Boston medical libbary 8 the fenwat Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa http://www.archive.org/details/leonsthoriquOObazi LEÇONS THÉORIQUES ET CLINIQUES sur M? s AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES Paris. — Imprimerie de L. Martinet, rue Mignon, 2. r/l? LEÇONS THÉORIQU.ES ET CLINIQUES SUR LES AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES Par le docteur 1SAZIHÏ, Médecin de l'hôpital Saint-Louis, Chevalier de la Légion d'honneur, etc. ilédigte el publiées Par M. Alfred FOUQUET, Interne des hôpitaux, REVUES ET APPROUVÉES PAR LE PROFESSEUR. Ouvrage orné de 5 planches gravées sur acier. PARIS A. DELAHAYE, LIBRAIRE, Place il« PBcoIe-de-mo'decine, 23. F. CHAMEROT, LIBRATRE, Rue du Jardinet, 13. 1858 Droits do traduction et de reproduction réservés. TABLE ANALYTIQUE. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. — Le parasite, l'affection parasitaire et la maladie parasitaire, p. 3. — Les parasites cutanés jouent le triple rôle de cause, de symptôme et de lésion. Doctrines bien différentes de MM. Caze- nave et Devergie, p. 4 à 7. — Historique. On connaît successivement : les parasites, les affections et les maladies parasitaires. Service signalé rendu par M. Devergie à la dermatologie; mais que d'erreurs contient son livre! p. 7 à 1 1. DES AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES EN GÉNÉRAI.. — Symptômes. Rapportés à 4 chefs: 1° parasite; 2° modifications physi- ques imprimées par le parasite à la peau et à ses annexes; 3° éruptions symptomatiques; 4" phénomènes sympathique», p. 1 1 à 17. — Marche, durée, terminaisons, p. 17 et 18. — Complications parasitaires, constitu- tionnelles, p. 18. — Étiologie. Causes prédisposantes : physiologiques, hygiéniques , pathologiques. Cause déterminante unique : le parasite. Point de génération spontanée; 4 modes de contagion. Étude des parasites, p. 18 à 27. — Diagnostic. Sources principales : physionomie de l'ensemble, prurit, causes, début de la maladie, microscope, p. 27 à 30. — Pronostic. Point de gravité aujourd'hui. Circonstances qui font varier le pronostic, p. 30 à 34. — Thérapeutique. 3 indications: 1° détruire les parasites; 2° faire disparaître les éruptions qu'ils ont produites; 3° combattre les éruptions constitutionnelles. Importance capitale de la première. Choix de agents parasiticides : huile de cade, sublimé, turbitb, soufre. Divers exci- pients. Proportions les plus convenables : un dixième ou un centième de substance parasiticide. Condition essentielle: que le parasite soit partout atteint par le parasiticide, point de traitement préparateur. P. 34 à 40. £EMIER£ SECTION. — Affections cutanée» produites par les parasitet végétaux. — 3 divisious, p. 40 et 41. Chap. i. Végétaux TRinnnrHvriQUF.s t.t omrcnoPBYTiQUBS, — Teignes en séné- et H TABLE ANALYTIQUE. rai. MM. Cazenave et Devergie en présence des teignes, p. 41 à -43. — Classification : il n'y a plus que 3 espèces, chacune avec des variétés, p. 43 à 47. — Nosographie, 3 époques distinctes: germination , état, déclin. Durée. Trois modes de terminaison: mort, guérison sans calvitie, guérison avec calvitie (non admise dans toutes les espèces de teignes). Comment arrive la calvitie définitive, p. 47 à 52. — Étiologie. Causes prédisposantes, causes déterminantes. 4 modes de contagion ; contagion par l'air contestée; inoculation. Comment les végétaux parasites des teignes se comportent à l'égard de l'épiderme, des ongles et des poils...., p. 52 à 61. — Diagnostic. Sources principales : parasites, éruptions symptomatiques, examen des poils et des ongles, microscope, épilation. Cause de certaines difficultés. p. 61 à 63. — Pronostic. Combien différent d'autrefois ! Pourquoi les Manon sont encore ici. Cause des variations: âge et étendue de la maladie, son siège, espèce de teigne, complications, p. 63 à 67. — Thérapeutique géné- rale. L'empirisme avait devancé la science. Pourquoi faut-il employer en même temps l'épilation et les parasiticides? p. 67 à 71. — 3 indications ; la première seule importante. Y a-t-il des agents épilatoires? Trois procédés d'épilatiou : calotte, doigts, pince. Avantages de l'épilation faite avec la pince. Pinces de M. Deffis. Résumé du traitement de la teigne, p. 67 à 81. Art. I. Teigne faveuse. — C'est la teigne par excellence, p. 81 et 82. — Historique. 3 périodes distinctes, dont la première très étendue ne s'arrête qu'à M. Devergie, p. 82 à 87. — Nosographie. Définition, 87 et 88. — Trois périodes dans la marche de la maladie, p. 88 et 89. — Trois variétés de forme. — § I. Teigne faveuse urcéolaire. Son siège. Signes de germination : prurit, érythème (on a eu tort d'en nier l'existence au cuir chevelu), cer- cles herpétiques, altérations des poils, quelquefois éruptions pustuleuses. Plus tard (2e période), formation du godet; erreur de traduction commise par M. Devergie. Mode de développement des godets, leurs rapports avec les poils, altérations de ces derniers. Odeur des croûtes. Favus urcéolaire cohérent. Complications. Extension de la maladie de la tète aux autres ré- gions. Enfin (3e période), calvitiedéfiuitive,chutedes croûtes, oblitération des follicules, formation des cicatrices. Troubles fonctionnels..., p. 90 à 102. -■■§11. Teigne faveuse scutiforme. Symptômes peu différents; hypersécré- tion épidermique plus abondante; mode d'apparition et aspect du crypto- game. Pourquoi la teigne scutiforme, en s'étendant du cuir chevelu aux autres régions, se transforme-t-elle en teigne urcéolaire; ou plutôt, expli- cation des différences de forme que présente la teigne faveuse, p. 102 à 108. — §111. Teigne faveuse squarreuse. Analogie avec Y impétigo granulata; elle diffère du favus scutiforme. Pourquoi cette disposition du champi- gnon? p. 108 et 109.— Variétés de siège : face, tronc et membres, ongles, parties sexuelles, p. 109 à 112. — Complications, durée et terminaisons, p. 112 et 11 3. — Étiologie et pathogénie (voir teignes en général). Inocula- tions pratiquées par M. Deffis; Gallot, p. 113 à 115. — Hypothèses sur la nature delà teigne; le microscope, la chimie et Tanatomie pathologique TABLE ANALYTIQUE. f"f| . montrent que le favus est une production d'origine végétale, p. 115 à- 119. — Fa vus transmis des animaux à l'homme (observation en notes). Dia- gnostic. Signes tirés de trois sources principales : 1" caractères propres aux croules favenses; 2° altérations des cheveux et alopécie ; 3° examen micros- copique (croûtes et poils), p. 1 19 à 126. — Causes d'obscurité dans le dia- gnostic, p. 126 à 128. — Diagnostic différentiel : pseudo-teignes humides, p. 128 à 130. — Pseudo-teignes squameuses ou furfuraeées, p. 130. — Pseudo-teigne sébacée, p. 130 et 131. — Diagnostic différentiel des variétés: porrigo scululata (pityriasis, psoriasis, teigne lonsurantc, favus urcéolaire cohérent), p. 131 à 133. — Porrigo squarrosa (impétigo granulata, favus urcéolaire cohérent), p. 133. — Variétés de siège, 134.— Pronostic. Point de gravité; influence de l'étendue de la maladie ; peu de différence dans les variétés de forme ; observation peu probante de M. Cazenave, p. 134 à 136. — Thérapeutique. Notre méthode est la seule efGcace. Au point de vue pratique, quatre cas différents suivant l'étendue de la maladie. Soins pen- dant la convalescence, p. 1 36 à 141. Art. II. Teigne tonsurante. — Historique. Teigne tondante décrite par Mahon, 1829. Ce qu'il faut penser de Yarea et de Vophiasis des anciens, de la tinea capillorum de Sennert. Porriginc tonsurante d'Alibert, 1835. Her- pès tonsurant, de M. Cazenave, 1840. En 1844, M. Gruby découvre un végétal parasite dans le porrigo decalvans (qui n'est autre que l'herpès tonsurant), et, deux ans plus tard, Malmstem donne à ce parasite le nom de Trichophyton tonsurans. En 1850, Traité des maladies du cuir chevelu (Cazenave). En 1852, mémoire de MM. Malherbe et Letenneur. En 1853, mon premier travail sur les teignes; résultats confirTnés par M. Robin. En 1854, mon deuxième travail (Considérations sur la mentagre et les tei- gnes de la face) dans lequel, pour la première fois, il est question du tri- chophyton sur les cercles herpétiques; on veut rattacher cette découverte au nom de M de Baerensprung. En 1856, inoculations de M. Deffis; mé- moire de M. Chausit dans lequel on trouve l'herpès circiné habilement rapproché du sycosis sous le nom nouveau de disques érythématcux; thèse de M. Cramoisy, p. 111 à 150. — Nosographie. Trois périodes, p. 150. — Importance des variétés de siège, p. 151 . — - Première période : prurit ; affections erythémateines, vésiculeuses, squameuses, confondues même par les willanistes ; prédilection pour la forme circulaire, p. 151 à 157. — Altération des poils, formation des tonsures, p. 157 et 158. — Deuxième période; cryptogame sur les poils et sur l'épiderme ; modification dans la couleur, saillie des surfaces, érection des follicules pileux, p. 158 à 162. — Troisième période: pustules, tubercules, furoncles, p. 162. — Rôle que joue le pus; l'épilation serait nécessaire lors même que le parasite eut été com- plètement détruit (le poil malade est un corps étranger), p. 163 a 165.— L'ordre des symptômes peut être changé. Durée des périodes et de la ma- ladie (importance du développement des poils), p. 165 à 169. — Comment peut sunenir la guérison spontanée, p. 169. —Variétés de siège: cuir IV TABLE ANALYTIQUE. chevelu. Début par de l'herpès en groupes, du pityriasis et quelquefois même de l'herpès circiné, quoi qu'en dise M. Devergie. Changement de couleur (importance de ce caractère), p. 170 à 174.— Face et cou, cercles herpétiques et disques érythémateux; sycosis, p. 174 à 176. — Tronc et membres; parties sexuelles, p. 176. Étiologie. — Causes prédisposantes. Cause déterminante: trichophyton. Ses caractères changent un peu avec le temps ; qu'est-ce que le Microsporon rrtentographytes de M. Gruby ? Le parasite se transmet de quatre manières, souvent par l'inoculation ou la rasure; théorie mécanique de MM. Caze- nave et Chausit, p. 176 à 183. — Diagnostic. Facile à la deuxième période. A la première période, l'affection peut être confondue avec le pityriasis, le psoriasis, la lèpre vulgaire, la teigne fa veusescuti forme; à la face, sur les tronc et les membres, difficultés moindres: psoriasis, anneaux faviques, pityriasis rubra, syphilides circinées, interlrigo. A la troisième période: scrofulides exsudatives et teigne faveuse, au cuir chevelu; à la face, scro- fulides, syphilides pustuleuses et tuberculeuses (trois caractères importants : débris de cercles herpétiques, plaques indurées circulaires sur les joues, lichen circonscrit au dos de la main ou de l'avant-bras ; aux aisselles et aux r parties sexuelles, difficultés, p. 183 à 188. — Pronostic. La teigne tonsu- ranle est aujourd'hui une affection plus sérieuse que la leigue faveuse; la durée du traitement est beaucoup plus longue, p. 188 et 189. — Traite- ment. On ne peut que très rarement guérir par les moyens ordinaires. — Emploi combiné de l'épilation et des parasiticides. Dans quels cas les para- siticides peuvent j-uffire? On doit quelquefois différer l'épilation. Limites de l'opération. Ses difficultés. A quel moment peut-on déclarer les malades guéris? Pourquoi les mentagreux guérissent plus vite dans notre service, p. 189 à 195. Art. III. Teigne pelade. — Historique. Embarras des auteurs pour classer cette affection. Area et alopécia des anciens, vitiligo de M. Cazenave, por- rigo decalvans de Bateman. En 1843, M. Gruby découvre un cryptogame dans cette affection ; M. Robin nie l'existence du parasite. En 1853. j'ad- mettais deux espèces de teignes, répondant au porrigo decalvans ; pourquoi je les réunis aujourd'hui sous le nom de pelade, p. 195 à 197. — Noso. graphie. Trois périodes, p. 198. — Deux variétés: pelade achromateuseet pelade décalvante, différences dans les caractères et dans la marche, p. 199 à 201. — Étiologie. Causes prédisposantes, p. 201. — Description du microsporon d'Audouin; altérations qu'il produit dans la texture des poils, p. 202 à 204 — Diaguostic. Vitiligo simple, teignes faveuse et lonsurante, différentes variétés d'alopécie, lupus érythémateux du cuir chevelu, p. 204 à 207. — Pronostic, p. 207. — Traitement: sa durée (difficultés de l'épi- lation), p. 207. Chap. II. VrfiÉTAUx ÉPiDERttoPHYTiQUES. — Je réunis sous le nom de cra.ises parasitaires les affections qu'ils produisent, situation superficielle du para- site {microsporon furfnr), p. 208, — Nosographie. Disposition et étendue ; TABLE ANALYTIQUE. V couleur; démangeaisons; exfoliation continuelle. Durée et récidives. M. Hardy considère le parasite comme un phénomène accessoire. Toujours guérison, p. 208 à 210. — Étiologie. Causes prédisposantes, cause déter- minante: épidermophyton, ses caractères, p. 210 à 212. — Diagnostic facile. La coexistence d'une syphilide papuleuse peut mettre dans l'embarras. Importance du microscope. Taches de rousseur; macules syphilitiques. Acné sébacée (pityriasis nigra, pityriasis versicolor). Vitiligo, pityriasis sim- plex, pityriasis rubra, p. 212 à 2U. — Pronostic, p. 2H. —Traitement: parasiticides. Point de traitement interne, p. 21a» Chap. III. Végétaux épithéliophytiques. —Simple mention. Rôle secondaire. Traitement parasiticide (sublimé ...), p, 215 et 216. DEUXIÈME SECTION. — Affections cutanées produites par les para- sites animaux. — Deux catégories de parasites animaux, p. 217. lre catégorie. — Affections cutanées produites parle pou (pou de tète, pou de corps, pou de pubis), p. 217 à 220 ; — et par la puce commune, p. 220 et 221. 2e catégorie. — Simple mention pour la puce pénétrante. Affections produites par l' Acarus scabiei ou gale. Définition, p. 221 — Nosographie. Trois pé- riodes dans la marche. Période d'incubation (pruiit et éruptions fugaces). Période d'état : quatre ordres de symptômes: 1° Acarus (mâle, femelle, nymphe); 2° sillons (leur importance, leurs aspects divers, leur nombre, leurs rapports avec les vésicules) ; 3° éruptions symptomaliques (vésicules, papules, pustules, furoncles...); 4° phénomènes sympathiques (violence du prurit pendant la nuit; irritation produite par les ongles). Période de déclin, p. 222 à 227. — Complications, p. 227. — Variétés de forme et va- riétés de siège (gale générale; gales partielles), p. 227 à 229. — Étiologie. Causes prédisposantes, cause efficiente : acarus mâle, acarus femelle, nymphe. Mode de contagion, p. 229 et 230. — Diagnostic. Importance des sillons; diversité des éruptions; papules rouges sur la verge, etc. Com- ment les auteurs ont compris le diagnostic différentiel, p. 230 à 232. — Pronostic, 232. — Traitement. Trois indications. Il faut que le parasite soit, sur tous les points, atteint par le parasiticide; donc la friction géné- rale est indispensable. J'avais réduit à quelques jours la durée du traite- ment; M. Hardy a fait mieux encore, p. 232 à 23'J. PREFACE. Ces leçons sont le résumé des connaissances nouvelles dont il nous a été donné, grâce à l'observation continuée pendant dix ans, dans un grand hôpital spécial, d'enrichir la science des affections cutanées. Elles ont suffi pour l'instruction des auditeurs qui. les ont suivies; mais leur publication est destinée à mettre, entre les mains des praticiens, un ouvrage où ils puissent trouver les moyens de reconnaître et de guérir les derma- toses parasitaires. J'ai réuni toutes ces affections dans une seule famille, j'ai décrit avec soin les caractères propres qui les distin- guent des éruptions dartreuses, scrofuleuses, syphilitiques, dans les diverses phases de leur évolution; j'ai indiqué le moyen de les attaquer avec succès, quels que soient d'ail- leurs leur siège, leur étendue et l'âge du parasite: on peut dire qu'envisagé de ce point de vue le sujet est entière- ment neuf. On en trouve, il est vrai, quelques fragments <;à et la dans des mémoires particuliers, dans certains traités des Viil PRÉFACE maladies de la peau ou d'histoire naturelle ; mais nulle part il n'est exposé dans son ensemble, comme dans ces leçons, fidèlement recueillies par M. Pouquet, interne du service, et publiées avec des planches destinées à foire reconnaître les parasites dans les cas embarrassants où l'emploi du microscope est devenu nécessaire. Il y a plus, le titre seul du sujet soulève des questions générales d'une liante importance ; questions de doctrine et de clafissication. Pourquoi dire affections cutanées et non maladies cuta- nées? Pourquoi réunir sous la dénomination commune d'af- fections parasitaires des inflammations de la peau si diffé- rentes et par la forme et par le siège élémentaire? Ceci demande quelques explications. Les dermatologistes, par cela seul qu'ils sont dermato- graphes, sont essentiellement organiciens, et par conséquent ennemis du nosologisme proprement dit. Us ne sauraient voir la maladie ailleurs que dans l'organe qui fait l'objet spécial de leurs études, c'est- à-dire dans la peau ; aussi n'at- tachent-ils qu'une très médiocre importance à cette dis- tinction de la maladie et de l'affection. Us ne professent qu'une doctrine et n'ont qu'une classification, empruntées toutes deux à l'anatomie pathologique. En un mot c'est la classification de Willan, à peine mo- difiée dans les détails, qu'ont adoptée la plupart des patho- logistes modernes, tous, plus ou moins imbus des doctrines organiques ou physiologiques. Le vrai nosologiste ne part ni de la physiologie, ni de l'anatomie, ou de l'anatomie pa- thologique, pour étudier les maladies et les classer par une PRÉFACE. 1M méthode simple et naturelle : il part du malade et l'obser- vation est son seul flambleau. L'observation, seule, lui apprend l'évolution et la suc- cession des symptômes, les rapports des symptômes entre eux, la marche, laduréc, les terminaisons de l'état morbide : il arrive ainsi à la connaissance des maladies ou des uni- tés pathologiques, qu'il partage en groupes ou familles na- turelles, d'après l'analogie de cause, de symptômes et de traitement et non d'après le siège des lésions. Telle est la véritable doctrine médicale, tels sont les principes que j'ai toujours professés. Cette doctrine traditionnelle établit une différence capi- tale entre l'affection et la maladie. L'affection est un étal morbide des organes; la maladie est l'état morbide de l'in- dividu. Comme je l'ai dit ailleurs, il n'y a pas de maladies de la peau: il n'y a que des affections de la peau. Partant de là, j'ai donc eu raison de dire affections cutanées para- sitaires et non maladies cutanées parasitaires. D'ailleurs toutes les affections delà peau ne se rattachent pas nécessairement à des maladies. La piqûre de puce est une lésion de la peau : on ne peut pas dire, sans blesser le bon sens, qu'elle est une maladie. Si beaucoup d'affections de la peau ne sont ni des mala- dies ni des symptômes de maladies, une classification no- sologique ne leur est pas applicable puisqu'elle ne saurait les comprendre toutes. Évidemment, elle ne peut servir qu'à la coordination des éruptions pathologiques. J'en dirai autant des classifications séméiotique et ana- lomo-pathologique qui, utiles d'un certain point de vue, pour le diagnostic par exempte, sent défectueuses dès qu'on X PRÉFACE. veut les appliquer aux affections cutanées, avec l'intention de tracer une histoire complète de ces dernières. La seule méthode de classement applicable en pareil cas aux affections de la peau est celle qui les réunit par les causes. Cette classification étiologique les partage tout d'abord en deux grandes sections, l'une où se trouvent les affec- tions de cause externe, et l'autre qui comprend toutes les affections de cause interne. Je rattache aux affections de cause externe : 1° Les éruptions mécaniques ; 2° Les éruptions artificielles; o° Les éruptions parasitaires. Les affections de cause interne sont congénitales ou pa- thologiques ; je n'ai point à m'en occuper ici : je dirai quel- ques mots seulement des affections de cause externe. 1° Les éruptions mécaniques ou chirurgicales sont pro- duites par l'action immédiate des agents physiques sur la peau : l'ecchymose par exemple. Ce sont de véritables blessures de la peau. 2° Les éruptions artificielles sont directes ou indirectes. Les premières succèdent à l'action locale des agents phy- siques, mais elles sont le résultat d'un travail inflamma- toire et non le produit immédiat de la cause extérieure : telles sont les éruptions produites par l'huile de croton, le tartre stibié, l'huile de cade, etc.... Les secondes sont les éruptions toxiques ou pathogénétiques. , consécutives à l'ingestion de substances plus ou moins vénéneuses. 11 im- porte de les connaître afin de ne pas les confondre avec les éruptions analogues de cause interne. PRÉFACE. XI o° Les éruptions parasitaires, déterminées par des êtres organisés, vivant exclusivement sur la peau, appartenant au règne végétal ou au règne animal. Ces différentes éruptions mécaniques, artificielles, para- sitiques sont manifestement de cause externe, mais elles agissent sur des organisations plus ou moins prédisposées aux affections cutanées ; elles éveillent des prédispositions dont les effets ont été confondus avec les résultats simples et immédiats de la cause extérieure. C'est ainsi quela dartre a été, dans beaucoup de cas, confondue avec la gale ; que la scrofule a été confondue avec la teigne. On remarquera que, parmi les éruptions artificielles, il est un groupe de ces affections qui se rapprochent singu- lièrement des affections parasitaires ; je veux parler des blessures produites par les animaux qui ne se trouvent qu'accidentellement sur la peau de l'homme : tels que pu- naises, mouches, cousins, etc L'importance et les avantages d'une pareille classification sont faciles à comprendre. La connaissance des affections morbides ne saurait avoir d'autre but pour l'homme de l'art que la thérapeutique. Or, classer ces affections par les causes, c'est déjà indiquer leur nature et mettre sur la voie d'un traitement rationnel : sublatâ causa, tollilur effectus. Qu'une affection soit papuleuse, vésiculeuse ou pustu- leuse, qu'importe? — Nous savons qu'elle est parasitaire et nous sommes certains qu'elle disparaîtra sous l'influence des parasiticides. La forme varie, mais la nature est la même ; or, la forme n'est qu'une chose secondaire et classer les affections par la forme en papuieuses, vésiculeuses , XH PRÉFACE. pustuleuses..,, c'est subordonner la nature ou le fait prin- cipal à la forme ou au fait secondaire. Le mode pathogénique des affections cutanées a plus d'importance sans doute que la forme des éruptions ; mais il en a moins, pour la thérapeutique, que la cause pre- mière, l'origine ou la nature de ces éruptions. Ainsi, pour ne citer qu'un exemple : la question la plus importante pour le médecin et pour le malade n'est pas de savoir si telle éruption cutanée est hypertrophique, inflammatoire ou fibro- plastique, c'est de connaître si cette éruption est d'origine scrofuleuse, afin de pouvoir diriger contre elle une médi- cation appropriée à la maladie dont elle n'est que la traduc- tion cutanée. L'étude approfondie des affections cutanées suppose la connaissance antérieure de la nosographie et de la séméïo- tique cutanée. Citons un exemple pour bien rendre notre pensée et nous faire comprendre du lecleur. Comment arriver à la connaissance parfaite des scrofu- lides si l'on ne connaît déjà l'histoire de la scrofule. Pour savoir ce qui est scrofulide, il faut connaître les affections qui ont précédé, celles qui doivent suivre et les rapports de ces affections entre elles. Je dis de plus qu'il faut connaître la séméïotique de la peau, car c'est elle qui détermine la valeur individuelle des diverses périodes d'une même affection. Ainsi, je suppose qu'on veuille tracer l'histoire complète de l'éruption vario- lique, n'est-il pas évident qu'il faudra connaître la noso- graphie par laquelle on apprend toute l'évolution de la pe- tite vérole et la séméiotique de la peau qui détermine la valeur absolue et relative des taches, des papules, des pus- PRÉFACÉ. \H1 tules et des croûtes. Avec ces données, il est facile de tracer une histoire complète, à tous les points de vue, de l'affec- tion cutanée dite éruption variolique. Si l'on ne peut arriver à la connaissance parfaite des af- fections de la peau, sans avoir fait une étude préalable de la nosographie, nous pouvons rigoureusement tirer de là cette conséquence: qu'avant d'être spécialiste, il faut avoir été médecin. En effet, le spécialiste, qui ne s'est jamais livré qu'à l'étude de sa spécialité, n'est et ne peut être qu'un médi- easlre aveugle. Un moment, le succès peut en apparence couronner sa pratique, mais en réalité ce spécialiste igno- rant n'est appelé qu'à faire des victimes et non à guérir des malades. On trouvera, dans ces leçons, quelques considérations nouvelles sur les parasites végétaux, des divisions et des descriptions qui ne se rencontrent pas ailleurs, ni dans les livres des autres ni dans les brochures que j'ai déjà publiées sur les teignes. J'ai essayé d'éclaircir les points les plus obscurs du sujet en même temps que j'ai expliqué certaines contradictions apparenles entre mes croyances actuelles et les assertions émises dans mes recherches antérieures. Dans l'historique, j'ai fait connaître les travaux des au- teurs qui ont traité le même sujet ; avec un soin tout parti- culier, je me suis attaché à faire la part qui revient à cha- cun dans les découvertes modernes. J'ai dû aussi flétrir ce système d'appropriation, assez à la mode aujourd'hui, qui consiste à s'emparer sous des noms différents des dérouverfes des autres. Ainsi, pour ne X.IV PRÉFACE, citer qu'un fait : les rapports de V herpès circiné, du pity- riasis alba et du sycosis étaient ignorés avant moi ; je les ai signalés à l'attention des dermatographes, et voilà que bientôt M. Chausit admet une forme de sycosis qu'il ap- pelle disques érythémateuœ Singulier sycosis pour un disciple de l'école de Willan ! — puis, c'est M. Devergïe (1) qui vient à son tour transformer son pityriasis alba, la deuxième période de ma teigne tonsurante, en une maladie nouvelle, la mentagrophyte traçante!!! Le microsporon mentagro- phytes, que j'avais cru mort, est ressuscité et vient mer- veilleusement s'adapter à la pathogénie de cette maladie nouvelle. Mais, le microsporon mentagrop hy tes a été trouvé par le docteur Gruby, dans une éruption mentagreuse et non dans un érytbème ou un pityriasis du menton!..,. Ne serait-ce pas qu'au temps où le docteur Gruby faisait ses recherches, ce champignon vivait dans les pustules ou dans les follicules et qu'aujourd'hui il ne végète plus que sur l'épidémie? C'est un parti pris, personne ne veut admettre ni l'identité de nature, ni la succession de ces -trois affections, herpès circiné, herpès tonsurant, sycosis, mais chacun veut avoir sa part de cette prétendue décou- verte. Une discussion vient d'avoir lieu à l'Académie de méde- cine sur les parasites de la peau humaine. Mon collègue, M. Devergie, a cru devoir, à l'occasion d'un rapport sur la dartre tonsurante des chevaux, porter devant la docte as- semblée les doctrines des micrographes ; je dirai, moi, pour (l) Journal des connaissances médico-chirurgicales, par Lucas-Ctiam- pionnière (n° de septembre 1857).. PRÉFACE. XV parler avec plus de franchise, les principes exposés dans cet ouvrage. On s'était mépris sur le sens de mes paroles: j'avais dit, en répondant à un mauvais argument de M. Cazenave, que l'Académie était incompétente en matière de teignes; sans doute on aura pris cela pour une provocation, et l'on s'est présenté devant elle armé de pied en cap, pour engager la lutte contre les micrographes ; mais à peine commencé le combat a fini, faute de combattants. Que pense-t-on main- tenant de ma témérité irrévérencieuse? Dans une lettre, adressée à M. le Président de l'Aca- démie, j'ai reproché à M. Devergie d'avoir passé sous si- lence mes travaux sur les affections parasitaires, d'avoir tronqué mes phrases, d'avoir traduit inexactement le sens de mes paroles, de s'être approprié mes idées en les dé- naturant : le lecteur impartial, qui aura pris connaissance du rapport de M. Devergie, verra par la lecture de ces leçons si tous ces reproches sont fondés. A la tribune académique, M. Devergie, dans sa sollici- tude pour tout ce qui peut mintéresser directement, est venu dire qu'il rejetait, comme n'ayant pas de caractère véridique, les paroles que l'on me prête dans les leçons pu- bliées par mes élèves. A cette occasion, je ne puis m'em- pècher de réclamer toute la responsabilité des opinions émises, des laits allégués dans ces écrits. le laisse au jeune médecin distingué, qui a bien voulu recueillir mes leçons sur les affections parasitaires, tout le mérite delà rédaction, mais il me parait juste d'ajouter que, loin de donner plus d'àpreté à mes paroles, il a parfois, au contraire, apporté quelque adoucissement à mon langage. XV! PttftfAËB. En butte à des attaques passionnées, on conçoit aisément que j'aie dû éprouver une vive satisfaction en lisant les articles de M. Hardy, qui ont paru tout récemment dans le Moniteur des hôpitaux. Ce savant collègue n'a pu garder le silence en voyant le peu de cas qu'on faisait à l'Aca- démie des progrès réalisés depuis quelques années à l'hô- pital Saint-Louis, dans la thérapeutique des affections de la peau. Après avoir rendu pleine et entière justice à mes travaux, M. Hardy déclare qu'il accepte sans réserve mes doctrines sur les affections parasitaires, qu'il partage mes idées, et, avec cet esprit droit, ce jugement sûr que tout le monde lui connaît, il n'a pas de peine à prouver que les maladies parasitaires forment une famille très naturelle dans la nosologie dermatologique. Cette déclaration si franche, si explicite de notre hono- rable collègue a plus de valeur à nos yeux qu'une sanction donnée par toutes les académies de l'Europe ; puisse-t-elle mettre un terme à des insinuations perfides contre les- quelles il est souvent plus difficile de se défendre que contre une accusation ouverte ! Les éditeurs n'ont rien négligé de ce qui pouvait être utile dans cette publication pour la rendre intéressante et com- pléter l'étude des parasites. Us y ont ajouté des planches où se trouvent figurés tous les cryptogames de la peau hu- maine. On y remarquera surtout ceux de la pelade et des crasses parasitaires, qui n'ont été nulle part représentés d'une manière exacte. E. Bazin. 2G février 1858. LEÇONS THÉORIQUES ET CLINIQUES SUR LES AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES. En terminant mes leçons de l'année dernière, je vous avais promis de continuer, celle année, le parallèle si intéressant de la scrofule, de la syphilis, de la dartre et de l'arthritis. Après avoir suivi ensemble les différentes manifestations de ces diverses maladies sur les systèmes cutané, muqueux, cellulaire et ganglionnaire, nous devions aborder l'étude des affections plus profondes, et j'aurais pu sans peine vous convaincre que la scrofule, quand elle atteint les os, les articulations, les viscères, se présente toujours avec des caractères qui n'appartiennent qu'à elle, et qui, par consé- quent, la distinguent toujours de la syphilis, de la dartre et de l'arthritis dans leurs manifestations profondes. Pourquoi donc ai -je abandonné ce sujet, et pourquoi ai-je choisi, pour mes leçons de cette année, l'étude des affections cutanées parasitaires? Deux raisons surtout m'ont déterminé à interrompre mes leçons de Tannée dernière. i 2 PARASITES EN GÉNÉRAL. D'abord je n'ai point, ce que je devais avoir, mon service de femmes scrofuleuses, et vous savez que, chez la femme, la scrofule se montre avec des caractères aussi tranchés, plus tranchés peut-être que chez l'homme. En second lieu , la publication de mes dernières leçons n'étant pas encore achevée, il m'était impossible de continuer un sujet dont mes nouveaux auditeurs n'auraient pu connaître la première partie. J'ai voulu reprendre, cette année, l'étude des affections parasitaires, parce que ce sujet n'a été traité que d'une manière tout à fait incomplète dans mes leçons de 1855 : je n'ai pas dit un mot des parasites animaux, et c'est tout au plus si j'ai consacré une leçon à la description des différentes variétés de teignes. — ■ Le moment m'a paru opportun de faire, cette année, avec vous, une étude sérieuse, complète, approfondie, de ces affections parasitaires les plus intéres- santes peut-être, et, sans contredit, les plus négligées de la pathologie cutanée. Elles forment une classe très nombreuse, très variée; chaque jour, elles donnent lieu aux méprises les plus fâcheuses, et je ne saurais dire combien de malades (tant le nombre en est considérable!) sont venus ici nous consulter, portant une affection parasitaire que des confrères très habiles avaient rattachée à la dartre ou, plus souvent, à la syphilis. Entrons maintenant dans notre sujet, et permettez-moi, avant tout, de vous donner une définition claire et précise des termes que nous emploierons 5 car, vous le savez, pour s'entendre sur les choses, il faut d'abord s'entendre sur les mots. Qu'est-ce donc qu'un parasite, une affection parasitaire et une maladie parasitaire ? PARASITES EN GÉNÉRAL. 3 On donne le nom de parasite à un être organisé, végétal ou animal, qui, fixé sur un autre être, y puise exclusivement les éléments de sa subsistance. Il y a donc deux classes de parasites : les parasites animaux et les parasites végétaux. Les uns et les autres peuvent se montrer sur des animaux ou sur des végétaux. — Je ne m'occuperai que des parasites qui vivent sur la peau de l'homme. \À affection cutanée parasitaire est une affection de la peau produite directement par le parasite lui-même, ou sympto- malique d'une maladie parasitaire. Enfin, sous le nom de maladie parasitaire , nous entendons un étal particulier et accidentel de l'organisme qui se montre, par suite delà présence d'un parasite (animal ou végétal), sur un point quelconque du corps, et qui se manifeste par un ensemble de symptômes, de lésions et d'affections. Ainsi, la teigne lonsurante est un état qui embrasse toutes les expressions se rattachant à l'existence d'un végétal parasite : disques érythémateux, herpès circiné, eczéma et lichen circonscrits, pustules, tubercules La teigne ton- surante est donc une maladie parasitaire; l'une quelconque de ses manifestations, l'herpès circiné, par exemple, est une affection parasitaire ; et. le parasite lui-même, c'est le trichophyton. Je crains que vous ne compreniez pas bien, et, par suite, que vous trouviez subtile la distinction que j'ai établie entre Y affection parasitaire et la maladie parasitaire. Sans doute, il est difficile de poser des limites fixes, et quelquefois on ne saurait dire s'il y a maladie parasitaire ou simplement affection • mais il n'en est pas moins vrai que la différence est grande entre l'une et l'autre, puisque la première est un eiat dont la seconde n'est qu'une manifestation, .le n'insiste pas davantage, eette question n'ayant qu'une médiocre impor- h PARASITES EN GÉNÉRAL1. tance, à cause de l'ordre que j'adopterai dans cette étude ; vous me comprendrez mieux à la fin de cette leçon. Le parasite fixé sur la peau de l'homme joue le triple rôle de cause, de symptôme et de lésion. 1° Il joue le rôle de cause en déterminant des lésions phy- siques. — En traçant son sillon, l'acarus soulève et détruit les couches superficiellesde l'épiderme. — L'achorion, dans le favus, dissocie, en se développant, les deux lamelles épider- miques entre lesquelles il est placé, et quand il existe depuis longtemps, il produit souvent des cicatrices indélébiles ; d'autres fois, le même parasite se développe sous l'ongle, le soulève, le détruit lentement, et finit par le perforer. Outre ces lésions purement mécaniques, il provoque, à une certaine période de son existence, des éruptions cutanées diverses : herpès, eczéma, lichen, pityriasis, eclhyma, etc. Déjà, à ce moment, s?est développée dans l'organisme une apti- tude sans laquelle ces éruptions ne sauraient se manifester. Ici, comme dans toute maladie, nous trouvons deux causes dont le concours est nécessaire, l'une externe, l'autre interne. C'est cette dernière que j'ai déjà désignée sous le nom d'aptitude, et que je vous prie de ne pas confondre avec la condition de terrain. La maladie peut être considérée comme la résultante de ces deux forces interne et externe. Le parasite ne peut rien sans l'aptitude de l'organisme, et sans le parasite, cette aptitude demeure stérile.— J'ai eu l'oc- casion d'observer un sujet dont la peau des mains était cou- verte de sillons et d'acares, sans qu'on pût trouver la moindre trace de la plus légère éruption : évidemment, dans ce cas, il y avait défaut d'aptitude, et le sujet n'avait pas la gale. Cependant les conditions de terrain étaient très favorables au développement des parasites, puisque ces derniers étaient extrêmement nombreux. Vous voyez, par cet exemple, que PARASITES EN GÉNÉRAL. 5 les conditions locales et l'aptitude sont choses très différentes. 2° Leparasiteest aussi symptôme.— r N'est-ce pas, en effet, l'acborion qui constitue ces godets si remarquables dans le favus? N'est-ce-pas également le trichophyton qui forme ces gaines blanches qui entourent et masquent les poils cas- sés dans la teigne tonsurante? Et ne savez-vous pas tous que, dans la gale, ce petit point blanc, brillant, que Ton voit à l'ex- trémité d'un sillon, n'est autre chose que l'acarus? 3° J'ai dit, enfin, que le parasite jouait le rôle de lésion. Il joue ce rôle par son mélange avec les éléments cutanés qu'il a altérés, ou avec les produits morbides dont il a pro- voqué la formation. J'attache une très grande importance à ce triple rôle que joue le parasite dans les affections cutanées. Vous verrez, en effet, que ces idées sont loin d'être admises par tous les der- matologistes, et je désire vous faire bien comprendre en quoi ma doctrine est différente des autres. Dans un grand nombre de maladies, dans la fièvre typhoïde et dans le choléra, par exemple, on voit souvent se dévelop- per des parasites. Leur existence est incontestable, mais ils diffèrent essentiellement des parasites cutanés, que nous étudierons. — Ils ne jouent pas le triple rôle de cause, de symptôme et de lésion. — Ils n'ajoutent rien à la maladie dans laquelle ils se produisent, et leur développement a lieu sur des tissus altérés ou sur des produits de nouvelle forma- tion. Cène sont donc que des parasites de la lésion morbide, qui ne méritent en aucune façon de fixer l'attention du médecin. Eh bien, beaucoup de dermatographes n'attachent pas plus d'importance à nos parasites cutanés, puisqu'ils les con- sidèrent comme se développant sur des produits de sécrétion altérés, ou comme se montrant sous l'influence d'un état morbide de l'organisme. 6 parasites en général. Lisez, dans ie livre de M. Cazenave, le mode de production du champignon favique, et, dans celui de M. Devergie, le chapitre qui traite de la gale, et vous verrez quel triste rôle joue le parasite. Pour M. Cazenave, le champignon (quand il existe) ne forme qu'une très petite partie des croûtes faviques, lesquelles se composent, en presque totalité, de matière sébacée, et c'est toujours sur cette matière sébacée altérée que le parasite se développe. — La vérité est, je crois, vous l'avoir déjà dit, que ces croûtes jaunes du favus sont exclusivement constituées par ce végéta! parasite auquel les naturalistes donnent le nom (Yachorion. M. Devergie fait un peu plus d'honneur au parasite ani- mal. — L'acarus peut être engendré spontanément sous l'in- fluence d'un état morbide de l'organisme, par suite d'une altération particulière des humeurs; mais dès qu'il est créé, ce parasite joue un rôle actif et contribue au développement des diverses éruptions qui se manifestent dans la gale. — En un mot, l'acarus, qui n'est d'abord qu'un effet de la maladie, est plus tard élevé à la dignité de cause. Vous ne sauriez croire quelle funeste influence ces doc- trines ont exercée sur la thérapeutique des affections cutanées parasitaires. Et, pour ne citer qu'un exemple, pourquoi, en I8/18, se bornait-on encore aux frictions partielles dans le traitement de la gale, lorsque depuis longtemps déjàHelmerich et Burdin, son élève, avaient montré l'efficacité delà friction générale? — C'est qu'en considérant l'acarus comme un pro- duit de la maladie, on ne pouvait donner qu'une mauvaise explication de la supériorité des frictions générales; la des- truction de l'acarus n'était rien moins qu'importa nte, il fal- lait avant tout corriger les humeurs, comme le dit expres- sément Burdin, et pour cela il suffisait de faire absorber par l'AiîAsn ks en général. 7 la peau quatre onces de pommade : la friction générale n'était préférable qu'en permettant l'absorption de la quantité vou- lue de pommade. On put donc croire, après Burdin, que plu- sieurs frictions partielles équivalaient à une friction générale, et cette dernière fut négligée. Déjà vous avez vu que ma doctrine sur le rôle des para- sites cutanés n'était pas généralement adoptée; vous le com- prendrez mieux encore par les considérations historiques générales dans lesquelles nous allons maintenant entrer. Historique. — Les animaux parasites ont été connus bien plus tôt que les végétaux parasites. La connaissance du pou et de la puce remonte sans doute à l'antiquité la plus reculée ; celle de l'acarus est d'une date moins ancienne, Avenzoar est le premier auteur qui en fasse mention. Quant aux végétaux parasites, leur découverte est toute récente ; il y a à peine vingt- cinq à trente ans que Schcen- lein, le premier, a décrit, sous le nom (ïoïdiim, le végétal parasite de la teigne fàveuse, aujourd'hui connu sous le nom à'Achorion Schœnleinii. Depuis cette époque, on a observé et décrit les champi- gnons des autres variétés de teigne, et à ces intéressantes découvertes se rattachent les noms des micrographes les plus distingués, parmi lesquels nous devons surtout citer MM. Re- mak, Bennett, Fuchs, Lebert, Gruby et Ch. Robin. Mais ne croyez pas que la connaissance des affections et des maladies parasitaires ait accompagné ou suivi de près la découverte des parasites. Turner, qui écrivait dans le siècle dernier, fait dans son ouvrage un groupe des différents para- sites, et, dans ce groupe, on trouve l'histoire de l'acarus à côté de celle du pou et delà puce ; puis, dans un autre cha- pitre, le même auteur traite de la gale, qu'il considère 8 parasites en général. comme unemaladie des humeurs: le parasite n'est ainsi, vous le voyez, qu'un simple produit de la maladie. Les champignons sont connus depuis plus de vingt, années, et leur histoire est aujourd'hui à peine achevée. Comme dans toutes les découvertes en médecine, on n'est arrivé que pas à pas à la vérité, en marchant toujours du simple au composé. — D'abord ce sont les symptômes qui frappent: aussi le prurit etl'érythème produits parle para- sites ont-ils la première chose mentionnée par les auteurs. — Plus tard, on arrive aux affections, et depuis Mercuriali jusqu'à Willan, on trouve des descriptions exactes et déplus en plus complètes des affections cutanées que les parasites déterminent. — Enfin, pour arrivera la connaissance de la maladie parasitaire, il fallait apprécier les rapports des diver- ses affections entre elles, grouper ces affections, travail évi- demment sérieux et plus difficile, d'autant plus que les ma- nifestations, se rattachant à un même parasite, étaient plus nombreuses. C'est ainsi que les maladies les plus simples sont très bien connues depuis très longtemps (teignes achroma- teuse et décalvante, désignées sousle nom commun depelade), tandis que les plus compliquées (gale, et surtout teigne ton- surante) sont, aujourd'hui encore, méconnues dans leur unité par le plus grand nombre des médecins. Dans les traités spéciaux de dermatologie, les animaux parasites occupent une place; mais on y trouve plutôt des groupes de parasites que des affections cutanées parasitaires. Turner nous en a déjà fourni un remarquable exemple. Dans ces mômes ouvrages, il n'est pas question des végé- taux, ou s'ilssont mentionnés, ce n'est qu'à l'état d'hypothèse : je vous ai déjà dit combien peu d'importance certains auteurs leur accordaient. Peut-êti\^ quelques esprits rêveurs sont-ils aujourd'hui PARASITES EN GÉNÉRAL. 9 disposés à voir des champignons dans toutes les affections, dignes émules de Raspail qui, vous le savez, admet, dans toutes les maladies, des animaux parasites auxquels il fait jouer un très grand rôle. Tenez-vous toujours dans une grande " défiance en présence de doctrines entachées d'une si évidente exagération- mais n'allez pas non plus, avec M. Cazenave, vous jeter dans un excès contraire, et, par une crainte exa- gérée du morbidisme végétal, nier jusqu'à l'existence des végétaux parasites. Vous êtes entre deux écueils qu'il faut savoir également éviter. Parmi les médecins de l'hôpital Saint-Louis, M. Hardy est le premier, après nous, qui ait admis l'existence des végétaux parasites; — viennent ensuite M.Gibert, et, après lui, M. Devergie, qui, dans la seconde édition de son ouvrage qu'il a fait paraître tout récemment, reconnaît aux champignons une existence incontestable; et, bien que dans cet ouvrage le végétal parasite (mycoderme) n'occupe pas sa vraie place, on doit assurément quelques éloges à notre honorable collègue pour avoir donné le premier signal en faisant prendre rang- dans la science à nos parasites des teignes. Maintenant, pourquoi ne le dirais-je pas, ce livre renferme une multitude d'erreurs : erreurs de dates et de faits , erreurs d'appréciations et d'interprétations, erreurs de doc- trines. Et je n'en finirais pas si je voulais les signaler toutes. Ces erreurs innombrables ont été ou seront très pro- chainement relevées. Qu'il me soit cependant permis de répondre à une injuste accusation de M. Devergie. « Vous avez, me dit-il, tout ren- versé, vous n'avez rien édifié Vous professez un profond mépris pour les noms séculaires...» — J'avoue que je croyais avoir apporté un peu d'ordre et de clarté dans l'étude des affections parasitaires ; je croyais aussi avoir, plus que tout 10 PAilASITiiS hM GÉiNÉlUL. autre, respecté la tradition, en conservant des vieux mots tombés en désuétude, tels que ceux de teigne, de pelade. Et si ces mots n'ont plus dans ma bouche leur ancienne signi- fication, faut-il m'en faire un reproche? Ne devais-je pas, en les conservant, les mettre en harmonie avec les progrès de la science? Je n'ai donc pas bouleversé la science, mais bien plutôt et seulement celle de M. Devergïe. Pour vous en convaincre, comparez les deux éditions de son ouvrage ; — c'est en vain que vous chercherez dans la première le groupe de maladies à champignons. On peut; dans l'étude des parasites, se placer à plusieurs points de vue, et suivre l'ordre nosographique, l'ordre sé- méiotique ou l'ordre étiologique ; c'est cette dernière marche que j'adopterai. » DES AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES EN GÉNÉRAL. L'étude des affections cutanées parasitaires comprend la nosographie, l'étiologie, la séméiotiqueet la thérapeutique ; nous prendrons d'abord la nosographie, qui embrasse les symptômes, la marche, la durée et la terminaison. Symptômes. — Ils sont très nombreux et peuvent être rapportés à quatre ordres différents : 1° symptômes fournis par le parasite lui-même ; — 2° symptômes fournis par les modifications physiques que le parasite imprime à la peau et à ses annexes ; — 3° symptômes se rattachant aux diverses éruptions symptomatiques de la maladie parasitaire ; — II0 enfin, phénomènes sympathiques consistant le plus souvent dans des troubles d'innervation de la peau, et quelquefois dans des troubles d'autres appareils. Reprenons successivement ces divers symptômes. 1° Symptômes fournis par le parasite. — Les parasites sont visibles (à l'œil nu ou à la loupe) ou invisibles, et, dans ce cas, le microscope est nécessaire pour les apercevoir. Ils sont, vous le savez, de deux sortes : végétaux ou animaux. Les végétaux parasites onl un siège anatomique qui ne varie pas; qu'ils vivent aux dépens des poils, des ongles ou de l'épidémie, c'est toujours le même terrain qu'ils occupent, 4 2 AFFECTIONS CUTANÉI.S PARASITAIRES c'est-à-dire cette partie de la peau si connue sous le nom de corps muqueux de Malpighi : c'est la couche profonde de l'épiderme, formée de cellules molles ou pigmentaires. Ces parasites demeurent fixes dans la région qu'ils occu- pent, et, s'ils prennent de l'extension, c'est toujours par un développement intrinsèque. Quelquefois, souvent même ils paraissent en un point plus ou moins éloigné de leur siège primitif, mais c'est toujours mécaniquement qu'ils ont été transportés dans ce point, et le grattage joue le principal rôle dans ce transport de la matière champignonneuse. Voici en effet ce qui arrive. Un malade porte du favus au cuir chevelu ; il éprouve des démangeaisons et se gratte ; en se grattant, il ne songe assurément à rien moins qu'à éviter les croûtes dont sa tête est couverte, et il s'introduit ainsi, sous l'ongle, une certaine quantité de matière favique, qui, plus tard, sera portée par les doigts sur tel ou tel point du corps où elle pourra se développer. Mais, sous l'ongle même, le parasite occupe un terrain favorable; aussi voyons-nous souvent du favus unguéal chez les malades affectés depuis longtemps de teigne faveuse. Tantôt (au début) le parasite se présente recouvert d'une lamelle épidermique (couche cornée de l'épiderme); — tantôt, cette lamelle ayant cédé à la pression du champignon, ce dernier esta nu à la surface de la peau ; — quelquefois aussi le parasite est mélangé à des débris épidermiques ou à delà matière piginentaire, et il est impossible à l'œil de distinguer l'élément parasitaire de l'élément cutané. Ce sont des moisissures régulières ou irrégulières, remar- quables par leur sécheresse, leur couleur jaune-paille, leur odeur comparée, avec raison, à l'odeur de souris (favus); — ou bien, des lamelles très minces et sèches, d'un blanc jaunâtre (favus épidermique) ; — d'autres fois, ce sont des EN GÉNÉRAL. 13 filaments courts et d'un très beau blanc (teigne tonsurante) ; — un duvet grisâtre (pelade) ; — des taches couleur café au lait, plus ou moins analogues à celles qui recouvrent la peau des gens malpropres, tantôt rares et espacées, tantôt réunies sur de larges surfaces (cbloasma et pityriasis versicolor) ; — quelquefois, enfin, c'est une crème blanche fixée à la surface d'une muqueuse. Les animaux parasites ne sont pas fixes dans leur siège, comme les champignons; et il y a ici une distinction à faire parmi ces parasites animaux ; les uns, comme les poux et les puces, étant sans cesse en mouvement, tandis que les autres, tels que les morpions et les acares, ne se meuvent qu'à cer- tains moments. On peut également établir une distinction sur le siège anatomique qu'occupent ces parasites : les uns sont toujours à la surface de la peau, et les autres se logent quelquefois sous une couche épidermique. On doit enfin mentionner, cà côté des animaux parasites, les lentes , les chiures de puces, les fèces d'acares qui produisent ces légères traînées, connues sous le nom de sillons, dont la valeur est si grande dans le diagnostic de la gale. 2° Symptômes fournis par les modifications physiques que le parasite imprime à la peau et à ses annexes. — Ces modifications dépendent souvent d'une pression méca- nique exercée par le parasite ; — souvent aussi c'est un chan- gement de couleur affectant la peau (vitiligo), les poils (di- verses teignes) ou les ongles (favus unguéal) ; — d'autres fois c'est une disjonction des éléments cutanés (sillons de l'aca- rus) ; — quelquefois, enfin, il y a rupture des petits vaisseaux de la peau, et, par conséquent, hémorrhagie cutanée (piqûres de puces). 3° Symptômes fournis par les éruptions sy Diplomatiques fli AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES de la maladie parasitaire. — Ces éruptions, très variées et très nombreuses, comprennent les huit ordres de Willan, et même, vous le verrez, le cadre des Willanistes est insuf- fisant. Dans l'ordre des exanthèmes, les éruptions parasitaires sont nombreuses : souvent l'éry thème, sous forme d'anneaux ou de disques, signale le début de la teigne tonsurante, et quelquefois de la teigne faveuse. Eh ! ne connaissez-vous pas celte aréole érythémateuse qui succède h une piqûre de puce? — Je signalerai aussi la stomatite érythémateuse qui précède le développement de X oïdium albicans (muguet), et certaines roséoles par lesquelles le parasite annonce sa germination. Les éruptions papuleuses ne sont pas moins communes : ellis appartiennent à certaines variétés de mentagres, et elles ne manquent presque jamais dans la gale. L'ordre des vésicules nous offre l'herpès circiné auquel nous attachons une importance capitale dans le diagnostic de certaines teignes; des petits groupes eczémateux, de forme plus ou moins arrondie Rien de plus commun que les pustules dans la gale, la mentagre. Les bulles se voient plus rarementetappartiennent presque exclusivement à la gale. Dans le sycosis (troisième période de la teigne tonsurante), existent des tubercules plus ou moins nombreux, plus ou moins volumineux. Comme affections squameuses, nous trouvons le pityria- sis alba (deuxième période de la teigne tonsurante), \e pity- riasis versicolor (dont je viens de vous montrer un si bel exemple), qui, pour beaucoup de médecins, doit être rattaché à la dartre, et que je considère, moi, comme une affection essentiellement parasitaire. m GÉNÉRAL. 15 Dans le dernier ordre, celui des macules, signalons le chloasma, ou masque des femmes enceintes, certaines varié- tés de vitiligo, le purpura qui succède à une piqûre de puce. En- dehors de ces ordres nous avons : les godets favi- ques, les furoncles parasitaires, les abcès dermiques ; j'avais donc raison de vous dire que le cadre de Willan était trop étroit pour nos parasites; et, en résumé, vous voyez que ces derniers, jouant le rôle de corps étrangers, peuvent pro- duire toutes les formes des inflammations de la peau et quel- quefois aussi des lymphites et des gangliites. Les éruptions symptomatiques viennent par poussées suc- cessives, et ce sont tantôt des affections de même forme, et tantôt des affections de forme différente : ainsi les éruptions vésiculeuses se succèdent souvent chez les sujets affectés de parasites ; d'autres fois, c'est une poussée de pustules qui remplace les affections vésiculeuses. Ordinairement, le nombre et l'étendue des affections para- sitaires sont en rapport direct avec le nombre des parasites ; mais cette règle souffre de nombreuses exceptions. Enfin, cà ces éruptions symptomatiques on doit rattacher divers troubles fonctionnels qui sont tout à fait indépendants de la cause parasitaire et sont propres à l'éruption; je veux parler des démangeaisons, du sentiment de brûlure...., et de quelques modifications physiques de la peau ou de ses annexes. h° Phénomènes sympathiques. — Les premiers qui parais- sent sont des troubles de l'innervation cutanée. C'est le prurit, qui manque si rarement, et qui souvent se fait sentir, n'étant accompagné d'aucun autre symptôme, avant qu'on puisse as- seoir un diagnostic : c'est là un l'ait très commun dans la gale. Ordinairement le prurit existe avant, pendant, et après les 16 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES éruptions parasitaires. Est-il produit directement par le para- site, ou bien dépend-il du phénomène éruptif ? — C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. Toutefois une distinction importante doit être faite : tan- tôt, en effet, le prurit est franc, et en même temps modéré; tantôt il est violent et accompagné d'un sentiment de tension, de brûlure.— - Peut-être le prurit franc appartient-il au para- site, et le prurit avec brûlure aux éruptions symptomatiques; mais ce n'est là qu'une hypothèse, et le fait n'a d'ailleurs qu'une médiocre importance. Quel que soit son caractère, qu'il dépende du parasite ou des éruptions parasitaires, le prurit augmente ordinairement pendant la nuit, surtout quand il s'agit de parasites animaux. La violence des démangeaisons nocturnes est un fait bien connu des galeux; et les habitudes de l'acarus, qui semble ne se reposer pendant le jour que pour opérer plus de ravages pendant la nuit, donneraient de ce fait une explication assez satisfaisante, si pareille augmentation du prurit pendant la nuit ne se rencontrait également dans les teignes, dans les affections dartrcuses Après les troubles de l'innervation cutanée, nous devons placer l'insomnie, la fatigue, l'inappétence. Plus tard, à une époque avancée de la maladie, un autre ordre de phénomènes sympathiques apparaît, phénomènes très rares aujourd'hui, grâce aux progrès delà thérapeutique: je veux parler des symptômes de la cachexie parasitaire dont nous avons ici observé plusieurs exemples, et dont vous trou- verez un tableau assez fidèle, emprunté, d'ailleurs, à M. De- vergie, dans mes leçons de 1855. — Il semble que le parasite, à mesure qu'il prend de l'extension, absorbe l'individu aux dépens duquel il vit ; et certaines maladies du ver à soie nous offrent un remarquable exemple de ce singulier phénomène, EN GÉNÉRAL. 