de' ces petits conduits n'est pas le même dans toutes les parties du système circulatoire (2), et il est facile de prévoir que ces circonstances doivent exercer une influence considérable sur la manière dont l'irrigation physiologique s'effectue dans les organes qui , sous ce rapport, sont inégalement partagés, et sur tous les autres phénomènes qui se lient au passage du sang dans leur intérieur. Je ne reviendrai pas en ce moment sur la disposition anatomique que je viens de rappeler ; mais avant de terminer ce qui est relatif au cours du sang dans l'inté- rieur de ces vaisseaux, je crois devoir appeler l'attention sur quelques-unes des conséquences des différences qui existent (1) M. Donders , en .se fondant résultat ni celui obtenu par M. Vie- sur, d'autres observations faites par - rordt (6) ne peuvent être considérés M. Voikmann, n'évalue l'aire totale du autrement que comme des approxi- syslèmc capillaire qu'à 500 fois celle mations fort inceriaincs. de rentrée de l'aorte {a) ; mais ni ce (2) Voyez tome ICI, page 570, (a) Donders, Phusioluyie des Memclicus, t. I, p. lUl . ((;) Vierordt, Op. cit., p. 72. IV. 19 290 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dans le calibre des petits capillaires, car la connaissance de ces faits nous permettra de comprendre la cause de plusieurs phé- nomènes anormaux dont notre organisme est parfois le siège. D'après tout ce que je viens de dire touchant l'influence retardatrice des parois des petits canaux sur le cours des liquides en mouvement dans leur intérieur, sur les obstacles que la stase des globules dans les capillaires oppose au passage du sang dans les artères, et sur l'état morbide qui en résulte, nous pouvons prévoir que les accidents de ce genre, c'est-à-dire l'hypérémie et l'inflammation, seront, toutes choses étant égales d'ailleurs, les plus fréquents là où ces capillaires sont les plus fins. Or, nous avons vu que dans les poumons quel- ques-unes de ces voies de communication entre les artères et les veines sont plus étroites que dans aucune autre par- tie de l'économie. Nous devons donc nous attendre à voir les congestions sanguines et les phénomènes inflammatoires se manifester plus souvent dans les poumons que partout ailleurs, et la statistique médicale nous montre qu'il en est effectivement ainsi. Les pathologistes, il est vrai, attribuent la fréquence de l'iiypérémie pulmonaire à la grande activité de la circulation dans l'appareil respiratoire et à la nature des fonctions que celui-ci remplit; mais la cause principale me semble résider dans la ténuité extrême des canaux parcourus par le sang, et quant à l'influence de l'obstruction des capil- laires sur le développement de tous les autres symptômes de l'inflammation, nous en avons la preuve par une multitude d'expériences dans lesquelles on a produit à volonté et avec une grande promptitude ces phénomènes en injectant dans les veines d'un Animal vivant des substances qui n'exercent aucune action toxique sur l'économie, mais qui s'arrêtent dans les petits vaisseaux et les encombrent ou les bouchent même complète- ment. Cet engorgement se produit non-seulement quand on introduit dans le torrent de la circulation des particules sohdes COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 291 dont le volume est supérieur au diamètre des capillaires , mais aussi quand on y pousse certains liquides, tels que du mercure ou de l'huile : ces substances s'arrêtent dans les petits vaisseaux du poumon, les rendent imperméables au sang, et déterminent tous les symptômes qui accompagnent une pneu- monie ordinaire (1). Si le nombre des capillaires qui se trou- vent obstrués de la sorte est très considérable, il peut même en résulter une mort subite, et cela nous permet de comprendre comment des accidents funestes peuvent être occasionnés par la présence de petits caillots fibrineux que le sang entraîne dans son cours à travers quelques parties éloignées de l'organisme et charrie jusque dans l'artère pulmonaire (2). Par ces expériences on a pu voir aussi que des obstacles, légers en apparence, (1) Magendie a constaté que cette par exemple [d). Magendie a vu les obstruction des vaisseaux capillaires mêmes effets se produire quand il des poumons se fait dans une étendue injectait dans les veines d'un Chien de plus ou moins considérable, toutes les la fécule en granules (e). fols que l'on injecte de l'huile dans les Les globules du lait, au contraire, veines d'un Chien. Le même résultat traversent les capillaires sans diffi- a été obtenu par Gaspard, en injectant culte (/"). dans les veines de plusieurs Animaux (2) La présence de ces concrétions du mercure (a) , ou diverses ma- fibrineuses obstruant les petits vais- tières organiques très divisées et te- seaux des poumons a été constatée nues eu suspension dans de l'eau [b) : dans divers cas de mort subite due la viande désagrégée par la macéra- à ce que les médecins appellent une tion (c), ou de la substance cérébrale, apoplexie pulmonaire {g). (a) Magendie, Note sw l'inlroduction des liquides visqueux dans les organes de la circula- tion etc. (Journal de physiologie, 1821, t. I, p. 37). (6) Gaspard, Mémoire sur le mercure (Journal de physiologie, t. I, p. 166 et suiv.). — • Mag-entlie, Leçons sur les phénomènes physiques de ta vie, t. II, p. 190, etc. (c) Gaspard, Mém. physiologique sur les maladies purulentes, putrides, etc. [Journal de physio- logie, 1822, t. II, p. 2 i;t suiv.). id) Magendie, Leçons sur les phénomènes physiques de la Vie, t; I, p. 153 et suiv. (e) Magendie, Op. cit., t. II, p. 162. (/') Donné, Cours de microscopic, p. 91 et suiv. {g] liaron, Recherches et observations sur la coagillatiûn du sang dans l'artère pulmonaire et ses effets (Archives générales de médecine, 1838, 3° série, t. II, p. 1). — l'agel. On Obstructions oflhe Pulmonary Artei'y (Medico-Chinirgical Transactions, 1844, 2' série, l. IX, p. 102). — Virchow, llandb. der speciellen Pathologie,' l.l, p. 158 et suiv. (1854). — Lasègue, Thrombose et embolie, Exposé des théories du professeur Virchow (Arch' gén. dé méd. 1857, 5« série, t. X, p, 412). 292 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. opposent en réalité une résistance très grande au passage des liquides dans les vaisseaux capillaires, et qu'en cherchant à pous- ser ensuite dans ceux-ci une injection, on les rompt ordinaire- ment plutôt que de les dégorger. Or cela nous explique aussi comment le sang, lancé par les contractions du cœur dans les canaux obstrués, peut souvent les déchirer et se répandre dans les parties voisines. De petits épanchements se produisent fré- quemment de la sorte sur une multitude de points dans les tissus enllammés, et concourent à y produire l'état connu des patho- logistes sous le nom àliépatisalion (1). Enfin, lorsque les petits vaisseaux qui sont engorgés se trouvent près d'une surface libre, comme cela a lieu dans les cellules pulmonaires, des ruptures produites de la mêuie manière peuvent devenir la cause d'hémorrhagies abondantes. D'après ce que j'ai dit précédemment sur la cause de la poussée du sang dans les artères (2\ il est facile de comprendre comment le développement du travail inflammatoire dans une portion de la périphérie du système circulatoire peut être accompagné de battements insolites dans les petits vaisseaux de la partie malade. Par suite de l'obstruction des capillaires dont je viens de parler, la totalité du sang qui, dans les circonstances ordinaires, s'écoule, pendant la durée du flot systolaire, des artères dans les veines par les canalicules, devenus alors imper- méables, se trouve arrêtée et obligée de se loger dans la por- tion du système vasculaire située en amont de l'obstacle : par conséquent, la charge additionnelle est accrue d'autant. Il en résulte donc à chaque coup de la pompe cardiaque une distension plus grande que dans l'état normal, et cette distension à son tour (1) Ces ruptures, que j'appellerai de M. Lebert sur les tissus enflam- miliaires , ont été très bien constatées niés (a). par les observations microscopiques (2) Voyez ci-dessus, p. 227 et suiv. {a) Lebert, Physiologie pathologique, 1. 1, p. 13. COURS DU SANG DANS LES CAPILLAIRES. 293 diminue l'action du ressort des parois artérielles. La tonicité de leurs tuniques s'affaiblit aussi de proche en proche par la per- sistance de l'excitation ainsi produite, et ces vaisseaux se laissant distendre plus aisément, le sang y arrive en plus grande abon- dance. Ainsi toutes les conditions dont dépend le phénomène du pouls dans les grosses artères tendent à se réaliser dans les ^ artérioles de la partie malade, et souvent le mouvement rémit- tent du sang s'y fait sentir même plus que dans les troncs dont ces petits vaisseaux dépendent, à cause de la sensibilité morbide des tissus circon voisin s (1). § 10. — La ligne de démarcation entre les capillaires propre- passage p-adnei ment dits et les veinules qui forment les canaux efférenis du ''aLTe'nér' réseau constitué par les premiers est encore moins tranchée que la limite entre ces mêmes capillaires et les artérioles dont ils reçoivent le sang. En effet, les veines de très petit calibre s'an- astomosent aussi très fréquemment entre elles, et constituent, comme ces vaisseaux , des mailles ir,régulières plutôt que des con- duits directs ; elles ne diffèrent aussi que très peu des capillaires les plus fins par leurs propriétés histologiques. On pourra donc (1) II est évident que robstrnction exercée par ce liquide sur les parois des voies d'écoulement doit augmen- de la portion du système circulatoire ter proportionnellement la pression située en amont est rendue manifeste latérale exercée par le sang sur les par quelques expériences dues à Ma- parois des vaisseaux situés en amont gendie. Ce physiologiste, ayant adapté de Tobstacle, et si cette pression ne riicmodynamomètre de M. Poiseuille devient pas égale à la charge sous la- à i'une des artères carotides d'un quelle le sang est lancé du cœur dans Chien, plaça un fd autour de l'autre l'aorte, comme dans l'expérience des carotide, et constata une augmentation vases communicants , c'est parce que notable dans la hauteur de la colonne les branches latérales des artères per- manomélrique en communication avec mettent la sortie d'une portion plus ou le premier de ces vaisseaux, chaque moins grande du liquide. fois qu'il serrait la ligature de façon L'influence des oi)stacles opposés au à empêcher le passage du sang dans cours du sang artériel sur la pression l'autre vaisseau (a). (o) MagenJie, Lerons sur les phénomènes physiques de la vie, t. III, p- '!•''■. 29/|. MÉCANISME DE LA CIRCULATION. s'étonner peut-être de me voir séparer ici l'étude de ces diverses parlies contiguës de l'appareil circulatoire. Il n'y aurait, en effet, aucun inconvénient à considérer le réseau capillaire comme une dépendance du système veineux ; mais il faudrait toujours distinguer avec soin ce qui se passe dans les veines, dont les dimensions sont suffisantes pour les rendre faciles à voir sans le secours du microscope, et dans les canaux dont la ténuité est extrême, car, ainsi que je l'ai montré dans cette Leçon, ces derniers jouissent de propriétés importantes qui dépendent du fait même de leur exiguïté. Je ne m'arrêterai donc pas sur l'étude du passage du sang dans les radicules du système veineux, et dans la prochaine Leçon j'examinerai comment ce liquide se meut dans les canaux centripètes, dont le calibre est tel que l'adhérence entre leurs parois et le fluide nourricier n'influe pas d'nne manière notable sur le mouvement circulatoire. TRENTE- SEPTIÈME LEÇON. Du cours du sang dans les veines. — Cause principale de ce mouvement. — Dilatabilité , élasticité et contractilité de ces vaisseaux. — Fonctions des val- vules ; influence de la contraction des muscles circonvoisins sur le cours du sang dans les veines. — Influence des mouvements du thorax sur ce i)héno- mène ; zone de l'action aspirante de la pompe Ihoracique ; introduction acci- dentelle d'air dans les veines ouvertes qui est parfois déterminée par cette cause. — Influence de la multiplicité des veines et de leurs anastomoses sur le cours du sang dans leur intérieur. — Influence de la pression veineuse sur la poussée du sang dans les artères. — Particularités de la circulation veineuse dans le crâne et dans le système de la veine porte. ^1. — Le cours du sans: dans les veines est dû essentielle- ^'action •-^ du cœur est la ment à l'impulsion donnée à ce liciuide par les contractions principale ^ cause du cours du cœur et régularisée par l'action des artères. En effet, nous ''" «ans dans les veines. avons vu que l'agent moteur qui lance le sang dans ces der- niers vaisseaux et qui détermine la réaction exercée par leurs parois sur le fluide contenu dans leur intérieur est le cœur, et il nous sera également facile de constater que c'est le mou- vement dont le sang est animé dans les artères qui, après avoir déterminé le passage de ce liquide dans les capillaires, le fait avancer dans les veines. Cela ressort nettement d'une expérience faite par Magendie. Ce physiologiste , après avoir mis à découvert l'artère cru- rale d'un Chien et sa veine satellite, appliqua une ligature autour du memhrc de façon à ne pas comprimer ces deux vaisseaux, mais à interrompre la circulation par toutes les voies collaté- rales; puis il lia la veine crurale et y fit une petite ouverture en amont de la ligature. Les choses étant ainsi disposées, le sang continua à arriver dans le memhre par l'artère laissée libre, et sortait de la veine en formant un jet continu assez con- 296 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. sidérable. On comprima alors l'artère entre les doigts de façon à y intercepter le cornas du sang : le jet sortant de la veine con- tinua pendant quelques instants (1), mais diminua sensiblement à mesure que l'artère se vidait , et cessa tout à fait dès que ce vaisseau ne contenait plus de sang, bien que la veine elle-même fût encore remplie de ce liquide dans toute sa longueur. On interrompit alors la pression exercée sur l'artère : le sang s'y précipita avec force, et presque au même instant le jet se réta- blit à l'extrémité delà veine. L'intensité de ce jet était toujours réglée par la force du courant dans l'artère et était complètement indépendante de la quantité de liquide contenue dans la portion du système veineux comprise entre la terminaison de ce vaisseau centripète et l'orifice d'écoulement. Enfin Magendie, ayantinter- rompu de nouveau la circulation dans le membre, substitua au sang lancé dans l'artère par les contractions du cœur de l'eau chaude poussée dans ce vaisseau par le piston d'une seringue , et il vit aussitôt la sortie du sang recommencer à l'extrémité coupée de la veine , puis de l'eau s'écouler au lieu de sang, et, en variant la pression du piston, il faisait varier proportionnel- lement la force du jet ainsi formé (2). Enfin ce physiologiste (1) Quelques pbysiologisies ont sent sur le sang et continuent à pous- argné de cette persistance temporaire ser ce liquide dans les veines, après du cours du sang veineux après l'obli- qu'elles ont été soustraites à l'in- tération de l'artère correspondante, fluence du ventricule gauche, ponr soutenir que le cœur n'est pas (2) A l'époque oii Magendie publia l'agent moteur dont l'action déter- pour la première fois les expériences mine le retour du sang du système que je me plais àciterici (6), la plupart capillaire vers ce dernier organe (a) ; des physiologistes partageaient l'opi- mais, en raisonnant de la sorte, ils ont nion de Bichat , qui considérait le oublié que c'est le cœur qui donne sang veineux comme étant « mani- aux parois artérielles la tension en festement hors de l'influence du cœui'» vertu de laquelle ces vaisseaux près- et mis en mouvement par «le res- (a) Holland, The Influence of the Heart on thc Motion ofthe Blood (Ediniurqh Med. and Surrj. Journ., 1841 , t. LVI, p. 69 et suiv.). (6) Magendie, Mémoire sur Vaclion des artères dans la circulation {Journ. de médecine, ISll, t. XXXvilI, et Journ. de physiol., 1821, t. I, p. 111). COURS DU SANG DANS LES VEINES. 297 reconnut que l'accélération déterminée dans le cours du sang artériel par les mouvements expiratoires se traduit aussi au dehors par l'agrandissement du jet qui s'échappe delà veine jugu- laire quand on fait un pelit orifice aux parois de ce vaisseau (1). § 2. — En entretenant de la sorte le mouvement circulatoire dans une portion de l'organisme à l'aide d'un agent mécanique artificiel, on peut constater aussi que la pression qu'il est nécessaire d'exercer sur le sang de l'artère pour faire refluer ce liquide par les veines correspondantes n'est pas très considé- rable, et se trouve notablement inférieure à celle que le cœur est susceptible de développer. Ce fait ressort des expériences dues à Haies, mais a été mis mieux en évidence par les recherches récentes de M. Sharpey, professeur de physiologie à l'univer- sité de Londres. Ce savant poussa dans l'artère abdominale d'un Chien qu'on venait de tuer du sang délibriné, et pour pra- tiquer cette transfusion, il employa une seringue à laquelle était serrement insensible » du système se vider au-dessous du point oblitéré capillaire (a). Magendie, par ses re- par l'effet de l'aspiration thoracique, et cherches et par ses leçons, a plus se gonfler beaucoup au-dessus, comme contribué que tout autre à introduire cela arrive toujours quand le passage du des idées saines relativement à cette sang est interrompu de la sorte ; puis partie importante du mécanisme de il piqua légèrement la portion disten- la circulation , et je me souviens d'à- due de la veine de façon à obtenir un voir entendu, dans ma jeunesse, plus petit jet de sang, et il remarqua que d'un professeur à l'école de médecine ce jet triplait ou quadruplait de traiter d'hérésies physiologiques tout longueur chaque fois que l'Animal ce qu'il disait à ce sujet. Aujourd'hui faisait un effort inspiratoire un peu ces vérités sont devenues vulgaires. considérable (6). Le sang , dont le (1) En étudiant l'influence des mouvement était accéléré dans les mouvements de la poitrine sur la cir- artères par la pression thoracique, culation, Magendie fit l'expérience sui- s'écoulait donc avec une vitesse pro- vanle. Ayant lié une des veines jugu- portionnelle par la veine correspon- laires sur un Chien, il vit le vaisseau dante. (a) Bicliat, Anatomie générale, t. I, p. 384 (édit. de 1818). (b) Magendie, De l'influence des mouvements de la poitrine et des efforts sw la circulation du sang (.hum. de physiol., 1821, ). I, p. 137). 298 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. adapté un manomètre à mercure. Dans une de ses expériences il lia l'aorte au-dessus de l'origine des artères rénales , de façon à ne diriger le courant que dans les vaisseaux des intestins et du foie, et, à l'aide d'une pression d'environ 9 centimètres de mercure , il vit le sang couler rapidement par la veine cave ; sous une pression d'environ 13 centimètres , le jet devenait très fort, et avec la même force il put faire passer le liquide à tra- vers tout le système vasculaire des membres inférieurs et les canaux de la petite circulation (1). Or, nous avons vu, dans l 'avant-dernière Leçon , que la pression développée dans les artères par les contractions du cœur chez le même Animal est ^ égale au poids d'une colonne mercurielle d'environ 170 milli- . mètres de haut. La force motrice engendrée par cet organe est donc surabondante. Le cours § 3. — L'influcncc des battements du cœur sur la progrès- du sang veineux est parfois slon du saug dans les veines devient encore plus manifeste dans rémittent. . , ^ les cas où le mouvement intermittent impnme a ce liquide par les contractions du ventricule aortique n'est pas complètement transformé en un mouvement uniforme par l'action des parois artérielles. Etïectivement on voit alors le choc imprimé au sang artériel se propager même au delà du système capillaire et pro- duire dans les veines périphériques de légers battements qui cor- respondent aux pulsations des artères. Ce phénomène s'observe assez souvent chez l'Homme quand la circulation est accélérée, quand les vaisseaux sont un peu distendus et quand le cours du sang est facilité par la position horizontale du corps (2). Il se (1) Il résulte de ces expériences de kilogramme établit le courant dans M. Sharpey que, chez le Chien, un le système des vaisseaux pulmo- poids d'environ 1 kilogramme peut naires (a). suffire pour eflectuer la circulation (2) M. King a fait des observations artificielle à travers le double système intéressantes sur ce poids veineux, capillaire viscéral, et qu'un demi- chez l'Homme en santé aussi bien que (a) Voyez Rowman et Todd, Physiological Anatomy and Physlology ofMan, 1856, t. II, p. 350. COURS DU SANG DANS LES VEINES, 299 produit aussi dans diverses expériences faites sur des Animaux, et M. Poiseuille a constaté, à l'aide de mesures manométriques, que dans les circonstances ordinaires, lorsque les rémittences du cours du sang dans les artères sont insuffisantes pour déter- miner dans les veines des pulsations appréciables, elles n'en continuent pas moins à se faire sentir, de sorte que toute aug- jnentation de pression dans le système artériel due, soit aux contractions du cœur, soit aux mouvements respiratoires ou à d'autres causes analogues, est suivie d'une augmentation dans la poussée du sang veineux (1). chez des malades, et pour mettre le phénomène en évidence, il a fait usage d'une espèce de sphygmomètre très simple, savoir, un fil capillaire de cire à cacheter noire , étiré très mince et attaché par une de ses extrémités sur la peau à l'aide d'une gouttelette de suif; le levier constitué par ce fil repose sur la veine que l'on veut ob- server, et tout mouvement de dilata- tion ou de contraction de ce vaisseau se trouve représenté en grand par l'élévation ou l'abaissement de l'ex- trémité libre 'du levier. A l'aide de ce petit instrument, il a pu rendre visibles des pulsations dans les veines sous- cutanées de la main , du . front et d'autres parties du corps sur des per- sonnes en bonne santé, dont la circu- lation était un peu activée par l'in- fluence d'un repas ordinaire. Il a reconnu que ces battements se mani- festent à peu près en même temps que ceux des artères, mais ne résultent en aucune facondes mouvements que ces derniers vaisseaux peuvent trans- mettre aux parties adjacentes (a). On connaît aussi divers cas pathologiques dans lesquels ce pouls veineux était visible sans le secours d'aucun in- strument, flaller cite un exemple de ce genre, et depuis quelques années plusieurs médecins ont eu l'occasion de faire des observations analogues (6). Ce phénomène se fait remarquer prin- cipalement dans les cas où le sang est pauvre en matières solides, et paraît traverser plus facilement que d'ordi- naire les petits vaisseaux. (1) Ainsi, en plaçant son hémody- namomètre dans la veine humérale ou dans la veine saphène d'un Chien, M. Poiseuille a vu la colonne mercu- rielle osciller dans cet instrument, et s'élever chaque fois que le cœur se contractait ou que l'Animal faisait quelque mouvement violent (c). Ce physiologiste a fait aussi la contre-partie de cette expérience pour montrer que la pression dans les (a) King, An Essay on the Safety-Valve Function ofthe Right Ventricle of the riuman Ilearl {Guy's Ilosjnlnl Hepovls, IH'M, t. H, p. d07 et suiv.). (6) Marliii-Solon, Sur le pouls veAneux {Gazette médicale de Paris, 1844, p. (iOd). (c) Poiseuille, Recherches sur les causes du mouvement du saufj dans les veines, p. 19 (cxtr. du Journal univeriel et hebdomadaire de médecine, 1 830, 1. 1). 300 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. Influence § 4- — L'actioii clii CŒUF et (Ics artèrcs est donc bien la des valvules sur le principale cause du cours du sang dans les veines ; mais d'autres cours du sang veineux, forccs coucourcnt d'une manière accessoire à la production de ce mouvement centripète , et leur influence peut devenir même très puissante à raison d'une disposition particulière de ces vaisseaux que j'ai indiquée lorsque j'ai fait l'histoire anatomique de l'appareil circulatoire (1). En effet, les valvules que nous avons vues exister de distance en distance dans l'intérieur de la plupart des veines chez l'Homme et les autres Mammifères, sont disposées de façon à s'écarter quand le sang les presse d'amont en aval, et à livrer passage au courant centripète ; mais elles se gonflent et se rapprochent quand ce liquide les presse en sens contraire. Il en résulte que le sang contenu dans ces vaisseaux ne peut y couler que dans une seule direction : des capillaires vers le cœur ; et que toute pression intermittente qui tend à diminuer momenta- nément le calibre d'une portion de veine ainsi garnie de valvules doit contribuer à pousser ce liquide vers le cœur. Cherchons donc quelles sont les causes qui peuvent amener veines diminue toutes les fois qu'elle clans la pression du sang dans la par- est diminuée dans les artères. Pour tie terminale de l'artère ainsi ou- cela, il lie les vaisseaux à l'aide des- verte détermine aussitôt un abaisse- quels les capillaires d'une anse d'intes- ment correspondant dans la colonne tin communiquent avec les branches manométrique tenue en équilibre par artérielles voisines de celle dont il veut la poussée du sang veineux. En va- se servir, et il place l'hémodynamo- riant la grandeur de l'orifice d'écou- mètre dans le tronc veineux corres- lement, M. Poiseuille a pu diminuer pondant à cette dernière ; puis ayant à volonté la pression artérielle, et il noté la hauteur à laquelle le mercure est arrivé de la sorte à montrer que s'élève dans cet instrument, il pratique le système capillaire n'a aucune part une petite ouverture à l'artère qui ali- appréciable dans la production de la mente la susdite veine, de manière à force qui pousse le sang des artères produire un jet de sang, mais à main- dans les veines (a). tenir ce vaisseau plein de liquide en (1) Voyez tome HT, page 57à. aval de la ponction. Or la diminution (a) Poiseuille, Op. cit., p. 29. COURS DU SANG DANS LES VEINES. 301 ces changements alternatifs dans la contenance des diverses portions du système veineux, et accélérer de la sorte le retour du sang vers le centre de l'appareil circulatoire (1). § 5. — Il est d'abord à noter que les veines sont beaucoup plus dilatables que les artères et se prêtent facilement à l'ac- cumulation du sang dans leur intérieur (2). En général , bien que leurs parois soient plus minces que celles des artères, elles peuvent supporter sans se rompre une pression encore plus considérable (3). Elles jouissent aussi d'une certaine élas- ticité ; mais cette propriété n'est pas la seule cause du ressort Dilatabiliiû et élasticité des veines (1) Quelques physiologistes disent que les valvules des veines servent aussi à diminuer la pression exercée sur les parois de ces vaisseaux par le sang contenu dans leur iulérieur. La présence de ces soupapes aurait cet ettet si elles étaient abaissées, car elles fractionneraient la colonne sanguine, et empêcheraient ainsi les portions supérieures de celle-ci de peser sur les couches inférieures du liquide. Mais dans les circonstances ordinaires les choses ne se passent pas ainsi. Les valvules sont relevées , puisque le cours du sang est continu dans l'inté- rieur de la veine, et par conséquent leur présence n'empêche pas l'effet de la pesanteur d'être proportionnel à la hauteur totale de la colonne san- guine au-dessus du point que l'on considère. Cette question a été traitée par i'.eimbold (a) et fort bien discutée par M. Bérard (6). (2) Il est bien entendu que je ne parle ici que des veines ordinaires, et non de colles dont les parois adhèrent à des parties circonvoisines, qui sont elles-mêmes inflexibles, ainsi que cela se voit dans les canaux veineux des os et les sinus de la dure-mère. (3) Vers le milieu du siècle der- nier, Haies et Wintrinsham ont fait beaucoup d'expériences sur la force de résistance dont sont douées les parois des veines. Le premier de ces physiologistes a vu la veine jugulaire supporter sans se rompre une pres- sion égale à celle d'une colonne d'eau de llxS pieds de hauteur (c), et le se- cond a trouvé que la veine iliaque d'un BéUer peut résister à une pres- sion de plus de U atmosphères. Dans une autre expérience, Wintringham a pu soumettre à une pression de près de 6 atmosphères l'air dont un tron- çon de veine porle était rempli, et il a constaté que chez un Béhcr, où la rupture de la veine cave ne se pro- duisait que sous une pression corres- pondante à 176 livres, l'aorte se dé- chirait lorsque la pression exercée de dedans en dehors sur ses parois , (a) Voyez BischoB', Derichl (Muller's Avcliiv, 1842, p. lxxxiii). (6) Bérard, Cours de lihysioloyie, t. IV, p. 47. le) llalcs, Hdmostaliquc, p. 130. 302 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. dont elles sont douées, et sur le cadavre elles restent toujours Ilasques, à moins d'être fortement distendues, tandis que dans l'organisme vivant on les voit souvent se resserrer avec force sans avoir été préalablement dilatées (i). devenait égale à un poids de 158 li- vres [a). On sait cependant que les veines ont des parois beaucoup plus minces que les artères : ainsi Keil es- time que l'épaisseur relative de la veine cave est à celle de l'aorte dans le rapport de 9 à 51 (6), et, suivant Wintringliam, elle serait comme 9 est à 15Zi (c). Ce dernier expérimentateur attribua aussi aux tissus constitutifs de ces vais- seaux une densité notablement plus grande que celle des parois artérielles ; mais, plus récemment, AI. J. Davy a pris la pesanteur si>écifique de ces or- ganes avec beaucoup de soin, et les différences qu'il y a trouvées étaient insignifiantes {d). Il a fait aussi des ex- périences sur la résistance des tuniques vasculaires, et les faits qu'il signale paraissent concorder assez bien avec la tendance générale des résultats obte- nus par Wintringham (e). Je dois ajou- ter que , d'après ce dernier, l'inégalité dont il vient d'être question ne serait pas constante : ainsi , en expérimen- tant sur les vaisseaux des glandes, il a trouvé que la force de résistance est en général plus considérable dans les artères que dans les veines [f). 11 résulte aussi de ces expériences que les veines sont moins extensibles en long qu'en travers. (1) Verschuir a vu, dans plusieurs de ses expériences, les veines se res- serrer fortement dans les points où il les avait irritées, soit avec le scalpel, soit avec des acides [g). Marx a con- staté des faits du même ordre, et a trouvé qu'après la mort les agents stimulants dont il avait fait usage ne produisaient aucun effet de ce genre (li). Hastings a obtenu des ré- sultats analogues {i) ; mais dans toutes ces expériences les résultats étaient très variables. Ainsi Verschuir a vu l'une des veines jugulaires d'un Chien se contracter fortement sous l'influence d'une légère excitation traumatique , tandis que la jugulaire du côté opposé ne donnait aucun signe d'irritabilité ( j). Hastings n'a pu (a) c. Wintringliam, Expérimental Inqidry on Some Parts of the Animal Structure, 1740, p. 100 et suiv. (6) Keil, De quantitate sanguinis, p. 112. (c) Wintringham, Op. cit., expérience n» 5. (d) J. Davy, On the Spécifie Gravity of Différent Parts of the Human Body [Researches , Physic logical and Anatomical, t. II, p. 255). (e) J. Davy, Notice of a Fatal Case of Rupture of the Hearl and Aorta, with an Account of some Experiments on the Power of Résistance of the Heart and Great Arteries (Researches, Physiological and Anatomical, 1. 1, p. 441 et suiv.). (/■)Idem, Op. cif.,p. 158, etc. (g) Verschuir, Dissert, med.inaug. de arteriarum et venarum vi irrltabili, 1766. (h) Mar.x , Diatribe anatomico-physiologica de structura atque vita venarum , p. 73, 81, etc. (1819). (i) Hastings, On the Inflammation ofthe Mucous Membrane of the Ltmgs, p. 62 et suiv. (j) Verschuir, Op. cit., p. 91; COURS DU SANG DANS LES VEINES. 303 ^ (3. — En effet, les parois des veines sont par elles-mêmes contraciiiué , , , tonique contractiles. Nous avons va précédemment que leur tunique des veines. moyenne renferme des éléments musculaires , et les expé- riences des physiologistes nous montrent qu'elles sont douées d'une irritabilité analogue à celle que possèdent les artères (1). déterminer aucune contraction clans la veine cave en la touchant avec de l'acide nitrique , bien que chez le même Animal cet agent excitât des contractions bien manifestes dans les veines mésentériques et jugulaires. (1) L'irritabilité des parois vei- neuses pouvait se déduire des faits constatés depuis longtemps par di- vers physiologistes et mentionnés dans la note précédenle ; mais l'existence de cette propriété a été démontrée d'une manière plus nette par les expériences pratiquées, il y a quel- ques années, par M. KôUiker, sur les vaisseaux de la jambe d'un Homme vivant, quelques instants après que ce membre eût été séparé du corps par amputation. En faisant passer un courant d'induction sur les parois des veines saphènes, il vit ces vaisseaux se contracter lentement, expulser le sang dont ils étaient gorgés, et prendre l'apparence de cordons blanchâtres. Cet état persista pendant assez long- temps. Sur les petites veines les eiïets produits étaient moins marqués ; la lu- mière de ces vaisseaux ne s'eilaçait pas complètement. La veine libiale posté- rieure se comporta comme les gros troncs sous-cutanés dont il vient d'être question ; en une minute elle prit l'apparence d'un cordon exsangue ; mais la veine poplitée, qui était déjà presque vide, ne donna aucun signe de contractilité (a). En étudiant l'ac- tion de divers agents sur les parties irritables du corps humain, chez des suppliciés, Nyslen avait constaté précé- demment que la veine cave est suscep- tible de se contracter par l'action du galvanisme. Chez divers .Mammifères, il a déterminé par le même moyen des contractions dans la veine azygos, ainsi que dans la veine cave supé- rieure. On doit aussi à ce physiolo- giste beaucoup d'expériences qui prouvent la longue persistance de la puissance contractile dans les parois des gros troncs veineux , chez les Oiseaux , les Batraciens et les Pois- sons. Par le galvanisme, il a pu exis- ter des mouvements dans la veine cave aussi bien que dans l'oreillette du cœur, plusieurs heures après que l'Animal paraissait complètement mort (6). M. Gubler a appelé l'attention sur un mode de démonstration de la contracti- lité des veines qui est facile à employer. Quand les veines du dos de la main sont un peu gonflées, il suffit en gé- néral de les percuter un peu vivement pour voir, au bout de très peu de temps, ces vaisseaux se rétrécir beau- coup dans le point frappé ; la con- (a) Kollil mus est, ut pluriinum lamen eum quoqne in vivis Canibns observaviinus loto illo duclu ab bopale et » ajugulo in cor usqtie. » (Wallœus, Eidst. ad Gasp. Uarlholinum de niolu chyli et sanyuinis , IGOO, Opéra medica omnia, p. 254.) (b) SUnonis ex varwnim Animalium seclionibus hinc inde faclis excerpUe observationes circa molwn cordis , auricularum el vente caî^œ (Barlliolini. Acta medica Hafniensia, 1073, t. Il, ohs. 40, n" 7 à 12, p. 143). (c) Lancisi, De moiu cordis et anenrismalibus, p. 211. (d) Lower, Tractatus de corde, p. 53, 73, etc. (e) Magendie, l'récis élémenlairc de physïoloQie, 1825, t. Il, p. 257. IV, 20 306 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. chaque contraction le sang contenu dans l'intérieur de ces petits vaisseaux, pressé par ces mouvements, ferme les valvules reflux du sang dans ces vaisseaux (a). U avait vu cependant que chez ces Batraciens la poiiion terminale des veines pulmonaires est susceptible de se vider complètement dans le cœur, après qu'elle a été séparée de la por- tion périphérique du système circu- latoire par une ligature, et soustraite par conséquent à l'influence de l'im- pulsion imprimée au sang par les systoles ventriculaires. Or, ce résultat suppose l'existence de la faculté con- tractile dans les parois de la veine qui chasse ainsi le sang, phénomène qui ne s'observa pas dans toutes les par- ties du système veineux , dans les branches des veines mésentériques , par exemple. La veine cave infé- rieure, après avoir été liée, se désem- plissait sensiblement en aval, mais pas d'une manière aussi complète que le faisait la veine pulmonaire , car du sang continuait à y arriver par des branches latérales (6). Spallanzani avait remarqué égale- ment ces battements dans la veine cave chez les Tritons et les Rainettes ; il avait reconnu en outre que ces pul- sations coïncident avec la diastole de l'oreillette et qu'elles persistent après que le vaisseau qui en est le siège a été rescisé et vidé (c). Les expériences de M. Flourens donnèrent des résultats plus frap- pants, et démontrèrent le rôle actif des parois des veines dans la production des pulsations dont ces vaisseaux sont le siège. A l'aide de ligatures placées près du cœur, il a constaté que le reflux du sang de cet organe dans les veines n'est pas la cause de la dia- stole de ces vaisseaux , et que leur systole dépend de la contraction mus- culaire de leurs parois. Enfin il a trouvé des battements rhythmiques du même ordre dans tous les gros troncs veineux de la Grenouille {cl). Plus récemment des expériences analogues ont été faites sur des Tor- tues , aussi bien que sur des Gre- nouilles, par un physiologiste amé- ricain, M. Allison, et elles ont fourni les mêmes résultats. Dans un cas, un tronçon de la veine pulmonaire d'une Tortue, lié à ses deux extrémités et complètement séparé du corps, con- tinua à battre avec vigueur pendant ([uatre ou cinq heures, et donna des signes d'irritabilité au bout de huit heures (e). D'après cet ensemble de faits, on ne saurait révoquer en doute l'inter- vention active des gros troncs veineux dans la production du courant circu- latoire chez les Batraciens et chez les Reptiles. Mais en est-il de même chez les Vertébrés supérieurs? Les recher- ches de M. Flourens, ainsi que celles (a) Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p. 310, etc. (b) Idem, ibid., p. 76. (c) Spallanzani, Expév. sur la circulation, p, 199 et 364. (d) Flourens, Expériences sur la force de contraction propre des veines jjrincipales dans la Grenouille (Ann. des sciences nat., 1833, t. XXVIII, p. 65). (e) Allison, Experiments proving the Existence of a Venons Puise Indépendant of the Heart andNervous System, luith Remarks on the Contractilily of the Veins in General {American Jour- nal of Médical Sciences, 1838, n" 45, t. XXIII, p. 318). COURS DU SANG DANS LES VEINES. 307 situées en amont du point de contraction, et se trouve par con- séquent poussé vers le cœur (1). La contractilité des gros troncs veineux cliez les Mammi- fères, aussi bien que chez les Batraciens ou les Poissons, nous permet de comprendre comment une circulation faible et lente a pu se maintenir pendant un temps assez long chez certains fœtus monstrueux qui étaient privés de cœur, et qui n'auraient certainement pas continué à vivre et à se développer dans le sein de leur mère si le sang avait été en repos dans leurs vais- seaux. de Ilaller, tendeni à établir que chez les Mammifères les veines sont com- plètement passives, et que les pulsa- tions qui s'y remarquent dans le voi- sinage du cœur dépendent exclusive- ment du reflux du sang déterminé par les contractions de ce dernier or- gane (a). Néanmoins je ne pense pas qu'il y ait, à cet égard, une différence fondamentale entre les divers Verté- brés, et les expériences de M. Allison prouvent que les gros troncs veineux voisins du cœur sont susceptibles de se contracter sponlanément, et même de battre d'une manière rhyliimique chez divers llam mifères. A insi,chez un Chat, les veines pulmonaires ont exécuté des mouvements pulsatiles assez intenses, pendant plusieurs heures, après avoir été séparées du cœur et extraites du corps (6). Dans la veine cave l'irrita- bilité s'est manifestée aussi , mais d'une manière moins puissante. Enfin, !\I. Allison assure avoir observé des phénomènes du même ordre sur des Chiens et sur un Bœuf, aussi bien que sur des Oiseaux et des Poissons. (1) M. Wharton Jones a reconnu que les contractions et les dilatations alter- natives de ces veines se répètent en général huit à dix fois par minute, quelquefois davantage, et que la di- minution de calibre déterminée de la sorte est d'environ l/i ou l/5\ Toutes les valvules ne ferment pas complète- ment le vaisseau lorsqu'elles se rabat- tent , et , dans les parties où elles offrent cette disposition, il y a souvent un reflux du sang au moment de la contraction ; mais dans la plupart de ces canaux le courant sanguin con- tinue toujours à s'avancer vers le cœur et se trouve accéléré par chaque con- traction de la veine. Ces mouvements rhythmiques ne s'observent pas dans les veines sous-cutanées des autres parties du corps et n'existent pas dans les vaisseaux du pavillon de l'oreillette, par exemple. L'électricité paraît les exciter. Enfin la contraction tonique ne se remarque pas dans les veines de ces Animaux (c). (a) Flourens, Op. cit. {Ann. des sciences nat., i" série, t. XXVIII, p. 67). • (b) Allison, Op. cil., p. 318. (c) Wli.irton .lonos, Discovery that the Veins of Ihe Bai's Wiiigs are endowed ivith Mylhmical conlraclilUy {l'kilun. Tram., 185!2, p. 131, pi. 4). 308 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. coutraciililé Mîiis tlaiis la plupart des veines, chez l'Homme et chez tous les Ionique. autres Mammifères, la contractilité offre le même caractère que dans les artères (i) ; elle ne se manifeste que lentement, et l'irri- tabilité est moins grande qne dans ces derniers vaisseaux (2). Effets § 7. — Des effets semblables à ceux que détermineraient de la pression intermiitentc dcs contractlons rhythmiques dans les parois des veines peu- GXGTCGG sur les veines vcnt être la conséquencc de toute pression exercée sur ces par les muscles . ... circonvoisins. vaisscaux par les organes cuTonvoisms, pourvu que cette pres- sion soit intermittente et de courte durée. Or, nous savons que les muscles en se contractant se gonflent et se durcissent, et nous verrons que dans le jeu ordinaire de ces organes leur con- traction est bientôt suivie d'un temps de repos, pour recom- mencer ensuite. Les veines, qui sont situées entre les muscles ou dans leur épaisseur, ou bien encore qui marchent entre leur surface et une gaine résistante comme est celle formée autour dé nos membres par la peau et les tissus aponévrotiques sous- cutanés, doivent donc être comprimées par ces organes lorsque ceux-ci sont mis en action, et cette compression doit tendre à aplatir ces vaisseaux et à les vider, résultat qui ne peut être (1) Le resserrement lent, ou con- bres abdominaux, et que ces mêmes traction tonique des veines, se mani- vaisseaux paraissent filiformes quand feste dans im grand nombre de cir- ces parties ont été exposées pendant constances. Ainsi, sous Tinfluence du quelque temps à l'action du froid, froid, ces vaisseaux se resserrent (2) Ainsi dans le pavillon de roreille beaucoup, et cet effet est très visible du Lapin, où les artères sont douces, à travers la peau sur les veines sous- comme nous l'avons vu, d'une faculté cutanées de la main, par exemple, de contraction très grande, les veines tandis que par l'action de la chaleur ne sont que peu irritables. Elles ne on les voit se gonfler, Chacun sait sont cependant pas privées de celte aussi que l'immersion des pieds dans propriété, comme on peut s'en con- de l'eau chaude détermine prompte- vaincre par les expériences de Has- ment une grande dilatation des veines tings (a) et de M. Vulpian [b], de toute la partie inférieure des mem- (a) Haslings, On the Iii/lammatiou of the Mucous Membrane ofthe Lungs, p. 61 et suiv. (b) Vul[iian, De la contractilUé des vaisseaux de l'oreille chex le Lapin {Comptes rendus de la Société de biologie, 1856, 2° série, t. III, p. 187). COURS DU SANG DANS LES VEINES. 309 obtenu que par le^léplacement du sang du point pressé vers le cœur, puisque les valvules situées en amont s'opposent à tout mouvement de reflux. Mais dès que la contraction des muscles adjacents s'inlerrompt, cette pression cesse, et la portion du tube veineux qui s'était vidée se remplit facilement de nouveau; à raison du jeu des valvules, elle ne peut recevoir du sang que des. parties qui sont situées en amont, c'est-à-dire du côté des capillaires , et par conséquent aussi l'afflux du liquide dans son intérieur doit accélérer le mouvement progressif du sang dans cette partie périphérique du système circulatoire. La contraction des mêmes muscles venant à se renouveler, l'ondée de sang qui est venue occuper la portion vide de la veine précédemment apla- tie sera à son tour poussée vers le cœur, puis la veine sera encore une fois libre pour recevoir une nouvelle charge de liquide, et ainsi de suite, chaque fois que ces élats alternatifs de contrac- tion et de repos se succéderont. Si la durée de chaque pression exercée de la sorte était considérable et le temps de repos très court, le passage du sang j^ourrait être ralenti par suite de ces aplatissements du tube veineux; mais si, au contraire, ces mouvements alternatifs se succèdent rapidement, il en résultera un effet contraire , car la quantité de sang déplacée à chacun des coups de piston donnés ainsi par les muscles circonvoisins sera beaucoup plus considérable que celle qui aurait passé dans les mêmes espaces de temps sous l'empire des llirces circula- toires générales. Cette influence des mouvements musculaires sur la rapidité du coings du sang dans les veines devient très manifeste dans l'opération de la saignée du bras. Si le membre est en repos, le sang s'écha[)pe do la veine ouverte en moins grande abon- dance que si les muscles de l'avant-bras ou de la main viennent n se conh^acter : (^liaque fois rpie le malade serre le poing , on voil le jcl d(!V(;nii' |)lus fort; et c'est j)oiu^ déterminer le jeu all(iii;ilir de c(,'s muscles et la pression intei'mittente sur les 310 \ MÉCANISME DE LA CIRCULATION. veines voisines, qui en est la conséquence, que les chirurgiens ont l'habitude d'engager le malade à remuer les doigts, afin de provoquer l'écoulement du sang par la petite plaie destinée à y Mvrer passage. Cet emprunt de force motrice fait au système de la locomo- tion en faveur du travail circulatoire est subordonné , comme nous venons de le voir, à l'action des valvules dont les veines sont pourvues ; car si ces soupapes\ie donnaient une direction constante au liquide déplacé de la sorte, ces alternatives de pression et de repos ne produiraient qu'un mouvement oscilla- toire et nuiraient au cours du sang dans ces vaisseaux plutôt que d'y être utile. Les fonctions de (îes valvules sous l'influence des pressions exercées par les parties voisines nous permettent aussi de comprendre pourquoi la Nature a multiplié ces replis membraneux dans l'intérieur des veines des membres plutôt que dans les veines du tronc ou des viscères, car c'est surtout dans l'appareil de la locomotion que les veines se trouvent placées dans des conditions favorables au développement de ces pressions rhythmiques extérieures ; là elles sont entourées de muscles puissants qui alternent dans leur action , et là aussi elles sont renfermées avec ces muscles dans une sorte de gaîne tégumentaire très résistante , tandis que dans l'abdomen la pression exercée sur ces vaisseaux ne serait pas sujette à varier de la même manière. Je ferai remarquer aussi combien cet enchaînement d'effets est bien calculé pour répondre aux besoins de la machine vivante. Nous verrons plus tard que le passage du sang dans les muscles est une des conditions de l'activité de ces organes, et que plus la puissance musculaire développée est considérable, plus la quantité de sang artériel que les muscles transforment en sang veineux devient grande. Les muscles qui agissent ont donc besoin d'être le siège d'une circulation plus rapide que les muscles en repos, et, pour pourvoir à ce surcroît d'activité dans COURS DU SANG DANS LES VEINES. 311 la portion du service irrigatoire qui appartient à chacun de ces or- ganes, la Nature a rendu Taccélération du cours du sang dépen- dante de leur contraction même. Ces harmonies physiologiques ne sont pas sans intérêt aux yeux du philosophe, et si besoin était, on poiuTait les invoquer comme preuves de l'intervention d'une intelligence créatrice dans la formation des êtres vivants. § 8. — Pour terminer cette revue des forces mécaniques qui Muence des interviennent dans la production du mouvement circulatoire du mouvements sang, il me reste encore à parler d'une des puissances accessoires \nAT que dans le langage des écoles on appelle adjuvantes^ savoir, "^Teine^u?"^ le jeu de la pompe thoracique dont la fonction principale est le renouvellement de l'air dans les organes respiratoires. Nous avons vu dans une précédente Leçon que le cœur et les gros vaisseaux qui l'avoisinent sont logés, ainsi que les pou- mons, dans la cavité du thorax dont les parois mobiles s'écartent et se rapprochent alternativement pour effectuer les mouve- ments d'inspiration et d'expiration. Or, il est évident que la diminution de pression qui , au moment de la dilatation de cette espèce de pompe aspirante, détermine l'entrée de l'air dans les voies respiratoires, doit exercer une influence analogue sur le liquide contenu dans les autres canaux qui sont également en communication avec des réservoirs extensibles renfermés dans l'intérieur de cet appareil. L'espèce d'appel exercé de la sorte ne peut avoir que peu d'influence sur le calibre de la por- tion terminale de l'artère aorte qui se trouve incluse dans la chambre thoracique, et qui est trop résistante pour céder notable- ment quand cettccavité augmente de capacité. Par conséquent, la force aspirante développée de la sorte ne peut retarder que peu ou [)oint le cours du sang dans ce vaisseau ; mais les parois de la portion terminale des veines caves sont beaucoup plus exten- sibles, et cbaquc Ibis que l'agrandissement du thorax détermine l'entrée d'une nouvelle ondée d'air dans les poumons, ces vais- seaux se gonflent sous l'influence de la même cause qui dilate les 312 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. cellules pulmonaires. L'arrivée du sang vers le cœur est donc ^ aidée par l'espèce de succion exercée par l'appareil respiratoire, et le mouvement centripète ainsi développé dans le système veineux se fait sentir au dehors du thorax partout où les veines qui ahoutissent à cette cavité sont suffisamment protégées contre l'action de la pesanteur de l'atmosphère pour ne pas céder à la pression exercée par celle-ci avec plus de facilité que le liquide contenu dans leur intérieur ne se laisse attirer vers la poi- trine. Cette aspiration du sang veineux par la pompe thoracique a été aperçAie par Valsalva (1), mais n'a été bien constatée et expliquée que dans ces derniers temps par David Barry. Ce physiologiste introduisit dans l'une des grosses veines voisines du cœur d'un Cheval l'extrémité supérieure d'un tube coudé dont le bout opposé plongeait dans un vase contenant un liquide coloré; il plaça ensuite une ligature autour de la veine, de façon à y assujettir l'appareil ainsi disposé, et il vit qu'à chaque mouvement d'inspiration exécuté par l'Animal le liquide mon- tait dans la branche verticale du tube , tandis que pendant les mouvements d'expiration il redescendait plus ou moins bas (2). (1) Valsalva paraîi avoir été le pre- située au-dessous de ce point de cou- niier à observer l'action aspirante des 1er vers le cœur («). Haller, ayant mis mouvements inspiratoires sur le sang à nu sur des Animaux vivants les di- veineux. Morgagni nous apprend que vers troncs veineux qui se rendent au ce physiologiste, ayant mis à décou- tiiorax, vit que pendant l'expiration ces vert les veines jugulaires d'un Chien, vaisseaux devenaient rouges et gonflés remarqua que ces vaisseaux étaient par l'accumulation du sang dans leur gorgés de sang, mais se désenflaient intérieur, mais devenaient pâles et quand l'Animal inspirait de l'air, puis flasques pendant l'inspiration, et que se distendaient de nouveau pendant dans cet état ils étaient vides, car en l'expiration; enfin qu'en comprimant les ouvrant il n'en fit pas sortir de ces vaisseaux de façon à y arrêter le sang (6). cours du sang dans un point , on (2) D. Barry varia ces expériences n'empêche pas la portion du liquide de différentes manières, et les pratiqua (a) Morgagni, De sedibus et causis morborum, episl. xix. (b) Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p. G8, COURS DU SANG DANS LES VEINES. 313 11 est probable que l'influence accélératrice des mouvements inspiratoires se fait sentir d'une manière directe dans tontes les veines profondes qui viennent aboutir dans la cavité thoracique; mais les veines superficielles du cou et des membres s'affaissent trop facilement pour qu'une succion notable puisse s'exercer dans leur intérieur sans en amener l'aplatissement. Ainsi, lorsqu'on répète l'expérience dont je viens de parler en intro- duisant le tube manométrique dans la partie antérieure de la veine jugulaire, on n'y observe aucune ascension de liquide au moment de l'inspiration (1). Mais si l'action directe de cette sur des Chiens aussi jjien que sur des Ciievaux. Les résultats en furent tou- jours les mêmes, et établirent nette- ment l'intervention de la force appa- rente de la pompe représentée par la cavité thoracique dans le travail circu- latoire; mais ce physiologiste s'exa- géra singulii^rement l'importance de la succion développée de la sorte, et supposa que les effets directs s'en fai- saient sentir jusque dans les parties les plus éloignées de l'organisme : ce qui n'est pas (a). (1) ^L Arnolt a fait voir que dans un tube flexible rempli d'eau, la suc- cion produite par chaque coup de pis- ton d'une pompe aspirante ne déplace qu'une colonne de liquide très courte, parce queplus loin les parois du conduit s'affaissent sous la pression de l'atmos- phère. Macfadyen s'est appuyé aussi sur ce fait pour combattre la théo- rie de l'aspiration du sang veineux, et il a trouvé que dans la veine cave abdominale ce liquide reste en repos lorsqu'on le soustrait à l'action du vis à tergo, c'est-à-dire de la pres- sion qui tend à le pousser vers le cœur (6). 11 est aussi 5 noter que M. Ellerby, en répétant les expé- riences de Barry sur des Anes, a vu que l'ascension du liquide dans le manomètre n'était bien marquée que lorsque le tube rigide introduit dans la veine jugulaire externe arrivait très près du thorax (c), et M. Searle, ayant placé dans la veine jugulaire d'un Cheval un tube vertical dont l'extré- mité inférieure plongeait dans de l'eau, n'a vu le liquide s'y élever que dans le cas où l'Animal était couché et sa respiration très laborieuse (d). Enfiu les expériences de M. Poiseuille, sur lesquelles j'aurai à revenir bientôt, prouvent aussi que chez le Chien , à une assez petite dislance du thorax, (a) D. Barry, lîecherche.i expérimentales sur les causes du mouvement du sang dans les veines. In-8, Paris, dSSô. — Experim. Itesearclies on the influence exercised by Atmospheric Pressure xtpon the hwjrcssion of tlie ftlood in the Veins, etc., tS40. {b) Macfadyen, An Inquiry on Severnl noubtfut l'oints connected with the Circulation (Edinb. Med. and Surg. .lonrn., 1824, t. XXII, p. 275). (c) Kllcriiy, Exper. on the Venons Circulation and Absorption (Lancct, 182fi, l. XI, p. '^'iCt). (d) H. Searir;, A Critical Analysis of the Mem. read liy D' liarry on llie Atmospheric l'rcssure being the Principal Cause of the Progression of the lltood in the Veins, 1827, p. 41). 314 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. force aspiratrice ne s'étend que peu, les effets consécutifs qui en résultent doivent néanmoins favoriser le cours du sang veineux dans toute l'étendue du système vasculaire; car, par cela même que la portion de ces tubes la plus voisine du thorax a été vidée en totalité ou en partie, le courant qui arrive des portions adjacentes du système trouve moins de résistance à son mouvement vers le cœur, et ainsi, de proche en proche, l'effet utile peut se généraliser. Il est aussi à noter que les effets de l'action aspirante de la pompe respiratoire sur le cours du sang veineux sont favorisés par la disposition anatomique de quelques-unes des grosses veines à leur entrée dans la cavité thoracique. Ainsi les lames fibreuses qui entourent ces vaisseaux à la base du cou, et qui adhèrent à leurs parois, les maintiennent béantes, et les muscles voisins contribuent même à les dilater au moment des grandes inspirations. Un mécanisme analogue se remarque là où les veines hépatiques débouchent dans la veine cave inférieure, et dans le point où ce dernier vaisseau traverse le diaphragme. Enfin le retour du sang qui a été amené au foie par la veine porte et qui se dirige vers le cœur paraît devoir être beaucoup accéléré par la force aspirante développée dans cette région par les mou- vements du diaphragme (i) . dans la veine brachiale, près de Pais- (1) M. Bérard a appelé raltention selle par exemple, TefTet des mouve- des anatomistes sur les adhérences ments d'inspiration et d'expiration ne qui existent entre les parois des veines sont pas sensibles sur la pression à caves supérieures, jugulaires, sous- laquelle le sang veineux se trouve clavières et même axiliaires, avec les soumis (tt). Mais en ce qui touche les lames aponévrotiques circonvoisines, gros troncs veineux qui aboutissent à et sur l'influence que ces adhérences la cavité thoracique, les recherches doivent exercer sur la circulation de ce physiologiste sont pleinement quand le thorax se dilate. Il a fait confirmatives de la théorie donnée voir que ces veines ne deviennent pas par Barry (6). flasques et ne s'aflaissenl pas quand (a) Poiseuille, Recherches sur la cause des mouvements du sang dans les veines-, p. 10. (&) Poiseuille, Op. cit., p. 7. §9. COURS DU SANG DAINS LES VEINES. 315 L'étendue de la zone d'action de la puissance aspi- Étendue de la zone rante développée par la dilatation du thorax dépend , comme je de lactiou , j /^p 1 • 1 aspirante l'ai déjà dit , du degré de résistance qu ottrent les parois des de la pompe . .„ thoracique. veines, et, d'après certains accidents graves qui se manitestent parfois dans les opérations chirurgicales, lorsque ces vaisseaux elles cessent d'être distendues par le sang, ainsi que cela arrive pour les veines dont les parois ne sont pas maintenues en place par suite de leur union avec les parties résistantes cir- convoisines. Or, il résulte de cette disposition qu'au moment de la dila- tation du thorax, ces gros vaisseaux ne s'aflaissent pas sous le poids de Tal- mosphère, et permettent à la force aspirante, développée par les mouve- ments de cette cavité de produire son effet sur le sang qui se trouve à une certaine distance dans ces mêmes ca- naux. Il est aussi à remarquer que les aponévroses qui maintiennent ainsi béante la portion terminale des grosses veines du cou, étant à leur tour fixées aux os qui composent la partie adjacente des parois thoraciques, sa- voir, le sternum, les premières côtes et les clavicules, se trouvent tendues quand ces os sont soulevés dans l'in- spiration, et que cette tension doit augmenter celle des parois veineuses auxquelles elles adhèrent. Ainsi le mouvement qui détermine l'aspira- tion du sang dans les veines place en même temps ces vaisseaux dans les conditions les plus favorables pour l'utilisation de la force déployée (o). J'ajouterai que le muscle peaucier et les muscles scapulo-hyoïdiens, qui se contractent dans les grandes inspira- tions, contribuent aussi à tendre les aponévroses de la région cervicale inférieure, et à augmenter, par consé- quent , l'écartement des parois des troncs veineux en question (b). On sait aussi que les veines hépa- tiques adhèrent au tissu du l'oie, de façon à rester béantes quand on les coupe, et la veine cave inférieure, dans laquelle ces vaisseaux débou- chent, est entourée d'expansions fi- breuses qui la fixent au pourtour de l'orifice pratiqué dans le diaphragme pour y livrer passage. 11 y a donc dans cette région une consolidation des parois du conduit sanguin centri- pète analogue à ce qui se voit à la base du cœur; et si l'on examine'attentive- ment les changements que la contrac- tion du diaphragme doit déterminer dans la position de ces parties, on voit que les mouvemenls inspiratoires doi- vent tendre à augmenter le diamètre de ces conduits et à y favoriser l'action aspirante de la pompe thoracique. Ce mécanisme, indiqué par M. Bérard et (a) Bérard, Mém. sur un point d'anatomie et de physiolorjie du système veineux (Arch. ijéu. de méd., 1830, t. XXIII, p. dOO, et Cours de physiolo(jie, t. IV, p. 9). — Voyez aussi, à ce snjet : Hamernilc, Ueber einiije Verlialtnisse der Venen, der Vorliôfc vnd Kammern des llerzens und iiber den Einjluss der Krcifi, der LuiKjcn und der lU'sjiirallons Detverjiuid auf den Circulations apparat (Prager Vierteijahrscitrift fur die prakl. Ikilk., tSTiiî, t. XXXIX, p. 57:2). [b] Foliz, Note sur les fonctions des muscles peauciers. Paris, 1852. 316 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. sont divisés, il est évident que chez l'Homme les effets directs de cette force peuvent s'étendre très loin. Dans un assez grand nom- bre de cas, lorsqu'une grosse veine a été ouverte, l'air atinosphé- introduciion Hquc s'y cst tout à coup précipité avec un bruit comparable au dan/ies veines, sifflcmeut prodult par le passage du vent dans un orifice étroit, et, arrivé dans le cœur ce tluide a déterminé une mort presque subite en arrêtant la circulation du sang dans les capillaires des poumons. Cette entrée de l'air dans les veines s'effectue au mo- ment de l'inspiration, et elle est due à l'espèce de succion produite dans l'intérieur de ces vaisseaux par la dilatation de la cavité tho- racique dans laquelle ceux-ci pénètrent. Or des accidents de ce genre ont été observés non-seulement dans divers cas où les grosses veines de la base du cou avaient été ouvertes , mais aussi dans des opérations Cjui portaient sur des parties assez éloignées de la poitrine. Ainsi on en cite des exemples à la suite de plaies faites à la veine faciale, près de l'angle de la mâchoire, et à la veine axillaire. Il en faut conclure que chez l'Homme l'influence directe de la force aspiratoire du thorax sur le cours du sang veineux peut s'étendre à ces vaisseaux et même au delà, puisque dans ces points cette force a été assez grande pour attirer rapidement l'air du dehors dans l'intérieur des veines et faire arriver ce fluide jusque dans le cœur (1). Aciioii foulante § 10. — Du rcstc , pour apprécicr le degré d'utilité que la ."' ""''' force aspirante ainsi développée par le thorax peut avoir pour par Carson (a), a été exposé avec plus expiraloires forcés devient considé- de détail par M. Sliaw (6). rable (c). C'est surtout dans les cas d'insuffi- (1) Wepfer, médecin suisse du sance des valvules des veines jugu- xvii'' siècle, paraît avoir été le pre- laires que Tinfluence des mouvements mier à bien constater l'action funeste (a) Bérard, Cours de physiologie, t. IV, p. 64. — Carsori, Inqiiinj into the Causes of thc Molion ofthe Blood, 2» édition. — J. Carson, Circulation ofthe Liver (Lond. Med. Galette, 4 842, 2° série, t. Il, p. 800). (6) A. Sliaw, On Some PecuUarilies in the Circulation of the Liver (London Med. Galette, 1 842, 2° série, t. 11, p. 293). (c) 1-laniernik, Op. cit. {Vierteljahrschr. fur prakt. Heïlk., t. XXXIX, p. 32). COURS DU SANG DANS LES VEINES. 317 l'entretien du courant circulatoire , il faut tenir également compte de l'influence inverse exercée par les parois de cette même cavité à chaque mouvement d'expiration. Ainsi que nous de l'air introduit brusquement et eu quantité considérable dans les vais- seaux sanguins des Animaux {a). On sait qu'en soufflant avec la bouche dans la veine jugulaire d'un Bœuf, il tuait souvent celui-ci presque immé- diatement (b). On doit aussi à Redi (c), Antoine de IJeide (d), R. Camera- rius (e), Harder {f), Boliin {g), Spren- gel {h), Langres (?'), et à plusieurs autres physiologistes de la même épo- que, des expériences sur les effets de l'injection de l'air dans les veines. Les accidents qui se manifestent varient d'intensité et de caractère sui- vant les Animaux sur lesquels on opère et suivant la quantité de gaz injectée. Ainsi Redi et Caldesi ont sou- vent trouvé les vaisseaux sanguins occupés en grande partie par de l'air chez les Tortues, sans que ces Ani- maux aient paru en soutTrir (j) ; Haller a vu souvent des bulles d'air dans les vaisseaux mésentériques des Gre- nouilles qui avaient été ouvertes {k), et Lancisi cile des faits du même ordre observés chez des Hérissons (/). Enfin INysten a fait voir qu'on pouvait injecter dans les veines de beaucoup d'autres Mammifères une certaine quantité d'air sans produire d'acci- dents graves, tandis que l'introduc- tion subite d'un volume un peu consi- dérable de gaz produit la syncope et souvent une mort subite (m). L'entrée spontanée de l'air dans les veines dont les parois avaient été in- cisées, ou, pour parler plus exacte- ment, l'entrée de ce fluide dans ces vaisseaux par suite de l'aspiration que les mouvements de dilatation du tho- rax y exercent, paraît avoir été ob- servée pour la première fois par Méry. Ayant ouvert l'abdomen d'un Chien et piqué la veine cave infé- rieure, ce physiologiste vit ce vais- seau se remplir peu à peu d'air, et ce gaz arriver jusque dans le ventricule droit du cœur (n). On trouve aussi dans les annales de la chirurgie plu- sieurs exemples assez anciens de mort subite survenue chez l'Homme pen- (3) Voyez Brunner, De expevimentis cii'ca veiuc sectionis utilUalein (Ephemeridmn Acad. nat. curios., 1040, déc. 3, ann. iv, p. 158). (b) Voyez Vcrdrios, Dissert, epist. de inflatione urelerum. Giessîe, 1704. (c) lîedi, Lettre à Sténon {Collection académique, part, étrang;., t. IV, p. 580). ((/) Antoine lie Heide, Centuria observationwn medicarum, 1085, olis. 00. (e) U. .]. Camei-arius, Tensio cordis lipotliymice caxisa {Ephemer. natiiroi curios., 1080, déc. 3, ann. v, obs. 53, p. 95). (/■) Harder, Apiarium observalionibus medicis cenliim, 1087. {g) Boliin, Circulus anatomico-physiologicus, 1097, progymnasma iv, Ue principio vitœ, p. 09. (h) Sprengcl, Expérimenta circa varia venena. Gottingen, 1759. (i) Langres, l'hysical Experiments on Brûles, 1740, p. 151, 1 54. (i) Redi, Lettre à Sténon (Collecl. aco(i., part, étrang., t. IV, p. 580). — Caldesi, Os.serv. anat. interna aile Tartarwjhe. Florence, 1087, [i. 04. (fc) Haller, Mém. sur le mouvement du sang, p- 27. (f) l.ancisi, De molu cordis, lil). I, scct. i, cap. 2, propos. 2, digi'. 1 . [m) Nj'iitcn, HecUerchcs de physiologie et de chimie pathologiques, 1811, p. 2 et siiiv. (;t) Méry, Question physique (Mém. de l'Acad. des sciences, 1707, p. 107). 318 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. l'avons déjà vu, l'air comprimé par l'action foulante de la pompe respiratoire doit nécessairement transmettre une portion de la pression qu'elle supporte aux réservoirs sanguins qui sont logés dant des opérations , qui aujourd'hui s'expliquent par les effets connus de l'aspiration veineuse ; mais le premier cas dans lequel la cause de ces acci- dents fut constatée par l'autopsie est celui observé par Magendie en 1818, sur un malade de l'IIôtel-Dieu de Paris, qui en quelques minutes périt entre les mains de ce physiologiste, à la suite de l'ouverture de la veine ju- gulaire externe à la base du cou (a). Depuis lors, un assez grand nombre d'accidents du même genre ont été observés, soit chez l'Homme, soit chez le Cheval, et l'histoire de la plupart de ces cas a été réunie dans un ou- vrage spécial par Amussat (b). Les accidents plus ou moins graves qui accompagnent l'entrée subite d'une certaine quantité d'air dans les veines de l'Homme ou des autres Mammi- fères ont été attribués à diverses causes. Bichat crut pouvoir expliquer ces phénomènes en supposant que l'air, arrivé dans les petits vaisseaux sanguins du cerveau , détermine la mort en irritant cet organe (c). Nysten pensa que la syncope et les autres accidents en question résul- taient de l'interruption des mouve- ments du cœur par suite de la disten- sion excessive des cavi tés droites de cet organe , occasionnée par la présence de l'air, et cette hypothèse a été adop- tée par beaucoup d'auteurs {d). D'au- tres physiologistes ont supposé que l'air parvenu dans les capillaires des poumons s'y dilatait au point de rompre ces vaisseaux et de se ré- pandre dans le tissu conjonclif cir- convoisin (e). Mais les autopsies ne confirment pas ces vues, et les expé- riences faites plus récemment sur ce sujet par M. Poiseuille tendent à prouver que dans les cas de ce genre l'arrêt de la circulation est le résultat, non de la cessation des battements du cœur, mais de l'état spumeux du sang qui, mêlé ainsi avec des bulles de gaz, ne peut plus traverser les vaisseaux capillaires des poumons. Ef- fectivement, ce physiologiste a trouvé que la pression développée par le cœur est insuffisante pour faire passer les petites bulles d'air dans ces canaux étroits (/). Cette explication, qui avait («) Magendie, Sur l'entrée accidentelle de l'air dans les veines, et sur la mort subite qui en est Veffet (Journ. de physioL, 1821, t. I, p. 190). (6) Amussat, Recherches sur l'introduction de l'air dans les veines, In-8, 1839. — Voyez aussi Putégnat, Essai sur l'inti'oduction de l'air dans Us veines pendant les opéra- tions chirurgicales. Thèse, Paris, 1834. (c) Bichat, Recherches physiologiques sur la vie et la mort, 2" partie, art, 2, § 11 (édit. de 1818, t. I, p. 126 et suiv.). (d) Nysten, Op. cit., p. 31 et suiv. (c) Leroy d'Eiiolles, Note silr l'introduction de l'air dans les veines {Archives générales de médecine, 1823, t. III, p. 410). — Piedagnel, Recherches anatomiques et physiologiques sur l'empyènie des poumons {Journal de physiologie de Magendie, 1829, t. IX, p, 79). {f) PoiseuillCj Lettre sur les causes de la mort par suite de l'introduction de l'air dans les veines {Galette médicale, 1837, p. ôll). COURS DU SANG DANS LES VEINES. 319 dans son intérieur, et doit tendre à expulser le licjuide contenu dans les grosses veines qui aboutissent au cœur. De mênie que cette pression accélère le cours efférent du sang dans les artères, elle doit ralentir l'afflux du sang dans les veines ou occa- sionner même dans ce liquide un mouvement rétrograde. Si l'expulsion de l'air était déterminée seulement par la constric- tion des parois du thorax, la pression exercée de la sorte sur les veines de l'intérieur de la poitrine pendant l'expiration serait en général beaucoup plus considérable que la force aspiratoire développée pendant l'inspiration , et par conséquent le résultat total serait défavorable au cours du sang dans le système irri- gatoire. En effet, nous avons vu que la pression sous laquelle été donnée précédernment par M. Mer- publications auxquelles je renverrai cier (a), s'accorde aussi très bien avec pour plus de détails à ce sujet [d). les résultats obtenus par M. Valken- Dans quelques cas, on a constaté hoff (6) et par M. Erichsen (c). l'introduction de l'air dans les veines L'appréciation de la gravité des de l'utérus, à la suite de l'accouche- accidents causés par l'inlroduction de ment (e) ; mais cet accident ne paraît l'air dans les veines, et l'explication pas avoir été occasionné par l'aspira- de ces phénomènes, ont donné lieu, tion tboracique, et dépendait proba- il y a quelques années, à de longues blement d'une sorte d'injection de ce discussions dans le sein de l'Académie fluide dans les vaisseaux béants, résul- de médecine de Paris et à diverses tant des contractions de cet organe (/"). (a) Mercier, Observations siir l'introduction de l'air dans les veines et sur la manière dont elle produit la mort {Gazette médicale, 1837, p. 481). {b) ValkenhofF, De acris in venas ingressu ejusque effectis lethalibus, 1840. (c) Erichsen, On the Proximate Cause of Death after Spontaneous Introduction of Air into Ihe Veins lEdinb. Med. and Surg. Journ., 1844, t. LXI, p. 1). (d) Bouillaud, Rapport sur les expériences relatives à l'introduction de l'air dans les veines, faites par M. Amiissat {Bulletin de l'Académie de médecine, 1837, t. II, p. 182j. — Gerdy, De l'introduction de l'air dans les veines {Bull, de l'Acad. de méd., t. II, p. 280). — Velpeau, Lettre sur l'introduction de l'air dans les veines {Gazette médicale, 1838, p. H 3). — Bartliélcmy, Introduction de l'air dans les veines {Gazette médicale, 1838, p. Cl). — .Marchai (ilc Caivi), is'ote sur l'Introduction dite spontanée de l'air dans les veines. Expli- cation nouvelle de la mort par suite de cet accident {Ann. de chirurgie, 1842, t. VI, p. 290). (e) Lc?allois, Des maladies occasionnées par la résorption du 2ms {Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. III, p. 183). — Lionel, Sur un cas de mort prompte après un accouchement naturel {Journal de clùrurgie, 1845, l. 111, p. 234). — Cormack, The Kntrance of Air by the npcn Mouths of thc Utérine Veins considered as a Cauve of Danger and Death after l'arturition {Montltly Journ. of Med. Sciences, 1850) 3° série, l. X, p. 483;. (/■) Borard, Cours de physiologie, t. IV, p. 97. 320 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. l'air s'échappe des voies respiratoires est supérieure à celle que l'atmosphère exerce sur ce même fluide dans rintérieur de la trachée au moment de l'inspiration (I). Mais dans la respira- lion calme et ordinaire , la pression expiratrice est développée principalement par le resserrement des poumons sur eux- mêmes, et cette action des poumons, loin de produire une com- pression des vaisseaux en question, doit tendre à les dilater de la môme manière qu'elle attire le diaphragme en dedans. Une portion de la pression développée par la constriction des parois du thorax doit donc être contre-balancée par la traction exercée par les poumons, et l'on comprend que la résultante de ces deux forces contraires puisse devenir de la sorte plus petite que celle développée parles mouvements d'aspiration. Or, l'expé- rience nous montre qu'effectivement les choses se passent de la sorte. M. Poiseuille a mesuré la longueur d'une colonne de liquide qui se trouve alternativement soulevée ou déprimée dans la grande branche ascendante d'un tube en U dont la petite branche était engagée dans l'une des grosses veines intrathoraciques, et il a trouvé que dans les conditions ordinaires de la respiration les effets produits par la succion inspiratoire étaient plus grands que ceux dus à la pression développée pendant l'expirahon (2). (1) Voyez tome II, page /i5/i. repos ; niveau que l'on prend pour (2) Le manomètre employé clans ce Je zéro de réchelle de l'instrument, cas par M. Poiseuille consiste en un Mais quand, par suite de la dilatation siphon renversé, ou tube en U, dont du thorax, le sang veineux est attiré la petite branche est coudée et fixée vers le cœur, la dissolution saline doit dans la veine , tandis que l'autre suivre ce mouvement, et la colonne branche , qui s'élève verticalement, située dans la grande branche du ma- est ouverte au bout. La petite bran- nomètre s'abaisse proportionnelle- che est remplie d'une dissolution de ment à la force déployée; le niveau carbonate de soude (sel qui empêche dans cette branche descend donc le sang de s'y coaguler) , et le liquide au-dessous du niveau, tandis que si s'élève au même niveau , dans la le sang veineux est refoulé au dehors grande branche , quand tout est en par le mouvement opposé du thorax, COUlîS DU SANG DANS LES VEINES. 321 Par conséquent, en somme, l'action de l'espèce de pompe alter- nativement aspirante et t'oiilante représentée par la cavité tho- racique est favorable au cours du sang veineux des parties périphériques vers le cœur. 11 est aussi à noter que la présence des valvules n'oppose aucun obstacle à l'extension des effets d'aspiration produits dans les veines par la dilatation du thorax, tandis que le jeu de ces soupapes arrête presque immédiatement le reflux occasionné parle mouvement expiraloire. Ainsi lorsque, dans des expé- riences analogues à celles dont je viens de parler, M. Poiseuille ajustait l'extrémité de son manomètre dans la veine jugulaire de façon à rester en deçà des valvules qui se trouvent à l'embou- chure de cette veine, les effets dus à l'action aspirante de la pompe thoracique restèrent à peu près les mêmes que dans le cas où il dépassait ces valvules ; mais le reflux déterminé par c'est-à-diie par l'expiralion, le niveau s'élèvera, d'une manière correspon- dante à celte pression, plus ou moins liaut au-dessus dn même zéro. Dans une première expérience, faite sur un Chien de moyenne taille, l'in- slrnment fut assujetti convenable- ment dans la veine jugulaire externe g;auclie , de façon à y déboucher tout près du thorax. Le liquide oscilla tout de suite dans l'instrument , et le dé- placement alternatif du niveau autour du zéro, pendant les mouvements res- piratoires, donnèrent les résultats sui- vants : l'in.l.-iiit rjli>,.ilati..il, Pnid.ii.l IVvpii .iliiiii. — 00 rnjlliiii('lrfs. -|- 85 luilliiiiùlrcs. — 711 4- ^'0 Kl aiii>-i de siiile. l'ui^, soui PiMlliienre d'ciroi'ls rfs- piratoires un peu plus considérables : IViKhint riiispiliitinn. Pindiint l'f vpiration. — 150 millimètres. -)- 120 millimètres. Enfin, sous l'influence de mouve- ments nispiraloires plus étendus, la dépression correspondante aux aspira- tions a atteint 250 millimètres au-des- sous du zéro, et l'élévation du liquide pendant les expirations a été jusqu'à 155 millimètres au-dessus du zéro. Des phénomènes analogues furent observés lorsqu'on expérimenta sur la veine sous-clavière et sur la veine cave inférieure, à leur entrée dans la poitrine. Ainsi la dliférencc en faveur de l'in- fluence aspirante sur le cours du sang veineux a été , en moyenne, égale au poids d'une colonne de dissolution saline d'environ 1 centimètre de haut à chaque inspiralion (a). in) l'ois(Miilli', liei herihes ,svr les cavscif du ■mouvement du samj dtnis les veines, \>. (! (cxtr, lin .Uiwnal hebdomadaire de mMecine, 18; 0, l. 1). IV. 21 O-Î'â MÉCANISME DE LA CIRCULATION. les mouvements d'expiration correspondants se trouvait réduit prescjue à rien (]). Lorsque les mouvements respiratoires, au lieu de s'effectuer comme d'ordinaire d'une manière calme et lente , deviennent violents et difficiles , les effets produits sur la circulation sont beaucoup plus considérables. Ainsi, dans les cas où quelque obstacle s'oppose à l'entrée libre de l'air dans les poumons au moment où le thorax se dilate , l'appel du sang veineux dans l'intérieur de cette cavité sera plus fort que de coutume et pourra doubler d'intensité ou s'accroître davantage encore ; et lorsque la glotte se resserre pendant cpe les parois thoraciques se contractent énergiquement, ce sera au contraire le reflux du sang dans les veines qui s'en trouvera augmenté (2). La pre- (1) Dans cette expérience faite sur un Cliien, la hauteur de la co- lonne du liquide attiré vers le cœur par les mouvements d'inspiration a varié entre 70 et 90 millimètres , tandis que celle de la colonne sou- levée pendant les mouvements d'expi- ration a varié entre 15 et 3 milli- mètres , et a été , terme moyen , d'environ 7 millimètres. En faisant avancer l'extrémité de l'instrument dans la veine jugulaire, de façon à franchir les valvules, les oscillations sont restées à 75 miUimètres environ pour les inspirations, et se sont éle- vées, terme moyen, à 55 millimètres dans les moments d'expiration (a). (2) M. Poiseuille a produit artifi- ciellement ces phénomènes chez un des Animaux sur lesquels il mesurait l'influence des mouvements respira- toires sur le cours du sang veineux, à l'aide de l'mstrument décrit ci-dessus. Pour cela, il plaça dans la trachée ar- tère un tube métallique muni d'un robinet. Lorsque celui-ci restait ou- vert, les excursions du liquide dans le manomètre étaient alternativement d'environ 70 millimètres au-dessousdu zéro de l'échelle pendant les inspira- tions, et de 80 ou 90 au-dessus pen- dant les expirations ; mais ayant fermé le robinet immédiatement après une expiration , l'aspiration déterminée par les efforts impuissants de l'Ani- mal pour attirer de l'air dans ses pou- mons occasionnait des mouvements correspondants dans la colonne li- quide, qui furent successivement de 60, 80, 100, 120, 1/tO, 150, 160 milli- mètres. Ainsi à mesure que, stimulé par le besoin d'air, l'Animal faisait plus d'efforts pour dilater sa poitrine, la force aspirante à laquelle le sang vei- neux se trouvait soumis a fait équi- libre au poids d'une colonne d'eau de plus en plus longue (6). Ces résultats bien constatés, M. Poi- (a) Poiseuille, Recherches sur les causes du mouvement du sang dans les veines, p. 8. (b) Poiseuille, Op. cit., p. 7. COURS DU SANG DANS LES VEINES. 323 mière de ces modifications dans le jeu de la pompe respiratoire ne s'observe que rarement, si ce n'est dans certains états patho- logiques ; mais la seconde est très fréquente et se manifeste chaque fois que nous faisons quelque effort musculaire. Dans le chant et la parole soutenue, la pression expiratoire est tou- jours augmentée de la sorte ; quand on pousse des cris , elle grandit davantage, et lorsqu'on fait un effort violent pour sou- tenir un fardeau ou pour vaincre toute autre résistance , elle s'accroît encore plus (1). Or, ces actions déterminent en même temps une augmentation de la force qui pousse le sang artériel dans les capillaires et de là dans les veines ; ces derniers vaisseaux se gonflent donc par les effets de deux causes agis- sant en sens contraire : par l'afflux plus abondant de liquide dans leur intérieur et par l'obstacle opposé à l'écoulement de celui-ci vers le cceur, ou même par son reflux du cœur vers la périphérie , phénomène qui devient d'autant plus facile que la distension des parois vasculaires a été portée plus loin; car dans ce cas le jeu des valvules peut devenir insuffisant pour empê- cher le courant de s'établir en sens inverse de sa direction nor- male (2). seuille a changé une des conditions de (1) Ce gonflement des veines sous rexpcrience, de manière à annuler les Finfluence de la pression développée effets de la dilatation des parois Iho- par les contractions violentes du tlio- raciques et à augmenter les efforts rax est facile à observer à la base du d'expiration. Pour cela, Il laissa ren- cou et même à la lête, surtout chez irer l'air dans les poumons, et ferma les personnes maigres, le robinet adapté à la trachée dans le Un des membres de l'ancienne Aca- moment où l'animal venait de faire demie des sciences de Paris, Berlin, a une grande inspiration. Alors le li- étudié avec beaucoup d'attention ces quide du manomètre ne descendit plus phénomènes (a) . au-dessous de zéro et s'éleva succès- (2) Cette insuffisance des valvules sivement à /lO, 50, 70, 95, 105, 115, pour empêcher le reflux du sang dans l'iO Miilliiiiètres, les veines, quand la distension de ces (a) lîcrtiii, Mémoire sur la principccle cause du fjon/lemcnl el du ddgonllemcnl allernalif dus veines jugulaires, etc., différent de celui qui est produit par la contracHon de l'oreiltelle droite du coiur [Mém. de L'Acad. des sciences, 1758, i>. 