20U9 .C5T5 1903 Ti ÀtéC " \ ûUilax^T Les CV.ar me^-l 4es e.+ \^s Q C» rVra;Vs tA e, \\/ acCnS iil mil mil III U r/if OTTAUA II: III lllll III II: llllll lll III lll 39003002'128'197 1 L. TIDER-TOUTANT LES CHARMETTES ET LES PORTRAITS DE M" de WARENS PARIS GAZETTE DES BEAUX- ARTS 1903 r i \ i LES CHARMETTES ET LES PORTRAITS DE M"" de WARENS / -a' L. TIDER-TOUTANT LES CHARMETTES ET LES PORTRAITS DE M"^ de WARENS PARIS GAZETTE DES BEAUX- A RTS I 9o3 / Digitized by the Internet Archive in 2011 with funding from University of Toronto http://www.archive.org/detaNs/lescharmettesetlOOtide ^ 1^ httrTelcilê ftûb»/ LES CIIARMETTES ET LES PORTRAITS DE MADAME DE WARENS iiAMBÉRv ! Commont prononcer ce nom sans songer aux Cou fessions, sans revoir le clair et lin regard, la taille replMe et la gorge engageante de M"" de Wa- rens, sans rêver de pastorales et de pastels! En clieniinant dans ce doux pays de Savoie, on remonte en plein xvni'' siècle, on revit la vie de Jean-Jacques, on savoure les réminiscences des lectures de l'adolescence: le style enchanteur du chantre do la nature mêle sa note berceuse au gazouillis des ruisselets et des oiseaux. Hui- conque se souvient comprend le charme de la Savoie et s'y retrouve comme en pays connu il raniilifi-. A quinze cents mètres de ClianihcTy. à mi-colline, s'élève iiih' modeste maisonnette dont le loil d'iuiloi^i' i'uhti;!' d'un t'ouillis de verdure : c'est Les Charmettnx. Le nom seul vaut une description. Ji- doute que son élymologie / 6 LES PORTRAITS lti; MAOAMF. DK WAREN?? soit bien fixée; en tout cas, il peut prêter à deux interprétations, car le lieu est charmant el les charmes, nombreux, y forment des char- milles ombreuses. La roule qui y conduit suit le lit dun torrent en miniature, petit ruisseau qui filtre en cascatelles multiples ses eaux claires et chan- tantes; elle longe l'enclos de nombreux cottages juchés sur les coteaux voisins, dont les pontes gazonnées viennent mourir sur de petits murs de pierres ou de rocs niuussus. La voûte verte, formée de hêtres, d'ormeaux et de noyers entrelacés, laisse filtrer des filets de soleil qui sablent «l'or le sol raboteux de la chaussée. Les bruits lointains de la ville se mêlent au doux clapntemoiit de l'eau qu'on entend sourdre de tous eûtes. On revoit Jean-Jacques montant le sentier au bras de « maman » ou lisant assis au bord du chemin, accoté au tronc noueux d'un vieil ormeau. Enfin, on arrive aux Charmeltes. En bordure de la route, une construction massive, couverte de tuiles plates, frappe tout d'abord: c'est l'ancienne chapelle que M"" de Warens converiil en four; elle sert aujourd'hui de grenier : un cintre muré, surmonté d'armoiries mutilées au ciseau, est le seul vestige île sa première destination. Aussitôt à droite, une pente en lards, très courte, conduit à un terre-plein soutenu par des murs en maçonnerie. Une ouverture, fermée par une grille, donne accès sur le terre-plein qui abrite les caves de la maison. Celle-ci est une construction un peu lourde, sans style, mais devant laquelle on s'arrête ému et intéressé comme devant un monument consacré cl un culte. N'est-ce pas, en eiïet. un lieu ib- pèlerinage que cette modeste maison de campagne, qui abrita des pensées contenant tout simplement le germe de la Hévo- tion française? L'immi-nble se compose d'un rez-de-chaussée et d'un unique étage, surmonté d'un toit d'ardoises élevé, à pente raide, comme dansles pays où laneige est abondante. A droite de la porte d'entrée, une plaque de marbre a été fixée dans la façade par les soins de lléraull de Séchelles, pendani la Uévnlnlion. alors qu'il était com- missaire de la Convenlioii à Cbambc-ry. E\U' porte une inscription en vers de M"" d'I^iiinay ou de Hérault lui-même, l'ne glycine sécu- laire, au tronc énorme, fnriue au-dessus de cette inscriptinii niie véritable frise de verdure, el, enguirlandant chaque fenêtre, pousse ses entrelacs jusqu'au bord de la