17 Sans doute, chez les malades atteints de favus généralisé, une altération profonde de l'organisme peut résulter, ainsi qu'on le voit à la suite de brûlures très étendues, du défaut d'action de la peau couverte de croûtes épaisses ; mais les autres fonctions importantes ne tardent pas à se déranger, le malade tombe au dernier degré de la ebloro-anémie et la mort est inévitable. Aujourd'hui, je puis le dire avec orgueil, nous sommes à l'abri de pareils accidents. M,vuche, durée, terminaisons. — Le début de l'affection est quelquefois immédiat, par exemple dans la piqûre de puce; — ordinairement, il y a un temps d'incubation qui peut varier d'un jour à six semaines, et pendant lequel on n'observe que bien rarement du prurit; d'où Ton pourrait conclure, peut- être avec raison, que le prurit est plutôt lié aux éruptions qu'au parasite. La marche des affections varie avec l'âge du parasite ; une éruption se termine pour être remplacée bientôt par une autre : quant à la maladie, elle suit une marche progressive, et la durée en est ordinairement indéfinie. Terminaisons. — Abandonnée à elle-même, la maladie peut, quand elle ne se prolonge pas indéfiniment, se terminer par la guérison ou par la mort. Pouvons-nons comprendre la possibilité d'une guérison spontanée avec nos idées sur la nature des teignes ? — Oui assurément. — Il faut pour le développement du parasite, certaines conditions organiques que nous ne connaissons pas; dans beaucoup de maladies graves, dans le choléra, la fièvre typhoïde, par exemple, le favus et la gale semblent disparaît! e pour un moment; le parasite sommeille, parce que les con- ditions actuelles de l'économie ne lui conviennent pas; tli bien, de ce sommeil à la mort il peut n'y avoir qu'un pas. 18 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES D'ailleurs, les cas de guérison spontanée sont extrêmement rares . La mort peut survenir par le développement de la chloro- anémie et de la cachexie parasitaire. Grâce à l'intervention de l'art qui détruit le parasite, cause de tous les accidents, la mort n'existe plus comme terminai- son de la maladie, et l'on en peut dire autant de la prolon- gation indéfinie; cependant, on a souvent encore l'occasion d'observer des exemples de cette dernière, par suite de l'in- curie des malades ou de l'ignorance des médecins. Ne voyons- nous pas ici presque chaque jour des teignes faveuses datant de vingt-cinq ou trente ans, et des mentagres presque aussi anciennes ? Complications. — Elles consistent quelquefois dans la coexistence d'affections de même nature, c'est-à-dire d'affec- tions parasitaires ; — tantôt on trouve en même temps plu- sieursespècesde parasites végétaux-, — tan tôt plusieurs espèces de parasites animaux; — tantôt, enfin, les parasites animaux et les parasites végétaux sont réunis sur un même sujet. Ainsi, l'on peut avoir du favus avec de la teigne tonsurante, des poux avec des acares, de la teigne avec de la gale ou des poux. Mais les maladies constitutionnelles sont des complications plus sérieuses des affections cutanées parasitaires; sous leur influence surviennent des éruptions qui rendent le diagnostic plus difficile, le traitement plus long et plus pénible. La scro- fule complique plus souvent le favus, et la syphilis plus sou- vent la teigne tonsurante. Etiologie. — Les causes appartiennent à deux catégories bien distinctes ; nous étudierons, dans la première, lescauses EN GÉNÉRAL. 19 prédisposantes et la prédisposition ; dans la seconde, les causes déterminantes ou les parasites eux-mêmes. L'âge et le sexe exercent une influence incontestable; chaque âge a ses parasites, et ces derniers semblent affecter tel ou tel siège de prédilection. Les poux de la tête se trou- vent surtout chez les enfants, et les poux du corps chez les vieillards. La teigne tonsurante occupe plus souvent dans l'enfance le cuir chevelu, et la face dans l'âge adulte. — Le sexe influe non-seulement sur le siège, mais encore, sur la marche et la durée de l'affection. Tout le monde sait que les sillons de l'acarus doivent être cherchés à la région pénienne chez l'homme, et chez la femme à la région mammaire. — La teigne tonsurante de la face a ordinaire- ment une longue durée chez l'homme, et arrive presque tou- jours à la période menlagreuse ; — • chez la femme,, elle ne dépasse pas la première période, et sa durée est beaucoup moindre. La raison de cette différence est sans doute dans le peu de développement du système pileux de la face dans le sexe féminin ; car, aux parties sexuelles, la marche et la durée de la maladie ne diffèrent pas sensiblement dans l'un et l'autre sexe. Le tempérament et la constitution jouent aussi un certain rôle ; les sujets lymphatiques ont une prédisposition évidente aux affections vésiculeuses ou pustuleuses ; les sujets bilieux et nerveux ont plus souvent des éruptions papuleuses. Certaines conditions physiologiques ( la grossesse par exemple) ont de l'influence sur le développement de tel para- site et sur le siège qu'il occupe; ainsi le ckloasmacl ^pity- riasis versicolor ne sont qu'un seul et même champignon (microsporon furfur ou mieux épidermophylon) ; l'un occupe toujours le visage (c'est le masque des femmes enceintes), et l'autre se fixe plus volontiers sur le tronc. 20 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES Plusieurs fois déjà je vous ai parlé, mais indirectement, de l'action des causes morbides, les unes favorables, les autres défavorables. Sans doute vous n'avez pas oublié cette dispa- rition momentanée de la gale et du favus, ce sommeil du para- site dans la fièvre typhoïde, le choléra. La scrofule etla syphi- lis, au contraire, prédisposent singulièrement aux teignes : la scrofule plutôt au favus , et la syphilis à la teigne tonsurante et à la pelade. De même, l'étisie favorise le développement de l'oïdium albicans. Un état particulier des humeurs (acidité de la salive dans le muguet) , certaines conditions atmosphériques (humidité, chaleur, obscurité) doivent aussi trouver place parmi les causes prédisposantes. Je vous signalerai, enfin, la malpropreté, dont l'influenceest aisée à comprendre et qui joue un rôle si important dans les localités où certaines affections parasitaires sont endémiques. J'ai distingué les causes prédisposantes de la prédisposi- tion, et malgré qu'on se révolte contre cette dernière, je maintiens la distinction. Il faut, pour qu'une affection parasitaire se développe, un état particulier de l'organisme, indépendant des nombreuses conditions dont nous venons de parler, et sans lequel toutes ces conditions réunies seraient impuissantes. Ainsi, qu'on inocule le favus à plusieurs sujets placés dans des conditions à peu près identiques ; toujours l'inoculation réussira, mais tandis que chez les uns une guérison spontanée arrivera en peu de temps, on verra, chez les autres, le parasite se déve- lopper et la maladie durer jusqu'à ce que l'art intervienne. Comment donc expliquer des effets si différents, si l'on ne veut admettre cet état particulier de l'organisme que nous ayons appelé l'aptitude ou la prédisposition ? EN GÉNÉRAL. 21 Le parasite est l'unique cause déterminante des affections cutanées parasitaires. Mais ce parasite d'où vient-il? du dedans ou du dehors? Est-il engendre spontanément par l'organisme ? Quant à moi, je ne suis pas partisan de cette doctrine absurde delà génération spontanée que je ne puis admettre dans aucun cas; écoutez ce qu'en dit Turner : « On convient généralement dans ce siècle éclairé qu'il n'y a point de génération spontanée, et que comme tout végétal porte avec lui, selon le décret du Tout-Puissant, sa propre semence dont une nouvelle plante doit sortir, de même chaque animal, si petit qu'il soit, tire son origine d'un prin- cipe séminal logé dans sa propre matrice. . . N'est-il pas absurde de supposer que la structure la plus curieuse et la mieux imaginée, celle des insectes parasites, sorte de l'ordure et de la corruption ? » (Turner, Maladies de la peau, 2e volume.) N'est-ce point une honte pour notre époque qu'il faille aujourd'hui encore, plus de cent ans après Turner, discuter cette doctrine de la génération spontanée ? Aussi serons-nous brefs dans l'examen des principaux arguments mis en avant par ses partisans. En admettant, disent-ils, que le parasite vienne du dehors, ne faut-il pas toujours remonter à une formation première? Sans aucun doute nous remontons volontiers pour le para- site, comme pour tous les êtres, à cette première formation; toutes choses ont été créées, mais nous ne pouvons admettre qu'il y ait ainsi tous les jours des créations nouvelles. Lors- que vous admirez un beau chène^ si quelqu'un voulait vous prouver que cet arbre s'est développé spontanément dans le lieu qu'il occupe, assurément vous ririezd'unepareille simpli- cité, car vous savez, à n'en pouvoir don 1er, qu' un chêne naîl tou- jours d'un gland dontil n'est qu'un développement magnifique. 22 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES Mais alors, nous dira-t-on, comment expliquer ces épidé- mies de végétaux parasites qui, depuis quelques années, dé- vastent nos champs et dont il n'a jamais été question avant notre époque? — N'ayons pas, messieurs, la sotte prétention de connaître toutes les merveilles, tous les êtres de la créa- tion ; gardons-nous d'admettre, pour satisfaire notre orgueil, autant de créations partielles que de découvertes nouvelles, et, quand les astronomes nous signalent une nouvelle étoile au ciel, ne pensons point que cet astre n'est fait que d'hier. ' — Ces parasites, dont on nous parle, existaient donc, mais ils étaient cachés à nos regards, ne se trouvant pas dans des con- ditions favorables à leur développement; aujourd'hui, ces con- ditions étant remplies, ils paraissent, exerçant leurs ravages. Tous les jours nous sommes témoins de faits de ce genre, sur lesquels s'appuient encore les partisans de la génération spontanée et dont je vous ai plusieurs fois donné l'explication; il s'agit de a disparition des parasites dans le cours des ma- ladies graves. — Ces parasites sommeillent alors ; la maladie disparaissant, ils sortent de leur sommeil, et jouissant d'une ac- tivité nouvelle, ils se reproduisent avec une incroyable facilité. — Au fond, vous le voyez, tous ces arguments sont les mêmes. Quant à la rétrocession des affections parasitaires, je ne ferai que la mentionner comme une vieille erreur qui n'a plus de partisans aujourd'hui. Puisque le parasite vient toujours du dehors, naissant d'un être semblable à lui-même, comment se transmet-il? Je n'admets que la transmission par contagion, ne connais- sant aucun fait authentique de la transmission par voie d'hé- rédité. — Je vous engage donc à ne pas perdre votre temps à l'examen des hypothèses plus ou moins ingénieuses qui ont été faites pour expliquer le mode de transmission des para- sites de le mère au fœtus. EN GÉNÉRAL. 23 La contagion peut s'opérer, comme clans la variole, de quatre manières différentes : Contagion par l'air (elle est fréquente; c'est dans ce cas que l'on dit la teigne spontanée) : la poussière sporulaire est emportée par l'air et les dimensions si petites des spores leur permettent de traverser les pores de l'épidémie, de pénétrer dans les phanères. Contact immédiat ou médiat : cette dernière cause est la plus ordinaire, et la contagion s'opère par l'intermédiaire d'un bonnet, d'un. rasoir, d'un baiser Le plus souvent, le principe contagieux est transmis d'un individu à un autre; quelquefois il est transmis sur le même individu d'une partie du corps à une autre partie ; c'est ainsi qu'on voit si souvent la teigne tonsurante du dos de la main consécutive à une teigne tonsurante de la face. Enfin, l'inoculation est le quatrième mode de transmission du parasite: elle est tantôt volontaire et artificielle, tantôt involontaire et accidentelle, comme dans les cas où elle s'opère par le rasoir du barbier. Des quatre modes de contagion (par l'air, par le contact immédiat, par le contact médiat et par l'inoculation), deux seulement appartiennent aux parasites animaux : ce sont le contact immédiat et le contact médiat; les parasites végétaux peuvent se transmettre des quatre manières. La contagion s'opère ordinairement de l'homme à l'homme, quelquefois de l'homme aux animaux et réciproquement ; et dans ce passage d'une espèce animale à une autre, il ne me paraît pas déraisonnable d'admettre que le parasite puisse subir certains changements dans sa forme ou dans son orga- nisation, sans que toutefois il y ail transformation d'une espèce dans une autre. 2â AFFECTIONS CUTANÉLS PARASITAIRES Etude du parasite. — Je disais, en 1853, dans ma pre- mière brochure sur les teignes, que l'histoire des végétaux parasites était inachevée, imparfaite; ce que je disais alors, je ne puis que le répéter aujourd'hui. Depuis cette époque, j'ai réduit le nombre des espèces, et quelque micrographes distingués ont également modifié leur manière de voir. Les végétaux parasites de la peau humaine sont d'une orga- nisation fort simple ; ils appartiennent tous aux tribus les plus inférieures de cette nombreuse famille de cryptogames connus sous le nom de champignons ; ils sont tantôt visibles et tantôt invisibles ; ils sont visibles à l'œil nu ou à la loupe ; ils sont invisibles, soit parce que leur situation dans la peau est profonde, soit à cause du grand écartement des éléments anatomiques qui les constituent; mais, quoique invisibles à l'œil nu, le microscope nous apprend que leur structure est la même que celle des champignons composés, parasites ou non parasites. Les éléments constitutifs des parasites végétaux ont été rapportés cà deux systèmes : au système reproducteur com- prenant les spores et les filaments réceptaculaires, et au sys- tème végétatif qui ne renferme que le mycélium. Les sj)ores sont les corps reproducteurs de toutes les plantes cryptogamiques, bien diversement disposées selon qu'on les examine dans les fougères, dans les thalassiophy tes, les lichens ou les champignons. Dans les végétaux parasites de la peau de l'homme, ce sont des corpuscules cellulaires, qui se présentent, à un grossis- sement de 200 à 300 diamètres, sous l'aspect de granulations blanches, réfractant la lumière, brillantes à la lumière ailili- cielle, reflétant un éclat stellaire. Ces corpuscules, à un grossissement de 500 a 600 diamètres, paraissent formés d'une double enveloppe et contiennent, dans EiN GÉNÉRAL. 25 leur intérieur des granules qui, ne sont sans doute que des spores plus petites. Dans quelques cas, les granules paraissent comme agités de mouvements rotatoires (mouvement brow- nien des auteurs). Les spores, sporules, sporidies, ont des dimension svaria- bles de 1 à 5 ou 6 millièmes de millimètre de diamètre. Elles paraissent dures et prennent une teinte bleu foncé quand elles sont mises en contact avec l'acide sulfurique et la teinture d'iode. Leur structure se compose, d'après M. Ch. Robin, d'une membrane extérieure formée de cellulose, qui leur donne de la consistance, et d'une partie intérieure qui est Tutricule azoté, dans lequel se trouvent un liquide et des granules. Les acides concentrés coagulent le liquide, et la teinture d'iode donne alors une couleur jaune verdàtre à la membrane extérieure. L'étber, le chloroforme, le solutum potassique, l'acide acé- tique, l'ammoniaque et une multitude d'autres réactifs vous serviront à distinguer les spores des corpuscules étrangers qui pourraient être confondus avec elles. Les filaments réceptaculaires, réceptacles, tubes à spores, tubes sporulaires^ tubes sporophores, etc., sont des cellules allongées, sous forme de tubes, renfermant des spores. Ils sont écartés ou rapprochés les uns des autres sous forme de rubans, et quelquefois comme articulés. On trouve d'infinies variétés, depuis le tube vide jusqu'au tube rempli de spores, arrivées à leur parfait développement. Les spores rudimen- taires sont comme des granules. D'autres fois les parois du tube ne sont pas distinctes des parois des spores. On dirait, en effet, des sporules réunies bout à bout en chapelet, formant un tube cloisonné. Le mycélium, représentant le système végétatif, est com- posé de cellules allongées, sous forme de tubes plus ou moins 26 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES élroils. On en a admis deux espèces, le mycélium nématoïde et le mycélium membraneux. Je reviendrai sur cette division quand nous ferons l'anatomie des favi. Les tubes ont un diamètre de 2 ou 3 millièmes de millimètre, qui est le même généralement dans toute leur longueur. Cette longueur est variable elle-même depuis quelques millièmes jusqu'à plu- sieurs centièmes et même dixièmes de millimètre. Ils sont droits ou iîexueux, simples ou bifurques, fourchus; les divi- sions s'opèrent sous des angles extrêmement variables. Le groupe des champignons a été partagé en six classes, par Léveillé : 1° Arthrosporés ; 4" Clinosporés; 2° Trichosporés ; 5° Thécasporés; 3° Cystosporés; 6° Basidiosporés. M. Ch. Robin a adopté cette division ; il a fait rentrer tous les végétaux parasites de la peau de l'homme dans deux de ces divisions, les arthrosporés et les clinosporés. On trouve, dans les arthrosporés, deux tribus qui en renferment (torulacés et oïdiés); une seule dans les clinosporés, la tribu des coniopsidés. Je mets sous vos yeux le tableau des genres et des espèces extrait de l'ouvrage de M. Ch. Robin (1) : 1° TORULACÉS (structure très simple, spores seulement ou spores et mycélium). Genre : trichophyton ; espèces : lonsurans (herpès tousruant) ; sporuloïdes ; ulcuum. Genre : microsporon ; espèces : mentagrophites (mentagre) ; Audouini (porrigo decalvans) ; furfur (pityriasis versicolor). (1) Histoire naturelle des végétaux parasites qui croissent sur l'homme et les animaux vivants. Paris, 1853. EN GÉNÉRAL. 27 2° OlDIÉS (structure plus complexe; spores, mycélium, réceptacles). Genres : achorion ; espèce: Schœnleinii (favus). — oididm ; espèce : Albicans (muguet). 3° CONIOPSIDÉS Genre : puccima; espèce : d'Ardsten (favus). Cette classification est sans cloute fort savante : elle peut être très exacte quant aux divisions principales, pour les tri- bus et même pour les genres; elle ne l'est plus pour les espèces. Mais je n'entre pas dans plus de détails sur les végétaux parasites, et je passe sous silence les animaux, ne voulant pas ici faire un cours d'histoire naturelle. Je renvoie aux traités spéciaux ceux d'entre vous qui voudraient faire une étude approfondie des parasites. La séméiotique comprend le diagnostic et le pronostic. Diagnostic. — Il est ordinairement simple et facile ; d'autres fois il est difficile, et alors on voit les affections parasitaires prises, par des médecins même éclairés, pour des éruptions dartreuses, scrofuleuses ou syphilitiques ; quelque- fois enfin, la difficulté est extrême et l'on est forcé de rester dans le doute, au moins pendant quelque temps : j'ajoute immédiatement que ces derniers cas sont très rares. On peut être également embarrassé dans le diagnostic spécial et dans le diagnostic différentiel. Quand l'affection parasitaire occupe une région du corps qui est ordinairement son siège de prédilection, le diagnostic est presque toujours facile ; — la teigne occupe-t-ellele cuir chevelu , il sera rare de ne pouvoir la distinguer, tandis qu'aux parties sexuelles elle sera méconnue et prise pour de la dartre, parce que cette partie du corps est le siège habituel des affections de nature dartreuse. — De même dans la gale : que l'éruption existe principalement aux mains, aux pieds, aux poignets, dans les 28 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES intervallles des doigts, sur la verge chez l'homme, sur les mamelles chez la femme, et rarement vous verrez commettre une erreur de diagnostic -, mais si ces parties sont saines et que l'acarus siège en une autre région, soyez assurés que le plus souvent on ne songera même pas à la gale, et cette erreur aura peut-être des suites fâcheuses. Permettez-moi de vous citer un exemple : je fus appelé, il y a quelques années, dans une pension de Paris pour voir un élève qui éprouvait depuis quelque temps des démangeaisons très vives sur tout le corps, et plus fortes la nuit que le jour; j'eus beau chercher, je ne trouvai rien, absolument rien, ni aux mains, ni aux pieds, ni à la verge ; cependant après avoir parcouru avec le soin le plus. scrupuleux toute l'habitude extérieure, je finis pas découvrir sur l'épaule droite un sillon, un seul sillon, mais d'où je pus extraire l'acarus. Jefusdonc fixé à l'instant ; l'enfant avait la gale. Je vous laisse à penser quelles tristes conséquences auraient eues pour le maître de pension une erreur de diagnostic ! Le diagnostic différentiel offre les mêmes alternatives : souvent facilité extrême et impossibilité d'une méprise, comme dans la' teigne pelade (teignes achromateuse et décal- vante) , et quelquefois difficulté extrême dont il n'est pas toujours possible de sortir. — La teigne tonsurante et la gale nous offrent souvent des cas de ce genre : elles appartiennent également aux deux sexes, à tous les âges, à tous les tempé- raments, à toutes les constitutions; elles peuvent revêtir les formes éruptives les plus diverses, et par conséquent simu- ler toutes les affections artificielles et constitutionnelles delà peau. Mais nous sommes encore sur le terrain des généra- lités; et il faut aujourd'hui nous contenter de signaler les principales sources où l'on peut puiser pour arriver au diagnostic. EN GÉNÉRAL. 29 Tenez compte, avant toute chose, de la physionomie de l'ensemble, de la disposition, constituant le cachet propre de certaines affections parasitaires, et qui frappe immédiate- ment un œil exercé ; c'est ainsi que vous nous voyez presque toujours, à la consultation, faire à distance le diagnostic de la gale, et rarement commettons-nous quelque erreur. Le prurit est un symptôme très important : il appartient à presque toutes les affections cutanées parasitaires, et rare- ment il fait défaut; toutefois, n'oubliez pas qu'il peut dépendre de l'éruption et non du parasite ; j'ai longuement insisté sur cette distinction dans ma dernière leçon. Les affections cutanées parasitaires offrent presque tou- jours des caractères particuliers qui facilitent le diagnostic ; et, sans entrer dans des détails qui seront mieux placés plus tard, je vous rappellerai seulement ici quelle importance j'attache à la couleur, à la forme circulaire, au siège de l'af- fection. Les circonstances étiologiques, la connaissance du début et du développement de la maladie, apportent souvent des lumières précieuses : — un sujet porte sur la face une érup- tion de nature douteuse, par exemple, quelques points pity- riasiques ; des démangeaisons existent, il est vrai ; mais ne peuvent- elles pas appartenir à la dartre tout aussi bien qu'au parasite? Interrogez le malade, et s'il vous raconte qu'après s'être fait raser, chez certain barbier, il a vu au bout de quelques jours des cercles rouges en différents points de la face, yous serez immédiatement amené à soupçonner la nature parasitaire de l'affection actuelle. — De même aussi, quand vous trouverez sur les mains (ordinairement à la face dorsale), une plaque arrondie, érythémateuse, herpétique ou lichénoïde, postérieure à l'affection du visage, portez har- diment le diagnostic : le malade est affecté d'une teigne 30 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES tonsurante de la face qui a été transmise par contagion au dos de la main. Les cas de ce genre sont nombreux, et nous en trouve- rions aisément de semblables clans d'autres affections para- sitaires. Interrogez aussi les malades (et vous ne saunez le faire avec trop de soin) pour connaître les divers traitements qui ont été mis en usage ; car, ordinairement, les topiques irri- tants ne sont pas épargnés, et ils produisent des éruptions qui masquent les caractères de la maladie primitive, et qu'on rattache à la scrofule ou à toute autre maladie constitu- tionnelle. Il y a, je vous l'ai déjà dit en commençant cette leçon, des cas où il faut rester dans le doute et attendre que les caractères de la maladie soient mieux dessinés. Toutefois, s'il est nécessaire d'arriver immédiatement au diagnostic, il vous reste une ressource précieuse, le micros- cope, qui ordinairement lève tous les doutes. Ne négligez donc pas l'emploi du microscope dansles cas difficiles. — Nous avons eu ici un enfant dont la tête était couverte de croûtes jaunes et sèches ■ nous hésitions entre la gourme et la teigne faveuse, M. Defiîs penchant vers la seconde et moi vers la première; l'examen microscopique nous mit d'accord; nous nous trompions tous les deux, l'enfant était affecté de teigne tonsurante avec complication d'impétigo. J'ai déjà cité ce l'ait dans mes leçons de 1855. Pronostic ■ — On peut dire aujourd'hui que toutes les affections cutanées parasitaires sont faciles à guérir, et vous savez sans doute qu'il y a cinq ans, on ne tenait point un pareil langage. A cette époque, on ne connaissait aucun moyen de guérir le favus, et pour peu que l'affection fût EN GÉNÉRAL. 31 ancienne ou généralisée, la morl était inévitable. Depuis quelques années, la guérison de cette maladie redoutable n'est vraiment plus qu'un jeu, et le favus est même, de toutes les teignes, la plus facile à guérir. Mais ii ne faut pas confondre dans un même pronostic les affections parasitaires et les éruptions constitutionnelles ou autres qui peuvent exister à titre de complications. Le pro- nostic de ces dernières est tout à fait indépendant de celui de l'affection parasitaire. Quand on voit survenir du muguet chez un phthisique, on peut affirmer qu'il sera facile de faire disparaître le muguet en quelques jours, tandis qu'on portera pour la phthisie un pronostic des plus gaves.... De même quand un malade porte en même temps une érup- tion syphilitique et une éruption scrofuleuse (car je n'admets pas ces affections métisses participant en même temps des caractères des deux maladies constitutionnelles), on doit faire un double pronostic, l'un pour la scrofulide, l'autre pour la syphilide. Dans les affections parasitaires, le pronostic doit varier suivant un grand nombre de circonstances qu'il faut bien connaître. Ces variations peuvent être rapportées : 1° aux éruptions elles-mêmes; 2° aux causes et à la prédisposition ; 3° aux complications ; h° enfin, aux traitements antérieurs. 1° Variations relatives aux éruptions* — Le siège de l'affection a une grande importance, et l'on doit distinguer ici le siège anatomique et le siège topographique. Pour ce qui est du siège anatomique, il est aisé de com- prendre que le pronostic est d'autant moins grave, que l'af- fection est plus superficielle; ainsi, dans la classe des para- sites végétaux, nous trouvons le champignon du pityriasis versicolor et le muguet qui, occupant la couche superficielle de l'épiderme, disparaissent en quelques jours avec un traite- 32 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES tement rationnel ; tandis que les parasites des différentes espèces de teignes s'insinuant plus profondément, jusque dans les follicules pileux et sur la papille pilifère, sont beaucoup plus difficiles à atteindre. — Il en est de même pour les ani- maux parasites : les poux, qui vivent en liberté à la surface de l'enveloppe cutanée, sont plus faciles à -détruire que les morpions, qui adhèrent assez fortement à la peau et aux poils, que les acares protégés par une lamelle épidermique qu'il faut déchirer pour arriver jusqu'à eux. Le siège topographique a aussi de l'importance : générale- ment, la guérison d'une teigne se fait attendre d'autant plus longtemps, que la région affectée est plus abondamment fournie de poils. Celte règle n'est cependant pas sans excep- tion. J'ai cité, dans mon rapport sur le traitement de la tei- gne, l'observation du nommé Pilliot, entré dans nos salles pour un favus généralisé, et chez lequel le champignon fut bientôt détruit au cuir chevelu, tandis que sur le corps, la maladie se reproduisait sans cesse, malgré l'emploi répété des mêmes moyens thérapeutiques. Ce fait peut paraître extraordinaire, et cependant l'explication en est facile : sur le corps, le parasite du favus vit aux dépens de poils impar- faits ou poils follets ; il faut cependant, sur le corps comme au cuir chevelu, pour arriver à une guérison solide, arracher ces poils dont la ténuité est souvent extrême ; l'épilation est donc très difficile, et c'est pourquoi la guérison se fait atten- dre si longtemps. — - Il existe aussi certaines régions où les acares sont plus difficiles à atteindre. 11 suffit de six frictions générales avec l'huile d'olive ou d'amande douce pour tuer ces petits animaux partout , excepté sur la verge, où l'on ne trouve que des parties molles et au- cun point d'appui solide pour exécuter convenablement l'opération. EN GÉNÉRAL. 33 L'étendue des affections cutanées parasitaires, leurs formes diverses influent aussi sur le pronostic. On doit également tenir compte del'âgedela maladie : tantôt le pronostic est d'autant plus grave que la maladie est plus ancienne, comme dans la teigne faveuse ; tantôt, au con- traire, le pronostic devient plus favorable par l'ancienneté de la maladie, qui est alors plus facile à guérir; c'est ce que nous voyons si souvent dans les teignes tonsurantes de la face arrivées depuis longtemps à la période menlagreuse. 2° Variations relatives aux causes et à la prédisposition. — L'âge et le sexe ont une influence incontestable ; les teignes du cuir chevelu sont, toutes choses égales d'ailleurs, plus tenaces chez les enfants que chez les adultes. Les femmes prennent, en général, plus de soin de leur peau que les hommes ; elles ont le système pileux do la face moins déve- loppé ; aussi, chez elles, la teigne tonsurante est-elle une maladie moins sérieuse, qui ne dépasse jamais les périodes herpétique et pityriasique. Les sujets d'une constitution faible, d'un tempérament nerveux, supportent ordinairement l'épilation plus difficile- ment que les autres malades ; cette opération exige un plus grand nombre de séances, circonstance fâcheuse qui retarde toujours la guérison. Enfin, on est obligé d'admettre des prédispositions indivi- duelles, indépendantes de toute cause appréciable (générale ou locale), qui hâtent la guérison chez les uns ou la retardent chez les autres. Eh ! ne voyons- nous pas souvent des sujets atteints de la même maladie, dans des conditions à peu prés identiques, dont les uns restent ici une ou deux semaines seulement, tandis que les autres font un séjour de plusieurs mois ou même de plusieurs années? 3° Variations relatives aux complications, — Les compli- 3 34 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES cations les plus fréquentes des affections cutanées parasitaires sont la scrofule, la syphilis, la dartre. Souvent elles retardent la guérison en empêchant l'emploi des moyens parasiticides, et par conséquent elles ajoutent a la gravité du pronostic. Au reste, l'affection parasitaire peut disparaître et l'éruption scrofuleuse ou clartreuse persister, lors même que le para- site a occasionné le développement de cette dernière. Nous verrons tout à l'heure quels sont, dans ce cas, les moyens thérapeutiques qui doivent être mis en usage. Zi° Variations relatives aux traitements antérieurs. — Règle générale, une affection parasitaire guérira plus facile- ment quand elle sera vierge de tout traitement. Les Mahon avaient depuis longtemps remarqué que les teignes déjà trai- tées étaient les plus tenaces ; j'ai fait, de mon côté, la même observation. Les affections parasitaires sont ordinairement dénaturées par des applications irritantes de toutes sortes; aussi, avant de mettre en usage nos moyens curatifs, sommes-nous obligé de faire un traitement préparatoire, ou d'attendre une hui- taine, une quinzaine de jours, en recommandant au maiade de s'abstenir de tout topique. D'ailleurs, chez ces teigneux traités par d'autres, il est impossible de bien distinguer les parties malades des parties saines ; la guérison n'étant qu'apparente en tel ou tel point, on s'exposerait presque infailliblement à des récidives, en soumettant tout de suite les malades à notre traitement, et le bienfait des premières opérations serait ainsi presque com- plètement perdu. Thérapeutique générale. — La thérapeutique rationnelle des affections cutanées parasitaires est facile et très simple, à la condition cependant qu'on ne confonde pas les éruptions EN GÉNÉRAL. 35 parasitaires, les éruptions symptomatiques et les éruptions constitutionnelles. Elle comprend trois indications essentielles : — il faut d'abord et avant tout détruire les parasites ; -— puis, on s'attachera à faire disparaître les éruptions inflammatoires, liées directement ou indirectement à la présence du parasite; — enfin, il faudra combattre les éruptions constitutionnelles qui compliquent les affections parasitaires. Première indication. — J'ai dit que la destruction du parasite, était l'indication principale; n'est-ce point en effet le parasite qui, fixé à la surface ou dans la profondeur de la peau, y joue le rôle d'un corps étranger, d'une épine, fait naître et entretient les différentes éruptions que l'on observe? Aussi, malgré l'intensité des phénomènes inflammatoires et l'étendue des surfaces malades, n'hésitez pas à extraire cette épine, à faire disparaître ce corps étranger, et. vous verrez ensuite l'inflammation s'éteindre comme par enchantement; si parfois elle persiste, vous pourrez employer avec un succès certain les moyens antiphlogistiques qui ont, avant la destruction du parasite, une action nulle ou défavorable. Dans la mentagre pustuleuse ou tuberculeuse, essayez avant l'épi- lation l'emploi des cataplasmes émollients, et presque tou- jours vous observerez, après cette application, et dès le len- demain, une augmentation très sensible du gonflement de la face. Ainsi, il faut avant tout détruire le parasite. Comment remplir cette indication ? Les parasiticides peuvent être employés de deux manières : à l'intérieur ou à l'extérieur. Les préparations internes n'ont aucune influence ; elles n'arrivent pas à la peau ou n'y arri- vent que décomposées, Il faut donc se borner aux p.irasiti- cides externes qu'on distingue en phylicides et en insecticides, selon qu'ils détruisent les parasites végétaux ou les parasites 36 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES animaux. Ces agents parasiticides sont nombreux et plusieurs sont en môme temps phyticides et insecticides, par exemple, l'huile décade, la staphisaigre, la camomille romaine, le sublimé. Parmi ces agents, il faut nécessairement faire un choix, et, après de nombreuses expériences, voici ceux auxquels je donne la préférence : contre les parasites végétaux, j'emploie surtout l'huile de cade, le sublimé, le turbith minéral-, j'ai renoncé aux préparations de cuivre (dont j'ai fait longtemps usage), parce qu'elles produisent plus souvent des éruptions pustuleuses très confluentes. Parmi les insecticides, le soufre tient le premier rang; après lui viennent l'huile de cade et la staphisaigre. Les parasiticides peuvent être à l'élût demi-solide, sous forme d'onguents, de pommades ou de liniments, employés en onctions ou en frictions, et les frictions sont douces ou rudes; — ils sont souvent à l'état liquide (bains et lotions de toutes sortes), — et quelquefois à l'état gazeux (douches, fumigations sulfureuses ). Quelle que soit la forme sous laquelle ils sont employés, les parasiticides ont des inconvénients qu'il faut connaître : très souvent ils amènent des complications inflammatoires (mais ces éruptions artificielles disparaissent toujours très rapidement), et quelquefois leur absorption détermine quel- ques accidents plus graves et variables selon les substances employées, ce sont, à divers degrés, les phénomènes d'intoxi- cation par les préparations de cuivre, d'arsenic, de mercure.... Les excipients ordinaires des agents parasiticides sont : l'eau, Fhuile d'amande douce, la glycérine, l'axonge.... En général, 1/10 de substance parasiticide suffit pour tuer les animaux parasites; il n'en faut que 1/100 pour détruire les parasites végétaux. Ne vous éloignez pas de ces propor- tions que l'expérience m'a montrées les plus convenables : EN GÉNÉRAL. 37 avec une moindre quantité ùe] parasiticide, vous courriez risque de manquer le but auquel vous tendez, et en augmen- tant, au contraire, le chiffre de la substance active, vous vous exposeriez à produire, sans aucun profit pour le malade, des éruptions inflammatoires que l'on aurait pu éviter. J'emploie comme excipients l'huile d'amande douce, la glycérine, le blanc de baleine de préférence à l'axonge, dans les hôpitaux surtout, parce que l'axonge en vieillissant se décompose ; des acides se forment qui exercent ordinairement sur la peau une action corrosive. Au reste, la nature de l'excipient doit varier suivant la nature et le siège du parasite, la disposition des parties malades, et, enfin, l'état du parasiticide. La seule chose vrai- ment importante c'est de ne pas oublier le but qu'on se propose, et de mettre toujours le parasiticide en contact avec le parasite ; quant aux moyens à employer, on saura toujours en trouver de convenables. Pourquoi avant moi ne guérissait-on pas la gale à l'hôpital Saint-Louis ? — Parce que le rôle de la friction était méconnu ; M. Cazenave, chargé du traitement, se bornait à des frictions partielles aux mains, aux poignets et aux pieds, et les acares répandus dans les autres régions ainsi épargnées ne tardaient pas à reproduire la maladie. Si quelquefois une guérison durable était obtenue, c'était que le malade avait eu l'esprit de se frotter, non-seulement les mains et les pieds, mais encore toutes les parties du corps où il éprouvait des déman- geaisons, et, de celte manière, avait eu la chance de détruire tous les animaux parasites. A côté de la gale, je puis placer la teigne, qui faisait, il y n'y a que cinq ans ! le désespoir des médecins de cet hôpital ; et cependant de quels agents parasiticides n'avait-on pas essaye l'emploi? — A quoi pouvait tenir un insuccès si 38 AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES constant? —Vous le savez lous, sans doute, car vous con- naissez les immenses progrès faits depuis cinq ans dans la thérapeutique des teignes, et les succès innombrables, con- stants, obtenus dans notre service. Avant mes recherches, on se bornait à l'application extérieure des parasiticides, on ne détruisait donc que la partie aérienne du champignon, et on laissait toujours sur la partie intra-cuSanée du poil et dans le follicule pileux, l'élément reproducteur de la maladie. Il est indispensable d'atteindre le parasite partout où il se trouve, jusque sur la papille cutanée qui produit le poil ; c'est là l'unique but vers lequel on doit tendre, et, pour y arriver, l'épilation et les parasiticides sont également nécessaires. On emploie , pour l'application des parasiticides, des brosses douces, des éponges, des tampons ou des balais de charpie, avec lesquels on fait des onctions, des frictions douces ou rudes, des lotions ; mais souvent la main et. les doigts sont plus commodes que les divers objets dont nous venons de parler. Le nombre des applications parasiticides ne peut être pré- cisé d'avance: quelquefois une seule suffit, c'est l'exception; ordinairement il faut en faire dix, quinze, vingt, et souvent plus; il n'y a d'autre limite que la destruction complète du parasite. Je me borne généralement à prescrire un bain de propreté avant et après l'emploi des parasiticides ; les frictions où lotions savonneuses sont, je crois, au moins inutiles. Deuxième indication. — Elle consiste à combattre les • éruptions inflammatoires produites soit par les parasites, soit par les parasiticides. On peut employer les émollients, les résolutifs, les antiphlogistiques ; ce sont ordinairement les cataplasmes froids, les pommades au calomel ou à l'oxyde de zinc, les lotions saturnines, les bains de son ou d'amidon, les EN GÉNÉRAL. 39 douches froides ou les douches de vapeur.... auxquels on donnela préférence. Les sangsues et même îessaigneesgéné- rales sont quelquefois aussi indiquées. Dans le choix à faire parmi tous ces moyens, il faut surtout tenir compte delà nature de l'éruption, de la prédisposition et de la constitution du sujet. Troisième indication. — Il faul, enfin, traiter les différentes complications constitutionnelles, telles que les éruptions dartreuses, syphilitiques, scrofuleuses, etc. Mais, avant tout, détruisez le parasite, qui souvent occasionne et presque tou- jours entretient ces diverses complications. Il est quelque- fois possible d'attaquer en même temps le parasite et la ma- ladie constitutionnelle, qui, dans certaines circonstances, c'est un fait digne de remarque, exercent l'un sur l'autre une réciproque et fâcheuse influence. Ainsi, la syphilis est une cause prédisposante de la teigne tonsurante,et le tricho- phyton (parasite de cette teigne) entretient souvent une érup- tion syphilitique. Nousavons observé, il y a quelques années, un remarquable exemple de cette influence bien singulière chez un malade de nos salles. ÉTUDE DES AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES EN PARTICULIER. Il y a deux classes de parasites, les parasites végétaux et les parasites animaux; deux classes d'affections cutanées leur correspondent : — affections produites par les végétaux pa- rasites;— affections produites par les animaux parasites. PREMIÈRE SECTION. AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES PAR LES PARASITES VÉGÉTAUX. Quelle méthode suivrons-nous pour diviser ces affections? — Celle de Willan? ■ — Mais c'est une méthode peu natu- relle, qui nous obligerait à rapprocher des choses qui n'ont entre elles aucun rapport, et à en éloigner d'autres qui se touchent de très près. Ainsi, un parasite produit simultané- ment ou successivement des vésicules, des pustules, des tubercules ; faudra-t-il étudier ces différentes affections en autant de chapitres distincts ? Quelle route longue et ennuyeuse à parcourir !.... Suivrons-nous donc l'ordre de l'histoire naturelle, Tordre adopté par M. Robin ? Non, assurément, car nous encoui- AFFECTIONS CUTANÉES PARASITAIRES EN PARTICULIER. ^ rions le reproche de tomber dans un excès contraire, en rapprochant des espèces pathologiques n'ayant entre elles aucune analogie. La division que je propose, celle qui me parait la plus naturelle, est fondée sur le siège de prédilection (siège ana- tomique, bien entendu) des végétaux parasites. Les uns ont une préférence marquée pour les poils ou les ongles, d'autres vivent plus volontiers aux dépens de l'épiderme, d'autres, enfin, occupent principalement les surfaces épilhéliales; de là les trois catégories de végétaux parasites : Végétaux tiichophy tiques et onychophytiques ; Végétaux épidermophy tiques ; Végétaux épi théliophy tiques. C'est dans cet ordre que nous étudierons successivement les végétaux parasites. CHAPITRE PREMIER. VÉGÉTAUX TR1CH0PHYTIQUES ET ONYCHOPHYTIQUES. Ces parasites peuvent bien quelquefois aussi se dévelop- per sur l'épiderme ; mais les poils et les ongles, les poils surtout, sont leur siège .de prédilection. Je donne le nom de teignes aux affections cutanées qu'ils déterminent. Les teignes forment un groupe très naturel, car elles pos- sèdent un grand nombre de caractères communs : — toutes sont contagieuses, toutes produisent une altération des poils, et, selon la période de leur existence, une calvitie tempo- raire ou permanente; les démangeaisons sont un de leurs signes les plus constants; elles sont encore remarquables par une résistance opiniâtre aux traitements ordinaires, par leur Zj2 - DES TEIGNES durée souvent indéfinie et par la rareté extrême d'une gué- rison spontanée; enfin, elles exigent une thérapeutique ration- nelle identique, qui permet d'assurer dans tous les cas une complète guérison. En faut-il davantage pour légitimer un rapprochement contre lequel tant de voix s'élèvent encore? M. Cazenave proposait, il y a quelques années {Traité des maladies du cuir chevelu, 1850), de réserver le nom de teignes à toutes les affections contagieuses du cuir chevelu ; l'idée était bonne, sans doute, et nous l'eussions acceptée, s'il eût été possible de ne pas considérer comme affections identiques l'herpès lonsurant du cuir chevelu et l'herpès ton- surant des parties sexuelles. Une affection ne change pas de nature parce qu'elle change de siège. Quelques objections nous ont été adressées, auxquelles nous devons répondre. M. Devergie, repoussant quelques-uns des caractères com- muns que nous avons dit appartenir aux teignes, avance que le favus est la seule teigne que l'on ne puisse pas guérir par les moyens de traitement ordinaires; que c'est la seule qui soit suivie de calvitie Quelle profonde erreur!.... Parce qu'on a fait disparaître pour un temps (ordinairement très court) les éruptions inflammatoires symptomatiques, on croit avoir guéri la maladie ! Plus tard, les malades reviennent réclamer le secours du médecin, et il semble qu'alors on dût ouvrir les yeux • mais il est plus commode de considérer le même sujet comme atteint d'une affection différente de la première : autrefois, il avait de l'herpès tonsurant, et aujour- d'hui, sur les mêmes parties, il porte de la syphilis ou de la dartre !.... M. Devergie nous objecte enfin que, sur nos six teignes, deux seulement sont contagieuses, inoculables. EN GÉNÉRAL. , Zi3 Mais d'abord, pourquoi me faire admettre six espèces de teignes ; n'était-ce pas assez de cinq? Il est vrai que deux teignes seulement ont été inoculées, la teigne faveuse et la teigne tonsurante ; j'ajoute immédia- tement que ce sont les deux seules sur lesquelles nous ayons fait, M. Deffis et moi, des essais d'inoculation. A l'époque de nos expériences, nous pensions que dans les teignes achro- mateuse et décalvante le champignon n'était visible ni à l'œil nu, ni à la loupe ; nous ne savions pas alors que cette sorte de fécule, de duvet grisâtre qui recouvre les surfaces dénu- dées, n'est autre chose que le microsporon. L'inoculation peut être essayée avec cette poussière champignonneuse, et je ne doute pas qu'ici encore nous n'obtenions un plein succès; les faits cliniques prouvent d'ailleurs que ces deux teignes (achromateuse et décalvante), dont je ne fais qu'une seule espèce aujourd'hui, sous le nom de pelade, sont contagieuses comme les autres. Quant à la teigne mentagrophytique, je n'en parle pas, la rattachant, comme vous allez le voir, à la teigne tonsurante. Comment classer les teignes? Dans mon premier travail (Recherches sur la nature et le traitement des teignes, 1853), j'admettais cinq espèces de teignes : la teigne faveuse, la teigne tonsurante, la teigne men- tagrophytique, la teigne achromateuse etla teigne décalvante. Dans la petite brochure que je fis paraître l'année suivante (Considérations sur la mentagre et les teignes de la face), je disais déjà que la mentagre était rarement produite par le microsporon mentagrophyte de M. Gruby , que le plus souvent le champignon de cette teigne était le même que dans la teigne tonsurante, c'est-à-dire, n'était autre que le chophyton. Cependant, je croyais encore à l'exislence des mentagrophyU's. kh DES TEIGNES Depuis cette époque, M. llobin, étudiant à son tour cette question, a nié complètement l'existence du champignon décrit par M. Gruby, sous le nom de microsporon mentagro- phyte; ce micrographe distingué pense que M. Gruby aura pris pour un champignon quelques lamelles d'épiderme rou- lées sur les bords et simulant ainsi des tubes de mycélium. J'ai fait, démon côté, quelques recherches avec M. Deffis, et je suis loin de partager l'opinion de M. Robin, bien que je sois d'accord avec lui sur ce point que le microsporon men- tagrophyte n'existe pas. — Nous avons examiné les poils de malades affectés depuis longtemps de teigne tonsurante (les faits cliniques ne nous permettaient pas d'en douter) ; nous les avons comparés à des poils pris sur la figure d'autres malades affectés de teigne menlagrophytique : dans les deux cas, nous avons trouvé un végétal parasite ayant absolument les mêmes caractères, caractères rapportés par M. Gruby au microsporon mentagrophyte. Je suis donc porté à croire que M. Gruby n'a pas pris do l'épiderme pour un parasite, mais qu'il a décrit comme un champignon nouveau du trichophy ton vieilli, dégénéré. Je pense qu'avec le temps les spores du Irichophylon de- viennent moins grosses et moins nombreuses ; et, lorsqu'on voit les caractères extérieurs de ce champignon varier selon l'époque de la maladie, pourquoi ne pas admettre qu'un changement puisse s'opérer aussi dans les caractères micros- copiques ? — Dans le Irichophylon n'y aurait-il pas, avec les spores, quelques tubes de mycélium ? Je le croirais volontiers; mais quelques recherches nouvelles sont nécessaires pour que je sois fixé à cet égard. En résumé, je ne puis plus diviser les teignes comme je le faisais autrefois, mettant d'un côté celles dans lesquelles le champignon est visible, et de l'autre, celles dans lesquelles il EN GÉNÉRAL 4 5 est invisible; car l'apparition extérieure du champignon est un fait commun à toutes et n'appartient pas seulement à la teigne faveuse et à la teigne tonsurante, comme je le croyais. La teigne mentagre n'est plus une espèce, ce n'est qu'une période avancée, la dernière période de la teigne tonsurante. Enfin, je réunis sous\e nom ùq pelade les deux teignesachro- mateuse et décalvante. Je distingue donc trois espèces de teignes, répondant cha- cune à une espèce botanique différente ; ce sont ; La teigne faveuse avec Xachorion Schœnleinii ; La teigne tonsurante avec le trichophyton tonsurans ; La teigne pelade avec le microsporon Audouini, On peut ensuite, dans chacune des espèces, établir des variétés, variétés de forme et variétés de siège. Les pre- mières, plus importantes, nous fournissent les divisions sui- vantes : Dans la teigne faveuse : — le favus urcéolaireou en godets {porrigo favosa), dans lequel les croûtes champignonneu- ses sont très régulièrement déprimées en cupule; — le favus scuti forme ou nummulairc (porrigo sciitirfata), qui se pré- sente sous l'aspect de plaques continues, légèrement saillan- tes et occupant quelquefois de larges surfaces; — le favus squarreux (porrigo squarrosa), dans lequel le parasite est disposé en monticules plus ou moins élevés, plus ou moins irréguliers. Dansla teigne tonsurante, trois variétés aussi, suivantqueles éruptions affectent une forme circulaire, ponctuée ou rayon- née (circinata, punctata, gyrata). — Aucune de ces dispo- sitions n'a de rapport nécessaire avec l'élément primitif; et, par exemple, dans la teigne tonsurante circinnée, ce sont tantôt des vésicules, tantôt des pustules ou des papules qui signalent le début de la maladie. /|6 DES TEIGNES La teigne pelade peut se présenter sous deux formes diffé- rentes, à ce point que j'en faisais autrefois deux espèces. La première variété est la pelade simple ou ophiasique (an- cienne teigne décalvante); la seconde est la pelade achroma- teuse (ancienne teigne achromateuse), remarquable, comme son nom l'indique, par la décoloration des poils et des sur- faces dénudées; elle est confondue par les auteurs avec le vitiligo et décrite sous ce nom. Une subdivision doit être établie dans la pelade achroma- teuse ; tantôt, en effet, les surfaces malades sont déprimées, et tantôt elles sont de niveau avec les parties saines. J'ai dit que dans la classification des teignesil fallait tenir compte de la région occupée par la maladie. Aussi, bien que cette considération de siège n'ait qu'une importance secondaire, admettons-nous: des teignes du cuir chevelu; des teignes de la face; des teignes des parties sexuelles ; des teignes du tronc et des membres- cette division s'appliquant également à chacune des espèces et des variétés établies. Voici, sous forme de tableau, le résumé très exact de ma classification des teignes : . I Irceolans /l Du cuir che- A. TEIGNE FAVEUSli ic , . , / „„,„ ... „ , , . ... ( Scutulata / velu. (achonon bchœulcinn ). / c • 0° r»„ i„ c>„~ x ; ( Squarrosa i 2 De la lace. n fCircinata 1 oo tw „o..i,-«» B. TEIGNE TONSURANTE ) p , / 3 Des parties ( irichophyton tonsurans). j g„t, \ sexuelles. r [Simple, ophiasique f V Du tronc et t. teigine pelade dépression! des membres, (microsporon Audouini.) Achromateuse < .. , \ f Sans QGprçStsioii v Commençons maintenant la description générale des tei- gnes. Nous passerons successivement en revue la nosographie, l'étiologie, la séméiotique et la thérapeutique, nous confor- EN GÉNÉRAL. kl mant à l'ordre déjà suivi dans l'étude des affections cutanées parasitaires envisagées d'un point de vue plus général. Cette marche nous expose à quelques répétitions et c'est sans doute un inconvénient sérieux, mais cet inconvénient est largement racheté par de nombreux avantages. H est impossible, quand on veut exposer les faits avec méthode, de ne pas procéder ainsi du général au particulier. D'ailleurs, nous passerons sur ce sujet aussi rapidement que possible. Nosographie. — Je divise les symptômes et la marche des teignes en trois périodes, correspondant à (rois époques bien marquées dans le développement du cryptogame. Ce sont : la période de germination ; la période d'état ou d'accroissement; la période de déclin du végétal parasite. Période de germination. — Le champignon est alors invi- sible. Le prurit est ordinairement franc et quelquefois accompa- gné de cuisson, d'éruptions fugaces, vésiculeuses, pustuleuses, érythémaleuses , Une hypersécrétion d'épidémie, l'alté- ration primitive des poils, caractérisent essentiellement cette première période. L'altération des poils dont nous parlons ici varie selon l'espèce de teigne; les cheveux deviennent secs, ternes, leur diamètre n'est pas le même dans les différents points de leur tige, ils portent des nœuds et des rétrécissements, ils chan- gent de couleur, et au lieu d'être blonds ou bruns, ils sont rougeàtres, gris-souris, blanc d'argent.... Ce changement de couleur, souvent obscur, est quelquefois très net, comme chez cet enfant couché en bas au n° 75, et qui, depuis un mois, a quitté notre service. Il était affecté de pelade achro- mafeuse et portait sur le cuir chevelu un grand nombre de plaques blanches, ovalaires de diverses grandeurs; de plus, 4ô DES TEIGNES en certains points, et sur des surfaces ou la peau ne paraissait nullement altérée, on voyait des bouquets de poils, les uns rougeâtresèt ternes, les autres fins et sensiblement décolorés. Période d'état. — Les démangeaisons souvent continuent, et le végétal parasite paraît au dehors et se développe. Ce sont des croûtes jaunes et plus ou moins épaisses dans le favus,des lamelles blanches et nacrées dans la teigne ton- surante, un léger duvet blanchâtre ou grisâtre dans la pelade. Tantôt le champignon est seul, tantôt il se trouve mêlé à des débris épidermiques,àde la matière pigmentaire... En même temps, se manifestent d'autres éruptions symp- tomatiques , ordinairement accompagnées de prurit et de cuisson j elles dépendent d'une altération plus profonde de la peau, aussi disparaissent-elles moins rapidement que les éruptions primitives. Alors aussi, on observe une altération plus avancée des poils, qui non-seulement sont friables, lanugineux, tortillés, d'une couleur différente, mais encore tombent ou se brisent à lasurfacedela peau, selon l'espèce de teigne. — Il y a donc, à la deuxième période des teignes (teigne tonsuranle excep- tée), une calvitie qu'il ne faut pas confondre avec la calvitie qui survient quelquefois à une période plus avancée; car celle-ci est permanente et celle-là temporaire. Période de déclin. — Cette période est caractérisée, nous venons de le dire, par une calvitie définitive, résultant ordi- nairement de la destruction de la papille pileuse et de l'oblité- ration du canal pilifère. Souvent alors on voit le champignon disparaître avec les éruptions symplomatiques, et le malade se trouve guéri. Le tableau que nous venons de tracer à grands traits varie dans les détails, suivant chaque espèce de teigne, et aussi suivant les variétés déforme et de siège. EN GÊNÉHAL. l\9 Durée. — Quelle est la durée des affections de la peau auxquelles j'ai donné le nom de teignes? Elle est très variable et l'on ne peut la préciser d'avance, quand la maladie n'est pas attaquée par des moyens convena- bles. Cependant on peut dire que, abandonnées aux seules ressources de la nature, ces affections ont une durée ordinai- rement fort longue et souvent même indéfinie, et vous savez vous-mêmes combien sont communes, à notre consultation des vendredis, les vieilles teignes de vingt ou trente ans!... Terminaisons. — Trois modes de terminaison sont possi- bles; ce sont : la guérison spontanée sans calvitie, la gué- rison avec calvitie définitive; enfin la mort. Je ne ferai que mentionner, comme souvenir d'un passé qui n'est pas encore loin de nous, la terminaison par la mort. Elle a été observée plusieurs fois dans cet hôpital, chez des malades atteints de favus, précédée des symptômes de plus en plus graves de la cachexie parasitaire. Aujourd'hui, nous sommes loin de craindre cette terminaison funeste pour nos teigneux. La guérison spontanée sans calvitie, produite parla mort du végétal parasite, et dont on fait si grand bruit à nos dé- pens, est une terminaison possible, mais extrêmement rare de la teigne. Je vous en ai fait comprendre la possibilité, en vous parlant des conditions nécessaires à la vie des parasites. Elle survientsous rinfluencedecausesque nousneconnaissons pas. La guérison avec calvitie permanente est incomparable- ment la plus fréquente des trois terminaisons que nous avons admises ; elle offre donc plus d'intérêt que les précédentes et mérite d'être étudiée avec plus de soin. La teigne faveuse et la teigne décalvante sont ordinaire- ment suivies delà perle des cheveux, après une durée plus ou moins longue et variable d'ailleurs pour l'une et pour l'autre; h 50 DES TEIGNES tous les auteurs en conviennent avec nous. — Dans la teigne tonsurante, la calvitie est plus rarement observée, et la ma- ladie dure deux ans et plus qu'aucun poi! n'est encore détruit sans espoir de retour. Ce ne sera que plus tard, quand nous traiterons en particulier de la teigne tonsurante, que vous comprendrez bien l'explication de ce fait; et nos détracteurs ne manquent pas d'en exagérer l'importance pour repousser tout rapprochement entre des affections si dissemblables (di- sent-ils), dont les unes sonUj^sjTirement, et les autres pres- que toujours suivies d^l^e^ë^e^àjh^yelure. J'accorde volon^eœ^ cjH^c&SlTla vérife^Aue la teigne ton- surante se termine moins souvent que la pelade ophiasique par une calvitie définitive ; majs4es exemples de cette ter- minaison ne sont^s assez rare^V surtout quand la teigne tonsurante siège à la facP; pour qu'il soit permis de les nier. Généralemenfcpn considère comme guéris les malades chez lesquels on a vu disparaître après un traitement anti- phlogistique de plusieurs mois, les éruptions inflammatoires symptomatiques de la présence du trichophyton sur les poils; mais, vous îesavez, le champignon demeure sur la racine et dans le follicule, lors même qu'on a joint aux émollients les divers parasiticides, et i! ne tarde pas à manifester sa présence par d'autres éruptions. D'autres fois, à une période plus avancée de la maladie, le cryptogame peut être détruit, non par les traitements mis en usage, mais par le pus sécrété en plus grande abondance ; et cependant, la maladie ne guérit pas, l'inflammation se perpé- tue, entretenue par les poils altérés, qui, au centre des folli- cules malades, jouent, en quelque sorte, le rôle de corps étran- gers. Quoi qu'il en soit, l'affection change d'aspect, et lorsque, au bout d'un certain temps, quatre ou cinq ans, par exemple, la chute des poils arrive, la calvitie est rapportée (sans doute EN GÉNÉRAL. 