t^ . • • î ./-^ LES BROMÉLIACÉES BRÉSILIENNES. Gand, imp. C. Annoot-Braeckman. LES BROMÉLIACÉES BRÉSILIENNES DECOUVERTES EN 1879 PENDANT LE VOYAGE DES PRINCES AUGUSTE ET FERDINAND DE SAXE-COBOURG ET DECRITES PAR M. LE D^ Henri WAWRA DE FERNSEE, PRÉCÉDÉ D'UNE NOTICE BIOGRAPHIQUE ET D'UNE RELATION DE SES VOYAGES PAR MM. Ed. MORREN et H. FONSNY Publié dans le Bulletin de la Fédération des Sociétés d'horticulture de Belgique pour 1880. LIEGE BOVERIE, N" 1 1881 .A) PRÉFACE. M. le D"" Henri Wawra, chevalier de Fernsee, ancien médecin d'état-major de la marine impériale et royale à Vienne, est bien connu parmi les botanistes par les excellentes descriptions de plantes nouvelles qu'il a découvertes pendant ses nombreux voyages dans presque toutes les régions du monde. Après un premier voyage dans l'Amérique du Sud et sur les côtes occiden- tales d'Afrique en 1857-58, à bord de la corvette Carolina, M. le D' Wawra retourna au Brésil en 1859-60, à la suite de S. A. Imp. l'Archiduc Maximilien. Les résultats botaniques de ce voyage ont été publiés dans un magnifique ouvrage qui parut en 1866. En 1864 et 1865, le D"" Wawra s'est trouvé sur la Novara qui conduisit l'empereur Maximilien au Mexique; en 1868, il visita l'Asie jusqu'à l'extrême Orient; en 1872-73, il accompagna dans leur voyage autour du monde le prince Philippe de Saxe-Cobourg et son frère, le prince Auguste, gendre de l'empereur du Brésil. Enfin, en 1879, il fut encore choisi pour retourner au Brésil avec le même prince Auguste de Saxe-Cobourg et son jeune frère le VI PRÉFACE. prince Ferdinand. Il eut ainsi l'occasion de faire quelques excur- sions sur le territoire brésilien pendant lesquelles il porta spécia- lement son attention sur les Broméliacées. Il récolta beaucoup de plantes de cette famille, la plupart nouvelles pour la science. M. le D"" Wawra a bien voulu me communiquer son herbier de Broméliacées avec ses observations et les descriptions qu'il en a faites. Ce travail a paru dans le Journal autrichien de botani- que (i). Nous en donnons ici une édition française, soigneusement révisée. A notre prière, M. le D'' Wawra a bien voulu nous four- nir une relation générale de ses pérégrinations, quelques ren- seignements biographiques (2) et un récit plus circonstancié de son dernier voyage au Brésil avec les princes Auguste et Ferdinand de Saxe-Cobourg(3). Ces documents ont été traduits dans les meilleurs termes par M. H. Fonsny, docteur en sciences natu- relles : tant par la forme que par le fond, leur lecture nous a paru aussi attrayante qu'instructive. La notice biographique reflète les impressions vives et fraîches d'une vocation spontanée et irrésistible vers les sciences botani- ques ; elle dépeint en couleurs lumineuses la vie des étudiants autrichiens et leurs relations avec leurs professeurs, parmi les- quels M. le D'' Wawra eut le bonheur de compter nos anciens amis Fenzl et Unger. Lui-même exprime ses sentiments et ses impres- sions avec la bonne grâce de l'autrichien et la franchise du marin. (1) Die Bromeliaceen-Ausbeute von der Beise der Prinzen August und Ferdinand von Sachsen-Coburg nacJi Brasilien^ 1879, von D'' Hkinrich Wan\^ra. — Oester- reichische Botanische Zeitung, XXX, Vienne, 1880, pp. 70-73, 111-118^ 148-151, 182-187, 218-225. (2) D"" Eeinrich Ritter Wa/era von Fernsee, K. K. Marine-Stabsarzt : Fine Lebens- skizze. Séparât- Abdruk (mit Zusâtzen) aus n" 10, 1878, des Noiizen-Blatter der hist.-stat. Section der K. K. Màhr.-schles. Gesellschaft zur Beforderung des Acker- baues der Natur- mid Landeshunde. Brijnn, 187S. (3) Reise Ihrer Koniglichen Holieiten, der Prinzen Augtist und Ferdinand von Sachsen-Coburg nach Brasilien, 1879, von D"- H. Wawra. — Oesterr. Bot. Zeit- schrift, XXXI ; Vienne, 1881, p. 83-90, 116-122. PREFACE. VII Simple naturaliste, il fut mêlé à de grands événements et il a vécu dans la familiarité de princes qui touchent de près à notre Auguste Famille Royale. Avec les princes Auguste et Ferdinand de Saxe- Cobourg , esprits distingués et excursionnistes déterminés , le D"" Wawra a pu pénétrer au sein de la flore du Brésil ; il l'a vue en savant et il la décrit en artiste. Le récit de ses herborisations dans l'Entre Rios, à la Sierra dos Orgaos et sur l'Itatiaia sont comme des photographies animées qui ont saisi la nature sur le fait. Les Broméliacées, qui nous intéressent particulièrement, sont aussi les objets de sa prédilection. Il en rapporta plus de 40 espè- ces, dont 19 sont nouvelles et, en les récoltant, il a pu faire sur le vif et sur place, nombre d'observations utiles et judicieuses. Ajoutons que M. Wawra a rapporté les graines de plusieurs espè- ces découvertes par lui : elles ont germé et bientôt elles orneront les serres de l'Europe; enfin, qu'il prépare un grand ouvrage illustré sur les résultats botaniques de son voyage qui paraîtra bientôt sous les aupices du duc de Cobourg. Liège, le 20 décembre 1881. Éd. Morren. AUTOBIOGRAPHIE DU D' HENRI ¥A¥RA DE FERNSÉE (*). Mon éducation fut des plus soignées. Tenu à la maison sous une discipline sévère, je fus confié, pendant mes études de gymnase, aux soins d^un homme non moins rigide, le vicaire-général Charles Nottig, aujourd'hui évêque de Briinn, alors professeur renommé, qui se chargea de mon éducation scientifique. Il faut bien Pavouer, son régime sévère ne me plaisait guère alors, mais j'ai compris plus tard qu'il convenait à merveille à l'égard de l'adolescent turbulent et indiscipliné; c'est auprès de lui que j'acquis une base sérieuse pour mes études professionnelles, les aptitudes voulues pour explorer plus tard le domaine des sciences exactes; et, si quelque succès a couronné mes efforts, je le dois surtout aux mérites de mon ancien professeur, à qui je témoigne ici de ma profonde reconnaissance, et de la bienveillante amitié duquel je puis justement m'enorgueillir. Et ce n'était pas encore assez de cette discipline inflexible : un pauvre étudiant, un humaniste, qui vivait gratis à la maison, était chargé de veiller sur moi au sortir de l'école, de m'empêcher de suivre les méchants garçons qui cherchaient à m'entraîner, etc. Joseph Pelz est aujourd'hui chevalier de Felinau, conseiller aulique et chef de section au ministère de la Maison Impériale et de l'Extérieur ; il n'a cessé de conserver pour ma famille et pour moi-même les sentiments de l'amitié la plus dévouée ; mais à cette époque il était, ainsi que moi, sous la férule du « Père Nottig », dont nous avions l'un et l'autre une terreur respectueuse. (*) Né à Brùnn, le 2 février 1831 — promu chevalier le G mars 1873. __ 6 -- Un tel régime devait facilement venir à bout de mon impétuosité juvénile; cependant, plus l'occasion de commettre quelque mauvaise farce était rare, et plus elle était avidement saisie ; mon ami Pelz, je puis bien Pavouer aujourd'hui, fermait volontiers les yeux sur les méfaits de ce genre, dès qu'ils ne devaient venir au jour que par son intermédiaire. Comme, d'autre part, mon activité mentale ne pouvait s'épuiser tout entière sur les études prescrites, qui n'étaient guère de mon goût, je parvins à me procurer une bibliothèque vraiment extraordinaire; j'absorbai sans discernement tous les ouvrages qui me tombaient entre les mains et, parmi eux, des livres pas mal abstraits, tels que l'Esprit du Christianisme de Feuerbach, la Psychologie de Eosenkrantz, la Ci-itique de Kant, etc.; et moins j'y comprenais quelque chose, plus ces lectures avaient de charme et d'attrait pour moi. Pendant les années d'humanités, la bride fut un peu relâchée ; le besoin d'activité scientifique continua à se manifester d'une façon non moins déréglée jusqu'au jour oii, brusquement, les choses prirent une tournure plus décidée et le torrent turbulent, écumeux, coula désormais dans le lit paisible où son mouvement, ralenti il est vraij se continue encore aujourd'hui calme et tranquille. Mon frère, à cette époque étudiant en droit à Vienne, suivait par goût et en amateur le cours d'Êndlicher,et de retour à la maison, les jours de fête, il me nommait quantité de plantes et m'entretenait de leur organisation, ce qui excitait puissamment ma curiosité et mon intérêt; car, jusqu'à ce jour, je n'avais aucune idée de ces sortes de choses et ne connaissais Linné que de nom. C'est alors que je compris combien il est facile de trouver tout autour de soi de riches matériaux pour les études les plus intéressantes. Et je me mis à herboriser : pas de montagne si haute que je n'aie escaladée, pas de gorge si profonde où je ne sois descendu, à part la Macocha, que je dus abandonner après maintes tentatives désespérées (1849) : je ne crois pas qu'il y eût dans toute l'Europe plus zélé collectionneur. On s'étonnait à la maison de cette nouvelle marotte, mais on me laissait faire d'autant plus volontiers que je ne négligeais pas pour cela mes études classiques, et que j'étais en rhétorique parmi les sept premiers, « les sept sages », comme on disait alors. Mon frère m'avait mis en rapport avec Klâcel, son ancien professeur de philosophie, qui, à cette époque, passait à Brùnn pour un grand botaniste, et tenait en ordre l'herbier installé par le professeur Thaler à « Koniginkloster ». Je m'occupai activement de cet herbier pendant les mois d'hiver, analysant et déterminant les plantes d'après la méthode de Kittl (Manuel de la flore allemande) ; mais la botanique me souriait bien davantage en été : le caractère romanesque de ces excursions par monts et par vaux, à travers forêts et plaines, et le désir irrésistible de voir en vie ces plantes qui gisaient entassées et fanées dans l'herbiei", de suivre les phases de leur développement, de découvrir de nouvelles stations, etc., me chassaient invinciblement de ma demeure. Plus tard, je voulus vivre au milieu de mes chères plantes, et, à la grande terreur de ma famille, j'emplis notre potager de toutes les mauvaises herbes imaginables, dans l'intime conviction que je créais un véritable jardin botanique. Ce désir de voir, d'observer les plantes vivantes et dans leur lieu d'origine, avait sur moi une telle puissance qu'il suffit, quelques années plus tard, pour décider du choix de ma carrière et de la direction de toute mon existence. Mon entrée en philosophie mit fin à ma tutelle; l'étude de la botanique, à laquelle j'avais joint celle des autres sciences natu- relles, m'avait entièrement absorbé, et il n'était pas à craindre que je fisse un mauvais usage de la liberté désormais acquise. Les loisirs que me laissèrent les études classiques pendant le semestre d'été 1848 donnèrent une nouvelle impulsion à mes aspirations botaniques : je remplissais, il est vrai, les devoirs de l'étudiant-citoyen, au moins à la parade ; mais quant aux heures de classe, je faisais en sorte de les remplacer par des excursions, et si les examens semestriels n'eussent été une simple formalité, je ne sais trop comment je me serais tiré d'affaire. Il est cependant une épreuve oii je me distinguai spécialement : ce fut en botanique. Notre vieux professeur Diebl, en entendant appeler mon nom à l'examen, avait bien déclaré ne pas avoir l'honneur de me connaître; mais le fait que j'étais un auditeur payant pour des cours qui, dans le plan d'études admis à cette époque, n'étaient pas obligatoires pour la catégorie d'étudiants à laquelle j'appartenais, le disposa sans doute favorablement à mon égard, car il se montra plein d'indulgence pour moi et me combla d'éloges — sans cependant employer précisément les termes fleuris reproduits par le Bot. Zeitschrift : pour rester dans le vrai, je tiens à déclarer que ma qualité précitée d'auditeur payant ne dut pas rester complètement étrangère à cette trop flatteuse appréciation. Eu 1848, les étudianis en philosophie de V^ année furent ~ 8 — autorisés à entrer directement à l'ITaiversité sans passer par la 2*^^ année; malheureusement je ne fis aucun usage de cette per- mission : mes parents^ convaincus de la nécessité d'une prépa- ration solide aux études universitaires^ ne voulurent pas me priver des leçons de sagesse de nos professeurs de philosophie d'alors, et je perdis à les écouter tout une précieuse année : peut-être fût-ce pour un bien, car Dieu sait comment les choses eussent été sans cela. Eu attendant j'avais assez de loisirs pour compléter mes connaissances dans la Flore de Briiun, et je crus être assez fort, vers la fin de l'année suivante, pour publier un Comjoendium des plantes croissant spontanément aux environs de ma ville natale. Eu 1849 j'entrai à l'université de Vienne; mon choix fut bientôt fait: m'inspirant de mon inclination vers l'étude des scieaces naturelles, je me décidai pour la médecine. Pendant le semestre d'hiver, les cours si importants de cette faculté (anatomie, chimie, etc.) m'absorbèrent complètement : les exercices anatomiques dans la salle de dissection et surtout les distances énormes entre les divers auditoires me prenaient tous mes loisirs; mais pendant les mois d'été je pus me livrer davantage à mes aspirations botaniques, commencer des excursions aux en- virons de Vienne et réunir une quantité prodigieuse de matériaux; plus expert dans le métier cette fois, je fus à même d'apporter au professeur Fenzl nombre de plantes encore fraîches, que j'affirmais avec conviction être extrêmement rares ou même complètement nouvelles pour la flore viennoise. Fenzl, rendu attentif par ces essais, me prit sous sa direction spéciale; il soutint le débutant de la façon la plus bienveillante, et, bien des années plus tard, m'aida de ses conseils dans mes travaux originaux. Les conservateurs du cabinet de botanique de cette époque, M. Siegfried Reissek, collaborateur du « Gênera plantarum » d'Eadlicher, et le célèbre voyageur D'' Théodore Kottschy, m'accueillirent avec la plus franche cordialité, et le professeur Unger, dont les leçons sur l'anatomie, la physiologie et plus tard la paléontologie végétale ouvraient à mes yeux, dans le domaine botanique, des horizons tout nouveaux, fiait par m'absorber entièrement. Dès ce moment je lâchai quelque peu la botanique systématique pour me consacrer surtout aux études anatomiques et physiolo- giques. Il me fallut bientôt un microscope, et quand ce précieux instrument fut en ma possession, j'allai trouver le professeur Unger et lui dis qu'après nous avoir enseigné au cours tant de choses intéressantes sur le microscope, il devrait bien m'apprendre _- 9 — à en tirer parti. Cette naïve requête ne parut pas trop déplaire à l'éminent professeur et mou éducation microscopique commença aussitôt sous la direction immédiate d^Unger, auquel je servais d^assistant pendant ses leçons et dont le laboratoire me prenait toutes mes heures de loisir jusque bien avant dans la soirée. Le professeur Unger tenait à sa méthode d'enseignement : il fallait fixer par le dessin Pobjet tel qu'il se présentait au micros- cope. Pour moi qui ne savais pas dessiner c'était une nouvelle étude à faire et une étude hérissée de difiicultés^ étant donnée la nature toute spéciale des objets à reproduire. Quant à Unger, jamais il ne vous montrait où vous péchiez ; il vous laissait recommencer deux, trois, quatre fois, pour vous apprendre, comme il disait, l'art d'interpréter exactement ce que vous aviez vu. Pendant que le microscope absorbait ainsi tous mes instants de liberté, il ne me restait plus que les jours de fête à consacrer à mes travaux de botanique systématique. J'employai mes pre- mières vacances à achever mon « prodrome d'une flore de Brûnn », les suivantes à de grands voyages à travers toute l'Allemagne ; une première fois je visitai Prague, la Suisse saxonne, Dresde, Leipzig, Berlin et l'Erzgebirge; une seconde fois je parcourus la haute Autriche, la Bavière, la Suisse, l'Alsace, les bords du Rhin, la Belgique, la Hollande et revins d'Amsterdam à Hambourg par eau — mon premier voyage sur mer ! Je ne pouvais me passer d'herboriser pendant ces excursions; ce n'était guère facile cependant, vu le peu de temps dont je disposais et l'équipement de voyage peu commode que j'avais adopté — car je faisais alors mes tournées studiosorum more, le havre-sac sur le dos; mais coûte que coûte il fallait récolter, et de chaque station j'expédiais chez moi un paquet de plantes, encore fraîches pour la plupart. Mon second voyage avait surtout pour but de faire personnelle- ment connaissance avec le plus grand nombre possible de pro- fesseurs de botanique: de là mes chasses-croisés à travers l'Alle- magne, assez semblables au célèbre itinéraire de feu maître Jobs. Mes professeurs Unger et Fenzl m'avaient remis toute une pacotille de cartes de recommandation et de lettres adressées à ces Messieurs ; un heureux hasard me les fit rencontrer pour la plupart — quoiqu'on fût en vacance — soit dans la ville où ils enseignaient, soit aux environs dans leurs maisons de campagne ; car les profes- seurs allemands ne sont ou du moins n'étaient guère alors amis des longs voyages et demeuraient volontiers chez eux. C'est ainsi que j'appris à connaître en personne la plupart de ces hommes pour les ^ 10 — connaissaBces scientifiques desquels mon imagination juvénile se passionnait. Mais, à vrai dire, chaque entrevue refroidit quelque peu mon enthousiasme. Seul, le vieux Martius, de Munich, me fit une excellente impression; ce fut aussi le seul avec lequel je con- servai des relations qui se changèrent plus tard (1863) en un commerce scientifique très suivi. Mais je ne dois pas omettre de mentionner, à la fin de cette période de mon existence, mon premier essai de publication. Après quatre années de travail, je crus avoir assez pillé la flore des envi- rons de Brilnn pour exposer, les résultats de mes recherches sous le titre de : « Prodrome d'une flore de Brûnn » devant la Société zoologico-botanique constituée alors à Vienne, et en solliciter l'insertion dans ses publications. L'introduction donnait un aperçu de la constitution géologique des environs de Brûnn ; puis venait rénumération des espèces, d'après l'ordre adopté par Koch dans la flore de l'Allemagne. Ce travail — nous l'appellerons un péché de jeunesse — présentait mainte imperfection, comme je l'ai reconnu depuis lors ; je me croyais à la hauteur de la tâche que j'avais entreprise, le rayon d'exploration comprenait une étendue de 8 milles carrés et j'avais omis de consulter des hommes d'expé- rience 1 La faute devait s'expier. Les « hommes expérimentés » s'acharnèrent après mon travail pour en compléter les lacunes : le professeur Albin Heinrich, de l'air d'un « censor castigatorque mino- rum », s'attaqua à la partie géologique, tandis que le conseiller d'Etat Tkany s'occupait surtout du dénombrement des espèces végétales omises. Le résultat de toute cette afii'aire, c'est que mon travail établit pour la première fois la liste des plantes croissant spontanément aux environs de Brilnn ; leur authenticité fut garan- tie par les déclarations des savants précités ; et la nature et le caractère de l'intervention bienveillante de ceux-ci m'apprirent à être prudent à l'avenir et à y regarder à deux fois, avant de plus rien livrer à la publicité. A trois années d'activité et de travail botanique succéda un intervalle d'inaction d'égale durée; les deux années de pratique m'absorbèrent tout mon temps, d'autant plus qu'il me fallait songer à prendre mon premier diplôme de médecin; ce diplôme me fat accordé au commencement de la dernière année d'études, au bout de laquelle je subis heureusement l'examen final avec les annexes ; et puis, que faire après ? Depuis longtemps déjà mon parti était pris; un beau jour je déclarai mon intention et signifiai à mes parents et à mes amis — 11 -- stupéfaits de cette nouvelle que j'allais entrer dans la marine ! — Ce fut une surprise, un étonnement! Qui songeait sur le continent en 1855 à la marine de guerre autrichienne? — Mais ma résolution était réfléchie; le goût des voyages s'était réveillé en moi, et le désir d'explorer des contrées étrangères et de contempler vivantes les plantes que je n'avais jamais vues, sinon dans des herbiers poussiéreux et moisis, me poussait à embrasser une carrière qui semblait répondre aux aspirations de mon âme; et puis, peu d'années auparavant, le frère de l'empereur, l'archiduc Maxi- milien, s'était mis à la tête de la marine; l'on pouvait être certain d'avance qu'elle allait prendre un rapide essor, et je calculais sans rien dire que je pourrais, tout en satisfaisant mes goûts botaniques, m'y créer une position relative. A l'époque dont je parle, les médecins de marine ne formaient pas un corps spécial : je dus faire d'abord, en qualité d'aspirant médecin de troupe, mes 6 mois de service à l'hôpital militaire de Vienne, et fus transféré dans la marine le 6 décembre 1855, jour de St. Nicolas, patron des matelots, ce que les bons catholiques eussent considéré comme de favorable augure pour mon avenir dans la carrière où je m'engageais..., au petit bonheur. Au commencement de janvier 1856, je me rendis à Trieste, mon lieu de destination, où notre chef, le médecin major Patay, me fit passer par de rudes épreuves de discipline et de subordi- nation militaires. Il était généralement redouté, le sévère médecin major ; cependant, à part le plaisir qu'il éprouvait à tourmenter ses subalternes, il n'était pas méchant au fond, et je lui dois, pour ma part mes premières — mes plus belles — expéditions, dont la seconde surtout exerça sur ma destinée une influence décisive. La première eut lieu au mois de janvier sur le brick « Saïda », petit mais fin voilier, qui devait, se disait-on à l'oreille, faire dans les eaux de la Méditerranée un joli voyage, à l'occasion duquel le commandant baron von Bruck, fils du ministre des finances, avait réclamé un médecin diplômé au lieu de l'oflicier de santé attaché d'ordinaire à ce bâtiment. Et de fait le voyage projeté eut lieu le 15 mai, avec mission de toucher Messine, Naples, Livourne (Florence), Bastia (en Corse), Barcelone, Alicante, Car- thagène, Malaga, Gibraltar et, au retour, Tunis et Alger. J'étais au comble du bonheur; je voyais se réaliser prématurément les espérances que j'avais conçues. — Eu octobre nous revînmes à Venise pour nous joindre, 14 jours après, à l'escadre qui fut bientôt rappelée à Pola. — 12 - Là nous attendait une grande nouvelle. Les médecins de marine venaient d'être détachés de l'armée et formaient un corps à part, avec avancement spécial, l'uniforme de la marine et le traitement du grade immédiatement supérieur. Mais quelque chose de plus important encore se préparait. La frégate « Novara, » était destinée à un voyage autour du monde, et la corvette « GaroUna » devait l'accompagner jusqu'à l'Equateur, pour entreprendre de là, pour son propre compte, un voyage de circumnavigation dans le sud de l'Atlantique. C'était une attrayante perspective ! Pour la « Novara » il n'y fallait pas songer : les médecins avaient été désignés à l'avance et d'autres passagers avaient déjà réussi à se faire inscrire sur les rôles sous la rubrique « savants » ; pour le dire ici en passant, l'un d'eux, le D"^ Lallemand, quitta l'expédition dès Rio Janeiro, tandis que l'autre, le D"^ Schwarz, engagé pour la récolte de plantes, se montra, dans le cours du voyage, aussi mauvais botaniste qu'habile observateur et médecin distingué. Mais la corvette était plus abordable. La disette momentanée de médecins de marine, provoquée par le départ de