loiliire. Le petit domainr. depuis le dé|iart de sa gracieuse et célèbre locataire, passa en plusieurs mains; il appartient aujourd'hui au fils Li:S POTiTlîAITS ni' MADAMT DK W A H IN S 7 iluD'Ha^panlDi'iiarii'', lequel apiihlié nu Guiili'au.r C/iarmet/e.i[[i accès dans le salon. Ce salon forme ce qu'on appelle le musée des Cliarnu'lles. Il contient ([uidques rares meubles qui datent soi- disant de l'époque de Jean-Jacques, car, d'après M. Mei/ger, M""" de Warens aurait loué les Cbarmettes toutes meublées. On rcmar(|ue une vieille épinetti- à peu pri»s apbone, sur la([uelle Jean-Jacques se serait livré à ses premiers essais de composition musicale. Une table, au centre de la pièce, supporte l'indispensable registre où les touristes entassent leurs élucubrations plus ou moins prétentieuses et ridicules. Mais la partie la plus intéressante consiste en documents cunceruant M""" de Warens et Jean-Jacques Rousseau, dont le plus grand nombre a été réuni par les soins d'un cliercbeur infatigable doublé d'un érudit : j'ai nommé M. Mel/ger, de l'Aca- démie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie. M. Metzger, originaire de Mulhouse, est fixé en Savoie depuis une vingtaine d'années; il occupe ses loisirs à rccbercher tout ce qui concerne Jean-Jaciiues et sa bienfaitrice. Très préparé à ce genre d'études par de nombreuses publications sur Lyon pendant la Mi-vo- lution, il connaît les sources où il faut puiser. L'idée première du musée remonte à la Révolution. A cette époque, la municipalité de Chambéry plai'a sob-nnellenic^iit dans le salon des Cliarnu'ttes un portrait de J.-J. Rousseau, attribué à un bon peintre local, Jean- Baptiste_,Peytavin. Ce tableau y est encore. M. Met/ger y a ajouté des autogra^^bes et les portraits inédits ou connus de M'""' de Warens. Grâce à lui, les Cbarmettes sont devenues ce ([u'on jiourrait appeler « le musée Carnavalet » de Cbambéry. Nous ne nous occuperons que des portraits'. D'après M. Met/ger, tous les portraits de M""" de Warens sont de pure convention, sauf celui (lu musée de Lausanne, d'un auteur inconnu, et attribué à tort à Largillière, et celui, signé de ce peintre, qui appartient actuellement à MrsJ.-R. Fil/.-Gérald, à Londres, après avoir fait partie de l.i col- lection de sirSamuel Ilammond Russell.à Hoslon. M. Mtignier,ancien conseiller à la Cour d'appel de Chambéry, (jui ;i puldié un iniporlanl ouvrage: Mailanip dr Warens cl ■Jfii>i-Jniliie, a même couru le monde sous cette légende : " .M"" de Warens, d'après le tableau original qui se trouve aux Charniettcs ». Or, d'après Charles Berlhoud, écrivain suisse', l'un des propriétaires des Char- inelles lui aurait avoué querelle loilr fui achetée par son père à I . /It'i iw Suisse, I »:>'.». Li:s l'oitriivirs dh mad.v.mk m-; \vAiti:.\s n un colportour iK- |)a>s.ijix>, i-t (lu'ellc n'a jamais rien fii ili' cuinnimi avec M"'" lU' Waiens. Quant au lahlcau représentant Aiiniile, il .-si point dans Icf-enrc de l'école do Castiglione, ol bien pins ancien ipic M" (II' Waiens. ajoute V.U. liciliiuiul. .M. .Mn^niera pnhiié dans son ouvrage un portrait iin'il croit èlre celni de l'amie de Jean-.iacques. C'est la reproduction d'une miniature orii^inale du musée do Cluny, où elle est cataloguée sous le n" 17811 (sullo dos ivoires . IMle lut ofTerte an musée on ISlil, par le profes- seur .1. (Hoquet, qui la tenait du comte de Lenzé ; elle était parvenue à celui-ci par une famille .lurine. de Genève. Le IC Louis .luriuo, médecin et naturaliste, était né dans cette ville en 17ul : " Il a donc pu. dit M. Mugnier. apprendre de la bouche même de ses parents le nom du modèle dont le médaillon reproduit les traits et dunt la physionomie répond bien à ce qui a été dit de M""" Warens : yeux expressifs, gorge trop (h'veloppée, taille un peu courte. Los cheveux de la dame sont gris ou poudrés, avec une coilTure dont les barbes descendent un peu sur le dos. Llle porte au cou