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LES GRANDS ARTISTES

Les Clouet

LES GRANDS ARTISTES

COLLECTION D ' E N S E i G N E M E N T ET DE V L" L G A P 1 S AT I O N

Placée sous le Haut Patronage

DE

L'ADMINISTRATION DES BEAUX-ARTS

Volumes parus

Boucher, par Gustave Kahn. Canaletto , Les deux), par Octave Uzannk. Carpaccio, par Léon Rosenthal. Carpe aux, par Léon Riotor. Chardin, par Gasiom Schéfer. Clouet (Les), par Alphonse Germain, Louis David, par Charles Saunier. Eugène Delacroix, par M.\urice Tolr-

Niax. Donatello, par Arsène Alexandre. Douris et les peintres de vases grec, par

E. POTTIER.

Albert Diirer, par Auguste Marguillieu. Fragonard. par Camille Mauclair. (Jainsborough, par Gabriel Mourev. Gros, par Henry Lemonnier. Hogarth, pa. François Benoit. Ingres, par Jules Mo.mméja. Jordaëns, par Fierens-Gevaert.

La Tour, par Maurice Tournfu.x. Léonard de Vinci, par Gabkikl Séailles Claude Lorrain, par R.wmond Bouyer. Luini. i)ar Pierre Gauthifz. Lysippe, par Maxime Collignon. iSIichel-Ange, par Marcel Reymond. J.-F. Millet, par Henry Marcel. Percier et Fontaine, par M.\urice Foiché. Poussin, par Paul Desjardins. Praxitèle, par Georges Perrot. Puget, par Philippe Auquier. Raphaël, par Eugène Muntz. Rembrandt, par Emile Veriheren. Rubens, par Gust.we Geffrov. Ruysdaël, par Georges Ri.\t. Titien, par Maurice Hamel. Van Dyck. par Fierens-Gevaert. Velazquez, par Elie Faure. Watteau, par G.\briel Séailles.

\'<ilu}iies à paraître

Fra Angelico, par André Pératé. .lean Goujon, par Paul Vitry. Meissonicr, par Léonce Bénédite.

Paul Potter, par Emile Michel.

Puvis de Chavannes. par P.<tl Dfsjar-

85-4-06. Corbeil. Imprimerif Kl). ("rÉTÉ.

LES GRANDS ARTISTES

LEUR VIE -- LEUR ŒUVRE

Les Clouet

PAR

ALPHONSE GERMAIN

BIOGRAPHIE CRITIQUE

ILLUSTREE DE VINGT-QUATRE REPRODUCTIONS HORS TEXTE

^rôjrVi/à-^

^^^ ^^^ ^^m^

PARIS

LIBRAIRIE RENOUARD

HENRI LAURKNS, KDITKUU

6, KIE DE TOI' R NON (Vl'=) Tous clioils ik- iraduclioii tl ilc riproductiiin rcservOs pour lous pajs.

LES GLOUET

Le t('!ii|is est loin \ ollairc l'aisiiil roniiiiencer notre pcinlun' à IV'|»o(|U(' de Nicolas Poussin. Gi'àcc aux travaux (le salaces érudils, ou counaîl inainleuaul. au uioius dans ses lijL>iies essentielles, lliisloire de notre ai't deiiuis ses oi-ig^ines et, gTàce sui'tout à linilialixe de L('ou de Lalioi'de. on ne se inéprend ])lus sur l'origine des bons portiails de notre \vi' siè(de. Jean (Uoui't et son fils l-'raneois, les (( Janet » connue les appidaient leiu's coulenij)orains. oui <'l(' remis eu linuière. S'il rest(^ heaucoup à apprendre sur ces maîtres, si nombre de leurs li-aMur\ sont à l'elrouxcr. on |)ossè(b' cependant (lassez nndtij)les d('tails p(uu" vyo- (juer leui-s pbysionomies et moulrei' la \aleui' de leurs («nivres.

Les Cdouel axaient ('(•lips(' par ieui' renoui la plujiart des peintres (pu g ra\ liaient autour dCiix .( Mi lin il par les reiiar- dei" coiiliiie les seuls grands poil rail isles de leur e[iO(pie. Un deiiii-si('M'le ne s"('lail pas (''coub' de|Uiis la iikm'I «le Fi'aïKMds (pie ib'jà I <ni attribuait à ce iiiaitre une multitude (Tiinigies peintes dans les aniK-es l.'ilM) et au diduil des aiUK'cs KiOO. ()ii en \ml hicnliil à coiiloiidre Jean el l"'ran(;ois. I"]| la coul'usion s'i-tablit d aulaiil plus ais(''Uieul

6 LES CLOUKÏ.

(jiif le lils aviii; t'h' ci'lèljrc sous le iik'iiic prciioiii iliiiiiiiii- lil' (|ii<' son \H'Vii (1).

Au \\n' sii'clc. l-"<''lil)i«'ii. i|.ii jiourlaiil naxail pas épargne' les rcclicrclics. n»' incnlionnc (|u ini CJoiicl sous le noui de Janel, dans ses E/itt^etiens sin- hi rie tlfs pei?it7^es. Lu colleclionncur de la même «■ji(m|U('. l"al)l)(' de Marolles. au(]u<d ou doil iiu data/ix/in' de Ihrres, d'estampes et de fujures en tai/li- douce, pensail ('izalenienl (|u uu seul Clouel a\ail exish'. lillusli'e Fraueois. Au sirde sui\aul. ini aulre auialeur, Marietle. dans s(ju Aljccvdurio jtilto- rico, ne trouvait à ajouter (jue le nom de Glouet aux renseiiznemenls de I*'('li]iien. Plus jn-ès de nous. Alexandic Lenoir s en tenait toujours à l'unique Janel. auejuri ou l'apporlail i^énéraleuieiil loules les bonnes j»cinlures. el même (ju(d(jues aulres, du xvi' sièele. Mais depuis ou a fouillé l'îs ai'cluxes. seruU' divei's t'ci'ilN. el I on es( arri\<' \\ dissijier la IVudieusc Ix'nih'. Les couiptes surloul oui rnidu d nisiiines sei'Niccs. (le soûl des i('iuoius peu diseris mais paiTailemnil sùi-s:c(dui (|ui sail 1rs iulei-roiicr pai-\icul à i"econ>liluer bien des choses, à en cou ij)rcndrc bien d aulres. Non seulement on a reconnu el |)rouvé (ju il v a\ait eu deux Clouel. le père el b' lils. mais encore on en a di'cou- \crl un Iroisiruir. Irés pr(diablcuicnl Irri-f i\u yvi'www.

(1) L'usage <lo désigner par un ilimiiiiilil' l'I.iil alors hi''> rc'|iaiiilii. cl il aiTJvait assez souvent que Ton penlait le sens de ee soliriqwil. Ccilains déformèrent celui de Clouel en .Irhaniet, Jainet ou Jannl. On relève ces erreurs dans les comptes adininistratifs.

LES CLOUET.

I

JKAX Cr.OlKT. SA SITUATION A LA CdlTS.

ci; uiK l'on sait DK LLI.

On ignore na(|iiit Jean Clouet, mais assun'iin'ul ce ne tut pas on Franco. piiis(}u"apros sa mort tous s«'s liions ocliuront. par droit daubaino, à la Couronne. Le roi. lo- connaissanl c«)mmr il convenait envers un de ses meilleurs peintres, s'empressa d'abandonner cet Iieritaire au (ils du défunt, François, ol les ternies mêmes de sa donalioii ('la blissent ({ue Jean n'«''tail pas originaire d[i royaume el n'avait pas élt' ualuralis*' ( 1 i. Peul-etre devai(-il le jour à ce Jean Cloot (jui Iraxaillail U Bruxelles, dans le troisième ({uart du \v'' siècle, pour le duc de Bourgogne, et ([ui è'iail élève de van Orlev. Peut-ètr<' aussi u"y axait-il eiilre les doux peintres (luuue siuiilitude lorliiile de noms (2). Aucun témoignage u"a eucore «■claiit' ce point.

On ne sait daxaidage (|uaud notre (lloiirl passa clie/, nous, m (|uelles causes I \(l(''lernniièrenl . Les k l'.lals ^ de la maison du l'oi iu)us r('\èlenl seulemenl (pi à la inori de

(1) Los IcIU'Cs l'dViili's conli'iiiinl (otlo (lonalioii stmt aiiv Aicliiscs naliiiiiali's. Trésor des Chai'les. .1. ,1. :2.'il; elles datent de 1541.

(2) (lu iii' posstide i|(ie tics |icii dr ii'iisoijjiH'iiii'nts sur Clin'l. Lfnn di- Laboi'de a dû-couvert une iniitt.irice datée du 4 sciili-iulire r»T.">(|iii |>iiiii\>' ([ue, cette aiiiKH'-là, ledit |)ciiitir |ii'ii,'iiit. à Hruxelles, sous le coulrùlo d<; son eonl'ivii' .|(>an de llaïunkarl. dilVérentes ligures de saints sur les pai'ois d'un |i;i\ dlmi.

8 LES CLOU ET.

Louis XII il ('liiil |M'iîili'(' en I il rc ( Ko (lice de ce Mioiiai'(|iic ( I ). Son nom liii'ti l'ail le dcciiicr sui' la liste des pciiilrrs ion aux, à la suilc (If Nicolas Belin, de Modèiic et de BarlJK'Iciiiy Giiérv. dil (linol. Les tètes de liste, les chefs d"<'mj>l(»i. «'taiciil les ci'dèbres Perrt'al et Boui'diclion (2). A ceux-ci (( deux cens (|uacanle li\i'es tourudis » t-laienl all<)ii<''es (duujue aiiiK'e, iu)us apprennent les comptes des dépenses royales; Jean devait se contenter <le cent soixante livi-es.

François 1''' n'ayant pas modili»' le i^r-oupe de ])einlr<'s formé par son beau-père, notre artiste reste dans sa situa- tion modeste jusqu'en 1522. 11 succède alors à Boui'di<di()n défunt et devient ainsi valet de garde-i'obe extraordinaire. Six ans plus lai'd. après le décès de Perréal, la première place lui (>st donnée avec le dire de peintre et valet de

(1) Sa prniiiriu (luiUance conniR' est du i':2 (i(!'(X'iiibrc J.")].s. Le Kdiix ilc Liney l'a publiée dans \e Moniteur du 17 avril IMiil, p. 1130.

(2) Ci'.ÉIats (le lu maison du l\<ii{\'.Ai\), (-(Utirs pour Rosi'i' du Gaij^niùi'os, riibli(>tlié(iuc nationale, ins. lianrais 21 iiiJ. Jean IVrréal, dil île l'acis, ;«iiiuit vers IKiO. on ne sait où, et mourut vers lo28. Il ne subsiste aucune ipunic autlientique de lui. Jean liourdiclion na(piil à Tours en 14.57 el mourut vers la lin de l.i2l). On lui doit les meilleures miniatures des Heures d'Anne de Bretagne et (|ualrc miniatures : Vilomme sauvof/e. 11! Pauvre, l'Artisan, Vilomme ric/ie, à M. J. Masson. d'Amii iis. .M. l'.milr .Mâle lui attribue les miniatures des Heures de Ferdinand, loi ib' Xapies. des Heures de Cbai'les VI 11 el ipielqui's-iines de relies ipii déeorent un missel provrn.iiil dune église toui'angelle. On ne sait rirn sur les autres peintres royau.x et pres([ue rien sur un autre artiste i|ui travaill.i. bii aussi, pour la cour et que certains proelann'rent le rival de Fouipiel : le Tourangeaii Jean Poyet. On n'est pas mieux renseigné sur |{a\m<ind Boteric, dont il reste une médiocre Trinité entourée d'anges peinte en !.")()'.». ni sur Jean Colombe de Bourges qui décora les Hru)-rs de Jacques (lu ur. l'^t, sans des a(;tcs d'arcliives, nous ne eouiiaili iuiis mi'iiie p,is les nnins île i'ierie Didier, de Claude des Bruyères el ije |''i aii.dis jien.ird. >• pi yiihe de la Ueync en 151;i ».

.1 1: v N ('i.ouET. riiv>(;(>is I"' Pciiil iircj. (\j)u\ve.)

LES CLOUET. 11

rliambrt'. Très lionoi»' et chargé de travaux, il remplira ses fonctions jusqu'à sa mort, en 1540.

Le titre rie valel de chambre était, à cette époque, pai- faîtement lionorahle, car il n'impliquait aucune fonction et il conféi'ait le droit d'approcher le roi ainsi (jue de le suivre. Aussi avait-il t'té réservé tout d"al)ord aux gentils- honunes. Puis l'étiquette de Ja cour avait en ([uehjue sorte obligé les princes à l'octroyer à leurs artistes favoi'is. En effet, cette étiquette, reposant sur les traditions et les slaluts des corporations, assimilait les poètes et les pein- tres aux gens de métiei'. lesquels occupaient la deiniérr place hiérarchique. Le seul moyen de uieitre les aiiisles au-dessus des divei's ofliciers d()mesti(}ues. de leur assurer un rang au moins coinenable, c i'iail d fii faire des \alels de cliambie.

Pourquoi Louis \I1 s"('lait-il attaché' .lean Cdouel? Nul ne saurait le dire. A\ait-il accjuis (juelque rtqtutation a\anl dèli'e adnus au nombre des artistes royaux, ou de\ail-il son heureuse foiliiuc au sens esthétique île (|uel(|U(' cnii- seiller du monai'<jue? Aucun docunieni ne nous ('claire sui- tes (h'buls du maîirc. sin' srs premiers lra^■au\ à la cour de Fi-anc('. Plus lard, il semble bien (|U il eu! ralfeclion de son roi, mais lul-il son porlrail isie pn'IV'ré' ? A ce sujel encoi'e, on se voit r(''dinl aux eon jeclures.

Ces! Tom's. ceiilre d une \ieille ('cole Ibirissanle. (|Ue Jean (ilouel a\ail é'bi pdur sa i-esidenee ordinanc. S'il alla (luebiuelnis besogner à Paris, (juand le roi s y Irouxail entre deux (b'placemenis. il aeeonqdil en pr()\ince. croit-

12 LKS CLOUKT.

(Ml. la iiiaicdrr parlic de son (ruxir. (In lie |M)il rail u rail pas alors coiiiinc ;i |)r(''sciil: les jkmsoiiiics (h'siraiil Icni' image ne |)()sai('iil pas dans la^'licr de I arlisic. cCsl (•(dui-ci (jui se rciidail dans Icnr dcnicnrc II les dessinai! liés soigneuseiiienl sur j)aj)ier. indi(juail les Idnalilés de leur cîirnalion pai' (|n(d(|ues Iraint-es de pasltd dur el noiail par écril les leinles de leui' coslunie : jtuis, d'après celle ('ludc. d p('i<:iiail le lahlisiu. Ce svslènie n a l'ien (|ui doixc sur- prendre ; entre les mains d'un peintre, maîlrt; de son mt'lier. il ne peut iiuère donnei- de iuau\ais résultais ( Ij. Lorsque Jean rapportai! de ses soi'ties, de ses voyages, inic douzaine d études, il avai! du travail pour plusieurs uKiis à son loyer. Des courriers emportaient les ou\iai;es aclie\(''s au fur e! ;i mesure des besoins. In com|)le nous allesle (ju'au mois de mars \l'}2\) un certain Loys du ^^olllln lil. « en dillin'ence el sur (dievaulx de posie ». le voyage de lilois h Paris pour apj)Orler U François 1" des porirails el des (( elïigies au \il" » dont Cloue! axai! ('■!(' cliarg»'. Et nous saxons. |)ar une pièce adressi'-e au pr(''\(H de Paris, qu une fois au moins, vers [.'i.']". Jeanne, la femme du maiire, rempli! ce! ollice de courrier (2j.

(1) Ceci iloil .s'ciili'iiilii' (lus poil laits |)('iiits d'iiprès les crayons iii("'iiirs ilii jjoiti'uilish', l'I iiicnic ;i conilitioii dr l'aire iiir'tloiiiini'i' la slnuliii !■ ilu (lussln sur la |irinluir. |ji |ici;L;iiaiil (ra|Fi('s \v dessin d'un aulre. li' )fIu> liahile des niaili-('s |-is(|iii'rail l'iiil di' ne r(''alisrr i|ii'iini' irn\re de vii'Luqsité l'rivole. On peul s'en convaincre; en exaininanl le l'ranrois /" du Louvre exOculé par Titien, d"aprés des documents, en 1535, aiVlsahcllr '/'7i\/f du Musi'm! de Vienne |ieinle i»ai' le ni(''tne, un an plus lui. de la nièiiie manière.

(2) ICn ell'el, (die a donne'' (piillance. celle annee-là. an ti(''>()iicr de riùiai^;ne d'une soninnj de 45 livres Iniiiiiois iiui lui a\ad eh'' allouée

Anne ije Montmoiiencv. depuis connt'lnlili'. ù l'df/e de i*:^ ans.

Robert de La .Mauck,

ilil Fl.El UAMiES.

Gni.LAl'ME GdUl'KlKll.

ilit IJoNMVET, atiiir.il (le Frunci'.

AuilH'H (iiil I lIKIt.

.1 r.\ \ (', 1. or i: I

MiNiMiHKs m. \. \ Cl iif ne tj u 1 1 iii n c

|l!ililiiilli(''i|iii' ii.iliiiliali'.)

LES GLOUET. 13

Quelles raisons delerminèrent Jean à se fixer à Tours, on l'ignore. Peut-être est-ce tout simplement parce qu'il s'allia, par son mariage, à une famille de cette ville, celle (le l'orfèvre Gatien Boucault. Ce fut au moins en lol.')(ju'il se maria, car nous verrons plus loin (ju'il convient de pla- cer en l.")l() la naissance de son lils François. En tout cas, on ne saurait beaucoup reculer la date de cette union puisqu'une pièce nous apprend (jue les deux époux achetè- rent à Tours, par-devant notaii'e. le ^endredi (I juin \l)'2'2, une rente en grains (\).

11

LE GOUT DES PORTRAFFS AU XM SIKCLK.

Au moment la fortune commenrait de sourire à Jean, les portraits avaient une vogue extraordinaire. l)<''j;i. au xiii' siècle, ils jouaient un i('ile. parfois imporlanl. dans les n«'gociations des mariages princiers : à j)arlir du \i\'. on en usa de bien d'aiilres farons. Kois cl grands licnncnl h se faire repr('seiiler sur les noIcIs des (li|»l\(jn('s cl lripl\(|ii('s (ju'ils olfreiil aux «'gbscs. l]\\ oulre. (|iiel(|nrs liauls per- sonnages se niclleni à réunir dans leurs demeures ib-s séries de porirails. Maliaul dArlois |)ossède. axcc une

« à cause du voyage qu'elk' .ivail fiiitl ilc Paris à Konlaiiiclili-au.

pinu- nppoi'lcf (■( inoriiiticr au lluy aucuns duvragcs » ilc sou uiari.

On eu |icul (Iciluirc que .Icau sciduruail |)arlois à Paris, pcul-t'lrc il a\ait une dcuicure.

(1) Arr/iiri's de l'iirl fninriiis. 1 '' sciic, I. III. p. :::!•<) (>l s.

16 LKS GLOUET.

siiilr (le jx'iiiliircs coiisacft'cs à la \i(' de son pri-c. une f>"alri-i(' ilr Idisics rcproduisiiiil nos somcraiiis cl nos soincraincs. Jean de Bcrrv conserve, dans son manoir de Biceti"*'. les clliiiics peintes de Cléinrnl \11, des cardinaux, rois cl j)rinccs de France, des empereurs d'Orient et dUc- cidcnt. I^nlin d assez nombreux scio'ucurs impriment leur image sur les J)àliments publics de lein- domaine.

Nos artistes excellaient à figurer les donateurs et leurs entants; l'interpn'tation caractériste des tètes étant une des (|ualilt''S dominantes de noli'c l'ace, très t('it ils proct-dèreni a\('c une siiKM'ritf' et une conscience dcdectables. Le Jean le Bon du Louvre, le (lliarlesY et la reine Jeanne <jui se jii'olileiit sur le Parement de Narbonnc du m(~'me nnisi'c. les miniatures de maintes Heures nous en fournissent des preuves aussi di\eises (jue tvpi(]ues.