nombre de collègues plus anciens, et le désir que l'on avait d'en trouver un pour ce long voyage qui fut quelque peu familiarisé avec de plus courtes tra- versées, me faisaient espérer d'être choisi; et en effet, en novembre 1856, je fus attaché à la corvette « Oarolina » en qualité de médecin en chef, circonstance qui dissipa mes derniers regrets relative- ment à la « Novara » où je ne pouvais prétendre qu'à une position subalterne. Du reste il y avait à son bord trop d'éléments terrestres, — je veux dire de savants, — ce qui est mauvais; car l'éternelle mésintelligence des savants entre eux et avec les profanes rend la via à bord extrêmement pénible : c'est une vérité que j'ai eu maintes fois occasion de reconnaître plus tard. Le 30 avril 1857, les deux navires se mirent en route; nous touchâmes successivement Messine, Gibraltar, Madère; le 13 juillet, le baptême équatorial fut célébré au milieu d'une pompe et d'un tumulte indescriptibles et, le même jour, la « GaroUna » se sépara de sa compagne : cette dernière cingla vers le sud dans la direction de Rio Janeiro, tandis que nous continuions notre voyage par Fernambuco, Bahia, Rio-Janeiro, Buenos-Ayres, Montevideo, tra- versions l'Océan à la hauteur de Tristan d'Acunha, visitions la ville du Cap, Benguela et Loanda (sur les possessions por- tugaises au Congo), l'Ascension et S. Antonio, une des îles du Cap- Vert, et jetions enfin l'ancre à Trieste le 16 mai 1858. Il va — 13 — sans dire que j'herborisai ferme dans ces différentes contrées, et je donnerai une idée du zèle et de Tentrain que j'y mettais en ajoutant que j'y consacrais parfois les heures de la nuit: j'herborisais dans la campagne jusque bien avant dans la soirée, et passais la nuit en plein air, en l'absence d'un refuge rapproché, — pour pouvoir me remettre à la besogne le lendemain dès le point du jour. Ce genre de campement avait bien aussi sou côté pittoresque : trois grands feux l'entouraient, — conformément aux conseils des Euro- péens établis dans ces parages, qui ne trouvaient pas de couleurs assez noires pour décrire les dangers de pareilles haltes et préten- daient éloigner par le feu tous les êtres rampants, volants, bondis- sants, piquants et mordants. Plus tard je compris l'exagération de semblables peintures; je mis dans mes excursions plus d'insou- ciance et de laisser aller et ne m'en trouvai pas plus mal; car, parmi nos innombrables tournées d'exploration pas mal téméraires, à part une seule fois — à Catombela — où nous jouîmes du spectacle d'un couple d'hyènes grinçant des dents à notre approche, nous n'avons jamais été sérieusement inquiétés, ni par animaux ni par êtres hu- mains.Bien entendunous ne comptons pas l'engeance aquatique, tels que requins, crocodiles, tortues, etc.; les moustiques et autre ver- mine du même genre ne sont pas plus terribles que nos cousins : j'en excepte ceux d'Australie, par exemple; et, quant aux hommes, ils ne sont pas plus méchants qu'ailleurs vis-à-vis des voyageurs : les moins hospitaliers sont les Mexicains-Espagnols, puis les anthropophages. La partie de notre voyage la plus féconde en épisodes fat notre halte dans les colonies portugaises du territoire de Congo (Ben- guela 14°, Loanda 8° L. S.). Un climat meurtrier — c'était au mois de février que les gens du pays nomment « Meses de Matenzas » (mois meurtrier) à cause des nombreux décès — rend extrêmement dangereux le séjour de cette contrée, et un jour, dans une excursion vers l'intérieur des terres, abandonnés par notre guide, un nègre aux pieds nus, qui s'était blessé aux fruits épineux d'un Tribulus gisant sur le sol — une nouvelle espèce que pour cela je nommai Tribulus excrucians — et séduits par la folle pensée de continuer à avancer pour atteindre le fleuve Cadombela nous nous égarâmes et faillîmes périr dans ces solitudes désolées. — A Loanda (Angola di Loanda), je rencontrai Welwitsch, un compatriote célèbre par la découverte du fameux Welwitschia, envoyé par le gouvernement portugais dans ces colonies qu'il parcourut pendant 4 ans. Nous avions projeté une excursion de plusieurs jours dans les fo- — 14 — rets (1^ Euphorbes de l'Afrique occidentale^ lorsque la fièvre des côtes éclata à bord, et la corvette dut mettre précipitamment à la voile. Qu'il me soit permis, à cette occasion, d'exposer en quelques mots ma méthode d'herborisation à l'étranger. Je partais de préfé- rence seul, après m'être renseigné en ville — auprès des employés du Consulat anglais, d'ordinaire — sur les lieux oii je pourrais me livrer à de fructueuses recherches. Parfois je prenais avec moi un guide servant de porteur, rarement mes compagnons de bord; car du moment oii l'un d'eux avait fait avec moi semblable tournée, il n'était pas facile de l'y reprendre une seconde fois. Tout mon équipement consistait en un vasculum, un cahier de papier blanc, un revolver, du rhum fort et des provisions de bouche — en petite quantité, du reste, car dans ces excursions fatigantes sous les tropiques, le besoin de nourriture ne se fait guère sentir; les plantes récoltées prenaient place dans la boîte, puis de là entre les feuilles de papier où elles s'entassaient les unes sur les autres de façon à conserver leur fraîcheur. Grâce à cette méthode, la récolte marchait lestement. Aussitôt de retour à bord, les plantes étaient séparées et largement arrosées d'eau fraîche ; elles reprenaient alors pen- dant la nuit leur forme naturelle, sans trace d'affaissement, de flé- trissure, etc. ; c'est alors seulement que je les étendais avec soin et les séchais entre des feuilles de papier buvard. Je tenais en outre, relativement aux plantes récoltées, une sorte de journal où j'inscrivais les détails impossibles à reconnaître sur les sujets secs. Pour opérer leur dessication je n'avais recours à aucun appareil spécial : deux planches, une charge variable suivant les circon- stances, et c'était tout ; seulement il fallait retourner les plantes chaque jour, car l'état de saturation de l'air de la mer rend la des- siccation à bord lente et difîicile, surtout sous les tropiques. Lors do mon dernier voyage, je me servis avantageusement de l'appareil à courant d'air chaud embarqué sur les paquebots trans-océaniques pour dessécher les vêtements humides. En règle générale je récol- tais de chaque espèce 10 spécimens, dont chacun était soigueuse- ment étiqueté. La corvette se mit en rade à Venise ; j'obtins un congé d'un mois et partis, chargé de mes trésors botaniques que je déposai à Vienne (au Musée botanique) et que j'allai rejoindre — après un séjour de quelques semaines à Bruun — pour commencer le travail de leur classement : j'avais obtenu à cet effet une prolongation de congé de deux mois. Il ne pouvait être question, dans ce court laps de temps, d'un arrangement complet et définitif; le professeur — 15 — Fenzl me conseilla de ne m^occuper qne de la collection récoltée au Congo : car la récolte des autres contrées — celle du Cap, par exemple, un des territoires les plus explorés, oii j'avais rencontré moi-même trois botanistes y domiciliés, M''^ Eklon, Zeiher et Pappo, occupés à cette époque à inonder de plantes indigènes les musées de l'Europe — ne présentait qu'un intérêt plus secondaire. Et puis, les plantes de Benguela étaient les filles de mes douleurs, et j'étais d'autant plus disposé à m'en occuper; mais la besogne avança moins que je ne l'avais pensé d'abord: c'était mon premier essai en flore exotique ; il y avait quantité d'espèces nouvelles et il s'agissait de montrer une extrême réserve, pour ne pas mériter, dès le début, une critique sévère. Le congé de deux mois fut bientôt expiré, l'ouvrage était à peine à moitié fait, et une demande de pro- longation fut formellement rejetée, car de noirs nuages montaient à l'horizon politique; il fallut partir, et à la fin de l'année 1858 — la nuit de Noël — je m'embarquai sur le « Donau », frégate de S. M. Mon ami, le botaniste Peyritsch, se chargea du reste du clas- sement et, le travail une fois terminé, le professeur Fenzl s'occupa de son insertion dans les mémoires de l'Académie impériale des sciences, oii il parut sous le titre de « Sertum Benguelense » (année 1859, vol. xxxviij) . — La collection de Benguela ne renfermait pas moins de 24 espèces nouvelles — parmi lesquelles un genre nouveau, le genre Basananthe. 11 d'entre elles furent décrites par moi, les 13 autres par Peyritsch. Quand je vis que ma collection avait certaine valeur, je l'abandonnai au cabinet de botanique im- périal. Et c'est le chemin que suivirent aussi les récoltes de mes voyages ultérieurs, car j'ai toujours pensé que les collections privées — à l'exception, bien entendu, des flores locales — ne sont que des assemblages fastidieux et sans valeur, aussi longtemps qu'elles ne servent pas à enrichir des musées plus importants. J'étais aussi flatté de cette idée que mes trésors botaniques allaient s'incorporer à une des plus belles collections existantes, dont les échantillons en double s'étalent à titre d'échange dans les musées les plus importants des cinq parties du monde. Le directeur Fenzl envisagea la chose à un point de vue plus pratique et obtint pour moi de l'Empereur, à titre de récompense, une superbe bague en brillants. — Outre ma récolte botanique, j'avais rapporte de mon voyage une petite collection numismatique ; plus tard^ dans mes autres excursions, je portai une attention spéciale sur les monnaies des contrées que j'explorais. L'idée de les recueillir _- 16 — me fut inspirée par une instruction destinée aux savants attachés à la Novara et accompagnée d'un tableau renseignant les monnaies des pays à visiter manquant à la collection impériale : il y en avait beau- coup et parmi elles d'assez communes, de sorte qu'il devenait pos- sible de rendre, sans trop de difficulté, un service important à l'Etat; je me mis donc à la chasse des pièces de monnaie et j'en rapportai une assezjolie collection, dont celles du Congo,entre autres,présentaient un vif intérêt, car peu de musées européens en possédaient quelques spécimens. J'en fis présent au directeur du cabinet numismatique impérial, le conseiller aulique von Arneth, ainsi que d'un exposé du système monétaire du pays qui fut imprimé dans les Mémoires de l'Académie des sciences (vol. XXIX). Reste le côté médical de mes fonctions; voici en quelques mots ce que j'en fis. Le rapport médical sur le voyage de la Caroline embrasse, en une cinquantaine de demi-feuillets, les détails relatifs à l'état sanitaire à bord et, autant que possible, sur les terres aux- quelles nous touchions; son étendue le distinguait seul des bulletins sanitaires annuels. Plus tard, dans mes expéditions ultérieures, lorsque je vis qu'on n'en faisait aucun usage, je fis ces rapports de moins en moins détaillés, de telle sorte que celui du plus long voyage — l'expédition autour du monde — se trouva être le plus court, à mon grand regret, car ce fut le seul qui parut dans l'an- nuaire statistique de la marine créé à cette époque — année 1873 — et il reçut au dehors l'accueil le plus favorable. C'est aussi lors de mon voyage à bord de la Caroline que je jetai les bases de ma collection photographique : l'augmenter et la com- pléter fut une des préoccupations principales de mes voyages. Aujourd'hui elle embrasse les cinq parties du monde — l'Orient seul y dépasse l'Europe en importance — et peut-être n'a-t-elle pas sa pareille en pays étranger. Je l'ai tout naturellement con- servée pour moi : c'est le plus beau souvenir de mes voyages. Mon excursion à bord de la Caroline eut encore un autre résultat. Son Altesse Impériale l'archiduc Maximilien, inté- ressé par mes travaux botaniques, voulut bien penser à moi. Ce prince si richement doué, enthousiaste d'art et de science, savait apprécier chez les autres l'ardeur, la persévérance dans l'étude de la nature qu'il cultivait lui-même avec prédilection, surtout quand il s'agissait d'attachés à la marine, à la prospérité, à l'accroissement de laquelle il avait consacré toutes ses forces, toute son énergie, — on sait avec quel résultat. Le développement de la marine autrichienne devait également profiter à la science — 17 — et aux arts pacifiques. Cette tendance de l'archiduc, entrete- nue par un homme extrêmement distingué, son médecin et son secrétaire privé tout à la fois, le D"" Auguste von Jilek, médecin- major, — aujourd'hui médecin en chef de la marine, — avait provoqué l'expédition de la « Novara » , Plus que jamais possédé d'un besoin de science et d'activité, Son Altesse Impériale voulut entreprendre en personne un voyage au-delà des mers — au Brésil, dont les forêts vierges exerçaient depuis longtemps sur lui une véritable séduction. — En fait le voyage fut décidé dès ce moment et mis en exécution à la fia de la guerre, le 1 4 novembre 1859. J'eus l'honneur d'accompagner l'archiduc sur le vapeur « Elizaheth. » Dans le cours même de la guerre, pendant laquelle la flotte devant Venise fut bien menacée, mais non engagée, j'avais été embarqué comme médecin chef de bord sur la frégate « Donau » d'abord, puis sur la frégate « Radetzlcy » — la même qui sauta en 1869 — et promu en avril 1859 au grade de médecin de frégate. L'archiduc était accompagné de son épouse, l'archiduchesse Charlotte, qui devait attendre à Madère son retour du Brésil. Dans la suite du prince se trouvaient entre autres le d"^ Jilek, son médecin, Tegetthoff, son adjudant, le comte Bombelles et le peintre Seleny, devenu célèbre par l'expédition de la Novara. J'étais moi-même engagé comme médecin du bord, chargé en outre de la récolte des plantes etc.; à cet eâ'et on m'avait adjoint un aide-jardinier de Schoabrunn, M. Fraoz Maly, aujourd'hui jardinier en chef au jardin du Belvédère. Après avoir visité en passant Messine, Malaga, Gibraltar, Tanger et séjourné quelques jours à Madère, nous touchâmes les plus importantes des Canaries — Canaria-grande, Ténériffe — et une des îles du Cap- Vert, S*- Vincent; puis nous fîmes voile directement vers Bahia, et de là un peu plus au sud, vers Ilheos, où les forêts vierges s'étendent jusqu'à la mer. Son Altesse Impériale y passa huit jours entiers; puis l'on se dirigea vers Rio-Janeiro, pour y explorer la forêt vierge de Petropolis. L'empereur du Brésil était justement en tournée dans les province du nord, et l'archiduc se décida à se mettre à sa recherche, afin de connaître personnel- lement ce souverain pour lequel il avait la plus grande estime. Il fallut visiter une foule de petits ports de la côte brésilienne avant de rencontrer l'empereur à Itapamerim (8 février 1860). De là nous reprîmes notre route par Bahia, Feruambouc, S' Vincent, Madère, Cadix et Gibraltar, jasqu'à Miramare (29 mars 1860). — 18 — Son Altesse Impériale avait décidé de publier l'histoire de son voyage transatlantique. Elle m'en confia le travail botanique^ en se réservant la partie descriptive. Deux volumes de cette œuvre remarquable, pleine d'ingénieuses conceptions^ écrite d'un style clair, chaud et coloré avaient déjà paru — manuscrits — en 1863; le lecteur, séduit, enchanté, y admire les brillantes descriptions de la nature des tropiques, la critique spirituelle et profonde des usages étrangers, et ne dépose le livre qu^en arrivant à la phrase interrompue du troisième volume incomplet; là le fil se rompt, et l'on se voit brusquement transporté devant la catastrophe de Queretaro. Pendant l'été de 1860, je me rendis à Vienne sur l'ordre de Son Altesse Impériale pour m'y occuper de l'arrangement des matériaux botaniques, consistant en plantes sèches et en végétaux vivants, nés de bulbes ou de semences ou non encore éclos. Les jeunes sujets, plantés à Schônbrunn et confiés aux soins du célè- bre directeur Schott, y prospéraient au point de remplir plus tard ni plus ni moins de trois serres. M. Maly avait aussi largement contribué, pendant le voyage, à l'entretien et à la conservation des sujets vivants. Le résultat de mes travaux — interrompus par de fréquents embarquements — parut chez Gérold, à Vienne, en 1868, sous forme d'un volumineux in-folio, contenant, outre un court récit du voyage, et la description en latin des espèces végétales, 104 planches (in-folio) dont 32 coloriées. Les planches originales étaient l'œuvre du, célèbre dessinateur Joseph Seboth, et l'impression typogra- phique en fut confiée à la maison Hartinger de Vienne. La première interruption de mou travail ne se produisit qu'au bout de quelques mois, après m'avoir laissé le temps de mettre en ordre et de classer systématiquement mes matériaux botaniques ^ je reçus l'ordre de m'embarquer sur « VAdria », frégate de Sa Majesté, qui croisa longtemps dans l'Adriatique sans guère toucher de ports de la Dalmatie : encore leur végétation, intéressante à coup sûr pour les botanistes du pays, n'avait-elle pour moi que peu d'attraits, habitué que j'étais à la flore plus riche, plus pittoresque des contrées tropicales. h'Adria avait spécialement pris la mer en destination de Corfou, et y demeura pendant tout le temps que Sa Majesté l'Impératrice passa dans l'île (jusqu'au 24 octobre 1861). C'est alors que je pus me remettre à l'œuvre; en 1862 et 1863 je fis paraître dans V Œderreich. ho tan, Zeitung la description des espèces nouvelles dont je réclamais la paternité. Et comme le dessi- -- 19 — nateur ne pouvait fiiire marclier de pair son travail avec mes déter- minations analytiques, il me restait un peu de loisir que je me pro- posai d^utiliser à décrire une partie de l'herbier de la Novara. Malheureusement des circonstances indépendantes de ma volonté retardèrent mon travail au point que je me décidai à l'abandonnei-, bien que j'eusse déjà en manuscrit la description de quelques espè- ces nouvelles sur les 150 que comptait ma collection. Je m'en tins exclusivement dès lors à l'herbier de Peckholt, petite collection de plantes brésiliennes d'après laquelle je classai jusqu'à l'expiration de mon congé la moitié de mes spécimens et, parmi eux, plusieurs espèces nouvelles dont la description parut dans la « Flora » de 1864 (*). Au printemps 1863, le texte et les planches étaient assez avancés pour pouvoir songer à leur impression ; c'est alors que j'eus l'heu- reuse inspiration de les soumettre d'abord au doyen de la flore brésilienne, au professeur Martius, en lui demandant à voir ses collections du pays. Je me rendis donc à Munich avec mes planches originales — en mai 1863 — et présentai ma requête à Martius; celui-ci prit à mon travail le plus vif intérêt; non-seulement il m'ouvrit ses collections privées, mais encore il me procura l'accès de l'herbier de l'université : je pus ainsi comparer et vérifier le plus ou moins d'exactitude de mes déterminations et j'eus la satisfaction de constater que la plupart des espèces citées par moi comme nouvelles figuraient bien daus les collections, mais sans dénomination, tandis que les autres étaient dénommées et suffisam- ment décrites. Martius, le professeur le mieux au courant de la flore brésilienne, me donna en outre quelques utiles éclaircisse- ments sur diverses espèces encore douteuses. — L'introduction à mon travail — imprimée également dans VŒsterreich. hot. Zeitung de 1864 — parut dès novembre 1863, et j'espérais que la publication de l'ouvrage lui-même pourrait avoir lieu dès l'année suivante. Mais — et c'est ici que se place la seconde interruption — je fus appelé en avril 1864 sur la frégate Novara en qualité de médecin chef de bord, chargé d'accompagner au Mexique l'em- pereur Maximilien ; et cette interruption dura un an et demi. Sa Majesté partit de Miramare le 14 avril 1864, au milieu des ovations enthousiastes de la population de Trieste et de la côte avoisinante. Ce fut une scène émouvante que celle de la séparation. (*) Cette collection présente aussi un certain intérêt pharmaoologique en ce sens que le pharmacien Peckholt, dans ses excursions, a surtout porté son attention sur lea plantes employées comme remèdes populaires par les naturels du pays. — 20 — lorsque retentirent du yacht « Fantasie » les derniers hurrahs poussés par les hauts dignitaires de la marine, qui avaient voulu escorter quelques milles au delà du port le navire de leur ancien chef. Au départ, après avoir passé en vue de Civita Vecchia (Eome) et touché Gibraltar, Madère, la Martinique et la Jamaïque, nous jetâmes Fancre devant Veracruz le 28 mai ; le 29 au point du jour Sa Majesté, après avoir pris congé de Pétat-major du bord, se rendit à terre pour continuer sa route vers la ville de Mexico. Plus tard, en souvenir de ce voyage, les officiers de Fétat-major furent décorés de la croix de chevalier de l'ordre de la Guadeloupe. La frégate ayant mission de stationner à Veracruz jeta l'ancre après quelques jours devant l'île Sacrificios, à un mille allemand de la ville, où elle était moins exposée aux atteintes de la fièvre jaune, et y demeura presque sans interruption pendant une année entière. Une fois seulement nous visitâmes la Havane et quelques points de la côte du Yucatan, ainsi que les Lobos, petites îles de sable, qui fournissent, aussi bien que nombre d'autres îlots voisins de Vex'acruz, d'utiles renseignements sur l'ensemencement spontané des terres isolées et stériles. Inutile de dire que nous herborisâmes partout avec ardeur, aux environs de Veracruz surtout, où notre séjour prolongé nous permit de récolter un riche butin. Sur toute sou étendue, le rivage proprement dit ressemble à un désert de sable dépourvu de végétation ; mais un peu au delà surgissent des coteaux séparés par des marécages qu'habite une flore abondante et vivace — en compagnie, il est vrai, des germes fébrigènes qui en font leur demeure de prédilection. Aussi n'out-ils guère été exploités jusqu'à présent, et c'est ce qui en faisait le but préféré de mes excursions botaniques. Ni les souffrances résultant de la chaleur excessive ou du manque d'eau potable, ni le danger de succomber aux atteintes de la fièvre jaune qui fait dans ces contrées de terribles ravages, ni les histoires d'attaques de brigands aux- quelles les étrangers étaient surtout exposés, rien ne m'arrêtait: je ne redoutais qu'un seul péril, les morsures des Carapatos, espèce de tiques microscopiques qui fondent sur les hommes eu essaims compacts, perforent la peau et y creusent des blessures qui ne font que s'exaspérer et m'ont plus d'une fois réduit au désespoir. — Eufin, au prix de mille peines, de mille souffrances, je parvins à récolter aux environs de Veracruz quelque chose comme 800 espèces végétales — chiffre auquel n'est jamais arrivé aucun de ceux qui ont herborisé sur cette côte, parce que chacun fuit ces parages — 21 — infernaux pour n'explorer que la région moyenne moins tourmentée, moins accidentée. En septembre, saison des pluies dans ce pays, j'entrepris, en compagnie de trois cadets de marine, un voyage à la ville de Mexico, excursion pas mal aventureuse, car, au lieu de suivre la grand' route, nous allions à cheval à travers les montagnes. En chemin nous visitâmes le vieux Sartorius à Mirador. — Autrefois professeur de botanique à Bonn, il s'était, à la suite d'agitations politiques, réfugié au Mexique (1848) où il avait fait bâtir, non loin de Huatusco, dans un site isolé et vraiment enchanteur, une splendide hacienda (Mirador, comme qui dirait Belvédère). Il était hautement apprécié dans le pays et fut plus tard en rapporta intimes et suivis avec