LS LR Gi LSDn. Ress E OM LP : ; TRES t: LE RÉGNE VÉGÉTAL TEXTES LE REGNE VÉGÉTAL DIVISÉ EN TRAITÉ DE BOTANIQUE, FLORE MÉDICALE, USUELLE ET INDUSTRIELLE HORTICULTURE THÉORIQUE ET PRATIQUE PLANTES AGRICOLES ET FORESTIÈRES HISTOIRE BIOGRAPHIQUE ET BIBLIOGRAPHIQUE DE LA BOTANIQUE PAR MM. O. REVEIL & FR. GERARD Docteur en médecine, Botaniste - micrographe, 5 Pharmacien en chef des hôpitaux, Membre de plusieurs Sociétés savantes , Professeur agrégé à la Faculté de médecine de Paris l'un des principaux collaborateurs cHEcoIe Supérieure ce phANNAGIE, | du Dictionnaire universel d'histoire naturelle Membre de plusieurs Sociétés savantes, etc. | À DUPUIS F. HÉRINCQ Professeur d'histoire naturelle, | Botaniste Ancien Professeur de botanique et de sylviculture | Attaché au Muséum d'histoire naturelle, à l'Institut agronomique de Grignon, | Rédacteur en chef Membre de plusieurs Académies de l’Hortieulleur français, et Sociétes savantes, etc. i Membre de plusieurs Sociétés savantes, etc, AVEC LE CONCOURS (pour la Flore médicale) DE M. LE DOCTEUR BAILLON Professeur de Sciences naturelles médicales à la Faculté de Médecine de Paris ET. D APRÈS LES PLUS ÉMINENTS BOTANISTES FRANCAIS ET ÉTRANGERS formant dix-sept beaux volumes dont neuf volumes grand in-8° jesus de textes ET HUIT ATLAS PETIT IN-QUARTO DE PLANCHES GRAVÉES SUR ACIER ET FINBMENT COLORIÉES TEXTES LIBRARY NEW * BOTA GARDEN. PARIS L. GUÉRIN ET Ci, ÉDITEURS DÉPOT ET VENTE À LA LIBRAIRIE THÉODORE MORGAND RUE BONAPARTE, 9 1870 Réserve de tous droits. . De FD Ar: | n nl re L re AL 44 a. : 7 : | se Re sen St COPA 0h Es ca Re | AREVANS V0 | Te pti aire N ati He pond _ n : + : DA AERr 47 TT Tee 1 € LU Po Tee rie ni = on — {Bt 6 0 : | = cles H : h a + En iris à | ANUS ee FRalstoinrr EU bc eo & À L L | LL . À in pa in 1 nm mn pe à à mes — : Da ET TN (A CR GS NTI LA PL" 1e 0 CAR 2-1 à Le LLC CEE CEEERE EEESEU ST CEEEE L L Û 121072 0 NiMernx QUTEE Sin 1” RAGE TAN EL TT Mardi tan au UE" » : m: | : di D L LC 7 "Me re PORT PA Ch nn, CS Vide bia gg 200 Sr ape % Le | NE TRANS | D 77 Mate n : ne ptet -pet FLORE MÉDICALE USUELLE ET INDUSTRIELLE DUXIX: SIÈCLE ACCOMPAGNÉE DE TROIS ATLAS ICONOGRAPHIQUES TEXTE Paris, — Imprimerie de P-A, BOURDIER et Ce, rue des Poitevins, 6. FLORE MÉDICALE USUELLE ET INDUSTRIELLE DU XIX' SIÈCLE PAR MM, A. DUPUIS O. REVEIL professeur d'histoire naturelle, docteur en médecine, aucien professeur de bolanique et de sylviculture pharmacien en chef des hôpitaux, à l'Institut agronomique de Grignon, professeur agrégé à la Faculté de médecine de Paris membre de plusieurs Académies I et à l'École supérieure de pharmacie, etSociétés savantes, elc. membre de plusieurs Sociétés savantes, ete. (Pour la description, l'habitat et La culture ( Pour la partie chimique, la matière médicale des plantes) et la thérapeutique), NONNANT LA DESCRIPTION, LA CULTURE, LA COMPOSITION CHIMIQUE LES PROPRIÉTÉS GURATIVES OU DANGEREUSES , LES USAGES ÉCONOMIQUES ET INDUSTRIELS DES PLANTES TOME DEUXIÈME PARIS LIBRAIRIE DES SCIENCES NATURELLES ET DES ARTS ILLUSTRÉES Théodore MORGAND), libraire-éditeur RUE BONAPARTE, D Réserve de tous droits. { uni minetisin 1 AA nf (truth 1) L en RTE ERP CEE" ; { r ‘omimmn. CR L Le i È È 2 MAMTRNNT AMÔT Par [CEE LE » - 1909 A1 JA FLORE MEDICALE DU XIX' SIÈCLE ÉGLANTIER Rosa canina L. et R. sepium Thuill. (Rosacées - Rosées.) L'Églantier, appelé aussi Rosier sauvage, Rosier des chiens, Rosier des haies, Cynorrhodon, etc., est un arbrisseau buissonnant, à tiges diffuses, rameuses, munies d’aiguillons recourbés, épars, ainsi que les rameaux, qui sont effilés, cylindriques et glabres. Les feuilles, alternes, pétiolées, munies de stipules ailées, imparipennées, se composent de cinq à neuf folioles sessiles, ovales, arrondies, obtuses, fortement dentées en scie, un peu glauques. Les fleurs, grandes, roses, plus rarement blanches, courtement pédonculées, sont grou- pées par cinq ou six en faux corymbes terminaux. Elles présentent un calice gamosépale, de ceux qu'on nomme adhérents, à tube ovoïde, allongé, glabre, à limbe divisé en cinq lobes foliacés, allon- gés, très-aigus, pinnatifides et élalés; une corolle à cinq pétales sessiles, cordiformes, un peu concaves, élalés; un nombre indéfini d'étamines incluses, insérées à la gorge du calice, en dehors d'un disque charnu qui double l'intérieur du réceptacle; des pistils, au nombre de douze à quinze, renfermés à l’intérieur du tube récepta- culaire et insérés sur ses parois, à ovaire velu, surmonté d'un style grèle et filiforme terminé par un stigmale capité glanduleux. Le fruit se compose d’akènes cornés, durs, anguleux, pointus, hérissés de poils rudes, renfermés dans le réceptacle persistant, dont les parois se sont épaissies en devenant charnues, et d’un rouge foncé. Hamirar. — Les églantiers sont abondamment répandus dans presque loute l’Europe; ils habitent les bois, les buissons, les haies, etc. Cuzrure. — Le Æosa canin est cullivé en grand chez les pépinié- Flore, T. IL. 14 2 FLORE MÉDICALE ristes, qui l’emploient comme sujet pour greffer les rosiers. On le multiplie facilement de graines et de rejetons. Les individus sauvages sont seuls employés pour les usages médicaux, auxquels ils suffisent amplement. Parries usirées.— Les réceptacles développés ou cynorrhodons, les pétales, le duvet des fruits, la racine, les galles ou bédéguars. Récozre. — Les réceptacles charnus de l'églantier, connus en phar- macie sous le nom de cynorrhodons, sont récoltés à leur maturité parfaite, c'est-à-dire lors qu’ils ont pris une teinte jaune-rougeàtre ou d’un rouge de corail; ils sont assez gros, lisses, couronnés par les divisions flétries du calice; à l'intérieur, on trouve un parenchyme jaune, ferme, acide et astringent, au milieu duquel on remarque de petits fruits secs mêlés de poils et des débris des pistils. Pour préparer la conserve de cynorrhodons, on prend indistinctement les fruits des Rosa canina, arvensis, sepium, Eglanteria, que l'on récolte un peu avant leur maturité ; on sépare les débris du calice et du pédoncule, y compris le petit renflement qui est au sommet; on ouvre le ré- ceptacle renflé, et on rejette les fruits (akènes) et les poils qui les accompagnent; on arrose les parties rouges et charnues avec du vin blanc, et on abandonne le tout dans un lieu frais, en ayant le soin d’agiter de temps en temps; lorsque la masse est ramollie, on écrase dans un mortier, et on passe à travers un {amis ; deux parties de cette pulpe, mêlées avec trois parties de sucre, constituent la conserve de cynorrhodons, qui est d’une couleur orange, et qu'on emploie comme astringente à la dose de 5 à 30 grammes. Les pétales de l'églantier, très-rarement employés, sont blancs ou roses, peu odorants; on les récolte à leur parfait épanouisse- ment. La racine de l'églantier peut être employée à toutes les époques de l’année. Le duvet qui entoure les akènes se récolte à la maturité du fruit ; il est peu usité. COMPOSITION CHIMIQUE. — Toutes les parties du véritable églantier et des divers autres rosiers sauvages, tels que les Z?. sepium, Eglante- ria L., arvensis, etc., sont riches en tannin. Les pétales sont peu odorants. M. Bils (Journ. de pharm. de Trommsdorf, NX, 63) a analysé les cynorrhodons: il y a trouvé une huile volatile, une huile grasse, du DU XIX° SIÈCLE. 3 sucre incristallisable, de la myricine, une résine solide, une résine molle, du tissu fibreux, de l’albumine, de la gomme, de l'acide citrique, de l'acide malique, des sels, etc. Usages. — Nous ne voulons parler ici que des usages du véri- table églantier (/?osa canina) et de ses succédanés, et nullement des autres rosiers, pour lesquels nous renverrons à l’article Rosier (€. I, p. 238-242). Quoique M. Loiseleur-Deslongchamps ait trouvé que les fleurs d'églantier pulvérisées purgeaient, à la dose de 15 à 20 grammes, elles ne sont jamais employées pour cet usage. La conserve de cynor- rhodons, dont nous avons parlé, est la seule employée comme astrin- gente contre la diarrhée ; elle agit très-bien chez les petits enfants, qui la prennent avec plaisir. En Allemagne , à Strasbourg, à Col- mar, etc., on fait avec les cynorrhodons des confitures que l’on sert sur les tables, et que l’on mange avec les viandes. La décoction des réceplacles, préparés comme nous l'avons indiqué au paragraphe Récolte, est souvent employée contre la diarrhée. Le duvet qui entoure les akènes, appliqué sur la peau, y détermine un prurit assez vif, avec gonflement et inflammation passagère des parties. On a proposé ces akènes à la dose de 15 à 50 centigrammes mêlés à du miel, contre les lombrics; ils ne déterminent aucune irri- tation intestinale ; cependant, ils sont peu employés à cet usage. Le nom de Rosier de chien (Æosa canina ) ou Cynorrhodon a été donné au véritable églantier, parce qu’autrefois sa racine, quoique inefficace, était très-employée contre la rage. De nos jours encore, dans plusieurs localités, et notamment dans les départements de l'Isère, de la Haute-Loire, de la Loire, de l'Aveyron, du Puy-de- Dôme, etc., la racine d’églantier est la base de remèdes populaires contre celte maladie dans lesquels nos paysans ont malheureusement la plus grande confiance. On trouve souvent sur les églantiers une excroissance spongieuse (Fungus rosaceus, Spongin Cynobasti), qui est le résultat de la piqûre d’un insecte hyménoptère, le Cynips Rosæ. Les anciennes pharmaco- pées désignent cesexcroissances sous les noms de Bédéquurs et deGalles d'Églantier. Mes sont divisées à l’intérieur en un grand nombre de cellules qui renferment des larves d'insectes, qui y passent l'hiver sous forme de #ymples, et en sortent au printemps avec la forme d'insectes parfaits; autrefois, les bédéguars étaient employés comme ! FLORE MÉDICALE diurétiques, lithontriptiques, anthelminthiques, etc. ; aujourd'hui, ils sont tout à fait inusités dans la médecine française. En Sicile, on s’en sert encore, dit-on, contre la dysenterie. ELATERIUM Echalüun Elatertum Rich. Momordica Elaterium L. (Cucurbitacées.) L'Elalerunn, appelé aussi Concombre sauvage, Concombre d'âne ou d'attrape, Giclet, Momordique piquante, etc., est une plante annuelle, à racine longue, grosse, charnue, fibreuse, planchâtre. Ses tiges, longues de 0,30 à 0,70, cylindriques, striées, épaisses, charnues, succulentes, hérissées de poils rudes, un peu glauques, rameuses, couchées, portent des feuilles alternes, longuement pélio- lées, à limbe large, cordiforme, à trois angles arrondis; ondulé etun peu denté sur les bords, épais, charnu, hispide, rude au toucher, d'un vert peu intense en dessus, plus pâle et blanchätre en dessous. Les fleurs sont monoïques, d'un jaune päle ; les mâles en grappes axillaires, les femelles solitaires. Elles présentent un calice adhérent, à tube ovoïde, à limbe divisé en cinq lobes étroits, aigus, étalés ; une corolle à cinq divisions, grandes, ovales, aiguës, étalées. Les mâlesont cinq élamines, insérées sur le calice, dont quatre sont unies deux par deux, à anthères uniloculaires, courbées en S; les femelles ont des élamines réduiles aux filets: un ovaire infère, à trois loges multiovu- lées, surmonté d'un style cylindrique à trois divisions, terminées chacune par un stigmate en fer à cheval. Le fruit est une baie ovoïde, allongée, couronnée par le calice, hérissée de poils rudes, renfermant une pulpe mucilagineuse, dans laquelle sont disséminées de nom- breuses graines. À la maturité, ce fruit se détache du pédoneule au moindre choc, ou même spontanément, et lance avec explosion, par l'ouverture qui en résulle, le mucilage et les graines. Hagrrar. — L'Æ/ateriuin croît dans les régions méridionales de l'Europe. Il habite surtout les lieux stériles, les plages sablonneuses, les bords des champs et des chemins, les décombres, ete. On ne le cultive que dans les jardins botaniques. PARTIES usITÉES. — Les fruits et les racines. Récoure. — Les fruits d'Æ/aterium doivent être récoltés en au- tomne, un peu avant leur maturité ; la racine se récolte à la même DU XIX° SIÈCLE. 5 époque ou au printemps ; elle ressemble un peu à celle de la Bryone ; ce qui est cause qu’on les donne quelquefois l’une pour l’autre dans le commerce. Composiriox cHIMiQuE. — Toutes les parties de l’£/aterium renfer- ment un suc extrêmement âcre et amer. M. Morus en à extrait une malière qui a reçu le nom d'Æ/atérine, matière qui a été étudiée par M. Zwenger. Ce corps cristallise en lames hexagonales fusibles, dé- composables par la chaleur, insolubles dans l’eau, peu solubles dans l'éther, très-solubles dans l'alcool ; il se dissout dans l'acide sulfuri- que en formant un liquide rouge, qui dépose, lorsqu'on l’étend d’eau, une substance brune peu connue. L'acide azotique dissout l’élatérine sans l’altérer ; l’acétate de plomb et l’azotate d'argent la précipitent de sa dissolution alcoolique. C’est un purgatif et un vomitif violents. Sa formule est —C"H"0". D'après MM. Braconnot et Paris, l’Æ/aterñun contient, outre l'éla- térine, une matière amylacée, de l'extractif non purgatif, de l’albu- mine végélale et quelques sels. Le dépôt du sue d’elatertum était employé autrefois sous le nom de Fécule d'elaterium. Usaces. — L'elaterium est un purgatif drastique très-violent, dont l’action se porte surtout sur le gros intestin, qu'il irrite et enflamme. On l’emploie peu aujourd'hui. Cependant, en France, on a quelque- fois fait usage de l'extrait, qu'il ne faut pas confondre avec le sédiment féculent qui se dépose dans le suc. On à quelquefois em- ployé en médecine ce dernier, desséché à une douce chaleur, mais ilest bien différent de l'extrait du suc. Les anciens faisaient grand usage de l'£/aterium contre les hydro- pisies. Sydenham le considérait comme un puissant hydragogue. Bontius, Mereurialis, Schulze, ete., lui ont attribué une grande effi- cacité contre les collections séreuses. Bright dit avoir guéri par l'Æ/a- terium deux personnes atteintes d'albuminurie avec hydropisie. Quel- ques médecins d'Angleterre, parmi lesquels nous cilerons M. Todd, en ont retiré de grands avantages dans l'anasarque, accompagné de signes évidents d'affection du cœur. Les Anglais en font grand usage : ils emploient surtout l'extrait préparé avec le sédiment du suc dont nous avons parlé, et qui est beaucoup'moins actif que l'extrait de suc ; il doit être manié avec prudence, mais il ne présente pas plus de dangers dans son emploi que la Coloquinte ou l'huile de Croton. L'action irritante qu'exerce l'£/aterium sur le rectum l'a fait pres- 6 FLORE MÉDICALE crire contre l’aménorrhée, contre les ascarides vermiculaires et les autres entozoaires. Gilibert l'a vu administrer avec succès contre le (ænia, Les Arabes l’emploient, dit-on, contre la jaunisse. Dioscoride l’administrait pour combattre les dyspnées. Hippocrate conseillait de faire manger de l’Æ/atertum à une chèvre pour en faire boire le lait aux enfants qu’on voulait purger. On à aussi employé cette plante contre la paraplégie, la scrofule, la goutte, etc., mais sans grands avantages. M. Morus employait l'élatérine, à 5 centigrammes dans 30 gram- mes d'alcool; il en donnait 30 à 40 gouttes. D'après M. Devergie, c’est un poison énergique; un seizième de grain suffit pour produire les effets ordinaires de l'£laterium. Selon M. Bird, son action est plus certaine que celle de l'extrait ; il la conseille dans les hydropisies essentielles et les maladies cuta- nées chroniques. La dose est de 1 à 3 milligrammes. D’après M. Loiseleur-Deslongchamps (Manuel des Plantes indi- gènes, T1), la racine d’£laterium desséchée purge doucement sans coliques. Dioscoride et Avicenne la donnaient comme purgative à la dose de 75 centigrammes ; Fallope allait jusqu'à 1 drachme (1 gr. 20); elle était regardée comme vomitive. Extérieurement, en fomenta- tions ou en cataplasmes, la même racine était conseillée pour résou- dre les engorgements œædémateux des jambes. Aujourd'hui, elle est généralement abandonnée. ÉPIAIRE Stachys sylvatica L.,S. recta L. et S. palustris L., etc. (Labiées- Stachydées.) L'Épiaire ou Stachyde des bois (S. sy/oatica L.), vulgairement Grande Épiaire, Ortie puante, etc., est une plante vivace, à rhi- zome longuement traçant, muni de racines fibreuses. La tige, haute de 0",50 à 1 mètre, tétragone, simple, rarement rameuse, dressée , velue, porte des feuilles opposées, longuement pétiolées, assez grandes, ovales-acuminées, fortement dentées en scie, molles, ridées, velues, d’un vert foncé. Les fleurs, d'un rouge pourpré, sont grou- pées en fascicules axillaires opposés, formant de faux verticilles, dont la réunion constitue de longs épis lâches, terminaux. Elles pré- sentent un calice tubuleux, évasé, velu, glanduleux, à cinq dents. DU XIX° SIÈCLE. 7 lancéolées-subulées, un peu piquantes ; une corolle bilabiée, beau- coup plus longue que le calice, tachée de blanc à la gorge; quatre étamines didynames, à anthères blanches; un ovaire composé de qua- tre demi-carpelles uniovulés, surmonté d’un style filiforme terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes ovoides et glabres. | L'Épiaire dressée (S. recta L., S. Sideritis Nill.), vulgairement Crapaudine, est aussi vivace et se distingue de la précédente par sa souche presque ligneuse ; par ses tiges, plus nombreuses, plus courtes, étalées ou ascendantes, diffuses ; par ses feuilles presque sessiles, les supérieures terminées en pointe épineuse; enfin par sa corolle jau- nâtre, à tube plus court que le calice. HaBiTaT. — Ces deux plantes sont communes en Europe ; la pre- mière, dans les lieux frais et couverts, les bois, les buissons, les haies touffues ; la seconde, dans les lieux secs, au bord des champs, sur la lisière des bois, etc. Citons encore, dans la tribu des Stachydées, les Épiaires ou Sta- chydes : des marais (S/achys palustris L.), abondant dans les fossés, le long des eaux et dans tous les lieux humides, facile à distinguer par ses feuilles lancéolées, dentées en scie, et par ses fleurs purpurines; d'Allemagne (S. germanica) grande et belle plante, à duvet blanc abondant, à fleurs réunies en verticilles épais; des champs (S. arven- sis L.), plante annuelle, faible et peu élevée, à feuilles ovales, ob tuses, à fleurs purpurines ponctuées de pourpre plus foncé, qui croit communément dans les champs en friche el parmi les moissons ; laineuse (S. lanata Jacq.), qui nous est venue de la Sibérie ; d'Hé- raclée (S. Heraclex AN.) qui se trouve sur les coteaux du Roussil- lon, de la Provence; grecque (S. cretica); épineuse (S. spénosa); à grandes fleurs (S. grandiflora Benth.; Betonica grandiflora W.), originaire de Sibérie, et remarquable par ses grandes et belles fleurs roses; des Alpes (S. a/pina L.), qui se trouve abondamment sur tou-- tes nos montagnes et même en plaine, dans les lieux couverts et frais ; Bétoine (S. Betonieu Benth., Betonica officinalis L.), plante commune dans les prairies, les bois de toute l'Europe et de la Russie asiatique ; Alopecuros (S. A/opecuros Benth. ; Betonica Alopecuros L.), espèce commune dans les Pyrénées et les Alpes; écarlate (S. coccinea W.) jolie espèce du Chili, introduite en Europe en 1800; annuelle Ssannua L.) commune dans les champs, sur les tertres et les cû- ë MLORE MÉDICALE teaux calcaires ; hérissée (S. kirta L.), qui se trouve dans l'Europe méridionale et l'Afrique septentrionale ; glutineuse ($S. gluti- nosa L.), de la Corse, espèce glabre, très-rameuse, dont les rameaux, raides et glutineux, finissent par dégénérer en épine à leur extré- milé ; elc., etc. Cuurure. — Les épiaires indigènes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques ; on les propage aisément par leurs graines, semées aussitôt après la maturité, ou par éclats de pieds, opérés au printemps. Les épiaires exotiques, comme l’épiaire écarlate, ont besoin de l’orangerie pendant l'hiver. PARTIES usITÉES. — Les sommités fleuries, les rhizomes. Récorre. — La plante entière se récolte à l’époque de la florai- son, avant l'épanouissement des bourgeons floraux; on la met en petits paquets peu serrés et on en fait des guirlandes, que lon fait sécher au soleil. ComPosiTION CHIMIQUE. — L'épiaire répand une‘odeur désagréable, repoussante ; l'analyse n’en a pas été faite. UsaGes. — L’épiaire ou stachyde des bois a été employée dans les campagnes comme emménagogue et anti-hystérique. On la con- sidère comme diurétique. On s'en est servi en l'associant au Lierre terrestre, contre l'asthme humide et les catarrhes pulmonaires chro- niques. Son suc à été administré avec succès, entre autres par M. Cazin, contre l'aménorrhée. Les paysans, dans certaines contrées, font macérer les feuilles dans de l'huile qu'ils emploient ensuite comme lopique contre les brûlures. Avec l'épiaire des bois, on oblient une couleur jaune assez belle ; les fibres corticales de cette plante peuvent fournir de bons cordages. L'épiaire dressée passe pour être excitante et vulnéraire. L'épiaire des marais a été préconisée comme fébrifuge. On retire de son rhi- zome une fécule amylacée. On le mange quelquefois cuit. En An- gleterre, dans les temps de disette, on l'a mêlé, réduit en poudre, avec la farine de froment. Les épiaires ou stachydes sont aujourd'hui à peu près abandonnés dans la matière médicale francaise. DU XIX° SIÈCLE. () ÉPIMÈDE Epimedium alpinum L. ( Berbéridées. } L'Épimède des Alpes, vulgairement appelé Chapeau d'évèque, est une plante vivace, à souche rampante. Les tiges, hautes de 0,20 à 0,30, sont cylindriques, grêles, trichotomes au sommet, garnies d’écailles à la base, munies de deux nœuds renflés et velus, d'où naissent des feuilles pétiolées, biternées, à folioles cordiformes-lan- céolées, acuminées, dentelées, rougeâtres sur les bords. Les fleurs sont petites, groupées en panicules lâches, latérales, naissant au des- sous des feuilles. Elles présentent : un calice à quatre sépales rouge- brun, accompagné de plusieurs petites bractées en dehors de la base; une corolle à huit pétales jaunes, disposés sur quatre rangs, les exté- rieurs plans, les intérieurs recourbés en cornet; quatre étamines à anthères valvicides; un ovaire ovoïde, uniloculaire, multiovulé, accompagné d’un style latéral, cylindrique, terminé par un stigmate en tête. Le fruit est une capsule en forme de silique, oblongue, unilocu - laire, polysperme, s'ouvrant en deux valves (PI. 1). Nous citerons encore l’Épimède à grandes fleurs (£. macranthum Dene), facile à distinguer du précédent par ses tiges brunàtres, el ses fleurs blanches, plus grandes, munies de longs éperons droits. HagirarT. — L'épimède des Alpes croit dans les régions monta- gneuses du centre de l'Europe, notamment dans les lieux ombragés. L'épimède à grandes fleurs est originaire du Japon. Cuzrure. — Les épimèdes ne sont cultivés que dans les jardins botaniques ou dans les massifs d'agrément. Ce sont des plantes assez rustiques et peu difficiles sur le sol, mais qui viennent n'ieux en terre de bruyère. On les mulliplie facilement par la séparation des touffes, pratiquée en automne; les jeunes pieds fleurissent l’année suivante. Pendant l'hiver, il est bon de rentrer les espèces japonaises, en orangerie ou sous châssis froid. PARTIES USITÉES. — Jadis la plante entière, les fruits, les graines. RécoLre. — Les fruits d'épimède, comme tous ceux des Berbéri- dées, se récoltent à leur maturité; les graines, séparées du péri- carpe, se desséchent à part. 10 FLORE MÉDICALE Comrosirion cHimique. — On ne connait pas la composition des fruits capsulaires des Épimèdes; les graines renferment du tan- nin. Usaces. — Matthiole (Commentaires sur Dioscoride, traduction française de A. du Pinet et J. Desmoulins, Lyon, 1572, in-ol., p. 366), fait remarquer que l'Epimedium, dont parlent Dioscoride, et, d'après lui, Pline et Galien, comme propre à affermir les ma- melles en les empêchant de croître, et à rendre les femmes sté- riles, ne se reconnait pas dans la plante qui porte aujourd'hui le même nom. D’après Dioscoride, en effet, l'épimède ne produit ni fleur, ni fruit, et sa racine est menue, noire, pesante et d'un goût fade. Les feuilles des épimèdes que nous connaissons ont été em-— ployées en médecine comme sudorifiques et alexipharmaques, c'est- à-dire contre le venin. Aujourd’hui ces plantes sont médicinalement tomhées en désuétude, du moins en France. Le suc que contiennent les fruits charnus de certaines Berbéridées, les rend propres à faire des sirops rafraichissants. ÉPINE-VINETTE Berberis vulgaris L. (Berbéridées.) L'Épine-Vinette ou Vinettier est un arbrisseau buissonnant, à ra- cines traçantes jaunes. Les tiges, hautes de 1 à 2 mètres ou plus, dressées, couvertes d’une écorce gris cendré, se divisent en rameaux diffus épineux, portant des feuilles d’abord fasciculées, plus tard alternes, pétiolées, ovales-obtuses, fortement dentées en scie, glabres, d'un vert glauque, plus pâle en dessous. Les fleurs, d’un beau jaune, portées sur des pédicules minces munis d'une petite bractée à la base, sont groupées en grappes axillaires, simples, allongées et pen- dantes. Elles présentent un calice à six sépales, disposés sur äeux rangs, le plus souvent offrant en dehors une sorte de calicule formé de quelques petites bractées ; une corolle à six pétales, également sur deux rangs, un peu concaves, échancrés au sommet, avec deux glandes rougetres à la base; six étamines à filets courts, aplatis, très-irri- tables; un ovaire simple, ovoïde, allongé, pauciovulé, surmonté d’un stigmate sessile, épais, discoïde, large, à rebords saillants. Le fruit est une petite baie, ovoide-allongée, ombiliquée au sommet, d'un DU XIX° SIÈCLE. 11 beau rouge (plus rarement violette ou blanchätre), contenant deux ou trois graines oblongues (PI. 2). Hagrrar. — Cet arbrisseau est assez abondamment répandu en Europe ; il croit dans les bois, les haies, les lieux incultes et sau- vages, etc. CucrurE. — L'épine-vinette est fréquemment cultivée dans les pares et les jardins d'agrément. Elle est très-rustique et croit dans presque tous les sols et à loute exposition. On pourrait la propager de graines ; mais comme les jeunes plants ne lèvent que la seconde année et demandent quelques soins, on préfère la multiplication par boutures ou marcottes, ou bien encore par rejetons, que l’on sépare en automne pour les replanter. La taille se réduit à enlever le bois mort et à éclaircir les parties trop touffues. IL y a une variété d’épine-vinette à fruits blancs, violets ou rouges, qui n’a point de semences; on la trouve dans les départements de la Seine-Inférieure, de l'Eure, du Rhône, de l'Isère; elle est connue des botanistes sous le nom de Berberis asperma. M existe une autre variété à larges feuilles, venue du Canada (Z. canadensis), qui est acclimatée en France. Parries usirées. — Le bois, l'écorce, les racines, les feuilles, les fruits, les semences. Récocre. — L’écorce, le bois et les racines sont récoltés à l’au- tomne pour les besoins de la teinture. Les feuilles se cueillent au moment de la floraison, les fruits à leur parfaite maturité. On fait dessécher ceux-ci, et ils ne perdent en se desséchant ni leur forme, ni leur couleur. La racine est ligneuse, d'un jaune pur, à structure rayonnée comme celle des Ménispermées. L’écorce est quelquefois substituée à celle du Grenadier, mais elle est plus jaune. CoMPosiTION CHIMIQUE. — D’après MM. Buchner père et fils, Her- berger et Polex, la racine d’épine-vinette contient de l'huile, de la cire, une graisse, de la chlorophylle, une résine, de la berbérine, de l’oxyacanthine, de la gomme, des malates et des phosphates, et de la fibre ligneuse. La berbérine a été découverte par MM. Buchner père et fils, et Herberger. M. Fleitmann a constaté le premier ses propriétés alea- lines. Elle constitue la matière colorante de l’épine-vinette. Déposée de sa solution aqueuse, elle présente l'aspect d’aiguilles jaunes dé- 12 FLORE. MÉDICALE liées; elle ramène au bleu le tournesol rougi par les acides- elle forme des sels cristallisables et inaltérables au contact de l'air ; elle fond à 120°. Sa formule est C®H'°Az 0". L'oryacanthine, découverte par M. Polex, est blanche, fusible, cris- tallisable; sa saveur est âcre et amère; elle est peu soluble dans l’eau froide, plus soluble dans l’eau bouillante, l'alcool et l'éther, les huiles grasses et volaliles; elle forme des sels dont quelques-uns cristallisent. Les feuilles ont une saveur aigrelette et renferment de l'acide ma- lique; les baies ont une saveur rafraichissante agréable ; elles con- tiennent des acides malique et citrique. Les fleurs ont une odeur désagréable, semblable à celle des fleurs mâles du Châtaignier. Usaces. — D'après M. Buchner, la 4erbérine est tonique et purga- tive à la dose de 50 à 70 centigrammes. Elle a été préconisée de nos jours comme fébrifuge (Qwinoïdine). L'épine-vinette commune a été employée autrefois contre la jau- nisse, les hydropisies, les engorgements du foie et de la rate. On a vanté sa racine et son bois comme toniques amers et légèrement purgalifs. Récemment on à préconisé ses feuilles contre les fièvres intermittentes, typhoïdes et bilieuses. Les feuilles et les fruits, joints au miel, donnent une sorte de limonade employée dans les campagnes contre la dysenterie et le scorbut. Prosper Alpin (Wedecina Ægyp- tiorum, AIS, et De plantis Ægypti, 1135) rapporte que les Écyp- tiens se servent des fruits contre la fièvre qu'ils appellent pestilen- tielle, dont le symptôme est une diarrhée bilieuse. Matthiole (Com. sur Dioscoride, trad. de Desmoulins, 1572, p.78) dit que de ce fruit « on fait un vin que les apothicaires appellent 77 de Berberis, dont on use dans les fièvres malignes, cholériques, pestilentielles, contre les diarrhées et les vomissements provenant d'abondance d'humeurs cholériques, contre le flux du sang menstruel, contre les crachements de sang, pour résoudre les inflammations du palais et de la gorge, pour sonder les plaies fraiches, déterger les vieux ulcères, pour raffermir les gencives et les dents, etc. » Aujourd'hui le suc con- centré des baies d’épine-vinette entre dans la préparation des pastilles médicales destinées à ce dernier usage. On prépare avec les baies un rob et un sirop. La pulpe fournit une boisson fermentte, saine, rafraichissante, mousseuse, se conservant deux ou trois ans. Vertes, ces baies remplacent les Càpres ; bien müres, elles servent à faire de DU XIX° SIÈCLE. 13 bonnes confitures. On assure que, dans les contrées marécageuses de la Bresse et de la Sologne, les feuilles se mangent en guise d’oseille et sont regardées comme un excellent tonique. Dans tous les cas, elles servent d'aliment aux bestiaux. La racine d'épine-vinette, qui a été employée en médecine comme Slyplique, donne, quand elle est bouillie, une belle couleur verte, propre à teindre les peaux de chèvre et de mouton. L’écorce moyenne, lessivée, donne beaucoup de lustre au cuir corroyé. Le sue des baies, joint à l’alun, fournit une couleur d’un rouge éclatant. ÉPURGE Euphorbia Lathyris L. (Euphorbiacées - Euphorbiées.) L'Épurge, appelée aussi Catapuce, et quelquefois Grande-Ésule, est une plante bisannuelle, à racine pivotante, blanche, ramifiée, fibreuse. La tige, haute de 0°,65 à 4 mètre, ferme, dressée, glabre, d'un vert glauque, simple à la base, rameuse au sommet, porte des feuilles opposées, décussées, sessiles, lancéolées, obtuses, entières, glabres, d'un vert glauque, plus clair en dessous. Les fleurs, vert- Jaunâtre, monoïques, sont réunies en ombelles terminales; une fleur femelle est entourée de plusieurs mâles, le tout renfermé dans un in- volucre caliciforme, composé de feuilles de même forme que les cau- linaires, soudées à la base, et de bractées, dont cinq extérieures en forme de croissant à cornes glanduleuses, cinq intérieures dressées, minces et frangées. L'ombelle est très-ample, ordinairement à quatre rayons dichotomes, terminés en grappes unilatérales. Les fleurs mâles, au nombre de quinze à vingt, consistent chacune en une éta- mine dressée, plus longue que l’involucre, à anthère didyme, à lobes globuleux. La fleur femelle, solitaire au centre de l'involucre et portée sur un long pédicelle recourbé, est réduite à un ovaire à trois loges uniovulées, surmonté de trois styles simples terminés chacun par un stigmate bifide. Le fruit est une capsule très-grosse, lisse, à péricarpe charnu-subéreux, composé de trois coques, dont chacune renferme une grosse graine ovoide, tronquée à la base, rugueuse, ré- ticulée et d’un brun mat ou jaunâtre. Hagirar. — L'épurge croît dans l’Europe centrale et méridionale ; on la trouve dans les lieux ombragés, les haies, les villages, au bord 14 FLORE MÉDICALE des chemins et des champs cultivés, dans ie voisinage des vieux châteaux, etc. Cuzrure. — Cette plante n’est cultivée que dans les jardins bota- niques. Elle demande une terre fraiche et substantielle, et se propage par ses graines, semées en place au printemps. Elle se resème d'elle- même. Parries usirées. — Les racines, les feuilles, les graines. Récoure. — La racine d’épurge se récolte au printemps et à l'au- tomne ; les feuilles, qui sont rarement employées, doivent être cueil- lies à l'époque de la floraison; elles exigent de grandes précautions pour la dessiccation, qui doit être faite très-promptement. On récolte les graines à la maturité du fruit, Composirion cHiMiQuE. — L'épurge fraiche laisse écouler de toutes ses parties, quand on la coupe, un suc laiteux, âcre, corrosif, qui n’est pas utilisé; les graines, analysées par M. Soubeiran, ont fourni ung huile fixe jaune (40 pour 100 environ), de la stéarine, une huile brune, âcre, une matière cristalline, une résine brune, une matière colorante extractive, de l’albumine végétale. La stéarine est blanche et insipide ; l'huile jaune est purgative ; mais M. Soubeiran croit qu'elle doit cette propriété à des matières étrangères à sa nature; c’est l’huile brune-âcre qui est le principe actif; elle a une odeur et une saveur désagréables ; elle est entière- ment soluble dans l'alcool et dans l’éther. L'huile d’épurge peut être obtenue par expression à froid ou à chaud, par les dissolvants, tels que l'alcool, l'éther, le sulfure de car- bone, les essences de pétrole rectifiées, ete. L'huile obtenue par ex- pression est adoptée de préférence. Usaces. — Les anciens connaissaient les propriétés actives de l'é- purge. Hippocrate a cité deux cas d'empoisonnement par cette plante. Dioscoride et Pline la signalent comme un purgatif violent. Orfila la rangeait dans les poisons irritants; elle cause une inflam- mation très-vive, irrite le système nerveux, produit des superpur- gations, des selles sanguinolentes, des coliques violentes et souvent des vomissements; (opiquement, elle détermine des boutons, des phlyctènes; et l'inflammation peut s'étendre au tissu cellulaire sous- cutané, c'est peut-être cette énergie d'action qui fail qu'elle est peu employée. Cependant les paysans de nos campagnes mâchent quelques graines DU XIX® SIÈCLE. ; 15 d'épurge lorsqu'ils veulent se purger ; et l’'émulsion des semences, ou l'huile émulsionnée par un jaune d’œuf, ou même associée à la ma- gnésie, sont quelquefois administrées ; mais il est prudent d'employer simultanément les émollients, tels que les décoctions de racines de Guimauve et de graines de Lin. Carlo Calderini, qui, le premier, a obtenu l'huile d’épurge, la con- sidérait comme un purgatif doux, à la dose de trois gouttes chez les enfants, et de six à huit chez les adultes; elle produit, dit cet auteur, des évacuations alvines sans coliques et sans ténesme; ce n’est que lorsqu'elle est rance qu'elle cause des coliques; cependant Lupis et Canella ont observé qu'elle déterminait souvent des vomissements ; mais il paraîtrait que l’épurge d'Italie est plus active ; et qu’elle ne purge qu'autant qu'on l’administre à faibles doses. L. Frank pensait que l’huile d’épurge pouvait être employée contre le tænia. Martin Solon l’a administrée à la dose de 1 à 2 grammes dans l’albuminurie chronique. Valleix a remarqué que son usage continué irritait le canal intestinal. On la fait prendre quelquefois en lavement à la dose de 1 à 2 grammes, soit émulsionnée, soit dans une décoction de mercuriale. Employée à l'extérieur, en frictions, elle est rubéfiante. On s’en est servi contre les affections bronchi- ques et contre la sciatique. Les feuilles en frictions déterminent une assez vive rubéfaction. Le suc est employé pour détruire les verrues, et dans le traitement de la teigne ; mais, dans ce dernier cas, l'application de ce suc n’est pas toujours sans danyer. La racine et l'écorce de la tige de l'épurge sont aussi purgatives, mais à un moindre degré que les semences. En médecine homæopathique on fait un assez fréquent usage de l'épurge. Son signe est Aep, son abréviation Lath. ERANTHIS (Renonculacées - Helléborées. ) Eranthis hyemalis Salisb. Helleborus hyemalis L. L'Eranthis ou Hellébore d'hiver est une petite plante vivace, à rhizome épais, arrondi, charnu, tubéreux, couvert de fibres radicales sur toute sa surface. La tige, haute de 0",10 à 0",15, dressée, porte à sa base une seule feuille radicale, longuement pétiolée, arrondie, 16 ULORE MÉDICALE palmée ou presque pellée, à trois segments divisés chacun en trois lobes oblongs ou linéaires, glabres, d’un beau vert. Les fleurs, d'un beau jaune d’or, paraissent avant les feuilles, sont solitaires à l'ex- trémité de la tige et accompagnées d’un involucre formé de trois bractées foliacées, découpées, persistantes. Elles présentent un calice pétaloïde, composé de cinq à huit sépales jaunes, cadues; une corolle ayant un nombre variable de pétales, très-courts, tubuleux, tronqués obliquement, nectariformes, à deux lèvres inégales ; des étamines en nombre indéfini; un pistil composé de trois à huit ovaires libres, uniloculaires, multiovulés, surmontés chacun d’un style court ter- miné par un sligmate obtus. Le fruit se compose de trois à huit folli- cules, libres, un peu divergents, prolongés en bec, s'ouvrant par la suture ventrale et contenant de nombreuses graines arrondies, un peu anguleuses, finement chagrinées (PI. 5). HagrratT. — On ne connait qu'un très-petit nombre d'espèces d'Eranthis, qui toutes sont originaires des régions montueuses, froides ou tempérées de l'Europe et de l'Asie. Cuzrure.— L'Æ£ranthis d'hiver est quelquefois cultivé dans les parcs et les jardins d'agrément, à cause de la précocité de ses fleurs. II demande une terre fraiche, légère, humide, et une exposition om- bragée. On le mulliplie de graines semées en place au printemps, ou mieux d’éclats de pieds, faits en automne. Parnies usirées. — Les fleurs, les rhizomes. Ricoure. — On récolte les fleurs avant les feuilles, vers le mois de janvier, et on les fait sécher à l'étuve. Les rhizomes possèdent leur maximum d'aelion après la chute des fleurs. COMPOSITION CHIMIQUE. — Vauquelin a analysé la racine d'£ran- this : il y a trouvé une huile extrêmement àcre, de l'amidon très- pur, une substance végélo-animale, du ligneux, des traces de sucre et de la matière extractive colorée (Annales du Museum, t. NW, p. 87). UsaGes.— Les £ranthis qui se placent à côté des Hellébores, dont ils ne paraissent pas devoir être génériquement séparés, non plus que les Coplis (Baillon, Monog. des Renonculacées, p. 16), exercent sur toute la paroi intestinale une irrilation locale qui peut aller de- puis la plus légère rougeur jusqu'aux accidents inflammatoires les plus graves. Ils agissent aussi sur le système nerveux. On assure que le rhizome de l'£ranthis est éminemment purgatif. Du reste, la mé- = DU XIX° SIÈCLE. 17 decine française ne recommande pas l'usage de cette plante dont il importe pourtant de connaître les effets. ERGOT Sclerotium Clavus D.C. Claviceps purpurea Tul. Sphaceliu segetum Léveillé, (Champignons.) On désigne vulgairement sous le nom d'Ergot du Seigle, un petit Champignon parasite qui occupe la place de l'ovaire dans certaines Graminées et particulièrement dans le Seigle. C’est d'abord une masse molle, visqueuse, d'un blanc jaunàtre; puis cette masse devient solide, s'allonge, sort de l’épi, et forme alors un corps brun-violet oblong, presque cylindrique ou irrégulièrement tétraédrique, long de 0",01 à 0%,03 sur 0%,003 de diamètre, aminci aux deux extrémités, obtus au sommet où se trouve une malière molle, visqueuse et blanchàtre qui coule le long de la partie solide. Dans l’ergot du commerce, cette matière manque , le champignon est plus ou moins arqué, res- semblant pour la forme à un ergol de coq, souvent marqué d'un sillon longitudinal, crevassé en long et en travers; sa cassure est nette, compacte, homogène, blanchâtre vers le centre, teintée de cou- leur vineuse à la circonférence. Il n’est pas que le Seigle qui soit sujet à l’ergot ; les épis du Blé, du Mais et de beaucoup d’autres graminées en peuvent être atteints. L'ergot du maïs se montre sous la forme d’un petit tubercule pisi- forme, ou d'un cône enté sur le grain, dont la couleur et le volume sont très-peu altérés. Hagrrar. — L'ergot, comme nous venons de le dire, s'établit en parasite sur les Graminées. PARTIES USITÉES. — Tout le champignon. Récore. — L’ergot de seigle n’est pas récolté isolément; on le trouve dans les moissons où on le trie; puis on le fait sécher; il s’al- tère rapidement, surtout lorsqu'il est pulvérisé ; aussi recommande- t-on de le réduire en poudre seulement au moment où on en a besoin. Aux caractères de l'ergot que nous avons donnés, nous ajou- * terons les suivants : il est ferme, solide, un peu élastique ; sa saveur, peu marquée d’abord, est bientôt suivie d'une astriction dans l'ar- rière-bouche ; son odeur rappelle celle des Champignons; respiré en masse, il présente une odeur forte et désagréable; à l'humidité, Flore, T. IH. 9* 18 FLORE MÉDICALE 3 il se putréfie, devient la proie d’un Sarcopte analogue à celui du fromage et répand alors une odeur fétide. Hisromme. — Quelques auteurs ont pensé que Pline avait voulu parler de l’ergot dans le passage du 1. XVI, c. 17 de son Histoire naturelle, où il dit : Znter vitia segelum el luxuria est, cum onerata fertilitate procumbunt. Néanmoins, ce qu'on peut affirmer, c’est que les anciens ont absolument ignoré les propriétés de l’ergot. Ces pro- priétés ne furent connues qu’à dater de l'an 1540. Joachim Came- rarius assure que de son temps (1534 à 1598) les femmes s'en ser- vaient pour faciliter et hâter les accouchements dans les cas d'inertie de l'utérus. Matthiole qui, dans ses Commentaires sur Droscoride, parle de la farine de seigle comme propre aux emplàtres maturatrices et de la décoction du grain comme vermifuge, ne dit rien de lergot. Dans les premières années du dix-huitième siècle pourtant, Dodart publia plusieurs observations sur ce qu'on appelait alors le Blé cornu. Les Mémoires de l Académie des sciences, année 1710, contiennent une étude sur le Blé cornu, appelé Ergot. Tillet et Duhamel qui, dans la seconde moitié du même siècle, étudièrent le sujet, pensaient que l'ergot élait une sorte de galle due à la piqüre d'une mouche. Le Dictionnaire de Trévoux résume ainsi l'état de la question à cette seconde époque : « £rgot, maladie des seigles. On appelle ainsi les grains de seigle qui deviennent, dans certaines années, longs, noi- râtres et cornus. La farine de ce grain est blanchâtre et très-perni- cieuse. Lorsqu'il est arrivé que les épis du seigle étaient chargés de ce mauvais grain, et qu'on n'a pas eu soin de le rejeter, on a vu régner à la campagne des maladies qu’on appelle Feu Saint-Antoine. On donne aussi le nom d’ergof à cette maladie singulière dont le seigle est attaqué. Quelques-uns l'ont attribuée aux brouillards qui gâtent les épis. Mais pourquoi les brouillards n'agiraient-ils que sur les grains de seigle, et n’atlaqueraient-ils pas également le froment, l'avoine, etc. De plus, une cause générale devrait produire un effet général. Cependant tous les seigles ne sont pas ergotés dans tous les endroits où les mêmes brouillards ont régné ; dans le même champ, tous les épis voisins les uns des autres, et souvent dans le même épi, tous les grains ne sont pas ergotés. Il est plus raisonnable d'attribuer cette maladie à la piqüre de quelque insecte qui dépose ses œufs dans le grain du seigle ; et cela s'accorde avec les observations de M. Tillet qui a découvert de petits vers dans les grains de seigle DU XIX° SIÈCLE. 19 ergoté. » Rosier regarda l’ergot comme une production morbide provenant d'une surabondance de sucs nourriciers de mauvaise na- ture. Bernard de Jussieu et Geoffroy le tinrent pour le résultat d’un défaut d'équilibre dans la fécondation. Tessier, dans un travail sur les Maladies des grains, figura le premier l'ergot. En 1802, De Can- dolle commenca à renverser toutes les idées reçues, en le donnant comme un champignon du genre Sclerotium ; i le nomma Sclerotium clavus el le figura dans son beau mémoire sur les espèces de ce genre (Mémoires du Museum d'hustoire naturelle, &. WI, p. 416, tab. 14). Virey et quelques botanisles jetèrent ensuite des doutes sur la nature de l’ergot. Desfontaines, balançant, dans un rapport qu'il fit sur ce sujet, les raisons pour et contre, augmenta, plutôt qu'il ne diminua, l'incertitude. Vauquelin, à qui on doit la première analyse chimique de l’ergot du seigle, crut pouvoir combattre l’opinion de De Can- dolle, et donner comme probable que l’ergot n’était pas un Sc/ero- lium, mais bien un grain altéré. En 1823, M. Fries composa de l’ergot du seigle et d’une autre espèce observée sur un Paspalum, un genre particulier de champignons auquel il donna le nom de Spermædia, mais en admettant jusqu'à un certain point que ce pouvait être une maladie du grain. En 1827, le docteur Villeneuve publia une Mono- graphie sur l'ergot, mais plutôt au point de vue médical que botanique. En 1823, le docteur Léveillé émit une opinion mixte en quelque sorte, etselon laquelle l’ergot comprend à la fois un champignon et une pro- duction anormale qui en fait la majeure partie. Selon lui « l’ergot du seigle et des graminées est une maladie de leur ovule causée par le développement d’un champignon parasite, qu’il a nommé Sphacelia segetum. Ce champignon se développe sur les graminées à la suite des pluies accompagnées d'orage, et peu de temps après la féconda- tion. Au début de l'invasion, le grain ne paraît pas malade; il con- serve sa forme et sa couleur, mais il s'écrase plus facilement que les grains sains. Alors l’ovule est encore blanc ; mais il est entouré d’une matière jaunàtre, visqueuse, qui l'enveloppe partout, excepté à son point d'insertion. Cette matière, développée entre le péricarpe et l’ovule, constitue la sphacélie encore jeune. Pendant qu’elle continue à croître, le péricarpe se détache à sa base et tombe ou reste collé sur elle ; celle-ci elle-même se détache à sa base, et ne fait plus que coiffer l’ovule déjà devenu violet. Dès lors le péricarpe et la sphacélie ne jouent plus qu’un rôle secondaire, et l’ovule ainsi affecté prend 20 FLORE MÉDICALE un accroissement tellement anormal qu'il finit souvent par acquérir % à 5 centimètres de longueur. Par suite de cet accroissement de la masse ovulaire altérée, la sphacélie finit par ne plus entourer que son extrémité. Exposée au contact de l'air, elle se dessèche ; elle ne forme le plus souvent qu'une pointe à l'extrémité de l'ergot, et même elle tombe pour l'ordinaire par le frottement des épis les uns contre les autres. Si la saison est humide, l’eau la dissout, l’entraine dans les balles, ou la laisse sur l’ergot sous la forme d’une couche blanchâtre qui se détache par petites écailles. » M. Léveillé a résumé ses recher- ches sur l'ergot dans le Bulletin de la Société philomatique (séance du 28 août 1847). La sphacélie de ce savant cryptogamiste, partie blanchâtre qui surmonte l’ergot, ne doit pas être confondue avec le Spermedia de M. Fries, qui, pour ce botaniste, est l'ergot lui-même. Divers observateurs, tels que MM. Philippar, Phœbus, Quekett, ont adopté l'opinion que l’ergot est une maladie du seigle causée par la présence d’un champignon de la nature de celui que M. Léveillé a décrit. M. Fée, à son tour, s’occupa de l’ergot auquel il donna le nom de Nosocarya, ce qui signifie grain malade. Après avoir admis que Pergot est un champignon, il conclut néanmoins par une sorte de contradiction, en disant que c’est une production pathologique ou une hypertrophie du périsperme (Mémoire sur l'ergot du seigle, Slras- bourg, 1843)..M. Guibourt pense que M. De Candolle avait eu raison de faire de l’ergot une espèce de Sc/erotium, et n'adopte pas l'opinion de M. Léveillé quand il regarde l'ergot comme un champignon arrêté dans son développement el privé de spores. Il y a reconnu d’ailleurs, après M. Fée, une masse de sporidies ovoides-allongées, dont quel- ques-unes offrent des spores très-petits dans leur intérieur. « En résumé, dit M. Guibourt, l’ergot n'est pas un ovaire ou un grain altéré ; l’ergot est un champignon qui, après la destruction de l'ovaire, s'est greffé à sa place sur le pédoncule (His. des drogues simples, 4° édit., 1849, €. I, p. 66-73).» Le dernier botaniste qui ait élucidé la question est M. Tulasne (x Compt. rend. Ac. scienc., t. XXXU, p. 645, et Ann. se. nal., sér. 3, L. XX, p. 1). Suivant lui, le cham- pignon de l’ergot commence par ce qu'on nomme la Sphacéle, qui, s'identifiant avec le parenchyme blanc qui enveloppe l'ovaire, le remplace en quelque façon et parait portée directement sur l'endo- carpe. Elle grandit ainsi et devient une masse fongueuse, creusée intérieurement de cavités irrégulières, communiquant souvent avec DU XIX° SIÈCLE. 21 l'extérieur. Ces cavités sont lapissées d'un Æymensum ; et sur celui-ci se développent des spermaties qui peuvent germer à la facon des spores, quand on les place dans l’eau. En plantant ensuite des er- gots arrivés à cel élat, on voit leur surface se fendiller et leur pelli- cule superficielle se soulever. Par la solution de continuité sort un corps tuberculeux et blanchâtre qui se nourrit de la substance de l'ergot en épuisant son parenchyme. Leur sommet, renflé en boule, est supporté par un pédicule qui s’allonge de plus en plus; et l’en- semble représente alors un petit champignon (C/aviceps purpurea) dont M. Guibourt avait, dès 1849 (ist. nat. des drog. simpl., &. W, p. 73), donné des figures exactes. La tête de ces petits champignons présente des points à sa surface; ce sont des ostioles qui conduisent dans des conceptacles garnis eux-mêmes dans leur intérieur de thèques et de paraphyses. Les thèques contiennent des spores qui sont aptes à reproduire, avec toutes ses phases de développement, le véritable cryptogame de l’ergot. Outre les auteurs déjà cités, Langius, Noël, Vétillard, Mœler, Schleger, Model, Parmentier, Paulet, Fontana, Cornet, Goupil, Willdenow, Deslandes, Sparzani, Pignacca, Cabini, Bazzoni, Stearus, Olivier Prescott, Chaussier, Mérat et Delens, Rams Batham, Boudet, Grandclément, Sédillot, Miahle, Gauthier-Laroze, Depaul, M°* Lacha- pelle, ete., se sont occupés de l'ergot, les uns au point de vue botani- que, les autres au point de vue médical. Après Vauquelin, MM. Wig- gers, Leperdrie!, Mitscherlich, s’en sont occupés au point de vue chimique ; il faut joindre à cette nomenclature M. Bonjean, qui en a tiré parti au point de vue commercial. CoMposiTION CHIMIQUE. — Vauquelin a analysé l’ergot de seigle. Il y a trouvé : une matière colorante jaune fauve, soluble dans l'alcool, d'une saveur d'huile de poisson ; une huile blanche, douce, très- abondante ; une matière colorante violette, soluble dans l’eau ; un acide libre (phosphorique?); une matière azotée abondante, très- putrescible, fournissant une huile épaisse et de l’ammoniaque à la distillation ; de l’ammoniaque libre, qui se dégage à la température de 100°. M. Wiggers a soumis depuis l'ergot à une analyse plus complète (Journal de pharmacie, t. XNW, p. 525). Ce chimiste ayant traité d'abord par l’éther 100 parties d'ergot pulvérisé, en a retiré 36 parties d'une huile brune-verdâtre, d'où l'alcool a extrait une petite quan- 22 FLORE MÉDICALE tité d’une huile grasse, rouge brun, d’une odeur fort désagréable, et un peu de cérine cristallisable ; le reste se composait d'une huile douce, blanche, très-soluble dans l’éther (35 p. 100). Le seigle ergoté, traité ensuite par l'alcool, lui cède 10, 56 p. 100 d'un extrait rouge, d’une odeur de viande rôtie, grenu, déliquescent, que l’on sépare en deux parties; l’une insoluble, pulvérulente, d’un rouge brun, d’une saveur amère un peu âcre, ni acide, ni alcaline, insoluble dans l’eau et dans l’éther, soluble dans l'alcool, et à laquelle M. Wiggers a donné le nom d’ergotine ; l'autre soluble dans l’eau, contenant un extrait azoté semblable à l'osmazone, du sucre cristalli- sable, et des sels inorganiques. Le seigle ergoté, épuisé par l'alcool, lui a cédé un extrait contenant du phosphate acide de potasse, de la gomme el un principe azoté d’une couleur rouge de sang. Le résidu était composé de fongine, d’albumine, de silice et de phosphate de chaux. L'ergotine de M. Wiggers est pulvérulente, d'un rouge brun, d’une saveur âcre, amère, infusible, insoluble dans l’eau, l’éther et les aci- des étendus; soluble dans l'alcool, l'acide acétique et la potasse caus- tique: l'acide azotique bouillant la décompose en lui donnant une teinte jaune ; l'acide sulfurique la dissout en se colorant d'un rouge brun. L’ergotine est très-vénéneuse. M. Wiggers conseille, pour obtenir l'ergotine, d'enlever à l'ergot les matières grasses et cireuses, de reprendre le résidu par l'alcool, de concentrer la liqueur par évaporation, et de précipiter l'ergotine au moyen de l’eau. Il est probable que le produit ainsi obtenu n'est pas un principe immédiat, mais qu’il est plutôt une résine mêlée de substances colorantes. 1 ne faut pas confondre l’ergotine de M. Wiggers avec le produit de ce nom que l’on trouve dans le commerce, et dont on doit la connais- sance à M. Bonjean, pharmacien à Chambéry. L'ergotine de M. Bon- jean, que son auteur a proposée comme un spécifique contre les hémorrhagies de toute nature, et auquel il attribue aussi la pro- priété obstétricale, est un extrait variable dans sa composition comme dans ses propriétés, dont les effets sont moins certains que ceux de l'ergot. Pour préparer son produit, M. Bonjean épuise la poudre d'ergot par l’eau, etil fait évaporer après filtration jusqu’à consistance de sirop; il y ajoute de l'alcool qui précipite les parties gommeuses et les sels insolubles dans l'alcool ; puis il fait évaporer à siceité. Il est DU XIX° SIÈCLE. 23 évident qu'outre le principe extractif, il y a dans le produit obtenu les sels déliquescents, l’osmazone, le sucre et d'autres substances encore. D'ailleurs, cet extrait présente des consistances très-variables, et il est très-hygrométrique. Le sucre extrait par M. Wiggers de l’ergot de seigle a été reconnu par M. Mitscherlich pour un sucre particulier qui a été étudié et décrit par lui sous le nom de mycose. L’ergot du blé a été observé au point de vue chimique par M. C. Le- perdriel dans une thèse soutenue, en 1862, devant l’école de phar- macie de Montpellier. D'après l’auteur, cetergot contient 15 centièmes de principe toxique, huile grasse et résine, et 20 p. 100 d’ergotine ou principe efficace. D’après ce travail, l’ergot du blé serait moins altérable, plus efficace et moins toxique que celui du seigle. M. F. Boudet a démontré que c’est dans l'huile que l'on trouve toutes les propriétés toxiques de l’ergot, et que l'action utile, celle que l’on recherche pour la guérison, est dans l'extrait aqueux. Pour le traitement médical, on doit préférer, selon nous, l'usage de l’ergot à celui de l’ergotine ; mais quand on voudra employer celle- ci, nous conseillons l’ergotine évaporée dans le vide et renfermée dans de petits tubes contenant chacun 10 ou 20 centigrammes d’er- gotine représentant une dose. Quant à la prétendue ergotine impar- faitement soluble dans l’eau, de consistance variable, sur l’action de laquelle le médecin ne peut pas compter, il faut la repousser de la thérapeutique. Usaces. — Bien que Joachim Camerarius, comme nous l'avons dit, ait commencé à parler, au seizième siècle, de quelques-unes des propriétés de l’ergot, ce n’est guère qu’en 1777 que la seconde men- tion de ces propriétés a été faite. On l’administre en poudre récem- ment préparée à la dose de 4 à 2 grammes dans l'inertie de la matrice, lorsque la délivrance est tardive, lorsqu'on veut expulser les caillots de l'utérus, dans les hémorrhagies utérines puerpérales et non puerpérales. Il calme quelquefois les coliques utérines. Spar- zani, le premier, l'appliqua contre l’épistaxis , l'hémoptysie, l'hema- témèse, l'hématurie, etc. Pignacca et Cabini répétèrent ces expé- riences, et obtinrent quelques succès. Bazzoni fit connaitre trois observations de leucorrhée rebelle guérie par l’ergot. On l’a aussi employé pour combattre le flux immodéré des lochies, l'abaissement et la chute de la matrice , la métrite chronique, les engorgements 24 FLORE MÉDICALE utérins, ete. L'ergot a été placé dans la classe des excitants du système musculaire : aussi l’a-t-on employé contre la parapelégie, les paryli- sies essentielles de l'enfance, l'inertie ou la parylisie du rectum et de la vessie. L'ergot et l'ergotine exercent une action sédative marquée; de sorte qu'on ena conseillé l'usage dansquelques hystéries, contre les fièvres intermittentes, les fièvres typhoïdes, les bronchites aiguës ou chroniques, les infiltrations cellulaires, contre les rhumatismes ; sans compter les vomissements périodiques et le hoquet, que M. Bonjean a vu, dit-il, guérir par l’ergotine ; mais de pareils résultats ont besoin de confirmation et de contrôle. Pour M. Fée, qui a étudié scientifique- ment la question, et qui n’a pas, à beaucoup près, obtenu des résul- tats aussi brillantsque ceux de M. Bonjean, la solution aqueuse d’ergo- tine doit être placée à la tête des liquides hémostatiques, car elle ne coagule pas le sang; c'est donc un hémostatique et non un kémoplas- tique. La solution la plus fréquemment employée est préparée au vingtième ou au dixième. On en arrose les plaies, et on en fait des pansements permanents, non-seulement dans les hémorrhagies, mais encore pour panser les plaies saignantes et gangréneuses, les ulcères sordidesou scrofuleux. La solution aqueuse d’ergotine aurait, comme l'ergot, la propriété singulière de tarir les suppurations. D'après M. Rams Batham, infusion d’'ergot du seigle doit être lim- pide et avoir une couleur de chair foncée; si elle était lacto-mucila- gineuse, ce serait une preuve que l'ergot est altéré. Des expériences qui ont été faites, particulièrement par M. Depaul, professeur de clinique d'accouchements à la Faculté de médecine de Paris, il résulte que l’ergot du blé agit de la mème manière et à Ja même dose que celui du seigle. Aucun essai n'a été fait dans le but d'étudier leur action toxique respective. Nous ne savons donc pas s'il est exact que l’ergot du blé soit moins vénéneux que celui du sei- ele. Il reste toutefois parfaitement établi que le premier se conserve mieux que le second; qu'il est moins sujet à être attaqué par le Sar- copte, et qu'il est moins hygrométrique ; c'est ce qu'ont démontré MM. Glandclément et Gauthier-Laroze. Ce n’est pas là un point sans importance. M. Miahle a constaté l'identité des effets de l’ergot du blé avec ceux de l’ergot du seigle (Union médicale, 15 juin 1850). Parmi les hommes de science qui ont observé l’ergot et ses effets, les uns l'ont consideré comme la source de maladies épidémiques ter DU XIX° SIÈCLE. 25 ribles, décrites sous les noms d’ergotisme, d'ergot, de convulsio cerea- lis epidemica, de peladero, ete. Telle était l'opinion de Langius, Noël, Vétillart, Tessier, etc., opinion qui été combattue par Mæler, Schle- ger, Model, Parmentier, Paulet, etc. C'est vers l'opinion de ces der- niers que nous inclinons. Dans plusieurs départements français, les paysans n'ont pas d’autre nourriture que le pain fabriqué avec le seigle ergoté. Il est vrai que ce seigle produit sur eux un enivrement dans lequel ils se complaisent et qui est analogue à celui qui pro- vient des boissors alcooliques; cet enivrement n’est suivi d'aucun des symptômes de dégoût el de malaise qui surviennent après l’ingestion d'une grande quantité de liqueurs fermentées. L'ivresse, d'ailleurs, ne se manifeste que lorsque le seigle est très-fortement ergoté. Quant aux épidémies auxquelles on a donné le nom d’ergotisme, ete., on a démontré leur ressemblance avec l’acrodynie qui règna épidémique- ment à Paris, en 1828 et 1829, et qui n'était certainement pas pro- duite par l'usage du pain ergoté. Néanmoins nous reconnaissons que l’ergot est un poison assez vio- lent, et qu'après l'enivrement on voit souvent survenir le sphacèle des mains et des pieds, dù très-probablement à l'oblilération des vais- seaux artériels de la partie. Outre la contraction de l'utérus, l'ergot du seigle détermine la dilatation des pupilles, la céphalalgie, des vertiges, de l'assoupisse- ment, avec nausées el vomissements, lorsque la dose est trop forte, des démangeaisons, la fatigue des membres, ete. D'après les auteurs qui admettent l'influence funeste et épidémi- que de l'usage de la farine ergotée, le symptôme principal du mal dont on est atteint est la gangrène des doigis et des orteils, quelque- fois même des mains et des pieds; on éprouve des vertiges, des nau- sées, des spasmes, des convulsions. La maladie que causerait l'ergot du maïs à ceux qui s’en nourrissent et que l'on nomme en Amérique peladero, détermine, dit-on, la chute des poils et des cheveux. D'après d’autres auteurs, il pourrait y avoir des ergots de plusieurs espèces, les uns dangereux, les autres ne l'étant pas ou l'étant heau- coup moins, selon les pays, les localités, les saisons. C’est à peu près ce que pensait Willdenow. Fontana admettait qu'il y avait un faux ergot; Goupil, qu'il y avait un ergot vénéneux et un autre qui ne l'élait pas. Entre des opinions aussi contradictoires, le plus sage est de n’em- 26 FLORE MÉDICALE ployer les céréales ergotées qu'avec la plus grande circonspection, jusqu’à ce que de nouvelles observations en aient prouvé l’innocuité d’une façon irrécusable. Les praticiens qui croient aux baies que peut amener l’ergot, re- commandent contre les accidentslégers une boisson acidule, de la limo- nade par exemple ; contre les accidents plus graves, quand la gangrène est imminente, une atmosphère chaude, le renouvellement fréquent des couvertures ; si un vomitif devient nécessaire, l'emploi de l'ipé- cacuanha ; si les membres se refroidissent, s’'engourdissent, des fric- tions avec des infusés chauds, aromatiques, acidulés; enfin si ces moyens ne réussissent pas, des vésicatoires que l’on placera sur les par- lies voisines de celles qui sont engourdies. ÉRYTHRÉE Erythrœa Centaurium Rich. Chronia Centaurium Lamk. Gentiana L. (Gentianées-Chironiées. ) L'Érythrée Centaurelle, vulgairement appelée Petite-Centaurée, Herbe au centaure, Herbe à Chiron, Herbe aux mille florins, ete., est une plante annuelle, à racines petites, blanchâtres, fibreuses. La tige, haute de 0",35 environ, dressée, grêle, lisse, glabre, à quatre angles mousses, rameuse au sommet, porte des feuilles opposées, sessiles, ovales, aiguës, entières, vert-jaunâtre. Les fleurs, roses, plus rarement blanches, sont groupées en cymes corymbiformes termi- nales. Elles présentent un calice cylindrique, à cinq divisions étroites, dressées ; une coroile en entonnoir, à tube étroit et strié, à limbe partagé en cinq divisions égales, ovales, obtuses; cinq étamines à peine saillantes; un ovaire simple, allongé, presque linéaire, à une seule loge contenant deux placentas multiovulés, surmonté d’un style simple, terminé par un stigmate bifide. Le fruit est une capsule allongée, pointue, polysperme, renfermée dans la corolle et le calice persistants. HagiraT. — La petite-centaurée est commune en Europe ; elle ha- bite les bois, les prés, les lieux incultes, etc. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où il est assez difficile de la propager par ses graines semées au printemps. PARTIES USITÉES. — Les sommités fleuries. RécoLte. — On récolte la petite cenlaurée à l'époque de la florai- DU XIX° SIÈCLE. 27 son, qui a lieu en juin, juillet ou août; on la coupe au pied, on en fait des petites bottes de la grosseur de trois doigts; on les entoure de papier gris pour empêcher la décoloration ; on les fait sécher ra- pidement, disposées en guirlandes, dans un grenier aéré. D’après M. Henry (Journ. anal. de médecine, A828, p. 165), cette plante est d'autant plus active, que sa floraison est plus avancée. M. Méhu a constaté que par la dessiccation elle perdait la plus grande partie de ses propriétés, surtout quand cette opération était mal faite ; les som- mités décolorées sont à peu près inactives. Composirion cHimique. — La petite centaurée a été étudiée au point de vue chimique par Vauquelin, et par MM. Henry, Moretti, Cheval- lier, Dulong d’Astafort, Stollmann et Méhu. D'après Moretti (Journ. de pharm., & N, p. 98), cette plante contient une matière amère extractive, un acide libre, une matière muqueuse, de l’extractif, des sels. En 1830, M. Dulong d’Astafort y a découvert un principe qu'il nomme centaurtum, lequel serait, d’après lui, le principe actif. C’est à M. Méhu, pharmacien en chef de l'hôpital Necker, que l'on doit l'étude la plus complète qui ait été faite sur la petite-cen- taurée. Il a vu qu'elle perdait 62 à 63 pour 180 de son poids par la dessiccation. A l’état sec, Cullen et Murray préféraient employer les feuilles; elles sont, disent-ils, plus amères; pour la même raison, Loiseleur-Deslongchamps choisissait les fleurs. Les remarques de M. Méhu donneraient raison aux premiers observateurs. D'ailleurs, l’âge de la plante, l'exposition, ont très-certainement une grande in- fluence sur les propriétés de cette plante, et nous avons constaté nous- même que la variété naine des dunes de Gascogne était plus amère que celles d’autres pays. La petite-centaurée laisse 56 à 58 pour 100 de cendres blanches, dont les cinq sixièmes sont du sulfate de chaux; le reste est formé de chlorure de potassium, de sulfate et de carbonate de potasse; la plante rend les quatre cinquièmes de son poids de poudre. Elle a donné à l'analyse, de l’apothème, une matière amère, une matière cristallisée ou érythro-centaurine, une matière céroïde (Méhu). La matière cristallisée ou érythro-centaurine existe en très-minime quantité dans la petite centaurée, = à = du poids de la plante sèche, et elle disparaît si la plante a été soumise à l’insolation; elle se présente en beaux cristaux aiguillés incolores, solubles dans les divers dissolvants ; ils rougissent sous l'influence de la lumière, redevien- 28 FLORE MÉDICALE nent incolores en se dissolvant dans l’eau, pour reprendre la couleur rouge rubis au contact des rayons solaires; celte matière n'est pas azotée ; l'analyse élémentaire n’en a pas été faite. La matière céroïde produit, avec l'acide azotique, une résine que M. Méhu nomme centauri-réline. Quant à la matière amère, les dis- solvants la partagent en une matière #0lle et une matière sèche mal définies. Usages. — C'est surtout sous la forme d'infusion qu'on emploie la petite-centaurée; la dose est de 10 à 30 grammes pour un litre d’eau bouillante. On emploie rarement le sue, le sirop et la teinture; le plus souvent on se sert de l’eau distillée, de la poudre, du vin et de l'extrait. À l'extérieur, la décoction à élé quelquefois ordonnée en lotions, fomentations, lavements, ete., etc. La petite-centaurée est placée parmi les loniques amers à côté de la Gentiane et du Ménianthe; elle est considérée comme fonique, stomachique, fébrifuge et vermifuge. Elle peut exciter la muqueuse intestinale de manière à produire des évacualions alvines et des vomissements, accidents qui persistent quelquefois assez longtemps pour qu'on soit obligé d'administrer de faibles doses d'opium. C'est le fébrifuge par excellence des campagnes; il guérit, d’après Brett, les fièvres intermittentes dites de saison, et les fièvres quotidiennes. Selon Roques, on associe avec succès la petite-centaurée à l'éther, et on administre ce mélange dans l’apyrexie. Frank employait sou- vent avec succès une mixture faite avec la petite-centaurée et les amandes amères. Gesner et Wauters regardent la petite-centaurée comme un excellent succédané du Quinquina. C'est certainement exagérer ses propriétés que de dire avec Wedelius (4 Centauria minore, Yéna, 1713), qu'appliquée en cataplasmes, elle guérit les ulcères et les trajets fistuleux, et de la préconiser comme vermifuge. Mais on l'emploie avec succès dans les affections atoniques du tube digestif, dans les fièvres muqueuses, la chorée, elc., etc. ÉSULE Euphorbia Esula L. (Euphorbiacées-Euphorbiées.) L'Ésule ou Euphorbe Ésule est une plante vivace, à souche presque ligneuse, ramifiée, traçante, munie de racines fibreuses. Les tiges, DU XIX° SIÈCLE. 2Q 9 hautes de 0,30 à 0,80, glabres, un peu glauques, dressées ou ascendantes, simples, quelquefois rameuses au sommet, portent des feuilles alternes, sessiles, oblongues, lancéolées ou linéaires, aiguës ou obtuses, atténuées à la base, entières ou légèrement dentées, assez fermes, glabres, un peu glauques. Les fleurs, monoïques, d’un vert jaunâtre, sont groupées en ombelles terminales, à rayons le plus souvent nombreux et bifurqués, entourés d’un involucre à feuilles ovales ou oblongues, à braclées libres, ovales-(riangulaires, plus larges que longues, obtuses où un peu aiguës, souvent jaunes lors de la floraison. Les fleurs mâles consistent chacune en une seule étamine, insérée vers la base de l’involucre, à filet articulé, à anthère divisée en deux lobes globuleux. Les fleurs femelles, solitaires au centre de l’ombelle et entourées de fleurs mâles, sont longuement pédicellées et réduites à un ovaire à trois loges uniovulées, surmonté de trois styles. Le fruit est une capsule formée de trois coques unilo- culaires finement chagrinées et renfermant chacune une seule graine lisse et d'un blanc cendré. On appelle souvent Grande Ésule \'Épurge (£uphorbia Lathyris L.) et l'Euphorbe des marais (Æ.palustris L.); Petite Esule, l'Euphorbe fluette (Æ£. exiqual.) et l'Euphorbe petit-cyprès ou Tithymale (Æ. Cy- parissias L.); Esule ronde, V'Euphorbia Peplus L., ete. Citons encore l'Euphorbe de Gérard (£wphorbia Gerardiana Jaeq.), qui a aussi porté le nom d’ésule. Hamirar. — L’euphorbe ésule est assez répandue en Europe, mais surtout dans les régions méridionales. Elie habite les coteaux pier- reux, les bois sablonneux, les bords des chemins, etc. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où elle est facile à propager, soit par graines, soit par éclats de pieds. PARTIES UsITÉES. — La racine et l’écorce de la racine; la plante entière. Récocre. — La racine d’ésule peut être récoltée vers la fin de l’année ou l'automne ; c'est surtout l'écorce qu'on employait au- trefois. COMPOSITION CHIMIQUE. — On trouve dans toute la plante un sue blanc gommo-résineux, très-abondant, très-àcre et très-actif ; appli- qué sur la peau, il détermine une vive rubéfaction, suivie bientôt de vésication ; de sorte qu'il peut servir pour remplacer la moutarde, le garou et les cantharides. Il est très-probable que par son évapora- 30 FLORÉ MÉDICALE tion on obtiendrait une espèce de cire-résine analogue à celle de l'Eu- phorbe. (Voyez plus loin ce mot.) Usaces. — D'après Coste (Mat. méd. indig. 13) V'ésule était l'Fpé- cacuanha des anciens, qui ne possédaient ni cette dernière racine, ni l'émétique. Seulement, pour en diminuer l'énergie, on la faisait tor- réfier légèrement, ou tremper dans du vinaigre. Pris à l'intérieur à forte dose, le suc de l’ésule peut déterminer un empoisonnement, à la manière des poisons irritants el caustiques ; aussi l’administre-t-on avec la plus grande prudence chez les sujets forts et robustes, et s’en abstient-on chez les personnes dont la constitution est faible et ner- veuse. D'après Pallas, les habitants de certaines parties de la Russie se purgent avec le sucde cette plante ou avec la racine ; ils emploient l’ésule contre les fièvres intermittentes, les maladies chroniques, etc. Néanmoins l’ésule est avec raison abandonnée en France comme trop àcre et trop active. Scopoli (Flora carn. 435) dit avoir vu la mort survenir chez une personne qui avait pris À gramme 50 centigrammes de poudre de racine, et qu'une autre personne perdit un œil pour s'être frotté les paupières avec le suc de la plante. C’est pourquoi avons-nous de la peine à comprendre qu’on l'ait autrefois conseillée contre la cataracte, quoiqu’on eût soin de l’étendre d'eau. Dans un mémoire publié en 1811 sous le titre de /?echerches et observations sur la possibilité de remplacer l'ipécacuanha par les ra- cines de plusieurs Euphorbes indigènes, Loiseleur-Deslongehamps a indiqué surtout la racine de l’Euphorbe de Gérard (£. Gerardiana Jacq.), comme succédané de l’Ipécacuanha. Sur vingt-deux individus, âgés de six à soixante ans, auxquels il avait fait prendre de 30 cen- tigrammes à 4 gramme 20 centigrammes de cette poudre, il y aurait eu chez tous, excepté chez quatre, des vomissements et des selles abondantes, sans coliques ou avec légères coliques. Les anciens l'em- ployaient comme purgatif hydragogue; aujourd'hui l'Euphorbe de Gérard est abandonnée à cause de son action trop violente. ÉTHUSE Æthusa Cynapium L. (Ombellifères -Sésélinées.) L'Éthuse, ou Faux Persil, appelée aussi Petite-Ciguë, Ciguë des jar- dins, Ache des chiens, etc., est une plante annuelle, à racine fusi- DU XIX° SIÈCLE. 31 forme, allongée, un peu ramifiée, blanche, pivotante. La tige, haute de 0",35 à 0,65, droite, cylindrique, fistuleuse, striée, glabre, ra- meuse, ferme, rougeâtre à la base, d’un vert glauque au sommet, porte des feuilles alternes, à pétioles embrassants, à limbe deux ou trois fois penné, à folioles étroites, aiguës, découpées, vert-foncé en dessus, plus päles en dessous, luisantes. Les fleurs, blanches, nom- breuses, sont disposées en ombelles terminales, planes, d'environ vingt rayons, dépourvues d’involucre ; mais munies d’involucelles composés de trois à cinq folioles longues, étroites, linéaires, ca- pillaires, rabattues et pendantes du côté extérieur. Elles présentent un calice à cinq dents très-courtes ; une corolle à cinq pétales iné- gaux, échancrés en cœur, étalés; cinq étamines à anthères blan- châtres, globuleuses; un ovaire simple, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles très-courts. Le fruit est un diakène ar- rondi, un peu comprimé, d’un vert foncé, présentant dix côtes sail- lantes. Cette plante est souvent confondue avec le Persil, dont elle est pourtant facile à distinguer par sa tige rougeàtre à la base et glauque au sommet; ses feuilles, d’un vert foncé et sombre à découpures étroites, ses involucelles unilatéraux, et surtout par son odeur vireuse. Les mêmes caractères ne permettent pas de la confondre non plus avec le Cerfeuil. HagiraT. — L'éthuse se trouve dans presque toute l’Europe ; elle habite surtout les bois, les lieux cultivés, les jardins, les décombres. Cuzrure. — Cette plante n’est cultivée que dans les jardins bota- niques ; il suffit de répandre ses graines au printemps, ou mieux d’en transplanter un pied sauvage, car elle se ressème d’elle-mème très- facilement. PARTIES uSITÉES. — Les feuilles, les fruits. RécoLre. — L’éthuse qui tire son nom principal du grec 4%, je brûle, et celui de Cynapium de xÿwy chien, n’est pas employée dans la médecine française, quoiqu’elle possède à peu près les mê- mes propriétés que la Grande-Ciguë (Conium maculatum). On ne doit, dans aucun cas, les substituer l’une à l’autre. Quelques auteurs regardent la première comme plus active, bien qu'aucune expé- rience clinique n’ait été faite pour justifier celte croyance, et qu’au- cune analyse chimique ne soit venue démontrer l'identité ou même l’analogie de composition de ces deux plantes. Quoi qu’il en soit, les 92 FLORE MÉDICALE propriétés toxiques de l'éthuse sont incontestables. Outre qu'elles ont été constatées par Vicat, Haller et Orfila, les cas, malheureuse- ment trop fréquents d'empoisonnement auxquels cette plante a donné lieu, ne laissent aucun doute à cet égard. L’éthuse fleurit pendant tout l'été, C'est à l'époque de la florai- son que les feuilles sont le plus actives; on doit les faire sécher rapi- dement dans un séchoir bien aéré et à l'obscurité, car elles se décolorent et jaunissent facilement; bien séchées, elles présentent une odeur vireuse des plus prononcées. Les fruits ou diakènes, recou- verts par le calice persistant, ressemblent à ceux de la Grande-Cigué, mais ils sont plus petits. On les récolle avant leur maturité complète, c'est-à-dire avant la séparation des méricarpes ; on les fait sécher rapi- dement à l’étuve ou au séchoir ; ils présentent cinq côtes saillantes, dont deux marginales plus développées; les commissures présentent deux vaisseaux et les vallécules un seul. ComposiTioN CHIMIQUE. — L'odeur désagréable que répand la petite- ciguë, lorsqu'on la froisse, fait supposer qu’elle contient de la conicine, base organique non oxygénée, dont nous avons fait l'histoire en par- lant de la Grande-Ciguë (voir t. EF, p. 343); il est même très-pro- bable que c’est à elle qu'elle doit ses propriétés vénéneuses, mais aucune analyse, aucune expérience précise ne donnent de certitude complète à cet égard. Les fruits sont plus actifs que les feuilles. Usages. — Les faits rapportés par Bulliard, Virey, Rivière, Vicat, Haller, Orfila, etc., démontrent les propriétés vénéneuses de la petite- ciguë; mêlée ou confondue avec le Persil et le Cerfeuil, elle a été la cause d'accidents graves. C'est à tort que des auteurs recomman- dables ont conseillé l’eau vinaigrée pour combattre cet empoisonne- ment; les expériences d'Orfila ont prouvé que cet acide, loin de neutraliser l’action de ce poison, en facilitait au contraire l’absorp- tion; il est donc plus nuisible qu'utile dans la première période de l'empoisonnement. Il faut dans ces cas, avant tout, provoquer les vomissements, administrer ensuite kes émollients, et la solution étendue d'iodure de potassium ioduré ; plus lard, on peut sans dan- ger faire boire les limonades végétales au vinaigre ou au citron. DU XIX° SIÈCLE. 33 Oo: EUPATOIRE Eupatorium cannabinum 1. C. trifoliatum Habl. non L. (Composées-Corymbifères.) L'Eupaloire à feuilles de Chanvre, Eupaloire Chanvrin, connue aussi sous le nom d'Eupatoire d'Avicenne, est une herbe vivace, plus ou moins poilue, haute de 0",80 à 1°,20, à tiges dressées, souvent rougeâtres, un peu anguleuses ou striées. Les feuilles sont opposées, brièvement péliolées, glanduleuses en dessous, lancéolées, rarement enlières, le plus souvent divisées en 3 ou 5 segments dentés, dont le terminal est le plus grand. Les fleurs sont roses ou purpurines, toutes hermaphrodites, {tubuleuses, réunies, ordinairement par 5, en petits capitules cylindriques, disposés en grappes corymbiformes très-ra- meuses. L'involucre est composé de folioles inégales, imbriquées, un peu concaves, obluses; les extérieures sont ovales; les intérieures, linéaires-oblongues, scarieuses sur les bords, de couleur rosée au sommet. Le réceptacle est presque plan, dépourvu de paillettes. L’ai- grelte est composée de nombreux poils roides; la corolie est gamopé- tale, glanduleuse, à 5 dents, à tube s’évasant graduellement de la base au sommet. Les étamines, au nombre de 5, sont unies par les anthères qui se prolongent au sommet en un appendice lancéolé obtus. L'’ovaire est infère, uniloculaire, uniovulé, surmonté d’un style dépassant le tube de la corolle, hérissé de petits poils à sa base, divisé au sommet en deux branches stigmatifères pubescentes, cylin- dracées, obtuses, arquées, convergentes par le haut. L'akène est oblong, à 5 côtes saillantes, de couleur noire, muni de glandes rési- neuses, couronné d’une aigrette de longs poils blancs dentelés, dis- posés sur un seul rang. Hagirar. — L'eupatoire à feuilles de Chanvre est très-commune dans toute la France ; elle croît sur le bord des eaux et dans les lieux marécageux. Cucrure. — Celle plante n'est cullivée que dans les jardins bota- niques; on la récolle à l’état sauvage pour l'usage médical. PARTIES usirÉEs. — Les racines, les feuilles, rarement les fruits. RécozTe. — La racine d’eupatoire à feuilles de Chanvre doit être récoltée au printemps ; on la lave pour en séparer la terre, et on la fait sécher. Elle est fibreuse et blanchàtre; plus active à l’état frais Flore, T. II. 3 31 FLORE MÉDICALE qu'à l’état sec. La plante doit être cueillie un peu avant la floraison. On emploie le plus souvent les sommités fleuries, prises au moment où les boutons floraux commencent à se montrer. EnRussie on a em- pioyé les fruits que l’on récolte à leur maturité; on les sépare de l’aigrette, et on les fait sécher. Comeosirion cmimiQue. — Toutes les parties de la plante ont une odeur faiblement aromatique, une saveur amère et piquante. D'après M. Boudet (Bull. de pharm., L. WX, p. 97), la racine d’eu- patoire contient de l'amidon, une matière animale, une huile vola- tile, de Ja résine, un principe amer, âcre, du nitrate de potasse, du malate et du phosphate de chaux, de la silice et des traces de fer. M. Righini (Journal de pharmacie, &. XI, p. 623) a trouvé dans les feuilles et les fleurs de l’eupatoire un principe qu'il a nommé eupatorine, et qu'il croit ètre un alcali organique : c'est une poudre blanche, d’une saveur amère et piquante, insoluble dans l’eau, solu- ble dans l’éther et dans l'alcool absolu; elle forme avec l'acide sul- furique un sel qui cristallise en aiguilles soyeuses. Usaces.—L'eupatoire était connue des anciens. Dioscoride, Galien, Paul d'Égine et surtout Avicenne en font mention. L'infusion des feuilles et des fleurs est indiquée par les vieux auteurs comme utile dans les obstructions. D’après Ferrein (Mar. méd., LUE, p. 191), elle convient pour combattre l'engorgement splénique qui accom- pagne ou qui suit les fièvres intermittentes. En Russie on emploie les fruits contre la rage. Martius (Bull. des sciences médicales de Férus- sac, t. XL, p. 355) dit qu'on applique l’eupatoire en cataplasmes résolutifs contre l'hydrocèle et les tumeurs. La racine d’eupatoire est purgative et vomitive. Gessner dit avoir constaté ses propriétés diurétiques. Loiseleur-Deslongchamps assure n'en avoir obtenu aucun effet à la dose de 3 grammes ; mais Chomel (Hist. des plantes usuelles, L W, p. 167) a mieux réussi en portant la dose jusqu’à 60 grammes ; il la donnait en infusion dans du vin blane. Ces différences d'action peuvent lenir, d'après M. Guersant, à ce que cette racine aurait été recueillie à différentes époques. D'après Roques, les habitants des campagnes l’emploient contre l'hydropisie. Tourne- fort et Boerhaave en faisaient usage contre la chlorose, les engorge- ments abdominaux, ete. Dubois de Tournay affirme qu'elle est utile dans la grippe et la toux opinitre. M. Cazin dit en avoir retiré de DU XIX° SIÈCLE. 5) bons effets contre les engorgements abdominaux, et, en lotions, contre les infiltrations cellulaires. Nous citerons en outre plusieurs Eupatoires exoliques : l'Eupatoire à feuilles d'Arroche (£, afriphcifolium Nahl, E. triangulare Poir.) des Antilles, vulgairement Æerbe au chat, Langue de chat, employée, aux colonies, comme emménagogue, apérilive et vulnéraire ; l'Eupa- loire Ayapana (Æ. Aya-Pana Nent., Æ. triplinerve Nahl) du Brésil, dont les racines, quoique peu usitées, ont été vantées comme alexitères, les feuilles comme stomachiques et pectorales {voir au mot AyaranA, t. I, p. 138) ; l'Eupatoire crénelée (Æ. crenatum Gomès) du Brésil, vulgairement Æerbe aux serpents, employée, en Amérique, en bois- sons et en applications locales, contre la morsure des serpents ; l'Eupatoire Dalea (Æ. DuleuL., Dale fruticosa Brown, Critonium Dalea D.C.) de la Jamaïque, dont les Espagnols substituent les feuilles sèches à la vaniile dont elles ont l'odeur; l'Eupatoire Guaco (Eupatortum Guaco M. B. K., Æ. saturæfolèum Lamk, Mrkania Guaco W.) qui a été indiquée contre le choléra et la fièvre jaune; dont les feuilles fraiches et leur suc sont usilés contre la morsure des serpents à sonneltes, et dont les feuilles sèches sont réputées slomachiques et vermifuges (voir au mot Mixanier, €. IE, p. 348) ; l'Eupatoire perfoliée (Æ. perfoliatum L., E. connatun Michx), de l'Amérique du Nord, indiquée, en son entier, comme diurétique, sudorifique, émétique, et employée en décoclion comme fébrifuge aux États-Unis ; l'Eupatoire à feuilles rondes { Z. rofundifolium 1), vulgairement Langue de vache, aussi de l'Amérique du Nord, dont on a préconisé les feuilles en infusion dans la consomption ; l'Eu- patoire à feuilles de Sophie (£. Sophivfoliun L.) d'Amérique, qui passe pour jouir de propriétés astringentes, el dont on administre le suc des feuilles comme tonique, apéritif dans les affections du foie ; l'Eupatoire à feuilles de Teucréum (E. Teucrifolium W ) d'A- mérique, dont les feuilles sèches, très-usitées dans le sud des États- Unis, se donnent en infusion comme loniques et fébrifuges ; enfin l'Eupatoire aromatique (£. aromaltisans D. C.) de Cuba, qui sert à aromatiser les cigares de la Havane. (Voir, comme il a déjà été dit ci-dessus, aux mots Avarana, €. 1, p. 138, ct Mixanier, €. I, p. 348.) 36 FLORE MÉDICALE EUPHORBE Euphorbia officinarum, antiquorum et canariensis L. (Euphorbiacées - Euphorbiées.) Le genre Euphorbe renferme environ huit cents espèces. Nous parlerons seulement, dans cet article, d'un petit nombre d’entre elles, qui ont des propriétés spéciales et dont le port rappelle celui des Cierges, genre de Cactées. L'Euphorbe officinale (ZÆ. officinarum L.) ressemble au Cierge du Pérou (C. peruvianus). Sa tige, dressée, charnue, épaisse, haute de 4 à2 mètres, de la grosseur du bras, est relevée de côtes longitu- dinales, saillantes et épineuses, portant des feuilles réduites à l'état d'épines. Les fleurs, assez petites, jaunàtres, forment, à la partie supérieure des côtes, des ombelles solitaires et presque sessiles, entou- rées d’un involucre à dix divisions disposées sur deux rangs, les exté- rieures arrondies et très-obtuses. Le fruit est une capsule formée de trois coques monospermes (PI. 4). L'Euphorbe des anciens (£. antiquorum L.) diffère de la précé- dente par ses côtes amincies, dans l'intervalle desquelles se trouvent les fleurs. L L'Euphorbe des Canaries (Æ. canariensis L.) a une tige de 2 mètres et plus, charnue, épaisse, présentant à la base cinq ou six angles calleux, qui se réduisent à quatre dans la partie supérieure. Ses rameaux nombreux, élalés, arqués, d’un vert noirâtre, sont dépour- vus de feuilles et portent des aiguillons courts, géminés ; les inflores- veuces sont entourées d’un involucre rouge sombre où les fleurs sont groupées par {rois. Hapirar. — La première de ces espèces croît en Afrique et aux Indes orientales ; la seconde se trouve sur les côtes d'Afrique : et la troisième, comme l'indique son nom, aux iles Canaries. Cuzrure. — Ces euphorbes exigent, sous nos climats, la serre tem- pérée ou une orangerie bien éclairée, el une terre sèche et légère. On les propage de graines, semées sur couche chaude ou sous chàs- sis, et mieux de boutures faites avec des rameaux où mamelons. On doit les arroser très-modérément. PARTIES uSITÉES. — La gomme-résine ou cire-résine, qu'on obtient par incision, DU XIX° SIÈCLE. o7 Ricozre. — Les euphorbes officinale, des anciens, des Canaries el toutes les euphorbes cactiformes donnent, lorsqu'on les incise, un suc blanc quise concrète en larmessèches nommées ewphorbe, gomme, résine d'euphorbe; M. Fée à proposé de l'appeler euphorbium, pour éviler l'équivoque. La forme toujours identique des larmes indique qu’en général ce suc a dû couler naturellement ; les débris de rameaux épineux, souvent quadrangulaires, qu'on y trouve quelquefois, font supposer que l’euphorbe officinale n’est pas la source principale ; mais plutôt que la résine en question est produite par les euphorbes des anciens et des Canaries. Elle nous arrive d'Afrique et des Indes orientales, en surons de 100 à 150 kilogrammes; il en vient du cap de Bonne-Espérance et des revers de l'Atlas. On l'extrait environ tous les quatre ans. Les personnes chargées de la récolle s'attachent autour du nez et de la bouche un linge mouillé pour se préserver de la poussière qui en résulte; on prend les mèmes précautions dans les pharmacies, lorsqu'on la pulvérise. Bruce dit qu'en Abyssinie, la racine d’euphorbe porte le nom de 40/-quall; il ajoute qu’en vieil- lissant les branches se fanent et se recouvrent d’une poudre très-irri- tante et très-àcre. La résine d’euphorbe se présente en petites larmes irrégulières, jaunâtres, un peu friables, translucides, avec un ou deux trous coni- ques qui se rejoignent par la base, et dans lesquels on trouve sou- vent encore les aiguillons de la plante, dont un est plus ou moins recourbé. Cette résine est inodore ; sa saveur, d'abord peu sensible, devient bientôt àcre, brülante et corrosive ; sa poudre est un puissant sternutatoire, ce qui la rend dangereuse à préparer. (Guibourit, Hist. des droques simples, À. H, p. 320.) CoMPosiTION CHIMIQUE. — La gomme-résine d'euphorbe a été ana- lysée par MM. Braconnot, Pelletier et par Brandes. Ils y ont trouvé une résine, de la cire, des malates de potasse et de chaux, du ligneux, de la bassorine, et une huile volatile. Brandes y a trouvé, en plus, du caoutchouc. Buchner et Herberger en ont extrait une matière parti- culière, qu'ils ont nommée ewphorbine. Elle est sèche, cassante, inco- lore, d’une saveur amère et àcre, insoluble dans l’eau, dans l’éther et dans les huiles ; avec les acides elle forme des combinaisons incris- lallisables. L'euphorbe ne contient pas de gomme soluble dans l'eau; c’est donc à tort qu’on lui donne le nom de gomme-résine ; celui de cére- 38 FLORE MÉDICALE résine lui conviendrait mieux. La résine est d’an brun-rougetre ; elle possède une faible odeur; elle est fusible et soluble dans l'alcool et les huiles grasses ; elle se dissout mal dans les alcalis, très-bien dans les acides azotique el sulfurique. La résine d’euphorbe étant traitée par l'alcool chaud, on obtient, par le refroidissement, une sous-résine cristalline, isomérique avec la sous-résine élémi, et qui, d’après M. Johnston, a pour formule CH*O0°. La cire de l'euphorbe se rap- proche de celle des abeilles. On a remarqué que toutes les plantes très-charnues renfermaient des quantités assez grandes de bimalate de chaux ; de sorte qu'on pourrait croire que la production de ce sel dans l'économie végétale causerait l'hypertrophie du parenchyme. Les Cactus, les Joubarbes, les Sedum, les Agaves, les Aloëès sont tous riches en bimalate de chaux. Usaces. — L’euphorbe est un des poisons irritants et caustiques les plus violents que l’on connaisse ; huit grammes appliqués sur la cuisse d’un chien ont fait périr rapidement l'animal. Elle entrait autrefois dans un grand nombre de pilules, de pommades et d'on- guents ; elle fait partie de l'emplâtre perpétuel de Jannin; on l’em- ployait pour remplacer les cantharides; d'après Murray, elle agit autant sur la vessie que les cantharides elles-mêmes. Bichat conseil- lait l’euphorbe comme sternutatoire, dans la céphalée, l’angine, les congestions cérébrales ; il la mitigeait avec de la poudre de Muguet de mai (Convallaria maralis L.) dont les fleurs et la racine sont aussi employées comme sternulaloires ; mais, même ainsi préparée, l’eu- phorbe a souvent produit des accidents graves qui ont fait à peu près renoncer à son emploi. À l'extérieur, on la préconisait contre le rhu- matisme chronique, la paralysie, ele. Les Mongols employaient l'eu- phorbe comme vésicant. Les vétérinaires ont employé l’euphorbe pour guérir la gale des chevaux. Au Cap, on se sert des capsules pour détruire les animaux nuisibles. À Mogador, dans l'empire du Maroc, les branches de l'eu- phorbe officinale sont employées au tannage des cuirs. DU XIX° SIÈCLE. 39 EUPHRAISE Euphrasia officinalis L,. (Personées - Rhinanthées. ) L'Euphraise offieinale, appelée aussi des noms vulgaires de Casse- lunette, Herbe à l'ophthalmie, Luminet, elc., est une petite plante annuelle pubescente, haute de 0,05 à 0°,30, considérée comme parasite par M. Decaisne. Sa tige est dressée, grêle, cylindrique, rameuse dès la base. Les feuilles sont sessiles, d’un vert gai, ovales, dentées, à dents obtuses dans les feuilles inférieures; les feuilles flo rales sont plus pelites, ovales, à dents plus profondes et acumi- nées. Les fleurs sont presque sessiles, solitaires à l’aisselle des feuilles supérieures, blanches ou lilas, veinées de violet. Le calice est velu, glanduleux, gamosépale, à tube marqué de cinq côtes saillantes, divisé en quatre lobes lancéolés-acuminés. La corolle est un peu velue, gamopétale à deux lèvres, dont la supérieure, un peu en casque, est large, échancrée en deux lobes court-dentés et à palais jaune ; lin- férieure est à trois lobes, maculée de jaune à sa base. Les étamines, au nombre de quatre, sont didynames, plus courtes que le casque, à anthères inégalement mucronées inférieurement, plus longuement aristées dans les deux élamines les plus courtes ; de couleur brunâtre, chargées de poils le long de la ligne de déhiscence. L’ovaire est libre, à deux loges, surmonté d'un style filiforme, terminé par un stigmate en tête. Le fruit est une capsule, velue supérieurement, à deux loges polyspermes, ovoide-oblongue, comprimée du côté de la cloison, s’ouvrant en deux valves bifides. Les graines sont ovoïdes-allongées, longitudinalement striées et parcourues dans la longueur par un raphé saillant. Hagrrar. — Cette espèce est indigène à toute la France; elle croît dans les prairies, les pelouses sèches et le bord des bois. Cuzrure. — L'euphraise n'est pas cultivée pour le commerce des plantes oflicinales. Sa culture offre de grandes difficultés, comme celle du reste de toutes les plantes parasites. Il faudrait semer ses graines dans un endroit où, préalablement, on eût fait venir les espè- ces sur lesquelles elle croît ; ce que la science n’a pas encore fait con- naître d’une manière positive. PARTIES USITÉES. — Les sommités fleuries. 40 FLORE MÉDICALE RécoLre. — On doit cueillir la plante avant le parfait épanouis- sement des boutons ; sa dessiccation, comme d’ailleurs celle de tou- tes les Pédiculariées, se fait avec difficulté ; il faut avoir soin de réunir les euphraises en petits paquets peu serrés qu’on enveloppe de papier ; on les dispose ensuite en guirlandes, et on les fait sécher au soleil. Malgré toutes ces précautions, l’euphraise présente toujours une teinte noire assez prononcée ; elle s’altère rapidement en vieil- lissant. ComposiTION CHIMIQUE. — L'odeur de l’euphraise est douce et agréa- ble ; elle se développe par la friction ; sa saveur est un peu amère et astringente; elle est riche en tannin ou plutôt en quercitron ; car elle noirecit fortement les sels de fer, et elle ne précipite pas la solution de gélatine. L'eau distillée en est laiteuse, aromatique, agréable. Usaces. — Le nom de cette plante (£wphrasia) exprime la joie, le plaisir. Les Anglais la nomment Æye-bright (Lumière de l'œil). On l'a, en effet, regardée comme propre à guérir les maladies des yeux. D'après Chaumeton , la tache jaune qu’on observe sur ses fleurs a la forme d'un œil, et à l'époque où l'étrange système des signatures était en vigueur, on en avait conclu que l’euphraise devait être un remède souverain dans les maladies des yeux. Aujourd'hui l'euphrise est très-peu usitée , pour ne pas dire com- plètement abandonnée. Elle à pu être utile comme astringente dans les ophthalmies chroniques ; mais nous sommes loin de l’époque où Matthiole lui attribuait la propriété de guérir la cataracte, l'épi- phora, etc. D'ailleurs, cette erreur était partagée par des hommes illustres, tels que Fabrice de Hilden, Lanzoni, Camerarius, Hoffmann, Ray, Jean Franck, etc. Aujourd'hui il est démontré que les pro- priétés de l’euphraise sont à peu près nulles. Les noms de Casse- lunette, Brise-lunette, qu'on lui a donnés quelquefois, venaient de la propriété qu'on lui attribuait de rendre les lunettes inutiles. On a encore attribué à l'euphraise la propriété d’être utile contre le vertige, les céphalées, la jaunisse. D’après Adanson, loin d’être utile à l'estomac, elle lui serait nuisible, ce qui parait d’ailleurs peu probable. DU XIX® SIÈCLE. 41 EXOSTEMA Exostema longiflorum caraction et caribæum Rüm. el Sch. ( Rubiacées - Cinchonées.) L’Exostème à longues fleurs (27. ongifloruin Rümer et Sch., Cin- chona longiflora Lamb.) est un arbre d'environ 10 mètres de hau- teur, à feuilles opposées, linéaires-lancéolées, atténuées aux deux extrémités, glabres, munies de stipules interpétiolaires. Les fleurs, blane-rosé, odorantes, sont solitaires à l'extrémité de courts pédon- cules axillaires. Elles présentent un calice ovoïde, à cinq dents lon- gues, lancéolées-linéaires ; une corolle à tube cylindrique, court, à limbe partagé en cinq lobes linéaires ; cinq étamines, insérées sur la gorge de la corolle et alternant avec ses divisions, à anthères linéaires, saillantes; un pistil à ovaire infère, à deux loges multiovu- lées, couronné par un disque charnu, et surmonté d’un style fili- forme, terminé par un stigmate en massue. Le fruit est une petite capsule, couronnée par le limbe du calice, divisée en deux loges qui contiennent chacune plusieurs graines imbriquées, arrondies, à albu- men charnu, et entourées d’une aile membraneuse. L'Exostème Caraïbe (Æ. caribæum R. et Sch., Cinchona cari- bœa L., C. jamaïcensis Jacq.) vulgairement Quinquina caraïbe, Quinquina des Antilles, Bois-chandelle, Poirier de montagne, diffère surtout du précédent par sa taille plus petite, de 6 à 7 mètres ; ses feuilles ovales-lancéolées, acuminées : ses fleurs blanches ; son calice à cinq dents obluses ; sa corolle plus longue. L'Exostème à fleurs nombreuses ( Æ. floribundum Rüm., Cin- chona floribunda Swartz, Cinchona Sante-Luzie Davids., Cinchona montana Badier, etc.), qui donne une écorce dite Écorce de Sainte- Lucie, Quinquina de Montagne, Quinquina-Badier, Quinquina de Saint-Domingue, Quinquina-Piron, des pitons de montagne où elle se trouve, est un arbre de 10 à 13 mètres, découvert, en 1742, par Des- portes, à Saint-Domingue, à feuilles courtement pétiolées, toutes glabres, très-ouvertes, longues de 14 à 16 centimètres, elliptiques- lancéolées ; à stipules oblongues, obtuses , engainantes; à panicule terminale très-étendue, à rameaux glabres, comprimés ; calice à dents subulées très-petites, corolle glabre ; tube long de 27 centimètres ; limbe à 5 divisions longues et linéaires; filets et style capillaires, 42 FLORE MÉDICALE aussi longs que les divisions du limbe; stigmate ové, indivis ; capsule obovée, glabre. Hagrrar. — Les Ærostema croissent dans les régions chaudes de l'Amérique. L'exostème à longues fleurs est indigène de la Guyane et de la province de Caracas, dans le Vénézuéla. Les exostèmes caraïbe et à fleurs nombreuses croissent aux Antilles. Nous citerons en outre l'Exostème à feuilles étroites (£. anqus- tifoliumK. et Sch., Cinchona angustifolia Lamb.) ; l'Exostème coriace (Æ. coriacea R. et Sch., Cénchona nitida Ruiz et Pav., Crnchona coriu- cea Poir.); l'Exostème à petites fleurs (Æ. parviflora Richard, Cin- chona micrantha Ruiz et Pav.?, tous trois des Antilles ; l'Exostème austral (Æ. australe À. S. 1H.) et l'Exostème cuspidé (Æ. cusprida- uni À. S. H.), tous deux du Brésil; l'Exostème du Pérou où Quina de Mato (Z. peruvianum Humb. et Bonpl., Céichona peruviana Poir..), arbuste de 3 à 4 mètres, décrit dans les Plantes équinoriales de Hum- boldt et Bonpland; l'Exostème de Philipps {Z. plulippica R. et Sch., Cinchona philippica Cav.); l'Exostème en corymbe (Æ. ro- rymbosa Spreng.); l'Exostème à fleurs dissemblables (Æ£. dissi- muliflora R. et Sch.; Cinchona dissinuliflora Mutis), ces quatre derniers du Pérou; F'Exostème linéaire (Æ. lineata KR. et Sch., Can- chona lineata Nahl), de Saint-Domingue ; l'Exostème brachycarpe (£. brachycarpa R. et Sch., Crinchona brachycarpa Lamb.), de la Jamaique. Cuzrure. — Peu cultivés dans leur pays natal, les Æzrostema ne se trouvent, en Europe, que dans les serres chaudes des jardins bota- niques. Ils exigent une chaleur constante et une terre substantielle. On les multiplie de houlures enues sur couche chaude ou dans une bonne tannée, PARTIES usITÉES. -— Les écorces. Récocre. — Les £zrosterna sont rangés parmi les faux Quinqui- nas. Leurs écorces portent les noms de Quinquina-Piton ou de Sainte- Lucie (Æ. floribundum KR. et Sch.) ; de Quinquina Caraïbe (Æ. cart- bœun R. el Sch.) ; deQuinquina du Pérou où Quina de Mato(E. peru- vana M. et B.); de Quinquina-Piauhi ou du Brésil {Æ. Souza- num Mart.). L'écorce de ce dernier, au rapport de M. Guibourt, a été quelquefois reçue sous le nom d'Æsenbechia febrifuga Mart. (Evodiu febrifuga A. S. MH); arbuste de la famille des Rutacées; M. Guibourt pense que c'est une erreur et que celte écorce ne saurait DU XIX° SIÈCLE. 43 être celle de l'£senbechia febrifuga, parce qu'elle est semblable à tous égards au Quinquina caraïbe. Le Quinquina-Piton se trouve dans le commerce sous différentes formes. Tantôt c'est une écorce roulée, cylindrique , grosse comme le doigt, recouverte d’un épiderme variable ; tantôt cet épiderme est d'un gris foncé, lrès-mince, ridé longitudinalement ; tantôt il est recouvert de plaques cryptogamiques, blanches et tuberculeuses, et marquées de légères fissures transversales; d'autrefois enfin, il est épais, fongueux, crevassé, blanchâtre à l'extérieur, jau- nâtre à l'intérieur. Dans tous les cas, l'écorce elle - même est mince, légère, très-fibreuse, sans ténacité, facile à déchirer ou à fendre dans le sens de sa longueur. Sa cassure est d’un gris jaunâtre, mais sa surface interne est d’une couleur plus ou moins noire, entre- mêlée de fibres blanches longitudinales; son odeur, quoique faible, est nauséabonde ; sa saveur est excessivement amère et désagréable ; elle donne une poudre d’un brun terne; elle possède une propriété vomilive. (Guibourt, Æst. des droques simples, 4° édit., t. IE, p.172.) M. Guibourt décrit un autre Quinquina-Piton, que nous avons trouvé souvent dans les collections ; les écorces en sont très-minces el très-larges; leur surface est lisse ou faiblement chagrinée; elles sont d’un gris sombre ou rougeàtre ; la poudre est d’un brun pâle ou blanchâtre. Quelquefois on y trouve des écorces plus épaisses, mais ayant le mème aspect; elles paraissent appartenir au tronc. Le Quinquina Caraïbe (Æ. cartbæum) a été décrit par Murray. L'écorce sèche du tronc est en fragments un peu convexes, d’une ligne et demie d'épaisseur, recouverts d’un épiderme profondément gercé, jaunâtre, spongieux, friable; le liber est dur, fibreux, d'un brun verdàtre, formé de fibres plates qui se séparent facilement les unes des autres. Dans une autre variété, décrite par M. Guibourt, laquelle paraissait appartenir à des branches plus jeunes, la cassure était nette, non fibreuse, d’un jaune orangé foncé. Le Quinquina du Pérou, décrit par M. Guibourt, a été trouvé chez André Thouin, professeur au Jardin des Plantes de Paris. Il se rap- porte à des descriptions faites par MM. de Humboldt et Bonpland dans leur beau livre des Plantes équinoziales. Cette écorce , qui a presque l'apparence de celle du Cerisier, est lisse, luisante, d’un gris sombre, parsemée de petits tubercules blancs, ou couverte d’un épiderme mince et cendré, sur lequel se dessinent de petits cryptogames noirs, 4 FLORE MÉDICALE linéaires et quelques Verrucaria. Le liber est vert, mince, fibreux ; la poudre est verdâtre ; elle est amère, un peu sucrée ; son odeur est nauséabonde. Le Quinquina du Brésil ou de Piauhi est une écorce tout à fait semblable au Quinquina Caraïbe. Nous avons déjà dit que M. Guibourt ne pensait pas que cette écorce füt produite par l'Æsenbechia febrifuga. Il l'attribue plutôt à un Æzosterna. Le liber en est fibreux, brunâtre ou verdàtre ; il est amer; il colore la salive en jaune. CoMPosiTION CHIMIQUE. — Le Quinquina-Piton à été analysé par Foureroy (Annales de Chimie, À. NU, p. 113). MM. Pelletier et Caventou, qui l'ont aussi soumis à quelques essais, n'y ont pas trouvé d'alcaloïde. Macéré dans l’eau, il donne un liquide rougetrès-foncé, très-amer, ne rougissant pas le tournesol, présentant plutôt une réac- tion alcaline. M. Buchner a extrait du Quinquina du Brésil un alcali organique, qu'il a nommé esenbeckine. Gomès prétend y avoir trouvé de la cèn- chonine. UsaGes. — Quoique réputées fébrifuges dans les lieux de produc- tion, les écorces des £zrostema sont loin de mériter cette réputation. Elles sont très-amères et agissent comme telles. (Voir l'article Quix- QUINA BLANC, lequel traite au long des faux Quinquinas, t. IE, p. 158- 162, de la Flore médicale.) DU XIX° SIÈCLE. 45 FABAGELLE Zygophyllum Fabago L.; Fabago alata Mœnch. (Zygophyllées.) La Fabagelle officinale, appelée aussi Faux-Câprier, est une plante vivace, à racine épaisse au collet, rameuse et blanchâtre. Les tiges, hautes de 0",70 à 1 mètre, cylindriques, un peu grèles, droites, ra- meuses, glabres, verdâtres, portent des feuilles opposées, pédalées, à pétiole assez court, accompagné de deux petites stipules géminées, terminé par une pointe subulée, et muni de deux folioles latérales, planes, entières, lisses, vertes, un peu charnues. Les fleurs, axil- laires ou terminales, naissant ordinairement par deux à chaque nœud, sont portées sur des pédoncules simples plus courts que les feuilles ; elles ne s'ouvrent que médiocrement et paraissent un peu irrégulières. Le calice est à cinq folioles ovales ou oblongues; la co- rolle, à cinq pétales oblongs, oblus, un peu plus longs que le calice, d'un rouge orangé à la base et blanchâtre au sommet. A lintériear, on trouve dix étamines inclinées latéralement, ainsi que le style, et un ovaire vblong, prismatique, présentant à l'intérieur cinq angles, et divisé en cinq loges qui renferment plusieurs graines anguleuses (PI. 5). Hagirar. — Cette plante est originaire de la Syrie, de la Maurita. nie et des régions voisines. On la trouve surtout dans les lieux secs. Elle peut croître en pleine terre jusque sous le climat de Paris. Currure. — La fabagelle officinale n’est cultivée que dans les jar- dins botaniques ou d'agrément. Elle demande une exposition chaude, une terre sablonneuse et sèche, car elle craint surtout l’hu- midité. On la propage de graines, de boutures ou d'éclats. Nous nommerons aussi : les Fabagelles à feuilles de Pourpier (Zygophyllum portucaloides Forsk.; Z. simpler L.), originaire d'Arabie ; écarlate (Z. coccineum L.; Z. desertorum Forsk.), d’Afri- que ; et la Fabagelle en arbre (Z. «rboreum L.), d'Amérique. PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les bourgeons, la racine, les graines, et, dans la fabagelle en arbre, le bois. ComposiTion cHimiQue. — L'analyse de la fabagelle n’a pas été faite; les feuilles renferment un suc àâcre et très-amer. Usaces. — Autrefois la fabagelle officinale était usitée comme A6 FLORE MÉDICALE vermifuge et antivénérienne ; elle n’est plus employée dans la mé- decine française. Dans certains pays on confit ses bourgeons dans du vinaigre, en guise de câpres. Le suc des feuilles de la fabagelle à feuilles de pourpre, plante qui a été aussi donnée comme vermifuge, est usité comme ophthalmique chez les Arabes, qui l'emploient en outre pour faire disparaître les taches de la peau. Les semences aro- matiques de la fabagelle écarlate servent de poivre en Arabie. On dit que le bois, très-dur, de la fabagelle en arbre peut remplacer le Gayac. Les Hottentots regardent la fabagelle herbacée comme un poison pour leurs troupeaux. FENOUIL Fœniculum officinale AN. Anethum Fœniculum L. (Ombellifères-Sésélinées. ) Le Fenouil officinal, Fenouil doux majeur, appelé aussi Aneth ou Anis doux, est une plante bisannuelle ou vivace, à racine fusi- forme, allongée, de la grosseur du doigt, ronde et blanchätre. Les tiges, hautes de 1 à 2 mètres, cylindriques, fistuleuses, rondes ou légèrement aplaties, giabres, lisses, un peu striées, d'un vert gai ou glauque, rameuses, dressées, portent des feuilles alternes, très- grandes, à pétiole membraneux et largement embrassant, à limbe plusieurs fois ailé, à divisions principales opposées, découpées en un grand nombre de segments simples, capillaires, subulés, d'un vert plus foncé que la tige. Les fleurs, jaunes et petites, sont groupées en ombelles terminales, composées d'une douzaine de rayons, dé- pourvues d’involuere et d’involucelles. Elles présentent un calice à cinq dents très-petites; une corolle à cinq pétales entiers, égaux, re- pliés en dedans au sommet; cinq élamines très-longues, étalées; un ovaire simple, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles courts. Le fruit, presque cylindrique, se compose de deux akènes oblongs, à cinq côtes saillantes, presque égales. Hapirar. — Le fenouil croît dans les régions chaudes et tempé- rées de l'Europe; on le trouve surtout dans les lieux secs. Cultivé depuis longtemps dans les jardins, et quelquefois dans les vignes, il a produit plusieurs variétés. Cuzrure. — Le fenouil vient bien dans tous les sols; il préfère cependant une terre sèche, légère et chaude. On le propage de DU XIX° SIÈCLE. A7 graines semées en place. Il se ressème ensuite de lui-même. Le fenouil doux d'Italie se cultive comme le Céleri; mais il ne tarde pas à perdre en France les qualités qui le distinguent dans son pays natal, Aussi est-il bon de faire venir tous les ans de nouvelle graine de ce pays. | Parties usirées. — Les fruits (improprement semences), les racines, rarement les feuilles. Hisrome et RÉcOLTE. — On doit à M. Guibourt (Histoire des dro- ques simples, & WT, p. 209-215, édit. de 1850) les meilleurs éclair- cissements sur les Fenouils en général, plantes qui, bien que connues de toute antiquité, étaient naguère encore enveloppées de beaucoup d’incertitudes et surtout de contradictions. Il ne parait pas douteux pour M. Guibourt que le Harathron de Dioscoride et le Marathrum de Pline et de Galien, ne soient des fenouils. Gaspard Bauhin (Prnar theatre bolanici, 1671) compte sept espèces de fenouil: mais la plu- part des auteurs n’en ont nettement désigné que deux : l’une à tige plus élevée, à akènes plus pelits, àcres et bruns; l’autre à tige plus basse, à akènes plus gros, pâles et sucrés. A.-P. De Can- dolle, dans son Prodrome, divise le fenouil en trois espèces, qui sont : le Fenouil commun (Feniculum vulqare Gaertn.), le Fenouil doux (Æ. dulce Gasp. et Jean Bauhin), et le Fenouil poivré (Æ. piperi- tum D.C.). Enfin, MM. Mérat et Delens (Dictionnaire de mat. méd. et de thérap., L. MW, p.270, édit. de 1831) signalent quatre espèces de fenouil, à savoir : le Fenouil commun (F. vwlgare), grande Om- bellifère dont les fruits sont connus sous les noms de fenouil noir et de fenouillet ; le Fenouil de Florence ou Fenouil officinal (Æ. offi- cinale) ; le Fenouil doux (Æ. dulce des deux Bauhin et de De Candolle), et le Fenouil poivré (Æ. piperitum D.C.). Mettant fin à ces contradictions et incertitudes, M. Guibourt (ist. des drog. simples, LUE, p. 212), s'exprime ainsi : «1° Le fenouil offi- cinal de Mérat et de Delens est très-certainement le fenouil doux de Gaspard Bauhin, dont on a eu tort de faire une espèce distincte ; 2° le fenouil officinal des mêmes auteurs paraît être non moins sû- rement celui d'Allioni, qu'Allioni lui-même fait synonyme du Fæni- culum dulce de Bauhin ; donc M. De Candolle aurait dû se dispenser de séparer le ÆFeœniculum officinale d'Alioni du Fæniculum dulce, pour le joindre au Æewniculum vulgare. » Ces préliminaires posés, M. Guibourt ayant réuni les diverses 18 KFLORE MÉDICALE espèces ou variétés de fenouil que l'on peut trouver dans le com- merce, établit les distinctions suivantes : 41° Fenoul vulgaire d'Allemagne (Foniculum vulgare germani- cum G. Bauhin), fruit entier, très-rarement divisé, cependant privé de son pédoneule, ovoide-elliptique, long de 4 millimètres, large de moins de 2, surmonté de deux styles courts, très-épaissis à la base. Ce fruit est très-souvent droit, mais aussi souvent courbé en are d'un côté par l’oblitération partielle ou par l'avortement d’un des car- pelles. Il à une leinte générale d’un gris foncé; mais, à la loupe, 1l présente huit côtes linéaires un peu blanchâtres, dont deux doubles et plus grosses que les autres, et huit vallécules assez larges, noi- rätres et à un seul canal oléifère. Il présente, lorsqu'on l’écrase, une odeur de fenouil forte et agréable, et 1l possède une saveur très-aro- malique, piquante et menthée. 2° L'enoul äcre d'Italie (probablement le Færiculum vulqare itali- cum, seine oblongo, qustu acuto, de Gaspard Bauhin). Fruit presque semblable au précédent, mais d'une couleur beaucoup plus claire, tout à fait glabre, à côtes blanchâtres étroites et à vallécules verdâtres offrant un canal oléifère développé. Ce fruit, écrasé, présente une odeur forte qui se rapproche de celle du Cajeput ; il a une saveur un peu àcre, non amère, très-aromalique, accompagnée d'un sentiment de fraicheur. 3° Fenouil doux majeur (Fæniculum dulce, de Gaspard Bauhin ; Feœniculum dulce, majore et albo seine, de Jean Baubin ; Fænicu- lum officinale AN.). C'est le fenouil ordinaire du commerce, le véri- table fenouil officinal, vulgairement Fenouil de Florence, parce qu’autrefois on le tirait des environs de cette ville. Il est très-cultivé dans le midi de la France, particulièrement aux environs de Nimes. Fruit long de 10 à 15 millimètres, large de 3, de forme linéaire, quelquefois un peu renflé à la partie supérieure ; il est pourvu de son pédoncule, qui forme presque toujours un angle marqué avec l'axe du fruit; il est toujours entier, cylindrique par conséquent, pourvu de huit côtes, dont deux doubles, toutes carénées au som- met, élargies à la base, laissant à peine apercevoir la vallécule. A proprement parler, il est cannelé; il est quelquefois droit, mais le plus souvent il est arqué d'un côté par l'avortement d’un des car- pelles. 1 est d’un vert très-pàle et blanchàtre, uniforme. Son odeur, douce et toujours agréable, devient plus forte par la fric- DU XIX° SIÈCLE. 41) lion; sa saveur, fort agréable également, est aromatique et sucrée. 4° Fenouil doux mineur d'Italie (Fæniculum mediolanense G.Bauh.; Fœniculum dulce vulgarti simile X. Bauh.). Fruit long de 6 à 7 milli- mètres, épais de 2 et plus, quelquefois entier, droit ou recourbé, comme le précédent ; le plus souvent séparé en deux méricarpes ; côles blanches, carénées au sommet, mais plus étroites que dans l'espèce précédente, et laissant apercevoir la vallécule renflée par le canal oléifère. Ce fruit, écrasé, dégage une odeur forte et franche de fenouil. Sa saveur est agréable et sucrée. Il ressemble beaucoup, à première vue, au fenouil àcre d'Italie, mais, indépendamment des caractères précédents qui l'en distinguent, il est plus large et d’une couleur générale plus pâle et plus blanchätre. »° Fenouil amer de Nimes. Fruit plus petit que tous les précédents et presque semblable au Carvi: long de 3 à 4 millimètres, très-rare- ment de 5, entier ou ouvert, éroit ou arqué, d’un vert brunàtre assez prononcé. Les côtes sont étroites, filiformes, d’un blanc ver- dâtre; les vallécules sont assez la:ses, d’un vert foncé, et offrent quel- quefois l'apparence d’un second canal oléifère. Il présente en masse une odeur de fenouil vert, qui devient beaucoup plus forte quand on l’écrase. Sa saveur est amère et se joint à un goût aromatique el fort de fenouil. M. Guibourt, après avoir pensé que ce pouvait être le Feniculum semine rotundo minore de Gaspard Bauhin, et avoir ensuite reconnu son erreur, se demande si ce ne serait pas le Æ- niculum sylvestre du même auteur. M. Guibourt, pour mieux déterminer les espèces précédentes, les a fait semer dans le jardin de l'École de pharmacie de Paris. Toutes ont levé, sauf le fenouil àcre d'Italie, et il a pu se convaincre de la valeur de ses distinctions. De tous les fruits de fenouil qui viennent d'être décrits, le seul qui soit usité en pharmacie est le fenouil doux majeur (Fæniculum officinale AI.). I convient de le choisir gras, d’un vert pale, et non jaunâtre ni brunâlre, comme il devient quand il est vieux ou altéré. La racine de fenouil employée en pharmacie vient soit du fenouil vulgaire d'Allemagne, soit du fenouil doux majeur dégénéré qui, dans la plupart des jardins, prend la place du premier. Elle est for- mée d’une écorce fibreuse, blanchâtre, quelquefois ocreuse à sa sur- face, et d’un cœur ligneux, à couches concentriques. Son odeur est Flore, T. II. 4 o0 FLORE MÉDICALE faible, douce, agréable. Sa saveur est celle de la carotte. Elle se dis- tingue de la racine de persil par son cœur ligneux ; d’ailleurs elle est plus blanche. Composirion cmimique. — Le fenouil doit son action stimulante à une huile essentielle répandue dans toutes les parties de la plante, et plus spécialement accumulée dans les conduits oléifères que l’on trouve dans les vallécules des fruits. Cette substance, que l'on sépare par distillation, est limpide comme de l'eau, d’une odeur très-suave, d'une pesanteur spécifique de 0,983 à 0,985. A 5 degrés au-dessus de O0, elle se concrète en un stéaroplène qui parail avoir la mème composition que celui de lAnis vert, et 1l reste une essence liquide qui, d'après M. Cahours, ne contient pas d'oxygène, et aurait la même composition que l'essence de Térébenthine. Usages. — Les fruits du fenouil étaient employés par Hippocrate pour augmenter la sécrétion du lait. On les considère comme {oni- ques, stimulants, stomachiques, cordiaux et carminalifs. D'après Cullen, on les a employés, en Angleterre, contre la colique des enfants ; on leur préfère en général le Coriandre et l’Anis. Seuls ou associés à d’autres substances, on les à autrefois prescrits comme emménagogues et fébrifuges. Ils entrent dans les électuaires de A/:- thridate, le Philonium Romanum, e Diaphœnrr, le Catholicon, la confection d'Hamech, Va thériaque, le lénitif, le sirop de Stæchas, l'eau vulnéraire. La racine fait partie, avec celles de Persil, d'Ache, d’'Asperges et de petit Houx, des cry racines apéritives. Elle entre dans l'eau générale, etc. Les fruits faisaient partie des quatre semences chaudes majeures. L'essence est prescrite quelquefois à la dose de # à 10 gouttes comme stomachique, cordiale et carminative. D'après Tragus et Arnaud de Villeneuve, les feuilles, en infusion ou sous forme d’eau distillée, jouissent de la réputation de conserver la vue. En cataplasmes ou en décoction dans l’eau et dans le vin, elles sont réso- lutives. À l'intérieur, les préparations de fenouil ont été autrefois prescrites contre la gastralgie, l’atonie de l'estomac et les coliques venteuses. Les Italiens et les habitants de la Provence mangent les pétioles blancs et volumineux du fenouil cultivé, comme on fait en France le Carvi. On en use également, sans aucune préparation, comme des Artichauts à la poivrade. Au cap de Bonne-Espérance, on fait euire ou rôtir les jeunes pousses. Les graines se confisent avec les corni- DU XIX° SIÈCLE, 51 chons. Toute la plante teint en jaune foncé. L'huile essentielle est très-employée en parfumerie. On met les graines du fenouil poivré dans les ragoüts comme condiment. FENUGREC Trigonella Fœænum-græcum L. (Légumineuses - Lotées.) Le Fenugrec, ou Trigonelle, appelé aussi Foin grec, Saine-grain, Sé- négré, est une plante annuelle, à racine grêle, très-rameuse, fibreuse. La tige, haute de 0",35 environ, cylindrique, un peu creuse, striée, légèrement pubescente, dressée, presque simple, porte des feuilles alternes à pétioles courts, accompagnés de deux stipules entières, lancéolées, subulées, pubescentes, à limbe divisé en trois folioles ovales, oblongues, obluses ou échancrées au sommet, dentelées sur les bords, glabres, d'un vert assez foncé en dessus, plus pàle el cen- dré en dessous. Les fleurs, d’un jaune pâle, sont sessiles, axillaires, solitaires ou géminées, dressées. Elles présentent un calice ubuleux, presque cylindrique, velu , un peu membraneux et transparent, à cinq divisions égales subulées et ciliées; une corolle papilionacée, beaucoup plus longue que le calice, comprimée latéralement, à élen- dard ovale, obtus, obcordé, comprimé et peu ouvert, à ailes rappro- chées et obtuses, ainsi que la carène, qui est très-courte ; dix éta- mines diadelphes, courtes, à anthères simples ; un ovaire allongé, à une seule loge multiovulée, surmonté d’un style et d’un stigmate simples. Le fruit est une gousse très-longue, presque cylindrique, étroite, arquée, dressée, terminée en longue pointe conique, et ren- fermant une douzaine de graines oblongues, un peu comprimées, tronquées aux deux extrémités, bosselées et brunètres. Hagrrar. — Le fenugrec croit dans les régions méridionales de la France et de l'Europe ; on le trouve surtout aux bords des champs. IL peut croître en pleine terre jusque dans nos départements du Nord. Cuzrure. — Cette plante demande une bonne exposition, une terre légère et chaude. Il suffit de semer ses graines en place, au printemps. PARTIES uSITÉES. — Les graines, la plante entière. Récoure. — On récolte la graine à la maturité des fruits ; elle doit 52 FLORE MÉDICALE être choisie grosse et récente, de couleur jaune, très-cdorante ; en vieillissant, elle perd son odeur et devient brune. Composirion cuiMique. — Deux principes dominent dans les graines de fenugrec : elles renferment environ trois huitièmes d'une matière mucilagineuse, et un principe actif d’une odeur très-agréable, ana- logue à celle du Mélilot et de la fève Tonka, qui appartiennent à la même famille, principe dont la nature est inconnue, mais qui pour- rait bien être du à la présence de la coumarine. M. Bosson , pharmacien à Mantes, a trouvé dans le fenugrec une huile fixe et àâcre, de l'acide malique, une huile volatile, une ma- lière amère, une malière colorante jaune, et un principe aroma- tique. Usaces. — Le fenugrec était connu des anciens. Les Grecs et les Égyptiens le plaçaient au rang des meilleurs fourrages. Mésué le fai- sait entrer dans un looch et dans un sirop. Il a été, de tout temps, considéré comme émollient, résolutif, maturatif et adoucissant. On l’a employé en décoction , sous forme de lavements, contre la diar- rhée, la dysenterie, et en général contre toutes les inflammations intestinales. À l'extérieur, il a été aussi utilisé en décoction, en rai- son de ses propriétés adoucissantes, contre les ophthalmies, les aphthes, les gerçures du mamelon; en calaplasmes, comme dépu- ralif, pour favoriser la résolution des phiegmons. Les graines entrent dans l'Élæolé de fenugrec (autrefois Auile de mucilage), qui lui-même est le principe aromatique de l'orguent d’'Al- thea. Elles font partie des farines émollientes. Elles sont souvent em- ployées en médecine vétérinaire. Dans le Levant, on mange les jeunes pousses de fenugrec. Du temps de Prosper Alpin, on leur attribuait, en Égypte, la propriété de faire engraisser. Les Arabes les considèrent comme un excellent stoma- chique et comme un spécifique contre la dysenterie. Grillé comme le café et mêlé avec du miel, de l'eau et du suc de citron, le fenu- grec, au rapport de Sonnini (Voyage dans la Haute et la Basse- Égypte, Paris, 1799), sert à préparer une boisson agréable. La teinture et l'huile essentielle de fenugrec servent en parfume- rie. La graine entre dans la composition d'un carmin factice. La décoction jaune donne sur la laine une couleur verte solide avec le sulfate de cuivre, une nuance olive avec les sels de fer, et avec la garance une nuance orange. DU XIX° SIÈCLE. 53 On cultive surtout le fenugrec comme plante fourragère ; on en fait des prairies artificielles. FÉRULE Ferula communis L.; persica W., etc. (Ombellifères - Peucédanées. ) Les Férules sont en général de grandes plantes herbacées, bisan- nuelles ou vivaces, à tige droite, fistuleuse, portant des feuilles alter- nes, dont le pétiole large et membraneux se termine par un limbe surdécomposé, à découpures menues, linéaires. Les fleurs, jaunâtres, sont disposées en ombelles terminales à rayons nombreux, entourées d'un involucre formé de quelques folioles membraneuses et cadu- ques ; les ombelles latérales supérieures sont le plus souvent oppo- sées ou ternées. Les ombellules, composées de fleurs régulières, tou- tes fertiles, sont entourées d’involucelles formés de folioles très- courtes et pointues. Chaque fleur présente cinq pétales presque égaux, cordés ou oblongs. Le fruit est ovale, comprimé, relevé, sur chaque face, de trois côtes longitudinales. Ce genre renferme environ douze espèces, qui sécrètent pour la plupart un sue gommo-résineux d’une odeur désagréable. Nous citerons comme les plus intéressantes au point de vue de cet ouvrage : la Férule de Perse (Æerula persica W.), qui, selon Willdenow, fournit la gonune séraphique où le Sagapenum, et à laquelle même Olivier avait attribué la gomme-ammoniaque; la Férule de Tanger (Æ. tingitana L.), qui, selon M. Lindley, produit la gomme-résine appelée par les habitants de Tanger /usôgh ou fasôgh ; a Férule d'Orient (F. orientalis L.), à laquelle on à aussi attribué cette même résine, et la Férule Assa fœtida (F. Assa-fo- tida Lamk), qui fait l’objet d'un article spécial (voyez ASSA-FÉTIDA, t.I, p. 126). Hagrrar. — Les férules sont des plantes propres aux régions chaudes et tempérées de l’ancien continent. Elles habitent surtout les bords du bassin méditerranéen. Cuurure. — Ces plantes ne sont guère cultivées que dans les jar- dins botaniques ou d'agrément. Elles demandent une exposition chaude et éclairée, une terre légère, sèche et profonde. On les pro- page de graines, semées, autant que possible, en place aussitôt après 54 FLORE MÉDICALE leur maturité, ou au printemps, en terrines et sous châssis ; on arrose alors le semis, et on repique les jeunes plants dès qu'ils sont un peu forts. ParTiEs usiTÉESs, — Les sucs concrétés oblenus par incision, et for- mant diverses gommes-résines. RécoLre. — La férule de Perse est généralement regardée comme fournissant le Sagapenum, lequel était connu des anciens et figure dans plusieurs médicaments composés qu'ils nous ont laissés. Comme la résine de l’Assa-fœtida, le sagapenum est recueilli en Perse, en Médie, en Arabie, etc. Il se présente en masses et rarement en lar- mes; il est mou, demi-transparent , d'une couleur plus foncée que celle du Galbanum, autre gomme-résine qui a longtemps passé pour provenir d'une férule, mais qui vient du Bubon galbanum (Bubon Galbarum L.), autre Ombellifère, originaire du cap de Bonne-Espé- rance (voir au mot GALBANUM, dans ce volume). Le stgapenum entre danslecommerce, mêlé de fruits d'Ombellifères et d’autres impuretés. Sa saveur et son odeur sont celles de la résine de l'Assa-fætida, mais affaiblies ; il diffère de cette dernière résine en ce qu'il ne rougit pas au contact de l'air et de la lumière. Le sagapenum se présente quelquefois en larmes arrondies, agglu- tinées, irrégulières, de la grosseur d’une noisette, légèrement trans- parente, d’une cassure cornée, d’une odeur résineuse, analogue à celle de la résine du Pin, un peu alliacée; il se ramolhit par la cha- leur, s’enflamme facilement et brüle avec beaucoup de fumée. Enfin, on rencontre quelquefois dans le commerce un sagapenum très-impur, de couleur foncée, d'une odeur forte, qui arrive enve- loppé dans des toiles bleues. On y trouve quelquefois mélangées des larmes de Bdellium et de Gomme ammoniaque, ete. Composirion CHIMIQUE. — Le sagapenum est une gomme-résine ; le principe résineux y domine sur la gonime ; à la distillation, il four- nit une huile volatile. Voici d'ailleurs la composition que lui a assi- gnée M. Pelletier : résine, 54,26; gomme, 31,94; malate acide de chaux, 0,40 ; huile volatile et perte, 11,80; matière particulière à laquelle on attribue toutes ses propriétés, 0,60; bassorine, 1,00 (Bu/- letin de pharm., &. WE p. AS). Usaces. — Le sagapenum, où gomme séraphique, quelquefois aussi appelé Serapinum, a élé employé comme emménagogue, anti- spasmodique et résolutif. Ferrein le regardait comme purgatif à la DU XIX° SIÈCLE. 59 dose de 1 à 4 grammes. Il l'employait contre l'épilepsie, l'hysté- rie, elec. Ou s’en est servi à l'extérieur comme résolutif et maturatif. Les Grecs, les Romains et les Arabes, qui l'employaient aussi comme fondant, lui attribuaient la propriété d'activer les fonctions des organes digestifs. Il entre dans la thériaque et l'emplâtre de Dia- chylon gommé. La fausse gonune-ammoniaque de Tanger, décrile par M. Guibourt (Hist. des drog. simples, & WW, p. 224-226), et qui, selon cel auteur, aurait été prise par Jackson pour la gomme ammoniaque vraie, serait produile, non pas, comme le dit Sprengel, par le Æerula orienta- lis L., mais bien, d’après M. Lindley, par le Ferula tingitana L. (Voir, pour plus amples renseignements, l'article Dorème, t. I, p. 470-473.) FICAIRE Ficaria ranunculoides Mœnch. L. Ranunculus Ficaria L. {Renonculacées - Renonculées.) La Ficaire, appelée aussi Éclairette, Grenouillette, Herbe aux hémorrhoïdes, Herbe du siége, Petite chélidoine, Petite Éclaire, Petite scrophulaire, Pissenlit doux, etc., est une petite plante vivace, à racines fibreuses, granuleuses, présentant des renflements tuber- culeux, ovoides, charnus. La souche, très-courte ou presque nulle, donne naissance à plusieurs liges ou hampes, longues de 0,10 à 0",20 au plus, lisses, couchées ou ascendantes et formant une large toufle. Elles portent des feuilles allernes, à pétiole élargi et engainant à la base, à limbe cordiforme obtus, crénelé, anguleux, épais, luisant, très-glabre, d’un vert foncé en dessus, plus pâle en dessous. Les fleurs, jaune d'or, sont solitaires à l'extrémité de longs pédonceules axillaires et presque radicaux. Elles présentent un calice à trois sépales presque herbacés, cadues; une corolle de six à neuf pétales d'un beau jaune, souvent verdâtres en dehors, brièvement onguiculés et transparents à la base, munis intérieurement d'une fossette neclarifère cachée par une écaille; des élamines en nombre indéfini, libres et hypogynes, à anthères oblongues ; un pistil com- posé d’ovaires nombreux, libres, à une seule loge uniovulée, dispo- sés en capitule globuleux. Le fruit se compose de nombreux akènes oblus, portés sur un réceptacle arrondi (PI. 6). Hagrrar. — Cette plante se rencontre dans presque toute l'Europe 56 FLORE MÉDICALE et jusque dans le nord de l'Afrique. Elle habite surtout les prés humides, les lieux couverts et ombragés, les buissons, la lisière des bois, etc. Cuzrure. — On ne la cultive que dans les jardins botaniques ; elle demande un sol humide, et se propage très-facilement, soit de graines semées en place, soit d'éclats de pied. Parties usirées. — Toute la plante, les racines. RécoLre. — La ficaire jouit de propriétés bien différentes, selon l'époque à laquelle on la récolte; très-jeune, elle peut être mangée en salade; dans le Nord on la vend en guise de pissenlit; plus àgée, on ne la mange que cuite; les racines, très-àcres avant la flo- raison, abondent plus tard en fécule et peuvent servir d'aliment. Galien et Dioscoride avaient remarqué que la ficaire devenait plus àâcre en avançant en âge. Pour ses usages en médecine, on ne l'employait que fraiche; elle perd toutes ses propriétés par la des- siccalion. - Comprosirion cHimique. — La ficaire exhale une odeur ana- logue à celle des Crucifères. Elle renferme un principe poivré, beaucoup moins àcre que celui des autres Renonculacées. Elle contient une matiere volatile qui se dissipe cu se dissout par la coc- tion. UsaGes. — Boërhaave et Bulliard ont recommandé l'usage de la ficaire contre les hémorrhoiïdes. Boërhaave employait contre cette maladie les racines et les feuilles pilées ; 1l en prescrivait aussi la dé- coction comme un remède puissant. Bulliard ordonnait les lotions pour apaiser les douleurs hémorrhoïdales. I recommandait aussi de laver les ulcères invétérés avec le suc ou avec la décoction de ficaire. On employait encore cette plante en cataplasmes. C'était un préjugé populaire que les racines de ficaire, portées dans la poche, étaient un préservatif des hémorrhoïdes. L'odeur de la ficaire, analogue à celle des Crucifères, l'a fait longtemps conseiller comme antiscor- butique, purgative et diurétique. Enfin, on s'en est servi topiquement sur les tumeurs scrofuleuses, el ses racines ont été quelquefois em- ployées comme rubéfiantes. La ficaire est aujourd'hui très-peu en usage dans la médecine. Dans le Upland, on mange les feuilles de ficaire cuites en guise d'épinards. On confit aussi les boutons floraux dans du vinaigre pour lenir lieu de Càpres. DU XIX° SIÈCLE. o7 Les pores recherchent les racines de [a plante; les abeilles buti- nent sur les fleurs; les chèvres et les moutons broutent la ficaire; les chevaux et les vaches la mangent, mais sans la rechercher. FIGUIER Ficus Carica L. (Morées. ) Le Figuier est un arbre dont la tige peut atteindre la taille de 10 mètres, mais qui reste généralement beaucoup plus bas dans nos cultures. Elle se divise en nombreux rameaux, terminés par des bourgeons très-pointus, et portant des feuilles alternes, grandes, à pétiole cylindrique et pubescent, à limbe large, échancré en cœur à la base, palmé, à cinq lobes arrondis et obtus; épais, ferme, d'un vert foncé et luisant à la face supérieure, plus clair à l’inférieure, qui est couverte de poils rudes et courts, Les fleurs, monoïques, très- petites, blanchâtres, pédicellées, sont renfermées dans un involucre pyriforme charnu, dont elles occupent toute la face interne, et qui est muni, à la base, de deux ou trois petites écailles ; tandis que le sommet est percé d'un trou (æ7/) bouché par de nombreuses écailles scarieuses disposées sur plusieurs rangs. Les fleurs mâles, situées à la partie supérieure, présentent un calice à trois divisions, et trois étamines saillantes. Les fleurs femelles, beaucoup plus nombreuses, occupent le milieu et le fond du réceptacle, et présentent un calice à cinq divisions, un ovaire à une seule loge uniovulée, muni d'un style latéral terminé par un stigmate filiforme et bifide. Le fruit (ou ce que l'on désigne vulgairement sous ce nom) se compose du récep- tacle, devenu épais et charnu, et de nombreux akènes très-petits (vé- ritables fruits, vulgairement appelés graines) adhérant par des pédi- celles charnus à la paroi interne du réceptacle. Hagrirar. — Les figuiers sont originaires de l'Asie. On en a trouvé des espèces en Amérique ; mais elles ne sont pas comestibles. Ils nous sont venus de l'Orient et paraissent avoir été introduits dans le midi de la France par les Phocéens. Le figuier est aujourd’hui cultivé en grand et en plein champ jusque sous le climat de Paris, où l'on con- naît la figue d'Argenteuil. Dans nos départements du sud-ouest, dans ceux de l’ouest, particulièrement sur les côtes maritimes, dans le Maine-et-Loire, l'Indre-et-Loire, etc., les figuiers sont de la plus belle 58 FLORE MÉDICALE venue, pourvu qu'ils soient un peu abrités. Le figuier produit par la culture de nombreuses variétés dans la forme, le volume, la cou- leur, la qualité et l’époque de la maturité des fruits. Curure. — Quoique le figuier s'accommode de {outes sortes de terres, il préfère cependant un sol sablonneux et doux. Il se multiplie de rejetons, de boutures, de marcottes et de tronçons de racines ; mais le mode par rejeton est le plus court et le plus facile. PARTIES usiTÉEs. — L'inflorescence fécondée et arrivée à maturité, nommée Figue. RécoLre. — 1] y a deux sortes de figue, la Fique-fleur ou de prin- temps, et la Æique d'été. La première mürit dans nos départements du Midi, selon les variétés plus ou moins hâlives, depuis le commen- cement de juin jusqu'au mois de juillet, et un peu plus tard dans les contrées du Nord; elle croit sur les rameaux de l'année précédente, el est d'ordinaire très-grosse. La seconde, ou d'automne, ne tarde pas à lui succéder, depuis le mois d’août jusqu'en septembre et oc- tobre; elle est plus petite, plus succulente ; si les gelées ne venaient pas en arrêler la production, elle donnerait encore durant tout le mois de novembre. Les figues du midi de l'Europe et de la France se conservent très-bien; celles des environs de Paris sont d'une moins bonne conservation. Les figues fraiches demandent, pour ainsi dire, à être mangées aussitôt après avoir été cueillies. Elles ne peuvent supporter le transport que quand on les eueille avant la maturité complète, et, dans cet état, elles ne sont pas bonnes à manger. Dans le Midi, on opère en grand la dessiccation des figues, qui forme une branche de commerce assez considérable. On les divise alors en trois classes : la figue grasse, la violette et la petite. Celte dernière est la meilleure. Les figues sèches se prennent parmi les variétés hà- tives ; on les place sous l'action la plus forte des rayons solaires, el lorsqu'elles sont à point, on les met dans des corbeilles que l'on dé- pose dans un lieu sec. La variélé de figues à préférer pour l'usage médical est la figue monissonne, moissonne ou mouissonne; elle est petite, à peau d’un bleu violacé, très-fine, souvent crevassée, hâtive et délicate ; on en fait deux récoltes dans le Sud-Est. {Voir pour les autres variétés et pour d'autres détails, l'article Ficuier, dans l'Horticulture potagère et fruitière, qui fait partie du Æègne végétal, p. 562 à 570.) Comrostrion cHiMique.— Les figues contiennent du sucre analogue à celui du raisin. Elles renferment en outre une matière mucilagineuse, DU XIX° SIÈCLE. 09 abondante, et très-probablement de la pectine et de l'acide pectique. Toutes les plantes du genre Æicus produisent, par incision, un suc blanc qui, par évaporalion, fournit du caoutchouc. Parmi les figuiers, ceux qui donnent le plus de cette substance, que l’on trouve dans d’autres familles de végétaux, sont les Figuiers élastique (F. ela- stica L.), elliptique |F. elliptica K.), de l'Inde (F. éndica L.), des pa- godes (Æ. religiosa L.), qui fournit la gomme-laque, vénéneux (Æ, toricaria L.), verruqueux (#°. verrucosa Nabl), tous appartenant aux Indes Grientales; et le Figuier Toka (#. Toka Forsk.), de l'Arabie. (Voir au mot ARBRE A CAOUTCHOUC, t. 1, p. 250-253.) Usages. — Les figues sont laxatives. Elles entrent dans les tisanes pectorales lorsqu'elles sont fraîches ou sèches ; dans ce dernier cas, on les appelle Cariques, en Provence. On les emploie comme cata- plasmes émollients. Elles font partie, avec la Datte, le Jujube et le Raisin, des quatre fruits pectoraux qui entrent dans la composition des pâtes pectorales et des sirops, si employés contre les rhumes, les catarrhes, les inflammations de poitrine, de la bouche, du larynx. Bouillies dans l’eau ou dans du lait, on s’en sert souvent sous forme de gargarisme. Les anciens les croyaient bonnes comme diurétiques, et pour dissoudre la pierre. Le suc de l'arbre est purgatif ; on l’em- ploie pour détruire les verrues. Les figues sont la base de la nourriture de certaines populations, particulièrement en Afrique. On en mange beaucoup en Italie, en Espagne, dans le midi de la France. Partout où elles n’abondent pas, c'est un hors-d'œuvre ou un dessert. Aux Canaries et en Portugal, on prépare avec les figues, par fermentation, un vin qui, à la distillation, procure une éau-de-vie agréable et très-recherchée. Les Romains en tiraient du vinet du vinaigre. Ils les faisaient entrer dans une espèce de mortier indestruclible. Les athlètes s'en servaient pour augmen- ter leurs forces. On accusait les figues d’engendrer une sorte de ver- mine; mais celle opinion, qui remonte à Galien, a été détruite par Garidel. La décoction des feuilles de figuier, fraiches, teint en jaune d'or, tombant un peu dans le rouge. Le suc de la plante sert à faire de l'encre sympathique. Le bois poreux et chargé de beaucoup d'émeri, sert à polir. Quand l'arbre est gros, on en fait des vis de pressoir. Les figues, desséchées au four, servent à la nourriture des besliaux. 