Au w' siècle, nos peintres les nneux douc's IraxaillenI en gènc'ral comme des portraits les personnages de lem's d(''- corations ou di' ieui's motifs religieux. Voy<'z le St-Au- giisliii et le Sl-A)n/)f()tsr de Saint-Sauxeui' à (laen. la l*r()C('ssi(tii (lu jxtjx' (jré(jOirc dans la callit'di'ale d Aiilim. les peinlui'es nmrales A\\ li'ansepl el du bas v^\\v ninil de Nolie-Dame de Dijon, la Plela (pii. de \'illeneu\e-lès- Avignon. est passi'c au Louxie. et. dans ce nuMue nnist'e. la Stc-Mddc/riiif (pu prè'senli' une \ieille dame.

Le (■('■lèbre dipl\(piede l''()U(piel. naguère à Melmi. ne s nu|)ose à ladmiralion (pie par les images de (.liexaliei' et du moine (pu ligure Sl-I']| iciiiie. Le ('.(il rui ri', jadis au IVdais de .liishce de Paris, se reconimaiide siirhiiil |iar ses

lÉcoLE DE Jean (Iloif.i. I'ouikai,! m: iemmi; ^l'oiuUirc) '(Ancioniic colloclion Laurent Riclmrd.)

LES GLOUET. 19

saillis aux physionomies si uellcnient iiidividiicllfs. L"iii- trrùt (lu triptyque au Buisson ardent de Nicolas Froment (catlu-drale dAix-en-Provence), du tripty(jue de la cathé- drale de Moulins et de la Nativité de révèché d"Auluii est loul entier dans les figures des donateurs si vivantes, si délicieusement expressives.

De ttdles œuvres durent contrihuei- ('iKtniKMiicul à rt'- pandre l'usage des portraits isolés. Les panneaux ne suffi- sant pas, on portraitura sur les tapisseries, sur les manu- scrits, les livres impriuK's (1), voire sur Ifs cheminées monumentales que l'on adornait de médaillons ou de motifs à plusieurs figures e( même à l'exItMifur des mai- sons. Jac(jues Cœur et son épouse illustrèrciil de leurs images sculptées la façade de le m- palais.

L'honnne a toujours chéri la représentation de ses traits, e( heaucouj). même, dans le piihh'c. ne conçoivent pas l'art plasti(jue en dcdiors de la lidèle reproduction des tètes. Quand la photographie fut iuvenli'e. rimmanih' recul iiii des plus mer\('ilh;ux hochets (|u Vile pi~il dt'sirer. Aussi (|uelle allégresse; ! Que de soins apporlivs au jx-rfec-

(1) Il y .1 lie savouifiiv |>()rlniils siii- les plus diverses tapisseries. On en roiiianim: dans la Vie de saint Pierre de la eatlu'dialc de IJeauvais comme dan.^ la Condamnation de Souper et de Ban<iupt du musée di" Nancy, dans la Scène d'amour du Louvre comnje ilans le Priam et sa cour du Palais de .liislici' d'Issoiir.

Enfrt' tous les [lortiails des livri's, il faut iclenii' ceux de Cliailcs VIII cl d Anne di- Ui-elaj;no cxccuti's en luinialiirf sur Irs Ajiotitr/urs et lùihtes d'Esope (tradiiclinn Iran. Mise dr G. Tanlil'i cl sur la Léijende dorée (tnidnction de .1. du Vi^'uaii, in-l'olin >tii- vcliii nublics à Paris par .Vnt. Vérard, l'un en •14'J0, l'aulie m ll'j;>.

^10 LES GLOUKT.

lioiiiiciiiciit (le J iii\ fiilioii ! J{t (jiicl siiccrs ciiN aliissfur 1 Cliacuii iiiaiiih'iiaiil voudrait opi'ici- soi-mèiiie.

Au lt'uij)s (le Cluu'k'S \111, il devint de bon Ion. dans la nol)lt'sse, de se taire portraitui-cr. Et ce genre alla se dt'-- vidoppant. Les princes du sang se piquèrent d'aNoir leurs peintres comme le roi. Les riches bourgeois tinrent honneur de procéder l'instar des seig"neurs. A partir (hi règ'ne de Louis XII, tout favorisé de la fortune recourut au talent d'un portraitiste; ceux qui ne pouvaient s'olfrir une peinture sur panneau ou une miniature sur vélin se con- tenlèi-ent dini crayon sur papier.

Dès lors, il fallut bien placer les porti'ails sur les muis; ainsi connnenca-t-on, dans maintes familles, des galeries analogues aux collections d'effigies des palais royaux et de certaines maisons princières. Un n'en forma pas seule- ment de peiidures sur bois, mais aussi démaux, surtout (piand Léonard Limosin eut provoqué des enthousiasmes. Et les ensendjles de portraits en ('mail ne fureid pas les moins goùlt'S, car par leurs teintes sobres el lumineuses, ils constituaient des effets dt'corat ifs assuri-menl agréables.

D'aucuns continuèrent h |»lacer leurs busies sui' (|uel(|iie mur de leur demetn-e, t(ds les Dumonlat en leur IkMcI de lliom, les Dordel de Montai au château de ce nom. dans le Lot (1). D'autres \()ulureiil leur image en liaule lisse, comme Pierre de Kohan et Marguei'iie d'Ainiagnac lenaiil l'orgue sur la tapisseiie de la eallu'drale d'Angers, c(Mmne

(1) Lolligio <lf DuiduL uslpa.sséu uu Loin ru. I^cs porlrails un liaiil ruliul de DumontaL el de son épouse sont encore dans la cour de son liolel.

(.'.lichi' Alin.'iii.

l'It A NCOIS (', l.Ul'KT. l'itWCUIS 1' l'i'illllllt'.

(.Musée (les Oriiccs, l-'liirciu-i'. 1

lp:s glouet. 23

la (lame revêtue de drap dor qui se tient à genoux dans la Descente de Croix du musée Çrozatier, au Puy, comme les anonymes assemblés au Concert du nmsée des Gobe- lins. D'autres encore se mirent à collectionner des minia- tures ou des dessins. On se plut à recueillir les portraits des célébrités du temps, des ligures qu'un événement transformait en actualités . L'arrivée de Maiie Stuart à la cour dans son costume national « à la barbaresque mode des sauvages de son pavs » ayant lait sensation, nous ap- prend Brantôme eUe paroissoit une vi-aye déesse )>), l)eau('Oup désirèrent son effigie « est.uil ainsi babilb'e ». Beaucoup aussi se disputèrent les copies dr \\\ pcinliirc (|iii représentait Marguerite de Fiance, sous b; costume de velours incarnat d'Espagne quelb; portait au feslin (b's andjassadeurs polonais ; costume dont l'etlet axait t'tt' pro- digieux sur tous les assistants, notanuiienl sui- don Juan d'Autricbe.

Un alJMini (b' la l)il)li()lliè(|ue Ab'janes d'Aix-cn Pi'ovence et un recueil aiialoguc de la bihliolbècjiir d Ai'ras nous oll'rent deux curieux spi'cimi'iis îles collec- tions de [)orlrails cra\()iin('s. coinnic on les comprcnaii dans le prcnncr ([uarl du wT siè(dt'. Au second (|uart, les crayons suscilèrenl tni hd engournienl (|ii il y eiil i(ierd(~)l du lra\ail jtour les plus nu'diocres dessinateurs ; et JorccMnenl ceu.v-ci, b'conds aiilani (pi insullisauts. (b'terniin'''renl la d('(di(''ance de ce mode de jiuuralion. Ils axaient pour en\ Ions les gcnsdennes degoiil. iesipuds sont toujoui's h'gion : n(''ainnoins en (|n(dqiies ann(''es.

24 LES CLOU ET.

ils comniircnl do toiles ([iianlih's do tètes banales (|tra|)rès le règne i\(' Henri [\ on cessa do s'intéresser aux [lor- Iraits crayonnés. Ingres, par d'incontestables inei\cilles, l'olèvora plus tard ce genre sans le remettre en bonneur. Jean Clouet crayonna certainement plus de porliails (ju il n'en peignit, et peut-être en lit-il davantage sur vélin que sur panneau de bois (1). D'après ce que nous venons Ar \(>ii', cela semble bien pro])ablo. Enlin, selon l'usage du temps, il décorail aussi dos meubles, exécutai! dos ai'moi- rios et, à l'occasion, modelait. Même s'il peignit pou do portraits, son u^u\i"e lui donc considt'rablo. François T'' l'atioctionnail ou reslimait trop })0ur le laisser ( li("imei- longtemps; à [)artir do l.j2.'). il dut morne l'accabler de travaux puis(|u il no lui donna ipiun auxiliaire, ce l*etit- Jean Gbampion dont on no sait rien.

m

L (KrVME 1)K .IKAN.

On no peul allribuer à Jean CJouoI (|uo Irois ou (|ualre peinlures. six ou sept ilessins el les uK'dadlons d un nia- nuscril. l'jicore nCsI-ce (|uo par une s('ru' do conjoclures. Li' seul de ses lableaux (jui nous soit signali' pai' (ni texio a (■!(■ perdu : c est le poihail d ( Mduce h iik'. le uiallieuia- licien daupinnois. Son projtro (ils ci'itilie (|(i \\ lui [icnil

(1) « Il I f.i \ ailldil l'^'ali'iiiriil liii'ii en liiiik' r| en iiilniiiliii I' •>. imld FiJlibii'ii. I. III. |). 1 iS (if l'éditinii ml.'.

Cli,-lu' ll.inM:ii-iii:l.

Franchis C.idir.r. - (liivmis |\ Pi'inlmcj.

(Muséo ilr N'iriiiU'.)

LES CLOU ET. 27

par le maître ( prohaljlcmcnl vei\s lo)^(l). Une gi-avure le re]»iT)iluil dans les « Hommes illnstres » de Tliev(4, mais, (l'ès vulgairement établie, elle n'en donne (luiiiie piètre idée, et ne permet même pas de reconnailre un (Uouet. Les peintui'es conservées (jue lOu supjtose, avec quel(|ue raison, œuvrées par noire Jeau soûl : le graud /'/v/z/ro/.s' /''' du Louvre et deux efïigies de Montmorencv, lune au môme musée, l'autre au Palais des Beaux-Arts de Lyon. La première, tort comuu', dale des années l.j20, eu juger par l'âge du porli-ailui'»'. Vêtu dun poui'|)oint de satin gi'isovanl ciiainan'é' dOi'. le roi se |»rolile sin' un fond rougeàti'e dans uiu'. poslui'e iialur(dle. inie main sur la garde de sou ('pi'e. La télé relienl par son dessin |>i't''- cis, afïiruialir. la structure giMu'rale par sa \ ie ; les di-lails du eoslume IralussenI une soliieilude de niimalui'iste. L'exécution pictur.de, [n-es(jiH' loiile en glacis el en Ions plais très lissc's, est uniforme, monotone, sauf dans les maneiies el le fond, d oii. par malheur, les ornenienis (Muergenl lro[t; il sendde (|ue l'auleur ail eu les liésilalions d un piMiili'e (|ui sori de son lormal ordinaire. Les mains sont l(''(di(''es d'mie l'aeon \ulgaire el. par-ci. par-là. !('•- jti'euses. mais il iaiil sCii prendieau reslauiMlenr (|in les suUsIilua aux originales.

(iC porirail avail v\r place'- au palais de {•"oniainiddeaii dans le caltinel t\i\ roi: el au wii' siècle, il se Iroiivail loujoui's à sa même |)lace au-dessus d une iiorie. Les ama- leurs (''rudils sa\aienl encore (pi M elail de Lionel ; loiile- lois ils crovaienl. eux aussi, (piil n \ a\ail eu (piini arlisie

28 LES CLOUET.

(lo rc noin. l'ji HitO. le P. Dan sipnalo ce portrait et celui <le Fiaii(;ois 11 « qui sont fie Jand. jH'iulrc fort renoninié par la muse du prince de nos poètes (1) ». Mais le dire de ce religieux lut bien vite oublie. Quand, en 1731,rabbé Guilbert cila de nouveau celte (îffigie royale comme un ou- vrage de .laiiel (2), Bailly l'avait inscrite, dans son inventaire, depuis vingt-ipois ans. sous la mention d'ou- \ rase d'inconnu. Celle insci'iplion . Louis-Jac(jues du Kaiiieau la reproduira, en 1784, dans V Inventaire des liihhum.r du cabinet du )-oi.

il est légitime de donner à Jean Clouet les deux poi- trails de Guillaume de Montmorency. L'âge accusé par le vieux seigneur, père d'Anne le Connétable, dans ces pein- tures, les place vers le milieu ou la liii des années l.')20. au j)lus tai'd eu \^VM) (3). A celle (-j^xpie. il n'\' avait guère (jue le niaîlre (jui tVil en ('lai de r('alisér des œuvres aussi puissantes. Sans doute la pâle n'est pas tout ;i l'ail élab'c dans ces deux ligures connue dans celle de Franeois F'% elle y modèle les plans avec autrement plus d aisance cl, en ([uebpies endroits, elle paraît moins lisse: mais Jean a lorl bien pu niodiliersa facture à un certain moment de sa carrière, comme lanl d'artistes, et il serait pliih')! i-lonnant |ii il ne IVil pas parvenu, dans ses dernii'res années, à mano'UN rer les bi'osses avec cràneia'e.

(Il l'.l piiiir (■•viti'i- liiiilc (•(inriHinii, II' iiuiii ili' (T |iiiiici'. liim<,U(l. rst in.si'ril en ni.ir;,'!'.

{2)Descrtp/ion lii.tft)ri(iiiei/('sc/tf!leaiij/iiiii;/ cl fores I il c l'ini I a'ntehle<i u A~'''>\ .

(:{) ( inill.i iiinc ilr .Mdiil iiH iicin'v , rlii'\ alirr iriKuiiiiMir ilr Lmiisr ilc Savoie, iniiunit en \'.)\\\ .

Fn A >coi s (11. U U ET.

Ki.is.vitETii 11 ' A i 1 lu i.iii, l'fiiiluiv'i. (Louvre.)

LES CLOUET. 31

Sans doute encore 1 exécution des Monlniorencv lail songer à l'archevêque d'Holbein, mais n'oublions pas que, entre les maîtres à même psychologie, à semhlabh' osthe'- tique, il y a forcémoril un air de famille. Jean Clouef concevait Finterpi-i'tation des caractères comme Hans Holhein : il s'ordonnait, lui aussi, de serrer hi forme el de peindre en amoureux du dessin, c'est-à-dire en sacrilianl tout effet pictural à la scrupuleuse indication des plans. D'ailleurs, doi(-on vraiment au maître de Bàlerar( he\('Mjue de Canlorhery? Plusieurs ('ruchts en douleiil. .Maintes peintures que, sur la foi des catalogues, le public continue de saluer comme des créations d'Holbein seront ])eul-tMi"e restituées demain à Jean Clouet.

Le Guillaume de Montmorency offre un admirable exemple d'interprétation caractériste. Les moindres traits du visage, les doigts, aux dc'formations implacablement traduites, tout accuse son individualiti'. On discei-ne sur cette tète une ti'naciti' formidable, une aust('rité pi-es(|ue féroce et certainement m(tr<tse. (let homme parait ignorer le soui'ire et peut-être la bien\ cillance. Il cause une im- pi'ession lugid)re (|ue renl'orccnl le Ion de sa cliair jainni' ninie un vieux parchemin el le noir de son coslinne. (le serait effrayant si ce dernier n ê'tail liunianis»' par (piehpu's accents de ci'aniorsi en haut, à IV'(diancrnre du costunu'. el sur les (bdtoïdes. amsi (pie p;n' la ta(die Innnneirsc de la chaîne d'or. Profondi'Uient «^xpi'essii's et très liarnioimiix en leur gamme s('\ère, ces deux porliaits coniplen! jKirnu les chcds-d'œuvre.

32 LES GLOUET.

Les dessins doiil on jicuU sans crainlf, l'aii-c lioniiciir an viiiilanl arlisic sr IronNcnt à Cdianlillv, au nius('(' (Idiidi'. Cr son! les cifiuics du'^iand niaiti'c Arthur Goullicr. dAnnc (II- Monlinorency à vinyt-deux ans, de Guillaume Gouffier. dil lîonnivet, amiral de France, du sieui' de Tournon, de Cliabannes la Palice, de Robert de la ,Mar(d< dit Fleurang-os. d'Odet de Foix, sieur de Lautrec (1). (les leles valent tonles par leur dessin signilicatif et animt'. surtout (•(dles d'Amie de .Montmorency el de Guillaume Gonllier, si lariiemenl construites. Elles ont une saveui" de ci-0(|uis el une robustesse d étude consciencieusement cherchée.

Quant aux miniatui'es attribuables à Jean, elles ornent uu manuscril. A/ (tuerre (jaUiqut'^ aujourd hui à la Bibho- tliè(jue nalionjde (fonds français, 1342!)) ; ce sont h's lejiroihu'lions, ri'duites au diamètre d une pièce (h- .'i IV.. des dessins prc'cilés. A M. Ileni-i Bouchot, le mérite d'avoir découvert la parfaite ressemblance de ces minuscules eidu- minures avec les cravons de (ihanlillv. et (h- h's a\(iir res- tituées à ('Jouet le [)èi'e. Restitution des plus plausibles, on \\\ le \(iir (2).

Jmi eli'et, ;i r('po(|ue oii fui ex(''cul('e A/ (iitcrri' (/(if/if/iic jionr l'"ranc(»is 1'''. en Kjll), notre Jean ('lail en |deine |ios-

(I) Cus di'.s.siii.s l'aisaluiil partie de la ((illccliuii de Slall'oril IIùuso, (|u'.\lbert Lenoir avait composée et iiuc le duc d'Aunialo acliota, on 1889. ci hird Cari i si e.

[i] Il y a d'autres iidniatnics dans hi Guerre r/fillir/iie : des scènes cl des l'cprésenlalions d'en;,niis de j^ueiic (le sont do léfj;èros prisaillos. presipie des SÔpiaS, liMll à l'ail, iialialos ediiniH' .1 riM li^riMcid el riiiMlMi' exo'Ciiliun. inconloslablomenl. leur auteur, (judelrciy le lliillandai>, lia pu tracer les oxijuis portraits de soiyui'urs.

'u\\(:(i[s ('.i.uiET. llr.Niu II Miiiialiiifi. (Cabine! des Ksliimpcs.)

LES GLOUET. 35

session de sou métier, el il n'avait g"uère au-dessus île lui que Perréal et Boui-(licli()ii. Or la t'aeture des médaillons en (|uestion dill'ère sensiblenieni de (-(die de Hourdielion, plutôt lourde et cliarg-ée en coiilcur: d<' pins, (die déeèle une l'ermeli'' de main, une \"irilil('', (|ue ne devait pas a\oii", en sa vieillesse, le miniaturiste des ïfnn-fs d'Anne de liretag'ne. On ne saurail daMintage soutenii- (pic celle ma- nière soit celle de Perréal, et parce que nous ne possé-dons aucune œuvre auliientiipie de ce brasseur de lra\;iu.\. et parce que, si Ion a loul lieu de croire (pi'il l'ul nci-s»' en divers genres, on ne lit nulle part (|u'il se soit atlirmi' bon portraitiste (1). Au contraire, Jean devint c('lèbre en inlei- prétant des pbysionomies : onpeul d'auiani mieux b' re^ai'- der connue lauleur des dessins d On l'urenl liri'cs les mi- m'atm'es de ((( Guerre (/a//ir/ii(\ (pi'enlre ces ci-avons el ceux de son (ils François on i'(dè\(' ({'('Iroiles .inim'h's. |']| il est «''\ ideni (|ue les mininlures sont de l;i ini^me nmin (pie ces dessins, les mènu's (pialih's s \ recomiaissanl .

Sans doute rien n Cmjtéidie d'admelli'e (pie liiii des Iteiiilres iUiX(jU(ds l''ran(;()is P' iidress;iil xoloiiliei's des commaiides ail v\v capable de r('aliser les im'daillons de /(( (liicrrc (j<i//i(/U(\ mais jtouripioi le idi eTil-il lail app(d à cet ai'lisie alors (piuii de ses peinli'cs en lilre se dislin- giiail jusiemeni par les plus rares dons de poilrail isle ".' N'élail-il pas iialiir(d. au coniraire. (piil conjii'il à son IVmI.