51 par ignorance, plutôt que par mauvaise foi) à la dartre, à la scrofule..., et non au parasite. A l'appui de ce que j'avance, je pourrais vous raconter l'histoire du nommé Barbier, que nous avons guéri d'une tei- gne tonsurante invétérée, et qui avait été, pendant plusieurs années, considéré comme dartreux par un habile professeur de la Faculté; vous trouverez cette observation dans ma bro- chure sur la mentagre et les teignes de la face. Peut-être les différences de calvitie dans les diverses espè- ces de teignes s'expliquent-elles quelquefois, et jusqu'à un certain point, par l'épaisseur du champignon qui appartient à chacune d'elles. \ Nous verrons, en effet, que la pression mécanique exercée parle parasite joue, avec l'inflammation, un certain rôle dans la production de la calvitie; et il suffît de comparer les croûtes épaisses du favus aux minces lamelles de la teigne tonsurantepour être convaincu que, dans les deux cas, la pa- pille pileuse et le conduit pilifère sont soumis à des forces de pression très différentes. Gardons-nous, cependant, de faire une part trop large aux causes purement mécaniques, dont on conçoit si aisément l'action quand on compare le' favus et la teigne tonsurante. Mettons, au lieu du favus, la pelade en regard de cette der- nière; aussitôt notre explication est en défaut, et nous sommes obligés d'admettre que d'autres causes plus puissantes con- courent à la production de la calvitie. Comment donc arrive la calvitie définitive dans les tei- gnes? — De deux manières différentes. Le plus souvent, il y a oblitération du canal pilifère, oblité- ration produite soit par la pression delà matière parasitaire, soit par l'inflammation du follicule pileux (peut-être mémo un certain degré d'inflammation est-il toujours nécessaire). 52 BES TEIGNES En même temps que le conduit s'oblitère, la papille pileuse s'atrophie de plus en plus et finit par être détruite. D'autres fois (ce phénomène avait échappé à l'attention des observateurs), il n'y a ni oblitération du canal, ni atro- phie de la papille; mais cette papille a subi une altération spéciale par suite de laquelle elle ne produit plus que de l'épiderme, au lieu de sécréter le pigment nécessaire à la formation du poil. Le premier, je crois, j'ai fait connaître cette cause de calvitie. Etiologie et pathogénje. — L'étiologie comprend les causes prédisposantes avec la prédisposition et les causes déterminantes. Les causes prédisposantes doivent être rapportées à trois sor- tes d'influences : physiologiques, hygiéniques et pathologiques. Influences physiologiques. — Les teignes sont plus fré- quentes dans l'enfance qu'a toute autre époque de la vie. La région qu'elles occupent varie avec l'âge des malades; ainsi la teigne lonsurante a pour siège de prédilection le cuir che- velu chez les enfants, et, à un âge plus avancé, chez l'ado- lescent ou chez l'homme adulte, elle affecte plus souvent la face, le cou, les parties sexuelles. Les sujets du sexe masculin sont plus exposés que ceux de l'autre sexe à contracter la maladie ; les garçons teigneux sont toujours ici plus nombreux que les jeunes filles; et les différences d'habitudes fournissent peut-être de ce fait une explication naturelle et très simple. Les garçons se livrent à des jeux plus animés, ils luttent corps à corps, prennent les casquettes ou les bonnets les uns des autres.... En un mot, les rapports médiats ou immédiats sont, chez eux, incontes- tablement plus fréquents que chez les filles; aussi la contagion a-t~elle lieu plus souvent. EN GÉNÉRAL. 53 Les tempéraments lymphatique, bilieux..,..., prédispo- sent-ils à la teigne, comme le disent quelques auteurs? — Je ne le pense pas, bien que je sois convaincu de l'influence du tempérament sur l'espèce d'éruption que provoquent les parasites. Quant à la constitution, on a singulièrement exagéré son importance ; et si quelques-uns de nos teigneux sont pâles, maigres, chélifs, vous pouvez aisément constater que plus des deux tiers sont forts et robustes, d'une excellente consti- tution. Je viens d'apprendre ce matin même, en arrivant à l'hôpital, que dans un village des environs de Paris, à Fon- tenay-aux-Roses, la plupart des habitants étaient affectés de teigne tonsurante; on aurait, je crois, dans ce cas particulier, quelque peine à admettre que la faiblesse de la constitution a pu favoriser le développement de la maladie ! Influences hygiéniques. — Parmi les causes de cette na- ture, l'habitation, le climat, les saisons n'ont qu'une importance très secondaire. Il n'en est pas de même des soins de toilette-, tout le monde sait ici que le meilleur moyen de se mettre à l'abri de la teigne dans un foyer de contagion, c'est de ne négliger aucun soin de propreté ; et la raison en est si simple que je ne sau- rais, sans vous faire injure, insister davantage sur ce point. Permettez-moi seulement de vous dire que, selon toute appa- rence, c'est à des habitudes de malpropreté que sont dues les teignes endémiques et celles que l'on a, bien à tort, appelées héréditaires. Les conditions sociales méritent aussi d'être mentionnées parmi les causes prédisposantes. Dès le début de mes recher- ches sur les teignes, j'avais observé que certaines espèces affectaient de préférence les classes pauvres, et d'autres la classe aisée: l'expérience de quelques années n'a fait que hk DES TEIGNES me confirmer dans celte opinion. Le favus esl plutôt la teigne des -pauvres, tandis que les teignes tonsurante et pelade ne se rencontrent pas plus souvent chez ces derniers que chez les riches. Mais cette action prédisposante des conditions sociales ne doit-elle pas être rapprochée des influences pathologiques ? La scrofule, en effet, prédispose au favus, et la syphilis à la teigne tonsurante et à la pelade; — aussi peut-on dire que la syphilis, la teigne tonsurante et la pelade sont souvent des maladies des classes aisées-, et lascrofule, avec le favus, presque toujours le triste apanage des pauvres; — mais que d'exceptions dans ces divers rapprochements ! ! ! Influences pathologiques. — Je n'ajouterai rien aux con- sidérations qui terminent le dernier paragraphe, et qui au- raient peut-être trouvé dans celui-ci une place plus naturelle. Il me suffît de vous avoir signalé la coexistence fréquente de la scrofule et du favus d'une part, et, d'autre part, de la syphilis et des teignes tonsurante et pelade. Quant à la prédisposition, je vous en ai déjà parlé assez longuement dans les leçons précédentes ; et maintenant aucun de vous n'ignore qu'indépendamment de toutes les causes qui viennent d'être énumérées, certaines conditions organiques, inconnues dans leur essence, sont nécessaires pour que les cryptogames se développent et produisent une affection cutanée. Cause déterminante. - — Il n'y a qu'une cause détermi- minante de la teigne, c'est le végétal parasite. Comment se transmet-il ? — Sans aucun doute, par contagion ; mais comment la contagion peut-elle s'opérer? — De quatre ma- nières différentes : 1° par l'air ; — 2° par le contact médiat ; — 3° par le contact immédiat ; — h° enfin par l'inoculation. C'est contre le premier mode de contagion admis par nous EN GÉNÉRAL. 55 (contagion par l'air), qu'on s'élève avec le plus de force; c'est alors qu'on croit si volontiers au développement spontané de la maladie Est-il donc si absurde ou si difficile d'admettre qu'une de ces nombreuses spores, d'une ténuité extrême, qui recouvrent la tête d'un teigneux, puisse être emportée par un léger mouvement dans l'air et déposée sur la tête d'un frère ou d'un camarade? — . Mais, nous dira-t-on, s'il est vrai que la contagion puisse s'opérer et s'opère souvent de cette manière, comment se fait il que les médecins, les élèves, les infirmiers, les malades qui s'y exposent tous les jours, soient si rare- rement affectés de teigne ? — Apparemment, ceux qui nous adressent de semblables objections n'ont jamais interrogé à cet égard ni examiné nos malades, car ils auraient appris, de manière à n'en pouvoir douter, que la teigne, la teigne tonsurante surtout, se gagne assez souvent dans nos salles. Et , sans aller plus loin, voyez nos infirmiers épileurs qui por- tent en permanence, sur le dos des mains, un ou plusieurs cercles herpétiques (première période de teigne tonsurante); il est vrai que chez eux la contagion a pu s'opérer par le contact immédiat plutôt que par l'air. On oublie aussi, ou plutôt on ignore, qu'il faut, pour con- tracter la teigne, certaines conditions de terrains et une apti- tude de l'organisme. Presque toujours on peut remonter cà la source de la contagion dans les pensionnats , dans les familles.... J'allais omettre la boutique du barbier où un même rasoir fait souvent tant de victimes ! M Mais, puisque l'on ne croit plus aujourd'hui aux généra- tions spontanées, et que la teigne dépend toujours de la présence sur les poils d'un végétal parasite, n'est-il pas évi- dent qu'il faut, de toute nécessité, admettre la contagion dans la production de ces affections de la peau ? 56 DES TEIGNES A proprement parler, il n'existe pas, pour chaque espèce de teigne, un mode particulier de transmission de la maladie ; cependant il est d'observation que la teigne faveuse, la teigne tonsurante du cuir chevelu et la teigne pelade se communi- quent ordinairement par le contact médiat (bonnet, peigne, serviette ou tout autre objet de toilette....), tandis que la teigne tonsurante de la face se transmet le plus souvent par inoculation (rasoir du barbier). Nous avons fait ici avec M. Deffîs, sur les teignes faveuse et tonsurante, de nombreux essais d'inoculation. Je vous l'ai déjà dit, nous ne savions pas à cette époque qu'il y eût dans la pelade une manifestation extérieure du champignon; ce sont donc, pour cette teigne, des expériences à reprendre. L'inoculation réussit toujours. Après avoir introduit du favus dans la couche la plus superficielle de la peau avec la pointe d'une lancette, nous avons toujours vu l'achorion germer. Mais neuf fois sur dix c'est du favus épidermique qui se développe (vous en comprendrez la raison quand nous étudierons la teigne faveuse) ; dans un seul cas, sur un des infirmiers du service, nous avons obtenu un petit godet très bien formé, offrant un poil à son centre, comme tous les godets faviques. Le plus souvent, le champignon inoculé meurt et disparaît après une courte durée; mais, quelquefois aussi, il peut se développer, et il faut que l'art intervienne pour arrêter les progrès du mal. L'avortement du cryptogame dépend sans doute de certaines conditions locales, du défaut d'aptitude ou des deux causes interne et externe réunies. Des considérations qui précèdent, il résulte que le favus et la teigne tonsurante, toujours inoculables comme affections, ne peuvent l'être comme maladies que dans des conditions de l'organisme que le mot aptitude résume très bien. L'étude des teignes inoculées a jeté quelque lumière sur EN GÉNÉRAL. 57 des points obscurs de leur histoire. C'est en effet par l'inocu- lation que nous avons pu connaître le siège exact du parasite végétal qui germe, la durée de l'incubation et le temps né- cessaire pour la formation du godet favique. Mais nous reviendrons sur ce sujet en étudiant chaque espèce en parti- culier, et nous entrerons alors dans tous les détails que comporte ce point intéressant de pathologie. Disons maintenant comment se comportent les végétaux parasites des teignes relativement à 1'épiderme, aux ongles et aux poils. Le parasite qui vit aux dépens de l'épidémie occupe tou- jours, nous l'avons dit ailleurs, la couche profonde de cette membrane ; il se trouve entre la lame cornée et la lame mu- queuse, ou. si l'on aime mieux, entre les cellules pavimen- teuses et les cellules à noyaux. Mais bientôt, la couche cornée de l'épidémie cède à la pression du cryptogame, qui se montre à nu et sous des formes variables suivant l'espèce de teigne. Ce sont des croûtes jaunes et minces (favus épider- mique), des lamelles d'un beau blanc de neige (teigne tonsu- rante), un duvet grisâtre (pelade). Le champignon qui germe sous l'ongle se comporte abso- lument de la même manière; il occupe le môme siège anato- mique. Remarquons, en effet, que l'ongle n'est qu'une modi- fication de la couche superficielle de l'épidémie, dont il ne diffère que par une plus grande dureté et une plus grande épaisseur. — Les trois cryptogames des teignes peuvent-ils se développer ici comme aux dépens de 1'épiderme?- — Le fait est possible et môme probable. Cependant, nous n'avons jamais observé le microsporon de l'ongle (1), signalé d'ailleurs par d'autres auteurs. — L'achorion et le trichophytoii produisent (1) Le lecteur verra plus loin que depuis cette époque M. Uaziu a eu l'oc- casion d'en observer un cas remarquable. 58 DES TEIGNES des altérations remarquables dont nous parlerons plus tard Qu'il nous suffise aujourd'hui de savoir que le cryptogame manifeste toujours sa tendance à la disjonction des éléments cutanés; mais ici, la lamelle cornée offrira une plus grande résistance, et il lui faudra toujours un temps très long pour la détruire, la perforer et paraître au dehors. Quant aux poils, ils sont le siège de prédilection des cham- pignons des teignes (voy. la définition de la teigne) ; il est donc intéressant de connaître les rapports exacts qu'ils affec- tent avec ces champignons. Or, il résulte des nombreuses recherches microscopiques auxquelles nous nous sommes livrés, que nos végétaux parasites se comportent tousles trois à l'égard des poils absolument de la même manière, fait im- portant, qui avait échappé à l'attention des micrographes ! Vous voyez représenté sur ce tableau, avec un grossisse- ment assez considérable, un poil à l'état de développement parfait; permettez-moi de vous en donner une description aussi abrégée que possible. Si nous considérons d'abord le poil même, nous le trou- verons formé d'une partie libre ou aérienne, c'est la tige, et d'une partie inlra-cutanée, appelée racine, qui d'un côté, au niveau de la surface tégumentaire, s'unit à la tige, et, de l'autre côté, dans la profondeur de la peau, aboutit à une saillie mamelonnée connue sous le nom de bulbe. Sur un poil laissé en place, on voit cette saillie bouton- neuse constituée par deux éléments : la papille pileuse et la papille dermique, celle-ci étant recouverte et comme emboîtée par celle-là. Dans la tige, deux parties distinctes : une externe ou cor- ticale, principalement formée défibres longitudinales; l'autre interne ou médullaire, constituée par de la graisse ou des globules pigmenlaires auxquels les poils doivent leur colo- EN GÉNÉRAL. 59 ration. Telle n'est, pas, cependant, l'opi nion de Klliker, qui n'admet guère que des bulles d'air dans la partie centrale et attribue aux fibres corticales la couleur des cheveux. A la surface de la papille pileuse on voit un produit de sécrétion qui, après quelques transformations, constitue le poil; ce n'est autre chose que du pigment. A mesure qu'ils approchent de l'origine de la racine [souche), les noyaux pig- mentaires prennent une forme de plus en plus allongée [grains d'orge) ; c'est en ce point que se fait révolution des fibres longitudinales; c'est là aussi- que commence la partie centrale ou médullaire du poil. Quelquefois, mais rarement, les granules pigmentaires devenus ovoïdes, au lieu de se diriger dans le sens de la longueur du poil, pour constituer les fibres longitudinales, affectent une direction perpendicu- laire à celle-ci ; de là sans doute ces stries transversales signalées par tous les auteurs et généralement décrites sous le nom de fibres en spirale. Le poil, dans sa partie intra-cutanée, est immédiatement en rapport avec une gaine épidermique qui lui adhère assez intimement et qui se confond en bas avec la membrane interne de la capsule; c'est le canal épidermique, dans lequel est déversé le produit de sécrétion des glandes pileuses, ordi- nairement au nombre de deux; chacune de ces glandes possède un canal excréteur large et court. En dehors de la gaîne épidermique, on trouve la mem- brane interne ou translucide de la capsule, puis la membrane externe ou grenue, qui n'est qu'une dépendance du corps pigmentaire; enfin, le fout est logé dans une dépression du derme appelée follicule. Ainsi, pour résumer, nous voyons successivement : le poil, le conduit épidermique, la capsule avec ses deux membranes interne et externe, enfin le derme. 60 DES TEIGNES Supposez maintenant que la moindre parcelle d'un crypto- game de nos teignes tombe dans le canal épidermique du poil ; qu'arrivera- t-il ? Les spores se dirigeant vers la profondeur du follicule, traverseront (elles sont si petites !) les cellules pavimenteuses qui constituent ce canal et seront bientôt arrêtées par les conduits sécréteurs des glandes pileuses. C'est immédiate- ment au-dessus de l'orifice de ces derniers, dans le canal épi- dermique, qu'elles (les spores) viennent se fixer; tel est du moins le résultat de mes observations, confirmé tout récem- ment par de nouvelles recherches de M. Ch. Robin sur ce point de micrographie. C'est de là qu'elles vont s'étendre, s'accroître dans tous les sens, en convertissant tout en leur propre substance. En dedans, elles rencontreront le poil ; en dehors, les membranes capsulaires interne et externe; en haut, les cellules épidermiques et plus tard la lige du poil ; en bas, la souche et le bouton avec les globules pigmentaires qui les recouvrent. Tout est donc attaqué, détruit ou plutôt transformé en matière champignonneuse. Aussi le poil, examiné au micro- scope, offre- t-il des altérations remarquables; les fibres longi- tudinales paraissent écartées et leurs intervalles remplis par des spores qui pénètrent souvent jusque dans la partie mé- dullaire ; en différents points on peut trouver des renflements circulaires, ovoïdes, tubériformes..., et, quelquefois, ces alté- rations sont appréciables à l'œil nu. Tels sont les principaux phénomènes observés dans toutes les teignes indistinctement. Mais il y a, suivant les espèces, des différences que nous étudierons plus tard ; aujourd'hui nous nous contenterons d'en dire seulement quelques mots. Dans la teigne tonsurante, le parasite se développe prin- cipalement aux dépens des poils, dont tous les éléments FN GÉNÉRAL. 61 paraissent plus complètement désorganisés que dans les autres espèces ; aussi voit-on les poils se briser clans leur partie aérienne, à quelques millimètres de la surface tégu- rnentaire; d'où la production des tonsures qui ont mérité à cette affection le nom qu'elle porte. Dans la pelade, la désorganisation de la capsule est très rapide et le poil tombe en peu de temps. Dans \efavus, le champignon envoie dans la profondeur du follicule un renflement mamelonné; quelquefois, comme dans la teigne tonsurante, le poil altéré peut se briser, et, dans ce cas, la brisure se produit ordinairement au niveau du godet ou des croûtes ; d'autres fois, le poil tombe en entier, mais ce n'est jamais qu'au bout d'un temps assez long. Diagnostic. — Le diagnostic des teignes est ordinairement facile ; et cependant, que d'erreurs sont commises au sujet de ces affections ! Journellement on voit l'impétigo confondu avec lefavus, et la teigne tonsurante au début prise pour une syphilide ! Les signes à l'aide desquels on peut établir le diagnostic doivent être puisés à trois sources principales : 1° Aux parasites eux-mêmes se rattachent des caractères importants. Ce sont des incrustations jaunes soufrées dans le favus 5 des lamelles blanches, amiantacées, dans la teigne tonsurante; une fécule grisâtre dans la pelade. 2° Je n'insisterai pas sur les éruptions symptomatiques ; vous savez tous quelle valeur séméiotique nous accordons ici à l'herpès circiné , aux disques érythémateux, à certains groupes d'eczéma. 3° Enfin, l'examen des poils, desongles, fournit des signes d'une importance capitale, des signes souvent patbogno- moniques. 62 DES TEIGNES Les cheveux peuvent être rares ou même manquer dans une certaine étendue ; quelquefois ils sont brisés; très souvent on les voit atrophiés, raccornis, fendillés, bifurques, tortillés... Ils ont un aspect lanugineux et sont secs et friables à divers degrés. Le changement de couleur est un des phénomènes les plus fréquents et les plus remarquables, sur lequel on ne saurait trop insister, car il est lié à un autre fait d'une grande importance ; je veux parler de la présence du végétal parasite dans la partie profonde du follicule pileux. Pour peu que vous ayez fréquenté nos salles et assisté à nos consultations, vous n'avez pas été sans remarquer ces poils flétris, déco- lorés et rares qui recouvrent les surfaces malades dans la pelade, et cette couronne rougeàtre ou gris souris qui entoure les parties affectées de favus ou de teigne tonsurante. Ces altérations sont un signe certain de la germination du para- site sur les parties du corps où on les observe. Il est des cas, avons-nous dit, dans lesquels le diagnostic est loin d'être facile ; presque toujours cette difficulté tient à quelque complication. Tantôt, ce sont deux teignes d'espèces différentes qui, se trouvant en même temps sur le cuir chevelu, peuvent mettre le médecin dans l'embarras ; — tantôt, ce sont des animaux parasites, des poux, qui masquent les caractères d'une teigne en produisant des éruptions impétigineuses plus ou moins confluentes. Plus souvent peut-être, l'obscurité du diagnostic est due à la coexistence d'affections constitutionnelles ou d'éruptions artificielles. C'est le parasite qui, jouant le rôle de corps étranger, occasionne le développement d'affections scrofu- leuses ou dartreuses qu'ensuite il entretient, et au milieu desquelles il est bien difficile de le retrouver. Quant aux éruptions artificielles, vous ne sauriez croire EN GÉNÉRAL. 63 combien souvent elles compliquent les affections parasitaires ! Il n'est presque pas de malades affectés de teigne qui, avant de venir nous consulter, ne se soient adressés à des empi- riques; ordinairement, ils ont fait un long abus de topiques irritants, lesquels ont amené des poussées impétigineuses et dénaturé l'affection primitive. Aussi est-il souvent impos- sible, en pareil cas, de poser un diagnostic. Que faire donc, et quels conseils donner? — Il faut atten- dre, renvoyer à huitaine ou à quinzaine le malade qui se présente à vous, en lui recommandant de ne se servir (^au- cune pommade, d'aucun onguent..; tout au plus permettrez- vous quelques applications émollientes (cataplasmes de fécule), si l'inflammation, produite par un traitement irra- tionnel, paraît trop vive. De cette manière, les éruptions arti- ficielles disparaîtront de jour en jour, et l'affection parasitaire se montrera avec des caractères de plus en plus accusés. Il y a cependant un moyen précieux de dissiper le doute quand il faut sans retard arriver à un diagnostic : c'est, vous le devinez, l'examen microscopique. J'ajoute que la manière dont se fait l'épilation fournit quel- quefois des indications précieuses que, par conséquent, vous ne devez pas négliger; aussi me verrez-vous souvent, à la consultation, dans les cas difficiles, interroger la pince do Tépileur. Pronostic. — Le pronostic est généralement peu grave ; nous ne redoutons plus l'incurabilite, ni la mort, depuis que nous avons inauguré la méthode actuelle de traitement ; eh, ne vous semble-t-il pas que ce progrès dans la thérapeutique des teignes soit un véritable bienfait rendu à l'humanité ? Pour le favus, tout le monde est. obligé de reconnaître la supériorité de notre méthode ; la guérison était un fait excep- 04 DES TEIGNES tionnel et aujourd'hui elle est constante. Mais dans la cura- tion des autres espèces (lonsurante et pelade), on ne veut pas nous accorder que nous ayons rendu le plus léger ser- vice. — Pourquoi cela? — C'est ^que, en effet, toutes les teignes ne guérissent pas avec la même facilité, et la teigne faveuse qui était, à juste titre, considérée comme la plus rebelle et la plus grave, est justement celle que nous faisons disparaître le plus aisément. Ce n'est pas cependant que nous traitions les autres teignes avec moins de succès ; mais il nous faut, pour obtenir une guérison complète et solide, un iemps ordinairement beau- coup plus Jong, ce que ne comprendront jamais qu'à grand' peine ceux qui, depuis si longtemps, considèrent les teignes tonsurante etpelade comme des affections légères relativement au favus. Il faudra pourtant bien un jour ouvrir les yeux à la lumière ou se constituer définitivement en état de cécité ! Je vous l'ai déjà dit, et j'aurai certainement encore l'occa- sion de le répéter, on croit guérir par les moyens ordinaires, mais on ne guérit point la teigne tonsurante; les éruptions symptomaliques disparaissent, et, quand l'affection parasi- taire revient, elle est méconnue parce qu'elle se montre sous une forme différente. Vous comprendrez aisément pourquoi nous guérissons telle teigne plus rapidement que telle autre. Dans le favus, Tépilation est habituellement facile ; avec la pince on peut très bien saisir les poils qu'on arrache en totalité avec leur capsule. — Dans la teigne tonsurante, par suite d'une altération plus avancée du poil, ce dernier se brise plus souvent qu'il n'est arraché, surtout quand l'épila- tion n'est pas faite avec soin et par une main exercée, et il reste, sur la partie non avulséc, de nombreux cléments repro- ducteurs de la maladie. — Dans la pelade, il n'y a plus ou EN GÉNÉRAL. 65 presque plus de véritables poils sur les surfaces malades; ces dernières, en apparence dénudées, sont couvertes d'une innombrable quantité de poils de duvet que la pince peut à peine saisir et qu'il faut cependant extraire, sous peine de ne pas guérir le malade ; l'opération offre encore plus de diffi- culté que dans le cas précédent. Ainsi, règle générale, la guérison est d'autant-plus prompte que l'épilation est plus facile. Je pense donc que désormais les teignes doivent être rangées dans l'ordre suivant au point de vue de la gravité du pronostic: teigne pelade, teigne ton- surante, teigne faveuse. Nous guérissons toutes les teignes avec notre méthode thé- rapeutique tandis que les autres procédés sont impuissants. Mais s'il en est ainsi, nous dira-t-on, pourquoi voit-on encore, ici, à côté de vous, des empiriques soutenir la con- currence dans le traitement delà teigne? — Parce que, j'ose à peine le dire, quelques-uns de mes collègues de l'hôpital envoient tous les jours, au traitement des Malion, des enfants affectés non do teigne, mais d'impétigo scrofuleux et plus souvent d'impétigo pédiculaire. Les malades guérissent en peu de temps, et l'on fait ainsi, à la faveur de nombreuses erreurs de diagnostic, des statistiques incroyables. Les élèves du service savent combien nous en avons guéri de ces pauvres enfants affectés de gourmes, qui avaient été adressés comme teigneux aux héritiers du secret desMahon, et épiléspar eux pendant une ou plusieurs années ! ! ! Certaines circonstances font varier le pronostic de la teigne. L'étendue et l'âge plus ou moins avancé de la maladie exer- cent une influence incontestable ; mais sur ce point encore que d'erreurs sent professées par les dermatologisles ! On dit généralement que le pronostic est d'autant plus grave que la maladie est plus ancienne. J'en conviens, si l'on 5 66 DES TEIGNES ne veut tenir aucun compte du traitement ; mais je ne sau- rais admettre, dans aucun cas, qu'on puisse ainsi faire abstrac- tion de l'influence des moyens thérapeutiques quand on porte un pronostic. Gela posé, je n'accepte point la proposition des auteurs, et je crois qu'en la renversant on est beaucoup moins éloigné de lavérité. Nous guérissons les mentagres invé- térées bien plusaisémentque les mentagres récentes : uneseule épilation suffit souvent pour la guérison complète des pre- mières ; lesautres enexigent deux, trois et parfois davantage. Entendons-nous cependant, et distinguons avec soin ces deux choses généralement confondues : l'âge de lamaladie et l'étendue de la maladie. J'ai dit que la guérison était d'au- tant plus facile que la teigne était plus ancienne; j'ajoute qu'elle est d'autant plus difficile que la maladie est plus éten- due. Aussi, n'en doutez pas, si la teigne au début est si aisé- ment et si rapidement guérie, c'est uniquement à cause de la circonscription du mal. Voici deux hommes affectés de teigne tonsurante de la face à une période différente : l'un porte depuis six mois un cercle d'herpès tonsurant au milieu de la barbe; l'autre offre, depuis quelques jours seulement, trois ou quatre dis- ques érythémaleux répandus en divers points du visage. Direz-vous avec presque tous les auteurs que la guérison du premier de ces malades sera plus difficile et exigera un temps plus long? — Quant à moi, je prendrais sans crainte l'engagement de l'obtenir en moins de six semaines, tandis que je n'oserais affirmer d'avoir guéri l'autre malade (j'en- tends guéri radicalement) après un espace de temps double ou triple. Le premier serait immédiatement confié aux soins de l'épileur et peut-être deux ou trois opérations suffi- raient-elles ; pour le second, il faudrait se borner aux agents parasiticides (lotions de sublimé, pommade au turbith), et Î'N GÉNÉRAL. 67 attendre, avant de commencer i'épiiation, que l'affection fût parfaitement localisée. Le pronostic varie suivant l'espèce de teigne, et vous savez déjà que, pour nous, ie favus est la moins grave des teignes à cause de la facilité de la curation ; vient ensuite la teigne tonsurante ; la pelade occupe le dernier rang. Le siège de la maladie, les conditions anatomiques ont aussi leur importance. Le pronostic est d'autant plus sérieux que la région affectée est plus abondamment fournie de poils (cuir chevelu, barbe, face chez l'homme, parties sexuelles...), que le système pileux général, y compris le duvet, est plus développé, la matière sébacée sécrétée en plus grande abon- dance; car la matière sébacée, qu'on me passe le mot, est, pour nos parasites, une sorte d'engrais qui favorise leur déve- loppement. Il faut tenir compte également des complications diverses qui peuvent exister, bien qu'en réalité, dans ces conditions, la teigne ne soit pas en elle-même plus difficile à guérir; mais l'état des parties malades peut exiger quelques précau- tions, occasionner quelques retards dans le traitement. En outre, vous aurez de la peine cà faire croire à la guérison d'un malade affecté de teigne, tant qu'il portera au cuir che- velu ou ailleurs des éruptions dartreuses ou scrofuleuses. Enfin, les traitements antérieurs qui jettent parfois tant d'obscurité sur le diagnostic, rendent aussi, généralement, la curation plus longue et plus difficile. THÉRAPEUTIQUE GÉNÉRALE DES TEIGNES. — Avant 1852, l'empirisme seul guérissait la teigne, ce dont vous ne devez I as vous étonner. Dos théories fausses pouvaient-elles en- gendrer autre; chose qu'une thérapeutique impuissante? La teigne faveuse faisait le désespoir des médecins, cl personne 68 DES TEIGNES n'eût, osé dire, comme au temps d'AmbroiseParé :« La récente est difficile à curer, et la vieille ne guérit jamais, )> car la ré- cente était traitée sans plus de succès que la vieille. La teigne tonsurante était-elle plus efficacement combat- tue?— On le disait partout; mais vous savez maintenant quelle valeur il faut accorder à ces assertions, et ce que l'on doit penser de ces rapides guérisons proclamées définitives et qui tardaient si peu à se démentir. On faisait tant bien que mal disparaître les accidents inflammatoires, les éruptions symptomaliques, et on laissait presque toujours intact le champignon producteur du mal. Aujourd'hui, comme autrefois, on a la prétention de guérir la teigne tonsurante par des moyens de traitement ordinaires, avec des topiques de toutes sortes; que font cependant les détracteurs de notre méthode? — A l'hôpital, ils renvoient les malades, les déclarant à tout jamais guéris; en ville, ils agissent avec plus de prudence , et, quand une mentagre a longtemps résisté à leurs onguents et à leurs pommades, ils ne se mettent point en peine de recourir en secret à l'épila- tion. Ils font donc en ville ce qu'ils proscrivent à l'hôpital. Quant à la pelade, on la considérait comme une affection mystérieuse dont la nature seule pouvait quelquefois débar- rasser le malade, etl'on n'essayait môme pas de la combattre. Parfois cependant, à cause d'antécédents fâcheux, cetteaffec- tion singulière des poils était rattachée à la syphilis et traitée en conséquence. La méthode épilatoire des frères Mahon, méthode empiri- que et enveloppée de mystères, était la seule vraiment effi- cace dans le traitement du favus, à l'époque où nous avons entrepris nos recherches. Elle avait, nous devons le dire, un immense avantage sur la calotte et les autres moyens propo- sés jusque-là. On guérissait, sinon toutes les teignes, du moins EN GÉNÉRAL. 69 un très grand nombre de ces affections de la peau. Cepen- dant, quand la maladie était invétérée, il ne fallait pas moins d'un an à dix-huit mois pour obtenir une guérison complète ; et, si le favus était senti forme, on voyait assez souvent le mal reparaître, même après un traitement de plusieurs années. La même méthode était appliquée par les Mahon aux teignes tonsurantes et avec autant de succès qu'aux teignes faveuses; mais la guérison se faisait encore attendre très longtemps, huit, dix mois, terme moyen. — Voici donc où nous en étions en 1852 : pour la teigne comme pour la gale, l'empirisme avait devancé la science, il était temps que cette dernière reprît son rang. Aune thérapeutique empirique si souvent impuissante, j'ai substitué une thérapeutique rationnelle, et toujours efficace, quelle que soit l'espèce de la teigne et quelles que soient les conditions de santé du teigneux. Nous ne connaissons vraiment aucune contre-indication à la cure radicale de ces affection ; le règne des théories humo- rales est passé, et un médecin instruit ne dirait point aujour- d'hui qu'il peut être dangereux de guérir la teigne. Nous ne sommes plus au temps où il fallait la respecter comme un émonctoire dont la nature se servait pour prévenir des mala- dies plus sérieuses. La cause, l'unique cause de la maladie est un champignon ; donc, pour guérir, il faut et il suffit de détruire ce champi- gnon. Mais, dira-t-on, cela n'est pas nouveau, longtemps avant vous on avait employé les parasiticides ; pourquoi ne guérissait-on pas ? Déjà, dans une leçon précédente, j'ai répondu indirecte- ment à cette objection. On ne guérissait pas, parce qu'on ne remplissait pas cette condition fondamentale de mettre par- tout le parasiticide en contact avec le parasite. Ou détruisait 70 DES TEIGNES le champignon à la surface de la peau, et on laissait de nom- breuses spores dans la partie centrale du poil, sur sa racine et dans le follicule. L'épilation est nécessaire dans le double but d'enlever, avec le cheveu, le champignon qu'il renferme et de laisser béante, parle l'ait de cette extraction, l'ouverture du follicule pileux, dans lequel on peut alors introduire la solution parasiticide. Il est vrai qu'on peut me dire encore que l'épilation n'est pas chose nouvelle dans le traitement de la teigne; que la calotte, qui n'est qu'un procédé d'épilation, est presque aussi ancienne que la médecine, et enfin qu'avant moi, on s'est également servi des doigts et de la pince pour pratiquer cette petite opération. Pourquoi donc ne guérissait-on pas, et pourquoi cette mé- thode de traitement a-t-elle été abandonnée? Tout à l'heure, avec le parasiticide, on détruisait le cham- pignon à la surface de la peau et on le respectait dans l'épaisseur du poil, sur la racine et dans le follicule ; main- tenant, avec l'épilation seule, on enlève les spores qui tien- nent au poil (à la racine et à la tige) , et on laisse le reste. Quelquefois cependant, on joignait, sans trop savoir pour- quoi, l'épilation aux parasiticides, comme faisaient et font encore les Mahon, et l'on guérissait un certain nombre de teignes ; mais comme cette méthode de traitement ne s'ap- puyait sur aucune raison scientifique, et qu'il était impossible (la nalure de la teigne étant inconnue) de donner de sa su- périorité une explication satisfaisante, elle ne pouvait trouver de nombreux partisans parmi les médecins. Comment, en effet, concilier l'efficacité de l'épilation avec les hypothèses le plus généralement acceptées sur la nature des teignes ? Quelle importance pouvait-on accorder à l'extraction des poils et à l'emploi des parasiticides, quand on EN GÉNÉRAL. 71 admettait que la maladie était produite parla pourriture des cheveux, par un vice spécial des humeurs, par une altération de certains produits de sécrétion ?... Évidemment, la nécessité de l'épilation était incompatible avec ces fausses théories. — Et n'avons-nous pas vu de même [Généralités sur les affections cutanées parasitaires) la fric- tion générale abandonnée dans le traitement de la gale, malgré sa supériorité incontestable, et parce seul fait que son rôle était méconnu ? Toute méthode thérapeutique, pour avoir chance de durée, doit être fondée sur des indications. Or, trois indications principales se présentent dans le trai- ment des teignes. La première, et de beaucoup la plus im- portante, est de détruire le parasite qui produit la maladie. La seconde est de combattre les éruptions inflammatoires développées par ce même parasite. La troisième est de faire disparaître les éruptions entretenues par un vice interne, et de modifier, s'il est nécessaire, la constitution des teigneux. Généralement, un praticien un peu instruit ne sera pas embarrassé pour remplir ces deux dernières indications. On attaquera les phénomènes inflammatoires par les antiphlo- gistiques, les résolutifs... On prescrira l'application de cata- plasmes émollients, des lotions, des frictions avec une pré- paration iodée, ou avec la pommade de ciguë... Tel teigneux aura besoin de toniques, et on lui donnera du sirop de fer, du vin de quinquina ; pour tel autre, il faudra mettre en usage un traitement antisyphilitique ou antidartreux... Quant à la première indication, qui se rapporte plus direc- tement à la teigne, son importance nous oblige à l'étudier avec une scrupuleuse attention. Il faut détruire le parasite, le détruire partout, et, pour cela, il est nécessaire de savoir exactement où il se trouve, 72 DES TEIGNES — Or, nous avons dit que le parasite pouvait siéger entre les deux couches épidermiques, à la surface de la peau, sur les poils et dans le follicule pileux. Pour faire disparaître le champignon situé soit dans l'épais- seur de l'épiderme, soit à l'extérieur (à ce moment le parasite a rompu la lame cornée superficielle), les parasiticides suffi- raient; mais pour l'atteindre dans le follicule et sur la racine du poil, l'épilation associée aux parasiticides est indispensable. Entrons dans quelques détails sur le mode d'extraction des poils. L'épilation est une opération qui exige, comme toute opé- ration chirurgicale, une certaine habitude pour être pratiquée convenablement. Elle parait si simple, que l'on considère tout apprentissage comme inutile, et, sans aucun scrupule, on la confie à tel infirmier plus ou moinsmaladroit. Aussi qu'arrive* t-il ? C'est que souvent on ne guérit point les malades ; et l'insuccès est attribué à la méthode thérapeutique plutôt qu'à la manière dont elle a été appliquée! — Je vous engage donc, messieurs, à observer avec soin comment on épile ici dans notre service ou au traitement externe que dirige avec nous M. Deflis ; et puis, vous mettrez vous-mêmes la main à l'œuvre-, car il se présentera telle circonstance où il faudra forcément vous passer d'un infirmier spécial et pratiquer l'épilation jugée par vous nécessaire. Mais, s'il est indispensable, comme nous l'avons établi, pour la curation de la teigne, de dépouiller les parties ma- lades des poils ou des cheveux qui les recouvrent, ne peut- on pas cependant se passer de la petite opération, toujours un peu douloureuse, dont je vous parle, et recourir à l'emploi des agents dits épilatoires? En un mot, y a-t-il ou non des agents épilatoires, et, s'il y en a, ceux des frères Mahon méritent- ils la préférence? £N GÉNÉRAL. 73 A celle double question, je ferai sans hésiter une réponse négalive, après avoir tenté moi-même de nombreux essais pour connaître la valeur des pommades et des poudres réputées épiiatoires. Nous avons épilé des surfaces dont les unes avaient été longtemps frictionnées avec différents agents épiiatoires, y compris ceux des frères Mabon , tandis que sur les autres on n'avait fait l'application d'aucune pommade ni d'aucune poudre, et nous n'avons pas trouvé de différence appréciable dans l'arrachement des cheveux. Les agents dissolvants les plus puissants peuvent détruire la partie libre des cheveux, par exemple le sulfhydrate de chaux ; mais la partie intra- cutanée demeure toujours intacte. Tel est le résultat d'expériences multipliées par lesquelles nous avons appris également que les préparations des frères Mahon n'étaient, aucunement préférables aux autres. Toutes n'agissent que par l'irritation qu'elles provoquent dans les bulbes pileux, et à cet égard, la maladie ne le cède en rien aux épiiatoires. Aussi peut-on reprocher à M. Cazenave d'avoir cru, sur la foi des Mahon, à l'action des agents épiiatoires, lorsque les Mahon eux-mêmes, habiles à exploiter leur secret, n'y croyaient pas, et arrachaient les cheveux malades à l'aide du peigne et des doigts. Je le répète, le meilleur épilatoire que je connaisse, c'est la maladie. A une certaine période (lors- qu'il y a inflammation suppuralive du follicule), le poil se détache, tombe, et souvent ne se reproduit pas ; de sorte que, si l'on voulait attendre la terminaison naturelle des teignes, on guérirait beaucoup de malades ; mais la guérison ne serait obtenue qu'au prix d'une perle irrémédiable de la chevelure, résultat sans doute peu séduisant! Quoi qu'il en soit, et malgré mon opinion bien arrêtée sur lk DES TEIGNES la valeur des agents épilatoires, je ne me prive pas de l'usage de certains agents que j'appellerai volontiers préparatoires et dont l'expérience m'a démontré l'utilité. Presque toujours, avant d'épiler, je fais recouvrir d'une couche d'huile de cade la tête ou toute autre partie malade; l'huile de cade est un parasiticide qui flétrit et quelquefois détruit la partie exté- rieure du champignon, elle éteint la sensibilité du cuir che- velu et exerce une action spéciale sur le bulbe pileux qu'elle ramollit. L'épilation est donc ensuite plus facile. Il existe pour l'extraction des poils trois procédés que nous allons comparer, ce sont : la calotte générale ou partielle ; l'extraction avec les doigts ; l'extraction par les pinces. Épilation par la calotte. — La calotte est le procédé le plus anciennement connu ; elle remonte aux premiers âges de la médecine et se perd, pour ainsi dire, dans la nuit des temps. Elle consiste en un emplâtre agglutinatif qu'on appli- que sur toute la tète ou seulement sur une partie de la tète ; de là, la distinction de la calotte en générale et partielle. Sa composition est la suivante : Vinaigre blanc 150 Farine de froment Poix noire \ 25 Poix blanche. ....... C'est encore le moyen de traitement le plus répandu en France ; c'est le seul employé à Lyon et dans quelques dépar- tements, sous le patronage de religieuses (dames de Saint- Thomas) qui y ont attaché leur nom. Et cependant, c'est un moyen barbare, qui produit toujours des douleurs atroces et constitue un véritable supplice pour les malades qui sont obligés de le subir plusieurs fois. Car l'efficacité du traite- ment par la calotte n'est rien moins que certaine ; témoin ce EN GÉNÉRAL. 75 malheureux enfant auquel on Ta appliquée soixante-dix fois, sans pouvoir le guérir. Signalons aussi les accidents qui peu- vent résulter de l'emploi de cette méthode, accidents souvent graves, et que l'on trouve consignés en bon nombre dans les annales de la science. Il n'est pas difficile de comprendre pourquoi ce moyen est à la fois si cruel et si incertain. Les cheveux sont arrachés en masse, et tirés, pour la plupart, dans des directions oppo- sées à celles des capsules : aussi se cassent-ils en grand nombre, et sur les poils cassés, le champignon demeure et se développe pour reparaître bientôt à la surface de la peau. La calotte est donc un procédé d'épilation aussi imparfait que douloureux, qui mérite d'être à tout jamais proscrit de la thérapeutique des teignes. Je n'insiste pas davantage sur ses inconvénients et ses dan- gers, bien que tout récemment une thèse ait été soutenue à la Faculté de Paris en faveur de la supériorité de ce moyen de traitement. Epilation avec les doigts. — C'est le procédé des frères Mahon, qui épilent leurs malades de la même manière qu'on plumerait un oiseau. Ils se servent en même temps du peigne et des doigts, et toujours, avant l'opération, le cuir chevelu a été recouvert de la poudre merveilleuse. Malgré l'habileté la plus consommée dans ce genre d'exer- cice, acquise par une longue pratique, il est difficile de bien saisir avec les doigts les poils que l'on veut extraire, et sou- vent même, quand les cheveux sont très courts ou quand il n'y a qu'un léger duvet, comme dans la teigne pelade, l'ex- traction par ce procédé devient impossible. Mais, si leurs doigts sont insuffisants, les Mahon ne se font aucun scrupule de recourir à notre méthode et de faire usage de la pince, ce qui, d'ailleurs, n'est ni plus long ni plus douloureux. 76 DES TEIGNES Épilation par la pince. — Ce procédé n'est pas nouveau. A. Paré dit quelque part que, si la teigne existe en un point circonscrit, il faut se servir de la pincette, et, par ce mot, il désigne sans doute la pince dont nous nous servons ou du moins un instrument analogue. En Angleterre, Samuel Plumbe parle aussi du traitement de la teigne par la pince. En Italie, ce procédé a été usité de tout temps ; telle est du moins l'opinion de J. Franck, à laquelle je me rallie complètement. Cette méthode d'avulsion des cheveux a, sur les précé- dentes, d'incontestabies avantages, et les reproches dont elle a été l'objet sont entachés d'une exagération presque in- croyable. Ecoutez plutôt ce qu'en dit Alibert : « Que signifie la torture de l'épilation, pratiquée encore dans quelques lieux de l'Italie et de l'Angleterre? Ce genre de médication est tout aussi barbare que celui de la calotte. Arracher les cheveux un à un avec des pinces et sur une surface plus ou moins étendue, ensanglanter la tète à chaque instant par la plus douloureuse des mutilations, est un acte odieux, qui rappelle le supplice de ces anciens martyrs delà foi qu'on faisait mourir à petit feu, » [Monographie des Der- matoses, 2e édit., p. 320.)r L'épilation par la pince cause, j'en conviens, quelques dou- leurs aux malades ; mais je pense que, sous ce rapport, on ne trouve pas qu'elle le cède à la calotte, ni même à l'épilation avec les doigts. D'ailleurs, dans la plupart des cas, la douleur n'est très vive qu'au début du traitement, à la première séance; plus tard les malades s'aguerrissent; au troisième jour, ils sont déjà accoutumés et disent ne souffrir que très modérément. Si l'épilation par la pince exige un temps plus long que la calotte, ce temps au moins est employé au profit du malade; IûS GÉNÉIUL. 77 car, l'extraction des poils étant plus complète, mieux faite, dans une direction convenable, les chances de succès sont beaucoup plus nombreuses. La lenteur de notre procédé n'est cependant pas telle qu'on veut le faire croire; il ne faut à nos infirmiers guère plus de sept à huit heures pour épiler avec la pince toute une tète, et ce temps est partagé en trois, quatre ou cinq séances ; de sorte qu'en général, au quatrième jour, l'épilation est terminée. Ce que je viens de dire de la durée de l'opération et des douleurs qu'elle occasionne doit être considéré comme la règle générale; et, puisqu'il est si peu de règles sans excep- tions, nous avouerons volontiers qu'il y a un certain nombre de malades qui supportent difficilement celte légère opération, et chez lesquels on doit la pratiquer avec une lenteur extrême, ou, pour mieux dire, avec des temps d'arrêt très nombreux. Quelquefois, il faudra s'en prendre à la maladresse de l'épi- leur, et, plus souvent, a une sensibilité excessive de quelques malades, ou à une pusillanimité dont vous ne vous faites pas d'idée. M.Delfis a vu au traitement externe, chez des menta- greux, la seule crainte de l'épilation provoquer unesyncope ! Quant aux enfants, vous savez aussi bien que moi qu'on ne peut pas juger, par leurs cris, de la douleur qu'ils éprouvent; rarement ceux qui crient le plus sont-ils ceux qu'on fait le plus souffrir. Je résume les avantages que me paraît avoir l'épilation par la pince, et qui doivent lui mériter la préférence sur les autres procédés : elle est beaucoup moins douloureuse que la calotte, et ne l'est pas plus que l'épilation avec les doigts ; elle est surtout plus efficace que l'une et l'autre, car on peut extraire les poils (les poils de duvet comme les poils parfaits) sans en laisser un seul; et l'on n'en casse qu'un petit nombre, parce qu'on les tire dans le sens de. leur direction naturelle. 78 DES TEIGNES S'il en est autrement dans la teigne tonsurante, c'est que les poils se brisent d'eux-mêmes, par suite d'une altération spéciale : nous en parlerons plus lard. Il n'est pas indifférent de prendre la première pince venue pour pratiquer l'épilation, et surtout pour la bien faire. Les pinces qui servent ordinairement à cet usage sont impropres à remplir le but qu'on se propose en évulsant les cheveux ou les poils dans les teignes. Les branches en sont trop minces, trop flexibles ; quand on les presse, elles fléchis- sent sous les doigts 5 les deux faces internes se touchent au centre, et les deux extrémités libres, au lieu de se rap- procher de plus en plus, s'écartent au contraire l'une de l'autre, ce qui fait qu'elles glissent sur les cheveux qu'elles ont saisis, les tiraillent et les rompent; Tépilation est incom- plète et elle cause de très" vives douleurs. Frappé de ces graves inconvénients et profondément con- vaincu de la nécessité d'une épilation prompte et bien faite, M. Deffis a remédié à l'insuffisance de ces pinces en faisant subir une légère modification à la pince à disséquer. Cette modification porte tout simplement sur les extrémités libres des deux branches de la pince; elles sont aplaties, d'un dia- mètre de trois ou quatre millimètres, se touchant exacte- ment par leurs surfaces internes quand on les presse, et munies d'une dentelure émoussée, dans une étendue de un centimètre à peu près. Je dis émoussée, car si les dents de lime dont sont armées les extrémités internes de la pince, conservent leurs bords tranchants, elles coupent les cheveux comme le feraient des ciseaux, et l'épilation devient impos- sible. Le bout libre de la surface externe de chacune des deux branches est taillé en biseau, et son épaisseur à l'extrémité esta peu près d'un millimètre ; l'une des deux branches est percée au centre; dans cette petite ouverture circulaire. EN GÉNÉRAL. 79 vient s'engager une pointe qui se trouve solidement fixée à la branche du côté opposé-, elle maintient ainsi les deux branches appliquées Tune contre l'autre, et les empêche de glisser quand on les serre sur les cheveux, au moment de les extraire. Celte pince, avec ces petites modifications, remplit parfai- tement les conditions nécessaires pour pratiquer l'épilation avec facilité et presque sans douleur, lorsque les cheveux ou les poils sont fournis et qu'ils ont un certain développement. Mais là où il n'y a que des poils follets ou quelques cheveux rompus très ras, qu'il est également indispensable d'évulser, M. Deffis remplace cette pince par une autre, qui, dans ce cas, fonctionne beaucoup mieux. Celle-ci diffère de la première en ce que les deux branches sont plus larges, surtout aux extrémités libres qui ont un diamètre de huit à dix millimètres, et qui sont recourbées en dedans, de façon à simuler une tenaille. Quand un espace plus ou moins étendu de la peau a été déblayé par la première pince, la seconde, si elle est bien maniée, s'empare de tout ce qui offre la moindre prise et fait place nette. C'est en appelant ainsi à notre secours, tantôt l'une, tantôt l'autre de ces pinces, que nous sommes parvenu à obtenir une épilation aussi parfaite que possible. Comment pratique-t-on l'épilation ? L'opérateur fait prendre au malade et prend lui-môme la position qui lui semble la plus commode. Ici nos infirmiers épileurs sont assis, et font reposer sur leurs genoux la tète du patient. D'une main (ordinairement de la droite) ils tien- nent la pince comme une plume à écrire, ou s'ils veulent (dans les cas les plus faciles), comme un archet pour jouer du violon. L'autre main est appliquée sur la partie qu'il s'agit 80 DES TEÎGNKS d'épiler, et, entre le pouce et l'indicateur, on tend la peau afin qu'elle ne glisse pas. Puis, une lotion savonneuse ayant été faite préalablement, on extrait les poils en les tirant dans le sens de leur direction naturelle; on n'en prend à la fois qu'un petit nombre, deux, quatre, six et tout au plus un bouquet uniloculaire. Quand on a dénudé une surface de deux à trois centimè- tres carrés, on suspend quelques instants l'épiialion, et l'on fait une application parasiticide (presque toujours solution de sublimé) avec une brosse douce, une éponge, un pin- ceau,... selon le siège de la partie affectée. Alors on recom- mence l'avulsion des poils, pour s'arrêter de nouveau après quelques instants, et ainsi de suite, jusqu'à la fin de la séance. Il ne faut épiler ni trop vite ni trop doucement ; il y a un point intermédiaire qu'on ne peut saisir qu'avec un peu d'habitude. Quatre ou cinq heures après i'épilalion, on fait une onction avec la pommade parasiticide; ici nous employons de préfé- rence la pommade à l'huile de cade, et, plus souvent, la pom- made au turbith ; voici les formules de ces deux prépa- rations : 1° Axonge 15 gr. Huile d'amandes ) Glycérine j Turbith minéral 0,50 centigr. 