l'empereur. Bien que sans lettres de recom- mandation, je reçus de lui à Mirador, en qualité de botaniste, le plus fraternel accueil, et le vieux professeur parut on ne peut plus heureux d'offrir un veire de vin à des compatriotes, en causant avec eux de la patrie absente et des jours heureux d'autrefois. Après deux jours passés à Mirador, nous commençâmes à esca- lader rOrizaba. Un guide indien, sagace et intelligent, nous fit passer par les sentiers de la montagne au milieu des guérillas qui occupaient la ravissante campagne de Jalappa; nous gravîmes la montagne, haute de 18000', jusqu'à la ligne des neiges — 15000' — et arrivâmes à un point d'où nous pûmes voir, à travers un précipice, la ville d'Orizaba étendue à nos pieds, et embrasser d'un seul coup d'œil les diverses zones de végétation de la neige éternelle — sapins nains, pins, chênes décorés de superbes orchidées — jusqu'à la région des palmiers tropicaux. Ensuite nous dépassâmes la ligne des eaux et continuâmos notre chemin, au milieu de privations et de dangers sans nombre, à travers les hautes terres jusqu'à Mexico. — Les plantes recueillies pendant cette excursion furent envoyées par l'intermédiaire de notre guide à Sartorius, qui voulut bien se charger de leur dessication et de leur expédition à Veracruz. Le 19 mai 1865, la corvette Dandolo aborda à Veracruz avec mission de nous relever. Inutile de dire quels transports de joie éclatèrent à bord de la Novara; dès le lendemain nous reprîmes la mer, et n^arrivâmes au port, va l'ordre de ne marcher qu'à la voile, qu'après une traversée de 84 jours. Je retournai à Vienne en automne pour continuer et terminer mon travail ; il s'agissait de se hâter, car j'étais désigné pour l'expédition dans l'Asie orientale que la frégate Schwarzenlerg — 22 -^ devait entreprendre l'année suivante, sous le commandement de Tegetthoff; ce voyage n'eut pas lieu, il est vrai, en 1866, car l'horizon politique s'assombrissait de nouveau, la guerre paraissait imminente, et j'eus bien du mal à ne pas être interrompu une seconde fois dans mon travail. Ces interruptions de longue durée avaient ceci de regrettable qu'il me fallait reprendre au retour ma tâche de beaucoup plus haut, et il y avait encore une partie des planches et tout le texte à imprimer, le groupe confus des fougères à classer, l'index et l'introduction à composer. — Le tout fut prêt en juin; muni des dernières feuilles d'impression encore humides, je courus chez le relieur pour pouvoir au moins contempler un exemplaire complet de mon ouvrage et l'emporter avec moi à Pola, d'où je devais prendre la mer le lendemain; mais la fatigue résultant de la surexcitation intellectuelle et de l'insomnie qu'elle avait pi'ovoquée me retinrent à Vienne huit jours plus tard. — J'offris respectueusement un exemplaire de mon ouvrage à S. M. l'Empereur, qui m'en récompensa, en avril 1867, par la croix de chevalier de l'ordre de François-Joseph : j'avais déjà reçu en fé- vi'ier 1864 de S. M. l'Empereur du Brésil la croix de chevalier de l'ordre de la Rose, en récompense de mes travaux sur la Flore brésilienne. Ari'ivé à Pola, je fus embarqué sur la frégate cuirassée Ferdi- nand Max, le vaisseau amiral de Tegetthoff; mais je dus bientôt céder la place à un collègue plus ancien, médecin chef d'escadre revenu de congé, et passai sur la frégate tSchwarzenherg , à bord de laquelle je pris part au combat naval de Liessa et à laquelle je demeurai attaché comme médecin chef d'escadre, lorsque, une fois la guerre fiaie, elle devint le porte-enseigne de la nouvelle flotte. — En février 1867, je fus promu au grade de médecin de vaisseau de ligne; en été, je revins à Pola, puis à Trieste, oii je m'embarquai sur la frégate Donau, destinée — en remplacement du Scliwarzenherg — à l'expédition dans l'Asie orientale. Le numéro de janvier 1867 de VOesterreich. hotan. Zeitschrift publia, dans sa Galerie des botanistes autrichiens, ma biographie accompagnée de la mauvaise reproduction d'une excellente pho- tographie. Tandis que le voyage de la Novara poursuivait un but essen- tiellement scientifique, l'expédition dans l'Asie orientale avait des visées presque exclusivement politico-commerciales. Le con- seiller aulique Cliev. de Scherzer, le nouveau consul-général pour la Chine et le Japon baron Calice, le baron Herbert, conseiller _ 23 — de légation à Constantinople, étaient chargés de la mission diplo- matique; ils étaient embarqués sur le Donau, tandis que les représentants de l'industrie occupaient la corvette Friedrich, — et je citerai, parmi eux, le directeur du musée de Trieste, le D'' Syrski, aujourd'hui professeur à Lemberg, en compagnie duquel je fis presque toutes mes excursions botaniques pendant la pre- mière moitié du voyage; plus tard les diplomates et les industriels, les plus nombreux de beaucoup, s'éclipsèrent et disparurent, le camarade Syrski fut rappelé au pays, et il n'y eut plus qu'une poignée de fidèles qui tinrent bon jusqu'à la fin. Les deux vaisseaux prirent la mer le 18 octobre 18(38, sous le commandement du contre-amiral baron von Petz; après une courte balte à Messine, ils s'ax*rêtèrent devant Carthagène, d'où nous fîmes, le corps diplomatique et ma modeste personne, le trajet par terre jusqu'à Gibraltar oii nous attendaient les bâtiments, en passant par Cordoue, Grenade, etc.; puis nous touchâmes Tanger, Madère et Ténérifife; dans la ville du Cap (17 janvier 1869) nous fîmes un plus long séjour ; la frégate devait aller jusqu'à Port-Natal, mais on trouva plus simple et plus avantageux de n'y envoyer que les diplomates sur un vapeur spécial, en nous priant de les attendre. — SjH'ski et moi, nous nous réfugiâmes dans les « montagnes noires » aux environs de Wellington, afin d'en étudier, autant que nous le permettrait cette halte forcée, la flore et la faune si pleines d'intérêt. Da Cap nous partîmes pour Java oii nous ne fîmes que toucher Anger (6 avril 1869) pour laisser Batavia à notre droite et naviguer vers Singapore ; sur l'invitation du Maharadja de Jahore, je visitai, en compagnie du D' Syrski, les forêts vierges de la pointe méridionale de Malacca. Le 10 avril, nous arrivions à Bangkok; le corps diplomatique accompagné d'un détachement de soldats de marine fut logé dans la résidence royale ; je lui fus attaché en qualité de médecin ; et grâce à cette circonstance, pendant les 20 jours que dura notre séjour dans la capitale de Siam, je ne man- quai pas d'occasions d'étudier les gens et les choses et surtout les productions des tropiques qui prospèrent là mieux que partout ailleurs. Bangkok fut le point culminant de ce voyage ; notre audience auprès du premier roi — car Siam en a deux — fut entourée de cet apparat, de cette pompe que les Orientaux aiment à déployer aux yeux delp étrangers et des indigènes pour les pénétrer de l'idée de leur puissance: le fait est qu'elle produisit vraiment sur nous une profonde impression. La suite de notre voyage nous conduisit à Saigon, IIong-Kong — 24 — (Canton, Wampoa) et Shanghaï; puis nous nous rendîmes à la baie de Petschili et jetâmes l'ancre à 10 milles de l'embouchure du Peiho (3 juillet) ; je débarquai aussitôt en compagnie du baron Ran- sonnet et me rendis aux forts de Taki, puis directement à Pékin. Là, je trouvai à me loger à la mission française (couvent des Lazaristes, jadis collège des Jésuites) ; des excursions furent orga- nisées vers la muraille de la Chine, à Kupeiku, vers les célèbres mausolées royaux, aux défilés de Nankou, etc. ; puis, après Séjours passés dans la capitale de la Chine, je revins sur un vapeur amé- ricain à Tschifou, oii nos vaisseaux attendaient le retour des diplo- mates de Pékin ; mais ceux-ci se firent attendre pendant cinq semaines encore et je profitai de ce retard pour explorer la flore si intéressante des environs de Tschifou. Le 12 septembre, nous quittâmes cette localité et le royaume du Midi pour l'empire du Levant, le Japon ; nous gouvernâmes sur Nangasaki, pour nous rendre de là par le magnifique détroit de Simonoceki à Hiogo et gagner enfin Jocohama (Jeddo). En 1869, on pouvait encore voir le Japon dans toute son originalité et toute son étrange splendeur : il ne peut naturellement être question de l'appeler ici les souvenirs de notre séjour dans cette merveilleuse contrée — car il nous faut poursuivre notre récit. — Nous avions quitté Jocohama en destination de San Francisco, après nous être séparés du « Friedrich » qui demeurait dans les eaux chinoises, lorsqu'un terrible cyclone assaillit notre frégate et l'endommagea' assez sérieusement pour nous obliger à chercher un asile dans le port le plus rapproché : c'était Honolulu, sur une des îles Haway, à 1600 milles de l'endroit de la catastrophe. Pour remettre la frégate en état de tenir la mer, il fallut quatre grands mois que j'employai activement à explorer à fond les grandes îles de l'Archipel, pour me dédommager autant que possible de la perte que m'infligeait ce maudit typhon, en écartant notre navire de la route de San Francisco, Mexique, Guatemala, Costarica et Guyaquil. Je publiai plus tard (1871-72), dans le Oesterreich. hot. Zeitschrift, une des- cription assez détaillée de la végétation d' Haway. Le 30 avril 1870 nous assistâmes encore à l'ouverture solennelle du parlement hawaïen, et le lendemain, l^"" mai, nous quittions la résidence hospitalière du roi Kamehameha, au milieu des hurrahs retentissants des matelots et du cri d'adieu « Aloha » sortant des poitrines de milliers de naturels réunis sur le rivage — la sépa- ration était pénible aux uns et aux autres. Notre voyage nous conduisit ensuite à Callao (Lima) dans le Pérou, où je me procurai, indépendamment d'une récolte botanique — 25 — raisonnable, un couple de jennes lions américains (lions argentés). Ces derniers prospérèrent à bord, grâce aux soins du maître artil- leur Kraus, (*) et étaient en parfaite santé lorsque huit mois après, de retour de voyage, je les envoyai à Schonbrunn. De Callao nous gagnâmes Valparaiso (Santiago), puis Montevideo par le détroit de Magellan. En chemin nous touchâmes Portgalant et fîmes une halte de 5 jours à Puenta-Arenas, capitale, comme qui dirait, de la Patagonie. A Montevideo (et Buenos- Ayres) les néo-ociations commerciales durèrent 2 mois et demi ; nous demeu- râmes tout ce temps enfermés dans la ville qu'assiégeaient les co?ora(^05 insurgés contre les hlancos ; il fallut renoncer à l'excur- sion projetée vers Eutre-Rios, parce que la province était en pleine révolte, et le professeur Burmeister me détourna de visiter Nou- velle Cadice, parce que, me dit-il, la récolte à faire était hors de proportion avec les dangers à y courir. Le 12 décembre, nous quittâmes Montevideo pour faire route^ non vers Rio-Janeiro — où la fièvre jaune venait d'éclater — mais directement vers Pola (P'' mars 1871). Sa Majesté l'Empereur daigna récompenser mes services bota- niques pendant ce voyage autour du monde par la croix de chevalier de la Couronne de fer; mes travaux numisma tiques par la grande médaille d'or pour les sciences et les ai-ts ; et pour notre conduite pendant le terrible cyclone, il fut remis à chacun des membres de l'état-major un diplôme d'honneur conçu dans les termes les plus élogieux. Des esquisses botaniques sur ce voyage, écrites en style de feuilleton, parurent dans le Oest. bot. Zeitschrift de 1871-72. Après l'expédition dans l'Asie orientale, je demeurai à Pola où mes travaux botaniques, faute des matériaux scientifiques néces- saires, furent pour ainsi dire nuls. Je ne pus guère mettre en ordre que mes collections des îles Haway, parce que la littérature de ce petit territoire botanique n'est guère étendue et que je fis revenir de Vienne la plupart des ouvrages nécessaires à ce travail. Quant à des herbiers qui eussent rendu possible la comparaison d'espèces très voisines, il fallut bien m'en passer. Cependant l'ou- vrage marcha lestement jusqu'au P'' juin 1872 où je reçus un télé- gramme des princes de Saxe-Cobourg m'invitant à les accompa- gner dans un voyage autour du monde. (*) M. Kraug a aussi pris part à l'expédition de la Novara et au voyage de l'archiduc Masimiliea au Brésil; il m'a été abord d'un grand secours pour la conser- vation de mes collections et a obtenu, à son retour de ce dernier voyage, le poste d' in- specteur de ménagerie à Schonbrunn. — 26 — Leur précédent compagnon de voyage^ Gerstacker, venait de mourir; pour le remplacer aussi promptement que possible, ils songèrent naturellement à la marine où ils avaient chance de trou- ver un homme habitué aux voyages, à l'épreuve du mal de mer, qui leur servirait dans leur « giro dôl mondo » de médecin, de compagnon, etc. — tout en profitant de cette occasion pour étudier soit la flore, soit toute antre branche du domaine scientifique. Leur choix tomba sur ma personne et je dus cette faveur, comme je l'appris plus tard, à la recommandation du D"^ Gustave Braun, leur médecin, dont j'avais été autrefois l'élève, et auquel mes publications scientifiques avaient fréquemment remis mon nom en mémoire. Heureux temps ! J'avais en poche un congé de trois semaines pour visiter la haute Italie et en perspective un splendide voyage autour du monde ! Toutes mes précédentes traversées s'étaient effectuées sur des navires de guerre ; j'avais autour de moi autant de compatriotes que l'équipage comptait d'hommes : il ne me sem- blait pas avoir quitté le sol autrichien. Dans le voyage projeté, au contraire, je n'aurais d'autre société que celle des deux princes: la fréquentation de si grands pei^sonnages ne laissait pas de m'inspirer certaines préoccupations ; mais leur abord sympathique, leur carac- tère bienveillant bannirent bientôt toute inquiétude superflue, et je pris la mer, gai et dispos, le 30 juillet 1872, en compagnie du prince Philippe, fils aîné de Son Altesse Royale le duc Auguste de Saxe-Cobourg, dont le jeune frère, le prince Auguste, gendre de l'empereur du Brésil et grand amiral brésilien, devait s'embarquer à Kio-Janeix'O pour nous rejoindre à New-York. Nous étions en tout 6 personnes : les deux princes, trois serviteurs et moi. Nous fîmes route par Paris, Londres et Liverpool, d'où le vapeur rapide « Java » nous conduisit en 9 jours à New-York. Pendant cette traversée, je mis, en ordre le manuscrit relatif à la partie de la flore hawaïenne que j'avais pu classer avant mon départ, et l'envoyai de New-York à la rédaction du « Regensburger Floral (1872-73). Les princes étaient reçus partout en souverains, salués par des salves d'artillerie, logés la plupart du temps dans le palais des gouverneurs, des vices-rois, etc., et voyageaient presque toujours en train spécial dans le wagon-gala des autorités; en dépit des meilleures intentions, il ne leur était que rarement possible de garder l'incognito : les gouverneurs des colonies anglaises avaient été prévenus de notre arrivée par la reine d'Angleterre; ils avaient — 27 — reçu d'elle les instructions les plus précises au sujet de notre réception et se télégraphiaient les uns aux autres, de façon qu'à notre arrivée nous trouvions déjà la garde d'honneur sous les armes, etc., etc. L'étiquette qui nous était imposée de cette façon avait bien son côté fâcheux, mais l'inconvénient était largement compensé par le spectacle qu'offraient à nos regards la pompe ot le luxe déployés en telles circonstances par les grands d'Europe et d'Asie. — Nous n'avions que peu de temps à consacrer à notre voyage, car le prince Auguste, président de la section brésilienne de l'exposition universelle de Vienne, devait absolument être de retour avant la fin d'avril. Pour que nous pussions tirer tout le parti possible de notre séjour dans chaque station, les gouverneurs avaient préparé d'avance les plans d'excursion, soigné dans tout le rayon de nos promenades les escortes, les relais, les moyens de transport, les haltes pour les repas; parfois même, comme à Ceylan, à Java, ils avaient fait ouvrir de nouvelles routes à travers les forêts; nous n'avions qu'à nous mettre en chemin sans nous inquiéter des arrausrements ultérieurs: tout allait comme sur des roulettes et nous épargnions de cette façon pas mal de temps. Et ce voyage, de même que ceux où j'avais précédemment accompagné quelque personnage d'importance — l'expédition au Brésil avec l'archi- duc Maximilien, le tour du monde avec l'amiral Petz représentant l'empereur d'Autriche en qualité d'ambassadeur extraordinaire — avait cet avantage sur les excursions privées que les autorités, les gouverneurs, etc., faisaient de leur mieux pour rendre à Leurs Altesses Royales le séjour aussi agréable, aussi intéressant que possible : les établissements de tout genre, les arsenaux, etc. leur étaient ouverts à toute heure du jour; des fêtes publiques extraordinaires étaient données en leur honneur, etc. On comprend sans peine qu'un voyage aussi rapidement exécuté ne m'ait laissé que peu de loisirs pour explorer la flore des contrées parcourues; cependant une somme considérable de zèle et d'ardeur, jointe à la routine acquise par une pratique de plusieurs années, me permit de recueillir une quantité de plantes relativement con- sidérable : il est vrai d'ajouter que notre mode de voyage par trains spéciaux me rendit sous ce rapport de grands services. Eu Australie, par exemple, en traversant des étendues de terre richement parées de fleurs et de verdure, on s'arrêtait à volonté; toute la compagnie se précipitait hors des wagons et se mettait à la récolte; puis les plantes étaient entassées dans mon coupé et rangées à loisir pendant le reste du voyage. De New-York nous fîmes un coude vers Philadelphie. — Après — 28 — 6 jours passés à New-York^ pendant lef?quels les princes firent visite au président Grant et furent molestés d'une façon incroya- ble par l'ennuyeuse curiosité des journalistes-reporters, nous remontâmes l'Hudson jusqu'à Westpoint pour y visiter l'aca- démie militaire célèbre à cette époque; puis nous nous rendîmes par chemin de fer aux chutes du Niagara et de là à Chicago où nous passâmes trois jours. La ville brûlée aux quatre-ciaquièmes en 1870 était presque complètement rebâtie. Le 31 août, nous arrivâmes à Omaha où cesse la ligne du Pacifique ; jusque là le voyage s'était effectué à travers des pays riches, cultivés, peuplés; mais, sur le Missouri, toute culture cesse; pendant des centaines de milles l'unique voie ferrée traverse des étendues de terres désertes, stériles, où ne se dressent à longs intervalles que les huttes de quelques rares trappeurs disséminés ; quant aux rapports sociaux qui doivent régner parmi ces hommes à demi sauvages, ils sont faciles à déduire d'un conseil donné confidentiellement aux jeunes princes par le fils de Grant : « Tuez un homme s'il le faut, leur avait-il dit, mais n'y dérobez jamais un cheval. » Le 1" septembre, nous avions dépassé le point culminant (9000' dans les Montagnes Rocheuses); d'Ogden nous nous rendîmes, en faisant un détour, à la capitale des Mormons (Cité du Lac salé) où nous fîmes une visite au président Brigham-Young; puis nous avançâmes à travers les Steppes salées jusqu'à Humboldt'shouse où commencent les montagnes californiennes. Nous en atteignîmes le faîte (Summit) le 5 septembre; et de Lathrop — dans la plaine de Sacramento — nous entreprîmes en voiture, à pied et à cheval une excursion jusqu'aux arbres géants {Wellingtonia), dans l'ad- mirable vallée de Yosemite au milieu des hautes montagnes de la Californie; enfin le 10, nous arrivions, morts de fatigue, à San- Francisco. Malheureusement le vapeur dont nous devions à tout prix profiter partait dès le surlendemain pour Honolulu. Le 21 septembre, nous jetions l'ancre dans ce port. — J'étais transpoi'té de joie à la pensée de fouler de nouveau aux pieds cette terre de Hawaï qui m'était chère, et mes amis, qui se souve- naient encore de leur vieux compagnon de l'expédition précédente, ne furent guère moins heureux de me revoir. La durée de notre séjour fut fixée à six jours et je me promis bien d'en profiter pour compléter mes collections botaniques des îles hawaïennes. Malheu- reusement j'eus la malchance de faire une chute de cheval dès la première excursion, et reçus de l'animal un coup de sabot au visage; la blessure n'était pas grave, il est vrai; elle suffit cependant pour me tenir au lit pendant toute la durée de noti'e séjour et c'en — 29 -- fut fait des excursions botaniques projetées. Da reste, je fus heu- reux d'en être quitte pour si peu, car ma chute avait eu lieu juste devant un précipice profond de mille pieds, et il s'en était fallu d'un rieo que cheval et cavalier ne roulassent au fond. Mais on n'herborise pas à cheval, dira-t-on ; c'est une erreur : une fois expert en équitation, j'ai fait à cheval une bonne partie de mes tournées. Tout marin doit savoir monter à cheval : c'est le moyen de transport le plus commode et le plus rapide à travers les pays peu cultivés ; et, après une première tentative d'équitation assez malheureuse où, dans une ascension au Vésuve, mon cheval — une bête on ne peut plus pacifique — me désarçonna et me jeta dans le sable tête la première, je compris la vérité de ce précepte et pris à Trieste des leçons dont je tirai plus tard un excellent parti. Le 26 septembre, nous partîmes pour la Nouvelle-Zélande sur un vapeur américain aussi incommode que dangereux et atteignî- mes Aukland en 16 jours; le peu de durée de notre séjour ne m'empêcha pas d'entreprendre une excursion dans les magnifiques forêts de Kauri oii je me mis à herboriser avec ardeur, bien que ma blessure ne fût pas encore complètement guérie. Le 24 octobre, arrivée à Sidney et excursion botanique eu chemin de fer sur la fameuse route en zigzag dans les Montagnes Bleues ; le 29, arrivée à Melbourne. Là j'herborisai surtout en com- pagnie du fameux explorateur australien baron Ferdinand von Millier, aujourd'hui directeur du jardin d'acclimatation de l'endroit. Outre diverses promenades dans les environs richement boisés, nous fîmes une excursion de plusieurs jours dans l'intérieur du pays en allant par chemin de fer jusqu'à Sandhurst pour y visiter les célèbres mines d'or australiennes, nous rendant de là en voiture jusqu'au Murray (le plus grand fleuve du pays), puis parcourant une vingtaine de milles à cheval dans les prairies australiennes — vastes solitudes interrompues de temps à autre par des forêts d'Eu- calyptus sans ombrage, oii furent organisées de grandes chasses au kanguroo; après 4 jours passés dans ces déserts, nous revînmes à Melbourne, d'où nous partîmes le 8 novembre et demeurâmes trois heures à Albany où je recueillis — malgré une pluie bat- tante — 112 ( ! ! ) espèces végétales: c'est le territoire le plus riche que j'aie jamais rencontré — puis nous repartîmes pour Ceylan. Le 28 novembre, nous arrivions à Point de Galle où les chefs du pays rassemblés nous firent une réception grandiose; puis un petit vapeur du gouvernement nous conduisit à Colombo, résidence du gouverneur anglais ; là fut organisée une excursion à travers le — 30 — territoire entier de l'île : d'après un arrangement classique pré- paré par le gouverneur, nous fîmes l'ascension du pic le plus élevé (Pietro Talagala, 8000), et assistâmes, à Nuwara Elia, au simulacre d'une chasse à l'éléphant. A Candy, l'on recommença, par ordre du gouverneur et en l'honneur des princes, la remarquable cérémonie de l'exposition de la