(I) 'l'oiili'lois (III III' pi'iil iliiulri' iiii'il ail |iiirl l'aihin'-. l'iir Irtiir ilr lui

nous a]5iin'iiil ciu'i! III aiiv ciayuiis ilr cnulciir l'iiiiaj;i' de la IVmiiic ilii

sccriMairi' ilc Mai^ncriti' iJAulriclu'. I.cltir </r l'rrriuil ii lluriiiii/it'r.

8 octobre IM 1. Itililiulh. iiatidiialr. iiis., iiiiu\cliis a(i|iii>ilii>iis, ii" I 1 1:2.

:}6 LES CLOU ET.

k ce iiiailrr (|iii connaissait si hicn la cour. le soin de lii:ii- rer ses cliers seigneurs, ses preux de Mariguan ? En loul cas, ces efrigies soni dun bel artiste. Très sinipleincnl ]iro- (ilées sur un fond outremei-. dont le (on met en valeui- les linesses des chairs, elles produisent un excellent elle! pai' leur structure intelligente et leur intense vie. Linteipr-' tation ])icturale en est large, nette, IVanclie : Tensendile très sobre, car on n'entrevoit qu'une faible partie des cos- tumes, tous à dominante sombre. Ijinlérèt se concentre d'autant mieux sur les visages, et Ton doit s'en réjouii'.

lY

S(»N Aivr.

11 se peut que. |>armi les crayons de Clianlilly. il y ail d'autres tiMes de (llouet (|iie cidles des compagnons de l''rancois l"''. Certains portraits d aiiteui's inconiuis sont assez artistemeid tracés pcuii- (pi on les suppose du niaiti-e. Toutefois il faudi'ait (b's arguments jdus indiscutai)les pour ('lablir des conjectures en sa laveur. puis(pril eut. autour de lui. maints confrères caj)al)les de bien ('crire une pliN sionomie. Muant au rici/fard (\y\ Lou\ re. bnig- |(MUps (dass('', sans motil solide, au nombi'e de ses (cuvres, c'est un crayon très oi'dniaire oi'i rien iriiiili(pie le poi'traitiste de prennCr |dan.

11 se pourrait aussi (pie Jean lut I aiileiii' du p(»rlrai( |»r('siimt' de (Jaude d rrr(''. aujoiird liiii au roi i'jlouard \ II.

LES CLOU ET. 37

dr Vllenri d'AIhret (vers 1535), à M. G. de Montbrison, (If la Catherine de Médicis (1540) du musée de Versailles, de la Charlotte de France enfant, acquise par MM. Ag-new, de Londres, et île ce petit Daupiiin du musée d'Anvers dont on a longtemps honoré Corneille de Lyon. Mais il paraît douteux qu'il ait fait le François 1''' en Saint Jean-Bapfisfc de M. P. fïordoii Smitl».

L'iiypotliéti({ut' yWrfé se rapproche fort, par la facture, des deux Montniorenrij auxquels il serait postérieur: au contraire, le grand-père de Hciiii IN' et surtout l'épouse (le fleuri 11 s'en édoignent, ce (jui s'explicjiK' beaucoup par la différence d'âge et de complexion des portraiturés. Une jeune femme déjà gi-asse comme r('lait Catherine, en 154(1. ne pouvait être interprétt'c de la nuMue maiiit'ic (jii un vieillard desséché (l).Pourles deux «'niants (2). ilesl lorl dif- licile <i ('tal)lir wnr conjectur-e, siiiloul pour le Diuipliin dont nous ne connaissons menu? [)as sùremeni ridenlili'. Nous prt'senle-l-il les Irailsde François II qui natjuil en l."')ii ou ceux de h'rançois. [)reniier lils de François l" el de Claude

(1) [.(■ ]inrli;iit ci';! \ nriiii' d'iiin-rs li'i|U('l a l'It' l'ail Ir lalilcim ilc N'crsaillos li;;illi' ail iiiiisi'r t'iiii(l('' siius le liiiiii ili> .Miiii> il .\llil\r; Ir dessin iMl est toul juste sullisaMl, mais il livre liieii les signes earaeirTi>li(iiies de Catlieriiie. I.e piirtrail peint est inleiieiii' à celui d'Henri d Alliiel.

(2) Le porliail |)eiMl de la lillelle e>t expressif, l'il des--ili du niliséo Condl' ijui la i-eprôsonle au niènio à;j;e ni> ])ariul |ias ('die de Jean C.loiiet, ni- serait-ce cjiie i)ai'cc i\u(' la lèvre supérieure évoque par trop une laini! de couteau. On ne peut adiiielire ijue l'artiste capai)le. en l.'ilil. de li'acer les iii('daill(iii> de la (liicrfc '/(i/li(iiii' ail si pau\ iciik'II I dessiin'' une tête \ers 15154, date ap|ii(i\iniati\e de ce ciayiui de la piesunn-e Jeanne. I"ll si c'e.sL une copie d'un dessin du niaiire, elle laisse cerlaiiienieni iieaucniiii à di'sirer.

^8 LES CLOU ET.

(le France, (jui, nv on 151 S. (l('C('(la on 153G '? Si ce poil rail (lo garçonnet représento Fran^-ois 11, il n"osl ('vidoiiiimiil pas de Jean, mort avani la naissance de ce princo. Pour surcroît de difïicultos, ces images d'enfants ne sont pas de oclles à (|ai l'exécution tient lieu do signaturo ( I ).

Plusieurs arlislos do la proniièro moitié do noti-o \m' siècle ('■laient en état de l'i'alisor di' tfdlos peintures, et aussi los autres portraits exliilx's, on [\)()i, commo atti'il)ual)l<>s au maître, à l'exposition dos Primitifs franoais. l'orco pointi'os du temps do Jean usaioiil d'un miUior analogue au sien, ol leur personnalité no se manifestait poiid ])ar des signes li'î'S sensibles; à pi'i'senl, ils nous tVaj>penl surtout parleur ail' de famille. (•(»iiime leurs porlraiturt's jiar leur type d op()(|ue. f^os points de comparaison nous iiian(|uoiil pour discerner les nuances (|ui les dislinguaioiil ol ris(|uoi' des attrihulions on nous basant sur' la seule lecbni(|ue de leurs oeuvres. (Test aux scrutateurs daicliix-os. aux ('lu- dils de rbisloii'o de l'art, (|U il appai'lioni d aiillioiili(|iier los peintures dos inconnus.

Parmi celles-ci, plusieurs sont [loul-ètro bien du ïvvyr de Jean, col artiste doni on sait seulemeni (pi il lut aux g^ag'os de Marguerite d Angoulèmo. so-ur de hraïK-ois I'. el (|uo, pour celle raison, on noiiimo (Jouel de .Na\arre. .Mais coninieiil \ (■rilior sa fa cl lire ( pu. I rès probablemeiil . eiil lorce analogies iwvc celle de son illustre frère, ;i (piels signes vv-

(1) LiMili lie |„i lidi'ili' priisilil i{lli' .1. (llullcl ,l\;iil |Mirl |-,iilllli' le |irlil ilaui)liiii murl rn |.'i:!l) ri (|iic son lil> l''raiicins ;i\;iit Ciil, |Miiir j-'iaïu'ui^ l''\ lllir ic]|ii(' lie ceUe (l'iivrr.

LES CLOU ET. 39

connaître ses travaux? C'ost sans motif peromptoire (|u"on lui altribuc le Saint Gelais du Louvre, bon portrait aux tonalités un peu plus chargées en rouge que celles de Jean et de François, à la barbe lécliëe méticuleusement, aux détails très poussas. Le billet qui l'exhume ilc lOui)!! ne nous apprend rien sur son ait, rien sur sa psychologie. ses sentiments d'artiste. Le voici :

A monsieur le chancelier d'Alenron,

Monsieur le clianeelier, le Roy de Navarre et inoy avons délibéré prendre le peintre, frère de Jeannet, peintre du Roy, à notre service (1); et luy baille le dirt seigneur eent livres sur son estât et luoy cent. Et pour ce que nous avons nécessairement à faire de luy, pour quidipic chose que nous voulons faire, je vous prie incontinent le nous envoyer et qu'il soit icy lundy, pour le plus tard, et vous prie luy faire délivrer quelijue argent pour idiiiniciiccr, jiour luy donner couraige di' bien besongner.

Priant Dieu, monsieur le clianeelier. vous avoir en sa sainte gardr à Fontainebleau le XX'' jour de juillet.

Votre bonne maîtresse, MAnocEiirrE (2).

C'est beaucoup cl c'est peu. Attendons j)aliemuienl la d('Couverte d un nouveau documcni. L<'S archives nOiil pas li\'rt' lous h'iirs sccn-ls, b's lettres réserNcnt iiiaiiilcs surprises. Mais tant (|Lie nous n'aui'oiis pas une agnsdilc aubaine, abslcnoiis-uons de iv'b'rcr au uivsh-rirux iicmlrc d(! iVargu<Til(' de .Na\arre ce (|ui pourrait ajipaili'nir à (|uel(pi(' autre. A (|U(>i bon Nouloir loujom's a|ipli(pn'r un

|l) A r('lMii|lU' ni'i cr lidli'l lui iM-rit. t-'esl hiru Je;Ul, rapprliUls-le. qui élail |iiiuln' du roi. I''r.i urois avilit huit au plus IrtMZO ans.

{'2) Uelti' Icllri' ol dater de l.'iiVI : clic sr Irouvr dans le uiauil><ii| di' l!(''tliuni'. Mil. ;iucii'U S.'ilCi, loi. ;î.

^0 LES CLOUKT.

iKnn sous iiii livre? 1-ji (lr\ icul-illr iiiiill('ui-c ? Ouf les

t'spiils aflinés cessent donc i\r h i>( r -^ur les noms des au- li'Uis leur adinii'alion pour les reuvrcs: iir jias aimer ces dfi'iiirics jiour leurs tjualih'-s nn-iiies- c'est nv f)as eom- pri'ndii' I ai't.

Jean (.Iducl. iKius ui'ii saurioiiv .Imilcr. t'-lail trèscstiuit- de ses c-oiilriiiporaiii>. ;i rau.sf de la hclK' siucérilé de sa jiein- lure cl de sa pi'nétranliMnt('i-pr('fatioii des cai'acti'-rrs indivi- duels. Les eloii'es dunt (Hi I eii\ cloppa pendant sa \ h' et après sa moil ne provenaient pasd un eniiouement passager, mais de laililection (jue lepublic a toujours ressentie pour les jjor- trails ressemblants. A la \ ille connue à la cour, on le salua niaili'e pai'ce (jue les t \ pes écrits de sa main •'•taieni aduu- ralileinenl recdiniaissaldes. Les rares œuvres (|ue Ton a l'uil dniil de i-eiiarder t'ounne siennes sullisent ]miui- pitiu- \cr sa maîtrise et justilier sa l'eiKiiiiint'e. Leur >tiufture prorlanie que, s il s arrêtait volontiers aux minuties, il savait à lOccasion rnnfiiiui'f'r les formes avec ampleur: leurs tonalilt's t«'moii;niiil ([iie. s il axait la vision sobre et le goût des neutres, c était un harmoniste didicat et un l'jiris de cbairs lumineuses. Si la carnation des Montmo- reiKN |ir('-seiite un aspect saur»-, c est moins parce (jue c'est celle d un \ieillaril au teint terreux ipie jiarce (jue ses jaunes et ses bruns ont souH'erl de laclion des âges. .Mais. dans les i;ammes on dominent les oramrés cbaiiiels. dans le h iii ii<;i)is I \ comme dans les médaillons de la (iurrrr (jiilhqui'. les \isag«'s sont l'estes (daiis. Ceux des seigneurs, à peine altiMi-s. (diaiMueiit |iai- leur e\ipiise IVai( lieiir. leur

UXNCllIS (".l.olKT. MuiVMl. I>l \ Il lIlliiN |)l'>>ill

(Caliiiift lies l!slaiii|"'s.)

LES CLOU ET. 43

Iransparence; fait pni commun dans les miniatures, ils causent une impression d'atiuarelle. El ces chairs nuan- cées avec une suhtilitt' donl. seul, Fouquct avait donné des exemples (1), s'orchestrent à merveille avec les gris et les noirs linement comhinés dans les costumes. Celui (|ui a construit et \ ivilit' cesefhgics, et les dessins de Chan- tilly et les Montmoi'encv. celui-l<à mérite sans conteste le liti'e d artiste sup('i"i('ui'.

Jean Clouet appai'ail dCspril llamand par sa Iciidaiice à relever scrupuleusement les minuties.. 'i respccltr les sifines particuliers : mais, par sa manière à la l'ois lai'ge et dili- g'ente d'accuser les formes quand il dessiiiail sur j)apier ou de bâtir les plans d'une face (juand il jx'ignait, il se rat- tache à notre race. Je ne serais pas étonné si Ion décou- vrait un jour (|u il iiil de ces artisles ('tranj^ers dont la formation s'acheva chez nous (2).

11 V a toujours eu maintes alliiiih'S eiilre les lils de la France septenti'ioiiale et les nordiijues des l-'lamlres. de la Wallonnie el des pays rlnMians. Un peintre on un sculp- leur venant de ces ri-uions. sous Charles \'lll ou Louis XII. n'était pas dépaysé à Paris; en i:('ii('ral. il s"\ allinaiL el. s il e.xercail ensuile une inlltience elle/, nous, c ('lail pour noire plus grand bien. Les nord icpies. a\'e<' leur |U(''occu pal ion con- slanle de xi-rih', leur esj)iil d'ohserN aliiui louj(uns en é'\eil.

(I) Diiiis i|ii('li|iii's |)aysa^n's t\r> llciufs il l'.liriiiii' Clnxalici' imiixi'

('.(Il H II').

[•2] De liés iioniii' liciiri', force iii)i(lii|iii's \inrenl eompli'tei- leiii's l'-Unles irailistc aii|)i(''s île nos iiiailres; tels, au xn"" siècle, Jaciiues (loene «le Uriii^i's, llainci'lin ilc Mai:ih'iiau, l'ul ijr l.iiiiliniii^ cl ses IVt'res.

44 LES CLOU ET.

maintenaient nos artistes dans la saine inlt'ijirt'latioii des êtres et des choses. Nos sculpteurs du w" sirclc duii'iil beaucoup à Clans Sluter (|iii. kii-inème, dt'\ail liés pro- bablement quel(|ue ciiose à nos imagiers du \i\' : nos peintres des aimées 13(10 furent sans doute aussi rede\a- ])les les ouvraii'es manqueul. liidas ! ](0ui' s en i-ciidre compte à Beauneveu et à Jehan Bandolf. Icscjucds n'au- raient peut-être pas développé si bien leurs dons sans nos « paingneurs » de l'ère des g"randcs catbédrales. Fou({uet ne pei'dit rien de si's (|ualit('s etbni(jues pour avoii' eu un maître llauiaud, Jean Clouet n'aurait pu que gag'nei- aux conseils d^un continuateui- di' notre illustre Touran- g<^au. Il convient (jue. deteni|»s en temps, une race reçoive d'une autre race sœur, un afflux de sève, les élénu'nts d un renoLiNeau artisinpie. Le rôle des ajjp(jrts adventices est aussi nécessaire à r<'\olution iluii art (juà sa formation. Unt; grande loi d imiverselle fraternitc' se manifeste par ces «'chanires enli'e peujdes. en ih'qjit des bari'ières g('oi2'ra- phi(|ues ou p()nii(|nes. et il faut s'en f('liciler. Li's apports (pi mie i-ace accepte du dejioi's ne hn de\ lenneni funestes (pie si ses teiilali\t's pour se les assimiler sont illogi(jue- iiieiil dirigées.

FllA.NÇOIS Cl.orKl'. SA VIK.

l'^raniMiis Chiuel naipiil à Tours : et . si l'on iu nore encoi-e la date e\acle de sa naissance, au iiKiins iieul-on I iiidi-

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F K.\ N CO I s (1 1.0 U KT.

15 OH LUI m: I. A .Mviu.K, l)i ( m: lloi u.i.on (Dessin^.

(daliiiii'l (1rs l'Isl.iiiiiK'sJ

LES CLOU ET. 47

quer approxiniativeinent d'après cellf de sa mort, dont on est sûr. Ayant trépasse le 22 septembre lo72. il a venir au monde vers l.'iKi: car, en l'iiU. un uiaïuiscrit le prouve (1), il remplaça son père dans sa charge de peintre du roi. aux mêmes liages et prérogalix es : or. (|uoique fils d ini maiire bien en cour «'I lui-même s\ nipatlii(jue au monar(jue, eùl-il éh' iuNcsli de celle sorle duiu' telle l'onc- tion, s'il n'avait eu plus de vingt ans?

Formé par son j)ère doni il possédail toules les (|iialilt's, François s'aflii-ma ti'ès vile caractériste insigne; et lOu reporta sur lui toute l'estime dont on avait env(do|)pë Jean. La cour lui prodigua ses i'axcurs: les poètes, Koiisaid i ii tète, l'auréolèrent de louanges. Le roi Irouxail (|iir Ir jeune artiste marchait déjà très bien sur les (races de son regretté Janet et caressait l'espoir (piil le dépasserait: il le (b'clara nellenieni dans son acte de donation signalé' [)lus haut et lui octroya des letties de naturalisation. De l'iiO à l.")4(l, François resta le seul peintre du roi: il eut ensuite à ses côtés un artiste fort inti'ressant. (jiie ses portraits en émail classent painii les bons interprètes de phvsiono- mies : Léonard l^imosin.

Ou.iud mourut François I". en l.'iiT. ce l'ut noire Clouet (jui prit, h Rand)ouillel, rempreinle de la l'.ice du feu roi. Api'ès en avoir l'ail aussi mi estampage et ime ('tude dessi- iK'e, il alla coid'ect lonner le moulage à l*aris. et. connue le temps j)ressail, il passa plusieuis nuits a\ec ses auxiliaires

(I) l!ilili{iMii'i|Mr n.iliniialc. iiis. l'iaiirais. l'IioO. Dès l."»'»ll. Fi'anrcii.s Clourl

rcriil :il(i livres cniiimi' ^'ai;i's aiiiiui'ls.

iH LES CLOU ET.

pour iiiciicr il bien celle l)es()i;iie assez delicale. Il saisissait (le donner lilliision du cadavre royal au moyen dini inan- niMjuin coslunx' el d un Imste en ciic colorit'e. aïKjuel on a|i[di(juail. en se servaid de mastic, une cheNclure et une barlje postiches, (l'est ce que Ton a])[)elait une repr«'sen- talion funéraire. Notre artiste ('dalilit le l)uste en londe Ijosse a\('C de la (erre à potier, d'après son propre mou- lage, puis il en surveilla l'exécution en ciie. 11 moula el modela de même les mains dans deux poses diverses, les unes jointes pour ser\ ii- pendant l'exposition de l'effigie, les autres « clozes » de manière à tenir le scej)lre el la main de justice au cours des cérémonies i'unèbi'es. Quant à la carcasse d'osier que l'on devait recouvrir du costume royal et qu'il fallait, par consé(|uenl, jn-opoilionner comme le gisani, un ou\rier l'apjjréta sous la direction du jeune maître, (iclui-ci fut aussi chargé' de peindre les molifs d('- coralils des ohsèijues ainsi (|ue les llc'Ui's de lis des ban- nières et des enseignes destinées aux genlilsbonnnes, aux ar(diers de la gai'de ef aux Suisses. Ces traxaux reniraieni dans les altribulions des peintres de nos l'ois ( I ).

Henri II n'eut garde de se pri\cr des services d'un ai't iste tel «pie François Clouet, il le maintint dans ses préroga- tives et lui adjoig'nille peintre (luillaume Jîoulelou. liienh'it

(1) Ces peintres, coiiinir Imis iimix (|ui i';ii>;iiriil ii.nlic de l,i iiiaisun royale, portaient le deuil des nionan|ues déi'uiils. On Irm ildiuLiil ICldlle nécessaire. A la mort de François I'"", notre Clouet rcriit six auiie> et liciuie de drap nuira 4 livres l'aune. Ms. Cluirumbaull. ll'lf). fol. fiO. Diiix ans anii.ir.i \ .iiil . il a\ait l'Ii' cliarj^c di' la |miiii|m> t'inirlirc du |Mdil due d'( iili'ans.