200). o2/|. MÉCANISME DE !,A CIHClJLATÎON, La force aspirante développée par la dilatation dn thorax ne se fait que peu sentir sur le sang contenu dans les grosses veines de l'abdomen, à cause de la flaccidité des parois de ces vaisseaux; mais l'abaissement du diaphragme, qui concourt à attirer l'air dans les poumons, contribue aussi àenvoyer ce liquide vers le cœur. En effet , chaque fois que le diaphragme se con- tracte dans l'inspiration , ce muscle comprime les viscères placés au-dessous dans la cavité abdominale, et ceux-ci pressent à leur tour sur la veine cave inférieure et sur ses affluents : or, cette pression ne peut pas déterminer un reflux du sang vers les extrémités à cause de la présence des valvules veineuses, et par conséquent elle doit tendre à pousser ce Hquide de l'abdo- men dans le thorax. Si la respiration est calme, les muscles des parois abdominales n'interviendront pas dans les mouvements d'expiration, et la pression exercée alors sur les viscères, venant à diminuer l'afflux du sang des membres inférieurs dans la veine cave en partie vidée, sera de nouveau plus facile, et de la sorte ces mouveuients rhythmiques viendront en aide à la circulation de la même manière (jue nous avons vu les contractions muscu- vaisseaux est devenue considérable attribué qu'à un reflux du sang vei- sous l'influence de mouvements expi- neux, s'effectuant malgré le jeu des ratoires violents, se démontre à l'aide valvules situées entre l'embouchurede de quelques-unes des expériences de la jugulaire et le point où était placé M. Poiseuille. Ayant ajusté son mano- l'ajutage de l'instrument {a). D'autres mètre dans la veine jugulaire, vers le expériences analogues montrent que, haut du cou, ce physiologiste remar- même dans les circonstances ordi- qua que le liquide n'oscilla pas tant naires, les valvules les plus rappro- que la respiration de l'Animal était chées du cœur ne suffisent pas pour calme ; mais des eflorts violents d'in- s'opposer efficacement à tout reflux spiralion et d'expiration ayant eu lieu, du sang dans les jugulaires, mais que le liquide descendit d'abord à 5 milli- leur action est complétée par le jeu mètres, puis remonta à 2 millimètres. des valvules suivantes. Or ce dernier résultat ne pouvait être {a) Poispuillo, Recherches sur les causes des mouvements du sang dans les veines, p. 9 (exir. du Journal licbdomadaire de médecine, 1830, t, I). COUnS DU SANG DANS LES VEINKS. o25 laires de nos membres accélérer le cours du sang dans les veines adjacentes. Mais si l'expiration devient laborieuse et violente , les parois de l'abdomen se contracteront pour aider à l'abaissement des côtes, et alors la pression exercée sur les veines contenues dans cette cavité deviendra permanente, et, au lieu de favoriser le mouvement du sang , sera un obstacle au passage de ce liquide des membres inférieurs vers le cœur (1), Ainsi nous voyons que pour bien apprécier l'influence des diverses forces qui interviennent dans le travail de la circulation,, il faut examiner attentivement les conditions dans lesquelles chacune d'elles peut s'exercer, car les effets produits par une même cause peuvent être inverses, suivant qu'elle agit dans telle ou telle circonstance. Ces actions alternatives et contraires du thorax sur le mouve- p°"'s veineux. ment du sang dans les grosses veines qui y pénètrent à la base du cou nous expliquent les pulsations qui s'observent souvent dans cette région, et que l'on désigne d'ordinaire sous le nom de pouls veineux. La cause de ces battements est com})lexe. En effet, ils dépendent, d'une part d'un reflux du sang dans les gros troncs veineux chaque fois que l'oreillette droite se contracte, d'autre part de l'accumulation subite et du reflux de ce liquide qui est déterminé par les mouvements expiratoires (2). (1) Dans diverses expériences failes liinèUes. En empêchant la sorlie de par M. l'olseuille sur les veines ilia- l'air des poumons cl en provoquant ques du Chien, la pression exercée ainsi des mouvements expiratoires par les viscères de l'abdomen sur le d'une intensité extrême, M. Poiscuille sanj; contenu dans ces vaisseaux était a vu le liquide du manomètre en cum- égalc au poids d'une colonne d'eau de munication avec la veine iliaque s'élc- 50 ou 60 millimètres pendant l'inspi- ver à 575 millimètres (a). Les expé- ralion, et à environ 75 millimètres ricnces de ce physiologiste montrent dans l'expiration ; mais, dans les ef- aussi qu'il n'y a jamais aspiration dans forts violents, elle s'élevait, dans l'ex- les veines des membres inférieurs, piralioii, à l/iO, IGO et même 210 mil- ^2) Le relUix du sang de l'oreilletle in) [Viisoiiille, Viedierches sxiv les causes des mouvements du mnn dans les veines, p. H. 326 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. La coïncidence des effets contraires produits sur le cours du sang dans les veines et dans les artères par les mouvements expiratoires énergiques nous explique la grande accumulation de ce liquide dans les vaisseaux de la tête et d'autres parties du corps, qui se remarque souvent lorsque des mouvements de ce genre se prolongent beaucoup, comme dans le chant (et plus par- ticulièrement dans la production des sons aigus qui nécessitent une grande contraction de la glotte) ou dans le rire immodéré. On voit alors la face rougir, les yeux s'injecter, se gonfler, et par- fois même des hémorrhagies se déclarer par suite de la rupture de quelques petits vaisseaux sous la pression du sang contre leurs parois ; aussi les médecins rangent-ils ces mouvements vio- lents du thorax au nombre des causes qui peuvent déterminer même l'apoplexie, maladie qui consiste d'ordinaire en un épan- chement de sang dans la substance du cerveau (1). droite dans les veines caves, lors de la en résulte dans ces vaisseaux des bat- systole auriculaire, est en général très tements irréguliers , quant à leur faible ; mais lorsque ce réservoir est rhythnie et à leur intensité, atteint d'une dilatation morbide qui Nous aurons bientôt l'occasion de amène l'agrandissement de l'embou- voir que des phénomènes analogues chure des troncs veineux, ou que la se produisent dans l'intérieur du crâne valvule tricuspide devient inapte à sous l'influence des mouvements res- fermer complètement l'orifice auri- piratoires , et M. Donders a constaté culo-ventriculaire, une portion consi- l'existence de pulsations de même dérable du sang pressé par la contrac- nature dans les veines de l'intérieur tiondu cœur s'échappe par cette voie, du globe de l'œil (a). et en rentrant dans les veines, y déter- (l) Swammerdam cite l'exemple mine des pulsations synchroniques d'un jeune homme qui, en retenant avec les battements des artères ou les avec force son haleine, faisait couler précédant un peu. Le sang peut ren- à volonté le sang par une plaie qu'il trer aussi dans les veines de la base avait au pied (6). Boerhaave dit avoir du cou, lorsque le thorax se contracte ; vu une personne qui, dans un rire et comme ces deux sortes de mouve- immodéré, était près de mourir d'apo- menls ne coïncident pas toujours, il plexie (c) ; et Van Swieten parle d'une (a) Donders, Physiologie des Menschen, t. I, p. iid. (6) Swammerdam, Tractatus de respivatione, p. 9 (1G79). (c) Boerhaave, Comment., t. V, p. 23S. COURS DU SANG DANS LES VEiNES- 327 § 11. — En étudiant anatomiquement l'appareil circulatoire, vitesse 11 , . , , . du courant nous avons vu que dans chaque région du corps les veines sont sanguin , , 1 . . -, , dans les veines non-seulement plus grosses, mais aussi plus nombreuses que les artères. ïl en résulte que la somme des sections des vaisseaux centripètes est beaucoup plus grande que celle des aires des vaisseaux centrifuges, et que par conséquent le courant sanguin doit être aussi beaucoup moins rapide dans les premiers que nous ne l'avons trouvé dans les derniers; car nous savons, d'après les principes d'hydraulique déjà exposés, que le volume de liquide qui passe dans un temps donné par une section quel- conque de ce système de tubes doit être partout le même. L'expé- rience est d'accord avec le raisonnement : en elïet , on a con- staté que le mouvement du sang est plus lent dans les veines que dans les artères (1); mais dans les veines, de même que dans les artères, il existe à cet égard des différences assez grandes suivant les portions du système irrigatoire que le courant traverse, et l'on peut établir en règle générale, que le cantatrice qui, en poussant des sons domen qui pousse le sang des vais- aigus et prolongés, éprouvait des ver- seaux des viscères dans la veine cave ligesjusqu'à tomber, si elle ne cessait inférieure, et fait ensuite refluer ce immédiatement son chant (a). liquide dans la veine cave supérieure ; Berlin, qui a écrit très longuement ce qui arrête le coiu-s dn sang dans snr rinfluence que les mouvements lesjiigiilaires, et par conséquent aussi respiratoires exercent sur la circula- détermine l'accumulation de ce li- tion, fait remarquer que c'est par le quide daus les sinus encéphaliques. même mécanisme que la toux aug- (1) Ainsi, dans les'reclierches de mente souvent d'une manière vio- M. Volkmann, la moyenne de trois lente lacéphalalgie (6). 11 a beaucoup expériences a donné, pour la vitesse insisté aussi sur l'iniluence exercée du sang, 329 millimètres dans l'artère sur la circulation veineuse par la con- carotide, et 225 millimètres dans lii traction violente des muscles de l'ab- veine jugulaire du Chien (c). (a) Van Swiotcn Commentarla in II. BocrUaave aphorismos de cognoscendis et curandis mor- bis, l. III, p. 270. ((/) Bertin, Mémoire sur la principale cause du gonflement cl du, dnjoiillemenl aller natif des veines jtitjulaires, etc. (Méni. de l'Acad. des sciences, 1758, ji. 293). — Voyez aii.ssi, à ce sujci : lioiirdou, Hccherches sur le mécanisme de la respiration et sur la circulation du sang. Iri-8. 1820, p. 5U et suiy. (c) Vulkiiiaiin, Die lldmodijnamik, p. lOT). Bruits veineux anormaux. Pression du sang; dans les veines 328 MÉCANISME DE LA CIRCULATION, inoLiveinenl du sang s'accélère à uiesure qu'il se rapproche du cœur. Du reste, ce mouvement est toujours à peu près uniforme, et, dans les circonstances ordinaires, il ne donne pas lieu à la production de vibrations sonores, mais dans divers états patho- logiques il est accompagné d'un bruit de souffle analogue à ceux qui s'observent dans les artères (1). § 12. — La disposition de la portion centripète de l'appareil circulatoire a aussi pour effet de rendre très faible la pression sous laquelle le sang se ment dans son intérieur. Nous avons vu précédemment que la poussée latérale exercée par ce liquide sur les parois des artères est déterminée principalement par la résistance que les capillaires opposent à son passage. Or, cet obstacle se trouve en amont des veines, et il n'existe rien de semblable à l'extrémité opposée de ces vaisseaux ; l'écoulement du sang de ces canaux dans le réservoir cardiaque est même (1) Les veines peuveiil être le siège de bruits anormaux, non-seulement quand une communication patliolo- gique s'établit entre leur cavité et l'ar- tère voisine, accident qui donne lieu à l'alTection connue sous le nom de varice anévrijsmale (a) , mais aussi dans plusieurs autres circonstances. Ainsi il n'est pas rare de voir des personnes chez lesquelles les mouve- ments d'expiration violents sont ac- compagnés d'un reflux du sang vei- neux, qui fait sentir ses elïets jusque dans la veine crurale, ainsi que dans la jugulaire interne , et qui détermine dans ces vaisseaux un frémissement cataire plus ou moins bruyant (6). Les pathologistes ne sont pas d'accord sur le siège du murmure continu qui se fait souvent entendre dans les gros vaisseaux du cou chez les i;:dividus d'une constitution lymphatique et fai- ble ; les uns le considèrent conime dépendant du passage du sang dans les carotides (c), mais la plupart Tat- tribuent aux veines jugulaires {d). (a) Thurnaui, Mémoire sur les anévrijsmes variqueux (Archives générales de médecine, 1841, 2« série, t. XI, p. -225). (&) Beau, Traité de l'auscultation, p. 417. (c) Hardy et Béhier, Traité de pathologie interne, t. I, p. 445 et suiv. \ — Beau, Op. cit., p. 418 et suiv. (d) Ward, On the « bruit de diable » (London Med. Galette, 1837, t. XX, p. 7). — Hope, .4 Treaiise on the Diseases of the Ileart and the Great Arteries, 1839, p. ilB. — Arrau, Recherches sur le murmure continu vasculaire [Arch. gén. de méd., 1843, 4" série, t. II, p. 491). — Silvestre, On Venons Bruit {London Med. Gazette, 1846, 2° série, t. III, p. 894). ^^ Bartli et Roger, Traité pratique d'atiscultation, p. 516. COLKS DU SANG i>.\NS LES VKINES. 3'29 sollicité plutôt qu'entravé , et par conséquent la pression laté- rale développée par la charge sous l'influence de laquelle ce liquide sort des capillaires doit diminuer progressivemeiit des racines vers l'embouchure de ce système de conduits, de la même manière que la poussée de l'eau diminue dans un tube inerte depuis sa sortie du réservoir jusqu'à son ouverture terminale (1). Effectivement, c'est de la sorte que les choses se passent dans l'organisme; mais, d'après ce que j'ai déjà dit au sujet de l'inlluence des mouvements alternatifs de dila- tation et de contraction de la cavité thoracique sur le cours du sang veineux , nous pouvons prévoir que cette diminution dans la pression supportée par ce liquide doit varier à chaque instant quant à sa valeur. Les mouvements de systole et de diastole de l'oreillette droite doivent modifier aussi cette pres- sion, puisqu'ils développent tour à tour des résistances positives ou négatives à l'écoulement du sang des veines dans les cavités du cœur. Enfin la poussée latérale du sang noir est modifiée aussi par le degré de réplétion des veines, par la largeur des voies que celles-ci fournissent pour son passage et par la pres- sion que les parties voisines exercent sur ces vaisseaux. Comme preuve de ce que je viens d'avancer relativement à la diminution progressive delà pression supportée par le sang veineux, depuis les capillaires jusqu'au cœur, je citerai quelques- uns des résultats numériques obtenus dans les expériences de M. Volkmann. En plaçant des manomètres en communication avec l'artère carotide, la veine métatarsienne et la veine jugulaire d'un Veau , ce physiologiste vit le mercure se soutenir à la hauteur moyenne de 165™'", 55 dans le premier de ces instruments; à 27""", 5 dans le second, et à 9 millimètres seulement dans le troisième (2). (1) Voyez ci- dessus, page 227 et ('_>) iVI. Moyk avait fait précède m - suivantes. meiil plusieurs expériences compara- OOU MECANISME DE LA CIRCULATION. Influence LorsQue BOUS avofis cherché à nous rendre compte des mouvements causcs oui déterminent l'entrée da sang dans l'oreillette droite du cœur sur la pression du CŒur, nous avoHs vu que, en général, soit par l'effet de veineuse. , , . , l'élasticité propre des parois du ventricule correspondant, soit par suite de la traction exercée sur cet organe par les poumons adjacents, le liquide contenu dans la portion termi- nale du système veineux se trouve légèrement attiré vers l'in- térieur des réservoirs cardiaques pendant la durée de chaque diastole (1) : la pression exercée alors par h sang sur les parois des grosses veines qui avoisinent le cœur doit être nulle ou même négative ; pendant la systole , au contraire , le sang, tout en continuant d'affluer dans ces mêmes vaisseaux, ne peut plus s'en écouler, et par conséquent il doit y avoir nécessairement des variations dans la pression à laquelle ce liquide s'y trouve soumis , suivant que le cœur est dans l'état ' de contraction ou de relâchement. Mais l'expérience prouve que les oscillations produites ainsi sont très petites, et nous pouvons les négliger dans l'étude de la plupart des questions dont l'examen nous occupe en ce moment (2).- tives sur la pression développée par du cou était Uk millimètres, et celle le sang dans les veines jugulaire, bra- donnée par la jugidaire SI'"'", 5. Chez chiale et crurale; les hauteurs mano- lii Chèvre, il trouva une pression de métriques ont varié beaucoup, mais une pour la veine faciale, et de 18 pour presque toujours le maximum de près- la veine jugulaire (6). M. Ludvvig a sien dans la veine jugulaire n'était confirmé ces résultats par des expé- pas plus considérable que le minimum riences faites sur des Chevaux , des dans les veines des membres (a). Veaux, des Chèvres et des Chiens (cj. M. Volkraann a obtenu des résultats (1) Voyez ci-dessus page 6 et suiv. analogues en comparant entre eux les (2) Dans les expériences faites sur la rameaux et le tronc du système jugu- force aspirante du cœur par M. Wey- laire. Ainsi, chez un Cheval, la près- rich (de Dorpal), les variations de sion donnée par une des petites veines pression déterminées ainsi dans la (a) Mogli, Ueber die Stromkraft des Venbsen Blutes in dem Ilohladersysteme (Zeitschrift fur rationnelle Medizin, 1845, t. III, p. 51 et suiv.). {h) yo\kmma, Die Hâmodynamili, p. 173. (c) Ludwig, Lehrbuch der Physiologie des Menschen, t. Il, p. 126. COURS DU SANG DANS LES VEINES. 331 Quant à l'influence des mouvements thoraciques sur la influence pression du sang dans les veines, les faits que j'ai déjà exposés mouvements n T /«\ • • r> é-0 ■ ? respiratoires dans cette Leçon (1) sont assez signiticatits pour que je ne m y sur la pression arrête pas de nouveau ; et, au sujet des effets produits par la contraction des muscles des membres ou d'autres parties du corps, j'ajouterai seulement que l'accélération du cours du sang veineux que nous avons vue résulter de ces mouvements doit nécessairement déterminer, là où la quantité de liquide se trouve augmentée, un accroissement dans la poussée de celui- ci contre les parois des vaisseaux qui le retiennent; phéno- mène qu'il est d'ailleurs facile de constater expérimentale- ment (2). La pesanteur de la colonne sanguine contenue dans les influence de la pesanteur. diverses parties du système veineux contribue aussi à faire varier la pression exercée par ce liquide sur les parois vascu- laires. Pour se convaincre de la puissance de l'action exercée par cette force physique sur le sang en mouvement dans l'or- ganisme, il suffit de tenir pendant quelque temps le bras levé verticalement, puis de le laisser pendre : dans le premier cas, c'est-à-dire lorsque le poids du liquide contribuera à hâter son cours vers le cœur, on verra la peau des mains pâlir et les veines du bras se rétrécir ou même se vider presque ; tandis que dans le second cas, lorsque le sang de la main devra remonter, malgré l'influence de la pesanteur, à une hauteur veine jugulaire ne correspondaient l'aide de laquelle ce physiologiste me- qu'à quelques millimètres de mer- surait la pression développée par le cure (a). sang dans diverses veines s'est tou- (1) Voyez ci-dessus, page 311 et sui- jours élevée lorsque l'Animal s'agi- vantes. tait, et des effets semblables ont été (2) Ainsi, dans les expériences de produits artificiellement en pressant M. Mogk, la colonne manométrique à sur la cuisse avec la main {b). (a) VVcyricli, De cordis aspiratione experimenla, 1853. {b) Mogk, Op. cil. {Zeilschr. fur ralionnelle Mcdiain, 1845, t. 111, p. 52). 332 mécanisme; de la circulation. de près d'un mèfre, il s'accumulera dans les mêmes vais- seaux et en déterminera le gonflement. Lorsque les veines des membres inférieurs sont douées du degré de résistance et de tonicité normal , elles résistent pendant longtemps à ce sur- croît de poussée et ne se dilatent que peu ; mais lorsque l'organisme est affaibli par l'âge ou par les maladies, ou bien encore lorsque la fatigue occasionnée par l'emploi continu et prolongé de cette force de réaction est devenue considérable, il n'en est plus de même, et là où leurs parois se trouvent pous- sées de dedans en dehors par le poids d'une colonne de sang d'une hauteur considérable et ne sont pas soutenues par les parties circonvoisines , elles se laissent distendre outre me- sure. Enfin la répétition fréquente de cette dilatation amène souvent dans les points de moindre résistance, c'est-à-dire au-dessous des valvules, un gonûement permanent ou état variqueux, surtout quand le cours du sang a été gêné en même temps par une pression extérieure située au-dessus de la partie distendue (i). Les personnes qui sont atteintes de cette infirmité savent (jue le matin, au sortir du lit, quand les membres ont été pendant plusieurs heures dans une position horizontale, les veines de la jambe sont revenues plus ou moins complètement sur elles-mêmes, tandis que le soir, après que la station verticale a été prolongée pendant la plus grande partie de la journée, et que la jambe malade est demeurée par consé- quent fort longtemps dans une position défavorable au cours du sang veineux, ces mêmes vaisseaux se trouvent dans un grand état de distension. Influence L'état dc réplétiou plus ou moins considérable des veines de rép"iIiion fait varlcr, ai -je dit, la pression du sang dans l'intérieur de ces vaisseaux. La preuve nous en est iburnie de deux manières. Ainsi quand, au moyen delà saignée, on diminue la masse des (1) Par cx.eniple , la constriclion exercée sur les veines sous-culanée de la jambe par des jarretières. des veines. COURS DIJ SANG DANS LES VEINES, 3â3 liquides en circulation, on voit que cette opération est suivie d'un abaissement dans la colonne manométrique adaptée à une veine quelconque , et lorsqu'on détermine une augmentation de l'afflux du sang dans une de ces veines par suite d'obstacles apportés au passage de ce liquide dans des parties voisines de l'appareil circulatoire, on voit toujours la pression s'accroître('l ). Enfin ces effets contraires s'observent également lorsqu'on fait varier la quantité de sang qui est versée dans une veine par l'artère correspondante (2). L'influence de la multi[)licité des canaux veineux sur le cours du sang des capillaires vers le cœur a été mise en évidence par une expérience de M. Poiseuille. En établissant autour de l'un des membres d'un Animal vivant une ligature serrée de façon à empêcher tout passage des liquides, excepté par l'ar- tère et par le tronc veineux correspondant, ce physiologiste (1) Lorsque les capillaires du sys- tème circulatoire général opposent plus de résistance que d'ordinaire au passage du sang des arlères dans les veines, la pression s'accroît dans les premières et diminue dans les se- condes. Il résulte des expériences de M. lîeid que, dans l'asphyxie commen- çante (avant que l'action du cœur soit notablement alfaiblie) , il se produit dosphénomènesde ce genre, et il n'est pas permis de les attribuer aux efforts musculaires que l'Animal fait quand sa respiration commence à s'arrêter, car ils se manifestent après la cessa - lion de tout mouvement volonlaire (a). (2) Je citerai à ce sujel quelques expériences faites par Ma^'cndie dans ses leçons iiubliqucs au c). (&) Magcri'lio, Lcr.ons sur les pliriioiacuei! pliiiskiues di: hi vie, I. III, p, IM fl siiiv. 3â/l MÉCANISME DE LA CIRCULATION. força la totalité du sang distribué dans la région ainsi isolée à revenir par un seul vaisseau dont le diamètre ne différait que peu de celui de l'artère par laquelle le courant était alimenté dans les racines de ce conduit, et alors il vit la pression du sang devenir presque aussi considérable dans les veines que dans les artères (i). Rôle § 13. — Ainsi, tout obstacle local provenant soit de la com- anastomoses. prcsslon d'unc vcittc, soit du rétrécissement ou de l'oblitération pathologique de ce vaisseau, doit tendre à augmenter la poussée latérale du sang dans les parties du système situées en amont, en même temps qu'il tend à ralentir le cours du liquide tant en aval qu'en amont. Mais lorsque l'obstruction, au lieu de porter sur la presque totalité des veines de toute mie région, comme dans l'expérience précédente, n'affecte qu'une ou deux branches ou même un tronc principal, le retour du sang noir vers le cœur n'en est pas beaucoup gêné, à cause des anasto- moses fréquentes qui relient entre elles les veines collatérales, du nombre de celles-ci et de leur grande dilatabilité. Ces voies de communication sont beaucoup plus directes que celles établies entre les diverses parties du système artériel, et elles rendent les différentes veines si complètement solidaires entre elles, que les accidents dont je viens de parler n'ont en général que peu d'importance. Elles existent non-seulement entre les diverses veines d'un même membre, mais entre les troncs prin- cipaux des deux systèmes des veines caves, et entre les branches de la veine cave abdominale et celles de la veine porte hépa- (1) Cette expérience de M. Poi- téraiix, on voyait la pression indiquée scuille a été souvent répétée dans les par rhémodynamomèlre dans le tronc leçons publiques faites au collège de veineux resté libre augmenter ,. au Fra.nce par Magendie. En serrant ou . point d'égaler celle de la poussée du en relâchant alternativement la liga- sang dans l'artère correspondante, ou ture destinée à empêcher le retour du descendre à son degré normal (a). sang veineux par les vaisseaux colla- (a) Magendie, Leçons sur les jMnomènes physiques de la vie, 4837, t. III, p. 4SI. COURS DU SANG DANS LES VEINES. 335 lique (1). Ainsi, dans le cas où la veine cave abdominale vient à s'obstruer dans le voisinage du cœur, le sang des membres (1) Bichat considérait le système de la veine porte de l'Homme comme étant complètement indépendant du système veineux général et ne s'y réunissant que par son tronc termi- nal (a); mais on sait aujourd'hui que ces deux portions de l'appareil vascu- laire centripète communiquent entre elles sur divers points. Ainsi les in- jeclions pratiquées par M. Retzius montrent que le réseau veineux très fin situé dans le tissu conjonctif sous- péritonéal communique à la fois avec la veine porte et avec la veine cave (6); il y a aussi des anastomoses entre les veines œsophagiennes qui dépendent de ce dernier système et les veines gastriques qui appartien- nent au premier, et des rapports ana- logues sont établis dans le bassin par l'intermédiaire des veines hémorrhoï- dales. Dans certains états patholo- giques les communications entre les veines du foie et les veines diaphrag- matiques deviennent très faciles (c). Enfin ces voies détournées, en s'élar- gissant peu à peu, rendent possible la circulation du sang dans les veines, lors même que les troncs eflerents du système portai (c'est-à-dire les veines sus-hépatiques) se trouvent oblitérés, comme cela a été observé dans un cas décrit par Baillie (d). Chez le Cheval et chez quelques autres Mammifères, M, Claude Ber- nard a trouvé des canaux anastomo- tiques qui se portent directement du tronc de la veine porte à la veine cave inférieure, et qui sont dépourvus de valvules. Ces vaisseaux doivent servh' à déverser le trop-plein du système, veineux général dans la veine cave. D'après M. Claude Bernard, ces ana- stomoses directes existeraient aussi chez l'Homme, quoique moins déve- loppées (e) ; mais M. Bérard assure qu'elles y manquent complètement ou ne s'y rencontrent qu'à l'état rudi- mentaire (/"). Chez le fœtus, le système de la veine porte communique librement avec le système veineux général par l'intermé- diaire de la veine ombilicale etdu canal veine ux(^); maispeu après la naissance cette anastomose s'oblitère. Dans quel- ques cas tératologiques , on a trouvé un gros vaisseau étendu entre l'une des veines iliaques et le sinus de la veine porte ou d'autres communica- tions plus ou moins analogues {h). [a) Bichat, Anatomie générale, t. I, p. 396. (6) Relzius, Om Anastomoser imellen Porl-og Huulaaresystemet {Tidsskrift fër Làkare och Phavmaceuler. H. I, 1832). (c) Gubler, De larArrhose, ISSB. {d) Bailli",, Of Uncommon Appearances of Disease in Blood-vessels (Transacl. of a Soc. for thc Jmprov. ofMed. and Chir. Knowledge, t. 1, p, 127). — Voyez aussi Reynaiiil, IJes obstacles à la circulation du sang dans le tronc de la veine porte, etc. {Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. IV, p. 137). (e) Cl. Bernard, Note sur une nouvelle espèce d'anastomose vasculaire {Comptes rendus de l'Acad. des sciences, 1850, t. XXX, p. G'Ji). (/■) Bérard, Cours de physiologie, t. IV, p. 50. {g) Voyez Martin Saint-Ange, Circulation du sang considérée chex, le fœtus, etc., fig'. 1 et 2. (7i) Mance, Dissertation sur la liernie crurale. Thèse, 182C, p. 29, pi. 2, lig-. 3 et 4. -- Moriiére, Observation relative à mie anastomose remarquable du système veineux général avec le système veineux abdominal {Arch. gén. de méd., t. X. p. 381). — Vclpeau, Traité d'analomie chirurgicale, 3" édil., t. II, p. 30. 336 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. inférieurs et des viscères peut arriver dans le tronc de la veine cave supérieure par la veine azygos qui relie entre eux ces deux vaisseaux, et la circulation peut se continuer aussi à l'aide des veines du racliis et des parois de l'abdomen (1). Lorsque le cours du sang se trouve de la sorte dévié de sa route ordinaire, il arrive souvent que dans les veines, de même que daus les artères, la direction du courant est intervertie dans certaines' branches du système vasculaire ; ce changement s'effectue sans difficulté dans les veines où les valvules manquent, et peut même avoir heu dans celles qui possèdent des soupapes de ce genre, car la dilatation excessive du vaisseau résultant d'une grande augmentahon dans la poussée latérale du sang accumulé dans l'intérieur de ce conduit, amène souvent à sa suite l'insuf- (1) Lorsque la veine cave inférieure férieures du corps passe par cette est ol)struée, le sang de ce vaisseau voie, et le reste arrive dans la veine peut s'engager dans les racines de la cave supérieure par une route moins veine azygos, el arriver, par l'inler- directe : savoir, en passant par les médiaire de celle-ci , dans la veine veines rachidienncs et par les veines cave supérieure. Dans l'étal ordinaire, sous- cutanées du ventre et du lliorax, ce tronc anastomotique n'est pas d'un qui grossissent rapidement (6). calibre assez grand pour livrer pas- Les cas d'oblitération de la veine sage à tout ce liquide ; mais, de même cave supérieure sont beaucoup plus que les autres veines, il est suscep- rares; mais lorsque cet accident a lible de se dilater beaucoup. Ainsi lieu, la veine azygos peut aussi per- Morgagni cite un cas dans lequel la mettre le passage du sang de ce tronc veine azygos était devenue aussi dans la veine cave inférieure. En grosse que la veine cave [a). En gé- effet, la valvule qui garnit l'embou- néral, cependant, lors de l'oblitéra- chure de ce vaisseau anastomotique lion de la veine cave, une portion n'empêche pas le courant de s'établir seulement du sang des parties in- de haut en bas, et à mesure que l'af- (rt) Morgagni, De sedibns et causis morborum, cpist. xxvi. (6) Voyez Raynaud, Obliteralion des veines cave inférieure, iliaques, etc. (Archives générales de médecine, 4 831, i" série, t. XXV, p. iOG). — Des obstacles au cours du sang dans la veine cave inférieure (Journal hebdomadaire de médecine, iS'ii, t. Il, p. 381. — Velpoau, Traité d'anatomie chirurgicale, 3^° édilion, t. II, p. 29. — Duplay, voyez Reynaud, Des obstacles à la circidation du sang dans le tronc de la veine porte, etc. {Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. IV, p. IGO). — Dubreuil, Artérite et phlébite {Mémorial des hôpitaux dit, Midi, t. Il, p. 549). — S.tannius, Ueber die kranlihafte Verschliessung grOsserer Venenstâmme, 1839. — Gély, Oblitération de la veine cave inférieure {Gazette médicale, 1810, p. 71Cj. — Cvuveilliiev, Traité d'anatornie pathologiqtie générale, t. 11, p. 317 et 344, COUaS DU SANG DANS LES VEINES. 3o7 flsance des valvules qui, ne pouvant plusse rencontrer, devien- nent incapables de s'opposer efficacement an reflux du liquide. § l/l. — Les variations de pression qui se produisent dans le influence , , . ■>• n . 1 , 1 1 de la circulation système vemeux n mlluent pas seulement sur le cours du sang veineuse dans celte portion de l'appareil circulatoire, elles réagissent aussi '"' Z slng'"" sur le mouvement de ce liquide dans les artères, et font varier les anLs. la pression exercée par celui-ci sui" les parois de ces derniers vaisseaux. Ainsi, toutes les fois que, par la contraction des tlux anormal du liquide détermine rélargissement de celte voie anaslo- molique, la valvule en question de- vient de plus en plus insuffisante (a). Dans un cas d'oblitération de la veine cave supérieure rapporté par M. Marlin-Solon , les deux veines brachio-céplialiques et rembouchnre de la veine azygos étaient devenues imperméables ; cependant la circula- tion avait continué, et le sang des parties supérieures du corps arrivait dans la veine cave par l'intermédiaire des veines du racliis et des parois du tronc (6). La communication collaléraie des veines des membres avec les veines du tronc a été mi^e en évidence par les injections (c) et par les résultats des opérations chirurgicales , aussi bien que par les cas d'anatomie pa- thologique {d). Le retour du sang vemeux de la tête vers le cœur est assuré à l'aide des communications qui existent non- seulement entre les veines jugulaires externes et internes, mais aussi des anastomoses de ces vaisseaux, d'une part avec les veines vertébrales et les branches cervicales des veines sous- clavières et leurs dépendances, d'autre part avec les veines intra-ra^iidiennes. ElTectivement, on connaît des cas dans lesquels la ligature de la veine ju- gulaire a été pratiquée chez l'Homme sans qu'il soit résulté de cette opéra- lion aucun trouble notable dans la circulation du sang dans la tête (e). (a) Frcnchs, hisiilficien;i dcr art. piûmon. {Pratjcr Vierteijahrsschr., 1854, t. ll,yl?ia/., p. 40). \h) Maiiin-Solon, Observ. d'oblitération comptèle de l'artère brachio-céphalique et de la veine cave supérieure déterminée par un anévrysme de l'aorte {Arcli. gén. de méd., 2° série, t. X, p. -290). — Voyez aussi Rcid, Case of Obllt. of the Vena Cava Superior al ils enlrance inio the Ileart {Ediub. iiled. andSiirg. Journ., 1835, t. XI.1I1, p. 2'J7). (c) Voyez Piichel, Traité pratiqiie d'anatomie mcdlco-cliirurgicale, -1855, t. I, p. t5t. ((/} Wilfon, An Instance of the Oblileralion of ilie Vena Cava Inferior from Inllammalion (Trans. ofaSoc. for the Improv. ofMed. and Chir. Knoivledge, I. III, p. 70). — Hod^son, A Treatise on the Diseuses of the Ar ter les and feins, p. 530. — Boirllaud, Ve t' oblitération des veines {Arch. gén. de méd., 1823, t. Il, p. 188). — Picynaud, Oblitérulion de la veine iliaque gauche, etc. (Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. Il, p. 82). — Cruveilliicr, Anatoiuie pathologique générale, t. Il, p. 324. (e) Simmons, Tivo Cases of the Succcssful Terminatina of W'ounds thut hâve bcen hithcrio deemed .Mortal iMcdical hirts and Observ., 1K00, I. VIII, il 23 v.l suiv ). IV. 22 ÔO( MECANISME DE LA CIRCULATION. muscles des membres, ou par toute autre cause analogue, une veine est comprimée, le sang qui est clans son intérieur tend, comme nous l'avons vu, à s'en échapper, et détermine d'un côté la clôture des valvules situées en amont, pendant que de l'autre il se porte avec un mouvement accéléré vers le cœur (1). Or, (1) Celte action des muscles cir- convoisins sur les veines détermine non-seulement l'accélération du cours du sang vers le cœur, ainsi que je l'ai fait voir au commencement de cette Leçon (a), mais aussi une augmenta- tion notable dans la pression latérale exercée par ce liquide sur les parois des vaisseaux. Ainsi, dans une des expériences faites par Magendie, le manomètre, étant placé dans la veine jugulaire de l'Animal, indiqua une pression d'environ 7 millimètres de mercure quand l'Animal était calme, et d'environ 25 ou 30 millimètres quand il se débattait, et accusa même une pression de Zi5 millimètres au moment où l'application du galva- nisme détermina dans ses muscles une contraction convulsive (6). Les expériences faites par M. Mogk ont donné des résultats analogues (c), et l'influence des mouvements mus- culaires sur la poussée latérale du sang dans les veines ressort non moins nettement des recherches faites plus récemment sur le même sujet par M. Cl. Bernard. Ainsi, dans une expé- rience rapportée par ce dernierphysio- logiste, le cardiomètre fut appliqué au bout périphérique de la veine jugulaire d'un Cheval. L'Animal étant calme et portant la tête haute , l'instrument marqua 90, puis 80 degrés. Le nerf récurrent ayant été pincé, le Cheval fit un mouvement de la tête, et aussitôt la colonne manométrique s'éleva de 80 à 115, puis redescendit à 80 dès que l'Animal était redevenu immo- bile; bientôt on le vit exécuter avec les mâchoires quelques mouvements de mastication, et aussitôt la pression remonta à 130, puis redescendit de nouveau à 80 quand ces mouve- ments cessèrent ; enliq l'Animal , étant fatigué, laissa retomber sa tête, et à mesure que les muscles éléva- teurs de cette partie cessèrent de se contracter, on vit la pression vei- neuse descendre progressivement jus- qu'à /lo. Mais alors on lui pinça le nerf facial ; la douleur lui fit rele- ver brusquement la tête, et en même temps la pression veineuse remonta à 100 pour retomber à 60, à 50, à ZiO et même à 35, lorsque l'Animal était redevenu calme et cessait de tenir la tête haute : il paraissait alors s'en- dormir ; mais il dressa brusquement le cou, et l'effort musculaire qui déter- mina ce mouvement fut accompagné d'une ascension de la colonne mano- métrique à 130 (rf). (a) Voyez ci- dessus, page 308. (&) Magendie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, •1837, t. III, p. 154 et suiv,)^ (c) Moglv, Op. cit. {Zeitschr. fur rationnelle Medizin, 4845, t. llî). [d) Cl. Bernard, Leçons sur la physiologie et la patliolo{iie du système nerveux, 1. 1, p. 285. COURS DU SANG DANS LES VEtNKS. 339 ces effets qui favorisent le déplacement de la portion de sang- veineux ainsi pressé, produisent un résultat contraire sur la por- tion de la colonne liquide qui est située en amont; tant que les valvules restent fermées, le sang se trouve arrêté dans la por- tion périphérique correspondante du système vasculaire , et oppose par conséquent un surcroît de résistance à l'écoulement du liquide contenu dans les artères dont ces veines sont la continuation. Chaque fois que les mouvements généraux de l'Animal viennent de la sorte en aide à la circulation veineuse, la circulation artérielle se trouve donc plus ou moins entravée, et cet effet se traduit par une augmentation de la pression que le sang exerce contre les parois de cette portion centrifuge du système irrigatoire. Pour s'en convaincre, il suffît de placer l'hémodynamomèlre en communication avec une artère, et d'ob^ server les variations de hauteur de la colonne mercurielle dans la branche montante de cet instrument, lorsque l'Animal est en repos ou lorsqu'il s'agite. Tout mouvement, même léger, mani- feste ainsi son influence sur la poussée latérale du sang dans les artères, et l'augmentation qui s'y remarque est due essentielle- ment non à l'action directe des muscles circonvoisins sur ces vaisseaux, mais à la pression qu'ils exercent sur les veines cor- respondantes. Cela nous explique en partie au moins la cause de l'augmentation de pression qui s'observe dans les artères toutes les fois que l'Animal sur lequel on expérimente éprouve une sensation douloureuse, car la douleur provoque des contractions musculaires, et ces contractions retardent l'écoulement du sang des capillaires dans les veines (1). (1) A l'appui de ce que je viens de marquait de 100 à loO degrés, quand dire ici, je citerai encore quelques- TAnimal était calme, et indiqua une unes des expériences faites par M. Cl. pression de 110 à 170, quand on Bernard. Chez un Chien le cardlo- pinça légèrement les racines motrices mètre, adapté à Tune des carotides d'un de ses nerfs rachidiens («). Celle {a) CA. P.oinard, Leçons mir la pliysioloyie cl la valliolOQlc du syslème nerveux, t. \, p. 2!}3. o/|0 MÉCANISMIÎ DE LA (^lllCULATlON. Pariicuiarités § 15. — ToLit ce que je viens de dire relativement au cours de la ciiciilalion , .,,. •n- i ■ i-ii» encéphalique, du sang uow dii réseau capnlaire vers le cœur est applicable a la presque totalité du système formé par les veines caves et leurs affluents , mais ne l'est pas complètement à quelques par- lies de l'appareil circulatoire centripète, où les vaisseaux sont placés dans des conditions particulières. Ainsi, dans l'intérieur de la cavité crânienne (1), les gros canaux veineux ne sont que peu dilatables, et leur surface, de même que les parois plus extensibles des veinules de l'arachnoïde et du cerveau , se trouve presque entièrement soustraite à l'influence de la pression atmosphérique, à raison de la rigidité des parois de la boîte osseuse qui les renferme. Les vaisseaux augmcntalion de pression ne se mani- était calme, et s'élevait à 190 quand lesta pas seulement au moment où le onarictait la ciiculalion dans une des cœur se contracta, mais s'observa carotides (a). aussi pendant la diastole ventri- (1) Le mode de circulation du sang culaire. dans les vaisseaux de l'encépiiale a Des effets analogues sont produits occupé d'une manière spéciale i'atten- quand on arrête le passage du sang tion de plusieurs physiologistes, parmi dans la veine correspondante à une lesquels je citerai plus particulière- artère. Ainsi, dans une des expé- ment Alexandre Monro, Carson, Kcl- riences de M. et. Bernard, la pression lie, Ahcrcrombic, Burrows, M. Ha- du sang dans l'artère carotide corres- mernik, M. Kiwisch, M. Donders et pondait à 170 ou 175 quand l'Animal M. VV. Berlin (6). (a) Cl. Bernard, Op. cit., t. I, p. 283. (b) Alex, Monro, Observ. on the Nervous System, 4783. — Atiercronibie, Observ. on Apoplexy {Edinb. Med. and Surg. Journ., t. XIVj. — Carson, On the Circulation of the Blood in the Head {Edinburgh Med. and Sunj. Journal, 1824, t. XXI, p. 253). — Ivellie, An Account of the Appearances observed in the Dissection of two or three Indivi- duals presuined to hâve perished in the Storm of the 3'', and whose Bodies were discovered in the Yicinity of Leilh in the Mornirig of the 4ti' Nov. 1 82 1 ; with some Reflections on the Pathology of the Ftrain (Trans. of the Medico-CInr. Soc. of Edinburgh, 1824, t. I, p. 84 et siiiv.). — Abercrombie, Conjectures m Regard to the Circulation in the Brain (Pathological and Practical Researches on the Diseases of the Brain, 1828, p. 300 et suiv.). — . burrows , Lumlean Lectures { Londou Médical Gazette, 1843, 2° série, t. Il, p. 145 et suiv.). — Hamernik, Physiol.-Path. Untcrs. ûber des Verhâllnisse des Kreislaufcs in der Schddelhôhle (Pragcr Vierteljahrsschrift. 1848, t. VII, p. 38). — Kiwiscli, Kritische Bemerkwigen sm D. Ilamernik's physiol.-pathol. Untersuch . ûber dias Vcrhdltniss des Kreislaufcs in der Suhàdelliohle (Prager Vierteljahrsschrift, 1848, t. XI.\, p. 77). ^- W. Berlin, Onderzoeliingen betreklalijk den. flloedsomloop in de Hersenliolle (Nedcriand'ich lancet, 1850, 2" i^érie, t. V, p. 4(il). COLKS UL SANG DANS LKS VEIKKS. 341 sanguins encéphaliques sont par conséquent comparables, jus- qu'à un certain point, à un siphon, et l'on a constaté cj^u'ils ne se vident pas comme le font les autres parties du système circula- toire chez les Animaux qui périssent d'hémorrhagie (1). Plusieurs auteurs ont été conduits môme à penser qu'ils doivent contenir toujours une quantité identifjue de sang , et que l'accumulation •qui s'observe souvent dans quelques-uns d'entre eux ne saurait se produire que par suite d'une diminution correspondante du volume de ce liquide logé dans les autres parties du système vascuiairede l'encéphale ; mais les expériences physiologiques, ainsi que les observations des pathologistes, prouvaient qu'il n'en est pas ainsi, et que le degré de réplétion de ces vaisseaux est susceptible de varier notablement. Du reste, ce fait s'explique facilement, car, ainsi que nous le verrons dans la suite de ce cours, il existe entre les parois inflexibles de la boîte crânienne et la surface du cerveau, ainsi que dans les cavités dont ce der- nier organe est creusé, un liquide séreux qui est susceptible de refluer en partie dans la cavité rachidienne, et qui peut aussi augmenter ou diminuer de quantité assez rapidement. Par conséquent, le volume total des liquides contenus dans la cavité du crâne peut demeurer constante, bien que la quantité de sang qui s'y trouve subisse des variations assez grandes, (1) Ainsi Kellie a constaU; que les surface extérieure de ces tubes est vaisseaux de rencépliale, au lieu de soustraite à l'intluence de la pression se vider comme ceux des autres par- atmospliérique : car il reconnut que lies du corps, lorsqu'un Animal meurt le sang s'en écoule comme du reste d'iiéinorrliagie , restent pleins de de l'appareil circulaloire, lorsqu'on sang (a). Ce fait avait été déjà ob- pratique une ouverture aux parois serve par d'autres physiologistes [b) ; de la boîte crânienne, de façon à per- mais cet expérimentateur prouva en mettre l'accès de l'air dans cette ca- nutri' f|iio cela dépend de ce (|ue la vite [r). {a) Kcllic, Op. cil. {Trans. of the Med. Chir. Soe. ofEdinburgh, ISSi, I. F, \>. dO?). [b) Seetl», De sanguine misso (Dissert, inau;;., Edimb., 1815). (r) Kollie, fleftect. nn the Palhnl. nf the Brain [Inc. cit., t. I, p. 125). 342 MÉCANISME DE L.V CIRCULATION. car l'augmentation ou la diminution du contenu des vaisseaux peut être compensée par des changements en sens contraire dans la quantité de la sérosité circon voisine (1). La disposi- tion anatomique des grands sinus veineux qui sont situés à la base de la cavité crânienne ne se prête que peu à des variations dans la capacité de ces réservoirs ; mais les veines nombreuses qui sillonnent la surface du cerveau sont très dilatables, et c'est principalement dans ces vaisseaux que l'hypérémie est apte à se manifester. 11 est aussi à noter que dans la tête l'effet de la pesanteur, au lieu d'être défavorable à la circulation veineuse, comme dans les membres , tend en général à faciliter le retour du sang des capillaires vers le cœur. Mais lorsque l'Homme ne conserve pas la position verticale qui lui est naturelle, et que sa tête se trouve au-dessous du niveau de sa poitrine , les choses ne se passent plus de même , et ce liquide tend à s'ac- cumuler dans les veines céphaliques. Cet effet se manifeste (1) Monro soutenait qu'à raisoii.de treut qu'en réalité la quantité totale l'incompressibilité de la substance du de sang renfermée dans les vaisseaux cerveau, la quantité de sang contenue encéphaliques est susceptible de va- dans les vaisseaux qui se trouvent rier considérablement. Ainsi , dans renfermés avec cet organe dans la une de ses expériences, Kellie fit cavité crânienne, dont les parois sont mourir deux Lapins au moyen de inextensibles, ne pouvait varier, et l'acide cyanhydrique, et suspendit en- Kellie attribua à un mode de réparti- suite l'un de ces Animaux par les tion anormale de ce liquide entre les oreilles, l'autre par les pattes posté- veines et les artères les phénomènes rieures. Chez celui dont la têle était de congestion qui se remarquent sou- dans cette position déclive, on trouva, vent dans diverses parties de l'encé- par l'autopsie, que non-seulement les phale (a). Plus récemment, M. Ha- grosses veines, mais tous les vais- raernik a émis une opinion analo- seaux de l'encéphale, aussi bien que gue (6). Mais les résultats fournis par ceux des parties superficielles de la les expériences de Kellie lui-même ne tête, étaient dans un état de conges- sont pas favorables à ces vues, et les tion extrême ; tandis que chez l'indi- faits constatés par Barrows et par vidu qui avait été placé avec la tète quelques autres physiologistes mon- en haut et les pieds en bas, les sinus (a) KcUie, Op. cil. (Trans. of (he Med. Cliii'. Soc. ofEdinb., ISti, t. 1 ). {b} Hamernik, Op. cit. [Prager Yierteljahrsschr. fiir prakt. Heilkt., 1848, t. VU, p. 38). COURS DU SANG DANS LES VEINES. â^S même quand on est couché horizontalement , et augmente beaucoup si la tête est pendante. C'est en partie à cause du ralentissement produit de la sorte dans le cours du sang dans le cerveau que la position horizontale est si favorable au som- met , et la congestion qui tend à se produire dans cet organe quand l'Homme marche sur les mains aussi bien que sur les pieds suffit en général pour rendre cette position insupportable pendant longtemps. Il en serait probablement de même pour la plupart des quadrupèdes à sang chaud , si leur cou était aussi court que le nôtre et leur tête aussi lourde ; mais la plu-^ part de ces Animaux sont conformés de manière à pouvoir tenir la tête haute tout en ayant le tronc horizontal, et par consé- quent le coiu's du sang veineux dans le cerveau se trouve placé dans des conditions non moins favorables que si la totalité de leur corps était dans la position verticale. veineux de la dure-mère, de même que tous les autres vaisseaux sanguins de la tête, étaient presque vides et affaissés (a). Lorsqu'un obstacle mécanique s'op- pose au libre cours du sang veineux de la lête vers le cœur, ainsi que cela a lieu dans les cas de strangulation, on trouve en général non-seulement les vaisseaux sanguins de la face très injectés, mais les veines encéphali- ques gorgées de ce liquide, et, dans ces cas , on a remarqué aussi une diminnlion correspondante dans la quantité de sérosité cérébro-spinale qui se rencontrait dans la cavité du crànc (h). Quand la congestion sanguine de l'cncépliale se produit brusquement, raugnuMilalioii du volume des vais- seaux doit être compensée par le reflux d'une quantité correspondante du liquide cérébro-spinal de la boîte crânienne dans le canal rachidien, et la déplétion proportionnelle des plexus veineux qui entourent la moelle épinière dans l'intérieur de cette gaînc osseuse. La diminution brusque de la quantité de sang dans les vais- seaux de l'encéphale doit être accom- pagnée d'un déplacement en sens in- Sërse d',1 liquide céphalo-rachidien; mais lorsque cette déplétion se produit graduellement, comme dans les cas d'anémie ou dans les cas de mort par inanition, la compensation s'établit à l'aide d'une augmentation dans la quantité totale du sérum qui baigne l'axe cérébro-spinal. (a) Biiftdws, l.wnlean LecAiivcs {Loadon Mi-A. Hnzelie, \Hi'.\, 2' sûrio, i. Il, p. l'i'J). {b)\\. liciliii, 0/;. dt.(Ncdcrl(mih(:h Ijtnrcl, ISJO, 2':^(jii(!, I. V, [i. 4(;o). S/j/'t MÉCANISME DE LA CIHCLILATION. La disposition [)articiilièpe dos grosses veines encéphalir|ues est aussi la cause d'un pliénomène dont on est témoin quand on observe le cerveau à découvert soit chez l'Homme, soit chez un Chien ou tout autre Mammifère. Quand la boîte crâ- nienne a été ouverte, on voit cet organe se soulever et se gon- fler d'une manière rhvthmique, et l'on reconnaît facilement que ces battements ne coïncident pas avec ceux du cœur, mais sont synchroniques avec les mouvements expiratoires (1). Effecti- vement ils dépendent de l'accumulation du sang dans les sinus veineux qui sont situés entre le cerveau et la base du crâne, accumulation qui à son tour résulte en partie de l'accélération du cours du sang artériel déterminée par la pression exercée sur les vaisseaux intra-thoraciques lors de la contraction des parois de la poitrine, et en partie du ralentissement que cette pression thoracique occasionne dans l'écoulement du sang noir des veines du cou vers le cœur, et du reflux qui s'opère dans la portion terminale de ces canaux centripètes sous l'influence (1) Ces mouvements alternatifs lier, Busslère de la Mure, que l'on d'élévation et d'abaissement du cer- est redevable de la connaissance du veau avaient été observés par plu- mécanisme à l'aide duquel ce pliéno- sieurs physiologistes de l'antiquité et mène est produit (c). Bussière de la delà renaissance, à la suite de frac- Mureconstataquelecerveaucessede se tures du crâne ou de l'opération du mouvoir de la sorte quand le thorax est trépan ; on les attribua d'abord à des ouvert ; et qu'en comprimant artifi- contractions de la dure-mère (a); ciellement les parois de la poitrine, ou mais Schlichling constata expérimen- en pressant sur les vaisseaux intra- lalement la coïncidence de ces bat- thoraciques par l'insufflation des pou- tements avec les mouvements d'in- mons, soit chez un Animal vivant, spiration et d'expiration (h). C'est soitsur le cadavre, on peut déterminer surtout aux recherches d'un proies- à volonté des mouvements encéphali- seur célèbre de l'école de Montpel- ques analogues (rf). Il vit aussi que les (a) Baglivi, De fibra molrice (Opéra omnia, \i. 290 ut suiv.). (b) Sclîlicliling, De motu cerebri (Métn. de l'Aead. des sciences, Savants étrangers, 1750, l. I, p. H4 et suiv.). (c) De la Mure, Mémoire sur la cause des mouvements du cerveau qui -paraissent dans l'Homme et les Animaux trépanes (Mém. de l'Acad. des sciences, 1749, p. 541). (rf) Idem, ibid., expériences n" 4, 5, 6, etc. coins DU SANG DANS LliS VEINES. 3'|5 de la même cause. Dans les eirconstances ordinaires, c'est-à-dire quand le cerveau est entouré de tous côtés par les parois osseuses du crâne, ces mouvements ne peuvent pas avoir lieu ; mais chaque fois que le thorax se contracte avec force, le sang dis-- haUements du cerveau cessent quand, par la ligature, des artères carotides, ou empêche le sang d'arriver dans la boîte crânienne (a) ; qu'ils cessent quand on ouvre le confluent des sinus de la dure-mère (ou pressoir d'Héro- philc), de façon à procurer l'écoule- ment facile du sang versé dans ces réservoirs veineux (6), et qu'on peut les produire sur le cadavre en com- primant avec la main la veine cave (c). Enfin , il constata directement que , sous l'influence du resserrement des parois du thorax, les sinus de la dure- mère se gonflent dans toute leur éten- due, tandis qu'au moment de l'inspi- ration ces réservoirs se vident en grande partie (rf). Les conclusions qu'il tira de ses expériences nombreuses et variées sont trop absolues, car il attri- bua les mouvements du cerveau uni- quement au reflux du sang dans les veines qui est déterminé par la pres- sion thoraciquc dans l'inspiration (e), et il ne tint pas compte de l'augmen- ta'lion que cette même pression de- vait occasionner dans la quantité de sang envoyée h la tête par les artères carotides et vertébrales. Ces expériences cependant sufTisaient pour montrer que celte accélération dans l'afllux du sang artériel dans les vaisseaux de l'encéphale était une des principales causes du phénomène. Elfeclivement il avait reconnu que la ligature des veines jugulaires, ligature qui empêche nécessairement tout re- flux de liquide sous l'influence des mouvements expiratoires, ne fait pas cesser les battements du cerveau et tend plutôt à les aiismenler (/"). Les expériences faites vers la même époque par Haller n'avancèrent pas beaucoup la question, et la tbéoric adoptée par ce physiologiste n'était pas l'expression de la vérité, car il attribuait le gonflement des vaisseaux sanguins du cerveau à la difTiculté que le sang trouve à traverser les capillaires des poumons, lorsque ces organes sont contractés {g). Un autre physiologiste de la même époque, Lorry, étudia à son tour ce phénomène et en donna une explica- tion plus exacte, tout en ne faisant pas une part assez large au reflux du sang veineux constaté par Bussière de la Mure. Il fit voir que les obstacles op- posés au retour du sang veineux dans les jugulaires augmente l'espèce de gonflement qui se remarque dans le cerveau au moment d'une forte cxpira- (a) linssii';i(; iJc la Mure, loc. cit., cxpiji'. il" 2. (b) Expér. n" 9. (c) Expi-r. n« Id. (d) Expôr. ri° 10. le) Loi:, cit., \>. 500 clsuiv. (/) ExjHJr. 11* 7. (//) Ilallcr, Mém. sur les mouvemenls du san'j, p. 08 ut siiiv. o/|6 MÉCANISME Dli LA CIUCULATION. tend de la même manière les cavités veineuses situées à la base de l'encéphale, et détermine une fluctuation dans le liquide céphalo-rachidien (1). tion, et il se rendit compte des batte- ments de ce viscère par l'augmenta- tion de l'afflax du sang artériel déter- miné par la pression des vaisseaux intra-thoraciques au moment des ef- forts expira toires, coïncidant avec le ralentissement dans le retour du sang veineux dû à la même pression (a). Enfin, de nos jours, ce phénomène a été examiné de nouveau par Ravina, M. Is. Bourdon, Magendie, M. Flou- rens et plusieurs autres physiolo- gistes (6). Magendie a montré, mieux que ne l'avaient fait ses prédéces- seurs , l'influence que la pression expiratoire exerce sur le cours du sang dans les artères, et par suite sur les mouvements du cerveau (c). M. Flourens a constaté que les mou- vemenls du cerveau ne consistent pas seulement dans l'élévation et l'abais- sement alternatif de cet organe, mais aussi dans une sorte d'expansion et de resserrement successifs. Il a fait voir également que le sang dont l'ac- cumulation détermine ce phénomène vient des veines du rachis en plus grande quantité que des jugulaires et des veines vertébrales {d). Plusieurs physiologistes ont pensé que la moelle épinière éprouvait des déplacemenls analogues aux mouve- ments observés dans l'encéphale (e), et dans quelques cas de spina-bifida des phénomènes analogues ont été constatés (/"; ; mais , dans les condi- tions ordinaires, celte portion du sys- tème nerveux paraît n'offrir rien de semblable , et il existe seulement un afflux de sang dans le plexus veineux intra-rachidien, ainsi qu'un refoule- ment du liquide céphalo-rachidien, chaque fois que le thorax se con- tracte (g). (1) La pression centrifuge exercée de la sorte par le sang, sous l'influence d'efforts expiratoires violents, est tel- lement considérable , que souvent la substance du cerveau se trouve pous- sée à travers l'ouverture pratiquée aux parois du crâne dans l'opération du trépan, et fait hernie au dehors. (a) Lorry, Sur les mouvements du cerveau et de la dure-mère [Mém. de l'Acad. des sciences , Savants étrangers, 1760, t. III, p. 308). (6) Ravina, Spécimen demotucerebrl {Mém. de l'Acad. de Turin, 1811 et 1812 , Sav. étranrj., p. 61). — Bourdon, Recherches sur le mécanisme de la respiration et sur la circulation du sang, 1820, p. 66. — Ecker, Physiologische Untersuchungen xlber die Be^vegungen des Gehirns und Rïicken- 7narks. Stultg., 1843. (c) Magendie , De l'influence des mouvements de la poitrine et des efforts sur la circulation (Journal de physiologie, 1821, t. I, p. 139). (d) Flourens, Recherches expérimentales sur le système nerveux, chap. xxi : Mouvement du cerveau, p. 340 et suiv. (2= édit., 1842). — Vieussens, Neurographiaiiniver salis, p. 141 (1685). — Magendie, Sur un mouvement de la moelle épinière isochrone à la respiration (Journal de physiologie, 1821, t. I, p. 200). (e) Burg-, voyez Ollivicr, Traité des maladies de la moelle épinière, 1837, t. I, p. 46. . — Portai, Cours d'anatomie médicale, 1804, t. IV, p. 66. (f) Cruveilhier, Anatomie descriptive, p. 564. (g) Longet, Anatomie et physiologie du système nerveux, t. I, p. 798 et suiy. COURS DU SANG DANS LES VEINES. 347 § 16. — Le passage du sang dans le système de la veine circulation porte présente des particularités qui sont plus importantes à YZ^ noter, et qui dépendent principalement de deux circonstances ^''' ''^'"'' ^°"^* Les effets de cette pi'ession ont été mis très bien en évidence par les expé- riences de Uavina. Ainsi ce physiolo- giste, ayant perforé le crâne d'un Chien, adapta à l'orifice obtenu de la sorte un tube vertical dans lequel il plaça une certaine quantité d'eau, et il vit la colonne de ce liquide s'élever et descendre alternativement, suivant que l'Animal faisait des efforts d'expi- ration et d'inspiration [a). Chez les enfants nouveau-nés, lors- que les os du crâne ne sont pas en- core unis entre eux, ces mouvements se produisent de la même manière que lorsque les membranes du cer- veau ont été mises à découvert ; mais lorsque les parois de la boîte crânienne se sont consolidées et sont devenues immobiles, les choses ne se passent pas de la même manière, et le cerveau reste toujours appliqué contre la voûte de cette cavité. La preuve en est four- nie par une expérience de AI. de Bour- gougnon. Un tube de verre, muni d'un robinet vers le haut et portant dans son intérieur un petit stylet mobile, fut ajusté hermétiquement dans le trou pratiqué à la voûte du crâne d"uM Animal vivant, à l'aide du trépan ; de l'eau fut versée ensuite dans ce tube, et, à chaque mouve- ment expiratoire, on vit la colonne liquide s'élever, ainsi que le petit sty- let dont l'extrémité inférieure posait sur la dure-mère ; mais lorsqu'on tourna le robinet de façon à opposer aux mouvements d'ascension du li- quide un obstacle invincible, comme l'est celui formé par les parois osseu- ses du crâne, le cerveau cessa de s'éle- ver et de s'affaisser, car le stylet, dont le déplacement n'était pas gêné par le liquide qui remplissait le tube resta immobile. Enfin cet expérimentateur a obtenu des mouvements analo- gues de l'encéphale en injectant de l'eau par saccades dans la veine ju- gulaire sur le cadavre (6). Plus récemment , M. Donders s'est con- vaincu aussi de la non-existence de ce déplacement du cerveau dans l'état normal chez les Animaux à crâne ré- sistant, au moyen d'expériences dans lesquelles il a substitué une lame de verre à la portion d'os enlevée par le trépan (c). Enfin, M. Longet pense que, dans les conditions ordinaires, le liquide céphalo-rachidien ne reflue pas du crâne dans la cavité rachi- dienne pendant les mouvements d'ex- piration, et que, par conséquent, il ne peut pas y avoir gonflement et déplé- tion alternatifs des vaisseaux sanguins de l'encéphale, comme dans le cas où les parois du crâne, à raison de leur dilatabilité ou de leur perforation, n'opposent pas un obstacle invincible (a) P.avin;i, Spécimen de inolu cerebvi {Mém. de l'Acad. des sciences de Turin, 1811 et 1812 , Sav. élranij., \<. 75). (b) liourtçougnon, liecherches sur les mouvements du cerveau. Tliàsc, Paris, 1830, ii" 355. (c) DonrJcrs, De lleiverjinfjen der llersenen en de Veranderinijen der Vaalvullimj van de l'ia Mater, noie bij yeslolen ouuHzctbaren ScImkL retjlslreelts onderxoclil [Nederlandscli Lancel, 1850, 2"S(!ri(;. t. V, p. 53H). o/|8 MÉCANISME 1)1] LA CIKCULATJON. analomiques : riiilerpositioii d'un réseau capillaire entre les vaisseaux veineux afférents et eflërents du foie, et l'absence de valvules dans toute cette portion de l'appareil circulatoire. Par suite de la ramification de plus en plus considérable du tronc de la veine porte dans la substance du foie et de la forme capillaire de la portion terminale de ce vaisseau, le sang noir qui arrive des intestins et des autres viscères" où ce système prend naissance doit se trouver dans des conditions analogues à celles qui déterminent dans le système artériel la poussée du liquide contre les parois des canaux qui le renferment: seule- ment , ici , la charge sous laquelle le courant s'avance étant beaucoup plus faible, la pression latérale développée de la sorte doit être aussi beaucoup moindre. 11 doit résulter aussi de ce mode d'organisation que le mouvement du sang dans le système de la veine porte serait beaucoup plus lent que dans les autres parties de l'appareil circulatoire, si ce mouvement ne dépendait que des contractions du cœur ; mais ici ces conditions défavo- rables sont en partie contre-balancées parle jeu du diaphragme. En effet , chaque fois que la voûte formée par ce muscle vient à s'abaisser , le foie et les autres viscères de l'ab- domen ont comprimés avec plus ou moins de force, et la pression développée de la sorte doit tendre à chasser de leurs veines le sang (contenu dans leur vaisseau. Les valvules situées dans l'intérieur des grosses veines qui arrivent des membres inférieurs dans cette cavité s'opposent à la rétrocession du à la poussée du sang contenu dans les mentation considérable de la pression veines du plancher encéplialique (a). exercée par le sang sur les parois des Celte dernière conclnsion ne me pa- veines de l'encéphale, chaque fois que raît pas suffisamment étayée par les le thorax se resserre, et que celte faits. Mais, quoi qu'il en soit à cet pression doit s'accroître avec l'inlen- égard, il me paraît évident que, dans site de l'effort expiraloire. tous les cas, il doit y avoir une aug- (rt) Longet, Anatomie et physiologie du sijstème nervevx, 484'2, 1. 1, p, 170 el suit. COURS DU SANG DANS LES VElNKS. â/|9 litiuide par cette voie , et par conséquent c'est seulement le sang contenu dans le tronc de la veine cave et dans le système de la veine porte qui peut céder à cette compression ; chaque fois que le diaphragme se contracte , ce muscle communi(jue donc au sang des vaisseaux hépatiques une impulsion qui con- tribue à le faire avancer vers le cœur, et lorsque ce muscle se relâche et remonte dans le thorax, le mouvement ascensionnel du liquide dans ces mêmes veines est encore sollicité par la force aspirante que développe l'élasticité des poumons (1). L'absence presque complète de valvules dans les diverses parties du systèune de la veine porte permet le mouvement du sang dans tous les sens, et par conséquent si la pression exercée par les organes circonvoisins sur les parois de ces vaisseaux devient moindre dans la portion inférieure de ce système que dans sa portion supérieure, non-seulement le cours du sang vers le cœur peut s'y trouver arrêté, mais un reflux peut s'établir des veines du foie dans les veines des intestins (2). Il (1) M. Poiseiiille a rais en lumière lièrent au iissu circonvoisin, et res- ce mécanisme adjuvant de la circula- tent béantes lorsqu'on les coupe. Il Uon veineuse dans le foie (a). U est en résulte que la succion exercée sur aussi à noter que l'action aspirante de ces dernières par la pompe thoraciquc la cavité tlioracique sm- les vaisseaux ne doit pas déterminer leur aplatisse- efférents de ce viscère est favorisée ment et doit produire tout son effet par les dispositions anatomiqucs des sur le sang contenu dans leur inté- diverses parties du système de la rieur, tandis que les veines aftérenles veine porte. Ainsi que Ta fait remar- se prêtent à l'écoulement du liquide quer \I. lîéraid, les parois vasculaires qui les remplit {b). .■•ont flasques dans la portion intesli- (2) i\I. Cl. Bernard a appelé l'attcn- nale ou afférente de ce syslènie, et lion des physiologistes sur un pliéno- clles se laissent facilement déprimer mène de ce genre qui paraît s'opérer comme celles des veines ordinaires ; quand on ouvre largement l'abdomen mais les veines ellérentes du foie ad- d'un Animal vivant (c). (n) Cnisouillc, l{ef:herches sur les causes des moiivcmeiils du sang dans les veines, p. I .'> (cxtr. lin Jownal kehdomndaire de médecine, 183u, l. 1). Ib) Uérnnl, Cours de phnsioloole, t. IV, p- 04. (c) Cl. ncnianl. Ile t'oriijine du sucre dans l'écnnomie animale [Archives {jênc'rales de méde- cine, 1848, 4- M'iii', I, XVIII, p. :iOi)). 350 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. esl môme probable que clans les cas où les mouvemenls respi- ratoires deviennent très puissants, le sang oscille dans la por- tion efférente- du système hépatique, et le cours de ce liquide vers le cœur me semble devoir être entravé aussi d'une manière temporaire lorsque la veine porte se contracte, ainsi qu'elle paraît êlre apte à le faire (1). Mais je ne m'arrêterai pas davantage sur ces questions dans ce moment, me proposant d'y revenir quand je traiterai des fonctions du foie. (1) La coniractilité des parois de la à raison de l'absence ou de l'insuffi- veine porte a été constatée sur le ca- sance des valvules dans ce système davre d'un supplicié par MM. KôUiker de vaisseaux , toute constriclion de et Virchow (a) ; mais elle est très l'un de ceux - ci doit devenir un faible, et elle ne me paraît pas suscep- obstacle au passage du sang, et déter- lible d'accélérer le mouvement du miner un reflux plutôt qu'un mou- sang vers le cœur, comme le suppo- vement de progression, sent quelques physiologistes (6) : car, (fl) Kôlliker, Ueber einige an der Leiche eines Hingerichteten angestellte Yersuche und Beobach tungen {Zeitschr. fur wissensch. Zoologie, 1851, t. III, p. 40). (6) Voyez Colin, Traité de physiologie comparée des Animauœ domestiques, t. II, p. 325. TRENTE -HUITIEME LEGON. 1° De la petite circulation. — Pression du sang dans l'artère pulmonaire; variations dans la résistance que les capillaires opposent au passage de ce liquide. — 2" Du cours du sang considéré dans l'ensemble du système vasculaire. — Durée de chaque révolution circulatoire ; application de celte donnée à l'évaluation de la quantité de sang existant dans l'organisme. — Influence de la gravitation sur la distribution du sang. — Phénomènes cadavériques. § 1. — L'étude détaillée que nous venons de faire du méca- circuiaiion nisme de la grande circulation nous permettra de passer rapi- fuimon^i'e. dément sur l'histoire du cours du sang dans les vaisseaux des poumons. Nous avons vu , dans une des précédentes Leçons, commen-t ce liquide, versé dans l'oreillette droite par les veines caves, passe ensuite dans le ventricule situé au-dessous et se trouve lancé dans l'artère pulmonaire par les contractions de ce dernier réservoir (l). Nous savons également que les valvules sigmoïdes situées à l'intérieur de ce vaisseau empêchent la rétrocession du liquide pendant que le cœur est en repos, et j'ai déjà eu l'occasion de montrer que les parois de ce conduit ont la même structure et les mêmes propriétés que celles des tubes du système aortique. Nous pouvons donc prévoir que dans l'artère pulmonaire il doit y avoir aussi une transformation plus ou moins complète du mouvement intermittent dont le sang est animé en sortant du ventricule droit en un mouvement d'abord rémittent, puis uniforme ; et, effectivement, quand on observe au microscope le cours de ce liquide dans les petits vaisseaux des [)Oumons , on voit que tout s'y passe à peu près de même que dans les capillaires de la grande circulation (2). (1) Voyffzci-dcssiis page 5 et SHJv. rcssante de reclierclies manomdtrl- (2) M. liiilner ;i fait une série iiil6- ques sur les variations de la pression 352 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. 11 est évident que lors môme que la capacité des deux ventri- cules serait inégale (1), il doit y avoir similitude complète entre la quantité de sang qui, à chaque systole, est lancée de la sorte dans l'artère pulmonaire, celle qui revient au cœur par les veines caves et celle que le ventricule gauche envoie dans l'aorte , puisque le nombre des contractions est le même dans les deux moiliés du cœur et que les diverses portions du cercle circulatoire s'alimentent réciproquement. Mais la force déployée par le ventricule droit pour établir le courant dans les vaisseaux pulmonaires est moins considérable que celle employée pour mettre le sang en mouvement dans le système aortique (2), et la pression engendrée dans l'artère puhnonaire par l'impulsion ainsi donnée et par la résistance que les capillaires de l'appa- reil respiratoire opposent au passage du sang est aussi beau- coup moins grande que dans les artères de la circulation irri- gatoire (o). du sang dans les vaisseaux pulmo- naires, et il a employé le kymogiapi.e de M. Ludwig, de façon à tracer la courbe des niouvemcnls de la colonne mercurielle , ce qui lui a permis de bien observer la marche des oscilla- lions. Pour disposer 5€s expériences, ce physiologisle naicotise l'Animal et fait généralement la seclion des nerfs pneumogastriques, puis il établit la respiration artilicielle et ouvre large- ment le thorax du côté gauche, en évitant autant que possible les pertes de sang et en ménageant le médiaslin ainsi que le poumon du côté opposé ; enfin il ajuste le bout de la petite branche de son hémodynamomètre dans l'artère pulmonaire gauche ou dans la veine du même côté. La courbe correspondante aux variations de pres- sion dans l'artère , montre que la poussée du liquide augmente chaque fois que le cœur se contracte, mais les oscillations produites de la sorte sont très petites. On remarque aussi que cette courbe à petites sinuosités s'élève ou s'abaisse à chaque mouvement respiratoire. Enfin, M. Butner signale encore d'autres variations à plus lon- gues périodes, qui paraissent corres- pondre à des différences dans le degré d'énergie avec laquelle le cœur se contracte ^a'. (1) Voyez tome III, page /i98. (2) Voyez ci-dessus, page 117, ('à) Dans les expériences de M. But- (a) A. Biitiier, Ueber die Slrom-und Druckkraft des Blutes in der Arlerla und Yena pvlmo- nnlis (Zeilschrift fitr rationnelle Medix^hi, I85;i, i'.' série, I. Il, p. 100 et suiv.). COURS DU SANG DANS LES VAISSEAUX PULMONAltlES. 55â Ainsi M. Butner a déterminé expérimentalement la pression exercée sur le manomètre par le sang dans l'artère pulmonaire et dans l'artère carotide, chez des Animaux placés dans les mêmes conditions , et ce physiologiste a trouvé que chez le Chat elle est au moins 5 fois plus grande dans ce dernier vais- seau que dans le premier (1). Il en résulte que les parois des vaisseaux pulmonaires peuvent être sans inconvénient beau- coup plus minces et plus déhcats que ceux des conduits irri- gatoires de l'organisme en général. Or, nous avons déjà vu que dans ces mômes vaisseaux respiratoires les échanges entre le liquide nourricier en mouvement dans leur intérieur et les fluides situés au dehors doivent être rapides et faciles. La ténuité et la délicatesse des tuniques interposées est évidem- ment une condition favorable à l'accomplissement de ces phé- nomènes d'exhalation et d'absorption. Nous trouvons donc ici encore un exemple de cette harmonie physiologique dont l'or- ner, la pression du sang dans Tarière pulmonaire a présenté les variations suivantes : Cliicn. . . 31,4 27,2 29,0 Chat . . . 24,7 7,5 17,0 Lapin. . . 47,5 8,4 12,07 Ces indications correspondent à la hauteur de la colonne inercurielle évaluée en millimètres (a). (1) L'ouverture du lliorax et les mouvements inspiraloires artificiels qu'il a fallu pratiquer dans ces expé- riences ont dû modifier Taclion du cœur, et les pressions observées par ^L J')Utiier n'étaient probablement pas exactement celles qui se produisent dans l'état normal ; mais dans ces expériences les conditions étaient à peu près les mêmes pour les deux ventricules, et par conséquent les ré- sultats obtenus dans l'artère pulmo- naire et dans l'artère carotide sont assez comparables. Dans une série de ces expériences faites sur cinq Chats, la pression du sang a varié généralement entre 13 et 19 dans l'artère pulmonaire, et entre 71 et 115 dans l'artère carotide; terme moyen, le rapport des pres- sions entre ces deux vaisseaux était comme 1 : 5,3. En représentant tou- jours par 1 la pression moyenne dans l'artère pulmonaire, la pression dans la carolide était de /i,'2 cliez le Lapin et d'environ 3 chez le Chien (b). la) r.iilncr, 0//. cil. {Zeitschr. fuv rnlinnn. Med,, U II, p. 100 (bj Hulncr, Op. cil., p. M H. IV. 23 354 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. ganisme de l'Homme et des Animaux nous a déjà offert tant , de preuves. Nous avons vu que , dans les vaisseaux de la circulation générale, les capillaires opposent des résistances considérables au cours du sang, et que, à raison de cette circonstance, il existe une différence très grande entre la pression du sang dans les artères et dans les veines. Dans la circulation pulmo- naire il n'en est pas de même : les capillaires qui sillonnent les parois des cellules respiratoires, malgré leur grande ténuité, n'opposent que peu d'obstacles au mouvement du sang (1), et la poussée latérale de ce liquide contre les parois vasculaires n'est pas beaucoup plus forte dans les artères que dans les veines (2). Influence § 2. — L'influcnce de la respiration sur le cours du sang de la respiration sur dans les vaisseaux de la petite circulation est importante a la circulation t ->• nn ' • i i pulmonaire, ctudicr. Effcctivcment, un des signes cadavériques les plus remarquables de l'asphyxie est d'ordinaire un grand état de réplétion de l'artère pulmonaire et des cavités droites du cœur. Lorsquela respiration est interrompue, le système aor- tique se vide presque complètement avant que le ventricule gauche ait cessé de battre , et le sang s'accumule en majeure partie dans la portion du cercle vasculaire qui est destinée à contenir le sang noir. Cette cessation du mouvement circula- toire paraît être déterminée par la stase du liquide dans les capillaires des poumons ; mais la cause de cet arrêt n'est pas encore bien connue. C'est probablement le résultat non- seulement du trouble que l'asphyxie détermine dans l'action (1) Voyez les expériences de faites par M. Bulner, la colonne mano- M. Sharpey , citées ci-dessus , page métrique se maintint entre 10""", 4 et 298. 10""", 6 dans ce dernier vaisseau, tan- (2) Dans les expériences compara- dis tfue dans l'artère elle indiquait tives sur la pression du sang dans une poussée égale tout au plus à l'artère et dans la veine pulmonaire environ 19 millimètres (a). (o) Butner, Op. di. {Zeitschr. fur rationn. Med., t. III, p. 124). COURS DU SANG DANS LES VAISSEAUX PULMONAIRES. .355 mécanique de la pompe respiratoire, mais aussi de la suspen- sion des phénomènes chimiques dont le poumon est le siège, et de l'influence exercée par l'influence carbonique en excès sur les capillaires de la petite circulation. Dans l'état actuel de nos connaissances, je ne puis cependant en trouver une explication satisfaisante , et je dois me borner à appeler l'attention sur ce lait, fourni par les expériences de divers physiologistes : que la stase du sang dans les capillaires du poumon se manifeste quand l'asphyxie est produite par la respiration d'un gaz impropre à l'entretien de la vie, quoique non délétère , tout aussi bien que dans l'asphyxie par cessation des mouvements inspira- teurs ; circonstance qui ne permet pas d'attribuer le phénomène à \me cause mécanique seulement , et qui me paraît tendre à prouver que l'adhérence du sang noir aux parois vasculaires est plus grande que celle développée entre ces mêmes parties et le sang artériel (1). Or, s'il en était ainsi, nous comprendrions (1) L'influence de la respiration sur pendant un certain temps ; tout en le cours du sang dans les vaisseaux reconnaissant que dans l'asphyxie il se pulmonaires a occupé l'attention de produit une stase dans les capillaires plusieurs physiologistes. Haller pen- pulmonaires , Bichat rejette donc sait que chez l'Homme et les autres l'explication toute mécanique de ce Mammifères l'asphyxie est due à l'in- phénomène adoptée par Haller , et il terruption de la circulation dans les cherche à s'en rendre compte en sup- poumons , et que cette interruption posant que la présence de sang noir dépend de la flexion anguleuse des non dans les ventricules, mais dans les petits vaisseaux quand ces organes artères coronaires, empêche le cœur sont dans l'état de contraction (a). de pousser ce liquide avec assez de Goodwyn entreprit une série d'expé- force dans les vaisseaux pulmonaires riences pour démontrer qu'il n'en est pour le faire passer des artères dans pas ainsi (b), et Bichat (it voir que les veines (c). Des recherches faites lors même que les poumons sont par Kay et par plusieurs autres phy- complélement affaissés, ainsi que cela siologistes, travaux dont je rendrai a lieu quand le thorax est largement compte dans une autre partie de ce ouvert, le sang peut encore y circuler cours, prouvent que le sang veineux (ft) Il.-illcr, Rlemenla physiologiœ, t. IIl, p. 243 et stiiv. {b} OoofJvvyri, The Connection of Life vAlli Respiration, 1188, p. '10 et siiiv. (c) liitliat, lieclicrclies pliysioLûyi'ques sur la vie et la mort, p. 30'J et suiv. (édil. de Magendie). 356 MÉCANISME m: la citicuLA'iioK. plus facilement que nous ne le pouvions jusqu'ici comment la stase du sang clans les capillaires de la grande circulation con- tribue à produire l'obstruction de ces vaisseaux dont on est témoin n'exerce pas une influence de ce genre sur le système musculaire {a) ; mais des expériences faites par David Wil- liams montrent que Bichat et Good- wyn avaient raison de ne pas vouloir admettre l'hypoibèse de Ilailer, car ce physiologiste constata que si on lie la trachée -artère pendant que les poumons sont dans l'état de disten- sion, et qu'on ouvre aussitôt le tliorax, ces organes ne s'afl"aissent pas, et ce- pendant l'asphyxie est accompagnée, comme d'ordinaire, de la déplétion des veines pulmonaires et de la con- gestion du sang dans les artères de la petite circulation (6). Alison fit un pas de plus. Il constata que lorsqu'un Animal est placé dans de l'azote, où il continue à faire des mouvements d'inspiration et d'expiration, la con- gestion du sang se manifeste dans le côté droit du cœur, comme dans les autres cas d'asphyxie, et par consé- quent il attribua la stase du liquide dans les capillaires des poumons à l'interruption des phénomènes de la respiration. Enfin, M. Reid est arrivé à une conclusion analogue pur une série d'expériences dans lesquelles il me- sura, à l'aide de l'hémodynamomètre, la pression du sang dans les diverses parties du système circulatoire pen- dant que l'asphyxie se produisait soit avec interruption, soit avec persis- tance des mouvements respiratoires. Eu effet, il paraît résulter de ses re- ciieiches que le sang veineux ne traverse pas les capillaires aussi faci- lement que le fait le sang artériel, et qu'ainsi l'interruption des phéno- mènes chimiques de la respiration tend à pioduire directement l'arrêt du mouvement circulatoire dans les vais- seaux des poumons. M. Reid argue aussi d'un fait bien connu : le rétablis- sement des battements du cœur qui est souvent déterminé par l'introduc- tion de l'oxygène dans les voies respi- ratoires, lorsque l'asphyxie a dû avoir produit non-seulement la cessation de ces contractions, mais la stase du sang dans les capillaires pulmonaires. En eflet, dans ce cas, l'oxygène ne peut pas agir directement sur le cœur, et M. Reid pense que si cet organe se contracte , c'est parce que les capil- laires, sous l'influence locale du fluide respirable, ont laissé passer le sang devenu artériel, et que ce liquide, ar- rivant de nouveau dans le ventricule gauche, y a excité des mouvements (c). Ce raisonnement est fort plausible, mais il se pourrait que le rétablisse- ment des mouvements cardiaques fût (a) J.