dent de Buddha ; d'après les pres- criptions religieuses, cette fête ne doit avoir lieu qu'une fois par an, en novembre, pendant la pleine lune ; elle avait donc été célébrée 14 jours avant notre arrivée; elle ne peut être répétée que dans un seul cas, lorsque des souverains étrangers visitent la vieille capitale. Le faste déployé en cette circonstance et l'originalité de cette cérémonie défient toute description ; du reste, Candy fut le point culminant de notre voyage, et Ceylan, pour la beauté des sites, l'emporte à mes yeux sur tous les pays étrangers. Un vapeur français — où nous apprîmes à apprécier la supé- riorité de la cuisine gauloise sur celle que l'on prépare à bord des paquebots américains — nous conduisit de Point de Galle à Sin- gapore, Saigon, Hongkong et enfin Shangaï (22 décembre), où. nous séjournâmes 1 0 jours pour reprendre ensuite la mer sur un microscopique vapeur fort endommagé et tâcher de gagner le Japon. Un typhon nous surprit en route ; nous arrivâmes cepen- dant, après 4jours de traversée, à Nangasaki,où stationnait l'escadre russe commandée par le grand-duc Alexis, un ami intime des princes ; nous traversâmes l'admirable détroit de Simonoseki et touchâmes Hiogo pour arriver, le 11 janvier 1873, à Yokohama et nous rendre de suite à Jeddo. Là nous nous trouvâmes en plein hiver ; partout plusieurs pieds do neige, une température de 9"^ sous 0 ; nous logions dans le palais de papier des ambassadeurs anglais sur une hauteur chérie des vents, et y gelions d'une façon lamentable ; 14 jours plus tôt nous avions à 8aïgon une température de 40" C. au-dessus de 0. Ce fut du reste la même chose pendant notre retour. Le 15, nous eûmes une première audience du Micado, une seconde le 17, à laquelle pa- rut son épouse. Nous étions le troisième groupe d'Européens reçus jusqu'alors par lui j notre prédécesseur avait été le baron Hiibner ; du reste, lors de mon premier séjour à Jeddo — avec la frégate « Donau », —j'avais déjà vu le souverain japonais, sa figure du moins, qu'il avait montrée par une sorte de guichet. — Cet intervalle de trois ans avait amené des changements même au Japon ; les mœurs et la démoralisation européennes s'y étaient largement répandues et avaient effacé la meilleure partie de l'origi- nalité japonaise d'autrefois. — 31 — Comblés de présents par le Micado — je reçus pour ma part deux superbes vases de porcelaine de Satsuma — nous reprîmes notre voyage en passant de nouveau par Hongkong (et profitant de ^occasion pour visiter Macao), Saigon et Singapore oimous fîmes un séjour plus prolongé ; de là, sur l'invitation du Maharadja (sultan), nous nous rendîmes à Johore efc fîmes ensuite un coude vers Batavia. Nous ne demeurâmes guère danscette ville et établîmes notre résidence à Buitenzorg où. le vice-roi avait mis à notre dis- position tout une aile du palais d'été du roi, sur laquelle la ban- nière saxonne flotta pendant tout le séjour des princes. Le vice-roi organisa en outre d'une façon très intelligente une excursion de plusieurs jours dans l'intérieur de l'île ; nous vîmes Bandong, puis fîmes l'ascension du volcan Tangkoeban Prao ; nous visitâmes les plantations de quinquina de Lembang, et assistâmes à une chasse au rhinocéros. Après 10 jours passés à Java, nous revînmes à Singapore; le yacht-vapeur du Maharadja nous conduisit à Pulo Penang, petite île couverte de forêts où j'herborisai consciencieusement. — De Penang, le magnifique vapeur de la P. A. 0. Gompamj (Compagnie Péninsulaire et Orientale) nous ramena à Point de Galle — c'est ainsi que nous fîmes deux fois la traversée de Ceylan au Japon — et de là à Bombay. A Bombay, fut organisée une excursion de 3 semaines dans l'intérieur des terres, sous le commandement du colonel Beagry que le vice-roi attacha au prince comme oâicier d^ordonnance. — Un séjour de 25 années dans l'Inde en avait fait un explorateur habile des contrées à parcourir, et il passait pour le meilleur tireur de tigres du pays. Nous visitâmes d'abord les caves (temples creusés dans le roc) d'EUora, puis la résidence du Nizam de Daulatabad; ensuite eut lieu, dans les montagnes de Sat Poora, une chasse au tigre qui dura trois jours et à laquelle je ne m'associai que le premier et le dernier jour, réservant le second pour herboriser; le voyage se continua ensuite par Allahabad jusqu'à Delhi ; de là, après cinq jours passés dans les défilés de l'Himalaya, nous gagnâmes Mossourio située à une hauteur de 8000' et d'où l'on a une vue superbe des hautes montagnes du Thibet. Enfin, après avoir encore visité Bônarès, nous revînmes directement à Bombay et de là à Alexandrie par le canal de Suez. Nous étions à Vienne le 20 avril 1873, conformément à notre programme de voyage. Au milieu de mai, je pris cordialement congé des princes qui me firent présent, en souvenir du voyage, d'un splendide chronomètre de poche, _ et obtinrent plus tard pour moi de leur oncle, le — 32 — prince régnant, la croix de commandeur de l'ordre d'Ernest de Saxe — et je revins à Pola. Là, je continuai et terminai mon travail sur la flore des îles Haway, qui parut en une seconde série d'articles dans la Flora (1874-75) ; et puis je commençai à souffrir de la disette bota- nique, à telle enseigne que faute de mieux je composai un herbier de la flore de Pola pour T école de marine, eu échange duquel je reçus du ministère de la guerre une lettre remplie d'appréciations flatteuses. Je fus nommé médecin-major en 1874; médecin chef d'escadre en mai 1875 et servis en cette qualité sur la nouvelle frégate Radetzhy d'abord, puis sur le vaisseau-casemate Oustozza. Je passai près de deux années dans le Levant et revins à Pola en février 1877. Et maintenant j'ai le temps et le loisir de m' aban- donner aux souvenirs de mes longs voyages sur notre globe dont les dimensions commencent à me paraître mesquines — car les espaces parcourus par moi, reportés sur une carte du monde et juxtaposés en ligne droite, comprennent à peu près 200,000 milles marins — 50,000 milles allemands — juste la distance de la terre à la lune. De nombreux travaux botaniques me restent encore devant les mains; si je suis jamais en état de pouvoir les reprendre, les col- lections rapportées du second voyage autour du monde seront, sur l'ordre exprès du prince Philippe de Saxe-Cobourg, le premier objet de mou activité. Pola, 4 Août 1878. D"" Wawea. Je donne ci-dessous le dénombrement des nouvelles espèces qui ont été désignées d'après mon nom : Cyperus Wawreanus Beichardt. Akademio der Wissenschaften vol. 76. Oampylopus Wawreanus Beichardt. Id. id. vol. 75. Muiadelphu3 Wawreanus Beicliardt. Id. id. vol. 75. Acrostichum Wawrae Luersson " Flora " 1874. Perfcusaria Wawraeaua. Massalongo, Monogr. Alsodeia Wawraeana. Eiclil. Psychotria Wawrae. Miihl. Gurania Wawraeana. Gogn. Pleurothallis Wawrae. Barh. Lepanthes Wawrae. Barb. VOYAGE DE LEURS ALTESSES ROYALES LES PRINCES AUGUSTE & FERDINAND DE SAXE-COBOURG AU BRÉSIL, EN 1879, par le D' Wawra. Quoique ma sauté fût assez chancelante, je ne pouvais guère refuser l'invitation de Leurs Altesses de les accompagner dans un voyage au Brésil. Sept ans auparavant, dans une excursion autour du monde faite avec le prince Auguste et son frère aîné le prince Philippe, j'avais appris à apprécier mes compagnons de route, dont l'amabilité et l'ardeur scientifique avaient rendu le voyage aussi agréable que fructueux pour moi. Cette fois le but de notre excur- sion était le Brésil ; des affaires de famille appelaient le prince Auguste à Rio, et son jeune frère, le prince Ferdinand, devait pro- fiter de cette occasion pour entreprendre son premier voyage trans- atlantique. Deux fois déjà auparavant, j'avais eu le bonheur de visiter le Brésil — en 1857 sur la corvette royale « OaroUna », en 1860, sur le vapeur « Elisabeth » en compagnie de Son Altesse Impériale l'archiduc Ferdiuand-Maximilien ; — malgré cela, à cause de cela peut-être, je saisis avec empressement l'occasion d'une troisième visite ; car le Brésil, en dépit de nombreuses et fructueuses explorations, est et reste quand même la terre promise des botanistes, et l'état chancelant de ma sauté me paraissait devoir s'accommoder on ne peut mieux d'un séjour de quelques mois sous le ciel enchanteur des tropiques. — Les résultats scientifiques de mes deux exploi'ations feront l'objet d'un travail actuellement en — 34 — pi'éparation ; la description d'une partie des espèces nouvelles découvertes dans cette contrée vient d'être publiée ailleurs ; je me bornerai donc ici au simple récit du voyage, et tûcherai d'oublier les fastidieuses minuties des classifications scientifiques pour ne me souvenir que des splendeurs déployées aux regards émerveillés par ces contrées aimées du Ciel. Nous partîmes de Vienne le 12 mai, et nous nous embarquâmes le 20, à Bordeaux, sur le « Niger », un coquet vapeur rapide de la Messagerie maritime ; nous touchâmes en chemin Vigo, Lisbonne, Dakar ; le 4 juin nous arrivions à Récife (Pernambouc) et le 6 à Bahia, que nous quittâmes après quelques heures pour jeter l'ancre le 9 au lever du soleil et par une mer assez agitée devant Rio-de- Janeiro. Le vapeur s'engagea lentement dans l'étroit canal aux innombrables récifs, et peu à peu le golfe aux eaux tranquilles déploya à nos regards enchantés sa vaste surface telle qu'un gigantesque miroir. LL. MM. l'Empei-eur et l'Impératrice atten- daient au débarcadère le prince Auguste, leur gendre, et son frère ; nous partîmes immédiatement pour Cristovâo, résidence d'été de la cour, et prîmes nos quartiers dans le palais du prince Auguste situé tout à côté. La courte durée imposée à notre séjour au Brésil — le voyage entier devait s'effectuer en trois mois — nousfaisait un devoir de tirer du temps tout le parti possible, résultat que les nombreuses voies ferrées sillonnant le pays ainsi que les ressources de tout genre mises au service des princes devaient nous permettre d'atteindre sans trop de peine. — Mais ces facilités n'étaient applicables qu'aux excursions — pas mal hardies — auxquelles Leurs Altesses trouveraient bon de s'associer. L'objection du reste fut bientôt levée, grâce au caractère entreprenant des princes. La prédilection de l'un pour la chasse, les goûts ornithologiques de l'autre, l'attrait des excursions pour tous deux ne leur laissèrent ni trêve ni repos ; et tout notre séjour au Brésil ne fut qu'une suite ininterrompue de voyages à travers les provinces qu'il nous était possible de visiter. Nous avions adopté, pour ces explorations, le système des voies ferrées, qui nous transportaient dans l'intérieur du pays ; puis l'une ou l'autre station devenait notre point de départ vers le territoire oi^i il y avait quelque chose à voir ou à récolter. C'est ainsi que furent organisées trois grandes excursions : la première (du 11 au 21 juin) par Petropolis, sur le territoire d'Eutre- Kios compris entre le Paraïba et le Paraïbunha; la seconde (du 28 juin au 4 juillet) de Nicteroi à Cautagallo, puis do là par — 35 — Novafriburgo à Teresopolis (Serra dos Orgaos) ; la troisième (du 9 au 13 juillet) sur Fltatiaia, la plus haute montagne du Brésil (2700 m.) dans la province de Minas Geraes. — D'autres excursions de moindre importance eurent lieu au Corcovado (24 juin); à Gavea (25) au Tijucca (26 et 28 juin) et enfin à Santa-Cruz (6-8 juillet). Aussi ne vîmes-nous pas grand' chose de la ville de Rio; les quel- ques jours que nous y passâmes par intervalles suffisaient à peine à nous remettre d'un voyage et à prépai'er le suivant. Et puis les plantes recueillies se trouvaient dans uu singulier état; elle refu- saient obstinément de se dessécher dans cette atmosphère tiède et humide. Il fallait, pour le temps de notre absence, les diviser en petits paquets dont je décorais tous les salons du palais du duc de Saxe, au grand désespoir de la valetaille en général et en parti- culier de l'austère « Signor Majordomo », qui secouait sa tête grise d'un air de profonde douleur en entendant le prince Auguste nous autoriser à nous servir des superbes in-folio de la bibliothèque ducale en guiso de lest pour charger nos échantillons botaniques. Le temps nous servit à souhait pendant toute la durée de notre séjour; c'était la saison sèche qui coïncide avec les mois d'hiver dans ce pays. Nous séjournâmes plusieurs jours à Pétropolis. — J'avais connu Pétropolis en 1857, à l'époque où elle n'était qu'une colonie alle- mande. Mais depuis lors des habitants aisés de Rio y ont fait construire leurs maisons de campagne, et du sein d'un misérable village a surgi une ville superbe oii les colons allemands se sentent mal à l'aise et d'où ils émigrent vers l'intérieur pour se chercher un nouvel asile. Le climat de Pétropolis est doux en été, mais quelque peu rigou- reux en hiver; aussi raanque-t-il aux forêts de cette région, au moins à ce qu'en ont laissé les premiers colons allemands établis dans la contrée, cette luxuriance de verdure qui caractérise les forêts vierges des régions plus profondes ou plus septentrionales. Il n'y a guère que les gorges mieux protégées contre les vents du Sud et de l'Est, à Benod par exemple, où la végétation re- pi'enne cette exubérance de force représentée par le gigantesque Vriesea reglna, que j'ai toujours regardé comme le type par excellence de l'énergie de la vie végétale sous les tropiques. — Non moins intéressant, tant au point de vue botanique que pour la beauté des sites, est le bassin de l'Itamarati, surtout le parcours de ce fleuve à travers la partie encore debout de la forêt vierge : des arbres peu élevés, mais vieux comme le monde, — 86 ~ garnissent ses rives et forment au dessus de ses eaux des arcades de verdure; leurs troncs robustes sont parsemés d'innombrables cryptogames parasites; des Broméliacées et des Orchidées aux teintes éclatantes et variées décorent le feuillage épais de leurs cimes, et de capricieuses lianes, suspendues à leurs rameaux, trempent leurs guirlandes entrelacées dans les ondes fraîches et limpides. Plus bas l'Itamarati forme la célèbre chute de Pétropolis. Après six jours passés à Pétropolis, nous partîmes par extra- poste pour Entre-Rios. La route d'une solidité exceptionnelle qui y conduit descend constamment à travers une vallée pittoresque bordée de toutes parts de noires montagnes granitiques. Les parois sombres des rochers sont parsemées de taches blanchâtres; on dirait de loin des sortes de mamelons; en réalité ce ne sont que des touffes de fouilles mortes de VAechmea ramosissima. Au fur et à mesure de la descente, le caractère tropical de la végétatioa s'accentue de plus en plus, et fiait par régner sans partage dans la vallée de Pai'aïba. — Entre Rios ne comprend guère que les bâti- ments de la station et quelques habitations; mais la situation, qui en fait le point de raccordement entre deux voies ferrées impor- tantes (les lignes de Paraïba et de Paraïbanha) lui réserve un brillant avenir, et promet de l'élever en quelques années au rang d'une riche cité commei'çante. Nous y passâmes la nuit pour entreprendre dès le lendemain matin dans la foret voisiue une excursion à laquelle nous ne pou- vions malheureusement consacrer qu'une demi-journée. Dans les vallées de ce district montueux et accidenté, la végétation revêt l'aspect majestueux des contrées tropicales ; sur les hauteurs croissent surtout les Bambous, qui tendent à prendre au Brésil le dessus sur tous leurs congénères et anéantissent la flore des loca- lités où ils se développent; aussi le botaniste doit-il soigneusement éviter semblables régions. Dans les gorges boisées et profondes grandit le gracieux Aechmea Nôttlgii. — Le soir même, nous nous mettions en route vers Juiz de Fora. Juiz de Fora est une petite ville habitée surtout par des colons allemands — tyroliens pour la plupart — et dont les alentours sont couverts de cultures. Accompagné d'un guide allemand, un tyrolien, j'entrepris une excursion vers la forêt voisine distante d'une lieue équestre environ. Malheureusement l'esprit obtus de mon tyrolien n'imaginait d'autre excursion botanique qu'une pro- menade à travers les plantations voisines; aussi me conduisit-il par ce que l'on nomme « la contréf> cultivée », sans oublier de — 37 — s'arrêter devant les maisons éparses çà et là poar faire la causette avec les compatriotes. Je fiais par en avoir ju-^q ne par dessus la tête; je tournai mon cheval et f^alopai dirocteineat vers la forêt la plus proche. Mon guide suivit bon gré mal gré, et j'eus enfin le bonheur d'atteindre la terre promise, la forêt tropicale avec son exubérancede végétation, de richesse et de beauté. Les véritables forêts vierges tendent chaque jour davantage à disparaître au Brésil. Partout où s'installent les colons, c'en est fait de la région boisée; on y met le feu, et l'incendie, abandonné à lui-même, anéantit d'immenses étendues de splendides forêts. De cette vaste région désolée, le colon ne cultive qu'un minuscule espace, juste assez pour fournir à sa subsistance; le reste se trans- forme en Capoeira, c'est-à-dire se couvre d'un fouillis compacte de mauvaises herbes, en partie étrangères, et d'arides buissons, hideux à voir, qui envahissent de toutes parts le sol vierge et en rendent impossible l'ensemencement spontané. Notre forêt, située sur le versant de la montagne, ne formait qu'une sorte de bande étroite entre les terres déboisées de la base et la région aux Bambous du sommet. Aussi dirigeai-je mes recherches non suivant l'horizontale, mais suivant la verticale; autrement dit, je fis abattre par la hache de mon guide un certain nombre d'arbres que j'ex- plorai ensuite soigneusement pour j découvrir des épiphytes, — sans oublier les fleurs ou les fruits des arbres eux-mêmes, dont la place, daus la classification naturelle, est encore assez mal connue; l'occasion du reste était unique, vu le peu d'épaissi'ur relatif de la forêt en cet endroit. — Dans une vraie forêt vierge un peu serrée, il n'est guère commode de se procurer les fl<'urs ou les fruits de ses robustes habitants, et lorsque l'on est même arrivé à atteindre le sommet de ces arbres gigantesques — besogne à laquelle le botaniste doit s'employer lui-môme, car il n'y a pas à compter sur l'aide des guides indigènes, peu au courant de semblable exercice — il est presque impossible de se retrouver au milieu de l'inextricable fouillis de branches et de lianes entre- lacées les unes dans les autres, et de mettre la main sur les fleurs ou les fruits appartenant à l'arbre exploré. L'abattre, d'un autre côté, n'est guère plus pratique, à cause de son énorme circonfé- rence et surtout parce que, une fois sa tige sectionnée, il s'arcboute par sa cime contre les arbres voisins ou demeure suspendu en l'air, grâce aux lianes et autres plantes parasites qui forment en sur- plombant une voûte continue sur l'ensemule de la forêt. Aussi ne peut-on recoui'ir efficacement à la méthode de l'abattage que dans — -18 — des forêts peu serrées^ sans lianes, et en ayant soin de n'attaquer que les arbres à direction oblique, parce que leur poids, aidé de quelques coups de hache, suflSt souvent pour les entraîner vers la terre. Grimper dans la cime ainsi renversée n'est pas non plus une besogne facile : la trop grande épaisseur des rameaux glissants et couverts de mousse humide et de parasites de tout genre en fait un travail pénible et dangereux. — Je trouvai de cette façon le Vriesea Augnsto-Coburgi et quelques autres Broméliacées extrêmement intéressantes. Les Orchidées y sont moins richement représentées; mais je rencontrai, en revanche, une splendide collection des Orchidées du pays cultivées dans le jardin de notre hôtesse, une brave femme originaire de la Suisse, qui donne à ses fleurs de prédilection les soins les plus assidus et les plus intelligents. Le lendemain, je consacrai les quelques heures de la matinée qui me restaient avant le départ à une courte excursion vers la chute d'eau voisine. La végétation environnante est celle des terres déboisées ; j'y découvris cependant quelques produits intéressants, entre autres une plante considérée jusqu'alors comme douteuse pour le Brésil et connue seulement par quelques chétifs spécimens de serre, le Tillandsia ijulchella. Notre voyage le long du littoral nous conduisit à travers le célèbre district caféier du Brésil. La végétation luxuriante de l'intérieur des terres devient de plus en plus maigre aux environs de Rio et aboutit à la fin à une région aride, stérile, épuisée par la culture du café, incapable de nourrir dorénavant aucun végétal. Et du sein des plantations abandonnées surgissent des villes, des villages florissants, reliés aujourd'hui par des voies ferrées. — Le 20 juin, nous étions de retour à Rio. Notre seconde excursion, — à Cantagallo etc., — eut lieu le 28 octobre ; entretemps nous avions entrepris trois courtes tournées sur le Corcovado, à Gavea et sur les hauteurs du Tijucca. Dans la seconde, nous rendîmes, par occasion, visite au compatriote Glasl, directeur du Jardin botanique, dont l'accueil cordial et l'excellent déjfûner servi au jardin m'ont laissé le meilleur souvenir. Dans la suite, j'eus fréquemment le plaisir de sa compagnie, et pus, grâce à lui, lier connaissance avec un autre botaniste brésilien, le fameux palrao- et orchidologiste Rodriguez Barbosa. Glasl a eu depuis lors l'obligeance de m'envoyer à Vienne une belle collec- tion do Palmiers et de Lianes brésiliennes: je lui en exprime ici toute ma reconnaissance. Notre excursion au Tijucca dura doux jours; nous reçûmes — r;;y __ rhospitalité chez le seigneur Bomretiro, un homme d'État très en faveur auprès de l'empereur, chargé en même temps de la direction du parc d'acclimatatiou situé à mi côte de la montao-ne ; nous y trouvâmes entre autres choses le Nidularium Plumieri, — Le parc se trouve à mi-chemin du sommet; les plantes cultivées y ont été semées entre les arbres respectés en partie de la forêt primitive. Il en résulte un mélange des plantes indigènes avec des végétaux étrangers, non classés malheureusement, et, dans cette confusion, , passent inaperçus quantité de sujets indifférents pour le reste du monde, mais d'un haut intérêt pour le botaniste, dont la conscience scientifique est en proie à de continuelles angoisses, grâce au manque de tout renseignement sur la prove- nance de bon nombre d'individus. Le lendemain matin, avant le lever du soleil, nous escaladions le Pic de Tijucca; il est surmonté d'une étroite aiguille granitique — le « dio de Tijucca » — accessible seulement au moyeu d'ap- pareils ; son étroit plateau, large de 20 mètres carrés au plus, mais d'oii l'œil embrasse un panorama superbe, est le point culminant des environs de Eio. De son sommet, l'on jouit d'une vue illimitée sur la baie et les îlots situés plus au loin, en avant de l'entrée du port. Mais tout cela ne fait pas l'affaire du botaniste; et cette malheu- reuse aiguille ne porte pas ombre de végétation, à part quelques buissons de bambous et ces mauvaises herbes que l'on rencontre partout et en abondance sous les tropiques. Il n'y a que sur les parois déclives des rochers que l'on rencontre le Vriesea Gla- ziouana. Le 28 juin, nous partions pour la Montagne des Orgues par Novafriburgo en faisant un coude vers Cantagallo. Nous avions tra- versé le golfe de bon matin, et de Nicteroi nous prîmes le train pour Nova-Friburgo. Pendant ce trajet je fis la connaissance