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l'KANcnm (',i,((t'r.i. l'K \ m;o 1 Si: IIauiii m \.\ lîm kka i si i iir

Il \ M i: I»' 1"^ s I ni.ES (Dessin).

(daliiiii'l (li's l'",st;im|M's.)

LES CLOU ET. SI

apr<''s il manifesta combion il pi'isait l'cMiiinont protraitu- reur; en l.j:il. il le gralilia (runc charge de coininissaire au Chàtelet (1).

Le iiiaiire ii en continuait pas moins, selon la tradition, d'exécuter des travaux doi'dre dficoratif. Une quittance nous apprend (ju au di'hut de l'année 15o0 il avait peint les devises et les croissants laces du l'ol sur le coffre d'un chariot htvinslant t"abri(|ué par Francis(jue de Garpy, me- nuisier italien établi à Pai'is. Les comptes nous informent (ju'en juillet 1559 il organisa les obsècjues et les pompes funèbres de Henri 11, répétant pour ce roi ce qu'il avait fait pour son prédt-cesseur. A partir du règne de Fran- çois 11, sa situation devint magnilique; on ne se lassait |)oinf (b' sa manière (|ui, d'ailleurs, n-pondail à merveille au gont français el mil rival ne lui portait ombrage. C'est envelopjK' d "homu'ur et de gloire (|u"il rendit l'âme (2).

La veiHe de sa mort, le 21 se|(l<MMbre l."i72, il avait l'ail son leslamenl en ]»i'('seiice du rwvr Av Saint-Mei'ry, sa pa- roisse: il b'guait I2n0li\i-es ;i ses deux (illes naturelles, Diane <•! Lucrèce, el une renie de (iOO li\res surl'lK'tlel de \ille à sa Sd'ur t'allierme. ('pousc d Abel l''()id(iii. ('<(dle-ci

(Il l!ii)Ii(i(lir(|ti(' niiliiiii.ili', luiids français, ;>1:28, ji. .•)'.). (les cliai'irps venais élaicnl octroviMss coiniiir iccompi'uscs et se i'ev<'ii(laienl ; Fiani;ois céda la sienne à nii certain J. l'auimiei'.

(2) A une ('pociue encore inconnue il avait élc ai)|i(li' au conlrùlo j;(''iH'Mal (les clligies de la Monnaie. S'il iiCul jias la cliaif^e uiènie de conliùli'ur. il est ceilain ([u'il en reiii|iliL les fonctions, car on sait iju'il lui iiiaiide. le il dceeiidiic l."l(i'.l, il la V.imv des Monnaies, inmi' éruettro son avis sur la valeur d'un nou\eau iinimiin à relli;,'ie de (lliarles l\, que vi'uail de i,'i'a\er Claude île lléfv.

52 LES CLOU ET.

revendiqua la succession de son frèic et ohliiil les autres biens : une maison de i apjMiil. rue Saint-Avoye, celle HK'nie diuis laquidlc il mourut, et quelques arpents boisés dans la loi-rl d'Urlrans ( 1 ).

Le dernier compte relatif à Fj-ançois date de I.jTO; il nous fait savoir (|ue. raiiiK'e même on il ])ortraitura si splendidement Fnmyois de Coli^ny el si précieusement le C/mrh'y. /X destiné à l;i cour de Vienne, le maître peiiinil aussi des bannières.

VI

SES POUTRArrS TKINTS El' SES MIMATLHES.

Force portrails. peints et dessinés. ont éli' naguère ail ri- bués à Fran(;ois Clouet simplemeni jtarce (ju ils reprt'sen- laient avec beaucoup de soin des ])ersonnaiies du wi' siè- cle. En l'éalih'. il v a liieii une soixanlaine de dessins, au Cabinet des Eslamj)es, au Louxre el au imisée Coudé, donl loni pei-niel de le direlauleur; maison ne peut consid('rer comme si<'nnes (pie 1res peu de peinhires. Ce son! les por- I rails (■(|ile^ll•es de François l''' (IJffizi. j-'lorence) cl de lleiiii II (clie/ MM. Law ne. I^ondres). les pdrliails sur |)amieaii\ de l'"rancois de (luise (L()u^•re). de Charles l\

(1) La maison do François, dilc ilii rli,i]iili'an. piiyait un cons, on raison (lo sa silualion, à la coniniandriir du '!'i'ni|)lr. l'n ai-lr consorxi'' aux .Vroliivos nati(jnaii'S (S. 50Co) inuis a|i|iiL'nil i|u il la iinsMilail au nniiii^ (lo|)uis loTI.

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. Cl V i.r Kaik, sii:i 11 lu: I'ihuac ^Dossin)

^C;ibiurl lies EsUiinpos.)

LES GLOUET. 55

(iniisec (le Vienne ci Louvre), d'Elisabetli dAiili-ielie (Louvre): 1rs })orlrails en niinialine de Henri 11 (Cabiiiel des Estampes), de Caliieriue df» Médieis et de Charles IX (Trésor impérial de Vienne i et de Marie Stuai-t (eolleclion de Windsor).

Tous ces portraits de François valent par leur structure comme par ieni- r('alisation picturale, et chacun d'eux lixe avec rectitude des caractères moraux, une individualité.

François 1", sui- son portrait é([uestre, paraît trente ans enviion ; en vérité, il a <'lé exécuté aux dernières an- nées du roi, entre l'iil et l'ji.'j. C'est une liuuration stvli- sée el, pour la face, idéalisée en un âge dt,' pleine robus- tesse. Les galbes en sont d'un dessin quelque peu sec, et leui- facture précieuse ne les dt'r;ii(lit guère, mais ellea grand air et sa silhouette engendre un heureux etfet décoratif. L'harmonie des teintes enestfine, les rouges carminés s'('- panouissent agréablement sur la tunicjue du cavalier el h' ca|)araçon du destrier. A une épO(jue inconnue, cette œuvre passa dans la galerie de Mesmes, Gaignières la lil copieL'. coiiNaincii, comme son possesseur, (pu* François l'axai! |ieinle ( I ). Or, (laignièi'es a laissé le renom d un collec- lionneur très avei-ti. circonspect non moins (pie rairnu-. h>l-ce TdMivre ac(piise pai' de AFesmes (pii se trouve main- lenanl aux Uilizi ? On en [leul (h)uier. car c (-lail une l-ep|-('senlalion oflicielle el Ton en demanda plusieurs r(''pli- (pies au niallre. Les l'"lorenlins ne possèdeiil peiil-t'lre

(1) (li'llc copir se tiiiusc aiijnunriHii .m Ciiliiiirl dos i']stain|ics, (),i |(i, fui. li (lU'c'ucil GaigiiiéiTs).

56 LES rj;OUKT.

(|ii une r(''|»(''lili()ri, mais l'ieu iiCiiiprclic de la cioiic de François, j)uis(|ue 1rs ai'lisics les plus gi-aixls cllcctiiaiciil de tels doubles. 11 leur fallait Iréquernnient re[»roduir(' cer- taines effigies, les hauts personnages ayant, en mainte circonstance, besoin de plusieurs exemplaires de leur image. Le Louvre conserve encore une autre réj)li(jur. en miniature C(dle-là, du poi'trait equesti'e de Fi-an- çois L''; elle se recommande par assez de grâce et de soli- dité pour (|ue 1 on se sente entraîn*' à l'accorder au mailic. Assurément, elle dérive dun gentil miniaturiste.

Le portrait équestre de Henri H semble avoir l'I»' rid(|U('' sur le François l"" dont il vient d'èlic (juestion: il en a tout le caractère, les mêmes qualités et les mêmes d('l'auls. (iOnstruit d'après des docunuMils et brosse'" non sans crà- nerie, vers 1559, c'est une grande image sècbe el jjuIs- sante. Jodelle signale un Henri H représentt' à cbeAal. en triomphateur, par notre Clouet, sous une sorte de |)(ir- tique (1). On ne saurai! dii'e si le porlraii pai-Ncnii jusqu à nous i-t'jjèle cette peint ui'e. aujoui'd hui pei'due. ou l)ien un auti'e original. Ia\ joui cas, il porte nette- ment la inai(|ue de François [2].

Ce genre de [toriraiture, (lù la ri'-alil»' se niide à la con- venliou. ra|»pelle ces anti(|ues images de m(»nar(|ues t'gvp- lieus el assyi'iens <|ue Ton construisail d après un canon.

(Il .Indclli'. HeciU'il (/('.s- iitscfijiliolis, fii/iirrs cl indsqiKtriidvs ordoniircs en, r/iiilcl de ville de l'iiris, le jeudi 11 de jrrv'u-v l'i'i,s\ l'aris. Wci'krl, 1:jo8, in-4", fol. [V.i.

(2) On n'en jimil dire aulantdc l,i n'iilhiin' en iniiii^iliii c ilr ir llriiii II (juo conscrvu 1<; imiséu Coiiili'.

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LES CLOUET. 59

('/<'st le iiK^'iiic syslriiie porfcclioniK'. CJir/ nous coimne en UrieiiL on visait à rendre le portrait plus royal, à l'em- preindre d'une majesté propre à frapper h' vuliiaire.

Le petit portrait de François de Guise (l.'KiO?) appartint à Gaig-nières, qui le tenait pour unClouet; fions-nous d'au- tant mieux au sentiment de cet amateur compétent (jue re panneau attire l'attention par un caraetérisme expressif et une factuie assez vi\(; en certaines parties. Toutefois, dans l'œuvre d'un maître comme François, une telle peint ui'e compte pou, elle n';i izurre (|ui" la valeui' d'une ('lude.

Sur- le tableau de N'iennc, Gliarles IX se di'esse sous sa stature naturelle, et ce format a sans doute gènt! l'auteui'. Si le visage du prince parle, les autres formes sentent un tantinet le mannequin: n<''amnoins l'ensemble est roval. Les détails (\[\ costume sont, connue dans toutes les pein- tures de Fi'ançois. traduits à souliait. surtout le bandeau de j)ierreries, bon spi'cimen de notre orl'è\ rerie. l'orne- mentation de la ceintiu'e. les bi'oderies du juslaucor|)s et des rbingra\'es bouHanles. Pendant loimlemj)s. on a dati' ce tablejiii de I.')b3, son inscription a\ant soulferl(l): en \éril(''. il ;i (■!(■ f;iil \'ers la lin de |.")(»!). I àg'c (lu'accuse le l'oi, nt' en lo.'id, iicliè\ <• de le d('monli-er lors(|ue sc'dabo- rait le mariage de CJiarles l\ ;i\ec l^lisabetb d'Autriclie.

Le |»elil j)anne;iu du Loti\ re on [Mêle ce piince d.ins inie attil ude imalogue lui peint \ raisemblablenieni à la nii-nie épocjue cl par le maiire. car ItH-i'itiire un est artiste. Je le

(I) Cf. Aiiatdir (iriiyn-, ('/iiir!rs l\ ri rniiirois t'/ouci [lieviic i/,:s Ih'it.r Mondes, I. lAXII. p. iiSb).

r.O I.KS CLOU ET.

consi(l(''rei"ais |tliis \ oloiilicrs coiihim' uiir (''IikIc tirs poiis- S('e,avaiil servi à rexécution du iiiaiid lahlcau. (|iic coiiiiiic uiu' rt'j»li(juf. La iiiaiiirrr de li'aNaillci' de (lloucl autoi'ise celle coujeclure.

Envoyés à Vienne poui' ré\('ler à la lillc de Alaxiiiii- lien 11 les Irails de son l'iilui- ('j)on\ ( I ). «'es deux porliaits re\ ini-eiit h l'aris. avec lanl d aulres OHivres, à la simIc de la cainj)ai:;ii»' de Napob'on 1''' en Aulri(die. J']| l()rs(ju"eii 181ÎJ, les Alli(''S repi'iicul leur bien, les Auliifdnens se con- tenlèiful. heureusement poui' nous, du grand jtortrait. Le petit. (juoi(ju«' caressi' avec ini ])eu de préciositi". laisse inie bien meilleure impression. Tout y Iraliit un i^oTit par- lait. J^a jihvsionomie du roi. jj;('nlimenl ui(>d(dée. inspii'i; delà sym[)atlii(' ; ses mains cliarmeni par leur structure. Les noii's \(d()ut('s du justaucorps, les blancs jaunàlres soyeux des mau(dies et des rbini;'rav('s c(Mistilurnt . avec 1rs di\('rs oi Trois, une harmonie sobic et ri(di('.

Lf portrait dElisabelli d'Autriche, si justeuieut c('lèbre, lui (eu\r«'' suixanl loule apparence en 1571, ajtrès larriNi'e (1(^ la jcuuc rt'iuc ;i Paris. Le dessin en est si'ricux. 1 atti- tude lieiH'euse en sa siuiplicib'. Le visai^e. dont t(Mis les traits respirent la sér('iiil('', se coui'onne duue coillure en arr(dels (|ui le lad didicieusenienl \aloii'. Les mains, rt'U-

(1) Ccsl .suiiIi;mioiiI li' -~ iiuNciiilir.' l.'iTO, tii'iilf ilrii\ jdur.s aju-ùs smi mariage par procuration, à Spire, i|u lllisain'lli se rciicoiilra, pour la

|pit'iiiiore fois, avec son iny.il i'ikhix. i.ciilirx ni lien à Mé/iùrcs, dans

les .Ardenncs. Lp coniral <{ui 1 arcordail a Cliarlis 1\ avait été signé ipieiijiii'S mois aiii)ara\ant. le 1 1 jatuicr. (^ourniun'i' à Urims, le 2(> mars l-'iTI, la jciini' ri'ini' lil snn cnlu'i' solrnnrlli' a l'aii> lrni> jnurs plu^ l,ii(l.

LES CLOUET. 61

nies avec un abandon qui corrobore les indices de carac- tère livres par la physionomie, ('(juilibrenL l'orl bien Ten- senible. Les yeux, intelligents et bons, un peu voiles d'apathie et de mélancolie, le front pensif et épris d'idi'al élevé disent la \ie inl('iieur<' de cette princesse belle de solides vertus (1).

Les chairs, aux modelés suaves, sont lumineuses et dune rare unitt'; même du cùlt' de Tombi-e, les gris neu- tres conservent une transparence. Celte peinture suffirait pour pi'ouver que son auteur avait un sens très alfin(' des valeurs: les lonalitt'S des lèvres ont été post'es sans liaison apparente av«'C les tons voisins, et cependant la bouche ne présente aucune dureté. Le corsage bouillonné et la parure, les elfets de la soie, de l'or el de largent sont merveilleusement interprétt'S. La collerette goderonnée, vrai motif ornemeiihil cl douce symphonie en blanc, a é'té peinte avec amoui', cfda se dcxine, et connue par des mains de fée. Les perles, h\s pend(do(iues et les cai'cans dorfèvrei'ie jouent un ri'ile d('C(ual if dans la conlexture des lignes el lienneul inie partie dans rorchesl rai ion des lonalilt's. Ijc maître n Cxcellail pas senlcnienl à caresseï" la inalière. il sa\ail aniinei' les étoiles, les bijonv et jus- (inaux moindres riens. Tontes ses ressources de minia-

(I) Cf. sur KlisahcLli : iSraiilnini', I. IX cl llatloii. Mrinoires. CiMiiiiii- flic n'iMail pas vi'tiic à iioti'c (icrnii'ic iihhIc, ('(11111110 elle ('-tail ilc ix^litc lailli' et Ile |iiii'lail pas (II' paliii>, la ji'iiin' |inii('('ssc paru! i niiucctiti' o( sans lj(;aii(o à |)i('S([iH! tous les sci^iicms cl d inics ilc la ((lur-. Ils ii'i'ii poinaiciil (•(iiiii)i'('nilri' la ^'l'àce simple: k'iir cspril élail Inip (JcpraM'. leur j^di'il Irop ;;r(is>icl'

62 LES CLOU ET.

lurislf. L'I elles ('■hiieiil peu (•(»iiiiiiiiiies. il les a (l(''|tl()\ ('es dans ee porliail (IKIisabelli. Sulioidoiiiies à 1 ell'el d en seiiiMe. les divers di'lails el les dilliTeiils tons y concon- reiil à formel' une liarnionie lendre el juraN'e. 1res en rap- poi't avec Tespril de la pi'incesse. Ce pur eind'-d (eux re doit être regardé connue lun des jovaux de 1 ('cole liau- çaise (1).

Dans les miniatures de Fi'aïKjois. nous reIrouN ous. hien afîirmtM'S. ses (|ualit(''S de cousl ludeur de formes, d in- lerpi"('[e de plivsiononiies el d harmoniste de tons. Le portrait sur |»ai(diemin de Henri IL tri's travailli' on pourrait m("''me dire troj). tant les ])lans de la tète sont mt'ticuleusemenl mod(d(''s a la solidil(' d une peinture à riiuile. Quoi(|ue linenieiil gouacli(''. il cause une impres- sion de lourdeur, (le buste, aujoui'd'hui aux Estainjtes, illustrait ini li\re dlieures de Catherine de Médicis; au wu" si(''cle. on \\m détacdia et (laii:ni('-res en lil I ac- (|uisition. le sau\anl ainsi de loule uiau\aise aNcnt ui'c (2 ). Le roi. dont le xisaizc d(''C('de de la lalimu' ou de I ennui, parait (Mre eidre ti-ente-cin(| à (piaraule an>;. Sans doule ful-il peint peu a\aid sa mort il<» juillet l."»."»!h ou plus lard (I apr('s les proju'es ('Indes du maiire. Il ne semble |»as (pie notre artiste ait exécut(' d autres mimai ures pou r ces Meures, car. sauf les elli^ies de l'^rancois L'. de

(1) 1{. ilr (j.iif^iiirri'S |)Osséila ce poclr.iil. ijni iiinvii-iil de l'aiirii'iiiic collection ilii I^(juvre.

(2) Ce livi-(^ (j'iii'uces f.iit, partie aujoiinllmi ilr- collecliDiis .lu Lndvi-c. .\ In pl.ici' lie lli-mi II, (in a mis rellisicdu vii-'uiiilc de Maiti^'ues.

LES CLOU ET. 03

Louise <le Savoie et de Catherine dr Mt'dicis en lo72 (1). la j)luparl oui luie eonliguralion bien anodine el plusieurs, comme le Hcni'i III en l.'i^l. e( les Callierine en L'iHO el [."JH.'j, sont puslt'rieurcs ;i la niurl de Cloiiel. Si cr dernier avait été charge de peindre quelques-unes de ces tètes, dont celles de Charles IX ti (rÉlisaheth d'Auti-iche. (|ui rappellent mal ses fameux portraits, vraiment il aurait accompli sa besogne comme un pensum ennuyeux, avec d'incroyables nég-ligcnces.

La Catherine de Vienne a été laite selon toute vraisem- blance en 1571; car un registre des comptes de l'Epargne de l'année suivante nous appi-end (jue Clouet reçut le paie- ment de celle effigie au mois de mai ('2). La boîte d"or oii elle repose exhibe sur lune de ses faces extérieures le cliill're de Cliarles 1\ deux (- eidaci's (|ue sui'monte une couronne royale fei'niée el (|u Cnloure une couronne de fleurs et (le fi'iiits et sur l'autre sa de\ ise : deux co- lonnes a\ec la Pi«'l(' et la.luslice. lùdiii il coiilieiil un portrait du uK'ine pi'ince: el, connue celle miniature re- produit à la perfection I inie des Udes (|ue dessina fian- eois. il ne faut pas rranidre de la cron'e de ses manis. (|uoi(iue le document prt'Cih' m- la meiiliouue pas. {Jud penilre am'ail jiu \i\ilier une pli\ sionomie. d après une

(1) LnMis(! (le Savoie a (•citaiiieiiienl éfi'' laite d'api'ès lios (lociiinoiils. car il la iiKirt (le cette pi'iiieesse Ftaneois avait tout au plus i[uiii/e ans. l'.atliei'irie a le tyiii' ilune eoninierçante enricliie el opanouie.