2° Axonge . 20 Huile de cade 2 Je résume en quelques mots, afin que vous le compreniez mieux, le traitement auquel les teigneux sont soumis dans notre service : Il faut d'abord nettoyer la tête, faire tomber les croûtes, Teigne Paveuse. 81 s'il y on a, et couper les cheveux à deux ou trois centimètres (Ju cuir chevelu. Aussitôt on applique une couche d'huile de rade, qui détruit en partie le parasite placé à la surface de la peau, éteint la sensibilité du cuir chevelu et facilite l'ex- traction des poils. Le lendemain on épile, et l'opération exige ordinairement d'une à cinq séances, suivant l'étendue du mal et la sensibilité du sujet. Pendant l'épilation on fait des applications de sublimé avec une brosse douce; les mêmes lotions sont continuées malin et soir pendant deux ou trois jours après que l'épilation est terminée ; puis on les remplace par des onctions avec de la pommade au turbith jusqu'à la complète guérison de la maladie. • Ordinairement, une seule épilalion est insuffisante, et il faut en pratiquer deux, trois, et quelquefois davantage. Nous arrivons maintenant à la description des diverses espèces de teignes. Nous commencerons par la teigne faveuse. ARTICLE PREMIER. TEIGNE FAVECSE. Le fa vus [tinea vera de Lorry) mérite la première place parmi les teignes, et, pour beaucoup d'auteurs encore, c'est la seule affection à laquelle on doive réserver le nom de teigne. Longtemps il s'est montre rebelle à toute thérapeu- tique, et aujourd'hui nous le guérissons avec une étonnante facilité. Aussi sommes-nous loin du temps où la teigne, mystérieuse dans sa nature, était considérée comme une viciation di.s humeurs, et où le teigneux, reg rdé comme un paria dan> la société, était repoussé de tous les emplois, jugé impropre aux plus grossiers services, non-seulement à cause de l'incurabililé de l'affection cutanée et de la crainte 0 82 . DES TEIGNES. de la contagion, mais aussi et surtout à cause de la fai- blesse de la constitution qui produisait une pareille ma- ladie ! Vous savez, messieurs, ce qu'on doit penser maintenant de cette faiblesse de la constitution à laquelle on attachait naguère une si grande importance ; et il me suffirait de vous montrer réunis les teigneux qui occupent nos salles pour vous convaincre qu'à part quelques enfants scrofuleux, ces malades sont tous d'une constitution robuste, et, par consé- quent, aptes à tout service. Avant d'aborder la description de la teigne faveuse, nous entrerons dans quelques considérations historiques, • Historique. — L'étude historique du favus se divise naturellement en trois époques répondant à trois degrés bien marqués dans la connaissance de cette affection. Ces trois périodes sont séparées par d'assez longs inter- valles. La première époque, de beaucoup la plus longue, com- mence aux écrits des Arabes et ne s'arrête qu'à M. Devergie. Elle est tout entière consacrée à l'élude des caractères noso- graphiques et séméiotiques. La seconde date de l'année où Schœnlein découvre le vé- gétal parasite de la teigne faveuse, et finit en 1852. — Les naturalistes s'occupent activement de l'étiologie et de la pa- thogénie des teignes, et, sous ce rapport, font faire à la science d'immenses progrès en très peu de temps. La troisième commence en 1852. C'est à ce moment que nous inaugurons une thérapeutique rationnelle des teignes. Le traitement du favus est désormais assis sur des bases solide. Première époque. — Avant les Arabes, on ne trouve rien TEIGNE FAVEtJSE. 83 sur l'affection que nous éludions. Ualopecia et varea des anciens s'appliquaient à la teigne tonsurante, ou plutôt à la pelade, et non au favus. On a pensé et dit que Celse avait parfaitement tracé les caractères des croûtes faveuses ; mais il suffit de lire avec un peu d'attention la description qu'il en donne pour demeurer convaincu qu'il les confondait, comme tous les médecins de cette époque, avec les croûtes d'impétigo. D'ailleurs cette manière de voir ne m'est point personnelle, c'est l'opinion du savant Lorry et de beaucoup d'autres auteurs. C'est donc aux Arabes qu'on doit faire commencer l'his- toire de la teigne faveuse. Avenzoar, Avicenne, Rhazès, Haly Abbas, connurent parfaitement les caractères cliniques du favus, bien qu'ils ne le désignassent pas encore sous le nom de teigne. Ils appelaient cette affection : sahafats, sa- fati, albathin, et n'ignoraient pas qu'elle entraîne souvent après elle la perte de la chevelure. On peut leur reprocher cependant d'avoir distingué deux espèces, l'une sèche (la seule qui soit du favus) et l'autre humide, qui n'est autre chose qu'une pseudo-teigne muqueuse ou eczéma impétigineux du cuir chevelu. Le mot tinea se trouve pour la première fois dans Etienne d'Antioche, traducteur des écrits arabes ; mais déjà depuis longtemps le mot existait dans la langue populaire, expri- mant sans doute un des caractères les plus saillants de cette maladie, la ténacité, la persistance. Un grand nombre de sens étymologiques ont été proposés, mais je ne veux pas insister davantage sur ce point très peu important. Toujours est-il que le mot teigne passa dans la science et fut adopté par tous les auteurs du moyen âge, par Gordon, 8/j DES TEIGNES.. Nicolas Florentin, Arnauld de Villeneuve,.... el surtout par Guy de Chauliac, qui en admet cinq espèces : 1° Favosa, 2° Ficosa, 3° Amedesa (similis carni humiditas), 4° Uberosa (similis uberibus mamillarum), 5° Lupioosa. Une seule de ces espèces doit être rattachée au favus, c'est la tinea hipinosa; peut-être aussi la tinea amedesa s'applique- t-elle à cette variété du favus dans laquelle on trouve, après la chute des croûtes, un étal fongueux du cuir chevelu. L'es- pèce favosa répond exactement à la gourme ; c'est une pseudo-teigne. A. Paré réduit à trois les cinq espèces de Guy de Chauliac. Ce sont les : 1° Ficosa, 2° Furfurosa, 3° Corrosiva. Mais l'espèce ficosa de Paré, la seule qui mérite le nom de teigne, répond à la tinea lupinosa de Guy de Chauliac , et non à l'espèce ficosa de ce dernier auteur. Quant à Lorry, il ne reconnaît qu'une seule teigne qu'il appelle tinea vera; les autres espèces ne sont que des pseudo- teignes. Alibert, dans sa première édition, parue au commence- ment de ce siècle, donne un sens générique au mot teigne, et en admet cinq espèces : 1° furfuracée ; 2° granulée; 3° mu- queuse ; h" amianlacée; 5°faveuse; dont une seule, la faveuse, correspond au favus. Mahon jeune conserve la classification d'Alibert, et y ajoute la teigne tondante, qu'il ne confond pas, comme les Anglais, avec une variété de favus (porrigo scutulata). Alibert publie une deuxième édition de son ouvrage, TEIGNE FAVEUSE. 85 et dans la classe des dermatoses teigneuses, il établit quatre genres : r Achore JMuqueux, 1 Acnore (Lactumineux. / Furfuracée, „„ _ . . \ Amiantacée, 2°Porr.gine....jGranuIée> ' Tonsurante. 3° Favus (Vulgaire, ( Scutiforme. i" Trichoma (qui u'a aucun rapport avec notre trichophyton). Jusqu'alors les affections, à tort ou à raison, rattachées à la teigne, avaient été rapprochées parles caractères cliniques des croûtes et la communauté de siège. Mais une autre école venait de se fonder avec Willan, dans laquelle on prenait pour base de classification les formes primitives des affections (vésicules, pustules....). Or, les croûtes n'étant qu'une production secondaire, perdaient désormais toute leur importance. Willan considère donc le favus comme une affection pus- tuleuse, et le place à côté de l'impétigo, dont il ne se dis- tingue, dit-il, que par son caractère contagieux. Le mot teigne est trouvé trop vague et remplacé par un autre non moins obscur. C'est le porrigo (de porrigere, étendre), dont il fait deux variétés : le porrigo favosa et le porrigo scutulata. Bateman, qui vient ensuite, adopte la mutation opérée par Willan dans la classification des teignes, et porte à six le nombre des porrigo. Ce sont : 1° le porrigo larvalis (scrofu- lide bénigne exsudative); "2" le porrigo furfnrans (pseudo- pityriasis du cuir chevelu) ; 3° le porrigo lupinosa; U° le porrigo scutulata ou ringworm, confondu avec la teigne ton- dante; 5° \eporrigo decalvans, répondant à Yarea des anciens, et dans lequel il reconnaît, avec Celse, deux variétés : Valo- pecia et Yophiasis ; 6° enfin, le porrigo favosa. 86 DES TEIGNES. Je ne puis m'empècher de louer Baleman d'avoir ainsi rap- proché le porrigo decalvans du porrigo favosa, d'avoir com^ pris que ces affections ont un grand nombre de caractères communs malgré des différences de forme très apparentes ; car, pour nous, toutes les deux appartiennent à la grande famille des teignes. Mais les Willanistes, placés à un point de vue tout autre, devaient blâmer un pareil rapprochement: aussi semble-t-il que Bateman ait voulu, au moyen d'une singulière hypothèse, prévenir tout reproche à cet égard. Il suppose dans le porrigo decalvans l'existence de pustules éphémères; voici plutôt comment il s'exprime : « Il peut exister, quoique le fait ne soit pas prouvé, autour des che- veux, une éruption de petites pustules qui ne subsistent que peu de temps et ne donnent issue à aucun fluide. » Samuel Plumbe ne fait que reproduire les divisions de Bateman. Biett intronise en France la classification germanico-an- glaise; pour le porrigo, il revient à Willan ; et, comme ce dernier, n'admet que deux espèces : le porrigo favosa et le porrigo scutulata. C'est la nomenclature qui a été adoptée, sans modification aucune, par les élèves de Biett, MM. Gibert et Cazenave. Voici donc où nous en étions : il fallait, avec Lorry et Alibert, prendre les croûtes pour point de départ dans la classification des teignes, ou, marchant sur les traces des Willanistes, les considérer comme des affections pustuleuses, et les faire figurer à côté de l'impétigo. Jusqu'alors on ne s'était occupé que des caractères cli- niques ; nulle part il n'était question ni de la nature, ni du traitement des teignes. Deuxième époque. — On découvre la nature de la teigne. C'estàSchœnlein qu'appartient l'honneur d'avoir démontré le TEIGNE FàVEP&E. 87 premier l'existence d'une production végétale dans le favus. II donna au champignon qu'il venait de découvrir ïe nom r s Teignes. rompt ses enveloppes ou plutôt déchire la membrane épider- mique superficielle, qui est incapable de résister plus long- temps à la pression qu'elle supporte. La rupture de 1'épi- derme peut se faire en différents lieux; le plus souvent elle s'opère à quelques millimètres du point où la croûte est tra- versée par le poil, quelquefois aussi au niveau de la circon- férence de la cupule. A partir de ce moment, le parasite se développe en liberté à la surface de la peau et n'offre plus dans son accroissement de forme régulière. Cependant le poil s'altère chaque jour davantage, les che- veux paraissent de plus en plus décolorés, atrophiés; leur diamètre varie dans les divers points de la tige. Ils sont flétris, d'une couleur terne, gris-souris ou cendrée; la plus légère traction suffît pour les faire tomber avec leur racine et leur bulbe, quand ils ne tombent pas d'eux-mêmes. Quelquefois aussi ils se cassent au niveau des croûtes, et leur racine de- meure dans le follicule. Le champignon est encore vivace ; les croûtes tombent et se reproduisent, et occupent des surfaces de plus en plus étendues. En quelques points on peut trouver encore les godets caractéristiques; mais presque partout ils sont défor- més, méconnaissables et remplacés par de larges croûtes plus ou moins saillantes et inégales qui exhalent une odeur fade, repoussante, qui a quelque analogie avec l'odeur de souris, d'urine de chat, de moisissures, de matières animales en macération — On peut aussi la comparer, avec Alibert, à l'odeur des marécages. Cette odeur ne peut être confondue avec aucune autre : et, par exemple, celle que répandent les gourmes ou l'impétigo du cuir chevelu est tout à fait dif- férente; aussi, dans les cas où le diagnostic différentiel entre la teigne faveuse et la pseudo-teigne offre quelques ditïieul- TçicNii: faveUsk. 97 tés, il ne faut pas négliger les signes que peut vous fournir le sens de l'odorat , sans toutefois leur accorder une trop grande importance, l'odeur ne pouvant jamais constituer un signe palhognomonique. Il n'est pas très rare de voir plusieurs poils traverser le même godet; comment se comporte à leur égard la matière favique ? ïanlôt ces poils partent d'un même follicule, tantôt et plus souvent ils naissent de follicules différents; dans ce der- nier cas un seul de ces poils traverse le godet dans une di- rection perpendiculaire cl en occupe ordinairement le centre ; les autres le traversent plus ou moins obliquement. Ces der- niers peuvent à la rigueur n'être pas malades, et quelquefois l'examen microscopique ne fait découvrir de spores ni dans leur épaisseur, ni sur leur racine, ni dans le follicule d'où ils naissent. Ce sont des poils qui se sont rencontrés par ha- sard sur la petite surface envahie par le cryptogame au mi- lieu duquel on les trouve. Quant au poil central, nous savons quels rapports il affecte avec le parasite. Tels sont les phénomènes que l'on observe dans la deu- xième période delà teigne faveuse urcéolaire, quand les go- dets sont isolés et éloignés les uns des autres ; mais pour peu qu'ils soient rapprochés, ils ne tardent pas à se rencontrer dans leur développement excentrique ; la couche superficielle de l'épiderme est rompue plus tôt et quelquefois en différents points, et le champignon se développe d'une manière ut à fait irrégulière. De la réunion des godets faviques résulte une surface plus ou moins étendue, de plus en plus anfractueuse, que l'on pourrait prendre pour une plaque de teigne scuti- forme ou de teigne squarreuse. Cependant on trouve encore, malgré la déformation des godets, quelques vestiges bien évi- dents de la disposition urcéolaire primitive. C'est une sous- va- 98 DES TEIGNES. riélé deporrigofavosa, à laquelle j'ai donné le nom de favus ur- céolaire cohérent. Nous verrons mieux tout à l'heure, quand nousauronsdécrit \eporrigoscutulata et Xeporrigosquarrosa, en quoi elle diffère de ces deux variétés de la teigne faveuse. Assez souvent le malade lui-même, ne résistant pas aux démangeaisons qu'il éprouve, se gratte et déchire avec les ongles l'enveloppe épidermique des godets qui, dès lors, n'of- friront plus de forme régulière dans leur développement. Il peut arriver aussi que le grattage donne lieu à un suinte- ment de quelques gouttelettes sanguines qui se dessèchent sur la croûte faveuse et lui donnent un aspect brunâtre ; il augmente l'irritation du cuir chevelu occasionnée déjà par la présence du parasite, véritable corps étranger; alors se montrent en différents points des pustules ; des croûtes impétigineuses leur succèdent qui, se mêlant aux croûtes sèches du favus, peuvent masquer le caractère de ces der- nières et rendre ainsi le diagnostic sinon impossible, au moins très difficile. D'ailleurs, ces éruptions d'impétigo, qui viennent compli- quer le favus, dépendent de plusieurs causes, parmi lesquelles l'action de gratter est loin d'occuper le premier rang. Assez souvent le parasite peut, par sa seule présence au sein du tissu cutané, éveiller des prédispositions morbides et provoquer la manifestation d'éruptions dartreuses ou scrofuleuses. Sou- vent aussi des topiques de différentes sortes ont été appli- qués dans un but curatil*, et des éruptions inflammatoires plus ou moins confluentes ont accompagné ces applications intempestives. Quelquefois, enfin, ce sont des animaux para- sites, des poux, qui pullulent sous les croûtes faveuses et oc- casionnent le développement de l'impétigo para&itaire. Je vous ai déjà signalé les rapports des pustules et des croûtes i'aviques ; je n'y reviendrai pas. TEIGNE FAVEUSE. 99 Chez quelques sujets, l'inflammation produite par le para- site végétal ne demeure pas limitée à la couche superficielle de la peau; elle s'étend plus profondément et atteint le tissu cellulaire sous- cutané; alors de véritables abcès se forment en différents points du cuir chevelu, abcès ordinairement circonscrits, de nombre et de volume variables et qui, dans certaines circonstances, d'ailleurs très rares, détruisent toutes les parties molles péricràniennes et arrivent jusqu'à la sur- face osseuse dénudée; nous en avons tout récemment observé un exemple chez un jeune garçon de quinze à seize ans, cou- ché en bas, au n° 59. Mais je le répète, ces complications de la teigne faveuse sont rares. Bien plus souvent, on ren- contre des angioleueites et des adénites sympathiques qui occupent les régions sous-maxillaire et parotidienne. Arrivé à une certaine période de son existence, après un temps qui varie de quelques mois à plusieurs années, le favus urcéolaire, longtemps localisé au cuir chevelu, s'étend aux autres régions du corps, à la face, au tronc, aux membres, souvent précédé dans son développement par des cercles her- pétiques d'un très petit diamètre. C'est ordinairement par voie d'inoculation qu'a lieu la propagation de la maladie, et j'ai dit ailleurs quel rôle jouait le grattage dans ce transport de la matière parasitaire du cuir chevelu à tel ou tel point de l'économie. Le teigneux qui gratte avec l'ongle une partie couverte de favus peut, en grattant ensuite une partie saine do la peau, insérer sous l'épidémie quelques parcelles de ma- tière faveuse. Aussi est-il assez rare de rencontrer des malades qui portent depuis longtemps de la teigne faveuse, chez les- quels on ne trouve pas d'altération des ongles; car le cham- pignon inséré sous l'ongle occupe un terrain qui lui convient à merveille. Il est entre deux lames épidermiqucs dont la su- perficielle est très dure et très épaisse; il se trouve donc dans 100 DES TEIGNES. des conditions favorables à la germination. Toutefois le favus alvéolaire peut se montrer de prime abord sur toutes les régions , notamment aux bras, aux jambes, aux parties sexuelles; et déjà Mahon avait signalé ce fait que le favus de l'ongle est quelquefois primitif. La maladie arrive à la troisième période après un temps si variable qu'on ne saurait aucunement le préciser ; les cheveux tombent pour ne plus reparaître, les follicules s'obli- tèrent; en même temps les croûtes faveuses se détachent, laissant à découvert des surfaces rouges, déprimées, qui peu à peu se Iransforment en de véritables cicatrices. Que s'est-il donc passé, et pourquoi un changement si pro- fond dans l'aspect de la maladie ? car déjà les poils étaient tombés plusieurs fois, et plusieurs fois aussi l'éruption favique avait été balayée à la surface de la peau. — L'explication de ces phénomènes est très simple; tout dépend de la papille pileuse, car, sans elle, pas de poil, et sans poil le champignon ne peut vivre longtemps. La première condition pour qu'un poil se reproduise, c'est que la papille pileuse continue à sè- créter les éléments nécessaires à sa formation; cette vérité tombe sous le sens. Or qu'arrive- t-il dans la teigne faveuse, comme, d'ailleurs, dans toutes les teignes? C'est que le para- site, dans sa marche envahissante, a bientôt atteint la partie la plus profonde du follicule où il rencontre la papille, élé- ment générateur ; il se borne d'abord à dénaturer, à trans- former en sa propre substance les produits sécrétés, et de là résultent ces altérations si remarquables des poils sur les quelles je viens d'attirer votre attention. Jusqu'alors, il n'y a point perte irrémédiable delà chevelure. Mais, au bout d'un certain temps, l'organe sécréteur lui-même s'altère, ne souf- frant pas impunément la présence de la matière parasitaire. La papille devient donc le siège d'une irritation obscure, TEIGNE EAVEUSE. 101 elle s'atrophie, et cette altération, faisant des progrès inces- sants, un jour vient où elle ne sécrète plus les éléments for- mateurs du poil; alors ce dernier tombe, et, ne pouvant plus se reproduire, il y a calvitie définitive. Alors aussi, le folli- cule pileux n'a plus de raison d'être, et ses parois se rappro- chent et ne tardent pas à arriver au contact. Quelquefois, il me semble vous avoir déjà signalé ce fait sur lequel j'ai le premier appelé l'attention des observateurs, la papille pileuse n'est pas détruite, mais par suite d'une al- tération spéciale, elle sécrète des cellules épidermiques et non plus des cellules pigmentaires. Dans ce cas, il n'y a pas oblitération du follicule qui doit livrer passage aux cellules épidermiques, comme il livrait passage au poil. D'autres fois enfin, après la disparition du parasite et l'obli- tération incomplète du follicule, la papille peut sécréter encore les éléments du poil, et l'on voit, ainsi que l'a fait remarquer M. Cazenave, des débris de cheveux qui rampent et qui sem- blent emprisonnés sous l'épiderme. Le jour où la sécrétion pileuse est suspendue sur le bulbe, papillaire, le champignon ne trouve plus les éléments néces- saires à sa subsistance, et il ne tarde pas à mourir. Il dispa- rait donc à la surface de la peau, laissant à découvert les cicatrices qui se forment et sur lesquelles on ne le trouve jamais, quoi qu'en dise M. Devergie. — M. Cazenave ne peut comprendre cette disparition du parasite à la troisième pé- riode de la maladie, et il l'invoque comme un puissant argu- ment contre la nature végétale de la teigne. Quant à nous, rien, dans ce fait, ne peut nous étonner; qu'il nous suffise donc, pour répondre aux objections de M. Cazenave, de répéter ce que nous venons de dire, que le champignon meurt faute de nourriture. Les surfaces dépouillées de cheveux ont un singulier as- 102 DES TEIGNES. pect. Cl- sont des places blanches où les bulbes pileux et tout le pigment ont été absorbés par le champignon favique; la peau est lisse, tendue, luisante et extrèment amincie. A son début, la teigne faveuse urcéolaire est une affection locale, qui n'a aucune influence fâcheuse sur la santé géné- rale des sujets qui en sont atteints; mais à une époque avan- cée, quand la maladie dure depuis nombre d'années et qu'elle s'est étendue à la plus grande partie du corps, elle devient beaucoup plus sérieuse. Les fonctions digestivesse troublent, le malade devient anémique, tombe dans le marasme, et la mort vient mettre un terme à une si triste existence. — Mais ces faits sont maintenant du domaine de l'histoire, et. de pareils accidents ne sont plus à craindre depuis que nous avons mis en usage et fait connaître une méthode de traite- ment toujours efficace. § 2. — Teigne faveuse scutiforme. Cette variété, connue aussi sous les noms de favus en écu? favus nummulaire, favus en groupe, en anneaux, en cercles, porrigo scutulata..., obscure avant Willan, est maintenant admise par tous les auteurs. Cependant elle est, en France, généralement confondue avec la teigne squarreuse. Ouvrez, en effet, les ouvrages de MM. Gibert, Cazenave, Rayer, et vous verrez que favus squarrosa, porrigo scutulata, favus en groupes, sont des termes synonymes. Les Anglais, sous le nom de ringworm, l'ont confondue aussi, non plus avec le porrigo squarrosa, mais avec la teigne tonsurante. Je vous rappelle enfin que M. Devergie, par suite d'une erreur de traduction, a donné à l'article porrigo scutulata la descrip- tion du favus urcéolaire cohérent. A la première période de la maladie on observe, dans cette variété comme dans la précédente, du prurit, des éruptions TEIGNE FAVEUSE. 103 fugaces, ordinairement érythématenses, quelquefois aussi, niais plus rarement, pustuleuses, une hypersécrétion épider- mique, l'altération primitive des poils. Nous ne revien- drons pas sur chacun de ces phénomènes; nous signale- rons seulement les particularités qu'ils offrent dans le favus scutiforme. L'altération des poils est moins prononcée, moins profonde. L'érythème précurseur affecte une forme plus régulièrement circulaire; les plaques arrondies sont plus larges, plus sail- lantes, plus rouges et par conséquent plus apparentes, sen- sibles à la pression du doigt. L'hypersécrétion d'épiderme est beaucoup plus abondante et d^ne durée plus longue; nous l'avons vue, sur un malade de notre service, persister six semaines avant l'apparition extérieure du favus. Les poils sont entourés à leur base d'écaillés épidermiques, blanchâtres, qui leur forment une gaîne adhérente, d'un aspect gommé, donnant à l'affection que nous étudions une grande analogie avec la teigne tonsurante arrivée à la deuxième période; et c'est sans doute ce qui ex^ plique Terreur des Anglais, qui n'ont pas su distinguer les deux maladies. Cependant il y a des caractères diflérentiels assez nombreux et assez tranchés que vous connaîtrez plus tard . On pourrait également confondre le porrigo scutulata au début avec le pityriasis du cuir chevelu ; mais la forme cir- culaire, l'adhérence des squames, la couleur plus foncée, l'aspect gommé des gaines permettront presque toujours de reconnaître l'affection parasitaire. Dans les cas diffi- ciles, il faudrait recourir à l'examen microscopique; car, chose remarquable, il semble que cette production d'épiderme se transforme insensiblement dans les éléments du parasite végétal. Les cellules épidermiques deviennent de plus en plus 'JO/l DES TEIGNES. allongées et ne sont bientôt que des tubes de mycélium aux- quels se joignent plus tard des sporules, longtemps avant que l'œil puisse distinguer la couleur jaune de la matière faveuse. Cependant les éléments cryptogamiques se rassemblent, et l'on aperçoit, au miiieu des squames, plusieurs petits points jaunes qui soulèvent un peu l'épidémie, et qui peuvent pa- raître un instant isolés, mais ne tardent pas à se réunir. Ces points jaunes, formés par le champignon, sont autant de petits godets dont il est impossible de distinguer nettement la disposition, et qui, très voisins les uns des autres, se pressent et se déforment mutuellement, avant que le parasite soit visible à la surface de la peau. A ce moment la maladie arrive à sa deuxième période. Les petites croûtes jaunes partielles se réunissent bientôt pour n'en former qu'une seule qui, traveisée par les cheveux, recouvre complètement la surface affectée. Les plaques fa- veuses ont donc, dans cette variété, une forme circulaire ; elles sont plus ou moins inégales, bosselées, légèrement sail- lantes dans leur totalité; elles paraissent quelquefois un peu relevées sur les bords et plus ou moins squameuses. D'ail- leurs, ces croûtes jaunes qui exhalent, comme dans la variété précédente, une odeur fade, marécageuse, sont assez souvent aussi imprégnées de sang desséché. Il est rare de n'avoir à observer qu'une seule plaque dans le porrigo scutulata; ordinairement on en voit plusieurs pa- raître simultanément ou successivement dans la même région ; elles se réunissent et ne forment plus qu'une large surface, qui occupe la plus grande partie et quelquefois môme la tota- lité du cuir chevelu, et sur laquelle on retrouve presque tou- jours, à la circonférence, des arcs de cercle qui rappellent l'évolution primitive par plaques circulaires. Le plus souvent il reste sur le front et sur la partie inférieure de la région TEIGNE FANEUSE. j 05 occipitale une couronne de cheveux respectés par le para- site. L'altération des poils est bien évidente, quoique moins prononcée qu'à la période correspondante du favus urcéolaire; l'alopécie arrive moins vite et quelquefois après plusieurs années seulement. Il semble que dans cette variété de la leigne laveuse le parasite perde en profondeur ce qu'il gagne en surface. La troisième période ne se distingue en rien de la période correspondante dans la variété précédemment étudiée; peut- être la marche en est-elle plus lente. Arrivée à une époque avancée de son existence, la teigne faveuse scutulée peut s'étendre, comme la teigne faveuse urcéolaire, du cuir chevelu aux autres régions du corps-, mais, chose remarquable, dans cette extension, la forme en écu disparaît et se change en urcéolaire. — Je ne sais pas ce que les dermatologistes pensent de cette transformation qu'ils doivent trouver au moins singulière, et je me demande quelle explication ils en pourraient donner. Personne (sans doute à cause de la difficulté) ne s'est clairement expliqué à cet égard, et l'on a de la peine à comprendre la contradiction que l'on trouve dans un des auteurs le plus justement estimés. — M. Cazenave dit, en effet, que le porrigo scutulata, qui siège sur les membres, peut être confondu avec l'impétigo; — quelques lignes plus loin, on lit que le porrigo scutulata ne se montre jamais sur les membres!!! Pourquoi donc la teigne scutiforme, quand elle se propage au tronc, à la face,... a(Tecle-t-elle une disposition urcéo- laire? — C'est ici le lieu d'expliquer les différences de forme que nous avons signalées entre le porrigo favosa et \e por- rigo scutulata. Tout dépend du mode d'ensemencement de la matière parasitaire; car, dans les deux variétés, le champi- 106 DES TEIGNES. gnon est le même : c'est toujours Xachorion de Schœnlein. Quand une ou plusieurs spores tombent sur un poil, elles se développent uniformément autour de ce poil dont elles sont toutefois séparées par la gaîne épidermique, le canal épider- mique et la tunique capsulaire interne; car, nous l'avons déjà dit, les spores tombant dans le canal épidermique du poil, traversent sans peine, à cause de leur ténuité, les élé- ments qui constituent la tunique interne (celle-ci n'est autre chose que la couche cornée de l'épiderme légèrement modi- fiée). — Elles se développent entre les deux tuniques du follicule, occupant leur siège de prédilection, l'épaisseur de l'épiderme dont les tuniques sont une dépendance; de ce point, elles s'étendent dans tous les sens : en bas, en haut, en dedans, en dehors; elles oblitèrent graduellement, à mesure qu'elles deviennent plus nombreuses, le canal épi- dermique et appliquent la tunique interne contre la gaîne du poil. — Mais, à ce moment, la tunique refoulée offre au champignon qui germe une résistance d'autant moindre qu'on s'éloigne davantage du poil central; aussi les spores se déve- loppent-elles surtout en haut et en dehors ; de là résulte leur disposition en cupule, comme il est facile de s'en rendre compte sur les figures où l'on voit les poils représentés avec leurs enveloppes. Rien n'est donc plus aisé à comprendre que le mode de formation du godet favique; — il suffit de bien connaître l'anatomiedu poil et le siégeexact des spores cryp- togamiques. Tels sont les phénomènes qui se passent dans l'épaisseur de la peau, alors que les éléments constitutifs de l'achorion sont trop peu nombreux et trop profondément situés pour paraître aux regards de l'observateur. Cependant les spores se multiplient, se rapprochent de la surface légumentaire et forment bientôt un corps opaque, visible à l'œil nu. Dès le TEIGNE BAVEUSE. 107 premier jour qu'on peut l'apercevoir, le champignon revêt manifestement l'aspect d'une petite coupe-, et à mesure qu'il prend plus de développement, il conserve toujours cette dis- position si remarquable, qui ne disparaît pas avant que la maladie soit arrivée à la troisième période. — Si les spores cryptogamiques se fixent et se développent en même temps sur des poils isolés etplus ou moins distants les uns des autres, les choses se passent comme nous venons de le dire, et au lieu d'un godet il y en a plusieurs. — Dans ce dernier cas cependant, il peut arriver que les godets, primitivement iso- lés, soient assez rapprochés pour se rencontrer dans leur développement excentrique et se déformer mutuellement, à tel point qu'au bout d'un certain temps ils soient devenus méconnaissables. Nous aurons alors cette sous-variété de la teigne faveuse urcéolaire à laquelle j'ai donné le nom de favus urcéolaire cohérent. Supposons maintenant que les poils affectés soient encore plus voisins, et, par exemple, naissent d'un même follicule : les spores auront la même tendance à se disposer d'une ma- nière régulière autour de chaque poil; les godets pourront donc se former encore , quoique les conditions anatomiques soient un peu changées ; mais, à cause de leur rapprochement extrême, leur déformation, par suite de pressions réciproques, aura lieu de très bonne heure; et quand le champignon de- viendra visible à l'extérieur, il ne paraîtra rien de la dispo- sition urcéolaire. Ainsi, pour résumer, on peut admettre que l'achorion de Schœnlein, champignon de la teigne faveuse, se développe toujours uniformément sur les poils qu'il a envahis ; la dispo- sition en cupule parait être la forme primitive sur les parties velues, forme qui persiste quand les poils sont indépendants, et qui, au contraire, si les poils sont 1res rapprochés, s'altère 108 DKS TEIGNES. dans la profondeur de la peau , et ne peut être distinguée à l'époque où le cryptogame parait. — Dans le premier cas, la teigne faveuse est urcéolaire, c'est le porrigo favosa des auteurs; — dans le dernier, elle est scutiforme, c'est le porrigo scutulala. Aussi , quelques observateurs habiles, entre autres M. Defïis, n'attachent-ils que peu d'importance à toutes ces distinctions. Comprenez-vous maintenant pourquoi le favus scutiforme n'occupe que le cuir chevelu, et pourquoi il se change en favus urcéolaire quand il gagne quelque autre partie de la surface cutanée? — C'est que, généralement, en aucune autre région, on ne trouve le même développement du sys- tème pileux qu'au cuir chevelu, et que là seulement existent les bouquets de poils uniloculaires. — Pour vous mieux con- vaincre que les différences de forme dans la teigne faveuse tiennent uniquement au développement du système pileux et au mode d'ensemencement du champignon, je crois devoir vous signaler ici le fait bien remarquable de la transformation du favus scutiforme en favus urcéolaire, après une première épilatiou de la tète. §3. — Teigne faveuse squarreuse. Cette variété de favus [porrigo squarrosa) n'est pas géné- ralement admise; les auteurs la confondent, les uns avec le favus scutiforme, les autres aveé Yimpetigo granulâtà ; et nous devons convenir qu'il y a, en effet, une grande analogie entre la teigne squarreuse et cette dernière affection Comme le porrigo scutulata, le porrigo squarrosa ne se rencontre qu'au cuir chevelu, et débute par des groupes sur lesquels on ne distingue rien de la forme urcéolaire, qui peut être, ici également, la forme primitive. Cependant les deux variétés, scutulée et squarreuse, offrent, dans leurs carac- ÎËlGfiR PaVEUSE. 409 tères, des différences bien tranchées : l'évolution extérieure du champignon ne se fait pas d'une manière aussi régulière dans le favus squarreux ; elle a lieu sur des surfaces allon- gées, inégales, et non plus circulaires. La matière favique semble se développer plus particulièrement sur la tige des poils auxquels elle forme, dans une certaine étendue, des gaines qui se réunissent et adhèrent assez fortement les unes aux autres. De là ces saillies anfractueuses et quelquefois considérables qui hérissent le cuir chevelu sortes de monti- cules que j'ai depuis longtemps comparés aux cartes de géographie en relief, représentant le sol de l'Ardèche. — La membrane épidêrmique du poil ne reste pas en place, comme dans les variétés précédentes ; mais détachée par la pression du parasite, elle glisse sur la racine et plus tard sur la lige, formant ainsi à cette dernière, avec la tunique in- terne de la capsule, une véritable gaîne dans une étendue d'un à plusieurs centimètres ; — le cryptogame est, dans ce cas, en rapport immédiat avec le poil. Les autres symptômes du porrigo squarrosa ne diffèrent en rien de ceux qui appartiennent aux deux variétés de la teigne faveuse précédemment étudiées. Disons maintenant en quelques mots (bien que cette con- sidération ne soit ici que d'une médiocre importance) quelles sont les modifications qu'impriment k la teigne faveuse les régions qu'elle envahit ; car les descriptions précédentes s'appliquent spécialement aux cas dans lesquels l'affection occupe le cuir chevelu, son siège de prédilection. — Mais n'oubliez pas que la variété urcéolaire (porrigo favosa) eslla. seule qu'on observe dans les régions dont nous allons parler. Les godets faviques peuvent se montrer sur tous les points de la face : sur les joues, les sourcils, le nez, dans les con- 110 DES TEIGNES. duits auriculaires J'ai cité dans mes leçons de 1855 l'observation, à plusieurs égards très remarquable, d'une femme entrée dans le service pour une vieille affection syphi- litique, et chez laquelle nous vîmes se développer, au bout du nez, un très beau godet de favus. Le parasite lui avait été probablement communiqué par une malade voisine, affectée de teigne faveuse. — Actuellement nous avons dans nos salles, au n° 51, un jeune homme qui porte, depuis onze ou douze ans, une teigne faveuse du cuir chevelu ; la maladie s'est tout récemment étendue à la face, et trois godets de différentes grandeurs occupent la région sourcilière gauche. — Presque jamais la teigne faveuse de la face ne s'accompagne de ces éruptions pustuleuses si fréquemment observées au cuir che- velu ; mais il n'est pas rare de voir autour des godets, et dans une étendue fort variable, une furfuration jaunâtre qui offre avec les croûtes de l'eczéma une certaine analogie ; c'est du favus épidermique si souvent pris pour de la dartre! Sur le tronc et les membres, l'éruption cryptogamique se montre ordinairement au centre d'anneaux érythémateux, remarquables par leur uniformité et leur très petit diamètre, et se distinguant en cela des cercles herpétiques qui appar- tiennent à la teigne tonsurante. — L'affection occupe le dos, les épaules, les coudes, les ongles....; elle a une prédilection marquée pour le côté externe des membres (sans doute parce que le système pileux y est plus développé). — Les godets quelquefois se réunissent, et alors on voit une ou plusieurs plaques de favus urcéolaire cohérent. Nous en avons observé, il y a quelques années, à la face antérieure des jambes, sous la forme de larges incrustations brunes, irrégulières, cou- vertes de moisissures; ces dernières étaient, dans ce cas, le parasite du parasite. Les altérations des ongles produites par l'achorion de TEIGNE FAVEUSE. lll Schœnlein avaient échappé à l'attention des observateurs. MM. Gibert et Cazenave n'en font aucune mention. Ce n'est pas cependant qu'elles soient bien rares, car, depuis plusieurs mois, nous en avons eu, dans le service, un assez grand nombre d'exemples. — Mabon, le premier, parla de cette singulière maladie qu'il avait contractée lui-même en soignant des teigneux; il la rapprocha du favus, mais n'en connut point la véritable nature. — Un auteur allemand, dont le nom m'échappe, avait aussi, je crois, vu et signalé le favus de l'ongle . Presque toujours cette affection est consécutive à la teigne faveuse. Les malades se grattent, quelques parcelles de cham- pignon s'introduisent sous l'ongle, et trouvant là, dans les cellules molles de 1'épiderme, un terrain favorable, elles se développent et produisent la maladie que nous étudions en ce moment. Parmi les phénomènes qui annoncent la germi- nation du parasite, on doit signaler surtout l'épaississement de la lame cornée unguéale; en même temps on aperçoit, par transparence, une matière sale, brunâtre. Mais bientôt l'ongle jaunit et se flétrit dans une partie de son étendue; les stries longitudinales deviennent plus apparentes, semblent s'écarter les unes des autres, quelquefois même les lamelles se brisent. Assez souvent des renflements, des nodosités, des tubérosités se forment, et dans ces divers points on observe un amincis- sement de plus en plus marqué, comme si l'ongle était gra- duellement usé pari' action du champignon sous-jacent. Après un temps ordinairement assez long, la perforation de l'ongle est complète. Aux parties sexuelles, le favus n'offre aucune particula- rité qui mérite d'être signalée ; on n'y observe jamais que la forme urcéolaire. Je vous ai dit ailleurs que M. Lebert le pre- mier avait fait connaître l'existence des godets faviques sur 112 DES TEIGNiiS; le gland. Dans mon premier travail sur les teignes, j'avais émis quelques doutis sur la réalité d'un pareil phénomène, ne sachant pas qu'il y eût des poils sur cette partie du corps; mais, plus tard, un fait du même genre s'est offert à mon observation : un beau godet existait sur le gland , traversé à son centre, comme tous les godets faviques, par un poil que l'on apercevait très distinctement à la loupe. Je ne veux point revenir ici sur les symptômes communs aux différentes variétés de la teigne faveuse ; je vous rappel- lerai seulement qu'à son début, le favus est toujours une affection locale ; ce n'est que dans les cas rares où il se géné- ralise, que la santé des sujets affectés peut être plus ou moins gravement altérée. Complications. — Les complications sont celles dont nous avons parlé en étudiant les teignes en général. Tantôt, c'est une autre teigne, la tonsurante, par exemple, qui se montre en même temps que le favus -, tantôt, et plus souvent, c'est une affection produite par des animaux parasites (poux); dans le plus grand nombre des cas, ce sont des affections consti- tutionnelles dartreuses, scrofuleuses qui compliquent l'éruption cryptogamique. Durée et Terminaisons. — Le favus a ordinairement une durée très longue; presque toujours, neuf fois sur dix au moins il se prolonge indéfiniment jusqu'à la complète destruction de la chevelure. Dans un vingtième des cas, environ, l'affection se généralisant, on voyait se manifester les symptômes de la cachexie parasitaire, signes avant-coureurs d'une terminaison funeste. — La possibilité de la guérison spontanée ne peut être teigne Paveuse. 413 révoquée en doule; niais cette terminaison est une très rare exception dans la teigne faveuse. Etiologie et pathogénie. — Je vous renvoie ici àl'étiologie des affections parasitaires et des teignes en général, car je ne puis rien ajouter à ce que j'ai dit alors des causes prédis- posantes; et dans l'étude des causes efficientes, je ne veux aborder que deux points : l'inoculation et la disposition spé- ciale qu'affecteTachorion, végétal parasitede la teigne faveuse. Cependant je rappellerai en quelques mots les principales hy- pothèses émises sur le siège et la nature de cette affection. L'inoculation peut être involontaire et accidentelle: par exemple, dans le cas où un teigneux gratte avec l'ongle sa tête couverte de croûtes faveuses, puis une partie saine de la peau , et transporte ainsi le mal de la tète à une autre ré- gion du corps. D'autres fois elle est volontaire et artificielle, pratiquée à l'aide de la lancette par un expérimentateur, dans le but de connaître la pathogénie du favus. M. Cazenave, dans son Traité des maladies du cuir chevelu, invoque, pour ne pas admettre la nature végétale du favus, un grand nombre de raisons plus spécieuses que solides, que j'ai en partie réfutées dans ma première brochure sur les teignes (Recherches sur la nature et le traitement des teignes , 1853). Toutefois, deux objections de mon honorable collègue sont demeurées jusqu'alors sans réponse, et je ne puis me dispenser d'en parler aujourd'hui; il s'agit de la sanction de l'Académie de médecine, dont M. Cazenave se couvre comme d'un bouclier, et de la stérilité des tentatives d'inoculation. Malgré mon respect pour l'Académie , il m'est impossible de reconnaître sa compétence en matière de teigne; et, sans aller plus loin, ne lui a-l-on pas, ces jours derniers, présenté comme pellagreux trois aliénés venus d'Angers tout exprès et 8 11Û t)ES ÏEtGNES. simplement affectés de teigne tonsurante à la période pity- riasique? Relativement à l'inoculation, M. Cazenave pourrait-il dire aujourd'hui, comme en 1850, que les tentatives faites dans ce sens sont demeurées stériles? — Je ne le pense pas ; car, depuis les expériences de M. Deffis, nous avons pour le favus, comme on a pour le chancre, toute l'histoire de l'inoculation. Lisez dans mes leçons de 1855 le résumé des trois observa- tions recueillies par M. Deffis (Sérnéiotique cutanée.... page 10ZI). Sur trois cas, deux fois c'est du favus épidermiquequi se développe sous la forme de petites croûtes minces, blan- ches, striées de jaune, à quelques égards analogues aux croûtes eczémateuses; examinées au microscope, elles offrent une structure intime ne différant en rien de celle des croûtes épaisses qui constituent les godets faviques. Une seule fois, oh obtient un godet très bien formé, traversé au centre par un poil. -Pourquoi ne produit-on pas toujours un godet? — Parce qu'il faudrait atteindre toujours avec la pointe de la kincette le canal pilifère, et y déposer une ou plusieurs spores. Or, la chose n'est pas facile, vous le comprenez ; le hasard seul peut venir en aide à l'expérimentateur. Ces inoculations ont singulièrement éclairé l'histoire du favus. Nous avons pu suivre jour par jour la marche du cryp- togame , depuis le moment de la piqûre jusqu'à la chute des croûtes ou des lamelles faviques ; nous avons appris la durée de l'incubation et le temps nécessaire à la formation du godet (il est de quarante jours environ ). Que deviennent maintenant toutes ces histoires, dans les- quelles on nous parle de godets faviques paraissant quatre ou cinq jours après l'inoculation, et ces expériences de Gallot, que rapporte M. Cazenave, et dans lesquelles l'inoculation ne réussit qu'une fois sur huit? — Presque tous les auteurs TEIGNE FAVEUSE. 115 font mention de ces expériences, auxquelles il est cependant impossible d'accorder la moindre valeur, quand on a lu la brochure de Gallot. On n'y trouve vraiment qu'un certain nombre de faits plus ou moins étranges, d'anecdotes curieuses qui ne ressemblent en rien à une relation d'expériences con- sciencieusement faites. Je suis convaincu que Gallot n'a jamais essayé l'inoculation de la teigne favèuse. D'ailleurs , le seul cas de réussite qu'il rapporte, cas observé par un officier de santé, ne prouve absolument rien en faveur de l'inoculation; c'est simplement un fait de contagion. J'arrive maintenant à la description du végétal parasite qui produit la teigne faveuse. Mais auparavant disons quel- ques mots des hypothèses le plus généralement adoptées sur la nature et le siège des teignes. Bien que j'aie réfuté toutes ces fausses hypothèses dans mon premier travail, et que j'aie démontré la nature végétale du favus par des arguments tirés de trois grandes sources : de l'examen microscopique , de l'action des réactifs chimiques et de l'anatomie patholo- gique; cependant, je crois utile de revenir sur ces questions, car il y a encore , parmi les dermatologistes , des hommes d'un mérite incontestable, qui opposent toute la force de leur talent aux doctrines nouvelles, niant jusqu'à l'existence des végétaux parasites qui vivent sur la peau de l'homme. Sur la question du siège anatomique du favus, trois opi- nions différentes étaient en présence. Pour ceux-ci ( Baude- locque et M. Bayer), il est dans le- follicule pileux; — pour ceux-là (Murray, Mahon, etc.) , dans les follicules sébacés. — D'autres, comme MM. Letenneur et Cazenave , le placent en même temps dans les follicules sébacés et à l'extrémité du conduit pilifère ; — quelques-uns enfui, dans la peau elle- même, mettant ainsi les follicules hors de cause. Sur la question de nature, mêmes divergences d'opinions; 116 DES TEIGNES. Les anciens rattachaient le favus à un vice spécial des hu- meurs; parmi les modernes, les uns l'attribuaient à l'inflam- mation, les autres à une lésion spéciale de sécrétion. Aussi, laissant de côté les doctrines surannées, devrons-nous dé- montrer que les croûtes faveuses ne sont ni du pus desséché, comme le pensait Letenneur, ni un produit altéré de sécrétion folliculaire, comme le soutient encore M. Cazenave. Voyons donc ce que nous apprennent à cet égard l'examen microscopique, les réactifs chimiques et l'anatomie patholo- gique. Si l'on examine au microscope, sous un grossissement de 200 à 300 diamètres, un fragment de croûte faveuse, délayé dans un peu d'eau ou d'acide acétique, on ne voit que des sporules, des tubes vides {mycélium) et des tubes chargés de sporules {sporidies). Les sporules ont un volume et une forme variables : les unes, plus petites, se distinguent à peine des granulations noires; les autres ont jusqu'à 0ra,n,007 à 0mm,008 de diamètre et paraissent avoir deux enveloppes, si on les examine à un grossissement de 800 diamètres. Leur forme n'est pas régulièrement sphérique , elles sontplus souvent ovoïdes , quelquefois triangulaires et comme étran- glées vers le milieu ; il n'est pas rare de les voir réunies bout à bout en chapelet. Les tubes sont flexueux, simples ou ra- mifiés, vides ou chargés de spores ou de granules; accolés les uns aux autres, ils forment des tiges plus ou moins larges et quelquefois comme articulées. Si l'on examine de la même manière un peu de muscardine, quelques parcelles de cette matière blanche caséiforme qui se produit dans le muguet , les moisissures qui se développent sur les matières ani- males en putréfaction, on trouve le même aspect, la même structure intime, sauf quelques nuances d'ailleurs peu accusées. Quant aux productions sébacées, épidermiques, TEIGNE PAVEUSE. 117 elles n'offrent , dans leur composition , aucune analogie avec les matières précédentes; je n'insiste pas sur ces nombreuses différences. — Aussi, et sans aller plus loin, pourrions-nous conclure que les croûtes faveuses ne sont pas du pus desséché ni un produit de sécrétion folliculaire, mais qu'elles sont en totalité constituées par un cryptogame de la tribu des toru- lacées des arthrosporées, c'est YAchorion Schœnleinii, le plus évident de tous les champignons des teignes. L'alcool, l'éther, le chloroforme ne dissolvent point les croûtes faveuses, tandis qu'ils dissolvent, le chloroforme sur- tout, la matière sébacée. L'ammoniaque, mise en contact avec du pus liquide ou concrète, exerce la même action dissolvante et prend un aspect blanchâtre, laiteux, gélatiniforme; elle ne fait que blanchir un peu le favus. L'action de la potasse , de l'acide nitrique, de l'acide sulfurique, est également diffé- rente sur les croûtes purulentes et la matière sébacée d'une part, et, d'autre part, sur le favus. Si j'ajoute que les divers réactifs dont nous venons de parler se comportent à l'égard des moisissures (dont la nature végétale ne saurait" être mé- connue) comme à l'égard du favus, vous en conclurez avec moi que les caractères chimiques plaident aussi fortement que les caractères microscopiques en faveur de l'opinion que je soutiens. Enfin, si les glandes annexes des poils sécrétaient la ma- tière faveuse, comme le pense M. Cazenave , on devrait les trouver hypertrophiées. Or, il est aussi difficile de constater leur existence sur la tète des teigneux que sur celle des sujets sains. La même objection s'adresse à l'opinion de Manon qui repose d'ailleurs sur une erreur anatomique. Je vous ai dit dans la première partie de cette leçon que les caractères anatomiques des pustules étaient bien différents de ceux des favi; ce sont des différences d'état (les premières il 8 DES TEIGNES; sonl toujours liquides au début, les seconds sont toujours solides) ; des différences de couleur, de siège-, des différences dans- la marche. ... Le temps ne me permet pas d'entrer dans les détails, et je vous engage à lire ce que j'ai écrit dans mon premier ouvrage (Recherches sur la nature et le traitement des teignes, 1853). Ainsi donc, le microscope, la chimie et l'anatomie patho- logique se prêtent un mutuel et solide appui pour démontrer que le favus est une production d'origine végétale. . Mais l'achorion n'existe pas seulement dans les croûtes faviques qu'il constitue en presque totalité. Nous avons dit plus haut, en parlant des altérations si remarquables des poils affectés, qu'on trouve des spores et des tubes sur la racine, sur le bulbe, sur la capsule et jusque dans l'épaisseur du cheveu; fait important qui renverse toutes les théories mécaniques (en particulier celle de M. Letenneur adoptée par M. Cazenave), et qui cependant avait échappé à l'obser- vation de très habiles micrographes. Les spores de l'achorion déposées à l'extrémité du canal pilifère, envoient de ce point, dans leur développement, une double irradiation externe et interne, ou plutôt superficielle et profonde. Du côté de la surface cutanée, les éléments se multiplient , se réunissent pour constituer la croûte faveuse. Dans la profondeur des follicules, au contraire, ces éléments demeurent isolés, peu nombreux et ne sont pas visibles au- trement qu'au microscope; les altérations primitives des poils, que la théorie de M. Letenneur est impuissante à ex-r pliquer, témoignent de leur existence avant l'apparition du cryptogame à la surface de la peau(l). (l) Tous les auteurs qui oui écrit sur la teigne faveuse semblent n'avoir jamais observé celte maladie que dans l'espèce humaine; aussi personne n'a, TEIGNE FAVEUSE. 119 Diagnostic. — Le diagnostic est complexe. Il faut d'a- bord savoir quels sont les signes à l'aide desquels on pour- ra reconnaître la teigne faveuse; puis nous dirons quels sont les caractères qui permettent de distinguer le favus des diverses affections qui ont avec lui quelque analogie ; en que je sache, parlé de la transmission du favus des animaux à l'homme; — M. Bazin lui-même n'en a point observé d'exemple. Cependant, dans le courant de l'hiver dernier, un jeune médecin fort dis- tingué de New-York, M. Draper, m'assura que, dans son pays au moins, le favus n'était pas rare chez les animaux, et que lui-même avait eu l'occasion d'en voir plus d'une fois sur des rats. — Il en avait recueilli avec soin une observation fort remarquable, et je le priai de me la communiquer dès qu'il serait de retour à New-York. — Voici le résumé de cette observation à la- quelle M. Draper a bien voulu joindre quelques fragments des croûtes prises à cette époque sur les animaux malades. Dans le courant de l'année 1854, plusieurs membres d'une même famille parmi lesquels était un jeune médecin, remarquèrent que plusieurs souris prises au piège étaient affectées d'une singulière maladie : sur la tête et sur les membres antérieurs existaient des croûtes jaunâtres, un peu foncées, de forme assez régulièrement circulaire, et plus ou moins élevées au-dessus du niveau des parties demeurées saines. — En outre , une dépression mani- feste se voyait au centre de chacune de ces croûtes, ainsi qu'on l'observe dans le porrigo favosa, et, sur les parties où ces dernières étaient tombées, des ulcères existaient et semblaient avoir détruit la peau dans toute son épaisseur. — Ces souris malades furent données à un chat qui offrit quelque temps après, au-dessus de l'œil, une croûte semblableà celles que portaientles souris. — Plus tard, deux jeunes enfants de la maison, qui jouaient avec le chat, fu- rent, successivement et à quinze jours d'intervalle, affectés de la même ma- ladie ; des croûtes jaunes, circulaires, se montrèrent en plusieurs parties du corps, à l'épaule, à la face, à la cuisse. — Le médeciu appelé prononça le nom redoutable de porrigo favosa. Cependant des applications d'acétate de cuivre et d'hyposulfUe de soude suffirent pour la complète guérison des pe- tits malades. Les croûtes envoyées avec l'observation avaient été prises par M. Draper sur la têted'une souris, et ce jeune médecin, qui a appris à l'école de M. Robin le maniement du microscope, m'écrit, après avoir examiné cette matière : « J'ai l'impression que c'est bien du favus que j'ai recueilli autrefois.» — M. Bazin, à son tour, ayant examiné les fragments envoyés, y a trouvé l'a- chorion avec ses caractères les plus tranchés. - Le cryptogame n'avait pas été détérioré par le temps. Voilà assurément une observation intéressante et sur laquelle toute ré- J 20 DES TEIGNES. troisième lieu, nous ferons le diagnostic des variétés de cette affection parasitaire. Entrons maintenant en matière. Mais, avant tout, la teigne faveuse est-elle ou non facile à reconnaître ? — Les réponses que vous obtiendrez à cette question seront fort différentes et même opposées, selon les médecins auxquels vous l'adresserez. — Les praticiens ordi- naires, et parmi eux des hommes souvent très distingués, vous répondront que les affections de la peau (qu'ils appellent des maladies) sont habituellement d'un diagnostic très facil", et que, pour le favus en particulier, il est impossible de com- mettre une erreur, n'eût-on qu'une ou deux fois dans sa vie observé cette affection. — Les médecins de l'hôpital Saint- Louis, et tous ceux qui se sont spécialement occupés de der- matologie, vous diront, de leur côté, que le diagnostic du favus, ordinairement facile, offre parfois quelques difficultés. — Quant à moi, Messieurs j après avoir fait des recherches sérieuses, approfondies sur la teigne faveuse, je vous déclare que ces difficultés sont plus grandes et plus nombreuses qu'on ne se l'imagine même ici dans un vaste hôpital spécialement consacré aux affections cutanées; et je crois avoir eu déjà l'occasion de vous parler de ces enfants affectés de dartres ou de scrofulide bénigne exsudative, que certains de mes col- lègues envoient journellement, comme affectés de teigne, au traitement des frères Mahon. L'erreur opposée est commise au moins aussi souvent. Et maintenant, comment nous éton- ner que tel professeur de clinique de la Faculté de Paris fasse flexion me semble inutile. Toutefois on pourrait s'étonner Je la facile dispa- rition du favus chez les jeunes enfants, sous la seule influence des préparations parasiticides, et peut-être en conclure qu'il n'y avait qu'une apparente ana- logie entre la maladie des enfants et celle des animaux; — mais si l'on con- sidère quelles régions du corps occupaient les croûtes faveuses : l'épaule, la face, lacuisse. ., on comprendra que le parasiterait pas été difficile à détruire là où il ne pouvait trouver qu'une pauvre nourriture. TEIGNE FAVELSE. 