-P. Kay, PhysiologicalExperiments and Observ. on the Cessation of the Contractility of the Heart and Muscles of Warm-Blooded Animais (Edinb. Med. and Surg. Journal, i 828, l. XXIX, p. 37 et suiv.). [bi D. Williams, On the Cause and the Effecls of an Obslruclion of the Blood in the Lungs {Edinburgh Med. and Surg. Journ., 1823, t. XIX, p. 524). (c) J. Reid, On the Order of Succession in which the Vital Actions are arrested in Asphyxia (Edinburgh Med. and Surg. Journ., 1841, t. LV, p, 437 et suiv.}. COURS DU SANG DANS LES VAISSEAUX PULMONAIRES. 357 quand on observe au microscope les progrès du travail inflam- matoire ; car, par le fait même de cette stase , le sang devient plus riche en acide carbonique. Mais ce sont là des questions qu'il ne suffit pas de discuter, et qui ne peuvent être résolues dû à une action nerveuse réflexe dé- lermiaée par le contact de l'oxygène avec la surface respiratoire. Du reste, le fait de la persistance de la circulation , pendant un certain temps, après l'alTaissement du pou- mon, ne prouve pas que le passage du sang dans les capillaires de cet organe soit aussi facile quand celui- ci est contracté que lorsqu'il est dis- tendu par Texpansiou du thorax, et il y a même lieu de croire qu'il en est tout autrement. Quand la cavité thoracique s'agrandit, comme cela a lieu pendant l'inspiration, il est pro- bable que les petits vaisseaux creusés dans la substance des poumons, aussi bien que les cavités aérifères circon- scrites par le tissu extensible de ces organes, augmentent de capacité, et si les capillaires se dilatent de la sorte, la résistance que ces canaux étroits opposent au passage du sang doit di- minuer et le cours de ce liquide deve- nir plus facile. Cet effet des mouve- ments inspiratoires sur la somme des aires des capillaires pulmonaires est difficile à démontrer expérimen- talement, parce que la distension du poumon pur remprisonnemenl d'un grand volume d'air dans son inté- rieur ne saurait influer de la même manière sur l'état de ces petits vais- seaux, cl doit tendre plutôt à en diminuer le calibre; mais l'accéléra- tion de la circulalirjii qui se mani- feste toutes les fois que les luouve- monls inspiratoires se précipitent nu* paraît dépendre en partie de celte cause. En effet, le sang, revenant alors plus rapidement au cœur, stimule cet organe plus promptement et provoque dans un temps donné un plus grand nombre de contractions, il ne faut cependant pas attribuer seulement à cette circonslance la fréquence du pouls qui s'observe quand la respira- lion est accélérée, car l'afïlux du sang veineux dans la portion inlra-thora- cique des veines caves doit aussi y contribuer. Peut-être pourrait-on expliqueraussi par l'agrandissement des capillaires pulmonaires durant l'inspiration les eflets utiles que M. Piorry assure avoir obtenus de l'accélération volontaire des mouvements Ihoraciques dans les cas où il y a stase inflammatoire des liquides dans ces petits vaisseaux. A l'aide des données lournies par la plessimélrie , ce pathologiste pense avoir pu constater que , sous l'in- fluence de mouvements respiratoires grands et fréquents, le volume du cœur diminue momentanément d'une manière très remarquable. Ses obser- vations, communiquées à l'Académie au moment même où cette feuille va être mise sous presse, sont trop ré- centes pour que j'aie pu me former une opinion quant à leur exacti- tude; mais si le résultat annoncé n'est pas conirouvé, il en faudra con- clure que la précipitation des grands mouvements respiratoires tend à la fois il désemplir les cavités du cœur 358 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. que par de nouvelles recherches expérimentales. Je ne m'y arrêterai donc pas davantage dans cet exposé de l'état actuel de la science physiologique. État fœtal § 3. — En étudiant anatomiquement les vaisseaux de la petite des organes . -. . ,.,,,, de la petite circulation, nous avons trouve qu a 1 époque de la naissance l'ar- circulalion. ^ , . ■ i •/> . ,., tere pulmonaire, avant de se miurquer, communique librement avec l'aorte par l'intermédiaire d'un tronc anastomotique appelé canal artériel (1), et que l'oreillette droite débouche dans l'oreil- lette gauche par un orifice nommé trou de Botal (2) . Il en résulte qu'à ce moment, aussi bien que pendant la vie intra-utérine, la circulation ne se fait pas de la même manière que chez l'enfant plus avancé en âge et chez l'adulte. La totalité du sang qui arrive au cœur par les veines caves, et qui pénètre dans l'oreillette droite, n'est pas obligée de passer dans le ventricule correspondant et de se rendre ensuite aux poumons ; une portion de ce liquide s'échappe du premier de ces réservoirs cardiaques par le trou de Botal, et se déverse directement dans l'oreillette gauche, qui le transmet à l'aorte par l'intermédiaire du ventricule du même côté ; l'autre portion du sang reçue par l'oreillette droite des- cend dans le ventricule adjacent, et s'engage ensuite dans l'ori- fice de l'artère pulmonaire ; mais le courant établi ainsi dans ce vaisseau ne va qu'en partie aux poumons , et se sépare bientôt en deux branches dont l'une gagne ces organes, tandis que l'autre prend le chemin de traverse formé par le canal artériel, et arrive directement dans l'aorte sans avoir traversé et à facililer le passage du sang dans rnonaire, mais on n'y trouve aucun les capillaires du poumon {a). résultat expérimental nouveau, et le Je dois ajouter que M. Frey a pu- sujet est envisagé surtout au point de blié un travail spécial sur l'étude des vue médical (6). circonstances qui peuvent faire varier (1) Voyez tome IIl, page 603. la pression du sang dans l'artère pul- ('2) Voyez tome III, page 50/i. [a) Piorry, Influence des 7'esplralions profondes et accélérées sur les maladies du cœur, du foie, des -poumons, etc. (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1858, t. XLVIIl, p. 689). (6) H. Frey, Von den Yerschiedenen Spannungsgraden der Lungen Arterie {Archiv fur physio- logisclie Heilkunde, 1846, t. V, p. 520). COURS DU SANG DANS LES VAISSEAUX PULMONAIRES. 359 ni les capillaires de la petite circulation, ni les cavités gauches du cœur. A cette période de la vie, la circulation du sang dans les vaisseaux pulmonaires est donc incomplète, et sous ce rap- port l'enfant nouveau-né , de même que le fœtus de tous les Mammifères , nous rappelle ce qui existe d'une manière per- manente chez les Vertébrés pulmonés à sang froid, bien que la disposition anatomique dont dépend cette particularité phy- siologique ne soit pas la même dans ces deux groupes zoolo- giques. Mais, ainsi que je l'ai déjà dit, ces communications directes entre la base des deux cercles vasculaires ne persistent que peu de temps dans la classe des Mammifères, et, en géné- ral, dès que les poumons entrent en fonction, le canal artériel commence à se resserrer, et le trou de Bolal tend à se fermer. D'ordinaire ce travail d'occlusion marche très rapidement , et au bout de quelques jours la totalité du sang veineux qui arrive à l'oreillette droite est obligé de traverser l'appareil respira- toire pour parvenir au système vasculaire centrifuge. Dans une autre partie de ce cours, nous reviendrons sur l'étude de la circulation chez le fœtus, et ici je me bornerai à ajouter que, dans quelques cas tératologiques, l'état embryonnaire dont je viens de parler persiste jusque dans l'âge adulte et détermine un trouble considérable dans le travail circulatoire (1). En effet, (1) Nous avons vu ci-dessus que la cet état tératologique (6), et M. Briicke persistance du trou de Botal n'est pas pense que la petite fente oblique qui rare [a) ; mais l'existence d'une petite subsiste souvent dans ce point ne ouverture dans cette partie de la cloi- laisse pas passer de sang dans l'oreil- son inler-auricnlaire ne sullil pas pour lette gauche, parce que ce liquide déterminer des symptômes de cya- rencontre moins de pression dans nose. Ainsi M. ^atalisGuillot a trouvé l'artère pulmonaire, à raison de la cette communication ouverte chez succion exercée sur ce vaisseau par plusieurs vieillards qui, pendant l.i le tissu élastique du poumon (c). vie, n'avaient présenté aucun indice de II est plus rare de voir la cyanose (a) Vnjcz loiiio III, |)ap;e 505. (ft) Voyez (Iri^ollo, TraiU de pathiilDiiic interne, l. Il, \>. li.'iS. {c)\»yuy. Hcii\e elMeksncv, liei'ichl ilber dev l''(n-lschv. derAnal.und rituswl. un 1850 {Zcitschr. fiir ralionn. Med., 3' série, l. I, p. 431). 360 MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. l'influence de la respiration ne s'exerce alors que sur une por- tion du sang en mouvement dans l'économie, etc'est un mélange de sang veineux et de sang artérialisé qui est distribué par le système aortique dans les différentes parties de l'organisme. Cet état morbide est accompagné d'une coloration bleuâtre de la peau qui, dans certaines parties, le voisinage des yeux et de la bouche, par exemple, devient souvent tout à fait livide. De là le nom de cyanose que les médecins ont donné à cette maladie (1). dépendre de la persistance du canal n'avait pas échappé à l'attention de artériel ou d'un arrêt de développe- Senac et de Corvisart, on peut con- nient dans la cloison inlerventricu- snlter avec avantage les écrits de laire. En général, la gêne de la respi- Meckel (a), de M. Gintrac, de M. Louis ration et les autres accidents qui dé- et de plusieurs autres patliologistes. pendent de ces vices de conformation (1) La coloration ijleuatre ou vio- s'aggravent rapidement dans les pre- lacée de la peau peut être déterminée niiers temps qui suivent la naissance, par d'autres causes, telles que l'usage et, après quelques mois ou quelques interne de l'azotate d'argent, et, dans années d'une vie languissante, le ma- la cyanose pioprement dite, ce phé- lade succombe le plus ordinairement. nomène paraît dépendre du trouble Quelquefois des accidents de ce genre introduit dans la circulation capillaire ne sont pas congénitaux, et se décia- par le vice de conformation du cœur rent à un âge plus ou moins avancé, ou de l'artère pulmonaire, plutôt que par suite de l'établissement d'une par la présence d'une certaine pro- communication pathologique entre les portion de sang veineux dans le sang deux côtés du cœur. Pour plus de distribué aux diverses parties du corps détails au sujet de cette affection qui par le système aortique. (a) Mccliel , Beilvag zur Geschichte der Bildunqsfehler des He.r%ens welche die Bildung des rothen Blutes hindern {Deutsches Archiv fur die Physiologie, 1815, I. 1, p. 274). — Gintrac, Observations et recherches sur la cyanose, ou maladie bleue, 1824. — Louis, Observations suivies de considérations sur la communication, des cavités droites avec les cavités gauches du cœur (Archiv. gén. de méd., 1823, t. lit, p. 325). ■ — Tlioro, Mém. sur le vice de conformation du cœur consistant seulement en iine oreillette et un ventricule {Archiv. gén. de méd., 1842, 3» série, t. XV, p. 316). — Diipau, Cyanose congénitale chez- un enfant de huit ans {Gazette hebdomadaire de médecine, 1857, t. IV, p. 40). — Valelic, Note sur un. cas curieux de vice de conformation du cœur consistant en une oreil- lette et un ventricule (Gazette médicale, 1845, I. XllI, p. 97). — Spillu, Case ofCyanusis of forty Ycars standing dépendant upon congenial Obstruction in thepulmonary Artcry (Med. Chir. Trans., t. XXXI, p. 81). — Clievers, A Collection ofFacts Illustrative of the morbid Condition of the piilmonary Artery {LondonMed. Gaz., 1846, «•= série, t. lllj. — Wallacli, Ein FjU vom Blausucht, bedingl durch offenbleiden der Herzkammerscheideivand bei Verschliessung der Lungarterie und Fclden des Duciiis Arteriosus des Bolals. Nebst Tempe- rdtur Messung {Arch. fur physiol. Heilkunde, 1852, I. Xi, p. IH). COURS un SAING DANS LES VAISSEAUX PULMONAIRES, 301 Il est digne aussi de remarque que dans les cas où une por- tion du réseau capillaire de la petite circulation vient à être oblitérée ou détruite par suite du développement de tubercules dans les poumons, il arrive souvent que la nature supplée en partie à ce défaut, non-seulement en agrandissant les commu- nications anastomoliques entre les ramifications des artères bronchiques et pulmonaires, mais aussi en développant de nou- veaux vaisseaux dans des membranes adventives qui se forment entre la surface de ces organes et les parois de la cavité thora- cique, disposition qui relie le réseau capillaire respiratoire aux rameaux des artères intercostales, et qui ressemble un peu à ce que nous avons rencontré d'une manière normale chez certains Reptiles (1) ; mais ce sont là des phénomènes anormaux dont nous n'avons pas à nous occuper ici (2). Nous avons étudié successivement le passage du sang dans les cavités du cœur, le cours de ce liquide dans le système aortique , dans les capillaires qui établissent la communication entre ce système centrifuge et les veines dont se compose la portion centripète de l'appareil vasculaire général , puis son retour vers le cœur par ces veines elles-mêmes ; enfin nous venons de le suivre dans les diverses parties du système des vaisseaux pulmonaires. Nous avons donc examiné tour à tour chacun des actes particuliers dont la réunion constitue le grand phénomène de la circulation, et, au premier abord, la tâche que nous nous étions proposée pourrait paraître accomplie ; mais, pour connaître tout ce que les physiologistes ont décou- vert au sujet de cette fonction im[)ortantc, il est nécessaire de (1) Voyez tome H!, page ^i^lD. de ces vaisseaux advenlifs chez les (2) Voyez les ob.servaUons de M. N;i- plitliisiqiics (a), lalis (Jiiillot sur le développement (a) N. (iiiillot, Description des vaisseaux particuliers qui naissent dans les poumons tubercu- leux et qui dcviennenl au milieu de ces onjaucs des conduits d'une circulalion nouvelle { Joiii'iial V Expérience, 1837, t. I, p. 545). 362 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. nous y arrêter encore quelques instants , aiin de la considérer dans son ensemble, et de chercher en premier lieu quelle peut être la puissance du travail irrigatoire effectué de la sorte. Durée § /t. — Plusieurs physiologistes ont cherché à déterminer la d'une révolulion , , , / i .• • i , • pp < / i i circulatoire. Qurce dcs rcvolutious circulatoircs eltectuees par le sang dans le corps de l'Homme et de divers Animaux', c'est-à-dire le temps employé par ce liquide pour achever le parcours du cir- cuit vasculaire. M. Bering, professeur à l'école vétérinaire de Stuttgard, a fait à ce sujet des expériences très intéressantes, et tout récemment le mode d'investigation qu'il employait a été beaucoup perfectionné par M. Yierordt, de Tubingue (1). Pour évaluer le temps que le sang met à parcourir la totalité du cercle circulatoire, M. Hering introduit dans l'une des grosses veines, la jugulaire, par exemple, une certaine quantité d'eau chargée d'un sel dont la présence est facile à constater dans le sang, et il pratique à la veine correspondante du côté opposé une petite ouverture, de façon à recueillir, à des intervalles de temps déter- minés, des échantillons du sang qui passe dans ce vaisseau ; puis, à l'aide d'un réactif convenablement choisi, il fait l'essai de ces échantillons et détermine le moment où le sel commence à s'y montrer. Le temps écoulé depuis l'instant où la substance étran- gère a été injectée dans le torrent circulatoire jusqu'à l'instant où (1) Les premières expériences de irouvé que le prussiate de potasse est Hering sur ce sujet datent de préférable aux autres sels, et ilinjecte 1827 (a); mais elles ont été conti- dans les veines d'un Cheval environ nuées h diverses reprises, et ont été 30 grammes d'eau chargée de 1/S° de dernièrement le sujet d'un Mémoire celte substance. Les recherches de très étendu (6). Ce physiologiste a M. Yierordt datent de 1858 (c). (a) Hering, Versuche die Schndlùjkeit des Blullaufs und Absondenmg %u bestimmen {Zeit- chrift fur Physiologie von Treviranus, 1829, t. III, p. 85). (b) Herinj, Versuche ûber das Verhdltniss %iuischen der aahl der Puise und der Schnelligkeit' des Blutes {Zeitschrift fur Physiologie, 4 832, t. V, p. 58). — Hering-, Versuche ûber einige Moments die auf die Schnelligkeit des Blullaufs Einflus haben {Arch. furphysiol. Heilhunde, 1853, t. XII, p. 112). (c) Yierordt, Die Ercheimmgen und Geset%e der Slromgeschvjindigkeiten des Blutes, p. 55 et suiv. DURÉE DES RÉVOLUTIONS IRRIGATOIRES. S63 elle apparaît dans le sang ainsi recueilli, est celui que ce liquide aura employé pour passer du point d'introduction au point d'émission. Or, le sang qui vient de la tête par l'une des veines jugulaires ne peut parvenir dans l'autre jugulaire qu'après avoir passé successivement dans les cavités droites du cœur, dans les vaisseaux du poumon, dans les cavités gauches du cœur, dans toute la longueur des artères qui se rendent de ce dernier organe à la tête, dans les vaisseaux capillaires dépendants de ces artères et dans les branches afférentes de la veine jugulaire : il aura donc effectué une révolution circulatoire complète ; et si l'on admet que le sel introduit dans le courant veineux a été sim- plement charrié par le sang auquel on l'a mêlé et a circulé avec la vitesse dont celui-ci est animé, sans se répandre au loin dans ce liquide par voie de diffusion, il en faudra conclure que le temps observé est aussi celui pendant lequel une molécule quel- conque do sang parcourt le même trajet. Or, diverses expé- riences dont je rendrai compte ailleurs tendent à établir que le transport des matières salines employées dans ces expériences ne se ferait que très lentement par voie de simple diffusion, et que les erreurs dues à des effets de ce genre sont si petites, qu'on peut les négliger sans inconvénient. Il en résulte que la précision des résultats dépend surtout delà détermination exacte du moment où le réactif commence à se montrer à l'extrémité efférente du cercle circulatoire; et comme il s'agit ici de temps très courts, il faut pouvoir recueillir à des instants déterminés et fort rapprochés une série d'échantillons de sang dont on fait ensuite l'essai chimique. M. Hering se bornait à recueillir de cinq secondes en cinq secondes le sang qui sort de la veine ouverte à cet effet; mais M. Vierordt a eu recours à un moyen (|iii adnici beaucoup plus de précision. Il reçoit le sang dans une série de petits vases disposés sur un dis([iie (jui tourne (ïun mouvement uniforme, et es[)acés de façon à se présenter SÔ/l mécanisme de la CUIGULATION. succesivement sous le filet sanguin de seconde en seconde ou à des intervalles plus rapprochés encore. Les expériences de M. Hering portèrent principalement sur des Chevaux , et en prenant la moyenne entre les termes extrêmes ainsi obtenus, ce physiologiste évalue le temps d'une révolution circulatoire de jugulaire à jugulaire, chez cet Ani- mal, à 30 secondes ; mais la moyenne générale fournie par tous les résultais partiaux n'est que de 27", 3. Dans les expériences de M. Vierordt, ce trajet circulatoire a été parcouru chez les mêmes Animaux, terme moyen, en 28", 8 (1). Chez le Chien, ce circuit s'achève, terme moyen, en 15", 2; , Chez la Chèvre, en 12", 8; Enfin, chez le Lapin, en 6",9 (2). (I) Dans des expériences analogues, M. J. Blake injecta une solution de nilrale de baryte dans la veine jugu- laire d'un Cheval, et examina de 5 en 5 secondes le sang fourni par un orifice pratiqué à la carotide du côté opposé. Pendant les premières 15 se- condes qui suivirent l'opération, le sang artériel ne contint aucune trace de ce sel ; mais les échantillons re- cueillis entre la 15" et la 20% puis entre la 20' et la 25'^ seconde , en offraient abondamment, bien qu'à ce dernier moment le cœur eut déjà cessé de battre (a). En répétant sur un Cheval l'expé- rience de M. Hering, MM. MaUeucci et Pyria ont obtenu à peu près les mêmes nombres que ce physiologiste ; mais i\1. Matteucci pense que la ditru- sion de la dissolution saline dans le sang peut influer beaucoup sur la ra- pidité avec laquelle le réactif injecté (a) Blakc, On the Action of Poisons (Ediiih. Med. and Stirçi- Jouvn.. 1841, t. LVI, p. 416). (6) Mallcucci, Leçons sur les phénomènes physiques des corps vivants,, iSil, p. 320 ct^suiv. (c) Vierordt, Die Erscheinungen und Gcsetxe der Slrom.gescliu>indigkeilen des Blutes, p. 146. (d) Vollimann, Ildmodynamik, p. 253. dans la veine se montre dans une partie éloignée du système circula- toire, et que par conséquent on ne peut avoir que peu de confiance dans ce mode de détermination de la durée 'de la révolution circulatoire (6). (2) Dans une expérience faite sur un jeune l'.enard, M. Vierordt trouva 12", 69; mais il croit que celte éva- luation est trop élevée (c). D'après AI. Hering, la durée de la révolution circulatoire, estimée de la sorte, serait un peu moindre chez le Bœuf que chez le Cheval. AI. Volk- mann porte ces évaluations beaucoup plus haut que M. Vierordt, mais ne paraît se baser que sur des calculs théoriques : suivant ce physiologiste, la durée de la révolution circulatoire serait de 120 secondes chez les Che- vaux, de /lO secondes chez le Chien, et de 2Zi secondes chez le Lapin [d). DURÉE DES RÉVOLUTIONS IRRlGATOIkES. 365 M. Hering a constalé aussi que le temps nécessaire à l'aehè- vement du parcours circulatoire dans les diverses parties du corps d'un même Animal augmente avec la longueur du trajet, mais pas d'une manière proportionnée aux distances à franchir; car la vitesse du courant est 1res grande dans les gros vais- seaux, et la majeure partie du temps employé à l'accomplis- sement de la révolution complète est consacrée au passage dans les capillaires. M. Yierordt est arrivé au même résultat. Ainsi, en moyenne, le temps que le sang chargé de cyanure rouge de potassium met à passer d'une jugulaire à l'autre est d'environ i\ moins grand que celui nécessaire pour que le réactif, partant du même point, se retrouve dans la veine crurale (1). En se fondant sur cet ensemble de faits et sin^ quelques con- sidérations secondaires, M. Yierordt a été conduit à penser que la durée de la révolution circulatoire chez l'Homme doit être à peu près intermédiaire entre ce qu'il avait constaté chez le Cheval et chez le Chien, et il l'estime à 23 secondes (2). (1) Dans une série d'expériences, De la veine jugulaire à l'artère crii- où le temps employé pour effectuer raie, 8'', 63 (a). le transport du réactif dans ces deux C2) En calculant de la sorte, ce portions du système circulatoire a été physiologiste évalue à 21", û la durée déterminé comparativement sur le du trajet d'une jugulaire à l'autre, et même Animal, M. Vieroidt a obtenu il fait remarquer que ce temps doit les résultats suivants : être plus long pour la circulation dans les membres inférieurs et dans le D'une veine De la veine ,, i i • . .i jugulaire jugulaire «y«'«'"e de la veuie porte ; d pense à i'auire. à la crurale. que 1/5' du volumc du sang n'accom- serondes. Spronti.s. P'^' ^on circult qu'cu 30 sccoudcs, et r^o ^ ^g 92 24, ■/G il arrive eftfin 23", 1 comme moyenne N° 2 17,98 20,45 générale (6); mais les bases de celte N" 3 d4,95 10,05 estimation ne me paraissent pas assez ^' ^ 13,40 13,40 solides pour que l'on puisse avoir beaucoup de confiance dans la préci- Termonoy,.,,. 10,32 18,08 siou du résultat. (a) Vierordt, Die Erscheimingcn xmd Geselae lier Slromijeschwmdiijkeiten des Blutes, p. ttS, (6) Vierordl, Op. cit., p. 111). 366 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. La concordance qui se remarque dans les divers résultats obtenus par ce physiologiste, et la grande rapidité avec laquelle certains poisons introduits dans le torrent de la circulation par voie d'absorption agissent sur des organes déterminés (1), me (1) M. James Blake, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les expériences relatives à l'action que diverses sub- stances toxiques injectées dans les veines exercent soit sur le cœur, soit sur les vaisseaux capillaires des pou- mons, s'est appliqué à déterminer le temps qui s'écoule entre le moment de l'introduction du poison dans le torrent de la circulation et l'appari- tion des premiers symptômes dépen- dants de leur action sur l'un ou l'autre de ces organes. Les diverses substances qui détruisent l'irritabilité du cœur, lorsqu'elles arrivent dans les vaisseaux propres de ses parois (l'arsenic, l'acide oxalique et beaucoup de sels métalli- ques, par exemple), manifestent leur action de 6 à l/i secondes après leur injection dans la jugulaire; ce qui semble indiquer qu'en moins de ill secondes elles ont été portées par le courant circulatoire dans les cavités droites du cœur, puisqu'elles ont par- couru les artères pulmonaires, les ca- pillaires qui y font suite, et les veines du même nom, pour arriver au ventri- cule gauche, et être chassées par les contractions de cet organe dans l'aorte, d'où elles auraient passé dans les artères coronaires. L'action locale du poison sur le tissu musculaire du cœur était indiquée d'abord par la diminution de la pression dépen- dante des contractions de cet oi'gane et mesurée à l'aide de l'hémodynamo- mèlre de !VL Poiseuille, Dans d'autres expériences du même ordre, M. Blake a vu, au bout de U secondes, de l'am- moniaque injectée dans la jugulaire d'un Chien apparaître sous la forme de vapeur dans l'air expulsé des pou- mons (a). Il résulte aussi des expériences de ce médecin, que le temps écoulé entre l'injection des poisons à action lo- cale , et la manifestation de certains indices de leurs effets, varie propor- tionnellement à la durée de la révolu- tion circulatoire, chez les divers Ani- maux dont on fait usage, et ne diffère pas notablement du temps employé par le sang pour aller de la veine ju- gulaire dans les capillaires des parois du cœur chez ces mêmes Animaux. Ainsi ces symptômes ont apparu au bout de h secondes et demie chez lés Lapins ; de 6 secondes et demie chez la Poule; de 12 secondes chez le Chien, et de 16 secondes chez le Cheval. La strychnine , par exemple, à la dose de 18 grains injectés dans la jugu- laire d'un Cheval, ne détermina aucun symptôme d'empoisonnement pendant les 16 premières secondes ; mais , au bout de ce temps , des raouve- (a) Blake, Mém. sur les effets de diverses substances injectées dans le système circulatoire {Archives générales de médecine, 1839, 3° série, t. VI, p. 284). Observations and Experiments on the Mode in luhich varions Poisonous Agents act on the AiiimalBody (Edinburgh Med. and Surg. Journ., 4840, t. LUI, p. 35). — On the Action of certain inorganic Compoimds when introdiiced directJy into the Blood [Edinl). Med. and Surg. .fottm., 1841, t. LVI, p. 104), DURÉE DES RÉVOLUTIONS IRRIGATOIRES. 367 font penser que cette évaluation n'est pas très éloignée de la vérité. La distance parcourue par chaque molécule de sang dans ce court espace de temps ne saurait être évaluée en moyenne à moins de 3 mètres , et en prenant cette limite inférieure pour, base de nos calculs, nous trouverions donc que chez l'Homme le torrent circulatoire coule à raison de 7"', 8 par seconde : ce qui correspond à /i68 mètres par minute, et à 28 kilomètres par heure, vitesse que nos meilleurs Chevaux ne pourraient soutenir longtemps. § 5. — La comparaison des temps employés pour l'accom- Rapport plissement d'une révolution circulatoire et la fréquence des cette durée ^ et le nombre battements du cœur jettent d'utiles lumières sur la manière dont des baitements du cœur. cet organe fonctionne. Par cela même que le sang envoyé du ventricule gauche dans toutes les parties du corps revient à son point de dé- part au bout d'un temps donné, nous devons supposer que pendant ce même espace de temps la totalité du sang existant dans le système vasculaire de l'Animal a dû traverser ce ré- servoir. Durant cet intervalle, le cœur bat un certain nombre de fois, et par conséquent la valeur de chaque coup de piston donné par la pompe cardiaque doit correspondre à une certaine fraction de cette quantité totale: ou, en d'autres termes, le volume de sang lancé dans l'aorte par chaque systole doit être égal à cette quantité totale divisée par le nombre des con- mcnis spasmodiques se déclarèrent injectée de la même manière, mani- dans les muscles ilioraciqiies, et à la festa son action en ^secondes et demie, 17' seconde; l'Animal tomba à terre et au bout de 7 secondes l'Animal dans un étal tétanique des plus vio- était déjà dans un étal de mort appa- lenls. Chez un Lapin, la strychnine, rente (a). (a) LIake, On Ihe Aclion of l'oisom {Edinb. Med. and Sury. Journ., 1841, t. LVI, p. MG et »uiv.). 368 MÉCANISME DE LA CIKCL'LATiON. tractions nécessaires pour l'achèvement de la révolution cir- culatoire. Si le volume expulsé ainsi du ventricule gauche à chaque contraction de ce réservoir, volume que j'appellerai la valeur systolaire^ était toujours le même , la vitesse de la circulation serait en raison directe de la fréquence de ces battements; et quand la vitesse moyenne du sang est constante, c'est-à-dire quand la durée de la révolution circulatoire ne varie pas, la valeur systolaire serait en raison inverse du nombre de ces coups de pompe effectués pendant que cette révolution s'accomplit. Connaissant la valeur de la révolution circulatoire, et constatant le nombre des battements du cœur en un temps donné, nous pourrons donc arriver à connaître aussi la valeur systolaire rela- tive de ces mouvements. Les expériences de M. Bering et de M. Vierordt, employées delà sorte, tendent à établir que chez tous les Mammifères la valeur systolaire moyenne est dans un rapport constant avec la quantité totale de sang que le cœur est chargé de mettre en mouvement. Ainsi, dans chacune des espèces sur lesquelles portent ces recherches , on compte , terme moyen , de 26 à 28 batte- ments du cœur pendant l'espace de temps employé à l'ac- complissement de la révolution circulatoire. Il en résulte que chez tous ces Animaux , quelles que soient la vitesse du tor- rent sanguin ou la quantité de liquide en mouvement dans leurs vaisseaux, la valeur systolaire ou la capacité fonction- , nelle du ventricule gauche est égale à environ ij du volume total du sang. Par exemple , dans les expériences de M. Vierordt , le nombre des battements du cœur chez les Lapins était en moyenne de 210 par minute, et la durée de la révolution circulatoire était de 7",Û6. Par conséquent , le ventricule gauche chassait dans les artères , à chaque systole , envi- DURÉE DES RÉVOLUTIONS IRRIGÀTOIRES. 369 ron 21; de la quantilé totale da sang dont ces Animaux sont pourvus ; car 60 : 210 :: 7,/i6 : 26,1. Chez la Chèvre , le même physiologiste obtint comme expression de la durée du mouvement circulatoire 14'',l/i, et compta par minute 110 battements du cœur; or 60 : 110 :: là,lli : 26. Chez les Chiens sur lesquels M. Yierordt mesura la durée de la révolution circulatoire, celle-ci était en moyenne de 16'', 7, et le cœur se contractait 96 fois par minute. Le rapport entre le temps employé par le cœur pour accomplir un battement et la durée du mouvement circulatoire était donc comme 1 est à 26,7 (1). Les expériences faites par M. Bering sur des Chevaux dans l'état normal ont donné, pour la durée de la révolution circu- latoire , ol",5, et pour la fréquence du pouls, 55 par minute. Or, la réduction de ces nombres donne encore pour expression du nombre des mouvements systolaires correspondants à cha-r cune de ces révolutions, 28,8. Enfin, l'évaluation que j'ai rapportée il y a quelques instants comme représentant approximativement la durée d'un mouve- ment circulatoire chez l'Homme donne pour le nombre corres- pondant des systoles du cœur 27,7, si l'on suppose que le pouls bat 72 fois par minute, degré de vitesse qui en effet s'observe le plus fréquemment. La concordance de tous ces résultats est fort remarquable, et me porte à croire que lors même qu'il y aurait quelque inexac- titude dans la valeur réelle du temps que M. Yierordt considère comme étant nécessaire à racc()m[)lissement de la révolution circiihiloii'o clic/ ces divoi's Mammilèrcs, la loi foi'inulée par ce (1) Vieiordt, 0/*. ril., p. i;jo. IV. 24 o70 MÉCANISME DE LA CIUCULATION. physiologiste doit être vraie, et que pro'itablemeiit dans toute cette classe de Vertébrés la valeur systolaire est dans un rapport con- stant avec la quantité de sang en circulation, ou, ce qui revient au même, avec la durée d'un mouvement circulatoire complet. On peut exprimer aussi ce résultat, en disant que chez ces Mammifères, la durée moyenne de la révolution circulatoire dans chaque espèce est proportionnelle à la durée d'un batte- ment du cœur dans cette même espèce , ou en raison inverse de la fréquence du pouls de l'Animal. Influence § 6. — Daus Ics évaluatlous précédentes il n'a été question l'accéiéîat.on q^G dcs résultats moyens fournis par la série totale d'expériences *^''dJ'cœTr^"" dont chaque espèce a été l'objet; mais les résultats extrêmes dfia Jëvoiuiion s'éloigncut plus ou moins de cette moyenne, et il importe de cucuiatoire. gjjy^jj, quellcs sout Ics circonstanccs qui coïncident avec les variations les plus considérables. M. Hering et M. Yierordt se sont l'un et l'autre occupés de ces questions, et un des faits les plus intéressants qui ressortent de leurs expériences est relatif à l'inégalité des valeurs systolaires chez un même individu. Nous avons vu que, chez les diverses espèces de Mammifères, l'effet utile produit par le jeu de la pompe cardiaque , c'est-à- dire la quantité de liquide lancée par le ventricule aortique en un temps donné, est toujours en rapport avec le nombre des battements de cet organe. Au premier abord, on pourrait donc croire qu'il doit en être de même chez les individus, et que toute accélération dans le pouls doit entraîner une augmentation dans la vitesse du torrent circulatoire. Les médecins partagent géné- ralement cette opinion, et supposent que chez le malade dont le cœur bat 100 ou 120 fois par minute, la circulation est beaucoup plus rapide que chez l'Homme dans l'état normal, où l'on ne compte qu'environ 70 ou 75 pulsations dans le même espace de temps. Mais l'expérience vient démontrer que cela n'est pas. Quand les mouvements du cœur se précipitent, sa valeur sys- tolaire diminue presque toujours ; soit que le ventricule gauche DURÉE DES RÉVOLUTIONS 1RR1G\T0IRES. 371 ne se dilate pas autant que dans les circonstances ordinaires , soit que ce réservoir se vide moins complètement au moment de sa contraction, toujours est-il que le volume de sang lancé dans l'aorte à chaque battement est moins grand que dans l'état normal . Ainsi, nous savons qu'un exercice violent accélère beaucoup le pouls; et dans une des expériences faites par M. Hering sur un Cheval, le nombre des battements du cœur étant normale- ment de 36 par minute , s'est élevé à 100 par l'effet d'une course au trot. Quand le cœur ne battait que 36 fois par minute, la révolution circulatoire s'opérait en 22", 5 et sous l'influence de 13,5 systoles. Si l'accélération du mouvement circulatoire avait été proportionnelle à l'augmentation du nombre des coups de piston donnés par la pompe cardiaque, ce mouvement se serait donc accompli en moins de 8 secondes quand le cœur se contractait 100 fois par minute; mais l'expérience prouva que dans ces conditions la durée de la révolution circulatoire était encore de 17", 5. La valeur de chacun de ces coups de pompe était diminuée dans le rapport de 135 à 292, et, en tri- plant presque le nombre de ses contractions, le ventricule gauche n'avait augmenté la vitesse du courant sanguin que d'environ | (1). (1) Dans celte expérience faite à Les mêmes nombres furent obtenus un jour d'intervalle sur le même dans une autre expérience. Ainsi la Clieval, M. Ilering trouva d'abord par durée de la révolution circulatoire minute 36 pulsalions et 8 inspira- était, en moyenne, de 17", 5 sous Tin- tions. Le cyanure jaune, injecté dans fluence des battements précipités du une des jugulaires, se montra dans le cœur, et de 22", 5 quand ceux-ci se .sang tiré de l'autre veine au bout de faisaient lentement. Dans ce dernier !20 à 25 secondes. Après la course qui cas, le cœur se contractait 13 fois et fit monter le nombre des pulsalions demie pendant la durée de la révolu- à 100, et celui des mouvements res- tion circulatoire, et, dans l'autre cas, piraloires à 28 , le même résultat 29,2 fois pour produire le même ré- s'oblint entre la 15" et la 20'' seconde. sullat (a). (a) Hering , Versuche ûber einige Moments die auf die SchneUiykcit des lihtlhivfs Elnflvsl hnben (Arch. fur phyuinl. Ileilkundc, IRr.S, t. Xll, p. 134). 372 MÉCAA'ISMK DIÎ LA ClUCULATION. Quelquefois la diminution de la valeur fonctionnelle de la sys- tole qui accompagne l'accélération anormale des battements du cœur est même assez grande pour compenser l'effet produit par cette augmentation dans le nombre des pulsations, et l'on voit la vitesse du courant circulatoire rester invariable, malgré les différences qui se manifestent dans la vitesse des battements du cœur; enfin, dans d'autres cas, l'accélération des mouvements de cet organe coïncide avec une diminution si considérable dans l'étendue de ces mêmes mouvements, que le cours du sang se ralentit à mesure que la fréquence des pulsations augmente. Comme exemple de ce dernier résultat, si contraire aux idées généralement admises parmi les palhologistes, je citerai les fiuts constatés par M. Hering chez des Chevaux. Ainsi que je l'ai déjà dit, la révolution circulatoire s'accomplit normalement chez ces Animaux dans l'espace de 29 secondes et par l'action d'environ 27 coups de la pompe cardiaque. Le cœur bat alors au plus 55 fois par minute; mais, chez des Chevaux atteints de maladies fébriles ou d'inflammations locales, on compte souvent une centaine de pulsations dans le même espace de temps, et alors M. Hering a trouvé que la durée de la révolution circu- latoire pouvait être augmentée de plus de j et être même de /i2 secondes (i). (1) Chez un Cheval déjà affaibli voliilion éiant de 35 à /lO secondes, par la maladie, M. Hering dclormina Enfin, le troisième jour, le cœur bat- une inflammation du péricarde en tait 100 fois par minute, et le sang injectant de l'ammoniaque dans ce mettait à parcoiuir la totalité du cer- sac membraneux. Au commencement clc vasculaire de àO à /|5 secondes. de l'expérience, le nombre des piil- Dans plusieurs antres expériences du salions était entre 72 et 8Zi, et la durée même auteur, on voit le mouvement de la révolution circulatoire d'environ circulatoire tomber au-dessous de la 25 secondes. Le lendemain , le pouls vitesse normale, chez les Chevaux était monté à environ 90; mais la malades dont le cœur bat d'une ma- vitesse de la circulation était nota- nière précipitée (o). blemcnt diminuée ; la durée d'iiiie rO- (a) Hering', Op. cit. {.\i\h. Inr ph>js. Iklll;., t8,j3, t, XII, p. t32 cl sniv,). DL'nÉI-: D!'S UÉY0LLT10ri du sang rendre compte peuvent nous éclairer relativement a la quan- l'orga-Sme. tité dc saug qui traverse certains organes. Ainsi M. Brown- Séquard, adoptant la valeur systolaire admise par M. Volkmann, et évaluant de la sorte à environ 12 likO kilogrammes le poids du sang qui chez l'Homme sort du ventricule gauche en vingt- quatre heures, a calculé qu'il doit arriver plus de 1000 kilo- grammes de ce liquide par jour dans les vaisseaux du foie, et qu'une quantité presque aussi considérahle doit traverser en même temps les vaisseaux de l'appareil urinaire (2). (1) Voyez tome II, page 51/4. desdiles branches artérielles. Ainsi, (2) Tour arriver à ces estimations, en représentant par 28 millimètres le M. Brown-Séquard admet, comme je diamètre de l'aorte à son origine, il viens de le dire, qu'en vingt-quatre obtient le carré de ce nombre (=78/i) heures il passe dans le système aor- comme expression de l'aire du tube tique, en aval de l'origine des ar- qui débite en vingt -quatre heures 1ères cardiaques, 12 oOO kilogrammes 12/i/|0 kilogrammes de sang, et en de sang, et que la quantité qui évaluant à 5 millimètres le diamètre s'engage dans les artères dont dé- du tronc cœliaque, à /i'"'",96 le dia- pend le système de la veine porte mètre de l'artère mésentérique supé- est une certaine fraction de celte rieure, et à Zi""",60 le diamètre de quantité, proportionnelle à la diiïé- l'artère mésentérique inférieure, il rence qui existe entre l'aire de l'en- trouve pour l'aire dc ces trois vais- Irce de l'aorie et la somme des aires seaux ces mêmes nombres élevés au RÉPARTITION IRRIGATOIRE, 385 § 11. —Mais la puissance du travail irrigatoire dans les diverses parties de l'économie n'est pas réglée seulement par le débit de la pompe cardiaque et le calibre relatif des diffé- rentes branches du système artériel; elle est subordonnée aussi à d'autres circonstances, parmi lesquelles je citerai en pre- mière ligne l'influence inégale de la gravitation sur le cours de ce liquide dans les vaisseaux centrifuges, qui, en se rendant aux organes, s'élèvent plus ou moins verticalement ou bien descen- dent vers le sol. Il est facile de comprendre que le travail utile effectué par cet agent moteur central doit être plus grand dans les branches de cet appareil hydraulique, où le poids du liquide tend à en accélérer le mouvement, que là où le courant doit vaincre les effets dus à la pesanteur. Si les artères et les veines formaient un système de tubes à parois rigides, ils constitue- raient des siphons, et le poids de la colonne dans l'une des branches de ce système ferait équilibre au poids de la colonne correspondante dans l'autre branche, quelle que fût la direction du tube coudé; mais ici il n'en est pas de même : les parois des vaisseaux sanguins, surtout celles des veines, sont très extensibles et faciles à déprimer ; par conséquent, les mouve- carré, c'est-à-dire !25 millim., 2Zi""°,6 physiologiste adopte le diamètre de et Sl-'-^g. 5""',^ (dont le carré = 29""",76) , et, La somme de ces aires est donc pour celle du côté droit, le diamètre ,j^„„5 de 5'""',5h; par conséquent, pour l'aire, 30""", 69. Faisant ensuite uncal- Par conséquent, cul de proportion comme dans le cas ^^ i - P''(-cédent, il trouve que si l'aorte dé- ■■''■■ ='^'5; bite en vingt-quatre heures 12 300 ki- d'où logrammes de sang, l'artère rénale 12300 X ■îl -5 gauche doit livrer passage à Z|57 kilo- "^ ^ T8Î '~~^ ''^^^' grammes, ot l'artère rénale droite à ^81 kilogrammes ; ce qui donne un l'our l'artère rénale gauche, ce total de 938 kilogrammes {a). (a) Browii-Séquard, .Sio' (ks fuils qui scmblenl montrer que plusieurs lùloyrammcs de jibriiic se forment et se Irrinsfurinni! duiqvr jour ilans le corps de rilrmimr (.lournal de phusinUmic i8r.«, I. I, p. 30.")). ■ ' 'V. 2:> Influence de la gravitalion. 386 MÉCANISME DE LA. CIRCULATION. ments du courant ne sont pas solidaires dans les deux moitiés de chaque portion de l'appareil circulatoire, et le sang tend à s'amasser dans les parties déclives en même temps qu'il ne se porte qu'en moindre abondance dans les parties élevées. Ainsi quand l'Homme est dans la position verticale, la quantité de sang qui arrive à la tête est, toutes choses égales d'ailleurs, moins grande que lorsqu'il est dans une position horizontale ; et c'est pour cette raison qu'il est si utile de coucher les per- sonnes qui, sous l'influence d'une hémorrhagie, tombent en syncope par suite d'un défaut d'activité dans la circulation encéphalique. § 12. — Les variations dans la pression que supporte la sur- face extérieure du corps n'ont que peu d'influence sur la circula- tion, lorsqu'elles se produisent à la fois sur toutes les parties de l'organisme (1) ; mais lorsque l'équilibre est rompu, et que cer^ taines parties se trouvent soustraites à l'action du poids de l'atmosphère ou sont soumises à une pression insolite, le mode de distribution du sang dans l'intérieur de l'économie est mo- difié. Là où la pression est diminuée, les liquides affluent en plus grande quantité que d'ordinaire ; et là où les artères sont pressées de dehors en dedans, le sang ne coule pas avec l'abon- (1) M. Poiseiiille a fait, à ce sujet, Batraciens, il a reconnu que ni une une série d'expériences au moyen pression de 5 ou 6 atmosphères, ni le d'un petit appareil qu'il nomme porie- vide presque complet, ne modifient objet pneumatique, et qu'il a disposé d'une manière appréciable le mouve- de façon à pouvoir observer au mi- ment du sang dans les vaisseaux (a), croscope la circulation chez des Ani- Quant à l'influence du degré de pres- maux renfermés dans un espace où il sion extérieure sur la fréquence des fait le vide, ou dans lequel il com- battements du cœur chez l'Homme , prime de l'air. En expérimentant de je renverrai à ce qui en a été dit dans la sorte sur des petits Mammifères la trente-deuxième Leçon (6). nouveau-nés, aussi bien que sur des {a) Poiseuille, Recherches sur les causes du mouvement du sang dans les capillaires, chap. ill, art. 4, p. 65 et sniv. (extr. dos Mém. de l'Acad. des sciences, Sav. étrang., t. VIT). (6) Voyez i;i-(lessiis, page 78. RÉPARTITION IRRIGATOIRE. 387 dancê accoutumée. Ainsi en plaçant la jambe d'un Homme dans une des machines pneumatiques que les médecins connaissent sous le nom de ventouses Junod^ on peut attirer une si grande quantité de sang dans les vaisseaux de ce membre, que la circu- lation de ce liquide dans la tête s'en trouve notablement affai- blie et produise sur l'encéphale les effets qui d'ordinaire sont les conséquences d'une saignée abondante, bien que dans ce cas la quantité totale du sang contenu dans l'organisme n'ait pas varié (1). ^ 13. — C'est principalement l'influence de la pesanteur qui Phénomènes '■ ^ '■ cadavériques. détermine l'accumulation du sang dans les parties déclives du corps chez le cadavre ; mais, après la mort, on remarque une particularité singulière qui a fait naître chez les premiers physiologistes de l'antiquité des opinions fort erronées touchant les fonctions des artères (2). Le sang, au lieu d'occuper toutes les'parties de l'appareil circulatoire, s'accumule alors dans les veines, et les artères se vident plus ou moins complètement. Diverses hypothèses ont été proposées pour expliquer ce phénomène; mais pour s'en rendre compte, il suffit de se rap- peler que les artères sont douées d'une puissance de contraction tonique bien plus grande que les veines, et qu'en vertu de cette propriété, elles tendent à se resserrer, au point d'expulser tout le sang qui se trouve dans leur intérieur. Tant que le cœur, en (1) Des efi'ets analogues se mani- avurapplicaliondela grandeueniotise festent sur une petite éclielle dans Jimod produire des résultais fort re- rapplicaiion d'une ventouse sèche or- marquables , et il était d'avis que, dinairc, et il arrive souvent que lasuc- dans certains cas de congestion où la cion produite de la sorte détermine la saignée présenterait des inconvé- ruptufe des parois de quelques petits nients , la médecine pourrait obtenir vaisseaux sous-cutanés et l'épanché- de bons eflets du déplacement des ment d'une certaine quantité de sang liquides elleclué de la sorte (a). dans les tissus circonvoisins. Magendie (2) Voyez tome 111, page 11. (fl) Megciidiu, Lerims mr les phénomènes phyd'iueii de la vie, 1837, ), lll, p. a.'H. 388 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. se contractant, lance du sang dans leur intérieur, les effets de cette contraction lente sont contre-balancés et les artères restent remplies ; mais lorsque le ventricule gauche cesse d'y envoyer de nouvelles charges de liquide , rien ne s'oppose au retrait de leurs tuniques, et peu à peu tout le sang que ces vaisseaux renferment est poussé dans les capillaires, et de là dans les veines, comme dans les expériences où l'on a inter- rompu le passage dans un de ces vaisseaux centrifuges à l'aide d'une hgature, pour constater la manière dont il se videra en aval du point oblitéré. Or, nous avons vu aussi que cette con- tractilité tonique persiste assez longtemps après que le cœur a cessé de battre, et par conséquent son action peut suftlre pour déterminer la vacuité des artères dans le cadavre; car la coa- gulation du sang, qui, après la mort, ne tarde pas à s'effectuer dans les capillaires, empêche ce liquide de refluer des veines dans ces vaisseaux, lorsqu'ils ont été vidés de la sorte (1). (1) Les physiologistes ont beaucoup de sang dans les oreilletles du cœur disserté sur la cause de la vacuité des et dans les grosses veines contenues artères dans le cadavre. Harvey attri- dans cette même cavité (6). Mais , biia cet état à une obstruction des ainsi que le fait remarquer avec rai- vaisseaux des poumons au moment son M. Robert Hunter, le même phé- de la mort (a) ; mais il est évident que nomène s'observe chez des Animaux la cessation de l'arrivée du sang dans où aucune force aspirante de ce genre les cavités gauches du cœur ne suffi- ne peut se développer :les Oiseaux, les rait pas pour chasser des artères dans Reptiles et les Poissons, par exemple; les veines le liquide contenu dans le et d'ailleurs la contractililé tonique des système aortique. parois artérielles suflit pour chasser Carson a cherché à expliquer ce fait complètement le sang de ces vais- par l'action aspirante que les pou- seaux dans les veines, et nous savons mons, à raison de l'élasticité de leur déjà que celte contractiiité se con- lissu, développent dans la cavité tho- serve très longtemps après la mort(c), racique; succion qui, en effet, doit J'ajouterai qu'une des expériences tendre à produire une accumulation faites par M. R. Hunter, pour établir (a) Harvey, Exercitalio altéra ad J. Riolanum [Opéra omnia, p. H 5). (6) Carson, On Vie Cause of the VacuUy of the Arteries after Dealh (Mcdico-Cltiritrgical Transactions, 1891, t. XI, p. 165). (c) Voyez ci-dessus, page 195. PHÉNOMÈNES ACCESSOIRES. 389 § ill. — Il est aussi quelques autres phénomènes qui dépen- dent du mode de circulation du sang : par exemple, la turges- cence que l'accumulation de ce liquide peut déterminer dans divers organes dont le tissu est dit érectile. Je pourrais donc en traiter ici; mais, afin de ne pas prolonger davantage l'his- que l'aspiration thoracique intervient dans la production de cet état de va- cuité cadavérique, prouve qu'elle n'est pas nécessaire à l'accomplissement de ce phénomène. Ce physiologiste, ayant constaté préalablement que dans le cas où le thorax a été largement ou- vert et les grosses artères liées à leur origine, la portion périphérique du système artériel ne se vide pas com- plètement, répéta celte expérience en maintenant les poumons distendus par de l'air insufflé dans leur intérieur et retenu à l'aide d'une ligature placée sur la trachée, et il vit alors qu'après le refroidissement du cadavre, les ar- tères étaient complètement vides. Or, dans celte expérience, comme dans la précédente, toute cause d'aspiration thoracique était détruite, et l'on ne peut attribuer la vacuité des artères qu'à la contraction vitale de leurs pa- rois; contraction qui, un certain temps après la moit, cesse d'agir et permet aux parois élastiques de ces vaisseaux de reprendre leur position normale. Les expériences de M. R. Hunier ne dé- montrcntpas, comme celui-ci le pense, que l'aspiration thoracique inter- vienne dans la production du phéno- mène en question, mais elles prouvent que le passage plus ou moins complet du sang des artères dans les veines du cadavre est subordonné à la capacité des cavités fournies par ces dernières. En effet, lorsque M. R. Hunier em- brassait dans une même hgature l'em- bouchure des veines caves et l'origine de l'artère aorte, celle-ci se vidait plus imparfaitement que dans le cas où, toutes choses étant égales d'ailleurs, le sang de la veine cave pouvait avan- cer jusque dans le cœur, et la vacuité du système artériel devenait tout à fait complète lorsque les poumons étant distendus , au lieu d'être aifaissés comme dans les cas précédents, le sang veineux pouvait s'amasser dans les vaisseaux de ces organes aussi bien que dans les autres parties du système veineux (a). M. Holland a remarqué que, dans les cas de mort subite par submersion ou par strangulation, les artères se vi- dent moins complètement que dans les circonstances ordinaires, et il a été conduit de la sorte à attribuer la vacuité de ces vaisseaux à l'affai- blissement graduel du filet sanguin lancé dans leur intérieur par le cœur, à mesure que la puissance con- tractile de cet organe diminue (6) ; mais cette diminution aurait seule- ment pour effet d'arrêter l'écoulement (a) Hobert Hunier, On the Muscularily of Arteries {fidinbitryh Médical and Sunjical Journal, 1824, t. XXll, p. 205 clsuiv.). — Vuje/, alls^i, à co sujet, Kcnnel, Experimenls and lie/lexions on the Cause of the Vacuily of the .'\r\eiies afler iJealh {l'hilosophicat Magazine, 1822, ti" 9). (bj IlollaiiiJ, The l'i-operlies and Iniluence ofArleries on the Circulation of the lilood {lUdinh, Med. and Snnj. Jouru., 1841, I. LV, p. 17). 390 MÉCANISME DE LA CIRCULATION. toire de la fonction qui vient de nous occuper si longuement, je préfère renvoyer ce sujet à une autre partie du cours, et clore ici ces considérations sur l'irrigation physiologique considérée sous le double rapport de ses instruments et de son mécanisme. du sang des artères dans les veines, si ces vaisseaux ne se resserraient pas. Tout dernièrement , M. ïliudicum a clierclié à renverser la théorie de la vacuité des artères qui aujour- d'hui est généralement adoptée et qui a été exposée ci-dessus. Il argue prin- cipalement de ce fait que, dans quel- ques parties du corps, les artères sont logées dans des canaux osseux et y adhèrent de façon à ne pouvoir se contracter, et que dans quelques cas pathologiques les tuniques de ces vais- seaux sont rendues rigides par le dé- veloppement du tissu osseux dans leur épaisseur, mais que cependant les por- tions du système ainsi disposées se vident comme les autres ; enfin, cet auteur croit trouver une explication plus satisfaisante du phénomène, en attribuant aux capillaires une action aspirante qu'il appelle force de diffu- sion (a). Si les capillaires étaient vides, on pourrait cerlainement pen- ser qu'ils attireraient dans leur inté- rieur une portion du liquide contenu dans les artères; mais ils sont déjà remphs de sang, et par conséquent l'attraction capillaire ne saurait entrer en jeu. Quant à l'écoulement du sang dans les parties du système artériel dont les parois sont rigides, il me pa- raît facile de s'en rendre compte , du moment que les portions voisines de ce même système se sont vidées. Du reste, il faut se rappeler que la vacuité des artères n'est pas complète; seu- lement on dit que ces vaisseaux sont vides parce que la quantité de sang qui peut y être retenue est en général insignifiante. (a)Voyeî! Canstalt's Jahresbericht iïber die FortschrUte der (jesammten Medidn, 1855, 1. 1, p. 89. TRENTE -NEUVIÈME LEÇON. De la transsudation. — Perméabilité des parois vasculaires. — Épanchements séreux. — Transpiration insensible, ou évaporation. — Nécessité d'un travail de résorption. § 1. — Lorsqu'on isole par la dissection les vaisseaux san- preuves guins de l'Homme ou de tout autre Animal supérieur, ou lors- ^^ perméabilité qu'on observe au microscope le phénomène de la circulation vtscuialr'-s dans une partie transparente de l'organisme, et que l'on voit jg cïme. le sang couler comme un torrent dans l'intérieur d'un système de tubes dont les parois sont résistantes et n'offrent sur aucun point ni fentes ni pores visibles à nos yeux , on est naturellement porté à croire que ce liquide doit être sûre- ment emprisonné dans ces vaisseaux, et que rien ne saurait s'en échapper. Cependant, dès que les anatomistes ont com- mencé à faire usage des injections pour l'étude du système vasculaire , ils ont vu que ces conduits irrigatoires ne sont pas imperméables, et laissent facilement filtrer en dehors l'eau dont on les remplit. Pour peu que la pression sous laquelle ce liquide avance soit un peu forte, celui-ci se répand rapidement dans les parties circon voisines, et ne tarde pas à les distendre, de façon à produire un gonQement considérable. L'eau épan- chée de la sorte finit même par sourdre au dehors à travers la peau et les autres membranes ; cependant il ne s'est fait aucune déchirure dans les parois des vaisseaux sanguins ni uiv.). (c) Maxcugni, Vaaorum lymphalicorum hislovia, l. 1, p. ■!« (;t sniv., il l'i-ndronie d'un (nivra{je snr le syslémc drs vaiaseav.r tnuiphrili'inrs, Sionnr, ■17S''i, p. S cl Mii\. 39/1 TRANSSUDATIO??. Enfin je citerai une expérience dont j'ai souvent rendu témoins les étudiants de la Faculté des sciences. Si l'on prend un vaisseau sanguin d'une certaine longueur, dont toutes les branches latérales ont été liées avec soin , et si, après l'avoir courbé en forme d'anse, on le plonge dans un bain d'eau chargée de la teinture bleue du tournesol et qu'on y fasse passer un courant d'eau acidulée, on voit bientôt virer au rouge la partie du bain qui entoure le tuyau organique ainsi disposé, changement qui indique que la filtration d'une certaine quantité d'acide à tra- vers les parois de celui-ci s'est effectuée (1). Il est donc bien évident que sur le cadavre, au moins, les parois vasculaires n'opposent pas au passage des liquides une barrière infranchissable, et laissent échapper dans les parties voisines de l'organisme une portion de leur contenu. Mais tout en admettant ces résultats, que personne ne révoque en doute, on peut être partagé d'opinion au sujet de leur signi- fication ; et effectivement beaucoup de physiologistes les ont considérés comme dépendants seulement de l'état cadavérique et ne pouvant être appliqués à l'explication de ce qui se passe dans l'organisme vivant (2). Les expérimentateurs ont constaté (1) J'ai représenté, dans un de mes traces de ce sel dans la sérosité con- ouvrages élémentaires , le petit appa- tenne dans le péricarde (6). reil dont je me sers pour cette expé- (2) Ainsi Cruikshank, tout en citant rience, qui est très facile à faire et qui beaucoup de faits qui démontrent la est très démonstrative (a). perméabilité des parois vasculaires sur Je citerai aussi , à celte occasion , le cadavre, a cherché à établir que, quelques expériences de M. J. Davy, dans l'organisme vivant, rien de sem- dans lesquelles une solution de prus- blable n'existe, et que ni ces tissus, ni siate de potasse ayant été injectée dans aucune autre partie du corps , ne sont les veines de plusieurs cadavres , on perméables dans l'état physiologi- trouva, quelques heures après , des que (c). (a) Milne Edwards, Eléments de zoologie, 1 834, 1. 1, p. 40, fig. '1 4. — Voyez aussi Matteiicci, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, 1847, p. 78, fig'. (!)) J. Davy, On tlie Aije of Blorbid Adhésions and of the Fluid found in the Pericardium after Death {Researches Physiological and Anatomical, t. Il, p. 243 et suiv.). (c) Cniiksliank, Analomie des vaisseaux absorbants du corps humain, trail. par Polil-Railel, 4 787, p. 25 et suiv. PERMÉABILITÉ DES PAROIS DES VAISSEAUX. 395 cependant un grand nombre de faits qui me paraissent établir P'-euve* T \ 1 1 / \ '^'^ celle de la manière la plus claire l'existence de phénomènes analogues pormcabiiité pendant la vie, et prouver que les liquides en circulation dans les Animaux , , , . . i , . , , . , vivants. l économie animale ne sont qu incomplètement emprisonnes dans le système vasculaire, et peuvent s'en échapper en partie, pour se répandre dans les interstices des tissus circonvoisins. Ainsi, dans une de ses expériences sur la transsudation phy- siologique, Fodéra isola avec soin l'artère carotide dans une certaine longueur sur un Chien vivant, et plaça aux deux bouts de ce vaisseau des ligatures, puis introduisit de la noix vomique dans sa cavité. Le tube artériel ainsi disposé était simplement en contact avec les parties voisines où la circulation s'o[)érait comme d'ordinaire , et cependant le poison renfermé dans son intérieur ne tarda pas à manifester son action sur le système nerveux de l'Animal : la noix vomique avait donc été absorbée, et, pour être absorbée, cette substance devait être sortie préala- blement de la carotide où on l'avait logée; par conséquent aussi ce vaisseau à l'état vivant s'était laissé traverser par le liquide contenu dans sa cavité, à peu près comme il l'aurait laissé filtrer au dehors si l'expérience avait été pratiquée sur le cadavre (1). (1) Dans cette expéi'ience, Fodéra auteur plusieurs autres expériences avait eu soin de détruire toutes les qui tendent également à prouver que adliérences qui existaient entre la les parois des vaisseaux sanguins sont portion de la carotide sur laquelle il perméables aux liquides {a). Mais opérait et les parties voisines, de façon comme la plupart de ces recherches que la communication avec le reste de ont été faites en vue de Texplication l'organisme ne pouvait s'établir ni par du pbénomène de l'absorption, je me des vaisseaux lymphatiques, ni par les réserve d'en parler dans une autre vasa vasorum, ni même par des fila- partie de ce cours. monts de tissu conjonctlf : il y avait Je citerai également ici le passage simplement contact entre la surface suivant tiré des écrits de Mascagni : extcrnedu vaisseau et les li.ssiis vivants « l^n faisant des expériences sur les d'alentour (o). Animaux vivants, dit cet analomiste, On trouve dans l'opuscule de cet j'ai vu un suiuteineut des matières les {«; i o.léi'.i, licchaxhcs exijà-itnenlalcs sur t'absurpl'Kjii cl L'cxhalaiwn. lii-S, j'aris, 182i. 396 TR.VNSSUDATION. Mngendie a constaté aussi qu'en injectant une quantité con- sidérable d'eau dans les veines d'un Animal vivant , on peut faire sourdre ce liquide à la surface du péritoine, et produire dans la cavité abdominale une sorte d'hydropisie artificielle (i). Je pourrais multiplier beaucoup les faits qui mettent en évidence la perméabilité des parois vasculaires dans l'état phy- siologique; mais je crois inutile de m'arrêter davantage sur ce sujet, car les preuves de la possibilité du passage des liquides de l'intérieiu^ du système circulatoire dans les parties circon- voisines de l'organisme, pendant la vie aussi bien qu'après la mort, se présenteront en foule à mesure que nous avancerons dans l'étude des phénomènes de l'irrigation nutritive. Mais ce que j'en ai dit ne suffit pas pour fixer nos idées touchant le mécanisme de cette transsudation. Natmo Guillaume Hunter, Mascagni et quelques autres physiolo- ce piiénlmène. glstcs du sièclc demicr avaient été conduits à considérer ce phénomène comme étant dû seulement à la porosité des tissus dont les tuniques vasculaires sont formées, et comme devant être assimilé à ce qui se passe dans un filtre ou tout autre corps plus subtiles du sang par les porosités porosités des tuniques de ces vaisseaux des tuniques des ancres et des veines. H suinte une quantité considérable J'ai vu aussi un suintement par les d'humeurs, .Pai répliqué {sic) cette porosités des tuniques des vaisseaux expérience dans d'autres Animaux lymphatiques. J'ai noué dans le cou avec le même succès (a). » d'une Anesse, dans le même temps (i) Après avoir injecté assez d'eau au-dessous et au-dessus, la jugulaire pour doubler ou tripler le volume interne, l'artère carotide et un gros naturel du sang, Magendie a vu la sé- vaisseau lymphatique. Tous ces vais- rosité s'écouler rapidement de la sur- seaux au commencement étaient rem- face des membranes séreuses, et, dans plis, ils suintaient de leur surface, certains organes, tels que le foie et la et peu à peu ils se sont tous flétris, et rate, entraîner quelquefois avec elle la matière qu'ils contenaient a beau- une portion de la matière colorante du coup diminué ; ce qui prouve que des sang (b). (u) Mascagni, Prodrome d'un ouvrage sttr le sijstème des vaisseaux lumphaliques. Siormc, 1784, p. 1), noio. [b) Mn-ondio, Précis élémentaire de physiologie, 4 825, l. II, p. 447. PERMÉABILITÉ DES PAUOIS DES VAISSEAUX. 397 inorganique qui se laisse traverser par les fluides (1) : mais cette explication si simple fut vivement repoussée par la plupart des auteurs de cette époque, ainsi que par presque tous ceux du commencement du siècle actuel (2) ; et, en effet, elle ne repo- sait encore que sur des bases insuffisanles. Bichat, par exemple, pensait qu'on ne pouvait se rendre bien compte de la transsu- dation des liquides de l'appareil circulatoire qu'en admettant l'existence d'un nombre presque iutini de petits conduits par- ticuliers qui naîtraient des vaisseaux capillaires sanguins, et qui déboucheraient au dehors, soit dans des cavités closes de l'or- ganisme, soit à la surface libre des membranes tégumentaires; il les suppose organisés d'une manière spéciale, doués de pro- priétés vitales remarquables, et constituant un vaste ensemble auquel il donna le nom de sijstème exhalant io). Pour Bichat, (1) Ces auteurs allèrent même beau- dont il admettait l'existence, parce que coup plus loin , et atlribuèrent à des ie raisonnement l'avait conduit à les causes analogues les phénomènes clii- croire nécessaires, étaient doués d'une miques des sécrétions, tiypolisèse qui espèce de tact particulier qu'il appela ne pouvait soutenir l'épreuve de la sensibilité organique , en vertu de discussion, et qui est depuis longtemps laquelle ces coilduils auraient clioisi complètement abandonnée [a). dans le sang les matières qui de- (2) AinsiCruikshanliattribuaitlasor- valent les traverser, et il crut pou- lie des liquides à l'existence d'artères voir expliquer de la sorte la nature exhalantes qui, en se terminant à la variée des excrétions dans les divers surface libre des membranes, y consti- organes. Bichat pensait aussi qu'une tueraient des bouches ou pores dilata- partie des vaisseaux exhalants fournis blés {b). Hewson professait une opinion par les capillaires sanguins débouchait analogue (c), et cette manière de voir lut au dehors, tandis que d'autres s'ou- longuement développée par Lupi [d]. vraient dans les aréoles du tissu cel- (3) La doctrine de Bichat ne dillérait lulaire, et que d'autres encore péaé- que peu de celle de Crnikshank. il traient dans la substance des organes et supposait que les vaisseaux exhalants servaient à en opérer la nutrition (e). (a) Masea^'ni, Vasorum lymphaticorum hisloria et iconographia, p. G et siiiv. — G. Ilunter, Médical Commentavies , cliap. v, Of Absorption by Veins, p. 40. {b) Cruiksliank, Analomie des vaisseaux absorbants, p. 18. (c) llc\v.son, Itescripl. of the Lympkatic System, cliap. viii {Works, p. 10(!). (d) 1*. Lupi, Novaperporos inonjanicos secretiouuiii Iheoria, vasoruinque lynijikaticoridii his- loria ilastutjni ilcrwn vuUjata alque parte altéra aucta in qua vasorum minorum viiidicatio et secretionumper poros inorynnicos refulatio ciinti)telvr. IWriMc, il'J'.i, 'J vol. in-8. (e) Hicliat, AnatOTide (jén(:rale,i. I, p. 73 el siiiv. (édil. de 1818). 398 , TRANSSUDATION. cette expulsion des liquides hors du cercle circulatoire était un travail essentiellement vital ; pour Mascagni et G. Hunter, c'était un phénomène purement physique. La question resta longtemps indécise ; mais il me paraît bien démontré aujourd'hui que Bichat était dans l'erreur (1). L'influence de la vie modifie, il est vrai, la marche de la trans- sudation ; mais tout tend à montrer que celle-ci est un phéno- mène essentiellement physique ; qu'elle est une conséquence de la perméabilité des tissus organiques; que cette perméabi- lité dépend non de l'existence de vaisseaux parhculiers , mais des lacunes interstitielles qui se trouvent dans l'intérieur de ces solides comme dans tous les corps bruts d'une structure lâche, et qui communiquent plus ou moins librement entre elles de façon à former un système de cavités irrégulières d'une petitesse extrême ; enfin que les mouvements des fluides opérés de la sorte sont soumis à toutes les lois qui régissent les mou- vements analogues dans les corps inorganiques. En effet , malgré les grands perfectionnements apportés depuis quelques années dans la construction des microscopes, personne n'a pu distinguer la moindre trace des orifices exha- lants qui, dans cette hypothèse, seraient situés à la surface des membranes où la transsudation s'effectue, et qui constitueraient l'embouchure des vaisseaux invisibles fournis par les canaux sanguins. Dans l'état actuel de la science , on ne peut même apporter aucune raison plausible à l'appui de l'opinion de Bichat ; et d'ailleurs, pour expliquer ce qui se passe, il suffit de tenir compte des propriétés physiques bien connues des tissus (1) Magendie a combattu avec per- des idées saines touchant la porosité sévérance les doctrines de Bichat sur des tissus vivants et les phénomènes le système exhalant, et il a beaucoup physiques d'imbibition dont ceux-ci contribué à introduire dans nos écoles sont le siège {a). (a) Magciulie, Leçons sur les phénomènes physiques de la vie, l. I, p. 18 ci suiv. PERMÉABILITÉ DES PABOIS DES VAISSEAUX. 399 organiques, et de ne pas perdre de vue les modifications que nous savons par expérience pouvoir être déterminées dans ces mêmes propriétés par l'action nerveuse et les autres influences vitales. Laissons donc de côté les hypothèses inutiles dont les médecins sont parfois trop enclins à se préoccuper, et cher- chons comment les forces physiques et la puissance vitale con- courent à régler cette portion importante du travail nutritif, en la considérant comme une simple conséquence de la perméa- bihté des tissus organisés. § "2. — Les vaisseaux sanguins, comme je l'ai déjà dit, sont système entourés par une substance à structure caverneuse que les interorganiques anciens anatomistes appelaient du tissu cellulaire, parce qu'elle conjon'ci"if. est creusée d'une multitude de cavités irréguhères, mais que l'on désigne plus généralement aujourd'hui sous le nom de tissu conjonctif, parce qu'elle sert cà unir entre elles toufes les parties de l'organisme, et parce qu'il est devenu nécessaire de la distin- guer des tissus utriculaires dont les éléments constitutifs sont des cellules proprement dites (1). Nous étudierons ailleurs la structure et le mode de développement de cette substance con- nechve ; mais il nous est nécessaire de savoir aujourd'hui qu'elle consiste en faisceaux de fibrilles incolores très molles et d'une grande finesse, qui affectent en général la forme de brides ou de lamelles entrelacées dans divers sens, de façon à constituer une masse aréolaire plus ou moins épaisse dont les cavités, incomplélement séparées entre elles , communiquent toutes ensemble, et se laissent facilement distendre ou aplatir à raison de l'extensibilité et de la mollesse de leurs parois. Ce tissu réticulé occupe les vides que les organes laissent entre eux-, il est (1) Lo nom très bien clioisi de par beaucoup craulctirs français et tissu conjonclir (<m corjiorls huniaiu, 1. 1, p, 4 8 ol siiiv. 402 TRANSSLDATION. cernent de cette Leçon peuvent être employées aussi pour démontrer la structure de ce tissu conjonctif. Effectivement, c'est dans les lacunes ménagées entre ses lamelles constitutives que l'eau introduite dans les artères, et poussée à travers les parois de ces vaisseaux par la pression mise en jeu, se répand et s'accumule. Cette transsudation cadavérique, personne n'en doutera, est un phénomène purement physique, et l'intensité des effets pro- duits dépend de deux conditions : d'une part , la grandeur de la pression exercée sur le liquide ; d'autre part, le degré de perméabilité des tuniques vasculaires. Par conséquent, toutes choses étant égales d'ailleurs, on peut à volonté, en augmen- tant ou en diminuant la poussée du liquide, accélérer ou ralentir le passage de celui-ci de l'intérieur du système circulatoire dans les cellules interorganiques du tissu conjonctif, et produire une infdtration plus ou moins abondante. Si l'injection s'accomplit sous une faible pression, la transsudation est à peine appré- ciable; mais si la force sous l'influence de laquelle l'eau dis- tend les vaisseaux est considérable, il se manifeste une sorte d'œdème ou d'anasarque. c'est-à-dire d'hydropisie générale. Si la transsudation physiologique est , comme je l'ai dit, un phénomène mécanique soumis aux lois ordinaires de la phy- sique, nous pourrons prévoir qu'il en sera de même dans l'or- ganisme vivant, et que toute augmentation dans la pression sous laquelle le sang circule dans les vaisseaux tendra à aug- menter la quantité de liquide qui filtre à travers les parois de ces tubes et se répand dans le tissu aréolaire interorganique. Effectivement, il en est ainsi. Influence Eu étudlaut Ic mécanismc de la circulation, nous avons vu de la pression , 'ii'ii ii • i , y du sang, que la poussée latérale du sang contre les parois des artères et des veines dépend principalement, d'une part, de la pression développée par les contractions du cœur, d'autre part, des obstacles qui se trouvent en aval du courant et qui s'opposent LOIS DE CE PHÉNOMÈNE. ÛOô à récoiilement libre des liquides en mouvement. Nous avons vu aussi que, dans l'état normal , ces obstacles se rencontrent principalement dans le système capillaire, et que , par consé- quent, la pression du sang contre les parois des artères est considérable , tandis que dans les veines, où le cours du sang vers le cœur est facile, cette pression est très faible. Mais il est évident que si la voie suivie par le sang veineux venait à être rétrécie dans un point donné, l'obstacle qui y serait ainsi créé déterminerait dans la portion du courant situé en amont une pression anormale ; et si les résultats que nous ont fournis les expériences pratiquées sur le cadavre sont applicables à l'organisme vivant, nous devons par conséquent nous attendre à voir la transsudation augmenter lorsque, toutes choses étant égales d'ailleurs, une grosse veine vient à être comprimée de façon à y gêner le cours du sang. Or, c'est là précisément un des effets les plus remarquables du trouble déterminé dans le mouvement circulatoire par l'obli- tération temporaire d'une ou de plusieurs veines. Des expériences faites il y a près de deux cents ans par Lower nous en fournissent une excellente preuve. Effectivement, ce physiologiste ayant, à l'aide de ligatures, intercepté le cours du sang dans les veines jugulaires d'un Chien, vit un épanche- ment séreux se former rapidement dans le tissu aréolaire sous-cutané de la face de cet Animal (1). Magendie a été témoin de faits du même ordre, et de l'ensemble de ses re- cherches sur ce sujet il a déduit cette règle : « Toute cause qui (1) Dans une autre expérience Lower l'on trouva dans sa cavité péritonéale lia sur un Chien la veine cave infé- un épanchement considérable de séro- rieure dans le thorax. L'Animal ex- site (a), pira aii hoiil de quelques heures, et (a) I>o\vcr, Trnctatus de corde, item de niotu el colore sannuinis cl chyll in cum h'cmsilu (voy, le flibliotheca niialomica tlo Man^jct, t. )I, y. '.!'.>). hOli TRANSSXJDATiON. rend plus forte la pression que supporte le sang accroît l'exha- lation (1). » Les observations pathologiques sont ici en parfait accord avec les résultats fournis par les expériences des physiolo- gistes; et il est aujourd'hui bien démontré que l'œdème ou infiltration des membres, par exemple, est presque toujours causé par quelque obstacle mécanique qui gêne le relour du sang veineux de la partie malade vers le cœur (2). M. Bouil- laud, à qui l'on doit des recherches importantes sur ce sujet, a réuni un grand nombre de cas dans lesquels l'autopsie a fait voir que les principales veines appartenant au membre affecté (1) Magendie ajoute: «J'ai observé plusieurs fois cet accroissement d'ex- halatioi,! dans le canal vertébral, sur l'arachnoïde de la moelle épinière, et voici dans quelles circonstances. J'ai dit ailleurs que la cavité de cette membrane est souvent, sur l'Animal vivant, remplie par de la sérosité. J'ai remarqué plusieurs fois que dans certains moments où les Animaux l'ont des efforts violents, cette sérosité aug- mente sensiblement ; la même chose peut être vue à la surface du cerveau, où il existe aussi habituellement une certaine quantité de sérosité (a). » (2) Boerhaave fut, je crois, le pre- mier à attribuer la formation de cer- taines hydropisies à l'existence d'un obstacle mécanique au cours du sang qui se rend de la partie malade au cœur (6). Morgagni émit une opinion analogue, et cet excellent observateur, dont l'ouvrage sur le siège et les causes des maladies est un recueil presque inépuisable de faits impor- tais pour la physiologie aussi bien que pour la pathologie, a enregistré plusieurs exemples de coïncidence de l'œdème de diverses parties avec l'oblitération des veines correspon- dantes (c. L'inthience de l'oblitération de la veine porte sur la production de l'iiy- dropisie a été mise en lumière par les observations de M. Reynaud (d). On connaît aussi des cas dans lesquels l'obslruclion des sinus de la dure- mère paraît avoir déterminé l'iiydro- céphale , c'est-à-dire un épanchement considérable de sérosité dans les ca- vités cérébrales (e). (a) Magendie, Précis élémentaire de physiologie, 1825, t. 11, p. 448. (b) Boerhaave , Aphorismi de cognoscendis et curandis morbis , in usiim doctrinœ medicinœ (aph. 1228, t. IV, p. 163, édit. de 1773). (c) Morgagni, De sedilnis et causis morborum per anatomen indagatis libri qidnque, 17G2 (voy. epist. xxxix, gg 3 et 4 ; epist. XLVi, g 10 ; L, g 55, elc). {dj Reynaud, Des obstacles à la circulation dans le tronc de la veine porte, et de leurs effets anatomtqiies et -physiologiques (Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. IV, p. 137). (e) Toniielé, Cas d' épanchement séreux dans le crdne à la suite de l'oblitération des sinus veineux [Journal hebdomadaire de médecine, 1829, p. 184 et suiv.). LOIS DE (JE l'HÉNOMÉNE, 105 (le cette sorte d'iiydropisic étaient ou oblitérées, ou fortement comprimées par le voisinage de quelque tumeur (1) ; et il me serait facile de multiplier ici beaucoup les faits du même ordre (2). Mais une simple coïncidence ne suftit pas pour (1) En citant ici l'excellent travail de M. Bouillaud (a), je dois faire re- marquer cependant que cet auteur attribue l'infill ration des parties dé- pendantes des veines obstruées, non à une augmentation dans la transsuda- tion des liquides du système vasculaire dans les aréoles du tissu conjonctif, mais à un affaiblissement de la puis- sance absorbante de ces vaisseaux (6). (2) Les recherches anatomiques de Hodgson, de P. Béclard et de plusieurs autres pathologistes, montrent que Tocclusion d'une grosse veine n'est pas toujours suivie d'un épanchement hydropique dans la partie dont ce vaisseau reçoit le sang; mais cela s'explique par la facililé plus ou moins grande avec laquelle la circulation col- latérale s'établit. Effectivement, nous avons vu que non-seulement il existe dans les membres des veines profondes aussi bien que des veines superficielles, et que ces vaisseaux sont solidaires les uns des autres , mais que les gros troncs veineux de la tète et du torse communiquent tous entre eux par des anastomoses. Or l'observation directe nous apprend qu'il existe dans ces anastomoses des variations indivi- duelles très considérables, et que tantôt elles offrent des voies larges et assez directes pour le passage du sang, tandis que d'autres fois ces communications sont étroites et fort détournées. Baillie rapporte l'observation d'une femme chez laquelle la veine cave abdominale était complètement oblitérée depuis le niveau des veines émulgenles jusqu'à l'oreillette droite, et le passage du sang des parties inférieures vers le cœur s'effectuait par l'intermédiaire des veines lombaires et azygos (c). Des cas analogues ont été décrits par M. Hallett (d), et Wilson rapporte aussi des observations relatives h des siijels chez lesquels on trouva le tronc de la veine cave abdominale et ses princi- paux affluents oblilérés ou remplis de caillots et de lymphe coagulable, sans que les membres inférieurs se fussent infiltrés (e). Comme exemples de l'obstruction d'une veine considérable chez l'Homme sans que l'œdème se soit manifesté, je citerai également deux cas d'oblitéra- (a) Bouillaud, De l'oblitération des veines et de son influence sur la formaiion des hydropisies partielles {Archives (jéncrales de médecine, 1823, l" série, i. II, p. 188). — Observations et considérations nouvelles sur l'oblitération des veines regardée comme cause d'hydropisie {Arch. gén. de méd., t8-24, l. V, p. 94). (b) Op. cit. {Arch., t. Il, p. 20i). (c) IJaillic, Of Uncommon Appearances of Disaase in Dlood-vessels { Transactions ofa Soririn for Ihe Improvernent of Médical iind Hurijical Knoivledfje, vol. I, p. -127, pi. 5). (d) IliilIcU, On tlie (Mlateral Circulation in Cases of Oblitération or Obstruction of Ihe Venœ cava; (ICdinburoh Med. and Surf/. Jowmal, 1848, t. LIX, p. 209). (e) i, Wil.wn, An Instance of Ihe Oblitération of Ihe Venœ cava; inferior from Inllammation (Trans. ofa Soc. for ihe Jmprov. of Med. and. Chir. Knowl., 1812, t. III, ji. 05). /j06 TRANSSUDAÏION. établir des relations de causes et d'elTets ; pour aïonlrer que l'infiltration du tissu conjonctif dépend bien réellement de l'obstacle apporté au cours du sang veineux, il faut faire voir que la cessation de l'embarras produit de la sorte dans la cir- culation entraîne la cessation du phénomène qu'on lui attribue. Je ne m'arrêterai donc pas sur les exemples d'une simple coïn- cidence qui a été constalée entre l'oblitération d'une veine et le g'onilement œdémateux de la partie correspondante du corps, et je ciferai seulement quelques cas dans lesquels , d'une part, l'apparition de ce phénomène pathologique a eu lieu à la suite de la compression d'un tronc veineux, et, d'autre part, la cessation de cette pression a déterminé la disparition de l'hy- dropisie locale qui y correspondait. L'observation journahère a depuis longtemps appris aux médecins que , dans les derniers temps de la grossesse , les femmes ont souvent les jambes gonflées , mais que cet acci- dent se dissipe après l'accouchement. Or, l'agrandissement de l'utérus et le poids de cet organe dans les périodes avancées de la gestation déterminent sur les veines iliaques une pression considérable, et le sang, gêné ainsi dans son cours, s'accumule dans les vaisseaux situés en amont de l'obstacle et les distend. Cette distension est suivie d'une augmentation dans l'activité de la transsudation dans les parois du système vasculaire des membres abdominaux, et cette transsudation abondante déter- tion de la veine iliaque menlionnés par que l'on doit à Travers, et surtout Hodgson (o), et un autre cas dans le- à M. Reynaud, des observations inlé- quel un chirurgien de Manchester ressantes sur la circulation collatérale pratiqua la ligature de la veine jugu- dans divers cas d'oblitération dequel- laire interne (6). Enfin, j'ajouterai que gros tronc veineux (c). (a) Hodgson, On thc Diseases of the Arteries and Veins, p. 531 . (&) Simmons, voy. Médical Facts and Observations, t. VIII, p. 23. (c) Travers, On Wounds and Ligatures of Veins (Astley Coop(;r and 13. Travers, Svrgical Essays, vol. I, p. 259, édit. de 1818). — Reynaud, Oblitération de la veine iliaque gauche; circulation collatérale, etc. (Journal hebdomadaire de médecine, 1829, t. II, p. 84 et 109]. LOIS DE CE PHÉNOMÈNE. 