60 FLORE MÉDICALE FILIPENDULE Spiræa Filipendula L. (Rosacées-Spiréées.) La Filipendule ou Spirée filipendule est une plante vivace, à ra- cines fibreuses, grêles, donnant naissance, près de leur extrémité, à des renflements tuberculeux, ovoides, bruns, de la grosseur d’une noisette. Les tiges, hautes de 0,30 à 0,60, dressées, rondes, gla- bres, d'un vert clair, presque simples ou à peine rameuses au som- met, portent des feuilles allernes, très-longues, à stipules dentées, à limbe divisé en quinze à vingt paires de segments très-inégaux, à lobes ciliés, glabres, d'un beau vert foncé en dessus, plus clair en dessous; les radicales sont longuement pétiolées, les caulinaires em- brassantes. Les fleurs, blanches, quelquefois rosées en dehors, odo- rantes, sont très-nombreuses et groupées en élégants corymbes ter- minaux. Elles présentent un calice à cinq divisions petites, courtes, réfléchies ; une corolle à cinq pétales ovales, écartés; des étamines nombreuses, filiformes, plus courtes que les pétales, à anthères arrondies; un pistil composé d’une douzaine de carpelles verti- cillées, à une seule loge pluriovulée, surmontées de styles termi- naux, marcescents. Le fruit se compose d’une douzaine de petits follicules secs, pubescents, renfermant chacun un petit nombre de graines. Hapirar. — Cette plante est répandue dans la plus grande partie de l'Europe; elle croit surtout dans les clairières des bois, sur les coteaux secs et sablonneux, quelquefois dans les prés. CuLrure. — Assez abondante à lélat sauvage pour suffire aux be- soins de la médecine, qui l'emploie rarement, la filipendule n'est cultivée que dans les jardins botaniques ou d'agrément. Peu exi- geante pour le sol, elle se propage frès-facilement par graines, par éclats de pieds ou simplement par tubercules. PARTIES usiTÉESs. — Les racines, les feuilles. Récocre. — Les racines de filipendule se récoltent à la fin de l’au- tomne ; elles sont brunes, rougeàtres en dehors, blanches en de- dans; leur saveur est amère et astringente. On ne trouve générale- ment dans le commerce de la droguerie que les renflements tubéri- formes isolés. DU XIX° SIÈCLE. GI COMPOSITION CHIMIQUE. — Les racines fraiches de filipendule exha- lent une odeur analogue à celle des fleurs d'oranger. Elles contien- nent assez d’amidon pour qu'on ait pu y recourir dans les temps de disette. Elles sont riches en tannin comme la plupart des racines de la même famille ; aussi les a-t-on quelquefois employées, ainsi que les feuilles, pour tanner les cuirs. Si on les râpe fraiches et si on les traite par l’eau, on obtient une dissolution de couleur rosée, renfer- mant du fannin, et il se dépose une fécule dont Bergius a obtenu une excellente colle. Après les avoir pulvérisées et fait cuire, Gilibert en a isolé une matière amylacée bonne à manger. Usaces. — La racine de filipendule est un léger astringent ; on l’a employée, à la dose de 50 à 60 grammes, en décoction contre les diarrhées et la dysenterie. On la regardait autrefois comme diuré- tique et lithontriptique. On l'employait, ainsi que les feuilles, contre les hydropisies, La poudre des racines a été usitée contre la leucor- rhée, les hémorrhoïdes et les scrofules. Les cochons sont très-friands des tubercules auxquelles les racines donnent naissance. Ces tubereules peuvent servir à faire du pain en temps de disette. La plante entière peut être employée pour le lannage. Parmi les plantes du genre Spéræa, qui jouissent des mêmes pro- priétés que la filipendule, nous citerons l'Ulmaire ou Reine des prés (Spiræa Ulnaria L.), qui fait le sujet d’un article spécial (t. HE, p. 424); la Barbe de chèvre ou Barbe de bouc, ou Épine de boue (Spiræa A runcus L.), indigène de France ; la Spirée cotonneuse (Spr- ræa tomentosa L.); la Spirée (Gillénie) à trois folioles (S. /r2/0- liata L.), l’une et l’autre de l'Amérique septentrionale, où la seconde, appelée aussi Zpécacuanha de Virgiue, est employée comme émé- tique, et contre les fièvres intermittentes. D'après Barton et Chap- mann, la Spirée à trois folioles posséderait en effet des propriétés vomitives puissantes ; mais Bigelow assure qu'elles ont été très-exa- gérées. Cependant Coxe croit qu'il existe dans le Kentucky une espèce de Spirée dont les propriétés éméliques sont très-accentuées. 62 FLORE MÉDICALE FLUTEAU Alisma Plantago L. (Alismacées - Alismées. ) Le Fluteau ou Plantain d’eau est une plante vivace, à rhizome tubéreux, fibreux, blanchâtre. Les feuilles, toutes radicales, dispo- sées en rosette ou en fascicule, ont un long pétiole engaînant à la base, terminé par un limbe ovale-oblong ou lancéolé, un peu cordi- forme, entier, glabre, marqué de cinq ou sept nervures. La tige, haute de 0,50 à 1 mètre, est dressée, dépourvue de feuilles, gla- bre, cylindrique, et se divise au sommet en rameaux floraux verti- cillés. Les fleurs, assez petites, blanc rosé, sont groupées en petits bouquets terminaux, garnis de braclées scarieuses, et dont l'ensemble constitue une grande panicule terminale. Elles présentent un pé- rianthe à six divisions, alternant sur deux rangs ; les trois extérieures herbacées, lancéolées, concaves, persistantes ; les trois intérieures pétaloïdes, plus grandes, caduques; six éfamines opposées deux à deux aux trois divisions intérieures du périanthe , un pistil composé d’ovaires nombreux, uniovulés, verticillés, surmontés chacun d'un style court, latéral, terminé par un (rès-petit stigmate en tête. Le fruit se compose de nombreuses carpelles monospermes, arrondies au sommet et verticillées sur un seul rang. Nous citerons encore les Fluteaux nageant (A. natans L.) et Renon- cule (A. ranunculoïdes L.). Hagirar. — Ces plantes sont communes en Europe. Elles croissent dans les lieux humides ou marécageux, les terrains tourbeux, au bord des eaux, le long des fossés, etc. On ne les cullive que dans les jardins botaniques, où on les propage avec la plus grande facilité par la division des vieux pieds. PARTIES usITÉES. — Le rhizome et les feuilles. Récozre. — Les rhizomes du fluteau peuvent être récoltés pen- dant toute l'année; ils sont actifs lorsqu'ils sont frais; ils perdent à peu près toutes leurs propriétés par la dessiceation. Les feuilles peu- vent être cueillies pendant la floraison. Composirion cmimiQue. — Les feuilles du fluteau possèdent une saveur légèrement amère et styptique. Elles contiennent du tannin; du moins leur infusion précipite par le sulfate de fer. Les rhizomes DU XIX° SIÈCLE. 63 frais présentent une odeur chloro-iodée des plus remarquables ; elle est due très-probablement à une huile essentielle très-fugace, car elle disparaît par la dessiccation. Cette plante mériterait un examen chi- mique plus approfondi. Usages. — Le fluteau est une des plantes les plus préconisées par le vulgaire contre la rage. Sa réputation date de 1717, époque à laquelle Lewshin annonça ses propriétés antirabiques. On l’'employait non-seulement comme prophylactique de la rage, mais encore contre l'hydrophobie confirmée. En Russie, dans le gouvernement de Tula, on en fait usage depuis longtemps, et son efficacité ne s’est jamais démentie, dit Lewshin, qui assure avoir été lui-même témoin d’une guérison. Burdach a publié aussi des observations favorables à cette médication. Malheureusement de nombreux essais, faits en France et dans d’autres pays, n’ont pas été suivis de bons résultats. Dans la méthode de traitement de la rage par le rhizome du flu- teau, comme dans la plupart des traitements de la même maladie, on recommandait des précautions qui paraissaient être les conditions indispensables du succès. C’est ainsi que l'on recommandait de cueil- ir le rhizome pendant l'été, de le faire sécher à l'ombre, de le pul- vériser, On faisait manger au malade une tranche de pain couverte de beurre saupoudré de poudre de rhizome de fluteau. Les feuilles et les rhizomes frais sont certainement rubéfiants. Il paraît cependant que les Kalmoucks mangent ces tubercules. M. le professeur Fée dit en avoir ingéré une grande quantité sans éprouver d'accident. (Hist. nat. pharm.,t. X, p. 311.) Dehaen regardait le fluteau comme diurétique ; il le substituait à la Busserole (voir ce mot, &. [, p. 209). Wauthers dit l'avoir em- ployé avec succès contre les douleurs néphrétiques, l’hématurie et les rétentions d'urine. D'après le docteur Hochstetter (Revue de Thérap. médico-chirurg., mars 1858, p. 154), la poudre du rhizome du fluteau lui a réussi, à la dose de 15 centigrammes à 2 grammes, contre la chorée et l'épi- lepsie. 64 FLORE MÉDICALE FRAGON Ruscus aculeatus L. (Liliacées- Asparagées.) Le Fragon épineux, appelé aussi Brusc, Houx-frelon, Petit houx, Buis piquant, Buis sauvage, Myrte épineux, etc., est un arbrisseau à souche horizontale, tracante, de la grosseur du doigt, émeltant de nombreuses racines fibreuses, grèles, cylindriques, blanchâtres. Les tiges aériennes, hautes de 0",50 à 1 mètre, verticales, fermes, très- flexibles, très-rameuses, portent des feuilles alternes, simples, très- petites, avortées et réduites à des écailles membraneuses, de l’aisselle desquelles naissent des rameaux aplatis, foliacés, ovales, pointus et piquants, qu'on a longtemps regardés et qu'on regarde souvent en- core comme des feuilles. Les fleurs, diclines, petites, presque ses- siles, blanches, sont solitaires ou peu nombreuses au milieu de la face supérieure des rameaux aplatis, el sont d'abord renfermées dans une pelite spathe membraneuse. Elles présentent un calice à six sépales blanchâtres, disposés sur deux rangs ; trois élamines mona- delphes, à filets formant par leur réunion un godet urcéolé, violacé ou rougeàtre, qui porte les anthères; un ovaire à une seule loge biovulée, surmonté d'un style simple, très-court, que termine un stigmate en tête. Le fruit est une baie globuleuse, d’un rouge vif, du volume d'une petite cerise, renfermant une graine assez grosse, globuleuse, dure et blanchätre. Citons encore le Fragon hypophylle où Laurier alexandrin (/èw- scus hypophyllum L.); le Fragon hypoglosse ou à foliole (2. .y- poglossum L.) que l’on retrouve sur quelques monuments de l'an- tiquité ainsi que sur le revers de plusieurs médailles, et qui ser- vait à couronner les poëles et les triomphateurs ; et le Fragon à larges feuilles (/?. latr/olèus), ete. Hagirar. — Le fragon épineux est répandu dans presque toute l'Europe ; le fragon à larges feuilles est fort commun dans notre Bretagne; les fragons hypophylle et hypoglosse sont propres aux ré- gions méridionales. PARTIES usiTÉEs. — La souche, appelée vulgairement racine. Récocre. — La souche de fragon peut être récoltée à l'automne ou pendant l'hiver. On la coupe par fragments et on la fait sécher à DU XIX° SIÈCLE. 65 l'étuve. Elle est blanchâtre, de la grosseur du petit doigt, longue, noueuse, articulée, présentant de distance en distance des anneaux rapprochés, et portant, à la partie inférieure surtout, un grand nombre de radicules blanches, longues, pleines et ligneuses. En masse elle présente une légère odeur térébinthacée. Sa saveur est sucrée et amère. On peut substituer sans inconvénient à la racine de fragon épi- veux ou employer concurremment avec elle, celle des fragons hypo- glosse et hypophylle. Composirion cutmique. — L'analyse de la souche de fragon n'a pas été faite. On sait toutefois qu’elle renferme un principe amer peu abondant, du sucre, une matière légèrement odorante, et très-pro- bablement de l’asparagine. Usaces. — La racine de fragon fait partie, avec celles d’Asperge, d'Ache, de Fenouil et de Persil, des cinq racines apéritives, si em- ployées comme diurétiques ou apéritives, sous forme de sirop ou de tisane. On l’emploie dans les hydropisies, l’ictère, la gravelle, les en gorgements viscéraux, etc. On en faisait usage dès le temps de Dios- coride. Le fruit du fragon a été regardé comme laxatif. D'après M. Pignol, les graines de fragon torréfiées sont employées, en Corse, comme succédanées du café. Les jeunes pousses, que l’on mange quelquefois en guise d’Asperges, sont considérées comme diurétiques. FRAISIER lragaria vesca L. (Rosacces -Dryadées.) Le Fraisier est une plante vivace, à souche courte, donnant nais- sance à de nombreuses racines fibreuses, chevelues, rougeàtres. Les tiges sont de deux sortes : les unes rampantes (s{o/ons ou coulants), présentant de distance en distance des nœuds qui produisent des feuilles en dessus et des racines adventives en dessous; les autres dressées, florifères, hautes de 0",10 à 0,30, nues ou portant une seule feuille florale, velues ainsi que le reste de la plante. Les feuilles, presque toutes radicales, sont longuement pétliolées et divisées en trois folioles sessiles, ovales, un peu onduleuses, dentées, vert foncé en dessus, pubescentes, blanchâtres en dessous. Les fleurs sont blan- ches, grandes, réunies en cymes corymbiformes pauciflores à l'ex Flore, T, I. G}e 66 VLORE MÉDICALE trémité des axes floriferes. Elles présentent un calice à cinq divi- sions, étalé à la maturité du fruit et accompagné d’un calicule aussi à cinq divisions; une corolle rosacée, à cinq pélales entiers, arron- dis, concaves, brièvement onguiculés; des étamines nombreuses, insérées sur le calice; un pistil composé de carpelles nombreux, réunis en capitule hémisphérique au centre de la fleur et portés sur un ré- ceptacle globuleux et charnu. Le fruit (fraise) se compose de ce récep- (acle, qui devient pulpeux, sucré et parfumé, et de nombreux akènes, petits, durs et granuleux, qui sont les véritables fruits. Nous citerons encore dans ce genre les Fraisiers des collines (F. co/- lina Ehrh.), à grandes fleurs (#. grandiflora Ehrh.), de Virginie (F. virginiana L.), ete. Haprrar. — Le fraisier est répandu dans presque toute l'Europe. On le trouve surtout dans les bois. Cultivé en grand dans les jardins et dans les champs, il a donné naissance à d'innombrables variétés. Cucrure. — Le sol qui convient le mieux aux fraisiers est léger, sablonneux, amendé par des fumiers bien consommés. Les fraisiers se multiplient de graines ou de filets ou coulants. Du reste on trou- vera de grands détails sur la culture des fraisiers et sur leurs nom- breuses variétés dans l’ÆHorticullure potagère et fruitière, qui fait partie du Æ?ègne végétal (p. 390 à 398). Parties usiréEs. — Les racines, les feuilles, et les fruits. Récozre. — Les racines du fraisier doivent être récoltées à l'au- tomne ou pendant l'hiver; après les avoir arrachées, on les dé- pouille des radicelles, on les lave et on les fait sécher; ce sont des souches ligneuses longues de 0",06 à 0",08, de la grosseur du doigt, d’une couleur brune, inodores, d’une saveur astringente ; elles sont recouvertes d'écailles accumulées vers le sommet. Les feuilles doi- vent être cueillies très-jeunes; on les fait sécher pour l'usage ; elles sont peu usitées. Les fraises se récoltent à leur maturité ; elles doi- vent être mangées immédiatement, car elles perdent promptement leur saveur agréable et leur arome. Pour la préparation du sirop et des confitures, il vaut mieux les cueillir un peu avant leur complète maturité. CoMPOSITION CHIMIQUE. — La racine de fraisier contient du tannin et de l'acide gallique. Les feuilles, employées autrefois en infusion théiforme, renferment les mêmes principes. Les fraises ont été étu= diées par M. Buignet, qui a suivi pas à pas la formation et les transfor- DU XIX° SIÈCLE. 67 mations du sucre dans ces fruits. Les proportions de ce principe va- rient beaucoup, selon les variétés et selon le climat. D'après ce chi- mise, la variété fraisier des collines d'Erhardt, renferme pour 100 de matière sucrée : 56 de sucre de canne et 44 de sucre interverti. Les fraises contiennent en outre de la pectine et de l'acide pec- tique, de l'acide malique, et un arome difficile à isoler, mais que, d’après M. Slanislas-Martin, l'on peut obtenir sous forme d'hydrolat (Bull. de Thérap., 1. 48, p. 544). Usages. — La racine et les feuilles de fraisier sont considérées comme diurétiques et astringentes. On les emploie encore quelque- fois dans les affections des voies urinaires, dans l'hématurie, les hé- morrhagies passives, contre la diarrhée, la gonorrhée, la blennor- rhagie, etc. Nebel préconisait les feuilles pilées comme topique contre les ulcères. Distillées avec le fruit, ces feuilles donnent un hydrolat autrefois usité comme cosmétique. La décoction faite avec les racines est employée en gargarismes contre l’angine. D’après M. Klekzinsky, de Vienne, les feuilles du fraisier des forêts . cueillies immédiatement après la maturité des fruits, séchées et légèrement torréfiées sur des plaques chaudes, servent à préparer une infusion qui peut remplacer celle du thé de Chine. Tout le monde connaît les usages économiques de la fraise. Comme elle est très-riche en sucre, on peut, par fermentation, en obtenir une liqueur vineuse, qui se conserve mal, mais qui produit un bon alcool par distillation. L'alimentation par les fraises a été souvent usitée comme médication. M. Gelnecke les à employées comme anthelmintiques contre le {ænia. Il faut ajouter peu de foi aux faits rapportés par Van-Swielen, quand il dit avoir vu guérir des maniaques, qui avaient mangé des quantités énormes de fraises; à ceux de Schulze, de Hoffmann et de Gilibert, quand ils assurent avoir vu gué- rir des phthisiques par l'emploi de ces fruits. Leur usage immodéré ou exclusif peut déterminer, comme l’a démontré M. de Liebig, des changements notables dans la composition des urines; elles diminuent la quantité d'acide urique, et voilà pourquoi on comprend maintenant comment l'illustre Linné parvenait à se garantir des attaques de goutte en faisant des fraises son unique nourriture; comment encore on ne doit plus être surpris des faits signalés par Gessner et par Boerhaave, qui disent avoir vu employer ce moyen avec succès contre la gravelle, les calculs, les néphrites calculeuses, etc. Les re- 68 FLORE MÉDICALE cherches physiologiques sur l'alimentation par les végétaux et sur- tout par les fruits acides, rendent parfaitement compte du résultat de ces observations, et on se rappelle que MM. de Liebig et Woëlher ont démontré que tous les fruits renfermant de la potasse et un acide organique rendaient lesurines alcalines. Or, la médication alcaline est une des plus préconisées contre lesaffections goutteuses et calculeuses. Manger des fraises, c'est un moyen détourné d'administrer des alcalis. M. Champouillou a proposé, pour rendre les fraises plus diuréti- ques, de les arroser avec du nitrate de potasse en solution étendue. En médecine homæopathique, on fait usage de la racine de fraisier; son signe est A/7, son abréviation /ragar ; avec cette racine on prépare une teinture mère. FRAMBOISIER Rubus idœus L. (Rosacées-Dryadées.) Le Framboisier, ou la Ronce-Framboisier, est un sous-arbrisseau à racines ligneuses, rampantes. Les tiges, hautes de 1 à 2 mètres, ligneuses, assez grêles, vertes, striées, dressées, à rameaux arqués, cylindriques, glabres, d’un vert glauque, armées d'aiguillons faibles et droits, portent des feuilles alternes, à pétiole faiblement épineux, à limbe imparipenné, les inférieures à cinq, les supérieures à trois folioles sessiles, ovales, aiguës, cordées à la base, dentées en scie, glabres en dessus, tomenteuses-argentées en dessous. Les fleurs sont blanches et réunies en petites grappes à l’aisselle des feuilles supé-" rieures, sur des pédoncules glabres, rameux, un peu épineux. Elles présentent un calice presque plan dans la partie centrale, à cinq divisions ovales, lancéolées, aiguës, un peu velues sur les bords et réfléchies en dessous ; une corolle à cinq pétales petits, arrondis, un peu obtus, dressés et connivents; des étamines assez nombreuses, plus courtes que la corolle ; un pistil composé de nombreux ovaires globu- leux, réniformes, velus, réunis en capitule, sur un réceptacle co- nique, au centre de la fleur, et surmontés chacun d’un long style grêle que termine un stigmate très-petit. Le fruit (framboise) est une réunion de petites drupes rouges, jaunâtres ou blanches, charnues, succulentes, monospermes, {rès-serrées entre elles et portées sur un réceptacle conoïde allongé. Hagrrar. — Le framboisier est assez répandu dans les régions DU XIX° SIÈCLE. 69 tempérées et septentrionales de l'Europe; on le trouve surtout dans les bois humides, montueux, sur les rochers, etc. Cuzrure. — Le framboisier vient dans tous les terrains ; il pré- fère néanmoins les sols pierreux et frais ; il lui faut une exposition où, bien qu'à demi ombragé, il reçoive l'air et la lumière. Comme il appauvrit la terre et nuit aux autres plantes, on le cultive à part. On le multiplie de drageons qui poussent de la racine. Il a produit de nombreuses variétés que l’on trouvera énumérées dans notre AHor- ticulture potagère et fruitière (p. 572). PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les fruits. Récorte. — Les feuilles, rarement employées, doivent être récol- tées à l'époque de la floraison. Les fruits, ou framboises, se cueillent à leur maturité pour être mangés, et un peu avant cetle époque pour les préparations culinaires et pharmaceutiques. Ils s'allèrent rapi- ‘dement. Comrosirion caimique. — Les feuilles du framboisier se rappro- chent par leurs propriétés et leur composition de celles de la Ronce. Elles renferment du tannin en assez grande quantité. Les fruits con- tiennent, d'après M. Bley, une huile essentielle, de l’acide malique, de l'acide citrique, de la pectine, du sucre, une matière colorante rouge, et une malière azotée. | UsaGes. — On emploie en gargarismes les feuilles du framboisier comme styptiques et détersives contre les inflammations de la bou- che, du pharynx et de la gorge. D'après Macquart, les fleurs seraient sudorifiques, comme celles du Sureau. Le fruit du framboisier, si recherché sur nos tables et dans la confiserie et la pâtisserie, est très-riche en sucre. On peut en ob- tenir un vin par fermentation et de l'alcool par distillation du liquide fermenté. Les framboises écrasées et abandonnées au frais pendant vingt-quatre heures, éprouvent la fermentation pectique. Par filtration, on obtient un suc qui, chauffé très-légèrement avec un peu moins que le double de son poids de sucre de canne, produit le sirop de framboises, très-employé, délayé dans l’eau, comme bois- son d'agrément, et dont on fait usage dans les fièvres bilieuses et in- flammatoires, dans l’angine, le scorbut, etc. On emploie dans les mêmes cas le sop de vinaigre framboisé, que l’on obtient en faisant macérer des framboises dans du vinaigre blane, en filtrant, et faisant 70 FLORE MÉDICALE dissoudre dans le liquide obtenu, et à froid, le double de son poids de sucre. Enfin la gelée de framboises s’obtienten chauffant avec un peu d’eau ces fruits, dans une bassine en cuivre rouge non étamée, passant avec expression légère à travers un linge très-propre et fai- sant dissoudre dans le jus produit une quantité suffisante de sucre de canne. Les framboises servent à aromatiser les glaces. On les conserve, pour cel usage, entières, soit dans du sirop en vase clos par la mé- thode d’Appert, soit dans de l'alcool! faible légèrement sucré. FRÈNE Fraxinus excelsior, Ornus et rotundifolia L., etc. (Oléinées- Fraxinées.) Le Frêne élevé ou commun (Fraxinus excelsior L.) est un grand arbre, dont la tige, haute de 20 à 25 mètres, droite, couverte d’une écorce grisèlre, se divise en rameaux opposés, portant des bour- geons noirs et des feuilles opposées, grandes, imparipennées, présen- tant neuf à treize folioles ovales-lancéolées, acuminées, glabres en dessus, pubescentes en dessous. Les fleurs, polygames, verdàtres, peu apparentes, naissant avant les feuilles, sont groupées en pani- cules opposées, munies de bractées, penchées après la floraison. Elles sont dépourvues de calice et de corolle, et présentent deux élamines et un ovaire à deux loges biovulées, surmonté d’un style simple et d’un stigmate à deux lobes étalés. Le fruit est une samare membraneuse, coriace, oblongue, renflée à la base et presque foliacée au sommet. Le Frêne à fleurs (F. Ornus L.; Ornus europæu Pers.) atteint 8 à 10 mètres d’élévation; ses rameaux portent des bourgeons veloutés et des feuilles à trois ou quatre paires de folioles. Ses fleurs ont un calice à quatre sépales et une corolle à quatre pétales linéaires, beaucoup plus longs que le calice ; elles sont disposées en panicules latérales et fournies. Le fruit est une samare étroite, linéaire-lancéo- lée et obtuse. Le Frêne à feuilles rondes ou à la manne (7. rotundifolia Lamk. ; Ornus rotundifolia Pers.) se distingue du précédent par sa taille moins élevée ; ses feuilles, à deux ou quatre paires de folioles arron- dies, glabres, à dents obtuses et à pétioles canaliculés. Hagrrar. — La première espèce de ces frènes habite les régions DU XIX° SIÈCLE. 7A tempérées de l'Europe, où elle est très-répandue dans les bois. Les deux autres sont propres aux régions méridionales ; on ne les cultive guère que dans les jardins botaniques ou d'agrément. On connait d’ailleurs une soixantaine d'espèces de frênes qui elles- mêmes ont produit plusieurs variétés. Nous citerons, entre autres : le Frêne argenté (Fraxinus argentea Desf.); le Frène doré(F. aurea W.); le Frêne horizontal (FÆ. Aorizontalis Desf.); le Frène jaspé (F. jaspi- dea Desf.) ; le Frêne pleureur (Æ. pendula Desf.) ; le Frêne verruqueux (F. verrucosa Desf.); le Frêne à une feuille (F. keterophylla. Vah], F. monophylla Desf., F. simplicifolia W.) d'Angleterre; le Frêne à feuilles de Noyer (F. juglandifolia Lamk., F. viridis Michx) de l'Amérique septentrionale; le Frêne sous-denté (F. subintegerrima Vahl, F. subserrata NW.) d'Amérique; le Frêne à feuilles de Len- tisque (Æ°. lentiscifolia H. Par., F. mycrophylla Bosc.?, F. parvifolia Lamk, Æ. tamariscifolia Nahl) d'Orient; le Frène à larges feuilles (F. latifolia Ait.); le Frêne à petites feuilles (F. Theophrasti Dub.), appelé aussi Frène de Théophraste, Frêne de Montpellier ; le Frêne pubescent ou Frêne rouge (Æ. pensylvanica Marsh., F. pubescens Lamk, F. nigra Duroi, F. tomentosa Michx); le Frène quadrangu- jaire ou Frêne bleu (Æ. quadrangulata Michx, F. tetragona Cels.); le Frène à feuilles de Sureau ou Frêne noir (F. sambucifolia Lamk, F. crispa Mort., F. nigra Marsh.); le Frêne d'Amérique ou Frêne blanc (7. americana L.), ces quatre derniers de l'Amérique du Nord. PARTIES usitÉEs. — L'écorce des racines, de la tige et des bran- ches, les racines elles-mêmes, le bois, les feuilles, les fruits, le suc concrété qui découle du feuillage et des rameaux, et que l’on nomme manne. Récocre. — Les feuilles de frêne doivent se récolter jeunes, lors- qu'elles laissent suinter une matière gommeuse et visqueuse, ce qui a lieu, en France, vers le mois de mai ou de juin. On fait sécher ces feuilles à l'ombre. On enlève les écorces au printemps, et mieux, à l'automne, sur les branches de trois à quatre ans. On les fait sécher et on les conserve en lieu exempt d'humidité. Le frêne à feuilles rondes et le frène à fleurs sont ceux qui four- nissent le plus de #anne ; ils croissent spontanément dans les Calabres et en Sicile. On en extrait aussi en assez grande quantité du frêne élevé ou commun, du frène verruqueux, du frène à une feuille, et de plusieurs autres frênes. C’est principalement dans les années de 72 FLORE MÉDICALE chaleurs excessives, et chez les plantes qui croissent dans de mauvais terrains, que la manne s’extravase en plus grande quantité. On dit géné- ralement que la zanne en larmes des frènes, qui se trouve dans le commerce, est uniquement due à la piqüre d’une cigale (Cicada Ori), qui certainement détermine l'écoulement de la manne, mais en quantité très-insuffisante pour les besoins des officines. L'exsu- dation de la manne est principalement obtenue au moyen d'incisions praliquées par la main de l’homme. Ces incisions se font sur les arbres parvenus à l’âge adulte, c’est-à-dire à leur dixième année. C'est d'ordinaire vers le milieu de juillet et en août, par un ciel serein, et à l'approche de la nuit, que l’on entaille les frênes, à l’aide d’une espèce de {tranchet. On commence par la partie du tronc expo- sée au soleil levant; l’autre partie est réservée pour l’année suivante. La manne coule en liqueur épaisse et blanche, durant toute la nuit, et le matin, jusqu’au moment où les rayons solaires ont pris de la force, sur de grandes feuilles de Figuier qui, en séchant, prennent la forme d’une auge. Pour empêcher que la manne ne se perde en coulant le long du tronc, au-dessous de la grande incision, on en fait une autre plus petite dans laquelle on fixe une feuille qui reçoit la liqueur encore fluide, et qui la porte à tomber dans le bassin placé au pied de l'arbre, Une température moyenne et la pluie nuisant à la récolte de la manne, l'absence d’une forte chaleur diminue sa quan- tilé, et l’eau du ciel, en la dissolvant et l’entrainant au fur el à mesure de l'extravasation, en fait perdre la majeure partie. Le commerce distingue plusieurs sortes de manne. Il n’y en a réellement que deux aux yeux du cultivateur et du naturaliste : la manne en larmes, qui est très-blanche, d’une grande pureté, et qui provient des frênes cultivés ; et la z7anne en sorte que l’on obtient des frènes venus spontanément sur les montagnes. Quant à la distinc- tion de ##7anne grasse et de manne sèche, établie par quelques auteurs qui ont écrit sans avoir observé par eux-mêmes, elle n’est que spé- cieuse, surtout quand ils donnent ces deux espèces pour venir d'un même arbre, à des époques différentes; leur manne sèche est la manne en larmes qu'on demande aux plaines de la Calabre, et plus particulièrement à la Sicile ; leur manne grasse est la manne en sorte ou des montagnes, qui se conserve beaucoup moins longtemps que la première. Les mannes ne peuvent guère être sophistiquées sans que l’on dé DU XIX° SIÈCLE. 15 couvre promptement et facilement Ja fraude. La manne en larmes factice, que l’on a trouvée dans le commerce, el qui était préparée en filtrant, évaporant et faisant cristalliser un soluté aqueux de sucre et de vieille manne en larmes ou de manne en sorte, était plutôt un produit de purification qu'un produit d'altération. Un pharmacien de Paris, M. Dausse, a présenté à l’Académie de médecine, en 1836, des morceaux de #2anne en larmes artificielle de la plus grande beauté, et jouissant de propriétés laxatives très-prononcées. ComposiTioN CHIMIQUE. — La manne a été analysée par MM. Thé- nard, Dumas, Leuchtewasse, etc. M. Thénard l’a trouvée composée de trois principes : sucre, prin- cipe doux cristallisable, et matière nauséeuse incristallisable. Sui- vant ce chimiste, on n’en peut isoler le sucre qu’en le détruisant par une fermentation ménagée ; on obtient le principe doux cristallisable en évaporant le liquide fermenté à siccité, et en traitant le résidu par l'alcool chaud, qui le dissout complétement, mais qui laisse cristal- liser ce principe par le refroidissement ; l'alcool évaporé donne le principe incristallisable. Le sucre existe dans la manne pour un dixième de son poids. Le principe doux cristallisable constitue presque entièrement la manne en larmes, et lui donne toutes ses pro- priétés. On l’a nommé #rannile. I est composé de C°H' Of. M. Du- mas, de son côté, a représenté la mannite par la formule suivante : CH"0°. Obtenue à l'état de pureté, la mannite se présente cristalli- sée sous forme de prismes quadrangulaires, anhydres, minces, in- colores, transparents et doués d’un éclat soyeux ; elle est légèrement sucrée, très-soluble dans l'eau et l'alcool chaud. Elle est sans odeur. Mise en présence d’un ferment, la dissolution de mannite n’éprouve pas de fermentation. Sous l'influence d'une température élevée, elle se décompose en donnant les mêmes produits que le sucre de canne. L'acide nitrique la convertit en acide oxalique. M. Biot a trouvé la mannite sans action sur les plans de polarisation. MM. Boutron- Charlard et Guillemette ont cru que cette substance avait de l’iden- tité avec la grenadine où grenatine, matière tirée de la racine du Grenadier (voir ce mot, t. II, p. 117-120). Le docteur Pallas a pensé, de son côlé, qu'on pouvait la comparer au principe cristallin de l'Olivier. La #anne en sorte renferme moins de mannite que la manne en larmes. M. Leuchtewasse a trouvé dans la manne en larmes : eau, 11, 6; 74 FLORE MÉDICALE matière insoluble, 0, 4; sucre, 9, 1; mannite, 42, 6 ; substance mu- cilagineuse, résine et acide organique, matières azolées, 40, 0; cendre, 1, 3. M. Keller a trouvé dans l'écorce du frêne un principe immédiat cristallisant en prismes hexagonaux, qu'il a nommé fraxinine. Cette substance est soluble dans l'alcool et dans l’eau, peu soluble dans l’'éther. Elle a été étudiée par M. Mandet, pharmacien à Tarare, et par M. Mouchon, de Lyon, qui la nomme /rarinite. D'après quelques auteurs, ce ne serait pas un principe immédiat, mais bien un prin- cipe amer, combiné avec un tannin particulier. M. Garat a trouvé dans l'écorce du frêne 16 pour 100 de malate de chaux. Cette écorce est, de plus, très-riche en tannin. Les feuilles de frêne contiennent les mêmes principes, mais en moins grande quantité. UsaGes. — La manne est fréquemment employée comme purgatif léger, à la dose de 20 à 40 grammes. C'est de la #7anne en larmes que l'on fait surtout usage, quoique nombre de praticiens la considèrent comme moins active que la #anne en sorte. À dose de 2 à 6 grammes, la manne est regardée comme expectorante. La manne convient sur- tout pour la médication des enfants. Elle entrait jadis dans les com- positions des médecines noires, de la marmelade de Zanetti, etc. Le docteur Martin Solon a préconisé la mannite dans les embarras gastriques, la péritonite, ete. La manne, quand elle est fraîche, sert de sucre dans les pays où on la recueille. Elle convient en médecine vétérinaire comme purgative pour les petils quadrupèdes, comme béchique chez le cheval, dans le catarrhe pulmonaire chronique et comme évacuant chez les jeunes chiens. L'écorce de frêne, particulièrement celle du frêne verruqueux, était autrefois très-usitée comme fébrifuge. Aussi l’appelait-on Qrin- quina d'Europe. Boërhaave, Christophe Helwig, Kniphof, Coste et Willemet, Burtin et Murray, l'ont vantée comme telle. Cette opinion a été combattue par Torti, Linné, Chaumeton, ete. L'écorce de frène a été aussi employée comme astringente dans la diarrhée et la dy- senterie. Le docteur Martin Solon, à l'opposé, la regardait comme éméto-cathartique. Les propriétés purgatives de cette écorce sont aujourd'hui considérées comme très-douteuses. Aussi n'est-elle plus employée. Les feuilles du frêne purgent à double dose du Séné, sans laisser DU XIX° SIÈCLE. 75 une irritation aussi persistante dans les intestins. MM. Pouget et Peyraud leur ont attribué une action spécifique dans les affections rhumatismales et goutteuses; elles constituent aujourd'hui, à cet effet, un remède populaire qui produit quelquefois de bons effets. La dose est de 4 à 2 grammes, que l’on fait infuser pendant trois heures dans deux tasses d'eau bouillante. Dans les cas de goutte aiguë, on double la dose, surtout au commencement des accès. À diverses épo- ques, les feuilles de frêne ont été vantées comme anthelminthiques ; mais il a été constaté depuis qu'elles ne le sont pas. Jadis on employait beaucoup les graines de frêne comme hy- dragogues et diurétiques contre les engorgements hépatiques et spléniques. Suivant M. Cazin, les graines, à dose élevée, sont plus purgalives que les feuilles. Les racines de frêne verruqueux sont alimentaires. En Angleterre, on mange quelquefois les jeunes feuilles de cet arbre, qui servent en outre, dans ce même pays, à falsifier le thé. On confit les jeunes fruits avant leur maturité, dans le sel et le vinaigre, et on les em- ploie comme assaisonnement. L’écorce du frêne verruqueux, avec le sulfate de fer, teint en vert ou noir verdâtre ; avec les alumineux en jaune ; avec l’acétate de cuivre en vert-olive clair. Le bois frais teint s la laine en couleur vigogne. L'écorce du frène d'Amérique ou frène: blanc donne une belle couleur reconnue très-solide pour peaux, plu- mes, ele. C’est plus particulièrement sur le frène verruquefx que l’on recueille les cantharides, ces insectes si employés dans la mé- decine à cause de leurs propriétés vésicantes. Le bois des frènes est très-propre aux ouvrages de charronnage, de menuiserie et d'ébénisterie. FUMETERRE Fumaria officinalis L. (Fumariacées, ) La Fumeterre officinale, appelée aussi dans quelques localités Fiel de terre, Pied de géline, Lait battu, ete., est une plante annuelle, à racine pivotante, blanchâtre, grêle, chevelue. Les tiges, longues de 0%,20 à 0°,80, anguleuses, rameuses, diffuses, inclinées ou cou- chées, tendres, cassantes, succulentes, glabres, glauques, rarement rougeàtres, portent des feuilles alternes, pétiolées, bipennées, à folioles écartées, découpées en lobes étroits et aigus, glabres et d’un 706 FLORE MÉDICALE vert clair ou glauque. Les fleurs, petites, d’un pourpre violacé, courtement pédonculées, el accompagnées de petites bractées, sont réunies en grappes lâches terminales. Elles présentent un calice à deux sépales ovales-lancéolés, aigus, attachés par leur partie moyenne ; une corolle irrégulière, oblongue, tubulée, à quatre pé- tales inégaux, hypogynes, connivents et caducs ; le supérieur plus grand, prolongé à la base en éperon court et obtus; les deux laté- raux onguiculés à la base et cohérents au sommet ; l’inférieur long, étroit et canaliculé. Les élamines, au nombre de six, sont diadelphes et unies en deux faisceaux égaux. L'ovaire est libre, ovoïde, formé de deux carpelles, à une seule loge renfermant deux ou trois ovules, et surmonté d'un style articulé et caduc. Le fruit est une petite capsule ovoïde, un peu comprimée et glabre. Nous citerons encore les Fumeterres jaune (Fumaria lutea L.), à petites fleurs (F. parviflora Lamk), à épis (F. spicata L.), grimpante (F. capreolata X.), moyenne (F. media Loisel.), de Vaillant (F. Vai/- lantit D. C.). Quant au Fumaria bulbosa Retz (F. solida L.; Cory- dalis bulbosa D. C.), c'est un Corydalis (voyez ce mot, t. I, p.398). Haprrar. — Toutes ces espèces sont répandues en Europe; elles croissent dans les champs, les jardins, les vignes, au bord des che- mins, etc. On ne les cultive que dans les jardins botaniques, où il suffit de les semer en place, au printemps. Pafnies usirées. — Toute la plante. Récoure. — Elle se fait en mai, juin et juillet, au commencement de l'anthèse; on arrache la plante, on enlève les racines et les feuilles inférieures; on dispose par petits paquets peu serrés el on fait sécher rapidement au soleil; lorsqu'elle est mal desséchée, la fumeterre noircit. La plupart des fumeterres jouissent des mêmes propriétés que la fumeterre officinale. CourosirioN cuimiQuE. — La fumeterre, quand elle est écrasée, répand une odeur herbacée; sa saveur possède une amertume pro- noncée et désagréable qui augmente par la dessiccation. M. Peschier, de Genève, y a trouvé un principe immédiat mal défini qu'il a nommé /umarine, de l'extractif, de la résine, un acide cristallisable. La fumarine, peu étudiée encore, à une saveur amère; elle est vis- queuse, soluble dans l’eau, l'alcool et l’éther. On avait cru trouver du malate de chaux dans la fumeterre ; mais DU XIX° SIÈCLE. ti M. Winckler a démontré que cette plante renfermait un acide par- ticulier cristallisable, volatil, soluble dans l'alcool et dans l’éther, inattaquable par l'acide azotique; il l'a nommé acide fumarique. M. Demarçay (Annales de chimie et de physique, t. LNE, p. 81 et 429) a ensuite reconnu que cet acide était semblable à l'acide paramu- léique obtenu, par M. Pelouze, de la distillation de l'acide malique, et dont la formule est C'HO*, HO. Usages. — Les médecins anciens, tels que Galien, Oribase, Aétius, Avicenne, Mésué, regardaient la fumeterre comme tonique, fon- dente, dépurative; ils l'administraient dans la débilité des voies digestives, l’ictère, les engorgements des viscères abdominaux, dans les affections scrofuleuses, cutanées et scorbutiques, etc. Les mo- dernes, comme Gilibert, Pinel, Sprengel, Strandberg, Hoffmann, ont constaté son efficacité incontestable dans les scrofules et les ma- ladies cutanées. On a certainement beaucoup exagéré les effets de la fumeterre contre les vers intestinaux et contre la lèpre. Strandberg et Pinel l'ont beaucoup vantée contre les dartres invétérées. Des Bois de Rochefort, qui plaçait le siége des affections cutanées dans le foie, considérait la fumeterre, infusée dans du lait, comme un des meilleurs herpétiques. M. Hannon, de Bruxelles, loin de regarder la fumeterre comme tonique et dépurative, la considère comme hyposthénisante. La fuma- rine, d'après le même auteur, serait légèrement excitante. La fumeterre a été quelquefois appliquée, sous forme de cata- plasmes, contre les dartres. La fumeterre donne beaucoup de potasse par l'incinération. Cette plante teint la laine traitée par un mordant de bismuth en jaune solide, d’une nuance plus jolie que la Gaude. Elle donne, avec addi- lion d’alun, de tartre ou mieux de sel d’étain, un beau s// de grain. La racine teint en jaune foncé; elle donne de l'encre avec gomme et sulfate de fer. 78 FLORE MÉDICALE GALANGA Alpinia Galanga W., Maranta Galanga L. (Amomées. | Le Galanga ou Languas est une plante vivace, à rhizome tubé- reux, noueux, rampant, émettant des racines fibreuses, très-longues, verticales. Les tiges, hautes de 2 mètres et plus, cylindriques, gla- bres, simples, dressées, portent dans leur partie inférieure des feuilles avortées et réduites à des gaines terminées en pointe, et, dans le haut, des feuilles ncrmales, alternes, distiques, glabres, à pétioles élargis et engainants, à limbe oblong, lancéolé, aigu, marqué de ner- vures latérales obliques, très-fines et très-rapprochées. Les fleurs, blanchâtres et pédonculées, sont réunies en une grappe ou panicule oblongue, étroite, terminale. Elles présentent un périanthe double : l'extérieur (calice) à trois divisions; l’intérieur (corolle) à six divi- sions disposées sur deux rangs, les trois externes ovales, lancéolées, réfléchies, presque égales, très-écartées, les trois internes très-Iné- gales, deux étant rudimentaires, et la troisième (labelle) large, on- guiculée, spatulée, concave, un peu charnue, dressée, légèrement crénelée au sommet; une élamine à filet pétaloïde, aplati, portant une grosse anthère, divisée en deux loges; un ovaire infère, à trois loges multiovulées, surmonté d’un style filiforme, qui passe entre les deux loges de l’anthère, et se termine par un stigmate trigone. Le fruil est une petite capsule ovoïde, un peu charnue, rougeàtre, souronnée par les restes du périanthe, et s'ouvrant en trois loges, qui renferment des graines arrondies, à testa dur et un peu ru- gueux (PI. 7). Cette plante, encore peu connue, paraît présenter quelques varié- lés mal déterminées. On à donné du reste le nom de Galanga à d'au- tres végétaux de la même famille (Xwmpferia) ou même de celle des Cannacées. ' Hagirar. — Le galanga croil aux Indes orientales; il fréquente surtout les lieux humides, et on le cultive dans les jardins. Sous nos climats, il exige la serre chaude, et se cultive comme les autres Amomées. (Voyez les mots CarDAMONE, p. 265, CurCuMA, p. 430, dans le t. I de la Æore médicale.) PARTIES usITÉES. — Les racines. DU XIX° SIÈCLE. 79 Récocre. — Les racines de galanga sont fibreuses, rougeàtres, marquées de franges circulaires; leur saveur est aromatique et âcre. On distingue dans le commerce le grand Galanga où Galanga de l'Inde, Galanga de Java, et le petit Galanga, qui se nomme encore Galanga de la Chine, Souchet babylonique, vrai Galanga officinal (Galanga minor de Matthiole et de G. Bauhin). Le petit galanga se divise lui-même en deux sortes commerciales, qui ne semblent différer que par l’âge de la plante. La plus petite de ces deux sortes, d'après M. Guibourt, est épaisse seulement de 5 à 10 millimètres; la plus grosse est épaisse de 14 à 25 millimètres; toutes deux sont cylindriques, ramifiées, rougeàtres, ou d'un brun noirâtre, terne à la surface ; elles sont marquées de nombreuses franges circulaires. À l’intérieur, elles sont d'une texture fibreuse, compacte, uniforme, et d’un fauve rougeàtre. Elles ont une odeur forte, aromatique, agréable, très-analogue à celle des Cardamones; leur saveur est piquante, très-âcre, brûlante, aromatique. Leur pou- dre est rougeàtre, et donne, par l’eau et l'alcool, des teintures de même couleur qui précipitent en noir par le sulfate de fer. Cette ra- cine ne laisse pas précipiter d’amidon, lorsque étant concassée elle est agitée avec de l’eau. Le grand galanga se distingue par son intérieur blanc-grisâtre, plus foncé au centre qu'à la circonférence. Il est plus tendre, plus àcre et moins aromatique que le précédent. Il contient beaucoup d’amidon et ne noircit pas les sels de fer. C’est une mauvaise sorte de galanga. M. Guibourt pense que le petit galanga est produit par le Lanquas chinensis Retz (Hellenia chinensis W.), que les Malais nomment Sna Languas où Galanga de Chine, dont les caractères se rapportent à notre galanga officinal, sauf la couleur blanche qui est indiquée ; tandis que le grand galanga viendrait de l'A/pinia Galanga (Galanga major Rumph.; Maranta Galanga L.). Enfin une troisième espèce appelée Galanga léger, qui, par sa gros- seur, tient le milieu entre les plus gros et les plus petits morceaux du petit galanga, serait produite par une plante voisine du Languas chinensis, et qui ne serait ni le Xæmpferia Galanga L., ni aucun autre Kæmpferia (Guibourt, Hist. des drog. simp., t. M, p. 199-202). Composirion curmique. — D'après M. Morin, la racine de galanga contient une matière résineuse, une sous-résine, une huile volatile Us 80 FLORE MÉDICALE blanchâtre, très-balsamique, de l’osmazôme, de l'amidon, du soufre, une matière colorante brune, du ligneux, de l’oxalate de chaux et de l’acétate acide de potasse (Journal de pharm., À. IX, p. 258). Cette analyse aurait besoin d’être refaite. Par le sulfure de carbone, on extrait du galanga pulvérisé une matière aromatique, qui a été proposée comme condiment et épice. Usages. — Comme le gingembre et la zédoaire, le galanga est un stimulant; il excite les fonctions digestives ; aussi est-il regardé comme stomachiqueet cordial. On l’emploie surtout en Angleterre et aux Indes orientales comme condiment. On en fait souvent un abus, qui peut devenir funeste en déterminant des inflammations chro- niques des muqueuses digestives. On le prescrit dans les fièvres con- tagieuses pestilentielles, dans le typhus, dans les débilités de l'estomac, lorsqu'on veut donner de la tonicité aux tissus. On le fait prendre dans du vin contre quelques nécroses par atonie. On le regarde comme un remède contre le mal de mer. Il est peu usité en France. Il entre dans la composition de l'eau thériacale, de Veau générale, du baume de Ficraventr, etc. Les médecins homæopathes preserivent quelquefois le galanga; il est placé par eux parmi les stimulants; son signe est Aga, et son abréviation Galang. Les Arabes l'emploient pour donner du feu aux chevaux. Le petit galanga est usité en parfumerie. On en retire, aux Indes orientales, une huile essentielle très-recherchée. GALBANUM Galbanum officinale Don. ( Ombellifères -Silérinées. ) Le Galbanum est un arbrisseau, dont la tige, haute d'environ 2 mètres, arrondie, dressée, glabre, porte des feuilles alternes, très- grandes, à pétiole engainant, à limbe plusieurs fois découpé en seg- ments cunéiformes, dentés, glabres et glauques. Les fleurs, jaune verdàtre, sont disposées en ombelles terminales, à rayons nombreux, pourvues d’involucres et d'involucelles formés de plusieurs folioles linéaires. Elles présentent un calice à limbe presque nul ; une corolle à cinq pétales obovales entiers, aigus et roulés en dedans au sommet; cinq étamines; un ovaire simple, à deux loges uniovulées, surmonté DU XIX° SIÈCLE. 8] de deux styles divergents. Le fruit est un diakène comprimé, len- ticulaire, à bords dilatés et formant une aile arrondie; chaque car- pelle est marquée de cinq côtes, et la columelle est bipartite. Haprrar. — Cette plante se trouve en Syrie; elle croit surtout dans les lieux secs. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où elle exige l’orangerie ou la serre tempérée. Parties usiTées. — La gomme-résine qui découle de la plante à la suite d’incisions, et que l’on nomme Galbanum. RécoLTE. — Presque tous les auteurs s'accordent à dire que le galbanum du commerce vient de Syrie, quoique le célèbre médecin et botaniste Paul Hermann ait figuré et décrit dans son Paradisus Batavus (1705, in-4°) une plante, originaire du cap de Bonne-Espé- rance, qui laissait couler une gomme-résine présentant tous les ca- ractères du galbanum, plante qui serait, au dire de plusieurs au- teurs, le Bubon Galbanum de Linné, et le Selinum Galbanum de Kurt. Sprengel, que l’on trouve aussi en Éthiopie. Quoi qu'il en soit, on obtient le galbanum en incisant le collet de la racine ou les branches. Le suc se concrète sur place, et, pour le délacher, on enlève des fragments de bois avec lui. Pendant les fortes chaleurs de l'été, ce suce découle aussi spontanément des arti- culations de la tige. Il arrive en caisses du poids de cinquante à cent kilogrammes. M. Guibourt distingue deux sortes de ga/banum dans le commerce, mais il ne peut dire de quelles contrées elles sont tirées. Le galbanum mou se trouve sous deux formes : en /armes et en masse. Le premier est en larmes molles, s’aplatissant sous les doigts, jaunes, vernissées, gluantes, s'agglutinant entre elles ; sa cassure est grenue ; son odeur est forte, persistante, un peu fétide ; sa saveur est âcre et amère. Le gal/banum en masse est plus riche en huile vo- latile : ‘aussi les larmes sont-elles réunies en une seule masse, dont le fond est plus foncé; les larmes et la masse se distinguent de la gomme ammoniaque en ce que celle-ci est plus dure, plus blanche, moins odorante, et se ramollit beaucoup plus difficilement; cette dernière est laiteuse au lieu d’être huileuse; elle rougit à l'air et à la lumière, tandis que le galbanum devient seulement brunâtre. Le galbanum mou ressemble beaucoup plus au Sagapenum, mais l'odeur de ce dernier se rapproche beaucoup plus de celle de l’Assa- fœtida. Flore, T. II. 6* 82 FLORE MÉDICALE Le galbanum sec se trouve également en larmes ou en masse, mais il est beaucoup plus sec, non gluant et visqueux ; il est jaune, ver- dâtre à l'extérieur, blanc et opaque à l’intérieur, peu consistant; sa cassure est inégale, non conchoïde; ces deux caractères le distin- guent de la Gomme ammoniaque ; son odeur est forte, assez agréable; il renferme des impuretés, tels que troncons, tiges, débris de pédon- cules ou de fruits, dont les caractères se rapprochent de ceux que Don attribue au Galbanum officinale (Arch. de Botan., &. X, p. 273, et Guibourt, Hist. des droques simples, L. WE, p. 226). ComposiTion cHimiQue. — D'après Pelletier, le ga/banum contient : résine, 66,86; gomme, 19,28; bois et impuretés, 7,52 ; malate acide de chaux, traces; huile volatile et perte, 6,34. D’après Meissner, le galbanum en masse contient de ladragantine; par la distillation sèche du galbanum, on obtient vers 430° centigrades une huile d’un beau bleu indigo, soluble dans l'alcool, inaltérable par les acides et les alcalis étendus. Distillé avec de l'eau, le ga/banum donne une huile essentielle incolore qui jaunit en vieillissant ; l’eau bouillante dissout environ le quart de son poids de galbanum ; il est soluble dans le vinaigre et l'alcool étendu. Usaces.—Le ga/banum fait partie desemplätres de diachylon gommé et diabotanum ; entre dans la thériaque, le diascordium, le baume de Fioraventi, ete., etc. Les anciens le considéraient comme résolu- tif et fondant. On l’'employait contre l’obstruction des viscères, dans les débilités de l'estomac, comme les autres gommes-résines. On s'en est servi comme carminatif el antispasmodique. Il était surtout administré contre l'hystérie. Murray le regarde comme plus actif que la Gomme ammoniaque. Le docteur Arnold l’a préconisé contre les ophthalmies scrofuleuses ; 11 lemployait dissous dans l'alcool contre l'agitation spasmodique des paupières. Dissous dans ie vinaigre, il était réputé pour la destruction des cors aux pieds. Il est à peu près inusité aujourd'hui. En médecine homæopathique, le ga/banum est considéré comme antispasmodique ; son signe est A/4b et son abréviation Ga/ban. \ DU XIX° SIÈCLE. 83 GAROU Daphne Gnidium L. (Thymélées. ) Le Garou, appelé aussi Daphné à feuilles de Gnidia, Sain-bois, Lauréole paniculée, Thymélée à feuilles de lin, Thymélée de Mont pellier, Trintanelle, Bois d'oreilles, Camélée noir à feuilles délices, Coquenaudier, etc., est un arbuste à racine longue, de la grosseur du doigt, fibreuse, grisàtre. La tige, haute de 0",60 à 1 mètre, se divise presque dès la base en rameaux nombreux, eflilés, flexibles, portant des feuilles alternes, sessiles, lancéolées-linéaires, aiguës, lisses, glabres et d’un vert foncé. Les fleurs, blanches, pubescentes, odorantes, sont groupées en bouquets terminaux. Elles présentent un calice pétaloïde, gamosépale, à quatre divisions ; huit étamines ; un ovaire simple, globuleux, surmonté d'un style court {terminé par un stigmate arrondi. Le fruit est une petite baie globuleuse, sèche, noi- râtre à la maturité, monosperme. Hagirar. — Cet arbuste croit dans les lieux incultes et arides des régions méridionales de l'Europe. On le cultive dans les jardins, comme les autres espèces du genre Daphne. PARTIES usiTÉES. — L'écorce du bois et des racines, le bois lui- mème, les feuilles, les fruits, les graines. Récocre. — Le bois qui servail jadis à fabriquer des pois à cau- tères très-irrilants élait récolté à l'automne; les fruits et les grai- nes étaient cueillis à leur maturité; les feuilles, en été, à l’épo- que de la floraison. L'écorce était autrefois détachée du bois sec, que l’on faisait tremper dans de l’eau ou dans du vinaigre; mais il faut préférer celle que nous fournit le commerce, el qui est récoltée au printemps, sur la plante fraiche : elle est mince, roulée longitu- dinalement en petits paquels, très-fibreuse et difficile à rompre; l'épiderme mince, ridé, gris foncé, demi-transparent, se détache facilement ; il est marqué de distance en distance de taches blanches tuberculeuses; sous l’épiderme on trouve une enveloppe herbacée assez abondante, et sous celle-ci un liber formé de fibres longitudi- nales, très-lenaces, couvertes d’une soie fine, blanche, luisante, qui, en s’introduisant dans la peau, produit de vives démangeaisons ; l'écorce de garou a une odeur faible, mais nausteuse; sa saveur est 8/4 FLORE MÉDICALE àcre et corrosive ; les morceaux sont longs de 0,30 à 0®,60, larges de 0,025 à 0,060 ; il faut choisir cette écorce large et bien séchée. Elle nous vient d'Italie, d'Espagne, de Grèce. On la récolte aussi dans les Alpes et les Pyrénées, aux environs de la Rochelle, et surtout à l'ile de Noirmoutiers. Composirion cHimiQue. — L'écorce de Garou a été analysée par Vauquelin, Gmelin, Coldefy-Dorly, Dublanc jeune et de Bar. Elle a la même composition que celle du Daghne Mezereuin. La daphnine, extraite du Garou par Vauquelin, est en cristaux incolores, amers, astringents, peu solubles dans l'eau froide, très-solubles dans l'eau bouillante, l'alcool et l’éther ; elle se volatilise quand on la chauffe, en répandant des vapeurs àcres ; elle n’est nullement vésicante. Son étude chimique est incomplète. (Voyez au mot Daruxé, t. LE p. 449.) L'écorce de garou contient une résine àcre, irritante, vésicante, qui paraît être la matière active ; mais c’est un principe complexe qui paraît devoir son action vésicante à l'huile jaune qu'elle renferme. Usaces. — Toutes les parties du garou sont purgatives, mais leur action, extrèmement irritante, rend leur emploi dangereux. Les graines étaient autrefois employées comme purgatives. Les feuiiles sont moins aclives, mais moins dangereuses que les graines. Dios- coride employait ces graines enveloppées dans de la farine où dans du miel. Les feuilles de garou, d’après Garidel, sont extrèmement actives. Loiseleur-Deslongehamps assure, au contraire, qu'on peut les administrer à assez forte dose sans inconvénients ; il les employait en décoction à l'intérieur et en lotions contre les maladies cutanées. Les anciens faisaient usage de l'écorce de garou, à l'intérieur, contre la svphilis invétérée, contre les maladies de la peau, ete., etc. Russel, Wright, Swédiaur l'employaient aussi dans ces maladies. Home assure que celle écorce guérit les engorgements de toute nature. Cullen la préconisait pour le pansement des ulcères, mais Wedelius et Hoffmann se sont élevés avec raison contre son usage ; c’est un remède dangereux, un poison violent, comme l'ont démon- tré les expériences d’Orfila. Aussi, à présent, en borne-t-on l'emploi aux usages externes. L’écorce de garou fraiche, appliquée sur la peau, détermine une vésication rapide ; on obtient les mêmes effets avec l'écorce sèche que l’on a fait macérer dans du vinaigre. Cette mème écorce sert à pré- parer une pommade épispastique frès-active ef très-irritante, qui DU XIX° SIÈCLE. co agit bien lorsqu'on veut aviver et irriter les exutoires ; on s’en sert pour fabriquer des papiers irritants destinés aux pansements des vési- catoires, surtout chez les enfants et chez les vieillards, lorsqu'on craint l’action particulière des cantharides sur la muqueuse vésicale. Les écorces des Daphne Laureola X., Daphine Mezereun L., Da- plme Thymeleal., Daphne Tarton-raira L., jouissent des mêmes pro- priétés que celles du garou(Daphne Ginidium). Toutefois celle du Daphne Laureola (Lauréole, Lauréole mâle, Laurier des bois, Laurier épurge, Laurier purgatif de France) est regardée comme moins active; tan- dis que celle du Daphne Tarton-raira (Tartonraire, Trintanelle Mal- herbe, de la France méridionale), si commune sur les bords de 1 Méditerranée, est, d'après M. Hétet, beaucoup plus énergique. Les pois de garou étaient faits avec le bois de la plante; on s'en servait pour augmenter la suppuration des cautères ; ils sont aujour- d’hui tout à fait imusités. La médecine vétérinaire tire souvent parli des propriétés du garou comme irritant pour le pansement des sélons; on reproche à ces pré- parations de faire souvent saigner les plaies. GAYAC Guaiacum officinale L. (Zygophyllées.) Le Gayac officinal, appelé aussi jasmin d'Afrique, jasmin d'Amé- rique, est un arbre élevé, dont la tige, haute de 15 à 18 mètres, se divise en rameaux presque articulés, couverts d’une écorce rugueuse et grisätre, portant des feuilles opposées, paripennées, composées de deux ou trois paires de folioles opposées, sessiles, ovales, obtuses, entières, glabres, longues de 0",03 à 0",04, persistantes. Les fleurs, bleues, portées sur de longs pédoncules pubescents, sont réunies, au nombre de huit à dix, à l’aisselle des feuilles supérieures. Elles pré- sentent un calice profondément partagé en cinq divisions presque égales, obtuses, un peu pubescentes en dehors ; une corolle régulière à cinq pétales plans, étalés, obovales, obtus, rétrécis en onglet à la base ; dix élamines dressées, à filets grêles, à anthères allongées, s’en- roulant après la fécondation ; un ovaire pédicellé, ovoide, comprim, à cinq loges, surmonté d'un style simple. Le fruit est une capsule un peu charnue en dehors, quelquefois globuleuse, à cinq côtes et à 80 FLORE MÉDICALE cinq loges, mais le plus souvent comprimée, presque cordiforme , présentant comme deux ailes et divisée en deux loges (PI. 8). Le Gayac à feuilles de Lentisque, connu encore sous les noms de Bois de vie, de Bois saint (Guayacum sanctum L.) se distingue du précédent par sa taille moinsélevée, par ses feuilles de cinq à sept paires de folioles plus petites et mucronées, par ses capsules tétragones, à quatre loges, renfermant des graines ovoïdes, rouges. HagrraT. — Ces deux espèces croissent dans les régions chaudes de l'Amérique centrale, au Mexique , aux Antilles, ete. Cucrure. — Les gayacs sont peu cullivés dans leur pays natal, et chez nous, ils ne se trouvent guère que dans les serres chaudes des jardins botaniques. Leur accroissement est très-lent, et leur multi- plication, qui se fait par boutures étouffées, présente quelques diffi- cultés. Parties usirées. — L'écorce, le bois, la résine ou gomme de gayac, nommée gayacine. Récoure. — Le bois de gayac officinal nous vient de la Jamaïque, de Saint-Domingue, de Cuba, des îles Lucayes, etc. Il arrive en frag- ments d’un fort diamètre, recouverts souvent de leur écorce ; il est très-dur ; sa densité est de 1,33. L'aubier est jaune et moins dense que le duramen, qui est vert; il est très-compact; ses couches sont alternativement dirigées à droite et à gauche etse croisent en formant des angles de 30° environ; quand il est coupé perpendiculairement à l’axe, et examiné à la loupe, après avoir été poli, 11 laisse voir une rayure rayonnante très-fine et très-serrée, parsemée de gros vaisseaux coupés renfermant de la résine verte. Ce hois est peu odorant à froid, mais chauffé, il répand une odeur de benjoin. C’est la ràpure qu’on emploie le plus souvent pour les préparations pharmaceutiques ; elle est jaunâtre et verdit à l'air et à la lumière ; elle verdit également au contact des hypochlorites, ce que ne font pas les ràpures des autres bois avec lesquels on la mélange, celle du buis, par exemple. Bouillie dans l’eau, la râpure du gayac fournit un extrait aqueux qui possède une odeur fort agréable, rappelant celle de la Vanille. Dans le commerce, on trouve plusieurs variétés de bois de gayac : le plus commun, que M. Guibourt attribue au gayac oflicinal, est en büches eylindiques de 0°,18 de diamètre offrant un aubier de 0,020 à 0,023 d'épaisseur, qui est régulier, séparé du bois, jaune, mou- cheté de vert ; le cœur est vert-noirâtre foncé ; il est inodore. DU XIX° SIÈCLE. 87 Dans une autre sorte, que M. Guibourt nomme Gayac à couches irrégulières, V'aubier est plus épais; la malière résineuse, qui donne au bois sa couleur verte, est irrégulièrement répartie; elle y est moins abondante ; le bois est moins foncé, et les bûches ne sont pas cylindriques. M. Guibourt nomme Gayac à odeur de vanille un bois très-dense, très-serré, d’un vert noirâtre foncé, d’une odeur aromatique va- nillée fort prononcée même lorsqu'il est entier. L'écorce de gayac est en morceaux plats ou un peu cintrés, très- durs, compactes, épais de 0",003 à 0,005, couverts d'une couche jaunâtre ; au-dessous sa coloration est d’un vert foncé ; le liber est jaune et très-uni à l’intérieur; celte écorce renferme une matière résineuse différente de celle du bois. Le gavac à feuilles de lentisque ou bois saint fournit un bois jaune fauve, uniforme, à structure fibreuse ; il ne verdit pas à la lumière ; il présente, dans sa coupe transversale, une rayure fine parsemée de points blancs. L’écorce est recouverte d'un épiderme crevassé noirâtre; elle est enduite d’une résine transparente, jaune-ver- dâtre; c’est elle qu'Étienne-François Geoffroy a décrite dans son Tractatus de materiä medicä, lraduit en français par Antoine Bergier. Sous le nom de Gayacan de Caracas, M. Guibourt a décrit le bois du Guaiacum arboreum D. C. Il est fauve-verdàtre, nuancé de cou- ches concentriques; le cœur est plus foncé; 1l verdit à l'air; il est plus âcre que les autres gayacs; aussi les ouvriers qui le travaillent le nomment-ils Gayac pique-nez; 1 se distingue surtout par sa rayure fine et rayonnante en lignes droites non ondulées, avec un nombre considérable de petits vaisseaux blanchâtres, disposés par lignes tremblées dirigées dans le sens des rayons. Sous le nom de Gayac du Chili, le même auteur signale encore un bois produit par le Porlieria hygrométrique (Porlieria hygrometrica Ruiz el Pavon), dont l’aubier est jaune pâle et très-dur ; le cœur, également très-dur et très-pesant; il est d’un vert noirâtre; 1l con- tient une résine qui verdit à la lumière comme celle de gayac. Les feuilles de la plante peuvent servir d'hygromètre. La résine de gayac que l’on trouve dans le commerce, peut être obtenue en traitant la ràpure par l'alcool; mais le plus souvent elle provient d’incisions, de blessures faites aux arbres; quelquefois aussi on perce les büches dans leur axe avec une tarière, el on place ces 88 FLORE MÉDICALE büches sur le feu de manière à liquéfier et faire couler la résine que l’on recoit dans des calebasses; cette résine se présente en masses d'un brun verdâtre, friables ; les lames sont d’un vert jaunàtre; elle verdit à la lumière; elle contient des impuretés telles que débris d'écorces et autres; elle répand, lorsqu'on la frotte, une odeur très- agréable de Vanille et de Benjoin; elle se ramollit sous la dent; sa saveur, d'abord nulle, devient bientôt àâcre; elle est soluble dans l'alcool; cette solution est précipitée en blanc par l’eau, en gris cen- dré par l’acide chlorhydrique, en vert par l'acide sulfurique, en bleu pâle par le chlore. L’acide azotique la colore d'abord en vert, puis en bleu, enfin en brun, avec précipité de même couleur. Un papier imprégné de teinture de gayac, exposé aux vapeurs nitreuses, preud une belle teinte bleue. La résine de gayac n’est pas soluble dans les huiles fixes et l’es- sence de térébenthine. Ce caractère la distingue d’autres résines avec lesquelles on pourrait la confondre. Certaines substances orga- niques, comme le mugilage de gomme arabique, les racines fraiches de Guimauve, de Raifort, de Chicorée, la bleuissent; le savon et le sublimé corrosif lui donnent la mème coloration. D'après M. Biot, la résine de gayac contient deux matières : l’une est jaune; la lumière est sans action sur elle; l’autre est incolore ou Jaunàtre; la lumière la plus réfrangible la teint en bleu, et la lumière la moins réfrangible lui rend sa couleur primitive. Toutes les teintes vertes que présente la résine de gayac viennent du mélange du bleu et du jaune. COMPOSITION CHIMIQUE. — Par une déduction logique des choses, nous aurait été difficile de ne pas empiéter dans le paragraphe pré- cédent sur celui-ci qui n’en est, sous plusieurs rapports, que la suite. Le bois de gayac contient de la guayacine, une résine particulière abondante, de l'acide guayacique, une matière à odeur de Vanille, une matière extractive, de l’extractif muqueux, probablement de la gomme et del'albumine. L’écorce a une composition identique. L'huile essentielle que M. Deville a obtenue par distillation sèche est analo- gue à l’hydrure de salycile. Ce chimiste la nomme Aydrure de guayacyle. Elle est composée de CH O*. D'après M. Thierry, ancien pharmacien de Paris, la résine de gayac contient un acide qu'il nomme guajacique ; il est volatil, soluble dans l’éther, l'alcool et dans l'eau; il diffère des acides benzoïque et cinnamique par sa DU XIX° SIÈCLE. 89 plus grande solubilité. M. Deville l'a trouvé composé de C®H° Of. Tromsdorif regarde la guayacine comme la partie active du bois et de la résine. Elle estamorphe, compacte, jaune, inodore, amère et àcre; elle est peu soluble dans l’eau froide; elle se dissout bien dans l'alcool bouillant ; elle se combine aux alcools. Il est très-probable que la guayacine de Tromsdoriff n’est que l'acide quajacique impur de M. Thierry. Usages. — Le bois de gayac râpé fait partie, avec la Squine, le Sassafras et la Salsepareille, des quatre bois sudorifiques. Il est em- ployé sous forme de tisane, d'extrait, de teinture, de résine, contre les affections vénériennes anciennes, les maladies de la peau, etc. Les Espagnols, qui le rapportèrent d'Amérique, en 1508, le présen- tèrent comme un antisyphilitique précieux. Ils le regardaient comme un remède surnaturel, et de là lui vinrent les noms de Dors saint, bois de vie. Hutten le vanta contre la syphilis. Jérôme Fracastor, célèbre poële et savant médecin italien du seizième siècle, en fit un pompeux éloge dans le troisième livre de son poëme de la Syplules. Aujourd'hui le bois de gayac est à peu près abandonné. Cependant on l'emploie quelquefois comme adjuvant du mercure, et la plupart des pilules mercurielles renferment de l'extrait de gayac. Mead, Pringle, Solenander, Tode, Barthey ont beaucoup vanté le gayac contre la goutte et les rhumatismes, contre les névralgies rhumatis- males, les maladies de la peau, les scrofules, la leucorrhée, elc. La résine de gayac a été surtout préconisée contre la goutte; dissoute daus du rhum ou tafia, elle constitue le fameux Æemède des Caraibes, si employé à la Martinique contre cette maladie. Fowler préférait la teinture alcoolique. Dewes, de Phiiadelphie, associait cette tein- ture aux alcalins pour faciliter la menstruation. Cullen et Hunter l'ont aussi vantée comme antisyphilitique, et pour le pansement des ulcères. La teinture de gayac entre dans plusieurs eaux dentifrices anglaises. in médecine vétérinaire, on s’est servi du bois et de la résine de gayac contre le farcin et les maladies de la peau. La résine de gayac a été employée pour falsifier celle de Jalap. Le bois de gayac est très-dur; de sorte qu’on l’emploie beaucoup pour les ouvrages de tour et la marqueterie. On en fait aussi des roues el des lanternes de moulins à sucre, aux Antilles. 90 FLORE MÉDICALE GENET Genista tinctoria, scoparia et purgans L. (Légumineuses- Lotées.) Le Genêt des teinturiers ou Genestrole (Genista linctoria L.) est un arbuste, dont les tiges, hautes de 0",50 à 1 mètre, cylindriques, striées, un peu anguleuses, glabres, ascendantes, portent des feuilles alternes, lancéolées, aiguës, glabres ou un peu pubescentes, d’un vert foncé. Les fleurs, jaunes, sont réunies en grappes à l'extrémité des rameaux. Elles présentent un calice à deux lèvres terminées, la supérieure par deux dents, linférieure par trois; une corolle papi- lionacée, à étendard redressé, à carène abaissée, ne recouvrant pas complétement les organes sexuels; dix élamines monadelphes ; un ovaire simple, uniloculaire, pluriovulé, surmonté d'un style simple un peu courbé au sommet et terminé par un petit stigmate. Le fruit est une gousse allongée, comprimée, glabre, brune à la maturité, renfermant plusieurs graines réniformes. Le Genêt à balais (Genista scoparia Lamk, Sarothamnus scopa- rèus Godr., Spartium scoparium L.) a une tige d’un à deux mètres; des rameaux nombreux, effilés, anguleux, dressés; des feuilles pubescentes-soyeuses, les inférieures pétiolées et à trois folioles ; les supérieures presque sessiles et réduites à une foliole. Les fleurs, jaunes d’or, sont groupées en grappes terminales; le style est fili- forme, très-allongé, roulé en spirale pendant la floraison. Le fruit est une gousse comprimée, polysperme, velue-hérissée sur les bords. Le Genèt purgatif ou Griot (G. purgans D. C., Sarothamnus Godr., Spartium 1.) est caractérisé par ses tiges hautes de 0%,50 au plus, droites et très-rameuses ; ses rameaux presque nus, les plus jeunes soyeux; ses feuilles alternes, petites et lancéolées; ses fleurs jaunes, latérales et solitaires ; sa gousse noire, velue sur les bords. HagiraT. — Ces trois espèces croissent en Europe, dans les bois et les buissons, les terrains montueux et sablonneux , etc. On ne les cultive guère que dans les jardins botaniques. PARTIES USiTÉES. — La plante entière, les fleurs, les graines, l'écorce. Récocre. — Les feuilles et les rameaux des genêls doivent être DU XIX° SIÈCLE. 91 récollés avant la floraison, les fleurs à l’époque de leur entier épa- nouissement. On fait sécher celles-ci rapidement à l'ombre et on les conserve à l'abri de la lumière. Il ne faut les cueillir que lors- qu’elles ne sont pas mouillées ; dans le cas contraire, elles noir- cissent par la dessiccation. L'écorce de genêt, rarement employée, est détachée à l'automne. On cueille les graines quand les gousses sont parfaitement sèches et avant leur déhiscence. ComposiTiON CHIMIQUE. — M. Stenhouse a extrait des divers genêts, et spécialement du genêt à balais, une matière gélatineuse qu'il nomme scoparine ; elle se présente sous la forme de cristaux étoilés jaunes, solubles dans l’eau bouillante et dans l'alcool ; leur formule est CH!" O0". Ce chimiste assure que c’est à la scoparine que sont dus les effets des genêts. IL à extrait des eaux-mères qui lui ont fourni la scoparine, un autre principe qu’il nomme spartéine ; c'est une base organique, liquide, volatile, incolore, amère, qui jouit de propriétés narcotiques très-prononcées. Usages. — Dioscoride mentionne les fleurs et les semences du genêt comme purgalives. Pline leur attrinue les mêmes propriétés ; il ajoute qu'elles sont diurétiques, et il les dit efficaces contre la sciatique. Arnaud de Villeneuve affirme que la poudre des fleurs de genêl guérit l'hydropisie et les scrofules. Cardan préconisait les ra- cines dans les mêmes cas. Cullen employait comme purgative et diu- rétique la décoction des jeunes pousses. Mead rapporte un cas de guérison d'hydropisie ascite obtenue par l'administration des graines de moutarde, associées à la décoction de sommités de genêt. A peu près abandonnées de nos jours par la médecine francaise, les pré- parations de genêt ont été vantées par des médecins anglais contre l'albuminurie. M. Rayer dit en avoir obtenu de bons effets, et M. le docteur Grazia y Alvares a cité un cas de guérison de néphrite albu- mineuse obtenue par l'administration de l'infusion des fleurs de genêt. Dans les mèmes cas, ainsi que dans l’anasarque, la gravelie, les engorgements viscéraux survenus à la suite de fièvres intermit- tentes, on prétend avoir employé avec succès le vin préparé avec les cendres de genêt. Dans les abcès froids, l’æœdème, les tumeurs scrofuleuses, on a employé les cataplasmes préparés avec les branches, les fleurs et les gousses des genêts. Levrat employait les fleurs de genêt d'Espagne contre l’ascite. 92 FLORE MÉDICALE M. Cazin dit les avoir administrées avec avantage dans l'albumi- uurie avec anasarque. Le docteur Marochetti à vanté l'usage du genêt des teinturiers contre la rage. Plusieurs médecins Font em- ployé sans succès dans ces cas. Les paysans emploient pour se purger le genêt purgatif ou genêt griot, qui est considéré comme vénéneux. D'après M. Stenhouse, la scoparine peut remplacer toutes les pré- paralions du genêt, et une seule goutte de spartéine dissoute dans l'alcool peut produire un narcotisine prononcé. La matière jaune des genêts, et plus spécialement celle du genêt des teinturiers, élait autrefois fort employée en teinture. De nos jours, on l’a remplacée par la Gaude (Zèeseda luteola L.). Avec la dissolution du fer, les feuilles et les jeunes branches de genêt teignent en olive très-solide. Dans certains pays, les boutons de fleurs des genêts se confisent comme des Càpres el servent d'assaisonnement. Les graines ont été proposées pour remplacer le Café. On en nourrit la volaille. Les jeunes rameaux se donnent comme fourrage. On en fait des balais, de la litière, qui sert ensuite de bon engrais. Les genèts sont riches en fibres textiles. En Espagne, en Italie, on en extrait, par le rouissage, des fibres solides qui servent à fabri- quer des toiles très-résistantes et susceptibles de prendre la tein- ture. GENÉVRIER Juniperus communis et Orycedrus L. (Conifères-Cupressinées.) Le Genévrier commun est un petit arbre ou un arbrisseau, à racines fortes, très-rameuses. La tige se ramifie souvent dès la base en formant un buisson ; d’autres fois elle atteint la hauteur de 4 à 5 mètres, et se couvre d'une écorce rougeûtre et rugueuse, ainsi que les rameaux, qui sont nombreux, diffus et terminés par de jeunes pousses un pêu pendantes. Les feuilles sont verticillées par trois, sessiles, linéaires, très-aiguës, piquantes, glabres, fermes, d'un beau vert, marquées d'une raie blanche longitudinale. Les fleurs sont dioïques, disposées en petits chatons axillaires et solitaires, dépourvues d’enveloppes florales et réduiles aux organes sexuels, qui sont abrilés par des braclées. Les màles, reunies au nombre de DU XIX° SIÈCLE. 93 dix environ, en petits chatons un peu coniques, présentent trois ou quatre étamines. Les femelles sont groupées par trois en chatons plus ou moins petits et se réduisent chacune à un ovule nu, situé à l’aisselle d’une écaille. Le fruit (vulgairement bwe) est un petit strobile charnu, bleu, noirâtre à la maturité et renfermant trois graines. Le Genévrier Cade (Juniperus Oxycedrus L.) se distingue du pré- cédent par sa taille plus élevée, ses feuilles marquées de deux raies blanches longitudinales, et son fruit plus gros, arrondi et jaune orangé. Nous citerons encore le Genévrier de Phénicie (Juniperus phæ- nicea L.), et le Genévrier de Lycie (J. lycra L.), qui n’en est qu'une variété. Hagrrar. — Le genévrier commun est répandu dans les forêts et sur les bruyères de presque toute l'Europe. Il parait rechercher de préférence les terrains crayeux. Les genévriers Cade et de Phénicie habitent les bords du bassin méditerranéen. Ces espèces ne sont guère cultivées que dans les jardins botaniques. Parties usitéEs. — Le bois, l’écorce, les rameaux, les fruits. Récocre. — On doit récolter le bois et l'écorce de genévrier à l'automne, Les rameaux, peu employés d'ailleurs, se cueillent à l’époque de la floraison. Les fruits se récoltent à leur maturité, en octobre et novembre ; on les fait sécher au grenier, sur des claies. Ils ne mürissent qu'au bout de deux ans. Ils renferment une pulpe succulente, aromatique, d’une saveur résineuse, amère el sucrée. On doit rejeter de l'usage ceux qui sont trop secs. Composrrion cumique. — Les fruits du genévrier contiennent de l'huile volatile, de la cire, de la résine, une malière extractive, une matière sucrée, de la gomme, des sels de chaux et de potasse. D’après Tromsdorff, la matière sucrée est cristallisable et analogue au sucre de raisin. M. Nicolet a obtenu la résine de ces fruits cristallisée. L'huile essentielle incolore a une densité de 0,911. Suivant M. Du- mas, elle est isomérique avec l'essence de térébeuthine. Tromsdorff à remarqué qu'elle était plus abondante dans les fruits non encore mürs que dans les fruits tout à fait murs; plus tard elle se vési- nifie. Usaces. — Les fruits du genévrier sont stimulants, toniques, diu- réliques, stomachiques, diaphorétiques, ete.; ils facilitent la diges- 94 FLORE MÉDICALE tion, dissipent les flatuosités, augmentent l'appétit, provoquent les sueurs, augmentent les sécrétions muqueuses. C’est surtout dans les affections catarrhales de la vessie et du poumon qu’on s'en est servi. Van-Swieten, Hoffmann, Vogel, Rosenstein, Meckel, Smidt, Hecker, Loiseleur -Deslongchamps, Lange, Demangeon, les ont employés dans les maladies de poitrine et de la vessie, contre la leucorrhée, la blennorrhée, la bronchorrée, le scorbut, les engor- vements viscéraux , l'asthme humide, les affections goutteuses et rhumatismales, les dyspepsies, les maladies de la peau, les scro- fules, etc. Macérés dans du vin, on les a employés dans les fièvres intermittentes automnales ; il est vrai qu’on leur associait souvent l'Absinthe et d'autres plantes amères et stimulantes. En fumigations, soit seules, soit mélangées avec d’autres plantes aromatiques, les baies de genièvre ont été employées dans les aphonies, les laryn- gites et les pharyngites, les catarrhes pulmonaires, l'asthme, ete. Leur décoction à l'extérieur a été appliquée comme tonique et résolutive dans un grand nombre de maladies. L'huile de cade, employée depuis longtemps comme remède po- pulaire dans certaines maladies de la peau, à été préconisée par M. Serre, d'Alais. On l’emploie tantôt pure, tantôt mélangée à l'axonge, sous forme de pommade. C'est surtout contre la gale et contre les affections eczémateuses qu'elle a produit de bons effets. M. Devergie en reconnait l'utilité dans le traitement des dartres sé- crétantes et des ophthalmies scrofuleuses. Cette huile est très-usitée en médecine vélérinaire pour guérir la gale des chevaux et des mou- tons. Dans le nord de la France, en Belgique, en Allemagne et en Hollande, on obtient des fruits du genévrier, par fermentation et distillation, une liqueur alcoolique nommée genièvre où eau de vie de genièvre. Les Suédois préparent, avec ces mêmes fruits, une espèce de bière regardée comme saine et salutaire. L'erfraii de genièvre des pharmacies, qui est mou, grenu, aromatique et sucré, s'obtient par macération dans l'eau des fruits contusés et évaporation. On assure que dans les pays chauds les génévriers laissent couler, spontané- ment ou par incision, une résine nommée gonune où vernis de géné- crier, qui n’a reçu aucune application. On a dit que le Cedria, espèce de goudron liquide dont les Égyptiens se servaient pour les embau- mements, provenait du genévrier de Phénicie qui, selon quelques DÜ XIX° SIÈCLE. 95 auteurs, donnerait l'encens d'Afrique. Le bois des génévriers res- semble à celui du Cyprès et peut être emplové aux mêmes usages (voir au mot Cyrrës, t. I, p.444. Voir aussi l’article CÈèDre, t. I, p. 294). GENTIANE Gentiana lutea L.; purpurea L.; punctata L., etc. (Gentianées-Chironiées. ) La Gentiane jaune où Grande-Gentiane (Gentiana lutea 1.) est une belle plante vivace, à racine cylindrique, longue et grosse, charnue, spongieuse, ridée, rugueuse, brun-jaunâtre, rameuse, pivotante. La tige, haute d'environ un mètre, cylindrique, simple, dressée, porte des feuilles opposées, grandes, entières, d’un vert clair, lisses, à nervures fortement saillantes en dessous : les radicales rétrécies en pétiole à la base, les caulinaires sessiles, largement connées, ovales, un peu aiguës. Les fleurs, grandes, nombreuses et d’un beau jaune, sont réunies en grappe feuillée terminale. Elles présentent un calice membraneux, mince, à cinq divisions aiguës, fendu d’un côté jus- qu’à la base; une corolle régulière, gamopétale, presque rotacée, profondément partagée en cinq divisions aiguës, lancéolées, étroites, poncluées; cinq étamines courtes, dressées, à anthères oblongues; un ovaire ovoïide, allongé, conique au sommet, à une seule loge mul- tiovulée, surmonté d'un style simple terminé par deux stigmates divergents. A la base de l'ovaire se trouvent cinq nectaires glandu- leux, arrondis. Le fruit est une capsule ovoïde, à quatre angles ar- rondis, allongée, uniloculaire, s’ouvrant en deux valves, et renfer- mant, attachées sur deux placentas pariétaux, un grand nombre de graines orbiculaires, aplaties et membraneuses sur les bords (PI. 9). Hagirar. — La grande gentiane habite les régions centrales de l'Europe. Elle croît dans les lieux montueux, surtout dans les ter- rains calcaires, dans les bois, les pâturages, les prés secs, ete. Comme elle est assez abondante à l’état sauvage pour suffire aux usages médi- caux, on ne la cultive que dans les jardins botaniques ou d’'agré- ment. Nous citerons encore les Gentianes pourprée (G. jurpurea L.) ; ponctuée (Gr. punctata L.\, l'une et l’autre fort répandues dans les Alpes; sans tige (G. acaulis L.), aussi des Alpes; Amarelle (G. ama- rella L.); des champs (G. campestris L.) ; des marais ou Pneumo- 96 FLORE MÉDICALE nanthé (G. Preumonanthe L.); Croisette (G. cruciata L.); à feuilles épaisses, de Sibérie (G. macrophylla Pallas); de Catesby (G. Catesbæe Ait.), commune aux États-Unis ; verticillée (G. verticillata LL.) de l'Hindoustan ; etc. Parries usiréEs. — Les racines. Récorre. — Ta racine de gentiane ne doit être récollée qu'à la fin de la deuxième année, après la chute des feuilles. Quand on l’a arrachée, mondée des radicelles et des écailles du collet, on la lave pour en séparer la lerre, et on la fait sécher, tantôt entière, tantôt coupée par tronçons d'un centimètre de long environ; quelquefois aussi on la fend longitudinalement. La racine de gentiane du commerce nous vient des Alpes, des Pyrénées, de la Bourgogne, des Vosges, de la Franche-Comté, où elle croît abondamment dans les bois; sa grosseur varie depuis celle du pouce jusqu'à celle du poignet; elle est longue et rameuse, ru- gueuse à l'extérieur, jaune et spongieuse à l’intérieur; son odeur forte rappelle un peu celle des miels communs ; sa saveur est fran- chement amère. On doit la choisir bien saine et médiocrement grosse. Les racines des Gentianes pourprée et ponctuée jouissent des mêmes propriétés que celles de la grande gentiane; cependant elles sont plus amères; la première est surtout employée en Allemagne et dans le nord de l'Europe. Coupostriox cutmique.—La racine de gentiane, l’un de nos meilleurs médicaments indigènes, contient un principe odorant fugace, du gentisin, de la glu, une matière huileuse verdàtre, du sucre incris- tallisable, de la gomme, de l'acide pectique, de la matière colorante fauve, un acide organique. M. Planche à constaté dans la gentiane la présence d’un principe nauséabond volatil, qui donne à l’eau distillée la propriété de causer des nausées et une sorte d'ivresse. Le gentianin, extrait de la gentiane par MM. Henry et Caventou, est un principe cristallin que ces chimistes ont considéré comme le principe amer de cette racine. MM. Leconte et Tromsdorff ont démon- tré que ce principe cristallisable était une simple matière colorante non amère ; ils l'ont nommée gentisin; cette matière est jaune pâle ; elle cristallise en longues aiguilles insipides et inodores; chaufés, ces cristaux se décomposent et se volatilisent en partie; ils sont peu solu- DU XIX° SIÈCLE. 97 bles dans l’eau, plus à chaud qu'à froid; peu solubles dans l’éther ; ils forment, avec les alcalis de véritables sels (gentisates). La matière amère est, d’après M. Leconte, une substance extractive, incristalli- sable, très-soluble dans l’eau et dans l'alcool; quant à la glu, M. Leconte à démontré que c'était un mélange d'huile, de cire et de caoutchouc. Usaces. — La racine de gentiane est rangée dans la classe des loniques amers; on la considère comme fébrifuge, anthelmintique et antiseptique; elle à été employée en poudre sous forme de tisane, de sirop, d'extrait, de teinture et de vin, contre les fièvres intermit- tentes automnales, ainsi que dans les dyspepsies, les flatuosités, les scrofules, l'ictère, le scorbut, la chlorose, certaines hydropisies, les maladies de la peau, ete. Haller la regardait comme un excellent anti-goutteux. Tout en reconnaissant son efficacité dans certains cas, MM. Troussean et Pidoux lui refusent toute action spéciale. Boërhaave la vantait contre les fièvres intermittentes. Dans le nord, elle est sou- vent administrée dans du vin contre la cachexie paludéenne. Vicat, Willis, Eller, Alibert, Julia de Fontenelle en font le plus grand cas. Quant à nous, nous croyons, avec MM. Trousseau et Pidoux, que c’est un fébrifuge relatif, qui peut être ulile pour s'opposer au retour des accès pendant les convalescences, mais qui est loin de valoir Île quinquina. La racine de gentiane entre dans les Élixirs de lonque vie et de Peyrilhe, si longtemps employés comme anti-scrofuleux. Le sirop et le vin de gentiane conviennent parfaitement dans les cas d’atonie géné- rale, et plus spécialement dans celle des organes digestifs. En chirurgie, la racine de gentiane est employée avec de grands avantages pour dilater les trajets fistuleux à la place d’éponges pré- parées. Les sommités fleuries de la Gentiane verticillée servent, aux Antilles, contre les fièvres intermittentes. Les fleurs de la Gentiane de Catesby sont employées, en décoction, dans le sud des États-Unis, contre la pneumonie, comme toniques et sudorifiques. Les habi- tants des bords du lac Baïkal se servent de la Gentiane à feuilles épaisses (G. macrophylla Pallas) contre les convulsions et le délire. En Russie, le peuple emploie la gentiane des marais contre l’épi- lepsie. Les médecins homæopathes emploient la gentiane comme tonique Flore, T. II. Fe 98 FLORE MÉDICALE amer dans un grand nombre de maladies. Son signe est Ag/, el son abréviation Gent. GERMANDRÉE Teucrium Chamædris L.; Chamædris officinalis Mœnch. {Labiées - Ajugoïdées.) La Germandrée chamædris, appelée aussi Germandrée officinale, Petit-chène, Thériaque d'Angleterre, etc., est une plante vivace ou un petit sous-arbrisseau, à racines ligneuses, un peu fibreuses, tra- çcantes. Les tiges, hautes de 0",15 à 0",25, sous-frutescentes, à quatre angles mousses, grêles, pubescentes, couchées où ascendantes, por- tent des feuilles opposées, presque sessiles, ovales-obtuses, crénelées, épaisses et fermes, luisantes, glabres et d’un vert foncé en dessus, vert jaunâtre et légèrement pubescentes en dessous. Les fleurs, pur- purines, rosées ou blanchätres, courtement pédonculées à l'aisselle de petites bractées, forment de faux verticilles, dont la réunion con- slitue un épi lâche, terminal. Elles présentent un calice tubuleux, rougeûtre, pubescent, à deux lèvres, la supérieure entière, l'inférieure à quatre petites dents aiguës; une corolle monopétale, irrégulière, pubescente, à tube cylindrique, un peu comprimé, recourbé, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure très-courte et profondément bilobée, l'inférieure à trois lobes, dont deux latéraux très-petits, ovales, aigus, et un médian très-grand, dilaté, arrondi, un peu con- cave et échancré ; quatre étamines didynames, à filets grêles, subulés, glabres, saillants et coudés au sommet, à anthères ovoides, surmonté d'un style simple et d'un stigmate bifide, Le fruit est un tétrakène, entouré par le calice persistant. Hamirar.—La germandrée chamædris se trouve dans presque toute l'Europe; elle croit dans les lieux montueux, stériles et pierreux, dans les bois, etc. CuurTure, — La germandrée croit.à peu près dans tous les sols. Elle se propage (rès-facilèment de graines semées en place ou sur couche, ou par la séparation des pieds, faite au printemps ou à l’au- tomne. PARTIES usITÉES. — Les feuilles et les sommités fleuries. RécoLre. — La germandrée chamædris doit être récoltée à l’époque de la floraison ; en juin, elle perd, par la dessiccation, la plus grande partie de son odeur, mais elle conserve son amertume ; elle doit être DU XIX° SIÈCLE. 99 rejetée lorsqu'elle est tout à fait inodore; on en fait de petits paquets que l’on dispose en guirlandes et que l’on fait sécher au grenier enveloppés dans du papier gris. Comrosirion carmique. — Cette plante répand une odeur faiblement aromatique, due à une huile essentielle ; elle renferme un principe amer et une malière extractive. L'eau dissout des principes actifs; l'alcool n’en prend qu’une partie. Usaces.— Depuis Pline, qui préconisait la germandrée comme très- efficace contre la toux invétérée, les affections pituitaires, l’hydropisie commençante, elc., jusqu'à nos jours, cette plante a été employée comme expeclorante et tonique amer. D’après Prosper Alpin, les Égyptiens l’employaient contre les fièvres intermittentes. Matthiole, Boërhaave, Rivière, Chomel, Baumer, etc., ont proclamé ses bons effets dans ce cas. En Italie, où on la désigne sous le d’£rba delle febbri (Herbe aux fièvres), c’est un remède populaire. Les Grecs et les Arabes l'employaient contre les engorgements de la rate et du foie ; ce qui pourrail bien avoir, comme le font remarquer MM. Trous- seau et Pidoux, quelques rapports avec ses propriétés fébrifuges. Au rapport de Vésale, la germandrée fut employée pour combattre la goutte, dont fut atteint Charles-Quint. Senner et Solenander l'ont vantée contre cette maladie. Tournefort constate que de son temps c'élait un remède populaire contre cette affection; il ajoute que, pour son compte, il n'en a obtenu aucun bon résultat. Cependant Carrère prétend l'avoir employée avec avantages, et Bodart croyait à ses propriétés anti-goutteuses ; 1l est vrai que ce dernier ajoute qu’elle agit alors en rélablissant les fonctions digestives perverties. Peut- être aussi, en raison de son huile volatile, pourrait-elle activer la circulation et la respiration, et conséquemment rendre plus com- plète la combustion des aliments plastiques. Mais encore, dans cette hypothèse, beaucoup d'autres Labiées devraient lui être préférées. Tout en reconnaissant que l’infusion de germandrée peut convenir dans quelques cas de fièvres muqueuses, et comme léger expectorant dans les catarrhes pulmonaires, nous croyons, pour notre compte, que c'est avec raison qu'elle est aujourd’hui beaucoup moins usitée qu'autrefois, et qu'on a bien fait de lui préférer d’autres plantes plus actives, l'Hyssope par exemple. 100 FLORE MÉDICALE GINGEMBRE Amomum Zingiber L. Zingiber officinale Rose. (Amomées.) Le Gingembre est une grande plante vivace, à rhizome tubereu- leux, irrégulièrement coudé, de la grosseur du pouce, coriace, jau- nâtre, produisant des tiges aériennes ou hampes cylindriques hautes de 0",60 à 0,70; elles portent des feuilles alternes, distiques, lan- céolées, longues, glabres, terminées à la base en une longue gaine fendue. Les fleurs portées sur des hampes nues, longues de 0,25 à 0",30 et placées à côté des tiges feuillées, forment un épi ovoïde, imbriqué d'écailles verdätres, et marqué à son sommet d'une pointe rouge ; elles sont jaunâtres, avec un /abelle ou tablier pourpre, varié de brun ou de jaunàtre. Elles n’ont qu'une seule étamine épigyne , à anthère bilobée ; un ovaire à trois loges, un style grêle, terminé par un stigmate concave. Le fruit est une capsule polysperme, à trois loges, s’ouvrant en trois valves (PI. 10). HagrraT. — Cette plante est originaire des Indes orientales ; elle croit, d’après quelques voyageurs, aux environs de Zingi ou Gingi, d’où lui viennent ses différents noms. On la trouve, sur les côtes de Malabar, à Ceylan, dans les îles de la Sonde, aux Moluques, aux Philippines, à Java, à Sumatra, en Chine ete. On l’a importée au Mexique, au Brésil et aux Antilles; elle est cultivée en grand à la Jamaïque et à la Guadeloupe. CuLrure. — Le gingembre demande une terre substantielle, fraiche et ombragée ; après l'avoir ameublie par des labours énergiques, on y plante des tronçons de rhizomes dans des sillons profonds de 0,15 à 0",20 et espacés de 0",40 à 0",50; cette plantation se fait ordinai- rement dans la saison des pluies, au moment où ces rhizomes entrent en végétation. I n'y a plus ensuite qu'à chausser les jeunes plants dès qu’ils se montrent, et à les garantir des mauvaises herbes par des binages. Dans nos climats, on ne peut élever le gingembre qu’en serre chaude. Parties usiTÉES. — Les rhizomes. Récozre. — Le commerce nous fournit deux sortes de gingembre, le gris el le YWanc. Ce dernier n’est entré dans nos officines que depuis 1815, époque à laquelle les Anglais, qui n'en emploient pas DU XIX° SIÈCLE. 101 d'autre, le firent connaitre ; il vient particulierement de la Jamaïque. Le gingembre gris est de la grosseur du doigt. Il se compose de tubercules ramifiés et comprimés, réunis au nombre de trois ou quatre, recouverts d'une écorce grise jaunàtre, ridée et marquée d'anneaux peu apparents. Au-dessous de la première couche grise (euticule) se trouve une couche grise ou brune. La cuticule, que divers auteurs nomment à tort épiderme, est détruile par place, et laisse voir des taches noirâtres ; à l’intérieur les rhizomes sont blanc jaunàtre; leur odeur est fort aromatique, leur saveur est âcre; leur poudre, qui est jaunâtre, provoque l’éternuement. Ils sont souvent piqués des vers; il faut les choisir sains, durs et pesants. Le gingembre blanc est plus grêle, plus allongé, plus plat et plus ramifié que le précédent. Son écorce est fibreuse, jaunâtre, striée longitudinalement, sans anneaux transversaux ; le plus souvent elle est enlevée avec soin. La racine est blanche à l’extérieur et à l’inté- rieur; la poudre en est blanche. Le gingembre blanc est plus léger, plus tendre, plus fibreux que le gris. Il a une odeur forte, mais moins aromatique que ce dernier, sa saveur est plus forte et plus brûlante. Composirion caimique. — Morin et Bucholz, qui ont analysé le gin- gembre, l'ont trouvé composé de résine molle, de sous-résine, d’huile volatile, de matière extraite de gomme, d’amidon et de ma- tière azotée : la résine molle est le principe actif. M. Béral à proposé de l'appeler piperoïide de gingembre ; il en a fait la base de plusieurs préparations qui ne sont pas employées. Usages. — Le gingembre entrait dans la plupart des médicaments officinaux des Grecs et des Arabes, tels que la /hériaque, le diascor- dium, Va confection Hamech, ete. C'est un excellent stimulant stoma- chique, très-vanté par Dioscoride. On en fait un très-grand usage aux Indes orientales et en Angleterre pour faciliter la digestion. On en met dans les sauces, dans certaines bières, etc. Les nourrices le mêlent aux tisanes des petits enfants pour guérir la colique. On s’en sert contre les catarrhes chroniques, les extinctions de voix. On l’associe aux cathartiques pour rendre leur administration plus facile et pour dissiper les coliques venteuses. Murray l'employait avec succès contre les tranchées. Le gingembre, comme toutes les autres racines ou graines aro- matiques des Amomées, est un excellent stomachique ; c’est un des digestifs les plus efficaces que l'on connaisse; 1l agit en surexcitant 102 FLORE MÉDICALE le tube digestif, en activant ses fonctions et en augmentant les sécré- lions gastriques, intestinales et biliaires, sécrétions si nécessaires surtout dans les pays chauds à l'accomplissement d'une bonne diges- tion. Malheureusement on fait souvent abus du gingembre, et alors il fatigue et peut déterminer des inflammations du canal digestif. GINSENG Aralia quinquefolia Decne. Panaæ quinquefolium L. (Araliacées, | Le Ginseng ou Gen-seng, connu chez nous sous le nom de Mandra- gore de Chine, est une plante vivace, à racine simple, un peu striée, blanche, pivotante. La Lige, haute de 0",40 à 0,50, cylindrique, simple, grêle, glabre etlisse, porte dans sa partiesupérieure trois feuilles verticillées, longuement péliolées, digilées, à cinq folioles presque sessiles, ovales, dentées, divergentes. Les fleurs, blanches, poly- games, sont groupées en ombelle terminale, Elles présentent un ca- lice à cinq petites dents, une corolle à cinq pétales planes, cinq éta- mines, un ovaire infère surmonté de deux styles. Le fruit est une petite baie globuleuse, un peu comprimée, à deux loges mono- spermes. Hagirar. — Cette plante croil en Chine, au Japon, dans la grande Tartarie. On la trouve également au Canada, dans la Pensylvanie, la Virginie. Elle n’est cultivée que dans quelques jardins botaniques. PARTIES usiTÉES. — Les racines. Récoure — La racine de ginseng est de la grosseur du petit doigt, fusiforme, cylindrique ou renflée à sa partie supérieure ; eile est marquée d’un grand nombre d'impressions cireulaires; souvent elle se partage en deux branches ressemblant aux cuisses d'un homme, ce qui, dit-on, au temps des signatures, lui a valu son nom et la réputation d’être aphrodisiaque. La racine varie pour sa cou- leur du blanc au jaunàtre, elle possède une faible odeur de racine ‘d’ombellifère; sa saveur est amère, àcre et sucrée. On a longtemps confondu la racine de ginseng avec une autre racine qui lui ressemble, laquelle vient de la Morée et est cultivée en Chine et au Japon. C’est le Ninsin {Saux Nensi L.), ombellifère voisine du Chervi (Séum Sisarum L.); mais on distingue facilement la racine de gin-sing par le collet tortueux quila surmonte, etoù se trouve marquée, DU XIX° SIÈCLE. 103 tantôt à droite, tantôt à gauche, l'empreinte de la tige unique que la plante pousse chaque année, tandis que le Ninsin produit un amas de racines tuberculeuses. La racine de ginseng se trouve quelquefois dans le commerce dis- posée en chapelets à l’aide d’une ficelle. Composirion cHimique. — Le ginseng n'a pas été analysé. Coxe (American dispens., p. 434), a remarqué qu’il possédait une saveur sucrée analogue à celle de la réglisse; il renferme un principe amer. M. Garrigues y a, il est vrai, trouvé une matière particulière qu’il dé- signe sous le nom de Panaquilon, mais on ne sait rien de positif sur les propriétés de cette substance. Le ginseng d'Amérique paraît être plus aromatique et plus aclif que celui de Chine ; les Américains ne font aucun cas de ce dernier. Usages. — Le docteur Vandermonde a traduit un ouvrage chinois (le Pan-Sau-Kan-Mou-Li-Tchi-Sin), d'après lequel les Asiatiques considèrent le ginseng comme une panacée universelle; ils l’em- ploient dans toutes les maladies, et leurs médecins ont écrit des vo- lumes entiers sur ce merveilleux spécifique qu’ils nomment Smple spirilueur, Esprit pur de la terre, Recette d'immortalité, ete. C’est surtout contre la diarrhée, les dérangements d'estomac, les engour- dissements, les paralysies, les convulsions qu'ils emploient. Les mé- decins hollandais en ont fait aussi un fréquent usage. Mais c’est plus particulièrement comme aphrodisiaque, comme propre à soutenir les forces, que le ginseng a été très-vanté. Aujourd’hui il est aban- donné de la médecine française. Sans nier qu'il ne puisse exercer des effets légèrement excitants, nos médecins ont bien fait de nier les propriétés merveilleuses qu'on lui attribuait jadis, qu’on lui attribue peut-être encore dans certains pays. GIROFLÉE Cheiranthus Cheiri L. (Crucifères -Arabidées. ) La Giroflée commune, appelée aussi Giroflée de muraille, Muret, Ravenelle jaune, Violier jaune, ete., est une plante vivace, à racines rameuses et tracantes. La lige, haute de 0",25 à 0,50, sous fru- tescente dans sa partie intérieure, se divise dès la base en rameaux anguleux, pubescents au sommet, portant des feuilles alternes, atté- 104 FLORE MÉDICALE nuées en pétiole, oblongues-lancéolées, entières, un peu charnues, d'un vert pâle en dessous, persistant quelquefois pendant l'hiver. Les fleurs jaunes et d’une odeur suave, sont groupées en un corymbe ter- minal qni s’allonge ei se transforme en grappe par les progrès de la floraison. Elles présentent un calice à quatre sépales disposés sur deux rangs et opposés en croix, les deux intérieurs gibbeux à la base; une corolle à quatre pétales onguiculés et opposés en croix ; six élamines tétradynames; un ovaire simple, allongé, tétragone, à deux loges multiovulées, surmonté d'un style simple, très-court, épais, terminé par un stigmate bifide à lobes courbés en dehors. Le fruit est une silique linéaire, à quatre angles arrondis, deux valves convexes ren- fermant de nombreuses graines ovoides-comprimées (PL 4 1). La Giroflée blanchâtre ou des jardins (C. éncanus L., Malthiola éncana R. Br., Hesperis violaria Lamk) se distingue de la précédente par sa tige et ses feuilles blanchâtres et cotonneuses, ses sépales et ses pétales violets, sa silique cylindrique comprimée, ses graines à rebords membraneux. Quelques botanistes rapportent à cette espèce, comme variété, la Giroflée annuelle ou Quarantaine (C. annuus L., Matthiola annua Swert). Hamirar. — La giroflée commune habite presque toute l'Europe; elle se trouve perticulièrement sur les rochers et les vieux murs. La giroflée blanchâtre croit dans les sables maritimes. Ces plantes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques et d'agrément. PARTIES USITÉES. — Les rameaux fleuris, les fleurs, les se- mences. Récoute. — La giroflée est une des premières fleurs du prin- temps; elle fleurit en mai et juin ; on en cueille les rameaux fleuris à l’époque de la floraison, on les dispose en petits paquets peu serrés, que l’on attache en guirlandes, et on les fait sécher au grenier ou au séchoir; les fleurs isolées se décolorent facilement; on doit les con- server à l'abri de la lumière; elles perdent en grande partie leur arome par la dessiccation. Lorsqu'on veut employer les graines, on cueille les fruits avant leur déhiscence et on fait sécher les siliques ; la maturité des graines achevées, on les sépare du péricarpe et on les fait sécher à l'ombre dans un lieu chaud. Composirion cHimiQue. — La giroflée n'a pas été analysée. L'odeur assez forte qu’elle exhale et sa saveur piquante font supposer qu'elle renferme une huile essentielle toute faite, ou que, comme d’autres DU XIX° SIÈCLE. 105 plantes de la même famille, elle contiendrait les éléments néces- saires à la formation de cette essence, probablement sulfurée, et qui ne prendrait naissance qu’au contact de l’eau et d'une température convenable. Usaces. — Galien rapporte (Sëmpl., liv. VIT) que les Grecs em- ployaient la giroflée contre l'avortement ; ses fleurs étaient regardées comme céphaliques, cordiales, anodines, antispasmodiques ; on les employait comme diurétiques et emménagogues dans la chlorose, l'aménorrhée, les paralysies. Dans les campagnes ces mêmes fleurs étaient un remède vulgaire contre la gravelle et les hydropisies ; on les employait infusées dans du vin blanc. Dans quelques pharmaco- pées, on trouve sous le nom d'huile de kerri, la formule d’une huile oblenue par digestion des fleurs de giroflée. Les semences étaient administrées en poudre à la dose de 4 à 6 grammes contre la dysenterie; l'huile était appliquée topiquement contre les contu- sions et les douleurs nerveuses et rhumatismales. GIROFLIER Caryophyllus aromaticus L. (Myrtacées-Myrtées.) Le Giroflier est un arbre de moyenne grandeur, dont la tige, haute de 8 à 10 mètres, se divise en rameaux dont l’ensemble forme une cime pyramidale très-élégante. Ils portent des feuilles opposées, un peu soudées à la base, ovales, entières, pointues, lisses, longue- ment pétiolées et marquées de nombreuses nervures latérales pres- que perpendiculaires à la nervure médiane ; ces feuilles sont per- sistantes. Les fleurs roses, à pédoncules articulés, sont groupées en corymbe terminal et munies de petites bractées caduques. Elles pré- sentent un calice rougeàtre, rugueux, en entonnoir, à tube étroit, allongé, soudé avec l'ovaire, à limbe partagé en quatre divisions épaisses, charnues, aiguës; une corolle à quatre pétales, des étamines nombreuses insérées, comme les pétales, autour du sommet de l’o- vaire, qui est infère et à une seule loge uniovulée. Le fruit est une drupe sèche, ovoïde, couronnée par les dents du calice persistant (PI. 12). | Hagrrar. — Le giroflier est originaire des Moluques, d’où il a été successivement importé aux iles Maurice (ile de France) et de la 106 FLORE MÉDICALE Réunion (Bourbon), à Mahé, à Sumatra, à la Guyane, dans les An- tilles francaises, ete. Cuzrure. — Cet arbre est très-délicat ; il préfère l'exposition de l'est et les terres fortes, profondes et fraiches. On le propage par graines semées en place ou par boutures, faites à l'époque où la séve commence à monter. Les jeunes sujets exigent beaucoup de soins; il leur faut un ombrage qui les abrite contre le soleil, sans les sous- traire aux influences de la pluie et de la rosée. Aussi le giroflier vient-il très-bien sous le couvert des arbres à feuillage clair et léger et à racines peu étendues, ou mieux encore sur les défrichements partiels opérés dans les parties humides des bois. En Europe, on ne peut le cultiver qu’en haute serre chaude, où du reste sa culture et sa conservation sont assez difficiles. Parties usirées. — Les fleurs non épanouies ou clous de girofle, les pédoneules brisés ou griffes de girofle, l’essence de girofle. Récozre. — Les elous de girofle nous viennent principalement des Moluques, de lile de la Réunion et de Cayenne. On cueille les boutons avant que les fleurs soient épanouies ; quand les pétales non séparés forment un corps globuleux au-dessus du calice, on les fait sécher au soleil ; ils brunissent en séchant; lorsqu'on les comprime à la base du tube calicinal, ils laissent suinter une huile essentielle, âcre, d’un brun rougeûtre, ce qui n’a pas lieu lorsqu'ils ont été soumi à une distillation préalable, opération à laquelle se sont, dit-on, quelquefois livrés les Hollandais, avant de les mettre dans le com- merce. D'après M. Guibourt, voici quelles sont les trois sortes de girofle que l'on trouve dans le négoce : 1° Le Girofle des Moluques où Güirofle anglais qui est fourni par la compagnie des Indes ; il est brun clair, gros, bien nourri, obtus, pesant, obscurément quadrangulaire ; sa saveur est âcre et brûlante ; 2 le Gérofle de Bourbon (ou de la Réunion), plus petit que le pré- cédent; 3° le Grrofle de Cayenne, petit, grèle, aigu, noirâtre, peu aromatique, moins estimé. Sous les noms d’'Antofle où Mère de girofle, on trouve quelquefois dans le commerce les fleurs du giroflier épanouies sur l'arbre. On en distingue deux sortes, selon qu’elles ont été cueillies à une époque plus ou moins éloignée de la floraison. Tantôt ces fleurs sont tubuleuses, cylindriques, terminées par les quatre pointes du calice, sans corolle DU XIX° SIÈCLE, 107 et sans étamines, celles-ci étant tombées, et elles possèdent une odeur prononcée de girofle. Tantôt, elles sont bien épanouies, ayant l'as- pect de corps ovoides couronnés par les quatre dents du calice qui sont recourbées en dedans, et à l'intérieur on trouve une semence dure, marquée d’une rainure longitudinale, ondulée. Ce dernier pro- duit est peu aromatique et peu estimé, On désigne sous le nom de Griffes de girofle les pédoncules brisés du giroflier. Ce sont de petites branches grisätres, minces, d’une odeur et d'une saveur assez prononcées ; elles sont employées par les distillateurs en guise de girofle. ComPosiTion CHIMIQUE. — D'après Trommsdorff, les girofles con- tiennent sur 100 parties : huile volatile 48, matière extractive et astringente 17, gomme 43, résine 5, fibre végétale 28, eau 18. M. Lodibert a trouvé dans le girofle des Moluques un principe qu'il a nommé cayoplulline ; M. Bonastre a constaté sa présence en pe- tite quantité dans le girofle de Bourbon; il n’en a pas trouvé dans celui de Cayenne. Entrevue par M. Baget et découverte par MM. Lodibert et Bonastre, la caryoplulline est une résine brillante, satinée, cristallisée, insipide el inodore, fusible, volatile, insoluble dans l’eau, se dissolvant dans l’alcool et dans l’éther; l'acide sulfurique concentré la colore en rouge coquelicot; elle est isomérique avec le camphre et contient C2? H!° 0?. L'huile essentielle s'obtient par la distillation du girofle avec de l'eau saturée de sel marin ; elle est àcre, sa densité est de 1,061, peu volatile, elle ne se solidifie pas à — 20° ; l’acide azotique la colore en vert ou en rouge ; avec la potasse et l'armmoniaque elle se prend en masse cristalline. L'essence de girofle contient trois produits différents : 4° une huile essentielle hydrocarbonée isomère de l'essence de térébenthine; 2° une huile oxygénée (acide eugénique de M. Dumas) qui est com- posée de C?H°0, et qui se combine aux alcalis; 3° un stéaroptène (eugénine de M. Persoz) qui contient un équivalent d'oxygène de moins que l'acide eugénique; il est en lames minces, blanches et noires; il absorbe l'oxygène et se résinifie ; il est soluble dans l'eau et dans l’alcool, Usaces. — Le girofle entre dans le laudanum de Sydenham et dans un grand nombre d’alcoolats composés. On en fait grand usage, 108 FLORE MÉDICALE ainsi que de son essence, en parfumerie €t pour la fabrication des liqueurs. C'est un des excitants les plus puissants que possède la thérapeutique. C’est surtout comme condiment qu'on l'emploie dans Part culinaire; on s’en sert pour rehausser la saveur des sauces et les rendre plus digestives. En médecine on l’emploie comme la Can- nelle et aux mêmes doses (voyez au mot CANNELIER, t. E, p. 250). L’es- sence de girofle placée sur du coton sert à cautériser les dents cariées. GLAUCIÈRE Glaucium flavum Krantz. Chelidonium glaucum L. (Papavéracées.) La Glaucière jaune, vulgairement Pavot cornu, est une plante bisannuelle, à racines fibreuses et traçantes. La tige, haute de 0",30 à 0",60, robuste, glabre, glauque, rameuse, ascendante, porte des feuilles alternes, grandes, pinnatifides, à lobes sinués ou dentés, velues, pulvérulentes, glauques ; les inférieures pétiolées, les supé- rieures sessiles et embrassantes. Les fleurs, grandes, d’un beau jaune doré, sont généralement solitaires, à l'extrémité de pédoncules courts, épais, glabres, qui terminent la tige et les rameaux. Elles présentent un calice à deux sépales cadues, verdâtres, à poils transparents ; une corolle à quatre pétales larges, obovales, disposées sur deux rangs et décussés ; des étamines au nombre de vingt environ, hypogynes ; un ovaire simple, allongé, à deux loges multiovulées, surmonté d'un style très-court et d'un stigmate à deux lobes lamelleux. Le fruit est une capsule siliquiforme, longue de 0%,15 à 0,25, rude, légèrement tuberculeuse, divisée en deux loges par une cloison spongieuse, s’ou- vrant en deux valves du sommet à la base et renfermant de nom- breuses graines attachées sur deux placentas persistant avec la cloison. Nous citerons aussi les Glaucières fauve (Glaucrum fuloum Sm., Chelidonium fuloum Voir.), et corniculée (G. corniculatum Curt., Chelidonium corniculatum L.) qui a des fleurs d’un rouge ponceau, noires-brillantes à la base. HagiraT. — Ces trois espèces habitent les lieux sablonneux et ma- ritimes du midi de l'Europe. La première est naturalisée dans quel- ques localités du nord de la France. Elle n’est guère cultivée que dans les jardins botaniques. Dans ces derniers temps, on a proposé de la cultiver en grand, comme plante oléagineuse. DU XIX° SIÈCLE. 109 PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les fleurs. Récote. — Ou récolte la plante pendant la floraison; sa dessicea- tion s'opère avec difficulté et doit se faire rapidement au séchoir. ComposiTION CHIMIQUE. — La glaucière répand une odeur vireuse ; sa saveur est amère et piquante ; son extrait exhale une odeur narco- tique qui rappelle celle de l’opium ; aussi s’en sert-on, d’après Lan- derer, pour falsifier ce produit ; quand on blesse la plante, il s'en écoule un suc jaune, âcre, caustique et vénéneux. M. Probst a trouvé dans la racine de glaucière de l'acide chélidonique et deux alcaloi- des, la chelidonine et Va chélérythrine, semblables à ceux que l'on trouve dans la Grande Chélidoine (voir t. EF, p. 325). Les graines renferment une huile fixe analogue à celle que l’on extrait du Pavot noir ou Pavot à œillette. M. Cloëz a démontré que cette plante pou- vaii être exploitée avec avantage comme plante oléagineuse. Usages. — La glaucière jaune et surtout la glaucière corniculée possèdent des propriétés narcotiques très-prononcées. D'après Charles Worth, elles provoquent des accidents graves qui se manifestent plus particulièrement par une altération de l'organe de la vision, altération par suite de laquelle tous les objets sont vus jaunes. Dans certaines provinces, d'après Garidel, les paysans emploient les feuilles de glaucière pour déterger les plaies et panser les ulcères qui surviennent à la suite des contusions et des écorchures. On les applique à cet usage en médecine vétérinaire, surtout pour les che- vaux. Ces feuilles pilées et mélangées à l'huile sont employées en cataplasmes, contre les panaris commencçants, l’irritation phlegma- sique des vésicatoires. M. Girard de Lyon a constaté les bons effets de cette préparation contre les plaies contuses avec déchirement, et les douleurs hémorrhoïdales. M. Cazin dit avoir employé avec succès le suc jaune mêlé au suc de Jusquiame et au jaune d’œuf contre la con- striction spasmodique de l’anus. Ce n’est là toutefois qu’un remède populaire peu employé de nos jours et tout à fait inusité dans la médecine rationnelle. En Portugal, on faisait autrefois prendre les feuilles de glaucière infusées dans du vin blanc aux personnes attein- tes de la pierre. 1140 FLORE MÉDICALE GLÉCHOME Glechoma hederacea L. Nepeta Glechoma Benth. (Labiées- Népétées.) Le Gléchome hédéracé, vulgairement appelé Lierre terrestre, Lierrette, Rondotte, Terrette, Herbe de Saint-Jean, etc., est une plante vivace, à racines grêles, rampantes, blanchâtres. La tige, haute de 0",25 à 0,50, létragone, rougeâtre, un peu pubescente, couchée ou ascendante, émet de distance en distance de nombreux rejets rampants. Elle porte des feuilles opposées, longuement pétio- lées, réniformes, arrondies, crénelées, d’un vert foncé, quelquefois rougeñtres en dessous. Les fleurs, rose violacé, plus rarement blan- ches, sont courtement pédonculées et réunies au nombre de deux à quatre à l’aisselle des feuilles supérieures. Elles présentent un calice tubuleux, cylindrique, strié, à cinq dents très-aiguës, un peu inégales; une corolle à tube très-long, à gorge très-dilatée, à limbe partagé en deux lèvres, la supérieure droite presque plane, échancrée, l'inférieure étalée à trois lobes, dont le médian est beaucoup plus grand; quatre étamines didynames rapprochées sous la lèvre supérieure de la co- rolle, portant des anthères à lobes divergents, rapprochées par paire en forme de croix ; un ovaire composé de quatre carpelles surmonté d'un style simple, que termine un stigmate bifide. Le fruit se com- pose de quatre akènes ovoides, finement ponclués, entourés par le calice persistant. Harirar. — Le lierre terrestre est commun dans toutes les régions de l’Europe; il croit dans les bois, les haies, les prairies, les buis- sons, les lieux ombragés, le long des murs et des fossés, etc. CuLrure. — Cetle plante, élant assez abondante à l'état sauvage pour suffire aux besoins, n’est cultivée que dans les jardins botani- ques. On la propage très-facilement par graines semées en place au printemps ou par éclats de pied faits dans cette saison ou à l’au- tomne. PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les sommités fleuries. RécoLre. — Le lierre lerrestre doit être récolté lorsqu'il est en fleurs, ce qui arrive en juin et juillet ; après l'avoir arraché on en coupe la racine, et on détache les feuilles inférieures pour les atta- cher en paquets, que l’on dispose en guirlandes et que l’on faitsécher DU XIX° SIÈCLE. 111 à l’étuve ou au soleil; on emploie rarement les feuilles isolées ; elles doivent être conservées dans un lieu sec à l'abri du contact de l’air ; elles sont sujettes à noircir. - COMPOSITION CHIMIQUE. — Quoique possédant une odeur forte, assez prononcée, le lierre terrestre est loin de posséder le prineipe aroma- tique si abondant dans la plupart des Labiées. Cependant il renferme une petite quantité d'huile essentielle ; il est riche en principe amer ; il possède une saveur douceâtre, amère, àcre et piquante. Usaces. — Dans les campagnes, le lierre terrestre est considéré comme un léger excitant auquel on attribue la propriété de faciliter l'expectoration. Baglivi l’a vanté, sous la forme de teinture, contre les débilités de l'estomac, les flatuosités et la dyspepsie. Cullen, Simon Paulli, Ettuuller, Morton, Willis, l'ont recommandé contre la phthisie, la pneumonie et la pleurésie. Daniel Senner et Plater lemployaient contre les calculs, les graviers et les maladies de vessie. On en faisait aussi grand cas à une certaine époque comme fébri- fuge; mais on nie, non sans raison, aujourd'hui, ses propriétés merveilleuses, et c'est tout au plus si, sur les indications très- anciennes de Lazare Rivière, de Sauvages, etc., on l’'emploie encore quelquefois comme expectorant, sous forme de tisane, dans les ca= tarrhes chroniques et dans la période atonique des bronchites. Son infusion facilite certainement l’expectoration, mais elle est bien loin de posséder les propriétés bienfaisantes qu'on lui avait attribuées. À l'extérieur, le lierre terrestre a été employé autrefois comme tonique et résolutif. J. Bauhin en faisait des cataplasmes, qu'il appli- quait chauds sur le ventre des femmes pour calmer les tranchées qui précèdent et qui suivent les couches. On en faisait un onguent contre la brûlure; on l’employait pour déterger les vieux ulcères. Ces remèdes sont aujourd’hui justement abandonnés. Les maquignons mêlent quelquefois du lierre terrestre dans l’a- voine de leurs chevaux pour leur faire rendre des vers et les guérir de la pousse (A. Duchesne, Répertoire des plantes utiles, p, 81.) On s'est servi, en Angleterre, du lierre terrestre pour donner de l’amertume à la bière, qu'il a, dit-on, la propriété de clarifier. 112 FLORE MÉDICALE GLOBULAIRE Globularia Alypum L. (Globulariées.) La Globulaire-Turbith, Alypon, Herbe terrible, Séné des Proven- caux, Turbith blanc, est un arbrisseau à racines épaisses et noirâtres. La tige, haute d'environ un mètre, droite, brun-rougeâtre, se divise en nombreux rameaux anguleux, striés, rougeàtres, un peu glau- ques, glabres, effilés, dressés, devenant grisätres en vieillissant , portant des feuilles alternes, presque sessiles, obovales, lancéolées, aiguës, entières, fermes, d’un vert glauque, dressées, les inférieures courtement pétiolées. Les fleurs petites, bleuâtres, sont réunies en capitules globuleux, terminaux, sessiles, à réceplacle spongieux, convexe et garni de paillettes, entouré d’un involucre à écailles im- briquées, brunes, scarieuses, ciliées sur les bords. Elles présentent un calice gamosépale, légèrement {ubuleux, très-velu, fendu aux deux tiers de sa hauteur en cinq dents linéaires, aiguës, subulées ; une corolle irrégulière, gamopétale, ligulée, à tube un peu arqué et évasé vers la gorge, à limbe allongé, roulé en dehors, fendu jusqu'au tiers de sa longueur en trois lanières étroites et obtuses ; quatre éta- mines égales, dressées, saillantes, insérées au sommet du tube de la corolle : un ovaire libre, ovoïde, allongé, glabre, uniloculaire, unio- vulé, surmonté d’un style assez court, grêle, filiforme, incliné et ter- miné par un très-pelit stigmate bifide. Le fruit est un akène ovoïde, très-petit, jaunâtre, lisse et luisant, complétement enveloppé par le calice persistant. La Globulaire commune (G. vulgaris L.) ou Marguerite bleue, est une petite plante vivace, à tige courte, rameuse, formant une touffe qui se termine par des capitules de fleurs bleuâtres ou blanchâtres. On cite encore, comme ayant les mêmes propriétés, la Globulaire à tige nue (G. nudicaulis L.). Hagrrar. — La globulaire turbith croît dans les régions méridio- nales de l'Europe. La globulaire commune s'avance jusque dans le Nord. La globulaire à tige nue se trouve surtout dans les Alpes. Ces plantes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques, où la pre- mière est assez difficile à conserver. Parties usiréEes. — Les feuilles, l’inflorescence. DU XIX‘° SIÈCLE. 113 RécoLre. -—— Les feuilles de globulaires doivent être récoltées à l’époque de la floraison ; on les fait sécher rapidement au soleil, et on les conserve dans un endroit sec; les fleurs, rarement employées, sont cueillies au moment de l'épanouissement; on en sépare les pédoncules et l'involucre, et on les fait sécher. ComrosiTioN cHimiQuE. — L'analyse de la globulaire n'a pas été faite. Les feuilles présentent une saveur âcre, très-amère, désagréa- ble ; on leur avait attribué des propriétés dangereuses. J. Bauhin la nomme à tort Herbe terrible (Herba terribilis, Frutex terribilis). C'est sous ces noms qu'elle est désignée dans les ouvrages de Lobel, de Dalechamp, de Bauhin, etc.; mais Ramel fit connaître qu’elle n'avait rien de terrible. Les faits publiés par ce dernier, par de Can- dolle, Gilibert et Loiseleur Deslongchamps, démontrèrent, au con- traire, que la globulaire-turbith est un purgatif qui n’a rien de dangereux. Usaces. — Les diverses espèces de globulaires sont employées dans un grand nombre de localités comme un purgatif doux. Les paysans en font un très-fréquent usage. Elles peuvent très-bien remplacer le Séné, mais il faut en doubler la dose; elles n'ont pas les sa- veurs nauséeuses du Séné. Clusius et Ramel regardaient la globu- laire comme hydragogue et fébrifuge. Néanmoins, c’est sans succès qu’on l’a employée contre les fièvres intermittentes et les hydrepi- sies. GOMMIER Eucalyptus Globulus; resinifera Labill.; etc. (Myrtacées -Leptospermées.) Le Gommier bleu (Æucalyptus globulus Labillardière), est un arbre à racines fortes, pivotantes et tracantes. La tige, haute de 50 mètres, droite, régulière, couverte d’une écorce glabre, gris-cen- dré, se divise en rameaux tétragones, dressés ou étalés, à feuilles opposées et presque cordiformes sur les jeunes pousses, alternes, pétiolées, falciformes, coriaces et d’un vert glauque sur les rameaux adultes. Les fleurs sont ordinairement solitaires, quelquefois gémi- nées ou ternées, à l’aisselle des feuilles. Elles présentent un calice gamosépale, campanulé, à tube turbiné, anguleux; des étamines nombreuses, insérées sur le calice, à filets allongés, à anthères ovoi- des; un ovaire simple, arrondi, à quatre loges multiovulées, sur- Flore, T. IT. . 11/4 FLORE MÉDICALE monté d'un style simple terminé par un petit stigmate convexe. Le fruit est une capsule turbinée, anguleuse , déprimée, ordinai- rement à quatre loges, renfermant plusieurs graines ovoïdes et noi- râtres. Le Gommier résineux appelé aussi Arbre à gomme (Æ. resinifera Smith, Metrosideros qummifera Gærln.), se distingue du précédent par ses branches flexibles et pendantes; ses feuilles oblongues, termi- nées en pointe allongée, et ses fleurs en ombelles. Nous citerons encore les Gommiers gigantesque ( Æucalyptus robusta Sm.), à feuilles en cœur (Æ. cordata Labiil.), huileux (£. o/eosa F.Muell.) poivré(£.piperita Labiil.), à manne (Æ. mannifera Bot. Soc.). Hagirar. — Ces arbres sont originaires de l'Australie, où ils crois- sent dans les lieux sablonneux, sur les bords de la mer, etc. Presque tous peuvent être cullivés en pleine terre, en Algérie el jusque dans le midi de la France. Mais, sous le climat de Paris, ils exigent l'oran- gerie ou la serre tempérée. Parties usirÉEs. — Les feuilles, l'écorce, les fruits, l'huile essen- tielle, la matière sucrée, la matière résineuse souventnommée X?n0. Récore. — Les feuilles et l'écorce des £wcalyplus nese trouvent pas dans le commerce. Les fruits employés à la Nouvelle-Hollande pour remplacer les épices, ne nous arrivent pas en France. Murray (Apparatus med., t. VE, page 203) a décrit sous le nom de Kino, un produit très-rare en Europe que M. Duncan, d'Édimbourg, appelleKëno de Botany-Bay(Edimburgh ner dispensar y \830, p.448) ; on l'appelle aussi Kino de la Nouvelle-Hollande et Gomme rouge. Ce produit est en morceaux paraissant avoir été moulés dans un vase. On coupe ces masses en fragments du poids de 500 grammes environ, qui sont déformés par le frottement réciproque et qui présentent des fissures. À la partie inférieure on trouve des bandes de feuilles de palmiers. Leur face supérieure présente des sortes d’efflorescences grisètres, ou une poussière rouge-brun venant des masses elles-mêmes. Ce Æino est assez friable, inodore, peu astringent ; il se dissout dans l'alcool, et la solution est précipitable par l’eau. D’après Thompson, cette espèce de {no n'aurait pas été revue dans le commerce de- puis 4810. M. Guibourt pense que c'est un produit artificiel obtenu par lévaporation du suc provenant d'incisions faites sur le tronc du gommier résineux. Nous citerons encore, parmi les plantes qui donnent des produits DU XIX° SIÈCLE, 115 dits nos, les Butea frondosa et Butea superba de la famille des Papilionacées, et les P/erocarpus marsupium Roxb., et erinacea D. C., qui produisent la Gorune astringente de Gambie de Fothergill, et le Kino des Indes orientales ou d’Amboine. (Voir au mot PTÉROCARPE, NI, p. 141.) Le Kino de la Jamaïque est le troisième Kino en extrait de M. Dun- can (Edimburgh nero disp., p. 489). On en distingue de plusieurs sortes, qui toutes sont estimées. On croit qu'il est produit par le Raisinier à grappes, des Antilles, Coccoloba uvifera, de la famille des Polygonées. Le Xino de la Colombie et celui de New- York ou du Brésil, sont attribués au Manglier. (Voir au mot ManGuier, p. 283 de ce volume.) ComwposiTion cmimiQuE. — Il découle spontanément des tiges des gommiers résineux et gigantesque un suc abondant qui se dessèche sur le tronc. Lorsqu'il est desséché, il se présente sous forme de masses irrégulières, dures, compactes, composées de larmes agglu- tinées. Ce suc n'est pas opaque. À l’intérieur sa couleur est d'un rouge foncé. Il est inodore, peu friable. Sa saveur est peu astrin- gente. Dans l’eau froide, il se gonfle et devient mou et gélatineux. Il est complétement soluble dans l’eau bouillante, sauf les impuretés qu'il peut contenir. Sa solution est précipitée par l'alcool; ce qui démontre la présence d'une gomme mêlée au suc concret des Zuca- lyptus, suc qui renferme en outre une matière colorante rouge soluble dans l’eau, ainsi que du tannin. L'huile essentielle obtenue par la distillation des feuilles des Eucalyptus, est analogue à celle du Cajeput. (Voir au mot Caserur, pe 224). Le gommier à manne (Æwcalyptus mannifera) produit une manne abondante, qui a été analysée par M. Johnston. Le sucre que ce chimiste en a extrait est cristallisé en aiguilles, ou en prismes radiés : il est soluble dans l’eau et dans l'alcool, surtout dans ce dernier liquide bouillant. Desséché à 82°, il a pour formule C* H* O*1. La manne d'Australie qui vient de la terre de Van-Diemen, et qui est produite par plusieurs Æ£ucalyplus, a été étudiée par M. le pro- fesseur Berthelot, qui en a extrait un sucre analogue à celui qui est fourni par la Canne, et qu'il a nommé #elitose. Sa formule est CH" O"—+3 ag. Desséché à 130° il présente la même composition que le sucre de canne; il est dextrogyre, ne réduit pas l’oxyde de 116 FLORE MÉDICALE cuivre; il fermente en se dédoublant et produisant de l’evcalyne ; les acides le dédoublent en glycose et en eucalyne; traité par l'acide azotique, il donne de l'acide mucique. L'eucalyne CH OF est dex- trogyre, et elle réduit l’oxyde de cuivre : elle ne fermente pas, même après avoir éprouvé l’action des acides. Usages. — Le suc concret des £ucalyplus est analogue au Æino, non-seulement par son aspect, mais encore par ses propriétés théra- peuliques. On l’a employé comme astringent contre les diarrhées rebelles et la dysenterie. M. White, médecin à Sydney, l'a employé contre les flux séreux. La manne de l'Eucalyptus mannifera est analogue à celle des Frênes (voir le mot Frève dans ce volume), et on l’emploie aux mêmes usages en Australie. Les fruits du gommier bleu pourraient au besoin servir d'épices. On retire des vésicules des feuilles une huile essentielle qui peut remplacer celle de la menthe poivrée. M. Ramel abeaucoup étudié les propriétés de cette plante. Les bois des divers £ucalyptus sont en général durs et liants ; ils peuvent servir pour les constructions navales, les mâtures, pour meubles, etc. Quelques-uns sont incorruptibles. GOYAVIER Psidium pyriferum L. (Myrtacées-Myrtées.) Le Goyavier blanc ou Goyavier poire est un arbre à racines lon- gues et fortes. La tige, haute de 6 à 7 mètres, rarement droite, ordi- nairement tordue, couverte d'une écorce très-mince, unie, vert rou- geàtre, se divise en rameaux opposés, tétragones, qui portent, surtout vers leur extrémité, des feuilles opposées ovales, entières, longues de 0,10 et larges de 0",05, d’un vert clair en dessus, pâles en dessous. Les fleurs, blanches et d’une odeur agréable, sont réunies en petites grappes axillaires pédonculées. Elles présentent un calice à quatre divisions, muni exltérieurement à la base de deux petites écailles; une corolle à quatre pétales; des étamines nombreuses, épigynes ; un ovaire ovoïide, adhérent, à quatre loges multiovulées. Le fruit est une drupe jaunâtre, de la grosseur d’un œuf de poule, à quatre loges remplies d’une pulpe charnue, dans laquelle se trouvent de nom- breuses graines blanchâtres. DU XIX° SIÈCLE. 117 Le Goyavier pomme, appelé aussi Goyavier rouge ou des savanes (Psidium pomiferum L.) est regardé par quelques botanistes comme une simple variété du précédent; il s'en distingue surtout par ses fruits arrondis, plus acides, plus astringents, et moins agréables au goût. Nous citerous encore les Goyaviers à fruit pourpre (P. Cattleyarnum Lindl.), de la Trinité (P. polycarpum Lamb.), savoureux (P. sapidis- sum Jacq.), citronnelle {P. aromaticum Aubl.), à grandes fleurs (P. grandiflorum Aubl.). Hagrrar. — Le goyavier blanc et le goyavier rouge habitent les Indes orientales et plusieurs contrées de l'Amérique; on les cultive en grand aux Antilles. Le goyavier à fruit pourpre est originaire de Chine. Les goyaviers cilronnelle et à grandes fleurs croissent à la Guyane. Cuzrure. — Les goyaviers sont surtout cultivés comme arbres fruitiers, dans les régions chaudes et tempérées des deux continents ; on les trouve même en Algérie et jusqu’en Provence. Parties usirées. — Les fruits. Récocre. — On récolte les goyaves ou fruits du goyavier, un peu avant leur maturité, lorsque l’épicarpe est encore vert : il jaunit plus tard. Suivant les variétés, la chair et les semences sont blan- ches ou rouges; en vieillissant, le mésocarpe devient comme blet; la pulpe est sucrée, juteuse, agréable, un peu astringente avant la maturité. Composition CHIMIQUE. — On ne connaît pas d'analyse des goyaves; on sait cependant que leur épicarpe contient une huile essentielle aromatique, et que leur pulpe est riche en sucre; on peut, par fer- mentation et distillation, en obtenir un bon alcool, qui est légèrement aromatisé. Elles renferment probablement encore un acide organique cristallisable, de la pectine et de l’acide pectique. Usaces. — Les racines, les feuilles et les bourgeons de goyaviers sont employés comme astringent au Brésil et aux Antilles, contre la diarrhée, la dysenterie, ete. Les fruits mürs sont quelquefois donnés aux malades, comme laxatifs, rafraichissants et pectoraux. On mange les fruits du goyavier crus, pelés et privés de leurs graines; on les coupe par quartiers et on les assaisonne avec du vin, du sucre, de la cannelle, etc. Pour les conserver, on les fait sécher ou on les confit, soit au sirop, soit à l'eau-de-vie; on en fait des compotes et diverses autres préparations. 118 FLORE MÉDICALE Les fruits du Psédium Cattleyanum sont petits, peu sucrés, ceux du Psidium aromaticun sont bons à manger, tandis que ceux du Psidrum grandiflorum Aubl., également de Cayenne, sont àcres et astringents. A la Havane on prépare avec les fruits du goyavier des marmelades et des gelées ; mais pour celles-ci, on est obligé d'ajouter une petite quantité de colle de poisson. GRATIOLE Gratiola officinalis L. ( Personées - Gratiolées. ) La Gratiole officinale, appelée vulgairement Herbe à pauvre homme, et aussi Hysope de haie, Petite Digitale, Séné des prés, est une plante vivace, à rhizome noueux, blanchâtre, rampant, émettant de chaque nœud des racines fibreuses, capillaires, verticales. La tige, haute de 0,35 à 0",50, simple, arrondie, noueuse, glabre, marquée de deux sillons opposés et alternativement interrompus à chaque nœud, dres- sée, porte des feuilles opposées, sessiles, un peu embrassantes, ovales- lancéolées, légèrement dentées, lisses, glabres, d’un vert jaunâtre et marquées de trois sillons en dessus. Les fleurs, purpurines ou blan- châtres, sont solitaires à l'extrémité de pédoncules grèles et axillaires, dont chacun est muni, à son sommet, de deux bractées lancéolées, aiguës, entières, redressées, dépassant les sépales. Elles présentent un calice à cinq sépales lancéolés, aigus, étroits, le supérieur un peu plus grand ; une corolle gamopétale, irrégulière, à tube allongé, à limbe partagé en deux lèvres, la supérieure échancrée et redressée, l'infé- rieure trifide et munie de poils jaunes en dedans; quatre étamines, dont deux seulement fertiles, à anthères globuleuses; un ovaire simple, ovoide, pointu, à deux loges mulliovulées, inséré sur un disque jaune qui forme un bourrelet autour de sa base, et surmonté d'un style simple, glabre, et s'épaississant vers le sommet, qui se ter- mine par un stigmale aplati. Le fruit est une capsule ovoïde, glabre, à deux loges renfermant chacune un grand nombre de petites graines d'un jaune roussàtre (PI. 13). Hagrrar. — La gratiole est commune dans loutes les régions tem- pérées de l’Europe. Elle croit dans les endroits humides, sur les bords des ruisseaux, des étangs, etc. Assez abondante naturellement pour suffire aux besoins de la médecine, elle n’est cultivée que dans DU XIX° SIÈCLE. 