121 de magnifiques leçons sur le favus en montrant à ses nom- breux auditeurs des jeunes enfants atteints de pseudo- teigne? Le fait nous a été rapporté par un juge très compétent qui avait appris dans notre service à distinguer le favus d'avec l'impétigo, et qui ne pouvait revenir de la profonde ignorance en pareille matière du savant professeur. Tous les jours vous serez témoins d'erreurs du même genre. On pose hardiment un diagnostic en ne s'atlachant qu'à un seul signe, et en cela on croit souvent faire preuve d'une remarquable habileté. Les croûtes sont-elles partout très sèches, incontestablement c'est du favus; ont-elles une couleur jaune soufrée, c'est encore du favus.... quels que soient d'ailleurs les autres caractères de l'affection observée! — Comme si l'impétigo ne pouvait jamais offrir pareille cou- leur ni pareille sécheresse dans ses croûtes, quand l'éruption est de date ancienne et qu'une poussée nouvelle ne s'est faite en aucun point du cuir chevelu ! ! — Cette manière de procéder est, à coup sûr, plus simple et plus commode; mais les résultats en sont déplorables. On se trompe souvent dans les cas un peu difficiles ^ on recommande l'épilation quand il faudrait se borner à des applications émollientes; ou, plus souvent, on ne prescrit que ces dernières dans les cas où il serait nécessaire d'épiler. Et c'est en agissant ainsi qu'on laisse se perpétuer pendant des mois ou des années une affec- tion qu'on aurait fait disparaître en quelques jours, si l'on eût apporté dans l'examen du malade une plus sérieuse at- tention. D'ailleurs, ce que nous disons là du favus pourrait égale- ment s'appliquer à toute autre branche de la science médi- cale. Il n'y a que les ignorants qui aient la sotte prétention de ne jamais rencontrer de difficultés. Le diagnostic du favus n'est donc pas aussi simple qu'on 422 DES TEIGNES. veut bien le dire, au moins dans quelques cas; et pour réta- blir, il faut se garder de toute précipitation, observer avec soin, en procédant toujours avec méthode, et tenir compte de l'ensemble des caractères et non pas seulement d'un seul. Quels sont donc les signes à l'aide desquels on peut faire un diagnostic exact? Ils peuvent être tirés de trois sources principales : 1° des caractères propres aux croûtes faveuses ; 2° des altérations des cheveux et de la calvitie; 3° de l'exa- men microscopique. 1° Caractères propres aux croûtes faveuses — Quand ces caractères sont bien dessinés, le diagnostic ne saurait être un instant douteux. Des incrustations sèches, adhérentes, plus ou moins épaisses, d'une couleur jaune-paille, d'une odeur de souris ou de marécage, d'une cassure pulvérulente ne peuvent appartenir qu'à la teigne faveuse. Rarement, il est vrai, les signes sont aussi nombreux, les caractères aussi tranchés; plusieurs peuvent manquer à la fois, et c'est alors qu'il faut redoubler d'attention dans l'examen du malade, s'informer avec soin de la disposition primitive de l'affection, de sa marche.. ..., c'est alors surtout qu'il faut résistera la tentation bien naturelle d'accorder à un seul signe une trop grande valeur. La couleur jaune soufrée, l'enchâssement et l'adhérence des croûtes appartiennent aussi à certaines va- riétés d'impétigo; la sécheresse à la pseudo-teigne amian- tacée, la forme déprimée à la lèpre vulgaire.... Quant à l'odeur, fût-elle très prononcée, je ne suppose pas que vous la considériez jamais comme un signe suffisant pour poser un diagnostic : les perceptions fournies par le sens de l'odorat sont trop incertaines et fugaces. 2- Altérations des cheveux et alopécie. — Ces altérations ont une très grande importance-, seules elles mettent quel- quefois sur la voie d'un diagnostic difficile. Les modifications TEIGNE FAVEUSE. 123 de couleur manquent très rarement; les cheveux sont ternes et comme flétris, ordinairement secs, d'un gris cendré, cou- leur de souris, qui tranche d'une manière bien remarquable au milieu d'une belle chevelure blonde ou brune. Plus rare- ment c'est une couronne de cheveux rougeàtres, couleur de feu, qui entoure les plaques du favus. En même temps, les poils imprégnés de parasite paraissent (surtout à loupe) tor- tillés, bifurques, lanugineux • ils sont cassés ou complètement déracinés, et, dans tous les cas, la plus légère traction suffit pour les avulser. C'est sur ces poils faciles à extraire qu'on peut constater l'absence complète de capsules ; d'autres fois, au contraire, si l'altération est moins avancée, celte dernière est hypertrophiée, d'un volume trois ou quatre fois plus con- sidérable qu'à l'état normal. Plus tard, la chute spontanée des cheveux arrive; en même temps l'éruption parasitaire disparaît et les surfaces malades paraissent pendant quelques jours à peu près complètement, sinon tout à fait dénudées. Mais quand les croûtes sont tombées ou ont été enlevées, ne reste-t-il pas encore quelques signes d'une assez grande valeur pour établir le diagnostic de la teigne faveuse? Au-dessous des godets, ou plus généralement, des croûtes faviques, on trouve des surfaces rouges, plus ou moins dé- primées, nettement circonscrites, sur lesquelles il semble, au premier abord, que le derme soit à nu; cependant, en exami- nant avec un peu d'attention, on aperçoit une mince lamelle épidermique qui séparait la croûte faveuse de la couche su- perficielle du derme ; nous en avons déjà parlé. A mesure que la rougeur s'éteint, et que les dépressions s'effacent, l'aspect cicatriciel de la peau se prononce chaque jour davantage, à moins toutefois que, les papilles pileuses n'étant pas complè- tement détruites, d'autres cheveux ne paraissent, et de nou- velles croûtes ne su forment. 124 DES TEIGNES. En résumé, le diagnostic du favus peut être établi dans deux conditions bien différentes : les croûtes existent encore, ou bien elles sont tombées. Si elles existent, leur couleur, leur forme, leur odeur.... fournissent des signes ordinaire- ment plus que suffisants. Si elles sont tombées, des surfaces rouges, déprimées, ovalaires, exactement limitées, ne per- mettent pas un seul instant l'incertitude. J'ajoute que l'alté- ration des cheveux dans le premier cas, et leur absence dans le second, nous fournissent également des signes précieux. A une période plus avancée de la maladie, et à défaut des caractères précédents, on a encore, pour asseoir une opinion, des surfaces blanches et lisses où les bulbes pileux et tout le pigment ont été détruits. Ce sont de véritables ci- catrices, assez souvent analogues à celles qui succèdent à des brûlures superficielles ou au lupus érylhémateux. 3° Examen microscopique. — C'est dans les cas difficiles, quand les caractères de l'affection ne sont pas nettement des- sinés, qu'il faut recourir à l'examen microscopique. On prend un fragment de croûte, ou, plus souvent, un ou deux poils dont la couleur paraît suspecte; on les place sous le champ du microscope, et, si l'on a réellement affaire à une teigne faveuse, dans les croûtes comme sur les cheveux, on trouve les éléments caractéristiques du végétal parasite, de YAcho- rion Schœnleinii. Nous avons déjà fait connaître, dans la leçon précédente, les résultats de cet examen relativement aux croûtes faviques ; aujourd'hui nous devons dire aussi quelques mots des altérations de structure si remarquables dont les poils sont le siège, altérations qui varient d'ailleurs, nous allons le voir, suivant l'époque de la maladie. La tige seule peut paraître affectée, et sur les divers points de sa longueur, on trouve des fragments de matière analogue à celle qui constitue les croûtes, c'est également du favus ; TEIGNE FaVECSE. 125 de plus, le poil est terne, les deux substances corticale et mé- dullaire sont moins distinctes que dans l'état normal, les fibres longitudinales paraissent plus grosses. Il n'est pas rare de re- trouver sur les membranes, non plus seulement des spores, des tubes de mycélium, mais aussi de la matière faveuse en masse, déposée entre le prolongement radiculaire du poil et la tunique capsulaire interne. En même temps, la tige offre la même altération, mais plus prononcée encore que celle dont nous venons de parler tout à l'heure. D'autres fois, la capsule est absente* ou bien l'on n'en trouve que des lambeaux. Le bulbe du poil, la souche et le prolongement radiculaire sont parsemés de spores et de filaments lubuleux; tantôt les globules pigmenlaires ou grains d'orge se voient encore à l'origine des fibres longitudinales, et tantôt ces élé- ments anatomiques ont complètement disparu. Des spores et des tubes existent manifestement au centre de la tige. Dans quelques cas, quand l'altération est portée à son comble, le poil est atrophié, décoloré, la capsule et le bouton man- quent, les fibres longitudinales de la tige sont écartées et comme transformées en tubes; dans leurs intervalles se voient des spores bien distinctes et, sur les bords, des filaments tu- buleux qui semblent sortir de l'épaisseur du cheveu. Ces der- nières altérations offrent une grande analogie avec celles qui appartiennent aux poils affectés de teigne tonsurante. Permettez-moi de vous rappeler ici que, de ces recherches microscopiques qui me sont personnelles, il résulte : 1° Que les altérations primitives des poils, avant la manifestation extérieure du champignon favique, altérations qui mettent en défaut la théorie toute mécanique de MM. Letenneur et Cazenave, dépendent du développement du parasite dans la profondeur des follicules, à l'intérieur du bulbe; 2° que les altérations d'une époque plus avancée (seconde période) ne 126 DÈS TEIGNES. sont pas le fait de la compression exercée sur la tige au- dessus du bulbe par l'incrustation faveuse, puisque, contrai- rement à l'opinion de Letenneur généralement adoptée, les parties constituantes du bulbe lui-même sont altérées et que, d'ailleurs, la lésion des cheveux n'est pas une simple atro- phie, mais une désorganisation de leur structure intime ; 3° que les follicules pileux ne sont pas étrangers à la mala- die, puisqu'on trouve dans leur intérieur et sur les organes qu'ils renferment les mêmes produits morbides qu'à l'exté- rieur ; k° enfin, que si le bulbe disparaît à une époque avancée de l'évolution favique, ce n'est pas seulement, comme on l'a dit, à cause de l'atrophie de la papille, mais bien plutôt à cause de la présence du parasite qui absorbe et détruit tout, transformant en sa propre substance les globules pigmen- taires aussitôt qu'ils sont sécrétés, jusqu'à ce qu'il y ait com- plète oblitération des canaux excréteurs de la papille. Ces détails étaient nécessaires pour compléter ce que nous avons dit à la fin de la leçon précédente, et ils trouvaient ici, ce me semble, une place fort naturelle. Plusieurs causes que nous allons passer rapidement en re- vue, peuvent rendre obscur le diagnostic du favus. Quelques parents, c'est presque toujours une affaire d'amour-propre, prennent pour leurs enfants malades, avant de nous les conduire, des soins extrêmes de propreté; la tête est nettoyée, brossée, pommadée avec une exactitude scru- puleuse, les croûtes ont été détachées avec des cataplasmes ou avec le peigne de sorte que, le jour où ces enfants nous arrivent, il nous est impossible de découvrir sur la tête la moindre trace de l'éruption parasitaire pour laquelle on vient nous demander des conseils. Nous sommes bien évidemment, pour juger la question, dans des conditions défavorables, pri- vés de signes nombreux et des éléments les plus importants. Teigne faveuse. 127 A côté des soins de propreté exagérés, nous devons, par opposition, placer les traitements irrationnels. Tout à l'heure, la tète était trop nettoyée, dépouillée des croûtes caractéris- tiques ; et maintenant ce sont des éruptions artificielles, or- dinairement impétigineuses,qui. se combinent avec l'éruption parasitaire qu'elles masquent plus ou moins complètement. Dans les deux cas, nous attendons, avant de nous prononcer, et nous recommandons aux parents de s'abstenir de tous soins et de tous topiques pendant huit ou quinze jours, et après ce laps de temps, de nous conduire de nouveau leurs enfants. On pourrait toutefois pratiquer l'avulsion de quelques poils, et recourir au microscope, s'il était nécessaire de por- ter sans retard un jugement. Quelquefois une erreur de diagnostic pourra résulter de la coexistence de plusieurs espèces de teignes chez un même sujet. Nous avons eu dans le service un jeune enfant affecté en même temps de teigne faveuse et de teigne tonsurante du cuir chevelu ; M. Bion en a pris le dessin ; les deux affections étaient tellement tranchées qu'on ne pouvait guère les mé- connaître; mais supposons un instant qu'on n'eût pas exa- miné toutes les parties malades (et l'on est bien tenté d'agir ainsi quand en un point on trouve des signes non équivoques), une erreur de diagnostic aurait été inévitablement commise, et un pronostic défectueux en eût été la conséquence; car, je vous l'ai déjà dit, le pronostic est différent dans chacune de ces deux espèces de teignes. Si la pelade, la pelade achromateuse surtout, existe sur une même tète avec la teigne faveuse, elle passera souvent inaperçue , les plaques de teigne achromateuse seront presque infailliblement prises, par un observateur peu attentif, pour des plaques de favus arrivées à la période cicatricielle; on n'épileia pas ces surfaces en apparence dénudées, et le ma- 12S DES TEIGNES» ladc sera, par la faute du médecin, privé d'une pailie de sa chevelure qu'on aurait pu lui conserver. Une dernière cause d'obscurité dans le diagnostic du favus consiste dans la coexistence d'éruptions constitution- nelles, ce que Ton comprend d'autant mieux que la distinc- tion entre ces éruptions et la teigne faveuse est, en dehors môme de toute complication , parfois très difficile. Mais nous voici arrivés à cette seconde partie du diagnostic. Diagnostic différentiel. — On peut confondre le favus avec un certain nombre d'affections constitutionnelles, que l'on a, pour cette raison , désignées sous le nom de pseudo-teignes. Elles forment un groupe naturel dans lequel on peut établir trois divisions principales: les pseudo-teignes humides, les pseudo-teignes squameuses et les pseudo teignes sébacées. Les pseudo-teignes humides répondent à nos scrofulides bénignes exsudatives (lre période de la scrofule) ; elles com- prennent: les achores, l'eczéma, l'eczéma impétigineux, l'im- pétigo, toutes distinctions qui ne peuvent avoir de l'importance que pour les partisans exagérés de la méthode de Willan. Quels sont les caractères qui permettent d'établir un dia- gnostic différentiel entre ces affections et la teigne faveuse? Les croûtes sont moins sèches, plus foncées, souvent même brunâtres en certains points ; presque toujours, sur les parties où elles sont de date assez récente, elles offrent un aspect lui- sant, comme si on les eût recouvertes d'une couche de vernis. Assez souvent, dans leur ensemble, ellesont une remarquable analogie avec de la marmelade d'abricots un peu cuite. Leur disposition est moins régulière, et il est extrêmement rare que la face interne du pavillon de l'oreille ne soit pas affectée en même temps, et souvent à un degré plus prononcé que le cuir chevelu. Le suintement, quand il existe, est un signe d'une très grande valeur ; mais lors même qu'il fait défaut, que TElONIÏ FAVFLsr. 129 les croules sont sèches, on trouve habituellement dans la disposition de ces dernières, dans leur aspect, quelque chose de particulier que l'œil saisit très bien, et qu'il est fort diffi- cile, pour ne pas dire impossible, d'exprimer par des mois. On voit que ces croûtes sont le résultat delà concrétion d'unpro- duitliquide; quoique sèches, elles ont un faux air d'humidité. Les cheveux sont collés les uns aux autres , et ils n'offrent aucune de ces altérations de forme et de couleur sur les- quelles nous avons tant insisté dans la nosographie de la teigne faveuse; ils résistent à la traction de la pince ou des doigts, et, quand ils cèdent, les capsules n'ont pas un volume plus considérable qu'à l'étal normal. Enfin, il n'y a de calvitie que dans les cas rares où la maladie dure depuis très longtemps. Ces signes fournis par l'examen des cheveux méritent de fixer l'attention d'une manière toute spéciale, au point de vue du diagnostic différentiel que nous cherchons à éta- blir en ce moment; et si les deux affections se compli- quent, ils ne le cèdent en importance à aucun autre ca- ractère. Quand les croûtes sont tombées par suite d'un traitement ou par la marche naturelle de la maladie, la distinction n'est pas moins facile dans la plupart des cas, en dehors même de l'examen des cheveux , entre le favus et la pseudo-teigne hu- mide. A ce moment, il est vrai, les deux affections sont ca- ractérisées par de la rougeur seulement ; mais cette rougeur est superficielle, diffuse, occupe des surfaces plus ou moins irrégulières et plus ou moins étendues dans la pseudo-teigne; — dans le favus, au contraire, la rougeur est plus foncée, les surfaces sont nettement limitées, de forme ordinairement ovalaire , très sensiblement déprimées et recouvertes d'une laquelle épidcimique 1res mince et transparente, qui laisse apercevoir les vaisseaux du derme injectés. 0 130 DES TEIGNES. Sachez aussi Messieurs, que très souvent on voit survenir chez les teigneux soumis à notre traitement des pustules qui occupent quelquefois la presque totalité du cuir chevelu. Ces pustules, qui n'ontqu'une durée éphémère, ont pu être prises, par des élèves peu habitués au diagnostic de la teigne, pour une éruption constitutionnelle; et en même temps l'affection parasitaire était méconnue. Je devais vous signaler ce fait, afin que désormais vous fussiez vous-mêmes à l'abri d'erreurs aussi grossières. Les pseudo-teignes squameuses ou furfuracées compren- nent le psoriasis et ses variétés, la lèpre vulgaire et quel- quefois le pityriasis ou le pseudo-pityriasis du cuir che- velu. On ne peut guère le confondre qu'avec le favus en cercle (porrigo scutulata). Les croûtes sont moins épaisses, et, par conséquent, moins saillantes; elles ont une couleur plus blanche, un aspect plus lamelleux, une forme moins ré- gulièrement circulaire ; elles adhèrent moins à la peau et aux Cheveux, et par ce caractère se distinguent très nettement des gaines gommées dont nous voyons si souvent les poils entourés dans le favus en écu. Dans la plupart des cas, l'érup- tion constitutionnelle n'est pas bornée au cuir chevelu. Est- il nécessaire d'ajouter que dans les pseudo-teignes squa- meuses, les cheveux ne paraissent point altérés, et que la calvitie n'est pas autant à craindre que dans le favus scuti- forme ? Quant à la pseudo-teigne sébacée , elle est plus difficile à distinguer delà teigne faveuseque les affections précédentes. L'alopécie est un caractère commun à l'affection parasitaire et à l'affection constitutionnelle; toutefois, elle est loin de suivre la même marche dans les deux cas. Quand le sujet est atteint de pseudo-teigne sébacée, les cheveux tombent d'une manière irrégulière, et en différents points de la tête à la fois; TEIGNE FAVEtiSE. 131 avant leur chute, ils n'ont subi aucune altération appréciable dans leurs caractères physiques, et, plus tard , les surfaces dénudées ne revêlent point un aspect cicatriciel. Nous savons qu'il en est tout autrement dans le favus. D'ailleurs, les ca- ractères des croûtes offrent habituellement, dans l'un et l'au- tre cas, des différences extrêmement tranchées ; ici elles sont très sèches, épaisses, d'une couleur jaune-paille... là, au con- traire, elles sont minces, noirâtres ou grisâtres, et plus ou moins onctueuses au toucher. Enfin, n'oubliez jamais l'examen microscopique, qui est, dans les cas embarrassants , d'un si grand secours. Nous avons établi dans la teigne faveuse trois variétés de forme: le favus urcéolaire , le favus scutiforme et le favus squarreux. La teigne faveuse urcéolaire est, de toutes les variétés, celle qui est le moins souvent confondue avec une autre affection ; c'est à elle spécialement que se rapporte tout ce que nous avons dit du favus en général; nous n'y ajouterons rien. La teigne faveuse en groupes (porrigo scutulata) n'offre pas toujours un diagnostic facile. A la première période de son existence (avant l'apparition du champignon), elle simule à un degré remarquable, à cause de l'hypersécrétion épider- mique dont elle s'accompagne, le pityriasis dartreux ouïe pseudo-pityriasis du cuir chevelu. Nous avons actuellement dans notre service, couchée au n° 18 de la salle Sainte-Foy, une jeune fille de douze ans, que depuis longtemps nous trai- tons pour une scrofulide bénigne exsudative (eczéma impéligi- neiïx), qui se transforme en ce moment en pseudo-pityriasis. Eh bien! une disposition circulaire de l'éruption en certains points, quelques taches jaunes isolées, l'adhérence des squa- mes aux cheveux nous font soupçonner aujourd'hui une teigne faveuse scutiforme compliquée d'une scrofulide. Nous restons 4B2 DES TEIGNES. dans le doule en attendant les résultats de l'examen micros- copique, et nous ne faisons aucun traitement; cars'il y aun végétal parasite, les caractères qui lui appartiennent se dessineront déplus en plus. A côté du pityriasis, nous devons placer le psoriasis, la lèpre vulgaire , qui ont beaucoup d'analogie avec le favus en groupes arrivé à la deuxième période ; nous en avons déjà parlé, il y a quelques instants. — Eh ce n'est pas sans raison que les Anglais ont décrit sous le nom de ringivorm le favus scutiformeet la teigne tonsurante! aussi, quand nous traiterons de cette dernière affection , établirons-nous avec grand soin le diagnostic différentiel entre les deux espèces de teignes. Il semble que le favus scutiforme soit toujours facile à dis- tinguer du favus urcéolaire. Il est cependant une sous-variété du porrigo favosa que nous avons appelée favus urcéolaire cohérent, etqui offre avec le favus en groupes de nombreux points de ressemblance, si bien que des observateurs très dis- tingués, M. Deflfis entre autres , ne voient aucune différence entre les deux. Dans l'un et l'autre cas, les godets se sont réunis et déformés, par suite de la pression qu'ils exercent les uns sur les autres dans leur développement; mais la dé- formation ne s'étant pas opérée à la même époque, il en ré- sulte des différences très sensibles dans l'aspect des croûtes. Vous vous rappelez, en effet, que, dans le favus scutiforme, la réunion des godets a lieu dans l'épaisseur de la peau, avant l'apparition extérieure du champignon; tandis que dans le favus urcéolaire cohérent, la disposition cupuliforme s'est manifestée à la surface de la peau, et ce n'est qu'au bout d'un certain temps que les godets, parfaitement distincts dans le principe, ont fini par se réunir. Or, on comprend que, dans ce dernier cas, il reste toujours dans la forme de l'éruption TEIGNE FAVEUSE. 133 quelque chose des dépressions primitives si remarquables. Aussi les croûtes du favus cohérent sont-elles plus épaisses, plus anfractueuses, hérissées de nombreuses saillies et creu- sées d'enfoncements également nombreux, mais toutefois moins marqués au centre de la plaque qu'à la circonférence où la forme en godet est souvent encore évidente. En outre, les lignes qui tracent les limites de l'éruption sont plus régu- lières dans \ç poïrigo scutulatfli où elles représentent des arcs de cercle d'une certaine étendue, que dans le favus cohérent où, formées par la réunion des godets, elles revêtent une ap- parence festonnée. Le favus squarreux est celui dont le diagnostic différentiel offre le plus de difficultés. Il simule, à s'y méprendre, l'impé- tigo granulata, avec lequel, surtout en Angleterre, il est jour- nellement confondu. Cependant les monticules champignon- neux sont plus saillants, plus adhérents, et souvent plus volumineux que les croûtes impétigineuses; la matière qui les compose est plus sèche, d'une cassure plus franchement gra- nuleuse, d'une couleur moins foncée; les cheveux paraissent moins enchevêtrés : unegaîne blanchâtre, dont la couleur tran- che au milieu de la matière cryptogamique, entoure leur tige dans une certaine étendue; c'est le canal épidermique du poil qui aété refoulé par la pression du parasite. L'extraction des che- veux est plus facile etoccasionne peu de souffrance aux malades. Peut-être pourrait-on prendre aussi le favus squarreux pour du favus urcéolaire cohérent, et réciproquement; mais il suffit, pour ne pas s'y laisser tromper, d'être prévenu de la possibilité de l'erreur. J'arrive, et je termine par là le diagnostic de la teigne faveuse, aux variétés de siège, sur lesquelles je passerai très rapidemenl. Distinguons toutefois le siège topographique du siège anatomique. ï'èh DES TEIGNES. La teigne faveuse du corps et des membres, delà face, des parties sexuelles..., revêt toujours la forme urcéolaire , et comme les poils sont indépendants, beaucoup moins nombreux et moins rapprochés qu'au cuir chevelu , les dépressions en cupule sont toujours faciles à reconnaître et le diagnostic n'offre, par conséquent, aucune difficulté. Si le favus unguéal et le favus épidermique sont si souvent méconnus, c'est qu'en réalité on aime mieux ne pas croire à leur existence. Comment admettre que les alté- rations si remarquables des ongles, chez les sujets affectés de teigne faveuse, sont dues à la présence et au développement d'un champignon, quand on affirme que les croûtes faviques elles-mêmes ne sont qu'accessoirement constituées, si tant est qu'elles le soient, par une production végétale? Cependant, M. Cazenave, observant ces altérations spéciales des ongles, ne peut s'empêcher de leur trouver une analogie frappante avec les croûtes faveuses, ce qui ne laisse pas que de l'étonner beaucoup! En vérité, Messieurs, nous ne pouvons partager un pareil étonnement, puisque, depuis plusieurs années, nous professons avec une conviction profonde que la matière unguéale, comme la matière favique , est en totalité formée par un cryptogame, Fachorion de Schcenlein. Pronostic. — Le pronostic est bien différent de celui d'au- trefois. — On pouvait dire encore en 1851 (il n'y a par con- séquent que six ans), que la teigne faveuse était une maladie grave qui, résistant opiniâtrement à tous les traitements con- nus, avait une durée indéfinie et compromettait non-seulement la chevelure, mais quelquefois aussi l'existence, surtout quand elle s'étendait sur le corps et devenait générale. Aujourd'hui , au contraire, nous disons que la teigne faveuse est une affec- tion légère , et même, de toutes les teignes , la plus facile à guérir; qu'on ne doit craindre ni la mort, ni une pro- TEIGNE FAVEUSE. 135 longation indéfinie dans le cas même où elle est généra- lisée. Une seule circonstance, l'étendue de la maladie, fait varier le pronostic; le traitement est d'autant plus facile et la guéri- son plus prompte que le favus est plus circonscrit. Portez donc toujours un pronostic plus sérieux quand l'affection oc- cupe toute la tête ou au moins la plus grande partie de cette région. Mais je prévois une objection que vous allez m'adresser. J'ai dit que le pronostic était d'autant plus grave que la ma- ladie était plus étendue, et je n'ai point fait d'exception pour le favus du tronc généralisé , qui disparaît si aisément par notre traitement. — N'y a-t-il pas, dans ces paroles, une con- tradiction évidente? Non assurément, et voici pourquoi :1e favus qui devient général sur le tronc et sur les membres ne se montre jamais d'emblée, mais il survient toujours chez des malades affectés depuis nombre d'années de teigne laveuse au cuir chevelu ; et, avant de se généraliser sur le reste du corps, il avait envahi entièrement cette dernière région; de sorte que le pronostic du favus du corps généralisé ne peut pas être fait indépendamment du favus général de la tète ; et si l'affection disparaît sur le tronc après un traitement de quelques jours, vous savez qu'il n'en est pas de même au cuir chevelu. Ainsi, bien que le favus général du corps ne soit pas en lui-même une affection sérieuse, les circonstances dans lesquelles il paraît donnent toujours au pronostic une certaine gravité. Toutefois, ne croyez point que je n'admette lateignefa- veuse primitive qu'au cuir chevelu. Le favus du tronc, comme le favus des ongles, peut paraître d'emblée; mais, dans ce cas, il est toujours circonscrit et ne se généralise point. Vous entendrez dire généralement que \o porrigo scuftflata 136 DES TEIGNES. est la variété de teigne faveuse qui guérit le plus aisément, et l'on trouve clans l'ouvrage de M. Cazenave [Traité des ma- ladies du cuir chevelu) une observation ainsi conçue : Favus en cercle. — Traitement par les émollients, les onctions avec la 'pommade au sulfure de chaux, les lotions alcalines. — Guërison sans alopécie. Puis on voit plus loin qu'à la sortie du malade les cheveux sont ternes et secs, et que les surfaces envahies par la maladie se distinguent encore très bien des surfaces demeurées saines. Je vous prie de bien remarquer ces derniers mots: à la sortie dumalade les cheveux sont ternes et secs.... — Qu'in- dique en effet cette altération , sinon que les cheveux sont encore, avec les follicules qui les renferment, imprégnés de cryptogame, au moment où on déclare le malade guéri? — Il semble vraiment que M. Cazenave, dans sa bonne foi, ait voulu nous mettre à l'abri d'un jugement téméraire sur la réalité et la solidité d'une pareille guérison. Les Mahon, au contraire, trouvent que le porrigo scutulata est une affection plus grave que le porrigo favosa, parce qu'il résiste plus longtemps à leurs poudres et à leurs pom- mades. — Eri réalité, les différences entre les trois variétés de favus (sous le rapport du pronostic) sont presque insigni- fiantes; tout au plus peut-on dire que le favus scutiforme, à cause de sa marche plus lente et de sa tendance moins pro- noncée à la généralisation, est la variété la plus légère. — Le traitement a toujours à peu prés la même durée, et je n'ai point remarqué que telle forme fût plus rebelle que telle autre. — J'entends parler des variétés de forme et non des variétés de siège-, car, vous savez, je vous l'ai déjà dit, que le favus du corps disparaît en quelques jours avec notre traitement. Thérapeutique. — On convient généralement aujourd'hui TEIGNE PAYEUSE. d 37 que notre méthode de traitement est la seule vraiment effi- cace dans la curation du favus, et ce n'est pas sans peine qu'on est arrivé à nous rendre justice. On désirait apporter quelques moditications à notre méthode, et je ne saurais dire tous les essais qui ont été tentés pour y parvenir. On voulait se passer de l'épiîalion et n'employer que les parasi- ticides; puis, l'épîlatidn étant reconnue indispensable, on a supprimé le parasiiicide, on en a préconisé d'autres différents des miens; mais j'avais tant expérimenté moi-même avant de me fixer, que je ne pouvais attendre aucun résultat avan- tageux des efforts qu'on faisait après moi dans une voie que j'avais si longtemps parcourue. Il y a peu de temps qu'on avait encore la prétention de guérir le favus par les moyens thérapeutiques ordinaires. — Un médecin distingué de la capitale, chargé, dans un hôpital d'enfants, du traitement de quelques teigneux, avait fait, part à l'administration des hôpitaux de succès presque incroyables; il guérissait, disait-il, le favus en cinq jours ! Mais, peu de temps après cette communication importante, la maladie si vite guérie reparaissant, les enfants retournèrent à l'hôpital, et le médecin dont je vous parle reconnut son erreur. — Il y a quelques années, peu de temps après l'inauguration de la nouvelle méthode thérapeutique, un de mes collègues les plus distingués, à l'hôpital Saint-Louis, me pria de voir dans son service une jeune femme affectée^ de favus qu'il voulait guérir par les seuls soins de propreté. Rien ne fut négligé, comme bien vous pensez, pour triompher de la maladie ; au bout de six mois en effet, les croûtes caractéristiques ne pa- raissant plus, on crut à une guérison complète et la malade sortit de l'hôpital. Or, à ce moment, j'avertis mon savant collègue que, le parasite étant seulement détruit au dehors, avant deux mois la malade reviendrait à l'hôpital avec la 138 DES TEIGNES. même affection du cuir chevelu. Ma prédiction ne tarda pas à se réaliser, et la jeune femme vint nous prier de l'admettre dans notre service; mais, avant de la recevoir, j'eus soin de l'adresser au médecin qui l'avait gardée si longtemps dans ses salles, croyant pouvoir la guérir sans l'emploi de notre mé- thode. Nous serons bref dans l'exposé du traitement de la teigne faveuse, car déjà nous sommes entré dans presque tous les détails en étudiant la thérapeutique générale des affections cutanées parasitaires et plus tard celle des teignes. Nous ne répéterons ici que ce qui s'applique spécialement au favus. Au point de vue pratique, on peut distinguer dans le trai- tement de la teigne faveuse quatre cas différents : 1° Favus universel répandu sur toute la tête et sur tout le corps. — Que faire en pareille circonstance? Il faut d'abord nettoyer la tête, et, dans ce but, couper les cheveux au niveau des croûtes, faire des onctions d'huile de cade avec une brosse ou un balai de charpie. Puis on recouvre la tète de cataplasmes de fécule de pomme de terre, et on fait prendre, si l'on veut, un bain d'amidon ou un bain sul- fureux dans lequel le malade a soin de se plonger la tête à plusieurs reprises ; quand les croûtes sont bien ramollies, on les détache au moyen d'un peigne. Il est bon, immédiate- ment après la chute des croûtes, de faire une nouvelle appli- cation d'huile de cade. Dès le lendemain, on commence l'épi- lation, toujours accompagnée des lotions de sublimé, et au bout de quatre ou cinq jours, ordinairement, l'opération est terminée. En même temps on s'occupe du favus du corps et du favus unguéal. Le malade prend quelques bains de sublimé, et, les croûtes détachées, on procède à l'épilation qui exige un temps considérable (ordinairement quinze à vingt jours). TEIGNE FAVEUSE. 139 A mesure qu'on épile, on fait matin et soir sur les parties dénudées (au corps et au cuir chevelu) des applications de pommade au turbith. Quant aux ongles affectés, on en détruit peu à peu, avec la lime, les couches superficielles, jusqu'à ce qu'on soit arrivé à la matière jaunâtre, champignonneuse, que l'on met à nu sur la plus grande étendue possible, pour la laver ensuite avec les solutions de sublimé. Trente jours se passent ainsi, pendant lesquels la rougeur avait été diminuant de plus en plus sur les parties malades, après l'épilation ; mais, à ce moment, la rougeur augmente ou reparaît, si elle s'était complètement effacée, et bientôt le parasite se montre de nouveau sous forme de godets, et ordi- nairement précédé de très petites pustules. — La maladie semble aussi étendue qu'avant toute épilation (au cuir che- velu seulement, car sur le reste du corps il est rare que l'affec- tion reparaisse); cependant les croûtes sont moins larges et séparées par des intervalles plus considérables. — Il faut donc, au bout d'un mois environ, pratiquer une deuxième épilation générale de la tête. On attend encore un mois, six semaines; et si quelques godets se montrent de nouveau, ils sont très rares et ne nécessitent que des épilations partielles sur des surfaces très peu étendues. Après ces trois épilations (deux générales et une par- tielle) , la guérison est presque toujours assurée et sans danger de récidive; cependant la prudence fait un devoir de surveiller les parties malades pendant quelques jours, car il est possible qu'un ou deux godets paraissent encore, et né- cessitent une quatrième opération. 2° Favus du cuir chevelu généralisé ou disséminé partout de telle sorte qu'un sixième à peine de la région a échappé 140 DES TEIGNES. à l'affection parasitaire. — Comme dans le cas précédent, il faut pratiquer une première épilation générale de la tête, sans respecter ces couronnes de cheveux, sains en apparence, qui occupent le front, les tempes ou la nuque. — Au bout d'un mois, six semaines, deuxième épilation, suivie, s'il est nécessaire, un mois après, d'épilations partielles. 3° Favus circonscrit ; cinq ou six plaques au plus sur le cuir chevelu. — Il est inutile dans ce cas d'arracher les che- veux sur toute la tête, l' épilation des parties malades est suffisante. Toutefois il ne faut pas la borner aux surfaces couvertes de croûtes, car les cheveux qui entourent ces sur- faces sont malades dans un rayon très variable, et il est néces- saire, pourguérir lesujel,de les extraire sansen laisser un seul. Mais quelle est la limite que doit respecter la pince de l'épileur? C'est là un point de pratique qu'il faut bien connaître, car, s'il est important de ne laisser aucun germe cryptogamique, c'est également un devoir de ne pas faire souffrir le malade plus qu'il n'est nécessaire pour sa guérison. — Or, il est im- possible de fixer d'avance les limites de l'opération ; l'épileur seul sait à quel moment il doit s'arrêter; les cheveux sains tiennent mieux, et par conséquent offrent à la traction de la pince une plus grande résistance ; leur avulsion est plus dou- loureuse en même temps que plus difficile. Ordinairement il ne faut pas se flatter d'obtenir une gué- rison radicale après une seule épilation partielle; on doit donc garder le malade, et si, au bout de quelque temps, les godets se montrent, on épile de nouveau là où il est né- cessaire. Il0 Favus très circonscrit; deux ou trois godets seulement au cuir chevelu; favus primitif du corps. — Ici la durée du traitement de la teigne se réduit à quelques minutes. — TEIGNE TONSLRANTE. 1^1 11 suffit de détacher les godets et d'arracher quelques che- veux-, on peut ensuite renvoyer les malades comme parfaite- ment guéris. — Plusieurs observations recueillies par M. Deffîs au traitement externe de l'hôpital, sont une preuve irrécu- sable de la possibilité de ces guérisons presque instantanées. Pendant la convalescence de la teigne faveuse, il ne faut pas négliger les soins de propreté. — H y a souvent une hypersécrétion d'épiderme ou de matière sébacée qui néces- site l'usage de lotions savonneuses. — C'est la crasse mem- braneuse, dont parle Mabon, qui succède si souvent à l'emploi des poudres et des pommades secrètes. Peut-être serait-il prudent, pour consolider la guérison, de se frotter la tête tous les quatre ou cinq jours avec la pommade fie turbith. ARTICLE DEUXIÈME. TEIGNE TONSURANTE. Historique. — Je suivrai l'ordre chronologique dans l'étude que nous allons faire, et je réclamerai d'avance toute votre attention, car les faits sont plus nombreux et plus multi- pliés que dans la teigne faveuse, et ce n'est pas sans peine qu'on parvient à les débrouiller. Si, au temps de lîiett et d'Alibert, le favus constituait une espèce pathologique distincte, dont l'histoire clinique était à peu près achevée, onn'enpeut certes pasdire autantde la tei- gne tonsuranle; car, aujourd'hui même, cette maladie n'existe guère que pour nous comme unité pathologique. Les derma- tologisles la considèrent comme un être imaginaire, n'ayant d'existence que dans notre esprit, et ne voient pas les liens étroits qui unissent les diverses affections qu'elle comprend. Aussi, combien d'erreurs sont commises tous les jours à ce sujet, erreurs souvent préjudiciables aux malades qu'on croit ill'2 DES TEIGNES. atteints de syphilis, de dartre, de pellagre... Trop heureux sont ceux pour lesquels on se contente de faire le diagnostic de l'affection : herpès, pityriasis, lichen circonscrit..., puis- qu'ils échappent à un traitement quelquefois nuisible et dont le moindre inconvénient est d'être complètement inutile. Une des formes de la maladie, la plus essentielle incontes- tablement (elle répond, nous le verrons, à la période d'état du végétal parasite), était depuis longtemps connue; c'était une porrigine tonsurante pour Alibert, un herpès tonsurant pour M. Cazenave ; et, dans cette affection, on avait parfaite- ment observé les squames pityriasiques, la rupture des poils, l'érection des follicules pileux... Mais, sous le nom de teigne tonsurante que j'ai adopté et proposé ensuite, je comprends non-seulement l'herpès tonsurant des willanistes, mais aussi les diverses éruptions qui le précèdent, l'accompagnent ou le suivent, et qui se rattachent essentiellement à la présence sur les poils d'un végétai parasite, le trichophyton tonsurant. C'est à Manon jeune que revient l'honneur d'avoir, le pre- mier, fait connaître cette affection sous le nom de teigne tondante, la rapprochant ainsi du favus 5 d'en avoir assez exactement tracé les caractères cliniques, montré la nature contagieuse... {Recherches sur le siège et la nature des teignes, 1829). Il fut assez heureux pour l'observer en diffé- rentes parties du corps, sous l'ongle même, où il est frappé de son analogie avec le favus de cette région ; toutefois, il fait remarquer avec juste raison que, dans la teigne tondante de l'ongle, la matière est blanche, tandis qu'elle est jaunâtre dans le favus. Mahon jeune avait donc étudié en bon obser- vateur l'affection qu'il appelait le premier teigne tondante, et l'on ne voit pas sur quoi sont fondés les reproches qui lui sont adressés par Alibert et plus tard par M. Cazenave. Ne croyez pas cependant que le livre de Mahon ne renferme TEIGNE TONStRAME. 143 aucune erreur. Il considère la teigne tondante comme une maladie constitutionnelle, héréditaire, et assurément nous sommes loin de partager cette opinion. Il dit aussi que cette affection est rare, et j'avoue que j'ai de la peine à croire qu'elle fût, en effet, en 1829, moins commune qu'à l'époque actuelle. — J'étais, en 1834, interne à l'hôpital Saint-Louis, et j'ai souvenir d'avoir vu de nombreux malades affectés de sycosis, d'herpès circiné, dans les salles de Biett et d'Alibert. Mais ces malades étaient considérés par ceux-ci comme atteints de dartre, par ceux-là comme infectés de syphilis ; d'autres enfin, non moins habiles ni moins nombreux, ne voyaient rien au delà du cercle herpétique ou du tubercule de sycosis. Dans tous les cas, les sujets dont je vous parle n'étaient point adressés à Mahon chargé, comme aujourd'hui les héritiers de son nom, du traitement de la teigne à l'hôpital Saint-Louis. En outre, la teigne tondante affecte aussi sou- vent les enfants riches que les enfants pauvres, et les premiers vont avec plus de peine consulter les Mahon. Voilà sans doute pourquoi Mahon jeune disait la teigne rare en 1829. J'ajoute qu'il devait être porté à regarder comme peu commune une affection qu'il avait observée le premier. Si l'on en croit M. Cazenave, les Grecs et les Latins auraient connu l'herpès tonsurant, et l'auraient désigné, les Grecs sous le nom d'ophiasis (o^aatç), et les Latins sous celui d'area. Mais je ne partage pas cette manière de voir, et d'accord avec Bateman, je pense que les noms d'ophiasis et d'area s'appli- quaient plutôt à la teigne pelade. Quant à l'affection que Sennert appelle tinea capilloram, j'admettrais volontiers qu'elle n'est autre chose que l'herpès tonsurant, car, dans la description que cet auteur en donne, il est question de cheveux brisés. Le nom de ringworm employé par les Anglais depuis Willan, s'applique évidemment à deux affections différentes, à celle que nous étudions en ce moment, et plus souvent peut-être au porrigo scutulata; c'est le ringworm furfuracé, vésiculeux, contagieux de Willan, et pustuleux de Samuel Plumbe. En 1835, Alibert, dans la deuxième édition de son ouvrage, ajoute la porrigine tonsurante dont il n'était point question dans l'édition précédente; il emprunte la description de la maladie à Mahon jeune, et reproche à ce dernier d'avoir confondu la teigne tondante avec le ])orrigo decalvans de Bateman ; et, chose étrange, c'est après avoir fait à Mahon cet injuste reproche, que ce trop célèbre dermatologiste, méconnaissant lui-même le porrigo decalvans de Bateman, en fait une variété de teigne faveuse sous le nom ridicule de favus sine favis. En 4 8/iO, M. Cazenave appelé dans un collège de Paris a l'occasion d'y observer une maladie très obscure, dit-il, et qu'il étudie avec grand soin ; maladie entrevue seulement par Biett, vaguement décrite par les Anglais sous le nom de ringworm, et par Mahon jeune sous celui de teigne tondante. — J'avoue que je ne puis admettre la qualification de vague appliquée par mon savant collègue à la description de Mahon. Mais M. Cazenave a le bonheur d'apercevoir quelques vési- cules, et aussitôt il s'arrête, comme si toute recherche ulté- rieure était devenue inutile; la maladie peut prendre place dans les cadres de Willan, elle appartient à l'ordre des vési- cules, c'est un herpès (herpès tonsurant au cuir chevelu, herpès circiné sur toute autre partie du corps). Et au fait, qu'est-il besoin d'en savoir davantage, quand on se trouve si fort a l'aise dans une étroite classification? C'est en 184/i que M. Gruby lut à l'Académie des sciences un travail intéressant sur un champignon découvert par lui TEIGNE TONSL'RaN'TE. 1^5 dans le porrigo decalvans, qui , comme le fait remarquer M. Cazenave, n'est aulre chose que l'herpès tonsurant. Mais déjà, deux ans auparavant, M. Gruhy avait découvert et décrit sous le nom de microsporon mentagrophytes un crypto- game extrait delà phyto-mentagre , cryptogame dont vous savez que je n'admets pas l'existence, d'accord en cela avec M. Gh, Robin. A partir de cette époque, des progrès rapides se font, en clinique par les médecins spéciaux, en étiologie par les natu- ralistes. En 1846, le Suédois Malmstem donne le nom de tricho- phyton tonsurans au champignon trouvé par M. Gruby dans l'herpès tonsurant.... En 1850, paraît le traité de M. Cazenave sur les maladies du cuir chevelu, lesquelles sont distinguées en contagieuses et non contagieuses. A la première catégorie appartiennent l'herpès tonsurant et le favus. — M. Cazenave ne pouvait se dispenser de parler des théories végétales et des découvertes annoncées par Schœnlein et par le docteur Gruby ; mais il rejette ces théories comme de pures hypothèses et nie l'exis- tence du champignon. Toutefois, si vous lisez le Traité des maladies du cuir chevelu, vous demeurerez convaincus que les doctrines nouvelles n'étaient pas sans avoir produit quelque impression sur l'esprit de notre habile collègue, car il entasse, pour les combattre, des arguments dont la valeur est loin d'égaler le nombre. En 1852, MM. Malherbe et Letenneur font connaître bon nombre de faits nouveaux et très bien observés, qui prou- vent la liaison intime ou, pour mieux dire, l'identité de na- ture de l'herpès circiné et de l'herpès tonsurant. La conta- gion d'une partie du corps à une autre, la contagion de l'homme à l'homme, la contagion de l'homme aux animaux ou réci- 10 1A6 DES TEIGNES. proquement, sont désormais des faits acquis à la science. Cependant ces habiles observateurs n'admettent point la na- ture végétale de ces affections. En 1853, je publie mon premier travail sur les teignes [Recherches sur la nature et le traitement des teignes); mais, tout en reconnaissant que c'est un cryptogame qui produit la teigne tonsurante, je ne rattache à cette dernière aucune autre affection; la teigne tonsurante répondait exactement pour moi, à cette époque, à l'herpès tonsurant de M. Caze- nave, ou à la teigne tondante de Mahon. Cependant je signale quelques faits nouveaux; j'appelle l'attention sur ces flocons blancs qui entourent les poils et auxquels nous attachons au- jourd'hui tant d'importance dans le diagnostic de la teigne tonsurante; je montre que l'affection ne débute pas toujours par des vésicules; je cite quelques observations intéressantes, une entre autres, dans laquelle on voit la maladie communi- quée des animaux à l'homme. Mais je n'admettais encore aucune relation entre l'herpès circiné et l'herpès tonsurant, erreur capitale dont je suis revenu depuis longtemps. Quelques mois après la publication de ma première bro- chure, et dans la même année, M. Robin étudie le même sujet et confirme le résultat de mes recherches. En 1854, paraît ma deuxième brochure (Considérations sur la mentagre et les teignes de la face), dans laquelle, pour la première fois, il est question de l'existence du tricho- phyton sur les cercles herpétiques. Alors aussi, je signale la liaison qui existe entre l'herpès circiné, le pityriasis et le sycosis, que je considère comme trois périodes de la teigne tonsurante. Cependant je faisais encore des réserves, et je croyais, tant j'étais imbu des vieilles doctrines, que l'herpès circiné pouvait être indépendant du parasite. J'admettais donc deux espèces différentes d'herpès circiné, et ce n'est TEIGNE TONSURANTE. 1/|7 qu'en 1855 [Leçons de séméiotique cutanée....) que je rat- tachai cette affection, dans tous les cas, à la présence du trichophyton sur les poils, la considérant toujours comme la première période de la teigne tonsurante. Je disais aussi, dans ce travail sur la mentagre, que le trichophyton pouvait se rencontrer sur toutes les parties du corps. C'est donc bien à tort qu'on veut aujourd'hui rattacher la découverte d'un végétal parasite dans l'herpès circiné au nom de M. de Baerensprung, dont le travail ne parut dans la Gazette hebdomadaire qu'en 1856, deux ans, par con- séquent, après mes Considérations sur la mentagre et les teignes de la face. En 185A, j'écris qu'on trouve dans l'herpès circiné le même végétal parasite que dans la teigne tonsurante, c'est-à-dire, le trichophyton tonsurant. — En 1856, M. de Baerensprung dit vaguement qu'il y a un champignon dans l'herpès cir- ciné, sans préciser, comme je l'avais fait moi-même, quel est ce champignon. — Voilà des faits et des dates précises qui me dispensent de tous commentaires. En 1856, M. Deffis inocule le trichophyton, comme il avait déjà inoculé lefavus, et ces nouveaux essais sont couronnés d'un plein succès. La même année 1856 est encore marquée par un mémoire de M. Chausit sur le sycosis {Gazette hebdomadaire), mé- moire dans lequel nous trouvons les choses les plus éton- nantes. M. Chausit nous reproche de ne pas rendre justice à M. Ca- zenave, qui a, dit-il. singulièrement éclairé la nature de la maladie, en établissant, par ses travaux, qu'elle consistait dans une inflammation du conduit pilifère. — Mais d'abord, pourquoi faire tant d'honneur à M. Cazeuavc d'une décou- verte qui ne lui appartient pas? Comme s'il n'eût pas rendu iliS DES TEIGNES. de service plus signalé à la dermatologie!... N'avait-on pas dit longtemps avant lui, Alibert entre autres, que le sycosis consiste en une inflammation du follicule pileux? Et d'ail- leurs, quelle importance pouvais-je attacher à une pareille découverte, qu'elle dût ou non être rapportée à M. Cazenave? En quoi éclairait-elle la nature de la maladie? — Apparem- ment on confond ici la nature de la maladie avec le mode pathogénique, deux choses pourtant hien distinctes! Pour me reprocher de ne pas rendre justice à M. Cazenave, il faut que M. Chausit ne comprenne pas l'immense distance qui nous sépare sur cette question de nature du sycosis. Pour lui, c'est la rasure, action mécanique, qui produit la maladie ; — pour nous, le trichophylon en est l'unique cause détermi- nante;— d'où il résulte qu'aux yeux de MM. Cazenave et Chausit, le sycosis est une affection chirurgicale, tandis que nous le considérons comme une affection parasitaire. Mais voici un fait plus important que renferme ce mé- moire : c'est une modification remarquable apportée dans la symplomatologie du sycosis. Il s'agit de disques érythéma- teux que M. Chausit croit avoir, le premier, signalés à l'at- tention des observateurs. Singulière prétention, en vérité ! Tout d'abord, nous avons reconnu un air de parenté non équivoque entre les disques érythémateux de M. Chausit et notre herpès marginatiim. A quoi M. Chausitrépond qu'entre les deux affections la différence est grande, puisque, dans un cas, la rougeur s'étend à toute la surface des cercles et que, dans l'autre, au centre du cercle, la peau n'offre jamais d'altération. Mais, n'en déplaise à M. Chausit, la distinction qu'il cherche a établir est radicalement fausse, et je n'en veux pour juge que M. Cazenave lui-môme, qui décrit, au chapitre Herpès de son ouvrage, les disques pleins et les cercles her- pétiques, faisant remarquer, avec juste raison, que les cer. TEIGNE TONSURANTE. 149 cles d'un petit diamètre sont rouges dans toute leur étendue, tandis que, dans les autres, la rougeur est limitée à la cir- conférence. D'ailleurs, ne voit-on pas souvent réunis, sur la figure de malades atteints de teigne tonsurante, des dis- ques érythémateux et de l'herpès circiné? — Il serait, j'en conviens, très commode de pouvoir ainsi, en inventant quel- ques nouveaux mots, attacher son nom aux découvertes des autres; mais de tels larcins ne sont pas permis. Nous avions distingué, dans la marche de la teigne tonsurante, trois pé- riodes caractérisées par : 1° Y herpès circiné; 2° le pityriasis alba; 3° le sycosis; on a supprimé le moyen terme de la pro- gression, on a établi le rapprochement entre le troisième et le premier (dont le nom a été changé); et l'on a cru cacher de la sorte (au moins aux yeux du public ignorant) le vol manifeste que l'on commettait à nos dépens. Pour terminer l'historique de la teigne tonsurante, je dois faire mention de la thèse inaugurale de M. Cramoisy, sou- tenue récemment devant la Faculté de Paris ; c'est la pre- mière monographie qui ait paru sur ce sujet. L'historique que nous venons de tracer vous montre comment, dans l'étude des sciences, on arrive à la découverte de la vérité. C'est une montagne escarpée qu'il nous faut gravir à pas lents, chaque jour nous montrant, à la faveur d'un horizon nouveau, les erreurs de la veille, jusqu'au mo- ment où, arrivés au faîte, la lumière brille à nos yeux de tout son éclat. Dans une première brochure, j'admets l'existence du tri- chophyton dans la teigne tonsurante (herpès tonsurant des auteurs) ; mais je laisse éloignés l'herpès circiné et la teigne tonsurante, ne voyant entre ces affections aucun lien de parenté. Dans la deuxième, je reconnais deux espèces d'herpès 150 DES TEIGNES. circiné : l'un de nature contagieuse, dans lequel on trouve le trichophyton, et l'autre indépendant de tout parasite. Enfin, dans la dernière publication, j'affirme, avec la con- viction la plus profonde, qu'il n'y a point d'herpès circiné sans végétal parasite. Je me résume et je termine par la définition de la teigne tonsurante : — C'est une teigne (voy. la définition du mot) caractérisée par une manifestation champignonneuse spé- ciale, blanche, lamelleuse ou floconneuse, qui a son siège sur l' épidémie ou sur des poils cassés, et qui peut être accom- pagnée d'autres éruptions symptomaiiques nombreuses, vé- siculeuses, pustuleuses, tuberculeuses — selon son siège et l'époque de son existence à laquelle on l'étudié. Dans la description de la teigne tonsurante, nous suivrons l'ordre auquel nous avons toujours été fidèle depuis le com- mencement de ces leçons. Nosographie. — La marche de la teigne tonsurante, comme celle de la teigne faveuse, doit être partagée en trois périodes : A la première appartiennent: le prurit avant-coureur, les éruptions primitives, fugaces, et l'altération primitive des poils. A la deuxième, le prurit souvent continue, et le champi- gnon paraît au dehors; on observe encore des éruptions, mais elles sont différentes des éruptions primitives, et dépen- dent de l'inflammation des conduits pilifères-, l'altération des poils est plus avancée. A la troisième période, le champignon souvent dispa- raît à la surface de la peau; il y a une altération plus pro- fonde des bulbes pileux et quelquefois aussi une calvitie défi- nitive. TEIGNE TONSURANTE. 