407 mine l'œdème (1); mais, dès que la matrice reprend son volume normal , l'obstacle mécanique qui arrêtait le sang au passage disparaît, et l'hydropisie locale qui en résultait ne tarde pas à se dissiper. On cite aussi des cas dans lesquels l'œdème de l'une des extrémités avait été déterminé par la présence d'une tumeur, d'une hernie, par exemple, et s'est dissipé dès que le chirur- gien eut fait cesser la pression exercée ainsi sur le tronc vei- neux de la partie infiltrée (2). D'un autre côté , la poussée des liquides en sens inverse , c'est-à-dire du dehors sur la surface extérieure des vaisseaux ou sur des tissus dans lesquels ces conduits sont renfermés, doit tendre à retarder ou même à empêcher la transsudation dans ces parties (o). Aussi a-t-on remarqué depuis longtemps qu'à la suite de la ponction de la cavité péritonéale, dans les cas d'hy- dropisie ascite , une nouvelle accumulation de liquide s'effectue beaucoup plus vite si l'on abandonne le malade aux seules forces de la nature que si l'on exerce sur son abdomen une pression méthodique et continue à l'aide de bandages (4). On (1) Camper, dont j'ai déjà eu Toc- daiite d'un état cancéreux, peut pro- casion de citer les travaux anatomi- duire des effets analogues (c). ques (a), a été un des premiers à fixer (2) Richter rapporte une observa- l'attention des médecins sur le méca- lion de ce genre {d). nisme de ce phénomène (h). (3) La pression exercée de la sorte On a remarqué aussi que, lorsque par les liquides sur les vaisseaux l'utérus, chargé des produits de la qu'ils baignent extérieurement con- conception, prend une position obli- tribue aussi, comme nous le verrons que , c'est en général seulement le plus tard, à activer l'absorption de membre du côté duquel cet organe ces produits de la transsudation, penche qui devient œdémateux. {[\) L'emploi des bandages compres- La tuméfaction de l'utérus, dépen- sifs après l'opération de la ponction est («) Voyez ci-dessus, loiiic H, pag-c 342. (6) P. Campfir, Dissertatio medica de hydropuni variorum indole, caii.sis et mcdicina {Mém. de la Société royale de médecine, ilHi et 1785, p. i'SQ). (c) Olivier!, De l'œdème des membres inférieurs chez tes femmes o/feclées de eanrcr de Vntériis. Tlièsc, Pari», 183.J, ii' 120. (rf) Voyez Rayer, nrlicle IIyhhopisik (Dkiioniuiire de médecine, 1821, I. i, p. 12;,'), IV. 27 /|08 TR41NSSUDATI0N. sait aussi que rinfîltralion du tissu conjonctif se produit beau- coup plus facilement dans les parties du corps où la peau est lâche et extensible que dans les régions où les téguments et les gaines aponévrotiques serrent fortement les organes sous- jacents (1). Influence § 3. — La rapidité avec laquelle un liquide traverse un l'état du sang filtrc dépcttd, comme chacun le sait, non-seulement de la pres- trans^udalion. slou plus OU molus considérablc exercée sur les molécules du fluide qui sont en contact avec la cloison perméable , mais aussi des propriétés physiques de ce fluide et du degré de porosité du filtre. Nous pouvons donc prévoir que le passage des hquides à travers les tuniques vasculaires ou les autres tissus de l'orga- nisme sera soumis aux mêmes influences, et que les variations dans la composition du sang, ain^i que les modifications qui pourront survenir dans les propriétés physiques des tuniques vasculaires , influeront sur les phénomènes de transsudation dont les organismes vivants sont le siège. Les preuves de ces derniers effets sont faciles à donner. Dans les circonstances ordinaires, les parois vasculaires ne se laissent pas traverser par les globules sanguins et ne s'im- bibent que de sérum; aussi a-t-on constaté que les variations dans la proportion de ces corpuscules n'exercent que peu ou point d'influence sur les phénomènes qui sont dus à la trans- général (a), et même, dans quelques ment. La même cause rend i'infiltra- cas, on a eu recours avec succès à la tion du tissu cellulaire sous-cutané compression métliodique pour le trai- des membres beaucoup plus fréquente tement des hydropisies (6). que l'épanchement d'une quantité (1) C'est une des raisons pour les- anormale de sérosité dans les parties quelles le gonflement œdémateux de profondes des extrémités qui sont la paupière inférieure et des parties situées dans une gaîne aponévrotique voisines de la face se produit si facile- très résistante. (a) Voyez Velpeau, Médecine opératoire, t. II, p. 280. (6) Voyez Brichetoau, De la compression, de son usage dans les hydropisies, et particulièrement dans l'ascite {Archives générales de médecine, 1832, t. XXVin,p. 75). LOIS DE CE 1>HÉN0MÈNE. /i09 sudation ; mais il n'en est pas de même lorsque la densité du sérum vient à être modifiée par une diminution notable dans la quantité d'albumine que ce liquide tient en dissolution. En effet, M. Andral a trouvé que dans les cas où le sang est appauvri de la sorte, il se manifeste toujours plus ou moins promptement une hydropisie qui, d'abord partielle et légère, finit par être générale et très considérable (1). Il a remarqué cette coïncidence cbez les Animaux aussi bien que chez l'Homme (2), et nous sommes en droit d'attribuer l'épanche- (1) Celle relation entre la diminu- tion de la proportion d'alijuniine du sang et la manifestation de symptômes d'hydropisie plus ou moins générale a été constatée non-seulementpar M. An- dral (a), mais aussi par MM. A. Bec- querel et Rodier (6). La diminution de la proportion de l'albumine contenue dans le sérum du sang des malades affectés d'albuminurie avait été pré- cédemment signalée par Bostock (c). j\l. Sabatier avait même cherché à expliquer la production des épanche- ments séreux et des infiltrations du tissu cellulaire, dans les cas où l'urine est albumineuse, par la fluidité plus grande du sang résultant de Tappau- vrissementdu sérum (d). ^ous avons vu, dans une précédente Leçon, qu'un des effets des saignées répétées est d'appauvrir le sang (e), cl MM. A. Becquerel el Rodier ont constaté que, dans les cas où les émis- sions sanguines sont poussées très loin, la proportion d'albumine dimi- nue aussi bien que celle des globules et de la fibrine. Or , dans ces cir- constances, il y a tendance à la pro- duction des hydropisies, et les au- teurs que je viens de citer rapportent des exemples de ces accidents patho- logiques (/). Du reste, H est probable que la diminution de la proportion de l'albu- mine dans le sang n'est pas la seule cause de l'épanchement anormal de cette substance , et que son passage rapide des vaisseaux dans les cavités adjacentes dépend en partie de la même cause qui amène son excrétion par les urines , excrétion qui , à son tour, appauvrit le sang, savoir : une modification dans la constitution de cette substance protéique qui la rend plus fluide, ainsi que nous le verrons bientôt. (2) Dans une des variétés de la maladie appelée par les vétérinaires pourriture ou cachexie aqueuse, les ?iloulons sont toujours infestés de (a) finiiru], Essai d'hématologie pallwloiiique, 1843, p. 154 et suiv. (6) A. lîccfineiel i.t Piodier, De Vanémie par itimiinilion de proportion de i albumine du sang, et des liydrnjiisics qui en sont la conséquence (Caxclte médicale de Paris, ISnO). {(:) Roslock, An Klententary System ofFliysiology, 1827, I. III, p. 411. id) S;ilj;iii(;r, Considérations el observations sur l'Iiydropisic syuiptoinatiqnc d'une lésion spé- ciale des reins (Archives générales de médecine, 18;!4, 2" stiio, 1. V, p. ;i:!:t). {<>) Voyez ti-rtcfsiis, toiiu; I, pa(?c 250. (/) A. I!ff(pi(;r(j| (!l Rodier, De l'anémie, p. 0 (cNlr. d»' 1" Ho'ictlc nirdirole, ISTiO), 410 TR4NSSUDÂTI01V. ment, en partie au moins, à la constitution trop aqueuse du sérum, car nous savons, par les expériences de Magendie, que l'on peut déterminer à volonté des accidents analogues en injectant de l'eau dans les veines (1). Influence § 4. — L'influcnce de l'état des parois vasculaires sur la de perméabilité transsudatiou ne se démontre pas d'une manière aussi nette , des^vaïsTe°aux. uiais UB mc paraît pas moins indubitable. Et d'abord il est à noter que le passage des liquides à tra- vers les tuniques des vaisseaux ne se fait pas avec la même facilité dans toutes les parties du système circulatoire , et, lorsque toutes choses sont égales d'ailleurs, cette espèce de fdtration semble s'effectuer le plus aisément là où ces tuniques sont le plus minces. Ainsi nous avons vu dans une précédente Leçon que les artères ont des parois plus épaisses que les veines, et que c'est surtout dans les capillaires que les tuniques vasculaires acquièrent une grande délicatesse. Or, la ligature d'un tronc artériel occasionne, comme l'oblitération d'une veine, une augmentation dans la poussée du sang contre ses parois, en amont de l'obstacle ainsi créé ; mais cet accroissement de pression ne suffit jamais pour déterminer l'infiltration des parties circonvoisines, ainsi que cela a lieu si souvent quand le cours du sang est arrêté dans une veine. Les effets produits par les injections faites sur le cadavre Douves qui se logent dans le foie, et cours qu'en injectant de l'eau dans le le sang de ces Ruminants est pauvre système vasculaire, on pouvait pro- en albumine : or, un des symptômes duire un gonflement si grand, que les plus saillanls de cette affection l'Animal soumis à l'expérience de- est Télat œdémateux de la face, et venait incapable de fléchir ses mem- l'on remarque aussi dans les cavités bres, ou de faire le moindre mouve- séreuses des épanchements anor- ment, sans éprouver une difficulté maux [a], extrême (6). (1) Magendie a fait voir dans ses (a) Andral, Clavarrel et Delafond , Rechei'ches sur la composition du sang de quelques Animaux domestiques dans l'état de santé et de maladie (Annales de chimie, 1842, 3° série, t. V, p. 318), (6) Magendie, Levons sur les pliénom.ènes physiques de la vie, t. I, p. 109. LOIS DE CE PHÉNOMÈNE, 411 montrent aussi que les petits vaisseaux ne sont pas également perméables clans toutes les parties du corps. Dans certains organes, non-seulement l'eau que l'on pousse dans le système vasculaire s'en échappe plus facilement que dans d'autres par- ties, mais des substances qui ailleurs resteraient emprisonnées dans les capillaires suintent à travers les parois de ces petits tubes et se répandent dans les tissus circonvoisins. Ainsi les épanchements se produisent très facilement à la surface du poumon, dans le péricarde, dans l'arachnoïde, et même dans la cavité péritonéale, tandis qu'elles sont plus rares dans le tissu conjonctif sous-cutané ou dans le système musculaire. J'ajouterai que, dans les premiers temps de la vie, la perméa- bilité des tissus paraît être plus grande que chez l'adulte , et que, chez les jeunes enfants, des épanchements de sérosité se forment souvent dans diverses parties du corps sous l'influence de causes qui, dans un âge plus avancé, ne produiraient sur la distribution des liquides dans l'organisme aucune modification appréciable (1). § 5. — Nous avons vu, dans les Leçons précédentes, que les vaisseaux sanguins ne sont pas des tubes inertes, mais qu'ils (1) Chez les jeunes enfants, les sous de cinq ans Fanasarque se déclare épanchements séreux sont très fré- beaucoup plus souvent que chez ceux quents et se reproduisent très faci- dont l'âge est moins tendre (a). Il est lement. L'œdème des poumons paraît aussi à noter qu'à la suite de certaines ôlre un des accidents les plus com- alfections, telles que la fièvre scarla- muns vers la fin des maladies mor- tine et la petite vérole, l'œdème de telles des enfants, aussi bien que chez diverses parties du corps est beaucoup ceux dont la constitution est cachée- plus fréquent chez les enfants que tique. Il est aussi à noter que l'hydre- chez les adultes. Dans quelques épi- céphale aiguë est d'autant plus fré- démies ces infiltrations ont été très quente que les enfants sont plus communes (6). jeunes, et que chez les sujets au-des- (a) Voyez lîartlicz cl Hilliol, Traité clinique et patholoauiue des maladies des enfants, 1853, l. Il, 1». 135, 150, 185, clc. (b) Vuyoz ltai- ... • j ]n TT ii« „» - 1',,., Albumine .... 0,088 à un Memone de M. Heller et a 1 ou- , . . ^ , , j , Matière animale vrage de M. Lehmann 6 . " extractive. . . 0,474 pour dOO. (1) Voyez ci-dessus, tome 1, p. 226. (2) Dans une de ces analyses il chez le Cheval , il n'a trouvé que trouva : 0,035 d'albumine et l,10/i de matière Eau 975,20 animale extractive dissoutes dans Albumine 5,42 98,180 parties d'eau. Une autre ana- Matières extractives , grais- jyse faite par Haldat a donné à peu ses, etc 3,76 p|.j>g jgg mêmes résultats [d], S^'s^'-'"'^ 15,62 (c) L'eau de l'amnios ne contient aussi Le liquide céphalo-rachidien qui se que très peu de matières organiques. (ft) Bostock, On the Nature and Analysis of Animal Fluids {Medico- Chirurgical Transactions, 18d9, t. IV, p. 53). (6) Heller, Qualitative und quantitative Anahjse albiiminoser Flûssigkeiten {Archiv fur phij- siologische und pathotogische Chemie und Mikroscopie, 1844, t. I, p. 192). — Lehmann, Lehrbuch der physiologischen Chemie, t. II, p. 280. (c) Heller, Pathologische Chemie des Morbus Brightii (Archiv fur physiologlsche und patholo- gische Chemie und Mikroscopie, 1844, t. 11, p. 184). (d) Magendie, Recherches physiologiques et cliniques sur le liquide céphalo-rachidien ou cérébro-spinal, 1842, p. 48. COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. 419 ici, le plus souvent , que dans la proportion d'environ 5 mil- lièmes, tandis que les matières extractives, c'est-à-dire l'albu- minate de soude ou la caséine, et les autres substances pro- téiques qui ne se coagulent pas par l'ébullition, étaient à peu près aussi abondantes que dans le sang. La sérosité qui s'accumule dans la cavité péritonéale chez les hydropiques est aussi très pauvre en matières solides (1), mais contient en général un peu plus d'albumine, et se montre parfois assez riche en caséine ou en albuminate basique de soude; même il n'est pas rare d'y découvrir de petites quantités de fibrine (2). Bostock y a trouvé, chez la femme, 98,3/1 pour 100 d'eau et 0,16 d'al- bumine (a) ; et dans les analyses faites plus récemment par MM. Rees, Vogt, Sclierer, Mark et quelques autres chi- mistes, la proportion d'eau s'est géné- ralement maintenue entre 979 et 990 sur 1000 (6). Enfin l'humeur aqueuse de l'œil, dont j'aurai également à parler avec plus de détail dans une autre partie de ce cours, est encore plus pauvre en matières organiques. Berzeiius n'y a trouvé que des traces d'albumine. 100 parties de ce liquide lui fourni- rent 98,10 d'eau, 1,15 de sels et 0,75 de matières extractives (c). (1) Ainsi , dans un cas d'asclte , M. Heller a trouvé : Eau 950,00 Matières extractives et traces (l'albumine 5,97 Graisses 0,84 Sels (principalement chlorure de sodium) 44,00 (d) (2) Dans la plupart des cas, cepen- dant, la proportion d'albumine con- tenue dans la sérosité péritonéale des hydropiques ne varie qu'entre 8 et 12 par millième , et en général on trouve dans ce produit environ 3 mil- lièmes de matières extractives com- posées en partie de caséine soluble ou d'albuminate de soude. Ainsi, dans quatre analyses sur cinq , dont les résultats ont été publiés par M. Lhéritier, l'albumine figure pour 8,65, 10,19, 10,85 et 11,85 dans la composition de ce produit (e). C'est aussi environ ,-;^ d'albumine que M. Heller a trouvés dans la séro- (a) Bostock, Op. cit. (6) Voyez Lliéiitior, Traité de chimie pathologique, p. Cii. — Schcrer, Chem. Unlers. der Amniosllûssiglieit des Menschen (Zeitschrifl fur ruissensch. Zoologie, 1849, l. 1, p. 89). (c) lier/elius, rruité de chimie, trad. par Esslinger, t. VII, p. 459. (d) Heller, llydropische t'Hisslglieil und Harn bei Asciles (Arch. fiir phys. and palli. Cheniie, 1844, lid. I,p. 47). (e) Lhéritier, Traité de chimie pathologitiue, 1842, p. 570. /l20 TRANSSUDATION. Causes Si l'oii admet que les liquides qui s'échappent des vaisseaux de la différence . ^ ^ décomposition sanguius par transsudation se trouvent môles à des produits entre le sérum , , , , . , du sang secrètes , il est facile de s'expliquer comment la sérosité peut et là sGrositp renfermer accidentellement certaines matières en plus grande proportion que le sérum du sang ; mais , au premier abord , il semble difficile de concilier avec la théorie toute mécanique que j'ai donnée de l'origine de ces épanchements les diffé- rences que je viens de signaler dans les proportions relatives de l'eau et de l'albumine. On sait, en effet, que, dans les expé- riences ordinaires de laboratoire, une dissolution saline ou autre ne s'appauvrit pas quand on la filtre, et si, comme tout jus- qu'ici semblait le prouver, le liquide du tissu conjonctif ou des poches séreuses est du sérum qui filtre à travers les parois des site péritonénle chez un malade atteint cl'alljuminurie (a), Fr. Simon a trouvé dans le fluide liydropique obtenu par la ponction de l'abdomen , chez un jeune homme dont les reins étaient en suppura- tion : Eau 978,0 Albumine 12,0 Matières grasses 1,0 Matières extraetives alcooliques. 2 , 0 Carbonate de soude et phos- phate de chaux 1,2 Chlorure de sodium et lactate de soude. 6,8 Urée 1,2 Des produits analogues, dont l'ana- lyse a été faite par M. Hoppe, ont donné, sur 1000 parties, 6 ou 7 d'al- bumine, et de 982,5 à 98Z(,5 d'eau (6). Mais, dans d'autres circonstances, on a irouYé dans ces épanchements ime proportion plus considérable, soit d'albumine coagulable, soit d'au- tres produits protéiques. Ainsi, dans un cas étudié par M. Scherer , le liquide obtenu par la ponction de l'abdomen a donné : Eau 952,99 Albumine 11,88 Albuminate de soude 22,70 Fibrine 0,32 Matières extraetives 3,02 Graisses 1,20 Sels 7,22 Chez un autre hydropique, le même chimiste trouva : Eau . 960,49 Albuminate de soude '29,73 Matières extraetives 2,-12 Graisses . 1 ,63 Sels 5,94 L'albumine coagulable par la cha- (a) Heller, ùp.cit. [Arch. fur phys. umlpathol. Chemie, t. Il, p. 83). {b) Hoppe, Ueber serôse Tranmidate {Arch. fur pathol. Anat., 1856, f. IX, p. 290). COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. /i21 vaisseaux, on doit se demander comment il a pu perdre en route une si grande quantité d'albumine. Une expérience, qui paraît être due à Berzelius, semble mon- trer que les seules forces physiques peuvent accomplir des chan- leur n'existait pas en quantité appré- ciable (a). L'analyse du liquide extrait de l'ab- domen par la ponction chez six ma- lades afiectés d'hydropisie a été faite par MM. A. Becquerel et Rodier, et a donné, en moyenne, 21,6 d'albumine sur 1000, et comme extrêmes, d'une part 11,13, et d'.iutre part, 3Z|. La quantité de matières extractives a os- cillé entre 3,2/i et 19,30 sur 1000 (6). Dans des produits analogues ana- lysés par M. Percy, l'albumine s'est trouvée dans la proporlion de o/i mil- lièmes dans un cas, et dans un autre s'est élevée à 38 millièmes (c). Chez un hydropique observé par M. Marchand, la sérosité péritonéale renfermait une quantité très considé- rable d'urée (plus de U millièmes ) et près de 2li millièmes d'albumine {d). Des faits analogues ont été constatés par M. P.. Willis (e). L'analyse du liquide extrait du thorax d'un malade affecté d'em- pyème a donné, d'après Simon : Eau 934,72 Albumine 31 ,00 Albuminale de soude. . . . 18,86 Fibrine 1,02 Graisses 1,05 Extraits alcooliques et sels. 1,35 Extrait aqueux et sels . . . 10,04 Sels fixes 9,50 (/") Un produit analogue , analysé par M. Bôdeker , a fourni 938 d'eau , 51 d'albumine, 0,5 de synlonine avec un peu de fibrine, et à peu près 10 de sels {g). Dans l'hydrocèle , la sérosité est souvent encore plus chargée de ma- tières organiques. Ainsi , dans trois analyses de ce liquide faites par M. Heller, l'albumine s'est trouvée dans les proportions de 5'2 à 60 mil- hèmes (h). Dans un cas analogue, ob- servé par M. Percy, la proportion d'albumine était de 59 pour 1000. Au sujet de la présence de la fibrine dans la sérosité, je renverrai aussi aux observations de M. Dela- harpe (^). (a) Scherer, Dericht ilber die Leistungen im Gebiete der pathologlschen Chemic im Jahre 1843 {Csnsl-M's Jahresbericht, 1843, t. Il, p. 133). (6) Simon, Animal Chemistrjj, t. II, p. 492. (c) J. Percy, Contributions to Patholoijy {London Médical Gazette, 1844, 2° série, t. I, p. Cil), {d) Marchand, Untersuchungen einer hydropischen Flûssigkeit ( PoggendorlTs Annalen, 1837, t. XXXVIII, p. 350). (e)P.. Willis, On the fJropsy which follows Scarlatine {Briiish and Foveign Médical lUvicw, 1842, t. xm, p. 202). if) liôdcker, l'atliologisch-chemische Miltheilungen aus den chern. Laborat. der physiol. hiHl. %u Gotlingen (Zeitschr. fur rationnelle Med., 1855, 2' série, t. VIT, p. 4 40). (il) I''r, Simon, Pathologisck-chendsche Unlersiœhungen {lieitrdge aur physiol. und palhol. Chemieund Mikroscopic, 1844, t. 1, p. 115). {h) Heller , Die llydroceleflussiglieit und die Resullale ihrer Xusammenselxuna {Arch. fur physiol. und palhol. Ileillc, 1844, t. I, p. 215). (i) Dolaliarpc, De la présence de la fibrine dans la sérosité extraite du péritoine {Arch. gén. de méd., 1842, 3' «ério, I. MV, p. 174). 422 TRANSSUDATION. gements de ce genre. En effet, ce grand chmiiste aurait Irouvë que de l'eau salée peut être rendue douce par le seul fait de son passage à travers une couche de sable d'une épaisseur suffi- sante (1). M. Matteucci a vu aussi qu'une solution de carbonate de soude se dépouille d'une partie de son eau quand on la fait passer à travers un long tube rempli de sable (2); et l'on sait que certains corps poreux , tels que le charbon ordinaire, mais surtout le noir animal , exercent une action adhésive très iné- gale sur les substances qui les traversent , de façon à retenir les unes et à laisser passer les autres. D'après ces faits, on pour- rait donc croire à la possibilité d'une action analogue qui serait exercée dans l'intérieur de l'organisme vivant par les molé- cules solides des parois vasculaires entre lesquelles le sérum doit serpenter pour arriver au dehors , et effectivement des recherches très intéressantes , qui ont été faites il y a peu d'années en Allemagne , et qui ne sont pas assez connues des physiologistes, prouvent que les membranes animales sont des filtres capables de trier jusqu'à un certain point les matières (1) Celte expérience est citée par Berzelius , à qui M. Malteucci l'atlri- M. Matteucci (a) ; mais je n'en ai pas bue, cette cause d'erreur n'aurait pas trouvé mention dans les ouvrages de pu exister sans avoir attiré l'attention Berzelius, et je regrette de ne pas en de ce chimiste illustre , et du reste connaître tous lesdélails, parce que, au les faits dont je vais rendre briève- premier abord , on serait porté à n'y ment compte rendent le résultat an- attribuer que peu d'importance et à nonce ici beaucoup moins difficile à supposer que le sable employé comme admettre qu'on ne l'aurait supposé il liltre était humide et a cédé de l'eau à y a quelques années, la dissolution saline, de façon que le (2) Dans l'expérience de M. Mat- liquide qui passait se serait trouvé teucci, une solution de carbonate, en étendu, non pas à raison de l'abandon passant à travers un tube long de d'une portion de son sel, mais par 3 mètres et rempli de sable, augmente suite d'une addition d'eau. Cependant de densité dans la proportion de 1,005 si Texpérience a été réellement faite par à 1 (b). (a) Malteucci, Leçons sur les phénomènes physiques des corps vivants, 1847, p. 29, (b) Idem, ibid. COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. 423 qui, mélangées entre elles, tendent à les traverser, et cela indé- pendamment de toute action vitale ou même chimique. M. Hoppe a constaté que le sérum du sang , en filtrant à travers les membranes organiques, change de composition. Le liquide qui passe renferme à peu près la même quantité relative de matières salines que celui dont il provient, et ces sels sont mêlés dans les mêmes proportions ; mais la quantité d'albumine est beaucoup moindre (1). Par le seul fait de ce filtrage, le sérum s'appauvrit donc, et se rapproche de la sérosité par sa composition chimique. Quant à la théorie physique de ce phé- nomène, je ne puis la discuter en ce moment, et je me propose d'y revenir quand, en traitant de l'absorption et des sécrétions, j'aurai à parler de l'influence que la diffusion des liquides et l'endosmose exercent sur le transport des matières constitutives des humeurs ; mais je crois utile , dès aujourd'hui , de faire (1) Comme les tuniques des grosses proportion de matières minérales , et artères sont trop épaisses pour être calculer par différence la quantité propres à des expériences de ce genre, de substances organiques. Le sérum et que les veines offrent trop de ijran- ayant été préalablement étendu d'eau, ches , M. Hoppe a fait usage de mcm- il obtint les résultats suivants pour branes telles que des fragments de la 1000 parties de liquide : vessie, de l'uretère ou du péricarde. »r„,;A„^o ^„„. „ - ^,. » ' j# V, . Matières organiques nu sérum. . . . 55,7 Il a remarqué qu'en général la per- Matières organiques du liquide filtré. 41^6 méabilité de ces filtres pour l'ai- _ _ 41 5 bumine s'accroît avec la durée de Cendres du sérum 6,2 l'expérience, ce qu'il attribue à la Cendres du liquide filtré 6,3 distension et à l'augmentation de la ~ — '7,0 porosité de la membrane. Pour dé- La légère augmentation apparente terminer la quantité relative de ma- dans la proportion des matières sa- lières albuminoïdes et salines tenues Unes s'explique par le fait même de en dissolution dans le sérum avant et la soustraction d'une portion des ma- après la filtration de ce liquide à tra- téiiaux organiques du sérum ; en vers la membrane , il faisait évaporer effet, 1000 parties du liquide filtré une certaine quantité des deux liqui- correspondaient, quant à l'eau et aux des; puis, après avoir pesé le résidu sels, à environ lOlZj parties de sé- sec , il l'incinéra pour connaître la rum (a). (a) !■'. Hoppe, L'efcer serose Transsudnle (Virchow's Avchiv fur patliolnçiischc Anatomie und Physiotntiie, ISr.fî, i. IX, p. 200 et siiiv.). IV. 28 /|2/t TRANSSUDATIUN. remarquer que, pour expliquer les résultats fournis parles expé- riences dont je viens de rendre compte , il suffirait d'admettre que l'attraction adhésive exercée par les parois des cavités ca- pillaires des membranes organiques sur les liquides adjacents, attraction en vertu de laquelle ces tissus se laissent mouiller par ces mêmes liquides et s'en imijibent, est plus grande pour l'eau chargée de matières salines que pour les substances albu- minoïdes qui se trouvent mêlées à cette eau et à ces sels dans le liquide complexe appelé sérum. Effectivement, s'il en est ainsi, la couche de liquide qui adhère aux parois de ces espaces capillaires sera de l'eau moins chargée d'albumine que le liquide situé vers leur centre , et la composition du mélange qui, sous l'inlluence d'une pression faible, traversera leliltre, sera modifiée d'autant plus fortement que la couche fluide ainsi attirée par les parois des canalicules de celui-ci sera consi- dérable comparaUvement au volume du courant central qui échappe à cette influence. On conçoit donc la possibilité, non- seulement d'un certain appauvrissement dans les humeurs qui transsudent à travers une membrane organique privée de vie , mais de variations dans le degré de ces modifications, suivant que le filtre ainsi constitué sera d'ime texture plus ou moins lâche, et offrira, par conséquent, des passages plus ou moins étroits. Or, nous n'avons aucune raison de croire que cette filtralion élective , opérée par une membrane organique tirée d'un cadavre , ne s'effectuerait pas de la même manière si cette membrane était vivante , et , par conséquent , nous pouvons appliquer avec toute confiance ces résultats à la physiologie, et considérer la différence de composition existant entre le sérum du sang et la sérosité des cavités interorganiques comme étant due, en partie au moins, au fait même de la transsuda- tion, et comme étant la conséquence d'une action physique (1). (î) 11 existe dans la science un semblent être du même ordre que grand nombre de faits épars qui me ceux dont il est ici question, et qui COMPOSITION DES LIQUIDES Él^ ANCHES. Zl'25 Mais cette sorte de tamisatioii des liquides est-elle la seule cause dont dépende la faible proportion des matières albumi- noïdes contenues dans les humeurs fournies par la transsuda- tion ? J'Hésite à le croire, et il me parait nécessaire de cher- cher si quelque autre action ne contribue pas à produire les résultats obtenus par le travail physiologique dont l'étude nous occupe ici. En faisant, dans une des premières Leçons de ce cours , l'histoire chimique du sang, j'ai fait mention des expériences intéressantes de M. Mialhe sur les modifications que l'albumine est susceptible d'éprouver. Elles tendent à établir que cette substance, tout en paraissant dissoute, peut se présenter sous méritPraient, de la part des chimistes physiciens, plus d'attention qu'ils ne leur en ont accordé jusqu'ici. L'action condensante exercée avec divers de- grés de puissance sur les différenis gaz par le charbon de bois, l'éponge de platine, etc.; le pouvoir décolorant du noir animal dont on fait un si grand usage dans l'industrie, et la propriété absorbante de certains sels pour les matières ammoniacales et peut-être même pour diverses substances sa- lines, dépendent probablement de la même cause qui, dans un tube capil- laire, rend le ménisque terminal d'une colonne d'eau concave, tandis que ce- lui d'une colonne de mercure est con- vexe. Le mercure ne mouille pas le verre, tandis que la surface de cette dernière substance contracte une cer- taine adhérence avec de l'eau, et se laisse de la sorte mouiller par ce li- quide ; on conçoit donc que si un mélange d'eau et de mercure était poussé à travers un système de tubes capillaires, on ce qui revieol aumème, à travers les cavités inlcrslilicllcs d'une membrane organique, telle qu'une peau de chamois, l'eau s'en- gagerait plus facilement dans ces con- duits élroits que ne le ferait le mer- cure, et passerait plus vite. Une opé- ration que l'on pratique souvent sur le mercure de nos cuves pneumati- ques, mais qui est trop vulgaire pour que l'on y fasse grande attention, montre qu'efl'eclivement il en est ainsi. On sait également qu'en faisant passer à travers un filtre imbibé d'un corps gras de l'alcool qui est mêlé à de l'huile essentielle, on peut retenir la totalité ou la majeure partie de cette dernière substance et purifier l'esprit-de-vin. Dans cette opération, il ne paraît cependant se développer aucune réaction chimique, et l'essence n'est arrêtée au passage que parce qu'elle adhère au corps gras plus que ne le fait l'alcool. Or, le filtrage électif eireclué par les membranes animales quand elles livrent facilement passage à l'eau et aux matières salines qui sont dissoules, c'est-à-dire mêlées à ce liquide, landis qu'elles ne se lais- sent que didicilement traverser par les substances albiuninoïdes, me pa- /|26 ÏIIANSSUDATION. deux formes que la chimie ne distingue pas, mais qui diffèrent sous le rapport physique ; car, dans un cas, elle traverserait facilement les tissus organiques , tandis que dans l'autre cas elle serait retenue par ces espèces de filtres. Ce chimiste en conclut que l'alhumine de la première espèce, qu'il appelle albumine modifiée, est bien réellement à l'état fluide, tandis que la seconde variété, qui est l'albumine ordinaire, est à l'état globulaire , en suspension et non en dissolution , dans les liquides (pii la renferment (1). Or, l'albumine du sérum du laîl être iin phénomène analo2;ue à tous ceux dont je viens de parler. Les forces qui entrent ici en jeu me scm- Ijlcnl être intermédiaires à celles qui d'un côlé louchent à l'attraction new- tonicnne, et qui détermineni la cohé- sion des corps similaires, et aux forces chimiques qui déterminent un rap- procliement plus intime et un certain mode de groupement entre les molé- cules hétéroj^cnes. 11 est probable qu'elles jouent un grand rôle dans beaucoup de phénomènes naturels, et, par exemple, contribuent. à donner au sol arable la grande fertilité qui s'y remarque parfois. Depuis quelques années les chimistes qui s'occupent d'agriculture ont constaté un grand trouvent en dissolution dans l'eau qui la traverse; que les produits ammo- niacaux, par exemple, se trouvent con- densés de la sorte en quantité consi- dérable, et M. Liebig, qui vient de publier des observations très intéres- santes sur ce sujet si important ponr l'agronomie, considère cette fixation de matières étrangères comme ne devant pas être attribuée seulement à des forces chimiques, et comme étant en partie au moins comparable aux effets produits par le cbarbon ani- mal (a). J'ajouterai que l'on doit à M. Chevreul la connaissance de beau- coup de faits qui tendent également à prouver que les tissus organiques peu- vent exercer une action élective sur nombre de faits dont je pourrais ar- les liquides dont ils s'imbibent, et que gucr ici pour montrer comment le ce chimiste célèbre a mis en évidence phénomène essentiellement mécani- le rôle que cette espèce d'affinité ca- que de la filtralion peut influer sur la pillaire peut remplir dans le travail constitution des liquides que le sang abandonne pendant son cours à tra- vers les tissus perméables de l'éco- nomie animale. Ainsi on a reconnu que la terre de bonne qualité possède la propriété de retenir certaines sub- stances salines et organiques qui se sécréloire dont les êtres vivants sont le siège (6). (I) Lorsque je traiterai de l'ab- sorption , j'aurai à revenir sur les expériences et sur les vues de ce chi- miste , dont les recherches ont été résumées dans une publication ré- (a) Liebig, Ueber einifje Eigenschaften der Ackerkrume {Aiin. der Chcmie uiid Pharm., 1858, S'scrie, t.XXlX, p. 109). (h) Chevreul, Recherches chimiques sur la teinture, 0' rném. {Mém. de l'Àcad. des sciences, 1854, t XXIV, p. 432 à 508). COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. /i27 sang est précisément cette albumine qui, dans les circonstances ordinaires, d'après M. Miahle , ne traverserait que peu ou point les membranes organisées. Il serait donc (licite de comprendre que les tuniques vasculaires, dans leur état nor- mal , pussent laisser transsuder de l'eau chargée des sels et de la petite quantilé de caséine soluble ou d'albuminose qui se trouvent dans le sérum, et relinssent l'albumine, comuie nous les voyons retenir les globules hématiques. Dans celte hypothèse , tout s'expliquerait à l'aide de la théorie méca- nique de la transsudation que nous avons vue réunir déjà en sa faveur tant de faits significatifs. Pour que le hquide fdtré par les tuniques vasculaires soit extrêmement pauvre en matières organiques, ilsuflirait que le sérum du sang, tout en étant riche en albumine ordinaire, ne contînt que très peu d'albumine modifiée, c'est-à-dire d'albumine éminemment fluide, condition qui d'ordinaire paraît se trouver réalisée ; et l'augmentation de la proportion de cette variété de la matière proléique dans le liquide nourricier nous rendrait compte de la présence d'une quantité plus grande de cette même substance dans la sérosité des espaces interorganiques. Quant à l'existence d'une quantité, même assez considé- rable, d'albumine ordinaire dans les liquides (ranssudés , nous en comprendrions également bien la possibilité si les tissus des parois des vaisseaux qui font office de filtres deve- naient plus lâches qu'ils ne le sont dans leur état normal ; car alors les particules de cette albumine non modifiée, au centc (a); mais je dois faire ici loules au lieu d'èlic en dissolution , et les réserves au sujet de la tliéoiic que ])liénoniènes observés s'expliquent M. Miallie donne de l'arrêt de l'albu- également bien en supposant seule- mine ordinaire par les membranes ment que la maliére en question organiques; rien ne me semble auto- mouille moins facilement ces tissus riser à croire que cette substance soit animaux que ne le fait l'albumine h l'état globulaire et en suspension , modiliée. (a) Mi.'illie, lUiimie appliquée à la pliysiolwjie el à la ihrrapeuliqiie, IHTiii, p. i:i4 d .-iiiiv. A'^S TRANSSUDATIOjS^ lieu d'être en majeure partie arrêtées par ces membranes, les traverseraient plus ou moins rapidement, et, suivant le degré de facilité avec lequel leur passage s'effectuerait, l'eau du sérum , en s'épanchant au dehors, entraînerait une proportion plus ou moins grande de cette substance protéique. Si la per- méabilité des tissus vasculaires venait à augmenter encore, on devrait s'attendre à voir le liquide qui transsude emporter non-seulement de l'albumine , mais aussi de la fibrine , qui semble se trouver en suspension dans le sérum dans un état de division moins grande que l'albumine. Enfin, en se fondant toujours sur cette même théorie mécanique de la transsuda- tion, on concevrait la possibilité du passage des globules héma- tiques eux-mêmes au travers des parois vasculaires, si ceux-ci, en perdant de leur densité , devenaient des filtres un peu plus lâches. Relations § 9. — Ccs vucs nous permettent aussi de coordonner sys- enlre le degré ^ _ ' '' de richesse tématiquemcnt d'autres faits que nous révèle l'étude des liquides et des liquides épauchés, soit daus les aréoles du tissu conjonctif , soit dans les épanchés. , . , , grandes cavités séreuses. Effectivement, si l'exphcation du mécanisme de la production de la sérosité que je viens de développer est l'expression de la vérité , nous dçvons nous attendre à trouver que non- seulement les liquides épanchés de la sorte varieront dans leur composition chez les divers individus, ainsi que chez le même individu suivant les changements qui s'effectueront dans l'état général de son organisme, mais seront rarement identiques dans les différentes parties du corps lorsqu'elles se produiront simultanément (1) ; car il serait difficile de supposer que (l) Ou sait, par les expériences de d'extension ou de contraction du tissu M. W. Schmidt sur la filtralion de Teau organique exerce beaucoup d'influence et des dissolutions salines au travers sur la rapidité de la transsudation (o) ; des membranes animales, que le degré mais je ne connais pas de faits qui (a) Wilibald Schmidt , Versuche iiber FiUrationsgeschwindigkeit verschiedener Flûssigkeiten durch Herlsche Membran (Pogg'endorfF's Annalender Physik undChemie, ISSC, t.XCIX, p. .337). COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. k^lQ partout le système vasculaire pourrait offrir exactement le même degré de perméabilité normale, et éprouverait à la fois dans toutes .ses parties les modifications physiques qui paraissent devoir influer sur leur degré de porosité. Or, toutes ces varia- tions se constatent par l'analyse chimique des liquides épan- chés, et la discussion des résultats obtenus de la sorte fournit de nouveaux arguments en faveur de la théorie que je viens de présenter. Ainsi, en comparant les faits isolés fournis par les recherches innuence , ^ ^ de la pression de plusieurs chimistes, M. Lehmann est arrive a cette conclu- arténeiie. sion que, toutes choses étant égales d'ailleurs, le liquide épan- ché sera d'autant plus riche en albumine que le passage du sang dans les capillaires aura été retardé davantage, et ce retard, comme nous le savons , est une des circonstances qui tendent à augmenter la poussée de ce liquide contre les parois des vaisseaux où il se trouve emprisonné (i). Les belles recherches de M. Schmidt, entreprises à l'occasion influence de la nature de ses études sur le choléra, tendent à établir aussi que, lorsque ^es ' ^ tissus filtrants les conditions physiologiques ne varient pas, chaque système de s"r la richesse vaisseaux capillaires fournit ordinairement de la sérosité dont la épanchés. prouvent directement l'influence de sidéi-ables , tels que les affections la densité des meiîibranes sur le pas- hépatiques qui sont accompagnées sage proportionnel des matières albu- d'une contraction du parenchyme du minoïdes et salines, et c'est par le foie, etc. Lorsque le trouble déter- raisonnement seulement que je suis miné dans la circulation du sang conduit à dire que cela doit être. dans une certaine portion du système (Ij « Lorsque la circulation dans les capillaire devient très considérable, veines abdominales est obstruée par comme dans l'hypérémie inflamma- la présence de tumeurs volumineuses, loiie , l'épanchement devient beau- dit M. Lehmann, nous trouvons que coup plus riche en albumine, et, les liquides transsudés contiennent effectivement , dans les cas où la sé- une plus forte proportion d'albumine rosité contient de la (ibriiic, nous que dans les cas où le cours du sang trouvons , terme moyen , beaucoup dans ces vaisseaux est eniravé par plus d'all)iuiiiiic que dans voiw où des obstacles mécaniques moins con- rinlillralioii est dile sirciisr (n). » (a) l.eliinanii, l.chrhuch dcr phyfsio}. Clicwie, iSy.i, I. It, p. 275. /iâO TIUNSSIIBATION, richesse en albumine ne varie que peu ; mais que, sous ce rapport, il existe entre ces divers systèmes des différences assez grandes. Ainsi, toutes choses paraissant égales d'ailleurs, ce physiologiste a vu que ce sont les vaisseaux de la plèvre qui laissent suinter la sérosité la plus chargée d'albumine; que dans le péritoine le liquide épanché renferme un peu moins de cette substance ; que dans la cavité crânienne cette proportion est encore plus faible, et que c'est dans le tissu cel- lulaire sous-cutané qu'elle descend le plus bas (1). Il paraîtrait aussi que l'âge des tissus organiques à travers lesquels la sérosité s'épanche est susceptible d'influer sur la (1) -M. Schmidt a observé ces diffé- rences cliez le même individu (a). Le malade était atteint d'albuminurie, et l'albumine se trouvait dans les pro- portions suivantes : Liquide de la plèvre . . 2,85 iwur dOO. ■ — du péritoine . . 1,13 — crânien .... 0,80 — du tissu con- joiictif sous- cutané. ... 0,36 (&) Chez un homme qui était adonné à l'ivrognerie et qui avait une affec- tion organique du foie, M. Lehmann a trouvé une gradation analogue , savoir : Dans le liquide de la plèvre. . 1,85 d'album, — du péricarde . 1 ,06 — du péritoine. . 1 ,04 — des ventricules cérébraux. . 0,56 MM. A. Becquerel et Rodier ont publié des observations analogues (c). Chez un homme qui avait succombé à la maladie de Bright, ils ont trouvé : Dans le liquide périlonéal — extrait de la plèvre — tiré des extrémités inférieures infiltrées EAU. ALBUMINE. MATIÈRES EXTRACTIVES. 985,57 989,69 993,17 11,88 8,36 5,38 2,55 1,95 1,45 (a) L'ouvrage imporlant dans lequel M. Schmidt a consigné ses recherches sur la composition des produits de la transsudation, a paru sous deux litres difl'érenls : Charakterislik cler epidemischen Choiera geçienûher verwandten Transsudalionsanomaleen , — et Zur Kenntniss des vegativen Lebens, iS50, t. l. (b) SchmidI, Op. cit., p. 146. (c) A. Becquerel et Rodier, Traité de chimie pathologique, p. 512, COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. 431 composition de ce liquide, et que la proportion d'albumine qui transsude ainsi dans les jeunes membranes dont le tissu est délicat est plus considérable que dans les mêmes parties à une période avancée de leur développement. Ainsi, M. Leh- mann a fait remarquer qu'en général la liqueur amniotique, qui est une exsudation produite par les vaisseaux des enveloppes du fœtus, est plus riche en matières organiques dans les pre- miers temps de la gestation que vers l'époque où l'accou- chement doit arriver et où ces membranes doivent cesser d'exister (1). (1) Pour établir cette relation entre l'âge de l'amnios et la qualité du liquide contenu dans cette poche , M, Lehmann se fonde sur trois ana- lyses qui lui sont propres (a) et sur un certain nombre de résultats isolés obtenus par d'autres chimistes. Ainsi M. Vogt a trouvé dans le liquide amniotique provenant d'une femme dont la grossesse n'était que de quatre mois , l/i,/i6 millièmes de matières albuminoïdes ( savoir : albumine, 10,77 ; matières extractives , 3,69 ) , et il a obtenu seulement 7,01 de matières organiques ( savoir : albu- mine, 6,67, et matières extractives, 0,3!i) dans un cas de grossesse à six mois (6). M. Scherer a trouvé dans les eaux de l'amnios à huit mois de gestation : Albumine et mucus Matières extraclives Sels Eau 7,67 7,24 9,25 975,84 A terme , ce produit utérin lui a fourni : Albumine et mucus 0,82 Matières extractives. .... 0,60 Sels 7,06 Eau 991,47 (c) Dans deux analyses faites égale- ment à neuf mois, M. Mack a obtenu les résultats suivants : nH. N"2. Eau 985,14 988,10 Albumine 3,70 2,64 Extrait alcoolique. . 5,25 4,75 Extrait aqueux. . . 4,65 4,35 Matières grasses. . 1,25 0,13 Sels solubles. . . . 7,61 7,56 Sels insolubles. . . 1,72 1,67 (d) Enfin, dans les eaux de l'amnios examinées vers sept mois de la gesta- tion par M. Rees , l'albumine s'est trouvée dans la proportion de 5,9 à 2,/i pour 1000 (e). (a) Lehmann, Lehrbuch der physiologischen Chemie, 1853, t. II, p. 275. {&) Vogt, Op. cit. {Annalen der Pharmacie, 1836, t. XXVIH, p. 338). (c) Scherer, Chemische Untcrsuchung der AmniosjlixssUjkeil des Menschen in verschiedenen Perioden ihres lieiilehens {Zeilschr. fur wissensch. Zooloaie, 1849, t. I, p. 92). {d} Mack, l-Amrjelleilriigezur Kenntnins der Amnios/lûssigheit (Hellcr's Arch. fUr physiol. tmd pathol. Chemie und Milcroscopie , 1845, t. 11, p. 218). (e) Rees, Amlysis of the Liquor Amnii (Londmi Médical GazeUe, 1838-1839, p. 40). Influence de la CGinposition du sang sur celle de la sérosité'. k'à'i TRANSSUDATION. J'njouterai que la composition chimique du sang exerce éga- lement une influence assez grande sur la richesse aussi bien que sur la quantité des liquides épanchés, mais dans un sens inverse. C'est quand le sérum est peu chargé d'albumine, ai-je dit, que la transsudation est la plus facile -, mais la sérosité qui Proportion 86 formc dans ces circonstances est plus pauvre en principes d'albumine. ri organisés que celle que fournissent les vaisseaux renfermant un sang où l'albumine abonde (1). Présence Quand le sang est très chargé de glvcose , comme cela se de glycose , >~j ^^ v ' d'urée, etc., yolt chcz Ics diabétiques , on peut rencontrer aussi cette espèce la sérosité, de sucre dans la sérosité épanchée, soit dans les cavités inté- rieures, soit à la surface extérieure du corps (2). (1) Celte relation entre la richesse du sang et des liquides qui consti- tuent les épanchements hydropiques a été signalée par M. Andral et re- marquée aussi par M. Lehmann. Ainsi le premier de ces physiologistes, en examinant la composition du sérum obtenu dans des cas d'ascite par plusieurs ponctions successives pra- tiquées chez le même individu , a trouvé que la proportion d'albumine et des autres matières organiques y diminue à mesure que la maladie s'a- vance. La sérosité obtenue par la vé- sication de la peau lui a fourni plus d'albumine que tout autre produit analogue ; mais là encore la propor- tion des principes organiques lui a paru diminuer chez les individus qui étaient affaiblis par de longues souf- frances (a). M. Lehmann est arrivé à la même conclusion en comparant les épan- chements qui se font dans la même cavité, sous l'influence d'une mala- die du cœur ou du foie, lorsque le sang est riche en albumine , et chez des individus où ce liquide est très appauvri , comnrie cela se voit souvent dans les cas d'albuminu- rie , de cancer , de phlhisie pulmo- naire , etc. (6). (2) Ainsi , M. Claude Bernard a trouvé de la glycose dans le liquide du péricarde chez un diabétique qui était m.ort subitement (c). M. Grohé a ob- tenu le même résultat dans deux cas de péricardite {d} , et M. Wurtz a reconnu la présence de celte sub- stance dans la sérosité fournie par un vésicatoire chez une personne affectée de la même maladie (e). (a) Voyez Monneret et Fleury, Compendium de médecine pratique, 1841, t. IV, p. 6:22. (6) Lehmann, Handbuch der plnjsiol. Chetnie, 1853, t. II, p. 275. (c) Cl. Bernard, Autopsie d'un diabétique {Compt. rend, de la Soc. de biologie, 1849, p. 81). (d) Grohé, Zur Kenntniss der pathologischen Exudate in HBlilimgen der Pleura und Pericar- diums (Verhand. der Phys. med. Gesellsch. in Wiirxburg , 1854, t. IV, p. 147). — Voyez aussi les observations de Frerich sur la présence du sucre dans la sérosité des bydro- piques {Weiner med. Wochenschr., 1854). (c) VVurtz, Présence du glucose dans la sérosité d'un vésicatoire posé à un diabétique {Comptes rendus de la Société de biologie, 1850, p. 4). COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. /l3â Dans (les cas d'ictère on a constaté la présence du pigment biliaire dans des dépôts hydropicfues (1 ). L'urée, qui se trouve toujours en petite quantité dans le sang, peut se rencontrer aussi dans les licfuides épanchés dans les diverses cavités du corps (2) . Enfin, on a reconnu également que, dans certains états pathologiques où il existe des produits ammoniacaux dans le sang (3), il s'en est trouvé aussi dans les humeurs fournies par la transsudation (/i). (1) Dans tous les cas dliydropisie dépendante d'une maladie du foie , que M. Lehmann a étudiés sous ce rapport , ce chimiste a reconnu l'exis- tence des acides résineux de la bile dans la sérosité ; mais , dans les cas où l'épanchement était dû à une ma- ladie du cœur et n'était pas accom- pagné d'un état pathologique du foie, il n'a découvert dans ces liquides au- cune trace de ces produits de la sé- crétion biliaire (a). Dans deux cas d'hydrocèle , il a trouvé aussi des traces de matières résineuses et colorantes de la bile dans la sérosité des bourses , bien qu'il n'y eût chez ces malades aucun symptôme d'une affection hépatique. M. Heller a trouvé du glycocholate de soude dans divers liquides en pu- tréfaction provenant d'hydrocèles (6). (2) M. Marchand a découvert de l'urée dans la sérosité péritonéale (c), et Fr. Simon a constaté un fait ana- logue (d). M. Schmidt a trouvé cette substance dans le hquide arachnoïdien chez un hydrocéphale (e) , et, dans un cas d'albuminurie , M. Schlossberger en a aperçu dans le liquide épanché dans les ventricules cérébraux {f). M. Millon {g) , ainsi que MM. Mar- chand et Wôhler , en ont trouvé dans les humeurs de l'œil (h]. Enfin M. Wôhler {i) , et, plus récem- ment, M. J. Regnault, en ont con- staté la présence dans l'eau de l'am- nios (j). (3) Voyez ci-dessus, tome I, p. 206. (/() D'après M. Schmidt , la pré- sence de matières ammoniacales dans (o) Lehmann, Handb. derphysiol. Chemie, t. II, p. 279, (6) Heller, Die Ilydrocelellûssi'jkeil und die Resultate ihrer Zusammensel%xincj {Archiv fur fihysiol. undpalhol. Chemie, 1841, t. I, p. 215). (c) Marchand, Ueber das Vorkommen des Harnstoffes im thierischen Koi'per {Journ. fiirprakt. Chemie, 1837, t. XI, p. 458). (rf) Voyez ci-dessus, p. 420, note. (e) Schmidt, Charakteristik der epidemischen Choiera, p. 124. (/■) Sclilossberger, Chemical Ga%ette, iHi^, p. 302. {rj) Millon, Sur la présence de l'urée dans l'humeur vitrée de l'œil {Comptes rendus de V Académie des sciences, t. XXVI, p. 121). {h} Wôhler, llarnstoffim Humor vilreus {Jotirn. fur prakt. Chemie, 1848, t. XLIV, p. 245). — Ilarnsto/fim jUuje {Journ. fur prakl. Chemie, 1849, t. XLVI, p. 384). (i) Wohlcr , Uarnslolf im FruclUiuasser {.lotmial fur prakt. Chemie, 1840, t. XXXVIII, p. 252). Ij}.\. l'icpnault, Sur le liquide amniolùiue de la femme (Comptes rendus de V Académie des sciences, 1850, t. XXXI, p. 218). Sels inorganiques. /i3/|. transsudation. Quant aux sels inorganiques qui sont tenus en dissolution dans la sérosité, ils sont en général non-seulement les mêmes que ceux qui existent dans le sérum du sang, mais ils sont mêlés à peu près dans les mêmes proportions respectives (1 ) ; seulement ils sont presque toujours moins abondants que dans le fluide nourricier f2). la sérosité ne serait pas rare chez les liydropiques afTectés d'albumi- nurie (a). (1) M. Sclmiidt a trouvé une excep- tion remarquable à cette règle dans le liquide qui transsude du plexus choroïdien et qui s'épanche dans les ventricules latéraux du cerveau. Le Uquide céphalo-rachidien fourni par la pie-mère et l'arachnoïde contient le même mélange salin que le sérum du sang; mais , dans la sérosité ven- triculaire , ce mélange renferme un grand excès de phosphates et de sels à base de potasse, de façon à se rap- procher beaucoup de ce qui existe dans les globules hématiques du sang (6). Cela dépend-il de l'exis- tence d'une véritable sécrétion dans celte partie de l'encéphale , ou bien de ce que là il y aurait dans les vais- seaux dont naissent les plexus cho- roïdiens une grande consommation des matières organiques constitutives des globules du sang ? Dans l'état ac- tuel de la science, cette question n'est pas soluble. (2) Si , au lieu de comparer les ma- tières salines entre elles dans le sérum du sang et dans la sérosité des hydro- piques, on les considère dans leurs rapports avec l'eau et avec l'albumine, on remarque entre les fluides en cir- culation et les liquides épanchés des différences très grandes. Une même quantité d'eau contient en dissolution presque aulantde sels de part et d'au- tre, tandis que la proportion d'albu- mine, comme nous l'avons déjà vu , s'abaisse en général beaucoup dans la sérosité. Dans les épanchements char- gés de fibrine , la proportion des sels solubles ne varie généralement que entre 0,73 et 0,82 pour 100, tandis que dans le sérum du sang normal elle est d'environ 0,85 pour 100 (c). Mais , ainsi que nous l'avons vu ail- leurs , cette proportion diminue en général chez les malades dont l'ali- mentation est insuffisante {d). Dans la sérosité des hydropisies ordinaires, la proportion de ces matières salines est souvent beaucoup plus considé- rable, et s'élève parfois à 0,86 ou même à 0,95 pour 100, de façon à dépasser celle du sérum normal : mais il est à remarquer que dans ces affections le sang est aussi plus riche en substances inorganiques que dans l'état normal (e). Dans d'autres (a) Voyez Lehmann, Lehrb. der physiol. Chenue, t. II, p. 285. (6) Schmidt, Charakleristik der epidemischen Choiera, p. 148. (c) Lehmann, Lehrbuch der physiol. Cheniie, I. II, p. 282. (d) Vojez ci-dessus, t. I, p. 287. {e) Schmidt, Ckarakter. der epidem. Choiera, p. J43. COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. /l35 Il est aussi à noter que la composition chimique des liquides Modifications , ,, ,A, l'p' ^1 ,•! • consécutives épanches peut être modihee après leur sortie des vaisseaux de la sérosité. sanguins, soit par les effets de l'absorption d'une certaine quantité de leur eau , soit par leur mélange avec des matières provenant d'une autre source : par exemple, d'une sécrétion morbide développée dans quelque partie adjacente (l). cas , l'excès des principes salins dans los liquides épanchés paraît tenir à la résorption d'une partie de l'eau, comme je vais le faire voir. (1) Les changements dans la con- stitution chimique de la sérosité, qui paraissent être dus à la résorption d'une portion de ses matériaux con- slitutifs . se remarquent principale- ment dans les cavités closes et peu extensibles où ce liquide séjourne très longtemps, et ces changements déterminent une diminution dans la proportion de l'eau et des matières salines. On peut expliquer de la sorte la concentration des humeurs qui se voit souvent dans les cas d'hydrocèle, d'hydropisie de l'ovaire , etc. Mais , en général , les liquides altérés de la sorte doivent une partie de leur densité à leur mélange avec des pro- duits de quelque, sécrétion morbide qui est parfois excitée par le seul fait de leur présence et qui , d'au- tres fois , dépend de quelque autre cause. M, Lehmann fait remarquer que les substances protéiques, qui sont d'or- dinaire confondues dans les analyses sous le nom de matières extractives, sont en généial plus abondantes dans la si'-rosilé des liydropiques que dans le sérum normal, et il pense qu'elles sont dues , en partie au moins , à des modifications qui s'opéreraient dans les matériaux constitutifs des liquides épanchés après leur sortie des vais- seaux. Mais, pour donner de la valeur à cette hypothèse, il faudrait com- parer la composition chimique de la sérosité, non pas à celle du sang nor- mal , mais à celle du sérum du ma- lade dont provient le premier de ces liquides , comparaison qui n'a été que rarement faite. Il est néanmoins à noter que AI. Lehmann trouve qu'en général , la proportion de ces produits albuminoïdes est plus grande dans les épanchements anciens que dans ceux dont la formation est ré- cente (a). L'influence que la résorption d'une portion plus ou moins considérable de l'eau épanchée dans les cavités interorganiques peut exercer sur la proportion des substances salines en dissolution dans la sérosité des hy- dropiques paraît être considérable, et nous explique certaines particularités constatées par l'analyse chimique. Ainsi M. Cli. Schmidt a trouvé que dans les cas oi^i la transsudation in- terne dont résulte l'hydropisie est ac- compagnée OH suivie d'une excrétion abondante de liquides albumineux , comme dans la maladie de Briglit , la proportion des sels augmente beau- coup dans la sérosité et y dépasse (a) i-i:liiii.-irin, Ixhrhuc.h (le.r pliys'ml. CItemie, t. Il, p. 277. /|.36 TUANSSUDATION. Il est probable que la plus grande partie de la fibrine qui, dans certains cas pathologiques, se trouve dans ces liquides, ne provient pas directement du plasma sanguin et se forme sur place (1) ; telle est aussi l'origine des corpuscules de pus que quelquefois celle qui existe dans les autres humeurs de l'économie (a). C'est aussi de la sorte qu'on peut se rendre compte d'un léger accrois- sement de la quantité de matières fixes trouvées dans la sérosité péri- tonéale, par M. Hoppe , chez un ma- lade qui , étant affecté d'albuminurie, subit la ponction trois fois dans l'es- pace d'un mois (6). (1) La distinction que M. Vogel et quelques autres pathologistes ont éta- blie entre leshydropisiesditessereîfses et les hydropisies fibrineuses me pa- raît en parfait accord avec les don- nées de la physiologie. Dans les pre- mières , que je préférerai appeler hydropisies simples, le liquide épan- ché a tous les caractères de la sérosité normale ; il ne contient pas de fibrine, et sa transparence n'est iroiiblée que par la présence de quelques débris d'épithélium et autres corpuscules étrangers tenus en suspension , mais n'appartenant réellement pas à ce produit. Dans les hijdropisies coin- plexes , ou hydropisies fibrineuses, le sérum a d'autres propriétés qui sont dues à la présence d'une pro- portion considérable de fibrine; en général , il se coagule spontanément , mais d'une manière lente , lorsqu'on le retire du corps ou même pendant qu'il est encore dans l'intérieur de l'organisme. M. Vogel suppose que le liquide aqueux des hydropisies simples provient des veines, et n'est pas le résultat d'une transsudation mécanique seulement , mais de quel- que phénomène endosmoUque encore inconnu ; tandis que le liquide fibri- neux des hydropisies complexes se- rait du plasma provenant directement du sang et épanché par les capil- laires [c) : mais cette opinion ne me paraît pas admissible. Dans tous les cas, c'est, bien certainement à travers les parois des vaisseaux capillaires que la plus grande partie , sinon la totalité de l'eau épanchée, s'échappe du sang pour pénétrer dans les cavités interorganiques circonvoisines ; mais il me paraît probable que la majeure partie de la fibrine que l'on trouve mêlée au sérum ordinaire dans les cas d'hydropisies complexes ne vient pas de l'intérieur du système circula- toire, et se forme sur place , c'est-à- dire à la surface libre des tissus qui limitent ces espaces infiltrés. Quoi qu'il en soit, la proportion de fibrine contenue dans ces liquides est en général inférieure à celle qui se trouve dans le plasma du sang : ainsi, dans plusieurs cas d'empyème ob- servés par MM. Quevenne, Scherer, (a) Sclimidt, Charakter. der epidem. Choiera, p. 147. ib) Hoppe, Ueber serôse Transsudate (Arcliiv fur pathologische Anatomie und Physiologie, 1856, t. IX, 'p. 250). le) i. Vogel, Traité d' anatomie pathologique générale, trad. de l'allemand par Jourdan, p. 29 etsuiv.). COMPOSITION DES LIQUIDES ÉPANCHÉS. /|37 l'on remarque parfois dans ces humeurs; et je suis porté à croire que plusieurs autres substances qui s'y montrent excep- tionnellement en dissolution proviennent de quelque source semblable (1). Mais ce sont là des questions qu'il serait préma- turé de discuter en ce moment, et que nous ne pourrons Vogt, etc., elle ne s'est pas élevée au-dessus de 1,8 pour 1000 (a). Mais si l'analyse de la sérosité provenant d'une hydropisie ascile , et due à Schwann , est exacte , dans certains cas elle dépasserait de beaucoup cette limite ; car ce chimiste annonce qu'il a trouvé dans ce produit , sur 100 parties : Fibrine 8,33 Albumine 2,96 Malièrcs exlraclives 0,78 Matières insolubles 0,21(6) En général, cette fibrine se coagule plus lentement que celle du plasma, et dans quelques cas on l'a vue ne se prendre en gelée que vingt-quatre heures après son exposition à l'air. Il est aussi à noter que la proportion de matières grasses qui s'y trouve associée est en général plus grande que dans le sang , et quelquefois l'o- rigine étrangère de ces substances est évidente : par exemple, la graisse qui devient très abondante dans l'eau de l'amnios vers la fin de la gestation , provient de la sécrétion cutanée du fœtus. Les globules du pus qui se mon- trent souvent dans les exsudations circumvasculaires sont aussi des pro- duits d'un travail inllammatoire local et ne viennent pas de l'intérieur des vaisseau-x. ?.'. Lebert a publié à ce sujet de très bonnes observations sur lesquelles je reviendrai quand je trai- terai des sécrétions morbides (c). (1) Dans quelques circonstances très rares le sang présente des caractères d'acidité dus probablement à la pré- sence d'un excès d'acide lactique, dans quelques cas de fièvre puerpérale, par exemple (d) ; et alors les liquides four- nis par transsudation peuvent pré- senter une réaction analogue. Mais , quand le sang est, comme d'ordinaire, alcalin , on ne rencontre que très rarement des traces d'acidité dans la sérosité, et, quand on en découvre, cela paraît tenir au mélange de ce liquide avec les produits de la fermen- tation butyrique des matières grasses opérée hors des vaisseaux sanguins (a) Quevenne, Résumé de deux analyses de liquides lires de la plèvre par l'opération de l'em- pyème {Journal de pharmacie, 1857, t. XXIII, p. 551). — Scliercr, Clœm. uni milcroscop. Untersuchungen zur Pathologie, p. 106. — Vosjt, Op. cit., p. 43. — Voyez aussi, au sujet do ces liquides fibrineux, l'ouvrage de MM. A. Becquerel et Rodier {Traité de chimie pathologique, p. 510 et suiv.). (6) A. Magiius, Vorliommen von h'aserslojf in einer hydropischen Flûssiijkeit ( Miiller's Arch. fiir Anat. und Physiol., 1838, p. 07). . (t) Lebcrt, Physioloyie pathotoyiiiue, art! De l'exsudaiion et de la suppuration, 1815, 1. 1, p. 20 et suiv.). [d) Lclimann, llandb. derphys. Chemie, t. II, p. 282. évaporation. A38 TRANSSUDATION. aborder utilement qu'après avoir étudié les caractères du travail sécrétoire. Je me bornerai donc à signaler ici celte cause de complication en quelque sorte accidentelle, me réservant d'y revenir dans la suite de ces Leçons. Influence § 10. — Aiusi tout s'accordc à nous montrer que chez la transsudaiion l'Hommc ct tous les Anloiaux supérieurs, les parois du système sur les perles . , . , . in i on , \ • n l par cu^culatoire , bien quelles n oftrent a nos yeux m tentes m ouvertures quelconques, sont en réalité formées de tissus dont la [lorosité leur permet non-seulement de s'imbiber des liquides qui les baignent, mais de laisser filtrer ceux-ci à travers leur substance. Cette transsudation a tous les caractères d'un phé- nomène essentiellement physique, mais ses résultats sont subordonnés aux conditions dans lesquelles il s'effectue, et ces conditions, à leur tour, peuvent varier suivant l'état physiolo- gique de l'organisme. Le travail qui s'accomplit de la sorte est donc soumis en partie aux forces vitales , et les circonstances ou avec les produils de la sécrétion ou donne même au produit tout on- des glandes sudorifiques, comme dans lier une consistance pâteuse. Cela se quelques cas de suette (a). Dans les voit principalement dans l'hydropisie maladies phlycténeuses ordinaires de de l'ovaire et dans Fliydrocèle (6). Il la peau, comme dans les cas de pem- est aussi à remarquer que les plexus phigus et d'inflammation due aux vé- choroïdiens se couvrent quelquefois sicants, par exemple, la sérosité est de petites concrétions de la même aj(.aljne^ substance. En général, cependant, les Il me paraît probable qu'il faut liquides épanchés ne contiennent que attribuer aussi à une sécrétion extra- des traces très faibles de cholesté- vasculaire la cholestérine qui se rine. Nous verrons ailleurs que celte trouve parfois en si grande abondance substance grasse non acidifiable se dans la sérosité , qu'elle s'y dépose produit souvent en abondance dans sous la forme de paillettes cristallines, les tissus anormaux. (a) Voyez à ce sujet : — Curling, A Practical Treatise on the Diseuses of the Tesiis, etc., 1843, p. 123. Morin' Examen chimique d'im liquide formé par une tumeur enkystée qui avait son siège dans l'abdomen chez une femme (Journal de chimie médicale, 1825, t. I, p. 276). Henry, Existence de la cholestérine dans des liquides foîirnis , 1° par l'hydropisie de l'ovaire, 2° par l'ascite (Journal de chimie médicale, 1825, t. I, p. 280). Braconnot Examen chimiqite de l'urine d'un ictérique et d'un liquide épanché dans son bas-ventre (Jmirnal de chimie médicale, 1827, l. III, p. 480). (b) Srliorcr, Chem. und mikroscop. Untersuch. %ur Puthol., p. 147 ct sniv. PERTES PAR ÉVAPORATION. i!io9 qui influent sur sa marche sont trop nombreuses et souvent trop peu connues pour que nous puissions nous rendre compte de tous les faits particuliers que nous révèle l'étude de cette fonction ; mais c'est en invoquant les lois de la physique que l'on s'explique tous les points les plus importants de son his- toire. Nous verrons plus tard que l'extravasation des parties les plus fluides du sang, effectuée de la sorte d'une façon toute mécanique^ contribue à l'accomplissement de beaucoup d'autres actes physiologiques, et joue même un grand rôle dans les sécrétions qui dépendent de forces d'un autre ordre. Ce serait prématuré de chercher à faire ici la part de la transsudation dans les diverses fonctions où elle n'intervient que d'une manière secondaire ; mais il est un phénomène important qui en est une conséquence directe, et sur lequel il sera bon de porter en ce moment notre attention : c'est l'évaporation, qui, à chaque instant, s'effectue par tous les points de la surface des corps vivants. § 11. — En parlant des expériences de Lacauchie sur Pertes l'hydrotomie, j'ai fait remarquer que l'eau injectée dans l'ap- évaporàtion. pareil circulatoire sous une certaine charge, non-seulement s'en échappe et se répand dans toutes les parties du cadavre, mais encore vient suinter à la surface de la peau et s'écouler au dehors. Chez les êtres vivants, les liquides ne sont pas poussés vers le dehors avec la môme force, et la peau, revêtue de son épiderme, oppose à leur passage de grands obstacles ; mais cette membrane tégumentaire est toujours imbibée d'une certaine quantité de sérosité fournie par les parties sous-jacentes, et par conséijuent, si tout ce que j'ai dit relativement à la iiatiu'C mécanique des phénomènes de transsutlatiuii cl d'exsudation est vrai , nous (l(;voiis voir une {lartic de l'eau ;iiusi répandue dans l'orga- iiisme se dissiper au dehors à l'étal de vapeur, comme dans tout autre corps qui soi'ail perm('able à ce liquide et qui en rcnfcrmerail ; nous devons trouver aussi (juc la marche de IV. 29 lidO TRANSSUDAÏION, cette évaporation est soumise aux mêmes inlluences que dans le règne inorganique, et que les pertes subies de la sorte par l'économie animale sont réglées par les conditions physiques dans lesquelles le phénomène s'accomplit. La vapeur aqueuse qui se dégage sans cesse de la surface de la peau et des autres membranes organiques en contact avec l'air constitue la majeure partie de l'exhalation que les anciens physiologistes appelaient la transpiration insensible, parce que d'ordinaire les produits n'en sont pas visibles comme ceux de la transpiration proprement dite ou sueur. L'étude de cette espèce particulière d'excrétion a occupé pendant longtemps plusieurs physiologistes , parmi lesquels il faut citer en première ligne Sanctorius, Dodart, Keil, de Gorder et Lenning (1); mais ce sont surtout les expériences méthodiques et logiquement com- binées de mon frère, Wilham Edwards, qui nous ont fait connaître les lois de ce phénomène. J'ai déjà rendu compte de ces recherches lorsque j'ai traité du travail respiratoire (2). Je me bornerai donc à rappeler ici les principaux résultats obtenus de la sorte , et à montrer l'accord parfait qu'ils offrent avec ceux auxquels nous venons d'arriver par l'étude de la transsudation intérieure. Influence Nous avous VU d'abord que , toutes choses étant égales d'ail- du degré i i , r • i , -, n de saiuration Icurs, Ics pcrtcs par evaporation sont d autant plus grandes surkmarehe quc l'Animal est plus rapproché de son point de saturation, la transpiration, c'cst-à-dirc dc l'état dans lequel son organisme est chargé de la quantité d'eau la plus forte qui soit compatible avec sa con- stitution ; nous avons vu aussi que, sous ce rapport, la marche des phénomènes est la même chez l'Animal vivant que dans le cadavre, et nous aurions pu montrer qu'il en est également ainsi dans les corps inorganiques. Ces faits sont en harmonie (l) Voyez ci -dessus, tome lî , (2) Voyez lome II, page 604 eî page 602. suivantes. des conditions physiques extérieures. PERTES PAR ÉVAPORATION. /^/j.! complète avec les résultats que je viens d'exposer, touchant l'influence de la quantité des liquides en circulation sur l'acti- vité de la transsudation, et ils tendent également à montrer que le passage des liquides au travers des tissus vivants est un phénomène régi par les lois de la physique générale. Il en est de même de tout ce que j 'ai dit au sujet de l'influence influence de la température extérieure , de l'état hygrométrique de l'air, des courants atmosphériques, des vêtements et de la pression sur la marche de la transpiration insensible. Nous avons vu que toute variation dans l'une quelconque de ces conditions extérieures tend à entraîner un changement dans la quantité de vapeur aqueuse exhalée par les Animaux vivants, et que cette modification est toujours suboixlonnée aux lois physiques de l'évaporation des liquides en général. En exposant ces résultats remarquables, j'ai ajouté cependant que, sous ce rapport, tout ne se passait pas exactement de même dans un Animal vivant et dans un cadavre, que l'action physiologique de l'organisme exerçait aussi une grande influence sur la marche du phénomène ; et maintenant il nous sera possible d'apprécier la nature de cette intervention mieux que nous ne pouvions le faire au début de ce cours. L'eau qui s'évapore de la peau n'est pas libre à la surface de influence . . , -de l'activité cette membrane , mais interposée entre les molécules de son de rinigaiion , , . ,,.,., physiologique tissu , et c est a raison de la perméabilité de celui-ci que ce sur les effets fluide peut obéir à sa force expansive et s'échapper au dehors iranspirafion. sous la forme de vapeur. Lorsque le liquide excrété se répand même en couche mince à la surface d'une tunique muqueuse qui est en contact avec l'air, comme dans les voies respi- ratoires , il y arrive en majeure partie par transsudalion , et par conséquent la formation plus ou moins active de la vapeur dans ces points est encore, quoi(jiic d'une manière moins directe, subordonnée à la [)crméal)int(; dii tissu sous- jaccnl. Il y a plus : la persistance du phénomène <1épeiid du [lli'2 TRANSSt'DA'fiON. renouvellement de la provision d'eau qui se trouve dans cette couche superficielle de tissu perméable , et ce n'est pas tant la quantité de liquides contenus dans l'organisme tout entier qui influe sur l'abondance de la transpiration insensible que la quantité des humeurs répandues immédiatement sous la sur- face d'évaporation. Ce phénomène se trouve donc subordonné, jusqu'à un certain point, à l'arrivée plus ou moins facile des liquides dans les parties qui en sont le siège, et cet afflux, toutes choses étant égales d'ailleurs , est à son tour réglé par le degré de vascularité de cette même partie et le degré de perméabilité des parois des vaisseaux qui y apportent le fluide nourricier. Toutes les conditions qui influent sur la transsu- dation seront donc susceptibles de modifier la marche de la transpiration, et parmi ces conditions il en est plusieurs, comme nous venons de le voir, dont la nature est essentiellement physiologique. C'est en tenant compte de toutes ces circonstances qu'on peut comprendre ce qui se passe dans les cas particuliers, et expliquer divers faits qui , au premier abord , ont beaucoup embarrassé les observateurs. Je n'en citerai qu'un exemple. Conséquences Chacun Sait que d'ordinaire la peau de l'Homme et des variables , , , (le Animaux terrestres , en gênerai , quoique étant toujours le la dessiccation , . n \ i des membranes slégc d'unc cvaporation abondante, ne se dessèche pas, et con- exlérieures. . .,,, , .,,, ., serve dans son tissu la quantité d eau nécessaire a 1 entretien de la souplesse et des autres propriétés physiques sans lesquelles cette membrane ne pourrait remplir ses fonctions dans l'orga- nisme. Mais chez les Animaux aquatiques il n'en est pas toujours de même, et les expériences de William Edwards, relatives à l'influence des agents physiques surla vie, nousfont voir que chez les Poissons la transpiration cutanée peut suffire pour amener promptement la mort. Ce physiologiste s'en est assuré en pla- çant un certain nombre de ces Animaux avec le corps à l'air, landis que la tête plongeait dans l'eau, afin de permettre au PERTES PAR ÉVAPORATION. /|/|.3 travail respiratoire de s'effectuer comme dans les circonstances ordinaires , et il a constaté cependant que dans ces cas il n'y avait eu aucune diminution dans la quantité totale des liquides contenus dans l'organisme ; car l'absorption de l'eau par les branchies et les autres parties baignées par ce liquide suffisait pour contre-balancer, sous ce rapport, les effets de l'évapora- tion. La dessiccation de la peau du corps, qui ne tardait pas à se manifester dans cette expérience , tenait donc , non pas à un défaut de liquides dans l'ensemble de la machine animée , mais à l'insuffisance du travail irrigatoire : il y avait assez de liquides dans l'organisme pour subvenir à tous les besoins phy- siologiques ; mais ce liquide n'arrivait pas assez vite dans les parties superficielles du tronc , de la queue et des membres, pour en empêcher la dessiccation et la mort. La faculté de résister plus ou moins longtemps à un changement de miheu , faculté qui est si inégalement développée chez les divers Animaux aquatiques, doit donc dépendre non -seulement des disposi- tions que j'ai fait connaître ailleurs dans leur appareil respi- ratoire (1), mais aussi du degré d'activité dans la transsudation des liquides des vaisseaux sanguins dans les tissus circonvoi- sins, et de leur diffusion dans ces tissus ("2). Par conséquent (1) Voyez tome II, page 258. 