d'un troisième botaniste brésilien, M. Schiich-Capanema, aujour- d'hui directeur général des télégraphes du Brésil ; son père autrichien de naissance, avait accompagné au Brésil l'archi- duchesse Léopoldine et y avait pris le surnom de Capanema. Le musée impérial de Vienne renferme d'innombrables spécimens végétaux i-écoltés par Scliiich père dans sa nouvelle patrie. La voie ferrée de Novafriburgo est la plus anistemeut faite du Brésil; elle grimpe hardiment, sans tunnels, en s'accrochaut aux flancs de la montagne, jusqu'à une hauteur de 3000 pieds; des locomotives de Fell la parcourent. A Cordeiro, station toute voisine de Cautagalloj nous attendait ~ 40 — le baron de Novafriburgo. (Les Brésiliens nouvellement anoblis empruntent de préférence leur titre de noblesse à leurs posses- sions (Bomretiro^ etc.) — et l'ancien nom de la famille ne tarde pas à tomber dans l'oubli.) C'est le plus richp/acè/i(iero du Brésil; il possède dans l'endroit un territoire de plusieurs milles carrés d'étendue, traversé par des lignes télégraphiques et des routes carrossables et cultivé par 3000 esclaves. L'esclavage existe encore à l'intérieur des terres, en dépit de sa suppression légale et de quelques ordonnances restrictives ; la richesse des facenderos se suppute d'après le nombre de leurs esclaves, et le plus pauvre de ceux dont nous ayous rencontré les possessions en voyage n'en a pas moins de dix-huit têtes. Je ferai observer à ce sujet que l'on désigne partout au Brésil sous ce nom de « facendero » le posses- seur indigène de terrains par opposition aux colons immigrés. La résideuce du puissant propriétaire s'étend sur une hauteur de laquelle on découvre une bonue partie de son territoire ; c'est là que nous passâmes la première nuit. Le jour suivant, les princes s'en allèrent à la chasse au tapir ; quant à moi, accompagné d'un guide, je résolus d'explorer la forêt vierge voisine; une promeuade en ti-amway de deux heures nous conduisit à nos territoires de chasse respectifs. La forêt est la plus belle que j'aie vue dans le cours de ce voyage ; elle doit son aspect enchanteur à cette circon- stance que les Palmiers prennent une part considérable à sa formation — car elle n'atteint guère l'imposante majesté des foi'êts vierges du Nord (d'Ilhéos par exemple) que j'ai eu l'occasion de contempler dans mon second voyage (1860). — Pour y arriver, nous dûmes traverser d'abord un vaste champ de cannes à sucre, ce qui reste toujours, quoi qu'on puisse dire, un rude et pénible labeur. A sa lisière inférieure, la forêt est sombre, épaisse, humide: à peine le souffle du vent vient-il en agiter le feuillage; plus haut elle s'éclaircit, et, vers le sommet de la montagne, les Bambous apparaissent disséminés parmi les arbres. Dans sa partie moyenne grandit l'intéressant Qaesnelia strobllospica. Le troisième jour, nous revînmes par chemin de fer à Novafri- burgo pour parcourir à cheval les 14- milles qui nous séparaient de Térésopolis, petite ville assise au pied de la montagne des Orgues. Il n'y a pas de chemin tracé: on s'en va par la montagne à travers des foi'êts vierges d'Araucaria et des terres défrichées (Capœira) : pas une ville ni un village sur tout le trajet. Ntms passâmes sous une hutte de bois, comme en habitent les dii minonini gentium parmi les grands propriétaires — disons, si vous le préférez^ les — 4.1 — riches paysans — du Brésil. Ceux qui voyagent à travers ces territoires presque déserts, comptent sur Thospitalité des facen- deros, et celle-ci ne leur est jamais marchandée; le moindre d'entre eux est toujours prêt à héberger les voyageurs, qui peuvent être assurés en tout temps d'un accueil sympathique et cordial. Ils sont certains d'y trouver un lit propre, un excellent repas préparé à la mode brésilienne et une bouteille de fort bon vin, que l'hôte tient en réserve pour les étrangers et à laquelle lui-même ne touche pas. Le maître du logis et sa famille vivent d'une façon simple et quasi patriarcale; au^^si fûmes-nous surpris de rencontrer, dans ces demeures si primitives, des instruments de physique, tels que baro- mètre anéroïde, etc., ainsi qu'un journal d'agriculture imprimé à Kio et qui sembla ne manquer dans aucune d'elles. Nous pas- sâmes la nuit dans une petite fac enda (celle aux 18 esclaves). 3 juillet. — Il nous reste à accomplir une tâche bien difficile, un trajet de 8 milles à effectuer à travers la montagne. Et le che- min ne parcourt que des terres défrichées, sans sites, sans paysages, sans intérêt botanique; pour comble de malheur, aux environs du terme de notre voyage — deux milles avant Térésopolis — tout le terrain, montagne et vallée, disparaît sous d'innombrables pieds de Pteris aqiùUna, serrés et compacts au point de ne laisser aucune place aux autres végétaux du pays. Cette maudite plante joue un rôle important dans toute l'étendue du Brésil. Elle est la conséquence fatale des déboisements; elle ne manque dans aucune région, donne au paysage qu'elle envahit une monotonie déso- lante et fait le désespoir du botaniste. — Et ce n'est que bien tard que nous arrivons à Térésopolis, épuisés, exténués, exaspérés par la vue de cette damnée fougère. Le lendemain, 4 juillet, est consacré à une excursion dans la montagne des Orgues. A mi chemin du sommet, mon guide perd la route et la tête : je tâche de me tracer moi-même un chemin à travers les arbres tordus et rabougris et les buissons de bambous (ou mieux Olyra); enfin, après des souffrances et des efforts inouïs, nous finissons par atteindre la crête de la montagne (1100 m.) — Malheureusement, il ne nous reste que bien peu de temps à y passer, car il faut profiter des dernières heures du jour pour entreprendre la périlleuse descente; aussi, après un regard jeté en hâte sur le golfe de Rio étincelant sous les lueurs rougeâtres du soleil cou- chant, nous reprenons notre chemin. L'obscurité nous surprend au milieu de la forêt vierge ; nous nous décidons à y passer la nuit, abrités sous des branches d'arbres et des buissons — et je constate — 42 ~ avec surprise tout le confortable qu'offre au voyageur fatigué la généreuse hospitalité de la nature. — Le lendemain, nous re- gagnons Rio. L'empereur nous avait invités à visiter Santa-Cruz, un domaine comprenant une plantation modèle exploitée par un millier d'esclaves libérés. Nous partîmes le 6 juillet, de bonne heure, du pied-à-terre impérial de Cristovao ; la locomotive toute décorée de bannières et de banderoles nous conduisit en deux heures à Santa-Cruz. L'empereur fat reçu par sa population nègre au milieu de cris de joie assourdissants, au son désordonné d'effroyables instruments de musique, sous la lueur d'innombrables fusées éclatant de toutes parts. Vers le soir, nous visitâmes la plantation, sur laquelle l'empereur a fondé de grandes espérances; nous lui payâmes un juste tribut d'admiration, quoique son organisation ne nous parût pas un argument bien probant en faveur du travail des esclaves libérés. Du reste, je devais avoir le lendemain même une épreuve pas mal divertissante de la façon dont ces nègres comprennent la liberté. — Nous demeurâmes pendant deux jours les liôtes de l'empereur. Santa-Cruz s'élève au milieu d'une vaste plaine marécageuse à laquelle on ne peut arracher qu'au prix de dépenses insensées et d'un travail acharné quelques arpents de terre cultivable. Les coteaux des environs sont extrêmement secs et stériles. J'eus envie de les explorer; deux nègres me furent donnés comme guides sur l'ordre exprès de l'empereur. Mais au lieu de me conduire, comme il était convenu, au pied des coteaux où les espèces des marécages croi^saient en abondance, mes hommes s'en allèrent juste du côté opposé, vers un petit tertre, au milieu de la plaine, pour s'y livrer à leur aise à la chasse aux bangas, sorte de rongeur assez semblable au rat qui niche au faîte des arbres et fournit à ces Messieurs un rôti succulent, mais ne peut guère servir à remplir un vasculum ; aussi eus-je bientôt pris mon parti; je tournai bride et m'en allai seul, sans que les nègres parussent se soucier de moi ni vouloir interrompre leur chasse, pour tâcher d'atteindre la rangée de monticules, objet de mes désirs. Mais le passage à travers ces maudits marécages semblait introuvable; et lorsqu'enjBu j'arrivai sur la bonne voie, la nuit tombait, il ne me restait que le temps de regagner la résidence. En chemin, je retrouvai mes deux chercheurs, qui n'eurent pas honte de me réclamer un pourboire, en récompense de leur zèle et de leur dévouement. C'était un jour de perdu pour ma récolte. Il est vrai que je fus — 43 — bien dédommagé de cette petite déception par le plaisir d^une causerie tout iutime avec l'empereur lui-même. C'est une vraie bonne fortune que la faveur d'un entretien avec un prince aussi richement doué, aussi profondément versé dans le domaine des sciences et des arts. Le 9 juillet, nous partîmes pour l'expédition d'Itatiaia. Le som- met le plus élevé n'avait encore été jusqu'alors exploré par aucun botaniste ; et « las Aiguillas > — un groupe d'aiguilles granitiques qui en couronnent le faîte — étaient réputées inaccessibles. Nous avions décidé d'en faire l'escalade. — Nous nous rendons par train spécial à la ville d'Itatiaia et passons la nuit tout proche, dans la résidence d'un baron brésilien, qui récolte chaque année 40,000 arrobes (600,000 k°') de café et tient 2000 esclaves; celui-ci met à notre disposition les moyens de transport nécessaires à la mise à exécution de notre projet audacieux; 15 chevaux (ou mules) et 10 porteurs sont adjoints aux cinq personnes composant notre petite troupe, et le lendemain, aux premières heures de la matinée, la caravane se met en route sous la conduite d'un vieux nègre pour lequel le pays avoisinant n'a plus de secrets : un touriste brésilien s'était joint à notre cortège. Nous traversons d'abord des champs de café et de sucre jusqu'au pied de la montagne, dont nous faisons l'ascension en passant par des foiêts coupées de larges et nombreuses clairières; nous arrivons enfin, non sans peine, vers 3 heures de l'après-dîner, au sommet, haut de 2000 m. ; c'est un plateau étendu, parsemé de monticules peu élevés et couvert d'un maigre gazon ou, par places, de buissons nains de Mélastomacées tout ridés, tout rabougris. Entre les coteaux surgissent de petites forêts serrées et fournies; mais les arbres sont de petite taille, et portent sur des troncs relativement épais des cimes vraiment minuscules. Sur leurs souches grandit le Vriesea Itatlaiae, le seul épiphyte qui atteigne cette altitude; les dernières Orchidées sont restées bien en arrière. Les arbres ont tous un faciès nettement indigène (brésiliei), tandis que les herbes et les buissons qui tapissent le sol rappellent vivement notre végétation subalpine. — Au milieu du plateau s'élève la crête de granit qui se partage en aiguille à son tiers inférieur; à sa base le gazon est extrêmement élevé, et presque impraticable par places; du sol sur- gissent les souches épaisses d'un demi-mètre du Lomaria tahularis, couronnées de feuilles minuscules, et caractéristiques de la flore de cette région. — Nous faisons notre quartier-général d'une hutte de bois que nous rencontrons; sur le plateau ; elle sert aux — u — valets d'écurie, qui, à époques déterminées, escaladent la montagne pour s'emparer d'un certain nombre de chevaux qu'on y laisse paître en liberté, abandonnés à eux-mêmes, pendant la plus grande partie de Tannée. Le 11 juillet, dès les premières lueurs du jour, nous entreprenons — - les deux princes, deux serviteurs, le guide, le touriste brésilien et moi — l'escalade de la crête. — Je tiens à faire observer, avant d'entrer dans les détails circonstanciés de l'ascension, que la route suivie par nous décrivit une ellipse : nous prîmes par le flanc orien- tal, et, incliuant petit h petit vers le sud, puis vers l'ouest, nous finîmes par atteindre le sommet, pour redescendre ensuite par le nord, suivant une direction foi tement oblique vers l'est, de façon à regagner le plateau non loin de notre poiut de départ. A la base de la crête — et s'élevant parfois jusqu'à son tiers inférieur — surgissent, surtout au sud, de gigantesques monticules de rochers éboulés et entassés confusément les uns sur les autres, complètement dépourvus de végétation (côté sud-oriental), ou couverts par places de buissons surbaissés (côté ouest), ou séparés par dt'S espaces vides oii grandissent des brousailles et des arbustes tîipissés de mousses épaisses (nord, nord-est), de ftiçon à rendre le passage périlleux, pour ne pas dire impossible. Il fallait, dans ce dernier cas, nous laisser glisser plus bas, dans des creux moins encombrés, et nous frayer péniblement un chemin au milieu des débris détritiques. La montée commença par les amas rocheux sans végétation du flanc sud-est. En sautant de bloc en bloc comme de vrais cliats, nous arrivâmes à un monticule formé de débris accumulé?. Il fallut l'escalader, car il ne pouvait être ques- tion de passer par le profond ravin qui le bordait de chaque côté. Heui-eusement la surface arrondie des pierres est extrêmement rui>-ueuse, et rend presque impossible un faux pas, qui pourrait avoir les plus graves conséquences. Nous voilà au sommet du monticule : mon bâton — nous en avions taillé la veille une demi-douzaine — m'écliappe tout à coup des mains et glisse par une fente entre les rochers pour ne s'arrêter qu'à une raisonnable profondeur ; bon o-ré mal gré il s'agit d'aller l'y reprendre, car sans lui ce serait folie de songer à avancer. Pieds nus, débarrassé de tout vêtement superflu, je procède à la périlleuse descente et arrive à l'objet de mes désirs ; mais je ne me sens guère à l'aise dans ce pi'ofond et obscur précipice : la pensée des afl'reux serpents dont la contrée regorge et de toutes sortes d'êtres diaboliques me trotte par la tête, et c'est avec un soupir de — 45 — soulagement que je reprends pied sur le roc où m'attendent mes compagnons. Une fois débarrassés de ce maudit monticule mouvant, BOUS arrivons au flanc occidental, par lequel nous devoas tenter l'escalade de la montagne. Mais auparavant nous nous asseyons auprès d'une source pour nous y reposer un instant et casser une croûte, pendant que le guide s'en va à la recherche d'un passage qui puisse nous conduire jusqu'à la base, en apparence inacces- sible, des aiguilles granitiques. Il revient après deux longues heures, nous annoncer que le chemin est trouvé. — J'évalui^ à 400 mètres environ la distance verticale entre notre campement (à 2o00 m.) et la pointe des aiguilles. Celles-ci reposent sur une pyramide de granit haute d'environ 250 m., à parois fort escarpées et nues sur la plus grande partie de leur étendue. Leur surface, du côté est, est creusée d'abîmes larges et profonds; à l'ouest, au contraire, elle est à peine entamée par des sillons remplis d'humus qui la divisent en grand casiers et dans lesquels grandit le Rackia Itatiaiae, celle des Broméliacées qui atteint l'altitude la plus élevée. — C'est par ces sillons et, à défaut d'eux, par la surface lisse de la pierre qu'il faut gagner le sommet. Comme les mouches aux carreaux des fenêtres, nous nous accrochons par les mains à la roche rugueuse ; nous rampons à quatre pattes, effrayés de temps à autre par la vue d'un serpent endormi au soleil : vaine terreur, du reste, car l'animal effarouché détale en toute bâte, et nous n'avons qu'à attendre que le passage soit devenu libre. Jugez, d'après ce tableau, ce que dut être la descente le long de ces rochers à pic; nous l'effectuâmes dans une posture demi-assise, avec des mouvements pas mal grotesques, tels que ceux d'un gros hanneton renversé sur le dos et qui agite ses pattes d'un air désespéré sans parvenir à reprendre l'équilibre. De temps en temps il fallait, bon gré mal gré, prendre une allure accélérée; c'est ainsi qu'il arriva à l'un d'entre nous de culbuter et de faire dans la profondeur un plongeon d'une vingtaine de mètres. Enfin, nous voilà à la base des aiguilles; elles s'élèvent pres- que verticalement à 150 m. de hauteur ; elles sont confluentes à la base, on elles forment par leur réunion un bloc rocheux compacte; celui-ci se partage plus haut en une quantité de prismes d'inégale longueur serrés les uns contre les autres : les extérieurs — une demi- douzaine de notre côté — sont plus espacés et plus élevés que ceux du milieu ; ces derniers, avec leurs sommets mousses, forment une sorte de plateau que les aiguilles extérieures entourent en guise de palissade. L'escalade de ce plateau présente d'immenses — 46 — difficultés, que l'absence de tout appai'eil d'ascension fait paraître presque insurmontables. Aussi n'est-ce qu'après deux heures d'un travail aussi pénible que dangereux que nous atteignons le point culminant de l'empire brésilien ; et comme nous avons été, d'apiès tous ceux qui pouvaient nous renseigner sous ce rapport, les premiers à oser cette périlleuse entreprise, je crois bien faire de conserver à la postérité les noms de ceux qui y prirent part, à savoir : les princes Auguste et Ferdinand de Saxe-Cobourg, le D'' Wawra, les valets de chambre Herrmann et Strohl et notre guide. Quant au touriste brésilien, la fatigue l'enchaîna au pied des aiguilles. — Une fois arrivés au sommet, nous constatons que le plateau est formé de deux parties d'égale hauteur, l'une orientale, l'autre occiden- tale, inclinées l'une vers l'autre et séparées par un profond précipice. La première est absolument stérile, ce qui la fait paraître toute raboteuse et crevassée ; la seconde, celle où nous nous trouvons, est parée d'une végétation relativement abon- dante. Les pilastres extérieurs, épais de trois mètres, dépassent les intérieurs de 4 à 8 mètres ; ces derniers sont à peu près d'égale hauteur et si rapprochés que l'on franchit sans les voiries crevasses qui les séparent et qu'il est possible de parcourir de cette façon une bonne partie du plateau. Cependant la plus extrême prudence est de rigueur, car les profonds abîmes ouverts entre les rochers sont fréquemment cachés sous des buissons et des mousses, et lé moindre faux pas aurait les plus graves conséquences. Une fois sur le plateau, nous prenons un peu de repos et nous nous plongeons dans la contemplation de la colossale perspective déployée sous nos regards. A l'est, nous pouvons suivre et reconnaître un à un, sur une étendue de plusieurs railles, les villes et les établisse- ments par lesquels nous avons passé à notre départ de Rio ; la ville d'Itatiaia elle-même repose à nos pieds, en grandeur lillipu- tienne. — Partout ailleurs tout est forêt, ombre et solitude ; du sein de cette immensité, surgit tout près de nous l'Itacolumi, mais son sommet est bien en dessous du nôtre, et nous distinguons par dessus son faîte la plaine immense et les innombrables pics qui la parsèment. Les phases critiques de la descente ont été précédemment décrites ; qu'il me suffise d'ajouter que vers le soir apparurent les symptômes manifestes d'un orage : le temps s'assombrit pendant que nous errions dans le dédale des débris et des pierres, et mal nous eut pris de nous laisser surprendre par la nuit ou par quelque tourmente. Il fallait à tout prix sortir de cette région et redescendre dans la haute plaine, où nous arrivâmes sans malencontre à l'heure du crépuscule. Le 12 juillet, avant l'aube, nous étions prêts à reprendre notre route. Mais de noirs nuages s'étaient, pendant la nuit, accumulés sur la contrée, et nous avions compté sur la lumière bl;ifarde de la lune, sans laquelle il ne pouvait être question de parcourir le che- min coupé et accidenté qui devait nous ramener dans la plaine; force nous fut donc d'attendi*e le jour. Vers six heures nous nous mîmes en marche ; nous étions encore au haut de la périlleuse descente, en pleine forêt vierge, quand l'orage éclata. Il fallut quit- ter la selle et conduire nos chevaux par la bride. Bientôt la tempête fut à son apogée; nous occupions le centre de la tourmente ; les éclairs déchiraient l'espace devant nous, autour de nous ; ils sem- blaient sortir du sol plutôt que des nuages, et le roulement conti- nuel du tonnerre, entrecoupé d'effroyables détonations, faisait trem- bler sur leur base les masses gigantesques des rochers avoisinants; c'était un vrai ouragan des tropiques et nous l'avions de première main. Sur le terrain glissant détrempé par les torrents de pluie, hommes et chevaux trébuchaient, tombaient ; et les faux pas incessants du cheval ne laissaient pas que d'être dangereux pour le cavalier qui le précédait. Eufin, après quatre heures de marche — si l'on peut donner ce nom à une suite ininterrompue de cul- butes et de cabrioles — nous arrivâmes dans la basse plaine; là le soleil souriait à la nature et éclairait gaiement de ses rayons le lamentable état de nos personnes. Toutes ces mésaventures ne m'empêchèrent pas d'herboriser et de remplir nos vasculums des plus beaux et des plus intéressants spécimens du règne végétal. — L'après-dînée était bien avancée quand nous partîmes pour Rio. Cependant le temps affecté à notre séjour au Brésil était écoulé. Le 14 juillet, LL. MM. nous accordèrent notre audience de dé- part et daignèrent s'asseoir à un dîner intime, au palais du prince Auguste. Le 15, nous nous embarquâmes sur l'Orénoque — un vaisseau proche parent du Niger — et S. M. Impériale accompagna les princes jusqu'à l'embarcadère; l'Orénoque nous fit repasser par les mêmes pons qu'au départ, et nous nous séparâmes enfin à Paris. (5-9 Août). SUR LES BROMÉLIACÉES RÉCOLTÉES PENDANT LE VOYAGE DES PRINCES AUGUSTE ET FERDINAND DE SAXE-COBOURG AU BRÉSIL. EN 1879. par le D"^ Henri Wawea. Dans ce voyage^ notre attention s'est portée spécialement sur les Broméliacées, de sorte que, malgré le peu de durée de notre séjour au Brésil — six semaines à peine — et la saison peu favo- rable, nous n'avons pas recueilli moins de 45 espèces de ces jolies plantes. Un examen attentif m'a fait reconnaître, à ma grande surprise, bon nombre de ces espèces comme nouvelles; mais, comme cette famille jouit d'une faveur spéciale auprès des amateurs de jardins et que la plupart des espèces ont été établies sur des spécimens cultivés, il pouvait bien se faire que nombre de ces plantes eussent perdu leur allure primitive sous l'influence des circonstances arti- ficielles au milieu desquelles elles avaient grandi et conduit ainsi à la création de nouvelles espèces, ou, réciproquement, qu'une plante recueillie sur son sol natal fût considérée comme spécifique- ment distincte de ses sœurs défigurées par la culture et devint le point de départ d'une espèce nouvellp. Je dois cependant faire observer à ce sujet que, dans leur patrie, les Broméliacées appar- tiennent aux classes de végétaux les moins variables : cLaque espèce a son faciès bien déterminé; les dimensions mêmes demeu- rent à peu près constantes chez les divers représentants d'une même espèce. La plus grande prudence était donc de rigueur; il fallait, avant de songer à décrire nos plantes, nous livrer à des travaux préli- minaires considérables, soumettre toute la famille à une élude approfondie, avec le secours d'une littérature indigeste et confuse; — 49 — j'ai visité eu outre tous les jardins importants de Vienne (^) pour y voir le plus grand nombre possible de ces types qui ont servi à l'établissem'^ut de genres nouveaux. Le nombre de genres