151 Devons-nous maintenant revenir sur chacun de ces sym- ptômes et les étudier d'abord dans la teigne tonsurante en général, et puis dans les variétés de cette affection? — C'est Tordre que nous avons suivi dans la description de la teigne faveuse, et sans doute vous n'avez pas oublié les différences tranchées que nous avons observées dans le favus urcéolaire, le favus scutiforme et le favus squarreux; quant au siège, il n'apportait que des changements de peu d'impor- tance dans l'aspect et la marche de l'affection. En est-il de même dans la teigne tonsurante? — Les trois variétés que nous avons admises (cifcinafa, punctata, gy- rata), impriment-elles aux symptômes des modifications aussi prononcées ? — Non ; et ce que nous venons de dire des variétés de siège de la teigne faveuse peut parfaitement s'ap- pliquer aux variétés de forme de la teigne tonsurante : que l'éruption parasitaire affecte une disposition annulaire, étoilée ou rayonnée, l'évolution des symptômes est à peu près la même. En revanche, le siège a ici une tout autre importance, et les phénomènes varient singulièrement suivant que l'affec- tion occupe le cuir chevelu, la face, le tronc — Cela est si vrai, que l'herpès lonsurant, si rarement méconnu sur telle partie du corps, l'est presque inévitablement sur telle autre. Nous pouvons donc rapprocher, à cause de l'importance qu'elles méritent, les variétés de siège dans la teigne tonsu- rante des variétés de forme dans la teigne faveuse, et faire pour les premières ce que, dans une précédente leçon, nous avons fait pour les secondes. Aussi étudierons-nous d'abord la teigne tonsurante d'une manière générale, examinant dans tous leurs détails les divers symptômes déjà énumérés ; puis, arrivant à la description des variétés, nous ferons connaître les modifications qu'apporte le siège de la maladie à tel ou tel phénomène. 452 DES TEIGNES. Première période. — Le prurit est un des premiers sym- ptômes que l'on observe, et en même temps un des plus con- stants. Tantôt il est simple, franc; tantôt, au contraire, il s'accompagne de battements, de picotements, d'un sentiment de brûlure. Il offre de fréquentesvariations dans son intensité, variations dont il nous est ordinairement impossible de pé- nétrer la cause. Signalons cependant la nuit, le régime ali- mentaire, le travail de la digestion, dont l'influence est si connue des malades; les démangeaisons peuvent alors devenir atroces et constituer un cruel supplice pour les sujets cbez lesquels se développe le trichopbyton.Ils se grattent avec fu- reur, et presque toujours, en se grattant ainsi, ils transpor- tent la maladie sur une autre partie du corps. Quand le mal occupe la face, ce qui souvent arrive, on ne se gratte pas ordinairement avec les ongles, comme dans le cas où il siège au cuir chevelu ; on se sert plus volontiers du dos de la main, du poignet, avec lesquels en frotte plus ou moins vivement les points où les démangeaisons se font sentir et où existe le trichophyton. — Rien n'est donc plus aisé que de comprendre pourquoi les malades affectés de teigne tonsurante à la face portent si souvent sur le dos des mains, à la face externe des avant-bras, près du poignet, des cercles herpétiques, des disques lichénoïdes ou éry thémateux : quelques spores cryptogamiques auront été déposées sur ces parties, après un contact immédiat, et s'y seront dévelop- pées. Et si les affections que nous venons de citer sont obser- vées sur le membre droit plus souvent que sur le membre gauche, c'est uniquement parce que l'on se sert moins sou- vent du second que du premier. Le fait que nous signalons ici aune très grande importance au point de vue pratique, et c'est pourquoi nous avons cru devoir nous y arrêter quelques instants-, tant de fois il nous est arrivé, dans des cas dédia- TEIGNE TONSURANTË. 153 gnostic difficiles-, d'être immédiatement éclairés par la pré- sence au dos de la main de cercles herpétiques ou, plus sou- vent, de plaques lichénoïdes circonscrites !! ! En même temps que le prurit, ou peu de temps après, les éruptions symptomatiques primitives se manifestent, et elles ne consistent pas seulement, comme généralement on le croit, en affections érythémateuses. Toutefois, je ne veux point nier la fréquen ce de l'érythème qui existe souvent et peut revêtir différents aspects. Ce sont des points rouges, légèrement saillants, dispersés sur les surfaces où germe le trichophy- lon, et que les willanistes pourraient ranger dans l'ordre des papules plutôt que dans celui des exanthèmes. Plus souvent ce ne sont pas des points, mais de véritables taches circulaires, dont les dimensions peuvent varier d'une pièce de vingt centimes à une pièce de deux francs. — Ces plaques discoïdes peuvent ne pas s'élever sensiblement au-dessus du niveau de la peau voisine, et toute l'altération consiste en une rougeur plus ou moins foncée et plus ou moins étendue. - — D'autres fois, au contraire, l'injection du derme est accom- pagnée d'une légère induration des tissus, et les disques for- ment une saillie parfois très prononcée. — Tantôt cette saillie s'étend à toute la surface éry thémateuse, et tantôt elle n'existe qu'à la circonférence où elle forme un bourrelet également sensible à l'œil etau doigt. — Enfin, le bourrelet rouge, cir- conférentiel peut exister seul, c'est-à-dire qu'au centre du cercle on ne trouve ni injection, ni aucune autre altération de la peau. Ce sont autant de variétés d'érythème bien connues des auteurs, et dont quelques-unes ont été parfaitement dé- crites par M. Rayer sous les noms tferythema circinatum et & erythema marginatum. Les affections vésiculeuses ne sont pas moins communes que les affections érythémateuses dans la période de germi- 154 DES TEIGNES. nation du trichophyton ; quelquefois elles passent inaperçues, dans le cas, par exemple, où se développant rapidement sur des surfaces déjà rouges, les vésicules n'ont qu'une durée éphémère. — Assez souvent ces éruptions vésiculeuses se disposent en petits groupes de nombre variable, qui, tantôt demeurent isolés pendant toute la durée de l'affection, et tantôt au contraire se réunissent, occupant de larges sur- faces. — La réunion des plaques éruptives a lieu, non, comme on pourrait le croire, par l'intermédiaire de groupes nouveaux, mais presque toujours par l'extension de ceux qui existent déjà ; et cette extension s'opère avec une régularité remarquable du centre à la circonférence, de sorte que la forme circulaire ne se perd jamais. — Les poussées vésicu- leuses successives qui se font à la circonférence permettent à l'affection d'acquérir des dimensions parfois considérables, lors même qu'il n'y a pour point de départ qu'un seul groupe très circonscrit. — C'est là l'herpès tonsurant des auteurs. Dans l'herpès circiné, les vésicules affectent une autre dis- position. • — Elles se développent en très grand nombre sur une bande rouge de forme annulaire, et elles sont extrême- ment petites; — mais la surface rouge qu'elles occupent n'est pas toujours un simple anneau ; c'est, dans quelques cas, un cercle plein, un disque à la circonférence duquel elles se réu- nissent pour former un bourrelet analogue à celui de Yery- thema marginatum. Parfois, autour d'un cercle herpétique, on voit se déve- lopper un autre cercle herpétique, et même, plus tard, un troisième autour de ce dernier ; ces divers cercles concentri- ques peuvent offrir des nuances variées et constituer l'affec- tion décrite, dans les divers ouvrages de dermatologie, sous le nom & herpès iris. Il peut arriver aussi que l'herpès tonsurant et l'herpès TEIGNE TONSURANTE. 155 circiné se combinent; voici comment: un groupe eczémateux existe, et bientôt on le voit enveloppé par un cercle herpé- tique, en dehors duquel de nouveaux groupes vésiculeux ne tardent pas à se manifester; et ceux-ci à leur tour peuvent être cernés par un deuxième cercle Toutes ces variétés d'herpès circiné ont été confondues avec les éruptions érythémateuses dont nous venons de parler.— La forme circulaire appartient aux unes et aux au- tres, mais tandis que d'un côté on trouve des vésicules, il n'y a, de l'autre, qu'une simple rougeur ; distinction qui ne peut avoir un grand intérêt que pour de purs willa- nistes. Des éruptions pustuleuses signalent, dans certains cas, le début de la maladie; et les détails dans lesquels nous venons d'entrer sur les affections vésiculeuses peuvent leur être ap- pliqués. Tantôt on voit, disséminés en différents points de la barbe, des boutons acuminés, purulents au sommet, et habi- tuellement traversés par des poils ; tantôt ce sont des groupes de pustules de forme plus ou moins circulaire, telles qu'on les observe si souvent à la partie médiane de la lèvre supé- rieure, dans la gouttière sous-nasale ; tantôt, enfin, ce sont de véritables cercles à la circonférsnce desquels paraît une éruption pustuleuse miliaire à laquelle on pourrait donner le nom d'herpès circiné pustuleux. Les affections papuleuses, sans être très rares, sont cepen- dant moins fréquentes que les éruptions précédentes, et on les observe, non au cuir chevelu, mais presque toujours sur le tronc ou les membres (très souvent au dos de la main et du poignet), où elles forment des plaques de lichen circon- scrit, qu'il n'est pas rare de rencontrer aussi sur la face ou à la partie supérieure du cou, au milieu même des cercles herpétiques. V 156 DES TEIGNES. L'éruption primitive qui décèle la présence du cham- pignon dans la peau peut également appartenir à l'ordre des squames, lesquelles surviennent tantôt d'emblée (dartres furfuracées), et tantôt succèdent à des vésicules qui dispa- raissent rapidement pour ne plus se reproduire (eczéma squameux, herpès squameux). En résumé, les affections qui précèdent le développement du trichophyton peuvent se rencontrer dans les divers ordres de la classification des willanistes. Le parasite qui germe dans le tissu cutané y joue, comme l'achorion, le rôle d'un corps étranger, d'une épine, et provoque des inflammations éruptives qui varient suivant la constitution du sujet, sui- vant le siège du cryptogame, sans parler des autres circon- stances que nous ne pouvons pas apprécier. Cependant toutes les formes d'éruptions sont loin de se montrer avec le même degré de fréquence; presque toujours c'est de i'éry- thème , de l'herpès vésiculeux ou pustuleux qu'on ob- serve. Je vous ai déjà dit que les disciples de Willan eux-mêmes confondaient souvent ces diverses affections symptomatiques les unes avec les autres, et donnaient le nom d'herpès circiné à l'érythème de forme annulaire ou réciproquement ; souvent aussi l'herpès circiné pustuleux est pris pour de l'herpès vési- culeux. Quant à nous, nous croirions employer notre temps en pure perte, si nous vous entretenions plus longtemps d'aussi fu- tiles distinctions, puisque pustules, vésicules, érythème, etc., peuvent également se produire par le seul fait de la présence du parasite végétal, etqu'il n'estpas rare, d'ailleurs, de trouver ces affections réunies sur un même malade. La seule chose importante, c'est de ne pas oublier la disposition spéciale que ces éruptions affectent, qu'elles soient vésiculeuses ou pustu- TEIGNE TOJSSURANTE. J 57 leuses, limitées à d'étroites surfaces, ou, au contraire, très étendues. Pourquoi le trichopbylon a-t-il une prédilection aussi mar- quée pour la forme circulaire qui, d'ailleurs, il faut le savoir, n'appartient pas à lui seul? Je ne saurais vous le dire; mais le défaut d'explication ne peut rien contre le fait; et le rap- port qui existe entre le champignon et la disposition en cer- cle est tellement intime et tellement constant, qu'à la simple vue d'une éruption de forme circulaire et surtout annulaire, nous pensons immédiatement au parasite. A propos du diagnostic, nous reviendrons sur la valeur de ce caractère. Disons seulement ici que la disposition dont nousparlonsn'estpas toujours rigoureusement et exactement circulaire. Les auréoles inflammatoires peuvent représenter des lignes elliptiques , des arcs de cercle, tantôt isolés et tantôt réunis par leurs extrémités, et embrassant parfois dans leur courbure la plus grande partie de la face, du cou et même du thorax. L'altération primitive des poils est aussi un des symptômes qui appartiennent à la première période de la teigne tonsu- rante. En quoi consiste cette altération? Le premier phénomène qui frappe les yeux est ordinaire- ment un changement de couleur-, les cheveux, qui étaient blonds ou noirs, deviennent rougeâtres, fauves, gris cendré... et, en même temps, ils paraissent, comme à la même période de la teigne faveuse, plus ou moins ternes et secs. Leur con- sistance n'est plus la même ; ils sont friables et se brisent spontanément à quelques lignes de la surface tégumentaire. Par suite de cette altération, ils ne peuvent être qu'impar- faitement extraits avec la pince; les [dus malades se cassent toujours malgré les soins et l'habileté de l'épileur. IN'oubliez jamais cette difficulté de Tépilntion dans Ta teigne 158 DES TEIGNES. tonsurante, parce qu'elle nous donne l'explication de faits très importants sur lesquels j'attirerai de nouveau votre at- tention, quand nous parlerons du pronostic et du traitement de cette affection. Tous les cheveux, sur les parties où germe le tricophyton, ne sont pas altérés au même degré ; ce sont les plus malades qui se cassent les premiers; et, à une époque rapprochée du début de la maladie, ces poils brisés sont rares, et il faut une certaine habitude pour les apercevoir au milieu d'une épaisse chevelure et déjà entourés de débris épidermi- ques abondants. Mais à mesure que la maladie avance en âge, ils deviennent plus nombreux; la tonsure se dessine, et un moment vient où l'on ne voit plus sur les surfaces affectées qu'un ou deux bouquets de poils flétris, décolorés, ayant encore cependant conservé leur longueur normale et avoi- sinant la circonférence plutôt que le centre. Ces derniers ne tardent pas à subir le sort desautrs, et la tonsure pro- duite par la maladie simule alors, à s'y méprendre, une tonsure artificielle, d'autant plus qu'elle offre, comme cette dernière, une forme circulaire rappelant la disposition favo- rite des éruptions primitives. Ainsi, la brisure des poils et la tonsure quienest la consé- quence sont des symptômes que je range dans la première période de la teigne tonsurante ; mais, immédiatement après leur apparition, la deuxième période commence; de sorte qu'on pourrait, ajuste titre, les considérer comme des phéno- mènes de transition entre la première période et la deuxième. Deuxième période. —Elle est essentiellement caractérisée par l'apparition du parasite à la surface de la peau. Les dé- mangeaisons persistent, quelquefois aussi vives que dans la première période, presque toujours plus franches à cause de la disparition des éruptions symptomaliques; celles-ci, en TEIGNE TONSURANTE. 159 effet, s'accompagnent clans la plupart des cas, de chaleur, de tension..., toutes sensationsqui, s'unissantau prurit, en mo- difient le véritable caractère. Toutefois, les éruptions symp- tomatiques primitives n'ont pas toujours disparu quand la deuxième période commence, et les phénomènes .qui appar- tiennent aux deux périodes se trouvent réunis sur une même surface malade. Nous avons vu l'herpès squameux ou tonsu- rant s'étendre régulièrement du centre à la circonférence par l'évolution successive des vésicules ; il n'est donc pas éton- nant qu'à la circonférence, sur les parties -récemment enva- hies, on observe des altérations moins avancées qu'au centre où la maladie existe depuis longtemps. Ici, ce sont des sym- ptômes qui appartiennent à la deuxième période; là, ce sont encore ceux que nous avons rattachés à la première. On com- prend aisément qu'en pareil cas les caractères primitifs des démangeaisons ne changent pas. Le champignon, ai-je dit, paraît immédiatement après la rupture des poils et pendant la formation des tonsures. Ces deux phénomènes se suivent de si près, qu'il m'a été longtemps impossible de savoir lequel des deux précédait l'autre ; et ce n'est qu'après des observations multipliées que j'ai cru pou- voir établir l'ordre de succession que je viens de vous indi- quer. Aussi, quand sur une plaque de teigne tonsurante vous verrez paraître le champignon (prenez garde de le confondre avec des squames épidermiques), ne craignez pas d'affirmer qu'il y a des poils brisés sur la même surface ; examinez avec soin, et, s'il est nécessaire, aidez-vous de la loupe; cherchez avec confiance, car je vous donne l'assurance que vous n'aurez pas cherché en vain. Le parasite se montre sur les poils brisés et sur l'épiderme en même temps. Sur les poils, il prend la forme d'une gaine amiantacée, 160 Di:5 TtsïGNËg. d'un blanc mat, complète ou incomplète. Si elle est incom- plète, on voit, au centre de la petite masse blanche constituée par le champignon, un point noir qui répond à l'extrémité libre du poil cassé. Mais, plus souvent, la gaîne est complète, et les poils, entièrement cachés à la vue, ne se peuvent re- connaître qu'à la saillie de la matière cryptogamique. Ils simulent, quand ils sont nombreux, une surface couverte de gelée blanche. Le champignon qui se développe sur l'épidémie, dans les intervalles des poils, forme, par la réunion de ses éléments, une substance floconneuse ou lamelleuse, dont la couleur blanche est un des caractères les plus saillant,;. En réalité, cette substance ne diffère pas de celle qui constitue les gaines; seulement la disposition des éléments est un peu différente, et en rapport avec le siège qu'occupe le parasite. Il es4. difficile de commettre quelque méprise sur la nature de ces gaines blanches qui entourent plus ou moins complè- tement les poils cassés dans la teigne tonsuranle; et je ne saurais dire avec quoi on peut les confondre. Leur exis- tence bien constatée a une très grande valeur quand il s'agit de poser un diagnostic; c'est un signe qui suffit à lui seul, un signe vraiment pathognomonique de cette espèce de teigne. Toute la difficulté consiste à le trouver là où il existe, et le seul moyen de surmonter la difficulté est d'observer beau- coup de malades affectés de teigne tonsurante; car, la pre- mière fois, les gaines champignonneuses les mieux ca- ractérisées passent inaperçues aux yeux de ceux qui les- cherchent. Les flocons blancs formés par le môme végétal parasite (tricJwphyton), pourraient être plus aisément confondus avec les squames épidermiques au milieu desquelles ils sont répan- dus; car une hypersécrétion d'épiderme, ordinairement très TElGNi: TONSUï-.AMM. 161 abondante accompagne le champignon qui se manifeste au dehors, et constitue un des symptômes les plus constants et les plus remarquables parmi ceux qui appartiennent à la deuxième période de la teigne tonsurante. Cependant la dis- tinction entre l'élément parasitaire et l'élément cutané est tou- jours possible ; le champignon, nous l'avons déjà dit, est blanc, floconneux, sansformebien déterminée; l'épidémie, au con- traire, est jaunâtre ou grisâtre plutôt queblanc, et sa disposition est toujours manifestementécailleuse. Chez certains malades, les caractères propres aux deux éruptions sont parfaitement accusés , et l'on peutfaire sur eux une bonne étude comparative. Les surfaces couvertes de poils brisés, de champignons et de débris d'épiderme, ont des dimensions très variables. Quel- quefois il n'y a qu'une seule plaque; souvent il y en a plu- sieurs, qui tantôt demeurent isolées, et tantôt se réunissent, formant ainsi (principalement au cuir chevelu ) de larges sur- faces tonsurées, sur lesquelles on retrouve encore des ves- tiges de la forme circulaire. Quand les tonsures se forment, ou quand elles sont for- mées, il est bien rare de ne pas observer une modification dans la couleur tégumentaire; les surfaces malades deviennent habituellement plus foncées, et tranchent plus ou moins sur la peau saine qui les environne. Mais comme ces changements de couleur varient suivant la région qu'occupe la teigne ton- surante, nous en parlerons plus tard avec plus de détails en décrivant les variétés de siège de cette affection. En même temps la surface des tonsures paraît soulevée, saillante d'un ou deux millimètres au-dessus du niveau des parties voisines. Cet aspect est dû sans doute à l'hypersécrétion épidermique et à la turgescence des follicules pileux, qui, remplis de cham- pignons, donnent aux surfaces qu'ils occupent l'aspect d'une peau de chagrin, U 162 DES TEIGNES. Les poils sont plus altérés qu'à la première période ; ils sont brisés, recouverts de champignons, et il est très difficile de les arracher en totalité, la racine restant presque toujours dans le follicule qui la renferme. Troisième période. — Le champignon qui occupe le folli- cule pileux, après avoir détruit la capsule et le bouton, arrive à la surface de l'organe sécréteur du poil et l'enflamme. De nouvelles éruptions symptomatiques se manifestent donc à ce moment; mais, l'inflammation affectant des parties plus pro- fondément situées, ces éruptions ont une durée plus lon- gue et des caractères différents de ceux qui appartiennent aux éruptions primitives. Le parasite disparaît à la surface de la peau, et bientôt on ne voit plus en aucun point ni gaines, ni lamelles argentées. Les tonsures deviennent pus- tuleuses et se couvrent de croûtes jaunâtres ou brunâtres, au travers desquelles on voit souvent passer quelques poils flétris et brisés. Alors la maladie a changé d'aspect, à tel point qu'elle est presque toujours confondue (au cuir chevelu) avec une scro- fulide bénigne exsudative, ou avec le favus et particulière- ment avec le favus scutiforme. L'inflammation reste rarement limitée auxfollicules pileux : elle s'étend aux aréoles voisines du derme; aussi les pustules sont-elles ordinairement accompagnées ou suivies d'indura- tions profondes, de nodosités, de véritables tubercules cutanés ou sous-cutanés, qui, tantôt rares et isolés, tantôt nombreux et agglomérés sur d'étroites surfaces, donnent aux parties malades un aspect inégal, mamelonné, tout particulier. Il est rare de ne pas trouver aussi quelques furoncles au milieu des pustules et des tubercules. Les indurations tuberculeuses dis- paraissent presque toujours par résolution, surtout sous l'in- fluence d'un traitement convenable. Il en est autrement des pustules et des furoncles qui s'ouvrent à l'extérieur et son TEIGNE TONSUUANTE. 163 assez souvent le point de départ de petites végétations fon- gueuses qui font saillie à la surface des téguments, entrete- nues d'ailleurs par les poils malades qui les entourent. Que se passe-t-il donc dans les follicules pileux, quand ces phénomènes inflammatoires arrivent, et que deviennent les poils déjà si profondément altérés dans les périodes précé- dentes? — Une sécrétion purulente assez abondante a lieu dans le follicule dont les parois sont enflammées dans toute leur étendue. Le pus sécrété joue, à l'égard du champignon qu'il baigne, le rôle d'un agent parasiticide. Le cryptogame est donc détruit, au moins en très grande partie ; et il est, sinon impossible, au moins très difficile de trouver des spores sur les poils. J'insiste sur ce fait, parce qu'il est complètement ignoré de la plupart des médecins et des micrographes, et qu'il est le -point de départ du plus grand nombre des objections qu'on nous adresse. — Nous considérons, en effet, le sycosis comme la troisième période de la teigne tonsurante; et nous disons que cette teigne résulte toujours de la présence sur les poils d'un végétal parasite appelé trichophyton. Voici donc que, pour vérifier nos assertions, on va prendre, pour l'examiner au microscope, précisément tel poil flétri, jaunâtre, qui passe au centre d'une pustule, parce qu'on le croit plus malade que les poils environnants. Mais on a beau chercher, on ne trouve pas le champignon annoncé, et l'on se hâte d'en conclure qu'il n'a d'existence que dans notre imagination. — Or, ce cham- pignon, qui a existé autrefois, et qui peut-être existe encore, ne se trouve plus aujourd'hui sur le poil que vous examinez. Par sa présence, il a provoqué dans le follicule une sécrétion purulente dont il a été la victime. Ce n'est donc pas ce poil qu'il faut prendre si l'on veut découvrir au microscope les élé- ments caractéristiques du végétal parasite, mais un autre des 16/4 DES TEIGNES. environs qui ne sera point encore entouré par une pustule, et qui n'offrira que les altérations rattachées par nous à la deuxième période de la maladie. N'oubliez donc jamais ce fait important, capital dans l'his- toire de la teigne tonsurante: destruction plus ou moins corn- plète du parasite par le pus ; car s'il nous donne l'explica- tion de certaines erreurs trop répandues, il nous fait com- prendre aussi comment la guérison spontanée peut quelquefois arriver dans la teigne tonsurante. Malheureusement le pus ne se borne pas à détruire le pa- rasite, il sépare des parois du follicule le poil, qui peu à peu se détache et ne tarde pas à tomber. — A ce moment • — écoulez bien ceci — deux choses peuvent arriver: ou bien les parois du conduit pilifère enflammées se rapprochent et se réunissent, et le follicule est oblitéré ; toute repro- duction du poil est impossible; il y a donc guérison spon- tanée, mais en même temps calvitie définitive; — ou bien (c'est le cas le plus fréquent) la papille pileuse sécrète encore, malgré une altération profonde dans sa structure, les élé- ments nécessaires à la formation du poil; mais, par suite de cette altération, le poil nouvellement formé ne peut avoir ses caractères normaux, il est rouge et jaunâtre, très grêle, il n'a pas de capsule, et l'examen microscopique nous montre que ses éléments sont totalement confondus. Cependant ce poil vit encore, et par sa présence il contribue puissamment à entretenir l'inflammation suppurative dans le follicule d'où il naît. Alors tout espoir de guérison spontanée doit être aban- donné; le poil malade est un séquestre dont il faut débar- rasser le follicule. L'épilation est nécessaire , indispen- sable, n'y eût-il plus de champignon, et c'est dans ces circonstances qu'elle fait merveille. Aussi ai-je pu dire en TEIGNE TONStfRAME. 165 toute vérité que les vieilles menlagres étaient plus faciles à guérir que les récentes, et que, le plus souvent, une seule épilation suffisait pour débarrasser complètement les malades. C'est vraiment là le triomphe de notre méthode thérapeu- tique. Ainsi, en résumé, le trichophyton produit, quand il se dé- veloppe sur la peau de l'homme : d'abord des éruptions fugi- tives, érythémateuses, vésiculeuses ou pustuleuses; plus tard une hypersécrétion d'épiderme, et en dernier lieu une inflam- mation profonde des conduits pilifères. Chacun de ces trois principaux phénomènes correspond à chacune des périodes que nous avons admises dans la marche de la teigne tonsu- rante, et il n'est pas rare de les trouver réunis. Voilà la règle générale; signalons maintenant les exceptions. L'ordre des symptômes n'est pas toujours celui que nous venons d'indiquer ou, pour mieux dire, une ou deux périodes peuvent manquer, de sorte que l'inflammation sup- purative profonde peut être le premier phénomène observé. Mais ces cas sont beaucoup plus rares qu'on ne le pense ; les symptômes qui appartiennent aux premières périodes ont parfois une marche si rapide et une durée si courte, qu'ils sont inaperçus; et le malade ne fait remonter le début de l'affection dont il est atteint qu'à l'époque où des boutons rouges et durs à la base, purulents au sommet, ont paru en différents points du visage. L'intervalle de temps qui sépare les périodes est extrême- ment variable; et, à cet égard, le traitement suivi a une in- fluence des plus marquées. Qu'un malade affecté d'herpès circiné à la face recule devant l'épilation qui lui a été pro- posée comme moyen curatif, et se borne aux applications parasiticides, l'herpès durera très longtemps et pourra dispa- raître et reparaître plusieurs fois, occupant toujours les 166 DES TEIGNES. mêmes surfaces. — Que se passe~t-il donc là, et pourquoi la maladie n'arrive-t-elle pas plus tôt à la troisième période? — Le champignon qui produit l'éruption herpétique peut n'exister qu'entre les deux lames del'épiderme et sur les poils de duvet; or, par le seul usage des lotions ou des onctions parasiticides, on peut détruire le champignon situé à la sur- face tégumentaire, sans atteindre celui qui occupe la racine clés poils follets ; et voilà pourquoi l'éruption ne dispa- raît pas ou se montre de nouveau après avoir disparu. Mais le même traitement a pour effet de s'opposer, jusqu'à un cer- tain point, à l'extension du parasite sur les poils parfaits, et c'est ce qui nous explique pourquoi la maladie a tant de peine à passer à la période mentagreuse. Nous avons souvenir d'avoir donné des soins à un malade de la ville qui, par sa faute, et pour n'avoir pas voulu se laisser extraire les poils de la barbe, garda plus de dix-huit mois, à la première et à la deuxième période, une teigne tonsurante dont il était affecté. Ici, à l'hôpital, nous sommes rarement témoins de faits de ce genre, parce qu'on épile immédiatement les malades quand cette opération est indiquée. Le traitement n'est pas la seule cause qui rende variable la durée des diverses périodes de la teigne tonsurante. Il faut également tenir compte de certaines conditions générales et locales dont les unes (surtout les générales) souvent nous échappent, quoique leur influence ne puisse être révoquée en doute, et dont les autres nous sont mieux connues. Il y a des idiosyncrasies incontestables: chez tel malade, l'herpès cir- •ciné disparaît en quelques jours, et chez tel autre, il dure plusieurs mois sans que l'on puisse trouver dans la constitu- tion ni dans le développement du système pileux l'explica- tion de cette différence. Avec de pareilles variations dans les périodes, vous con- TEIGNE TONSURANTE. 167 cevez que la durée totale de la maladie ne puisse être rigou- reusement déterminée. On peut dire cependant qu'en général la teigne lonsurante est une maladie longue, qui persiste ha- bituellement plusieurs années quand elle arrive à la troisième période; déjà je vous ai parlé de ces vieilles mentagres de quinze, vingt ans, qui se présentent quelquefois au traite- ment externe. Mais lors même que le développement du sys- tème pileux sur les régions envahies ne permet pas à l'affec- tion de dépasser la période pityriasique, ou même la période herpétique, on ne peut pas toujours espérer une prompte dis- parition de la maladie. J'ai parlé tout à l'heure de cas dans lesquels on voit l'herpès circinése perpétuer pendant plusieurs mois ou plusieurs années; ces cas ne sont pas extrêmement rares, et c'est surtout chez les enfants et les femmes qu'on a l'occasion de les observer. Quelquefois même l'herpès circiné résiste à nos moyens de traitement avec une opiniâtreté qui certainement doit vous surprendre. Mais remarquez les diffi- cultés de l'épilation dans une région où il n'y a que des poils follets; la pince peut à peine les saisir, et presque toujours ils se brisent sous la traction : et cependant il faut lâcher de les extraire pour ne pas voir l'affection durer bien plus long- temps encore. S'il est difficile, pour ne pas dire impossible, de savoir à l'avance, et en dehors d'un traitement convenable, combien de temps environ durera une teigne tonsurante, n'y a-t-il pas au moins quelques circonstances (comme celles dont nous venons de parler à propos des périodes) qui font varier les chances de durée de la maladie, et qu'il est bon de con- naître? Oui assurément il y en a. Le champignon de la teigne tonsurante peut vivre sur les poils, sous l'ongle, dans l'épaisseur de l'epiderme, mais c'est principalement aux dépens des poils qu'il se nourrit. Aussi, 168 DES TEIGNES. toutes choses égales d'ailleurs, doit-on craindre une durée plus longue chez les sujets où le parasite trouve une abon- dante nourriture. Voici deux malades qui se présentent à nous en même temps, tous les deux affectés de teigne tonsurante de la face à la période herpétique. Ce sont, si vous voulez, et comme d'ailleurs cela arrive souvent, une femme et son mari : celui-ci porte une barbe bien fournie. Assignerons-nous à la maladie la même durée dans l'un et l'autre cas? Evidemment non ; car, chez la femme, l'herpès circiné devra disparaître au bout d'un certain temps, et, après sa disparition, la malade pourra se considérer comme radicalement guérie. — Pour l'homme, il en sera tout autrement : l'herpès sera ordinaire- ment suivi des phénomènes de la deuxième et plus tard de la troisième période ; or, arrivée à ce dernier degré, la maladie se prolonge indéfiniment, à moins qu'il n'y ait, chose rare, après la chute des poils, une oblitération des follicules et par conséquent calvitie permanente. D'autres circonstances doivent également être prises en considération, mais ce n'est pas le lieu de les faire connaître ; elles trouveront leur place dans l'étiologie et la thérapeu- tique, dans l'étiologie surtout ; et, sans entrer dans d'autres détails pour le moment, on conçoit sans peine que les causes qui contribuent à produire la teigne puissent aussi con- tribuera l'entretenir; ce sont toujours les mêmes conditions qui favorisent ou contrarient dans sa période d'état, comme à son début, le développement du végétal parasite. La teigne tonsurante abandonnée aux seules ressources de la nature et (je puis, sans scrupule, l'ajouter) aux moyens thérapeutiques différents des nôtres, se prolonge indéfini- ment dans la plupart des cas. Entendons-nous cependant, car il y a teigne tonsurante et teigne tonsurante. Si l'affection occupe une partie du corps où il n'y ait que TEIGNE TONSURAiNTE. i 69 des poils de duvet, et, par exemple, chez un enfant, toute autre région que le cuir chevelu, il est évident que la ma- ladie n'aura pas une durée indéfinie; car, pour cet enfant, comme pour la femme dont nous parlions tout à l'heure, un moment viendra où le champignon mourra, ne trouvant plus les éléments de sa subsistance, et le malade sera guéri. — Je n'ai donc pas en vue cette teigne tonsurante, quand je dis qu'abandonnée à elle-même presque toujours elle se pro- longe indéfiniment, mais bien la maladie capable de prendre un développement complet et dépasser à la troisième période. Cependant, la guérison spontanée n'est pas impossible; mais si rarement on l'observe, qu'on ne doit vraiment pas, dans un cas déterminé, compter sur un pareil mode de ter- minaison. Quand donc et comment arrive la guérison spontanée, quand par hasard elle arrive? — Il peut se faire que le cham- pignon meure^ malgré qu'il occupe un terrain favorable à son développement; et nous ne connaissons pas assez, tant s'en faut, les conditions nécessaires à la vie des parasites, pour comprendre ou même soupçonner les causes qui peuvent amener leur mort. — N'essayons pas de pénétrer ce mys- tère, et contentons-nous, de dire que certains états mor- bides paraissent exercer sur les parasites une action tellement prononcée, qu'on peut raisonnablement admettre comme un fait possible la mort de ces derniers sous l'in- fluence des mêmes causes. — Toutefois, de la possibilité à la réalité d'un fait il y a loin ; et, d'ailleurs, je ne sais pas si l'on a jamais observé clans la teigne tonsurante, comme dans le favus et la gale, cette léthargie du parasite qui se montre dans le cours de certaines maladies.— Quittons donc le ter- rain des hypothèses et appliquons-nous à l'étude de questions moins obscures. 170 DES TEIGNES. Mais, avant d'aller plus loin, résumons ce que nous venons de dire sur les modes de terminaison de la teigne tonsurante, car je désire que sur ce point ma pensée soit bien comprise. — Quand la maladie est à la première période, elle peut gué- rir spontanément; — tantôt la cause de cette guérison nous échappe ; — lantôt nous présumons (si les poils ne sont qu'à l'état rudjmen taire) que le parasite est mort, faute de nourri- ture.— Si la maladie est arrivée à la troisième période, dans le sycosis en un mot, la guérison est encore possible, mais beaucoup plus rare; et, dans tous les cas, remarquez-le bien, elle est nécessairement accompagnée d'une calvitie irrémé- diable; car, je vous l'ai déjà dit, après la destruction du pa- rasite par le pus, et la chute des poils malades, il y a adhé- sion des parois et oblitération de la cavité folliculaire. Peut-être devrais-je dire ici ce qu'on doit espérer des divers moyens mis en usage pour la curation de la teigne tonsu- rante ; — et vous comprendriez sans peine, je n'en doute pas, pourquoi cette dernière est la seule, parmi les teignes, qui puisse quelquefois disparaître sous l'influence des seuls agents parasiticid.es* — mais je réserve pour plus tard, quand il sera question du traitement, ces considérations intéressantes. Etudions maintenant les variétés de siège de la teigne tonsurante, qui peut occuper le cuir chevelu, la face et le col, le tronc et les membres, enfin, les parties sexuelles. Cuir chevelu. — C'est au cuir chevelu que l'affection parasitaire que nous étudions ici a été observée pour la pre- mière fois ; c'est la teigne tondante de Mahon, la porrigine tonsurante d'Alibert, Y herpès tonsurant de M. Cazenave. En quoi la teigne tonsurante de cette région diiïère-t-elle de la teigne tonsurante en général? C'est ce que nous devons examiner, et, pour cela, il nous faut revenir sur les divers symptômes qui appartiennent à chacune des trois périodes. TEIGNE TONSURANTE. 171 Le début a lieu ordinairement par de l'herpès en groupes à marche excentrique. On voit, dans la plupart des cas, des petites plaques ordinairement circulaires, qui occupent diffé- rents points de la tête et qui, s'étendant graduellement par le développement de nouvelles vésicules à la circonférence, finissent par se réunir, et la maladie recouvre une grande partie de la région. Mais les groupes herpétiques peuvent se disposer autrement qu'en cercles, et on a alors non plus la variété circinée, mais les variétés ponctuée et rayonnée (pane fat a, gyrata).. D'autres fois, le pityriasis est le premier phénomène qui se manifeste au cuir chevelu ; peut-être les squames qui caractérisent cette affection sont-elles précédées de vési- cules éphémères ; de là, sans doute, le nom d'herpès squa- meux donné à cette manifestation du trichophyton. Sur la tête, comme à la face, l'herpès circiné peut être le premier signe de germination du cryptogame ; mais ce mode de début est plus rare, et il paraîtrait même que M. Devergie n'aurait jamais eu l'occasion de l'observer. Aussi notre honorable collègue ne craint-il pas d'affirmer (Traité pratique des maladies de la peau, 2e édit., p. 506) que l'herpès circiné n'existe pas à la tète. C'est une des nombreuses erreurs échappées à notre confrère, et que M. Deffis a pris soin de relever dans une brochure récente que je vous engage à consulter. Et pourquoi l'herpès circiné n'existerait-il pas à la tête comme sur toute autre région du corps? Je pense que cette affection n'y est pas aussi rare qu'on le croit généralement, mais elle est moins facile à distinguer à cause de conditions anatomiques toutes particulières ; c'est ce que nous obser- vons tous les jours pour l'érysipèle et l'érylhème, dont la rougeur est habituellement si peu accusée en cette région, 172 DES TEIGNES. M. Devergie a donc eu tort de nier l'existence de l'herpès circiné au cuir chevelu, et, pour le mieux convaincre de son erreur, M. Deffis a pu citer, entre plusieurs autres, une observation très probante dont je vous ai déjà parlé à propos du favus : il s'agit d'une jeune fille de quatorze ans, traitée au dispensaire de l'hôpital pour une teigne achromateuse, et qui contracta sur les genoux de l'épileur la teigne tonsurante. Le début de cette dernière affection parasitaire fut signalé par une douzaine de très beaux cercles herpétiques occupant tout le cuir chevelu. Ainsi donc, l'herpès en groupes ou herpès tonsurant des auteurs, l'herpès squameux, l'herpès circiné, appartiennent au début de la teigne tonsurante qui occupe le cuir cbevelu. J'ajoute que les altérations primitives des poils sont habituel- lement observées à cette même époque ; elles ne diffè- rent en rien de celles que nous avons assignées à la première période de la teigne tonsurante en général. Plus tard, les poils se brisent et immédiatement ils se re- couvrent de leurs gaines blanches, comme nous l'avons déjà dit. Alors la maladie passe à la deuxième période, et l'on voit sur la tête une ou plusieurs tonsures des mieux caracté- risées ; les surfaces malades sont saillantes dans leur totalité; elles sont aussi légèrement rugueuses, et ont un aspect ma- melonné, chagriné, dû sans doute à l'érection des follicules pileux. La couleur tégumen taire est également modifiée dans presque tous les cas ; elle est bleuâtre, ardoisée chez les sujets bruns; plutôt grisâtre, rougeâtre ou jaune quand la chevelure est blonde. Au point de vue du diagnostic, vous ne sauriez attacher trop d'importance à ce signe, qui n'ap- partient à aucune autre affection du cuir chevelu. Il est d'autant plus marqué que la maladie est arrivée depuis long- TEIG3H TONStfRÂNTE. 173 temps à la deuxième période, el il se voit surtout très bien quand la tête du malade a été nettoyée et qu'une première épilation a été faite. C'est aussi un des signes qui disparais- sent le plus tardivement. Aussi, indique-t-il assez exactement à quel moment il faut cesser l'épilation, dans cette espèce de teigne; quand les parties malades ont repris une couleur qui ne tranche pas sensiblement sur celle des parties envi- ronnantes, on peut déclarer que le malade est parfaitement guéri. Que deviennent les tonsures à la troisième période de l'affection parasitaire? — Elles se dénaturent à tel point qu'il est souvent impossible de les reconnaître. Le champignon, gagnant en profondeur, détermine une inflammation pro- fonde dans les follicules pileux ; des éruptions pustu- leuses, souvent très confluentes, paraissent et recouvrent plus ou moins complètement les surfaces malades. Bientôt ces pustules sont remplacées par des croûtes jaunâtres, foncées, luisantes, humides, présentant, en un mot, tous les caractères assignés par les auteurs aux croûtes impéti- gineuses. C'est pourquoi, cà cette période, la maladie para- sitaire est presque toujours confondue avec les scrofulides bénignes exsudatives du cuir chevelu, et quelquefois aussi avec le favus, dans les cas où les croûtes sont moins foncées en couleur et plus sèches. Les plus habiles et les plus instruits peuvent s'y laisser prendre, et nous-mêmes ne serions point absolument à l'abri de semblables erreurs, si nous ne savions par expérience combien la difficulté du diagnostic différentiel est grande en pareil cas, et si nous n'avions, pour nous tirer d'embarras, l'examen microscopique. Déjà je vous ai parlé de ce petit malade affecté de teigne tonsurante du cuir chevelu, que je croyais atteint de scrofule, tandis que M. Deffis le croyait l7Zj DES TEIGNES. atteint de favus, et sur les cheveux duquel nous trouvâmes, au microscope, les éléments très évidents du trichophytori. Toutefois, le microscope doit être employé comme dernière ressource, et, autant que possible, il faut apprendre à s'en passer. On doit étudier les malades avec le plus grand soin, et ne pas se borner à l'examen des surfaces couvertes de croûtes, car c'est souvent ailleurs qu'on trouve un signe ignoré du malade et d'une importance capitale pour l'établis- sement du diagnostic. J'ai reçu, il y a quelques mois, un enfant de neuf à dix ans (couché actuellement au n° 50), dont toute la tête était couverte de croûtes impétigineuses. A la première vue, je le crus atteint d'une scrofulide du cuir chevelu, et je l'admis dans mon service. Le lendemain, à la visite, je l'observai de plus près, et, frappé de la régularité et de la disposition circulaire des croûtes d'impétigo, comme aussi de l'absence de toute altération de la peau à la face interne du pavillon de l'oreille, la pensée me vint que l'impétigo pouvait bien être de nature parasitaire, et je cherchai avec tout le soin possible quelque altération caractéristique. Or, après un examen de quelques minutes, je découvris à la nuque, au niveau de l'origine des cheveux, une petite surface moitié moins étendue qu'une pièce de 20 centimes, et sur laquelle on voyait manifestement quelques poils brisés et entourés de champignon. Je fus donc fixé immédiatement, et l'enfant, confié depuis cette époque aux soins de l'épileur, est aujour- d'hui en état de quitter le service. Face et cou. — Sur la face et le cou, le début de la teigne tonsurante a ordinairement lieu par de l'herpès circiné ou des disques érythémateux dont le nombre et la dimension sont très variables, et qui peuvent occuper tels ou tels points de la région. On trouve assez souvent l'éruption primitive répandue dans les diverses parties de la face, excepté TEIGNE TONSU'RANTE. 175 aux environs delà lignemédiane. La région sous-maxillaire et la nuque sont souvent affectées en môme temps que le visage. Très fréquemment une petite plaque rouge, circulaire, de la dimension d'une pièce de 1 franc ou de 50 centimes, est située au-devant de la ligne d'implantation des favoris. Plus rarement on voit un cercle herpétique d'un diamètre considérable et ordinairement incomplet, étendu de la région mastoïdienne gauche à la même région du côté droit, com- prenant dans sa concavité les joues, le menton et la moitié supérieure du cou, toutes parties qui peuvent être en même temps couvertes d'anneaux ou de disques d'un moindre diamètre. L'herpès en groupes et l'herpès squameux sont beaucoup moins communs à la face qu'au cuir chevelu ; ils peuvent néanmoins s'y montrer, et se combinant avec l'herpès circiné, ils envahissent de larges surfaces, et offrent dans cette extension plus ou moins rapide les dispositions que nous avons déjà indiquées. A la deuxième période, des plaques pityriasiques se for- ment, et les poils cassés et engaînés se montrent en même temps. C'est ordinairement au centre des cercles herpétiques, et à mesure que la rougeur disparaît à la circonférence, qu'on voit paraître les premiers signes qui indiquent le pas- sage de la maladie à la deuxième période. La peau est rugueuse et chagrinée comme au cuir chevelu ; les surfaces sont légèrement saillantes, mais n'offrent aucun changement de couleur. La troisième période est caractérisée non plus seulement par des éruptions pustuleuses, mais aussi par tous les degrés du sycosis. Ce sont des noyaux indurés, des tubercules cuta- nés ou sous-cutanés, des furoncles qui tantôt occupent une portion très limitée, et tantôt, au contraire, la plus grande 476 DES TEIGNîS. partie de la face, se mélangeant aux papulo-pustules que des poils traversent à leur centre, et auxquels les disciples de Willan attachent tant d'importance. Chez certains malades, ces pustules sont extrêmement rares, et on a de la peine à en découvrir quelques-unes ; gardez-vous de croire que l'affection soit moins sérieuse et la guérison plus facile à obtenir. Une tuméfaction parfois considérable de la face résulte de la présence des pustules, des tubercules et des furoncles ; les traits peuvent devenir méconnaissables, l'exer- cice de la parole pénible, et la fonction de mastication impossible. Tronc et membres. — L'herpès circiné, les disques éry- thémateux, le lichen circonscrit sont à peu près les seules éruptions primitives qu'on observe sur le tronc ou sur les membres ; et, presque toujours, à cause du peu de dévelop- pement des poils, le champignon avorte, et la maladie ne dépasse pas la première période. Parties sexuelles. — Les trois périodes de la teigne ton- surantesont habituellement réunies en cette région. Aucen- tre d'un cercleherpétique se trouvent des poils brisés et en- gaînés, parfois difficiles à distinguer des débris épidermiques abondants qui les environnent ; un peu plus loin, ce sont des pustules ou des tubercules. Dans les deux sexes, la maladie revêt le même aspect, les, poils offrant à peu près le même degré de développement. , Tout ce que nous disons là peut également s'appliquer aux régions axillaires où les conditions anatomiques de la peau sont très peu différentes. Étiologie. — Je partage les causes en prédisposantes et efficientes. Causes prédisposantes. — Elles doivent être rapportées, TEJGNË TOKSUKANTi:. 17 7 comme celles du favus et des autres teignes, à des condi- tions physiologiques, hygiéniques et pathologiques. J'aurai peu de choses à ajouter à ce que j'ai déjà dit à ce sujet. Je rappellerai seulement l'influence de l'âge. — Chez les enfants, la teigne tonsuranle occupe presque toujours le cuir chevelu; chez les adultes, elle est rare en celte région et fréquente à la face. — La femme, comme l'enfant, n'est pas souvent af- fectée de teigne tonsuranle de la face et, si le champignon germe en cette région, la maladie ne dépasse point la première période, à moins cependant qu'il n'y ait un développement exceptionnel des poils. Aux parties sexuelles, où les condi- tions pileuses sont les mêmes chez l'homme et chez la femme, la maladie suit la même marche et se montre à peu près avec le même degré de fréquence. En résumé, toutes les causes physiologiques prédisposantes se réduisent à des conditions plus ou moins favorahles que présente le système pileux. Le tempérament et la constitution n'exercent pas d'in- fluence sur la teigne même, mais seulement sur les érup- tions symptomatiques. Les sujets lymphatiques ont ordinai- rement des affections vésiculeuses ou pustuleuses, tandis que les tubercules et les furoncles se rencontrent plus souvent chez les hommes sanguins et fortement constitués. Peut-être, parmi les maladies constitutionnelles, peut-on signaler la syphilis, qui, se rencontrant assez souvent chez les malades affectés de teigne lonsurante, semble prédisposer a cette affection ; mais bornons-nous à constater la coexistence de la maladie vénérienne et de l'affection parasitaire sans entrer en plus d'explications. Cause déterminante. — L'unique cause delà teigne ton- surante est le cryptogame auquel les naturalistes ont donné le nom de triçhophyton. 178 DES TEIGNES. Quels sont ses caractères ? — Ces caractères sont-ils les mêmes aux diverses périodes de la maladie, ou bien, comme les symptômes, changent-ils avec le temps? — Nous avons distingué trois époques dans la marche de la teigne tonsu- rante, trouverons-nous de même dans la vie du trichophyton trois âges marqués par quelques différences dans son orga- nisation intime? — Vous connaissez déjà ma réponse, si vous avez souvenir de la discussion que nous avons établie dans une leçon précédente, au sujet de l'existence du microsporon mentagrophytes . Mais je ne craindrai pas de me répéter, en touchant de nouveau à ces questions intéressantes. Le trichophyton est en grande partie ou presque exclusi- vement composé de spores, et, par ce caractère, il se dis- tingue des autres champignons des teignes. On lit même dans les Traités spéciaux que les spores sont ses seuls élé- ments constitutifs. Je ne puis cependant accepter sans restriction cette opinion des micrographes, qui, privés du puissant secours de l'observation clinique, se sont parfois égarés dans ces voies difficiles. Je suis porté à croire qu'au début de la teigne tonsurante, de même qu'à une période avancée de cette maladie, des tubes de mycélium exis- tent au milieu de spores innombrables. A une époque inter- médiaire, quand le cryptogame est dans toute la force de son développement, les spores seules le constituent, et c'est en vain qu'on chercherait un autre élément. Comme tous les champignons des teignes, le trichophyton commence à germer entre la couche molle et la lame cornée de l'épiderme. Comme l'achorion du favus, il peut vivre aux dépens des poils, des ongles ou de l'épiderme; c'est toujours, dans ces différents cas, le même siège anatomique qu'il occupe. Quand il vit sur la lame molle de l'épiderme, il forme ces TEIGNE TONSURANTE. 179 flocons, ces lamelles, qui tranchent ordinairement par leur couleur nacrée au milieu des débris épidermiques. Quand il affecte les ongles, il produit une altération spé- ciale qu'on peut confondre avec celle que détermine le favus, quoiqu'elle en diffère à certains égards. Sur les poils, le parasite existe longtemps avant que la concentration de ses éléments permette de l'apercevoir ; c'est alors la période de germination, pendant laquelle les poils plus ou moins altérés dans leurs qualités physiques indiquent la présence du cryptogame. Lors même qu'on n'observe d'autres symptômes qu'un cercle herpétique, le champignon ne fait point défaut, et il suffit de le chercher avec soin pour le trouver toujours. Il n'en est pas de même quand la maladie est arrivée depuis longtemps à la troisième période ; les poils que l'on examine au microscope offrent des altérations de structure, mais on ne peut quelquefois découvrir sur eux aucun élément crypto- gamique, et les recherches sont souvent renouvelées pendant huit ou quinze jours sans plus de succès. — Gardez-vous cependant d'affirmer que le trichophyton a été complètement détruit, car il peut arriver qu'à force de persévérance, on finisse par distinguer quelques spores caractéristiques sur l'un des nombreux poils arrachés. D'ailleurs, quels que soient les résultats fournis par l'examen microscopique, nous avons toujours l'étude clinique qui nous éclaire, en nous rappelant le rôle que joue le parasite dans le sycosis. A la deuxième période de la maladie, non-seulement le champignon ne manque pas, mais il est toujours extrême- ment facile à trouver, puisqu'à ce moment il devient visible à l'œil nu, et constitue en totalité les gaines blanches des poils brisés. Quels sont donc les phénomènes que nous révèle l'examen 180 DES TEIGNES. microscopique sur les cheveux cassés à quelques lignes de la surface cutanée? — Ils sont très remarquables et un grossis- sement de deux, à trois cents diamètres suffit pour les aper- cevoir. Le poil paraît comme épié aux deux extrémités et ses éléments sont altérés à tel point qu'il est impossible de distinguer les deux substances (corticale et médullaire) qui le composent dans l'état normal ; tout est confondu. Les fibres longitudinales sont écartées, et leurs intervalles sont remplis de sporules. On ne trouve ni racine, ni capsule, le poil ayant été brisé aux deux extrémités ; et l'on voit par- faitement la trace de la rupture. On remarque aussi en dehors du poil, et dans une certaine étendue, une masse uni- quement composée de spores qui lui forment une enveloppe complète, une sorte de manchon dont il occupe le centre. Les spores sont innombrables, très régulières, partout iden- tiques, sur le poil comme dans la gaîne. A une époque moins avancée de la teigne tonsurante, à la période herpétique, on peut, non sans difficultés, extraire avec leurs bulbes les poils malades. On voit alors, sur la par- tie intra-cutanée, des altérations du même genre, mais moins avancées que celles dont nous venons de parler. Des spores existent encore autour du poil et dans son épaisseur, mais elles ont des diamètres différents, sont moins nombreuses, moins régulièrement arrondies , quelques-unes même sont allongées et se rapprochent ainsi des tubes de mycélium. Une altération remarquable des poils , plus remarquable cependant dans la pelade que dans la teigne tonsurante, con- siste en des renflements olivaires ou tubéreux qui paraissent formés, au moins en grande partie, par une accumulation de matière parasitaire, et sont plus fréquents et plus pro- noncés sur la rai ine que sur la tige. Aussi serait-on tout d'abord tenté de leur attribuer quelque part a la difficulté de TEIGNE TONSURANTE. 