119 les jardins botaniques, où on la propage facilement, dans un sol frais, par graines ou par éclats. PARTIES usiTÉES. — La plante entière et la racine. Récozre. — On doit récoller la gratiole au moment de la floraison ou pendant la floraison ; on la fait dessécher au grenier ou au séchoir, disposée en paquets et en guirlandes; l'opération doit être terminée rapidement, car la gratiole noircirait et perdrait de ses propriétés; elle n’est guère employée que sèche. ComposiTion cHimiQuE. — L'analyse de la gratiole, faite par Vauque- lin, ne nous a pas appris grand'chose ; ce chimiste y a trouvé une ma- tière résinoide amère, du malate acide de chaux, de la gomme, du chlorure de sodium, un acide végétal et un sel à base de potasse. La matière résinoïde est peu soluble dans l’eau, mais elle se dissout facilement à l'aide des autres principes ; on a proposé de la nommer graltioline ; c'est à elle que la plante doit ses propriétés purgatives. Le marc de la gratiole contient du phosphate de chaux, un acide végé- (al, un autre sel calcaire, du fer et de la silice (Vauquelin, Ann. de chimie, &. LXXI, p.191). Usages. — L'usage fréquent que font de la gratiole les habitants des campagnes, comme purgalif, lui a valu son nom d’Aerbe à pauvre honune ; mais comme elle est assez énergique, il en résulte quelquefois des accidents fächeux ; à dose un peu élevée, c'est un drastique puis- sant, aussi énergique, sans contredit, que l’Aloës et la gomme-eutte ; mais à dose modérée, c’est un calhartique actif qui est certainement trop négligé, et qui pourrait heureusement remplacer le Séné comme purgalif. Cependant, il faut se rappeler qne la gratiole est urie plante véné- neuse. Orfila la place parmi les irritants; ila vu des chiens périr en trois heures, après avoir pris 3 grammes de cette plante. M. Bouvier a observé quatre cas de nymphomanie chez des femmes qui avaient pris des lavements avec une forte poignée de gratiole, conseillés par des herboristes. La gratiole a été très-vantée par Heurnius, Ettmuller, Harmann, Coste et Willemet, contre l'œdème et les hydropisies. Elle fait, dit-on, partie de l'eau médicinale d'Husson, el très-probablement de l'eau de Meunier. Conseillée comme vomitive, la gratiole n’est pas constante dans ses effets; c'est ce qu'ont observé Wauthers et M. Cazin. Wendl en faisait grand usage comme purgalif dans la scrofule. Bergius la pres- 120 FLORE MÉDICALE crivait contre les fièvres intermittentes de saison. M. Cazin l’a associée dans ces cas à l'écorce de Saule, à l'Absinthe et à la racine d'Angéli- que ; il la faisait prendre dans du vin blanc ou dans de la bière; mais on sait que ces fièvres guérissent le plus souvent sans médication ; il n’y a donc rien à conclure des faits cités. Hufeland employait la poudre de gratiole à la dose de 8 grammes dans la scrofule; Joel l’administrait à la même dose, mêlée à la Can- nelle et à l’Anis vert, dans l'hydropisie. D'après Hanin, un herboriste de Paris s'était acquis une grande réputation en faisant prendre du vin de gratiole dans les hydropisies; mais, nous l'avons déjà dit, c'est un remède dangereux, qui a besoin, pour être employé, de toute la science et la prudence du médecin. Quoique Muhebeek, Wolff et Scudamore l'aient employée contre la goutte, elle n’est plus usitée aujourd’hui dans cette maladie. L'eau #édicinale d'Husson, dont l'usage est si répandu en Angleterre contre les affections goulteuses et rhumatismales, doit surtout son aclion au Colchique. La gratiole a encore été prescrite sous la forme de lavements comme anhelmintique et surtout contre les ascarides vermiculaires. On l’a employée sous la même forme comme révulsif dans les affec- tions cérébrales. D'après Kroskevski (Desruelles, A/4/. vénér., t. 1, page 280), la gra- tiole est très-utile dans les ulcères, les nécroses, les caries, les dou- leurs ostéocopes, etc. Stoll et Swediaur l’annexaient au rob de Sureau et au sublimé corrosif, contre les dartres et les plaies syphilitiques ; mais c’est certainement au sublimé qu'il fallait rapporter dans ces cas les bons effets observés. Matthiole et Césalpin croyaient que la gra- tiole pilée et appliquée sur les plaies en hâtait la cautérisation ; Murray adopte cette opinion sans qu'elle ait jamais été démontrée par aucun fait. Au résumé, la gratiole est une plante qui pourrait très-certaine- ment rendre de grands services, si les médecins lemployaient plus souvent et s'ils la soumettaient à une observation clinique rigoureuse. Les racines et les tiges de la gratiole de Brown (Gratiola Monnie- ria L., Herpestris Brownii Pers.), des Indes orientales, sont usitées, dans leur pays d'origine, comme apérilives, diurétiques et alexi- tères. La gratiole du Pérou (G. peruviana A.) jouit des mêmes pro- priélés que la graliole officinale. Quoique peu employée en médecine homæopathique, la gratiole DU XIX SIÈCLE, 121 est mentionnée dans les auteurs de cette école ; son signe est Ag et son abréviation Grat. GRENADIER Punica Granatum L. { Granatées. ) Le Grenadier commun est un arbre de moyenne grandeur. Sa tige, haute de 5 à 7 mètres, irrégulière et tordue, se divise presque dès la base en nombreux rameaux opposés, tétragones, épineux, portant des feuilles opposées, courtement pétiolées, lancéolées, entières, lisses et luisantes, glabres, d’un beau vert. Les fleurs, d'un beau rouge, sont presque solitaires et sessiles au sommet des rameaux. Elles présentent un calice en entonnoir, épais et charnu, coloré, à tube adhérent avec l'ovaire, à limbe partagé en cinq divisions triangulaires, obtuses; une corolle à cinq pétales sessiles, arrondis, entiers, un peu chiffon- nés, insérés au sommet du tube calicinal, ainsi que les étamines qui sont très-nombreuses, à filets rouges et subulés, à anthères réni- formes. L'ovaire est infère, adhérent avec la base du tube du calice, à plusieurs loges disposées sur deux étages superposés, renfermant un grand nombre d’ovules attachés à des placentas gros et saillants qui occupent le côté interne ou externe de chaque loge ; il est surmonté d'un style simple, renflé à la base, lisse, glabre, terminé par un stigmate glanduleux, discoïde et aplati. Le fruit est une capsule glo- buleuse, de la grosseur du poing, couronnée par les dents du calice ; le péricarpe dur, coriace, d’un jaune rougeàlre, est partagé intérieu- rement en un grand nombre de loges disposées sur deux étages, séparées par des cloisons membraneuses et renfermant chacune une graine polyédrique, irrégulière, à tégument charnu et succulent. Hagirar. — Le grenadier passe pour être originaire du nord de l'Afrique; il s'est propagé dans le midi de l'Europe, où on le cul- tive en grand comme arbre fruitier. PARTIES USITÉES. — L'écorce de la racine, les fleurs, les fruits, l'écorce des fruits. Récozre. — Les fleurs du grenadier, sauvage ou cultivé, sont con- nues dans le commerce sous le nom de balaustes ; on les récolte à leur parfait épanouissement ; on doit préférer celles de l'arbre sauvage ; on les fait dessécher rapidement et on les conserve dans un endroit sec, pour ne pas leur enlever leur belle couleur rouge. Les fruits, 122 FLORE MÉDICALE nommés grenades, sont récoltés à leur maturité. [ls se conservent très-longtemps si l’on a soin de fermer l'ouverture calicinale supé- rieure avec un petit tampon d’étoupe. Ce sont les graines que l'on mange ; leur tégument charnu et succulent est rouge, sucré et un peu acide. L’écorce du fruit, formée par le calice, porte le nom de Wali- corium (cuir de pomme); elle se trouve dans la droguerie en frag- ments secs, durs, coriaces, d’un brun rougeàlre à l'extérieur et jau- nâtre en dedans ; sa saveur est amère et astringente. La racine de grenadier, dont on emploie surtout l'écorce, est noueuse, ligneuse, pesante, jaune; sa saveur est astringente ; l'écorce est gris cendré en dehors, jaune en dedans; elle porte des fragments de bois qui y adhèrent; son liber est rude; elle est fibreuse et astrin- gente ; elle n'est pas amère. Humectée d'eau, elle teint le papier en jaune, qui devient noir au contact d’un sel de fer. On falsifie, dit-on, l'écorce de grenadier du commerce avec celle de Berberis ou Épine- vinette el avec celle de Buis ; la première se distingue par sa couleur vive et par la belle coloration jaune qu’elle donne à la salive, quand on la mâche ; on reconnait Ja seconde à son amertume, à son liber lisse et luisant et en ce qu’elle ne porte jamais de bois adhérent. Mais une fraude beaucoup plus fréquente consiste à mélanger l'écorce des tiges avec celle des racines; on reconnait l'écorce des racines à l'absence de productions cryptogamiques, tandis que sur celle des tiges de grenadier, on trouve divers Cryplogames, tels que l'Opogra- pha serpentina, le Verrucaria leinitata, ete. Composirion cuimique. — Les fleurs et les écorces des fruits de grenadier sont riches en lannin et en acide gallique. L'écorce de ra- cine à été analysée par M. Mitouard, et plus tard par M. Latour de Trie ; elle contient du tannin, de l'acide gallique, de la résine, de la cire, de la matière grasse, de la mannite, et, suivant M. Landerer, une matière amère cristalline, nommée granaline, différente de la matière cristallisée, sucrée, blanche, que M. Latour avait nommée grenadine et qui est de la wannite. L'épisperme que l'on mange renferme du sucre, de l'acide gallique et de l'acide tartrique. Usaces. — Les fleurs ou balausles et l'écorce des fruits du grena- dier sont d'excellents astringents que l’on emploie duns le Levant pour expulser les vers el surtout le lænia. L'écorce de racine et surtout l'écorce fraiche de racine de grenadier sauvage est un des læniacides les plus constants dans leurs effets, Les propriétés anthelmintiques DU XIX‘ SIÈCLE, 123 de cette écorce étaient connues des anciens. Dioscoride les men- tionne. Oubliées pendant longtemps, elles furent rappelées avec suc- cès par Buchanan en 1807. L'écorce de grenadier réussit très-bien contre le botryocéphale à anneaux courts, mais elle est moins efficace contre le botryocéphale à anneaux longs. Le plus souvent les insuccès doivent être attribués au mauvais choix de l'écorce, ou au mode vicieux d'administration, On doit suivre pour l'emploi de ce médica- ment les préceptes indiqués par MM. Mérat et Legendre. Il est d’ail- leurs inutile, quoi qu'on ait prétendu le contraire, d’avoir exclusi- vement recours à l'écorce de racine fraiche: les observations publiées par MM. Legendre, Grisolle, Dechambre, etc., ont démontré que l'écorce sèche, macérée dans l’eau pendant vingt-quatre heures, el administrée en apozème concentré, produisait les meilleurs effets. La dose est de 60 grammes pour deux verres d’eau, En Abyssinie où le tænia est extrèmement commun, on fait usage de l'écorce de racine de grenadier. On l’administre en décoction concentrée; mais elle est moins certaine dans ses effets que le Kousso {dont nous parlons p. 198 de ce volume), et que le Musenna (dont nous parlons p. 341 du même volume. Les différentes parties du grenadier, mais plus spécialement les fleurs et les écorces des fruits, ont été enrployées souvent en raison de leur astringence, contre la diarrhée, la dysenterie, les flux muqueux, les engorgements articulaires, les inflammations de la bouche , des gencives, du larynx, dans la leucorrhée, la chute du rectum. Avec les graines charnues de la grenade, on prépare un sirop d'agrément, qui jouit de propriétés tempérantes et rafraichissantes. La médecine homæopathique fait usage de l'écorce de grenadier comme astringente et anthelmintique ; son signe est Aya et son abréviation granat. GROSEILLIER Ribes rubrum et nigrum L. (Ribésiées. ) Le Groseillier commun (Æ16es rubrum L.) est un arbrisseau haut de 1 à 2 mètres, dont la tige, couverte d'une écorce d'un brun cendré, se divise dès la base en rameaux portant des feuilles alternes, pétiolées, échancrées à la base, à cinq lobes dentés, d’un vert clair, glabres ou à peine pubescentes, Les fleurs, d’un jaune verdàtre, sont 124 FLORE MÉDICALE disposées en grappes axillaires pendantes ; les pédicelles sont munis, à leur base, de bractées très-courtes, obtuses. Elles présentent un calice glabre, tubuleux, à limbe rotacé, partagé en cinq lobes étalés; une corolle à cinq pétales glabres, insérés à la gorge du calice, ainsi que les cinq étamines; un ovaire infère, simple, globuleux, plurio- vulé, surmonté de deux styles plus ou moins soudés. Le fruit est une petite baie globuleuse, charnue, succulente, rouge , plus rarement blanche, couronnée par les dents du calice, et renfermant un petit nombre de graines mucilagineuses. Le Groseillier noir ou Cassis (22. nigrum L.) se distingue du pré- cédent par ses feuilles glanduleuses, aromatiques; ses fleurs verdà- tres, rougeàtres en dedans; son calice pubescent, glanduleux, à limbe élargi et campanulé; son fruit noir et aromatique. Le Groseillier à maquereau (2. Uva crispa L.) est un arbrisseau très-rameux, à branches diffuses, armées de fortes épines, portant des feuilles velues pubescentes, et des fleurs solitaires, géminées ou ternées, à pétales pubescents. Le fruit, verdâtre ou rougeûtre, est plus gros et moins acide que dans le groseiller commun. Hagrrar. — Ces trois arbrisseaux, qui habitent les bois et les haies de l’Europe centrale, sont cultivés dans tous les jardins frui- tiers. PARTIES USITÉES, — Les fruits. Récore. — Lorsqu'on veut les manger, les fruits des divers gro- seilliers doivent être récoltés à leur maturité. Pour la préparation des gelées, des sirops et des conserves, on doit cueillir les fruits avant qu'ils soient tout à fait mürs. Composirion cuimique. — Les fruits des divers groseilliers, et sur- tout ceux du groseillier rouge contiennent de l'acide citrique, de l'acide malique, de la pectine, du sucre, une matière azotée, une matière colorante. La quantité d'acide citrique contenu dans les groseilles rouges et les groseilles à maquereau, est assez grande pour que M. Tilloy de Dijon ait proposé de l'extraire industrielle- ment. Les fruits et les feuilles du cassis (22. #igrum L.), renferment en outre un principe aromatique très-odorant. UsaGes. — La groseille est beaucoup plus importante sous le rap- port économique et industriel qu'au point de vue médical. Dans les années d’abondance, les fruits écrasés donnent, par fermentation, un vin assez agréable, qui se conserve mal, mais qui produit par DU XIX° SIÈCLE. 125 distillation un alcool très-estimé. Ces fruits écrasés avec quelques Cerises aigres (Merises), donnent un suc épais, visqueux, qui, élant abandonné à la cave pendant vingt-quatre heures, subit la fermen- tation pectique, pendant laquelle il se prend en masse et s’éclaireit ; ce suc, filtré, peut se conserver d’une année à l’autre dans des bou- teilles, par le procédé d’Appert. Lorsque dans ce suc on fait fondre, à une très-douce chaleur, le double de son poids de sucre, on obtient le sirop de groseilles, très-employé à la dose de 60 à 100 grammes dans un litre d'eau, comme tempérant et rafraichissant dans les phleg- masies aiguës, les fièvres adynamiques, ete., ete. Les groseilles chauf- fées avec un peu d’eau, donnent un suc qui, étant additionné d’une quantité suffisante de sucre, produit la gelée de groseilles. On assure que la gelée de groseilles, appliquée sur les brûlures, calme les douleurs et prévient la formation des phlyctènes. Le suc et le sirop de groseilles sont regardés comme diurétiques ; mêlés à l’eau, ils forment une boisson agréable que l’on donne aux malades atteints de scorbut, de rougeole, de scarlatine, de gastrite, d’entérite, de phlegmasies gastro-intestinales chroniques, ete., etc. Dans quelques contrées du Nord, on fait sécher les groseilles dans un four légèrement chaufté; on les conserve ensuite dans des bocaux ou des boîtes de fer-blanc parfaitement closes. La groseille à maquereau tire son surnom de l’usage que l’on en fait en Angleterre pour accommoder les poissons de ce nom. Les fruits du groseillier noir, écrasés et mêlés à de bonne eau-de- vie, servent à préparer la liqueur connue sous le nom de cassis ; on l’aromatise avec le girofle, la cannelle, etc., et on la sucre. Celle qui est préparée en Bourgogne jouit d'une très-grande réputation. GUI Viscum album L. (Loranthacées.) Le Gui, généralement désigné sous le nom de Gui de Chêne, est un arbrisseau parasite, s'implantant sur l'écorce des arbres par un empâtement radiculaire. La tige, longue de 0",35 à 0,65, se divise dès la base en rameaux nombreux, articulés, dichotomes ou poly- chotomes, divergents, diffus, rudes au toucher, glabres, formant une toufle globuleuse; ils portent des feuilies opposées, épaisses, 126 FLORE MÉDICALE charnues, oblongues, obluses, d'un vert jaunâlre, marquées de cinq nervures parallèles et convergentes, et atténuées en une base cana- liculée un peu embrassante. Les fleurs dioïques, verdâtres, petites, peu apparentes, sessiles, accompagnées de courtes bractées, sont groupées en petit nombre à l'extrémité des rameaux. Les mâles pré- sentent un calice à limbe quadrifide; quatre élamines, à anthères sessiles, soudées dans toute leur étendue à la face interne des divisions du calice. Les femelles ont un calice à tube soudé avec l'ovaire, à limbe très-court, partagé en quatre petites dents; une corolle à quatre pétales écailleux, charnus, élargis à la base ; un ovaire infère à une seule loge contenant {rois ovules dont deux rudimentaires, surmonté d'un stigmate sessile et obtus. Le fruit est une baie muci- lagineuse, blanche, du volume et de la forme d’une groseille, cou- ronnée par le rebord du calice, et renfermant une petite graine verte. HagiraT. — Le gui se trouve dans la plus grande partie de l'Eu- rope. Il vit en parasite sur les arbres, notamment sur le Pommier, le Poirier, le Peuplier, le Sorbier, l'Aubépine, etc. On le trouve très- rarement sur le chêne. C’est, dans certaines contrées, un fléau re- douté des agriculteurs, et qui se propage avec une déplorable facilité. I n’y a donc pas lieu de s'occuper de sa culture, qui ne pourrait guère intéresser que les physiologistes. PARTIES USITÉES. — Autrefois l'écorce et les fruits. Récozre. — Lorsqu'on croyait aux propriétés dites merveilleuses du gui, on récoltait la plante en automne. On en séparait l'écorce que l’on faisait sécher et que l’on conservait dans des vases bien fermés, en lieu exempt d'humidité. Les fruits n'étaient employés qu'à l’état frais. COMPOSITION CHIMIQUE. — À l'état frais, le gui possède une odeur désagréable, une saveur âcre et amère. On a trouvé dans son écorce une matière glutineuse analogue au caoutchouc, un extrait résineux, un extrait muqueux et un principe astringent. D'après M. Henry (Journ. de pharm., À N, p. 338), les fruits du gui contiennent de la glu, de la cire, de la gomme, une matière-visqueuse insoluble, de la chiorophylle, des sels à base de potasse, de chaux et de magnésie, de l’oxyde de fer, ete. Les feuilles et les tiges du gui, tombées à l’état de pourriture dans un lieu humide et pilées avec de l’eau fraiche, donnent une sorte de glu qui contient un principe particulier auquel M. Macaire DU XIX° SIÈCLE. ati a donné le nom de wscine (Journal de chimie médicale, février 1834). Usaces. — Tout le monde a entendu parler de l'espèce de culte que les Gaulois professaient pour le gui, plante sacrée que les Druides, leurs prêtres fatidiques, recueillaient en grande pompe, avec une serpelte d'or, à certaines époques de l’année. Selon eux, cette plante magique, dont on se servait pour la bénédiction de l’eau qu'on distribuait au peuple, pour purifier, pour répandre les grâces de la fécondité, pour guérir toutes les maladies, et combattre les sortiléges, était la panacée universelle. Les vieilles idées, surtout celles qui tiennent à un eulte même abandonné, traversent les siècles, et l’on est tout étonné d'en retrou- ver la trace, encore vivante, dans les époques de civilisation avan- cée. Ce n’est pas seulement Pline, Théophraste, Matthiole, Paracelse, qui ont exalté les vertus du gui, particulièrement contre l'épilepsie. Dalechamp, Boyle, Koelder, Kolbatch, Jacobi, Fraser, etc., préten- daient avoir obtenu de cette plante de grands succès contre la même maladie. Dehaen la plaçait sur la même ligne que la Valérianne. Boëerhaave disait s'en être servi avantageusement contre les névroses, Koelder contre l'asthme convulsif, Kolbatch contre la chorée, Brand- ley contre l’hystérie, Frank contre la toux convulsive rebelle, Du- mont de Gand contre la coqueluche. Dubois de Tournay publia même un travail circonstancié à l’appui des propriétés, reconnues au- jourd’hui à peu près fabuleuses, du gui, plante à laquelle Tissot, Cullen, Des Bois de Rochefort et Peyrilhe refusent loute espèce d'ac- tion. M. Guersant, qui ne rejette pas entièrement l’usage du gui, et qui recommande l'écorce, pense que le mode d'administration de celte plante n'est pas sans influence sur ses propriétés. Néanmoins, nous croyons que c’est avec raison qu'on la rejette de la matière mé- dicale pour le traitement des maladies précitées, de mème que pour celui de la diarrhée, de la dysenterie, des écoulements hémorrhoï- daux, de la goutte, de l'apoplexie, des engorgements lymphatiques, de l’æœdème, etc. GUIMAUVE Althæa officinalis L. (Malvacées - Malvées.) x La Guimauve officinale est une plante vivace, à racine longue d'environ 0",35, de la grosseur du doigt, fusiforme, charnue, mu- 128 FLORE MÉDICALE cilagineuse, blanc jaunâtre, simple ou quelquefois rameuse, pivo- lante. La tige, haute de 1 mètre à 1,50, cylindrique, cotonneuse, rameuse, dressée, ferme, porte des feuilles alternes, pétiolées, cordi- formes, à trois ou cinq lobes peu marqués, aigus, crénelés, molles et douces au toucher, d’un vert blanchâtre, surtout en dessous. Les fleurs, blanchâtres ou rosées, presque sessiles à l’aisselle des feuilles supérieures, forment une sorte de grappe terminale. Elles présen- tent un calicule de six à neuf divisions étroites et aiguës; un calice monosépale à cinq divisions ovales, très-aiguës, acuminées; une corolle à cinq pétales cordiformes, légèrement soudés à la base entre eux et avec les filets des étamines, qui sont en nombre indéfini et monadelphes; un ovaire composé de plusieurs carpelles cunéi- formes verticillés, surmontés par un nombre égal de styles. Le fruit est déprimé, orbiculaire, composé de carpelles nombreux, tomen- teux, verticillés autour du prolongement de l'axe, se séparant à la maturité, et renfermant chacun une seule graine réniforme et mu- cilagineuse. Hagirar. — La guimauve croît dans presque toute l'Europe cen- trale et méridionale; elle habite les champs, les bords des ruis- seaux, elc. Currure. — Cette plante est cultivée en grand pour les usages médicinaux. Elle est rustique el croit dans tous les terrains, mais de préférence dans les sols légers, frais, humides même et assez pro- fonds. On la propage en général par graines, que l’on sème au prin- temps, en planches ou sur couche, et de préférence à lexposition de l’est. On peut encore la multiplier par éclats de pied faits à l’au- tomne; mais ce procédé ne donne pas d’aussi bons résultats. PARTIES usiTÉES. — Les racines, les feuilles, les fleurs. Récocre. — La racine de guimauve peut être arrachée dès Ja seconde année; celle que le commerce nous fournit vient du midi de la France, et principalement de Nimes et de Narbonne; elle est blanche, mondée de son écorce, d'une odeur faible, d’une saveur mucilagineuse, un peu sucrée. Elle doit être choisie sèche et peu fibreuse ; on la fait sécher au soleil ou au four très-légèrement chauffé. On lui a, dit-on, substitué quelquefois la racine de la Rose- trémière ou alcée dont nous. avons parlé {tome 1, page #2) ; elle est plus grosse, plus fibreuse, moins mucilagineuse ; elle jouit d’ailleurs des mêmes propriétés et est très-employée en Orient. DU XIX° SIÈCLE. 129 On a prétendu à tort que l’on blanchissait la racine de guimauve avec l’eau de chaux ; il est certain, au contraire, que les alcalis caus- tiques et terreux colorent cetle racine en Jaune. Les feuilles de guimauve sont d'autant plus mucilagineuses, qu’elles sont cueillies plus jeunes, On attend cependant qu'elles aient acquis leur parfait accroissement, ce qui a lieu en juin, avant la floraison ; on préfère celles du sommet des rameaux ; on les fait sécher à l’étuve et mieux au grenier. Les fleurs doivent être cueillies en juillet, vers midi, lorsque la rosée est parfaitement dissipée et par un temps sec; on doit les faire sécher rapidement à l’ombre et les conserver à l° abri de l'humidité; on rejette celles qui sont noirâtres. ComposiTiON CHIMIQUE. — Toutes les parties de la guimauve sont riches en matière mucilagineuse. La racine renferme de la gomme, de l’amidon, une matière colorante jaune, de l’albumine, de l’as- paragine, du sucre de canne, une huile fixe. L'asparagine est une substance azotée, très-intéressante au point de vue chimique, dont nous avons parlé dans la BOTANIQUE GÉNÉRALE. Quoiqu'on lui ait attribué des propriétés diurétiques, elle n'intervient nulle- ment dans les propriétés thérapeutiques de la racine de guimauve ; c'est la même substance que M. Bacon, pharmacien à Caen, a ex traite de la guimauve en 1827, et qu'il avait désignée sous le nom d'althéine. Usages. — Les feuilles et les racines de guimauve constituent un de nos meilleurs émollients. On les emploie en décoction #tus et extra dans toutes les inflammations, les phlegmasies aiguës, locales ou générales. On s’en sert en décoction et sous forme de cataplasmes, pour calmer les douleurs et hâter la maturité des abcès, des phleg- mons; en infusion, sous forme de lavements, comme émollientes et légèrement laxatives. Les fleurs, en infusion, sont données sous forme de tisane, dans les catarrhes, pour calmer la toux. On préfère la décoction des racines dans les inflammations gastriques et intes- tinales, ainsi que pour combattre les empoisonnements par les sub- stances âcres et irritantes. Une racine de guimauve, bien propre et bien nettoyée, constitue le meilleur hochet que l’on puisse donner aux enfants pour calmer les douleurs de la dentition. On s'en est servi quelquefois, en guise d’éponges préparées, pour dilater les trajets fistuleux; mais on pré- fère en général, la racine de gentiane pour cet usage. Flore, T. I!. 9 130 FLORE MÉDICALE . La racine de guimauve entre dans le sirop de guimauve; mais la pâte dite de guimauve, du Codex, n'en contient pas. Dans divers pays, plusieurs plantes sont employées pour rempla- cer la guimauve. Aux Indes orientales, en Amérique et en Afrique, on emploie la racine du S2da rhombhfolia L. (vulgairement Fausse Guimauve); à la Réunion (Bourbon), celle du Wal/{heria indica, de Jacquin. GUTTIER Cambogia Gutta L. Mangostana Cambogia Gærtn, Garcinia Rich, (Guttifères.) Le Guttier ou Mangostan-Guttier est un grand arbre, lactescent dans presque toutes ses parties. La tige se divise en rameaux nom- breux, couverts d'une écorce noirätre, portant des feuilles opposées, pétiolées, ovales, aiguës, entières, coriaces, glabres, luisantes, mar- quées de nervures latérales parallèles. Les fleurs, petites, herma- phrodites, sont groupées en petits bouquets sessiles à l’aisselle des feuilles qui terminent les jeunes rameaux. Elles présentent un calice gamosépale, caduc, profondément divisé en quatre lobes obtus; une corolle à quatre pétales concaves, très-obtus, alternant avec les divi- sions du calice ; seize étamines hypogynes, libres; un ovaire simple, libre, globuleux, à huit loges uniovulées, surmonté d’un style très- court que terminent quatre stigmates presque sessiles et persistants. Le fruit est une capsule globuleuse, jaunàtre , de la grosseur d’une orange, marquée de huit côtes peu saillantes; l'enveloppe extérieure est dure et coriace comme celle de la grenade ; l'intérieur est divisé, par des cloisons minces et membraneuses, en huit loges remplies d'une pulpe charnue et contenant chacune une seule graine dépour- vue d’albumen. Nous renvoyons à l’article MaxGosran (p.285 de ce volume) pour ce qui est relatifau Mangostana indica Rumph. (Garcinia Mangostana L.). Hagrrar. — Les gultiers croissent aux Indes orientales. Peu cul- livés dans leur pays natal, ils sont à peine connus en Europe, et on ne les trouve que bien rarement dans les grands jardins botaniques ; ils exigent la serre chaude, où leur conservation et leur propagation sont assez difficiles. ; Parties ustrées. — La gomme-gutle ou suc concrété qui découle de la plante; les fruits. DU XIX° SIÈCLE. 131 Récorte. — C'est Charles de Lécluse qui, le premier, à men- tionné la gomme-gutte ; et c’est Paul Hermann qui en indiqua le pre- mier la véritable origine, en l’attribuant à deux arbres appelés Car- capulli, que les botanistes modernes ont nommés Garcinia Cambo- gia et Garcinia Morella. Linné confondit ces deux arbres sous le nom de Cambogia Gutta. Gærlner les distingua l’un de l’autre, en les nommant Mangostana Cambogqia et Mangostana Morella. Des- Rousseaux leur restitua le nom générique de Garcinia, mais en les distinguant sous les noms de Garcinia Cambogia el Garcinia Morella. La gomme-qutte de Ceylan à été décrite par M. Christison. Elle est en masse arrondie et aplatie, du poids de 400 grammes environ: elle est formée de larmes agglomérées, laissant entre elles des inter- valles; elle n’a pas été purifiée comme celie de Siam; elle ne s’'émul- sionne pas avec l’eau, et ne pourrait pas servir pour la peinture. La gomme-quite du commerce en canons ou en bâtons (pipe Camboge des Angl.) se tire de Siam et de Camboge. Elle arrive en général de Chine en Angleterre par Singapore; il parait qu'il en vient aussi de Borneo. Les Malais l'envoient à Singapore, où les Chinois la purifient et la façonnent. Les rouleaux ont de 0",03 à 0",06 de diamètre; ils sont faits à la main ou coulés dans des tiges de bambou, comme le démontrent les impressions longitudinales et parallèles qu'ils pré- sentent. Cette gomme est jaune-orange, un peu fauve, recouverte sou- vent d’une poussière jaune verdàtre; elle est opaque, à cassure con- choïde; elle est inodore ; sa saveur, nulle d’abord, devient bientôt âcre. La gonune-quite du commerce en masses où en gäleaux (cake Cam- boge des Angl.) est en masses informes, bien différentes de celles qui résultent de la soudure des canons. Ces masses pèsent de 1000 à 1500 gr. Elles renferment des débris de branches et de pétioles. La gomme-gulte en question forme avec l'eau une émulsion jaune et gluante. La gomme-gutte du Garcinia Camboqgia (Cambogia Gutta L.) a longtemps passé pour être la gomme-gutte du commerce. Mais le pro- duit que le Garcinia Cambogia fournit diffère dela vraie gomme-gutte par l'huile volatile qu’il contient, et par sa résine qui est soluble dans l'éther. Nous signalerons encore comme se rapprochant de la gomme- gutte la gomme-résine du Stalagmite de Camboge (S/alagmites cam- bogioides Murray, Xanthochymus pictorius Murray), la résine de Massi 132 FLORE MÉDICALE qui découle du Massi (Woronobea coccinea Aubl.), grand arbre de la Guyane, et le Baume de calabu où Baume Marie, produit par un Calophyllum (voir au mot CaLaBa, t. 1, p. 224). ComposiTion CHIMIQUE. — D'après M. Christison, la gomme-gutte en canons ou en bätons contient : résine séchée à 104° centigrade, 74,2; arabine, 21,8; eau, 4,8. La gomme-gulte en masses renferme : résine, 64,7; arabine, 20,2; fécule, 5,6; ligneux, 5,3; eau, 4,2. Enfin, celle du Garcia Cambogia contient : résine, 66; arabine, 14; huile volatile, 12; fibre corticale, 5; perte, 5. Usaes. — La gomme-gulte est surtout employée dans les arts pour la peinture. Elle sert à colorer en jaune les fleurs artificielles. C'est la variété en canon qui est la plus estimée. La gomme-gulte est un des purgatifs drastiques les plus puissants que l’on connaisse. Elle entre dans la composition des pilules de Bontius, et des pilules écossaises d’Anderson. Elle agit plus particuliè- rement sur le gros intestin. On ladministre à la dose de 30 centi- grammes à À gramme. Les médecins homæopathes l'emploient quelquefois; son signe est Igt, et son abréviation Gutf. Ils la prescrivent comme dérivatif contre les hémorrhoïdes. Les fruits du guttier se mangent; ils sont légèrement acides et astringen(s. DU XIX° SIÈCLE. 153 HABZÉLI Habzelia æthiopiea Alph. D.C. Unona æthiopiea Dunal. Xilopia A. Rich. (Anonacées. ) L'Habzéli d'Éthiopie, appelé aussi Kanang ou Canang d'Éthiopie, Poivre d'Éthiopie, Maniguette, Poivre des nègres, etc., est un arbre de moyenne grandeur et d’un port élégant. La tige, haute de 8 à 10 mètres, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, ovales lancéolées, aiguës, glabres, lisses, d’un vert glauque en dessous. Les fleurs, blanches, sont solitaires à l'extrémité de pédoncules axillaires. Elles présentent un calice à trois divisions ; une corolle à six pétales disposés sur deux rangs, les intérieurs plus petits ; des étamines en nombre indéfini, à filets très-courts, claviformes, à anthères allon- gées ; un pistil composé d'ovaires nombreux, libres, sessiles, à une seule loge pluriovulée, surmontés d'un style court, terminés par un stigmale obtus. Le fruit se compose de plusieurs gousses charnues, cylindriques, noirâtres, longues de 0",07 à 0",08, de la grosseur d'une plume, fibreuses, flexibles, ridées, partagées en plusieurs loges dont chacune renferme une graine ovoïde et noirâtre (PI. 14). L'Habzéli aromatique ( Æ/abzelia aromatica Alph. D. C.) se dis- tingue du précédent par ses feuilles oblongues, acuminées, glabres, à pélioles velus; ses fleurs violettes, solitaires ou géminées; ses fruits pédicellés. Nous citerons encore les Habzélis ondulés (/7. undulata Alph. D. C.) et à fruits en ombelle (7. discreta Alph. D. C.). Hagrrar. — Ces arbres habitent les régions chaudes des deux con- tinents: ils se trouvent surtout dans les bois. Currure. — Les habzélis ne peuvent être cultivés chez nous qu’en serre chaude: ils demandent une bonne terre franche et douce, mélangée de terre de bruyère. On ne les à guère multipliés jus- qu'ici. Parties usirées. — Les fruits. Récocre. — Il y a, d’après plusieurs auteurs, une distinction à éta- blir entre les fruits de l’Æabzelia œthiopica Alph. D. C. (Unona œthiopica Dunal), que l'on nomme graines de Sélin, poivre d'A frique, poivre de singe, poivre des Maures, poivre d'Etliopre, et ceux de l'Uvaria aromatica Lamk (Unona uromatica Dunal, Unona conco- 134 FLORE MÉDICALE lor N.) qui, outre ie nom de Porvres d'Éthiopie qu'ils ont de commun avec les premiers, portent ceux de Maniguelte et de Poivre des nègres (E. A. Duchesne, répertoire des plantes utiles, p. 179). La réalité est qu'on les confond le plus souvent sous le même nom et sous la même origine. Ils sont très-rares dans le commerce. On ne les trouve guère que dans les droguiers. Usaces. — La présence du principe aromatique doit faire placer le poivre d'Éthiopie dans les stimulants généraux, et parmi les épices destinées à faciliter la digestion. Il est considéré comme sialagogue. Les Abyssins s’en servent contre les maux de dents. Les fruits de plusieurs espèces d'Habzéli sont prescrits, dans leur pays d'origine, comme stomachiques et digestifs. La plupart entrent dans la compo- sition des masticatoires, et souvent sont simplement mâchés pour combattre les anorexies, les affections asthéniques de l'estomac et des intestins, ainsi que l'énervement déterminé par les grandes cha- leurs (Voir l’article KaxaxG, p. 19% de ce volume). HELLÉBORE Helleborus niger L. I. grandiflorus Salisb. (Renonculacées-Helléborées. ) L'Hellébore noir appelé aussi Rose de Noël, Fleur de Noël, Hellé- bore à fleurs rouges, Herbe de feu, Rose d'hiver, est une plante vivace, à racine de la longueur et de la grosseur du doigt, brun noi- râtre, marquée d’anneaux circulaires, portant des vestiges d'écailles foliacées, couverte de fibres radiculaires grêles. Les feuilles, toutes radicales, sont grandes, longuement pétiolées, coriaces, fermes, pen- natiséquées, à folioles dentées, d’un beau vert foncé et luisant. Les tiges, ou hampes, sont nues, hautes de 0",20 à 0",30. Les fleurs, grandes, blanc rosé, sont solilaires ou géminées au sommet de ces tiges. Elles présentent un calice pétaloïde, à cinq sépales persistants ; une corolle à dix pétales très-courts, tubuleux, nectariformes; des élamines très-courtes, en nombre indéfini; un pistil composé de cinq à dix ovaires à une seule loge multiovulée, surmontés d’un style simple. Le fruit se compose de deux à dix follicules verticillés, coriaces, couronnés par le style, s'’ouvrant par la suture interne et renfermant de nombreuses graines (PI. 15). Nous devons citer également, comme ayant des propriétés ana- DU XIX° SIÈCLE. 135 logues : l'Hellébore fétide (Æ/e/leborus fœtidus L.) appelé aussi Fève de loup, Herbe au fi, Herbe aux bœufs, Herbe du cru, Marfouré, Par- ménie, Pas de lion, Patte d'ours, Pied de griffon, Pied de lin, Pom- melée ; l'Hellébore d'hiver (77. Ayemalis L., H. monanthus Mœnch, Eranthus hyemalis Salisb., Kallea hyemalis Birm., Robertia hyemalis Mérat), appelé aussi Fleur d'hiver et Tue-loup ; l'Hellébore d'Hippo- crate ou d'Orient (77. officinalis Salisb. /1. orrentalis Tourn.}, qui est peut-être le fameux Hellébore des anciens si en usage parmi eux dans les maladies mentales; l’Hellébore à trois feuilles (4. pumilus Sa- lisb., H. crifolius L., H. trilobus Lamk, Anemone grôenlandica Mül}., Chrysa borealis Schmaltz, Coptis trifolia Salisb.) ; enfin l'Hellébore vert (4. viridis L., Hellereboraster viridis Mœnch). Hagrrar. — L'Hellébore noir est commun dans la France méri- dionale. L'Hellébore fétide est également propre à la France. L'Hel- lébore d'hiver est une plante des Alpes. L'Hellébore d'Hippocrate est originaire de l'Orient. L'Hellébore à trois feuilles croît en Sibérie. L'Hellébore vert est indigène de France. PARTIES uSITÉES. — Les racines. RécoLte. — La racine d'Hellébore se récolte en automne. On la tire plus particulièrement de l'Allemagne ct de la Suisse. Elle perd la plus grande partie de ses propriétés par la dessiccation. Elle s’altère rapidement, surtout lorsqu'elle est pulvérisée. Il importe done de Ja choisir de date récente. On trouve souvent mélangées les racines des Hellébores fétide, noir et vert. Il est impossible à un œil même mé- diocrement attentif, de les confondre avec celles des Veratrum album (Varaire blanc, vulgairement Hellébore blanc) qui appartient à une autre famille (voir t. IF, p. 439). La racine d'Hellébore noir est noire en dehors et blanche en dedans; elle présente un tronçon très-court avec des radicules très- cassantes, de Ja même couleur ; sa saveur est âcre, nauséeuse, désa- gréable. Une fraude, plusieurs fois signalée, est la substitution de l’Actée des Alpes ou Herbe de Saint-Cristophe (Ac/ea spicata L.) à celle de l'Hellébore noir. La racine de l'Hellébore vert est formée de plusieurs tronçons d'un brun noirâtre, irréguliers, portant un grand nombre de radicelles ; elle est plus dure et plus ligneuse que la pré- cédente, ce qui tient à ce qu’elle est vivace, tandis que celle de l'Hel- lébore noir est bisannuelle, c’est-à-dire se détruit tous les deux ans, à mesure que la nouvelle se produit; son odeurest forte et nauséeuse ; 136 FLORE MÉDICALE sa saveur est très-amère; celte amertume, signalée par Murray, est, d'aprèsM. Guibourt, un bon caractère de l’'Heliébore vert. La racine de l'Hellébore fétide présente un tronc pivotant, ligneux, d'un gris noi- râtre, avec de nombreuses radiculesramifiées; son goût est désagréa- ble; à peine âcre, elle n’est nullement amère. Très-souvent on vend la racine de l’hellébore fétide à la place de celle de l'hellébore noir. ComMPosiTION CHIMIQUE. — D'après MM. Feneulle et Capron, la racine d'hellébore noir contient : huile volatile, huile grasse, acide volatil, matière résineuse, cire, principe amer, muqueux, ulmine, gallate de potasse, gallate acide de chaux, sel à base d'ammoniaque; et d’après Vauquelin : huile àcre et caustique, amidon, substance végélo-animale, sucre, matière extractive. Pour les auteurs de la première analyse, la matière active de la racine d'hellébore réside- rait dans le mélange d'acide volatil et de matière grasse. Vauque- lin attribue l’action de cette racine à l'huile àcre qu'il a signalée, mais qui parait être la même chose que le mélange de corps gras et d'acide volatil de MM. Feneulle et Capron. M. Bastick a séparé de l’hellébore une matière cristalline qui n’a pas été étudiée suffisam- ment ; on l’a nommée Lelléborine ; elle se présente sous la forme de cristaux transparents, d'une saveur désagréable et mordicante ; elle est neutre, non volatile , à peine soluble dans l’eau, peu soluble dans l'éther, très-soluble dans l'alcool ; elle est azotée. UsaGes. — Les racines des divers hellébores sont vénéneuses. D'après Orfila elles perdent une grande partie de leurs propriétés en vieillissant ; leur saveur d’abord douceàtre, devient, par la dessicca- tion, àâcre et mordicante. Employées à l'extérieur, elles excorient la peau, et, d’après Emmert, déterminent des vomissements lorsqu'on les applique sur les plaies. Employées à l'intérieur, elles amènent des vomissements, des déjections alvines abondantes, des vertiges, des tremblements, une grande prostration des forces, des convul- sions, un froid excessif, finalement la mort. A l'aulopsie, on con- state une vive inflammation du canal digestif. Vessel combattait les accidents produits par l'hellébore avec des laxatifs et desaromatiques ; mais les boissons délayantes et émollientes, et l’opium conviennent beaucoup mieux. Quant aux tisanes acidulées qui ont été quelquefois conseillées, elles sont certainement plus nuisibles qu'utiles. Les propriétés de la racine d'hellébore ont été mises à profit. Cullen employait cette racine en décoction contre la teigne et la gale, DU XIX° SIÈCLE, 127 mais en l'associant à un sulfare alcalin. Les Anglais en font encore usage dans les mêmes cas. Peyrilhe conseillait de faire avec la racine d’hellébore des pois à cautères. Elle a été surtout employée pour combattre les névroses et les névralgies ; il n’est peut-être pas de maladies ou de lésions des centres et des conducteurs nerveux contre lesquelles elle n’ait été administrée. Musa, Brassavole, Lor- ris, Vogel, Freinel, Brunner, Hildanus, Mead, ete., se sont disputés à qui ferait le plus d'éloges des propriétés médicinales de la racine d'hellébore, qui est incontestablement un purgatif drastique très- énergique, inmais dans tous les cas fort dangereux. Dans les temps anciens, Hippocrate, Mésué, Arétée, Avicenne, Celse, avaient vanté l'usage de la racine d’hellébore d'Orient contre la folie. Naguère encore Baglivi, Juncker et plusieurs autres la prescrivaient dans le même but. Mais, de nos jours, l’hellébore est abandonné à l'empi- risme dans le traitement des maladies de l’homme; ce qui tient pro- bablement à l'action irritante, caustique, dangereuse que cette plante exerce sur l'économie animale, et aussi aux substitutions, aux mélan- ges dont elle est l’objet. Elle entre dans la composition des pr/ules de Bacher. On l'administre quelquefois encore contre la gale, en pou- dre ou sous forme de pommade, de décoction, de teinture, de vin, de vinaigre ou d'extrait. Si la racine d’hellébore est à peu près délaissée pour la médecine de l'homme, elle est au contraire, el à bon droit, fort usitée dans la médecine vétérinaire. On emploie les racines des hellébores noir, fétide et vert, pour entretenir les cautères et les sétons des chevaux et des bœufs, et pour guérir le farcin. HENNÉ Lawsonia inermis L., L. alba Lamk., Alcana Arabum Bell. (Salicariées. ) Le Henné d'Orient, appelé aussi Alcana, Lausone, Mindi, Réséda des Antilles, Racine à farder, Troène d'Égypte, est un arbrisseau dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, couverte d’une écorce ridée, se divise en rameaux étalés, diffus, glabres, roides, aigus, légèrement tétragones au sommet, portant des feuilles opposées, presque sessiles, petites, ovales-lancéolées, entières, atténuées aux deux extrémités, glabres. Les fleurs, petites, blanches ou blanc jaunàtre, odorantes, 138 FLORE MÉDICALE sont disposées en panicules rameuses terminales. Elles présentent un calice à quatre divisions aiguës, glabres, persistantes ; une corolle à quatre pélales ovales, étalés; huit étamines, plus longues que les pétales ; un ovaire arrondi, à quatre loges multiovulées, surmonté d’un style et d’un stigmate simples. Le fruit est une capsule arrondie, pisiforme, brunâtre, à quatre loges polyspermes, surmontée par le style persistant. Le Henné épineux de Linné, appelé aussi Orcanette de Constanti- nople (Lawsonia spinosa L.), n’est qu'une simple variété du précé- dent, dont il se distingue par les extrémités de ses ramuscules plus aiguës et un peu piquantes. Le Henné à fleurs pourpres (Lawsonia purpurea Lamk.), que Linné a confondu avec le Lawsonia inermis, en diffère surtout par ses feuilles deux fois plus longues; ses fleurs inodores, d’un pourpre bleuàtre, à calice velu et à pétales connivents; ses fruits bacciformes, oblongs et bleuâtres Hagrrar. — Le henné se trouve aux Indes orientales, en Perse, en Arabie, en Égypte et jusqu'en Algérie; il a été introduit et naturalisé aux grandes Antilles. Cucrure. — Le henné est l'objet de cultures assez importantes aux Indes orientales, en Algérie et aux Antilles. En Europe, on ne le trouve que dans les jardins botaniques, où il exige la serre chaude. On le propage assez facilement de boutures et de graines, mais il est peu répandu. PARTIES uSITÉES. — Les feuilles. RÉCOLTE. — On trouve rarement entières dans le commerce les feuilles de henné des Indes orientales; elles sont le plus souvent en poudre, d'un brun jaunâtre. Le henné d'Égypte, qui est moins estimé, contient 20 pour 100 de sable. Celui d'Arabie n'en renferme que » pour 100. D'ailleurs, d'après le docteur Figari-Bey, professeur d'histoire naturelle au Caire, et selon M. Abd-el-Aziz-Herraouy, qui a publié un travail important sûr le henné, celui d'Égypte et celui d'Arabie, en tenant compte des impuretés qu'ils renferment, sont identiques. Composirion cHimiQuE. — D'après Berthollet, le henné ne contient pas de tannin, mais bien de l'acide gallique. Son infusion précipite en noir la solution de sulfate de fer (Journ. de pharm., &. X, p. 405). Les fleurs exhalent une odeur fort hircine; néanmoins on prépare DU XIX° SIÈCLE. 139 avec ces mêmes fleurs une eau distillée que l’on vend comme cosmé- tique en Orient. D'après M. Abd-el-Aziz-Herraouy, l'eau froide n'enlève rien au henné; l'eau bouillante lui prend son principe colorant; l'éther s'empare de la matière colorante verte, tandis que l'alcool dissout le principe actif; celui-ci est brun, résinoïde, soluble dans l'eau bouillante ; il possède toutes les propriétés du tannin, c’est-à-dire qu'il précipite la gélatine, noircit les sels de fer et réduit les sels de cuivre. M. Abd-el-Aziz nomme ce principe acide henno-tannique. Usaces. — Le suc des feuilles du henné épineux (Lawsonia spi- nosa L.) est employé, au Malabar, contre la purulence des urines et contre les affections de la peau. On prescrit les feuilles elles-mêmes contre les maladies cutanées. Ces feuilles, réduites en poudre fine et mises en pâte avec du suc de limon, servent, dans toute l'Asie, pour teindre en rose-orangé les mains, les pieds et les ongles des femmes. Les Égyptiens les ot pour teindre leur barbe et leurs cheveux. Les feuilles, broyées avec un peu d’eau de chaux, servent à teindre les cheveux, en Perse et en Turquie, et aussi la laine et le cuir. Les chefs de bourgades, au Sénégal, teignent la crinière et la queue des chevaux avec un cataplasme de feuilles de henné; les marques ainsi produites sur le poil des animaux sont en quelque sorte ineffacables. La racine sert de fard en Orient. Avec les fleurs, on prépare une eau distillée qui sert aux femmes comme cosméti- que (consultez pour les usages du henné aux Indes orientales la Matière méd. ind. d'Ainslie, t, IF, p. 190). HÉPATIQUE Hepatica triloba Chain. Anemone Hepatica L. (Renonculacées - Anémonées. ) L'Hépatique trilobée, appelée aussi Anémone hépatique, Hépa- tique printanière, Herbe de la Trinité, etc., est une petite plante vivace, à souche courte, émettant inférieurement des racines fibreu- ses. Les feuilles, loutes radicales, sont longuement pétiolées, échan- crées à la base, à trois lobes arrondis, un peu aigus, coriaces, d’un beau vert foncé et luisant en dessus, plus pâles en dessous. Les fleurs, bleues, rosées ou blanches, sont solitaires à l'extrémité de hampes grèles, velues, soyeuses, longues de 0,10 à 0",15. Elles 140 FLORE MÉDICALE présentent un involucre caliciforme, très-rapproché de la fleur, à trois folioles entières, ovales, aiguës, pubescentes; un calice péta- loïde, de six a neuf sépales ovales-lancéolés ; des étamines en nom- bre indéfini, très-courtes, à anthères blanc jaunâtre ; un pistil com- posé d'ovaires nombreux, libres, à une seule loge uniovulée, surmontés d’un style court et simple. Le fruit se compose de nom- breux akènes surmontés du style persistant (PI. 16). On trouve encore dans ce genre quelques espèces si peu distinctes de la précédente, que plusieurs auteurs n’en font que des variétés. HagiraT. — L'anémone hépatique est répandue dans les diverses régions de l’Europe; elle habite surtout les bois montagneux. On la cultive fréquemment dans les jardins, où elle fleurit au premier printemps. Cuzrure. — Celle plante est très-rustique ; et, bien que préférant la terre de bruyère, eile réussit dans tous les terrains frais et ombra- gés. On la propage aisément par graines. On peut aussi, quand les touffes sont fortes, les diviser, soit pendant la floraison, soit en au- tomne, en éclats qu’on aura soin de ne pas faire trop petits. PARTIES usirées. — Les feuilles et les fleurs. Récozre. — Les fleurs de cette plante paraissent au commence- ment de mars ; les feuilles peuvent être récollées à l'époque de la floraison ; on les fait sécher à l’étuve ou au grenier. Comrosirion caimique. — L'analyse de lhépalique n'a pas été faite ; mais c'est à tort que Peyrilhe la signale comme inerte et insi- pide; quoique moins âcre que les autres Renonculacées, elle n’en renferme pas moins un principe actif. Usages. — On a écrit que le nom d'hépatique avait été donné à la plante dont nous nous occupons, parce qu'on l'avait employée contre les affections du foie, dans les obstructions particulièrement. Toute la plante était regardée, et l'est même encore dans certains pays, comme vulnéraire, apéritive et astringente. On s’en servait en gargarismes contre les maux de gorge. En Amérique, on a employé l'hépatique contre les maladies des poumons. Sous forme de cata- plasmes, on l’a vantée contre les hernies, les affections des voies urinaires, et les maladies cutanées. Les feuilles d'hépatique passaient pour détersives. On préparait jadis une eau distillée d'hépatique, à l'usage des dames, pour faire disparaitre les taches de rousseur et pour blanchir la peau brunie par le soleil. Aujourd'hui l'hépatique DU XIX° SIÈCLE. 141 n'est plus usitée en France, tandis que dans d’autres payselle a encore des partisans. ( Voir aux mots ANÉMONE, t. EL. p. 82, PuLsarTiLce, t. I, p. 445, Renoncuce, 1. IE, p. 200.) HERNIAIRE Herniaria glabra L., H. alpestris Aubr., H. fruticosa Gouan. (Paronychiées-Illécébrées.) L'Herniaire glabre, vulgairement appelée Herniole, Herbe aux Hernies, Turquette, Herbe du Turc, etc., est une petite plante an- nuelle où bisannuelle, à racines grèles, fibreuses, blanchâtres. Les tiges, longues de 0",10 à 0",20, très-nombreuses, grèles, étalées et appliquées sur le sol, glabres, très-rameuses, diffuses, portent des feuilles opposées à la base, alternes à l'extrémité, entières, petites, ovales oblongues, glabres, vert jaunâtre, accompagnées de petites stipules scarieuses. Les fleurs, très-petites, vertes, herbacées, forment de petits bouquets latéraux, presque sessiles à l’aisselle des feuilles, dès la base de la plante. Elles présentent un calice à cinq divisions obtuses, un peu concaves, glabres, jaunâtres à la face interne; une corolle à cinq pétales filiformes ; cinq étamines, insérées sur un dis- que charnu qui revêt la gorge du calice; un ovaire libre, uniloculaire par avortement, uniovulé, surmonté de deux styles courts. Le fruit est une petite capsule membraneuse, oblongue, monosperme, indé- hiscente, enveloppée par le calice persistant. L'Herniaire velue (Herniaria hirsuta L.), regardée par quelques botanistes comme une simple variété de la précédente, en diffère par ses feuilles pubescentes et fortement ciliées ; ses tiges velues, héris- sées, ainsi que le calice, dont chaque division se termine au som- met par une longue soie; ses fleurs plus grandes et ses fruits plus gros. Hamrrar. — L'herniaire est commune dans presque toutes les ré- gions de l'Europe ; elle croit en abondance dans les terrains incultes et sablonneux, les champs en friche, au bord des étangs, etc. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où il suffit de semer ses graines en place, au mois de mars. Nommons aussi l'Herniaire Payco du Chili (4. Payco Molina) Parties usiTÉES. — Toute la plante. Récore. — Cette plante peut être cueillie pendant tout l'été. 142 FLORE MÉDICALE Cependant il vaut mieux la récolter à l'époque de la floraison, qui a lieu en juillet et août, On la fait sécher au grenier et au séchoir, et on la dispose en petites bottes cubiques un peu comprimées ; elle se conserve très-bien à l'abri de l'humidité, ComposirioN CHiMiQue. — L'herniaire est inodore; elle possède une saveur légèrement amère et astringente ; son infusion colore en brun foncé les persels de fer, ce qui indique la présence de la ma- tière astringente nommée guercitrin, plutôt que celle du tannin. Usages. — La plante dont nous nous occupons a été vantée, par Matthiole, contre les hernies, d'où lui sont venus les noms d’her- niaire, d'herniale, d'herbe aux hernies. Cet auteur la prescrivait con- tusée et appliquée en cataplasmes. La vertu de faire disparaître les hernies est aujourd'hui complétement déniée à l'herniaire, qui a été aussi prônée contre la morsure des vipères, contre les maladies des yeux, et surtout contre celles des voies urinaires. Bergius, Spidman, Peyrilhe, Murray semblaient avoir réduit les propriétés médicinales de l'herniaire à néant, quand le docteur Herpain de Mons et le doc- teur Van Denbrouk prétendirent la remettre en honneur comme diurétique lithontriptique; Mérat et Delens ont combattu cette opi- nion. En général on considère, avec ces derniers, l’action médicale de l’herniaire comme à peu près nulle. Cependant, il est encore des pays où on l’emploie. Au Chili et au Pérou on se sert de l'AHernaria Payco comme stomachique et anti- pleurétique. HIEBLE Sambucus Ebulus L., S. kumilis Lamk, {Caprifoliacées-Sambucées, ) L'Hièble ou Yéble, appelée aussi Petit-Sureau, Sureau-en-herbe, Eble, Euble, est une plante vivace, à racines longues, grosses, char nues, rameuses, blanchâtres. Les tiges, hautes de 1 mètre à 1,50, herbacées, annuelles, robustes, glabres, cannelées, à moelle très- abondante, simples, dressées, portant des feuilles opposées, à pétiole muni de deux stipules foliacées, ovales-aiguës, dentées, inégales, à limbe imparipenné, composé de cinq à onze folioles presque sessiles, oblongues-lancéolées, dentées, glabres et d’un vert foncé. Les fleurs, blanches, quelquefois rougeàtres en dehors, odorantes, sont grou- pées en faux corymbes plans, terminaux. Elles présentent un calice à DU XIX* SIÈCLE. 143 tube soudé avec l'ovaire, à limbe divisé en cinq lobes très-petits ; une corolle rotacée, à limbe partagé en cinq divisions ; cinq étamines libres, à anthères noirâtres, insérées sur le tube de la corolle; un ovaire infère, offrant trois à cinq loges uniovulées, surmonté d’un mème nombre de stigmates sessiles. Le fruit est une petite baie char- nue, noire, à suc d'un rouge foncé, et renferme trois à cinq petites graines. Hamrrar. — L'hièble est répandue dans toute l'Europe ; elle croît dans les champs incultes, particulièrement dans les bonnes terres fortes et argileuses, au bord des chemins, des fossés humides, etc. Cuzrure, — Cette plante, étant assez abondante à l’état sauvage pour suffire aux besoins de la médecine, n'est cultivée que dans les jardins botaniques, et quelquefois aussi dans les parcs d’agrément. Elle croît dans tous les sols, mais mieux dans les terres fortes et fer- tiles. On la propage aisément de graines, semées au printemps ou à l'automne, ou mieux par éclats de racines. Elle pousse avec une grande vigueur, et ne demande aucun soin. PARTIES usITÉES. — La. seconde écorce de la racine, la moelle, les feuilles, les fleurs, les baies et les semences. Récocre, — L'écorce de la racine doit être récoltée à l'automne : on enlève la première couche (épiderme) et on coupe par petites lanières ; on fait sécher le reste de l'écorce à l’étuve, et l’on con- serve à l'abri de l'humidité. Les feuilles, rarement employées sèches, sont récoltées pendant tout l'été. Les fleurs doivent être cueillies à leur parfait épanouissement, par un temps sec, et après que la rosée du matin a été dissipée; on les fait sécher rapidement au soleil et on les enferme en les comprimant dans des sacs en papier que l’on a soin de placer à l'abri de l'humidité. Lorsque la dessieca- tion est mal opérée, elles noircissent. Les fruits sont récoltés lorsqu'ils sont bien mürs, c’est-à-dire lorsqu'ils sont tout à fait noirs. La moelle peut être séparée de la tige à l'automne, lorsqu'elle commence à sécher et qu'elle est tout à fait blanche. Composirion cuimique. — Toutes les parties de l’hièble correspon- dent, par leur composition et leurs propriétés, à celles des Sureaux. Toutefois l'odeur de ses feuilles est plus vireuse, et celle de ses fleurs moins suave. Les baies contiennent les mêmes principes; cependant leur sue est plus rouge et plus persistant. (Voir l’article Sureav, IT, p.363.) 144 FLORE MÉDICALE Usaces. — La partie la plus active de l’hièble paraît être l'écorce de la racine. A petite dose, elle est considérée comme diurétique. Les paysans font an fréquent usage de l'écorce et même des feuilles de l’hièble comme purgatif diurétique. On à regardé pendant quel- que temps cette racine comme un spécifique des hydropisies. Les semences d’hièble, quoique purgatives, sont rarement usitées; elles contiennent une huile mucilagineuse que Haller recommandait dans les hydropisies. Les fleurs, comme celles du Sureau, sont calmantes et sudorifiques ; on les emploie en infusion, sous forme de lotions et de fomentations. Le suc des baies, évaporé en consistance d'extrait, constitue le Z?0ob d'hièble, léger laxalif que l’on administre à la dose de 4 à 10 grammes. Les feuilles d'hièble, contusées ou bouillies dans l'eau, sont employées dans les campagnes, sous forme de cataplasmes, contre les engorgements articulaires, lymphatiques, glanduleux, ete. La moelle de la plante, séchée et imprégnée d’une solution de nitrate de polasse, a été usitée pour appliquer des moxas. Les fleurs d'hièble, en infusion théiforme, entrent dans des boissons alcooliques fermentées; on s’en sert pour imiter le bouquet du vin de Sauterne. Avec le jus des baies d’hièble et de l’alun, on fabrique une liqueur destinée à colorer les vins, qui est connue sous le nom de fente ou vin de Fismes. C'est dans la ville de ce nom, en Champagne, qu'on prépare cette liqueur dont on fait un grand commerce. Cette indus- trie, très-ancienne, qui est tolérée, sinon autorisée, constitue pour- tant une véritable fraude. En général, on préfère les préparations au Sureau à celles des l'hièble. {Voir l’article Sureau, t. IE, p. 853.) HORMIN Salvia Horminum L. S. colorata Thore. Horminum sativum Mill. ( Labiées - Monardées.) L'Hormin, appelé aussi Sauge-Ormin ou Prudhomme, est une plante annuelle, à racines grêles et fibreuses. La tige, haute de 0",30 à 0,50, tétragone, velue, dressée, rameuse dès la base, porte des feuilles opposées, ovales oblongues, irrégulièrement crénelées, ob- tuses, hérissées de poils blanchätres; les supérieures ovales cordi- formes; les florales larges, aiguës, bractéiformes, bleu violacé, for- tement veinées de bleu plus foncé, formant par leur réunion une DU XIX° SIÈCLE. 145 touffe membraneuse colorée. Les fleurs très-petites, pourpre violacé, sont réunies par cinq ou six en faux verticilles, dont l’ensemble constitue une fausse grappe allongée. Elles présentent un calice tu- buleux, pubescent, à cinq dents inégales; une corolle irrégulière, à deux lèvres, la supérieure voùtée et un peu échancrée, l’'inférieure trilobée; deux étarmines, à filels très-courts, à anthères séparées par un connectif filiforme très-long; un ovaire composé de quatre demi-carpelles, surmonté d’un style simple à stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes ovoides trigones, entourés par le calice persistant. Cette plante présente une variété à bractées et à fleurs blanches. Hagirar. — L'hormin croît dans les régions méridionales de l'Europe. I! habite surtout les lieux secs. Cucrure. — Celte plante est peu cultivée en dehors des jardins botaniques ou d'agrément. Elle demande une exposition chaude et une terre légère. On sème en place, en avril et mai. On peut aussi semer en pépinière, el repiquer de même, pour planter à demeure, quand le jeune plant est assez fort. Parties usiTées. — Les feuilles, les fruits. Récozre. — Les feuilles d'hormin doivent être récoltées au mo- ment de la floraison; on les fait dessécher au grenier ; elles per- dent la plus grande partie de leur odeur et de leurs propriétés par la dessiccation. Les fruits se cueillent à leur maturité; on en sépare le péricarpe, et l’on fait sécher les graines qui sont {rès-petites. Composition cHimiQue. — L'hormin, comme toutes les plantes du genre Salvia, renferme deux principes :-une huile essentielle volatile, et une substance amère fixe. Usaces.— Dioscoride et Pline ont mentionné l'hormin qui a été longtemps regardé comme aphrodisiaque et employé contre les maux. d'yeux. En médecine française, l’hormin a cessé d’être usité. Il n’en est pas de même dans certains pays. Infusé dans du vin ou de la bière, il communique à ces liquides une propriété promptement eni- vrante. ( Voir l’article Sauce, t. HE, p. 284 à 287.) Flore, T. IL 10" 146 FLORE MÉDICALE HOUBLON Humulus Lupulus L. (Urticées - Cannabinées. Le Houblon est une plante vivace, à racines fortes, rameuses, drageonnantes. Les tiges, longues de plusieurs mètres, grêles, un peu anguleuses, rudes, couvertes de poils courts, robustes et crochus, sarmenteuses et volubiles, portent des feuilles opposées, munies de stipules, pétiolées, cordées à la base, palmées, à trois ou cinq lobes ovales-acuminés dentés, vert foncé et rudes en dessus, munies en dessous de glandes résineuses. Les fleurs sont petites, verdâtres et dioïques. Les fleurs mâles, disposées en grappes de cymes, axil- laires et terminales, ont un calice à cinq sépales presque égaux ; cinq étamines à filets très-courts, à anthères longues, dressées, mu- nies d’un connectif prolongé en pointe. Les fleurs femelles sont réunies par paires à l'aisselle de bractées membraneuses foliacées, dont l’ensemble constitue des épis compactes, ovoïdes où arrondis, axillaires et terminaux, pédoneulés, solitaires ou groupés en pani- cule. Elles présentent un calice formé d’un sac d'une seule pièce, membraneux et accrescent; un ovaire libre, ovoide, à une seule loge uniovulée, surmonté de deux styles terminés par de longs stigmates filiformes. Le fruit est une sorte de cône, composé des bractées et des sépales foliacés, à l'aisselle desquels se trouvent des akènes ovoïdes un peu comprimés, entourés de granules jaunes, ré- sineux, odorants et amers (/upuline où lupulin). Hagirar. — Le houblon est répandu dans presque toutes les ré- sions de l'Europe; il croit dans les haies, les buissons, sur la lisière des bois, dans les lieux frais et ombragés. On le cultive en grand dans quelques provinces, telles que l'Alsace, les Flandres, etc., pour la fabrication de la bière. Cucrure. — La culture du houblon présente quelques difficultés et exige une atlention particulière. Son succès dépend du choix du terrain, plus encore que de la manière dont elle est conduite. Le sol dans lequel le houblon réussit le mieux est léger et en même temps un peu substantiel. Rarement les tiges de la plante atteignent une hau- teur satisfaisante dans une terre sèche et pierrense. Elle réussit sur- tout dans les lieux humides et abrités contre les vents dominants. DU XIX° SIÈCLE. lA1 Du reste la culture du houblon appartient surtout à l'économie ru- rale ; aussi renvoyons-nous pour les développements à cet égard à la Flore agricole et forestière qui fait partie du RÈGNE VÉGÉTAL. PARTIES usiTÉEs. — Les inflorescences femelles, ou cônes, les feuilles, jeunes pousses, la matière jaune que l’on trouve à la base des écailles (/upulin ou lupuline), les racines. RÉCOLTE. — Les cônes verts du houblon se récoltent vers la fin du mois d'août. Par la dessiccation qui s'opère au four ou à l’étuve, ils deviennent jaunâtres ; lorsqu'ils sont secs, on les comprime dans des sacs. Les jeunes pousses du houblon, que l’on mange dans le Nord en guise d’asperges, se cueillent lorsqu'elles sont encore très-ten- dres. Les feuilles, rarement employées, se récoltent en juillet, les racines en automne. Le houblon du commerce, passé à travers un tamis de crin, donne de petits granules jaunes, que l'on monde des impuretés, par plusieurs tamisages successifs. C'est le /apaulèn où la lupuline. Ces gra- nules, considérés d’abord comme un principe immédiat, avaient été signalés par Planche, en 1813, comme possédant les principales propriétés du houblon. En 1827, M. Raspail entreprit de démontrer que cette matière, qui, à la loupe, paraît sous forme de petites gout- tes résineuses, transparentes et homogènes, était organisée; il la con- sidéra comme un pollen isolé, et la nomma pollen desorqanes foliacés. M. Lebaiilif constata l’organisation de ces granules. M. Guibourt n'admit pas l'opinion &e M. Raspail sur ce pollen isolé. M. J. Per- sonne, dans un travail important sur le houblon, a exprimé que ces granules étaient d’une nature glanduleuse; il a étudié leur organo- génie, et a cru voir qu'ils commençaient par une cellule interpo_ sée à celles de l’épiderme, et qu'à son entier développement cette cellule secrétait une matière résineuse, ce qui ne contredit par l'opinion de MM. Chevallier et Payen, qui regardent le lupulin comme le produit d’un organe destiné à protéger le fruit contre l’hu- midité, au moyen de la matière résineuse qu'il secrète. ComposiTion chimique. — Le houblon et le lupulin ont été étudiés au point de vue chimique par MM. Planche, Yves de New-York, Payen et Chevallier, Lebaillif, Pelletan, J. Personne et Trécul. Suivant MM. Payen et Chevallier, le Jupulin contient : huile volatile, lupuline, résine, gomme, matière extractive, osmazome (traces), malière grasse, acide malique, malate de chaux, sels. Le docteur Yves a trouvé 148 FLORE MÉDICALE que le lupulin renfermait, sur 120 parties, 3 parties de tannin, 10 de matière extractive, 11 de principe amer, 12 de fécule, 36 de résine et 46 de ligneux. M. J. Personne y a trouvé une huile volatile et de l'acide valérianique. L'huile volatile est jaunâtre, d’une odeur pro- noncée de houblon, d’un goût àcre ; elle est plus lourde que l'eau ; elle fut prise d'abord pour le principe narcotique, mais ce fait a été contredit par Wagner. Le lupulin est sous forme de petits grains dont la couleur varie d'un jaune verdàtre au jaune d’or ; il est peu soluble dans l'eau ; il se dissout mieux dans l'alcool et dans l’éther ; il possède une odeur d’ail très-prononcée ; sa saveur est âcre. La grosseur des grains varie de 20 à 30 centièmes de millimètre. Quoiqu'on ait donné souvent le nom de /#puline au lupulin, on désigne plus particulièrement, sous le premier de ces noms et sous celui de /upulite, le principe amer du lupulin qu’on en extrait par l'alcool ; ce principe est blanc ou jaunâtre, transparent, sans odeur, incristallisable, soluble dans 20 parties d’eau froide et dans 5 parties d’eau bouillante ; peu solubie dans l'éther, très-soluble dans l'alcool ; est neutre et non azotée (Liebig). Usaces. — Les cônes de houblon sont regardés comme fondants, toniques, amers et dépuratifs. On les emploie sous forme de lisane, et rarement d'extrait, dans les maladies de Ja peau, les scrofules, le rachitisme, etc. Le houblon excile l'appétit et favorise les digestions : Il augmente l'énergie vitale et la vigueur des organes. À dose élevée, il détermine l'accélération du pouls, élève la chaleur animale, pro- duit de la cardialgie, des troubles intestinaux sans déjections alvines ; il excite le système nerveux, délermine des pesanteurs de tête, l’en- sourdissement des membres, quelquefois des vomissements, sans vertiges ni céphalalgie. On lui attribue des propriétés narcotiques que M. J. Personne n'a pu constater. D'après M. Walter-Jauncey, il est sédatif et anodin, c’est-à-dire qu'il calme la douleur sans pro- duire le sommeil. Toutes les propriétés du houblon se trouvent réunies et mème exagérées dans le lupulin ; aussi a-t-on cherché à substituer celui-ci aux cônes autrefois employés. Suivant M. Yves, le lupulin serait aro- matique, tonique el narcotique ; il pourrait, dit-il, remplacer l'o- pium, sans avoir, comme celui-ci, l'inconvénient de fatiguer l'es- tomac et d'amener la constipation. Cette propriété a été constatée par M. W. Byrd Page, de Philadelphie, qui ajoute que le lupulin exerce DU XIX° SIÈCLE. 149 une aclion sédative puissante sur les organes génilaux de l'homme. Aussi M. Pescheck l’a-t-il employé contre les pollutions nocturnes, et MM. Debout et Van Den Corput s’en sont-ils servi contre la sperma- torrhée. M. Zambaco a constaté ses propriétés antiérectiles. D'après M. Debout, c'est à l'élément volatil du lupulin qu'il faudrait attribuer les propriétés anaphrodisiaques. Le lupulin pur, en teinture ou sous forme de saccharure, a été employé avec succès à la dose de 4 à 6 gram- mes contre les érections nocturnes, et pour combattre l’éréthisme morbide des organes génitaux. D’après M. Walter Jauncey, le lupulin contiendrait deux principes distincts : l’un, qui est l'huile, serait sédatif et anodin ; l’autre, le principe amer, /vpuline où lupulite, exercerait une action tonique sur les organes digestifs. Le houblon, outre sa propriété tonique incontestable, a été re- gardé, avec moins de raison peut-être, comme diurétique, diapho- rélique, anthelmintique. Quoique ses propriétés sédatives soient encore contestées, les médecins anglais l’emploient pour combattre l’insomnie, en faisant coucher les malades sur un oreiller rempli de houblon odorant. On l'emploie dans toutes les cachexies, dans les cas de débilité générale, d'affaiblissement des organes digestifs. C’est à tort, on le pense du moins aujourd'hui, que Desroches l’a vanté contre le rhumatisme, Freake, contre la goutte, Graunt, contre les calculs. D’après Coste et Willemet, la racine de houblon peut être substituée à la Salsepareille. En médecine homæopathique, on emploie le houblon comme sédatif et dépuratif ; son signe est Skw, et son abréviation Æum. Tout le monde connait l’usage que l’on fait du houblon dans la fabrication de la bière, pour donner à cette boisson une saveur amère, pour l’aromatiser et l'empêcher de s’acidifier. Malheureusement on substitue au houblon d’autres plantes amères moins chères, qui sont loin de posséder les mêmes propriétés, et dont quelques-unes sont dangereuses. C’est ainsi qu'on à employé la Gentiane, le Buis, le Quassia amara, V Absinthe, le Trèfle d’eau, et même, dit-on, la Noix vomique. Depuis quelques années, on s’est servi aussi de l'acide picrique. Tous les bestiaux mangent le houblon. Les abeilles en recher- chent les cônes. Les tiges, macérées dans l’eau, servent à faire des liens. 150 FLORE MÉDICALE HOUX , llex Aquifolium 1. (Ilicinées.) Le Houx épineux ou commun, appelé aussi Aquifoux, Agrion, Bois Franc, Épine du Christ, Gréou, Housson, etc., est un arbre de moyenne grandeur, à racines fortes et ramifiées. La tige, haute de 6 à 8 mètres, droite, couverte d’une écorce lisse et d’un vert grisälre, se divise en rameaux droits, flexibles, verts, portant des feuilles alternes, pétiolées, ovales, ondulées sur les bords, dentées et fortement épineuses, épaisses, coriaces, lisses, d'un vert foncé et très-luisant en dessus, plus pâle en dessous. Les fleurs, poly- games, petites, blanchâtres, presque sessiles, forment de petites cymes courtes el serrées dans les aisselles des feuilles. Elles présen- tent un calice très-petit, à quatre dents aiguës ; une corolle gamo- pétale, rotacée, très-profondément divisée en quatre lobes obtus, élalés, un peu concaves; quatre étamines courtes, dressées, à an- thères ovoïdes; un ovaire globuleux, déprimé, à quatre loges unio- vulées, surmonté d’un style simple et d’un stigmate quadrilobé. Le fruit est une drupe globuleuse, pisiforme, déprimée, ombili- quée au sommet, d’un rouge vif, renfermant quatre petits noyaux osseux. Hagrrar. — Le houx épineux est très-répandu en Europe; il croît dans les lieux incultes, frais, un peu couverts ; on Îe trouve surtout dans les bois, les haies, les buissons, etc. Le Houx Apalachine, appelé aussi Thé des Apalaches, Houx pur- gatif (/lex ronutoria Ait.), est un arbrisseau de ?2 à 5 mètres de hau- teur, qui croit spontanément dans les parties marilimes de la Caro- line et des Florides ; ses feuilles sont oblongues ou elliptiques, obtuses à leurs deux extrémités, glabres ainsi que les rameaux, bordées de crénelires aiguës ; ses fleurs sont réunies en fausses ombelles laté- rales presque sessiles Nous citerons encore les Houx à feuilles épaisses (//er crassifolin Ait.); hérisson (7. /eror Aït.) ainsi nommé à cause des épines qui hérissent la surface de ses feuilles; en scie (/. serrata Aït); panaché (1. variegata Mort.) ; safrané (7. crocea Thunb.), ce dernier du Cap: et enfin le Houx du Paraguay appelé aussi Houx Maté (7. paraqua- DU XIX° SIÈCLE. 151 riensis, où /. Mate À. SH.) qui fait l'objet d'un article spécial (voir au mot Maté, p. 305 de ce volume). Cucrure. — Le houx ordinaire demande une bonne terre et une exposition ombragée ; on le propage de graines semées, aussitôt après leur maturité, dans du sable et à l'ombre. Au printemps sui- vant, on repique les jeunes plants sur couche, et un ou deux ans après, à l'automne, en pépinière. On ne les plante à demeure que lorsqu'ils sont assez forts. Parties usirées. — Les feuilles, l'écorce, les fruits, la racine. Récozre. — Les feuilles de houx peuvent être récoltées pendant toute l’année; on préfère les cueillir à l'automne. Les fruits, rare- ment employés, sont récoltés à la maturité, c'est-à-dire lorsqu'ils ont pris une belle couleur rouge. La seconde écorce du houx (liber) qui sert à préparer la glu, se récolte en juillet. Composition cHimiquEe. — L'analyse des feuilles de houx a été faite par M. Lassaigne ; elle ne présente rien de particulier. M. Deles- champs a extrait de ces feuilles un principe cristallin et amer, nommé #/icine, que ce pharmacien regarde comme le principe actif de la plante, et qu'il a proposé, bien à lort, comme un succédané du sulfate de quinine. D'après Barbier, les feuilles de houx, lorsqu'on en boit linfusion, déterminent de la pesanteur avec chaleur à lépi- gastre, qui s'élend bientôt à d'autres parties du corps ; il survient plus tard des coliques etquelques rapports àcres. Les fruits du houx pro- voquent des vomissements et sont purgatifs. UsaGes. — Paracelse à préconisé les feuilles et l'écorce de houx dans les affections arthritiques. Durande, Rousseau, Reil, Constantin, Raymond, Delorme, Serrurier, Magendie, Bodin, Saint-Amand, Hu- bert, etc., les ont prescrites, en décoction, contre la toux, le catarrhe chronique, la pleurésie, la variole, les fièvres intermittentes, la goutte, lerhumatisme. Mais, en dernier lieu, le professeur Chomel à démor- tré que la plupart des vertus qu'on attribuait jadis au houx n'étaient pas confirmées par l'expérience. Pour préparer la glu, on prend la seconde écorce du houx ; on la fait bouillir pendant huit ou dix heures ; on la met dans un pot que l'on enfouit pendant vingt jours environ dans la terre; puis on lave avec de l’eau et l'on bat fortement dans un mortier ; on obtient alors une substance visqueuse, molle, tenace, élastique, qui a longtemps été ordonnée comme maturative et résolutive contre les engorge- 452 FLORE MÉDICALE ments scrofuleux et les tumeurs blanches, mais qui aujourd'hui ne sert plus guère qu'aux oiseleurs. Le houx purgatif tire son nom spécifique ({/ex vonutoria) des pro- priétés vomitives que possèdent ses fruits et l'infusion de ses feuilles prise à haute dose. Cette même infusion, prise à dose peu élevée, passe pour tonique, diurétique, sudorifique. C’est elle qu’on appelle Thé des Apalaches. Les Indiens des parties méridionales des États- Unis en font un très-grand usage contre les calculs, la goutte, etc. Comme elle produit sur eux un effet excitant, à peu près analogue à celui des liqueurs spiritueuses, ils en prennent au moment d'aller au combat. Ils lui croient aussi la propriété d’apaiser la faim. HYDROCOTYLE Hydrocotyle vulgaris et asiatica L., etc. (Ombellifères -Hydrocotylées. ) L'Hydrocotyle commun (H. vulgaris L.) appelé aussi Écuelle d’eau, est une plante vivace, à racines grêles, fibreuses, blanchâtres. La tige, de longueur très-variable, grêle, vert-pàle, noueuse, ram- pante, émettant à chaque nœud des faisceaux de racines, porte des feuilles alternes ou géminées, longuement pétiolées, arrondies, pel- tées, à nervures rayonnantes, à bords crénelés, d’un vert pâle, gla- bres. Les fleurs, blanchâtres, très-petites, sont disposées en ombelles entourées d’involucelles formés de quelques folioles, et portés sur des pédoncules nus, axillaires. Elles présentent un calice à cinq petites dents; une corolle à cinq pétales très-petits, entiers, à som- met droit; cinq étamines épigynes, courtes ; un ovaire infère, ovoïde, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles distincts. Le fruit est un diakène lenticulaire, presque didyme, échancré à la base, à columelle adhérente. L'Hydrocotyle d'Asie (1. asiatica L.) est également une plante vivace. Ses tiges, légèrement velues, émettent à chaque nœud, comme dans l’espèce précédente, des racines fasciculées, des feuilles solitaires ou géminées et des pédoncules floraux. Les feuilles arron- dies, réniformes, échancrées à la base, à sept nervures rayonnantes, à bords régulièrement crénelés, sont portées sur des pétioles pubes- cents. Lesfleurs, petites, purpurines, sont groupées par trois ou quatre en ombelles capitulées au sommet de courts pédoncules pubescents. DU» XIX® SIÈCLE: 153 Nousmentionnerons aussi l'Hydrocotyleen ombelle(Æ.umhellatal..) Hagirar. — L'hydrocotyle commun est répandu dans toute l'Eu- rope. L'hydrocotyle d'Asie se trouve aux Indes orientales et an cap de Boone-Espérance. L'hydrocotyle en ombelle est originaire du Brésil. Ces plantes croissent dans les lieux très-humides, dans les marais tourbeux, au bord des étangs et des ruisseaux, ete. Currure. — Les hydrocotyles ne sont cultivés que dans les jar- dins botaniques. On les multiplie facilement par la séparation des rejetons. Les hydrocotyles en ombelle et d’Asie exigent l'orangerie sous nos climats. Parries usitées. — Les racines, les feuilles. Composirion cHiMiQue. — M. Lépine, pharmacien de la marine, a extrait de l’hydrocotyle d'Asie une substance particulière qu'il a nommée vellarine, et qui paraît être le principe actif de la plante ; il y a trouvé en outre une huile jaune, une résine verte, une résine brune, un extrait sucré, un second extrait non sucré, un troisième extrait amer, de la gomme, de l’amidon et du ligneux. La vellarine, du nom tamoul de la plante ( Vallarar), est une huile épaisse jaune pâle, amère, piquante, d’une odeur forte, vireuse ; elle s’altère à l'air et fond à 100°. Usages. — L'hydrocotyle vulgaire a été indiqué par Lemery comme diurétique, détersif et vulnéraire. L'hydrocotyle d'Asie, au rapport de Horsfield , est employé, dans son pays d’origine, comme diurétique. Ainslie (Mat. med. ind.,t. W, p. 473) dit que ses feuilles, associées au Fenugrec, sont prescrites, en infusion, contre les fièvres et les maladies des intestins. C’est dans tous les cas une plante active (Bull. des sciences méd. de Férussac, t. XVII, p. 288), ce qui fait que beaucoup d'auteurs doutent qu’on la mange comme légume, dans l’Hindoustan, ainsi qu’on l’a prétendu. L’extrait hydro-alcoolique d’hydrocotyle asiatique a été préconisé contre la lèpre et les autres maladies de la peau. Les faits rapportés par M. le docteur Boileau, de l’île Maurice, par M. Poupeau, chirur- gien de la marine, et par MM. Houbert et Leroux, ont démontré l’ef- ficacité de cette préparation contre l’éléphantiasis des Grecs et l'élé- phantiasis des Arabes. On l’a employée contre les dartres avec le même succès. Plusieurs faits rapportés par les médecins que nous venons de nommer, tendraient à faire penser, s’ils élaient confir- més, que cette plante pourrait être employée avec succès contre les 15: FLORE MÉDICALE syphilides, les ulcères, les rhumatismes chroniques et les scrofules. En France on à employé lhydrocotile d'Asie. M. Devergie en à constaté les bons effets dans les eczémas chroniques rebelles. M. Ca zenave à amélioré un éléphantliasis des Arabes et guéri plusieurs éruptions vésiculeuses par l'usage de l'extrait hydro-alcoolique d'hy- drocotyle asiatique. Les hypersthésies douloureuses, avec ou sans papules, ont été calmées par le même moyen. On fait avec l'extrait hydro-alcoolique un sirop et des granules ; mais il vaut mieux que le médecin formule lui-même ces prépara- tions. M. Devergie conseille des pilules contenant chacune deux cen- tigrammes et demi d'extrait ; il en prescrit de une à six par Jour. Les feuilles sont administrées sous forme de tisane, qui se prépare par infusion, à la dose de huit grammes pour un litre d’eau; on en prend trois verres par jour. D'après M. de Martius, le suc de l’hydrocotyle à ombelle (4. nbel- lata L.) est employé, au Brésil et aux Antilles, contre lés affections du foie et des reins, contre l'hypocondrie. À haute dose et frais, ce sue est émélique. La racine est aussi employée dans les maladies du foie el des reins. Lorsqu'elle est confite, on l’ordonne comme mastica- toire. Aublet assure que cette racine est vulnéraire et diurétique (Plantes de la Guyane, p. 28%). HYDROPELTIS Hydropeltis purpurea Michx. Brasenta peltata Pursh. {Cabombées.) L'Hydropeltis pourpre est une plante vivace, aquatique, à rbizome rampant, submergé, émeltant en dessous des racines fibreuses. Elle est couverte, dans toutes ses parties, d'une malière visqueuse. La tige, assez faible, porte des feuilles allernes, pétiolées, à limbe ovale, pelté ou en bouclier, d'où vient le nom de la plante. Les fleurs, pourpres, larges de 0",03, sont solilaires à l'extrémité de longs pédoncules axillaires. Elles présentent un calice à trois sépales un peu colorés ; une corolle à trois pétales; des élamines nombreuses, hypogvnes ; un pistil composé de plusieurs carpelles libres, unilocu- laires. Le fruit se compose de plusieurs capsules, couronnées par le style, entourées par le calice persistant et renfermant des graines globuleuses ovoides (PI. 47). DU XIX° SIÈCLE. 155 Hagrrar. — L'hydropeltis, comme le Cabornba, autre plante aqua- tique qui à donné son nom à la pelite famille des Cabombées, est ori- ginaire des régions chaudes de l'Amérique. Currure. — Les hydropeltis ne sont cultivés que dans les jardins botaniques. On les met en pots que l'on plonge dans un bassin, en plein air, pendant l'été, et dans une serre lempérée durant l'hiver. PARTIES USITÉES. — Les feuilles. Usages. — Les feuilles de l’'hydropeltis pourpre sont légèrement astringentes. Elles passent, en Amérique, pour un bon remède contre la phthisie et la dysenterie. HYPOCISTE Cytinus Hypocistis L. (Cytinées.) L'Hypociste, appelé aussi Cytinelle ou Cylinet, est une plante vivace, parasite, charnue. La tige, haute de 0",15 environ, simple, épaisse, droite, rougeàtre, quelquefois jaunâtre, porte, au lieu de feuilles, de petites écailles charnues, imbriquées, ovales, rouges, souvent teintées de Jaune à la base. Les fleurs, monoïques, pelites, rougeâtres, axillaires, presque sessiles, accompagnées de bractées, sont groupées en épi terminal, globuleux. Elles présentent un calice coloré, pétaloïde, campanulé ou tubuleux, à limbe partagé en quatre divisions ovales oblongues, un peu inégales, velues extérieurement et ciliées sur les bords, persistantes. Les fleurs mâles, placées à la partie supérieure de l’épi, renferment huit étamines ou plutôt des étamines en nombre double de celui des divisions du calice, à filets unis entre eux en une colonne cylindrique, et avec le tube du calice par des cloisons membraneuses qui alternent avec ses divisions, à anthères unies aussi en un seul corps, surmonté d'appendices qui sont des stigmates rudimentaires. Les fleurs femelles, situées au-dessous des mâles, ont un ovaire infère, à une seule loge présen- tant huit placentas pariétaux multiovulés, surmontés de styles réunis en un cylindre adhérent au tube du calice par des cloisons membra- neuses, et terminé par un sligmate arrondi, charnu, marqué de huit sillons en étoile. Le fruit est une baie ovoïde, couronnée, coriace, à intérieur pulpeux, renfermant un grand nombre de petites graines arrondies. Hagrrar. — L'hypociste se trouve dans tout le pourtour du bassin 150 FLORE MÉDICALE méditerranéen, où il vit en parasite sur les racines des Cistes, nolam- ment du Ciste de Montpellier. Il n’est pas cullivé. Parries usirées. — Le sue extrait de la plante. Récozre. — Le suc d’hypociste du commerce est en masses de 2 à 3 kilogrammes qui sont formées par la réunion de petits pains orbi- culaires du poids de 30 grammes à peu près. La cassure est noire et luisante; la saveur est aigrelette et astringente. On l’altère souvent avec du suc de réglisse qui lui donne une saveur douceàtre et sucrée. Composirion cHiMique. — On dit que le suc d'hypociste, avec du sulfate de fer, forme de l’encre. Il précipite, la gélatine, quoiqu'il ne contienne pas de tannin. D’après MM. Pelletier et Caventou, qui l'ont analysé, il contient une matière charbonneuse insoluble dans l’eau et l’alcool, une matière colorante soluble dans l’eau, et une autre dans l'alcool ne précipitant pas la gélatine; de l'acide gallique, une matière soluble dans l’eau précipitant la gélatine, une autre matière soluble dans l'alcool qui ne précipite pas la gélatine. Usaces. — Le suc d’hypociste entre dans la /hériaque ; il faisait par- tie autrefois du #wthridate, de l'emplätre contre les ruptures, ete. On le regardait comme astringent et tonique ; on le conseillait contre les gonorrhées, les diarrhées rebelles, la dysenterie, les hémorrha- gies, etc.; on l’administrait à la dose de 1 à 2 grammes dissous dans un liquide approprié. Il est très-peu employé aujourd'hui. HYSSOPE Hyssopus officinalis L. (Labiées - Saturéiées.) L'Hyssope officinale est une plante vivace, à racine ligneuse, forte, rameuse et fibreuse. La tige, haute de 0",35 à 0",65, sous-frutes- cente à la base, télragone au sommet, dressée, se divise en rameaux peu nombreux, effilés, tétragones, un peu pulvérulents, d’un vert clair, dressés, portant des feuilles opposées, sessiles, ovales-lancéo- lées, étroites, aiguës, entières, vert foncé, glabres ou légèrement pu- bescentes, un peu pulvérulentes et glanduleuses, surtout à la face inférieure. Les fleurs, bleues, roses ou blanchàtres, sont groupées, à l’aisselle des feuilles supérieures, en petits glomérules, dont la rèu- nion constitue un épi feuillé, terminal et unilatéral. Elles présentent DU XIX° SIÈCLE. 157 un calice tubuleux, cylindrique, un peu évasé au sommet, d’un vert plus ou moins violacé, strié, à cinq dents aiguës, un peu inégales ; une corolle irrégulière, gamopétale, à tube grêle, recourbé, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure courte et un peu échancrée, l'inférieuve trilobée ; quatre étamines didynames, saillantes; un pis- til composé de quatre demi-carpelles, surmonté d’un long style, à stigmale bifide. Le fruit est un tétrakène. Hagirar. — Cette plante croît dans les régions tempérées et mé- ridionales de l’Europe; elle habite surtout les lieux montueux. Currure. — L'hyssope est cultivée en grand dans quelques loca- lités pour l’usage de la médecine. Elle préfère les terres légères, cal- caires, sèches et bien exposées au soleil. On la propage de graines, semées en planches ou en terrines bien drainées, au commencement du printemps, ou bien encore de boutures ou d’éclats de pieds, faits à la même époque. Les jeunes plants sont repiqués en place, dès qu’ils sont assez développés. Il est bon de renouveler les planches tous les trois ou quatre ans, en éclatant les pieds, au printemps ou à l'automne. Parries usrrées. — Les sommités fleuries et les feuilles. Récorre. — Les sommiltés fleuries et les feuilles de l'hyssope se récoltent pendant la floraison ; on dispose la plante en paquets de Ja grosseur du bras et en guirlandes ; on fait sécher au grenier ou au séchoir. On conserve la plante sèche à l'abri de la lumière et de l'humidité. Composition cHimiQue. — Quoique M. Herberger ait cru avoir trouvé dans l’hyssope un précipité immédiat qu'il a nommé Æyssopine, on attribue avec raison les propriétés de cette plante à l'huile essen- tielle qu’elle contient. Elle renferme en outre un principe amer. D'après Proust, l’hyssope des pays chauds donne à la distillation un camphre artificiel analogue à celui des Laurinées. Récemment préparée, l'essence d’hyssope est incolore, mais elle jaunit au contact de l'air et se résinifie. D'après M. Stenhouse, elle bout à 160°, et son point d’ébullition s'élève à 180°; ce qui in- dique que c’est un mélange d'au moins deux essences. Celle qui se vaporise à 160°, renferme : carbone, 84,18; hydrogène, 11,00 ; oxygène, 4,82. Celle qui bout à 180°, contient : carbone, 80,31; hydrogène, 10,43 ; oxygène, 9,24. Usaces. — L'hyssope est regardée avec raison comme expecto- 158 FLORE MÉDICALE rante et béchique. Moins stimulante que la Méiisse et les Menthes, elle l’est plus que le Marrube, la Germandrée et le Lierre terrestre, qui d’ailleurs sont plus spécialement toniques. Elle à plus d’ac- lion que ces plantes, d’après MM. Trousseau et Pidoux, dans l’asthme et dans les affections nerveuses des organes respiratoires. Le professeur Chomel l’administrait souvent, ainsi que la German- drée, dans ia convalescence des fièvres typhoïdes à forme adyna- mique, ainsi que dans les maladies aiguës, suivies d'épuisement et d'atonie des organes. Quoiqu'on prépare un sirop et une eau distillée d'hyssope, c'est presque uniquement l'infusion que l'on emploie à la dose de 10 à 15 grammes pour un litre d'eau bouillante. Cette infusion, sucrée avec du miel et quelquefois avec de loxymel scillitique, convient parfaitement dans les affections catarrhales du poumon ; on l’a sou- vent associée dans ces maladies à la Gomme ammoniaque. Elle agit puissamment dans la débilité des voies digestives, les coliques ven- teuses, l’aménorrhée. Quoiqu’on l'ait beaucoup -vantée dans les affections des reins et les exanthèmes, en raison des propriétés diu- rétiques et sudorifiques qu'on lui attribuait, elle est peu usitée dans ces cas. Quant à ses propriétés vermifuges, signalées par Roseinstein, elles sont nulles ou à peu près. La décoction d’hyssope a été employée à l'extérieur, sous forme de gargarismes, dans les inflammations de la gorge, et en lotions ou en cataplasmes contre les contusions. DU XIX' SIÈCLE. 159 ICIQUIER Icica heptaphylla Aubl. ( Burséracées - Amyridées. L'Iciquier à sept feuilles, appelé aussi Icique, Aroucou, est un arbre dont la tige, haute de 10 à 15 mètres, à suc propre transparent, balsamique, gommo-résineux, se divise en rameaux qui portent des feuilles alternes, pétiolées, imparipennées, à sept fo- lioles. Les fleurs, petites, blanches, sont disposées en panicules axil- laires ou terminales. Elles présentent un calice persistant, à quatre dents; une corolle de quatre pétales à onglet dressé, à limbe étalé ; huit étamines incluses, insérées, ainsi que les pétales, sur un disque annulaire, glanduleux, qui entoure l'ovaire, et portant des anthères à deux loges; un pistil à ovaire libre, ovoïde, à quatre loges uniovu- lées, surmonté d’un style simple très-court, terminé par uu stigmate en tête, marqué de quatre sillons en croix. Le fruit est une drupe à enveloppe coriace, pulpeuse à l'intérieur, s’ouvrant en quatre valves, dont chacune recouvre un noyau osseux, monosperme. Hapirar. — Ce genre, dont les espèces sont loin d’être bien con- nues et déterminées, habite les régions chaudes de l'Amérique cen- trale, particulièrement la Guyane. On trouve surtout les iciquiers dans les lieux sablonneux, au bord de la mer, etc. Ils ne sont pas cultivés en Europe, et on ne les rencontre pas même dans les jardins botaniques, où ils ne pourraient probablement être conservés qu’en serre chaude et avec beaucoup de soins. PARTIES usiTÉES. — Les résines qu'on en extrait, appelées /aca- maques et élémis. On emploie aussi le bois de certains iciquiers à divers usages. RécocTe. — Parmi les résines que produisent les iciquiers ou qu'on attribue à ces végétaux, on trouve celles que l’on désigne sous les noms de chibou,cachibou, tacamahaca où tacamaque, alouchi, ara- couclani, caragne où caraïgne et élemi du Brésil. Ces résines, retirées d'arbres qui sont loin d'appartenir tous à l'Amérique, car il en est qui viennent de la côte occidentale d'Afrique, de Madagascar, de l'Hin- doustan, de la Malaisie, des Philippines, etc., jouissent de propriétés semblables, ce qui rend leur distinction très-difficile. Nous allons les indiquer brièvement. 160 FLORE MÉDICALE La résine élémi du Brésil est produite par l'Iciquier-icicariba ou iciquier-élémi. A la suite d'incisions, la résine découle abondamment de cet arbre. Vingt-quatre heures après on la récolte et on la renferme dans des caisses qui peuvent en contenir 100 à 150 kilogrammes. Elle est molle et onélueuse, mais elle devient sèche et cassante en vieillissant. Sa couleur varie du blanc au jaune et au vert. Son odeur est analogue à celle du Fenouil. Par la distillation, on peut en re- tirer une essence. Il faut préférer cette résine quand elle est récente et odorante. Elle est soluble en partie dans l'alcool froid et en entier dans l'alcool bouillant, à l'exception des impuretés qu’elle peut con- tenir; par le refroidissement de la solution alcoolique bouillante, il se dépose des aiguilles opaques, inodores et insipides d'une substance que l’on a nommée é/emine. La résine élémi est quelquefois falsifiée par du galipot; elle est alors beaucoup plus soluble dans l'alcool. Nous parlons ailleurs des autres sortes d'élémi, ainsi que des taca- maques produites par d’autres arbres que les iciquiers. Voir aux articles BaumiEr (A4myres elemifera L.; A. balsami- fera À, etc.) t. [, p. 161; et Caraga (Calophyllum Calaba L.; C. Tacamahaca W.; C. inophyllum L.), {4 X p. 224. On comprend dans les tacamaques attribuées aux Iciquiers : 4° La tacamaque jaune huileuse. Celte résine a été tantôt désignée sous le nom de /acanaque, d’autres fois sous celui. d'entné. Elle se présente sous deux formes. D'après M. Guibourt, les descriptions de l’animé, faites par Monardès, de Meuves, Lemerv, Geoffroy et Murray doivent ètre rapportées à la tacamaque jaune huileuse. La première est en larmes qui varient de grosseur, depuis celle d’une aveline jusqu'à celle d’un abricot. Elles sont opaques, recou- vertes d’une poussière blanche. Leur odeur rappelle celle du cumin. Elles ont une saveur douce et agréable. Elles contiennent une essence; sont solubles dans l'alcool, à l'exception d’un résidu blane, soluble dans l’eau, et d’une résine insoluble dans l'alcool et l’éther. La seconde espèce semble avoir fait partie des bâtons cylindri- ques de 4 à 5 centimètres de diamètre ; les fragments sont opaques, friables à la circonférence, transparents et mous à l'intérieur; lo- deux est moins forte que celle de la précédente ; elle perd son essence en devenant friable ; elle cristallise facilement. On attribue ces deux résines à l'Iciquier décandrique. 2° La /acanuque incolore. Celle résine a été aussi désignée sous le DU XIX° SIÈCLE. 161 nom d'encens de Cayenne. Elle est en bàtons demil-cylindriques, longs de 0",16 à 0",22; larges de 0",027 à 0,054, amincis aux extrémités. Elle est opaque, mais devient transparente en s’aggluti- nant. Son odeur est forte, semblable à celle de la précédente ; elle est riche en huile volatile. Sa saveur est douce, parfumée et plus tard amère. Cetle résine est produite par l’Iciquier à sept feuilles où par lciquier à fleurs vertes que certains auteurs considèrent comme une même espèce, allant jusqu'à y joindre l'Iciquier Tacamahaca. C'est l'opinion de M. Guibourt. (Voy. Drog. simpl., éd. 4, UE, 475-189.) Les arbres en question laissent exsuder une résine blanche, d'une odeur de citron, qu'Aublet désigne sous le nom d'encens. 3° Tacamaque jaune terreuse. Elle est très abondante dans le commerce et se vend comme résine swmé. Elle est en masses considérables, aplaties, friables et noires à l'extérieur, jaunes et de nuances diverses à l'intérieur. Son odeur, d’après M. Guibourt, est analogue à celle de l’arnica. Sa saveur est douce dans le principe, et plus tard amère. Elle est fusible et entitrement soluble dans l'alcool. 4° Tacamaque rougeûtre. Cette résine a été lrouvée, par M. Gui- bourg, mélangée à la tacamaque jaune huileuse ; il pense que c'est la tacamaque de Monardès, et la première tacamaque de Bergius, attribuée par lui à l'£laphrium tomentosum Jacy. Elle est en larmes détachées, d'un jaune rougeâtre, ressemblant à l'oliban d’Afrique. Quelques larmes sont grisätres el farineuses. M. Guibourt croit que la tacamaque rougeätre contient une matière gommeuse et qu'elle se rapproche du bdelliur:. Cependant elle est très-odorante. On lattri- bue à un iciquier. La résine alouchi. Pomet et Lemery supposaient que cette résine élait fournie par l'arbre qui produit l'écorce de Winter et la Can- nelle blanche, qu’ils confondent ensemble; mais cela n'était pas exact. Elle possède l'odeur des résines des Iciquiers et doit être produite par un de ees arbres. M. Guibourt croit que le nom de résine wlouchi est une altération du mot aracouchi qui, d'après Aublet, est le nom d’une espèce d'iciquier de Cayenne. La résine caragne où caraïgne. Les Indiens et les Espagnols nom- ment caranna une résine à odeur de lacamaque qui, suivant Monar - dès (Traité des droques de l'Amérique, 159, traduit de l'espagnol en français par Colin, Lyon, 1619), est tirée de l’intérieur du conti- Flore, T, II. 11* .d 162 FLORE MÉDICALE : nent américain. Elle est en masses enveloppées de feuilles de roseau. On a pu croire qu’elle était produile par l'ciquier carague (Z. Ca- rana Humb.); mais, suivant le docteur Hancock, elle proviendrait de l'Arwba gquianensis Aubl. (Cedrota longifolia W.). Comrosirion cuimiQue. — Toutes les résines des Térébinthacées, des Burséracées, sont composées d’un mélange de matières rési- neuses diverses et d’essences. Voici deux analyses faites par M. Bo- nastre. La résine alouchi contient : résinesoluble dans l'alcool froid, 68,2; résine cristallisable iusoluble dans l'alcool froid, 20,5 ; huile vola- tile, 1,6; extrait amer, 1,1 ; acide libre et sel ammoniacal, 0,06; im- puretés, 4, 1; perte, 3,9. Total, 100. La résine élémi du Brésil contient : résine transparente, soluble dans l'alcool froid, 60 ; élémine, 24; essence, 12,50; extrait amer et impuretés, 1,50. Total, 100. Usages. — Les résines des iciquiers, qui ne se trouvent et ne s’eni- ploient jamais à l’état pur, entrent dans la composition d’onguents et d’emplâtres composés, ainsi que dans celle de quelques alcools composés. Dans les pays de production, on les a administrées dans du. vin contre l’épilepsie, la dyspnée. On s’en sert conime stimu- lants à la place de la térébenthine. Les Galibis se servent comme vulnéraire de la résine de l'iciquier aracouchini. La résine de lici- quier élémiest excitante el entre dans le baume de Fioraventi, l'on guent styrax, elc. Les résines des iciquiers servent pour la fabrication des vernis et pour calfater les navires. On les brûlé dans les églises comme encens. On les a employées comme parfums. L'iciquier aigu (Zcica cuspidata K.) fournit une résine tenace qui remplace Ja glu. IF Taæus baccata L. ( Conifères - Taxinées. } L'If commun ou d'Europe est un arbre dont la tige, haute de 40 à 12 mètres, droite, arrondie, couverte d'une écorce rougeàtre, se divise en rameaux nombreux, minces, striés, flexibles, portant des feuilles allernes, distiques, presque sessiles, très-étroites, aiguës, planes, d'un vert sombre, persistantes. Les fleurs sont dioiques. Les DU XIX° SIÈCLE. 163 mèles forment des chatons très-petits, globuleux-ovoides, solitaires et presque sessiles à l’aisselle des feuilles supérieures, environnés à leur base de bractées écailleuses obtuses et imbriquées. Elles con- sistent chacune en un connectif écailleux pelté, lobé, portant à sa face inférieure trois à huit lobes d’anthère disposés circulairement. Les fleurs femelles forment également de petits chatons, en forme de bourgeons, à pédicelles munis d’écailles imbriquées. Chacune d'elles consiste en une écaille cupuliforme, très-courte, accrescente, entou- rant un seul ovule nu, ovoide, dressé, ouvert au sommet. Le fruit est un pelil cône arrondi, drupacé, composé de l'écaille cupuliforme accrue,'charnue succulente, d'un beau rouge, qui renferme, sans y adhérer, une graine ovoide oblongue, à testa crustacé, osseux, dé- pourvu d'aile, brunàtre. Hagirar. — L'If est répandu dans les régions centrales et méridio- nales de l'Europe. Il habite surtout la zone subalpine des régions montagneuses, et se trouve aussi naturalisé dans les plaines. Cucrure. — L'If est surtout cultivé dans les parcs et les planta- tions d'ornement, dans les cimetières. On le propage de graines et de marcottes. Malgré la lenteur de sa croissance, il a été très-recher- ché autrefois dans les jardins, à cause de sa docilité à la taille, qui permet de le soumettre aux formes les plus variées et les plus bizarres. Parries usirées. — Les feuilles, le bois, les fruits. Récore.— Les feuilles de l'if peuvent être récoltées pendant toute l'année ; leur dessiccation et leur conservation sont des plus faciles. Les fruits ne sont plus usités; on les récollait à leur maturité, c'est- à-dire lorsque le pédoncule bacciforme est devenu rouge. Le bois, qui doit être coupé pendant l'hiver, était d’un jaune rougeûtre, veiné; son grain est fin, etil est susceptible de poli; il résiste longtemps aux diverses influences atmosphériques, et il est très-recherché des ébé- nistes, des luthiers et des tourneurs. Composrrion cuimique. — Nous ne possédons aucune analyse com- plète et exacte des feuilles dif. MM. Chevallier et Lassaigne ont trouvé dans les fruits (sphalérocarpe de de Mirbel) une matière sucrée, fermentescible, non cristallisable, de la gomme, des acides malique et phosphorique, une matière grasse d’un rouge carmin (Journal de pharm., X\, 558). Ces fruits, quand ils sont mürs, sont {rès-remar- quables par l'abondance d’une matière mucilagineuse et visqueuse qu’ils contiennent. 164 FLORE MÉDICALE D'après M. Paretti, la racine d'if renferme de la chlorophylle, du tannin, de l’acide gallique, du malate de chaux, de la résine, du mucilage, de l'huile volatile amère, une matière colorante jaune et du sucre (Journ. de pharm., XIN, 538). Usages. — Les feuilles et les jeunes rameaux de l'if sont des poi- sons irritants, violents qui ont très-souvent occasionné la mort des chevaux qui en ont mangé, et quoique Théophraste rapporte que cette plante n’empoisonne pas les ruminants, il est démontré aujour- d'hui par de nombreux faits qu'elle tue les poules, et qu'elle a été très- souvent la cause de la mort de l'homme. Les fruits paraissent n’exer- cer aucune action nuisible, et il n’est pas exact que son ombrage soit dangereux, comme on l'avait prétendu. Les propriétés toxiques de l'if étaient connues des anciens. Galien, Pline, Dioscoride et Matthiole le regardent comme très-délétère. D'après Strabon, son suc servait à empoisonner les flèches des Gau- lois, et César rapporte (de Bello Gallico, lib. IV), que Cativuleus, roi des Éburoniens, périt empoisonné par le suc de l'if. Les faits rap- portés par Bulliard, par Gérard, botaniste anglais, démontrent que ses émanations ne sont pas dangereuses ; toutefois, Harmand de Montgarny cite le fait d’une jeune fille dont le corps fut couvert d’une éruption miliaire après avoir dormi sous un if; mais cet érythème pourrait bien avoir d'autres causes, et Raï assure que les ouvriers qui élaguent ces arbres sont souvent incommodés. Quoique très-dangereux, l'if a été préconisé contre les affections catarrhales et calculeuses. Dans l’ouest de la France, il est, regardé par les paysans comme un puissant abortif, et les femmes qui en font un fréquent usage sont souvent les victimes de leur coupable ignorance. Les faits cités par MM. Duchesne, Chevallier et Raynal ne laissent aucun doute à cet égard. Perey regardait les fruits comme adoucissants et béchiques; il les administrait sous forme de gelée contre la toux, la coqueluche, la gravelle, les catarrhes, ete. L'if est une plante dangereuse que les médecins ont eu raison de bannir de la thérapeulique : on mange au Japon les fruits du arus japonica Lam. ; ceux du T°, nucifera sont employés contre l'inconti- nence d'urine. DU XIX° SIÈCLE. 165 JMPÉRATOIRE Imperatoria Ostruthium L. Peucedanum Ostruthium Koch. (Ombellifères-Peucédanées.) L'Impératoire des montagnes, appelée aussi Benjoin français, Au- truche, etc., est une plante vivace, à racine tuberculeuse, ovoiïde, charnue, brune, rugueuse, sillonnée transversalement, divisée en de nombreuses ramificalions qui sont souvent terminées par de petits tubercules. La tige, haute de 0,50 à 1 mètre, cylindrique, fistu- leuse, forte, glabre, dressée, porte des feuilles alternes, pétiolées, larges, glabres, d'un vert clair ; les radicales très-grandes, longue- ment pétiolées, à trois ou cinq folioles larges, ovales, à trois lobes ou segments dentés ; les caulinaires peu nombreuses, à pétiole court, élargi et membraneux à la base, à limbe divisé en trois folioles den- tées et lobées. Les fleurs, blanches, sont disposées en ombelles ter- minales, ouvertes, assez grandes, dépourvues d'involucre, munies d'involucelles, à bractées peu nombreuses, courtes et étroites. Elles présentent un calice adhérent, à cinq dents; une corolle à cinq pé- tales presque égaux, cordiformes, réfléchis en dedans ; cinq étamines assez courtes, à anthères arrondies; un ovaire infère, surmonté de deux styles à stigmate globuleux. Le fruit est un diakène, marqué sur chaque face de trois côtes saillantes, entouré d’une aile membra- neuse, échancrée au sommet. 4 Hagrrar. — L'impératoire croit dans toutes les régions centrales et méridionales de l'Europe. On la trouve dans les régions monta- gneuses, les prairies élevées et quelquefois dans les plaines. Cuzrure. — Cette plante vient à toutes les expositions et dans tous les sols, à l'exception de ceux qui sont trop humides. On peut la pro- pager par graines; mais il vaut mieux le faire par la division des vieux pieds, opérée à l'automne. Enfin, on peut encore relever les rejetons, et les replanter en bonne terre. Parties usirées. — Les racines. Récozre. — La racine d’impératoire nous vient plus spécialement des montagnes de la Savoie, où elle porte le nom d’ofouwrs. I en vient aussi de l'Auvergne. On l’arrache en hiver, et, après l'avoir lavée, on la fait sécher ; quelquefois on la coupe en morceaux; elle perd une partie de son action par la dessiccation, surtout en vieillissant. 166 FLORE MÉDICALE Elle est grosse comme le doigt, rugueuse à l'extérieur et marquée d'espèces d'anneaux. Son odeur est analogue à celle de l’angéljque, mais moins forte; sa saveur est âcre et aromatique; il faut rejeter celle qui est inodore, noire et vermoulue. Comrosrrion cmimiQue. — Lorsqu'on coupe la racine fraiche d'im- pératoire, il s'écoule un suc blanc laiteux qui renferme une matière résineuse et une huile essentielle que l’on peut séparer par distilla- tion et à laquelle elle doit son action. Usages. — Elle entre dans l’eau thériacale, l'esprit carminatif de Sylvius, l'orviétan, etc. Les vétérinaires l'emploient comme forti- fiante; Hoffmann l’appelait divin remedium ; À Vemployait contre les coliques. Forestus l’a vantée contre l'hystérie; Horstius dans les hydropisies; Chomel dans la néphrite, l'asthme et les rétentions d'urine; Lesage dans les fièvres intermittentes, et il prétend avoir obtenu des résultats plus avantageux qu'avec le quinquina dans les fièvres quartes rebelles. C’est là une assertion que nous ne cherche- rons même pas à réfuler. Baglivi l'administrait en poudre dans les fièvres adynamiques, et Roques la regarde comme très-utile dans ces cas. Il est nécessaire d'ajouter qu'on a reconnu l'inexactitude des assertions de Decker, qui disait l'avoir employée avec succès contre les paralysies de la langue; celles de Spitta, qui assure avoir guéri le delirium tremens avec celte racine; et surtout celles de Millius (Bull. des sciences médicales de Férussac, t. Y, p. 153), qui dit avoir guéri un cancer ulcéré de la face avec la poudre de ceite racine. Ce sont là autant d'observations dont il ne faut tenir aucun compte. L'impératoire màchée, soit seule, soit mêlée avec d’autres sub- stances aromaliques ou irritantes, excile la salivalion ; aussi Cullen la conseillait-il comme anti-odontalgique. C'est en excitant la sali- valion qu'elle agit. Elle peut certainement, dans certains cas, calmer les douleurs de dents, et alors la pyrèthre est bien préférable ; mais nous ne pouvons admettre avec quelques auteurs que cette supersé- crélion salivaire puisse être utile contre les paralysies de la langue. En . résumé, la racine d’impératoire jouit des mêmes propriétés que celles d'angélique, de méum, d’ache, de livèche, etc., et, comme celle-ci se conserve mieux, il faut la préférer et bannir l’impératoire de la matière médicale. En Suisse, on se sert de cette racine pour aromatiser les fromages de Glaris. DU XIX® SIÈCLE. 167 INDIGOTIER Indigofera tincloria, anil et argentea L. (Légumineuses - Lotées.) L'Indigotier tinclorial ou des Indes (/rdigofera tinctoria L., 1. Indica Lam.) est un sous-arbrisseau, dont les tiges dressées, hautes d'un mètre environ, portent des feuilles alternes, munies de stipules, péliolées, imparipennées, à trois ou quatre paires de folioles ovales, un peu pubescentes en dessous. Les fleurs, rougeätres, sont réunies en grappes axillaires plus courtes que les feuilles. Elles pré- sentent un calice petit, campanulé, urcéolé, à cinq divisions presque égales, aiguës; une corolle papilionacée, à étendard arrondi et réflé- chi, à ailes de même longueur que la carène, qui est gibbeuse à la base; dix étamines diadelphes, à anthères mucronées; un ovaire simple, pluriovulé, surmonté d’un style filiforme et d’un stigmate simple. Le fruit est une gousse cylindrique, bosselée, arquée, réflé- chie, divisée, par de fausses cloisons membraneuses transversales, en plusieurs loges ou articles monospermes. L'Indigotier franc ou Anil (7. ail L.) diffère du précédent par ses feuilles de trois à sept paires de folioles presque glabres en dessous ; ses fleurs pourpres; sa gousse arquée, réfléchie, comprimée, non bosselée, à sutures écailleuses saillantes. L'Indigotier argenté (7. argentea L.; I. articulata Gouan ; I. glauca Lam.; /. lincloria Forsk., non L.) est un sous-arbrisseau à tiges de 0,60, rameuses, pubescentes soyeuses, blanchâtres, ainsi que les feuilles, qui ont trois à cinq paires de folioles obovales ; à fleurs pourpres; à gousses pendantes un peu comprimées, bosselées, blan- châtres, renfermant deux à quatre graines. Hagrrar. — Les indigotiers tinctorial et argenté habitent l'Inde, l'Égypte, l'Afrique centrale, ete. L'indigotier anil est propre aux ré- gions chaudes de l'Amérique. Cuurure. — Cullivés en grand, comme plantes annuelles, dans les régions chaudes des deux continents, ces indigotiers ne se trouvent, en Europe, que dans les jardins botaniques, où ils exigent l'orange- rie ou la serre tempérée. Parties usirées. — Les feuilles, la matière colorante qu'on en extrait, 168 FLORE MÉDICALE Récozre. — L'indigo est une matière colorante extraite des feuilles des plantes suivantes : 4° l’indigotier sauvage, Z. argentea, qui four- nit le plus bel indigo, mais en petite quantité; 2° l'Z. disperma, de Guatemala; 3° V’Z. anil ; 4° VI. linctoria où indigolier français, qui donne beaucoup de produits, mais moins beau que les précédents. Dans d’autres famiiles, nous citerons le pastel, quède ou vouède isatis tinctoria des crucifères, et un indigo de Chine, produit par le po/ygo- run linctorium, polygonées, sur lesquels nous reviendrons plus loin. . L'indigotier des légumineuses est une plante bisannuelle ; mais le plus souvent on l’épuise par des coupes successives; la première donne le meilleur produit ; la plante est mise à tremper dans l'eau, dans une cuve nommée {rempoir ; jusqu'à ce qu'une écume irisée vienne surnager, on soutire et on fait couler le liquide dans une autre cuve inférieure nommée batterie ; on agite très-forlement, jus- qu'à ce que la liqueur soit devenue bleue et qu’elle soit caillebotée ; on y ajoute alors de l'eau de chaux pour précipiter la matière colo- rante et empêcher la putréfaction ; on laisse déposer, on décante, on lave et on fait égoutter sur des toiles, puis on fait sécher à l'ombre, dans des caisses en bois à fond de toile. L'indigo est une substance sèche d’un bleu foncé, avec des reflets violets et cuivrés; sa cassure est uniforme et fine. Il ne happe pas à la langue, comme le bleu de Prusse, avec lequel on peut le con- fondre. Frotté avec l’ongle, il prend un aspect cuivré. Ilest insoluble dans l'eau. Les diverses sortes d'indigo sont distinguées par le nom du pays qui les fournit; ainsi l'indigo de l'Inde se distingue en Bengale, Ma- dras, Coromandel, etc.; indigo Guatemala où indigo flore, qui est le plus estimé ; l’éndigo de la Louisiane, ete. L'indigo flore est le plus léger et le plus recherché; il se distingue par sa belle couleur bleue violette. L'indigo du Bengale s’en rapproche le plus; celui de là Louisiane est plus compacte, plus foncé. Composrrion cumique. — L'indigo de Guatemala a été analysé par M. Chevreul à l’aide de la féconde méthode des dissolvants ; par l'eau il a obtenu : ammoniaque, matière verte, indigo blane, peu ; extrac- tif, gomme, 12; par l'alcool: matière verte, résine rouge, indigo bleu, peu, 30 ; par l'acide chlorhydrique, résine rouge, carbonate de chaux, peroxyde de fer, alumine, 2 ; 1l est resté un résidu formé de bleu, 3; indigo bleu, 45. DU XIX° SIÈCLE. 169 L'indigo blanc, tel qu'il existe dans les plantes, a été analysé par M. Dumas. Sa composition est la suivante : —C'° HS Az O*, par ex- position à l'air, un équivalent d'hydrogène est brülé et on obtient l'indigo bleu = C'°H°'Az 0° + HO. Tous les corps désoxydants, tels que les sels de protoxyde de fer, l'orpiment ou trisulfure d'arse- nic transforment l'indigo bleu en indigo blanc. C’est sur celte réac- tion qu'est basée la teinture en bleu par l'indigo. C’est de l'indigo blanc que la matière colorante dépose sur les étoffes, et celles-ci, exposées à l'air, le tranforment en indigo bleu. L’indigo chauffé doucement laisse dégager de belles vapeurs pour- pres qui se condensent et constituent l'indigotine ou indigo pur, que l’on peut d'ailleurs isoler par la méthode des dissolvants ; elle est d’un très-beau bleu violet, inaltérable à l'air; la chaleur la volatilise et la décompose en partie; elle est insoluble dans l’eau, l'alcool, les alcalis et les acides faibles ; l'acide sulfurique la dissout avec belle coloration bleue, et forme le #/eu en liqueur, qui est la base du 4e de Saxe. D’après Berzélius, cette solution contient deux acides copulés, qu'ilnomme acides su//o-indigotique, et kyposulfo-indigotique. K se forme en même temps un composé pourpre insoluble dans la liqueur acide étendue, mais soluble dans l'eau pure. C'est l'acide su/fo-pur- purique. L'indigotine oxydée par un mélange d’acide sulfurique et de bichromate de potasse forme l'izatine — C!° H° Az 0", découverte par Laurent, qui en a fait une étude si complète. Elle crisiallise en prismes rhomboïdaux de couleur aurore foncée très-éclatante. L'acide azotique étendu d’eau transforme l'indigo en acide indigo- tique cristallisable, incolore, volatil, dont la formule est C'* H° Az O"° ou par C'*H°A:0° “+ HO une molécule d’eau pouvant être rempla- cée par une base. L'acide nitrique concentré transforme l'indigo en acide picrique où carbo-azotique, où ritro-picrique, nommé aussi amer de Walter, qui se forme d’ailleurs par l’action du même acide sur un grand nombre d’autres corps, tels que la benzine, la soie, la sali- cine, ete. Cet acide a pour formule C*H° Az O0"; un équivalent d’eau peut être remplacé par un équivalent de base. L'indigo chauffé avec la potasse et de l’eau forme de l’ésatine el de l'acide anthranilique (Fritzche). D'ailleurs, l’indigo a été l'objet d'un des plus beaux travaux de la chimie moderne; il a été fait par M. Laurent. Usages. — L'indigo est une des matières tincloriales les plus pré- 170 FLORE MÉDICALE cieuses ; elle fournit une des couleurs bleues des plus solides. Aussi, sa consommation dans l'industrie est-elle considérable. En médecine, l'indigo est peu usité ; cependant on l’a vanté contre l'épilepsie à la dose de 30 à 40 grammes, à prendre dans la journée ; mêlé à du miel, ila souvent produit de bons effets. D'après Laënneec, les racines de l'éndigofera anil sont néphrétiques et combattent l'ac- tion des poisons, mais ce sont là des asserlions que rien ne justifie. Les feuilles sont purgatives ; on les emploie, d’après Ainslie, contre les affections des reins, et les nègres les font macérer, dit-on, dans du rhum, pour détruire la vermine. L'Indigofera tinctoria L. est V'Amert de Ramphius, le Colinil de Rheede. On l'emploie aux Antilles comme fébrifuge, et contre l'épi- lepsie. C'est la racine dont on fait usage. Les feuilles sont employées comme celles du précédent. D'ailleurs, tous ces produits sont incon- nus et inusités chez nous. Les médecins homæopathes prescrivent quelquefois l’indigo contre les névroses ; mais comme il n’agit qu'à doses très-élevées, ils doivent s'écarter de leurs habitudes posologiques lorsqu'ils veulent l'admi- nistrer. Son signe est Oid et son abréviation /#d'g0. IPÉCACUANHA Cephælis ipecacuanha Rich. Callicocea ipecacuanha Gomez et Brot,. Ipecacuanha fusea Pison. (Rubiacées - Cofféacées.) L'Ipécacuanha vrai ou Ipécacuanha annelé est un petit arbuste, à rhizome rampant, horizontal, émettant des racines fibreuses, capil- laires, presque ligneuses, brunâtres, souvent tuberculeuses et mar- quées d'empreintes annulaires très-rapprochées. La tige, haute d'en- viron 0",50, à quatre angles mousses, légèrement pubescente, simple, dressée, porte, dans sa parlie supérieure, six ou huit feuilles oppo- sées, décussées, presque sessiles, longues, ovales, acuminées, entières, à peine pubescentes, accompagnées de deux stipules assez grandes, opposées, réunies à leur base, pubescentes, pla- cées entre les feuilles et dont le sommet est découpé en einq ou six lanières étroites. Les fleurs, petites, blanches, sont groupées en un petit bouquet terminal, dont ja base est entourée d'un involucre, formé de quatre grandes bractées ou folioles pubescentes. Elles pré- DU XIX° SIÈCLE. 471 sentent un calice adhérent, à cinq dents; une corolle en entonnoir, à tube cylindrique, à limbe divisé en cinq lobes longs et aigus ; cinq étamines, insérées sur le tube de la corolle; un ovaire infère, ovoïde, à deux loges uniovulées, surmonté d’un style simple terminé par deux stigmates linéaires divergents. Le fruit est une petite drupe, ovoide, peu charnue, noirâtre, renfermant deux petits noyaux blan- châtres, qui se séparent à la maturité (PI. 18). Hagrrar. — L'ipécacuanha est originaire du Brésil ; il habite les lieux ombragés et surtout les forêts épaisses. On le cultive dans plu- sieurs contrées de l'Amérique méridionale. En Europe, on ne le trouve guère que dans les grands jardins botaniques; il exige la serre chaude, où il est assez difficile de le conserver et de le mul- tiplier. Partis usirées. — Les racines ou rhizomes. Récore. — Nous ne parlerons ici que de l’ipécacuanha officinal ; nous traiterons plus loin de lipécacuanha strié (Psychotria eme- tica L.), et de l'ipécacuanha ondulé (/2chardsonia Brasiliensis). Nous dirons alors quelques mots des faux ipécacuanhas, Lorsque, en 1672, l'ipécacuanha fut apporté en Europe, il était connu sous le nom de béconguille et de mine d'or; il fut d'abord peu employé : ce n'est qu'en 1686 qu'il fut préconisé par Adrien Helvé- lius, médecin de Reims, et, en 1690, Louis XIV en acheta le secret d’un nommé Grenier, et le publia; il était à cette époque extrème- ment rare, et son nom fut donné à plusieurs racines plus où moins vomilives ; il en résulta une certaine confusion dans l'histoire de cette racine. Aujourd'hui que l’origine des différentes racines qui ont usurpé ce nom est parfaitement connue, on ne range plus parmi les ipécacuanhas que la première espèce employée, et quelques autres analogues fournies par des plantes de la même famille ; celles qui appartiennent à d’autres familles, quoique possédant des propriétés vomitives, sont désignées sous le nom de faux ipécacuanha. Le Cephælis ipécacuanha produit seul la racine officinale ; on en distingue plusieurs sortes ou variétés. M. Guibourt admet les sui- vantes : 1° Zpécacuanha officinal où annelé mineur, deux variétés. À. Ipécacuanha gris norätre Guib.; ipécacuanha brun Lem.; ipécu- cuanha gris, ou annelé Mérat; il est de la grosseur d'une plume à écrire, mince à son extrémité supérieure, long de 0",08 à 0",12, 12 FLORE MÉDICALE tortu, recourbé dans tous les sens; le cœur ligneux ou #editulliumn est blanc jaunâtre ; l'écorce est épaisse, disposée en anneaux qui font le tour de l'axe, facile à séparer; l’épiderme gris noirâtre recouvre une écorce dure, cornée, grise, d'une saveur àcre un peu aroma- tique ; son odeur, lorsqu'elle est respirée en masse, est irritante et nauséeuse. B. Jpécacuanha annelé gris rougeätre Guib.; épécacuanha gris rouge de Lémery et de Mérat; son écorce est moins foncée, plus rouge, sa saveur n'est pas aromatique; son odeur est moins forte ; Mérat dit qu'il est plus amer, mais ce caractère, d'après M. Gui- bourt, est peu appréciable; l'écorce est plus amylacée et moins active ; Pelletier y a trouvé moins d'éméline. 2° Ipécacuanha annelé majeur, ipécacuanha gris blanc, de Mérat; il a été regardé comme une variété du précédent; mais comme il en est venu de grandes quantités du Brésil sans aucun mélange, M. Guibourt pense que c’est une sorte distincte, produite peut-être par un autre cephælis. Il est souvent mêlé de souches et de tiges; les racines rompues sontlongues de 0",15 et épaisses de 0",005 à 0°,006; moins tortueuses que les précédentes, les anneaux sont plus régu- liers, moins saillants, quelquefois nuls; l'écorce, très-épaisse, est dure, cornée, translucide, d’un gris jaunàtre ou rougeàtre ; l'odeur est forte, la saveur àcre et irritante, etc. Composirion cmimiQuEe. — L'ipécacuanha a été analysé par MM. Pel- letier et Magendie, Richard et Barruel; il contient un acide nommé acide ipécacuanhique, qui est combiné à une base, l'émétine; de la gomme, de l'amidon, de la cire végétale, une matière grasse hui- leuse, une matière extraclive. L'éméline est jaunûtre; elle brunit à l'air; elle est inodore, amère, à peu près insoluble dans l’éther et dans l’eau froide, assez soluble dans l’eau chaude, très-soluble dans l'alcool ; elle fond à 50°. Elle est très-vomilive. L'ipécacuanha officinal en contient environ le dixième de son poids. UsaGes. — Les expériences de M. Bretonneau ont démontré que la poudre d'ipécacuanha, mise en contact de la peau dénudée ou des muqueuses, déterminait une inflammation locale des plus énergi- ques; dans l'estomac ou dans le rectum, cette inflammation est pro- duite. C’est un des vomitifs les plus précieux. Son action est moins rapide que celle de l'émétique, mais elle dure plus longtemps ; 1l DU XIX° SIÈCLE. 173 faut l'administrer en poudre très-fine, délayée dans une grande quantité d'infusion chaude. On le fait prendre en petites doses, sou- vent répétées. Il purge quelquefois, surtout lorsqu'il ne fait pas vo- mir. On l’associe souvent à l'émétique. Piron considérait l'ipécacuanha comme le meilleur remède contre la dysentérie; aussi l’a-t-on appelé racine anti-dysentérique. Cette propriété de l'ipécacuanha à été admise sans contestation, seulement on fait ressortir l'importance qu'il y avait à l’administrer à doses fractionnées, souvent répétées, et à poursuivre son usage pendant plusieurs jours. Il est également très-efficace contre les diarrhées; mais ici encore le mode d'administration varie selon la nature et les causes de la diarrhée ; on le mélange souvent alors au calomel. La poudre ou le sirop d'ipécacuanha sont souvent employés à faibles doses comme d'excellents expeclorants. Ils combattent la dyspnée ; ils sont très-précieux contre la coqueluche; mais c'est sur- tout dans l’état puerpéral que MM. Trousseau et Pidoux vantent avec raison leurs bons effets. L'ipécacuanha a été vanté par Barbeyrac, Gianelli, Dalberg, contre la ménorrhagie, l'hémoptysie, le flux immodéré des hémor- rhoïdes. Baglivi l'appelle 2r/allibile remedium influribus dysentericis aliüsque hemorrhagiis. Dans le croup, l’angine couenneuse, ete., il faut préférer comme vomitif l’ipécacuanha à l'émétique. Il en est de même dans les empoisonnements par les irritants. Sous le signe Azc et l’abréviation Zpec, l'ipécacuanha est employé par les médecins homæopathes dans un grand nombre d’affections : dans les embarras gastriques, les affections nerveuses, les hémorrha- aies, les fièvres, etc., etc. IRIS Iris Germanica, Florentina, pseudo-acorus, ete. L. (Iridées. ) L'Iris germanique ou d'Allemagne, appelée aussi Iris ou Glayeul des jardins, Flambe, elc., est une plante vivace, à rhizome épais, charnu, tub‘reux, rameux et rampant, émettant de nombreuses fibres radicales. Les feuilles, radicales, sont ensiformes, pliées lon- gitudinalement et soudées dans presque toute leur longueur par les deux moitiés de leur face interne, équitantes à la base, assez larges, un peu arquées, plus courtes que la tige, qui est haute de 0",50 PL 174 FLORE MÉDICALE à 0",80, rameuse et pluriflore. Les fleurs, très-grandes, d’un beau violet veiné, sont solitaires, sessiles à l'extrémité des rameaux et en- tourées chacune d’une spathe herbacée dans sa partie inférieure. Elles présentent un périanthe régulier, à tube très-long, trigone, herbacé, à limbe partagé en six divisions pétaloïdes, disposées et alternant sur deux rangs, les trois extérieures munies en dedans d'une tige longitudinale de poils blanchâtres à sommet jaune, les intérieures obovales, brusquement rétrécies et canaliculées à la base ; trois élamines insérées à la base des divisions extérieures du périan- the, à filets grèles, appliqués contre la face intérieure des stigmates, àanthères longues et linéaires ; un pistil à ovaire infère, à trois loges multiovulées, surmonté d’un style trigone et de trois stigmates dilatés, pétaloïdes, carénés en dessus, concaves en dessous et élargis au sommet. Le fruit est une capsule trigone, à trois loges renfermant un grand nombre de graines déprimées-planes, bordées, à testa membraneux. L'Tris de Florence (1. floreñtina L.) se distingue de la précédente par son rhizome vivace, plus odorant; ses feuilles plus étroites; sa tige plus courte ; ses fleurs toujours blanches et son tube calicinal plus court. Elle est aussi vivace, comme les espèces suivantes. L'Iris des marais, vulgairement Glayeul des marais (7. pseudo- acorus L.)a ses feuilles radicales lancéolées-linéaires, égalant presque la longueur de la tige, qui est haute de 0,50 à 0%,90, rameuse et pluriflore ; les fleurs grandes, d'un beau jaune, pédicellées, réunies en petit nombre au sommet des rameaux ; les divisions intérieures du périanthe veinées de brun à la base, mais ne présentant pas de lignes de poils. L'Iris fétide (Zrs fœtidissima L.), vulgairement Gigot, spatule ou glayeul puant,' est caractérisée par ses feuilles, qui exhalent par le frottement une odeur désagréable ; sa tige, de 0°,40 à 0°,60, angu- leuse d’un côté ; ses fleurs bleuâtres, assez petites, longuement pédi- cellées ; enfin, par ses graines rouges et arrondies. Hagrrar. — Ces diverses espèces sont communes dans les lieux incultes de l’Europe centrale et méridionale ; l'iris des marais croît, comme son nom l'indique, dans les terrains humides ou inondés. On ne les cultive guère que dans les jardins botaniques où d'agrément. PARTIES USITÉES. — Les rhizomes, improprement appelés racines. RécoLte. — La souche de l'iris flambe est horizontale, charnue, articulée, recouverte d'un épiderme gris ; son odeur est vireuse, sa DU XIX° SIÈCLE. 175 saveur âcre ; à l'intérieur elle est grisâlre; sèche, elle répand une odeur prononcée de violette. L'ivis des pharmacies est produit par l'iris de Florence. IL nous vient de la Toscane et d’autres parties de l'Italie. Îl est biane, d’une saveur àcre et amère; il a une odeur de violette. C’est avec lui que l’on prépare les pois d’iris destinés au pansement des cautères. I en tre dans plusieurs compositions pharmaceutiques. Les parfumeurs en font très-grand usage. La souche de l'iris des marais est rougeàlre, légère, percée de trous. La graine torréfiée a été employée comme succédanée du café. (William Skrimshire.) Composition caiMiQuE. — D’après Vogel, le rhizome de l'iris de Florence contient une huile très-âcre et très-amère, une huile vola- ile, une matière âcre, jaune, solubie dans l’eau, de la gomme et de lamidon. L'huile volatile est solide, nacrée, lamelleuse; elle pos- sède une odeur de violette très-prononcée. Elle a été annalysée par M. Dumas. Tous les iris contiennent une substance âcre, mal connue. Vogel croit que l’action vomitive et purgative de cette plante est due à une matière extractive amère et à une huile âcre. M. Lecanu a extrait ces deux corps de l'iris fétide. La souche de l'iris des marais ne con- tient pas d'huile volatile. Usages. — L'odeur de violette très-prononcée que possèdent les rhizomes des iris les font souvent employer en parfumerie et en con- fiserie. En raison de leur âcreté on les emploie pour fabriquer des pois destinés à irriter et faire suppurer les cautères. C’est aujourd’hui à peu près leur seul usage admis dans la médecine rationnelle. Nos paysans les emploient comme purgatifs. A haute dose ils sont vomi- tifs. A faible dose, on les a regardés comme un stimulant des pou- mons et comme propres à faciliter l'expectoration dans les calarrhes chroniques. Malgré les assertions de Plater, de Rivière, de Ruffus, de Lesther et de Werlhoff, l'iris n’agit pas mieux dans les infiltrations cellulaires et les épanchements séreux que ne le font les autres purgatifs. Comme son aclion est très-incertaine, il n’est plus guère usité. Eltmuler em- ployait le suc d'iris comme hydragogue. Rivière, Amatus Lusitanus, Brassavole le prescrivaient contre les hydropisies; Mesué le mêlait au nard indien; Zapata donnait la souche d'iris à manger aux scrofuleux. 176 FLORE MÉDICALE On à employé l'iris contre les maladies de la peau, et, malgré ce qu’en ont dit un grand nombre d'auteurs, il est inefficace contre la rage. Le rhizome de l'iris des marais a été employé en Flandre comme sternulatoire ; on le faisait priser pour dissiper les céphalagies opi- uiâtres et les odontalgies. Ce remède n’est pas sans danger. L'iris fétide, autrefois vanté par Bourgeois comme emménagogue et anti- hystérique, n’est plus employé aujourd'hui, du moins dans la méde- cine rationnelle. IVRAIE Lolium temulentum L. (Graminées -Triticées. ) L'Ivraie enivrante est une plante annuelle à racines fibreuses, capil- jaires, fasciculées. Les tiges, solitaires ou peu nombreuses, hautes de 0",60 à 0,90, dressées, fistuleuses, noueuses, portent des feuil- les alternes, glabres, à gaine fendue dans toute sa longueur, à limbe plan, très-long, presque linéaire, un peu rude au toucher. Les fleurs, verdàtres, herbacées, peu apparentes, sont groupées en épillets ses- siles, alternes, comprimés d'avant eu arrière, et dont la réunion constitue un épi distique à la partie supérieure de la tige ou chaume. Chaque épillet, qui regarde l'axe de l’épi par le dos des fleurs, pré- sente une glume à deux valves, la supérieure ordinairement nulle dans les épillets latéraux ; l'inférieure herbacée, mutique, non caré- née, égalant ou dépassant l’épillet. Chaque fleur présente en outre une glumelle à deux valves, la supérieure à double carène ciliée, l'inférieure convexe, ovale-oblongue, munie où non d’une arête au- dessous du sommet; deux glumellules entières ou vaguement bilo- bées; trois étamines à filets grèles et pendants, à anthères bilobées; un ovaire simple, glabre, surmonté de deux stigmates plumeux, ses- siles, terminaux. Le fruit est un caryopse oblong, plan d’un côté et convexe de l’autre. Hagrrar. — Cette plante est commune dans toute l'Europe; on la trouve dans les moissons, les champs sablonneux, les terrains en friche. I n'y à pas lieu de s'occuper de sa culture; elle est tellement abondante qu'elle fait quelquefois le désespoir de l’agriculteur. Aussi ne la cultive-t-on que dans les jardins botaniques, où il suffit de semer ses graines en place au printemps. Dans les champs, on re- cherche plutôt les moyens de l’extirper. DU XIX' SIÈCLE. 177 Parties usITÉES. — Les fruits. Récorte. — L’ivraie enivrante ne possède pas les mêmes propriétés à diverses époques de sa végétation; c'est à la maturité des fruits qu'elle est plus active ; aussi la récolte-t-on à cette époque. Cepen- dant, d'après Loiseleur-Deslongchamps, elle serait plus active avant leur maturité. Composirion chimique. — L'ivraie, mêlée à la farine de froment, dont on se sert pour faire du pain, peut déterminer des accidents mortels. D'après Tessier, elle empêche la fermentation panaire lors- qu'elle est mêlée à la farine dans la proportion d'un neuvième ; son action vénéneuse a été constatée par MM. Tessier, Gallet, Sarazin, Clabaud et Gaspard. D’après ces derniers auteurs, elle ne l’est point pour les cochons, les vaches, les canards et les poulets. Bourgeois ajoute qu'on engraisse les volailles avec la pâte d'ivraie. M. Gallet attribue à une matière résineuse et à l’eau de végétation les accidents produits par l'ivraie. Au moyen de l’éther, l’un de nous a extrait des fruits une matière résineuse très-aclive ; mais ce sont MM. Filhol et Baillet qui nous ont appris la véritable composition de celte substance ; ils ont vu que l’huile verte contenait de la chlo- rophylle et de la xanthine, qu'elle n'était pas complétement saponi- fiable ; la partie qui ne se saponifie pas est solide, molle, de couleur jaune orangé, insoluble dans l’eau, très-soluble dans l'alcool et l'éther; elle est neutre et incristallisable; elle est vénéneuse et dé- termine des tremblements généraux sans narcotisme. Le résidu laissé par l’éther étant épuisé par l’eau, on obtient du sucre, de la dextrine, des matières albuminoïdes, une substance extractive qui possède une action narcotique prononcée, et qui ne détermine aucun des phéno- mènes convulsifs produits par la substance jaune. MM. Filhol et Baillet ont constaté que le L. nicole est au moins aussi actif que le /emulentum; le L. perenne est peu actifetle Z. /a- lacum ne l'est pas du tout. Usages. — En Allemagne, les fruits du ZL, {emulentum sont em- ployés comme stupéfiants; on compare leurs effets à ceux produits par l’aconit. On en fait usage en poudre, à la dose de cinq à dix centigrammes, quatre à six fois par jour, contre la céphalalgie, la méningite rhumatismale, etc. Les symptômes produits par l’ivraie à dose toxique sont les sui- vants : pesanteur de tête avec douleur frontale, vertiges, tintements Flore, T. II. 12 178 FLORE MÉDICALE d'oreilles, tremblement de la langue, gène de la déglutition, de la prononciation et de la respiration, épigastralgie, vomissements, inap- pétence, ‘envies d’uriner, tremblement général, sueurs froides, grande lassitude, assoupissement. Séeger, qui a observé plusieurs cas d’empoisonnement par cette substance, considère le tremblement général comme le symptôme dominant et caractéristique. Gallet regarde le sucre comme l’antidote de l'ivraie. Il vaut certainement mieux provoquer ou faciliter les vomissements, et recourir aux bois- sons légèrement excitantes, comme l'infusion de camomille, puis on administre des boissons alcooliques et éthérées. Parmentier a proposé de soumettre le blé mélangé d'ivraie à la chaleur du four avant de le faire cuire. Rien ne démontre l'efficacité de cette méthode , et il vaut mieux, certainement, séparer l'ivraie du bon grain. D'après Dioscoride (lib. If, p. 93), on employait de son temps l'ivraie en topique contre les ulcères, les dartres et les écrouelles. On l’a considérée comme anti-septique, résolutive et détersive. On en appliquait des cataplasmes sur les articulations gonflées et doulou- reuses. Aujourd'hui elle est à peu près inusitée; mais les travaux de MM. Filhol et Baillet ayant éclairé son étude, elle pourra recevoir d'utiles applications. DU XIX° SIÈCLE. 179 JALAP Convolvulus jalapa L. C. officinalis Pelletan. Ipomæa purgans Wender. (Convolvulacées.) Le Jalap est une plante vivace, à racine portant des tubercules charnus, arrondis ou ovoïdes, brunâtres, lactescents. La tige, haute de plusieurs mètres, cylindrique, rameuse, volubile, porte des feuilles alternes, pétiolées, entières, cordiformes, aiguës, à lobes arrondis, glabres, d'un vert clair en dessus, glauques en dessous: Les fleurs, d’un rose clair, sont solitaires, rarement géminées à l’ex- trémité de longs pédoncules axillaires, munis de deux petites brac- tées vers leur partie supérieure. Elles présentent un calice persis- tant, à cinq divisions profondes; une corolle campanulée ou en entonnoir, à tube long, renflé dans sa partie moyenne, à limbe vaguement divisé en cinq lobes ; cinq étamines saillantes ; un ovaire simple, surmonté d’un style que termine un stigmate bilobé. Le fruit est une capsule globuleuse, à deux loges monospermes, entou- rée par le calice persistant (PI. 19). Hagirar. — Cette plante est originaire du Mexique, où elle vit dans les forêts. Elle n’est cultivée que dans les jardins botaniques. Parties usiTées. — Les racines, la résine qu’on en extrait. Récoure. — Le jalap vient du Mexique et tire son nom de la ville de Xalapa, aux environs de laquelle il croît en abondance. Consi- déré tour à tour comme une 4ryone, un Useron, une belle de nu, une rhubarbe, confondu longtemps avec d’autres plantes, son origine est aujourd’hui parfaitement connue. En 1570, Monardès publia son histoire des Médicaments du Nou- veau-Monde ; il y parle du #échoucan et du méchoacan sauvage, qui pourrait être le jalap. En 1619, Antoine Colin, apothicaire lyonnais, dans sa traduction de l’ouvrage de Monardès, décrivit le jalap; il fit connaître cette racine sous son véritable nom et la compara au méchoacan. En 1620, Gaspard Bauhin, dans son Prodromus Theatri Botanici, décrivit le jalap sous le nom de Bryona mechoacana nigricans ab Alexandrinis et Massiiensibus Jalapium dicta. K en fait remonter l'arrivée en France en 4609, et il le nomme #néchoacan noir ou mûle. Plus tard Ray, Plunkenet, Sloane, firent du jalap un convolvulus. 180 FLORE MÉDICALE Plumier et de Lignon, et plus tard Tournefort le mentionnent sous le nom de Jalapa (Mirabilis L.) officinarum fructu rugoso. Linné l'attribua au Merabilis longiflora, et Bergius au MZ. dichotoma. À Va même époque, Houston avait rapporté d'Amérique ‘une plante à racine purgative, que B. de Jussieu reconnut pour un liseron et que Linné nomma Convoloulus jalapa. En 1777, Thierry de Menonville décrivit une plante trouvée près de la Vera Cruz. C'était la même que celle de Houston et de Linné, et que Michaux avait décrite sous le nom d’/pomæa macrorhyza. Des- fontaines la décrivit sous le nom Linéen, et on a cru jusqu’en ces derniers temps que celte plante, qui est le Batatas jalapa Chois., produisait le jalap officinal. C’est Redman Coxe qui a décritle premier, en 1827, le vrai jalap. Il le crut semblable à l’Zpomcæa macrorhyza; etil le nomma /pomeæa jalapa vel macrorhyza. En 1831, M. Daniel Smith démontra que la plante décrite par Coxe fournissait le vrai jalap. Un pharmacien français, qui a longtemps habité le Mexique, M. Ledanois, a mis hors de doute l'origine du jalap. La plante a été décrite par M. G. Pel- letan sous le nom de Convoloulus officinalis, et M. Guibourt, auquel nous empruntons ces détails, le nomme, avec M. Bentham, E£zx0go- néum purga. Les Mexicains le nomment Tolonpad. Le jalap officinal est pyriforme, avec ou sans radicules ; les tuber- cules sont quelquefois accolés entre eux; les fragments sont plus ou moins gros, ils peuvent peser jusqu'à une livre. On y trouve souvent des incisions profondes, qu'on y a pratiquées pour faciliter la des- siccation. Souvent aussi les tubereules sont coupés par moitié ou par quart. Sa surface est grise rougeâtre, veinée de noir; l'inté- rieur, gris sale, est ondulé et présente des points brillants. L'odeur est nauséabonde ; la saveur âcre et irrilante ; il est souvent piqué de vers, selon l’observation de M. Henry; il est alors plus actif, plus riche en résine et doit être réservé pour la préparation de cette substance. Sous le nom de yalap mûle, où jalap léger, on trouve souvent, dans le commerce, une racine que M. Guibourt désigne avec juste raison sous le nom de Jalap fusiforme. Elle est produile par l'/pomæa Ori- zabensis Ledanois, Convoloulus Orizabensis Pell. C’est une racine grosse, fusiforme, ramifiée à sa partie inférieure. Dans le commerce, ilest en rouelles larges de 0,055 à 0",080, ou en fragments plus longs et moins larges. Leur couleur est noire à l'extérieur et plus DU XIX° SIÈCLE. 