s'est accru depuis l'époque d'Eiidliclier, qui n'en comptait que 10, jusqu'à près de 80, et, chose remarquable, l'ancien genre fondamnutal « Bromelia » s'est complètement perdu dans C3 démembrement démesuré. J'ai cru préférable, dans mon travail, de m'en tenir aux classifi- cations relativement plus anciennes, à celle notamment publiée par Liudley dans le XIIl^ volume du Botanical Rfgister : là seulement oii l'extension des connaissances relatives à ce groupe de plantes l'exigeait, j'ai eu recours à l'un des nouveaux noms, en indiquant entre parenthèses le genre récemment créé auquel pourrait se rapporter l'espèce décrite; plus d'une fois j'ai dû composer moi- même la diagtiose du genre. Eu somme cette classification doit être considérée comme provisoire et valable seulement jusqu'au jour où une plume autorisée soumettra à un examen rationnel et méthodique cette famille si tourmentée. NiDDLARiuM Kaeatas [Regdia) Lem. Bromelia Karatas Jacq. L. [Karatas Plumieri Morr., K agavaefollal Brongn.). AcauUs,fi)Uis in rosulam vastissiviam trimetralem dispositis, rigi- dis glabris, basivalde dilatatis j vagina late ovata, intégra, pundalis elevatis confertissimis roseo-inducta, in laminam lanceolatam repevtine contracta ; lamina breuiter acuta et cimpiduta, spinis patentibits fuscis serrato-dentata ; — jioribns circa dticentenis capitato-spicatis {^), in discum subplaniim duodecicentimidralem arcte coadanatis, sessillbns, singulis bractea lanceolata caJi/ce subaequilonga fultis; — cali/cis foliolis ima. basi coalitis coriaceis porrectis lanceolalis cuspidatis rvfo lanatis — corollae gamopetalae iiifandibuliformis tubo calycem siibaeqiiante tenero, basi inflata nndo; laciniis calycem triente super- aniibus lanceolatis obtusis dilute caeruleis, ante et post anthesin convolutis; — antheris summo corollae tabo jilamentis brevibus ('} Je saisis cette occasion, pour remercier M" Elooibi-enk, Vet;er, Rorleket Antoine de la comp'aisance avec laquelle ils m'ont accordé l'entrée de leurs serres ; M' An- toine à mis en outre très gracieusement à ma disp. sition sa collectioa de dessins originaux des Broméliacées venues en fleurs dans le jnrdin impérial. (") L'inflorescence est en réalité un corymbe très contracté d'épis très réduits, disposition qui ne s'apprécie bien que sur une section longitudinale, car les fleurs, vues d'en haut, forment un capitule uniforme et ininterrompu. Cette dispostion peut être regardéecomine caractéristique de l'espèce, non du genre, car déjàdauslesJEunidularWOT sont indiqués les axes secondaires incomplètement développés. ^'' __ 50 — insertis inclnsis, medio dorso affixis linearibus utrinque açutis ; — ovario infero lineari-cuneato apice infnndibuliformi-protracto (^) ; ovidis in summo loculo ad angulos centrales funiculo distincto insertis (^); stylo fili fur mi (stijlohasi) in ovarii loarteinfundilndiformi incrassato et riyido; stigmatibus Jiliformibus ; — Bacca..., (^). Pico de Tijucca (*); VVvvr. coll. 233. Linné, suivant l'exemple de Jacquin, avait rangé cette plante, anciennement connue et décrite systématiquement pour la P* fois par Plumier (Gen. 10, t. 33), dans son genre Bromelia, non sans répugnance cependant, sans doute parce qu'il doutait de l'exacti- tude des assertions de Plumier qui décrit expressément cette plante comme monopétale, alors que Linné ne connaissait que des Broméliacées diaiypétales. Aussi fait-il suivre les extraits de Plumier cités par Jacquin d'un grand point d'iuteiTOgation. N'est- il pas vraiment éti'auge que plus de 150 années se soient écoulées depuis Plumier (1703), avant que l'on ait découvert d'autres Broméliacées épigyues à corolle gamopétale et que l'existence de (') Daus la plupart des iiroméliacées, l'ovaire s'élargit vers le haut en un entonnoir dont le bord est occupé par le calice et la coi'olle ; cet appendice dépend manifestement de l'ovairt, non deiaboudure des sépales et des péta. es, comme le prouve l'extension des cioisoijs séparant les loges du iiuit jusque dans la cavité entre les parois de l'entonnoir. Four le genre Disteganthus, cette particularité serait le caractère anatomique spécial et i'oiigine du nom générique. (Je qu'il y a de particulier, c'est que le style, partout ailleurs grêle et flexible, s'épaissit, se raidit et devient trian- gulaire daus l'entonnoir : c'est ce que je nomme Stylobase. C'est peut-être ce stylobnse qu'il faut entendie parle « Stylus nanus » que Lindley at.ribue au genre Browelia. (^) La forme des placentas et la disposition des ovules devraient sans doute avoir une haute importance pour l'établissement des genres ; seulement ces carac- tères ne sont plus recounai^sables sur les Broméliacées desséchées, et nous ne pourrons y faire allusion dans noire travail ; les formes des stigmates très tendres et charnus ne sont même plus distinctes sur les plantes sèches. (^) Je n'ai pu recueillir que la plante fleurie ; le fruit est du reste décrit en détail dans Jacquin (1. c). C) La patrie du Karatas est aux Antilles. A Rio, j'ai recueilli cette plainte au milieu du l'ico de Tijucca, dans un parc d'acclimatation créé daus la forêt et où l'on a laissé subsister les arbres primitifs : sans doute cette plante, recherchée dans sa patrie à cause de son fiuit savoui'eux, y avait été plantée, soit intentionnellement Boit sans but déterminé. Ou pourrait cependant douter de l'exactitude de sa détermination, parce qne jusqu'aujourd'hui les fleurs de la plante de Plumier n'étaient pas connues ; m;iis à part quelques différences vraiment insignifiantes provoquées seulement par la diver- sité d'âge, les descriptioi-s de Plumier, Jacqnin et Linné se rapportent assez bien à notre plante pour rendre une erreur à peine possible. Béer parle de feuilles que leur poids entraîne vers le sol. La chose n'est pas impossible dans les spécimens élevés en serre ; quant à notre plante, venue dans des conditions naturelles, elle a des feuilles raidos, divergentes, qui, dressées tout autour comme autant d'épieux, défen- dent l'approche de la rosette florale. cette disposition essentielle ait été confirmée (^) ? Son importance saute cepeudaut aux yeux, si l'on songe que la sourîuro ne se limite pas à Fextrême base des pétales : ainsi, chez les Nidiilarium, elle s'étend au moins jusqu'aux deux tiers de leur longueur, tandis que l'union des sépales n'en occupe jamais le quart et reste par suite cotnplètemeut insignifiant*?. Lemaire, le premier, en 1854, attira l'attention sur l'existence de corolles gamopétales chez les Broméliacées épigynes et fonda sur ce caractère le genre Nklidarium (Jard. fleur. IV mise. GO et tab. 411 {")). Koch tâcha, en 1860 {Berl. Woch f. gàrtn. 84), de grouper, d'après la classification de Béer, les divers genres de Broméliacées à ovaire infère et de construire la diagnose manquant pour certains genres — notamment ceux créés par Béer {Brom.) et Gaudichaiid (Bonite). D'après ces diagnoses, il serait impossible de séparer le genre Bromelia du genre Nidularium (Inflorescence centripète dans le premier, centrifuge dans le second ?). Regel {Gartenjiura, XVII, 66) donne à propos du groupe « Acaules » un commentaire de l'idée de Koch: dans le genre Nidularium, les sépales seraient soudés à la base; ils seraient entièrement libres dans le genre Bromelia, dont le Karafas lui sert de type. — Mais l'examen de quantité de Broméliacées épigynes à corolle gamopé- tale m'a fait voir que, chez presque toutes, les sépales sont plus ou moins soudés à la base; c'est aussi le cas pour le Karatas, comme l'indique la diagnose qui précède et, si l'on voulait attacher quel- qu'importance à ces différences du plus au moins, l'on se verrait obligé de démembrer en deux genres difi'érents les espèces les plus voisines. Le Karatas a été imposé comme type à un genre nouveau sans que ses fleurs fussent connues (^) ; aussi, pendant que le genre (') La monopétalie de la corolle était déjà reconnue auparavant chez certaines Broméliacées hypogyues : Lindley l'indique comme caractère essentiel du genre Caraguata. (^) Peut-être qu'avant lui Brongniavt en a fait mention dans un de ses travaux épars et en partie demeurés manusciits. Les Scbultes eux-mêmes n'en parlent pas dans leur excoUent travail sur les Broméliacées {Syst. veg. VIL II.) ; Latnarck {Eac. L 145) cice Plumier; Willdeiiow {Spec. H. 8), Kuuth (H. B. K. N>u. gen. et spec. am. I 297, corMla trifida) citent Linné. Claude Gny (Hist. fis. y jujl. de Ckile, t. VI. 1853, traduit par Morien dans la Belg. Hort. XXllI. 22,1) donne une vague description du gonie Bromelia d'après les ^ues de Linné. (^) Jacquin paraît dans la suite avoir vu quelque part les fleurs du Kaiatas et en donne {Sel. stirp. am. 90, t. 178, f. 26; 47 t. 260, p.24i.de la nouvelle édition) une ana- lyse d'où il n'y a rien à tirer. — :>t — 'Nifiularium compte un nombre respectable d'espèces, ce type pro- blématique est demeuré complètement seul : tant est impossible le classement d'espèces dans un genre dont on ne connaît pas le type fleuri. — Béer mentionne avec beaucoup de désinvolture, sans même donner la diagnose du genre, quantité d'espèces de Bromdia, dont une bonne partie est rapportée par d'autres natu- ralistes h des genres différents, et dont le reste est presque exclu- sivement emprunté aux dessins superficiels de la « Flora fiiimi- nensis » de Vellozo. Béer en compose son genre « Bromelia » et fait un nouveau genre, le genre Agallostachys, des espèces appro- chant le plus de la conception linnéenne du type Bromelia. Si l'on veut conserver l'ancien genre fondamental de Linné sans renoncer pour cela aux nouvt aux genres épigynes, d'une légitimité souvent incontestable, il faut apporter à la définition linnéenne une modification radicale, mais pas dans le sens proposé par Regel, lorsqu'il attribuait au genre Bromelia un caractère distinctif contre lequel Linné n'aurait pas manqué de protester ; la dialypétalie doit en rester l'attribut, et c'est dans ce s-ins que Lindley a tenté une définition du genre Bromelia, en disant (1. c): Calyx superus, petala convoliifa lasi nuda; stamina hasi perianfhii inserta (dylus nantis); stigmata carnosa abhreviata; hacca-, semina nuda. Ain^.i reste debout l'ancienne circonscription linnéenne des espèces appartenant au genre Bromelia, à part la présence de nectaires — et ici encore Lindley semble être entré dans la vraie -voie, car les meilleures espèces rappoi-tées par Linné lui-même au genre Bromelia — Agallostachys de Béer — n'ont eu fait pas de tels appendices; et la parenté indiscutable de ce genre et du genre Nidulariiim trouve une expression palpable dans l'absence de nectaires, constatée chez ce dernier ainsi que chez toutes les Broméliacées gamopétales. Pour peupler le genre ainsi rétabli par Lindley, il faut emprunter des espèces aux autres genres; des Bromelia de Béer il n'y a guère à prendre que le B. longifolia, auquel on ajouterait les AgallostacJiys, les Cryptanthus, les Ruckia, et diverses espèces d'autres genres {Aechmea, Billbergia), qui devraient être soumis dans ce but à une révision complète. Le genre Nidiilarium, comme le dit avec raison Lemaire, est le mieux défini parmi les Broméliacées; le nom seul, emprunté au faciès, n'a guère été heureusement choisi, car si les espèces connues jusqu'à ce jour ont toutes la forme nidtilaire, c'est-à-dire des inflo- — 53 — r rescences très contractées, une counaissauce plus approfondie du groupe y fera reconnaître, sans aucun doute, des Broméliacées gamo- pétales épigynes à inflorescences dilatées, sans compter que d^au- tres Broméliacées [Billbergiées, Ortgiesia, Canistruni) présentent aussi cette forme nidulaire. Le nom de Karatas est peut-être celui qui conviendrait le mieux au genre Nidularium. Mais Morren (Belg. Hort. XXII, 129) comprend sous ce nom de Karatas un groupe d'espèces en apparence très voisines {Karatas Plumier i=Bromelia Karatas L., K. hiimile^^Bromelia humili'i L., K. LegreUae Morr., K. agavaefolia Brongn. et K. Lagopus Morr.), caractérisé par des anthères basifixes. De ces espèces, le K. LegreUae seul (Morr. 1. c.) possède une description détaillée et une ligure où ce caractère est nettement apparent; les descriptioQS (et les dessins) les plus récents des K. humilis (Belg. hort. X, 206, Rev. hort. 1878, 196 et suiv.), K. agavaefolia (Belg. hort., X, 204 (^)) n'y font plus allusion; et quant au {Nidularium) Karatas {Plumieri) , nous avons déjà dit qu'il n'en a été donné aucune description nouvelle com- plète : Grisebach seul (Flor. Brit. West-Ind. 591) dit quelques mots des fleurs, dont il qualifie expressément les anthères de « décombantes ». Cette indication n'est donnée, il est vrai, que dans la caractéristique du genre ; mais il faut observer que Grise- bach, dans son travail original, emprunte précisément ce caractèi-e générique à la seule Broméliacée du groupe croissant dans les Indes occidentales et dont il fait une Nidulariée, genre dont tous les représentants connus jusqu'à ce jour ont en effet des anthères dorsifixes. — Je suivrai donc l'exemple de Lemaire et de Grise- bach, en laissant notre plante parmi les Nidulariées, aussi long- temps que la présence d'anthères basifixes n'est pas acquise à l'espèce indiscutable de Plumier; et même, quand cette hypothèse viendrait à se réaliser, notre plante, pour ne plus être l'espèce de Plumier, n'en demeurerait pas moins un vrai Nidularium, genre qui n'aurait, dans ce cas, rien de commun avec le genre Karatas Morr. Le Bromelia agavaefolia (Brongn.), à en croire sa description, se rapproche énormément de noti-e plante ou au moins du B. Karatas ; il possède aussi une inflorescence ramifiée corymbiforme telle qu'elle est figurée dans Jacquin (Hort. Vind. pi. 31, 32) et décrite dans Jussieu (Gen. 50). Nidularium denticulatum Regel, Gartenfl. XIX, 268. var. sim- plex Wwr. (i) Je n'ai putrourer la description du K. Lagojpus {Belg. hort. 1877 ?) 4 — 54 -- Entre Rios; Wwr. coll. 140. NiDULARiuM TEiSTE^ Regel, Garfcenfl. XV, 356 et XIX, 267. Bro- melia tristis Béer. Teresopolis, Wwr. coll. 357. Les plantes de serre (du jardin impérial) portent des feuilles plus raides, plus pointues et des baies blanchâtres. NiDULARiuM [Eerjelia) Feedinandocoburgi n. sp. {}), Scapo elevato 10 cm. longo fol. vaginis iuvolucrato; — foliis o-6, mèmbranaceis , magnitudine valde diversis, 1-2 extimis 25 cm., inte- rioribus 10 cm. longis, intimis sanguineis bracteiformibus nunquani flores foventibus ; (exteriorum) vagina caudice aequilonga ; lamina lanceolata basiii versus angustata et nervo mediano albido subtus valde prominente, supi-a profunde et late excavato et ad margines elevato, superius com- planato et infra apicem déliquescente percursa, saturate viridi, minute et apice coufertissirae serralata, naucronata ; — floribus sessilibus in capitulum 12-merum disgestis ; singulis bractea lanceolata acuta tener- riraa minute glandulosa cal. subdimidio breviore fultis; — calycis (cum ovario) 4 cm., foliolis 3 cm. longis lineari-lanceolatis acutis teneris, conferte striatis ; — corolla coerulea, speciosa cal. plus duplo superante, tubi parte cal. inclusa tenera et angusta, parte libéra clavata et apice ad 1 cm. ampliato breviter triloba; lobis late ovatis obtusis; — staminibns cum stigmate inclusis; filamentislatiusculis, oppositis quamalternantialatioribus, infra cor. partitionem insertis; antheris incumbentibus utrinque obtusis; — ovario breviter stipitato, cunoato, apice parum producto ; placeiitis crassis; stylo e stylobasi brcvi rigida, filiformi, filamentis aequilongo, stigmatibus in corpus late conicum contortis. Teresopolis (Petropolis); Wwr. 370, 101. " Fait la transition des Rogelia aux Eunidularmm : les feuilles les plus intérieures sont bi'actéiformes , sans cacher les fleurs ; l'aspect extérieur rappelle celui du N. {Eunidnlarium) Imiocentii Lem. dont notre plante so distingue par ses feuilles molles que traverse une nervure médiane très large, blanche, creusée supérieu- rement d'un profond sillon, et sa corolle très grande, à lobes extrêmement courts. Q) C'est à l'appui et à l'aide active de leurs Altesses Royales les princes de Saxe- Cobourg, que je dois d'avoir pu réunir une collection de plantes aussi nombreuse et aussi riche en un temps relativement court, pendant les deux voyages que j'ai eu l'honneur de faire en leur compagnie. Le vif intérêt que les princes ressentent pour la botanique se manifeste encore par la préparation d'un grand ouvrage descrip- tive comprenant la récolte des deux voyages, qui sera publié en son temps sous les auspices de son Altesse Royale le prince Philippe de Saxe-Cobourg, (Le l*' voyage autour du monde a eu lieu en 1872-73). — 00 — NiDULARiuM Antoineanum n. sp. [Eunidularium) . Scapo 15 cm. longo fol. int. basibus involucrato; — foliis infimis in rosulam parum densam ordinatis patentibus, superioribus erectis; vagina (superiorum) vix inflata 30 cm. longa; lamina tenera vitndi, basi haud angustata et bic distinctius — superue nonnisi sub lente conspicue serrulata, mucrone 1 cm. longo terminata, 20 cm. longa ; — floribus in capitulum bracteosum congestis, extimis ternis — quinis in bractese axilla sessilibus, intimis solitariis, omnibus — et exterioribus — bracteola fultis; — bracteis sanguineo-coloratis 5-6 cm. longis, fol. lamina latioinbus et rigidioribus remote serrulatis; bracteolis calyce breviovibus, exteriorum lanceolatis acntis rigidulis, interiorum amplectentibus ovatis liyalinis ; calycis 1 Vs ^^^- longi foliolis usque ad basin liberis lanceolatis acutis, rectis nec convolutis; — cox'oUse dilute — in aliis saturatius — cyaneae tubo cal. fere duplo superante basin versus sensim amjaliato apice valde angusto, laciniis anguste oblongis tubo triplo brevioribus valvatis et nonnisi apice paulisper contortis; — staminibus inclusis, filamentis brevibus summo tubo iusertis, antheris incumbentibus linearibus utrinque acutis» stylo e stylobasi parum incrassata capillaceo; stigmatibus contortis corpus conicum eflbrmantibus; ovario oblongo-obovato triangulari. Teresopolis^ Wwr. coll. 321 a. Rappelant par l'aspect extérieur un Caraguata. Se distingue du N. Innocentii hem. (111. hort. IX, pi. 329) par ses feuilles vertes et les lobes tout différents de sa corolle; le N. Scheremetievii Reg. (Gartenfl. VII, 137, pi. 224) a des feuilles fortement dentées et des proportions tout autres dans la corolle et le calice : espèce très voi- sine cependant, malgré de nombreuses différences morphologiques. NiDULARiuM Antoineanum var. angustipolium. Teresopolis; Wwr. coll. 321 b. Possède une hampe encore plus longue; le limbe foliaire est fortement rétréci dans sa moitié inférieure et enroulé sur les bords, disposition qui donne à la plante un faciès tout spécial; les autres caractères, notamment ceux des organes floraux, ne sont pas distincts de ceux du n° 321 a. NiDULARiTJM FULGENS Lem., Jard. fleur., IV, pi. 411. N.fulgens forma foliis immaculatis. Cantagallo, Wwr. coll. 359. Aux feuilles de notre plante manquent les taches noires dont la présence n'est du reste pas constante et que Béer ne mentionne pas. Bromelia? (Ruclcia) Itatiaiae n. sp. Caudice brevissimo crasso praemorso ; — foliis valde numorosis in l'osulam densam ordinatis rigidis glaucis, e basi triangulari semiaraplectente =* ^ >y I c A n — r.fs — liuearibus, subius lacteo farfiiraceis , 15-20 cm. lougis, 6-7 mm. lafcis, ad margines deflexos valde spinosis apice subintegris; exterioribus paten- tibus arcuatis, intimis (novellis) erectis et basi lanatis; — scapo centrali spithameo, gracili, ciim bracteis et floribus canescenti-arachnoideo, squamato; squamis infimis a foliis summis haud discrepantibus, supe- rioi'ibus laxe imbricatis scariosis fuscis lineari-lanceolatis, 5-4, summis 2 cm. longis; — floi'ibus simpliciter racemosis ; racemo 8-10 cm. longo denso cylindraceo ; bracteis squamis cousimilibus, inferioribus fl. lon- gioribus summis eo brevioribus ; pedunculis filiformibus lanatis erectis, infimis 1 Vs cm, longis, summis brevissimis ; — calycis superi foliolis liberis valvatis, 7 mm. longis , apice rotundato concavis, roseis ; — petalis cal. fol. quadi'ante supei'antibus spatbulatis, atro-sanguineis, basi nudis; — staminibus inclusis, filamentis basibus valde dilatatis contiguis et coloratis, superne tenerrimis ; antheris ovoideis supra basin emarginatam insertis; — stylo rigidulo cum stylobasi longiuscula et ovarii parLem infun- dibulari-dilatatara supei'ante articulato; stigmatibus filiformibus haud tortis apice incrassato papillosis; — ovario cylindraceo 1 cm. longo trigono; ovulis in placenta centrali totam longitudinom loculi implente snbsessilibus pîuriserialibua. Wwr. col 442. - - Au sommet de Fltatiaia^ la plus haute mon- tagne du Brésil - 2712 M. - . dont les crêtes (las aguillas) n'avaiomt jamais été escaladées avant nous. — Serait, diaprés Regel (Gartenfl. 1865, 681), un vrai Budcia. — - Très éloigné de la forme ordinaire des Broméliées. — Fx-uit inconnu. BlLLBERGlA ReeCHARDTI U. Sp. Simplex, foliis alte vaginantibua, perpaucis, patentibus, firmulis, 40-60 cm. longis, 2-2 V2 cm. latis, supra saturate viridibus, subtus albido vittatis, minute ac remote spinoso denticulatis, apice rotundato semilunari- emarginatis ; — scapo gracillimo fol. aequilongo purpureo glabro, remote squamoso; — floribus 6-10 in racemum laxum nutantera dispositis, bractea ampla rosea deflexa fidtis et pedunculo filiformi 2-2 ^,'2 cm. longo sus- tentis, pedunculis infimis non raro bifloris, pedicello pedunc. tune aequilongo; — calycis foliolis teneris lineari-lanceolatis rectis, inferne flavis apice cyanescentibus 3 '/s cm longis; — petalis fere 6 cm. longis apice patenti-revoluto azureis, basi squamula bifida fimbriata munitia ; — filamentis liberis filiformibus cal. foliolis aequilongis, antlieris ver- satilibus basi et apice obtusis — stylo filiformi ; stigmatibus exsertis clavatis tortis ; — ovario angaste clavato ; triangulari, elevato striato ad valleculas hirtello, triloculari, dissepimentis bilamellatis ; ovulis rotundatis funiculo distincte loculi angulo interno pluriseriatim insidentibus. Juiz de Fora; Wwr. coll. 197. C'est le seul vrai BlUhergia de notre collection, c'est-à-dire le seul dont les étamines soient libres jusqu'à la base. — Très voisin du B. iriiilfolia Liudl. (Bot. Reg., XIII, 1068), auquel il ressemble par l'allure et dont il se distiugue par ses feuilles tronquées émarginées — 57 — entières à striation transversale et ses fleurs longuement pédi- cellées; la figure du B. iridifoUa dans la Belg. hort. XXIV, 193, pi. 8 représente une plante à rhizome polycéphalé, que d'autres particularités nombreuses distinguent d'ailleurs de notre espèce. BiLLBERGiA LiBONiANA, de Jonghe, Belg. hort., XXVII, 57. Pico de Tijucca; Wwr. coll. 221. Les fleurs de notre plante sont beaucoup plus petites que celles figurées dans l'article cité; les dessins publiés dans le Bot. Mag. 5090 et le Jard. fleur. 197 lui ressemblent encore moins (voir re- marques sur le genre Quesnelia). Aechmea nudicaulis Griseb., FI. Westind. 