181 répilation, si l'on ne savait pas que les poils se brisent d'eux- mêmes dans la teigne que nous étudions. A la troisième période, sur les plaques suppurées des vieilles mentagres, le tiïchophyton est rare ; beaucoup de poils malades ne portent aucune spore, bien que leur altéra- tion soit profonde et qu'ils soient complètement dépouillés de leurs capsules. Les spores, quand on en trouve (c'est sur les poils moins altérés dans leurs caractères physiques qu'il faut les chercher), sont inégales, plus petites et mêlées à un plus grand nombre de tubes de mycélium. La différence des caractères microscopiques du végétal pa- rasite à la deuxième et à la troisième période de la teigne tonsurante explique l'erreur du docteur Gruby, qui a cru découvrir dans la dernière un champignon autre que le tri- chophyton. J'ai discuté ailleurs (Classification des teignes) l'existence de ce nouveau cryptogame, du microsporon men- tagrophytes, et je vous ai fait connaître en même temps une opinion un peu différente delà mienne, celle de M. Cb. Robin, consignée dans la dernière édition du Dictionnaire de Nysten. — Pour M. Robin le microsporon mentagrophytes de M. Gruby ne serait que de Pépiderme roulé en forme de tubes ; — pour moi c'est un trichophyton d'un âge avancé. Comme tous les végétaux parasites, le trichophyton peut se transmettre de quatre manières différentes : par l'air, par le contact médiat (mode de transmission le plus fréquent des teignes au cuir chevelu) , par le contact immédiat (ordinai- rement teigne tonsurante du dos de la main ou de l'avant- bras), enfin par l'inoculation (très souvent teigne de la face). Le contact médiat et l'inoculation (par l'ongle) ont à peu près le même degré de fréquence dans la transmission de la teigne tonsurante au tronc et aux parties sexuelles. Il n'est pas bien rare que l'affection parasitaire soit obser- 182 DES TEIGNES. vée en même temps sur tous les membres d'une même famille. C'est le père qui, affecté de mentagre, a commu- niqué la maladie à sa femme et à son enfant; ou bien c'est ce dernier qui, atteint de teigne tonsurante au cuir chevelu, a été le point de départ de la contagion. La fréquence des rapports médiats ou immédiats dans les familles donne de ces faits une explication rationnelle. Je vous ai déjà parlé des inoculations pratiquées avec succès par M. Deffis. Pourquoi donc nous demander des faits d'inoculation ? C'est un parti pris de ne les point admettre, et, quand par hasard ils se présentent, on ferme obstinément les yeux pour ne pas les voir; car il n'est pas nécessaire, pour savoir à quoi s'en tenir sur cette question, de prendre quelques spores de trichophyton et de les insérer sous l'épi- derme avec la pointe d'une lancette. Ecoutez les mentagreux qui se présentent à l'hôpital: presque tous accusent le rasoir du barbier, et vous savez à quel point cette accusation est fondée ! Comment donc agit ce rasoir, si ce n'est en inocu- lant le cryptogame? Il est vrai que MM. CazenaveetChausit, qui font également une large part à l'action du rasoir ou, pour parler leur lan- gage, à la rasure, proposent une explication purement mé- canique et, par conséquent, bien différente de la mienne. La mentagre serait, non plus une affection dermophy tique, mais une affection de cause externe, une inflammation des follicules pileux produite par un mauvais rasoir. — Singu- lière inflammation que celle-ci ! En vous coupant la barbe* on vous irrite un peu la peau de la face, et voici que vous avez successivement: de l'herpès circiné, du pityriasis, une mentagre; puis cette inflammation se transmet par conlagïon, et le sujet auquel elle est ainsi transmise est, comme vous, affecté d'herpès, de pityriasis et desycosis; TEIGNE TONSL'RANTE. 183 enfin, chose bizarre ! cette inflammation ne cède point aux antiphlogistiques, et c'est seulement par l'extraction des poils que l'on peut procurer une guérison définitive — Tout cela n'est-il pas bien difficile à accepter ? Vous êtes en présence de deux théories diamétralement opposées : la théorie mécanique, soutenue par M. Cazenave, et la théorie végétale, dont je suis, parmi les dermatolo- gistes, le plus zélé et presque l'unique défenseur. Vous devez choisir entre ces deux doctrines, et j'attends avec confiance le résultat de vos recherches et de votre expérience person- nelle, si vous entrez franchement, sans prévention, dans la voie que je vous ai tracée. Diagnostic. — En général, rien n'est plus facile que de reconnaître la teigne tonsurante à la deuxième période, sur- tout quand elle occupe une région telle que le cuir chevelu, où on la rencontre habituellement ; et si, quand elle se montre sur d'autres parties du corps, on la prend pour de la dartre ou de la syphilis, c'est qu'on ne veut pas se donner la peine d'en étudier les caractères, ou peut-être craint-on d'admettre des vérités auxquelles on aurait désiré rattacher son propre nom. Quant à vous, Messieurs, qui n'êtes pas imbus de semblables préjugés, vous ne commettrez jamais de ces erreurs grossières qui ne sont pas moins préjudiciables au médecin qu'au malade. A cette période de la teigne, le diagnostic est toujours très clair et n'offre aucun embarras. Avec quelle autre affection pourriez-vous confondre l'affec- tion parasitaire, quand, sur des plaques circulaires, légère- ment saillantes, vous trouvez des poils brisés à quelques millimètres de la surface de la peau, enveloppes de leur gaine blanche et entourés de flocons nacrés et d'écaillés grisâtres 184 DES TEIGNES. (ces dernières formées par de l'épidémie sont bien distinctes des premiers constitués par le cryptogame)? Ces plaques de teigne tonsurante ont sans doute quelque analogie avec le pityriasis, l'herpès dartreux, l'eczéma circonscrit, mais la rupture et l'engainement des poils ne sont-ils pas des carac- tères palhognomoniques de l'affection dermophytique ? Le diagnostic est-il aussi facile à la première et à la troi- sième période de la teigne tonsurante? Loin de là, et parfois, vous allez le voir, on rencontre de sérieuses difficultés. Ainsi, au cuir chevelu, l'éry thème précurseur échappe souvent à l'observation, et la desquamation qui lui succède peut être prise pour du pityriasis dartreux ; à ce moment, on ne trouve pas la brisure et l'engaînement des poils qui, tout à l'heure, empêchaient même l'incertitude. Cependant, quelques signes rendent encore probable l'existence du para- site : les points pityriasiques sont nettement circonscrits, et souvent ils affectent une disposition manifestement circu- laire, caractères qui n'appartiennent pas ordinairement au simple pityriasis. En outre, dans les deux cas, l'épilation ne se fait pas de la même manière. Dans l'affection constitutionnelle, la peau seule est malade et les poils n'ont subi aucune altération. On peut les extraire en totalité avec le bouton et la capsule; ils résistent à la traction de la pince ou des doigts, et leur avulsion fait souffrir le malade. Dans l'affection parasi- taire, au contraire, nous savons qu'ils sont altérés par le cryptogame longtemps avant que ce dernier, par la réunion, la concentration de ses éléments, soit devenu visible à l'œil nu ; ils sont friables, et par conséquent, n'offrent au- cune résistance à la pince; ils se cassent donc au lieu de se laisser extraire, et l'on ne trouve à leur extrémité profonde ni bouton, ni capsule. TEIGNE TONSURANTE. 185 Ce dernier caractère permet aussi de distinguer la teigne tonsurante, au début, de la lèpre vulgaire, du psoriasisetde la teigne faveuse scutiforme, affections qui ne sont pas rares au cuir chevelu, et qui se rapprochent de la teigne tonsu- rante par leur forme ordinairement arrondie. Maison trouve d'autres caractères différentiels : le psoriasis et la lèpre vulgaire (qui n'est qu'une variété de psoriasis) ne sont pas ordinairement localisés à la tète ; les environs des coudes et des genoux sont le siège de prédilection de ces affections darlreuses ; et lors même qu'elles n'existent qu'à la tète, il est bien rare de ne pas trouver quelque plaque en un point où les cheveux sont absents, derrière les oreilles, par exemple; d'ailleurs, les squames sont plus épaisses, plus adhérentes que dans la teigne tonsurante. La dartre a également une marche qui ne ressemble en rien à celle du parasite. Je n'in- siste pas davantage. Le porrigo scutulata à la période pityriasique, avant la manifestation extérieure de l'achorion, est extrêmement dif- ficile à distinguer de la teigne tonsurante au début; et, dans quelques cas, il faut attendre, pour se prononcer, que l'affec- tion arrive à une période plus avancée; la rupture de quel- ques'jioils, ou l'apparition de concrétions d'un jaune soufré, ne tardera pas à lever le cloute. Cependant, on pourrait essayer tout d'abord l'extraction de quelques poils : ceux-ci se brisent dans la teigne tonsurante; dans le favus ils cèdent facilement, viennent avec le bulbe et la capsule, et cette dernière est beaucoup plus volumineuse qu'à l'état normal. Ai -je besoin d'ajouter que, dans tous ces cas difficiles, l'examen micros- copique tirerait immédiatement d'embarras? Sur la face, le tronc et les membres, rien de plus facile que de reconnaître la première période de la teigne tonsu- rante. Les anneaux trichophyfiqùcs se distinguent aisément 186 DES TEIGNES. des anneaux faviques, psoriasiques ou pityriasiques. Les anneaux faviques sont d'un plus peiit diamètre et d'une uniformité remarquable. Les anneaux psoriasiques sont, au contraire, plus larges, et il est bien rare de les trouver complètement dépourvus des squames caractéristiques. Quant aux affections pityriasiques, leur forme seule pour- rait, dans certains cas (pityriasis rubr n), les faire prendre pour des plaques herpétiques ; mais l'étendue, la marche de l'affection et, en définitive, l'examen microscopique feront immédiatement connaître sa nature. En un mot, il est assez rare que les cercles herpétiques, qui annoncent la germination du trichophyton, soient con- fondus avec du psoriasis, du pityriasis, ou avec des anneaux faviques. Bien plus souvent, cette manifestation parasitaire est prise pour une syphilide circinée ; et nous avons pu constater un grand nombre d'erreurs de ce genre commises par des mé- decins qui occupent le premier rang en dermatologie. M. Def- fis (Réfutation des erreurs que contient l'ouvrage de M. De- vergie, p. 19) a cité une de ces observations. Cependant les éruptions syphilitiques n'occupent pas ordinairement les mêmes régions que la teigne tonsuranle ; elles ne sont point accompagnées de démangeaisons; et puis, j'insiste sur ce caractère, ce n'est pas aux syphilides érythémateuses (les seules qu'on puisse confondre avec l'herpès trichophy tique) qu'appartient la forme circulaire. L'intertrigo parasitaire est très difficile à distinguer de l'intertrigo mécanique, et, à défaut de microscope, il faut quelquefois suspendre le diagnostic et attendre des caractères plus tranchés (ceux de ia deuxième période). Cependant, dans la plupart des cas, la distinction esL possible ; l'érup- tion parasitaire est, au début surtout, moins étendue, plus TEIGNE TONSURANTE. 187 nettement circonscrite et toujours accompagnée du bour- relet circonférentiel propre à l'herpès circiné. A la troisième période, le diagnostic de la teigne tonsu- rante n'est pas moins obscur qu'à la première. Au cuir chevelu, les tonsures sont dénaturées, mécon- naissables ; des croûtes impétigineuses les recouvrent et cachent à la vue les poils brisés-, suivant que ces croûtes sont sèches ou humides, jaunes ou brunes, on croit avoir affaire à une scrofulide ou à une teigne faveuse, et non point à la teigne tonsurante. Au fait, dans ces circonstances, le dia- gnostic est souvent impossible, et l'examen des poils au microscope peut seul tirer d'embarras. A la face, on est peut-être trop disposé à rattacher, dans tous les cas, les papulo-pustules à la présence du trichophyton; cette légion est souvent aussi le siège de l' herpès dartreux, de l'impé- tigo scrofuleux ou de cause artificielle (impétigo de la lèvre supérieure par le contact d'un liquide irritant, par exemple, chez les personnes qui prennent du tabac); c'est également le siège de prédilection des scrofulides malignes, inflammatoires, crustacées; enfin, les syphilides pustuleuses et tuberculeuses n'y sont point rares. Le diagnostic différentiel devient sur- tout très difficile quand les éruptions constitutionnelles et les éruptions parasitaires se compliquent mutuellement. Trois caractères méritent de fixer principalement votre attention; il faut les bien connaître, car l'existence certaine d'un seul d'entre eux est une forte présomption en faveur du parasite. Ces caractères sont : 1° La présence sur une partie du visage ou du cou, do débris de cercles en voie de disparition : 2° L'existence sur les joues de plaques indurées circulaires; 3° L'herpès pellagreux ou lichenoïJe sur le dos des mains ou sur les avant-bras. 18S MS TEIGNES. Quand ces trois signes manquent à la fois, comment faire? — Il faut redoubler d'attention, interroger avec soin le ma- lade sur le début et la marche de l'affection qu'il porte, tenir compte de l'état des poils... Si l'on est obligé de rester dans le doute, relativement au parasite, el que l'on croie cependant à l'existence de la syphilis (c'est souvent une syphilide tuber- culeuse que l'on observe en pareil cas), il ne faut pas hésiter à soumettre le malade à la médication antivénérienne ; sous cette influence, la syphilis disparaîtra, et si, après cela, il reste une éruption parasitaire, on l'attaquera par les moyens que nous ferons connaître tout à l'heure. Aux aisselles et aux parties sexuelles, le diagnostic diffé- rentiel entre l'éruption parasitaire et l'éruption constitution- nelle ou mécanique est. d'une extrême difficulté, et si l'on ne trouve pas d'altération des poils ou quelques vestiges d'anneaux herpétiques, je ne connais que le microscope qui puisse trancher la question. Pronostic. — Abstraction faite de l'influence des moyens thérapeutiques, la teigne tonsurante est une affection moins grave que la teigne laveuse, car on n'a point à craindre, comme dans cette dernière, la mort, ni la cachexie qui pré- cède. Mais en dehors de ce point de vue, la teigne tonsu- rante est, au contraire, plus sérieuse; elle a une durée fort longue, et, lors même qu'elle ne dépasse pas la période her- pétique, il n'est pas très rare de la voir se prolonger quinze, dix-huit mois et plus. Quand elle atteint la troisième période, elle peut durer quinze à vingt ans, et si la guérison arrive, ce qui n'a lieu que dans les cas exceptionnels, il y a perte de la barbe ou de la chevelure sur les parties affectées. Assez souvent, le trichopbyton contribue par sa présence au développement des affections constitutionnelles (dartre TEIGNE TONSTJRÀNTE. 189 et plus souvent scrofule) que l'on a beaucoup de peine à faire disparaître, car elles sont entretenues par la cause qui les a fait naître et qu'il faudrait d'abord attaquer ; mais l'on n'y songe pas, l'affection parasitaire étant alors complètement masquée par les nouvelles éruptions. J'ajoute que notre méthode thérapeutique ne triomphe pas aussi aisément de la teigne tonsurante que de la teigne faveuse, et je vous en ai déjà fait comprendre la raison. Les enfants atteints de favus ne restent dans nos salles qu'un mois ou deux; il faut au moins un temps double pour guérir ceux qui sont affectés de teigne tonsurante au cuir chevelu. Traitement. — Peut-on par les moyens ordinaires de traitement guérir la teigne tonsurante? Je sais bien qu'on ne cesse de le dire autour de vous, et qu'on le répète sur tous les tons 5 mais que faut-il en croire? Je vous l'ai dit peut- être plusieurs fois, mais je ne crains point de le dire de nouveau. On considère comme définitives les guérisons d'un jour, et parce qu'on perd de vue les malades, on les croit volontiers à tout jamais délivrés de l'affection que l'on a su faire disparaître. Cependant je ne dirai point ici, comme pour la teigne faveuse, que la guérison est impossible par les traitements ordinaires, car moi-même j'ai pu guérir, avant d'être en possession de ma nouvulle méthode thérapeutique, sans leur faire subir Tépilation, cinq malades affectés de teigne tonsurante du cuir chevelu. Mais combien de temps faut-il pour arriver à ce résultat? Un an au moins, et ordinairement dix-huit mois, deux ans ! Avouez que l'on est peu tenté d'employer ces moyens quand par l'épila- tion on peut obtenir la guérison en moins de six mois. On doit donc attaquer la teigne tonsurante par les mêmes 190 DES TEIGNES. movens que les autres teignes, c'est-à-dire par l'emploi combiné de l'épilation et des parasiticides. Ce traitement est-il le même dans tous les cas, et faut-il immédiatement le mettre en usage ? J'ai dit tout à l'heure que la teigne tonsu- rante avortait quelquefois ; il est évident que, dans ce cas, l'épilation est inutile. Précisons donc dans quelles circon- stances tel traitement doit être employé plutôt que tel autre. Plusieurs cas peuvent se présenter. Si les sujets affectés sont des enfants ou des femmes, et que la maladie occupe toute autre région que le cuir chevelu (exceptons-en aussi les aisselles et les parties sexuelles chez les femmes), la guérison peut être obtenue par les lotions ou les frictions parasiticides, à moins cependant qu'il n'y ait sur les parties envahies par le parasite un développement anormal du système pileux. On voit quelquefois des femmes et des enfants dont tout le corps est couvert d'un épais duvet; chez eux, le parasite trouvant une abondante nourriture, ne disparaîtrait point aisément : il faudrait joindre l'épilation aux parasiticides. Ce que nous disons des femmes et des enfants peut s'appli- quer aux hommes qui n'ont que peu ou point de barbe. En un mot, si la maladie occupe des surfaces où, à cause du peu d'abondance des poils ou du duvet, elle ne peut dépasser la période herpétique, il faut se borner aux parasiticides; l'épi- lation n'est pas nécessaire; peu importe, d'ailleurs, que les sujets affectés soient des hommes adultes, des femmes ou des enfants. Mais l'herpès circiné existe sur des régions bien fournies de poils, telles que les parties sexuelles chez l'homme et la femme adultes, la face chez l'homme...; faut-il immédiate- ment et dans tous les cas commencer l'épilation ? Une dis- tinction doit être établie ici. TEIGNE TONSURANTE. 191 N'existe-t-il qu'un ou deux cercles bien limités, l'affection herpétique est-elle bien localisée ? Il faut sans retard arracher les poils sur les surfaces malades, car on doit obtenir par ces épilations partielles une guérison rapide et durable. — Si, au contraire, les cercles herpétiques sont plus nombreux, et disséminés sur tous les points de la région velue, oh! alors, on doit attendre et remettre l'épilalion à une époque plus avancée de la maladie, à la deuxième ou à la troisième période ; car, si l'on épilait immédiatement, il faudrait arra- cher tous les poils dé la région, ce dont on peut se dispenser. Parmi les nombreux cercles herpétiques qui existent, plu- sieurs disparaîtront sans être suivis des phénomènes qui appartiennent aux périodes plus avancées ; le cryptogame avortera peut-être après quelques jours de germination; pourquoi donc épiler en pareille circonstance ? A la deuxième période, l'affection parasitaire qui était diffuse, se localise, et les surfaces où l'épilalion doit être faite sont parfai- tement indiquées. En attendant, on évite souvent aux malades les douleurs d'une épilation générale. Ne croyez pas, toutefois, qu'il n'y ait rien à faire avant la localisation de la maladie. Il faut détruire le parasite qui se trouve dans l'épiderme ou à la superficie de la peau, car il enva- hirait les parties voisines, et pourrait être porté, par le grattage, ou par tout autre mécanisme, sur d'autres régions velues. En résumé , épiiez immédiatement à la période her- pétique, quand l'affection est localisée; si, au contraire, elle occupe de larges surfaces, laissez-la se localiser, c'est- à-dire arriver à une période plus avancée, et, en attendant, faites, matin et soir, des lotions avec la solution de sublimé, et, dans l'intervalle, des frictions avec l'huile décade ou avec la pommade au turbith. lV>2 DES TEIGNES, Quand la maladie est arrivée à la deuxième ou à la troi- sième période, il est nécessaire de pratiquer immédiatement l'avulsion des poils sur toute l'étendue des surfaces affectées; car la guérison spontanée et la guérison par les moyens ordinaires de traitement sont des faits exceptionnels et, dans tous les cas, n'arrivent qu'après un temps fort long. L'épilation est donc indispensable ; mais on trouve ici des difficultés qui n'existent pas dans la teigne faveuse. Les poils sont extrêmement friables et, malgré les plus grands soins, ils se cassent sous l'action de la pince et ne se laissent point arracher. Cependant on fait de son mieux pour débarrasser les surfaces malades des poils (parfaits ou imparfaits) qui les recouvrent, et pour favoriser la pénétration des parasiticides dans les follicules pileux; on se sert ordinairement, en pareil cas, des pinces à mors recourbés dont nous avons donné ail- leurs la description. Habituellement, il faut pratiquer quatre, cinq ou six fois ces épilations imparfaites, avant que les poils puissent être arrachés en totalité avec le bouton et la capsule. A quel moment faut-il cesser l'épilation, et quand peut-on dire que la maladie est guérie? C'est un point important de pratique qu'il est nécessaire de bien connaître. A mesure que le parasite est détruit, les cheveux qui paraissent après les épilations successives sont de moins en moins altérés dans leurs caractères physiques; au début, ils étaient frisés, tortillés sur toute l'étendue des plaques malades ; bientôt on n'en voit plus qu'un certain nombre avec ce caractère patho- logique ; et, quand la guérison est arrivée, ils ont tous une direction rectiligne, sont à peu près parallèles et ne diffèrent en rien des poils des parties saines ; en même temps, les plaques s'affaissent et arrivent au niveau des parties environ- nantes; l'aspect chagriné des surfaces, dû à l'érection des TEIGNE T0N3URANTF.« 193 follicules malades, se perd aussi de jour en jour, et il n'en reste rien quand le parasite n'existe plus. Au cuir chevelu (car cette altération pigmen taire n'existe pas à la face), la coloration brunâtre, ardoisée, qui est un des signes les plus frappants de la maladie, indique très exactement si la gué- rison est proche ou encore éloignée; elle disparaît en même temps que le cryptogame : aussi peut-on affirmer que ce dernier est complètement détruit quand les surfaces, d'une couleur si foncée autrefois, ne se distinguent plus des sur- faces voisines. A la face, certaines éruptions symptomatiques de la troisième période persistent quelquefois longtemps après la disparition du parasite; ce sont des rougeurs éry- thémateuses, des indurations tuberculeuses, qui n'exigent d'ailleurs aucun traitement, tout au plus l'application de pommades résolutives, de douches de vapeur. Lorsque la maladie est encore à la première période et qu'elle fait chaque jour des progrès par le développement excentrique du bourrelet circonférentiel, phénomène parfai- tement décrit par M. Devergie, il est bon d'arracher les poils follets en même temps qu'on met en usage les agents parasiticides ; dans tous les cas, ces derniers doivent être employés en frictions rudes; il faut déchirer la couche superficielle de l'épidermc, pour que, sur tous les points, le parasite soit en contact avec le parasiticide. Enfin, nous l'avons dit ailleurs, quand la teigne tonsu- rante est depuis longtemps arrivée à la période papulo-pus- tuleusC; il faut pratiquer l'épilation, lors même qu'on serait sûr (ce qui ne peut pas être) que le parasite n'existe plus ; c'est dans ces circonstances que la maladie cède comme par enchantement à l'emploi de nos moyens thérapeutiques; une seule épilation peut être suffisante. C'est pourquoi, je le répète, j'ai pu dire et écrire que la guérison de la men- 13 19A DES TEIGNES. tagre était d'autant plus facile que le mal était plus an- cien. Tel est le traitement auquel nous soumettons nos malades affectés de teigne tonsurante. D'autres médecins de cet hôpi- tal, je suis heureux de le dire, ont reconnu la nécessité de Tépilation qu'ils font également pratiquer dans leurs salles ; chez eux, la durée du traitement est cependant plus longue; à quoi cela tient-il? A deux causes différentes : la première, c'est que Tépilation est mieux faite par nos infirmiers spé- ciaux que parles malades eux-mêmes, ce qui se conçoit aisé- ment, et c'est un avantage incontestable que nous avons sur nos voisins. En second lieu, le traitement n'est pas constitué de la même manière : on voit un gonflement très prononcé à la face, et la crainte d'augmenter les accidents inflamma- toires fait différer Tépilation ; on a recours aux divers moyens résolutifs et antiphlogistiques pendant huit ou quinze jours, et alors seulement on procède à l'extraction des poils. Or, je pense qu'à ce moment les antiphlogistiques sont employés en pure perte; le meilleur moyen de dissiper l'in- flammation de la peau, c'est d'extraire le corps étranger qui l'a produite et l'entretient; après Tépilation, les résolutifs font merveille. Au lieu des antiphlogistiques, des cataplasmes, qui souvent ne font qu'augmenter le gonflement de la face, je n'emploie, avant Tépilation, que l'huile de cade, qui, éteignant la sensibi- lité des parties, rend l'opération plus facile et moins doulou- reuse. Mais je n'entre pas dans plus de détails et je renvoie pour compléter ce chapitre à la thérapeutique générale des teignes. TEIGNE PELADE. 195 ARTICLE TROISIÈME. TEIGNE PELADE. Historique. — Les nosologistes se sont trouvés singu- lièrement embarrassés quand il a fallu assigner à la teigne pelade une place dans leurs classifications ; qu'on s'attachât au symptôme principal de la maladie, ou qu'on s'appliquât à en chercher l'élément primitif, la difficulté était la même. Les anciens avaient surtout été frappés de la chute des cheveux, de là les noms d'area et d'alopecia qu'ils donnent à cette affection; les modernes ont attaché plus d'importance à un autre symptôme, à la décoloration de la peau et des poils, et l'ont appelée achrome, leucopathie,vitiligo, ou l'ont fait rentrer dans la classe des dermatoses dyschromateuses. Mais quel rapport y a-t-il, je vous le demande, entre la chute des cheveux et une décoloration de la peau? Et com- ment M. Cazenave a-t-il pu confondre sous le même nom vitiligo deux affections de nature si différente, dont l'une consiste simplement dans un vice congénital ou accidentel de la sécrétion pigmen taire (fait de médiocre importance), tan- dis que l'autre consiste principalement dans une altération profonde des poils, et s'accompagne souvent de la perte de la barbe ou de la chevelure ? Plus tard, nous établirons avec soin le diagnostic différentiel entre ces deux affections que, d'ailleurs, d'autres auteurs modernes, M. Rayer entre autres, n'ont point confondues. Bateman avait pressenti l'analogie qui existe entre la pelade et les autres espèces de teignes; il la décrit sous le nom de porrigo decalvans, et, pour justifier la place qu'il lui donne à côté du favus (porrigo favosa), il suppose (sin- gulière hypothèse!) l'existence de pustules d'une durée si courte qu'elles passent toujours inaperçues. 196 DES TEIGNES. En 48/i3, M. Gruby découvre la véritable nature delà pe- lade-, il montre que c'est, comme le favus, une affection d'origine végétale, et il décrit le parasite qui produit cette affection : c'est le microsporon Audouini. La description donnée par M. Gruby est assez exacte, les caractères des spores et des tubes de mycélium sont bien ceux qui appar- tiennent au microsporon Audouini; malheureusement, la plus grande partie du mémoire de M. Gruby n'est qu'un roman. Aussi M. Robin a-t-il nié l'existence du microsporon Audouini, comme celle du microsporon mentagrophytes , n'admettant d'autre microsporon que celui qui existe dans le pityriasis versicolor, le microsporon furfur. Mais les erreurs commises par M. Gruby dans la description du cryp- togame par lui découvert, n'empêchent aucunement l'exis- tence de ce dernier, que j'ai eu maintes fois l'occasion d'ob- server. Je ne puis donc pas partager l'opinion de M. Robin, et j'espère que mes recherches microscopiques contribueront à maintenir, comme espèce botanique distincte, le micro- sporon d'Audouin, et que ce parasite de la teigne pelade n'aura pas le sort du microsporon mentagroplnjtes, dont, le premier, j'ai nié l'existence en prouvant qu'il n'était autre que le tricbophylon tonsurant. En 1853, dans mes Recherches sur la nature et le traite- ment des teignes, je rapprochai du favus et de la teigne ton- surante deux formes d'alopécie auxquelles, profitant de la découverte de M. Gruby, je donnai le nom de teigne achro- mateuse et de teigne décalvante. J'admettais bien que les deux affections étaient produites par un cryptogame de la même espèce, par un microsporon , mais je pensais qu'il y avait entre le parasite de l'une et le parasite de l'autre quelques différences légitimant la distinction en deux varié- lés : le microsporon Audouini et le microsporon decalvans ; TEIGNE PELADE. 197 et les différences des caractères cliniques me confirmaient dans cette opinion que j'ai abandonnée. J'ai reconnu que les différences microscopiques et cliniques n'étaient pas aussi accusées que je l'avais cru tout d'abord 5 j'ai plusieurs fois observé la réunion des deux espèces sur une même tête, et, en ce moment, vous pouvez en voir dans le service un remarquable exemple ; quelquefois même, j'ai trouvé réunies la teigne décalvante et les deux variétés de forme de l'acbromateuse. Aujourd'hui donc, je ne fais qu'une seule espèce des teignes achromatcuse et décalvante, et je donne à cette espèce le nom de teigne pelade, vieux mot employé par les auteurs du seizième et du dix-septième siècle, qui considéraient cette affection comme une alopécie syphilitique. — Je n'admets point l'alopécie syphilitique comme l'entendent quelques auteurs; quand les cheveux tombent dans le cours de la maladie vénérienne, c'est qu'il y a une affection cutanée spécifique au cuir chevelu ; d'autres fois ce sont des exostoses qui se sont développées dans cette région ; dans ces cas seulement l'alopécie mérite d'être appelée syphilitique. La pelade qui se montre chez les sujets atteints de syphilis, sans avoir été précédée, sans être accompagnée d'une affection quelconque de la région qui en est le siège, reconnaît toujours comme cause déter- minante la présence sur les poils d'un cryptogame parasite. Nosoguaphie. — Trois périodes doivent être distinguées dans la marche de la pelade, comme dans celle des autres espèces de teignes. Deux phénomènes seulement caractérisent la première période ou période de germination; ce sont le prurit et les altérations primitives des poils. Le prurit est franc et ordinairement modéré. Les altérations des poils sont très 198 DES TEIGNES. variables : tantôt bien marquées, d'autres fois au contraire très obscures , elles consistent le plus souvent dans un aspect terne et poudreux; les cheveux paraissent sales et ont une couleur rougeâtre, quand ils ne sont pas décolorés. A la deuxième période , le champignon se manifeste au dehors sous forme d'un duvet grisâtre qui passe souvent inaperçu, parce qu'il est peu abondant. Le prurit persiste et le cuir chevelu offre parfois un état d'hypertrophie fort remarquable bien décrit par M. Devergie. Cependant cet auteur a eu tort de comparer à l'œdème cet empâtement des tissus, car l'application du doigt ne détermine jamais de dépression dans la teigne pelade, comme dans l'œdème. — À cette époque de la maladie, l'altération des cheveux ou des poils est plus prononcée, si déjà elle existait à la première période • les cheveux tombent et se reproduisent alterna- tivement. Mais, au bout d'un certain temps, ils sont devenus méconnaissables, et ne se distinguent en rien des poils de duvet que l'on trouve sur les différentes parties du corps des jeunes enfants. La troisième période arrive : les démangeaisons conti- nuent, les poils tombent pour ne plusse reproduire, les parties malades s'affaissent sensiblement, et le duvet blan- châtre, comme féculent, qui constituait le parasite, ne tarde pas à disparaître. A une époque avancée, on ne distingue plus de traces de duvet sur les surfaces malades ; la perte des cheveux est devenue irrémédiable. Nous avons établi (classification des teignes) des variétés de forme et des variétés de siège dans la pelade, comme dans les teignes faveuse et tonsurante. Il y a deux variétés de forme,, et ces variétés correspondent aux deux espèces que j'admettais autrefois; ce sont : la pelade achromateuse (ancienne teigne achromateuse), et TEIGNE PELADE. 19S la pelade décalvante ou ophiasique (ancienne teigne décal- vanle). La pelade achromateuse est \eporrigo decalvans de Bate- man, le vitiligo du cuir chevelu et delà barbe de M. Cazenave ; elle peut se présenter sous deux formes différentes. Tantôt les surfaces malades sont déprimées, comme les parties af- fectées de favus, après la chute des croûtes; tantôt, et plus souvent, elles sont au même niveau que les surfaces voisines ; cette distinction est sans grande importance, si ce n'est au point de vue pronostique. C'est surtout dans la variété achro- mateuse que les poils offrent, à la première période de l'af- fection, les altérations dont nous avons parlé; ils ont un aspect sale et terne, sont fins et décolorés, quelquefois rou- geâtres; phénomènes qui, soit dit en passant, ne sont jamais observés dans le vitiligo non dermophytique. A la deuxième période, on voit se dessiner des plaques ordinairement ovalaires, remarquables par la décoloration de la peau, et sur lesquelles on voit tomber peu à peu les poils qui les recouvrent; bientôt la dénudation est complète, au moins en apparence, et les caractères de l'affection para- sitaire sont alors extrêmement tranchés. Le nombre de ces plaques ovalaires, d'un blanc de lait, est très variable; il peut n'y en avoir qu'une seule, comme on l'observe assez souvent à la face; d'autres fois, on en voit douze ou quinze, qui, dispersées sur tout le cuir chevelu, donnent à cette région une apparence des plus bizarres. Quoi qu'il en soit, si l'affection n'est pas attaquée par des moyens de traitement convenables, les plaques blanches se multiplient, s'agrandissent; puis, se réunissant, elles occu- pent la plus grande partie de la tète, plus ou moins complè- tement dénudée. Quelquefois le mal s'arrête pendant un certain temps pour reprendre bientôt sa marche lentement 200 DES TEIGNES. envahissante, et il n'est pas rare de le voir s'étendre sur toutes les parties du corps, détruisant partout les poils qu'il rencontre. Dans ce cas, la maladie persiste jusqu'à la dispa- rition complète du système pileux à la surface de la peau. Cependant, il est moins rare de voir l'affection parasitaire achromateuse borner son siège au cuir chevelu ou à la barbe; parfois môme la guérison spontanée arrive avant que la maladie soit parvenue à la troisième période; le pigment reparait sur les surfaces décolorées, les poils recouvrent peu à peu leurs caractères normaux, et les parties affectées ne se distinguent plus des parties demeurées intactes. Mais ces faits sont des exceptions. La pelade décalvante a une marche beaucoup plus rapide que la variété précédente, dont elle se distingue, comme nous allons le voir, par d'autres caractères importants. Au début, on observe du prurit et, assez souvent, une hypersé- crétion d'épiderme ; les poils ne présentent point d'altération bien marquée., et cependant, quand le champignon paraît, ils tombent rapidement et en grand nombre, sur des surfaces qui n'ont aucune forme régulière ; de sorte qu'au bout de peu de temps , on trouve de larges plaques dénudées, sinueuses, sur lesquelles la peau a conservé sa couleur normale. Ainsi, en résumé, marche rapide, chute des poils avant toute altération appréciable de leurs caractères physiques, irrégularité des surfaces dépouillées, couleur normale de la peau, sont autant de caractères qui appartiennent à la teigne pelade décalvante, et qui sont plus que suffisants pour la distinguer toujours de la variété précédente (pelade achro- mateuse), quand les deux n'existent pas en même temps sur le même sujet. Nous ne reviendrons pas sur ce diagnostic différentiel. Les variétés de siège n'ont presque aucune importance TEIGNE PELADE. 201 dans la teigne pelade ; cette affection offre partout les mêmes caractères, et les différences entre les deux variétés que nous avons admises se trouvent dans les autres régions, comme au cuir chevelu ; aux parties sexuelles, le vitiligo simple n'est pas rare, et il faut prendre garde de le con- fondre avec la pelade achromateuse ; il en est de môme à la face dorsale des mains et des doigts. Nous avons dit que la pelade décalvante avait une marche très rapide tandis que l'achromateuse avait, une marche assez lente ; par conséquent, la durée de cette dernière est beau- coup plus longue que celle de la première, qui a souvent ravagé toute la surface du corps en moins d'un mois ou six semaines. Deux modes de terminaison peuvent être observés : ce sont la calvitie définitive et la guérison spontanée; la première, plus fréquente, arrive plus souvent dans la pelade décal- vante ; la dernière n'est pas rare dans la pelade achromateuse. Etiologie. — Nous n'avons que peu de chose à dire des causes prédisposantes. Aucun âge n'est à l'abri de la pelade; cependant, comme la teigne tonsurante, cette affection oc- cupe le cuir chevelu chez les enfants, et plus souvent la barbe ou toute autre région velue chez l'homme adulte. Rien de particulier à noter sur l'influence du sexe, du tempéra- ment, de la constitution ; les forts et les faibles, les lympha- tiques et les bilieux, les hommes et les femmes sont a peu près aussi souvent atteints les uns que les autres. Parmi les influences hygiéniques, l'humidité seule mérite d'être mentionnée, avec la syphilis, parmi les causes pathologiques. Le microsporon Audouini est la seule cause déterminante de la pelade. Quels sont le; caractères particuliers de ce végétal, et quelles altérations produit-il dans la texture d s 202 DES TEIGNES. poils qu'il affecte? Voilà deux questions d'autant plus inté- ressantes pour nous qu'elles ne sont traitées nulle part, et que nous devons y répondre par des recherches personnelles à peine achevées en ce moment. Dans le microsporon Andouini, les spores soiH plus petites et moins nombreuses que dans le trichophyton ; les tricho- mata plus nombreux. La disposition du champignon, par rapport à la tige et à la racine du poil, est fort remarquable et bien différente de celle du trichophyton. Ainsi, sur la tige, les spores forment quelquefois de petits groupes isolés ou affectent une disposition racémiforme. La tige ' elle-même présente de distance en distance des renflements ou nodo- sités, sphériques ou ovoïdes, constitués par les fibres longi- tudinales dilatées et incurvées, au travers desquelles on aperçoit des amas de sporules. Dans les intervalles des renfle- ments le poil ne paraît pas malade. Vous savez que le trichophyton produit d'autres désordres sur la tige du cheveu, qui est altérée dans toute son étendue, épiée à ses deux extrémités, fasciculée, offrant véritablement l'aspect d'un fagot. Les fibres longitudinales du cheveu sont écartées par les spores, quelquefois brisées, formant çà et là des éclats sur la tige. Or, cette disposition du champignon est exceptionnelle dans le microsporon et jamais d'ailleurs aussi prononcée que dans le trichophyton. Dans la pelade, on ne constate de brisure, sur les cheveux malades, qu'au niveau des nodosités qui se rompent à la manière d'un jonc. Quand l'altération cryptogamique est parvenue à son summum d'intensité, les fibres du cheveu sont écartées dans toute leur étendue par les spores disposées en séries linéaires; mais le cheveu est mince, transparent, aplati et non en fascicules ou en touffes, comme dans la teigne lon- surante. TEIGNE PELADE. 203 Sur la racine, les désordres ne sont pas moins remarqua- bles. Ainsi, le plus grand nombre des cheveux extraits des tonsures de la pelade ont un bouton sans capsule, tandis que, dans la teigne tonsurante ou l'herpès en desquama- tion, ils n'en ont pas, puisqu'ils sont rompus aux deux extrémités. Dans la pelade, la racine du cheveu est recour- bée en crosse ou droite et en massue ; le cheveu extrait de la circonférence des tonsures dans l'herpès offre souvent un renflement énorme qu'on peut comparer pour la forme soit à l'oignon, soit au navet ; et si l'altération de la racine est portée aussi loin que possible, celle-ci présente l'aspect d'une fourche ou d'un trident. Le microsporon épidermique et le microsporon unguéal (si tant est qu'il existe) sont faciles à constater, en exami- nant au microscope le duvet grisâtre qui recouvre les plaques dénudées de la pelade et la substance qui forme les points jaunes de l'ongle dans la même maladie; mais vous trouverez toujours avec les éléments cryptogamiques un grand nombre de cellules épithéliales, tandis que vous trouverez le tricho- phylon à l'état de pureté dans les gaines blanches qui entou- rent les poils brisés de l'herpès en desquamation. Ai-je besoin de dire que la teigne pelade peut se trans- mettre des quatre manières que nous avons indiquées pour les autres teignes ? Cependant l'inoculation n'a pas encore été pratiquée. Le microsporon Àudouini, comme les autres champignons des teignes, peut vivre aux dépens des poils, de 1'épiderme et des ongles. Quand il se trouve sur les poils, il produit l'affection quo nous décrivons en ce moment. Presque toujours, en mémo temps, il affecte L'épidémie dans l'intervalle des poils, et se montre sous ia forme de substance féculente. 204 DES TEIGNES. Déjà je vous ai dit que je n'avais pas eu l'occasion d'ob- server le microsporon de l'ongle, ce qui ne veut pas dire qu'il n'existe pas (1). Diagnostic. — Il est toujours facile. L'affection n'est ca- ractérisée que par un petit nombre de signes, mais ces signes n'appartiennent guère qu'à elle et sont presque pa- tbognomoniques. J'ai dit que je ne reviendrais pas sur le diagnostic diffé- rentiel entre la variété achromateuse et la variété décal- vante. Quelles sont les autres affections qui offrent assez d'ana- logie avec la pelade pour pouvoir être quelquefois confondues avec elle? Nous trouvons surtout le vitiligo, les diverses espèces de teignes, enfin l'alopécie sénile et l'alopécie sym- ptomatique de l'acné sébacée, des maladies graves.... Peut-on éviter l'erreur commise par M. Cazenave, et distinguer toujours aisément le vitiligo simple (affection dyschromateuse de la peau) du vitiligo parasitaire, ou pelade achromateuse? Oui assurément, et voici des caractères qui ne permettent pas la moindre hésitation dans le plus grand nombre des cas. Le vitiligo simple n'a pas son siège de pré- (1) En effet, il vient de s'en présenter tout récemment un beau cas à mon observation. Un médecin de la ville m'a fait conduire au dispensaire de l'hô- pital Saint-Louis l'enfant de sa bonne, petit garçon âgé de 10 à 12ans, affecté d'une pelade ophiasique depuis trois mois. La tète de cet enfant est cou- verte de plaques dénudées; sur deux doigts de la main droite s'observe une notable altération de l'ongle, qui se rapproche beaucoup de celle produite par le trichophyton. A son extrémité libre, les stries longitudinales sont sépa- rées et l'ongle fait brosse ; sur le corps de l'ongle on remarque, sous la lame superficielle, de petites taches jaunes dirigées dans le sens des stries longitu- dinales. Le microscope nous apprend que ces taches sont formées par \emicro- sporon Audouini qui se présente d'ailleurs avec une richesse remarquable sur tous les cheveux que nous soumettons à l'inspection microscopique . (Bazin.) TEIGNE PELADE. 205 dileetion au cuir chevelu comme la pelade. Les surfaces dé- colorées n'ont pas une forme ovalaire ou circulaire, mais affectent plutôt une disposition irrégulière ; les poils qui les recouvrent ne sont pas toujours altérés dans leurs caractères physiques, et leur décoloration, seule altération qu'on puisse observer, n'existe pas dans tous les cas. Enfin, et c'est là le plus important caractère, autour des parties blanches dé- pourvues de pigmentum, dans le vitiligo simple, on trouve une coloration beaucoup plus foncée de la peau, une hyper- sécrétion pigmenlaire. qui n'existe jamais dans le vitiligo parasitaire, îl semble que, dans le vitiligo simple, il n'y ait pas, en somme, dans la peau, une moindre quantité de ma- tière pigmen taire; mais celle matière pigmentaire se ré- partit inégalement sur les divers points, et de celte inégale répartition résulte l'affection dyschromateuse. Dans l'autre cas, au contraire, le pigment est détruit, absorbé par le parasite, et non plus refoulé sur les parties environnantes. Le favus et la teigne tonsurante peuvent-ils être con- fondus avec la pelade? Quand les croûtes laveuses tombent ou sont détachées, elles laissent à découvert des surfaces de forme ovalaire ordinairement arrondies, légèrement déprimées, et que l'on pourrait prendre pour des pla- ques de teigne pelade achromateuse, si la couleur n'était bien différente dans les deux cas: d'un blanc de lait dans cette dernière affection et d'une rougeur plus on moins intense dans la teigne faveuse. Mais la dépression et la rou- geur s'effacent graduellement, la peau (si toutefois il y a oblitération des conduits pilifères et calvitie définitive) se change en un tissu cicatriciel; et, à mesure que cette trans- formation s'opère, l'analogie devient plus grande entre les surfaces autrefois couvertes de croules, et celles qui sont affectées de teigne achromateuse. 206 DES TEIGNES. Plus souvent l'erreur opposée sera commise, et la pelade achromateuse sera prise pour du favus arrivé à la période ci- catricielle, surtout s'il y a coexistence des deux affections pa- rasitaires. Pour éviter cette erreur, il suffit de savoir que la méprise est possible ; qu'on y regarde de près, la différence est grande entre les cicatrices du favus et les plaques de teigne achromateuse. Il paraît, au premier abord, presque ridicule de dire que la teigne tonsurante peut être confondue avec la pelade ; car, dans la première, la peau offre une couleur notablement plus foncée, tandis que, dans l'autre, elle est, au contraire, déco- lorée. Cependant j'ai vu commettre quelques erreurs par des élèves qui connaissaient, pour les avoir appris dans les livres, ces deux caractères opposés de l'une et l'autre affection parasitaire; il suffit, en effet, pour se tromper, de prendre la coloration normale pour la coloration pathologique, et réci- proquement. Je n'insiste pas davantage. Dans la pelade décalvante (seule variété qui puisse être confondue avec les différentes espèces d'alopécie), la calvitie a lieu par places ; elle occupe indistinctement toutes les régions du cuir chevelu. Dans i'alopécie sénile, ce sont ordi- nairement les régions antérieures et latérales de la tète qui sont dénudées. Dans la véritable alopécie syphilitique, la chute des cheveux a été précédée de syphilides ou d'exos- toses ; et, dans la convalescence des maladies graves , comme dans l'acné sébacée, elle a lieu irrégulièrement et presque simultanément sur toutes les régions du cuir chevelu-, en outre, dans cette dernière affection, la tète est couverte d'un enduit huileux, brunâtre ou rougeâtre. Ici une omission importante a été faite. Le lupus érylhé- mateux du cuir chevelu peut simuler la pelade achromateuse au point d'embarrasser les médecins les plus habiles. A la Teigne pelade. 207 période d'état du lupus, le bourrelet circonférentiel accom- pagné d'une rougeur légère, est un signe distinctif delà plus haute importance. Mais, quand le lupus est guéri, ce signe disparaît, et l'affection offre encore avec la pelade achroma- teuse tout autant, si ce n'est plus, d'analogie. Alors il faut, avec le plus grand soin, examiner les surfaces dénudées ; dans la pelade, de nombreux poils follets existent, visibles à l'œil nu ou à la loupe; dans le lupus érythémateux, il n'en reste pas trace, et l'on a sous les yeux de véritables cicatrices. Je n'insiste pas d'avantage. Pronostic. — La pelade est une affection plus sérieuse que les autres espèces de teigne, quoique dans les cas mêmes où elle se généralise sur tout le corps, elle ne détermine aucune altération de la santé générale chez les sujets qui en sont affectés. Toute la gravité est relative au système pileux, qui est singulièrement compromis, dans la variété décalvante surtout, et dans la pelade achromateuse déprimée, beaucoup plus que dans l'achromateuse non déprimée. La calvitie est très fréquente, et survient très rapidement; la curation est très longue et très difficile à obtenir, si la maladie est déjà un peu ancienne. Traitement. — Il ne diffère pas du traitement des autres espècesde teignes. Il faut combiner l'épilation avec l'emploi des agents parasiticides (pommade au turbith, solution de sublimé) de la manière que nous avons déjà plusieurs fois indiquée. Ici, l'épilation est extrêmement difficile, et ce n'est qu'à force de persévérance qu'on peut triompher du mal. Ce sont des poils de duvet qu*il faut extraire, et ils sont tellement fins qu'ils ont passé longtemps inaperçus sur les surfaces malades-, ils se brisent presque tous, et l'opération doit être 208 DES VÉGÉTAUX ÉPIbERMOPHYTlQUF.S. répétée un grand nombre de fois sans beaucoup de succès. Cependant, au bout de quelque temps, 0:1 voit paraître quelques poils beaucoup plus forts et plus résistants, qui, d'abord très rares, deviennent de plus en plus nombreux; au fur et à mesure que l'on détruit le cryptogame, leurs carac- tères physiques se rapprochent de ceux des cheveux restés sains. Il faut qu'il n'y ait entre les uns et les autres aucune différence appréciable ..pour cesser l'épilation, et déclarer la maladie arrivée à parfaite guérison. L'avulsion des cheveux ou des poils ne doit pas être seule- ment pratiquée sur les surfaces malades, mais étendue aussi au pourtour des plaques dans un rayon variable, afin d'arrê- ter les progrès du mal. CHAPITRE If, VÉGÉTAUX ÉPIDERMOPHYTIQUES. Ces affections, que nous appelerons crasses parasitaires, sont assez nombreuses, et on les trouve dispersées en diffé- rents chapitres des traités classiques de dermatologie ; elles appartiennent en effet à divers ordres de la classification de Willan. Ce sont le pityriasis versicolor, le pityriasis nigra, le chloasma ou macula gravidarum, les taches hépatiques, les éphélides lenticulaires, etc., qui consti- tuent, pour les auteurs, autant de maladies différentes; tandis que, pour nous, elles ne sont qu'une seule et même affection parasitaire, produite par le microsporon fur fur découvert par Eichstedt et qui serait mieux nommé epider- mophyton. Ce cryptogame vit aux dépens de l'épiderme dont il occupe l'épaisseur; cependant il est situé plus superficiellement que les végétaux trichophytiques et onychophyliques ; quelque- OU CttASSl.S PAlUSlTAlKES, 209 fois aussi, mais rarement, on le trouve sur les poils follets; jamais il ne détruit les cellules pigmenlaires, comme l'ont avancé quelques auteurs, qui l'ont évidemment confondu avec le microsporon d'Audouin. Nosographie. — Les crasses parasitaires offrent à peu près partout les mêmes caractères; elles peuvent se montrer sur tous les points de la surface cutanée, principalement sur le tronc et sur le visage. Tantôt elles ont une couleur très foncée, comme dans la variété qui répond au pityriasis nigra des auteurs; tantôt, au contraire, elles se distinguent à peine des surfaces voisines. Ici, elles paraissent sous forme de points isolés, et là (c'est principalement au tronc qu'on i'observe), les points se réunissent, et l'affection occupe de larges sur- faces. Mais ces nuances de couleur, ces différences de forme, d'étendue, de siège, n'apportent jamais de changements bien prononcés dans l'aspect de l'affection, dont les signes sont aussi simples que peu nombreux. Des démangeaisons légères accompagnent ordinairement et souvent précèdent les crasses parasitaires ; elles devien- nent toujours plus vives, si l'on en croit les différents auteurs, sous l'influence de certaines conditions hygiéniques et phy- siologiques. On lit également dans quelques ouvrages, no- tamment dans celui de M. Cazenave, qu'elles appartiennent à certaines variétés et non à certaines autres; ainsi elles seraient constantes dans les éphélides, et n'existeraient jamais dans le pityriasis versicolor, à tel point que leur absence ou leur existence constituerait un signe d'une grande valeur. Nous ne partageons pas cette opinion, et nous avons plusieurs fois observé, chez les malades atteints de pityriasis versicolor, des démangeaisons aussi prononcées et plus peut- être que dans les éphélides. u 210 DES VÉGÉTAUX ÉP1DERMOPHYTIQUES Une exfoliation furfuracée continuelle est un des sym- ptômes les plus constants des crasses parasitaires; elle est parfois si peu prononcée qu'il faut examiner avec soin les surfaces malades pour la découvrir ; elle ne se manifeste qu'à une certaine époque de la maladie, quand le champi- gnon contenu dans l'épaisseur de l'épiderme rompt la la- melle extrêmement mince qui le recouvrait. Elle est formée, non-seulement de débris épidermiques, mais encore et en grande partie de matière parasitaire ; aussi la couleur des squames, leur forme, leur disposition, constituent-elles autant de caractères qui permettent de distinguer les crasses parasitaires de certains pityriasis dartreux. La durée de ces affections est ordinairement longue, et les récidives sont fréquentes, caractère qui les a fait rattacher à la dartre par le plus grand nombre des auteurs. M. Hardy lui-même, qui admet l'existence d'un parasite dans le pity- riasis versicolor, est disposé à considérer cette affection comme étant d'origine dartreuse ; il pense que le parasite n'est, clans ce cas, qu'un phénomène accessoire et ne mérite pas, à beaucoup près, la même importance que les parasites des teignes. Cette opinion n'est pas la mienne ; le microsporon furfur existe toujours à n'importe quelle période de la maladie, et lors même qu'on n'observe sur toute la surface du corps qu'une tache de la plus petite dimension, on peut démontrer son existence par l'examen microscopique. Si la récidive arrive si souvent dans ces affections, c'est que, le plus sou- vent, le cryptogame n'a été qu'incomplètement détruit ; il suffit, comme dans la teigne, de laisser quelques spores pour que le mal se reproduise au bout d'un certain temps. D'ail- leurs pourquoi ne pas admettre que les malades se sont de nouveau exposés à la contagion? J'imagine que rien ne serait OU CRASSES PARASITAIRES. 211 plus fréquent que les affections parasitaires, si certaines conditions de l'organisme ou de la peau n'étaient pas néces- saires au développement des parasites. Un seul mode de terminaison peut être observé, c'est la guérison, qui arrive tantôt spontanément et tantôt sous l'influence des moyens thérapeutiques qui sont mis en usage. Peut-être la guérison spontanée est-elle plus rare qu'on ne le croit, et ne consiste-t-elle qu'en une amélioration plus ou moins grande, d'où sans doute la fréquence des récidives. Étiologie. — Parmi les causes prédisposantes, l'âge n'est pas sans influence : les crasses parasitaires ne se montrent guère chez les enfants, mais presque toujours chez les ado- lescents et les adultes. Le tempérament lymphatique, au dire de tous les auteurs, favorise le développement de ces affec- tions. Certaines conditions physiologiques ont une action incontestable, par exemple, la grossesse. Peut-être aussi, parmi les influences pathologiques, peut-on signaler cer- taines affections du foie qui dépendent de maladies constitu- tionnelles. La cause déterminante est le microsporon furfur, dont je vous montrerai prochainement un bel échantillon, recueilli sur le visage d'une femme en couches dans le service de M. Hardy. — U épidermophyton, ou champignon des crasses parasitaires, se présente avec des caractères parfaitement identiques dans le pityriasis versicolor, le chloasma, les taches hépatiques. Ainsi, quand on avance qu'il se développe exclu- sivement sur les parties soustraites au contact de l'air, comme le tronc et les membres, on commet une erreur, puisque, dans le chloasma, il végète très bien sur la face. Ce champignon tient le milieu entre les cryptogames des teignes et les cryptogames des muqueuses, dont il se rap- 2'12 DES VÉGÉTAUX. ÉPIDEÎÎMOPHYTIQUES proche souvent par un réseau très riche, composé de tubes ou filaments droits ou contournés, simples ou ramifiés, avec des spores terminales. Ajoutons tout de suite que ces fila- ments se distinguent de ceux de V oïdium albicans en ce qu'ils sont plus étroits et ne sont pas cloisonnés. Les spores sont presque toutes sphériques,plus grosses que celles du microsporon Audouini; elles réfractent fortement la lumière et paraissent, vues sur le champ du microscope, avoir un contour bilinéaire ; elles ne renferment pas de gra- nules à l'intérieur. Mais ce qui dislingue surtout ce champignon des crypto- games des teignes, c'est la manière dont il se comporte sur les poils : il végète à leur surface, mais ne pénètre pas dans leur intérieur; je ne l'ai jamais rencontré sur la racine des poils arrivés à leur parfait développement. Cette disposition du champignon vous rend compte de la facilité avec laquelle on guérit les crasses parasitaires; de simples lotions avec la solution de sublimé suffisent pour détruire le parasite qui les occasionne. La crasse parasitaire n'est pas uniquement constituée par ce parasite, mais par un mélange d'épiderme et de crypto- games, au milieu desquels on trouve un plus ou moins grand nombre de poils follets. Dans le principe, les cellules épithé- liales prédominent sur i'élément cryptogamique et les per- sonnes peu habituées aux études microscopiques pourraient confondre le microsporon furfur avec de 1'épiderme, mais on peut se débarrasser de ce dernier au moyen de l'ammo- niaque, d'après le conseil donné par M. Robin, avant d'exa- miner au microscope le produit pityriasique. Quant à la couleur café au lait du pityriasis versicolor, c'est bien, n'en déplaise à M. Devergie, le champignon qui la produit par son mélange avec 1'épiderme, puisqu'on ne OU CRASSES PARASITAIRES. 