181 blanche à l’intérieur. L'odeur et la saveur sont les mèmes que celles du jalap officinal, mais plus faibles. On trouve depuis quelques années, dans le commerce, de petits tubercules de jalap, gros comme une noix et au-dessus, pyriformes, durs, peu riches en résine, et contenant beaucoup d'amidon. Cette racine porte le nom de Ja/ap de Tampico. On prétend que c’est le jalap officinal cultivé. On trouve aussi souvent de faux jalaps, tantôt isolés, tantôt mé- langés à des jalaps vrais; ils sont le plus souvent produits par des mirabilis. Celui qui a été désigné sous le nom de jalap à odeur de rose est attribué à la paate à odeur de rose (Grosourdy). D’autres fois, ce sont des racines ou des rhyzomes de nature inconnue, et l’un de nous à reconnu, dans un faux jalap, la présence d’excroissances qui viennent sur la tige du goyavier et des tubercules de dahlia. Composition CHIMIQUE. — D’après M. F. Cadet, la racine de jalap officinal contient : eau, 4,8; résine, 10; extrait gommeux, 4,4; fécule, 2,5; albumine, 2,5; ligneux, 29; phosphate de chaux, 0,8; chlorure de potassium, 1,6; carbonate de potasse, 0,4; carbonate de chaux, 0,4; silice, 0,5; perte, 3,5; total, 100. M. Ledanois a trouvé dans 100 parties de jalap fusiforme; résine : 8; extrait gommeux, 295,6; amidon, 3,2; albumen, 2,4; ligneux, 5,8 ; eau et perte, 2,8. La quantité de résine varie, dans le jalap officinal, de 8 à 20 pour 100. La résine de jalap est brune, àcre, soluble dans l'alcool; l'éther la sépare en deux espèces de résines, l'une molle, qui forme les trois dixièmes de son poids; l’autre, sèche et cassante, que l'éther redissout : la résine de jalap est insoluble dans les huiles volatiles, tandis que certaines résines, avec lesquelles on la falsifie, le sont. M. le professeur Guibourt a récemment décrit deux nouvelles sortes de jalap, qu'il désigne sous les noms de Jalaps digités, majeur et mineur. Leur origine est inconnue ; mais 1l croit pouvoir les attribuer à l’Zpomæa metistlanica, Chois. Is renferment beaucoup plus de sucre incristallisable (mélasse) et beaucoup moins de résine que le jalap officinal; aussi doivent-ils être exclus de l'emploi médical et réservés à l'extraction de la résine. Usaces. — Le jalap est un purgatif drastique des plus puissants ; on l’emploie en poudre, à la dose de un à deux grammes, tantôt pure, tantôt mélangée avec 10 à 20 centigrammes de calomel ; les tein- 482 FLORE MÉDICALE tures, simple ou composée (eau-de-vie allemande) purgent à la dose de 15 à 50 grammes ; on en fait un extrait alcoolique qui est peu employé; la résine l’est plus souvent à la dose de 20 à 60 centi- grammes; on l’administre dans du lait ou dans une émulsion d'amandes. La médecine homæopathique fait quelquefois usage du jalap comme purgatif, lorsque, surtout, on veut agir sur le gros inteslin. Son signe est Ap, et son abréviation Jalap. JASMIN Jasminum officinale L. (Jasminées.) Le Jasmin blanc ou officinal est un arbrisseau dont la tige, longue parfois de plusieurs mètres, sarmenteuse et volubile, se divise en rameaux longs, grèles, arrondis, striés, glabres, d'un vert foncé, portant des feuilles opposées, pétiolées, pennatifides, à cinq ou sept folioles ovales, aiguës, entières, glabres et d’un vert très-foncé, sur- tout en dessus. Les fleurs, blanches, d'une odeur suave, longuement pédonculées, sont réunies en petits bouquets axillaires et terminaux, accompagnés de deux bractées linéaires. Elles présentent un calice campanulé, à tube court, à limbe divisé en cinq lanières longues et très-étroites; une corolle en coupe, à tube très-long et un peu strié, à limbe partagé en cinq divisions ovales, lancéolées, aiguës, un peu concaves ; cinq étamines incluses, insérées vers le milieu de la hau- teur du tube, à filets courts et aplatis, à anthères ovoïdes, oblongues, un peu comprimées; un ovaire simple, libre, arrondi, à deux loges biovulées, surmonté d’un style filiforme terminé par deux stigmates allongés. Le fruit est une baie ovoide, glabre, à deux loges contenant chacune ordinairement une graine aplatie. Hagrrar. — Originaire de l'Orient, le jasmin blanc est aujour- d'hui presque naturalisé dans le midi de l'Europe. On le cultive dans un grand nombre de jardins. Cuzrurs. — Le jasmin peut croitre en plein air jusque dans le nord de la France; il vient dans tous les sols et à toute exposition, mais mieux dans une terre légère et chaude et à l'exposition du midi, surtout s’il est palissé contre un mur. On le multiplie facile- ment de graines, de rejetons, de boutures et de marcottes. Il demande DU XIX° SIÈCLE. 183 à être arrosé et tondu de temps en temps. Quand le froid détruit les tiges, il en repousse de nouvelles ; mais il faut, dans le Nord, couvrir les pieds avec de la litière. PARTIES uSiTÉES. — Les fleurs. Récorte. — Les fleurs du jasmin officinal sont récoltées à l’époque de leur épanouissement ; il faut les cueillir le matin. Elles ne sont employées que fraiches; par la dessiccation elles perdent tout à fait leur odeur, qui est extrêmement fugace. Cowposirion cmimique. — Outre le jasmin officinal, on peut em- ployer, pour la parfumerie, le jasmin d'Arabie, J. sambac Aït, qui est cultivé dans l'Inde et dans toute l'Arabie; le jasmin Jonquille J. odoratissimum L., cultivé en Europe; le jasmin d'Espagne ou jas- min grandiflore J. grandiflorum, originaire de l'Inde. Les fleurs de toutes ces plantes doivent leur odeur suave à une huile essentielle, qui est tellement fugace qu'on ne peut l'obtenir qu'en dissolution dans l'huile (huile de jasmin) dans la graisse (graisse de jasmin) ou dans l’eau et l'alcool (esprit de jasmin). Pour obtenir cette odeur, on imprègne d'huile d'olives de coton cardé, que l'on place au milieu des fleurs dont on veut enlever le parfum. Ce coton est ensuile soumis à la presse, et on obtient ainsi une huile d’une odeur suave, qui, traitée par l'alcool, cède son parfum à ce liquide. Ce procédé est connu sous le nom d’en/leurage. On est parvenu à isoler l'essence du jasmin par une autre méthode ; elle consiste à trai- ter les fleurs par du sulfure de carbone et à chauffer celui-ei en vase clos, à la température de 65° environ (Millon). L'essence de jasmin, ainsi isolée, possède une odeur des plus agréables. Refroidie à 0°, elle laisse déposer un stéaroptène blanc, cristallisé, inodore, fusible à 125°, peu soluble dans l’eau, très-soluble dans l'alcool, l'éther, les huiles fixes et volatiles. Ce stéaroptène forme, avec l'iode, un com- posé brun qui prend peu à peu une teinte vert-pré. Usaes.— L'essence de jasmin n’estusilée qu'en parfumerie; elle sert à préparer des eaux de senteur et des pommades. La racine du J. an- gustlifolium L. est employée dans l'Inde contre les dartres (Aïnslie, Mat. ind., M, p. 52). En Turquie, on cultive le jasmin sur une seule tige, de manière à obtenir des axes droits et longs, que l’on perfore pour fabriquer des tuyaux de pipe très-recherchés, 184 FLORE MÉDICALE JOUBARBE Sempervivum tectorum 1. L (Crassulacées.) La grande Joubarbe ou Joubarbe des toits, appelée aussi Artichaut bâtard, est une plante vivace, à racines fibreuses, ramifiées, fascicu- lées, tracantes. La tige, haute de 0°,30 à 0,60, cylindrique, épaisse, robuste, velue glanduleuse, dressée, émet à sa base de nombreux rejets terminés par des rosettes globuleuses de feuilles imbriquées, et se divise au sommet en rameaux nombreux, étalés et recourbés en dehors. Elle est couverte de feuilles alternes, sessiles, oblongues ou obovales, pointues, épaisses, charnues, tendres, d’un vert gai; les radicales plus larges, ciliées, réunies et imbriquées en rosettes glo- buleuses ; les caulinaires velues et distantes. Les fleurs, rose pourpre, striées, grandes, insérées sur des pédoncules très-courts, sont dis- posées en épis unilatéraux scorpioïdes dont la réunion constitue un corymbe terminal au sommet de la tige. Elles présentent un calice velu glanduleux, à douze divisions linéaires-lancéolées ; une corolle à douze pétales lancéolés linéaires, velus glanduleux, deux fois plus longs qué le calice; vingt-quatre élamines rougeâtres, à anthères arrondies ; douze écailles hypogynes, très-petites, convexes, dentées, glanduliformes ; un pistil composé de douze carpelles distincts, à une seule loge multiovulée, surmontés de styles très-courts et de stigmates très-petits. Le fruit se compose de douze petits follicules velus glan- duleux, rapprochés à la base, divergents au sommet, et renfermant chacun plusieurs graines oblongues. Hagrrar. — La joubarbe des toits est commune en Europe. On la trouve dans les fentes des rochers, dans les lieux pierreux, sur les vieux murs, les toits de chaume, etc. Cuzrure. — Cette plante se multiplie très-facilement par graines, par drageons ou par éclats de touffes, et ne demande aucun soin. Parties usirées. — Les feuilles. Récorre. — Les feuilles de joubarbe ne sont employées que frai- ches ; il faut les choisir grosses et charnues, et les cueillir avant que la tige soit développée. Composirion cuiMiQuE. — Le suc de la joubarbe est äcre et astrin- gent; il contient beaucoup d'albumine et de malate de chaux. DU XIX° SIÈCLE. 185 Usaces. — La joubarbe est un remède vulgaire contre les cors, les plaies gangreneuses, les ulcères sordides, la brülure, etc. Le suc était autrefois employé contre les fièvres bilieuses, inflammatoires et même intermittentes. On la conseillée contre la diarrhée, les mala- dies convulsives, la chorée, l’épilepsie, etc. Boerhaave recomman- dait le suc dans la dysentérie, et Roques affirme qu'il lui à réussi. Un médecin bavarois, Reichel, le regardait comme un narcotique spécifique contre certaines affections spasmodiques. Tournefort dit qu'il n'ya pas de meilleur remède pour les chevaux fourbus que de leur faire avaler 500 grammes de suc de joubarbe ; mais, en méde- cine humaine comme en médecine vétérinaire, cette plante est justement abandonnée, C’est surtout à l'extérieur que le jus de jou- barbe à été préconisé. On le conseillait sur du coton contre la sur- dité. Forestus l’'employait en onctions mêlé à la craie contre les ulcérations serpigineuses de la face chez les enfants. M. Cazin dit l'avoir employé avec succès contre l'eczéma aigu. On l’a vanté contre les ophthalmies, et le professeur Boyer l'appliquait sur les irritations de la peau, les dartres, les ulcérations profondes; on en faisait des pommades et des onguents qu'on prescrivait contre les brülures, les hémorroiïdes, et les feuilles en cataplasmes avec du vinaigre appli- quées sur le scrotum arrêtent, dit-on, à l'instant les hémorragies nasales ! La joubarbe est aujourd'hui tout à fait abandonnée et inusitée dans la thérapeutique rationnelle. JUJUBIER Rhamnus Zizyphus L. Zizyphus vulgaris Lam. (Rhamnées -Zizyphées.) Le Jujubier est un arbre de moyenne grandeur, à racines traçantes et très-drageonnantes. La tige, haute de 6 à 10 mètres, tortueuse, couverte d'une écorce brune, raboteuse, rude, crevassée, se garnit, dès la base, de nombreuses branches à écorce brun rougeàtre, émet- tant des rameaux annuels verts, grêles, filiformes, flexueux, épineux ; ceux-ci portent des feuilles alternes, brièvement pétiolées, ovales- oblongues, acuminées, arrondies à la base, dentées, assez fermes, d'un vert clair et brillant,et marquées de trois ou cinq nervures longitu- dinales fortement saillantes. Les fleurs, d'un jaune pâle, petites, sont » 186 FLORE MÉDICALE solitaires à l'extrémité de courts pédoncules axillaires. Elles présen- tent un calice à cinq sépales; une corolle à cinq pétales; cinq éta- mines, à filets courts, à anthères d’un beau rouge vif; un pistil com- posé de deux carpelles insérés sur un disque glanduleux, surmonté d’un style simple que termine un petit stigmate globuleux. Le fruit (jujube) est une drupe ovoïde, à peau lisse, coriace et rouge brun; à chair jaunâtre, molle et visqueuse à la maturité ; à noyau allongé, ligneux, très-dur, rugueux, divisé en deux loges, dont chacune ren- ferme une graine aplatie, arrondie, lenticulaire et jaunàtre. . Hagrrar. — Cet arbre habite le bassin méditerranéen; il est assez répandu dans toute l'Europe méridionale. Il peut croître en pleine terre jusque sous le climat de Paris; mais il y végète péniblement et son fruit n'y mürit pas. Cuzrure. — Le jujubier est surtout cultivé comme arbre fruitier; on le trouve aussi dans les plantations d'agrément, et on le plante même pour faire des haies. Nous ne nous étendrons pas sur ce sujet, qui appartient essentiellement au domaine de l’arboriculture. Parties usiTÉEs. — Les fruits. Récorre. — Le jujubier, originaire de la Syrie, a élé apporté en Italie sous le règne d’Auguste. Il est aujourd'hui naturalisé dans la Provence et surtout aux îles d'Hyères, d'où nous recevons ses fruits. Où les récolte à leur maturité et on les fait sécher au soleil. I faut les choisir gros, rouges, bien charnus. ComPosiTION CHIMIQUE. — L'analyse des fruits du jujubier n'a pas élé faite ; leur saveur est douce, mucilagineuse et sucrée, un peu astringente. C’est le mucilage et le sucre qu'ils contiennent qui les font rechercher. UsaGes. — La jujube fait partie des quatre fruits pectoraux avec le raisin, la datte et la figue. On en faisait autrefois un sirop et on l'employait en tisane comme émollient et béchique. Elle entrait dans la pâte de jujubes, d'où on l’a supprimée à lort depuis longtemps, de sorte que la prétendue pâte de jujubes des pharmaciens et des confiseurs n'est qu'une préparation de sucre et de gomme aromatisée avec un peu d’eau de fleurs d'oranger. Les jujubes, à peu près inusitées en médecine, ont une saveur légère- ment styplique, Les Indiens les mangent. D'après Ainslie (Hat. ind. t. IE, p. 96), les Wiliens prescrivent les racines en décoction contre les fièvres. En Cochinchine, on mange les fruits du Z. agrestis Lour. DU XIX° SIÈCLE, 187 D'après Leprieur et Perrotet, les fruits du Z. hardei du Sénégal sont vénéneux, et les Nègres emploient ses racines contre la gonorrhée (Flora Senegalensis, page 146). On croit que c'est Ja même espèce dont Adanson assure que les Sénégaliens usent contre les maladies vénériennes (Ferrein, Mat. méd., 1. WI, p. 339), et Forskal dit qu'en Arabie on lave les ulcères avec la décoction des feuilles sèches du Z. Napeca Lam., Rhamnus spina Christi L., ainsi nommé parce que la couronne d'épines qui figure dans la Passion fut faite avec ses rameaux ; les Arabes le nomment Nabka. Les fruits des Z. Ænoplia Lam. (Zhamnus ænoplea L.), Orthacaulha Dec., Salious, Trinervius Rottler sont mangés dans différents pays. Le Zizyphus sativa Gaertner, Z. Lotus Lam., Z. Lotos Desf., Bhamnus Lotus L., vient en abondance dans la régence de Tunis, dans l’île de Zerbi, pays habité par les Lotophages. Clusius, Shaw et J. Bauhin avaient signalé cet arbre comme fournissant le fameux Lotos des anciens. Théophraste et Polyhe nous ont appris que les habitants de ce pays s'en nourrissaient, ainsi que leurs esclaves et leurs bestiaux. Ils en préparaient une sorte de liqueur dont ils s'abreuvaient, et Homère ajoute que ces fruits avaient un goût si délicieux qu'ils faisaient perdre aux étrangers le souvenir de leur patrie, et qu'Ulysse fut obligé d'enlever de force ceux de ses compa- gnons qu'il avait envoyés pour reconnaitre le pays (Guibourt, Drog. sémple, &. WE, p. 493, 4° édition). On extrait par décoction, des feuilles et des rameaux du jujubier, un extrait très-astringent, que l'on prépare en grande abondance en Algérie, et qui nous parait devoir remplacer un jour le cachou dans toutes ses applications. JULIENNE Iesperis matronalis L. (Crucifères-Sisymbriées.) La Julienne des jardins, appelée aussi vulgairement Beurrée, Cas- solette, Damas, Girarde, etc., est une plante vivace, à racine rami- fiée, fibreuse. La tige, haute de 0",40 à 0,80, rude, pubescente ou velue, dressée, simple où rameuse dans sa partie supérieure, porte des feuilles alternes, dentées, un peu rudes; les radicales oblongues, atténuées à la base en péliole ; les caulinaires ovales-lancéolées, acu- minées, presque sessiles. Les fleurs, pourpres, violettes ou blanches, 188 FLORE MÉDICALE très-odorantes, sont groupées en un corymbe terminal qui s'allonge et se transforme en grappe par les progrès de la floraison. Elles pré- sentent un calice à quatre sépales dressés, connivents, disposés sur deux rangs, les deux extérieurs gibbeux à la base; une corolle à quatre pétales longuement onguiculés, à limbe obovale, apiculé, arrondi ou échancré au sommet; six étamines tétradynames; un ovaire simple, allongé, presque cylinärique, à deux loges multiovulées, surmonté d'un style {rès-court et d’un stigmate presque sessile, à deux lobes lamelleux dressés et connivents. Le fruit est une silique linéaire, allongée, presque cylindrique, à deux valves convexes, glabre, ascen- dante, un peu toruleuse, à deux loges renfermant de nombreuses graines oblongues (PI. 20). Cette plante présente plusieurs variétés, dont une à fleurs ino- dores, d’autres à fleurs doubles diversement colorées, etc. HaBirar. — La julienne habite les régions centrales et méridio- nales de l'Europe. On la trouve dans les endroits ombragés, les haies, les buissons, les bois montueux, etc. Cuzture. — Cette plante est surtout cultivée dans les jardins d'agrément. Elle croit dans tous les sols et à toute exposition. On la propage lrès-facilement de graines ou d’éclats de pieds. ParTies usiTéEs. — La plante entière. Récocte. — On récolte la julienne pendant la floraison ; elle n’est vraiment active que fraîche; elle perd à peu près toutes ses pro- priélés par la dessiccation. COMPOSITION CHIMIQUE. — Par sa composition chimique et ses pro- priétés, cette plante se rapproche du cresson, du cochléaria, du rai- fort, de la cardamine, etc. Sa saveur est piquante, un peu àcre; contusée et appliquée sur la peau, elle détermine une vive rubéfac- tion. Cette action irritante est due à une huile essentielle, qui, pro- bablement, ne préexiste pas, et qui ne se forme que lorsqu'on vient à briser le tissu de la plante, car l'odeur forte ne se développe que lorsqu'on froisse les parties. Usaces. — Boerhaave et Clusius regardaient la julienne comme sudorifique, incisive et apéritive. Dans les vieux dispensaires, elle est désignée sous le nom de 6/4 matronalis, parce que les dames aimaient à s’en parer, et que ses fleurs sont violettes. Elle est anti- scorbutique au mème titre que les autres crucifères ses congénères, quoique moins active. Autrefois employée contre l'asthme, les con- DU XIX° SIÈCLE. 189 vulsions, la toux, le cancer, la gangrène, etc., elle est aujourd’hui tout à fait inusitée. Nous reconnaissons toutefois que dans certains cas urgents, dans les campagnes, lorsqu'on n'aura sous la main ni moutarde, ni cresson, ou toute autre plante analogue, la julienne contusée pourra être appliquée avec avantage, non pas comme résolutive, détersive et ma- turalive, comme on l'a dit trop souvent, mais bien comme rubé- fiante. La julienne est une plante que le médecin doit connaitre, mais qu'il emploiera le moins possible. JUSQUIAME Hyoscyamus niger L. (Solanées.) La Jusquiame noire ou commune, appelée aussi Hanebane, Pote- lée, Herbe de Sainte-Apolline, herbe caniculaire, etc., est une plante annuelle ou bisannuelle, à racine fusiforme, épaisse, ridée, bru- nâtre. La tige, haute de 0",30 à 0",80, cylindrique, robuste, dres- sée, recourbée, vert grisàtre, couverte de longs poils visqueux, rameuse dans sa partie supérieure, porte des feuilles alternes, grandes, ovales, aiguës, profondément sinuées, molles, velues et visqueuses ; les radicales pétiolées ; les caulinaires sessiles et un peu embrassantes. Les fleurs, jaune pàle, veiné de pourpre noirâtre, presque sessiles, sont groupées en épi feuillé terminal, unilatéral, roulé en crosse au sommet. Elles présentent un calice campanulé, à tube renflé et pubescent, à limbe divisé en cinq lobes lancéolés mu- cronés ; une corolle en entonnoir, à tube cylindrique, à limbe oblique divisé en cinq lobes inégaux et obtus; cinq étamines un peu sail- lantes, à filets un peu arqués; un ovaire à deux carpelles, à deux loges multiovulées, surmonté d'un style simple terminé par un stig- mate en tête. Le fruit est une pyxide, s’ouvrant au sommet par un opercule en ferme de calotte, contenue dans l’intérieur du calice per- sistant, et renfermant de nombreuses graines petites, arrondies, ri- dées, réticulées et d’un blanc grisätre (PI. 21). La jusquiame blanche (A. albus L.) est annuelle et se dis- tingue de la précédente par sa taille moins élevée; ses tiges moins rameuses, plus blanches, plus cotonneuses; ses feuilles pétiolées ; sa corolle jaune pâle, plus petite, à tube verdàtre intérieurement. 190 FLORE MÉDICALE HamirarT. — La jusquiame noire est commune en Europe; elle croit dans les décombres, les lieux incultes, au bord des chemins, ete. La jusquiame blanche habite le Midi. Ces deux plantes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques. PARTIES USITÉES. Les racines, les feuilles, les graines. RécoLte. — On récolte la jusquiame lorsqu'elle est en pleine végé- tation, un peu avant l’anthèse. On la fait sécher d’abord au soleil ou au séchoir, puis à l’étuve. La racine, rarement employée, doit être préférée à la fin de la seconde année. Sa ressemblance avec celles du navet, de la chicorée et surtout du panais a souvent été la cause d’ac- cidents mortels. Les graines sont cueillies à la maturité du fruit. On les fait sécher à l’étuve. La jusquiame mal desséchée est noire ; il faut alors la rejeter. Composirion CHIMIQUE. — Les 77. niger, albus et aureus L. pos- sèdent à peu près la même composition et jouissent des mêmes pro- priétés. La première est seule employée. Toutes dégagent, lorsqu'elles sont fraiches, une odeur vireuse repoussante, qui disparaît en partie par la dessiccation. Leur saveur, d'abord fade, devient bientôt âcre, nauséabonde et amère. Geiger et Hesse en ont extrait un alcaloïde qu'ils ont nommé Hyosciamine. Elle cristallise en aiguilles soyeuses. Sa saveur est àcre et désagréable. Elle dilate fortement la pupille. Elie est volatile sans décomposition. L'iode la précipite en brun; l'infusion de noix de Galle en blanc; le chlorure d’or en blane jau- nâtre ; le chlorure de platine ne la précipite pas. Abandonnée dans l’eau et au contact de l'air, elle s’altère, se colore, devient incristalli- sable, sans rien perdre de ses propriétés physiologiques et thérapeu- tiques. Usages. — La jusquiame est un des poisons narcotico-àcres des plus violents. Moins active que le stramonium et la belladone, elle détermine des accidents graves qui peuvent occasionner la mort. D'après Wepfer (Tractatus de cicuta aquatica), des moines qui avaient mangé par erreur de la jusquiame en salade, éprouvèrent, quelques heures après, des douleurs d'entrailles, des malaises, des vertiges, des hallucinations, du délire, de la diplopie chez quelques-uns ; de l’amblyopie chez d’autres ; tous guérirent. La jusquiame s'administre dans les mêmes cas que la belladone et le stramonium ; seulement à dose plus élevée. Elle était peu connue chez les anciens. Dioscoride la donnait pour calmer les douleurs DU XIX° SIÈCLE. 194 (lib. 6, cap. 69). Celse s’en servait en collyre, et il injectait son suc dans les oreilles contre l’otorrhée purulente. C'est Storck (de Stra- monio, Hyosciamo, ele., p.28) qui l'a le mieux étudiée. I cite des faits nombreux qui prouvent ses bons effets dans les névroses; et, malgré les dénégations de Greding, les observations de Storck, appuyées d’ailleurs par celles de Collin, sont restées l'expression de la vérité, tout en faisant la part de l’exagération habituelle du médecin de Vienne. Witt l’'employait dans les maladies nerveuses. Stoll la pré- férait à l'opium. Wollze la faisait prendre dans la colique saturnine. Roseinstein l'administrait avec succès contre la toux nerveuse (Mur- ray, App. méd., t. TX, p. 666). On l’a souvent employée dans la coque- luche avec autant de succès que la belladone ou que le stramonium, Mais c’est surtout dans les névralgies que la jusquiame est efficace. Les faits rapportés par Breiting, Méglin, Chailli, Burdin, etc., ne laissent aucun doute à cet égard. I n'y a pas jusqu'aux rhumatalgies qui n'en aient été heureusement modifiées. M. Michéa l'a appliquée au traitement de l’aliénation mentale. Elle à paru bien agir dans l'épilepsie. M. Troubine a conseillé les fumigations de jusquiame contre l’odontalgie. Plater l’a vantée dans les flux hémorroïdaux. MM. Chanel et Magliari assurent qu'elle aide à la réduction des her- nies et des paraphymosis. Enfin la jusquiame est souveraine pour cal- mer la toux et procurer le sommeil. A l'extérieur, sous forme de cata- plasmes, elle est maturalive et narcotique. La jusquiame est employée en poudre, sous forme de teinture et d'extrait. Celui-ci entre dans les pilules de Méglin, et les graines font partie des pilules de cynoglosse. En médecine homæopathique, on fait souvent usage de la jus- quiame, surtout après la belladone. On l’emploie dans un grand nombre de maladies, mais plus particulièrement dans les affections nerveuses. Son signe est Sy et son abréviation Hyosc. 192 FLORE MÉDICALE KALMIE Kalmia latifolia et angustifolia L. (Éricinées - Rhodorées.) La Kalmie à larges feuilles (A. latifolia L.) est un arbrisseau, dont la tige, haute de 2 à 4 mètres, ordinairement courbée, à écorce rude et légèrement colorée, porte des feuilles alternes, pétiolées, lancéolées, entières, longues de 0",08, larges de 0",03, épaisses, glabres et d'un vert foncé. Les fleurs, d'abord blanches et pana- chées de rouge, plus tard carnées, sont disposées en corymbes terminaux. Elles présentent un calice persistant, à cinq divisions petites, ovales, aiguës, épaisses; une corolle monopétale, en coupe, à tube cylindrique, plus long que le calice, à limbe entier, creusé à sa base et dans son pourtour de dix fossettes neclariferes, qui font saillie au dehors ; dix étamines, à filets courts, subulés, droits, étalés, à an- thères simples, encastrées avant la fécondation dans les fosseltes de la corolle; un ovaire arrondi, à cinq loges multiovulées, surmonté d'un style simple, filiforme, terminé par un stigmate obus. Le fruit est une capsule globuleuse, à cinq loges polyspermes. La kalmie à feuilles étroites (A. angustifolia L.) diffère de la précédente par sa faille plus petite; ses feuilles ovales, longues de 0",04, larges de 0,01, et d'un vert clair; ses fleurs d’un beau rouge. Hagrrar. — Ces arbrisseaux sont originaires de l'Amérique du Nord, particulièrement des États-Unis, où ils croissent dans les en- droits humides et ombragés. Cucrure. — Les kalmies ne sont guère cultivées que dans les jar- dins botaniques ou d'agrément. Elles demandent la terre de bruyère un peu humide, et une exposition demi-ombragée. On les propage de rejetons, de boutures faites avec les jeunes rameaux, et mieux de graines, semées, aussitôt la maturité, en terrines remplies de terre de bruyère, qu'on abrite sous chässis ou sous bâche durant l'hiver. PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les fleurs. Récocre. — Les feuilles, toujours vertes, peuvent être récoltées à toutes les époques de l'année, particulièrement au printemps, où elles sont plus actives. Les fleurs, très-recherchées des fleuristes, sont DU XIX* SIÈCLE. 193 cueillies au moment de leur épanouissement. On trouve sur les feuilles, les pédoncules, et autour des graines une poussière brune que l'on voit également sur les Andromeda et les Rhododendrum, qui est employée vulgairement, aux États-Unis, comme sternutatoire. Son usage peut présenter de graves inconvénients. Comrosiriox caimique. — Le principe actif et même vénéneux des kalmias est attribué à une matière résineuse, dont la nature est in- connue, l'analyse n'en ayant pas été faite. Certains insectes, et notam- ment les abeilles, butinent sur les fleurs une matière sucrée ; le miel qu'elles produisent alors est toxique. En général, le miel récolté dans les pays de bruvères (el ericeum, de Pline) est jaune, sirupeux et peu estimé (Zncyclop. mélod., Botanique, t. 1, 477). Mais celui que les abeilles de la Pensylvanie, de la Caroline méridionale, de la Géorgie et des deux Florides recueillent sur les Aalmia angustifolia, latifo- lia et hirsula L. et sur l'Andromeda Mariana L. cause souvent, selon B.-S. Barton (Trans. of American soc. at Philadelphia, N. 51), des maux d'estomac, des vertiges et du délire. D'ailleurs, les empoison- nements par les miels ne sont pas rares. Xénophon (de Exped. Cyri, lib. IV) rapporte qu’en Colchide les soldats de l’armée des dix mille furent pris d’un délire furieux pour avoir mangé un miel particulier, dans plusieurs villages. Ce fait, révoqué en doute par quelques écri- vains, à été confirmé par le P. Lambert (Tournefort, Voyage du Levant, M, 228), et par Guldenstaedt, le compagnon de Pallas, qui ont reconnu que les fleurs de l’Azalea Pontica L., et peut-être celles du Æhododendrum ponticum donnaient au miel de la Mingrélie des propriétés délétères, et plus récemment A. de Saint-Hilaire a rapporté un cas d’empoisonnement dont il faillit être victime, avec deux de ses guides, produit par un miel fourni par une guèpe du Brésil nom- mée Lechequana (Polistas LechequanaLatr.). Mais ce miel n’est délé- tère que lorsqu'il a été récollé sur des plantes vénéneuses, apparte- nant probablement à la famille des apocinées. Usaces. — Les feuilles et les fleurs des kalmies sont tout à fait inusilées en France. D'après Barton, la décoction des feuilles sert, en Amérique, à empoisonner les animaux et même les hommes. Bigelow assure que Jes faisans qui mangent les jeunes pousses péris- sent et ont leur chair vénéneuse. On leur a attribué des effets narco- tiques que cet auteur n’a pu constater. La décoction du X. latifola et sa poudre ont élé employées contre la teigne et la gale, et à l'inté- Flore, T. II. 13 19/ FLORE MÉDICALE rieur, à faible dose, contre les dartres et la syphilis. Ce sont, en résumé, des plantes vénéneuses qu'on fera bien de laisser aux par- terres, dont elles sont un des plus beaux ornements. KANANG Uvaria odorata, tripetala, etc. Lam. (Anonacées.) Le Kanang odorant, appelé aussi Alanguilan de Ja Chine, Uvaire odorante, etc., est un arbre dont la tige, haute de 12 à 45 mètres, épaisse, cylindrique, se divise en rameaux lisses, divergents, à écorce gris cendré ou jaunâtre, portant des feuilles alternes, courtement péliolées, ovales-oblongues ou lancéolées, arrondies et obliques à la base, acuminées au sommet, lisses et glabres. Les fleurs, vert bru- nâtre, pendantes, sont axillaires, solitaires, pédonculées. Elles pré- sentent un calice très-pelit, à trois divisions réfléchies ; une corolle à six pétales linéaires lancéolées, alternant sur deux rangs ; des élamines nombreuses, à filets très-courts, à anthères linéaires ; un pistil com- posé d’une dizaine de carpelles à une seule loge uniovulée. Les fruits sont des baies oblongues, cylindriques, à pulpe visqueuse, renfermant des graines brunes et luisantes. Le Kanang à trois pétales (U. fripetala Lam.) est un arbre de la taille du précédent, à feuilles alternes, grandes, lancéolées, granu- leuses en dessus, cotonneuses en dessous, à fleurs verdàtres, odo- rantes, presque solilaires, ayant les trois pétales extérieurs très- grands; à baies ovoïdes, de la grosseur d'une prune, contenant, dans un brou un peu dur, une pulpe mucilagineuse où se trouvent trois graines aplaties. Le Kanang narum (U. narum D. C.) est un arbrisseau rampant, à tige sarmenteuse, portant des feuilles lancéolées, pointues ; à fleurs d’abord vert brunâtre, puis rouge foncé ; à fruits presque lisses, jaune rougeàlre et portés sur de longs pédoncules. Nous citerons encore les kanangs de Ceylan (OU. Zeilanica L.), à longues feuilles (U. longifolia Lam.), etc. Hagrrar. — Ces arbres croissent en Chine, aux Moluques, aux Philippines, dans l'Inde, à Ceylan, etc. Leur culture est celle des habzélis. Parties usirées. — Les feuilles, le bois, les racines, les fruits. DU XIX° SIÈCLE. 195 Récote. —Les produits des kanangs ou canangs ne se trouvent pas dans le commerce de la droguerie. On les récolle à mesure du be- soin et on en fait usage exclusivement sur les lieux de production. Composirion caimique.—Les différentes parties des Uvaria possèdent une odeur et une saveur aromatique qui les font employer comme condiments, en guise de poivre. Les fleurs sont très-odorantes ; on en fait des pommades et des huiles qui sont employées comme cosmé- tiques. Leur arome, qui se rapproche de ceux du narcisse et de l’œillet, les font rechercher. Aussi les Malais, les Chinois et les Java- nais les plantent-ils autour de leurs habitations ; ils en décorent leurs vêtements, leurs lits, leurs appartements. Les feuilles et les écorces sont fibreuses ; on en fait des tissus et des cordes d'instruments de musique. Les fruits sont mangés crus dans plusieurs pays. Usaces. — Les Indiens préparent avec les fruits de l'U. odorata les fleurs de champac, le curcuma et l'huile de Palme une pommade qu'ils nomment Borri-Borri où Borbori, dont ils enduisent le corps des fébricitants pour rappeler la chaleur, surtout par les temps froids et pluvieux. On pense que ce cosmétique est analogue ou semblable à celui que l’on vend à Paris sous le nom d'huile de Macassar. Aux iles Moluques, on emploie contre la colique l'écorce et la racine du kanang musical U. Musaria Dun. Les racines du £anang narum servent à préparer, par distillation, une huile aromatique, légère, limpide, verdàtre, à laquelle on attri- bue des propriétés toniques. Elle est employée comme stimulante, ainsi que l'écorce. Celle-ci, broyée dans l’eau, sert à préparer au Bengale et aux Moluques un gargarisme qu'on emploie contre les aphtes et le scorbut. Son infusion est appliquée en fomentation dans les maladies vermineuses. On l’administre à l’intérieur contre les affections du foie et les fièvres. L'Uvaria Tripetala Lam., que l’on trouve aux Moluques et aux Philippines, présente des graines d’une odeur agréable et aromati- que dont les femmes d'Amboine préparent une espèce d'onguent dont elles se frotient le corps pour se parfumer. Quand on incise cet arbre, il s'écoule un suc visqueux et aromalique qui se concrète en une gomme blanche qui est très-balsamique. Le bois des U. Longifolia Lam., Tripetala Lam., quoique blanc et léger, est très-employé pour les constructions. Les graines de l'U. amayon, en Tamoul amayon sont appelées par 196 FLORE MÉDICALE les Espagnols Granos del Paraiso, graines du Paradis. Elles sont rouges et odorantes. Elles sont considérées comme vomitives, et on les fait mâcher comme contre-poison. L'herbe qui les produit croît à Java, au Bengale, à Pondichéry et sur les côtes de Coromandel. Ine faut pas les confondre avec la maniquelte, qui porte aussi le nom de graine du Paradis, qui est produite par un amome. Les U. Lanotan, et Cabog, en Tamoul Lanotan et Cabog donnent aussi des bois de construction. L'Ü. camphorata en Tayal Taghivalar, en Bissaya, Dalaganum, Daliga donne des racines qui, d'après Blanco, répandent l'odeur de camphre lorsqu'on les brûle. Elles sont regardées comme un puissant abortif. Nous citerons encore les U. corniculata, obtusa, Burahol, Blum, latifolia, dumetorum et sylva- tèca, dont on mange les fruits dans divers pays et dont les bois servent aux constructions. KETMIE Hibiscus esculentus et Syriacus L. (Malvacées-Hibiscées.) La Ketmie comestible (Æ. esculentus L.), appelée aussi Gombaud, Gombo, Guiabo, etc., est une plante annuelle, dont la tige, haute de 0",60 à 1°,30, épaisse, simple, porte des feuilles alternes, pétiolées, très-grandes, cordées à la base, palmées, à cinq lobes obtus et den- tés, d’un vert foncé. Les fleurs, d’un jaune soufre, à centre pourpre, sont solitaires à l'extrémité de pédoncules axillaires. Elles présentent un calicule à dix folioles caduques; un calice monosépale, à cinq divisions, se rompant en long; une corolle à cinq pétales obovales ; des étamines nombreuses, monadelphes; un ovaire à cinq loges plu- riovulées, surmonté d’un style simple qui passe au centre du tube staminal, et se divise à son sommet en cinq branches terminées cha- cune par un petit stigmate en tête. Le fruit est une capsule conique ou pyramidale, sillonnée, longue de 0®,08 à 0,10 sur 0%,03 à 0®,04 de diamètre à la base, s’ouvrant par cinq valves et divisée en cinq loges dont chacune renferme plusieurs graines assez grosses, réni- formes, verdâtres, légèrement sillonnées d’aspérités grises. La ketmie de Syrie (A. Syriacus L.), vulgairement Guimauve en arbre, est un arbrisseau, dont la tige, haute de 2 mètres et plus, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, pétiolées, ovales, cunéiformes, à trois lobes dentés. Le calicule est à six ou sept DU XIX° SIÈCLE. 197 folioles ; les fleurs sont d’un rouge pourpre, quelquefois blanches ou panachées. Nous citerons encore les Ketmie vésiculeuse (Z7. trionum L.), Rose de Chine (7. Rosa Sinensis L.), rose (H. roseus Thor.), etc. Hagirar. — La ketmie comestible est originaire de l'Amérique méridionale. Les autres espèces croissent dans des régions très-diverses des deux continents. On les cultive dans les jardins. PARTIES usiTÉES. — Les racines, les fruits. Récoure. — La racine, employée aux Antilles et en Turquie pour remplacer celle de la guimauve, est arrachée avant la floraison. On la lave à grande eau; on en sépare l'écorce et on la fait sécher. Les fruits sont récoltés très-jeunes, lorsque l'ovaire est à peine déve- loppé. On les enfile avec une ficelle et on les fait sécher, sous forme de chapelets. Ils ont une couleur gristre. Ils sont recouverts d’un duvet un peu rude. Au sommet, ils présentent une espèce de bec, formé par les cinq divisions de la capsule. Cowposirion cHimiQue. — Toutes les parties des ketmies sont riches en mucilage; mais il abonde surtout dans les fruits. Ceux-ci renfer- ment, en outre, un peu d'acide libre qui leur donne quelque chose d'agréable au goût. La racine renferme de l'asparagine. UsaGes. — Dans les contrées chaudes de l'Asie, de l’Afrique et de l'Amérique on fait une grande consommation des fruits de ketmie, appelés gombo ou 4amia. On en prépare des potages et on en extrait, au moyen de l'eau bouillante, un mucilage abondant que l’on emploie pour donner de la consistance aux aliments liquides. On mange ce fruit cuit au naturel ou assaisonné d'épices. Aux Antilles, on en fait l'espèce de potage nommé calalou. En Égypte, on croit que l'alimentation par le gombo préserve de la pierre. Les feuilles des ketmies sont acidules et comestibles. On les emploie comme émollientes. Dans l’Indoustan, l'écorce de ces malvacées sert à fabriquer des cordes. Les graines, un peu musquées lorsqu'elles sont sèches, sont utilisées en parfumerie ; on les lorréfie pour les employer comme succédanées du café. Au Japon, on fait du papier avec les fibres de l’Æébiscus Manihot L. D’après Thunberg ( Voyage au Japon, t. IN, p. 139), on met la racine de cette espèce à macérer dans l’eau, et, par ce moyen, on obtient un mucilage émollient. L’ÆHibiscus populneus L. croît dans les îles de la mer des Indes et dans l’Indoustan. Son suc est administré à l'intérieur, à Calcutta, contre diverses maladies de la peau. Les Javanais se servent 12* 198 KLORE MÉDICALE de l'écorce pour fabriquer des nattes. D'après Lesson (Voyage médhe., p. 46), la ketmie rose de Chine (A. Rosa sinensis) est employée contre les maladies des yeux, et Rhéede ditque dans l'Indoustan sa racine, sa- turée avec de l'huile, est regardée comme utile dans la ménorrhagie. Il ajoute que son usage rend les femmes stériles, et Rumphius assure qu'elie les fait avorter. Les pétales sont employés, en Chine, pour noir- cir les sourcils, les cheveux et le cuir des souliers (De Candolle, Æssar, p. 82). Toutes les autres ketmies jouissent de propriétés analogues. Le fruit du gombo est la base des préparations dites pectorales, que le charlatanisme vante sous les noms de pâle et de sirop de nafé d'Ara- bie, et qui n’agissent certainement pas mieux que ne le feraient la pâte et le sirop de guimauve. KOUSSO Brayera anthelminthica Kunth. Hagenia Abyssinica Lam. (Rosacées - Agrimoniées.) Le Kousso ou Cousso est un arbre dont la tige, haute de 10 à 20 mè- tres, se divise en nombreux rameaux inclinés, marqués de cicatrices annelées, velues à l'extrémité, portant des feuilles allernes, pétiolées, grandes, imparipennées, à six ou sept paires de folioles sessiles, lan- céolées aiguës, dentées, vert foncé, entremêlées d’autres folioles arron- dies, bien plus petites. Lesfleurs, très-petites, blanchâtres, polygames, accompagnées de bractéoles, sont groupées en larges panicules termi- nales et compactes. Elles présentent un calice turbiné à la base, très- velu, terminé par un limbe à cinq divisions oblongues, obtuses, glabres, étalées ; une corolle à cinq pétales linéaires ; une vingtaine d'étamines ; un pistil composé de deux ovaires libres, à style terminal. Le fruit n'est pas connu. Hasrrar. — Le kousso croît sur les montagnes de l'Abyssinie. Son introduction dans nos jardins est récente. Parties usiréEs. — Les inflorescences. Récocre. — La récolte du kousso se fait en Abyssinie. Lorsque, en 1824, Kunth examina le kousso rapporté de Constantinople sous le nom de cabotz et de cotz, par le docteur Brayer, ce savant botaniste put croire avoir affaire à une plante nouvelle, et il lui donna le nom de Brayera anthelminthica, qui lui est resté. Cependant il avait été décrit antérieurement par Bruce sous le nom de Ban/esia abyssinica et par Lainark sous celui de Hagenia abyssinica. DU XIX° SIÈCLE. 199 Les inflorescences du kousso ou cousso, telles qu’elles existent dans le commerce, présentent l'aspect de fleurs de muguet de mai ou de tilleul brisées. Leur saveur, d’abord fade ou mucilagineuse, devient bientôt très-àcre. Leur odeur, quoique très-faible, rappelle un peu celle du sureau et devient plus sensible au contact de l’eau bouillante. On croit qu'après trois ans de récolte, il perd ses propriétés, mais en vase bien fermé, dans un lieu sec et à l'obscurité, il peut très-certai- nement être conservé plus longtemps. En Abyssinie, on distingue deux sortes de kousso : le rouge, qui est formé par les fleurs femelles, et un second nommé cosso esels, qui est fourni par les fleurs mâles. En France, ils nous arrivent mélangés. ComPosiTiON CHIMIQUE. — Quoique l’analyse de cette plante intéres- sante ait été faite par plusieurs chimistes, elle laisse encore beaucoup à désirer, et les recherches dont elle a été l'objet ne s'accordent nul- lement. MM. Benoît Viale et Vincent Latini, professeurs à l'Université de Rome, y ont trouvé un produit ammoniacal formé par un acide organique qu'ils ont nommé agénique, et le sel agénate d'ammonia- que. Mais cet acide n’a pas été suffisamment étudié, pas plus au point de vue chimique que sous le rapport physiologique et thérapeutique. Stromeyer a trouvé dans le kousso une résine amère, du tannin et un alcaloïde nommé cossein. M. Witistein a trouvé dans les fleurs une matière grasse, de Ja chlorophylle, de la cire, une résine àcre et amère, une résine insipide, du sucre, de la gomme, du tannin, du ligneux et des sels. M. Willing dit en avoir isolé une huile volatile odorante, de l'acide tannique colorant les sels de fer en vert, une matière extractive, un acide cristallisable et une résine astringente et odorante. Le cossein de Stromeyer est la cossine, où coussine, lroussine de quelques auteurs, la {nine de M. Paveri. Sa nature n’est pas parfai- tement déterminée : elle a été étudiée par M. A. Vée. Usaces. — Le kousso est le téniacide le plus efficace que l’on con- naisse. Les Abyssiniens sont tous atteints du tœnia, ce qui tient à l'usage immodéré qu'ils font de la viande crue ou peu cuite du pore ; car il est parfaitement démontré aujourd'hui que les cysticerques qui constituent la ladrerie de cel animal ne sont que les larves du tœnia. Les expériences de MM. Kuchenmeister, Leukart et Van Bénéden, Hum- bert, etc., ne laissent aucun doute à cet égard. Le kousso s’adminis- tre, en Abyssinie, dans une sorte de bière (Bouga) faite avec le Poa 200 FLORE MÉDICALE abyssinica. Ms le prennent Je malin à jeun, et ils ne font le premier repas qu'après l’expulsion du ver. M. Courbon rapporte que le jour de l'administration du remède, le domestique se présente à son maitre avec une croix de paille à Ja main, en disant encotach (cadeau). Le maitre prend le kousso et donne une étrenne. La dose de kousso est de 30 à 35 grammes. On l’administre en poudre délayée dans un liquide chaud. Après l'avoir pris, on ressent une certaine àcreté, des naustes, du malaise, du dégoût. Une heure après l'administration, il survient une selle ordinaire; une heure plus lard, une selle liquide, et quatre ou cinq heures après le tœnia est expulsé sous forme de pelotte blanchâtre. M. Hannon, de Bruxelles, a administré le kousso avec succès à Ja dose de 4 à 10 grammes contre les ascarides lombricoïdes des enfants. Le kousso est employé depuis longtemps en Angleterre et en Alle- magne, En France, on ne le connait bien que depuis 1840, époque à laquelle M. Aubert Roche le présenta à l’Académie de médecine. Deux ans plus tard, M. Rocher d'Héricourt en rapporta de grandes quanti- tés. L'arbre qui le produit est abondant sur tout le plateau éthio- pien, dans les provinces du Samen, du Lasta, du Gojam et du Golta. DU XIX° SIÈCLE. 201 LAITUE Lactuca sativa et virosa L. ( Composées - Chicoracées. ) La Laitue commune ou cultivée (L. sativa L.) est une plante bisan- nuelle, à racine pivotante, un peu fibreuse. La tige, haute de 0,50 à 1 mètre et plus dans quelques variétés, cylindrique, presque pleine, glabre, lisse, dressée, simple à la base, rameuse au sommet, porte des feuilles allernes, sessiles, succulentes; les radicales ovales, arrondies, ondulées, entières, sinuées ou dentées, obtuses, atténuées à la base, semi-amplexicaules, disposées en rosette ; les caulinaires cordiformes, dentées, presque auriculées, amplexicaules. Les fleurs, jaunes, sont groupées en capitules dont la réunion constitue une panicule corymbiforme terminale, et dont le réceptacle plane est en- touré d'un involucre ovoïde, allongé, à folioles ovales, allongées, presque obtuses, glabres et imbriquées. Chaque fleur présente un calice en aigrelte ; une corolle ligulée, partagée en cinq dents à l’ex- trémité ; cinq étamines épigynes, soudées par les anthères ; un pistil à ovaire infère, à une seule loge uniovulée, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Les fruits sont des akènes ovoïdes, comprimés, striés, surmontés d’une aigrette stipitée à soies capillaires. Cette plante a produit par la culture un grand nombre de variétés appelées Laitues frisées, pommées, romaines, elc. La laitue vireuse (L. »#rosa L.) est aussi bisannuelle et diffère de la précédente par sa tige un peu moins élevée, fistuleuse ; ses feuilles entières, à nervure moyenne couverte d’aiguillons; ses capitules disposées en panicule étalée, et ses akènes d’un brun foncé. Quelques auteurs rapportent à cette espèce, comme variété, la Laitue scariole (L. scariola L.). Hagrrar. — La laitue cultivée, originaire d’Asie, est aujourd'hui cultivée dans tous les jardins maraichers, et quelquefois aussi en grand par l'usage médical. La laitue vireuse habite l'Europe; elle croit dans les lieux incultes, au bord des chemins, sur la lisière des bois, etc. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où il suf- fit de semer ses graines en place. Parries usiréEs. — Les liges, les feuilles, rarement les fruits. 202 FLORE MÉDICALE Récozre. — Les fruits de la laitue ont été autrefois employés ; on les récoltait à leur maturité; ils sont aujourd'hui inusités. Les tiges et les feuilles sont employées fraiches : elles servent à préparer une eau distillée, qui est souvent employée sans que jamais aucune obser- vation ait démontré ses bons effets. L'eau distillée de sue de laitue se conserve très-mal; on n’en fait aucun usage. La /hridace est l'ex- trait sec de tiges de laitues montées. 11 faut préférer le sue des écorces de laitues. Le lactucaréum est le suc évaporé et obtenu par incisions des tiges des diverses laitues. C’est sans raison aucune qu'on a pré- tendu qu'il fallait préférer pour sa préparation le L. altissima, qui, d’ailleurs, n’est qu'une variété du L. sativa. M. Mouchon avait proposé de faire dessécher la laitue pour en oblenir en toute saison de l’eau distillée, et un extrait hydro- alcoolique. Le lactucarium se présente en petites masses d’un brun rougeätre, d'une odeur forte, qui rappelle un peu celle du bouc. Sa saveur est amère et un peu àcre. Il est très-peu soluble dans l'eau et imparfai- tement soluble dans l'alcool rectifié. COMPOSITION CHimiQue, — D'après M. Aubergier, le sue de laitue et le lactucarium renferment un principe amer soluble dans l’eau et dans l'alcool, insoluble dans l’éther, de la mannite, de l'asparamide, de l’albumine, de la résine, de la cire, un acide indéterminé et des sels. M. Walz, qui a analysé la laitue vireuse, y a trouvé une matière grasse, soluble à 125°, l'odeur de laitue, de la lactucine ; une résine qui fond à 25°; une résine insipide, une résine âcre, une matière brune analogue à l'ulmine, une matière brune qui paraît être alea- line, de l'acide oxalique. La lactucine cristallise ; sa saveur est amère ; elle est soluble dans 60 à 80 parties d’eau froide, plus soluble dans l’eau chaude, soluble dans l'alcool et dans l'éther. Elle a été découverte par M. Lenoir dans la laitue vireuse, et par M. Aubergier dans la laitue cultivée ; elle pa- rail être sans influence sur l’action de ces plantes. Usaces. — Les anciens vantaient les propriétés calmantes de la laitue. Hippocrale la connaissait. Celse la plaçait à côté de l'opium et la donnait aux phthisiques. Galien la mangeait en salade pour se procurer le sommeil. Le poële Martial la mangeait pour rafraichir ses entrailles ; il l'appelait le repos de la bonne chère, grataque nobr- DU XIX® SIÈCLE. 203 lèum requies lactuca ciborum. Abandonnée pendant longtemps, la lailue fut remise en honneur au dix-septième siècle par Lanzoni. Employée depuis cette époque sous forme d’eau distillée, elle a été regardée comme narcotique et calmante et employée contre la toux, les maladies nerveuses, etc. La lailue vireuse élait regardée comme plus narcotique. D'après MM. Trousseau ct Pidoux, ce n’est qu'à la dose de huit grammes que son extrait produit quelque effet, et M. Fouquier a pu doubler cette dose sans observer aucun phénomène de narcotisme. Aujourd’hui, les préparations de laitue sont de nou- veau abandonnées. Le nom de laitue vient de Zac, lait (plante laiteuse); on a long- temps cru que ce végétal donnait du lait aux nourrices, ce qui était une erreur grossière. La /hridace, naguère si vantée comme calmante et expecto- rante, est, à présent, généralement considérée comme tout à fait inerte. Quant au /actucarium, mentionné par Dioscoride, remis en hon- neur, en Angleterre d'abord, par MM. Young, Duncan et Probart, recueilli et vulgarisé en France par M. Aubergier, de Clermont- Ferrand, qui réussit à donner à ce produit, dans la matière médi- cale, une certaine importance que les faits ne justifient pas, il est reconnu que ses effets calmants et narcotiques tiennent surtout à l'opium introduit dans ses préparations. La laitue et ses préparations sont rarement prescrites par les mé- decins homæopathes. Cependant on trouve celte plante consignée dans leur Codex, sous le signe A//., et l'abréviation Lact. LAMIER Lamium album 1. { Labiées - Stachidées. }) Le Lamier blanc, appelé aussi Lamion, Ortie blanche, Ortie morte, Archangélique, est une plante vivace, à racines fibreuses, un peu rampantes, blanchâtres. Les tiges, hautes de 0°,25 à 0",50, tétragones, succulentes, velues, ascendantes, simples ou rameuses, portent des feuilles opposées, pétiolées, ovales, cordées à la base, longuement acuminées, dentées. Les fleurs, blanches, assez grandes, sont groupées en pelits glomérules à l'aisselle des feuilles supé- 204 FLORE MÉDICALE rieures. Elles présentent un calice tubuleux campanulé, pubescent, à cinq dents presque égales, aiguës, ciliées; une corolle à tube ascen- dant, contracté à la base, portant à l'intérieur un anneau de poils, oblique, à gorge insensiblement dilatée, à limbe bilabié; quatre étamines didynames, à anthères noirâtres; un ovaire composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes, à trois angles aigus, tronqués au sommet, et entourés par le calice per- sistant. Le Lamier maculé (L. maculatum L.) est aussi vivace, et diffère du précédent par sa taille plus élevée, et ses corolles purpurines, ponctuées de rouge, à anneau de poils horizontal. Le Lamier pourpre, vulgairement Ortie rouge (L. purpureum L.) et le Lamier amplexicaule (L. amplexicaule L.) sont des plantes annuelles, dont la corolle purpurine a le tube droit et la gorge très- dilatée. Le Lamier jaune ou Galéobdolon, vulgairement Ortie jaune (L. galeobdolon Crantz, Galeopsis Galeobdolon L., Galeobdolon luteum Muds.), est une plante vivace, à souche longuement traçante, émettant de longues fibres radicales, et à fleurs assez grandes, d'un beau jaune. Hagrrar. — Ces plantes sont communes en Europe; on les trouve dans les lieux cultivés et herbeux, les friches, les décombres, Îles bois, au bord des chemins, etc. On ne les cultive que dans les jardins botaniques. Parties usirées. — Les feuilles et les fleurs. Récocre. — On peut récolter la plante, pour la faire sécher, au moment de la floraison. Mais le plus souvent on emploie les fleurs mondées, que l'on fait dessécher rapidement au soleil, car elles sont sujettes à noircir. Par la dessiccation, les plantes et les fleurs perdent leur saveur et le peu d’odeur qu'elles possédaient. ComposiTioN cuiMiQuE. — La saveur amère de celte plante est due à un principe extractif. Son astringence doit être attribuée au tannin qu’elle renferme en petite proportion. Quoique son odeur soit forte et désagréable, on n’en a extrait aucune huile essentielle. Usages. — Le nom d'Ortie blanche a été donné à celte plante à cause de la forme de ses feuilles. Du temps de Pline, on l’estimait déjà comme astringente, et on l’utilisait contre les hémorrhagies, la , DU XIX° SIÈCLE. ; 205 leucorrhée, etc. On l’administrait en infusion ou on faisait prendre le suc à assez forte dose. On l’a employée aussi comme anti-scrofu- leuse; mais, malgré l'opinion du docteur Consbruch, qui assure n'avoir jamais rien trouvé de meilleur contre la leucorrhée, elle est aujourd'hui à peu près tout à fait abandonnée, et nous croyons que c'est avec jusle raison. Cependant l'infusion des fleurs est quel- quelois prescrite contre la bronchorrée et les affections catarrhales en général. On a également donné le nom d’ortie morte au séachys palustris L., de la même tribu. Les médecins homæopathes indiquent le Lamium album comme élant peu connu dans ses effets. Cependant ils l'ont inscrit dans leur Codex sous le signe 4/7 et l'abréviation Lam. Ils indiquent son emploi dans une foule de maladies. LAMINAIRE Laminaria saccharina et digitata Lamx. (Algues - Fucacées.) Les Laminaires sont des algues à crampons (vulgairement racines) fibreux, ramifiées ; à stipe cylindrique, épais, plus ou moins long, terminé par une fronde membraneuse ou coriace, brun verdâtre, recouverte d’un enduit muqueux, renfermant à l'intérieur un prin- cipe gélalineux et sucré très-abondant, qui, par la dessiccation, apparaît à la surface sous forme d’efflorescence farineuse et blan- châtre. Les fructifications forment des sortes de renflements pyri- formes, disposés dans le tissu des lames de la fronde. La laminaire sucrière (Laminaria saccharina Lamx., Fucus saccha- rinus L.) a un stipe cylindrique, court, de la grosseur du doigt; une fronde longue de 2 à 3 mètres, membraneuse, un peu coriace, roux verdàtre, ovoide, lancéolée, aiguë, ondulée et frisée sur les bords. La liminaire digitée { L. digitata Lamx., Fucus digitatus L.), vul- gairement appelée Fouet des sorcières, a un stipe semblable à celui de l'espèce précédente, brun, devenant noirâtre par la dessiccation, terminé par une fronde épaisse, coriace et comme cornée, brunûtre, d'abord cordée et entière, puis se divisant {rès-profondément à son extrémité en longues lanières (PI. 22). La laminaire bulbeuse {L. bulbosa Lamx., Fucus bulbosus L.) a 206 : FLORE MÉDICALE une sorte de bulbe creux, souvent très-gros, donnant naissance à un stipe très-long, épais, comprimé, simple, terminé par une fronde conique, flabelliforme, profondément divisée en lanières longues et linéaires. Hagrrar. — Les laminaires habitent généralement les mers sep- tentrionales. Les trois espèces que nous avons décrites sont abon- damment répandues sur toutes les côtes océaniques de la France. Elles flottent dans l’eau, et se fixent par leurs crampons sur les rochers sous-marins. PARTIES USITÉES. — Toute la plante. Récoure. — Pour les usages industriels comme pour les emplois en médecine, les divers fucus peuvent être récoltés à toutes les époques de l’année. On les fait dessécher au soleil. Composirion cHimiQue. — D’après M. Gaultier de Claubry, c'est la laminaire digitée qui fournit le plus d'iode. D'après M. John, le Fucus vesiculosus contient : corps gras, 2; squelette du fucus |/un- gine), 18; mucilage brun rougeâtre, matière extractive, sulfate de soude, chlorure de sodium, 4; sulfate de chaux, sulfate de ma- gnésie, phosphate de chaux, 12,9; sulfate de soude, chlorure de sodium, 3,1 ; iodure de sodium indéterminé, oxyde de fer de man- ganèse, silice, acide particulier, traces. La fungine se rapproche de la cellulose. Braconnot la représente par la formule C° H° 0°; mais, d’après M. Lœwig, sa composition correspondrait plutôt à C° H°! O°!. En distillant diverses algues avec de l'acide sulfurique, M. Sten- house a obtenu un liquide oléagineux, incolore, qui bout à 171”, qui est soluble dans l’eau et isomère avec le /urfurol ou laule de son, dont la formule est C!° Hf 0. Nous avons dit précédemment que les cendres de la laminaire digitée étaient celles qui renfermaient le plus d'iode ; voici d'ail- leurs quelle est la composition de ces cendres : potasse, 20,66; soude, 7,65; chaux, 10,94 ; magnésie, 6,86; oxyde de fer, 0,57; chlorure de sodium, 26,18; iodure de sodium, 3,34; acide sulfu- rique, 12,23 ; acide phosphorique, 2,36; silice, 1,44; acide car- bonique, 8,18; charbon, 0,53 (Pelouze et Frémy, Traité de chimie générale, À. NX, p. 438). Tandis que la proportion d'iodure de sodium contenue dans les cendres des autres algues varie de 0,40 à 1,50. La plupart des algues, et principalement la L. succharina, se DU XIX* SIÈCLE. 207 recouvrent après leur mort d’efflorescences sucrées qui ont été con- fondues avec le sucre cristallisable (Leman., Diction. des sciences na- turelles). Étudiées par Biarne Povelsen, rapprochées de la mannite par Vauquelin, qui cependant les distinguait de cette substance, elles ont été confondues avec elle par T.-L. Phipson, tandis qu’il est très-probable que ces cristaux sucrés sont un isomère de la man- nite et semblables à la pAycite, extraite du Protococcus vulgaris, algue, phycée, celle-ci cristallise en prismes rectangulaires d’une saveur sucrée, fondant à 112° et dégageant à 160° une odeur carac- téristique qui les distingue. M. L. Soubeiran, qui a étudié la subs- tance sucrée des fucus, croit avec Phipson qu’elle est le produit de l'oxydation de la matière mucilagineuse intercellulaire, mais il la décrit sous le nom de mannite, et c'est par erreur qu'il confond la matière albumineuse avec le mucilage. Dans tous les cas, M. L. Sou- beiran a démontré que cette matière sucrée ne préexislait pas dans les fucus vivants, et qu'elle ne se formait qu'après la mort de la plante. UsaGes. — Plusieurs algues sont employées comme aliments dans l'Islande, le Nordland, la Norwége, etc. On les fait sécher et on les réduit en poudre que l’on mélange à la farine pour faire du pain. A l'intensité près, toutes les algues jouissent des mêmes pro- priétés ; aussi M. Boinet les emploie-t-il indistinctement en poudre pour les faire entrer dans l'alimentation iodée; il en prépare un vin par fermentation avec le jus de raisin, qui est très-iodé et agréable à boire; il en fait fabriquer un pain iodé, etc. Les frondes de la laminaire digitée sextuplent environ de volume lorsqu'on les fait tremper dans l’eau ; elles sont de la grosseur d'une plume à écrire environ. M. Sloane d'Ayr et M. Wilson de Glascow ont proposé ces cylindres pour remplacer l'éponge à la ficelle et dila- ter les trajets fistuleux. On peut à volonté amincir ces cylindres ou en réunir plusieurs selon le diamètre de la plaie ; il faut, dans tous les cas, les ràcler pour effacer les rides de la surface. Nous devons ajouter que la laminaire digitée essayée pour dilater la plaie que le général Garibaldi portait au pied a parfaitement réussi. 208 FLORE MÉDICALE LAPSANE Lapsana communis L. (Composées - Chicoracées.) La Lapsane ou Lampsane, appelée aussi Herbe aux mamelles, est une plante annuelle, à racines fibreuses, fasciculées, blanchâtres. La tige haute de 0",30 à 0,60, légèrement pubescente, rameuse, dressée, porte des feuilles alternes, les inférieures lyrées, à lobe terminal très-grand et anguleux, les supérieures simplement dentées. Les fleurs, jaunes, sont groupées en capiiules terminaux, solitaires à l'extrémité de pédoncules grêles et nus, et dont la réunion cons- tilue une panicule lâche terminale. Le réceptacle est nu et entouré d'un involucre de huit à dix folioles égales, glabres, disposées sur un seul rang, muni d'écailles courtes à sa base. Les corolles sont toutes ligulées. Le fruit est un akène un peu comprimé et strié. La petite Lapsane (L. munima Lam., Arnoseris nurima Gærtn., Hyoseris minima 1.) se distingue de la précédente par sa taille plus petite, et ses akènes terminés par un rebord court, anguleux, en forme de couronne. Hagrrar. — Ces deux plantes sont communes en Europe. On les trouve dans les lieux cultivés, les champs sablonneux, les rem- blais, etc. Parties usitÉEs. — Les feuilles, les racines. Récozre. — Cette plante ne croît guère chez nous que dans les jardins, elle est peu usitée et on ne l'emploie que fraiche, on la récolte avant la floraison. COMPOSITION CHIMIQUE. — Par ses propriétés thérapeutiques et ali- mentaires, et par sa composition, la lapsane ou lampsane se rapproche de la chicorée, l'analyse n’en a pas été faite. Usages. — On regardait autrefois les feuilles comme calmantes et astringentes, on les appliquait sous forme de cataplasmes sur les endroils enflammés, contre les engorgements nammaires, chez les nourrices et les nouvelles accouchées, d’après Pline (/24. XX, c. 9). Son nom vient de 2érrw, purger, on lui attribue en effet des pro- priélés laxalives, mais c’est bien à tort; les feuilles .et surtout les racines, ainsi que celles de l'Æyoseris minima L. ou petite lapsane, sont mangées dans plusieurs localités du Levant, on les dit aussi DU XIX° SIÈCLE. 209 bonnes que celles du salsifis, d'après Belon (Singularités 465), on les vend en bottes sur les marchés de Constantinople, on en fait la soupe et on accommode les feuilles comme les épinards. Les anciens désignaient sous le nom de Lampsane une espèce de chou sauvage; le Brassica arvensis L. probablement, LARDIZABAL Lardizabala biternata Ruiz et Pay. (Lardizabalées.) Le Lardizabal bilerné est un arbrisseau, dont la tige, haute de plusieurs mètres, couverte d’une écorce brune et rude, se divise" en rameaux grimpants, volubiles, portant des feuilles alternes, à pé- tioles articulés, à limbe deux fois terné, à folioles entières, dentées, coriaces, lisses et luisantes. Les fleurs, dioïques, violet foncé, sont réunies en grappes axillaires rameuses, à pédoncule commun accom- pagné de deux grandes bractées cordiformes, luisantes. Elles pré- sentent un calice à six divisions disposées sur deux rangs ; une co- rolle à six pétales hypogynes, coriaces, carénés à la base, plus courts que le calice. Les mâles ont six étamines opposées aux pétales, à filets monadelphes, à anthères munies d’un connectif saillant ; un pistil rudimentaire. Les femelles présentent six étamines libres et stériles; un pistil composé de trois ovaires distincts, uniloculaires, multiovulés, surmontés d'un stigmale sessile et aigu. Le fruit est ovoide, arrondi, charnu, lisse, vert jaunâtre, renfermant un grand nombre de graines petites et réniformes (PI. 23). Le lardizabal triterné (L. friternata R. et P.), diffère surtout du précédent par ses feuilles trois fois ternées. Hagirar. — Ces deux espèces habitent le Pérou et le Chili; on les trouve dans les vallées abritées, les bois humides, les haies, etc. On les cultive dans quelques localités. Cucrure. — Le lardizabal est encore peu répandu dans nos jar- dins. Il est probable qu'il pourrait être cultivé en pleine terre, à la condition d'être couvert de litière pendant l'hiver. Il demande une exposition aérée, la terre de bruyère ou un mélange de terre franche et de gravier. On le multiplie de boutures sous cloche et sous châssis. Parties usiréEs. — Les fruits. Flore, T. II. 14 210 FLORE MÉDICALE RécoLre. — Au Chili, le fruit de lardizabal biterné porte le nom de Coguil, sa saveur est agréable, il est assez recherché ; on prétend qu'il est dangereux, et qu'il acquiert des propriétés nuisibles lorsque la plante a pris pour appui le Z?hus causticus, mais ce fait n’est pas démontré. ComposiTioN cHiMiQuE. — Les fruits sont très-sucrés et très-muci- lagineux, l'analyse n'en à pas été faite. Usages. — Les tiges flexibles du lardizabal biterné, sont em- ployées au Chili, par les habitants des campagnes, comme on fait chez nous l'osier; on en fait des toits, des clôtures, des palissades, des cerceaux, des paniers; on croit que c'est le Cogu/ de Molina dont on se sert pour faire des càbles qui résistent à l'humidité; on en- lève l’écorce, on les fait macérer dans l'eau pendant vingt-quatre heures et on les passe au feu pour les rendre plus flexibles. Au Chili et au Pérou, on confond souvent le Z. /riternata avec le précédent; il jouit d’ailleurs de propriétés identiques. Dans la même famille des Lardizabalées, on trouve encore les Burasaia qui se distinguent par leur amertume et leurs propriétés toniques;les S/auntonia, dont les fruits sont émollients et rafraichis- sants, et qui donnent un suc employé contre les ophthalmies, Les fruits du Stauntonia angustifolia du Népaul, sont désignés par les habitants du pays sous le nom de Goupli et de Bégal, ils font par- tie du régime alimentaire des habitants de cette région asiatique. LASER Laserpilium siler et Gallicum L. (Ombellifères - Thapsiées. ) Le Laser siler est une plante vivace, à racine épaisse. La tige haute de 0,50 à 1 mètre, porte des feuilles alternes, deux ou trois fois ailées, à segments lancéolés ou ovales, allénués en coin à la base, mucronés, entiers, d'un vert pàle, à nervures transparentes ; les inférieures à pétiole comprimé, les supérieures sessiles sur une gaine ventrue. Les fleurs, blanches ou rosées, sont groupées en om- belles terminales de trente à quarante rayons, à involucre et Invo- lucelles formés de plusieurs folioles étalées. Elles présentent un calice à cinq dents; une corolle à cinq pétales obovales échancrés; cinq élamines saillantes; un ovaire infère, cylindrique, un peu com- DU XIX* SIÈCLE. 211 » primé, à deux loges unioyulées, surmonté de deux styles divergents. Le fruit est un diakène cylindrique, oblong, presque linéaire, ar- rondi à la base, glabre, portant sur chaque face quatre ailes larges, membraneuses, entières. Le laser de France (L. Gallicum L.) est aussi vivace, et se dis- üingue du précédent par ses feuilles décomposées, à segments oppo - sés, divariqués, cunéiformes à la base, entiers ou lobés, verts et lui sants en dessus, plus pâles en dessous; les inférieures à pétioles cylindriques ; les supérieures sessiles sur une gaine courte, non ven- true; ses ombelles de vingt à cinquante rayons; son fruit ovale, tronqué à la base, glabre, à ailes marginales plus larges que les dorsales. Citons aussi le laser à larges feuilles (L. latéfolium L.). Hagrrar. — Sauf cette dernière espèce, qu'on trouve dans le Nord, les lasers sont propres aux régions méridionales, où ils crois- sent dans les bois montueux, sur les rochers, etc. Ces plantes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques. Parties usirées. — Les feuilles, les racines, les fruits, la résine. Récore. — Les feuilles sont récollées au moment de la floraison, les racines au printemps ou à l'automne, les fruits à leur maturité. Toutes ces parties perdent la plus grande partie de leurs propriétés par la dessiccalion ; on préférait les employer fraiches. Composrrion cuimique. — Les laserpitium doivent leur odeur forte et pénétrante à un suc laiteux, amer, âcre, qui n'a pas été examiné chimiquement ; on ne sait pas non plus quelle était la nature et la composition du laser des anciens. Usaces. — L'origine du Laser des anciens est encore aujourd’hui douteuse, c’est une substance gommo-résineuse que les Romains estimaient au poids de l'or; on le tirait de la Cyrénaïque, les Grecs le nommaient syl/phion, la plante qui le fournissait était appelée La- serpitium, et le pays qui le produisait était désigné sous le nom de Regio sylplufera. D'après Sprengel, sa découverte est due à Aristée, qui vivait 607 ans avant l'ère chrétienne. Le laserpitium croissait non-seulement en Cyrénaïque, mais encore en Syrie et en Médie. Dioscoride rapporte que ses racines, qui étaient employées comme condiment, s’appelaient magydaris; ses tiges, grosses comme celles des férules, #aspelon; ses feuilles semblables à celles de l’ache, maspeta. Le Laser, ou résine obtenue par incision de la racine, était 10) FLORE MÉDICALE : roux, transparent, d'une odeur forte, d'une saveur âcre et piquante. On lui attribuait des propriétés merveilleuses, comme celle de ra- jeunir, de rendre la vue, de guérir de tout poison, les plaies veni- meuses, etc. À Rome, on l’enfermait dans le trésor de l'État. L'his- toire rapporte que sous le consulat de C. Valérius et de M. Herennius, on en vendit publiquement trente livres, et sous J. César, cent onze livres furent vendues pour subvenir aux frais de la première guerre civile (Pline, lib. XIX, c. 3). Plus tard il vint à manquer tout à fait, et une tige de laserpitium fut présentée à l'empereur Néron en grande pompe, comme une chose très-rare; il devint in connu aux générations suivantes et on ne le connaissait que par son image, qui était représentée sur les médailles frappées en son honneur. On a beaucoup discuté sur l'origine du laser; on s'accorde géné- ralement à dire qu'il était produit par une ombellifère. Stapel l'at- tribue, dans son commentaire sur Théophraste, au Ligusticum latifo- lium L.; Linné désigne le Laserpitium siler L.; Sprengel le Ferula Tingitana L.; Desfontaines le Laserpilium qumuniferum ; V'abbé- Della Cella le Thapsia sylphium, et M. Pacho croit qu'il était pro- duit par le Laserpitium derias (Voyage dans la Cyrénaïque, Paris, 4827, in-4°). Scaliger a écrit de longues considérations sur le laser ; rappelons enfin que l'opopanax a été attribué au Laserpitium chiro- nium, confondu aujourd'hui avec l'Opopanar chirontum Koch, qui parait être le même que le Laserpitium latifolium L., dont la ra- cine élait employée comme carminative, anti-hystérique et échauf- fante; ses propriétés purgatives lui avaient valu le nom de Turbith des montagnes. Peyriihe dit que c’est un purgalif violent et Ber- gius se plaint de ce qu’on le néglige. C’est le Seseli d'Éthiopie, Va Panacée d'Hercule des anciens, et la Gen/iana alba des vieux for- mulaires. Tous ces produits sont aujourd'hui tout à fait inusités. LATHRÉE Lathræa clandestina et squamaria L. (Arobanchées. ) La Lathrée clandestine (Lathræa clandestina L., Clandestina rec- tiflora Lam.) appelée aussi Clandestine de Léon, madrate, herbe cachée, herbe de la matrice, elc., est une plante vivace, dont les DU XIX° SIÈCLE. 213 racines sont remplacées par de petits sucoirs tuberculeux, et la tige et les feuilles réduites à une souche souterraine munie d’écailles courtes, épaisses, charnues, blanchätres, imbriquées. Les fleurs, pourpre violacé, assez longuement pédonculées et accompagnées de bractées demi-embrassantes, sont groupées en corymbe terminal. Elles présentent un calice campanulé, à quatre divisions; une corolle à deux lèvres, la supérieure longue, concave , courbée, apiculée, l'inférieure plus courte et tribolée, quatre élamines didynames, à anthères velues, presque saillantes; un ovaire uniloculaire, mul- tiovulé, muni d’une glande à sa base, surmonté d’un style simple, recourbé au sommet et terminé par un stigmate bilobé. Le fruit est une capsule ovoïde, uniloculaire, se séparant à la maturité en deux valves, et renfermant un grand nombre de graines très-pelites, attachées à deux placentas pariétaux, linéaires. La lathrée écailleuse (L. squaminaria L.) diffère de la précédente par son rhizome rameux et tortueux; sa tige aérienne dressée, simple, haute de 0",10 à 0,15; ses bractées grandes, obovales, blanches, lavées de pourpre, imbriquées; ses fleurs pendantes, blanches, lavées de pourpre, en grappe terminale unilatérale, et ses capsules coniques. : HagiTar. — Ces plantes sont assez répandues en Europe; elles habitent surtout les lieux humides et ombragés, et vivent en para- sites sur les racines des aunes, des peupliers et de quelques autres arbres. On ne les cultive pas. Parties usitTÉEs. — La plante entière. Récoure. — Cette plante vit en parasite sur les racines de plu- sieurs arbres; à l'époque où elle jouissait d’une grande célébrité, on préférait celle qui croissait sur les racines du hêtre. Les fleurs sont les seules parties saillantes au-dessus du sol. Composition caimiQue. — La clandestine n’a jamais été analysée, on ne sait rien sur sa composition chimique. Usaces. — La clandestine est aujourd'hui tout à fait inusitée. Linné a réuni, sous le nom de Lathræa, les genres clandestina, phe- lippæa et amblatum, que les botanistes modernes ont séparés de nou- veau. Nous signalons la clandestine comme un nouvel exemple de la crédulité populaire; elle a joui en effet à une certaine époque d’une très-grande réputation, comme propre à rendre fertiles les femmes 214 FLORE MÉDICALE stériles ; on l’employait dans ce but, dans le plus profond mystère, et Daléchamps lui attribue cette propriété avec bien d’autres; il ne dit pas qu’à sa connaissance elle ait réussi, mais il parait que les gens riches, qui désirent avoir des enfants, en font assez souvent usage. MM. Mérat et Delens disent qu'en 1814 ils ont été consultés sur les propriétés de celte plante, qu'on voulut administrer à une princesse ; ils ajoutent & qu'elle eut le bon esprit de se refuser à l'usage que désiraient lui en faire faire les officieux de sa cour. » LAURIER Laurus nobilis L. (Laurinées.) Le Laurier noble ou franc, appelé aussi Laurier d’Apollon, Lau- rier sauce, etc., est un arbre, dont la tige, haute de 8 à 40 mètres, cylindrique, grisâtre dans le bas, verte dans le Haut, dressée, se divise en rameaux droils, flexibles, dressés, glabres, d’un beau vert, portant des feuilles alternes, courtement pétiolées, lancéolées, ai- guës, ondulées sur les bords; fermes, coriäces, glabres, luisdntes, d’un vert foncé surtout en dessus, persistantes. Les fleurs diviques, d'un jaune blanchätre ou herbacé, sotit groupées en petits fascicules axillaires, entourés d’un involucre formé de quatre petites brattées écailleuses, concaves, obtuses, brunes, caduques. Elles présentent un calice à quatre divisions profondes, obovales, obtuses, concaves, étalées. Les mâles ont douze étamines presque égales, disposées et alternant sur trois rangs, à filets un peu comprimés et légèrement soudés par leur base au fond du calice, à anthères munies d’un con- nectif saillant. Les femelles renferment quatre rudiments d'éta- mines ; un ovaire ovoide à une seule loge uniovulée, surmonté d'un style épais, court, recourbé, marqué d’un sillon longitudinal et ter- miné par un très-pelit stigmate glanduleux. Le fruit est une drupe ovoide, noire, légèrement charnue, renfermant une graine blan- châtre à testa assez solide et à cotylédons très-volumineux. Hasirar. — Le laurier franc est origitiaire des bords du bassin Méditerranéen. Il croît assez bien en pleine terre dans le centre et l'ouest de la France. ‘ Cuzrure. — Cet arbre demande une terre légère, fraiche et subs- lantielle. On le propage de graines, semées en pots, sur couche et DU XIX° SIÈCLE. 215 sous châssis, ainsi que de boutures, de marcoltes et de rejetons. Parries usiTÉEs. — Les feuilles et les fruits. Récoure. — Les feuilles plus particulièrement employées fraiches, peuvent être cueillies pendant toute l’année; elles perdent une grande partie de leurs propriétés par la dessiccation. Les fruits im- proprement appelés bares de laurier, nous viennent secs de la Pro- vence, de l'Espagne, de l'Italie et du Maroc; ils sont noirs, globu- leux, un peu allongés, très-aromatiques, lorsqu'on les brise on trouve sous le péricarpe desséché une graine renfermant deux gros cotylédons huileux très-odorants, Le bois assez dur répand une odeur agréable, il est assez recherché pour la marqueterie. CoMPosITION CHIMIQUE. — Par expression à chaud des fruits de laurier pulvérisés, on obtient une huile dite de laurier, qui est molle, verte, de la consistance de l'huile d'olives figée, granuleuse, très-aromatique ; dans le commerce elle est souvent préparée avec de l'axonge, chargée par digestion des principes colorant et odo- rant des feuilles et des fruits de laurier; c’est ce produit que l’on nomme saquent de laurier, ne faut pas le confondre avec l’huile. M. Bonastre a trouvé dans les fruits de laurier : une huile volatile, de la laurine, de la laurane, une huile grasse de couleur verte, de la cire, une huile liquide, de la résine, de la fécule, un extrait gom- meux, de la bassorine, une substance acide, du sucre incristallisable, de l’albumine. D'après M. Marson, la laurine qui forme la partie solide de l'huile de läurier, constitue une matière grasse particulière; elle est blan- che, cristalline, fond à 45°. Elle est peu soluble dans l'alcool et l’éther froid, très-soluble dans l'alcool bouillant. La /aurane ou lauro-stéa- riñe, est sans importance au point de vue médical. La matière grasse peut être extraite des semences de laurier au moyen du sulfure de carbone (Berjot, Lepage). Usages. — Les fruits du laurier entrent dans l’eau Thériacale, le baume de Fioraventi, l'esprit carminatif de Sylvius, ete. Toutes les parties de cette plante sont considérées comme excitantes; quant aux propriétés stomachiques, carminatives, expeclorantes, diuré- tiques, sudorifiques, anti-spasmodiques et emménagogues, qu'on a attribuées aux feuilles et aux fruits, s’il est vrai qu'elles peuvent se réaliser dans certaines conditions , il faut ajouler qu’elles ne pro- duisent ces effets que dans certains cas d'atonie et de débilité géné- 216 FLORE MÉDICALE rale, et alors il existe d’autres slimulants, qui exerceront la même action et qui sont plus faciles à administrer; c’est plus spécialement dans l’inappétence, la débilité de l'estomac, l'aménorrhée avec atonie et le catarrhe pulmonaire, que les feuilles de laurier ont été conseillées. Tantôt en infusion dans l’eau, d’autres fois dans de la bière ou dans du vin; les fruils jouissent des mêmes propriétés, mais ils sont plus actifs. Autrefois très-employés comme abortifs, ils sont tout à fait inusités pour l'usage interne ; l'huile et l'onguent de laurier sont employés contre les douleurs rhumatismales; on s'en sert quelquefois pour le pansement des plaies et des ulcères atoniques. Les feuilles du laurier d'Apollon sont très-employées dans l'art culinaire, aussi lui donne-t-on quelquefois le nom de /aurter sauce. LAURIER-CERISE Cerasus lauro-cerasus Lois. Prunus lauro-cerasus L. (Rosacées - Amygdalées.) Le Laurier-cerise, appelé aussi Laurier-amande ou Laurier aux crèmes, est un arbre dont la tige, haute de 6 à 8 mètres, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, distiques, ovales allongées, acuminées, dentées, coriaces, lisses, luisantes, d’un beau vert, sur- tout en dessus, persistantes. Les fleurs, blanches, petites, très-odo- rantes, sont groupées en épis axillaires dressés. Elles présentent un calice campanulé, à cinq divisions courtes et obtuses; une corolle rosacée, à cinq pétales ; des étamines nombreuses, insérées sur le calice ; un ovaire simple, à une seule loge uniovulée, surmonté d’un style et d'un stigmate simples. Le fruit est une petite drupe ovoide, allongée, aiguë, noiràtre, glabre, renfermant un noyau monosperme. (PI. 24.) Hagrrar. — Originaire des bords de la mer Noire, cet arbre a été naluralisé dans les contrées méridionales de l'Europe. On ne le cultive que dans les jardins botaniques ou d'agrément. Parties usitées. — Les feuilles fraiches. Récorre. — Il existe dans les jardins deux variétés de laurier-ce- rise : l’un est appelé offcinal et l'autre laurier de la Colchide. Celui-ci a les feuilles plus courtes, plus obtuses ; les nervures sont moins pro- noncées, d'où il résulte qu’à poids égal il fournit plus de principe actif, DU XIX° SIÈCLE. at Des recherches intéressantes, faites par MM. Mayet, Marais, Adrian, Plauchud, etc., ont démontré que l'on pouvait récolter les feuilles de laurier-cerise à toutes les époques, pour la préparation de l'eau distillée, mais que celte eau, faite dans les mêmes conditions, était plus active à l’époque de la maturité des fruits, qui a lieu en février et mars. D'après Soubeiran, elle serait plus active en juillet et août. D'ailleurs, tout fait présumer que le nouveau Codex prescrira l'emploi pour l'usage médical d'une eau distillée de laurier-cerise titrée. Il importera moins alors de déterminer d’une manière pré- cise l’époque de la récolte. La dessiccation détruit les principes actifs du laurier-cerise, ou du moins elle annihile les substances qui con- tribuent à le former; mais elles renferment le principe qui, mis en contact avec l'émulsine, produit l'essence de laurier-cerise et l'acide cyanhydrique. Composirion camique. — L'eau distillée de laurier-cerise doit son action à une huile essentielle et à l’acide cyanhydrique. Ces corps ne préexistent pas dans les feuilles, car, traitées intactes par l'alcool absolu, on ne dissout pas l'essence et l'acide cyanhydrique, mais bien une substance qui a été isolée par M. Simon de Berlin, et qui con- court à la formation de ces deux principes actifs. Ce corps est ana- logue à l’amygdaline, et la formation de l'essence et de l’acide cyan- hydrique dans le laurier-cerise est analogue, sinon identique avec celle des amandes amères. (Voyez ce mot.) Il est facile et important de doser l'acide cyanhydrique dans l'eau distillée de laurier-cerise. On se sert, pour cela, d'un des procédés d’analyse par les volumes indiqués par MM. Liebig, Fordos, et Gélis, et Buignet; mais malheureusement on ne peut pas titrer l'huile essen- tielle qui concourt puissamment à l’action thérapeutique. Aussi la commission du Codex propose-t-elle avec raison de titrer les eaux distillées de laurier-cerise, de manière à ce qu’elles soient toujours les mêmes dans toutes les pharmacies : l’époque de la récolle des feuilles, l’âge de la plante, le procédé de distillation employé, la quantité d'eau recueillie étant autant de causes qui peuvent influer sur sa composition et sur ses propriétés. De nombreuses expériences ont démontré que l’eau distillée, bien bouchée, se conservait par- faitement. Usaces.— A part l’usage des feuilles de laurier-cerise, que l’on fait quelquefois servir dans l’art culinaire, pour aromatiser les crèmes à 218 FLORE MÉDICALE l’amande amère, c’est le plus souvent l'eau distillée que l'on em- ploie ; l'essence trop active est réservée pour les besoins de la parfu- merie. On prescrit quelquefois les feuilles en infusion, dans les cas où l'eau distillée est indiquée. L'eau distillée de laurier-cerise convient dans tous les cas où l'acide cyanhydrique médicinal a été employé. C'est surtout comme narcotique et calmant qu'elle produit de boris effets. On l’emploie avec succès dans les névralgies, dans la dyspnée ; elle agit moins bien dans lés névroses. On à prétendu qu'elle guérissait des maladies réputées incurables, telles que la rage, le cancer; mais on ne doit ajouter aucune foi aux récits merveilleux que l'on à faits à ce sujet. A l'extérieur, l’eau de laurier-cerise a été conseillée contre les affections de la peau. En général, elle ne produit, dans aucune d'elles, des effets assez marqués pour que son emploi se soit élendu. Le laurier-cerise est un médicament dont les médecins homtæo- pathes font un assez fréquent usage. Ils le considèrent comme nar- cotique et slupéfiant, mais son action varie selon les cas dans les- quels en l'emploie et là dose que l'on administre. Son signe est S/o, et son abréviation Lawro.-c. LAURIER-ROSE Nertum oléander L. (Apocynées- Echitées.) Le Laurier-rose, appelé aussi Laurose, Rosage, Nérion, etc., est un arbrisseau à racines traçantes. La tige, haute de 3 à 5 mètres, se divise en rameaux trifurqués, allongés, pubescents, portant des feuilles verticillées par trois, rarement opposées, sessiles, lancéolées, aiguës, fermes, coriaces, roides, d’un vert souvent grisätre, persistantes. Les fleurs, grandes, d’un beau rose, sont groupées en cymes corymibi- formes terminales. Elles présentent un calice assez pelit, campanulé, profondément partagé en cinq lanières linéaires, aiguës, rougeàlres; une corolle monopétale, régulière, en entonnoir, à tube long et un peu renflé au milieu, à gorge munie de cinq appendices pétaloides frangé, à limbe divisé en cinq lobes oblus, égaux, obliques ; cinq étamines incluses, insérées vers le milieu du tube de Ja corolle, à filets courts, un peu renflés et arqués, à anthères sagittées, amincies au sommet, qui se termine par une longue pointe renflée, couverte DU XIX° SIÈCLE. 219 de poils blancs, laineux ; un pistil composé de deux carpelles à une seule loge multiovulée, surmonté d’un style court dilaté au sommet et terminé par un stigmate obtus. Le fruit se compose de deux folli- cules ovoïdes très-allongés, aigus, renfermant un grand nombre de graines munies d'une aigretle soyeuse. Le Laurier-rose de l'Inde (AN. odorum Sol.; N. Indicum Mill.) se distingue du précédent par ses feuilles plus vertes, plus longues et plus étroites ; ses fleurs odorantes, à divisions plus larges, à appen- dices plus longs ; et les soies de ses anthères dépassant la gorge de la corolle. Ces deux espèces ont produit par la culture de nombreuses variétés à fleurs pourpres, roses ou blanches, simples ou doubles. Hagrrar. — Le Laurier-rose habite le bord du bassin méditerra- néen. On le cultive beaucoup dans les jardins d'agrément; mais, dans lé Nord, il exige l’orangerie durant l'hiver. PARTIES usITÉES. — Les feuilles. Récocre. — Les feuilles doivent être récoltées au commencement de la floraison. Elles sont plus actives dans le Midi que dans le Nord. Dans les pays chauds, elles laissent écouler, lorsqu'on les coupe, un suc blanc très-abondant et très-âcre ; dañs les pays froids et tem- pérés, ce suc est plus rare et moins actif. ComposirioN CHIMIQUE. — L'analyse faite par M. Latour (Journal de pharm., tome 32, 3° série, p. 332), a démontré que le laurier-rose contenait de là cire, une matière grasse verte, de la chlorophylle, une matière indifférente, blanche, cristallisable, une résine jaune, àcre, électro-négative, qui est le principe toxique, du tannin, du sucre incristallisable, de l’albumine, de la cellulose, et des sels, chlo- rures, sulfales et acétates à bases de potasse, de chaux et de magné- sie. Distillées avec de l'eau, les feuilles de laurier-rose laissent en- traiuer une portion de la résine âcre et active. Ce principe existe dans toutes les parties de la plante, et plus en abondance dans l'écorce. La proportion est plus forte dans la plante qui vit à l'état de liberté que dans celle qui est cullivée; la solubilité du principe actif est facilitée par les sels alcalins. Usaces. — À diverses époques on a essayé d'introduire les prépa- rations du laurier-rose dans la thérapeutique, sans qu'on ait pu y réussir. C'est un poison des plus violents: Les faits rapportés pär Morgagni, Orfila et Loiseleur-Deslongchamps le prouvent surabon- 220 FLORE MÉDICALE damment. L'on a cité le cas d'empoisonnement de tout un corps d'ar- mée du maréchal Suchet, qui, en Espagne, avait mangé de la viande cuite et embrochée avec des rameaux de cette plante, Quoiqu'on ait dit que le principe actif du Nerium oleander était destructif de lirritabilité, c'est-à-dire hyposthénisant, on ne sait rien de précis à cet égard ; et de nouvelles études seraient indispen- sables pour bien établir les effets physiologiques et toxiques de ce poison. Les feuilles sèches sont moins actives que fraiches; pulvérisées, elles sont sternutatoires et peuvent alors devenir dangereuses. Les feuilles digérées dans l'huile cèdent à ce liquide une grande partie de leur principe actif, et on obtient ainsi un remède popu- laire contre la gale, employé dans le midi de la France, et que l’on applique avec moins de raison et de succès contre la teigne et les dartres. L'infusion des feuilles fraiches, autrefois employée contre la syphilis, n'est plus usitée, et il en est de même de toutes les plantes du même genre. LAVANDE Lavandula vera D.C. L. officinalis Auct, (Labiées-Ocimoïdées.) La Lavande officinale ou vraie est un sous-arbrisseau à souche ligneuse, courte, rameuse. Les tiges, hautes de 0",30 à 0,60, ligneuses à la base, rapprochées en touffe, se divisent en rameaux tétragones, allongés, grêles, pubescents, blanchâtres, nus dans leur partie moyenne, et portant, dans la partie inférieure, des feuilles opposées, sessiles, lancéolées-linéaires, aiguës, entières, velues et blanchâtres dans leur jeune àâge, à bords roulés en dessous. Les fleurs, petites, bleu violacé, sessiles, sont groupées en petits verticilles insé- rés à l’aisselle des feuilles supérieures transformées en bractées sca- rieuses, ovales arrondies, aiguës ; l’ensemble de ces verticilles cons- titue un épi grêle terminal, interrompu à la base. Chaque fleur présente un calice ovoide tubuleux, velu, strié, bleuâtre, à cinq dents inégales, les quatre inférieures très-courtes, la supérieure plus large prolongée en un appendice dilaté en forme d’opercule ; une corolle à tuhe plus long que le calice, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure bilobée, l'inférieure trilobée ; quatre étamines incluses, didynames, les deux plus longues en bas ; un pistil composé de quatre DU XIX‘° SIÈCLE. 221 petits carpelles libres, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes oblongs, lisses, convexes au sommet. La lavande en épi, vulgairement Spic ou Aspie, Lavande mâle, Grande lavande, Faux nard, ete. (Z. spica L.), longtemps confondue avec la précédente, s’en distingue surtout par ses bractées linéaires, ses feuilles spatulées, son calice moins cotonneux, etc. La lavande à larges feuilles, vulgairement Lavande femelle (Z. lati- fobia Nil.), espèce très-voisine ou peut-être même simple variété de la lavande en épi, en diffère par sa taille plus petite; sa tige moins ligneuse, à rameaux étalés; ses feuilles linéaires lancéolées, longue- ment atténuées à la base ; ses braclées étroites et cotonneuses. La lavande Stéchas, ou Stéchas arabique (L. stæchas L.), est aussi un sous-arbrisseau, dont la tige, haute de 0,35 à 0",65, sous- ligneuse à la base, épaisse, presque droite, se divise en rameaux nombreux, dressés, portant des feuilles opposées, sessiles, oblongues linéaires, entières, à bords roulés en dessous. Les fleurs, petites, pourpre foncé, solitaires à l’aisselle de bractées ovales, pubescentes, forment par leur réunion des épis terminaux, serrés, ovoides, courts, imbriqués, couronnés par une touffe de bractées colorées en pourpre bleuâtre. HaBirar. — Toutes ces plantes croissent sur les bords du bassin méditerranéen. Elles habitent surtout les lieux secs et arides, et peuvent croître en pleine terre dans le centre et l'ouest de la France. Cuzrure. — Les lavandes ne sont guère cultivées que dans les jar- dins botaniques, et en bordures dans les jardins d'agrément. On peut les propager de graines semées au printemps; mais il vaut mieux les multiplier par éclats de pieds, faits dans cette saison ou à l'automne. Parries usirées. — Les sommités fleuries, avant le complet épa- nouissement des fleurs. Ricorre. — Toutes les lavandes sont récoltées lorsque les corolles commencent à s'ouvrir. On coupe les sommités fleuries, on les dis- pose en paquets et en guirlandes que l’on fait sécher au grenier ou au séchoir. Quelquefois on trouve les fleurs isolées, dans le commerce de l'herboristerie ; celles du stæchas le sont toujours. La lavande officinale sert dans le Nord à faire des bordures dans 222 FLORE MÉDICALE. les jardins. Son odeur est moins forte mais plus agréable que celle de la lavande spic ; elle est préférée pour les préparations de l’alcoolat de lavande. La lavande anglaise est la plus usitée; on la cultive en grand à Mitcham, comté de Surrey. La lavande mäle ou Spéc nous vient du midi de la France, de la Sicile, de toute l'Italie et d'Afrique. Elle exhale une odeur forte, très-aromatique ; sur les lieux de production, on en extrait une essence désignée dans le commerce sous le nom d'huile ou d'essence de spie où d’aspic. Elle est employée dans la fabrication des vernis et des peintures fines. Les fleurs de stæchas nous arrivaient autrefois d'Arabie ; aussi les nommait-on stæchas d'Arabie où arabique. Mais aujourd'hui la Pro- vence en fournit suffisamment. Ce sont des sortes d’épis serrés, ovales oblongs, de la grosseur d'une petite olive. Leur couleur est pourpre, blanchätre ; leur odeur est forte et térébinthacée ; leur saveur àcre, chaude et amère. Elles fournissent moins d’huile essentielle que les précédentes. Elles entrent dans le sérop de stæchas composé, qui n’est plus employé. Courosirion cuimique. — Les layandes doivent leurs propriétés à une huile essentielle qu'on en retire par distillation. Celle du L. vera est légèrement colorée; son odeur est forte, aromatique; sa saveur est brûlante et amère ; sa densité est de 0,898; elle est soluble dans l'alcool, l'éther et l'acide acétique concentré. D'après Proust, elle laisse déposer un camphre semblable à celui des Eaurinées. M. Dumas, qui a vérifié cette assertion, a vu que l'essence produite par la plante des pays chauds laissait déposer, jusqu'à moitié de son poids, de ce stearoptène. L'essence du Z. spèca est analogue à la précédente, mais son odeur est moins suave. Elle laisse également déposer du camphre. Usaces. — Les essences de lavande sont employées dans la parfu- merie commune : le vinaigre, l’alcoolé et l'alcaolat de lavande, em - ployés comme eaux de senteur, sont regardés comme anti-septiques. On fait avec les sommilés fleuries des bouquets et des sachets que les ménagères mettent dans les armoires à linge pour les parfumer. En médecine, les lavandes sont rarement employées; elles sont stimulantes ; on les a conseillées dans les affections nerveuses, atoni- ques, contre la débilité digestive, les catarrhes chroniques, l'asthme humide. Les propriétés emménagogues qu’on leur a attribuées sont DU XIX' SIÈCLE. 223 nulles. A l'extérieur, les infusions aqueuses ou vineuses sont regar- dées comme toniques et résolutives. On s’en sert pour lotionner les contusions. L'huile volatile a été employée quelquefois sous forme de liniment contre les douleurs. Bodart dit que l'on fait respirer les fleurs de lavande avec succès dans la dyspnée. D'ailleurs, leur action est analogue à celle de l'hyssope ; celle-ci est préférée. LÉDON Ledum palustre et latifolium L. (Éricinées - Rhodorées. ) Le Lédon des marais ou à feuilles étroites (L. palustre L.), appelé vulgairement Romarin sauvage, est un arbuste de 0,35 à 0,65, rameux, diffus, à tige brune, à jeunes rameaux velus et roussâtres, portant des feuilles alternes, sessiles, étroites, linéaires, coriaces, persistantes, à bords repliés en dessus, à face inférieure couverte d'un duvet épais et roussàtre. Les fleurs, blanches, à pédoncules courbés après la floraison, sont réunies en ombelles terminales. Elles présentent un calice petit, à cinq dents; une corolle à cinq pétales hypogynes, libres, étalés; dix étamines, plus longues que Ja co- rolle; un ovaire à cinq loges pluriovulées, inséré sur un disque hypo- gyne glanduleux, et surmonté d'un style simple, que termine un stigmate discoïde, à cinq rayons. Le fruit est une capsule, s'onyrant, par le décollement des cloisons, en cinq loges, à placentas pendants au sommet de la columelle et portant un grand nombre de petites graines. Le Lédon à larges feuilles (L. latifoltum L.), vulgairement appelé Thé du Labrador, se distingue du précédent par sa taille plus éle- vée, sa forme arrondie plus régulière, son écorce brunâtre, ses feuilles plus larges, ovales oblongues, d'un vert noirâtre en des- sus, jaunâtre en dessous; ses cinq étamines, égalant à peu près la corolle. Hagrrar. — Le lédon à feuilles étroites se trouve surtout dans le nord de l'Europe, où il vit dans les marais. Le Jédon à larges feuilles habite les régions septentrionales de l'Amérique. Cucrure. — Ces arbrisseaux demandent une exposition ombragée et la terre de bruyère fraiche. On les multiplie de graines semées en terrine, de rejetons et de marcottes faites au printemps. 224 FLORE MÉDICALE Parties usrrées. — Les feuilles et les sommités. XÉCOLTE. — La récolte des feuilles doit être faite avant la floraison; celle des sommités, lorsque les bourgeons floraux commencent à s'ouvrir. Compostrion cuimique. — Toutes les parties des Ledum présentent une odeur forte, vireuse et résineuse, une saveur chaude, piquante, amère et astringente. Les feuilles du L. palustre ont été analysées par le docteur Meissner de Halle, qui y a trouvé une huile volatile plus légère que l'eau, de la chlorophylle, de la résine, du tannin, du sucre incristallisable, une matière colorante brune. (Bulletin des sciences, méd. de Férussac, tome XIT, page 179.) On croit que l'odeur de cette plante éloigne les insectes ; elle concourt, avec le bouleau, à donner au cuir de Russie l'odeur qu'on lui connait. On prétend qu'en Allemagne on le fait entrer dans cerlaines bières qui sont ainsi rendues plus enivrantes, et même narcotiques. M. Bacon, qui a analysé les feuilles du Z. lafifoliurn y a trouvé du tannin, de l'acide gallique, une matière amère, de la cire, de la ré- sine et des sels. (Journal de pharm., t. XX, p. 558.) Usages. — D'après Linné, les feuilles du Z. palustre sont em- ployées en Westro-Gothie contre la coqueluche (Aræn. Acad., VW, p. 268), ce qui n'aurait rien de surprenant, puisqu'on leur attribue des propriétés narcotiques et un peu vomitives, on les a crues pro- pres à calmer et à guérir les fièvres éruplives. D'après Odhelius, la décoction est employée contre la lèpre et préconisée contre la gale et la teigne. L'eau distillée à été conseillée contre la céphalalgie. Hufeland prescrivait la tisane par infusion contre les toux ner- veuses. Aujourd'hui les ledum sont inusités. LENTILLE Lens esculenta Mœænch. Ervum lens L. Vicia lens Coss.-Germ. (Légumineuses- Viciées.) La Lentille, appelée aussi dans quelques localités Arousse ou Arroufle , est une plante annuelle, dont la tige, haute de 0°,20 à 0",40, tétragone, pubescente, rameuse, dressée, porte des feuilles alternes, pétiolées, paripennées, présentant cinq à sept paires de folioles oblongues, obovales ou linéaires, accompagnées de deux sti- pules lancéolées et terminées par une vrille simple ou bifurquée. DU XIX° SIÈCLE. 225 Les fleurs, petites, blanches, veinées de violet, sont réunies, au nombre d’une à trois, à l'extrémité de pédoncules axillaires égalant à peu près la longueur des feuilles. Elles présentent un calice à cinq dents égales, velues, longues, linéaires, subulées; une corolle papi- lionacée; dix étamines diadelphes ; un ovaire simple, allongé, com- primé, à une seule loge pauciovulée, surmonté d’un style filiforme terminé par un très-petit stigmate en tête. Le fruit est une gousse pendante, presque rhomboïdale, terminée en bec, glabre, fauve à la maturité, renfermant une ou deux graines comprimées, lenticu- laires, lisses, jaunâtres, brunes ou marbrées. La lentille à une fleur (Ærvum monanthos L., Vicia monantha Coss. — Germ.) est aussi annuelle, et se distingue de la précédente par ses feuilles à folioles linéaires tronquées ou échancrées; ses stipules de deux formes différentes pour la même feuille, l’une linéaire, l’autre réniforme et lacimiée; ses fleurs solilaires, à dents calici- nales plus courtes. On donne le nom de lentille du Canada à une variété à graines blanches de la vesce commune ( Vécia sativa L.). Hagrrar. — La lentille croit dans les moissons, sur les terrains secs et sablonneux du midi de l’Europe. On la cultive en grand dans les champs et les jardins maraichers. PARTIES USITÉES. — Les semences. Récorre. — Les graines de lentilles sont récoltées à l'automne, un peu avant la déhiscence du fruit; on les bat sur un drap pour faire ouvrir les gousses; et après avoir vanné les graines, on les fait dessécher et on les conserve pour la consommation de l'hiver. Composirion cimique. — Les lentilles sont riches en fécule; leur épisperme contient un peu de tannin. Foureroy a trouvé dans la farine de l'albumen et un peu d'huile verte (Ann. du Muséum, t. VU, p. 12). D'après Braconnot, elles contiennent une quantité considé- rable d'une matière azotée, soluble dans l’eau, coagulable par l'acide acétique, soluble dans un excès d'acide, très-analogue à la caséine du lait, et que, pour celte raison, on a nommée caséine animale, mais qui est cependant plus souvent désignée sous celui de légumine. et qui constitue la partie essentiellement nutritive des graines des légumineuses. Usaces. — Les quatre farines résolulives autrefois très-employées Flore, T, IL. 15 226 FLORE MÉDICALE en médecine étaient préparées avec le lupin blanc, Luprnus albus L., la fève, Faba sativa, V'orobe, orobus vernus, que l'on rempla- çait souvent par la lentille, Ærvwm lens, ou par l’ers, Ervum, Ervilia, et la vesce, Vicia sativa, appartenant à la famille des légumineuses. Aujourd'hui toutes ces farines sont très-peu em- ployées. C’est surtout comme plante alimentaire que la lentille est impor- tante; on la mange en purée, en ragoüts, en potages, en salades, etc. La farine, mélangée avec un peu de sel marin, de sucre ou de mé- lasse, constitue ces préparations dépourvues de toutes qualités médicinales ou hygiéniques, quoique si vantées par la spéculation et le charlatanisme, comme guérissant de lous les maux, sous les noms de Revalescière, de Revalenta et d'Ervalenta. Les anciens prescrivaient la décoction de lentilles comme sudo- rifique et l’employaient contre la variole; Zacutus la disait utile contre Ja pleurésie, mais Murray a fait voir qu'elle ne pouvait agir que comme émolliente (App. méd., t. A, p.453). D'après Lange, le café de lentilles est un puissant diurétique dont usent les habitants de Cronstadt contre l'hydropisie (Ancien Journ. de méd., t. LXXX. p. AT). On emploie quelquefois la farine en cata- plasmes comme résolutive ; elle n’est qu'émolliente. C'est sans raison que l’on a prétendu que l'usage de ce légume dispose aux engorge- ments, à l'éléphantiasis, ete. L'Ervum monanthos L., que l’on a placée dans les Vice et qui produit la jarosse, est cultivée comme fourrage ; les semences com- primées sont plus épaisses et un peu moins grandes que celles de la lentille ; leur couleur est rougeûtre. LENTISQUE Pistacia lentiseus L. (Térébinthacées - Pistaciées.) Le Lentisque est un arbrisseau à racines traçantes. Sa tige, haute de 2 à 3 mètres, tortueuse, rameuse, diffuse, porte des feuilles alternes, pétiolées, paripennées, offrant huit à douze folioles ovales, lancéolées, obtuses, glabres, odorantes, persistantes. Les fleurs, petites, rougeätres, dioïques, sont groupées en panicules axillaires. Elles présentent un calice profondément divisé en cinq lobes lan- DU XIX° SIÈCLE. 227 céolés-linéaires. Les mâles ont cinq étamines; les femelles, un ovaire à une seule loge uniovulée, surmonté d'un style simple ter- miné par trois stigmates épais. Le fruit est une drupe sèche, très- petite, pisiforme, rougeàtre, contenant un noyau osseux. Haprrar. — Cet arbrisseau est répandu sur tout le pourtour du bassin méditerranéen, Il croit surtout dans les lieux arides et mon- tueux. On ne le cultive que dans les jardins botaniques. Dans le Nord, il exige l’orangerie durant l'hiver. ParTies usirées. — La résine qui en découle ou mastie, le bois, les fruits, les graines. Récozre. — Le bois du lentisque est jaunâtre, un peu aromatique, résineux ; sa saveur est un peu astringente, et on peut le couper en toute saisou, mais de préférence à l'automne. Les fruits que l’on mange sont cueillis à leur maturité. Le produit le plus important de cette plante est le #astic. La plante n'en donne pas partout ; ainsi en Provence, d'après Gassendi, elle n'en fournit pas, ou elle en fournit si peu que cela ne vaut ,pas la peine d'être ramassé; il en est de mème en Algérie. Cette exploitation est particulièrement faite dans l'ile de Scio ou de Chio; c'est une des sources de la fortune de cette île ; le sultan des Turcs défendait qu'on cultivât ailleurs cette plante. Pour obtenir le #4s/c, on fait au tronc et aux principales branches, du 15 au 20 juillet, des incisions légères et nombreuses; il découle de chacune d'elles un suc liquide qui se concrète sur l'arbre, et forme des larmes sèches qui quelquefois tombent à terre. La pre- mière récolte se fait vers la fin d'août; on incise de nouveau pour récolter une seconde fois en septembre. Il est défendu de ramasser cette production. Le mastic se recueille dans vingt et un villages de l'île. Les arbres couchés et rampants en donnent plus que ceux qui sont dressés. La récolte s'élève, dit-on, annuellement à soixante mille ocques (l'ocque vaut 2,500 grammes). La meilleure qualité est destinée à l'usage du sullan; l'autre est envoyée au Caire (Oli- vier, Voyage dans l'empire ottoman, 4, p.292). D'apr.s le P. Labat, le lentisque croit en Senégambie, et il y produit du mastic. Du temps de Galien, il y en avait en Égypte, et ii parait qu'il y en a aussi dans la Natolie. Le mastlic se présente sous la forme de petites larmes dures, sèches, d’un jaune pâle, lisses, cassantes, transparentes, presque sphériques, d'une odeur un peu térébenthacée, brülant sur les char- 228 FLORE MÉDICALE bons ardents en répandant une fumée noire et épaisse; chauffées dans la bouche, elles adhèrent aux dents. On désigne sous le nom de mastie mâle les larmes les plus grosses; la seconde sorte, appelée mastic femelle, est celle que l'on ramasse par terre; il est moins estimé. La sandaraque (Thuya articulata), produite par une conifère, res- semble beaucoup au mastic; on la distingue en ce que les larmes sont plus allongées, plus jaunes, et en ce qu'elles se brisent sous la dent sans y adhérer, à leur complète solubilité dans l'alcool, et à leur solubilité beaucoup moins grande dans l'éther et dans l'alcool. Composirion CHIMIQUE. — Les larmes du mastic sont recouvertes d’une poussière blanchâtre provenant de leur frottement réciproque ; leur cassure est vitreuse, leur transparence un peu opaline, leur odeur est douce el agréable, leur saveur un peu aromatique; elles sont incomplétement solubles dans l'alcool, la partie non dissoute est tenace et élastique lorsqu'elle tient de l'alcool interposé et séché, et casssante lorsqu'elle n’en contient pas; elles sont solubles dans l'éther et dans l'essence de térébenthine chaude. Mathews a désigné sous le nom de HMasticine la partie du mastic insoluble dans l'alcool ; c'est, d'après M. Bonastre, une sous-résine, et M. Guibourt en a trouvé une analogue dans la résine animée. Usaces. — Wrenck a vanté le bois de lentisque comme une sorle de panacée contre la goutte ; on l'a employé en gargarismes; on en fait des cure-dents. D’après Pline, les fruits du lentisque étaient mangés de son temps confits dans des olives; il raconte que Damo- crate guérit la fille du consul Servilius, atteinte d’une maladie chro- nique, avec le lait d'une chèvre nourrie de feuilles de lentisque (lib. XXIV, c. 7). En Espagne, dans le Levant et en Algérie, on retire de l’amande par expression une huile qui sert à l'éclairage ; on en fabriquait aussi en Provence, du temps de Clusius (Tournefort, Voyage, t. W, p. 65). Le mastic est très-employé par les femmes grecques, turques, américaines, juives, etc.; elles le mâchent sans cesse; il parfume l'haleine, raffermit les gencives, conserve la blanchenr des dents, augmente la sécrétion salivaire, agit sur l'estomac ; il est regardé comme astringent et anti-spasmodique ; on l'a employé avec succès pour combattre la diarrhée rebelle des phthisiques. On fait usage en Algérie dans le même but de l'extrait alcoolique de lentisque. DU XIX° SIÈCLE. 229 En Orient, le mastic sert à parfumer les liqueurs; on en met dans le pain, on en brüle dans les appartements ; on le mélange aux eaux de senteur, aux poudres dentifrices; on en fait des fumigations contre le rhumatisme, la goutte, le rachitisme, les spasmes de la poitrine, différentes douleurs ; à l'intérieur on le donne contre le catarrhe chronique, la leucorrhée, etc. En France, il est peu employé; Dubois de Rochefort l'a cependant quelquefois administré. En Allemagne, on en prépare une huile, un sirop, une teinture, un élixir, etc. Chez nous, il sert surtout pour la fabrication des vernis fins. LÉONTICE Leontice leontopetalum L. Leontopodium vulgare Mor. (Berbéridées.) La Léontice commune ou Pied-de-Lion est une plante vivace, à rhizome tubéreux, émettant des fibres radicales. La tige, haute de 0",30 à 0®,40, verte, striée de pourpre, cylindrique, dressée, porte des feuilles alternes, pétiolées, deux fois ternées, à folioles obovales, presque sessiles. Les fleurs jaunes, fortement veinées, sont groupées en une panicule terminale, accompagnée de bractées foliacées, ovales, entières, stipitées, plus courtes que les pédicelles. Elles pré- sentent un calice à six pétales alternant sur deux rangs, colorés, caducs ; une corolle à six pétales également sur deux rangs, ongui- culés, plus courts que les sépales ; six étamines sur deux rangs, à filets planes et très-courts, à anthères biloculaires ; un pistil à ovaire ovoide-oblong, à une seule loge renfermant quatre ovules, sur- monté d’un style court terminé par un stigmate obtus. Le fruit est une capsule membraneuse, vésiculeuse, uniloculaire, renfermant trois ou quatre graines noires et globuleuses (PI. 25) La léontice pigamon (L. thalictroïdes L., Caulophyllum thalic- troïdes Mich.) est aussi vivace, et caractérisée par sa tige nue, ter- minée par trois feuilles pétiolées, deux fois ternées ; ses fleurs jaunes en grappe rameuse, et ses graines d’un bleu foncé. Hagrrar. — La léontice commune croît sur les bords du bassin méditerranéen; on la trouve dans les terres labourées, les mois- sons, etc. La léontice pigamon habite les bois montueux de l’'Amé- rique du Nord, et particulièrement de la Virginie. Cucrure. — Les léontices demandent une terre légère et une 230 FLORE MÉDICALE bonne exposition. On les multiplie par la division des tubercules. On doit les couvrir pendant les hivers rigoureux. Parties usiTées. — Les feuilles, les racines. Récocre. — Cette plante n'existe pas dans le commerce de la droguerie. Son nom de y#ed-de-lion lui vient de la forme de ses feuilles, qui imitent, dit-on, la trace du pied du lion. CompPosiTION CHIMIQUE. — On ne sait rien de positif sur la compo- sition des /éontices ; on prétend que les Arabes mangent les feuilles acides du L. chrysogonum L. (Journ. de Pharm., t. IX, p. 209). Ce ‘qui ferait supposer qu’elles renferment de l'acide oxalique ou plutôt de l'acide malique, si communs dans les feuilles et les fruits des plantes de la même famille. Ce qui nous parait moins probable, c'est qu'on a dit qu'en Perse et dans tout l'Orient, sa racine savon- neuse sert à dégraisser les cachemires, ce qui ferait supposer qu'elle est riche en saponine, substance neutre très-décrassante qu’on n'a jamais trouvée dans aucune autre berbéridée ; cette assertion d'Oli- vier est peu probable, et nous croyons avec Mérat et de Lens, que la plante employée en Orient pour dégraisser les laines (Journ. de Pharm., t. XW, p. 203), est une caryophyllée du genre gypsophila, analogue à celui qui produit le Æa/vage des Arabes, ou saponaire d'Égypte. Usaces. — D'après Dioscoride, les /éontices apaisent les douleurs de dents ; administrés en lavement ils calment la sciatique et gué- rissent la morsure des serpents (lib. m1, €. 94). Les Orientaux les ont, dit-on, employés contre la gale, aujourd'hui ils sont tout à fait inusités. En Orient on appelle le L. Leontopetalum, Moiïadé. D'après M. Bentley, le L. Thalictroides où Caulophyllum Thalic- troides où cohost bleu est employé par les peuplades du Nord, comme l’ergot de seigle chez nous, pour faciliter les accouchements ; la dose est de un à deux grammes, le principe actif qu'on en à isolé a été nommé caulophyllin. C'est une matière résineuse qui se dépose lorsqu'on traite la teinture alcoolique par l’eau. Ce sont les rhizomes du cohost que l’on emploie; ils sont longs de plusieurs centimètres, ramifiés et ressemblent à la racine de ser- pentaire de Virginie; coupés transversalement on remarque deux couches toutes deux d’un blanc jaunâtre, séparées par un tissu brun foncé. Il est inconnu en France. DU XIX° SIÈCLE. 231 LICHEN Lichen Islandicus et L. pulmonarius L. (Lichénées.) Les Lichens sont des végétaux cryptogames cellulaires, à fronde ou thallus pulvérulent, crustacé, filamenteux, foliacé ou ramifié ; les fructifications (apothécies), bombées ({ubercules) ou en godet (scutelles), se composent d'une partie interne productive et d’une externe qui lui sert de réceptacle : l’interne renferme les gongyles ou sporules, lantôt libres et nus, tantôt contenus dans des thèques, ou dans une lame ouverte, où un nucleus ; l'extérieure ou concep- tacle est plus ou moins évasée ou fermée, plus ou moins dilatée. Les lichens se présentent sous des formes très-variées; tantôt de larges plaques crustacées, grises, jaunes ou brunes; tantôt de longs fila- ments suspendus aux branches des arbres; d’autres sont rameux et végètent sur le sol; quelques-uns ressemblent à une poussière grise ou verdâtre, ou plutôt tous les lichens offrent cet aspect dans les premiers temps de leur développement. Nous réunissons dans un même article toutes les espèces usitées en médecine, et dont une ou deux seulement ont quelque importance. Le lichen d'Islande (Zichen Islandicus L., Physcia Islandica D. C., Cetraria Islandica Achar.) a des frondes membraneuses, coriaces, sèches et comme cartilagineuses, glabres, d’un gris roussâtre, rami- fiées, formant des touffes serrées, d’une hauteur totale d'environ 0,10. Les divisions des frondes sont très-écartées, obtuses, à bords repliés en goultière et munis de poils ciliés presque épineux. Les fructifications consistent en scutelles sessiles, peu nombreuses, planes, arrondies, d’une couleur pourpre foncée, entourées d’un rebord cilié et placées obliquement au sommet et sur le disque des divisions de la fronde (PI. 26, fig. 1). Le lichen pulmonaire (L. pulmonarius L., Lobaria pulmonaria D. C., Stcta pulmonaria Achar.), appelé aussi pulmonaire de chêne, thé des Vosges, etc., a des frondes cartilagineuses très-grandes, éla- lées, à lobes profonds, anguleux, rameux, tronqués au sommet, d’un roux fauve à la face inférieure, qui est glabre et réticulée, marquée de creux qui correspondent aux bosselures de la face supérieure. Les scutelles sont éparses, peu nombreuses, d’un rouge marron, 232 FLORE MÉDICALE d'abord concaves, puis planes, placées sur les bords des frondes. On remarque encore, sur ces bords et sur les lignes saillantes de la face supérieure des sorédies ou sortes de petits arnas pulvérulents (PI. 26, fig. 2). Nous ne ferons que nommer les lichens aptheux (L. apthosus L., Peltigera aphihosa D.C.), en entonnoir (L. pyxidatus L., Beo- müces Achar.), des murailles (L. parietinus L., Parmelia parietina Achar.), etc. Hagrrar. — Ces diverses espèces sont répandues dans presque toute l'Europe; elles habitent de préférence les régions monta- gneuses, les lieux arides, les bois, etc. On les trouve croissant sur la terre, les pierres, les vieux murs, sur le tronc des arbres, les bois morts, etc. Parties usitéEes. — Toute la plante. Récorre. — Le lichen d'Islande, le seul à peu près employé en médecine est abondant dans le Nord de l'Europe, surtout en Islande ; on en trouve en France, dans les Vosges, l'Auvergne, les Pyré- nées, etc.; il croît sur l'écorce des arbres ou sur terre ; il nous ar- rive sec, il est alors coriace, inodore, d’une saveur amère, il se gon- fle dans l’eau froide en cédant au liquide du principe amer et du mucilage; ainsi gonflé et traité par l’iode, toute la partie externe du thallus se colore en bleu noirätre, landis que la partie interne cal- caire conserve sa couleur grisètre. Lorsqu'on fait bouillir longtemps le lichen dans l'eau, il se dissout presque en entier et le liquide se prend en gélée par le refroidissement. Le lichen pulmonaire tire son nom, d’après quelques auteurs, de l’analogie d'aspect que présentent ses frondes avec un poumon coupé ; d'après d’autres, de ce qu’on l’a employé contre les maladies du poumon. Quoique très-commun, il est peu estimé et inusité. Le lichen pixidé (L. Pixridatus L., Scyphophorus Prridatus D. C.), commun en Auvergne et dans nos bois, était autrefois employé, il ne l’est plus aujourd’hui. On a beaucoup vanté contre l'épilepsie l'usnée du crâne humain, on la payait, dit-on, jusqu’à mille francs les 30 grammes, c’est le L. saxatilis L. (Parmelia saxatilis Ad.). Il fal- lait choisir exclusivement la plante qui croissait sur les crânes hu- mains exposés à l'air; il est vrai qu'on lui substituait presque tou- jours le L. Æicatus L. (usnea plicata D.C.). Tous deux sont aujourd'hui tout à fait oubliés. DU XIX° SIÈCLE. 233 Composirion cHiMiQuE. — Le lichen a été analysé par Proust, Ber- zélius, Schnopp et Schneidermann, étudié par MM. Robinet, Her- berger, etc. Il contient les principes suivants : amidon particulier (lichénine), matière amère (cétrarin où cétrarine), sucre incristalli- sable, gomme, graisse, chlorophylle particulière insoluble dans l'acide chlorhydrique (#a/lochlore), matière colorante extractive (apothème), squelette amylacé, tartrate et lichénate de potasse, phos- phate et lichénate de chaux. D'après MM. Schnopp et Schneider- mann, le lichen contient deux acides particuliers qu’ils ont nommés acide cétrarique et acide lichen stéarique. La lichénine est brune, insipide, d’une odeur faible de lichen, elle se gonfle très-peu dans l’eau en se dissolvant à peine; elle est soluble dans l’eau bouillante. Par le refroidissement la liqueur se prend en gelée, mais elle perd cette propriété par l’ébullition prolongée; elle est insoluble dans l'alcool, l’iode est sans action sur sa solution, mais il colore en bleu la lichénine gélatineuse ; les acides étendus lui font perdre la propriété de se prendre en gelée, et par une ébullition prolongée il se fait d’abord de la gomme, puis du sucre. John a trouvé de l’inuline dans le lichen, M. Payen a vu que l’amidon du lichen était transformé en dextrine et en sucre par la diastase, en même temps qu'il se dépose de l'inuline, de sorte qu’il est probable que la matière amylacée du lichen est un mélange d’amidon et d'inuline. La matière amère ou cétrarin ou acide cétrarique, est solide, in- colore, inodore, cristallise en aiguilles ténues ; elle est très-amère, peu soluble dans l’eau froide, très-soluble dans l’eau bouillante et dans l'alcool absolu. Pour les usages de la médecine, lorsqu'on veut employer le lichen comme {onique amer, on ne le prive pas du cétrarin, mais lorsqu'on en fait usage comme expectorant, on lui enlève le principe. Herber- ger conseille de le traiter par l'alcool concentré. Ce procédé, très- bon lorsqu'on veut isoler le cétrarin, est impraticable au point de vue pharmaceutique. Berzélius a proposé la macération dans un liquide alcalin et les lavages prolongés, mais comme on n’est jamais certain d'enlever tout l’alcali, il vaut mieux employer la méthode de M. Robinet, qui consiste à faire une infusion aqueuse et laver ensuite dans l'eau froide; un courant longtemps prolongé d’eau froide est suffisant. 23/ FLORE MÉDICALE Usaces. — Comme tonique amer, c’est-à-dire non privé de célra- rin, le lichen est très-peu employé; lorsque au contraire cette sé- paration a été effectuée, le lichen est un des émollients adoucissants et expectorants les plus souvent employés sous formes de tisane, de sirop, de gelée ou de pâte. On peut pour ainsi dire l’employer à toute dose dans toutes les maladies de poitrine, il calme la toux et facilite lexpectoration. Depuis 1673, époque à laquelle Borrichius employa le lichen contre les maladies de poitrine, jusqu’à nos jours, le lichen a été usité journellement comme calmant, sous les formes que nous avons fait connaitre. Dans les pays pauvres du Nord, en Norwége principalement, les divers lichens sont employés comme aliments; on les prive du prin- cipe amer par des lavages. C'est surtout le lichen esculent Lrchen esculentus L. Lecanora esculenta, que quelques auteurs nomment manne tombée du ciel et manne des Hébreux, que l'on emploie à cet usage. On prétend que les populations pauvres qui se nourrissent de lichen sont exemptes de l'éléphantiasis, très-commun au contraire chez ceux qui mangent du poisson. LIERRE Hedera helix L. (Araliacées.) Le Lierre est un arbrisseau à tiges sarmenteuses, grimpantes ou rampantes, de longueur et de grosseur très-variables, émettant sur l'une de leurs faces une ligne presque continue de racines advenlives blanchâtres. Elles portent des feuilles alternes, pétiolées, fermes, coriaces, luisantes et d’un beau vert foncé en dessus, plus pâles en dessous, persistantes ; les inférieures cordées à la base, palmées, à trois, cinq ou sept lobes triangulaires; les supérieures atténuées à la base, ovales, aiguës, entières. Les fleurs, d'un jaune verdàtre, sont portées sur des pédoncules pubescents, et réunies en ombelles très-denses, arrondies, rapprochées en panicule terminale. Elles pré- sentent un calice pubescent, à tube adhérent, à limbe divisé en cinq dents {rès-courtes, écartées ; une corolle à cinq pétales ovales, ai- gus, larges et tronqués à la base, pubescents, élalés et un peu réflé- chis; cinq étamines courtes, droites, saillantes, insérées sur un disque épigyne qui revêt le sommet du tube du calice; un ovaire DU XIX° SIÈCLE. 235 infère, globuleux, à cinq loges uniovulées, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate en tête. Le fruit est une baie globuleuse, coriace, noire, couronné par le limbe du calice et le style persistants, à cinq loges monospermes. Hamrrar. — Le lierre est commun dans toute l'Europe; il croit dans les lieux frais et ombragés des bois, dans les haies et les buis- sons, sur les vieux murs et les édifices en ruines ; tantôt il rampe sur la terre, tantôt il grimpe et vit en faux parasite sur les troncs d'arbre et les autres appuis. Curure. — Le lierre n’est pas cultivé exclusivement pour l'usage médical ; mais on le trouve dans presque tous les pares et les jardins, où l’on en fait même des bordures. Il croît dans tous les sols et à toute exposition, et se propage très-facilement de graines, semées aussitôt après leur maturité, de boutures et de rejetons enracinés, plantés à l'ombre. Parties usirées. — Les feuilles, les baies, l'écorce, la résine. Récozre. — Les feuilles qui ne sont employées que fraîches peu- vent être récoltées pendant toute l’année; il en est de même de l’écorce, qui est facile à reconnaître aux crampons nombreux qu'elle présente sur sa partie externe. Les fruits, autrefois employés, et qui ne le sont plus aujourd'hui, étaient cueillis à l’époque de leur matu- rité, qui a lieu de janvier à mars. La résine de.lierre découle spontanément, ou à la suite d’incisions, dans les pays chauds, du tronc des vieux lierres. Autrefois employée en fumigations, elle est aujourd'hui à peu près inusitée. Elle est d'ailleurs très-variable dans sa composition : tantôt elle est en forme de résine, d’autres fois de gomme pure. C’est la résine qui était estimée. La résine de lierre du commerce présente des morceaux de trois sortes différentes : les premiers paraissent noirs et opaques, parce qu'ils sont recouverts d’une croûte présentant cette couleur; mais si on l’enlève, ils deviennent transparents et orangés. Leur cassure est vitreuse; leur saveur mucilagineuse. Ils donnent une poudre presque blanche, qui se gonfle dans l’eau sans s’y dissoudre. Ce- pendant il arrive quelquefois que la liqueur filtrée précipite par l’alcool, ce qui indique la présence de la gomme; de sorte que, d’après M. Guibourt, ces fragments seraient composés d’une ma- tière gommeuse insoluble, analogue à celle de la gomme de Bas- 236 FLORE MÉDICALE sora et d’une matière soluble ressemblant à celle de la gomme du Sénégal. La seconde sorte de résine est en fragments irréguliers d’un brun noirätre, avec des taches ocreuses et des fragments d’écorce adhérents. Leur cassure est brillante et vitreuse, opaque dans les points colorés. Ils sont inodores, donnent une poudre brune et brülent comme du bois lorsqu'on les expose au feu. Ils sont formés de matières gom- meuses analogues à la précédente; mais dans les cavités on trouve des larmes petites, résineuses, d’un rouge rubis. Enfin, la troisième sorte de résine de lierre est brun noirâtre, salie extérieurement par une poussière jaune. Elle offre plus rare- ment des débris d’écorce. Sa cassure est vitreuse, transparente, d’un rouge rubis foncé. Son odeur est résineuse et rance; sa saveur est forte; elle donne une poudre jaune très-odorante. C’est cette variété qui a été décrite par De Meuve et Lémery, et qui doit être seule employée. Cowpostrion cHimique. — Les feuilles de lierre qui n’ont pas été analysées ont une saveur âcre très-irritante. La résine, appelée quel- quefois kédérée où hédérine, contient, d’après M. Pelletier, gomme, 7; résine, 23 ; acide malique, 0,30; ligneux, 69,70. Maison comprend, d'après ce que nous venons de dire, que sa composition doit beau- coup varier. M. Guibourt, qui a soumis cette résine à l'action de divers dissolvants el réactifs, pense qu’elle renferme un principe immédiat différent des gommes et des résines, et qui pourrait être utilisé en teinture. Usaces. — Il y a quelques années encore, on se servait des feuilles de lierre pour panser les exutoires. Aujourd'hui on les remplace par des papiers épispastiques. Quoique vantées par Celse contre l’éry- sipèle, par Baillou contre les engorgements mésentériques, elles sont tout à fait inusitées. Dans les campagnes, la décoction aqueuse est quelquefois employée contre la gale. Les fruits sont éméto-cathartiques. Hoffmann et Simon Pauli les regardent avec raison comme dangereux. La résine était employée comme aromatique et balsamique; l'écorce comme purgative. DU XIX° SIÈCLE. 231 LILAS Syringa vulgaris L. Lilac vulgare Tourn. ( Oléinées -Syringées.) Le Lilas commun ou Lilac est un arbrisseau dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, se divise en rameaux opposés, terminés par deux bourgeons géminés, et portant des feuilles opposées, pétiolées, cordi- formes, aiguës, entières, glabres, d'un beau vert sur leurs deux faces. Les fleurs, violettes ou pourpre violacé, quelquefois blanches, sont groupées en thyrses terminaux. Elles présentent un calice court, tubuleux, un peu globuleux, persistant, à quatre dents ; une corolle en coupe ou en entonnoir, à tube grêle, cylindrique, trois à quatre fois plus long que le calice, un peu renflé vers la gorge, à limbe divisé en quatre lobes un peu concaves, étalés; deux étamines in- cluses, presque sessiles, insérées vers la partie supérieure du tube de la corolle; un ovaire simple, libre, globuleux, à deux loges biovu- lées, surmonté d'un style court, inclus, terminé par un stigmate allongé et profondément bifide. Le fruit est une capsule ovoïde, coriace, un peu comprimée, pointue au sommet, s'ouvrant en deux valves carénées qui entrainent chacune la moitié de la cloi- son adhérente au milieu de leur face interne; l’intérieur est divisé en deux loges qui renferment chacune deux graines planes, étroite- ment ailées. Le Lilas de Perse (S. Persica L.) se distingue du précédent par sa taille plus petite; ses feuilles lancéolées aiguës, entières ou irrégulièrement pennatifides; ses fleurs plus grèles, d’un pourpre clair. Nous citerons encore le Lilas Josika (S. Josikæa Jacq.) Hagrrat. — La véritable patrie du lilas commun n'est pas bien connue ; on croit cependant que cet arbrisseau est originaire de l'Orient. Le lilas Josika vient de la Hongrie. Toutes ces espèces sont fréquemment cullivées dans les jardins d'agrément. ParTies usiTéEs. — Les feuilles, l'écorce, les fleurs, les fruits et les semences. Récorre. — Les feuilles doivent être récoltées avant la floraison ; l'écorce au printemps ou à l'automne; les fruits à leur maturité, mais avant la déhiscence des capsules ; les fleurs au moment de 2384 FLORE MÉDICALE leur épanouissement, car leur odeur, très-fugace, se dissipe après leur éclosion. Cowrosrrion cimique. — Toutes les parties du lilas sont d’une amertume très-prononcée. MM. Pétroz et Robinet, qui ont analysé les fruits, y ont trouvé une matière résineuse, une substance sucrée, une autre amère, une matière qui précipite les sels de fer en gris, une espèce de gomme se rapprochant de la bassorine, de l'acide malique, du malate acide de chaux, du nitrate de potasse, et d’au- tres sels; plus, une matière incristallisable, que l’on trouve surtout dans l'écorce, les bourgeons et les feuilles, qui a été nommée syrin- gine. Ce sont des aiguilles radiées, solubles dans dix parties d’eau, et dans l'alcool, insolubles dans l'éther. Leur saveur est amère, dou- ceâtre, nauséabonde et astringente. Elles sont solubles dans l'acide sulfurique concentré avec une coloration jaune verdâtre, qui vire au vert violacé. La dissolution, étendue d’eau, présente une couleur améthyste. Les fleurs du lilas, très-odorantes, sont employées en parfu- merie, où on extrait l’arome par les huiles fixes très-fines par un procédé analogue à celui que l’on emploie pour la tubéreuse et le jasmin, et qui porte le nom d'enfleurage. Un chimiste alle- mand, nommé Weismann, a cependant oblenu, par distillation, de cinq cents grammes de fleurs de lilas, quatre grammes d'une huile essentielle d’une odeur très-suave, analogue à celle du bois de Rhodes. Usages. — Les feuilles de lilas sont très-amères; les cantharides les mangent avec avidité. C'est, en effet, sur ces arbres qu'on les trouve le plus souvent. Le bois est dur, d'un grain fin, susceptible de prendre un beau poli, et pourrait servir pour faire des ouvrages de tour. A défaut de jasmin, les Turcs emploient les jeunes pousses du lilas pour faire des tuyaux de pipe. Sans un travail que M. le professeur Cruveilhier, alors médecin à Limoges, publia en 1822, sur l'emploi de l'extrait des fruits de lilas contre les fièvres intermittentes , le lilas n'aurait peut-être jamais été employé en médecine. On l’a considéré comme un tonique amer propre à combattre les affections asthéniques; mais, malgré l'éloge qu’en fit en 1853 M. le docteur Clément de Vallenoy (Cher), le lilas est aujourd'hui tout à fait abandonné, depuis surtout que la société de médecine de Bordeaux a déclaré que ses propriétés DU XIX° SIÈCLE. 239 fébrifuges étaient nulles. En Russie, on prépare par macération des fleurs, pratiquée au soleil, une Ale de lilas, qui est très- vantée contre le rhwmalisme articulaire. LIN Linum usitatissimum 1. (Linées.) Le lin commun ou usuel est une plante annuelle, à racine grêle, simple ou un peu fibreuse. La tige, haute de 0,35 à 0",65, cylin- drique, effilée, grêle, glabre, dressée, simple à la base, un peu rameuse au sommet, porte des feuilles alternes, sessiles, lancéolées, étroites, aiguës, entières, d'un vert glauque, glabres, marquées en dessous de trois nervures longitudinales parallèles. Les fleurs, bleu clair ou violacé, assez grandes, sont groupées, sur des pédoncules filiformes, en corymbe terminal. Elles présentent un calice presque campanulé, à cinq sépales ovales, lancéolés, aigus, mucronés, verts au milieu, scarieux et blanchâtres sur les bords, persistants; une corolle à cinq pétales longs, obovales, arrondis, obtus ou un peu crénelés au sommet, atténués en onglet à la base, très-caducs; dix étamines alternativement stériles et fertiles, à filets soudés à la base, à anthères cordiformes sagittées; un ovaire globuleux, à dix loges uniovulées, surmonté de cinq styles filiformes, grèles, termi- nés par des stigmates obtus. Le fruit est une capsule globuleuse, pointue, entourée par le calice persistant, et divisée en dix loges, dont chacune renferme une graine ovale, aplatie, brune, lisse et luisanie. Le lin cathartique ou purgatif (L. catharticum L.) est aussi annuel, et se distingue par sa taille de 0,20 au plus; ses feuilles cauli- naires opposées; ses fleurs petites, blanches, à onglet jaunâtre ; ses capsules obluses au sommet, et ses graines un peu concaves d'un côté. Hagrrar. — Ces plantes sont communes en Europe ; on les trouve surtout dans les champs, au bord des chemins, etc. Cuorurs. — Le lin usuel est cultivé en grand, dans plusieurs loca- lités, comme plante textile et oléagineuse. Le lin purgatif n'est cultivé que dans les jardins botaniques. Parties usirées. — Les semences, les fibres des tiges. 240 FLORE MÉDICALE Récozte. — Il existe un grand nombre de variétés de lin; on s'accorde à préférer celle qui vient de Livonie; celle de Riga ne se ramifie pas, produit peu de graines, mais sa tige s'élève très- haut et donne de bonne filasse; celle de Window produit de la filasse plus fine; les variétés d'Italie donnent de très-belles graines, mais peu de filasse; d’ailleurs les graines importées dégénèrent bientôt. On doit choisir les graines pesantes, brillantes, d'un jaune d'or ou brun clair, lisses, luisantes, glissantes dans les mains; elles petillent lorsqu'on les jette au feu; placées sur une éponge mouillée, elles doivent germer dans les vingt-quatre heures. La récolte du lin se fait avant sa parfaite maturité, c’est-à-dire avant la déhiscence des fruits; on l’arrache et on le met en javelles, que l’on appuie les unes contre les autres, les capsules en haut; lorsque les tiges sont sèches, on en fait des bottes de six à huit kilo- grammes, en les attachant avec deux liens placés au-dessus des racines et au-dessous des fruits; on l’entasse alors sous des hangars; les graines sont ensuite détachées en étendant les bottes déliées sur des toiles, et en les battant avec un large instrument de bois à man- che recourbé que l’on nomme barte; les tiges, privées des graines, sont liées en bottes de dix ou douze kilogrammes, et on les soumet au rouissage dans une eau courante ou dans des rouloirs, en se réglant sur les principes indiqués pour le chanvre ; lorsque les fibres se détachent de la tige, on délie les bottes et on étend le lin sur le gazon, où il sèche et blanchit; il faut avoir le soin de le retourner souvent; quand il est sec, on le teille au moyen d'un instrument nommé espadon ; puis on le peigne et on le brosse. La graine de lin, avant d'être livrée au commerce, est vannée et séchée. Composition CHiMiQuE. — La graine de lin contient du mucus végétal, de l’extractif mêlé de quelques sels, du sucre, de l’amidon, de la cire, de la résine molle, de matière colorante jaune, de la gomme, de l’albumine végétale, de l'huile grasse, des sels. Vau- quelin avait analysé le mucilage du lin; il a été examiné plus récem- ment par M. Meyer et par M. Meuret. La portion que l'on peut extraire par l’eau froide est composée d’arabine, avec un peu d'al- bumine et des sels; le résidu laissé par l’eau froide, repris par l'eau bouillante, il reste une matière insoluble qui se gonfle dans l’eau DU XIX° SIÈCLE. 