\-2\ l{il)li(»tliè(iue nationale, nis. Clairanihaull, l'iK!, p.2".l'J2. C'est M. Maze- roile (pii lit cette inipni'tante déeduverle, (11'. Hcrue de l'arl c/irrih'ii. ISS'.i. t. VII. p. 41G41'J.

64 LES CLOUET.

rluilc (le Clouel, mieux que Clouet lui-niènie ? P()un|uoi se serail-oii avisé de lui enlever une mission qui lui reve- nait tout naturellement ?

Pour la même raison, considérons comme son œuvre la J/«7'/e-/S'^*/rtr^ de Windsor. Celle-ci ne reflète pas trait pour trait, elle évoque avec une analogie d'écriture très sen- siljle, un dessin de François. Entre ce dessin, qui date de 1.538, et la susdite miniature, il y a une indiscutable parenté. La tulure reine d Ecosse, vêtue d un rose réjouis- sant, qui s'accorde assez bien avec le fond outremer, est d'une exquise faclui'e: Charles IX et sa mère sont splendi- ilciucnl fouillés, ce qui ne rend pas la terrible et grasse royiti' plus sympatlii(pie. au contraire ( 1 1.

VII

SES DESSINS I)K 1, ANCIEN ALBUM FOI I.ON.

Maigri' leur xalcur, les peintures et les miniatures de Fi*an(;ois ne nous niaiiifestenl jtas. dans sa pli'nitude, sa puissance réalisatrice. Bien aulremml \ igdurcux. iinpres-

(1) Ces i)Oih<iils cl leur éciin iïu-enl cxôculés poiii- la reine irE.spafj:no Anne-Marie il'Autriciie. La iiioilc exigeait ces sortes de caileaiix entre princes. Les fréquentes relations qu'enlrelenaient, les ilcux hranches de la maison de llabshonrg exi)]ii|uenl ([lie ce liijuusoit niainlenanl à Vienne. Klant donnée la date de son exécution, il aurait contenir l'clligie d'iilisaljeth, épouse de Charles I.X, plutôt ([ue celle de Galhorine: mais celle-ci se considérait comme un \rai iiiiiii-lic des all'aires étrangères, lieut-clri' comme la vraie rciiie, et elle cnlcihliil (|uc sa hru restât (lan> une ilisei'éte pénombre.

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^\Lc/ui '^ 6(/i/ , cJhhkÔMxi\ uicjJ«

(l'.nl.iiiil Av< Iv-tampi's.)

LES CLOUET. 67

sionnants cl artistes apparaissent ses portraits crayonnés. Ce sont d'admiraljles interprétations, à la fois liardies et sévères. Aussi sûrement construits que les tètes peintes, ils expriment plus encore ; ils ont cette souplesse et cette acuité, ce quelque chose d'intime que Ion chercherait en vain dans la meilh^ure peinture. Travaillés sur le vit", ils nous mettent en contact direct avec des personnalités, ils nous livrent des physionomies au dernier point parlantes.

Les plus remanjuahles enrichissent le Gahinet des Es- tampes. Ils proviennent d'un album que possédait le neveu du maître, peintre comme lui. Benjamin Foulon, et qui (init par tomber entre les mains d'un c<'rtain Lecu- rieux, lequel, en 182o, vendit à la Bibliothècjue natioiuile ce trésor inestimable (ju'il n'était pas en état d'estimer. C'est M. Bouchot, le savant conservateur des Estampes, (jui reconnut tous les épi'is d'art lui en seront recon- naissants — (ju une bonne partie de ces dessins pouvait être très raisonnablement attribuée à François Clouel (I).

Les ol dessins de cet album ont au moins (Jcnx au- teurs très dislincls. on le constate d'un simple coup d"(eil. Vinci-deux poitrails de conleniporains de Heiuà IV suin- tent la banalitt' el l,i plupart floi\('nl t'Ire iniputt's à l-'ou- lon, car leur faclin'e se rattache à celle de l'un d'eux (|u il a sigillé' de son nom. Trois au |tlus lonl exception (2|.

fjcs effipies al I riliiiables à h'raneois sont celles île |>ei"

(I) llcmi |{uiiili((l. Les por/i'fii/s aux cidi/iins, |i. IS-fii!. {•2\ Si ci's ili'ssiiis III' SDiil pas lios copies, il taul les rri^Midci- cnniiiK- l'(iu\ i;iiii> il un iiii lie ili'iix iiiiiiiiiiii--. i|iii li'> auraii'iil cxr'culi's \oi's t.">;iO.

68 LES CLOUET.

snnnag'cs poi'trailiin's ciilrc l.'i.'iSct l'iTI. ("Jiosc nolahle, il csl impossible (juc 1 iiiif d elles soil post/'iieiire ;i l.')72. c est à-(Iire à la inorl du maiire. Pour contester (|tiClles soient son œuvre, il faudrait supposer (juelles reproilui- sent des originaux; or. sauf deux, toutes ont celte frai- (dieur d'exécution, ce charme particuliei- (|ui caractt'iisenl les dessins d'après nature. Comment Benjamin aurai! il eu. si ce n'est jiar son oncle, ces portraits de |)ers(iinies (juil iiaNail pu connaître? M. lioucliot présume donc (|ue François, n'ayant pas d'enfant ai'tisie, lit don à son ne\eu de ses albums d'r/t/rhs. C'était bien naturel. Benjamin embrassant la même carrièi'e (jue lui: on ne voit pas quelle meilleure hypothèse pouirait être ('cbafaudée.

Les dessins de François ont été travailb'S, comme l'Eli- sabeth du Louvre, avec un soin très intidlii^-ent. un rare souci de noter les valeurs et les di'gradations des modelés voire, dans «juebjues-uns, les minuties des costumes el des pai'ures parlant en \ ue de sCn sei'\ ir pour |teindre sur pamieau. Le maître a si bien trace'' ces ('Indes jjour ses propres besoins (pTil n'a mis sur aucune des b'uilles les noms des pori rail urt's il). (Jr ses coulrèi'es u oniel- laienl j;iuiais ce di'iiiil lors(|u"ils (b'sira ieni \t'udre des efligies craNonni'es. ce (pii s('\|(li(|ue du resie puis(|ue les amaleiH's aciiehiieiil surloul des noms. Doue les conjec- tures les j)lus j)lausibles indulsenl à regarder les nii'd-

(I ) G usi Benjamin l''(iiiliiii liii-ini'iur ipii ;i irril les Mniii~ cl le> iiumiMums (|iie l'<iii ieiiiar(|Ui' sur l.i |ilii|i;iil d'inlir ellev. I )ti ;i rciiiimu son éeiiUire.

lp:s clou?:t. 69

leurs dessins de raihum Foulon comme des œuvres de FraïKjois Clouet.

Ces dessins sonl au iioudjre de trente-eincj; les voici dans 1 ordre qu ils uccupaieiil jadis :

Jounc hoiume anonyiiio (1365?). Mme de Villeroy (.Magdclcinc de l'Aiihespine, femme de Nicolas de Neuville, seigneur do Villeroy et secrétaire d'Etat). Philippe Sfrozzi, sieur d'Épernay (1.567. date postérieure au dessin d'après .M. linmlioti. Madeleine Leclerc liu Ti'e'iMbiay, épouse de Sébastien Zamct, baron de Murât, surintendant de la maison de la reine. Claude II de l'Aubespine, baron de Cbàteauneuf. (llaudf Catherine de Clermont, duchesse de Retz (loTO). Henri-Robert de la Marck Bouillon. Léonore Breton, dame du Goguier {vers 1.509). Robert IV de la Marck. duc de Bouillon (1369). Jeanne Cliasteignier de a Rocheporay, dame d'^ Sehomberg. Albert de Gondi, duc de Retz (qui l'ut chargé, avec Neuville-Villeroy, par Charles IX, d'aller recevoir à Spire la rrine Elisabeth). Françoise Babou de la Bourdaisiére, dame d'Kstiées.

Guy du Faur, sieur de Pybrac, président au Parlement de Toulouse. Françoise d'Orléans-Rothelin, princesse de Condé. Louis Dubois, sieur dis Arpentis, maître de la garde-robe du roi. Denise de Neuville-Villeroy, dame Glausse de Fleury depuis 1308. François île Valois, duc d'Alençon (1339 ou 1360). Hélène ou Henriette de Tournon, comtesse de la Baume-Montrevel. Guy-Chabot, baron de Jarnac. Jeanne de Laval-Loné, dame de Scneterre, dame d'iinninur de la comtesse de Soissons. François de Coligny, sieur d'Andelot (1369).

Jeune femme vers 1303 (Kcnée de Rieux, d'après M. Bouchid). .M. de Morvilliers. Mme Liébaud. Louis de Bérenger, sieur du Gast (157l)i. Marguerite de Valois (portrait présumé de la lille dr Catherine de Médicis). Jean de la Burte ou de Barta. sieur d'.\iijac, ehancelirr (h' Navarre. Marcjuise de Lononcourt (Marguerite de Broyés. |iuis (l.iiiic de Rnhan, princesse de Giiéménée), femmr il'iiii i;riililliiiiiimc de la eliambri' sous ilcnii II. Jean de Léaumnnt, sieur (h- Puigaillard.

Philippe de Montesprdon (plus tard [iiineesse de la Roehe-siir-Vnui. Ji'annc d'.VIbret. Vincent de Goiizaguc dui- de Maubme. Mlle du V.d le Grand (personne inconnue qui pourrait être une certaine Flisabelh Diival. peintre portraitiste). Odel île Coligny, dit le cardinal de Chàtillon (1370). Isabeau de Hauteviile (même année), femme du pn''ci'd('iil (1).

(1) Mémi' si l'un n'avait rricuinu l'i» lilure de Fnulon. mi ne puuiiail atliibucr à François h's insiiiptions de ces dessins, à cause du lilndlr ilr

70 LES CLOUET.

Os dessins ont rlr disjoints: afin de les cnnscrvci' dans de meilleures conditions, on les a collés sur des carions et onles serre dans des boîtes. Connue ils on! v\r lra\aill«'s à la sanguine ou aux crayons de couleui-, cette précaution s'imposait (I ). Six seulement ont (|U(dques défectuosités, tous les autres sont expressifs et révèlent des àines. (Juel(iues-uns frappcnl dadmiration pai' leur coidexlure supérieure et leur belle vie. Tels ceux (|ui rt'prt'senient les deux Coligny, Isabelle de lJaule\ ille. les deux la Marclie. Jarnac, du Gast, des Arpentis. Gonzague, la inar(|uise de Lenoncourt. Puicaillard. Pibrac et Gondi.

La tête de François de Coligfiy, réalisée avec une magis- trale simplicih' de moyens, est une interprétation très syn- tliétique oi^i ne mancjue rien d'essentiel. Les modeb's en sont à la fois précis et enveloppeurs; les yeux, en impec- cable perspective, reflètent une flamme intérieure. OuanI aux jeux de cravon. ils donnent bien limpression de la chair et. sur les lèvres, ('lalenl de Unes dégradations <le teintes. Odet de (îolignv et son ('pouse Isabeau ollicnl des faces non moins parlantes, non moins largement traitées,

queliiucs-uncs. Cclli' ([ui se truuM' |iii's de la li'tc ilr ilu (!a>t imus apprend que Ci; iiersonnaf,'f lut tué par Ir liaioii de Viteaux : cille qui concerne .leanne dWlhrct signale cette piiieesse comnie niéir ili' (' Henri l''». Or François, ayant trépassé en 157i', n'a pu uictlrc de telles indications, il n'a ]iu davantaf^e écrire que Mme de N'illeroy unuirut en lij'JG, i'liilip|ie de Montesjiedon en l.'iTS, Mine de Senetei-re en tiilii; que Gonzague l'imusn, en l.").S4. Eléonur de Midicis, sniir de la reine et Jeanne Ghasteignior Gaspard de Schoiuberg en li)73.

(1) Ainsi braveront-ils mieux les siècles. Toutefois il convienilrait (|ue ceux qui se les font coniinuni(iuer les traitassent avec le l'espect du aux belles (euvros. On \nil par les souillures des carions qui emadrenl quel(|ues-uns de ces dessins que maints barbares les nnt \ilipeiides.

LES CLOU ET. 71

et'leur costume est traduit en quelques traits typiques à la Holbein.

Robert IV de lu Murck a des formes souples et fermes agréablement modelées au crayon marron-orangé (l). Des Arp<'ntis et Pibrac. au regard inoubliable, rayonnent une abondante vie intime. Gonzague, par l'esprit et la sûreté de son dessin, annonce Domini(jue Ingres. Les plans de son visage, les mèches de sa chevelure sont éta- blis avec autant de naturel que de savoir. Ses yeux gris clair à peine bleuis attirent par leur transparence et re- tiennent par leur éloquence. La physionomie intelligente et grave de la marquise de Lenoncourt est travaillée avec un tact exquis.

Plusieurs de ces tètes sont si merveilleusement teiiilt'es. avec un sentiment si juste des valeurs, qu'elles sembleîil des peintures à Ihuile ; ainsi celles de Jarnac, de du (lnsl. de Gondi, aux tonalités vigoureuses, celle de Piiigaillard. aux harmonies savantes, celle de Pibrac, dont les nmltiples nuances causent lilliision d'une chair palpable. D'autres, celles de Gonzague et de Mme de Lenoncourt, pr(''senteiil des ellets de pastel: en outre, la seconde eiicliaiile par sa gamme un tantinet l'aïK-e. La bai'be de l''ranr()is de Coligiiy s'avive dune leinle pr('cieuse de sépia oi'angt'e; celle d'Odet grisomie au moyen d'un ing('nieux assemblage de [Utils et de roux. |)armi les(juels opèicnl les blancs du

(1) M. Houchot iiiclino à voii- tiaiis ce poitrail uiio cupii' l'aile par Frani:ois d'aiin's im de sos proincs liossius ; s'il rii l'st ainsi, c'est imo cxcellcnti' copie.

"72 LES GL0U?:T.

suhjcdilc : celle de Jarnac, dont la l'acliire i'aj)|ielle les Pritiiitils. el celle de du (last soiil diiii (diàlaiii (dair 1res juste.

()ii j)eut ranger aussili')! a{)rès ces ceuvres. pour leurs qiialif(''s artistes, les jiori rails du jeune anonvnie. de Kenee de Rieux. de Jeanne d'Albret, de la présumée Marguerite de Valois, de François dAlencon, de Strozzi, de 3Inie de la Hourdaisière, de Mme de Retz. Les quatre premiers sont très délicatement modelés. Sur le visag^e de linconnu. le maître a traduit les demi-teintes ])ar des frottis de crayon noir et les clairs par de légères ti-aînées de sang-uine entre les(|uelles le papier exécute au mieux sa partie. Ainsi s"«'fFectue un mélange opti(jue (jui procure une sensation de chair suavement dégradée. Renée séduit par ses teintes hunineuses (1). Jeanne par sa physionomie vraiment nolde. que poétisent des tonalités fondues sous faction du temps. Marguerite se recommande par un nez et une houi lie dé- leclaMemenl ('ci'its. des (die\ eux fi'isotés dun rare intt-rèt ornemental: et tdle produit un curieux eti'et axcc son visage à peine teint»' ses lè\ res. (juoiipie rougies sans excès, mettent um- note intense. La galante Rourdaisière. à la face é'galemeni pâle, se distuigiie par sa houclie aunn- cie et ses iris per\eu(dies. Strozzi et Mme de l{el/. nionireni deux cas (h; physionomie nulle l'cndue |tres(|ue attaidianle |iar la [niissance I ransforniat nce dun ai'lisle. A\('c ses gros veux azur hidiiilh'. la seconde qui. parail il. ne iiian-

|l) |).:in> ir jKii'ti.iil , sur la |iliiiii(' ilc la lij([ur, li' niaitrc a iiulf des indications de couleurs.

/'

/■•■

fruiu o/.!

UAXiois Ci.orKT. I' Il \ N (Il I >; m: C.n i n. n v, sir.c n n A n i>ri c (Dessin -

(Cahiiicl ilrs i;>tam|)es.)

LES CLOUET. 75

quail pas (rcspiil, a un air vag-ueinont bovin, mais coinme on l'oublie à ne regarder que les jeux du rrayoïi : nuances légères du visag-e,. modelés presque vaporeux, détails du costume et du collier (Ij!

L'imag-e du petit François d'Alenron exprime bien les caractères de Tenfance, par la pose des mains comme parla délinéation des formes; et les yeux parlent à ravir.

C'est encore avec un art peu commun (jue le maîtr»' a ligure M. de la Burte, la princesse de Condé, anmsante sous sa toque à plume, la comtesse de Montrevel, au très seyant béguin de veuve, Mmes de Schomberg, de Villeroy et de Fleury, aux tètes diversement banales, même Pliilippe de Montespedon, au masque mafïlu de duègne du vieux ré- pertoire, et Mlle Duval, au type liouîmasse, au sourire éginétique.

Ml!

SKS Al l'UKS DESSINS.

Ijcs aiilres dessins ait nbiiabb'S ii Fraïujois C.loiiel pro vieinieut (le la l»il»li(»lliè(|iie Sainle-(iene\ iè\ c. ils repi'i'-- seiilenl :

Un anonyini' liomme (1555 ?K Un anonyiiio fciiiiiir en clKiiuToii cl colliTiMlc l'ii fraise (itl.). Marie Stuart (l"t:iS nu Vy.iiK seul jiorirail aullieiiliqiic de celle princesse). Marguerite de Valois (vers \lti\:i\.

(1) (yi'tail. avec Margueiite dr Valois, une ciHnicItt' irrésistildc iiin- Circé, ilire de son i'nl<iiira^;c. i'.llc a\.iil i'ihuim' en si'Cuiidi's noces l'avenlurier Alberl de Gondi.

■'G LES CLOUET.

La iiii'iiii' (lb(J0-l.")(i7). Cliarli's l.\ (l.'iG.'Il. Jucquelim- uu .JactiULttc di' l-(iii^r\w-Givry, comtesse de Bar-sur-Scinr, duchesse de Montpensier (vers l.'ili'.i). L'amiral Gaspanl de Coli^Miy (loTO). François de Valois, duc d'Alençon (liiTO). Hélène de Tournon, dame de Vassalicu, depuis darne de la Baume, comtesse de Montrevel (vers lo70). Ctiarlcs IX (l.">70 ou 1571). Elisabelh d'Autriche i1.p71. papier très abîmé). Françoise de Brezé, depuis coiidesse de Mauleviier, dame de Flourange rt dui hesse de Bouillon (V). Marie de Cléves, princesse de Condé.

Ces |(()rl i;iils se rtMM)iiiiiiaii(l('iit pur 1rs mciiics (juulités (le striK'Iui'o. d'oxpréssion et de \ ic (jiic leurs cniifitMièrcs <li' I ;mcit'ii ;illiuiii Foulon. Les plus iii,iL;islr:ii]\ son! ct'ytx (le Mar^LU'i'iic. lillcIU-, du Cliaflcs JX jeiiiic lioimiic vide Gaspard de Coligny.

T^a fiiliire i-cine Margot est une (l«'licicus(' inlci-|)rrtaiion (If l)a(di('l('lt('. aux modelés obtenus avec une adnnrahle siniplicil*'. à la cliair transformée en fleur diaphane par un Irollis caressanl. C.liarles IX captive lallenlion par son nuisque psycholog^iciueuieiil liuiiné, aux denii-leinles ('la- hlies avec UIU' heureuse \ii:iieur en noil" et sieiuie hnih'e. Li'S yeux. niei'Ncille de r(''alisation, soni in(|ui(''(anls connue crux de certains n(''vr()j)allies. la hoindie a (pi»d(|ue chose de niauxais. le nez j^rossier accuse de raiiluialih'. (Tesl d'aj)rès ce dessin, dune saisissanle hunianih'. (|u a ('-té- l'aile la nuniaiui'e du Tri'sor de \ ienne. Posh-rieui' de (piin/.e ou vingt mois aux ( Iharles j)einls pai' ( 'lonel en I ."di'.l. d nelnpie .pnd pr(dond (diauMcmen! s ('lail opeic en ce prince peiidani cel inler\alle ( 1 i.