3 à 1) ; et ayant trouvé que chez les (2) Ces expériences ont permis à Reptiles et les Animaux à sang cliaud William Edwards d'expliquer corn- les variations de poids dues à des ment la dessiocation des blanchies circonstances analogues peuvent être d'un Poisson peut s'elfecluer, et dé- également très considérables, il étudia terminer la mort de l'Animal quand au même point de vue la marche de la celui-ci est exposé à l'air, bien que transpiration chez les Poissons , et il la perte totale de poids qu'il a éprou- vit que ces Animaux, quand ils sont vée de la sorte soit très faible. Ayant exposés à l'air, meurent en général constaté que chez les Batraciens la avant que le poids de leur corps ait différence entre le point de saturation été bien notablement réduit parles de l'organisme et le point de dessic- effets de l'évaporation. Ayant placé cation du corps incompatible avec un Poisson avec le corps dans l'eau l'entretien de la vie est très grande et la tète hors de ce liquide, il trouva (à peu près dans la proportion de que la perte de poids pouvait être llllll TRANSSUDATiON. aussi, cetle faculté doit être soumise à l'influence du degré de pression sous laquelle le sang circule dans les vaisseaux, aussi bien qu'à celle de l'abondance plus ou moins grande de ces vaisseaux et du degré de perméabilité des tissus situés entre le fluide nourricier et l'extérieur. Des considérations du même ordre nous font comprendre aussi comment nos lèvres, et même notre peau, se dessèchent et se gercent plus facilement par l'action d'un vent sec et froid .que sous l'influence d'une atmosphère dont la température douce est cependant plus favorable à l'activité del'évaporation. C'est que, sous l'influence du froid, les petits vaisseaux superficiels se resserrent, le sang y circule en moins grande quantité , la transsudation se ralentit, et les tissus situés entre les capillaires et l'extérieur, c'est-à-dire la couche épithélique et les parties sous-jacentes, ne reçoivent plus par imbibition la dose de séro- sité nécessaire pour contre-balancer les effets d'une évaporation, même peu abondante. C'est donc un défaut d'équilibre entre la recette et la dépense des fluides qui survient, et qui amène la dessiccation de la parhe dont l'irrigation est insuffisante. Je pourrais multiplier beaucoup les exemples de faits parti- culiers dont l'explication nous est fournie par la théorie phy- niille, et que cependant l'Animal mou- que la masse totale des humeurs con- rait assez promptement. D'un autre tenues dans l'économie ne soit pas côté, il avait reconnu que lorsque ces notablement diminuée par l'évapora- Animaux respirent dans l'air, la du- lion dont elles sont le siège. Or, les rée de leur vie est, dans certaines expériences mentionnées ci-dessus lui limites , dépendante de l'activité plus firent voir que cela devait tenir au dé- ou moins grande de l'évaporation faut d'équilibre dans la répartition des dont leurs branchies sont le siège , et fluides nourriciers et à l'insuffisance par conséquent il fallait chercher de l'irrigation locale d'une partie du comment , dans les circonstances or- corps, lorsque , dans le reste de l'or- dinaires, ces organes peuvent, par le ganisme, il pouvait y avoir surabon- contact de l'air, se dessécher, bien dance de liquides (a). (a) William Edwards, De l'influence des agents physiques sur la vie, p. 120 et suiv. inférieurs. PERTES PAR ÉVAPORATION. /i/i5 sique de la transsudation que je viens d'exposer ; mais je ne crois pas devoir entrer ici dans ces détails , car l'objet principal de cette Leçon était la démonstration de la nature essentielle- ment mécanique de ce travail , et les résultats que j'ai fait connaître me semblent devoir lever toute incertitude à cet égard. § 12. — Tout ce que je viens de dire de la transsudation Effets chez l'Homme et les autres Mammifères est applicable à la lairanssudaiion totalité de l'embranchement des Vertébrés, mais ne l'est pas les Animaux aux Animaux inférieurs. En effet, chez presque tous les Inver- tébrés , nous avons vu que le sang n'est pas renfermé dans un système de tubes clos et distincts des cavités interorganiques; il occupe ces lacunes, et par conséquent il n'y a aucune distinc- tion à faire entre les liquides nourriciers et les liquides épan- chés ; mais les parois de ces cavités n'en sont pas moins per- méables , comme celles des vaisseaux sanguins tubulaires des Vertébrés , et elles laissent échapper au dehors de l'économie une partie de leur contenu, comme ces derniers canaux laissent filtrer de la sérosité dans les chambres viscérales ou les autres cavités closes de l'organisme. Il est même à remarquer que chez quelques Invertébrés , divers Mollusques marins , par exemple , les pertes déterminées de la sorte peuvent être très considérables. Ainsi , quand une Aplysie, une Pleurobranche ou une Pholade s'est gorgée de liquide, et qu'on la retire hors de l'eau , on voit souvent une sorte de sérosité suinter de la surface de son corps , et il y a tout lieu de croire que ce phé- nomène ne dépend pas de l'existence d'orifices excréteurs par- ticuliers, et résulte seulement d'une sorte de filtralion. Du reste, les physiologistes n'en ont pas encore fait l'objet d'une élude spéciale, et je dois me borner ici à en signaler l'exis- tence. Chez la plupart des Animaux arti(;ulés, de même que cliez les Vertébrés, la peau et ses dépendances sont d'une texture llhQ TRÂNSSUDATION. trop dense pour que rien de semblable puisse s'effectuer, car il ne faut pas confondre cette transsudation avec la production de la sueur, qui est une sécrétion ; et, chez les Vertébrés, les liquides épanchés par l'appareil circulatoire, à moins de se mêler aux sécrétions, ne s'échappent de l'organisme que sous la forme de vapeur. Nécessité Du reste, l'évaporation qui enlève une partie de ces liquides contraire' cst loiu dc pouvoir contrc-balancer les effets de la transsudation , d'absor'piion. ^t par conséqucut il faut que nous cherchions maintenant quelles sont les voies par lesquelles les tissus ainsi chargés d'humeurs peuvent s'en débarrasser ; comment les matières extravasées peuvent rentrer dans le torrent de la circulation , et comment les pertes que l'évaporation détermine dans la masse des hu- meurs peuvent se réparer ; ou , en d'autres termes , comment Vabsorption s'effectue. Mais, avant d'aborder l'histoire physio- logique de cette fonction importante, il nous faut connaître un système particulier de vaisseaux qui est en quelque sorte une dépendance ou plutôt un complément de l'appareil irrigatoire chez l'Homme, ainsi que chez les autres Vertébrés, et qui joue un rôle important dans l'accomplissement du retour des ma- tières extravasées dans le torrent dc la circulation : c'est le système des vaisseaux lymphatiques , dont l'étude fera le sujet de la prochaine Leçon. par Aselli. QUARANTIÈME LEÇON. Du SYSTÈME DES VAISSEAUX LYMPHATIQUES. — Histoire de la découverte de ces organes. — Disposition du système lymphatique chez les Batraciens , chez les Poissons, chez les Reptiles , chez les Oiseaux, chez les Mammifères. § 1. — Le 23 juin 1622. dans l'amphithéâtre anatonniqne Découveno de Pavie , le professeur Gaspard Aselli , de Crémone , ayant ThîTifôres"' ouvert le corps d'un Chien vivant, pour montrer à quel- ques amis la disposition de certains nerfs et les mouve- ments du diaphragme, vit avec surprise, dans le mésentère de cet Animal, c'est-à-dire dans le repli membraneux, mince et transparent, qui tient les intestins comme suspendus dans l'abdomen , un grand nombre de lignes blanchâtres qui avaient l'apparence de cordons et qui s'étendaient de cette portion du tube alimentaire vers le foie. Au premier abord, Aselli crut avoir -sous les yeux des nerfs; mais, ayant piqué un de ces cordons, il en fit sortir une liqueur blanche et épaisse qui res- semblait à de la crème. Saisi de joie à la vue d'un phénomène si inattendu, il s'écria, comme Archimède : E'jp-/i/,a, car il comprit qu'il venait de faire une grande découverte. Mais bientôt l'Animal mourut, et le spectacle dont Aselli et ses disciples étaient encore émus s'évanouit promptement. Ces vaisseaux blancs qui lui avaient semblé si beaux, se vidèrent et disparurent sans laisser aucune trace de leur existence. Un doute s'éleva alors dans l'esprit d'Aselli, et, dès le lendemain, il voulut confirmer sa découverte. Il ouvrit donc l'abdomen d'un autre Chien; mais il ne put apercevoir aucun vestige de vaisseaux blancs, et il commença à craindre d'avoir été séduit par (juclquc illusion dans sa j)remière observation ; il se rappela cependant rpie les circonsluiices n'avaient pas été les mêmes dans /|48 APPAREIL LYMPHATIQUE. les deux expériences ; que l'Animal chez lequel il avait aperça des vaisseaux d'apparence lactée venait de faire un copieux repas, tandis que celui chez lequel il ne trouvait rien d'analogue était à jeun depuis longtemps ; il pensa heureusement que l'insuccès de sa dernière tentative pourrait bien dépendre de l'état de vacuité de l'appareil digestif, et il se hâta de faire une nouvelle expérience dans les mêmes conditions, que la première. Un troisième Chien , auquel on avait donné des aliments quelques heures avant , fut donc ouvert, et Aselli reconnut qu'il ne s'était pas trompé. Il revit les vaisseaux blancs sillonnant le mésentère , et il conclut avec raison de cet ensemble de faits, que les canaux dont il venait de découvrir l'existence étaient les voies par lesquelles des matières nutritives préparées par le travail digestif étaient absorbées dans l'intestin et transpor- tées dans les organes où le sang s'élabore; que c'était à cause de leur transparence que ces vaisseaux avaient échappé à ses recherches dans son expérience de la veille, et que c'était à raison de l'aspect lactescent de leur contenu qu'il les distinguait quand ils étaient pleins. Il multiplia ses.observations, tantôt sur des Animaux dont la digestion était en pleine activité , d'autres fois sur des Animaux que l'on avait fait jeûner; il employa à cet usage tous les grands Mammifères qu'il put se procurer : des Chats, des Agneaux, des Porcs, des Vaches, un Cheval, et toujours il obtint les mêmes résultats que sur les Chiens. Quand le travail digestif était suffisamment avancé ou achevé depuis peu de temps, il ne manqua jamais de retrouver dans l'épaisseur du mésentère les vaisseaux gorgés d'un liquide qui avait l'aspect et la consistance de la crème ; à côté de ces vaisseaux se trouvaient les artères et les veines, faciles à recon- naître à raison de la couleur du sang dont elles étaient rem- plies. Quand il ouvrait un de ces vaisseaux blancs, ceux-ci laissaient échapper l'humeur lactée dont ils étaient remplis, et^ après s'être vidés, ils cessaient d'être visibles. Enfin, il s'assura HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE S\:STÈME. [ih9 de l'absence constante de cette matière crémeuse chez les Ani- maux qui depuis un certain temps avaient été privés d'aliments, et il reconnut que dans ces circonstances on ne pouvait distin- guer dans le mésentère d'autres conduits que les vaisseaux sanguins. Aselli désigna sous le nom de veines lactées les canaux transparents qu'il avait découverts de la sorte ; il les vit se réunir, près de la paroi postérieure de l'abdomen , en une espèce de pelote ovoïde qu'il crut être le pancréas, et, trompé par une disposition anatomique que je ferai connaître plus tard, il pensa que tout ce système de vaisseaux allait aboutir au foie pour y verser le chyle, c'est-à-dire le produit final du travail digestif. Enfin il se complut à tirer de ses observations nouvelles des arguments à l'appui de la doctrine surannée de Galien sur l'hématose , et il chercha à montrer que ces veines lactées n'avaient pas échappé à l'attention des anciens (1). On trouve effectivement dans les écrits de Galien quelques Notions G6S 311016113 passages qui paraissent applicables à ces vaisseaux chylifères. sur Ainsi il dit, en se fondant sur les observations d'Érasistrate, que si l'on divise l'épigastre et le péritoine , on peut voir clairement les artères pleines de lait sur les Chevreaux qui viennent de teter (2) ; mais ni Galien ni aucun autre prédé- (l)Gaspard Aselli (ou Aselio) naquit est consacrée à l'examen des éciils vers 1581, et mourut en 1626. L'on- des anciens, et l'auteur, loin de né- vrage dans lequel il rend compte de sa gliger les droits de ses prédécesseurs, découverte des vaisseaux chylifères, ou attache trop d'importance à des pas- dcs veines lactées, comme illes appelle, sages obscurs où l'on peut supposer ne fut imblié qu'en 1628; on y trouve qu'il a été question de ces organes une description succincte de ces con- dont nous lui devons la connais- duits et quatre planches destinées à en sancc {a). montrer la position chez le Chien; mais (2) Le passage mentionné ici est la plus grande partie de ce petit livre tiré du livre sur le contenu des ar- (a) G. Aselli, De lactibus, stu lacteis venis, quarto vaso7'um mesaraiconim yenere novo inventa, In-4, Ba.silea;, 1028. ces vaisseaux. Dccouvcrle du canal thoraciqne. 450 APPABEIL LYMPHATIQUE, cesseiir d'Aselli n'avaient reconnu l'existence d'un système particulier de vaisseaux destinés à recevoir les produits du travail digestif, et jusqu'alors tous les physiologistes avaient attribué ces fonctions aux veines mésaraïques seulement (1). La découverte de ces conduits absorbants appartient donc bien réellement à Aselli , et si cet observateur habile ne fût mort peu de temps après l'avoir faite, il l'aurait peut-être com- plétée ; mais cette tâche fut réservée à d'autres anatomistes. § 2. — Déjà, près d'un siècle avant, Eustachi, en poursui- vant ses recherches sur la veine azygos chez le Cheval, avait tères {a) ; mais il n'est pas le seul que l'on puisse citer pour montrer que les vaisseaux chylifères avaient été entrevus par les anciens. Ainsi, dans son Traité sur l'usage des par- ties , Galien , en parlant de la ma - nière dont la Nature effectue la nutri- tion des intestins et des parties voi- sines, ajoute : « D'abord elle a créé dans tout le mésentère des veines par- ticulières destinées à porter la nour- riture dans les intestins, et qui ne vont pas au foie. Car, ainsi que le disait Iléropliile, ces veines aboutissent à des corps glanduleux, tandis que tou- tes les autres remontent aux portes du foie (6), » Mais il est facile de voir, par ce passage même, que les vaisseaux dont la disposition anatomique parti- culière est indiquée ici étaient con- sidérés par les anciens comme des conduits nourriciers, et non des or- ganes absorbants, (1) Celte opinion prévalut encore pendant assez longtemps après la dé- couverte d'Aselli. Harvey, par exem- ple, la soutint avec persévérance (c) ; mais on ne larda pas à répéter de toutes parts les observations du pro- fesseur de Pavie, et peu à peu la vérité triompha. Parmi les expériences qui contribuent le plus à amener ce ré- sultat, il faut citer celle pratiquée à l'instigation de Pieresc, sénateur d'Aix, (c'est-à-dire premier magistrat muni- cipal de cette ville) sur un criminel condamné à mort. Celui-ci avait fait un repas copieux peu de temps avant d'être conduit au supplice; une heure et demie après son exécution, les mé- decins auxquels son corps était aban- donné en firent l'ouverture, et tous les assistants virent de la manière la plus évidente les vaisseaux lactés du mésentère remplis de chyle (d). Dès 1626, riolfink, avant de quitter l'adoue pour aller occuper la chaire de mé- decine à l'université d'Iéna, fit publi- (a) Galeni An sangiàs in arteriis nalura conlineatur, J. Rota interprète, cap. v {Opéra , édit. de Venise, 1609, t. I. p. 61). (b) fialoni De usupartium corporis Immani, lib. IV, cap. xix {Opéra, t. I, p. 141, verso). ■ (c) \iar\ey , Epislola responsaria Morisono medicinœ doclori Loudiiii , 1652 ( Opo'a OînnJa, p. 620 et suiv.). {d) Voyez Gassendi, Vita Pierescii {Opéra omnia, f. LV, p. 300, 317). HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE SYSTÈME. /l5l VU dans le thorax un vaisseau qui était rempli d'une humeur aqueuse. Il avait reconnu que ce canal s'ouvrait dans la veine sous-clavière par un large orifice , et il l'avait suivi jusque dans la région lombaire, mais il n'avait pu constater son mode de terminaison (4). Cette observation passa presque inaperçue, et ni Aselli ni aucun de ses contemporains ne soupçonnèrent les relations qui existent entre ce canal thoracique et les vaisseaux chylifères. On oublia même la découverte d'Eustachi, jusqu'au moment où un jeune étudiant de la faculté de Montpellier, JeanPecquet, eut découvert de nouveau la même disposition anatomique et en eut fait comprendre l'importance (2) . Pecquet, en observant les viscères d'un Animal vivant, quementla démonstration de ces vais- tiiie : en sorte que, vers 1650, époque seaux (o) ; et en 1629, Simon Pauli où la découverte d'Aselli devait se les fit voir également aux étudiants de compléter, il ne restait que peu d'in- Copenhague (b). Vers la même épo- crédules au sujet de la nature parti- que, Marc-Aurèle Severini à ^aples, culière et des fonctions de ces vais- Wormius en Danemark, Fabrice de seaux lactés (c). Hilden à Berne, Fournier à Paris, (1) Ces observations d'Eustachi (d) Highmore en Angleterre, Walœus à datent du milieu du xvi° siècle (e). Leyde, Tulp (moins connu aujour- (2) J. Pecquet était natif de Dieppe, d'hui par ses propres travaux que par et exerça la médecine à Paris ; mais le magnifique tableau de Rembrandt ses recherches sur les vaisseaux chyli- représenlant une de ses leçons, et con- fères paraissent avoir été commencées serve dans le musée de la Haye), en- pendant qu'il étudiait à l'université fin Vesling, et plusieurs autres encore, de Montpellier. Suivant Haller, elles contribuèrent à vulgariser les con- datent de 16Zi9 ; mais l'ouvrage dans naissances déjà acquises sur les con- lequel il les rendit publiques ne parut duits chylifères, et ajoutèrent même que dix ans plus tard (/]. Il mourut de nouveaux faits relatifs à leur struc- en 176Z|. (a) Rolfink, Dissertaliones anaiomicœ velerum et recentioruin observationibus ad circulatio- ncm accommodatœ, 1656, p. 909. {b) Voyez Sprerigcl Histoire de la médecine, t. IV, p. 204. (fi) l'oiir plus de détails à ce sujet , voyez Haller, Elemenla physiologice corporis humani, lil.. XXV, secl. I, t. VII, p. i202. (d) Voyez ci-dessus, tome III, page 21. (e) B. Eustaclii, Traclatus de vena qua: axygos grœcis dicitur, anligramma 13, p. 279 et 280 [Opuscida anatomica, cdit. de 1707). (/■) .1. Pecqueli Diepaîi Expérimenta nova anatomica quibus iiicoquil^im haclcnus chyli re- ceptaculum et ab eu per Ihoracem in ramos usque subclavios vasa laclea delcguulur. In-4, Parisiig, 1551. 452 APPAREIL LYMPHATIQUE, reconnut que les veines lactées. d'Aselli, ou vaisseaux chylifères, ne se rendent pas au foie, comme ce physiologiste l'avait sup- posé, mais vont se terminer dans une sorte de réservoir commun situé non loin de la douzième vertèbre dorsale; que ce réceptacle se continue sous la forme d'un canal membraneux à travers le diaphragme et la cavité du thorax, jusque vers la base du cou, et là débouche dans la veine sous-clavière du côté gauche ; enfin, que le liquide laiteux dont Aselli avait signalé la présence dans les vaisseaux blancs du mésentère, c'est-à-dire le chyle , se trouve également dans ce canal thoracique , et que celui-ci le verse dans le torrent du sang en circulation ; car, en interceptant le passage dans ce conduit à l'aide d'une hgature , il vit le chyle s'y arrêter et distendre le vaisseau au- dessous de l'obstacle , tandis que du côté de la veine ce liquide continuait à s'écouler, comme cela a lieu dans les circonsjances ordinaires. Les deux extrémités de la chaîne , aperçues isolément par Eustachi d'un côté, et par Aselh de l'autre, furent ainsi réunies , et peu importe à la gloire de Pecquet d'avoir été à son insu devancé par Eustachi dans une partie de ses observa- tions anatomiques, car c'est à lui, et à lui seul qu'appartient tout le mérite de la découverte physiologique accomplie de la sorte (1); et l'on comprend facilement combien cette décou- verte devait influer sur la marche de la science. En effet , jusqu'alors , attribuant aux veines mésaraïques seulement la faculté d'absorber dans l'intestin les matières (1) Sprengel, se fondant sui une lequel il pensa que le chyle se diri- asserlion de Hénault (a), dit, dans geait (6). Mais dans «ne lettre de Men- V Histoire de la médecine, qu'en 1629 tel, datée de 1651, et publiée dans Jacques Mentel aperçut le tronc com- l'ouvrage de Pecquet, il n'est pas ques- mun des vaisseaux lymphatiques vers tion de celte observation, et le mérite (fl) Henault, Quo tela in Pecqueti cor a claro vero Carolo Lenoble conjecia infringuntur et elu~ dunUir, 1655. (&) Sprengel, Histoire de la médecine, Irad. par Jourdan, t. IV, p. ^Oi. HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE SYSTÈME. li^'à nutritives extraites des aliments par le travail de la digestion, et voyant ces vaisseaux pénétrer dans le tbie pour s'y résoudre en une multitude de ramuscules et envoyer ensuite leur contenu au cœur , on pouvait croire C{ue Galien ne s'était pas trompé lorsqu'il avait dit que le foie est l'organe chargé de transformer le chyle en sang, et d'achever par conséquent l'élaboration du fluide nourricier. Cette doctrine, qui avait résisté aux progrès de la science depuis l'antiquité jusqu'au milieu du xwi" siècle , cessait même d'être plausible ; car Pecquet faisait voir que le chyle suit une autre route, qu'il ne passe pas dans le foie avant de se mêler au sang, et que le fluide nourricier chargé de ce produit ne peut arriver dans cette glande qu'après avoir rempli ses fonctions dans les divers tissus qu'il est chargé d'arroser. § 3. — Mais ce n'est pas tout. Dans la science, comme dans Découvene les sociétés humaines, chaque progrès qui s'accomplit devient f '/lîiqueà aussitôt la cause de progrès nouveaux ; les découvertes engen- ^" ^'^""'^^• drent les découvertes , et les conquêtes physiologiques si heu- reusement commencées par Aselli, et portées déjà si loin par Pecquet, n'étaient pas encore arrivées à leur terme. Les beaux résultats déjà obtenus excitèrent partout un grand intérêt; tous . les anatomistes voulurent voir et étudier ce système nouveau de vaisseaux absorbants dont le rôle était si grand dans l'organisme ; les observations se multiplièrent, et presque aussitôt on reconnut que chez TBomme les conduits chylifères et le canal thoracique, dont ils sont en quelque sorte les racines, ne forment qu'une petite portion d'un vaste appareil hydraulique qui s'étend au loin dans toutes les régions du corps, qui pénètre dans la pro- de la découverte est attribué à ce quet, Vesling avait vu un grand vais- dernier (a). seau lacté qui remontait dans le tho- 11 est aussi à noter qu'antérieujc- rax (6); mais il ne l'avait pas suivi ment à la découverte faite par l'cc- jusqu'au bout. (a) Voyez Pecquet, Expérimenta nova anatomica, d552, p. 92. (b) Voyez Haller, lilemenla jihysiologia corporis humani, t. VII, i>. 203. k^d APPAREIL LYMPHATIQUE. fondeur de presque tous les tissus constitutifs des organes, et qui constitue, à côté des veines, de nombreuses voies de com- munication ouvertes pour l'afflux des humeurs des parties péri- phériques vers le cœur, et munies de valvules dont le jeu empêche le retour de ces liquides vers les organes dont ils proviennent. La découverte de ce nouveau système vasculaire, qui se trouve en quelque sorte surajouté à l'appareil circulatoire , et qui est désigné aujourd'hui sous le nom de système des vais- seaux lymphatiques^ se fit presque en même temps en Hollande, en Danemark et en Angleterre. En droit, elle paraît appartenir à Rudbeck (1), jeune étudiant suédois à l'université de Leyde; mais je croirais être injuste envers la mémoire de Thomas Bartholin, professeur d'anatomie à Copenhague, et même de (1) Olaiis Rudbeck: naquit en 1630, à Aiosen en Suède, et alla de bonne heure à Leyde pour y étudier les sciences médicales. Ce fut là qu'à l'âge de vingt et un ans, il fit la dé- couverte qui le rendit célèbre. D'au- tres analomistes avaient aperçu à la surface du foie, ou dans le voisinage de cet organe, des vaisseaux analogues aux conduits chylifères ; mais lUid- beck fut le premier à constater expé- rimentalement la direction du liquide contenu dans ces canaux. 11 trouva de la sorte que ce liquide ne va pas au foie, comme Aselli le supposait, mais se dirige en sens contraire ; puis il trouva que ces vaisseaux aquifères du foie, car c'est ainsi qu'il les dé- signa , vont se rendre dans la vési- cule ou réservoir où aboutissent les vaisseaux chylifères; et ignorant la découverte récente de Pecquet, il fit une autre série de recherches à l'aide desquelles il reconnut les connexions de ce réceptacle avec la veine sous- clavière. Il découvrit aussi dans d'au- tres parties du corps des vaisseaux analogues , qu'il appela vaisseaux séreux, et les vit tous se rendre au canal thoracique ou à ses annexes. Ses premières observations datent du 27 janvier 1651, et, en avril de l'année suivante, il fit la démonstration de ce système de vaisseaux en présence de la reine Christine de Suède ; mais l'ou- vrage dans lequel il consigna les ré- sultats de ses recherches ne fut publié qu'en 1653 (a). Rudbeck professa l'anatomie à l'université d'Upsal, et mourut en 1702. (ft) Rudbeck, Nova exercitatio anatomica eœhibens duc.tus hepaticos aquosos et vasa glandu- larum scrosa. Iu-4, 1C53. (Reproduit dans la Bibliothèque anatomique de Manget, t. II, p. 700 et suiv.) HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE SYSTÈME. /l55 Jolyffe, candidat en médecine à Cambridge , si je n'associais ici ces trois noms : car, à cette époque, les nouvelles scientitiques ne se répandaient pas avec la rapidité que nous admirons aujour- d'hui, et il y a tout lieu de croire que les trois investigateurs dont je viens de faire mention se sont occupés simultanément des mêmes études et sont arrivés chacun à des résultats analogues à peu près en même temps, sans avoir eu la moindre connais- sance de ce que les deux autres avaient fait (1). Je dois ajouter (1) Thomas Bartholin appartenait à une de ces familles en petit nombre, où le talent et l'amour de l'étude ont été transmis de génération en géné- l'ation pendant une longue suite d'an- nées. Son père , Gaspard Bartholin, professa avec éclat à Copenhague, et publia un ouvrage d'anatomie fort estimé; il fut remarquable aussi par ses connaissances littéraires et son habileté comme linguiste. Tho- mas naquit en 1616 , et après avoir fait d'une manière brillante de lon- gues études à Leyde , à Paris , à Padoue et à Bâle , il retourna à Co- penhague pour y professer les ma- thématiques ; mais ce fut dans les sciences médicales qu'il se distingua le plus, et il ne tarda pas à occuper une chaire d'anatomie. Il mourut en 1680, et son fils, Gaspard Bartholin, dernier du nom, soutint dignement l'honneur scientifique de sa maison. L'ouvrage de Thomas Bariholin sur les vaisseaux lymphatiques parut en mai 1653. Par conséquent, il pourrait bien être un peu antérieur à celui de l'iudbeck; mais c'est seulement le 15 décembre 1651, puis le 9 janvier et le 28 février 165'2, que Bartholin commença à constater les faits nou- veaux qui le conduisirent à admettre l'existence de vaisseaux de cet ordre distincts des conduits chylifères ; et, par conséquent, il avait été devancé par Rudbeck (a). Il y a lieu de croire aussi qu'il connaissait les observations de celui-ci au moment où il publia son livre, car en donnant à ces organes le nom de vaisseaux lymphatiques qui leur est resté, il critique l'expression de vaisseaux séreux que nous savons avoir été employée par cet anatomiste ; et l'on voit par une de ses lettres, en date du 30 avril 1552 (6), qu'à ce moment il n'avait encore aucune idée bien nette des fonctions de certaines portions de ce système qui lui four- nirent plus tard un des arguments les plus solides à l'appui de ses vues nou- velles. Du reste, il contribua beaucoup à bien établir ce point de la science ; il découvrit des vaisseaux blancs dans presque toutes les parties du corps hu- main (c) : et bien que je le place ici au second rang, je le considère cependant comme ayant droit à une part con- sidérable de la gloire aiïérente à la découverte du système lymphatique. Lie rôle de Jolvlfe fut moins grand ; (n) Th. Bariholin, Vasa lymphatica miper llnfiiiœ in Animalibus invenla (voyez la TlMwthèque (inatomique do Manget, t. II, p. 092 cl siiiv.). (/;) Bartholin, Kpist., «enl. II, 4;î, 444. (r)Tli. Bariholin, Vnsa lymplitiiira in llowiiic nnpcr inventa. 4054. {Opusrula nova anatomica de tacttis Ihnraciciii et de lymphttticisvnnis in vno vtihnnine compvdiensa, tfilO.i IV. 30 /l56 APPAREIL LYMPHATIQUE. aussi que déjà divers fragments de ce système de vaisseaux avaient été entrevus par quelques anatomistes, qui ont pu contribuer ainsi à préparer la voie que Rudbeck, Bartholin et Jolyffe ont si heureusement parcourue ; mais personne , jusqu'alors, n'a- vait su tirer parti de ces faits isolés, et l'on n'en comprit la portée que lorsque la découverte dont je viens de rendre compte eut été accomplie (1). Les nouveautés introduites ainsi dans la science à de si courts intervalles par Pecquet , par Rudbeck , par Bartholin et par Jolyffe , furent accueillies avec méfiance par les uns, avec enthousiasme par d'autres , et suscitèrent une multitude de tra- vaux dont il serait fastidieux de rendre compte ici (2). Je me bornerai donc à dire que, dès 1665 , Ruysch nous fit mieux connaître les valvules qui se trouvent dans l'intérieur des lym- phatiques et qui y déterminent la direction des courants (3) ; mais, d'après le témoignage de Wliar- avec le foie. Aselli avait décrit quel- ton, il aurait fait connaître les vais- ques-uns de ces vaisseaux comme seaux lymphatiques en Angleterre dès étant la terminaison des conduits chy- 1650, et Glisson assure avoir vu, en lifères dans le foie. En 16/t9, Vesling 1552, les préparations que ce jeune avait également aperçu des vaisseaux anatomiste en avait faites (a). Du blancs entre l'estomac et la rate, ainsi reste, Jolyffe ne publia rien à ce sujet. qu'à la face supérieure du foie , et La question de priorité entre Paid- J.Van Horne, vers la même époque, en beck et Th. Barlliolin fut disputée avait trouvé près delà terminaison de très vivement, et donna lieu à un l'aorte; mais toutes ces observations grand nombre de publications, dont incomplètes étaient restées stériles, et Haller a rendu compte avec tout le méritent à peine d'être citées (c). savoir et l'imparlialilé qui lui étaient (2) Sœmmering a dressé une liste de ordinaires (6). ces ouvrages qui n'est pas complète, (1) D'après un passage du traité de et qui occupe cependant trente-quatre Fallopio sur les veines, on est porté à pages de son livre sur les maladies des croire que cet anatomiste, contempo- vaisseaux absorbants (d). rain de Vésale, avait entrevu quelques (3) Fiuysch, que j'ai déjà eu l'occa- vaisseaux lymphatiques en relation sion de citer pour sa grande habileté (a) Voyez Sprenîjel, Histoire de la médecine, t. IV, p. 210. (b) Haller, Boerhavii prœlect., g 121, t. I, p. 271-9, note 4. — Bibliotheca anatomica, t. I, § 378, p. 400 et suiv., § 415, p. ii^ et suiv. — Voyez aussi sa grande Physiologie, 1. 1, p. 460 et suiv. (c) Voyez Haller, Elem. physiol. corp. hum., t, I, p. 158. v. {■d) Sœmmering, De morbis vasorum aisorbentium corporis humani, il9B, HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE SYSTÈME. /l57 que, vers la fin du xvii" siècle, Nuck étudia avec plus d'atten- tion qu'on ne l'avait fait avant lui les glandes ou ganglions qui se trouvent sur le trajet des lymphatiques, et constata l'exis- tence de ces derniers vaisseaux dans diverses parties de l'orga- nisme où ses prédécesseurs ne les avaient pas observés (1); que, dans le cours du siècle suivant, les travaux de Meckel l'ancien (2) , de Hevvson (3) , de Cruikshank (k) , et surtout dans l'art des injections {a), a démon- tré aussi l'existence des lymphatiques dans la rate, fait qui était révoqué en doute par la plupart de ses contempo- rains (6). (1) A. Nuck, professeur d'anatomie à l'université de Leyde, fut, je crois, le premier à employer les injections mercmùelles pour l'étude de ces vais- seaux. Il constata aussi un fait intéres- sant au sujet des connexions qui exis- tent entre les lymphatiques et les vaisseaux sanguins ; savoir, qu'en in- sufflant de l'air dans les artères ou dans les veines de quelques parties du corps, on peut faire passer ce fluide dans les lymphatiques; enfin il dé- couvrit dans les poumons, ainsi que dans la rate, un nomhre considérable de ces vaisseaux (c). (2) J. Fréd. Meckel, l'un des dis- ciples les plus distingués de Haller, et le grand-père de l'auteur du Traité d'anatomie comparée, que je cite si souvent dans ces Leçons, naquit en 172/j, et professa l'anatomie, ainsi que l'art des accouchements, à Berlin ; on lui doit une description des vaisseaux lymphatiques du corps humain, qui est plus complète que celles données jusqu'alors, mais qui n'est pas exempte d'erreurs graves (d). Il mourut en 177Z|. (3) Hewson (e) publia dans les Tran- sactions philosophiques de la Société royale de Londres trois mémoires sur les lymphatiques des Oiseaux, des Amphibies et des Poissons, sujet qui alors était presque entièrement neuf; en 177/1, il fit paraître un traité spé- cial sur le système lymphatique chez l'Homme et les Animaux, accompagné de planches (/"). (/i) Cruikshank , disciple et ami de W. Hunter, publia en 1736 un ouvrage spécial sur les vaisseaux lym- phatiques. Ce livre était destiné prin- cipalement à soutenir la théorie erro- née de l'absorption par ces organes seulement; mais on y trouve aussi des descriptions anatomiques plus exactes que dans les traités précédents {g). {a) F. P.iiyscli, D'Uiicidalio valvularum invasis lymphaticis et lacteis, cum figuris tcneis, elc, T,a Haye, i(JU5. {h) Voyez tome III, page 40. {c) Nuck, Adenixjrajihia curiosa, elc, 1692, p. 52, clc. (d) i. V. Meckel, hisserlalio ejAsiolav'is de vasis lymphaticis ylandiUisque coiiglobalis, Mil , el (Ijimcula anatomica de vasis lymphaticis, 1770. (e) Voyez ci-dessus, tome I, poi^o 44. (f) Hewson, An Account of Ihe Lymphatic System of PArds {Philos, fraus,, 1708, p. 3l7). — J.ymph. Sysl. in Amph. and Anim. in Pish. (Philos. Trans., 1709, [i. 100 et 204). 1») VV. Ouiksliatik, Analomy of Via Absorbing Vcasels ofthe lluman flody, ivw\, en fraiiçuit; l'ur rclil-RaUcl, 1787. /l58 APPAREIL LYMPHAtlQUE, (le Mascagiii (1), jetèrent de nouvelles lumières sur le rôle de ces vaisseaux dans la constitution de l'organisme ; que les recherches des deux frères Hunter, de Monro et de quelques autres expérimentateurs conduisirent les physiologistes à con- sidérer le système lymphatique comme étant le principal instru- ment à l'aide duquel l'absorption s'effectue dans l'économie animale; enfin que, de nos jours, l'étude de cet appareil vasculaire chez les Oiseaux, les Reptiles, les Batraciens et les Poissons, commencée, ainsi que celle des lymphatiques, des Mammifères , par Aselli , Bartholin et leurs contemporains , a fait de grands progrès entre les mains de Fohmann (2) , (1) p. Mascagni est généralement si grande, que Mascagni était arrivé considéré comme un des anatomistes même à penser qu'ils constituaient la les plus habiles du siècle dernier. Il presque tolalité de certains tissus de naquit en 1752, et occupa pendant l'organisme , question sur laquelle longtemps une chaire à l'université de nous aurons bientôt à revenir. Le Sienne. Il mourut à Florence en 1815. principal ouvrage de Mascagni est Ses travaux sur les lymphatiques font accompagné de magnifiques plan- époque dans l'histoire de nos connais- ches (a). sances relatives à ce système d'orga- (2) Vincent Fohmann , professeur nés; il était d'une habileté rare dans à l'université de Liège, naquit en l'art des injections, et, malgré l'im- 179Zi, et mourut en 1837. Ses princi- perfeclion des moyens d'étude dont il paux travaux portent sur les relations faisait usage, il est parvenu à démon- qui peuvent exister entre les lympha- irer l'existence d'un réseau capillaire tiques et les veines, sur la disposition de conduits lymphatiques dans la pro- des radicules de ces vaisseaux dans fondeur de presque toutes les parties divers tissus, et sur l'anatomie com- de l'organisme : et l'abondance des parée du système lymphatique dans vaisseaux mis ainsi en évidence était la classe des Poissons (6). (a) Mascagni, Yasonmi lymphaticovum corporis huniani historia et iconographia. In-fol., Sienne, 1187. — Voyez aussi, du même : Prodrome d'un ouvrage sur le système des vaisseaux lymphatiques. In-4, 1784.. — Vasorum lymphaticovum historia, 1. 1, in-8. Sienne, 1785. (6) Fohmann, Anatomische Vnlersuchungen iiber die Yerbmdjing der Saugadern mit den Yenen. Mit einer Vorrede vonFr. Tiederaann. In-12, Heidelberg, 1821. ( Breschet a donné une Iraduclion dps principaux chapiires de cet opuscule dans le Bulletin de la Société médicale d'émula- tion, 1822, p. 136 ctsuiv.) ■ — Bas Saugadersystem der Wirbellhiere. Erste Hefte, Fische. In-folio, Heidelberg', 1827, — Mémoires sur les communications des vaisseaux lymphatiques avec les veines, et sur les vaisseaux absorbants duplacenta et du cordon ombilical. In— 1, Liège, 1833, fig. — Mémoire sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, des membranes muqueiises, séreuses, des tissus nerveux et musculaires. In-4, Liège, 1833, fig. HISTOIRE DE LA DÉCOUVERTE DE CE SYSTÈME. /i59 de Lauth(l), de J. Millier (2), de M. Panizza (3), et de quelques autres anatomistes dont les noms reviendront sou- vent ici à mesure que j'examinerai chacune des questions particulières qui se rattaclient à l'histoire de ce système vas- culaire. Quant aux usages de cet appareil, je m'abstiendrai d'en parler pour le moment, car ce sujet a des rapports trop intimes avec l'histoire de l'absorption considérée d'une manière géné- (1) Ei-.-Alex. Lauth s'occupa avec succès de l'étude des lymphatiques du corps luimain, et fit un travail fort estimé sur ce système chez les Oi- seaux (a). Plusieurs de ses observa- tions ont été publiées dans un ouvrage spécial de Breschet (6). 11 était le fils de Th. Lauth, l'auteur de VHistoire de l'anatomie que j'ai déjà eu l'oc- casion de citer, et il mourut en 1837, à Strasbourg, où il était né en 1803. {•2) Johannes Muller naquit à Co- blenz, en 1801, et professa la phy- siologie à l'université de Bonn, puis à celle de Berlin, où il mourut en 1858. Il exerça une très grande et très heureuse influence sur la direction des études physiologiques et zoologi- ques en Allemagne pendant près d'un quart de siècle, et on lui doit un grand nombre de travaux d'une haute im- portance. J'ai déjà eu l'occasion de citer ses recherches sur le sang (c) et plusieurs de ses observations sur la structure des Poissons et de divers autres Animaux. On lui doit la décou- verte des cœurs lymphatiques chez les Balraciens et les Reptiles; un travail remarquable sur la structure des glan- des ; un excellent Manuel de physio- logie, et une longue série de recher- ches, pleines d'intérêt, sur les méta- morphoses des Échinodermes, ainsi que diverses observations embryolo- giques. M. Bischoff a publié récem- ment une notice sur la vie et les tra- vaux de ce naturaliste éminent {d). (3) M. Panizza est professeur à l'université de Pavie. On lui doit deux grands ouvrages sur ce sujet : l'un contient beaucoup d'observations im- portantes sur les lymphatiques chez l'Homme et les autres Mammifères (e); le second est une magnifique mono- graphie du système lymphatique chez les Reptiles et les Batraciens (f). (a) E.-A. Laulli, Essai sur les vaisseaux lympJiatiques (dissertation inaugurale). Strasbourg, 4824. — Mémoire sttr les vaisseaux lymphaliques des Oiseaux et sur la manière de les préparer {Ann. des sciences nat., 1824, i" série, t. III, p. 381, [j1. 21 à 25). (b) G. Kroschet, Le système lymplMtique considéré sous les rapports analomique, physiologique et pathologique. In-8, 18.'iG. (c) Voyez lome I, page 121. (d) Bi.-cliolV, Ueber ./. Millier und sein Verhâltniss zum jetzigen Standpunkt der Physiologie. In-4, .Munich, 1858. (e) l'anizza, Osservazioni antropo-zootomico-flsiologiche. In-folio, Pavia, 1830. (/■; Panizza, Sopra il sislema Imfalico dei Rettili, Ricerche xoolomiche. In-folio con soi lavolc, Pavia, 1833. tlBO SYSTÈME LYMPHATIQUE, raie, pour que je puisse l'en séparer, et, avant d'arriver 5 l'étude de cette fonction importante, il nous faut connaître plus en détail la structure du système lymphatique. Méthodes § 4. — Ainsi que je l'ai déjà dit, les vaisseaux lymphatiques investigation. ^^^^^ ^^^^^ trausparcuts et d'une grande délicatesse , en sorte qu'il est difficile de les apercevoir quand ils sont vides, et qu'on ne peut en faire bien l'étude qu'après les avoir remplis de quelque matière étrangère dont l'aspect tranche avec celui des parties circon voisines. Mais ici une autre difficulté se présente : les valvules qui , chez l'Homme et les autres Mammifères , sont disposées de distance en distance dans l'intérieur de ces conduits, et qui servent à diriger la lymphe vers le cœur, empêchent aussi les injections de passer des gros troncs vers les branches , ou de celles - ci dans les ramuscules; par conséquent, c'est par les plus petites divi- sions qu'il faut pousser les fluides dont on veut remplir ces vaisseaux, et encore n'obtient-on ainsi que des préparations partielles, car l'injection ne pénètre souvent que dans la portion du système dont ces canalicules sont des affluents. Rudbeck et les autres anatomistes de la même époque avaient recours principalement à l'insufflation; mais bientôt on substitua à l'air le mercure, et aujourd'hui ce liquide est le plus employé. Pour en faire usage , on se sert généralement d'un petit appareil qui se compose d'un gros tube vertical d'une certaine hauteur, faisant fonction de réservoir pour ce métal, et garni inférieu rement d'un tuyau flexible terminé par un ajutage à robinet auquel s'adapte un petit tube capillaire de verre ou d'acier. Pour introduire le bec de cet instrument dans un des ramuscules du système lymphatique, on a d'abord cherché péniblement un de ces petits vaisseaux au milieu des fibrilles des tissus circon voisins, afin d'en faire la ponction et d'y placer le tube à injection; mais, depuis quelques années, on sait que ce soin est inutile, et qu'en choisissant certaines PROCEDES D INVESTIGATION. m parties du corps où ces vaisseaux constituent un réseau des plus abondants , il suffît de piquer au hasard la substance des tissus pour arriver tout de suite dans les cavités en commu- nication avec le grand appareil vasculaire, et pour y faire péné- trer le mercure (1). On parvient aussi à remplir avec beaucoup de facilité les vaisseaux lymphatiques en poussant avec force de l'eau dans les artères , d'après la méthode de Lacauchie , et l'on peut même y introduire par cette voie des dissolutions salines qui , en s'y mêlant , donnent heu à des précipités colorés ; mais , jusqu'ici, ces procédés d'injection n'ont pas fourni des résul- tats aussi bons qu'on aurait pu s'y attendre (2). (1) Ce nouveau procédé pour l'injec- tion des lymphatiques, qui paraît avoir été employé pour la première fois par Fohmann (a) , facilite singulièrement cette opération, et aujourd'hui on y a recours dans tous nos laboratoires ana- tomiques. M. Cruveilhier a été un des premiers à en faire un usage général pour les travaux d'anatomie humaine ; et à l'occasion de deux concours ou- verts il y a quelques années, l'un à la Faculté de médecine, et l'autre par l'administration des hôpitaux de Paris, MM. Denonvilliers, Jacquart, Sappey et plusieurs autres jeunes anatomistes ont fait des recherches intéressantes pour découvrir quelles sont les par- ties des corps qui sont les plus favo- rables à cette injection, dite par ponc- tion réticulaire {h). Ils ont reconnu que, pour l'Homme, les régions où les lymplialiques sous- cutanés se rem- plissent le mieux de la .sorte sont, pour la tète, la ligne médiane du crâne et de la face, le pavillon de l'oreille, le nez et les commissures des lèvres ; pour les membres supérieurs, les par- ties latérales du bout des doigts, près la racine des ongles ; pour le tronc, le scrotum et le voisinage du mamelon, et, pour les membres inférieurs, les orteils. C'est chez les sujets maigres et un peu infiltrés que le réseau lym- phatique est le plus facile à injecter, et un commencement de putréfaction est favorable à l'opération en ce qui concerne les petits vaisseaux, mais rend le progrès du métal dans les grosses branchesplus difficile ; et pour complé- ter la préparation des troncs , il faut souvent avoir recours à l'injection dite par ponction directe. Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai aux ou- vrages sur l'anatomiede l'homme (c). (2) L'injection des lymphatiques par la méthode hydrotomique peut (a) Folirnann, Mémoire sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, etc., 1833, p. 4. (6) Voyez Sappey, Injection , préparation et conservation des vaisseaux lymphatiques, Tiièsc, Paris, mis, fi. dâ et .suiv. (c) Cruveilliier, Traité d'anatomie descriptive, 1843, t. 111, p. 138 ut suiv. — Sappey, Traité d'anatomie descriptive, 1852, I. 1, p. 039 et suiv. 462 SYSTÈME LYMPHATIQUE Disposition § 5. — C'est chez l'Homme que l'anatomie du système lym- générale , . ' , ' ' , ^• ' i i i ■ i ' ' du système phatique a ete étudiée avec le plus de soin et de persévérance ; ymp aique. ^^^^^ ^^^ Vcrtébrés inférieurs, il ne nous est connu que d'une manière fort incomplète : cependant, pour nous en former une idée juste , il me semble utile d'en examiner la disposition chez ces derniers avant d'en aborder l'histoire chez les Mammifères et les Oiseaux. Système Lcs preniiers exemples que je choisirai ici seront donc tirés lymphatique i -.x i .. , • • . i . des Batraciens, des VERTÉBRÉS Allantoidiens , ct parmi ccux-ci jc prendrai d'abord la Grenouille , parce que chez ce Batracien le système lymphatique offre, avec certaines parties de l'appareil irriga- toire des Invertébrés, des points de ressemblance qu'il me paraît important de faire bien ressortir. Grenouille. ^hcz cct Animal , la lymphe , liquide dont je ferai connaître plus tard les caractères distinctifs, et dont la composition est à peu près la même que celle du plasma du sang, n'est pas renfermée dans des tubes ramifiés , comme chez les Vertébrés supérieurs étudiés par Aselli , Pecquet , Rudbeck et Bartholin, mais est répandue dans un vaste système de cavités irrégu- se faire en inlrocliiisant l'eau, non- plus facile, et lorsque l'opération est seulement dans le syslèine artériel , bien conduite, elle met en évidence mais aussi par les veines ou par le une multitude prodigieuse de petits canal tlioracique ; car la distension des vaisseaux lymphatiques {a). vaisseaux empêche les valvules de M. Doyère a injecté aussi les lym- s'opposer efficacement au passage des phatiques en jaune, en poussant suc- liquides du centre vers la circonfé- cessivement dans les artères des renée de l'organisme. M. Lacauchie a dissolutions de chromate de potasse obtenu aussi le même résultat en fai- et d'acétate de plomb, de façon à sant arriver l'eau dans les canaux ex- obtenir, comme dans le procédé de créteurs des glandes (notamment ceux Krause (6), un précipité dans l'inté- du foie, des reins ou du pancréas) ; rieur des vaisseaux où ces réactifs se mais c'est la voie artérielle qui est la rencontrent (c). (a) Lacauchie, Traité d'h\jdrotomie,'ç.1 et suiv. (b) Krause , Yerinischte BeobaclUungen und Bemerkungen (Miiller's Archiv fur Anal, und PhijiioL, 1837, fi. 3 et suiv.). (c) Doyère, Sur un nouveau procédé d'injections anatonïiques {Comptes rendus de l'Acad, des sciences, 1841, t. XIII, p. 75). CHEZ LES BATKAGIENS. ^63 lières qui communiquent les unes avec les autres, et qui res- semblent souvent à des lacunes ou méats interorganiques plutôt qu'à des vaisseaux ordinaires. Ainsi , entre la peau et les muscles , on trouve de grands espaces lymphatiques qu'il est facile d'insuffler, et J. Millier a constaté que l'air introduit de la sorte pénètre jusque dans le système circulatoire (1). i\utourdes veines périphériques il existe aussi une sorte de réseau formé par une multitude de méats analogues, mais très petits, et une série de cavités de même nature embrassent les vaisseaux sanguins de l'intestin, de façon à constituer autour de chacun de ceux-ci une sorte de gaine ou de canal concentrique à la paroi vascu- laire et partagé intérieurement par une foule de brides ou de cloisons incomplètes (2). Enfin ces réseaux ou traînées de (1) M. Panizza a cherché vainemeiilà déterminer si tous les méats du tissu découvrir des vaisseaux lymphatiques connectif interorganique font partie de proprement dits dans les membres de ce système, mais il s'est assuré que la Grenouille. Souvent il crut d'abord les cavités sous-cutanées qui sont oc- avoir injecté quelques ramuscules de cupées par la lymphe, et qui se trou- ce système dans les membranes inter- vent dans les cuisses , n'ont pas la digitales ; mais il vit toujours le mer- forme de vaisseaux, et sont seulement cure se répandre presque aussitôt dans des espaces irréguliers situés entre les interstices cellulaires voisins, et pé- la peau et les muscles. Aussi est-ce par nétrer ensuite dans les grands espaces le nom (Vespaces lymphatiques qu'il sous-cutanés de la jambe et de la désigne les cavités occupées par la cuisse (a). Cet anatomiste pensa, par lymphe dans l'aisselle et dans d'autres conséquent, que les cavités remplies parties du corps (6). de la sorte n'appartenaient pas à l'ap- (2) La connaissance de celte dispo- pareil lymphatique; mais J. Millier a sition curieuse des conduits lympha- trouvé qu'elles sont occupées par un tiques qui, chez la Grenouille , en- liquide qui possède toutes les pro- gainent divers vaisseaux sanguins, est priétés caractéristiques de la lymphe. due principalement à Uusconi (c) ; Ce dernier physiologiste n'a pas pu mais elle n'appartient pas exclusi- (a) Panizza, Sopra il sistema linfatico dei Rettili, Ricerche zootomiche, p. 28. {h) .1. Mùller, Observ. sur l'analyse de la lymphe, du sang et du chyle {Ann. des sciences nat., 1833, 2' série, t. I, p. 340). — On Ihe Existence offour Distinct Hearts, having Regular Pulsa- tions, connected uiitli the Lympha tic System in certain Amphibious Animais {l'hilos. Trans., 1833, p. 80 et suiv.). (t) liuscorii , Observations sur les vaisseaux lymphatuiues de la Salamandre et de la Gre- nouille, extraites d'une lettre adressée à llreschet {Ann. des sciences nat., 1841, 2° série, t. XV, p. 24'J). — Sopra unaparlicularità riguardente il sistema linfatico délia Salamandra terrestre. Havia, 1841. fx6!l SYSTÈME LYMPHATIQUE cellules communiquent avec diverses cavités plus vastes, dont les unes sont limitées par des lames m_embraneuses seulement, vement aux Batraciens, et, ainsi que nous le verrons bientôt , un mode d'organisation analogue avait été pré- cédemment aperçu cliez certains Reptiles par Bojanus , par Jacobson et par M. E. Weber (a). C'est chez la Salamandre terrestre que Rusconi Va décrite de la manière la plus com- plète, mais il a trouvé qu'elle est en- core plus facile à constater chez la Grenouille. On voit, par les recherches de cet anatomiste, que la plupart des artères des viscères de l'abdomen, et notamment les artères mésentériques, sont logées dans Tintérieurde conduits de ce genre qui, dans certains points, sont unis aux parois du vaisseau inclus, soit par des brides, soit par une sorte de soudure ; et lorsque ces adhérences se multiplient et se raccourcissent, l'es- pace occupé parla lymphe, au lieu d'a- voir la forme d'un cylindre continu , prend l'aspect d'un réseau , surtout quand on l'injecte. Ailleurs le vaisseau sanguin adhère à sa gaîne lymphatique d'une manière presque ininterrompue par deux points opposés de son diamè- tre, et alors ce vaisseau, au Heu d'être logé dans la cavité de ce conduit péri- phérique, paraît être simplementbordé par deux vaisseaux lymphatiques sa- tellites qui, d'espace en espace, sont reliés entre eux par des traverses anaslomotiques. Il paraît y avoir, à cet égard, beaucoup de variations in- dividuelles, et il est aussi à noter que les anatomisles ne sont pas d'accord sur la question des rapports établis de la sorte entre le système circulatoire et le système lymphatique. Quelques auteurs pensent que la tunique propre du canal lymphatique forme autour du vaisseau sanguin une double gaîne, ou plutôt deux tubes concentriques entre lesquels circulerait la lymphe et s'étendraient des brides filiformes ; d'autres supposent que les vaisseaux sanguins sont à nu dans la cavité de ces conduits lymphatiques, et que, par conséquent, ils baignent directe- ment soit dans le chyle, soit dans la lymphe. Rusconi a soutenu cette der- nière opinion ; mais je suis disposé à croire que la surface externe du vais- seau sanguin est garnie d'un revête- ment membraniforme analogue à la tunique qui circonscrit en dehors le conduit lymphatique. Pour plus de détails à ce sujet, je renverrai au der- nier ouvrage publié par Rusconi, sur les lymphatiques des Reptiles (b), et j'ajouterai seulement que M. Leydig a fait récemment de nouvelles observa- tions sur l'engainement des vaisseaux sanguins du mésentère par les lym- phatiques chez le Pipa (c). (a) Bojanus, Anatome Testudinis europœœ, p. 143, pi. 26, Gg. 155. — Jacobson, Om de Modlflcatloner det lymphatiske System undergaaer i de lavere Classer af Hvirveldyrene {Danske videnskabernes Selskabs AfliandUnger, 1828, t. III, p. xl). — Weber , Ueber das Ltjmphherx, einer Riesenschlange ( Miiller's Arch. fur Anat. und Physiol., 1835, p. 530). (6) Rusconi, Riflessioni sopra il sistema linfatlco dei Rettili. Pàvia, 1845, avBC fig. (c) Leydig, Lehrbuch der Histologie, p. 419. CHEZ LES BATRACIENS. ^65 tandis que les autres ont des parois garnies de fibres muscu- laires et sont contractiles. Les premières sont généralement désignées sous le nom de citernes, ou de réservoirs lymphatiques. L'une d'elles entoure l'œsophage dans toute sa longueur, ou plutôt loge dans son intérieur cette portion du tube alimentaire et a pour paroi externe une membrane transparente et mince , mais assez résistante; elle est traversée par les vaisseaux sanguins des membres antérieurs , et elle reçoit le tronc principal des con- duits lymphatiques de l'estomac. L'autre réservoir est beaucoup plus vaste et se trouve entre les viscères abdominaux et la colonne vertébrale; il est situé entre les deux lames du mésen- tère, là où ces membranes cessent d'être flottantes et vont se continuer avec le péritoine ; il s'étend jusqu'au cloaque, en arrière, et jusque dans le voisinage de la tête, en avant ; il loge dans sa cavité l'aorte ainsi que la veine cave, et l'on voit y déboucher des conduits plus ou moins vasculariformes qui pro- viennent du réseau lymphatique des intestins , des organes génitaux et des parties voisines (i). (i) Lorsqu'on injecte le système la sorte, cet anatomiste a trouvé prfis lyniphalique des Batraciens avec du de la surface extérieure de l'intestin mercure, les canaux et les réservoirs grêle une multitude de petits canaux dont cet appareil se compose sont qui logent dans leur intérieur les ra- tellement déformés par le poids de ce mifications artérielles dont ils atFec- métal, qu'on ne saurait bien juger de tent la forme, et qui vont transversa- la disposition normale de ces parties, lement déboucher dans un canal et que les figures faites d'après des longitudinal assez gros, situé le long préparations de ce genre {a) en don- de la ligne de jonction du mésentère nent souvent une idée fausse. Pour avec celte portion du tube intestinal, les bien étudier, il est préférable de Ce canal marginal loge les anses vei- se servir d'un liquide coloré comme neuses aussi bien que les arcades l'a fait Rusconi (b). En procédant de terminales des artères mésentériques, («) Par cxoinplo, les figures donricos par M. Panizza {Sopm il sistcma linfatko dei Retlili, pi. 5 ot G). (6) Rusconi , Lellra sur une nouvelle méthode pou,r injecter le système lumphallque des Itep- tiles (Ann. des sciences nat., d842, 2' série, t. XVII, p. Ht). ■ — Voyez aimi brescliet, Additions à la lettre précédente {loc. cit.). Cœurs lymphatiques. 466 SYSTÈME LYMPHATIQUE Les réservoirs contractiles ont reçu le nom de cœurs lym- phatiques^ parce qu'ils exécutent des mouvements pulsatiles, comme les cœurs proprement dits. Ils sont au nombre de quatre, et sont disposés par paires : deux dans la région scapulo- cervicale, et deux à la partie antérieure et dorsale des cuisses. Ces dernières reçoivent le liquide versé par les espaces lym~ phatiques des membres postérieurs et par des conduits qui viennent de la région lombaire ; mais les embouchures de ces canaux paraissent être garnies de replis valvulaires, de façon à empêcher tout reflux; enfin ces poches ischiahques, ou et donne naissance postérieurement à une série de canaux qui servent aussi de gaines à ces vaisseaux sanguins et qui convergent vers le point oii le mésentère rejoint la paroi dorsale de l'abdomen. Là ces canaux se réunis- sent en un large sinus qui est traversé par ces mêmes vaisseaux, et qui se continue avec le réservoir prévertébral ou grande citerne lymphatique {a). Des canalicules analogues, mais qui, pour la plupart , sont indépendants des vaisseaux sanguins ou les côtoient seulement, forment sur le gros intes- tin et sur la vessie urinaire des ré- seaux encore plus riches (6), dont les troncs efférents débouchent aussi dans la grande citerne. On voit, par les recherches de M. Panizza, qu'il existe également un réseaude lymphatiques à mailles assez serrées sur les ovaires et sur les poumons, à la base desquels ces canalicules se réunissent en deux grands sinus irréguliers qui se conti- nuent à leur tour avec la citerne. Enfin, quelques ramuscules vasculari- formes , en connexion avec la partie postérieure de ce grand réservoir, rampent sur la paroi inférieure de l'abdomen, et y accompagnent les divisions des artères épigastri - ques (c). M. Robin a constaté aussi l'existence d'un réseau lymphatique sur les ovaires, l'estomac, la vésicule biliaire, etc. {d). La cilerne, ou réservoir lymphati- que prévertébral où tous ces canaux vont aboutir, est une énorme poche membraneuse qui a été figurée dans l'état de distension par M. Panizza (e), mais qui, en général, est affaissée sur elle-même. Ainsi que je l'ai déjà dit, elle est de forme irréguUère et occupe toute la portion dorsale de la cavité viscérale ; antérieurement, elle se ré- trécit et se termine en cul-de -sac de chaque côté de l'œsophage, sous les muscles cervicaux ; en dessus, elle est limitée par la colonne vertébrale et les muscles latéraux de celle-ci ; de cha- (a) Rusconi, Rifless. sopra il sistema linfalko dei Reltili, p. 74, pi. i , ûg. 2, et pi. 4, fig. 1 . (b) Piusconi, Op. cit., pi. 4, fig. 10. (c) Panizza, Op. cit., pi. 0, 8 et 9. (d) Robin, Note sur les lymphatiques des viscères abiominaux des Grenouilles, et sur leurs réservoirs (l'Institut, 1846, t. XIX, p. 54). {e) Panizza, Op. cit., p. 18, pi. 6, %. 7. CHEZ LES BATRACIENS. " ^67 cœurs lymphatiques postérieurs, communiquent avec les troncs veineux voisins , de sorte qu'en injectant de l'air ou du mer- cure dans leur intérieur, on fait passer immédiatement ce fluide dans le système sanguin. Les réservoirs cervicaux, ou cœurs lymphatiques antérieurs, débouchent dans les veines jugulaires , et ils sont en connexion avec les méats lympha- tiques de l'aisselle : il y a quelques raisons de croire que la grande citerne prévertébrale s'y ouvre aussi ; mais les rap- ports de celle-ci avec le système veineux n'ont pas été constatés d'une manière satisfaisante (1). que côté et en dessous, elle est circon- scrile par les viscères et par les deux feuillets séreux qui enveloppent ces organes et constituent le péritoine ; enfin, en arrière, elle se rétrécit de nouveau et se termine sur les côtés du cloaque. L'artère aorte et la veine cave la traversent suivant son grand axe et y sont entièrement libres , excepté par les branches vasculaires qui s'étendent de ces troncs vers les parties circonvoisines. Le l'éservoir péri-œsophagien que Rusconi a figuré sous le nom cVoutre lymphatique {a), et qi\e M. Robin a dé- crit avec plus de détail, loge dans sa cavité la portion antérieure du tube alimentaire. Cette poche s'étend de la partie postérieure du pharynx au com- mencement de l'estomac, et lorsqu'elle est reiillée, elle peut avoir le volume d'une grosse noisette ; elle est libre de toutes parts, excepté du côté dor- sal, où elle adhère au réservoir prin- cipal, et elle repose sur le cœur. (1) Lesréservoirspulsaliles ou cœurs lymphatiques des Batraciens ont été découverts, en 1832, par J. Millier, et M. Panizza, sans avoir eu connais- sance de ce fait, en donna une des- cription peu de temps après (6). Ce sont de petites poches dont les parois membraneuses sont garnies de fibres musculaires striées (c), et dont les battements ne sont synchroniques ni avec les mouvements respiratoires , ni avec les contractions du cœur. Les pulsations qu'on y voit ne dépendent en aucune façon de l'action de ce der- nier organe, car elles persistent après qu'on l'a enlevé, et même après que le train postérieur a été séparé du reste du corps. Il est aussi à noter que ces différents réceptacles ne se con- (a) Rusconi, Op. cit., p. dl-i, pi. 4, fig. 10. (fc) .1. Millier, Deohacht. %ur Analyse der Lymphe, des Blutes und des Cliylus {Pog2:cnJorfl"9 Annalen, et Ann. des sciences nat., 1833, 2' série, t. I, p. 339). — On the Existence of four Dislincl llearts, havinrj liegular Pulsations connectedwith the Lymphalic System in certain Amphihious Atdmals [l'hilos. Trans., 1833, p. 89). — I';iniz2a, Sopra il sislema linfalico dei ltettili.l'ii\\n, i 833. (c) l,es caraclères liistolo';ifiucs de ces fibres contractiles ont été d'abord coiislalés cIjcz des Serpents par M. Valentin, puis chez des Crapauds par M. Lcydig {Aiiatomische hisloloyische Hntersuchuriyen iiber Fiacht und lieplilien, p. 58). /i68 SYSTÈME LYMPHATIQUE Cet ensemble de cavités , dont la plupart ressemblent à des ^"vmJhaSur cellules irrégulières, et dont d'autres affectent la forme de vais- seaux variqueux et tortueux , a la plus grande analogie avec la portion périphérique du système irrigatoire cavitaire que nous avons vu coexister avec l'appareil sanguifère chez certains Animaux invertébrés, tels que les Annéhdes; seulement, au lieu de communiquer librement avec la grande chambre viscé- rale, comme chez ceux-ci, les méats lymphatiques de la Gre- nouille sont séparés de la cavité de l'abdomen par la membrane Analogie lymphatique et certaines parties du système cavitaire des Invertébrés tractent pas toujours simullanément. Les cœurs lymphatiques de la paire postérieure , ou réservoirs ischiati- ques, sont situés sous ]a peau, der- rière l'articulation du fémur, près de l'anus (a) ; ils reposent sur les gros vaisseaux sanguinsde la cuisse, et leurs pulsations sont visibles à travers les téguments. Millier a reconnu qu'en les insufflant, il est parfois possible de faire parvenir l'air dans tous les méats lymphatiques des membres posté- rieurs, ainsi que dans deux grandes cavités situées sur les côtés de la por tion dorsale de l'abdomen, l'une sous la peau, l'autre entre les muscles et le péritoine ; mais il croit que les em- bouchures de ces cavités sont garnies de valvules. Les espaces lymphatiques de la cuisse sont situés en partie sous la peau , en partie entre les muscles, et ils se réunissent successivement pour former plusieurs grands troncs qui se rendent au réservoir ischia- tique correspondant ; enfin celui-ci est aussi en relation avec un conduit lymphatique qui longe l'artère iliaque, et qui paraît s'anastomoser avec son congénère, puis se diriger en avant en côtoyant l'aorte, mais qui ne se laisse pas injecter d'arrière en avant. Enfin, chacun de ces réservoirs pulsa- tiles communique avec la grosse veine ischiatique adjacente, de façon que les fluides poussés dans ces poches pénètrent facilement dans ces vais- seaux et vont de là dans le système porte rénal (6). Les cœurs lymphatiques antérieurs sont placés de chaque côté de la ré- gion dorso-cervicale, et sont adossés aux grandes apophyses transverses de la troisième vertèbre, entre la colonne épinièreet l'omoplate, dont ils dépas- sent un peu le bord postérieur; ils sont arrondis en arrière et un peu rétrécis en avant, où ils communi- quent avec une branche de la veine jugulaire, et y versent de la lymphe de façon à distendre ce vaisseau cha- que fois qu'ils se contractent, circon- stance qui, mal observée par Marshall- Hall, avait conduit ce physiologiste à croire que chez la Grenouille il existe (a) Voyez Rusconi, Rijless sopra Usistema linfatico dei Bettili, pi. 4, %. 7. (&) Voyez ci dessus, tome III, page 399. CHEZ LES BATRACIENS. 469 séreuse dont les parois de celle-ci sont tapissées (1). Je suis même porté à croire que cette analogie n'est pas apparente seulement, et que l'appareil lymphatique de ces Vertébrés est en réalité un démembrement du système cavitaire général com- parable à celui que nous avons déjà vu s'établir chez les Inver- tébrés, quand l'appareil sanguifère est devenu distinct des lacunes interorganiques circonvoisines. La formation de cet appareil nouveau serait donc la conséquence d'un progrès ulté- rieur dans le travail organogénique qui , chez les Animaux inférieurs , a amené la distinction du système circulatoire , et qui maintenant aurait pour résultat la constitution d'un second appareil hydraulique assez semblable au premier, lorsque celui- ci n'était encore que très incomplet. S'il en est ainsi, nous pouvons nous attendre à voir le sys- tème lymphatique des Vertébrés se perfectionner en revêtant successivement les différentes formes par lesquelles l'appareil sanguifère a passé chez les Animaux inférieurs ; se régulariser de plus en plus; perdre peu à peu la forme de méats polymor- dans la région cervicale des artères (1) Ainsi que je l'ai déjà dit dans pulsatiles (a). une précédente Leçon (c), M. de Chez les Crapauds, la dispos) tin;! Quatrefages a signalé la ressem- dii système lymphatique est à peu blance qui existe entre certaines por- près la même que chez la Grenouille lions du système lacunaire général commune ; mais chez le Ceratophys des Annélides et l'appareil lympha- dorsato, Batracien de l'Amérique, très tique des Vertébrés. Ce nalura- voisin de celle-ci, M. Leydig a signalé liste considère plus particulièrement l'existence de six paires de réservoirs comme étant des lymphatiques les contractiles, savoir, une paire située conduits vascularifornies qui por- comme d'ordinaire dans la région tent le fluide cavitaire dans les ap- scapulaire, et deux paires dans la ré- pendices respiratoires des Branchel- gion ischiatique (6). lions (rf). (a) Maraliall-llall, A CrUicaland Expérimental Essay on thc Circulation of Ihe Blood, 1831, p. 82, pi. 9. (b) l''r. I.cyJiiî, Anatomisch-hisloloijische Uiitersiichungen iiber Fisclie und Reptilien, p. 58. (c) Voyez ci-dessus, tome III, pajje 249. ((/) De Quairefageu , Mémoire sur le BrancheUlon (Ann. des sciences nat., 1852, 3° série, l. XVIII, p. 307). /l70 SYSTÈME LYMPHATIQUE phes, pour affecter celle de tubes dendroïdes ; s'endiguer de mieux en mieux, et constituer finalement un vaste ensemble de conduits tubulaires dont les racines seraient répandues au loin dans l'organisme et dont les troncs se centraliseraient de plus en plus. Si ce perfectionnement s'obtient d'une manière con- forme aux principes généraux que j'ai si souvent invoqués dans ces Leçons, nous devons voir aussi les parties périphériques de ce système conserver des caractères d'infériorité là où les par- ties centrales sont déjà des tubes membraneux parfaitement constitués, et nous devons rencontrer aussi une centralisation croissante dans les communications qui existent entre cet ordre de canaux et les vaisseaux sanguins. Enfin, nous devons voir également la structure de ces conduits se compliquer de façon à spécialiser davanlage leurs fonctions et à régulariser la marche du liquide qu'ils sont chargés de transporter. Or, ces prévi- sions sont toutes confirmées par l'observation ; et si nous com- parons le système lymphatique des Reptiles, des Oiseaux et des Mammifères à celui des Batraciens, nous verrons se réaliser successivement toutes les modifications que je viens d'indiquer. Lymphatiques l^éjà mêmc , chcz quelques Batraciens , on trouve des indices de ce genre de perfectionnement, et chez les Salamandres, par exemple , la plus grande partie du réservoir prédorsal devient tubiforme, de façon à ressembler davantage au canal thoracique des Vertébrés supérieurs (1); mais, dans la classe des Poissons, (1) Chez les Salamandres et les Tri- recherches de Millier) dans la région tons, la disposition générale du syslèirie scapulaire (6). Le mode de conforma- lymphatique est à peu près la même tion des chylifères est à peu près le que chez la Grenouille; on y trouve même que chez ce Batracien, et les une paire de réservoirs contractiles vaisseaux sanguins du mésentère sont dans la région pelvienne (a), et une toujours logés dans leur intérieur; seconde paire (qui avait échappé aux mais la citerne lymphatique qui est {a) J. Miiller, Op. cit. {Philos. Trans., 1833, p. 91). (6) J. Meyer, Systema Amphibiorum lymphaticiim disquisUionib%is novis examina tum. Berlin, 1845. des Salamandres. DES POISSONS. lili OÙ le tubage de quelques parties de ce système commence à s'effectuer, nous trouvons d'autres caractères d'intériorité dont l'appareil circulatoire de divers Animaux invertébrés nous a déjà offert des exemples. § 6. — Dans la Classe des Poissons, le système lympha- tique n'est encore que très imparfaitement connu (1), mais il paraît devenir plus distinct du systèm.e lacunaire interorganique, Système lymplialique des Poissons. située à leurpoiulde réunion, à la base dorsale du repli niésentérique, est beaucoup plus petite, et prendla forme d'un viiisseau à peu près cylindrique en arrière aussi bien qu'en avant de celte région moyenne du tronc, de façon à mériter dans cette dernière portion le nom de canal thoracique ; enfin l'aorte, au lieu d'être libre dans son intérieur, est adliérenle à sa paroi dorsale. On rencontre aussi un ^rand nombre de brides filiformes qui s'éten- dent de la surface libre du vaisseau inclus à la surface interne du conduit engainant, et il est facile de voir que si ces amarres venaient à se raccour- cir et à s'élargir, le canal lymphatique, au lieu d'être simple, se trouverait transformé en une espèce de plexus vasculaire (a). Les préparations figu- rées par M. Panizza font voir que vers la partie antérieure du thorax, ce gros canal thoracique se bifurque pour se porter en dehors vers les veines sous- clavièrcs, et reçoit dans cette région beaucoup de canaux lymphatiques tubuliformes provenant des parties antérieures du cou et de la tête. Sui- vant cet anatomiste, les plexus axil- laires déboucheraient dans les veines sous-clavières par plusieurs petits ori- fices, et le système lymphatique ne communiquerait pas avec le système sanguin sur d'autres points (6); mais il ne connaissait pas l'existence des réser- voirs pulsatiles qui paraissent s'ouvrir également dans les veines. M. Panizza décrit aussi un réseau lymphatique vasculaire très riche , situé sur les oviductes , et deux réceptacles , ou citernes latérales, qui sont placés dans la partie lombaire de la cavité abdo- minale, entre les testicules et la citerne médiane. (1) Vers la fin du siècle dernier, une question de priorité relative à la découverte des lymphatiques dans la classe des Poissons donna lieu à une polémique très vive entre deux ana- tomistes distingués de la Grande-Bre- tagne, flewson et A. Monro (c) ; mais l'existence de ce système chez ces Animaux était connue longtemps avant cette époque, car elle fut signa- lée en 1652 par Th. Bartholin,dont le nom revient si souvent lorsqu'il s'agit (o) l'iusconi, OiJ. cit., p. 87, \,\. 2, (ig-. 1 ot 8. (b) Panizza, Op. cil., p. ii), y\. 5, fii,'. 3 ot ^. (c) A. Aloriro , siaU of t'acls concerniny the l'irst Proposai of Performing the Paracenlesis of Ihe Thorax, on account, of Mr difl'ased , and ou Lytnphatic Vessel.i in Oviparoua Animnis (1770). — Tke Structure and Pliy.siolodu of Fishcs, p. 38 (1785). - Hcwson, Appeudi.t relating to the Uiscovery of Ihe Lynwhalic System la liirds, Finîtes, etc. {Works, p. '.)) cl siiiv.). IV. 31 472 SYSTÈME LYMPHATIQUE Cl i'oîi y aperçoit des tubes membraneux mieux caractérisés. Il se compose de deux portions appartenant, l'une aux viscères abdominaux, l'autre à la peau, aux muscles et aux parties voi- sines. Cette dernière se subdivise à son tour en deux ordres de vaisseaux, les uns superficiels, les autres profonds. de l'histoire des vaisseaux de cet ordre (a). Quoi qu'il en soit, Ilewson tit sur ce sujet d'excellentes observa- tions qui ne sont pas assez présentes à la mémoire de quelques anatomistes de nos jours (6) ; et A. Monro, tout en confondant souvent ies veines avec les lymphatiques, contribua aussi à avan- cer nos connaissances relatives à celte partie de l'histoire analomique des Poissons (c). Plus récemment, cette élude a été poursuivie avec beaucoup de persévérance par Fohmann, dont j'ai déjà eu l'occasion de citer les tra- vaux [d). Enfin M. Hyrti, d'une part (e), et MM. Agassiz et Vogt, de l'autre (/), ont ajouté des résultats importants à ceux obtenus par les recherches de leurs devanciers , et quelques autres analomistes se sont occupés des mêmes questions; mais l'histoire du système lymphatique des Poissons est cepen- dant encore fort incomplète et très obscure dans plusieurs de ses parties. Dans ces dernières années, on a même élevé des doutes sur la nature de quelques parties qui sont générale- ment attribuées à ce système de vais- seaux. Ainsi M. Robin a trouvé du sang dans le vaisseau latéral chez les Raies et les Squales, circonstance qui l'a porté à croire que ces organes ne sont que des vaisseaux veineux {g), et je dois ajouter que M. Natalis Guillot, en étudiant le vaisseau la- téral chez des Carpes vivantes , en a vu sortir du sang {h) ; mais M. Hyrtl a reconnu que, dans la plupart des cas au moins , ce même vaisseau ne renferme qu'un liquide séreux. Il est aussi à noter que MM. Agassiz et Vogt paraissent avoir confondu les vaisseaux mucipares de la tête avec les lymphatiques, et c'est de la sorte qu'ils ont été conduits à penser que ces derniers communiqueraient à l'ex- térieur par des orifices pratiqués dans la peau {i). (a) Bartholin, De lacieis thoracicis in homine hrutisque nuperrime observatis historia anato- mica, 1652, p. 70. — De lacteis venis sententla, cl. V. G. Harvssi expeiisa J. D. Horstio, 1065. (ù) Hewson, An Account of the Lymphalic Sustem in Fishes {Philos. Trans., 1769, t. LIX, p. 204). — Expérimental Inquiries , 2° part., Descript. of the Lymphatic System, chap. vi {Works, p. 152 elsuW.). (c) Monro, TUe Structure and Physiology of Fishes, p. 29 et suiv. (1785). {d) Foliraami, Das Saugadersystem der Wirbelthiere, 1' Hefi, 1827. (e) Hyril, Ueber die Caudal-und Kopf-Sinuse der Fische und das damit «.usammenhangende Seitengefâss-Syslem (Mùller's Archiv fur Anat. und Physlol., 1843, p. 22'i, trad. dans les Annales des sciences nat., 2° série, t. XX, p. 215). if) Agassiz et Vogt, Analomie des Salmonés, p. 134 et suiv. (e.xtr. des Mémoires de la Société des sciences naturelles de Neufcliâtel, ls45). (g) Robin, Note sur le système sanguin et lymphatique des Raies el des Squales (Journal l'Institut, 1845, t. XIII, p. 452). {hj Voyez Robin, Sur les vaisseaux lymphatiques des Poissons (Arch. gén. de méd., partie analomique, 1845, p. 65). (t) Agassiz et Vogt, Op. cit., p. 137. BKS POISSONS. (iTo Le système lymphatique soiis-cntané constitue en général trois troncs principaux qui ont une direction longitudinale, et qui sont situés, l'un sur la ligne médiane du ventre (1), les deux autres sur les flancs , dans le sillon qui sépare entre elles les masses musculaires de la portion dorsale et de la portion ventrale du corps, et qui se reconnaît extérieurement parce qu'il correspond à la ligne latérale que l'on distingue en général très nettement depuis la tête jusqu'à la base de la nageoire cau- dale. Dans la région scapulaire, le vaisseau médian-abdominal se bifurque , et ses deux branches remontent sous la ceinture osseuse qui soutient les nageoires pectorales ; elles s'y renflent beaucoup , de façon à constituer deux grands réservoirs dans lesquels viennent déboucher les vaisseaux latéraux dont il vient d'être question, ainsi que divers canaux provenant de la tête. Enfin ces branches communiquent de chaque côté avec l'une des grosses veines qui se rendent au cœur, et les ouvertures à l'aide desquelles ces relations s'établissent sont garnies de valvules disposées de façon à permettre le passage des liquides des réservoirs dans le système sanguin, et à empêcher égale- ment le reflux du sang des veines dans le système lympha- tique. Quant aux vaisseaux latéraux, ils se terminent posté- rieurement en un sinus qui est situé à la base de la nageoire caudale, et qui les fait communiquer non-seulement entre eux, mais aussi avec le tronc de la veine caudale, lequel nait de deux (1) L'existence de ce tronc lympha- nius Ta vu chez les Salmonés , les tique médian .ilKlominal a été con- Chipes, les Gadoïdes, etc., et il pense slatée chez TÉglefin {Gadus œylefi- qu'il existe chez tous les Poissons 7m.s) par Hewson et par Monro (a). osseux (c), de même que chez les IHa- M. r.ohin l'a trouvé aussi chez les gioslomes. MM. llyrtl, Agassiz et Vogt Squales et les Haies (6). Enfin M. Stan- n'ont pas parlé de ce vaisseau. (a) Hewson, Op. cil. {Works, \t. 152). — Moiiro, The Slriwltt,re and l'hysiolorjy of Flshes, \>\. 25, fijf. 2. (b) RoWiii, Op. cit. {flevue itinlofiique, 1845). (c) Stamiiu.s unii Sieljold, llandbnch dcr Zuolomic, zvvcilu Aiillayu, l. 1, \'. 253. IxTfl SYSTÈME LYMPHATIQUE orifices à bords valvulaires, pratiqués dans les parois de ces poches lymphatiques (1). Ce système de vaisseaux reçoit une multitude de branches secondaires qui rampent sous la peau , et , comme nous venons de le voir, il débouche dans les veines par ses deux extrémités, c'est-à-dire dans le voisinage de la base du crâne et à l'origine de la nageoire caudale. Les réservoirs ou sinus situés dans ces points de jonction varient un peu quant à leurdisposition, et dans (1) Ces vaisseaux latéraux ont été brièvement décrits par Hevvson et par Monro ; mais, jusqu'à ces derniers temps, on ignorait leur connexion avec la veine caudale. MM. Agassiz et Vogt furent les premiers à constater leur anastomose avec ce vaisseau san- guin (a), et Ton doit à M. Hyrtl des recherches très approfondies sur leur mode de terminaison dans la région caudale (b). Chez le Brochet et chez un assez grand nombre d'autres Poissons os- seux, dont cet anatomiste habile a étudié la structure, ces vaisseaux mar- chent parallèlement au canal muci- pare qui , de chaque côté du corps, longe la ligne latérale , mais ils sont situés un peu plus profondément et ne communiquent pas avec ce tube. Leurs parois sont très minces et ad- hèrent intimemenl aux parties circon- voisines. Leur diamètre, chez des Brochets et des Tanches de 30 à ZiO centimètres de long, est de un demi à un millimètre seulement, et, d'espace en espace, ils reçoivent une série de branches transversales qui sont éga- lement sous-cutanées et qui se diri- gent les unes vers le dos, les autres vers la face ventrale du corps pour s'y ramifier et s'y résoudre en un réseau grossier dont les mailles entourent les espaces correspondants aux écailles. Parvenu près de l'extrémité de la queue , chacun de ces vaisseaux laté- raux se renfle de façon à constituer un sinus qui est appliqué contre la base osseuse de la nageoire caudale, et qui communique avec son congénère au moyen d'un canal transversal, lequel perfore la base d'un des rayons de la dernière vertèbre coccygienne. Une valvule paraît exister dans le point où le vaisseau latéral débouche dans ce sinus caudal, et empêcher le passage du liquide de ce réservoir au dehors. D'autres vaisseaux plus petits, qui viennent de la nageoire caudale, s'ou- vrent également dans chacun de ces réservoirs, et ceux-ci , à leur tour, communiquent avec l'extrémité de la veine caudale, qui est bifnrquée et qui semijle prendre naissance de ces or- ganes, dont les parois membraneuses sont en continuité avec sa tunique [a] Vogt, Ueber die Schleimgdnge dcr Fische {Amtlicher Bericht ûber die Vevsammlung der Gesellschaft deutscher Naturforscher und Aerztc z,u Mainz, d842, p. 220). [b) Hyrll, Ueber die Caudal-und Kojif-Siuuse der Fische (Miillor's Archiv fur Anat. undPliys., 1843 p. 224). — Sur les sinus caudal et céphaliquc des Poissons, et sur le système de vais- seaux latéraux avec lesquels ils sont en connexion {Ann. des sciences nat., 1843, 2° série, t. XX, p. 215). DES POISSONS. * ^75 quelques cas ils sont bien manifestement contractiles, de façon à constituer des espèces de cœurs lymphatiques comparables à ceux que nous avons déjà rencontrés chez les Batraciens. Cette propriété est surtout remarquable chez l'Anguille , où le sinus caudal bat d'une manière rhythmique et avec tant de force, que ses pulsations peuvent être facilement aperçues à travers les téguments (4). interne, mais dont la cavité est séparée de la sienne par un appareil valvii- laire (a). Le mode de terminaison du vais- seau latéral dans la veine dorsale, qui marche d'arrière en avant sous la colonne vertébrale, est le même chez les Truites (b) , ainsi que chez les Squales et les Raies (c). Chez les Silures, on trouve de cha- que côté, au h'eu d'un seul vaisseau latéral, trois troncs qui se dirigent à peu près parallèlement vers la queue, et s'y réunissent pour déboucher dans le sinus caudal (d). Chez quelques Poissons, tels que le Brochet, le Gardon, le Carassin, le Goujon, le Barbeau et le Sterlet, le vaisseau latéral se prolonge jusque dans la tête, et va se terminer sous la base du crâne, dans un sinus qui est situé en dedans de la veine jugulaire, et qui à son tour débouche dans celle- ci par un petit canal transversal (e). Mais chez les Salmonés (/"), les Ga- des (g), les Raies et les Squales {h], les vaisseaux latéraux s'ouvrent dans une paire de grands sinus cervicaux qui descendent derrière la ceinture scapu- laire et qui se réunissent entre eux inférieurement sur la ligne médiane, dans le point où le vaisseau médian abdominal vient y aboutir. Chacun de ces sinus, ou réservoirs scapulaires, communique avec la veine cave anté- rieure , ou canal de Cuvier, par un orifice garni de valvules. Quelquefois, par exemple, chez le Sandre ( Leucioperca ) , la Tanche {T. Chrysitis) et le Chabot ( Cotlus gobio), les deux modes de comnmni- cation entre l'extrémité antérieure du vaisseau latéral et le système veineux coexistent («). (1) Pour étudier les battements de ce réservoir contractile chez les jeunes Anguilles, il suffit d'étendre la portion caudale du corps sur une lame de verre et de l'examiner par transparence. Cet organe a été vaguement aperçu, il (a) HjTtI, Op. cit. {Ann. des sciences nat., 2° série, t. XX, pi. G, fig. 1 à 5). (6) Agassiz et Vogt, Anatomie des Salmonés, p. 135, pi. K, Ctç;. (c) l'iohin, Sur les vaisseaux lymphatiques des Poissoiis {Revue zoolodique do OiR'Tiii, IR-iS, p. 22i). (d) llyril, Op. cit. {Ann. des sciences nat., 2° scrii', t. XX, p. 224). {e) Iilcm, ibid. {loc. cit., p. 22G). (/■) Monru, Op. cit., pi. 27, flg. i. — A(,'assiz ot Vofjl, Op. cit., pi. L, fiff. 7. (f/) Munro, Op. cit., pi. 24, Pi^. 1 (la Moruo ) (h) \>h-u\, ihid., p. .'!0, pi. 28. (i) llvrll. Op. cil. (Ami. des sciences nal., 2' \. 2r), li-. 1 (K^lp(in). li.', 1. XX, p. 227). 476 ^\STÈME LYMPHATIQUE D'autres troncs lympliatiques longitudinaux se voient aussi près de la ligne médiane du dos , mais ils n'ont qu'une impor- tance secondaire. De même que les précédents, ils commu- niquent avec des branches transversales qui suivent les inter- sections aponévrotiques des muscles latéraux, et, à l'aide des anastomoses établies de la sorte, toutes les parties superficielles de ce système vasculaire se trouvent reliées entre elles (1). Les vaisseaux lymphatiques profonds du corps se rendent pour la plupart dans des troncs longitudinaux qui sont placés près de la face interne de la cavité abdominale et qui s'ouvrent y a près de deux siècles , par Leeu- wenhoek (a) , mais n'avait que peu attiré l'attention des physiologistes, lorsque , en 1836 , Marshall-Hall publia à ce sujet des observations qu'il croyait être complètement nou- velles (6). Ce dernier auteur considéra ce sinus caudal lymphatique comme un réservoir sanguin , et le désigna sous le nom de cœur caudal. Mais, peu de temps après, J. î\iiiller en reconnut la véritable nature. Les pulsations qui s'y manifestent paraissent , au premier abord , avoir leur siège dans la veine caudale, mais dépendent en réalilé des contractions des parois du renflement terminal des vaisseaux la- téraux. Ces mouvements n'ont aucun rapport avec ceux du cœur, et s'é- lèvent parfois à plus de 150 par mi- nute, pendant que le cœur ne se con- tracte que 60 fois, ou même beaucoup moins. Enfin , le liquide contenu dans ce sinus est de la lymphe (c) . J. Millier a trouvé un organe pulsatile analogue chez le Mursenophis (d) ; mais M. Hyril n'a pu apercevoir aucun signe decontractilité dans les parois du sinus caudal chez les autres Poissons dont il a étudié l'anatomie. Dans les sinus céphaliques , au contraire , il croit avoir constaté cette propriété {e). Je dois ajouter que les troncs du système lymphatique des Poissons pa- raissent ne pas être doués d'irritabi- lité, car M. Stannius n'a pu y déter- miner de contraction en les excitant par le galvanisme (f). (1) Les vaisseaux longitudinaux dorsaux ont échappé aux recherches de la plupart des anatomistes, mais leur existence a été constatée par M. Stannius chez les Chabots et les Silures (g). (a) Leeuwenhoek, Arcana Natures détecta, epist. lxvi (Opéra omnia, t. II, p. 174). (6) Marshall-Hall, A Critieal and Expérimental Essay on the CÂrculation ofthe Blood, 1836, p. 170, pi. 10. (c) J. Millier, Bemerkungen ûber eigenthiïmliche Herzen des Arlerien-und Venensystems (Archiv fur Anat. und Physiol., iSi^, p. 477). (d) Millier, On the Existence of Four Distinct Hearts, etc. (Philos. Trans,, 1833, p. 92) (e) Hyrtl, Op. cit. (Ann. des sciences nat., 2° série, t. XX, p. 225). (f) Stannius uni! Siebold, Handbuch der Zootomie, 2° cdit., 1854, t. I, p. 254, (3) Stannius unil Siebold, ibid., p. 253. DES POISSONS. " /|77 antérieurement dans les sinus scapulaires ou céphaliques dont il a été déjà question. En généra! , on trouve un ou deux de ces conduits qui longent la colonne vertébrale en dessous et qui côtoient l'aorte (1). Les vaisseaux lymphatiques des viscères sont très nombreux et varient beaucoup dans leurdisposition. Tantôt ils formentsur toute l'étendue des parois de l'estomac et de l'intestin un lacis très serré et fort irrégulier; d'autres fois ils accompagnent les vais- seaux sanguins et les entourent d'un réseau anastomotique (2). (1) Fohraann a décrit et figuré chez l'Anguille deux troncs longitudinaux qui marchent sous la colonne verté- brale, et qui, d'espace en espace, sont reliés entre eux par de petites tra- verses anastomotiqups; des vaisseaux lymphatiques provenant des muscles du tronc y débouchent assez régu- lièrement, et à leur partie antérieure ces troncs communiquent avec deux sinus céphaliques que cet anatomiste désigne sous le nom de réceptacles chylifères (a). M. Stannius a rencon- tré deux troncs semblables chez beau- coup de Poissons osseux (6). J. Millier a trouvé chez les Myxines un tronc lymphatique qui, dans toute la longueur du corps, marche entre la colonne vertébrale et les gros vaisseaux sanguins, et qui dans la tête se bifur- que au-dessus des branchies; mais cet anatomiste n'a pu découvrir les ana- stomoses de ce réservoir avec le sys- tème veineux (c). M. f'iobin a trouvé chez les Squales une paire de gros vaisseaux lympha- tiques sous - péritonéaux qui sont appliqués contre les parois latérales de la cavité abdominale, et qui se ter- minent antérieurement dans la bifur- cation du vaisseau médian abdominal, derrière la ceinture scapulaire. En arrière, ils se réunissent entre eux en forme d'anse, et reçoivent de chaque côté un tronc anastomotique qui con- tourne la base de la nageoire ventrale et va déboucher dans le vaisseau laté- ral correspondant. Deux autres troncs anastomoliques se portent sur les côtés du cloaque et vont se joindre avec le vaisseau médian abdominal, de façon que dans la région pelvienne les trois troncs longitudinaux sous- cutanés et les deux troncs sous-péri- tonéaux communiquent facilement entre eux. La disposition de cette portion du système lymphatique est à peu près la même chez les Raies (d). ('2) Fohmann a constaté que chez la Torpille la portion moyenne du lube intestinal est couverte d'un réseau lymphatique exlrèmemcnl sorn;, «l'où (fl) Foliriiann, Uns Sauçiader-Snslcm der Wirhcllhiere, p. 24, pi. 4. (6) Stannius et Siobojd, Noxiveau manuel d'nnatomie comparée, t. Il, p. 121. (c) .1. Miillcr, Veraleichende Anatomie der Myxinniden {Mémoires de l'Académie des scinires de Berlin pour 1839, p. 190). (d) Piohin, Op. cit. (Hevue xooloçjique de f'.iK'Tin, 1R4.''