241 sans s'y dissoudre; tout le mucilage se trouve dans l’épisperme, d'un peu de résine et d’une huile soluble dans l'alcool. L'huile existe dans l’'amande; sa proportion varie de 30 à 40 pour 100; on l'extrait par torréfaction et expression à chaud ; celle qui est destinée aux usages de la médecine doit être obtenue par expression à froid. Usaces. — La farine de graine de lin est un des émollients le plus souvent et le plus utilement employés; tout le monde connaît les usages si fréquents des cataplasmes que l'on applique quand il s'agit de calmer la douleur et d’apaiser les inflammations. La dé- coction des graines vantée par Sydenham, Gesner, Dehaen, van Swienten, etc., est employée en lotions, fomentations, injec- tions,ete., et même en tisane comme adoucissant. L'huile de lin est émolliente et laxative; on l'emploie à l'intérieur et à l'extérieur ; on l’a administrée contre les hémorrhoïdes, le carreau, les asca- rides vermiculaires, dans les phlegmasies diverses, et plus particu- lièrement dans celles des organes respiratoires. Baglivi la vantait contre les pleurésies; aujourd’hui elle est peu employée. Pour l’usage extérieur, l'huile de lin a été conseillée contre les maladies de la peau; battue avec de l’eau de chaux, elle forme une sorte de liniment oléo-calcaire qui est très-efficace pour les brûlures, mais en général on préfère pour cet usage l'huile d'olives. La filasse et l'étoupe ont été quelquefois usitées pour les panse- ments, surtout en médecine vétérinaire ; la charpie, qui n’est que du vieux linge effilé, rend de grands services à la chirurgie. Dans certains pays, on fait manger aux animaux à l’engrais des tourteaux de lin ; leur chair devient alors d’une odeur et d’une saveur des plus désagréables, qui doit les faire rejeter de l'alimentation publique. Jean Bauhin, qui vivait de 1541 à 1613, rapporte qu'à une époque de disette, les habitants de Middelbourg, dans l'ile de Walcheren (Hollande), furent obligés de se nourrir de pain fabriqué avec la farine de lin; il en résulta chez les consommateurs des tumé- factions des différentes parties du corps, et plus spécialement des hypocondres et de la face. L'huile de lin est siccative; on l’emploie en peinture; on la rend plus siccative en la faisant bouillir avec de l'oignon et un peu de litharge; elle sert à préparer l'encre typographique; elle entre dans la composilion de certains vernis gras ; on l'utilise pour huiler les machines; en l’épaississant avec de la litharge, on en fabriquait au- Flore, T. II. 16 242 FLORE MÉDICALE trefois des bougies uréthrales, des sondes, des pessaires et divers instruments de chirurgie, pour lesquels on préfère aujourd'hui le caoutchouc. LINAIRE Linaria vulgaris Mœnch. Antirrhinum linaria L. (Personées - Antirrhinées.) La Linaire commune, appelée aussi quelquefois Lin sauvage, est une plante vivace, à rhizome ligneux, fibreux, blanchâtre, rampant, obli- que. Les tiges, hautes de 0",25 à 0,50, cylindriques, lisses, glabres, vert pâle, simples ou à peine rameuses, dressées, portent des feuilles allernes, très-rapprochées, sessiles, lancéolées ou linéaires, entières, glabres, un peu glauques, à nervure moyenne seule très-distincte, dressées contre la tige. Les fleurs, jaunes, sont groupées en grappes terminales compactes. Elles présentent un calice à cinq divisions lan- céolées aiguës: une corolle irrégulière, personée, grande, jaune pâle, tachée de jaune safrané, prolongée à la base en un éperon très-long, droit, renflé à sa naissance et pointu à l'extrémité; quatre étamines didynames, incluses, à filets blancs et à anthères jaunes; un ovaire à deux loges multiovulées, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate obtus. Le fruit est une capsule arrondie-oblongue, à deux loges renfermant de nombreuses graines ailées, noires, lisses et presque planes. La linaire auriculée ou velvote (L. elatine Desf., Antèrrhinum ela- tine L.) est une plante annuelle, à tiges de même longueur que dans l'espèce précédente, mais couchées-diffuses, velues, ainsi que les feuilles, qui sont ovales-hastées ou auriculées; les fleurs, jaune pâle, tachées de bleu violacé à l’intérieur, sont solitaires à l’aisselle des feuilles et ont l'éperon un peu arqué; le pédoncule est très-long et glabre. Les graines sont ovoides et tuberculeuses. Hagrrar. — Ces deux plantes sont communes en Europe; elles croissent dans les champs en friche, les lieux sablonneux, au bord des chemins. On ne les cultive que dans les jardins botaniques. Parries usirées. — Les feuilles et les fleurs. Récore. — La linaire n’est employée que sèche; on peut la récolter pendant toute la saison, c’est-à-dire de mai à septembre; on la fait sécher au grenier ou au séchoir. ComPosiTionN CHIMIQUE. — L'analyse de la linaire n’a pas été faite; DU XIX° SIÈCLE 243 elle possède une odeur vireuse faible, et une saveur amère et nau- séabonde ; elle n'a pas de suc blane, ce qui la distingue de l'Ewphor- bia Cyparissias L., à laquelle elle ressemble. Usages. —— Autrefois très-vantée comme diurélique, les anciens auteurs ont désigné la linaire sous le nom d’Urinalis ; elle était aussi regardée comme purgative. Simon Pauli et Horst, ete., l’ont vantée en fomentations contre les tumeurs hémorroïdales; les habitants des campagnes l’emploient quelquefois à cet usage; les médecins ne la prescrivent presque jamais. Les fleurs employées seules en infusion ou associées à celles du bouillon blanc ont été conseillées dans les maladies de la peau, et Jérôme Wolfius, principal du collége d’Augsbourg, en préparait, au xvi° siècle, un onguent qui à été très-célèbre contre les mêmes ma- ladies. En Suède, on suspend la linaire dans les chambres pour tuer les mouches; bouillie dans du lait, on s’en sert dans ce pays contre les hémorroïdes. Le secret de l’onguent de Jérôme Wolfius fut acheté par le landgrave Guillaume de Hesse, protecteur des arts et dessciences, qui pensait s’en êlre bien trouvé, moyennant une rente annuelle via- gère d’un bœuf gras. En faisant connaître sa formule, Wolfius, qui était un linguiste distingué et qui avait traduit du grec en latin Iso- crate et Démosthène, afin qu'on ne confondit pas la linaire avec l'ésule, à laquelle elleressemble avant la floraison, composa ce vers : Esula lactescit, sine lacte linaria crescit, auquel un plaisant ajouta le suivant : Esula nil nobis, sed dat linaria taurum. Aujourd’hui la linaire est tout à fait inusitée, La velvote on linaire auriculée passe pour être purgative. LINNÉE Linnæa borealis L. (Caprifoliacées- Lonicérées. ) La Linnée boréale est une petite plante vivace, à racines fibreuses. Les tiges, longues de 4 à 2 mètres, sous-frutescentes, grêles, ram- pantes, pubescentes, rameuses, portent des feuilles opposées, arron- 244 FLORE MÉDICALE dies, crénelées, persistantes. Les fleurs, blanches en dehors, veinées de rouge en dedans, un peu velues, penchées, accompagnées cha- cune de deux bractées subulées et opposées, sont situées à l'extrémité de pédoncules droits, nus, solitaires, terminaux, bifurqués et biflores. Elles présentent un calicule à quatre folioles hispides, glutineuses, alternativement pointues, très-petiles, ovales, grandes, conni- ventes; un calice à tube ovoïde, à limbe divisé en cinq lanières lan- céolées, subulées, caduques; une corolle campanulée, turbinée, à limbe partagé en cinq divisions obtuses, presque égales ; quatre éta- mines didynames, incluses, à filets subulés, à anthères comprimées et vacillantes ; un ovaire infère, arrondi, à trois loges, dont deux ren- ferment plusieurs ovules stériles, la troisième un seul ovule fertile ; l'ovaire est surmonté d'un style simple, grêle, incliné, à peine sail- laut, terminé par un stigmate globuleux, couvert de petits poils roi- des. Le fruit est une petite baie sèche, ovoïde, à trois loges, renfer- mant une graine arrondie, brune, et entourée par le calice pefsistant HagiraT. — La linnée croît dans les régions septentrionales et sur les montagnes élevées des régions moyennes de l'Europe; elle se trouve aussi en Sibérie et aux États-Unis; elle habite en général les forêts et préfère les localités ombragées, point trop humides. Cucrure. — Cette plante demande une exposition ombragée et la terre de bruyère un peu tourbeuse et fraiche. Elle se multiplie aisé ment par la division de ses tiges rampantes et traçantes, qui forment des marcottes naturelles. On emploie rarement le semis. Parties usiTÉEs. — Toute la plante. Récozre. — Le genre Linnæa a été dédié par Grovonius à l'illustre auteur du système végétal. La Zinnæa Borealis croit dans les forêts ombragées du Nord. On la trouve sur les hautes montagnes, telles que les Alpes, les Cévennes et les Vosges. Elle est commune en Suède et Norwége et en Laponie, ete. On l’emploie sèche. On la récolte lors- qu’elle est en fleurs. Comwrosirion cHimiQue. — L'usage que l'on a fait de cette plante, en guise de thé, peut faire supposer qu’elle possède des propriétés sli- mulantes et aromatiques. Usaces.— Elle est inusitée en général aujourd’hui hors du royaume de Suède, où on la donne en infusions; on en fait des fomentations ou on l’applique en cataplasmes contre lesrhumatismes, la goutte, la sciatique, etc. . DU XIX° SIÈCLE. 245 LIQUIDAMBAR Lijuidambar styraciflua et imberbe L. (Balsamifluées. ) Le Liquidambar styracifère ou à feuilles d'érable (L. styraciflua L.), appelé aussi Copalme d'Amérique, est un arbre dont la tige, haute de 12 à 15 mètres, se divise en rameaux nombreux, qui forment une cime pyramidale, et portent des feuilles alternes, longuement pétio- lées, palmées, à cinq ou sept lobes aigus et dentés, visqueuses, à ner- vures velues en dessous. Les fleurs sont verdâtres, unisexuées et groupées en chatons globuleux, entourés de quatre bractées ; les mâles ont des étamines nombreuses, insérées sur un réceptacle commun entouré de quelques écailles ; les femelles ont un ovaire libre, à deux loges multiovulées, surmonté de deux longs styles filiformes. Le fruit est une sorte de cône renfermant de petites capsules à deux loges polyspermes. Le liquidambar imberbe ou du Levant (L. #mberbe Ait., L. Orien- tale Mill.) est un arbre ayant le port du précédent, mais à rameaux plus nombreux et formant une pyramide plus serrée. Les feuilles sont divisées en cinq lobes plus profonds, et ont les nervures glabres. Enfin, le fruit est plus petit. Hasrrar. — Le liquidambar styracifère habite le Mexique et les États-Unis. IL croît naturellement dans les terrains bas, argileux et humides. La seconde espèce, comme son nom l'indique, se trouve en Orient. Currure. — Ces deux arbres demandent une exposition chaude, abritée et ombragée, un terrain léger et frais ou humide. On les multiplie de graines, semées, au printemps, en pots ou en pleine terre, ainsi que de rejetons ou de marcottes par incision, faites, en automne, en terre de bruyère maintenue fraiche. Parties usirées. — Les sucs résineux ou baumes qu’il produit. Récoure. — Dans la Floride et le Mexique, où croit le liquidam-— bar, on en obtient deux produits : l’un est liquide, huileux, trans- parent; l’autre est mou, blanc et opaque, comme la poix de Bour- gogne. Le liquidambar liquide où huile de liquidambar est obtenu par des incisions faites à l'arbre ; le suc résineux qui en découle est reçu dans 2416 FLORE MÉDICALE des vases, et soustrait au contact de l'air. Au bout de quelque temps, on décante la partie liquide, qui est une huile épaisse, jaune ambré, d'une odeur agréable. Sa saveur est âcre, chaude et aromatique. II rougit fortement le tournesol, ce qu'il doit aux acides benzoïque et cinnamique qu'il contient. L'alcool bouillant ne le dissout pas en entier; il subsiste un résidu blanc peu considérable, et le liquide filtré se trouble par le refroidissement. Le lquidambar mou ou blanc provient soit du dépôt formé par le précédent, soit du baume qui s’est épaissi sur l'arbre au contact de l'air. M. Guibourt pense que les deux baumes fondus ensemble et passés, produiraient le liquidambar mou tel qu’on le trouve dans le commerce. Alors il a l’aspect d’une térébenthine épaisse; il est gris ardoisé, opaque. Son odeur est moins forte que celle du précédent ; sa saveur est douce, aromatique, mais un peu âcre. Exposé à l'air, il s'épais- sit, perd son odeur, devient transparent el laisse s’effleurir à sa sur- face des cristaux d'acide benzoïque ; il ressemble alors un peu au baume de tolu, mais il s’en distingue par sa plus grande amertume. Le styrax à été distingué du s/yrax où storax calamite par les Arabes. Quoique Geoffroy (Étienne-Francçois) dise (Tractatus de mu- teria medica sive de medicamentorum simplicium lustoria) qu'il était inconnu des Grecs, il est probable pourtant que c'est le styrax liquide qu'ils nommaient, suivant Dioscoride (lib. E, cap. 62) Sfactè (Ezarr», c'est-à-dire qui distille, qui découle). On a pensé que c'était du storax calamite mêlé à du vin, de l'huile, des térébenthines. On a dit aussi qu'il ne différait du storax que parce qu'il était produit par la décoc- tion de l'écorce et des jeunes rameaux, etc. On croit plus généralement que le storax liquide tire son origine de l'Arabie et de l'Étliopie. D'après Petiver, l'arbre qui le produit, nommé Æosa mallos, paraît être le liguidambar orientale des bota- nisles, qui diffère peu du L. styraciflua, lequel donne, en Amérique, le baume liquidambar. Suivant le même auteur, le styrax liquide serait obtenu par ébullition de l'écorce concassée dans de l'eau de mer. On le purifie par une seconde fusion dans la même eau, et par filtration. Dans le commerce, il est souvent mélangé à d'autres substances, et falsifié. Le styrax du commerce est gris brunâtre, opaque. Son odeur est très- forte, sa saveur est aromatique et pas trop àcre. Exposé à l'air, il s’épais- sit et se recouvre quelquefois de cristaux d'acide cinnamique. L'alcool DU XIX° SIÈCLE. 247 froid le dissout parfaitement, mais il est soluble dans l'alcool bouil- lant, sauf les impuretés. Par le refroidissement, la liqueur se trouble. Aux îles de la Sonde, le L. altingia forme un arbre gigantesque, qui produit un suc balsamique, semblable aux précédents, qui ne vient pas jusqu'à nous. Une chose assez singulière, c'est que l'arbre porte, dans son pays d'origine, le nom de 7ossa mala, qui se rap- proche de celui de Zosa mallos, que l'on donne au L. orteniale, dans la mer Rouge. Comrosirion cummique. — Les liquidambars et le styrax liquide se rapprochent par leur composition et par leurs propriétés. M. E. Si- mon, qui a analysé le liquidambar, y a trouvé une huile volatile, de la résine, de la styracine, et de l'acide cinnamique. La résine se com- pose de deux substances, l’une dure, l'autre molle. Celle-ci se rap- proche de la cénnaméine de M. Frémy, et, au contact de l'air, elle se transforme en acide cinnamique. La styracine a été découverte par M. Bonastre et étudiée par M. Simon. Elle cristallise en belles aiguilles allongées blanches, fon- dant à 50°, insolubles dans l’eau, solubles dans l'alcool bouillant, et un peu dans le même liquide froid ; avec l'acide azotique elle donne de l'acide cyanhydrique et de l'essence d'amandes amères. Les alca- lis caustiques la changent en s{yrone cristallisable, en acide cinna- mique et en huile pesante (s/yracone Simon), qui bout à 220° et pos- sède une odeur agréable de rose, d'amande et de cannelle. La styracine peut être représentée par C?*H'"0*. Usages. — Les deux liquidambars sont employés en parfumerie ; le styrax liquide entre dans la composition des pilules, du sirop et de l’onguent de ce nom. Pour les usages de la médecine ou de la pharmacie, le styrax, qui est souvent impur, est purifié par simple fusion ou par l'alcool. Lhéritier croit, et on s'accorde généralement à penser avec lui que le styrax agit, comme le copahu, dans le traitement de la blen- norrhée, de la gonorrhée et de la leucorrhée; mais c’est surtout comme détersif des plaies qu'on l'emploie. En médecine humaine et vétérinaire, c'est l'onguent dont on se sert alors. Le sirop de styrax est employé, comme cordial et stomachique, dans les catarrhes de vessie et d’autres maladies des voies urinaires. 218 FLORE MÉDICALE LIS Lilium candidum L. (Liliacées - Tulipacées.) Le Lis blanc est une plante vivace, bulbeuse, à tige très-courle ou plateau, émettant en dessous des racines grêles, fibreuses, fascicu- lées, blanchâtres, et portant en dessus un bulbe ou oignon arrondi, formé d'écailles charnues, épaisses, lancéolées, blanches, imbriquées. Du centre de ces écailles naît une hampe (vulgairement tige), haute de 0%,60 à 1 mètre, cylindrique, glabre, simple, dressée, vert bru- nâtre, portant, dans toute sa longueur, des feuilles alternes, sessiles, lancéolées, aiguës, glabres, lisses, ondulées, d'un vert clair. Les fleurs, très-srandes, blanches, très-odorantes, longuement pédoncu- lées, sont disposées en grappe terminale. Elles présentent un périan- the à six divisions libres, marquées d’un sillon glanduleux médian, longitudinal, alternant sur deux rangs, les trois intérieures plus larges ; six étamines à filets longs, grèles, blancs, dressés, à anthères très-longues, jaune doré, oscillantes; un ovaire simple, à trois angles arrondis, à trois loges multiovulées, surmonté d’un style simple que termine un stigmate trilobé, verdàätre, glanduleux. Le fruit est une capsule allongée, à trois angles arrondis, à trois loges contenant chacune un grand nombre de graines plates, disposées sur deux rangs. Hamirar. — Le lis est originaire de l'Orient’; il est cullivé aujour- d'hui dans tous les jardins de l'Europe. Currure. — Cette belle plante n’est pas cultivée spécialement pour l’usage médical. Elle croit dans presque tous les sols assez profonds, exceplé dans ceux qui sont trop secs ou trop compactes, et de pré- férence à l’exposition du midi. On la propage de graines, et plus souvent de bulbilles qui croissent en abondance autour du bulbe principal, et qu'on sépare quand les feuilles de la plante sont des- séchées. Parties usitéEs. — Les bulbes, les fleurs. Récocre. — Les bulbes, qui ne sont employés que frais, peuvent êlre récoltés à toutes les époques de l'année; mais ils sont plus âcres et plus actifs en hiver et au printemps, avant le développement de la bampe. Les fleurs sont récoltées fraiches pour les usages de la parfu- DU XIX° SIÈCLE. 249 merie. En phermacie, elles sont peu employées; cependant, l'huile de lis, autrefois usitée, était préparée souvent avec des fleurs fraiches, mais quelquefois aussi avec des sèches. Elles perdent, d'ailleurs, tout leur arome par la dessiccation. Comwposrrion cHimique. — Les fleurs de lis, formées par des sépales blancs, sont extrèmement odorantes. Leur odeur, suave, flagrante, se rapproche de celle de la jacinthe et de la tubéreuse. Elle est très-re- cherchée par les parfumeurs, mais elle se dissipe et se détruit par la distillation, de sorte que, pour isoler cet arome, on est obligé, comme pour le jasmin, d'employer des moyens détournés, c'est- à-dire l'expression des fleurs au contact de flanelles imprégnées d'huile d'olives ou de ben, ou le procédé de dissolution par le sul- fure de carbone indiqué par M. E. Millon, de la pharmacie centrale d'Alger. Ce procédé consiste à faire macérer les fleurs fraiches dans du sulfure de carbone, et à laisser évaporer spontanément celui-ci. Le parfum du lis reste pour résidu. Les étamines du lis portent un pollen abondant, riche en matière colorante jaune, employée dans les campagnes pour colorer le beurre, ainsi que pour donner au lait la teinte jaunâtre qui lui est naturelle, et effacer ainsi la couleur bleuâtre qu'il acquiert quand on l’a mélangé d’eau, abus si commun. Les bulbes imbriqués du lis renferment deux principes essen- tiels : l’un est une essence àcre, irritante, un peu caustique, qui est quelquefois utilisée comme rubéfiant, et alors on applique la pulpe du bulbe cru; l’autre estune matière mucilagineuse abondante, usitée comme calmante et dépurative, et dans ce cas on prépare la pulpe cuite par ébullition des bulbes dans l’eau, ou par la coction sous la cendre; par la chaleur, le principe àcre et irritant est volatilisé ou détruit. Usaces. — L'eau distillée de fleurs de lis, autrefois employée dans les maladies des yeux, et l'huile de lis, dont on frictionnait les mem- bres endoloris, ne sont plus employées aujourd’hui. La pulpe du bulbe cuit dans de l'eau ou dans du lait est quelquefois appliquée dans les campagnes sur les tumeurs, les phelgmons, les furoncles, les an- thrax, et surtout les panaris, comme résolutive et maturative. Nous ne pensons pas qu’elle agisse mieux que ne le ferait un cata- plasme de farine de lin. Aussi cette pulpe est-elle peu employée dans la médecine rationnelle. L'huile servait aussi au pansement 250 FLORE MÉDICALE des plaies et des brülures, et l’eau distillée était vantée contre la toux ; les anthères étaient regardées comme anodines et anti-spas- modiques. LISERON Convolvulus sepium L. Calystegia sepium R. Br. (Convolvulacées - Convolvulées.)} Le Liseron des haies ou Liset est une plante vivace, à rhizome long, mince, blanchâtre, traçant, émettant un grand nombre de ra- cines fibreuses. La tige, qui atteint souvent plusieurs mètres de lon- gueur, est grêle, anguleuse, plus ou moins torse, striée, glabre, lisse, souvent rougeâtre, et s'enroule autour des corps voisins. Elle porte des feuilles alternes, pétiolées, grandes, ovales aiguës, cordées à la base, presque sagittées, à lobes obliquement tronqués, sinués ou lâchement dentés. Les fleurs, très-grandes, blanches, terminent des pédoncules solitaires à l’aisselle des feuilles, très-longs, anguleux, munis, immédiatement au-dessous du calice, de deux ou quatre bractées foliacées, ovales, cordées, allongées. Elles présentent un calice à cinq divisions ovales lancéolées ; une corolle campanulée ou en entonnoir, très-évasée, marquée de cinq plis longitudinaux; cinq étamines incluses ; un ovaire globuleux, à deux loges biovulées, en- touré à sa base d'un disque annulaire charnu, et surmonté d’un style simple, filiforme, terminé par deux stigmates. Le fruit est une cap- sule arrondie, à deux loges incomplètes, renfermant chacune deux graines {rigones, assez grosses. On remarque aussi dans ce genre le Liseron des champs (C. ar- vensis L.), la soldanelle (C. so/danella L., Calystegia R. Br.), et surtout plusieurs espèces exotiques, Jalap, Méchoacan, Scammo- née, Turbith, etc., pour lesquelles nous renvoyons aux articles. spéciaux. HagiratT. — Le liseron des haies est commun en Europe; il croît surtout dans les endroits humides et ombragés, au bord des eaux, etc. On ne le cultive que dans les jardins botaniques, et quelquefois dans les parcs d'agrément, où il suffit de replanter ses rhizomes. Parties usirées. — Les racines, les feuilles. RécozTe. — Les feuilles sont récoltées au mois de juillet, soit qu'on les fasse sécher, soit qu’on veuille en extraire le suc. Les racines sont DU XIX° SIÈCLE. 251 plus actives à la fin de l'automne, ou au commencement de l'hiver. C’est donc à celte époque qu'il faut les arracher. Composirion cimique. — Les fleurs et les feuilles du liseron des haies sont inodores et amères. La racine peut fournir, par l'alcool, une résine àcre et purgative, analogue à celles du jalap et de la scam- monée. Elle contient, en outre, des matières grasses, de l'albumine, du sucre, des sels, du soufre, de la silice et du fer. Cette analyse a- été faite par M. le professeur Chevallier (Journ. de pharm., 1. X, p. 230). Usages. — Déjà employé au temps de Dioscoride, et presque ou- blié de nos jours, le liseron est cependant une plante active que Mérat et Delens regardent avec juste raison comme un de nos meil- leurs purgatifs indigènes. Ce fut Haller (Mar. méd., t. Y, p. 225) qui proposa de substituer cette racine à la scammonée d'Orient. Coste et Wilmet, d’après ce que l’on voit dans leur- Matière médicale, em- ployaient Je suc laiteux comme purgatif à la dose de un à deux grammes. M. Chevallier a constaté que la résine extraite de la racine élait aussi purgative que celle du jalap et de la scammonée. M. Cazin dit même qu’elle agit aussi bien que la scammonée, tout en étant moins irritante. Il pense que le suc épaissi du liseron est fébrifuge. Les feuilles contusées du grand liseron ont été employées en infu- sion, dans de l’eau, comme purgatives. Les enfants prennent cette infusion sans répugnance, lorsqu'elle est sucrée avec du miel; on peut remplacer les feuilles fraiches par celles qui ont été desséchées. Les feuilles, broyées entre les doigts et appliquées sur les furoncles, jouissent d’une grande réputation dans les campagnes comme ma- turalives. Le Petit Liseron, ou Liseron des Champs, Petit Liset, Campanette, jouit des mêmes propriétés. Le Liseron à feuilles de guimauve (C. athæoïdes L.), si abondant dans les contrées méridionales de l'Eu- rope, et qui est commun en Languedoc et en Provence, a été expé- rimenté par Loiseleur-Deslongchamps (Dre. des scienc. méd., &. XNUW, p. 329). Ce savant a constaté que la teinture alcoolique purgeait très- bien les enfants, et sans coliques. 252 ELORE MÉDICALE LIVÈCHE Levisticum officinale Koch. Ligusticum Levisticum L. Angelica Levisticum Al. (Ombellifères - Angélicées. ) La Livêche ou Lévèche, appelée aussi Ache de montagne, Angé- lique à feuilles d’ache, Sermontaine, Séséli de montagne, etc., est une plante vivace, à racine assez grosse, charnue, rameuse, fibreuse, brunâtre. La tige, haute de 1 à 2 mètres, arrondie, fistuleuse, noueuse, un peu striée, glabre, simple, dressée, porte des feuilles alternes, très-grandes, pétiolées, deux fois ailées, composées de folioles gran- des, rhomboïdales, irrégulières, pointues, dentées dans leur partie supérieure, planes, luisantes, d’un vert foncé en dessus, plus pâles en dessous. Les fleurs, jaunes, sont groupées en ombelles terminales, en- tourées d’un involucre à folioles lancéolées, bordées de blanc, réflé- chies et munies d’involucelles semblables. Elles présentent un calice à bord oblitéré, à cinq dents peu marquées; une corolle à cinq pétales presque égaux, arrondis, entiers, recourbés en dedans, avec une la- nière courte, infléchie; cinq élamines un peu saillantes; un ovaire infère, adhérent, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles simples, divergents, terminés chacun par un petit stigmate. Le fruit est un diakène oblong, comprimé, à dix côtes longitudinales ailées, formé de deux carpelles dont chacun renferme une graine aplatie d'un côté. HagiraT. — La livèche croit dans les régions montagneuses des contrées méridionales; on la trouve surtout dans les prés couverts. Cuzrure. — Cette plante, élant assez abondante à l'état sauvage pour suffire aux besoins de la médecine, n’est cultivée que dans les jardins botaniques. Une terre fraiche et profonde est celle qui lui convient le mieux. On la propage de graines, semées aussitôt après la maturité, et d’éclats de pieds, faits au printemps ou à l'automne. Elle ne demande ensuite que les soins ordinaires. ParTies usiTÉEs. — Les racines, rarement les fruits improprement appelés semences. Récoure. — Nous avons dejà dit en parlant de l’ache, que les fruits et les racines de la livêche étaient les seuls que l’on trouvait dans le commerce en France, sous les noms de /rwits et de racine d'ache. La racine de livêche est épaisse, noirätre en dehors, blanc jaunâtre en DU XIX® SIÈCLE. 253 dedans; son odeur est fort analogue à celle du céleri; sa saveur est âcre et aromatique; sèche, cette racine est de la grosseur du pouce, grise à l'extérieur, ridée dans tous les sens, et présentant souvent des renfle- ments dus à de nouveaux collets; l'intérieur est jaunâtre, spongieux, parfumé, un peu sucré et âcre; l'odeur est celle de toute la plante; elle rappelle celle des ombellifères en général et en particulier celle de l’angélique. Les fruits d'ache peu odorants en masse, acquièrent une odeur térébenthinée lorsqu'on les froisse ; leur saveur amère rappelle un peu celle de la térébenthine. Ils sont peu usités. Composirion emmique. — L'ache fraiche laisse écouler souvent par sa racine un suc gommo-résineux ; les fruits renferment une huile essentielle très-odorante, et il est probable que la racine en contient également, ainsi que les autres parties de la plante. UsaGes. — Par ses propriétés, la livêche se rapproche de l’angé- lique et de l’impératoire; sa racine et ses fruits excitent les voies digestives. On leur a attribué la propriété de stimuler l'utérus; aussi Gilibert les employait-il contre l’hystérie avec asthénie, l’aménor- rhée, la chlorose; et Pierre Forest, dit Forestus, savant médecin du seizième siècle, regardait la racine comme emmenagogue et l’administrait en poudre ou en macération dans du vin; mais quoi- que excitante, la livêche est loin d’avoir une action spéciale sur l'uterus et de ranimer les règles comme le prétend Roques. Loi- seleur-Deslonchamps à reconnu aux fruits des propriétés carmi- natives, qu’ils partagent d’ailleurs avec tous les fruits non vénéneux de la même famille. Aujourd’hui on n’en fait plus usage, et contrai- rement à l'opinion de Mérat et Delens, nous pensons que la livêche, quoique très-aromatique, peut être remplacée avec avantage par l’angélique et d'autres ombellifères très-communes. ; D'après Jacques Horstius, qui florissait au seizième siècle, les lotions faites avec la décoction de livèche et de raves guérissent des engelures. La plante fraiche pilée avec du sel de cuisine et du vinaigre, forme une espèce de pulpe que les paysans emploient contre la gale. Enfin on a prétendu que la livèche mêlée aux four- rages guérissait la toux des bestiaux (Dict. des sc. méd., t. XVI, p. #89). 254 FLORE MÉDICALE LOBÉLIE Lobelia syphilitica L. (Lobéliacées.) La lobélie syphilitique, appelée aussi Cardinale bleue, est une plante vivace, à racine fibreuse, charnue, blanchâtre. La tige, haute de 0,35 à 0,65, droite, ferme, anguleuse, velue, simple ou à peine rameuse, porte des feuilles alternes, sessiles, rapprochées, ovales- lancéolées, aiguës, dentées, velues, d’un vert foncé, étalées. Les fleurs, d'un beau bleu violacé, sont solitaires à l'extrémité de courts pédoncules axillaires, et forment par leur réunion un long épi feuillé terminal. Elles présentent un calice à cinq divisions profondes, lan- céolées, aiguës, velues, ciliées, à bords repliés en dehors à la base; une corolle monopétale, irrégulière, à tube plus long que le calice, un peu recourbé, à limbe divisé en deux lèvres subdivisées, la su- périeure en deux, l'inférieure en trois lobes; cinq étamines, sou- dées à la fois par les anthères et par les filets, insérées sur le tube du calice ; un ovaire semi-infère, à deux loges multiovulées, surmonté d'un style simple, cylindrique, glabre, dépassant les étamines, re- courbé et un peu renflé dans sa partie supérieure, qui se termine par un stigmate velu et violacé. Le fruit est une capsule angu- leuse, s’ouvrant en deux valves et divisée en deux loges polyspermes (PI. 27). Nous citerons encore les lobélies brûlante (L. wrens L ) et à lon- gues fleurs (L. longiflora L.). L Hagirar. — Les lobélies syphilitique et à grandes fleurs sont ori- ginaires de l'Amérique du Nord. On les cultive en Europe depuis l'an 1665. *La lobélie brüûlanté est commune dans nos contrées; elle croit dans les lieux sablonneux, au bord des chemins, etc. Cucrure. — La lobélie syphilitique est souvent cultivée dans les jardins d'agrément. Elle demande la terre de bruyère et une expo- sition demi-ombragée. On la multiplie par le semis en pépinière ou sur couche, par éclats de pieds ou par boutures de racines. Parnies usirées. — Les racines, les feuilles, les tiges. Pécoure. — Aux États-Unis on emploie surtout en médecine le L. enflata L. Les quakers du Nouveau-Liban (Nezw- Lebanon) récoltent les tiges et les feuilles, les coupent et les compriment sous forme de DU XIX° SIÈCLE. 255 carrés longs du poids de 250 à 500 grammes. La masse est d’un vert jaunâtre, d’une odeur un peu nauséeuse et irritante ; sa saveur est àcre, brûlante, analogue à celle du tabac. En Amérique on emploie aussi la racine de Lobelia syphalitica, qui est cultivée dans nos jardins sous le nom de Curdinale bleue. On ue peut pas assurer que la racine du commerce soit produite par le L. syplulitica; on croit même que celle qui vient des Alpes doit être attribuée au L. laurentiaL. (Laurentia Michelii D. C.). Quoi qu'il en soit, elle est grosse comme le petit doigt, d’un gris cendré, striée, avec la superficie des lignes dirigée dans tous les sens, de sorte que l’épi- derme ressemble un peu à la peau d’un lézard ; sa cassure transpa- rente est jaune, comme feuilletée, avec un grand nombre de cellules rayonnantes; elle est molle et cède sous la moindre pression; ce caractère suffit pour la faire distinguer du genseng qui est dur et résistant et avec lequel on pourrait la confondre. D'ailleurs la lobélie présente une odeur aromatique et une saveur sucrée qui se rap- prochent de celles des aristoloches. COMPOSITION CHIMIQUE. — On a trouvé dans la lobélie un principe que Reinsch a découvert en 1843, et qu'il a nommé Lobéline. Elle fut plus tard préparée et étudiée par MM. Procter et William Bas- tick qui ont constaté qu'elle possédait des propriétés analogues à celles de la lobélie, seulement qu’elle était plus active. La lobélie enflée ou #ndian tabacco des Anglais, contient, d’après M. Procter, un principe odorant volatil, probablement une huile essentielle, un alcaloïide nommé /obéline, un acide déjà isolé par M. Péreira et appelé acide lobélique, de la gomme, de la chloro- phylle, une huile fixe, du ligneux et des sels; les graines sont beau- coup plus riches en lobeline que les feuilles ; elles contiennent en outre 30 p. 100 d'une huile fixe incolore. Par ses propriétés chimiques, la lobeline se rapproche de l'hyos- ciamine, mais elle est incristallisable; c’est une huile visqueuse, aromalique, jaunâtre, alcaline, plus légère que l’eau, d’une odeur aromatique, d'un goût piquant analogue à celui du tabac; elle est volatile, soluble dans l'eau, mais plus dans l'alcool et dans l’éther; les alcalis la décomposent. Elle forme avec les acides sulfurique, azo- tique et chlorhydrique, des sels cristallisables que le tannin précipite. Boissel à analysé la racine de lobélie; il y a trouvé une matière grasse, du sucre, du mucilage, du malale acide de chaux, du malate 256 FLORE MÉDICALE de potasse, une matière amère très-fugace, des sels et du ligneux. Toutes les lobélies, quand on les coupe, laissent écouler un suc blane qui contient du caoutchouc; on peut extraire cette substance du L. caoutchouc Humb., qui croît dans la province de Popayan (Nouvelle-Grenade). UsaGes. — En France, les lobélies sont peu usitées. En Angleterre et en Amérique on en fait un très -fréquent usage. D'après M. Proc- ter, 5 centigrammes de lobéline suffisent pour tuer un chat; à dose un peu élevée elle est vomitive et cathartique; à dose plus faible, elle agit comme diaphorétique et expectorante. Elle est regardée comme précieuse dans l'asthme pour diminuer la force des accès ; on la-recommande contre les calarrhes, le croup, la coqueluche, en général dans les affections du larynx et de la poitrine. Eberle a em- ployé une forte décoction de lobélie contre la hernie étranglée. La teinture a été administrée dans le tétanos. C’est surtout au Canada que la lobélie syphilitique a été employée contre les maladies vénériennes ; d’après Johnson et Kalm peu de médicaments agissent d’une manière aussi prompte et aussi certaine. Malgré cela, et bien qu’en 1780, un médecin de Paris nommé Dupau, ait vanté ses bons effets, des expériences faites à Montpellier ont donné des résultats tellement négatifs qu'on ne l'emploie plus. La lobélie brûlante (L. wrens L.), dont le suc âcre est extrêmement irritant, a été proposée contre les fièvres intermittentes; elle est au- jourd'hui justement oubliée. Les sauvages de l'Amérique septen- trionale emploient la lobélie cardinale comme fébrifuge; aux Antilles, la lobélie à grandes fleurs (L. longiflora L.) est appelée matta cavallo et en Espagne où on la cultive, rabicula cavallos. Les nègres s’en servent comme poison. Selon Jacquin, elle déter- mine des ophihalmies violentes quand on la touche. Au Chili et au Pérou, sous le nom de /upa, on emploie le suc du L. pa L. contre les douleurs de dents. C'est un vomitif puissant et un poison actif. D'après Thunberg, il y a, au cap de Bonne-Espérance, une lobélie que les Hottentots nomment #arup et dont ils mangent la racine ( Voyage, t. IE, p.158), ce qui paraît bien douteux, car toutes les lobélies sont âcres et irrilantes; ce sont des poisons violents dont il faut se méfier. DU XIX‘ SIÈCLE. 207 LUNAIRE Lunaria adorata et inodora Lam. (Crucifères - Alyssinées) La Lunaire vivace ou odorante (L. odorata Lam., L. rediviva L.), appelée aussi Bulbonac ou Satinée, est une plante vivace, dont les tiges, hautes de 0",40 à 0",60, dressées, simples à la base, un peu rameuses au sommet, portent des feuilles allernes, longuement pétiolées, ovales cordiformes, dentées, velues, rugueuses, les supé- rieures plus étroites, ovales acuminées. Les fleurs, petites, d’un bleu gris de lin ou lilacé, très-odorantes, sont groupées en corymbes terminaux et axillaires, dont l’ensemble constitue une panicule ter- minale. Elles présentent un calice à quatre sépales disposés sur deux rangs, les deux extérieurs bossués à la base; une corolle à quatre pétales longuement onguiculés, obovales, étalés; six étamines tétra- dynames, à anthères d’un jaune foncé; un ovaire simple, ovale, aplati, à deux loges multiovulées, surmonté d’un style très-court et d'un stigmate bilobé. Le fruit est une silicule ovale lancéolée, très- aplatie, à cloison mince, large, soyeuse, satinée, brillante, séparant deux loges dont chacune renferme plusieurs graines aplaties, réni- formes, ailées (PI. 28). La lunaire bisannuelle ou inodore (L. #nodora Lam., L. biennis Mœnch., L. annua L.), appelée aussi grande lunaire, monnaytre, clef de montre, monnaie du pape, passe-satin, médaille de Ju- das, etc., est bisannuelle, et diffère de la précédente par sa taille plus élevée ; ses feuilles plus pâles, sessiles dans le haut de la tige; ses fleurs inodores, plus grandes, violel pourpré; ses styles trois fois plus longs; ses silicules beaucoup plus grandes, presque rondes, à cloison cartilagineuse, nacrée, persistante. Hagrrar. — Ces deux plantes se trouvent dans les régions cen- trales et méridionales de l'Europe; elles habitent les forêts monta- gneuses, les bois escarpés, etc. On ne les cultive que dans les jardins d'agrément, où on les propage par graines, et la première aussi par éclats de pieds. Parties usirées. — Les feuilles, les semences. Récorre. — Les lunaires, comme toutes les plantes de la même famille, perdent leurs propriétés par la dessiccation, aussi ne les Flore, T. II. 17 258 FLORE MÉDICALE. employait-on que fraiches ; les semences sont récoltées à la maturité des fruits, avant leur déhiscence. Composirion cuimique. — Les feuilles sont âcres et amères, un peu piquantes, surtout celles du L. parviflora Delile, qui vient dans les déserts de l'Égypte; les Arabes appellent celui-ci ARaschat-Guébélr, cresson du désert, et ils le mangent comme nous faisons le véritable cresson. Usages. — Les feuilles de lunaire, ainsi que les semences, sont réputées apérilives, antiscorbutiques et incisives; on les a préco- nisées comme diurétiques; on les employait autrefois contre l'épi- lepsie; elles sont maintenant complétement inusitées ; on mange les racines en salade comme celles de la raiponce (Campanula Rapun- culus). LUPIN Lupinus albus L. (Légumineuses - Lotées.) Le Lupin blanc est une plante annuelle, à racine dure, un peu fibreuse, pivotante. La tige, haute de 0°,35 à 0",65, cylindrique, velue, dressée, un peu rameuse, porte des feuilles alternes, à pétiole long, muni de deux stipules à la base, à limbe palmé, divisé en cinq ou sept folioles ovales, lancéolées, entières, molles, pubescentes, ciliées, douces au toucher, d’un vert foncé en dessus, plus pâles en dessous. Les fleurs, blanches, courtement pédonculées, sont réunies en grappes terminales dressées. Elles présentent un calice mono- sépale, velu, à deux lèvres, la supérieure presque entière ou à peine échancrée, l’inférieure à trois dents; une corolle papilionacée, à étendard cordiforme, arrondi, à ailes égalant la carène qui est formée de deux pétales libres dès la base; dix étamines monadelphes, à anthères alternativement arrondies et oblongues; un ovaire simple, libre, allongé, à une seule loge pluriovulée, surmonté d’un style et d’un stigmate simples. Le fruit est une gousse épaisse, coriace, oblongue, velue, brun noirâtre, renfermant plusieurs graines arron- dies, comprimées et blanchâtres. Hapirar. — On ne connaît pas bien la véritable patrie du lupin blanc; on pense toutefois qu’il est originaire de l'Orient, d'où il s’est répandu et naturalisé dans le midi de l'Europe et sur les bords du bassin méditerranéen. « DU XIX° SIÈCLE: 259 Cucrure. — Le lupin se trouve répandu soit dans les champs, comme plante fourragère, soit dans les jardins, comme végétal d’agré- ment. Il demande une terre légère et chaude, et se propage très- facilement de graines, semées en place au printemps. PARTIES usITÉES. — Les graines. RécoLte. — On récolte les semences de lupins à la maturité des gousses; elles sont blanches, assez grosses, un peu aplaties; elles possèdent une saveur amère assez désagréable, que l’eau chaude fait disparaître; on les conserve sèches comme les haricots. CoMPosITION CHIMIQUE. — Outre le principe amer dont nous avons parlé, les graines de Lupin contiennent un peu de tannin, de l’ami- don, des traces de sucre, et une matière azotée que l’on retrouve d'ailleurs dans les graines d’un grand nombre de légumineuses, ma- tière que M. Braconnot a nommée Léqgumine. Elle a beaucoup d’ana- logie avec la casérne du lait; elle est soluble dans l’eau et coagulable par l'acide acétique; mais ce précipité est soluble dans un excès d'acide, ce qui distingue la matière en question des autres albumines. Elle se dissout dans les alcalis libres ou carbonatés et dans les eaux de chaux et de baryte. Usages. — La farine de lupin entrait, avec celles de Fève (Faba sativa) et d'Orobe (Orobus vernus), que l’on remplaçait souvent par celles de l'Ers (£rowm ervilia) ou de la Vesce ( Vicia sativa), dans les quatre farines résolutives autrefois très-employées ; mais aujourd’hui ces farines sont aussi peu usitées les unes que les autres. Cependant nous devons dire que la evalescière, V Ervalenta et la Revalenta, dont le charlatanisme, toujours si plein d’attrait pour la foule, vante les prodigieux effets, ne sont que de la farine de lentilles (Æroum lens) mêlée avec des farines de haricots et de lupin, du sucre et un peu de sel. En Égypte et en Italie, on mange les graines de lupin, mais c’est une triste nourriture. Trestis Lupinus, dit Virgile, quoique ses con- temporains ne dédaignassent pas ces graines, que l’on vendait cuites dans les rues de Rome, comme on les vend encore aujourd'hui en Égypte. On prétend que le célèbre peintre grec Protogène vécut pendant sept ans de graines de lupin. Dioscoride et le médecin arabe Jahia, fils de Masouiah, vulgairement appelé Jean Mésué, employaient la farine de lupin pour rétablir l'appétit, combattre les maladies de la peau et faire périr les vers. En Italie et en Catalogne, on ne se sert Il. 17* 260 FLORE MÉDICALE des graines, après les avoir dépouillées de leur amertume en les trempant dans l’eau, pour engraisser les bœufs. La plante, encore Jeune, du lupin blane, fournit un fourrage que l’on donne particu- lièrement aux moulons. En Égypte, dit Sonnini (Voyage, t. M, p. 17), on fait usage de la farine pour adoucir les mains et effacer les rides du visage. Cette farine entrait autrefois dans les trochisques de myrrhe. D'après Bruce (Voyage, t. VUE, p. 67-79), le lupin termis(L. ter- mis Forsk) d'Abyssinie, est si amer qu’il communique cette saveur au miel des abeilles qui butinent sur ses fleurs. On cultive le lupin ter- mis dans le royaume de Naples comme un bon fourrage vert pour les chevaux. LYCOPERDON Lycoperdon giganteum D.C. L. Bovista L. (Champignons - Lycoperdacées.) Le Lycoperdon gigantesque, vulgairement appelé Vesse-de-loup, est un énorme champignon globuleux, atteignant parfois 0,35 de diamètre, fixé au sol par une très-petite racine. Sous une peau blanc sale, lisse ou un peu pelucheuse, ilrenferme une chair ferme et blan- châtre dans le jeune âge. Plus tard, celte chair prend des teintes de plus en plus foncées et se change en une poussière brune, formée par les spores, qui sont attachées à des filaments. À la maturfé, l'enveloppe s'ouvre au sommet, pour laisser échapper ces spores, dont le singulier mode d'émission a valu à ce cryptogame ses noms vulgaire et scientifique. 1 ne reste plus alors qu’une peau assez épaisse, molasse et filandreuse, contenant les débris des filaments, Hagirar. — Ce champignon se trouve dans presque toute l'Europe ; il croit, ordinairement solitaire, dans les bois et les pâturages secs. Citons encore, pour emploi qu'on en fait, les Lycoperdons ver- ruqueux (L. verrucosum Bull.), carcinomale (L. carcinomale L.), effrayant (L. horrendum), qui a plus d’un mètre de diamètre, et parait être le plus volumineux des Champignons. PARTIES USITÉES. — Toule la plante, la poussière qu'elle contient (Sporidies.) RicozTe. — On cueille, pour les manger, les lycoperdons comesti- bles, avant que la partie charnue soit transformée en poussière. Comrostriox cuimique. — Comme celle de la plupart des champi- DU XIX° SIÈCLE, 261 auons, l'analyse des Iycoperdons n'a pas été faite. Leur chair est peu aromatique ; elle possède un peu d'àâcreté, qu'elle perd par la cuis- son. Plus tard, lorsque la poussière est bien formée, elle est àcre, cause de la cuisson et de l'inflammation, si elle est portée sur les veux et sur les narines. Selon Bulliard, prise à l'intérieur, elle peut ètre mortelle. Usages. — Léveillé dit que l'usage que l'on fait des Lycoperda- cées, en Italie, où on les mange, prouve que ces champignons ne sont pas vénéneux ; il ajoute toutefois qu'on ne pourrait garder longtemps chez soi un lycoperdon gigantesque sans être incommodé par l’odeur qu'il dégage, et que l'expérience à démontré qu'on ne pent pas en recevoir impunément les nuages des spores dans les yeux. D'après Tournefort, la poussière des lycoperdons est astringente ; elle était lrès-employée autrefois contre les hémorrhagies externes. En Allemagne, les barbiers en mettaient sur les coupures produites par les rasoirs. La chair des lycoperdons desséchée, battue et trem. pée dans une solution de nitre, peut servir d’amadou. Thunberg (Dict. acad., LT, p. 274) rapporte que le Lycoperdon carcmomale L. est employé, au cap de Bonne-Espérance, contre le cancer. Le Lyco- perdon verrucosum Ball., est regardé comme aphrodisiaque; il porte le nom de Truffe de cerf, parce que, dit-on, ces animaux le recher- chent pendant le rut. Dans quelques contrées de l'Allemagne, l poussière des lycoper- dons a été employée contre les hémorrhagies traumaliques ; mais on ajoute que le champignon était préparé, qu'on l'arrosait pendant quinze jours avec une solution de sulfate de zine, et que chaque fois on faisait sécher au soleil, puis qu'on réduisait en poudre. Félix Plater arrêlait le flux hémorroïdal trop abondant en introduisant dans le rectum de la poussière de Iycoperdon. Boerhaave, Tulpius, Adrien Helvetius la considéraient comme un excellent hémostatique. Lecat l'employail pour arrêter les hémorrhagies dans les opérations chirurgicales. Ravius l’'employait contre les hémorrhagies trauma tiques. Paul Hermann l’a vantée contre les excoriations, les pus- tules, ete. IL est vrai qu’il la mélangeait avec le colcothar ou peroxyde de fer anhydre. Après M. Cazin, nous avons nous-même employé avec succès le Iycoperdon gigantesque contre les hémorrhagies nasa- les rebelles. En Angilelerre, on emploie depuis longtemps la fumée produite 202 FLORE MÉDICALE par la combustion lente des Iycoperdons pour engourdir les abeilles, lorsqu'on veut enlever le contenu des ruches. C’est probablement cette application qui a donné à M. Richardson l'idée de se servir de cette même fumée comme anesthésique et ne présentant aucun danger. Les expériences faites à ce sujet ne sont pas assez nom- breuses pour que l’on puisse se prononcer sur la valeur de ce moyen, mais il est très-probable que les effets anesthésiques constatés sont dus à la production de l'acide carbonique, et surtout de l’oxyde de carbone. : LYCOPODE Lycopodium clavatum L. {Lycopodaciées.) Le Lycopode à massue est une plante vivace, dont la tige, longue parfois de plus d’un mètre, couchée, rampante, radicante, se divise en nombreux rameaux ascendants, entièrement recouverts, ainsi que l'axe primaire, de feuilles alternes, sessiles, linéaires lancéolées, roides, à une seule nervure médiane peu marquée et se terminant par une longue soie, imbriquées sur plusieurs rangs. Les organes reproducteurs consistent en sporanges d’un jaune pâle, naissant cha- cun à l’aisselle d’une bractée semblable aux feuilles, et disposés en épis allongés, cylindriques, qui sont portés sur des pédoncules termi- naux, ascendants, assez longs, munis de bractées espacées, terminés chacun par deux ou trois épis, rarement par un seul; ces sporanges renferment les spores ou granules (PI. 29). Le Lycopode sélagine (L. selago L.), est une espèce à lige droite, haute d'environ 2 décimètres, rameuse et fastigiée. Hagrrar. — Les lycopodes sont assez répandus en Europe; il crois- sent surtout dans les lieux accidentés, les bois montueux, au pied des rochers, ete., presque toujours à lexposition du nord. PARTIES usiTÉES. — La poussière des capsules; la plante. Récoure. — Le lycopode des officines nous vient en général de l'Allemagne et de la Suisse. C'est une poussière d’un jaune tendre, très-finé, légère, insipide et inodore, inflammable au contact d’une hougie. Aussi lui a-t-on donné le nom de Soufre végétal; on s'en sert dans les théâtres pour imiter les éclairs et les incendies. Le lycopode du commerce est souvent falsifié avec le tale on la craie de Briançon, et avec l'amidon. La première de ces sabstancesse préer- DU XIX° SIÈCLE. 263 pite au fond de l’eau, lorsqu'on met la poudre sur ce liquide, tandis que le lycopode surnage. Quant à l’amidon, il est reconnu par l'eau iodée. On à prétendu que l’on falsifiait le lycopode avec les pollens de certaines plantes, et notamment avec ceux des pins, des sapins et des typhas. Nous pensons, comme M. Guibourt, que cette fraude n’est pas aussi facile qu’on le suppose, et nous nous demandons s’il ne coûlerait pas plus cher de ramasser les pollens des plantes en question, que ne vaut le lycopode lui-même. D'ailleurs, ces pollens sont en général très-colorés, et leur examen microsco- pique permet de les distinguer les uns des autres, et du lycopode lui-même, avec la plus grande facilité. Cette distinction ne serait peut-être pas aussi facile avec la poudre de vieux bois, poussière jaune et ténue que les larves d’insectes produisent dans les vieux bois de charpente, et avec laquelle on a, dit-on, mélangé quelquefois le lyco- pode; mais encore ici se présente la difficulté de se procurer ce produit en assez grande abondance pour pouvoir le vendre à un prix inférieur à celui du lycopode. Comwposrrion cmmique. — Le lycopode reste à la surface de l’eau; par agitation une portion se précipite ; par la chaleur, tout tombe au fond, l’eau acquiert une saveur cireuse, et renferme un muci- lage qui lui donne la propriété de se prendre en gelée par le refroi- dissement ; l’alcool le pénètre, et l’on obtient par la chaleur une tein- ture jaune que l’eau précipite en blanc. Ce liquide contient du sucre. L'éther, au contact du iycopode, prend une teinte jaune verdâtre, contenant de la cire en dissolution et précipitant abondamment par l'eau. Le résidu, insoluble dans tous ces liquides, équivaut à peu près à 0,90 pour cent de la poudre employée. Il est pulvérulent, jaune, combustible. On l’a nommé Pallénine. W est azoté et se putréfie lorsqu'il est humide, en formant une masse putride ayant l'aspect du fromage. On voit que le lycopode, mouillé avec de l’alcool et examiné au mi- croscope, est formé de granules isolés représentant des sections de sphères formées par trois plans dirigés vers le centre. Ces grains sont rarement réunis; mais ils se préseulent sous plusieurs formes. Ils sont imparfaitement transparents, et composés de cellules denses, avec des granulations à leur surface, dans l'intervalle desquelles on trouve de petits poils ou appendices terminés en massue. # à 264 FLORE MÉDICALE Û UsaGes. — La poudre de Iyeopode est employée à deux usages à peu près exclusifs : en pharmacie, on s’en sert pour rouler les pilules et les empêcher d’adhérer entre elles; en médecine, sous le nom de poudre de vieux bois, on l’emploie comme absorbante contre les ex- coriations, et chez les enfants, pour panser l'érithème des fesses, des aines et des cuisses, qui accompagne la diarrhée et le séjour pro- longé dans l'urine ou les matières fécales. Mais il est bien important de ne pas confondre le lycopode avec la poudre de vieux bois, que M. Devergie préfère dans le traitement de certaines dermatoses sécré- tantes. Toutes les gerçures, les inflammations cutanées légères, telles que l'eczéma des bourses et des seins, l’érysipèle, sont traités avantageu- sement par le lycopode. Helwich, d'après Murray, a étendu son usage au traitement des ulcères serpigineux. Hufeland lemployait coritre les ulcérations des paupières. En Pologne, on en jette sur les che- veux des malades atteints de la plique. Aussi a-t-on nommé la plante Phicaria et Herbe à la plique. Quoique vanté avec exagération dans certaines maladies, le Iyco- pode n'est pas employé à l’intérieur. On l’a regardé comme utile contre le rhumatisme, l'épilepsie, les néphrites, les rétentions _ d'urine, etc. D’après Martius (Bu/l. des sc.méd. de Férussac, tom. XXE, p. 430), on l’emploie, dans certaines parties de la Russie, en Hon- grie, en Gallicie, contre la rage. Hufeland l’a recommandé contre la diarrhée des enfants et la strangurie. La plante entière possède des propriétés vomitives, et on rapporte que des paysans tyroliens, qui avaient mangé des légumes cuits dans de l’eau où avait macéré du L. selago éprouvèrent des symptômes d'ivresse et des vomissements. Raclius l’employait en infusion contre les rétentions d'urine. Aujourd'hui l’usage en est abandonné. Le L. selago L. ou sélagine, commun dans le nord de l'Europe et de la France, est éméto-drastique. Bischoff, Winkler, Zingler, Haller ont constaté ses propriétés. Linné dit qu’en Suède on emploie sa dé- coction pour détruire la vermine des animaux. Quoique rarement employé en médecine homæopathique, le lyco- pode figure au Codex homiæopathique sous le signe A//p et l'abrévia- tion Lyc. DU XIX° SIÈCLE. 265 LYSIMAQUE Lysimacchia vulgaris et nummularia L. (Primulacées-Primulées. ) La Lysimaque commune (L. vulgaris), vulgairement appelée Cor- neille ou Chasse-bosse, est une plante vivace, à rhizome rampant, muni de racines fibreuses. La tige, haute de 0",60 à 1 mètre, à qua- tre angles peu marqués, velue, très-rameuse, dressée, porte des feuilles le plus souvent opposées, rarement alternes ou verticillées, brièvement pétiolées, ovales, oblongues, lancéolées, aiguës, pubes- centes et d’un vert pâle en dessous. Les fleurs, d’un beau jaune doré, sont disposées en panicules rameuses terminales. Elles présentent un calice monosépale à cinq divisions lancéolées aiguës, ciliées, mem braneuses et rouges sur les bords ; une corolle presque rotacée, à tube très-court, à limbe divisé en einq lobes glanduleux supérieurement ; cinq étamines saillantes, à filets soudés à la base, recouvrant un ovaire uniloculaire, multiovulé, surmonté d’un style et d'un stigmate simples. Le fruit est une capsule membraneuse, globuleuse, à une seule loge polysperme, s’ouvrant à la maturité en cinq valves longi- tudinales. La Lysimaque nummulaire (L. numunularia L.), vulgairement Monnayère, Herbe aux écus, Herbe à cent maux, etc., est une plante vivace, à tiges longues de 0,25 à 0",50, grèles, glabres, simples ou à peine rameuses, radicantes à la base, portant des feuilles opposées, brièvement pétiolées, ovales ou arrondies, glabres. Les fleurs sont solitaires à l’aisselle des feuilles, opposées, longuement pédonculées. Le calice est à cinq divisions ovales aiguës, cordées à la base. Les étamines sont soudées sur une moindre longueur que dans l'espèce précédente. Les autres caractères sont à peu près les mêmes que dans la lysimaque commune. Hagrrar. — Ces deux plantes sont très-répandues en Europe ; on les trouve dans les lieux humides des bois, sur le bord des eaux, etc. Elles ne sont cultivées que dans les jardins botaniques. PARTIES usITÉES. — La plante entière. Récocre. — Pline rapporte que la lysimaque tire son nom de Lysimachus, fils d'un roi de Sicile, qui fit connaitre ses propriétés astringentes. Il ajoute qu’elle empêche les chevaux d’être hargneux. 266 FLORE MÉDICALE Les Anglais la nomment Loose-strife, Chasse-querelle; et le nom de Chasse-bosse, qu'on lui donne chez nous, à probablement une ori- gine analogue. On cueille la plante à l'époque de la floraison : on la fait sécher au grenier ou au séchoir. Composition cuimiQuE.— Les lysimaques ont une saveur astringente et un peu acide. Par la dessiccation elles perdent une partie de leurs propriétés. UsaGEes. — Érasistrate, petit-fils d’Aristote, faisait grand cas de la lysimaque ; mais quelques commentateurs pensent qu'il voulait par- ler de la salicaire (Lythrum salicaria L.), que quelques auteurs ont nommée Lysimachia purpurea. D'ailleurs, ces deux plantes sont au- Jourd’hui tout à fait abandonnées. Autrefois, la lysimaque vulgaire était employée comme vulnéraire et astringente, et on la regardait comme utile dans les hémorrhagies, la leucorrhée, la diarrhée, la dyssenterie. La décoction miellée était conseillée contre les aphtes de la bouche, les amygdalites, les inflammations de la gorge, etc. La nummulaire est négligée par presque tous les praticiens. Cependant Boerhaave, et depuis, Lieutaud, en ont fait grand cas comme astringente. Jérôme Bock, plus connu sous le nom de Tragus, la recommandait, dans le seizième siècle, aux phthisiques, et Gattenhof (S#irpes agri Heipelle) rapporte que les pâtres la fai- saient prendre aux brebis, pulvérisée, mélée à du sel, pour les pré- server de la phthisie pulmonaire. En Alsace, c'est un remède popu- laire contre les diarrhées, l'hémoptysie et les hémorroïdes. M. Cazin, qui l’a expérimentée, dit en avoir obtenu de bons effets dans un cas de ménorrhagie lente et passive. Quoi qu’il en soit, elle est aujour- d'hui généralement abandonnée dans la pratique médicale, et nous croyons que c’est avec juste raison. Les anciens attribuaient aux lysimaques la propriété de faire mou- rir les serpents et les mouches ; ils leur prêtaient bien d’autres mé- rites encore, dont le temps a fait juslice. DU XIX° SIÈCLE. 207 MACERON . Snyrnium olusatrum L. (Ombellifères-Smyrnées.) Le Maceron à feuilles ternées, Ache large, Gros-Persil de Macé- doine, qu'il ne faut pas confondre avec le Persil de Macédoine (Atka- manta macedonica Spreng., Bubon macedonicum 1), est une plante. bisannuelle, à racine fusiforme, épaisse, rameuse. La tige, haute d'environ un mètre, fistuleuse, striée, rameuse, porte des feuilles alternes, pétiolées, découpées, à segments ovales, crénelés, d’un vert foncé en dessus, plus pâle en dessous; les radicales trois fois ter- nées, les supérieures simplement ternées. Les fleurs, d’un jaune ver- dâtre, sont groupées en ombelle terminale convexe, dépourvue d’in- volucre, à ombellules entourées d’involucelles formées de folioles très-pelites. Elles présentent un calice à limbe oblitéré ; une corolle à cinq pétales ovales lancéolés, entiers, acuminés, à pointe infléchie ; cinq étarmines saillantes ; un ovaire infère , à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles divergents. Le fruit est un diakène gros, noir à la maturité, à côtes dorsales fortement saillantes. Hagrrar. — Le maceron croît dans le midi de l'Europe; on le trouve surtout dans les lieux frais et ombragés, au bord des che- mins, elc. Très-répandu autrefois comme plante maraichère, il n’est plus guère cultivé aujourd'hui que dans les jardins botaniques. Citons aussi le maceron perfolié (Sreyrnaun perfoliatum L.), qui se distingue par sa taille plus petite, sa racine napiforme, ses feuilles embrassantes, comme perfoliées, et ses fleurs jaunes. Il croit en Provence, en Italie, en Hongrie. PARTIES USITÉES. — Les racines, les feuilles, les Liges, les fruits. técoLte. — Le maceron à feuilles ternées ne peut être employé que frais, la dessication lui enlève son arome et ses propriétés. Composirion CiMiQuE. — Toutes les parties de la plante dégagent. une odeur aromatique due à une huile essentielle. Les racines ont une saveur amère, qu'on leur fait perdre par l’éliolement à la cave. Usages. — Les propriétés carminatives qu'on a attribuées aux feuilles et aux fruits du maceron sont très-douteuses, et quoiqu'on ait vanté les différentes parties de la plante comme cordiales et anti- scorbutiques, elles ne sont plus, en général, usitées. 268 FLORE MÉDICALE Les jeunes tiges du maceron, blanchies comme le Céleri, se man- gent dans certains pays. On employait autrefois beaucoup la plante comme polagère; mais on lui préfère aujourd’hui le Persil et les jeunes pousses de Céleri, dont la saveur est plus agréable. Le maceron perfolié se cultive quelquefois à Paris, comme plante polagère. Il possède les mêmes propriétés que le maceron à feuilles ternées. Sa racine, plus grosse et plus charnue, le fait préférer. MACRE Trapa natans L. (Haloragées.) La Macre floitante, appelée aussi Cornuelle, Écharbot, Châtaigne ou Truffe d’eau, etc. ; est une plante annuelle, à racines fibreuses et traçantes, à tige grêle, simple, de longueur variable selon la profondeur de l’eau où elle vit, émettant de distance en distance des faisceaux de racines adventives grêles, fibreuses, blanchâtres. Les feuilles qu'elle porte affectent deux formes et deux dispositions différentes : les unes, constamment plongées dans l’eau, sont opposées, écartées, sessiles et découpées en nombreuses lanières d’une extrème ténuité ; les autres, flottantes et étalées à la surface, sont alternes, très-rapprochées, réunies en rosette, rhomboïdales, dentées sur les bords et portées sur de longs pétioles dont la partie moyenne est renflée el vésicu-- leuse. Les fleurs, petites et blanchâtres, sont portées par de courts pédoncules renflés spongieux, solitaires à l’aisselle des feuilles na- geantes. Elles présentent un calice à tube court, soudé avec la base de l'ovaire, à limbe divisé en quatre lobes persistants; une corolle à quatre pétales plissés ; quatre étamines ; un ovaire semi-infère, à deux loges uniovulées, surmonté d’un style simple, filiforme, que termine un stigmate en tête. Le fruit est une capsule à enveloppe ligneuse, brune, munie de quatre appendices ou cornes, et renfer- mant une graine à amande farineuse. Hagirar. — La macre flottante se trouve dans l’Europe centrale et méridionale; elle habite surtout les eaux stagnantes. CuzTuRE. — On à proposé de cultiver cette plante dans les étangs et les marais, pour les utiliser et les assainir. Cette culture est très- simple. Il suffit de jeter dans l’eau quelques fruits, aussitôt après leur maturité. Les graines germeront, et la plante se propagera aisé - DU XIX° SIECLE. 269 ment. Maisil faut, autant que possible, que les eaux aient une pro- fondeur de 0,35 à | mètre. PARTIES USITÉES. — Les fruits, les feuilles. : Nous citerons encore la Macre à deux cornes (Trapa bicornis Linné fils), fort commune aux environs de Canton, où elle est l’objet de cultures assidues. Récocre. — Les fruits de la macre flottante se récoltent à leur maturité. Ils sont alors noirs et de la grosseur d'une châtaigne ordi- naire. Ils présentent trois cornes divergentes, courtes et pointues. Composirion cuimiQue. — La graine de macre est très-riche en ami- dou. D'après Thompson, la racine de macre serait vénéneuse (Z/xcy- clopédie botanique, 1. WE, p.670) ;:mais rien n’est cerlain à cet égard. Usages. — Autrefois on regardait et on employait les fruits de la macre flottante comme astringents, et les feuilles comme résolutives. On appliquait les feuilles en cataplasmes résolutifs. On prétend que la décoction de macre chasse les puces. Cette plante aquatique a été très-anciennement en usage pour l'alimentation. Les Égyptiens la tenaient probablement en grand hon- neur, car on en trouve dans les cercueils de leurs momies (Journ. de phaurm., LXNE, p. 434). Dans presque tous les pays de l'Europe, les paysans s'en nourrissent. Eu Suède, on en fait du pain. En Limou- sin, on en fait une très-bonne bouillie. Loin de nuire aux pois- sons, comme on l’a quelquefois prétendu, la macre, pendant les ardeurs de l'été, les protége de l'ombre de ses feuilles qui servent de nourriture aux bestiaux, engraissent les pores, el ont la propriété d'absorber l'air infect des marais. MACROCNÈME Macrocnemum corymbosum el speciosum P. Br. (Rubiacées -Hédyotidées.) Le Macrocnème à corymbes (27. corymbosum P. Br.), confondu, avec quelques autres végétaux, sous le nom de Faux quinquina, est un grand arbre, à feuilles opposées, munies de slipules, pétiolées, obovales, allongées, cordiformes à la base, luisantes. Les fleurs, pourpre foncé en dehors et d'un blanc pur en dedans, sont groupées en. corymbes terminaux, accompagnés de bractées très-grandes et colorées. Elles présentent un calice turbiné, à cinq dents : une corolle 0 210 FLORE MÉDICALE caripanulée, à cinq divisions ; einq élamines saillantes : un ovaire infère, à deux loges pluriovulées, surmonté d’un style simple, ter- miné par un stigmate bifide. Le fruit est une capsule brun pourpre, turbinée, bivalve, à deux loges contenant chacune plusieurs graines jaunâtres, planes, imbriquées, à bords un peu membraneux. Le Macrocnème superbe (A7. speciosum P. Br.) est un arbuste dont la tige, haute d’un à deux mètres, porte des feuilles ovales-lancéolées, et des panicules de fleurs nombreuses, presque sessiles, pubescentes, roses en dehors, rouges en dedans, accompagnées de grandes bractées d'un beau rose. Le Macrocnème écarlate (MW. coccineum VP. Br.) se reconnait à ses feuilles, longues de 0",40, entières et velues, et à ses corymbes de fleurs pourpres accompagnées de bractées écarlates. Nous citerons aussi les Macrocnèmes à fleurs blanches (17. candi- dissünum P. Br.), tinctorial (22. tinctorium P. Br.), de la Jamaïque (M. Jamaicense L.), austral (M. australe Rich.), etc. Hagrrar.— Ces végétaux croissent dans les régions équaloriales de l'Amérique. Le Macrocnème à ombelles est assez répandu sur la chaine des Andes ; le Macrocnème superbe se trouve à Caracas; les autres espèces habitent les bords de l'Orénoque, le Brésil, la Trinité , ete. PARTIES USITÉES. — Les écorces. RÉCOLTE. — On ne connail pas au juste les caractères qui distin- tinguent les écorces des macrocnèmes rangées dans les /aux Quin- quinas, de celles des vrais Quinquinas. On sait cependant que l'écorce de macrocnème tinciorial, que l’on trouve quelquefois dans le com- merce sous le nom d’écorce de Paraguatan, et que l'on nomme Socchi, au Pérou, est en morceaux courts de 0",005 à 0,015, re- courbés en dehors par la dessiccation ; ràclée à l'extérieur, avec une écorce blanchâtre ou jaunâtre fongueuse, à texture grenue et un peu fibreuse du côté interne, dure et renfermant une grande quantité de matière rouge, qui lui donne une belle coloration foncée, tandis que sa teinte générale est rose. On la trouve au Musée britannique, sous le nom de Ciachona laccifera. (Voyez aux articles ExosremA dans ce volume, p. Al, et Qunquina, €. HE, p 158 à 187.) COMPOSITION CHIMIQUE. — Les écorces des macrocnèmes sont toutes astringentes. D'après Tafalla, on obtient un suc épaissi au soleil, qui peut remplacer la laque, en ràclant la surface interne des écorces fraiches du macrocnème tinetorial (Bw//. de pharm., t. M, p. 307). DU XIX° SIÈCLE. 271 Usaces. — D'après Kunth (Nova gen. et spec., X, p. 199), l'écorce du 27. tnctorium, qui croit dans les Missions de l'Orénoque, est em- ployée en teinture. D'après Ruiz et Pavon, l'écorce du A7. corymbo- sum est un peu amère et visqueuse. Associée au quinquina, elle a été employée dans les fièvres intermittentes. On la mêle quelquefois au quinquiva, mais on la distingue par sa couleur blanche. Elle doit être placée parmi les écorces constituant les guënguinas blancs, qui sont tous de faux quinquinas. MAGNOLIA Magnolia grandiflora, glauca, etc. L. (Magnoliacées - Magnoliées. ) Le Magnolia ou Magnolier à grandes fleurs (Magnolia grandiflora 1... (M. altissima Catesb.) est un arbre, dont la tige, haute de 20 à 25 mètres, se divise en nombreux rameaux, porlant des feuilles alternes, courtement pétiolées, longues de 0,15 à 0,20, ovales- oblongues, lancéolées, très-entières, fermes, coriaces, d’un vert vif et brillant en dessus, ferrugineuses en dessous, persistantes. Les fleurs, larges de 0°,15 à 0,20, d’un blanc pur, très-odorantes, sont soli- taires, dressées, à l'extrémité de courts pédoncules terminaux, accom- pagnés de bractées spathiformes, très-caduques. Elles présentent un calice à trois sépales étalés, caducs ; une corolle de neuf à douze pé- tales, disposés sur trois ou quatre rangs, étalés, décidus ; des étamines nombreuses, à filets très-courts, à anthères munies d’un connectif proéminent ; des ovaires nombreux, libres, sessiles, à une seule loge biovulée, groupés en épi imbriqué, terminés chacun par un style et un stigmate simples. Le fruit est une sorte de cône ou strobile, formé de petits follicules coriaces, renfermant chacun une ou deux graines rouges, suspendues à un funicule très-long, blanchâtre, pendant. Le Maguolier glauque (HZ. glauca L., M. fragrans Salisb.) est un petit arbre, dont la tige, haute de 5 à 6 mètres, couverte d’une écorce grise tachetée de blane, se divise, dès la base, en rameaux nombreux et diffus, verts, portant des feuilles alternes, courtement pétiolées, longues de 0",12 à 0",15, ovales, entières, lisses, d'un vert gai en dessus, glauques en dessous, caduques. Les fleurs, blanches, très- odorantes, larges de 0®,08 à 0°,10, ont neuf ou douze pétales redres- sés. Le fruit est un cône de la grosseur d'un œuf de poule. 272 FLORE MÉDICALE Le Magnolier Yulan (M. Yulan Wall., M. conspicua Salisb.) est un arbre de 10 à 42 mètres de hauteur, portant des feuilles alternes, pétiolées, obovales, acuminées, pubescentes, longues de 0,20 à 0°,25, paraissant après les fleurs et caduques. Les fleurs, très-nombreuses, blanches, quelquefois teintées de pourpre, odorantes, ont six ou neuf pétales, dressés, ainsi que les styles (PL. 30). Nous citerons encore les Magnoliers acuminé (7. acuminata L.), auriculé (M. auriculata Lam.), à grandes feuilles (M. macrophylla Michx), parasol (M. tripetala L.). etc. Hagirar. — Les magnoliers habitent les régions chaudes et tem- pérées des deux continents. Les deux premières espèces croissent dans l'Amérique du Nord, la Caroline, la Louisiane, les Florides, etc. Le yulan habite la Chine. Les magnoliers sont aujourd’hui fréquem- ment cultivés dans les parcs et les jardins d'agrément. Parries usirées. — Les feuilles, l'écorce, les fleurs. Récorre. — Les feuilles des divers magnoliers peuvent être récol- tées pendant tout l'été. L'écorce est, dit-on, plus amère au printemps et à l’automne. Les fleurs doivent être cueillies au moment de leur épanouissement. Elles perdent toute leur odeur par la dessiccation. Composirion CHimiQuE. — Les feuilles et l'écorce des magnolias ren- ferment un principe amer et aromatique abondant. Dans quelques espèces, les fleurs exhalent une odeur des plus exquises, mais qui, malheureusement, est très-fugace et se détruit par la distillation, de sorte qu'on ne peut guère la séparer que par le procédé d’enfleurage des parfumeurs, c'est-à-dire par expression au contact des huiles fixes très-pures. Usages. — Les écorces, qui sont amères et aromatiques, ont, dit-on, des propriétés toniques. Les graines sont regardées comme fébrifuges. Quelques espèces renferment une huile concrète qui se rapproche du camphre ; d’autres, par leur odeur et par leurs pro- priétés, se rapprochent du sassafras. Dans les pays où les magnoliers croissent, on en a souvent employé les écorces comme fébrifuges. Chez nous, elles sont tout à fait inusitées. En Amérique, on fait macérer les fruits à moitié mûrs du 47. acu- minata L. dans de l’eau-de-vie, pour préparer une liqueur amère; les Américains la boivent le matin, dansle but de se préserver des fièvres et des rhumatismes. L'écorce du 27. glauca est quelquefois désignée sous le nom de Quinquina de Virginie. Elle est tonique et fébrifuge, DU XIX° SIÈCLE. OùT(2) stimulante et diaphorétique. Bigelow dit qu’on l’emploie beaucoupaux États-Unis contre le rhumatisme chronique et les fièvres. C’est à tort qu'on avait dit que cette plante produisait l'engusture. Humboldt et Bonpland ont fait voir qu'elle était fournie par le Cusparia febri- fuga, de la famille des Rutacées. D'après M. Ledanois, les semences du 47. grandiflora L. sont em- ployées au Mexique contre les paralysies. On dit qu’à la Martinique on aromatise les liqueurs avec les graines, mais il est plus pro- bable qu'on emploie à cet usage celles du A. Plumierii Sw. (Ta- lauma Juss.), ainsi que les fleurs. Le bois est nommé Boës pin, Bois cachiment. On confit dans du vinaigre les jeunes boutons du A7. yulan L. ; on met les fleurs dans le thé pour l'aromatiser. Les fruits sont employés en infusion contre les affections catarrhales. En France, les produits des magnoliers ne sont pas en usage; ils sont d’ailleurs moins aroma- tiques que dans leur pays d'origine. MAIS Zea mais L. (Graminées - Panicées.) Le Maïs, vulgairement appelé Blé de Turquie, Millet, etc., est une plante annuelle, à racines fibreuses, fasciculées, naissant en verti- cilles sur les nœuds inférieurs. La tige ou chaume, haute de 4 à 2 mètres, cylindrique, pleine, robuste, simple, glabre, porte des feuilles alternes, engainantes, lancéolées, longues de 0,50 et plus, larges de 0",05 à 0",06. Les fleurs sont monoïques, verdàtres. Les mâles sont groupées en épis allongés, recourbés à leur partie supé- rieure, et formant par leur réunion une grande panicule terminale. Elles présentent une glume à deux valves convexes, mutiques ; une glumelle à deux valves membraneuses, carénées, mutiques, échan- crées, l'intérieure plus grande et plus velue; des glumellules très- minces, tronquées, un peu charnues, membraneuses et transpa- rentes ; trois étamines pendantes. Les fleurs femelles sont groupées en épis très-gros, cylindriques, longs de 0",20 environ, axillaires, sessiles, étroitement renfermés dans des bractées engainantes ven- trues. Elles présentent une glume à deux valves larges, membra- neuses, mutiques, l'inférieure échancrée ; une glumelle à deux valves Flore, T. Il. 18 274 FLORE MÉDICALE membraneuses, convexes, arrondies, obtuses; un ovaire simple, ovoide, glabre, lisse, uniovulé, surmonté d’un style très-long, pen- dant, terminé par un stigmate pubescent. Le fruit est un caryopse arrondi, réniforme, très-gros, luisant, jaune ou rougeûtre, à albu- men farineux très-abondant. Hamrrar. — Bien qu’il y ait encore quelque doute sur la vraie pa- trie du maïs, on s'accorde généralement à le regarder comme origi- naire du Paraguay. Il est aujourd'hui cultivé en grand dans l'Europe centrale et méridionale ; mais ce sujet est essentiellement du domaine de l’agriculture. Parties usrrées. — Les fruits, improprement nommés semences, les écailles des fruits, le tissu cellulaire de la tige, les stigmates, les jeunes épis avec les ovaires. Récozre. — Les fruits du maïs sont récoltés à leur maturité, qui a lieu en octobre. On coupe les épis ; on les met d’abord en tas sur les champs, plus tard dans les granges; on les dépouille de leurs enve- loppes pendant les longues soirées d'hiver, puis on les égrène, et on fait sécher les graines au grenier. On conseille de les exposer à la chaleur du four à mesure qu'on veut les transformer en farine. Dans certains pays, on tresse les épis en guirlandes à l’aide de leurs enve- loppes, et on les suspend au plancher pour les faire sécher. La tige est arrachée plus tard, après la récolte. Elle sert à faire des litières. Les stigmates doivent êlre cueillis à la maturité du fruit, avant qu’ils soient flétris. On les fait sécher au soleil. Comrosrrion cumique.— Les tiges et les feuilles de maïs contiennent à une certaine époque du sucre incristallisable. Cependant, d'après Roques (Plant. usuel, t. IV, p. 273), M. de Bonrepos, procureur du parlement de Toulouse, en aurait obtenu jadis yn pain de sucre cris- tallisé du poids de six kilogrammes; et l’on sait que Pallas de Saint- Omer en a, depuis, présenté un pain à Louis XVIII et à l’Académie des sciences. Mais tous les essais industriels faits dans ce sens ont été infructueux ; d'autant plus que le sucre disparait bientôt des Liges, et que l’on n’y trouve plus que de la #annite. La farine de maïs se distingue de celle des autres céréales par sa coloration jaune ; elle est aussi beaucoup plus riche en matières grasses. L'huile qu'elle contient peut s’altérer en rancissant. Aussi vaut-il mieux ne moudre le grain que par petites quantités, au fur et à mesure des besoins. DU xIX° SIÈCLE. 275 MM. Dumas, Boussingault et Payen ont trouvé que la farine d'un maïs blanc, récolté près de Paris, avait la composition suivante : matières azotées, 12; amidon, 71; matières grasses, 8,70; cellu- lose, 5,80 ; dextrine et sucre, 0,50 ; matière colorante, 0,05; sels, 2. Total, 100,05. Une autre variété de maïs, récolté à Hagueneau, a donné à M. Boussingault les résultats suivants : albumine, 12,8; amidon, 59; huile, 7; dextrine et sucre, 1,5; ligneux et cellu- lose, 1,5 ; sels, 1,1 ; eau, 17,1. Total, 100. M. Boussingault a trouvé que la graine avait la composition élémen- taire suivante : carbone, 54,3 ; hydrogène, 7,00 ; azote, 16,3; oxy- gène et cendres, 22,4. © D’après Humboldt, un grain de maïs en rend 150; au Mexique ou en Alsace, dans une culture espacée, 190 (Schwertz). D'après Sprengel, la tige du maïs est composée de substances solubles dans l’eau, 17 ; substances solubles dans une lessive alcaline, 57,034; cire, résine et chlorophylle, 1,740 ; fibre végétale, 24,226. Total, 100. C'est un mauvais fourrage ; mais les feuilles fraiches ou sèches, ainsi que les panicules des fleurs mâles, sont recherchées des animaux. Usages. — Les enveloppes des fruits, desséchées, sont employées, en Espagne et dans le sud-ouest de la France, pour remplir des pail- lasses. Le tissu cellulaire de la tige, bouilli dans une solution de nitre, a été proposé par M. Bonafous, pour faire des moxas. Les stigmates secs en infusion théiforme sont très-vantés comme diurétiques, et les jeunesépis, avec les ovaires peu développés, peuvent être confits dans du vinaigre et remplacer avantageusement les cornichons. Dans l'Inde, les fruits sont mangés, avant leur maturité, en guise de petits pois. Avec les fruits mûrs, on fait une boisson alcoolique nommée Clca, et qui est analogue à la bière. Avec les tiges broyées, additionnées de feuilles et de jeunes tiges de vigne, on fait également, par fermentation, une boisson agréable, que l’on colore quelquefois avec la betterave et qu'on aromatise avec des fruits du genévrier. Par distillation de ces liquides, on peut obtenir de l'alcool susceptible de se transformer en vinaigre. - Mais c’est surtout comme aliment que le maïs est précieux. Le pain qu’on en prèpare (Miche, Milhas, Méture, selon les pays), lève mal et est très-indigeste. La farine, délayée dans de l’eau bouillante ou dans du lait salés, constitue les pâles connues sous les noms de Gaude, Polenta, Cruchade, etc. Préalablement torréfiée, elle sert à prépa- 276 1 FLORE MÉDICALE rer l'escoton, le pastel, ete., préparations qui changent de nom dans les divers pays où on les fait. De Rumford considère cet aliment comme le plus sain, le plus nutritif et le plus économique que l'on puisse employer. MM. Mérat et Delens, Munaret regardent les pâtes de maïs comme très-précieuses pour les convalescents et les malades atteints d’inflammations chroniques de l'estomac et des intestins. M. Duchesne recommande cette farinelpour préparer des cataplasmes, préférables à ceux qui sont faits avec la farine de lin. On a reproché à l'alimentation par le mais de déterminer des diarrhées, la dysentérie, la lienterie, les engorgements abdominaux, mais surtout la pellagre. M. Caron (Archives gén. de méd.,t. XXN, p. 120) a cherché à prouver que ces accidents n'avaient lieu que lorsque le maïs n’était pas mür. D'un autre côté, le nombre des médecins qui nient l'influence du maïs sur l’étiologie de la pel- lagre est au moins aussi grand que celui des médecins qui l’ad- mettent. Ballardani, et après lui M. Costallat, affirment que cette terrible maladie est produite par un champignon nommé Verdet et Verdérame, qui se développe sur le maïs altéré. Ils ajoutent qu'on enlève au grain toute vertu malfaisante en le chauffant au four ou en torréfiant la farine, ce qui expliquerait l'absence de la cachexie pellagreuse au Mexique, où on fait torréfier la farine de maïs avant de la cuire. Pour quelques mycologues, ce verdet serait un champignon nommé Spheria demacium. Cette sphérie se développe sur un grand nombre d'herbes, et principalement sur les citrouilles. La tige du maïs porte un champignon qu'on a nommé Sc/erotium zeéinum, et qui pro- duit, dit-on, chez les habitants de la Colombie, une maladie nommée peladina. La fleur femelle est souvent le siége du développement d'un champignon qu’on nomme Charbon où Goître, que De Candolle attribue à Uredo maïdis, Ustilogo maïdis Tul. Enfin, les tiges portent souvent un autre champignon nommé Fusisportum aurantiacum. MALPIGHIER Malpighia glabra et urens L. (Malpighiacées.) Le Malpighier glabre (AZ. glabra L.\, appelé aussi Moureiller, Ceri- sier des Antilles, est un arbrisseau, dont la tige, haute de 4 à 5 mè- tres, mince, dressée, se divise en rameaux divariqués, portant des DU XIX° SIÈCLE. 277 feuilles opposées, courtement péliolées, ovales, entières, glabres et lisses, munies de deux stipules à la base. Les fleurs, d'un rouge clair, sont groupées en petites ombelles axillaires, accompagnées de brac- tées. Elles présentent un calice hémisphérique, à cinq divisions peu profondes, portant en dehors deux glandes; une corolle à cinq pétales onguiculés, plissés, étalés ; dix étamines, à filets monadelphes à la base; un ovaire simple, libre, à trois loges uniovulées, sur- monté de trois styles lerminés chacun par un stigmate tronqué. Le fruit est une baie globuleuse, rouge, renfermant des graines osseuses et anguleuses. Le Malpighier piquant (47. wrens L.\, vulgairement appelé Bois capitaine, diffère du précédent par ses feuilles oblongues, hérissées en dessous de poils en navette jaunâtres, lrès-acérés et urlicants ; ses fleurs blanches, lavées de pourpre, insérées par petits bouquets de quatre à six à l’aisselle des feuilles ; enfin par ses dix glandes cali- cinales vésiculeuses, arrondies, transparentes, renfermant un liquide jaunâtre. Le Malpighier à feuilles étroites (A7. anqustifolia L.) présente une tige haute de 2 à 3 mètres, pourprée, couverte de poils soyeux ; des feuilles lancéolées, d’un vert très-foncé en dessus, couvertes en des- sous de poils jaunâtres, comme dans le Malpighier piquant; des : fleurs purpurines, en petites ombelles, et des fruits d’un rouge vif. Harrar. — Ces végétaux se {rouvent dans l'Amérique du Sud et aux Antilles. On ne les cultive que dans les jardins botaniques, où 1ls- exigent la serre chaude. Parties usirées. — Les feuilles, les écorces, les fruits, les graines. Récoure. — Les différentes parties des malpighia ne sont em- ployées que dans les lieux de production; on ne les trouve pas dans le commerce. Cowposirion cmmique. — Les fruits bacciformes et aigrelels des différents malpighia sont mangés, dans divers pays, sous le nom de Cerise ou Merise d'Amérique. Aux colonies, on mange et on fait des confitures avec les baies du A7. punicifolia L. On les appelle Cerises des Antilles. I découle du même arbre-une gomme analogue à l'arabique, et qui jouit des mêmes propriétés. Quoique l'analyse de ces différents produits n'ait pas été faite, on peut conclure de leur usage et des propriétés qu'on leur attribue, que les fruits renfer- ment du sucre, de la résine ou de l'acide pectique, un ou plusieurs 278 FLORE MÉDICALE acides organiques, et que l'écorce contient du tannin ou de l’acide gallique, ainsi que des matières colorantes rouges, qui abondent surtout dans le bois. Quant à lirritation très-vive déterminée par les piquants que l’on trouve sous les feuilles du 27. wrens, on ne sail pas à quoi elle doit être attribuée. Usages. — Les produits des malpighias sont inconnus en France. Nous avons déjà dit qu’on mangeait les fruits sous différentes formes dans divers pays. On assure que les amandes du M. armeniaca Caw. sont vénéneuses. Aux Antilles, on emploie, sous le nom de Quin- quina des Savanes, l'écorce du 7. crassifolia pour remplacer le quinquina et le simarouba, contre la dysentérie (Flore méd. des An- tèlles, 1. W, p. 164). À Cayenne, on emploie comme fébrifuge l’écorce du 7. Mourala Aubl. Sa décoction est usitée comme siccalive pour déterger les plaies. Le 27. spicata Cav. est connu sous le nom de Bois dysentérique, de Mérisier doré, Boistan. Ses fruits, jaunes, quoique peu agréables, sont cependant mangés par les nègres. Ils jouissent de propriétés laxatives, et on les a recommandés dans l’an- gine (Flore méd. des Antilles, LA, p.445, t. 1, p. 97). Le AZ. urens L., appelé Bois capitaine, Brin d'amour, Couhaya, Cerisier de Courweth, a des baies astringentes, employées contre la diarrhée, la leucorrhée, les hémorragies. D'après Nicholson, elles surexcitent les passions, et l'écorce jouit des mêmes propriétés. Le 47. verbascifolia L. donne un bois qui est employé comme astringent et vulnéraire. Il fournit - une matière colorante rouge. Toutes les écorces sont employées dans le tannage des cuirs. MANCENILLIER Hippomane mancinella L. (Euphorbiacées - Hippomanées.) Le Mancenillier est un arbre, dont la tige, haute de 5 à 7 mètres, couverte d'une écorce épaisse, lisse et grisätre, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, longuement pétiolées, ovales, acumi- nées, crénelées, épaisses, assez grandes, d’un vert foncé en dessus, pàle en dessous. Les fleurs sont monoïques ; les mâles, disposées en longs chatons ou épis interrompus terminaux, ont un calice turbiné et bifide, et deux étamines à filets très-courts ; les femelles, solitaires au milieu des épis mâles, ont un calice à trois divisions, un ovaire sessile, à sept loges uniovulées, surmonté d'un style simple, très- DU XIX° SIÈCLE. 279 court, épais, terminé par sept stigmates aigus et élalés. Le fruit, arrondi, lisse, de la grosseur d’une pomme d’api, d'une odeur assez agréable, renferme une chair mollasse, spongieuse, d’un goût fade d’abord, mais qui ne tarde pas à devenir très-caustique et à pro- duire dans l’intérieur de la bouche une sensation de brülure. (PI: 31): Toutes les parties de cet arbre sécrètent un suc propre, laiteux, àcre, caustique, très-vénéneux, qui, en se durcissant, présente l’as- pect et les caractères d’une matière gommo-résineuse jaunâtre, opaque et friable. Il ne faut pas confondre avec cet arbre celui que l’on appelle im- proprement aux Antilles Mancenillier de montagne, et qui appartient au genre sumac (/?hus). Hamirar. — Le Mancenillier croit aux Antilles et dans l'Amérique méridionale, de préférence sur les bords de la mer. Il n’est pas eul- tivé dans ces régions, où l’on a au contraire soin de le détruire. Il ne se trouve, en Europe, que dans les serres chaudes des jardins bota- niques. Parties usiTées. — Les racines, les feuilles, les fruits. RécoLte. — On a prétendu que l'atmosphère et l’ombrage du man- cenillier étaient vénéneux. M. Ricord-Madiana a pu voyager pendant deux heures sous cet ombrage sans en être incommodé. Cependant, il paraît certain que pour couper cet arbre sans avoir à redouter de graves accidents, il faut être masqué et ganté. Le fruit se cueille à la maturité. Il présente des sillons qui con- vergent en dessous, comme la pomme de Calville. Il répand une odeur agréable de citron. Cowrosiriox cuimiQue. — Le suc blanc laiteux que répand le man- cenillier, quand on le blesse, l’a fait appeler fiquier, à Cayenne, d’après Aublet. Examiné en France, ce suc a présenté une odeur analogue à celle de l'absinthe. Respiré fortement, il produit des picotements à la figure; fade d’abord, il amène bientôt à la gorge un sentiment de chaleur et d’äcreté ; il enflamme et irrile les parties qu’il touche. Les nègres l’emploient pour empoisonner leurs flèches, et le P. Labat dit qu'on ne peut enlever les propriétés vénéneuses de ces armes que par la calcination (Nouveau voyage aux îles de l Amérique (AT22), LI" p-3919) MM. Orfila et Ollivier d'Angers, ont analysé et expérimenté le 280 FLORE MÉDICALE suc de mancenillier. Ils ont vu que c'était un poison àcre et irritant; qu'il tuait rapidement un chien, lorsqu'on l’introduisait dans l’esto- mac à la dose de quatre grammes, et à celle de un à deux grammes si on l'injectait dans les veines. Ils ont trouvé que son principe actif est un acide cristallin non volatil. M. Pelletier s’est assuré qu'il satu- raitles bases, M. Ricord a également analysé le suc du mancenillier. I y a reconnu un arome qui se rapproche de celui du pêcher, une matière colorante jaune, de l'huile essentielle, une substance savonneuse, des cristaux de mancenillite, de la stéarine, de la soude, de l'huile grasse acidi- fiée, de la résine, de la gomme et du caoutchouc. Quant au gaz hydrogène carboné, que l’auteur dit avoir trouvé dans ce sue, c’est très-certainement un produit de décomposition. Outre le suc dont nous venons de parler, il découle du mancenil- lier une résine qui ressemble à celle du gayac. Usaces. — Le bois de mancenillier est léger; il sé corrompt facile- ment; en brülant, il répand des fumées dangereuses, que l’on em- ploie, dit-on, pour guérir une sorte de tumeur qui vient aux pieds des nègres, et que l’on nomme Crabe. On fait avec les feuilles un extrait très-irrilant, qui peut remplacer celui de Aus toxicodendron, et qu'on emploie contre les paralysies et l’éléphantiasis (Descourtils, Ilore méd. des Antilles, À, WE, p. 12). C'est un poison très-actif, que l'on a abandonné avec raison. On à raconté des choses merveilleuses sur le fruit du mancenillier. On a prétendu qu’il tuait tous les mammifères et les oiseaux, sauf Vara, qui peut s'en nourrir impunément. On ajoute que lorsque les fruits tombent à la mer, les crabes et les poissons les mangent sans en être incommodés, mais que la chair de ces animaux devient par suite très-vénéneuse et mortelle (Bruce, Voyage, t. IV, p. 361); mais tous ces faits auraient besoin d'être confirmés. Descourtils ajoute qu’on fait cuire le poisson, soupçonné d'en être infecté, avec une cuiller d’ar- gent; si elle noireit, on ne doit pas le manger. M. Ricord préconise le fruit du mancenillier comme un excellent diurétique. La résine a été prescrite comme vermifuge. Pour combattre l'empoisonnement par le mancenillier, on admi- nistre des vomitifs et des purgatifs. Plusieurs plantes ont été vantées comme contre-poison, mais aucune ne parait lrès-efficace. DU XIX° SIÈCLE. ; 201 MANDRAGORE Mandragora officinarum Pers. Atropa mandragora L. (Solanées. ) La Mandragore officinale est une plante vivace, à racine épaisse, fusiforme, charnue, longue, bifurquée ou trifurquée, munie de radi- celles minces, blanc jaunâtre. Les feuilles, toutes radicales, sont grandes, entières, ovales, ondulées, molles, glabres, d’un vert foncé, rapprochées et réunies en rosette, les extérieures obtuses, les inté- rieures acuminées. Les fleurs, blanc pourpré, sont dressées et soli- taires à l'extrémité de courts pédoncules radicaux naissant du milieu des feuilles. Elles présentent un calice turbiné, à cinq lanières étroites, linéaires, acuminées; une corolle campanulée, marcescente, un peu velue en dehors, plissée, à tube court, à limbe divisé en cinq lobes; cinq étamines, égalant à peu près la corolle, à filets dilatés et barbus à la base, à anthères épaisses ; un ovaire ovoïde ou globuleux, à deux loges pluriovulées, inséré sur un disque annulaire glanduleux, jaune, et surmonté d’un style simple terminé par un stigmate en tête. Le fruit est une baie ovoide, jaunâtre, charnue, molle et ren- fermant quelques graines réniformes. La Mandragore printanière (AZ. vernalis Bert.), souvent confondue avec la précédente, en diffère surtout par ses feuilles plus larges, son calice relativement plus court, sa corolle blanc verdàtre, et son fruit globuleux et beaucoup plus gros. Hamrrat. — Ces deux plantes croissent dans le midi de la France et sur tout le pourtour du bassin méditerranéen. On les trouve dans les champs, les lieux humides et ombragés, ete. Cuzrure. — Les mandragores ne sont guère cultivées que dans les jardins botaniques et quelquefois aussi dans les jardins d'agrément. On les propage de graines ou d’éclats de racines faits au printemps, en terrain sec. Dans le Nord, il faut les couvrir durant l'hiver. Parties usiTÉEs. — Les racines, les feuilles, les fruits. Récote. — La mandragore tire son nom de udpe, étable, et &yvp0c, nuisible, nuisible aux animaux. Ses racines, grosses et bifur- quées, ont été comparées aux cuisses de l'homme ; aussi les a-t-on appelées Anthropomorphon et Semihomo.V'après Matthiole, c'était une profession en Italie que de préparer les racines de mandragore, en 282 FLORE MÉDICALE leur donnant des formes humaines. On en fabriquait de fausses avec d'autres végétaux, tels que la bryone; on y attachait des idées de magie ; on leur attribuait la propriété de rendre heureux, de faire trouver de l'argent, de donner la fécondité, etc. C'était la Circé des anciens. Les fruits, nommés Pommes de mandragore, seraient, d'après quelques commentateurs de la Bible, le Dudaim, nom hébreu du ba- nanier (Mura paradisiacaX.). On connait deux variétés de mandragore. L'une, nommée Mandra- gore mâle, a les feuilles longues et larges, les fleurs blanches, elle est divisions obtuses ; son fruit est rond et uniloculaire. L'autre variété, dite Mandragore femelle, a les feuilles plus petites, étroites, les fleurs pourpres, elle est à divisions aiguës, et son fruit est allongé avec un calice persistant dont les divisions sont plus aiguës. ComposiTION CHIMIQUE. — Par sa composition comme par ses pro- priétés, la mandragore se rapproche de la belladone, mais elle est moins active. UsaGes. — La mandragore entrait autrefois dans le baume tran- quille et l’onguent populeum. On la remplace aujourd'hui par la bel- ladone. Pline raconte les cérémonies superstitieuses que l’on faisait pour arracher sa racine. Hippocrate, Galien et Celse en parlent dans leurs écrits. On l’employait comme stupéfiante lorsqu'on voulait pra- tiquer de grandes opérations; elle calmait les douleurs et produisait un uarcotisme profond dont est venu le proverbe des Latins : 77 à pris la mandragore, pour désigner un homme apathique. Boerhaave la pres- crivait, bouillie dans du lait, en cataplasmes que l'on appliquait sur les tumeurs scrofuleuses. Hoffbert et Swediaur la préconisaient contre les indurations cancéreuses et syphilitiques. Gilibert la disait propre à calmer les douleurs de la goutte. Elle est aujourd'hui tout à fait abandonnée, et n’est intéressante qu’au point de vue historique. Les fruits de la mandragore sont quelquefois la cause d’empoison- nements chez les enfants, qui les prennent pour de petites pommes. Le célèbre voyageur Pallas dit ( Voyage en diverses parties de l'empire russe, 1771-1776, t. 1) qu’en Sibérie ils portent le nom de Pommes d'Adam, et qu'ils jouissent de la réputation de guérir un grand nom- bre de maux. Ils sont aujourd'hui tout à fait inusités. DU XIX* SIÈCLE. 283 MANGLIER Rhizophora mangle L. Bruguiera gymnorhiza Lhér. (Rhizophorées. ) Le Manglier ou Palétuvier est un arbre de moyenne grandeur, à racines les unes traçantes à la surface du sol, les autres adventices et naissant sur la tige et les rameaux. La tige, haute de 4 à 6 mètres, ordinairement tortueuse, couverte d’une écorce épaisse, rugueuse, crevassée, brunâlre, se divise en rameaux nombreux, s'étendant au loin, portant des feuilles opposées, courtement pétiolées, très-grandes, ovales lancéolées, couvertes d’une efflorescence saline blanchâtre, marquées d’une nervure moyenne très-saillante à la face inférieure, qui est d’un vert pâle, et munies de stipules. Les fleurs sont jaune verdàtre, pendantes et accompagnées de deux bractées. Elles présen- tent un calice à divisions profondes, linéaires ; une corolle de dix à douze pétales carénés, ciliés, velus à la base ; des étamines en nom- bre double des pétales ; un ovaire semi-infère, surmonté d'un style trigone terminé par un stigmate trifide. Le fruit est une baie ovoïde, rougeûtre, pulpeuse, à une seule loge monosperme, surmonté du style persistant. La graine commence sa germination dans le fruit même, et ne s'en détache que lorsque la radicule s’est implantée dans le sol. Hagrrat. — Les mangliers habitent les régions chaudes des Indes Orientales et de l'Amérique ; on en trouve au Mexique, aux Antilles, à la Guyane, au Brésil, ete. Is-se rencontrent surtout aux embou- chures des fleuves et le long des rivages de la mer, dans les terrains vaseux, où ils sont souvent baignés par les flots. Les racines soutien- nent la tige au-dessus du sol, souvent à une assez grande hauteur. Ces arbres ne sont pas cultivés dans leur pays natal, et, en Europe, on ne les trouve pas même dans les jardins botaniques. PARTIES usITÉES. — L'écorce, le suc qui en découle par incisions. Récorre. — Lorsqu'on fait des incisions aux écorces des mangliers, il en découle un suc rouge qui, par dessiccation, fournit le kino de la Colombie. Ce produit, qu'un négociant français, M. Anthoïine, a fait connaître le premier, se présente sous la forme de pains aplatis, du poids de 1,000 à 1,500 grammes, et porte à l'extérieur l'empreinte d'une feuille de palmier ou de canne d'Inde ; il est recouvert d’une poudre rouge qui lui donne l'aspect d’un sang-dragon commun (Gui- 28/ FLORE MÉDICALE bourt, Drogues simples, t, KE, p. 40%). I est friable, à cassure bril- lante, d’un rouge brunâtre; sa saveur est astringente et amère ; son odeur est faible. Il est en grande partie soluble dans l’eau froide, plus soluble dans l’eau bouillante, qui se trouble par le refroidissement. I se dissout presque en entier dans l'alcool. À l'histoire des palétuviers se rattache un fait singulier et fort curieux. Certaines plages du Yucatan abondent en mangliers, dont les branches produisent les racines aériennes qui viennent s’implan- ter dans le sol, et forment un treillis souvent inextricable. Le flux et le reflux des eaux submergent tout à fait et laissent à sec les troncs et les racines des mangliers; les huîtres, entrainées par la marée, sont retenues par les racines, s’y attachent et ensuite se joignent les unes aux autres. Les Indiens coupent les racines au-dessus et au-dessous de cette conglomération de mollusques, qu'ils apportent en ville et vendent sous le nom de grappes d'huîtres (/?acimo de ostiones). Ces huîtres se conservent fraiches pendant trois ou quatre jours, pourvu qu'on les maintienne à l'ombre et attachées à la racine de manglier. M. le docteur Jourdanet, qui a exercé pendant vingt ans la médecine au Mexique, nous a rapporté que ces huîtres, qui sont man- gées crues, ont souvent occasionné de véritables empoisonnements, caractérisés par une abolition presque complète de la sensibilité des lèvres d'abord, des extrémités ensuite ; de sorte que les malades ne se sentent pas marcher, et que la sensibilité tactile est abolie aux lèvres et aux mains. Il est très-probable que ce phénomène doit être altribué à une altération ou à une maladie des huîtres analogue à celle que l’on a constatée chez quelques poissons, crustacés ou mol- lusques, et nullement aux mangliers sur lesquels vivent ces animaux, car ces plantes ne sont pas vénéneuses. ComposiTioN cHimiQue. — Toutes les parties des mangliers sont riches en tannin analogue à celui des kinos et des sang-dragons. Usages. — Suivant M. Batka, l'écorce du À. mangle, nommé Mangrove, dans quelques ouvrages, est acidule et astringente. Ce serait le Cortex astringens des auteurs (Journ. de pharm., t. XNI, p. 296). Elle sert à tanner les cuirs. Celle du À. gymnorrhiza L. (Bruigeria gymmorrhiza Lan.) sert à teindre en noir. D'après Perrotet, l'écorce du À. Tagal est employée, en poudre, par les habitänts des Philippines, en guise de quinquina. Dans l'Inde, on mange l'écorce et les feuilles de certains rhizo- DU XIX° SIÈCLE. 285 phoras. On fait cuire la moelle dans du vin de palmier ou du jus de poisson. Aux Antilles, et en général dans l'Amérique, d'après Pison et Margraff (Host. naturalis Brasilie, 1648), on appliquait la poudre de rhizophoras sur la morsure des animaux venimeux. On s’en sert pour leindre en rouge. Les fruits sont bons à manger ; on en fait une ‘sorte de vin aux Antilles (Labat, Nouveau voyage aux îles de l Amé- rique, 1722,.t. IL, p. 199). MANGOSTAN Mangostana Indica Rumpbh. Garcinia mangostana L. (Guttifères. ) Le Mangostan ou Mangoustan est un arbre de moyenne grandeur, dont la tige, haute de 6 à 7 mètres, droite, couverte d’une écorce crevassée et grisàtre, se divise en rameaux obliques, opposés, dont l'ensemble forme une cime assez régulière. Ils portent des feuilles opposées, à pétiole renflé, à limbe ovale lancéolé, aigu, long de 0,45 à 0",20 sur environ 0,10 de largeur, entier, ferme, assez épais, lisse, d'un vert vif et brillant en dessus, olivätre en dessous, marqué de nervures latérales parallèles. Les fleurs, de moyenne grandeur, rouge aurore, sont solitaires à l'extrémité de courts pédoncules axil- laires et terminaux. Elles présentent un calice à quatre divisions ; une corolle à quatre pétales arrondis et concaves; seize élamines à anthères arrondies ; un ovaire globuleux, offrant cinq à huit loges uniovulées, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate étoilé et divisé en lobes dont le nombre égale celui des loges. Le fruit est sphérique, charnu, du volume d’une orange moyenne, ren- fermé dans une enveloppe ou coque épaisse de près d’un centimètre, vert jaunâtre en dehors, rouge en dedans et n’adhérant pas au fruit. L'intérieur est divisé en cinq à huit loges remplies d’une chair pul- peuse, blanche, succulente, dans laquelle se trouve une graine de la forme et de la grosseur d’une amande. Hagirar. — Le mangostan est originaire des Molujues, d’où il a été transporté à Siam, à Malacca, à Java, à Luçon, et dans quelques régions voisines. Il est cultivé en grand dans les Indes, où on en fait des avenues ; mais, en Europe, on ne le trouve guère que dans les jardins botaniques, où il est même assez rare. ParTiES usITÉES. — Les fruits, le suc qui découle de la plante. 286 FLORE MÉDICALE Récozre. — Nous avons dit, en parlant du Guttier, comment Gaertner, après avoir réuni en un seul genre, qu’il nomma Mangos- tana, les deux genres Garcinia et Morella, de Linné, distinguait les deux carcapulli d’Acosta et de Lynscheten nomma le premier Man- gostana cambogia et le second M. morella. Le fruit appelé m#angoustan est une sorte de baie à cinq loges, de la grosseur d’une orange, revêtu d'un épicarpe noir recouvrant une partie blanche charnue, et formant des espèces de côtes, molles, fon- dantes, à saveur sucrée, légèrement acidule, d’une odeur prononcée de framboises. Suivant Thunberg (Voyage, t. U, p. 377), c’est le plus délicieux fruit de l’Inde. D'après Rafles et Crawfurd (Car. des plantes de Java), on le nomme, à Java, en langage du pays, le 07 des fruits. La Mangostana garcinia donne, par incision de son écorce, un suc semblable à la gomme-gutte, mais moins actif. Les fruits en sont exempts, tandis que ceux de la mangue (Moengifera indica L., dont nous parlerons ailleurs, ont un léger goût de térébenthine. Couposirion cuimique. — Les fruits des mungostana renferment du sucre, un acide libre, un principe aromatique, de la pectine, de l’acide pectique, etc. Le suc résineux de ces plantes contient une matière gommeuse et une autre résineuse. Le Mangostana malaba- rica Gaert. (Garcinia malabarica Lam.) donne, par incision, une ma- tière résineuse jaune, qui est.si abondante dans le fruit, qu'elle transsude à travers le péricarpe et y forme une couche épaisse. On se sert de cette substance en guise de colle, pour la reliure principale- ment, et pour imprégner les tissus. Usages. — Les mangostana et leurs produits sont tout à fait in- connus en France. L’écorce des fruits (épicarpe) d’un pourpre noir, est regardée comme astringente et vermifuge. La partie charnue (sarcocarpe) est très-rafraichissante ; on la croit utile dans les fièvres inflammatoires, le scorbut, ete. Elle est un peu laxative. Les épicarpes d’autres #7angostana et garcinia sont employés comme astringents. Les fruits jeunes du 27. malabarica, en décoc- tion, sont regurdés, dans l'Inde, comme un bon remède contre les aphtes et les crevasses de la langue (Rhéede, Hort. Malab., €. WE, p. #l). DU XIX° SIÈCLE. 287 MANGUIER Mangifera Indica L. ( Térébinthacées - Pistaciées. ) Le Manguier ou Arbre de Mango est un arbre dont la tige, haute de 10 à 15 mètres, couverte d’une écorce épaisse, rugueuse et noi- râtre, se divise en rameaux nombreux, dont l’ensemble forme une cime large et étalée, et qui portent vers leur sommet des feuilles alternes, oblongues lancéolées, entières, longues d'environ 0",20 sur 0",05 de largeur, fermes et coriaces. Les fleurs, petites, blan- ches, teintées de rouge, quelquefois polygames par avortement, sont disposées en grappes, dont la réunion constitue une large panicule terminale. Elles présentent un calice profondément divisé en cinq lobes égaux et caducs; une corolle à cinq pétales oblongs, sessiles, étalés, alternant avec les divisions du calice; cinq étamines; un ovaire ovoïde, libre, inséré sur un disque glanduleux, et portant un style latéral terminé par un sligmate obtus, globuleux, qui devient d'un rouge carmin après l'épanouissement de la fleur. Le fruit est une drupe ovoïde, jaune, rouge, noire ou verdâtre, de forme assez variable, du volume d’une poire ordinaire, renfermant, sous une peau mince mais ferme, une chair pulpeuse, jaune, succulente quoique filandreuse. Le noyau large et aplati qui s’y trouve contient une amande un peu charnue et très-amère. HamiraT. — Le manguier est originaire du Malabar et des régions voisines, d'où il a été transporté et naturalisé à Cayenne, aux Antilles et à l'île Maurice. On le cultive en grand dans ces divers pays. En Europe, on ne le rencontre que dans les jardins botaniques ; il exige la serre chaude, et se multiplie de boutures étouffées. Parties usitées. — Les feuilles, le bois, le fruit, les graines, le suc résineux qui découle de la plante. Récore. — Les fruits des manguiers, qui sont des plus usités des tropiques, se récoltent à leur maturité. Le bois de l'arbre est très- estimé dans l'Inde ; il sert, avec celui de santal, à brüler les personnes de distinction. Les feuilles sont employées pour orner les maisons les jours de fête. Composrrion cutmique. — Les fruits des manguiers, nommés Man- ques, renferment très-probablement, comme tous les autres fruits 288 FLORE MÉDICALE charnus, du sucre, un acide organique, de la pectine et de l'acide pectique. Les graines présentent une amande tournée en spirale, formée de deux cotylédons qui paraissent être constilués par des pièces articulées. Cette amande est fortement astringente, et, d'après M. Avequin (Journ. de pharm., &. XNN, p. 421), renferme une grande proportion d'acide gallique libre, que l’on pourrait en extraire éco- nomiquement et facilement. Usages. — Les mangues sont très-recherchées dans l'Inde et en Amérique ; on les mange partout où elles mürissent. Leur chair est jaune, filandreuse, surtout autour du noyau, d’où lenom de Manque à perruque, qu'on leur donne à lle de France. Leur saveur est fon- dante, sucrée, légèrement térébenthinée. On les mange pelées, cou- pées par tranches, avec du vin, du sucre et des aromates. On les fait bouillir quelquefois. On les conserve salées et en compotes, ou con- fites soit au sucre soit au vinaigre. Il y a beaucoup de variétés de ce fruit. Quelques-unes ne sentent pas la térébenthine ; d’autres ont la chair rouge. La mangue de Java pèse jusqu'à sept livres. On regarde leur chair comme nourrissante et rafraichissante, propre à calmer les douleurs intestinales, et à guérir du scorbut. Il est probable que le fruit nommé Bz/ubo aux Phi- lippines est une sorte de mangue. Les branches et les fruits des mangliers laissent exsuder, avant leur maturilé, un suc résineux, qu’on a préconisé comme anti-syphili- tique. Les feuilles jouissent d'une réputation anti-odontalgique fort usurpée. Les amandes passent pour être anthelmintiques. MANIOC Manihot edulis Plum. Jatropha manihot L. (Euphorbiacées - Crotonées.) Le Manioc est un arbrisseau à racine très-épaisse, charnue, fécu- lente. La tige, haute de 2 à 3 mètres, noueuse, tendre, cassante, cou- verte d'une écorce lisse, verdätre ou rougeâtre, et remplie d’une moelle très-abondante, se divise, vers le sommet, en un petit nom- bre de rameaux cassants, portant des feuilles alternes, longuement pétiolées, très-grandes, lisses, assez fermes, vert clair en dessus, glauques en dessous, palmées, profondément divisées en trois, cinq ou sept lobes aigus et entiers. Les fleurs, rougeâtres, monoïques, sont DU XIX° SIÈCLE. 289 disposées en grappes terminales ; les mâles ont un calice pétaloïde à cinq divisions, et dix étamines monadelphes; les femelles ont le calice à cinq divisions plus profondes, et un ovaire à trois loges, sur- montées chacune d’un style simple à stigmate bifide. Le fruit est une capsule arrondie, lisse, légèrement ridée, à trois loges, se séparant à la maturité en trois coques, dont çhacune renferme une graine ovoïde, aplatie, luisante, caronculée, d'un gris blanchâtre mêlé de taches un peu plus foncées (PI. 32). Hagirar. — Originaire de l’Amérique du Nord, et particulière ment du Mexique et de la Caroline, le manioc a été introduit aux Antilles et dans les régions chaudes de l'Amérique centrale. Cuzrure. — Cet arbrisseau n’a été jusqu’à ce jour cultivé, en Eu- rope, que dans les jardins botaniques, où on le lient en serre chaude. Il paraît cependant susceptible d’être cultivé en pleine terre, du moins dans les contrées méridionales. Les graines ne reproduisant guère que le type sauvage, il serait préférable de faire venir d’Amé- rique les variétés à grosses racines que l’on y cultive généralement, et qui se multiplient avec la plus grande facilité par éclats de pieds ou par rejetons. Parries usiTÉES. — La moelle, les racines. Récozre. — Le manihot, manioc ou magnoc est une des plantes les plus nécessaires à l'homme. Le nombre des individus qui s’en nourrissent presque exclusivement dépasse de beaucoup celui des hommes qui mangent du blé. On en connaît un grand nombre d’es- pèces. Deux variétés doivent surtout nous occuper, tant à cause de l'usage qu’on en fait, comme matière alimentaire, qu’en raison du poison violent qu’elles renferment, à côté de la fécule la plus inof- fensive. La première espèce porte le nom de Manioc doux, Camagnoc, Aïpi, Juca dulce (Manihot Aïpi Pohl.), ne renferme aucun principe dangereux. La racine peut être mangée cuite sous le cendre ou dans l’eau, comme on le fait des pommes de terre. Les animaux la man- gent crue. L'autre espèce, nommée plus spécialement Manihot, Ma- nioc amer, Juca amarya, Mandüba, Mandioca, (Manihot utilissima Pohl., Janipha manihot Kunth), contient, dans sa racine, un poison des plus violents. Cowposirion caimiQuE. — Le principe actif du manioc vénéneux est, d'après MM. Boutron et Ô. Henry, de l'acide cyanhydrique, ou un Flore, T. Il. 19 290 FLORE MÉDICALE corps qui se transforme facilement en cet acide. Il tue tous les ani- maux, en causant des vomissements, des convulsions, des sueurs froides, et détermine rapidement la mort. D’après Rajon, exposé à l'air, il perd ses propriétés en trente-six heures ; il les perd égale- ment par la coction. Le docteur Firmin, de Surinam, M. Ricord Madiana ont isolé ce principe par distillation, et MM. Boutron et O. Henry ont déterminé sa nature. Le traitement de cet empoison- nement consiste dans des affusions d'eau froide le long du rachis, et des inspirations chlorées; qnant au sucre, au rocou, à l’eau de mer et aux sucs de diverses plantes, qui ont été successivement proposés comme antidotes, on ne doit y avoir aucune confiance. Le suc de la plante laisse déposer une fécule fine qui est la #ous- sache; elle est formée de grains arrondis, égaux en volume, d’un diamètre de 4 de millimètre, présentant à leur centre un point noir. Quand cette fécule humide est séchée sur des plaques chaudes, des grains crèvent et s'agglomèrent en petites masses irrégulières, qui forment le fapioka. Celui-ci, pulvérisé et soumis à l’action de la vapeur d’iode, prend une couleur chamois. Ce caractère ne peut servir à le distinguer des faux tapiokas que l’on fabrique avec toute espèce de fécule et dont la plupart prennent la même coloration. Le vrai tapioka est en grumeaux irréguliers, composés de grains agglomérés, tandis que le factice est en fragments presque réguliers, d’une structure homogène non granulée. Usages. — Comme toutes les fécules, celle du manioc peut être utilisée en médecine comme émolliente, mais c’est surtout comme aliment qu’elle est précieuse. On la mange sous la forme de diffé- rents produits qui portent le nom de Couaque, Cassave, Moussache ou Cipipa, Tapioka, ete. La farine de manioc est un mélange d’amidon, de fibre végétale et d’un peu de matière extractive. On la mélange à la farine de froment pour en faire du pain. On l'obtient en enlevant l'écorce de la racine de manioc, en réduisant le corps de la racine en pulpe, au moyen de la râpe, et en passant au travers d’un sac de palmier de forme par- ticulière, ou en exprimant à la presse. La fécule est desséchée sous des cheminées, puis elle est pulvérisée. La couaque s'obtient en séchant sur des claies, exposées à la cha- leur, la fécule de l'opération précédente ; on la crible ensuite pour l'obtenir d’un volume à peu près égal; on la chauffe par petites par- DU XIX° SIÈCLE. 291 ties dans des chaudières de fonte, moyennement chauffées, jusqu’à ce que la fécule ait subi un commencement de torréfaction. Elle se gonfle beaucoup dans l’eau et dans le bouillon. Pour obtenir la cassave, on étend la fécule non séchée en forme de gâteau mince sur une plaque de fer chauffée; le mucilage et l'amidon, en cuisant, se tiennent entre eux et forment un gâteau so- lide, qui est très-estimé des créoles. Nous avons dit que la moussache était la fécule séchée à l'air. On la vend quelquefois pour de l’arow-root ; mais elle s’en distingue par ses granules sphériques, beaucoup plus petits que ceux de l'arow-root, et que ceux de l’amidon de blé. Le tapioka sert à faire des bouillies, des potages. Il n’est pas com- plétement soluble dans l’eau. Ce liquide bouillant, forme, avec lui, une espèce d'empois qui présente un caractère particulier de trans- parence et de viscosité. Il reste un résidu, sous forme de flocons muqueux, qui sont colorés par l’iode. Il est probable que ce sont des débris de cellules tapissées de fécule. MARCHANTIE Marchantia polymorpha L. (Hépatiques. } La Marchantie polymorphe, vulgairement appelée Hépatique des fontaines, est une petite plante cryptogame, à frondes {expansions foliacées) longues de 0,05 à 0,10, lobées ou pennatifides, à divi- sions obtuses, presque entières, glabres, d’un vert foncé, ponctuées en dessus, marquées en dessous de nervures anastomosées, couvertes de nombreuses fibres radicales. Les organes reproducteurs sont portés sur des pédicules de deux sortes. Les mâles, longs de 0",04 à 0",02, naissent sur le bord des divisions de la fronde, et se terminent par un disque membraneux, lamelleux et blanc en dessous, à huit divisions renfermées dans la membrane du disque, et contenant la matière fécondante. Les pédicules femelles, longs de 0,03 à 0",04, rougeà- tres à la base, velus, opaques, striés, un peu tortillés, naissent éga- lement sur les bords de la fronde, dans de petites cavités, et se divisent au sommet en dix rayons linéaires, rabattus, puis étalés, recouvrant deux ou trois fleurs femelles, entourées d’écailles blan- ches, et dont une seule fructifie. Le /ruit est une petite capsule à 292 FLORE MÉDICALE quatre valves. On observe encore sur la fronde des cupules sessiles, remplies de petits corps lenliculaires, qui paraissent être des bulbilles ou gemmes. ; Cette plante présente de nombreuses variétés, que plusieurs au- teurs ont élevées au rang d'espèces, et parmi lesquelles on remarque la Marchantie hémisphérique (AZ. Lemisphærica L.). Hagrrar. — Les marchanties sont lrès-communes en Europe ; on les trouve dans les lieux humides et ombragés, au bord des puits, des fossés, des fontaines, dans les cours inhabitées, etc. C’est à peine si on les cultive dans quelques jardins botaniques. Parties usiTÉEs. — Toule la plante. Récozre. — L'hépatique des fontaines, que l'on trouve souvent dans les cours ombragées et humides, peut être recueillie pendant toutes les saisons, mais il vaut mieux la cueillir lorsqu'elle est dans toute sa vigueur, c'est-à-dire en été. Après avoir séparé les frondes mortes, on la fait sécher au soleil ou à l’étuve. On la conserve dans un endroit sec et à l’abri du contact de l'air. Composirion culmique. — L'odeur de marchantie est fade, insipide et marécageuse. On ne sait rien sur sa composition. Usages. — La marchantie tire son nom d’hépatique de la pro- priété qu’on lui attribuait de guérir les engorgements abdominaux, et principalement ceux du foie. Regardée comme diurétique, dépu- rative et détersive, elle a été vantée par Lieutaud dans les engorge- ments du foie et les maladies chroniques de la peau. M. Short, mé- decin de l'Infirmerie royale d'Édimbourg, lui attribue des propriétés diurétiques et dit l'avoir employée avec succès contre les hydropi- sies ; il l’applique sous forme de cataplasmes, qu'il prépare avec la plante fraiche, bouillie et pulpée dans l’eau et de Ja farine de lin. Il pose ces cataplasmes sur le ventre ct les renouvelle souvent, pendant plusieurs jours. Si, après quinze jours ou un mois de bons effets ne se sont pas produits, il est inutile de continuer. Cette médication, dil M. Short, jette quelquefois les malades dans une grande faiblesse, qui oblige à en suspendre l'emploi. Malgré les résultats que dit avoir obtenus le médecin d'Édimbourg, ce mode de traitement des hydro- pisies trouvera beaucoup d'incrédules et peu d'imitateurs. M. Cazin a employé la marchantia dans deux cas d’anasarque : dans le premier, les effets ont été nuls; dans le second, la plante avait été administrée intus et extra; les effets diurétiques ont été assez prononcés. DU XIX SIÈCLE. 293 M. le docteur Levrat-Perrotton dit avoir employé avec succès la marchantie contre la gravelle ; le docteur Gensoul l’emploie souvent comme diurétique et en obtient de bons résultats. Elle mérite donc l'attention des praticiens. Les anciens connaissaient cette plante, et Pallini dit d’elle : « Apud medicos olim in usu erat (Marchantia) in morbis hepatis et vesice. » Le MT. conica jouit des mèmes propriétés que le A7. polymorpha. MARJOLAINE Majorana hortensis Mœnch. Origanum majorana L. (Labiées -Saturéiées. ) La Marjolaine des jardins, appelée aussi Grand Origan, est une plante vivace, à racines grêles, fibreuses. La tige, haute de 0",30 à 0°,50, sous-ligneuse à la base, tétragone, grêle, pubescente, ferme, dressée, très-rameuse, porte des feuilles opposées, pétiolées, petites, ovales-oblongues, obtuses, entières, cotonneuses, blanchâtres. Les fleurs, petites, blanches ou purpurines, accompagnées de bractées colorées, sont disposées en épis courts, tétragones arrondis, com- pactes, formant par leur réunion des corymbes dont l’ensemble cons- titue une grande panicule terminale. Elles présentent un calice à deux lèvres, la supérieure beaucoup plus grande ; une corolle à deux lèvres, la supérieure échancrée, l'inférieure trifide ; quatre étamines didynames, à anthères rougeâtres; un pistil composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple et d’un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes lisses. La Marjolaine à coquilles ou Origan d'Égypte (42. crassifolia Benth., Origanum Æqyptiacum Auct.) est aussi vivace, et se distingue de la précédente, surtout par ses feuilles plus grandes, sessiles, épaisses, cotonneuses, ainsi que les rameaux, les bractées et le calice. Hagrrar. — Ces deux plantes sont originaires de la région médi- terranéenne, où elles croissent dans les lieux découverts. Cuzrure. — La marjolaine demande une exposition chaude, une terre légère et assez sèche. On la multiplie de graines, de boutures et d'éclats de pieds, au printemps ou à l'automne. Dans le Nord, elle exige, durant l'hiver, une couverture ou l’orangerie. La marjolaine à coquilles est encore plus délicate. PARTIES usITÉES. — Les sommités fleuries. Récozte. — On doit récolter la marjolaine au moment de la flo- 294 FLORE MÉDICALE raison : On coupe la tige à la base; on attache les sommités en petits bouquets peu serrés, afin que l’air puisse circuler à l'intérieur; on les dispose en chapelets avec de la ficelle et on les suspend en guir- landes, au séchoir ou au grenier, mais toujours à l'ombre. Lorsque la plante est sèche, on la conserve dans des boîtes ou dans des sacs parfaitement fermés et à l'abri de la lumière. Composition cuimique. — Toutes les parties de la marjolaine exha- lent une odeur aromatique très-forte, analogue à celle de la sauge, du thym et du romarin, Sa saveur est chaude, aromatique. Dans le midi de l'Europe, on l’emploie comme condiment pour l'art euli- naire. Elle doit ses propriétés à une huile essentielle oxygénée qu'on en sépare par distillation. D’après Proust, la marjolaine des pays chauds, comme d’ailleurs beaucoup d’autres labiées, contient du cam- phre; elle renferme en outre un principe amer assez abondant. Usaces. —La marjolaine entre dans la composition de l’Æau géné- rale, de l'Eau impériale, de la Poudre sternutatoire, Au Sirop d'ar- moise composé, du Baume tranquille, ete. On en préparait autrefois l’'Ongquent de marjolaine. On Y'emploie surtout en infusion et on en fait une eau distillée. Elle présente un des aromatiques indigènes les plus agréables, et si elle est aujourd’hui tombée dans un oubli presque complet, cela doit être attribué à ce que plusieurs plantes de la même famille jouissent des mêmes propriétés, et qu’on peut, sans inconvé- nient, les substituer les unes aux autres. La marjolaine était autrefois employée dans les maladies ner- veuses. On la prescrivait dans les paralysies, les vertiges, l’épilep- sie, etc. On la regardait comme expectorante contre le catarrhe mu- queux, et comme propre à donner plus de force et de tonicité au tissu pulmonaire. Elle passait aussi pour donner de la force à l'estomac. D'après Paulet, la marjolaine est l’Araracos de Théophraste. Selon Stackouse, ce nom devrait être appliqué à la marjolaine coquille, (0. Egyptiacum L., M. crassifolia Benth). Dioscoride indique la marjolaine d'Héraclée (0. Héracleoticum L. et VO. onites L., O. Smyr- neum L. etc.), comme propres à remédier à la piqüre des serpents. Murray signale l'O. creticum L. comme salutaire pour calmer les douleurs dentaires. On l’emploie comme condiment. DU XIX° SIÈCLE. 295 MAROUTE Maruta fœtida Gass. Anthemis cotula L. (Composées - Sénécionidées. ) La Maroute, appelée aussi Camomille des chiens ou Camomille puante, est une plante annuelle, à racines fibreuses. La tige, haute de 0,25 à 0",50, un peu anguleuse, striée, glabre ou à peine pu- bescente, dressée ou ascendante, très-rameuse, porte des feuilles alternes, sessiles, bipennées, à segments linéaires étroits et pointus, presque glabres, d'un vert assez foncé, d’une odeur très-forte. Les fleurs, jaunes au centre, blanches à la circonférence, sont disposées en capitules solitaires à l'extrémité des rameaux, à réceptacle conique, saillant, offrant à la base de chaque fleur une écaille étroite et subu- lée, entouré d’un involucre à folioles scarieuses, étroites, blanchâtres sur les bords, imbriquées. Les fleurs du centre sont tubuleuses et hermaphrodites ; elles ont cinq étamines épigynes soudées par les an- thères, et un ovaire simple, infère, uniovulé, surmonté d’un style simple et d'un stigmate bifide; celles de la circonférence sont ligu- lées et femelles, quelquefois stériles. Le fruit est un akène ovoïde, gris brunâtre, marqué de dix côtes longitudinales décomposées en tubercules saillants. Les akènes d’un même capitule sont souvent inégaux. HagiTaT. — La maroute est commune dans presque toutes les ré- gions de l'Europe ; on la trouve en abondance dans les moissons, les champs en friche, les lieux cultivés, au bord des chemins, le long des ruisseaux et des marais, etc. Cuzrure. — Cette plante n’est pas cultivée exclusivement pour l'usage médical ; elle croît dans tous les sols, et se propage très-faci- lement par graines, semées en place au printemps. Mais on préfère les pieds qui croissent à l’état spontané. PARTIES usITÉES. — Les inflorescences, ou capitules. Récozte. — La maroute doit être récoltée lorsque l’inflorescence est parfaitement développée. On coupe les pédoncules au sommet, de manière à séparer le capitule {seul, et on fait sécher au grenier ou au séchoir, mais toujours à l'ombre. Il faut éviter de cueillir les fleurs lorsqu'elles sont mouillées, parce qu’alors elles se noircissent en séchant. 296 FLORE MÉDICALE Composrrion cuimique. — La maroute répand une odeur des plus infectes, surtout lorsqu'on la froisse; elle la doit à une huile essen- tielle qu'on peut en séparer par distillation. Elle est d'un vert bleuûtre et d'une odeur très-forte. On a prétendu que comme les mairicaires dont elle est voisine, elle pouvait fournir une sorte de camphre cristallisé, mais de nouvelles recherches sont nécessaires à cet égard. UsaGes. — L’odeur fétide de cette plante la fait regarder comme un excellent succédané de l’assa-fætida. Cest donc contre les né- vroses, et plus spécialement contre l’hystérie qu’on l’a administrée, tantôt en poudre, tantôt sous forme de tisane; on la faisait pren- dre contre les gastralgies, les entéralgies et les coliques venteuses. Elle était regardée comme un {rès-bon carminatif. Peyrilhe prétend lavoir donnée avec succès contre les fièvres intermittentes rebelles au quinquina. Roques dit que son infusion, administrée au moment du frisson, peut empêcher le retour de l'accès, comme le ferait l’absinthe ou la camomille. Zimmermann place l’infusion de maroute immédiatement après l’opium pour combattre la dysentérie, ce qui nous paraît un peu hasardé. Il la considère comme antiseptique. Gilibert la faisait prendre contre les scrofules. On l’a administrée pour combattre les accidents nerveux qui précèdent ou qui suivent la menstruation. M. Cazin l’a employée avec succès dans la dysménor- rhée nerveuse et dans les gastralgies accompagnées de flatuosités. M. Dubois de Tournay a préconisé l’infusion de cette plante dans les pneumatoses. La camomille des champs (Anfhemis arvensis L.) jouit d’une amertume très-prononcée. Roques la considère comme un de nos meilleurs fébrifuges indigènes. On la substitue souvent à la matri- caire. La camomille des teinturiers, ou œil de bœuf (Anthemis tinc- toria L.) possède des propriétés analogues. Elle fournit à la teinture une couleur jaune. MARRONNIER D'INDE Æsculus hippocastanum L. (Hippocastanées. ) Le Marronnier d'Inde est un grand et bel arbre, à racine pivotante et ramifiée. La tige, haute de 20 à 25 mètres, couverte d'une écorce rugueuse et d’un brun grisàtre, se divise en rameaux nombreux, DU XIX° SIÈCLE. 297 opposés, dont l’ensemble forme une large cime pyramidale, et quise terminent par des bourgeons très-gros, ovoides, pointus, à écailles imbriquées, glutineuses. Ils portent des feuilles opposées, à pétioles très-longs, renflés et articulés à la base, à limbe très-grand, digité, divisé en cinq ou sept folioles obovales, acuminées, rélrécies à la base, dentées, d’un beau vert en dessus, plus pâles en dessous. Les fleurs, grandes, blanches, tachées de rose, odorantes, sont groupées en longues et larges panicules terminales. Elles présentent un calice campanulé, à cinq lobes obtus et ciliés, caduc ; une corolle irrégulière à cinq pétales inégaux, libres, élalés, un peu onduleux et ciliés, on- guiculés à la base; sept étamines saillantes, insérées sur un disque annulaire, à filets arqués, déclinés, à anthères rougetres ; un ovaire libre, arrondi, épineux, à trois loges biovulées, surmonté d'un style réfléchi terminé par un très-petit stigmate. Le fruit est une capsule charnue-coriace, globuleuse, épineuse, s’ouvrant en deux ou trois valves, et renfermant une à quatre graines très-grosses, arrondies, déformées par compression, à testa ligneux luisant, marqué d’un hile très-large, et à cotylédons très-volumineux. Hagrrar. — Originaire d'Asie, cet arbre est aujourd’hui répandu et presque naturalisé en Europe. On le plante fréquemment dans les pares et les jardins; on en fait des avenues et il commence même à s’introduire dans les forêts. Parties usirées. — L’écorce, les fruits. Récorte. — L’écorce doit être récoltée au printemps et être prise sur des branches de moyenne grosseur. Après l'avoir séparée du bois, on la fait sécher. Dans le commerce, on la trouve en mor- ceaux roulés, d’un brun jaunätre en dehors, d’un jaune fauve en dedans. La cassure est très-fibreuse, la saveur amère; les écorces présentent une épaisseur variable ; on la trouve même quelquefois en fragments aplatis. Les fruits sont récoltés à l'automne. ComposiTioN cHiMiQuE. — L’écorce de marronnier d'Inde est riche en tannin. Sa saveur est astringente et amère. La potasse précipite son infusion avec coloration bleue. D'après MM. Pelletier et Caven- tou, elle contient une matière astringente rougeâtre, une huile verte, une matière colorante jaune, un acide, de la gomme, du ligneux. Le fruit ou marron d'Inde a une saveur amère extrêmement désa- gréable. IL contient une substance neutre que M. Cazoneri, qui l'a 298 FLORE MÉDICALE découverte, a nommée Æsculine, et qui a été étudiée par Trommsdorff, MM. Minor, Mouchon, Frémy, etc. M. Lepage, de Gisors, a trouvé que les marrons d'Inde décorti- qués contenaient pour 100 parties : eau, 45; tissu végétal, 8,50; fécule, 17,50 ; huile douce saponifiable, 6,50 ; glucose, 6,75 ; sub- stance particulière douce, 3,70; saponine ou principe amer, 4,45; matière protéique (albumine ou caséine), 3,35 ; gomme, 2,70 ; acides divers et sels, 1,b5. La fécule est combinée avec un principe amer que l’on peut enlever par des lavages à l’eau alcaline, procédé autre- fois proposé par Parmentier, remis depuis en vigueur par M. Flan- drin et par MM. Remilly et Thibierge. M. Raspail a proposé les lavages à l’eau acidulée de la pulpe de marrons pour enlever le principe amer. L’esculine est cristallisable, incolore, amère, inodore, peu soluble dans l’eau et l'alcool froids, plus soluble dans l'alcool bouillant, à peu près insoluble dans l’éther. Trommsdorff a signalé, le premier, un phénomène fort curieux de dichroïsme que présente la solution aqueuse d’esculine; elle paraît incolore par transmission et bleue par réflexion. Cette coloralion augmente par les alcalis. Le chlore la colore en rouge; elle précipite par le sous-acétate de plomb et réduit les sels de cuivre à l’état de protoxyde (Zvenger). Chauffée lentement, elle fond à 160°, et, plus tard, donne un produit cristallisable nommé Æsculetine. Les acides sulfurique et chlorhydrique étendus et la synaptase transforment l’esculine en glycose et en esculetine. C'est, par conséquent, un glycoside. La saponine des marrons d'Inde, traitée par les alcalis, produit l’acide esculique dont la formule = C*H**0". Usages. — La fécule du marron d'Inde peut êlre employée dans un grand nombre d'industries pour remplacer l’amidon. En raison de la saponine qu’il contient, on s’en est servi, dans certaines locali- tés pour savonner le linge. On a quelquefois employé la fécule comme cosmétique, en place de pâte d'amandes. On a voulu l'intro- duire dans la bougie stéarique : celle-ci devenait alors plus dure, mais elle brûlait très-mal. Le charlatanisme prône comme un spéci- fique contre la goutte et le rhumatisme, une huile qu'on dit en ex- traire au moyeu de l’éther. Cette prétendue propriété de l'huile de marrons d'Inde de guérir les douleurs diverses doit être placée sur la mème ligne que la vieille croyance populaire d’après laquelle il suffit DU XIX‘ SIÈCLE. 299 de porter trois marrons d'Inde dans une poche, placée à gauche, pour êlre guéri et préservé de toute espèce de maux. Il n’est pas de préjugé, pour si ridicule qu’il soit, qui n’ait encore des adhérents, ni d’absurdité que la spéculation ne puisse exploiter. Un pharmacien distingué de Lyon, M. Mouchon, a beaucoup pré- conisé l’esculine comme fébrifuge. Les observations publiées par M. le docteur Durand de Lunel, celles qui ont été recueillies à Lyon et à Saint-Étienne, semblent donner quelque valeur à ce médica- ment. Toutefois, nous croyons que de nouvelles expériences sont né- cessaires, surtout dans les pays où les fièvres intermittentes sont en- démiques, tels que l’Algérie, les Dombes, la Sologne et les Landes de Gascogne, avant de se prononcer définitivement sur la valeur de ce médicament : car si les observations de M. Durand sont favorables à l’esculine, celles de M. Vernay lui sont contraires. Depuis 1720, époque à laquelle le président Bon proposa à l'Aca- démie des sciences l'écorce de marronnier d'Inde comme fébrifuge, elle n’a cessé d’être employée dans divers pays d'Europe, et il est résulté de tous ces essais que si elle parait guérir quelquefois les fiè- vres légères, elle est impuissante dans un grand nombre de cas; aussi est-elle aujourd'hui à peu près abandonnée. On l'employait en poudre ou en décoction à la dose de 4 à 6 grammes comme tonique, et de 15 à 20 grammes comme fébrifuge. A l'extérieur, la poudre est regardée comme tonique, détersive et anti-septique. Coste et Wilmet l'ont quelquefois substituée, avec avantage, au quinquina, pour certains pansements. MARRUBE : Marrubium vulgare L. ( Labiées - Stachydées. ) Le Marrube blanc ou commun est une plante vivace, à racines épaisses, ligneuses, fibreuses, blanchätres. Les tiges, hautes de 0,35 à 0°,65, fermes, tétragones, cotonneuses blanchâtres, dressées, un peu rameuses, portent des feuilles opposées, pétiolées, ovales aiguës, crénelées, crépues, ridées, d’un vert cendré, cotonneuses, surtout en dessous. Les fleurs, blanches, petites, sessiles, peu nombreuses, très- serrées, sont groupées en faux verticilles axillaires, compactes, ac- compagnées de bractées courtes, aiguës, subulées. Elles présentent 300 FLORE MÉDICALE un calice tubuleux, cylindrique, velu, strié, à dix dents alternative- ment grandes et petites; une corolle irrégulière, bilabiée, à tube légèrement arqué et dépassant le calice, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure dressée, plane, étroite et bifide, l'inférieure à trois lobes inégaux, dont deux latéraux petits, ovales et obtus, et un médian plus grand et échancré ; quatre étamines didynames très- courtes, incluses ; un ovaire composé de quatre carpelles libres, unio- vulés, insérés sur un disque charnu, et surmonté d’un style simple, court, terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes cunéiformes obovales, lisses et glabres, à trois angles arron- dis, renfermés dans le calice persistant. Hagirar. — Le marrube blanc est commun dans toute l'Europe ; il croit en abondance dans les lieux incultes, les décombres, au bord des chemins et des fossés, etc. Cuzrure. — Cette plante, assez abondante à l’élat sauvage pour suffire aux besoins de là médecine, n’est cullivée que dans les jardins botaniques. Elle vient à peu près dans tous les sols, et se propage très- facilement par graines, ou par éclats de pieds, plantés à la fin de l'hiver. Parties usitées. — Les feuilles, les sommités fleuries. Récozre. — La récolte du marrube se fait au moment de la flo- raison. Il perd une partie de ses propriétés par la dessiccalion, qui doit être faite à l'ombre; mais il conserve son principe amer. Les feuilles se courbent en dessus, de sorte que lorsque la plante est sèche, la partie inférieure des feuilles, qui est plus blanche, devient plus apparente. ComposiTioN CHIMIQUE. — Lorsque le marrube est frais, il répand une odeur forte, légèrement musquée. Sa saveur est chaude, amère, nauséeuse. Elle doit être attribuée à une huile volatile. Le suc de la plante précipite abondamment en noir par les persels de fer. On a même fait de l'encre par ce procédé. Cette réaction prouve sa richesse en tannin. On y trouve également de l'acide gallique et un principe amer. Ses principes sont solubles dans l’eau et dans l'alcool. Usaces. —- Malgré l'enthousiasme avec lequel Cullen et Dehaen ont vanté le marrube, il est tout à fait inusité de nos jours. Gilibert le regardait comme un dépuratif puissant et comme une des meilleures plantes d'Europe. On employait autrefois son suc ou son infusion contre toutes sortes de maladies, mais plus spécialement contre les DU XIX* SIÈCLE. 301 affections de poitrine. Hufeland vantait l’infusion contre les irrita- tions bronchiques, le catarrhe chronique et même la phthisie. A. de Jussieu l'a employé contre l’ictère. Mérat et Delens le recommandent dans le rhumatisme chronique. Linné dit l’avoir employé avec suc- cès pour combattre le ptyalisme mercuriel. Wauthers le prescrivait contre les fièvres journalières et les fièvres intermittentes, lorsque surtout celles-ci étaient accompagnées d’engorgements des viscères, et c’est surtout dans ces cas qu’on lui attribuait des propriétés souve- raines. Mais, d'après Zacatus Lusitanus, Forestus, Chomel, etc., on ne peut l’employer dans ces cas, ainsi que dans l’ictère et les engor- gements du foie que lorsqu'il n'ya ni douleurs, ni inflammations, ni pléthore sanguine. Le marrube a été très-préconisé contre la chlorose et l’anémie, et regardé comme un reconstituant de sang. Borelli l'employait dans tous les cas d’anémie, et Freind (Æmmenalogia, Londini, 1717, p.160) assure que le suc de cette plante, mêlé au sang, rend celui-ci plus vermeil et plus fluide. Suivant Alibert, c’est à tort que cette plante est tombée dans l'oubli. D'après M. Cazin, elle agit particulièrement sur le système pulmonaire et doit être rapprochée, par ses effets, de l'hysope, du lierre terrestre, du: pouliot, que l'on préfère, selon nous, avec raison. MARUM Teucrium marum L. (Labiées - Ajugoïdées.) Le Marum, appelé aussi Germandrée maritime, Herbe aux chats, etc., est un sous-arbrisseau, à racines ligneuses, fibreuses. La tige, haute de 0",30 à 0",50, ligneuse à la base,se divise en rameaux nombreux, opposés, presque cylindriques, grèles et effilés, coton- neux et pulvérulents, blanchätres, dressés, portant des feuilles oppo- sées, courlement pétiolées, très-petites, ovales, aiguës, entières, à bords roulés en dessous, rétrécies brusquement à la base, vert foncé en dessus, blanches et cotonneuses en dessous. Les fleurs, purpu- rines, terminent de courts pédoncules, solitaires ou géminés à l'ais- selle des feuilles supérieures, ef constituent par leur réunion une grappe oblongue, terminale, presque unilatérale. Elles présentent un calice tubuleux, assez large, un peu bossu à la base, à cinq dents presque égales, lancéolées, rougeâtre, couvert de poils cotonneux 302 FLORE MÉDICALE blanchâtres ; une corolle irrégulière, à tube redressé, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure à peine marquée, profondément bifide, terminé par deux dents saillantes et dressées, l'inférieure grande, à trois lobes, dont deux latéraux petits, et un médian plus large, ar- rondi, concave ; quatre élamines didynames, saillantes; un ovaire composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes ovoides, entourés par le calice persistant. Hapirar.— Le marum est originaire de la région méditerranéenne, où il croît dans les lieux stériles. On ne le cultive que dans les jardins botaniques. Dans le Nord, il exige l’orangerie durant l'hiver. On doit surtout le garantir contre les chats. Parries usirées. — Les sommités fleuries, les feuilles. Récorre. — On peut recueillir les feuilles de marum pendant tout l'été; l’inflorescence se récolte au moment de la floraison. La des- siccation s'opère facilement et ne lui fait perdre aucune de ses pro- priétés. Composirion cuimique. — Comme tous les teucrium, le marum possède une odeur forte, aromatique, pénétrante, une saveur amère. Il renferme une huile volatile d’une odeur camphrée très-prononcée. D'après Bley (Bull. des sc. méd., t. XXIE, p. 256), on y trouverait, outre l’essence du tannin, de l'acide gallique, de l’extractif, de l’al- bumine, du phosphate de chaux, du gluten : cela nous paraît très- douteux. Les principes actifs sont solubles dans l’eau et dans l'alcool. Usaces. — Le marum, d'après Matthiole (Com. 38), est le 907 de Dioscoride, le Lamaracus de Galien et de Paul d'Égine, le Sampsuchus de Théophraste. Il a été regardé comme tonique, excitant et sternu- tatoire. Il agit, dit-on, sur le système nerveux et est regardé comme efficace dans tous les cas d’atonie générale et de débilité. Cartheuser et Linné ont proclamé les vertus du marum, et Wédelius lui donait le nom de Polychreste. Bodard, qui a beaucoup expéri- menté les plantes indigènes, place le marum parmi les cordiaux, et il compare les effets qu'il produit à ceux du camphre. Il assure qu’il s'oppose à l’aigmentation de la sécrétion biliaire, ranime l'appétit, favorise les fonctions digestives et rémédie à la lenteur du système circulatoire (Bot. méd. comp., 4. WE, p. 150). Chaumeton déplore l'oubli dans lequel une plante aussi précieuse est tombé; mais il n’y a rien qui doive nous surprendre, et cela doit être attribué à l’exagé- DU XIX° SIÈCLE. 