Gaspard, exc(dlennnenl couslruil. connue ses deux

(I) Ce porhait l'st cului ipii sr huuNr <lans un l'Hcadrcrurid de hrislol bleu.

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Fk.vn(:ois (li.ouET. - Mvuniisi: m. L i; n o mo i ii i Doniii)

(Uahiiicl (l(.'s Mslaiiiiirs.)

LES GLOUET. ^^9

frères, est non moins signilicalif. Ses yeux gris d'acier, d'une extraordinaire acuilr, suffiraient pour le classer parmi les fortes œuvres. De savoureuses tonalités animent sa chair. Deux autres imasres du même Gaspard, fl voisines de la préct'deiile, pourraient bien èlre sorties des mains de notre François. La première, de petit format, semble un beau travail pi'('paratoire de miniaturiste; on y remarque une barbe subtilement fouillée et des colorations ingénieu- sement constituées sur les joues avec de la sanguine. Sur la seconde, la face seule a été travaillée, mais de la meilleure manière.

Charles IX en I.060, la blanche et rose Jacqueline de Long'wv, à lair plulùt l»onnasse, et Hélène de Tournon retiennent ensuite par le dessin de leurs jtbysionomies. Hélène a [)lus dintelligence et de dislin<-tiun ilans ce ])or(i-ait (|ue daiis c(dui de l'album Foulon. Marie Stuart, avec sa fraîcheur (elle avait alors seize ou dix-sept ans), ses prumdles dans le vag"ue, sa cbeNidure dûment cahi- mistrée, évoque assez bien une agnelle. Des modelés vaj)oreux en\(dt)ppenl son chiir et j>àle minois à jxdne loii<di('' |)ai' le craNon Ion de (diaiiM I ). l^lisabelb n a pas sa |dace pai'mi les (duds-d'anu re du maitic. mais ses traits n en sont pas nionis (do(pienls et ses umdeb's suaves. Le nez est très ('crit. la lè\ re inb'rieure a de bonnes dt'gi'a- dalions. ÎVIai'ie de (élèves exhibe des i'oi-nies molles; un

(1) Sans (louto ost-ii' \inuv faii'o valoir sa pàk'ur nalurfllc, pour se prrsontcr en uni' st-duisaulc liai'uionic d'aiialoitïut's, (|Ut'. coiilrairoiucnl ;i l'usaf^c (Ir tinUL' cour, elle adiijita If lilaiic poui' son cosluino ili^ niarit'i' ; la pit'iiiirir des rrini'S di' KrauL'c, elle prit cette iidlialivc

80 LES CLOUET.

gros nez achève de la vulgariser, <'l. dans sa lace blan- châtre, SCS h''Vï'es paraissent saigner. Tout, dans la j»ré- sumee dame dr Fleurange, tlénole une vie végétative.

11 y a encore, aux Estampes, trois effigies que lein\s (jualih'S e( leur sonune darl jiernicllciit dallrihuer à François : ceHe. très curieuse, d'Antoine de Bourbon. loi de Navarre (fo47), prestement enlevée en esquisse, celle de François 11 éphèbe, bien modelée, bien teintt'e, bim vivante, et c<dle dun Fdiai'les IX garçonnet silbouellé-e, d un tour almabl<\ dans un entourage ornemental.

Six dessins de l'ancien album Foulon ont des inqjeitec- tions. ai-je dit plus haut. I']n elfef. les porti'aits de lim- pressif lAubespine et de linsigniliant Morvilliers, ne sont pas partout d'une délint'ation très solide: les contours du second mancjuent même beaucoup de fermeté' du (•(')!(■ lunii- iHMix. Néanmoins on ne saïu'ait. j)our celte raison, les refuser à François, les maîtres ayant leurs moments de lassitude, de faiblesse et aussi de ni'gligences. L"el!igie de Mme de Senelerre nCst j)as non plus des mieux é'cnt«'S. elle atout I aspect dune coine làcliee: toulelois la boui'be et les veux ces dei'uiers bien lu lia ii'es sont signilicatils. (Juan! aux trois autres dessins, leur inlerioiité' ne se jieiit contester. L;i (hiiiie du Goguiei', grasse, bl.iiiclie et rose. expose des rondeurs lelleiiieiil eiillUX ciises ipie I ou se |»reiid il douter (iiiVlle soit de François. Mais celle personne é'i.iil si I ri\ ialeiiieiil adipeuse, ipie nul porirailisie sincère Il en efil lire iiieilleiii' |i,iiii. La daiiie Zaïiiel. blalaide a\ec du carmin aux pommelles comme une lv{r laiib'c. clnupie

^ p-.

l

Jcjrf i<K /• t .r//j/uyi/ J^^^.'ii. Juyfai/^if'^

|-UAM,..IS Cl.dlET. .h. \N l>E I.I.MMONI, S 1 K l K lU IM H, A 1 I. I Ml l.

(Dessin). (Caliiiici lies Estampes.)

6

LES CLOUET. 83

par ses sourcils filiformes, sa bouche misérable, son oreille plutôt indigente. Le maître dut être mal impressionné par cette tète froide, voire glaciale, aux lèvres égoïstes, et il resta certainement insensible devant l'inanité de Mme Liébaud, car celle-ci, tout le crie^ a été bâclée sans pitié. La bouche n'existe pas, les modelés sont poussés au noir du côté de l'ombre et l'indication du costume n'est pas précisément artiste.

Les costumes de quelques-uns des personnag'es précités intc'ressent par l'intellig'ente traduction de leurs minuties, ttds ceux de Renée de Rieux. à l'accorte collerette, et de Jeanne d Albret, ainsi (juc la partir supérieure de celui de Marguerite. Ceux des autres sont prestement configurés, certains, comme ceux d'Odet et de sa femme, en (jU(d(|ues traits essentiels et définitifs. Les chevelures de Gonzague et de Mme de Seneterre, la barbe d'Odet présentent de bons exemples d'interprétation syntlu''ti(|ue: les ciieveux et la bai'be de Gondi, de Puigaillard et (h' (Ui Gast des spécimens de représentation \alant par le naturel. La chevehnc et la coiM'tii'e de la marcjuise de LenoncourI constituent une nia- giiili(|iie coiitexlnre de dt''lails.

11 va sans dire (|ue les cai'actères indix iihiels des di\ers portraiturés dont il ;i ('•l('' ([uestion sont excellemnieiil iiia- tiifeslés.

On reconnaît en Krancois de Golignv un morose s'en- nuyaiil a\cc (ligiiit('', en Gas|»ard. le moins sinisti'e des trois frères, en (h'pil de ses Ncnx daigle. un (''iu'rg"i(|ue jns(|u'à la dureti', en Odet un opiniàti'e acariâtre, un fâcheux

84 LES CLOUET.

solennel. LN'pouse de ce dei'iiiei-. ;iii eoiilraire, n 1 air so- eial)le. Ses prunelles, seiuhlr luire un crf'pLiseuIr Meuis- sant, son nez et ses lèvres in(li(]ueul une cfrlaiiie honh'. Les yeux châtains de Marguerile laissent voir quelque ten- dresse et déjà force sensualité. Robeil de la Marck respire la fraiicliise el la niarlialit»'. La vulgai'ih' (riienri-Uoherl, au nez légèremcnl de lra\ers. est Iraduile sans euplié- niisnie:elle est nn^iie [)lut(M corroborée pai' son clia|)eau endenii-cloclie. DesArpentis reflète les qualih's d'un brave homme. L'épais Sti'ozzi, avec son l'ecai'd ('leint el ses (raits résolus, décèle un bizarre mélange de vigueur physique et dinhibilion morale. Les yeux dacier de Jarnac n'inspirent ni confiance, ni sympathie. Les yeux félins de du GasI ont inie lueur qui ne dit rien (jui vaille, son nez un lanliuel retroussé dénote une propension à la médisance, au men- songe, et tout, dans son masque,' accuse un espril capri- cieux, insidieux, malfaisant.

La mar(|uise de Tjeiioncourl l'ayonne une inlelligenle gravitt'. La princesse de Condé', au nez volui)lueu\'. offre un Ivpe cui'it'irx d"imaginali\'e scej)li(jU('. lMiilip|»e de .Mon- lespeddu. dame d liounrur de (lai lierinr. parait excessive- mcnl c()ii\ aiucuc de son nu|»(irlaiice. mais, malgi'c' ses pr('- Iciilioiis. ne diïpasse pas l'orgiK'il des pii'es enrichis. La peu allracli\<' ll('lèn(' de Tournon iiàlc paidc la riiiidiU' la pelile somme de dislmclion (|ii clic |)ossè(lc. j^c uoii'àlre Claude de rALd)es|tine a la uime d un ii'ascilile peu connnode. 1) l'Jisabel li. ('mane une 1res lirande douceur. Les lares (!(; d(''g('nér('' du CJiailes l\ de 1570. I an' quel(|ne

'UANTOIS Cl.OUIOT. M VHI.lKUl I I-, |. |; \ \lnls ^•.', J)fSsil|).

(Cabine! lir^^ Kslaiii|Ms. i

LES GLOUET. ^'

l,ou ingrat .lu d'Alenron de la iiu'nic .'po(iue sonl implaca- blement lix(-s. Et combien lisibles les expressions animales (lu piètre condottiere Gondi, de Mme de Retz et autres pauvres êtres de ce genre! Que d'utiles documents humains dans toutes ces œuvres ! En les examinant avec soin on arrive à découvrir dans la plupart d'entre elles jusqu^iux nuances du caractère. 11 y a. dans les meilleures de ces l.Mes. des éléments de psychologie très précieux pour les

historiens.

Souhaitons (jue celte merveilleuse .■ollection d.' dessins passe au Louvre, notre école du \m" sièch' est encore hisuffisamment représentée. Les raisons (jui motivèrent Ir passage aux Estampes de la collection dr Sainte-Geneviève „-élaienl guèiv (hscutables : le sont-elles davanta-e, celles qui Iniil .[.'■siivr la translation de ce trésor inestimable dans notre grand musée? Là, du moins, tous les amis dr I art pourraient le contempler.

IX

(«•Avnr.s or'oN i.n miiuiui:. oi vu.viiKs i'KUDls.

Au MuséT d.' Chanlillv l.'s i)orti-ails dcssint^s atliibua 1,1, -s à Traurois sonl à p< u piès une di/aine. Au-dessus .1,. l.Mis. il eonvi.'Ml dr placer .Tlui dr Marguerite de Valois, au costume a.iinirell.'. C/cst un uviv d.'-li-

n.'use tout exprim.' la j.M.nesse. Il seii dégage comme ,,n ravon de soleil daMil. Les uueux venus des autivs

88 LES GLOUET.

reproduisent Antoine de Bourbon, roi de Navarre (vers 1348), à la personnalih' lariienienl éci'ite. la niarfjuise de Nesie (?) et Henri d'All>r<'l.

x\u Louvre, il uy a guère (jue (|Uiili'e dessins dignes d'aug'menter cette liste. Ce sont des portraits de Icmmes, dont une seule jusqu'à ee jour a l'I)' reconnue : Anne de Beauvillier, dame Forgct du Fresne (vers i"J70). Sa l'ace disgracieuse un nez insolent 5^ domine une bouche exi- guë' — est celle diine assez fine mouche, au demeurant sans intelligence. L'une des jeunes femmes, que dislingue un escoffjon à voile, rappelle la Renée de Rieux de l'an- cien album Foulon ; mais il faut se (b'dier de ces sortes <le ressemblance, qui, souvent, sur les sujets au-dessous de quarante ans. ne liennent qu'à Yair dune ('iMMiiie. Ces diverses effigies, sans atteindre à la perfection, sont

diligemment cai-aclerisées.

Beaucoup de j)orlrails peints sont encore alli'il)U<'s à François Clouet sans raisons suffisantes, tels le llrtiri II en pied (\-ers l.'.'H) du Lou\re.le l'^raiirnis II {\vv<, l.'ioO) du Musée de Berlin, le pr('siiiiir Dkc ilWIcnvoii (l.'i(iO) à M. Kro-mei" (Paris), la pn-suiut'c Mari/iicrilf de I n/ais (vers l.'Kio) du .Musée Coudé'. La l'acliii-e de ces 011- vragfes n'est ])as si personiudle, leui' soiiiiiic dail si lorlc (ju \\ Il V ail hMiM'i'ilt'. en I absi-ncr de docuinenls ccrlanis. à les dire du niailrc Le Henri //.aux lourds uiodtdt'S, aux jaudx'S uial propoil lonm'es. scndde loii un lia\ail dcléxc ou d unilalciM'. Le l'iunirois II a loul I aspccl d unr coinr. Le l)nc il Aicnrun . exrellcule lii^uic jadis au cliriicau

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l'iiANt.ois Cl,..! i-.T. - OhiT 1.1, Col. n.NV ^Dessin).

iL'.aliinrl (lr> I'.sImiiiiu'S.)

LES CLOUET. 91

(l'Azay-l('-Ri(loaii, on la consi(l('rail comme d'Antonio Moro, pourrait bien v\io de Pierre Poui'bus. On sait, en effet, que ce caractériste sincère fit une remarquable por- traiture de ce prince; van Mander en a témoigné. La Jlarr/iirrife, qui provient de cbez Colnagbi (Londres), vaut par sa bonne structure. Mais si cette image met effective- ment sous nos yeux la future reine Margot, elle est idt'a- lisée ou plus exactement dépersonnalisée, car il s'en faul que son type individuel la rapproche des Marguerite des Estampes; elle en diffère môme par le dessin du front, du nez, delà bouche et des arcades sourcilières.

D'autre part, les Clouet ayant »'!(' 1res copiés, on ne saurait davantage rapporter à François l'effigie peinte de Mme de Retz qui se trouve dans la galerie Czartoryski. Quoi(|u'elle y porte le nom de Catherine de Médicis, le doute sur sa personnalité n'est pas possible. car rlb' i-élb-- cliit le dessin de l'ancien album Foulon. Et cet exemple, entre beaucoup, montre avec (|uelh' légèreté' on [iroct'dait naguère aux attributions.

Quelques cravons passent poui' des copies d'originaux du maîti'e; un des ]»lus acceptables est le l'rancois de la Rochefoucauld, sieur de Ra\('l. au Louxie. D'autres œuvres ont de Icdies (|ualit('s de coiitextuic et de peinture (|ue l'on ne doil [tas cranidre de les classer parnu les allii- buables à h'rancois. ('/est le cas du uiiiniscule portrait présumé de Jean d Albon. seigneui' de Saint-André (Louvre) el du buste de l'Vancois de Lorranie. duc de Guise ( LouNi'e). I^e premier, (|ui date de la lin >\vs annt'cs

92 LES CLOUET.

1340, si nous en croyons son costume, se recommande par une physionomie très \ i\aiil(' cl des chairs aux gris (léhcats : le second, par son liarmonie austère ainsi que par sa carnation (jui seml)le laite d'un seul ton et dont cependant existent tous les plans ne'cessaires (1).

On pouriail. à la rigueur, sans manquer de resix'cl ;i la mémoire du maître, reconnaître sa manière dans ([uaiie ])0ilraits peints du Musée Conde : celui d'Alhert de Gondi tentre looH et 1562), ceux, hien secs, de Jeanne et d'Henri d"Alhi-el et celui dun g'entilhomme de la cour de Charles IX. On a vu plus haut que les tètes des deux pre- miers ont été crayonnées par François (Estampes), il est donc fort prohahle ([u'elles furent peintes. Mais il ne s'ensuit pas (jue les panneaux de Chantilly soii'ul des originaux de notre artiste, et parce que ses œuvres ont ('h- heaucoup reproduites, et parce (jue les personnages dont ils divulguent l'image se firent certainement porli-aire par phis d'un peintre. Quant au g'eniilhomnie. il jdait par son exécution prime-sautière.

Parmi les miniatures, (|uel(jues érudits ont ci'u dis cerner iCmpreitde de François, il en est une tout ii l'ail dig-ne dattention. Elle décoi'e les Heures de Henri il r\ rrpr(''seutc ce priiu'e au milieu des scrol'uleux de Saint- Denis i^l).

(1) A point: 11' liiii (If chaii- csl-il irli;nissr> di' roux aux pdiiiiiicllos, et, comme le Ion dos (Iciiii-loinlcs, il est ingi'nieuscmcnt ilof^radc

(2) Biblioliioquc nationale, fonds latin, n" 14:2!). .\ on ju-cf jiar- les costumes, la scène des écrouelles a ilù l'Ire exéculoe vers le niilii-u (lu siècle.

LES CLOUET. 93

Composée comme par un caractériste préoceupé avant tout d'expressions, c'est-à-dire sans recherche de contex- lure belk'ment ('quilibrée, cette scène constitue néanmoins un ensemble satisfaisant. Presque au milieu, le roi, assez décoratif en son costume outremer et rouge carminé, touche un iiommc agenouillé devant lui; à g-auclie, de pauvres gens sont rangés. L'architecture est indiquée avec soin et, chose plus remarquable, il y a une atmosphère dans le monument. Les tonalités, oij dominent les gris, forment une harmonie sobre et tine. Le manteau violet et la tunique marron jauni du pauvre que touche Henri n'attristent pas le regard: la robe carminée du cardinal de Guise, qui se lient à droite, le vêtement noir d'un sei- gneur, son voisin, ne détonnent point. Les nuances légè- res delà partie supérieure (b' bi basilitjue, les rellels rosés du surplis du prébd témoignent dune sublib' vision de peinde. Les tètes des divers personnages vivent normale- ment, mais quelques j)ieds clio(|uent par leur petitesse, et le susdit seigneur est du ne longueur démesurée. J'ai peine à croire (pie h'rancois ail conunis de telles dispropor- tions. (|uoi(|ue, je b' lépèle. un maître se laisse allei' pai'- l'ois à (l"inconci'\ ailles lu-gligences. l'^ri loul ras. on ne |)eul. en se basani exclusivement sur l'étude de celte page, l'allribuer au uiaitre. Nous n(> comiaissons ses (pia- lités fie uiinialurisle (|ue yixv des |iorli-ails. les poiuls de comparaison iu)us maïuiuenl donc pour di-couxiir sa main dans une coiiqiosilioii. liornons-nous à constater (jue celle scèue des écrouelles l'emporte sur celles (|ui

94 LES CLOUET.

rontourciit, non si'ult'iiienl j)ar sa l'aclui'e. mais aussi par son cncadreinent ornemental d'un si joli lour Uciuiis- sance.

Peut-être découvrira-t-on demain, en cxploi-ant des ai'- ehives, que tel ou hd portrait dr musée esl un Franrois Clouet, mais on ne retrouvera jamais sans doute certaines j)eintures (jue Ion sait avoir rlr réalisc-es par le maîtic et qui, depuis longtemps, ont dispai'u : le j)orlrai( de Léonor d'Orléans, duc de Lonj^ueville.à vingl-cincj ans, et une série de tableaux à sujets divers ayant tiait à l'histoire de Henri II et de Catherine de Médicis. Le Léonor (["Or- léans ('fait regardé par Gaignières, qui le posséda, connue un authcnti(|ue François, et l'on jM'ut se lier à cet ama- teur soucieux de l'oi'igine des œuvres qu'il acqu(''rail. L'imag^e du jeune duc nous est à moitié n'vt'dée par une copie, hélas vulgaire, du dessin original dont se ser\ it le maître pour exécuter le portrait; on la conserve aux Estampes (1).

Quant à la Sf-rie de peinlm-cs. nous la connaissons par Y Inventaire (/rnêral des lablcau,v du liot/ (juc lit. en 1709 et 1710, le sieui' Bailly, « garde desdits tableaux ».

Ces tableaux mesuraient IT) pieds de haut sur 7 \\ !• de larg'e. On ignore ce (ju ils sont deNcnus: L. de Laborde supposait (jue Mar'ie de Mé'dicis se les ('lail a|)pr()pri('s el les avait lait placer an Lu\end)Ourg". On ne saurai! tro]» regretter la dispanlion de ees (euvres: bien \('iuies on

(1) lierueil de Uaii/iiièrr.s, (l,i 17. loi. :i3.

LES GLOUET. 95

nianquées, elles achèveraient de nous renseigner tort utilement sur les dons et le savoir du maître.