593. — [Hohenber- gia {})). Bak., Journ. of Bot. 1879, 234. — Bromelia nudicaulis L., Spec. 409; Hook., Ex. FI., t. 143. — Tillandsia unispicata, Vell., FI. flum., III, pi. 124. — Billhergia nudicaulis, Lindl. Bot. Reg. ad t. 1068 ; Schult., Syst. veg., VII, II, 1257. -- Hoplo^liytum unispicatum, Béer, Brom. 138. — Hoplophytiim nudÀcaule, Koch, Ind. sem. hort. Berol., 1856; Walp., Ann. VI, 70. — Hohenhergia nudicaulis Bak., Réf. botan., IV ad tab. 284 (vide Regel, Gartenfl., XXV. 242). Itatiaia; Wwr., coll. 438. Notre plante est un peu plus petite que les spécimens représentés, les épis sont moins serrés, les fleurs horizontales : nous n'avons du reste que la plante en fruits. Aechmea {Hoplopliytum) Petropolitana n. sp. Foliis ... — panicula stricta cum scapo ea breviore digitum ciaaso 70 cm. alta et 12 cm. lata, cylindrica densissima, ramis ramulisque abbreviatis cum scapo purpureis et glaberrimis, singulis bractea squamis scapi homomorpha emarcida in infimis 10 cm. longa fultis ; floribus confertis pedunculafcis, pedunculo (ram. secund.) rigido l '/s ■ ^ cm. longo, bracteola minuta */2 cm. longa plerumque ad spinulam reducta, saepius (') Le genre Aechmea renferme quantité d'espèces qui ont au moins ceci de commun, de n'appartenir ni de près ni de loin au genre Aechmea tel qu'il a cté établi par Ruiz et Pavon, dans la Flore du Chili. Je désigne ici sous ce nom des Billbergiées à sépales très courts, coriaces, aristés, d'ordinaire inéquilatéraux, surtout quand un de leurs bords se déploie en une longue aile, et que ces ailes s'enveloppent les unes les autres. Par cette définition, je crois me raprocher de la diagnose du genre récemment indiquée par Baker (Journ. hot. 1879), qui ne signale du reste, dans les caractères morpholo- giques des fleurs, aucune particularité suffisante pour la distinction des genre Aechmea et Billhergia; le noyau du genre ainsi défini serait fourni par les espèces du igenre Hoplophytum, de Béer. Peut-être vaudrait-il mieux de classer tous les Achmea — à part l'espèce fondamentale de Ruiz et Pavon — dans une sous-division des BiUbergrn. — 58 — nulla susfcentis; — calycis (cum ovario) 3-4 cm. longi fusiformis rosei glaberrimi folioHs plus quam 2 cm. longis coriaceis, infra apicem spinula patente impositis, valde inEequilateris margiue sinistro recto margine dextro in alam amplam protenso, alis lafceraliter imbricatis et contortis ; — coroUa ... ; — bacca ovoidea laevi cal. persistente ea longiore coro- nata ; seminibus clavatis rostellatis, rostello saepe minimo — plane nullo. Petropolis; Wwr. coll. 63. Malheureusement il nous manque les feuilles et les fleurs de cet admirable végétal, intermédiaire entre VA. Mellinoni, Hook. (Bot. Mag., 5235; — [HoTienhergia] Bak., Eef. bot., IV, ad t. 285; Bak., Journ. Bot., 1879, 227) et VA. sjpedahilis Brongn. (v.Rev. hort. 1875, 310, c. ic, Bak. 1. c. 165), et se distinguant du premier par sa panicule longue et étroite, ses fleurs pédonculées et plus grandes, ses sépales beaucoup plus grands que Povaire ; du second par la forme cylindrique, non deltoïde et Faspect glabre de son inflorescence, par ses rameaux serrés, condensés, contractés et ses fleurs plus grandes : le Brésil n'est pas non plus la patrie de ces deux espèces. — Dans les dessins originaux de la collection du directeur Antoine se trouve une plante figurée sous le nom de Gusmanîa spectabilis, qui ne se distingue de notre espèce que par sa panicule plus lâche. Aechmba (Roplophytiim) organensis n. sp. Plantae 6-10 in caespitem aggregatae, glaberrimae ; — foliis firmulis in rosulam depauperatam dispositis, circiter 30 cm. longis, basi vaginanle scapi trientem inf. obvolventibus ; vagina chalybaeo-inducta intégra, sensim in laminam abeunte; lamina 4 cm. lata, versus apicem rotundatum et mucrone 1 cm. longo impositum densissime spinuloso-serrulata ; — scapo 45 cm. longo gracili erecto striato bracteis 2 cm. longis rubris emarcidis vestito; — paniculae 10 cm. longae, ovoideae densae cruentae bipinnatae ramis (inferioribus), nonnihil flexuosis, bractea squamis scapinis consimili fultis, 4-6 floris; — floribus sessilibus in pan. apice spicam simplicem efiformantibus, minutis, bracteola ovato longe cuspidata stipatis ; — calycis foliolis fera orbicularibus rotundatis striatis dorso carinatis et infra apicem emarginatum aristula fusca patente armatis; — jietalis rubiginosis cal. fol. Bubduplo longioribus basi squamigeris; — filamentis filiformibus, oppositis ima petali basi adnatis, antheris inclusis, medio dorso affixis linearibus subulatis ; — ovario cylindraceo 8 mm. longo manifeste striato ; — bacca (capsula subbaccata) ovoideo-trigona, striata; seminibus lineai'i-oblongis erostribus sub lente forti subtiliter striolatis. Sierra dos Orgaos; Wwr. coll. 317. Se distingue de 1'^. coelestis Bak., (Journ. bot., 1 879, 228 ; Ho- henbergia coelestis Bak., Réf. bot., 1871, 284; Hoplophjtum coeleste, — 59 — Koch iu Walp. Aun.j Vî, 70), plante très voisine, par le caractère glabre de toutes ses parties, par ses feuilles plus tendres, (very horny Bak.) entières, bleu noir dans le tiers inférieur, et ses fleurs plus petites et fortement condensées. Notre plante s'éloigne plus encore de VAechmea coelestis figuré dans la FI. des serres 1875, 5 et de VKoplophytum coeleste figuré dans la Belg. hort., XII, 97. Aechmea Nottigii (^). Planta gratissima Lamprococci habita, acaulis ; — foliis numerosis in rosulam Vs ^- diametri ordinatis 60 cm. longis, 2 ctm. latis, coriaceis patenti recurvis lineari-lanceolatis, in apicem cuspidatum sensim attenuatis pallide glaucis ; basi (ad vaginam parum dilatatam) spinis longis fuscis horizon talibus in lamina sensim minoribus et erectis ad apicem vero subintegrum vix conspicuis armatis, marginibusque involutis ; — scapo centrali (cum paniciila) 40 cm. longo, crasso, succulento roseo, squamis 4-5 remotis semiamplectentibus, 8-5 cm. longis, teneris roseis lanceolatis, spinoso cuspidatis et remote spinoso-denticulatis, laxe vestito ; — pani- culae cylindricao 20 cm. longae ac 10 cm. latae, continuae parum densae racemoso-bipinnatae rhachi crassiuscula rnbiginosa et argenteo furfiiracea, ramis valde abbreviatis, 3-1 cm. longis bractea ampla squamis scapinis consimili patenti-reflexa subtus argenteo tomentella fultis, 5-8 floris; — floribus (quibusdam inferioribus saepe abortivis) pedunculatis ; pedunculo filiformi gracillimo — 4 cm. longo bracteola minuta filiformi sustente; — calycis fere turbiuati foliolis cyaneis coriaceis glabris fere obovatis emarginatis, lobo sinistro brevi infra apicem spinula recurva superato, lobo dextro in alam fere orbicularem teneram dilatato, alis sese invicem involventibus; — petalis linearibus cal. longe excedentibus 4 cm. longis, semissi superioi'e spathulatis et roseis, basi squamigeris, post anthesin a basi laxe spiraliter convolutis ; — staminum pet. subaequautium filamentis filifoi'mibus , antheris subexsertis versatilibus utrinque acutis ; — stylo capillaceo basi (stylobasi) vix incrassato ; stigmatibus clavatis tortis; ovario subgloboso albido glabi'o, ovulis numerosis gelatina vitrea loculum implente inclusis ; bacca Entre Rios ; VVwr. coll. 108. A première vue on croit avoir affaire à un Lamproeoccus, mais l'organisation florale révèle un vrai Aechmea. Seuls l'insertion des placentas et l'enfouissement des ovules dans une masse gélatineuse i-appellent les particularités analogues des Lamprococcus , genre du reste très discutable. Aechmea [Billbergia] puepureoeosea Hook., Bot. Mag., pi. 3304. Rio Janeiro ; Wvvr. coll. 239. (1) Dédié à mon ancien professeur, son Excellence Charles de Nôttig, évêque de Brùnn, chevalier de l'ordre impérial d'Autinche, comte Romain, assistant au trône pontifical, etc., en témoignage de respectueuse reconnaissance. — 60 — La plante cultivée dans les serres de notre pays sous le nom de Billbergia puiyureorosea, a de beaucoup plus petites fleurs^ qui lui donnent une certaine ressemblance avec VÂechmea organensis précédemment décrit. — Particulièrement intéressante en ce que les cavités de Povaire pénètrent jusque dans la base des sépales, de telle sorte que la coupe longitudinale semble à première vue révéler la présence d'un calicule. Billbergia [Quesnelia?] ehodocyanea Lam. in Van Houtte, FI. des Serr., III; pi. 207 ; Bot. Mag., pi. 4883. Petropolis; Wwr., coll. 59. Trouvée à l'état d'inflorescence desséchée. PiRoNNBAVA [Aechmea] eamosa. Mart. — Schult., Syst. veg., VIL II, 1272 ; Bak. in Journ. bot. 1879, 166. Filamentis oppositis medio petalo inserbis, ovulis caudafco-acuminatis Entre Rios ; Wr., coll. 131. Le peu de fleurs existantes sont rongées à la base par les insectes, ce qui rend impossible la constatation des nectaires. Le port rappelle celui du P. platynema Gaud. (Bon. 64) (voir remar- ques sur le genre Quesnelia) . Quesnelia [Billbergia?] strobilospica n. sp. (^). Foliis parcis, erectis coriaceis basibus convolutis , 1 m. longis, 3-4 cm. latis, subtus obscure fasciatis, remote spinuloso-serratip, in acumen integrum sensim acutatis ; — scapo centrali fol. aequilongo, squamis linearibus distantibus tota fere longitudine arcte amplectentibus vestito; — floribus in spicam strobiliformcm ovoideam 5-8 cm. longam coadun- riatis, bracfcea e basi ovali cuspidata erecta rigida straminea in aliis castauea fl. aequilonga in summis eo breviore suffiiltis ; calycis foliolis lineari-oblongis miiticis cum ovario bracteaque teuere incano-furfura- ceis ; — petalis calycem duplo superantibus 3 cm. longis apice patulo ovali-dilatatis cœruleis supra basin bisquaniatîs; — filamentis pet. breviori- bus, valde compressis, op])ositis medio petalo insertis ; antheris versati- (1) Je range dans le genre Quesnelia les Billbergiées dont les étamines sont soudées jusque la moitié ou au delà avec les pétales opposés. Tandis que les Quesnelia du groupe du Q. rufa Gaud, (Bon. 34), — auquel appartiennent les espèces décrites ici comme nouvelles — possèdent un faciès tout spécial, le genre défini comme plus haut renfermerait quantité d'espèces ressemblant aux Billbergiées et rangées jusqu'à présent parmi elles; peut-être un examen approfondi, sur des spécimens vivants, des insertions séminales et placentaires, faciliterait-il la distinction à établir entre les deux types et la délimitation du genre Quesnelia. — Les Pironneavées Kont des Quesnelia à graines étirées en pointe. Le genre Tironneava est au genre Aeclimea ce que les Qvesnclic'es sont aux Billbergiées. - 61 - libus; stylo basi haud incrassato, stam. aequilongo ; stigraatibus lanceolatis basi angustatis, torfcis ; ovario trigono-cuneato, cal. subduplo breviore; placentis semissi sup. loculi insidentibus, ovulis ecaudatis. Cantagallo ; Wwr., coll. 273. Par l'examen floral, notre plante correspond au Qiiesnelia rufa Gaud. (Voy. de Bon., pi. 54) ; le faciès général des deux plantes est aussi très analogue. QUESNELIA [BiLLBERGIA ?] LATERALIS D. Sp. Foliis non rosulatis, extimis squamiformibus, intirais 2-3 erectis, 90 cm, longis, 4 cm. latis, basibus convolutis, firmulis subtus argenteis et versus apicem transverse fasciatis, remote — ad apicem in acumen mucronatum repentine contractum — confertius serrulatis; — scapo ad basin turionis novelli erumpente horizontali arcnato, squamis contiguis amplectentibus lanceolatis acutis glabris laxe velato, fol. multo breviore; — floribus 7-12 in spicam oblongani digestis, singulis bractea erecta tenera valida florem amplectente sufFultis; calycis foliolis teneris e basi latiore oblongis apice rotundato muticis, 1 Vs cm- longis; — petalis cal. duplo longioribus, ti'iente supei'iore ovali-dilatato coeruleis, supra basin squamula gemina valde lacera instructis; — filamentis pet. quadrante brevioribus jjarum dilatatis, oppositis petalo ultra médium adnatis, antheris medio dorso affixis; — stylo basi haud incrassato stam. aequante; stigmatibus e basi angustata lanceolatis tortis; — ovario substipitato trigono cuneato obtusangulo, tenero cum calyce glaberrimo, apico infundibulari-protracto; loculis in parietera infun- dibuli cavum continuis, placentis semissi superiori anguli interni insertis; ovulis obovatis ecaudatis. Sierra dos Orgaôs ; Wwr., coll. 315. QUESNELIA [BiLLBERGIA?] CENTRALIS n. Sp. Foliis parcis basibus convolutis, erectis rigidissimis et latissimis, 30 cm. longis, 5-6 cm. latis, glaborrimis, spinis triangularibus fuscis grosse dentatis apice rotundato mucrone subuliformi impositis; scapo centrali fol. longitu- dine, squamis ovato-lanceolatis amplectentibias velato; — floribus in spicam circiter 10-meram dispositis, stricte sessilibus, singulis bractea ovato-lan- ceolata erecta tenera amplesis, bracteis in spicse statu juveniîi adpresse irabricatis; — calycis foliolis ante anthesin leviter convolutis rigidulis obovatis rotundatis 1 cm. longis; — petalis 3 7^ cm. longis, supra basin bisquamatis, quadrante summo ovali-dilatato cœruleis; filamentis parum dilatatis cum stylo cœruleis, pet. triente brevioribus, oppositis pctali triente summo adnatis; antheris incumbentibus; — stylo stam. sequilongo; stigma- tibus e basi filiformi lanceolatis, tortis; ovario ovoideo corapresso, subalato- trigono, apice infundibulari-producto, glaberrimo; loculis in parietem infun- dibuli cavum alte continuis, placentis semissi superiori loculi insertis, ovulis obovatis ecaudatis. Sierra dos Orgaôs ; Wwr., coll. 376. Faciès et structure florale presque identiques dans les deux - 62 - espèces, très voisines du reste : la hampe est latérale chez la première, centrale dans la seconde (^). QuESNELiA [Billbergia] Augustocoburgi n. sp. Stolonifera, ex omnibus partibus glaberrima, paiicifolia; — foliis exfcimis squamiformibus interioribus 70 cm. longis ac 5-6 cm. latis; vaginis ad ochream scapi basi involventem convolutis, haud dilatatis in laminam sensim productis; lamina loriformi rigidula erecta, triento inferiore intégra supe- riore ad marginem diaphanum spinulis minutis sursum spectantibus argute serrulata et apice in cuspidem 2 cm. longnm protensa; — scapo longe exserto 1 m. longo subtili, apice arcuato, laxe squamato; — floribus in spicam 15 cm. longam fere quadrifariam ordinatis horizontalibus-pa tenti deflexis arcte sessilibus, bracteis cal. longioribus coriaceis fuscis e basi late obovata et fere biaurita aristato cuspidatis sustentis; — calycis foliolis liberis lineari-lanceolatis acutis porrectis scarlatinis; — corollss subbilabiatEe fasco-cyaneœ petalis 5 cm. longis, apice spatbulato paten- tibus nec vero circinnatim revolutis, basi bisquamatis; — filamentis pet. subsequilongis compressis, 3 oppositis petali medio adnatis ; antheris exsertis incumbentibus linearibus acutis basi obtusis ; — stylo e stylo- basi baud incrassata filiformi; stigmatibus exsertis basi dilatata connatis lanceolatis fusco viridibus spiraliter tortis; — ovario ovoideo trigono crasso gibboso et deorsum flexo apice in infundibulum vastum fere solidum dilatato; placentis ovoideis coUo angusto prope loculi apicem insertis, polyspermis, ovulis ecaudatis. Juiz de Fora; Wwr., coll. 185, 196. Figure la transition de la forme Quesnelia vraie à la forme Billbergia ; rappelle le Billhei'gia Eujihemiae Morr. (Belg. hort., XXII, 11, pi. 1, 2) et quelques espèces du groupe Billbergia amcena Lindl.; ne l'essemble pas mal non plus à un B. Liboniana de Jonghe, tel qu'il est figuré dans le Bot. Mag., 5090. Vriesea (-) PSiTTACiNA Lindl. — Tillandsia psittacina Hook., Bot. Mag., 2841. — Tillandsia simplex Vell., FI. fl., tab. 130 (= Vriesea ;psittacina ? Béer, Brom. 96, foliis obtuse-acutis). (1) Cette différence ne peut certainement être invoquée à l'appui d'une distinction générique. (2) Le genre Vriesea, quoique généralement admis, est cependant extrêmement problématique. — D'après la définition de Lindley (Bot. Mag. ad t. 4382), il ne se distinguerait du genre Tillandsia que par la disposition binaire des fleurs ; encore cette particularité ne figure-t-elle pas dans la caractéristique du genre donnée par Koch (Appeiid. quarta ad Ind. sem. h. Berol., 1873). C'est qu'en effet elle n'est pas constante — ex. Vriesea gracilis — et ne peut servir de caractéristique au genre. — Les semences, dit-on, ne seraient insérées que sur la moitié inférieure des cloisons; les ovules rempliraient la totalité de la cavité ovarienne avant la maturité complète, puis l'ovaire grandirait par le haut, et l'espace gagné de cette — 63 — Bracteae 4 cm. longae, concavae laeves nec striatae, nequaquam con- duplicatae ac rosfcratae. Capsula calycem triente superans, valvulis ligneis, dorso margine (septo complanato) excepto transverse rugosis. Semina in funiculo 2 cm. longo fibrillis incanis sub lente torulosis radiatim cincfco ','2 cm. longa teretia laevia, rostello hyalino superata. Tijucca, 216; Petropolis, 2. La plante figurée par Vellozo a évidemment ses fleurs imparfaite- ment développées. Vkiesea psittacina var. decolok. Cantagallo ; Wwr., coll. 266. Plus faible et plus grêle, à fruits capsulaires plus petits et moins larges ; hampe et bractées d'un vert sale uniforme — exemplaires tous en fruits. Veiesea carinata Wwr.j Oesterr. botan. Zeitschr., 1862, 349. Kais. Max. 154, pi. 26. — F. hrachjstachys Reg., Gartenfl., XV, 258, pi. 518. — Rev. hort., 1875, 331, c. ic. — Wiener Obst-und Gartenzeitung, 1876, 25 (Bot. Mag., pi. 6014). Bracteis angustis, rostratis conduplicatis distincte carinatis. La planche citée du « Voyage de l'empereur Maximilien » repré- sente une plante encore jeune, à bractées peu colorées et à fleurs très imparfaitement développées, mais l'identité avec l'espèce de Regel est incontestable et se confirme du reste par la concordance de l'analyse des fleurs — pas d'exemplaires en fruits. — C'est une des Broméliacées les plus abondantes aux environs de Rio et de Petropolis. Veiesea carinata var. constricta. Squamis scapinis quam in praecedenti multo latioribus et laxiorlbus, obtusis; spica densissima aequabiliter sanguinea; bracteis erectis arcte conduplicatis floribus ... (in specim. nostr.) iis ejusdem status formao normalis consimilibus. Spica fructifera densa, rhachi inter capsulas '2 cm. ab invicem remotas geniculata; capsula calycem triente superans lignea, extus septo excepto transverse rugosa; semina ad dimidium septorum inferius funiculo cen- façori serait bientôt envalii par les graines, attachées grâce à leur long cordon ombilical à la moitié inférieure de la caijsule — seulement cette disposition paraît se rencontrer aussi chez les Tillandsia. Peut-être trouverait-on un caractère vrai- ment distinctif dans l'absence? de nectaires chez tous? les Tillandsia. — Les Encholiriées, si, semblables sous une foule de rapports, ont des semences compri- mées, aplaties, à bords scarieux (? Schult, Syst. veg., VII, LXVIII) et des capsules loculicides (Koch, App. quarfca ad Ind. sem. h. Berol., 1S73), et appartiennent par conséquent à une tout autre section. — 64 — timetrali inserta, fibrillis tenerrimis flavescentibus circumdata 4 mm. longa teretia, caudiculata. Juiz de Fora; Wwr.; coll. 184. Feuilles moins nombreuses; hampe plus courte que dans l'espèce normale; écailles larges, obtuses, non comprimées ; épis uniformé- ment rouge-sang; bractées dressées, étroites, carénées. Vkiesea carinata var. inflata. Scapo quam in praecedenti miilto robustiore; squamis decoloribus stricte adpressis caudato-acuminatis ; spica densissiraa crassa succo gela- tinoso exubérante; bractsis scarlatinis et aureo-marginatis valde inflatis 5 cm. longis ac (complanatis) 4 cm. latis. Corcovado; Wwr., coll. 219. Fleurs manquantes, capsules incomplètement mûres. Les bractées énormes, renflées, à demi enveloppées les unes dans les autres, donnent à la plante un faciès quasi monstrueux ; l'épi, à part sa couleur écarlate, ne ressemble pas mal à celui du Tillandsia setacea, tel qu'il est figuré dans le Bot. Mag., 3275. Fait la transition vers le F. incurvata Gaud. (s. d.), près duquel il pourrait tout aussi logiquement figurer comme variété ; fleurs mauquantes, capsules non mûres. Veiesea carinata var. inflata formm. intermedia, Tijucca ; Wwr., coll. 266. Forme intermédiaire entre l'espèce normale et la variété précé- demment décrite, qu'elle contribue surtout à faire rapporter au F. carinata plutôt qu'à l'espèce F. incurvata. Veiesea incurvata, Gaud. Bon., pi. 6(y. Glaberrima fol. rosula depauperata, folia saturate viridia subtus magis quam supra nitentia. Spica (in specim. nostr.) 10-12 cm. longa; bracteae carinatae hepaticae vel livido carneae, rarissime roseo inductae. Petropolis (Itamarati) ; Wwr., coll. 86, 95. Les épis de notre plante sont plus courts que ceux représentés par Gaudichaud. Absence de fleurs et de capsules mûres. Le n° 95 a des bractées teintées de rose. Assez commune dans la forêt vierge, le long de l'Itamarati. Vriesea conferta Gaud. Bon., pi. 65. — F. enslformis (?) Vell., FI. fl., pi. 129. Glaberrima, fol. rosula densa. Folia tenera, supra fusco, subtus pallide viridia. Scapi (absque spica) 40 cm. longi squamœ .sordide virentes ; Bpica scapo acquilonga, floribus subcoutiguis. Bracfccac ccavîuatac pallide ochraceae vel livido-carneae, capsula calyce arcfce obclusa; semina in funiculo longissimo fibrillis tenerrimis caudidis basi cincto terotia ros- tellata. Entre Rios ; Wwr.