303 ration avec laquelle des plantes, actives d’ailleurs, et qui auraient pu rendre des services, administrées avec sagesse et discernement, ont élé préconisées à outrance contre des maladies incurables ou des lésions qui nécessitent l’intervention du chirurgien. C’est ainsi que nous avons vu Hufeland et M. Mayer d’Arbon assurer que la poudre de marume prisé guérissait les polypes du nez et s’opposait à leur reproduction. Au Teucrium Marum on peut, sans inconvénient, substituer l'ivette (T, chameæpitis L.); l'ivette musquée (7. #a); le botrys (T'. botrys); la sauge des bois (T°. scorodonia) ; la germandrée des mon- tagnes (7°. montanum) : la germandrée polium (T°. polium), préconisée en Orient contre la rage, et la germandrée fleurs en tête (7°. capitatum). MASSETTE Typha latifolia et angustifolia L. “ (Typhacées.) La Massette à larges feuilles (T. /atifolia L.), vulgairement appelée Canne de Jone, Chandelle, Masse d’eau, Matelasse, Quenouille, Roche, Roseau de la passion, Roseau des étangs, etc., est une plante vivace, à souche rampante, traçante. Les feuilles, toutes radicales, sont très-longues, alternes, engaînantes, fasciculées, planes, d’un vert glauque. La tige ou hampe, haute de 2 mètres et plus, robuste, dres- sée, se termine par deux épis ou chatons floraux cylindriques, su- perposés, sortant chacun d’une longue spathe lancéolée aiguë; les mâles, situées à la partie supérieure et dont l'axe persiste après la floraison, se composent d’étamines soudées deux à quatre par leurs filets, terminées par des anthères à connectif proéminent, et entourées de longues soies qui ne sont que des étamines avortées; les feuilles ont un ovaire libre, à une seule loge uniovulée, surmonté d’un style allongé, capillaire, que termine un stigmate élargi en languette, et sont entourées aussi de longues soies qui paraissent être des éta- mines ou des pistils rudimentaires. Le fruit est un akène, porté sur un pédicelle capillaire, muni de longues soies dilatées au sommet (PI. 33). La Massette à feuilles étroites (7. angustifolia L.) est aussi vivace, el se distingue de la précédente par sa taille moins élevée ; ses feuilles plus étroites, convexes en dehors, un peu concaves en dedans, dépas- 304 FLORE MÉDICALE sant souvent la tige; ses deux chatons plus distants, el ses stigmates linéaires. Hagirar. — Ces plantes sont répandues dans toutes les régions de l'Europe; elles croissent dans les étangs et les marais. Cuzrure. — Les massettes sont très-rustiques, et se propagent facilement par graines, semées au printemps en terre forte et hu- mide, et mieux encore par la division des souches. PARTIES usiTÉES. — La racine, le duvet, le pollen. RécoLTe. — La racine se récolte en automme, après la floraison ; le duvet est cueilli au moment où il se détache de l'axe. Composirion cuimique. — M. Raspail, qui a analysé la racine de massette, y a trouvé une substance féculente qui rougit à l'air. M. Lecoq en a isolé un huitième de son poids de fécule, qui forme empois avec l’eau. Elle est plus abondante en automne. Le même chimiste dit avoir trouvé des cristaux de phosphate de chaux dans les tiges? (Journal de ch. méd., &. IN, p. 771). Usaces. — Les Kalmouks mangent la racine de massette. Elle est d'une grande ressource aux époques de disette. Dans divers pays de l'Europe, on la mange en salade, ou confite au vinaigre. D'après Gmelin, les sangliers en sont très-avides. Les feuilles ser- vent à couvrir les chaumières ; on en fait des naltes, des paillassons, et on en rembourre des chaises. Le duvet a été travaillé dans ces derniers temps; on en a fabriqué une espèce de drap feutré assez solide. En Sibérie, la racine et les feuilles de massette sont employées contre le scorbut (Découvertes des Russes, t. WI, p. 450). Aublet (Guyane, p. 847), dit qu'elle est utile dans la gonorrhée et la blennorrhagie. Gmelin lui attribue la propriété de faire cesser le hoquet (Æ/ore de Siber., t.1, p.134). On a essayé de faire des édredons avec le duvet doux et soyeux des massettes, mais il se tasse et n’est pas élastique. On s’en sert avec suc- cès pour le pansement des brûlures. Le docteur Vignal a démontré ses bons effets dans ces cas, et M. le docteur Durand s’en est servi pour les engelures ulcérées. D'après De Candolle (Æssar sur les propriétés des plantes, p. 304), le pollen des massettes, qui est très-abondant, peut remplacer le lycopode; mais la récolte de ce pollen coûterait plus cher que le lycopode lui-même. D'ailleurs, celui-ci renferme une matière DU XIX° SIÈCLE. 305 ciro-résineuse qui le rend imperméable à l’eau, ce qui est très- précieux pour les écorchures, et pour rouler les pilules afin de les préserver de l'humidité. MATÉ Lex Mate Saint-Hil. Jex Paraguensis Lamb. (Ilicinées.) Le Maté, appelé aussi Thé du Paraguay ou Herbe du Paraguay, est un grand arbre, à rameaux touffus, portant des feuilles alternes, presque sessiles, ovales, oblongues ou lancéolées, grandes, un peu obtuses, dentées, coriaces, luisantes. Les fleurs, blanches, sont grou- pées en cymes corymbiformes serrées, à l’aisselle des feuilles de la partie moyenne des rameaux. Elles présentent un calice à quatre sépales arrondis, concaves; une corolle à quatre pétales arrondis; quatre étamines, à filets courts ; un ovaire à quatre loges uniovulées, surmonté d’un stigmate sessile quadrilobé. Le fruit est une drupe rouge, de la grosseur d’un grain de poivre, à quatre noyaux mo- nospermes. Hagirar. — Le maté croît au Paraguay, dans les parties méridio- nales du Brésil et dans les régions voisines; on le trouve surtout dans les forêts. Il n’est cultivé, en Europe, que dans les serres chaudes des jardins botaniques ; on le tient en pots remplis de terre de bruyère mélangée de terre franche. PARTIES usiTÉES. — Les feuilles. Récorre. — Le maté, Yerba maté, Gon gouha, Thé des jésuites, Thé du Paraguay, que Martius avait cru d’abord être son Cassine gongouha, et qu'il a reconnu ensuite être différent, est une plante dont les Brésiliens et tous les habitants de l'Amérique centrale font une consommation considérable. Le commerce de cette plante monte à plusieurs millions par année. Maté, nom sous lequel on désigne la boisson, veut dire herbe en brésilien, comme qui dirait Lerbe par excellence. Après avoir récolté ses feuilles vertes, on les fait sécher avec soin, et on les comprime pour qu'elles occupent un moins grand volume. Composrrion cuimique. — L'analyse complète du maté n’a pas été faite d’une manière satisfaisante : on y a trouvé de la Ca/éine en pro- portions assez considérables, et nous ferons remarquer que ce prin- cipe immédiat, dont nous avons déjà parlé (voyez Café, tome I, p.213), Flore, T. II. 20 306 FLORE MÉDICALE se retrouve dans un grand nombre de substances qui sont employées dans divers pays pour préparer des boissons alimentaires, ou du moins pouvant, jusqu'à un certain point, suppléer aux aliments en conservant les forces, ou en diminuant la dépense de combustion organique. C’est ainsi que les mineurs belges prennent l'infusion du café; les Chinois, les Anglais, etc., le thé; les Portugais el les Brésiliens, la guarana; et les Américains, le maté. Or, toutes ces substances contiennent de la caféine en assez grande proportion. Usages. — Les Brésiliens, les habitants du Paraguay, ceux de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud préparent l'infusion du maté de la manière suivante : On met les feuilles, légèrement torré- fiées, avec un peu de sucre, dans une espèce de gourde ou de cale- basse (Calabasa); on y verse de l’eau bouillante, et, après quelques instants de contact, on aspire le liquide avec un petit tube en paille, ou de toute autre matière. Dans les visites, on offre cette boisson aux visiteurs, et on passe ainsi la calebasse, contenant l'infusion, de main en main. Le plus souvent on emploie, pour boire le maté, un chalumeau terminé par une sphère percée de petits trous (Bombilla). On fait plusieurs infusions successives, avec la même herbe, en ajou- tant du sucre chaque fois ; la première infusion est consommée par le domestique qui prépare le maté. L’infusion de maté est considérée comme tonique, diurétique et diaphorétique. Sa saveur n'est pas très-agréable, mais on s’y habi- tue rapidement, et il est alors difficile de s'en passer. On lui attri- bue surtout la propriété de soutenir les forces, comme le fait la Coca (Noyez ce mot, Flore médicale, tome T, p. 356). Dans d’autres pays, les habitants du Paraguay entreprennent de longs voyages sans emporter d’autres provisions que la Yerba mate. Lorsqu'ils rencontrent une source, ils préparent leur infusion, et celle-ci est souvent le seul aliment qu'ils prennent pendant trois ou quatre jours. À. de Saint-Hilaire à démontré que le thé du Paraguay était pro- duit par l'ex mate, qu'il nomma d’abord Z/ex paraguensis. Mais il a existé, à une certaine époque, parmi les auteurs, une certaine confusion sur l'origine de cette plante. On l’a rapportée au Cassina paraqgua LE. et au Psoralea glandulosa L. Mais il paraît que dans l'Amérique du Sud on boit linfusion de ces différentes plantes, ainsi que celle d'un Zuremburaqra. DU XIX° SIÈCLE. 307 Le Thé des Apalaches, où Apalachina, qui est produit par l'Z/er vomitoria Aiton, et qui croît abondamment dans la Virginie, la Caro- line et la Floride, a été confondu, souvent À tort, avec le thé du Paraguay. Ses feuilles, prises en infusion, sont aussi regardées comme toniques et stomachiques ; mais, à dose un peu élevée, elles sont purgatives et même vomitives. Les Indiens du sud de l'Union les font griller d’abord, puis ils en boivent des infusions qu'ils prennent comme diurétique, contre la goutte, la néphrite, les calculs, ete. Is en font usage pour exciter leur courage lorsqu'ils vont à la guerre. Cette boisson possède en effet des propriétés eni- vrantes, analogues à celles que produit le chanvre des Indiens. Les fruits sont plus spécialement vomitifs. On attribue aux feuilles la propriété de calmer la faim. MATICO Piper elongatum Nahl. Artanthe elongata Miq. Steffensia elongata Kunth. (Pipéracées. ) Le Matico ou Moho-Moho est un arbrisseau, dont la tige noueuse se divise en branches glabres à gros nœuds, subdivisées en rameaux pubescents, portant des feuilles alternes, stipulées, courtement pé- liolées, lancéolées, obliques, longuement acuminées, un peu cordi- formes à la base, longues d'environ 0",20 sur 0,05 de largeur, un peu coriaces, verruqueuses et rudes en dessus, plus pâles, réticulées et pubescentes en dessous. Les fleurs sont groupées en épis pédoncu- lés, compactes, légèrement recourbés, opposés aux feuilles, et accom- pagnées de bractées pédicellées, peltées, ciliées, coriaces, glandu- leuses, convexes, à bords un peu étalés, persistantes. Elles renferment trois ou quatre étamines, à filets arrondis, glabres, et à anthères ré-- niformes-cordées ; un ovaire sessile, ovoïde, tétragone, surmonté de deux à quatre stigmates sessiles, filiformes, subulés. Le fruit est une baie presque sèche à la maturité, ovoïde, tétragone, glabre, aroma- tique, à péricarpe mince sur les côtés, légèrement gonflé au sommet, renfermant une graine de même forme, tronquée au sommet, à testa écailleux, à albumen dur et presque corné. Cette espèce présente plusieurs variétés : l’une à entre-nœuds et à pétioles plus longs, l’autre glabre dans toutes ses parties, ete. Haprrar. — Le matico croit dans les contrées chaudes de l'Amé- rique du Sud, au Pérou, au Chili, dans la Bolivie, ete. La variété à 308 FLORE MÉDICALE longs entre-nœuds se trouve au Brésil, dans les forêts d'Ithea (pro- vince de Bahia); la variété glabre croît au bord des ruisseaux, près de Contenda (province des Mines). Quelques espèces du même genre se trouvent aux environs de Quito, à Oxaca sur les Cordilières Mexi- caines, à une altitude de 1,000 à 2,000 mètres. Parties usirées. — Les feuilles. Récocre. — Les feuilles de matico, telles qu’on les trouve dans le commerce, sont lancéolées, légèrement crénelées, à rainures pro- fondes, d’un brun foncé à la partie supérieure et d’un vert pâle à l'inférieure. Celle-ci est parsemée de points transparents légèrement pubescents. Lorsqu'on les froisse, elles exhalent une odeur de menthe assez prononcée. Leur saveur, d’abord nulle, devient bientôt amère et âcre. Elles paraissent avoir subi quelquefois une forte compression, et les Péruviens recommandent de les faire griller, lorsqu'on les des- tine à l'usage externe. Composition cuimiQue. — M. le docteur Hodges, qui a analysé les feuilles de matico, y a trouvé de la chlorophylle, un peu de résine vert foncé, une matière colorante brune, une matière colorante jaune, de la gomme, du nitrate de potasse, un principe amer (maticine), une huile aromatique volatile, des sels, du ligneux. La mnaticine est une résine molle, d’un vert foncé. D'après cet au- teur, le matico ne renfermerait ni tannin, ni acide gallique, tandis que des analyses antérieures y avaient signalé des quantités consi- dérables de tannin; et dans un travail récent, M. J. Marcotte y a constaté la présence de ce principe astringent. Il y a trouvé, de plus, un acide organique fixe qu’il a nommé acide artanthique, dont l'étude chimique laisse encore beaucoup à désirer. Usages. — Le matico tire, dit-on, son nom d’un soldat ainsi nommé qui, le premier, l'employa accidentellement contre une hémorrhagie. Aussi le nomme-t-on, dans toute l'Amérique du Sud, oùilest très-employé, Herbe du soldat. Les Indiens l'employaient depuis fort longtemps comme hémostatique ; il est vrai qu'ils aidaient à ses effets par la compression ; mais ils le regardent comme un astringent si puissant, qu’appliqué sur un vaisseau ouvert, il en déter- mine l’occlusion, quel que soit, disent-ils, son calibre ! C’est en 1827 que M. Frow (The North Americ, med. and surg., oct. 4827) fit connaître le matico. Plus tard, M. le docteur Dutrouil, DU XIX° SIÈCLE. 309 de Bordeaux, le rapporta du Pérou. Il en offrit à MM. Mérat et Delens, qui le décrivirent dans leur Dictionnaire d'histoire naturelle (tome IV, page 254). En 1835, un capitaine de navire, venant du Pérou, en rapporta à Anvers. M. Sommé, chirurgien de cette ville, constata ses effets astringents, et M. Vanhaesendonck améliora, en l'employant, l’état de quelques malades atteints de catarrhes pulmo- naires chroniques, et même de phthisie. En 1850,M. de Santa Cruz, ambassadeur de Bolivie, en envoya à l’Académie de médecine de Paris, où il fut l’objet d'un rapport fait par MM. Mérat et Velpeau, dans lequel étaient constatés les résultats obtenus par M. Sommé, ainsi que ceux acquis par M. Lane, qui dataient de 1843. Mais ce n'est que depuis 1852, époque à laquelle M. Dorvault décrivit le matico, qu'il commença à être connu en France. Dans le traité de thérapeutique de MM. Trousseau et Pidoux, que nous étions chargé de revoir pour ce qui concernait la pharmacologie et la matière médicale, nous avons placé le matico parmi les stimu- lants, et non dans les astringents. La famille à laquelle fappartient cette plante, sa richesse en huile volatile et en résine odorante, sa saveur, et surtout son odeur, justifient assez celte classification et dé- montrent ses propriétés balsamiques, aromatiques, toniques et sti- mulantes. D'après M. Martius, le matico serait employé au Pérou comme aphrodisiaque. M. Jeffreys, de Liverpool, dit l'avoir employé avec succès contre les maladies des muqueuses, telles que les gonorrhées, les leucorrhées, les ménorrhagies, les catarrhes de la vessie, ainsi que dans les hémorroïdes et les épistaxis. M. H. Lane a confirmé une partie de ces bons effets. M. Lesaulnier a administré avec suc- cès le sirop de matico aux malades atteints de dyspepsies accompa- gnées de gastralgies, et MM. Trousseau et Pidoux regardent cette plante comme destinée à jouer un rôle important en thérapeutique. Le travail le plus complet qui ait été fait sur cette plante est dû à M. le docteur Cazentre, de Bordeaux. Le matico est administré en poudre, en pilules, en infusion ou décoction {10 à 20 grammes pour un litre d'eau), l'extrait alcoolique à la dose de 0,20 à 0,40 et le sirop à la dose de 20 à 60 grammes. 310 FLORE MÉDICALE MATRICAIRE Matricaria Chamomilla L. Pyrethoum Chamomilla Coss. et Germ. ( Composées - Sénécionidées. ) La Matricaire Camomille, ou Camomille ordinaire des officines, est une plante annuelle, dont la tige, haute de 0,30 à 0",50, striée, labre, dressée, ascendante ou diffuse, très-rameuse, porte des feuilles alternes, sessiles, épaisses, charnues, glabres, bipennées ou tripennées, à segments linéaires, allongés, étalés. Les fleurs, jaunes au centre, blanches à la circonférence, odorantes, sont groupées en capitules solitaires au sommet des rameaux, très-nombreux, à récep- tacle creux, ovoïde-conique aigu, entouré d'un involucre à folioles oblongues, largement scarieuses, blanchâtres. Les fleurs du centre, tubuleuses et hermaphrodites, ont cinq étamines soudées par les an- thères, et un ovaire infère, uniovulé, surmonté d’un style simple et d'un stigmate bifide; celles de la circonférence sont ligulées et femelles, quelquefois stériles. Le fruit est un akène très-petit, blanc jaunàtre, presque cylindrique, à trois angles mousses, légèrement arqué, terminé par un rebord obtus ou tranchant, plus rarement par une couronne membraneuse. La matricaire inodore (47. inodora Auct., Chrysanthemum inodo- rum L., Pyrethrum inodorum Smith) est aussi annuelle, et se dis- tingue de la précédente par ses fleurs presque inodores; son récep- tacle plein, obtus, arrondi-conique ; ses akènes brun noirâtre, finement chagrinés, à quatre angles mousses. La plante désignée communément en pharmacie sous le nom de malricaire appartient au genre Pyrèthre (Voyez ce mot). Hamirar. — Ces deux plantes sont communes dans les moissons, les lieux inculles, ete. On ne les cultive que dans les jardins bola- niques. PARTIES USITÉES. — Les inflorescences ou capilules. PRécoLre. — On récolte les fleurs de la camomille vraie, ou camo- mille commune, à l'époque de la floraison. On cueille les capitules isolés et on les fait sécher au grenier ou à l’étuve. On lui substitue quelquefois la camomille des champs (An/hemis arvensis), dont les capitules sont plus grands et garnis de paillettes, et on lui préfère la camomille romaine (arthemis nobilis). Elle est aussi quelquefois DU XIX‘ SIÈCLE. 311 mélangée dans le commerce avec la matricaire odorante (Matricaria suaveolens), qui se distingue par ses capilules plus petits et par leur odeur plus forte. Elles jouissent d’ailleurs, d'après Loiseleur-Deslon- champs, des mêmes propriétés. ComPosiTION CHIMIQUE. — Les matricaires doivent leurs propriétés à une huile essentielle que l’on obtient en Allemagne par distilla- tion. Elle est épaisse, bleu foncé, opaque ; mais, par rectification, M. Guibourt l'a obtenue très-fluide, d'un bleu indigo. Son odeur est toute parliculière, moins pénétrante que celle de la camomille ro- maine, et moins agréable, Les capitules secs ont une odeur agréable, peu amère. Usages. — Les fleurs de la camomille commune sont {rès-em- ployées en Allemagne, et on les préfère à la camomille romaine. Elles sont rarement usilées en France. Les anciens, parmi lesquels nous citerons Dioscoride, Zacatus Lusitanus, Rivière, Morton, Hotf- mann, Vogel, Pitcairn, Herberden, Cullen et Wauters, prescrivaient les fleurs pulvérisées dans le vin, à la dose de quatre à huit grammes, contre les fièvres intermittentes. On doit rapporter à cetle plante ce que l’on trouve dans les anciens auteurs sur la camomille romaine. On l'a regardée comme stomachique, vermifuge, antispasmo- dique, etc. L'essence de matricaire, analysée par MM. Dessaignes et Chau- lard, était produite par le Pyrethruin parthentum Smith, dont nous parlerons plus loin. MAUVE Malva sylvestris et rotundifolia L. (Malvacées - Malvées. ) La Mauve sauvage ou grande Mauve (7. sylvestris L.) est une plante bisannuelle ou vivace, à racine pivotante, presque simple, charnue, blanchâtre. Les tiges, hautes de 0",30 à 0",80, cylindri- ques, rameuses, velues-hérissées, dressées, portent des feuilles alter- nes, longuement pétiolées, réniformes, arrondies, à cinq ou sept lobes peu profonds, obtus, crénelés. Les fleurs, purpurines, longue- ment pédonculées, sont groupées en fascicules axillaires. Elles pré- sentent un calicule à trois divisions étroites ; un calice campanulé, à cinq divisions aiguës ; une corolle à cinq pétales obcordés, onguicu- lés, échancrés au sommet ; des étamines nombreuses, monadelphes ; 312 FLORE MÉDICALE un ovaire composé de nombreux carpelles uniovulés, verticillés, surmontés de styles en nombre égal, soudés entre eux, et libres seu- lement dans leur partie supérieure, qui se termine par un stigmate simple. Le fruit est composé de nombreuses coques monospermes, fortement réticulées, indéhiscentes, groupées en verticille autour d’un axe central commun. La mauve à feuilles rondes ou Petite mauve (1. rotundifolia À.) se distingue de la précédente par sa faille plus petite ; ses tiges cou- chées, pubescentes ; ses feuilles plus arrondies; ses fleurs blanc rosé ou rose lilacé, plus petites; ses carpelles non réticulés. Nous citerons encore les mauves glabre (HZ. glabra Lam.), crépue (21. crispa L.), musquée (17. moschata L.), etc. Hagirar. — Ces plantes sont communes dans les diverses régions de l'Europe; on les trouve dans les champs, les bois, les lieux inculles, le long des haies, au bord des chemins, ele. Cuzrure. — Les mauves sont peu cultivées pour l'usage médical. Elles viennent dans tous les sols, mais mieux dans une terre chaude, douce et substantielle. On les propage très-facilement de graines semées au printemps, ou bien aussitôt après la maturité. PARTIES usirées. — Les racines, les feuilles, les fleurs, les graines. Récozre. — Les racines des mauves, rarement employées, doivent être récoltées à l'automne, après la floraison. Elles ne se trouvent pas dans le commerce, et ce n’est guère que dans les campagnes qu'on en fait usage. Les feuilles, que l’on cueille isolées et que l'on fait sécher, se récoltent au mois de juin ou de juillet. Les fleurs sont récoltées à la main pendant l'été, les unes après les autres, au fur et à mesure de leur épanouissement. Fraiches, elles sont d'un rose tendre ; elles deviennent d’un beau bleu par la dessiccation, qui doit être opérée rapidement au soleil. On doit les conserver à l'abri de la lumière, dans un endroit sec. On recueille les graines à la matu- rilé du fruit. Comwrostrion cmimique. — Toutes les parties des différentes espèces de mauves sont riches en mucilage visqueux. Les racines, d'après Spielmann, renferment le quart de leur poids de mucilage. Les fleurs contiennent une belle matière colorante bleue, qui est extrêmement sensible à l’action des acides, qui la rougissent, et à celle des alcalis, qui la verdissent. On en fait des infusions et un sirop employés comme réaclifs de ces agents. DU XIX°® SIÈCLE. 313 Depuis quelques années, les fleurs de mauve du commerce sont fournies par le A7. glabra Lam., que l'on cultive exprès dans les jar- dins, qui, sèches, donne des fleurs plus grandes et d’un beau bleu, et, fraîches, des fleurs d’un beau rouge. Cette plante paraît origi- naire de la Chine. UsaGes. — Dans toutes les phlegmasies internes et externes, la mauve est employée avec succès; elle agit comme les semences de lin et la racine de guimauve. Dans les maladies de poitrine, on pré- fère employer l’infusion des fleurs soit seule, soit associée avec du lait. La racine est quelquefois administrée en décoction sucrée avec du miel. Avec les feuilles hachées on fait des décoctions concentrées que l'on peut appliquer seules en cataplasmes, ou dans lesquelles on ajoute quelquefois un peu de farine de lin. Les feuilles, mangées en guise d'épinards, étaient vantées par Amatus Lusitanus contre les ardeurs d'urine. On les préconise sous cette forme contre les phleg- masies chroniques du tube digestif, la constipation, les irrilations des voies biliaires, la néphrite, la eystite, les toux sèches. La décoction des feuilles et des racines est appliquée sous forme de lotions, de fomentations, de collyre, de lavements, toutes les fois qu’il s’agit de calmer des parlies irritées et enflammées. | Les 17. rotundifolia, qlabra, moschata et crispa jouissent des mêmes propriétés. L'écorce de la première, d’après Cavanilles, donne un liber qui est employé en Espagne à fabriquer des cordes. Les graines du M7. moschata peuvent être employées, d’après M. Hannon, de Bruxelles, comme anti-spasmodiques. On peut en retirer une huile essentielle, qu’on a nommée Muse végétal, et que l’on peut, dit ce médecin, substituer au muse animal. MÉDICINIER Jatropha cureas L. Castiglionea lobata R. et P. (Euphorbiacées - Crotonées.) Le Médicinier purgatifwwcathartique est un arbrisseau, dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, couvéfté d’une écorce grisâtre et lisse, sécrétant un suc laiteux àâcre, se divise en rameaux nombreux, touffus, cassants, portant des feuilles alternes, longuement pétiolées, grandes, palmées, à cinq lobes entiers, cordées à la base, épaisses, lisses, luisantes, d'un vert foncé, couvertes de poils urticants. Les. 314 FLORE MÉDICALE fleurs, pelites, monoiques, d'uu vert blanchätre, sont groupées en ombelles terminales. Elles présentent un calice petit, à cinq dents. Les mâles ont une corolle en entonnoir, à limbe divisé en cinq lobes lancéolés; dix élamines monadelphes, disposées sur deux rangs, les cinq extérieures plus courtes. Les fleurs femelles ont une corolle à cinq pétales ;‘un ovaire libre ovoide, marqué de trois sillons, à trois loges uniovulées, surmonté de trois styles terminés chacun par un stigmate bifide. Le fruit est une capsule arrondie, brunâtre, du vo- lume d’une noix ordinaire, se séparant à la maturité en trois coques, dont chacune est surmontée d’un style persistant et renferme une graine ovoide, oblongue, aplatie, noirätre, de la grosseur d'un haricot. Nous citerons les Médiciniers brülant (J. wrens L.}, acuminé (J. acuminata Lam., J. panduræfolia And), mulüfide (J. mulii- fida L.), etc. Hagirar. — Ces arbrisseaux croissent dans l'Amérique tropicale, aux Antilles, à la Nouvelle-Grenade, à la Guyane, etc. Cuzrure. — Le Médicinier cathartique est cultivé en grand aux Antilles, où l’on en fait des haies de clôture. Il vient mieux dans les endroits humides, et se propage facilement par boutures ou par graines. En Europe, il exige la serre chaude. PARTIES usiTÉES. — Les graines, l'huile qu'on en extrait. RécoLre. — La graine de médicinier ressemble, par la forme, à celle du ricin; elle s’en distingue en ce qu’elle est faiblement lui- sante, privée de caroncule, et sans écusson comprimé sur le dos; la face extérieure est bombée, avec un angle peu marqué; celui de la face inférieure l’est davantage; l'épisperme est dur, compacte ; l'amande, enveloppée d'une pellicule blanche, est souvent recouverte de paillettes cristallines très-brillantes. On à prétendu que le prin- cipe purgatif élait seulement dans l'embryon, et que l'endosperme, ou albumen très-développé, n'en renfermait pas; mais cela n’est pas plus exact que pour le ricin. Dans toutes les contrées chaudes de l'Amérique, d'où vient cette graine, les amandes écrasées dans du lait purgent très-bien; exprimées, elles fournissent une huile ana- logue à celle du ricin, que l’on n’emploie pas, en raison de sa ranci- dité. Anciennement, on la mêlait à l'huile de ricin d'Amérique, ce qui la rendait plus active. La Noselte purgative, où médicinier d'Espagne (Jatropha multi DU XIX° SIÈCLE. 315 fida L., Curcas multifida) a des semences de la grosseur d’une noi- selle, arrondies, anguleuses, à épisperme lisse et marbré, épais. L'amande, blanchâtre, est fortement purgative. L'arbrisseau qui la produit vient de Amérique méridionale. Le médicinier sauvage (Jatropha gossypifolia L.), donne des se- mences qui ressemblent à celles du ricin, mais elles sont plus petites. Elles portent une caroncule charnue très-développée sans l’écusson comprimé qui distingué le ricin. L'épisperme est lisse, luisant et fauve, avec des {aches blanches et noires. Compostriox caimiQue. — Un kilogramme de graines de Jatropha eurcas fournit 344% grammes d'épisperme et 656 grammes d’aman- des, dont on peut retirer, par expression, 265 grammes d’une huile incolore très-fluide, qui laisse précipiter par le froid une grande quantité de stéarine. Quoiïqu'elle diffère totalement de l'huile de ricin par son peu de solubilité dans l’alcoo!, qui n'en dissout que quatre pour cent environ, elle doit s'en rapprocher par la composi- tion et par les produits qu'elle fournit au contact des alcalis et par la distillation sèche (Voyez Ricin). M. Soubeiran a trouvé dans les amandes de l'huile fixe, du gluten, de la gomme, un principe sucré, de l'acide malique, un acide gras et une matière âcre particulière, Il ajoute que Nimmo de Glascow a analysé sous le nom d'huile de Croton tiglüun celle du J. curcas, tandis que MM. Pelletier et Caven- tou ont fait l'inverse. Usaces. — Le médicinier, qui croit en Afrique, en Amérique et aux Antilles, sous les noms de Pignon de Barbarie et des Barbades, Noir des Barbades, Noir américaine, est très-actif; il provoque les vomissements et purge violemment, comme l'ont reconnu MM. Geof- froy, Soubeiran, ete. Orfila a vu qu'il tuait les chiens à la dose ds quatre à douze grammes. Son huile est moins active que celle du Croton tiglium, et beaucoup plus que celle de ricin. Elle purge à la dose de quatre à douze gouttes. Dans l'Inde, on l’emploie en fric- tions contre la gale, les dartres, les rhumatismes. On s'en sert pour l'éclairage, et M. Lunan assure qu'associée avec son poids d’axonge, elle forme un onguent très-bon contre les hémorroïdes (Aiïnslie, Mat. médic., t.M, p. 47). Elle contient une matière âcre dont on peut la priver en l'agitant avec de l'alcool. Kunth dit que dans l'Amérique du Sud on prend les amandes du médicinier dans du chocolat ou dans de l’eau sucrée. Le docteur Revel, de Canton, 316 FLORE MÉDICALE dit qu’on en fait des vernis. M. Lherminier rapporte qne les Nègres emploient mystérieusement les feuilles en nombre impair, et Des- courtils prétend que c’est le contre-poison du mancenillier (Flore méd. des Antilles, t. M, p. 304). MÉLAMPYRE Melampyrum arvense L. ( Personées - Rhinanthées. ) Le Mélampyre des champs ou des moissons, vulgairement appelé Blé de vache, Queue de renard, Rougeole, Rougerole, ‘etc., est une plante annuelle, à racines fibreuses, vivant en parasites sur celles des graminées. La tige, haute de 0",30 à 0,50, velue, roide, dres- sée, rameuse, porte des feuilles opposées, sessiles, lancéolées linéaires, rudes. Les supérieures sont modifiées en braclées ovales lancéolées ou acuminées, laciniées à lobes très-longs linéaires aigus, d’un beau rouge. Les fleurs, purpurines, plus ou moins tachées de jaune, sont disposées en épis presque cylindriques. Elles présentent un calice à ube pubescent, à limbe partagé en divisions triangulaires, lancéo- lées, terminées en une pointe sétacée, très-longue, rouge; une corolle bilabiée, à lèvre supérieure en casque, échancrée, comprimée, à lèvre inférieure plane, trifide, tachée de jaune; quatre étamines incluses, didynames, à anthères barbues à la base, qui est prolongée en pointe ; un ovaire à deux loges biovulées, surmonté d'un style simple à stigmate obtus. Le fruit est une capsule ovoïde, acuminée, comprimée, bivalve, à deux loges contenant chacune deux graines ovoïdes-oblongues un peu anguleuses. Nous mentionnerons les Mélampyres à crêtes (AZ. cristatum L.), des prés (7. pratense L.), des bois (A7. sylvaticum L.), ete. Hagrrar. — Le mélampyre commun est répandu dans presque toute l’Europe ; on le trouve dans les moissons, dans les champs en friche, dans les prairies artificielles; les autres espèces se rencontrent surtout dans les bois. Les mélampyres, qui sont, le commun du moins, un fléau pour l’agriculture, et que l'on cherche plutôt à détruire, ne sont cultivés que dans les jardins bota- niques. PARTIES USITÉES. — Les semences, les feuilles. RécoLre. — Le mélampyre tire son nom de ux:, noir, et de DU XIX° SIÈCLE. 317 rvg6s, blé. Il croit dans les moissons. On le récolte avec le blé et se mêlant avec lui à l’époque du battage. Cowposirion CuimiQue. — Le 37. arvense, qui croît dans les terres fortes, est un bon fourrage pour les bestiaux, surtout pour les vaches, ce qui lui a fait donner un de ses noms vulgaires. D’après Linné (Flora Suec.), les M. arvense et M. sylvaticum L. donnent au beurre des animaux une couleur jaune. Les graines de mélampyre ont été analysées par M. le docteur Gaspard, de Saint-Étienne. Il y a trouvé une matière caséiforme très-soluble dans les alcalis, insoluble dans l'alcool et les acides, précipitable par le tannin ; un peu d’albumine, du sucre incristalli- sable, une gomme résine, une substance blanche, considérée comme de la stéarine, une espèce d'oléine et une matière colorante très- soluble dans l’eau et dans l'alcool, du ligneux et des sels (Journ. de pharm., t. XV, p. 74). Usaces. — D'après M. Tessier, la graine de mélampyre, mêlée au froment, donne une farine qui produit un pain amer, mais non nuisible (Mém. de la soc. roy. de méd., 1780, p. 363). C’est aussi l'avis de l'abbé Rosier ; et nous sommes loin de partager cette sécu- rité. Les farines mélampyrées donnent un pain incolore, s’il n’est pas fermenté. Il est au contraire d’un rouge violacé, si la fermenta- tion a eu lieu. M. Dizé attribue ce développement de couleur à la matière colorante se dissolvant ou, peut-être, se produisant au con- tact de l'acide acétique qui se forme pendant la fermentation de la pâte à pain. Aussi conseille-t-il, pour reconnaitre la farine mélarn- pyrée, d’en délayer dans du vinaigre affaibli pour en faire une pâle ferme que l’on fait cuire dans une cuillère ; si la farine contient du mélampyre, le pain devient violet (Journal de pharm., &. XN, p.71). MÉLASTOME Melastoma Malabathricum L. ( Mélastomacées - Mélastomées. ) Le Mélastome du Malabar est un arbrisseau, dont la tige, haute d'environ un mètre, se divise en rameaux opposés, décussés, his- pides, portant des feuilles opposées, ovales-oblongues, rudes sur les deux faces, marquées de cinq ou sept nervures longitudinales, réu- nies par de nombreuses nervures transversales parallèles. Les fleurs, 318 FLORE MÉDICALE d'un beau rose, sont disposées en panicule lâche terminale, feuil- lée. Elles présentent un calice à six sépales caducs; une corolle à six pétales; douze étamines, à anthères munies d’un appen- dice bicorne; un ovaire à six loges mulliovulées, surmonté d’un style et d’un stigmate simples. Le fruit est une baie noire, poly- sperme. Nous citerons encore le Mélastome thé (27. theezans Bonpl.) HaBiTaT. — La première espèce croit au Malabar et à Ceylan; la seconde, au Pérou et dans les contrées voisines. Parties usirées. — Les feuilles, les fleurs, les fruits. Récorre. — Le genre mélastoma tire son nom de px, noir, et de széuz, bouche, car les fruits de ces plantes, originaires de l’Amé- rique du Sud, donnent un suc noir qui colore fortement la salive. On peut l’'employer comme de l'encre. Couposiriox cuimiQue. -— Les fruits des mélastomes sont doux et sucrés. On les mange dans divers pays. Les singes en sont, dit-on, très-friands. D'après Martius, au Brésil, on donne le nom d'onnianga- pérerica à des mélastomes avec le suc des baies fermentées desquels ou fait une sorte de vin ou de vinaigre. Usages. — Sous le nom de Aéle, on désigne, aux Antilles, les petits fruits doux. Or, c'est le nom que l’on donne dans ce pays aux fruits des divers mélastomes. On y mange ceux du 27. flavescens Aubl., et du A7. quianensis Poiret. À Cayenne, ceux du A7. spicata Aubl., ainsi que ceux du Æ7. succosa Aubl., appelés Caca Henriette, sont re- cherchés pour leur bon goût. Le bois macaque A7. {ococa Lam. (Tococa Guranensis Aubl.) donne des fruits recherchés comme aliments. Les feuilles et les fleurs sont réputées astringentes. En effet, d'après Aublet, la décoction du A7. alata sert, dans la Guyane, à laver les vieux ulcères. Les fleurs du 47. grandiflora Aubl. y sont usitées contre la toux. L’amadou de Panama ou Yesca de Panama, dont on transporte de grandes quantités à la Havane, et qui sert à étancher le sang, est préparé avec les fibres des feuilles du 27. kolosericea 1. Les feuilles écrasées du 27. lœvigata Aubl. s'appliquent sur les piqures. Les feuilles et les fruits de plusieurs de ces plantes sont em- ployés pour la teinture en noir. Dans l'Inde, on s’en sert encore contre la dysenterie, la leucorrhée. D'après Horsfield, au Brésil, sous le nom d'Axnga-Pari, on emploie les feuilles séchées et pulvérisées du A7. pauciflora Lam. contre les ulcères. On les applique aussi DU XIX° SIÈCLE. 319 fraicheset contusées. Le suc des feuilles du AZ. /amonea Sw. (Fother- gilla mirabilis Aubl.) est appliqué sur les piqüres pour les adoucir, et à Popayan on boit en infusion théiforme les feuilles du 27. {heærans Humb. et Bonpl., arbuste odorant dont l'infusion aromalique est préférable, d'après Bonpland, à celle du thé ordinaire. Cet arbuste pourrait être cultivé en pleine terre dans le midi de la France. MÉLÈZE Lariæ Europæa D. G. Pinus larix L. Abies larix Poir. (Conifères - Abiétinées.) Le Mélèze est un grand arbre, à racines pivotantes. La tige, qui at- teint jusqu'à 40 mètres de hauteur, est ordinairement rès-droile et couverte d’une écorce lisse. Elle se divise en nombreux rameaux, à écorce écailleuse, et dont l'ensemble constitue une cime pyramidale. Les feuilles, d'abord fascieulées sur le vieux bois, plus tard allernes par suite de l'allongement du rameau, sont linéaires, étroiles, presque planes, molles, lisses, d'un vert gai, caduques. Les fleurs sont mo- noïques, et disposées en chatons : les mâles en forme de bourgeons, solitaires et laléraux, composés d’écailles imbriquées, dont chacune porte en dessous deux lobes d’anthère ; les femelles latéraux, ovoïdes, composés d’écailles imbriquées, accrescentes, obluses, munies en dedans d’une bractée membraneuse et colorée, et portant à leur base deux ovales nus. Le fruitest un cône presque sessile, assez petit, dressé, ovoide, à écailles ligneuses, obtuses, minces même au sommet, con- caves, portant chacune à leur base deux graines à testa coriace, pro- longé au sommet en une aile membraneuse. Hagrrar. — Le mélèze appartient aux pays froids et aux mon- tagnes élevées. C’est à peu près le dernier arbre que l’on rencontre en s'élevant sur les Alpes. Il se plaît néanmoins sur le bas des coteaux et dans les plus profondes vallées. Il croît moins bien dans les cli- mats tempérés, et ne forme pas de grands massifs dans les plaines ; mais il est répandu dans les parcs et les jardins paysagers. Nous ne dirons rien ici de sa culture, qui appartient essentiellement au do- maine de l’art forestier. Parties usitées. — La térébenthine qui découle des troncs, la malière sucrée ou manne de Briançon, rarement les feuilles et les rameaux. 320 FLORE MÉDICALE Récocre. — Le mélèze perd ses feuilles l'hiver, il faut donc couper les rameaux pendant l'été; on les fait brûler pour fumi- gations. La Manne de Briançon (Manna Brigantiaca des pharmacopées) produite par cet arbre est en petits grains de la grosseur de la corian- dre, blancs, gluants ; on les trouve surtout sur les feuilles des vieux arbres dans les mois de juin et de juillet; il faut récolter la manne le matin, car les rayons solaires la font disparaitre ; d’après Villars elle est légèrement purgative; les habitants des environs de Briançon l'emploient ; elle jaunit en vieillissant et possède alors une odeur nauséabonde désagréable ; elle est très-rare (Journ. des pharm., t. VILLE, p. 335). Dioscoride dit que de son temps on apportait de la Gaule subal- pine (la Savoie), une résine que les habitants nommaient Larice, c'est-à-dire retirée du Larix. Pline ajoute : « La résine du Larëx est abondante, elle a la couleur du miel, elle est plus tenace et ne durcit jamais. » Galien dit que, « parmi les résines il y en a deux très- douces, la première nommée Térébenthine et la seconde Larice ; » ailleurs ii l’assimile à la térébenthine et il dit qu'on peut employer le Larice pour remplacer celle-ci dans la préparation des médicaments ; celte térébenthine du mélèze est épaisse, consistante, opaque, d'une odeur particulière forte, tenace, plus faible que celle de la térében- thine citronnée du sapin, et que celle de Bordeaux; sa saveur est amère et persistante; elle ne s’épaissit pas à l'air comme celle du pin. Pline et Jean Bauhin avaient signalé cette propriété non siccalive; elle ne s'épaissit pas davantage au contact d'un seizième de ma- gnésie; elle est complétement soluble dans cinq parties d'alcool à 86° C.; elle constitue la Térébenthine fine ordinaire où Térében- lune de Strasbourg; on la tire de Suisse; elle est toujours un peu nébuleuse. Les fissures naturelles du mélèze produisent très-peu de térében- thine. Pour augmenter la récolle on fait des entailles avec une hache, ou des trous avec des tarières, à un mèlre de hauteur, et en conti- nuant, à un mètre de distance, jusqu'à quatre ou cinq mètres de hau- teur ; à chaque trou on adapte un canal en bois qui conduit la résine dans une auge, d'où on la retire pour la filtrer; le trou est rebouché avec une cheville, que l’on rouvre tous les quinze jours. La récolte dure de mai à septembre. Un beau mélèze peut fournir trois ou DU XIX‘ SIÈCLE. 321 quatre kilogrammes par an et produire pendant cinquante ans, mais le bois est alors moins estimé. Le bois du mélèze est rougeûtre, plus fort et plus serré que celui du sapin ; il résiste pendant des siècles à l’action destructive de l'eau, de l'air et du soleil; les chalets en Suisse sont construits avec ce bois. C'est sur les vieux troncs du mélèze que croit l’agaric blanc (Polyporus officinals) dont nous parlerons plus loin (Voyez Polypore). Comprosirion cmimique. — Les mélèzes sont des arbres résineux, la térébenthine qu'ils fournissent, distillée avec de l’eau, donne 15,24 pour 100 d’une essence incolore très-fluide, d'une odeur douce non désagréable, lorsqu'elle a été obtenue par distillation avec de l’eau: elle dévie le plan de polarisation de la lumière polarisée vers la droite de 5°, 8. Après la distillation de la térébenthine du mélèze, il resle pour résidu une matière résineuse analogue à la colophane ou arcanson. La Manne de Briançon est formée presque en entier. par un sucre particulier que M. Berthelot a étudié et nommé Mélézitose; on l’ex- trait en traitant cette manne par l'alcool bouillant; on obtient des petits cristaux, courts, durs, brillants, qui paraissent avoir la même forme que le sucre de canne, et qui séchés à 100° en ont la même composition. Avant la dessiccation, ils contiennent un équivalent d'eau ; le mélézitose est dextrogyre. Au contact des acides et à 100°, son pouvoir rotatoire diminue presque de moitié et devient égal à celui de la glycose de raisin. Il fermente, ne donne pas d’acide mu- cique par l'acide azotique, et se réduit par le réactif de Frommbere (Berthelot). UsaGes. — Nous avons déjà dit que la Manne de Briançon était très-peu employée. Son action purgative est moitié moindre, à peu près, que celle de la manne du frène. Les térébenthines, quelle que soit leur origine, jouissent les unes et les autres des mêmes propriétés thérapeutiques. Ce sont des stimulants qui agissent plus spécialement sur les muqueuses pul- monaire et vésicale, qui augmentent l’exhalation cutanée, la sécré- tion urinaire et l’expectoration. On emploie celle du mélèze dans toutes les affections catarrhales des muqueuses bronchique, urinaire, uréthrale, etc. C’est un excellent remède contre les douleurs rhu- matismales. M. Martinet l’a employée avec le plus grand succès contre Flore. T, II. 21 322 FLORE MÉDICALE le lombago et la sciatique. Elle convient, d’ailleurs, dans un grand nombre de névralgies. C’est plus spécialement l'essence de térében- thine dont on fait usage dans ces cas. Elle a été vantée par M. Réca- mier et par un grand nombre de médecins. Il serait trop long d’énu- mérer seulement les cas dans lesquels la térébenthine du mélèze ou son essence ont été employées. A l'extérieur, l'essence seule ou associée à d’autres substances a été employée comme rubéfiante contre les douleurs. Elle fait partie du baume de Fioraventi, où alcoolat de térébenthine composé. La pâte de térébenthine est la base du savon de Starkey et des digestifs divers, employés comme détersifs. On solidifie la térébenthine par l'ébulli- tion dans l’eau, ce qui constitue la Térébenthine cuite, ou par la magnésie. C’est sous cette forme qu’on l'administre dans les ca- tarrhes divers, la gonorrhée, la blennorrhée, la leucorrhée atoni- ques, les diarrhées muqueuses, la cystite, la strangurie, etc., etc. L’essence de térébenthine a été utilisée avec succès contre cer- taines ophthalmies catarrhales. On l’a appliquée en frictions le long du rachis, contre les convulsions des enfants. Émulsionnée avec un jaune d'œuf, elle est anthelmintique et tue très-bien les ascarides lombricoiïdes, les oxyures, et même le tænia. A forte dose, elle peut produire une diarrhée violente, des vomissements. Cependant on à pu, dans certains cas, en porter g graduellement la dose jusqu'à cent et cent cinquante grammes. On l’a conseillée pour combattre l'em- poisonnement par l'acide cyanhydrique et même par l’opium. On s’en est servi comme désinfectant dans la gangrène d'hôpital, etc. La térébenthine et les résines qui en dérivent sont la base d’un grand nombre d’onguents et d'emplâtres composés. Nous reviendrons sur les résines de térébenthine en parlant du pin sylvestre, et nous traiterons en même temps du goudron, quoique celui-ci puisse être préparé avec le mélèze et autres conifères. MÉLIANTHE Melianthus major et minor L. (Zygophyllées.) Le Mélianthe pyramidal (4. snajor L.), vulgairement nommé Pimprenelle d'Afrique, est un arbrisseau, dont la tige, haute de 2 à 3 mètres, cylindrique, porte des feuilles alternes, imparipen- DU XIX° SIÈCLE. 323 nées, à péliole muni à la base de deux stipules soudées en une seule, ovale, membraneuse, très-grande, intrapétiolaire, à limbe composé de cinq ou sept folioles opposées, sessiles, décurrentes, oblongues, dentées, glauques. Les fleurs, petites, irrégulières, d’un rouge foncé, sont disposées en grappes pyramidales, sur des pédoncules munis chacun d'une bractée. Elles présentent un calice ample, pétaloïde, à cinq divisions inégales, les deux supérieures plus grandes, planes et lancéolées, comme les latérales qu'elles recouvrent, l’inférieure très- courte, gibbeuse à la base, capuchonnée au sommet, creusée à la base en une cavité qui renferme un nectaire; une corolle à cinq pétales plus courts que le calice, ligulés, le supérieur très-petit ou presque nul, les quatre autres déclinés, velus et connivents dans leur partie moyenne, libres à la base et au sommet; quatre étamines didynames, les deux supérieures libres, les deux inférieures plus courtes et cohérentes à la hase ; un ovaire quadriloculaire à la base, uniloculaire au sommet, pluriovulé, surmonté d’un style strié, fistu- leux, terminé par un stigmate quadrilobé. Le fruit est une capsule membraneuse, vésiculeuse, à quatre loges ailées, cohérentes à la base, libres au sommet et monospermes. Le Mélianthe à feuilles étroites (AZ. #nor L.) se distingue du pré- cédent par sa taille plus petite, ses feuilles à neuf folioles blanchâtres et velues en dessous, et ses fleurs jaune rougeûtre. Hagirar. — Ces deux arbrisseaux sont originaires du cap de Bonne-Espérance. Ils sont quelquefois cultivés dans nos orangeries. Paris usitrées. — Les feuilles, le suc qui en découle. Comwposirion cHimiQue. — Ces plantes contiennent deux principes distincts : d’abord, la matière sucrée, à laquelle elles doivent leur nom, puis un principe odorant fétide, rappelant l'odeur du stramo- nium, et dont la nature chimique est inconnue. Usaces. — Le genre Melianthus tire son nom de peu, miel, et de æ00:, fleur, à cause du suc sucré qui découle de ses feuilles. Les différentes parties de ces plantes n'existent pas dans la matière médi- cale française. D'après Lémery (Dect. des drog., p. 484), les Hotten- tots sucent, pour se rafraichir, la liqueur miellée qui s'écoule des glandes situées entre les pétales. Ce liquide est noirâtre et si abon- dant qu’il tache le sol et les feuilles sur lesquelles il tombe, Il est réputé comme cordial et pectoral. 324 VWLORE MÉDICALE MÉLILOT Metilotus officinalis Willd. M. macrorhiza Pers. M. altissima Thuill. (Légumineuses - Lotées.) Le Mélilot officinal, appelé aussi Mirlirot, Trèfle de cheval, est une plante bisannuelle, à racines fortes, fibreuses, blanchâtres. Les tiges, hautes de 0",50 à un mètre, cylindriques, glabres, striées, dressées ou ascendantes, portent des feuilles alternes, munies de stipules à la base, pétiolées, à trois folioles oblongues, très-étroites, tronquées au sommet, dentées, glabres. Les fleurs, jaunes, très-petites, sont dis- posées en longues grappes dressées. Elles présentent un calice cam- panulé, à cinq dents; une corolle papilionacée, à ailes aussi longues que l’étendard, à carène obtuse ; dix étamines diadelphes ; un ovaire libre, à une seule loge biovulée, surmonté d'un style simple, fili- forme, terminé par un petit stigmate en tête. Le fruit est une gousse velue, ridée, alténuée au sommet, surmontée du style persistant, et contenant deux petites graines réniformes. Le Mélilot de champs (41. arvensis Wallr., M. diffusa Koch) est aussi bisannuel, et se distingue du précédent par sa taille moitié plus petite, ses feuilles à folioles ovales, plus larges; ses gousses glabres, rugueuses, presque obtuses, renfermant huit à dix graines. Le Mélilot bleu (47. cœrulea Lam.), appelé aussi Trèfle musqué, Lotier odorant, Baume du Pérou, etc., est annuel et tient le mi- lieu, pour la taille, entre les deux précédents. Il se reconnait d'ail- leurs à ses fleurs bleuâtres en grappes ovoides compactes, ses gousses striées longitudinalement, et son odeur aromatique. Le Mélilot blanc (97. leucantha Koch, M. alba Thuill.) est carac- térisé par ses fleurs blanches, à long étendard, et ses gousses à trois ou quatre graines. Hagrrar. — Toutes ces plantes, sauf le mélilot bleu, qui est ori- ginaire de la Bohême, se trouvent dans presque toute l'Europe. On les rencontre dans les prairies naturelles et artificielles, les moissons, au bord des chemins, sur la lisière des bois, dans les jardins, etc. PARTIES usITÉES. — Les sommités fleuries. RécoLte. — On récolte le mélilot au mois de juin ou de juillet. On en forme des paquets que l’on dispose en guirlandes, et que l'on fait sécher au grenier. Le mélilot doit conserver sa couleur jaune; son DU XIX° SIÈCLE. 325 odeur s'exalle par la dessiceation. D'après M. Chatin, on vend sur les marchés de Paris, pour le mélilot officinal, le mélilot des champs (AL. arvensis Wallr.). On distingue celui-ci en ce que les hottes sont plus courtes, et toujours mélangées d’un grand nombre de plantes étrangères. Il est d’ailleurs moins aromatique que le mélilot offici- nal. Comrosirion cuimiQue. — Vogel, en 1820, avait cru reconnaitre, dans le mélilot, la présence de l’acide benzoïque ; mais les recher- ches ultérieures de MM. Chevallier, Thubeuf, Cadet, Guillemette, ont démontré que ce prétendu acide benzoïque élait de la cowriarine, tout à fait semblable à celle que l'on trouve dans la fève Tonka. C'est une substance blanche, qui fond à 68° et non 50° comme on l'a écrit, et bout à 270°, d’une odeur très-agréable, plus soluble dans l’eau bouillante que dans l’eau froide. Elle cristallise, d’après M. de La- provostaye, en prismes rectangulaires droits, appartenant au système rhomboïdal. Traitée par la potasse, à chaud, elle se transforme en acide coumarique. La formule de la coumarine = CH°O*. UsaGes. — Le mélilot est placé dans la classe des émollients, et jouit de la réputation d’être résolulif, anodin, carminatif. Haller le regardait comme suspect, Bulliard dit qu'en séchant, il prend de l'âcreté. Ses propriétés médicales sont mal connues. On lui a attri- bué une foule de vertus contradictoires ; on l’a préconisé contre les coliques, les rhumatismes, les dysenteries, la dysurie, la néphrite, les douleurs utérines, l’inflammation des viscères abdominaux, la leucorrhée, l'angine, etc., etc. ; mais, malgré les faits avancés par Michaelis, Haller et Tournefort, le mélilot n’est plus guère employé à l’intérieur. Pour l'usage externe, Ettmuller et Simon Paulli, ont recommandé l’infusion et fomentation sur le ventre. Chomel dit que le mélilot lui a souvent réussi contre les coliques venteuses. En Alle- magne, on l’ajoute dansles bains pour la goutte, les rhumatismes, etc. Les lavements au mélilot jouissent de la réputation d’être vermifu- ges et carminatifs. Roques employait l'infusion de mélilot, mêlée au miel, dans les ophthalmies inflammatoires ; l'eau distillée de‘eette plante est quelquelois encore employée au même usage. On préparait autrefois une huile et un emplâtre de mélilot, que l’on regardait comme résolutifs. Le mélilot blanc (47. alba Thuill.) jouit des mèmes propriétés que le mélilot officinal. Le mélilot bleu (47. cerulea Lamk) remplace It. 21° 326 ELORE MÉDICALE en Allemagne le mélilot ordinaire; son odeur est très-forte et très- persistante. En Silésie, on l'emploie à la place de thé. Matthiole rap- porte que de son temps, en Italie, on préparait avec cette plante des eaux de senteur; et il ajoute que le suc de mélilot, versé dans les yeux, guérit les éblouissements. Le nom de Trifolium caballinum était jadis donné au mélilot offi- cinal, parce queles chevaux aiment beaucoup àrencontrer cette plante dans leur fourrage ; les éleveurs anglais ont soin d'y en ajouter. Valmon de Bomare dit qu'il suffit de mettre une pincée de mélilot dans le corps d’un lapin de chou pour lui donner le parfum du lapin de garenne. On emploie les fleurs de Mélilot pour préparer des parfums et des cosmétiques. On pourrait se servir du mélilot pour remplacer la fève Tonka et le substituer au tabac. En Moldavie et en Alsace, on met des paquets de cette plante dans les fourrures et les vêtements, afin d'en éloigner les insectes destructeurs. MÉLINET Cerinthe aspera Roth, C. major L. { Borraginées - Borragées. ) Le Mélinet rude ou Grand Mélinet est une plante annuelle, dont la tige labre, succulente, un peu rameuse, porte des feuilles alter- nes, larges, ovales, oblongues, obtuses, ciliées, un peu glauques, parsemées de petits points tuberculeux, rudes et blanes ; les inférieu- res pétiolées, spatulées ; les supérieures embrassantes, auriculées, cordées, obluses, mucronées. Les fleurs assez grandes, jaunes, quel- quefois pourprées dans leur milieu, sont réunies en grappes scor- pioides, dont l’ensemble forme presque une cime. Elles présentent un calice persistant, profondément divisé en cinq lobes inégaux ; une corolle à tube renflé, à gorge nue, à limbe divisé en cinq dents lar- ges, courtes, acuminées, -réfléchies ; cinq étamines, à filets courts, élargis, à anthères hastées, divisées en deux lobes un peu obtus, divergents à la base; un ovaire à quatre loges uniovulées, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate obtus. Le fruit se com- pose de deux nucules, dont l’ensemble présente quatre loges mono- spermes. Le Mélinet glabre (C. glabra W.) est regardé par la plupart des botanistes comme une simple variété du précédent, dont il diffère DU XIX° SIÈCLE. 327 par ses feuilles glabres, non ciliées, et ses fleurs plus petites, d’un jaune pâle. Le Mélinet à petites fleurs (C. mnor L.) ressemble beaucoup au mélinet glabre; il s’en distingue facilement par sa souche vivace et sa corolle à lobes aigus et profonds. Hagrrar. — Le mélinet rude se trouve dans le midi de l’Europe; il croît de préférence dans les champs sablonneux. Le mélinet à pe- tites fleurs habite surtout les Alpes. PARTIES uSITÉES. — Les feuilles. Récozre. — Le Cerinthe major L. doit être récolté à l’époque de la floraison. Linné en distinguait deux variétés, que Roth et De Can- dole ont élevées au rang d'espèces; l’une est le C. aspera, dont les feuilles, d’un vert bleuâtre, sont parsemées de petites aspérités blanches, cornées et prolongées en poils rudes; l’autre espèce, le C. glabra, dont les feuilles ne sont ni ciliées, ni velues, présente à peine quelques taches blanches, écailleuses, ressemblant à des fragments d'émail ou de faïence. La dessiccation des feuilles de cé- rinthe s'opère facilement, mais elles noircissent toujours un peu en se desséchant ; il faut les conserver à l’abri de la lumière, et sur- tout de l'humidité. COMPOSITION CHIMIQUE. — Comme toutes les borraginées, les feuilles de mélinet sont charnues, aqueuses, et contiennent beaucoup de mu- cilage dans leur jeune âge ; plus tard, elles deviennent moins émol- lientes, et plus riches en principes extractifs ; elles sont alors amères et dépuratives, et astringentes. Usaces. — Sous le nom de cérinthe, Virgile paraît désigner le Satureia timbra. L. ou le Satureia capitata L. D'après Tendre, c’est Linné qui a appliqué ce nom à la plante de la famille des borragi- nées, dont nous venons de parler. Lemery, dans son Dictionnaire des drogues, indique le C. major comme astringent et rafraîchissant. On l'a autrefois prescrit contre les maladies des yeux. Dans la pratique sérieuse, on n’en use pas aujourd'hui, du moins en France. 328 FLORE MÉDICALE MÉLISSE Melissa officinalis L. (Labiées- Saturéiées.) La Mélisse ou Citronnelle est une plante vivace à souche longue, traçante, un peu ligneuse, munie de fibres radicales. La tige, haute de 0%,40 à 0,80, tétragone, cannelée, pubescente, dressée, plus ou moins rameuse, porte des feuilles opposées, longuement pétiolées, ovales, crénelées, pubescentes, luisantes et d'un vert foncé en des- sus, plus päles en dessous. Les fleurs, blanches, courtement pédon- culées, accompagnées de bractées oblongues mucronées, sont dis- posées en glomérules, à l'aisselle des feuilles supérieures. Elles présentent un calice assez grand, strié, campanulé ou tubuleux, évasé au sommet, profondément divisé en deux lèvres, la supérieure tridentée, l'inférieure bifide; une corolle à tube long, arqué, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure droite et échancrée, l’in- férieure trilobée; quatre étamines didynames, incluses; un pistil formé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple ter- miné par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes entourés par le calice persistant. Hagirar. — La mélisse croît dans les régions méridionales de l'Europe ; elle habite surtout les terrains incultes, le bord des haies, la lisière des bois. Cultivée depuis longtemps dans les jardins, elle s'est naturalisée dans plusieurs localités. Cuzrure. — La mélisse est cultivée assez fréquemment pour l’usage médical. Elle demande une exposition chaude, et, bien que venant dans presque tous les sols, elle préfère une terre légère. On la pro- page de graines, semées en planche au printemps, et d’éclats de pieds faits dans cette saison, ou de préférence à l’aulomne. Dès qu'elle a pris possession du sol, elle se ressème le plus souvent d’elle- même. Parties usirées. — Les feuilles et les sommités. RécoLte. — La récolte de la mélisse se fait vers le mois de mai, avant la floraison; plus tard elle acquiert une odeur assez désagréable analogue à l’odeur de la punaise. Tantôt on cueille les feuilles iso- lées, tantôt les sommités fleuries; on fait sécher les feuilles au gre- nier, ainsi que les sommités que l’on dispose en guirlandes. Elle perd DU XIX° SIÈCLE. 329 une partie de ses principes aromatiques par la dessiccation; mais lorsqu'on froisse les feuilles sèches, elles répandent une odeur des plus suaves. Il faut conserver ces feuilles dans un lieu sec ; la lumière les décolore, l’humidité les noircit. COMPOSITION CHIMIQUE. — Toutes les parties de la plante, surtout les feuilles, lorsqu'on les à cueillies avant la floraison, exhalent une odeur de citron des plus prononcée, mais plus suave, que celle de ce fruit. Sa saveur est chaude, aromatique, peu amère. Ses propriétés sont dues à une huile essentielle oxygénée, et à un principe extractif amer, peu abondant. Usages. — Les Latins nommaient la mélisse Cérago et les an- ciens Melisphylle et Melisphyllon, qui signifie feuille de miel. Vir- gile recommande d'en mettre à portée des abeilles, d’où est venue l'épithète d’apéastrum. L'action légèrement stimulante qu’elle exerce sur le système nerveux lui à valu les qualifications, peu employées de nos jours, de céphalique, cordiale, stomachique, carminative, etc. Elle est cependant considérée comme légèrement stimulante et anti spasmodique. Elle convient dans les affections nerveuses, l'hystérie, les cardialgies, les spasmes, les vertiges, la migraine, dans tous les cas d’atonie générale. Hoffmann l’administrait en poudre contre l'hypocondrie, et Rivière en infusion vineuse contre la manie. On la conseille quelquefois contre le catarrhe chronique des vieillards. Son infusion théiforme est d’un fréquent usage contre les flatuosités, l’inappétence, les indigestions. Les Arabes en faisaient grand cas, comme cordial. Rondelet, Forestius, Gratarolus, Fernel, Rivière, Hoffmann, la prescrivaient comme cordiale et stomachique. Comme cela a lieu en toutes choses, on a exagéré les propriétés de la mélisse. Peyrilhe en faisait la boisson habituelle des syphilitiques. Il prétendait qu’il suffisait d'en mettre de la poudre dans la chemise du malade pour guérir l’aménorrhée. Simon Pauli dit qu’il convient d’en mêler au pain pour le même objet. C'est surtout en infusion théiforme, à la dose de quinze grammes pour un litre d’eau bouillante, que la mélisse est employée. On en fait une eau distillée. Elle est la base de l'Æau de mélisse composée ou alcoolat de mélisse composé, Eau des Carmes déchaussés, que l'on emploie souvent avec succès, tantôt en inhalations, tantôt à l’inté- rieur, à la dose d’une cuillerée à café pour un verre d’eau sucrée, contre la syncope, les défaillances, les flatuosités. Les feuilles de 330 FLORE MÉDICALE mélisse entraient dans l’euu générale, Veau divine, l'eau impériale, le sirop d'armoise composé, dans la poudre chalybée, ete. Le Melisse Calamentha L. où Calament, Calament des montagnes, et le Melissa Nepeta, Calament des Anglais, jouissent des mêmes propriétés. La mélisse 4tarde, ou mélisse punaise, mélisse sauvage, mélisse de Tragus, est le Melissa Melissophyllum. Le Dracocepha- lum L. Moldavicum porte le nom de Mélisse de Moldavie, le Dra- cocephalum Canariense L., porte le nom de Mélisse des Canaries et de M. turcica. Enfin la mélisse de Constantinople est le Mo/ucella Levis L. MÉLITTE Melittis melissophyllum L. (Labiées-Stachydées.) Le Mélitte à feuilles de mélisse, vulgairement appelé Mélissot, Mé- lisse des bois ou sauvage, Mélisse bâtarde, Herbe sacrée, etc., est une plante vivace, à souche traçante. Sa tige, haute de 0,30 à 0,60, simple, rarement rameuse, robuste, simple, plus ou moins velue ou pubescente, dressée, porte des feuilles opposées, longuement pétio- lées, assez grandes, ovales-aiguës, quelquefois cordiformes à la base, crénelées ou dentées, les inférieures plus petites. Les fleurs, très- grandes, blanches, tachées de rouge pourpre, pédonculées, sont solitaires ou géminées, plus rarement ternées, à l'aisselle des feuilles. Elles présentent un calice très-ample, membraneux, campanulé, veiné, obscurément partagé en deux lèvres, la supérieure plus grande, à peine lobée ou presque entière, l’inférieure divisée en deux lobes arrondis; une corolle à tube ample, dépassant le calice, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure droite, arrondie, en- tière ou à peine échancrée, un peu concave, l'inférieure à trois lobes étalés, le médian plus grand ; quatre étamines didynames, in- cluses, à anthères à deux lobes divergents, rapprochées par paires en forme de croix ; un pistil composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate bilobé. Le fruit se compose de quatre akènes ovoides arrondis, lisses ou finement réliculés ou pubescents, entourés par le calice persistant. Haprrar. — Cette plante est commune dans l'Europe centrale et méridionale, surtout dans les régions montueuses; elle habite les bois. On ne la cultive que dans les jardins botaniques ou d’agré- DU XIX° SIÈCLE. 331 ment ; elle demande une exposition ombragée, une terre légère, et se multiplie facilement de graines ou d’éelats de pieds. Pagries usiTées. — Les feuilles, les sommilés, la racine. Récorte. — Les feuilles el les sommités de la mélisse sauvage sont rarement employées en médecine. On les cueille au moment de la floraison. Les fleurs, très-belles, sont difficiles à conserver avec leur blancheur; elles perdent une portion de leur odeur par la dessicca= tion. La racine se récolte en octobre. La racine de mélilte ressemble beaucoup à celle de la Petite Aristoloche (Ayréstolochia Pistolo- chia L.). Composrrion cuimique. — L'’odeur, assez désagréable, que répand cette plante, lui a fait donner le nom de Mé/isse puante où de punarse. L'analyse n’en a pas encore été faite. Usages. — Tournefort et Garidel ont recommandé la mélitte contre les rétentions d’urines. Les feuilles passent pour vulnéraires, diu- rétiques et stimulantes. C’est d’ailleurs bien à tort qu’on a attribué à cette plante les mêmes propriétés qu'à la Mélisse ofticinale. MÉNISPERME Menispermum canadense L, Cissampelos smilacina Jacq. (Ménispermées. ) Le Ménisperme du Canada est un arbrisseau, dont Ja tige, haute de 5 à 6 mètres, s’enroule autour des corps voisins et porte des feuilles alternes, longuement péliolées, peltées, cordiformes, arron- dies ou anguleuses, entières, lisses, d’un vert foncé en dessus, plus pales en dessous, marquées de nervures fortement saillantes et un peu roulées sur les bords. Les fleurs, dioïques, petites, verdâtres, sont groupées en grappes axillaires; elles présentent un calice de six à douze sépales, ternés ou quaternés, disposés sur deux ou trois rangs; une corolle formée d’un nombre égal de pétales. Les mâles ont les étamines en nombre double, hypogynes, disposées sur deux ou quatre rangs, à filets linéaires, à anthères quadrilobées. Les femelles ont un pistil composé de quatre ou cinq carpelles libres, uniovulés, surmontés chacun d’un style court terminé par un stig- mate trifide. Le fruit est une drupe noirâtre, pisiforme, à noyau osseux, renfermant une seule graine réniforme (PI. 34). Haprrat.—Nous citerons encore, comme appartenant à l'Amérique 392 FLORE MÉDICALE du nord, le Ménisperme de Caroline (47. carolinianum L.), qui a des feuilles cordiformes, velues en dessous, des fleurs odorantes, des fruits rouges; et le Ménisperme de Virginie (47. vérginianum L.), à feuilles peltées, cordiformes, lobées, et à fruits bleus. Le Ménisperme percé (M. fenestratum Gærtn.), dont le bois est considéré par les Hindous comme un excellent amer, se trouve aux Indes orientales. Le Ménisperme creux (47. lacunosum D. C.) croil aux Moluques, et le Ménisperme de Plukenet (M. Plukenetir D. C.) à Java. Le Ménisperme comestible (47. edule Vahl) se trouve en Égypte. Le Ménisperme palmé ou Colombo et le Menispermum Cocculus où Coque-du-Levant, font l'objet d'articles spéciaux (1, p.371 etp. 387). Parnies usiTÉES. — Les racines, les tiges. Composirion cHimiQue. — Toutes les plantes de la famille des Mé- nispermées se font remarquer par l'abondance d’un principe amer, souvent toxique, mais, la plupart du lemps, tout à fait inactif. La racine du ménisperme du Canada a une saveur douceâlre, mu- cilagineuse d'abord, et plus tard (rès-amère. Cette propriété la rap- proche de la racine de Rhubarbe et de celle de Colombo. La tige est moins amère, elle possède une saveur amarescente, herbacée, muei- lagineuse, et un peu nauséeuse. Usages. — Les produits de la plupart des ménispermes sont très- rares dans le commerce. Les racines sont tout au plus de la grosseur d'une plume à écrire ; elles sont d’un jaune clair, et renferment, ainsi que les tiges, une matière colorante jaune, que l’on pourrait utili- ser. Les racines du ménisperme du Canada doivent, en raison de leurs propriétés, être placées parmi les toniques amers. En Amérique, on emploie le ménisperme comme tonique et dépuratif; on en fait usage contre les maladies de la peau. D'après le capitaine Wright, les Malais emploient, contre les fièvres intermittentes, et avec autant de succès que le Quinquina, les racines de différents ménispermes des Indes orientales, dont les fruits sont vénéneux (Ainslie, Ma’. med. ind., M, p. 378). Nous ne donnons qu'une médiocre confiance à cette opinion. En Égypte, on mange les baies de ménisperme comes- tible, et par la fermentation, on en fait une liqueur enivrante. DU XIX° SIÈCLE. 333 MENTHE Mentha piperita L. M. pyramidalis Ten. (Labiées - Menthoïdées.) Le genre Menthe renferme plusieurs espèces employées en méde- cine, ou susceptibles de l'être. La plus importante est la Menthe poivrée (M. piperita L.), plante vivace, à rhizome long, rampant, traçant, chevelu. Sa tige, haute de 0,30 à 0°,50, tétragone, glabre ou à peine pubescente, dressée ou ascendante, se divise en rameaux opposés, dressés, portant des feuilles opposées, courtement pétiolées, ovales-oblongues lancéolées, aiguës, dentées en scie, d’un beau vert foncé en dessus, plus pàles en dessous, glabres ou tout au plus pré- sentant quelques poils le long des nervures, qui sont assez fortement saillantes. Les fleurs, violacées, à pédicelles glabres, forment des épis assez courts, ovoides, très-compactes, à l'extrémité des ra- meaux. Elles présentent un calice tubuleux, presque régulier et cylindrique, strié, à cinq dents aiguës, ciliées, les deux supérieures un peu plus courtes; une corolle en entonnoir, à tube court, évasé vers la gorge, à limbe divisé en quatre lobes d’égale longueur, le supérieur un peu plus large et échancré; quatre étamines presque égales, divergentes; un pistil composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style grêle, filiforme, saillant, terminé par un stig- mate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes lisses, entourés par le calice persistant. La Menthe sauvage (MZ. sylvestris L.) est aussi vivace, comme toutes les suivantes, et se distingue par ses feuilles sessiles, à dents aiguës ; ses fleurs rose pâle, rarement blanches, disposées en épis cylin- driques. La Menthe cultivée (M. sativa L., M. gentilis Auct.), vulgaire- ment appelée Baume des jardins, est caractérisée par ses fleurs d'un beau rose, en glomérules nombreux, espacés à l’aisselle des feuilles. La Menthe aquatique (M. aquatica L.) se reconnaît à ses feuilles pétiolées, et à ses fleurs en glomérules rapprochés en têtes globuleuses. Le Pouliot (M. puleqium L.) se distingue aisément de toutes les espèces précédentes par son calice, dont la gorge est fermée, après la floraison, par un anneau de poils connivents en cône. Hagrrar. — Toutes ces plantes sont abondamment répandues en 334 FLORE MÉDICALE Europe; on les trouve surtout dans les lieux humides, au bord des eaux, le long des fossés et des chemins herbeux, dans les champs et les jardins, etc. Cuzrure. — La menthe poivrée et celle des jardins sont les seules qui soient cultivées pour l'usage médical. Elles préfèrent une terre franche, légère et fraîche. On les propage quelquefois de graines, mais le plus souvent par drageons, qui reprennent très-facilement, si on les plante en automne, ou mieux en mars. Les autres espèces se cultivent de même, mais seulement dans les jardins botaniques. Parties usirées. — Les feuilles, les sommités fleuries. Récorre. — Les feuilles des menthes s'emploient presque tou- jours sèches. Ou les recueille en juillet, un peu avant la floraison. La dessiccation doit être opérée rapidement; on rejette les feuilles qui ne sont pas vertes. et dont l'odeur n’est pas forte et agréable. Tantôt ce sont les feuilles isolées que l’on fait déssécher, tantôt ce sont les sommets; ce dernier procédé est en usage pour le pouliot, par exemple. ComrosiTioN CHiMiQuE. — Presque toutes les menthes sont em- ployées en médecine; mais la menthe poivrée est la plus usitée. L'odeur de celle-ei est forte; sa saveur est aromatique, accompagnée de fraicheur à la bouche. Elle est riche en huile essentielle. On en prépare une eau distillée très-odorante. L’essence de menthe la plus appréciée vient d'Angleterre; les États- Unis d'Amérique en fournissent aussi, mais qui est moins estimée. Celle qu'on fabrique en France a toujours une saveur désagréable ; elle est la base des pastilles et des tablettes de menthe. On attribue la supériorité de l'essence d'Angleterre à la précaution que l'on prend dans ce pays de détruire toutes les autres espèces de menthe. Les Chi- nois la nomment Z2n-{s40, ils appellent le pouliot Pou-Lo ou Po-ho. L'essence de menthe du commerce provenant de la menthe poi- vrée est un mélange d'une substance liquide et d’un corps solide qui présente de l’analogie avec le camphre. L’essence concrète examinée parM Walter se dépose en cristaux incolores, peu solubles dans l'eau, très-solubles dans l'alcool et l’éther. Elle fond à 34° et bout à 213. La densité de sa vapeur est de 5,62. Sa formule — C*°H?°0*. L’a- cide phosphorique anhydre lui enlève deux équivalents d’eau et la transforme en menthène — C*H'$. Celui-ci est liquide, incolore, très-fluide. Son odeur est très-fraiche ; sa densité est 0,85. Il bout DU XIX° SIÈCLE. 339 à 163°. L’essence de menthe d'Amérique se congèle presque à 0°. Rectifiée avec soin en fractionnant les produits, on obtient par re- froidissement du résidu, l'essence concrète en beaux prismes ; c’est le Stéaroptène de menthe; mais l’essence brute renferme, en outre, une huile essentielle liquide ou E£/woptène , et une huile grasse sus- ceptible de rancir. Celle-ci est séparée par le rectificateur au con- tact de l’eau, en même temps qu'on retire une portion du stéarop- tène ; le produit obtenu est incolore, très-fluide, léger, d’une saveur chaude, poivrée. Sa pesanteur spécifique est de 0,899; il bout à 490°, et il est représenté par = C?°H!*O0*. Usaces. — Les menthes sont des stimulants diffusibles, qui exci- tent toutes les fonctions et plus spécialement celles du canal digestif. La menthe poivrée est à peu près la seule employée; c'est d’ailleurs celle dans laquelle les propriétés excitantes sont les plus développées. On la regarde comme antispasmodique ; elle est prescrite dans tous les cas où il y a des désordres nerveux graves, dans les céphalalgies, les coliques, les vomissements nerveux, la tympanite nerveuse, le hoquet, les flatuosités, les pertes périodiques avec des symptômes nerveux, l'asthme humide, etc., etc. Elle convient dans tous les cas de débilité, lorsqu'il s’agit de fortifier les organes, de ranimer les forces, d'exci- ter une fonction, de faciliter l’expectoration. On la fait prendre en infusion aux anémiques, aux chlorotiques, aux lymphatiques, aux vieillards, etc., etc. MM. Trousseau et Pidoux recommandent l’infu- sion de menthe dans la période de concentration du choléra asiatique. Ils conseillent le sirop et l’eau distillée de menthe pour les enfants qui vomissent pendant l'allaitement, pour le sevrage prématuré, dans les fièvres typhoïdes à forme muqueuse. Barthez la conseillait pour les goutteux. Alibert donnait la poudre à la dose de 1 à 2 grammes dans les fièvresnerveuses. Bergius, Cullen, Knigge, Fr. Hoffmann, etc., en faisaient grand cas. Hippocrate attribuait à la menthe une propriété anaphrodisiaque. Plus tard, Dioscoride, au contraire, en parlait comme d’un breuvage excitant les passions. La pulpe de menthe a été proposée à l’intérieur comme résolutive contre les engorgements laiteux des mamelles ; l’infusion aqueuse ou vineuse a été proposée en lotions et fomentations, comme tonique et résolutive contre les engorgements scrofuleux, les contusions, les ecchymoses, pour panser les ulcères atomiques, etc. L'infusion, très- 336 FLORE MÉDICALE chargée, a été conseillée contre la gale. L'alcoolat s'emploie en fric- tions contre les douleurs rhumatismales chroniques. L'essence entre dans la composition des eaux et des poudres dentifrices. A la dose de quelques gouttes, on l’emploie pour les gargarismes ; on s’en est servi contre les engorgements indolents des gencives. Elle entre dans divers liniments excitants. M. Bodard la regarde comme un succé- dané du campbre. La menthe aquatique, M. aquatica L., la crépue, M. crispa L., le pouliot, AZ. pulegium, la menthe sauvage, M. sylvestris, la menthe verte, M. viridis L., la menthe gentille, A7. gentilis, celle des champs, M. arvensis L., celle des jardins, 27. sativa L., celle à odeur de citron, M. citrata L., jouissent toutes des mêmes propriétés que la menthe poivrée, mais elles sont moins actives. Le pouliot a surtout été em- ployé comme expectorant. La menthe crépue a été recommandée par Celse, Huffeland, et plus récemment par M. Roques, dans un grand nombre de maladies. MÉNYANTHE Menyanthes trifoliata L. (Gentianées - Ményanthées. ) Le Ményanthe trifolié, vulgairement appelé trèfle d’eau ou trèfle des marais, est une plante vivace, à rhizome cylindrique, épais, ar- ticulé , rameux, marqué de cicatrices annulaires, traçcant, muni de racines fibreuses blanchâtres. Les feuilles, toutes radicales, sont al- ternes, à pétiole très-long, engainant et membraneux à la base, à limbe divisé en trois folioles oblongues ou obovales, entières ou légèrement dentées, glabres, d’un vert un peu glauque, plus pâle en dessous. La hampe qui sort du centre de ses feuilles est nue , haute de 0",20 à 0",40, et se termine par une grappe de fleurs blanc rosé, pédonculées et munies de bractées lancéolées-aiguës. Chaque fleur présente un calice campanulé, profondément partagé en cinq divi- sions lancéolées obtuses; une corolle à entonnoir, à cinq divisions étalées, lancéolées, aiguës, barbues à la face interne, à bords roulés en dedans; cinq étamines incluses, à anthères brun jaunàtre; un ovaire libre, à une seule loge multiovulée, surmonté d’un style simple, filiforme, terminé par un stigmate bilobé. Le fruit est une capsule arrondie, uniloculaire, surmontée du style persistant, et renfermant de nombreuses graines ovoïdes, comprimées, jaunâtres, luisantes. DU XIX° SIÈCLE. 337 Hagrrar. — Le ményanthe trifolié est assez répandu en Europe; il habite les localités marécageuses ou tourbeuses. Cuzrure. — Cette plante n’est cultivée que dans les jardins bota- niques ou d'agrément. Elle demande un sol marécageux ou inondé. On peut la propager de graines semées au printemps, en terre de bruyère maintenue humide, et mieux d’éclats de pieds, faits à l'au- tomne ou au printemps, en terre argileuse et tourbeuse. PARTIES usiTÉEs. — Les feuilles, les tiges, les rhizomes. Récore. — Les feuilles doivent être cucillies à la fin de l'été. Lorsqu'elles sont séchées avec soin, elles conservent bien leur amer- tume, mais elles perdent un peu leur couleur verte. La plante, qui est souvent employée à l’état frais, peut être récoltée pendant tout l'été. ComposiTion CHIMIQUE. — Le ményanthe, comme toutes les gen- tianées, possède une saveur extrêmement amère et un peu nauséeuse ; son odeur est faible. D'après Trommsdorf, il contient une fécule verte, de l’extractif amer, une gomme brune, de l'albumine, une matière animale non coagulable par la chaleur, et de l’inuline. M. Nativelle en a extrait une matière amère cristallisable qu'il a nommée Ményan- thine et mieux Ményanthène. Ce sont des cristaux prismatiques ai- guillés, blancs, courts, très-amers, solubles dans l'alcool bouillant, peu solubles dans l’éther et dans l'eau bouillante. M. Kromeger, qui a examiné la ményanthine l’a placé parmi les glycosides. Usaces. — L'amertume bien prononcée de cette plante l’a fait employer quelquefois par les brasseurs pour remplacer le houblon dans la bière. Elle doit être placée dans les toniques amers; mais on la considère comme fébrifuge, anti-scorbutique , vermifuge, emmé- nagogue. Elle est aujourd'hui peu employée, si ce n’est peut-être dans les maladies cutanées et les scrofules. Elle entre dans le sirop antiscorbutique du Codex. C'est alors la plante fraiche que l’on em- ploie ; elle concourt à donner à cette préparation une amertume très- prononcée. Le trèfle d'eau convient dans toutes les maladies où les toniques amers sont indiqués ; mais il ne possède certainement aucune des propriétés spéciales qu’on lui a attribuées. Il est employé avec succès contre les cachexies, la chlorose, et surtout le scorbut ; mais Villiers le regardait comme antihydropisique. Boerhave et Bergius l'avaient trouvé utile contre la goutte ; Simon Scholtius disait en avoir obtenu de bons effets contre le rhumatisme articulaire aigu, et M. Double a Flore, T. II. 22 338 FLORE MÉDICALE appuyé celle opinion (Journ. gén. de méd., À. LXXIV, p. 68). Cullen a constaté ses bons effets contre les affections herpétiques; Roques le conseille contre les dartres. En Angleterre, où l’éruption scor- butique est si fréquente, le suc de ményanthe est un remède po- pulaire contre cette affection. Enfin la décoction des feuilles sèches ou le suc frais peuvent être employés pour le pansement des plaies atoniques. D'après Linné (Æore lap. n° 80), les Lapons extraient du rhizome de cette plante une matière féculente comestible qu'ils font entrer dans la fabrication de leur pain. En Angleterre et dans plusieurs par- lies de l'Allemagne, les feuilles sèches de ményanthe remplacent par- liellement, quelquefois même en totalité, le houblon dans la compo- sition de la bière et du porter. On les préfère pour cet objet à la gentiane, qui donne à tous les liquides dans lesquels on la met une odeur particulière et persistante. Le M. Indica L. est honoré par les Chinois comme une sorte de dieu Lare (Vallot, Mémn. de l' Acad. de Dijon, 829, p. 204). D'après Descourtils, elle remplace aux Antilles notre ményanthe. Au Japon, on mange, dit-on, en salade, les feuilles du 4. rzymphoïdes L., et au cap de Bonne-Espérance, e’est le 17. ovata L. que l’on emploie pour le même usage. D'après Théophraste (Æistoire des plantes), le ményanthe se nomme en grec prvayos, mot formé de u, menstrue, et de &8o, fleur, à cause des vertus emménagogues qu'on lui attribuait. MERCURIALE Mercurialis annua et perennis L. (Euphorbiacées - Acalyphées.) La Mercuriale annuelle (1. annua L.), vulgairement Mercuriale officinale, Foirolle, Rimberge, Vignette, etc., est une plante an- nuelle, à racine grèle, fibreuse, pivotante, blanchâtre. La tige, haute de 0,30 à 0,50, anguleuse, articulée, noueuse, glabre et lisse, dressée, se divise, souvent dès la base, en rameaux opposés, dressés, portant des feuilles opposées, pétiolées, ovales ou lancéolées, dentées, ciliées, glabres, molles, d’un vert pâle. Les fleurs sont ver- dâtres, dioïques, et présentent un calice à trois sépales soudés à la base. Les mâles, disposées en glomérules dont Ja réunion constitue DU XIX° SIÈCLE. 339 des épis nus, lâches, grêles, axillaires, opposés, longuement pédon- culés, ont dix à vingt étamines. Les fleurs femelles, presque ses- siles, groupées par deux ou trois à l'extrémité de courts pédoncules axillaires, ont deux ou trois étamines rudimentaires, réduites à des filets stériles ; un ovaire simple, à deux (rarement trois) loges unio- vulées, surmonté d'un même nombre de styles courts, épais, portant à la face interne un stigmate couvert de papilles glanduleuses. Le fruit est une capsule, formée de deux (rarement trois) coques his- pides, arrondies, contenant chacune une graine rugueuse. La Mercuriale vivace (M. perennis L.), vulgairement Mercuriale des bois ou Chou de chien, se distingue de la précédente par sa durée; son rhizome long, traçant', muni de nombreuses fibres ra- dicales fasciculées ; ses tiges, hautes de 0,20 à 0,40, simples ; ses feuilles pubescentes, d’un vert foncé ; ses fleurs femelles longuement pédonculées, et ses capsules plus grosses. Hagrrar. — Ces deux plantes sont communes en Europe; la première se trouve dans les lieux cultivés, les jardins, au voisinage des habi- tations ; la seconde croît dans les bois et les lieux ombragés. On ne les cultive que dans les jardins botaniques. Parties usiTées. — Toute la plante. Récoure. — La dessiccation enlève les propriétés de la mereuriale. On ne l’emploie que fraiche, pour en extraire le suc. On la coupe au moment de la floraison. Lorsqu'elle est montée en graines, on la regarde comme moins active. On en extrait le suc par contusion, expression et clarification à chaud, avec du miel; on en prépare le miel de mercuriale, ce qui est à peu près la seule forme sous laquelle on administre cette plante. On en fait toutefois un extrait au moyen du suc dépuré. Composrrion caimique. — La mercuriale possède une odeur désa- gréable, une saveur amère, salée. D'après M. Feneulle, elle contient un principe amer, du mucilage, de l'albumine, une matière grasse incolore , une faible quantité d'huile volatile, de la potasse, quelques sels (Journ. de chim. médic.t. W, p. 116). D'après M. Stanislas Martin (Bull. de Thérap.t. XL, p. 359), lorsqu'on la distille avec de l’eau, on en obtient un hydrolat d’une odeur forte, vireuse, détestable, qui provoque les vomissements. Les graines, comme toutes celles de fa même famille, renferment un albumen huileux. L'huile qu'on peut en extraire par expression ou par l’éther, est purgative. On a extrait 340 FLORE MÉDICALE de cette plante un principe immédiat, nommé mercurialine, dont l'étude chimique n’a pas été faite. Usaces. — La mercuriale est laxative, mais elle est inconstante dans ses effets. C’est presque uniquement sous la forme de el de mercuriale, qu'on l'emploie, à la dose de 60 grammes. M. Cazin as- sure que lorsqu'on l'emploie fraichement cueillie, elle est plus constante dans ses effets. Le sirop de longue vie ou de Calabre de Zwinger , autrefois employé, et aujourd'hui tout à fait abandonné, avait pour base la mercuriale. Hippocrate connaissait les propriétés purgatives de la mercuriale. Il la prescrivait pour expulser le placenta, après l'accouchement. I] la faisait appliquer sur les parties sexuelles. Dioscoride, Galien, Paul d'Égine, Oribase, l’employaient pour purger les femmes enceintes, et dans les fièvres intermittentes. D'après Brassavole, célèbre mé- decin et philosophe de Ferrare, mort en 1554, les paysans fer- rarais en mettaient dans leurs potages, pour se purger. Gonan en faisait préparer une soupe, qu'il donnait à manger aux enfants, pour tuer les vers. Linné lui attribuait des propriétés hypnotiques qui n’ont pas été confirmées. Desbois, de Rochefort, la regarde comme diurétique. Bouillie dans de l’eau, elle cède au liquide son principe purgatif, et le résidu jouit, dit-on, de propriétés excellentes, ce qui, toutefois, est nié par Linné, Cranz, Bergius, Plenck, etc. La mercuriale est employée dans les campagnes sous différentes formes. On introduit dans l'anus des feuilles et des sommités de mercuriale, broyées avec du miel ou de l'huile d'olive, pour com- battre la constipation. M. Cazin regarde comme très-efficace, dans ce cas, un supposiloire fait avec une tige de chou et enduit de suc de mer- curiale. C’est, dit-il, un remède souvent employé par les nourrices. La mercuriale vivace (47. perennis) est très-active. Son ingestion a toujours été suivie d'accidents plus ou moins graves. Elle contient en assez grande quantité un principe colorant bleu, que lon trouve dans la maurelle, vulgairement appelée tournesol (Crozophora tinc- toria Neck. Croton tinctorium, L.). Le M. Tomentosa a été, depuis Pline, le sujet des fables les plus absurdes ; les anciens Maures le nommaient Carra. Clusius dit qu'ils l'employaient dans les maladies des femmes. La mercuriale, surtout la mercuriale vivace, est très-nuisible aux animaux ; M. Chorlet, vétérinaire, à Saint-Aignan (Loir-et-Cher), a DU XIX° SIÈCLE. 341 cilé des cas d’empoisonnements survenus à des vaches qui avaient mangé de la mercuriale annuelle. Les médecins homæopathes reconnaissent à la mercuriale des pro- priétés laxatives. Ils l’emploient cependant rarement. Son signe est smu et son abréviation mercurial. MESENNA Albizzia anthelminthica Brong. (Légumineuses-Mimosées.) Le Mesenna ou Musenna est un arbre, dont la tige, haute de 4 à 6 mètres, couverte d'une écorce épaisse et très-rugueuse, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, pétiolées, imparipennées, à trois ou quatre paires de folioles. Les fleurs, verdâtres, sessiles, sont disposées en cymes globuleuses. Elles présentent un calice cam- panulé, turbiné, à cinq dents; une corolle régulière, campanulée, deux fois plus longue que le calice; des étamines nombreuses, à filets blanchàtres, soudés à la base, à anthères vertes et très-petites; un ovaire à une seule loge pluriovulée, surmonté d’un style blanchâtre terminé par un très-petit stigmate en tête. Le fruit est une gousse aplatie, blanchâtre, sèche, à une seule loge, renfermant plusieurs graines ovoides. Le mesenna, généralement appelé Musenna , est nommé Prsenna par M. Aubert Roche; et Besenna, par Ant. Petit, ainsi que par A. Ri- chard dans sa Flore d'A byssinie. Mais son véritable nom est Mesenna, en Ambara, et Besenna, en Tigré (Courbon). D’après M. Aubert Roche, le mesenna serait produit par le Juniperus Virginiana (J. pro- cera, À. Rich.), (Bullet. de l'Acad. de méd., 1. VE, p. 498). A. Richard le rapporte à une légumineuse indéterminée, qu'il désigne sous le nom de Besenna anthelminthica ; M. Courbon ayant rapporté des fleurs et des fruits d'Abyssinie, M. Ad. Brongniart a placé l'arbre qui produit cette écorce à côté de l’acacia de la Haute-Égypte (Acacia lebbek Del., A/bizzia lebbeck Bent), et l'a nommé A/bizzia anthelmainthica. Haprrar. — Cet arbre croit en Abyssinie ; on le trouve surtout dans les lieux situés à une élévation moyenne. Il n'est pas encore connu dans les jardins de l’Europe, où il exigerait probablement la serre chaude, comme la plupart de ses congénères. PARTIES USITÉES. — Les écorces. 942 FLORE MÉDICALE RécoLre. — L'écorce du mesenna se récolte en fragments plats, d'un brun rougeâtre, durs, compactes, inodores, d’une saveur mucila- gineuse. Composition cmiQue. — M. le professeur Gastinel, du Caire, a trouvé dans l'écorce de mesenna beaucoup de gomme, et un principe particulier analogue aux alcaloïdes, principe blanc amorphe et qui sature les acides, L'analyse du mesenna n’a pas été faite. Usaces.— C’est toujours de l'écorce que les Abyssiniens font usage. Is l’emploient comme anthelminthique, et surtout contre le ténia. Ils l’administrent à{ la dose de 60 grammes, délayé dans un liquide quelconque, aidje (hydromel), /4alla (sorte de bière) ou eau. Ils mé- langent cette poudre avec de la farine pour en faire du pain. Ils la joignent au beurre, au miel, elen forment ainsi des boulettes qu'ils avalent. On prend le remède le matin à jeun, on mange {rois ou quatre heures plus tard, et rien n’est changé aux habitudes. Dans la soirée, 1l survient une selle ordinairement solide, mêlée à de la sérosité, dans laquelle on trouve des fragments de tœnia. Mais ce n’est le plus souvent que le lendemain, que l’entozoaire est rendu comme broyé dans une selle séro-muqueuse. Les jours suivants on continue à rendre des fragments sous le même état. Les Abyssiniens, qui sont tous atteints du ténia, prennent un té- niacide tous les deux mois. Ils regardent le mesenna comme plus efficace que le cousso. s En 1848, à son retour de son voyage en Abyssinie, M. d’Abbadie, rapporta du mesenna qui fut expérimenté par le docteur Pruney-Bey, du Caire. D’après M. Gastinel, 30 grammes suffisent pour la médica- mentation. M. d'Abbadie le préfère au cousso, parce que celui-ci est un purgatif drastique, qui détermine des nausées et n'effectue jamais une guérison radicale. Nous pouvons affirmer que le cousso, bien ad- ministré, ne détermine jamais d'accidents, et qu'il expulse parfaite ment le ténia. Les effets purgatifs du mesenna ne sont pas non plus constants, puisqu'on est souvent obligé d’administrer à sa suite des évacuants. M. Courbon attribue les insuccès du mesenna, qui ont étéobservés par des chirurgiens de marine, aux doses insuffisantes qu'ils ont ad- ministrées. Il ajoute que le mesenna est tout à fait insipide ; tandis que M. Aubert Roche dit : « Qu'on le prend incorporé à du miel, auquel il communique un goût de térébenthine, » DU XIX° SIÈCLE. 343 MÉTHONIQUE Methonica superba Herm. Gloriosa superba L. (Liliacées - Tulipées.) La Méthonique superbe, appelée aussi Glorieuse du Malabar, est une plante vivace, à rhizome épais, tubéreux, jaunâtre, muni de fibres radicales. La tige, haute de 1,50 à deux mètres, cylindrique, grêle, lisse, dressée, presque sarmenteuse et grimpante, porte des feuilles alternes, sessiles, lancéolées, très-longues, entières, rétrécies à la base, lisses, terminées en vrille. Les fleurs, grandes, d’un jaune orangé qui passe au rouge, naissent à l'extrémité de longs pédon- cules solitaires à l’aisselle des feuilles supérieures. Elles présentent un périanthe à six divisions profondes, lancéolées aiguës, canali- culées, brusquement réfléchies dès la base, ondulées sur les bords ; six élamines, un peu plus courtes que les divisions du périanthe, à anthères linéaires ; un ovaire libre, ovoïde, obtus, à trois angles ar- rondis, marqué de six sillons longitudinaux, à trois loges multio- vulées, surmonté d'un style très-long, coudé à la base et terminé par un stigmate trifide. Le fruit est une capsule ovoïde, à trois loges renfermant chacune deux rangées de graines globuleuses et rou- geûtres. La Méthonique changeante (M. simpler H. P.) diffère de la pré- cédente par sa tige plus droite et moins élevée ; ses feuilles plus larges ; ses fleurs plus grandes, à divisions non ondulées, passant successivement du vert au jaune et au rouge vif. Hagrrar. — La méthonique superbe est originaire de la côte du Malabar. La méthonique changeante croît au Sénégal. Ces deux plantes ne sont guère cullivées, en Europe, que dans les jardins botaniques, où elles exigent la serre chaude. On les propage par caïeux, plantés en pots remplis de terre franche légère. Parties usitTées. — Les feuilles, les fleurs, les bulbes. Composirion cuimique. — L'analyse chimique des méthoniques n'a pas été faite; les feuilles ont une saveur amère, astringente, un peu âcre, les bulbes sont vénéneux. Usaces. — D'après Bodwich, les bulbes sont employés en Guinée, à l’état frais, contre les entorses; on les pulpe avec divers aro- mates, et principalement avec la maniguette, ou graine de paradis 344 FLORE MÉDICALE (Amomum grona paradisi, Amomées), et on les applique sous forme de cataplasmes (Walkenaër, Voyages, t XI, p. 468). Les feuilles passent pour être astringentes. Tous ces produits sont tout à fait inusités et inconnus en France. MÉUM Meun athamanticum Jacq. Athamanta meum L. Æthusa meum L. (Ombellifères - Sésélinées. ) Le Méum, appelé aussi Fenouil des Alpes, Éthuse à feuilles capil- laires, est une plante vivace, à racine fusiforme, rameuse, brunâtre, fibreuse, aromatique. La tige, haute de 0,35 à 0°,65, cylindrique, striée, glabre, dressée, un peu rameuse au sommet, porte des feuilles alternes, les radicales pétiolées, les caulinaires presque sessiles, les unes et les autres grandes, très-découpées, trois fois ailées, divisées en segments linéaires, courts, aigus-subulés, et rappelant un peu celles du fenouil. Les feuilles, blanches, petites, sont disposées ‘en ombelles terminales composées de douze à vingt rayons très-inégaux, à involucre nul ou réduit à un très-petit nombre de folioles li- néaires, à involucelles formés de dix à’ douze folioles semblables. Elles présentent un calice très-petit, à limbe oblitéré, à cinq dents ; une corolle à cinq pétales presque égaux, obovales, acuminés, étalés, à sommet recourbé en dedans; cinq élamines saillantes, à anthères arrondies ; un ovaire infère, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles divergents. Le fruit est un diakène ovoïde, allongé, pré- sentant sur chaque face trois côtés saillants. Le Méum mutelline (M. mutellina Gaertn., Phellandrium mutellina L.) est aussi vivace, et se distingue du précédent par ses feuilles à segments plus grands, ses ombelles à rayons presque égaux et ses fleurs blanc rosé. Hagirar. — Ces deux plantes habitent l'Europe centrale ; on les trouve surtout dans les régions montagneuses. Elles sont abondantes sur les Alpes, les Pyrénées, les Vosges, etc. Cuzrure. — Le méum n'est cultivé que dans les jardins bota- niques ; il préfère un terrain frais, et se multiplie de graines semées en automne, ou d'éclats de pieds. Sa culture est, du reste, celle des plantes Alpines. PARTIES USITÉES. — Les racines, les fruits. DU XIX° SIÈCLE. 345 Récoure. — Le commerce fournit la racine de méum desséchée ; elle est grosse comme le petit doigt, longue de 0",11 environ ; grise en dehors, blanche en dedans, elle ressemble à la racine de livèche surtont par son odeur et sa saveur, quoique ces qualités soient plus faibles dans la racine de méum. Elle est caractérisée par une couronne de poils fibreux, roides, qui entourent son collet, et forment une es- pèce de petit pinceau, semblable à celui que l’on trouve à celle du chardon Rolland, avec laquelle on pourrait quelquefois la confondre. Mais celte dernière est plus grosse, plus longue, et moins aroma- tique. La racine de méum est récoltée à l'automne. Après l'avoir lavée pour la débarrasser de la terre, on la fait sécher à l’étuve ou au grenier. Les fruits sont rarement employés; ils se distinguent par les côtes saillantes que portent chaque méricarpe ; les deux marginales sont très-développées. La coupe de chaque semence est demi-cir- culaire. Composition cummique. — La racine de méum, dont la saveur est amère, âcre et aromatique, doit ses propriétés à une huile essen- tielle et à un principe résineux. Les fruits et les feuilles ont une odeur et une saveur analogues, qui ressemblent, quoique beau- coup moins prononcées, à celles de l’angélique, de lache et de la livèche. Usages. — Le méum est aujourd’hui à peu près inusité. Sa racine entre dans la thériaque et le mithridate. Considérée comme tonique, stimulante et diurétique, elle était employée autrefois contre les affections atoniques des voies digestives. Dans l'asthme humide, on la regardait comme emménagogue, et quelques auteurs ont recom- mandé son infusion à la dose de 45 à 30 grammes pour un litre d’eau, contre les fièvres intermittentes; on l’a administrée contre les affections hystériques. On l’a aussi employée comme masticatoire, et l’on recommandait d'en avaler le suc. Les racines du méum mutelline (NZ. mutellina), et celles de l'atha- manta oreoselinum, L., espèce très-commune , jouissent des mêmes propriétés. 346 YLORE MÉDICALE MICHÉLIE Michelia Champaca L. M. suaveolens Pers. (Magnoliacées -Magnoliées.) Le Champac ou Michélie odorante est un arbre, dont la tige, haute de 10 à 12 mètres, se divise en rameaux nombreux, étendus, divariqués , couverts d’une écorce verdàtre ponctuée, portant des feuilles alternes, pétiolées, ovales-oblongues, acuminées, atténuées à la base, entières, d’un vert foncé, marquées de nervures fortement saillantes et soyeuses, caduques, renfermées, avant leur développe- ment, dans deux stipules réunies en bourgeon acuminé. Les fleurs, grandes, jaunes, odorantes, sont solitaires à l'extrémité de pédon- cules soyeux, axillaires ou terminaux, et entourées, avant leur épanouissement , d'une bractée ou spathe soyeuse, caduque. Elles présentent un calice à trois sépales pétaloïdes, étalés, cadues; une corolle à neuf pétales oblongs, légèrement tordus, disposés sur trois rangs, un peu élalés, caducs; des étamines nombreuses à filets courts, à anthères munies d’un connectif saillant; un pistil couvert d'ovaires nombreux, à une seule loge pluriovulée, formant une sorte d'épi imbriqué, et surmontés chacun d’un style filiforme, recourbé, terminé par un stigmate verruqueux charnu. Le fruit se compose de capsules arrondies, d’un vert pâle, ponctuées de blanc, renfermant chacune trois à sept graines rouges, convexes d’un côté et anguleuses de l’autre (PL. 35). Nous ne ferons que nommer les Michélies Tsiampac (M. siampaca L.), de montagne (M. montana Blum.), élevée (M. excelsa Wall.) Doltsopa (AZ. doltsopa Hamilt.), etc. Hasirar.— Le champac croît dans la Malaisie et surtout aux Indes, où on le cultive dans les jardins. Parties usiTéEs. — Les feuilles, les fleurs, le fruit, les graines, et surtout l'écorce. Composirion cmmique. — Toutes les parties de la plante, mais sur- tout l'écorce, sont à la fois amères, et aromatiques, et même àcres. On retire de celle-ci, par distillation, une huile essentielle très-odo- rante ; l'écorce ne contient pas de tannin. Blume attribue ses pro- priétés à un principe extractif amer. Usages. — Le champac est, chez les Hindous, l’objet d'une grande DU XIX° SIÈCLE. 347 vénération. Ils l'ont dédié à Vichnou, la seconde personne de la Tre- mourti, où trinité Hindoue. D'après Blume, les fleurs de cette plante sont fétides quand elles sont seulement flélries, mais très-agréable- ment odorantes lorsqu'elles sont sèches ; fraîches et conservées dans les appartements, elles causent le vertige, et irritent le système ner- veux. Les Javanais en ornent leur lit nuptial. Desséchées, on les met dans les vêtements, auxquels elles don nent une odeur agréable. Les Javanais regardent le champac co mme tonique, stimulant, anti-nerveux, diurétique, diaphorétique et fébrifuge. Les semences sont âcres, amères et résineuses. Ce sont elles surtout que l’on em- ploie contre les fièvres. On les mélange au gingembre, ou Jar, à la Zédoaire ou Xuaje, au Kananga (Unona odorata). On frotte, avec ce mélange, les enfants atteints de fièvres intermittentes. IL est vrai que la plupart des auteurs ajoutent que c'est sans succès. On attribue, à la décoction des racines, réduites en poudre, la propriété de provoquer les règles. On prétend, même qu'à dose élevée, elles possèdent des propriétés abortives. Les bourgeons, re- couverts d'une résine aromatique, sontemployés contre la gonorrhée ; les feuilles mêlées à la Zédoaire, et réduites en poudre, sont préco- nisées contre les affections arthritiques. On en prépare des bains , pour combattre les rhumatismes, ainsi que les douleurs arthritiques ; on en use en gargarismes contre l’angine et contre la fétidité de l'haleine. Le jus des baies, en friction sur le bas-ventre, jouit de propriétés carminatives ; et l'huile essentielle, également en friction, s'emploie contre les douleurs articulaires et les rhumatismes. Le bois du champac est résistant ; on s’en sert pour la construction des bâtiments. Le fruit est comestible, mais peu agréable au goût. C'est à tort que J.—. Dietrich, dans son Dictionnaire de Jardinage et de Botanique, dit que les Indiens mangent les graines du M. cham- paca. X a confondu cette plante avec une autre. Une pareille erreur pourrait avoir des conséquences fâcheuses. Les écorces et les feuilles des autres michélies jouissent des mêmes propriélés. Les bois des AZ. {siampaca L, Montana Blum, excelsa Wall. et Dolisopa Hamilt., sont lrès-estimés pour les constructions. 348 FLORE MÉDICALE MIKANIER Mikania quaco et scandens Pers. (Composées - Eupatoriées.) Le Mikanier Guaca, appelé plus simplement Guaco, est un arbuste grimpant dont la tige, haute de 10 à 15 mètres, cylindrique à la base, anguleuse au sommet, volubile, se divise en nombreux rameaux striés et velus, portant des feuilles opposées, pétiolées, ovales , légè- rement ondulées sur les bords, d’un vert blanchâtre. Les fleurs, blanches, sont groupées en capitules, dont l’ensemble forme des corymbes axillaires, opposés et feuillés. Elles sont monoclines et in- sérées sur un réceplacle nu, entouré d'un involucre à folioles, peu nombreuses et presque égales. Chacune de ces fleurs présente un ca- lice en aigrette; une corolle tubuleuse; cinq étamines, à anthères soudées et saillantes ; un ovaire infère, uniovulé, surmonté d'un style simple Lerminé par un stigmate proéminent, à deux branches diva- riquées. Le fruit est un akène pentagonal, surmonté d’une aigrette plunieuse. Le Mikanier à feuilles de Morelle (47. scandens Pers.), confondu avec le précédent, ainsi que la plupart de ses congénères, sous le nom vulgaire de liane guaco, a des liges grimpantes hautes de 2 à 4 mè- tres; des feuilles molles, cordiformes, d’un beau vert, et de petites fleurs purpurines, disposées en panicules. Le Mikanier du Brésil (27. stipulacea Pers.) se reconnait à ses feuilles hastées, velues, munies de deux stipules cunéiformes, et à ses akènes couronnés d’une aigrette pourpre. Nous citerons encore les Mikaniers de Houston (J/. Houston Pers.), de l’'Orénoque (MZ. Orenocensis Pers.), herbacé (M. Lerbacea Pers.), etc. Hagrrar. — Ces végétaux sont répandus dans les régions centrales de l'Amérique, depuis le Mexique jusqu'au Brésil, et croissent sur- tout dans les bois. Ils sont peu connus en Europe, et c’est à peine si on les y trouve dans les serres chaudes des jardins botaniques. PARTIES USITÉES. — La racine, les feuilles, les fleurs. COMPOSITION CHIMIQUE. —M. Fauré, pharmacien de Bordeaux, qui a analysé les feuilles de guaco, y a trouvé une matière grasse, de la chlo- rophylle, une résine particulière (Guacène), une matière extractive et DU XIX® SIÈCLE. 349 astringente analogue au tannin , du ligneux. Les cendres renferment des sulfates de soude et de chaux, du chlorure de sodium, du carbo- nate et du phosphate de chaux, de la silice et de l’oxyde de fer (Journ. de pharm, XXW, 293 — 1836). Usaces. — Sous les noms de Guaco, de Huaco, etc., on a certai- nement confondu plusieurs plantes appartenant à des genres et à des familles différents, et auxquelles on attribue la propriété de guérir de la morsure des serpents venimeux ; l’une de ces plantes est le Hr#anra Guaco, dont nous allons parler ; les autres appartiennent aux genres Erynqium et Aristolochia. D'après M. Roulin, on emploie au Mexique, sous le nom de Guaco ou de Bejucos de Guaco (liane de Guaco), quatre espèces de mikaniers : 1° le vrai mikanier guaco de Mutis, qui a les fleurs blanches; ?° une autre espèce ou variété à fleurs violettes, employée à la Nouvelle- Grenade sous le nom Guaco morado ; 3° le Mikania anara des An- tilles; 4° une autre espèce observée à Guatemala (/?evue des Deur- Mondes, 1* octobre 1833). L'Académie de médecine a reçu du Mexique, sous le nom de Guaco, une racine inodore, d’une saveur douceàtre, qui parait être inactive ; il est vrai que Cavanilles dit qu’elle perd ses propriétés par la dessiccation. En Amérique, d’après MM. de Humboldt et Bon- pland, c'est le suc de la plante que l’on emploie. Ce que nous avons vu sous le nom de Guaco était des inflorescences analogues à celles des eupatoires, qui ressemblaient à des fleurs d'arnica du com- merce brisées. En effet, le genre Mikania dédié au botaniste Mikan, est un démembrement du genre eupatorium. Enfin le guaco du commerce présente souvent un mélange de tiges brisées, de feuilles et de fleurs. MM. de Humboldt et Bonpland, dans leurs Plantes équinoriales re- cueillies au Mexique, citent des expériences de Mutis et d'autres qui leur sont propres, expériences qui ne paraissent laisser aucun doute sur les propriétés que possède le Mikana quaco, comme un pro- phylactique et un curatif de la morsure des serpents venimeux; il est vrai qu’à l’état sec la plante perd ses propriétés. D’après Cavanilles, elle est amère, aromatique, vermifuge et stomachique. Il est vrai que les propriétés antivenimeuses du guaco ont été révoquées en doute par M. Rochoux, qui a longtemps habité les Antilles, et qui affirme avoir vu à la Guadeloupe des serpents manger cette plante; 350 FLORE MÉDICALE mais nous ferons remarquer avec MM. Mérat et Delens que les ser- pents ne sont pas herbivores. On a affirmé, sans preuves suffisantes, que le guaco guérissait Ja rage, la fièvre jaune et le choléra, malgré les observations de Haw- kins, celles du docteur Chabert et de M. Péreira de Bordeaux. Le guaco est regardé comme inefficace dans ces maladies; les obser- vations de MM. Dugès, Dubreuil, ete., ne laissent aucun doute à cet égard. Quant aux faits relatifs au traitement avantageux de la blen- norrhagie aiguë, au début, des chancres, des bubons, ulcères, etc. par le guaco, signalés par M. Gomez de Valence, et par MM Tur- chetti et Massone, ils ont besoin d'être confirmés par de nouvelles expériences. La confiance des Indiens dans les effets du guaco est telle, qu'ils ne partent jamais en voyage sans en emporter des feuilles dans leurs poches. Le M. ofjicinalis Martius, est nommé au Brésil Coracao de Jera. Il y est employé comme succédané du quinquina et de la cascarille, contre les pertes rémittentes, les faiblesses intestinales, etc. D'après Martius, le AZ. opifera Mart., autre espèce du Brésil, donne un suc en usage contre la morsure des serpents; c’est le 7. contrajerba Kunt. Le Mikania quaco est Y Eupatorium satureiw folium de Linné. MILLE PERTUIS Hyperieum perforatum L. (Hypéricinées.) Le Millepertuis, vulgairement Herbe de Saint-Jean ou Trescalan, est une plante vivace, à racines ligneuses, un peu rameuses, brun jaunâtre. Les tiges, hautes de 0",30 à 0",80, cylindriques, mar- quées de deux lignes saillantes allernes, fermes, rameuses, dressées ou ascendantes, portent des feuilles opposées, sessiles, ovales, en- tières, vert foncé en dessus, glauques en dessous, criblées de petits points glanduleux transparents. Les fleurs, d’un beau jaune d’or, sont disposées en panicules terminales très-fournies. Elles présentent un calice à cinq sépales lancéolés, aigus, étalés, persistants; une corolle à cinq pétales ovales, obtus, étalés, bordés de petites glandes noirâlres ; des étamines en nombre indéfini, très-fines, saillantes, à filets soudés en trois faisceaux, à anthères marquées d’un point noi- DU XIX* SIÈCLE. 351 râtre ; un pistil à ovaire libre, ovoide, à trois loges multiovulées, sur- monté de trois styles libres, subulés, divergents, terminés chacun par un petit stigmate en tête. Le fruit est une capsule ovoïde, à trois loges, s'ouvrant en {rois valves, et renfermant un grand nombre de petites graines oblongues. Nous citerons encore les Millepertuis tétragone (Æ. quadrangu- lare V., H. tetrapterum Fries), baccifère (H. bacciferum 1.), de Cayenne {/. Cayennense L.), et Androsème (4. Androsæmum L., Androsæmum officinale Fries), qui se distingue facilement des autres espèces par son fruit bacciforme indéhiscent. Haprrar. — Le millepertuis ordinaire est commun en Europe ; il croit dans les lieux secs, au bord des chemins, sur la hisière des bois, ete. L'androsème habite surtout les endroits humides et om- bragés. Les millepertuis baccifère et de Cayenne appartiennent à la Guyane. Ces plantes ne sont cultivées que dans les jardins botaniques. Parties usirées. — Les sommités fleuries. Récozre. — Elle se fait, pendant la floraison , au moment où les premières fleurs commencent de s'ouvrir. L'odeur et la saveur rési- neuse résident surtout dans les fleurs. On les dispose en paquets que l’on fait sécher au grenier. Il faut que ses fleurs, bien sèches, aient conservé leur belle couleur jaune pour être employées; on rejette celles qui sont noires ou rouges. On trouve quelquefois les fleurs mondées dans le commerce. Cowposiriox camique. — L’odeur aromatique et résineuse que ré- pand le millepertuis est due à une matière résineuse qui découle des espèces arborescentes des pays chauds, lorsqu'on y fait des incisions. Ce suc jaune est analogue à celui des guttifères. Il est purgatif. Desséché, il ressemble assez à la gomme-gutte. Tel est celui qui est produit par le Capra de Pison et Margraff ( Vismia Guianensis Pers., Hypericum Guianens Aubl., H. bacciferum L. F.). Les fleurs du mil- lepertuis renferment deux matières colorantes : l’une jaune, inso- luble dans l'eau ; l’autre rouge, résineuse, et soluble dans l'alcool et dans les huiles. Ce dernier principe réside spécialement dans le styg- mate et dans le fruit. Ces fleurs contiennent, en outre, une huile vo- latile et du tannin (Journ. de pharm., t. XW, p. 134). Les deux ma- tières colorantes des millepertuis ont été fixées à l’aide de mordants sur le fil, la laine et la soie. Usaces. — Dans les temps d'ignorance et de superstition, le mille- 352 FLORE MÉDICALE pertuis a eu une réputation de sortilége qui lui à valu le nom de Fuga demonum. En 1714, Eysel soutint une thèse intitulée de Fuga demo- num, et Georges-Wolfgang Wedel en soutint une autre, la même année, à Jéna, qui avait pour titre : de Hyperico alias fuga demonium . Ange Sala la recommande aussi contre les possessions démoniaques. On employait le millepertuis dans les maladies mentales. En Russie on s’en sert contre la rage. Les anciens thérapeutistes, tels que Théophraste, Thomas, Bar- tholin, Tragus, Camerarius, etc., ont conseillé le millepertuis con- tre une foule de maladies. Matthiole, Paracelse, Fallope, Scopoli, Locher, Geoffroy ont beaucoup vanté ses propriétés prélendues vul- néraires et cicatrisantes. Ettmuller, célèbre médecin et botaniste allemand du dix-septième siècle, le considérait comme diurétique, et l'employait fréquemment contre les maladies des voies urinaires. Baglivi, qui ne jouissait pas, à la même époque, d'une moindre illus- tration en Italie, croyait qu'il pouvait guérir la pleurésie chro- nique. Aujourd’hui il est à peu près abandonné, quoique MM. Cazin et Dubois de Tournay en aient obtenu quelquefois de bons effets contre les catarrhes pulmonaires chroniques, certaines leucorrhées, le catarrhe vésical, etc. Les sommités fleuries du millepertuis entrent dans la thériaque, le baume du Commandeur, le baume Tranquille, l'huile d'hypéricum, l'eau vulnéraire, le sirop d’armoise composé, la poudre contre la rage, ainsi que dans une foule d’autres préparations pharmaceutiques qui ne sont plus employées. En Suède, on se sert des fleurs pour colorer l’eau-de-vie. L'androsème ou toutesaine (Æypericum androsæmum L.), tire un de ses noms des propriétés vulnéraires qu'on lui a attribuées. On la conseille en cataplasmes sur les brûlures, et pour arrêter les hémor- rhagies. Le millepertuis tétragone (4. quadrangulare L.), très-recom- mandé par Bergius, n’a pas d’autres propriétés que celles du mille- pertuis commun. * Quoique peu employé en médecine homæopathique, le millepertuis est indiqué dans le Codex des médicaments homæopathiques. On lui attribue des propriétés résolutives et vulnéraires. Son signe est 1//p et son abréviation Æyper. DU XIX' SIÉCLE. 909 MIMUSOPS Mimusops elengi L. (Sapotacées.) Le Mimusops elengi est un grand arbre, dont la tige droite, à écorce crevassée, se divise en rameaux cylindriques et grisàtres, por- tant des feuilles alternes, pétiolées, ovales-oblongues, entières, co- riaces, glabres, luisantes, à nervure médiane saillante et donnant naissance à d’autres nervures très-fines et presque transversales. Les fleurs, d’un beau jaune, sont solitaires ou réunies en petits bouquets à l’aisselle des feuilles. Elles présentent un calice à huit divisions disposées sur deux rangs; une corolle à huit divisions entières ou trilobées ; huit étamines fertiles, accompagnées d’un même nombre de filets stériles ; un ovaire à huitloges, contenant autant d’ovules qui avortent pour la plupart. Le fruit est une drupe ovoiïde, rouge à la maturité, renfermant une ou deux graines osseuses. L'arbre est connu vulgairement sous les noms de Marone, Cavequi, Magouden, Elengi. Selon R. Brown, le genre #necta- ria de Forskahl doit être réuni au ##?musops, dont il ne diffère que par les divisions extérieures de la corolle, qui sont deux fois bifides. L'Achras dissecta de Forster, n’est aussi qu’une espèce de mimusops, ce dernier genre est voisin de l’Zmbricaria de Jussieu, qui en diffère par sa corolle dont les lanières trifides forment trois rangées, el par ses graines munies d'une crête saillante vers l'ombilic. ; Hagirar. — Cet arbre est originaire des Indes, où il est fréquem- ment planté dans le voisinage des habitations; il croit aux Philippines et aux Moluques. Parties usiTÉEs. — Le bois, les fleurs, les fruits. Cowposirion cuimique. — Les fruits renferment du sucre, de l’amidon, et une matière astringente. Les fleurs sont très-aroma- tiques. Usaces. — Les Indiens mangent les fruits des mimusops ; ils sont cependant très-astringents. Les fleurs, très-odorantes, servent à faire des colliers, et on en prépare, par distillation, une eau de senteur très-agréable (Zumplaus, Amb., H, 189). Le Mimusops kauki L., M. obtusi/olia Lam., que l’on trouve à Flore, T. I. 23 354 FLORE MÉDICALE l'île de France, donne un fruit rond, du volume d’une pomme, vert pâle, d'un goût sucré, farineux, que les nègres mangent. Le bois sert aux constructions. MOLLÉ Schinus molle L. (Térébinthacées - Pistaciées.) Le Mollé des jardins ou à feuilles dentées, appelé aussi Poivrier du Pérou ou d'Amérique, Arbre au poivre, etc., est un grand arbre, dont la tige droite, couverte d’une écorce crevassée, laissant écou- ler un suc résineux très-odorant, se divise en rameaux nombreux, flexibles, effilés, pendants, qui portent des feuilles alternes, pétiolées, persistantes, imparipennées, composées de vingt à trente folioles lancéolées, sessiles, à odeur poivrée, la terminale très-longue. Les fleurs, blanches, dioïques, sont groupées en panicules terminales. Elles présentent un calice à cinq divisions égales, arrondies, persis- lantes; une corolle à cinq pétales obovales-oblongs, insérés entre Je calice et un disque annulaire ondulé. Les mâles ont dix étamines, à filets libres et subulés, insérés sous le disque, à anthères arrondies ; un ovaire rudimentaire. Les femelles ont des filets staminaux stéri- les; un ovaire libre, uniovulé, surmonté de trois styles très-courts dont chacun est terminé par un petit stigmate en tête. Le fruit est une drupe charnue, globuleuse, à saveur poivrée, renfermant un noyau osseux, Mmonosperme. Hagrrar. — Le mollé est originaire des régions centrales de l’Amé- rique, où il s'étend depuis le Mexique jusqu'au Chili; il habite sur- tout les plaines etles vallées. Il s’est naturalisé dans quelques autres régions, et jusque dans le midi de l'Europe. Cuzrure. — Cet arbre croît en pleine terre dans le midi de la France; mais dans le nord il exige l'orangerie ou la serre tempérée. Il préfère une terre franche, légère. On le multiplie de graines, se- mées sur couche au printemps, et quelquefois aussi de marcottes. On emploie rarement les boutures, dont la reprise est difficile. Parnies usiTées. — L'écorce, les fruits, le suc qui découle de la plante. Composirion cimiQuE. — La résine, que l’on oblient par évapora- tion du suc laiteux qui s'écoule lorsqu'on coupe les feuilles et les jeunes rameaux du mollé, est extrêmement rare, et à peu près inconnue en Europe. Les fruits donnent, par macération dans l’eau DU XIX° SIÈCLE 355 et par fermentation, une liqueur alcoolique très-échauffante, qui, exposée à l'air, s’acidifie, et peut alors remplacer le vinaigre. Les écorces sont amères et astringentes. Usaces. — Les différentes parties de cette plante ne sont pas connues dans la matière médicale. Les feuilles fraiches, qui ont une odeur rappelant celle du fenouil, quand elles sont brisées par frag- ments et jetées sur l’eau, semblent s'y mouvoir, ce qui nous paraît devoir être attribué à un suc non miscible à l’eau qui en découle. Monard, qui le premier a figuré cette plante, rapporte, d’après P. Cicca, que la décoction de l'écorce et des feuilles est employée, au Pérou, pour guérir les douleurs et l’æœdème des membres inf:- rieurs. On l’emploie en fomentations. Avec les petits rameaux, on fait des cure-dents. On attribue à la résine du mollé, dissoute dans du lait, la propriété de dissiper les éblouissements. Cette résine, blanche, molle, opaque, est employée contre la carie des dents. On dit qu’elle est purgative. D'après Bertero, le mollé, cité par Molina Cluli, 140, ne serait pas le même que le précédent, et, sous le nom de Schinus huigan, il en signale un autre qui serait le Schinus areira L. ou Larocira de Pison et Margraff. C’est un arbre qui sent la té- rébenthine ; par distillation de ses feuilles fraîches, on obtient une eau aromatique qui est employée pour la toilette. Au Brésil, son écorce est regardée comme fébrifuge. D'après Buchner, elle renferme du tannin, et elle pourrait remplacer le cachou (Journ. de chim. méd., NI, 204-1830). MOLUCELLE Molucella lævis et spinosa L. ( Labiées - Stachydées. ) La Molucelle lisse (M7. Zœwrs L.), appelée aussi vulgairement, mais à tort, Mélisse des Moluques, est une plante annuelle, dont la tige droite, haute de 0",65, unie, rameuse, porte des feuilles opposées, longuement pétiolées, arrondies, dentées, molles, presque glabres, d’un vert gai. Les fleurs, blanc-jaunâtre, accompagnées de bractées subulées, roides, piquantes, sont groupées en faux verticilles axil- laires. Elles présentent un calice campanulé, très-ample, évasé, mem- braneux, strié, réticulé, à cinq dents épineuses ; une corolle incluse, à tube court, à limbe profondément divisé en deux lèvres, la supé- rieure entière, convexe et dressée, l’inférieure à trois lobes, les deux 396 FLORE MÉDICALE latéraux un peu dressés, le médian large, obcordé, étalé; quatre éta- mines didynames ; un ovaire composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes trigones, tronqués au sommet, entou- rés par le calice persistant. La Molucelle épineuse (7. spinosa L.) est aussi annuelle, et se dis- tingue de la précédente par ses feuilles ovales, un peu cordées à la base, incisées ou lobées; son calice plus grand, presque bilabié, à dix dents épineuses; sa corolle plus longue, d’un rose tendre, à lèvre supérieure largement échancrée et velue sur le dos. La Molucelle frutescente (A7. frutescens L.) est un arbrisseau très- épineux, dont latige, haute de 0%,35 à 0%,65,'porte des feuilles pétio— lées, petites, ovales, obtuses, pubescentes, et des fleurs blanchâtres. Hamirar. — Ces plantes habitent l'Asie Mineure, la Syrie, la Perse. On les cultive depuis longtemps dans nos jardins, et quelques-unes sont naturalisées dans l’Europe méridionale. Parries usirées. — Les feuilles. Comrosrrion cuimiQuE. — Toutes les molucelles possèdent une odeur forte, que l’on a comparée à celle du melon. Leur saveur est aroma- tique, un peu àcre et amère. Usaces. — C’est la molucelle lisse que l’on emploie le plus fréquem- ment. Elle est cependant peu usilée en France. On à attribué à ses feuilles des propriétés cordiales, vulnéraires el céphaliques. On l’em- ploie le plus souvent pour aromatiser des liqueurs alcooliques. Les Orientaux s’en servent, dit-on, contre les hernies. On ne la trouve pas dans nos officines. MOMORDIQUE Momordica Balsamina et Charantia L. (Cucurbitacées.) La Momordique balsamine (47. balsamina L.), appelée aussi Pomme de Merveille, est une plante annuelle, dont la tige grimpante, longue d'environ un mètre, anguleuse, rameuse, munie de vrilles simples, porte des feuilles alternes, pétiolées, palmées, à cinq lobes dentés, glabres et luisantes. Les fleurs, jaunâtres, monoïques, sont solitaires à l'extrémité de pédoncules axillaires, grêles, qui portent vers leur milieu une bractée foliacée, cordiforme, dentée. Les mâles ont un calice court, campanulé, à cinq divisions étalées ; une corolle à cinq DU XIX° SIÈCLE. 307 divisions obtuses, un peu ondulées, étalées; cinq étamines triadel- phes, à anthères conniventes, uniloculaires, à connectif épais, on- dulé. Les femelles ont un calice à tube ovoïde, adhérent; le limbe, ainsi que la corolle, comme dans les fleurs mâles; trois étamines rudimentaires; un ovaire infère, ovoïde, à trois loges multiovulées, surmonté d’un style cylindrique terminé par un stigmate trifide. Le fruit est une péponide, ovoide-arrondie, amincie aux deux bouts, tuberculeuse, d’un jaune orangé à la maturité, s’ouvrant irréguliè- rement, et laissant voir une pulpe charnue, rouge sanguin, dans la- quelle sont disséminées de nombreuses graines brunâtres, à arille rouge. ÿ La Momordique à feuilles de vigne (47. charantia L.), appelée aussi Pandipane ou Papareh, se distingue de la précédente par ses dimen- sions deux fois plus grandes ; ses feuilles à sept lobes velus ainsi que les vrilles; ses fruits oblongs, acuminés, anguleux, à pulpe jaune. Li Momordique sauvage ou d'Europe a été décrite à l’article Ela- terium (V. ce mot). Hagrrar. — Ces deux plantes sont originaires de l'Inde. Élles sont cultivées, en Europe, dans les jardins botaniques, et on les trouve aussi assez répandues comme végélaux d'ornement. ParrTies usitéEs. — Les racines, les feuilles, les fruits. Récocre. — Les racines doivent être arrachées à l'automne. Comeosrrion cmimique. — Tous les momordica renferment, dans les feuilles, les racines ou les fruits, un principe âcre, plus ou moin irritant et purgatif; mais on ne sait pas s’ils contiennent le prin- cipe blane, cristallisable, amer, styptique, insoluble dans l’eau, solu- ble dans l'alcool et dans l’éther, que l’on a trouvé dans l'elatertum, et désigné sous le nom d’É/atérine. Usages. — Les fruits des plantes du genre elaterium sont em- ployés à leur maturité, ceux surtout que l’on mange, tels sont les M. luffa L., en Égypte, le A. operculata L. où Gatole, que l'on cul- tive aux îles de France et à Bourbon, le AZ. pedata L., que, d’après Feuillée, on mange, au Pérou, sous le nom de caïqua. Quelques au- teurs pensent que les z70mordica, dont les fruits sont purgatifs, appar- tiennent au genre echalium. D'après Descourtilz (Ælore méd. des Antilles, WI, 62), dans l'Inde, le fruit du AZ. balsamina est nommé Nexiquen; il sert à préparer un extrait qu'on emploie à faible dose, car il est très-vénéneux, 358 FLORE MÉDICALE contre l'hydropisie; la chair, appliquée en topique, est regardée comme rafraichissante et siccative; avec l'huile d'olive, on pré- pare une huile composée qui est employée, en frictions, comme vulnéraire et balsamique ; on croit même que c’est de cette propriété qu'elle tire son nom de Balsamina. Aux Philippines, cette plante croit dans les haies ; elle y est connue sous les noms de Pavia, de Palla, d’A ppaclia ; ses feuilles y sont appliquées topiquement, contre les céphalalgies, et comme siccalives sur les plaies; la décoction y est regardée comme vomitive. Dans l’Inde et en Amérique, la Momordica charantia L. donne des feuilles d’une odeur forte ; ellessont employées dans ces pays à la place du houblon et comme vermifuge. D'après Aublet (Guiane, I, 886), les Malabares en mettent dans leur caris. À la Jamaïque, la décoc- tion de ces feuilles est usitée pour faciliter l'écoulement des lochies. Nous citerons encore le Momordica cylindrica L. dont le fruit, très- amer, est purgatif, et dont le suc, introduit dans les narines, déter- mine un flux nasal abondant, propre à guérirles céphalalgies, et même, at-on dit, l'apoplexie. La racine du Momordica dioica Roxb. de l'Inde est, au contraire , regardée comme émolliente. Les médecins du pays l'emploient en électuaire contre les hémorrhoïdes confluentes, et dans les inflammations intestinales (Ainslie, Mat. ind., H, 274). MONARDE Monarda didyma et fistulosa L. { Labiées - Monardées. ) La Monarde didyme ou écarlate (M. didyma L., M. coccinea Mich., 27. purpurea Lam.), appelée aussi Monarde pourpre ou à fleurs roses, Thé d'Oswego ou de Pensylvanie, etc., est une plante vivace, dont les tiges, hautes de 0°,50 à un mètre, tétragones, robustes, ve- lues-hérissées, rameuses au sommet, portent des feuilles opposées, pétiolées, ovales lancéolées, acuminées, cordées à la base, velues hérissées, dentées, d’un vert gai, les florales sessiles, oblongues-lan- céolées, colorées. Les fleurs, nombreuses, rouge ponceau, accompa- gnées de bractées linéaires aiguës de mème couleur, sont groupées en fascicules globuleux terminaux. Elles présentent un calice tubuleux, strié, pourpré, à cinq dents aiguës presque égales; une corolle à tube grêle et longuement saillant, à gorge dilatée, à limbe divisé en DU XIX° SIÈCLE. 359 deux lèvres presque égales, l’inférieure trilobée, à lobe médian allongé et échancré; deux étamines saillantes, accompagnées de deux filets staminaux stériles, rudimentaires ou presque nuls; un ovaire composé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes lisses, entourés par le calice persistant. La Monarde fistuleuse ou velue (Af. fistulosa L., M. media WN.), est aussi vivace, et se distingue de la précédente par sa taille ordinaire- ment plus élevée; ses feuilles oblongues-lancéolées, aiguës, pubes- centes ; ses fleurs à calice non coloré, à corolle velue en dehors, rose, passant quelquefois au pourpre et au violet. Hagirar. — Ces deux plantes sont originaires de l'Amérique du Nord ; la première croît plus particulièrement dans la Pensylvanie, la seconde au Canada. D'un tempérament rustique et d'une culture facile, elles sont assez répandues dans les jardins d'agrément. Parties usirées. — Les feuilles et les sommités fleuries. Récorre. — Les feuilles et les sommités doivent être cueillies à l’époque de la floraison. On les fait dessécher dans un lieu chaud, mais à l'ombre. Elles perdent une partie de leurs propriétés par la dessiccation. Covwrosirion cimique. — Toutes les parties des monardes possèdent une odeur forte, suave, pénétrante, due très-probablement à une huile essentielle, ce qui leur fait attribuer des propriétés analogues à celles de la menthe, de la sauge et du romarin. Toutefois, leur odeur est moins forte et moins flatteuse que celle de ces plantes. Nous rappellerons que le célèbre chimiste Proust, d'Angers, mort en 1826, a, depuis longtemps, signalé la présence du camphre dans les labiées des pays chauds ; ce produit est identique à celui des laurinées. Usaces. — Les Américains préparent, avec les feuilles de monarde, des infusions théiformes assez agréables, que l'on prend contre les débilités de l’estomae, la gastralgie, ete. Bodardconseillait d'employer cette-plante comme un succédané de la muscade et du macis. Aux États-Unis, la monarde fistuleuse est employée comme lonique amer antispasmodique. On la prescrit contre les fièvres intermittentes, d'après Schæpf (Mat. méd. améric.). En Pensylvanie, les feuilles de la monarde coccinée, qui possèdent une odeur très-agrèable, sont employées à la place de thé. À Phi- ladelphie, on trouve la monarde ponctuée qui contient une huile 360 FLORE MÉDICALE essentielle et, dit-on, du camphre. On l’emploie pour calmer les nausées, les vomissements, les fièvres bilieuses (Bullet. des scienc. méd. de Féruss., t. XI, p. 302). MONBIN Spondias monbin et myrobalanus L. (Térébinthacées - Spondiacées. ) Le Monbin à fruits rouges (S. monbin L), vulgairement appelé Prunier d'Espagne, est un arbre, dont la tige, haute de 10 à 42 mè- tres, droite, peu rameuse, porte des feuilles alternes, pétiolées, im- paripennées, composées d’une vingtaine de folioles ovales, entières, luisantes. Les fleurs, petites, rouges, solitaires ou germinées sur chaque pédoncule, forment des grappes courtes à l'extrémité des rameaux. Elles présentent un calice petit, caduc, campanulé, à cinq dents ; une corolle à cinq pétales étalés ; dix étamines courtes, alter- nativement grandes et petites, insérées sur un disque glanduleux ; un ovaire à cinq loges uniovulées, surmonté d'autant de styles et de stigmates distincts. Le fruit est une drupe ovoïde, pourpre orangé, odorante, renfermant un noyau fibreux, pentagonal, à cinq loges monospermes. Le Monbin blanc, ou à fruits jaunes (S. #2yrobalanus L.) est un arbre élevé, dont la tige, couverte d’une écorce rugueuse et grisâtre, se divise en rameaux nombreux, portant des feuilles très-grandes, imparipennées, d’un vert gai, douces au toucher. Les fleurs, blan- ches et petites, sont disposées en longues panicules, et présentent la même structure que celles de l’espèce précédente. Ses fruits sont des drupes jaunâtres. Nous ne ferons que nommer le Monbin de Cythère {S. cythereaL.). Hagirar. — Les deux premières espèces croissent aux Antilles, à Carthagène, à la Guyane, etc ; la dernière, à Otaiti. Cucrure. — Les monbins sont cullivés en grand dans leur pays natal; on les multiplie très-facilement de boutures faites au printemps. On peut aussi les propager par semis. En Europe, on les multiplie de la même manière; mais ils exigent la serre chaude. PARTIES usiTÉEs. — Les racines, les écorces, le bois, les fruits, la résine et la gomme qui découle des arbres. DU XIX° SIÈCLE. 361 Récote. — Les fruits des divers mombins sont récoltés à leur maturité. CoMpPosiTION CHIMIQUE. — On ne sait rien sur la composition chi- mique des différents produits des monbins ou spondias ; les usages que l’on fait des fruits font supposer qu'ils se rapprochent, par leur composition, de nos prunes. Usaces.— Le seul produit que l’on trouve quelquefois dans la matière médicale, appartenant à ces plantes, est la Gomme d'amara, qui est brunâtre, transparente, soluble dans l’eau, un peu amère. Lamarck, en décrivant le spondias amara (Encyclop. bot., t. AV, p. 261), qui pro- duirait cette gomme, n’en fait pas mention. Il ne faut pas la con- fondre avec une résine transparente que les naturels de Taïti nom- ment Tapon, qui suinte de l'écorce du S. cytherea, et qui sert à calfater les pirogues, qui sont souvent faites avec le bois du même arbre. On mange crus les fruits des monbins pourpres (S. purpurea) et blancs (S. lutea), ainsi que ceux d’autres espèces. Les fruits du S. purpurea Lam. S. monbra L. (non Jacq.), S. myrobolanus Jacq. (non L.), sont employés, aux Antilles, à faire des gelées et des confi- tures. Les cochons les mangent avec avidité (Labat, Nour. Voyage, t. VIIL, p. 216). A la Martinique, on les nomme Aucare. Les fruits du S. luiea, S. monbra Jacq. (non L.), S. myrobolanus XL. (non Jacq.), sont; jaunes. Aux Antilles et à Cayenne, on les nomme Prunes d'Amérique. Ws sont aigrelets ; on en fait des tisanes rafraîchissantes. Il en est de même de ceux du $S. cytherea, que l’on ne mange guère que cuits. Les habitants des îles de la Société et des îles Hermites, dans la mer du Sud, ainsi que ceux de l'île de France ou Maurice, dans la mer des Indes, en usent aussi comme aliment. On croit que l’Ambulam de Réede, S. mangifera W. (mangifera pennata L.), est le même, ou une variété du S. amara Lam. Son suc sert, aux Malabares, à préparer, avec du riz, une sorte de pain qu'ils nomment Apen. Sa racine est employée, au lieu de pessaire, pour exciter les règles ; l'écorce, pulvérisée et bouillie dans du lait, est employée contre la dysenterie, et on a vanté la décoction du bois contre la gonorrhée. Enfin, on prétend que le fruit, pilé avec les feuilles, apaise les douleurs d'oreille (Æort. malab., t. X, p. 50). 362 FLORE MÉDICALE MONÉSIA Chrysophyllum glycyphleum Cas. (Sapotacées. ) Le Monésia ou Mohica est un arbre de moyenne grandeur, dont Ja tige, couverte d’une écorce épaisse, compacte, brun foncé, à épiderme grisètre, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, ovales- lancéolées, d’un vert gai en dessus, soyeuses et à reflets métalliques en dessous. Les fleurs sont petites, solitaires et axillaires. Elles pré- sentent un calice à cinq divisions ; une corolle campanulée, à limbe divisé en cinq lobes étalés ; cinq étamines hypogynes ; un ovaire libre, globuleux, à deux loges pluriovulées, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit est une baie ovoïde, lisse, renfermant quatre graines aplaties, à amande huileuse. HaBiTaT. — Cet arbre croît au Brésil : il n’est guère connu que depuis un petit nombre d'années ; aussi ne le trouve-t-on pas encore dans nos cultures. PARTIES usrrées. — Les écorces, les fruits, l'extrait. Récorre. — L'arbre auquel on attribue l'écorce que l’on récolte pour la droguerie sous le nom de Monésia, de Mohica, de Buran- hem, où de Guaranhem, et qui nous vient du Brésil, a élé décrit par Pison et Margraff (His. nat. Brasiliæ, publiée par Jean de Laët, 1648) sous le nom de Zéire. Ia été reconnu par Biedel, pour un Chrysophyllum, et nommé par Casaretti Chrysophyllum glycy- phleum (Journ. de pharm. et de chim., t. NI, p. 64). Virey croit que c'est avec l'écorce de cel arbre, que l’on obtient l'extrait de monésia, qui nous vient tout préparé du Brésil, et celui que l'on fabrique en France. Mais, certains auteurs ont attribué le même extrait au Palétuvier (rlazophora gymnorhiza L.); d'autres, à l'Ace cia cochleocarpa Mart., à l'Acacia virginalis, et au Chrysophyllum caintto, où Caimitier, Cahimitier, qui croît aux Antilles. Le nom de Chrysophyllum, vient de la couleur dorée que présente le dessous des feuilles de cet arbre. L'écorce de monésia se récolte en morceaux assez épais. Elle est très-compacte, pesante, dure, d’un brun rougeàtre, sa cassure est nelte, non fibreuse. Elle possède une saveur douce, sucrée, mucila- gineuse, qui devient bientôt âcre, amère ct astringente. DU XIX° SIÈCLE. 363 L’extrait de monésia est noir, plus ou raoïns sec, en masses plates, enfermées dans des feuilles de papier. Sa saveur, d'abord douce et sucrée, devient astringente, amère, très-âcre et très-désagréable. D'après M. Latour, l'extrait de monésia est quelquefois falsifié avec l'extrait du bois de campêche, dont la saveur sucrée se rapproche de celle du monésia. Mais celui-ci mousse dans la bouche, et colore la salive en brun rougeàtre ; tandis que l'extrait de campêche ne mousse pas et colore la salive en violet. Comrosirion cuimique. — MM. Heydenreich, Bernard Derosne, O. Henry et Payen ont analysé le monésia. Ces derniers chimistes ont trouvé à l'écorce la composition suivante : Matière grasse, cire el chlorophylle 14,2 ; glycyrrhizine 1,4; monésine (matière analogue à la saponine) 4,7 ; lannin 7,5 ; matière colorante rouge (acide rubi- nique) 9,2; malate, acide de chaux 1,3 ; sels de potasse, de chaux, silice, etc. 3 ; pectine et ligneux 71,7 ; total 100. C'est.la glyeyrrhi- zine qui lui donne la saveur sucrée, et c’est à la monésine qu’elle doit la propriété de mousser dans l’eau. Usages. — Lorsqu'en 1839, M. Bernard Derosne fit connaître, dans la pratique médicale, le monésia, il lannonça comme un to- nique astringent, qui n'irritait pas le tissu, et qui n’agissait que contre les flux muqueux et sanguins, passifs et actifs. Il le préconi- sait dans la chlorose, comme siccatif pour le traitement des plaies et des ulcères, dans tous les cas, en un mot, où la ratania était em- ployée; mais il lui donnait sur celle-ci l'avantage de ne pas enflam- mer les parties auxquelles on l’appliquait. Expérimenté, depuis cette époque, par un grand nombre de mé- decns et chirurgiens, au nombre desquels nous citerons, MM. For- get de Strasbourg, Alquié, À Bérard, Hervez de Chegoin, Lisfranc, Manec, Monod, Martin Saint-Ange, Trousseau, en France; MM. Bil- ling, Holmes, Jones, Ruppel, Sigmond, en Angleterre ; MM. Nan- crède à Philadelphie, et l'Herminier à la Guadeloupe, l'extrait de monésia a été reconnu pour être bien inférieur à l'extrait de ratania et surtout au kino, comme astringent ; il ne possède aucun des avantages qu’on lui avait attribués ; aussi ses préparations sont-elles aujourd’hui très-peu employées. L'écorce de monésia était administrée en poudre, en décoction, sous forme d'extrait, de sirop, de pilules, de vin et de teinture, à l'extérieur, comme siccatif. C'était surtout de la solution concentrée 364 FLORE MÉDICALE d'extrait que l’on faisait usage. On en a retiré de bons effets dans le traitement des fissures du sein et de l’anus, dans les engelurcs ulcé- rées. On en faisait des pommades ; avec la poudre de monésia on saupoudrait les plaies. Mais, c’est surtout contre les écoulements muqueux et sanguins, dans la leucorrhée, la vaginite, la blennorrhée etles hémorragies, que l’extrait de monésia a été employé. Quant à son usage interne, appli- qué contre les faiblesses d'estomac, les bronchites, la phthisie, il n'a donné que des résultats douteux dans quelques cas, nuls dans d’autres. Le genre CArysophyllum renferme des espèces dont les fruits sont comestibles. Ces fruits varient de grosseur, depuis celle d'une olive (C. oliviforme Lam.), jusqu'à celle d’une pomme (C. cainito L.); leur chair est blanche et rafraichissante ; l’amande est huileuse; la chair du Chrysophyllum macrophyllum Yam. présente une teinte jaune, d’où lui est venu le nom de Jaune d'œuf. Le fruit du Chryso- phyllum plulippense, des îles Philippines, est de la grosseur d'une poire de Rousselet. Il a été observé par M. Perrotet, à Cayenne. On mange celui du Chrysophyllum macoucou Aubl. MONIMIE Monimia rotundifolia Dup.