., p. 22ri). A78 SYSTÈMJ;; LYMPHATIQUE Chez l'Anguille, par exemple, ils offrent la première de ces dispositions, et vont pour la plupart déboucher dans des sinus à structure caverneuse qui longent le tube digestif et qui commu- niquent, par l'intermédiaire d'autres plexus vasculaires, avec les troncs lymphatiques sous-rachidiens déjà mentionnés (1). part un faisceau de gros vaisseaux variqueux ou même celluleux , qui remonte vers le foie, et qui, cliemin faisant, reçoit deux plexus d'une structure analogue, venant, l'un de la grande courbure de l'estomac, l'autre de la petite courbure du même or- gane. Près de la face postérieure du foie, ce faisceau mésentérique reçoit deux autres plexus provenant, l'un de la vésicule du (ici dont les lymphati- ques forment un réseau très serré, l'autre du foie; puis il se réunit à un autre faisceau composé de troncs variqueux encore plus gros et plus nombreux , qui vient de la portion terminale de l'intestin, qui reçoit les lymphatiques des oviducles et qui s'avance derrière l'œsophage (a). Ce dernier paquet de gros vaisseaux irréguliers et parallèles, mais plexi- formes, peut être comparé au réser- voir de Pecqiiet, et bientôt se bifurque pour aller se terminer dans les deux veines sous - clavières par un grand nombre d'embouchures fort rappro- chées et garnies de valvules (6). Les lymphatiques qui longent en dessous la colonne vertébrale, et qui recueil- lent les branches rénales de ce sys- tème, débouchent également dans ces faisceaux terminaux, qui peuvent être considérés comme les représentants des canaux thoraciques des Vertébrés supérieurs, et qui reçoivent aussi d'autres plexus venant des branchies, de la tête et des parties latérales du corps. Chez les Raies , la disposition du système lymphatique abdominal est à peu près la même que chez la 'J"or- pille, mais les vaisseaux qui consti- tuent les plexus terminaux sont moins gros et moins variqueux ; enfin la communication avec les veines se fait de chaque côté par un seul canal qui ne se dilate pas en forme de sinus, et qui est pourvu d'un seul orifice elfé- rent, lequel débouche dans la veine sous-clavière au point de jonction de celle-ci avec la jugulaire (c). M. Robin a constaté que chez les Raies et les Squales, ainsi que chez divers Poissons osseux, les vaisseaux lymphatiques du système viscéral com- muniquent librement avec les bran- ches des vaisseaux sous-cutanés à l'aide de conduits anastomotiques situés dans la partie postérieure de l'abdomen {cl). (1) Les principaux sinus lympha- tiques du système viscéral de l'An- guille ont été décrits par Fohmann, et sont au nombre de trois. L'un de ces (a) Fohmann, Op. cit., pi. 1. (bj Idem, ibid., pi. 2. (c) Monro, Op. cit., p. 30, pi. 18. (d) Robin, Op. cit. (Revue %ooloçiique, 1845, p. 220). DES POISSONS. /l79 Chez d'autres Poissons , tels que le Brochet , ces sinus viscé- raux sont remplacés par des faisceaux de canaux anastomosés en manière de lacis. Il en est de même chez les Gades , et chez les Raies ce mode d'organisation est encore mieux carac- térisé (1). Il est aussi à noter que chez ces Plagiostomes les vaisseaux lymphatiques viscéraux engainent souvent les vaisseaux san- guins de la même manière que chez les Batraciens, et que ces derniers organes donnent parfois naissance à des ramusciiles qui se pelotonnent en forme de glomérules et sont hbres dans l'intérieur des premiers (2), Quelques anatomistes considèrent aussi divers tissus spongieux qui se trouvent dans le voisinage du tube alimentaire ou dans la lête de certains Poissons comme réservoirs, long et étroit, occupe toute la face inférieure de l'estomac ; un second est placé entre ce dernier organe et l'intestin ; enfin le troisième suit le bord opposé de l'intestin et se loge entre celui-ci et les organes de la génération, qui, de même que l'in- testin, y envoient beaucoup de bran- ches. Ces sinus sont subdivisés inté- rieurement par une multitude de brides et de lamelles membraneuses, et on ne les trouve jamais distendus par le liquide qu'ils charrient (a). (1) Ainsi sur l'estomac du Turbot les lymphatiques forment une gaîne réticulaire autour des principaux vais- seaux sanguins (6). Ciiez le Silure , les lymphatiques constituent un plexus très serré qui couvre tonte la surface de l'esto- mac (c). Chez VAnarrhichas lupus, les lym- phatiques couvrent aussi d'un plexus très serré la surface externe de l'in- testin ; mais dans le mésentère ils ne constituent qu'un réseau scalariforme autour des vaisseaux sanguins [d). (2) La découverte de ce mode d'or- ganisation est due à M. Leydig (e), et s'observe non- seulement chez les Raies, mais aussi dans le tissu spon- gieux qui constitue autour du cœur des Esturgeons les appendices dont il a déjà été question (/"), et qui semblent être des dépendances du système lym- phatique {g). H {a) Fohmann. Op. cit., p. 26, pi. 3. (b) Idem, ibid., p. 27, pi. C, fig-. 2. (c) Idem, ibid., y. 27, pi. G, 'fit'. \. (d) Idem, ibid., pi. 9, fig. 2. (e) I.eyditç, Anutomisch-liistoloriische Untermchunyen iiber Fische vnd Reptilien, p. 24, pl.l, ■• 8. (/■) Voyez ci-dcs»iis, loiiie III, pai^'u :i20. (ff) Lf-ydic, OjK rit., p. 25, pi. ■). n-. ;t. 480 SYSTÈME LYMPHATIQUE étant des dépendances du système lymphatique, et les compa- rent aux ganglions que nous rencontrerons chez les Vertébrés supérieurs; mais cette analogie n'est pas encore suffisamment démontrée , et l'on ne sait encore que peu de chose sur la structure de ces parties (1). J'ajouterai que dans cette classe d'Animaux on ne trouve pas de valvules dans l'intérieur des lymphatiques , si ce n'est dans le point de réunion de ces vaisseaux avec les gros troncs vei- neux, et que, indépendamment des communications établies de la sorte entre ces deux ordres de conduits, il existe beaucoup d'anastomoses entre les petites branches lymphatiques et les ramuscules veineux (2). (1) M. Leydig a été conduit à pen- ser qu'on devait assimiler aux gan- glions lymphatiques des Vertébrés supérieurs, non-seulement la masse lobée qui revêt le cœur de l'Estur- geon, mais aussi divers tissus mous et blanchâtres qui se rencontrent chez d'autres Poissons (a), savoir : 1° Une masse d'apparence glandu- laire qui se trouve entre la membrane muqueuse et la tunique musculaire de l'œsophage chez les Raies ; 2° Une masse d'apparence glandu- laire qu'il a trouvée dans l'orbite et sous la membrane muqueuse du pa- lais chez la Chimère (6); 3" L'organe épigonal , découvert dans le pli du péritoine, chez certains Squales, par J. Millier (c); h° La masse pulpeuse qui est ren- fermée dans la cavité crânienne et dans la portion antérieure du canal rachidien chez l'Esturgeon, Toutes ces parties se ressemblent beaucoup par leur structure intime, et c'est principalement sur leurs carac- tères histologiques que M. Leydig se base pour les considérer comme des glandes lymphatiques. Enfin, il rapporte aussi à ce sys- tème d'organes le tissu aréolaire qui entoure les vaisseaux sanguins du mésentère chez les Trigles et beaucoup d'autres Poissons osseux, et qui ren- ferme des granules semblables en apparence à ceux contenus dans les ganglions lymphatiques chez les Ver- tébrés supérieurs {cl). (2) Fohmann a constaté ces anasto- moses directes entre les parties péri- phériques des systèmes lymphatique et sanguin dans le réseau vasculaire (a) Leydig, Lehrbuch der Histologie der Mensclien und der Thiere, p. 422. (6) Leyflig-, Zur Anatomie und Histologie der Chimera raonstrosa (Miiller's Areh. fur Anat. und Physiol., 4851, p. 269). (c) Millier, Untersuchungen ûber die Eingevjeide der Fische (Mèm. de l'Académie de Berlin pour 4S43, p. 131). {d) Leydig-, Kleinere Mittheilungen %ur thierischen Gewehelehre (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1854, p. 323, pi. 12, %. 4 et 5). DES REPTILES. 481 S 7. — Dans la grande division des Allantoïdiens, le svs- Lymphatiques tème lymphatique se régularise davantage, et, à certains égards, vertébrés '' ' ■• ^ _ _ Allantoïdiens. se perfectionne, bien que les organes d'impulsion dont il a été question chez les Batraciens deviennent rudimentaires ou cessent d'exister chez les Vertébrés à sang chaud. Dans la Classe des Reptiles , la disposition de cet appareil Lymphatiques ne diffère que fort peu de ce que nous avons vu chez les Batra- Reptiles. ciens. Chez tous ces Animaux, on trouve dans la région pel- vienne une paire de réservoirs pulsatiles, ou cœurs lympha- tiques, qui communiquent avec les troncs veineux adjacents (1 ) . de ia surface externe de l'estomac et de Tintestiii chez le Silure et le Turbot (a). Cet anatomiste a trouvé aussi que, dans quelques cas, les vaisseaux lym- phatiques naissent d'un tissu spon- gieux ou caverneux. Ainsi, le long du bord libre de la valvule spirale du gros intestin chez les Raies, il existe un bourrelet vésiculeux d'une struc- ture très irrégulière, dont partent les vaisseaux lymphatiques qui forment un réseau fort serré sur les deux sur- faces de ce repli membraneux, et vont se confondre avec les lymphatiques efférents de l'intestin (6). D'autres fois les i-acines de ce sys- tème consistent évidemment en une multitude de petits tubes terminés en cul-de-sac, disposition que Fohmann a constatée dans les franges ou papilles de la muqueuse intestinale de VAnar- rhichas lupus (c). (1) Ces cœurs lymphatiques, décou- verts d'abord chez les Lézards et les Batraciens par J. !\liUler(d),et signalés aussi à peu près en même temps par M. Panizza (e), ont été étudiés d'une manière plus attentive par MM. E. Weber et Valenlin {f). ils sont pourvus de libres musculaires striées et renfermées dans une capsule fi- breuse. Il est aussi à noter que leur tunique charnue adhère à celte cap- sule par du tissu conjonctif élastique, de façon que lorsqu'ils se contractent, ils tendent les filaments de cette cou- che intermédiaire , qui , pendant la diastole , réagissent en manière de ressort {g). Il en résulte que ces petits réservoirs doivent agir alternative- ment comme des pompes foulantes et (a) Folimanri, Das Saugadersystein der Wirbelthiere , p. 27, pi. G , fig. 1 et 2 ; p. 30, pi. 7, fig. 3 et 4. (6) Idem, ibid., p. 28, jil. 7, fit?. 1 et 2. (c) Idem, ibid., p. 31, pi. 8, fijj. 1. (d) .1. Miillci-, On the Existence of Four Distinct Ilcarts in Certain Amphibions Animais (l'hilos. Tram., 1833, p. 92). (e) l'anizza, Sopra il nistema linfatico dei Retlili, p. IC. (/■) K. Weber, Ueber das Lymphherz einer niesenschlan/jc (Miiller's ArcUiv fiir Annt. nnd Physifil., 1835, (.. 535). Vali-iilin, liemcrlc. iiber die Slruklur der Lymphherx-en (Midler's Archiv, 1839, p. 170). {g) Hyrl! , lieilrdge %ur verni. Angiologie ( Denkschriften der Al:nd, der WissensehnfleV' zu Wien, i«50, t. I, |-. 28). Ii82 SYSTÈME LYMPHATIQUE Le sinus dans lequel viennent aboutir les lymphatiques des intestins est une grande cavité irrégulière qui occupe la por- tion dorsale de la cavité abdominale; en général, il loge l'aorte dans son intérieur, et il se bifurque antérieurement pour gagner les côtés de la base du cou, où il débouche dans les veines jugulaires ou sous-clavières. Chez les Tortues, par exemple, il présente cette disposition et il acquiert un développement énorme (1). Chez les Serpents, ce réservoir est plus grand, aspirantes. Enfin des valvules plac(^es à leurs ouvertures afférentes , aussi bien qu'à leurs orifices efférents , déterminent rutilisalion de tous ces mouvements pour l'envoi de la lym- phe dans les veines adjacentes. (1) Les lymphatiques des Tortues de mer ont été étudiés avec beaucoup de soin, d'abord par Hewson, puis par M. Panizza et par J. i\U\ller (a). Ils constituent des plexus très irréguiiers qui semblent résulter de l'assemblage de cellules bossuées et anastomosées plutôt que de tubes rameux. Dans les parties périphériques du système ces cavités lymphatiques sont petites et constituent en général un réseau à mailles assez larges ; mais dans la portion centrale elles deviennent si grandes et si rapprochées, qu'elles donnent naissance à de grosses poches gibbeuses plutôt qu'à des lacis vas- culaires. De chaque côté du cou on trouve, sous la peau, un de ces sacs à parois minces et boursouflées , qui s'élargit d'avant en arrière, qui com- munique vers sa base avec d'autres réservoirs analogues, situés plus pro- fondément dans la même région ou dans les régions axillaires, et qui dé- bouche dans la partie antérieure du réservoir central (6). Celui-ci com- mence , en arrière, à la partie supé- rieure et postérieure de la cavité abdominale, et constitue dans cette région le sinus appelé la grande citerne chylifère. Ce réservoir est le confluent des gros plexus qui vien- nent des membres postérieurs , des viscères pelviens, des intestins, des reins et des autres parties voisines; il est situé à côté de la veine cave pos- térieure, entre la colonne vertébrale et le rectum ; il loge l'aorte dans son intérieur, et il s'avance entre les deux poumons jusque vers le cœur, où il se bifurque pour constituer les prolon- gements auxquels on donne le nom de canaux thoraciques (c). Ceux-ci for- ment de chaque côté du cœur un gros sac irrégulier qui est traversé par les artères pulmonaires, ainsi que par les (a) Hewson, An Account of the Lymphatic System in Amphibious Animais {PItilos. Trans., 1769, t. LIX, p. 196 ; — Works, p. 146 et suiv.). — Bojaiius, Anatome Testudinis europœœ, 1819. — Panizza, Soprail sistema linfatico dei Rettlli, 4 833. — J. Millier, Ueber die Lympliherzen der Schildkrolen {Mém. de l'Acad. de Berlin pour 1839, p. 31). (h) Panizza, Op. cit., pi. 1. (c) Idem, ihid., pi. 2 rt 3, lig-. 4. DES REPTILES. tiS^ comparativement à la grosseur du corps ; mais il se termine d'une manière un peu différente, au moyen d'un grand plexus irrégulier qui est situé au-devant du péricarde, et qui reçoit aussi trois gros troncs cervicaux dans lesquels se réunissent tous les lymphatiques de la tête et du cou (1). Chez les Sauriens ordinaires, tels que les Lézards, la portion centrale du système lymphatique présente à peu près la même crosses aortiques , et ils vont débou- cher dans les veines sous-clavières, h leur point de jonction avec les jugu- laires. Ces communications s'établis- sent de chaque côté à l'aide de deux ou trois orifices ovalaires qui sont garnis de valvules. Le tronc de l'aorte et ses principales branches se trou- vent, comme je l'ai déjà dit, dans la cavité de ce réservoir, et y sont comme amarrés par un grand nombre de brides divergentes ; mais ces vaisseaux n'y sont pas à nu, et sont revêtus d'une membrane analogue à celle qui tapisse en dedans les parois du sys- tème lymphatique (a). Chez la Cistude d'Europe, le grand réservoir lymphatique est disposé à peu près de même, mais les branches més- entériques qui s'y rendent sont moins irrégulières et plus tubiformes (6). Les cœurs lymphatiques des Tor- tues sont deux petits sacs arrondis, situés sur les côtés de la colonne ver- tébrale, derrière l'articulation coxnle et près du bord postérieur de la cara- pace (c). (I) La citerne lymphatique, ou ré- servoir uK-sentérique de la Couleuvre est un grand sac à parois d'une délica- tesse extrême, qui se trouve compris entre la colonne vertébrale et les deux lames de la portion dorsale du mésen- tère. Cette poche commence dans le voisinage de l'anus, où elle est très étroite et où elle reçoit les lympha- tiques de la queue et du pénis ; mais bientôt elle s'élargit beaucoup, et con- stitue un énorme sinus subcylindrique qui se prolonge jusqu'au niveau de l'estomac, où elle se termine en cul- de-sac (rf). Elle loge l'aorte dans son intérieur, et elle reçoit successivement les lymphatiques des reins, des intes- tins, de l'estomac, etc. Enfin, à quel- que distance de son extrémité anté- rieure, elle donne naissance à deux canaux thoraciques. L'un de ces con- duits naît beaucoup plus loin en ar- rière que son congénère, et constitue le canal thoracique droit ou inférieur [e) ; il communique avec la portion anté- rieure de la citerne par plusieurs pe- tits troncs anastomoliques, et il reçoit les lymphatiques du plexus gastrique, du pancréas et de la rate ; puis il s'élar- git beaucoup pour eutourer, en ma- nière de gaine, le foie (nu quelquefois {n) Panizz;i, Op. cit., p. 9, pi. 3, fig;. 0. tfcJBojamis, Op. cit., pi. 2G, fit?. 154, d55; pi. 27, lig. 157. (t) Viiller, loi: cil., pi. I, (d\ \>anm.a, Oji. cil., y\. (i, li-. -I, ti" 13. (e) Iflciii, ihid., pi. .'), li;; . 1, II' 54. llSll SYSTÈME LYMPHATIQUE disposition que chez les Tortues (1); mais, chez les Crocodi- liens, la citerne mésentérique, ou réservoir de Pecquet, se il se borne à longer les deux bords de ce viscère), et se continue ensuite sous la forme d'un tube irrégulier, jusque dans le voisinage du cœur, où il se termine en cul-de-sac, mais commu- nique latéralement sur plusieurs points avec le tronc commun des lymphati- ques, qui va déboucher dans un grand plexus situé au-dessus du cœur. Le canal thoracique gauche ou dor- sal naît aussi de la citerne par trois ou quatre racines, et longe l'œsopiiage jusque auprès du cœur ; chemin fai- sant, il s'anastomose avec son congé- nère au moyen de divers conduits transversaux , et antérieurement il se divise en deux branches qui se réunis- sent au devant du cœur en un sinus où viennent également se terminer trois troncs cervicaux et le tronc pul- monaire déjà mentionné. Il en résulte que, par des chemins plus ou moins détournés, tous les principaux conduits lymphatiques viennent se terminer dans ce réservoir précardiaque, qui, à son tour, débouche dans la veine cave supérieure par deux ou trois petites ouvertures (a). Enfin, l'extrémité postérieure de la grande citerne, ou réservoir mésenté- rique, communique par plusieurs pe- tites branches avec deux sinus con- tractiles ou cœurs lymphatiques qui débouchent à leur tour dans une branche de la veine caudale. Ces cœurs lymphatiques ont été étudiés d'une manière plus complète chez les Pythons. Ils sont situés hors de la cavité abdominale, dans des cavités particulières qui sont bornées en avant par la dernière côte , et qui adhèrent aux muscles adjacents. Cha- cun d'eux reçoit la lymphe par trois embouchures et la verse dans la veine voisine par deux orifices placés à son extrémité antérieure. On y distingue trois membranes dont la moyenne est musculaire, et leurs embouchures sont, comme d'ordinaire, garnies de replis valvulaires (6). M. Valentin a trouvé que ces organes pulsatiles sont plus développés chez l'embryon que dans l'Animal adulte (c). Chez le Boa, la disposition de la ci- terne lymphatique est à peu près la même que chez la Couleuvre, et, en ouvrant ce réservoir, on voit que l'aorte, ainsi que les principales bran- ches de ce vaisseau, traversent sa cavité et y sont fixées par des brides divergentes (d). Il est aussi à noter que, d'après Jacobson, il y aurait chez les Serpents, de chaque côté du corps, un canal cylindrique en communication avec de grands espaces lymphatiques situés sous la peau; mais cet anatomiste ne donne pas de détails au sujet de cette disposition remarquable , qui semble avoir de l'analogie avec ce que nous avons déjà vu chez les Poissons (e). (i) Chez le Lézard, la citerne lym- (a) Panizza, Op. cit., pi. 5, fig. 2, n° 14. (6) E. Weber, Ueber das Lymphhei'z einer Riesenschlange (Python tigris) (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1835, p. 538, pi. 13, fig. 7, 8 et 9). (c) Valentin, Bemerkungen ûber die Struktur der Lymphherzen und der Lymphgefdsse (Miiller's Archiv, 1839, p. 176). (d) Panizza, Op. cit., p. 25. (e) Jacobson, Op. cit. {Mém. de l'Académie de Copenhague, 1828, t. III, p. xl, cl Isis, 1848; p. 96). DES REPTILES. 485 rétrécit beaucoup, et la portion supérieure de ce sinus, qui représente les canaux thoraciques , devient plus tubulitbrme. Il est aussi à noter que chez ces Reptiles on voit, pour la pre- mière fois, les lymphatiques de l'intestin, pendant leur trajet dans le mésentère, donner naissance à un de ces organes glandulaires que les anatomistes désignent sous le nom de ganglions lym.'phatiques , et que nous trouverons en grand nombre chez les Mammifères (1). phatiqiie est très grande et de forme fort irrégulière ; elle commence dans le bassin et se renfle beaucoup dans la région lombaire ; vers le niveau de la rate elle présente un étrangle- ment, puis elle s'élargit en forme de panse et s'avance au-dessus du cœur, où elle se divise en deux branches très courtes qui reçoivent les troncs céphaliques, etc., et qui débouchent dans la veine cave inférieure (a). Dans la région pelvienne le système lymphatique communique aussi avec la veine caudale par l'intermédiaire d'une paire de petites poches pulsa- tiles, ou cœurs lymphatiques, qui s'anastomosent d'aulre part avec la grande citerne abdominale (6). Chez le Scheltopusik ( Pseudopus Pallasii) , il existe une paire de petits cœurs lymphatiques qui sont situés entre les muscles dorsaux et les apo- physes transverses de la vertèbre sacrée. Ces poches sont renfermées chacune dans une loge fibreuse, et ne reçoivent qu'un seul vaisseau alfércnt qui vient du grand sinus abdominal ; enfin elles débouchent dans les veines ombilicales et elles battent environ 50 fois par minute (c). (1) Chez le Caïman à museau de Brochet, dont le système lymphatique a été étudié par M. Panizza, on trouve à la base de la queue un grand plexus qui entoure les vaisseaux sanguins, et qui, après s'être uni aux réseaux ilia- ques, constitue la portion postérieure de la citerne abdominale. Ce réservoir est un plexus à branches grosses et courtes plutôt qu'un sac ; il embrasse d'espace en espace l'aorte abdominale, sans loger ce vaisseau dans son inté- rieur, et il s'avance ainsi entre la veine cave et la colonne vertébrale jusque auprès de la rate, où il se réunit au faisceau plexiforme de gros lympha- tiques qui vient de l'inteslin grêle et occupe le sommet du mésentère. Le renflement ainsi constitué se prolonge antérieurement autour de l'aorte, et bientôt se divise en quatre troncs qui s'anastomosent souvent entre eux, el forment de chaque côté du cœur un faisceau analogue au canal thoraci- que, lequel va déboucher dans la veine sous-clavièrc correspondante. (a) Panizza, Op. cit., p. 15, pi. 0, (ig. 4 et 5. (b) Idem, ibid., \>. 10. (c) llyril, Ueilrâge aur vertjleiclienden Angiologie [Mém. de L'Académie de Vkime, 1850, l. I, p. 25, pi. 3). llSQ SYSTÈME LYMPHATIQUE § 8. — Chez les Reptiles, de même que chez les Vertébrés Anallantoïdiens, les lymphatiques ne présentent que de rares vestiges de valvules , excepté dans le voisinage immédiat de l'embouchure de ces vaisseaux dans les veines; mais, dans la Vaisseaux Qlasse DES OisEAux (1) , CCS souDapcs directriccs du courant lymphatiques \ / ' i i oistlix ^ormé par la lymphe se multiplient beaucoup, et, en général, s'opposent au reflux des liquides dans presque toutes les parties de ce système vasculaire. Le grand réservoir abdominal qui, chez les Reptiles , reçoit la plupart des canaux lymphatiques des membres, du tronc et de la tête, et qui se bifurque antérieu- rement pour aller déboucher dans le système veineux, près du après avoir reçu, en passant, les ganglion lymphatique à la racine du plexus lymphatiques du cou et des mésentère, chez le Crocodilus acu- pattes antérieures (a). Les cœurs lym- tus (c). phaliques de ces Kepliles sont situés, (1) Les vaisseaux lymphatiques des comme d'ordinaire, dans la région Oiseaux paraissent avoir été décou- ischialiquo. On les trouve entre le verts par Swammerdam (cl) , mais ne bord supérieur du bassin et l'apo- furent étudiés d'une manière atlenlive physe iransverse de la première ver- que vers la fin du siècle dernier, par tèbre caudale ; enfin ils consistent cha- Monro (e) et par Hewson if). Plus cun en une vessie ovoïde qui commu- récemment M. Tiedemann, l<"ohmann, nique avec les veines alïerenles du Laulh, M. i'anizza et M. Stannius en système rénal (6). ont fait l'objet de recherches plus M. Owen a constaté l'existence d'un étendues {y). (a) Panizza, Op. cit., p. 10, pi. 4-, fig. 1 et 2. (!)) Idem, ibid., p. 15. — Millier, Ueber die Lymphherzen der Schildkrôlen (Méni. de l'Acad. de Berli7i pour i8dd, p. 33). (c) Owen, Notes on the Anatomy of a Crocodile {Proceediiigs of the Zool. Society, 1831, t. I, p. 141). (d) Voyez Bircli, History of the Royal Society of London, 1676, t. III, p. 312. (c) Monro, Statement ofFacts concernlng the Paracentesis of the Thorax, etc., 1770. — Voyez aussi The Striict. ofFishes, chap. vu, Of the First Discovery of the Lacteals and Lyinphatic Vessels inFishes, Birds, etc., p. 38. (/■) Hewson, An Account of the Lymphatic System in Birds {Philos, trans., 1768, t. LVIII, p. 217, pi. 10). — Expérimental Inquiries, part. 2, chap. iv {Works, p. 144 et suiv.). {g} Tiedemann, Anatomie und Naturgeschichte der Vôgel, 1810, t. I, p. 633. — Fnhmann, Anatomische Untersuchungen ïiber die Verbindung der Saugadern mit den Venen, 1821, p. 63 (traduit par Breschet dans les Mémoires de la Société médicale d'êm^llation, 1822, p. 136). — E.-A. Laulli, Mémoire sur les vaisseaux lymphaliques des Oiseaux {Ann. des sciences nat,, 1824, 1" série, t. III, p. 381). — Panizza, Osservazioni antropo-wotomico-fisiologichc, 1830, p. 63 et suiv. — Stannius, Ueber Lymphherzen der Vôgel (Miiller's .irchiv fur Anat. und Physiol., 1843, p. 449). DES OISEAUX, ll^l cœur, est remplacé par un plexus étroit qui embrasse l'aorte vers l'origine de l'artère cceliaque, et qui se continue supérieu- rement sous la forme de deux tubes grêles et presque cylin- driques dont la longueur est considérable. Ces conduits sont les canaux Ihoraciques ; ils s'écartent entre eux en remontant vers la base du cou , où ils se terminent dans les veines sous- clavières et jugulaires (1). Enfin, on rencontre sur le trajet de (i) Les lymphatiques des Oiseaux sont beaucoup plus grêles et plus ré- gulièrement tubi formes que ceux des Reptiles. Dans les membres inférieurs de roie ils ne constituent pas deux couches distinctes, une sous-cutanée et une profonde, mais suivent presque tous les gros vaisseaux sanguins. Ainsi, sur chaque côté des doigts, on voit un de ces vaisseaux qui se réunit à ses congénères sur le dos du pied et y forme un plexus lâche dont partent quelques branches ascendantes, les- quelles constituent un autre réseau analogue vers le haut du tarse, et se continuent dans la cuisse sous la forme d'un tronc satellite de la veine cru- rale (a), qui, arrivé dans le bassin, s'anastomose avec plusieurs rameaux pelviens, puis se divise en deux bran- ches. Celles-ci se réunissent aux ra- meaux provenant des reins, des ovaires ou des testicules et des intestins, et con- courent ainsi à former autour de l'aorte et de l'origine de l'artère cœliaque un plexus où viennent aboutir aussi les lymphatiques du l'oie, du gésier et de la rate (6). Les branches qui naissent de l'intestin grêle accompagnent les principales divisions de l'artère mésen- térique supérieure, et, en s'anastomo- sant entre elles, entourent ces vaisseaux d'un réseau à grandes mailles ; mais elles sont toutes très grêles et peu nombreuses fc). Celles des reins, du rectum et des parties voisines accompa- gnent l'artère mésentérique inférieure, et forment un plexus considérable. Enfin, les deux canaux thoraciques naissent, comme je l'ai déjà dit, du plexus aorlique, qui représente la ci- terne mésentérique des Heptiles ; ils reçoivent quelques rameaux des pou- mons et de l'œsophage, puis se réunis- sent aux lymphatiques des ailes, et se terminent chacun dans la veine jugu- laire de leur côté (d). Le canal Ihora- cique gauche reçoit aussi près de son embouchure le tronccommun des lym- phatiques du cou de ce côté ; mais un rameau seulement de celle portion du système lymphatique se déverse dans le canal thoracique droit, et le tronc cervical principal de ce dernier côté s'ouvre directement dans la veine ju- gulaire un peu plus haut. Les lympha- tiques des ailes suivent la marche de l'artère brachiale, et forment un plexus (a) Laulh, Op. cil. {Ann. des sciences nal., 1 " série, 1. 111, |il. 22 cl 2;i). \l)) lilcm, ibid., pi 21. (c) i(]<;iii, ihid., pi. 24. • - ['aiih7.a, Osserv. atUropu-zooluinicu-llsiuluiiickc, |il. 'J, lij,'. 1. ((/) L.mlli, loc. cit.. pi. 22 (H 25 IV, 32 tlSS SYSTEME LYMPHATIQUE quelques gros troncs , mais principalement au cou, des glandes vasculaires qui dépendent de ces vaisseaux et qui sont connues sous le nom de ganglions lymphatiques; du reste, ces corps sont toujours en très petit nombre et peu développés (1). Il est aussi à noter que chez les Oiseaux , de même que chez les Reptiles, il existe dans la région pelvienne une paire de poches lym- phatiques contractiles ; mais ces réservoirs ne paraissent pas être le siège de battements rhylhmiques (2). Enfin, les commu- autour de ce vaisseau, surtout vers l'articulation huméro-cubitale. Enfin, les lymphatiques de la tète accompa- gnent les divisionsde la veine jugulaire, et se réunissent à ceux du cou pour former à droite elà gauche deux troncs satellites de la veine jugulaire {a). Chez le Cygne , les lymphatiques sont à peu près de même cahbre que chez roie ; mais, chez le Dindon, la l'oule et le Canard, ils sont plus grêles et plus difficiles à injecter (6). Ma- gendie a cherché en vain ces vaisseaux chez un grand nombre d'Oiseaux, et il était persuadé que chez tous ces Animaux ils manquaient complète- ment ilans toute îa région viscérale, et n'existaient au cou que chez l'Oie et le Cygne (c) ; mais ce résuiîal négatif provenait .seulement du peu d'habileté de ce physiologiste dans l'art des injections. (1) Les ganglions lymphatiques du cou n'avaient échappé à l'attention, ni de Monro, ni de Hewson (ci), et de- puis la fiii du siècle dernier on voyait dans le musée Huntérien des prépa- rations qui montraient ces organes chez la Poule et la Cigogne, et qui avaient été faites par J. Hunter (e). Il est donc étonnant que Magendie s'en soit d'a- bord attribué la découverte (/). Ils ont été observés aussi par Laulh {g). On en trouve chez l'Oie une paire à la partie inférieure du cou, et sou- vent, vers le haut du thorax, une autre paire dépendant des lympha- tiques des ailes ; mais leur disposition est très variable. Chez le Pingouin, il existe aussi des ganglions lympha- tiques à la cuisse, et ceux de la partie supérieure du thorax sont plus nom- breux (Ji). (2) Ces sinus lymphatiques, dont (a) Laiith, Op. cit. (Ann. des sciences nat., i" série, t. III, pi. 25, fig. 2)._ (6) Idem, ibid., p. 392. (c) Magendie, Mém. sur les vaisseaux lymphatiques des Oiseaux {Journal dephysioL, 1821, t. I, p. 50). {dj Monro, The Structure and Physiology ofFishes, p. 39. — Hewson, Lymphatic System in Birds (Philos. Trans., t. LVIII, p. 176, et Works, p. 145). (e) Voyez Descriptive and Illustrated Catalogïceof the Physiol. Séries of Comp. Anat. contained in the Muséum of the Collège of Surgeons in London, t. II, p. 21. (/■) Magendie, Mémoire sur phisieurs organes nouveaux propres aux Oiseaux et aux Reptiles. In-4, 1819, avec pi. (g) Lautli, loc. cit., p. 387. (h) Reid, Anat. Descript. ofthe Aptenodytes patachonica {Proceed. ofthe Zool. Soc, 1835, t. III, p. 147). DES OISEAUX. /i89 nications entre ce système vnsciilaire et l'appareil circulatoire ne s'établissent pas seulement dans le voisinage immédiat du cœur, et il existe plusieurs anastomoses entre les branches des plexus aortiques et les branches de la veine porte , ainsi qu'entre les lymphatiques du bassin et les veines de la région caudale (1). § 9. — Dans la Classe des Mammifères, l'appareil lympha- tique se perfectionne davantage, à certains égards ; mais, sous d'autres rapports, il se simplifie. En effet, on n'y trouve plus, comme chez un grand nombre de Vertébrés ovipares, des réser- voirs contractiles faisant fonction de cœurs lymphatiques, tandis que, d'autre part, la portion vasculaire de ce système se régu- larise davantage, les valvules s'y multiplient beaucoup, et ren- dent invariable la direction du courant dans toutes ses princi- pales divisions; il s'enrichit d'un grand nombre de ganghons; Système lymphatique des Mammifères. l'existence a été d'abord signalée par M. Panizza (a) , mais dont la nature n'a été bien constatée que par les re- cherches plus récentes de M. Stan- nius (6), se trouvent sur la limite du bassin et des vertèbres caudales, à côté ou au-dessous des muscles releveurs de la queue. Ils reçoivent un ou plu- sieurs troncs formés par la réunion de diverses branches lymphatiques de la région caudale, et ils débouchent dans les veines caudales latérales par un tronc anastomolique assez grêle. Chez l'Autruche et le Gasoar, ainsi que chez les Cigognes et les Mouettes, ils ont des parois musculaires, et peuvent être considérés comme des cœurs lymphatiques, car ils sont munis de valvules à leurs orifices all'érents aussi bien qu'à leur embouchure dans les veines ; mais chez le Cygne et l'Oie ils deviennent rudimentaires, et chez les Rapaces, les Corbeaux, etc., ils ont des parois membraneuses. Des petits tendons traversent leur cavité, et chez l'Autruche ils sont attachés aux os voi- sins par des filaments aponévrotiques. M. Stannius a remarqué aussi que les fibres musculaires de ces organes sont moins développées chez les adultes que chez les jeunes individus. (1) Lauth a vu des anastomoses nombreuses entre les branches du plexus lymphatique rénal et les veines rénales et sacrées. Il a constaté aussi des communications analogues entre le plexus aortique ou mésentériquc et les branches veineuses voisines (c). la) I':iniz/,;i, Onnei'vazioni anlr(ypo-xootomico-llsiologwhe, 1830, p. 65, pi. 9, lig-, ". (b) Sliiriiiiiis, Ueber Lymphliersen der VOgel (Miiller's Arcliiv fur Analomie und l'Iiiisiuluiue i8i:i, p. U'j). (t) Lauth, loc. cil., p. a'j;{. 490 SYSTÈME LYftlPHATIQUE enfin, ses anastomoses avec le système veineux se localisent davantage. Canal Ainsl , chcz l'Homme, les lymphatiques des membres inle- Ihoracique. . ,., ii- iii • i i_ rieurs, des viscères abdominaux et thoraciques , du membre supérieur gauche et du côté correspondant de la tête , se réunissent en un tronc impair nommé canal thoracique , qui remonte de l'abdomen jusque vers la base du cou , et qui débouche dans la veine sous-clavière gauche par un ou plusieurs orifices très rapprochés. Les parties du même système qui appartiennent au côté droit de la tête et du cou, au membre thoracique du même côté et aux parties voisines de la poitrine, se terminent dans un petit tronc qui correspond à la portion supérieure du canal thoracique droitdes Vertébrés ovipares, et qui s'ouvre dans la veine jugulaire droite, à son confinent avec la sous-clavière correspondante. Le tronc terminal principal , ou canal thoracique proprement dit , est un tube irrégulier et souvent en partie plexiforme. Il offre quelquefois un petit l'cn- flement en manière d'ampoule à son extrémité supérieure, et il se place au-devant de la colonne vertébrale, à gauche de l'artère aorte et derrière l'œsophage. Inférieurement, il franchit, de concert avec ce vaisseau , l'orifice compris entre les piliers du diaphragme, et, au-dessous de ce muscle, il présente un ren- flement assez marqué qui est le confluent des cinq troncs secondaires, et qui constitue le sinus mésentérique ou réservoir du chyle, appelé aussi la citerne de Pecquet (1). (1) Le réservoir de Pecquet n'est inférieure de ce conduit est peu di- bien caractérisé chez l'Homme que latée. Quoi qu'il en soit à cet égard, ce lorsque les troncs lymphatiques ve- canal commence en général au niveau nant des membres inférieurs, des vis- de la deuxième vertèbre lombaire, et cères et des parties voisines des parois se trouve d'abord sur la ligne médiane, thoraciques , confluent tous sur un derrière la racine de l'artère rénale seul point ; car lorsqu'ils déboucheut droite, entre l'aorte et le pilier du dans le canal thoracique, à quelque diaphragme du côté droit. Il pénètre distance les uns des autres, la portion dans le thorax , entre l'aorte et la DE l'homme et des AUTRES MAMMIFÈRES. Û91 Mais cette disposition n'est pas constante parmi les Mammi- fères, et il est des espèces qui, sous ce rapport, se rapprochent davantage des Oiseaux. Ainsi, chez le Kanguroo, le canal thora- cique est double et plexiforme dans presque toute son étendue, mais il se termine , comme d'ordinaire , dans la veine sous- clavière gauche, par un tronc unique (1). Un mode d'organi- sation analogue se voit souvent chez le Bœuf, ainsi que chez veine azygos , et y remonte derrière l'œsophage; vers le niveau de la troi- sième ou quatrième vertèbre dorsale, il se porte un peu à gauche, passe derrière la portion descendante de la crosse aortique et gagne la partie infé- rieure du cou ; là il se recourbe en dehors derrière la carotide, et redes- cend ensuite au-devant de l'artère sous-clavière avec la jugulaire in- terne {a]. Son cours est souvent un peu tortueux, et il n'est pas rare de le voir se diviser une ou même plu- sieurs fois en deux ou trois branches qui se réunissent bientôt entre elles ; quelquefois aussi il se termine dans la veine sous-clavière par deux ou trois branches. Enfin, on connaît aussi beau- coup d'exemples d'anomalies assez grandes dans son mode de constitu- tion : ainsi , dan^ quelques cas très rares, on a trouvé deux troncs ihora- ciques entièrement distincts qui s'ou- vraient, l'un à gauche et l'autre à droite, dans les deux veines sous- clavières (6). D'autres fois ce canal, simple inférieurement, se bifurquait vers le haut pour aller déboucher de la même manière des deux côtés de la base du cou. Très souvent il affecte une disposition plexiforme dans sa portion moyenne, et Haller a désigné sous le nom (Viles les espaces circon- scrits ainsi par ses différents bras (c). Pour plus de détails sur les anomalies de cette portion du système lympha- tique , je renverrai à l'ouvrage de Breschet (d). (1) !\!. Hodgkin a constaté que chez le Macropus Parryi, le réservoir de Pecquet, de structure plexiforme, est situé sur le pilier droit du diaphragme, s'étend jusque dans le thorax, et donne naissance à deux canaux thoraciques qui remontent sur les côtés de la co- lonne vertébrale, et se réunissent vers le milieu de la région dorsale, mais se séparent bientôt de nouveau, et forment un petit plexus avant de se terminer au confluent des veines jugulaire et sous-clavière du côté gauche (e). (a) Voyez Mascagni, Vasorum lymphalicomm corporis humani historia et iconographia, pi. tO, cl la plupart des iconographies iccenles, où les figures données par cet anatoniistc se trouvent repro- duites plus ou moins exactement, par exemple VAnatomic do Bourgery et Jacob, t. IV, pi. 90. (b) Voyez Haller, Klementa physiolofjiœ, t. VII, p. 222. — Cruikshanks, Anatomie des vaisseaux absorbants, p. 335. — Sœmmerin;,', De corporis humani fabrica, t. V, p. 450. (c) Haller, Klementa physiolofiiœ, t. VII, p, 21'.). (d) Breschet, Le système lymphati(iue considéré sous les rapports analomique, physiologique et palhologitiue , iH'.Ui, p. 2H8 et suiv. (e) Voyez Owen, art. Maiisui'Iama (Todd's Cyclop. ofAnal. and l'hysiol., t. III, p. 305). 492 SYSTÈME LYMPHATIQUE le Cheval. Quelquefois même les deux canaux thoraciques restent distincts dans toute leur longueur et débouchent isolé- ment dans la veine cave antérieure (1), (1) Chez le Cheval, le réservoir de Pecquet a la forme d'une ampoule al- longée, à structm'e caverneuse, et pa- raît être divisé intérieurement en deux parties très distinctes (a). Il se trouve au-dessus de l'aorte, au niveau du corps de la deuxième vertèbre lom- baire, entre les deux piliers du dia- phragme ; après son entrée dans la ca- vité thoracique, il se rétrécit, et donne naissance tantôt h deux canaux thora- ciques qui restent distincts dans une étendue plus ou moins considérable, mais qui se réunissent toujours avant d'arriver à la veine cave antérieure, d'autres fois à un tronc unique qui se bifurque au niveau de la base du cœur ou qui reste simple dans toute sa longueur. 11 arrive souvent aussi que l'un de ces troncs se dédouble dans une certaine étendue vers sa partie antérieure, et, d'autres fois, l'un de ces vaisseaux paraît être re- présenté par une branche rétrograde qui débouche près du diaphragme, mais ne s'anastomose pas avec le tronc principal en avant. M. Colin a fait une étude particulière de toutes ces variations dont la connaissance est parfois nécessaire aux physiolo- gistes dans les vivisections expéri- mentales ; il a constaté aussi que l'embouchure du canal thoracique a toujours lieu , chez cet Animal , dans la veine cave antérieure , au point de réunion des deux jugulaires (b). Chez le Bœuf, ce canal pénètre dans le thorax par une ouverture du dia- phragme qui est assez distincte de celle que traverse l'aorte. Il est rare- ment simple dans toute sa longueur, et, en général, il se bifurque vers la base du cœur ou plus en avant ; quel- quefois il forme même un plexus près de son extrémité antérieure. Enfin ses deux branches se terminent d'ordi- naire séparément dans l'angle de réunion des veines jugulaires et axil- laires, de chaque côté de l'entrée du thorax (c). Chez le Porc, le canal thoracique est en général simple dans toute sa lon- gueur ; quelquefois il s'ouvre dans la veine azygos {d). Chez le Chien, le réservoir de Pec- quet est beaucoup plus dilaté que chez la plupart des autres Mammifères, et le canal thoracique présente de grandes variations dans sa configuration [e] ; en général, cependant, il est double et se termine dans les veines sous-cla- vières ; mais ce grand développement (a) Panizza, Osservazioni antropo-zootomico-fisiologiche, p. 60. (6) Colin, Traité de physiologie comparée des Animaux domestiques, t. II, p. 74, fig. lîd, 03 et 68). — Voyez aussi Leyli, Handbuch der Anatomie der Hausthiere, p. ii8, ûg. 178. — Chauveau, Traité d' anatomie comparée des Animaux domestiques, p. 603, fitj. 04. (c) Colin, Op. cit., t. II, p. 77,fig. 64 à 67 et 69. — Chauveau, Op. cit., p. 4 04, ûg. 65. (d) Panizza, Osservazioni antropo-zootomico-fisiologiche, p. 56. (e) Blasius, Anatome Animalium, p. 34 et suiv., pi. 9, fîg. dû à 18. — Colin, Op. cit., t II, p. 79. DE l'homme et des AUTRES MAMMIFÈRES. /|.9?J Les principaux affluents du réservoir de Pecquet sont deux troncs qui y arrivent des membres inférieurs, et un tronc pro- venant des intestins. Les Ivmphatiques sous-cutanés des membres abdominaux vaisseaux- i i i lymphatiques de l'Homme naissent en erand nombre des orteils et des 'lesmemims abdominaux. autres parties du pied ; ils montent vers le genou , les uns verticalement, les autres obliquement, et ils tendent à se con- centrer de plus en plus sur la face interne de la cuisse, où on les voit se rendre à un groupe de ganglions situés vers le pli de l'aine, autour de l'embouchure de la veine saphène interne dans la veine fémorale (1). Les branches lymphatiques superficielles qui viennent de la région fessière , des organes génitaux externes et de la portion inférieure des parois de l'abdomen , se rendent également dans ces ganglions ingui- naux. D'autres ganglions situés dans la même région, mais sous l'aponévrose fémorale , reçoivent les lymphatiques pro- fonds des membres inférieurs. Ces derniers vaisseaux accom- pagnent, pour la plupart, l'artère crurale et ses principales du réservoir n'est pas constant chez (1) Le nombre de ces ganglions est les Carnassiers et ne s'observe pas très variable : en général , on en chez la Loutre, par exemple (a). compte de 7 à 13, et leur volume est Chez le Dauphin, la partie posté- toujours en raison inverse de leur rieure du canal ihoracique ne se renfle nombre; ils sont d'un brun rouge, pas en forme de réservoir, et anté- et il n'est pas rare de les voir se con- rieurement ce conduit se bifurque tinuer autour de la veine saphène , pour déboucher dans la veine jugulaire presque vers le milieu de la cuisse, gauche par deux orifices distincts (6). Les vaisseaux qui s'y rendent mar- chez le Lapin, lecanal ihoracique est client presque parallèienienl entre assez gros et reste simple dans la plus eux , mais s'anastomosent de dis- grande partie de sa longueur, mais se lance en distance, de façon à c.on- divise d'espace en espace; il se termine slituer un réseau à mailles très allon- dans la veine sous-clavière gauche (c). gées (d). (ajPanizza, O»serva%ioni antropo-%notomico-fisiolo(iiche, p. Ti/k (b) Ciivier, Leçons d'anatomie comparée, I. VI, p. 0(1. (r.) Panizza, Op. cit., p. 03. ((/) Voyez Ma.scajf ni, Op. cit., pi. 4. du bassin , etc. /i.9/l. SYSTÈME LYMPHATIQUE branches ; chemin faisant, ils communiquent avec les lympha- tiques superficiels par diverses branches anastomotiques, et ils traversent plusieurs ganglions dont un est situé au-devant du ligament interosseux de la jambe et les autres sont logés der- rière le genou (1). Vaisseaux ^cs faisccaux dc petits troncs lymphatiques qui sortent des iyraph"?iques ganglious inguinaux pénètrent tout de suite dans le bassin et y rencontrent plusieurs ganglions analogues, dont les uns sont accolés à l'artère iliaque externe, et les autres occupent l'espace compris entre ce vaisseau et l'artère hypogastrique. Ces gan- glions émettent à leur tour d'autres faisceaux lymphatiques qui rencontrent sur leur route de nouveaux ganglions auxquels viennent se rendre aussi les branches lymphatiques des viscères pelviens, des reins et de la région lombaire. Leur disposition est trop complexe pour que je puisse en donner ici la des- cription, et je me bornerai à ajouter que les ganglions qui sont situés au-devant de l'aorte abdominale, et qui font suite à ce système plexiforme, fournissent enlin deux troncs ascendants principaux situés, l'un à droite, l'autre à gauche, mais destinés à se réunir bientôt pour concourir à la formation du réservoir de Pecquet (2). (1) Le ganglion tlbial antérieur est les gros intestins, etc.; d'autres appar- petit et situé en général vers le tiers tiennent au contraire à tout cet assem- supérieur delà jambe (a). Les gan- blage de vaisseaux, et il esta noter que glions poplités sont au nombre de chacun de ces conduits traverse plu- qualre; un se trouve immédiatement sieurs ganglions avant d'arriver au ré- sous l'aponévrose, les autres sont logés servoirde Pecquet. Pour plus de détails plus profondément (ô). sur la disposition très compliquée de (2) Plusieurs de ces ganglions ap- cette partie du système lymphatique, partiennent en propre aux faisceaux je renverrai aux belles planches que de lymphatiques provenant des divers l'on doit à Mascagni (c) , ou à celles, organes adjacents, tels que la vessie, également remarquables, publiées ré- les cordons spermaliques, les reins, cemmenl par Bourgery et Jacob (d). (a) Voyez Mascagni, Vasorum lymphaticomm hist. et iconogr., pi. (j, Rg. 2, n- 25. (6) Idem, ibid., pi. 9, fig. ] et 3. (c) Idem, ibid., p). ii. (d) Bonrgery ot .Jacob, Op. cit., t. IV, pi. 89 ; t. V, pi. 32. _ DE L HOMME ET DES AUTRES MAMMIFERES. /l95 Le troisième tronc qui débouche dans ce réceptacle a pour Lymphaiiquos ^ ' des viscères affluents les vaisseaux lymphatiques de l'intestin grêle , de l'es- abdominnux. tomac, du foie et de la rate. Ainsi que je l'ai déjà dit, on désigne souvent sous le nom de vaisseaux lactés ou de chylifères, les lymphatiques de l'intestin grêle ; mais ceux-ci ne présentent rien de particulier dans leur structure, et font partie d'un vaste système qui appartient à toute la portion abdominale de l'appareil digestif. Il est seule- ment à noter qu'ils marchent entre les deux laines du mésen- tère et y traversent un grand nombre de ganglions dont la disposition est loin d'être constante, mais est toujours très com- plexe (1). Quelques anatomistes réservent le noni de chylifères (1) Les vaisseaux lymphatiques du rectum et du côlon descendant, après avoir traversé des ganglions qni leur sont propres, vont pénétrer dans les ganglions lombaires, où ils se mêlent aux lymphatiques des organes géni- taux et des membres inférieurs. Ceux du côlon transverse, du côlon ascen- dant et du cœcum traversent des gan- glions dits mésocoliques, parce qu'ils sont logés dans le mésocôlon, c'est-à- dire le repli péritonéal dans lequel le côlon transverse est suspendu (a) ; puis ces vaisseaux se rendent dans les ganglions mésentériques , où aboutis- sent aussi les lymphatiques de l'intes- tin grêle. Ces derniers ganglions sont beaucoup plus nombreux que les pré- cédenls, et sont disséminés dans pres- que toute l'étendue du mésentère , mais sont plus gros et plus rappro- chés vers le point d'attache de ce grand repli membraneux à la paroi postérieure de l'abdomen; l'un d'eux est en général plus volumineux que les autres, et l'on y applique quelque- fois le nom de pancréas d'Aselli. 11 est aussi à noter que ces organes sont situés dans les arcades que les artères et les veines mésentériques laissent entre elles (6). Les lymphatiques de l'estomac for- ment à la surface de cet organe un ré- seau variqueux» et ils traversent une série de petits ganglions situés près de son bord : puis ils se réunissent en trois faisceaux qui suivent les artères coro- naire stomachique, gastro épiploïque droite et gastro-épiploïque gauche , pourallerrejoindre Icsganglions hépa- tiques, spléniques et sus-pancréatiques. Les lymphatiques de la raie suivent le trajet des vaisseaux sanguins de ce viscère, et convergent vers le sillon de sa face interne, où ils rencontrent plusieurs ganglions qui reçoivent aussi les lymphatiques du grand cul-de-sac de l'estomac et ceux qui suivent l'ar- (a) Voyez Mascagni, Vasorum lymphaticoi'um liisl. et iconoar., [il. iC>. {b) Idem, ibid., pi. 1 &. 496 SYSTÈME LYMPHATIQUE aux lymphatiques qui proviennent de la tunique interne de l'intestin grêle, et distinguent de ceux-ci les branches qui naissent près de la surface externe de cette portion du tube digestif ; mais tous ces vaisseaux ne tardent pas à se confondre dans les ganghons mésentériques adjacents. La disposition de cette portion du système lymphatique pré- sente chez les divers Mammifères de nombreuses variétés qui dépendent principalement, soit du développement plus ou moins considérable des ganglions , qui y appartiennent , soit de la dispersion ou de l'agglomération de ces organes, ou même de leur fusion en une seule masse. Le ganglion mésentérique unique ou principal, que j'appellerai le ganglion d'Aselli^ plutôt que le pancréas d'Aselli, ainsi que le nomment la plupart des anatomistes, car ce dernier mode de désignation peut faire naître des idées fausses (1), est surtout développé chez les tère gastro-épiploïqiie gauche. Ce sys- tème de branches longe ensuite le bord supérieur du pancréas, traverse d'autres ganglions situés sur le tra- jet de l'artère splénique, et va se con- fondre avec les lymphatiques du foie, près de leur terminaison dans le canal thoracique. Les lymphatiques du pancréas se rémiissent aux précédents, non loin du bord supérieur de cette glande. Les lymphatiques du foie sont très nombreux : les uns, situés profondé- ment, sont satellites de la veine porte, d'une part, et de la veine hépatique , d'autre part ; les superficiels se ren- dent en partie dans le thorax en tra- versant le diaphragme, mais le plus grand nombre gagnent des ganglions qui se trouvent dans le voisinage du cardia ou des ganglions qui sont situés entre la vésicule du fiel , la petite courbure de l'estomac et les piliers du diaphragme, et qui reçoivent éga- lement une portion des lymphatiques de l'estomac ; il en est aussi quel- ques-uns qui se rendent aux gan- glions lombaires. Enfin, les canaux efi'érents de ces ganglions gastro- hépatiques se confondent avec ceux des ganglions mésentériques, et vont plus ou moins indirectement con- courir à la fonnation du réservoir de Pecquet (a). (1) Les anatomistes donnent sou- vent à ce ganglion le nom de pancréas d'Àselli, parce qu'Aselli , en le décri- vant pour la première fois, le consi- dérait comme étant le pancréas ; mais ce serait consacrer une erreur que {a) Voyez Mascagni, Op. cit. , pi. 4 8. — Boure:cry et Jacob, Op. cit., 1. V, pi. 40. DE l'homme et des AUTRES MAMMIFÈRES. 497 Mammifères à régime carnassier, non-seulement chez ceux de i'ordre des Carnivores, mais aussi chez les Cétacés qui se nourrissent de la même manière (1). Chez les Rongeurs, les ganglions mésentériques sont peu développés, tandis que chez les herbivores , les frugivores et les omnivores , ils sont en général très nombreux et se trouvent souvent plusieurs fois sur le trajet du même vaisseau (2) ; mais on ne peut saisir d'adopter ce mode de désignation, et je conserve le souvenir de la décou- verte du physiologiste de Gôme d'une manière plus honorable pour cet expérimentateur illustre, en donnant à cet organe le nom de ganglion d'AselU. (1) Chez le Chien (a) , l'appareil ganglionnaire des lymphatiques intes- tinaux ne se compose guère que d'une masse ovalaire située à la l'acine du mésentère (le ganglion d'Aselli), et de deux petits ganglions situés vers la fin du gros intestin (b). Tl en est à peu près de même chez les Martres. Chez les Chats, il y a aussi dans le mésentère un ganglion d'Aselli isolé, mais on voit sur le parcours des lym- phatiques du gros intestin cinq ou six ganglions épars (c). Chez l'Ours, le ganglion d'Aselli est très volumineux, et se prolonge vers l'intestin, en forme de rayons, entre les vaisseaux du mésentère ; vers l'ex- trémité postérieure du côlon on trouve une autre masse ganglionnaire al- longée. Chez le Raton, le ganglion d'Aselli est accompagné de trois autres gan- glions dont le dernier est situé vers la fin du gros intestin. Mais cette concentration des gan- glions mésentériques n'est pas con- stante dans l'ordre des Carnivores. Ainsi, chez la Mangouste à front blanc, ce corps est remplacé par un groupe d'environ quinze ganglions arrondis et assez gros. Chez la Loutre, la masse ganglion- naire principale est quatre fois plus considérable que tout le reste de ce système mésentérique, mais se compose de huit ganglions bien distincts {d), ou même d'un plus grand nombre (e). Chez le Marsouin, le mésentère est occupé, dans toute l'étendue de ses attaches, par une masse ganglionnaire lymphatique qui, dans sa plus grande partie, est épaisse et compacte, mais qui, tout à fait postérieurement, se résout en petits ganglions arrondis {f). Il y a aussi un ganglion d'Aselli chez le Narval (g). (2) Chez le Cheval, les ganglions du système lymphatique des intestins sont très nombreux. Ainsi, dans la (a) Voy:/. Aselli, Dissert, de laclih^is, , sive Lacteis venis, pi. 1. (b) Panizza, Op. cil., p. 49. (c) Mcokcl, Traité d'nnatomie comparée, t. IX, p. 460. {di Mem, ibid., p. 459. (c) D'après l'anizza, douze ou quatorze {Op. cit., p. 52). (f) Meckel, Op. cit., \>. 455. (fl) Slannins, Nouveau Manuel d'analnmie comparée, I. 11, p. 48T. 498 SYSTÈME LYMPHATIQUE aucun rapport constant entre leurs caractères anatomiques et le régime de l'Animal , et l'on rencontre à cet égard des variations très grandes chez des espèces dont l'organisation et les mœurs ne diffèrent que fort peu : aussi le physiologiste ne doit-il attacher aucune importance à ces particularités de structure (1). grande anse formée par le côlon replié, ils sont disposés en une longue chaîne qui côtoie les Ironcs sanguins de cette partie ; et les vaisseaux efférents de cet assemblage de ganglions, après avoir traversé d'autres corps analogues situés près de l'aorle, constituent deux grosses branches qui se rendent au ré- servoir de Pecquet, et, chemin faisant, s'unissent aux troncs lymphatiques provenantde l'intestin grêle. Les lym- phatiques de cette dernière portion du tube digestif se réunissent assez promptement en plus de quatre cents canaux qui marchent presque parallè- lement vers le dos, et traversent vingt- cinq ou trente ganglions placés près de la naissance de l'artère mésentérique supérieure, et quinze à vingt ganglions iliaques; puis ils concourent à former les racines du réservoir de Pecquet, comme je l'ai déjà dit (a). Chez le Bœuf, la disposition des lymphatiques de l'intestin est un peu différente. Ceux du gros intestin, dès qu'ils arrivent au mésentère, traver- sent des ganglions assez gros, et se réunissent ensuite en un tronc volu- mineux qui s'accole aux vaisseaux sanguins correspondants, et remonte vers le foie, où il reçoit une branche considérable provenant de ce viscère, de la rate et de l'estomac; enfin, parvenu près de l'aorte, il se divise en deux branches qui embrassent ce vaisseau et donnent naissance supé- rieurement au canal thoracique [b]. Il en est à peu près de même chez les autres lîuminants. Chez les Singes, de même que chez l'Homme, les ganglions lymphatiques de l'intestin sont nombreux et très disséminés. Chez le Sajou, Meckel a compté dans le mésentère environ quinze de ces corps disposés sur un seul rang, et il a trouvé un grand ganglion conique sur le trajet des vaisseaux du gros intestin. Chez le l'apion, douze à quinze gan- glions ovalairessont disposés en cercle près de la racine du mésentère, et d'autres ganglions aussi nombreux, mais plus petits, sont épars entre les lames du mésocôlon. Chez l'Ouistiti , il existe dans le mésentère un ganglion très allongé qui est flanqué de quelques autres plus petits, et l'on ne rencontre dans le mésocôlon que trois petits ganglions arrondis (c). (1 ) On trouve chez les Mammifères tous les degrés intermédiaires entre la dispersion complète des ganglions (c) Colin, Ph7jsiologie comparée des Animaux domestiques, I. 11, p. 69, fig'. 08. (6) Idem, ibid., p. 72, fig. 69. (c) Meckel, Traité d'anatomie comparée, t. IX, p. 461. DE l'homme et des AUTRES .MAMMIFÈRES. Il99 Je signalerai cependant un fait anatomique qui me paraît remarquable. En général, les vaisseaux efférents des ganglions mésentériques, qui concourent à former le canal thoracique, sont nombreux, lors même que ces ganglions sont représentés par une masse unique ; mais cbez quelques Mammifères, les Phoques, par exemple, il en est autrement, et ce canal naît presque directement du ganglion d'Aselli, sous la forme d'un gros tube membraneux (1). mésentériques nombreux qui se remar- que chez l'Homme et chez les herbi- vores, tels que le Cheval ou le Bœuf, et la concentration complète de ces corps en une masse unique. Comme exemple de ces passages, je citerai d'abord certains Rongeurs. Chez le Lièvre, on ne voit de ces ganglions intestinaux qu'à la racine du mésentère, et Meckel en a compté cinq ou six seulement, dont trois ou quatre sont très rapprochés entre eux sans être confondus, et dont un autre, presque aussi grand que tout le groupe précédent, n'est que peu éloigné de celui-ci (a). M. Panizza en décrit huit ou dix chez le Lapin et deux ou trois de plus chez la Marmotte 7;). Chez le Castor, le ganglion d'Aselli est représenté par huit petits lobes allongés qui sont disposés en demi- cercle près de la racine du mésentère, et qui ne sont qu'incomplètement sé- parés entre eux. On trouve aussi dans le mésentère, près de l'intestin, un ou deux pclils ganglions isolés, et les lymphatiques du gros intestin ne pré- sentent sur leur trajet qu'un seul petit groupe composé de deux ou trois gan- glions (c). Chez le Cochon, de même que chez les autres Pachydermes, les ganglions mésentériques sont très nombreux et réunis en deux groupes principaux ; mais chez le Pécari, qui appartient à la même famille, ces ganglions se rapprochent au point de se confondre en une seule masse , surtout chez l'adulte (d). Chez le Fourmilier tridactyle, on trouve dans le mésentère une ving- taine de petits ganglions isolés, et un ganglion d'Aselli long et étroit, qui s'étale antérieurement , comme s'il tendait à se résoudre en peUls gan- glions isolés. Chez le Fourmilier di- dactyle , cette masse est représentée par plusieurs ganglions isolés (e). Chez le Pangolin à courte queue, on trouve environ quinze petits ganglions mésentériques isolés. Chez les Tatous, au contraire, ils sont réiuiis en une masse unique et allongée (/). (1) Chez les Phoques, le passage (a)Meokel, TraUé d'nnalomie comparée, t. IX, p. 458. (b) Panizzd, Osservazioni anlroijo-zoolomico-lisioloyichc, p. 01 cl 02. fc) Mcckcl, Op. cit., |). iT>l. [d) l'anÎMa, Op. cil., p. 54. (c) .Mockcl, Op. cit., p. 450. If) Ifleiii, ihid., p. 4.-,-. Lymphatiques du thorax. 500 SYSTÈME LYMPHATIQUE Le canal thoracique reçoit à son extrémité intérieure deux troncs qui viennent des parois postérieures du thorax (1), et, à mesure qu'il s'avance vers la base du cou, d'autres lympha- tiques dépendants des poumons, du cœur et des parties voisines y viennent également déboucher. Ces vaisseaux traversent préalablement des ganglions qui se trouvent en nombre consi- dérable (2). des injections des vaisseaux atterents au ganglion d'Aselli, dans les lympha- tiques efférents de cet organe , est moins facile que chez beaucoup d'au- tres Mammifères, et lorsque les tissus ont été ramollis par un commence- ment de putréfaction, les liquides introduits de la sorte se répandent souvent dans les veines adjacentes. Ce sont ces circonstances qui en ont imposé à Fohmann, et qui ont fait croire pendant quelque temps que chez ces Mammifères le ganglion d'Aselli était privé de vaisseaux efférents, et déversait directement dans les veines du mésentère le chyle que les lym- phatiques afférents y apportaient (a) ; mais les recherches analomiques de Rosenthal et de M. Knox vinrent bien- tôt démontrer l'existence de lympha- tiques efférents qui , chez le Phoque comme chez tous les autres Animaux de la même classe , se rendent de cet organe au canal thoracique (6j. Il paraît, du reste , y avoir quelques variations dans la disposition de ces vaisseaux , et Rosenthal les a vus se réunir très promptement pour consti- tuer, dans le sillon en forme de hile situé sur la face dorsale du ganglion, un conduit unique qui est désigné par quelques anatomistes sous le nom de canal de Rosenthal (c), et qui , après s'être joint à des lympha- tiques de l'abdomen pour constituer le canal thoracique, se divise en deux branches ascendantes , lesquelles se réunissent de nouveau avant d'arriver à la veine sous-clavière gauche, il est aussi à noter qu'il, existe chez les Phoques un petit nombre d'autres ganglions lymphatiques abdominaux qui dépendent du gros intestin, du foie , etc. (d) . (1) Deux troncs lymphatiques, dont les affluents arrivent des huit derniers espaces intercostaux et de la partie postérieure du diaphragme, descen- dent vers le réservoir de Pecquet, et rappellent, par leur disposition, fes veines azygos. (2) D'après leurs rapports anato- (a) 1^'ohmann, Anatomische Untersuehungen ûber die Verbindung der Saugadern mit den Veneii, 1821, p. 45. (b) Rosenthal, Brie/' (Froriep's Notizen , 1822, t. II, p. 5). — Z«f Anatomie der Seehunde (Nova Acta Acad. Nat. curios., 1831 , t. XV, 2» partie, p. 335, pi. 26, fig. 3 et 27, fig. 4 (figures repro- duites par Carus et Otto, Tab. anat. coinpar. illuslr., pars vi, pi. 7, fig. 6 et 7). — Knox, Observations on the Aiiatomy ofthe Lacteal System in the Seal and Cetaeea (Edin- burgh Médical and Sur gical Journal, 1824, t. XXII, p. 23). (c) Stannius etSiebold, Nouveau Manuel d'anatomie comparée, t. II, p. 487. (d) Rosenthal, Op. cit. {Actes de l'Acad. des curieux de la Nature, t. XV, "l" partie, pi. 27 fig. 4). DE l'homme et des AUTRES MAMMIFÈRES. 50 1 Les lymphatiques des membres thor^iciques sont disposés à peu près de la même manière que ceux des membres abdomi- naux, et arrivent à un grand nombre de gros ganglions qui sont logés profondément dans le creux de l'aisselle, et qui reçoivent aussi les branches venant des mamelles et des parties latérales et superficielles du thorax (1). Les vaisseaux efférents de ces Ljuipliatiqiics des membres thoraciques. miques, on divise les ganglions viscé- raux du thorax de l'Homme en quatre groupes : les médiastinaux anté- rieurs, les médiastinaux postérieurs, les cardiaques et les bronchiques. Les ganglions médiastinaux posté- rieurs sont répandus autour de l'œso- phage, dont ils reçoivent les branches lymphatiques ; une partie de celles du diaphragme y pénètrent aussi , et leurs vaisseaux efférents se rendent au canal thoracique (a). Les ganglions logés dans le mé- diastin antérieur, au-devant du péri- carde , ne sont qu'en petit nombre , et viennent des lymphatiques qui ac- compagnent l'artère mammaire in- terne et qui viennent en partie du diaphragme. Supérieurement , cette portion du système thoracique se con- fond avec les ganglions cardiaques et leurs branches plexiformes (b). Les ganglions bronchiques sont très nombreux et d'un volume considé- rable ; ils se font remarquer aussi par leur couleur noire, et s'étendent de l'angle de bifurcation de la trachée aux premières divisions des bronches, de façon à se loger jusque dans la substance de la racine des pou- mons (c). Les vaisseaux qui s'y rendent for- ment , les uns un lacis serré et vari- queux à la surface des poumons, les autres des réseaux anastomotiques profonds qui se lient aux premiers et entourent chaque lobule, puis four- nissent des branches qui suivent en sens inverse le trajet des canaux bron- chiques. Les canaux efférents des ganglions bronchiques vont déboucher dans la portion voisine du canal thoracique. La disposition de la portion pulmo- naire du système lymphatique a été récemment l'objet de recherches très approfondies, dues à M. Jarjavay {d). Les vaisseaux lymphatiques du cœur sont très nombreux et accompagnent les vaisseaux coronaires : les uns vont se joindre aux ganglions bronchiques; les autres pénètrent dans les ganglions cardiaques situés au-devant de la crosse de l'aorte , puis débouchent par un tronc commun dans le canal thoracique, près de l'extrémité supé- rieure de celui-ci. (1) Ce système de ganglions axil- laires se prolonge plus ou moins loin vers la glande mammaire , mais se trouve en majeure partie groupé au- tour de l'artère et de la veine axil- 21. («) Voyez Ma.scagni, Vasorum lymphaticorum hist. el iconoiji'., pi {b) Idem, ibid., pi. 20, fiu. i et 2. (cj Mciii, ibid., pi. 21. — iJourgery el Jacob, l. IV, pi. 01. [di .Jarjavay, Mémoire sur les vaisseaux lumpkaliques du poumon {Arck. {jcn. de mcd., i' scric, t .Mil, p. 70 et 220). de la lêle et du cou. 502 SYSTÈME LYMPHATIQUE ganglions forment un plexus entrecoupé d'autres ganglions, qui accompagne la veine sous-clavière et qui se termine par un ou deux troncs. Du côté gauche, ces derniers vaisseaux s'ana- stomosent avec la portion terminale du canal thoracique, ou débouchent séparément dans la veine sous-clavière, près de l'orifice de ce conduit; du côté droit, ils y pénètrent isolé- ment ou se réunissent au tronc cervical correspondant pour constituer le vaisseau terminal que les anatomistes désignent d'ordinaire sous les noms de grande veine lymphatique ou de canal thoracique droit (1). Lymphatiques Lcs lymphatlques de la tête et du cou présentent aussi sur leur trajet de nombreux ganglions. On trouve déjà quelques- uns de ces organes dans le voisinage de l'oreille et sous la partie postérieure du cuir chevelu ; d'autres se voient près du bord de la mâchoire inférieure, au-devant du muscle masséter, ou der- rière l'os maxillaire inférieur (2) ; mais la plupart sont logés dans le cou, près des veines jugulaires, et dans les portions de cette région qui avoisinent les clavicules, où ils constituent avec leurs branches anastomotiques un plexus très com- laires. Il se relie aussi aux ganglions Les ganglions parotidiens sont lo- cervicaux par de nombreuses bran- gés, soit sous la peau, soit dans l'é- ches anastomotiques (a). paisseur de la glande parotide, entre (1) Dans la prochaine Leçon, nous l'oreille et la branche montante de la reviendrons sur le mode de terminai- mâchoire mférieure (c). son des lymphatiques dans les veines. D'autres ganglions , dits zygoma- (2) On désigne ces ganglions lym- tiques , sont situés sous l'arcade du phatiques d'après leur position, même nom. Les ganglions crâniens occaçent, Il existe aussi des ganglions hue- comme je l'ai déjà dit, la région pos- cinateurs , qui se trouvent près des térieure du crâne au-dessus de la lèvres. nuque ; dans l'état normal , ils sont Enfin , les ganglions sous-maxil- fort petits, mais souvent ils deviennent laires sont placés dans le voisinage très apparents dans les cas de maladie de l'artère faciale et se prolongent au- du cuir chevelu (6). devant du muscle masséter. (a) Voyez Mascagni, Vasorum lymphaticorum hist. et icoiiogr., pi. 25, lîg, 3, et 26, fig. 1. (b) Idem, ibid., pi. 24. {c)Uem,ibid., pi. 27, fig. 4. UE l'homme et des autres mammifères. 503 pliqué, dont la portion inférieure se confond avec le plexus axillaire (1). Les troncs efférents de ce système s'unissent au canal thoracique du côté gauche, mais du côté droit ils débouchent directement dans la partie inférieure de la veine jugulaire (2). Il est important de noter aussi que chez quelques Mammi- fères, le Cheval, par exemple, la grande veine lymphatique communique hbrement avec le canal thoracique par plusieurs grosses branches anastomotiques, de façon que, lorsque ce dernier vaisseau se trouve obstrué, le passage du hquide des Troncs terminaux du système lymphatique. (1) Quelques-iiiis de ces ganglions cervicaux sont snperliciels et se trou- vent dans le voisinage des veines jugu- laires externes [a); mais la plupart sont logés plus profondément sur les côtés du cou, sous le muscle stemo- masloïdien ou derrière sa portion inférieure. Leurs troncs terminaux débouchent directement dans le canal thoracique ou se réunisse'nt à des branches axillaires ou cardiaques. (2) 11 existe souvent quelques va- riations dans le mode de jonction de ces deux portions du système lympha- tique avec les veines centrales. Ainsi, quand le plexus axillaire gauche se termine par un seul tronc, on voit en général celui-ci s'ouvrir dans la veine sous-clavière avant d'avoir at- teint le canal thoracique (b) ; mais le plus souvent il donne nais.sance à deux branches dont l'une .se jelte dans ce dernier conduit, près de son extrémité , soit isolément, soit après .s'être joint à une branche cervicale, tandis que l'autre s'ouvre dans la veine sous-clavière, tout près de ce dernier. Du côté droit, il arrive souvent que le tronc commun des lymphatiques cervicaux s'ouvre isolément dans la partie inférieure de la veine jugulaire correspondante , tandis que le tronc terminal des lymphatiques du mem- bre supérieur débouche dans la veine sous-clavière, à peu de distance de la jonction de celle-ci avec la jugulaire. Souvent aussi le tronc terminal des lym- phatiques mammaires ex ternes s'ouvre isolément dans la veine sous-clavière ; d'autres fois ces vaisseaux , avant de se terminer de la sorte , sont reliés entre eux par des branches anaslo- motiques, et d'autres fois aussi ils se confondent tous en un seul tronc très court, appelé grande veine lympha- tique. Mais ces variations n'ont que peu (rimporlance , car ces embou- chures sont toujours très rapprochées entre elles (c). (a) Voyez .Masc.-igni, Op. cil., \i\. ii. (b) Idem, thid., \<\. 20, li(,'. 1, et pi. 27, fig. 5. (c) Idfm, ibid., pi. 27, fii,'. 4. — Uoui-gory et .|yt:ol), 0;<. cil., t. IV, pi. !ll. IV. 33 50 /j. SYSTÈME LYMPHATIQUE . lymphatiques abdominales vers les grosses veines situées près du cœur n'en continue pas moins d'avoir lieu ; seulement le courant ascendant, au lieu de se déverser dans la veine sous- clavière gauche, se détourne alors de sa route ordinaire pour gagner la jugulaire droite (!)• Résumé. En résumé, nous voyons donc que cliez l'Homme et les autres Mammifères, le système lymphatique arrive à un haut degré de comphcation, et que les nombreux ganglions dont il est pourvu se montrent dans toutes les parties du corps où le tissu con- jonctif est abondant. Ces ganglions, de même que les principaux vaisseaux dont ils dépendent, occupent principalement dans les membres le voisinage des articulations et y sont toujours situés du côté qui, dans les mouvements de flexion, forme un angle rentrant. Ceux qui se logent dans les grandes chambres viscé- rales se trouvent pour la plupart accolés à la paroi dorsale de ces cavités, ou groupés autour des gros vaisseaux qui partent de l'aorte ou du cœur pour se répandre dans les viscères adjacents, ïl est aussi à noter que chez l'Homme toutes les branches qui naissent des parties plus ou moins périphériques de l'organisme, et qui convergent vers le canal thoracique ou les autres troncs (1) Celte disposition anastomo tique l'Homme, je renverrai à la grande a été constatée par ]\L Colin cliez les Physiologie de Haller {h) , à l'ouvrage Solipèdes (a), mais ne paraît exister de Breschet (c), et à un article de d'ordinaire ni chez les Ruminants ni M. Todd [d). chez le Chien. Dans quelques cas pathologiques, Au sujet des anomalies qui se ren- ces vaisseaux se dilatent énormément, contrent parfois dans la disposition et forment çà et là des paquets de des vaisseaux lymphatiques chez grandes ampoules (e). [a] Colin, Physiologie comparée des Animaux domestiques, i. II, p. 110. (b) Haller, Elementa physiologiœ, t. VII, p. 222. {c) Breschet, Le système lymphatique considéré sous les rapports anatomique, physiologique et pathologique, chap.iv, p. 238 et suiv. (d) Toild, art. Lymphatic System, Abnormal Anatomy {Cyclopœdia ofAnat. and PhysioL, t. III, p. 232). — Voyez aussi Edien von Patrieban, Ueber die Einmïmdung eines Lymphaderstammes in der liscke vena anonyma (Miiller's Arch. fur Anat. und PhysioL, 1845, p. 15, pi. 4). (e) Amussat, Grimaud et Rivière, Développement extraordinaire du canal thoracique et des vaisseaux lymphatiques, etc. [Journal de physiologie de Magendie, 1830, t. X, p. 22). DE l'homme et des AUTRES MAMMIFÈRES. 505 terminaux de ce système, n'y arrivent qu'après avoir traversé au moins un de ces ganglions. Enfin, non -seulement aux membres, mais dans toutes les autres parties, les lympha- tiques constituent deux couches assez distinctes, l'une super- ficielle, l'autre profonde ; mais ces deux portions du système des vaisseaux blancs communiquent fréquemment entre elles par des anastomoses, et elles ne sont en réalité bien nettement délimitées que dans les parlies périphériques de l'organisme où les lymphatiques sous-cutanés sont séparés des branches profondes par la membrane aponévrotique dont le système musculaire est revêtu. Maintenant que nous connaissons d'une manière générale la topographie de l'appareil lymphatique, nous devons examiner de plus près la structure des différentes parties constituantes de ce système, chercher comment ces vaisseaux naissent dans la profondeur des tissus dont nous les voyons sortir, et étudier la nature du liquide qu'ils recueillent dans les divers points de l'économie pour le verser dans le torrent de la circulation. Tels sont, en effet, les points dont je me propose de traiter dans la prochaine Leçon. QUATIANTE ET UNIÈME LEÇON. Structure des vaisseaux lymphatiques ; leurs valvules. — Ganglions lymphatiques ; leur structure et leur mode de développement. — Mode d'origine des vaisseaux lymphatiques ; leurs relations avec les vaisseaux sanguins. Tuniques § 1 . — Lq disposltioii générale et la structure des vaisseaux vaisseaux lympliatlques de l'Homme et des aulres Mammifères otTrent, ympiaïqucb. ^^^^ cclles des vclnes, une analogie remarquable, et si ces deux ordres de canaux ne différaient par l'aspect des liquides renfermés dans leur intérieur, il serait souvent presque impos- sible de les distinguer. Mais les lympbatiques sont d'une texture plus délicate que les vaisseaux sanguins. Ainsi que je l'ai déjà dit , ils sont transparents , et leurs parois sont très minces. Cependant, si l'on examine un gros tronc, ou même une branche de moyen calibre, il est facile d'y distinguer, comme dans les veines, plusieurs tuniques (1). A l'intérieur, on y aperçoit une couche de cellules épithéliales adhérentes à une lame membraniforme réticulée dont les fibrilles sont dispo- (1) Les premiers anatomisles qui indiqua un moyen pour rendre facile se sont occupés de la structure des la démonslralion de ce moded'organi- lymphaliques, et même Hewson, n'a- salion : c'est de retourner une por- vaient aperçu dans les parois de ces lion du canal llioracique, en l'étendant vaisseaux qu'une couche membra- sur un cylindre de verre de façon à le neuse uniforme, c'est-à-dire dépour- dilater; car alors la tunique interne, vue de fibres (a) ; mais Nuck y con- moins élastique que les aulres, se dé- stata l'existence de deux tuniques, et cliire avant que celles-ci aient cédé, chez le Cheval il reconnut une texture et elle laisse à découvert, d'espace fibreuse dans le canal thoracique (6). en espace, la tunique moyenne (c). Sheldon confirma ces observations, et Dans la plupart des ouvrages sur (a) Hcwson, Descripiion ofthe Lymphalic System {Works, p. 124). (6) ÏSuck, Adeiiographia ciiriosa et uteri focmiiiei anatome nova, 1690, p. 43. (c) Sheldon, Tke Histonj ofthe Absorbant System, ilS'i, p. 20. STRUCTURE DES VAISSEAUX LYMPHATIQUES. 507 sées longitudinalement. Ces parties constituent ce que les ana- tomistes appellent la tunique interne de ces lymphatiques. Plus en dehors , on découvre une tunique moyenne composée de fibres musculaires lisses et de fibres élastiques très fines, dirigées les imes et les antres transversalement (1) ; enfin le tout est revêtu extérieurement par une troisième tunique qui se compose principalement de faisceaux longiludinaux de filaments de tissu conjonctif entremêlés de quelques fibres musculaires fisses dont le trajet est oblique ou longitudinal (2). Le déve- ranatomio descriptive de l'Homme, on ne fait mention que de deux tuniques {a) ; mais les observations de Sheldon et les reclierches histologi- ques de 1\LM. Henle, Valentin, Krnuse, Lane,Kôliil<.er,BowmannetTodd,etc., montrent que la structure de ces vais- seaux est plus complexe. (1) Suivant quelques analomisles, cette tunique moyenne n'existerait pas (6), ou tout au moins manquerait dans les lymphatiques du mésen- tère (c). M. Kôlliker Ta toujours ren- contrée dans ceux du plexus lombaire et des membres [cl), et ses observa- lions à ce sujet s'iiccordent avec celles de M. Henle le). (2) Les fibres musculaires lisses dont il est ici question ont été dé- crites et figurées par M. Kôlliker dans les ganglions lymphatiques du mésen- tère du I.apin {f), et dans les gan- glions lymphatiques de la Souris, par M. Heyfelder (g). Elles ne paraissent pas difTérer no- tablement de celles qui se trouvent dans la tunique moyenne des artères et des veines, et appartiennent à la variété des fibres non striées, que M. Cruveilhier et quelques autres analomistcs désignent sous le nom de tissu dartoïde {h). Ou reste, elles ne sont que très peu développées. (a) Cniveilliier, Traité d'analomie descrlplive, I. III, p. i&i. — Hoiilc, Symbolœ ad nnatomiam vlllorum imprimis eorum epilhelii et vasonim laclenrinn, 1837, cl Traité d'anatomie générale, t. II, p. 89. — Valeniin., Ueber das Gewehe der ductus thoracicvs und der LymptKjejâsse {Heperlorhim, W.M, t. Il, p. '242). — Krau«e, Vermischte Beobnchtuntjen (Miiller's Archiv fur Anat. und Physiol., 1837, p. 5). — S, l.ane, arl. Lympliatic and Lacleal System (ToM's Cyclop. of Anat. and l'hysiol., 1. III, p. 'iOH}. — Ktillikcr, [Cléments d' histolo'jie , p. 025 ot siiiv. — Bowiiiann et Todd, l'hysiulooical Anatomy, t. II, p. 272. (b) BiirjfKracvc, llistotodie, p. 338. (r) VVfyrich, De Icxtura et structura vasnrum lymphalicorum . Doipal, 18.^)1. idi Kôlliker, Eléments d'histolo(jie, p. 027. (e.) Ili-iiln, Traité d'anatomie (jénérale, t. II, p. 00. (f) Kôlliker, lieitrâye %ur lienntnixn der (jlatten MusUeln {Zeitscfirifl fur ifiiseiischafllirhe Zoologie, I84'.l, i. I. p. S.1). (//) lle>fi;liier, llcber den liau der l,ijiii]iltdriisen {Nova Ai ta Arud. Niit. ciirins., l. Wlll, p. 54rj, |,l. r.3, (iK. .'.). {h) Criivrillii.T, Traité d'iiiintiiiitir dcsi-ripliiu', l, III, p, \\\\. 508 SYSTÈME LYMPHATIQUE. loppement relatif de ces divers éléments anatomiques varie, et dans quelques parties du système la structure de ces vaisseaux se complique davantage. Ainsi, dans le tronc principal, ou canal thoracique^ le microscope fait découvrir, entre les tuniques interne et moyenne déjà mentionnées , plusieurs lames striées et une membrane élastique réticulée; enfin la tunique externe, devenue plus épaisse , est enrichie d'un certain nombre de fibres musculaires longitudinales (1). On a constaté aussi la présence de vaisseaux sanguins dans l'épaisseur des parois des lymphatiques , mais jusqu'ici on n'est point parvenu à y recon- naître des nerfs (2). contractiiiié Pcndant longtemps on a révoqué en doute l'existence d'élé- de leurs parois. , i-jii- j • ii t ments musculaires dans les tuniques des vaisseaux blancs , et aujourd'hui encore beaucoup d'anatomistes se refusent à consi- dérer comme telles les fibres lisses et contractiles qu'on y aper- çoit (3). Effectivement l'irritabilité de ces conduits est en général (1) Déjà , vers la fin du siècle der- rois minces et transparentes de ces nier , Sheldon avait distingué des vaisseaux a été constatée aussi par fibres musculaires circulaires dans les plusieurs autres anatomistes, et de- parois du canal thoracique, chez le vient parfois facile à reconnaître Cheval (a), et ses observations à ce par la manifestation de phénomènes sujet ont été confirmées par des ana- inflammatoires dans ces tubes. En tomistes de l'époque actuelle (6). effet , les lymphatiques sont alors (2) Cruikshank a injecté les arté- non - seulement gonflés et doulou- rioles nourricières des parois des reux , mais fortement injectés , et vaisseaux lymphatiques, et les a vues prennent l'apparence de cordons se ramifier élégamment dans la sub- rouges (d). stance de leurs tuniques (c). L'exis- (3) Ainsi, M. Cruveilliier et M, Sap- tence des vasa vasorum dans les pa- pey considèrent ces fibres comme ap- (ffl) Sheldon, The History ofthe Absordent System, p. 16. (b) Burggraeve, Histologie, 1843, p. 337. • — Bowman et Todd, Physiological Anatomy, t. II, p. 273, fig. 169. (c) Cruiksliaiik, Anatomie des vaisseaux absorbants, p. 131. {d) AUard, De l'inflammation des vaisseaux hjmphatiques , etc., 1824. — Andral, Recherches pour servir à l'histoire des maladies du système lymphatique {Arch. gén. de méd., 1824, t. VI, p. 503 et suiv.). — Velpeau, Mémoire sur les maladies du système lymphatique {Arch. gén. de méd., 2= série, .VIII,p. 129j. — Grisolle, Traité de pathologie eitterne, 1855, t. II, p. 69 et suiv. STRUCTURE DES VAISSEAUX. 