D'après L. de Laborde, il faudrait aussi reg^arder eonune perdue une autre peinture de notre artiste : reffigie du petit duc d'Orléans décédé en lo4y. Enfin plusieurs ont attribué à François un portrait du jurisconsulte René Choppin en 1570, dont une gravure de J.-Cli. Flipart serait la reproduction. Cette estampe étant d'un métier très qutd- conque, on n'en peut faire état.

Quelques miniatures du maître ont également disparu, elles portraituraient Catherine, Giiarles IX, le duc d'Alen- çon, le futur Henri III et Marguerite de Valois. Oll'ertes en cadeau, vers la lin des années looO, à Elisabeth, reine d'Espagne (1), peut-être ont-elles échappé à la destruc- tion. C'est suî'tout chez nous (jue les œuvres des Clouet tombèrent entre des mains barbares. Nojnbre de leurs peintures ont jx'rir ou échouer chez des brocanteurs au moment de la tourmente révolutionnaire.

X

I.KS l'KlMUKS 1)1 \\f SIKCLK

Un riipi<le coup (['(ril siii' les peintres cont('ni|i( iraiiis de

François acIièNciM de mcltre m lumière sa \aleiii' et sa

personnalil('. Il y a pt'iiuiie de renseigriemeiils sur nos

artistes du wi' siècle, toutefois les documeiils rtdatifs aii\

[l] Négocialions sous I^'i-ainois II, DocuiulmiIs iiu'(li(.s. p. SliT.

96 LES CLOUET.

mis cl les ci'uvrt'S (lu (|U('l(jiics aiilrcs nous jx-i'iiicllciil dr coiislater qu ils rtaieni en assez grand iioiiihre et (|ue heau- (■oii|) pnss('(laienl du laleiil.

Guillaume Jioultdou (né h lilois au commencoinenl du siè(de). axaiil dClre iiounM(' peintre du roi, avail elt-, dès l.'))^!), celui du daupiiin Franeois d'Ang-oulème. Son seul dessin connu, le jtorirail du fou Thonyn (Musée Condé), quoi(jue un peu fVèle. ne manque pas diiili'i'èl. 11 date de l.'»(i(l: vingt-trois ans plus lard, Boulidoii \i\ail encore et lra\ aillait pour (lallicriiic de AL'dicis. Il a\ail. à ses débuts, peint quelques-uns des stucs de h'onlaine- i)]eau: mais s"('lant sjx'cialisé très lot dans la poi-lrailure, il ne ressenlil point linlluence du Primatice (1).

.Moins heureux, Jean Cousin (n('. lui aussi, dans les premières anné'cs loOO, Soucy, près de Sens), l»a\a Iri- l)ul il ritalianisme. du moins danS'Ses compositions ; son J/fi/c//i>'/i/ (Icfiiicr du Louvre et ses scènes gravées en fournissent la jiieuve. Mais deux poriraits, (|ue loul autorise à croire de sa main, se recommandent |»ar des qualih's hieii françaises el \alenL le prcniier surloul. par leur jxiissance expressive ; ils repr(''seiileiil sa tille Marie el son heau-frère ,1. Bouvyer (collection V. Houvyi'i-). Sans doiile <inl-ils ('lé' i-('alis('s vers le mdieu du siècle, alors (pie leuraiileiir se lrou\ail dans la |(l(''nilude de ses lorces.

L(''oiiard Li sin (Limoges, nci's I .■»().")- 1 ')77 ) n"(''lail pas

(1) On sait enfin, par un coniplc. iiu'il oxécuta. en l.'ioli, divorsos puinlurcs néccssaiios à la IragéditJ (]ue l;i reine fil jouer à lilois celle nn^nie anniîc.

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u\M.(M> (:i...ii;ï. -IsMir.u- i. r. Il m tk\ 1 1 i k Dessin^.

(Cahiiirl (les Kstiuii|ics. |

LES CLOUEÏ. 99

seulement einailleur, il peignait aussi sur panneau et gra- vait sur cuivre. On a vu qu'il fut nommé valet de chambre (lu roi en 1548 : c'est surtout à partir de ce moment (|ii"il exécuta, croit-on, ces portraits à l'émail aux(jiit'ls il doit sa grande rt-puLation. Quelques-uns tort peu ont t'ti' réalisés d'après ses propres dessins; de ce nombre, le su- perbe Montmorency du Louvre, dont le crayon trrs artiste enrichit le musée Dubouché à Limoges. Quant à runi(|ue tableau (jui nous le révèle comme peintre, /.' Incrédulité de saint Thomas ( 1551, Limoges), il prouve que cr maître es arts du feu n'était pas doué pour arranger des figures et accorder des tons.

Nicolas Denisot (1515-1559), esprit très cultivé, ne se consacra pas entièrement à l'ai't et sans doute produisil-il en x\ngleterre, il passa de longues années, autant (ju en France. On ne connaît de lui (|u'un portrait, encore est-ce par une gravure sur bois : il nous fait conteinpiei- Mar- guerite de Valois, i-eine de Navarre, en son dt''(din. Le xvlograpiie a traduit avec une heureuse sollicitude celle fine interprétation, (jui [)are ini li\i'e exécuté par liois élèves du peintre, les sœurs Seymour (1).

Geolfrov Dumonstier. (|ue I italianisme a\ail alleinl. S('vil il h'onlainebleau de |.").'n à L'iiU ['1\. De ses li'ois lils. égalemeiil peintres, 1 aîné, liitienne (1 5:20-1 (iO.'iK fut \alel

(l) /.(■ Totnbean i/r Miif'/iifritc. l'aris. Miclirl Fezandal ri HnltiMl Gaulon, 15."):). iii-S. IJiliJiolli. iiat'", imprimés Y. laiiG. résurvo.

("2) Il n'csl (lue le sccdiid de la dynastie des numonslier, le ciii'l' en (•>t Éliciiiie h'", dont on sait ijeuleineiil iiu'il participa auv travaux do Gaillon en 1501.

100 LES CLOUET.

lie cliaiiildc îles (jiialif (Imiicrs N'alois cl ilc llciiri IV. cl (-(tsiiic. le cadcl. cul une cliarprc ii|ciili(|uc aiipics de (ialiierine. ('csl de lui (jue ua(|uil Daniel, en l."»7i : de la dvnasiic des Dunionsliei'. il dcxail dcscnir le |ilu.s ccIMji'c mais non le |)lus artiste, ('.eux de ses dessins (|ui nous sont paiNcnus ne dt'pussciit pas 1 lionnelc traduction.

Antdine Caroii (IJcauvais. vers l.)2 i- I .'>'.lll i lui île ceux i|iii s'italianiscicnl couijilèlcnicnl, aussi l»(''n(''licia-l-il des lionnes gi'àcos de Callicrine. Pendant les ainu-cs l')")î) cl l'ilîd. il proct'da au « laliVcidiisscnienl » de ((uel(|ues pein- fures à Fontainebleau, |)uis coinniil. sous le liiie A //is- loirc (lA rl/i'-inisr. une suite de 1 rcnlc-neulCoinpdsilions à la séj)ia. tlit'àlralcs cl rénuniscenles, en I liomieur de lailile reine itlahiiiet des Estampes^. Ku outre, il a c('d<'I)rt' des Irioinplies dans une autre st-ric de dessins.

Coi'iiélis de la Haye, coinniuiK'iuent app(d('- ('orncillc r|c Lv'on, s'était t'talili die/, nous d assez lionne heure. Les ar(dn\('s Iviinnaiscs nous ont apjiris (juc le daupliin lavait (diniiic peintre en l'iiH et que. onze ans plus lard, il lut iKMunie peintre en tille de Ijeliri II. Lcs dons (jii il tenait (le sa race ne i'is(|uaieiit pas de s'allci'cr dans le tcri'oir lui^iluiiieii I intcrprelalioii smccrc cl um'I iculeu>c des l'orines a toujours ('■!(• en honneur: mais avant ncj^ligc le dessin pour la |icinlure. il narrixa |ias ;i une hidlc puis- sance d ex|iressi(iii. Ses poi'trails aut lient i(|ucs, ceux du (laujihin |- lançois d Aiii:tiuh~'UU', vers l.'iiiili (uuisée ("midé), de MarilUerite. dlliliesssc de SaXdic liil.). de .lac(|U«diue. mar(|uise de Kdtlndin iimuscc de \ ci'sailles i. de Louis de

LES CLOUET. loi

Montponsici' ( i(l. I. d'un jj-snido-diic de Aloiitpriisiri'. (|iii dalc de la lin des aniit'es loiO (iiiiisi'c (".oml(''), intéressent par leur vie et leurs souplesjeux de pàfe ; tous pèchent par leur structui-e ( 1 ). De in(Mne les nieilirurs des portraits (|ui lui sord raisonnablement alliiliiiés: celui, prt'sunit'. de la niai(|nise de I{ollielin. Ncrs lo48 [Il M. Avnard, Lxoni. celui de la duchesse de Savoie (inusée de Versailles).

Le Jilésois Jean de Court axait eu jiour premier maître Léonard Limosin. Après avoir remplacé son père Jacques, en l.")72. comme [leiiilre allacli('' aux t-cuiàes, il succt'da deux ans plus tard, à noire |-"ian(;ois dans sa (diaru'e de peintre (lu roi (2). En I.jTI. il axail [loilraituiM' le l'utui- Henri III.

Fi'an(;ois Quesnel. en l'iii. Kdindiouri:. dun [)ère (pii desceiidail d une \ ieille laniillc écossaise, lui idext' en hrance el s \ li\a. ()n lieiil poiii- li'ès plausible (pi \\ a rt'-a- lis(' 1 exjiressd porirail [lemi d inconnu de 1 ancieime col- lection Antonin Proiisl el diverses elii^ies cravomu-es. doiil plusieiu's aii'n'ahleiiieiil l'crites. celles de l*'ran{;ois. duc d Aleiicoii. Ncrs I'mSI). de Keiiaud de IJeaune. l'iNî*. de Galuiidle d'i^slrees \ crs l.'lîlO (l'estampes) et de (îeorges lialioii. coiiile de Sai2'oinie ([^ouNi'e) {'.\]. (Vt'tail un (-lève.

(I) (lis iKirliaits liiLMil |i;irlic' <lr i,i coili'cliDU t\r Gaignioros. ils (iiiuiaii'iil ((iiiiiiu' t\iis iiMivies aiinii'Mlii|iics tic CitriU'ille.

[d) VA alors son liis Charles jwil sa place aux écuries.

(3) lin outre, on lui alliiliue li-s carions dos tapisseries consacrées aux Fètos tic liriii i III. coniposilions allrayanles, plus liarnionicuscs ciuunie accoi-ils lie lini.ililes beaucoup soni déleclaMes que comme arraiifie- meiils lie lignes (muséi> (\(i:i tapisseries de Florence).

102 LES CLOU ET.

un (lisriplf mrnuMle François (îloïK'l. Do sos flonx fivrcs. Nicolas, adomu' au blason on même l('m|)s (ju'au poilrail, et Jacques, spécialisé dans Tliistoire, il ne reste rien, croit-on. Rien non plus de leur père, Piei-n- Quf'snrI. Au moins sait-on quil avail composé, pour It-glise des Grands Augustins de Paris, un carton de verrière représentant une Ascension où, près des personnages traditioinicls. se voyaient Henri II et son ('pouse.

Au milieu des ann^'es l.'idO, on trouve encore Etienne Martelange, auquel on donne la Bianca Capello de Ver- sailles; Jean de Gourmont, banal metteur on scène: Sci- pion Bruisbal, témoin au testament (b; François Clouol ; b' Lorrain Pierre Woériol. (jui séjourna longtemps en Italie et finit pai' s'installer à Lyon. Puis c'est, dans le dernier quart du siècle : les peintres aux gages de Catborine, gens de métier plus ou moins avariés par l'italianisme, Jacques Patin, dont il subsiste dimbgontes g-ravui'os relatant les phases du ballet de Circé représenté, en Kj81, aux noces (TA. de Joyeuse ; Pierre Gourdello, gcnilro de Caron. Keni'' Tiborg'eau, Pvramus Lucas, Gontien lîourdonnais. Nico- las Leblond. Los italianisarits (b''g('iu'it's, Toussaint Dii- bi'euil (!')() I ?-l(i(l2) sc(Miarisle adliizcinl : Jacob liunel (l.'i.'iH-lGli), (|ui s ellorça ilu moins d"(Mre un [lortiailisle sincère ; Martin Fi-c-minot (I;)(j7-101î)), aux groupenienis empliali(jues : Henri Guigne ou Guigonis, bien nul si tous ses ouvi'ag'os rossenddaieni aux Adorai ions de .M. <le Lainollie lAxignoni. 1^1 les aull'es decadeiils. Ueiijamin F<julon. (jui ligui'a dans les l'Ials di- la maison du

L?:S GLOUET. 103

roi (lès lo77 cl <I('viii( en 1609 valet de cliambre de Henri IV, Antoine de Recouvrance, que compromet une médiocre PrMication de saint PauJ (h M. Scordel, Cliau- mont), Lagneau ou Lanneau, dont trop de crayons ont écliappé à la ruine !

X côté de ces peintres aux noms sauvtLs de 1 oubli, que d'autres artistes dont on comiaît (jue certaines œuvres! Assurément on peut admettre que quelques-uns des por- traitistes précités ont fait les effigies si l)ien caractérisées de Claude de France, duchesse de Lorraine, aujourd'hui à Munich, (Ui vieillard que conserve M. Thiéhault-Sisson, <lu seigneur anonyme (jue possède M. Aynard ; et aussi l'es- timable Henri il en pied des LIfïizi, les ti'ès bonnèles Charles IX éphèbe, de Windsor, el Cossf'-Biissac (?) de la National Gallery, les non moins bons Heini II. Fran- çois il et Fran(;ois lil de La Rocbetoucanld du Kuiisl/iis- forisr/zt' /fof'//nfs/'i//// Ac Vienne, les lypitjues archiducs Philippe et Marguerite (rAutri(die de MM. Agnew, le curieux Ronsard du Mus('e de lilois. maints poilinils du Lonxre. de Versailles et de Chantilly.

Mais Idul |M)rle à xoir d antres |)ei"Sonnalil('s dans les auteurs de /a l /n-t/c l'iilrc (/cit.r (londlcu rs iLonxrei el de lexcidlenl M(inatj<> nii/slitiiif \\ M. \(Mi Kautniami (liei'liu) altribuc'S sans raison ;i Perrt'al. de \ Aii</r ittirhiiil (I Alnuthitin (\\ la comlesse Durrieui. du Cul rniri' expi'es- sit" mais un p(Mi conN cnlioiUKd Mlle .Nitdi. delà femme alh'gorisanl la l*ai\ (nuisc-e d "Amiens) aux Ions de |»(M-ce- laine.de la haine à sa htilclh'. aimable nn i à M. Ilaxanli.

loi LES CLOU ET.

(le la Diane aux Irois suivantes (iiius(M' "le Rouen), ilaliancrie assez hieii arrangt'e. de la Danse du mai/ el de kl (loupe M. Tlu'venin), 1 un (h'iuèle une cerlaiue recherche de sincei'itr.

Et si (h'jà h^s arlisles altondaient à Paris, on en cornp- lail (les h'gions encore dans maintes villes du loyaunie. (juehjues juovinces conservaient leui's ('coies, cl (|ue ih' lahleaux en sortirent!

A Lvon, foyer d'art intense depuis au uioius Charles YIU, les interprètes de la ligure se distinguai»'!)! dans Ions les genres. Malheureusement, il n'existe plus (jue très ])eu de peintures de I (''pixjue des deruiei's \alois: la meilleui'e est une sigiulicalive sainte (lalJierine, exécutée en Kj()7 ]iar Claude Tiuinel et travailh'c counue un poi*li"ail (uuisée de Lyonj.

Plus nomhreux soni les ouvrages hourguiguons. et jjresque tous se recommandeni par la \ie rohusie de leurs ligures; telles la Vicrt/e-nn'-n' au danaleur de .\.-l). de Dijon (has eôh' sud), la Messe de saini drét/aire (vers 1520) aux t\pes trac»\s dureuieiil mais ex|ti'essi\ eiiieiil (au due de liaull reiiioul I. (elle /a Cj'ne i uu'Uie ('pi^iue. Nolels de la sacnslu' de .\ol re-l)aiiie de lioiu'g I. se retnai'(|ueid siii'Ioid les edigies des donaleiii-s el de leurs e I d a 1 d s .

Dans Auuens. (|U(d(jues dt'eoraleurs ('laienl caiiahles de liieii liiiiirer. on le eonslale par les Si/ji/Z/es de la cailie- dl'ale. D adiré pari, une eoiilViTie lil h'-raire. celle de Nolre-Danir du l*ii\. eneoii ragea 1 1 les peinlres locaux en

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"^''^'""^ Ci.'M , ,. _ M,,,,|.; SiiAui (l).w.in (C.iliiiici (ii-s listamitcs.)

LES GLOUET. 101

leur (leniandant d interpréter les thèmes des ballades auxquelles elle accordait des récompenses. Aucune des interprétations parvenues jusqu'à nous n'est attachante: mais il n'en faut l'ien inférer de péjoratif ; avec des sujets imposés de la sorte, on nohtient guère que (h- piètres résultats. Deux volets de triptyques, oii se profilent un seigneur et une dame en costume de 1540 M. Heugel. Paris), montrent qu'il y eut en Picardie, comme ailleurs, d'excellents portraitistes.

Le Ponthieu avait ses peintres, connue on le voit par les deux panneaux datés de lool qui représentent, d une faron vulgaire mais xigomvusa, /a Peste «T^o/z/e (Saint-Nicolas, Avesnes). Le Yelay avait les siens, on peut h' supposer, d'après les figures qui symbolisent, non sans bonheur. b>s arts libéraux, dans le bâtiment relié à la cathédrale thi Puy, et d'api-ès le tal)leau votif du musée Notre-Dame se trouvent rt'unis r('vè({ue de Senecteiic el son frèi-e François avec la femme et l'enfant (h' cekii-ri (l.jHi). De même le Poitou, (hinl un certain Mèrevaclie était « l'A- pelle », dans la j»remièi-e nioilit' (ki siècle, selon Sct-xole (le Sainte-Marthe. Lt, dans (iuel(|ues terroirs, l'école locale s augmenlail de professionnels ncuus d ailleurs. Lyon donnait l'hospitalih' au lialave Corneille, au Pii-nionlais (leorges Reverdi, à d'autres encoi-e : Avignon, le Laoïmais Charonloii el le Limousin Villate s'élaieiil li\('s;ui siècle [ii-('cédenl, avait accueilli Simon de (".hàlons.

Les iuùlaleurs. les iidlueno-s leiiaient. coiniiie à chaque épO(|ue, une place ('•nonne. La \ isihiluui et la /*rrsr/i-

108 LES GLOUET.

talion <1u miis('r de Màcon nous apprcnnoiil l'existence de pasliclieui's allanlés des qualtrocentisti. Les (jualre sa^ ou- roux iiiolif's lirt's de la h'gende de Sainte-Marguerile (au roi l'jloiiai'd Nil), nous doinieni lieu de croire que les ar- chaïsants ne disparaissaient pas vite (1). Bourdiclion, Cou- sin, les Clouet (surtout François) avaient l'ail ('cole; Cor- neille était d(''inar(]ii('. El ceux qui rt'pi'taieni nos artistes ou tàchaienl de s Cn inspirer opposaient peut-(Mre une masse égale en nombre \\ l'armée des coi'y])li<'es el des suivants du Prinialice.

Tant dœuvres disséminées dans les musées et les col- leclions prouveni (|ne notre wi"^ siècle fui une ère de lions poi'traitistes. Les mieux doués des peiiilres daloi's sonl des interprètes de physionomies ou des compositeurs de scènes désireux de liien Iraduii'e des individualih's. Aussi leui's lra\aux sonl ils liés utiles j)Out' 1 étude des c;nac- ières de noire race; |-eleuons-en les meillein's el nallen- dous jias. pour piiNcr un Irihul daduiiralion \\ ceux des inconnus, de saxoir (|ui les ;i consiruils. Ou iuip(ule le nom de liuileur si louni'e esl helle ! I lahil uons-nous donc ;'i Itaser noire l'esjx'cl eslli('li(|ue sio' la sonnue d arl des (r-uxres. non sur le degrc' de (•('■l/'linh' de letn's auleurs.