un ruban de velonis noir: elli? a une veste ou corsage de soie jaune auqmd s'assortit un nœud de la même couleur au sommet de la tète, dans l'échancrure du bonnet. Ce peut fort bien être la châtelaine des Charmettes, vers IT'tT. au trmps de ses vastes entreprises, de ses grands espoirs. » Ce porirait n'ollre aucune analogie comme ressemblance avec ceux de Lausanne et de Boston : la physionomie est plutôt commune et n'a pas la distinction et la finesse qu'on retrouve dans les antres, con- cordant bien mieux avec la description de ,lian-.la(i|ues. Le Cabinet des estampes de Paris ne possède que cinq exemplaires des portraits de .M'"" de Warens. Ce sont : celui de Batoni. gravé par Lebeau; celui de la Bibliothèque du Corps législatif, en double exemplaire; un médaillon ovale représentant grossièrement celui ilc l'acini, mais liiurn(- en sens inverse, il porte comme sous-liii'o : « M'"" de Warens, d'après une ancienne gravure, dessin et gravure de George .leannorets, Paris, Imp. .\. Quantin » : celui (l'.Vmbroise Tardieu ; enlin celui de Devéria, gravé par Chollel. On vend encore à Chambéry, comme purlrait de M'"" dr \\ aiens, la photographie d'un pastel attribué à La Tour, ([ni n'ollre (|ue peu de ressemblance avec les portraits précités. Celte pliolographie a élé- cnmmuniqnée à .\l. Mel/ger par lady IMayfair. fille de feu Kussell : ( 1 -l la reproduction d'un pastel exposé en ISHi aux Grafii'U Gal- leries, à Londres, sous u" 22.S. Liidy l'Iaylair i iiil y recunnaiire une ccriaine ressemblance avec le pnrlrail de Bii?lun et en cimcluf, 12 Li;S POKTIiAITS F)E MADAME DE WAlîENS un peu hàliveraenl peut-être, que c'était bien un portrait de l'héroïne des Charnicttes. Nous ne pouvons partager cette opinion. lùifin, nionlionnons une gouache figurant dans la collection d'un amateur chamhérien, M. Faga, qui la découvrit chez un brocanteur de la ville. Elle représenterait, selon lui, M""^ de Warens vers l'âge de soixante ans et elle ofTre. en eiïel, une certaine ressemblance avec les autres portraits dans la forme de l'espace interorbitaire: mais, en l'absence de tout document, on ne peut que s'en tenir aux suppositions. En ces matières, il est permis de penser ([ue l'opinion publique est le seul critérium possible, si aucun fait probant ou aucun docu- ment aiitlH-nlique ne vient la contredire. La concordance des dates avec la tradition est également un commencement de preuve suffi- sante pour lixer l'opinion. Ces deux facteurs se trouvent ici réunis en ce qui concerne les portraits de Lausanne et de Hoston. On peut conclure, de ce que nous savons sur ces origines, que le premier est bien celui de M""' de Warens. It'aulre jiart, selon les anthropologistes, il y a dans la ligure humaine une série de caractères anatomiques ipie le peintre repro- duit pour ainsi dire malgré lui, et d'autant plus exactement qu'il est plus habile. Ce sont ces caractères qui constituent l'individualité du modèle, (l'est ainsi que le D*^ Pa])illaull. le distingué professeur à l'école d'anthropologie, à qui nous avons soumis ces deux portraits, nous a fait remarquer que l'ensemble de l'apophyse zygomatique et de la pommelle forme une saillie ([ue ciia(|ue artiste a rendue dune façon identique. Cette conformité de l'ossature serait déjà une présomption en faveur de leur identité avec un mi'nie modèle. Le portrait de Boston offre donc avec celui de Lausanne, tant dans l'ensemble que dans les détails, des points de ressemblance tels, qu'on peut affimer qu'il représente la môme personne, plus jeune. La signature de Largillière n'est point apocryphe et les dates con- cordent assez pour qu'on puisse admettre que le célèbre peintre y a bien rej)roduit les trails de la célèbre » maman » de Jean- .lacques Kousseau. / / / {> r ^ A I ) J, l La Bibliothèque Université d'Ottawa ichéanca The Library University of Ottawa Data du* # I CE PC 2C^<; .C5T5 1903 COO TIOER-TOUTAN ACC« 121813A LES CHARMETT