213 trouve, dans la crasse parasitaire, aucun autre élément au- quel on puisse la rapporter. Diagnostic. — Parmi les affections cutanées, il en est peu d'aussi faciles à reconnaître que les crasses parasitaires ; quand on a vu une ou deux fois un pityriasis versicolor — , on ne s'y laisse guère tromper. Cependant, il peut se présen- ter des circonstances qui apportent quelque difficulté dans le diagnostic: ainsi, qu'une syphilide papuleuse se développe chez un sujet affecté depuis quelque temps de pityriasis ver- sicolor, à un certain moment, les papules disparaissant, il ne restera plus que des macules dont l'aspect sera peu différent de celui des crasses parasitaires. Souvent, en pareil cas, le parasite passe inaperçu ; on s'étonne seulement qu'une sy- philide papuleuse soit accompagnée de démangeaisons. — « Parfois, cependant, les malades sauront vous dire qu'ils portent deux affections dont l'une est récente et l'autre très ancienne. Nous avions dernièrement, au n° 12 de la salle des femmes, un curieux exemple de cette coexistence du pity- riasis versicolor avec une syphilide papuleuse. Le plus souvent, la forme et l'étendue des taches, leur couleur, leur desquamation particulière, un prurit modéré, suffisent pour établir le diagnostic. On peut cependant confondre les crasses parasitaires avec d'autres affections cutanées ; et comme, dans ces dernières, il n'y a point de cryptogame, je dirai ici, une fois pour toutes, que l'examen microscopique est toujours un moyen infaillible auquel il faut par conséquent recourir dans les cas embarrassants. Les épbélides lenticulaires peuvent être prises pour des taches de rousseur ; mais il n'y a dans ces dernières ni prurit, ni furfuration, et si l'on essaye (le les faire disparaître 214 DES VÉGÉTAUX ÉPIDERMOPHYTtQUES. en les grattant avec un instrument tranchant, on n'y réussit point. Toutes ces différences se comprennent à merveille ; il Suffit de savoir qu'on a : d'un côté, une affection parasitaire; de l'autre, une simple affection dyschromateuse. La cou- leurseule peut induire en erreur quandon n'est pas prévenu. Les taches hépatiques simulent quelquefois les macules syphilitiques, et c'est encore la couleur qui trompe, quoi- qu'elle soit un peu différente dans les deux cas. D'ailleurs, il est rare de ne pas trouver les macules syphilitiques ac- compagnées d'un certain nombre d'autres symptômes qui ne peuvent pas laisser dans l'incertitude. Le pityriasis m'araserait peut-être plus difficile à distin- guer de l'acnésébacée. Mais le siège n'est point le même: le pityriasis occupe ordinairement les régions temporales, tandis que l'acné occupe presque toujours le bout du nez; et puis, il n'y a pas de prurit dans cette dernière affection, phénomène qui manque rarement dans la première. Enfin, et c'est là le principal caractère différentiel, la matière sé- bacée qui se concrète à la surface de la peau ne peut res- sembler que de loin à la matière parasitaire et épidermique qui constitue les taches brunes eu pityriasis nigra. On comprend difficilement, quand on n'a appris les affec- tions cutanées que dans les livres, que le pityriasis versi- color, si remarquable par la couleur café au lait des surfaces qu'il recouvre, puisse être confondu avec le vitiligo ; il y a néanmoins des cas* dans lesquels l'incertitude est un ins- tant permise, surtout lorsqu'on n'ii pas l'œil exercé; car l'affection parasitaire peut être étendue en larges plaques qui laissent quelques rares intervalles de peau saine; on prend alors la couleur normale pour la couleur pathologique, et la peau saine paraît décolorée. Il me suffit de vous avoir signalé la possibilité et la cause d'une semblable erreur. OU CRASSES PARASITAIRES. 215 Le pityriasis simplex et le pityriasis rubra se distinguent principalement par leur couleur, leur marche. Les squames sont différentes; elles sont plus épaisses, plus prononcées, plus franchement lamelleuses dans ces deux variétés de pityriasis que dans la variété versicolor. Quant à l'acné séhacée, elle se distingue du pityriasis versi- color par les caractères que nous avons indiqués tout à l'heure. Je ne reviendrai pas non plus sur la roséole syphilitique, au milieu de laquelle il est parfois si difficile de reconnaître le pityriasis parasitaire. Pronostic. — Il n'offre absolument aucune gravité 5 cepen- dant, les récidives sont à craindre. Traitement. — La thérapeutique des crasses parasitaires est extrêmement simple. L'affection est toujours produite par un champignon, qui, se trouvant dans la partie la plus superficielle de l'épiderme ou à la surface de la peau, est facile à atteindre. Les agents parasiticides que nous avons fait connaître sont ici parfaitement applicables; ils doivent être employés en lotions, en frictions rudes ou en bains, selon le siège et l'étendue de l'affection. Ordinairement, dans notre service, les malades atteints de pityriasis versicolor font des lotions avec le solutum de sublimé, et prennent des bains sulfureux -, ces derniers peu- vent être avantageusement remplacés par des bains de sublimé. Le traitement général interne est, pour nous, sans aucune valeur, puisque nous ne croyons point que l'affection soit produite ni entretenue par un vice général de l'économie ; il faut qu'il y ait, ce qui peut être, complication de dartre, de scrofule, pour que nous soumettions les malades aux 216 DES VÉGÉTAUX ÉP1THÉL10PHYTIQUES. préparations arsenicales ou balsamiques, aux amers et aux toniques, CHAPITRE III. VÉGÉTAUX ÉPITHÉLIOPHYTIQUES. Je ne dirai qu'un mot de ces affections qui sortent des cadres de la pathologie cutanée, et que cependant je ne pouvais pas passer sous silence, parce que, dans certaines circonstances, par. suite de frottements répétés, la prau revêt complètement les caractères des muqueuses. D'ailleurs, au niveau des orifices des conduits naturels (bouche, anus), le système cutané et le système muqueux se réunissent ; et les muqueuses, dans une étendue variable, font partie de la sur- face extérieure du corps. Lps végétaux épilhéliophytiques se développent assez souvent aussi sur la peau dénudée, comme à la suite d'applications de vésicatoires..*.. Si ces parasites nous intéressent moins que les précédents, c'est surtout à cause du rôle tout à fait secondaire qu'ils jouent dans les affections où on les rencontre, Dans la plu- part des cas, ils surviennent consécutivement à u»ne altération des solides ou des liquides de l'économie ; tel, par exemple, Y oïdium albicans (champignon du muguet), qui ne se montre jamais avant que le mucus buccal soit devenu acide. Cepen- dant, malgré leur moindre importance, ces parasites méritent l'attention du médecin ; ce ne sont point encore les parasites de la lésion pathologique ; mais plutôt, ils forment le passage entre ces derniers et les parasites précédents (teignes, crasses parasitaires). Ils sont contagieux et, chose remarquable, ils disparaissent avec une facilité merveilleuse par l'emploi des mêmes agents parasiticides; aussi ne saurais-je trop vous engager à remplacer, dans le traitement du muguet buccal, PARASITES ANIMAUX, 217 les préparations de borax si usitées, par le solutum de sublimé qui a une action bien plus prompte. Enfin, avant d'abandonner l'étude des affections cutanées produites par les végétaux parasites, je dois vous signaler un fait qui a une certaine importance pratique. Beaucoup d'altérations, désignées sous le nom de pourritu- res, gangrènes, mélanoses des muqueuses ou des ulcères, etc., sont produites par des champignons qui se développent sur ces surfaces; il faut alors, dans les pansements, avoir prin- cipalement pour but de détruire ces productions végétales: c'est en pareilles circonstances que l'emploi de l'huile de cade nous donne des résultats avantageux. DEUXIEME SECTION AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES PAR LES PARASITES ANIMAUX. Les animaux qui vivent sur la peau de l'homme appartien- nent à deux catégories distinctes : les uns occupent la surface extérieure du corps et la parcourent en toute liberté ; les autres sont situés dans l'épaisseur même de 1'épiderme. Dans la première section se trouvent le pou et la puce com- mune ; dans la seconde, la chique ou puce pénétrante et les acares. Je ne m'occuperai pas de l'histoire naturelle des animaux parasites ; vous trouverez dans les traités spéciaux des détails suffisants et très exacts, car les animaux sont mieux connus, et depuis plus longtemps, que les végétaux para- sites. Je laisserai également de côté l'étude historique de ces affections cutanées, non qu'elle manque d'intérêt, mais parce que je n'aurais pas de faits nouveaux à vous faire connaître, 218 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES et que je ne veux pas ici vous apprendre ce que vous pouvez lire dans tous les ouvrages modernes de dermatologie. J'ajoute que, pressé par le temps, je dois me borner à poser quelques jalons, à l'aide desquels vous puissiez aisément vous diriger dans l'étude de ces affections aussi intéressantes que communes. PREMIÈRE CATÉGORIE. Les animaux parasites qui vivent en liberté à la surface de la peau produisent des affections qui sont journellement confondues avec d'autres que déterminent certains insectes, tels que les punaises, les cousins — Qu'il me suffise de vous signaler le fait, pour vous faire éviter les méprises de ce genre ; car les animaux dont nous venons de parler ne se trouvent qu'accidentellement sur la peau de l'homme ; ce ne sont pas des animaux parasites comme les poux et les puces, et par conséquent ces derniers seuls doivent nous occuper. AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES PAR LE POU. Le pou (pediculus) offre trois variétés, qui sont : le pou de tête, le pou de corps et le pou du pubis. Le pou de tête existe principalement dans le jeune âge, où il complique souvent les achores, l'eczéma, l'impétigo, la teigne (surtout la teigne faveuse). Quelquefois, au contraire, le parasite est antérieur aux éruptions constitutionnelles dont il a, par sa présence, provoqué le développement. Quoi qu'il en soit, des démangeaisons plus ou moins vives se font presque continuellement sentir, et les malades se grattant avec fureur augmentent l'irritation dont le cuir chevelu est le siège, et contribuent à entretenir les éruptions. On voit les animaux parasites se mouvoir en différents points PAR LES PARASITES ANIMAUX. 219 de la tête, au milieu des croûtes qu'ils soulèvent et déplacent ; ils sont toujours accompagnés d'un grand nombre de lentes. En résumé, l'affection pédiculaire du cuir chevelu est ca- ractérisée par le prurit et la présence de lentes et de poux au milieu des éruptions symptomaliques. Dans tous les cas, il est indiqué de traiter cette affection, car nous ne sommes plus au temps où l'on craignait les ré- percussions de la maladie sur les organes intérieurs. Il faut détruire la vermine, et si, pour parvenir rapidement à ce but, les soins de propreté ne suffisent pas, on fera des onctions avec l'onguent napolitain, des lotions avec la sta- phisaigre ou tout autre agent parasiticide. Le pou de corps, qui se rencontre ordinairement chez les sujets d'un âge avancé, manifeste sa présence par des sym- ptômes habituellement fort simples. Presque toujours il produit, accompagnées de prurit, des éruptions papuleuses discrètes auxquelles est réservé le nom de prurigo pédicu- laire. En même temps, on trouve à la surface du corps les lentes et les animaux parasites. Cette affection est sans aucune importance, et il faut l'attaquer par les moyens que nous avons indiqués tout à l'heure, en remplaçant, bien entendu, les lotions par des bains. Je ne fais aucun cas, comme vous voyez, de certains faits plus ou moins étranges, consignés dans les anciens auteurs, et acceptés par quelques observateurs modernes peu scru- puleux. Je ne crois en aucune façon à cette maladie pédicu- laire (phthiriasis), qui résulterait de la génération spontanée d'une grande quantité de poux, et qui, dans certaines cir- constances, pourrait amener des accidents mortels. A. Paré, au chapitre IV de son vingtième livre, page 73S, parlant de cette maladie, dit expressément qu'il ne faut pas la négliger; 220 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES car, ajoute-l-il, plusieurs personnes en ont été travaillées (sic), et en ont perdu la vie, comme Hérode, roi de Judée; Sylla, dictateur de Rome; le poète Alcman; Acactus, fils de Pélias ; Pherecydès, théologien -, Callisthènes, Olynthien ; Mu- tius, jurisconsulte ; Gunus; enfin Antiochus. Immédiatement après cette longue énumération de noms illustres, le même auteur raconte, s'appuyant sur le témoignage de Pline, que les poux se peuvent engendrer par toutes les parties de notre corps, même dans la masse du sang. Si tous ces contes pouvaient passer au temps d'A. Paré, il n'en doit pas être ainsi dans un siècle aussi éclairéque le nôtre. Quelques bains sulfureux et cinabres triomphent en peu de jours de la maladie. Les poux du pubis, autrement dits morpions, peuvent occuper non-seulement les parties sexuelles , mais aussi toutes les régions velues, excepté la tête. Après la région pubienne par laquelle ils débutent ordinairement, les parties le plus souvent affectées sont les aisselles, les cils... Les démangeaisons sont ici plus vives qu ) dans les affec- tions précédentes; la peau est parsemée de granulations rouges, et l'on croirait aisément qu'elle est le siège d'ordures, d'éruptions eczémateuses ou prurigineuses ; quant à l'animal, il est plus difficile à distinguer, car il est moins volumineux que les poux du corps et de la tète, et il adhère fortement aux poils. Quelques frictions avec l'onguent napolitain suffisent pour le détruire et guérir le malade. AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES PAR LA PUCE COMMUNE. Vous connaissez tous assurément la sensation que produit une piqûre de puce; mais peut-être peu d'entre vous savent- PAR LES PARASITES ANIMAUX. 22l iis de quels phénomènes la peau devient le siège sur les points attaqués par le parasite. Immédiatement après la piqûre la peau se soulève; il se forme de petites saillies congestives plus ou moins arrondies, d'un volume variable, et au sommet desquelles on peut dis- tinguer un point plus rouge indiquant le lieu précis où la piqûre a été faite. Bientôt ces saillies s'affaissent et ne tardent pas à dispa- raître complètement et le doigt n'en peut plus reconnaître la plus légère trace ; cependant il reste encore pendant plusieurs heures une altération bien évidente du tégument. — Le point rouge, qui occupait tout à l'heure le sommet de la petite tumeur, devient de plus en plus prononcé et prend tous les caractères d'une petite tache ecchymolique; il oc- cupe maintenant le centre d'un cercle rouge ou plutôt rose, dont la couleur s'efface insensiblement et ne tarde pas à disparaître. Alors il ne reste plus, après la complète dispa- rition de la zone congestive, que l'ecchymose centrale qui persiste pendant plusieurs jours. Quand ces taches sont très nombreuses et répandues sur la plus grande partie du corps, elles sont souvent prises pour des pétéchies, dont elles se distinguent par leur uniformité, leur moindre diamètre et l'absence complète de tous sym- ptômes généraux. DEUXIÈME CATÉGORIE. Cette catégorie comprend la puce pénétrante et l'aca- rus. Je ne dirai rien de la chique ou puce pénétrante , que l'on n'a jamais l'occasion d'observer, si ce n'est dans les 222 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES contrées méridionales. Je ne veux parler que de Yacarus scabiei. AFFECTIONS PRODUITES PAR L'ACARUS SCABIEI. Ces affections sont connues sous les noms de scabies, psore, gale.... On doit considérer la gale comme une affection de la peau, contagieuse, produite \>SLvYacarus scabiei, caractérisée par une éruption spécifique (l'éminence acarienne et le sil- lon), et par des éruptions inflammatoires symptomatiques qui varient suivant l'âge de la maladie, l'âge du sujet con- taminé, et les prédispositions individuelles. Dans l'étude de cette affection, nous suivrons le même ordre que dans l'étude des teignes. Nosographie. — On peut distinguer trois périodes dans la marche de la gale : la première période, ou période d'incu- bation, correspond à la période de germination des végé- taux parasites; la deuxième est la période d'état; la troi- sième comprend les divers phénomènes qui se manifestent après la mort des acares ; les éruptions cutanées disparais- sent graduellement, les démangeaisons s'éteignent, et tout revient promptement à l'état normal. Période d'incubation. — Sa durée varie entre des limites peu rapprochées : tantôt c'est au bout de deux ou trois jours que le parasite manifeste sa présence par les phénomènes dont nous allons parler tout à l'heure ; tantôt ce n'est qu'a- près un mois ou six semaines. On dit généralement que tout est silencieux pendant cette période ; c'est une erreur. Presque toujours des démangeai- sons plus ou moins vives se font sentir sur les parties du corps qu'occupent les parasites, et il n'est pas rare d'observer eu PAR LES PARASITES ANIMAUX. 223 même temps quelques éruptions fugaces mal déterminées, telles que des traînées érythémateuses — Période d'état. — Elle est essentiellement caractérisée par l'apparition de l'animal parasite à la surface de la peau, de même que, dans les affections cutanées produites par les végétaux parasites, la deuxième période était toujours carac- térisée par l'apparition extérieure du cryptogame. Quatre ordres de symptômes méritent de fixer l'attention, ce sont : 1° les symptômes fournis par les parasites eux- mêmes (ici, les aca.res) ; 2° les symptômes fournis par les modifications que les parasites impriment directement à la peau et à ses annexes (ici, les sillons); 3° les éruptions sym- ptomatiques; h° enfin les phénomènes sympathiques (trou- bles de l'innervation cutanée). Acarus. — L'acarus mâle, découvert en 1852 par M. Lan- quetin, alors élève à l'hôpital Saint-Louis, est assez difficile à trouver, et ne joue d'ailleurs qu'un rôle tout à fait secondaire; c'est un animal doué d'une certaine vivacité; il est sans cesse en mouvement, et parcourt en liberté toute la surface du corps; c'est surtout sous les croûtes qu'il faut le chercher pour le découvrir. La femelle seule a de l'importance au point de vue du dia- gnostic 5 elle est logée dans l'épaisseur de l'épiderme où elle occupe un siège précis ; elle se trouve toujours à l'extrémité d'un sillon, où on la dislingue sous la forme d'un petit point blanc, brillant. On peut la mettre à découvert et la prendre à l'extrémité d'une épingle ou d'une aiguille, et souvent on peut apercevoir les mouvements qu'elle exécute. Quant à la nymphe, nous nous bornerons à signaler son existence. Sillons. — Le sillon constitue toutes les altérations que le parasite imprime directement à la peau. C'est un des sym- 22/{ AFFECTIONS CUÏA-NÉES 1 ÎIODL'IÎES ptômes les plus importants de la gale, et quand il est bien tranché, il peut suffire à lui seul pour poser un diagnostic. Aussi nous voyez-vous, à la consultation, occupés à chaque instant de son existence chez les sujets qui présentent des éruptions de nature suspecte. L'acarus logé dans la peau n'y demeure pas toujours à l'état de repos, il chemine dans l'épaisseur de l'épiderme où il se creuse une sorte de terrier ; tantôt la couche épider- mique superficielle est intacte dans toute l'étendue de la voûte ; d'autres fois, elle est détruite en différents points. Toujours est-il que l'on voit se former des petites traînées grisâtres semblables à de très légères égratignures que pro- duirait la pointe d'une épingle, d'une longueur variable, tantôt droites et tantôt courbes, qui, examinées à la loupe, paraissent formées par la réunion d'un très grand nombre de points noirs; ces derniers ne seraient, -dit-on, -autre chose que les fèces de l'animal. Les apparences de ces terriers épidermiques sont bien différentes suivant leur âge, la finesse de la peau et les habi- tudes de propreté des malades; ce sont quelquefois des lignes blanches très peu apparentes. Les sillons offrent deux extrémités: l'une (c'est l'orifice d'entrée) répond au point, où l'acarus a pénétré dans la peau, et l'autre, au point où le parasite est arrivé, dans sa marche plus ou moins lente; non loin de là est le point blanc nacré qui n'est autre chose que l'animal lui-même. Le nombre des sillons est extrêmement variable: chez tel sujet on en voit beaucoup, tandis que chez tel autre il faut chercher longtemps pour en trouver un seul ; ces variations ne sont nullement en rapport avec l'abondance des phéno- mènes éruptifs, mais bien plutôt avec certaines conditions de terrain qui favorisent le développement des acares. Je PAR LES PARASITES ANIMAUX. 225 crois vous avoir déjà parlé d'un malade que j'ai eu l'occasion d'observer, et donl les mains étaient couvertes de sillons, tandis qu'en aucun point on ne trouvait d'éruptions inflam- matoires : dans ces cas, qui d'ailleurs sont extrêmement rares, les sujets sont atteints de la gale sans avoir la psore. La multiplicité de l'éruption psorique survient sous l'influence d'une prédisposition spéciale. Mais, s'il n'y a pas de relation entre les sillons et l'abon- dance des éruptions symptomatiques, il est cependant im- possible de nier toute connexion entre les formes éruptives et le nombre des sillons ; car il est d'observation que ces der- niers sont rares dans la gale pustuleuse, et, au contraire, nombreux dans la gale papuleuse. Y a-t-il, comme on le dit, des rapports constants entre les sillons et les éléments inflammatoires symptomatiques, et, s'il y en a, quels sont ces rapports ? On lit dans quelques auteurs que, des deux extrémités du sillon, l'une correspond toujours à une vésicule, et l'autre à l'éminence acarienne ; cependant, si cette disposi- tion est la règle générale, cette dernière souffre un cer- tain nombre d'exceptions. Assez souvent la vésicule avoi- sine l'acarus à tel point qu'il est impossible d'extraire celui- ci sans rompre celle-là ; ou bien la vésicule est située sur le trajet du sillon qui paraît la traverser ; quelquefois enfin, ce dernier, en forme de cercle plus ou moins complet, cir- conscrit la vésicule. Eruptions symptomatiques. — L'acarus, avons-nous dit tout à l'heure, joue dans la peau le rôle d'un corps étranger et produit, comme les champignons des teignes, diverses éruptions inflammatoires. Mais, tandis que les parasites végé- taux sont fixes dans leur siège, l'acarus est souvent en mou- vement,et fouille, pour ainsi dire, tousles élémentsdela peauj 15 226 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES il exerce donc Une action plus irritante que les cryptogames, et il n'est pas étonnant qu'il produise successivement ou simultanément des éruptions inflammatoires multiples, vési- culeuses, papuleuses, pustuleuses.... Presque toujours ce sont des vésicules qui paraissent les premières, ou plutôt des papulo-vésicules qui ont pour siège de prédilection les intervalles des doigts et leur face interne. Nous ne reviendrons pas sur les rapports de ces vésicules avec les sillons. Plus tard, quelques pustules se montrent, pustules d'impétigo, ou plus souvent pustules d'eclhyma, parfois accompagnées de furoncles et de ganglites sympathi- ques. Phénomènes sympathiques. — Le prurit, qui déjà existait à la première période, devient intense à la seconde ; c'est alors un des symptômes les plus pénibles pour les malades, auxquels il ne laisse pas un instant de repos. Pendant la nuit surtout les démangeaisons se font vivement sentir, et le sommeil est impossible ; peut-être cette exacerbalion si mar- quée du prurit pendant la nuit a-t-elle quelque rapport avec les habitudes de l'acarus qui est à ce moment en pleine activité, tandis que pendant le jour il garde le repos, logé à l'extré- mité du terrier qu'il s'est creusé. — N'oublions pas cepen- dant que d'autres circonstances, notamment la chaleur du lit, doivent exercer quelque influence dans la production de ce phénomène, qui est observé dans presque toutes les affec- tions cutanées accompagnées de prurit. Les malades ne cessent de se gratter et souvent se déchi- rent la peau avec les ongles ; on voit alors, au milieu des diverses éruptions symptomatiques de la gale, de longues traînées noirâtres produites par du sang desséché. Outre ces lésions mécaniques immédiates, il résulte d'un pareil grat- PAR LES PARASITES ANIMAUX. 227 lage une irritation plus ou moins vive de la peau ; el des éruptions diverses peuvent se montrer, se confondant avec celles que produit le parasite. Ainsi, les éruptions cutanées inflammatoires que l'on ob- serve chez les galeux peuvent être dues à deux causes : d'abord à la présence du parasite, et puis à une action [sûre- ment mécanique (grattage)'. Aussi observe-t-on, dans cette affection parasitaire, des alternatives d'amélioration el d'ag- gravation 5 — si le malade, au lieu de se labourer la peau avec les ongles, prend des bains émollients. certaines érup- tions doivent disparaître, mais il en reste toujours quelques- unes produites et entretenues par le parasite. La maladie peut durer ainsi des mois, des années, et il est même probable qu'elle ne disparaîtrait jamais, si on ne l'at- taquait pas par des moyens convenables. Cependant la gué- rison spontanée n'est pas impossible, et l'on voit se mani- fester alors les phénomènes qui appartiennent a la troisième période. Période de déclin. — Les animaux parasites meurent et disparaissent clans les divers points qu'ils occupaient à la surface du corps ; cette mort est tantôt spontanée (ce qui est au moins extrêmement rare), tantôt et presque toujours consécutive à l'emploi des insecticides. Quoi qu'il en soit d'ailleurs, les éruptions s'éteignent graduellement et finissent par disparaître; 1'épiderme se détacbe au niveau des sillons, et il ne reste bientôt pas la plus légère trace de ces derniers. — Quant aux démangeai- sons, elles persistent quelquefois très longtemps après la disparition complète des autres symptômes ; mais elles sont beaucoup moins vives qu'à la période d'état de la ma- ladie et diminuent de jour en jour. 228 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES Les complications de la gale sont les mêmes que celles des teignes. Ce sont, tantôt des affections parasitaires de nature végétale, tantôt des éruptions arlifîcielles (presque toujours produites par des traitements intempestifs), tantôt enfin, et plus souvent, des éruptions constitutionnelles (dartreuses, scrofuleuses, etc.). La gale présente quelques différences dans sa forme et dans son siège. Variétés de forme. — Baleman distinguait quatre variétés : la gale papuli forme, la gale lymphatique , la gale pustuleuse et la gale cachectique. La plupart des auteurs- modernes ont adopté cette division, en supprimant toutefois la variété lym- phatique. On admet généralement que, dans la gale papuliforme, il y a beaucoup d'animaux parasites, et par suite un grand nombre de sillons; dans la gale vésiculeuse ou pustuleuse, il y aurait, au contraire., très peu d'acares et de sillon?. La forme cachectique de Bateman "répond sans doute à ces cas dans lesquels, par suite de grattages ou de traitements irrationnels, il existe des éruptions confluenles et tenaces (gales invétérées) ; souvent aussi ces éruptions dépendent d'une complication darlreuse. scrofuleuse, etc., éveillée parla présence du parasite (gales compliquées); il y a alors un mé- lange obscur de plusieurs éléments éruptifs. Variétés de siège. — L'affection est tantôt générale et tantôt partielle. La gale générale est la plus commune ; elle débute presque toujours par les mains et les poignets, et de là s'étend aux autres parties du corps. Le malade éprouve des démangeai- sons, et bientôt, aux commissures des doigts, à leur face in- terne, paraissent des vésicules de forme conique, papuleuses à la base, transparentes au sommet, des papules pseudo- PAR LES PARASITES ANIMAUX. 229 vésiculeuses, des vésicules perlées, en nombre variable; ordi- nairement elles ne s'ouvrent pas, et la sérosité qu'elles ren- ferment se résorbe. En même temps les sillons se forment et deviennent distincts sur les doigts, dans les commissures, aux poignets (surtout à la face antérieure). Mais l'acarus ne demeure pas longtemps localisé aux mains, qui peuvent le transporter sur tous les points de la surface du corps, mais plus particulièrement aux parties sexuelles chez l'homme, à cause du contact immédiat si souvent répété et occasionné par les besoins de l'émission de l'urine. Aussi la gale de la verge est-elle extrêmement commuue, et M. Piogey, dans un excellent Mémoire publié en 1850, avance que, huit fois sur dix, chez les hommes galeux, on trouve des acares en cette région. Les caractères sont un peu différents de ceux qui appartiennent à la gale des mains et des poignets ; les vésicules perlées sont remplacées par de grosses papules qui deviennent quelquefois purulentes au sommet, et sur les- quelles on voit ordinairement une petite traînée obscure; à l'extrémité de ce sillon existe le point blanc caractéristique, l'éminence acarienne. Dans certaines circonstances, la gale n'existe qu'à la verge ; c'est une gale partielle qui, à beaucoup d'égards, peut être rapprochée de la gale localisée aux seins de la femme. La théorie Piogey est-elle en défaut en pareil cas ? — Non assu- rément. — Les animaux parasites ont été portés sur ces di- verses parties, non plus par le malade lui-même, mais par une main étrangère. — Comment M. Devergie n'a-t-il pas pensé à ce mode de contagion si facile ta comprendre, avant d'admettre la génération spontanée des animaux para- sites ? Le début de la gale par les fesses, le ventre, se conçoit tout aussi aisément ; sur les fesses, l'acarus produit des éruptions 230 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES pustuleuses plus ou moins confluenl.es, souvent même des furoncles. Etiologie. — Les causes sont prédisposantes ou efficientes. Les premières n'ont qu'une très médiocre importance. Le sexe, le tempérament, la constitution..., n'ont aucune influence sur le développement du parasite,, mais seulement sur les éruptions que le parasite produit. Ainsi, les enfants ont en général des gales pustuleuses, de même que les sujets lymphatiques ; les galeux robustes, sanguins, ont plutôt des éruptions papuleuses ou furonculaires. Les professions, les conditions sociales, méritent également d'être mentionnées ; celte affection parasitaire est plus rare dans la classe aisée qu^ dans la classe pauvre, où les soins de propreté sont si souvent négligés. Vacants est la cause déterminante de la gale. Si les para- sites mâles sont seuls, ils peuvent produire quelque irritation sur les parties qu'ils occupent, mais leur nombre ne pouvant augmenter, il n'y a point de véritable psore ; et c'est pour- quoi j'ai du avancer que l'acarus mâle ne jouait qu'un rôle secondaire. Et ce que je dis là des mâles peut s'appliquer également aux nymphes et aux femelles non fécondées. — Mais un seul acarus femelle fécondé suffit parfaitement pour produire la maladie telle que nous venons de la décrire. Les parasites se multiplient avec le temps et peuvent être portés sur les différentes parties de la surface tégumentaire. La contagion s'opère par le cor tact médiat ou immédiat, beaucoup plus souvent que par le contact médiat. Presque toujours on prend la gale en couchant dans un lit qu'a occupé un galeux. Des rapports directs ou indirects, le soir ou pen- dant la nuit, avec des personnes affectées de psore, méritent PAR LES PAUAS1TES ANIMAUX. 23J. aussi une mention spéciale- car il ne faut jamais oublier les habitudes nocturnes de Facarus. Diagnostic. — Pour établir le diagnostic de la gale, il suf- fit de constater la présence de l'acarus ou une de ces altéra- tions spéciales (sillons) qu'il imprime à la peau. Dans la plupart des cas, on ne s'occupe pas du parasite lui-même, et l'on se borne à la recherche des sillons qui se trouvent habituellement à la face interne. des doigts, dans les commissures, à la partie antérieure du poignet ou à la paume de la main. Mais quelquefois les éruptions symptomatiques sont elles-mêmes très suffisantes, et il est presque inutile de chercher les sillons. D'autres fois ces derniers sont difficiles à découvrir, et cependant les formes éruptives qu'on observe rendent très probable l'existence des animaux parasites. Il faut donc porter un jugement en l'absence des signes pathognomoniques (acarus et sillons), et voici les caractères qui méritent le plus de fixer l'attention : La diversité des éruptions qui couvrent les mains, les poignets, les bras, les pieds, ou la partie inférieure des jambes. L'existence à la face interne des doigts de papulo-vésicules coniques, peu nombreuses, ou, sur la verge, de grosses pa- pules rouges. L'abondance des phénomènes éruptifs dans certaines ré- gions, telles que l'aisselle, où le parasite établit si volontiers son siège. Les démangeaisons très vives, surtout pendant la nuit, etc. Quand donc chez un malade on ne peut trouver ni sillons, ni acares, on ne doit pas pour cela laisser le diagnostic en suspens, si des papules, des vésicules, des pustules d'ecthyma, quelquefois même des furoncles ou des bulles de pemphigus 232 AFFECTIONS CUTANÉES PRODUITES se montrent à la fois, répandus sur les mains ou sur les avant- bras ; si l'on trouve sur la verge les papules dont nous avons parlé : toutes éruptions accompagnées d'un prurit plus ou moins intense. Je n'établirai pas, comme l'ont fait presque tous les au- teurs, le diagnostic différentiel entre l'eczéma, le prurigo, le lichen, d'une part, et la gale de l'autre ; car les éruptions lichénoïdes. eczémateuses...., peuvent être symptomatiques de la psore comme elles le sont souvent de la scrofule, de la dartre, etc.; quelquefois aussi ce sont des éruptions artifi- cielles, différentes des affections parasitaires ou constitution- nelles, dont nous venons de parler. Ainsi, comprenez bien ma pensée, la difficulté du dia- gnostic ne consiste pas à distinguer une papule d'une vési- cule ou d'une papulo-vésicule, mais à reconnaître si les pa- pules, les vésicules, les pustules, dépendent de la présence de l'acarus dans la peau, 0:1 si elles ne doivent pas plutôt être rattachées h quelque cause externe, ou, plus souvent, à l'une des grandes causes générales : scrofule, dartre, arthri- lis, etc. On donne le nom de pseudo-gaie à un certain nombre d'affections qui n'ont d'autre caractère commun que de res- sembler plus Ou moins à la véritable psore ; assez souvent ces affections sont produites par les parasites de certains ani- maux, tels que le chat, etc. La gale partielle est plus difficile à distinguer que la gale générale ou commune ; on croit souvent (principalement aux fesses) à l'existence de simples furoncles, et d'autres fois à une syphilide papuleuse.... Mais, nel'oubliezpas,dansle douteil faut toujours prescrire la friction insecticide ; car les inconvénients de cette dernière ne sont rien en comparaison du bien qu'elle peut produire. PAR LES PARASITES ANIMAUX. 238 Pronostic. — Il est sans aucune gravité ; la maladie ne résiste jamais à l'emploi des parasiticides et disparait gra- duellement. Traitement. — Trois indications principales dominent la thérapeutique de la gale : Il faut d'abord détruire les parasites qui produisent la maladie.* En second lieu, combattre les éruptions symptomatiques. Enfin, modifier, s'il est nécessaire, la constitution des galeux. Il me suffit d'avoir signalé ces deux dernières indications ; je veux seulement insister sur la première, qui est la plus im- portante, et qu'on doit, par conséquent, faire passer avant les autres. Il est rare qu'il y ait contre-indication à la friction immédiate ; i! faudrait que la peau fût bien enflammée, pour qu'on fût obligé de mettre d'abord en usage les émollients ou les antiphlogistiques. Aujourd'hui on ne rencontre plus de médecins, à part quelques rêveurs, qui aient la prétention de guérir la gale par l'emploi des moyens internes. Les parasites, qu'il faut détruire, ne sont plus le produit d'une viciation des humeurs; — ils occupent la surface de la peau, par conséquent les moyens externes peuvent seuls les atteindre. Une condition doit être remplie pour arriver sûrement au but qu'on se pro- pose : il faut (dans la gale comme dans la teigne) que le parasite soit partout en contact avec les parasiticides ; c'est une condition indispensable que j'ai le premier nettement établie en 1850, époque à laquelle j'étais chargé, dans cet hôpital, du traitement de la gale. De là résultait la nécessité de la friction générale. On nous objecte que, longtemps avant nous, cette dernière 23Û AFFECTIONS CUTANÉES FK0DU1TES avait été préconisée, notamment par Helmerich et Burdin, son élève ; cela est vrai, mais dans quel but? — Était-ce pour remplir l'indication que nous avons formulée ? — Nullement, car Burdin lui-même nous dit que la friction générale est pré- férable, parce qu'elle permet l'absorption plus rapide et plus complète de cette pommade (il en fallait employer quatre onces) qui doit corriger les humeurs. Si donc la friction générale avait été conseillée, elle n'avait point été assise sur des bases solides. Aussi M. Cazenave, chargé avant nous du traitement des galeux, se bornait-il (imitant en cela la pratique d'Hebra de Vienne) à la friction partielle des mains et des pieds. D'autres, comme M. Rayer, étendaient la friction à toutes les parties malades, et quel- quefois ils obtenaient une complète guérison ; mais, plus souvent, quelques acares étaient respectés sur des régions saines en apparence, et la maladie se reproduisait au bout de quelques jours, ou plutôt ne disparaissait jamais. Il faut donc frictionner toute la surface du corps pour dé- truire tous les parasites qui l'occupent ; la tête seule est épargnée, car l'acarus ne s'y montre jamais. On prend 100 à 125 grammes de pommade d'Helmerich, et pendant 20 à 25 minutes on frotte rudement toutes les parties, celles surtout qui sont le siège de prédilection des animaux parasites, comme les mains, les pieds, les aisselles, le périnée et les environs de l'anus, le creux poplité. On fait ainsi deux frictions à six heures de distance ; le malade prend un bain le lendemain ou le surlendemain, et tout est fini. J'avais ainsi réduit h deux ou trois jours la durée du séjour des galeux dans nos salles, et, en cela, rendu un véri- table service à l'administration de l'Assistance publique. M. Hardy, qui est venu après moi, a fait mieux encore, et au- PAR LliS PARASITES ANIMAUX. 235 jourd'hui, vous le savez, le traitement de la gale est réduit à une heure, et les malades ne sont plus admis à l'hôpital. Au lieu de deux frictions avec la pommade, M. Hardy n'en fait qu'une, ou plutôt, dans la première, la pommade est remplacée par le savon noir (c'est une préparation que je crois inutile); entre les deux frictions, qui ne sont séparées que par un intervalle de trois quarts d'heure, les malades prennent un bain. Enfin, pour empêcher les récidives, les linges, les vête- ments du malade doivent être mis à l'étuve ou soumis à des fumigations sulfureuses ; les animaux parasites sont ainsi détruits partout. FIN. ERRATA. Plusieurs failles se sont glissées dans cet ouvrage, malgré tous les soins ap- portés dans la correction des épreuves. Tes unes, assez nombreuses (elles por- tent principalement sur la ponctuation et l'orthographe), sont très légères, et comme elles ne nuisent point à l'intelligence du sens, il importe peu de les signaler au lecteur. — Les autres, beaucoup plus rares, devaient être rele- vées ici. Page 4, ligue 29, au lieu de et le sujet n'avait pas la gale, lisez et le sujet n'avait pas lapsore (1). Page", ligne 16, au lieu de oidum, lisez oïdium. Page 15, ligne 10, au lieu de gangliiles, lisez gangliles. Page 43, avant-dernière ligue, au lieu de chophylon, lisez : trichophyton. Page 47, lignes 16, 17, 18. — D'une seule phrase on en a fait deux, ce qui altère tant soit peu le sens. — Le prurit, l'hypersécrétion d'épidémie et l'altération des poils caractérisent celte première période. Page 137, ligue 8, au lieu de on a supprimé leparasiticide, lisez on a sup- primé les parasiticides. Page 194, ligne 12, au lieu de le traitement n'est pas constitué, lisez le traitement n'est pas institué. Page 202. — Une omission importante a été faite dans l'étiologie de la teigne pelade, et nous devons la réparer ici. Il n'est pas inutile, en effet, à une époque où l'on nie encore la contagion (1) Ceux qui no comprendront pas l'importance de ce changement sont pries de lire le rc- marquable Rapport présenté tout récemment à l'Académie de médecine par M. Dcvergie, sur l'herpès tonsurant des chevaux. 230 errata; de la teigne achromateuse, d'emprunter à l'ouvrage de Baumes de Lyon (Nou- velle dermatologie, page i08) une observation publiée par le docteur Gilette dans la Gazette médicale (année 1839) : '( Je viens d'avoir l'occasion d'observer cette afTectiou du cuir chevelu dans » un des collèges royaux de Paris, où sont pris les soins les plus minutieux » de propreté, et où, certes, une seule pustule de teigne ne pourrait semon- » trer sans que l'élève fût sur-le-champ séparé des autres. Il y a quatre mois, » un élève de douze à treize ans arriva de province. Dans le village où il « vivait habituellement existait-il des teigneux ? C'est ce que je n'ai pu savoir. » Le lendemain de son arrivée, ou reconnut qu'il portait sur un des côtés de la » tête, au-devant, de l'oreille, une place dégarnie de cheveux, ayant à peu » près trois centimètres de diamètre. Le médecin de l'établissement l'exa- » mina, n'y vit rien de suspect, et pensa qu'il pouvait impunément habiter » avec les autres élèves. Au bout de quinze jours, le voisin d'études de celui- » ci eut également la tête dépouillée, d'une largeur un peu moins grande, » sans qu'aucun sigue précurseur eût pu avertir. Depuis ce temps, et dans la » même étude, six autres élèves au moins ont été atteints, et toujours brus- » quement, mais jamais dans une étendue plus grande que celle que je viens » d'indiquer. » Chez tous il ne s'est montré qu'une place qui s'est peu élargie. J'ai exa- » miné avec soin, plusieurs fois, les places mêmes quand elles commençaient » à se former, et je n'ai rien remarqué que celte blancheur indiquée par Ba- » teman chez les six derniers. — Chez le premier atteint, il y avait quelques » pustules épaisses d'impétigo ; chez le second, un peu de desquamation fur- » furacée était mêlée aux cheveux environnants. L'auteur anglais ajoute à sa » description que c'est une malndie obstinée qui ne cède que lentement. Cette )) assertion s'est encore vériûée dans le cas présent: on a pendant longtemps » fait frotter la place malade avec une pommade soufrée; ces onctions n'ont » produit aucun résultat. 3- Chez l'un, on s'est abstenu de tout traitement, et les cheveux ont re- » poussé au bout de trois semaines, plus rares et plus soyeux, mais sans avoir » changé de couleur; chez les autres, sans que je veuille en rien accuser le « traitement, les cheveux manquent encore. Du reste, si j'étais appelé pour » un cas semblable, je me contenterais, selon le précepte donné par Celse, » de faire raser fréquemment la tête aux environs de cette place, et je foi ais » laver fréquemment la surface avec quelque liquide un peu stimulant, de » l'eau de savon, ou bien avec de l'alcool aromatisé étendu. » De cette observation je crois devoir conclure: » 4° Que les auteurs anglais ont eu raison de faire de cette affection une » espèce particulière, quoiqu'ils ne me paraissent pas avoir du reste prouvé « qu'elle appartient au genre porrigo ; » 2" Qu'elle semble être contagieuse et qu'il serait prudent d'isoler les » premiers sujets chez lesquels elle se manifeste dans une grande réunion » d'enfants. » LIBRAIRIE F. CHAMEftOT. Traité théorique et pratique de l'art des accouchements par P. Cazeau.X, Chevalier de la Légion d'honneur, membre de l'Académie impériale de médecine, etc. Ouvrage adopté par le conseil de l'Instruction publique et placé, par décision ministérielle, au rang des livres classiques destinés aux Élèves sages-femmes de la Maternité de Paris. — Sixième édition, 1 vol. grand in-8, 1050 pages, orné de 4 planches sur acier et 130 planches in- tercalées dans le texte, dessinées par Léveillé, gravées sur bois par Badou- reau. — Prix : il fr. Traité pratique d'anatomie médico-chirurgicale, par M. Ricuet, chevalier de la Légion d'honneur, professeur agrégea la Faculté de médecine de Paris, etc., 1 vol. grand in-8, avec planches intercalées dans le texte, des- sinées par Léveillé, gravées sur bois par Badoureau. — Prix : 12 ff. Éléments de chirurgie opératoire, ou traité pratique des opérations, par Alphonse Guérin, chirurgien des hôpitaux de Paris, etc. Deuxième édition, 1 vol in-18 Jésus, avec 295 figures intercalées dans le texte; dessinées par Léveillé, gravées sur bois par Badoureau. — Prix : 7 fr. 50 Traité de toxicologie générale et spéciale, médicale, chimique et légale, par C.-P. Galtier, D.M.P, professeur de pharmacologie, etc. Dans cet ouvrage, l'auteur a embrassé la toxicologie dans sou ensemble dans ses rapports avec les diverses branches des sciences physiques, médicales, et la juridiction criminelle. La toxicologie générale résume les principes fon- damentaux de celte science. Dans la toxicologie spéciale, chaque poison est considéré sous le point de vue dos caractères physiques et chimiques, des ef- fets, des lésions et du traitement : un article e. t consacré aux rapports, aux questions toxicologiques et aux procédés pour déceler les poisons dans les ma- tières suspectes, les organes, etc. Sous le titre de FAITS PRATIQUES l'auteur fait l'historique de l'empoisonnement et des voies par lesquelles il s'est effec- tué, cite des observations à l'appui, commentées comme dans un traité de pathologie clinique, de sorte que l'élude de chaque poison forme une espèce de monographie toxicologique. Toxicologie générale.! vol. in-8. Prix : 4 fr. 50. Toxicologie médicale, chimique et légale, 1 vol. in-8. Prix : 15 fr. Chacun de ces traites se vend séparément. Nouveau traité théorique et pratique sur l'art du dentiste, par M. J. Le- foulon, chirurgien dentiste. 1 vol. in-8 avec 130 figures sur bois gravées par Badoureau. — Prix, broché : 4 fr. Introduction à l'étude de la chimie par le système unitaire, par M. Gerhardt, professeur à la Faculté des sciei.ces de Strasbourg. 1 volume grand in-18 avec planche. — Prix, broché : 4 fr. Médecine préventive, ou Organisation du service sanitaire, par J. Panet , D. M. P. 1 vol. in-18. Prix : 3 fr. Cure radicale des rétrécissements du canal de l'urèthre, critique des doc- trines contemporaines, par le docteur Debeney. 1 vol. in-8. Prix : 3 fr. Manuel de la métallurgie du fer, par C.-J.-B. Karsten. 2 volumes in-8 (épuisé) Prix : 24 fr. Inspirations pulmonaires, ou fumigations internes. Guide pratique de la méthode thérapeutique du docteur J.-M. Richard Desruez. 1 volume in-12. Prix ; 3 fr. Recherches sur la végétation appliquée à l'agriculture, par M. Bouchardat, professeur d'hygiène à la faculté de médecine de Paris. 1 vol. in-12. Prix, broché : 2 fr. lies métaux sont des corps composés. La production artificielle des mé- taux précieux est possible, est un fait avéré, par G. Théodore Tiffereau, ancien élève et préparateur de chimie à l'École professionnelle de Nantes. 1 vol. in-12. Prix : 2 fr. Nouveaux procédés d'irrigation, de dessèchement et de drainage, spécia- lement applicables à la graade et à la petite industrie agricole; appareils servant à régulariser l'écoulement des liquides et leurs applications à l'in- dustrie agrjcole et manufacturière, par C. Théodore Tiffereau. 1 volume In-8. Prix : 50 c. Pisciculture, pisciculteurs et poissons, ou Mémoires d'un pisciculteur, par Eugène Noël. 1 vol. in-18 Jésus. Prix : 1 fr. 25 Anatomie des formes extérieures du corps humain, à l'usage des peintres et des sculpteurs, par le docteur J. Fau. 1 vol. in-S, avec un atlas grand in-4 de 24 planches litographiées. dessinées d'après nature. Prix, broché: figures noires, 15 francs , coloriées, 30 fr. Nouvel écorché, statuette à l'usage des artistes, par F. Caudron, sous la di- rection du docteur J. Fau. Hauteur de la statuette 70 centimètres. Prix en blanc : 15 fr.; en couleur, 40 fr. LIBRAIRIE D'ADRIEN DELAHAYE. BARBASTE. — De l'état des forces dans les maladies et des indications qui s'y rapportent, thèse de concours pour l'agrégation (1857). 1 volume iu-8 de 170 pages. 2 fr. BAUCHET. — Du panaris et du phlegmon de la main. In-s, 1858. BAYLE. — Encyclopédie des sciences médicales, publiée sous la direction de M. Bayle. 40 volumes iu-8. 70 fr. DOLBEAU.— Mémoire sur une variété de tumeur sanguine, ou grenouillette sanguine. In-8 de 31 pages, 1857. 1 fr, DUCHESNE(E.-A). — De la prostitution dans la ville d'Alger depuis la conquête. In-8 de 231 pages. 2 fr. DURIAU (Fréd.). — Parallèle du typhus et de la fièvre typhoïde. Thèse de concours pour l'agrégation, 1857. 1 fr. 25. DURIAU et LEGRAND.— De la péliose rhumatismale, ouérythème noueux rhumatismal. In-8, 1858. 1 fr. FOUCHER. — Mémoire sur les kystes de la région poplitée. 1 fr. 25 FOURNIER (Alfred). — Recherches sur la contagion du chancre. Mé- moire in-8 de 7 feuilles, 1857. 2 fr. GENDR1N. — Traité de médecine pratique. 3 volumes in-8. 10 fr. — De l'influence des âges dans les maladies, i volume de 108 pag. 1 fr. 50 — Lettres à M. Ducoux sur les eaux minérales. Brochure. 75 c. — Mémoire sur le diagnostic des anévrysmes des grosses artères. Brochure in-8 de 70 pages. 1 fr. 25 GUYON (F.). — Études sur les cavités de l'utérus dans l'état de vacuité, depuis la naissance jusque dans la vieillesse, ln-4 avec 2 pi. 1858. 2 fr. 50 JORDAO. — Considérations sur un cas de diabète. In-4, 86 pages et 2 planches, 1857. 1 fr. 50 LEGOUEST. — Études sur les amputations partielles du pied et de la partie inférieure de la jambe. Mémoire in-8 de 54 pages, 1856. 1 fr. 50 LEGOUEST. — Des congélations observées à Constantinople pendant l'hiver 1854-55. Mémoire in-8 de 31 pages, 1856 1 fr. 25 LEGOUEST. — Des kystes synoviaux du poigûet et de la main. Thèse de concours pour l'agrégation, 1857. In-8 de 136 pages. 2 fr. LUTON. — Études sur l'albuminurie, considérations de physiologie patho- logique fondées sur l'observation clinique. In-8 de 32 pages, 1857. 75 c. MALGAIGNE. — Journal de chirurgie et Revue médico-chirurgicale de Paris. Prix de la collection complète (22 volumes). 30 fr. Ces deux collections importantes, publiées par M. le professeur Malgaigne, forment 22 volumes grand in-8. (Journal de chirurgie, 4 vol., 1843-1846, et Revue médico- chirurgicale, 1 8 vol. 1847-1855). Les deux journaux réunis contiennent un grand nombre de mémoires originaux très importants et des articles critiques fort estimés. MOITESSIER. — De l'urine. Thèse de concours pour l'agrégation, 1856 in-4. 2 fr. PIORRY. — De la scrofule. Leçons cliniques professées à l'hôpital de la Charité, recueillies par Fréd. Duriau, chef de clinique de la Faculté. In-8 de 14 pages. 50 c. RICORD. — Leçons sur le chancre, rédigées et publiées par Alfred Four- nier, interne du Midi, suivies de notes et pièces justificatives, etc., for- mant 1 vol. in-8. 5 fr. 50 — Leçons sur les maladies du testicule publiées par V. Poisson, interne des hôpitaux. (Sous presse.) ROUYER (Jules). — Des vices de conformation du bassin. Leçons et obser- vations recueillies à la Clinique d'accouchement de M. le professeur Paul Dubois, 1855. Brochure in-8 de 50 pages. 1 fr. 25 — Du traitement des kystes de l'ovaire par les injections iodées. Mé- moire in-8 de 16 pages. - 1 fr. — Des tumeurs de la région palatine formées par l'hypertrophie des glandes salivaires. Mémoire in-8 de 23 pages. 1 fr. — Nouveau procédé de staphyloraphie. in-8, 8 p. 30 c. — De la taille prérectale (taille bilatérale de M. le professeur Nélaton). In-8, 1858. THOLOZAN. — Des métastases. Thèse de concours pour l'agrégation, 1857. 1 vol. in-8 de 124 pages. 2 fr. — Hématologie (De l'état actuel des connaissances acquises en) .1 vol. in-4 de 112 pages, 1853. 2 fr. 50 TRËLAT. — De la nécrose causée par le phosphore. Thèse de concours pour l'agrégation, 1857. 1 vol. in-8 de 120 pages. 2 fr. 50 PLI 1 >,/> ,£ F i-/i,,r,l-n T&rfo Map. pi ,%\« -■■■•: i. Fie. I. — Cheveu ordinaire vu à un grossissement de 200 diamètres, réduit d'un tiers dans la gravure. A — Racine du cheveu. B — La tige. C — L'écorce. D — La moelle. E — Fibres longitudinales. F — Fibres transverses. G — Globules pigmentaires. !1 — Plaques épidermiques de la tige I — Prolongement radiculaire de la tige. K — La capsule. L — Le bouton. M — La souche. N — L'origine du poil. 0 — Chevelu de la racine. P — Globules pigmentaires étoiles. Q — L'origiue des fibres longitudinales. II — Côue à la naissance de la tige. S — Gaine ou canal épidermique du poil. T — Membrane externe de la capsule. V — Membrane interne de la capsule. X — La capsule. Fig. 2. — Poil follet vu à un grossissement de 200 diamètres. A — Stries trausverses. B — Le bouton. C — La souche. D — L'origine du poil. E — Globules pigmentaires étoiles. F — L'origine des fibres longitudinales. Fig ;;. — Coupe horizontale de la peau, qui permet de voir les bulbes p'deu.\ avec leur papille. A — Papille pilitere. B — Vaisseaux des papilles. G — Tronc vasculaire dont les branches collatérales se rendent aux papilles. ita\'i.tnt.n Tîrfy jy. PLJÏÏ. TSflS» JYz/fc. PLANCHE g II. ''ig. t. — Parcelle de favus montrant des spores, des tubes sporulaires, des sporidies el des granules. A — Sporuies isolées. B — Sporuies réunies. G — Chaîne de sporuies. D — Tubes vides. E — Tube sporulaire. F — Filaments tubuleux réunis. G — Granules. Fig. 2. — Parcelle de muguetf-vue au microscope, A — Sporuies. B — Tubes vides. C — Tube sporulaire. D — Granules. Fig. 3. — Mince fragment de muscardine conservée dans une boîte depuis deux ans. A — Sporuies isolées. B — Chaîne de spores. C — Tubes complexes. Fig. i. — Fragment imperceptible de moisissure vu à un grossissement de 200 diamètres. A — Sporuies. B — Filaments lubuleuv PLAXCHG IV. Fig. 1.- — Cheveu defavus vu à un grossissement de 300 diamètres. AA — Racfne du cheveu dépourvye de sa capsule. B — Renflement de la partie supérieure de la racine. C — Bouton couvert de cryptogames. D — Fibres longitudinales de la tige; spores dans les intervalles. E — Sporules isolées sur la partie moyenne et les bords de la tige. F — Petits groupes de spores sur le renflement de la souche. G — Sporules sur le bouton. H — Petits tubes de l'achorion intra-capsulaire répandus sur le bouton du cheveu. Fig. 2. — Cheveu de pelade ophiasique. AF — Partie inférieure de la tige. FG — Racine du cheveu dépouillée de capsule. G — Renflement sphéroïdal de" la partie inférieure de la tige, formé par la dilatation et l'incurvation des fibres lodgitudinales entre lesquelles on aperçoit des spores. B — Petit groupe de spores sur un des côtés de la tige. D — Rupture des fibres longitudinales sur un point du renflement sphéroïdal de la tige. E — Spores du renflement de la tige. H— Grappede microsporon Atidoui ni sur uu des côtés delà raciue. I — Spores et petits tubes sur la souche et le bouton. G — Rupture de la racine. Fig. 3. — Parcelle de crasse parasitaire extraite d'un pityriasis versicolor datant de dix ans et vierge de tout traitement. A — Cellules épithéliales. B — Spores de l'épidermophyton. CG — Chaînes de spores. D — Tubes et spores aux extrémités F. — Tubes sans spores. ?L.1V. • , S ] r A ~ fi i J , • 0 , ». i - - r ■ PL.V. .Eff.I ! . Fi«r.II. J^ 3$ 1 - Oo î o,. uv~ p r^U4^ V, o ,-, o ->' "5 V &5 ^m o a< i/fflT ' 7 //Zip. ^(Z/" .F. L'/l»tf\h>?> i PLAXCHE V. Fig. 1. — Poil du menfon'dans la deuxième période delà teigne tonsurante. A — Rupture de l'exirémilé supérieure. D — Rupture de l'extrémité inférieure. BRB — Tunique épidermique. C — Gaîne ou enveloppe sporulaire de la tige. EE — Chaînes de spores irirhophytiques. Fig. 2. — Poil du menton extrait de la circonférence des plaques herpétiques. AF — Partie inférieure de la tige et racine du poil dépourvue de capsule. BB — Stries trausverses. C — Renflement napiforme de la souche. DD — Ruptures des fibres incurvées sur les bords du renflement radiculaire. E — Partie centrale ou médullaire de la lige. F — Rupture du bouton. GG ■ — Spores disséminées sur la racine. i - ■ - • \ ■