-Th. (Monimiacées - Amborées.) La Monimie à feuilles rondes est un arbrisseau, dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, se divise en rameaux diffus, opposés, portant des feuilles opposées, pétiolées, arrondies, entières, longues de 0®,10, membraneuses, couvertes de poils étalés et fugaces à la face supé- rieure, cotonneuses à l’inférieure. Les fleurs, dioïques, très-petites, munies de bractées caduques, écailleuses, jaune orangé, d'une odeur agréable, sont groupées en panicules axillaires. Elles sont dé- pourvues de corolle. Les mâles ont un involucre globuleux, terminé au sommet par quatre dents; des étamines nombreuses appliquées contre les parois. Les femelles ont un involucre globuleux, ouvert seulement au sommet, velu à l’intérieur ; un pistil composé de cinq à dix carpelles à une seule loge uniovulée, surmontés chacun d'un style simple, dressé, et attachés sur la paroi interne de l’involucre. Le fruit se compose de nombreuses drupes monospermes, enveloppées par l'involucre qui s’est accru en prenant une consistance charnue. DU XIX° SIÈCLE. 365 La Monimie à feuilles ovales (27. ovalifolia Dup.-Th.) se distingue de la précédente par ses feuilles ovales, plus petites, entières, un peu rétrécies à la base; ses fleurs disposées en grappes axillaires latérales, opposées, quelquefois terminales, plus petites, à pédicelles beaucoup plus courts, inégaux, quelquefois nuls. Hagrrar. — Ces arbrisseaux, répandus dans l'hémisphère austral, se trouvent particulièrement aux îles Maurice et de la Réunion, à Madagascar, à Java, etc., où ils croissent surtout dans les régions montagneuses. Ils sont peu connus en Europe, et c'est à peine si on les rencontre dans les serres chaudes des grands jardins botaniques, où leur conservation est assez difficile. Parties usiTées. — Les écorces, les fruits. Cowposrrion cuimique. — Les fruits des monimies sont acides et sucrés. Ils se rapprochent, par leur composition chimique et leur saveur, de ceux des figuiers. Usaces. — Les écorces des monimies ont été employées comme fébrifuges. On les a aussi préconisées contre les vers, mais elles sont tout à fait inusitées. Les fruits sont émollients et rafraîchissants. MONODORE Monodora myristica Dun. Anona myristica Gaertn. (Anonacées.) Le Monodore aromatique est un arbre, dont la tige, haute de 6 à 7 mètres, rameuse, porte des feuilles alternes, persistantes. Les fleurs, grandes, d’abord blanches, puis passant au jaune, ponctuées de brun, sont solitaires à l'extrémité de pédoncules latéraux, accompa- gnés d’une bractée foliacée. Elles présentent un calice à trois sépales crispés, ondulés, réfléchis; une corolle à six pétales hypogynes, sou- dés à la base et disposés sur deux rangs, les trois extérieurs assez larges, carénés, ondulés, crispés, étalés; les trois intérieurs plus élroits, un peu cordiformes, ciliés en dedans, connivents; des éta- mines nombreuses, hypogynes, insérées sur le côté d’un torus con- vexe, à filets très-courts, à anthères oblongues ; un pistil à ovaire simple, stipité, à une seule loge multiovulée, surmonté d’un stigmate sessile. Le fruit est une grosse baie globuleuse, jaune, lisse, charnue, uniloculaire, renfermant plusieurs graines ovoides allongées, angu- leuses, couleur rouille (PI. 36). 366 FLORE MÉDICALE Hamirar. — Cet arbre est originaire de l’Afrique tropicale, pro- bablement de la Nigritie, d'où il a été transporté à la Jamaïque et sur le continent américain. On le trouve surtout dans les jardins; aux Antilles, ses fruits mürissent mal. Cuzrure. — Le monodore aromatique ne se trouve, en Europe, que dans les serres chaudes, où il est rare. Il demande un sol com- posé de terre franche et de sable. On le multiplie de boutures étouf- fées, prises sur le bois aoûté. PARTIES uSITÉES. — Les fruits, les graines. Récore. — Les fruits du Monodora myristica Dun, sont récoltés à leur maturité; les graines sont logées dans la pulpe et sont devenues anguleuses par suite de leur pression mutuelle; elles sont disposées dans le fruit avec une telle économie que si on les enlève, on ne peut en faire tenir la même quantité dans le même espace. ComposiTION CHIMIQUE. — Les graines renferment une huile essen- tielle analogue à celle de la muscade; ces deux huiles se ressemblent tellement qu'il est à peu près impossible de les distinguer l’une de l’autre, Cependant celle des monodores est moins piquante et un peu moins aromatique. Usaces. — Le fruit et les graines du Monodora myristica peuvent remplacer la muscade. Ils possèdent, comme cette amande, des pro- priétés stomachiques et stimulantes qui les font employer comme aromates condimentaires. Ces produits sont inusités en Europe. MORELLE Solanum nigrum L. (Solanées. ) La Morelle noire ou commune, appelée aussi vulgairement Mou- relle, Moxette, Crève-chien, etc., est une plante annuelle, à racine fibreuse, blanchâtre. La tige, haute de 0",30 à 0",60, anguleuse, pubescente, dressée, se divise en rameaux diffus, anguleux, portant des feuilles alternes, pétiolées, ovales aiguës, atténuées à la base, si- nuées ou dentées, plus ou moins pubescentes, molles, succulentes, d’un vert sombre. Les fleurs, blanches, petites, pédicellées, sont réunies, au nombre de trois à six, en cimes ombelliformes. Elles présentent un calice très-petit, à cinq lobes courts, triangulaires ; une corolle rotacée, à cinq divisions ovales-aiguës, étalées ; cinq éta- DU XIX° SIÈCLE. 36: mines saillantes, à filets très-courts, à anthères conniventes: un ovaire libre globuleux, multiovulé, surmonté d’un style simple, ter- miné par un stigmate obtus. Le fruit est une baie globuleuse, pisi- forme, ordinairement noire, quelquefois verdätre, jaune ou rouge, portée sur un pédoncule réfléchi et renfermant plusieurs graines arrondies. Cette plante présente un certain nombre de variétés, que plusieurs auteurs ont regardées comme des espèces distinctes. Telles sont les Mo- relles jaunâtres (S. ochroleucum Bast., S. luteo vérescens Gimel), naine (S. lumile Bernh.), écarlate (S. méniatum Bernh.), velue (S. villo- sum Lam.), etc. A ce genre appartiennent aussi la pomme de terre, l'aubergine ou mélongène, et la douce-amère (Voyez ce mot). Hagirar. — La morelle noire est commune en Europe; on la trouve en abondance dans les lieux cultivés, les décombres, au bord des chemins, etc. On ne la cultive que dans les jardins botaniques. Pannes usrrées. — La plante entière, les fruits. Récote. — La récolte de la morelle se fait au commencement de l’automne, depuis l’époque de la floraison jusqu’à la maturité des fruits ; la plante possède alors toute son énergie. On la fait dessécher à l’étuve et au grenier. On va même jusqu’à prétendre, sans que cela soit prouvé, que l'énergie augmente par la dessiccation. Lorsqu'on veut, au contraire, employer la morelle comme aliment, on la cueille très-jeune. COMPOSITION CHIMIQUE. — La morelle noire à été analysée par M. Desfosses, de Besançon, qui a trouvé dans les baies un principe immédiat qu'il a nommé so/aune, principe que l’on trouve égale- ment dans les fruits des divers autres solanum, et plus particulière ment dans ceux du Solanum pseudo-capsicum, où faux piment, porune-d'amour, qui est une cause fréquente d'empoisonnement chez les enfants disposés à prendre ses fruits pour des cerises. Nous avons déjà donné les caractères de la so/aune en parlant de la Douce- amère (Voyez douce-amère, Flore méd., t. X, page 474). UsiGes. — La morelle est loin de posséder les propriétés narcoti- ques de la plupart des autres solanées; Dioscoride (lib. IV, c. 66) mentionne son usage comme plante alimentaire ; les créoles des iles Maurice et de la Réunion, ainsi que ceux des Antilles, man- gent, sous le nom de Brèdes, du Solauun nodiflorum, variété du 368 FLORE MÉDICALE Solanum nigrum, à la manière des épinards ; ils le préfèrent même à ceux-ci. D'après Dunal et de Candolle, on mange la morelle aux environs de Paris, et on la vend quelquefois hachée en guise d'épi- nards. Cependant les observations publiées par M. Bourgogne, mé- decin à Condé (Journal de chimie médicale, 1827), et celles de M. Pihan-Dufeillay, médecin à Nantes (Journal l'Esculape, 2° année, 7 mars 1840), sembleraient démontrer que, dans quelques cas du moins, la morelle exercerait sur l’économie animale une action assez énergique ; les fruits surtout ont été regardés comme plus toxiques; mais M. Dunal a pu faire prendre à des animaux et ingérer lui- même jusqu'à cent baies de morelle sans en éprouver le moindre inconvénient. Wepfer parle de trois enfants chez lesquels ces fruits ont occasionné le délire, la cardiagie et les distorsions des membres, et on a cité des cas où des moutons, après avoir mangé de la morelle, étaient morts ayant offert auparavant des symptômes nerveux, tels que vertiges; à l’autopsie de ces animaux on a constaté une vive inflammation des voies digestives et de la vessie, qui était fortement contractée (Journ. de chim., de pharm. et de toxicol., 1827). Orfila a pu empoisonner des chiens par l'administration interne et l'appli- cation externe de l'extrait de morelle. M. Dunal lui-même a remarqué que ce suc, appliqué sur les yeux, contractait la pupille. Il parait donc certain que si la morelle peut être mangée impunément dans sa jeunesse, dans cerlains cas elle exerce une action délétère. Il est probable que l'eau lui enlève, à l’ébullition, ses principes actifs : c’est ce qui pourrait expliquer les contradictions que l'on remarque dans les effets qu'elle produit. La morelle est très-rarement employée à l'intérieur ; on l'admi- nistre quelquefois en injections vaginales et rectales, comme émol- lient, adoucissant et calmant contre les coliques ; pour l'usage exté- rieur, on en prépare des cataplasmes regardés comme calmants et maturatifs. On employait ces cataplasmes contre le cancer, les hé- morrhoïdes douloureuses, les fissures du mamelon, les ulcères dou- loureux, les scrofules, ete. Alibert les ordonnait pour calmer le prurit produit par les dartres vives. Celse prescrivait les feuilles incorpo- rées à l’axonge contre l'érysipèle. Le docteur Bone les employait contre les tics douloureux. La décoction est quelquefois employée en fomentalions contre le rhumatisme articulaire aigu (Cazin). La morelle servait autrefois à préparer une eau distillée qui était DU XIX° SIÈCLE. 309 regardée comme calmant; on en faisait une huile par digestion. Elle entrait dans l’onguent populeum, le baume tranquille, ete. En médecine homæopathique, les feuilles de morelle sont quel- quefois employées comme calmantes et sédatives; leur signe est msn.n et son abréviation Sol. nig. Plusieurs autres solanum jouis- sent des mêmes propriétés. MORINDE Morinda umbellata et royoc L. ( Rubiacées - Guettardées. ) La Morinde à ombelles (47. wmnbellata 1.) est un arbrisseau, dont la tige, haute de 2 à 3 mètres, se divise en rameaux étalés, portant des feuilles lancéolées, aiguës, rudes au toucher, Les fleurs, blanches, petites, sont agglomérées en capitules, dont la réunion constitue une sorte d'ombelle. Elles présentent un calice urcéolé, persistant, à cinq dents très-courtes ; une corolle monopétale, à tube assez long, à gorge garnie de poils, à limbe partagé en cinq divisions étalées; cinq étamines incluses, à filets très-courts, à anthères linéaires et presque sessiles; un ovaire à deux loges uniovulées, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit, constitué par une réunion de baies, portées sur un réceptacle globuleux, est charnu, anguleux, comprimé, ombiliqué, à quatre noyaux cartilagineux, dont chacun renferme une ou deux graines. Le Morinde royoc (M. royoc L.), appelé aussi Fausse rhubarbe, est un arbrisseau dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, grêle et flexi- ble, se divise en rameaux courts et sarmenteux, portant des feuilles opposées, pétiolées, ovales aiguës, glabres et lisses. Les fleurs, blan- ches, sont groupées en capitules globuleux à l’aisselle des feuilles vers l'extrémité des rameaux; la corolle a le tube étroit, le limbe divisé en cinq lobes ovales aigus, rabattus en dehors. Le fruit est arrondi, charnu et assez semblable à une mûre. Citons aussi la Morinde à feuilles d'oranger (HZ. citrifolia L.). Hagirar. — Ces arbrisseaux croissent dans les régions chaudes des deux continents; on les trouve en Chine, en Cochinchine, aux Mo- luques, au Mexique, à la Guyane, etc. Parties usrrées. — Les racines, les feuilles, les fruits. Récocre. — Les fruits du Morinda doivent être cueillis à la ma- Flore, T. II. 24 370 FLORE MÉDICALE turité ; les racines, récoltées à Fautomne, sont plus riches en matières colorantes. COMPOSITION CHIMIQUE. — On ne sait rien de positif sur la com- posilion chimique de ces plantes, mais leurs usages en thérapeutique et en teinture doivent faire supposer qu'elles sont riches en tannin. Usaces. — Le fruit du Morinda citrifolia est connu dans l'Inde sous les noms de Cada, Calava et Nano. À Taïti, sa racine donne une teinture safranée. Dans l'Inde, en Chine, dans l'Amérique du Sud, à Cayenne, la racine du M. royoc L. est employée à faire de l’encre et de la teinture ; celle du AZ. wmbellata L. sert à teindre en jaune. Dans l'Inde, les fruits des morinda, cuits sous la cendre, sont man- gés pour combattre la dysentérie, l’asthme, les vers, et, dit-on aussi, comme emménagogues. L'extrait des racines purge à petites doses ; il est vermifuge, stomachique, et on l’emploie contre la diarrhée (Flore des Antilles, 1. M, p. 251). Les médecins des Tamouls, peuple de la famille malabare, qui habitent le Karnat, emploient, d'après Ainslie (Mat.ind., t. MW, p. 253), les fruits du AZ. wmbellata comme vermifuges, et pres- crivent ses feuilles en décoction, associées à des aromates, dans les cas de dysentérie, de lienterie, à la dose d’une demi-tasse par jour. MORINGA Moringa oleifera Lam. Guilandina Moringa L. Hyperanthera Forsk. (Légumineuses - Moringées. ) Le Moringa oléifère ou Ben est un arbre de moyenne grandeur, dont la tige droite, haute de 7 à 8 mètres, couverte d'une écorce noirâtre, se divise en rameaux à écorce verte, portant des feuilles alternes, deux fois ailées, imparipennées, à folioles ternées. Les fleurs, blanches, sont disposées en panicules terminales. Elles pré- sentent un calice à cinq sépales presque égaux, oblongs, un peu soudés à la base, caducs ; une corolle à cinq pétales presque égaux, le supérieur redressé ; dix élamines inégales, à filets libres, à anthères uniloculaires ; un ovaire multiovulé, surmonté d’un style filiforme, aigu. Le fruit est une capsule striée, allongée, s’ouvrant en trois valves et renfermant plusieurs graines trigones, à cotylédons épais et huileux. DU XIX° SIÈCLE. 311 Hagrrar. — Cet arbre est répandu à Ceylan et au Malabar. Il croit dans les sables, et les Hindous le cultivent dans leurs jardins. En Europe, on ne le trouve que dans les serres chaudes des jardins botaniques. Parties uSITÉES. — Les racines, les feuilles, les fleurs, les graines. RécoLte. — La graine est la seule partie que l’on trouve dans le commerce. Elle est connue sous le nom de Semence de Ben, ou Noir de Ben. Les Grecs la nommaient féavos uuperueos (gland de parfum), et les Latins Glans unguentaria ; on V'appelait aussi Bula- nus myrepsus, Glans ægyptiaca, Benalbum. On recevait les semences d'Égypte et d'Arabie. Mais le végétal qui les produit (47. aptera Gaertner), croît en Ethiopie, en Judée, en Espagne, d’après Matthiole, et aux Moluques. Belon dit l'avoir vu sur le mont Sinai. Il ajoute (Singularités, p. 281) qu'il a le port du bouleau, et que les hali- lants tirent de l'huile de ses graines. On le trouve aussi aux envi- rons de Smyrne, où on le nomme Morugthee blanche. N y est très- employé contre la dysentérie. Endlicher (Gen, plant, pl. 1321, n° 6811) à divisé le genre Mo- ringa en deux sections, l'une (la section Bo/anus) à graines dépour- vues d'ailes, l’autre (Woringa) à graines pourvues de trois ailes. Le ben ailé (Moringa pterygosperma Gaertn, Hyperanthera moringa Wild., Anoma morungo Lour.), est produit par un arbre qui croît aux Moluques, aux Philippines, dans la Cochinchine, dans l’Inde, à Ceylan, aux Antilles. Ses graines sont de la grosseur d’un pois, noi- râtres à l'extérieur, arrondies, triangulaires, et pourvues de trois ailes blanches papyracées ; l’épisperme est blanc, spongieux, fra- gile, l'amande huileuse, amère. Le fruit de cette espèce a été décrit et figuré par Gaertner (Carpologia, t. M, p. 314); Burmann (Tes. Zeylan, 163, t. VD; Rumphius (Amb., 1, 484, t. T4 et 75) et Rheède (Æort.malab., VE, t. I) ont figuré la plante. Dans les divers pays où elle croît, on l’a désignée sous les noms de Melangay, Mo- runga, Moringa, Moringou, etc., d'où l’on a fait définitivement Moringa. Les semences de ben sans ailes, ou Ben aptère, Moringa aptera Gaertn., sont celles du commerce. L'espèce à laquelle elles appar- tiennent ne paraît pas avoir été inconnue à Linné, qui dit que les semences venues d'Asie étaient ailées sur les bords; celles d'Afrique sont dépourvues d'ailes. M. Decaisne a décrit les fruits et les graines oz FLORE MÉDICALE du Moringa aptera. Les semences du commerce sont ovées, trigones, turbinées, marquées d’un ombilie blanc; le lesta gris, noirätre en dedans, revêtu d’une membrane blanche et épaisse en dehors, est sous-crustacé, peu dur. Ce sont les noix de ben grises du commerce ; mais elles sont souvent mélangées de noix de ben blanches, plus estimées. Celles-ci sont d’un blanc verdàtre ; le fruit qui les produit est représenté dans Pomet, dans le Matthiole de Gaspard Bauhin ; daus l’Historia universalis plantarum, de Jean Bauhin (3 vol. in-fol., 1660); dans le Séirpium sciagraphia, de Chabræus (Genève, 1677, in-fol.). 11 est décrit par M. Guibourt (Mist. nat. des drog. simp., t IE, p. 359, 4° édit.). Cet auteur indique le Moringa disperma comme étant l'espèce qui fournit le ben officinal. Enfin le M. po- lygona D. C., Hyperanthera decandra Wid., Anoma moringa Lour., produit un fruit à semences ailées. Composrrion cuimique. — Les semences des divers moringa, mais surtout les noix de ben du commerce, produisent, par expression, une huile douce, dont la proportion peut aller jusqu'à 45 et 50 pour cent, lorsqu'on l’extrait au moyen des dissolvants. Elle est inodore et rancit très-difficilement : aussi les parfumeurs l’estiment-ils beaucoup pour isoler le parfum des fleurs, par la méthode de l'enfleurage, qui consiste à interposer des flanelles imbibées d'huile, avec des couches de pé- tales odorants, et à exprimer le tout. Les horlogers recherchent aussi beaucoup l'huile de ben. Cette huile se sépare avec le temps en deux couches, l’une est solide, et l’autre reste fluide; c’est celle-ci qui était préférée par les horlogers, avant qu'on eût trouvé dans la sapo- nification incomplète de l'huile d'olive, le moyen de se procurer de l'oléine pure, non oxydable et n’agissant pas sur les métaux, notam- ment sur le cuivre. Usages. — L'amande des noix de ben est amère et purgative: fraiche on la mange. D'après Dioscoride (/4.T, C. 152), toutes les parties du M. pterygosperma sont âcres ; la racine est même, dit-on, vésicante. On compare son action à celle du raifort, et les feuilles ont été appliquées comme toniques, stimulantes, rubéfiantes ; dans la paralysie, l’œdème, le choléra-morbus, le tétanos, les morsures des serpents; ce qui revient à dire qu'on les a employées, comme cela arrive souvent, sans aucun discernement. Les feuilles, les fleurs et les fruits sont administrés sous forme de pilules, contre les fièvres, les affections nerveuses. Cependant Joseph d’Acosta, dit (De pro- DU XIX° SIÈCLE. 373 curundii Indorum saluie, 1588) qu'au Malabar, on porte les fruits au marché, et M. Perrotet ajoute qu'à Java, les jeunes feuilles rem- placent l'oseille. D'après Ainslie (Mat. ind., t. 1, p. 176), l'huile de ben est em- ployée au Bengale en frictions, contre la goutte et le rhumatisme. C'est à tort que quelques auteurs ont attribué le bois néphrétique au Moringa plerygosperma. MOUTARDE Sinapis nigra L. S. incana Thuill. Brassica nigra Koch. (Crucifères-Brassicées. ) La Moutarde noire ou Sénevé est une plante annuelle, à racines blanches, assez épaisses, fibreuses. La tige, haute de 0",60 à 1 mètre, assez robuste, rameuse, glauque, velue, dressée, porte des feuilles alternes, péliolées, les inférieures grandes, lyrées, pennatifides, à lobe terminal très-grand et plus ou moins sinué, les supérieures lancéolées, atténuées aux deux extrémités, entières ou sinuées. Les fleurs, d’un jaune pâle, sont groupées en grappes terminales. Elles présentent un calice à quatre sépales étalés; une corolle à quatre pétales opposés en croix; six étamines lélradynames; un ovaire allongé-linéaire, à quatre loges multiovulées, surmonté d’un stig- male presque sessile. Le fruit est une silique linéaire, à valves ca- rénées, renfermant des graines brun noiràtre (PI. 37). La Moutarde blanche (S. alba L.) est aussi annuelle, et se dis- tingue de la précédente par sa taille moins élevée ; ses feuilles plus profondément découpées; ses siliques étalées à la maturité; ses graines jaunâtres, finement ponctuées, disposées sur deux rangs. La Moularde sauvage ou Sanve (S. arvensis L.) est encore une plante annuelle qui diffère de la moutarde blanche par ses feuilles supérieures inégalement sinuées-dentées , sessiles ou à peine pé- tiolées ; ses siliques glabres, et ses graines noires lisses. Hazirar. — Ces plantes sont communes en Europe; on les trouve dans les lieux cultivés ou herbeux, au bord des chemins et des ruis- seaux, etc. Cucrure. — La moutarde noire préfère une lerre douce, légère, un peu fraîche, bien ameublie et modérément fumée. On sème la graine clair et à la volée, au commencement du printemps. La 37/4 FLORE MÉDICALE plante ne demande plus ensuite d'autres soins que des binages et des sarclages. Parties usiTÉEs. — Les semences. Récocte. — La graine de moutarde du commerce provient de la culture de celte plante, qui se fait en Alsace, en Flandre et en Pi- cardie ; la première est plus grosse que les deux autres. Elle présente des grains anguleux, ou comprimés en divers sens. Sa saveur est très-forte, elle est très-estimée. Elle donne une farine tirant beaucoup sur le jaune, et tout à fait jaune, si on sépare l’épisperme. Celle de Picardie est la plus petite des trois. Elle fournit une farine d'un gris noirâtre, mêlé de jaune verdâtre. Elle est moins forte et moins estimée. Différentes graines de crucifères, telles que celles du colza, de la navette, peuvent être frauduleusement mélangées avec celles de la moutarde. Celles-ci sont menues, rougeâtres, ou recouvertes d'un enduit gris bleuâtre, ou blanchâtre ; leur saveur est très-âcre. Pilées, elles exhalent à peine de l'odeur, mais si on délaye la farine dans l'eau, on perçoit de suite une forte odeur piquante. Quant à Ja falsi- fication de la farine de moutarde, par celle de graine de lin, du son, de la sciure de bois, elle est très-facile à reconnaître à l'œil nu ou à la loupe. La graine de moutarde, examinée à la loupe, est presque ronde, ou elliptique arrondie ; l’ombilic est à l'une des extrémités de l'ellipse, l'épisperme est rouge translucide et très-chagriné à sa surface , l’'amande est jaune vif. Les grains blanes sont recouverts d'un enduit crétacé que l’on peut enlever. La graine du S. arvensis L. est beaucoup plus grosse que celle de la moutarde officinale. Moins volumineuse que la blanche, examinée à la loupe, on remarque que sa surface est chagrinée. Elle est beaucoup moins active que la moutarde officinale, avec laquelle on la mélange souvent. Le pharmacien doit faire piler lui-même, et non moudre, la farine de moutarde nécessaire à sa consommation. La graine de moutarde blanche est beaucoup plus grosse que les précédentes. Sa couleur est jaune, la forme des grains estelliptique arrondie, l'amande est jaune, l'épisperme translucide, et sa surface est très-légèrement Chagrinée. CoMPposITioN CHIMIQUE. — Boerhaave, et d'autres avant lui, avaient constaté que la moutarde renfermait une huile inoffensive fixe, et une huile volatile âcre, irrilante et caustique. M. Thibierge cons- lala la présence du soufre dans l'essence, celle d'une matière DU XIX° SIÈCLE. 315 albumineuse dans le macéré aqueux; par expression, il obtint une huile fixe peu odorante, à laquelle l'alcool enlevait son odeur ; il vit en outre que l’éther et l'alcool n’enlevaient pas le principe âere de la moutarde. Cependant il conclut, à tort, à la préexistence de ce principe dans la graine. M. Guibourt démontra le premier que l'essence ne préexistait pas dans la moutarde, et qu'une tempé- rature élevée, les acides, l'alcool, ete., s’opposaient à sa formation. Ce fait, extrêmement important, fut confirmé par MM. Robiquet et Boutron, el par M. Fauré, de Bordeaux. Ce dernier chimiste, après avoir admis d'abord qu’une température de 70° favorisait la for- mation de l'essence, prouva bientôt après, que fous les corps ou agents qui coagulent l'albumine, s'opposaient à la formation de l'huile essentielle. : C’est M. le professeur Bussy qui, le premier, a fait connaitre les phénomènes de la formation de l'essence de moutarde. On supposait avant lui, que l'alcool qui enlevait au tourteau la propriété de pro- duire de l'essence, agissait en enlevant un corps complexe très-sul- furé, différant de celui qui avait été trouvé déjà dans la moutarde blanche, par MM. O. Henry père et Garot, qu'ils avaient nommé Sulfosinapisine ou sinapisine, et laissait ainsi l’albumine dans le résidu. M. Bussy à démontré qu’il existait dans la moutarde noire deux principes. L'un, la Myrosine, est une espèce de ferment, que l’on trouve également dans la moutarde blanche. L'autre, l'acide Myro- nique, est le corps fermentescible; il ne se trouve que dans la mou- tarde noire, à l’état de Myronate de potasse. C'est par l’action de ces deux principes l'un sur l’autre, au contact de l'eau tiède, que se forme l'essence de moutarde ; et comme la Myrosine est une albu- mine, {ous les agents qui coagulent l’albumine, s'opposent néces- sairement à la formation de l'essence, ou comme on l’a dit, à la /er- mentation sinapisique. Lorsqu'on exprime la farine de moutarde, on obtient une huile fixe, douce, qui peut être utilisée à divers usages. M. Robinet avait proposé de séparer cette huile, afin d'obtenir un tourteau plus actif. Celui-ci pulvérisé, et traité par l’alcoel à 90° C. bouillant, lui cède le reste du corps gras, et coagule la Myrosine, ou la rend inso- luble, c’est-à-dire impuissante. Ce résidu exprimé, et traité par l'eau bouillante, on à le WMyronate de potasse, que l’on peut obtenir pur et 376 KFLORE MÉDICALE cristallisé, et duquel on peut isoler l'acide myronique , au moyen de l’acide tartrique. Si maintenant on prend du tourteau de moutarde blanche, si on le pulvérise, et si on le fait macérer dans l’eau tiède, on obtiendra, après filtration, un liquide renfermant un peu d’albumine, que l'on sépare par l'ébullition, et une matière mucilagineuse ou gommeuse, que l’on précipite par l'acétate de plomb. Après avoir séparé l'excès de métal par l'hydrogène sulfuré, on traite le liquide filtré par l'al- cool absolu : on obtient alors la Myrosine. Or, celle-ci dissoute dans l'eau tiède, et mise en contact avec de l'acide myronique, extrait de la moutarde noire, on produit l'essence de moutarde; absolu- ment comme avec l'Émulsine ou Sinaptase, des amandes douces, et l'Amygdaline des amandes amères, on obtient l'essence d'amandes arnères. L'essence de moutarde peut être considérée comme un sulfocyanure de sulfure d’un radical composé nommé A//yle, en effet C?AzS + CSHS HE S — CSH5AzS. Sulfo- allyle. soufre. essence cyanogène, de moutarde. Et l'essence d’ail serait le sulfure du même radical ; de sorte qu'en traitant l'essence de moutarde par du potassium, on lui enlève un équivalent de sulfocyanogène, et on la transforme en éssence d'ail, en effet : CS HS Az S? + K — C?AzSK + CS HS. Essence de sulfocyanure essence d'ail. moutarde. de potassium. L'essence de moutarde, se combine avec un équivalent d’ammo- niaque , pour former une base organique cristailisable, nommée Thiosinnamine. ï CSH5Az S° LR H9Az — CS HS Az? S?. Essence de ammoniaque, thiosinnamine. moutarde. La thiosinnamine, à son tour traitée par le bioxyde de mereure, ou par l’oxyde de plomb, produit une nouvelle base organique, la Sinnamine = CŒ'W'A # O, lorsqu'elle est hydratée, et C* H°A z? lors- qu'elle est anhydre. D'un autre côté, l'essence de moutarde elle- même désulfurée par l’oxyde de plomb, produit du sulfure de plomb et une troisième base salifiable , la Sénapoline = CH° AS. Enfin la thiosinnamine peut se combiner avec des radicaux composés, DU XIX° SIÈCLE. 317 ou ammoniaques alcooliques, tels que l’éthylammine, l'aniline , la naphtalidine, pour former des bases organiques nombreuses. Le principe àcre de la moutarde blanche n’est pas volatil, il est probable que l’eau est nécessaire à sa formation; aussi cette graine est-elle très-peu irritante. MM. O. Henry et Garot, avaient extrait de cette graine, au moyen de l'alcool, un corps cristallisable azoté, qui jouissait de la propriété de colorer les persels de fer en rouge cramoisi, et qu'ils avaient nommé acide sulfosinapique, nom qui a été changé plus tard en celui de sw//0-sinapisine. MM. Robiquet et Bou- tron ont extrait aussi de la moutarde blanche un autre principe qui se distingue de celui de MM. O. Henry et Garot, en ce qu'il ne colore pas les persels de fer. Usaces. — La farine de moutarde est appliquée à deux grands usages. On s’en sert comme rubéfiant, sous forme de poudre, de si- napismes, de pédiluves, manuluves, ou de bains entiers. En second lieu, elle est ka base d’une préparation connue sous le nom de mou- tarde de table, qui est un apéritif et un digestif des plus recherchés. L'expérience clinique a confirmé ce que la chimie avait avancé, à savoir que pour que la moutarde ait toute son activité, il faut la délayer dans de l’eau tiède de 30° à 40°. Une température de 70° à 100°, les acides, l'alcool, le tannin, elc., coagulent la myrosine, et l’on n’oblient que des médicaments inactifs. M. Trousseau à prouvé, en effet, par des expériences comparatives, que les sinapismes faits avec la farine de moutarde et du vinaigre très-fort, élaient moins rubéfiants que ceux qui avaient été préparés avec de la scare de bois et le même vinaigre. Ce qui démontre que le vinaigre et la moutarde détruisent mutuellement leurs effets. C’est donc l'eau tiède qu'il faudra toujours employer pour les sinapismes et pour les bains; une macération préalable dans le même liquide sera tou- jours préférable à l’immersion directe de la farine dans l’eau très- chaude. Les cas dans lesquels les sinapismes, ou les bains révulsifs, partiels ou généraux, peuvent être employés avec succès, sont extrèmement nombreux. Ils sont utiles toutes les fois que l’on veut produire une dérivation, ou une excitation générale, comme dans l’apoplexie, la paralysie, les affections comateuses, les fièvres typhoïdes, quelques névralgies, la sciatique, l'emphysème pulmonaire, ete., ete. Tout Free bien préparé doit agir en dix minutes, et ne pas rester 378 FLORE MÉDICALE appliqué plus d’un quart d'heure, ou vingt minutes. Lorsque la sen- sibilité est pervertie ou abolie, lorsque le coma est profond, et que le malade ne manifeste aucune douleur, il faut avoir le soin de changer les sinapismes de place, sans cela il pourrait y avoir vésication, et plus tard gangrène des parties. Dans ce cas, on combat les accidents locaux à l'aide de cataplasmes narcotiques à base de belladone, de jusquiame ou de stramonium. Les pédiluves et les manuluves sinapisés, sont employés avec succès dans les migraines, les céphalalgies intenses, pour rappeler le cours des menstrues. Les bains généraux sinapisés sont conseillés par M. Trousseau, dans l’algidité du choléra, contre le refroidisse- ment qui survient chez les enfants atleints de convulsions, ou dans la période suffocante du croup, etc. A faible dose, à l’intérieur, la farine de moutarde noire est dépu- rative, purgative et antiscorbutique. On administre rarement en France, plus souvent en Angleterre, où on l'utilise surlout comme apéritive. La moutarde de table est préparée avec la fleur de farine de moutarde noire, du vin, du vinaigre et divers aromates. Elle excite l’appétit, augmente la sécrétion gastrique, et facilite aussi la digestion. La graine de moutarde blanche est employée avec succès comme dépurative, à la dose d’une cuillerée à bouche, contre la consti- pation, les dyspepsies, l'apepsie, les flatuosités, en un mot dans presque tous les cas où il y a des désordres digestifs graves. Le char- latanisme s’est emparé de cette médicalion, qui n’est pas quelquefois sans danger, et qui sera loujours plus efficace, lorsqu'elle sera dirigée par le médecin. Inutile d'ajouter que la moutarde blanche des phar- macies vaut certainement aulant que celle qui est préconisée comme jouissant de propriétés plus spéciales qu’elle est loin de posséder. MM. Woelher et Liébig ont proposé, sous le nom de révulsif de moutarde, une solution d'essence dans l'alcool. L’essence pure a été elle-même conseillée, dans les cas où il s'agissait d'opérer sûrement et _promptement la rubéfaction. DU XIX° SIÈCLE. 379 MUCUNA Mucuna pruriens el urens Adans. (Légumineuses-Phaséolées.) Le Mucuna, pois à gratter (NW. pruriens Adans., Dolichos pru- riens L.), appelé aussi Liane à gratter, Pois pouilleux, OEil de bour- rique, etc., est un arbrisseau dont la tige, longue de plusieurs mètres, sarmenteuse, grimpante, épaisse, couverte d’une écorce gri- sâtre et velue, porte des feuilles alternes, à trois folioles ovales, allon- gées, velues et presque soyeuses en dessous. Les fleurs, papilionacées, forment de longues grappes pendantes, axillaires et terminales ; elles ont l’étendard rouge incarnat, les ailes pourpre violacé et la carène verdâtre. Le fruit est une gousse longue, courbée en S, ridée, rouge brunâtre, noircissant à la maturilé, couverte de poils courts, poin- tus, fragiles; elle s'ouvre en deux valves, et renferme des graines assez grosses, arrondies, aplaties, à testa coriace, d'un rouge brun, marquées d’un ombilic noirâtre, très-long. Le Mucuna à gousses ridées (A7. wrens Adans., Dolichos urens L.), appelé aussi Liane à Cacone, se distingue du précédent par ses feuilles à folioles ovales, acuminées; ses fleurs jaunes tachées de pourpre ; ses gousses, longues de 0",10 à 0",15, brunes, marquées de rides saillantes, renfermant quatre à six graines très-grosses, bru- nes, arrondies, aplaties, chagrinées, marquées d’un cercle noir sur les bords. Le Mucuna gigantesque (M. gigantea Adans.) est caractérisé par les dimensions considérables de ses gousses. Hagrrar. — La première espèce habite les Indes Orientales, et il paraît qu’elle se trouve aussi aux Antilles. Les deux autres croissent dans ces iles et dans les parties de l'Amérique du Sud qui en sont voisines. Ces plantes se rencontrent dans les lieux incultes, et sur- tout dans les bois, où leurs longues tiges grimpent le long des arbres. Elles sont peu cultivées dans leur pays natal, et en Europe on les trouve à peine dans les serres chaudes des jardins botaniques. Parties usiTÉEs. — Les gousses, les poils qui les recouvrent, les graines. Récoure. — Sous les noms de Pois à gratter où de Pois pouil- leur, on emploie quelquefois les gousses de plusieurs légumi- 380 FLORE MÉDICALE neuses recouvertes de poils piquants. On en connaît deux espèces : 4° Les gros Pois pouilleux, Œul de bourrique (Zoophtalmum, Brown, Mucuna urens DC., Dolichos urens L.), dont les gousses, renflées à l'endroit des semences, plissées transversalement, sont couvertes de poils cadues, roux, fins, durs et acérés, qui causent une vive déman- geaison en s'implantant dans la peau ; les graines, très-grosses, por- tent le nom vulgaire d'Œ de bourrique, à cause de leur ressem- blance avec l'œil d’un âne; mais M. Guibourt fait remarquer qu'elles ressemblent beaucoup plus à celui d’une chèvre ; elles sont rondes, un peu aplaties, avec un épisperme brun rougetre chagriné, entou- rées dans les deux tiers de leur circonférence par un hile circulaire creux noir, avec un rebord dont la couleur brune est affaiblie et presque blanche dans la partie la plus voisine de l'ombilic; 2° Les perits Pois pouilleux (Stizolobium Browne Mucuna pru- riens DC., Dolichos pruriens L.) sont produits par une plante qui est commune aux Antilles, dans l'Inde et aux îles Moluques; les gousses, plus petites que les précédentes, non ridées, sont indéhis- centes, présentent une suture saillante et sont recouvertes de poils rousstres brillants et qui produisent une vive démangeaison lors- qu'on les touche ; les graines, de la grosseur d’un petit haricot, sont brunes, luisantes, non chagrinées, avec un hile uni, latéral, très- court, avec un bord proéminent très-dur. Le Mucuna pruriens, d'une hauteur excessive, est connu dans l'Inde sous le nom de Cadjuet. Les Européens le nomment Pois à gratter, et ses semences sont appelées Æves puantes. Dans l'Inde, le Mucuna urens porte le nom de Cowhage. K est remarquable par l'aspect de ses fleurs à étendard couleur de chair, à ailes pourpres et à carène verte. COMPOSITION CHIMIQUE, — D’après Martius, les pois de ces fruits renferment du tannin et des traces de résine (Bull. des se. méd. de Férussac, t. XIE, p. 254). Ce sont les poils seuls qui agissent. On ne sait pas à quelle substance ils doivent leurs propriétés irritantes. Usaces. — Les poils qui recouvrent les gousses des Mucuna ont élé proposés comme urticants dans le cas où l'on voudrait déterminer une vive et rapide rubéfaction. Le frottement seul suffit pour faire disparaître les démangeaisons qu'ils déterminent, mais les frictions huileuses agissent beaucoup mieux encore. Ces poils, incorporés dans du miel, dans de la thériaque ou tout autre électuaire, ont été proposés DU XIX° SIÈCLE. 381 comme vermifuges par Bancroft et Kerr. Ils ont été employés par Palmer, Rudolphi, Bremser, Chamberlain, ete. {ls ne déterminent aucune douleur intestinale ; mais ce moyen n’est plus employé. Phéede dit que les semences sont aphrodisiaques, et que les ra- cines, en décoction, sont utiles dans les catarrhes. Aux Barbades, les gousses des A7. pruriens, infusées dans de la bière, sont adminis- trées dans l'hydropisie (Ray, Æistoria Plantarum, 1686 à 1704, 3 vol. in-fol., t. I, p. 887). MUFLIER Antirrhinum majus L. (Personées - Antirrhinées.) Le Muflier des jardins ou à grandes fleurs, appelé aussi Gueule de lion, Gueule de loup, Mufle de veau, Mufleau, etc., est une plante bisannuelle ou vivace, à racinesrameuses, blanchâtres. La tige, haute de 0",40 à 0",80, cylindrique, ferme, dressée, un peu rameuse, glabre à la base, pubescente ou glanduleuse au sommet, porte des feuilles allernes, courtement pétiolées ou presque sessiles, entières, planes, glabres, d’un vert foncé, à nervure médiane fortement sail- lante en dessous, un peu épaisses, élalées; les inférieures oblongues lancéolées, les supérieures lancéolées linéaires. Les fleurs, d’un beau rouge pourpre et à gorge jaune dans le type, mais de couleurs très- variables, sont réunies en grappes terminales munies de bractées courtes. Elles présentent un calice à cinq divisions presque égales, ovales ou arrondies, pubescentes-glanduleuses ; une corolle très- grande, personée, à tube large, renflé à la base, un peu comprimé au milieu, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure à deux lobes réfléchis en dehors, l’inférieure trilobée et présentant un palais sail- lant bilobé et velu qui ferme complètement la gorge; quatre éta- mines incluses, didynames, ayant des anthères à deux lobes diver- gents ; un ovaire à deux loges inégales, multiovulées, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate obtus. Le fruit est une capsule à base oblique, à deux loges inégales, s'ouvrant au sommet par trois trous, et renfermant un grand nombre de petites graines noires. On rapportait autrefois à ce genre quelques espèces à corolle pro- longée en éperon à la base, qui forment aujourd’hui le genre Linaire (Voir ce mof). Hagrrar. — Originaire des régions méridionales, où il croît dans 382 FLORE MÉDICALE les lieux secs, sur les rochers, les vieux murs, etc., le muflier est naturalisé dans le Nord et fréquemment cultivé dans les jardins d'agrément. Parries usirées. — Les feuilles, les fleurs, les racines. Récozre. — Les feuilles rarement employées, doivent être récoltées à l’époque de la floraison, les fleurs à leur complet épanouissement, les graines à la maturité du fruit. ComPosiTIoN CHIMIQUE. — Les mufliers se rapprochent beaucoup, par leur composition et leurs propriétés , des linaires dont nous avons parlé; ce sont des plantes inodores, amères. D’après Gmelin (Découvertes des Russes, t. HN, p. 238), on extrait en Perse des semences, une huile fixe, excellente, et aussi bonne à manger que l'huile d'olive. Pour l'obtenir on fait chauffer les graines , on les réduit en pâle et on exprime à chaud, entre des plaques métal- liques. D'ailleurs cette huile est très-peu abondante. Usages. — D’après Vogel (ist. mat. méd., p. 124), les mufliers avaient autrefois dans certains pays, la réputation vulgaire de chasser les esprits, de détruire les charmes et les maléfices. A un point de vue moins déraisonnable, on leur a attribué des propriétés stimu- lantes; on en use peu aujourd'hui; cependant on a conseillé de les appliquer sous forme de cataplasmes sur les tumeurs. D'après Loureiro, en Cochinchine, on nourrit les porcs avec l'A. porcinum Louv.; l'A. orontium, ou tête de mort, et VA. spu- rium, sont indiqués comme usités, mais sans spécification de pro- priétés. MUGUET Convallaria maialis L. (Liliacées - Asparagées. ) Le muguet de mai ou Lis des vallées est une plante vivace, à rhizome horizontal, noueux, longuement traçant, émettant au des- sous de chaque nœud des fibres radicales grèles, fasciculées, blan- châtres, et au-dessus des feuilles radicales, péliolées, ovales, aiguës, entières, glabres, d’un beau vert, réunies par deux et entourées à leur base d’écailles engainantes. Les fleurs, blanches, odorantes, sont groupées en grappe au sommet d’une hampe ou pédoncule radical, latéral, haut de 0",10 à 0,20, demi-cylindrique , un peu incliné. Elles sont portées sur des pédicelles longs d’environ 0°,01, situés à DU XIX® SIÈCLE 293 l’aisselle de bractées très-courtes, et présentent un périanthe cam- panulé-urcéolé , à six dents réfléchies en dehors ; six étamines . insérées à la base du périanthe; un ovaire libre, à trois loges bio- vulées, surmonté d'un style simple, assez épais, terminé par un stig- mate obtus, à trois angles mousses. Le fruit est une petite baïe pisiforme, rouge, contenant trois graines. Le Sceau de Salomon (C. polygonatum L., Polygonatum vulgare Desf.) est aussi vivace; son rhizome long, épais, charnu, blanchâtre, marqué de cicatrices à la face supérieure, donne naissance à des tiges droites, hautes de 0,30 à 0,50, anguleuses, striées, portant des feuilles alternes, presque sessiles, ovales oblongues, glabres, rejelées d'un seul côté. Les fleurs, blanches, à sommet vert, ino- dores, terminent des pédoncules axillaires pendants et rejetés du côté opposé aux feuilles. Elles ont un périanthe tubuleux-cylindrique. Les baies sont d’un noir bleutre. Hagrrar.— Ces deux plantes sont communes en Europe ; elles crois- sent dans les bois, les pâturages ombragés, etc. On ne les cultive guère que dans les jardins botaniques ou d'agrément. Parties usitées. — Les rhizomes, les fleurs, les fruits. Récozre. — Les fleurs du muguet de mai doivent être récoltées au printemps, au moment où elles s'ouvrent. On les fait sécher rapide- ment au soleil, et on les conserve dans un lieu sec; elles perdent leur odeur, mais elles conservent leur saveur. Les rhizomes sont récoltés à l'automne. Ce sont plus spécialement ceux du Sceau de Salomon (Polygonatum vulqare Desf., Convallaria polygonatum LL.) que l’on emploie. Ils forment une souche vivace horizontale, longue, blanche, charnue, grosse comme le doigt, por- tant à sa partie inférieure un grand nombre de radicules ; cette sou- che porte à sa surface des empreintes circulaires ou elliptiques, pro- fondes, auxquelles la plante doit son nom de sceau de Salomon. Composition curmique. — Toutes les parties des convallaria pos- sèdent une saveur âcre, amère et nauseuse. L'analyse chimique n’en a pas été faite; le nom de muguet a été donné à la fleur du C. Maialis, à cause de l’odeur musquée et agréable que répandent ses fleurs. Cette odeur est d’ailleurs assez forte, pour qu'elle puisse pro- duire des accidents, lorsque la plante est placée dans des apparte- ments fermés. Usaces. — Les fleurs du muguet de mai ont été regardées comme 38/4 FLORE MÉDICALE céphaliques, et antispasmodiques. On les à employées quelquefois comme purgatives el vomitives, d’après Moosdorf. M. Wauthers les a conseillées comme un succédané de la scammonée, et M. Cazin les a employées fraiches, à la dose de un à deux grammes, mélées à du miel, contre les fièvres intermittentes automnales. Elles ont l’in- convénient de produire de violentes coliques. D’après J.-H. Schulze, l'extrait alcoolique des fleurs est amer et purgatif; Peyrilhe, Cartheuser et Klein, l'avaient indiqué comme pouvant être substitué à laloès. Les baies ont été employées, par MM. Senckenberg père et fils, contre l’épilepsie idiopathique, et les fièvres intermittentes. La propriété la moins contestée que l’on reconnaisse au muguet de mai, c'est d'être un sternutatoire violent, lorsqu'on prise la pou- dre grossière des fleurs. On emploie celte poudre contre les migraines el les grandes douleurs de tête; on la prescrit contre les fluxions chroniques des yeux et des oreilles, et contre les vertiges succédant à la suppression du mucus nasal. On préparait autrefois une eau distillée de fleurs de muguet, que l'on nommait Eau d'or. On lui attribuait la propriété de ranimer les forces vitales. Le rhizome et le fruit du sceau de Salomon sont vomitifs d'après Schroder ; Hermann les prescrivait contre la goutte et les affections rhumatismales. En Russie, d’après Martius, on les emploie contre la rage; c'est dans ce pays un remède populaire, ce qui est loin, assurément, de signifier que ce soit un remède effectif. On regardait autrefois le sceau de Salomon comme vulnéraire, et on l’appliquait sur les plaies et les contusions. On en préparait une eau distillée, qui était regardée comme cosmétique; les Baskirs, peuple de Russie, appartenant à la famille turque, emploient la souche fraiche comme telle (Bullet. des science. méd., de Férussae, t. XVI, p. 71). Les fleurs et les rhizomes du C. #ultiflora, jouissent des mêmes propriétés. MUNGO Ophiorhiza mungos L. (Rubiacées - Hédyotidées.) L'Orphiorhize mungo est une plante vivace, dont la tige sous- frutescente, peu élevée, porte des feuilles opposées, stipulées, cour- DU XIX’ SIÈCLE. 389 tement péliolées, ovales-lancéolées, atténuées aux deux extrémités, glabres et membraneuses. Les fleurs, petites, sessiles, sont groupées en épis dont la réunion constitue des cimes ombelliformes , ra- meuses, terminales et pédonculées. Elles présentent un calice court, turbiné, persistant, à cinq dents; une corolle en entonnoir, à tube court, à limbe partagé en cinq divisions ovales obtuses, velues à l'intérieur , étalées, cinq étamines à filets courts, à anthères saillantes ; un ovaire à deux loges multiovulées, surmonté d'un style filiforme terminé par un stigmate globuleux et bilobé. Le fruit est une capsule comprimée, à deux loges renfermant un grand nombre de petites graines brunâtres. Hagirar. — Le mungo croit dans l'Indoustan, à Ceylan, à Java, etc. On le trouve à peine en Europe, dans quelques jardins botaniques. PARTIES usITÉES. — Les racines. Récorre.— Peu de substances ont porté autant de noms que la ra- cine de Mungo ou Mongo, où de Mangouste. On l'a encore nommée Chonlin, Chouline, Chuline, Souline, Racine d'or, Racinejaune, Racine amère de la Chine ; d'après M. Guibourt, la racine désignée sous le nom de Foli des Chinois est analogue au Chynlen de Bergius ( Mat. méd., &. , p.967), et au Az de mungo décrit par Rumphius, que Linné attribue à l'Ophioxylon serpentinum L. de la famille des Apo- cynées, que Loureiro et certains auteurs font venir du Thalictrum sinense, et plusieurs autres de l’'Ophiorrhiza mungos Lin. M. Guibourt, contrairement à l'opinion de Linné, rapporte la racine de mungo au Radix mustelæ, où Raiïz de mungo de Rumphius. Sous le nom de racines de chylen, cet auteur décrit deux substances : l’une qui lui a été remise par M. Idt, sous le nom de Racine d'or, est de la gros- seur d'une plume àécrire, longue de deux à trois centimètres, tor- tueuse , d’un jaune obscur, inodore et très-amère ; elle donne, avec l’eau, une infusion jaune qui rougit par le sulfate de fer ; la seconde espèce, que M. Guibourt tenait de M. Lodibert, est plus grosse et peut acquérir le volume du doigt ; sa longueur est de cinq à six cen- timètres. COMPOSITION CHIMIQUE. — La racine de mungo ou de chylen n'a pas élé analysée. On sait seulement qu'elle renferme en abondance un principe amer, et une matière colorante jaune. La matière extractive s’y trouve quelquefois en si grande quantilé, que sa cassure est vitreuse. Flore, T. Il. 25 386 FLORE MÉDICALE Usaces. — De même que l’ophiorrhiza a pour étymologie ëxe, ser- pent, pi£s, racine, la racine de mungo ou de mangouste, tire son nom d’une espèce d'animal appelée mungo ou mongo, appartenant au genre Mangoustan, qui est très-voisin du genre Civelle, parce que cet ani- mal, regardé dans les pays qu'il habite comme un ennemi acharné des reptiles, ronge, pour se guérir, la racine de la plante dont il est ques- tion quand il est mordu par un serpent. On va même jusqu'à dire qu'il mange de cette racine lorsqu'il se dispose à aller combattre ces reptiles. Ce fait, tout extraordinaire qu'il paraisse, est attesté par Gar- cias, Kæmpfer et Rumphius. Il a conduit les habitants de l’Indous- lan, de Ceylan, des îles de la Sonde et des Moluques, à l’employer contre la morsure des animaux venimeux el contre la rage. Parmi les substances dites Serpentaires, c'est-à-dire employées contre la morsure des serpents venimeux, celle de mungo ou de mangouste à été l’une des plus estimées. Garcias la décrit sous le nom de Lignum colubrinum, arimum, seu laudatissinum, et le nom de bois de couleuvre lui est donné dans beaucoup d'ouvrages. Elle entre, dit-on, dansla composition des fameuses Pierres de Goa, espèces de bézoards artificiels, très-recherchés autrefois contre un grand nombre de maladies. Bergius dit que la racine de chylen est vomitive et qu'il l’a sou- vent employée avec avantage en Chine. A Batavia, on s’en sert contre les coliques, les fièvres putrides, et les vomissements. On l’ad- ministre en décoction. MURIER Morus nigra L. (Morées.) Le Mürier noir est un arbre dont la tige, haute de 10 à 12 mètres, irrégulière, couverte d'une écorce rude et grisätre, à suc laiteux, se divise en rameaux nombreux, longs, étalés, portant des feuilles alternes, pétiolées, ovales-aiguës, profondément échancrées en cœur à la base, dentées, quelquefois lobées, assez épaisses, velues, rudes au toucher, d’un vert sombre. Les fleurs monoïques, petites, ver- dâtres, sont groupées en épis ou chatons axillaires pédoncuiés. Les mâles, en épis allongés, ont un calice à quatre sépales ovales, soudés à la base, concaves, étalés lors de la floraison ; quatre étamines à filets grèles, rugueux. Les fleurs femelles, en épis ovoïdes ou ar- DU XIX® SIÈCLE. 387 rondis, ont le calice à quatre sépales ovales, concaves, libres, dressés, opposés par paires, devenant charnus et succulents à la maturité; un ovaire libre, à deux loges inégales, uniovulées, sur- monté de deux styles grêles, dont le stigmate occupe la face interne. Le fruit est une sorose ovoïde, pourpre noirâtre, formée en grande partie par la réunion et la soudure des calices charnus succulents, dont chacun renferme un petit akène. On remarque encore dans ce genre le Mürier blanc (47. alba L.), et le Mürier de Chine ou à papier (M. papyrifera L.), devenu le type du genre Broussonnetia de Duhamel. HaBirAT. — Originaire de la Perse, ou même de la Chine, d'après quelques auteurs, le mürier noir est aujourd’hui cultivé et presque naturalisé dans les régions méridionales de l’Europe. Cuzrure. — Cet arbre est très-rustique ; il préfère toutefois une exposition abritée et un peu ombragée, un terrain meuble et sub- stantiel. On le propage de graines, et mieux de marcottes ou de bou- tures ; on ne transplante les jeunes pieds que lorsqu'ils sont assez forts. La taille se réduit à enlever le bois mort et à éclaircir les par- lies trop touflues. Parties usiTÉES. — L'écorce de la racine, les feuilles et les fruits. Récorte. — L'écorce de la racine très-employée autrefois, et qui l'est à peine aujourd'hui, doit être recueillie avant la maturité des fruits. On la donne en infusion; la dose est de 5 à 15 grammes, et sèche en poudre de 2 à 4 grammes. Les fruits sont récoltés un peu avant leur parfaite maturité, lorsqu'ils perdent leur couleur rouge pour en prendre une noire. Composrrion cumique. — L'écorce des divers müûriers, surtout celle du mürier à papier (M. papyrifera), est très-riche en fibres. Les fruits sont mucilagineux, acides et sucrés. Ils renferment en effet de la pectine, de l'acide pectique, de l'acide tartrique et du sucre. Usaces.— Les fruits du mürier, nommés müres, servent à préparer un sirop qui se fait avec le suc légèrement fermenté, dans lequel on fait dissoudre, à une douce chaleur, le double de son poids de sucre. Ce sirop est regardé comme acidulé, rafraichissant; il est très-agréable à boire. On l’emploie surtout sous forme de garga- rismes et de collutoires, dans les inflammations de la gorge et de la bouche. On le prescrit quelquefois à la dose de 60 grammes contre les fièvres bilieuses, putrides et inflammatoires, ainsi que dans les 308 FLORE MÉDICALE phlegmasies légères. Le fruit fermenté peut être transformé en un vin assez agréable, mais qui se conserve mal. On peut en fabriquer du vinaigre et en extraire de l'alcool par distillation. D'après le na- turaliste Pallas, ces diverses opérations se pratiquent en Sibérie. Déjà à l'époque de Dioscoride, l'écorce de racine de mürier était employée comme anthelmintique ; un grand nombre d'auteurs, parmi lesquels nous citerons Jérôme Mercurialis, Daniel Sennert, Nicolas Andry, la recommandèrent contre les lombrics et le ténia. Lieutaud au contraire assure qu'elle ne possède aucune propriété vermifuge. Pline dit qu'elle est tout à la fois purgative et vermifuge. Cette écorce est aujourd'hui tout à fait inusitée dans la pratique médicale. D'après Antoine Ferrein (Mat. méd., t. 1, p. 279, t. WF, p. 312) et Desbois de Rochefort (Mar. méd., t. I, 197), la racine même du mürier blanc jouit de propriétés vermifuges. Les feuilles du mürier noir peuvent servir à nourrir les vers à soie ; mais on leur préfère avec juste raison celles du mürier blanc, surtout celles du mürier multicaule (A. multicaulis Perrottet), dont les feuilles sont plus grandes et plus nombreuses. Le 27. tinctoriu L., Broussonetia tinctoria Kunth, de l'Amérique du Sud et du Nord, fournit un bois, nommé fustoc, employé pour la teinture en jaune. Le M. papyrifera L., Broussonetia papyrifera Nent., appelé Aoufa à Tail et Tchukou en Chine, fournit des fibres qui servent à fabri- quer des pagnes et autres vêtements. On en fait aussi du papier et des cordes. MUSCADIER Myristica officinalis L. M. moschata Lam. (Myristicées. ) Le Muscadier aromatique est un arbre, dont la tige, haute de 10 à 12 mètres, droite, couverte d’une écorce peu épaisse, assez unie, brun jaunètre, se divise en rameaux étalés, couverts d’une écorce juisante et d'un beau vert, portant des feuilles alternes, pétiolées, grandes, ovales lancéolées, coriaces, vert foncé en dessus, blanchâtres en dessous, persistantes. Les fleurs, dioïques, petites, jaunâtres, pendantes à l'extrémité de pédicelles longs et grêles, sont réunies, au nombre de quatre à six, en fascicules portés sur des pédoncules axillaires très-courts. Elles présentent un calice campanulé, à trois divisions ovales aiguës, pubescentes, et sont dépourvues de corolle. DU XIX° SIÈCLE. 389 Les mâles renferment ordinairement douze étamines, soudées à la fois par les filets et par les anthères en un tube court. Les femelles ont un ovaire libre, ovoide, à une seule loge uniovulée. Le fruit est une drupe arrondie ou un peu allongée, lisse et d’un vert blanchâtre, du volume d’une petite orange. Le péricarpe ou brou, à chair blanche et filandreuse, s'ouvre par le haut en deux valves charnues, épaisses, laissant voir un arille (ou mieux un faux arille ou arèllode) découpé en lanières, qui passe de la teinte carnée au rouge écarlate vif (acis). On trouve enfin la graine (oëx muscade), qui, sous une enveloppe fragile, renferme une amande grosse, ovoïde, à chair très-dure, blanche, huileuse, très-odorante (PI. 38). Hagirar. — Le muscadier croît dans les régions chaudes de l'Inde, aux iles de la Sonde, aux Moluques, et notamment aux îles de Banda. C'est de là qu'il a été importé successivement aux îles de France et de la Réunion, au Bengale, à Sumatra, à Cayenne, aux Antilles, ete. Sous nos climats, on ne peut le cultiver qu’en serre chaude. ParTies usiTÉEs. — Les amandes ou Muscades, et l’arillode où Murs. RécouTE. — L'amande de muscadier se trouve dans le commerce dépourvue de ses enveloppes. Elle est arrondie, un peu ovoïde, de la grosseur du pouce, et au-dessus elle présente des rides et des sil- lons nombreux gris blanchâtres, brun rougeâtres sur les saillies ; coupée, elle montre un intérieur gris, veiné de rouge ; sa consis- tance est dure, quoique se laissant entamer au couteau; l'odeur en est forte, aromatique, la saveur huileuse, âcre et chaude. On doit préférer les muscades grosses et pesantes; la matière blanche que l’on trouve dans les sillons est du carbonate de chaux, provenant de l'usage qu'on a en Asie de les tremper dans l’eau de chaux avant de les livrer au com- merce. Cette opération a pour but d'empêcher les insectes d'attaquer amande. Souvent, dans le commerce, les trous faits par les larves sont bouchés avec une pâte préparée avec la poudre et le beurre de muscade. Les Muscades de Cayenne sont plus petites, moins huileuses que celles des Moluques. On en trouve rarement en France. Elles arrivent entourées de leurs coques et quelquefois même de leur acts ; l'épis- perme est brun foncé, ou noir, luisant, comme verni. Voici d’ailleurs les dimensions des deux muscades. Longueur des coques. Largeur. Longueur des amandes. Épaisseur. Muscades des Moluques. . . 0,027 à 0®,031 0,022 à 0,024 0%,023 à 0®,026 0,020 à 0®,021 _ de Cayenne, . . 0®,025 à 0®,027 0,017 à 0m,019 0,019 à 0®,022 Ow,01% à Om,u81 390 FLORE MÉDICALE La muscade ronde des Moluques est nommée quelquefois I/vscade femelle, et Muscade cultivée. On désigne encore sous le nom de Muscade lonque des Moluques, ou de Muscade sauvage et de Muscade mâle, Vamande du Myris- tica tomentosa Thunb. et Willd., M. fatua Houtt et Blum., 27. dac- tyloides Gaertn., arbre très-élevé dont les fruits sont elliptiques et cotonneux; la semence est également elliptique terminée en pointe mousse, longue de 0%,04, et large de 0,025 environ. Elle est toujours recouverte de sa coque; celle-ci porte l'impression d'un macis divisé en quatre bandes allant de la base au sommet; l’'amande est marbrée en dedans, mais moins huileuse que celle des Moluques. Le Macis, ou la fausse arille, a été improprement appelé quelquefois Fleur de muscade. Ce sont des espèces de capsules entourant presque complétement la graine, laissant des dépressions sur l'épisperme ; dans le commerce, le macis est en lanières plates, déchiquetées, carti- lagineuses, cassantes, d’une couleur qui varie du jaune au jaune rou- geätre. On le trempe dans l'eau de mer pour lui conserver sa flexi- bilité; il est plus aromatique que les autres parties du fruit, sa saveur est chaude, aromatique, très-agréable, moins âcre que celle de la muscade. Parmi les plantes du même genre, qui fournissent des semences plus où moins comparables à la muscade, nous signalerons le M. spuria des îles Philippines, le 27. madagascariensis de Mada- gascar, le 7. bicuiba du Brésil, le AZ. otoba de la Colombie, et le M. sebifera ( Virola sebifera Aubl.), dont la semence fournit un suif jaunâtre peu aromatique, qui sert à faire des bougies. Composirion CHiMiQuE. — Par la distillation des muscades avec de l'eau, on obtient une huile essentielle ; par expression des amandes pulvérisées, on extrait un mélange d'huile fixe et d'huile volatile, qui est désigné dans le commerce sous le nom de Beurre de muscade. On prépare ce produit sur les lieux de production, avec les amandes brisées, ou avec les rebuts; il nous arrive sous la forme de pains carrés longs, enveloppés de feuilles de palmier. Il est solide, gras, onctueux, friable, jaune pâle, marbré en jaune, rougeàtre, son odeur est très-forte. Celui du commerce est souvent altéré, soit par l'addition de matières grasses inodores, soit par soustraction de l'essence ; ondit même qu'on le colore par le cureuma. Les pharmaciens consciencieux DU XIX° SIÈCLE. 391 le préparent eux-mêmes ; il est alors jaune pâle, d'une odeur forte et très-suave, d'une apparence cristalline. M. Playfair a extrait du beurre de muscade une matière grasse qui fond à 31° etqu’ila nommée Myristicine. Celle-ci étant saponifiée par les acides, produit l'acide Myristicique qui [fond à 43°, et qui peut être représenté par C#H°7, O'HO = CH O0", il est monoba- sique. D’après MM. Pelouze et Frémy, la myristicine ne serait que de la margarine modifiée dans sa cristallisation. Le macis contient deux huiles fixes, l’une soluble dans l'alcool, l'autre jaune soluble en même temps dans l'éther, plus une essence qu'on obtient par distillation, qui est incolore, très-fluide, d’une odeur suave ; sa densité est de 0,928. On trouve depuis quelque temps dans le commerce deux cires, qui sont produites par des myristicas : la première est la C?re d'Ocuba ; elle est d’un blanc jaunâtre, soluble dans l'alcool bouillant, fusible à 36° 5; on l'extrait de l’amande de plusieurs #2yristicas, et prin- cipalement du A. ocuba; la seconde nommée cire de Bicurbu paraît provenir du M. bicuiba : elle est d’un blanc jaunâtre, soluble dans l’alcoo!l bouillant, et fusible à 35°. UsaGes. — La muscade et le macis sont des condiments aroma- tiques, très fréquemment employés dans l’art culinaire, peu usités en médecine. On en fait un usage considérable aux Indes Orientales; les habitants des Moluques en assaisonnent leurs mets et leurs boissons. Ces condiments entrent dans une foule de liqueurs cordiales et sto- machiques; ils aident à la digestion, en augmentant la sécrétion gastrique ; ils conviennent dans la faiblesse de l'estomac et des autres viscères abdominaux. Employés à l’excès, ils peuvent produire une surexcilation susceptible d'aller jusqu’à une sorte d'ivresse. Ils augmen- tent la circulation et la chaleur animale. Bontius, Lobel, Ettmuller et Ainslie, en faisaient le plus grand cas. Ferrein dit qu’on les emploie contre les fièvres putrides, adynamiques et pestilentielles. Cullen et Hoffmann les conseillent seuls, ou associés à d’autres substances contre les fièvres intermittentes. Ils entrent dans une foule de médicaments composés, parmi lesquels nous signalerons ceux que l'on emploie encore quelquefois, tels que : le Draphœnir, YEsprit carminatif de Sylvius, VEau de mélisse des carmes, V Élirir de Gurus, Va Thé- raique, le Vinaïgre antiseptique ou des Quatre voleurs, ete., etc. Le beurre de muscade est le principe actif du Baume Nerva/, 392 FLORE MÉDICALE très-employé contre les douleurs. Il fait lui-même partie du Zrw- ment de Rosen, très-fréquemment usité contre la coqueluche et les douleurs. Le muscadier o/0ba donne un macis qui, incorporé à la graisse, est employé contre la goutte, les rhumatismes et la gale. Zea rapporte qu’il découle de cet arbre une gomme -résine nommée Otolea qui, d’après Alibert (Mat. méd., t. IE, p. 250), est employée contre une foule de maladies. Nous avons dit plus haut que la semence de muscadier à suif (WT. sebifera) était employée dans l'industrie pour faire des bougies, et qne l'on trouvait dans le commerce deux genres de cires produits par des muscadiers : la cire d’Ocuba et la cire de Bicuiba. MUSSÆNDA Mussænda luteola Del. Ophiorhiza lanceolata Forsk. (Rubiacées - Gardéniées.) Le Mussænda est un arbrisseau à rameaux cylindriques, grêles, ‘ couverts d'une écorce brunâtre, velue, portant des feuilles opposées, munies de stipules presque sessiles, ovales lancéolées, atténuées aux deux extrémités, d’un vert pâle à la face inférieure, où les nervures sont saillantes. Les fleurs sont ternées et groupées en courtes pani- cules dichotomes. Elles présentent un calice adhérent, à cinq dents subulées, dont une plus grande, bractéiforme, jaunâtre, glabre, réti- culée ; une corolle à tube grêle, dilaté au sommet, à limbe divisé en cinq lobes ovales lancéolés ; cinq étamines incluses; un ovaire simple, arrondi, à deux loges multiovulées, surmonté d’un style capillaire, aussi long que le tube de la corolle, et terminé par un stigmate bifide. Hagrrar. — Cet arbrisseau croît en Égypte. On ne le trouve, en Europe, que dans les jardins botaniques; il exige la serre chaude. PARTIES USITÉES. — Les écorces. « Récorte. — Plusieurs auteurs ont attribué au Mussænda stadmanni ou plutôt Mussænda landia Lam., un faux quinquina, que M. Gui- bourt désigne sous le.nom de Quinquina de l'Ile Bourbon ; aux iles Maurice et de la Réunion, l'écorce de cette plante porte le nom de Qunquina indigène; elle est roulée, couverte d’un épiderme gris noirâtre, avec des taches grises par places, à surface rugueuse, fissurée, DU XIX° SIÈCLE. 393 ressemblant à du quinquina gris; son liber est mince, gorgé de sue à l'extérieur, dur, compacte, brun foncé. Cowposirion caimique. — L'analyse des écorces des divers mus- sænda, toutes placées dans les faux quinquinas, n’a pas été faite ; elles présentent une saveur plutôt astringente qu'amère, et légère- ment aromatique. Usaces. — La qualité faiblement astringente de ces écorces n’est pas douteuse; on leur a attribué à tort des propriétés fébrifuges ; on ne les a employées que dans les lieux de production ; les fleurs de ces plantes sont usitées à l'Île de France Maurice) comme diuré- tiques et pectorales. MYRICA Myrica gale L. (Myricées.) Cet arbrisseau, qu’on appelle vulgairement Galé odorant, Piment royal ou aquatique, Myrte ou Poivre de Brabant, etc., ne dépasse guère la taille d’un mètre. Sa tige, très-rameuse, porte des feuilles alternes, courtement pétiolées, oblongues ou lancéolées, légèrement dentées dans leur partie supérieure, glabres ou à peine pubescentes, d’un vert assez foncé en dessus, plus pâle en dessous, parsemées de points résineux. Les fleurs, verdâtres, dioïques, sont groupées en chatons latéraux et terminaux. Les mâles sont placées à l'aisselle d'une écaille canalieulée, brunâtre, bordée de blanc ; elles présentent quatre étamines à filets courts. Les fleurs femelles, placées également à l’aisselle d’une écaille munie, en dedans et à la base, de deux écailles plus petites, ont un ovaire sessile, uniovulé, surmonté de deux styles grêles, soudés à la base, et portant chacun un stigmate à la face interne. Le fruit est une baie, ou plutôt une petite drupe sèche, arrondie et monosperme. Parmi les autres espèces que renferme ce genre, nous citerons l’Arbre à cire ou Cirier de la Louisiane (7. cerifera L.), petit arbre de #4 à 5 mètres de hauteur, à feuilles lancéolées et persistantes, à fruits petits, arrondis, charnus, d’un noir bleuâtre, recouverts d’une substance d’aspect farineux, blanc verdâtre, onctueux , qui n'est autre que de la cire; et le cirier de Pensylvanie (M. Pensyloanica Hort. Par.). Hagrrar.— Le Galé croit dans les régions septentrionales des deux 394 FLORE MÉDICALE hémisphères; il habite surtout les lieux humides et marécageux. Les deux autres espèces sont propres à l'Amérique du Nord. Ces végétaux ne sont cultivés, en Europe, que dans les jardins bota- niques. ParTies usirÉes. — Les feuilles, les fruits, les cires qu'ils pro- duisen£. RécoLre. — Les noms de Myrte, Batavel, Piment royal, etc., ont été donnés à cette plante à cause de l'odeur aromatique de ses feuilles ; les fruits du Myrica cirier ou arbre à cire (M. cerifera et pensylva- nica) sont disposés en paquets très-serrés, recouverts de petits corps noirâtres, arrondis, portant des poils nombreux ; ces corps noirâtres, qui ont une odeur et une saveur de poivre très-marquées, laissent exsuder une matière cireuse d’un blanc de neige très-brillant ; aussi, ces plantes ont-elles été nommées Cirier de la Louisiane et Cirier de Pensylvanie ; et le AZ. cordifolia L. du Cap de Bonne-Espérance est appelé Buisson de Cire. Par ébullition des fruits dans l’eau, on obtient une cire qui sert à faire des bougies et qui, en brûlant, répand une odeur très-aromatique. La cire des myrica vient des États-Unis. Elle est jaune ou verte ; la première est la plus aromatique ; elle serait obtenue, suivant Duha- mel, en versant de l’eau bouillante sur les fruits placés sur un plan incliné; et la seconde, par l’ébullition du résidu de l'opération pré- cédente dans l’eau. Plus généralement, on jette les fruits dans l’eau bouillante ; au bout de quelque temps, la couche de cire qui les re- couvrait s’en sépare et surnage ; elle est alors verdâtre, mais il est facile de l’épurer et de la blanchir. La cire de myrica est cassante au point de pouvoir être réduite en poudre ; mais il suffit de la presser fortement pour la rendre flexible et ductile comme celle des abeilles. La cire des myrica fond à 43°, au lieu que celle d’abeilles fond à 65°; elle ne prend pas le même lustre par le frottement; mais ces deux défauts disparaissent en partie lorsqu'on Ja soumet à une lon- gue ébullition dans l’eau ou qu'on la blanchit par l'exposition à l'air, en couches minces ; mais son point de fusion ne monte pas au- dessus de 49° ; le mélange de la cire d’abeilles avec celle des myrica se reconnait à l'odeur, et à ce que le mélange étant plus fusible, se ramollit dans les doigts et s'y attache, tandis que la bonne cire d’a- beilles peut être pétrie dans les doigts sans y adhérer. DU XIX° SIÈCLE. 395 Comwrosirion curmiQue. — Toutes les parties des myrica répandent une odeur aromatique assez agréable; les fruits peuvent donner, d'a- près M. Boussingault, jusqu’à 25 p. 100 de matière cireuse ; cette cire a été examinée par M. Chevreul, qui a vu qu’elle donne à la saponi- fication des acides margarique, sléarique, oléique, et de la glycérine. Usaces. — Nous avons déjà dit que la cire des myrica servait à faire des bougies d'assez mauvaise qualité ; mais qui, malgré cela, sont assez recherchées à cause de l'odeur agréable qu'elles répandent en brûlant. Cette cire, ainsi préparée, se consume lentement. Dans la Caroline, on confectionne avec cette substance une espèce de cire à cacheter. D'après Thunberg ( Voyage au Japon par le cap de Bonne- Espérance, 1. X, p. 212), les Hottentots mangent la cire de myrica seule ou avec de la viande. Dans l'Amérique du Nord, la racine du myrica cirier est employée en décoction comme astringente contre les hémorrhagies de l'utérus, et contre les infiltrations séreuses qui suivent les fièvres d’accès (de Candolle, Essai, etc., p. 272). Le A1. gale, qui est recouvert d'une poussière aromatique jaune d'or, est employé pour chasser les insec- tes; on emploie les feuilles, surtout en Chine, en infusion théiforme, comme stimulantes, cordiales et stomachiques. Champmann, Dana et Maun (Mém. de l’Académie royale de médecine, \.X, p.459), disent que les racines du 7. pensylvanica L. sont vomitives; au Brésil, on emploie contre les douleurs une matière ciro-résineuse nommée dans le pays Tabocas combicurbo , que l'on croit provenir d’un myrica ; on la conserve dans des tiges creuses de végétaux (Bullet. des Sciences médicales de Férussac, t. XX, p. 278). MYROBALAN Terminalia chebula Lam. Myrobalanus chebula Gaertn. ( Combrétacées - Terminaliées. ) Le Myrobalan chébula est un arbre dont la lige, haute de 6 à 8 mèt., se divise en rameaux portant des feuilles presque opposées, péliolées, ovales, entières, ramassées en bouquets à l'extrémité des rameaux. Les fleurs, polygames, sont groupées en verticilles, dont la réunion constitue une grappe terminale. Elles présentent un calice à limbe partagé en cinq divisions élalées, et sont dépourvues de corolle. Les fleurs mâles ont dix élamines saillantes; les fleurs hermaphrodites 396 FLORE MÉDICALE ont, en outre, un ovaire infère, à une seule loge pluriovulée, sur- monté d’un style et d’un stigmate simple. Le fruit, auquel s'applique plus particulièrement le nom de Myrobalan, est une drupe ovoïde, allongée, brunâtre, monosperme par avortement, à noyau allongé, épais, marqué de dix côtes obtuses. Le mirobalan Indien n’est autre chose que le fruit de l'espèce pré- cédente, cueilli longtemps avant sa maturité, et probablement piqué par un insecte. Il est très-petit, dur, compacte, d’un noir foncé, et présente une cavité à la place du noyau. Le myrobalan citrin (T°. cétrina Roxb., M. citrina Gaertn.) n’est, suivant plusieurs auteurs, qu'une simple variété du chébule. Il est moitié moins gros, ovoide, allongé, jaune päle, à angles variables et ridés, à chair sèche et jaunâtre. Le myrobalan belleric (T. bellerica Roxb., M. bellerica Gaertn.) est ovoide, arrondi, brunâtre, et de la grosseur d’une olive. Le myrobalan emblic est le fruit d’une euphorbiacée du genre Phyllanthe (V. ce mot). HagiraT. — Les Myrobalans chébules, indique et citrin, croissent dans l’Hindoustan et dans les régions voisines. On les trouve rarement dans les jardins botaniques de l’Europe. PARTIES usiTÉES. — Les fruits. Le nom de Myrobulan vient de uÿgow, onguent, parfum, et de Bohavoc, gland où fruit, soit que ce fruit ait été employé comme cos- métique, soit à cause de la confusion qui en a été faite par Pline et par d’autres auteurs, avec la noix de ben. Le Myrobalan citrin se présente sous trois formes principales : 1° Myrobulan jaune et ovoide anguleux, dont la substance du noyau présente des cavités rondes pleines d'une résine analogue au succin ; 2° Myrobalan verdätre et pyriforme, ressemblant aux chébules par leur forme, mais en différant par leur couleur verdâtre, leur volume, qui est moins grand ; 3° Myrobalan brunätre et wvoide arrondi, à chair extérieure brune , presque noire, ou dure et compacte; dans le commerce, on les vend souvent pour des myrobalans bellerics et pour des chébules. Les Myrobalans chébules (Myrobalanus chebulæ Gaertner), allongés en poire, à angles souvent réguliers et rugueux, rudes au toucher, bruns jaunâtres ou verdàtres, pesants, à cassure luisante et résineuse ; leur saveur est astringente, l’amande est douce. DU xIX° SIÈCLE. 397 Les Myrobalans indiens se distinguent par leur petite taille, leur couleur noire, leur surface ridée, leur consistance dure ; leur saveur est astringente et aigrelette ; on croit que c’est le ckebule cueilli avant sa maturité. Le Myrobalan bellerie (Myrobalanus bellerica Gaertner), est ovale, presque rond; sa surface n'est pas rugueuse, ses angles sont arrondis ; il est terminé, du côté du pédoncule, en une pointe très-courte, et sa couleur est gris rougeâtre, mat et cendré; sa chair est brunâtre, poreuse et friable; son amande a un goût de noisette. On trouve souvent mêlée aux myrobalans citrins du commerce une galle que les Indous nomment Xadu/ai et Kadukar poo (fleur de Kadukaï), nom que l’on donne dans ce pays aux myrobalans citrins ; elle a été décrite par Samuel Dale, et par Geoffroy, sous le nom de Fève du Bengale; ces auteurs pensaient que ce pouvait être le fruit du myrobalan citrin, devenu monstrueux par suite de la piqüre d’un insecte. Composition CHIMIQUE. — Le nom de myrobalan fait supposer que ces fruits étaient autrefois odorants; les fruits que nous connaissons sont tout à fait inodores, ce qui peut faire supposer qu'il n’y a pas identité complète entre ceux des anciens et les nôtres; on croit que le myrobalan des Grecs était la Voir muscade, tandis que celui des Arabes était celui que nous connaissons; il a une saveur sucrée et astringente. UsaGes. — On a regardé les myrobalans comme laxatifs d’abord, et astringents ensuite ; ils agissent comme la rhubarbe, qui constipe après avoir purgé; on les a employés contre la diarrhée, la jaunisse, la dysentérie, etc.; dans l’Hindoustan, on emploie les chébules con- tre les aphtes; d’après Ainslie, ces fruits sont d'autant plus purgatifs qu'ils ne sont pas mürs. Matthiole (Pietro-Andrea Mattioli, né à Sienne en 1500, mort en 1577) parle longuement des myrobalans; il les vante dans un grand nombre de maladies; ils entraient autre- fois dans une infinité de préparations pharmaceutiques ; ils sont aujourd’hui inusités dans la médecine pratique française. 398 FLORE MÉDICALE MYROXYLON Myrozylum Peruiferum et Toluiferum Rich. (Légumineuses - Sophorées.) Le Myroxylon du Pérou (M. peruiferum Rich.), est un arbre de moyenne-grandeur, très-résineux dans toutes ses parties. Sa tige, re- couverte d’une écorce épaisse et lisse, se divise en rameaux tubercu- leux, portant des feuilles alternes, à pétiole d’abord pubescent, puis glabre, à limbe imparipenné, composé de folioles alternes presque sessiles, ovales, acuminées, entières, glabres, d’un vert clair, parse- mées de points glanduleux, transparents. Les fleurs, bianches ou blanc rosé, sont disposées en grappes rameuses à l’aisselle des feuilles su- périeures. Elles présentent un calice campanulé, court, tronqué au sommet, à cinq dents peu marquées; une corolle irrégulière à cinq pétales, longuement onguiculés, étalés, inégaux, le supérieur plus grand, arrondi, presque cordiforme, les quatre autres étroits, linéai- res, aigus; dix étamines, à filets libres, déclinés, à anthères ovoïdes, blanches; un ovaire stipité, à une seule loge biovulée, surmonté d’un style court, arqué, terminé par un stigmate obtus. Le fruit est une gousse courtement pédicellée, membraneuse, aïlée, longue de 0°,12 à 0",15, plane, glabre, indéhiscente, épaisse et renflée au sommet, qui est obtus. L'intérieur présente une seule loge contenant une ou deux graines. Le Myroxylon de Tolu (M. toluiferum Rich., Tolwfera balsa- mum L.), très-voisin du précédent, en diffère surtout par ses fo- lioles moins nombreuses, minces, membraneuses, lancéolées, lon- guement acuminées au sommet; la terminale plus grande que les autres. Quelques auteurs rapportent encore à ce genre le Myrosperme fru- tescent (Myrospermum frutescens Jacq.). HapiraT. — Ces végétaux croissent dans l'Amérique méridio- nale, au Pérou, dans les hautes savanes de Tolu, près de Corozol, au midi de la Nouvelle-Grenade, sur les bords du Rio de la Magda- lena, et jusqu'aux environs de Carthagène. Parties usirées. — Les bois, les écorces, les baumes qu'on en extrait par divers procédés. RécoLre. — Tous les Myrozylum où Myrospermum peuvent pro- DU XIX° SIÈCLE. 399 duire des baumes. Nous allons indiquer les principaux, ainsi que leur origine. 1° Myrorylum frutescens Jacquin (Amér., p. 370, tab. 174, fig. 34. Kunth. Nova genera, t. VE, p. 370, tab. 570, 571), dont les loges du fruit renferment un suc résineux qui, d’après Jacquin, possède une odeur forte et désagréable ; cet arbre abonde à Cartha- gène, en Colombie, dans les montagnes de Caracas, sur les bords du Rio Guarico. 2° Le myroxylon (Myrorylum peruiferun Mutis, Linn. fils et Rich.; Myrospermum peruiferum D.C. Myrospermum pedicellatum Lam.) ou baumier du Pérou, croît dans diverses provinces de l’Amé- rique du Sud; les indigènes le nomment Quinoquino, Chinochino, Chinachina ; aussi, Joseph de Jussieu l'appelait-il Quenquina: au Mexique, d'après François Hernandez (Histoire des plantes, des ani- maux et des minéraux du Mexique, en latin, Rome, 1651, in-fol.) on le nomme Hoitziloxitl; au Brésil, on l'appelle, d’après Guillaume Pison, Caburuba ; à Santa-Fè-de-Bogota, à la Nouvelle-Grenade, il a reçu le nom de Cabureira ; mais M. Poiret doute avec raison, d'après Mérat et Delens, que ce soit le véritable baumier. Ce ne fut qu'en 1781 que J.-E. Mulis fit connaître celui-ci. Il fut décrit par Linné fils dans son Supplementum, p.233. 3° Le Myroxylum pubescens Kunth (Myrospermum pubescens D.C., Myrospermum peruiferum Lamb.), cultivé aux environs de Cartha- gène et dans la province de Popayan, produit par incision le baume de l'Inde, qui est fauve, liquide, assez amer, cependant suave. 4 Le Myrozylum toluiferum ou toluifera Ach. Richard et Kunth où Myrospermum toluiferum D.C. (vulgairement Baume de Tolu) a été nommé par Linné Toluiferum balsamum, par suite d’une erreur de Miller, qui avait joint à la description des feuilles le fruit d’une autre espèce; J. de Jussieu l'avait placé dans les térébinthacées. L'un des auteurs de la Ælore du Pérou, Ruiz, dit, dans un de ses mémoires, que le myrosperme baume de Tolu fournit à la fois le baume du Pérou et celui de Tolu, et que ces substances ne diffèrent que par le mode d’extraction et par la distance des pays d'où elles proviennent; que la première nous vient en effet du Pérou et la seconde de Tolu, dans la province de Carthagène d'Amérique; mais Achille Richard, après avoir un moment adopté cette manière de voir, reconnut sur l'examen de deux échantillons recueillis par Humboldt, que 100 FLORE MÉDICALE la dernière constituait une espèce distincte, à laquelle il donna le nom qu’elle porte aujourd'hui. Le baume de Tolu, produit par le Myrospermum toluiferum, est sec ou mou. Autrefois, le Baume de Tolu sec nous arrivait dans des cale- basses de grosseur variable, quisont très-rares maintenant ; plus tard, il nous est venu dans des potiches de terre volumineuses et pesantes ; aujourd'hui, on l’enferme dans des caisses de fer-blane du poids de 3 à 4 kilogrammes ; il est solide, cassant, se ramollit par la chaleur, et peut alors être roulé en pilules pour fondre tout à fait à une tem- pérature plus élevée; il est roux, jaunâtre ou brun verdâtre, transpa- rent ou translucide; il devient très-sec en vieillissant ; son odeur est douce, suave el parfumée; sa saveur, aromatique d’abord, devient bientôt âcre ; lorsqu'on le chauffe au feu, il répand une fumée épaisse et agréable; il est soluble dans l'alcool et dans l'éther. Bouilli dans l'eau, il lui cède des acides cinnamique et benzoïque, et d'autres matières dont nous parlerons plus loin. On trouve depuis quelque temps dans le commerce un baume de Tolu plus mou, d’une odeur plus forte, moins aromatique que le précédent, plus opaque, qui vient du Brésil; il peut être utilement employé. Le Baume de Tolu mou est expédié dans des boites en fer-blanc; il a une consistance de poix molle ou de térébenthine épaisse; il est plus transparent et plus foncé en couleur que le premier; il est souvent mêlé à des impuretés; sa saveur est moins marquée que celle du tolu sec; sa saveur est plus suave et plus aromatique ; mais, d'après M. Guibourt, cela tient à ce qu'il est plus récent; en l'ex- posant longtemps à l'air, il devient cassant, cristallin, sans diminuer de poids; si, desséché de la sorte, on l’épuise par l’eau et si l'on sature le liquide par un alcali, on trouve qu'il renferme plus d'acide qu'à l'état mou, ce qui ne peut être attribué qu'à l'oxydation de l'essence. M. Guibourt recommande de ne pas confondre le baume de Tolu mou avec le liquidambar, que quelques négociants peu consciencieux lui substituent, ou bien avec un mélange des deux, ou encore avec du Tolu déjà traité par l’eau ; le Tolu, dit ce savant, ne doit pas être opaque; il ne doit pas contenir d’eau; son odeur et sa saveur sont plus douces, moins âcres, et plus agréables que celles du styrax et du liquidambar. Le myrosperme baume du Pérou (Myrorylum peruiferum) est DU XIX° SIÈCLE. 401 produit, d’après Ruiz, lorsqu'on incise l'écorce, un baume liquide blanchàtre, qui, en se solidifiant à l'air ou dans les calebasses dans lesquelles on l'enferme, porte le nom de Baume blanc sec ou de Baume de Tolu. D'après M. Guibourt, qui en a reçu un échantillon de M. Weddell, recueilli par ce botaniste lui-même au pied de l’ar- bre, en Bolivie, ce baume est solide, brun rougeûtre, translu- cide, dur, tenace; son odeur est plus aromatique et plus forte que celle du tolu ordinaire; sa saveur est parfumée, sans àcreté; ce pro- duit porte le nom de Baume du Pérou sec, el il doit être regardé comme une variété du baume de Tolu, supérieure en qualité à celui-ci. Le Baume du Pérou brun, que M. Guibourt a décril aussi sous le uom de Baume du Pérou en coces, et qu'il croit venu du Brésil, est probablement le cabureicica de Pison et Margraff, produit par le ca- burciba, arbre qui croit au Brésil, dans les provinces de Espirito- Santo et de Pernambuco. D'après M. Ph. Martius, les Indiens renferment ce baume dans les fruits non encore mürs d’une espèce d’eschaveilera où lecythis (de Xfzv90:, flacon, parce que ces fruits ser- vent de tasses et de vases aux indigènes) ; il est demi-fluide, grume- leux, très-odorant, foncé eu couleur, transparent lorsqu'il est en cou- ches minces; sa saveur est douce et parfumée. Le Baume du Pérou noir, appelé aussi Baume du Pérou liquide du commerce, où Baume de San Salvador, est obtenu par incisions que l’on fait à un Myrospermum qui croit sur la côte de Sonsonate ou Zonzonale, dans l'État de San Salvador de Guatamala ; aussi, M. Guibourt lui donne-t-il le nom de Baume de San Salvador, qui rappelle son origine; on avait cru d’abord que ce produit venait du Pérou, et qu'il était oblenu par décoction des rameaux dans l’eau ; mais M. Guibourt fait remarquer, avec juste raison, qu'une matière ainsi obtenue, au lieu d’être plus liquide et plus aromatique que celle qui est extraile par incisions, devrait être, au contraire, plus consistante et moins odorante; en outre, elle ne devrait contenir que très-peu ou même pas d'acides benzoïque ou cinnamique, que l'eau dissout. Or, le baume du Pérou et celui de San Salvador en renfer- ment beaucoup. Enfin, M. Guibourt relève une erreur commise par Jacquin, répétée plus tard par Chaumeton (l’un des auteurs de l’an- cienne {/ore médicale) et par Récluz, qui font préparer le baume du Pérou avec des semences, contrairement à ce qu'ont dit Hernandez, Flore, T. IL. 26 402 FLORE MÉDICALE Pison, Ruiz, de Humboldt, pour le &aume de Tolu, M. Bazire pour le baume de San Salvador, et M. Weddell ponr celui de /4 Paz (Haut- Pérou). Ë Le baume de San Salvador est rouge, brun foncé, transparent ; son odeur forte rappelle un peu celle du styrax; sa saveur est très-âcre ; il se dissout dans l’alcool en donnant une solution trouble, et en lais- sant déposer une matière sucrée pulvérulente; l'eau bouillante lui en- lève beaucoup d’acide benzoïque; on le falsifie souvent avec diverses essences, de l'alcool, etc. Composirion cHimiQue. — Le nom générique de Myrospermu (de pige, parfum, oxéoux, graine), a été donné par Jacquin aux arbres qui produisent les divers baumes; celui de Myrozylon (de pipe, parfum, Eov, bois) donné par Mutis, leur convient beaucoup mieux, car c’est du bois, par incisions, et non de la semence, que l’on ex- trait ces baumes. Les semences des myroxilons renferment des coty- lédons jauntres et huileux, ayant un goût de mélilot, et ne contien- nent pas de baume ; les loges du fruit n’en contiennent pas non plus; ce n’est que dans les lacunes du mésocarpe peu développé qu’on en trouve de petites quantités, bien insuffisantes, comme le fait remar- quer M. Guibourt, pour fournir à la consommation. Les produits résineux qui nous occupent sont de véritables bzumes, c’est-à-dire des produits qui renferment de l'acide benzoïque ou de l'acide cinnamique, et le plus souvent les deux à la fois. Le baume de Tolu a été analysé et étudié par M. Frémy; ce chimiste y a trouvé deux résines distinctes : l’une très-soluble dans l'alcool, et l'autre peu soluble. La résine &« — C?H% Of, est soluble dans l’éther et les alcalis, et la résine f — C*H"0", est insoluble dans l'alcool; très- cassante, elle se dissout dans la potasse; la première, exposée à l’air, se transforme en résine B; l’une et l'autre, traitées par l'acide azotique, donnent, à la distillation, de l'essence d'amandes amères. Distillé avec de l’eau, le baume de Tolu fournit une essence com- plexe formée de trois corps volatiles : 1° le To/ëne, qui bout à 100° (Deville) = C°H°,E Kopp; 2° de l’acide benzoïque ; 3° de la cinna- méine bouillant à 340°. Le baume du Pérou liquide contient, d’après M. Frémy, deux substances : l’une est liquide; c’est la connaméine = C*H# OS, qui, DU XIX° SIÈCLE. 403 sous l'influence de la potasse, se transforme en c’namate de potasse et en Péruvine; en effet; CS H2608 = (CI8H7 Os} + CSH1204 Cinnaméine. Acide cinnamique. Péruvine. l’autre est solide, cristallisable, isomérique, avec l’hydrure de cinna- myle; c'est la #étacinnaméine Frémy). L'acide cinnamique, que l’on trouve dans le baume du Pérou, provient de l'oxydation de la cinna- méine et de la métacinnaméine; la cinnaméine, traitée par l'acide azotique ou le bioxyde de plomb, est transformée en essence d’a- mandes amères; enfin, le chlore la transforme en cAlorure de benzoïle, que l’eau décompose en acides chlorhydrique et ben- zoïque. Usaces. — Les divers baumes de Tolu et du Pérou sont très-usit‘s en parfumerie, particulièrement en Angleterre. En pharmacie, on en prépare un sirop et des tablettes; ce sont à peu près les deux seules formes sous lesquelles on en fait usage. On regarde avec juste raison ces préparations comme des modificateurs puissants des mu- queuses ; on les emploie avec le plus grand succès et à assez fortes doses contre les catarrhes de la vessie, les cystites, les inflammations de l’urètre, et un très-grand nombre d’autres affections des voies génito-urinaires ; mais c’est surtout dans les maladies des bronches et des poumons qu'on en fait un fréquent usage : elles calment la toux, facilitent l’expectoration, et modifient avantageusement les sécrétions bronchiques ; mais il ne faut pas croire, comme le disent d'anciens auteurs, particulièrement Frédéric Hoffmann et Morton, que les baumes de myroxilon guérissent la phthisie; on est aujourd’hui revenu de ces erreurs. Ces baumes sont quelquefois employés dans les lieux de production pour le pansement des ulcères; on les fait entrer dans la composition de certains onguents et certaines pommades. MYRTE Myrtus communis L. (Myrtacées - Myrtées. ) Le Myrte est un arbrisseau, dont la tige, haute de 5 à 6 mètres, se divise dès la base en rameaux nombreux, opposés, portant des feuilles opposées, courtement pétiolées, ovales-aiguës, entières, fermes, per- 40% FLORE MÉDICALE sistantes, d'un vert foncé, parsemées de petits points glanduleux transparents. Les fleurs, blanches, odorantes, sont portées sur de longs pédoncules dressés, solitaires à l’aisselle des feuilles. Elles pré- sentent un calice glabre, lisse, à tube ovoïde et soudé avec l'ovaire, à limbe divisé en cinq dents ovales-aiguës ; une corolle à cinq pétales égaux, un peu concaves, étalés ; des étamines en nombre indéfini, à filets libres, disposées sur plusieurs rangs; un ovaire infère, ovoïde, à trois loges multiovulées, surmonté d'un style et d'un stigmate simples. Le fruit est une petite baie ovoïde, noire (M7. melano- carpa D.C.) ou blanche (4. leucocarpa D. C.), couronnée par le limbe persistant du calice, à trois loges renfermant chacune un grand nombre de graines réniformes, arquées, dont le bord externe est em- Lrassé par une grande caroncule de même forme. Nous citerons encore les Myrtes giroflée (AZ. caryophyllata L.) et piment (M. pimenta L., M. aromatica Poir., Eugenia pimenta D.C.). Hagrrar. — Le myrte commun croit dans tout le pourtour du bassin méditerranéen; les autres espèces appartiennent aux régions chaudes des deux continents. Cuzrure. — Le myrte demande une exposition chaude, une terre franche, légère, et mieux encore la terre de bruyère. On le propage de graines, de boutures et de marcottes, et on le rentre en hiver. Partis usitées. — Les feuilles et les fruits. Récocre. — Les feuilles nous arrivent sèches du Midi. Les fruits doivent être cueillis à la maturité et choisis récents, gros, secs et noirs, aromatiques et astringents. Les fruits du Myrtus pimenta L., nommés encore Amomi, Piment des Anglais, Toure épice, Piment et Poivre de la Jamaïque, sont cueillis avant leur maturité. Ces fruits, tels qu'ils nous arrivent, sont de la grosseur d’un petit pois, presque sphériques, rougeâtres, cou- verts de petites tubérosités et couronnés par le limbe calicinal; cette couronne est ordinairement détruite et réduite à un simple bourrelet par le frottement réciproque des fruits; mais si elle est entière, on re- marque que le limbe est recourbé en dedans. Le péricarpe présente une odeur très-forte, très-agréable, qui tient à la fois du girofle et de la cannelle. Le AZ. pimenta L. est le MT. arborea folus lauriuis aroma- tica de Sloane. Charles de Lécluse et Plukenet ont décrit un arbre à feuilles elliptiques (Myrtus acris Willd), qui, d’après le second de ces auteurs, produirait aussi le piment de la Jamaïque. Il pourrait DU XIX° SIÈCLE. 405 donc se faire que ces deux arbres fournissent en effet le piment de la Jamaïque. Néanmoins De Candolle, dans son Prodromus (Lt. IT), nomma le Myrtus pimenta de Linné Eugenia pimenta, et le Myrtus acris, de Willdenow, Myrcia acris, ayant soin, en outre, de distin- guer les fruits de ces deux plantes. Le Pünent Tabago ressemble tout à fait au piment de la Jamaïque, mais il est plus gros, moins rugueux et grisàtre. Sa couronne est plus petite, son péricarpe est moins aromatique. Il paraît avoir été cueilli dans un état de maturité complète. Peut-être est-il produit par le Myrcia acris. Quelques auteurs anciens mentionnent le Pr- ment de Tabasco, État du Mexique, et ne parlent point du Pément Tabago (l'une des petites Antilles), soit par corruption de langage, soit parce qu'on en récolte dans l’un et l’autre de ces pays tropicaux. Le Piment couronné, ou Poivre de Thévet, mentionné par Pomet (Histoire générale des drogues simples et composées, 169%; in-fol., et 1735, in-4°) ainsi que par Pierre-Jean-Baptiste Chomel (P/antes usuelles, A761, 3 vol. in-12), vient des Antilles, et principalement de l’île Saint-Vincent. Il est produit par le Myrtus pimentoïides, de Nées d'Esenbeck (Myrcia pimentoïdes D.C.); il ressemble tout à fait au Myrcia acris. Les fruits tuberculeux, très-aromatiques, sont termi- nés par une large couronne évasée en entonnoir et portant au som- met cinq dents calicinales. Les fruits sont un peu réniformes. Comrosrriox curmique. — Toutes les plantes de la famille des Myr- tacées se font remarquer par leur odeur aromatique, qui doit être attribuée à une huile essentielle que l’on peut en retirer par distilla- tion, et qui est tout à fait analogue à celle du giroflier. Usaces. — Le myrte était le végétal favori des anciens, qui le con- sacraient à Vénus et en entouraient toujours le temple de cette déesse. Des couronnes de myrte étaient décernées aux vainqueurs des jeux de Ja Grèce ; dans les festins, les convives en ceignaïent leur tête. À Rome, deux myrtes étaient plantés devant le temple de Romu- lus Quirinus pour représenter l’ordre des Patriciens et celui des Plé- béiens. Le parfum du ryrte était fort estimé des peuples de l’anti- quité ; les branches et les fruits étaient employés pour parfumer les vins; on mettait les feuilles dans les bains ; enfin, la plante tout en- tière était fréquemment usitée en médecine ; on préparait avec ses feuilles une eau aromatique, appelée eau d'ange, très-recherchée pour la loilette; les baies entraient dans des compositions astrin- 406 FLORE MÉDICALE gentes qui étaient très-réputées. Dioscoride et Pline recommandaient l'usage du myrte à l’intérieur, contre la débilité des organes diges- tifs, la diarrhée, la leucorrhée ; et, à l'extérieur, contre le relâche- ment des gencives, la chute du rectum, etc. Le botaniste Pierre Garidel (Histoire des plantes des environs d'Aix-en-Provence, AT15, in-fol.), donne la formule d’une huile préparée avec les feuilles et les fruits du myrte, dont il exagère les vertus. Aujourd'hui, le myrte n’est plus guère en faveur que comme arbuste d'agrément. Néan- moins ses fruits sont des condiments aromatiques très-estimés. Au Chili, on prépare avec les fruits rouges, arrondis ou ovoïdes, assez gros, du myrte ugni (Myrtus Ugni molina) une liqueur que les habi- tants de ce pays comparent aux meilleurs vins muscats. Les piments aromatiques du myrte sont employés chez nous comme on le fait du girofle, de la cannelle, du galanga, etc. DU XIX° SIÈCLE. A0 NANDHIROBA Nandhiroba hederacea Plum. Feuillea scandens L. (Cucurbitacées-Nandhirobées.) Le Nandhiroba à feuilles de lierre, vulgairement appelée Liane contre-poison ou Boîte à savonnette, est un arbrisseau, dont la tige, longue de plusieurs mètres, grimpante, flexible, munie de vrilles simples et axillaires, porte des feuilles alternes, pétiolées, cordées, acuminées, palmées, à trois ou cinq lobes, longues de 0",12 à 0",15, larges de 0",10, légèrement dentées, charnues, luisantes et d’un vert sombre. Les fleurs sont petites, rouges et dioïques. Les mâles, courtement pédonculées et disposées en longues panicules rameuses, ont un calice campanulé, à cinq divisions; une corolle à cinq pétales soudés à la base ; dix étamines, alternativement stériles et fertiles, à anthères didymes; un ovaire rudimentaire, surmonté de trois styles dont la réunion constitue une sorte d'étoile qui ferme la gorge de la corolle. Les fleurs femelles, portées sur de courts pédoncules solitaires à l’aisselle des feuilles, ont un calice à tube adhérent, à limbe partagé en cinq divisions; une corolle à cinq pétales oblongs, alternant avec cinq appendices qui paraissent être des étamines avor- tées ; un ovaire infère, trigone, à trois loges pluriovulées, surmonté de trois styles terminés chacun par un stigmate large, obtus et bifide. Le fruit est une péponide globuleuse, charnue, de 0,10 à 0,15 de diamètre, à enveloppe verte, ligneuse, cassante, comme chagrinée, assez épaisse, divisée vers le milieu de sa longueur par un bourrelet circulaire produit par le calice, et qui marque la section suivant laquelle elle s'ouvre à la maturité. L'intérieur est divisé en trois loges, qui renferment plusieurs graines ovales, aplaties, lisses et fauves, d'environ 0",03 de diamètre, vuigairement appelées Noir de serpent. Hamrrar. — Cette plante croît dans les régions tropicales de l'Amérique ; elle habite les bois et n’est pas cultivée. - PARTIES USITÉES. — Les semences. Récozre. — Aux Antilles et dans toute l'Amérique du Sud on em- ploie, sous le nom de Noix de serpent, les graines des Nandhiroba hederacea, scandens, cordifolia. Ces graines sont larges, d’un fauve grisâtre. L’'amande est jaunâtre. COMPOSITION CHIMIQUE. — On a extrait par expression, de ces 108 FLORE MÉDICALE semences, une huile fixe qu'on emploie pour brüler. Son extrême amertume, disent Pison et Margraff (Æist. naturalis Brasiliæ, 1648 et 1658, in-fol.), empêche qu'on ne la mange. On a trouvé encore dans ces graines une résine, de l’amidon, une matière muqueuse, du ligneux et du parenchyme. Usaces. — R. Brown, dans sa Æ/ore de Jamaïque (p.3T4), signale la propriété que possède la noix de nandhiroba de neutraliser le venin des serpents. On la regarde aussi comme un contre-poison des substances toxiques végétales, comme celles du manioc, du mance- millier, etc. M. Drapiez dit en avoir obtenu de bons résultats sur des animaux empoisonnés par la noix vomique, le Æ?4us toxicodendron et la ciguë. On fait prendre cette noix broyée dans un peu d’eau, ou on la réduit en pulpe et on l’applique sur les plaies par lesquelles l’ab- sorption du poison s’est opérée. On estime aussi qu’elle est fébrifuge. A petite dose, la noix de nandhiroba purge doucement. On fait remar- quer qu'elle agit comme vomitive sur les animaux. On l’a souvent administrée comme vermifuge. A la Nouvelle - Grenade, on emploie, comme fébrifuge, les amandes du Feuillea Javilla Kunth. NARCISSE Narcissus pseudo-narcissus L. (Narcissées.) Le Narcisse des prés ou faux narcisse, appelé aussi Narcisse sau- vage ou des bois, Aïault, Jeannette, Porillon, Fleur de coucou, etc., est une plante vivace, à bulbe arrondi, oblong, formé d’écailles très- serrées, émettant en dessous des racines fibreuses, fasciculées, blan- châtres, et en dessus des feuilles toutes radicales, linéaires, assez larges, obtuses, aplaties ou légèrement canaliculées, un peu glauques. Du centre de ces feuilles s'élève une hampe (vulgairement tige) haute de 0,20 à 0",40, comprimée, à deux angles saillants, glauque, ter- minée par une seule fleur grande, jaune, peu odorante, un peu pen- chée, renfermée, avant l'épanouissement, dans une grande spathe membraneuse, blanchâtre, monophylle, qui se fend longitudinale- ment sur un de ses côtés. La fleur présente un périanthe en enton- noir, à tube adhérent à la base avec l'ovaire et prolongé en dessus, évasé, jaune verdâtre, à limbe partagé en six divisions ovales, jaune DU XIX° SIÈCLE. 409 pâle ou soufre, à gorge surmontée d’une couronne tubuleuse, campa- nulée, d’un beau jaune, à bords frangés et ondulés; six étamines insérées sur le tube du périanthe au-dessous de la couronne; un ovaire infère, à trois loges pluriovulées, surmonté d’un style simple terminé par un stigmate à trois lobes peu marqués. Le fruit est une capsule arrondie, lrigone, trivalve, à trois loges renfermant chacune plusieurs graines arrondies (PI. 39). HaBrraT. — Le Narcisse des prés est assez commun en Europe; il habite les bois et les pâturages ombragés. Cuzrure. — Celle plante n’est cultivée que dans les jardins bota- niques ou d'agrément ; elle est rustique, croît à peu près dans tous les sols etse multiplie facilement par la division des caïeux. Parties usirées. — Les bulbes, les feuilles et les fleurs. Récorre. — Les bulbes doivent être récoltés pendant l'hiver, les fleurs à l’époque de leur épanouissement; il faut les cueillir par un temps see, les faire dessécher rapidement et les conserver dans un lieu see, à l'abri de la lumière ; sans cela, ils verdissent et jouis- sent alors de propriétés différentes. Comeosrrion cumique. — Les bulbes de narcisse ont une saveur amère et âcre; ils sont inodores. D’après M. Carpentier, les fleurs contiennent de l'acide gallique, du tannin, du mucilage, de l’ex- tractif, de la résine, du chlorure de calcium, du ligneux (Bulletin de pharm., t. WE, p. 128). M. Caventou en a extrait une matière grasse odorante, une matière colorante jaune, de la gomme. M. Jour- dain de Binche (Encyclopédie des sciences médicales, septembre 1839), a extrait de cette plante une matière qu’il a désignée sous le nom de Narcitine, et qu’il regarde comme le principe actif. C'est une matière blanche, transparente, d’une odeur suave, soluble dans l'eau, dans l'alcool et le vinaigre. D’après M. Jourdain de Binche, les squames contiendraient la moitié de leur poids de cette matière; les fleurs en renfermeraient moins; la kampe en contiendrait avant la floraison, et il n’y en aurait plus après celte époque. Il en serait de même des feuilles, et le contraire aurait lieu pour les bulbes. Tous ces faits auraient besoin d'être confirmés par de nouvelles observa- tions. On a extrait des fleurs de narcisse une laque jaune. Usaces. — Les bulbes de la plupart des narcisses, et principale- ment ceux du narcisse des poëtes (NW. poeticus), du narcisse odorant (N. odorus) et du narcisse jonquille (N. jonquilla), sont àcres et vo- 410 FLORE MÉDICALE mitifs ; les fleurs du narcisse-faux-narcisse (Nurcissus pseudo-narcis- sus) sont seules employées. Les propriétés vomitives du narcisse des prés sont incontestables, mais n’expliquent pas toutes les propriétés de celte plante. Plu- tarque, dans ses Symposiaques où Propos de table, dit que le nar- cisse endort les nerfs. Pline prétend que son nom vient de var, engourdissement, parce que les personnes qui en respirent la fleur sont engourdies (Pline, ist. nat., lib. XXI, cap. 19). Les bulbes ont été employés comme vomitifs depuis Dioscoride. On leur a souvent substitué les fleurs pulvérisées. Loiseleur - Deslonchamps et d’autres auteurs assurent que la propriété vomitive de ces fleurs est d'autant plus prononcée qu’elles ont été récoltées par un temps de pluie et qu’elles sont devenues vertes en séchant. Tour à tour proposées contre la dysentérie, par M. Passaguay; contre les dartres et les convulsions, par le docteur Dufresnoy de Va- lenciennes, contre l'épilepsie, par le docteur Vaillechèse et par M. Michéa, qui assurent en avoir obtenu de bons effets, ainsi que dans l’hystérie, contre la chorée, par M. Porché, ete., ete., les fleurs de narcisse sont à peu près inusitées de nos jours. Néanmoins M. Cazin les a prescrites en infusion, ou sous forme de sirop, contre les catarrhes pulmonaires. NASITOR Lepidium sativum L. Thlaspi sativum Desf. (Grucifères -Lépidinées. ) Le Nasitor, appelé aussi Passerage cultivée, Cresson alénoiïs ou des jardins, est une plante annuelle, dont la tige, haute de 0,25 à 0°,50, cylindrique, glabre, glauque, dressée, rameuse, porte des feuilles alternes, glabres et glauques; les radicales pétiolées, pennatiséquées, élalées en rosette, les supérieures sessiles, linéaires, entières. Les fleurs, blanches, très-petites, courtement pédonculées, sont réunies en grappes spiciformes à l'extrémité des rameaux. Elles présentent un calice à quatre sépales ovales, arrondis, obtus, un peu concaves en dedans; une corolle à quatre pétales spatulés, un peu étalés; six étamines tétradynames ; un ovaire lenticulaire, comprimé, à deux loges uniovulées, surmonté d’un style simple, très-court, terminé par un stigmate en tête. Le fruit est une silicule lenticulaire, un peu DU XIX° SIÈCLE. 11 échancrée au sommet, à deux loges monospermes, s’ouvrant en deux valves naviculaires, carénées, minces, membraneuses et un peu ailées (PI. 40). Hamirar. — Originaire de l'Orient, le nasitor est aujourd’hui cul- tivé dans tous les jardins potagers de l'Europe, et s'est même natura- lisé dans plusieurs localités. Cucrure. — Cette plante ayant une végétation très-rapide, on la sème, tous les quinze jours, sur couche, depuis janvier jusqu'en mars, et en pleine terre durant la belle saison, en choisissant une exposition fraiche et ombragée. Elle demande des arrosements fré- quents; on sarcle et on éclaircit au besoin. Par les temps chauds et dans les lerrains secs, le nasitor, si on néglige de l’arroser, s'élève peu, et son àcreté est beaucoup plus prononcée. Cette plante a pro- duit, par la culture, plusieurs variétés. Parties usirées. — Les feuilles, la plante entière jeune. Récorre. — Le cresson alénois est cueilli frais, lorsqu'on veut le manger, et c’est sous cet état qu'il a été employé quelquefois en mé- decine, car il perd toutes ses propriétés par la dessiccation. On admi- nistre le jus, qui s'obtient par expression des feuilles fortement con- tusées et par filtration à froid. ComposiTioN cuimiQue. — L'analyse de cette plante n’a pas été faite. Elle possède une saveur chaude, un peu âcre, piquante et agréable. Elle doit contenir une essence sulfurée ou les éléments né- cessaires à sa formation, que l’on trouve dans toutes Les plantes de la famille des crucifères. Usages. — Le nasitor est employé le plus souvent pour assaisonner les salades et en relever le goût. Il est rare qu'on le mange seul. Comme le cresson de fontaine, dont nous avons déjà parlé, il possède des propriétés anti-scorbutiques qui le rendent utile à la santé. On le mange cru ou on fait boire le jus dépuré, plus rarement l'infusion vi- neuse ou la décoction contre les affections atoniques, les engorgements chroniques des viscères abdominaux, dans les hydropisies, l’ana- sarque, etc., ete. Ambroise Paré prescrivait cette plante pilée avec de la graisse de porc, qu'il appliquait sur les croûtes qui se forment sur la tête des enfants. Bodard a proposé de la substituer à l'écorce de winter comme tonique, anliscorbutique. Forestus faisait prendre le suc dans les affections soporeuses, à la dose de 30 à 120 grammes. Il est toujours très-facile de se procurer la plante fraiche, car ses graines 412 FLORE MÉDICALE serment en vingt-quatre heures. Le ZLepidium latifolium, dont nous parlerons plus loin, jouit des mêmes propriétés {Voyez Pus- serage). NAUCLÉE Nauclea gambir Hunt. Uncaria gambir Roxb. (Rubiacées - Cinchonées.) La Nauclée gambir est un arbrisseau élevé, dont les tiges droites, cylindriques, se divisent en rameaux opposés, obscurément tétra- gones, effilés, étalés, glabres, portant des feuilles opposées, à stipules sessiles, ovales-obtuses, caduques, à pétiole très-court, à limbe ovale-aigu, entier, long de 0,10 à 0,15, glabre sur les deux faces, veiné, traversé par des nervures simples, latérales. Les fleurs, pur- purines, odorantes, très-nombreuses, sont réunies en cymes ombel- liformes, à l'extrémité de pédoncules courts, solitaires à l’aisselle des feuilles, et munis, vers leur milieu, d’un petit involucre formé de cinq folioles très courtes, conniventes à la base. Elles présentent un calice oblong, à cinq dents, persistant; une corolle en entonnoir, à tube très-long et grêle, à gorge nue, à limbe divisé en cinq lobes ovales, aigus, étalés; cinq élamines incluses; un ovaire infère, à deux loges multiovulées, surmonté d’un style simple, grèle, filiforme, terminé par un stigmate simple ovoïde. Le fruit est une capsule, très- allongée, couronnée par le calice persistant, à deux loges renfermant de nombreuses graines très-petites, ailées, à albumen charnu. La Nauclée d'Afrique (N. Africana Willd., Uncaria inermis Wild.) est un arbrisseau à feuilles larges, ovales, acuminées, longuement pédonculées. Les fleurs, réunies en cymes globuleuses sessiles, ont leurs étamines saillantes et réfléchies. Les capsules inférieures sont presque sessiles. La Nauclée pourpre (N. purpurea Roxb., N. orientalis Poir., Cephalanthus chinensis Lam.) est un arbrisseau de 3 à 4 mètres, à feuilles pétiolées, ovales oblongues, acuminées, glabres, luisantes; à fleurs pourpres, en cymes globuleuses, à l'extrémité de pédoncules terminaux solitaires ou ternés. Hasirar. — Les nauclées habitent les régions tropicales de l’ancien continent, La nauclée pourpre et le gambir se trouvent aux Indes Orientales; la nauclée d'Afrique, en Guinée, au Sénégal, etc. Elles ne sont cullivées que dans les serres chaudes des jardins botaniques. DU XIX° SIÈCLE. 413 PARTIES uSITÉES. — L'extrait obtenu par l'évaporation de Ja dé- coction des branches et des bourgeons, ou Gutta gambir. RécoLre. — D'après Hunter (Oëservations sur le Nauclea gam- bir, etc., Transact. of the Linn. soc. of London, vol. IX, 1808), deux procédés sont employés pour extraire le Gutta-gambir des feuilles du Nauclea gambir. Dans le premier, on fait bouillir les feuilles, séparées de leur tige, dans de l'eau; on évapore la décoction en consistance sirupeuse, et on laisse solidifier par le refroidissement ; on coupe alors en fragments carrés, que l’on fait sécher au soleil, en ayant le soin de les retourner souvent ; ainsi préparé, le Gutta-Gam- bir présente une couleur brune. Le second procédé employé, d'après le docteur Campbell, de Ben- coolen, pour le gambir, apporté de la côte malaise et de Sumatra, consiste à couper en petits fragments les feuilles et les jeunes bran- ches, et à les faire infuser dans de l’eau pendant quelques heures; il se dépose de la sorte une matière qu'on fait sécher au soleil, et qu’on façconne dans de petits moules arrondis. D'après Roxburgh, le Gambir est le nom malais d’un extrait pré- paré avec les feuilles de l'Uncaria gambir, qui est à la fois émol- lient, et presque aussi astringent que le cachou. On l'obtient par ébullition des feuilles hachées dans de l’eau. C'est la fécule astrin- gente déposée du décoctum qui est évaporée au soleil, qui prend con- sistance de pâte et se façonne dans des moules circulaires. Mais, dans d'autres parties du golfe de Bengale, la décoction des feuilles et des bourgeons est évaporée sur le feu et à la chaleur du soleil, jusqu’à consistance convenable pour pouvoir être divisée en petils pains carrés. À Singapour, d’après Bennett, on prépare le gambir cubique en faisant bouillir deux fois les feuilles avec de l’eau, dans un chau- dron nommé qualie, fait en écorces d'arbres cousues avec un fond de fer battu ; le résidu, épaissi et égoutté, est employé comme fumier pour les plantations du poivre. Par évaporation du liquide, on ob- tient un extrait ferme, d’un brun clair, jaunâtre el terreux, que l’on coule dans des moules oblongs ; lorsqu'il est solidifié, on le coupe en cubes que l'on fait sécher au soleil. Hunter dit qu’on y mêle du sagou, mais Bennett assure que celte fraude ne se pratique pas à Singapour. Le meilleur gambir vient de l’ilot de Riouw ou de Rhio, de l’île de Bintang et de Lingen ou Lingga, appelée aussi Lengan, possession des Malais indépendants. Les principaux lieux de fabrica- . VA PA FLORE MÉDICALE tion sont, d’après Hunter, Rhio, Siak et Malacca, où l'on emploie plus généralement le procédé par ébullition. Composirion ciMiQue. — Le gambir est une sorte de Æir0 qui est, comme les cachous, riche en un tannin particulier que l’on a désigné, pour le cachou, sous le nom d’acide mimo-lannique, à cause du précipité vert qu'il donne avec les sels de fer, de sorte que les gambirs, les kinos et les cachous sont des extraits astrin- gents de plantes diverses qu’il est souvent fort difficile de distin- guer les uns des autres. Ce sont des mélanges, en proportions véri- tables, de fécule, de tannin, de matières extractives d'acide pectique. La première sensation que le gambir produit sur l'organe du goût, dit Hunter, est celle d’amertume et d’astringence ; mais il laisse en- suite un arrière-goût douceâtre très-persistant. En Angleterre, sous le nom de #n0, on emploie le kino d'Afrique, qui est produit par le Plerocarpus erinaceus (Légumineuses). En France, on fait plus fréquemment usage du Æino d’Amboine ou vrai kino, qui est produit par le Nauclea qambir. Ce dernier est en masses d’un brun rougeâtre, sèches, friables, brillantes, opaques, d’une saveur amère et astringente, un peu solubles dans l’eau et dans l’alcoo!. Sa solution précipite les persels de fer en noir verdâtre géla- tineux. Elle précipite en gris les sels de plomb, et en rouge gélati- neux le tartrate d’antimoine et de potasse. Usaces. — C’est l'anglais Fothergill, aussi célèbre comme bienfai- teur de l'humanité que comme médecin, mort en 1780, qui a intro- duit le kino dans la matière médicale, en 1758. Il est assez rarement employé. Astringent puissant, 1l a été employé avec succès, à l’inté- rieur, comme détersif et dessiccatif des plaies, et, à l’intérieur, comme le cachou, contre les diarrhées rebelles, la dysentérie, les hémoptisies, la leucorrhée, etc. On lui préfère généralement aujour- d'hui l'extrait de ratanhia. Aux Indes Orientales, on l’'emploie comme astringent. On le fait mâcher avec les feuilles de bétel contre les aphthes (Aïnslie, Mar. méd., t. W, p. 106). Hunter dit qu'on lui a donné l'assurance qu’il agissait efficacement dans les angines, contre les aphtes, ainsi que dans les cas de diarrhée et de dysentérie. On fait, ajoute-t-il, in- fuser cette matière dans l’eau, à laquelle elle donne la couleur d'une infusion de thé. Les Malais la mêlent à de la chaux, et l'appli- quent à l'extérieur sur les coupures, brülures, etc. Mais l'usage le DU XIX° SIÈCLE. 415 plus fréquent qu'on en fait aux Indes Orientales, toujours d’après Hunter, consiste à le mâcher en le mêlant avec des feuilles de bêtel, de la même manière que le cachou ; on choisit pour cela la qualité la plus belle et la plus blanche. Au Sénégal, d’après M. Leprieur, le Nauclea africana est employé en décoction et en bains contre les fièvres. Fothergill le préconisait contre les flux immodérés, les fièvres intermittentes. On l’associe souvent au quinquina, et Thilenius a constaté les bons effets de la solution de kino, mêlée à l’eau de chaux, contre la leucorrhée ; il introduisait dansle vagin une éponge imbi- bée de ce mélange (Med. und Chir.). On a souvent aussi employé le kino contre les ulcères de la gorge, de même que contre les aphthes. Enfin, le kino est exporté en Chine et à Batavia, pour la teinture et pour le tannage des cuirs. NÉLUMBO Nelumbium speciosum Wild. Nymphæa nelumbo L. (Nélumbiacées, ) Le Nélumbo élégant, appelé aussi vulgairement Lis du Nil ou Lotus rose, est une plante vivace, sécrélant un suc laiteux dans presque toutes ses parties, à rhizome charnu, rameux, rampant, muni de nombreuses fibres radicales. Les feuilles, portées sur de longs pé- tioles cylindriques et nus, sont très-larges, orbiculaires, peltées, om- hiliquées, glauques, couvertes d’une efflorescence veloutée qui ne permet pas à l’eau de s’y arrêter. Les fleurs, très-grandes, d’un beau rose vif, sont solitaires à l'extrémité de longs pédoncules radicaux. Elles présentent un calice de six à huit sépales ovales lancéolés, nuancés de vert en dehors ; une corolle de dix à douze pétales, blan- châtres à la base, rose carminé au sommet ; des étamines en nombre indéfini, insérées en spires régulières au-dessous des ovaires, à an- thères munies d’un connectif saillant ; un réceptacle en cône ren- versé, surmonté d’un disque sessile, pelté, creusé de nombreuses alvéoles dans chacune desquelles est inséré un pistil à ovaire ovoïde, adhérent par la base, à une seule loge uniovulée, surmonté d’un style simple, très-court, persistant, terminé par un stigmate entier légère- ment déprimé. Le fruit est une capsule conique, ligneuse, surmontée d'un large plateau, creusé aussi d’alvéoles nombreuses dont chacune renferme une graine ovoide, libre à la maturité, du volume d’une noisette, à testa mince, dur, coriace et grisâtre (PI. 41). 416 FLORE MÉDICALE Hagirar. — Le nélumbo est originaire de l'Orient; on le trouve depuis la Chine et l’Indoustan jusqu'en Égypte. Il habite les eaux courantes ou stagnantes; en Europe, on le cultive dans les aquaria. PARTIES usiTÉEs. — Les racines, les fruits. ComrosiTioN cHimiQuE. — Les racines et les graines du nélumbo sont riches en fécule. Les anciens les réduisaient en farine et les man- geaient. Les fleurs sont un peu aromatiques. Ralfeneau-Delile a fait sur des pieds de nélumbo, cultivés au jardin de Montpellier, quel- ques observations que voici en substance : lorsque l’eau séjourne un peu sur le centre de la feuille, il y a fréquemment émission natu- relle d'air, par les bulles, à travers celle eau, et l'air, qui sort seu- lement de la tache centrale blanche, où se trouvent beaucoup d’au- tres stomates, y arrive du reste de la face supérieure de la même feuille ; à minuit, les feuilles qui avaient exhalé de l'air pendant le jour n’en donnaient plus; à six heures du matin, comme le soleil ne les frappait point encore, elles n'étaient pas exhalantes ; elles le rede- venaient pendant le reste de la journée ; cependant il s’est trouvé quelquefois des feuilles qui absorbaïent et exhalaient dans tous les temps et à toutes les heures ; quelquefois on voyait sortir de l'air d'une partie des feuilles autre que leur centre, et dans laquelle on ne découvrait au microscope ni stomates ni ouvertures d'aucune sorte ; l'air exhalé par les feuilles de nélumbo n'a pas semblé différer de l'air atmosphérique ; 1l resta démontré à Raffeneau-Delile que chaque feuille de la plante est pourvue d'un système respiratoire complet, pour lequel le velouté possède la faculté absorbante, et les stometes celle seulement exhalante, ce qui est, dit cet auteur, sans exemple pour toute autre plante que celle-ci, la seule qui ait pu se prêter aux ex- périences qui décident si manifestement l'aspiration et l’exhalation (notes de Delile et de Dutrochet, dans les Annales des sciences natu- relles, 2° sér., décembre 1841). Usages. — Le nélumbo élégant (Nelumbium speciosum) est la fève d'Égypte (faba Egyptiaca, fève pontique, yiauss aijérans de Théophraste), le Lys du Nil, le Nelumbo nucifera, de Gaertner; c'est le Loos sacré qui surmonte la tête d'Isis et d’Osiris ; le Tamara de la mythologie indoue, qui sert de coque flottante à Vichnou et de siége à Brama. Les semences étaient interdites aux prêtres d'Égypte pendant un certain temps. Dans plusieurs contrées de l'Asie, parti- culièrement en Chine, le numbo est également considéré comme une DU XIX° SIÈCLE. M7 plante sacrée, symbole de la fertilité. La plante, si célèbre sous le nom de Lotus du Nil, qui existait autrefois sur ce fleuve, a disparu ; elle a été retrouvée dans l'Indoustan par Rhéede, et dans les iles Moluques par Rhumphius. Aussi a-t-on pu vérifier les descriptions qu'en ont laissées les anciens, et principalement Théophraste. Raffe- neau-Delile attribue sa disparition du Nil, d'abord à ce que la plante n’a pu se prêter sur les bords de ce fleuve aux variations de la sécheresse et des inondations, ensuite au courant du Nil et à la pro- fondeur des canaux, puisque, dit-il, le Lo/us ne prospère que dans les eaux peu profondes, tranquilles ou peu courantes. Les graines fraiches du nélumbo ont la saveur de l’amande douce ; aussi les a-t-on fait entrer dans la composition des gàteaux et des pà- tisseries. Avec du sucre, on en prépare, aux Indes Orientales, une pète que l’on fait prendre contre la diarrhée, le marasme et le car- reau. Les anciens Égyptiens trouvaient dans les rhizomes et dans les graines du lotus un aliment sain et assez abondant ; ils faisaient du pain avec les graines qui, fraiches, ont un goût assez agréable d'amande. Dioscoride rapporte qu'on propageait la plante en en jetant les semences dans l’eau, après les avoir enveloppées de limon pour leur faire atteindre le fond. Les Arabes retiraient, dit-on, par expression, du nélumbo, une huile qu’ils employaient en frictions contre les maladies des nerfs, les douleurs, etc. D’après Ainslie, (Mat. méd., t. HW, p. 240), Hippocrale aurait employé la racine du nélumbo. Dans l'Indoustan, en Chine et en Cochinchine, on mange cette racine bouillie dans de l’eau ou cuite sous la cendre. Lorsqu'elle est fraiche, il en découle un suc visqueux qu’on a employé contre la diarrhée et les vomissements. En Amérique, on mange les graines de nélumbo jaune (Melumbiun luteum Wild, Cyamus flavicomus Sa- lisb., Nymphæa nelumbo Linn.). À Java, les pétales du nélumbo sont regardés comme astringents, et on les emploie comme nous faisons chez nous les roses (Proprié- tés des plantes de Java. Bulletin des sc. méd. de Férussac, t. NUL, p. 210). Les fleurs servent à faire des couronnes et des chapelets. Les feuilles, en raison de leur grandeur et de leur force, sont employées, dans l'Indoustan, comme éventail. Flore. T, IL. 27 418 FLORE MÉDICALE NÉNUPHAR Nuphar luteum Smith. Nymphæa lutea L. (Nymphéacées. ) Le Nénuphar jaune ou Plateau est une plante vivace, à rhizome épais, charnu, couvert de cicatrices, rampant et traçant, émettant en dessous de nombreuses fibres radicales. Les feuilles, toutes radicales, longuement pétiolées, grandes, arrondies, entières, échancrées en cœur à la base, sont, les unes submergées, plus larges, molles, mem- braneuses, minces, presque transparentes, fortement ondulées; les autres flottantes, ordinairement plus petites, coriaces, d’un vert foncé. Les fleurs, d’un jaune foncé, de moyenne grandeur, sont so- litaires à l’extrémité de longs pédoncules axillaires. Elles présentent un calice à cinq sépales ovales arrondis, obtus, roides, colorés, per- sistants; une corolle de dix à vingt pétales beaucoup plus courts que le calice, épais, charnus, disposés sur deux rangs, luisants à la face externe; des étamines en nombre indéfini, hypogynes ; un ovaire libre, arrondi, ovoïde, à loges nombreuses multiovulées, surmonté d’un stigmate sessile, pelté, rayonnant, persistant, fortement ombi- liqué à bords, entiers un peu ondulés. Le fruit est une capsule ven- true, rétrécie en col au sommet, à loges nombreuses, renfermant une pulpe abondante dans laquelle sont plongées de nombreuses graines à albumen double (PI. 42). Hagrrar. — Le nénuphar est très-répandu en Europe; il habite les eaux courantes ou dormantes. Le nénuphar bleu (Nymphæa cæ- rulea Savigny) croît dans les rivières et les canaux de la Basse- Égypte, ainsi que le nénuphar lotus (Nympheæa lotus Linn.). Currure. — Cette plante est cultivée dans les jardins botaniques et d'agrément, où elle sert à orner les pièces d’eau. Il lui faut une terre vaseuse ou argileuse et un peu tourbeuse. On la multiplie par la division des rhizomes, ou par graines, semées en juin et juillet, dans des pots ou terrines que l’on immerge aussitôt après. Paris usiTées. — Les rhizomes, les pétales. Récoure. — Le rhizome du nénuphar jaune (Nuphor luteum), est blanc; c’est celui que l’on emploie en médecine sous le nom de racine de nymphea ou de nénuphar. Celui du nénuphar blanc, au contraire, est jaune à l’intérieur et n’est pas employé. DU XIX° SIÈCLE. 419 Le rhizome du nénuphar jaune est gros, cylindrique, charnu, de la grosseur du bras environ. Il porte des empreintes nombreuses des feuilles. Il serait très-difficile et presque impossible de le dessécher entier. Aussi le coupe-t-on en lanières très-minces, que l’on ex- pose au soleil, et que l’on roule quelquefois en petits paquets lors- qu'ils sont secs ; ils ont alors l'aspect de l'amadou, mais ils sont plus blancs, et on les reconnaît toujours aux cicatrices qu'ont laissées les feuilles en tombant. Les pétales sont récoltés à l’époque du parfait développement de la fleur. On les fait sécher rapidement au soleil. Ce sont ceux du nénuphar blanc (Nympheæa alba Linn., vulgairement Lys des étangs, quelquefois aussi appelé Nénuphar o/ficinal) que l'on emploie de pré- férence. Composirion caimique. — Toutes les parties des nénuphars sont riches en mucilage ; elles présentent, d’ailleurs, une saveur amère et styptique. Le rhizome contient du tannin et de l’acide gallique. M. Morin, de Rouen, y a trouvé, en outre, de l’amidon, du mu- queux, du sucre incristallisable, de la résine, une matière azotée, des sels. Usages. — Le nénuphar bleu (Nymphæa cœrulea) et le nénuphar lotus (N. lotus), étaient, comme le nélumbo, l’objet d’une grande vénération chez les anciens Égyptiens ; ils les représentaient sur tous leurs monuments et parmi leurs hiéroglyphes; on en retrouve la figure jusque sous les ruines de Philæ (Tachompso des anciens Égyp- tiens) et d'Edfou (Atbo des anciens Égyptiens, Apollinopolis magna des Grecs), à l'extrémité méridionale de la Haute-Égypte, où il pa- raît que ces plantes croissaient autrefois, mais d’où elles ont disparu depuis longtemps. Des faisceaux de feuilles et de fleurs de nénuphar bleu étaient figurés parmi les offrandes aux dieux dans les tableaux hiéroglyphiques. On en tressait aussi des couronnes. On mangeail sa graine et ses rhizomes. Le nénuphar lotus était plus spécialement con- sacré à Isis; ses fruits, mêlés à des épis de blé, étaient le symbole de cette déesse et l'emblème de l'abondance. Aussi en trouve-t-on la figure sur un grand nombre de médailles égyptiennes. Le rhizome et la graine de ce nénuphar, comme ceux du précédent, étaient d’un usage alimentaire. Les graines, petites et arrondies, mais nombreuses dans chaque fruit, et qu'Hérodote compare à celles du millet, servaient à faire du pain. Selon Théophraste, on les retirait "20 FLORE MÉDICALE de l’intérieur des péricarpes en meltant les fruits en tas, les laissant pourrir et lavant ensuite le tout; par ce moyen on les isolait de la pulpe dans laquelle elles sont plongées. Le rhizome, dont la consis- tance et le goût rappellent ceux de la châtaigne, était également ap- précié. Les Égyptiens modernes comptent encore le nénuphar lotus parmi les substances alimentaires ; mais ils préfèrent à son rhizome celui du nénuphar bleu. L'un et l’autre ont leur place sur les mar- chés d'Égypte. Dans les temps de disette, on a essayé d'utiliser le rhizome du nénuphar blanc comme aliment, mais il ne renferme pas assez de fécule pour être d’un grand avantage. Dans certains pays, el principalement en Suède, les feuilles de nénuphar jaune servent à la nourriture des bestiaux ; des rhizomes, secs et pulverisés, entrent dans la composition du pain. Le rhizome et les graines du nénuphar blanc ont longtemps joui de la réputation, bien usurpée, d’avoir des propriétés sédatives et sur- tout anti-aphrodisiaques ; aussi, sous l’empire de celte croyance po- pulaire, s'en faisait-il une immense consommation dans les maisons religieuses. Des expériences précises ont fait à la fin justice d'une idée si fausse; et si quelques auteurs leur accordent encore de simples propriélés émollientes et rafraichissantes, comme le seraient celles de la guimauve, par exemple, d’autres, au contraire, les considèrent comme toniques et amères. A l’état frais, la substance du nénuphar est rubéfiante ; aussi Delharding l'appliquait-1l, sous forme de pulpe, à la plante des pieds, pour combattre les fièvres intermittentes, et Grégoire Horstius (Observationes medicinales et pharmaceuticæ, 667, 2 vol. in-4°) dit-il que, mêlée à du beurre et appliquée sur la tête, elle rend les cheveux plus beaux et plus abondants. Nous laissons, bien entendu, cette opinion à son auteur. NÉPHRODIE Nephrodium fil mas Stamp. Polystichum Roth. Aspidium Sw. Dryopteris Matth. (Fougères - Polypodiées.) La Néphrodie fougère mâle est une plante vivace, à rhizome épais, rameux, traçant, couvert d’écailles brunâtres scarieuses, émettant en dessous des racines grêles, fibreuses, brun rougeätre. Les frondes (vulgairement feuilles), toutes radicales, sont longues de 0°, 50 à un mèlre, plus ou moins longuement pétiolées, oblongues lancéolées, DU XIX' SIÈCLE. 42 pennaliséquées, à rachis couvert d’écailles, à segments un peu éta- lés, lancéolés pennés, offrant quinze à vingt-cinq paires de lobes oblongs-obtus, adhérents dans toute la largeur de leur base, crénelés dans leur partie inférieure, dentés au sommet. Les organes repro- ducteurs consistent en sporanges, disposés, à la face inférieure des feuilles, en groupes arrondis, assez gros, peu nombreux, formant deux lignes à la partie inférieure de chaque lobe et couverts d’un industum membraneux, arrondi, réniforne et comme pelté. Haprrar. — La fougère mâle est commune en Europe; elle habite les bois et les buissons, les chemins creux, les fossés, ete. On ne la cultive que dans les jardins botaniques, où on la propage simplement par la transplantation des pieds sauvages. PARTIES usiTÉES. — La souche ou le rhizome, improprement nommé racine, les bourgeons. Récoure. — Le rhizome de la néphrodie est plus actif à l’état frais qu'à l’état sec. Contrairement à l'opinion émise par quelques auteurs, nous pensons, avec M. Soubeiran, qu'il vaut mieux le recueillir en û hiver ; il est certain que pendant l'été il est plus tendre et plus vert, mais il est alors moins actif. A l’état sec, il faut qu'il ait la cassure verte, d’une odeur un peu nauséeuse, d’une saveur d’abord dou- ceâtre, puis astringente, amère, et même un peu âcre. Lorsque sa cassure présente une teinte brune, il a perdu la plus grande partie de ses propriétés. La souche est formée de tubercules oblongs, rangés tout autour et le long d'un axe commun, et recouverts d'une enve- loppe brune, coriace et foliacée, entre lesquels tubercules on trouve de nombreuses écailles d'une couleur dorée. On employait autrefois, concurremment avec la fougère mâle, la souche du Polypodium felix femina Lin. (Athyrium felix femina R.), qui est la petite fougère femelle, et celle du Preris aguilina Lin., que l'on nommait la grande fougère femelle. Les frondes ou feuilles de celle-ci sont souvent employées pour coucher les enfants pendant l'été, dans le but de les tenir au frais, et aussi pour tuer les vers. D'après M. Timbal-Lagrave, de Toulouse, on trouve souvent dans le commerce les souches de fougère femelle (celles de l'Aspidium an- gulare et de l'Aspidium aculeatum), qui sont vendues pour celles de la fougère mâle. Quoique leurs propriétés soient analogues, il faut préférer la véritable fougère mâle. Malheureusement ces espèces ne se distinguent que par la forme des frondes et celle de l’indusium , 422 FLORE MÉDICALE et, comme on vend les souches isolées, la distinction est difficile à faire. ComposiTioN CHIMIQUE. — Le rhizome de fougère mâle a été ana- lysé par M. Morin, de Rouen, qui y a trouvé une substance grasse, d’un jaune brunâtre, d'une odeur nauséabonde, d’une saveur très- désagréable ; elle parait être formée de chlorophylle altérée, d’une huile volatile odorante, d'oléine et de stéarine; cette malière com- plexe s’extrait par l'éther; le résidu, repris par l'alcool, donne de l'acide gallique, du tannin, du sucre cristallisable ; l'eau enlève de la gomme et de l’amidon. Trommsdorff avait séparé de l'extrait éthéré de fougère mâle, un corps cristallisé qu'il avait nommé f/icine, et que M. Lucke à appelé acide fi/icique; ce corps est insoluble dans l'eau, l'alcool faible, et l'acide acétique; il se dissout dans l'alcool concentré et bouillant, et dans l’éther ; il fond à 161° et se prend par le refroi- dissement en une masse transparente d’un vert jaunâtre; il se dé- compose à une plus haute température, en dégageant une odeur butyrique ; sa solution éthérée possède une réaction acide ; indépen- damment de cet acide, l'extrait éthéré renferme une huile verte sa- ponifiable, fournissant un acide gras qu’on a appelé acide filiroïde (Arch. des pharm. et Journ. de pharmacie et de chim., 1852). Enfin, un pharmacien, M. Allard, a extrait de la souche de fougère mâle, un principe astringent analogue à celui du cachou et de la ratanhia. D'après M. Peschier, de Genève, les bourgeons frais renferment une huile volatile, une résine brune, une huile grasse, une graisse solide, de l'extractif, et divers principes colorants. La cendre de fou- gère entre, dit-on, dans la composition de la porcelaine de Chine; elle est très-riche en carbonate de potasse. Usaces. — On assure que les couches des enfants, les coussins et les matelas en feuilles de fougères, sont plus sains que ceux de plume. On les emploie surtout pour les scrofuleux et les rachitiques. Dans plusieurs pays, et notamment dans les contrées septentrionales, on mange les jeunes pousses de fougères à la place d'asperges. Plenck dit que les habitants de la Sibérie font bouillir les souches dans de la bière, ce qui donne à celle-ci une odeur de framboise et un goût agréable. Dans quelques contrées, on les fait manger aux porcs; on prétend même qu’on en a mis dans le pain en Auvergne, pendant Ja disette de 1694. Enfin, les feuilles fraiches sont données aux bestiaux. DU XIX° SIÈCLE. 123 La fougère mâle était connue de Dioscoride (lib. IV, c. 128). Ga- lien (De simp. med., lib. VIE, et Method. Medend. Gb. XIV, c. 19), Pline et Ætius (lé premier médecin chrétien dont on ait un ouvrage sur la médecine, le Tetrabiblos, et qui, natif d'Amide en Mésopota- mie, florissait à Alexandrie à la fin du cinquième siècle) la signa- lent comme vermifuge. Le célèbre médecin arabe Avicenne ajoute qu'elle provoque l'avortement. On l’a vantée contre la goutte, le ra- chitisme, le scorbut, elc. Quoiqu’on l'ait regardée longtemps comme inerte pour expulser les vers, elle est employée avec succès comme teniacide. Depuis les observations de M. Ebers, de Breslau, c'est l'extrait éthéré de fougère que, dans ce cas, l’on emploie à peu près exclusivement, à la dose de deux à quatre grammes; il est la base du remède dé madame Nouffer. MM. Bourdier, Rouzel, Trousseau et Pidoux, ont indiqué des méthodes particulières d'administration, dont l'efficacité est incontestable. M. le professeur Christison, d'Édim- bourg (« Treatise on poisons), a publié de nombreuses observations qui constatent l'efficacité de l'extrait éthéré de fougère contre le ténia. La fougère femelle, quoique recommandée comme ténifuge, est bien loin de produire les mêmes effets. D'après un travail récent de MM. Deschamps (d'Avalon), et Collas, l'extrait alcoolique de fougère mâle doit être préféré à l’extrait éthéré, dont l’action est souvent nulle. NERPRUN Rhamnus catharticus L. (Rhamnées - Zizyphées.) Le Nerprun purgatif est un arbrisseau, dont la tige, haute de 3 à 4 mètres, droite, couverte d’une écorce lisse et grisâtre, se divise en rameaux souvent terminés en pointe épineuse, portant des feuilles alternes ou opposées, groupées en rosette sur les rameaux florifères, péliolées, ovales, aiguës, dentées, glabres, d’un vert foncé en dessus, jaunâtre en dessous. Les fleurs, polygames ou dioïques, d’un jaune verdàtre, petites, pédicellées, sont groupées en fascicule au sommet de rameaux latéraux très-courts. Elles présentent un calice campa- nulé ou urcéolé, persistant, à quatre divisions lancéolées, aiguës, étalées ; une corolle à quatre pétales linéaires, très-petits, dressés ; quatre étamines opposées aux pétales et un pistil rudimentaire dans 424 FLORE MÉDICALE les fleurs mâles; chez les femelles, un ovaire globuleux, déprimé, à quatre loges uniovulées, surmonté de deux à quatre styles soudés à la base, libres au sommet et terminés chacun par un stigmate obtus. Le fruit est une petite drupe globuleuse, pisiforme, glabre, noire, contenant deux à quatre noyaux monospermes (PI. 43). Hagrrar. — Le nerprun est très-répandu en Europe; il habite les bois et les haies, surtout dans les lieux humides. Cuzrure. — Le nerprun est fréquemment cultivé dans les jardins; on l’emploie aussi pour faire des haies vives. Il est très-rustique et vient dans tous les sols et à toute exposition. On le propage de graines, semées en pépinière, en octobre, aussitôt après leur matu- rité; les jeunes sujets sont plantés à demeure à l'automne suivant. Un moyen plus expéditif consiste à faire des marcottes, qui s'enra- cinent facilement et donnent, la seconde année, des pieds plus forts. ParTiEs usiTÉES. — Les fruits, l'écorce, le bois. Récorre. — Les baies de nerprun (dont la couleur a fait donner vulgairement à l'espèce le nom de Norprun, d'où est venu celui de nerprun) doivent être récoltées à leur maturité, c'est-à-dire en septembre et en octobre ; on les choisit grosses, luisantes, abondantes en suc; on les fait quelquefois dessécher. Composirion cHimique. — D'après M. Vogel, le suc du nerprun ca- thartique contient de la rhamnine, de l'acide acétique, du mucilage, et une matière azotée; on a vu depuis que le mucilage était de la pectine; M. Fleury en a extrait une matière colorante jaune, à peine purgalive, qu'il a nommée rhamnine, et que M. Preisser a étu- diée, dans les graines de Perse et d'Avignon; elle est blanche à l'état de pureté, et elle ne devient jaune que par l'action prolongée de l'air; elle paraît différer de la matière colorante jaune que M. Kane a extraite des graines de Perse et qu'il a nommée crysorhamnine, celle-ci, bouillie, se transforme au contact de l’air en une autre ma- lière jaune olive (xanthorhamnine), qui parait exister dans les fruits mürs, tandis que l’autre se trouve dans les fruits verts. Muratori avait signalé dans le nerprun la présence d’un principe résineux, du sucre, de la gomme, une matière colorante jaune, une autre verte, et de l'acide malique, sous le nom de rkamnine. M. Pi- chon désigne une matière purgative, différente de la matière colorante jaune dont nous venons de parler. Pour M. Fleury, le principe colo- rant et purgatif serait l’acide rhamnmique, analogue, probablement, à DU XIX° SIÈCLE. 