509 extrêmement obscm^e chez les Animaux les plus voisins de l'Homme; mais, ainsi que nous l'avons déjà vu, il en est quelquefois autrement chez les Vertébrés inférieurs (1), et tout porte à croire que, sous ce rapport, les lymphatiques des Mauimifères ne diffèrent pas notablement des veines, et pos- sèdent cette contractilité lente dont nous avons rencontré tant d'exemples en étudiant le système vasculaire sanguin. On a vu, dans beaucoup d'expériences, ces vaisseaux se resserrer peu à peu quand on les irritait, et, bien qu'ils soient doués d'une grande élasticité (2) , on ne saurait attribuer uniquement à cette force physique les phénomènes de contraction qui s'y manifestent , car les effets produits de la sorte sont plus considérables pendant la vie que sur le cadavre (3). Quelque- parlenanl à une classe parîiculière de tiques distendus par le mercure et tissus qui , par leurs propriétés et conservés dans l'alcool (c). leurs caractères anatomiques, seraient (3) Tous les physiologistes qui ont intermédiaires entre les muscles des fait des expériences sur les lymphati- tuniques intestinales, etc., et les liga- ques, chez des Animaux vivants, ont ments élastiques (a). eu l'occasion de remarquer que les (1) Voyez ci-dessus, pages /iG6, UT5, parois de ces vaisseaux ont un grand Û81 et /!j88. ressort, et tendent à se resserrer de (2) La grande élasticité des parois façon à expulser les liquides contenus de ces canaux a été bien démontrée dans leur intérieur. Ainsi, Aselli, le par une observation de Laulh. Un jour même où il découvrit les chyli- lymphalique qui, à l'état de vacuité, 1ères, constata celte propriété, car il présentera, dit cet analomiste, un vit ces conduits se vider et dispa- canal presque imperceptible , pourra raîtreen quelques minutes [d], Hew- acquérir un diamètre d'une demi- son constata des faits analogues chez ligne par l'injection ; mais si l'on les Oiseaux (e), et Sheidon fut sou- vide ce vaisseau, il reprendra son ca- vent témoin de phénomènes du même iihre primitif (6). iVIascagni a constaté ordre en étudiant les lymphatiques la persistance de cette élasticité peu- de la région cervicale, chez le danl deux années dans des lympha- Chien (/). MM. TiedemannetGmelin, (a) Cruvcilliier, Traité d' anatomie descriptive, t. III, p. 131. — Sappcy, Traité d'anatomie descriptive, t. I,p. 02C. (b) E. A. Lautli, Essai sur les vaisseaux lymphatiques, p. 5 (Tliùsc, Slrasljotirg, t82'l). (c) Mascagni, Vasorum lymphaticorum corporis humani historia et iconographia, p. 27. {d) Aselli, De lactibus sive lacteis venis dissert., p. 20. (e) Hewson, IVor/c«, p. 125. If) Sheidon, Op. cit., p. 27. 510 SYSTÈME LYMPHATIQUE. fois même, chez les grands Ruminants , certaines parties du système lymphatique sont animées de mouvements rhythmicpes ayant lié le canal ihoiacique d'un Chien, virent non- seulement ce con- duit se vider au-dessus de l'obstacle et se gonfler au-dessous, mais le li- quide dont celte dernière porlion était gonflée, s'en échapper en for- mant jet, aussitôt qu'ils y eurent fait une petite piqûre (a). Enfin M. Colin, en faisant des expé- riences sur les Chevaux, a vu fré- quemment des lymphaliques qui avaient le diamètre d'une plume d'oie, devenir tout à coup fdiformes, et cette diminution de volume ne dé- pendait pas de la pression exercée par les parties circonvoisines, car elle arrivait à son maximum quand ces vaisseaux avaient été isolés par la dissection (6). Mais on devait se demander si ce ressort était dû à l'élaslicilé des tissus seulement on à quelque force physio- logique. Mascagni adopta la première de ces hypothèses (c) ; mais la plu- part des expérimentateurs du siècle dernier se prononcèrent en faveur de la seconde manière de voir. Les raisons qu'ils alléguèrent ne furent cependant pas toujours bien solides. Les uns par- lèrent du resserrement des lymphali- ques comme étant dû à une propriété distincte de l'irritabililc musculaire, sans rien préciser, quant à la nature de cette force (d); d'autres l'attribuèrent à la contractilité musculaire (e). Hal- 1er, qui professa cette opinion, se fonda sur des expériences dans les- quelles il avait vu le canal ihoracique d'une Souris et les vaisseaux lactés d'un Chevreau se contracter, quand il les touchait avec de l'acide sulfuri- que if) ; mais Bichat objecta que les effets produits de la sorte pouvaient bien résulter seulement de la corru- gation des tissus déterminée par cette matière corrosive, et ne pas dépendre de l'irritabilité musculaire (17). Les expériences faites , vers la fin du siècle dernier, par Schreger, parais- sent plus décisives. Effectivement, cet auteur assure avoir provoqué dans ces vaisseaux des contractions bien manifestes, non-seulement en les ex- citant par le contact d'agents chimi- ques, tels que l'alcool, mais aussi en les stimulant mécaniquement ou en les exposant à l'action du froid (h). J. Aliiller a fait plus récemment des recherches sur ce sujet; mais il n'est arrivé qu'à des résultats négatifs, sauf dans un cas où il obtint un resserre- ment insignifiant du canal thoracique en soumettant ce vaisseau à l'action d'un courant galvanique (0- Enfin, {a) Tiedemann et Gmelin, Recherches sur la route que prennent diverses substances pour passer de l'estomac et de l'intestin dans le sang, traduit par Hidler, p. 4, 1822 (?). (b) Colin, Traité de physiologie comparée des Animaux domestiques, 1856, t. II, p. 87. (c) Mascagni, Op. cit., p. 27. (d) C. G. Oiilyrt, Dissert. acad. de causa absorplmiis per vasa hjmphalica, p. 79. I.e.yde, 1795. (e) Par oxem|)lc : Cruiksliank, Anatomie des vaisseaux absorbants, p. t28 cl siiiv. (f) Hallcr, Mém. sur les parties sensibles et irritables, t. I, p. 278. {g) Bicliat, Anatomie comparée, t. Il, p. 117. (h) Schreger, De irritabilitate vasorum lymphaticornm, 1780. (i) Miillcr, Manuel de physiologie, t. I, p. 212, STRUCTURE DES VAISSEAUX. 511 bien caractérisés. Ainsi , M. Colin a vu des contractions de ce genre dans les vaisseaux lactés du mésentère chez le Bœuf (1). Laulh a attaqué la question û\me autre manière ; il a comparé les etîets du ressort de ces vaisseaux chez les Animaux vivants ou récemment morts et sur des cadavres où lout indice de vitalité avait disparu, et il a constaté de grandes différences. Ainsi que je l'ai déjà dit, quand, sur le vivant, on lie le canal tlioraciquc, et qu'on y fait ensuite une piqûre au-dessous du point oblitéré , le liquide qui s'y trouve est lancé dehors sous forme de jet; mais en répétant cette opé- ration sur le cadavre, on voit que l'écoulement ne s'effectue que len- tement. Laulh a observé aussi que pendant vinjït-quatre heures après la mort, les vaisseaux chylifères conser- vent assez d'irritabilité pour se con- tracter, quand ils sont excités par le contact de l'air, mais que plus lard ils restent distendus par le chyle, lors- qu'ils sont mis à nu [a]. Mojon parle d'un mouvement ver- miculaire qu'il aurait vu dans les vais- seaux lymphatiques, mais il ne donne à ce sujet aucun détail qui soit de na- ture à inspirer quelque conliance dans l'exactitude de ses observations (6). Enfin, MM, Bowmann et Todd ont VII le canal ihoracique se contracter lentement sous l'inilucnce d'une exci- tation mécanique (c), et c'est la len- teur avec laquelle ce j)hén()uiène se manifeste, qui est probablement la cause des résultats négatifs auxquels la plupart des expérimentateurs sont arrivés dans des essais du même genre. Quant à la contractilité des villo- sités intestinales, où beaucoup de ces vaisseaux prennent naissance , j'au- rai l'occasion d'y revenir dans une prochaine Leçon. (1) Ces vaisseaux présentent quel- quefois, sur divers points de leur lon- gueur, des élargissements en forme d'ampoules, et M. Colin a vu ces par- ties dilatées se contracter au point de disparaître presque, puis s'agran- dir de nouveau, de façon à se remplir et à se vider alternativement, et cela d'une manière régulière {dj. Ce physiologiste a remarqué aussi que la rétractilité des lymphatiques est, en général, plus prononcée dans les petites branches que dans les gros troncs, et qu'elle est la plus forte dans les vaisseauxsinueuxqu'entoure beau- coup de tissu conjonctif, par exemple, dans ceux de Taine, du cou et de la région sous-lombaire. La citerne, ou réservoir de Pecquct, à moins d'être adhérente aux parties voisines, comme cela a lieu chez les !Solipèdcs , se resserre plus fortement que le canal tiioracique, bien que ses parois soient l)lus minces [e). (a) E. F. Laiitli, Essai sur les vaisseaux lymphatiques, p. H. (6) Voyrz Brescliel et Roussol de Vaiizôme, Recherches sur les appareils li'gnmnUaircs des Animaux {Ann. des sciences nat., iH'H, 2" série, t. II, p. 230). (c) iSowniann cl Torld, l'hysioloninal Annlomu, 1850, l. II, fi. 273. {(1) Colin, Hecherchrs expi'rimeri laies sur les fonctions du système lymphntiiiue (MiMiiuirc iii;i- niiscril présenli; à l'Acmlémie dos sciences en ■1858), (e) f'.olin, Tr'iitr île physiologie compari!e des Animaux domestiques, t. II, |i. 88. 5i2 SYSTÈME LYMPHATIQUE. Les parois des lymphatiques, malgré leur ténuité et leur grande délicatesse apparente , sont en réalité fort robustes ; elles ne se rompent que sous l'influence d'une pression très considérable (1) ; mais elles sont néanmoins fort extensibles , et c'est principalement à raison de cette propriété et de l'exis- tence de valvules très multipliées dans leur intérieur que ces vaisseaux prennent un aspect variqueux ou même moniliforme quand ils sont gonflés par une injection. Valvules. § 2, — Les valvules qui subdivisent de la sorte les lym- phatiques, et leur donnent l'apparence d'une série de cellules ovoïdes ou de cônes emboîtés les uns dans les autres , sont disposées à peu près de la même manière que cefles des veines (2). Elles représentent chacune une sorte de voile membraneux en forme de croissant qui adhère à la paroi du vaisseau par sa grande courbure , tandis que sa petite cour- bure, dirigée vers le centre du système, est libre. Efles con- sistent essentiellement en un repli de la tunique interne, et (1) Sheldon a vu que les pavois des a été étudiée par r.udl3eck, Bnrtho- lymphatiques, malgré leur grande lin et beaucoup d'anatomistes du minceur, résistent à la pression d'une siècle dernier; mais c'est surtout colonne de mercure dont le quart suf- à Paiysch qu'on en doit la connais- lirait souvent pour rompre les tuni- sance exacte (c). Ce point de Thistoirc ques d'une veine ou d'une artère de analomique des vaisseaux lymphati- mème calibre (o). Brescliet a trouvé ques a été l'objet de recherches nou- que dans les membres inférieurs cette velles et très approfondies, il y a une résistance des lymphatiques est à celle vingtaine d'années ; Breschet, et, à son des artères dans le rapport de 10 à 3 ; instigation, Lauth, s'en sont occupés mais qu'elle est plus petite dans les avec beaucoup de persévérance, et l'on membres supérieurs et moindre en- trouve dans un ouvrage du premier core dans les viscères (6). de ces deux auteurs une description (2) La structure de ces valvules très détaillée de ces organes (d). (a) Sheldon, The History of the Absorbent System, p. 27. (b) Breschet, Le système lymphatique considéré sons les rapports analomique, physiologique etpalhologiqite, 1836, p. 74). (c) F. Ruysch, Dilucidatio valvularum in vasis lymphalicis et lacteis {Opéra, 1. 1, p. 1-13). (d) Breschet, Le système lymphatique considéré sous les rapports analomique, physiologique et pathologique, 1836, p. 76 et suiv., pi. 1, %. 1-3. — Les observations de Lauth sont consignées dans cet ouvrage, p. 84 et suiv. STRUCTURE DES VAISSEAUX. 513 leur portion libre est d'une si grande délicatesse, qu'une pres- sion assez légère suffît souvent pour la déchirer ; mais, près de leur base , c'est-à-dire de leur ligne de jonction avec les parois dont elles naissent, elles sont plus fortes et renferment dans leur épaisseur un prolongement de la tunique moyenne (1 ) . En général, elles sont géminées, c'est-à-dire réunies par paires, en face l'une de l'autre, de façon à occuper toute la circonfé- rence du vaisseau, et à se rencontrer par leur bord, ou plutôt par la portion terminale de leur face interne. Les poches for- mées par ces replis sont très profondes dans les gros troncs , mais elles se raccourcissent beaucoup dans les petites branches, et quelquefois elles deviennent si étroites et se confondent si intimement par leurs points de jonction, qu'elles ressemblent à une petite cloison annulaire et n'interceptent qu'incomplètement le passage (2) ; enfin, dans d'autres parties, elles ne paraissent consister qu'en un prolongement du bord aigu de l'angle de jonction de deux de ces vaisseaux (3). Ces espèces d'écluses ne sont ni également nombreuses, ni également bien constituées dans toutes les parties du système lymphatique. Ainsi elles abondent dans les vaisseaux superfi- (1) Quelques anatomistes coiisi- fice d'une branche qui se réunitau tronc dèrent cette portion basiiaire des val- correspondant sous un angle très vules comme étant formée par un aigu, l'un des replis semi-lunaires se repli de la totalité des parois du vais- développe beaucoup, tandis que l'autre seau, et les comparent, sous ce rap- reste plus ou moins rudimenlaire ; port, à la valvule iléo-caecale de Tin- quelquefois même cette dernière dis- icstin, qui résulte d'une sorte d'inva - paraît complètement, et la première ginalion de ce tube (a). n'est indiquée que par un prolonge- (2) Celte disposition, qui avait été ment concave du bord aigu de Tcm- signalée par Bresclict, a été décrite boucbure. Les branches adérenles au avec plus de détails par M. Lane {b). canal thoracique oflrenl parfois celte (3) Il arrive, dans certains cas, que disposition, dans l'appareil valvulairc situé à l'ori- (a) Sappcy, Traité d'analomle dnscriptivc, 1. 1, |i. 018. (6) Lano, art. Lympliatic and Lacleal Su-stem (Toilit'.s Cyclop. of Anal, and Physhl., I. III, p. 210, (iB. r,0). 51 /i SYSTÈME LYMPHATIQUE. ciels des membres (1) ; elles sont moins multipliées dans ceux qui rampent dans les espaces intermusculaires, et elles sont plus rares dans ceux de la tête et du cou (2) ; dans le réseau pariétal des intestins , elles sont très rapprochées, tandis que dans les troncs lymphatiques qui sillonnent le mésentère elles ne se trouvent qu'à des distances plus notables, et elles sont encore plus espacées dans le canal thoracique. Dans quelques parties, elles manquent complètement (3); mais presque tou- jours elles sont disposées de façon à empêcher le reflux des liquides dans une longueur un peu considérable d'un de ces vaisseaux ou de celui-ci dans ses affluents. Enfin, l'embouchure du canal thoracique est en général garnie d'une valvule très forte, et lors même que ce repli membraneux manque ou est incomplet, comme cela se voit souvent, le passage du sang est presque toujours rendu impossible par de fortes valvules situées à peu de distance de l'extrémité de ce conduit {k). (1) M. Soppey a complé de 60 ù 80 valvules dans les lyinpl;aliqiies des membres tlioraciqiies, depuis leur origine, au bout des doigis, jusqu'à leur entrée dans les ganglions axil- Jaires, et les lymphatiques des mem- bres inférieurs lui en ont offert de 80 à 100. Dans le voisinage des réseaux d'origine, on les rencontre à 2 ou 13 millimètres de distance, et dans les troncs ils sont rarement placés à plus de 7 à 8 millimètres les uns des autres. (2) M. Bonamya pu injecler sur le crâne plusieurs vaisseaux lymphati- ques des grosses branches vers les petites, et il pense que ceux du cou sont même dépourvus de valvules dans la plus grande partie de leur étendue {a). (3) Dans la peau, par exemple, les lymphatiques sont souvent dépourvus de valvules dans une étendue assez con- sidérable ; mais, sur d'autres points, il paraît en exister, car les injections ne passent pas toujours des troncs dans les branches (b). En général, les valvules manquent ou sont en très petit nombre dans toutes les parties radiculaires du système lymphatique. {li) La plupart des anatomisles s'accordent, avec A^ascagni, pour dé- crire l'emboucluiredu canal thoracique de l'Homme comme étant garnie d'une (a) Voyez Sappey, Traité d'anatomie descriptive, p. 018. (6) Breschel nt Roussel de Vimzème, Recherches sur la structure des appareils tégumentaires des Animaux {Arm. des sciences nat., 2' série, t. Il, p. 22S i. STKUCÏUKE DES VAISSEAUX. 515 Il est également à noter que les lymphatiques ne sont pas aussi bien conformés sous ce rapport chez tous les Mammifères. Ainsi, sur l'intestin grêle de quelques Carnivores, ces vaisseaux paraissent même manquer complètement de valvules (1), et chez les Solipèdes l'embouchure du canal thoracique n'est que très incomplètement défendue contre l'entrée du sang dans son intérieur (2). graiide valvule en forme de voile et Irèsbiea constituée ('i) ; mais M. Sap- pey a trouvé que souvent celle-ci n'est représentée que par quelques filaments membraneux impropres à jouer le rôle de soupape. Du reste, on trouve à 1 ou 2 centimètres plus bas une paire de valvules qui sont capa- bles de cloie complètement le pas,- sage (6). Dans quelques cas, mais très rare- ment, on a vu les injections refluer du canal thoracique dans des parties plus ou moins éloignées du système lym- phatique. Ainsi Hunter, en insufflant de Tair dans le canal thoracique, opéra une fois la distension de tous les chylifères de Tintestin. Marchet- lis paraît avoir obtenu un résultat analogue (c). M. Colin a plusieurs fois injecté les ganglions bronchiques par le canal thoracique ; il a vu aussi l'injection passer de la giande veine lympha- tique dans les branches de ce tronc, et même dans les ganglions voi- sins ((/). .Mais la plupart de ces résul- tats paraissent être la conséquence d'altérations cadavériques plutôt que de l'insuffisance normale des valvules lymphatiques dans ces parties cen- trales du système (e); et souvent il est facile de voir que , sous l'influence d'une pression considérable, on force les passages qui, dans l'état normal, sont fermés (/j. Du reste, ces injections rétrogrades ne pénètrent jamais bien loin. (1) Suivant Breschet, Fohmann au- rait constaté cette disposition chez le Lion {g). (2) Chez le Cheval, cet orifice est garni de deux valvules semi-lunaires qui laissent entre elles une fente al- longée, et plus en arrière on trouve dans le canal thoracique cinq ou six paires d'autres valvules dont les der- nières sont situées à 1 ou 2 déci- mètres du réservoir de Pecquet. Mais les obstacles opposés de la sorte au reflux des liquides ne sont pas com- plets, et on voit le sang, ainsi que les injections qui sont poussées d'avant en arrière dans ce conduit, arriver (a) Voyez .Mascagni, Op. cit., pi. 27, lig. ."). (6) Sappey, Traité d'anatomie descriptive, I. I, p. 022. (c) Voyez Cniiksliank, Anatomie des vaisseaux absorbants, p. 14'i. (d) Colin, Op. cit., t. II, p. 93. (e) Voyez Sappey, p. G21. (/■) Voyez les rerririrques de Laiilh (IJrcscliel, Système lumpltaliquc, p. 01). (g) Itresdiet, Op. cit., p. 82. 516 SYSTÈME LYMPHATIQUE. Ganglions § 3. — Lcs gangHoos ou glandes (1) qui se trouvent sur le lymphatiques. ^^^^^^^ ^^^ lympliatiquos sont des corps généralement ovoïdes ou globuleux ; souvent colorés en rose ou en brun, quelquefois aussi ils sont noirâtres ; enfin ils sont toujours revêtus d'une enveloppe membraniforme qui se compose uniquement, ou du moins principalement , de tissu conjonctif parsemé de fibres élastiques (2). Cette tunique envoie vers le centre de ces organes des prolongements qui divisent ceux-ci en un nombre considérable de petits compartiments ou lobules , et elle est traversée par des vaisseaux de deux sortes qui sont , les uns afférents, les autres efférents. En effet , les vaisseaux lymphatiques qui se rendent à un jusque dans les branches intestinales adoptée aujourd'hui, et que je préfère et lombaires du système lymphatique. à celle de glandes lijmphatiques, parce Chez les grands Uuminants, le Porc, qu'elle ne préjuge rien quant aux la Chèvre, etc., ces valvules ferment fonctions encore très problématiques mieux, et l'on ne voit que rarement du de ces organes, sang dans le canal thoracique (a). (2) Chez quelques Mammifères, la (1) Les anciens anatomistes con- Souris par exemple, on a découvert naissaient l'existence de ces corps , des fibres musculaires lisses (ou fibres- mais ils les confondaient avec les or- cellules) dans cette tunique. Les ob- ganes sécréteurs ordinaires, sous le servalions de M. Briicke s'accordent nom commun de glandes. Sylviusles sur ce point avec celles de M. Hey- en distingua par l'épithèle de conglo- felder (d). bées , tandis qu'il appelait glandes Malpighi et quelques autres anato- conglomérées la plupart des glandes mistes avaient pensé qu'il existe des parfaites (6). Enfin Sœmmering ayant fibres charnues dans la tunique de fait remarquer une certaine ressem- ces ganglions chez l'Homme ; mais blance entre ces organes et les gan- cette opinion, réfutée par Haller (e), glions nerveux, Chaussier leur donna est en désaccord avec les résultats le nom de ganglions lymphatiques (c), des recherches histologiques plus mo- expression qui est assez généralement dernes (/"). (a) Colin, Physiologie comparée des Animaux domestiques, t. 11, p. 92. (b) Voyez Haller, Elementa physiologiœ, t. I, p. 1,81. (c) Chaussier, Table synoptique des vaisseaux lymphatiques. (d) Heyfelder, Ueber den Bau der Lymphdrilsen {Nova Acta Acad. Nat. curios., t. XXXII, 2" partie, p. 545). ■ — Briicke, Ueher die Chylusgefâsse {Sitzungsbei'icht der Wiener Akad., 1853, t. X, p. 430). (e) Haller, Elementa physiologioi, t. I, p. 182. (/■) Beck, Ueber die Natur des Colloid-Cysloids und den Bau der Lymphdrilsen (Illustr. med. Zeitung, 1856, t. HI, p. 242). STRUCTURE DES GANGLIONS. 517 ganglion se divisent en plusieurs branches avant de s'y enfon- cer, et c'est aussi sous la forme d'un pinceau que les vaisseaux efférents s'en séparent du côté opposé. Des artères pénètrent également dans ces organes; des veines en sortent, et l'on voit aussi des nerfs s'y rendre (1). Les anatomistes ont été depuis fort longtemps et sont encore 1)1 • j ' n ■ • • I 1 1 , • -• structure aujourd nui partages a opmion au sujet de la structure mtmie des ganguons. de ces ganglions. Quand on injecte ces corps par l'intermé- diaire de leur tronc afférent ou en poussant directement le liquide dans leur substance , il est facile de voir que les lym- phatiques qui y plongent s'y ramifient beaucoup, s'y pelotonnent pour ainsi dire, et y constituent un plexus dont le côté opposé donne naissance aux racines d'un système de vaisseaux efférents de même nature. Si l'on fait sécher une préparation obtenue de la sorte en remplissant le ganglion avec du mercure , et si l'on ouvre ensuite pour en faire écouler le métal, on n'aperçoit guère dans la substance de l'organe que des tubes rameux et contournés sur eux-mêmes. On est donc naturellement porté à supposer que le ganglion ne consiste qu'en un paquet de capil- laires lymphatiques disposés à peu près comme ces plexus bipolaires dont nous avons vu plusieurs exemples en étudiant le système vasculaire sanguin , plexus dans lequel un tronc lym- phatique se diviserait en un faisceau de branches capillaires , lesquelles se réuniraient ensuite peu à peu pour constituer les racines d'un système de vaisseaux efférents. Telle est effecti- vement l'idée que s'en forment beaucoup d'anatomistes , et (1) Tous les ganglions lymphati - aperçu aussi des pclils ganglions ncr- qucs un peu volumineux reçoivenl veux (a); mais M. KOllikci- n'a pu plusieurs petits filels nerveux qui tiotiver aucune irace de ces centres accompagnent les artères de ces or- médullaires, et croit qu'ils n'existent gancs. M. .Schaiïner croit y avoir pas (h). (a) SchafTncr, VermisclUe lleobachluwjen (/eitschr. fur rationnelle Medlcin, t. VII, p. 177). (6) Kollikcr, éléments d'histologie, p. 034.. 518 SYSTÈME LYMPHATIQUE. quelques-uns des petits corps arrondis auxquels on donne le nom de ganglions lymphatiques paraissent en effet n'offrir dans leur structure rien de plus. Mais il n'en est pas de même pour la plupart de ces organes. Ils sont généralement d'une nature plus complexe , et, si on les étudie au microscope, à l'état frais ou après avoir fait coaguler les liquides albumineux dont ils sont remplis, on voit que dans toute leur partie périphérique ils sont formés essentiellement d'un tissu aréolaire, tandis que vers le centre ils sont composés de vaisseaux tubulaires bien caractérisés. Les cavités de cette substance corticale sont plus grandes près de la surface du ganglion que plus profondément; elles ne paraissent être qu'incomplètement séparées entre elles par des lames ou des trabécules de tissu conjonctif fibrillaire, et elles sont occupées par une matière pulpeuse qui est très chargée de corpuscules arrondis, et constitue de petits amas en forme de grains (1). Des capillaires sanguins serpentent dans les cloisons qui divisent cette portion des ganghons en une masse caver- neuse , et les aréoles dont je viens de parler sont encore subdi- visées par une sorte de réseau de filaments et de petits vaisseaux lymphatiques; enfin le liquide qui occupe les vides de ce tissu spongieux ne diffère pas de celui contenu dans les vaisseaux lym- phatiques adjacents. Les uns considèrent cette substance corti- cale comme identique avec le reste du systèuie lymphatique, et comme n'offrant l'apparence cellulaire ou caverneuse que je viens de décrire qu'à raison de la détbrmation des vaisseaux, qui seraient pelotonnés sur eux-mêmes dans tous les sens et s'anastomoseraient souvent entre eux (2). Suivant les autres, (1) C'est cette substance que les considéré les ganglions comme étant anciens analomistes appelaient le suc formés seulement de vaisseaux lym- propre des glandes lymphatiques (a). phatiques très divisés et pelotonnés (2) Parmi les anatomistes qui ont sur eux-mêmes, je citerai Albinus, (a) Voyez Haller, Elemenia physiolngiœ, t. I, p. 484, Sïl'.L'CTLIU; [)ES GANGLÎO.NS. 519 ce serait un lissu esseLitieliemenl ditTéreiit où les rameaux affé- rents des vaisseaux lyuiphatiiiiies viendraient, se terminer et verser leur contenu, tandis que d'autres vaisseaux naîtraient de ces mêmes cavités pour constituer les conduits efférenfs de l'organe (1) : mais la vérité me semble être entre ces deux opinions extrêmes. En effet, si, au lieu de n'étudier la structure du ganglion que chez l'adulte , on en suit le développement chez l'embryon , on voit ({u'il se compose essentiellement de canaux qui, d'abord simples et droits, se divisent, se contour- Uiiysch (car, pour ce dernier, les ou ù d'autres altérations palliologi- glomérules dont il admettait Fexis- ques (h). tence étaient encore des paquets de (1) Malpiglii considérait ces gan- capillaires lymphatiques) , Hewson, glions comme ayant une structure Mascagni et Lautli (a). celluleuse , et Cruikshank (c) sou- Celte manière de voir est soutenue tenait une opinion analogue; mais ce aussi, avec une conviction ferme, par sont surtout les recherches récentes un de nos anatomistes les plus habiles de MM. Purkinje, Goodsir, Mandl, de notre Faculté de médecine, M. Sap- Noll , Heyfelder, Briicke, Donders et pey, d'après lequel l'apparence cellu- Kôlliker, qui me paraissent avoir bien leuse qui se voit dans la substance des établi l'existence d'une structure aréo- ganglions ne serait due qu'à des di- laire dans la portion corticale de ces lalations variciformes des vaisseaux organes {d). (a) Voyez Haller, Op. cil., t. I, p. 183. — Hewson, Op. cit. {Works, p. 248 el suiv.). — Mascag;ni, Lymphaticonim vasorum histor. et iconog7\, p. 30, |)l. 1, lig. 0. — Laulli : voyez Breschet, Op. cit., p. dOl. (6) Sappey, Traité d'anatomie descriptive, t. I, p. G29 et suiv. (c) Malpighi, De structura glandularum conglobularum epistola (Opéra poslliuniu, p. 139 et ^uiv.). — Cruiksliank, Op. cit., p. 178. ((/) Purkinje, Naturforscher in Prag , 1838, p. 175. — .). Goodsir, Structure of Ihe Lymphatic Glands {Anatomical and IHithological Observations, by .J. Goodsir and H. Goodsir. Edinburgh, 1845, p. 44.). -- ManJl, Analomie microscopique, 1845, I. 1, p. 231. ■Noll, Ueber den Lymphstrom in den Lymphgefdssen und die aiesentlichslen anatumiscken licstandtheile der Lymplidriisen {Zeilschrift fiir rationnelle Medicin, 1850, (. IX, p. 80 et suiv.). — Heyfelder, Ueber den, liau der Lymphdrûsen (Nova Acta Acad. Nat. curies., t. XXIll, pars ii, p. .Til). — E. Briicki;, Ueber die Chylusgefdsse und die h'ortbeiuegung der Chylus (HitMiigsberichl der Akad. der Wissenscliaftcn zic Wien, 1853, t. X, \i. 430). — Ueber die Cligiusgeltlsse und die Heaorplion des Cliylus (Denlcschriften der Wiener Akad. der Wissenscliaftcn, 1854, t. VI, p. 128 el .suiv.). — [Jonders , Over den bouw der weivaatskUereti en de beweglng der Lympiia (Nederlandsch Lnncet, 1853, 3» série, t. H, p. 553), ot l'Iujsiologie des Menschcn, 185(1, l. H, p. 3)«el !>lliv. — Kolliker, Mikroskopinche Analomie, I85i!, l. Il, p. rcjy el suiv, — lilàiieiils d'Itisloluiiic, 1855, p. li'iH. «V. '6U 520 SYSTÈME LYMPHATIQUE, uent, et se déforment de manière à constituer le tissu caver- neux en question; mais, d'un autre côté, si l'on observe au microscope le système de cavités irrégulières ainsi formées, on les portions voit qu'elles n'ont pas les mêmes caractères anato miques que tubulaires du système dont elles dépendent, et doi- vent nécessairement en être distinguées. Lauth a reconnu que chez l'embryon les ganglions lympha- tiques ne consistent d'abord qu'en im simple plexus vascu- laire (i), et les recherches plus récentes et plus approfondies de M. Engel nous apprennent que ces organes naissent chacun d'un vaisseau lymphatique ordinaire qui, sur un ou plusieurs points de son trajet, se dédouble de façon à former des bran- ches collatérales, lesquelles se contournent et se pelotonnent sur elles-mêmes de manière à constituer de petits amas revêtus (1) Les observations de Lauth {a) ont été confirmées par celles de Bres- chet> Ce dernier anatomiste n'a pu apercevoir aticune trace des ganglions lymphatiques de l'aisselle et de l'aine chez le fœtus humain, vers le sixième mois (b), et il ajoute que, lorsque ces organes paraissent, ils se montrent sous la forme de simples plexus où la continuité des vaisseaux lymphatiques ne peut être contestée (c). Ce fait est d'accord avec les résultats beaucoup plus complets obtenus par les re- cherches de M. Eugel, à qui nous devons presque tout ce qui est connu sur ce point important de l'organo- géniCi Ce physiologiste a étudié avec beaucoup de soin le mode de déve- loppement des ganglions lymphati- ques chez les jeunes embryons de Mouton , et il a vu que ces organes naissent de vaisseaux primitivement simples, qui d'ordinaire se dédoublent dans une certaine longueur. On aper- çoit ensuite, sur un point des parois de la branche dont la iransformation va s'opérer, un petit amas de gra- nules, puis un renflement latéral qui tantôt conserve cette position, tantôt entoure complètement le vaisseau, et d'autres fois se loge dans l'angle ren- trant d'une bifurcation de celui-ci. Une membrane capsulaire se con- stitue autour de l'espèce d'ampoule ainsi formée, et dans l'intérieur de celle- ci le vaisseau se dédouble de nou- veau, une ou plusieurs fois, s'allonge beaucoup, de façon à devenir très flexueux ou contourné sur lui-même, et donne parfois naissance à des pro- longenieats terminés en cul-de-sac. Souvent un ou deux des petits vais- fa) E. Lauth, Essai sur les vaisseaux hjmphati^ues (dissert, inaug.). Strasbourg, 1824, p. 29. (6) Breschet, Le système lympliatiqiie considéré sous les rapports anatomique, physiologiciue et itliologiqiie, ^836, p. 175. (c) Op. cil., p. 185. STRUCTURE DES GANGLIONS. 521 extérieurement d'une couche membrahifornne ; ces glomérules se réunissent en groupes entremêlés de branches lymphatiques qui n'ont pas subi de transformations analogues, et le tout s'en- kyste, pour ainsi dire, en condensant en forme de membrane la portion périphérique du tissu conjonctif au milieu de laquelle ce travail organogénique s'est effectué. Mais les canaux tortueux qui se constituent de la sorte ne paraissent pas éprouver dans leur développement les mêmes transformations que les parties voisines du vaisseau, et acquièrent des caractères histologiques différents. Dans le principe , les unes et les autres se compo- saient d'une substance plastique ou blastème, partout identique; mais là où le canal primordial conserve la forme d'un vaisseau ordinaire, ses parois se revêtent d'une couche d'épithëlium, et deviennent parfaitement distinctes du tissu conjonctif qui, aux dépens de la même gangue organogène, se constitue tout alen- seau\ ainsi conslitués traversent di- reclement de part en part l'ampoule, tandis que d'autres s'enroulent dans son inlérieur; ces ampoules se multi- plient sur diveis points de la lon- gueur d'un même vaisseau ou sur des points voisins de différentes branches collatérales provenant des dédouble- ments successifs d'un même tronc, et il en résulte ainsi une agrégation d'ampoules, qui renferment chacune dans leur intérieur un faisceau de vaisseaux dont les uns sont presque droits et les autres plus ou moins con- tournés ; enfin ces vaisseaux eux- mêmes, au lieu de rester cylindriques, dcviennenlirrégulicrs, se rcndenld'cs- pacc en espace ou s'étranglent çà et là. Dans cet état, le ganglion lymphatique se compose donc essentiellement d'une agrégation de petits plexus bipo- laires revêtus chacun d'une capsule membraneuse et constituant un nom- bre considérable de lobules (a). Les observations de M. Engel ne vont pas plus loin ; mais il me paraît pro- bable que, dans la plupart des cas, le travail organogénique ne s'ar- rête pas là , et que , sur beaucoup de points, les petits canaux tortueux ainsi constitués s'anastomosent entre eux et se transforment en un tissu caverneux, tandis que les grosses branches du même système se per- fectionnent et acquièrent dans leur in- térieur une tunique épilliélique dont toutes les parties de ce système vascu- laire sont primitivement dépourvues. De là les dillerences qui s'observent généralement chez l'adulte entre la portion vasculaire et la portion caver- neuse ou corticale dos ganglions. {a) KnKcl, IJnu and Ënlwickelumj dcr Lwnphdrilscii H'mgcv VicrMjahnachrilï fur vnili- lische UeilkwuU, 1850, l. XXV!, p. Mt, (ig-. 1 à 24). '^"^^uuin nu ,,uiii- 522 SYSTÈME LYMPHATIQUE. tour, tandis que dans les portions labyrinthitbrmes du même conduit la substance plastique circonvoisine ne donne pas nais- sance à du tissu épithélique, et semble conserver son caractère primordial ou ne se transformer qu'en tissu conjonctif fibril- laire, à la surface duquel se développeraient des corpuscules lymphatiques libres. On ne donnerait donc qu'une idée très incomplète de la structure des ganglions lymphatiques, si l'on persistait à ne les décrire que comme des plexus de vaisseaux pelotonnés en paquets arrondis : et il me paraît utile de distinguer dans ces corps, comme l'a fait un des histologistes les plus habiles de l'époque actuelle, M. le professeur Briicke (devienne), deux substances constitutives, l'une corticale et aréolaire, l'autre centrale ou médullaire, et offrant une structure essentiellement vasculaire (1). (1) M. J. Goodsii-, dont la manière de voir au sujel de la structure intime des ganglions lymphatiques ne s'é- loigne pas beaucoup de celle adoptée aujourd'hui par un grand nombre d'histologistes, considère la capsule de ces organes comme étant formée par une portion élargie de la tunique externe des vaisseaux tant etlerents qu'aflereiUs , sur le trajet desquels ceux-ci se trouvent. Les vaisseaux adérents, en plongeant dans le gan- glion pour s'y ramifier et s'y anasto- moser de façon à donner naissance à un réseau irrégulier, seraient donc réduits à leur tunique interne, laquelle se moditierait aussi de manière à de- venir plus épaisse et plus opaque ; enfin on y distinguerait deux couches : une , externe , transparente et très mince, qui offrirait d'espace en espace des renflements ovoïdes renfermant une ou plusieurs vésicules, et qui pour- rait être comparée à la membrane basilaire des membranes sécrétantes ; l'autre, interne, granulaire, épaisse et composée de corpuscules nucléoles, analogues aux utricules élémentaires qui recouvrent la surface de diverses cavités glandulaires. Cette couche épi- thélique ne laisserait qu'au centre de chaque vaisseau un canal étroit pour le passage de la lymphe (a). M. Koll, dirigé par le professeur Ludwig, a fait de nouvelles recherches sur la structure de ces ganglions, et il est arrivé à des résultats qui, sauf les détails, s'accorderaient assez bien avec les précédent^. Il pense que les vais- seaux elférents débouchent dans des (ft) GooJsir, Structure of the Lyiiiphatic Glands {Anatomical and Pathological Observations, 1845, p. 44). STRUCTURE DES GANGLIONS. ^>^lo Une partie des branches formées par les lymplialiqiies alTé- reiits traverse directement les ganglions sans s'y ramifier ou ne forment qu'à la surface de ces organes un réseau lâche; mais les autres s'y résolvent en ramuscules d'une grande ténuité (1) , qui pénètrent entre les cloisons intervasculaires de la couche corticale, et paraissent s'ouvrir dans les lacunes de cette substance spongieuse (2). Le tissu médullaire ne cavités occupées par la substance gra- nuleuse, et que la lymphe traverse cette matière pour s'écouler ensuite par le vaisseau eft'érent né de l'exlré- mité opposée de cette cavité (a). M. Briicke fut le premier à établir nettement la distinction entre la sub- stance corticale et la substance médul- laire des ganglions lymphatiques qui a été admise par M. Kôlliker, et il considère la première de ces couches comme étant formée de corpuscules arrondis dont la structure aurait beau- coup d'analogie avec celle des glandes de Peyer, que je ferai connaître dans une autre partie de ce cours (6). M. Kôlliker adopta cette manière de voir, et ajouta beaucoup de faits nou- veaux relatifs à certaines dispositions de la structure aréolaire dont se com- pose la couche corticale (c). Enfin les recherches de M. Donders ont conduit à des résultais analo- gues {(/), et les observations plus ré- centes de Mo Vierordt s'accordent par- faitement avec celles de M. Kôlliker (e). {!) M. KôlUker estime la largeur de ces branches lymphatiques de 0"''",02 à 0">"%018 if). (2) M. Kôlliker pense que les vais- seaux afférents débouchent en général dans les lacunes les plus profondément situées dans la couche corticale; ca- vités qui sont plus petites que celles situées vers la surface des ganglions. D'après cet histologiste , les aréoles en question seraient subdivisées cha- cune par un réseau très fin en un grand nombre de cavités fort petites, qui ne seraient aussi séparées entre elles que d'une manière très incom- plète, et consisteraient également dans des lacunes du tissu conjonclif {g). Mais il me paraît probable que ces petites lacunes sont, en réalité, les lumières des conduits tortueux des capillaires pelotonnés que M. Engel a observés dans les gangUons naissants, conduits qui n'auront pas acquis des parois propres et sont devenus extrê- mement irréguliers. (a) Noll, Op. cil. {Zeitschr. fur rationnelle Medicin, 1850, t. IX, p. 80 et suiv.). (b) Briicke, Ueber die Cbylusnefâsse und die Fortbezvegwjg des Chylus {Sitzungsbericbt der Wiener Akademie, 1853, t. X, p. 429), et Ueber die Chylusgefdsse und die Résorption des Chyhm {Mém. de l'Acad. de Vienne, 1854, t. VI, p. 128 et suiv.). (c) Ktillilier, Ueber den feineren liau und die Funclionen der Lymphdrilsen (Verhandiungen der physicalisch-medicinischen Gesellschaft in Wûrzburg, 1854, t. IV, p. 107). {dj Donriers, Op. cit. (Nederlandsch Lancet, 1853, 2" .sérir^, t. II, \<. 553). — Physiologie des Menschen, 185(1, l. Il, p. GIO. (e) Vircliow, iJie Cellular pathologie, 1858, \\. 1 5ri ol suiv., (itr. Cl . (/■) Kôlliker, Traité d'histologie, p, G32. (g\ Idfni, ibid., (ifr. 295. 524 SYSTÈME LYMPHATIQUE. présente en général aucune trace de la structure caverneuse, qui est si remarquable dans la couche superficielle, et il se compose essentiellement d'un plexus lymphatique serré qui donne naissance aux vaisseaux efférents du ganglion, et qui est entremêlé de vaisseaux sanguins ainsi que d'une sorte de stroma composé de tissu conjonctif serré (1). En résumé, nous voyons donc que l'on doit se représenter le ganglion lymphatique comme formé essentiellement par une agglomération d'organites arrondis qui sont logés dans une trame ou réseau de tissu conjonctif et de vaisseaux sanguins , et qui se composent chacun d'un petit système de cavités irré- gulières dans lesquelles un vaisseau lymphatique afférent vient se perdre en se ramifiant et en changeant de structure, et dans lesquelles aussi paraissent naître les vaisseaux efférents. Ces espaces sont limités par la substance hyaline et amorphe qui forme la couche sous-épithélique dans le vaisseau afférent, et qui, au lieu d'être revêtu d'une couche de tissu utriculaire adhérent en forme d'épitliélium, donne naissance à une multi- tude de corpuscules libres. Enfin , ces corpuscules sont sem- blables aux globules plasmiques de la lymphe, et constituent une sorte de magma granuleux à travers lequel ce liquide fdtre, pour ainsi dire, en allant du vaisseau afférent au vaisseau effé- rent du ganglion. Le mode d'organisation que je viens de décrire dans les ganglions placés sur le trajet des troncs lymphatiques paraît exister aussi dans un nombre considérable de petits corps spongieux qui se trouvent dans l'épaisseur des parois de l'in- testin , et qui sont connus sous le nom de glandes de Peyer. Dans une autre occasion, j'aurai à revenir sur l'histoire de ces organes, et je me bornerai à ajouter ici que M. Briicke , (1) Ce stroma ne renferme pas de vent des amas plus ou moins consi- fibres élastiques, mais contient sou- dérables de cellules adipeuses. STRUCTURE DES GANGLIONS, 525 qui a fait de leur structure uue étude attentive , les considère comme étant des ganglions lympliatiques diffus ; mais il n'a pu démontrer d'une manière satisfaisante les relations anato- miques de ces corps avec un système de lymphatiques effé- rents, et son opinion^ quoique réunissant en sa faveur beaucoup de probabilités , n'est pas généralement adoptée par les anato- mistes (1). 11 est aussi à noter que les ganglions lymphatiques sont plus développés dans l'enfance qu'à l'âge adulte , et que dans la vieillesse ils diminuent de volume (2). On a cru remarquer (l) M. lîriicke se fonde principale- ment sur ce qu'en injectant les petits canaux lymphatiques de la muqueuse intestinale, il a vu l'injection se ré- pandre dans l'intérieur des glandes de Feyer, sans qu'il y eiit aucune appa- rence de rupture des vaisseaux, et sur la ressemblance qu'il a constatée entre la structure intime de ces organes et celle des ganglions mésentériques. Il a trouvé, dans la substance de ces glandules, des globules semblables h ceux qui sont logés dans les aréoles de la substance corticale des ganglions lymphatiques, et qui, à leur tour, pa- raissent être identiques avec les glo- bules plasmiques de la lymphe. Enfin, il a vu partir de la base de chacune de ces mêmes glandules un cylindre blanchâtre qui lui a paru être de même nature que les faisceaux de lympliatiques qui naissent des villo- sités voisines, et qui vont concourir à la formai ion du système chylil'ère (a). (2) Plusieurs anatomistes ont cru que les ganglions lymphatiques s'atro- phiaient avec l'âge et disparaissaient dans la vieillesse. Mais celle opinion est fort exagérée, et Cruikshank a re- connu que, chez les vieillards, ces organes exisient toujours , quoique fort réduits en volume (b). M. Gulliver a trouvé que le déve- loppement relatif des ganglions est plus considérable dans l'enfance qu'à l'âge adulte, non-seidement dans l'es- pace humaine, mais même chez les Oiseaux (c). M. Cruveilhier a remarqué que c'est chez les enfants au-dessous de cinq ou six ans que le système lymphatique se laisse injecter le plus facilement, et que, chez les vieillards, cette opéra- tion réussit en général moins bien que chez les sujets jeunes ou de moyen âge (d). Ilewson pense que chez la Femme les ganglions lymphatiques sont en (a) K. IJriicko, IJeber den flau uinl die physinlogische fiedeulung der Peycrischm Drûsen (iJenkscliriften der Wïenar Akademie der Wissenschaften, 1851, (, II, p. '21, pi. 8, fig. 1-5). (b) Voyez llaller, Klemenla physioloyiœ, l. I, p. 1ÎM . — Cruik.sliank, Analomic des vaisseaux absorbants, p. l'iO. (f) Gulliver, A'o. 32. — Arilonimarciii, Mém. sur la non-existence de communication normale des vaisseaux lyni- phatUiueg et des veines, 18-29. - Cruveilliiei , Traité d'anatomie descriptive, 1843, t. III, p. 132. {b) Fohiiianri, Analomische llntcrsuchimgenûber die Verbindung der Saugadern mit den Yenen, Heiilfilb., 1821 (Irad. rlans le liullelin de la Soc. méd. d'émulation, 1822, p. 13). — Mémoires sur les commtivications des vaisseaux lymphutigucf^ avec les veines, eU;. Mùgi;, 1832. (f) Meckel, Nova expérimenta et observatinnes de finibus venarum ac vasorum lympliatiiorwn. Berlin, 1 '72. lUi I'. Hôclanl, Nlériii'iitn il'iiiKiluviii' iji'iii'rnie, 1H23, p. 417. 528 SYSTÈME LYMPHATIQUE. Communication Ufic autre questloii du même ordre a beaucoup occupé l'at- des vaisseaux lymphatiques avec les veines. tentiou des physiologistes il y a quelques années ; savoir : les vaisseaux lymphatiques de l'Homme viennent-ils tous aboutir aux canaux thoraciques (en comprenant sous cette désignation la grande veine lymphatique du côté droit du cou ) , ou bien y a-t-il des branches de ce système qui débouchent directement dans les veines des membres ou des autres parties du corps ? Nous avons vu dans la dernière Leçon que chez les Ver- tébrés à sang froid, et même chez les Oiseaux, il en est ainsi, et que, dans la région pelvienne, par exemple, il existe mais il est à noter que ce résultat ne s'obtient d'ordinaire que sur les cadavres dont les ganglions sont ra- mollis , et semblent avoir subi dans leur texture des altérations plus ou moins profondes : aussi la plupart des anatomistes considèrent -ils ce pas- sage comme élanl dû à des ruptures dans les parois vasculaires (a). Une circonstance qui vient à l'appui de cette manière de voir a été signalée dernièrement par M. Sappey : c'est que, sous l'influence de l'altération putride, les lymphatiques ne se lais- sent que difficilement pénétrer par le mercure, et que, sur le cadavre, les artérioles sont d'ordinaire vides et resserrées, tandis que les veinules sont distendues par du sang ; de sorte que si le mercure s'épanche dans l'inté- rieur des ganglions en déchirant les vaisseaux autour du point lésé , on comprend que ce liquide puisse s'é- couler plus facilement par les veines que par toute autre voie. Il est aussi à noter que l'injection simultanée des vaisseaux efférents lymphatiques et sanguins s'obtient , en général, très facilement, quand on introduit le mer- cure par une piqiire faite dans la sub- stance des ganglions (6). Fohmann cite aussi comme exemple d'anastomoses encore plus larges , entre les lymphatiques et les vais- seaux des ganglions, le mode d'orga- nisation décrit par Abernethy chez la Baleine. En eflet, d'après ce dernier anatomiste , les ganglions mésenté- riques de ce Cétacé gigantesque se- raient de grandes poches arrondies, dont la grosseur égalerait parfois celle d'une orange, et dont l'intérieur serait occupé par une cavité contenant un plexus de lymphatiques ; quelques- uns de ces vaisseaux contiuueraient leur route et sortiraient du ganglion sans s'être ouverts, mais d'autres dé- boucheraient librement dans ce réser- voir ; les artères mésentériques s'ou- vriraient dans la même cavité , et celle-ci communiquerait non moins directement avec les veines: ce se- raient donc des poches sanguines qui seraient traversées par un plexus lym- (a) Voyez ci-dessus, page 527, note c. (b) Sappey, Traité d'anatomie descriptive, 1852, 1. 1, p. 624. COMMUNICATIONS AVEC LES VEINES. 529 des anastomoses de ce genre; mais, chez l'Homme et chez les autres Mammifères , la centralisation de ces voies de commu- nication est portée plus loin, et si, dans un petit nombre de cas, on a vu quelques branches du système lymphatique se terminer dans les veines de l'abdomen ou des membres, cette disposition était une anomalie, et, dans l'état ordinaire de l'organisme, rien de semblable n'a lieu (1). phalique dont diverses branches dé- boucheraient dans leur intérieur. Abernethy assure que les orifices ter- minaux des lymphatiques dans ces cavités sont faciles à voir, et qu'il a pu y introduire des soies ; mais la lecture de son mémoire m'a inspiré beaucoup de doutes sur l'exactitude des conclusions qu'il tire des résultats de ses injections, et, d'après la facilité avec laquelle il a fait passer la sub- stance employée à cet usage des ar- tères mésentériques dans la cavité centrale des ganglions, il me paraît extrêmement probable que le tissu de ceux-ci était altéré par la putréfaction, et qu'il s'est produit des épanche- ments dans leur intérieur (a). Cette explication a été donnée depuis fort longtemps par M. Knox (6), et elle est parfaitement d'accord avec les résul- tats obtenus plus récemment par IVI. J. Reid, dans ses recherches sur les ganglions mésentériques du Balœ- noptera rostrata (c). Fohmann pensait que le ganglion d'Aselli était dépourvu de lympha- tiques efférents chez le Phoque ; mais nous avons déjà eu l'occasion de voir que le contraire a été établi par les observations plus exactes de Rosenthal et de M. Knox (cl). Fohmann considérait aussi quel- ques-uns des ganglions axillaires du Chien comme étant dépourvus de lymphatiques efférents ; mais je doute beaucoup de ce fait, et l'on comprend que ces vaisseaux, s'ils n'ont pas été remplis par l'injection, aient pu échap- per très facilement aux regards (e). Quant aux arguments tirés de la présence d'un liquide lactescent dans quelques parlies du système de la veine porte chez des Animaux sur lesquels on avait lié le canal thoraci- que, on ne peut y attacher de l'im- portance ; car, ainsi que nous le ver- rons ailleurs, on sait aujourd'hui que les matières grasses peuvent être ab- sorbées directement par les veines aussi bien que par les chylifères. (1) Des cas dans lesquels des com- munications de ce genre existaient réellement , ou paraissaient exister, {a) Abernetliy, Some Particulars in. Iht Anatomy ofa Whale (Philos. Trans., 1705, t. LXXXVI p. 27). (b) Knox, Observ. on IheAnat. of Ihe Lacteal System in iheScal and Ihe Cclacea (Edinh. Med. and Surg. Journ., d824, t. XXIF, p. 3t). (c) J. Kei<.i(j, J' série, i. VI, p. '.)[l SYSTÈME LYMPHATIQUE. tivemeiit rprganisme de tous les Animaux, tend à se creuser de vacuoles qui sont plus ou moins confluentes(l). Chez quelques Zoophytes extrêmement simples, les cavités les plus grandes qui se constituent ainsi s'ouvrent au dehors, et, en se réunissant aux autres, forment un système de canaux irréguliers répandus dans toutes les parties de l'économie et offrant partout les mêmes caractères. Tel est l'appareil irrigatoire que, chez les Éponges, nous avons vu servira la respiration (2), et que nous verrons hientùt être aussi le siège du travail digestif. Chez les Zoophytes plus élevés en organisation, tels que les Coralliaires, cet ensemble de canaux rameux à réservoir central ouvert se régularise davantage, et, dans la plus grande partie de sa lon- gueur, il se tapisse d'une tunique propre. Puis, chez des Ani- maux plus perfectionnés, les cavités dont le corps de l'embryon se creuse cessent d'être toutes confluentes , et la spécialisation s'établit primordialement entre celles qui doivent constituer l'appareil digestif et celles qui sont destinées à intervenir dans le travail irrigatoire. Ce dernier système de lacunes interorga- niques paraît être d'abord similaire dans toute son étendue, chez les Bryozoaires , par exemple ; mais, dans les organismes plus élevés, une portion de cet assemblage de cavités confluentes se canalise et donne naissance à un système de vaisseaux propre- ment dits, tandis que le reste constitue, soit la chambre abdo- minale où se loge le système de la digestion, ainsi que d'autres parties, soit les méats ou espaces interorganiques qui se trou- vent répandus entre les organes périphériques ou compris entre les fibres ou les lamelles constitutives de la plupart de ceux-ci. Ce mode d'organisation nous a été offert par les Insectes, les Crustacés etlesMollusques(3). 11 se retrouve aussi chez quelques (1) Je ne parlerai pas ici des va- (2) Voyez tome II, page 2. cuoles non confluentes qui donnent (o) Voyez tome III, page 79 et sui- naissance aux ulricules des lissus vailles, épithéliques. MODE DE DÉVELOPPEMENT. 535 Vers; mais nous avons vu que, chez les Aiinélides, un phé- nomène organogénique analogue à celui qui a déterminé la séparation primordiale des cavités digeslives et irrigatoires chez les Molluscoïdes semble avoir produit un degré de plus dans la spécialisation des vacuoles dont la substance vivante se creuse, et avoir donné naissance à des vaisseaux qui ne communiquent pas avec le système lacunaire général et qui logent le sang rouge dont la plupart de ces Animaux sont pourvus (1). Dans l'embranchement des Vertébrés, cette tendance à la division du travail se prononce davantage, et non-seulement les cavités dont l'organisme en voie de développement se creuse forment dès l'origine trois systèmes parfaitement distincts, savoir, un système digestif, un système circulatoire et un sys- tème lacunaire général ; mais ce dernier s'individualise aussi dans ses différentes parties, et constitue, d'un côté les cavités viscérales dont les parois se tapissent de membranes isolantes, ou tuniques séreuses, et d'autre part les aréoles interorganiques ou cellules du tissu conjonctif dont il a été question dans l'avant- dernière Leçon (2). Enfin, par un travail organogé- nique analogue à celui qui a amené la formation de l'appareil circulatoire chez les Mollusques et les Annelés , ce système lacunaire profond tend à se diviser en deux parties de plus en plus distinctes entre elles , savoir, l'appareil lympliatique et le système aréolaire du tissu conjonctif. Chez les Batraciens, cette séparation n'est qu'à peine ébau- chée, et les lacunes constitutives du système lymphatique ne se régularisent que rarement de façon à représenter des tubes vasculaires; elles conservent pour la plupart la forme d'espaces irréguiiers ou de lacunes, comme nous en avons trouvé dans (1) Voyez tome III, page 239 cl siii- (2) Voyez ci-dessus, page 399. vantes. IV. 35 536 SYSTÈME LYMPHATIQUE. l'épaissear de la tunique externe des artères ehez la Grenouille, et dans les parties périphériques du système elles ne paraissent avoir pour parois que la substance conjonctive d'alentour; niais dans les parties centrales de l'économie où les courants lymphatiques sont plus rapides, elles se revêtent d'une couche épithélique , et leurs parois se condensent en forme de mem- brane en même temps que leur trajet se régularise et que leur disposition devient de plus en plus tubulaire (1). Or, pour se former une idée générale et juste du système lymphatique chez les Vertébrés supérieurs, dont l'étude nous occupe plus spécialement en ce moment, il faut, ce me semble, considérer cet appareil comme étant analogue à l'assemblage de cavités interstitielles qui, chez les Batraciens, a été de la sorte distrait; du système lacunaire général ou système aréolaire du tissu conjonctif , mais perfectionné davantage , conformément aux tendances organogéniques dont je viens de parler, c'est-à- dire isolé et individualisé plus complètement. Les vacuoles étoilées que M. Kôlliker a vues se creuser dans la substance de la queue du Têtard et se transformer ensuite en canaux lym- phatiques, me paraissent être analogues aux vacuoles irréguliè- rement confluentes, mais plus vastes, qui se produisent dans la substance conjonctive, et qui, en se développant d'une autre ma- nière, forment les aréoles séreuses de ce tissu ; ces dernières lacunes circonscrivent extérieurement les lamelles et les filaments de cette matière gélatineuse que les médecins désignent d'ordi- naire sous le nom de tissu cellulaire, tandis que les espaces lym- phatiques occupent l'intérieur d'une partie de ces mêmes brides ou lamelles. Nous nous trouvons donc conduit à considérer les lymphatiques comme appartenant essentiellement à la substance conjonctive et comme affectant d'abord la forme de lacunes confluentes, puis celle de vaisseaux dont les parois se conso- (1) Voyez ci-dessus, page l\62. RACINES OU BRANCHES d'oRIGINE. 557 lident de plus en plus et se revêtent intérienrenient d'une couche de tissu utrieulaire, analogue à colle de îoutes les autres cavités d'une origine analogue, quand elles atteignent un cer- tain degré de développement. La conciie membrani forme et homogène qui porte cette tunique épithélique, et qui se montre à nu dans les dernières ramifications des vaisseaux de cet ordre, ne serait donc que la portion de substance conjonctive au miheii de laquelle s'est creusée la vacuole génératrice du canal, et l'analogie nous porterait à admettre à priori que, même chez les Animaux où la structure de ce nouveau système vasculaire se perfectionne le plus, on doit trouver des parties où la forme aréolaire persiste et où la substance fondamentale de l'appareil reste seule. Nous pouvons prévoir aussi que l'ana- tomie nous fournira des exemples de tous les degrés inter- médiaires entre ce mode de constitution simplement caverneuse et la forme tubulaire que nous avons déjà rencontrée dans presque toute la portion du système lymphatique de l'Homme et des Mammifères. Enfin, d'après le mode centrifuge de crois- sance observé dans le développement de ces vaisseaux par l'habile micrographe dont je viens de citer les travaux, nous devons nous attendre aussi à rencontrer cette forme aréolaire dans les parties les plus jeunes du système lymphatique, c'est- à-dire dans les parties périphériques de cet appareil. § 6. — Ces parties extrêmes, que les anatomistes appellent d'ordinaire les racines du système lymphatique, sont difficiles à ,ynlphaiTquo. étudier et môme à apercevoir; mais tout ce que nous en savons est piirfaitement d'ac(îord avec les résultats auxquels l'analogie vient de nous conduire. Ainsi M. Jirijcke, en observant an microscope l'origine des vaisseaux lym[)hatiqnes dans la tunique mucpicusc de l'inlcstin, (piand ces conduits étaient remplis d'un chyle laili!ux, a vu (ju'ils naissaient au milieu de la substance amorphe et conjonc- live de cette membrane, sous la forme de la<'unes dont l'asscm- Racincs 5o8 SYSTÈME LYMPHATIQUE. blage roprésente un réseau sans paroi membraneuse distincte : ces vacuoles se groupent ensuite autour des petites artères, de façon à leur constituer souvent une gaine analogue à celle qui s'étend jusque sur les gros troncs chez les Batraciens (1) ; mais bientôt elles s'en séparent et se régularisent sous la forme de tubes membraneux qui affectent la disposition dendroïde dont j'ai parlé précédemment. Un réseau composé d'aréoles irrégulières et confluentes , plutôt que d'un lacis de vaisseaux proprement dit, est aussi le point de départ des lymphatiques dans d'autres parties de l'or- ganisme, et il me paraît probable que, dans la plupart des cas, les racines de ces vaisseaux ne sont autre chose que des lacunes de la substance conjonctive ; mais il est à présumer aussi que ces lacunes ne sont pas toujours anastomosées en manière de réseau et restent parfois isolées de la plupart des cavités adja- centes, de façon à constituer des canaux terminés en cul-de- sac (2). Dans certains cas , on a cru les voir s'ouvrir directe- (1) M. Briicke a trouvé que, chez le tique, au lieu d'entourer le vaisseau Lapin, les canaux ou espaces lympha- sanguin, côtoie celui-ci. Cette dernière tiques des parois de Tinteslin logent disposition est prédominante chez la quelquefois dans leur intérieur, non- Souris (aj. seulement une arlériole, mais aussi (2) La plupart des anatomistes qui, la veine satellite de ce vaisseau. Sou- de nos jours, ont fait une étude appro- vent la cavité commune, ainsi dispo- fondie des lymphatiques, considèrent sée, semble tendre à s'oblitérer sur ces vaisseaux comme naissant d'un les lignes de jonction de ces deux réseau de canaux ou de cellules, c'est- vaisscaux et à constituer de la sorte à-dire de vacuoles confluentes qui ne deux canaux latéraux qui confluent communiqueraient nulle part, ni avec seulement de loin en loin, de façon à l'extérieur, ni avec les vaisseaux san- représenter une sorte de lacis; enfin, guins (6). dans d'autres points, l'espace lymplia- Ainsi, en résumant ses observations (a) Briicke, Ueber die Chylusgefâsse und die Résorption des Chylus {Mém, de l'Académie de Vienne, 1854, t. VI, p. 127). (6) Henle, Traité d'anatomie générale, t. II, p. 84. — Van dcr Haegcii , Mémoire sur une question de médecine : Quelles sont les dispositions du système lymphatique exlialant et inhalant dans les membranes séreuses, p. 3 i'i {Annales des tmiversités de Belgique, 2° année, 1843). ■ — Van Keinpen, Manuel d'anatomie générale, 4851, p. 115. — Sappey, Traité d'anatomie descriptive, t. I, p. 589. — Burggraeve, Histologie, 1843, p. 3:26. RACINES OU BRANCHES d'oRIGINE. 5o9 ment au dehors, soit à rexlrémité des villosités de la membrane muqueuse de l'intestin, soit à la surface de la peau: mais je ne pense pas que celte disposition se rencontre dans l'état normal, et le système lymphatique, de même que le système circulaloire, dont il est pour ainsi dire une dépendance , me paraît être par- faitement clos chez tous les Animaux supérieurs (1). sur la structure du système lympha- tique chez l'Homme et divers Ani- maux, tels que le Chieu, le Cheval, le Porc, le Bœuf, le Lapin, la Marmotte, l'Ours et même les Oiseaux , M. Pa- nizza dit : « Ho certificato i segiienli » fatli : 11 sistema linfatico, con.side- » rato anche nella sua più minuta n decomposizione, si dimosira sem- » pre in relicelle le une sovrapposte » aile allre, via via più minule e sem- » pre conlinue,senzacommunicazione » visibile col capillare sanguigno, an- » che quando l'injezione è microsco- » pica (a). » (1) Quelques anatomistes ont pensé que les lymphatiques naissaient à la surface de la peau par des bouches béantes. Ainsi Haase, en faisant avan- cer du mercure dans ces vaisseaux, à l'aide de la pression exercée par le manche d'un scalpel, a vu des gouUe- leltes de ce métal sortir par des ori- fices situés sur celte surftce (/j), mais toutes les recherches les mieux faites tendent à prouver que ce résultat ne pouvait dépendre que de ruptures, et que dans l'état normal les lympha- tiques cutanés n'ont aucune commu- nication directe avec l'extérieur (c). L'existence d'un ou de plusieurs orifices lymphatiques à l'extrémité des villosités de la tunique muqueuse intestinale a été admise par un plus grand nombre d'observateurs, mais ne me paraît pas plus réelle. Lors- qu'on examine au microscope un de ces petits prolongements , on y dis- tingue en général assez nettement un canal central qui fait partie du sys- tème lymphatique; et, ainsi que nous le verrons dans une autre partie de ce cours, on y reconnaît souvent la pré- sence du chyle. Lieberkiihn croyait avoir constaté que ce conduit, entouré par un lacis de vaisseaux sanguins, se terminait en une ampoule située à l'extrémité libre de la villosité et per- cée d'un ou de plusieurs pertuis (d). Ilewson, tout en réfutant les obser- vations de Lieberkiihn , relatives à l'ampoule dont je viens de parler, admit sans conteste l'existence des orifices béants comme formant l'ori- gine des vaisseaux lactés (e). Vers la fin du siècle dernier, Sheldon , CruiUshank et iledwig décrivirent ces racines ouvertes à peu près de la (a) r-anizM, Dello aasorbimcnto venoso (Memor deli' Instiluto Lombnrdo, 1843, 1. 1, p. iM). (U) llaase, De vasis cutis et inteslinoncm absorbent iOus plcxlbusiiue lijmph. pelvis humani, annotai, anat. I.ipsi-j;, nSii, p. A et i?iiiv. (c) Brescliel ol l'.oiissel du Vair/ènio, llecherches analoniique.'i cl iihysmlouhiucx sur les niiimrnis ti'fiumenlnires des Miiinatix, ISSI, 2° s('i-ic, t. Il, p. 20«. (ci) l-i<,'ljcikiilin, Disserl. anal, pliys. de fabrira el ficliniia vUloruvi iiileslinoruiii leiuiiUDi hominis. Anisicid., 170(1, p. i otsiiiv. (e) Ht'Wson, dp. ril., cliup. \ {Works, y. Iftl), Tissus qui 540 SYSTÈME LYMPHATIQUE. Puisque la formation des radiculeslymphatiques semble être sont (k^pourvus duc à la structure caverneuse des éléments histogéniques de la lymphatiques, substance conjonctive, nous pouvons prévoir que ces vaisseaux ne doivent pas surgir des parties de l'organisme où cette sub- stance ne se rencontre pas (1). Or, l'cpiderme et les autres même manière (a). Mais aujourd'hui que les moyens d'investigation ont été perfectionnés, on a pu se convaincre que les anatomistes dont je viens de parler avaient mal interprété quelque apparence illusoire, et que les vilio- sités ne sont pas percées au bout (6). Ainsi M. Goodsir a eu Toccasion d'exa- miner les préparations sur lesquelles Cruikshank avait cru voir les orifices en question, et il s'est assuré qu'il n'y existait en réalité rien de sem- blable (c). (1) Mon ancien ami et collabora- teur, feu Gilbert Breschet, me paraît avoir exprimé à ce sujet une opinion très juste , lorsqu'il a dit : « Le tissu cellulaire est, ànos yeux, le point prin- cipal d'où les vaisseaux lymphatiques surgissent; c'est le sol dans lequel leurs racines s'implantent, et dans la profondeur duquel elles se ramifient avec des caractères et des formes particulières. Si nous voyons des vais- seaux lymphatiques sortir de la sub- stance de beaucoup d'organes , c'est que le tissu cellulaire en constitue la base, la trame première. En effet, les organes dans la composition desquels ce tissu n'entre point ne donnent naissance à aucun lymphatique : tels sont les ongles , les cornes , l'épi- derme , les cheveux , l'émail des dents, etc. {d). » Quelques auteurs pensent que les brides et les lamellesdu tissu cellulaire ou conjonclif sont formées essentielle- ment de vaisseaux lymphatiques (e), et les recherches d'Arnold leur semblent favorables à cette manière de voir; car cet anatomiste a trouvé dans le tissu conjonctif des environs du globe de l'œil des lacis très riciies de ca- naux de cet ordre (/"); mais cette opinion n'est pas admissible aujour- d'hui que les recherches microsco- piques sont venues montrer que sou- vent ces mêmes brides ne sont pas creuses et ne consistent qu'en traînées d'une substance amorphe subgélati- neuse ({/). Les lymphatiques sont tou- jours formés par la substance con- jonctive, mais la réciproque n'est pas vraie, et toutes les parties du système (a) Sheldoii, Hist. of the Absorbant System, 1784, p. 32. — Cruikshank, Op. cit., p. H 8 et suiv. — Hedwig, Disquisilio ampullarum Lieberkûhn physico-microscopica. Lîpsia3, 1797. (b) Rudolphi, Einige Beobacht. ûber die Darmxottcn (Reil's Archiv fur Physiologie, 1800, t. IV, p. 66 et suiv.). — A. Meckel, Ueber die Villosa des Menschen und einiger Thiere (Deutsches Ai'chiv fur die PhysioL, 1819, t. V, p. 163). (c) Goodsir, Structure and Funclions of Intestinal Villi {Anatom. and PhysioL Observ., p. 4, pi. 1, fig. 5 et G). (d) Brescliet, Le système lymphatique considéré sous les rapports anatomique, physiologique et pathologique, p. 21. (e) Cruveilhier, Traité d'anatomie descriptive, 1843, t. HI, p. 126. {f} Arnold, Anat. undphysiol. Untersueh. ilber das A^l^e, 1832. (g) MandI, Anatowie microscopique, t. I, p. 290. Tissus qui en possèdent. RACINES OU BRANCHES d'oRIGINE. 5/ll tissus utriciilaires, dits épithéliques , ne renferment pas de tissu conjonctif; aussi n'y trouve-t-on pas de vaisseaux de cette espèce : mais, dans presque tous les organes où ce tissu se ren- contre en plus ou uioins grande abondance, on est parvenu à injecter des vaisseaux lymphatiques, et, dans les membranes qui sont composées essenliellement de substance conjonctive , les couches profondes des séreuses, par exemple, les canaux de' Membranes S6rCUS6S cet ordre, sont si nombreux qu'ils paraissent former presque à eux seuls la substance de ces tissus (i ) . conjonctif ne se creusent pas en con- duits lymphatiques. D'après ce que je viens de dire, on voit que je considère comme non moins exagérée l'opinion diamétrale- ment opposée à celle de Bieschet et d'Arnold, qui a été soutenue dernière- ment par quelques auteurs, au dire desquels les réliculations dont il vient d'être question n'appartiendraient pas au système lymphatique , et dépen- draient seulement du système aréo- laire général (a). Ainsi M. Sappey pense que le tissu conjonctif ou cellu- laire et tous ses dérivés sont dépour- vus de lymphatiques {b). (1) Les belles injections pratiquées par Àlascagni avaient porté cet anato- miste à penser que les séreuses et même tous les autres tissus blancs de l'économie étaient formés seulement de vaisseaux lymphatiques (a) ; mais les progrès de riiistologic rendentcetle opinion impossible à soutenir aujour- d'hui. On sait, en eflet, que les sé- reuses sont composées de plusieurs couches; que leur surface libre est formée pardu tissu épithélique pavi- menteux ; qu'au-dessous de cette lame utriculaire se trouve une substance amorphe et presque gélatineuse, et que, plus profondément, on rencontre du tissu conjonctif qui, condensé superficiellement, devient de plus en plus aréolaire et se confond avec celui des parties circonvoisines auxquelles ces membranes adhèrent. Or, la couche épithélique est dépourvue de lympha- tiques, et comme plusieurs auteurs considèrent les séreuses comme n'é- tant formées que par cette même couche, ils disent que ces membranes ne donnent naissance à aucun vais- seau de cet ordre {d); mais tous les analomislessont d'accord pour recon- naître que dans les couches profondes il existe un réseau lymphatique des plus riches, et l'on sait que pour l'in- jecter, il suffit de piquer celles-ci avec la pointe du Uibe effilé qui contient le mercuKC, et de laisser couler ce métal dans les aréoles du tissu conjonctif. Un voit alors le mercure se répandre en couches minces sous l'épilliélinm (û) Millier, Manuel depliynlologic, liad. par .ioiinlaii, I, 1, p. litii. {b) Sappey, Tr/iilé d'anatomie descriptive, 1. 1, |i. 002. (c) Ma.scajî'ii, Vasorum lymplialiinrurn liisinr. et ironogr., [>. OTi, pi. 1, litî-, 2. (rf) Sappey, TraiU- d'analoviic de.srriptivr, I. (, p fi'.lO. Derme, 542 SYSTÈME LYMPHATIQUE. Il en est à peu près de même pour la couche sous-épider- mique de la peau. Fohmann a fait voir que la surface du derme séreux ; et si l'on examine à la loupe une de ces plaques argentées, on re- connaît que l'injection n'est pas répan- due d'une manière uniforme, mais est contenue dans un réseau irrégulier de petites cavités plus ou moins lubuli- formes(a). D'après les recherches de M. Berres, ce serait dans les interstices compris entre les granules constitutives de la couche amorphe sous-épilhéliqne que naîtraient les lymphatiques, et ces lacunes se transformeraient peu à peu en canaux qui s'uniraient h ceux de la couche conjonctive sous-jacente (5). Cette dernière couche paraît occupée presque entièrement par des cavités du même ordre. D'après Arnold et Fohmann, les aréoles, ou cellules de cette partie des membranes séreuses, seraient toutes des cavités radiculaires lymphatiques (c). Fohmann a repré- senté ces réseaux dans le péricarde et le péritoine (c?). M. Lambolte, comme je l'ai déjà dit, considère les réseaux blancs des membranes séreuses comme étant en continuité directe non-seulement avec les troncs lymphatiques, mais aussi avec les capillaires artériels et vei- neux , de façon à constituer un sys- tème intermédiaire entre les vaisseaux sanguins et les vaisseaux lymphatiques proprement dits (e). Les lymphatiques des poumons constituent sous la plèvre viscérale un réseau variqueux très remarqua- ble , dont l'existence n'avait pas échappé h Mascagni, et dont la dis- position a été étudiée avec beaucoup de soin par M. Jarjavay (/"). La nature du réseau de lacunes irrégnlières, que divers anatomisles ont injecté à la surface du cerveau, entre la pie-mère et l'arachnoïde, est plus problématique : la plupart des auteurs qui en ont fait une étude attentive les considèrent comme ap- partenant au système lymphatique (g); mais on n'a pu les suivre jusque dans dos ganglions ou dans des vaisseaux bien caractérisés, et quelques observa- teurs pensent que ce sont seulement des cellules ou aréoles du tissu con- jonctif commun {h). (a) 4833, (b) (c) id) (e) if) 4" séi (a) {h) Fohmann, Mdm. sur les lymphatiques de la peau, des membranes muqueuses, séreuses, etc., p. 19. Berres, Anatomie der mikroscopischen Gebilde des menschlichen Kôrpers, 1830, p. 134. Van der Haegen, Op. Cit., p. 294 et siiiv. {Annales des universités de Belgique, 1843). Arnold, Anatom. und physiol. Untersuchungen ûber das Auge des Menschen, 1832. Berres, Op. cit., p. 87. Folimann, Mém. sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, etc., pi. 8 et 9. Lambotle, Op. cit. {Bulletin de V'Acad. de Bruxelles, t. VII, p. 164). Jarjawiy, Mémoire sur les lymphatiques du, poumon {Archives générales de médecine, ■ie, t. XIII. p. 70). Mascagni, Op. cit., p. 63. Folimann, Mém. sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, etc., p. 24, pi. 10. Arnold, Bemerlmng ûber den Bau des Hirncs und Riïckenmarks, p. 105, cl Tabulœ anato- , fasc. 1 , pi. 1 , fig-. 1,2; fasc. 2 , pi. 2, fig-. 1 , 7. Breschct, Op. cit., pi. 1, fig. 4. Van der Hae^en, Op. cit., pi. 13 (Aiin. des universités de Belgique, 1843), Ruyscli, Epistola nona, p. 8 et 12, pi. 10, et Thés, anal., VII, tab. 2, fig-. 2. Sappey, Op. cit., t. I, p. 004. RACINES OU BRANCHES D ORIGINE. 5/i3 est occupée en majeure parlie par un reseau de canaux lym- phatiques qui percent en tous sens cette limique, et forment aussi à sa face interne un lacis des plus riches (1). Dans celte portion périphérique du système , il n'existe généralement pas de valvules, et l'on peut injecter ces vaisseaux à rebours aussi bien qu'en poussant le liquide des radicules vers les troncs. Dans quelques parties du corps , les capillaires de cet ordre sont si abondants, que , pour arriver dans l'intérieur de ce réseau de cavités tubuliformes, il suffit de piquer au hasard la substance du derme, et la totalité du système lacunaire des tégu- ments semble y appartenir -, mais ailleurs ils sont ou moins abondants ou moins faciles à injecter (2). Enfin, dans le cordon (1) Les anatomisies appellent lieu tl^éieclion , pour les injeclions , ces parties où le réseau lymphatique des téguments communs est le plus déve- loppé. Cette disposition organique est très remarquable à l'exlrémité des doigts et des orteils, surtout de chaque côté de la base de l'ongle, sur la ligne médiane de la tète, sur le scrotum, autour du mamelon, sur le prépuce et le gland, et généralement au pour- tour des orifices par lesquels la peau se continue avec les muqueuses {a). (2) La grande abondance des lym- phatiques à la surface du derme a été constatée par Laulh. Sur le cadavre d'un homme mort d'anasarque , il injecla ces vaisseaux avec du mercure, et obtint ainsi sur divers points des taches grises qui, an premier abord, paraissaient ducs à des épanchements continus ; mais qui, examinées avec .soin, se montraient sons la forme d'un réseau des plus fins. Ayant fait macérer la peau pour en détacher l'épiderme, il vit que les canaux ainsi remplis de métal étaient à nu sur le chorion, et si rapprochés, qu'on n'aurait pas pu y placer la pointe d'une aiguille sans en intéresser quelques-uns. Ces réseaux communiquaient avec les branches ascendantes du système lymphatique, et, par leur intermé- diaire, se reliaient aux parties cen- trales de cet appareil vasculaire (6). Fohmann a vu aussi que, dans les préparations où l'injection avait bien réussi, les lymphatiques de la peau étaient si nombreux, que le derme semblait en être formé entièrement. Le réseau constitué par ces canaux perce cette membrane dans tous les sens, et forme à ses deux surfaces un lacis serré. Les lymphatiques du ré- seau superficiel sont d'une ténuilé extrême; mais ceux qui se trouvent plus profondément augmentent de volume, et donnent naissance à des (a) Voyez S.'ipp.-y, Thhe Hur l'iiijcrUun des vaisseau. t, lymplintiqurs. l';ii-is, 1813. {b) I.aiilli, l'^Hsni sur les vnisscuvx lumpluiliiiucs. Slf,i>l)oin>:, ISili, |i. 15. 5/t/i. SYSTÈME LYMPHATIQUE. ombilical du fœtus, la portion radiculaire du système lympha- tique se rapproche encore davantage de ce que nous avons vu chez les Yertébrés à sang froid , car elle est constituée par une réunion de grandes lacunes ou aréoles du tissu con- jonctif sous-cutané qui forment une gaine autour des vaisseaux sanguins (1). Ljmphaiiqnes Lcs radicclles lymphatiques des membranes muqueuses ^'LquliTs"'' affectent à peu près la même disposition que celles de la peau (2). Dans une autre partie de ce cours, j'aurai l'occasion branches nombreuses qui, en s'unis- sant , constituent une couche sous- cutancc où les valvules commencent à se montrer (a). Fohmnnn ajoute que la peau de Torelile des Lapins blancs est particulièrement favorable pour ce genre de préparation. (1) Ce mode d'organisation a été constaté par Fohmann dans l'espèce humaine aussi bien que chez plu- sieurs autres Mammifères. Chez le Cheval , la gaîne lymphatique qui renferme les vaisseaux sanguins du cordon ombilical , ainsi que leurs branches placentaires, est peu subdi- visée, et communique avec le canal thoracique par des branches logées dans les parois de l'abdomen. Chez les Ruminants, la disposition de ces conduits est à peu près la même que chez le fœtus humain, et le cordon ombilical se compose principalement d'un plexus très fin de vaisseaux ou de cellules qui renferment la matière connue sous le nom de gelée de ^]'harton, et qui embrassent le faisceau des vaisseaux sanguins. Ces canaux sont dépourvus de val- vules (6). ('2) Au commencement du xviii'siè- cle, lUiysch remarqua l'apparence vas- culaire que le tissu aréolaire, situé sous la conjonctive, présente lorsqu'on l'injecte au mercure (c). Arnold en a donné une figure (d). Les lymphatiques de la muqueuse intestinale et des voies génito-url- naii'es ont été étudiés très attentive- ment par Fohmann. Cet anatomiste les décrit comme étant très semblables à ceux du derme cutané, mais plus difiiciles à injecter. Ils sont égale- ment dépourvus de valvules et for- ment 5 la surface de ces membranes des lacis à mailles très serrées qui me paraissent avoir le caractère d'une (a) Folimann, Mémoire sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, des membranes muqueuses, séreuses, du tissu musculaire et nerveux. Liège, 1833, p. 2, pi. 1 (réseau lymptiatique de la peau du sein), pi. 2 (réseau lymphatique de la peau de la verge et du scrotum). (b) Fohmann, Ueber die Saugadern im Fruchtkuchen und Nabelstrang des Menschen (Tiede- raann's Zeitschr. fur Physiologie, -1832, t. IV, p. 276). — Mémoires sur les communications des vaisseaux lymphatiques avec les veines et sur les vaisseaux absorbants du placenta et du cordon ombilical, 1832, p. 23. (c) Ruysch, Thés, sec, p. 6, note X. ((/) Arnold, Tabulœ anatomica:, fasc. i, pi. 2, flg. 1. RACINES OU BRANCHES d'oRIGINE. 545 de m'arrôter davantage sur ce point de leur histoire anato- mique, et, pour terminer ce qui me paraît nécessaire de dire ici touchant l'origine de ce système vasculaire, il ne me reste plus qu'à ajouter que les lymphatiques se voient en grand nombre dans les muscles (1) et les glandes (2), aussi bien ({ue dans les membranes , et qu'on est parvenu à en con- réunion de lacunes interorganiqiies plutôt que d'un assemblage de vais- seaux (a). Les plexus et les troncs qui en nais- sent sous la membrane muqueuse du gland et du canal de Turèlbre ont été très bien étudiés et figurés par M. Panizza (6). Il est du reste à noter que les rela- tions de ces réseaux blancs du tissu muqueux avec les vaisseaux lympha- tiques bien caractérisés n'ont pas été toujours suffisamment démontrées, et quelques anatomisles considèrent les espaces irréguliers d'apparence vas- culaire qui sont injectés de la sorte comme n'appartenant pas à cet ap- pareil , et dépendant seulement du système aréolaire du tissu conjonclif ordinaire (c). (1) Leslymphatiquesdudiaphragme ont été étudiés par plusieurs anato- mistes , tels que lUidbeck, Nuck, Cruiksbank et .'\lascagni(c/); Foliinann en a l'ait de nouveau un examen at- tentif, et dernièrement ils ont été l'objet, de recherches nouvelles faites par M. Sappey (e). D'après Fohmann, ils sont plus faciles à injecter chez le Chien que chez l'Homme. Les lymphatiques des muscles su- perficiels sont plus difficiles à obser- ver; mais les faits constatés par Rnd- beck, Bartholin, Ilewson, M. Sappey et d'autres, ne laissent aucune incer- titude, quant à l'existence de ces vaisseaux. Il est aussi à noter que les lympha- tiques forment des mailles autour des fibres musculaires dont ils suivent la direction, et qu'ils sont dépourvus de valvules (/). (2) Les lymphatiques du foie sont très développés , et quelques bran- ches de ces vaisseaux paraissent avoir été aperçues par Fallope, fort long- temps avant la découverte des chyli- leres pur Aselli (g). Ceux de la portion superficielle de ce viscère se dirigent vers sa sur- (a) Voyez les figures données par Folimann dans son Mémoire sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, etc., et repréfenlant le réseau superficiel de la muqueuse dans l'œsopliage et l'estomac (pi. 3), dans l'inlestin (pi. 4), (i;in.i la (radiée (pi. 5), et dans la vessie (pi. G). {b) Panizza, 0.isevvax,ioni anlropo-zoolomlco-fisiologlche, p. 9 et suiv., pi. 4, lig. 2 el 3. (c) Sappey, Traité d'anatomie descriptive, t. 1, p. 595. {d) Hudljeck, Nova exercit. anal, exhibens ductus hepalis aquosos el vasa glandularwn gerosa, dO.53. — Cruiksliank, Op. cit., p. 302. — Mascagni, Op. cit., pi. 21 et 20. (e) Foliniann, Mémoire sur les vaisseaux lymphatiques de la peau, etc., p. 27. — Sappey, Op. cit., t. I, p. 000. (/■) Brcschct, Op. cil,, p. 38. ((/) Voyez l'iit lai, Histoire de l'anatomie, t. I, p. r)S5. 