(I) l'lii''iiiiiiii''iii' ruiiiiiiiui à luiis 1rs pays. Il y a liiiiimif^ ilr> .iili^lcs m irlaiil (l'un (Iciiii-siccli' ri (|iii'|i|ii('s-ii:i> n'en son! jias iiinins ili'iccla Mes. <;uMli'iil()iis-nniis lie si;,'nalrr (lcu\ rxcmpics : ni dilà des Alpes, Saiio di Pictro (pii, en jilrin \v .siècle. salLaehe à cdniiiiiiii llinrin. sans pnUsstM' pins loin s;i liihniijne ; au delà des Ardohnes, .luacliun l'ilciur ■|iii. an ti'ni|)S de Otienlin Massij.s, i)er.sisle dans les eririmnl- di> \an di i \\( vdni l'I de 'riiieiiN' itiiiils.

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l'KWCdis C.i.diKr. M V m, I I III 1 I. i> I \\inis J)i-s>iii

(Cabinol des l'.-laiui)es.)

LES GLOUET. 111

XI

LART DE FRANÇOIS. SON INFLUENCE. SES ENSEIGNEMENTS.

Enfin concluons que si François Clouet n'est pas le seul ^Tand portraitiste de son époque, il apparaît du moins comme l'un des plus grands. Ses peintures certaines, ses dessins incontestables sont vite comptés, on l'a vu : c'est assez cependant pour nous permettre de reconnaître en lui des dons exceptionnels et une force peu commune. Parmi les ouvrages sauvés, on chercherait inutilement une tète qui l'emporte sur ses effigies culminantes. Et malgré que l'on puisse supposer l'existence de maîtres in- connus, il est pres(jue impossible d'admettre (|u"au nombre des travaux détruits il y ait eu des portraits supé-- rieurs à ceux (ju'il dessina, (-ar peu de maîtres, au coui's des âges, ont bâti et vivifié des tètes avec plus de succès. lîoutelou,Denisot, ,1. deCourt, F. Quesnel. d'autres encore, ont peut-être acconqdi d'inqji-essionnantes choses; il serait sur|)renant, s'il leur ai'i'iva parfois de ( licf-ircrm icr. ipi il nCii resjj'il pas imMue mi soiiNcmr dans (|U('I(|U(' iexie.

L inlhieiicc (h' h'i'anrois Cloiicl lut bienfaisant»', cela res- sort (h' (h'ssins cl (h' priiil iirt-s assez notables jutur qudn ait pu les croire, pres(|ut' tous, ihi maître liii-mt-mc.

Sans (h)ule maints imitateurs exagéi-èrciil les (jt-laiils du maître en abusant des dcloK'alions sè( lies, des détails ini- crosco})i(|ues, des tons plats. (h''la\(''s. iiiiiloiiiics. licscllrl^

112 LES CLOUET.

inoiiocordcs, romino fit le pciiiln- ilr lu Chiidr «le Bcaunc (lu Louvre; sans doute d'autres pcrdii'cii! la loiinc f(tiiiiiic les exécuteurs de la prétendut» Mariiucrilc de Navarre d (rime aldx'ssc iiicdiiiiue (Cahiiiet des l']staiu|)t's ). et plus d iiii tondja dans la disproportion coinnic le niassacrcui- du Hour- dcillc. l'rrrc de Brantôme, (|ue icnd inoubliable son type de d(dv(di(tct-j)liale siniiesque. Mais de Itds excès sont iiu'- vitaldes dans les écoles. Soniiuf toute François Clouet poussa jtar ses exemples une nndiitude de peintres vers la lumière tout en les incitant au lespect du naturfd et des pi'incipes sans lesquels aucune structure sérieuse n est possii)le. Et son action fut d'aiilaiit plus salutaire (|u"elle s'exerra pendant les ravag'es de Titalianisuie. En pr()(da- nuint, |)ar dirridra^ables dessins, la \aleur de nos tradi- tions, alors (pu' Caron ni /'niir/iissitit les peintures de Fonlaintddeaii : en diMUontraid, pai' son porli'ait d l'disa- bclli. l'aniH'e luème disparut le l*i-imatiee. (pie I art de notre l'"rance \i\ait toujours, el belleuienl. de sa \ ie pro- piT. il rendit dinnnenses services. Couibien il altistes et de iii()iid;iiiis lui durent de ne pas succoiiiber au sii(d)isiiie rt-g-nan! ! ('jinibien d'autres osèreiil. iicàci- à lui. n'iu^ir coiilre I e\ol isiiie !

François Cloiiel lut. conuiie son père, un ainoui'eux de sincè-ritt'. un inlerpièle |(t\;d. un \ i\ ilicaleiii': mieux ipie son père, d'un trait |iliis niai^istral et plus iiiliiiie. il d('- \(iila les .iiiies en lixaiil la iindiilitt- des |tli\ sionomies. en leli.iiissaiil le sens îles c;iracl ('res. Coniine peintre, il lia. pas plus ipie Jean, une de ces orii: inalilès ipii lraj)pent les

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l'iiANiuis ("ii.DiKT. ('.iiAin.K-^ l\ ht'-- in (daliiiiol (It's l'isliiiniifs.)

LES CLOUET. 113

moins avertis; néanmoins sa persoimalité, pour s'affirmer discrèteniciit, n en est pas moins sensil)!»'. An Louvre, \ EllsahctJi resplendit dun éclat bien particulier. Les por- traits (jui 1 entourent ont ét(' iu'osst'S tous avec des procédés analogues, mais combien inférieure leur irradiation ! Elle l'emporte sur eux non seulement par ses (jualités techni- ques, mais par sa vie intérieure et l'indicible (ju'elle -

o-n o-fi

Dans le dessin, François atteignit aux plus hauts som- mets. Son sentiment de l'écriture plastique (-tait merveil- leux : il l'eut presque au degré devaient le posséder Poussin et Ingres, ses chefs-d'œuvre des Estanqics auto- risent cette assertion, (j'est en harmoniste (ju'il édifiait ses formes, en expressif (|u"il li-arait ses délinf'ations. m tout respectueux des signes (k' la \ ie autant (pie (h's htis de l'équilibre. Il fut si foncièrement dessinateur (juc ses por- traits peints, considérés au seul point de nui- im'ticr. apparaissent comme des dessins rehaussés de tons, l'as de jeux (le pjitc, pas d'habiletés (h' brosses, nul stratagème : les tonalités sont ('talées candidement, les luodtdt's traités à peu près couuue des Irdtlis de craNou et n'-duils au slnet nécessaire. (!es tonalitivs oll'rent, il est \rai. de Hues (h'gi'a- dations : mais n'oulilinus pas (pTun «eil de dessinateur [•(''elh'Uient artiste doit perceNoir aussi liieii (|iie celui d un lieiiiireces etl'elsde la lumière sur les reliefs et les plans (pie lOu ti'adiiil eu (h'gradaut les teintes. l'IH'ectut'es sans aucune de ces recherches au\(|uelles se délectent les ma- nieiirsde piguieiils. les (h'-gradal ions de r'raiii.'ois sont celles

tl6 LES CLOU ET.

d'uii liannoiiisle on noir cl blanc. De celle Ijelle iiiiih' el cette sévéï'ih' picturale <les h'Ies du iiiiiîli-e. De aussi la clai'lé (le ses cliaiis. La pleine lumière siinj)li(ie (oui : |ilus elle enveloppe une lornie, ])lus elle en syntlu'lise les tona- lités. Sans doute est-ce pai'ce (ju'il a\ail observé loul cela qu'il s'appliquait à rnainlenir dans une même gamme ses tons de cliair. Et comme, pour obtenir ce résullal. il lui fallait respeclei' scrupuleusemeid les \aleurs de ces Ions. ses carnalions y ont gagné une lumière (jue les âges nonl point lernie. (lar la luminosilé dune peinture ne d('pend pas du degré de pliotogénie de ses tons, mais de la bonne transcription de leui'S valeurs.

Mais, demanderont certains, a-t-il volontairement ust- de cette métliode de peinture simplifiée? Ne lui a-l-elle pas été imposée par lobligation il se trouvait de peindic exclusivement d'après ses dessins ? Assin<''menl nous ['ignorons. Aucini texte ne nous renseigne sin- sa tournure d'espi'it et ses j)i"('oecupalions d'artiste. Toulcdois. ('tant domu'e sa manière d'inlerpri'ter au crayon les tonalilt's, on peut sans ci'ainte pr('sumer (piil n'ei'it pas sensiblement mo(bli('' son taire s d a\ail pemi st.'s portraits d'après na- ture. I*eut-(~'ti(' en cTit-il \ai'i(' ou allim' daxantage les notes de sa gamme de cliair. di'grade plus sensd)lenienl ou plus subidemeni ses pari U's chures : mais tenons pour indiibi table iju d n eût pas compli(|U('' ses parlu'S d oudnc |iuis- i\\[ [\ a\ail. ses ci'axons pol\ (du'onu's latleslenl. celle \isioii (pu porte à niodcder par un mimuniin de deuu- leniles. A (juoi bon. d adieurs. s arré-ler ;i des li\polbèses

if \

l*"ii\\(;ois (', i.oiiET. Civsi'uiii m; ('. mu. w l)('^>in

M'.:i liiiicl Ai'< l\slaiii|M's.)

LES GLOUET. 119

quand la milite nous offre de si multiples sujets d'étude! On perdrait sa peine à cherclier ce que François aurait accompli, sei-vi [)ai- d'autres circonstances; au contraire, on gagnera tort k scruter les œuvres qu'il a laissées. En parvenant à rendre ses chairs lumineuses et harmonieuses, avec une justesse si parfaite, le maître a constitué une peinture délectable en son austérité. Quelles que soient les sensations quelle cause, quoi qu'on en pense, en toute justice on doit confesser qu'elle a de soh'des (pialités y)ic- turales.

Mais la supt-riorité de Fran(;ois s'affirme plus encore, répétons-le, dans ses crayons; voire sa supériorilt' de peintre. Que cela n'étonne pas. On obtient des dégrada lions de teintes plus multiples et plus fines avec des mines de couleur ou des pastels tendres sur le papier (ju'avec des pigments ;i riuille sur toile ou sur bois. Aussi des effets plus variés et plus impressifs. La matière oh-a^ineuse, iniMue ap|>li(jU('e par des mains fort expei'tes. ne manifeste jamais les dt'licatcsses, les Iransparencivs, 1rs poi-sies, connue le ]»en\('nl i'aii'c des caresses de crayon : elle a des opacili's (pie rien n;irn\e à \aincre. elle cuirasse les reliefs, elle impose au.x c((iil(»iii's une piii'tnc qui souxcnl les (M'rase.

Le cra\(»ii nioiiire a\<'C n('tlrl('' ce que les brosses niill- (|uenl à peine ; <-e (pTel les disent loin'denienl . d le C(Uile ou l"('\()(pu' a\'ec une grâce niconqiarable. Le |U'olane ne souiicomie |>as la baule uldilé" de cet ould idi'al. pas encor»! assez esiiiiK'. Le ci'avon ! mais \\ a d'uiappré'ciables (|ua-

120 LES CLOU HT.

lih's. oïl scrail Icnh' de «lue des vertus, loutre les iii;iiiis (le I ;ii-list(', il est beaucoiij) j)lu.s olK'issanl (jiic les hrosscs; la main le discipline et le dirii^^e à souliail, lanh')| 1 a|»|uivanl sur le papier eoinnie une pointe d'acier sur le cuix ic. lantôt le faisant évoliiei" dans une savante stratégie coniuie un pinceau leycr. iJeuiandez-lui des traits \ i^uoureux. inci- sifs, ou de suaves indications, de larges modelés, des con- trastes j)uissants ou des accords d'analogues, d'im})lacaldes perspectives ou de vaporeuses ('vocations: employez-le à retracer des drames lugubres ou de sei'eines visions. Ihu- manil(' ou la natui'e sous leurs plus divers aspects, il n'est rien ([u il ne mène à bien si vous savez le conduire. Toutes les souplesses, toutes les fermetés, tous les charmes, il les possède; tous les modes d'exprimer, de l'alerte au nsajes- tueuN, il les pratique: tous les effets, tous les caractères, il les reproduit a\cc une bonne Nolonti'-. un loyalisme, (jue rien ne rebute. 11 est Prot(''e, et il est fée. A cei'tains mo- ments, on le croirait pai'tie int('grante de la main: sous les impidsions de Tesprit. il conlMUie le traxail des doigts. 11 seud)le, tant persistent son zèle et sa docilité. (|u il xcuillc ('ollaborer ;i l'onivi'e de son maiti'e, de son guide. De lait, il en ('pousc li's ardeurs et la liè\ re : les phalanges (|Mi li'l reigiicnl le sentent maintes fois IVé'nur. I n imaiiiiiatil pourrait se surprendr<' à lui prt'tei' de I intidligence. La brosse tient de la truelle, elle permet des labeurs solides mais restreints, le plus \n-lui)se Ars penilres ne rt'ussil pas toujours il la plier sa x'oloiiti'': et iiK'ine ipiand il la maî- trise, il ne la eliange pas en calaiiie. La lii'osse est un sei"-

Aniii li iMii.i: A l'uANcois Ci.di i-.T. - I'"k\n<,i»is m: l.nivit\i\i

I) uc, ;>r. ('. r i s k (Pciiiliiic.. (I. ouvre.)

LES GLOUET. 123

viti'ur. ellt> no sera jamais un auxiliaire, un collaborateur. Le crayon a des secrets, que la brosse a toujours ignorés, pour nous initier à lintiniite des êtres et à Ten-dedans des cboses. D'ailleurs, en recouvrant de pâte une figure, on se sent entraîné à la matérialiser, même lors(ju'on se garde de la traduclion étroite: n"use-l-on que de mines, on est porté naturellement, à moins de compter parmi les incor- rigibles de 1 analyse méticuleuse, à n't'crirc que l'essentitd des formes. On exagère les mérites de la peinture parce que, seule, elle pei-mef les vastes décorations nun-ales et les scènes d'un cadre important. A la vérité, dans les for- mats ordinaii-es, le crayon (le noir. le sanguine comme les polycbromes), s'il est manié par un maître, vaut la pein- ture et parfois l'emporte sur elle. Le crayon se prête ;i merveille à l'interprétation psycliologique, cai- sa puissance évocatrice égale sa force expressive. Aussi les dessins des interprètes supiémes de la pbysionomie sufTisenl-ils pour confirmer leur (Muinence. Ceux de Dîirer, de Lionardo. de llans llolbein. de l-'cancois Cbtuel. de Ingres, eu fournis- sent <le suj)erbes exenq)les.

François se relie à [jonardo par son senliiiieiil du lan- gage des lignes et <le la valeur des icgards jiinsi (|iie pin- son intidligence des moyens (r(''clairer les profondeurs des âmes. Pai' le caraclère de son ('•criliire. son besoin dCxiger heaucoiij» du Irail. sa scienre ilc coiisl riicleur des iornies. sa l'igoureuse proliih- de porirail isle. il esl l'iiiicelre de Ingi'es. (pii la conlinuc' dans ses dessins en poussani plus loin encore le souci de svnlli(''liser.

1-24 LKS CL OU ET.

IV'i"ils ('oiniiic par un liiiriiiislc. les dessins de l'r.incois soni Ifiiih's par un liariiMniisIc Ivvh s(tl)rc iiiaisd une cxfinisc scnsihilllc. Ses di-j^radalioiis sur le papier sonI uivsh'- licuscs cl aiiiint'cs coinnic la ^ ic luènie. Ses siruclui'cs nous onseig'ncnl (|uc le j)lus i-(dii:i('u.\ souci de l'csicr \rai se ('(jncilie fort l)ien axcc le vouloir d (''\ lier 1 elroilessc dans l'exeeution. Tous les principes de larl de dessinei- se lisenl dans ces lèles si sùrenieni ('(juilihri'-es. propoi'lion- ni'cs cl \ivili<'es. El iiondtre (Tenlre (dies i-epn''senteiil une phase instruelixe ;iulanl (|u allacluinte de la marche vei's la Jiuuièi'c conuneiKM'c par nos jxdnli'es du su''(de de l'\)U(|uel. Soyons Mers de ce ('dou<'l. « hoinieur de nosire i'^raiice », connue disait Ronsard, saluons en ce digne artiste ini pr(''- cin'seur de nos portraitistes les plus l'ohusles el les j)lus subtils, un iiulialeui' aux l'ccdiei'clies conlenipoi'aines les plus ni'cessaii'cs. .N lii'silons pas à le classer dans le clueui- de nos maîtres insignes. (pioi(|iH' ses ceuvres certaines ne soieiil pas h'gioii. De hm'iiic (|u un soniiel iiii|)eccal)le siillil |)()ur ('lahlir la repiilalKUi d un poêle ; de iiK-iiie. c est assez d'une Icle arlislemeiil conslruile el amiiH'e pour immoria- liser un jteiiil re.

IN

TABLE DES GRAVURES

Jean Clouet. François !•='■. Peinture (Louvre) 9

Jean Clouet. ^Miniatures delà Guerre (jallique (Bibliothèque

nationale) 13

École de Jean Clouet. Portrait de femme. Peinture (Ancienne

collectittn Laurent Richard) IT

François Clouet. Fran(;ois I' ' . Peinture (Musée des Offices,

Florence) 21

iManrois ("Jouet. Charles IX. Peinture (Musée de Vienne). . . 2") François Clouet. —Elisabeth d'Autriche. Peinture (Louvre). . . 29 François (îlouct. Henri IL Minialure (Cabinet des Estampes) . 33 François Clouet. .Madame de \ illetoy. Dessin (Cabinet des

Estampes) ti.

l-'rançois ("Jouet. l{obertdela .Marck, Duc de lîouillon. Dessin

((kibiiiel (les Estampes) ï\}

François Clouet. l'rançoise llaliou de la lîourdaisière, dame

d'Eslrées. Dessin .Cabinet des Estam[)es'i 49

I laiKois Clouet. ('■ny du Faur, sieur de Pibrac. Dessiu

(Cabiiiel des Estampes) ■'•3

i'raiiiwtis Clouel. - Ciiv Clialmt, baron de Jarnac. Dessin

(Cabinet de- l'1-lampes) 'iT

126 TABLE DES GRAVURES.

François Clouet. Louis de lU'-rt'iiLier, sieur <lii Cast. Dessin.

(Cabinet des Estampes) 6-'>

François Clouet. François de Coligny, sieur d'Andelot.

Dessin (Cabinet des Estampes) "3

François Clouet. Marquise de Lenoncourt. Dessin (Cabinet

des Estampes) ~ '

François Clouet. Jean de Léaumont, sieur de Puigaillard

Dessin (Cabinet des Estampes) 81

François Clouet. Marguerite de Valois (?). Dessin (Cabinet des

Estampes)

François Clouet. Odet de Coligny. Dessin (Cabinet des

Estampes) '• 89

François Clouet. Isabeau de Ilauteville. Dessin (Cabinet des

Estampes) 97

François Clouet. Marie Stuart. Dessin (Cabinet des Estampes) iOo François Clouet. Marguerite de Valois. Dessin (Cabinet des

Estampes '"■'

François Clouet. Charles IX. Dessin (Cabinet des Estampes). 113 François Clouet. (iaspard de Coligny.' Dessin (Cabinet des

Estampes) 11"

Attribuable à François Clouet. François de Lorraine, dur de

Guise. Peinture (Louvre) 121

TABLE DES MATIERES

1. Jean (Uouet Sa situation à la cow\ Ce que

l'on sait de lui 7

H. Le goût des portraits au xvi" siècle l.'i

III. L'œuvre de Jean 24

IV. Son art 30

V. Fran(;ois Clouet. Sa vie 4'*

VI. Ses portraits peints et ses miniatures ;)2

VIL Ses dessins de l'ancien album Foulon 04

VIII. Ses autres dessins ''■'}

IX. Œuvres qu'on lui attribue. Ouvrages perdus 87

X. Les peintres du xvi'' siècle. 0."

-XI. L'art de François. Son iiiiluence. Ses enseigne- ments III

8lî7i-0ij. Corbilii . Im|iiiiiifiie ko. C.Hiirit.

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