425 l'acide frangulique signalé par d'autres auteurs; il résulte de tout ceci que le principe purgatif du nerprun n’est pas encore connu. Usaces. — Le nerprun purgatif (Rhamnus catharticus Linn.) est un des purgatifs cathartiques des plus actifs. Les propriétés purgatives que rappelle le nom de cette espèce résident dans les couches libé- riennes de l'écorce, et surtout dans les fruits. Les fruits écrasés et le suc fermenté au contact de la pellicule, donnent un liquide qui, étant filtré et évaporé en consistance d'extrait mou, constitue le rob de nerprun, autrefois employé, et qui ne l’est presque plus au- jourd'hui; il entre cependant dans le lavement purgatif des peintres. Le même suc, dans lequel on fait fondre son poids de sucre, et que l'on fait cuire en consistance sirupeuse, produit le srop de ner- prun, la seule forme à peu près sous laquelle on emploie aujourd'hui les fruits. Le sirop de nerprun s'emploie comme purgatif à la dose de trente à soixante grammes; on lui reproche de déterminer des coliques violentes. Quoiqu'on l'ait vanté comme vermifuge, contre les mala- dies cutanées et les hydropisies, il est à peu près aujourd’hui relégué dans la médecine vétérinaire, où on le regarde comme souverain contre la maladie des jeunes chiens. Les baies de nerprun sont beaucoup plus actives qu’une quantité correspondante de sirop; quelques-uns de ces fruits suffisent pour purger abondamment; c’est un moyen précieux pour les habitants de nos campagnes. Gilibert prétend que deux baies, prises tous les matins à jeun, éloignent les accès de goutte. Linné prescrivait les graines de nerprun, torréfiées et pulvéri- sées, comme purgatives; Tournefort les employait sèches et en pou- dre; ainsi que les fruits et l'écorce; elles agissent souvent comme émélo-cathartiques. M. Fleury en a extrait une huile fixe non pur- gative. Le fruit du nerprun bourdaine où nerprun Bourgène (Rhamnus Franqula Linn.), qui croît parmi les haies, les buissons et les taillis, jouit aussi de propriélés purgalives, mais moins prononcées que celles du fruit de Æ2hamnus catharticus. Ce fruit, d’abord rouge, de- vient noir en vieillissant. Le bois du nerprun bourdaine est très-léger et sert à faire du charbon qui entre dans la préparation de la poudre à canon, en moyenne, 100 kilogrammes de bois donnent 12 kilogram- - mes de charbon. Son écorce est purgative et constitue, dans les cam- 426 FLORE MÉDICALE pagnes, un médicament populaire ; on l’a conseillée comme fébrifuge. Le bois de nerprun en général est formé d’un aubier blanchâtre et d'un duramen rosé, comme satiné et presque transparent à sa surface, qui le rendrait propre à faire des meubles élégants s’il n’était pas de trop petite dimension. L'écorce des nerpruns est riche en matière colorante jaune, et pourrait être utilisée pour la teinture; mais on préfère employer à cet usage les fruits du nerprun des teinturiers (Æhamnus infectorius Linn.), que l'on connaît ‘sous le nom de graines d'Avignon. On retire une couleur jaune estimée, vulgairement appelée s/7/ de grain. Les Turcs s’en servent, dit-on, pour colorer leur cuir en jaune. I nous vient d'Orient des fruits d'autres nerpruns, connus sous les noms de graines de Perse, d’Andrinople et de Morée ; ces fruits sont surtout produits par les Z2Aamnus amygdalinus, oleoïdes et saxatilis. Les graines de Perse, les plus estimées de toutes, sont de la grosseur d'un petit pois, arrondies ; elles sont recouvertes d’un brou mince, vert Jjaunâtre, appliqué sur trois coques sèches et monospermes réunis, et formant un fruit trigone ou tétragone ; leur saveur est amère, leur odeur nauséeuse. Les graines d'Avignon sont plus petites et plus vertes; elles présentent trois coques réunies et souvent deux seulement par avortement de la troisième. Leur odeur et leur saveur sont moins prononcées. Avec ces fruits, de la craie et de l’alun, on prépare une sorte de laque jaune, connue sous le nom de s4/ de grain; le suc du fruit de Zkamnus catharticus, cueilli avant sa maturité, et mêlé à de la chaux et de la gomme, constitue le vert de vessie, lrès-employé en peinture. Enfin, c’est du ÆRhamnus utilis, ou Loza des Chinois, que l'on extrait la magnifique couleur verte, connue sous le nom de vert de Chine. NIELLE Agrostemna githago L. Lychnis githago Lam. Githago segetum D. C. (Caryophyllées - Dianthées.) La Nielle des champs, appelée aussi vulgairement Couronne des blés, est une plante annuelle, dont la tige, haute de 0®,40 à 0°,80, dressée, rameuse, dichotome au sommet, couverte de longs poils soyeux, porte des feuilles opposées, presque connées, linéaires allon- gées, velues, soyeuses, blanchâtres. Les fleurs, grandes, rouge vio- lacé, sont solitaires à l'extrémité de longs pédoncules axillaires et DU XIX° SIÈCLE. 427 terminaux. Elles présentent un calice tubuleux, soyeux, à limbe partagé en cinq divisions linéaires, aiguës, très-longues, à tube mar- qué de nervures; une corolle à cinq pétales à onglet linéaire, muni de bandelettes ailées, à limbe tronqué ou légèrement échancré ; dix élamines ; un ovaire libre à une seule loge multiovulée, surmonté de cinq styles. Le fruit estune capsule ovoïde, aiguë au sommet, unilo- culaire, d’un brun jaunâtre, s’ouvrant au sommet par cinq dents, et entourée par le calice persistant, accru, renflé, ovoïde campanulé, à nervures ou côtes fortement saillantes. Elle renferme, sur un pla- centa central, un grand nombre de graines réniformes, tuberculeuses, brun noirâtre. Hagrrar. — Cette plante est commune en Europe. Elle ne se trouve guère que dans les moissons, et s’est naturalisée dans presque tous les pays où l’on cultive le blé. Cuzrure. — La nielle étant une plante nuisible à l'agriculture, on recherche plutôt les moyens de la détruire que de la propager. Aussi n'est-elle cultivée que dans les jardins botaniques, et quelque- fois dans les massifs d'agrément. Elle est très-rustique, vient dans tous les sols, et se propage, avec la plus grande facilité, de graines semées en place au printemps. Parts usirées. — Les graines, la plante entière. Récocre. — Cette plante, qui est très-commune dans les blés, doit être récoltée en fleurs; les graines sont recueillies à la maturité du fruit. Elles sont noires, de la grosseur de celles de la vesce, recour- bées sur elles-mêmes, avec un épisperme tuberculeux, rangées par lignes longitudinales. Le célèbre naturaliste anglais Ray les a compa- rées, lorsqu'on les regarde à la loupe, à un hérisson roulé. , COMPOSITION CHIMIQUE. — Les semences sont inodores; leur saveur d'abord peu prononcée et farineuse, est accompagnée d’un peu d’amertume et devient ensuite assez âcre. M. Malapert, de Poitiers, en a extrait de la Saponine, principe âcre et irritant, que l'on trouve dans un grand nombre de plantes de la même famille, et notamment dans la saponaire officinale, et dans la saponaire d'Orient. Usaces. — D'après Simon Paulli, célèbre prélat et médecin da- nois, mort en 1680, la décoction des graines de nielle aurait été em- ployée pour guérir les ulcères, les fistules, et contre les hémorrhagies. Selon Léonard Fusch, l'un des plus illustres médecins du seizième siècle, ce serait un bon remède contre la gale, la teigne et d’autres 1428 FLORE MÉDICALE maladies de la peau. Mais aujourd'hui la nielle des blés est tout à fait abandonnée dans la pratique médicale. Ce n’est plus que comme plante nuisible que la nielle intéresse le médecin. La farine des graines de nielle, mêlée au pain, le noircit et passe pour lui donner des propriétés extrêmement irritantes. C’est à sa présence que l’on a attribué les hémorrhagies intestinales gra- ves que l’on a observées dans le Poitou. Il résulte d'expériences faites par M. Malapert, de Poitiers, qu’elle produit les mêmes accidents chez les animaux et notamment chez les poules, auxquelles on en fait manger les graines. La saponine isolée produirait les mêmes effets. Cependant il résulte d'expériences directes et antérieures de M. Cordier, que les semences, quoique àcres au gosier, ne sont pas nuisibles ; huit grammes en décoction n’ont causé à cet expérimenta- teur aucun accident ; d’après lui elles rendent le pain désagréable, mais non nuisible. Cette opinion a besoin d’être confirmée. NIGELLE Nigella arvensis, sativa et Damascena L. (Renonculacées - Helléborées.) La Nigelle des champs, appelée vulgairement Barbiche, Barbe de capucin, Nielle sauvage ou bâtarde, Poivrette commune, etc., est une plante annuelle, à tige haute de 0",15 à 0,30, grèle, dressée ou ascendante, rameuse, portant des feuilles alternes, pétiolées, profon- dément découpées en segments linéaires, pubescents. Les fleurs, grandes, d’un bleu pâle, sont solitaires à l'extrémité des rameaux. Elles présentent un calice à cinq sépales pétaloïdes, cadues; une corolle de cinq à dix pétales très-courts, onguiculés, brusquement coudés, munis, au-dessus de l'onglet, d’une fossette nectarifère profonde couverte par une écaille, à limbe bifide; des étamines nombreuses, à anthères munies d’un connectif saillant; un pistil composé de trois à sept carpelles pluriovulés, dont chacun est sur- monté d'un style et d’un stigmate simples. Le fruit se compose de trois à sept follicules oblongs, étroits, polyspermes, soudés dans leur moitié inférieure et prolongés en bec au sommet (PI. 44). La Nigelle cultivée ou Toute-épice (N. sativa L.) se distingue de la précédente par ses rameaux redressés; ses sépales à onglet plus court que le limbe ; ses anthères mutiques; ses follicules soudés jus- DU XIX° SIÈCLE. 429 qu'au sommet et formant une capsule ovoide-globuleuse, chargée de glandes scabres. La Nigelle de Damas (N. damascena L.), vulgairement cheveux de Vénus ou Patte d'araignée, est caractérisée par ses fleurs entourées d'un involucre à folioles très-découpées. Hagrrar. — Ces plantes habitent les moissons, les terrains mai- gres et meubles. La première est répandue dans presque toute l’Eu- rope ; les deux autres sont propres aux régions méridionales. On les cultive dans les jardins botaniques ou d'ornement. PARTIES usITÉES. — Les graines. Récote. — Les semences sont récoltées à la maturité des fruits. Elles sont noires, ce qui leur à valu leur nom grec de Melanthèum (de p£ze, noir), et leur nom latin de Migella, diminutif de Migra. On les a aussi appelées Melanospermum. Les graines, à la grosseur près, ressemblent beaucoup à celles de staphysaigre (Delphinium sta- physagria). Celles de la Nigella arvensis L. présentent l’aspect de la grosse poudre à canon : elles sont triangulaires et amincies en pointe à l'extrémité ombilicale. Leur épisperme est chagriné. Elles possè- dent une odeur aromatique qui se rapproche beaucoup de celle du carvi, et non de celle du cumin. Aussi les a-t-on appelées cumin noër. Celles de la Megelle des champs (N. arvensis) se distinguent en ce qu'elles sont moins noires; leurs angles sont très-marqués, et leurs surfaces planes sont chagrinées sans plis transversaux. Les semences de la #gelle cultivée (N. sativa) sont noires, excepté dans une variété où elles sont jaunes. Leurs surfaces planes sont plus profondément rugueuses que celles des espèces précédentes. Leur odeur aromatique tient à la fois de celle du citron et de la carotte (Guibourt). La variété citrine sent à la fois le poivre et le sassafras. La Nigella indica de Roxburg, nommée par Ainslie Migella sativa, est, d’après De Candolle, une variété de cette dernière espèce. On la nomme, aux Indes orientales, Xara-jira. Ses graines ont été con- fondues avec celles de la Veronica anthelmintica ; elles sont identiques aux graines venues d'Égypte, sous le nom de graines noires et de suneg. Enfin, il vient de Crète une autre variété de N'yella sativa, très-aro- matique, qui est employée comme épice, en Orient. Quant à la graine de Nigelle de Damas, elle est plus grosse que les précédentes, complétement noire, triangulaire; mais les surfaces, au lieu d’être planes, sont bombées, ce qui donne à cette graine une forme ovoïde. 130 FLORE MÉDICALE On y trouve, de plus, de nombreux plis transversaux très-proémi- nents. Son odeur, très-agréable, ne peut pas être comparée à celle des autres espèces. Il ne faut pas confondre, comme on l’a fait souvent, les vraies nigelles avec une plante qui porte souvent le même nom, mais qui est de fait la Nielle des blés (Agrostemma githago). ComposiTioN CHIMIQUE. — On ne connaît pas la nature du principe qui donne l'odeur aromatique à la graine de nigelle; cet arome existe dans l’épisperme. Sa saveur est âcre et piquante. L'alcool lui enlève un principe amer et astringent, et, d’après Cartheuser, l'ex- trait aqueux est insipide. Usaces.— Les Orientaux emploient les graines des nigelles comme épices. Les Égyptiens et les Orientaux en général, après les avoir pul- vérisées, en saupoudrent le pain ou l’introduisent dans les gâteaux pour les rendre plus appétissants. Les femmes de ce pays leur attri- buent la propriété d'augmenter l'embonpoint, ce qui, pour elles, constitue la beauté. Les anciens les regardaient comme incisives, apéritives, diurétiques, etc. Hippocrate les employait contre les ca- tarrhes, et Arnaud de Villeneuve (l’un des plus grands linguistes, mais l’un des plus empiriques médecins du treizième siècle) les regardait comme emménagooues. D’après Bodart, auteur du Cours de botanique médicale comparée, elles augmentent la secrétion du lait. Peyrilhe les prescrivait contre les vers. Enfin, Wauters proposait de substituer cette graine aux épices exotiques. D’après Dioscoride, les graines de la nigelle des champs peuvent donner la mort. On ne les emploie plus guère en Europe, etencore dans quelques contréesseulement, que pour assaisonner les ragouts. NOIX VOMIQUE Strychnos nux vomica L. ( Apocynées- Strychnées. ) Le Strychnos noix vomique, Strychnos vomiquier, ou simple- ment Vomiquier, est un arbre de moyenne grandeur, dont la tige se divise en rameaux opposés, cylindriques, glabres, d’un vert terne, portant des feuilles opposées, courtement pétiolées, ovales, arron- dies, entières, glabres et lisses. Les fleurs, blanches, petites, sont groupées en cymes corymbiformes terminales. Elles présentent un calice monosépale, à cinq divisions {rès-courtes; une corolle tubu- DU XIX° SIÈCLE. 431 leuse, un peu renflée vers la gorge, à limbe partagé en cinq divi- sions; cinq élamines incluses ; un ovaire globuleux ovoïde, à une seule loge multiovulée, surmonté d’un style et d’un stigmate simples. Le fruit est une capsule ovoïde, du volume d’une orange, à enveloppe extérieure crustacée, assez fragile, renfermant une pulpe aqueuse, dans laquelle sont disséminées des graines orbiculaires, aplatjes, om- biliquées sur une de leurs faces, larges d'environ 0°,02, grisàtres et pubescentes (PI. 45): Hagirar. — Cet arbre croît dans les Indes orientales, particuliè- rement à Ceylan, sur la côte de Coromandel et au Malabar. On ne le cultive, en Europe, que dans les jardins botaniques, où il exige la serre chaude. PARTIES usiTÉEs. — Les semences, l'écorce. Récozre. — Le S/rychnos vomiquier ou Strychnos noix vomique, n'est autre que le Caniram de Rhéede (Hort. malub., vol. I, p. 67, tab. 47). Il a été décrit postérieurement par Loureiro et par Rox- burgh. Rhéede indique trois espèces de Caniram. La première £st le Tseru-katu-valli-caniram ; elle donne des semences ressemblant à celles de la noix vomique, mais qui sont à peine amères ; c'est le S/rychnos minor de Blume, qui, d’après M. Guibourt, diffère très-peu du Cæu- ullar, où Lignum colubrinum de Rumphius, le même que le Srychnos ligustrina Blum. La seconde espèce de Caniram de Rhéede, est le Wallia-priva-nitica (Hort. malab., t. VI, pl. 7), dont les feuilles ressemblent à celles de la vigne. La troisième espèce est le Modira caniram (Hort. malab., t. VIE, p. 24), Strychnos colubrina L., qui fournit le véritable hors de couleuvre, quoique celui-ci puisse égale- ment provenir du Sérychnos nux vomica, d'après Commelin, et de plu- sieurs autres S/rychnos, dont le fruit, très-gros, contient des graines semblables à la noix vomique, que l’on y mêle dans le commerce, mais qui s’en distinguent par leur couleur vert bleuâtre, foncée. La noix vomique, telle qu’on la trouve dans le commerce, est orbiculaire, aplatie, ayant l'aspect d’un bouton déformé. Elle est grise, veloutée, douce au toucher; à l'intérieur, on trouve un albumen corné, très-amer, soudé à l’épisperme, sur un point de la circonférence. Elle présente une petite proéminence, qui répond à la chalaze et à la radicule embryonnaire (Gaertn., De fructibus, tab. 179). L’écorce du vomiquier produit, d’après le docteur O’Shaugnessy, 432 FLORE MÉDICALE la fausse angusture que nous avons décrite et distinguée de l’angus- ture vraie {Voyez Angusture, Flore médicale, t. X, p. 89). Cette fausse angusture est très-riche en brucine. Quant au Sérychnos bois de couleuvre (Strichnos colubrina À), il n’est pas employé en méde- cine, et on le distingue par ses fibres blanches et soyeuses, nom- breuses, mêlées aux fibres ligneuses, qui ont un peu l'apparence du bois de chêne. ComposiTION CHIMIQUE. — La noix vomique, d'abord analysée par Braconnot, a été l’objet d’un travail extrèmement important de MM. Pelletier et Caventou. Ils y ont trouvé de l’igazurate de strych- aine, de l'igazurate de brucine, de la cire, une huile concrète, une matière colorante jaune, de la gomme, de l’amidon et de la bas- sorine. Quant à l'igazurine, plus récemment indiquée par M. Des- noix, il paraît certain que c’est un mélange de plusieurs alcalis orga- niques différents. Les alcalis organiques existent dans la noix vomique à l’état de combinaison saline très-soluble dans l’eau et dans l’alcool. On croit, sans que cela soit positivement démontré, que l'acide igazurique ne diffère pas de l'acide lactique. La brucine, d’abord découverte par MM. Pelletier et Caventou, dans l'écorce de fausse angusture, a été retrouvée depuis dans la noix vomique et dans la F#êve de Saint-Lgnace (S. ignatia Berg. Tnatia amara Linn. fils, ou Noër d'igazur); seule- ment la fève de Saint-Ignace est plus riche en strychnine que la noix vomique (voir l'article Strychnos ignatier, Flore médicale, 1. WF). Les graines du vomiquier, de la grosseur d’une olive, sont dures, cor- nées, anguleuses. Elles se distinguent surtout par leur translucidité. La Strychnine CH AZ O$, est un des poisons les plus terribles que l’on connaisse. Un centigramme suffit pour tuer un gros chien. Elle est blanche, cristallisable en octaèdres ou en prismes. Elle n'est ni fusible, ni volatile ; elle est extrèmement amère, et très-peu so- luble dans l'alcool faible. Soluble dans l'acool concentré bouillant, elle bleuit par l’acide sulfurique et le bichromate de potasse, ou les” bioxydes de plomb ou de manganèse. Ses solutions étendues sont précipitées en blanc par le chlore. La Brucine = CHA O$S, HO, se distingue dela strychnine par sa très-grande solubilité dans l'alcool faible. Elle cristallise en prismes droits à base rhombuïdale. Elle se dissout dans 500 parties d’eau bouillante, et 800 parties d'eau froide. Elle est insoluble dans l’éther DU XIX° SIÈCLE. 133 et très-soluble dans l'alcool. Elle est moins vénéneuse que la strych- nine, l'acide azotique la colore en rouge de sang, la coloration passe au violet par l'addition d’un peu de proto-chlorure d’étain, le brôme la bleuit. Conime la strychnine et la brucine sont peu solubles dans l’eau, on préfère employer leurs sels. C’est le sulfate qui est le plus usité. Usages. — La noix vomique, la strychnine et la brucine sont des poisons violents, qui agissent en abolissant les fonctions des nerfs du sentiment, et en laissant intacts les nerfs moteurs et le système mus- culaires. On les emploie souvent pour faire périr les animaux des- tructeurs des récoltes ; depuis longtemps, en Alsace, on a substitué à l’arsenic la strychnine, pour se débarrasser des renards qui sont tués sur place, tandis que l’arsenic n’agit que lentement et ne permet pas aux chasseurs de tirer des bénéfices de la vente de la peau de ces animaux. Les strychnées déterminent des vertiges, qui rendent la démarche chancelante ; il survient ensuite des douleurs légères et une roi- deur des muscles du cou, ainsi que de ceux qui rapprochent les mâchoires. Le pharynx éprouve un resserrement notable, les mus- cles de la poitrine et de l'abdomen sont roidis. Il se manifeste bientôt des secousses convulsives et tétaniques, ressemblant à des secousses électriques; la roideur devient générale, la tête est ren- versée en arrière, la respiration ne se fait plus, le pouls diminue, et la mort survient au milieu d’une stupeur et d’une insensibilité complètes. Dans la pratique médicale, la noix vomique est employée en pou- dre, sous forme de teinture préparée au sixième, et sous celle d’ex- trait alcoolique. Elle entre dans la composition de la Poudre de Hufe- land et des Gouttes utérines de la reine d'Espagne. W serait impossible de pulvériser la noix vomique, tant sa dureté est grande. On com- mence par la râper, puis on la ramollit au moyen de la vapeur d’eau, et on la pile. On obtient ainsi une pâte que l’on fait sécher, et qui peut alors être pulvérisée facilement. L'écorce de la fausse angus- ture et la fève de Saint-[gnace, produits de l’Ignatier amer (Zgnatia amara L.), ne sont pas employées. En thérapeutique, on place ces médicaments dans les excitants du système musculaire, administrés à petite dose et au moment des repas. Ilsne troublent pas la digestion; les facultés digestives sont exaltées, et Flore, T. II. 28 434 FLORE MÉDICALE les évacuations succèdent le plus souvent à une constipation passagère. Les sécrétions, à part la sécrétion urinaire, ne sont pas augmentées ; l'excrétion urinaire est rendue plus fréquente et plus énergique. Magendie et Marshall-Hall ont signalé une action toute particulière sur les nerfs pneumo-gastriques. Nous avons dit comment les strych- nées agissent sur le système nerveux en général. I n'ya pas plus de deux siècles que les effets thérapeutiques de la noix vomique et de ses dérivés sont connus. L'action qu'ils exercent sur le système musculaire, avait conduit Fouquier à les employer contre les paralysies. On crut d'abord avoir obtenu de bons résultats. Mais les essais de Bretonneau, de Duméril et de Husson restreignirent leur emploi, et ne déposèrent pas en faveur de cette médication. Cependant M. Tanquerel des Planches en obtint de bons résultats dans les paralysies saturnines, et on les a depuis toujours employés dans ces cas. Liston et M. Miquel ont conseillé la strychnine dans l’amaurose, et MM. Lafaye et Mauricet, mais surtout M. Trousseau, l’ont employée avec succès dans l’incontinence, ou la rétention d'urine dépendant d’une paralysie de la vessie. Niémann, et MM. Cazenave, Fouilhoux, Rougier, Trousseau, etc., l'ont beaucoup vantée dans le traitement de la danse de saint-quy, et, de fait, dans cette maladie, son usage est devenu à peu près général. MM. Rœlants, Van Der Hoven, Van Anckeren, Meeburg, Lévie, Kriegerel, Jones ont obtenu de bons résultats de l'application de la noix vomique au traitement des névralgies faciales. M. Homolle s'en est bien trouvé pour faciliter la réduction des hernies, ainsi que dans les gastralgies, dans la dyspepsie, l'hypocondrie, etc. La noix vomique est conseillée pour tuer les vers intestinaux, et même le ténia. Dans ce cas, il vaut mieux, à notre avis, faire usage d’autres médicaments moins dangereux et plus efficaces. Les observations de M. Andral ont prouvé que la brucine agissait comme la strychnine, mais qu’elle était moins active. Cependant les expériences de M. Bricheteau et celles de M. Bouchardat, semble- raient démontrer que l’action de la brucine est plus énergique qu'on ne le pense généralement. M. Bricheteau l’administre d'abord à la dose d'un centigramme, augmentant chaque jour d’un centigramme, tant qu'il n'ya pas d'effet produit. Il l’a surtout administrée dans les hé- miplégies survenues à la suite d'apoplexie. DU xIX° SIÈCLE. L35 Il n'est pour ainsi dire pas de maladies dans lesquelles a noix vomique, la strychnine et son nitrate, ne soient employés par les médecins homæopathes. Ils l’administrent pour combattre les effets des narcotiques, des liqueurs excitantes, et des alcooli- ques. Le signe de la noix vomique est Aw. n., et son abrévia- tion Vom. Pour la strychnine Msy et Strychninum, et pour le nitrate Msy. n. et Strych. n. NOYER Juglans regia L. (Juglandées. ) Le noyer est un grand arbre, dont la tige, haute de 15 à 20 mètres, couverte d’une écorce gris cendré, se divise en branches et en rameaux à écorce blanchàtre, portant des bourgeons bruns et des feuilles al- ternes, pétiolées, articulées, imparipennées, composées de sept ou neuf folioles ovales aiguës, grandes, glabres, coriaces, d'un vert sombre. Les fleurs, qui paraissent avant les feuilles, sont monoïques. Les mäles, groupées en chatons cylindriques, brun noirâtre, pendants, ont un involucre pédicellé, à cinq ou six lobes membraneux, iné- gaux, concaves, muni en dehors d’une écaille bractéale, renfermant de nombreuses étamines insérées à diverses hauteurs, à filets très- courts, à anthères bilobées, acuminées par la saillie du connectif. Les fleurs femelles sont solitaires dans les involucres terminaux. Elles présentent un calice à tube adhérent à l’involucre et à l'ovaire, à limbe quadrifide ; un ovaire ovoïde, uniovulé, surmonté d’un style simple, court, et de deux stigmates allongés et courbés en dehors. Le fruit est ovoïde, et renferme dans une enveloppe verte et charnue (brou) un noyau ou coque (noër) à deux valves ligneuses, renfermant une seule graine divisée en quatre lobes très-irréguliers. On remarque aussi dans ce genre les Noyers noir (J. nigra L.), cendré (J. cinerea L.), pacanier (J. olivæformis Mich.), blanc (J. alba Mich.), à feuilles de frène (J. /raxini/olia L.), etc. Hagrrar. — Les noyers commun et à feuilles de frêne sont origi- naires de l'Asie Mineure et de la Perse; les autres espèces le sont de l'Amérique du Nord. Le noyer commun est cullivé en grand comme arbre fruitier ; ses congénères ne se trouvent, en Europe, que dans les jardins botaniques ou les parcs d'agrément. 436 FLORE MÉDICALE Pannes usirées. — Le bois, l’écorce, les feuilles, les fleurs, le pé- ricarpe ou brou, l’amande, les jeunes fruits. Récozre. — L'écorce de noyer, rarement employée, doit être récol- tée à l'automne. Les feuilles, très-odorantes lorsqu’elles sont jeunes, perdeni leur odeur agréable en vieillissant. Aussi, faut-il les récol- ter lorsqu'elles ont acquis à peu près la moitié de leur développe- ment. On les dispose en petits paquets, et on les fait sécher au soleil ou à l’étuve. Si elles sont mal desséchées, elles noircissent, il faut alors les rejeter. Les jeunes fruits que l’on pèle, et que l’on sert sur nos tables, sous le nom de Cerneaux, doivent être cueillis lorsque l’'amande est un peu formée; plus tard ils sont trop durs. Les noix que l'on mange, et dont on extrait de l'huile, sont récoltées à leur maturité, c’est-à-dire lorsque le péricarpe s'ouvre, et commence à se dessécher. C’est au contraire avant cette époque qu'il faut cueillir les fruits, lorsqu'on veut en utiliser le Brou, soit pour l'usage médi- cal, soit pour la préparation de la liqueur de noix, soit encore pour la teinture. Composition cuimiQue. — Lorsqu'on froisse entre les doigts les feuilles de noyer, on perçoit une odeur forte, aromatique ; la saveur de ces feuilles est amère, résineuse et piquante. Le brou de noix est plutôt piquant qu’amer ; d'après Braconnot, il contient de l’amidon, de la chlorophylle, de l'acide malique, de l'acide citrique, des sels, du tannin, une matière âcre, amère. A l'air, le suc de brou de noix se colore et perd sa saveur amère. Il se précipite une matière rési- neuse. L'amande de la noix contient environ la moitié de son poids d’une huile grasse. Usaces. — Le bois de noyer est fort estimé dans l’ébénisterie. On préfère celui du noyer cendré de l'Amérique septentrionale, dont le grain est fin, la couleur bistrée, et qui est susceptible d'un beau poli. L'huile de noix est bonne à manger et très-siccative; elle est employée en peinture. Obtenue par expression à froid, cette huile est meil- leure à manger que lorsque la même opération a été faite à chaud. Dans tousles cas, elle peut servir à fabriquer certains savons communs et les vernis gras. Le marc sert à nourrir les bestiaux. Le brou de noix, qui sert à préparer une excellente liqueur de table, est surtout employé pour la teinture en noir ou en fauve des DU xIX* SIÈCLE. 137 étoffes, des cuirs et des bois. Les feuilles servent à éloigner les in- sectes, et on éponge les chevaux avec leur décoction pour chasser les mouches. La séve fraiche contient un peu de sucre, qu'il serait im- possible d'extraire industriellement avec profit. Les différentes parties du noyer sont placées parmi les toniques amers. On les regarde comme astringentes, sudorifiques et déter- sives. Autrefois très-usitées en médecine, ces préparations étaient à peu près oubliées, lorsque M. Négrier, d'Angers, les vanta contre la scrofule. Elles sont, depuis lors, plus souvent prescrites dans cette maladie, ainsi que dans les affections herpétiques et vénériennes, l’ictère, les ulcères atoniques, scorbutiques, etc. On a même employé l'extrait de brou de noix comme anthelmintique. M. Baudelocque a appuyé les conclusions du travail de M. Négrier sur Pefficacité des préparations de feuilles de noyer, contre la scrofule. Malheu- reusement, les résultats obtenus n’ont pas été trouvés partout aussi satisfaisants. Le célèbre frère Côme, de l’ordre des Feuillants (Jean de Baseilhac, né en 1703, dans les environs de Tarbes, d’une famille qui exerçait la chirurgie), employait les feuilles de noyer contre l'ictère simple. Souberbielle, son élève, a cité plusieurs cas de guéri- son; mais, on le sait, l’ictère simple (ou jaunisse) guérit le plus sou- vent tout seul. Les feuilles de noyer appliquées topiquement sur les mamelles, ont été proposées par E. Kœnig, pour arrêter la sécrétion du lait. J. Bauhin, Vitet, Hunezowski, Home, Belloste, MM. Bois de Loury, Dubois de Tournay, Pomeyrol, Brugnier, ete., etc., ont préconisé la même application des feuilles, ou celle de l’eau distillée, de la dé- coction, de la solution d'extrait, etc., pour le traitement local des ulcères atoniques, scrofuleux, les flux leucorrhéiques, les ulcérations utérines, mais surtout contre la pustule maligne. D'après MM. Po- meyrol, Brugnier, Raphaël, Van Swygendoven, les feuilles et l'écorce fraiches de noyer, produisent d'excellents effets; toutefois la con- fiance dans cette médication n'est pas assez grande, pour qu’il ne soit pas prudent de conseiller la cautérisation préalable, au moyen du fer rouge. Hippocrate et Galien regardaient le brou de noix comme vermi- fuge. Fischer et Stadæ faisaient prendre l'extrait de noix dans l'eau contre les vers; Peyrilhe, l'administrait dans du vin ; Hunezowski, le vantait contre les ulcères anciens. 438 FLORE MÉDICALE D’après Rey, la pellicule coriace qui sépare les lobes de l’a- mande, et qui n’est autre chose que les placentas et l’épisperme frais a été administrée contre la dysentérie et ordonnée contre la fièvre. Solenander a préconisé l’infusion des fleurs, contre les hémor- ragies utérines, et le bénédictin Alexandre (Nicolas, mort en 1728, a uteur d’une Médecine et chirurgie des pauvres, et d'un Drction- naire de botanique), vantait la poudre des chatons de noyer, prise dans du vin, contre la dysentérie. L'huile de noix, quoique signalée comme vermifuge et même téni- fuge par Hippocrate, Galien, et par un grand nombre de médecins modernes, est à peine quelquefois employée aujourd'hui dans les campagnes. Scarpa et Caron du Villars proposaient de l’instiller dans l'œil, contre les taies de la cornée. On recommandait d'employer l'huile rance. Marc-Antoine Petit la rendait plus active en y ajoutant de l'émétique. Quoique Schræder, Ray, Buchner et Hoffman, aient constaté les propriétés vomitives de la seconde écorce, des branches et des racines, on n’en fait aucun usage... Wauters regardait ces parties comme rubéfiantes, et M. Ébrard, de Nimes, les employait en cata- plasmes contre les fièvres intermittentes. Les propriétés vésicatives et rubéfiantes sont beaucoup plus marquées dans l'écorce du noyer cendré de l'Amérique septentrionale. L'eau des trois noir des anciennes pharmacopées, très-employée autrefois, était préparée en trois fois et à trois époques différentes, avec les chatons fleuris, avec les noix nouées, et avec les noix müres. Elle n’est plus prescrite aujourd'hui. Les produits du noyer sont quelquefois employés en médecine homæopathique. Leur abréviation est N. jugl. et leur signe S/g n. Mais, ainsi formulées, on ne voit pas bien quelles sont les parties qu'il faut employer. NYCTAGE Nyctago Jalapa D. C. N. hortensis Juss. Mirabilis jalapa L. (Nyctaginées. ) Le Nyctage des jardins ou Faux jalap, désigné communément sous le nom de Belle-de-Nuit, est une plante vivace, mais connue et cultivée en Europe seulement comme plante annuelle. Sa racine est fusiforme, tubéreuse, charnue, brun noirâtre. La tige, haute de DU XIX° SIÈCLE. 139 0°,50 à 1 mètre, cylindrique, noueuse, glabre, dressée, rameuse di- chotome, porte des feuilles opposées, pétiolées , ovales-aiguës, un peu cordées à la base, molles, ciliées, d’un vert foncé. Les fleurs, grandes, rouges, jaunes, blanches ou panachées, courtement pédonculées, sont groupées en cymes axillaires ou terminales. Elles présentent un involucre caliciforme (calice), tubuleux campanulé, persistant, par- tagé presque jusqu'à sa base en cinq divisions ovales, lancéolées, ai- guës, dressées ; un périanthe pétaloïde (corolle) en entonnoir, à tube long, grêle, s'évasant à sa partie supérieure, à limbe divisé en cinq lobes obtus, plissés, échancrés, étalés ; cinq étamines à filets grèles, soudées en anneau à leur base et insérées sur un disque hypogyne ; un ovaire simple, libre, uniovulé, surmonté d’un long style saillant terminé par un sligmate arrondi et glanduleux. Le fruit est un ca- ryopse ovoïde, noirâtre, entouré par le calice, et renfermant une graine à albumen farineux. Hagrrar. — La belle-de-nuit est originaire du Pérou; on la cul- tive aujourd'hui dans tous les jardins de l’Europe. Cucrure. — Cette plante demande une terre un peu argileuse, meuble et profonde. On la propage de graines, semées au prin- temps en place ou en pépinière. On arrose fréquemment en été. A l'approche des gelées, on peut relever les tubereules et les conserver en hiver, pour les remettre en place au printemps suivant. PARTIES usITÉES. — La racine. Récozre. — La racine, qui doit être récoltée en automne, est moins active quand elle est recueillie dans le Nord que quand elle provient du Midi; en effet, Gilibert a vu qu’elle purgeait à Lyon et qu'elle ne purgeait pas en Lithuanie. Cette racine est donc sou- mise à ce principe que nous avons déjà fait observer, à savoir que les plantes des pays chauds perdent de leurs propriétés lorsqu'on les transporte dans les pays froids. On peut employer également les racines du Mirabilis dichotoma et du 27. longiflora. La première de ces plantes se distingue par ses feuilles plus petites, et par ses fleurs pourprées, qui sont aussi bien moins grandes que celles de l'espèce précédente. Elles s'épanouissent à la nuit, d'où leur est venu le nom de fleur de quatre heures. La seconde se distingue par l'odeur agréable et musquée qu’elle dégage la nuit. 410 FLORE MÉDICALE Les racines de ces plantes, que l’on trouve rarement dans le com- merce, sont à peu près cylindriques, épaisses de 0,025 à 0,035, coupées en tronçons de 0,055 à 0%,110, d’un gris foncé à l’exté- rieur, plus blanches à l'intérieur. Leur surface est marquée d’un très-grand nombre de cercles concentriques très-serrés; l'intérieur est également marqué des mêmes cercles. D'ailleurs cette: racine est dure, compacte, pesante, d’une odeur très-nauséeuse , d’une saveur douceàtre d'abord, et un peu âcre ensuite. Composirion cmtMiQuE. — La racine de belle-de-nuit contient beau- coup de principes gommeux et résineux; d’après Coste et Wilmet 120 grammes de cette racine, récoltée en octobre et médiocrement séchée, fournissent 25 grammes d'extrait aqueux et 12 grammes d'extrait résineux. Usages. — La racine de Mirabilis jalapa n'est plus guère em- ployée en médecine. Cependant Coste et Wilmet l’ont proposée comme purgative à la dose de 1 ou 2 grammes pour l'extrait aqueux, et moitié moindre pour l'extrait résineux; d’autre part, M. Cazin a employé cette racine en poudre, administrée dans un verre d’eau, chez lesenfants lymphatiques et scrofuleux ; ceux-ci en ont été purgés; Gilibert dit lavoir employée avec succès pour tuer et expulser le té- nia; enfin Bodart dit l'avoir employée avec avantage dans un grand nombre de maladies cutanées, et Roques la prescrivait associée au sucre. Quoiqu'on l'ait beaucoup préconisée contre les rhumatismes chroniques et les hydropisies, elle n’est jamais employée dans ces maladies. La racine de Mirabilis dichotoma L. jouit absolument des mêmes propriétés que celle de l'espèce précédente, comme l'ont démontré Bergius, Peyrilhe, Gilibert, Coste et Wilmet; il en est de même de la racine du 47. longiflora. NYMPHÉA Nymphæa alba L. (Nymphéacées.) , Le Nymphéa blane, appelé aussi Nénuphar blane, lis des étangs, ete, est une plante vivace, à rhizome charnu, très-long et (rès-gros, ra- meux, noueux, brun-jaunàtre au dehors, blanc à l’intérieur, couvert de cicatrices, donnant naissance en dessous à de nombreuses fibres radicales, et au-dessus à des feuilles longuement pétiolées, nageantes, DU XIX° SIÈCLE. LA à limbe arrondi, très-grand, profondément échancré en cœur à la base, entier, lisse, luisant, d’un beau vert. Les fleurs, très-grandes, blanches ou d'un blane rosé, sont solitaires à l'extrémité de longs pé- doncules axillaires radicaux. Elles présentent un calice à quatre sé- pales libres, lancéolés, caducs, verdâtres en dehors, pétaloïdes à la face interne ; une corolle de quinze à vingt pétales lancéolés, dispo- sés sur plusieurs rangs, les extérieurs égalant le calice, les inté- rieurs progressivement plus petits et portant au sommet une anthère plus ou moins développée ; des étamines en nombre indéfini; un ovaire à loges nombreuses incomplètes mulliovulées, enchâssé et presque complétement enveloppé dans un disque charnu, et sur- monté de stigmates sessiles, étalés, rayonnants, soudés en un pla- teau convexe à bords crénelés, persistants. Le fruit est une capsule arrondie, charnue-herbacée, enchässée dans le disque persistant , couronnée par le stigmate, marquée de cicatrices qui résultent de la chute des étamines et des pétales; l'intérieur, divisé en loges nombreuses, renferme une pulpe abondante dans laquelle sont plongées de nombreuses graines à enveloppe succulente, à périsperme double, l'extérieur farineux et l'intérieur charnu (PL. 46). Hapirar. — Cette plante est très-commune en Europe. On la trouve dans les eaux claires tranquilles ou peu rapides, les mares, les étangs, etc. Elle n’est cultivée que dans les jardins botaniques ou d'agrément. PARTIES USITÉES. — Les rhizomes, les fleurs. Récocte. — Nous avons déjà dit ailleurs (Voyez Nénuphar), que ce qu'on appelait improprement racine de nymphéa dans les phar- macies, élait le rhizome blane du Nuphar lutea, tandis que celui du Nymphea alba est jaunâtre à l'intérieur, et rendu presque noir à l'extérieur par la grande quantité de tubercules foliacés ou radicaux qui le recouvrent. Mais ces deux produits jouissent des mêmes pro- priétés, et pourraient sans inconvénient être substitués l’un à l’autre, soit comme aliment, soit comme médicament. On les arrache à l'automne, ou au printemps ; on les coupe en lanières longitudinales minces, et on les fait dessécher pour les conserver à l'abri de l’hu- midité, car les fragments spongieux ainsi obtenus sont très-hygro- métriques. Les fleurs blanches sont cueillies à leur parfait épanouissement. 142 FLORE MÉDICALE On les faitsécher entières, ou coupées par fragments, car leur réceptacle est volumineux, épais et visqueux. Il est rare qu’on isole les pétales ; dans lous les cas, la dessiccation doit être très-rapide. Composirion cHiMiQuE. — Le rlhizome de nymphéa a été analysé par M. Morin, de Rouen, qui y a trouvé de l’amidon, une matière mu- queuse, du tannin, de l'acide gallique, de la résine, une matière végélo-animale, quelques acides végétaux et des sels (Journ. de pharm. t. VIL, p. 450). Usaces.— Les fleurs et les rhizomes de nymphéas ont joui el jouis- sent encore de la réputation d’être des sédatifs puissants, des hypno- tiques précieux. On leur a surtout attribué la propriété de calmer les passions, ce qui à dû engager à en faire consommation dans les cou- vents. Cependant les Tartares et les Égyptiens s’en nourrissent, après les avoir fait cuire dans l’eau, et ils préparent une sorte de pain avec les graines de la plante, sans que cette alimentation paraisse nuire, d'après Pallas, à la fécondité de ceux qui en font usage. La saveur styptique et un peu amère de la pulpe, indique plutôt une action irritante qu’énervante, et si on l’applique en cataplasmes, elle agit comme rubéfiante. Desbois de Rochefort, qui a vu beaucoup em- ployer le nénuphar dans les couvents de son temps, a constaté que son emploi déterminait souvent des effets contraires à ceux qu’on en attendait. La réputation du nénuphar comme anti-aphrodisiaque est d’ailleurs lrès-ancienne. Marquis croit qu’elle doit son origine à la blancheur virginale des fleurs de la plante et à l'habitation de celle-ci au milieu des eaux (Dict. des scien. méd., t. XXXVW, p. 439). Dioscoride et Pline avaient signalé cette prétendue propriété. On ordonnait en consé- quence le nénuphar pour guérir les insomnies érotiques. Les chan- teurs en faisaient usage pour conserver et perfectionner leur voix. Rien ne confirme non plus les propriétés hypnotiques que l’on a attribuées au nénuphar. C’est plutôt comme émollient et adoucis- sant, qu’on le conseille dans la leucorrhée, la blennorrhagie, la dy- sentérie, etc. À une époque, la pulpe a été conseillée en épithème comme antifébrile, et Détharding prétend avoir guéri des fièvres intermittentes, en appliquant aux pieds la racine de nénuphar fraiche coupée par tranches. Le célèbre médecin écossais William Cullen (né en 1712, mort en 1790, qui attaqua la doctrine médicale de Boerhaave, ct y substitua, comme on lesait, une doctrine nouvelle dans DU XIX° SIÈCLE. 143 laquelle il attribuait le principal rôle au système nerveux, trop né- gligé par l’illustre recteur de l'Université de Leyde) crut devoir ban- nir, et non sans raison, le nénuphar de la matière médicale (A /reatise of the materia medica, 1789). Les Turcs font usage d’une eau distillée de nénuphar comme cos- métique. Dans quelques pays on prépare un sirop avec cette plante. Elle entrait autrefois, dans plusieurs préparations hypnotiques, au- jourd’hui oubliées. D’après Scapoli (Flora carniolica, p.316, n° 2), la racine est un poison pour les blattes et les grillons. Simon Pauli dit que les fleurs de nénuphar purifient l'air; aussi conseille-t-il d’en joncher les chambres des malades. Théophraste rapporte que les Béotiens employaient la plante qui nous occupe comme aliment. h44 FLORE MÉDICALE OEILLET Dianthus caryophyllus L. D. coronarius Lam. (Cariophyllées- Dianthées. ) L'OEillet des fleuristes est une plante vivace, à souche sous-li- gneuse, à racines fibreuses, fasciculées. Les tiges, d’abord stériles, couchées, articulées, noueuses, couronnées d’une rosette de feuilles imbriquées,- deviennent l’année suivante des tiges fertiles, dressées ou ascendantes, hautes de 0",50 à 0",60, portant des feuilles oppo- sées, connées, linéaires, assez épaisses, glabres, glauques, canali- culées, à nervure dorsale saillante. Les fleurs, rouges dans le type de l'espèce, mais de couleurs très-diverses dans les variétés cultivées, très-odorantes, sont solitaires à l'extrémité de la tige et des rameaux. Elles présentent un calicule formé de quatre écailles coriaces , ovales arrondies, courtes, à pointe mousse, disposées sur deux rangs et opposées par paires; un calice tubuleux, cylindrique, atténué au sommet, à cinq dents lancéolées aiguës ; une corolle à cinq pétales à onglets aussi longs que le calice, à gorge munie de dix bandelettes ailées longitudinales, à limbe cunéiforme, entier, un peu découpé sur les bords ; dix étamines; un ovaire simple, ovoïde, à une seule loge multiovulée, surmonté de deux styles. Le fruit est une capsule ovoïde, polysperme, s’ouvrant au sommet en quatre valves (PI. 47). Cette espèce présente de nombreuses variétés; la seule qui nous intéresse ici est l'OEillet grenadin ou à ratafia. Hagrrar. — Originaire du nord de l'Afrique, l'œillet est aujour- d'hui cultivé et naturalisé en Europe, en Amérique, etc. Cuzrure. — L'œillet grenadin est assez souvent cultivé en grand. On le propage par semis en pépinière. Les jeunes pieds sont repiqués en lignes, à 0%,65 de distance, et recoivent tous les ans trois ou quatre labours ; à l'époque de la floraison, on fixe les tiges sur des échalas. Tous les quatre ou cinq ans, on renouvelle la plantation sur une autre place. ParTies usirées. — Les pétales. Récocre. — L'œillet rouge est le seul qui soit employé par les pharmaciens et les liquoristes. On ceueille les pétales à l’époque de l'épanouissement de la fleur. On enlève avec soin les onglets, et on fait sécher à l’étuve. Pour la préparation du sirop d’æillets, on DU XIX° SIÈCLE. 445 emploie les pétales récents; quelquefois aussi il est préparé avec les fleurs sèches; mais alors on prescrit d'ajouter à leur infusion quelques clous de girofle. CoMPOsITION CHIMIQUE. — Le parfum agréable de l’œillet est tout à fait comparable à celui du girofle; c’est ce qui le fait employer par les parfumeurs et par les liquoristes. Ce parfum est dû à une huile essentielle, que l’on peut séparer par distillation, ou par le procéüé ._d'enfleurage des parfumeurs, qui consiste à exprimer les fleurs avec des huiles fixes. Usages. — Les fleurs d’œillets ont été employées comme stimu- lantes, cordiales, stomachiques; elles sont aujourd’hui peu usitées. On en préparait une eau distillée et un vinaigre; on en fait aussi un sirop qui sert encore à édulcorer les potions cordiales. Elles entraient dans la composition de l’Æau générale, et de l'Eau prophylactique, dans la Conserve d'œillet et dans l’'Opiat de Salomon. Elles servaient à préparer des liqueurs, d’où leur venait le nom d’'ŒÆwlet ratafia. En médecine, c’est surtout dans les fièvres malignes et typhoïdes, que le sirop d’æillet a été préconisé ; il est aujourd’hui peu employé. L’œillet de poëte (Dianthus barbatus L.), la mignardise (D. plu- martus L.), celui des chartreux (D. carthusianorum), possèdent aussi, mais à un moindre degré, l'odeur de girofle. L'œillet rouge, ou à ratafia (Dianthus ruber), est souvent employé pour remplacer le Dianthus caryophyllus ; 1 jouit des mêmes propriétés. OENANTHE Onanthe crocata L. (Ombellifères - Sésélinées. ) L'OEnanthe safranée, vulga:rementappelée Pensacre, est une plante vivace, à racines fusiformes, renflées, tubéreuses, charnues, sécré- tant un suc laiteux jaunâtre. La tige, haute de 0",65 à 1! iuètre, cylindrique, fistuleuse, cannelée striée, glabre, dressée, rameuse au sommet, porte des feuilles alternes, pétiolées, engainantes à la base, grandes, deux ou trois fois pennées, à segments presque cordiformes, dentés au sommet, glabres, d’un vert foncé, luisants en dessus. Les fleurs, petites, blanches, sont groupées en ombelles terminales très- compactes, à rayons grêles, à involucre nul ou réduit à un petit nombre de folioles, à involucelles formés de plusieurs folioles ; celles 4AG FLORE MÉDICALE du centre des ombellules sont presque sessiles et fertiles; celles de la circonférence, pédonculées, rayonnantes, stériles. Chaque fleur pré- sente un calice très-petit, à cinq dents, persistant et accrescent ; une corolle à cinq pétales obovales, échancrés ; cinq étamines saillantes ; un ovaire infère, à deux loges uniovulées, surmonté de deux styles divergents. Le fruit est un diakène cylindrique, oblong, bordé, marqué de trois côtes sur chaque face et surmonté des styles persis- tants (PI. 48). On remarque dans le même genre l'OEnanthe fistuleuse (ŒÆ. /is- tulosa L.), plante vivace, à tiges stolonifères à la base, à feuilles divisées en segments linéaires, à pétioles fistuleux. Quelques auteurs rapportent aussi à ce genre la Phellandrie aqua tique, qui sera l’objet d’un article spécial. Hagrrar. — Ces deux plantes sont assez communes en Europe ; elles croissent dans les lieux humides, au bord des rivières, dans les marais, etc. On ne les cultive que dans les jardins botaniques, où on les propage très-facilement par éclats de pied, faits dans un sol très- humide. PARTIES usiTÉEs. — Toute la plante, surtout les racines. Récoure. — Cette plante peut être confondue avec la phellandrie, (Œnanthe phellandrium Lam., Phellandrium aquaticum L.), qui est beaucoup moins vénéneuse. Le suc jaune de l’œnanthe safranée suf- fira pour établir la distinction. Les feuilles ont été quelquefois prises pour du céleri et du persil, et les racines pour des panais, ou des navets ; mais les feuilles ne présentent pas l'odeur aromatique de la première de ces plantes, et elles sont plus grandes que la seconde ; elles se distinguent d’ailleurs par leur odeur, et par les angles nom- breux que présentent les pétioles et les pétiolules; quant aux ra- cines, on les reconnait au suc lactescent qu'elles laissent écouler. L'œnanthe perd la plus grande partie de ses propriétés par la dessic- cation. | Composirion cmiMmiQue. — Le suc d'œnanthe est un poison violent. Les racines présentent une saveur douceàtre, aromatique, àcre, désa- réable, qui les rend très-dangereuses, de sorte qu'on les mange souvent avec confiance; mais élles déterminent bientôt une chaleur brûlante au gosier, des nausées, des vomissements, du vertige, du délire, des convulsions violentes et souvent la mort. On combat cel empoisonnement par les vomitifs et les laxatifs d'abord, ensuite par DU XIX° SIÈCLE. 447 les émollients appliqués #tus et extra, plus tard on fait prendre des boissons gazeuses et des potions éthérées. MM. Cormerais et Pihan-Dufailly (de Nantes) ont donné l'analyse de l’œnanthe safranée (Journ. de chim. méd., t. NV, p. 459), mais ils n'en ont pas isolé et fait connaître le principe actif. Son suc exhale une odeur analogue à celle de la carotte. Cette racine contient de la résine, une huile volatile abondante, une huile concrète, de la gomme, de la mannite, de la fécule, de la cire et des sels. On croit que la racine est le principe actif. UsiGes. — L'œnanthe safranée, est un des poisons des plus violents que l’on connaisse ; son suc et sa teinture alcoolique déterminent une vive rubéfaction. Elle est la cause d’empoisonnements fréquents dans l'ouest de la France, en Angleterre, en Hollande, en Corse, ete. Son application extérieure peut déterminer des accidents très-graves ; sur cinq personnes qui s'étaient frottées avec cette plante, pour se guérir de la gale, deux moururent (Revue médicale, février 1837). L'œnanthe safranée est aujourd’hui complétement abandonnée des médecins allopathes. Les anciens l’employaient contre la toux, les affections de vessie. On l’a même préconisée contre la lèpre. Les médecins homæopathes l'emploient, dit-on, quelquefois, et elle est inscrite à leur Codex sous l’abréviation ænant. croc et le signe Eœa. L'œnanthe à feuilles de pimprenelle (Œ. pimpinelloïdes L.) et VŒ. fistulosa sont beaucoup moins actives. La racine de la pre- mière, ainsi que celle de l'Æ. peucedanifolia peuvent être mangées, mais il faut bien éviter les confusions; il est plus prudent de s'abstenir. OIGNON Allium cepa L. (Liliacées - Asphodélées.) L'Oignon est une plante vivace, à bulbe arrondi ou ovoïde, ventru, très-gros, composé de tuniques épaisses, charnues, distinctes, alter- nant avec d'autres luniques membraneuses, minces, transparentes, les extérieures sèches, minces, scarieuses, blanches, jaunes, rou- geàtres ou brunes, insérées sur un plateau, qui est la véritable tige, d’où naissent en dessous des racines fibreuses, fasciculées, blan- châtres. La tige ou hampe, haute de 0",50 à 0",90, fistuleuse, AS FLORE MÉDICALE renflée, ventrue vers le milieu, porte à sa base des feuilles cylin- driques, fistuleuses, renflées. Les fleurs, petites, nombreuses, blanc verdâtre, longuement pédicellées, sont groupées en une ombelle ter- minale globuleuse, renfermée dans une spathe avant l’épanouisse- ment. Elles présentent un périanthe à six divisions alternant sur deux rangs; six élamines ; un ovaire à trois loges multiovulées, sur- monté d’un style court. Le fruit est une capsule, renfermant des graines noires, trigones. Harrar. — Cette plante, dont la vraie patrie n’est pas bien connue, mais qu'on croit originaire de l'Orient, est cultivée en grand dans tous les jardins maraîchers, souvent aussi dans les champs et dans les vignes. Parties usirées. — Le bulbe. Récore. — L'ognon ou oignon est récolté à l'automne, aussitôt que les feuilles jaunissent. On fait sécher les bulbes au soleil, tantôt isolés les uns des autres, tantôt réunis et tressés en cordes, au moyen des feuilles et d’un peu de paille. Quelquefois enfin, lorsque les bulbes sont petits, on coupe les feuilles avant de les faire sécher. Composirion cuimique.— Toutes les parties de ce végétal répandent une odeur forte et piquante, qui excite le larmoiement lorsqu'on le coupe; le bulbe surtout possède une saveur âcre et alliacée. Fourcroy et Vauquelin y ont trouvé une huile volatile incolore, àcre et odo- rante, du sucre incristallisable, de la gomme, une matière animale, des acides phosphorique et acétique, du phosphate et du citrate de chaux. Le suc de l'oignon est sucré ; exposé à l'air, il se colore en rose, et éprouve la fermentation alcoolique d’abord, et acétique ensuite. {l forme alors un vinaigre qui est peu estimé. Par l'addition de la levûre de bière, la fermentation est plus active, et du liquide on peut alors retirer de l'alcool par distillation. Par la coction, l'oignon perd ses propriétés irritantes, en conséquence de la volatilisation de l’es- sence, el il reste alors mucilagineux et émollient. UsaGes. — L'oignon doux et sucré du Midi est préféré comme aliment; celui du Nord, qui est plus àcre et plus irritant, est préféré comme médicament. Dans quelques pays, les oignons constituent la principale nour- riture des habitants. On préfère pour manger la variété blanche, qui est plus sucrée et plus douce. En ltalie, en Égypte, en Espagne, D'UMUINISTECUE. 449 dans le sud de la France, ils sont si doux qu’on peut les manger crus. Mais c'est surtout comme assaisonnement, que la consommation est considérable. Cependant les oignons rouges semés restent petits, de la grosseur d'une noiselte environ; on en fait alors des ragoüts, et on les fait confire dans du vinaigre avec des cornichons, des pi- ments, etc. L'oignon eru jouit de la réputation bien usurpée de dis- siper l'ivresse. Il est difficile à digérer et détermine des éructations nidoreuses. Le bulbe de l'oignon possède toutes les propriétés de l'ail, mais à un moindre degré, il est moins rubéfiant; cuit et mêlé à l’axonge ou à de l'huile, il forme une pulpe très-estiméedes habitants des campagnes, comme maturalive. On l'applique sous forme de cataplasme. Bouilli dans l'eau, on en fait une tisane, qui est regardée comme expecto- rante, et que l’on a employée contre lesrhumes, les catarrhes et autres inflammations de la poitrine. D'après Belon (Singwlarités, p. 433), les Tures se préservent du goitre en mangeant beaucoup d'oignons crus. Is en font une grande consommation. Le suc d'oignon jouit de la propriété d’être diurétique et lithontrip- tique. On a conseillé de le faire manger cru ou cuit aux graveleux. On le recommande dans les hydropisies ; Lanzoni et Murray ont cité des exemples de ses bons effets dans ces maladies. Malgré l'opinion de l’école de Salerne, le suc en a été très-vanté contre l’alopécie. Asso- cié à la diète lactée, l'oignon cru a été très-vanté par M. Serre, d'Alais, comme diurétique, et il a employé avec succès cette médication contre l'anasarque. Macéré dans du vin, on le regarde comme vermifuge. Le suc d'oignon, vanté autrefois contre la sur- dité, n'est plus employé aujourd'hui. Les cataplasmes de bulbes cuits sont appliqués sur les tumeurs, les phlegmons, les clous, les panaris, ele. On trouve dans l’Hierobotanicon d'Olaüs Celsius un article très- intéressant sur les oignons, article remarqué par Langlès dans son édition du Voyage en Perse de Chardin (Paris, 1814). Le Poireau (Allium porrum) est employé, comme l'oignon, en guise d’assaisonnement. Avec les feuilles, on a fait des lavements stimulants et des cataplasmes maturatifs. Flore, T. I. 29 A50 FLORE MÉDICALE OLIBAN Boswellia serrata Roxb. {Térébinthacées. ) Le végétal qui produit la substance connue sous le nom d’'Oliban ou Encens de l'Inde est un arbre, dont les rameaux portent, vers leur extrémité, des feuilles imparipennées, à folioles alternes, oblongues, obliques, pubescentes, en général au nombre de dix paires. Les fleurs, petites, verdàtres, sont disposées en épis axillaires dressés, longs de 0,06 à 0%,08, plus courts que les feuilles. Elles présentent un calice libre, à cinq divisions; une corolle à cinq pétales ; dix étamines, à filets alternativement longs et courts, insérés, ainsi que l'ovaire, sur un disque charnu, en forme de coupe, à bords crénelés ; un ovaire à trois loges multiovées, surmonté d’un style cylindrique, terminé par un stigmate trilobé. Le fruit est une capsule trigone, s'ouvrant en trois valves, à trois loges monospérmes. Haprrar. — Cet arbre, dont le tronc laisse exsuder une matière résineuse, habite les Indes Orientales ; il est assez commun dans cer- taines forêts. En Europe, on le trouve à peine dans quelques jardins botaniques. PARTIES uSITÉES. — La gomme-résine, oliban ou encens. Récozre. — On distingue dans le commerce deux sortes d'encens, celui d'Afrique, dont l’origine est encore inconnue, dont on attribue la production au Balsamodendrum Kataf, aux J'uniperus Lycra, Phe- nicea, thurifera, au Pinus tæda, au Terminalia catappa, ete., et qui, dans tous les cas, découle évidemment d'un arbre de la famille des Térébinthacées ; et le véritable encens, connu sous les noms d'O/2- ban, d'Encens mâle, où d'Encens indien (ou mieux #rdou), gomme- résine, produite, comme on vient de le voir, par le Boswellia ser- rata Roxb., et qui abonde dans le Bengale, aux environs de Caleutta. L'encens indien est bien préférable à celui d'Arabie, qui, selon Niebubr, se récolte à Dafar. L'Encens d'Afrique est en petits marrons rougeàlres ou jaune-pâle. Sa cassure est cireuse, translucide ou opaque, ce qui le distingue du mastie, qui est toujours transparent. Il se ramollit dans la bou- che; sa saveur est légèrement àcre. Il possède une odeur musquée ; quelquefois il est en larmes plus petites, mêlées de débris d’écorces. DU XIX° SIÈCLE. 451 Les marrons sont souvent mélangés dans les ballots avec de petits cristaux de spath calcaire (carbonate de chaux) plus ou moins régu- liers. IL est probable qu'ils y ont été ajoutés pour frauder le com- merce. L'Encens indien, qui arrive en grandes caisses, est formé de lar- mes jaunes, demi opaques, arrondies, plus volumineuses que celles de l’encens d'Afrique. Son odeur est parfumée, sa saveur aroma- tique. Les substances étrangères qu’on mêle à l’encens sont la sanda- raque, le mastic et autres résines. Sous le nom d'encens de Suède ou de Æussie, on emploie, dans ces pays, et on à quelquefois reçu en France une résine qui est le produit de plusieurs conifères, et très-certainement, d'après M. Gui- bourt, de l'Epicea et du Pin Laricio. On donne encore le nom d'encens au Selinum palustre, et celui d'encensoir au Romarin, à cause de l'essence balsamique qu'on en tire. CoMPosiTION cimiQuE. — L'encens est incomplétement soluble dans l’eau et dans l'alcool. Il fond difficilement à la chaleur. Il brûle avec une flamme blanche au contact d'une bougie. Distillé à sec, il produit une petite quantité d'huile volatile. Dans le commerce, on donnait autrefois le nom d'encens mâle à celui qui était en larmes plus nettes, plus pures et mieux détachées, et celui d’encens femelle aux larmes moins sèches, irrégulières ou soudées entre elles. D'après M. Braconnot, l’oliban contient, pour 100 parties : résine soluble dans l'alcool, 56; gomme soluble dans l’eau, 30,8; résidu insoluble dans l’eau et dans l’alcool, 5,2; huile volatile, 8 (Ann. de chim., t, LNUT, p. 60). UsaGes. — Le principal emploi que l’on fasse aujourd’hui de l'en- cens consiste à le brûler dans les églises catholiques. Depuis les temps les plus anciens on le brülait dans les temples, probablement à cause de l'habitude qu'ont eue presque tous les peuples de faire des sacri- fices d'animaux, d’où il devait résulter des émanations putrides que l'on cherchait à masquer par des vapeurs aromatiques. L’encens entre dans la composition de la thériaque, du baume de Fioraventi et de divers emplâtres. Hippocrate et Galien le prescrivaient dans les maladies de poitrine, la diarrhée, la leucorrhée, l’asthme humide, et les anciens Égyptiens en faisaient grand usage pour les embaumements. 152 ÉLORE MÉDICALE L'écorce de l'arbre qui produit l'encens était autrefois employée, sous le nom de Cortex Thuris, comme astringente. On la trouve dans les caisses d’encens. Le nom d’encens a été appliqué, comme on l'a dit au paragraphe Récolte, à plusieurs résines produites par des arbres appartenant à diverses familles; mais il doit être réservé aux substances que nous venons d'analyser. OLIVIER Olea Europæa L. OEléinées -Oléées. L'Olivier est un arbre dont la tige, qui peut acquérir une hauteur de 10 à 15 mètres, est couverte d'une écorce lisse, cendrée, et se divise en branches et en rameaux tortueux, dont l’ensemble forme une cime irrégulière. Les feuilles sont opposées, courtement pétio- lées, oblongues, étroites, lancéolées, aiguës, entières, fermes, dures et coriaces, lisses, d’un vert grisätre en dessus, blanchàâtres en des- sous, persistantes. Les fleurs, petites, blanc jaunàtre, forment des grappes courtes et serrées à l’aisselle des feuilles de l'extrémité des rameaux. Elles présentent un calice très-pelit, à quatre dents courtes, étalées; une corolle campanulée, à tube court, à limbe divisé en quatre lobes aigus, étalés ; deux élamines saillantes, insérées sur le tube de la corolle; un ovaire simple, libre, ovoide, à deux loges bio- vulées, surmonté d’un style simple, très-court, épais, terminé par un stigmate épais, allongé, bilobé. Le fruit est une drupe ovoïde, vio- let noirâtre à la maturité, monosperme par avortement. Cette description s'applique à l'Olivier cultivé. Le type sauvage s'en distingue par ses feuilles ovales, plus courtes et plus larges, et ses rameaux endurcis-épineux à l'extrémité. Nous citerons encore l'Olivier odorant (0. /ragrans L.), carac- térisé par ses feuilles ovales-lancéolées, dentées en scie, et par ses fleurs solitaires à l'extrémité de pédoncules latéraux, agrégés. Hasirar. — L'Olivier commun nous est venu de l'Asie Mineure ; introduit en Provence par les Phocéens fondateurs de Marseille, il s’est répandu et naturalisé dans toutes les contrées de l'Europe mé- ridionale et du nord de l'Afrique, où il est cultivé en grand, comme arbre fruitier et oléagineux. Il croit spontanément en Perse, en Syrie, en Arabie, dans la chaîne de l'Atlas. L'Olivier odorant DU XIX® SIÈCLE. 133 croit en Chine et au Japon, et ne se trouve, en Europe, que dans Îles jardins botaniques. Parties usirées. — Les feuilles, le bois, l'écorce, les fruits ou olives, la gomme d'olivier. Récoure. — Les feuilles d'olivier, d’un rare usage aujourd'hui, sont cueillies au mois de mai et de juin; il en est de même de l'écorce. On les fait dessécher et on les conserve pour l'usage. Les olives vertes destinées à être servies sur nos tables sont cueil- lies avant leur maturité, au mois de juin et de juillet. On les con- serve dans de l’eau salée ou saumure. On en connaît plusieurs varié tés. Les plus estimées sont les olives longues où Pichoulines. Pour l'extraction de l'huile, on eueille les olives à leur parfaite maturité, c’est-à-dire lorsqu'elles sont d’un violet tellement foncé, qu’elles paraissent noires. On écrase les fruits au moulin ; l'huile qui s'écoule ou qui surnage sans expression porte, à Montpellier, le nom d'Huile vierge, tandis qu’à Aix-en-Provence, on nomme ainsi l'huile obtenue par première expression. Cette Auile d'Aix est très-douce, un peu verdätre, d'un goût de fruit prononcé, très-solidifiable par le froid ; elle est fort recherchée pour la table. | Sous le nom d’'AHuile ordinaire on fabrique, à Montpellier, une huile obtenue par expression des olives écrasées, mélangées avec de l'eau bouillante. À Aix, on l’obtient de la même manière avec les olives qui ont déjà servi à préparer l'huile vierge. Cette huile est jaune, moins solidifiable que la précédente, douce au goût, très-estimée pour la table et pour les préparations pharmaceutiques. Les olives fraiches, abandonnées en tas considérables avant d’être écrasées, fermentent, c’est-à-dire que le parenchyme se ramollit, ce qui permet d'en retirer l'huile plus facilement. Pour cela, on mé- lange les fruits fermentés et écrasés avec de l’eau bouillante et on exprime. L'huile ainsi obtenue est plus abondante ; on la nomme Huile fermentée ; elle est âcre, elle a quelquefois un goût de moisi. Ce procédé, très-suivi en Italie, en Espagne et en Algérie, est à peu près abandonné en France. Enfin, on donne le nom d'Æwile tournante, où Huile d'enfer, à un produit que l'on obtient en faisant bouillir avec de l'eau tous les rési- dus des opérations précédentes, et en soumettant à une nouvelle ex- pression. L'huile ainsi obtenue est désagréable, infecte; elle n'est employée que pour les savonneries et pour l'éclairage. Enfin, l'eau 454 FLORE MÉDICALE qui a servi à ces diverses opérations est conduite dans de grands ré- servoirs nommés Æ£n/ers, et, après quelques jours de repos, on en sépare une huile employée aux mêmes usages que la précédente. L'huile d'olives est souvent falsifiée, dans le commerce, au moyen de l'huile blanche, ou huile d'œillette, qui est préparée avec les graines de pavots, et qui est beaucoup moins estimée. Les pro- cédés employés pour reconnaitre cette fraude sont les suivants : 1° l'huile d'olives pure se congèle vers 11° + 0; le point de congé- lation est d'autant plus retardé qu'elle renferme de l'huile blan- che ; 2° l’huile d'olives pure, agitée dans un flacon, fait très-peu de chapelet, c’est-à-dire que les globules d'air enfermés dans l'huile par l'agitation disparaissent rapidement, tandis qu'ils persistent très- longtemps dans l'huile blanche; 3° l'huile d'olives pure, mise en contact d’une petite quantité de nitrate acide de mercure (Réactif Poutet) ou d'acide nitrique nitreux, se solidifie en se transformant en acides oléique, margarique et éloïdique. Cette solidification est d'au- tant plus retardée que l'huile examinée contient une plus forte pro- portion d'huile blanche, et elle n’a pas lieu si on opère sur l'huile blanche pure ; 4° l'abbé Rousseau a construit un instrument qu'il à nommé dagomètre, qui sert à démontrer la pureté de l'huile d'olives; il est basé sur le principe que l'huile d'olives conduit l'électri- cité 625 fois moins que les autres huiles végétales, et qu'il suffit d'ajouter deux gouttes d'huile d'æillette ou de faîne à 10 grammes d'huile pure pour quadrupler son pouvoir conducteur (Journ. de pharm., LAX, p. 587, et t. X, p. 216). Le principe de cet instru- ment est basé sur l’action qu’exerce un courant électrique à faible tension, produit par une pile sèche, sur l'aiguille aimantée ; 5° enfin, sous le nom d’é/aïomètres, on a construit des densimètres qui ser- vent à démontrer la pureté de l'huile d'olives. Les plus employés sont ceux de Lefèvre et de M. Gobley. La gomme d'olivier, qui élait très en réputation chez les anciens, nous venait autrefois de l'Éthiopie. Aujourd'hui elle est récoltée sur les oliviers qui croissent dans le royaume de Naples ; elle ressemble à la sarcocolle; elle est sous forme de petites larmes rougeâtres, transparentes ou opaques, quelquefois agglomérées, se ramollis- sant par la chaleur; elles sont solubles dans l'alcool bouillant. Le liquide laisse déposer par refroidissement une matière particulière que M. Pelletier a désignée sous le nom d'O/irile : c'est une matière DU XIX° SIÈCLE. 405 blanche fusible à 70° ; elle n’est pas azotée et elle se dissout dans les alcalis. Cette substance a été plus récemment étudiée par M. Lévy. Cowposirion caimique. — Toutes les parties de l'olivier renferment une matière âcre et amère. Pelletier, qui a analysé les feuilles, y a trouvé une matière acide colorante, de l’acide gallique, une matière grasse, de la chlorophylle, de la cire végétale, de l'acide malique, de la gomme et de la fibre végétale (Journ. de pharm., octob. 1823). Pallas (Journal des scienc. médic., t. XLIX, p. 257), a constaté, dans les feuilles et dans l'écorce, la présence de l'olivile. L'huile d'olives a une densité de 0,9153 ; elle est composée d’un mélange de margarine et d’oléine. Sous l’influence des alcalis elle se dédouble en acides oléique et margarique et en glycérine. Usages. — L'huile d'olives est le véhicule des huiles médicinales simples ou composées, qui toutes s’obtiennent par digestion des substances fraiches ou sèches au contact de l’eau avec l'huile. Elle entre dans la composition de certaines pommades ou onguents, des savons à base de potasse ou de soude, et de l'emplâtre simple ou savon à base d'oxyde de plomb. La gomme ou résine d’olivier, autrefois employée à l'extérieur comme eicatrisante et vulnéraire, est tout à fait inusitée au- jourd'hui. Les feuilles et l'écorce d’olivier ont joui d'une très-grande répu- lation comme propres à remplacer le quinquina dans le traitement des fièvres intermittentes, dans les fièvres typhoïdes, les maladies atoniques. Très-vantées par Pallas et par le docteur Bonnet, et dans ces derniers temps par M. Faucher, elles sont aujourd’hui à peu près inusitées. L'huile d'olives est souvent employée à l'extérieur comme émol- liente et adoucissante ; elle sert à préparer l'Awÿe camphrée, qui est un léger rubéfiant. Mêlée à l’eau de chaux, elle constitue le liniment oléo-calcaire, très-employé contre les brûlures au premier et au se- cond degré. A l’intérieur, elle est souvent administrée pour combattre les empoisonnements par les substances irritantes. Elle exerce, d’ail- leurs, sur le canal intestinal, une légère action laxative. Le marc d'olives a été proposé contre le rhumatisme chronique, la goutte et la paralysie. On l’appliquait sous forme de cataplasmes, on plongeait même dans ce cas le corps entier dans Je mare d'olives, moyen qui n’ést pas sans danger. 456 FLORE MÉDICALE Les fleurs de l'O/ea fragrans L., où Lanhoa des Chinois servent à donner l'odeur au thé dit Chulan ou Schoulang, que l'on mé- lange aux feuilles d'une variété de thé vert. Cette addition de fleurs aromatiques se fait encore avec les fleurs du Camellia sesanqua el celles du Mongorium sambac, de Va famille des Jasminées. C'est ce qu'on appelle chwlaner le thé. Le bois de l'olivier est jaunaätre, marbré de veines brunes, très- dur, compacte, susceptible d'un beau poli, et n’est sujet ni à se fendre, ni à être attaqué par les insectes. Les sculpteurs anciens le préféraient à tout autre pour leurs ouvrages. Quoi qu'on en fasse peu d'usage aujourd'hui, il est éminemment propre aux ouvrages de tour de tabletterie et d’ébénisterie. C'est un excellent bois de chauffage. OMPHALÉE Omphalea diandra et triandra L. (Euphorbiacées - Acalyphées.) L'Omphalée grimpante ou à deux étamines (0. dandraL., O. cor- data Swartz) est un arbrisseau, dont la tige se divise en longs ra- meaux sarmenteux et grimpants, portant des feuilles alternes, stipu- lées, pétiolées, cordiformes, aiguës, entières, pubescentes à la face inférieure. Les fleurs, petites, verdàtres, monoïques, munies de brac- tées lancéolées obtuses, sont disposées en grandes panicules termi- nales. Elles présentent un calice à quatre divisions inégales, arron- dies, concaves, charnues, et sont dépourvues de corolle. Les mâles ont deux étamines incluses, à anthères roses, didymes, sessiles, insé- rées sur un disque hypogyne pelté, glanduleux, bilobé, pourpre vio- lacé. Les femelles ont un ovaire arrondi, à trois angles mousses et à trois sillons, divisé en trois loges uniovulées, surmonté d'un style court, épais, terminé par un stigmate bifide. Le fruit est une grosse baie globuleuse, jaunâtre, à trois loges remplies d'une pulpe molle, filandreuse, blanchâtre, et contenant chacune une graine à coque dure et brunâtre. L'Omphalée à trois étamines (0. triandraL., O.mucifera Swartz), vulgairement Noisetier d'Amérique, est un arbre, dont la tige, haute de 12 à 15 mètres, se divise en rameaux portant des feuilles alternes, oblongues, obtuses, entières, glabres, longues de 0,20 à 0,30, et des fleurs verdâtres, groupées en panicules longues de 0°,75 environ, DU XIX° SIÈCLE. Loin d'abord dressées, puis pendantes. Ces fleurs ont un calice à cinq di- visions, dont trois plus grandes, colorées et membraneuses sur les bords. Les mâles ont trois étamines, insérées sur un disque rouge pourpre. Le reste est comme dans l'espèce précédente. Hagrrar. — Les omphalées croissent dans les régions équato- riales de l'Amérique, notamment aux Antilles et à la Guyane. Elles habitent surtout les plages maritimes, et ne sont pas cultivées. En Europe, on ne les trouve que dans les jardins botaniques. PARTIES USITÉES. — Les semences, le suc desséché. Récocre. —- Les fruits de l'omphalée ou Omnphalier renferment des graines qui sont employées. Ces fruits portent le nom de Graines de l'Anse, du lieu où croît la plante qui les produit. Les naturels du pays appellent la plante Liane popaye. CoMPosiTION CHIMIQUE. — Les amandes donnent, par expression, une huile douce, bonne à manger. Par incision de la plante, on ob- tient un suc blanc qui, élant concrété au soleil ou au feu, fournit du caoutchouc d'assez bonne qualité. UsaGes. — Les amandes des omphalées sont comestibles; seule- ment Aublet recommande d'en séparer l'embryon, qui les rend pur- gatives. M. Pérottet ne cite pas cette particularité; il dit simplement qu'elles sont bonnes à manger, et qu’on en fait des cerneaux (Ann. de la Société Linn. de Paris, mai 1824). Le Noiselier de l'Amérique ou de Saint-Domingue (Omphalea trian- dra) porte un fruit dont les graines sont analogues à nos noisettes. On en retire une huile regardée comme pectorale. On les mange ; mais elles rancissent très-vite (Nicholson, Histoire natur. de Saint-Domingue, &. IT, p. 226). L'huile est administrée aux femmes en couches, et les fleurs sont regardées comme astringentes (Æ/ore méd. des Antilles, tH;-p:.92). OPOPANAX Opopanax Chironium Koch. Laserpitium Chironium L. { Ombellifères - Peucédanées.) L'Opopanax ou Panacée est une plante vivace, à racine épaisse, ra- meuse. La tige, haute de 1 à 2 mètres, cylindrique, fistuleuse, striée, rude, hispide à la base, porte des feuilles alternes, longuement pé- tiolées, un peu épaisses; les inférieures simples, cordiformes ; les caulinaires à pourtour triangulaire, à segments pennés ou ternés, ou 158 FLORE MÉDICALE bien deux fois pennatiséquées, à segments obliques, cordiformes; les supérieures presque réduites au pétiole élargi et engaiînant. Les fleurs, jaunes, sont groupées en larges ombelles planes, terminales, à rayons nombreux, entourées d’un involuere et munies d’involu- celles à plusieurs folioles. Elles présentent un calice à bord oblitéré: une corolle à cinq pétales arrondis, entiers, inégaux. Le fruit est un diakène ovale, comprimé, marqué de trois côtes sur chaque face, et entouré d’une aile membraneuse épaisse. Hagrrar. — L'opopanax croit sur les bords du bassin méditerra- néen. On ne le cultive que dans les jardins botaniques. PARTIES uSITÉES. — La gomme-résine opopanax. RécoLre. — La gomme-résine opopanax passait pour être extraite d'une plante nommée Panaces herasleum par Dioscoride et dont les caractères se rapprochent de l'ÆHeracleum panaces L.; mais on l'at- tribue aujourd’hui à l'Opopanaz Chironium Koch. On trouve cette gomme-résine, dans le commerce, en larmes et en masses. L'opopanax en larmes est en fragments variables de grosseur, mais ne dépassant jamais celle d’une petite noix. Ces fragments sont rougeûtres ou jaunâtres, légers, friables, amers, aromatiques, sou- vent attaqués par les larves d'insectes, ce qui les distingue, ainsi que leur légèreté, de la myrrhe, avec laquelle on peut les confondre. Leur opacité, leur friabilité, leur légèreté et leur destruction par les larves sont dues à de l’amidon que cette substance contient en abondance. L'opopanax en masses est sous forme de grumeaux agglutinés, jau- nâtres en dehors, blanchâlres en dedans, odorants, ressemblant au galbanum. I n’est pas attaqué par les larves. L'opopanax nous vient généralement du Levant, et particulière- ment de la Syrie, par Marseille, quoique l’on en récolte aussi aux Indes-Orientales. Cullivée en France, la plante ne fournit pas de gomme-résine. Comrosirion cHimiQue. — D'après M. Pelletier, l'opopanax con- tient, pour 100 parties : résine, 42,00 ; gomme, 33,4; amidon, 4,2; extractif d'acide malique, 4,4; ligneux, 9,8; cire, 0,3; huile vola- üile, 3,9: Usaces.— L'opopanax est le Baryosnos de Dioscoride. La gomme- résine est regardée comme anti-spasmodique, et comparée, par ses effets, aux autres gommes-résines d'ombellifères. On l'a quelquefois employée comme antihystérique et emménagogue. Elle entre dans DU XIX° SIÈCLE. 459 une foule de médicaments polypharmaques, parmi lesquels nous cite- rons la thériaque, l'emplätre diabotanum et le manus Dei. Celle gomme, regardée comme tonique et excitante est très-peu em- ployée de nos jours. Cependant son odeur forte peut faire supposer qu'elle possède des propriétés réelles. ORANGER Citrus aurantium L. (Hespéridées.) L'Oranger est un arbre de moyenne grandeur, à racines traçantes, jaunâtres. La tige, droite, robuste, couverte d’une écorce brun cen- dré, se divise en branches et en rameaux, dont l’ensemble forme une cime arrondie, et qui portent des feuilles alternes, articulées, à pétiole ailé, à limbe oblong, pointu, glabre, luisant, d'un vert un peu jaunâtre, parsemé de points glanduleux, transparents. Les fleurs, grandes, blanches, très-odorantes, sont disposées en grappes courtes, terminales. Elles présentent un calice court, à cinq divisions étalées ; une corolle à cinq pétales ovales, obtus, épais, un peu charnus, glanduleux ; une vingtaine d'étamines, à filets réunis en plusieurs faisceaux et rapprochés en tube; un ovaire globuleux, à huit à dix loges, surmonté d'un style court, terminé par un stigmate épais, arrondi, jaunâtre. Le fruit est une hespéridie arrondie, rouge orangé, renfermant une pulpe fibreuse, douce, sucrée et légèrement aci- dule. Hagrrar. — Originaire de l'Asie orientale et méridionale, l'oran- ger est aujourd'hui cullivé sur tout le pourtour du bassin méditer- ranéen. * PARTIES usitéEs. — Les feuilles, les fleurs, les fruits, les zestes ou écorce des fruits, le bois, les petits fruits ou orangettes. Récore. — Nous avons dit ailleurs, en parlant du bigaradier (Voyez Flore médicale, 1. Y, p.180), que les diverses préparations de fleurs d'oranger employées en médecine, en pharmacie et en par- fumerie étaient faites avec les différentes parties de cet arbre et non avec le véritable oranger, Citrus aurantium. Pour tout ce qui est relatif à la récolte des feuilles, des fleurs et des écorces d'oranger, nous renverrons à l’article Big\raDieR (Flore médicale, LV, p. 180) et au mot Crrronnier (/Vore médicale, {. 1, 115 FLORE MÉDICALE p. 350). Ce que nous disons de ces deux plantes peut également se rapporter à l’oranger vrai, dont les différentes parties peuvent être substituées à celles du bigaradier, quoiqu'elles soient moins suaves. Nous ajouterons seulement quelques détails à ceux que nous avons déjà donnés sur les bois de ces plantes, qui sont presque toujours confondus sous le nom de bois de citronnier ou de citron. On a dé- signé sous ce dernier nom des bois d'origines bien différentes : ainsi le bois de citron de Cayenne où bois jaune de Cayenne est le bois de Licari où bois de rose de Cayenne; il est produit par un arbre de la famille des laurinées, le Licaria Guianensis (bois de citron du Mexique), où Lignaloe où Linalué (bois d'aloës), est attri- bué à un Ayris. Quant au bois de Citrus d'Afrique (dont on fai- sait du temps de Cicéron et de Pline des tables d'un prix si con- sidérable, qu’on en cite une qui appartenait à Tibère, dont Île diamètre était de 1°,226 et dont la valeur était portée à plus de 100,000 francs de notre monnaie), il est certain qu'il était produit par un arbre de la famille des conifères, des genres Thuya juniperus ou Cupressus. Les pois à cautères qu'on faisait autrefois, et qu'on nommait pos d'oranges, pouvaient être préparés avec loute espèce de bois du geure Citrus, ou bien avec les petits fruits à peine développés, ou oran- gettes. Les fruits de l’oranger doux que l’on mange sont plus ou moins globuleux, quelquefois un peu déprimés (tels que ceux nommés #7a- darines), revètus d'un zeste lisse ou à peine rugueux, présentant une couleur jaune safranée, recouvrant une pulpe mince, filamenteuse, insipide ou un peu amère, et n'adhérant pas à la baie qui est très- volumineuse et se laisse séparer facilement en huit ou dix loges, formées chacune par de grandes vésicules oblongues pleines d’un. suc doux, sucré, agréable, portant vers leur angle interne une ou deux graines, blanches, oblongues et assez volumineuses. L'oranger du Portugal est le plus commun, puis vient celui de Chine (Ferrari, Tab., 427), l'oranger à fruit rouge, V'oranger à écorce douce, celui à écorce épaisse (Ferrari, 379), l'oranger à fruit nain, l’oranger à fleurs doubles, donnant des fruits qui en renferment souvent un second à l'intérieur ; la pampelmous d'Amboine (C. au- rantium decumanum) dont les fruits énormes sont connus sous le nom de pampelmous, et par corruplion pamplemousses ; puis enfin .DU XIX° SIÈCLE. 461 un nombre considérable d'hybrides, parmi lesquels nous citerons l’oranger à jiqure de limon où lime orangée (Ferrari, Tab., 385), l’oranger à fruit panché de blanc Ferrari, Tab., 399), et l’oranger à fruit strié (Ferrari, Tab., 401), ete. Quant aux fruits de l’oranger ou oranges, on les distingue par les uoms de leurs variétés ou par leur provenance. Les oranges man- darines, quoique plus petites, sont les plus estimées; puis viennent, pour la consommation en Europe, les oranges de Portugal, de Valence, de Blidah, d'Italie, de Nice, de Provence, etc. Les écorces d’oranges douces, que l’on vend quelquefois dans le commerce comme écorces d'oranges amires, s'en distinguent par leur nature spongieuse, par leur saveur fade et peu amère. COMPOSITION CHIMIQUE. — À cet égard encore, tout ce que nous avons dit relativement à la composition chimique du bigaradier et du cilronnier s'applique également à l’oranger, si ce n'est toutefois que les parties sont moins riches en essences, que les fruits contiennent moins d'acide citrique et plus de sucre. Quant aux essences retirées des différentes parties de ces plantes, quoiqu’elles paraissent identi- ques sous le rapport de leur composition chimique et de quelques- unes de leurs propriélés physiques, on les distingue en parfumerie et on leur donne les noms de leurs fruits respectifs. Rappelons que celle que l'on extrait du zeste de l’orange est la plus légère de celles des aurantiacées, puisque à l’état brut sa densité est de 0,844, et de 0,835 lorsqu'elle est distillée. C’est aussi celle qui agit le plus fortement sur la lumière polarisée; elle la dévie de 127 vers la droite. Usaces. — Les feuilles et les fleurs d'oranger sont classées parmi les médicaments antispasmodiques; on les emploie en infusion, soit seules, soit mélangées avec les fleurs de tilleul. L'ezu de fleurs d'oranger, qui devrait être toujours préparée avec les fleurs, est sou- vent falsifiée par la présence des feuilles. On considère encore ces préparalions comme toniques, stomachiques, vermifuges, sudori- fiques et même fébrifuges; on les emploie dans tous les cas où 1l y a des désordres nerveux plus ou moins caractérisés, dans les né- vroses, les toux convulsives, les fièvres typhoïdes, etc., mais souvent aussi à titre d'aromalisant dans les polions. L'art culinaire, la con- fiserie, la patisserie et les liquoristes en consomment beaucoup plus que la médecine. Les feuilles, autrefois si vantées contre l'épilepsie par Locher, 162 FLORE MÉDICALE Dehaen, Welse, Storch, Hufeland, ete,, sont tout à fait abandonnées aujourd’hui dans cette maladie, ainsi que dans l'onanisme, cas dans lequel Tissot démontre leur impuissance; mais avec Dehaen, ce der- nier leur accorde quelque efficacité dans la chorée, la toux convul- sive et l’hystérie. M. le professeur Dupré, de Montpellier, les con- seille en infusion très-chaude, prise immédiatement après l'huile de foie de morue, dans le but de faire supporter celle-ci. Les fleurs d'oranger ne sont employées que sous la forme d'eau distillée. L'écorce d'orange est tonique et stimulante ; on en prépare un sirop qui est employé avec succès dans tous les cas de débilité générale. M. Hannon, de Bruxelles, recommande l'essence dans les cas de névroses gastro-intestinales. Les fruits et les sucs, mêlés à l'eau sucrée, forment l'orangeude, excellente boisson que l’on donne aux malades dans les fièvres inflam- matoires bilieuses , putrides et adynamiques, dans les hémorra- gies, le scorbut, les irritations gastriques et génito-urinaires, ete. Le sirop d'oranges fait avec le suc se donne dans le même cas que l’oran- geade. La pulpe cuite d’oranges à été conseillée par le docteur Wright, sous forme de cataplasmes pour panser les ulcères fétides. Ferre (Mat. méd., t. ME, p. 86) préconisait la partie blanche du fruit contre la dysurie. Enfin nous avons indiqué ailleurs l'usage que l'on fait encore quelquefois des pois d’oranges et des orangettes pour le pansement des caulères. ORCANETTE Atkanna tinctoria Tausch. Anchusa tinctoria Desf. Lithospermum L. ( Borraginées - Borragées.) L'Orcanette, Buglose tincloriale ou Grenil tinclorial, en arabe Alkanna, est une plante vivace, à racine dure, Jigneuse, rameuse, rougeàtre. La tige, haute de 0,20 à 0",30, ascendante ou couchée, faible, pubescente-laineuse ou hispide, porte des feuilles alternes, étroites, lancéolées, hispides, rudes au toucher; les radicales pé- tiolées et groupées en rosette ; les caulinaires sessiles, cordiformes, embrassantes. Les fleurs, ordinairement bleues, mais passant quel- quefois au pourpre ou au blanc, sont réunies en grappes unilaté- rales, terminales, munies de bractées et roulées en crosse ou scor- DU XIX° SIÈCLE. 463 pioïdes. Elles présentent un calice turbiné, à cinq divisions; une corolle en entonnoir, à tube velu en dedans, ainsi que la gorge, qui est ouverte et munie de cinq callosités glabres, à limbe divisé en cinq lobes obtus; cinq étamines incluses ; un pistil composé de deux carpelles à deux loges uniovulées, formant une sorte d'ovaire qua- drilobé, surmonté d'un style simple terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes tuberculeux, entourés par le calice persistant. On à donné aussi le nom d'orcanette à plusieurs autres plantes de la même famille. Telles sont la lycopside vésiculeuse ou orcanette à vessies (ZLycopsis vesicaria L., Echioides violacea Desf.), l'onosma gigantesque (Onosma gigantea Lam.) et l'onosma vipérine ou orca- nette jaune (Onosma echioïdes L.) Hagirar. — La véritable orcanette ou alkanna se trouve dans les régions méridionales de là France et de l'Europe. Elle croit de pré- férence dans les lieux arides et pierreux. On ne la cultive que dans les jardins botaniques. PARTIES usITÉES. — Les racines. Récorre. — Dans le commerce, la racine d'orcanette que l’on ré- colte se présente sous la forme de fragments brisés de la grosseur du doigt, recouverts d’une écorce foliacée écailleuse, ridée, brisée, d’un violet foncé; le corps ligneux est formé de fibres distinctes, accolées, rouges à l'extérieur, mais blanches à l’intérieur. Cette racine est ino- dore, peu sapide. ComPosITION CHIMIQUE. — D'après M. John, l’orcanette présente la composition suivante : anchusine, 5,50; matières extractives, 4,0 : gomme, 6,25; ligneux, 18,0; matières indéterminées, 65,0 ; perte, 4,25; total, 400. L'anchusine = C° H*° Of a été étudiée par Pelletier; elle est inso- luble dans l’eau, très-soluble dans l'alcool et dans l'acide acétique; les alcalis et les lerres alcalines lui donnent une belle coloration bleue; le chlore et les acides la détruisent ; l’acétate neutre, le sous- acétate de plomb, le proto-chlorure d'étain, les sels de fer et d’alu- mine la précipitent. On l'obtient en épuisant l’orcanette par l'eau, séchant le résidu que l'on reprend par de l'alcool aiguisé d'acide chlorhydrique, évaporant la liqueur en consistance sirupeuse et agi- tant avec de l’éther qui dissout l’anchusine, que l'on isole par l’éva- poration spontanée. 464. VLÔRE MÉDICALE M. John, de Berlin, regarde l’anchusine comme un principe parti- culier, et la nomme pseudo-alkannin pour la distinguer de la couleur de l’alkanna. M. Chevreul à trouvé de l'acide phocénique dans la racine d'orcanette. Usages. — L’orcanette n'est pas employée en médecine; on s’en sert en pharmacie pour colorer les pommades en rose; le principe colorant est, en effet, très-soluble dans les corps gras. Aux États- Unis, l'A. Verguuca fut employée à l'instar de l’orcanette. Dans le nord de l'Europe, on trouve l'A. oficinalis L., qui, au rapport de Mayer, est regardée par les habitants de Strityki comme infaillible contre la rage (Nouv. Bibliot. méd., 1828, t WE, p. 443, extrait du Journal d'Hufeland ). Les diverses plantes de la même famille, auxquelles on a donné le nom d'orcanette, renferment dans leurs racines une matière colorante analogue à celle que l'on trouve dans l'A. #nctoria. ORCHIS Orchis maseula, Morio et conopsea L. (Orchidées -Ophrydées.) L'Orchis mâle (0. zrascula L.), appelé quelquefois Salep ou Satv- rion, est une plante vivace, à bulbes entiers, ovoides, blanes, charnus, entourés de racines fibreuses, grèles, cylindriques, fasciculées. La tige, haute de 0,40 à 0",50, cylindrique, glabre, simple, porte des feuilles alternes, ovales-oblongues ou lancéolées, glabres, luisantes, quelquefois marquées de taches brunes, et se termine par un épi lâche, allongé, de fleurs purpurines, rarement blanches. Chaque fleur est située à l’aisselle d'une bractée, membraneuse, colorée, à une seule nervure, et présente un périanthe pétaloïde, à six divisions alternant sur deux rangs; les trois extérieures libres, ovales-oblon- gues; deux des intérieures latérales, étalées, puis réfléchies; la troi- sième (/abelle) pubescente, à trois lobes larges, dentés, le médian échancré, prolongé en éperon ascendant ou horizontal, evlindrique, épais, oblus ; une étamine à anthère persistante, à deux lobes, rem- plis de grains de pollen agglomérés en masses; un ovaire infère, formé de trois carpelles, à une seule loge mulliovulée, à trois pla- centas pariétaux saillants, surmonté d'un stigmate glanduleux, sessile. Le fruit est une capsule trigone, surmontée des restes du périanthe, DU XiIX' SIÈCLE. ÀG5 à une seule loge s'ouvrant en trois valves et renfermant un grand nombre de graines très-pelites (PI. 49). L'orchis morion (0. Morio L.) est aussi vivace, et se distingue du précédent par ses bulbes entiers et arrondis ; par sa tige moins élevée ; ses fleurs d’un rose lilas ou violacé, à divisions conniventes ou en casque arrondi, obtus, veiné de vert, à labelle oblong, divisé en trois lobes larges, ohtus, présentant des taches blanches ponctuées de lilas; enfin, son éperon oblong, conique, un peu comprimé (PI. 49). L'orchis à long éperon (0. conopsea L., Gymnadenia Rich.) est une plante vivace, à bulbes palmés; la tige, haute de 0,40 à 0",60, porte des feuilles lancéolées, linéaires, allongées. Les fleurs, rosées ou purpurines, odorantes, placées à l’aisselle de bractées lancéolées, à trois nervures, sont disposées en épi compacte, cylindrique, allongé, aigu, terminal. Elles présentent un périanthe à six divisions ; les trois extérieures latérales, élalées, la supérieure connivente en cas- que avec les deux divisions intérieures; le labelle à trois lobes ovales, obtus, prolongé en éperon grêle, arqué, aigu, deux fois plus long que l'ovaire. Hagrrar. — Ces plantes sont assez abondamment répandues en Europe ; on les trouve surtout dans les prés et les pâturages humides, sur la lisière et dans les clairières des bois. On ne les cultive que dans les jardins botaniques, où l'on se contente de transplanter des pieds sauvages, qui sont en général assez difficiles à conserver. PARTIES uSITÉES. — Les tubercules ou salep. Récozte. — Geoffroy a démontré le premier que les tubercules des différents Orchis indigènes, privés de leur épiderme, lavés, plongés dans l’eau bouillante et séchés, donnaient un salep en tout semblable à celui des Orientaux et qu'ils peuvent le remplacer. Quoiqu'on ait obtenu ainsi un salep qui rivalise avec celui d'Orient, cette exploi- tation n’est pas faite en France. Les espèces d'orchidées susceptibles d’en fournir sont les Orchis morio, muscula, militaris, ete., les Orchis fusca, bifolia, latifolia, pyramidalis, Jurcina et maculata, et les Ophrys apifera, arachnates, et anchpophora. Le salep du commerce nous vient de la Turquie, de la Natolie et de la Perse. Ce sont de petits bulbes ovoides, enfilés sous forme de chapelets; ils sont gris jaunàätre, translucides, d'un aspect corné; leur odeur, très-faible, rappelle un peu celle du mélilot; leur saveur est mucilagineuse et salée; ils ont l'aspect de la gomme. Flore, T. Il. 40 466 FLORE MÉDICALE Sous le nom de sa/ep royal (Badshah saleb), 1 vient des Indes Orientales un gros salep, dont chaque bulbe est long de 0,03 à 0,05 et du poids de 15 à 47 grammes; il a l’aspect du salep ordinaire, mais il s’en distingue par son amertume, un peu d'äcrelé et son absence d’amidon, de sorte que si cette espèce de salep devenait abon- dant, on ne pourrait pas le substituer au produit oriental. M. Lindley croit que le sa/ep royal qui nous vient de Bombay, est produit par une tulipe croissant dans l'Afghanistan, peut-être la tulipe ŒÆ77 de soleil (Tulipa oculus solis, Saint-Amans). D'après MM. Mathieu de Dombasle et Beissenhirte, le moment le plus favorable à la récolte du salep est celui où la végétation exté- rieure de l’année cesse; le bulbe ancien est détruit, mais le nouveau est très-succulent. On ne récolle que ce dernier; on enlève les radi- celles, on les lave, on les enfile en forme de chapelets et on fait bouillir à grande eau, jusqu'à ce que quelques bulbes soient trans- formés en pulpe mucilagineuse ; on fait ensuite sécher au soleil ou à l'étuve; l'ébullition a pour but de rendre les bulbes diaphanes et de leur enlever leur odeur. ComrosiTioN CHIMIQUE. — Le salep est formé de grandes cellules, en- tourées d’un méat épais, peu translucide, formé de granules d’amidon, que l'on ne retrouve pas dans les cellules ; celles-ci renferment une malière insoluble, mais très-expansible dans l'eau, et que l’on a prise pour de la Bassorine. On y trouve en même temps une matière mu- cilagineuse soluble, que l’on croit être un état de cohésion de la partie insoluble ; enfin on trouve dans le salep un peu de matière azotée, du sel marin et du phosphate de chaux. Mis dans l’eau, le salep se gonfle plutôt qu'il ne se dissout ; pour le réduire en poudre, il est indispensable de le laisser macérer pen- dant douze heures dans de l’eau ; on l’essuie avec un linge rude et on le pile dans un mortier de fer. Le salep de Perse est plus insoluble que celui de nos climats. L'amidon du salep, de même que celui du sagou, n’a pas la même structure que celui de la pomme de terre et des céréales; il est formé d’une masse pulpeuse insoluble dans l'eau bouillante, mais s’y gon- flant considérablement. Usaces. — Le salep n’est employé qu'en poudre; c'est un analep- tique et non un médicament. Délayé dans de l’eau, du bouillon ou du lait, il sert à préparer des bouillies ou des gelées destinées à sustenter DU XIX* SIÈCLE. 461 légèrement les convalescents, à tromper leur faim, en leur donnant peu de matière alimentaire sous un grand volume. On le fait entrer dans des pâtes et du chocolat; on le regarde comme émollient et adoucissant ; on le fait prendre dans les irritations de poitrine, la phthisie, la fièvre hectique, le marasme, les irrilations intestinales, la diarrhée, la dysentérie chronique. M. Dubois, de Tournay, a proposé la poudre de salep pour remplacer l’amidon dans la confection des bandages inamovibles, mais la dex- trine remplit mieux le même but et coûle moins cher. La famille des orchidées donne encore à la médecine les feuilles de faham, fahon où fahum, produit par l'Angræcum fragrans Dup.-Thou. Cette dernière plante croit aux îles Maurice et Bourbon; elle est remarquable par son odeur, qui se rapproche de celle de la vanille et de la fève Tonka. On l’administre en infusion théiforme et on en fait un sirop agréable; elle est administrée comme digestive et dans la phthisie. ORGE Hordeum vulgare, heæastichon et distichon L. {Graminées - Tricticées.) ._ L'Orge commune (7/7. vulgare L.) est une plante annuelle, à racines fibreuses, capillaires. Les tiges (chaumes), peu nombreuses ou pres- que solitaires, hautes d'environ un mètre, assez robustes, fistuleuses, . noueuses, dressées, glabres et un peu glauques, portent des feuilles alternes, engainantes, planes, lancéolées-linéaires, très-aiguës, glabres, un peu rudes au toucher. Les fleurs, verdâtres, sont groupées en épi serré terminal, dont l’axe présente des dents alternes, portant cha- cune trois épillets. Chaque épillet est accompagné d’une glume à deux valves linéaires, aiguës, glauques, lerminées par une soie très- longue et très-fine. La fleur unique de l’épillet a une glumelle à deux valves, la supérieure marquée de deux carènes, l’inférieure convexe, à sommet terminé par une longue arète; trois étamines pendantes; un ovaire simple, velu au sommet, surmonté de deux stigmates plumeux. Le fruit est un caryopse oblong, un peu comprimé et Jaunâtre. L'orge carrée ou à six rangs (/7. kexastichon L.), plus connue sous le nom d'orge d'hiver, est aussi annuelle et diffère à peine de la pré- cédente; elle s’en distingue néanmoins par son épi plus court, plus GS FLORE MÉDICALE épais, presque tronqué, nettement hexagonal, à six séries longitudi- nales et également proéminentes d'épillets, tandis qu'il y a seulement quatre séries proéminentes dans l'orge commune. L'orge distique ou à deux rangs (/1. distichon L.), appelée aussi vul- cairement Pamelle où Paumelle, est un peu plus distincte des deux autres. Elle a toujours six séries d'épillets, mais deux seulement sont proéminentes. Les épillets moyens ont une fleur hermaphrodite, distique, munie d’une arète robuste beaucoup plus longue que l'épi; les latéraux ont une fleur stérile, rudimentaire, dépourvue d'arète. HapiraT. — Ces plantes, dont on ignore la vraie patrie, mais que es anciens ont cru originaires de la Sicile, sont aujourd'hui cultivées en grand, surtout dans les terrains maigres et les pays froids. Pannes usirées. — Les fruits. Récoure. — Il n’est personne qui ne sache à quelle époque et comment se fait la récolte de l'orge en général. Composirion cuimique. — La farine d'orge délayée dans l'eau et malaxée, à l’état de pâte, dans un linge serré, rien ne passe à cause de l'adhérence du gluten avec l'amidon. Cependant en opérant avec des précautions conveuables, Einhof à pu opérer celte opération, et l'analyse a fourni les résultats suivants : amidon et glutine, 67.18; fibre végétale, glutine et amidon, 7.29; albumine, 1.15; glutine, 3.52; sucre, 5.21; gomme, 4.62; phosphate de chaux, 0.24; eau, 9.37; perte. 4.42. Total : 100. La diastase s'obtient en précipitant une infusion d'orge germée par l'alcool; c'est une matière solide, blanche, neutre, amorphe, soluble dans l’eau et dans l'alcool faible; elle n’a pas été analysée; nous en reparlons plus loin. Usages. — D'après Pline, l'orge à été un des premiers aliments de l'homme civilisé; le pain qu'on en prépare se dessèche rapide- ment. La nature de l'amidon de lorge ne permet pas, en effet, d'en fabriquer un pain de bonne qualité. Celui que lon fait daus certaines contrées du Nord est très-indigeste. L’orge est générale- ment réservée pour la nourriture des animaux herbivores et pour la fabrication de la bière. En médecine, on emploie l'orge mondé et l'orge perlé (les deux seuls cas où le mot orge s'emploie avec un adjectif masculin}; ils s'obliennent l’un et l’autre en faisant passer les grains de l'orge en- tre deux meules placées horizontalement à distance : dans l'orge ger- DU XIX° SIÈCLE. 469 mée, le grain perd seulement sa glume, sa glumelle, et conserve son tégument propre; pour l'orge perlé, les meules sont plus rap- prochées graduellement, de manière à réduire peu à peu le grain à un petit globule blanc et farineux. L'orge mondé ou perlé réduit en farine grossière et séché au four constitue l'orge grue, griot où gruau, qu'il ne faut pas confondre avec le gruau d'avoine ; la décoction de ces grains, concentrée jusqu'à consistance de gelée, constitue la créme d'orge. L'orge germée qui est employée pour la fabrication de la bière, est aussi employée en médecine; on la trouve toute préparée chez les bras- seurs, mais on peut la préparer soi-même; pour cela on plonge l'orge dans l’eau, on sépare les grains avariés qui surnagent, on laisse en contact jusqu'à ce que les grains soient ramollis; on presse et on étend en couches minces sur le sol carrelé d'une pièce nommée ger- mor, qui doit être située de manière à ce qu’elle éprouve peu de va- riations de température; la germination commence, la radicule sort du grain et forme ce qu'on appelle les pattes d'uraignée. On arrète alors la germination en portant l'orge dans une étuve fortement chauffée, et même en la torréfiant dans un appareil nommé fouraille. On ne dépasse pas 30° à 40° lorsqu'on veut faire là bière blanche et 80° pour la jaune ou ambrée; le mal est alors criblé pour séparer les germes; il doit se dissoudre en entier dans de l’eau à 70°, à l’excep- tion de la pellicule. Lorsque la germination est poussée trop loin, jusqu’au point où Ja gemmule perce l'enveloppe externe du fruit, la diastase est détruite, et l'orge ne peut plus servir à fabriquer de la bière. Cette diastase, qui se forme pendant la germination, est une substance azotée, jouant le rôle de ferment énergique, qui jouit de la propriété de transformer l’amidon en dextrine et en sucre, de sorte qu’au contact de l’eau chaude cette transformation s'opère et il ne reste plus que l'enveloppe de l'orge, qui porte alors le nom de drèche, et sert à nourrir les bestiaux. Le liquide sucré ainsi oblenu est mis à fermenter au contact d’une décoclion de houblon; le sucre se dé- double en alcool, acide carbonique, en d’autres produits secondaires, et une portion de la dextrine non saccharifiée concourt à donner du corps à la bière, c’est-à-dire à augmenter la densité de celle-ci. L'orge est placée dans la classe des émollients; sa décoction, qui doit être très-prolongée, est employée, au sortir de sa préparation, dans les maladies aiguës et inflammatoires; on en use aussi, comme léger 470 FLORE MÉDICALE analeptique, dans les affections chroniques fébriles avec irritation. Les propriétés diurétiques qu'on lui a attribuées l'ont fait employer contre l’anasarque ; c’est surtout l'orge hexastique ou à six rangs qu'on a conseillée dans ce cas. La décoction de malt, la bière de malt concentrée, ont été em- ployées dans les gastralgies, la dyspepsie; la diastase qu’elles con- tiennent, agissant comme la diastase salivaire, facilite la digestion des matières amylacées. Magbride, Lind, Huscam, Percy et d’autres mé- decins ont conseillé ces boissons contre le scorbut. Perceval les disait efficaces contre les scrofules, mais on préfère dans ce cas la bière elle-même, qui est amère, nourrissante et tonique; celle-ci apaise la soif, excite les sécrétions, et plus particulièrement celle des urines. Quant aux propriétés anthelmintiques que l’on a attribuées à la bière éventée, elles sont très-douteuses. La levüre de bière, vantée comme antiseptique et administrée dans les fièvres putrides, les fièvres muqueuses vermineuses, a perdu sa réputation. Williams l’appliquait à l'extérieur, comme anti- septique, pour le pansement des plaies gangreneuses et sordides. Moss la faisait prendre délayée dans du lait pour les éruptions furon- culeuses. MM. Bird, Herepath, Bouchardat, etc., etc., qui l'ont pro- posée contre la glycosurie, n’en ont pas obtenu les bons effets qu'ils en avait espérés. Ajoutons que, d'après M. E. Baudrimont, cette sub- stance administrée à un enfant atteint de diabète sucré a déterminé au bout de trois jours des symptômes d'ivresse. Gibson et Magbribge avaient proposé la décoction de drèche contre le scorbut. Henning la recommande dans les maladies éruptives. Rush dit en avoir obtenu de bons effets dans les ulcères de mauvais caractère. Enfin les bains de drèche chauds ont été employés dans les rhumatismes, les engor- gements articulaires chroniques, ete. La levüre de bière est aujour- d'hui tout à fait inusitée. ORIGAN Origanum vulgare et dictamnus L. (Labiées - Saturéiées.) L'Origan commun (0. vulgare 1.), est une plante vivace, à rhi- zome sous-ligneux, noirâtre, rampant, muni de racines fibreuses. La tige, haute de 0",35 à 0°,65, à quatre angles mousses, pubes- cente, rougeâtre, dressée, rameuse à sa partie supérieure, porte des DU XIX® SIÈCLE. A7TA feuilles opposées, pétiolées, ovales, denticulées, d'un vert foncé, velues surtout en dessous. Les fleurs, petites, rosées, rarement blanches, insérées à l’aisselle de bractées ordinairement colorées en rouge pourpre, sont groupées en corymbes terminaux, dont l'en- semble constitue une grande panicule feuillée. Elles présentent un calice tubuleux campanulé , à dix ou douze nervures saillantes, à cinq dents presque égales et à gorge velue ; une corolle À tube assez long, à limbe divisé en deux lèvres, la supérieure droite, presque plane et échancrée, l'inférieure étalée à trois lobes presque égaux; quatre étamines didynames, saillantes et divergentes, à anthères munies d’un connectif large et presque triangulaire ; un pistil com- posé de quatre carpelles uniovulés, surmonté d’un style simple, sail- lant, terminé par un stigmate bifide. Le fruit se compose de quatre akènes ovoïdes arrondis. Le dictame de Crète (O. dictamnus L. Amaracus Benth.), est un sous-arbrisseau, dont la tige, haute de 0",35, laineuse, rameuse, diffuse dès la base, porte des feuilles opposées, pétiolées, arrondies, assez grandes, épaisses et molles; des fleurs pourpres, à bractées colorées. A ce genre appartiennent encore les marjolaines commune et d'Égypte, qui ont fait l'objet d'un article spécial. Hagrrar. — L'origan commun est très-répandu en Europe; il habite les bois, les prés secs, les buissons, les lieux incultes, les haies, etc. Le nom de l’origan ou dictame de Crète dit assez sa pa- trie. Ces deux plantes ne sont cultivées que dans les jardins bota- niques. PARTIES usiTées. — Les feuilles, les sommités fleuries. Récorte. — L'origan vulgaire (mot qui vient de 5po, montagne, yévos, Joie, joie de la montagne) se récolte en pleine floraison ; on le dispose en petits paquets et en guirlandes et on le fait sécher au grenier ; il conserve toutes ses propriétés par Ja dessiccation. On le remplace quelquefois par la marjolaine qui est moins odo- rante. Le dictame de Crète du commerce (Origanum dictamnus), se dis- tingue par la forme ovale arrondie de ses feuilles, qui d’ailleurs sont recouvertes d'un duvet cotonneux, épais et blanchâtre; les supérieures sont sessiles, arrondies et rougeàtres, ainsi que les brac- tées, et les unes et les autres sont recouvertes de nombreux points 472 FLORE MÉDICALE glanduleux. Dans le commerce, le dictame de Crète est souvent com- primé en petits pains cubiques ou allongés. COMPOSITION CHIMIQUE. — L'origan doit ses propriétés excitantes à une huile essentielle qui, comme celle de la plupart des Labiées, laisse déposer ensuite une malière analogue au camphre; il ren- ferme en outre une substance gommo-résineuse amère; l'essence qu'il fournit est analogue à celles de marjolaine, de thym et de ser- polet; elle jouit des mêmes propriétés et s'emploie dans les mêmes cas, surtout en parfumerie. UsaGes. — Les origans sont regardés comme stimulants, stoma- chiques, expectorants, sudorifiques et même emménagogues ; ils ont été employés dans la débilité générale, l’'aménorrhée, les engorge- ments viscéraux, elc.; mais c'est surtout en infusions ou en fumiga- lions qu'on s’en est servi contre l'asthme humide, les catarrhes chroniques, les douleurs rhumatismales, le torlicolis, ete. D'après Murray {Apparatus, ete., &. , p. 172), l'origan, quand on en suspend quelques poignées dans les tonneaux, empêche la bière de tourner. Il entre dans l’eau vulnéraire, Veau d'arquebusade, le sirop d'armoise composé et de stæchas, Va poudre sternutatoire, ele. Dès l'antiquité la plus reculée, le dictame était regardé comme un précieux vulnéraire; les poëtes l'ont souvent chanté, et Virgile dit que son héros, Énée, fut guéri par les soins invisibles de Vénus, sa mère, à l’aide de cette plante. Le dictame tire son nom de rcté, montagne et promontoire de l'ile de Crète, d’où la nymphe Dicté s'était, selon la fable, jetée dans la mer pour échapper aux poursuites de Minos. On le cueille aussi sur le mont Ida et sur d’autres points. Il contient une huile essentielle dont les Anglais font un fréquent usage contre les douleurs. D'après Tournefort, on l'emploie contre les fièvres tierces, les päles couleurs, ete. (Ferrein, Mar. méd, t. M, p. 70). Le dictame de Crète entre dans la composition de la /héria- que, du drascordium et de la confection d'hyacinthe. ORME Ulnus campestris L. {Ulmacées. ) L'Orme est un arbre à racines fortes, nombreuses, pivotantes el tracantes, produisant de nombreux drageons. La tige, haute de DU XIX° SIÈCLE. 113 30 mètres, droite, régulière, couverte d'une écorce épaisse, ru- gueuse où subéreuse, se divise en branches et en rameaux distiques, dont l’ensemble forme une cime arrondie, très-épaisse. Les feuilles sont alternes, distiques, pétiolées, inéquilatérales, obliques à la base, dentées, rudes, épaisses, vert foncé en dessus. Les fleurs, qui parais- sent avant les feuilles, sont rougeàtres et groupées en fascicules laté- raux sessiles. Elles présentent un calice membraneux, campanulé, à cinq lobes ; cinq étamines; un ovaire libre, à deux loges uniovu- lées, surmonté de deux styles larges, divergents, dont la face interne est occupée par le stigmate. Le fruit est une samare arrondie, mem- braneuse, monosperme par avortement. Hagirar. — L'orme est abondamment répandu en Europe, sur- tout dans les régions tempérées. On le trouve dans les forêts, mé- langé avec d’autres essences. Il est cultivé le plus souvent comme arbre d'avenue. PARTIES usiTÉEs. — La seconde écorce ou liber, autrefois les feuilles et le bois. R£cocre. — La seconde écorce ou liber de l’orme est détachée avant la floraison ; on commence par enlever l'épiderme, puis on divise le liber en lanières longues et étroites, que l’on roule en petits paquets allongés et que l’on fait sécher. C’est ainsi qu'on trouve celte écorce dans le commerce; elle à un aspect rougeûtre; on Ja reconnait à l'absence d'épiderme, à sa grande flexibilité et à sa sa- veur mucilagineuse et astringente ; elle est mince et inodore. On trouve souvent sur les feuilles de l’orme des vésicules où galles de la grosseur du poing, qui contiennent une eau claire, appelée evu d'orme dans certains ouvrages anciens; elle est douce et visqueuse. Ces galles sont produites par un insecte, le Tentredo ulmi L.; vers l'automne, ces productions se dessèchent, les insectes meurent, on y trouve alors un résidu noirâtre appelé baune d'orme. Les fruits ou samares, qui jonchent la terre vers la fin d'avril, étaient connus sous le nom de pain de hanneton. ComposirioN caimique. — L'écorce d'orme est riche en amidon et en mucilage; la décoction rougeâtre, visqueuse, colore en noir les sels de fer. D'après Vauquelin, la séve de l’orme contient du carbo- nate de chaux, de l’acétate de potasse (Ann. de Chim., t. XXNIT, p. 32). Ses cendres renferment une forte proportion de sels alcalins. L'ulmmine, découvert par Klaproth dans les excrétions des racines 47h FLORE MÉDICALE des ormes, est un acide que l’on trouve dans le terreau et dans toutes les matières organiques en décomposition ; elle joue un très-grand rôle en agriculture ; on l'a encore nommée acide ulmique, qéine, acide géique. Usaces. — L'eau d'orme dont nous avons parlé élait autrefois em- ployée dans les maux d’yeux, contre les coups, les contusions, après avoir été filtrée pour en séparer les pucerons. D’après Gmelin (Découv. des Russes, t. 11, p. 357), le harne d'orme était conseillé contre les maladies de poitrine. Dioscoride (lib., I, e. 95), dit que de son temps on mangeait les jeunes pousses et les feuilles d’orme. Pallas ( Voyages, t. V, p. 318), dit qu’elles sont purgatives. Aujour- d'hui on n’emploie plus que l'écorce d’orme. Les anciens et surtout Dioscoride vantaient cette écorce contre un grand nombre d’affec- tions cutanées. On n’en faisait plus usage, lorsqu'un médecin anglais, Lyson, la recommanda de nouveau contre les maladies de la peau, et prétendit avoir guéri, par ce moyen, des affections qui simu- laient la lèpre. Lettsom, Banan, Gilibert, confirmèrent ses obser- valions et ajoutèrent qu’on pourrait l’employer avec succès contre les vieux rhumatismes. Swédiaur la recommanda de nouveau contre les maladies cutanées, Struve contre l’ascite. M. Duvergier l’a em- ployée avec succès, dans l’eczéma chronique, comme un excellent modificalteur de la constitution. Cependant Sauvages la regarde comme trop débilitante, à cause des doses énormes auxquelles il faut l'em- ployer, et Dubois de Rochefort dit qu'elle a plutôt réussi à ceux qui l'ont vendue qu'à ceux qui en ont usé; nous partageons volon- liers cet avis, appuyé de l'autorité d’Alibert. L'écorce d'orme pyramidal, est administrée sous forme de tisane, de sirop ou d'extrait; on l'a vantée il y a peu d'années contre les maladies syphilitiques, dans lesquelles pourtant elle ne produit au- cun effet satisfaisant. Les charpentiers, les constructeurs de navires, les charrons sur- tout font grand usage du bois d'orme; celui que l'on nomme tortil- lard sert à une foule d'usages ; il est dur et rougeàtre; les fortes excroissances noueuses naissant sur les troncs, sont recherchées par les ébénistes, qui en font des meubles d’une grande beauté. Le bois d'orme se conserve longtemps dans l'eau, ce qui le rend très-propre à la construction des quilles de navires, des tuyaux de conduite, des pilotis. Comme bois de chauffage, on a estimé sa va- LD) DU XIX° SIÈCLE. 415 leur, comparativement à celle du bois de hêtre :: 1259 : 1540, et réduit en charbon :: 1407 : 1600. Les feuilles d'orme sont utilisées dans quelques contrées pour la nourriture du bélail ; assez souvent on les fait bouillir dans l’eau pour la nourriture des bestiaux. ORPIN Sedum Telephium, Cepæa, acre, ete. L. {Crassulacées.) L'Orpin reprise (S. telephéum L.), appelé aussi Herbe à la cou- pure, Herbe aux charpentiers, Grassette, Joubarbe des vignes, Fève épaisse, ete., est une plante vivace, à racines épaisses, tubéreuses. La lige, haute de 0°,30 à 0,60, charnue, rougeûtre, rameuse ausommet, porle des feuilles alternes, sessiles, ovales, aiguës, dentées, charnues, épaisses, glabres, vert glauque ou rougeàtre. Les fleurs, blanches ou purpurines, sont groupées en corymbe terminal, à rameaux épars. Elles présentent un calice à cinq sépales ovales, épais; une corolle à cinq pétales étalés, recourbés ; dix étamines, accompagnées d'écailles hypogynes ; un ovaire composé de cinq carpelles pluriovulés, sur- montés chacun d’un style, qui porte un stigmate à la face interne. Le fruit se compose de cinq follieules libres, s’ouvrant à l'intérieur et renfermant chacun plusieurs graines très-pelites. L'Orpin à larges feuilles (S. latifolium Bertol., S.marimum Sut.) est une espèce très-voisine, peut-être même une simple variété du précédent, dont il diffère par sa tige plus haute ; ses feuilles très- grandes, ordinairement opposées ; ses fleurs d’un blanc jaunâtre, à pétales non recourbés en dehors. L'Orpin Rose (S. Æhodiola D.C., Rhodiola rosea L.) est aussi vivace ; ses racines sont tubéreuses et odorantes ; ses feuilles, alternes, rapprochées, dressées, ovales-oblongues, dentées au sommet. Ses fleurs, purpurines ou un peu jaunâtres, ordinairement dioïques, pré- sentent un calice à quatre sépales ; une corolle à quatre pétales; huit étamines ; un ovaire et un fruit à quatre carpelles. L'Orpin Cépée ou Faux oignon (S. cepæa L.) est une plante an- nuelle, dont la tige, pubescente, glanduleuse, porte des feuilles opposées ou verticillées, obovales-cunéiformes, et des fleurs d'un blanc rosé, en petites grappes étalées, dont l'ensemble forme une pa- nicule terminale. 176 FLORE MÉDICALE L'Orpin àcre (S. ucre L.), appelé aussi Vermiculaire brülante, es! une plante vivace, à souche rameuse, gazonnante. Ses tiges, nom- breuses, diffuses, nues, couchées et radicantes à Ja base, puis ascen- dantes, portent, dans leur partie supérieure, des feuilles alternes, obtuses, ovoides, comprimées au sommet, arrondies et prolongées à la base, imbriquées sur les rejets stériles. Les fleurs, d’un beau jaune d'or, presque sessiles, sont groupées en épis scorpioides, dont l'en - semble constitue un corymbe terminal. Elles présentent un calice à cinq dents obtuses, prolongées à la base ; une corolle à cinq pétales longs, aigus, étalés; dix étamines. Le fruit est composé de cinq folli- cules divergents. L'Orpin blanc (S. «/bum L.), vulgairement Trique-madame, à aussi une souche vivace et rameuse. Ses liges, hautes de 0",25 à 0",50, portent des feuilles alterues, oblongues, charnues, glabres, étalées, et des fleurs blanches ou rosées, groupées en corymbe ter- minal. L'Orpin réfléchi (S. reflezum L.) est un sous-arbrisseau, dont là souche rameuse émet de nombreuses tiges, la plupart stériles. Les üiges fertiles, hautes de 0",20 à 0,40, couchées et radicantes à la base, puis ascendantes, portent des feuilles alternes, cylindriques, très-charnues, lisses, aiguës, prolongées en éperon à la base. Les fleurs, jaunes, presque sessiles, sont groupées en épis scorpioïdes, dont l'ensemble forme un corymbe terminal. HamiTaT. — Ces plantes sont abondamment répandues dans Îles diverses régions de l'Europe; elles croissent dans les lieux montueux, stériles, prerreux, sur les rochers et les vieux murs. Currure. — Les orpins ne sont guère cultivés que dans les jar- dins botaniques où d'agrément. On propage très-facilement les espèces annuelles de graines semées sur couche ou en place au prin- temps, et les espèces vivaces, d'éclats de pieds, faits au printemps ou à l'automne. Parties usiTÉEs. — Les feuilles, la plante entière. Récocre. — Les divers orpins frais peuvent être récoltés pen- dant toute la belle saison. Leur dessiccation est difficile, car ils sont très-charnus. Lorsqu'on les suspend la tête en bas, les fleurs restent fraiches. On les à quelquefois conservées en macération dans l'huile. ComposiTion chimique. — L'orpin reprise (Sedumn teleplium), est DU xtx° SIECLE. VArtri inodore; ses feuilles sont insipides et un pèu visqueuses; les fleurs et les racines sont âcres et acerbes; le suc contient du malate de chaux. Usages. — Les noms de /eprise, d’'Orpin reprise, que l'on donnait autrefois à cette plante indiquaient les propriétés vulnéraires qu'on lui attribuait. Les gens du peuple lappliquent, en effet, sur les cou- pures. Par sa nature àcre, elle doit plutôt retarder la cicatrisation que la hâter. L'orpin est, d’ailleurs, employé aux mêmes usages que la joubarbe des toits. Le nom latin de Sedum donné à ces plantes viendrait, d’après Mérat et Delens, de sedere, s'asseoir, parce qu'elles s’étalent sur les pierres, et non de sedare, apaiser, comme on l'a prétendu. L'orpin àcre ou vermiculaire brûlante donne un suc âcre et brû- lant, vomitif autrefois employé, d'après Linné, en Suède, contre les fièvres intermittentes, dans de la bière ou dans du vin. On l'emploie généralement contre le scorbut. Gesner et Borrichius prétendent avoir guéri des milliers de scorbutiques par ce moyen, et Bulow, médecin suédois, l'administrait en décoction, dans de la bière, contre cette maladie. C'est spécialement contre l’épilepsie que cette plante a été très-vantée, surtout en Allemagne; mais de nombreux essais ont démontré son impuissance contre cette terrible maladie, et il en a été de même dans le cancer, contre lequel le docteur Marquet l'avait préconisée. Le suc de l’orpin âcre à été vanté comme suscep- tible de détruire les cors aux pieds, mais on ne croit plus à ses effets L'orpin blanc entrait autrefois dans l'onquent populeum. W n'est plus employé. On peut le manger en salade. L'orpiu reprise (S. /elephium) a été regardé comme rafraichissant, vulnéraire et résolutif. Son suc à été autrefois préconisé contre les hémorroïdes. Aujourd'hui il est abandonné. ORTIE Urtiea urens, dioica et pilulifera L. (Urticées.) L'Ortie brûlante (U. wrens L.), appelée aussi Ortie grièche ou Petite Ortie, est une plante annuelle, à racine pivotante, fibreuse, blanchâtre. La tige, haute de 0",25 à 0",50, anguleuse, cannelée, hérissée de poils urticants, verte ou rougeâtre, rameuse dès la base, dressée, ascendante ou étalée, porte des feuilles opposées, pétiolées ATS VLORE MÉDICALE ovales, larges, aiguës, profondément dentées, d'un vert foncé surtout en dessus, un peu luisantes, parsemées de quelques poils urticants. Les fleurs, monoïques, verdâtres, sont réunies en grappes courtes, -presque sessiles, axillaires, opposées et comme verticillées. Les mâles ont un calice à quatre sépales presque égaux, soudés à la base, étalés après la floraison ; quatre étamines à filets grêles, élastiques et irri- tables. Les femelles ont un calice à quatre sépales, opposés sur deux ranss, les extérieures très-pelites ou avortées ; un ovaire simple, libre, uniovulé, surmonté d'un stigmate sessile, en pinceau. Le fruit est un akène obiong, comprimé, lisse, luisant. L'Ortie dioique ou grande Ortie (U. divica L.) est vivace, et diffère de la précédente par sa taille plus élevée; ses feuilles cordées à la base et ses fleurs dioïques, en grappes grèles. L'Ortie pilulifère ou Ortie romaine (U. pilulifera L.) est une plante bisannuelle ou vivace, à tiges ordinairement rameuses, portant des feuilles très-profondément dentées, et des fleurs monoïques, les mâles en grappes grêles, les femelles en têtes globuleuses. Parmi les espèces exotiques, nous citerons l'Ortie crénulée (U., cre- nulata Foxb.), l'Ortie blanche (U. nivea L.), le Rami (OU. wrilis Blum). Hagrrar. — Les trois orties que nous avons décrites sont abon- damment répandues en Europe; elles croissent dans les lieux cultivés ou incultes, les décombres, au pied des murs, etc. On ne les cultive que dans les jardins botaniques. Parties usirÉées. — Toute la plante, les fruits. Récozre. — L’ortie brülante peut être récoltée fraiche pendant tout l'été, lorsqu'on veut l'employer pour pratiquer lurtication. Lors- qu’elle est sèche, les poils urticants ne piquent plus. Les fruits ren- ferment des semences légèrement oléagineuses, que l'on récolte à la maturité et que l’on fait sécher au soleil. Composirion cHimiQue. — L'ortie brülante ( Urtica urens) est presque inodore ; sa saveur est herbacée, aigrelette et astringente. M. Saladin, qui l’a analysée (Journ. de chim. méd., t. NI, p. 492), y à trouvé du carbonate acide d'ammoniaque, surtout dans les vésicules de la base des aiguillons ; une matière azotée, de la cire, une malière muqueuse, une matière colorante noirätre, du tannin, de l'acide gallique, de l’azotate de polasse et de la chlorophylle. Le même auteur a trouvé dans la grande ortie (U. dioica L.) du DU XIX° SIÈCLE. 419 nitrate de chaux, du chlorure de sodium, du phosphate de potasse, de l’acétate de chaux, de la silice, du ligneux et de l’oxyde de fer. Usaces.— Les jeunes pousses d’ortie sont mangées dans plusieurs pays. On les fait bouillir dans l'eau et on les accommode en guise d'épinards. On les fait aussi manger aux bestiaux, surtout aux jeunes dindons, mêlées avec de la farine. Les graines d’ortie excitent l'appétit des volailles. Les maquignons en mêlent quelquefois une cerlaine quantité à l'avoine, pour donner aux chevaux un air vif et un poil brillant. Les diverses espèces du genre Urtica fournissent des fibres très- estimées. Les Kamschadales et les Baskirs les emploient à la fabrica- tion des cordes, des toiles et des filets pour la pêche. Les Hollandais en ont préparé de beaux tissus. Mais c’est surtout avec l’ortie de la Chine ou ortie blanche (Ur/ica nivea), d’une culture nouvelle en France, qu'on fabrique des tissus qui peuvent êlre comparés, pour leur finesse et leur blancheur, à la plus belle batiste. M. Decaisne et d’autres bo- tanistes ont aussi fort justement vanté , comme plante textile, | Urtica utiles BL, qui porte à Java le nom de Zum; mais sa culture parait devoir être plus difficile en Europe que celle de l’ortie blanche qui semble propre aux climats tempérés. Les Égyptiens extrayaient de l'huile des graines de l’ortie brü- lante. D’après Murray, Argstrom attribue à l’ortie plantée autour des ruches la propriété de chasser les grenouilles, dont le voisinage est, dit-on, un obstacle à la sortie des abeilles. Les écrevisses se conser- vent très-bien dans les orties fraiches. On à attribué aux diverses orties des propriétés astringentes, et on les a recommandées contre l'hémoptysie, la méthorragie et l’héma- temèse. Elles ont été vantées dans ces cas par Zacutus Luzitanus, Scopoli, Lazerne, Geoffroy, Desbois de Rochefort, Peyroux, Lange, Rivière, Joseph Franck et Sydenham employaient l’ortie contre l’avor- tement; Cocchius la disait propre à faire disparaître les tubercules pulmonaires; d'après Lieutaud, les feuilles ou les racines, introduites dans le nez, arrêlaient les hémorragies nasales; M. Ginestet a con- seillé le suc de cette plante contre les ménorrhagies, et M. Fiard l’a employé contre le diabète. Gesner conseillait la racine d'ortie contre la jaunisse. L’infusion et le suc ont été usités contre le rhumatisme, la goutte, la gravelle, la rougeole, les catarrhes chroniques, l'asthme humide, la pleurésie, etc. A8Ù FLORE MÉDICALE D'après Matthiole, les anciens considéraient la semence d'ortie comme dangereuse. Sérapion prétend que 20 à 30 graines suffisent pour purger. L'ortie est regardée comme emménagogue, purgalive, diurétique, vermifuge et même fébrifuge. Bulliard dit qu'il faut l'employer avec précaution. Quoique Linné, Vogel, Richter aient em- ployé les semences d'ortie contre les flux diarrhéiques, Faber contre la dysentérie, Hufeland contre la leucorrhée, elles sont aujourd'hui, ainsi que la plante elle-même, à peu près inusitées, bien qu'on en ait, récemment encore, proposé l'emploi, ainsi que de ses fleurs ou de ses graines, contre les maladies de la peau, les fièvres intermit- tentes, les rhumialismes et même les paralysies, ete. Nous croyons que c’est avec juste raison que Cullen, Alibert et Peyrilhe les ont bannies de la matière médicale. C'est tout au plus si on s'en sert quelquefois encore pour pratiquer lurtication, c'est-à-dire pour pro- voquer un érythème localisé contre les douleurs, ete. Les feuilles, hachées, étaient employées autrefois pour panser les ulcères sanieux et gangreneux. OSEILLE Rumex acetosa L. ( Polygonées.) L'Oseille est une plante vivace, à rhizome rampant, brun noi- râtre, muni de racines fibreuses jaunatres. La tige, haute de 0",60 à 1 mètre, cylindrique, cannelée, glabre, dressée, rameuse au sommet, porte des feuilles allernes, un peu glauques en dessous : les inférieures pétiolées, oblongues ou ovales, sagitlées, longues de 0%,10 et plus; les supérieures plus étroites, sessiles, amplexicaules. Les fleurs, dioïques, petites, verdàtres, sont disposées en faux ver- ticilles, et présentent un calice à six sépales alternant sur deux rangs. Les mâles ont six étamines, opposées par paires aux sépales extérieurs ; les femelles, un ovaire simple, trigone, uniovulé, sur- monté de trois styles filiformes, terminés chacun par un stigmate multifide, en pinceau. Le fruit est un akène trigone, brun, luisant, renfermé dans le calice persistant et accru. Hagrrar. — Cette plante est commune en Europe; elle croit dans les bois et les prés. On la cultive dans les jardins polagers. Parties usiTÉEs. — Les racines, les feuilles, autrefois les fruits improprement appelés semence. DU XIX° SIÈCLE. A81 Récocre. — La culture donne des feuilles vertes pendant toute l'année; mais elles ne possèdent l'acidité qu’on y recherche pour l'usage médical que lorsqu'elles sont bien développées et parfaitement vertes, c'est-à-dire vers la fin de l'été. La racine que l'on arrache à l'automne, qu’on lave et que l’on fait sécher, est rougeàtre, longue, très-fibreuse, inodore, d’une saveur amère et astringente. Sous le nom d'oseille, on peut employer encore les feuilles de Surelle (Rumex acetosella L.) et d'Oseille en bouclier, appelée aussi Oseille ronde et Petite oseille (22. seutatus L.) qui jouissent des mêmes pro- priétés. Lorsqu'on veut employer les racines fraiches, il vaut mieux les récolter au printemps. Comrosrrion cnimique. — L'acidité des feuilles d’oseille est due à la présence du bioxalate de potasse —°C?0*,KOHO—C'HO7,KO, ou sel d’oseille, qui est quelquefois un quadroxalate. En Suisse et en Souabe, on en extrait ce sel; mais c’est surtout de la Surelle acide (Oxals acetosella ; Oxalidées) qu’on le retire. (Voir au mot SURELLE, t. HI, p. 366.) L'oseille contient en outre, du mucilage, de la fé- cule, etc., et, ce qui est douteux, de l'acide tartrique. UsaGes. — L’oseille domestique, nommée aussi Oseille commune, Oseille des prés, elc., entre dans la composition du bouillon aux herbes, qui n'est qu'un apozème usité comme rafraichissant, employé pour faciliter l’action des purgatifs, rafraichissant qui renferme, en outre, du cerfeuil, du beurre et du sel de cuisine. L’oseille entre aussi dans la composition des sucs d'herbes dont elle facilite la clarification, et auxquels elle donne une saveur acide agréable. Les propriétés légèrement laxatives, diurétiques et antiscorbu- tiques de l'oseille l'ont fait fréquemment employer dans les affec- tions bilieuses, inflammatoires, dans les embarras gastriques, le scorbut, les fièvres putrides, etc. Quoique Des Bois de Rochefort, assure que le suc d’oseille guérit les fièvres intermitlentes comme . par enchantement, il n’est guère, et avec raison, employé dans ce but. Cetle substance semble être plus efficace dans les fièvres intermittentes printanières qui d’ailleurs guérissent le plus souvent loutes seules. On recommande, dans tous les cas, de préférer l'oseille sauvage à l’oseille cultivée. On comprend que l'oseille mâchée agisse bien dans le scorbut ; aussi l’a-t-on employée avec succès daus celle maladie, ainsi que dans le purpura hemorrhagica. Récamier la vantait contre l'acro- Flore, T. II. 31* 482 FLORE MÉDICALE dynie; mais on peut assurer que ce ne sont que les manifestations de ces maladies, que quelques-uns de leurs symptômes princi- paux que l’on fait ainsi disparaître, et non pas les maladies elles- mêmes. L'oseille est un aliment agréable, mais son usage prolongé peut déterminer des calculs muraux d’oxalate de chaux, surtout chez les individus qui sont sous l'influence d’une diathère calculeuse. Ce fait a été signalé par Magendie. Boyer, Burnet, Pinel, Richerand, etc., ont employé avec succès les cataplasmes d’oseille cuite mêlée à l’axonge et à la farine de lin, comme maturalifs et résolulifs, dans l'hygroma, sur les tumeurs scrofuleuses, les ulcères putrides gangréneux et sordides. Le docteur Missa a proposé de faire mâcher les feuilles pour combattre les acci- dents produits par les substances végétales âcres, comme l'arum, la bryone, les euphorbes, ele., etc. Le sel d’oseille entre dans la composition des /ablettes contre la soif. West employé dans la teinture et pour enlever les taches d'encre sur les linges blancs. OSMONDE Osmonda regalis L. (Fougères -Osmondées.) L'Osmonde royale, appelée aussi Fougère royale, Fougère aqua- tique, Osmonde fleurie, est une plante vivace, à souche épaisse, rampante, émetlant en dessous des racines fibreuses, allongées, d'un brun foncé, et en dessus des frondes (/ewilles), disposées en touffe, les unes fertiles, les autres stériles, enroulées en crosse pendant la pré- floraison. Ces frondes, toutes radicales, longues de 0",60 à 1°,20, ont un péliole robuste, dilaté à la base, à bords presque membra- neux, un peu arqué et terminé en un bec très-étroit au niveau de l'insertion; un limbe très-ample, deux fois pennatiséqué, à segments stériles peu nombreux, espacés, oblongs, divisés en lobes assez amples, oblongs-lanctolés, glabres, à nervures transparentes. Les segments fruclifères sont rapprochés en une panicule terminale, à lobes contractés linéaires, couverts de groupes de sporanges arrondis, pédicellés et d'un brun fauve à la maturité (PI. 50). DU XIX° SIÈCLE. 183 HagiraT. — L'osmonde royale croit, en France, dans les bois humides, les marais, les tourbières, au bord des eaux, etc. On ne cultive que dans les jardins botaniques, où on les propage simple- ment par la transplantation de jeunes pieds sauvages. Nous citerons encore les Osmonde à cicutaire ou Herbe-aux-ser- pents (Osmunda cicutaria Savigni) de Saint-Domingue, dentée en scie (O. lancea L.) des Antilles. PARTIES USITÉES. — Les rhizomes, nommés vulgairement racines, et les expansions foliacées, nommées vulgairement feuilles. RécozTe. — Les frondes ou feuilles, qui sont d’ailleurs peu em- ployées, doivent être récoltées lorsqu'elles ont acquis tout leur déve- loppement ; les rhizomes s’arrachent à l'automne, et on les divise pour les faire sécher plus facilement. Composirion cHimiQuE. — L'analyse de l’osmonde n’a pas été faite; mais, comme toutes les autres Fougères, cette plante renferme du tannin et probablement une huile odorante analogue à celle que l'on trouve dans la Fougère màle. UsaGes. — Cette plante, considérée autrefois comme vulnéraire, astringente et diurétique, était employée dans une foule de mala- dies, pour les contusions, les blessures, les hernies, la gravelle, ete. Hermann et Allioni l'ont vantée contre le rachitisme, et M. Au- bert, de Genève, a plus spécialement indiqué l'espèce de rachi- tisme dans lequel elle agissait surtout. D'après cet auteur, elle paraît exercer une aclion spéciale sur les wscères du bas-ventre, elle purge un peu, et, selon lui, c'est spécialement contre le carreau et les affections glanduleuses qu'elle convient. M. Cazin dit s’en être bien trouvé dans les engorgements mésentériques. On l’a pro- posée dans le mal vertébral et dans les affections scrofuleuses des os; mais elle ne paraît pas avoir produit, dans ces cas, de résul- tats appréciables. Les feuilles ou expansions foliacées de l’osmonde royale sont sou- vent employées par les paysans, comme celles de la fougère ordi- naire, pour faire des lits aux enfants scrofuleux et rachitiques, mais rien ne démontre l'utilité de cette pratique. On brüle les feuilles d'Osmonde royale pour en retirer de la potasse. En Amérique, les Indiens appliquent l'Osmonde cicutaire, en topique, sur la piqüre des serpents. 18% FLORE MÉDICALE DU XIX° SIÈCLE. L'Osmonde dentée en scie est regardée, aux Antilles, comme hépatique. La racine en est purgative et réputée anti-scorbutique. Lors du siége de Saint-Domingue on en a retiré, pour la nourriture, une fécule assez bonne. FIN DU DEUXIÈME VOLUME DE LA FLORE MÉDICALE. TABLE DES MATIÈRES DU DEUXIÈME VOLUME DE LA FLORE MÉDICALE ET USUELLE DU XIX° SIÈCLE DNDATTOE RON à le 1 DE TÉMNNN SORERMENIONr 4 HN LUOS MOT REO IT e 6 LOGE ESS 9 HPUE=vINEe.. 0... 10 DIT, = 25 CROP ONE 13 BÉNONE SSSR 15 RÉ eue ceee 17 Rébanelle pr Le 45 HONOR 0 ne 46 RÉRÉETER EN M rdc: 51 RÉRMIE Te ce serre MD CAT A ee tn a sv 55 RIEELs ere le de ie coment 57 Hiipendule. 60 Gaine Er. 18 GAHbAouMEMEe nt... 80 CARO tot 83 ROME PEACE ET 85 (ÉD tr RE CCE 90 GÉRÉNTIeL nt 92 Géntane Trenet ANUS 95 ÉTÉ n e e AE 26 EU Lo EEE PE 28 HSE rs TR 30 HUPAOITE Se 0 CE 33 BUPRONDEM RE UE CEE 36 EUphrase 0 39 HXOSteMAs 2 ie Ne A Hiufeaus st tr 2e 62 HBDON ER ee ce ec 64 ÉTRRIC RE arc ie ro 65 REAPOISIEL MR. ee 68 PPT er emmener 70 HUMelenre- ne ct ee 75 Germandréer. 11:27 98 Ginpembre Fe 1-0 100 CMSENEN EL mn 102 CATONCE ten fc: ut. 103 CATOMEL AL OS 105 PAS CNT EE one 108 GIÉLROME....1.1.1.0. 20e 110 486 Globulaire re Ur... 112 FOMNNIER EN NS NES 143 GOVAVIER LE 0. 116 Granolems mr cer ur 118 Grenadiente 25 memes 121 HabAElie. HAN AU LENS 12 133 IEC DOrEN cents us der 134 HEnNees escorte 137 HÉpatique: 54 +. … Hem. 139 Hetnidiress Etes 141 HHBDle Res nn cr 2 142 HÉMIN MR EE Le Un. 144 OO EN POSER EEE 159 DO ET LS DE 462 IMpÉrATOITE.... 2.050. 165 EnAIVOTIET 54 25 de 0 ace ci Lie 167 THÉ MRRRE ReR 179 ASIN eue en ee ane ete 182 TouDarbem set eu ee 184 Res ta ie aie 192 ROMA eue. cute Ve fie 194 LR RE Re 201 MA MICE Sr TD one Aer 203 aminaire 5 +. 200, lu. 205 Fapranen sn + che ce 208 Vardizabals." : 4... 0e 209 ML SR eo dirooic 210 TARAMÉCR EE QUE RE Ne 212 AUTONET 214 Laurier-Cerise . . à 2°: 2 à; . » 216 Laurier-Rose. , .. , . .. 218 TABLE DES MATIÈRES. Guimauve Guttiers : , NEC Re Hypociste Hyssope nee eo) pelle de Vos an Iris Jujubier ALICE Se ny le Doc Ketmie. RARES ROURSOS A M RCE Sc MÉdOR LS cree here ce Lentisque ; Léontice:, HAS SUR TABLE DES MIDnEPE LS Pa 243 Miquidambar Meur. : . . : 245 HE. Cr EIRE 248 NON ee du de 250 LIÉE RNA re 252 LD 100 RON 254 MACELON ee se tn oo 4 267 D HR ENS CT RP 268 MAETOCRÈME RE Le 0,6 269 MABHONASE ie ee sucre 271 LIEU ER RC ENT 273 MalDilRiér " *. . . : . . . . 276 MAHPERULIEr. 7". - : 06e 278 MANUERTOTE . 5 ce. de 281 Man OD ee ie 283 MAN PO AN. se che 285 MAN PUIO Re ee dec can 287 IMANIO Dee AN DR den e 288 Marchantes .… 1:14 291 MAO CC EC 293 MAT QU ÉR LS La Pers eue let ro ris le 295 Marronnier d'Inde . . . . . .. 296 MATEUNB 1 0 ste tance 299 MAT sv le © Lente 301 MASSE ds cut 303 Le tSee MORE 305 MAICOE AN NN RON ER 307 MAIGRIR 310 NETRS MAS PP RE 311 MÉDICINIEN 20 + he 0 à 1913 MÉTAMYTES es + ce se se 316 MÉTAS TOME es 0 2e 317 MÉTÉZE A Ne Ci ee 319 MÉHAR De 322 MUNIE SERRE 324 MATE NOR RER 326 RÉ HRSE RER A UT Gants tr à de 328 EPA er no ue 330 MÉIMRHELME. ee + ee 331 N NAndRirODis. tas ee se AU NATCISSE ae Se een a are 408 MATIÈR Lupin ES. LYCOpErdOn RU CR Lycopo Lysima Menthe de A DMC UE QUE AR CET RITES Ményanthe, 7 re Mercuriales 55 UT OR NÉE RMEMRREEe T7 Méum Millepe CAC ORDER LTSOMOS RSS 5 Pate ie MADUSOPSE ER CE CE . Monarde rt. ra en MONRDIN. Mes vs sudruene MONBSIAN ME UE aa at MONIMIES + ee mes Münodore : . & : SIA E Morelle ri. 5 ee MOriIndO 2-2 CURE à MONDES EE Ne ceci Moutarde: ee Mucünar ce Ca TR Myrica Myroba COR MAO NO TN TT MOTO OMOMOS MODE TO TT OCT D CT DÉCO ROMOUON ENV TION lan. "+4: LOS MYLOSYION EEE RE Myrte NASITO TR DA eee NaUCIÉe sr es nee Dre 188 TABLE DES MATIÈRES. NÉIUMDOMEEMR ES Mn. douies 415 INéQuphar er. «be. + 418 NépDrOME". : 7. 4 420 RMBTDTUR Se el as on 4923 NT O NS ane ce 426 (COTE SR ELA 444 AEnantheisnset os cs ue me 445 MODO: ee rares ce 9 MUC 447 Oiban eurent Ar 450 Olivier MS Et. 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