546 SYSTÈME LYMPHATIQUE. stater la présence dans presque toutes les parties de l'orga- nisme (1). Relations § 7. — D'après les détails anatomiquesque je viens de pré- organiques _ i i ti des vaisseaux scntcr, OU voit qu'il ne paraît y avoir aucune continuité ou sanguins et communicalion anastomotique directe entre le système capillaire lymplialiques. . v sanguin et les racines du système lymphatique ; mais on a pu voir aussi que le réseau d'aréoles ou de lacunes plus ou moins luhuliformes où ce dernier appareil prend naissance a des face (a) et y rampent, puis se portent sur le diaphragme ou gagnent direc- tement les ganglions situés au devant de l'aorte. Ceux des parties profondes se partagent en deux groupes : les uns marchent parallèlement à la veine porte, et se rendent aux ganglions voisins ; les autres côtoient les veines hépatiques en les embrassant d'un réseau, puis traversent le diaphragme, et se jettent dans les ganglions sus- diaphragmatiques, pour aller ensuite se terminer dans le canal ihoracique. Les autres glandes parfaites, telles que le pancréas, les parotides, etc., donnent également naissance à de nombreux vaisseaux lymphatiques. Dans les testicules , ces vaisseaux offrent un développement remarqua- ble (6). Enfin , on en voit aussi qui émergent des glandes imparfaites , du corps thyroïde , du thymus, de la rate, etc. (1) L'existence de lymphatiques dans les os paraît avoir été constatée par plusieurs anatomistes, tels que Cruikshank, Sœmmering, Breschet et M. Gros (c), mais est très difficile à mettre en évidence el paraît douteuse à quelques auteurs {d). M. Burggraevc a injecté des réseaux lymphatiques très riches dans le périoste (e). La présence de lymphatiques n'a pas été démontrée dans la substance du système nerveux (f) ; mais, ainsi que je l'ai déjà dit, on a injecté sur la surface du cerveau, et même dans les ventricules de ce viscère, des conduits qui paraissent faire partie de ce sys- tème ig). [a) Voyez Mascagiii, Op. cit., pi. i , fig. 0, et pi. 2, fig. 9. (b) Voyez Panizza , Osservazioni antropo-z-ootomico-fisiologiche , p. ■) 6 et suiv., testicule de l'Homme, pi. 5, fig. 3 ; pi. 8, fig. 4, 5, 6 ; — du Chien, pi. 5, fig. 2, et pi. 8, fig. 2 et 3 ; — du Taureau, pi. 5, fig. 1 ; pi. G et 7 ; — de l'Ours , pi. 5, fig, 4 et 5 ; — ^ et de la Loutre, pi. 2, fig. 6. ' (c) Criiikshank, Op. cit., p. 378. — Sœmmering, De corporis humanl fabrica, t. V, p. 395. ■ — Breschcl, Le système lymphatique, p. 40. — Gros : voyez Sappey, Op. cit., t. I, p. 612. (rf) Sappcy, Op. cif., 1. 1, p. 611. (e) Burggraeve, Histologie, 1844, p. 495. {f'i Heiile, .^natomie (jênérale, t. II, p. 86. {g) Voyez ci-dessus, page 542. — Pour les recherches des anciens analomisles à ce sujet, voyez Hal!er, Ekmenta physiolngiœ, 1. 1, p. 1 77. COMMUNICATIONS AVEC LKS VlilNES. 5^7 relations intimes avec cette portion jjériphérique de l'appareil circulatoire ; que les canaux capillaires où le sang circule ne sont séparés des cavités radiculaires du système lymphatique que par des parois extrêmement minces, formées d'un tissu très perméable ; enfin que ces aréoles entourent souvent en manière de gaine les artérioies. Nous pouvons donc comprendre que la transsudation des liquides doit se faire avec une grande facilité des parties termi- nales du système artériel dans les cavités radiculaires du sys- tème lymphatique, et que, dans certaines parties de l'organisme, sinon partout, cette espèce de filtration doit même s'opérer plus aisément que celle dont l'étude nous a occupés dans l'avant- dernière Leçon, et dont les résultats sont l'exlravasation d'une portion des hquides nourriciers dans les aréoles du tissu con- jônctif ou dans les grandes cavités que ce tissu tapisse. Ce pas- sage des liquides des artérioies dans les lymphatiques peut d'ailleurs être constaté à l'aide des injections. Si l'on pousse successivement dans l'appareil circulatoire d'un Mammifère , d'un Chien, par exemple, une dissolution de chromate de potasse , puis de l'eau chargée d'acétate de plomb , on trou- vera les lymphatiques colorés en jaune par le chromate de plomb insoluble, qui se sera précipité dans l'intérieur' de ces derniers vaisseaux aussi bien que dans les artères et dans les veines. Souvent des résultats analogues s'obtiennent par des injections mercurielles, et le passage des liquides d'une artère dans les lymphatiques adjacents se démontre également bien au moyen des expériences hydrotomiques de Lacauchie, méthode d'investigation dont j'ai fait mention dans la dernière Leçon (1). Or, ce qui a lieu de la sorte sur le cadavre, peut se constater aussi chez l'Animal vivant, et le mécanisme de ce Iransvase- (1) Voyez ci-dessus, page /iGl. 548 SYSTÈME LYMPHATIQUE. ment nous est expliqué en partie par des observations dues à M. Kolliker. En étudiant au microscope le mode d'origine des lymphatiques dans la queue des Têtards, ce physiologiste n'a pu apercevoir aucune communication préétablie entre ces vais- seaux et les artères voisines ; mais lorsque la circulation deve- nait embarrassée, il a vu souvent le sang passer de celles-ci dans les radicules lymphatiques. îl attribue ce phénomène à une altération pathologique des parois vasculaires ; mais, soit que l'épanchement sanguin ait été déterminé par une perfora- tion des tuniques vasculaires, soit qu'il ait été la conséquence d'un simple relâchement de leur tissu ou d'une augmentation dans la perméabilité de ces membranes, toujours est- il que ce fait prouve combien le passage entre les vaisseaux sanguins et lymphatiques est facile pendant la vie, car l'épanchement ne se répandait pas dans les cavités circonvoisines du tissu conjonctif, et les globules rouges ne s'introduisent que dans les vaisseaux lymphatiques (1). Perméabilité Du TCstc, il mc paraît peu probable que les communications intermédia"ire. obscrvécs par M. Kôllikcr aicut été le résultat d'une anastomose accidentelle, c'est-à-dire d'un passage direct étabh anormale- ment entre les vaisseaux sanguins et lymphatiques ; et divers faits, sur lesquels il est nécessaire de fixer maintenant notre attention, me portent à croire que le tissu interposé entre les diverses cavités dont nous étudions en ce moment le mode de relation n'est pas une membrane continue, mais une substance caverneuse comparable à ces tissus feutrés que les chimistes emploient pour clarifier les liquides dont la transparence est (1) M. Kolliker ajoute que souvent parois vasculaires, à travers lesquelles il lui a été impossible d'apercevoir les globules du sang avaient passé pour aucune trace de rupture dans les arriver dans les lympliatiques (a). (a) Kolliker, Note sîm' le. développement des tissus chez les Batraciens (Ann. des sciences nat., 1846, 3» série, t. V, p. 101). C0MM[JNICAT10NS AVEC LES VEINES, 5/|9 troublée par des corpuscules étrangers. Notre œil n'aperçoit dans le papier buvard ou dans tout autre filtre ni pores ni interstices quelconques, mais un système de lacunes irrégulières et confluentes y existe en réalité, car ces tissus se laissent tra- verser par des corpuscules solides aussi bien que par des fluides, pourvu que ces corpuscules soient suffisamment ténus ; seulement ils laissent passer les liquides plus facilement, et la matière qui s'écoule est d'autant moins chargée de ces parti- cules solides, que la substance du filtre est plus dense. Or, il en est de même pour le tissu organique qui limile les courants sanguins capillaires et qui les sépare des cavités adjacentes du système lymphatique. Si ce tissu était en réalité une membrane continue , nous pourrions concevoir le passage des fluides des capillaires sanguins dans les radicules lympha- tiques ; mais les globules hématiques du sang ne devraient jamais transsuder de la sorte, à moins de l'établissement de quelque fuite accidentelle; tandis que l'observation nous apprend que toujours, ou presque toujours, un certain nombre de ces corpuscules solides s'échappe de l'appareil circulatoire et arrive dans le système lymphatique. Des expériences très intéressantes, mais dont la plupart des physiologistes ne semblent pas avoir tenu suffisamment compte, nous apprennent aussi que la pro- portion des globules sanguins qui filtrent ainsi à travers les parois des capillaires, et qui se retrouvent dans les vaisseaux lymphatiques, varie avec le degré de pression sous lequel le sang circule dans le système vasculairc. Ainsi M. Herbst a constaté qu'il suffit d'augmenter notablement le volume du sang à l'aide de la transfusion , pour accroître non-seulement la quantité de liquide contenu dans les lymphatiques, mais poui' y rendre les globules rouges du sang beaucoup plus abondants que dans les circonstances ordinaires. On pourrait, au |)re- mier abord, objecter à cette expérience, que nous ignorons le lieu natal de ces globules hématiques, et que les corpuscules 500 SYSTÈME LYMPHATlOrt:. du même ordre qui se voient dans les vaisseaux lymphatiques pourraient bien ne pas leur avoir été transmis par le vaisseau sanguin. Mais, dans d'autres expériences analogues, M. Herbst, au lieu d'augmenter la masse des humeurs en circulation en injectant du sang dans les veines de l'Animal dont il voulait examiner ensuite le système lymphatique, y poussa du lait, et il reconnut ensuite la présence des corpuscules caractéristiques de ce liquide dans ces derniers vaisseaux. Les globules du lait avaient donc passé des canaux sanguins dans les conduits lymphatiques (1). Ainsi, quoique l'observation directe ne nous permette pas de constater de visu l'existence de voies de communication entre les parties périphériques du système sanguin et les cavités (1) M. Flerbst a varié ces expé- riences de différentes manières. Tan- tôt il injectait une quantité considé- rable d'eau tiède dans les veines d'un Chien ; et bientôt après, ayant tué l'Animal el lié le canal thoracique, il trouvait les lymphatiques fortement distendus par un liquide incolore et beaucoup plus aqueux que ne l'est d'or- dinaire la lymphe. D'autres fois il opé- rait la transfusion de façon à augmenter considérablement le volume du sang en circulation, et alors il trouvait di- verses parties du système lymphati- que distendues par un liquide rou- geâtre dans lequel le microscope faisait reconnaître un grand nombre de glo- bules rouges semblables en tout à ceux du sang. D'autres fois encore, après avoir fait jeûner l'Animal pen- dant assez longtemps pour être sûr de ne pas trouver de chyle dans les lymphatiques du mésentère, il injec- tait du lait dans les veines, et en examinant au microscope le liquide bhmchâtre dont les lymphatiques étaient gorgés, il y reconnut les glo- bules caractéristiques du lait. Enfin, dans une autre expérience, il injecta de la fécule dans les veines, et il ob- tint une coloration bleue en traitant la lymphe par l'iode. M. IJerbst ne s'ex- plique pas nettement sur le méca- nisme de ce passage de corpuscules solides des vaisseaux sanguins dans les lymphatiques, et il considère la production de la lymphe comme étant une sécrétion (a) ; mais il me semble évident qu'on ne peut s'en rendre compte qu'en admettant que les tissus constitutifs des parois de ces vaisseaux, interposés entre leurs cavités respec- tives, sont creusés de cavités con- fluentesqui établissent le passage à la manière des pores d'un fdtre. (a) Guslav Herbst, Das Lymphgefâsssystem iind seine Yerrichtung. Goltinguc, 1844, p. 62 et suiv.). COMMlIiMCATIOMS AVKC LliS VEINES. 551 radiciilaires du système lymphatique, les résultats tournis par les expériences physiologiques me semblent prouver clairement que le passage des uns dans les autres est établi à l'aide d'un tissu spongieux analogue à un fdtre, et remplissant son rôle de séparateur d'une manière plus ou moins parfaite, suivant les conditions dans lesquelles il fonctionne. Le passage des capillaires sanguins dans les parties péri- phériques du système lymphatique étant si facile, nous pouvons prévoir que si la charge sous laquelle les liquides coulent dans l'appareil circulatoire est supérieure à celle que supporte le contenu des lymphatiques , ces liquides doivent tendre à tra- verser la cloison filtrante interposée entre ces deux ordres de canaux et à passer en plus ou moins grande quantité des pre- miers dans les seconds. Or, cette différence de pression existe, et elle est même très grande. Nous avons vu dans une précé- dente Leçon que le sang exerce une poussée très forte contre les parois des vaisseaux centrifuges (i) ; mais il n'en est pas de même pour le liquide contenu dans les vaisseaux lymphatiques; la colonne manométrique qui fait équilibre à cette pression n'est même pas moitié aussi haute que celle dont l'ascension est déterminée par la poussée du sang en mouvement dans les veines, et elle n'égale pas le dixième de la hauteur de celle qui nous a donné la mesure de la pression développée dans les artères (2). Il en résulte donc qu'une force mécanique considé- (1) Voyez ci-dessus, page 23/t. des Chiens, à Taide d'un tube mano- (2) Ou doit à MM. Ludwig et Noil métrique chargé d'une dissolution de quelques expériences sur la pression carbonale de soude, et elles montrent sous laquelle la lymphe se meut dans qu'en i;énéral la poussée du courant le grand tronc lymphatique cervical, ne fait équilibre qu'à une colonne de qui, au côté droit, tient lieu du canal ce liquide haute de lli à 26 milli- Ihoraciquo. Elles ont été laites sur mètres {a). (a).Noll, Ueber deii Lymjihsirom in deii Lijiiiiilcjefasscii. {Zeilschrift filr raliuncUe Medicin, 1850, l. IX, p. 63 cl»uiv.). IV. 36 55"2 SYSTÈME LYMPHATIQUE. rable doit tendre sans cesse à pousser une partie des liquides nourriciers de l'intérieur des vaisseaux sanguins dans les cavités radiculaires du système lymphatique. § 8. — D'après cet ensemble de faits, nous pouvons donc prévoir aussi que la lymphe, c'est-à-dire l'humeur contenue dans l'ensemble de ce dernier système, et qu'il ne faut pas confondre avec le chyle qui est versé dans quelques parties du , même appareil par le travail de la digestion; que la lymphe, dis-je , doit avoir de l'analogie avec le sang, mais doit être beaucoup plus pauvre en corpuscules solides. Effectivement, il en est ainsi , et tous les faits connus concordent à établir que ce liquide provient du sang par transsudation. Cependant le phénomène mécanique dont je viens de rendre compte ne semble pas être le seul qui détermine la production de la lymphe, car celle-ci n'est pas identique avec le plasma du sang, et d'autres forces semblent devoir intervenir également pour y donner les caractères qui s'y observent. Cela ressortira des faits dont je me propose de rendre compte dans la prochaine Leçon. QUARANTE -DEUXIÈME LEÇON. De la lymphe ; constitution physique et composition chimique de ce liquide. — Origine du plasma lymphatique, des globules blancs et des globules rouges qui s'y trouvent. — Cours de la lymphe. — Causes de ce mouvement. — Quantité de lymphe reversée ainsi dans l'appareil de la circulation. § 1. — Jusque dans ces derniers temps, l'étude de la lymphe présentait d'assez grandes difficultés, car sur le cadavre on ne trouve que fort peu de ce liquide dans les vaisseaux lymphatiques, et sur les Animaux vivants il paraissait difficile d'en obtenir des quantités un peu considérables, sans qu'il lut mélangé de sang ou d'autres humeurs (1 ) . On était donc réduit à profiter de quelques affections morbides très rares, dans lesquelles un vaisseau de ce genre, situé près de la surface de la peau et devenu variqueux ou presque anévrysmatique, s'était ouvert extérieurement et versait au dehors la lymphe qui y afiluait (2). Mais depuis quelque Maiiièro de recueillir la lymphe. (l) J. Millier conseillait l'emploi de Grenouilles vigoureuses, dont il inci- sait la peau vers le haut de la cuisse, en ayant soin d'éviter, autant que pos- sible, la lésion des vaisseaux sanguins adjacents (a) ; mais la quantité de lym- phe qu'on obtient de la sorte est très faible. Magendic et Collard de Marligny se sont procuré soit du chyle, soit de la lymphe chez le Chien, en inci- sant la partie antérieure du canal iho- racique au cou [h). Plus ancienne- ment, Flandrin avait essayé de faire usage d'un moyen plus efficace, et, après avoir lié le canal thoraciquc d'un Cheval , il introduisit dans ce vaisseau un tube pour lui permettre de recueillir la lymphe ; mais le tube ne tarda pas à s'obstruer, et l'expé- rience ne donna que des résultats assez faibles (c). (2) MM. Marchand et Colberg ont fait des observations de ce genre chez (a) Millier, Observ. sur l'analyse de la lymphe, du sanij, clc {Ann. des sciences val., 1834, 2' .série, t. 1, p. 340). (b) M;i(,'cntlie, l'vdcis élémenlaire de pitysinlogie, t. Il, p. 171 (éilil. Je 182.'»). -— Collaril lie M;irli(;ny, lieclicrches expérimentales sur les rjfi Is île l'iibslinence, etc. ; sur la composUliin el la (inanlilé du san(j et de la li/mphe {Journal de ]iliu.Hol(iuie de Mii^'eiidio, iK2H, i. Vin, p. 1.".2). (c) Haridiin, Expériences sur les vaisseaux lymphaliqucs des Animaux {Journal de médecine i;. ■iu^j. (c) Voyez lomc I, p.'urc 128 et suiv. (d) \V. Piicliarilsfin, 'J'Iie Caîise of tlie Coagulation of Itie Hlood. I,oinlres, 1K58. (e) briicke, Au Kssay on Ihe Cav,se of Ihe Coaijulalioii of ttie lllood (llrilish and Foreign Med. CIdr. Iteview. l«57, l. XIX, p. 183). - - Uebev die Ursache der Gerinnung des lllutcs {Arcliiv fur palhol. Anal., 18.'i7, 1. XII). Globules lymphatiques. 556 SYSTÈME LYMPHATIQUE. du reste, les mêmes propriétés chimiques que le caillot du sang, et se compose essentiellement de fibrine (I) qui englobe dans'sa substance les corpuscules solides que ce liquide char- riait. En effet, quand on examine au microscope de la lymphe non coagulée, on y aperçoit un assez grand nombre de globules qui nageni; dans un plasma transparent (2). La plupart de ces cor- puscules sont sphériques et incolores. Leur diamètre varie entre itô à 2^0 de millimètre. Dans l'état normal, ils paraissent être presque homogènes ou seulement un peu granulés, et l'on ne distingue que très vaguement à leur centre un noyau arrondi -, théorie de M. Hichardson a été com- battue par M. Zimmermann [a) ; elle me semble réunir cependant en sa faveur beaucoup de probabilités, et il est à espérer que de nouvelles expé- riences viendront bientôt lever toutes les incertitudes à cet égard. (1) La coagulation spontanée de la lymphe ne s'opère que lentement. En général, elle ne commence que quinze ou vingt minutes après l'extraction du liquide, et ne devient complète qu'au bout de trente ou quarante minutes, quelquefois même davan- tage. Dans l'intérieur des vaisseaux, ce phénomène ne se produit pas, lors même que le cours du liquide se trouve interrompu (&). (2) L'existence de ces corpuscules dans la lymphe a été signalée par Hevvson ; mais jusqu'à une époque récente, soit que les microscopes ne fussent pas assez perfectionnés, soit que les physiologistes n'eussent pas assez d'habileté dans l'emploi de ces instruments, on ne connaissait que très imparfaitement la composition mor- phologique de ce liquide. En effet, llewson considéra les globules de la lymphe comme étant les noyaux des globules du sang, destinés à se revêtir plus tard d'une enveloppe colorée (c), et Magendie disait formellement qu'ils étaient semblables à ces globules rouges {d) ; mais depuis vingt-cinq ans M. Kôlliker, M. Gulliver et plu- sieurs micrographes en ont fait une étude attentive (e). (a) Zimmermann, Gegen eine neue Théorie der Fasersloffgerinnung (Moleschott's Untersuclmn- gen ûher Naturlehre des Mensclien und der Tliiere, 1857, t. H, p. 20). (6) Colin, Recherches expérimentales sur les fonctions du système lymphatique (Mémoire inédit présenté à l'Académie des sciences en 1858). (c) Hewson, Op. cit. {Works, p. 253). (d) Magendie, Précis élémentaire de physiologie, 1825, t. II, p. 191. (e) Nasse, Untersuchungen z-ur Physiologie und Pathologie, 1835, t. II, p. 24. — Gulliver, Contrib. to the Minute Anatomy of Animais {London and Edinb. Philosophical Magazine, 1842, t. XX, p. 480). — Henle, Traité d'anatomie générale, 1. 1, p. 446, — Kôlliker, Éléments d'histologie, p. 638. CONSTITUTION DE LA LYMPHE. 557 mais si on les soumet à l'action de l'acide acétique, ils prennent l'apparence de cellules transparentes renfermant un gros noyau granuleux (1). On les désigne plus spécialement sous le nom de corpuscules ou globules lymphatiques ^ et ils ne paraissent pas différer des globules plasmiques que nous avons déjà eu l'occasion d'observer dans le sang (2). D'autres globules d'une petitesse extrême se trouvent mêlés aux précédents , et parais- sent consister seulement en particules de graisse entourées d'une mince enveloppe de matière albuminoïde. Enfin, on reconnaît aussi d'ordinaire dans le plasma de la lymphe un nombre plus ou moins considérable de globules hématiques qui réunissent tous les caractères des globules rouges du sang. On voit donc que sous le rapport morphologique , la lymphe (1) Les globules plasmiques de la lymphe varient beaucoup en gran- deur ; les plus pelils semblent être en voie de développement, et se compo- sent de granulations très fines qui entourent étroitement un noyau ar- rondi et un peu brillant. Chez ceux qui paraissent être plus avancés en âge, la portion périphérique et granu- leuse est beaucoup plus épaisse. J ar l'eiTet de l'évaporation, ainsi que par l'action de dissolutions salines concen- trées, ils perdent une partie de leur eau de constitution et diminuent nota- blement de volume; souvent ils pren- nent alors une forme éloilée. Chez rilonime, ils ont, d'après M. Koilikcr, de 0""",005 ou 0""",007 à 0'""',012, ou niéme un peu plus en diamètre (a). Les recherches de M. Gulliver font voir qu'il n'existe aucune relation entre les variations qui s'observent clans la grandeur des globules héma- tiques du sang chez les divers Mam- mifères, et les caractères de ces glo- bules lymphatiques chez les mêmes Animaux. Ainsi ce micrographe a con- staté que ces corpuscules plasmiques sont presque aussi gros chez le Che- vrotain que chez l'Homme. Il résulte aussi des observations de M. Gulliver, que les globules plasmiques de la lymphe sont en général un peu plus petits chez les Oiseaux que chez les Mammifères, tandis que chez la Gre- nouille leur volume est au contraire plus considérable (ô). M. Nasse a donné aussi les mesures micrométriques de ces globules chez divers Mammifères (c). (2) Voyez tome I, page 72. (a) Kijllikcr, Éléments d'hislolnyie, p. G38. (b) Voyoz les noie» (|ui; M. Giillivor a ajoutées à l'édilion des Œuvres du Ilcwsoil puljliôo pai- la Société Sydenham ilo I,ondrcs (Huwbon's Works, p. 244). (c) Na»»e, art. l,VMi'iiii (Wagricr's llandwërtcrbuch der l'hysiolpyic, 1844, l. 11, p. WH). chimique. 558 SYSTÈME LYMPHATiaUË. ressemble singulièrement à du sang qui serait très pauvre en éléments organiques. Les résultats fournis par l'analyse chimique viennent con- firmer ce rapprochement. Composition Effcctivcment, la lymphe, de même que le sang, est de l'eau tenant en dissolution ou en suspension, de l'albumine, de la fibrine, des matières grasses et des matières salines. Elle donne aussi des réactions alcalines. Les sels qu'on en retire sont les mêmes que ceux du sérum du sang , et se trouvent associés entre eux dans les mêmes proportions que pour ce dernier liquide, ou dans des proportions qui n'en diffèrent que d'une manière insignifiante (1); mais ils sont mêlés à une moindre quantité de matières organiques. Enfin la quantité relative d'eau varie beaucoup, mais paraît être toujours supérieure à celle qui se trouve dans le sérum. On en pourra juger par l'exemple suivant. M. Lassaigne, professeur de chimie à Alfort, a fait dernièrement l'analyse de la lymphe de Vache, recueillie dans des circonstances très favorables, et a trouvé dans ce liquide : Eau 96-i,0 Albumine 58,0 Fibrine 0,9 Matières grasses 0,^ Chlorure de sodium 5,0 Carbonate, phosphate et sulfate de soude. 1,2 Phosphate de chaux 0,5 1000,0 Dans le liquide fourni par l'un des vaisseaux lymphatiques (1) Ce fait a été nettement établi en dissolution dans ces deux liquides ; par les recherches de M. Nasse sur semm. Ljmpi.e. la lymphe du Cheval. Ce physiologiste Chlorures 4,055 -i.lSS a analysé comparativement du sérum Carbonates .... d,l50 t,l35 et de la lymphe provenant du même Sulfates o,3m o,233 individu, et il a obtenu les résulta tssui- Phosphates .... 0,ii5 0,120 vants pour les sels à bases alcalines 5, on 5,62i (a) (a) Nasse, Ueher die Bestandtheile dev Lymphe (Simon's Beitrage %ui' physiol. und palhoL Chemie und Mikroscopie, '1844, 1. 1, p. 456). COMPOSITION DE LA LYMPHE. 559 des membres abdominaux d'un Ane, M. Rees a trouvé aussi 96 centièmes d'eau (1), et dans un produit d'origine analogue provenant du pied d'un Cheval, M. Geiger a constaté l'existence de plus de 98 centièmes d'eau (2). Chez le Chien, M. Chevreul a rencontré une proportion un peu plus forte de matières solides {?)). Enfin, chez l'Homme, la proporlion d'eau paraît La lymphe de Vache, dont j'ai rap- porté l'analyse ci-dessus , a été obte- nue à l'aide d'une fistule pratiquée par M. Colin ; elle paraissait èlre très pure, et l'animal était dans de bonnes conditions fa). (1) Cette analyse donna : Eau 965,36 Matières albumineuses. ... 12,00 Fibrine 4,20 Matières extractives solubles dans l'alcool 2,40 Matières extractives solubles dans l'eau 13,19 Sels 5,85 Quelques Iracos de graisse (6). (2) La lymphe de Cheval analysée par M. Geiger était fournie par un cas pathologique. Elle a donné : Eau 983,7 Albumine 6,2 Fibrine 0,4 Matières extractives 2,7 Sels 7,0 (f) De la lymphe du Cheval recueillie par M. Colin à l'aide d'une fistule établie au tronc cervical du côlé droit a été analysée par M. Clément, et a donné : Eau 957,208 Fibrine 0,511 Albumine 33,034 Matières grasses 0,287 Sels solubles 8,960 Quelques traces de fer. Dans la lymphe des vaisseaux du cou d'un autre Cheval , M. Lassaigne a trouvé seulement U25 milHèmes d'eau et beaucoup plus de matières protéiques , savoir : plus de 3 mil- lièmes de fibrine et 57 millièmes d'al- bumine (d). Dans doux analyses de la lymphe du Cheval faites plus anciennement par M. Gmelin, la proporlion d'eau était moins considérable ; elle est descendue à 961, et, dans une ana- lyse semblable faite par Emmert, elle n'était que de 960 pour 1000. La proportion de fibrine a varié entre 1,3 et 3; enfin, celle de l'albumine était de lZi,8 dans un cas, et de 27,5 dans un autre {p). (3) Ce chimiste a trouvé dans la lymphe retirée du canal thoracique {a) Colin, l'Im.iioloriic cnmpavde des Animaux domestiques , t. II, p. 111. (/() l'.ees. On Chyle and l.ymph {London Médical Gazelle. I 840, 1841 , t. I, p. 517). (c) fJei;,'CT, Analyse von Lymphe [Avehiv (tir physioloijisclic lleilkunde, 1846, t. V, p. 39). {d) Colin , Hccherches expérimenlales sur les fondions du système lymphatique (Mfîinoira inédit). (e) Voyez Nasse, art. I.ymimif. (VVa^cncr's llandworlerhuch der l'hysloloyie, t. II, p. 396). 560 SYSTÈME LYMPHATIQUE. varier entre 92 et 97 pour 100 (1), tandis que dans le sérum nous avons vu que la proportion normale de cette substance est de 90 pour 100 (2). d'un Chien qu'on avait fait jeûner pendant deux jours : Eau 926,4 Albumine 61,0 Fibrine 4,2 Chlorure Je sodium 6,1 Carbonale de soucie 1,8 Phosphates terreux, etc. . . . 0,5 (a) Une analyse qualitative faile par P.ergmann s'accorde à peu près avec les résultats obtenus par M. Chè- vre ul (6). M. Collard de Alartigny a obtenu par l'analyse de la lymphe recueillie de la même manière chez un Chien, après vingt -quatre heures d'absli- nence : Eau et sels 940 Albumine 57 Fibrine 3 (t) (1) Voyez tome I, page 226. (2) L'Uérilier a analysé la lymphe trouvée dans le canal ihoracique du cadavre d'un Homme qui n'avait pris aucun aliment pendant trente-six heures avant sa mort, il y trouva : Eau 924,3 Albumine 60,2 Fibrine 3,2 Maliôres grasses 3,1 Sels 8,2 (d) Chez un Homme qui avait au pied une fistule lymphatique, le liquide épanché au dehors par celte voie contenait, suivant l'analyse faite par MM. Marchand et Colberg : Eau 969,2 Albumine 4,3 Fibrine 5,2 Osmazôme 3,1 Matières grasses 2,5 Sels 12,4 (e) Dans la lymphe fournie par une ouverture accidentelle des lympha- tiques cutanés du pied chez une femme, MM. Quevenne et Gubler ont trouvé à deux époques différenles : Eau PREMIÈRE ANALYSE. DEUXIÈME ANALYSE. 939,87 42,75 0,56 13,00 934,77 42,80 0,63 12,60 Matières albuminoïdes , phosphates terreux, etc. Fibrine Sels, etc (ft) Voyez Magendie, Précis élémentaire de physiologie, 1825, t. Il, p. 192. (6) Voyez Nasse, Ueber die Lymphe (Zeitschrift fiïr Physiologie von Treviranus, 1832, t. V, p. 31). (c) Collard de Martigny, Recherches expérimentales sur les effets de l'ahstinence, etc. (Journal de physiologie deMagendie, 1828, t. VIII, p. 182). (d) L'Héritier, Traité de chimie jmthologique, p. 18. (e) Marchand et Colberg, Op. cit. (Mûller's Archiv fiir Anat. und Physiûl., 1838, p. 133). ORIGINE DE LA LYMPHE. 561 La fibrine , qui donne ù la lymphe la propriété de se coaguler sponlanément quand elle est sortie de l'organisme, se trouve souvent en aussi grande proportion dansée liquide que dans le plasma du sang ; mais l'albumine est toujours beaucoup moins abondante, et parait être associée à une plus forte proportion de soude (1). 11 est aussi à noter que la lymphe proprement dite est d'ordinaire pauvre en matières grasses; mais, comme nous le verrons bientôt, elle en charrie beaucoup dans quelques parties du système, à la suite du tra- vail digestif. Jusque dans ces derniers temps on n'avait pas signalé la présence de l'urée dans ce liquide; mais M. Wùrtz vient d'y découvrir une certaine quantité de cette substance (!2). Enfin la lymphe contient aussi un peu de sucre (3). § 2. — D'après cet ensemble de faits, nous devons être portés origine , . de la lymphe. à considérer la partie fluide de la lymphe comme étant du plasma du sang qui se serait échappé des capillaires du système cir- Parmi les matières extractives nié- l'eau et par l'alcool, contenaient une lées aux sels, il y avait des traces de proportion remarquablement élevée sucre (a). de carbonates alcalins (c). Une analyse analogue, faite par La lymphe du Cheval étudiée par M. Scherer, a donné : M. Geiger ne donnait pas de réaction ggy gg^ QQ alcaline, mais ne se coagulait pas par Matières fixes 42 40 l'ébuUition ; elle ne contenait pas de caséine, mais paraissait renfermer un Albumine oi maiières cxirac- aibuminale basique de soude ((/). érieurs, l'idée d'un système de lacunes intcrmolécu- laires, ou d'aréoles n)icroscopi(|ues analogues à ces (^avités (-1) Voyez ri-(lf'ssiis, pages 5129 et 530, note. 57/i SYSTÈME LYMPHA'flÙtJË. irrégulières et confluentes dont nous avons vu l'appareil irriga- toire se composer en totalité ou en partie chez les Animaux intérieurs, nous aurons, je crois, une notion juste du mode d'organisation de cette portion de la machine vivante. La vérité de cette théorie, toute mécanique, delà production de deux liquides distincts , la sérosité et la lymphe , aux dépens d'une seule et même humeur, le plasma du sang, ne me paraît pas pouvoir être démontrée dans l'état actuel de nos connaissances, mais elle réunit en sa faveur tant de probabilités, que je la pré- sente avec confiance, et je suis persuadé que les découvertes futures en prouveront l'exactitude (1) ; mais dans un ensei- gnement classique, on ne doit accorder que peu de place à de simples vues de l'esprit , et je me hâte de rentrer dans le domaine de l'observation directe. Mouvement § 3. — La lymphc, comme je l'ai déjà dit, n'est pas stagnante dans' le système daus Ics vaisscaux qui la renferment, mais coule de toutes les ymp aique. j^^^^^^jj^g ^^ l'organismc vers les gros troncs situés dans le voisi- nage du cœur, et se déverse ensuite dans l'appareil circulatoire ; mais ce mouvement centripète n'est pas rapide comme celui du sang dans les veines, et la plupart de ces conduits, au lieu d'être complètement remphs de liquide comme les vaisseaux sanguins, sont toujours plus ou moins affaissés sur eux-mêmes. Quand on ouvre largement le canal thoracique , on voit la lymphe (1) Je citerai, à l'appui de ceue opi- cette opération, ry\nimal était encore nion, une expérience très intéressanle vivant, et M. Briiclie trouva quelapres- faite par M. Briiclie sur une Tortue que totalité du plasma du sang était (Ëmys europœa ) vivante. Ayant sortie de l'appareil circulatoire et ac- poussé une quantité considérable d'air cumulée dans le grand réservoir lym- dans la veine sous-clavière , il vit le phatique ou citerne de Pecquet. Les gaz se répandre dans les artères; il globules rouges étaient restés dans lia ensuite la veine et replaça le plas- les vaisscaux sanguins, mêlés à une tron sur les viscères. Trois jours après petite quanlité de plasma (a). (a) Briicke, An Essay on tlie Cause of the Coarjulation of the Blond [Brilish and Forelgn Med. and Chintrg. Revkiv, 1837, t. XIX, p. 185). COUUS DE LA LYMPHE. 575 s'épancher au dehors sous la forme d'une nappe; mais lorsqu'on pratique seulement une petite fente vers la partie teruiinale de ce tube, il en sort souvent un jet assez considérable. La force du courant est même si grande, que si on lie le canal thoracique, on voit le vaisseau se distendre beaucoup au-dessous du point oblitéré, et la poussée latérale de la lymphe devient parfois tel- lement considérable , que les parois du tube se rompent pour livrer passage au liquide (1). Du reste, nous ne savons encore que fort peu de chose sur les agents qui produisent ce mouve- ment de progression. Chez les Vertébrés inférieurs, où les lymphatiques ne possèdent pas de valvules, nous avons vu qu'il existe des réservoirs contractiles en communication avec ces vaisseaux (2), et l'action de ces espèces de pompes fou- (1) Dans beaucoup de cas, la lym- phe s'écoule cl'ua tronc dans un autre avec assez de facilité, pour que Tob- stiuction complète d'un de ces vais- seaux ne soit suivie que d'une aug- mentation médiocre dans la poussée du liquide en amont de l'obstacle. Ainsi, dans les expériences de M. Noil, sur la parlie lerminaie du grand vais- seau lymphatique cervical du côté droit, l'oblitéra lion du canal en aval du point d'application du tube mano- mélrique n"a déterminé que très gra- duellement, dans la hauteur de la colonne de solution de carbonate de soude, une augmentation de 13 à 10 millimètres (a). M. Colin a fait r(;ccmnient de nou- velles expériences sur les elfeis de la ligature du canal thoracique, et il a constaté qu"apiès l'oblitiiralion com- plète de la portion terminale de ce vaisseau, les liquid(;s qui y arrivent peuvent souvent passer très facile- ment dans le tronc lymphatique du côté droit du cou, et de là dans les veines, tandis que d'autres fois ces communications ne sont pas suffi- santes, et alors l'opération entraîne des conséquences très graves. Cela explique la grande discordance des résultats obtenus par divers expéri- mentateurs, quand ils faisaient la liga- ture du canal thoracique chez diffé- rents Animaux (6). Nous reviendrons sur ces expériences quand nous nous occuperons de l'absorption du chyle.*' (2) Ces cœurs lymphatiques, ainsi que je l'ai déjà dit, sont pourvus de valvules qui garnissent leur entrée aussi bien que leurs orifices de sortie, et qui empêchent le reflux du liquide pressé par la contraction de Ictus parois (c). A chaque luouvement de systole de ces organes, la lymphe ron- l(!iiue diiiis leur intérieur doit donc (a) NoIl, Ueber den Lymphslrom {Zeitschr. fiir ralionclle Medlcin, 1850, t. I\, p. r.2). (6) Colin, Itecherches expérimentales sur le système Ijimphatiqtœ (Mijnioiiu nnuiii.icril), (c) Voyez ci-dessud, page 40(;. 576 SYSTÈME LYMPHATIQUE. lantes suffît pour rendre compte du courant centripète ; mais chez l'Homme et les autres Mammifères, il n'y a rien de sem- blable, et plusieurs forces paraissent être mises en jeu pour effectuer cette portion du travail irrigatoire (1). La plupart des physiologistes attribuent principalement le cours de !a lymphe à une force d'impulsion que ce liquide aurait reçue dès son entrée dans le système de vaisseaux où il être poussée dans le système veineux. Ils battent d'une manière rhythmique, et Millier les a vus se contracter envi- ron soixante fois par minute chez la Grenouille (a). (1) M. Volkmann a fait diverses expériences sur les relations du sys- tème nerveux cérébro-spinal avec ces cœurs lymphatiques chez la Gre- nouille. 11 a reconnu que les batte- ments de ces organes cessent lors- qu'on coupe les racines antérieures des nerfs rachidiens correspondants, mais ne sont pas arrêtés par la sec- tion des racines postérieures ; ce qui tend à établir que ces contractions ne sont pas de l'ordre des mouvements sympathiques ou réflexes. 11 a vu aussi que la destruction de l'encéphale et de la portion moyenne de la moelle épinière ne détermine pas l'arrêt des battements de ces réservoirs lym- phatiques ; tandis que la destruction de la portion supérieure de cette partie du cordon rachidien paralyse les cœurs cervicaux, et celle de la portion postérieure du même centre nerveux fait cesser les pulsations dans les cœurs ischiatiques (b). Mais ce serait à torique l'on considérerait ces organes musculaires comme tirant leur principe d'action des centres ner- veux, car si on les rescise avec pré- caution, on les voit parfois continuer à battre pendant assez longtemps, après avoir été séparés du reste de l'organisme (c). Les expériences de M. Heidenheim ne me paraissent pas infirmer cette conclusion : cependant elles tendent à établir que les mouvements rliylhmi- ques des réservoirs lymphatiques sont coordonnés par l'action de la moelle épinière [d], M. Schiif a fait aussi des expériences sur l'influence que le système cérébro- spinal exerce sur ces organes, et il a vu que la section des nerfs rachidiens de la dixième paire détermine un arrêt plus ou moins prolongé dans leur action ; que la section des nerfs rachidiens de la neuvième, de la hui- tième ou même de la septième paire produit souvent des effets analogues, mais moins marqués, et que ce repos est temporaire; enfin, que la destruc- (a) Millier, Manuel de physiologie, t. I, p. 202. (b) Volkmann , Beitrag zur ndhern Kenntniss der motorischen Nervenwirkungen (Miiller's Arch. fur Anat. und Physiol., 1845, p. 415 et siiiv.). (c) Valenlin, Grundris s der Physiologie, p. 565. [dj Heidenheim, Disquisitiones de nervis organisque centralibus cordis, cordiumque Banarum lymphaticornm, experimeniis illuslratœ. Berlin, 1854. COURS DE LA LYMPHE. 577 s'avance. Il est facile de s'assurer que ce vis a tergo n'est pas une conséquence directe du mouvement circulatoire déterminé par le cœur, et l'on s'accorde assez généralement à penser que la progression de la lymphe est due à la puissance avec laquelle l'absorption s'effectue par les extrémités radiculaires du sys- tème lymphatique, c'est-à-dire à la pression exercée par les liquides qui pénètrent dans ces radicules, et qui pousseraient devant eux l'humeur préexistante dans ces mêmes tubes (l); mais jusqu'ici nous ne savons que fort peu de chose sur la puissance mécanique engendrée de la sorte, et quoi qu'il en soit à cet égard, il me semble évident que le courant dont les vaisseaux lymphatiques sont le siège dépend, au moins en grande partie, d'autres causes. En effet, on sait depuis longtemps que les vaisseaux Ivmpha- contmcdons ' ' , des vaisseaux tiques se resserrent et se vident spontanément, quand, à l'aide lymphaiiques. d'une ligature ou par tout autre moyen, on empêche de nou- tion de la moelle allongée est suivie des lymphatiques ne sont ni assez d'une accélération dans les pulsations larges, ni assez directes pour que la de ces mêmes poches lymphali- poussée latérale du sang dans le sys- ques (a). tème circulatoire puisse èlre la cause M. Hyrtl a constaté que la destruc- principale du cours de la lymphe dans tion de la moelle épinière ne modifie les vaisseaux blancs, pas notablement l'action du cœur lym- On sait, d'ailleurs, par les cxpé- phatique caudal de l'Anguille (6). riences de M. Krause, que la grandeur (1) Quelques physiologistes ont de cette poussée n'influe que peu sur pensé que la progression de la lym- la pression sous laquelle ce dernier phe, comme celle du sang dans les liquide se meut. Ainsi, la ligature des veines, était déterminée par Fimpul- artères carotides ne détermine pas une sion donnée au liquide nourricier par diminution notable de celle pression les contractions du cœur (c) ; mais les dans les troncs lymphatiques cervi- communicalions entre les branches eaux [d). terminales des artères et les racines (a) Scliifr, Vortaufige berner hun yen ûber den tiinfluss der Nerven auf die Deweguny der Lymphherzen {Zcilschr. fur ralionelle Medicin, 1850, t. IX, p. 259). (6) Mjril, .Sur les Hinus caudal cl céphalique des l'oissons (Ann. des sciences nat., 1843, •série, t. XX, y. 215). (c) lii-jaii, On the PUysiology of Ihe Lacteal System {The Lancet, 18i5, t. I, p. 400). (d) Krause, Zur Physiologie der F.ymphe {Zeitschr. fur ralionelle Medicin, 1855, l. VII, )i. 148). 578 SYSTÈME LYMPHATIQUE. velles quantités de liquides d'y affluer. Or, la colonne de fluide qui se déplace ainsi se trouve soustraite à la poussée centripète qui serait due à l'absorption dont les parties périphériques du système peuvent être le siège ou à toute autre force développée en amont de l'obstacle ainsi créé : et ce resserrement, qui se manifeste en aval de cet obstacle, n'est pas déterminé seule- ment par l'élasticité des parois vasculaires ; car ce phénomène ne se produit pas de même sur le cadavre (1), et, ainsi que je l'ai déjà dit, les parois de ces vaisseaux sont douées d'une sorte d'irritabilité musculaire. Les mouvements qui s'y effectuent sont lents et de l'ordre de ceux que j'ai décrits sous le nom de contraclions toniques^ lorsque j'ai traité des propriétés phy- siologiques des vaisseaux sanguins; mais on peut les exciter à l'aide du galvanisme (2), et chaque fois qu'ils se manifestent, ils doivent contribuer à pousser la lymphe vers la région (1) Ainsi MM. Hedemann et Gmelin dans les vaisseaux lymphatiques a été ont remarqué que lorsque après avoir annoncée par Schreger, vers la fin du lié un tronc lymphatique chez un Ani- siècle dernier, mais révoquée en doute mal vivant, on y fait une ponction, le parla plupart despliysiologistes jusque liquide contenu dans ce vaisseau s'en dans ces derniers temps. Dans la Leçon échappe en formant souvent un jet précédente , j'ai rendu compte des assez fort ; mais que, après la mort, principaux faits qui tendent à établir il n'en sort que goutte à goutte {a\ quecesorganes vasculaires sont doués M. Valentin a vu aussi que, par le de contractilité (c) ; mais j'ajouterai contact de l'air et de divers autres ici de nouvelles preuves de l'existence stimulants, les lymphatiques du mes- de cette propriété dans les parois du enlère se resserrent au point dedimi- canal thoracique chez l'Homme, nuer de moitié en diamètre ou même En faisant des expériences sur le davantage, et il compare ces effets à cadavrededeuxcriminels qu'on venait ceux résultant de l'action des parois d'exécuter , MM. Ditlrich , Gerlach des veines (6). et Herz d'Erlangen {d) ont constaté (2j L'existence de celte propriété que, par la galvanisation, on peut ex- fa) Tiedemann et Gmelin, Recherches sur la roule que prennent diverses substances 'pour passer de l'estomac dans le sang, p. 4. (6) Valenlin, Ueber das Geivebe des Diictus thoracicus und der Lymphgefdsse (Repertorium fur Anat. undPhysiol., 1837, t. Il, p. 242). (c) Voyez ci-dessus, page 540. {d) DiUrich, Gerlach und Herz, Analomische und physiologische Versuche an den Leichen von zwei Hingerkhteten {Prager Vierteljahrschr. fur die prakt. Heilk., 1851, t. XXXI, p. 72). COURS DE LA LYMPHE. 579 cardiaque. En effet, nous avons vu que dans ces vaisseaux, de même que dans les veines, il existe une multitude de valvules dont la disposition est telle que le reflux de ce liquide est impossible, et que toute pression exercée sur un point quel- conque de la colonne fluide renfermée entre deux de ces espèces d'écluses doit tendre à classer celle-ci des branches vers les troncs terminaux du système. Il est probable que des contractions de ce genre se produisent de temps à autre sur divers lymphatiques, et contribuent à établir un courant dans leur intérieur; mais je dois ajouter que jusqu'ici les observa- teurs n'ont été que très rarement témoins de mouvements de cette nature ; que chez la plupart des Mammifères on n'a jamais vu de battements rhythmiques dans ces vaisseaux (1), et qu'on ne sait rien de positif sur la manière dont la contractilité propre de ces tubes intervient dans le mécanisme de la progression de la lymphe (2;. citer des contractions dans le canal ou même de contractions qui se ré- thoracique. péteraient à de courts intervalles dans MM. Kôlliker et Virchow ont ob- les parois des lymphatiques d'un serve les mêmes effets, mais à un Mammifère quelconque. Mais, ainsi moindre degré (a). que je l'ai déjà dit , M. Colin vient (1) Mojon a cru avoir vu un mouve- de constater des phénomènes de cet ment pérlstallique dans les lympha- ordre chez le Bœuf (d). tiques du mésentère 16); mais cette (!2) J. Millier et Schwann ont cher- observation a été infirmée par les ché si les lymphatiques ne seraient pas recherches multipliées de presque pourvus de cils vibratiles dont l'ac- tous les physiologistes qui se sont tion concourrait à déterminer les cou- occupés d'un sujet analogue (c) ; et ranls centripètes dont ces vaisseaux jusque dans ces derniers temps je sont le siège, mais ils n'ont pu aper- ne connaissais aucun exemple bien cevoir aucun indice d'organes de ce avéré de mouvements rhythmiques, genre (e). (a) Kôlliker iind Virchow, lleber einige an der Leiche eines Ilinyerichteten angeslelUe Versuchc und /leobachlimyen [Verhandlungen der phys.-med. Gesellschaft in Wûrzburg , 1850, t. I, p. 319). ((() Millier, Manuel de -physinlogic, Irad. par .(ourdaii, t. I, p. 212. (c) Voyez Hrcseliet et Uousscl do V.iuzèmo, Recherches aw les apimreils tégumcntaires des Animaux (Anii. des sciences nal., 1834, 2' série, t. Il, p. 230). (d) Voyez ci-dessus, page 511. (e) Millier, Manuel de physiologie, trad. par .[ourdan, t. I, p. 212. circonvoisins. 580 " SYSTÈMt; LYMPHATIQUE. Influence § 4. — Lcs coiitractions intermittentes dont les parties circon- déterminér voisines sont le siège eontribuent souvent d'une manière plus les muscles évideute à accélérer le cours de la lymphe (1). Nous verrons plus tard que, pendant une partie delà durée du travail digestif, les appendices filiformes ou villosités de la membrane muqueuse de l'intestin grêle se raccourcissent et s'allongent alternative- ment ; or ces organes renferment dans leur intérieur une portion du système radiculaire de l'appareil lymphatique, et les mouvements qu'ils exécutent doivent tendre à y faire pro- gresser les liquides contenus dans ces vaisseaux (2). Tout ce que j'ai dit dans une Leçon précédente, au sujet de l'influence des muscles de la locomotion sur le cours du sang dans les veines, est également apphcable à la progression de la lymphe; et lorsqu'on fait écouler ce liquide au dehors au moyen d'une fistule, on le voit aftluer en plus grande abondance à l'orifice des vaisseaux, toutes les fois que les muscles de la partie dont ce tronc provient entrent en action. On doit ranger aussi, au nombre des forces adjuvantes qui interviennent pour déterminer la progression de la lymphe;, les battements des grosses artères qui côtoient le canal thoracique (1) Lieberklihn a remarqué que (2) Les mouvements de contrac- les contractions vermiculaires de l'in- tion, de flexion , de raccourcissement testin déterminaient un mouvement et d'allongement des villosités intes- progressif dans le liquide contenu tinales ont été décrits à peu près en dans la portion correspondante des même temps par Lacauchie (6) et par vaisseaux lymphatiques du mésentère, MVI. Gruby et Delafond (c). M. Briicke et que ce courant cesse quand le les a également observés {d). Nous mouvement péristallique s'arrête {a). aurons bieutôt à revenir sur l'étude M. Poiseuille a constaté le même fait. de ce phénomène. (a) Lieberkùhn, Dissert, anat.-physiol. de fabrica et actione viUonun intestinonm lemmm hominis, 1760, p. 25, '26. • , ,• 7 //- (6) Lacauchie, Mémoire sur la structure et lemode d'action des villosités intestinales (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t. XVI, p. 1195). (0 Gruby et Delafond, Résultats de recherches faites sur l'anatomie et les fonctions des villo- sités intestinales, etc. [Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1843, t. XVI, p. 1195). (d) Briicke, Ueber die Chylusgefâsse und die Résorption des Chijlus [Mém, de l'Académie de Vienne, 1854, t. VI, p. 111). Influence des COUKS DE LA LYMPHE. 581 et les autres parties du systèaie lymphatique. En effet, chaque fois qu'une artère, en se dilatant ou en changeant de position, presse sur le vaisseau lymphatique voisin, elle doit produire sur celui-ci un effet analogue à celui qui résulterait de la contraction intermittente de ce vaisseau lui-même; et l'on peut s'expliquer de la sorte l'utilité de la disposition de la portion terminale du canal thoracique que nous avons vue contourner les troncs artériels adjacents, et quelquefois même les embrasser. Mais la pression intermittente développée de la sorte est en général trop faible pour influer notablement sur le cours de la lymphe (1), Les mouvements respiratoires exercent une influence beau- coup plus grande, sur la progression de ce liquide et concourent ™7j~'' à produire le même résultat, soit que le thorax se dilate, soit qu'il se contracte. Dans l'inspiration, une pression négative s'étabht autour de la portion sus-diaphragmatique du canal thoracique, et tend à y faire affluer la lymphe contenue dans la portion abdominale de ce tube et dans ses branches latérales. Le mouvement du liquide des parties périphériques du système vers ce canal terminal se trouve donc accéléré chaque fois que le thorax se dilate; puis, quand cette cavité se contracte pour chasser l'air des poumons, le vaisseau qui vient de se gorger de lymplie se trouve comprimé ; les valvules qui en occupent la portion périphérique ne laissent pas refluer le liquide, et celui-ci ne peut s'en écbappcr qu'en s'avançant vers la veine (1) ilaller allriljiuiit iinc. grande; vue des clioc.s que ce vaisseau doil i mportance aux elîets produits sur le subir dans le point où il est obligé de canal iboracique par les battemcnis croiser la direction de celte artère de l'aorle, et il pensait rpie vraisem- près de la base du cou (a). Cruikshank blablement l'insertion de ce conduit généralisa ces conclusions, mais sans du côté gauclie était déterminée en y attacbcr une grande valeur {h}. (ai llallc.r, l-Jkmenla pJiysMuy'ui:, t. VII, p. 2;î7. (b) Cruiksliank, Anat, des vaisseaux lymphaliqucs , (>. 327. Vitesse du courant lymphatique. 582 SYSTÈME LYMPHATIQUE. sous-clavière et en s'y déversant. Aussi, quand on met à nu Ja portion terminale du canal thoracique dans la région cervicale, la voit-on se gontler chaque fois que l'Animal fait une expiration profonde ; et lorsque après avoir lié l'embouchure de ce vaisseau, on pratique en amont de l'obstacle une petite ouverture, l'effet des contractions du thorax devient encore plus sensible, car alors on voit souvent, à chaque mouvement de ce genre, le jet grandir, ou bien la colonne liquide s'élever dans le tube manométrique, si l'on ajoute un de ces instruments à l'orifice du tronc lymphatique. M. Colin, à qui l'on doit beaucoup d'expériences intéressantes sur la progression de la lymphe, a très bien constaté ces faits, et il a vu que l'accélé- ration du courant est d'autant plus grande, que la respiration est plus laborieuse (1). § 5. — D'après diverses expériences dans lesquelles on avait ouvert largement la poitrine pour observer sur des Animaux vivants le cours de la lymphe dans le canal thoracique, on pensait généralement, jusque dans ces derniers temps, que le mouvement de progression de ce liquide de la périphérie de l'organisme vers les gros troncs veineux voisins du cœur était extrêmement lent, et que cette humeur n'était versée, pour ainsi dire, que goutte à goutte dans le torrent de la circulation. Mais les observations faites depuis quelques années dans des circonstances moins anormales montrent qu'il en est tout autrement, et que la quantité de lymphe qui va ainsi sans cesse (1) Dans les expériences faites par cique une série de pulsations parfai- M. Colin, sur les Chevaux et d'aulres tement synchroniques avec les efforts grands Mammifères, la sortie de la d'expiration. En plaçant un tube ver- lymphe était souvent rendue saccadée tical dans ce vaisseau, il a vu aussi le par les mouvements respiratoires, et liquide s'élever à chaque mouvement ce physiologiste a pu observer dans d'expiration et s'abaisser pendant les la porlion cervicale du canal thora- inspirations (a). (a) Colin, Traité de physiologie comparée des Animaux domestiques, t, II, p. 90. (JOURS DE LA LYMPHE, 583 se mêler au sang est en réalité fort grande. Elle s'accroît beau- coup à la suite de la digestion, comme nous le verrons bientôt; mais dans tous les temps elle est considérable. Pour s'en con- vaincre, il suffit d'ouvrir le canal thoracique à la base du cou, et d'y placer une canule de façon à établir dans ce point une fistule lymphatique qui débouche à l'extérieur. M. Colin a fait souvent cette expérience à l'École vétérinaire d'Alfort , et a vu que, chez le Cheval, il s'écoulait ainsi au dehors plus d'un demi-kilogramme de lymphe par heure, et quelquefois même plus du double de cette quantité. Chez le Bœuf, le courant est plus rapide, et une seule des branches terminales du canal thoracique a fourni parfois près de 2 kilogrammes de lymphe par heure, ou même davantage. Chez une jeune Vache, où la totalité de la lymphe et du chyle s'écoulait au dehors, on a recueilli environ 30 litres de ces liquides dans l'espace de vingt- quatre heures, et chez un autre Animal de la même espèce, dont la croissance était terminée, M. Colin a obtenu de la sorte 95 litres de ce mélange, dans le même espace de temps (1). (1) Dans une première expérience On trouve, dans l'ouvrage de M. Co- faite sur un Cheval âgé de dix ans , lin sur la physiologie des Animaux récoulement de la lymphe plus ou domestiques, beaucoup de détails in - moins mêlée de chyle, par une fistule téressants relatifs aux expériences sur du canal thoracique , a donné en les bêtes bovines citées ci-dessus, et, douze heures environ 11 kilogrammes dans un Mémoire encore inédit, pré- de liquide, et la quantité a varié entre sente à l'Académie des sciences en 685 et 1235 grammes par heure. 1858, cet auteur a donné les résultats Dans une autre expérience semblable, fournis par de nouvelles recherches les produits de l'écoulement ont varié sur le même sujet. Un Taureau du entre i>72 el 1060 grammes par poids de 258 kilogrammes lui a heure (a) ; enfin, sur un troisième fourni en vingt-quatre heures 21 ki- Cheval la fistule a donné en six heures logrammes de lymphe. Un autre indi- 10,55'i grammes de liquide, et les vidu du i)oids de '260 kilogrammes en variations horaires ont été entre 2107 donna dans le même espace de temps et 1105 grammes par heure (h). 26 86û grammes. Un troisième Tau- (a) Colin, Physiologie comparée des Animaux domestiques, 1. H, p. 101. (fr) Colin , Recherches expérimentales sur les fonctions du système lymphatique (Mémoire inédil). IV. 38 584 SYSTÈME LYMPHATIQUE. M. Krause ii l'ait sur des Chiens quelques expériences ana- logues, et en opérant non sur le canal thoracique, mais sur le grand tronc correspondant qui se trouve du côté droit du cou, il a obtenu un écoulement de lymphe sans mélange de chyle. Les produits étaient donc moins abondants que dans les cas dont je viens de parler; mais, d'après les résultats partiels obtenus de la sorte, ce physiologiste a cru devoir évaluer le poids du hquide ramené par les lymphatiques des diverses ■parties de l'organisme, dans l'espace de vingt-quatre heures, à plus du tiers du poids total du corps de l'Animal (I). Nous étudierons plus tard les effets que ces pertes déter- rean , du poids de 227 kilogrammes, donna en vingt-quatre Iieures 30 l/i2 grammes de lymphe mêlée de chyle. Une Vache pesant /|80 kilogrammes donna en douze heures Zi7693 gr am. de ces liquides, ce qui correspond à plus de 95 kilogram. en vingt-quatre heures. Enfin, chez -an Bélier, l'é- coulement fut dans la proportion de àSlih grammes en vingt-quatre heures, et chez mi Chien, de 1 912 grammes pendant le même espace de temps. (1) Dans les expériencesdeM.Krause une canule fut introduite dans le tronc lymphatique cervical du côté droit, de façon à faire écouler au dehors la lymphe provenant de la moitié cor- respondante de la tête et du cou. La quantité de liquide recueillie de la sorte , de quart d'heure en quart d'heure, fut pesée, et comparée au poids de la tête de l'Animal, après la mort de celui-ci. Dans une première expérience, M. Krause obtint sur un Chien du poids de lûi^ii,5, dont la lête pesait 1930 grammes, près de 2ig'",5 de lymphe, et c'est en calcu- lant d'après ces données, qu'il estime à /i06 grammes la quantité de lymphe que les vaisseaux d'une moitié de la tête doivent verser dans le torrent de la circulation en vingt-quatre heures ; puis, admettant que la proportion entre le poids des parties qui fournis- sent la lymphe et la quantité de ce liquide doit être partout la même, il arrive à cette conclusion, que le Chien, pesant environ 15 kilogrammes, a dû fournir en vingt-quatre heures 6 kilo- grammes de lymphe. Dans une seconde expérience, la proportion de lymphe, calculée de la même manière, était de 583 grammes pour 1 kilogramme de poids vif. Enfin, dans d'autres expé- riences semblables, cette proportion varia entre 2/i6 et 638 millièmes du poids vif (a). Quelques expériences faites précé- demment sur des Chats et des Chiens, par M. Bidder, avaient conduit ce physiologiste à évaluer à 1/à ou 1/6" du poids total du corps la quantité de (a) W. Krause, Zur Physiologie der Lymphe {Zeitschrift fur rationelle Médian, 1855, 2° série t. VII, p. 148). COLKS DE LA LYMPHE. 585 minent sur l'organisme; en ce momeni, je n'en parle que pour montrer combien doit être grande la quantité des liquides qui, transportés dans la partie périphérique de l'appareil circu- latoire par les artères, s'échappent des capillaires pour passer dans les lymphatiques, et revenir, par l'intermédiaire de ces vaisseaux, vers la portion centrale du système irrigatoire, où ils se mêlent de nouveau au courant sanguin (i). § 6. — Du reste, les liquides que les lymphatiques versent dans les veines centrales, de même que les liquides rapportés au cœur par le système veineux, ne proviennent pas exclusi- vement du courant irrigatoire centrifuge dont les artères sont le siège; ils ramassent, chemin faisant, des produits prove- lymplie ei de chyle qui traverse le système lymphatique dans l'espace de vingt-quatre heures (a). Enfin, dans les expériences déjà ci- tées de M. Colin, la proportion entre le poids du corps et la quantité de liquide fourni par des fistules lymphatiques dans l'espace de vingt-quatre heures a varié beaucoup. Chez un Taureau, elle n'était que de 35 grammes pour 1 kilogramme de poids vif; dans un second individu de même espèce, elle s'est trouvée être de ,-^ ; mais dans deux autres expériences faites sur des Animaux de même espèce, elle s'est élevée à environ j^. Chez une Vache, celte quantité a été même de 192 grammes par kilogramme du poids de l'organisme. Enfin, dans une expérience unique faite sur le Chien, elle était de ,,','j. On voit donc que les variations à cet égard sont très considérables {h). (1) Une certainequantité des liquides contenus dans les lymphatiques ne doit pas arriver jusque dans les veines, et doit s'épancher dans les cavités circonvoisines, en filtrant à travers les parois de ces vaisseaux, comme cela a lieu pour le sérum du sang. La lymphe doit par conséquent contribuer à la formation de la sérosité interorga- nique ; mais nous ne connaissons au- cun fait qui puisse nous faire bien juger du degré d'importance de celte transsudation. Je suis cependant porté à croire qu'elle ne doit pas donner des résultats considérables , car on connaît plusieurs cas dans lesquels les vaisseaux lymphatiques ont été trouvés dans un état de dilatation énorme, sans que cette altération ait été accompagnée de symptômes d'hy- dropisie, et d'ailleurs la poussée laté- rale de la lymphe est très faible. (a) 13ifJ'l«r, Vcrmche zur neslimmung der Chylusmenge, die durch den Duclus thoracicus dem Blute zuyefûlirl wird (Miillcr's Avchiv fur Anat. und l'Iiijsiol., 1845, p. AC)). (6) Colin , llecherchca expérimetUales sur les fonctions du syslèmc lijmph(iti(i)ir ( Mi'moin^ inédit). 58G SYSTÈME LYMPHATIQUE. nant d'autres sources : et c'est de la sorte que la masse des humeurs en cireulalioa dans l'organisme, tout en éprouvant sans cesse des pertes, soit par l'eiTet. de la Iranssudalion dont j'ai déjà parlé, soit par suite d'autres phénomènes dont l'étude nous occupera plus tard, ne diminue pas; car ce qu'elle aban- donne se trouve remplacé par des matières nouvelles arrivant du dehors. Nous nous trouvons donc conduits maintenant à étudier un nouvel ordre de faits, et à chercher comment les substances étrangères destinées à se mêler directement au sang, ou à y être versées avec la lymphe, peuvent pénétrer jusque dans la profondeur de l'organisme et arriver dans le torrent irrigatoire.. On donne le nom ^'absorption à ce phénomène, et l'on peut facilement reconnaître que, chez tous les Animaux, celte péné- tration des matières étrangères peut être souvent une consé- quence du seul fait de leur contact avec diverses parties de la surface de l'organisme, mais (jue d'autres ibis elle est subor- donnée à l'accomphssement d'un travail préliminaire, à l'aide duquel ces matières sont appropriées à l'usage auquel la nature les destine et rendues absorbables. Cette élaborahon des sub- stances nutritives constitue l'acte de la digestion. Nous aurons donc à nous occuper successivement de ces deux grandes fonc- tions physiologiques ; et alin de procéder du simple au com- plexe, nous n'examinerons ce qui est relatif au travail d'appro- priation des matières étrangères qu'après avoir étudié tout ce qui est relatif à l'absorption en général, fonction dont l'histoire se lie d'ailleurs de la manière la plus intime à celle des deux systèmes de vaisseaux que je viens de décrire. ADDITIONS ET CORRECTIONS. TRENTE-DEUXIÈME LEÇON. Page 63, ligne 17, ajoutez : M. Vierordi vient de publier de nouvelles observations sur la fréquence du pouls chez divers Animaux, l'our compter les battements du cœur, il a fait usage de l'auscultation, et il a reconnu ainsi que, chez les petites espèces, la fréquence de ces mouvements est beaucoup plus grande qu'on ne le pensait (a). Chez un jeune Écureuil, il a compté jusqu'à ^30 pulsations par minute. On trouvera ci-dessous les résultats numériques de ces recherches. Page 118, ligne à, ajoutez : D'après les recherches de M. Poiseuille, la pression du sang dans le ventricule droit du cœur serait même beaucoup plus faible (6). Page l/i2, Whylt, Physiological Essays, lisez : An account of Experimenls mode ivith Opium on liviny and dying Animais {Works, p. 310 et suiv., 1768). TRENTE-SEPTIÈME LEÇON. Page 300, ligne 18, ajoutez : il païaîi, d'après les observations récentes de M. Vierordt, que chez le Héris- son l'appareil vulvulaire des veines est si incomplet, que le reflux du sang est facile dans ces vaisseaux (c). Il serait intéressant de chercher si une disposition analogue du système circulatoire existe chez les autres Yamniifères hibernants. (a) Vierordi, Ims M/hdniiifikeU.i(jesetz dev millteren KrcislaufsieUen von deii miltlcrcn Puts- frefiuenzen der Tlderai-ieii {Archiv fur pliyswloyitiche llcillcnnde, iS:>8, t. XVII, p. 527). {b) .M. l'disoiiillo ôviiliio celte pression fi ', ou ,'-, de celle exercée p.ii' le vetilriciile g.iiiclie. Il a fait ses expériences sur le Chien et le Clieval, oi les a indiquées Inièvcnient dans luu! Notice snr ses tra- vaux (p»(,'e C) co-;nic ayant été connnnniiiuées à li Suciélé pliilomalitpio, le d 1 déccnilirc d8H ; niais je re(,'retle de n'en trouver aucune lucntion ni dans les extraits des procès-verl)aux des séances de ceUe Suciélé publiés par elle-rnèniu (Société plulomaliqiie de l'aris, extrait de» procès-verbaux des séances pemlirit l'année 1841 , in-S, l'ans, tS4i), m dans le Journal de l'Institut, qui rend liabi- luellenient cornplc de se» travaux, {CI Vierordi, Op. rit. (Aninr fur lihy.vol. Iktlk., 1h:,K, t. XVII, \<. r>;tii). 588 ADDITIONS ET CORRECTIONS. TRENTE-HUITIÈME LEÇON. Page 370, ligne 8, ajoutez ; Afin de soumettre ces résullats intéressants à des épreuves plus décisives, M. Vierordt a entrepris une nouvelle série d'expériences sur des Animaux chez lesquels le cœur bat avec une très grande rapidité, savoir : de petits Mammi- fères et des Oiseaux. Il a déterminé avec beaucoup de soin le nombre des pul- sations et le temps que les réactifs introduits dans une veine mettent à accomplir le voyage circulatoire. Le tableau suivant résume des données numériques obtenues de la sorte : m § DURÉE MOYENNE NOMBRE NOMS 2 POIDS MOYEN FRÉQUENCE de la révolution circulatoire de "1 évaluée en secondes pulsations des du moyenne ^ ' dans correspondant à la durée Q corps du dans le système de la ANIMAUX . H le système vasculaire révolution 2 o (en grammes). corps. jugulaire. en général. circulatoire. Mammifères. Écureuil . . . i 222 320 4,07 4,39 23,7 Chat 1 1312 240 6,19 6,69 26,8 Cochon d'Inde. i 480 ■ 230 6,53 7,05 27,0 Hérisson . . . 8 911 189 7,05 7,61 23,8 Lapins : i" série . . 3 1370 210 6,91 7,46 2° série . . 5 1473 226 7,41 8,00 2,5 Ensemble. . 8 1434 220 7 22 7,79 Renard .... 2 2790 172 7',59 8,20 23,5 Oiseaux. Poule 4 1332 354 4,79 5,17 30,5 Corbeau. . . . 1 317 280 5,48 5,92 27,6 Chat-huant {Strixnoctua). 1 135 216 6,08 6,56 23,6 Busard . . . . 4 693 282 6,23 6,73 31,6 Canard .... 3 1324 163 9,85 10,64 28,9 Effraie (Slrix flammea). . 1 253 150 9,94 10,73 26,8 Oie 2 2822 144 10,06 10,86 26,0 Les résultats moyens fournis par ces expériences s'accordent remarquablement bien avec ceux obtenus précédemment par M. Vierordt, mais tendent à établir que chez les Oiseaux la révolution circulatoire s'effectue à l'aide d'un nombre de contractions de la pompe ventriculaire un peu moins considérable que chez les Mammifères. Pour les premiers, la valeur systolaire serait de -^ de la quantité ADDITIONS ET CORRECTIONS. 589 totale de sang mis en mouvement clans l'oiganisme, et chez les Mammifères ce rapport serait dans la proportion de 1 à 29 (a). La généralisation de ces résultats ajoule beaucoup à leur importance. Page 381, dernière ligne, au lieu de : la quantité moyenne de sang contenu dans la totalité du système vasculaire est une fraction ù peu près constante du poids de Torganisnie, savoir : j^, lisez, savoir : rs- Page li16, note, ajoutez : Du reste, en traitant de l'endosmose, j'aurai à revenir sur cet ordre de faits. J'expo«erai alors des travaux de MM. Briicke et Ludvvig relativement à l'in- fluence des actions capillaires sur la composition des mélanges liquides qui traversent les membranes animales, et je me bornerai à ajouter ici que les vues de ces physiologistes à ce sujet sont tout à fait d'accord avec ce qui a été dit dans celte Leçon. Page /|29, notes, ligne 6 : J'ajouterai qu'on doit aussi à M. Gima des expériences intéressantes sur la fiitration des liquides au travers des membranes animales. Ce physicien a vu que la pression nécessaire pour déterminer la iranssudation varie avec la nature des liquides et des lissus ; qu'avec le péritoine du Veau, par exemple, l'eau passe sous une pression de U pouces de ce liquide, tandis qu'une dissolution saturée de sel commun ne passe que sous une pression de 8 à 10 pouces de cette même dissolution. Avec le péritoine du Bœuf, la liltralion de l'eau nécessite une pres- sion de 8 à 10 pouces de mercure, et avec la vessie de Bœuf la transsudation ne s'opère que sous l'influence d'une pression encore plus considérable ; dans ce dernier cas, le passage de la dissolution saline n'a lieu que sous une pres- sion de 18 à 20 pouces de mercure. M. Cima a trouvé aussi que la force néces- saire pour déterminer celte (illralion avec une rapidité égale était beaucoup moins grande quand le liquide était en contact avec la surface interne de la membrane que dans le cas où le coi.rant devait s'établir en sens inverse. Enfin il a remarqué que cette lillration exerçait une cerlaine influence sur la densité des mélanges employés dans ses expériences [b). (a) Vierordt, Op. cit. (Archiv. fur physiol. Ileilkunde, i8ï,S, l. XVII, p. 530 et suiv.). _ (b) Gima, SuW evaporazione e la Iransudazione dei liquidi allravevso le membrane aniimh (Mem. délia Acad. délie science di Turino, 1853, 2° série, t. XllI, p. 207). FIN DU TOME QUATRIEME. TABLE SOMMAIRE DES MATIÈRES DU TOME QUATRIÈME. TRENTE ET UNIÈME LEÇON. Suite de l'histoire de la circula- tion DU SANG i Mouvements du cœur 1 Diastole des oreillettes 5 Systole des oreillettes Il Systole des ventricules 14 Choc du cœur 15 Changements de forme du cœur lors de la systole 18 Locomotion du cœur 23 Jeu des valvules auriculo-ventri- culaires 30 Bruits du cœur 33 Bruit systolique 34 Cause de ce bruit 36 Bruit supérieur -il Bruits anormaux 45 Rhythme des bruits du cœur. . . 46 TRENTE-DEUXIÈME LEÇON. Suite de l'histoire des fonctions DU cœuR 33 Fréquence des mouvements du cœur de l'Homme 53 Influence de rilge sur la Tréquence de ci's battements 55 Influence des sexes 61 Kréquence des battements du cœur chez divers Animaux.. . 03 Additions 587 Influence de la taille 64 influence de la constitution indi- viduelle 67 Influence de l'activité muscu- laire fis Influence de la positioD du corps. 70 Influence du sommeil 74 Influence de la température 77 Influence de la pression atmos- phérique 78 Influence de la digestion 79 Variations diurnes 84 Rapports entre la fréquence des battements du cœur et celle des mouvements respiratoires. 8G Variations individuelles 89 Rhythme des battements du cœur 90 Débit de la pompe cardiaque aor- tique 92 Travail mécanique du cœur. . . . 100 Puissance motrice du cœur 101 Pression exercée par le cœur sur le sang artériel 1 04 Expériences de M. PoiseuiMe. ... 105 Variations de la force statique du cœur 110 Influence de la taille et de l'âge sur la puissance de la pompe cardiaque 113 Influence du volume du sang en circulation lli Influence de sa richesse 115 Variations dans la force des bat- tements du cœur 116 Puissance développée par le ven- tricule droit 117 TRENTE-TROISIÈME LEÇON. Suite de l'étude des mouvements DU cœuR 1 20 Nature de ces niouvements 120 Influence stimulante des agents extérieurs 121 592 TABLE SOMMAIRE DES MATIERES. Action stimulante du sang 123 Influence de l'épuisement de la contractilité sur le retour des battements 1 32 Résumé 133 Du rôle du système nerveux dans la production des contractions du cœur 134 Insensibilité du cœur 134 Le principe de la force contrac- tile du cœur ne réside ni dans le cerveau, ni dans la moelle épinière, ni dans les ganglions du grand sympathique 135 Cette force s'engendre dans le cœur 140 Source de l'irritabilité muscu- laire 141 Influence du système nerveux sur le développement de la con- tractilité du cœur 147 Efl"ets sédatifs produits par la galvanisation de certaines par- ties du système nerveux 149 Accéléralioii des battements du cœur déterminée par l'excita- tion du système nerveux 155 Distinction entre l'irritabilité et la puissance contractile du cœur 160 Irritabilité du cœur chez divers Animaux 163 De la coordination des mouve- ments du cœur 1 64 Résumé. 166 TRENTE-QUATRIÈME LEÇON. Du COURS DU SANG DANS LES AR- TÈRES 169 Mode de progression du sang dans ces vaisseaux 169 Transformation du mouvement intermittent en un mouvement continu 170 Influence de l'élasticité des pa- rois artérielles sur le débit de ce système vasculaire 175 Mode d'agrandissement des ar- tères 177 Dilatation transversale 177 Allongement 179 Locomotion de ces vaisseaux. ... 180 Du phénomène du pouls 181 Influence de la longueur de l'ar- tère sur la force du pouls. ... 184 Retard du pouls dans les parties éloignées du cœur 187 Influence du degré d'extensibilité des artères sur le pouls 190 De la cause du ressort des parois artérielles 191 Élasticité 191 Contractilité musculaire lente ou tonique des artères 192 Nature de la faculté contractile des artères 195 Du degré de développement de cette propriété dans les difl'é- rentes parties du système ar- tériel 196 Influence du système nerveux sur la contraction des artères. . . . 200 Action des stimulants mécaniques sur les artères 207 Action du froid, etc 208 Action de l'air 209 Action des stimulants chimiques . 210 Influence de la fatigue sur la contractilité des artères 212 Relâchement des parois arté- rielles 214 Influence des contractions par- tielles et du relâchement local des artérioles sur le cours du sang dans les parties voisines. 215 Production de divers phénomènes dits inflammatoires 216 Contractions rhythmiques des ar- tères chez certains Mammi- fères 217 Siège de la propriété contractile des artères 218 Influence de cette contractilité tonique sur le caractère du pouls 219 Influence de cette contraction sur la puissance circulatoire 223 Influence des mouvements du thorax sur le cours du sang ar- tériel 223 TRENTE-CINQUIÈME LEÇON. Suite de l'histoire du cours du SANG ARTÉRIEL 225 Poussée latérale du sang dans les artères 225 TABLE SOMMAIRE DES MATIERES. 593 Application des lois de l'hydrau- lique à l'explicalion de ce phé- nomène 227 Signiflcation des mesures hémo- dynamiques. 230 Variations dans la pression du sang déterminées par les con- tractions du ventricule gauche. 231 Évaluation moyenne de cette pres- sion 232 Emploi du kymographe 233 Évaluation de cette pression chez divers Animaux 234 Applications à la mesure de la pression artérielle constante et de la pression cardiaque 237 De riulluence des mouvements respiratoires sur la pression ar- térielle 238 Influence du volume du sang en circulation sur le degré de pression artérielle 242 Évaluation de la vitesse du sang dans les artères 243 Hémodromomètre de M. Volk- mann 244 Emploi de l'hémotachomètre de M. Vierordt 244 Causes de l'inégalité de la vitesse du courant sanguin dans les diverses parties du système ar- tériel 243 Agrandissement de l'aire des di- visions artérielles 243 Bruits produits par le passage du sang dans les artères 247 De l'influence des anastomoses artérielles sur le cours du sang. 253 Rétablissement des voies de com- munication après l'oblitération d'une portion d'artère 254 Influente des plexus vasculaires sur le cours du sang artériel. . 2G0 TRENTE-SIXIÈME LEÇON. Du cours du sang dans les capil- laires 262 Causes de la progression du sang dans ces vaisseaux 200 r^ll'ets de l'adhérence du sang aux parois des petits vaisseaux.. . . 209 (touche, périphérique du sérum immobile 270 Influence de la longueur et du diamètre des vaisseaux capil- laires sur leur débit 272 Contractilité des capillaires 274 Influence de l'état de ces vais- seaux sur le cours du sang. . . . 279 Action du froid 279 Influence de l'état physiologique des parois vasculaires . 281 Influence de l'état du sang sur le cours de ce liquide dans les capillaires 284 Mesure de la vitesse du courant dans les capillaires 286 Évaluation de la capacité totale du système capillaire 288 Influence du diamètre des capil- laires, etc., sur la production de diverses altérations mor- bides 289 Passage graduel des capillaires aux veines 293 TRENTE-SEPTIÈME LEÇON. Du COUUS DU SANG DANS LES VEINES 295 Influence du cœur sur la pro- gression centripète du sang. . . 295 Caractères de ce mouvement. . . . 298 Influence des valvules sur le cours du sang veineux - . 300 Additions 387 De la dilatabilité et de l'élasticité des veines 301 Contractilité tonique des veines. 303 Contractions rhythmiques de cer- taines veines 304 Contractilité des troncs veineux chez les Vertébrés inférieurs. . 307 Influence de la pression détermi- née par la contraction des mus- cles adjacents sur la progres- sion du sang dans les veines. . 308 Influence des mouvements respi- ratoires sur le cours du sang veineux 311 Étendue de la zone de l'action aspirante exercée par le tho- rax dans l'inspiration 315 Accidents dus à l'introduction de l'air dans les veines 316 Action foulante du thorax 31 G l'ouïs veineux 325 Évaluation de la vitesse du cou- rant sanguin dans les veines.. 327 594 TABLE SOMMAIRE DES MATIÈRES. Bruits veineux anormaux 328 Pression du sang dans les veines. 328 Rôle des anastomoses veineuses. 334 Influence de l'état de la circula- tion veineuse sur la pression du sang dans les artères 337 Particularités de la circulation dans la cavité crânienne 340 Cours du sang dans le système de la veine porte 346 TRENTE-HUITIÈME LEÇON. De la circulation pulmonaire. . . . 351 Pression du sang dans l'artère pulmonaire 353 Influence des mouvements respi- ratoires sur la petite circula- tion 354 De la circulation avant la nais- sance 358 Cas de persistance du trou de Botal, etc 359 Anastomoses entre les vaisseaux de la petite et de la grande circulation dans certains cas pathologiques 361 De l'ensemble du mouvemenl cir- culatoire 362 Durée de la révolution circula- toire 362 Expériences de M. llering et de M. Vierordt 362 Rapports entre cette durée et le nombre des battements du cœur 367 Additions 588 Influence de l'accélération des battements du cœur sur la du- rée de la révolution circula- toire 370 Influence de l'âge, du sexe et de In taille sur la durée de cette révolution 373 Evaluation du volume du sang qui circule dans l'organisme.. 375 Rapports entre le poids du corps et la quantité de sang chez divers Animaux 38 1 Mode tie répartition du sang dans l'organisme 384 Influence de la gravitation sur cette répartition 385 Phénomènes cadavériques 387 Cause de la vacuité des artères dans le cadavre 388 TRENTE-NEUVIÈME LEÇON. DE LA TRANSSUDATION 391 Preuves de la perméabilité des tissus organiques 391 Cause de cette perméabilité. . . . 396 Disposition du système lacunaire interorganique chez l'Homme et les autres Vertébrés 399 Tissu conjonctif ou cellulaire. . . . 399 Influence de la pression du sang sur la transsudalion 402 Additions 589 Influence de l'état du sang sur ce phénomène 410 Influence de l'état des parois vas- culaires 410 Influence de la résorption sur les elTets de la Iranssudation. . . . 413 Composition chimique des liqui- des épanchés par transsuda- tion 414 Constitution de la sérosité 417 Filtralion élective elTectuée par les tissus organiques 420 Relation entre lo degré de ri- chesse du sang et la composi- tion des liquides épanchés. . . 428 Proportion des matières qui trans- sudent 429 Influence de la nature des tissus sur la composition chimique des liquides qui les traversent. 429 Présence de l'urée , du gly- cose, etc., dans la sérosité.. . . 432 Sels inorganiques contenus dans la sérosité. 434 Modifications consécutives de la sérosité 435 Influence de la transsudation sur les pertes par évaporation. . . 4 38 Influence du degré de saturation du corps sur l'étendue de ces perles 440 Influence des conditions physi- ques extérieures 441 Influence du degré d'activité de l'irrigation physiologique sur la transpiration 441 De la dessiccation des membranes extérieures 442 TABLE SOMMAIRE DES MATIERES. 595 De la transsudalioti chez les Ani- maux inférieurs 443 Nécessité d'un travail contraire i ou d'absorption 446 I 1 QUARANTIEME LEÇON. | DU SYSTÈME LYMPHATIQUE. 447 Histoire de la découverte de ce système 447 Découverte des vaisseaux chyli- fères par Aselli 447 Notions des anciens sur ces vais- seaux 449 Découverte du canal thoracique. 450 Découverte des vaisseaux lympha- . tiques dans l'organisme eu gé- néral 453 Recherches ultérieures sur ces vaisseaux 456 Méthodes d'investigation analo- mique 460 Disposilion générale du système lymphatique chez les divers Ver- tébrés 462 Système lymphatique des Batra- ciens 462 Cœurs lymphatiques 466 Analogie entre le système lym- phatique et certaines parties du système lacunaire général chez les Annélides. . 468 Système lymphatique des Pois- sons 471 Système lymphatique des Rep- tiles 481 Système lymphatique des Oi- seaux 486 Système lymphatique des Mam- mifères 489 Description topographique de ce syslème 490 Canal thoracique 490 Vaisseaux lymphatiques des mem- bres abdominaux 493 Ganglions et vaisseaux pel- viens , etc 494 Vaisseaux lactésetchylifères, etc. 495 Lyinph;itiqiies du thorax 500 I,yrii|)liiiti(pies des membres tho- raciques 50 L F-ym|)iiatiques de la tète et du cou 502 Troncs terminaux de ce système. 50.'i Résumé 50'. QUARANTE ET UNIÈME LEÇON Suite de l'étude du système lym- phatique 508 De la structure intime du système lymphatique chez l'Homme et les autres Mammifères 506 Tunicjues constitutives des vais- seaux lymphatiques 506 Contractilité de ces vaisseaux. . . . 508 Valvules 512 Ganglions ou glandes lympha- tiques 516 Structure de ces organes 317 Mode de développement de ces ganglions S20 Résumé histologique 524 Des relations des lymphatiques avec les vaisseaux sanguins. . . 526 Questions relatives à la commu- nication directe des vaisseaux lymphatiques avec diverses parties du syslème veineux.. . 528 Mode d'origine des lymphatiques, ou racines de ces vaisseaux. . . 530 Mode de développement 532 Caractères généraux de ce sys- tème 533 Structure des parties radiculaires des lymphatiqueschez l'Homme et les autres Mammifères 537 Lymphatiques du tissu conjonctif et des membranes séreuses. . . 540 Lymphatiques de la peau 542 Lymphatiques des membranes muqueuses 544 Lymphatiques des autres parties de l'organisme 545 Relations des radicules lympha- tiques avec les vaisseaux san- guins 54(] QUARANTE-DEUXIÈME LEÇON DE LA LYMPHE 553 Manière de recueillir ce liquide. 553 Propriétés de la lymphe s.'ii Globules lymphatiques 55(i Composition chimique de la lymphe 55g Orit:ine de la lymphe 501 Production des globules plasmi- qucs 563 596 TABLE SOMMAIUli DES MATIEHICS. Provenance de la fibrine 569 Résumé 572 De la progression de la lymphe. . o74 Influence de la contractilité des vaisseaux lymphatiques sur ce phénomène 578 Influence des mouvements mus- culaires adjacents sur le cours de la lymphe 580 Influence des mouvements du tho- rax sur ce phénomène 581 Rapidité de la progression de la lymphe 583 Quantité de ce liquide qui est versée dans le système circu- latoire 584 Hl^ ^,^?; y ^ vww^ . . - ■:i^ W^. . ^'^i^^^ M^ t'éZv a ws/gm ^'>.i^^ .-■# ■■■V .^f \^^ ,# -V''^^ ..'J*^^^*-*- -y*^^ ' ■^.î'' ^>> T^ ^■^ y h'^' ^ ■■■'■'■■ àf*' ■' ■ ^ ;/^. .^- ti^^ S^^'s -■-■!• ?#' K'' ■.;€^- if^^ >?: ^'^^ trl^. .,-,-{. ^. V- ^^.^^■' iS«- ^:f -»^ ^"r 't*^>ifc; W ,.^-^^' ^ ■' ^:>^ v;J' . .^' f'."'- ■',"■ -■^*r^. :;/