^ coll. 126 a. Vriesea conperta var. recurvata. — V. recurvata? Gaud. Bon., pi. 69. Bracteis horizontalibus oblougis concavis subspathulatis apice fere truncato brevissime apiculatis. Entre Rios; Wwr., coll. 126 b. Bractées larges, concaves, spatulées, brusquement terminées à l'extrémité par une très courte pointe (mucronées) qui les fait paraître recourbées vers le bas. Gaudicbaud ne figure que de telles bractées ; sur nos plantes, on les trouve parfois isolées ou en nombre sur l'espèce normale, et réciproquement la variété peut présenter des bractées ordinaires oblongues. L'une et l'autre forme est assez commune dans les forêts chaudes et profondes de Entre Rios. Fleurs manquantes (^): fruits identiques à ceux du type normal. J'ai envisagé comme autant d'espèces distinctes les Vriesea mentionnés jusqu'à présent, pour me conformer aux vues des auteurs cités ; cependant je tiens à faire observer qu'un examen attentif des nombreux types recueillis par nous tend à ne laisser subsister que deux espèces principales, le V. conferta et le F. carinata: les autres seraient de simples variétés, remarquables en tous cas par l'invariabilité de leur allure ; les deux espèces prin- cipales sont elles-mêmes très voisines (~) : elles se distinguent parce que l'une a les bractées manifestement carénées, disposition qui manque chez l'autre. Les pétales de la première ont aussi (1) Les analyses des fleurs appartenant aux espèces ici mentionnées et établies par Gaudichaud se trouvent (à part quelques ornements superflus) assez exactement figurées dans le Voy. Bonite pour nous dispenser d'en parler dans notre travail. (2) Morren (Belg. hort., XX, 16) préfère foudre ces deux espèces principales en une seule et considérer V. brachystachys comme une variété de V. psittacina. Peut- être est-il dans le vrai et la recherche de matériaux plus riches et plus complets fournira-t-elle do nouvelles formes intermédiaires. Mais l'état actuel des choses exige que la séparation des deux espèces (groupes) soit rigoureusement maintenue. Le croisement obtenu entre elles (Belg. hort., XXIX, 300), n'est pas une preuve convain- cante de leur identité, non plus que la ressemblance des feuilles, puisque nous la constaterons bientôt dans des espèces d'un groupe tout différent {Xyphion)), — Q6 — le limbe bien plus court; ses semences sont plus longuement pédicellées et enveloppées de fibrilles d'un blanc-grisâtre et non d'un jaune sale, comme dans la seconde. L'ordre des espèces d'après leur ancienneté serait : Bracteis ecarinatis : Vriesea covferta Gaud., F. recurvata Gaud., V. psittacina Lindl., V, 'psiitacina-decolor. Bracteis carinatis : Vriesea incurvata Gaud., V. carinata Wwr., V. carinata var. constricta, V. carinata var. inflata fm. intermedia, V. carinata var. inflata. Vriesea regina Béer. — Tilkmdsia regina Yell., FI. fl., pi. 142. — Vriesea genicidata Wwr., Reise Kais. Max., 159, pi. 25. — Morr., Belg. hort., XIV, 325 ex cl. syn. V. Qlaziouana Lem. Planta inter annuas vastissima ex omnibus parfcibus glaberrima. Folia in rosulam araplissimam couferta et basibus dilatatis bulbum circa 30 cm. crassum formantia, 2 ^/j m. longa, integerrima. Panicula cum scapo sesquimetrali ac 5 cm. crasso fere 5 m. alta, ramis sparsis sim- plicibns vel parum divisis diffasis. Petala cal. aequilonga aurea; fila- menta sub anthesi pefc. unguibus parum longiora, demum excrescentia et corrugata vel spiraliter torta; capsula 3 '/^ cm. longa plerumque stylo accreto longissimo flexuoso vel circiiinatim torto superata, lignea extus fusca et longitudinaliter parce striata. Semina caudicula longissima loriformi saepe in comam penicillatim diffissa superata, funiculo V2 ^^^' haud longiore fibi-illis brevibus (sem. apicem non attingentibus) rigidis crispis ferruginois cincto septorum semissi inferiori iusidentia demum a septo soluta caudisque valvarum semissi superiori immissis retenta. Petropolis (Benod) Wwr. coll. 3. La figure de la FI. fiuminensis est si imparfaite que ni Béer ni moi n'y avons reconnu la plante recueillie lors du voyage de Sa Majesté l'Empereur Maximilien, laquelle devint le point de départ d'une nouvelle espèce (F, genicidata) ; il est vrai que la description publiée dans le compte rendu du voyage précité ne laisse pas que de présenter certaines eri'eurs qui nécessitent quelques mots d'ex- plication. Par suite d'un faux renseignement fourni par celui qui récolta le spécimen minuscule représenté dans l'ouvrage, le seul qui figurât dans l'herbier, la plante fut indiquée comme ayant des feuilles dentées (^), alors qu'en réalité celles-ci ont les bords entiers. Les étamines, au moment de l'anthèse, ne sont guère plus longues (1) Di reste, cette indication est suivie dans le texte d'un point d'interrogation et corrigée dans les remarques. — 67 — que le calice; plus tard elles se développent et persistent encore sur le fruit mûr sous forme de filaments longs, recourbés et velus ; le style est plus persistant encore : il demeure suspendu à la capsule sous l'apparence d'un prolongement raide, robuste, roulé en ressort de montre. Les semences, très brièvement pédicellées, avec les fibrilles courtes et velues qui entourent leur base et le long prolongement en forme de lanière, souvent divisé en pinceau, qui surmonte leur sommet, sont tout à fait caractéristiques de l'espèce. Le Vriesea regina a fleuri l'année dernière dans le jardin impérial; la plante sèche y a été conservée : elle est manifestement iden- tique au spécimen que j'ai vu en fleurs dans les forêts de Benod, quoique plus petite (rappelant le V. Glaziouiana v. seq.) et moins vivement colorée (^), au dire du directeur Antoine. La plante développée dans ses conditions normales d'existence, impose par sa vigueur et l'éclat de son coloris et, mieux qu'aucune autre, témoigne de la force étonnante de la végétation dans le domaine forestier de ces zones privilégiées. Mais il est difiicile de se l'approprier : elle trône dans les inac- cessibles profondeurs des bois, sur les flancs de rochers escarpés, entourée d'une armée de lianes sauvages qui rendent presque impossible l'approche de leur ficre souveraine. Vriesea regina var. Glaziouiana. — V. gigantea? Gaud., Bon., t. 70; Lem., 111. Hoit., XIV, pi. 516, et Mise. 43. Tijucca; Wwr., coll. 242. C'est la forme des hauteurs sèches; elle n'a qu'un mètre de haut; ses épis sont très contractés, raides pour la plupart; ses fleurs sont denses et serrées. Je n'ai pu me procurer que la plante en fruits, trouvée au sommet du Pic de Tijucca qui domine toutes les mon- tagnes des environs de Rio et n'est accessible qu'au moyen d'ap- pareils. Ses semences présentent les particularités caractéristiques décrites précédemment. Les spécimens cultivés dans les serres — sans avoir encore fleuri à Vienne — sous le nom de V. Glaziouiana, sont beaucoup plus grands : élevés dans les mômes conditions que le F. regina, ils ont dû gagner le môme aspect et n'auront sans doute que plus de ressemblance avec le tj^pe lors de la floraison. La variété n'a pas conservé le nom de V. gigantea que lui avait (1) A avait parfois, paraît-il, des pétales blancs, ce qui pourrait bien n'être qu'un phénomène de décoloration pi'ovoqué par la culture en serre. — tJb — donné anciennement Gâudichaud pra-ce qu^elle est plus petite que Tespèce type, dont elle constitue plutôt une forme naine. Veiesea geacilis Gaud., Bon., pi. 67. Glaberrima, foliorum rosula densissima. Folia firmula, 40 cm. longa e basi plumbeo iuducta et 6 cm. lata sensim in acumen saepe tortura angustata integerrima, pallide viridia et passim j^urpureo maculata. Pani- culae elongatae metvum excedenlis scapus subsemimetralis squamis viridi* bus foliaceis superioribus ad 10 cm. abbreviatis laxe obtectus ; panicula laxa ramis subsimplicibtis diffusis 5-7 floris , iuter flores flexuosis, flioribus subdistichis (sparsisp). Bracteae scariosae rotundatae flavidae 1-2 cm. longae. Calycis fructiferi foliola bractearum compagi et colore easque triente — duplo superantia, rotundata. Capsula calycem fera duplo excedens ; semina in funiculo bicentimetrali et basi fibrillis tenuissirois fuscis cincto minuta caudicula hyalina iis longiore imposita. Juiz de Fora, Rio Janeiro; Wwr., coll. 202, 515. Les écailles inférieures de la hampe sont foliacées et diminuent de grandeur vers le haut; l'espèce appartient au groupe du F. regina, et il serait illogique de se baser sur le caractère foliacé des écailles basilaires pour la ranger dans une autre section des Broméliacées hypogyues. Veiesea Philippocobuegi n. sp. Glaberrima foliis dense rosulatis amplis integerrimis ad apicem fusco bruuneum rotundato-obtusis et breviter mucronatis ; paniculae breviter stipitatae scapo squamis purpui'eis validis laxe obtecto, ramis sangùineis erectis subsimplicibus;floribus distantibus hoi'izontalibus secundis ; bracteis scariosis e basi ovata protracte acuminatis apice plerumque tortis ; calycis bractcara excedentis foliolis acutis aureis leviter convolutis ; petalorura lamina subanthesi porrecta demum revoluta, filamentis bre- viter — post anthesin longissime exsertis ; stylo stamina excedente demum longissimo, stigmate minuto trilobo ; nectariis ad pet. basin geminis flavis granuloso-punctatis. Folia 50 cm. longa, 6 cm. lata, subcoriacea laete viridia, prope basin purpureo maculata. Paniculae cum scapo digitum fore crasso métro parum brevioris rami stricti haud flexuosi, inferiores plerumque (semel) ramulosi, squamae scapinae coriaceae l'otundatae caudato apiculatae fusco purpureae, rameales scapinis minores caeterum iis liomomorphae ; florum bracteae 2 — fere '6 cm. longae, rubiginosae. Calycis foliola 3 cm. longa coriacea lanceolata basi sordide viridia. Petalorum ungues convoluti angusti, laminae 1 cm. longae vircscentes planae, post antlietiu corru- gatae et patentim revolutae ; nectaria lanceolato trigona valde tenera, ovario adpi-essa ; fi lamenta altei'nantia basi dilatata; antherae supra basin fissam dorso insertae obtusae citrinae, subtiliter transverse striolatae. Ovariiim elongato-conicum. Capsula 4 '/s cm. longa. Semina (haud matura) funiculo iis quadruplo longiore fibrillis ochraccis basi cincto sustenta, linearia rostello iis aequilongo superata. — 69 — Petropolis (Benod) Wwr., coll. 1. Plante superbe, remarquable par ses panicuîes d'un rouge de sang et ses fleurs étroites et tournées vers le dehors; appartient aussi au groupe du V. regina, croît sur les coteaux rocheux hu- mides, librement exposés, et est fréquemment cultivée dans les jardins de Petropolis. Veiesea Moeeeni n. sp. Glaberrima, foliis coriaceis laete viridibus et lineis fuscis grossis valde infracto-flexuosis trausverse vittatis, ad apicem rotundato-obtusum mucrone incurvo praeditis ; paniculae densae fol. longioris scapo squamis coriaceia recurvis laxe obtecto, ramis subsimplicibus erectis strictis, vix geniculatis, floribus substipibatis secundis j bracteis oblongis obovatis rotun- datis coriaceis fuscidulis, viscosis ; calycis foHolis parum couvobitis lanceo- latis rotundatis ; petalorum caL triente superantium ungaibus latiuscubs supra basin bisquamatis, lamina flavescenti-viridi oblonga patente; antheris (post anthesin) baud essertis ; ovario subuliformi, stylo esserto, stigmate globoso trigono. Folia 60 cm. longa, 7-8 cm. lata, integerrima. Paniculae (cum scapo) 80 cm. longae parce l'amosae, scapus 30 cm. longus digito crassior viridis, squamis amplectentibus flavidis vestitus, rami (in sicco) angu- losi. Flores 1 cm. ad invicem remoti ; bractea infima sterilis, superiores fertiles flores arcte involventes. Calycis foliola 3 cm. longa, petalorum ungues 4 mm. supra basin baud dilatatam squamulis 2 late ovatis serrnlatis instructi, leviter convoluti. Antberae prope basin fissam insertae, lineares obtusae. Capsula calycem persistentem valde excedens 5 cm. longa, fusiformis erecta. Semina faniculo fibrillis candidis circumdato et ipse demum in fibrillas diffisso 2 cm. longo sustenta, rostello lon- giusculo crispo superata. Petropolis (Itaraarati) ; Wwr., coll. 72. J'avais d'abord pris cette espèce, si reconnaissable aux mar- ques de son feuillage, pour le Vriesea fenestralis Lindl., mais la comparaison avec les feuilles fraîches de cette dernière plante, cultivée dans le jardin impérial, m'a fait voir que j'avais affaire à une espèce toute différente. Linden et André n'ont établi leur espèce que d'après les feuilles d'une plante de serre au port de Vriesea (111. hort., XXII, 124, c. ic), qui n'a pas encore fleuri jusqu'à présent. Notre plante a bien le faciès des végétaux appartenant au groupe du V. regina (la variété suivante surtout), mais ses anthères, tou- jours (?) insertes, la rangent (?) dans le groupe suivant {Xyphion), ou plutôt — vu l'étroitesse du limbe et de l'onglet de ses pétales — en font une forme de transition entre les deux groupes. — Alliée peut- être au Tillandsia gluHnosa Mart. (Schult., Syst. veg., VII, 1225). — 70 — Vriesea Morreni ? var. disticha. Floribus disticbis, capsula quam in forma genuina multo breviore. Folia haud conspicue, nonnisi pellucide vittata. Pauicula ampla et densa, ramis conferfcioribus diffiisis ; florum rhachis manifeste geni(;ulata; bracteae baud glutinosae. Semiua funiculo 2 cm. longo fibrillis rufis basi Btellatim circumdato sustenta, longe rostrata. Teresopolis ; Wwr., coll. 350. La disposition binaire de ses rameaux florifères lui donne un faciès tout différent de l'espèce précédente. Ce caractère, il est vrai, est essentiellement variable chez les Broméliacées hypogynes, mais il existe d'autres différences qui font peut-être de ce type une espèce propre, voisine sans doute du Tillandsia prûcera Mart. (Schult., 1. c). — Trouvée en fruits : la variété semble plus com- mune que la forme normale (?). Veiesea Itatiaiae n. sp. Glaberrima ; foliis amplis pergameneis e basi parum dilatata versus apicem rotundatum et purpureo-coloratum paulisper angnstatis ; pani- culae contractae et pauciramosae scapo squamis fuscis coriaceis laxe obsito, spicis pedunculatis abbreviatis, floribus densis et plerumque secundis bractea coriacea inflata castanea suffultis; calycis foliolis latissimis convolutis bracteam triente superantibus rotundatis; corollae limbo cam- panulato, uuguibus latissimis basi bisquamatis quam limbus orbicularis parum angustioribus, staminibus inclusis, filamentis dilatatis ; ovario ovoideo, stigmate parum exserto orbiculari obscure trilobo. Plateau de l'Itatiaia, Wwr. coll. 463. Allié au précédent; appartient manifestement au groupe XypMon (ainsi que V. Jonghei, viminalisj gladiolijlora, hituminosa et peut- être F. Morreni; v. Morr., Belg. hort., XXVIII, 257; F. genicu- lata appartient cependant à celui du F. regina); c'est, parmi les Xyphiées, le premier exemple d'une espèce à inflorescences ramifiées. Vriesea Jonghei, Morr., Belg. hort., XXVIII, 257. — Tillandsia Jonghei Koch, Morr., 1. c, XXIV, 291, pi. 12. — {Tillandsia ensi- formis ? Vell., FI. FI., III, 126). Teresopolis; Wwr., coll. 328, 339. Trouvé avec des épis peu développés, quelques-uns en fruits et desséchés ; très semblable au F. viminalis Morr. que l'on pourrait prendre, d'après la figure de la Belg. hort., XXVIII, p. 14, pour uu jeune F. Jonghei. Plus voisin peut-être du Tillandsia ensiformis Vell. que du F. conferta. — 71 — Vbiesea bittjminosa Wwr., Oest. bot. Zeitschr., 1862, 347, Reise Kaiser Max. 157, pi. 86. Petropolis : Wwr., coll. 25. Une des Broméliacées les plus communes dans la province de Rio Janeiro ; feuilles identiques à celles des V. Itatiaiae et V. Phil- lippocohurgi. Tillandsia (i) (Vriesea?) lineaeis, Vell., FI. FI., III, 128.-- Phytarrhiza linearis, Morr., Belg. hort., XXIX, 370. Caespitosa; spica simples; flores distichi, bracteae coccineae; corollae calycem duplo excedentis petala spatliulata ... ; antherae inclusae; stylus staminibus brevior. Tijucca ; Wwr., coll. 223. Les fleurs de Tunique exemplaire recueilli sont rongées à la base par les insectes, et rendent impossible la recherche des nectaires. Tillandsia venteicosa n. sp. Dense et vaste caespitosa, caulibus basi folîosia, foliis vaginig ven- tricosis ad caulis basin bulbum amplum hemisphaericum formantibus, supra vaginam orbicularem vel ovatam castaneo fuscam in limbum peran- gustum canaliculattim canescenti lepidotum repentine contractis ; pani- culae depauperatae subsemimetralis foliaque magis minusve superantis scapo inferne folioso superne squamoso, ramis bractea bracteolis aequali fultis patentibus abbreviatis 5-6 floris, floribus sparsis remotis patentis- simis, bracteolis teneris e basi ovata longe acntatis cal. superantibus ; calycis foliolis aequalibus usque ad basin liberis rotundatis glaberrimis ; petalis .... ; capsula cal. longe escedente; semina fibrillis fuscis, crispis. Corcovado; Wwr., coll. 224. Peut-être identique? au T. canescens Sw. (Prodr. 57, FI. Ind. occ, 595, Schult., Syst. veg., VII, 1216), semblable par le port au T. Balbisiana (Schult., 1. c, 1212, Belg. hort., XXIX, 98, pi. 6) et au T. tedonim Morr., 1. c, XXVII, pi. 18. Ces deux dernières espèces ont deux de leurs trois sépales soudés, particularité que ne pré- (1) De même que le genre Bromelia, le genre Tillandsia, le second de ceux qu'institua Linné dans la famille des Broméliacées, a subi un démembrement insensé, à tel point que Béer sait à peine mentionner trois espèces dans ce groupe autrefois si riche. Tous les Tillandsia de notre collection manquent de nectaires, et cette absence des écailles basilaires de la corolle a peut-être plus d'importance pour la distinction des genres Vriesea et Tillandsia que la disposition bi ou poly- sériée des fleura. — L'appendice chevelu des graines des Tillandsia présente du reste certaines particularités (v. T. stricta) qui mériteraient peut-être d'être exami- nées de plus près ; malheureusement nous no possédons les semences que d'un petit nombre d'espèces. 70 __ sente pas le T. canes cens ; mais comme celui-ci est intimement allié au T. poh/stachia L. (t. Sw. 1. c) et que la plante linnéenne diffère notablement de la nôtre (v. Catesby, Hist. Car., t. 98), j'ai cru préférable de l'envisager comme une espèce nouvelle en la plaçant à côté du T. canescens. Tillandsia stricta Soland. in Bot. Mag., 1529; Scliult, Syst. veg., VII, 1206. •— Anoplophytum strictum Béer; Morr., Belg. hort., XXVIII, pi. 13. Semina caudiculata, funiculo 2 cm. longo demum pro maxima parte in fibrillas candidas diffisso sustenta, fibrillis exterioribxis apice liberig rectig et funiculi basin radiatim cingentibus, interioribus vero basi liberis et supra semen arcuato recurvatis. Rio Janeiro, Itatiaia; Wwr., coll. 516, 439. Tillandsia globosa n. sp. Subcaospitosa, foliis ad caulis basin confertissimis (rosulatis) epifcha- meis rigidulis, e basi ampliore lineari-lanceolatis triente summo fera filiformibus, canescenti farinosis ; panicula densa in scapo inferne folioso superne squamoso foliisque breviore globosa, spiculis sparsis minutis bracteam aristato-acuminatam rubentem yix excedentibus pedunculatis 4-2 flavis; floribus in rhachi flexuosa disticbis, fl. terminali semper sterili calycis foliolis 2 int. ima basi connatis dorso cartilagineo incrassatis, rectis, nec convolutis, acutissimis bracteola aequilongis ; petalis ad imguem nudis, limbo obovato lilacino, staminibus cal. inclusis; ovario obovoideo; stylo stam. aequilongo stigmatis trifidi laciniis linearibus complanatis ; capsula ; . . (v. seq.). Entre Eios ; Wwr., coll. 142, b. Tillandsia globosa var. crinifolia. Foliis angustissimis fere capillaceis. Capsula linearis cuspidata 2 Vs cm. longa valvulis tenacibus demum delabentibus ad margines undulatis aut fere tortis. Semina (pro génère) parca breviter rostrata, funiculo bicen- timetrali demum in fibrillas candidas soluto sustentis (v. seq.). Entre Rios, Wwr., coll. 142 c. Tillandsia incana n. sp. Planta (nostra juvenilis) simples nec caespitosa, caule dense et ad basin rosulatim folioso, a medio florigero ; foliis (basilaribus) reclinatis, cum caule assurgentibus sensimque abbreviatis, e basi latiuscula gra- datim attenuatis acutissimis herbaceis indumento floccoso argenteo-sei^iccis; spiculis in foliorum summis in bractearum rubentium axillis solitariis minutis 4-5 floris ; floribus confertis in rhachi tenera distichis, brac- teola cal. longiorc manifeste carinata suffaltis ; calycis foliolis omnino — 73 — liberis marginibus imbricatis acutis ; petalis .... rotundatis esquamosis, antheris angustis sagittatis, ovario ovoideo in sbylum trifidum angustato. Itatiaia (Région profonde) Wwr., coll. 508. Un seul spécimen incomplètement développé; espèce alliée à la précédente, mais s'en distinguant en ce que les épis floraux nais- sent à Faisselle des feuilles dès le milieu de la tige, tandis que, dans Pespèce précédente, ils sont réunis en une panicule globu- leuse Q). A l'état jeune, elle a le port du T. recurvifolia (Hook., v. Bot. Mag., 5246). Plus tard j'ai trouvé dans les jardins impériaux une très jeune plante, désignée sous le nom de T. Bolissoni, à feuilles presque identiques à celles de notre spécimen : je n'ai rencontré nulle part de description de ce Tillandsia. Morren (Belg. hort., XXIX, 575) remarque seulement qu'il doit être très voisin du T. tedorum, dont notre espèce s'écarte notablement par la disposi- tion des fleurs. Tillandsia pulchea (pulchella) Hook. ex FI., 154; Schult., Syst. veg., VII, 1207. (Morr., Belg. hort., IX, 322, pi. 22 ; Bot. Mag., 5229 ; Siebtb. et Vriese, FI. jard., III, 49.) Tillandsia suhulata Vell., FI. FI., III, 127. Entre Rios ; Wwr., coll. 142 a. C'est la plante dessinée par Hooker dans sa « Flore exotique » : l'esquisse très grossière d'ailleurs de la Flora Fluminensis ne laisse pas non plus méconnaître cette espèce, dont elle représente un exemplaire ramifié (var. suiv.) ; tous les autres dessins figurent des feuilles plus succulentes, plus larges et moins épaisses. — Backer (Réf. bot., IV, 288) considère le T. jpulchra comme identique à T. setacea Sw., espèce toute difl'érente. Tillandsia pulchra var. vaginata. Caule foliorum vaginis valde arapliatia et adpressîs lusorie incrassato. Dense caespifcosa, caules spithamei ascendenfces (in specim. nostr. bis) (1) S'il est possible de déduire de l'aspect d'une jeune plante le faciès qu'elle présentera lors de son complet développement, je dirai que l'espèce en question doit avoir une allure typique distincte de toutes les Broméliacées, ressemblant assez bien à la figure centrale de la pi. 238 dans l'ouvrage de Burm. (Plum.) sur les plantes amer., mais ce dessin, comme le déclare Plumier lui-même (1. c. 234), représente une plante identique à celle figurée par Catesby (1. c.) c'est-à-dire le T. polysfachya L., espèce essentiellement diiférente de la nôtre. Eemarquons à ce sujet qu'il doit y avoir eu dans le texte de Plumier une transposition dans la description des feuilles des deux espèces figurées sur la pi. 238, ce qui a pu, comme il semble, occasionner plus tard la longue confusion relative à l'espèce linnéenne T. angustifolia (v. Morr., Belg. bort., XXVI, 202). — 74 — dichotome ramosi conferte foliosi, innovationibus (ramis summis) porrectia introrsum arcuatis et ramulam (spicam) annotinum (spurie) reclinatum in axilla fovenbibus. Spicae floriferao terminales 8-12 florae; fructiferae (annotinae) pedunculatae 1 '/i cm. longae, ovoidcae, densissimae. Cap- sula calycem bracteamque aequana vix 1 cm. longa obovata, apice subtrun- cato cuspidata ; semina .... Juiz de Fora, Wwr., coll. 212. Forme des touflFes gazonnantes épaisses, arrondies, sur les arbres de la Capocire ; nos spécimens sont ramifiés ; les figures citées ne représentent que de minuscules plantes simples : sans doute ces produits de serre chaude ne peuvent jamais donner de l'ameanx et meurent après la première floraison, tandis que les spécimens naturels poussent en dessous de l'inflorescence en voie de dévelop- pement deux innovations dont Pépi fructifère occupe Faisselle. PiTCAiENiA ODORATA (^) (Hort.) Kcg., Gartcufl., IV, 46, pi. 114; Koch in Walp., Ann. VI, 90. — Cochliopetalum jlavescens Béer, Brom. 69. — Tillandsia Schuchii Béer, Allg. Gartenztg., XIV, 266. T. laevis ? Vell., FI. FI., III, pi. 126. Teresopolis, Juiz de Fora ; Wwr., coll. 203, 380. (1) Le genre Pitcairnia est nettement caractérisé et séparé des autres Broméliacées hypogynes par ses semences sans fibrilles; moins important est son ovaire demi infère que nous trouvons aussi chez quelques Vriesea (F. iituminosa, etc.), alors qu'il manque à mainte espèce du genre (P. Funkii etc. ? v. Eeg., Gartenfl. IV, 45). TABLE DES MATIÈRES- Pagaa. Pbéface . 3 Biographie du D'' Wawra 5 Eelatiou du voyage au Brésil en 1879 33 Broméliacées 48 Nidularium Karatas, Lem 49 " denticulatum, Eeg 53 " triste, Reg 54 " Ferdinandocoburgi, Wra 54 " Autoineanum, Wra 55 " fulgens, Lem 65 Bromelia Itatiaiae, Wra 55 Billbergia Eeicbardti, Wra .......... 56 " Liboniana, de Jongbe 57 Aecbmea nudicaulis, Gris 57 " Petropolitana, Wra 67 " organensis, Wra 58 Nottigii, Wra 59 " purpureo-rosea, Hook 59 Quesnelia rbodocyanea, Lem 60 — strobilospica, Wra 60 — lateralis, Wra 61 — centralis, Wra 61 — Augustocoburgi, Wra 62 Yriesea psittacina, Lindl 63 — carinata, Wra 63 — incurvata, Gaud . , 64 — conferta, Gaud 64 — recurvataP, Gaud 65 — regina, Béer 66 — /O — Pages. Yriesea rogiua, var. Glaziouiaiio 67 — gracilis, Gaud 68 — Philippocoburgi, Wi'a 68 — Morreni, Wra 69 — Itatiaiae, Wra 70 Jongliei, Morr 70 — bitnminosa, Wra 71 Tillandsia linearis, VcU. . 71 ventricosa, Wra 71 — stricta, Sol 72 — globosa, Wra 72 — incaua, Wra > • • 72 — pulchra, Hook 7o Pitcairnia odorata, Eeg ^'^ FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES. New York Botanical Garden Library QL47.A1 W38 1881 gen Wawra Heinrich/Les Broméliacées bresili 3 5185 00024 9969 !*¥< ^■■^ V; -îi-i ..».. f «# *#.^^^^ wi^